LES DIATOMÉES HISTOIRE NATURELLE, PRÉPARATION CLASSIFICATION & DESCRIPTION DES PRINCIPALES ESPÈCES LE DK J. PELLETAN AVEC UNE INTRODUCTION A L'ETUDE DES DIATOMÉES Par M. J. DEBY ET UN EXPOSÉ DE LA CLASSIFICATION DES DIATOMÉES Par M. Paul PETIT Avec 265 gravures dans le texte et 5 planches I PARIS JOURNAL DK MICROGRAPHIE 14, RUE DE BERNE, 14 1888 LES DIATOMÉES PARIS IMPRIMERIE TYPOGRAPHIQUE J. BOLBACH 28, RUE DE LILLE, 23 3Ù LES DIATOMÉES HISTOIRE NATURELLE, PRÉPARATION CLASSIFICATION & DESCRIPTION DES PRINCIPALES ESPÈCES LE DR J. PELLETAN AVEC UNE INTRODUCTION A L'ETUDE DES DIATOMÉES Par M. J. DEBY ET UN EXPOSÉ DE LA CLASSIFICATION DES DIATOMÉES Par M. Paul PETIT Avec 265 gravures dans le texte et 5 planches I PARIS JOURNAL DE MICROGRAPHIE 14, RUE DE BERNE, 14 1888 TABLE SYSTÉMATIQUE DES MATIÈRES PAGES Préface j PREMIÈRE PARTIE Introduction, par M. J. Deby 1 Déduplication des Diatomées , 3 Mouvements des Diatomées 3 Structure microscopique des Diatomées 6 Reproduction des Diatomées 7 CHAPITRE I Historique Il CHAPITRE II 1 . Histoire naturelle des Diatomées 20 2. Mouvements des Diatomées 31 3. Multiplication des Diatomées 36 4. Mode de végétation des Diatomées 52 5. Reviviscence des Diatomées 55 '39547 VI TABLE SYSTEMATIQUE CHAPITRE III PAGES Structure des Diatomées 57 1. Valves 57 2. Structure intime des valves 66 3. Appendices et dispositions particulières 84 CHAPITRE IV Recherche et Récolte des Diatomées 93 1. Les Diatomées dans la nature 93 2. Récolte des Diatomées . 99 t CHAPITRE V Technique des Diatomées 106 1, Nettoyage des Diatomées 106 2. Triage des Diatomées 114 CHAPITRE VI Montage des Diatomées 118 1. Instruments et produits 118 2. Montage à sec 122 3. Montage dans ]es baumes 124 4. Montage dans les liquides 127 5. Préparations systématiques 128 CHAPITRE VII Moyens d'Étude 138 1. Les Microscopes , 138 2. Les Objectifs 148 3. Condensateurs et Appareils divers 164 4. Eclairage 175 5. Microtomes 180 CHAPITRE VIII Classification • 188 1. Systèmes de classification 188 2. Classification par M. Paul Petit 184 Placochromaticées. — Coccochromaticées. — DES MATIERES VII PAGES AiUXANTHÉES 192 GoMPHONÉMÉES 194 Cymbellées 194 Naviculées 195 Amphiprorées 196 Nitzschiées 196 Surirellées 197 Synédrées 198 Eunotiées 198 Fragilariées 199 Plagiogrammées 199 Trachysphéniées 200 Licmophorées 201 Tabellariées 201 Rhizosoléniées 202 Chjëtocérkes 203 BlDDULPHlÉES 204 Eupodiscées 201 héliopeltées 205 Astérolamprées 206 Coscinodiscées 206 Xanthiopyxidées 207 Gaillonellées 208 DEUXIÈME PARTIE CHAPITRE IX Description des principales espèces 211 1. — ]ro tribu : àchnanthées 211 2. — 2° tribu : Gomphoné.mées 218 3. — 3° tribu : Cymbellées 225' CHAPITRE X Description des principales espèces (Suite) 243 1. — 4° tribu : Naviculées 243 2. — Genre Navicula 245 VIII TABLE SYSTEMATIQUE DES MATIERES CHAPITRE XI PAGKS Description des principales espèces (Suite) 282 1. — 4e tribu : Naviculées (suite), G. Stauroneis 282 2. — — G. Scoliopleura . . . . 287 3. — — G. Pleurosigma. . . . 294 4. — G. Donkinia, Toœonidea, Amphipleura, etc 306 KRUATUM * Page 197, ligne 11. — C'est par erreur que le genre Amphiprora, qui appartient à la famille des Ampiiiprorées est répété parmi ceux qui composent la famille des Nitzschiées. Il faut le supprimer à cet endroit. PRÉFACE Nous n'avons pas eu, en publiant cet ouvrage, l'intention de faire une monographie complète de la famille des Diatomées, rap- portant tout ce qui a été dit, écrit ou imaginé sur ces charmantes Algues ; nous avons voulu seulement présenter un résumé de leur histoire, un tableau général de leur organisation, de leurs carac- tères, de leur classification, avec la description des espèces que l'on rencontre le plus fréquemment. Néanmoins, sans nous égarer dans les questions de détail et les discussions de systématique, nous avons cherché à donner à notre travail assez de développe- ment pour qu'il pût éveiller chez nos lecteurs le désir d'aller plus loin, d'étudier plus à fond ces intéressants organismes, et, par exemple, de résoudre les problèmes, si nombreux encore, qu'ils présentent à la sagacité, à la patience et à l'habileté des micro- graphes. C'est pour atteindre plus sûrement notre but que nous avons tenu à mettre noire livre, pour ainsi dire, sous le patronage de deux des diatomistes les plus autorisés de notre époque, qui, non seulement nous ont aidé des conseils de leur longue expérience, mais encore ont bien voulu nous prêter le concours de leur plume : M. Julien Deby, de Londres, qui a accepté la tâche de présenter notre ouvrage au public et d'en écrire Y Introduction, et M. Paul Petit, de Paris, qui s'est chargé de rédiger le chapitre relatif à la Classification des Diatomées. Nous prions les deux savants auteurs de recevoir ici tous nos plus sincères et nos plus vifs remerciements pour leur amicale as- sistance et leur précieuse collaboration. X PREFACE D'autre part, dans la description de plusieurs centaines d'es- pèces qui constitue la deuxième partie de ce livre, c'est particu- lièrement au Dr H. Van Heurck, d'Anvers, que nous nous sommes adressé; c'est de sa méthode descriptive que nous nous sommes généralement inspiré, telle qu'il l'a instituée dans son bel ouvrage que tout le monde connaît, la Synopsis des Diatomées de Bel- gique; ce sont ses diagnoses et ses figures que nous avons le plus souvent suivies, comme ce sont ses chiffres que nous avons presque toujours adoptés pour les nombres de stries et autres mensura- tions délicates, chiffres qui, toutes les fois que nous avons eu à les contrôler, nous ont toujours paru remarquablement exacts. Pour le reste, c'est à MM. Paul Petit, J. Deby, A. Truan, de Gijon; J. Brun, de Genève; P.-T Clève, d'Upsal; A. Grunow, de Vienne; J. Pantocsek, de Tavarnok, et divers autres auteurs, ou à nos observations particulières que nous avons emprunté les docu- ments dont nous avons eu besoin. Ce n'est pas à dire pour cela que, devant l'autorité de ces savants spécialistes, nous ayons renoncé à exprimer les idées personnelles que nous nous sommes faites sur beaucoup de points. Loin de là. Sur un grand nombre de questions discutées, nous avons émis des opinions qui nous sont propres, et nous ne nous dissimulons pas que, dans bien des cas, elles ne seront pas facilement admises par tous les diatomistes, à qui souvent elles ne paraîtront guère ortho- doxes. Nous les avons exprimées néanmoins, et nous les mainte- nons jusqu'à plus ample informé, par cette raison toute simple que nous les croyons justes, fondées d'ailleurs sur des observations directes, faites avec le plus grand soin, dans les meilleures condi- tions et surtout en dehors de toute idée préconçue. Nous laissons au temps le soin de les confirmer, et si, au contraire, il les ren- verse, elles auront encore servi à quelque chose puisqu'elles au- ront fait travailler. Nous avons divisé notre ouvrage en trois parties. Dans la première, après un très court historique de la décou- verte des Diatomées et des travaux dont elles ont été l'objet de la part des observateurs de la fin du siècle dernier et du commence- ment de celui-ci, nous étudions ces organismes au point de vue PREFACE XI botanique et au point de vue micro graphique. Puis nous indi- quons les procédés de leur récolte, les localités où ils se trouvent, les méthodes que Ton met en œuvre pour les préparer à l'examen microscopique; enfin, les meilleurs instruments que l'on peut em- ployer pour les étudier. Cette première partie se termine par l'ex- posé de leur classification par M. Paul Petit. La seconde est tout entière consacrée à la description des prin- cipales espèces. On comprend que dans un ouvrage que nous vou- lions faire « élémentaire » et dont le cadre était, par conséquent, limité, nous ne pouvions songer à signaler, et encore moins à dé- crire, chacune des dix à douze mille espèces connues, et dont le nombre augmente d'ailleurs tous les jours. Nous ne pouvions même pas décrire tous les genres, bien que la classification de M. Paul Petit, que nous avons adoptée, en ait notablement réduit la liste. Nous avons nécessairement dû faire un choix, et nous nous sommes arrêté aux genres et aux espèces le plus généralement répandus, à ceux que l'on rencontre le plus communément dans les mers, les cours d'eaux ou les dépôts de nos pays et des contrées voisines, de préférence aux genres et aux espèces absolument exotiques, que l'on ne trouve que dans les parages lointains, ou exclusivement localisés dans certains dépôts, certains fleuves, cer- taines mers, disséminés en différents points du globe. Sans doute, cette nécessité de nous restreindre nous a forcé de passer sous silence bien des espèces remarquables et intéressantes ; mais, si nous eussions voulu les faire figurer dans notre livre, il aurait rapidement acquis l'étendue de plusieurs in-folios. Nous sommes donc obligé de renvoyer nos lecteurs, pour l'étude de ces espèces, aux grands ouvrages spéciaux et aux monographies par- ticulières qui ont été publiées sur les Diatomées des différentes lo- calités, nous bornant à signaler, lorsque cela nous a été possible, quelques-unes des formes les plus typiques. C'est pour remédier, autant qu'il était en notre pouvoir, à l'exiguïté de notre cadre que nous avons donné quelque étendue à notre troisième partie, entièrement consacrée à une Bibliogra- phie aussi complète que nous avons pu la faire, et dans laquelle nos lecteurs trouveront l'indication de nombreux matériaux pour parfaire leur instruction diatomologique. XII PREFACE Nous avons néanmoins donné la description de cinq à six cents espèces, choisies dans toutes les tribus de la famille des Diato- mées ; de plus, au lieu de les énumérer les unes après les autres, comme les articles d'un catalogue, ou de les distribuer empirique- ment d'après la méthode dichotomique, qui est parfois très difficile à appliquer et établit souvent des divisions fort peu logiques, nous avons suivi un autre système que nous croyons meilleur, du moins dans un ouvrage tel que le nôtre. Nous avons, dans chaque genre, choisi un ou plusieurs types les plus caractérisés, autour desquels nous avons groupé les espèces qui leur ressemblent le plus, en in- diquant les détails qui les rapprochent et ceux qui les distinguent les unes des autres et du type commun. Ce système, peut-être moins méthodique, est infiniment moins fastidieux pour le lecteur et permet de décrire le plus d'objets dans le moins de lignes. Nous avons, en effet, écrit pour des « lecteurs » lisant cet ou- vrage comme on lit un livre quelconqne traitant d'histoire natu- relle, et non pour des savants consultant un recueil de docu- ments scientifiques. C'est pourquoi nous avons adopté une forme tout à fait nouvelle pour les ouvrages sur les Diatomées, c'est-à- dire que nous avons renoncé au système des Atlas et des Planches, et inséré des gravures dans le texte, aux passages où elles l'ex- pliquent ou le complètent. Les planches que l'on réunit à la fin du volume ou en atlas séparé, et où l'on peut grouper un grand nombre de figures, sont plus commodes pour l'auteur; mais si elles permettent, grâce aux procédés délicats de la lithographie, de donner des figures plus fines et plus artistiques, pouvant servir, comme nous le disions, de documents authentiques pour les savants qui les consultent plus que le texte, elles ne sont pas d'un maniement facile pour les lecteurs ordinaires, qui ont besoin d'avoir à la fois les figures et le texte sous les yeux. Il est vrai qu'intercalées dans le texte, les figures typographiques ne peuvent être que des repro- ductions par la gravure ou l'héliogravure de dessins ou de litho- graphies, que le tirage rapide des imprimeries ne permet guère de leur conserver toute la délicatesse et le fini du modèle; mais, telles qu'elles sont, nous avons pensé qu'elles suffisent au but que nous nous proposons, d'autant plus qu'elles nous paraissent racheter ample- ment ces défauts par l'avantage qu'elles ont de se trouver toujours PREFACE XIII à l'endroit utile, et enfin parce qu'elles permettent de faire des livres dont le prix est facilement abordable pour tout le monde. Si donc nos lecteurs trouvent quelques-unes de nos gravures un peu défectueuses au point de vue des détails, nous les prions d'être indulgents, en raison de la difficulté que nous avions à vaincre. On sait combien infiniment petits sont souvent les dessins qui ornent les valves des Diatomées; obligé que nous étions encore de réduire la dimension de nos gravures pour les faire entrer dans le format d'un in-octavo, on comprend que certaines de ces gravures sont venues un peu confuses lorsqu'il s'agissait d'objets très fins, et d'autant plus qu'aucune n'existait, qu'il a fallu les créer toutes, notre ouvrage étant le premier qui ait paru sous cette forme dans la littérature scientifique de langue française. Ceci dit, il ne nous reste plus qu'à livrer notre travail à l'appré- ciation du public et à le prier de vouloir bien, en raison de l'inten- tion, excuser les fautes de l'auteur. Dr J. Pelletan PREMIERE PARTIE HISTOIRE NATURELLE - PRÉPARATION CLASSIFICATION INTRODUCTION Partout dans ce monde où il existe de l'eau, ou même de l'humidité, la vie se manifeste avec vigueur par le développement d'organismes divers dont la multiplicité merveilleuse des formes paraît presqu'inépuisable. En majorité, ces êtres ont une fort petite taille : ce sont le plus souvent des « microscopiques » que l'œil humain ne distingue pas sans l'emploi de la lentille grossissante. On a rangé les uns parmi les protozoaires ou ani- maux, les autres parmi les algues ou plantes aquatiques inférieures, c'est à dire qu'on les a paigfcagés entre le règne animal et le règne végétal. Ces deux grandes divisions ou règnes de la nature se confondent dans la région des infiniments petits et leur ligne de démarcation échappe alors au naturaliste, non pas à cause de la difficulté de la définir, mais bien plutôt parce que celte distinction n'existe réellement pas dans la nature. Un troisième règne, celui des « protistes » a été, dans ces derniers temps, intercalé entre les précédents pour recevoir une foule de ces organismes douteux qui sont, à proprement parler, des animaux et des plantes, mais ce subterfuge, où la science veut se sauver par un mot, n'a pas de base scientifique solide et les êtres compris dans cette catégorie ne pré- sentent pas de caractères spécifiques communs qui les différencient des autres produits vivants qui peuplent notre globe. Parmi ces déclassés l'on rencontre, en nombre très considérable, une série de petites formes dont l'enveloppe ou carapace est formée en ma- jeure partie de silice et auxquelles on a donné le nom de Bacillariées ou de Diatomées. La beauté de sculpture, la variété et l'élégance des formes de ces petits êtres a depuis longtemps attiré l'attention des naturalistes et poussé les micrographes à les étudier avec assiduité, mais sans qu'on soit arrivé ce- pendant, à leur égard, à des résultats scientifiques satisfaisants, surtout en ce qui concerne leur biologie. » Contrairement h l'opinion de tous les naturalistes qui m'ont précédé, et contrairement même aux vues que j'ai exprimées dans des publications antérieures, je suis arrivé actuellement à la conclusion que les Diatomées doivent être considérées, non pas comme des plantes mu-cellulaires^ 1. 2 LES DIATOMEES mais bien plutôt comme des algues pluri-cellnhires. Pour un grand nombre de familles et de genres de Diatomées cela me paraît parfaitement clair, manifeste et démontrable par le simple examen d'une longue série de formes linéaires telles que les Hlmanthidium, les Fragilaria, les Achnanthes, les Rhabdonema , les Striatella, les Melosira et beaut coup d'autres. Ces plantes croissent comme le font toutes les autres algues simples et filamenteuses, par la division transverse successive des cellules végétatives [frustules, chez les Diatomées) qui les constituent. Cette division des cellules végétatives continue pendant un temps plus ou moins long, puis tout à coup elle cesse et il se développe alors, aux dépens d'une ou de plusieurs des cellules végétatives, des fruits 'ou sporanges destinés à la reproduction de l'espèce. Dans ces Diatomées chaque cellule végétative est adhérente d'une façon permanente à ses voisines. En dehors de ces Diatomées filamenteuses , il existe une multitude d'autres espèces, qui ne présentent pas ce caractère de continuité, pour cette raison que les cellules végétatives de la plante ou les frustules, au lieu de rester adhérents, se sont successivement détachés l'un de l'autre à chaque division ou déduplication des cellules, et ont mené une vie indépendante. A la longue, cependant, après une succession de cel- lules purement végétatives, de frustules fotmés par déduplication, il arrive un moment où une ou plusieurs de ces cellules végétatives produisent un fruit ou sporange tout comme cela a eu lieu pour les formes filamenteuses. Un examen quelque peu attentif des phénomènes de la vie et de la croissance des Diatomées nous conduit à considérer les frustules des Diatomées qu'on rencontre si fréquemment libres et isolés, comme étant, dans l'immense majorité des cas, de simples cellules végétatives des- tinées'à périr sans se reproduire, après avoir donné le jour à d'autres générations de cellules végétatives dont un nombre très infinitésimal seulement donnera naissance à des sporanges reproducteurs. Les cen- taines de millions de frustules qu'on rencontre partout où on les cherche no sont donc pas des individualités, ou des plantes complètes, comme on l'a cru ; ce sont les parties élémentaires à vie végétative d'un thalle qu'on pourrait, à défaut d'un terme plus convenable, appeler un thalle diflluent. D'après notre manière de voir, toutes les Diatomées sont parta- geables en deux séries : 1° les Diatomées filamenteuses proprement dites et 2° les Diatomées à frustules libres. Les unes comme les autres sont /)^n'-cellulaires (1) et finissent par fructifier après la production d'un nombre plus ou moins grand de cellules végétatives ou frustules. — Nous considérons les Diatomées comme des algues pfon'-cellulaires filamen- (i) C'est à dire composées de plusieurs frustules unicellulaircs. J. P. INTRODUCTION 3 teuses, ou cryplofilamenteuses, selon que le thalle en est persistant pen- dant la vie de la plante, ou qu'il se sépare en ses éléments constitutifs au fur et à mesure que ceux-ci se développent. Le sporange, dans les deux cas, est la fin d'une série. Déduplication des Diatomées. — Le mode de division des cellules des Diatomées, ou comme on l'exprime généralement, la déduplication des frustules, se fait d'après un plan spécial commun à toutes les Dia- tomées filamenteuses ainsi qu'à celles à fruslules isolés, et qui diffère es- sentiellement de ce que l'on observe chez d'autres organismes (1). Nous allons tâcher d'expliquer d'une façon aussi claire que possible le phénomène de la déduplicalion ou de la croissance des Diatomées. Une Diatomée réduite à sa plus simple expression, c'est-à-dire la pre- mière cellule d'une plante nouvelle, représente à l'imagination une petite boîte dont l'enveloppe est formée de cellulose dont la substance est tellement imprégnée de silice que cette dernière prédomine généralement au point de rendre celte pellicule cassante, incombustible et inattaquable ou o* ou A ê,Q i t t 2 3 Fig. 1. — Frustule théorique de Diatomée. — a, valve supérieure; b, valve iuférieure ; c, conuectif uuique ; e, noyau. — Fig. 2. — Commencement de la dé- duplication; développement du second connectif d. (Mêmes lettres que dans la fig. précédente). — Fig. 3. — Suite de la déduplication et de la formation du connectif nouveau (Mêmes lettres). par les acides. Un examen attentif sous l'objectif d'un bon microscope avec un fort grossissement, nous démontre que notre petite boîte est constituée en réalité par trois parties distinctes : un couvercle qui s'appelle la valve supérieure, un fond de la boîte qui s'appelle la valve inférieure e un anneau qui sépare les deux valves et qu'on appelle le connectif. (Fig. I). Ce connectif adhère assez solidement à la valve inférieure, mais ne tient que très légèrement à la valve supérieure. Dans l'intérieur de la boîte qui constitue le frustule de la Diatomée, on aperçoit, à travers la paroi transparente, un noyau central ou nucleus et souvent un nucléole, puis une masse de protoplasme ou matière vivante; puis enfin, des matières colorantes, des corps gras et quelques corpuscules (1) Braun, dans son ouvrage « Algarum Unicellularium, » avait déjà, dès 1855, pressenti la p/wri-cellularité des Diatomées, contrairement aux vues de Naegeli. J. D. 4 LES DIATOMEES indéterminés. Ce contenu prouve à toute évidence que le fruslule d'une Diatomée n'est qu'une cellule constituée sur le même plan que toutes celles des corps organisés. En suivant avec patience l'évolution d'un fruslule, on observe les phénomènes suivants : 1° Le couvercle de la boîte siliceuse ou valve supérieure sécrète peu à peu un anneau de silice tout autour de son bord interne (Fig. 2, 3. d). a. /V ^O i i a- d. •O £Q ù 4 5 6 Fig. 4. — Suite. — Le connectif nouveau d est complet. (Mêmes lettres). — Fig. 5. Commencement de l'écartement entre les deux valves. (Mêmes lettres). — Fig. 6. Ecartcment des deux valves. ('Mêmes lettres). Cet anneau grandit peu à peu depuis le haut vers le bas de la boîte en s'appliquant étroitement à la face interne de l'anneau primitif. En fin de compte, cet anneau ou connectif nouveau atteint le fond de la boîte ou la surface interne de la valve inférieure. (Fig. 4. d). Ici son développe- ment s'arrête et nous avons sous les yeux un frustule constitué de deux valves et de deux conneclifs, ces derniers superposés. >ÛL F [ 4V ? 7 S 9 Fig. 7. L'écartement des deux valves atteint son maximum. — Fig. 8. Com- mencement de la division du noyau. (Mêmes lettres). — Fig. 9, Division com- plète du noyau. (Mêmes lettres). 2° Aussitôt que le connectif nouvellement formé a atteint la valve infé- rieure, les matières vivantes contenues à l'intérieur du fruslule augmen- tent rapidement en volume et par leur pression forcent l'écartement des deux valves, ce qui s'effectue par le glissement graduel du connectif nouveau dans le connectif primitif comme dans une gaine ou tirant de lunette d'approche. (Fig. 5, 6.) Cet écartement se continue graduel- lement jusqu'au moment où les bords libres des deux connectifs sont très près de se rapprocher. (Fig. 7.) Un peu plus et le couvercle de la boîte ou valve supérieure avec son connectif se sépareraient entièrement de la valve inférieure et de son connectif. mettant à nu le contenu du INTRODUCTION O fruslule. Mais avant ce moment critique, l'écartement des deux valves a cessé et le frustule a atteint sa largeur maxima. Après que le glissement des conneclifs a atteint son maximum d'expansion, le nucléus intérieur commence à s'étrangler par le milieu (Fig. 8) et la matière de la cellule proloplasmique avec ses contenus commence ù se partager en deux portions égales. Quelques instants plus tard, le nucléus s'est divisé en deux (Fig. 9) et chaque moitié constitue un nucléus nouveau qui va occuper l'une des moitiés du protoplasme qui, maintenant aussi, est distinctement séparé en deux masses par une ligne de démarcation visible à l'œil. 4° Chacune des deux masses protoplasmiques commence alors à sé- créter, à sa surface nue, une mince pellicule siliceuse (Fig. 10) qui, par des accessions graduelles de silice, s'épaissit et reproduit exactement la valve qui lui est opposée. Dès ce moment la déduplication s'est effectuée et le 10 il 12 Fig. 10. Formation des nouvelles valves; a, nouvelle valve formée dans le conuectif de la valve supérieure ; b', nouvelle valve formée dans le connectif de la valve inférieure. (Mêmes lettres). — Fig. 11. Séparation des deux fructules. (Mêmes lettres). — Fig. 12. Résorption des rebords du connectif; déduplication achevée . (Mêmes lettres) . frustule j primitif se trouve transformé en un corps bi-cellulaire. Le frustule maintenant est réellement formé de quatre valves dont deux in- ternes et deux externes, le tout retenu par deux conneclifs appartenant à chacune des valves primitives. Le frustule mère a été modifié de manière à ce que chacune de ses filles est constituée par l'une des valves de la mère et une valve nouvelle formée à l'intérieur de l'un des conneclifs de ces valves mères. 5° Un léger glissement final des connectifs sépare bientôt les deux nouveaux frustules l'un de l'autre (Fig. 11) et les valves jeunes vont alors se placer au bord libre même des conneclifs pour reproduire exactement la cellule primitive qui a commencé la série; puis, les deux frustules se séparent (Fig. 12). Chacune des jeunes valves dont nous avons suivi le développement pas à pas, va à son tour passer par toutes les mêmes phases qui l'ont formée et celte succession de déduplications se continuera indéfiniment jusqu'à ce que la fructification de l'algue y mette fin. 11 est évident que, dans le cas des Diatomées filamenteuses, le glissement 6 LES DIATOMÉES des conneclifs n'a jamais lieu d'une manière complète et que les divers frastules restent attachés l'un à l'autre par l'extrémité des connectifs pen- dant toute la durée de l'existence de l'algue. Le mode de déduplication des cellules est d'ailleurs parfaitement le même pour les formes à union per- manente que pour celles dont les éléments se dissocient à mesure de leur création. La plupart des frustules des Diatomées, pendant au moins une certaine période de leur croissance, sont couverts ou protégés à l'extérieur par une matière amorphe sécrétée par l'organisme lui-même. C'est le coléo- derme appelé improprement le thalle par M. le Dr Lanzi. Cette sécrétion est anhiste et peut prendre un développement très considérable ou bien, dans certains cas, se réduire à une simple pellicule adhérente aux valves. Elle peut aussi, comme cela se voit chez les Schizonema, les Col- letonema, les Encyonema, former des tubes qui hébergent les frustules, ou bien des tiges plus ou moins rigides qui les supportent comme dans les Gomphonema, les Achnanthes et beaucoup d'autres genres. C'est d'ailleurs une matière morte et inerte, qui ne doit pas êtréconfondue avec la matière vivante intérieure du frustule qui ne communique pas plus di- rectement avec l'extérieur que cela n'a lieu chez d'autres cellules orga- niques vivantes. Nous ne pouvons nous étendre longuement sur le contenu des cellules ou frustules des Diatomées, ce sujet ne présente d'ailleurs guère de faits particuliers. Le noyau et le nucléole sont identiques à ceux d'autres plantes. La matière protoplasmique interne tapisse tout l'intérieur du frustule et se groupe en masses centrales et souvent terminales. Elle est le por- teur des plaques ou des grains colorés ou chromatophores et présente de nombreuses vacuoles remplies d'un liquide incolore dans lequel flottent quelques globules huileux.— Avec une grande attention, on découvre des filets protoplasmiques qui s'étendent entre la couche périphérique et celle qui entoure le noyau. Dans de fort bonnes conditions d'outillage et d'é- clairage on peut distinguer même une circulation ou cy close dans ces filets qui sont quelque peu finement granuleux. Mouvements des Diatomées. — Beaucoup de frustules de Diatomées libres sont doués d'un mouvement propre dont on n'a pas encore bien compris la cause, mais qui paraît mécanique ou due à des causes physi- ques. Nous sommes tentés de l'attribuer principalement à un phénomène de capillarité, qui se manifesterait entre les conneclifs, ou le long des bords des valves. Les opinions à l'égard de ces mouvements des Diato- mées sont extrêmement variées, mais aucune ne répond aux besoins de la cause. Structure microscopique des Diatomées. — La question de la struc- ture intime microscopique des valves des Diatomées constitue depuis long- temps le champ de bataille des micrographes et sa solution est l'un des INTRODUCTION 7 problèmes Jes plus difficiles à élucider que l'on puisse imaginer. L'on ne peut l'aborder qu'armé des meilleurs et des plus forts objectifs de notre époque et encore faut-il savoir s'en servir avec tous les raffinements modernes. Quand l'écaillé siliceuse d'une Dialomée a élé vue et même dessinée, au microscope, il reste à interpréter ce qu'on a vu, pour sépa- rer ce qui est réel de ce qui n'est dû qu'à des phénomènes compliqués d'interférence, de diffraction, de réfraction et autres causes d'illusions optiques qu'il est malaisé de débrouiller. Les fins dessins qu'on aperçoit, sous forme de stries, de côtes, de points, de réticulations se résolvent sous nos plus puissants instruments en détails si petits, si infiniment petits même, qu'on ne sait plus les apprécier avec certitude. C'est ce qui a causé tant de controverses sur leur nature qu'il m'est de toute impos- sibilité de passer en revue dans ces quelques pages sommaires. Je ne puis que résumer mon opinion, toute personnelle, à l'égard de la structure intime des valves des Diatomées et qui me fait croire que le dépôt de la silice se fait à l'intérieur des jeunes valves, au moment de la déduplication, par l'intermédiaire des courants protoplasmiques qui lui servent de porteurs. Ces courants ou filets cyclotiques varient de position, allant tantôt dans un sens, tantôt dans un autre. Les dépôts se font aussi en dessins sous forme d'anastomoses, dont les orifices se remplissent de plus en plus de silice tout en laissant toujours un lumen. Ce filet sili- ceux anastomosé s'adapte à une couche de cellulose homogène et con- tinue qui constitue la face externe de la valve. — A l'intérieur, lors de la maturité, le fond des petites cavités se recouvre également d'une mem- brane siliceuse, quelquefois même feuilletée. Je pense qu'une Diatomée qui présente à la vue des points, des hexago- nes, ou d'autres dessins délicats, montre en section des cavités nombreu- ses fort petites, recouvertes au-dessus et au-dessous par une membrane homogène continue. L'une ou l'autre ou chacune de ces cloisons peut por- ter des dessins encore plus petits qui lui sont propres. Chez les Diatomées fossiles, comme dans celles qui ont été soumises à l'action du feu ou des acides, les fines membranes externes ont disparu et dans ces cas la mem- brane du frustule est bien réellement perforée de trous, et forme tamis, comme cela a souvent été décrit. Nous ne pensons pas à la possibilité d'un contact direct du protoplasme du frustule avec les milieux ambiants. La cellule prend sa nourriture par intussusception ou par capillarité ; peut-être aussi par endosmose à travers ses membranes. Elle n'absorbe que des liquides et jamais il ne pénètre à l'intérieur du frustule des particules solides quelle que soit leur exiguité. Reproduction des Diatomées. — Comme nous l'avons dit précédem- ment, le thalle après avoir donné naissance à un nombre plus ou moins considérable de cellules végétatives ou de frustules, finit par développer un ou plusieurs fruits ou sporanges. Ces sporanges sont toujours formés au dépens du contenu d'un ou de plusieurs frustules qui ne diffèrent 8 LES DIATOMEES généralement des autres que par une taille quelque peu moindre. Ces fruslules, après s'être entourés de mucus, séparent leurs valves et s'ouvrent. Leur contenu mou protoplasmique, devenu libre, s'arrondit alors et s'en- kyste pour former ce que l'on a nommé des auxospores. Après un repos plus ou moins long, ces auxospores produisent à leur tour, soit des frustu- les ordinaires, analogues à ceux qui commencent une série ou plante nouvelle, mais de forme plus grande, soit des spores, en nombre plus ou moins grand, qui sont propres à reproduire, chacun, une plante nouvelle par leur développement ultérieur. Malheureusement, malgré un nombre très considérable de faits constatés, ce que nous savons de tout ce qui con- cerne la reproduction des Diatomées reste peu compris et mal élucidé. C'est un champ ouvert à l'observateur patient qui voudra écrire l'histoire complète d'une seule des dix mille espèces connues de Diatomées, travail qui reste encore à faire, à la honte réelle des micrographes et des natu- ralistes. Une préface comme celle-ci ne peut constituer qu'un résumé bien court de ce qui va suivre dans le corps de l'ouvrage, je me vois donc forcé d'en arriver à une conclusion, en priant le lecteur de bien vouloir m'excuser d'être si laconique. Je le fais avec la certitude qu'on n'aura pas à se plain- dre du travail de notre savant ami M. le Dr Pelletan dont l'érudition et la clarté de vues sont devenues proverbiales. Je ne puis, en terminant, que recommander instamment l'étude si attrayante de ces véritables joyaux de la nature, les Diatomées. Rien n'est plus facile que de s'en procurer, car il y en a partout, sur la terre hu- mide , dans les mousses des arbres et des vieux murs, sur les rochers arrosés par des sources, dans les ruisseaux, les rivières, les étangs, les fossés et les lacs d'eau douce, jusqu'au sommet des hautes montagnes et sous toutes les latitudes. Dans les eaux saumâtres, elles abondent, non seulement près de la mer, mais même dans les salines artificielles de l'inté- rieur des continents. Enfin, la mer en fournit un nombre extrêmement grand, de formes rares et belles, dont les unes sont essentiellement pélagiques et passent leur exis- tence flottant à la surface de l'océan, d'autres ne se récoltent que dans les abîmes les plus profonds qu'on ait atteints avec la drague, tandis que le plus grand nombre ne se trouvent que dans la zone littorale. Un nombre très grand d'animaux se nourrissent presqu'exclusivement de Diatomées et les carapaces siliceuses et indigestes de ces dernières remplissent, en ce cas, leurs cavités digestives qui constituent dès lors de véritables magasins ou des boîtes à surprise pour le naturaliste. — Les Diatomées ont vécu, dans les temps géologiques, aussi bien dans les eaux douces que dans les mers anciennes, comme le témoigneut d'immenses dépôts qu'on rencontre dans les cinq parties du monde, presqu'exclusi- ODUCTION 9 vement formés par leurs frustules impérissables. Beaucoup de ces formes des âges passés sont de races éteintes aujourd'hui. Il y a près de quarante ans que je m'occupe pendant mes loisirs, hélas ! trop peu nombreux, de l'étude des Diatomées. J'y ai trouvé, pendant celte longue partie de mon existence, un délassement bienfaisant, une récréa- tion saine et de bon aloi, un plaisir continu, qui m'ont maintes fois fait oublier momentanément les petites et les grandes misères d'une vie fort accidentée. Je souhaite à tous ceux qui suivront mes conseils de trouver dans l'élude de ces admirables petits organismes autant de satisfaction que j'en ai trouvé moi-môme. Un vaste champ reste ouvert pour compléter l'histoire des Diatomées, il y a donc gloire et profit à retirer de leur étude pour celui qui voudra sérieusement l'entreprendre. J. Deby. Hampstead (London), 26 sept. 1887. HISTORIQUE Le premier naturaliste qui, d'après Ehrenberg, observa une espèce ap- partenant à la famille des Diatomées serait Leeuwenhoek qui, en 1703, aurait vu sur des Algues vertes un organisme que le même Ehrenberg dit être le Synedra ulna. Cette découverte serait consignée dans un mé- moire « concernant les Algues vertes qui poussent dans l'eau et quelques animalcules qui se trouvent près d'elles (1), » mémoire inséré dans les Philosophical Transactions de la Société Royale de Londres pour l'année 4703. C'est là une erreur du célèbre micrographe allemand. Nous nous sommes reporté au travail original de Leeuwenhoek cité par lui : c'est une lettre, datée de Delft, en Hollande, le 25 Décembre 1702, faisant partie du n° 283 du Recueil des Transactions. Cette lettre est uniquement consacrée à la description de quelques Infusoires Vorticelliens et de la petite plante que tout le monde connaît sous le nom de lentille d'eau {Lemna major ou minor) et qu'on appelait alors Lenspalustris. La planchequi accompagne cette lettre représente d'une manière très reconnaissable et la plante et les animalcules. Quant à la figure 8, spécialement désignée par Ehrenberg comme relative à une Diatomée qui serait le Synedra ulna, elle repré- sente très nettement une radicelle grossie de Lemna, sur laquelle sont fixés des Vorticelles et des Vaginicoles. Peut-être la radicelle est-elle un peu trop droite et raide, le dessin de cellules peut-être un peu trop régu- lier, mais il est impossible de se méprendre sur ce qu'a voulu figurer Leeuwenhoek. Mais le volume 1702-1703 des Transactions contient plusieurs lettres ou parties de lettres de « M. Anthony van Leeuwenhoek. » Dans une de celles-ci, datée du 5 février 1703, (2), cet auteur raconte qu'en juillet 1702, en laissant au repos de l'eau prise dans un canal, à Delft, il y a vu des corps microscopiques réguliers et transparents, formant comme des arbo- (1) « Concerning green Weeds growing in ivater and some animalcula about them, » by M. Leeuwenhoek, Ph. Tr. 1703, n° 283. (2) Part of letter from M. Anthony van Leeuwenhoek containing his obser- vations on some animalcula in water, etc. — Ph. Trans. 1703, T. XXIII p. 1431. 12 LES DIATOMÉES risations. Il les compare à des cristaux et indique comment il a cherché à les imiter en laissant évaporer des solutions faibles d'un sel d'argent, produisant en petit le phénomène connu sous le nom d'#r#re de Diane. Est-ce un dépôt de Diatomées que Leeuwenhoek a observé ? — Cela est fort probable, et quelques-unes des figures qu'il donne (notamment celle qui porte le n° 1) sembleraient le prouver. Dans ce cas, il serait le premier observateur dont l'attention a été fixée sur une Diatomée. Au cas contraire, la découverte de ces petites Algues doit néanmoins être placée dans l'année 1703 — car, dans le n° 286 des mêmes Philosophical Transactions (1) se trouvent deux parties de lettres adressées par un « gentleman in the country » dont le nom n'est pas donné, lettres dont Ehrenberg n'a pas eu connaissance non plus que de la précédente. Dans la seconde de ces deux lettres (5 juillet 1703) il est dit : » Dans mes observations sur ces plantes, (racines de lentilles d'eau), j'ai souvent vu, adhérentes à ces tigesou quelquefois séparées dans l'eau, beaucoup de petites branches composées de pièces rectangulaires oblon- gues ou exactement carrées, réunies entr'elles comme dans le fig. VII que j'ai dessinée aussi exactement que je l'ai pu d'après nature (2). Il y a quelquefois vingt de ces pièces, ou davantage, dans une branche qui généralement adhère par une de ses extrémités aux tiges de la plante, et il est remarquable, je pense, que ces parallélogrammes rectangulaires sont toujours de la même taille, le long côté n'excédant pas le tiers de l'épais- seur d'un cheveu, les carrés étant visiblement composés de deux parallé- logrammes réunis par le long côté. Ils paraissent très minces, et la struc- ture de chacun semble à peu près la même. A un très fort grossissement, ils apparaissent comme dans la Fig. VIII (3). J'ai d'abord pris ces branches pour des sels, mais trouvant qu'elles avaient toujours la même taille et qu'elles ne prenaient pas un accroissement sensible de volume tout le temps qu'elles restaient dans l'eau, qu'après avoir été un jour ou deux à sec sur une lame de verre elles ne s'altéraient pas dans leur forme, et par l'addition d'une nouvelle eau (chaude ou froide) présentaient toujours la même apparence et la même cohésion, et que leur adhérence (quoiqu'elles ne se touchent que par les points angulaires) était si forte et si rigide que toutes se mouvaient ensemble et gardaient la même position les unes par rapport aux autres bien qu'elles fussent agitées par l'eau ; ces consi- (t) Lctters front a Gentleman in the country relating to M. Leeuwenhoek'' s letter in Transactions n° 283, — communiquées par M. G. (pas de nom). Ph. Trans. T. XXIII, 1703, n° 286, p. 1499. — (La première est datée du 1" juin, la seconde du 5 juillet 1703). (2) Ce n'est pas cette figure que cite Ehrenberg comme étant de Leeuwen- hoek, mais une figure 8, Planche I, qui représente, comme nous l'avons dit ci-dessus, une radicelle de Lemna. (3) Cette figure représente trois i'rustules un peu plus grossis. I. HISTORIQUE 13 dérations, dis-je, me persuadèrent qu'il s'agissait plutôt de plantes que de sels, mais comme elle sont si petites qu'aucun jugement ne peut en être porté par l'œil, je ne veux rien déterminer positivement. » Cet observateur anonyme a donc été tenté de prendre aussi cette série de frustules pour des cristaux, comme il paraît d'autant plus probable que l'a fait Leeuwenhoek dans son observation de juillet 1702. Néanmoins il revient à l'idée que c'est une plante et la description qu'il en donne, comme le fait remarquer M. F. Kitton (1) est suffisante pour faire re- connaître le Tabellaria flocculosa des diatomistes modernes et non le Synedra ulna comme l'a dit Ehrenberg. La figure d'ailleurs, fort bien dessinée, ne laisse pas de doutes. Puis, vint Louis Joblotqui, en 1714-1716, découvrit une espèce nommée par lui Vibrio Bacillus, laquelle semble être le même Tabellaria {Observations faites avec le microscope). En 1745, William Arderon découvrit un « animal-avoine » [oat-like animal) qu'il avait observé suri' « animal-cheveu » {hair-like animal) et qui a été longuement décrit et même figuré dans YEmploymenl for the Microscope, de Baker, paru en 1753. Dans ce temps là, on avait assez l'habitude de désigner ces êtres mi- croscopiques, jusqu'alors inconnus, en les comparant à des objets connus. C'est ainsi qu'on avait l'animal-cheveu, qui est une Oscillaire, l'animal- trèfle, qui est un Rotateur, un Chgetonotus, l'animal-fève, qui est un Infusoire cilié; quant à l'animal-avoine, c'était sans doute une Diatomée appartenant au groupe des Navicules, peut-être le Navicula sphœro- phora ou le N. amphisbœna. C'est encore un Navicula, peut-être le N. fulva, que Schrank décrivit plus tard (1776) sous le nom de Chaos infusorum. Le célèbre naturaliste Otto Frédéric Millier observa, en 1773, à Pyr- mont, le Gomphonema truncatum dont il fit un Vorticella pyraria; en 1779, XAchnanthes brevipes, et en 17S2 son Vibrio paxillifer qui n'est autre que la singulière Diatomée appelée depuis Gmelin jusqu'à pré- sent liacillaria-parodoxa. A ces espèces, il ajouta, en 1783, les Con- serva pectinalis, qui est un Fragilaria actuel, et Conferva armil- laris, qui est un Melosira. 11 décrivit encore, dans son grand ouvrage posthume publié en 1786 (2), un Vibrio bipunctatus, qui est sans doute le Synedra ulna, et un Vibrio tripunctatus qui est le Navicula qracilis, espèces qu'Hermann avait observées en 1784 et désignées sous le nom d'E?ichelys. Schrank, en 1797, décrivit encore deux Navicules sous les nomsde Vibrio turrifer et V. fusais, et un Cocconema sous celui de Kolpoda lima. (1) F. Kitton. — Early history ofDiatomaceœ, dans le Science Gossip, 1880. — Traduit dans le Journal de Micrographie, 1880. (2) 0. F, Mûllcr, Animalcula Infusoria fluviatilia et marina, etc. Haunise, 1786, in-4°, 50 planches. 14 LES DIATOMÉES On le voit, le nombre des Diatomées connues à l'époque ou parut le célèbre ouvrage de 0. F. Millier, était encore bien petit. Néanmoins, les difficultés étaient déjà grandes pour les naturalistes qui les avaient observées et qui cherchaient à les classer, les uns dans le règne animal , les autres dans le règne végétal, d'autres encore à les distribuer dans les deux règnes. Et les difficultés étaient d'autant plus grandes que parmi les formes microscopiques, qu'ils découvraient, il y avait non-seulement des Diatomées véritables, mais des Infusoires, des Acinètes, qui présen- tent des caractères d'animalité bien tranchés, et des Algues qui ont, au contraire, une physionomie nettement végétale. Cet embarras des classificateurs se révèle, d'ailleurs, par l'attribution qu'ils font des espèces nouvellement décrites les unes au genre Vibrio, les autres au genre Con- ferva. C'est ainsi que Gmelin, créateur dugenre Bacillaria, qu'il institua, en 1788, pour le fameux Vibrio paxillifer de 0. F. Millier dont il fil le Bacillaria paradoxa, rangea ses Bacillariées dans le règne animal, tandis que Yahl, dans sa Flora Danica, le rédacteur de YEnglish Botany, puis Roth, qui donne même une bonne figure due à Mertens d'une Diatomée dont il fait un Conferva flocculosa, les replacèrent parmi les plantes. D'autre part, vers la même époque, Schrank en fait des Vibrio et des Kolpoda, c'est-à-dire des animaux, avec Kammacher, qui, dans la Micrographia d'Adams (1798) range un Navicula dans le règne animal (1). A partir de cette époque, les travaux sur ces organismes devinrent de plus en plus nombreux, mais les idées étaient encore bien loin d'être fixées sur leur position systématique, car Girod Ghantrans en faisait des Algues qui produisaient des animaux, et lngenhousz, ne pouvant en faire ni des bêtes ni des plantes, ne trouva rien de mieux que de les classer dans le règne minéral (1802). Cependant, c'est dans les Algues que la majorité des observateurs de la fin du XVIIIe siècle classaient les organismes qui nous occupent, et notamment parmi les Gonferves, en raison de la forme filamenteuse qu'af- fectent un grand nombre d'espèces. Et, en réalité, c'est surtout les algo- logues qui s'adonnèrent à cette étude. C'est ce que firent Roth, Mertens, Trentpohl, Weber, Hornemann, Mohr, Dillwyn, Thore, Draparnaud. Agardh et, enfin, le célèbre botaniste de Candolle qui, en 1805, créa le genre Diatoma (du grec ôtaxô^vw, diviser), auquel il donne pour type le Conferva flocculosa de Roth et qu'il plaça parmi les Algues. Dillwyn (2) fit entrer aussi, sous le nom de Gonferves, un certain nom- bre de Diatomées filamenteuses dans ses British Confervœ (1809) et en (1) Roth. — Catalogus Botanicus, Fasc. I, Tab. IV, fig. 4 et Tab. V, fig. 6 (1797). (2) Dillwyn. — British Confervœ, in-4°, 1809. I. HISTORIQUE 15 donna des figures qui permettent de les reconnaître aujourd'hui (Fig. 13). L'exemple de de Candolle fut suivi par le grand algologue Agardh qui adopta le genre Diatoma, retendit et le fit entrer dans sa Synopsis A l- qarum (1817). C'est en se plaçant à un tout autre point de vue que Nitzsch se livra à des recherches approfondies, et de tous points excellentes, sur la constitu- tion de ces petites plantes dont il donna réellement les premières figures exactes dans son livre publié en 1817 (1). Il reconnut leurs formes, ob- Fig. 13. — Diatomées figurées par Dillwyn dans les British Confervae (1809). 1. — Confenu pectinalis, Dill. (Himantidium pectinale des auteurs moder- nes). — 2. Conferva flocculosa, Bill., Roth. (Tabellaria flocculosa, aut. mod.) — 3. Conferva nummuloides, Dill. (?) — 4. Conf. lineata (Melosira lineata, aut. mod. — 5. Conf. fasciata, Dill. (Melosira varians, aut. mod.). Ces figures sont soigneusement copiées sur celles de Dillwin qui repré- sentent ces Algues sous le « sixième pouvoir » de son microscope, c'est-à- dire, à ce qu'il semble, 200 diamètres. Les ombres représentent l'endo- chrome coloré en vert dans les figures originales (2). (1) D. Gh. Ludw. Nitzsch- B eitrcig e zur Infusorienkunde oder Naturbeschreibung der Zercarien und Bacillarien, avec 6 pi. sur cuivre, en couleurs. Halle, 1817, in-8°. (2) F. Kitton. Notes sur les genres et les espèces des Diatomées compris dans les « British confervœ » de Dillwyn. (Journal de Micrographie, T. VIII, 1883, p. 526 et Science-Gossip, 1883.) 16 LES DIATOMÉES serva la multiplication des « bâtonnets » par division longitudinale, ce qui lui permit d'expliquer facilement la formation des filaments et des chaînes en zig-zag, et signala la persistance de l'enveloppe après la mort de l'or- ganisme. Mais il en considéra le plus grand nombre comme de véritables animaux, en raison de leurs mouvements, tandis que d'autres étaient réel- lement des végétaux. Et cependant, parmi les espèces qu'il regardait comme des plantes, plusieurs sont douées de mouvement. Puis, Lyngbye publia, en 1819, son Tentamen Hydrophytologiœ Da~ niv.x, livre très important pour l'époque et dans lequel il décrivit beau- coup d'espèces Bacillariées nouvelles, remania et compléta les genres Dia- toma, Fragilaria et Echinella. Ce dernier a disparu des classifications et renfermait des organismes qui ont été reconnus plus tard pour des œufs d'insectes. Pour Lyngbye, toutes ces espèces appartenaient au règne végétal. Ce fut aussi l'opinion de Link et de Bonnemaison. Le premier décrivit en 1820 les deux nouveaux genres Hydrolinum et Lysigonium {Melosira et Schizonema), et le second, les genres Vag inaria et Spermogonia {Schizonema). C'est alors que Bory de Saint- Vincent établit, dans le Dictionnaire classique d'Histoire Naturelle, sa famille des Arthrodiées qu'il place comme intermédiaire entre les animaux et les végétaux, et dans laquelle il fait entrer les Achnanthes et plusieurs autres genres et espèces de Diatomées. Puis, il créa le genre Navicula qu'il rattacha à la famille des Bacillariées, laquelle, réunie aux Infusoires, forma son groupe des Psy- chodées. « Mais, dit Kûtzing, tandis que Bory de Saint- Vincent fondait surtout ses genres sur les recherches des autres observateurs et que les quelques investigations qui lui sont personnelles portent trop l'empreinte d'une étude superficielle, les travaux de C. A. Agardh sur les mômes groupes sont plus approfondis. Dans son Systema Algarum (1824), cet auteur men- tionne les Bacillariées comme un ordre spécial des Algues, sous le nom de Diatomées, et les classe mieux et plus complètement que ses prédécesseurs, dans les genres : Achnanthes, Frustulia, Meridion, Diatoma, Melo- sira, Schizonema, Gomphonema et Desmidium ». Ce dernier genre a, depuis, été séparé des Diatomées et a formé le type de la famille des Desmidiées. Dans les années suivantes, le même naturaliste agrandit encore le cadre de la famille des Diatomées qui, en 1830, ne comptait pas moins de 21 genres, la plupart conservés aujourd'hui, et contenant environ 116 es- pèces. Pendant ce temps, d'ailleurs, plusieurs botanistes éminents avaient enrichi cette famille de nouveaux genres et de nouvelles espèces : Gaillon, Link, Leiblein -et surtout Greville (1827) et le célèbre botaniste Turpin, l'un des précurseurs de la théorie cellulaire et le créateur du genre Su- rirella, en 1828 ; puis Gray, en 1832. I. HISTORIQUE 17 « Ainsi, dit encore Kiïtzing, jusqu'en 1832, les travaux systématiques s'arrêtèrent à ces organismes microscopiques; beaucoup des auteurs men- tionnés les considéraient, en partie comme animaux (les formes mobiles), en partie comme végétaux (les formes fixes). Agardh, Lyngbye et Leiblein seulement se déclarèrent plus décidément pour le caractère végétal ; mais, excepté Schrank, aucun ne soutint formellement leur nature animale. De leur constitution intime et de leurs fonctions vitales, rien, en dehors des observations complètes données par Nitzsch et de quelques indications su- perficielles de Gaillon, rien n'était connu qui avançât la question relative à leur nature » — En cette même année, 1832, parut la seconde Contribu- tion à la connaissance des organismes microscopiques de G. G. Eh- renberg. Dans cet ouvrage, les Diatomées furent décidément considérées comme des formes animales. Cette répartition des Diatomées parmi les Infusoires a été soutenue par Ehrenberg, dans les très nombreuses publications qu'il fit paraître pendant les années suivantes, et définitivement consacrée dans son grand ouvrage : Les Infusoires considérés comme des organismes parfaits (1). Il les incorpore à sa famille des Poly gastriques, regardant la matière colorée qu'elles contiennent comme des ovaires, et les globules plus clairs qui y sont répandus, par exemple dans les Navicula, comme les diverses par- lies d'un estomac à plusieurs lobes. Les observations de l'illustre micrographe eurent un immense retentis- sèment et exercèrent une influence considérable sur la marche de la science des infiniments petits. Elles furent faites, d'ailleurs, avec un soin inconnu jusque là dans ces sortes de recherches, accompagnées de planches superbes et d'une admirable exactitude dans le dessin général. Ehrenberg était, du reste, supérieurement placé pour donner à ses observations une étendue et une rigueur auxquelles la plupart de ses prédécesseurs n'avaient pu atteindre. Disposant des instruments les plus parfaits que construisaient les opticiens de son temps, profitant de ses relations dans les deux conti- nents, recevant des matériaux de tous les points de la terre, il put ras- sembler des documents en nombre considérable, étudier les formes fossiles et même retrouver à l'état vivant des espèces considérées jusqu'alors comme éteintes. C'est ainsi que pendant de longues années, et presque jusqu'à nos jours (1875), il publia de nombreux ouvrages, notamment sa Mikrogeologie (1854) et des mémoires plus nombreux encore insérés dans les Comptes rendus de l'Académie des Sciences de Berlin. Dès l'époque où parut son grand ouvrage sur les Infusoires, il y incorporait 24 genres comprenant 144 espèces de Diatomées, nombre qu'il augmenta considérablement dans les années suivantes. Mais, pendant cette longue période, les observateurs s'étaient multipliés (1) C. G. Ehrenberg : Die Infusionsihûrchen cils vollkommene Organisrnen, 2 vol. in-fol. Leipzig, 1838. 2 18 LES DIATOMÉES de tous côtés et beaucoup d'enlr'eux avaient porté leur attention sur cette famille des Diatomées. Ce fut d'abord A. de Brébisson, dont nous retrou- verons à chaque instant le nom dans l'histoire de ces organismes ; et, con- trairement aux idées d'Ehrenberg, il les rangea dans la classe des Algues où, depuis lors, tous les naturalistes se sont accordés à les maintenir. — Puis, Bailey, Gréville, Kûlzing. — Ce dernier auteur avait, dès 1833, publié des iravaux importants sur les Diatomées ou Bacillariacées à enveloppe siliceuse, et établi une classification (1), que Brébisson adopta en grande partie. A partir de ce moment, à mesure que ces formes si particulières de la vie végétale sont mieux connues, on voit de tous côtés surgir des chercheurs qui viennent enrichir la science de notions plus étendues et plus complètes. En même temps, cette étude se spécialise, pour ainsi dire, de plus en plus, et devient l'apanage de nombreux savants qui font des Dia- tomées l'objet à peu près exclusif de leurs recherches. Tels furent : Ralfs, Harting, Pritchard, Brigthwell, William Smith, Shadbolt, Rabenhorst, Gregory, Max Schultze, Boper, Walker Arnolt, Wallich, O'Meara, Don- kin, A. M. Edwards, Janisch, P. T. Glève, Grûnow, Hamilton Lawrence Smith, Eulenstein, Guinard, Paul Petit, Van Heurck, Castracane, Kitton, Flôgel, Pfilzer, Ad. Schmidt, Matteo Lanzi, Gox, Julien Deby, Leuduger-Fort- morel, Otto Mûller et un grand nombre de diatomistes dont nous ne pou- vons citer ici les noms, qui ont fait de l'étude de ces admirables petites plantes uue branche spéciale de l'histoire naturelle et de la micrographie. Les détails si intéressants de leur organisation, les phénomènes biolo- giques si curieux dont elles sont le théâtre, l'élégance et la finesse des sculptures dont leur enveloppe est ornée, la difficulté même qu'offre sou- vent l'étude de ces mêmes sculptures, la profusion avec laquelle ces espèces sont répandues dans la nature, suffisent bien pour expliquer l'irré- sistible attrait que les Diatomées ont exercé, depuis qu'elles sont connues, sur tant d'observateurs qui se sont passionnés pour ces délicates recherches. Ajoutons que jusqu'à ces dernières années où l'étude des Bactériens est venue prendre une place importante dans les travaux des chercheurs, au- cune branche de la science n'a été plus profitable à la micrographie ; car, outre qu'elle a forcé les opticiens à perfectionner de jour en jour leurs ins- truments, elle a amené les physiciens à rectifier les idées qu'ils professaient depuis Galilée, Kepler et Descartes sur la formation des images dans le microscope. Enfin, elle a doté tous ceux qui s'y sont adonnés d'une in- comparable habileté dans le maniement des instruments, dans l'emploi et l'appréciation des objectifs et dans la manipulation des petits objets. (1) KiïTziNG, Synopsis Diatomacearum, Halle, 1833, in-8°, 7 pi. (2) J. Pelletan, Le Microscope, son emploi et ses applications, 1 vol. in-8° avec grav. et pi., Paris, 1876. I. HISTORIQUE 19 Aussi, avions nous raison de dire dans un autre ouvrage (2) que les orga- nismes qui ont été le plus utiles à l'avancement de la science si vaste et si ardue des infiniments petits sont les Diatomées, celte joie et ce désespoir des micrographes, ces pierres de touche de nos objectifs ; les Diatomées, pour l'examen desquelles ont été construits les plus parfaits, les plus admi- rables (et les plus coûteux) des instruments ; les Diatomées qui ont fait faire à l'art si difficile de la construction des objectifs plus de progrès, peut-être, que tous les êtres réunis de la création. HISTOIRE NATURELLE DES DIATOMEES Quelle est la position systématique des Diatomées, autrement dit, quelle place occupent elles sur l'échelle des êtres ? Nous avons vu, dans un précédent chapitre, qu'elles ont été longtemps ballottées du règne animal au règne végétal, que Leeuwenhoek, 0. F. Mûller, Gmelin, Ehrenberg et d'autres auteurs les classaient parmi les animalcules infusoires, tandis qu'Agardh, Dilwyn, Turpin, de Gandolle et, après eux, tous les naturalistes les placèrent parmi les Algues, sauf In- genhousz qui, en raison de leur enveloppe siliceuse, les rangea dans le règne minéral. Aujourd'hui, tout le monde est d'accord pour les placer dans le règne végétal, mais à l'échelon le plus bas et parmi ces êtres qui forment, pour ainsi dire, le passage des plantes aux animaux et qu'on a réunis sous le nom d' Algues unicellulaires. Singulières plantes, en effet, que ces Algues inférieures dont certaines se meuvent de mouvements qui paraissent volontaires, souvent à l'aide de cils vibratiles semblables à ceux' des Infusoires Flagellés, possèdent un point rouge assimilable à un œil dont il remplit manifestement les fonc- tions, ont une vésicule pulsalile, organe de circulation ou d'excrétion, dont le mécanisme appartient évidemment à l'animalité. Aussi, beaucoup de ces Algues inférieures, les Chlamijdomonas, les Chlam?/dococcus,\es Gonium, les Pmidoriha, les Volvox, etc., sont elles réclamées par les zoologistes comme faisant partie de leur domaine. Où est, en effet, le caractère distinctif, le critérium qui permet d'at- tribuer ces divers êtres à tel règne plutôt qu'à tel autre ? En réalité, il n'en pas de certain, ni de complet, mais le plus satisfai- sant nous paraît devoir être cherché dans le mode de nutrition. La plupart des végétaux se nourrissent grâce à la chlorophylle ou matière verte dont ils sont munis, laquelle, sous l'influence de la lumière solaire, agit sur l'acide carbonique de l'air, fixe le carbone pour la nutri- tion de la plante et rejette l'oxygène. Tous les végétaux ne sont pas pourvus de chlorophylle, les Champignons, par exemple, et, par conséquent, ne II. HISTOIRE NATURELLE 2] se nourrissent pas ainsi aux dépens de l'atmosphère ; mais on doit, à notre avis, considérer comme des plantes tous les organismes à chlorophylle qui se nourrisssent par ce mode de nutrition exclusivement végélal et que, pour cette raison, on appelle holophy tique. Ce n'est pas qu'il n'existe un certain nombre d'êtres certainement ani- maux qui contiennent de la chlorophylle. Mais ils se nourrissent, néan- moins, à la manière des animaux : ils ont une bouche et avalent leur proie. La chlorophylle est, chez eux, disposée sous forme d'organes particuliers, assez compliqués, qu'on a appelés chromalophores, souvent en situation et en nombre constants pour chaque espèce. Nous supposons que ces organes constituent chez ces animaux, un appareil de perfectionnement des- tiné à la fonction respiratoire. Il peut arriver encore que ces organes chlorophylles soient, chez ces animaux, doués, pour ainsi dire, d'une vie autonome. Ils ont la cons- titution histologique d'une cellule, se multiplient même par division cel- lulaire, à ce point qu'on les considère aujourd'hui comme des organismes végétaux parasites de l'animal. Il semblerait même que ces parasites sont nécessaires et que l'animal ne pourrait pas vivre sans les parasites, de même que ceux-ci, malgré certaines observations qui tendraient à prouver le contraire, ne peuvent pas vivre en dehors de leur hôte. Il y aurait là un fait d'adaptation aboutissant à une symbiose par service réciproque. On a même classé ces parasites parmi les Algues inférieures, les Palmella- cées, sous les noms de Zoochlorella, Zooxanthella, etc. Les Diatomées n'ont ni cils vibratiles, bien que certaines se meuvent, ni point rouge oculiforme, ni vésicule contractile, mais elles sont pourvues d'un endochrôme formé par une variété jaune ou brune de la chloro- phylle et disposé en plaques ou en grains, c'est à dire en chromatophores, dont le nombre et la situation sont constants pour chaque espèce Elles se nourrissent uniquement grâce à celte chlorophylle modifiée, qu'on a ap- pelée diatomine et qui agit à la lumière solaire comme la chlorophylle des plantes vertes, décompose l'acide carbonique de l'air dont le carbone est utilisé parla Diatomée, et rejette l'oxygène. Leur mode de nutrition est donc entièrement holophytique ; elles ne possèdent, d'ailleurs, aucun des organes de l'animalité. Il y a donc lieu de les classer dans le règne vé- gétal et, par exemple, de les rapprocher des Algues inférieures. La matière colorante qui forme l'endochrome ou les chromatophores des Diatomées, bien qu'elle soit rarement verte, agit donc sous l'influence de la lumière comme la chlorophylle des plantes vertes. Nous avons dit qu'elle est formée par une modification de la chlorophylle, il serait plus juste de dire qu'elle est composée d'un mélange, à proportions variables suivant les espèces, de chlorophylle ordinaire et d'une chlorophylle modi- fiée que M. Paul Petit, dans un intéressant travail qu'il a publié sur ce sujet (1), a désigné sous le nom de phycoxanthine. Celle-ci est soluble (1) P. Peut, Brebissonia, 1880. 22 LES DIATOMÉES dans l'alcool faible, qu'elle colore en jaune, tandis que la chlorophylle n'est soluble que dans l'alcool fort, le chloroforme, etc. La phycoxanthine, que M. Frémy a appelée phylloxanthine, soumise au spectroscope, ne donne que deux bandes d'absorption, l'une dans l'orangé et le jaune, entre les lignes B et G du spectre, l'autre qui éteint toutes les parties de l'indigo et. du violet au delà du milieu de l'espace E — F. La chlorophylle donne cinq bandes, la première dans l'espace B — G, la seconde à gauche de la ligne D, la troisième au milieu de l'espace D — E dans le vert, le quatrième en E, et la dernière éteint toute la partie lumineuse du spectre au delà du milieu de l'espace E — F. La chlorophylle ou matière verte qui, chez les Diatomées est mêlée à la phycoxanthine, se comporte absolument comme la chlorophylle ordinaire des autres plantes, et les Diatomées vertes telles que les Melosira num- muloides, Navicula ramosissima, etc., agissent elles-mêmes sur la lumière comme la chlorophylle ordinaire. Les Diatomées brunes, au con- traire, ne donnent que la large bande BC de la phycoxanthine et l'étroite bande dans l'espace orangé C — D de la chlorophylle. Elles éteignent aussi la partie lumineuse à partir du milieu de l'espace E — F, comme, la phycoxanthine. Que les Diatomées agissent sur l'acide carbonique de l'air comme les plantes vertes, c'est un fait qu'il est facile de vérifier. Il est évident, d'ailleurs, qu'étant des plantes aquatiques, elles vivent à l'aide de l'air dissous dans l'eau qu'elles habitent. Si l'eau cesse d'être aérée, les Diatomées meurent, de même que si elle renferme des gaz de putréfaction. Il est facile de répéter avec elles la fameuse expérience de Saussure, comme nous l'avons fait, il y a quelques années. Nous avons expérimenté sur une récolte pure et fraîche de Fragila- ria capucina formant une masse à peu près de la capacité d'un dé à coudre. Nous avons vidé toute la récolte dans une petite éprouvette en verre, — un tube à essai — et nous avons achevé de remplir complète- ment avec de l'eau pure de rivière ; puis, nous avons placé dans l'ouver- ture du tube un petit bouchon de liège, assez petit pour laisser un certain espace entre sa périphérie et les parois internes du tube. Celui-ci a alors été rempli de manière à ce qu'il débordât. Puis, le fermant avec le pouce, sans emprisonner de bulles d'air, nous l'avons retourné sur un vase plein d'eau, et débouché. Dans cette position renversée, les Diatomées, en jjvertu de leur poids, tomberaient peu à peu et, sortant du tube, viendraient se répandre au fond du vase. Mais le petit bouchon, à cause de sa légèreté spécifique, s'é- lève doucement dans le tube et vient s'arrêter vers la partie supérieure en remontant les Diatomées qui restent ainsi suspendues en grande quantité en haut du tube, reposant sur le bouchon (1). (1) On n'aurait pas besoin de ce petit artifice en opérant sur une cuve à II. HISTOIRE NATURELLE 23 L'appareil est alors consolidé au moyen d'un support à pince et placé à une vive lumière. Il n'est pas utile de l'exposer à la lumière solaire directe : le phénomène est plus rapide, il est vrai, mais l'eau, en s'échauf- fant, perd une certaine quantité de l'air qu'elle dissolvait, air qui vient s'accumuler au sommet du tube et trouble les résultats. En plaçant l'ap- pareil à la lumière vive, près d'un objet éclairé par le soleil, on voit peu à peu de la masse des Diatomées se dégager de fines bulles de gaz qui se rassemblent au sommet du tube. En quelques heures, on obtient ainsi un volume de gaz occupant un centimètre cube, si les Diatomées sont bien vivantes, la lumière solaire active et l'eau employée bien fraîche. Ce gaz est de l'oxygène, avec une petite quantité d'air en nature rendu par l'eau. Il est facile d'en faire la preuve. On retourne le tube, en le tenant fermé avec le pouce, et, au moment où l'on soulève le pouce, on insinue dans la petite atmosphère gazeuse une allumette éteinte et pré- sentant un point en ignition. Celle-ci se rallume aussitôt. Ou bien, on fait passer la bulle de gaz dans un eudiomètre et, après y avoir ajouté un volume double d'hydrogène pur, on fait jaillir dans le mélange une étincelle électrique. Le mélange brûle grâce à l'oxygène, et il ne reste plus au sommet de l'éprouveUe qu'une toute petite bulle formée d'azote et de l'un ou l'autre des gaz, hydrogène ou oxygène, en excès. Il n'y a, du reste, rien d'étonnant à voir cette chlorophylle brune des Diatomées, ou ce mélange de produits dérivés de la chlorophylle, se com- porter avec l'air, sous l'influence de la lumière, comme la chlorophylle ordinaire des plantes vertes. Nous connaissons, en effet, un grand nombre de végétaux, dits à feuillage coloré, chez lesquels la chlorophylle a subi des modifications diverses, souvent très analogues à la matière colorante jaune ou brune des Diatomées. Tout le groupe des Algues marines apparte- nant aux Fucacées est coloré par une chlorophylle d'un bran verdâlre très foncé et tout le groupe des Floridées est coloré en un rouge parfois très vif. Les Phanérogames présentent aussi des espèces dont les feuilles sont colorées en toutes les nuances du vert ; un grand nombre, comme les Coleus, les Bégonia, les Altemanthera, les Caladium et mille autres, ont toutes les nuances du vert, du rouge et du blanc ; tout le monde con- naît les Hêtres et les Noisetiers au feuillage pourpre, les plantes à feuilles panachées de blanc ou de jaune, le Perilla nankinensis à feuilles presque noires, etc. Tous ces mélanges de produits dérivés de la chlorophylle verte agissent comme elle sur l'atmosphère en décomposant l'acide carbonique de l'air, fixant le carbone et rejetant l'oxygène. Enfin, ces modifications se produisent souvent sur une môme plante : par exemple, quand les feuilles deviennent jaunes ou brunes en automne, ou même d'un rouge de sang, comme dans la Vigne vierge. Les Diatomées, se nourrissant comme les plantes vertes et exclusive- mercure et en faisant passer les Diatomées et l'eau dans une éprouvette pleine de mercure et renversée sur la cuve. 24 LES DIATOMÉES ment comme elles, appartiennent donc évidemment au règne végétal ; il l'esté à déterminer le groupe de végétaux dans lequel on doit les ranger. Incontestablement, elles appartiennent à la classe des micro-organismes et doivent être placées à côté des Algues unicellulaires. Ce sont, en effet, des organismes unicellulaires. Leur corps entier n'est, au point de vue histologique, qu'une cellule. Et quand M. J. Deby dit, dans Y Introduction de ce livre, qu'il regarde les Diatomées comme des êtres pluricellulaires, il veut exprimer que l'organisme qu'on a appelé frustule, et que l'on considère ordinairement comme formant à lui tout seul toute la Diatomée, n'en est, au contraire, qu'un des éléments, la Diatomée se com- posant d'une agrégation de ces frustules unicellulaires, comme le Volvoce se compose d'une agrégation de monades formées d'une seule cellule. C'est à dire que les Diatomées sont plurifrustulaires, mais le frustule n'est qu'une cellule. II présente une enveloppe cellulaire ou cuticule, un protoplasma, un noyau et un nucléole. De plus, il est muni de chroma tophores diverse- ment constitués. C'est là la composition d'une simple cellule. Néanmoins, on a contesté que le frustule même des Diatomées puisse être une cellule simple. Certains auteurs se sont fondés, dans cette discussion, sur la complexité de ces organismes, dans lesquels on trouve des différenciations trop considé- rables, selon eux, pour qu'on puisse les attribuer à un simple élément cel- lulaire. D'autres se sont appuyés surtout sur l'existence de deux proto- plasmas, le premier, protoplasma ordinaire ou incolore, et le second, pro- toplasma coloré. Nous pensons qu'aujourd'hui cette thèse n'est plus soulenable: le proto- plasma coloré, l'endochrôme, n'est formé que par les chromatophores dont on constate l'existence, non seulement chez les Diatomées, mais encore chez un grand nombre d'autres cellules, d'abord dans toutes les cellules vertes des plantes, puis chez beaucoup d'organismes reconnus comme unicellulaires. Tels sont beaucoup d'Infusoires flagellés, comme les Dinobryiens, par exemple, qui possèdent de chaque côté de la cellule unique qui constitue leur corps, une plaque colorée en jaune brunâtre, compa- rable aux plaques d'endochrôme de beaucoup de Diatomées, comme les Navicula. Quant à la complexité de la cellule qui forme le corps des Diatomées, elle ne saurait non plus présenter un argument contre l'attribution de ces petites plantes à la classe des organismes unicellulaires. Celte com- plexité, d'ailleurs, n'est pas si grande qu'on peut le supposer ; elle réside en entier dans la faculté dont est douée la cellule diatomée de sécréter une carapace siliceuse qui double la membrane cellulaire d'une couche minérale indestructible et qui est pourvue de détails de structure, stries, perles, diaphragmes, pores, nodules, etc. fort compliqués, mais constants pour chaque espèce. Mais, quand on compare ces détails de structure à ceux qui sont réalisés II. HISTOIRE NATURELLE 25 par de simples différenciations des éléments cellulaires, chez d'autres micro-organismes, on reconnaît qu'ils n'ont, bien qu'extrêmement curieux et délicats, qu'une importance tout à fait secondaire, auprès de ceux que présentent les Infusoires, les Myxosporidies et beaucoup d'autres organismes unicellulaires. Avec les simples éléments cellulaires qui les constituent, les Infusoires peuvent se créer, par des différenciations de ces éléments, des organes locomoteurs, une bouche, un intestin, un anus, un appareil contractile, une cuticule parfois munie d'organes urticants ou trichocystes compa- rables à ceux des Zoophyles; on les voit se constituer des carapaces ou des coques de formes variées, voire des coquilles calcaires ou siliceuses dont les Acanthomèlres, les Polycyslines, les Foramifères nous offrent d'admirables exemples. Et quant au frustule siliceux des Diatomées, ce frustule composé de deux valves, dont la jointure est formée par une bande connective, n'est-ce pas un détail qui rappelle complètement la constitution des Psorospermies, (lesquelles ne représentent qu'une phase reproductrice des Myxosporidies) composées aussi de deux valves maintenues par un ruban connectif, valves qui s'écartent à certains moments pour mettre a nu le protoplasma inté- rieur en vue d'une conjugaison avec un autre organisme semblable? C'est le même phénomène qui se passe chez les Diatomées dans les cas, assez peu nombreux, où la conjugaison a été reconnue chez elles ; avec cette diffé- rence, tout à l'avantage des Psorospermies, que la bande connective n'a, chez les Diatomées, qu'un rôle passif, celui de protéger les valves de nouvelle formation dans la multiplication par voie asexuelle ou division cellulaire, tandis que chez les Psorospermies les filaments conneclifs agissent comme de véritables grappins ou rélinacles pour maintenir l'or- ganisme conjoint pendant l'acte de la reproduction sexuelle ou conjugaison. Chez les Diatomées, le seul organe de fixation pendant la conjugaison est un mucilage dans lequel les deux cellules sont enveloppées pendant toule la durée du phénomène ; tandis que, chez les Myxosporidies l'état, de mucilage ou de myxome est une véritable phase biologique, phase vé- gétative pendant laquelle se forment, dans le myxome, les Psorospermies qui se conjugueront plus tard librement (1). Nous ne voulons pas pousser plus loin qu'il ne faut cette comparaison des Diatomées avec certaines phases du cycle biologique des Sporo- zoaires, comparaison qui cependant conduit à des rapprochements très cu- rieux. Nous voulons seulement établir que la complexité de la cellule diato- mée et les différenciations qu'elle subit, ne sont point un argument contre l'opinion, aujourd'hui admise par la grande majorité des naturalistes, sur la nature unicellulaire des Diatomées; que, bien au contraire, les ana- (1) G. Balbiani. — Leçons sur les Sporozoaires, recueillies par le Dr J» Pelletan. 1 vol. in-8, avec figures et planches, Paris, 1885. 26 LES DIATOMÉES logies singulières que présentent ces différenciations et les phénomènes dont celles-ci sont l'objet ou le moyen, ne peuvent que confirmer cette opinion, s'il en était besoin. Si nous continuons, en effet, cette étude des Diatomées au point de vue biologique, nous arrivons à constater chez elles une série de phénomènes très intéressants et qui se rapprochent complètement de ce qu'on observe chez d'autres groupes d'organismes unicellulaires. Les uns sont relatifs à la constitution même des Diatomées, les autres à leurs différents modes de reproduction. M. J. Deby expose, dans X Introduction du présent ouvrage, la stru- cture anatomique, parfois si compliquée, de la cellule diatomée elle-même, le frustule. Mais nous ne pensons pas que l'organisme soit tout entier constitué par cette cellule ou ce frustule. Il y a encore un autre élément sur lequel plusieurs auteurs ont déjà appelé l'attention des naturalistes, mais auquel on n'a pas, à notre avis, accordé toute l'importance qu'il peut avoir. Nous voulons parler de ce que M. Matteo Lanzi a appelé le thalle des Diatomées. On a vu que M. Deby donne ce même nom de thalle à l'ensemble des frustules qui constituent une entité biologique Algue diatomée, et forment l'appareil végétatif de cette Algue, appareil végétatif qui peut rester cohé- rent, comme dans les Diatomées filamenteuses, ou se désagréger au fur et à mesure, comme dans les Diatomées diffluentes. Cette vue nous paraît fort juste, mais il y a quelque chose de plus. Chez un très grand nombre d'espèces, on a reconnu facilement l'exis- tence d'une substance servant de support ou d'enveloppe extérieure aux frustules cellulaires et qui a parfois une forme bien définie. Par exemple, beaucoup de Diatomées, comme les Gomphonema, sont portées par un pédicelle, c'est-à-dire par un filament, incolore, de consistance un peu mucilagineuse et doué de certaines propriétés autonomes, par exemple, de la propriété de prendre cette forme filamenteuse et de croître en longueur en se divisant et se subdivisant par bi-partitions dichotomiques. Il est an- histe, mais il n'est pas amorphe. C'est là le « thalle » pour M. M. Lanzi ; nous l'appellerons thalame pour éviter toute confusion. et ne rien pré- juger. D'autres fois, ce thalame est constitué par des tubes transparents, géla- tineux, d'un diamètre qui varie peu et dans l'intérieur desquels les frus- tules cellulaires s'entassent et se disposent dans une situation constante. La matière qui constitue le thalame tubulaire de ces espèces est donc douée de la propriété autonome de croître en longueur en affectant toujours une disposition en tube. Ce n'est donc pas une matière inerte. D'autres fois encore, le thalame ne présente pas une forme aussi nettement définie de pédicelle ou de tube, mais constitue un amas mucilagineux et transparent dans lequel sont englobés des frustules plus ou moins nom- breux ou un frustule unique. C'est le mucus matricalis des auteurs. Il II. HISTOIRE NATURELLE 27 forme une masse amorphe, une phytoglée, composée d'une substance glaireuse semblable à celle dont sont enveloppées beaucoup d'Algues inférieures, Palmellacées, Nostocacées, Volvocinées, etc. C'est dans une couche de celte glaire, qui ordinairement devient plus abondante et foisonne pour la circonstance, que s'opèrent les phénomènes de la reproduction sexuelle et de la formation des germes observés par M. Matteo Lanzi. Il peut même arriver que les thalames à forme définie, comme le pédicelle des Gompkonema, se transforment en une large ex- pansion hyaline aux bords de laquelle, le phénomène de la reproduction accompli, poussent les pédicelles filamenteux qui portent les jeunes frus- tules (1). Chez beaucoup d'espèces, le thalame mucilagineux est moins évident. Néanmoins, quoique réduit à une couche très mince, et peu visible, d'ailleurs, en raison de sa grande transparence, il n'en existe pas moins. Ainsi, chez toutes les Diatomées qui affectent la forme filamenteuse, comme les Melosira, les Himantidium, et une foule d'autres, les frus- tules demeurant accolés les uns aux autres au fur et à mesure qu'ils se forment par des divisions successives, il est certain que ces frustules restent adhérents parce qu'ils sont enduits, notamment sur leurs faces de contact, d'une couche extérieure agglutinative, qui est formée par la matière hya- line du thalame. La même observation peut se faire pour les Diatomées dont le frustule est triangulaire, comme les Meridion et les Lkmophora, frustules qui, restant accolés après des divisions successives forment, non seulement des cercles, mais des figures spirales comme une vis. Et, de même encore pour les espèces dont les frustules restent accolés par un de leurs angles, comme les Tabellaria. En général, chez celles-ci, il est assez facile de voir la petite masse ou coussinet de substance hyaline qui sert à fixer l'angle d'un frustule à l'angle du frustule voisin. Enfin, même chez les espèces dont les frustules paraissent libres et isolés, il est certain qu'il existe sur toute la surface extérieure une couche de subs- tance transparente, ordinairement très mince, mais dont il est néanmoins facile de vérifier la présence et qui, par exemple, masque partiellement ou complètement à l'œil de l'observateur les détails, stries et sculptures dont est ornée la surface siliceuse des valves qu'elle recouvre. C'est cette couche agglutinative externe qui fixe les Diatomées libres sur les plantes, les pierres, et, en général, tous les corps qui leur servent de support. H faut qu'on la détruise pour pouvoir reconnaître les détails de structure du frustule. Nous pensons donc qu'à l'état normal et complet, l'entité biologique qu'on appelle une Diatomée se compose d'un thalame plus ou moins volumi- (1) Matteo Lanzi — Le thalle des Diatomées (Bull, de la Soc. belge de Mi- croscopie, 1880. — Journal de Micrographie, 1880.) 28 LES DIATOMÉES neux, à forme définie ou à forme indéfinie, et d'un ou plusieurs corpuscules cellulaires ou frustules. Le. tout forme le thalle de la plante. Et nous sommes convaincu que c'est en considérant les caractères géné- raux de ce thalle tout entier, comme on le fait pour les autres Thallo- phytes, et les modes de fructification, quand on les connaîtra mieux, qu'on arrivera à une classification vraiment naturelle des Diatomées. Certains frustules présentent une structure et un aspect identiques, mais les uns appartiennent à une espèce possédant un thalame évident, filiforme ou tubulaire, tandis que les autres appartiennent à une es- pèce n'ayant qu'un thalame réduit à- une mince couche péricellulaire. De sorte que si l'on examine les frustules de la première espèce, alors qu'ils sont dépourvus de leur thalame, par suite d'un accident ou par les progrès de l'âge, on est exposé à les confondre avec ceux de la seconde espèce. Et, inversement, un même frustule, suivant qu'il est encore adhérent à un thalame défini ou qu'il en est débarrassé, peut être rangé dans deux es- pèces différentes. Quelle importance doit-on donc donner au thalame des Diatomées soit dans la classification, soit dans les phénomènes qui constituent la vie de la plante? Ce sont là des questions très complexes et auxquelles nous n'avons en- core à répondre que d'une manière très peu satisfaisante. Au point de vue de la classification des espèces, il est évident que les notions tirées du thalame sont de peu de ressources. Quand celui-ci est bien défini, d'une constatation facile dans la majorité des cas, comme les lhalames pédicellaires ou tabulaires, il est certain qu'il peut fournir des caractères pour la distinction des espèces. On s'en est servi, en effet, dans les classifications en usage aujourd'hui. Néanmoins, comme nous venons de le montrer, ces caractères sont dangereux à l'emploi quand il s'agit de déterminer des frustules qui se sont libérés de leur thalame. Et quand celui-ci se réduit à la mince couche pelliculaire qui revêt le frus- tule de toutes les Diatomées, il est difficile, quant à présent, sinon impos- sible, d'y chercher des caractères. Nous pensons donc qu'actuellement on . a tiré du thalame, au point de vue taxonomique, à peu près tout le parti qui était possible. Quant au point de vue biologique, l'importance du thalame des Diato- mées varie beaucoup avec la constitution qu'on peut lui supposer. N'est-ce qu'une simple matière inerte, destinée à servir de support et d'en- veloppe protectrice au frustule, comme celle qui enveloppe beaucoup d'Algues inférieures, les Palmella, les Nostoc, les Gonium, les Volvox, etc., où elle ne paraît remplir qu'un rôle mécanique de protection et de réunion pour les cellules vivant en colonies? S'il en est ainsi, son impor- tance est secondaire. C'est un simple coléoderme, comme l'appelait Bré- bisson. Mais, au contraire, remplit-il une fonction plasmatique? Intervient-il à certains moments, comme élément formateur? Est-il, par exemple, corn- II. HISTOIRE NATURELLE 29 parable à ces masses plasmatiques, mucilagineuses aussi d'apparence, qui constituent la phase végétative des Myxosporodies, masses au sein desquelles se produisent par des différenciations, des polarisations dans ce protoplasma, ces singuliers corpuscules, aux formes si curieuses, qu'on a appelés Pso?*ospermies? S'il en était ainsi, la part de cette glaire dans le cycle biologique des Diatomées serait considérable. On pourrait faire un rapprochement sai- sissant entr'elles et un grand nombre de Sporozoaires dans lesquels on voit d'abord une masse protoplasmique constituer l'organisme tout entier, masse dans laquelle, plus tard, apparaissent, à la suite de processus plus ou moins compliqués, des corpuscules à forme définie, forme qui rappelle môme quelquefois celles de certaines Diatomées naviculaires à ce point qu'on a appelés ces corpuscules pseado-navicelles. Ainsi, pour fixer les idées, nous rappellerons brièvement l'évolution de ces bizarres Sporozoaires, si bien étudiés par M. Bûtschli et surtout par M. Balbiani, et qu'on a désignes sous le nom de Myxosporidies : Sur les lamelles branchiales de certains poissons, de la Tanche, par exemple, on voit de petites masses arrondies, ou bien allongées en boyau, quelquefois ramifiées, d'une matière plasmatique ou sarcodique, qui sont douées de mouvements amiboïdes, émettant même, dans quelques cas, des expansions ou pseudopodes plus ou moins longs et fins. Souvent, comme on le voit aussi chez certaines Amibes, elles ne sont le siège que de mouvements de tluctuation se propageant tantôt dans un sens, tantôt dans l'autre, et qui se produisent sur place, sans déterminer de progres- sionde la masse plasmatique, parce que celle-ci repose sur un support solide. Si ces masses étaient flottantes dans un liquide, on conçoit que les ondes de fluctuation, formant comme une vague qui se propage, pourraient leur imprimer un mouvement de translation dans un sens ou dans l'autre, sui- vant le sens de l'ondulation. Ces masses sarcodiques grossissent peu à peu, et varient beaucoup de dimension suivant les espèces et la phase de dé veloppement, quelques unes ne dépassant pas 8 \ts d'autres atteignant jusqu'à 36 ^. Peu à peu, il se développe, dans leur intérieur, des globules d'une matière grasse colorée en jaune et des granulations qui prennent le caractère de noyaux et qui se multiplient, grossissent, et, à la suite de transforma- lions encore mal connues, acquièrent une forme elliptique, s'enveloppent d'une membrane solide ou coque transparente et constituent ce qu'on a appelé une psorospermie ; ces corpuscules doivent être considérés comme des corps reproducteurs ou spores. Ces psorospermies, qui correspondent chez les Myxosporidies aux cor- puscules que chez d'autres Sporozoaires, les Grégarines et les Coccidies, on a appelés pseudo-navicelles à cause de leur forme naviculaire, sont de petits organismes très compliqués. La coque est formée de deux valves appliquées l'une contre l'autre. 30 LES DIATOMÉES comme les deux moitiés d'une coquille de noix, et la ligne de suture est visible quand on examine le corpuscule par la tranche (ou par la face con- nective, comme on dirait pour une Diatomée). Chaque valve est garnie, tout autour de son bord, d'une fine bande ou ruban tellement appliqué contre ce bord qu'il est impossible de le voir, si ce n*est au moment de la déhiscence de la psorospermie. De plus, à l'un des pôles du corpuscule et dans son intérieur, se trouvent deux vésicules qui contiennent un filament enroulé ; on peut faire sortir de la psorospermie, à l'aide de certains réactifs, ces deux filaments qui sont deux ou trois fois plus longs que la psorospermie elle-même. Au dessous de ces deux vésicules sont deux granules brillants, vésicules polaires en expectative, et, au centre du corpuscule, un amas protoplat- mique au milieu duquel est un noyau. Telle est la période végétative de la Myxosporidie de la Tanche, pé- riode dans laquelle, au sein d'une masse protoplasmique à peu près amorphe,se forment des corpuscules figurés, très compliqués, mais que l'on peut néanmoins considérer comme de simples cellules constituant les corps reproducteurs et dont la formation inaugure la période reproduc- trice. Poursuivons doue cette analyse et voyons comment se clôt cette dernière période et se ferme le cycle biologique de ces singuliers organismes. A un certain moment, la psorospermie ou spore ayant atteint sa maturité, les rubans ou bandes connectives se décollent du bord des valves, sauf par un point situé au pôle postérieur, et l'on voit alors qu'elles sont très longues et se prolongent en un filament pointu ou ar- rondi. Deux psorospermies voisines se saisissent, pour ainsi dire, l'une l'autre par leurs filaments et s'accrochent à l'aide de ces organes préhen- seurs; ceux ci, faisant alors ressort élastique, amènent la déhiscence des valves de chaque psorospermie qui s'écartent, mettant en liberté le globule protoplasmique intérieur. Que se passe-t-il alors? Sans doute une conju- gaison par fusion ou échange des globules protoplasmiques intérieurs ; — on n'est pas encore fixé d'une manière certaine sur ces phénomènes qui sont très difficiles à suivre. Toutefois, on sait que les vésicules à fila- ment spiral se vident, les filaments sortent et se raidissent, contribuant à fixer le corpuscule à la place qu'il occupe, jusqu'à ce que le globule pro- toplasmique intérieur, à la suite de l'espèce de fécondation qu'il vient de subir, s'anime tout-à-coup de mouvements amiboïdes et sorte de la pso- rospermie à travers les valves écartées. Or, une fois libre, cette petite masse protoplasmique n'est autre chose qu'une nouvelle Myxosporidie qui va grossir peu à peu et au sein de laquelle vont se passer les mêmes phénomènes que nous avons décrits. Encore une fois, nous ne voulons pas établir une assimilation com- plète des Diatomées et des Sporozoaires, mais nous cherchons si les faits II. HISTOIRE NATURELLE 31 que nous venons de résumer brièvement et qui sont relatifs aux Myxospo- ridies, qui se produisent d'une manière à peu près semblable chez les Sar- cosporidies et les Microsporidies, ne pourraient pas nous aider à éclaircir quelques-uns des phénomènes que l'on remarque chez les Diatomées, notamment ceux qui ont rapport aux mouvements qu'exécutent ces orga- nismes et aux divers processus de leur reproduction. C'est ce que nous r.l'ons examiner maintenant. § 2. - MOUVEMENTS DES DIATOMÉES Un grand nombre de Diatomées sont douées de mouvements propres, et particulièrement celles dostles frustules affectent une forme allongée ou en nacelle, comme les Navicula, les Pinnularia et beaucoup d'autres. Il ne s'agit pas de ces vibrations moléculaires dont sont douées les très fines particules, même minérales, suspendues dans un liquide et, qu'on appelle mouvement brownien, mais d'une motilité autonome, qui semble mOme spontanée et volontaire. Cette propriété n'a pas peu contribué jadis à faire classer ces espèces parmi les animalcules infusoires. Si l'on dépose sur le porte-objet une goutte d'eau tenant en suspension plusieurs Navicula vivants, on les voit aussitôt se mettre en mouvement et se diriger tous, comme autant de petites nacelles, dans un sens différent, ce qui prouve que le mouvement n'est pas dû à un courant établi dans le liquide. La translation se fait toujours dans le sens de la longueur du frustule. Souvent, d'ailleurs, le petit corps, après s'être avancé dans un certain sens, s'arrête, comme hésitant, et repart en sens contraire. La plupart du temps, il va, pour ainsi dire, aveuglément, se jetant sur les obstacles qui se trouvent devant lui, et c'est alors que, d'ordinaire, il re- brousse chemin ; mais quelquefois, cependant, il parait se détourner, comme par un secret instinct, des corps qui peuvent l'arrêter. Cet effet, peut être dû à une petite différence dans la densité de l'eau qui se trouve un peu condensée, dans une certaine zone autour'des corps immergés, par un effet d'attraction moléculaire ou capillaire. Les Diatomées qui vivent associées en groupes sous forme de filaments, d'arborisations ou d'éventails peuvent aussi exécuter ces mouvements si, pour une cause quelconque, leurs frustules deviennent libres. Des espèces dont les frustules sont enfermés dans un tube gélatineux se meuvent aussi, c'est-à-dire que les frustules se déplacent dans l'intérieur du tube, ce qui démontre, par parenthèse, que, chez ces espèces au moins, le thalame est réellement tubuleux, ne contenant dans son intérieur que de l'eau ou une matière beaucoup moins dense que celle dont est formée la paroi. Une des espèces les plus célèbres parmi les Diatomées mobiles est le Bacillaria paradoxa, l'ancien Vibrio paxillifer de O.-F. Mùller; cette espèce est composée de plusieurs frustules en bâtonnets, disposés parallè- 32 LES DIATOMÉES lement les uns aux autres de manière à former une sorte de tablette quadrangulaire. Bientôt, le premier bâtonnet glisse le long du second, parallèlement à sa direction, et s'arrête quand il ne touche plus la tablette que par une de ses extrémités. Puis, le second bâtonnet, imitant le pre- mier, va le rejoindre en glissant sur le troisième ; puis, le troisième va se placer sous le second, le quatrième sous le troisième, et ainsi de suite jusqu'à ce que tous les frustules se soient déplacés. La tablette s'est ainsi avancée latéralement de toute sa largeur. Alors, le premier bâtonnet re- commence son mouvement, mais en sens inverse, et reprend la position qu'il occupait d'abord; le second le suit, puis le troisième, et tous les autres. Et le phénomène se reproduit ainsi indéfiniment. Depuis bien longtemps on cherche l'explication de ces singuliers mou- vements des Diatomées. La première idée a laquelle on a dû songer natu- rellement, en voyant tant d'Infusoires se mouvoir à l'aide de cils vibra- liles, a été d'admettre aussi chez les Diatomées la présence de cils vibra- tiles plus ou moins fins. Certains auteurs ont affirmé les avoir vus, soit naissant à la surface du frustule, soit sortant du protoplasma intérieur par des pores de la carapace. Malheureusement, aucun observateur moderne n'a pu réellement cons- tater l'existence ni le mouvement de ces appendices. On a bien vu à la surface de certains frustules une croûte hyaline plus ou moins irrégulière et présentant en divers endroits comme de petites pointes. Mais ces pointes, plus ou moins longues, outre qu'elles n'existent pas sur tous les frustules d'une même espèce et qu'elle n'ont pas de positions cons- tantes, n'ont jamais manifesté de mouvements ciliaires ni vibratiles. Aussi, les considère-t-on seulement comme des productions parasitaires. L'explication par les cils vibratiles étant généralement repoussée, on a dû, non moins naturellement, penser à l'endosmose, car on sait que l'ère de l'endosmose a succédé dans la science à l'ère des cils vibratiles. On a donc dit que les mouvements des Diatomées sont produits par des courants endosmotiques qui s'établissent, par les pores et les fentes que présentent le frustule, entre l'eau ambiante et le liquide protoplasmique intérieur. C'est encore à celte explication qu'on s'arrête le plus généralement au- jourd'hui et c'est, à notre avis, un tort, car cette explication a un défaut grave : elle n'explique rien du tout. Des « courants endosmotiques » , c'est un mot dont on se paie pour ne pas être obligé de chercher autre chose. Cela ne serait une explication que si l'on montrait comment ces courants agissent pour produire un certain mouvement, et, un instant après, pour produire le mouvement inverse. Des courants endosmotiques ne peuvent ainsi changer de sens d'un moment à l'autre. Aussi, beaucoup d'auteurs, sentant tout ce que cette prétendue expli- cation a d'incomplet, ont cherché à étudier de plus près les mouvements des Diatomées, et nous ne pouvons citer ici tous les raisonnements plus ou moins compliqués qui ont été mis en avant pour arriver à une explication II. HISTOIRE NATURELLE 33 qui explique. Nous devons toutefois citer M. Hamilton L. Smith qui a em- ployé le procédé bien connu des milieux colorés. Il a répandu dans l'eau où nageaient des Pinnularia, espèce à forme naviculaire, de l'indigo tel que l'emploient les aquarellistes. Celte matière colorante n'est pas, on le sait, réellement soluble dans l'eau, mais s'y répand en particules extrêmement fines qui donnent à l'eau une teinte bleue fort intense, et que l'on distingue au microscope. Il a vu ainsi que quand la Diatomée s'avance dans un certain sens, les particules d'indigo s'amassent au niveau du nodule central des valves, en formant une petite masse arrondie tournant sur elle-même, comme si elle était soumise à un « petit jet d'eau » sortant de la valve à cet endroit. Chacune de ces petites sphères tourbillonnantes, après avoir acquis un cer- tain volume, se désagrège et les particules qui la composent sont chassées le long des valves, d'avant en arrière, pour s'accumuler derrière l'extré- mité du frustule qui, dans la progression, est en arrière. Si le mouvement de la Diatomée se renverse, les particules d'indigo sont chassées en sens contraire, c'est-à-dire toujours de la partie médiane vers l'extrémité du frustule qui est en arrière, dans le mouvement. Ces par- ticules vont donc toujours comme si elles étaient soumises à un courant allant d'avant en arrière et se renversant, par conséquent, lorsque le mouvement se renverse. C'est un résultat auquel, en somme, on devait s'attendre, mais c'est un effet, et l'on ne connaît toujours pas la cause. Mais cette expérience a permis de constater, d'une manière bien nette, l'existence, à la surface du frustule, d'une couche d'une substance hyaline qui ne se laisse pas pénétrer par les grains d'indigo et forme une zone incolore entre la surface du frustule et le liquide ambiant chargé de par- ticules bleues. C'est ce que nous avons appelé le lhalame. M. K. L. Smith a même fait la contre épreuve, c'est-à dire qu'il a coloré la couche hyaline en une nuance assez vive de manière à la mettre encore mieux en évidence. En ajoutant, dans l'eau où nagent les Pinnularia, une très petite quantité de rouge d'aniline soluble, il a vu la matière colorante se concentrer dans la couche hyaline périfrustulaire et la colorer en rose vif, alors que l'eau de la préparation était elle-même à peine teintée. Nous avons fait la même expérience avec de l'éosine, matière colorante pour laquelle la substance hyaline périfrustulaire présente une affinité aussi grande que pour le rouge d'aniline. L'observation de M. H. L. Smith est peu exacte quant au mouvement des particules en suspension dans le li- quide, mais la coloration rose se produit immédiatement, et, comme l'a constaté aussi M. H. L. Smith avec le rouge d'aniline, le mouvement de la Diatomée est instantanément arrêté. On aurait donc ainsi démontré, à l'aide d'un réactif colorant du proto- plasma, l'existence d'une couche extérieure de protoplasma, invisible dans les conditions ordinaires, a cause de sa minceur et de sa transparence. — 3. 34 LES DIATOMÉES Cette couche a, d'ailleurs, été reconnue dans un assez grand nombre de cas, et il est possible que ce qu'on regarde souvent comme une production para- sitaire sur certains frustules ne soit que cette couche accidentellement épaissie de protoplasma externe. Protoplasma externe, tel est, en effet, le nom qu'ont donné plu- sieurs auteurs à celte couche hyaline périfrustulaire. Or, cette couche, avons nous dit, c'est le thalame du frustule. Pour nous, toutes les Diatomées vivantes et complètes possèdent cette couche plus ou moins épaisse et régulièrement disposée. Si certains frustules libres ne la présentent pas, c'est qu'ils l'ont perdue, comme la psorospermie sortie de sa gangue myxosporidique, comme la graine sortie du fruit, comme la pomme tombée du pommier. Mais si les frustules sont revêtus d'une couche de nature protoplasmique, n'est-il pas possible que cette couche soit douée, comme l'est tout proto- plasma, de mouvements propres, de contraction, de dilatation, d'ondulation, comme on en voit dans beaucoup de cellules, dans les Amibes, dans les masses myxosporidiques ? Et, si à la surface d'un frustule naviculaire, c'est-à-dire facilement mo- bile, le thalame protoplasmique éprouve un mouvement de contraction ou d'ondulation, ce mouvement ne déterminera-t-il pas la progression du léger frustule flottant au sein du liquide, dans un sens opposé, et le rejet des particules solides qui viennent le toucher, sur les côtés ou vers l'arrière ? N'est-ce pas, d'ailleurs, un phénomène presque constant dans les mou- vements protoplasmiques que ces changements subits dans le sens du mou- vement? — Quand on observe la marche des granulations dans les pseu- dopodes d'une Amide, ne les voit-on pas entraînées d'abord dans un cer- tain sens par le courant protoplasmique, s'arrêter, puis rétrograder, le courant qui les emporte ayant changé de sens ? Ces mouvements d'ondu- lations, comme une vague qui va et vient, ne sont-ils pas caractéristiques de certains organismes formés presqu'uniquement d'une masse de proto- plasma, comme beaucoup de Rhizopodes, les Pelomyxa, certains Rhizo- flagellés, etc. ? N'est-ce pas, chez certains d'entr'eux, comme chez les Acanthomètres, le protoplasma extérieur, entourant le squelette minéral, qui est chargé d'accomplir tous les mouvements dont est doué l'animal? Et la preuve que ce serait bien à leur thalame protoplasmique, c'est-à-dire au protoplasma extérieur qui les entoure, que les Diatomées à frustules locomoteurs devraient leurs mouvements, c'est que si l'on détruit ce pro- toplasma, le désorganise, le coagule, par exemple, en le traitant par une matière colorante qui contracte avec lui une combinaison, immédiatement les mouvements de la Diatomée sont paralysés. Le protoplasma externe et nu, avide du réactif colorant contre lequel il n'est pas protégé, se com- bine aussitôt avec lui, se colore et, tué, perd sur l'heure ses propriétés ; — et cela, bien avant que le proloplasma intérieur du frustule, défendu par II. HISTOIRE NATURELLE 35 la carapace siliceuse, soit le moins du monde atteint par le réactif, et bien avant même que l'eau ambiante ait pris de coloration sensible. Évidemment, les mouvements des Diatomées ne sont pas dus à ces pro- blématiques courants d'endosmose et d'exosmose ; il paraîtrait bien plus raisonnable de les attribuer à une couche protoplasmique entourant les frustules, couche qui est souvent assez abondante et douée de mouvements actifs assez énergiques pour imprimer aux frustules eux-mêmes une impul- sion à sens variable, mais toujours dans la direction où l'élément ambiant offre la moindre résistance. Telle est la conclusion à laquelle nous amènent l'étude de ces mouvements et la comparaison que nous avons faite entre les Diatomées et certains orga- nismes voisins, choisis particulièrement chez les Sporozoaires. Il faut remarquer que cette conclusion nous ramène presqu'à l'ancienne conception des cils vibratiles. En effet, on est d'accord aujourd'hui pour regarder les cils vibratiles des organismes qui en sont doués comme des dépendances du protoplasma, pour ainsi dire comme des fins pseudopodes qui seraient constants dans leur forme. Par conséquent, les mouvements ciliaires et les mouvements protoplasmiques proprement dits sont de même nature et ont la même origine. La matière mucilagineuse qui recouvre les frustules des Diatomées est, comme les substances albuminoïdes, soluble dans la potasse caustique. D'après le prof. H. L. Smith, quand on traite une Diatomée vivante par la potasse, sous le microscope, en déposant une goutte de la solution alcaline sur le bord du couvre-objet, aussitôt que la solution atteint le frustule, la matière mucilagineuse se dissout et les deux valves du frustule s'écartent, s'ouvrant comme une boîte. 1 faut donc en conclure que cette couche hyaline contribue à maintenir les deux valves en contact. Elles s'écartent sous la pression du protoplasma intérieur qui se gonfle peut-être en s'imbibant, par endosmose, de la solu- tion alcaline; M. H. L. Smith pense que c'est plutôt par une pression na- turelle du protoplasma contre les parois internes des valves, pression qui n'est plus contrebalancée par la présence et la pression en sens contraire de la matière hyaline externe. D'après cet auteur, ce serait cette pression, tant interne par le proto- plasma, qu'externe par la gaine hyaline, qui déterminerait les mouvements du frustule. De plus, dans les formes naviculées, dont les extrémités sont semblables et plus ou moins pointues, cette pression déterminerait des mouvements, tantôt dans un sens, tantôt dans l'autre, mouvements de va et vient, puisque le frustule est semblable par les deux bouts. Et alors, la matière mucilagineuse, en s'accumulant, se trouverait prendre une forme tubulaire en raison des mouvements alternatifs de la Diatomée dans la glaire. Telle serait l'origine des tubes hyalins dans lesquels sont contenus, et se meuvent, les frustules de certaines espèces. Dans les espèces, au contraire, dont le frustule n'est pas semblable à 36 LES DIATOMÉE ses deux extrémités, et a, par exemple, plus ou moins la forme d'un coin, la pression de la matière hyaline chasserait toujours le frustule dans le même sens, la base du coin en avant, de sorte que cette matière hyaline s'accumulerait toujours en arrière de la pointe du coin où elle formerait les pédicelles ou stipes que l'on constate chez certaines de ces espèces, comme les Gomphonema. C'est là une vue de l'esprit, ingénieuse, comme toutes les conceptions du savant diatomiste américain, mais à laquelle nous pensons qu'on peut faire bien des objections. MULTIPLICATION DES DIATOMÉES Les Diatomées, organismes unicellulaires, se multiplient comme tous les organismes unicellulaires : 1° par division ou fissiparité, mode asexuel ; 2° par conjugaison, mode sexuel. Multiplication par fissiparité. — On connaît le phénomène de la division cellulaire ; les détails qui l'accompagnent ont été, dans ces der- nières années, étudiées avec beaucoup de soin, par un grand nombre d'au- teurs, sur des cellules des tissus, et l'on s'accorde aujourd'hui à admettre que le processus très compliqué de la division des cellules a pour origine la division du noyau et de ses éléments. C'est ce qu'on appelle maintenant le phénomène de la karyokinèse. Nous n'avons pas à insister ici sur les modifications histologiques que subissent, pendant la division, les divers éléments des cellules, nous devons seulement indiquer la marche générale du phénomène tel qu'il se produit sur la cellule diatomée, et ses résultats. La cellule se compose d'un utricule primordial, c'est-à-dire d'une masse protoplasmique contenant, au centre, un noyau, et au centre de celui-ci, un nucléole; puis un endochrome disposé à la partie superficielle en amas diversement constitués et distribués, formant les chromatophores; enfin, des gouttelettes grasses, plus ou moins nombreuses. L'utricule primordial est recouvert d'une membrane ou cuticule, ordi- nairement chargée de silice et élaborée par le protoplasma aux dépens des matériaux qui lui sont fournis par le liquide ambiant. Si celte enveloppe minéralisée, résistante, était homogène et continue autour de la cellule, on comprend que la division ne pourrait pas se faire à moins de s'accompagner de la rupture de cette espèce de kyste. Mais nous savons que la carapace siliceuse est formée de deux valves dont l'une, dans les conditions ordinaires, est un peu plus petite que l'autre. Ces deux valves ne sont pas soudées par leurs bords, comme les deux moitiés d'une coquille de noix, mais elles sont emboîtées. L'une et l'autre sont munies, sur tout leur pourtour, d'une membrane qui se silicifie plus ou II. HISTOIRE NATURELLE 37 moins, les connectifs, zones ou bandes connectives. L'une des bandes conneclives, celle qui borde la plus petite des deux valves, entre dans l'autre qui la recouvre comme le couvercle d'une boite. — lien résulte que quand la cellule intérieure augmente de volume en se doublant, l'enveloppe siliceuse s'agrandit par 1 eloignement des deux valves dont les connectifs glissent l'un sur l'autre. D'ailleurs, ces connectifs peuvent s'allonger eux- mêmes par leur bord, afin de se recouvrir toujours et de ne pas laisser de solution de continuité. Pendant que les deux valves s'éloignent l'une de l'autre, poussées qu'elles sont par l'utricule primordial qui s'agrandit dans l'intérieur du frustule, le noyau s'allonge et commence à se diviser en deux, chacune des parties emportant un nucléole provenant de la division en deux du nucléole pri- mitif. En même temps, le protoplasma périphérique, avec l'endochrome Fig. 14. — Cellule diatomée (Navicule), d'après M. J. Dcby. BBB'B', protoplasma dont une couche entoure la cellule (utricule primor- dial); A, noyau et nucléole ; C, C, chromatophorcs; E, E, gouttelettes d'huile; D, cavité centrale ; F, F', valves; G, G, G', G', connectifs. qu'il limite, s'étrangle dans la zone médiane, sous les connectifs pro- longés, et la cellule tout entière commence à se diviser en deux autres. Celte division, se poursuivant, devient bientôt complète et l'on a deux ulricules primordiaux ou deux cellules accolées, ayant chacune son noyau, son proloplasma, ses chromatophores, comme la Diatomée primitive. Alors, sur les deux surfaces en contact se forment deux valves nouvelles, adossées, qui se silicifienl bientôt ; les bandes de connectifs qui se recouvrent et débordent les jeunes valves ne tardent pas à se résorber, les deux frus- lules deviennent libres et l'on a deux individus au lieu d'un. Un peu plus lard, il se forme dans chaque frustule, le long du bord de la nouvelle valve, un connectif qui glisse sous le conneclif de la valve ancienne, et la struc- ture initiale est rétablie dans les deux individus. Il faut remarquer que, suivant ce processus, tout frustule possède deux valves qui sont d'âge différent, une ancienne et une nouvelle, et qui ne 38 LES DIATOMEES sont pas. de même grandeur, la valve nouvelle toujours emboîtée dans le connectif de la valve ancienne et, par conséquent, plus petite (1). Il en résulte, si, comme cela est très probable, la division se fait toujours de la même manière, que si la taille de la Diatomée s'amoindrit par des divisions successives, il persiste à chaque division un frustule qui maintient la taille primitive, laquelle est réglée par la valve ancienne qui persiste et assiste en témoin à toutes les divisions que subit le frustule qu'elle re- couvre. Ainsi, dans la figure 14 ci-dessus, la cellule représentée par le dessin ne donnera jamais naissance qu'à deux sortes de frustules. Ceux dont la taille est réglée par la grande valve emboitante F', (le frustule de droite, fig. 16) identiques au frustule initial, et ceux dont la taille est réglée par la petite valve emboîtée F, (le frustule de gauche). Chaque division laisse donc toujours un frustule identique à celui qui se divise et produit un frustule plus petit. Fig. 15. — Cellule diatomée, commencement de la fissiparité. (d'après M. J. Deby). Mêmes lettres que pour la figure précédente. De sorte que si ces frustules « plus petits » deviennent de plus en plus petits, il persiste toujours des individus qui conservent la taille primitive, et il en est qui ont toutes les grandeurs intermédiaires. Malgré les particularités relatives à la formation et à l'emboîtement des connectifs,il est certain que ce phénomène de dédoublement du frustule des Diatomées n'est rien autre chose qu'un processus de division cellulaire (1) « Il découle de ceci, dit M. J. Deby, que dans la majorité des genres où les connectifs sont de la largeur exacte des valves, ou bien sont même in- férieurs en diamètre à celles-ci, toute déduplication doit amener une dimi- nution des dimensions du frustule nouveau équivalente au double de l'épais- seur d'un connectif. L'épaisseur de ce dernier étant connue, on peut même, à priori, déterminer la taille qu'aura la descendance d'un frustule quelconque après un nombre de déduplications détermina. » Cette loi de M. Deby n'amène pas un décroissement de la taille aussi rapide que l'indiquerait la raison mathématique de cette progression, parce qu'elle est troublée par la continuation du dédoublement dans les cellules anciennes ou de première génération, comme nous l'expliquons plus haut. II. HISTOIRE NATURELLE 30 telle qu'on l'observe dans les cellules des tissus et chez les organismes unicellulaires. Les Diatomistes n'aiment pas que l'on compare les Diatomées à quoi que ce soit clans le monde; pour la plupart d'entr'eux au moins, ce sont des êtres à part dans la création et qui n'ont point d'analogues. 11 est bien évident que c'est là une erreur, et quant à ce phénomène de dédou- blement ou déduplication, c'est certainement un fait semblable à la divi- sion fîssipare ordinaire qu'on observe chez tous les protophytes comme chez tous les protozoaires. La division se fait en suivant un plan longitu- dinal et les particularités qu'elle présente dans sa marche sont régis par la forme spéciale, la structure valvaire et la carapace résistante propres aux Diatomées. Dans aucun cas, du reste, ces particularités ne sont plus sin- gulières ni plus compliquées que celles qu'on observe chez d'autres orga- nismes unicellulaires, chez les Infusoires, par exemple, où l'on voit des Fig. 16. — Cellule dialomée en voie de division, f, P, valves nouvelles. — Pour le reste, mêmes lettres que ci-dessus. organes nouveaux se créer de toutes pièces, des cils se former, des cirrhes émigrer en des points différents de la surface du corps, etc. Dans tous ces organismes, le phénomène est de même ordre et de même nature, — c'est la division cellulaire, — mais il s'accompagne de circons- tances diverses en rapport avec la nature de la cellule qui se divise. Il arrive souvent que les frustules qui se sont multipliés par division restent adhérents les uns aux autres, comme les cellules des tissus. On obtient ainsi des groupements ou des thalles cellulaires, de formes variées, suivant la forme des frustules eux-mêmes, c'est-à-dire des filaments diver- sement contournés. Et, si la multiplication se fait plus activement à l'extré- mité, les filaments vont en diminuant de diamètre. C'est en considération de ce phénomène que M. Deby regarde les Diatomées comme des thallophytes ; seulement, s'il y a des cas où le thalle reste agrégé, comme chez les espèces filamenteuses, il y en a d'autres où il se désagrège, chacune des cellules se séparant complètement, au moment de la division, de celle qui lui a donné naissance. 40 LES DIATOMEES On voit donc, que l'on peut rencontrer chez la même espèce de Diato- mée, selon son état de développement, des individus possédant : 1° Deux valves, un connectif et un noyau. (Etat simple, au repos). 2° Deux valves, deux connectifs superposés et un noyau. (Etat simple et complet, au repos). 3° Deux valves, deux connectifs, deux noyaux. (Commencement de la division. 46 Quatre valves, deux connectifs, deux noyaux. (Suite de la division). 5° Quatre valves, quatre connectifs, deux noyaux. (Fin de la division). Il faut ajouter que souvent le connectif externe est caduc et se détache spontanément (1). Chez les Diatomées, nous l'avons dit, comme chez tous les organismes qui se multiplient par division fissipare, la taille diminue à mesure que le nombre des divisions augmente, de sorte que l'on pourrait craindre que la dimension des cellules diminuât ainsi indéfiniment. Mais il se produit chez ces Algues, le même phénomène que chez tous les êtres unicellulaires Fig. 17, — Isthmia, frustule formé de deux valves et un conneclit. voisins : à la suite d'une série plus ou moins longue de multiplications asexuelles, par fissiparité, intervient une génération d'ordre sexuel qui rétablit la taille et reconstitue le type de l'espèce. Autant qu'on en a pu juger par le 1res petit nombre d'observations qui ont été faites sur la reproduction sexuelle des Diatomées, observations qui, dit M. H. Van Heurck, ne portent que sur 75 espèces appartenant à 30 genres, cette reproduction sexuelle doit se faire assez rarement. D'ailleurs, ainsi que nous l'avons déjà indiqué plus haut, la décrois- sance de la taille peut ne pas se faire avec la rapidité que l'on pourrait supposer. Cette constitution de la cellule en deux valves, dont l'une est toujours plus petite que l'autre, semblerait devoir amener une décroissance continue, et pour ainsi dire suivant une progression géométrique, de la dimension des frustules issus de divisions successives. Or, c'est précisément celte disposition qui contribue à retarder considérablement l'amoindris- sement de la taille. On peut se rendre compte plus facilement de ce phénomène en consi- (1) J. Deuy, — Ce que c'est qu'une Diatomée. (Joum. de Micr., 1877). II. HISTOIRE NATURELLE 41 aérant une espèce filamenteuse, dans laquelle les frustules, au lieu de se séparer après chaque dédoublement, restent accolés de telle sorte qu'il est possible de les comparer les uns aux autres. C'est, du reste, ce qu'a fait M. Otto Millier qui a étudié le Melosira arenaria (Moore) et il a tiré de ses recherches une « loi * qui n'est pas facile à comprendre (1). Nous nous bornerons à faire remarquer les faits suivants : (1) Otto Muller. Die Zellhaut und das Gesetx, der Zelltheilungsfolge von Melosira arenaria, Moore. — Berlin, in-8° 1883., avec 5 pi. Voici l'exposé de la « loi » de M. 0. Millier, tel que le donne le Dr H. van Hourck (Syn. des Diatomées, p. 13). « Considérés isolement, les individus-frustules (ou individus-cellules, si l'on veulj qui composent un filament de Melosira arenaria, Moore, ont une valeur biologique inégale. Gomme expression extérieure de ce fait on re- marque que dans plusieurs individus, le bord d'une ou des deux valves (auquel bord la membrane connective est attachée), est épaissi d'une manière particulière ; cet épaississement manque dans les autres individus. La plus jeune valve de chaque frustule reste, jusqu'au commencement du moment de la division, dépourvue de membrane connective et est enveloppée par la membrane connective delà valve plus âgée. La structure de la membrane connective, différente de celle de la mem- brane de la valve, de môme que les délimitations latérales du filament per- mettent une certaine distinction microscopique entre la valve libre (plus âgée et non recouverte par la membrane connective) et entre la (plus jeune) valve enveloppée par la membrane connective de la valve plus âgée de la même cellule. La succession, la disposition relative et la structure anatomique men- tionnée des valves libres et des valves enveloppées, conduite distinguer, dans le filament, des groupes de cellules jumelles et trigémelles disposées régu- lièrement. On peut démontrer, de la façon la plus rigoureuse, que les cellules dont la valve enveloppée possède l'épaississement du bord sont produites par leurs aïeules spéciales en qualité de cellules filles plus grandes; celles, au contraire, où cet épaississement manque sont produites en qualité de cellules-filles plus petites. Sitôt que les grandes cellules, et les cellules filles plus petites, peuvent être distinguées d'une façon certaine, on peut ramener, par l'élimination des éléments de dernière formation (des valves enveloppées) les groupes de ju- meaux et de trigémeaux à leurs cellules-aïeules de Ni0 ou N,° période divi- sionnaire et retrouver leur disposition anatomique spéciale et leur situation relative dans le filament de chaque période. Si de cette façon on reconstitue l'arbre généalogique du filament, on trouve alors que les plus petites cellules- filles, très reconuaissables morphologique- ment par le défaut d'épaississement du bord des valves plus jeunes, fran- chissent régulièrement une période divisionnaire (génération); elles subissent ainsi un ralentissement de la durée de la division. Comme résultat de ce qui vient d'être dit, on peut formuler la loi suivante : « La plus grande cellule-fille se divise, dans la période divisionnaire consécutive, la N -f- 1" période ; la plus petite cellule-fille, au contraire, se divise d'abord régulièrement dans la N -f-2e période. » Cette loi occasionne non seulement un retard considérable dans la multi- plication par la division, mais met aussi un obslacle notable à la diminution 42 LES DIATOMEES Dans un filament de Diatomées, toutes les cellules n'ont pas la même valeur biologique. 11 en est de même, du reste, chez beaucoup d'Algues confervoïdes. Les unes sont destinées à une multiplication plus prochaine et plus .active que les autres. D'après M. 0. Mûller, ces cellules peuvent même être distinguées par certains caractères morphologiques, l'épaississe- ment du bord des valves, par exemple, (chez le Melosira arenaria, au moins). Or, si nous supposons une Diatomée filamenteuse théorique, nous voyons une de ces cellules (A, fig. 18), produire par une première division une cellule B, dont la plus grande valve « est égale à la petite valve, enve- loppée, b, de la cellule A. Si les cellules restent accolées, on aura un com- mencement de filament, 1, composé de la cellule mère A et de la cellule fille B. Si la cellule A subit une seconde division, elle produira une seconde cellule B', semblable comme taille à la cellule B. Celle-ci est repoussée par la nouvelle venue qui s'intercale entre elle et la cellule-mère A, pour c h [# H Fig. 18. 3 i / • y ■ * Décroissance de la taille par les divisions successives. former le filament % dans lequel la taille est restée la même que dans le filament 1 . La cellule A continuant à proliférer, donne une nouvelle fille B", qui s'intercale entre elle et B', et le filament, 3, s'allonge encore, mais la taille ne diminue pas. La cellule aïeule A, qui a le maximum de la taille, peut donner ainsi une longue série de grandes cellules filles B, B', B", B'", etc., et le filament s'allongera beaucoup sans diminuer de taille. Une diminution de taille ap- constante des cellules ; il en résulte que la diminution de taille ne se fait pas simultanément avec la multiplication par division et que cette diminution ne se produit que dans un rapport borné. Pour autant que l'on puisse rapporter la naissance des auxospores à la diminution de taille des frustules, la rareté de la production de ces derniers s'explique par les phénomènes qui viennent d'être décrits. L'effet de la loi est énergique : si, par exemple, la diminution de taille après 43 divisions est telle, dans les cellules du Melosira arenaria, que la pro- duction des auxospores soit nécessaire, comme on peut l'admettre d'après les faits connus, il résulte de la loi énoncée qu'tm seul auxospore se produira dans le cas actuel tandis que si la division se faisait d'après la règle généra- lementadmise et qu'énonçait M. Deby.alors il aurait du naître 1.052. 000. 000.000 auxospores. » II. HISTOIRE NATURELLE 43 paraîtra seulement quand la cellule B, première cçllule-fille de A, (ou une de ses sœurs B', B", ou Bn) va se mettre à se divisera son tour en donnant des cellules C, G', d'une taille encore diminuée, lesquelles vont s'intercaler dans la continuité de filament, la prolifération ou l'allongement se pro- duisant toujours du côté de la valve enveloppée. Une seconde diminution de taille apparaîtra quand une des cellules de troisième génération G, G' C" se mettra à se diviser et à former des cellules encore plus petites D, D' D", etc. On voit que la continuation de la division dans les grandes cellules, comme A par exemple, entretiendra très longtemps la taille sans diminu- tion. Si, plus tard, la division se produit dans les cellules B, il y aura un amoindrissement, qui persistera tant que les cellules B, B', B" se diviseront seules. Nouvelle diminution quand les cellules G, C', C", se diviseront, et ainsi de suite, et peu à peu le filament ira en s'amincissant si les divi- sions se font ainsi régulièrement, les nouvelles cellules s'ordonnant par rapport à leur âge relatif. Et le maintien de la taille à chacun de ces divers degrés pourra se prolonger très longtemps. Si les divisions ne se font pas régulièrement en procédant des cellules plus anciennes aux plus jeunes, mais qu'elles se produisent simultanément entre des cellules de divers âges, cellules A, B ou G par exemple, il se formera çà et là dans la continuité du filament des différences brusques de taille, augmentation et diminution, comme cela a lieu dans le Melosira varians. Quant aux faits que M. Otto Muller a signalés sur l'ordre de division des cellules du Melosira arenaria il est clair qu'ils ne constituent pas une loi, et du reste qu'ils ne se présentent très probablement pas de même chez toutes les espèces. Il est clair aussi que, chez les espèces non filamenteuses et dont les frustules se séparent aussitôt qu'ils sont formés, des faits du même ordre interviennent pour ralentir le rapetissement de la taille bien qu'on ne puisse pas les observer. Reproduction par conjugaison ou rajeunissement. — Quel que soit le ralentissement que le mode de succession des divisions fissipares apporte à la diminution de la taille des frustules, ceux-ci ne finissent pas moins par diminuer de grandeur. Toutefois, la diminution n'est pas indéfinie, et il y a pour chaque espèce un minimum de taille qu'elle ne dépasse pas. Il inter- vient alors un phénomène, évidemment de nature sexuelle, une conju- gaison plus ou moins évidente, dont le résultat est la formation d'une sorte de spore, de très grande taille, que M. E. Pfitzer a appelée auxos- pore et dont sort un frustule qu'on appelle frustule sporangial et qui a repris la taille maxima de l'espèce. Malheureusement, comme nous l'avons dit, ces phénomènes de repro- duction sexuelle des Diatomées nous sont encore très mal connus et, depuis bien des années déjà, la science ne s'est enrichie à ce sujet que d'un très 44 LES DIATOMÉES petit nombre défaits. Les cas de reproduction sexuelle paraissent relative- ment rares ou, du moins, « nous ne connaissons, dit M. Paul Petit, ni l'époque exacte à laquelle le phénomène se produit pour chaque espèce, ni les causes cliraatériques qui le font naître. Nous sommes donc réduits à at- tendre que le hasard favorise nos recherches. » Quoi qu'il en soit, le phénomène peut se produire sur un seul fruslule ou sur deux frustules, mais toujours, naturellement, sur ceux de plus petite taille. Le premier acte du processus consiste en une sécrétion abondante de la matière mucilagineuse transparente qui entoure le frustule. Celui-ci s'enve- loppe ainsi d'une couche épaisse de mucilage ; puis, son protoplasma inté- rieur se dilate se concentre sous forme globuleuse et, sous sa pression, les deux valves se disjoignent le long de la suture des connectifs, s'écartent et se séparent. Le globule protoplasmique, dont le volume est très augmenté, est ainsi mis en liberté dans la masse gélatineuse. Il s'entoure d'une mem- brane à double contour et forme un corps ovoïde dans lequel on constate ordinairement que le protoplasma interne est [d'abord réparti en deux masses plus ou moins distinctes qui paraissent fusionner ensuite. Ce corps ovoïde est un sporange. Bientôt, dans l'intérieur de ce sporange, il se développe un corps de forme variable suivant les genres et rappelant celle du frustule primitif. Ce corps grandit rapidement, s'enveloppe d'une membrane plus ou moins in- crustée de silice et souvent plissée en travers. C'est l'auxospore; celle-ci, par sa croissance, fait éclater l'enveloppe du sporange qui se rompt en deux moitiés. Parfois, en grandissant, l'auxospore reste coiffée à ses deux ex- trémités d'une calotte sphérique, débris de la membrane du sporange. L'auxospore prend ordinairement une taille^à^peu près double de celle du frustule qui l'a produite ; alors, à travers sa membrane transparente, on voit apparaître dans son intérieur un nouveau frustule doué de la forme caractéristique de l'espèce et ayant fait retour à la taille maxima de celle- ci. C'est un frustule sporangial. Enfin, la membrane de l'auxospore'se brise, le frustule] sporangial est mis en liberté, la masse mucilagineuse au sein de laquelle tous ces phéno- mènes se sont passés se résorbe, et se réduit en cette couche mince qui subsiste autour de tous les frustules normaux. Voilà la Diatomée remontée à sa taille efqui va maintenant se multiplier par division jusqu'à la formation d'une nouvelle auxospore. Que s'est-il passé dans ce phénomène ? Est-ce une fécondation? — La fécondation résulte, comme on le sait, du mélange de deux plasmas dont l'un joue le rôle d'élément mâle et l'autre d'élément femelle. Il faudrait donc admettre, dans ce cas où un seul frus- tule intervient, que le protoplasma de cette cellule s'est préalablement divisé en deux, peut-être en [vue d'une fissiparité qui ne s'est pas opérée, et que ces deux portions se sont polarisées, différenciées, puis, lors de la mise en liberté de la masse plasmatique, se sont fusionnées, jouant l'une par II. HISTOIRE NATURELLE 45 rapport à l'autre le rôle d'élément mâle et d'élément femelle. — C'est ainsi d'ailleurs, que les choses sont ordinairement interprétées. Est-ce ce qu'on appelle un rajeunissement protoplasmique, phénomène dans lequel le protoplasma subit un remaniement qui le renouvelle, pour ainsi dire, et ravive ses propriétés ? — Il faut avouer, du reste, qu'on ne sait pas du tout en quoi consiste ce rajeunissement, et nous ne voyons pas de raisons probantes pour qu'on ne puisse l'interpréter comme une fécon- dation d'une partie du protoplasma par l'autre. Quoi qu'il en soit, nous pen- sons qu'on doit le considérer comme un acte d'ordre sexuel, dans lequel les deux proloplasmas agissant l'un sur l'autre ne sont pas encore séparés ni individualisés ; c'est un acheminement vers la fécondation proprement dite opérée par deux éléments protoplasmiques distincts. Fig. 19. — Conjugaison de deux Diatomées. V, V valves de premier frustule ; v, v' valves du second fruslule. A, B, masses protoplasmiques des deux frustules mis en liberté par la séparation des valves. D'autre part, celte production de l'auxospore est elle un phénomène comparable à l'enkystement dont tant de Protozoaires nous donnent des exemples et dans lequel on voit, au sein du kyste, se produire une sorte de fusion de tous les éléments de l'animal ? Le kyste rompu, il en sort des corps reproducteurs ou l'animal lui-même dans de nouvelles conditions. A toutes ces questions, il n'a pas encore été possible de répondre d'une manière positive. Le même phénomène de production de l'auxospore peut aboutir à la formation de deux auxospores au lieu d'une. Sauf cette particularité, le pro- cessus est absolument le même que celui que nous venons de décrire. Ce mode de reproduction est attribué par W. Smith aux Achnanthes et aux Rhabdonema. Toutefois, M. H. van Heurck fait remarquer que ce détail n'a été confirmé par aucun auteur plus récent et qu'il pourrait bien y avoir là une erreur d'observation. 46 LES DIATOMÉES Enfin, la production des auxospores peut résulter du concours de deux individus de la même espèce (Fig. 19). C'est, pour ainsi dire, le processus normal ; on admet qu'il y a conjugaison entre les deux Irustules, comme cela se produit chez beaucoup d'autres Algues, chez les Zygnémées, par exemple, et fécondation de l'une par l'autre, — peut être fécondation réci- proque. Les choses se passent comme dans le cas précédent, les deux frustules s'appliquent étroitement l'un contre l'autre le long d'une des sutures de leurs valves et sécrètent une grande quantité de matière mucilagineuse transparente. Celle-ci prend souvent une forme déterminée, ovoïde par exemple, et enveloppe exactement les deux frustules conjugués. Bientôt, les valves de ceux-ci s'entrouvent le long de la suture de conjugaison et les deux masses protoplasmiques, qui ont grossi et pris une forme globuleuse, peuvent agir l'une sur l'autre. Du reste, elles sont bientôt mises en liberté dans le thalame gélatineux, par la séparation complète des valves de leurs frustules respectifs, et peuvent fusionner pour donner naissance à un seul globule arrondi qui correspond à la zygospore des Algues zygnémées. Cette Fig. 20. — Deux sporanges A, B, brisés par le développement intérieur des deux auxospores C, G'. (La substance interne de chaque sporange est divi- sée en deux masses) (J. Deby). zygospore peut rester unique ou subir une division en deux segments ; c'est un ou deux sporanges qui se recouvrent rapidement d'une membrane relativement épaisse (1). M. Lùders (2) pense que dans la formation de deux sporanges, il y a double fécondation, c'est à dire qu'il se produit d'abord une différenciation des plasmas à l'intérieur de chacun des frustules conjugués et la partie mâle de chaque frustule se conjuguerait avec la partie femelle de l'autre. Cette interprétation nous parait très admissible; elle concorde avec l'explication la plus plausible que l'on a donnée de la formation de l'au- xospore par un frustule unique dans lequel le protoplasma se différencie et la partie jouant le rôle de mâle se conjugue avec la partie jouant le rôle de femelle dans le même frustule. Néanmoins, M. P. Petit la repousse (1) W. Smitt, Synopsis. — Thwaites, (Ann. and Mag. Nat. Hist. T. XX, série ï, 1847. — Carter, Ann. and. Mag. Nat. Hist. T. XVII, série II, 1886. — E. Pfitzer, Bau und Entwick. der Diat. Bonn. 1871. — J. Deby, Ce que c'est qu'une Diatomée. (Journ. de Micrographie, 1877). (2) Luders/— Bot. Zeitung, 1882, n°s 7, 8, 9. II. HISTOIRE NATURELLE 47 parce que, dit-il, si les choses se passaient ainsi les deux auxospores, résultant d'une véritable conjugaison se trouveraient placées perpendicu- lairement au grand axe des frustules parents, ce qui n'est pas. — C'est là, à notre avis, une raison par analogie ou par induction, qui ne nous paraît pas absolument concluante. Les masses protoplasmique sont libres dans un milieu mucilagineux demi-liquide et nous pensons qu'elles peuvent s'orienter dans le sens qui leur est fourni par cette enveloppe elle-même, ordinairement un ovoïde dont le grand axe est parallèle à celui des frus- tules conjugués. Quoi qu'il en soit, il se forme un ou deux sporanges, lesquels s'entourent d'une double ou triple enveloppe et dans l'intérieur desquels le plasma paraît bien former, au moins pendant un temps, (et nous sommes surpris qu'on n'en ait pas fait la remarque jusqu'à présent), deux amas distincts contenant quelques gouttelettes graisseuses. Fig. 21. — Développement des auxospores. VV, vu', valves vides des deux frustules. — A, B, les deux sporanges rompus, contenant les auxospores C, G', dont le plasma est nettement divisé en deux masses (J. Dcby). Puis, dans chaque sporange se développe une auxospore dont la crois- sance fait éclater la membrane du sporange. Et, pendant un certain temps, dans l'auxospore, on reconnaît encore la distribution du plasma en deux masses distinctes. Bientôt les auxospores prennent une taille très considérable, double ou triple de celle des frustules primitifs, revêtent une forme spéciale, le plus souvent se strient en travers, se silicilient, et, dans leur intérieur, on voit apparaître le frustule sporangial. Tel est le phénomène de la reproduction sexuelle la mieux connue chez les Diatomées et telle est l'interprétation que la plupart des auteurs lui donnent, dans des différents cas, lesquels peuvent être résumés ainsi : 1° Un seul frustule : autofécondation, produisant un sporange et une auxospore. 48 LES DIATOMEES 2° Un seul frustule : autofécondalion, produisant deux sporanges eldeux auxospores (?). 3° Deux frustules conjugués, fécondation unique : un sporange, une auxospore. 4° Deux frustules conjugués, fécondation simple ou double (croisée) : Si la fécondation est simple : zygospore unique se dédoublant par fissi- parité, d'où deux sporanges et deux auxospores. Si la fécondation est double : deux zygosporanges et deux auxospores. M. Paul Petit qui a observé la reproduction du Cocconema cistida refuse à ce phénomène le caractère d'une génération sexuelle. Pour lui, il n'y a que rajeunissement des plasmas, mais non fusion de l'un avec l'autre. Voici la description qu'il en donne. Fig. 22. — Auxospores mûres (d'après M. J. Deby). Mômes lettres que ci-dessus. « Chez le Cocconema cistida (PI. I, fig. 1), comme chez toutes les Gymbellées, le chromatophore, sous forme d'une seule lame, recouvre les deux valves et l'un des côtés de la zone d'emboîtement, comme le montre le schéma (fig. 13) qui représente une coupe perpendiculaire au grand axe du frustule et passant par le centre. Lorsque le moment de la reproduc- tion est arrivé, deux frustules se rapprochent et se mettent en opposition par leur côté le moins cintré. 11 se produit, aussitôt après, une abondante sécrétion d'une matière gélatineuse, incolore et transparente, qui forme autour des deux frustules une large enveloppe ovoïde, complètement fermée, cette matière gélatineuse pourrait peut-être bien provenir de l'accroissement fort grand de l'enveloppe gélatineuse qui entoure d'ordi- naire toutes les Diatomées. » « Dès que l'enveloppe gélatineuse a pris tout son accroissement, on voit, dans chacun des frustules, les chromatophores s'agglomérer vers le PLANCHE I Figure 1. — Frustule du Cocconema Cistula, Ehb. Figure 2. — Frustules réunis et entourés d'une masse gélatineuse, avec le plasma aggloméré au centre. Figure 3. — Frustule vu de côté, laissant voir les valves écartéeB par la dilatation du plasma. Figure 4. — Sortie du plasma pour constituer les auxospores. Figures 5, 6, 7, 8. — Divers états de développement des auxospores. Figure 9. — Les chromatophores prennent leur forme naturelle; les auxos- pores deviennent arquées. Figure 10. — Auxospores fortement arquées. Figure 11. — Auxospores avec membrane plissée. Figure 12. — Auxospore (fortement grossie, 800 diamètres) laissant voir le plissement de la membrane et les commencements de la ligne médiane. Figure 13. — Coupe d'un frustule perpendiculairement an grand axe (schéma). Figure 14. — Navicula crassinervia (de Bréb.) avec deux auxospores, vu de face. Figure 15. — Navicula crassinervia (de Bréb.) avec auxospore plissée (vu de côté) ; la deuxième auxospore est masquée. (D'après M. Paul Petit, Bull, de la Soc. Bot. de France. T. XXXII, 1885.) LES DIATOMKKS PI. I :OCCONEHA CISTtTLAŒH.) /' Petit ait nul dcl îrr,p (rt-ny gros . Parts II. HISTOIRE NATURELLE 49 centre (PI. I, fig. 2) en se retirant des extrémités. Bientôt le plasma con- centré, au milieu du frustule, sous forme d'une masse ellipsoïde, augmente de volume et oblige les deux valves du frustule à s'écarter (PI. I, fig. 3) ; ce que l'on constate facilement en faisant rouler les frustules dans la pré- paration. Les masses protoplasmiques sortent alors des frustules par les côtés les moins cintrés, qui se sont entr'ouverts. et viennent se placer l'une contre l'autre et parallèlement aux valves des deux frustules vides (PI. I, fig. 4), sa?is qu'il y ait jamais de fusion entre les deux masses. Ce fait enlève donc toute idée de conjugaison; c'est un simple rajeunissement de la cellule, une reproduction asexuée. » «Les deux masses protoplasmiques constituent les auxospores ; elles ren- ferment les noyaux; elles sont nues et ont une teinte brun foncé dans toute leur étendue (PI. I, fig.' 5). Le volume des auxospores s'accroit rapidement, surtout dans le sens de la longueur (fig. 6 et 7) ; il atteint le double de la longueur des cellulules mères (fig. 8). » « Dès que l'accroissement a pris fin, on voit apparaître une membrane sur les auxospores; le plasma coloré se retire légèrement des extrémités (PL I, fig. 9) et, bientôt après, ce dernier prend la forme caractéristique du chromatophore des Cymbellées. Aussitôt que le plasma coloré a acquis sa forme définitive, on voit les auxospores, d'abord subcylindriques et droites, s'arquer plus ou moins fortement (fig. 9 et 10). En même temps, les extrémités s'atténuent et la membrane ne tarde pas à se plisser vers les deux pointes du frustule, tout en restant lisse au centre (fig. 11), et l'on voit alors apparaître les premières traces de la ligne médiane (PL I. fig. 12), A ce moment, l'enveloppe du jeune frustule est plus fortement marquée, c'est le commencement de la silicification, c'est-à-dire du dépôt de la silice dans la cellulose de la membrane primitive. (1). * Là s'arrêtent les observations de M. P. Petit. Il lui a été impossible de suivre plus loin le développement du frustule qui alors se trouve être deux fois plus grand que la cellule mère. Le même observateur a aussi rencontré, mais dans un état avancé, les auxospores du Navicula crassinervia. Elles étaient plus ou moins déve- loppées. Les unes (PL I, fig. 14) commençaient seulement à s'accroître ; d'autres (fig. 15) laissaient voir, sur les extrémités, un plissement ana- logue à celui des auxospores du Cocconema cistula (1). Ces observations confirment celles du Dr Schmitz sur la formation des auxospores du Cocconema cistula (2) et sont, au contraire, en contradiction avec les théories émises par MM. Thwaites, Carter, W. Smith et Liiders qui croient à une véritable conjugaison sexuelle. Pour nous, nous croyons à une action sexuelle. Nous voyons qu'il y a (1) Bull. Soc. Bot. de France, T. XXXII, 1835, (Sess. de Charlcville). (2) Bot. Zeitung, 1872, p. 217. — Lr Schmitz. — Ueber die Auxosporenbihhauj derDiat., Halle, 1877. 4 50 LES DIATOMÉES nécessité dun contact entre deux protoplasinas, nous pensons que ce con- tact a un but, que ce but est une influence qu'ils doivent exercer l'un sur l'autre ; nous savons que les observateurs, dans les cas cités plus haut, n'ont pas pu reconnaître par quel mode, quel mécanisme s'exerce cette influence, s'il y a fusion partielle des protoplasmas, échange d'un élément des cellules pendant la conjonction de ces cellules, — mais quels que soient ce mode et ce mécanisme, de quelque manière que se produise cette influence, nous pensons qu'il y a dans ce phénomène une action sexuelle. Nous rappellerons, à celte occasion, que pendant plus d'un siècle, on a vu les Infusoires s'accoupler, sans pouvoir se rendre compte de la nature du phénomène, et c'est seulement à une époque tout-à-fait récente qu'on a reconnu que cette conjugaison s'accompagne de l'échange d'un élément cellulaire, d'un noyau accessoire ou nucléole. Nous pensons qu'il en sera de même pour la conjugaison des Diatomées et que quand les observa- tions seront plus nombreuses, qu'on aura pu appliquer à cette étude les ressources de la technique moderne, on reconnaîtra dans ce phénomène quelque chose d'analogue a ce qu'on appelle « génération sexuelle » chez les autres Protorganismes. Cette génération, d'ailleurs, n'a pas toujours pour but la production d'œufs, de spores ou de germes, mais d'individus nouveaux, rajeunis si l'on veut, remontés au type de l'espèce, doués d'une activité vitale plus intense et d'une aptitude plus grande à la multiplication tissipare. C'est là, du reste, le seul phénomène connu qui, dans le cycle biolo- gique d'une Diatomée, rappelle une reproduction sexuelle. D'autres, il est vrai, ont été signalés, mais outre qu'ils sont encore moins étudiés que ceux dont nous venons de parler, ils ne présentent pas une ressemblance aussi frappante avec les processus de génération sexuelle que l'on connaît chez les autres Protorganismes et l'on peut aussi bien les considérer comme une sporulation asexuelle que comme une reproduction sexuelle. « L'apparition subite d'espèces, dit M. J. Deby, là où précédemment il n'en existait pas ; leur succession périodique chaque année en des saisons indéterminées, sans qu'on puisse en trouver dans l'intervalle dans la même localité, font pressentir la possibilité d'un mode de génération qui n'est pas encore suspecté, par germes, par micro ou macrozoospores, peut-être même dans le premier cas avec formation de zygozoospores comme cela a lieu pour tant d'Algues inférieures vivant dans les mêmes conditions que les Diatomées. » En effet, le Dr Matteo Lanzi, lors de ses études sur la matière mucilagi- neuse qui entoure le frustule des Diatomées, matière qu'il a, comme nous l'avons dit, regardé comme un thalle, et que nous avons désigné sous le nom de thalame, le Dr Matteo Lanzi, disons nous, a signalé des faits que nous ne pouvons passer sous silence (i). M. Lanzi. — Le thalle des Diatomées (Ann. Soc. B. de Microscopie et Journal de Micrographie, 1878). II. HISTOIRE NATURELLE 51 Pour cet observateur, la couche externe mucilagineuse, qui prend une si grande extension au moment de la « conjugaison, » n'est autre chose que le protoplasma cellulaire qui a acquis un développement considérable et qui, forçant les valves, non extensibles, à s'entrouvrir, est sorti du frustule. Mais, dès avant cette effraction, le protoplasma interne avait déjà subi des modifications : il s'y était formé des corpuscules de divers aspects. Les uns sont hyalins sans membrane et ce sont ceux-là qui, en grossissant, procurent la multiplication du thalame mucilagineux, amorphe ; les autres se revêtent d'une large membrane et, après leur sortie, s'organiseront en thalame à forme définie, pédicelles, tubes, etc., si l'espèce en comporte ; d'autres, enfin, sont colorés par de l'endochrôme et toujours en nombre plus grand que deux. Ceux-ci s'enveloppent aussi d'une membrane, s'or- ganisent en cellules, grossissent et deviennent de nouveaux frustules. Ce sont des germes. Ainsi, lorsqu'un frustule estmùr, son protoplasma interne se différencie, augmente de volume, disjoint les valves, sort, foisonne, s'étale en lames, se gonfle en masse plus ou moins épaisse, se dispose en pédicelles ou en tubes, et entraine les germes qui vont ainsi se trouver répartis ça et là dans les diverses expansions du thalame. « Une fois que la masse plasma- tique, ainsi organisée, est sortie du frustule, dit M. Lanzi, elle commence à vivre d'une vie propre, cherche un appui sur d'autres corps, et s'accroît avec une rapidité surprenante. Les germes nouveaux prennent alors la forme des frustules adhérents agrégés ou libres qui leur ont donné nais- sance. » « Dans une récolte que je fis à Rome, dit le même auteur, je reconnus que quelques morceaux de cette couche, qui faisait adhérer aux parois d'une fontaine un Epithemia ventricosa, étaient formés par une très grande quantité de corpuscules arrondis, de couleur vert- jaunâtre, granu- leux. Ces corpuscules étaient en tout semblables à ceux encore renfermés dans d'autres frustules murs ftEpithemia immergés aussi dans leur plasma hyalin, que ces frustules fussent adhérents ou libres. Telle était la ressemblance, qu'on ne pouvait douter que la substance plasmatique du « thalle » entier et les germes qu'il renfermait n'eussent été auparavant réunis dans d'autres frustules semblables à ceux qui en contenaient encore. » (PI. II). Dans une autre récolte, de Cymbella [Cocconema) cistula,d l'état de reproduction, M. Lanzi a vu des corpuscules arrondis, très petits, et de la couleur de l'endochrôme. Ils étaient contenus dans la couche hyaline mucilagineuse et ressemblaient à d'autres contenus encore dans les frus- tules. En suivant leur développement, il les a vu croître avec leur forme arrondie, puis s'allonger et prendre la forme lunulée et naviculaire propre aux plus petits frustules. Enfin, ils atteignaient la taille normale, les uns restant adhérents au thalame, les autres devenant libres. Leur nombre était extrêmement considérable, leur taille présentant toutes les dimensions 52 LES DIATOMÉES entre les deux extrêmes, et l'on ne pouvait admettre qu'ils résultassent d'une fissiparité. D'autres faits semblables ont été observés par M. M. Lanzi sur des Navicida ambigua, NUzschia minulissima, Amphora ovalis, et il a suivi, sur le Goirvphonema olivaceum, toute la série des transformations depuis l'état de germe contenu dans les frustules mûrs jusqu'à l'état de frustule nouveau parfait. 11 a observé en même temps le développement du thalame constituant d'abord une masse amorphe, puis poussant des pédi- celles qui se dicholomisaient. De sorte que « quand le cycle végétatif fut complet, la Diatomée montrait trois formes différentes : la forme sessile ou sphénelloïde, la forme pédonculée simple ou dicholome et la forme libre. » Nous ne reviendrons pas ici sur ce que nous avons dit, et assez longue- ment, à propos de la nature que M. Matleo Lanzi altribue au plasma ex- térieur, thalle ou thalame des Diatomées, et sur le rôle qu'il lui prèle dans la reproduction ou la multiplication de ces organismes, mais nous ne pou- vons nous empêcher de faire remarquer l'analogie évidenle qui existe enlre tous ces faits, et ceux que nous avons déjà brièvement signalés à propos de la multiplication de divers Sporozoaires, notamment les Psorospermies. Celte comparaison répugne, nous le savons, à la majorité des diatomisles, mais il n'en est pas moins évident que les phénomènes de division, de conjugaison ou de sporulation dont les Diatomées sont le théâtre ont leurs analogues dans la division, la conjugaison ou la sporulation d'autres orga- nismes que leur nature unicellulaire et certaines différenciations spéciales de leurs éléments rendent comparables aux Diatomées. H n'en est pas moins vrai que l'on peut dire que ces phénomènes ne diffèrent chez les uns et chez les autres que par des détails en rapport avec la structure particulière, les conditions d'existence et la situation de ces divers organismes dans la série des êtres. § 4. — MODE DE VÉGÉTATION DES DIATOMÉES On a déjà vu que la cellule Diatomée, qu'on appelle particulièrement frustule, est composée d'une membrane cellulaire formée de cellulose plus ou moins fortement imprégnée de- silice, (comme chez d'autres organismes elle est imprégnée de carbonate de chaux ou d'autres substances) et d'un contenu. Ce contenu est formé de protoplasma plus ou moins finement granuleux, renfermant un noyau ordinairement suspendu au milieu de la masse proto- plasmique et contenant lui-même un nucléole. A la surface du protoplasma est un endochrôme disposé de manière variable dans les diverses espèces, mais de manière constante dans la même espèce, formant des chromato- phores en plaques, lames ou grains, et pénétrés de cette modification PLANCHE II Figure 1. — Epithemiaventricosa, Kiitz. Thalle contenant des frustules mûrs et des germes (spores) en tout semblables à ceux renfermés dans d'autres frustules libres, comme on en voit dans la figure suivante. Figure 2. — Frustules libres du même Epithemia qui contiennent plasma et germes de formation nouvelle. Figure 3. — Cymbella (Cocconema) cistula, Ehb. Le thalle contient des germes (spores) et des frustules à différents degrés de déve- loppement. Figure 4. — Frustule du même, libre et mûr. Figure 5. — Gomphonema olivàceum, Kiitz. Frustules sporangiaux accrus de volume par la dilatation du plasma qui presse leurs valves. On en voit deux autres en a de la Figure 6. Figure 6. — Thalle contenant des germes de grandeurs différentes et pro- portionnelles aux divers degrés de végétation. De plus, on voit : en a deux fustules sporangiaux en croissance ; en b, la forme sphénelloïde du même Gomphonema; en c, sa forme pédonculée. (D'après le Dr Matteo Lanzi : Le thalle des Diatomées, Journ. de Micr. 1878.) LES DIATOMEES PI. II Tigl. fy.3.. ^-:-, II. HISTOIRE NATURELLE 53 brune de la chlorophylle que l'on a appelée diatomine et dont nous avons indiqué plus haut la composition. Enfin, çà et là sont des goutte- lettes huileuses. (Voir Fig. 14). Au point de vue histologique, le frustule des Diatomées correspond donc a une cellule. De plus, cette cellule est entourée par une matière mucilagineuse trans- parente qu'on a appelée coléodenne, thalle, thalame, qui reste souvent à l'état de mince couche enveloppante, se développe quelquefois en larges masses amorphes ou ovoïdes, ou bien prend la forme de pédicelles, ou slipes, simples ou ramifiés, a l'extrémité desquels sont portés les frustules (Fig. 23); ou bien encore constitue des tubes dans l'intérieur desquels sont contenus les frustules. Liemophora paradoxa, Ag (1). Dans certaines espèces, après leur formation par fissiparité, les frustules ou cellules restent accolées les unes aux autres, valve contre valve, par cette matière mucilagineuse incolore qui joue alors le rôle de substance intercellulaire. Ces espèces, dites filamenteuses, constituent ainsi des fila- ments pluri-cellulaires, de formes diverses, qui sont composés de la même manière que les filaments des Oscillaires, des Spirogyreset d'autres Algues analogues à thalle filamenteux. On peut supposer même que chez les espèces où l'on trouve les cellules libres et isolées, cet état est produit par la désagrégation continue, et au fur et à mesure de la multiplication, de ces cellules qui ne forment plus, pour ainsi dire, qu'un thalle virtuel.— Sous quelle influence s'est produit, dans l'évolution de l'espèce, cetémiettement ou cette segmentation continuel le (1) D'après M. A. Truan, Diat. de Asturias. 54 LES DIATOMEES du llialle ? C'est ce qu'on ignore, mais on peut y voir l'effet des besoins de la dissémination d'une espèce qui se reproduit rarement par génération sexuelle et en donnant seulement un très petit nombre de spores, ou de l'adaptation à des circonstances particulières de milieu. Quant aux espèces dont les frustules restent accolés, valve contre valve, après la fîssiparité et forment des filaments, on comprend que c'est la valve Fig. 24. — 1. Fragilaria virescens. 2. F. mutabilis. Fig. 25. — Meridion circulaire, Ag. qui détermine la section ou coupe du filament. Si les valves sont étroites et longues, parallèles l'une à l'autre, le filament sera plus ou moins plat et rubané (Fragilaria) ; si les valves sont circulaires ou à peu près, le fila- ment sera plus ou moins cylindrique (Melosira). Mais si les valves ne sont pas sur des plans parallèles, si elles sont incli- nées l'une sur l'autre, comme dans les frustules en coin, les filaments ne sont pas droits, mais courbes, tournent en cercle ou même peuvent faire Fig. 26. — Tabellaria flocculosa. plusieurs tours de spire plus ou moins plats, qui se superposent [Meridion). Enfin, entre les espèces dont les frustules restent réunis en filaments droits ou courbes, et celles dont les frustules se séparent aussitôt après la fîssiparité, il en est dont les cellules restent unies, mais seulement par un point de leur surface, un de leurs angles, par exemple, formant ainsi, dans ce cas, des filaments ou chaines en zigzag [Tabellaria). II. HISTOIRE NATURELLE 55 § 5. - REVIVISCENCE DES DIATOMÉES Pendant les chaleurs de l'été, la plupart des fossés et des mares qui contenaient des Diatomées se dessèchent et restent quelquefois pendant de longs mois dans un étatdedessication complet; certaines de ces Algues vivent dans la mousse des arbres et des murailles, exposées aussi à de fré- quentes périodes de dessication, et cependant, aussitôt que revient l'humi- dité, aussitôt que les pluies ont rendu de l'eau aux fossés, de la fraîcheur aux mousses et à l'écorce des arbres, on y retrouve les Diatomées vivantes comme auparavant. Il était naturel, dès lors, de se demander si la dessication tue définitive- ment les Diatomées. On n'a jamais constaté, en effet, qu'elles aient la pro- priété de s'enkyster, comme le font les Infusoires et d'autres protorga- nismes, ce qui permet à ceux-ci de résister, dans leur kyste, à toutes les influences climatériques. L'enkystement, il est vrai, est une propriété qui ne paraît guère appartenir qu'à des organismes doués de caractères plus ou moins manifestes d'animalité, mais il est remplacé chez les végétaux inférieurs par la formation de spores dormantes, dans la coque desquelles le protoplasma végétal conserve sa vitalité, à l'abri des intempéries, comme l'Infusoire dans son kyste. Or, on n'a pas constaté la formation de ces spores dormantes chez les Diatomées. Il était donc possible que les Diatomées eussent, comme certains animalcules microscopiques, les Rotifères, les Tardigrades, diverses Anguillules, la propriété de résister à une dessication complète, c'est à dire de pouvoir récupérer, après avoir été complètement desséchées, l'eau qu'elles ont perdue et de renaître à la vie. C'est ce que M. P. Petit a résolu d'éclaircir par quelques expériences positives (1). Il a laissé sécher dans des vases de terre, à l'abri de la pous- sière, pendant 6 et 8 mois, des Diatomées vivantes avec leurs subslra- tum vaseux. Examinant alors les frustules, il a vu que beaucoup étaient vides et par par conséquent morts, mais d'autres avaient conservé dans leur intérieur, à l'une de leurs extrémités, quelques granulations brunes, restes de l'endo- chrôme desséché. Il a alors ajouté dans les vases de l'eau distillée, filtrée et aérée, et les a exposés à la lumière directe du soleil. Il a vu que, dès le quatrième jour, les granulations brunes avaient grossi et repris leur couleur jaune na- (1) P. Petit. — La dessication fait elle férir les Diatomées. (Journal de Micro- graphie, 1877, p. 242). 56 LES DIATOMÉES turelle. Le lendemain, le plasma avait repris environ la moitié de son volume. Le huitième jour, les frustules avaient recouvré leur aspect ordi- naire et l'endochrôme sa disposition caractéristique pour chaque espèce . Les Navicula avaient retrouvé leurs curieux mouvements et bientôt com- mençaient à se multiplier par division, comme si rien d'anormal ne leur était arrivé. D'après les expériences de M. P. Petit, pour que la reviviscence puisse se produire, il faut que la dessication ne soit pas trop brusque. C'est, d'ailleurs, ce qui arrive aussi pour les Rotifères et autres animalcules révi- viscents. Ainsi, les Diatomées qui se dessèchent lentement dans la vase retrouvent leur vitalité, tandis que celles qui sont à découvert sont ordi- nairement saisies par une dessication trop rapide et se désorganisent com- plètement. C'est cette dessication lente qui se produit dans la vase des fossés et dans les mares. Il n'est donc pas étonnant que, pendant la saison humide, on voie apparaître, presque subitement, des Diatomées, là où on en aurait vainement cherché pendant la sécheresse. Du reste, sans faire les expériences démonstratives qu'a réalisées M. Paul Petit, nous avions remarqué déjà, qu'après avoir laissé longtemps sèches, faute de penser à y ajouter de l'eau, des Diatomées que nous con- servions dans des verres sur notre fenêtre, nous les trouvions toujours vivantes toutes les fois que nous leur rendions l'eau nécessaire. D'autre part, M. F. Habirshaw, en Amérique, avait constaté le même fait en 187i. Il était connu depuis assez longtemps par plusieurs diatomistes, notamment par M. J. Deby. —Néanmoins, il n'avait pas été constaté scien- tifiquement avant les expériences de M. P. Petit (1). Ajoutons que malgré les précautions qu'on peut prendre, comme une dessication pas trop brusque, pour obtenir la reviviscence des Diatomées, toutes les espèces, et même tous les individus d'une même espèce, sont loin de se prêter avec la même facilité à cette expérience. — Il en est de même, d'ailleurs, pour les Rotifères et les autres animalcules qui présen- tent cette propriété. (1) J. Pelletan. — La Reviviscence des Diatomées. (Joum. de Micrographie, 1878, p. 124). 111 STRUCTURE MICROSCOPIQUE DES DIATOMEES Nous avons étudié d'une manière générale la constitution des Diatomées, il nous reste à examiner les divers éléments qui composent leur frustule. § 1 VALVES. Nous savons déjà que le frustule est toujours composé de deux valves réunies l'une à l'autre le long de leur ligne de suture par une membrane B 6 a 2 3 Fier- 27. f. — Pinnularia virvlis vu de face et de profil. — a, Vue de profil, ou face valvaire (side view). — b, Vue de face, ou face connective (front vieil)). 2. — Synedra ulna. — a, Vue de profil, face valvaire (s. v,). — b, Vue de face, face connective (f. v). 3. — Coscinodiscus patula. — a, Vue de profil, face valvaire, (5. v.). — b, Vue de face, face connective, (f. v.). formant comme un anneau ou un ruban et qu'on appelle zone connective ou suturale ou simplement connectif. Nous savons de plus qu'à l'état de développement complet, le connectif est formé de deux membranes qui se recouvrent plus ou moins l'une l'autre, l'une adhérant aux bords d'une valve, l'autre aux bords de l'autre valve. 58 LES DIATOMEES De sorte que le frustule est constitué comme une véritable boîte, dont les valves forment le fond et le couvercle, et les connectifs les côtés, qui s'em- boitent, entrant l'un dans l'autre. Il en résulte que, dans tout frustule, une des valves est toujours sensiblement plus petite que l'autre. Nous avons vu, d'ailleurs, que cette disposition est le résultat du mode de formation des valves lors delà multiplication des cellules par fissiparité. En raison de cette structure bivalvaire, les fruslules (1), lorsqu'on les examine sur un plan, peuvent se présenter de deux manières : ou bien ils sont, pour ainsi dire, couchés sur le flanc et Tonne voit qu'une des valves, l'autre étant cachée par dessous. La membrane connective n'est visible qu'en projection sur les bords. C'est ce que la plupart des diatomistes désignent sous le nom de vue de côté ou de profil, ou face valvaire, et ce que les Anglais appellent side-vfeiv. (Fig. 27, a). Ou bien le frustule est, pour ainsi dire, couché sur le dos et l'on voit au milieu la bande con- nective et de chaque côté, le bord plus ou moins large des deux valves. Fig. 28. — Cyclotella sexpunctata. Deb. A. Face valvaire (side-view). — B.Face connective (front-view). C'est la vue de face ou face connective, ou face suturale, le front-view des Anglais. Nous conserverons ces désignations consacrées par un usage presque général. Il faut remarquer que dans certaines espèces, notamment les espèces dis- coïdes ou polygonales, les valves sont extrêmement larges, tandis que les connectifs sont relativement très étroits. De sorte que le profil, qui montre la face valvaire est très large, tandis que la vue de face ou de front est beaucoup plus étroite. (Fig. 28). Ces valves ont, du reste, des formes très variées, souvent elles sont beau- coup plus longues que larges avec les longs côtés sensiblement parallèles. (Fig. 27, B). Le frustule a l'aspect d'un bâtonnet (Syned?*a ulna) ; on dit que sa forme est bacillaire. C'est de la fréquence de cette forme chez (i) Remarquons que l'on désigne plus particulièrement sous le nom de frustule l'ensemble de la boîte siliceuse d'une Diatomée, indépendamment des protoplasma, noyau, endochrôme. Quand on a détruit par le feu ou les acides toute la matière organique vivante d'une cellule de Diatomée, ce n'est plus une cellule, mais c'est encore un frustule. III. STRUCTURE MICROSCOPIQUE DES DIATOMEES 59 les Diatomées, ou de formes très allongées, que ces Algues avaient reçu jadis le nom de Bacillariées. Dans un très grand nombre d'espèces les valves sont plus longues que larges, mais en ovale ou en navette ; on dit alors que le frustule est naviculaire (Fig. 29 et 30). Puis, les valves, et par suite le frustule, peuvent être circulaires, ovales Fig. 29. — Navicula major Kz. elliptiques, réniformes, cunéiformes, triangulaires, quadrangulaires, etc., désignations qui se comprennent toutes d'elles-mêmes et que nous n'avons pas besoin d'expliquer. Elles peuvent encore, à leurs extrémités, se terminer par une pointe [acn- minées), par une courbe courte [obtuses), par un prolongement rétréci et mousse [rostrécs), par un prolongement dilaté en bouton' [capitées), etc. Fig. 30. — Navicula major (face connective et coupe transversale). Mais, outre les différences de formes, elles peuvent présenter à leur sur- face des détails importants. Ainsi, dans un grand nombre d'espèces, particulièrement celles à forme plus ou moins naviculaire, les valves sont divisées suivant leur grand axe par une ligne très visible et saillante qui les divise en deux moitiés longitu- Fig. 31. — Synedra fulgevs. dinales, ordinairement (mais pas toujours) symétriques. Cette ligne s'ap- pelle le raphé ou le rachis (Fig. 29). Elle se termine ordinairement à chacune de ses deux extrémités près d'un épaisissement à peu près circulaire qu'on appelle nodule. De même, 60 LES DIATOMEES elle est interrompue au milieu par un autre nodule. De sorte qu'il y a deux nodules terminaux et un nodule central ou médian. (Fig. 29). Toutes les formes allongées ne présentent pas de raphé. Beaucoup, et particulièrement des formes bacillaires, au lieu de cette ligne longi- tudinale saillante présentent un espace lisse sur lequel cessent les autres détails, côtes ou stries, qui ornent souvent les deux côtés de la valve. C'est un pseudo-raphé (Fig. 31.) D'autres enfin, comme les formes larges, circulaires ou polygonales, ne présentent ni raphé ni pseudo-raphé médian. (Fig. 28). C'est précisément sur la présence ou l'absence d'un raphé ou d'un pseudo-raphé que M. H. L. Smith a fondé sa classification, si connue, des Diatomées, classification dont nous aurons à nous occuper. Qu'est-ce que le raphé ? Que sont les nodules ? Fig. 32. — Coupe d'un grand Navicula (1500 diam.j a, raphé ; b, c, d, un des côtés de la valve ; /",/*, nodules médians ; g, connec- tifs. (D'après M. W. Prinz). Le raphé est évidemment une arête saillante, épaissie, faisant saillie ordinairement à la face extérieure de la valve et à sa face interne ; mais cette arête saillante est sillonnée par une véritable fente par laquelle le contenu de la cellule se met en rapport avec le monde extérieur. Stras - burger admet même, ce qui nous paraît au contraire très peu probable, que le protoplasma interne émet par cette fente une bande mince, une sorte de pseudopode, qui serait l'organe du mouvement de la Diatomée. Quoi qu'il en soit, il paraît certain que le raphé est une fente longeant ou sillonnant un épaississement plus ou moins considérable de la valve. Ce fait est mis en évidence, d'ailleurs, par les coupes que l'on a pu obtenir accidentellement de frustules à raphé. Telle est celle que représente la fig. 32, trouvée par M. W. Prinz, sur un grand Navicula du dépôt de Franzensbad. Le même fait peut aussi être constaté de piano sur d'autres frustules IlL STRUCTURE MICROSCOPIQUE DES DIATOMEES 61 où, avec de bons objectifs, on peut voir, à côté de la ligne saillante, plus ou moins onduleuse, qui règne au milieu de la valve, une fente très nette. C'est ce que montre la fig. 33 qui représentent une valve brisée de Xavicula major, d'après M. H. L. Smith. On voit dans cette valve la fente cb du raphé longeant la ligne flexueuse épaissie et interrompue par le nodule médian e. Quelques auteurs, M. A. Schmidt notamment, nient cependant que le raphé soit une fente. M. Julien Deby n'admet pas de communication directe entre le contenu de la cellule et le milieu exté- rieur. Il est possible, en effet, que celte fente qui paraît incontestable sur les valves siliceu- ses des fruslules fossiles ou traités par les acides, soit obturée, sur les Diatomées vivan- tes, par la membrane cellulaire organique. La communication entre le protoplasma interne de la cellule et le milieu ambiant, communi- cation nécessaire aux échanges vitaux, se ferait par endosmose à travers la membrane organi- que dans les points ou fentes où manque le revêtement siliceux. Quant aux nodules, comme on le voit sur ces deux dernières figures pour le nodule mé- dian, ce sont des épaississements de la couche siliceuse, faisant saillie en dehors ou en dedans (/, /, fig. 32; e, fig. 33), et qui peuvent à leur surface extérieure être plus ou moins creusés en cupule. Il en est de même des nodules ter- minaux; cependant sur le côté de ces nodules, que contourne ordinairement le raphé, il existe des points, élargissements de la fente de ce raphé, qui traversent l'épaisseur de la valve et par lesquels on a admis jadis que sortaient des cils vibratiles ou des pseudopodes, et, plus récemment, que se produisaient des courants d'où résulteraient les mouvements des Diato- mées. La première de ces hypothèses est au- jourd'hui abandonnée des diatomistes, et nous pensons qu'il doit en être de même pour la seconde. Fig. 33. — Valve brisée de Navicula major. cb, fente du raphé; e, nodule médian ; ad, fracture de la lame supérieure de la valve montrant les côtes situéesaudessous de cette lame et qui la débordent (d'après M. H. L. Smith). Le prof. H. L. Smith a fondé sur la présence ou l'absence du raphé une classification générale des Diatomées qui a été adoptée par un certain nombre d'auteurs, M. H. van Heurck et M. Ad. Schmidt, notamment. Fon- dée sur ce seul caractère de forme extérieure, celte classification n'est point ce qu'on appelle une classification naturelle, c'est un système artifi- 62 LES DIATOMEES ciel, un peu comme le serait, par exemple, une classiûcation botanique qui répartirait les plantes suivant qu'elles ont les feuilles pointues, rondes ou divisées. Néanmoins, comme elle est employée dans plusieurs ouvrages importants, nous devons en dire ici quelques mots. M. H. L. Smith divise toutes les Diatomées en trois grand groupes. Le premier, groupe des Raphidées, comprend toutes les Diatomées qui ont un raphé évident, au moins sur l'une des faces. On peut en prendre comme type les Navicula. Elles ont, du reste, ordinairement une forme plus ou moins naviculaire, c'est-à-dire en navette ou en nacelle. (Fig. 27, 1). Le deuxième, groupe des Pseudo-raphidées, comprend les espèces qui n'ont pas de vrai raphé, mais présentent, au moins sur .l'une des valves, un espace lisse simulant un raphé par l'absence des stries, côtes ou dessins. On peut prendre pour type les Synedra. Elles ont sou- vent une forme plus ou moins bacillaire ou en bâtonnet. (Fig. 27, 2). Fig. 34. — Cymbella Ehrenbergii. a, vue de profil; b, vue de face. Fig. 35. — Amphora ovalis. Le troisième, groupe des Crypto-raphidées, se compose des espèces qui n'ont ni raphé ni pseudo-raphé. On peut prendre pour type les Cosci- nodiscus. Elles ont ordinairement une forme discoïde, ellipsoïde large, triangulaire ou polygonale. (Fig. 27, 3) En faisant intervenir dans ces trois grands groupes les caractères tirés de la forme des valves, de la position des nodules, etc., M. H. L. Smith établit les coupes de familles, de genres et d'espèces. Cette classification, on doit le reconnaître, est fort ingénieuse et attrayante. Malheureusement, elle ne considère dans les Diatomées que la matière morte, comme ferait une classification minéralogique répartissant les objets suivant la forme de leurs cristaux et la direction des axes ; elle néglige complètement les Diatomées en tant qu'organismes vivants, ayant les uns avec les autres des ensembles de caractères biologiques communs et des affinités naturelles ; elle contribue, par conséquent, dans une certaine mesure, à limiter l'étude des Diatomées à l'examen de leur carapace sili- ceuse, et à faire négliger les dispositions organiques et les phénomènes III. STRUCTURE MICROSCOPIQUE DES DIATOMEES 63 vilaux que présentent ces curieuses petites plantes dont Y histoire natu- relle est encore, nous le répétons, presque complètement à faire. Quoi qu'il en soit, et en dehors de sa classification proprement dite, M. H. L. Smith a basé sur la division des Diatomées en trois grands groupes, telle qu'il l'établit, des considérations intéressantes que nous devons résumer (i). Etant données ces trois formes principales, toutes les autres formes en dérivent, suivant le savant auteur américain, à l'aide de variations homo- logues dans les trois groupes. Ainsi, dans le premier groupe, par exemple, les valves sont partagées normalement en deux parties symétriques par le raphé, mais dans certains cas, les valves peuvent se développer d'un côté du raphé plus que de l'autre : elles ne sont plus symétriques de chaque côté du petit axe ; c'est ce que M. H. L. Smith appelle une variation équatoriale. Le frustule, gon- Fig. 36. — Epithemia gibberula. Eh. a, face valvaire; b, face connective. Fig. 37. — Cywatopleura Solea. fié d'un côté, s'incurve de l'autre. C'est ce qui arrive dans les Cymbella, dans les Cocconema (fig. 34), qui sont des Navicula dans lesquels un côté des valves est plus dilaté que l'autre et la zone connective de ce côté s'est elle-même élargie. La Diatomée s'est, pour ainsi dire, gonflée de ce côté, qu'on appelle côté dorsal. (L'autre côté, plus étroit et plus mince, est lecàté ventral). La variation équatoriale peut s'accuser encore davantage que dans les Cymbella, et l'on obtient un Amphora. (Fig. 35). La même variation, par expansion équatoriale de la zone connective d'un côté de la valve, se produisant dans le deuxième groupe donne les formes Epithemia, (Fig. 36), et dans le troisième groupe les formes Euodia. La variation au lieu de se produire à l'une des extrémités du petit axe pour se faire à l'un des bouts du grand axe, elle est alors dite axiale. (1) H. L. Smith. — A contribution to the life history of Diatomacex (Pro- ceedings of the Amer. Soc. Microc. 1886).— Traduit dans le Journal de Mi- crographie, t. XII, 1888. 64 LES DIATOMÉES C'est ainsi que s'obtiennent les Diatomées cunéiformes comme les Gom- phonema dans le premier groupe (Raphidées), Licmophora, Rhipido- dendron, etc., dans le second (Pseudo-raphidées) (Fig. 23), Podosira, dans le troisième (sans raplié ni pseudo-raphé). La dilatation axiale peut se faire aux deux extrémités, et l'on obtient des formes capitées ou dilatées en 8, dans les groupes qui comportent ces for- mes (Fig. 37). D'autres variations se manifestent encore comme la torsion du fruslule en S, par exemple dans les Pleur osigma, du premier groupe, torsion qu'on retrouve chez des Nitzschia du second. Ou bien encore, certains détails de forme peuvent subir des modifications qui établissent des relations entre tel groupe et les deux autres : l'allonge- ment, l'élirement du nodule central en une ligne tranversale, comme chez les Stauroneis, ou longitudinale, comme chez les Colletonema et les Berkdcya, et qui arrive à l'effacement à peu près complet chez \esAm- phipleura; la disparition du raphé sur une des valves, ou son émigration Fig. 38. — Achnantes Fig. 39. — Stauroneis Fig. 40. — Berkeleya brevipes. gracilis. Hai'veyi, Gr. (très grossi]. graduelle vers l'un des bords de la valve, rapprochent les formes du pre- mier groupe de celles des deux autres. En un mot, en appliquant les mêmes lois de variation aux trois formes normales, on obtient toutes les modifications qui caractérisent les genres et les espèces contenues dans ces groupes, modifications qui procèdent des mêmes causes. De plus, on obtient le passage de ces formes les unes aux autres par des variations graduelles, allant parfois jusqu'à la disparition de certains détails de structure. Certaines de ces variations se sont fixées, et on en a fait des genres et des espèces, — alors que peut-être ont n'eût dû les regarder que comme des variétés, — mais d'autres ne sont qu'accidentelles, bien que parfois elles puissent se reproduire par la division fissipare des frustules qui les pré- sentent, et alors elles constituent des formes anormales, de véritables mons- truosités. Ainsi M. Weissflog a publié la photographie de divers Navicula chez lesquels le raphé a disparu sur la moitié d'une valve, (Fig. 41), ou même III. STRUCTURE MICROSCOPIQUE DES DIATOMEES 65 presque complètement (Fig. 42), et où les stries composés de grains ou chapelets au lieu deresler parallèles au petit axe du fruslule ont pris une disposition rayonnante. C'est le premier groupe de M. H. L. Smith qui passe au troisième, un Navicula qui devient un Coscino disais. Fig. 41. Vis. 42 Fig. 43. Fig. 41, 42, 43. — Diatomées anormales (d'après Weissflog). Dans la forme suivante (Fig. 43) , on voit de même un Navicula qui, dans sa moitié inférieure, passe à XAulacodiscus. Nous aurons à décrire par la suite un certain nombre de monstruosités, car les Diatomées, comme tous les autres êtres vivants, sont sujettes à des anomalies, à des variations tératologiques souvent très intéressantes par- ce qu'elles peuvent nous révéler les différentes phases de développement par lesquelles passent ces organismes, les lois qui président à la formation de leurs parties et les divers états dont ils procèdent. 5 66 LES DIATOMEES § 2. — STRUCTURE INTIME DES VALVES Nous avons vu que les valves des Diatomées présentent des côtes, stries, grains ou perles, des détails de sculpture infiniment variés et délicats. Nous avons donc à examiner maintenant la structure intime de ces valves. C'est là une question très ardue, très controversée et le plus souvent, du Fig. 44. — Cestodiscus (Coscinodiseus) obscurus. reste, extrêmement difficile à résoudre, exigeant toutes les ressources de l'optique moderne la plus perfectionnée, et une grande habileté de la part du micrographe. C'est, comme le dit M. J. Deby dans notre Introduction, le champ de bataille des diatomistes. Quand on examine, avec un bon objectif, une Diatomée portant des stries sur ses valves, on reconnaît que, le plus souvent, les stries se résolvent en lignes de points, et tous ces points, au premier abord, paraissent comme des grains saillants, aussi les a-t-on généralement appelés perles. Cependant, en y regardant de plus près, sur certaines espèces, comme les Triceratium, les Coscinodiseus, les Isthmia et d'autres dont les points sont plus gros, on se prend à douter, et, avec beaucoup d'attention, on admet que ces points ne sont pas en saillie, mais en creux. C'est, pour nous, une disposition à peu près évidente sur le Coscino- III. STRUCTURE MICROSCOPIQUE DES DIATOMEES 67 discus Oculis lridis (1), entr'autres, où nous avons pu constater que les' hexagones ou yeux dont sont marquées les valves ont leur centre sur un plan inférieur a celui du périmètre hexagonal. Gela est si vrai qu'en abais- sant très légèrement l'objectif, on reconnaît un dessin très fin que nous avons pu représenter. De sorte que le centre de l'hexagone est le fond d'un alvéole et non le sommet d'une perle. C'est le fond qui porte une sculpture extrêmement fine, que l'on peut reconnaître en abaissant l'objectif pour mettre ce fond au foyer. Dès 1876, nous constations ainsi que la valve des Coscinodiscus, et autres espèces dont le dessin est analogue, est composée de deux couches, la première formée d'aréoles ou alvéoles, plus ou moins semblable à un Fig. 45. — Isthmia enervis. gâteau d'abeilles, et la seconde plus profonde fermant ces alvéoles par le fond. C'était presque la vérité, comme nous le verrons plus loin. C'est, à ce que nous croyons, le professeur Bailey, de New-York (2), qui a démontré, en 1851, que la plupart des parties que l'on prenait alors pour des trous ou des dépressions des valves sont, au contraire, des épais- sissements, et qu'inversement les parties que l'on regardait comme épaissies ou saillantes sont, en réalité, amincies ou déprimées. Par exemple, on considérait les nodules des Naviculées comme des trous et les points des Isthmia comme des perles ou des bosses. Bailey a eu l'idée de faire agir sur les frustules une solution d'acide fluorhydrique, qui dissout la silice. Il opérait sous le microscocope, en plaçant (1) J. Pelletan. — Le Microscope, son emploi et ses applications, in-8° 1876 p. 563. (2) J. W. Bailey. — Amer. Journ. of Se. and Arts, 2» série, tome XI. 68 LES DIATOMÉES les frustules entre deux lames de mica que l'acide fluorhydrique n'attaque pas, et en recouvrant d'une semblable lame de mica la lentille de l'objectif pour la préserver des vapeurs acides. Il a vu ainsi que, sur les valves pré- sentant des nodules, ceux-ci résistaient le plus longtemps à l'action dissol- vante du fluor, tandis que s'ils eussent été des parties plus minces ou des trous ils eussent disparu les premiers ou se seraient agrandis. 11 a vu, de même, que les bandes longitudinales lisses, de chaque côté du raphé dans les Pinnularia, ne sont pas des parties amincies, mais épaissies, et qu'au bout d'un certain temps, l'acide ayant attaqué la surface, elles apparaissent striées. Cette striation est donc profonde et recouverte par une couche de silice. Fig. 46. — Triceratium favus. Il a constaté encore que, chez les Isthmia, les taches ou points de la bande transversale de la valve ne sont pas des épaississements ni des bosses, mais des parties amincies ou des trous arqués, et qu'au contraire, les travées qui les séparent, et que l'on croyait tracées en creux, sont des épaississements qui résistent longtemps à l'action de l'acide et disparaissent en dernier (Fig. 45). Par ce procédé ingénieux, il a pu, sur les frustules récents et même sur quelques spécimens fossiles, isoler la membrane organique de la cellule dépouillée de toute son incrustation siliceuse. Depuis Bailey, un grand nombre d'observateurs ont étudié la structure intime des valves des Diatomées, et ce sont particulièrement sel valves des Coscinodiscus et des Triceratium, dont les «yeux» sont relativement volumineux, qui ont été l'objet des recherches des diatomisles. Il faut citer III. STRUCTURE MICROSCOPIQUE DES DIATOMEES 69 surtout les travaux de Flôgel (1), Otto MûHer (2), J. Gox (3), Prinz et Van Ermengem(4), Van Heurck (5) et J. Deby (6). Aujourd'hui, tout le monde est à peu près d'accord à reconnaître que les valves des Diatomées, et particulièrement de celles que nous venons de citer, sont composées de plusieurs couches, une couche supérieure et une couche inférieure réunies par un réseau composé d'alvéoles plus ou moins réguliers et souvent hexagonaux, formant comme un diploë entre deux lames osseuses. Il arrive parfois d'ailleurs qu'une valve de Diatomée se clive en ses deux lames parallèles. M. J. Gox a pu reconnaître ainsi directement que la lame inférieure ou interne de la valve d'un Triceratium portait les fines ponc- m Fig. 47. — Coscinodiscus bihariensis, Pant. tuations que l'on voit au fond des yeux quand on examine la valve dans son entier, et l'on reconnaissait la traee hexagonale laissée par le réseau alvéolaire qui était resté adhérent à la face inférieure delà lame externe (7). (1) Flôgel. — Vntersuchungen ùber die Structur der Zellwand, etc. (Arch. f. Mikr. Anat. T. VI, 1870). (2) 0. Mûller. — Uber der feinerem Bau der Zellwand dcr Bacillariaceen, etc. (Arch. f. Physiol. Reich. et Dub. Reym. 1871), (3) J. Gox. — Structure of the Diatom shell. (Am. Month. Micr. J. 1884). (4) M. Prinz et Van Ermengem. — Rech. sur la struct. de qq Diat. cont. dans le cementstein du Jutland. (Ann. de la Soc. B. de Micr. T. 8). (5) H. Van heurck. — Bull, de la Soc. B. de Micr. 1885. (6) J. Deby. — Sur la structure microscopique des valves des Diatomées. (Journal de Micrographie, 1886, et Journ. Quek. Micr. Cl. 1886.) (1) J. Deby. — Sur la structure microscop. des valves des Diat. (Journ. de Micrographie, 1886 p. 416,1. Voir la Pi. IV, fig. 4, 5, 6, qui représentent les lames sup. et inf. et la coupe d'une valve de Triceratium. 70 LES DIATOMÉES Néanmoins, certains auteurs, comme MM. Prinz et Van Ermengem, pensent que la lame supérieure est perforée au centre des alvéoles qui sont ainsi des cavités ouvertes en dessus comme dans un gâteau d'abeilles vide. M. Stephenson, au contraire, avait supposé que c'était la lame inférieure qui portait la perforation. Le Dr Flogel et M. J. Cox pensent que les alvéoles sont des cavités closes par le fond et le Dr H. Van Heurck admet qu'une lame supérieure peut fermer les alvéoles en dessus, mais qu'elle existe à tous les états de déve- loppement : complètement formée, épaisse et solide, obturant entièrement les alvéoles, ou bien très mince et même manquant tout à fait, et laissant les alvéoles ouverts en dessus. M. J. Deby qui, à ce que nous croyons, a fait les recherches les plus récentes sur ce sujet, pense que la couche ou membrane siliciliée supérieure existe toujours, à moins qu'elle ait été détruite accidentellement, comme cela arrive presque toujours sur les frustules fossiles qui ont subi des frottements et qui se sont usés sur leur surface, et comme cela a lieu aussi à peu près constamment sur les Diatomées qui ont été préparées par le brû- lage ou traitées par les acides. L'observation que nous avions faite jadis sur le Coscinodiscus Ocuhis lridis était donc exacte, — comme sont exactes celles de MM. Prinz et Van Ermengem, mais, ainsi que ces auteurs, nous avons étudié une Diatomée fossile dont la couche externe, usée, avait disparu, laissant les alvéoles ouverts. Voici, d'ailleurs, les conclusions du travail de M. J. Deby. « 1° La valve de ia plupart des Diatomées est composée d'une double lame. « 2° Entre les deux lames il y a un plus ou moins grand nombre de cavités limitées par des parois solides de silice. Ces cavités sont circulaires ou hexagonales dans leur contour. . « 3° Dans toutes les valves récentes vivantes et complètes, les cavités sont closes en-dessus par la lame supérieure, au fond par la lame infé rieure, et ces lames ne montrent aucune trace d'orifices, mais seulement des amincissements au sommet des cavités, excepté dans les cas anor- maux ou la cuticule organique a été partiellement ou totalement détruite par des causes accidentelles. « 4° La membrane supérieure est, dans le plus grand nombre des cas, si légèrement siliceuse, que le moindre contact avec les acides la détruit et ouvre les cavités placées au-dessous d'elle. Dans d'autres cas, cette mem- brane, qui est généralement plus mince dans la partie centrale des aréoles, peut devenir fortement silicifiée et contenir des particules ou granules de silice fortement réfringents, placés sur ce qu'on appelle les « yeux » aux- quels cas les cavités sont complètement fermées des deux côtés, sauf pour les actions osmo tiques. « 5° La membrane de clôture inférieure des alvéoles porte fréquemment STRUCTURE MICBOSCOPIQUE DES DIATOMEES 71 des dessins variés dont la nature, en raison de leur excessive petitesse, n'a pas encore été bien établie, mais qui doivent dépendre de la structure, car aucune image de ditïraclion, formée par queiqu'organisation siégeant sur le plan inférieur, ne peut les produire, attendu qu'aucune organisation n'existe sous ce fond, ni entre les diaphragmes. « 6° La fine membrane supérieure des aréoles est l'extension des bords des barres dites « en tête de clou » qui forment les parois limitantes des aréoles, comme cela a été figuré par MM. Otto Mùller, Flôgel, Prinz et Van Ermengem. (Dans beaucoup de Diatomées fossiles et sur presque tous les spécimens bouillis dans les acides, la lame externe qui ferme les aréoles a disparu et les valves sont, par conséquent devenues perforées à la surface supérieure. Dans quelques cas, la lame profonde finit aussi par présenter des perforations.) « 7° Les cavités dans la valve sont limitées par des parois de silice solide. Fig.48. — Coupe schématique d'une valve de Triceratium, d'après M. J. Deby. a, lame supérieure ; b, lame inférieure ; c, cavité des alvéoles ; d, piliers interalvéolaires ; m, partie amincie de la lame supérieure ; n, fond des alvéoles. Ces parois s'étendent souvent au-delà, en-dessus ou en-dessous des mem- branes qui ferment les aréoles, et fréquemment s'allongent en pointes ou épines, diverses de formes et de longueur, qui font saillie sur la valve entre les aréoles. t 8° Le sillon médian ou la fissure qu'on observe dans le raphé.ou ligne médiane épaissie de la plupart des Navicala, est aussi fermée en-dessus et en-dessous par une membrane organique très mince, légèrement sili- cifiée, dans toutes les valves récentes normales. Je crois cependant que de petites ouvertures peuvent exister dans ces étroites membranes de ferme- ture au voisinage du nodule central et des nodules terminaux. Mais ce point a besoin d'être encore élucidé.... « 9° Les zones ou bandes connectives de certains genres, comme les hthmia, paraissent réellement et véritablement perforées. « 10° Tout ce que les auteurs ont appelé aréoles, perles, pores, orifices, projections granuleuses, dépressions, hexagones, grains en chapelet, points, etc. ne sont qu'une seule et même chose mais exprimée d'après des 12 LES DIATOMEES interprétations microscopiques diverses, des idiosyncrasies différentes ou des idées préconçues. » Ainsi, comme nous le disions, les Diatomistes paraissent s'accorder aujourd'hui sur l'existence de deux lames séparées par une substance aréolaire, lames dont l'externe ou supérieure peut manquer souvent, sans doute par suite d'usure ou de destruction acci- dentelle. Pour certaines Diatomées, comme les Cos- cÀnodiscus, Eupodiscus, Triceratium, etc. , cette structure paraît assez évidente et elle donnerait, sur une coupe perpendiculaire à la surface, le schéma ci-dessus (fig. 48) dans lequel a représente la lame externe ou supé- rieure, b la lame interne pouvant porter des ornementations diverses, c la cavité close des alvéoles, d les piliers en tête de clou qui sé- parent les alvéoles et m la partie amincie de la lame supérieure dans l'axe des alvéoles, partie à travers laquelle, si elle est conservée, (ou par le trou qu'elle laisse, si elle est dé- truite), on aperçoit le fond orné n de l'alvéole. Mais en est-il de même pour toutes les Dia- tomées, par exemple pour celles dont les val- ves ne présentent pas d'yeux, mais des côtes plus ou moins robustes comme les Navicules Pinnulariées, et pour celles qui présentent des stries résolubles, avec de forts grossissements, en points distincts lesquels ont bien l'aspect de grains brillants ou, comme on dit, de per- les, les Pleur osigna, Frustulia, Amphi- pleura, et mille autres? — La chose paraît bien moins évidente, et d'autant moins que ces détails de structure sont ordinairement beaucoup plus petits et souvent très difficiles à voir. Il nous semble que jusqu'à présent ce n'est guère que par analogie qu'on a conclu à une identité de structure chez toutes les Diatomées. Cependant, M. H. Van Heurck, grâce aux milieux réfringents à haut indice de réfrac- tion composés par M. H. L. Smith (voir plus loin : Montage des Diato- mées), a pu vérifier l'existence des alvéoles dans les genres liaphoneis, Nitzschia et Pleurosigma. Pour nous, nous ne contestons pas la réalité de cette texture aréolaire des valves chez les espèces à fines stries résolubles en points, non plus, par conséquent, que l'existence des deux lames, l'une supérieure fermant les Fig. 49. — Navicula major raphé et nodules. ad, fracture mon- montrant la lame su- périeure recouvrant les côtes. — Deux côtes manquent. D'ap.M.H. L.Smith). III. STRUCTURE MICROSCOPIQUE DES DIATOMEES 73 alvéoles en dessus, l'autre inférieure fermant les alvéoles au fond. Mais nous pensons que les points en lesquels se résolvent les stries sont bien des grains ou des perles, c'est-à-dire des corps en saillie et non plus en Fig. 50. — Cocconema asperurn, Ehb. Face valvaire montrant les stries résolues en perles dans une partie de la valve, d'après MM. P. Petit et Leuduger-Fortmorel. creux ou en profondeur comme les yeux ou les taches des Coscinodiscus ou des Triceratium. En effet, si l'on se reporte aux figures qu'ont données les auteurs de la Fig. 51. — Coupe schématique perpendiculaire à la surface d'une valve perlée. coupe des valves (voir fig. 48), on remarque que tous ont représenté les piliers interalvéolaires sous forme de clous à tète saillante. C'est, en effet, m. Fig. 52. — Schéma de la strialion perlée du Pkurosigma angulutvm. ainsi qu'ils se présentent toujours. Dans les espèces dont nous parlons, Pleurosigma et autres, les alvéoles sont extrêmement petits et les têtes de clous saillantes relativement grosses. Ce sont précisément ces têtes de 74 LES DIATOMEES clous qui constituent les grains ou perles, réellement en saillie, qu'on ob- serve sur les valves des espèces à surface perlée. Si les alvéoles (o) ont une section régulière en losanges égaux disposés, par exemple, comme dans le schéma fig. 52, sur toute la surface de la valve, Fig- 53. — Pleurosigma angulatum résolu en perles à la 'lumière électrique, par M. H. Van Heurck. on voit qu'ils forment exactement le dessin des stries du Pleurosigma angulatum résolues en perles, alignées suivant les trois directions rarc, transversale, ma et nb, inclinées l'une sur l'autre a 60°. Les alvéoles peuvent avoir un contour carré ou rectangulaire allongé, et l'on obtient ainsi le schéma de toutes les striations perlées disposées en Fig. 54. — Schémas de striations parallèles perlées. en stries parallèles, comme dans un grand nombre de Navicula, dans les Frustafia saxonr'ca, Amphipleura pellucida, dans le Surirella gemma, etc. Les alvéoles peuvent avoir des formes très diverses suivant la forme même de la valve et former, par les têtes saillantes des piliers qui les séparent, des lignes, c'est-à-dire des stries, très diversement incli- nées les unes sur les autres, et par exemple plus ou moins rayonnantes. III. STRUCTURE MICROSCOPIQUE DES DIATOMEES 75 Cette disposition s'observe, comme on sait, chez un très grand nombre de Diatomées et particulièrement dans le voisinage des nodules. (Fig. 55, 56). Si l'on suppose que les grains formant une strie sont tellement près les uns des autres qu'ils se touchent, confluent, la strie ne sera plus résoluble en grains ou perles, mais ne formera plus qu'une barre saillante ou côte Fig. 55. — Schéma d'une striation perlée rayonnante. séparée de la barre ou côte précédente et de la suivante par une raie en creux. Beaucoup de Diatomées présentent des stries qui n'ont pas encore été résolues en grains. Pour quelques-unes il est possible que les moyens op- tiques nous manquent encore, mais il paraît très probable que chez d'au- tres les grains n'existent pas, qu'ils ne sont pas distincts les uns des autres et qu'ils confluent en une strie irréductible. On donne, en général, le nom Fig. 5fi. — Navicula lusca résolu en perles à la lumière électrique par M. Van Heurck. de côtes à ces stries lorsqu'elles sont très fortes, comme dans les Navkula major (Fig. 49), N. Debyi (Fig. 57). etc. Du reste, il n'est pas certain que ces côtes soient toujours formées, comme nous venons de le supposer, par la confluence des sommets des piliers de séparation des alvéoles. Dans certains cas, elles paraissent formées par des sortes de petits tubes aplatis rangés les uns à côté des autres et qui seraient creusés le long de leur axe d'un canalicule très fin. Nous considérons cette structure comme résultant de la coalescence des cavités d'une ou plusieurs rangées d'alvéoles. 76 LES DIATOMÉES Ainsi, si l'on se reporte à la fig. 54, et que l'on suppose que les perles des deux premiers rangs soient assez grosses pour se confondre entr'elles dans le rang ab et dans le rang cd et celles du premier rang avec celles du second de sorte que les deux rangs ab, cd ne forment plus qu'une grosse côte épaisse et saillante ; si l'on suppose que le rang d'alvéoles com- pris sous ces rangées de grains confluent aussi, parla disparution de toutes les cl oisons comme m, n, le rang d'alvéoles formera un canalicule qui sera surmonté par la côte composée de la fusion des deux rangées de grains. En somme, cette structure à côtes canaliculées ne serait, ainsi comprise, qu'une modification de la structure alvéolaire supposée générale à toutes les valves de Diatomées. Elle en dériverait d'une manière simple. De sorte que dans une même tribu, comme celle des Naviculées, ou même, plus généralement, dans un même groupe, comme celui que M. H. L. Fig. 57. — Pfavicula Debyi. Smith appelle les Raphidées, on ne trouverait pas des espèces dont la valve est construite de manières très différentes. Et, dans tous les groupes, la structure fondamentale serait la même, ne différant que par des variations dans la forme, la dimension, la séparation ou la réunion des mêmes éléments. Nous avons parlé de valves de Triceratium qui se sont dédoublées en une lame supérieure, à laquelle adhéraient les alvéoles, et une lame infé- rieure montrant encore l'empreinte de la réticulation hexagonale laissée par ces alvéoles ; M. H. L. Smitt a publié le dessin (Fig. 49) d'une valve de Navicula major brisée et montrant, dans la fracture ad, la lame supérieure passant par-dessus les côtes qui la débordent en un point et qui sont fixées à la lame inférieure. Deux côtes manquent tout à fait parla dis- parution des deux rangs d'alvéoles qu'elles recouvraient. La manière de voir que nous exposons ci-dessus n'est pas, nous le savons, admise par tous les auteurs. Beaucoup pensent que les stries perlées ne sont pas en saillie. Ainsi le Dr H. van Heurck, d'après des études faites sur des valves examinées dans des milieux à 1res haut indice de ré- III. STRUCTURE MICROSCOPIQUE DES DIATOMEES 77 fraction, considère ces stries comme formées non pas par les tèles des piliers interalvéolaires, mais par la vue en coupe optique d'une série d'al- véoles. Il assimile, par conséquent, les points qui composent une strie de Nuvicula, (ÏAmphipleura, ûeNitschia, de Surir ella, etc., à ceux qui forment les « yeux » des Triceratium ou des Coscinodiscas. Ainsi, en se reportant à la fig. 54, ce serait la ligne m n qui représenterait la Fig. 58. — Perles grossies à 2000 diamètres, d'un Stauroneis. strie dont les points seraient formés par la cavité des alvéoles eux-mêmes, cavité aperçue à travers la fine lame supérieure si elle existe, ou vue direc- tement en creux si cette lame est détruite ; les cloisons séparant les lignes d'alvéoles, cloisons qui seraient saillantes ou épaissies, ne formeraient que des lignes uniformes que M. van Heurck appelle interstries (1). Nous avons indiqué les raisons qui nous font croire qu'il n'en est pas Fig. 59. — Alloioneis Antillarum. Cl. ainsi et que les stries perlées sont bien formées par des grains en saillie, dilatation ou épaississement des « têtes de clous. » Nous ajouterons seule- ment que lorsqu'on examine ces « perles, » au microscope, sur de gros spécimens, l'œil qui a une si une grande habitude de discerner les reliefs et les creux perçoit complètement la sensation de relief. D'ailleurs, certai- nes Diatomées présentent des grains et des détails de structure qui per- mettent de les voir assez distinctement avec le microscope binoculaire ; on (1) H. van Heurc — Synopsis des Diat. de Belg. p. 244. 78 LES DIATOMÉES peut alors apprécier 1res neitement la saillie que forment ces grains, saillie qui a depuis longtemps fait comparer ces frustules à une râpe. (Fig. 59). Enfin, l'aspect brillant, la réfringence de ces points, quand on les examine à sec, indique bien que ce sont des parties épaissies, et réfractant plus la lumière, en raison de leur épaisseur même el de leur forme bombée, que les parties avoisinantes, lesquelles ont cependant le même indice de réfraction, étant formées de la même substance, une silice transparente, mais sont inoins épaisses. Ce sont bien ces sommets bombés qui se piquent d'une étincelle de lumière quand on les éclaire fortement par des rayons très obliques, étincelle qu'on retrouve sur chaque perle dans les images pho- tographiques. (Voir Fig. 53, 56). Et si l'on se fonde, pour établir que les grains sont des « creux » , sur l'examen des valves dans des milieux à plus haut indice de réfraction que la silice dont ils sont constitués, on a tort, car on démontre précisément le contraire de ce qu'on veut prouver, les granules devant paraître des creux en raison de leur moindre réfringence. Quand on regarde un objet trans- parent dans un milieu moins réfringent que lui, cet objet apparaît plus ou moins brillant, mais avec son relief; dans un milieu de même réfringence, il disparaît complètement et on ne le voit plus ; dans un milieu plus réfrin- gent il apparaît comme un vide ou un trou. A côté de ces diverses opinions sur la nature réelle des stries des Dia- tomées, il y en a encore une, très radicale, que nous devons signaler. C'est que ces stries n'existent pas du tout, ou, au moins, n'existent pas telles que nous les voyons. Et, en effet, le professeur Abbé a démontré, comme nous l'indiquerons plus loin (voir : Objectifs), que, suivant les conditions optiques dans lesquelles on examine, au microscope, les objets à très fine structure, on peut obtenir des images très différentes, et particulièrement très différentes de ce qui existe en réalité. M. J. Deby estime que le diatomo-microscopiste ne doit jamais perdre de vue les phénomènes de diffraction indiqués par M. Abbé. En thèse générale, cela est vrai, et il est possible, après tout, que les images que nous connaissons des structures extraordinairement fines de certaines Diatomées difficiles, comme X Ampkipleura pellucida, le Surirella gemma et quelques autres, ne représentent pas ce qui existe réellement sur les valves de ces espèces. Cependant, cela est peu probable. Il faut, en général, se méfier des raisonnements par analogie. Toutefois, il est évidemment des cas où ce genre de raisonnement paraît fondé. Ainsi, comme le fait très bien remarquer M. H. van Heurck, nous connaissons beaucoup de Diatomées dont la structure striée ou perlée est assez grosse et nette pour qu'on puisse la distinguer parfaitement, à peu près avec tous les objectifs. C'est, en un mot, une' structure connue, toujours la même, et nous pouvons être certains qu'elle existe réellement telle que. nous la III. STRUCTURE MICROSCOPIQUE DES DIATOMEES 79 voyons toujours. A côté de ces espèces, il y en a une série d'autres, voisines, présentant une structure semblable, mais de plus en plus tine ; ce n'est que dans les derniers spécimens de cette série, où les détails deviennent extrêmement fins, que l'on pourrait avoir des doutes sur la réalité des images et supposer qu'elles ne sont, peut-être, que des effets de diffraction. Mais, comme entre ces dernières espèces et les premières on trouve tout une suite de formes intermédiaires, dont la structure est certaine et analogue, on est conduit à admettre par analogie, et avec une raison qui paraît suffi- sante, que la même structure existe bien aussi, quoique de plus en plus fine, sur les derniers termes de la série, et telle que les objectifs actuels nous la montrent en effet. D'ailleurs, même sur ces tests difficiles, la structure se montre toujours la même, pour une même espèce, quel que soit l'objectif que l'on emploie, dès qu'il présente des conditions optiques suffisantes pour la résoudre. — Avec des objectifs d'ouverture numérique et de grossissements différents, on voit la structure ou on ne la voit pas : si on la voit, elle est plus ou moins distincte, mais elle est la même, dans les mêmes conditions d'éclai- rage et de milieu. Nous croyons donc que la structure des Diatomées, telle que nous la voyons sur les espèces aujourd'hui connues, est une structure réelle, bien que nous pensions, avec M. J. Deby, qu'il est toujours utile de se rappeler les phénomènes mis en lumière par le professeur Abbé à propos des effets de la diffraction et des images illusoires, surtout quand il s'agit d'interpréter des faits nouveaux. Nombre et constance des stries. — Une question se présente main- tenant à laquelle il nous paraît qu'il n'est pas encore possible de répondre d'une manière complète et certaine. Le nombre des stries sur tous les individus d'une même espèce est-il c onstant? Si tous les individus d'une même espèce avaient la même taille, on pourrait jusqu'à un certain point préjuger la question et admettre que le nombre de stries ne doit pas changer, ou sans doute, fort peu, sur leurs valves ; — bien que, cependant, les Diatomées se présentent comme des organismes très sujets aux variations, et peut-élre serait-ce non pas les individus d'une même espèce que l'on devrait comparer, mais ceux d'une même variété. Mais les individus d'une même espèce et d'une même variété, ceux qui descendent d'un même frustule par des divisions successives, peuvent avoir des tailles très différentes, comme on le sait, et varier du simple au double. Un frustule strié, double d'un autre, présente-t-il sur ses valves un nombre double de stries, celles-ci ayant le même écartement sur les deux 80 LES DIATOMÉES frustules ? — Ou bien prôsente-t-il le même nombre de stries, celles-ci étant deux lois plus écartées que sur le petit frustule? La réponse à celle question n'est pas, disons-nous, complètement cer- taine, car les différents auteurs ne sont pas d'accord sur le nombre des stries qu'ils indiquent pour une espèce donnée. Nous-mêmes, nous avons, il y a quelques années, compté les stries sur les valves de quelques Diato- mées tests et si les chiffres auxquels nous sommes arrivé s'accordent a peu près avec ceux que donne M. H. Van Heurck, ils ne ressemblent pas du tout à ceux qu'a trouvés M. Gastracane, de Rome, qui a fait tout un long travail sur ce sujet. Nous n'élevons aucune prétention sur la valeur de nos chiffres, ayant tout simplement fait le comptage, à l'œil, dans le microscope, à l'aide d'un micromètre objectif comparé avec un oculaire divisé, par un procédé bien connu et tout-à-fait classique. Nous pensons, néanmoins, qu'il y a dans le nombre des stries des différences individuelles, particulièrement dans le groupe si éminemment variable des Naviculées dans lequel un si grand nombre d'espèces s'accompagnent de tant de variétés. Toutefois, d'après l'accord des diatomistes à indiquer le nombre des stries dans une longueur donnée comme un caractère pouvaiït servir à différencier certaines espèces — ou variétés — voisines, il est évident que la plupart de ces auteurs voient dans ce nombre un élément d'une certaine fixité. Ainsi, une partie de la question que nous posions tout-à-1'heure se trouve résolue, c'est-à-dire que le nombre des stries serait très variable sur les différents individus d'une même espèce, suivant leur taille, et qu'un frus- tule de grandeur double présenterait sur ses valves un nombre total double, ou à peu près, de stries, tandis que le frustule deux fois plus petit en présen- terait à peu près deux fois moins dans sa totalité. — Ce qui serait fixe, ou à très peu de choses près, c'est le nombre de stries dans une longueur donnée, et l'on emploie ordinairement le centième de millimètre comme mesure. Nous disons « à peu près, » parce que tout en reconnaissant la constance du nombre des stries dans une longueur égale prise sur les valves d'individus de la même espèce, nous admettons néanmoins une certaine variation due aux différences individuelles. C'est ainsi que M. H. van Heurck indique 34 à 35 stries dans 1/100 de millim. sur le Frustulia saxonica, il en trouve environ 28 sur e Navicula rhomboïdes, alors que M. Castracane en indique 24 ; il en compte 23 1/2 à 26 sur le Nitzschia sigmoïdea, alors que M. Castracane n'en trouve que 10 1/2. Nous n'insisterons pas davantage sur celle question; comme nous le disions plus haut, la solution en est encore un peu douteuse, et nous ne pouvons la formuler qu'en disant que le nombre des stries sur un espace donné est considéré comme fixe dans une même espèce, avec des varia- III. STRUCTURE MICROSCOPIQUE DES DIATOMEES 81 lions assez légères imputables, selon nous, à des différences individuelles et aux erreurs personnelles d'observation. M. Castracane considère ce nombre de stries comme ayant une valeur importante dans la caractéristique des espèces, et, en effet, on ne peut nier que cet élément n'ait une importance réelle quand il présente des différences considérables et, pour ainsi dire, typiques. Par exemple, une discussion s'est élevée jadis entre les diatomistes à propos de l'idendité ou de la non idendité de trois « espèces » les Navicula rhomboïdes, Navicula cras- sinervia et Frustulia saxonica (1). L'auteur italien estime que ce sont bien trois espèces distinctes en se fondant sur la comparaison du nombre des stries dans 1/100 de millimètre. En effet : Le Frustulia saxonica a 34 stries transversales et 36 longitudinales. Le Navicula rhomboides : 24 » » 17 » Le Navicula crassinervia : 14 » » 24 » Ce qui représente évidemment des slriations de types très différents. En raison de l'importance qu'il attache à cette donnée, M. Castracane a entrepris un long travail de comptage sur un très grand nombre de Diato- mées (2). Le procédé mis en œuvre par lui présente de sérieuses garanties d'exactitude. Il a photographié les Diatomées sous un grossissement tou- jours le même (535 diamètres) et s'est servi des épreuves négatives sur verre pour projeter, à l'aide d'un appareil convenable, les images, qui se trouvaient ainsi considérablement grandies, sur un écran. Il superposait alors à l'image amplifiée une feuille de papier donnant exactement la me- sure de 1/100 de millim. prise de même sur l'image d'un millimètre divisé en 100 parties et grossie de la même quantité ; il marquait les stries sur le papier et les comptait (3). Nous donnons ci-dessous, à titra de document, les nombres auxquels il est arrivé, et nous en ajoutons quelques-uns dus, à M. H. Van Heurck ou que nous avons obtenus nous-mêmes. Pour éviter les fractions, tous les nombres ont été multipliés par 100, et représentent, en conséquence, le nombre des stries existant sur une longueur de 1 millimètre. (1) Ces trois espèces sont réunies par M. H. Van Heurck, dans sa Synop- sis, dans le genre Vanheurckia, et les deux dernières sont portées comme une variété du V. rhomboïdes, sous le nom de V. crassinervis. (2) Comte F. Castracane. — Sur les stries des Diatomées et sur la valeur qu'il faut attribuer à leur nombre, etc. (Comm. à l'Ac. dei Nuoyi Lincei. — Journal de Micrographie, t. III, 1879). (3) M. Castracane ne dit pas que l'écran était toujours placé à la môme distance, nous pensons qu'il en .était ainsi, car c'était une condition indis- pensable. 6 82 LES DIATOMEES NOMBRE DE STRIES COMPRISES DANS 1 MILLIMÈTRE Stries longitudinales Strie? transversales, Epithemia Argus, Sm. 900 1,200 — constricta, Sm. .) 1,450 — zébra, Kz. 1,250 1,700 — gibba, Kz. » 1,600 — turgida, Kz. 800 900 — ocellata, Kz., var. * 430 — musculus, Kz. » 1,750 — ventricosa, Kz. » 1,530 — granulata, Kz. 800 900 — Hyndmannii, Sm. 670 » Eunotia undalata, Griin. >i 1,070 — tetraodm, Ehb. » 1,400 — tetraodon, Ehb.. var. diodon. » 2,100 — tetraodon, Eh., var. diadema. » 2,400 — incisa, Greg. » 1,550 — indica, Grùn. » 1,200 — prerupta, Ehb. M 1,800 — Soleirolii, Kz. 0 1,200 Synedra thalassotrix, Clève (IV Icssine). » 1,370 — sicula, Castracane. » 835 — splendens, Kz. » 1,030 — tt/na, Ehb. » 970 — formosa, Hantzsch. » 1,030 — cristallina, Kz. » 1,200 — pulchella, Kz., var. »> 2,150 — tabulata, Kz. » 1,320 — af finis, Kz. >) 1,150 Grammatophora marina (Kz.), Sm. 1,600 1,600 — angulosa, Griï n., var. » 1,350 — oceanica, Ehb. » 3,850 Nitzschia formica, Hantzsch. 1,550 1,550 — linearis, Sm. <) 3.000 — amphioxys, Sm. » 2,000 — hungarica, Grûn. » 1,800 — sigmoïdea, Sm. n 1,070 — sigmoïdea (d'après H . Van Heurck). » 2,300-2.600 — sigmoïdea (d'après J. PelletanJ i) 2,500 — speclabilis,, (Ehb.), ! 5m. » 2,750 — dubia, Hantzsch. » 2,000 Perrya eximia. » 975 Mastogolia Dansei, Thw. H 1,450 — meleagris, Kz., var. » 2,000 III. STRUCTURE MICROSCOPIQUE DES DIATOMEES S3 — Braunii, Grùn. var. e 1,850 — marginulata, Grùn., var. » 1,600 — exigua, Lew. » 2,600 Achnanthes inflata, Grùn. » 970 — subsessilis, Kz. ;) 970 — longipes, Ag. 1,400 » — brevipes, Ag. 1,100 1,700 Cymbosira Agardhii, Kz. » 1,250 Achnanthidium lanccolatum, Bréb. » 1,400 Cymbella pisciculus, Ehb. » 1,250 — heteropleura, Ehb. » de 900 à 1.000 — a f finis, Kz., var. » 1,200 — helvetica, Kz. » de 1,100 à 1,300 — scotica, Sm. » 1,150 — kamtschatica, Grùn. 1,200 900 — navicula, Ehb. » 1,500 — cuspidata, Kz. » 1,175 Gomphonema robustum, Grûn. » 1,230 acuminatum, Ehb., var. coronatum. » 1,100 dichotomum, var. trigibbum. Eul. » 1,030 — capitalum, Ehb. » 1,130 commune, Rabh. » 1,250 Rhoïcosphcnia curvata, Grûn. » 1,670 Navicula ambigua, Ehb. 2,600 1,900 — serians, .Kz. » 2,200 — bohemica, Ehb. » 1,700 — sculpta, Ehb. « 1,450 — limosa, Kz. » 1,900 — quinquenodis , Grùn. » 1,900 — retusa, Breb. » 650 — Reinhardtii, Grùn. » 900 — slesvicensis, Grùn, » 1,050 — sphxrophora, Sm. » 1.600 — amphisbœna, Kz. »( un peuirrég.) 1,500 — ampldsbxna, Kz., var. » 1,300 — permagna, Bailey. » 1,275 — /ïrmet, Kz. » 1,550 — /irma, var. affinis, Ehb. » 1,900 — /îraa, var. amphirhyncus, Ehb, » 1,570 — /îrma, var. dilatata, Ehb, 1,650 1,650 — /îraa, var. latissima, Ehb. 1,650 1,650 — firma, var. Hitskockii, Ehb. » 2,100 — elegans, Sm. » 1,425 — crassrt, Greg. » 1,250 — quadrata, Greg. » 1,500 — entomon, Ehb. 850 900 — didyma, Kz. » 1,000 — elliptica, Kz. » 1,325 84 LES DIATOMÉES lyra, Ehb. » (irrég.) de 700 à 800 — lyra, var. » 1,000 — major, Kz. » 630 oblonga, Kz. » 850 — gibba, Kz. var. » 1,000 — hemiptera, Kz. var. » 1,400 — peregrina, Ehb. Sm. 2,400 750 — viridis, Kz. * 720 — divergens, Sm. » (irr ég.) 1,100 — divergens, Sm., var. » 1,100 — stauroneiformis, Sm. » 1,200 — stauroneiformis, Sm., var. latialis » 1,900 — crassinervia, Breb. 2,400 1,400 — rhomboides, Ehb. 1,700 2,400 — rhomboides, (d'après H. Van Heurck) » 2,800 — rhomboides, (d'après J. Pelletan). » 2,600 Fruslulia saxonica, Rabh, 3,600 3,400 Scoliopleura convexa, Grûn. a 700 — tumida (Breb.) Rabh. » 1,300 Pleurosigma balticum, Sm. » 1,450 — attenuatum, Sm. 1,050 1,400 — hippocampus, Sm. » 1,750 — formosum, S m. 1,580 1,900 — angulatum, Sm. » 2,080 Donkinia recta (Donk.), Ralfs. » 2,100 Toxonidea insignis, Donkin. ■ 2,250 Pleurostaurum javanicum, Grûn. 1,300 1,320 — acutum, Rabh., var. 900 1,300 Endostaurum crucigerum (Sm.), Breb. » 1,400 Grammatophora subtilissima, Bail, (d'après H. Van Heurck). 3,400 3,600 — subtilissima, Bail. (d'ap. J. Pellelan) » 3,600 Amphipleura pellucida, Ktz. (d'ap. H. Van Heu rck) » 3,700 — — (d'ap. J. Pelletan) » 4,000 — — (d'ap. Castracane ) » 5,200 Surirella gemma, Ehb. (d'ap. H. Van Heurck) 2,000 2,100 — — (d'ap. J. Pellelan) » 2,600 § 3. — Appendices et dispositions particulières Outre les détails de structure, côtes, stries, perles, grains, yeux, etc., que présentent ordinairement les valves des Diatomées, on trouve souvent différents appendices, soit en dehors, soit en dedans de la valve. Nous pouvons, à la rigueur, classer parmi les appendices certaines ondulations de la surface de la valve qui produisent quelquefois comme des nervures longitudinales plus ou moins saillantes sur cette surface, III. STRUCTURE MICROSCOPIQUE DES DIATOMEES 85 nervures qui peuvent prendre une grande exlension et constituer ce qu'on appelle des ailes, Dans le premier cas, on dit que la valve est carénée, comme dans les Nitzschia ; dans le second, qu'elle est ailée, comme dans les Sur ire lia. Fig. 60. Coupe transversale du Surit ella ovalis. Fig. 61. Coupe transversale de YAmphiprora baltica. Il arrive aussi que les valves ont leur surface ondulée transversalement, ce que l'on reconnaît facilement par les différences de mise au point quand on examine le frustule par la face valvaire, mais mieux encore quand on Fig. 62. Cymatoplcura solea. (Face connective), la regarde par la face connective. Tel est, par exemple, le Cymutopleura solea. (Fig. 62). Mais ce que l'on désigne particulièrement sous le nom d,appe?idices, ce Fig. 63, Cydotclla sexpunctata, i. Deb. Montrant les 6 appendices épineux auxquels cette espèce doit son nom. sont des pointes, des épines, des cornicules, quelquefois fort longues, rameuses, qui se dressent en certains points de la valve. Ces productions paraissent souvent dues à un prolongement plus ou moins considérable, en 86 LES DIATOMEES dehors de la valve, des piliers intéralvéolaires, c'est-à-dire de ce que nous avons désigné sous le nom de «têtes de clous». On en voit des exemples Fig. 64. Chœtoceros atlanticus. Cl. var. tumescent, Grun. (1). dans le Cyclotella sexpunctata, dans le Stephanopyxis corona ou certains piliers, disposés en cercle sur une des valves, se développent en (1) D'après M. H. Van Heurck, Syn. Diat. Belg. PI. 83 ter. III. STRUCTURE MICROSCOPIQUE DES DIATOMEES 87 pointes égales et bifurquées formant une couronne, tandis que l'autre valve est hérissée comme un oursin. D'autres fois, ces pointes, qui peuvent être très longues, ne sont que le dé- veloppement exagéré des extrémités de valves naturellement pointues, où d'aspérités de la valve en certains points disposés ordinairement d'une manière très régulière. Ces prolongements donnent à certaines espèces, comme les Rhizoso- lenia, les Chaetoceros, les Cylindrotheca, les Skeletonema, etc., les formes les plus caractéristiques et les plus singulières. Nous signalerons encore, parmi les appendices, des productions des valves qui, au lieu de faire saillie à l'extérieur, font saillie à l'intérieur et forment des crêtes on fausses cloisons pénétrant plus ou moins profon- dément dans la cellule. On les appelle vittx (au singulier : vitta). Mais fT Fig. 65. Grammatophora marina. quelquefois ce sont des cloisons complètes, sans doute perforées. On les appelle alors septa (singulier : septum). Quand on examine à plat, par la face valvaire, les frustules qui présen- tent des cloisons ou des fausses cloisons, on voit celles-ci figurant comme des lignes épaissies, et l'on ne peut se rendre compte facilement de leur profondeur qu'en examinant les frustules de trois-quarts, pour ainsi dire, en les faisant rouler dans la préparation. Les lignes ondulées, figurant des serpents, que l'on voit sur les valves des Grammatophora, sont des fausses cloisons. On en voit encore de nombreuses dans les Rhabdonema, les Tabellaria, les Striatella, etc. Nous en indiquerons de fréquents exemples et nous signalerons les autres détails particuliers de structure que présentent certaines Diatomées dans la description des principales espèces. Dispositions spéciales. — Nous devons ajouter que si la surface des valves, chez un grand nombre d'espèces, présente des ailes, des carènes ou des ondulations, comme nous l'avons indiqué pour le Surirella ovalis, le Cymatopleura solea, des pointes plus ou moins saillantes, comme 88 LES DIATOMEES chez le Cyclotella sexpunctata et surtout les Stephanopyxis, et des appendices plus ou moins remarquables, les frustules affectent quelque- fois une forme très singulière par suite de flexions ou même de torsions sur eux-mêmes. Nous avons déjà signalé la double flexion en S qu'éprouvent les valves des Pleu?^ o sigma, de certains Nitzchia, comme les Pleurosigma angulatum, P. scalprum, Nitzschia sigmoidea, etc. ; mais outre Fig. 61. — 1. Pleurosigma angulatum 2. Pleurosigma intermedium cette flexion dans le plan général du frustule, plusieurs Diatomées s'inflé- chissent dans divers plans, et, comme on peut le prévoir, ce phénomène se produit surtout dans les espèces plus ou moins discoïdes, c'est-à-dire présentant une assez large surface valvaire. Non seulement les valves, au lieu de rester planes, (comme dans les Coscinodiscus, dont la forme peut être comparée à celle d'une boîte de dragées), peuvent se renfler en chaudron ou en dé à coudre [Pyxidicula) ; non seulement l'une peut se Fig. 67. Surirella spiralis. renfler et l'autre rester à peu près plate, mais souvent elles se contournent de diverses façons. Ainsi, dans les Campylodiscus, le frustule qui esta peu près circulaire comme contour, serait plat s'il était étalé sur un plan, mais il se replie suivant deux courbes, en forme de selle de cheval. Enfin dans la Sart- re lia spiralis, le frustule, qui serait aussi à peu près plat, se tord en spirale autour de son grand axe (Fig. 67). D'ailleurs, nous indiquerons, en décrivant les principales espèces, les formes, souvent étranges, qu'affecte le frustule de certaines Diatomées. III. STRUCTURE MICROSCOPIQUE DES DIATOMEES 89 Valves secondaires. — Outre les cloisons, souvent perforées, que l'on constate dans certains (rustules, on trouve parfois, sous les valves, une seconde valve semblable, valve interne ou valve secondaire (Regenera- tionshùlle). On en constate souvent l'existence lorsque les frustules se rompent, notamment pendant les manipulations nécessaires pour le montage en préparation. Ces valves secondaires ne se trouvent jamais sous les valves très jeunes, mais seulement sous les valves anciennes. Nous les considérons comme une sécrétion supplémentaire de la membrane de cellule, une superfétation dont le but est de remplacer la vieille valve en cas de destruction par usure ou fracture. La membrane cellulaire secrète, en effet, de la silice d'une manière constante, et la valve secondaire est formée par une couche de silice qui ne s'est pas soudée, au fur et à mesure de sa formation, à la face inférieure de la valve. De sorte que celle-ci peut, en certains cas, subir une exfoliation, un dédoublement en deux feuillets, dont le feuillet interne est la valve secondaire. Cette production, et l'exfoliation ou le clivage naturel qui en résulte, ne se forment que chez les vieilles valves. C'est pourquoi, comme le fait re- marquer M. J. Deby, les frustules, qui sont formés d'une jeune et d'une vieille valve, se séparent toujours en un nombre impair de valves. Ces valves secondaires sont d'abord aréolaires et perforées, mais au fur et à mesure que la silice les épaissit, les orifices se ferment, i Dans quelques cas, dit M. J. Deby, ces orifices se remplissent tout à fait d'une masse dense et saillante de silice douée d'un indice de réfraction plus élevé que celui de la substance propre du reste de la valve, de manière à paraître comme des granules rouges ou roses sur un fond verdâlre avec les meil- leurs objectifs à immersion. » Noyau, double noyau, tache germinative. — Immédiatement sous la carapace siliceuse est la membrane de cellule, membrane vivante qui sécrète la silice. Elle forme comme un sac qui enveloppe tout le contenu de la cellule. Dans les espèces qui se prêtent à l'examen, on voit, dans l'intérieur de ce sac, une bande centrale, sombre, ordinairement granuleuse, géné- ralement appliquée à la face interne de la membrane cellulaire qui double les valves, et aussi le long des zones ; elle est contractile et extensible, et elle paraît diviser l'intérieur de la cellule en deux parties symétriques; sa surface forme des plis, quand on la regarde de côté, comme s'il y avait une fine membrane, plis qui dessinent comme des filaments. D'après, M. H. L. Smith, dans les formes discoïdes, cette bande est tout à fait centrale ; sur la face valvaire elle mesure à peu près le quart du dia- mètre de la valve, et sur la face connective elle a la forme d'une bande resserrée au milieu, en sablier. On la voit bien sur les grands Navicula et les grands Surirella, quand l'endochrôme n'est pas trop foncé. La substance qui forme cette bande est à peine colorée, mais le chloro- 90 LES DIATOMÉES iodure de zinc, qui teint en vert pâle les autres matières intérieures, la colore en brun foncé. Les extrémités des frustules se colorent de même, comme si la substance en question élait répandue partout sous les valves, mais plus épaisse seulement dans la bande centrale et aux extrémités. Quand on brûle les îrustules, on voit encore la trace de cette bande, bien que toutes les autres matières intérieures soient détruites. C'est dans cette bande centrale que sont placés les globules considérés comme étant de nature huileuse. Ils s'y meuvent, allant et venant depuis une extrémité du frustule jus ju'au centre, sans jamais franchir, à ce qu'il semble, cette partie centrale où est situé le noyau. Cet élément est quelquefois facilement visible, mais souvent fort obscur. Nous ne croyons pas qu'on ait jamais distingué, dans ce noyau, un nucléole bien évident. Autour du noyau, on voit souvent quelques doubles lignes rayonnantes, signalées déjà par Pfitzer. Fig. 68. — Surir ella splendida. (F. minor). Cette substance incolore répandue dans tout le frustule, condensée dans la partie centrale, et qui contient le noyau, substance qui brunit par l'iode, est, pour nous, le protoplasma cellulaire. C'est à la surface de ce sac proto- plasmique qu'est répandu l'endochrônie, souvent disposé de telle sorte ou d'une coloration tellement intense que le noyau n'est pas visible. Mais, M. H. L. Smith a signalé, quant à ce dernier, des détails intéressants. Beau- coup d'espèces présentent d'une manière constante deux noyaux, même en dehors de la période de division. Tel est le Siirirella splendida. Une espèce voisine, le Sur/relia elegans, n'en a jamais qu'un. — Dans la première, entre les deux noyaux et exactement au centre du frustule, on voit une petite tache sombre, que M. H. L. Smith appelle tache germi- native « germinal dot » , tache qu'on observe aussi chez le Surirella elegans au-dessus du noyau unique, du côté de l'extrémité large du frus- tule.— C'est autour de cette tache, extrêmement plus petite que le noyau, que rayonnent des filaments protoplasmiques et des franges d'endochrôme. III. STRUCTURE MICROSCOPIQUE DES DIATOMEES 91 Cette « tache, » que l'éminent diatomiste américain n'a vue que dans ces deux espèces, nous rappelle la « tache embryonnaire » que M. Balbiani a signalée à côté du noyau dans certains ovules animaux. — Quant au double noyau, il peut provenir, suivant nous, d'un élat préparatoire, et plus ou moins prolongé, à la déduplication de la cellule. M. H. L. Smith l'a cons- Fig. (39. — 1 . Sunrella'elegans ; 2 3 -|2. S.'ovata (2 formes). — 3. S. biseriata. taté, en effet, sur, le Cocconema lanceolatum, au premier printemps, sur'des-frustules qui venaient de^subir la déduplication, c'est à dire en pleine activité de reproduction fissipare, et qui vraisemblablement prépa- raient une nouvelle division. Du reste, les exemples de cellules multinu- cléées sont très fréquents dans les organismes inférieurs, et l'on trouve même des cellules bi-nucléées à l'état normal dans beaucoup de tissus animaux. IV RECHERCHE ET RECOLTE DES DIATOMEES § I. — Les Diatomées dans la Nature. Les Diatomées existent dans toutes les eaux, les eaux douces, les eaux marines, les eaux saumâtres et même les eaux thermales, mais non dans les eaux putrides. Il est bien évident, toutefois, que ce n'est pas au milieu du courant des fleuves et des grandes étendues d'eau qu'il faut aller les chercher; c'est, souvent mêlées à desDesmidiées, sur les bords, les pierres, les plantes aquatiques, et tous les corps submergés, qu'on les trouve, formant un enduit plus ou moins mucilagineux, d'une couleur brunâtre ou d'un vert olive foncé. Cette couche brune se voit souvent à la surface de la vase dans les mares, les flaques abandonnées par les pluies, les fossés, au bord des étangs, sur les rochers des plages marines, les bois des estacades; souvent aussi, elle flotte à la surface des eaux, dans les "écumes soulevées par un dégagement de bulles de gaz. Bien qu'on rencontre les Diatomées sur les objets baignés par les eaux dormantes, elles ne redoutent pas les courants les plus rapides, alors qu'elles trouvent un support solide. C'est ainsi quelles s'attachent aux pierres et aux bois qui formant la marge des barrages ou des cascades, et partout, en un mot, où elles trouvent de l'eau ou une humidité suffisante, et un support ou un abri. Elles se fixent sur les algues, les conferves, toutes les plantes des rivages. Il en est même qui vivent dans la mousse humide sur le tronc des arbres, les rochers et les murs, surtout à l'exposition du nord. On les a appelées Diatomées terrestres. Comme, d'ailleurs, elles résistent fort longtemps à la dessication, on les trouve aussi sur les fonds des marais, des ornières, des fossés laissés à sec depuis plus ou moins longtemps. Elles forment, sur la vase à demi desséchée de ces fonds, la couche brune que nous avons indiquée et qui est carac- téristique de leur présence. Dans toutes ces localités, on les trouvera à l'état vivant, mais on les rencontrera aussi en grande quantité à l'état de frustule privé de matière organique, ou même à l'état fossile, dans des gisements qui s'étendent souvent sous des contrées tout entières. 94 LES DIATOMÉES C'est ainsi que, les algues ou les animaux marins servant de nourriture aux oiseaux de mer, elles sont absorbées par ceux-ci avec les plantes sur lesquelles elles se font fixées ou avec les animaux qui les ont avalées. Comme leur carapace siliceuse est tout à fait insoluble dans les acides et dans les liquides gastriques, leur protoplasma, leur endochrôme, tou- tes les matières organiques qui entrent dans la constitution de leur cellule sont digérées par les oiseaux, mais les carapaces siliceuses se retrouvent dans les déjections. C'est dire qu'elles existent en grande abondance dans les guanos qui sont des amoncellements d'excréments laissés, depuis des siècles, par les oiseaux marins, sur certaines îles où ils ont pris, de génération en génération, l'habitude de se remiser. Quant aux Diatomées fossiles, elles forment, comme nous l'avons dit, des gisements considérables, des couches géologiques tout entières. Les tripolïs, dont on se sert pour le polissage des métaux, sont presqu'entière- ment composés de leurs débris auxquels ils doivent la finesse et la dureté de leur grain. Le gisement de cette nature le plus anciennement connu est, à ce que nous croyons, celui des marais tourbeux de Franzensbad, près d'Eger, en Bohème, dont la terre siliceuse a été reconnue par Fischer comme formée de frustules de Diatomées. Ehrenberg vérifia cette assertion et constata que ces frustules appartenaient à des Navicida viridis et N. major. Ce fut la première découverte de Diatomées fossiles. Bientôt, il fut reconnu que la terre siliceuse [Kieselguhr) de l'Ile de France, la farine de montagne {Bergmehl) de Santa-Fiora, en Toscane, qu'on avait parfois mêlée à la farine ordinaire pour en faire du pain, étaient composées de frustules de Diatomées. L'immense couche de tripoli {Polirschiefer) de Bilin, en Bohême, exploitée sur une profondeur de 40 mètres est formée de carapaces de Melosira, aussi bien que le dépôt de Planitz, en Saxe. D'autres dépôts ont été trouvés à Lùnebourg, à Ostie, à Oran, en Espagne, dans le Jûtland, au Japon. En France, on a rencontré des gisements com- posées d'espèces marines dans les terrains tertiaires. La détermination des espèces de Diatomées fossiles permet donc de préciser la nature des allu- vions, et cette détermination est facile, car la plupart de ces espèces se trouvent encore vivantes de nos jours. C'est ainsi que l'on retrouve « des preuves évidentes, dit M. J. Girard, du séjour des eaux dans des dépôts recouverts aujourd'hui d'épaisses cou- ches de terre. Berlin repose sur une tourbe argileuse, de 7 à 20 mètres de hauteur, composée de débris de Diatomées. Le lit inférieur de l'Elbe, jusqu'au dessous de Hambourg, est encombré de vases auxquelles sont mélangées des dépouilles organiques microscopiques. A Wismar (Meck- lembourg-Schwerin), il se dépose par an 640 mètres cubes de corps sili- ceux analogues aux Diatomées. En 1839, on a retiré du bassin du port de Swinmunde, à l'embouchure de l'Oder, 90.000 mètres cubes de vase dont le tiers se composait d'organismes microscopiques ; ces êtres vivent [V. RECHERCHE ET RECOLTE 95 dans tous les climats ; les limons des lleuves en charrient des milliards ; les vases de la Mer Noire et du Bosphore contiennent jusqu'à 46 espèces déterminées par le micrographe Ehrenberg. On en a trouvé dans les eaux qui avoisinent les glaces du pôle antarctique ; les rivières et les marais salants de tous les pays en sont remplis. Dans la Géorgie (Amérique), dans la Floride, des vases dialomifères forment des bancs d'une étendue considérable. Des organismes microscopiques ont aussi été découverts dans le sens vertical, résultat probable du séjour des eaux à des époques préhistoriques. On signale les Diatomées par couches prodigieuses : la ville de Richmond (Virginie) est bâtie sur un lit de leurs débris, qui a G mètres d'épaisseur (Smith). Dans l'île de Mull (Ecosse), le lac Boa, dont le fond desséché appartient à la période jurassique, a fourni au professeur Gregory 130 espèces nouvelles (18o4). » Dans ces dernières années, on a trouvé un très grand nombre d'autres gisements fossiles parmi lesquels nous pouvons citer ceux de Santa Bar- bara et de Santa Monica en Californie, sans oublier ceux de Ceyssat et de Randanne, dans le Puy-de-Dôme, dont la terre siliceuse, contenant 87 pour 100 de débris de Diatomées, sert, sous le nom de randannite, à la fabrication de la dynamite (1). D'autres gisements existent dansl'Ardêche, et l'on vient encore en Amérique, dans le Maryland, en forant un puits artésien, d'en découvrir un nouveau qui a fourni des espèces inconnues jusqu'à présent (?). L'existence des Diatomées fossiles dans les couches profondes du sol devait laisser supposer qu'on en trouverait aussi dans les étages, plus profonds encore, formés des débris de la végétation qui couvrait la terre dans les temps anciens. En effet, M. Gastracane, en incinérant de la houille et en recueillant les cendres, y a trouvé des Diatomées. Enfin, si la vase des ruisseaux et des rivières renferme de ces algues, les fonds marins n'en sont pas dépourvus. Détachées des plantes ma- rines qui vivent sur les côtes, emportées par les vagues, brassées par les courants et les marées, elles finissent par tomber lentement sur le fond des océans, quelquefois très loin de toute terre, et les dernières explora- tions sous-marines ont ramené dans leurs dragues, mêlés à des coquilles de Polycystines et de Foraminifères, des débris de Diatomées arrachés aux pro- fondeurs de la haute mer où ils reposaient peut-être depuis des milliers d'années. On voit donc que,pour les diatomisles, le champ des recherches est des plus étendus et qu'il lui faudra visiter non seulement les localités où il pourra trouver les Diatomées dans leur site naturel et à l'état vivant, mais, quand l'occasion s'en présentera, les couches profondes du sol et du sous- (1) Les gisements siliceux fosssiles de l'Auvergne ont été étudiés par MM. Leuduger-Fortmorel et Paul Petit dans un travail qui a paru, en 1878, dans le Journal de Micrographie, T. II, nos 3 et 4. 9G LES DIATOMEES sol, les matériaux des forages et des fouilles, la carène des navires, les pattes des ancres, les bois flottés, les plantes aquatiques rapportées des pays étrangers pour les besoins de l'industrie ou de la pharmacie, tous les objets en un mot, qui auront été, à un moment ou à un autre, en contact avec les eaux. Ce sont autant de sources où le collectionneur pourra faire de riches récoltes d'espèces exotiques. Le tube digestif des animaux marins, des oiseaux, des poissons, des mollusques, des annélides, de tous les êtres, enfin, qui se nourrissent de plantes sur lesquelles les Diatomées peuvent se fixer, ou qui vivent dans un milieu habité par elles, en contient ordinairement une grande quantité, et la visiie de l'estomac des huîtres, des moules, des palourdes et de tous les mollusques qu'on trouve partout sur les marchés est, à ce point de vue, toujours très intéressante. Nous donnons ci-dessous, à titre de renseignement, une liste des prin- cipaux gisements de Diatomées qui ont été découverts dans ces dernières années, non seulement dans l'intérieur des continents, mais dans les vases marines de certains golfes et les dépôts formés à l'embouchure de certains fleuves. PRINCIPAUX GISEMENTS, DEPOTS OU LOCALITES DONT LES DIATOMEES ONT ÉTÉ ÉTUDIÉES (1). Aberdeen. Afrique Australe. Also-Esztergaly (Hongrie). Agoa (Baie d'). Amazone (Embouchure de 1'). Amsterdam (Ile d'). Ardèche. Auckland. Australie. Bail, Californie, (Et. Un.). Bajtlia (Hongrie). Backeriiver (Afr. Centrale). Baléares (lies). Baltique (Mer). Barbades. Barlholomée(Ile). Baltaglia. Bengale. Beikum. Berlin. Berndorf. Bilin (Bohème). Blankenberghe. Boden (Lac de). Bonne- Espérance (Cap de). Boltina Creeks. Brésil. Bréhat (Ile de). Brest. Brohl-Thal sur le Rhin. Butïalo. Cadix. Calvados. Cambridge (Barbades). Campêche (Baie de) . Canada. Carcon (Californie). Carlsbad. (1) Nous n'avons pas la prétention de donner ici une liste complète, nous indiquons seulement les gisements les plus célèbres, dont on trouve des échantillons dans le commerce, ou les localités dont les Diatomées ont fait 'objet de publications spéciales. IV. RECHERCHE ET RECOLTE 97 Caroline dii Nord. Garpentarie iGoll'e de). Carrighill. Carleret. Caspienne (Mer). Calanisetla. Ceyssat (Puy-de-Dôme\ Cebu (Iles). Chalk Mont (Barbades). Cherbourg. Cherrylield, Maine, ^Etats-Unis). Cheslu. Chicago. Chrisliansladt. Côme (Lac de). ConsUmlinople. Cornwallis (Nouvelle-Ecosse). Corse (Le de). Cuba. Cuxhaven. Dalraatie. Davis (L)é!r. de). Degaruas (Suède). Delaware. Demerara. Dolgelly (Terre de). Dolje (Hongrie). Dorablitten. Dresde. Drondjeim (Norw). Duck Pond. Maine, (États-Unis). Durrnberg. East Stoughton,Massachusets(É. U.) Ebstorï (Hanovre). Eger (Bohême). Eléphant Point (Bengale). Elesd (Hongrie). Erié (Lac). Exmouih. Falaise. Fall River, Orégon, (États Unis). Fano. Falso Eszlergaly (Hongrie). Finistère (Cap). Finland. Finmark. , Floride. Fosarn (Iles). Frahan. Franzensbad (Bohême). French's Pond, Maine (États-Unis). Gallopagos (Iles). Gérardmer (Lac de). Gourvell. Gollland (Ile). Great Sait LakeDeseret,Ulah (É.-U.) Habitschwald. Hacienda Escalera (Mexique). Hammerfest, (Norwège). Hanis Counly, New Jersoy (É.-U). Hasiif ord. Haverfordwest. Heligoland (Ile), Hildesheim. Hjeikin(Norwège). Hochsimmer. Honduias. Hong-Hong. Hourdel. Hudson River, New- York (É.-U.) Hall. Ichaboë. lpswic!», Massachusets (États-Unis). Ischia. Isti-ia (Cap d'). Jan Meyen (Ile de). Japon. Java. Jenissey. Jérémie (Détroit de), Taïti. Jone Valley. Jonkoping. Karafjosd (Finmark). Kamtschalka. Kekko (Hongrie). Kerguelen (lie de). Kiel. Kinord Loch. Kinross. Klamasch (Lac de). Klicken sur Elbe. Kilkel. Korensmunster. Krungjotrap. Laconia, New Hampshlre (E.-U.) Lamlash (Baie de). Lara. Larne Lough. Lillhagjon. Lima. Liverpool. Livourne. Loka (Suède). Lough Mourne. Lûnebourg (Hanovre). Lyel (Baie). Magellan (Détroit de). Mahé (Iles Seychelles. LES DIATOMEES anille. Menât (Puy-de-Dôme). Mexico. Mocar. . Mogyorod (Hongrie1), • Monmoulh, Maine (Élals-Unis). Monterey. Monliceflo, New-York (États-Unis). Moron (Espagne). Mors (Ile) Jùtland. Mull, Lac Boa, (Ecosse). Nancoori. Naparina. Ngucy (Madagascar). Niagara Falls. Nicobar (Iles). Ni mes. Nimrod Sound (Chine). Norfolk. Norrland (Suède). Non h Providence, Rhodelsl. (È-U.). Nottingham, Maryland (Etats-Unis). Nykjôbing ( Julland). Oamaru (Nouvelle-Zélande). Oberhohe. Oldenberg. Oran. Ormesby. Ostende. Ovalau. Pabello do Pico. Para (Rivière). Pentsch (Silésie). Pernambuco. Peterburg, Virginie (États-Unis). Planilz (Saxe). Plonchères. Plymouth. Premney. Pudasjarvi (Finlande). Puerto Rico (Antilles). Quernero. Quina, Massachusetts (États-Unis). Randanne (Puy-de-Dôme). Rappahannock. Régla (Mexique). Rhin (Chute du). Richmond, Virginie (États-Unis). Richruond River, New Hamps. (E-U.) Ringkjobing (Jutland). Rhodes (Ile de). Roquelle (Embouchure de la). Rouge-Cloître (Belgique). Rouillât (Puy-de-Dôme). Rovigno. Saint-Paul (Mer du Sud). Saint-Salurnin (Puy-de-Dôme). Snlem, Massach. (Etals-Unis). Samoa (lies). San-Audrea (Mexique). San Diego, Calif. (Etats-Unis). Santa Barbara. Santa Fiora (Italie). Sanla Monica, Calif. (Élals-Unis). Sanlos. Savitajpel (Finlande). Séville. Seychelles (Iles). Shasla, Calif. (Etats-Unis). Sidmoulh. Sierra Leone. Sierra Nevada. Calif. (E.-U.) Simbirsk (Russie). Sodankyla (Laponie), Sodërleige (Suède). Soulh Yarra (Australie). Spalato. Spilzberg. Staplis Ranch. Slavanger (Norwège). Stralford Cliff. Sumatra. Swinmude sur l'Oder. Szakal (Hongrie). Szent Peter (Hongrie). Tacarigna (Lac) Nouvelle-Zélande. Taïli. Tamise 'La) près Grenwich. Tampa (Lac) Nouvelle-Zélande. Tay (Rivière). Teignmoulh. Tibre (Oslie). Tillewitz (Sibérie). Tokay. Tonga Tabou. Toome Bridge. Torbay. Trieste. Trouville. Upsal. Uiah. Valparaiso. Venise Vera Cruz. Vienne. Vierges (Iles). Vocklabruk. Vogelsgebirge. IV. RECHFRCHE ET RECOLTE 99 Vosges. Wankarema (Cap). Wedel (Holstein). Wernamo (Suède). Westerbotlen. Wisraar (Mecklemb. Schwerin). Yucatan. Zell 'Lac de). Zurich. Guanos de Bolivie. — de Californie. — de l'île Baker. — des lies Mexillones. — du Mexique. — du Patagonie. — du Pérou. — de Saldanha-Bay. § 2. - RÉCOLTE DES DIATOMÉES La récolte des Diatomées n'exige pas un matériel bien considérable ni bien gênant : quelques flacons et quelques tubes fermés avec un bouchon de liège, quelques morceaux de grosse toile, imperméable si possible, ou même des carrés de fort papier ; une sorte de cuiller en étain, en fer ou Fig. 70. Sac de M. Paul Petit, Pour la récolte des Diatomées. en cuivre, permettant d'enlever délicatement la couche diatomifère qui recouvre la vase, et de racler les pierres, les rochers, les bois submergés sur lesquels les Diatomées peuvent être fixées ; une canne au bout de laquelle peut se visser un crochet pour attirer à soi les plantes trop éloignées ; une bonne loupe ou, si l'on veut, un petit microscope de poche ; quelques lames de verre ou de mica, — et c'est tout. Le flacon et les tubes peuvent être très commodément disposés dans un sac de voyage, comme l'a indiqué M. Paul Petit. On peut de cette manière en transporter aisément un grand nombre, placés sur plusieurs rangées : au fond, sont arrimés les plus grands flacons, et dans la rangée supérieure les tubes (Fig. 70) Au surplus, comme on 1b comprend, chacun peut disposer comme il l'entend un appareil de transport, commode et léger, dans lequel les récipients ne courent pas le risque d'être brisés. Les morceaux de toile imperméable ou de gros papier servent à enve- lopper les paquets d'Algues ou de plantes aquatiques sur lesquelles on a UO LES DIATOMÉES reconnu la présence des Diatomées et qui n'ont pas pu trouver place dans les (laçons ou dans les tubes, ces dentiers étant destinés surtout à placer ce qu'on appelle des récoltes pures, c'est-à-dire des amas plus ou moins considérables formés, en grande partie au moins, par une seule et même espèce. Le diatomiste expérimenté est, en effet, renseigné le plus souvent sur la nature de la récolte qu'il fait dans telle ou telle localité, dans tel ou tel Fig. 71. Filet à crochet bi dent de M. Paul Petit, se vissant au bout d'une canne. site, soit par l'aspect même des matériaux, soit par leur couleur, soit par leur forme. Dans tous les cas, il est toujours utile qu'il puisse, à l'aide d'une forte loupe ou d'un petit microscope de poche, se rendre compte des espèces qu'il recueille. Comme loupe, il peut employer la loupe Goddrington, ou mieux encore la loupe de Brûcke. Plusieurs opticiens construisent aussi de petits instru- Fig. 72. Filet à lame tranchaute, de M. Giraudy. ments à grossissement variable qu'on appelle diatomescopes et dont, l'usage est commode. H existe aussi plusieurs modèles de petits microsco- pes composés, très por.alifs et que l'on peut aisément employer dans les , herborisations. Nous reviendrons plus tord sur ces instruments. Le diatomiste recherchera donc les plantes aquatiques, ces conferves molles et comme glaireuses qui garnissent le bord des rivières, des ruisseaux, des mares. 11 pourra atteindre les plantes placées hors de sa . portée à l'aide du crochet monté au bout d'une canne. M. Paul Petit conseille, dans ce but, un instrument composé d'un double crochet surmonté IV. RECHERCHE ET RECOLTE 101 d'une petite drague en (il de laiton, instrument qui peut ainsi servir à deux fins et permet de ramener dans le filet les plantes que l'on a arrachées avec le crochet. On peut aussi employer utilement le filet de M. Giraudy, filet en laiton, monté sur un petit cadre métallique, dont la partie antérieure se relève en lame tranchante. Cet instrument se visse, comme le précédent, à l'extrémité d'une canne. Il est inutile d'ajouter que l'un et l'autre peuvent servir dans les herborisations pour recueillir non seulement les plantes aquatiques, mais toutes celles qui sont hors de portée. Il y aura ensuite à récolter les enduitô brunâtres déposés sur la vase des marais, des ornières, des flaques d'eau. Ce travail se fait facilement à l'aide de la cuiller d'élain ou de laiton. Il faudra enlever ces croûtes, d'une main légère, en prenanl en même temps le moins possible de la vase sous jacente. Ces enduits seront déposés dans les tubes ou dans les petits flacons avec un peu d'eau, pour les empêcher de se dessécher. On grattera de même l'enduit sur les parois des citernes, sur les cons- tructions submergées, les pierres, les rochers, enduits qui les rendent quelquefois si glissants et comme glaireux. Il sera souvent plus com- mode, dans ce cas, de substituer à la cuiller une petite plaque de métal, en cuivre ou en zinc, tranchante sur son bord antérieur. Quant aux masses floconneuses nageant à la surface de l'eau, la cuiller, emmanchée, au besoin, au bout de la canne, ou les petites dragues dont nous avons parlé, permettront aisément de les recueillir. Les espèces pédicellées ou filamenteuses peuvent être reconnues très souvent à l'aspect quelles donnent aux corps qu'elles recouvrent, à leur consistance particulièrement glaireuse, en raison de la matière mucilagi- neuse qui forme leur pédicelle, leur tube ou leur thalame. Souvent, elles donnent aux plantes un aspect velouté ou irisé dû à l'accumulation de tous les pédicelles qui font comme des villosilés microscopiques dont la trans- parence produit des jeux de lumière. Si l'on veut conserver ces espèces dans leur intégrité, ménager les pédicelles et les tubes, qui présentent des caractères pour la classification, mais sonU souvent très fragiles, on comprend qu'on devra les traiter avec les plus grandes précautions. On arrive presque toujours, en déposant dans un flacon, avec un peu d'eau, la plante qui les supporte, à retrouver intacts, en renlrant chez soi, un certain nombre d'individus; cependant, les fila- ments sont quelquefois tellement fragiles, ou les échantillons que l'on rencontre si peu nombreux, qu'il peut y avoir avantage à leur faire subir sur place une préparation conservatrice. C'est dans ce but que Brébisson, M. Guinard et nombre de diatomisles. ont conseillé l'emploi de petites lames de mica. Ces lames de mica ont la forme d'un carré de 1 centimètre à 1 centimètre 1 /i de côté, c'est à dire a peu près la dimension d'une lamelle couvre-objet ordinaire. Yoici, ce que M. Guinard dit à ce sujet : « Lorsqu'au moyen du microscope, vous reconnaissez que vous avez rencontré une Diatomée pédicellée et dont le pédicelle est excessivement 102 LES DIATOMÉES fragile, par exemple les Cocconema, les fflupidopkora, etc., il est de toute nécessité de rapporter ces échantillons dans leur intégrité la plus parfaite ; c'est alors que l'on a recours aux petits carrés de mica. » « Vous détachez avec de petites pinces les fragments de mucosité bru- nâtre que présente une agglomération de ces espèces ; vous les étendez avec précaution sur vos micas, en y joignant une petite goutte d'eau. Par ce mode de préparation et d'examen préalable, vous évitez l'erreur dans laquelle sont tombés plusieurs algologues qui ont considéré comme dé- pourvues de pédicelle certaines espèces qui en sont munies, et qui, mises dans des flacons, sans contrôle, au moment de la récolte, avaient élé privés de cet appendice par les secousses du voyage. A défaut de micas, vous pourriez aussi vous servir de petits carrés de papier buvard ; mais le pre- mier moyen est préférable sous tous les rapports. » « La rigidité et la transparence des micas, se prêtent à un examen ultérieur sous le microscope, et de plus, sous celle forme, ils peuvent, sans qu'il soit besoin d'y revenir, être conservée en herbier. » t< Comme l'on n'a pas le loisir d'attendre que ces préparations extem- poranées soient arrivées en un étal de siccilé parfaite pour pouvoir les empaqueter, M. de Brébisson avait imaginé un pelil appareil très propre à cet usage. Nous allons donner, d'après cet auteur, la manière de le cons- truire. « Pile dialomique : Ce petit appareil est formé de disques de liège ou « simplement de bouchons coupés en rondelles d'une ou deux lignes « d'épaisseur, et enfilés par une tige de laiton reployée aux deux exlré- « mités, de manière à former un petit bâton d'une longueur convenable « pour être placé diagonalement dans un compartiment réservé à l'un des « bouts delà boîte destinée aux herborisations, ou, avec effort dans l'inté- « rieur du chapeau de l'exploraleur algologiste. Les rondelles de liège sont < pressées les unes contre les autres par un bout de ressort à boudin placé « au milieu de la pile et s'enroalant librement autour de la tige centrale. « On engage dans les fentes qui existent entre les rondelles un coin de la « lame de mica sur laquelle on a préparé l'espèce délicate. On peut ainsi en « placer un grand nombre qui se dessèchent sans se toucher. Un morceau « de liège entamé par des tr.iilsde scie peut remplacer la pile, mais avec « moins d'avantages 1). » Pour terminer ce qui a rapport à la récolle des Diatomées nous rappel- lerons que l'on trouvera souvent des espèces intéressantes dans les dépôts d'alluvion, sur les objets qui ont été en contact avec des milieux diatomi- fères, les coques de navire, les ancres, divers objets provenant des pays étrangers. M. de Brébisson a trouvé une r'che collection de Diatomées sur ce fucus connu dans les pharmacies sous le nom de mousse de Corse (Sphserococcus helmiuthocorton),M. P. Petit sur la mousse d'Irlande (1) A. de Brébisson, lettre à Ch. Chevalier. IV. RECHERCHE ET RECOLTE 103 ou Caraqahen [Chondrus crispus). Il y a sur toutes les plantes analo- gues d'abondantes récoltes à faire. Rappelons encore qu'on eu trouvera dans l'estomac des aniir-aux marins ou aquatiques, particulièrement des Mollusques, sur les coquilles de ces mêmes Mollusques, sur les carapaces des Crustacés, etc. Il est inutile d'ajouter que les recherches devront être faites dans les eaux douces, l'eau de mer, les étangs saumâtres, et que la matière glaireuse de certaines eaux thermales renferme plusieurs espèces de ces petites plan es. Enfin, comme beaucoup de Diatomées vivent libres, que certaines mêmes sont mobiles et, pour ainsi dire, nageuses, que d'autres sont souvent arra- chées de leur support par le mouvement des eaux, en filtrant une quantité suffisante de certaines eaux, on pourra trouver sur le filtre des Diatomées en plus ou moins grand nombre. Pour les Diatomées pélagiques, voici comment M. I. Brun recommande de les récoller et de les conserver. « Quant aux organismes pélagiques, on les prend en promenant un voile de soie au travers des couches supérieures de l'eau. L'on récolte ainsi les espèces à l'état vivant, et elles ne sont guère mêlées qu'avec un peu de poussières minérales. Le voile de soie doit être à mailles très fines et tendu sur un cadre (ou un cercle) tenu verticalement, de manière à ce que la partie supérieure effleure la surface aqueuse. Ceci pendant que, soit le bras, soit le bateau, avance très lentement : Toutes ces espèces péla- giques restent fixées au voile sous forme d'une couche à aspect glaireux. Elles s'enlèvent de temps en temps au moyen d'une lame en corne souple et mince. La meilleure manière de conserver longtemps ces récoltes consiste à les mettre immédiatement dans une solution au quart d'acétate de potasse neutre. L,'alcool que l'on emploie habituellement a l'inconvénient de contracter et de déformer la plupart de ces animaux ou végétaux infé- rieurs. L'acétate n'amène aucune déformation; il arrête toute putréfaction et s'élimine facilement par un simple lavage à l'eau, lorsqu'on veut entre- prendre l'étude microscopique (1). » Nous ne pousserons pas plus loin ces considérations, certain que pour la recherche des Diatomées dans leurs divers habitats, leur récolle et leur conservation jusqu'au moment de l'étude, chacun trouvera, dans son esprit, les ressources nécessaires pour réaliser les dispositions et les pro- cédés les plus convenables. Tous ceux qui ont herborisé ne seront jamais embarrassés pour mener à bien ces petites opérations qui, souvent délicates, ne sont pas difficiles et n'exigent que des soins, de l'attention et de la patience. (O J. Brun. — Journ. de Micrographie, T. XI, 1887, no 5. — Ce procédé de récolte s'applique non seulement aux Diatomées pélagiques, mais aux Poty- cystines, Foraminifères et autres Rhizopodes. TECHNIQUE DES DIATOMÉES § 1. — NETTOYAGE DES DIATOMÉES Après que les Diatomées ont été récoltées, la première opération à leur faire subir consiste à les séparer des sédiments sur lesquels elles reposent et à les détacher des plantes auxquelles elles sont attachées. Pour cela, on vide les tubes et les flacons dans des assiettes, des soucoupes ou des verres de montre, suivant la quantité de matière sur laquelle on opère, et, après avoir enlevé les corps étrangers les plus volumineux, on ajoute un peu d'eau pure de manière à recou-' vrir le dépôt; puis, on abandonne le tout, pendant 12 à 24 heures, dans un endroit fortement éclairé, mais non au soleil. Les Diato- mées, qui sont vivantes, quittent la vase et viennent se déposera la surface, ou même sur les bords de l'assiette. On peut recueillir avec un petit pinceau celles qui sont venues se rassembler ainsi sur les bords, en une couche légère plus ou moins brune, et on lave le pin- ceau dans un peu d'eau distillée. Ensuite, on décante doucement l'eau qui recouvre le sédiment déposé sur le fond de la soucoupe, et on enlève la couche supérieure diatomifère de ce sédiment, avec un pinceau, si elle est mince, avec une lame fine et tranchante si elle est plus épaisse. On trempe pinceau et lame dans un peu d'eau dis- tillée dans laquelle les Diatomées se répandent. Brébisson recommandait deux procédés particuliers pour séparer les Diatomées du sédiment sans emporter avec elles une partie de la vase plus ou moins meuble dans laquelle elles sont comprises. Déposant le sédiment diatomifère dans une soucoupe ou un verre de montre, suivant la quantité, on le recouvre d'une rondelle de papier buvard qu'on y applique avec le bout du doigt, sans compri- mer cependant, et en évitant d'emprisonner des bulles d'air qui sépareraient la face inférieure du papier de la face supérieure de la vase. On laisse les choses dans l'état, pendant au moins 24 heures, à la lumière. Au bout de ce temps; on lève avec précaution la rondelle 106 LES DIATOMÉES de papier et on la trouve couverte par dessous de Diatomées qui sont venues s'y attacher. On n'a plus alors qu'à laver le papier dans un peu d'eau pure pour avoir une récolte très propre. Ou bien, on applique sur le dépôt une rondelle de linge un peu clair, toile ou mousseline, et on maintient le contact en posant par dessus le linge un anneau de métal d'un diamètre un peu plus petit que celui de la soucoupe. Au bout d'un ou deux jours, les Diatomées se sont séparées du dépôt et, cherchant la lumière et l'air, se sont déposées sur le linge dont elles ont traversé les mailles. Si l'on a emporté, dans la récolte, des pierres, des morceaux de bois, des fragments de plantes garnis de Diatomées, après les avoir placés avec un peu d'eau dans une soucoupe, on les lave avec le bout du doigt pour détacher les Diatomées, qui se répandent dans l'eau avec quelques débris ; ou bien on gratte les objets avec un canif ou un grattoir. On opérera de même avec les algues et les plantes aquatiques chargées de Diatomées, et lorsqu'elles présentent quelque résistance, on obtient en suspension une grande quantité de Diatomées avec très peu de sédiments et de débris. Quand il s'agit de plantes très molles, et qu'il n'est guère possible de laver ou de gratter, on les réduit, avec le doigt ou une spatule, en une pulpe aussi homogène que possible, et l'on traite cette pulpe comme nous l'avons indiqué plus haut pour les vases. C'est dans ce cas surtout que l'on obtient de bons résultats du procédé de la rondelle de papier ou de linge. On peut, d'ailleurs, renouveler l'opération plusieurs fois, et autant que l'on trouve des frustules fixés à la rondelle. D'autres fuis, on est obligé de détruire complètement les plantes par les agents chimiques, comme nous le verrons plus loin, pour parvenir à isoler les Diato- mées. Enfin, on peut conserver très longtemps les récoltes telles qu'on les a recueillies, en les laissant dans un endroit éclairé et en ayant soin d'ajouter de temps en temps un peu d'eau. Il arrive même ordinairement qu'en gardant ainsi pendant quelques jours les récoltes, les Diatomées se séparent peu à peu, et comme elles continuent le plus souvent à vivre, elles reprennent petit à petit leurs positions normales, s'orientent pour ainsi dire, se multiplient même, revenant aux conditions ordinaires de leur existence, et l'on en obtient de véritables cultures. Les procédés que nous venons d'indiquer ont, en effet, pour résultat d'isoler, autant que possible, les Diatomées à l'état vivant. C'est dans cet état qu'on pourra les étudier au point de vue de leur histoire naturelle, de leur classification méthodique et des phéno- mènes biologiques qu'elles présentent. Cette étude a été jusqu'ici trop négligée, comme l'a très justement fait remarquer M. Paul Petit. X. TECHNIQUE DES DIATOMEES 107 On s'est trop borné à l'examen des frustules morts, du squelette, pour ainsi dire, de la plante, au préjudice de la plante elle-même, qui, cependant, présente tant d'intérêt. A cet état, on peut étudier la composition de la Diatomée, son protoplasma, son noyau, son endochrôme, les diverses substances qu'elle contient; — et, en particulier, c'est sur la disposition de l'endoclirôme que le professeur Plîtzer et M. Paul Petit ont fondé la première classification naturelle qui ait été faite de ces organismes. C'est à notre avis, une étude féconde, à laquelle les diatomistes ne sauraient trop s'attacher et grâce à laquelle seule on parviendra à étendre les connaissances si incomplètes encore que nous avons sur les Diatomées considérées comme des êtres vivants et non plus seulement comme des petites lames de silice merveilleusement sculptées. Mais ce n'est pas à cet état, pour ainsi dire, naturel, et dans lequel il serait d'ailleurs impossible de distinguer les détails du frustule, que l'on conserve les Diatomées pour les collections et qu'on les prépare pour l'observation. Il faut les dépouiller de leur protoplasma, de leur endochrôme et de toute la matière organique qu'elles contiennent ou dont elles peuvent être enveloppées, pour conserver uniquement leur carapace siliceuse. Celle-ci, en raison même de la matière qui la compose, et qui est de la silice pure, est complètement inattaquable par les acides autres que l'acide fluorhydrique et par les solutions même assez concentrées d'alcalis caustiques. C'est sur cette propriété et cette résistance aux agents chimiques, alors que la matière organique est détruite par ces réactifs, que sont fondés les procédés de nettoyage des Diatomées. Cependant, si les espèces d'eau douce sont munies d'une enve- loppe solide très fortement silicifiée, il n' en est pas toujours de même de certaines espèces marines telles que le Pleur osig mu angulatwn, l'une des plus employées comme test, et plusieurs autres dont le revêtement siliceux est beaucoup moins épais et moins résistant. Celles-ci devront donc être traitées avec plus de ménagement. Les procédés employés pour détruire la matière organique des Diatomées sont, d'ailleurs, analogues à ceux dont se servent les chi- mistes pour détruire la matière organique des substances dans les- quelles ils veulent, par l'analyse, rechercher des matières minérales. Traitement par V acide nitrique. C'est le procédé le .plus simple et le plus souvent employé pour les Diatomées d'eau douce récemment récoltées. Voici comment on ' l'applique : 108 LES DIATOMÉES Une certaine quantité du dépôt qui se forme dans l'eau où l'on a porté les Diatomées après les avoir séparées de la vase ou des objets sur lesquels elles étaient adhérentes, comme nous l'avons indiqué plus haut, est mise dans un tube à essai, et, si l'on sup- pose qu'elles contiennent encore quelques corps étrangers, des grains de sable, par exemple, on ajoute par-dessus une certaine quantité d'eau. Bouchant alors le tube avec le pouce, on le secoue, de manière à mettre toute la masse en suspension dans le liquide. Aussitôt que l'agitation a cessé, les grains de sable, qui sont lourds, tombent tout de suite au fond du tube, tandis que les Diatomées, plus légères, restent plus longtemps en suspension. On décante alors rapidement dans un autre tube le liquide, qui contient les Diatomées en suspension, et on laisse au fond du premier tube le dépôt, qui est formé des grains de sable et autres corps lourds. On laisse alors reposer pendant plusieurs heures ce second tube, pour donner aux Diatomées le temps de se déposer à leur tour. Quand l'eau est devenue parfaitement limpide, que, regardée par transparence, elle ne laisse voir aucun corpuscule miroitant en suspension, on la décante de nouveau, de manière à ne conserver que le dépôt avec une très petite quantité d'eau. On verse par-dessus assez d'acide nitrique ordinaire pour recou- vrir les Diatomées de 3 ou 4 centimètres d'acide. S'il s'agit d'espèces peu silicifiées, on laisse la réaction s'opérer à froid, mais pour celles dont la carapace est plus résistante, comme presque toutes les Diatomées d'eau douce, il est nécessaire de chauffer. On prend alors le tube avec une pince en bois comme celles dont se servent les chimistes, ou avec une de ces pinces en fer qu'on appelle fers a tuyauter et dont on a enfilé chacun des mors dans un bouchon portant une encoche du côté interne pour bien saisir le tube, et on porte celui-ci dans la flamme d'une lampe à alcool. Il faut tenir le tube incliné pour diminuer la hauteur de la colonne liquide au-dessus du fond, empêcher les soubresauts et éviter de respirer les vapeurs acides qui se dégagent. On doit donc opérer à l'air ou dans la cage vitrée d'un laboratoire, et dans tous les cas, dans une pièce où l'on n'a laissé aucun instrument en cuivre, microscope ou autre. On chauffe jusqu'à ébullition et l'on fait bouillir pendant une demi-minute à deux minutes, suivant la nature des espèces. Puis, on laisse refroidir. On ajoute alors de l'eau et on laisse le tout reposer pour permettre aux Diatomées de gagner le fond. Quand le dépôt s'est opéré, on décante avec précaution le liquide surnageant et on ajoute encore de l'eau pour laver les Diatomées et les débarrasser de l'acide qui les imprègne. V. TECHNIQUE DES DIATOMEES 109 On laisse encore reposer, puis on décante, et on ajoute de nou- velle eau, et ainsi de suite jusqu'à ce que l'eau décantée ne manifeste plus de réaction acide et ne rougisse plus le papier de tournesol. Il faut pour cela un assez grand nombre de lavages successifs et l'opération est toujours assez longue. Enfin, pour enlever les dernières traces d'acide, on ajoute un peu d'ammoniaque que l'on décante encore, et on lave plusieurs fois à l'eau distillée. On peut alors, après une dernière décantation, verser sur les Diatomées de l'alcool dans lequel elles se conserveront indéfiniment pour être montées au moment du besoin. M. J. Brun remplace l'alcool par une solution d'acétate neutre de potasse. Toutes les Diatomées peuvent être traitées ainsi ; il faut néan- moins examiner au microscope une parcelle du dépôt, pour reconnaître si elles sont bien débarrassées de toute la matière organique. Si les frustules n'étaient pas complètement nets, il faudrait recommencer. Les Diatomées marines devront être préalablement lavées une ou deux fois à l'eau distillée pour les débarrasser du chlorure de sodium dont elles peuvent être imprégnées. Dans tous les cas, il faut, pour ces opérations, se servir d'eau distillée (1), parce que celle-ci a la propriété de tenir en suspen- sion les matières argileuses qui sont ainsi enlevées par décantation, tandis que dans l'eau calcaire ou saline, elles se déposeraient avec les Diatomées. Cette précaution est indispensable pour le traitement des Diatomées des estuaires marins (Van Heurck). Procède par l'acide sulfu/rique et le chlorate de potasse . 11 arrive souvent que les Diatomées contiennent, soit leur appar- tenant en propre, soit à l'état de matière étrangère, une telle quan- tité de substances organiques que l'acide nitrique, même bouillant, ne suffît plus pour brûler et détruire toutes ces substances; il faut alors employer des matières comburantes plus énergiques, et par exemple le chlorate de potasse d'après un procédé inspiré par celui de Schulz pour la destruction du ligneux. Voici comment M. H. van Heurck conseille d'employer le chlorate de potasse. Si l'on soupçonne dans les matières la présence de sels calcaires, ce qui arrive très fréquemment, il faut les traiter d'abord par l'acide nitrique pour dissoudre et enlever ces sels qui, par l'acide, (1) L'eau distillée peut être remplacée par l'eau de pluie filtrée, beaucoup plus difficile, d'ailleurs, à avoir pure que l'eau distillée. 110 LES DIATOMÉES sulfurique, se transformeraient en sulfate de chaux insoluble ei resteraient mêlés aux Diatomées. On place alors les matières débarrassées ainsi des sels calcaires dans une capsule de porcelaine et on les recouvre d'acide sulfu- rique. La capsule doit être assez grande parce que le mélange se boursoufle beaucoup. On chauffe avec précaution à l'aide d'une lampe à alcool, d'un bec Bunsen ou tout autre appareil, jusqu'à ébullition. On maintient l'ébullition pendant quelques minutes et l'on enlève la capsule du feu. On verse alors sur les matières, qui sont devenues noires et charbonneuses, une solution saturée de chlorate de potasse dans l'eau. On ajoute cette solution goutte à goutte ; à chaque goutte il se produit une effervescence. On agite avec une baguette en verre et on ajoute une nouvelle goutte, jusqu'à ce qu'on ait employé une quantité de solution représentant à peu près la moitié du volume de l'acide sulfurique. A ce moment, la masse doit être tout à fait décolorée et les Diatomées débarrassées de toute] matière organique.. Dans le cas contraire, il faut recom- mencer. Ajoutons que M. F. Kitton préfère à !n solution saturée de chlorate de potasse le chlorate lui-même crist; iiïsé et sec, parce que si Ton ajoute cette solution un peu trop brasqueraeçtj il se produit une effervescence très vive et le contenu de la capsule ou du tube peut être projeté au dehors, ce qui n'est pas sans danger en raison des propriétés extrêmement corrosives de l'acide sulfurique. M. F. Kitton opère dans un tube et, à la fin de l'opération, projette dans le mélange quelques petits cristaux de chlorate de potasse. Quand la masse est blanchie, il fait des lavages successifs à l'eau pure jusqu'à ce que toute trace d'acide ait disparu. Alors, il ajoute 30 à 40 gouttes d'ammoniaque liquide* concentrée et laisse agir pendant plusieurs heures, en fermant le tube avec un bouchon. Il y verse alors 15 grammes d'eau distillée et donne une brusque secousse au tube. Lorsque les Diatomées sont tombées au fond, il décante l'eau surnageante, ordinairement très trouble, et continue les lavages à l'eau distillée jusqu'à ce que toute trace d'ammoniaque ait disparu. Procède par le permanganate de potasse et l'acide chlorhydrique. Ce procédé a été indiqué par M. Brun, de Genève. Voici com- ment il le décrit (1) : « Si l'on a un magma frais de Diatomées encore humides, on y (l) Journal de Micrographie, T. VI, 1882, p. 457. V. TECHNIQUE DES DIATOMEES 111 ajoute des cristaux de permanganate de potasse et très peu d'eau (environ 1 partie de sel sur 10 d'eau); si l'on a des Diatomées desséchées, pures ou mélangées de terre ou de matières organiques, on les arrose d'une petite dose de solution du même sel concentré, et contenant même quelques cristaux en excès. « La réaction du permanganate doit durer environ 12 heures. Il est bon de remuer quelquefois le mélange mis au fond d'une fiole de 100 grammes, en moyenne, de capacité, et de placer cette fiole sur un fourneau chaud ou au soleil. Il faut ensuite remplir à moitié d'eau la fiole, et ajouter un peu de magnésie calcinée (environ 50 centigrammes) que l'on laisse agir pendant 2 ou 3 heures en agitant quelquefois. Alors, on verse, par petites doses de 4 gramme au plus, et de 10 en 10 minutes, de l'acide chlorhydrique pur. Lorsque tout le contenu de la fiole s'est décoloré, l'opération est terminée. Au besoin, pour faciliter la réaction, on plonge la fiole dans l'eau chaude ou bouillante. L'on procède ensuite aux lavages et décantation habituels. Rappelons que la pureté absolue de Veau distillée, pour ces derniers lavages, reste toujours une condition essentielle de réussite. « Dans ce procédé, nous avons d'abord l'oxydation énergique de l'endochrôme par le permanganate et la magnésie ; puis, par l'acide, il y a dégagement à' oxygène gazeux (1) qui agit comme com- burant, et ensuite de chlore qui agit comme décolorant. C'est, sans, doute, à ces réactions multiples et successives, à l'extérieur et à l'intérieur même des valves, qu'il faut attribuer le nettoyage aussi parfait de leur silice. « Par ce traitement les espèces délicates ne sont pas corrodées, surtout si, avant l'action acide, on ajoute assez d'eau. La surface des valves a perdu tout son coléoderme ; elle apparaît avec tout son éclat et les moindres détails, stries ou ponctuations, se distinguent nettement. « J'ai essayé, ajoute M. J. Brun, successivement, ces dernières années, tous les différents procédés physiques et chimiques qui ont été annoncés et je puis dire que je n'en ai trouvé aucun qui réussisse aussi complètement et aussi régulièrement. » Procédé de M. Kitton pour les dépôts marins (2). Le nettoyage des Diatomées contenues dans les dépôts marins (1) Et même d'oxygène à Yétat naissant, où ses propriétés comburantes sont beaucoup plus énergiques qu'à l'état simplement gazeux. Il en est de même pour le chlore. — (T--P)- (2) H. van Heurck, Sijnopsis des Diatomées de Belgique, p. 28. 112 LES DIATOMEES est plus difficile, car elles sont souvent réunies par une sorte de ciment siliceux très difficile à enlever sans détériorer les Diatomées. M. F. Kitton opère de la manière suivante : Il traite d'abord la matière par l'acide nitrique, porte à l'ébul- lition, pour enlever les sels calcaires, lave à l'eau distillée, et fait agir l'acide sulfurique, puis le chlorate de potasse pour brûler la masse charbonneuse. Après un lavage complet, il fait bouillir la masse dans une petite quantité d'eau contenant un peu de carbonate de soude, lave et secoue fortement le tube pour désagréger les matières. Si la désagrégation ne se fait pas, il fait bouillir de nouveau dans une solution de potasse caustique, et, quand la masse est désagrégée, il verse le tout dans de l'eau contenant de l'acide chlorhydrique. Puis, derniers lavages. Procède de M. F. Kitton pour les guanos, les sondages marins et les Diatomées fossiles. On commence par le traitement ordinaire à l'acide nitrique et quand toute trace d'acide a été enlevée par les lavages successifs, on fait bouillir toute la masse pendant trois à quatre minutes dans une trentaine de grammes d'eau contenant un morceau de savon gros comme un pois. Quand les Diatomées sont tombées au fond du vase, on décante l'eau savonneuse et on fait bouillir dans de l'eau pure. Le résidu ne doit contenir que les Diatomées et du sable. Nous indiquons plus loin comment M. Kitton opère le triage des Diatomées et du sable. Procédé de M. J. Brun pour les vases marines et les guanos. « Un grand nombre de travaux récents de microscopie, dit M. J. Brun, ont eu pour but l'étude des récoltes pélagiques, celle des vases lacustres et marines et celle des dépôts fossiles. On y trouve des Polycystines, Radiolaires , Globigèrines, Forami- nifères, Spongiaires, Diatomées, et bien d'autres organismes infiniment petits et très variés. Dans les vases marines que ramène la sonde, on ne trouve guère que des espèces mortes et même momifiées. C'est à la surface des mers et des lacs qu'est la vie ! là où l'air et la lumière abondent. Et, si dans les vases profondes on trouve ça et là des exemplaires en bon état, c'est qu'ils viennent de la surface et qu'il n'y a pas longtemps que leur vie a cessé. « Le naturaliste éprouve souvent de grandes difficultés à séparer ces organismes de la masse pulvérulente ou cristalline {siliceuse, argileuse ou calcaire), qui compose la plus grande partie des V. TECHNIQUE DES DIATOMEES 113 sondages. Ces substances, souvent mêlées depuis des siècles aux détritus organiques, forment ordinairement une masse pâteuse ou plastique, quelquefois même goudronneuse, très gênante et difficile à séparer. On y trouve aussi souvent une forte dose de cendres volcaniques. Quelquefois même le sondage n'est composé que de matières minérales sans traces d'organismes. « Pour l'étude des organismes à carapaces siliceuses, Polycys- tines, quelques Radiolaires et surtout des Diatomées, il est indis- pensable de détruire entièrement cette encombrante matière organique. Dans les guanos, les détritus chitineux abondent. Ceux-ci sont extraordinairement résistants à la putréfaction et aux dissolvants, et même aux acides chlorhydrique, azotique, et au chlore. — Tous ces détritus organiques, par leurs pesanteurs spéci- fiques variées et surtout par la grande adhérence qu'ils ont contrac- tée avec les particules minérales, empêchent également de pouvoir agir par lèvigation. « Le procédé suivant permet la destruction complète de toute cette matière organique, et comme il ne donne pas de vapeurs acides, il a l'avantage de ne nécessiter ni un laboratoire spécial, ni une cheminée à fort tirage. Il donne aussi des résultats meilleurs que les traitements au chlorate de potasse, au permanganate ou à l'acide azotique, ordinairement employés, et qui tous dégagent des vapeurs acides et corrosives. « La masse desséchée (pulvérulente ou compacte), est traitée dans une fiole avec de l'acide chlorhydrique aqueux, afin d'éliminer le calcaire. La fiole doit être d'une dimension suffisante pour contenir toute l'écume visqueuse que les calcaires donnent lorsqu'ils sont- ainsi intimement liés à une masse organique en décomposition. La dissolution de ces sels terminée, le liquide et la vase sont jetés sur un filtre où le dépôt insoluble est lavé, puis desséché, sur le filtre même. « Ce dépôt sec est alors mis en fiole et arrosé de deux fois son volume d'acte sulfurique concentré, qu'on laisse agir plusieurs heures en agitant quelquefois. La masse noircit. Pour les guanos il faut 5 ou 6 fois leur volume d'acide sulfurique. Cet acide est le seul qui dissolve bien des débris chitineux, et on peut déjà en éliminer la plus grande partie en décantant les 3/4 du liquide sulfurique après un repos suffisant. Sur ce brouet épais et noirâtre on ajoute alors du bichromate de potasse en poudre grossière. On l'ajoute par petites doses successives et en agitant chaque fois. La masse s'échauffe et souvent il y a dégagement d'oxygène. On s'arrête quand du noir elle a viré au rouge ou qu'il y a formation de cristaux rouges d'acide chrômique. Dans ce traitement, les matières organiques sont carbonisées par l'acide sulfurique, et 114 LES DIATOMÉES c'est l'acide chrômique à l'état naissant qui en achève la combura- tion. Le lavage préalable à l'eau chlorhydrique a pour but d'éviter la formation de sulfate de chaux. « Le liquide précédent est additionné peu à peu d'eau. La masse s'échauffe à nouveau. L'eau est ensuite ajoutée en abondance. Le dépôt restant est devenu plus ou moins blanc. On le lave soigneu- sement par décantation. Les dernières décantations se font à l'eau distillée. Il est alors prêt à être utilisé. Pour cela, on le délaye avec de l'eau distillée, et on verse ce mélange sur de grands couvre- objets (covers) sur lesquels on le dessèche. C'est sur ces covers que se trient les espèces (1). § 2. — TRIAGE DES DIATOMÉES Dans une récolte composée d'un certain nombre d'espèces, il est utile de pouvoir trier les espèces, afin d'en faire des préparations séparées. Si ces espèces sont de taille différente, on pourra profiter de ces différences de taille pour opérer une division entre les petites et les grandes espèces. — En même temps, on pourra ainsi séparer les Diatomées des grains de sable plus ou moins fins et lourds qui ont, comme elles, résisté à l'action des réactifs, car ils sont comme elles composés de silice. Les grains de sable formés d'une substance plus condensée, sont plus lourds que les Diatomées de même volume. Et, parmi les Diatomées elles-mêmes, les plus grosses sont généralement les plus lourdes. Tous les procédés de séparation des Diatomées et du sable et des Diatomées entr'elles sont fondés sur ce principe, qu'on opère d'ailleurs sur des matériaux déjà passés aux réactifs, comme nous l'avons indiqué, ou sur des matériaux crus, c'est-à-dire bruts ou seulement débarrassés mécaniquement des corps étrangers les plus volumineux. On comprend que, pour ce triage, on opérera par lèvigation ou décantation, en agitant les matières dans l'eau et en séparant successivement les différents dépôts qui se forment, les corps les plus lourds se déposant les premiers. Quant à l'argile, s'il y en a, elle restera au contraire en suspension dans l'eau de lavage, pen- dant très longtemps au moins, si cette eau est distillée, et on pourra l'enlever par décantation. Enfin, il existe des procédés et même des instruments ou doigts mécaniques* qui permettent de choisir pièce à pièce dans un (1)' J. Brun. — Journal de Micrographie, T. XI, 1887, N° 5. V. TECHNIQUE DES DIATOMEES 115 groupe de Diatomées les spécimens que l'on veut monter, et même de les ranger dans la préparation, suivant un ordre voulu et dans une position déterminée. On fait ainsi ce qu'on appelle des prépa- rations méthodiques. Occupons-nous d'abord des procédés de triage du sable et des Diatomées, nous verrons plus loin à l'aide de quels artifices on arrive à manier, pour ainsi dire, chacun de ces corpuscules presque invisibles et à les disposer comme on le veut dans les prépa- rations. Procédé de M. H. L. Smith pour le triage des Diatomées. Le professeur H. L. Smith a publié les instructions suivantes pour le triage des Diatomées. Il opère sur des matériaux crus et qui n'ont pas été traités par les acides, mais son procédé est évidem- ment applicable aussi aux matériaux déjà traités par les acides. M. H. L. Smith se dispense de ce traitement parce qu'il détruit la matière organique des Diatomées en brûlant celles-ci sur la lame de verre au moment du montage, comme nous l'indiquerons plus loin. « Les récoltes, dit M. H. L. Smith, ne doivent pas être séchées, mais conservées humides, dans des fioles, avec un peu de créosote pour empêcher les moisissures. — Je préfère de beaucoup examiner les frustules entiers avec les deux valves adhérentes, ou encore attachés les uns aux autres, si l'espèce est filamenteuse. Je possède beaucoup de fioles de matériaux pour le montage, qui sont presque aussi propres que s'ils avaient été traités par les acides. . . « Supposons donc qu'on ait devant soi une fiole contenant une quantité d'eau considérable relativement au sédiment, lequel ren- ferme plus ou moins de Diatomées. Nous procédons comme il suit, et si la fiole est restée tout à fait au repos pendant plusieurs jours, cela n'en vaudra que mieux. « On imprime à la fiole un rapide mouvement de rotation : les matériaux les plus légers s'élèvent dans l'axe du liquide et se répan- dent bientôt dans l'eau. « On laisse reposer pendant deux ou trois secondes, jusqu'à ce qu'on ait vu les plus grosses particules se déposer ; aussitôt, on verse le liquide avec les particules flottantes qu'il contient dans une autre fiole. C'est de ce liquide que nous allons séparer les Diato- mées et le sable de l'argile et des matières organiques. « Les matériaux décantés dans la seconde fiole sont laissés au repos jusqu'à ce que l'eau paraisse simplement laiteuse ou nuageuse. Le temps varie avec la petitesse des Diatomées et l'on ne peut guère l'apprécier que par expérience. Supposons une minute : alors, tout 116 LES DIATOMÉES ce qui reste flottant doit être décanté et jeté, à moins qu'il ne s'y trouve de très petites formes que l'on peut vouloir séparer. « La fiole est de nouveau remplie avec de l'eau pure ou distillée (les eaux dures ou calcaires doivent être strictement écartées) — et l'on secoue de nouveau. « Aussitôt que le dépôt le plus lourd touche le fond, le reste est versé dans une troisième fiole, en laissant environ le quart du liquide dans la seconde. « Cette troisième fiole ne contiendra plus guère maintenant que du sable et des Diatomées avec quelque légère matière organique et de l'argile pure. Ces deux dernières substances peuvent être enle- vées par décantation : pour cela, on remplit d'eau la fiole n° 3 et, après l'avoir bien secouée, on la laisse reposer de deux à cinq minutes; on décante et on jette l'eau légèrement laiteuse, et on répète l'opé- ration en laissant reposer un peu plus longtemps. On peut recom- mencer une troisième fois et rejeter les particules en suspension après un intervalle de 8 à 10 minutes. « Souvent, après que le premier dépôt s'est formé dans la fiole n° 2, les Diatomées s'élèveront plus pures dans la masse en donnant à la bouteille un mouvement de rotation qu'en la secouant. » M. H. L. Smith ajoute à cet exposé les observations suivantes : « Un peu de pratique et de soin permettra à tout le monde de séparer certaines Diatomées suivant leur taille. J'ai reçu une récolte de Plcurosigma Spenceri qu'on m'avait envoyée de Scioto River (Ohio), mais quoiqu'elle eut été bien traitée au chlorate, quand j'en montai une préparation, je ne trouvai pas plus d'un ou deux frus- tules dans le champ de microscope, le reste n'étant que des formes plus petites ou de fins fragments de silex. En étudiant et en expé- rimentant avec soin le temps pendant lequel les différentes tailles restaient en suspension, j'ai fait de cette récolte une préparation qui montre des centaines de frustules où l'on n'en voyait à peine aupa- ravant, et l'on ne reconnaîtrait pas qu'elle provient de la même récolte. » M. H. L. Smith conseille ensuite, quand on a constaté la présence d'une assez grande quantité de Diatomées dans le dépôt, de remplir la fiole avec un mélange d'alcool et d'eau à parties égales, afin de les conserver pour le montage. Mais il faut avoir soin de n'employer qu'un alcool qui ne laisse pas de résidu par l'évaporation et que de l'eau distillée, sans quoi les préparations qu'on ferait avec ces Diatomées seraient mêlées de corps étrangers. Quant au montage, l'éminent diatomiste américain le pratique, comme nous le verrons plus loin, en brûlant les Diatomées sur le cover, d'après la méthode de Brébisson, ce' qui détruit en même temps leur matière organique. V. TECHNIQUE DES DIATOMEES 11/ Procède de triage de M. F. Kitton. Nous avons indiqué précédemment (p. 112) les procédés qu'em- ploie M. F. Kitton pour le lavage des récoltes, des sondages marins, des Diatomées fossiles et des guanos. Tous ces procédés d'ailleurs, quels qu'ils soient, arrivent toujours au même résultat : avoir dans de l'eau un dépôt qui ne contient plus, si les opérations ont été bien faites, que des Diatomées débarrassées de matière organique, et du sable. En secouant le vase qui contient ce résidu et en décantant, au bout de quelques secondes, l'eau surnageante, on séparera déjà un premier dépôt qui contiendra les grains de sable les plus volumineux et les Diatomées les plus lourdes. L'eau surnageante, abandonnée au repos, laissera déposer les Diatomées légères et les grains de sable les plus fins dont la sépara- tion est plus difficile. Voici comment M. F. Kitton opère pour faire ce triage : « Je prends deux lames de verre A et B. Sur A je place une goutte d'eau distillée et sur B une petite quantité du liquide à traiter. J'imprime à B un léger mouvement rotatoire horizontal, ce qui accumule le sable au centre du liquide et j'incline la lame vers un de ses angles ; les Diatomées s'écoulent et sont recueillies dans l'eau distillée de la lame A. — Cette eau chargée de Diatomées est ensuite répartie sur des couvre-objets. « Par cette méthode, des récoltes qui paraissent tout à fait sans valeur donnent de très bonnes .préparations, mais il est souvent nécessaire d'ajouter à l'eau de la lame A le produit de plusieurs gouttes de B (1). » C'est encore là, comme on le voit, un procédé par décantation, mais dans lequel on opère sur de petites quantités, en profi- tant à la fois de la différence de densité du sable et des Dia- tomées et de l'adhérence à la lame de verre des particules les plus lourdes. A propos de cette adhérence au verre de certaines particules, nous devons signaler une observation due au professeur Christophcr Johnston. Pour les dépôts débarrassés ou à peu près de matières étrangères, si on les verse dans un vase en verre très propre, les Diatomées discoïdales, après quelques instants de repos, adhèrent au fond du vase et l'on peut décanter tout le contenu sans que celles-ci se détachent si elles sont entières. On peut alors les enlever avec un pinceau très doux, et obtenir ainsi des frustules parfaitement isolés. (1) H. van Heurck. — Synopsis des Diatomées de Belgique, p. 27. VI MONTAGE DES DIATOMEES § 1. — INSTRUMENTS ET PRODUITS Le matériel pour le montage des Diatomées en préparation n'est ni compliqué ni dispendieux. L'appareil le plus important est un petit support métallique, formé d'une tige de fer verticale sur laquelle glissent un ou deux bras terminés par un anneau. On peut fixer ces bras à une hau- teur voulue, à l'aide d'une vis de pression, de manière à rapprocher ou éloigner l'anneau de la flamme d'une lampe à alcool ou à gaz qu'on place par-dessous. C'est, en somme, un instrument qu'on trouve dans tous les laboratoires, mais on doit le choisir de petite taille pour qu'il soit moins encombrant, et l'anneau doit être assez mince, pour ne pas absorber trop de chaleur, et de faible diamètre. Sur l'un de ces anneaux on pose une plaque de fer assez épaisse pour qu'elle ne se gondole pas en se dilatant par la chaleur, 5 mil- limètres par exemple. On se munit aussi d'une petite lame de platine dont on replie les angles par dessous. Cette lame pourra être posée aussi sur un anneau du support. Quelques pinces fines, parmi lesquelles on peut en avoir une munie d'un anneau de serrage qui permet de chauffer directement la lame de platine en la tenant à la main avec la pince ; tels sont, avec quelques aiguilles tous les instruments nécessaires, f On se servira, d'autre part, de lames et de lamelles très propres, et l'on choisira les lamelles ou covers aussi, minces que possible afin de pouvoir étudier les préparations avec des objectifs à court foyer. Les lamelles minces rondes sont plus commodes que les lamelles carrées, parce qu'on peut faire les cellules avec la tournette, ce qui est plus commode et plus expéditif. On préparera, en effet, d'avance un certain nombre de lames de verre sur lesquelles on aura tracé avec du bitume de Judée, du vernis au blanc de zinc, à la gomme laque ou autre, un cercle de MONTAGE DES DIATOMEES 119 même diamètre, ou un peu plus grand que le cover qu'on veut employer. — Tout le monde sait comment on trace ces cellules à l'aide de la tournette et la vue de l'instrument suffit à apprendre comment on s'en sert. Ajoutons seulement que les tournettes à centrage automatique, c'est à dire dans lesquelles la lame de verre se place de manière à ce que son centre coïncide toujours avec le centre du plateau tournant, sont préférables aux autres ; en effet, la même lame y reprend toujours exactement la même position, de sorte que les différentes couches que Ton veut donner à une cellule tombent toujours exactement les unes sur les autres (fig. 71). On doit faire les cellules, avec le vernis qu'on aura choisi, vernis au bitume, au blanc de zinc ou autre, plusieurs jours ou même plusieurs semaines d'avance et laisser sécher les lames de verre ainsi préparées à l'abri de la poussière. Ces cellules serviront pour monter les Diatomées à sec et dans un liquide conservateur. Vernis au bitume de Judée On le prépare en réduisant en poudre du bitume de Judée de bonne qualité et en versant par dessus de la benzine ou de l'essence de térébenthine. On agite avec une baguette de verre et on ajoute le liquide peu à peu jusqu'à ce que la solution ait la consistance d'un sirop un peu épais. On peut y mettre un peu de cire pour l'empêcher de se fendiller par la dessication. Vernis au copal. On dissout de la résine copal dans de l'essence de lavande, en ajoutant de la résine et de l'essence jusqu'à consistance convenable. Baume du Canada. Le Baume du Canada est la résine de YAbies canadensis . On l'emploie souvent tel qu'il se trouve dans le commerce. Il ne faut pas qu'il soit trop fluide ni trop filant. On peut aussi s'en servir à l'état de dissolution dans l'essence de térébenthine ou dans le chloroforme. Pour la préparation des Diatomées, le baume est préférable sans essence. La solution de baume du Canada dans la benzine remplace avan- tageusement le vernis noir au bitume pour la confection des cellules. Résine Damar. On dissout la résine broyée dans l'essence de térébenthine ou le chloroforme, en donnant au mélange la consistance du baume du Canada. 120 LES DIATOMÉES Térébenthine de Venise. Elle s'employe comme le baume, c'est la résine de YAbies pecti- nata. Vernis à la gomme laque. On dissout la gomme laque dans l'alcool absolu. Mixtion des doreurs ou gold-size. On trouve ce produit chez les marchands de couleurs. Il s'emploie comme le vernis au bitume. Il est long à sécher. Vernis au blanc de zinc. Le blanc de zinc est d'abord lavé dans la benzine. On fdtre, et avant que la matière soit complètement sèche, on la broie dans une solution épaisse de résine Damar dans la benzine. Styrax, Liquidambar Le Dr H. van Heurck a introduit, depuis quelques années, dans la technique le styrax (1) qui est la résine du Styrax orientalis, et le liquidambar, résine du Liquidambar styracifiua, pour remplacer le baume du, Canada. Le styrax du commerce est étendu, d'abord en couche mince sur des assiettes et exposé à l'air et à la lumière jusqu'à ce qu'il soit devenu assez dur et qu'il ait perdu l'eau qu'il contient; après quoi, on le dissout dans un mélange à parties égales d'alcool et de benzine ou d'éther sulfurique et d'alcool absolu. Et l'on iiltre au papier. On peut aussi le dissoudre dans le chloroforme (1). Son indice de réfraction est 1,64 (Raie D) (2). Le liquidambar, difficile à trouver dans le commerce ordinaire, se prépare de la même manière, et en solution dans la benzine ou le chloroforme. Nous indiquons plus loin les procédés de montage employés par M. H. van Heurck avec le styrax et le liquidambar. Baume de Tolu. C'est la résine du Balsamodendron toluifera. Récemment introduit aussi dans la technique, M. J. Rrun le (1). H. van Heurck. Syn. des Diat. de Belgique, p. 29. (2). J. Brun. Utilisation et valeur réelle des médiums. Journal de Micro- graphie. T. XI. 1887, p. 182. Vt TECHNIQUE DES DIATOMEES 121 prépare en le faisant bouillir pendant longtemps dans une grande quantité d'eau et en le dissolvant dans la benzine rectifiée. On filtre et on laisse dessécher complètement la solution. Le résidu est enfin dissous dans l'alcool ou dans le chloroforme. Le liquide doit être limpide et concentré. L'indice de réfraction du baume de Tolu mou est 1,64 (raie D) et 1,72 pour le baume sec. Il est donc supé- rieur à celui du styrax. Fig. 73. — Tournctte à centrage automatique, de W. Bulloch. Milieux à haut indice Dans ces dernières années, différents naturalistes ont cherché à produire des liquides, solidifiables ou non par le refroidissement, dont l'indice de réfraction soit supérieur à celui du baume. C'est ainsi qu'on a employé : La naphtaline monobromée, (voir p. 136). Les solutions de soufre et de phosphore dans le sulfure de carbone, Le sulfure d'arsenic sublimé, L'arsénite d'antimoine dissous dans le chlorure d'arsenic, 9 122 LES DIATOMÉES L'acide arsénieux dissous jusqu'à saturation dans une gelée formée de bromure d'antimoine dans la glycérine; (indice 1,80 à 2,00), L'acide arsénieux dissous dans une solution de sulfure d'arsenic (réalgar) dans le bromure d'arsenic; (indice = 2,30 à 2,40). Toutes ces substances, très désagréables à manier, parfois même dangereuses, n'ont pas grande valeur parce qu'elles ne sont pas stables et toutes celles qui renferment de l'arsenic, notamment, qui sont vitrifiables, (c'est sur cette propriété qu'est fondée leur emploi), éprouvent plus ou moins rapidement une dévitrification avec formation d'un magma de cristaux dans lequel la préparation est perdue. Ou bien, comme elles sont très avides d'eau, elles absorbent l'humidité de l'air et deviennent opaques. Nous pensons donc qu'il n'y a pas grand intérêt à se servir de ces diverses substances, à moins que ce ne soit pour quelque recherche extemporanée et qu'on ne tienne aucunement à conserver les prépa- rations. Liquides conservateurs Eau camphrée. — L'eau camphrée est un des meilleurs liquides pour conserver les algues, en général, et les Diatomées, en particu- lier, dans les préparations. On l'obtient en versant goutte à goutte de l'alcool camphré dans de l'eau distillée. A chaque goutte, il se produit un trouble ; on agite avec une baguette de verre et le léger précipité de camphre se dissout. On opère ainsi jusqu'à ce que l'eau devienne définitivement opaline, la dernière goutte d'alcool camphré ne se dissolvant plus par l'agitation. On filtre alors sur le papier, et l'on conserve pour l'emploi le liquide filtré. Chlorure de calcium. — On prépare une solution avec 3 grammes de chlorure de calcium pur dans 100 grammes d'eau distillée. — On filtre et l'on ajoute une goutte d'une solution d'acide phénique pour empêcher le développement des moisissures. S 2. — MONTAGE A SEC Le montage des Diatomées à sec, c'est à dire sans l'intermédiaire d'aucun milieu, est le procédé le plus rapide. Autrefois, on se bornait à déposer sur une lamelle couvre-objet bien propre une petite quantité des Diatomées destinées à être montées bien lavées, d'ailleurs, et conservées dans l'eau ou dans l'alcool. On prenait une gouttelette du dépôt diatomifère, à la VI TECHNIQUE DES DIATOMEES 123 pointe d'un pinceau ou avec une pipette, et on ladéposoit au milieu de la lamelle. On répartissait le mieux possible, avec une aiguille, la matière sur la lamelle, et on laissait sécher à l'abri de la poussière; ou bien, l'on hâtait la dessication en appro- chant la lamelle de la flamme d'une lampe à esprit-de-vin. Le liquide étant complètement évaporé et la lamelle bien sèche, les Diatomées restaient adhérentes au verre. Il suffisait alors de déposer cette lamelle, la face chargée de Diatomées tournée en dessous, sur une cellule tracée depuis longtemps à l'avance sur une lame de verre et bien sèche; on s'arrangeait de manière que le cercle de bitume ou autre vernis formant la cellule dépassât Un peu les bords de la lamelle. Alors, en exerçant sur celle-ci une douce pression avec la pointe d'un canif ou d'une aiguille, on déterminait l'adhérence de la lamelle avec le cercle de vernis. Ou bien, on déposait sur le couvre-objet un petit disque de plomb agissant de même par son poids. L'adhérence étant obtenue, il ne restait plus qu'à terminer la préparation en recouvrant les bords de la lamelle d'un cercle de vernis les dépassant un peu et se confondant avec celui de la cellule. La préparation se trouvait ainsi fermée. Actuellement, on préfère employer le procédé de Brébisson, p;ir le brûlage. Si les Diatomées sont conservées dans l'alcool aqueux, on dépose avec une pipette une goutte du liquide diatomifère sur un couvre- objet bien propre placé sur la plaque de fer ou la lame de platine dont nous avons parlé antérieurement. On chauffe alors avec la lampe à alcool. L'alcool prend feu, et en brûlant répartit les matières sur toute la surface de la lamelle. Quand il a brûlé, on baisse la flamme et on laisse l'eau qui reste s'évaporer lentement. Si les Diatomées à monter ne sont pas conservées dans l'alcool mais dans l'eau, on dépose une goutte du liquide diatomifère sur une lamelle placée sur la plaque de fer ou la lame de platine, et l'on chauffe doucement jusqu'à siccité, après avoir réparti le mieux possible les Diatomées sur la lamelle. Dans l'un et l'autre cas, quand la lamelle est bien sèche, on chauffe au rouge la plaque fer et le couvre-objet qui y est placé, ou on le porte sur la lamelle de platine, et l'on chauffe au rouge. Ce procédé permet de monter des Diatomées qui n'ont été traitées ni par les acides, ni par aucun des procédés employés pour détruire la matière organique, c'est à dire à l'état de ce qu'on appelle des matériaux ci%us. On comprend que la chaleur rouge détruit la matière organique qui noircit d'abord, puis brûle, et les frustules siliceux se trouvent parfaitement nettoyés. Toutefois, cette méthode serait insuffisante pour détruire la gangue organique et minérale de certains dépôts, et des guanos, en particulier. On ne peut l'employer l"-^4 LES DIATOMÉES que pour les Diatomées séparées des matériaux étrangers et ne con- tenant à peu près que la substance organique qui leur est propre. Cette calcination effectuée, on éteint la lampe, on laisse refroidir lentement et on dépose la lamelle ainsi chargée, les Diatomées en dessous, sur une lame de verre portant une cellule au vernis, tracée d'avance, et l'on opère en tout comme nous l'avons indiqué plus haut. Les Diatomées sont ainsi montées dans l'air pour milieu. En raison de la grande différence entre l'indice de réfraction de l'air et l'indice de la silice qui compose les frustules, les détails de ceux-ci seront plus faciles à voir et, par exemple, leurs stries plus faciles à résoudre. Néanmoins, ces avantages sont compensés par une notable perte de lumière par réflexion sur la face inférieure du cover, et une moindre admission de rayons lumineux dans l'objectif. De plus, ces préparations sont fragiles. M. H. L. Smith emploie ce procédé du brûlage sur des Diatomées qui n'ont pas été traitées par les acides, et, le plus souvent, la matière organique est ainsi parfaitement brûlée. Les Diatomées à monter étant dans l'alcool aqueux, il prend avec une pipette un peu du liquide qui les contient et en dépose une goutte au milieu d'un couvre-objet très propre. — Il faut autant que possible employer des lamelles très fines afin de pouvoir se servir pour l'étude des objectifs à court foyer. § 3. — MONTAGE DANS LES BAUMES On se servait autrefois de la térébenthine de Venise; on l'a rem- placée, depuis, par le baume du Canada, mais les manipulations sont les mêmes. Par ce procédé, les Diatomées, au lieu d'être mon- tées dans l'air, sous la lamelle, sont comprises dans une couche transparente de baume solidifié. On commence, comme nous l'avons indiqué pour le montage à sec, par sécher ou brûler les Diatomées sur la lamelle en portant celle-ci au rouge sur la lame de platine. D'autre part, on a préparé d'avance des lames porte-objets au centre desquelles on a déposé une goutte de baume, ou d'une solu- tion épaisse de baume dans une essence, et particulièrement dans l'essence de térébenthine. On a chauffé ces lames de verre à une chaleur modérée sur la plaque de fer, pour faire évaporer les parties volatiles du baume et l'essence de manière qu'il puisse se solidifier par le refroidissement. En chauffant ainsi, il se forme dans la goutte de baume fondu VI TECHNIQUE DES DIATOMEES 125 une plus en moins grande quantité de bulles. La goutte étant maintenue pendant quelques instants à l'état liquide, la plupart des bulles crèvent et se dissipent. Pour faire disparaître celles qui persistent, on en approche une aiguille chauffée dans la flamme de la lampe, ou même on les touche avec la pointe de cette aiguille. Elles crèventalors et disparaissent. S'il eu reste une ou deux petites dont on ne peut se débarrasser, il ne faut pas trop s'en préoccuper ; le plus souvent, elles seront chassées au delà des bords du cover quand on appliquera celui-ci , ou bien, formées de vapeurs d'essence, elles se résorberont avec le temps en se dissolvant dans le baume. Quant au cover, les Diatomées qui le couvrent ayant été chauffées au rouge avant qu'il soit complètement refroidi, on y dépose une petite goutte d'essence de térébenthine ou de girofles, et l'on chauffe pour l'évaporer. Quand elle est presqu'entièrement disparue et que le cover n'est plus que légèrement humecté par l'essence, on le prend, chaud encore, avec une pince et on le dépose, les Diatomées en dessous, sur la goutte de baume séchéeau milieu du porte-objet. On chauffe doucement, le baume se ramollit et adhère, sans former de bulles, au cover mouillé de térébenthine. On éteint la lampe et l'on exerce avec la pointe d'une aiguille une légère pression sur le cover ou bien on le charge d'un petit poids en plomb pour dimi- nuer l'épaisseur du baume sous la lamelle. Le baume en excès sort par la pression, autour du bord de la lamelle. On laisse le tout au repos jusqu'à ce que la solidification soit complète. Quelques jours après, on gratte avec un canif le baume extravasé qui est sec et solide, et on nettoie la préparation avec un linge fin imbibé d'alcool concentré. Le petit artifice, qui consiste à mouiller le cover diatomifère avec un peu d'essence de térébenthine avant de l'appliquer sur le baume, a une grande importance. La légère couche d'essence qui l'humecte permet une adhérence complète avec le baume sans interposition de bulles d'air. Déplus, l'essence pénètre toutes les anfractuosités, dessins, stries des frustules, et en chasse l'air qui pourrait y être emprisonné, de sorte que le baume à son tour peut s'insinuer dans toutes ces anfractuosités en se dissolvant dans la petite quantité d'essence qui les remplit. Enfin, cette mince couche d'essence détermine une adhérence des Diatomées au cover suffisante pour que celles-ci ne tombent pas pendant le retournement et les mani- pulations. Les préparations ainsi faites sont très solides et se conservent indéfiniment. Aussi, est-ce le procédé le plus employé, mais, comme le baume pénètre tous les détails de structure des frustules et que son indice de réfraction est peu différent de celui de la silice 126 LES DIATOMÉES transparente qui compose ces frustules, ceux-ci deviennent beaucoup plus difficilement visibles que dans les préparations à sec ou dans l'air. Ils forment avec le baume une masse à peu près homogène au point de vue optique, et, pour étudier leurs détails, il est nécessaire d'employer les instruments les plus perfec- tionnés. Préparations au stijraoc et au liquidambar Le styrax et le liquidambar ont un indice de réfraction supérieur à celui du baume du Canada. Les Diatomées y sont donc plus faci- lement visibles que dans le baume ; elles s'y montrent en vertu de la différence des indices de réfraction et par un phénomène analogue à celui qui rend visible une bulle d'air dans l'eau. Nous avons indiqué plus haut comment le Dr H. Van Ileurck pré- pare ces deux substances. Voici comment il opère pour la prépara- tion des Diatomées: « Nous commençons par placer les couvre-objets sur une grande plaque de verre et sur chacun d'eux nous plaçons, à l'aide d'une pipette, une large goutte d'eau distillée sur laquelle nous laissons tomber doucement une goutte du liquide diatomifère (1). Les Piato- mées s'éparpillent dans la goutte d'eau distillée qui, au besoin, est remuée délicatement. — Les couvre-objets sont recouverts d'une cloche de verre et abandonnés à l'évaporation spontanée. « Lorsque celle-ci est parfaite, les couvre-objets pris un à un sont chauffés au rouge sur la lame de platine et remis sur la grande plaque de verre, où, après avoir reçu une goutte très fluide de styrax, ils sont de nouveau abandonnés, sous la cloche , à l'évapo- ration. « Peu d'instants après, la couche blanchit, mais on n'a plus à s'inquiéter de ce phénomène (qui n'arrive pas avec la solution dans le chloroforme), et, au bout de 24 heures, la benzine est complète- ment évaporée. Le couvre-objet est alors placé, retourné, sur le porte-objet et chauffé légèrement, de préférence sur un jûain-marje, Une légère pression à l'aide d'une presselle chasse les bulles d'air, s'il y en a, ainsi que le styrax superflu que l'on enlève après refroi- dissememt (2). » On peut opérer de même avec le liquidambar que l'on emploie dissous dans la benzine ou le chloroforme. (1). Si les Diatomées sont conservées dans l'alcool, il faut décanter l'alcool et la remplacer par de l'eau distillée. (2) H. Van Heurck. -- Syn. des. Di Une bande de cuivre Ci(Fig. 74) formant bague ou ceinture, serrée par une vis U, peut être fixée solidement à la partie inférieure du tube du microscope, au dessus de l'objectif. Elle porte sur un de ses côtés une tige D qui, par deux articulations à boule M et S, soutient le poil emmanché Z. L'articulation M permet tous les mouvements à la tige T qui la traverse et dont on peut régler la longueur avec la vis de pression R. La boule de l'articulation S est traversée par la tige P qui porte le poil, et la longueur de cette tige peut de même être réglée en l'enfonçant plus ou moins dans la boule S. Le poil a donc, lui aussi, des mouvements dans tous les sens. On règle la hauteur de Vr TECHNIQUE DES DIATOMEES 133 la tige T et la longueur de la tige P de manière à ce que le poil puisse manœuvrer sur la platine du microscope sur laquelle est adaptée la plaque de cuivre portant le secteur et les covers fixés à la paraffine. On travaille alors sous l'objectif, avec le secteur tournant, comme on faisait précédemment sous le doublet, mais avec une grande sûreté de main et par des mouvements aussi précis et aussi petits qu'il est nécessaire (1). Il est facile de comprendre que, lorsqu'on emploie le doigt mécanique, certains mouvements sont renversés et d'autres ne le sont pas, ou plutôt sont redressés par le microscope. Ainsi, dans la position de la figure, si l'on pousse la tige P vers la gauche, le poil qui la termine prendra réellement cette direction, mais le microscope renversera le mouvement et le poil, paraissant venir par la gauche du champ, s'avancera vers la droite. Mais si l'on pousse la tige P vers le devant du microscope, il se fera un mouvement de pivotement autour de l'articulation S comme centre et le poil viendra en arrière sous l'objectif; mais le microscope renversera le mouve- ment et le poil paraîtra dans le champ venant de l'arrière et marchant vers le devant du microscope, c'est-à-dire que l'image sera redressée. Dans ce dernier mouvement, il faut remarquer (1) On trouve le doigt mécanique décrit ci-dessus au Laboratoire du Journal de Micrographie, à Paris. l'-U LES DIATOMÉES encore que plus le bras de levier du poil (SZ) sera grand par rapport au bras de levier du manche (SP), plus le déplacement du poil sera grand par rapport au déplacement du manche. Il faut donc une certaine habitude pour se servir aisément de cet instru- ment. Avec le premier appareil ou avec le second, triant les Diatomées avec le poil emmanché à main libre ou avec le doigt mécanique, M. Rataboul opère de la manière suivante : Les Diatomées à trier sont déposées avec une pipette sur un cover placé lui-même sur la petite lame de platine M (PI. III, Fig. 1) et brûlées suivant le procédé ordinaire. Puis, le cover refroidi est fixé avec un peu de paraffine sur le trou c du secteur tournant. D'autre part, un autre cover très propre est fixé de même sur le trou b. On dépose alors à son centre, avec un pinceau, une petite goutte d'une solution de gomme très pure. Cette solution est faite avec une grosse goutte de gomme arabique épaisse dans 43 c. cubes d'eau distillée. On laisse sécher l'enduit, et, au besoin, on hâte la dessication en approchant du cover une tige métallique chauffée au rouge. On fait alors le triage avec le poil, en amenant sous la loupe ou l'objectif le cover c, enlevant un frustule et le déposant sur le cover b amené à son tour dans le champ par un petit mouvement du secteur tournant. On place le frustule où l'on veut, sur l'enduit gommeux sec. Pour l'y fixer on prend un tube de verre H (Fig. 1) large par un bout, étroit par l'autre, et, la plus petite ouverture tournée vers la Diatomée, on projette l'haleine sur le cover dont l'enduit se ramollit assez pour que le frustule y reste collé. On répète l'opération autant de fois qu'on le veut, et quand les Diatomées sont rangées et fixées, il n'y a plus qu'à monter la préparation, soit aux baumes, soit à sec. Pour la monter dans le ba*ume du Canada, 31. Rataboul détache le cover et le place pendant une heure, la face chargée en dessous, dans un verre de montre contenant de l'essence de térébenthine ou de lavande. Puis, il dépose sur une lame porte-objet une goutte de baume. Il la chauffe sur une lampe à alcool, et quand des zébrures se montrent dans le baume, il laisse refroidir. S'il y a des bulles, il les crève ou les enlève avec une aiguille froide. Le cover est alors retiré de l'essence, égoutté et déposé, les Diatomées en dessous, sur la goutte de baume; à l'aide d'une chaleur ménagée, l'adhérence se produit, l'essence en excès s'évapore. On comprime légèrement et on laisse refroidir. Il n'y a plus qu'à nettoyer la préparation quand elle est parfaitement sèche, comme nous l'avons indiqué. M. Rataboul recommande le vernis au copal, comme plus facile à manier, quoique beaucoup plus long à sécher, parce qu'il est plus W TECHNIQUE DES DIATOMEES 135 facile d'éviter les bulles d'air. Le vernis doit être évaporé jusqu'à consistance sirupeuse, environ au tiers de son volume, et il suffît d'en déposer une goutte sur le porte-objet et de placer par dessus le cover imbibé de térébenthine. On laisse alors la préparation, pen- dant 2 ou 3 heures, sur une plaque de fonte légèrement chauffée (à 70° environ). Et l'on n'aura à craindre aucune bulle. Il est prudent d'attendre quelque temps avant de nettoyer la préparation. Pour les préparations à sec, M. Rataboul n'emploie pas la gomme pour enduire le cover, mais une gouttelette de baume dissous dans le chloroforme, ou de vernis au copal, dissolutions d'ailleurs très étendues. Il opère, du reste, comme précédemment, mais au lieu d'utiliser l'humidité de l'haleine pour ramollir l'enduit et le rendre agglutinatif, il emploie une tige métallique chauffée qu'il approche du cover. , Quand les Diatomées sont rangées, le cover est porté sur là lame de platine et chauffé au rouge. L'enduit noircit, puis disparait entiè- rement, mais les frustules restent en place. Le cover refroidi est alors appliqué délicatement, les Diatomées en dessous, sur une lame porte-objet où l'on a tracé une ou deux cellules concentriques avec du bitume. Les cellules doivent être bien sèches et préparées au moins trois semaines d'avance. La préparation est chauffée très légèrement pour obtenir l'adhérence que l'on aide ensuite en appuyant sur le cover. Enfin, la préparation est fermée par un cercle de bitume sur les bords du cover. M. A. ïruan emploie comme enduit, pour lixer les Diatomées sur le cover, le mélange suivant : Gélatine G grammes Eau distillée o0 — Acide acétique eristallisable ... 50 — Alcool à 36° 8 — On met la gélatine et l'eau dans un llacon de 200 grammes de capacité et on les laisse en contact jusqu'à ce que la gélatine n'absorbe plus d'eau ; puis, on plonge le llacon dans l'eau ehaude, en agitant, pour compléter la dissolution de la gélatine, et on ajoute l'acide acétique et l'alcool. On replace le flacon dans l'eau chaude pour rendre la solution plus liquide et on la liltre sur le papier eu rejetant sur le filtre les premières parties qui passent. Puis, on conserve le liquide dans un flacon bien bouché (1). On se sert de cette solution gélatinée en y plongeant une aiguille que l'on passe à plat sur le couvre-objet bien propre et on laisse (1) A. Truax y Luard, Ensayo sobfe la Sinopsis de las Diatomeas de Asturias, Madrid. 1884. 136 LES DIATOMÉES sécher sous une cloche. On peut ainsi préparer d'avance plusieurs covers. On range les Diatomées sur un couvre-objet ainsi préparé, comme nous l'avons dit, en ramollissant l'enduit avec l'haleine, et l'on termine le montage comme nous l'avons indiqué. Préparation dans la naphtaline monobromèe. La naphtaline monobromèe a été quelquefois employée par M. Moller comme milieu à haut indice pour le montage des Dia- tomées. Son indice de réfraction est, en effet, représenté par le nombre 1,63, celui du baume du Canada n'étant que 4,52. Voici comment M. A. Truan conseille de l'employer (1) : On commence par préparer des cellules sur des porte-objets avec une solution épaisse de gomme laque dans l'alcool. Il faut les faire assez profondes et un peu plus larges que le cover dont elles doiven dépasser légèrement les bords. On les laisse sécher un jour ou deux, puis on les use en les frottant sur une pierre à aiguiser bien plane, de manière à ce que leurs bords soient eux-mêmes parfaite- ment plans. Les Diatomées ayant été rangées sur un cover enduit de gélatine, comme nous l'avons indiqué, on dépose sur celui-ci une goutte de naphtaline monobromèe et on laisse sécher à l'abri de la poussière. Puis on met une goutte de naphtaline monobromèe au milieu d'une cellule tracée à la gomme laque sur un porte-objets, et on retourne sur celle-ci le cover portant les Diatomées, sans emprisonner des bulles d'air. On appuie légèrement sur la lamelle, et on enlève l'excès de liquide avec du papier buvard, en essuyant, au besoin, avec un petit linge humide. Si l'adhérence entre le cover et les bords de la cellule ne s'est pas produite, on ramollit ceux-ci en passant tout autour une aiguille chauffée, et l'on appuie sur la lamelle en épongeant le liquide excédant. L'adhérence ainsi obtenue, on laisse sécher et on ferme la prépa- ration en traçant sur les bords de la cellule un cercle de gomme laque qui recouvre un peu la circonférence du cover. On termine, si l'on veut, en traçant par dessus le cercle de gomme laque un cadre au bitume de Judée ou autre vernis. Au lieu de gélatine pour fixer les Diatomées sur le cover, M A. Truan indique un mélange d'albumine et d'ammoniaque obtenu en battant un blanc d'œuf, sans aucune trace de jaune, avec son (1) A. Truan y Luard, Loc, cit. VI. TECHNIQUE DES DIATOMEES 137 poids d'eau distillée et o grammes d'ammoniaque pure, jusqu'à ce que tout soit transformé en écume. On laisse reposer et on filtre plusieurs fois sur le papier. On prépare les couvre-objets avec cette solution comme avec la gélatine, et on y fixe les Diatomées en ramollissant l'enduit sec avec l'haleine. Quand on a terminé, on place le cover ainsi chargé sur la plaque métallique et l'on chauffe pour coaguler l'albumine. On opère ensuite comme il a été dit plus haut. Enfin, on peut employer comme enduit une dissolution faible de gomme laque blanche dans l'alcool absolu. On l'emploie comme la gélatine, sauf que pour la ramollir, au moment où Ton y dépose chaque Diatomée, on ne se sert pas de l'haleine, mais de la chaleur en plaçant le cover sur la plaque métallique chaude, ou en appro- chant de la surface résineuse une tige de métal chauffée. Puis, le rangement des Diatomées achevé, on chauffe le cover sur la plaque métallique de manière à fondre la gomme laque qui, sans cette pré- caution, serait attaquée par la naphtaline monobromée. 10 VII MOYENS D'ÉTUDE § 1. — LES MICROSCOPES On dit souvent qu'on peut faire de bonne besogne avec de mauvais outils et de bonnes observations avec un mauvais microscope ; la chose est possible, en effet, comme le prouvent les admirables découvertes que les Leeuwenhoek, les Swammerdam, les Malpighi surent faire avec les instruments grossiers qu'ils possédaient et fabricaient le plus souvent eux-mêmes en fondant à la chaleur un globule de verre. Mais il n'est pas donné à tout le monde d'égaler ces illustres fondateurs de la micrographie, et il est probable que les savants de nos jours se trouveraient fort empêchés s'ils n'avaient que ces instruments rudimentaires pour approfondir les recherches qu'ont commencées leurs célèbres devanciers. L'étude des Diatomées est particulièrement une de celles qui exige l'emploi des meilleurs instruments, non seulement au point de vue optique, mais encore sous le rapport de la construction mécanique. C'est même cette nécessité, pour le diatomiste, de mettre en œuvre les moyens d'observation les plus parfaits qui a été la principale cause des perfectionnements incessants que les opticiens ont apportés, depuis le commencement de ce siècle, à la construction des micros- copes et surtout des objectifs. Il ne s'agit plus, en effet, de reconnaître plus ou moins exacte- ment, comme au temps de Joblot, la forme et l'aspect d'une Diatomée ; chaque frustule se présente maintenant au micrographe comme une énigme qu'il s'agit de déchiffrer : il offre, dans son intérieur, une structure particulière et compliquée dont il faut déterminer les parties diverses et les dispositions variées, et, sur ses faces, des caractères, des dessins, des ciselures qu'il faut pouvoir reconnaître, caractériser, compter. — Et tout cela, dans l'espace de quelques millièmes de millimètre ; si bien que ces détails, si extraordinairement petits Vif. MOYENS D ETUDE 139 qu'ils atteignent la fraction de longueur d'onde que l'œil humain ne peut plus distinguer et qui marque la limite de la visibilité, il faut souvent, rien que pour les entrevoir, accumuler toutes les ressources et tous les perfectionnements de l'optique moderne. Aussi, quiconque voudra faire des Diatomées une étude sérieuse et trouver dans cette étude toutes les jouissances qu'elle peut pro- curer à un naturaliste devra se munir du meilleur microscope possible accompagné des objectifs les plus parfaits. F'ig. 75. — Microscope de Leeuwenhoek (1673) a : Face antérieure. — b : Face postérieure. La lentille est comprise dans une concavité entre deux lames d'argent fixées l'une à l'autre par trois rivets ; la platine, mue par une vis verticale et une vis horizontale, porte une pointe pour placer l'objet, laquelle pointe est mobile aussi, à l'aide d'un bouton (1). Les bons instruments sont maintenant nombreux et nous n'en décrirons que quelques-uns qui méritent pour les diatomistes une mention particulière et que nous leur recommandons tout spécia- lement. L'un des meilleurs est le microscope grand modèle de la maison Hartnack et Prazmo-wski, de Paris, maison qui appartient aujour- d'hui à MM. Bézu, Hausser et Cic, successeurs de Prazmowski. (1) Voir Journal de Micrographie, ls#7, p. 33" 140 LES DIATOMÉES Ce modèle est depuis longtemps connu de tous les mierograplies, et c'est certainement l'instrument le plus sérieux qui se construise en France; aussi a-t-il été imité partout. Voici, en quelques mots le principe sur lequel il est établi (Fig. 76). Le microscope est, bien entendu, à inclinaison, et la platine, carrée avec les angles mousses, large, garnie de glace ou d'ébonite, est à tourbillon, c'est-à-dire qu'elle peut tourner autour du centre optique dans un plan perpendiculaire à l'axe, quelle que soit l'incli- naison qu'on a donnée à cet axe. Dans ce mouvement, elle emporte avec elle tout le corps de l'instrument, la colonne du mouvement lent et le tube, qui viennent ainsi prendre toutes les positions autour du centre optique, le pied et le miroir restant seuls fixes. Ce mouvement s'exécute avec une précision extrême et il est construit avec une grande solidité, de manière à ce que le centrage exact des pièces soit rigoureusement maintenu. Du reste, cette solidité, cette perfection et cette garantie du cen- trage constituent le but principal qui a été recherché dans la construction de l'instrument tout entier. C'est en vue de ce résultat que la crémaillère à l'aide de laquelle le tube s'élève et s'abaisse, par ce qu'on appelle le mouvement rapide, est montée sur le tube lui-même au lieu d'être fixée sur un cylindre ou coulant fendu dans sa longueur et dans lequel le tube glisse à frottement, comme cela est pratiqué par beaucoup de constructeurs. Ce système du coulant, qui permet de faire mouvoir le tube à la main et même de l'enlever tout à fait, est assez com- mode, mais il nuit considérablement à la solidité, en même temps qu'il rend impossible la conservation du centrage. Au bout de fort peu de temps, le tube finit toujours par ne plus se mouvoir droit, le coulant se fatigue et l'axe optique se déplace toutes les fois qu'on fait tourner le tube sur lui-même. C'est encore en vue de la solidité et de la fixité de l'axe optique que la colonne contenant la vis micrométrique de ce qu'on appelle le mouvement lent se meut sur un prisme triangulaire comme axe et non sur un cylindre. On comprend que, de cette manière, il n'y a aucun déplacement latéral du corps du microscope ni aucun ballottement, comme il s'en produit toujours plus ou moins quand le mouvement lent résulte du glissement d'un cylindre creux sur un cylindre plein. Ici, lame prismatique de la colonne s'applique par tous les points de sa surface et par toute la longueur de ses arêtes sur le prisme fixe qu'elle emboite. Et, pour assurer encore l'exacte application des surfaces, l'un des côtés du prisme servant d'axe est évidé et le vide est rempli par une lame d'acier bombée en dehors, faisant ressort, et dont l'élasticité établit un serrage des surfaces en contact les unes sur les autres. VII. MOYENS 1) ETUDE 141 Sous la platine était naguère placé uno sorte de tiroir latéral, glis- sant dans des coulisses, et qui pouvait être amené sur le côté pour recevoir les divers diaphragmes et les appareils spéciaux d'éclairage. Il suffisait alors de le repousser sous la platine, où sa position était déterminée par un bouton d'arrêt, pour que ces appareils tombassent exactement dans l'axe optique. Ce système a été remplacé aujourd'hui par un levier excentrique qui vient se développer sur le côté, ce qui remplit le même but d'une manière plus commode. Fig. 76. — Microscope, grand modèle, de Hartnack et Prazmowski (Bézu, Hausser et Cie). Tels sont les principaux détails de construction de cet instrument. Il est, en effet, inutile d'ajouter qu'il est monté sur un pied lourd, en fer à cheval, garni de peau par dessous, que le miroir, plan d'un côté, concave de l'autre, mobile dans une glissière et sur un bras articulé, peut donner tous les degrés d'obliquité dans l'éclairage. Enfin, le tube à tirage a 12 centimètres de haut quand il n'est pas développé, 16 centimètres quand il est entièrement tiré. On voit que cet instrument qui, prêt à l'emploi, mesure, au plus, 30 centimètres de haut dans la position verticale et est naturellemeut 142 LES DIATOMEES moins haut encore quand il est incliné, bien que très complet et pouvant recevoir tous les accessoires que nécessitent les recherches les plus délicates, est, néanmoins, de forme et de dimensions très commodes, nullement encombrant, très maniable, et se présente comme un instrument de travail des mieux appropriés, des plus sûrs et ayant, de plus, cet avantage de n'exiger jamais de réparations. Ce modèle a été reproduit dans des proportions un peu moindres mais avec les mêmes dispositions (Fig. 77), par MM. Bézu, Hausser et Cie, qui ont même aménagé un petit modèle fort bien compris, Fig. 77. — Microscope, moyen modèle, de Hartnack et Prazmowski (Bézu, Hausser et Gi0). mais dont la platine n'est plus à rotation. En revanche la sous- platine a été modifiée ; elle est portée par une crémaillère qui per- met d'élever et d'abaisser facilement les diaphragmes et appareils d'éclairage malgré le peu d'élévation de la platine (Fig. 78). Ces instruments sont munis d'un adapteur qui remplace la vis pour fixer les objectifs à l'extrémité du tube. Mais il est un modèle que nous croyons pouvoir recommander d'une manière toute spéciale, c'est le microscope que MM. Bézu, Hausser et Cie construisent particulièrement pour l'étude des bac- téries. Bien qu'établi, comme nous le disons, en vue de la bactériologie, vu. MOYENS D ETUDE 143 cet instrument se prête admirablement aussi à l'étude des Diatomées, grâce à diverses modifications que les constructeurs ont apportées à la forme et au mécanisme du modèle généralement adopté en France et en Allemagne et que nous avons appelé jadis modèle continental par opposition aux modèles anglais et américains construits ordi- nairement sur un autre principe. Cet instrument, en effet, est à platine tournante, mais non plus par ce procédé qui consiste à faire tourner, avec la platine, tout le corps du microscope, la colonne, le tube, l'oculaire, tandis que le pied seul reste fixe. Dans le modèle dont nous nous occu- Fig. 78. — Microscope, petit modèle, de MM. Bézu, Hausser et Cle. pons, les constructeurs ont adopté le système anglais que, depuis de longues années, nous ne cessions de recommander : la platine, circulaire, tourne seule sur son support, autour de son centre, c'est à dire autour de l'axe optique, le microscope entier, corps, tube et oculaire, restant fixes, Cette platine, garnie de glace, qui peut d'ailleurs recevoir un système à mouvements rectangulaires, mesure 9 centimètres 1/2 de diamètre; elle a donc des dimensions suffisantes pour toute espèce de travail. D'ailleurs, sa surface supérieure ne se trouve qu'à 12 centimètres 4/2 au dessus du plan de la table, ce qui permet d'y travailler sans fatigue pour la main, ni pour le bras. Néanmoins, elle est munie, en dessous, d'un condensateur d'Abbé porté par un excentrique à l'aide duquel on peut amener l'appareil 144 LES DIATOMÉES dans l'axe optique ou le rejeter sur le côté. Cet appareil peut être enlevé et remplacé par de simples diaphragmes ou un appareil de polarisation. L'instrument est construit sur les mêmes principes que les précédents, avec une extrême solidité et une précision rigoureuse dans le mécanisme : colonne du mouvement lent montée à prisme, crémaillère portée sur le tube lui-même, pour maintenir l'exactitude du centrage. La vis micrométrique du mouvement lent a exactement 1/4 de millimètre de pas, et le bouton qui la surmonte est divisé sur Fig. 79. — Microscope bactériologique de MM. Bézu, Hausser et Cio. ses bords en 50 parties, ce qui permet de mesurer un mouvement vertical du tube de ~ de millimètre. Et même, grâce à l'index fixe placé devant la tète de vis, on peut apprécier facilement un dépla- cement d'une demi-division, c'est à dire un mouvement vertical de 1/400 de millimètre. Cet instrument est, comme les précédents, muni d'un adapteur pour fixer les objectifs. Le tube, à tirage, mesure 13 centimètres sans le tirage, et 20 cen- timètres quand celui-ci est entièrement développé. Le microscope, porté sur un pied lourd, en fer à cheval n'a, prêt VII. MOYENS D ETUDE 145 à l'emploi, dans sa plus grande dimension et dans la position verti- cale, que 40 centimètres de haut. C'est donc un instrument fort com- mode et très maniable; aussi, malgré son titre de « bactériologique, » nons n'hésitons pas à le considérer comme le microscope spécial des diatomologistes et c'est comme tel que nous le recom- mandons. Nous ne nous attarderons pas à décrire d'autres microscopes de construction française, et nous nous bornerons à ceux dont nous i avons parlé, pensant que l'on ne saurait trouver mieux. Quant aux Fig. 80. — Platine mobile à mouvements rectangulaires, de M. C. Reichert, de Vienne). instruments de construction étrangère, nous en dirons peu de chose. Les microscopes anglais et américains, ces derniers surtout, et particulièrement les grands modèles, sont le plus souvent des chefs- d'œuvre de mécanisme; mais, outre que leur prix, extrêmement élevé, ne les rend guère abordables qu'à quelques privilégiés, ils sont réellement un peu encombrants, avec leurs proportions monu- mentales. Aussi, ce sont plutôt des instruments d'apparat, construits pour l'exhibition, les conférences et les « soirées » que des instru- ments de recherches créés en vue du laboratoire ou du cabinet de travail. Les constructeurs anglais et américains, fort habiles, nous le reconnaissons, fort ingénieux, et auxquels nous sommes certai- nement redevables de nombreuses dispositions utiles, ont, à notre avis, le tort de faire un peu trop grand (pendant que nous faisons 14G LES DIATOMÉES quelquefois trop petit). Tel objectif anglais, par exemple, représente réellement un petit obus qu'il pourrait être dangereux de se laisser lomber sur le pied, tandis que l'objectif français correspondant est plus petit qu'un dé à coudre. Il y a donc, dans l'instrument anglais, une dépense de matière et de travail qui paraît inutile, mais que, naturellement, l'acheteur doit payer. Quant aux petits modèles de microscopes anglais ou américains, comme ils ne possèdent plus, en général, les dispositions des grands modèles et que comme construction ils sont, le plus souvent, loin de valoir les nôtres, il n'y a aucun intérêt à s'adresser à eux. Ajoutons que tous ces instruments, quelqu'admirables qu'ils puissent être, — et ils le sont souvent — ont un défaut commun et sérieux : les systèmes, à levier ou autres, employés pour le mouve- ment lent, sont très fragiles et se dérangent trop fréquemment. Quant aux microscopes allemands, il sont en général établis sur les mêmes principes que les nôtres. Les modèles actuels, en effet, datent de l'allemand Oberhoeuser qui, venu s'établir en France jadis, y subit l'influence des idées alors régnantes de Ch. Chevalier, idées mises en pratique, d'une part, par Nachet père et, de l'autre, par l'allemand Hartnack, successeur d'Oberhœuser à Paris. C'est de cette combinaison qu'est né le modèle continental. En 1870, Hart- nack qui, dans sa haine pour la France, voulait détruire sa maison, retourna à Berlin, laissant pour seul successeur à Paris son associé, le savant émigré polonais A. Prazmowski, l'ancien professeur de physique à l'Université de Varsovie et directeur de l'Observatoire de cette ville. Condamné à mort par les Russes, ce patriote, français de cœur, était venu à Paris où, pendant de longues années, il a travaillé aux progrès de la micrographie. C'est lui qui a su donner à la maison dont il avait pris les rênes la direction si éminemment scientifique qui en a fait la valeur. Cette maison, nous l'avons dit, est aujourd'hui dignement continuée, et l'on peut dire rajeunie, par MM. Bézu et Hausser dont nous avons déjà parlé. Ce court historique montre que le microscope désigné par nous autrefois sous le nom, adopté maintenant, de microscope continen- tal, provient en quelque sorte de la combinaison des idées françaises et allemandes. Il en résulte qu'aujourd'hui c'est encore, en Allemagne comme en France, le modèle classique. Seulement, en Allemagne, il est moins bien construit, sous le rapport mécanique, que dans notre pays. Les prix de vente sont peut-être inférieurs de quelques francs chez certains fabricants, mais les instruments sont de facture très notablement inférieure, et, dans l'étude des Diatomées, la perfection du mécanisme s'impose absolument. C'est pourquoi nous pensons que les micrôgraphès de notre pays VU. MOYENS I) ETUDE 147 n'ont aucune raison d'aller chercher des microscopes en Allemagne. Nous verrons plus loin ce qu'il y a à dire à propos des objectifs. Toutefois, si nous n'avons qu'une très médiocre estime pour les microscopes saxons, bavarois, prussiens, etc., nous devons faire Fig\ 81. — Microscope bactériologique de M. C. Reichert, de Vienne. R. Revolver — S. Miroir. — T. Crémaillère du condenseur Abbé. — f. Porte-diaphragmes du condenseur. — l. Bouton mouvant le portp-diaphragmes. exception pour ceux que construit M. Cari Reichert, de Vienne (Autriche), et qui sont tout à fait recommandables. Cette maison Viennoise est déjà fort ancienne, mais depuis une dizaine d'années, surtout, elle a pris un rang très important dans la 148 LES DIATOMÉES construction des microscopes ; c'est à l'Exposition Universelle de 1878 que nous avons examiné pour la première fois ses instruments déjà fort remarquables et qui nous ont été présentés par le profes- seur Von Fleischl. Depuis lors, elle a fait de grands et incessants progrès et ses microscopes ainsi que ses autres appareils d'optique peuvent être comptés parmi les meilleurs. Nous citerons seulement son grand modèle n° I dont la platine est à tourbillon, c'est-à-dire tourne avec le corps du microscope, et le modèle n° Iï b dont la platine est fixe, ce qui n'a pas d'inconvénient notable, l'instrument étant muni (comme le grand modèle, d'ailleurs) d'un éclairage d'Abbé porté sur une tige excentrique. Ces microscopes sont construits sur les principes que nous avons indiqués plus haut, montés à prisme, avec la crémaillère fixée directement sur le tube et la tête de la vis micrométrique, divisée, tournant devant un index fixe. Ajoutons que M. C. Reichert a inventé un chariot mobile, à mouvements rectangulaires., qui se place à volonté sur la platine, à l'aide de crans d'arrêt et d'une vis de serrage prenant son point d'appui à la face postérieure de la colonne (Fig. 80). Enfin, nous devons signaler, du même constructeur, un micros- cope bactériologique \ à platine carrée (pouvant recevoir le chariot mobile), non rotative, mais munie d'un éclairage du système xVbbé, et qui est un fort bon instrument. La tète de la vis micrométrique est divisée et le nombre des divisions dont elle tourne est indiqué par un index. § % — LES OBJECTIFS Si la construction du microscope doit être parfaite pour l'étude des Diatomées, on conçoit de quelle importance doit être l'excellence des objectifs. Nous ne pouvons faire ici la théorie de la construction des objectifs et de la formation des images microscopiques, nous rappellerons seulement que les objectifs, pour servir utilement à l'observation des fins détails de structure des Diatomées, doivent être doués d'un grand pouvoir de définition et de résolution, c'est-à-dire fournir des images dont les contours et les linéaments soient extrêmement nets et dont les parties soient bien dessinées et distinctement séparées. Quant au pouvoir de pénétration, il est presque toujours suffi- sant pour l'examen de ces petits corps. On sait que ce qu'on appelle VIL MOYENS D'ETUDE 149 le pouvoir pénétrant est la propriété que possèdent certains objectifs de laisser voir à la fois, sans changement de la mise au point, un certain espace dans la profondeur de l'objet. — Cette propriété est généralement incompatible avec une bonne définition et une fine résolution. Mais, comme l'a, d'ailleurs, très bien fait remarquer Helmholz, ce pouvoir pénétrant n'est pas absolument une propriété de l'objectif, il dépend aussi pour une bonne part de l'œil de l'obser- vateur dont la faculté d'accommodation est plus ou moins grande et qui peut distinguer à la fois des points plus ou moins éloignés au dessus et au dessous du foyer mathématique. Pour l'observation des Diatomées, il faut des objectifs ayant les plus grands pouvoirs définissant et résolvant ; ce sont, d'ailleurs, les plus parfaits et les seuls qui permettent déjuger avec certitude l'ordre de superposition des divers points dans l'épaisseur de l'objet. Quant à la pénétration, elle est ici peu utile et il ne faut rechercher que celle qui subsiste dans l'objectif dont la résolution est aussi par- faite que possible, pénétration aidée de la faculté d'accommodation que possède l'œil de l'observateur. Par conséquent, les objectifs doivent avoir la plus grande ouver- ture possible. Quant à l'ouverture, on sait qu'on appelait autrefois ouverture angulaire d'un objectif l'angle du plus grand cône de rayons qui pouvait entrer dans l'objectif. On comprend que, quelle que soit la combinaison optique qu'on ait imaginée pour admettre et iaire con- courir à la formation de l'image le plus large cône de rayons, l'objectif agissant dans l'air comme milieu réfringent extérieur, il y avait toujours un moment où les rayons extrêmes ne pouvaient plus entrer dans l'objectif parce que leur obliquité atteignait Y angle limite au delà duquel les rayons ne pénètrent plus, en se réfractant, de l'air dans le verre, mais se réfléchissent totalement à la surface de celui-ci. Cet angle limité est de 41° 49'. C'est précisément cette impossibilité de faire entrer un très large cône de rayons dans les objectifs observant les objets à travers une couche d'air, objectifs dits à sec, qui a suggéré à Amici l'idée de remplacer la couche d'air, interposée entre l'objet et la face inférieure de la lentille objective, par un milieu dont l'indice de réfraction diffère moins que celui de l'air de l'indice de réfraction du verre dans lequel sont taillées les lentilles. II a essayé plusieurs liquides, et s'est arrêté à l'eau, créant ainsi ce que l'on a appelé des objectifs à immersion. Ces objectifs, en raison du peu de différence entre les indices de l'eau et du verre, ont permis d'agrandir considérablement l'ouver- ture angulaire, si bien que le cône de lumière admise avait un angle qui approchait de 180°. On sait tous les services qu'ont rendus et 15U LES DIATOMÉES que rendent encore journellement ces objectifs à immersion dans l'eau, dont la construction a rendu célèbres les noms de Hartnack et Prazmovsski, de Toiles, dePowell et Leajand et de quelques autres opticiens habiles.. Néanmoins, l'indice de réfraction de l'eau, exprimé par le chiffre 1,33, celui de l'air étant 1, présente encore une différence notable avec celui du verre des objectifs (croion glassj, qui est en moyenne 1,525. C'est pour cela qu'Amici avait pensé à employer la glycérine et certaines essences, comme l'essence d'anis, dont l'indice se rap- proche davantage de celui du verre. S'il n'avait pas renoncé à l'em- ploi de ces liquides, comme peu pratique, il aurait inventé ce qu'on appelle aujourd'hui les objectifs à immersion homogène avec les- quels on use, pour l'immersion, de liquides qui ont sensiblement le môme indice que le verre. Cette appellation, assez mal choisie, veut exprimer que la lumière se meut ainsi dans un milieu, verre et liquide, qui est optiquement homogène puisqu'il a partout le même indice de réfraction. On sait que c'est M. C. Zeiss, d'Iéna qui, sur les calculs du pro- fesseur E. Abbé, et les expériences de M. R. Stephenson, de Londres, a construit les premiers objectifs à immersion homogène, qui fonctionnent avec l'huile essentielle de bois de cèdre, dont l'indice est 1,515. Néanmoins, ce n'est pas là une découverte ni de M. Zeiss, ni de M. Abbé, ni de M. Stephenson : c'est la réalisation, conduite abonne fin, de l'invention d'Amici, laquelle date de 1844. Comme nous l'avons dit, Amici, inventeur de l'immersion, après avoir essayé une série de liquides et entr 'autres plusieurs huiles essen- tielles, s'est arrêté à l'eau, liquide facile à trouver partout, dont l'indice est connu et ne varie pas. Ce progrès était immense et suffisait aux besoins des micrographes de cette époque. C'est aussi M. E. Abbé qui a remplacé la mesure de l'ouverture angulaire des objectifs, laquelle était souvent illusoire, presque tou- jours inexacte et d'ailleurs sujette à des interprétations erronées, par une autre mesure appelée ouverture numérique. Cette quantité est représentée par l'expression : Os« sin u dans laquelle n représente l'indice de réfraction du milieu ambiant, air, eau, huile, et u le demi-angle d'incidence des rayons extrêmes. Ainsi, un objectif à sec qui aurait le maximum d'ouverture angulaire, 180°, aurait pour ouverture numérique 1. En effet, dans la formule 0 = n sin u, l'indice n de l'air est 1, et l'angle u est la moitié de 180°, c'est-à-dire 90° dont le sinus est 1. La formule numérique devient donc 0 = 1X1 = 1- On voit ainsi qu'à cet objectif à sec, d'ouverture angulaire maximun, 180°, et d'ouverture numérique = 1, correspond, comme VII. MOYENS DETUDE 15] puissance optique, un objectif à eau de 97° seulement d'ouverture angulaire. Car le sinus de 48° 1/2, moitié de 97", est sensiblement 0,752, qui, mul.tiplié par 1,33, indice de l'eau, donne pour valeur de l'ouverture numérique : 4. Et les mêmes effets optiques seraient produits par un objectif à immersion homogène, à huile, qui n'aurait que 82° d'ouverture angulaire, car dans la formule 0 —n sin u, l'indice n est 1,52 et sin u ou sin 41°, est sensiblement 0.(>o8. D'où 0=l,o2XO,6o8=l. On verrait ainsi qu'à un objectif à sec qui aurait 128° (dans l'air) d'ouverture angulaire, correspondrait un objectif à immersion dans l'eau qui n'aurait que 85°, parce que tous deux ont la même ouver- ture numérique = 0,90. En effet, la formule donne pour l'ouver- ture numérique du premier 0 — 1 X sin 64° = 1 X 0,90 = 0,90 ; et pour celle du second : 0 = 1,33 X sin 42° 1/2 = 1,33, X b'8 =0,90. De même encore, un objectif à immersion homogène (n — 1,52) qui n'aurait que 92° d'ouverture angulaire, correspondrait à un objectif à immersion dans l'eau (n=i,33) de 112° d'ouverture angulaire, car tous deux auraient pour ouverture numérique : 1,10 comme il est facile de le voir par le calcul. On reconnaît enfin que si, comme nous l'avons vu plus haut, un objectif à eau dont l'ouverture angulaire est de 97° et l'ouverture numérique 1, et un objectif homogène de 82° d'ouverture angulaire ou d'ouverture numérique égale aussi à 1, correspondent à un objectif à sec de 180° d'ouverture angulaire avec ouverture numé- rique égale à 1, tous les objectifs à eau qui ont une ouverture angu- laire plus grande que 97° et tous les objectifs homogènes dont l'ouverture angulaire est plus grande que 82° correspondent à des objectifs à air dont l'ouverture angulaire serait plus grande que 180°. Or ce résultat parait absurde. On ne comprend plus un objectif dont l'angle d'ouverture serait plus grand que 180°, ce qui, en effet, est irréalisable dans la pratique avec les objectifs à sec. C'est précisément ces considérations qui ont excité de longues et vives discussions entre les micrographes sur ce qu'on a appelé la question de l'ouverture. Et c'est aussi une des raisons qui ont amené le prof. Abbé à abandonner la notion de l'ouverture angulaire, laquelle n'a plus de sens à une certaine limite, pour la remplacer par celle de l'ouverture numérique qui s'applique à tous les cas. M. Abbé a inventé un instrument, dit apertouiètre, qui permet de mesurer l'ouverture numérique des objectifs (1). On comprend que nous ne pouvons entrer ici dans les détails d'optique géométrique que soulève cette question de l'ouverture '); Voir Journal de Micrographie, 1881. 152 LES DIATOMÉES numérique et nous renverrons pour plus de développement sur ce sujet aux ouvrages spéciaux (1). Nous ajouterons seulement que, dans la pratique, l'ouverture numérique la plus considérable des objectifs à sec est ordinairement environ 0,95, ce qui correspond à ce qu'on appelait naguère une ouverture angulaire de 140°. L'ouver- ture numérique des objectifs à immersion dans l'eau est ordinaire- ment de "1,10 à 4,20, et celle des objectifs à immersion homogène va à peu près de 1,20 à 1,40. Pour que la définition et la résolution soient au maximum de pouvoir, il faut que l'ouverture numérique de l'objectif soit repré- sentée par un chiffre élevé. En effet, puisque cette quantité est le produit de l'indice de réfraction du milieu dans lequel fonctionne l'objectif par le sinus du 1/2 angle des rayons incidents extrêmes, — dans un même milieu, l'indice ne changeant pas, ce produit est d'autant plus grand que le sinus est plus grand, c'est-à-dire que l'angle lui-même des rayons extrêmes est plus grand. Et il faut que cet 'angle soit grand pour que l'objectif admette et superpose dans l'image un plus grand nombre des spectres de diffractions que forme la lumière en traversant l'objet à fine struc- ture que l'on examine. On sait aussi, en effet, que le professeur Abbé a établi, sur des expériences probantes, une nouvelle théorie de la formation des images dans le microscope, théorie que nous ne pouvons exposer ici, mais que nous résumerons en quelques mots (2). On admettait autrefois que, dans le microscope, l'objectif avait pour fonction de former, par les simples lois de la réfraction dans les lentilles, une image réelle, renversée et agrandie de l'objet, image que recevait l'oculaire et qu'il agrandissait de nouveau, fonctionnant comme une loupe. D'après M. Abbé, « le premier acte de l'objectif consiste plutôt dans la formation d'une image virtuelle à distance infinie avec des rayons parallèles. Le second acte comprend la réfraction ultime à travers la face postérieure de l'objectif et les autres réfractions qui se produisent dans l'oculaire, réfractions par suite desquelles (1) On doit avouer que les ouvrages où ces questions sont traitées d'une manière intelligible pour le plus grand nombre des lecteurs sont fort rares. C'est une lacune que nous avons essayé de combler dans notre petit livre : Théorie du microscope d'après les idées actuelles (sous presse). (2) E. Abbé. Beitrcege zur Théorie des Mihroshops, etc. (Arcfi. fùrmihr. Anatomie, IX, 1873, p. 413, et Monthly rriier. Journal, XIV, 1875.) Helmholtz. Die theoretische Grenze far die Leistungs fœhhigheit des mihroshops, (Ann.de Poggendorf, 1874, Jubelband, etMonth. Micr. Journ. XVI, 1876). ES. Giltay. Inleiding to het gebruih can den Microscoop,. Leideri, 1885* vu. moyens d'étude 153 l'image se forme, à la distance de la vision distincte, avec des rayons visuels divergents. Le premier acte répond simplement à la fonction d'une lentille grossissante ordinaire, tandis que le second répond à la fonction d'un télescope (avec un objectif de petite ouverture) auquel sert d'objet l'image virtuelle, à distance inlinie, formée par le premier processus. » C'est ainsi que se, produit, autrement qu'on l'exposait, mais toujours par les lois de la réfraction, l'image générale donnant la forme et les contours de l'objet. Mais pour la production, dans l'image, des fins détails de structure de l'objet, interviennent des phénomènes de diffraction, analogues à ceux qui se produisent dans les réseaux. On appelle réseau une surface présentant des bandes ou des stries extrêmement serrées, alternativement opaques et transpa- rentes, telles qu'on les produit, par exemple, en traçant sur une lame de verre, avec un diamant, une série de raies très rap- prochées, comme cela se fait dans la fabrication des micro- mètres ; les raies dépolies sont opaques, tandis que les espaces entre les raies sont transparents. Si l'on regarde un point lumineux, comme la flamme d'une bougie, à travers ce réseau, on ne voit pas seulement une flamme, mais une série d'images de la flamme, de chaque coté de celle-ci, sur une ligne perpendiculaire à la direction des stries du réseau. Et ces images sont étalées, colorées des couleurs du spectre, d'autant plus étalées et d'autant plus éloignées les unes des autres que les stries du réseau sont plus rapprochées. Ce sont des spectres de diffraction. » i i » i A ■ ■ ■ - Fig. 82. - Images de diffraction d'une flamme de bougie vue à travers un réseau. Or, pour qu'un objectif fournisse l'image des fins détails d'un objet, stries, ponctuations, — telles qu'il s'en trouve, par exemple, sur les Diatomées — il faut qu'il ait une ouverture suffisante pour recevoir, et faire concourir à la formation de l'image, le plus grand nombre de ces pinceaux diffractéspar les détails de la fine structure. Et il faut admettre que plus l'objectif utilise de ces pinceaux diffractés, plus l'image qu'il fournit est conforme à l'objet, plus, par conséquent, l'objectif définit et résout. Le prof. Abbé, à l'aide d'un objet ou test préparé artificiellement, une petite lame d'argent portant des lignes gravées à la machine à il 154 LES DIATOMÉES diviser, test dont la structure est ainsi connue, a démontré que quand on arrête, avec des diaphragmes convenablement établis, tels ou tels des spectres de diffraction produits par le test, on obtient des images absolument différentes et dont aucune ne repré- sente la réalité. Quant au pinceau central qui donne une image par réfraction, il ne fournit que la représentation de la forme générale, des contours du test. Il en résulte que le même objet, à fine structure, peut fournir des images différentes selon l'objectif avec lequel on l'examine et des images qui peuvent ne pas représenter la réalité. De même, des objets différents peuvent, suivant l'objectif, donner des images semblables. Et, en définitive, on n'est pas certain que l'image d'un objet vu avec le microscope représente cet objet tel qu'il est réellement (1). Maintenant, peut-on espérer qu'en créant des objectifs à ouverture de plus en plus grande, admettant le plus grand nombre possible des spectres de diffraction fournis par un objet à structure très fine, on pourra arriver à distinguer, à résoudre, comme on dit, des détails de plus en plus fins de cette structure? — Non : il y a une limite à la visibilité. Ainsi, deux stries d'une Diatomée qui seraient à une distance l'une de l'autre plus petite que 5^ de millimètre ne pourraient plus être résolues et l'œil ne les séparerait plus. Cette limite de la visibilité a été calculée par Helmholtz qui a trouvé qu'elle est donnée par la formule. 2 sin y. C'est-à-dire que s, la plus petite distance résoluble avec le microscope, est égale au quotient de la longueur d'onde X de la lumière dans laquelle on opère, divisée par le double du sinus de l'angle a que font les rayons incidents avec l'axe optique. Ainsi, si Ton prend la partie la plus lumineuse du spectre, le jaune dans le voisinage du vert, la longueur d'onde x est 0mm, 00055 ; (i) Consultez pour plus de détails, outre les ouvrages précédemment cités: DippeL. Bas Mihroskop und seine Amcendung, 2 Ed. Braunschweig, 1882. Fr. Crisp. On the influence ofthe diffraction in Microscopic vision (Journ. Quekett Micr. Club, 1878;. E. Abbé. Ueber die Grenzen der yeometrischen Optick (Jen. Zeitsch. f, Naturwiss. T. XIV, sup. H. 1, jena, 1881). Fr. Crisp. Notes on Aperture, microscopic vision, etc. (Journ. de Micro^ graphie VI, 1882. J. Pelletan. Théorie dv Microscope, in-8°, 1888. vu. moyens d'étude 155 si Ton suppose un angle d'ouverture maximum, 180°, 1 est égal à 90° dont le sinus est 1 ; la formule donne alors les valeurs numé- riques suivantes : 0*'", 000:27:; = JL de millim. 0.00055 3636 L'agrandissement de l'ouverture des objectifs ne saurait d'ailleurs être indéfini. S'il augmente, comme nous venons de le voir, le pouvoir résolvant des objectifs, il diminue la pénétration et réduit la distance frontale, c'est à dire la distance entre l'objet et la face inférieure de la lentille antérieure ou frontale, laquelle distance, dans les très forts grossissements, devient tellement petite que l'objectif est d'un emploi fort incommode et qu'on a la plus grande difficulté à trouver des couvre-objets assez minces pour permettre la mise au point. Du reste, il y a une relation forcée entre l'ouverture et le gros- sissement. On comprend qu'une grande ouverture, qui augmente le pouvoir résolvant, n'est utile que lorsqu'elle est accompagnée d'un grossissement suffisant. Et réciproquement : un très fort gros- sissement n'est utile que s'il est accompagné d'un grand pouvoir résolvant. M. E. Abbé a déterminé mathématiquement le rapport qui doit exister entre l'ouverture numérique et le grossissement total (par l'objectif et par l'oculaire) du microscope (1). Il a trouvé que ce rapport est lié par une formule assez com- pliquée : 1749 N a = ode dans laquelle le nombre 1719 est une quantité constante, N, le gros- sissement total et o l'ouverture numérique de l'objectif; d et v sont deux quantités connues, d la distance de la vision distincte, que l'on évalue ordinairement à 250 millim., et r l'angle visuel (en minutes) sous lequel doivent se présenter les plus petites distances à observer pour être perçues par l'œil. Pour un bon œil, cet angle peut n'être que de 1 '. Quant à À, c'est la longueur d'onde de la lumière employée, et si on la pose = 0,00055, longueur d'onde de la lumière jaune- verte, la formule donne une relation, dont tous les termes sont connus, entre N, le grossissement total, et o, l'ouverture numérique. De sorte que pour un grossissement donné qu'on veut réaliser* oïl peut calculer l'ouverture numérique que devra avoir l'objectif; et (1) E. Abbê. The relation of apertufe and poioer in the microscope. (Journ. ofR.Micr. S., II, 1882). 156 LES DIATOMÉES réciproquement, pour une ouverture donnée, on peut calculer quel est le grossissement que devra fournir le microscope. Il faut noter que dans cette relation entre le grossissement et l'ou- verture numérique, il s'agit du grossissement linéaire total, c'est-à- dire tel qu'il est produit par l'objectif, la longueur optique du tube et l'action de l'oculaire. Il reste dune à établir, dans ce grossisse- ment total, la part de l'objectif seul et le rapport qui doit exister, pour un bon fonctionnement de l'appareil, entre le grossissement propre de l'objectif et le « supergrossissement » réalisé par le tube et l'oculaire. Ce calcul a été fait aussi par M. Abbé (ï) et il est trop compliqué pour que nous puissions l'exposer ici, mais en voici les résultats principaux : Pour une ouverture numérique donnée, le grossissement fourni par l'oculaire et rallongement du tube peut être plus grand, maxi- mum, avec un objectif à immersion bomogéne; il doit être plus petit, minimum, avec un objectif à sec. (Il faut encore tenir compte, dans la détermination de cette valeur, de l'éclairage et de la nature de l'objet.) Pour les objectifs à sec et à eau, le grossissement par le tube et l'oculaire peut être au maximum de i fois en diamètre, environ, et de 6 fois pour les objectifs à immersion bomogéne. Pour les objectifs à petite ouverture, cette limite peut être portée jusqu'à 8 et 40 lois en diamètre. Toutes ces données sont fort utiles, non-seulement aux opticiens, parce qu'elles leur permettent de calculer l'ouverture numérique qu'ils doivent donner à un objectif fournissant tel grossissement déterminé, et réciproquement, — mais encore aux micrographes, qui y trouvent les indications nécessaires pour tirer le meilleur parti de leurs instruments et établir des combinaisons satisfaisantes avec les oculaires dont ils disposent et les objectifs dont ils connaissent l'ouverture numérique et le grossissement. A propos du grossissement, nous rappellerons qu'il est plus grand sur l'axe optique, dans le sens de la profondeur, que dans le sens transversal. En effet, le grossissement dans la direction de Taxe (axial) est directement proportionnel au carré du grossissement latéral, mais il est inversement proportionnel à l'indice de réfrac- tion du milieu dans lequel est l'objet. Ainsi, les objets apparaîtraient extrêmement déformés par cette (1) E. Abbé. Division of the entire poicer of the microscope between ocalar and objective (J. of R. M. S., III, 1883, Zeit. f. wiss. Mihrosh, II, 1885). vu. moyens d'étude 157 différence considérable entre le grossissement en profondeur et le grossissement en largeur, si l'œil pouvait apprécier cette différence dans toute son étendue, et la déformation serait bien plus accusée si le phénomène se présentait inversement, c'est-à-dire si l'agran- dissement était plus considérable dans le sens transversal. En effet, dans le sens de l'axe on l'apprécie moins, surtout avec les objectifs à grande ouverture qui ont peu de profondeur. Avec les objectifs à petit angle et à foyer profond, la déformation est très notable et est de nature à tromper tout à fait l'observateur sur la forme réelle de l'objet, ce qui est encore une cause d'infériorité de ces objectifs. Quoi qu'il en soit, plus ou moins marqué, le fait est réel. Nous avons insisté un peu longuement sur ces questions parce qu'elles intéressent autant l'opticien, qui construit les objectifs, que le micrographe qui les emploie, et qu'on les trouve rarement exposées d'une manière intelligible dans les ouvrages français sur le microscope. Nous n'avons pas cru, toutefois, devoir entrer dans des explications plus élémentaires, parce que nous ne faisons pas ici un ouvrage d'optique micrographique, et que nous avons dû supposer que nos lecteurs ne sont pas complètement étrangers à la connaissance de la construction et du mode de fonctionnement du microscope. C'est pourquoi, à propos des objectifs, nous ne nous occuperons pas des moyens que les opticiens emploient pour corriger ce qu'on appelle Yaberration de sphéricité des lentilles, aberration qui est duc à ce que ces lentilles, en raison de leur forme même, ne réfractent pas la lumière également dans toutes leurs parties, dans la partie centrale et dans les zones périphériques. Mais nous dirons un mot de X aberration chromatique, parce que la recherche d'un mode de correction plus complet de cette aberration a amené la construction de nouveaux objectifs, dits apochromatiques. Tout le monde sait que le prisme dévie, ou réfracte, les rayons de la lumière : c'est sur ce phénomène qu'est fondée l'action des lentilles, que l'on peut considérer comme composées d'éléments pris- matiques réunis. Mais, en même temps qu'il les dév ie de leur direc- tion première, il les disperse, c'est-à-dire qu'il sépare le rayon de lumière blanche en divers rayons colorés dont l'ensemble constitue ce qu'on appelle un spectre. Le pouvoir réfringent des diverses substances, pouvoir en vertu duquel elles dévient la lumière de sa direction primitive, n'est pas proportionnel à leur pouvoir dispersif, pouvoir en vertu duquel elles la séparent en un spectre plus ou moins large. C'est- à-dire qu'une substance peut dévier la lumière autant qu'une autre, 158 LES DIATOMÉES mais la disperser moins ou davantage. De telle sorte qu'on peut imaginer une combinaison de deux prismes, disposés en sens con- traire, telle que les rayons qui la traversent soient redressés dans leur direction primitive, mais restent encore séparés comme cou- leurs ; ou bien, telle que les rayons colorés soient réunis sous forme de lumière blanche, mais que le rayon blanc émergent reste encore dévié de sa direction primitive. C'est sur cette dernière combinaison qu'est fondé X achroma- tisme, procédé qui permet de faire des lentilles composées qui concentrent la lumière, mais qui ne la dispersent pas en rayons colorés. Tel est le principe, d'une manière générale. Malheureusement, les choses ne se passent pas, en réalité, d'une façon aussi simple. C'est qu'en effet le pouvoir dispersif partiel n'est pas proportionnel au pouvoir dispersif général. C'est-à-dire que si une substance donne, dans les mêmes conditions, un spectre deux fois plus long qu'un autre, chacune des diverses parties colorées n'y occupera pas un espace double de celui qu'elle occupe dans l'autre spectre. Il en résulte que, dans la pratique, il est impossible de super- poser complètement, dans toutes leurs parties, deux spectres destinés à s'annuler l'un par l'autre de manière à recomposer la lumière blanche. Il reste toujours des aberrations chromatiques partielles ou résiduelles qui donnent encore un spectre secondaire, moins sensible, il est vrai, mais qui altère encore la netteté des images. On ne peut superposer exactement que deux couleurs, par exemple dans la partie centrale, de sorte que les objectifs faits avec les len- tilles ainsi corrigées donneront encore un champ sensiblement coloré sur les bords, et des images teintées sur leur contour. De plus, ce spectre secondaire, empêchant toutes les radiations de converger en un foyer unique, donne encore naissance à une aberration chromatique de sphéricité et à une différence chromatique de grossissement pour les différents rayons colorés, résultant de la différence de réfrangibilité de ceux-ci et de leur différence de réfraction dans les diverses parties, centrale et péri- phériques, de la lentille. Dans la pratique micrographique, les objectifs formés de lentilles ainsi achromatisées ne conservent que des traces peu gênantes des aberrations résiduelles, qu'ils soient sur-corrigés ou sous-cor- rigés, comme on dit, suivant que ce sont les rayons rouges ou les rayons violets qui dominent dans le spectre secondaire, l'achroma- tisation étant faite pour la partie centrale du spectre, la netteté des images est peu altérée. Toutefois, avec les très forts grossissements et les grandes ouvertures, et surtout quand l'objectif doit servir à la micro- VII. MOYENS D'ETUDE 150 photographie, les inconvénients de l'achromatisme incomplet deviennent sensibles. Avec tous les verres connus jusqu'à ce jour et la construction la plus parfaite, il est impossible de les éviter et, pour y remédier, il a fallu fabriquer des verres nouveaux. C'est ce qu'a entrepris, il y a quelques années, le Dr 0. Schott, de Witten (Westphalie), qui, de concert avec le prof. E. Abbé et grâce aux subsides fournis par le gouvernement prussien, a fabriqué des verres dans lesquels l'acide borique et l'acide phosphorique remplacent plus ou moins l'acide silicique et dont la composition est fort complexe. Dans ces verres, le pouvoir dispersif partiel des divers rayons est à peu près proportionnel au pouvoir dispersif total, et d'après des rapports très divers suivant les échantillons. Plusieurs, ayant le même indice de réfraction, ont des pouvoirs dispersifs très différents, et réciproquement. C'est avec ces verres boriques et phosphoriques que M. Zeiss a construit ses objectifs apochromatiques. Ceux-ci contiennent une lentille de plus que les anciens, et leurs verres sont achromatisés pour trois couleurs, au lieu de deux, de sorte qu'il ne reste qu'extrêmement peu d'aberrations résiduelles ou qu'un spectre tertiaire extrêmement faible. L'aplanétisme, c'est-à-dire la correc- tion de l'aberration de sphéricité, est obtenu pour deux couleurs du spectre. Voici d'ailleurs, d'après M. Dippel, les avantages des objectifs apochromatiques : • 1° Utilisation de toute l'ouverture de l'objectif, c'est-à-dire en pratique, possibilité de construire des objectifs de plus grande ouverture utile. 2° Reproduction fidèle des couleurs de l'objet. 3° Possibilité d'agrandissement considérable de l'image par l'oculaire sans altérer sa netteté, parce que les défauts de l'objectif, qu'un fort grossissement par l'oculaire rend plus sensibles, n'existent plus dans ceux-ci. 4° Accouplés! avec de nouveaux oculaires, dits compensateurs, ils donnent une coloration égale de tout le champ et la même netteté de l'image dans toutes les parties du champ. Mais le plus grand avantage de ces objectifs est surtout pour la photo-micrographie, parce qu'ils réunissent en un même point les foyers chimique et lumineux. Les objectifs apochromatiques sont donc accompagnés d'oculaires nouveaux, dits compensateurs, qui ont, en effet, pour fonction de compenser les différences chromatiques du grossissement et les aberrations hors de l'axe. Ces oculaires ont la lentille de l'œil plus 160 LES DIATOMÉES large et la distance de cette lentille au point oculaire, où doit s'appliquer l'œil, plus grande. Enfin, on peut, comme nous l'avons dit, réaliser avec eux dc^ grossissements par l'oculaire beaucoup plus forts qu'avec les oculaires ordinaires accouplés aux objectifs non apochroma tiques. Anus avons vu qu'on ne peut guère, avec ces derniers, sous peine d'altération dans l'image, en employant même les meilleurs objectifs à immersion homogène; grossir plus de 6 fois avec l'oculaire ordinaire; or, avec les objectifs apochromatiques on peut employer des oculaires compensateurs grossissant jusqu'à 18 fois. Il va là, comme on le comprend; un avantage très sérieux, car il devient possible, avec un seul objectif apochromatique, de réaliser toute une série de grossissements, limitée seulement, pour ainsi dire, par l'insuffisance de ia lumière. En effet, avec un objectif apocliro- matique grossissant de 10 diamètres et ayant un pouce de foyer, ou peut obtenir une série de grossissements par les oculaires compen- sateurs nos 2, 4, 8, 4-2, 18, de 20, 40, 80, 128 et 180 diamètres, c'est-à-dire jusqu'à 3.607 fois en surface si l'éclairage est suffisant. Les objectifs apochromatiques sont fabriqués par divers construc- teurs, notamment par MM. Zeiss, dléna ; Powell et Lealand, de Londres ; et Cari Reichert, de Vienne. Nomenclature des objectifs On trouve aujourd'hui dans le commerce un grand nombre de bons objectifs. On comprend que nous ne pouvons pas les passer tous en revue et les décrire en détail, nous nous bornerons à signaler brièvement ceux qui nous paraissent devoir rendre les meilleurs services aux diatornistes comme à tous les micrographes qui s'occupent des recherches les plus délicates et exigeant les instruments les plus perfectionnés. C'est d'ailleurs de ces objectifs que nous bous sommes servi. Parmi les objectifs de construction française, nous recomman- derons particulièrement ceux de l'ancienne maison Hartnack et Prazmowski (Bézu, Hausser et Cie) dont la renommée est depuis longtemps faite. Ces opticiens construisent trois séries d'objectifs : à sec, à immer- sion dans l'eau, à immersion homogène. La première série comprend 9 objectifs à monture fixe, numérotés de 1 à 9, et ayant des distances focales, en pouces, de : 2, 1, 3/4, 1/2, 4/4, i/o, 4/6, 4/9, 4/41. Ils sont tous à grande ouverture et ont une bonne distance frontale, c'est-à-dire qu'ils laissent un espace suffisant entre la face inférieure plane de la lentille frontale vu. moyens d'étude 101 et le couvre-objet, pour qu'on puisse employer des lamelles facile- ment maniables. Nous pensons que les diatomistes pourront se contenter des nu" 2 et 4, comme chercheurs, fi* *>, qui est un bon objectif de travail avec 1/4 de pouce de foyer, n° 7 et nos 8 ou 9. Le n° 7, 1,0 de pouce, est un des plus précieux pour les recher- ches courantes, son ouverture numérique est 0,95. Il résout très facilement le Pleurosigma angulatum dans la lumière cen- trale. Le n° 8, 1/9 de p., a une ouverture numérique de 0,97. Le n° 9, 1/11 de p., a une ouverture numérique de 0,98. Tous ces objectifs sont admirablement clairs, donnent un champ très plan, une image très brillante et parfaitement définie. Ils supportent sans inconvénient sensible un très fort grossissement par l'oculaire. On peut ainsi pousser le grossissement par les oculaires jusqu'à 450 diamètres avec l'objectil n° 7 et jusqu'à 800 et 1000 diamètres avec les objectif 8 et 9. Toutefois, nous pensons qu'on peut remplacer l'objectif n° 9 à sec par un objectif à immersion. La série des objectifs à immersion dans l'eau comprend 5 numéros : 9, 10, 18, 15 et 18, correspondant à des longueurs focales de 1/12, 1/16, 1/25 1/33 et 1/50 de pouce. Tous ces objectifs sont munis d'un système de correction pour l'épaisseur du couvre-objet, et sont absolument de premier ordre (1). C'est à leur aide qu'ont été faites presque toutes les découvertes dans le monde des infiniment petits, et c'est de tous ceux qui ont le plus contribué à la connaissance des Diatomées. Les trois premiers sont les plus pratiques, et c'est le u° 9, (1/12 de pouce,) que nous proposons pour remplacer le n°fc9 à sec, quand on possède le n° 8 et qu'on est obligé de réduire un peu sa collection d'objectifs. Le n° 9 à immersion dans l'eau a une ouverture numérique de 1,20. Le n° 10, le plus célèbre de tous, a 1/16 de p. de foyer et une ouverture de 1,20. Ces objectifs résolvent aisément le Surirella gemma, le Frus- tuliq saœonica, HAmphipleura pellucida, et tous les tests les plus difiieiles. Il en est de même du n° 13, qui a 1/25 de pouce de foyer, et 1,20 (1) Voir pour les détails de la correction et autres : J. Pklletan. Le Microscope, son emploi et ses applications. Paris, 1876, in-8° 300 fig. « Théorie du Microscope d'après les idées actuelles. Paris 1888. 162 LES DIATOMKKS d'ouverture numérique. On peut obtenir avec lui un grossissement utile de 2,500 à 3,000 diamètres. La série des objectifs à immersion homogène de MM. Bôzu et Hausser ne comporte que deux numéros, ce qui nous paraît abso- lument suffisant pour les besoins des diatomistes les plus exigeants. Ils portent les nos 9 et 1 1 . Ces deux instruments sont parfaits et certainement valent autant, souvent mieux, que les objectifs similaires du meilleur constructeur allemand (1). Ces opticiens ont remplacé l'huile de cèdre, pour l'immersion, par une solution d'hydrate de ehloral dans la glycérine, solution qui a le même indice 4,52 que cette huile et est d'un usage beaucoup plus commode; on peut l'appliquer sur toutes les préparations sans crainte de les gâter et d'attaquer les vernis ; elle est solublc dans l'eau, ne tache pas, et tous les objets qui en ont été mouillés (la lentille frontale des objectifs tout d'abord) peuvent être facilement lavés. Le n° 9 à immersion homogène a 1/12 de pouce de foyer et une ouverture numérique de 1,25 à 1,30; le n° 11 a 1/18 de pouce de foyer et une ouverture de 1,25. Les objectifs de MM. Bézu, Hausser, sont accompagnés d'une belle série d'oculaires dont l'un, le n° 2, est muni d'un micromètre por- tant un centimètre divisé en 10 parties et que l'on peut mettre au point à l'aide d'un collier. Nous avons signalé M. C. Reichert de Vienne (Autriche), pour la bonne construction de ses microscopes, nous pouvons le citer aussi pour ses objectifs dont la série est fort nombreuse. Les objectifs à sec, dont plusieurs sont à correction, sont au nombre de 14, depuis 2 p. 1/2 de foyer jusqu'à 1/12, avec des ouvertures numériques allant de 0,17 à 0,95. Les objectifs à immersion dans l'eau, avec correction, sont au nombre de 5, avec des foyers de 1/15, 1/18, 1/20, 1/30 de pouce et des ouvertures numériques variant de 1,10 à 1,20. Trois objectifs à immersion homogène, de 1/15, 1/20, 1/30 de pouce de foyer, ont des ouvertures numériques variant de 1,25 à 1,40. M. C. Reichert construit aussi maintenant des objectifs apochro- matiques, accompagnés d'oculaires compensateurs qui sont d'excel- lente qualité. Nous ne nous attarderons pas à la description des objectifs de cons- truction étrangère qui sont fort nombreux, mais nous pensons que tout ce qu'on va chercher à l'étranger peut se trouver dans notre pays. (1) Voir Journal de Micrographie^. IX, 1885, p. 313* vu. moyens d'étude 163 L'opticien qui a construit les meilleurs objectifs du monde fut R. B. Toiles, de Boston, mort malheureusement, il y a quelques années. Nous avons été jadis le zélé propagateur, en France et sur le continent, de ces admirables instruments. Aujourd'hui, le fils de son ancien maitre Ch. Spencer, de Geneva, est à notre avis le pre- mier opticien du Nouveau-Monde. En Angleterre, MM. Powell et Lealand occupent le premier rang et leurs objectifs sont tout à fait supérieurs. Nous pouvons citer sur- tout le 1/8 de p. (new formula), à immersion dans l'eau, qui est célèbre, le 1/16 à eau et le 1/12 à immersion homogène, etc. Malheureusement, les objectifs anglais et américains sont d'un prix tellement élevés qu'ils restent à peu près inabordables pour la majorité des micrographes. En Allemagne, les constructeurs ne font pas très cher, mais ils font grossier, et nous n'avons à citer que M. C. Zeiss, bien connu d'ailleurs, et qui a construit les premiers objectifs à immersion homogène. Ce constructeur, aidé pour la partie théorique par son beau-frère, le professeur Abbé, occupe aujourd'hui une des pre- mières places dans l'optique scientifique. Il a certainement réalisé un progrès considérable pour l'Allemagne où, jusqu'à lui, on cons- truisait fort mal. Toutefois, nous avons dit que, pour la partie méca- nique, les bons instruments français, tels que ceux que nous avons décrits, sont très supérieurs aux meilleurs instruments allemands, et pour la partie optique, on trouve aussi bien en France. Nous devons, cependant, ajouter quelques mots relativement aux objectits apochromatiques que construit M. C. Zeiss. Ces objectifs composent trois séries : une série à sec, une série à immersion dans l'eau, une série à immersion homogène. La série à sec comprend trois numéros: un objectif de 2/3 de pouce (16 millirn.) de foyer, avec une ouverture numérique de 0,30 ; un objectif de 1/3 de pouce (8 millirn.) de foyer, avec une ouverture de 0,60 ; un objectif de 1/6 de p. (5 millirn.), avec une ouverture de 0,95. — Tous sont construits pour fonctionner avec une longueur de tube de 16 centimètres (tube des microscopes continentaux) et 18 centimètres en comptant la hauteur de la monture (1). Il n'y a, actuellement, qu'un seul objectif à immersion dans l'eau (avec correction). Il a 1/10 de p. de foyer et une ouverture numé- rique de 1,25. La série des objectifs apochromatiques à immersion homogène (lj Une autre série est construite pour les tubes anglais, de 25 centimètres- Elle comprend 3 objectifs de 1 p., 1/2 p. 1/4 de p. (24, 12, 6 millimètres^ avec des ouvertures numériques 0,30, 0,60, 0,95; 164 LES DIAToMKKS comprend deux numéros doubles : deux objectifs de 1/8 de p. (3 millim.) dont l'un a une ouverture numérique de 1,30 et l'autre de 1,-40; deux objectifs de 1/12 de p. avec ouverture de 1,30 et de 1,40. — Les uns et les autres sont sans système de correction. Il y a aussi 6 oculaires compensateurs, dont les grossissements sont respectivement 1, 2, 4, 8, 12. 18. 8 3. — CONDENSATEURS ET APPAREILS DIVERS La résolution des Diatomées et particulièrement des espèces difficiles, telles que le FrustuAia sacooniea, le Surirella gemma. Y Amphi'pleura peïluçiâa, etc. > exigent non seulement l'emploi des meilleurs objectifs, mais divers artifices de lumière que l'on réalisait autrefois à l'aide d'un grand nombre d'instruments divers, con- densateurs, réflecteurs, illuminateurs, éclairages obliques, parabo- loïdes, etc. — dont le perfectionnement dos objectifs à immersion homogène a de plus en plus restreint l'emploi et qui sont, à peu près tous, remplacés aujourd'hui par l'appareil qu'on appelle éclairage ou condensateur d' Abbé. Il y a, d'ailleurs, beaucoup de condensateurs, et l'idée de remé- dier à l'absorption considérable de lumière _ a Fig. 84. — Projecteur de Gundlach (marche du rayon ab). Vertical-illuminateur de Beck. (Vertical illuminatorj. — Cet instrument se compose d'une douille qui se visse sur le micros- cope au-dessus de l'objectif. Elle porte par en bas un pas de vis sur lequel on adapte l'objectif. La hauteur du tube est ainsi augmentée de la hauteur de la douille. Celle-ci est percée, sur le côté, d'un trou devant lequel, dans l'axe du tube, est placée une petite rondelle de verre très mince (un couvre-objet) incliné à 45° sur l'axe. Si l'on place une lumière devant le trou latéral, les rayons qui pénétreront par cette ouverture iront frapper la lamelle de glace, se réfléchiront par en bas, suivant l'axe, traverseront l'objectif, qui servira ainsi de condensateur, et iront se concentrer au foyer de cet objectif, c'est-à-dire sur l'objet. La lamelle de glace n'occupe pas tout le diamètre du tube, mais seulement la partie centrale, de sorte qu'elle ne gène pas sensible- ment la marche des rayons qui, partis de l'objectif, vont former l'image dans l'oculaire. De plus, elle est très mince et parfaitement ransparente. vu. moyens d'étude 171 Condensateur achromatique de Swift. — Cet appareil est plus qu'un condensateur ordinaire ; il peut remplacer à lui tout seul la sous-platine des instruments anglais. Il se compose d'abord d'un condensateur proprement dit A (Fig. 85), c'est-à-dire d'un système optique de 2/3 de pouce de foyer et de 0,93 d'ouverture numérique (140° ouverture angulaire). Sous les lentilles de ce système est un diaphragme à contraction que l'on manœuvre à l'aide du petit levier B. Le disque tournant E est percé de quatre cellules rondes, dans lesquelles on peut placer des rondelles diaphragmes à ouverture plus ou moins large ou à Fig. 85. Condensateur achromatique avec polarisateur, de J. Swift. éclairage latéral, ou des lames de sélénite pour la lumière polarisée. On peut amener toutes les cellules dans l'axe du condensateur et les rondelles y peuvent tourner autour de leur centre. Enfin, deux cellules opposées diamétralement D (une seule est visible dans la figure) peuvent être amenées dans l'axe au-dessus du plan du dis- que E, et recevoir des rondelles de mica tournant autour de leur centre, lorsqu'on opère avec la lumière polarisée. Un prisme pola- riseur F, porté par un excentrique, peut être poussé dans Taxe optique. Cet instrument se monte sous le microscope à la place de la sous- platine, à l'aide de la crémaillère G et se centre avec les petites vis C, C. 172 LES DIATOMEES Condensateur ou éclairage d'Abbé. — Nous avons déjà dit que le condensateur proprement dit qui fait partie de cet instrument n'est pas nouveau ; on le construisait depuis longtemps en France, lorsque M. Abbé eut l'idée d'y faire adapter par M. Zeiss un système spécial pour l'agencement et la manipulation des diaphragmes. Ce système, extrêmement commode, bien que le mécanisme en soit le plus souvent assez grossièrement construit en Allemagne, a fait de l'Eclairage d'Abbé le complément à peu près indispensable de tous les microscopes destinés aux études les plus délicates. Nous avons été le premier à en apprécier la valeur, à l'introduire Fig. 80. — Condensateur d'Abbé. en France, à le décrire (1) et à le recommander aux micrographes. Depuis lors, cet instrument a été adopté partout, et a remplacé à peu près tous les autres appareils modiiicateurs de l'éclairage. Il se compose de deux parties. (Fig. #6.) La première est le condensateur proprement dit, S, composé de 2 ou 3 lentilles, suivant le modèle, et constituant un système optique correspondant à une lentille de 2/5 de pouce de foyer (lo millini.i, mais n'ayant que 2 millimètres de distance frontale réelle. Ce système doit être monté sous la platine de manière que la face supérieure de la lentille frontale aflleure le niveau supérieur de cette platine et (1) J. Pelletan : Le Microscope, son emploi, etc. p. 1 15* yii. moyens d'étude 173 vienne au contact du porte-objet, lequel, ayant un peu moins de 2 millimètres d'épaisseur, aura le foyer du système sensiblement au niveau de sa face supérieure. On peut établir une immersion entre la lentille et le porte-objet pour constituer un milieu optique homo- gène. Ce condensateur est porté par un anneau T, soutenu par un bras horizontal tenant à une pièce métallique qui se fixe sous la platine et porte, en bas, un miroir Sp, plan et concave. La seconde partie de l'instrument est portée par l'anneau r. Celui-ci est soutenu par la mèmepièce métallique, à l'aide d'un excentrique qui tourne autour d'un pivot z et permet d'amener tout ce système en dehors de l'axe optique à droite de la platine. L'anneau r se trouve ainsi découvert, ainsi que le plateau B qu'il supporte. Celui-ci est percé d'une large ouverture ou cellule dans laquelle on peut placer des rondelles diaphragmes percées de trous de différents diamètres ou des écrans à fentes marginales ou latérales. La cellule étant ainsi garnie du diaphragme choisi, on re- pousse le système sous le condensateur, dans l'axe optique. Le plateau B porte une crémaillère sur laquelle roule un pignon commandé par le bouton molette g. Si l'on tourne le bouton dans un sens ou dans l'autre, on fait avancer ou reculer le plateau B et le diaphragme qu'il porte sur la monture r fixe. Le pinceau qui passe par le trou du diaphragme devient ainsi de plus en plus oblique en avant ou en arrière. Mais, de plus, en poussant le bouton g, sans le faire rouler sur la crémaillère, on peut faire tourner le plateau B sur l'anneau r, par un mouvement de rotation autour de l'axe optique. On peut ainsi éclairer obliquement la préparation de tous les côtés, et diriger le pinceau lumineux dans tel sens que l'on veut, par exemple perpendiculairement à certaines stries de l'objet pour en faciliter la « résolution ». Cet instrument, dont le maniement est facile et dont on apprend très vite à se servir, est extrêmement commode, et l'on résout aisé- ment à son aide les tests les plus difficiles. On le construit mainte- nant partout, et bien qu'il ait été un peu modifié dans sa forme par les divers fabricants pour l'adapter à leurs instruments, le prin- cipe est resté le même : un système condensateur, analogue à celui de Dujardin, pouvant arriver au contact de la préparation ; et, par-dessous, un mécanisme permettant de mouvoir des diaphragmes dans un plan perpendiculaire à l'axe optique et de les faire tourner sur eux-mêmes, dans ce plan, autour de l'axe optique comme centre. C'est la réalisation de ce mécanisme qui constitue l'invention de M. Abbé. 174 LES DIATOMEES Chambres claires. — Il ne rentre pas dans notre plan de décrire un plus grand nombre d'appareils accessoires, qui, du reste, n'inté- ressent pas d'une manière particulière les diatomistes. Nous signa- lerons, seulement pour mémoire, les chambres claires qui sont nécessaires pour dessiner ad naturam les objets microscopiques et pour en évaluer le grossissement. Il y a un très grand nombre de ces instruments et beaucoup de bons modèles, mais tous exigent de l'opérateur une certaine habitude pour pouvoir s'en servir utilement. Nous rappellerons spécialement Fig. 87. — Chambre claire d'Oberhaeuser (construite par MM. Bé/u, Hausser et Cie). les modèles de M. Govi, de M. Malassez, de M. Hofmann, et celui d'Oberhaeuser qui, bien qu'ancien, n'en est pas moins un des meil- leurs et des plus commodes. Cette chambre claire s'applique à tous les microscopes disposés verticalement ; elle se met à la place de l'oculaire, qu'on enlève, et transporte le champ sur la table au pied du microscope. (Fig. 87.) Nous n'avons pas à donner ici la théorie de ces instruments qui permettent de voir à la fois le champ du microscope et une feuille de papier placée sur la table et paraissent, par conséquent, trans- porter l'image sur le papier, où l'on peut la dessiner. Nous vu. moyens d'étude 175 renverrons pour toutes ces questions, ainsi que pour la mesure des grossissements, aux ouvrages de micrographie générale (1). § IV. — ÉCLAIRAGE On se sert pour éclairer le microscope de toutes les sources de lumière, et nous n'avons pas à apprendre ici à nos lecteurs comment on en dirige les rayons sur l'objet. Nous ferons seulement remarquer que pour la résolution des tests difficiles et particulièrement des Diatomées délicates, comme les Surireîla gemma, Amphipleura pellucida, etc., il est besoin d'une lumière très intense. La lumière émanée d'un nuage blanc fortement éclairé par le soleil est une des plus propices, mais la lumière solaire directe aide extraordinairement à la résolution des plus fines stries des Diatomées, résolution qui devient alors très facile, même avec des objectifs de qualité secondaire et d'ouverture numérique modérée, pourvu que le grossissement soit assez fort pour « séparer » net- tement ces stries. Lumière solaire monochromatique. — Seulement, il est indis- pensable que cette lumière solaire qui, si on la recevait telle quelle dans l'œil à travers les systèmes optiques, ne ferait qu'aveugler l'observateur, il est indispensable, disons-nous, que cette lumière soit monochromatisèe, c'est-à-dire réduite à une seule des radia- tions colorées qui composent la lumière blanche, et c'est la lumière bleue qui agit le mieux en fatiguant le moins. Pour réaliser cet éclairage monochromatique, il y a un moyen très simple qui consiste à faire traverser aux rayons solaires, avant de les diriger sur le miroir, une cuve en verre à faces parallèles de quelques centimètres d'épaisseur et contenant une dissolution d'un sel de cuivre ammoniacal, sulfate ou azotate, parfaitement limpide, du reste. On obtient, comme on sait, cette solution en dissolvant dans de l'eau distillée une certaine quantité de cristaux de sulfate ou d'azo- tate de cuivre. On ajoute alors de l'ammoniaque, qui produit aussitôt un précipité blanc bleuâtre d'hydrate d'oxyde de cuivre. On verse de l'ammoniaque avec précaution, en agitant la liqueur avec une baguette de verre, et le précipité ne tarde pas à se dissoudre. Il ne (1) Voir J. Pelletan. — Le Microscope, son emploi et ses applications. 1 vol. 775 p. et 300 grav., in-8. Paris, 1876. 176 LES DIATOMEES reste plus qu'à filtrer et à étendre, au besoin, la solution avec de l'eau distillée si sa nuance est trop foncée. La cuve de glaces à faces parallèles est alors placée devant le miroir de manière à ce que les rayons solaires traversent la couche liquide avant d'arriver au miroir. On est frappé alors de la facilité avec laquelle toutes les Diatomées se résolvent dans la lumière oblique et même avec un éclairage axial. On a cherché à remplacer la solution de sel de cuivre par un écran formé avec une lame de verre bleu au cuivre. Les résultats sont beaucoup moins bons, néanmoins cette disposition peut souvent être utile. On a placé aussi des verres teintés en bleu plus ou moins Fig. 88. — Héliostat de Prazmowski. foncé sous la platine, sous la préparation ; puis, sur la lentille de l'œil (de l'oculaire), et cela facilite souvent la perception des fines stries. M. E. Mauler, de Genève, a même réussi à préparer des Diatomées sur une lame povte-objet en verre bleu avec un couvre-objet pareil- lement en verre bleu, et la résolution de ces tests s'est trouvée notablement facilitée. On se servait davantage de la lumière monochromatique autrefois, avant qu'on possédât les objectifs puissants et perfectionnés que l'on a aujourd'hui. Néanmoins, nous recommandons ce procédé commode et facile de résolution des Diatomées. On peut compléter cette installation avec l'excellent héliostat de Prazmowski (Fig. 88), petit instrument fort ingénieux, le moins coûteux de tous les hélios- VII. MOYENS D ETUDE 177 tats, et qui, immobilisant les rayons solaires dans une même direction donnée, permet de résoudre immédiatement tous les tests et toutes les Diatomées imaginables sans avoir à déplacer continuel- lement le microscope pour suivre la marche du soleil. Ajoutons que nous ne saurions trop recommander Phéliostat de Prazmowski aux expérimentateurs qui font de la micro-photographie et à qui cet intrumen! est indispensable ( I ). Fig\ 89. — Lampe de Swift. Lampes. — La lumière des lampes à huile, à gaz et à pétrole est aussi fort employée pour le microscope, et surtout celle des lampes à flamme plate. Il est utile de rendre les rayons parallèles, en plaçant la flamme au foyer principal d'une lentille convergente, avant de la recevoir sur le miroir du microscope. On a construit beaucoup de modèles de lampes à écrans opaques, à réflecteur, à lentille, etc., pour le microscope. Nous représentons ci-dessus la lampe dite de Swift, qui est bien comprise, montée sur un pied extensible, munie d'écrans et de tous les accessoires utiles, et (1) Voir Journal de Micrographie, 1877. T. I, p. 130. 178 LES DIATOMEES qui porte une tubulure latérale pour le remplissage. M. Deyrolle fabrique maintenant une lampe analogue. Éclairage électrique du microscope. — Depuis quelques années, on emploie les lampes électriques à incandescence pour éclairer le microscope. C'est à M. H. van Heurck que l'on doit les premiers travaux dans ce sens, travaux qui datent de l'Exposition Universelle de Paris en 1878, mais qui ne sont guère arrivés qu'en 1881 à des résultats pratiques (1). *"•«• f\ '■■ Fig. 90. — Photophore Hélot-Trouvé et Van Heurck, pour l'éclairage électrique du microscope. Ce sont des lampes Swan modifiées par M. Stearn qui ont d'abord servi à M. Van Heurck. Ces lampes étaient de fort petite dimension de telle sorte que l'arc lumineux, en raison de la petitesse du globe de verre qui l'enfermait, pouvait être très rapproché de l'objet par- dessus ou par-dessous la platine, ce qui permettait d'éclairer celui-ci (1) Voir Journal de Micrographie, T. VII, 1883, p. 244. vu. moyens d'étude 179 directement d'une manière très intense. Ces lampes n'exigeaient qu'une force électromotrice de 3 1/2 volts et un courant de 4 am- père 1/4. Leur puissance lumineuse équivalait à environ une bougie, mais pouvait être poussée au besoin à 2 bougies 1/2 pendant quel- ques moments. Ces lampes, pouvaient être fixées sur le microscope à la place du miroir par exemple ou portées par un pied muni de bras articulés qui permettait de donner à la lampe telle position que l'on voulait au-dessus ou au-dessous de l'objet. « L'éclairage électrique par incandescence, dit à ce sujet M. Van Heurck, surpasse tout autre éclairage. Il a la douceur des bonnes lampes à pétrole et montre les détails délicats presque aussi Fig. 91 — Pleurosigma angidatum, résolu et photographié à la lumière électrique par M. H. van Heurck. bien que la lumière monochromatique. Les stries délicates de Y Amphipleuraei le 19° groupe de Nobert se voient avec une netteté parfaite. » Dès cette époque, M. H. Van Heurck avait appliqué l'éclairage électrique des lampes Swan à la photomicrographie et avait obtenu d'excellents résultats. Depuis lors, il a remplacé le pied-porte-lampe par un photophore analogue à celui dont se servent MM. Hélot et Trouvé pour l'éclai- rage des cavités du corps humain. C'est un petit cylindre nickelé A (Fig 90) portant au fond un miroir réflecteur, au milieu une petite lampe à incandescence et au sommet une lentille condensatrice dont la monture glisse à frottement doux dans le cylindre, ce qui permet de faire varier la divergence des 180 LES DIATOMÉES rayons émergents, de les amener au parallélisme et même, suivant les besoins, à la convergence (1). Cet appareil est fixé sur un pied autour duquel il peut prendre toutes les inclinaisons et les positions voulues. A, A', A", de manière à éclairer le microscope au gré de l'observateur. Employé comme source de lumière pour la micro-phothographie, le photophore Hélot-Trouvé et Van Heurek donne des résultats excellents, et nous reproduisons le dessin de deux Diatomées résolues et photographiées à l'aide de cet instrument. Quant à la source d'électricité, elfe peut être une simple pile à treuil, de 6 éléments, comme celle que construisent M. Trouvé et Fig. 92. Navicula fusca, résolu et photographié à la lumière électrique par M. H. van Heurek. d'autres électriciens et que l'on trouve maintenant couramment dans le commerce. La photographie est certes un moyen d'étude important pour les Diatomées, mais on comprend que nous ne pouvons, relativement à cette question toute particulière, que renvoyer aux traités spé- ciaux (2). (1) Voir H. van Heurck. — Journal de Micrographie, T. X, 1886, p. 29 et suiv. (2) Voir entre autres: H. van Heurck. — Photomicrographie {Journal de Micrographie. T. VII, 1883, p. 257). H. Viallan'es. — La Photographie appliquée aux études d'anatomie microscopique. Paris, in- 18, 63 pages, 1886. vu. moyens d'étude 181 § 5. — : MICROTOMES Microtome à levier, de Hansen. — On s'étonnera peut-être de nous voir, dans un livre consacré à l'étude des Diatomées, parler des microtomes, instruments destinés à obtenir des coupes très minces des objets destinés à L'examen microscopique. Nous le faisons cependant à bon escient. En effet, depuis quelques années l'étude, si arriérée encore, des Diatomées considérées comme des êtres vivants et non plus seulement comme de simples frustules siliceux marqués de stries, de côtes ou de perles plus ou moins fines, pré- occupe un assez grand nombre d'observateurs qui cherchent à péné- trer la structure intime de ces organismes et à élucider les phénomènes biologiques dont ils sont le théâtre. Or, nous sommes actuellement, en micrographie, dans ce qu'on peut appeler l'ère des coupes. — C'est par l'élude des coupes minces, exécutées avec une perfection inconnue jusqu'ici et faites méthodiquement, que l'on est parvenu non seulement à reconnaître d'une manière exacte la structure histologique des animaux et des plantes, mais encore à suivre, pour ainsi dire pas à pas, certains phénomènes évolutifs qu'il avait été impossible d'analyser alors qu'on ne disposait que des méthodes d'observation in toto, de disso- ciation ou décompression. Il faut ajouter à la pratique perfectionnée des coupes, les progrès de la technique, les procédés nouveaux et si nombreux de coloration qui ont permis de caractériser d'une manière plus complète les élé- ments histologiques et de reconnaître la différenciation des subs- tances qui les composent. Déjà, par l'étude des coupes de Diatomées, telles qu'on en trouve quelquefois dans certaines roches, quelques observateurs, comme MM. J. Dcby, W. Printz, Van Ermengem, sont parvenus à élucider des détails de structure qu'il avait été jusque-là impossible de recon- naître d'une manière certaine. D'autres observateurs ont cherché à appliquer la méthode des coupes aux Diatomées vivantes, et c'est à notre avis une excellente voie à suivre et qui sera sans doute féconde en découvertes, en ce qu'elle nous révélera la structure intime de l'organisme vivant, la disposition et la nature des matériaux orga- nisés qui composent la cellule diatomée, ainsi que les modifications que subissent ces éléments dans les différentes phases de l'évolution biologique de ces Algues. La principale cause qui a sans doute empêché jusqu'à présent les diatomistes d'appliquer tous les procédés délicats de la technique moderne, à commencer par la méthode des coupes, est l'extrême 182 LES DIATOMÉES difficulté qu'on éprouve à pratiquer des coupes sur ces êtres micros- copiques. La chose n'est cependant pas impossible et nous avons pu commencer, grâce à cette méthode, des travaux qui malheureusement ne sont pas assez avancés pour pouvoir trouver place dans le pré- sent ouvrage. Néanmoins, les coupes que nous avons faites récem- ment sur quelques grandes espèces nous ont permis, par exemple, de vérifier, — et de reconnaître pour parfaitement exacte, — la disposition de l'endochrùme dans ces espèces telle que l'a décrite M. Paul Petit (1) Il est évident d'abord qu'il ne peut pas être question ici de prendre une Diatomée au bout d'une pince et de la débiter en tranches avec un rasoir. Il faut employer des procédés beaucoup plus délicats et avoir recours aux instruments les plus perfectionnés. Voici comment on peut procéder : On prend une certaine quantité d'une récolte de Diatomées que l'on veut étudier, en ayant soin de les débarrasser, par les procédés de nettoyage que l'on connaît, de toutes les impuretés et notamment des grains de sable, même les plus petits, qui feraient déchirer la coupe et ébrécheraient le rasoir. Il est clair d'ailleurs que les espèces ou les frustules les moins silicifiés se prêteront mieux à l'opération. On délaie les Diatomées dans une petite quantité d'une solution de gomme arabique très épaisse, à laquelle on peut ajouter un peu de glycérine pour l'empêcher de devenir cassante en séchant. Les Diatomées restent suspendues dans la solution. On prend alors une forte goutte du mélange au bout d'une baguette de verre et on la dépose sur un morceau de liège ou de moelle de sureau, et on la laisse sécher à l'abri de la poussière. Quand la goutte est sèche, on peut en déposer une seconde sur la première et même une troisième et une quatrième, mais il n'y a pas avantage, en général, à obtenir une couche trop épaisse. Lorsque la masse d'inclusion ou d'enrobage est bien sèche, il est quelquefois utile, si les Diatomées sont assez fortement siliceuses, de la durcir encore en plongeant toute la pièce dans l'alcool à 82°, pendant 24 ou 48 heures Quand elle est suffisamment durcie, qu'elle ne cède plus sous la pression de l'ongle, il n'y a plus qu'à opérer des coupes comme on le fait dans les laboratoires d'histologie. Au lieu de la solution dégomme, on peut employer, à une douce chaleur, une solution de gomme et de gélatine, ou le collodion, ou la celloïdine, qui donne de très bons résultats et permet de faire des petits blocs tenant un grand nombre de Diatomées en suspension, (1) P. Petit: Essai de classification des Diatomées* vu. moyens d'étude 183 mais les coupes obtenues nous ont paru moins satisfaisantes et sont plus difficiles à traiter ultérieurement. Pour faire les coupes, on ne peut espérer réussir en opérant à main levée avec un rasoir. Le coup de rasoir donné avec la main n'est pas assez rapide et fort : les Diatomées que la lame rencontre en traversant la masse ont le temps de faire bascule sous la pression du couteau, en raison de la résistance qu'elles opposent, résistance grande relativement à celle de la masse qui les entoure. Il faut de toute nécessité employer un microtome, et même un excellent microtome, parfaitement construit, d'une marche très régulière et armé d'un rasoir à trempe dure. Le rasoir sera, du reste, assez vite émoussé et aura souvent besoin d'être aiguisé. On se sert aujourd'hui beaucoup des microtomes allemands qui fonctionnent en général bien, mais nous pouvons surtout recom- mander un excellent instrument français, le microtome à levier, de Hansen, construit par M. E. Deyrolle, à Paris. Le maniement en est infiniment plus commode que celui des instruments allemands ; la construction et la marche de l'appareil sont parfaites, et sa soli- dité extrême. Ajoutons que cet instrument peut servir dans un laboratoire, à toute espèce de coupes et qu'il fonctionne à volonté dans un liquide ou sur des corps durcis par congélation. Le microtome de Hansen est à glissement pour le rasoir et à levier pour l'objet. Le rasoir est monté sur le chariot au moyen d'un dispositif nouveau qui lui permet de prendre toutes les inclinaisons pos- sibles. La pièce portant l'objet est soulevée, après chaque coup de rasoir, par un levier sur lequel agit à l'autre bout une vis micrométrique de 1/2 millimètre de pas, dont la tète porte un cercle divisé en 50 dents; quand, à l'aide d'une petite manivelle, on fait tourner le cercle d'une division, la vis s'abaisse de 1/30 de 1/2 millimètre ou 1/100 de millimètre et comme le bras du levier qui agit sur la pince est o fois plus petit que celui sur lequel presse la vis, la pince ne s'élève que de I/o de 1/100 de millimètre, c'est-à-dire de 1/500 de millimètre, ce qui représente une coupe extrêmement mince. S'il était possible de réaliser pratiquement sur les Diatomées des coupes aussi fines, ce qui serait sans doute très difficile, on voit qu'on pourrait réellement débiter un frustule en tranches, puisqu'il y a des espèces qui mesurent 0mm,o de long dans lesquelles on pourrait faire deux coupes, et que la plupart ont plusieurs cen- tièmes de millimètres. Mais nous pensons qu'il nest pas nécessaire d'obtenir des coupes aussi minces et qu'il suffit d'avoir une coupe dans un frustule. 184 LES DIATOMÉES Pour cela, on monte le morceau de liège ou de sureau sur lequel on a déposé les Diatomées enrobées dans la gomme, dans la pince du microtome, en ayant soin de le fixer solidement sans l'écraser. On doit, d'ailleurs, avoir eu la précaution de placer la goutte diato- mifère sur le liège, de manière qu'on puisse y faire des coupes perpendiculaires à la surface et non des coupes parallèles ou tangentielles qui réussissent, en général, beaucoup moins bien. En disposant la pièce, comme nous venons de le dire, il suffit do pousser d'un coup un peu sec le chariot du rasoir, et la lourde lame traverse à la fois la goutte gommeuse et le morceau de liège qui lui sert de support. Les Diatomées saisies entre le tranchant de la lame et le fond de liège résistant n'ont pas 'le temps de se dé- placer et sont traversées par le couperet, qu'on repousse aussitôt en place. On fait avancer la roue de 5 ou 10 dents, selon qu'on a réglé la marche de l'instrument, et l'on donne un second coup de rasoir. On obtient ainsi une première coupe régulière qui a 1/100 ou 1/50 de millimètre d'épaisseur. On peut en pratiquer une série d'autres, qui, même beaucoup plus épaisses, seront fort utiles. Ces coupes, telles que nous les avons faites, contiennent une partie de liège ou de sureau et une partie de gomme diatomifère. On les place sur des lames de verre dans un peu d'eau; la gomme se ramollit bientôt et l'on peut enlever toute la portion étrangère. Si l'on couvre d'une lamelle et qu'on examine au microscope, on constate qu'un grand nombre de Diatomées ont échappé à la lame ; mais certaines aussi ont été tranchées et l'on a des coupes de frus- tules dans toutes les directions. Les deux faces de la préparation présentent des résultats semblables. C'est dans cet état, alors que la masse d'inclusion conserve sa cohérence, que l'on peut le mieux étudier la structure des éléments constituants de la cellule diatomée, parce que les frustules gardent leur position. Si l'on ajoute de l'eau de manière à dissoudre la gomme, presque toutes les Diatomées n'étant plus maintenues par la masse, tombent à plat sur la lame de verre et l'on n'en rencontre plus guère qui présentent leur section à l'observateur. Néanmoins, on peut encore en retrouver quelques-unes et faire agir sur elles les réactifs colorants, diverses couleurs d'aniline, par exemple, et le pi- crocarminate d'ammoniaque qui colore le protoplasma en jaune, le noyau en rouge, l'endochrôme en brun foncé et laisse les gouttelettes huileuses incolores. Quand la coloration est produite, on ajoute sur un des bords de la lamelle une goutte de glycérine et l'on aspire du côté opposé avec du papier brouillard. La glycérine pénètre ainsi peu à peu la préparation, que l'on peut dès lors transformer en une préparation persistante. LES DIATOMEKS PI. IV. a m vu. moyens d'étude 185 Une très bonne méthode, et même la meilleure, consiste à fixer d'abord les éléments dans leur forme, par l'acide osmique. On peut exposer les Diatomées, délayées dans un peu d'eau, aux vapeurs d'une solution d'acide osmique à 2 pour 100; mais la pénétration des vapeurs à travers la carapace siliceuse est difficile. Il vaut mieux verser sur les frustules, suspendus dans un peu d'eau, quelques gouttes de la solution osmique. On recouvre d'une cloche et, au bout d'une heure, on jette le tout sur un filtre et on lave avec de l'eau distillée pour enlever l'acide. Puis, on reprend les frustules, en raclant le filtre doucement avec une lame de scalpel. On les met dans la gomme et l'on fait les coupes comme nous l'avons dit. La fixation par l'acide osmique n'empêche pas la coloration des coupes, sur la lame de verre, par le picrocarminate; on recouvre d'une lamelle et l'on déplace le picrocarminate par la glycérine. La coloration est plus longue à obtenir, mais se produit généralement bien. Les globules huileux sont alors colorés en noir intense et l'on peut constater qu'ils sont ordinairement très nombreux. On peut, nous l'avons dit, employer pour l'enrobage le collodion ou la celloïdine (qui n'est qu'un collodion solidifié, autrement dit de la pyroxyline ; que l'on redissout dans un mélange à parties égales d'éther et d'alcool absolu), mais il faut, dans ce cas, commencer pardéshy- drater les Diatomées dans l'alcool ordinaire, puis dans l'alcool absolu. Après quoi, on les porte dans le collodion ou dans une solution faible éthéro-alcoolique de celloïdine, où on les laisse une journée. Puis, on les plonge dans une solution sirupeuse de la matière à inclusion, et l'on opère avec celle-ci comme nous l'avons indiqué pour le traitement dans la gomme. * On réussit ainsi beaucoup moins bien qu'avec la gomme; outre que l'alcool et l'éther dissolvent plus ou moins la matière colorante de l'endochrôme et les gouttes huileuses, la masse a moins de cohésion, les Diatomées se déplacent et fuient sous le rasoir; les coupes, que l'on doit faire avec le rasoir mouillé, s'effritent, se desséchent et se ratatinent. Aussi, est-on obligé de les faire beaucoup plus épaisses. Pour remédier au manque de cohésion de la celloïdine, on peut faire durcir la masse avant de pratiquer les coupes, en plongeant le liège et la couche diatomifère qu'on y a déposée dans l'alcool à 82° ou dans le chloroforme pendant 24 ou 48 heures, et même davantage. Les coupes sont reçues dans l'alcool et peuvent être examinées, montées dans la glycérine, sans qu'il soit besoin d'enlever la masse d'inclusion qui est parfaitement transparente et se laisse pénétrer parla glycérine. On peut même faire agir dans les mêmes conditions les réactifs colorants. Le montage de ces coupes dans le baume ne peut, au contraire, se 13 186 LES DIATOMÉES ^ faire qu'après traitement par l'essence de bergamotte. On aura d'ail- leurs à mettre en œuvre tous les procédés ordinaires de la technique des coupes. Mais nous devons faire remarquer que les traitements par l'alcool sont loin de conserver dans l'intégrité de leurs formes, de leurs rapports et de leur substance les éléments si riches en eau qui composent la cellule Diatomée, à moins qu'on ne les ait préala- blement fixés par l'acide osmiqué. Dans le cas contraire, nous pré- férons le procédé d'inclusion dans la gomme, auquel chacun peut du reste apporter les modifications que comportent les divers cas, qui est plus commode et nous parait montre]- suffisamment la disposition intérieure des cellules telle qu'elle est réellement dans la nature. (Voir PI. IV.) Nous n'avons pas à entrer dans plus de détails sur ces opérations. Cette méthode d'étude des Diatomées à l'état vivant est encore peu appliquée, pas toujours applicable, mais c'est une voie nouvelle à explorer qui, nous le pensons, peut amener la résolution de bien des questions encore à l'état de problèmes. Malheureusement, elle n'est pas toujours applicable, disons-nous, car beaucoup de Diatomées à carapace très siliceuse résistent complète- ment au rasoir du microtome. Il faudrait pouvoir les incorporer dans une masse plus cohérente que la gomme, et l'on éprouverait alors de grandes difficultés à exécuter les coupes, à les obtenir suffi- samment minces et à les rendre assez transparentes pour permettre d'en faire utilement l'examen microscopique. i Ajoutons que M. J. Deby est arrivé à faire des coupes de Diatomées en composant une masse d'inclusion dure, pierreuse, pour ainsi dire, avec des chlorures de zinc et de magnésium mêlés aux oxydes des mêmes métaux, constituant ainsi une roche artificielle dans laquelle il a pratiqué des coupes (1) par les procédés qui servent à faire des coupes minéralogiques. MM. Prinz et Van Ermengem s'étaient servis de la même manière de la pierre à ciment du Jutland et de l'argile de Londres qui con- tiennent des Valves de Diatomées fossiles (2). M; Flogel (3) avait aussi opéré des coupes de Pleurosigma; (1) J. 1)eby. — Sur la structure microscopique des valves des Diatomées. (Journ. de Micrographie, T. X, 1886, p. 416 et 467.) (2) W. Prinz et Van Ermengem* — Recherches sur ta structure de quel- ques Diatomées comprises dans le Cementstein du Jutland [Ann. Soc. B. de Microscopie, T. VIII, et JoUrn. de Micrographie^ 1881, p. 100.) (3) Flogel. — Vntersuchungen ilber die Structur der ZeUxoatid in d> Gat- iung Pleurosigma. (An f. Mik. Anat., VI, 1870;) vu. moyens d'étude 187 MM. Otto Mùller (1), .1. D. Cox (2) et H. Yan Hcurck avaient utilisé des valves brisées de Triceratium et d'autres espèces pour étudier la structure microscopique de ces valves. Mais on comprend que les études ainsi faites ne peuvent porter que sur des frustules morts, dans lesquels la matière organique est plus ou moins détruite, et par conséquent ne peuvent rien révéler sur l'organisation intérieure de la Diatomée vivante ni sur les phéno- mènes biologiques qui s'y produisent. (1) Otto Muller. — Uber den feineren Bau cler Zellwand der Bacilla.' rien, etc. (Arc. f. Physiol,, Reichert et Dubois-Reymond, 1871.) (2) J. D. Cox. — Structure of the Diatom-Shell. (Am. Month, Micr. Journ. 1884.) VIII CLASSIFICATION § i. — SYSTÈMES DE CLASSIFICATION Nous avons dit que plusieurs systèmes de classification avaient été proposés pour la famille des DIATOMÉES ou DIATOMACÉES ; aujourd'hui, il n'en reste guère que deux en présence; celui que le célèbre diatomiste américain Hamilton Lawrence Smith a établi sur la présence ou l'absence d'un raphé, et celui que le prof. Pfitzer a proposé de fonder sur la disposition de l'endochrôme, système que M. Paul Petit, le plus autorisé de nos diatomistes français, a appliqué développé et complété. C'est cette classification que nous avons adoptée ici et que nous suivons dans la description que nous don- nons des principales espèces de Diatomées. La classification du prof. H. L. Smith a été adoptée par plusieurs auteurs, notamment par le Dr H. Van Heurck, dans son bel ouvrage: Synopsis des Diatomées de Belgique. Nous en avons déjà indiqué les bases, nous n'y reviendrons donc qu'en quelques mots. M. H. L. Smith divise la famille des Diatomées en trois sous- familles. 1° Les Raphidées, ayant un vrai raphé, au moins sur l'une des valves. (Frustules à face valvaire généralement bacillaire, parfois large- ment ovale, montrant toujours un raphé distinct et des nodules sur l'une des deux valves ou sur toutes les deux. Nodule médian rarement absent ou peu visible. Valves simples ou composées. Frustules toujours dépourvus de dents, d'épines ou de piquants.) Cette sous-famille comprend les cinq tribus suivantes : Les Cym* bellées, les Naviculées, les Gomphonémées, les Achnanthées et les COCCONÉIDÉES. 2° Les Pseudo-Raphidées, ayant sur les deux valves, ou au moins sur l'une d'elles, un espace blanc simulant un raphé (pseudo- raphé). VIII. CLASSIFICATION 189 (Frustules à face valvaire généralement bacillaire, parfois largement ovale ou sub-orbiculaire, présentant souvent des cloisons ou fausses cloisons.) Cette sous-famille comprend trois tribus : les Fragilariées, les Tabellariees et les Surirellées ; 3° Les Crypto-Raphidées, n'ayant jamais de raphé ni depseudo- raphé sur aucune des valves. (Frustules à face valvaire généralement circulaire, sub-circulaire ou angulaire, plus rarement elliptique, ovale ou bacillaire ; souvent munis de dents, d'épines ou de piquants.) Cette sous-famille compte sept tribus : les Ch.etocérees, les Mélo- SIRÉES, les BlDDULPHIEES, les EUPODISCEES, les HÉLIÛPELTEES, les Astérolamprées et les Coscinodiscées. Quant à la classification de M. Paul Petit, ce savant diatomistc, après l'avoir révisée, complétée relativement à certains genres difficiles, et mise au point, pour ainsi dire, a bien voulu en rédiger, spécialement pour le présent ouvrage, un exposé général, accom- pagné d'un tableau dichotomique qui la résume tout entière et en rend l'application des plus faciles. Nous laissons la parole à M. Paul Petit. § 2. — CLASSIFICATION Pour classer les Diatomacées, alors que les espèces connues étaient en petit nombre, plusieurs systèmes, plus ou moins empiri- ques, furent mis en usage par Agardh, Ehrenberg, W. Smith, Kiïtzing, Meneghini et Rabenhorst. Le cadre de cet ouvrage ne nous permet pas de faire séparément l'analyse de chacun de ces sys- tèmes. Il suffira de dire que ceux qui ont été employés par la plu- part des auteurs indiqués ci-dessus reposent, tantôt sur la forme extérieure des frustules ou des valves, tantôt sur le mode de végé- tation des Diatomacées, qui vivent libres, ou réunies en filaments, quelquefois portées à l'extrémité d'un stipe ou enfermées dans des masses gélatineuses, ayant la forme d'un tube ou d'une fronde. En 1861, Ralfs (in Pritchard : InfusoriaJ, donna une classi- fication basée sur la présence ou l'absence du raphé ou des no- dules, dans laquelle il faisait ressortir l'affinité existant entre cer- taines familles. Cette classification fut reprise dix années plus tard par M. H. L. Smith, comme nous le verrons plus loin. A peu près dans le même temps, le prof. Grunow (Verhandl. 190 LES DIATOMEES der K. K. zool. bot. Gessellschaff, Wien, 1860-1862), faisant la description des Diatomacées d'Autriche, indiquait la délimitation et l'affinité de plusieurs familles très naturelles. W. Smith, dans sa classique Synopsis, avait appelé l'attention des observateurs sur la fixité de l'endochrôme, qui se présente tan- tôt en lames, tantôt en granules. (Synopsis, vol. II, p. xxv.) Cette remarque de W. Smith frappa le prof. Pfitzer, qui entreprit une étude sérieuse du plasma des Diatomacées. Il publia, en 1871, les résultats de ses recherches dans un remarquable travail : Bau und Entwicklung der Diatomaceen. La conséquence de ces recher- ches fut une nouvelle classification, basée sur la disposition de l'endochrôme dans le frustule, mais dans laquelle le prof. Plitzer ne rechercha pas assez l'affinité des genres et des grands groupes. L'année suivante, en 1872, le prof. H. L. Smith, de Hobart Col- lège, à Geneva (E. IL), reprenait, en la développant, la classifica- tion de Ralfs. Ce travail fut publié dans The Lens, qui périt en grande partie dans l'incendie de Chicago; mais il fut plus tard tra- duit et reproduit par 31. Van Heurck, dans son livre Le Micros- cope, 1878. Le système mis en usage par M. H. L. Smith a le grave incon- vénient d'éloigner les uns des autres des genres dont l'affinité est manifeste. C'est ainsi que le genre Gephyria, qui, par tous ses ca- ractères, se rattache aux Achnanthes, est placé par l'auteur amé- ricain-près du genre Eunotia, qui n'a rien de commun avec lui, si ce n'est la courbure des frustules. De même les Licmophora, que la présence de diaphragmes intervalvaires rapproche des Tabella- rièes, se trouvent placés parmi les Fragilarièes, etc., etc. C'est en vérifiant les observations du prof. Plitzer. et en les com- plétant par l'étude d'espèces marines et d'eau douce, qu'il n'avait pas eues à sa disposition, que nous avons compris tout le parti qu'on pouvait tirer de la forme et de la position de l'endochrôme dans le frustule pour la classification des espèces. Une étude ap- profondie d'un grand nombre d'espèces nous a permis de saisir l'enchaînement des genres entre eux et de suivre une chaîne non interrompue, partant du genre Cocconeis et aboutissant aux Gail- lonellèes. C'est alors que nous avons publié, en 1876 (Bull, de la Soc. de Bot. de France), un Essai de classification naturelle, basé sur la disposition de l'endochrôme dans le frustule. Les obser- vations, que nous avons poursuivies depuis cette époque, sont venues confirmer et corroborer notre manière de voir. Lorsqu'on observe un grand nombre de Diatomacées, à des épo- ques différentes, et en répétant souvent ces observations, tant pour les espèces marines que pour les espèces d'eau douce, on peut se convaincre, ainsi que W. Smith l'avait indiqué, que l'endochrôme VIII. CLASSIFICATION 191 se présente sous deux états distincts et que, contrairement à l'opi- nion de M. l'abbé comte Castracane (1), la disposition de l'endo- chrôme est fixe et invariable chez tous les individus d'une même espèce. On peut observer une légère variation à l'époque de la divi- sion de la cellule; mais aussitôt après la division, l'endochrùme reprend son état normal. Il est en même temps facile d'avoir la preuve que la division de l'endochrùme lamelleux en petite masse n'est pas, comme le pense 31. l'abbé Castracane, le prélude de la reproduction, mais que cet état est le signe précurseur et cer- tain de la mort prochaine du frustule. L'observation permet encore de remarquer qu'il existe un rapport constant entre la disposition de l'endochrùme et la forme extérieure du squelette siliceux du frustule, dans toutes les espèces d'un même genre et, souvent aussi, chez plusieurs genres ayant entre eux des analogies de constitution ou de développement de l'enve- loppe siliceuse. Nous sommes donc conduits à formuler les deux principes sui- vants : 1° La disposition interne de l'endochrùme est constante chez tous les individus d'une même espèce ; 2° Le rapport du frustule et de V endochrôme est fixe et commun à toutes les espèces d'un môme genre, et souvent a plusieurs genres ayant entre eux une grande analogie de constitution et de développement dans leur enveloppe sili- ceuse. Ces deux principes permettront de classer les espèces fossiles, ou celles provenant de sondages profonds, alors que le caractère tiré du plasma fait complètement défaut, contrairement à l'opinion émise par MM. H. L. Smith et Van Heurck dans la « Synopsis des Diatomées de Belgique ». Le rapport entre l'endochrùme et l'enve- loppe siliceuse est le même que celui qui existe en zoologie entre les viscères et le squelette ; et chacun 'sait que les zoologistes ne sont pas embarrassés pour classer à sa place un squelette fossile. Pourquoi les diatomophiles rencontreraient-ils plus de difficulté? Il est plus que probable que le rapport entre l'endochrùme et l'enveloppe siliceuse s'applique à la reproduction par auxospores ; malheureusement, le nombre des observations faites à ce sujet est encore trop restreint et les observations elles-mêmes ont besoin d'être contrôlées, ce qui ne permet pas d'en tirer un caractère ayant une valeur réelle. (1) Brebissonia, vol. I, p. 75. 192 LES DIATOMÉES Nous divisons, ainsi que le fait le prof. Pfitzer, la famille des Diatomacées en deux sous-familles : lre sous-famille : Endochrôme lamelleux : PLACOCHROMA- TIGÉES. 2me sous-famille : Endochrôme granuleux : COCCOCHROMA- TICÉES. Nous sommes d'avis que toute classification naturelle doit être basée sur la subordination des caractères. Parmi les caractères, la disposition de l'endochrôme dans le frustule et, à son défaut, la constitution du frustule lui-même, doivent être placées en première ligne, puisqu'il existe un rapport constant entre ces deux caractères. Au second rang nous mettrons la symétrie dans les valves par rapport au grand ou au petit axe, ou la dissemblance des valves d'un même frustule. Puis, viennent les caractères fournis par la présence ou l'absence de diaphragmes intervalvaires , ainsi que ceux qui proviennent du raphé et des nodules ; enfin les caractères extérieurs : carène, ailes, striation, état des valves, forme et aspect extérieur. La distinction des espèces, fournie par les états frondeux, stipité, filamenteux et tubuleux, est de peu de valeur, car ainsi que M. H. S. Smith l'a constaté (et nous sommes d'accord avec lui), ces caractères sont fugitifs et accidentels, et dépendent surtout d'influences extérieures. J'ai maintenu le genre Stauroneis, qui a été réuni par quelques auteurs au genre Navicula, parce qu'à l'état vivant, sans voir les stries, on peut toujours distinguer un Stauroneis d'un Navicula. Chez le genre Navicula, la lame d'endochrùme est lisse sur le bord, tandis que chez tous les Stauroneis elle est ondulée, de même qu'elle est dentelée dans le genre Amphipleura. lrc sous-famille : PLACOCHROMATICEES. Frustules munis d'un endochrôme lamelleux. Ie Tribu. — Achnanthées. • Cette tribu, telle que l'a établie le prof. Grunow, moins le genre Rhoicosphenia que nous rattachons aux Gomphonémées, comprend les Cocconèidèes et les Achnanthées de M. le. prof. Pfitzer. Elle renferme les Diatomacées qui ont les frustules cintrés ou courbés en genou, et formés de deux valves dissemblables, dont l'une est convexe et l'autre concave ; cette dernière seule porte VIII. CLASSIFICATION 193 un nodule ou un stauros (1), ou une striation différente de la valve convexe Fig. 93 — Achnanthes b reripes, C. Ag. L'endochrôme est constitué par une seule lame très épaisse, placée sur la face interne de la valve convexe. Sur le bord de la mer, j'ai pu vérifier la disposition de l'endochrôme chez Y Achnanthes longipes, Ag. ; à l'état frais, cette espèce rentre dans la loi com- mune, bien que le D. Pfîtzer (/. c, p. 80) prétende qu'elle renferme un endochrôme composé d'une grande quantité de petits fragments. On observe, en effet, quelquefois cette disposition de l'endochrôme, mais seulement quand les Achnanthes sont depuis quelque temps hors de la mer, attendu que leur plasma s'altère très rapidement. Cette tribu renferme les cenres suivants : Cocconeis (Ehr). Cyclophora (Gastr). Cymbosira (Kiitz). Achnanthes (Ag). Gephyria (Arnott). Eupleuria (Arnott). Rhoïconeis (Grun). Fig. 94. — Gomphonema geminatam, Ag. (1) On appelle stauros une surface lisse au niveau du nodule médian. 194 LES PUTOMEES 2e Tribu. — Gomphonémées. Cette tribu comprend les Diatomacéesà frustules cunéiformes, munis de valves cunéiformes symétriques seulement par rapport au raphé, qui possède un nodule central et deux nodules terminaux, excepté dans le genre Rho'icosplienia, où les deux valves cunéi- formes sont dissemblables et courbées en genou, comme dans la 1" tribu. C'est ce genre qui fait le passage, puisqu'il a le frustule siliceux des Achnanthées, qu'il est cunéiforme et qu'il possède l'endochrôme des Gomphonbmees : une seule lame reposant par le milieu sur l'un des côtés de la zone et recouvrant les deux valves. (Fig. 94.) Genres : Rhoïcosphenia (Grun). Gomphonema (Ag). 3e Tribu. — Cymbellées. Cette tribu comprend les Diatomacées dont l'endochrôme est formé d'une seule lame reposant par le milieu, tantôt sur la partie la plus concave, tantôt sur la partie la plus convexe, suivant les espèces. Les frustules sont formés par des valves cymbi formes ou cintrées, symétriques seulement par rapport au plus petit axe ; Fig. 95. — Cymbella Ehrenbergii, Kz. celles-ci sont munies d'un raphé et d'un nodule central, avec deux nodules terminaux. Cocconema (Ehr). Encyonema (Kùtz). Amphora (Ehr.) Genres Epithemia (Bréb). Cymbella (Ag). VIII. CLASSIFICATION 195 4e Tribu. — Nayiculées. Dans cette tribu, les frustules ont les valves symétriques par rapport au grand axe, qui peut être droit ou sigmoïde ; celles-ci sont naviculées ou lancéolées, souvent elliptiques ou panduriformes, munies d'un raphé et d'un nodule central, qui manque rarement, et de deux nodules terminaux. L'endocltrôme est formé de deux lames séparées, reposant chacune par le milieu sur la zone. Le bord de l'endochrôme à l'intérieur du frustule est uni chez les Navicula; Fig. 06 — Navicula major, Kz. ondulé chez les Stauroneis et dentelé chez YAmphipleura. Le passage aux Cymbellées a lieu par le Navicula sphœrophora, Kùtz, dont l'endochrôme est disposé comme chez les Cymbellées, et dont les valves présentent un manque de symétrie, par suite de l'absence de striation sur l'un des côtés du nodule central. Genres : Navicula (Bory). Schizonema (Ag). Brebissonia (Grun) Mastogloia (Thw). Stigmaphora (Wall). Stictodes?nis (Grev) . Diadesmis (Kùtz). Stauroneis (Ehr). Scoliopleura (Grun). Pleurosigma (W. Sm). Donkinia (Ralfs). Toxonidea (Donk). Berkeley a (Ehr). Amphipleura (Kùtz). 196 LES DIATOMEES 5e Tribu. — Amphiprorees. Les xUiphiprorées ne forment en quelque sorte qu'une sous-tribu des Naviculées. — La disposition de Yendochrôme est la même chez la plupart des espèces, mais la présence de carènes à la sur- face des valves et la torsion des valves dans un grand nombre d'espèces établissent la différenciation. Cette tribu forme le passage des Naviculées aux Nitzschiées. Voici comment on peut s'en rendre compte : si l'on considère YAm- phiprora paludosa, W. Sm., on remarque que ses valves sont disposées en 8 de chiffre, mais tordues de telle sorte que la moitié Fig. 97. Aiiiphiprora alata, Ehb. supérieure est à angle droit avec l'inférieure; de plus, la valve es, tellement pliée sur la carène, qu'il existe fort peu de place entre les deux côtés de la zone. On comprend alors que les deux lames d'en- dochrome, pressées l'une contre l'autre, se soudent entre elles et que l'œil ne perçoive plus qu'une seule lame, disposition qui se rencontre chez les Nitzschiées. Genre : Amphiprora (Ehr). 6e Tribu. Nitzschiées Les frushdes, dans cette tribu, offrent des formes très variées; les valves sont munies d'une carène ponctuée et Yendochrôme est formé d'une seule lame portant au centre une ouverture ellip- tique. Fig. 98. — Nitzschia vieux, W. Sm. L'endochrôme se présente sous trois dispositions différentes : 1° lorsque les parties opposées de la zone sont resserrées au |point VIII. CLASSIFICATION 197 de laisser fort peu d'espace entre elles, l'endochrôme ne peut former qu'une seule lame traversant en diagonale le frustule, d'une carène à l'autre ; 2° la lame d'endochrùme étant très petite se trouve com- plètement séparée en deux parties par l'ouverture centrale; 3° enfin la lame d'endochrùme repose sur l'un des côtés de la" zone et recouvre les deux valves adjacentes. iPar leurs valves munies de carènes, les Nitzschiees se rapprochent des Amphiprorées ; d'autre part, certaines formes du genre Tryblionella se rapprochent beau- coup des Cymatopleura, qui font partie des Surirellees. Genres : Amphiprora (Ehr). Bacillaria (Gmel). Niizschia (Hass). Tryblionella (W. Sm). 7e Tribu. — Surirellees. Cette tribu comprend les espèces à frustules dont les valves, sans nodules, sont semblables et symétriques par rapport au grand axe ; elles ont des ailes sur les bords ; les frustules sont souvent contournés comme une selle de cheval. L'endochrôme est formé de deux lames reposant sur les valves. On peut établir le rap- prochement de cette disposition de l'endochrôme avec celle du 3e groupe des Nitzschiees, en supposant que l'ouverture centrale s'est étendue dans le sens de la longueur jusqu'à séparer l'endo- chrôme en deux parties recouvrant chacune une valve. Fig. 99. — Surirella fastuosa. Ehb. Genres Cymatopleura (W. Sm). Surirella (Turpin). Campylodiscus (Ehr. ) Podocystis (Kutz) 198 LES DIATOMEES 8e Tribu. — Syxédrées. Chez les Synedrées, l'endochrome est formé par deux lames re- posant sur les valves; il est souvent dentelé sur les bords ou divisé en lanières courtes. Les frustules ont la forme de longs bâtonnets; les valves, symétriques par rapport au grand axe, n'ont pas d'ailes ilMJf'lriil-n n) iriîil ilsHrft ii'i fi r'ffilr '-"r rï" liji ïiifflli ntifinin iifttit Fig. 100. — Synedra fi'Igens, \Y. Sm. ni de nodules; elles sont striées transversalement et portent une ligne blanche médiane ou pseudo-raphé; on voit quelquefois un large pseudo-nodule au milieu de la valve. On observe chez cer- taines espèces un élargissement seulement à l'une des extrémités de la valve (Asierionella). Genres Staurosira (Ehr). Thalassiothrix (Clev). Toxarium (Bail). Asierionella (Hass). Synedra (Ehr.) 9e Tribu. — Eunotiées. Dans cette tribu, les lames de Vendochfôme reposent par 'eur milieu sur les valves et recouvrent les côtés adjacents de la zone; elles sont partagées vers le milieu de la zone par un sillon profond s'étendant perpendiculairement jusqu'à la valve. Les frustules rectangulaires sont souvent réunis en filaments rubanés; les valves sont cintrées, symétriques par rapport au petit axe, quand elles ne sont pas renflés seulement à l'une des extrémitées. Fig. 101. — Eunotia gracihs, Rab. Les Eunotiées se rapprochent, par la forme des frustules, des espèces de Synedra qui ont les valves cintrées. VIII. CLASSIFICATION 199 Genre? Eunotia (Ehr) Himantidium (Ehr) . Pseudo-Eunotia (Ehr). Amphïcampa (Ehr] Clavularia (Grev). Actinella (Grev). 2e sous-famille : COCCOCHROMATICÉES Frustules munis d'un endochrôme granuleux. 10e Tribu. — Fraoilariees. Dans cette tribu, l'endochrôme se présente en petites lames sé- parées ou en granules distincts et épars. Les frustules sont rectan- gulaires, très rarement cunéiformes, formant des rubans ou adhé- rant l'un à l'autre par des angles alternants et prenant une forme en zig-zag. ou très rarement en spirale (MerjdionJ) les valves Fig. 102. — Fragilaria virescens ot F. ntutabilis ont une forme linéaire allongée, elles sont quelquefois comprimées, lancéolées, très rarement cintrées ou cunéiformes ; elles portent des stries fines ou des ponctuations ; elles n'ont ni raphé, ni nodules ni ailes, ni carènes. Cette tribu se rattache d'une part à la tribu des Eunotiees, par le genre Campylosira, dont les valves sont cintrées, et par le Fragilaria isehaboensis (Grun) et le Fragilaria dubia (Grun), à la tribu des Plagiogrammées. Campylosira (Grun). Cymatosira (Grun). Raphoneis (Ehr). Terebraria (Grev). Genres Méridien (Agardh). Diatoma (D. C.) Denticula (Kùtz). Fragilaria (Lyngb). 11e Tribu. — Plagiogrammées. L 'endochrôme est constitué par des granules épars; les frus^ tules sont rectangulaires, souvent réunis en filaments rubanés; les 200 LES DIATOMEES valves sont elliptiques, souvent contractées, munies de ponctua- tions fortes, parfois carrées; on trouve aux extrémités des valves toujours des espaces blancs ou pseudo-nodules, et au centre un ocellus ou un stauros. Cette tribu, par l'aspect de ses valves et ses frustules rectangu- laires, a beaucoup d'affinité avec la tribu des TrachysphéniÉes. Fig. 103 — Playiogràmma Antillarum et PL attemiatum Genres : Dimereg ranima (Ralfs), Omphalopsis (Grev). Glyphodesmis (Grev), Plagiogramma (Grev). 12e Tribu. — Trachysphéniées. Vendochrôme n'a pas encore été observé dans cette tribu. — Les frustules sont rectangulaires, rarement cunéiformes; les valves sont toujours cunéiformes, portant de fortes ponctuations, souvent carrées, quelquefois remplacées par de larges fentes submarginales, en forme de boutonnières. Fig. 104. - Trachysphenia austrâlis. Gv. La disposition des valves en forme de coin constitue dans cette tribu le passage des Plagiogrammees aux Licmophorées. VIII. CLASSIFICATION 201 Genres : Traçhyspheniû (P. Petit). dpephom (1) (P. Petit). Sceptroïieis (Ehr). Peronia (Bréb. et Arnott). 13e Tribu. — Licmophorées Vëndochrome est granuleux, épars sur les cordons de plasma. Les fmlstuïes sont cunéiformes, largement arrondis à la partie supérieure; ils sont portés sur des pédicelles gélatineux, qui sont ordinairement ramifiés; les valves sont cunéiformes, finement striées et portent une ligne médiane sans nodules. Les caractères Fig. 105 — Licmophora paradoxa, C. Ag. distinctifs de cette tribu sont : 1° les fruslules et les valves cunéi- formes ; 2° la présence, entre les valves primaires, d'un certain nombre de diaphragmes ou de faux diaphragmes. Ce dernier carac- tère établit l'affinité de cette tribu avec les Tabellariees. Genres : lre section : diaphragmes rudimentaires : Podosphenia (Ehr). Licmophora (kg). 2e section : deux diaphragmes : Cliiiiacosphenia (Ehr). 14e Tribu. — Tabellariees. Vendoçhrâme, dans cette tribu, est granuleux, tantôt épars, tantôt disposé en lignes rayonnantes autour du noyau; les frus- (1) Genre nouveau créé [Diat. du Cap.Horn, 1887) pour réunir: Fragilaria paciflca (Grun). — Fragilaria Schwarzii (Grun). — Meridion marinum Greg). — Raphoneis australis (H. L. Sm.) — P. P. 14 202 LES DIATOMÉES tules sont rectangulaires ; les valves sont elliptiques, lancéolées ou linéaires, jamais cunéiformes; souvent renflées au centre et par- Fig. 106. — Tabellaria flocculosa, Roth. fois aux extrémités, elles sont finement striées. Entre les valves primaires se développent un nombre plus ou moins grand de dia- phragmes ou septa. Cette tribu comprend les genres suivants : Genres : lre section : Frustules munis de deux diaphragmes : Diatomella (Grev). Grammatophora (Ehr). 2e section : Frustules munis de plus de deux diaphragmes : * Endochrôme granuleux disposé en lignes rayonnantes : Rhabdonema (Ehr). Striatella (Ag), * * Endochrôme granuleux disposé sans ordre : Tessella (Ehr). Tabellaria (Ehr). Tetracyclus (Ralis). Hyalosira (Kùtz). Biblarium (Ehr). Attheya (West). Gomphogramma (Braun) . 15e Tribu. — Rhizosoléxiees V endochrôme est constitué par des granules épars, dans cette ribu qui comprend les Diatomacées à frustules composés de lames Fig. 107. — Cj/lindrotheca gracllis, Grun. siliceuses très nombreuses, soudées par leurs bords en un tube cylindrique terminé par deux valves en forme de coiffes coniques armées de soies ou d'éperons terminaux. Par ses valves armées de soies, celte tribu, composée jusqu'ici de deux genres, se rattache aux Tabellariées par le genre Attheya et encore par ses frustules composés de lames siliceuses. VIII. CLASSIFICATION 203 Genres : Rhizosolenia (Ehr). Gylindrotheca (Gnun). 16e Tribu. — Ciletocérées. Vendockrôme est sous forme de très gros granules, au moins dans les espèces qui ont été observées à l'état vivant ; les frustules son! lisses ou finement ponctués, simples ou réunis en filaments, armés de longues soies ou dépiquants; les valves, dans les espèces à longues soies, sont ovales ou presque circulaires et sem- blables ; dans les espèces non filamenteuses, les valves sont dissemblables, renflées ou lobées, souvent munies de piquants ou d'autres appendices. Cette tribu, par ses espèces non filamenteuses, offre de grandes affinités avec les Biddulphiees ; le genre Syringi- dium (Ehr) présente une assez grande analogie de forme dans les frustules avec le genre Hemiaulus, Ehr., appartenant aux Biddul- phiees. Fig. 108. — Dacteriastt'Hiii tartans, Lauder. lrc section : Espèces à frustules réunis en filaments à articles semblables. Bacteriastrum (Shad). Chœloceros (Ehr). 2e section : Espèces à frustules réunis en filaments ; à articles alternants et à valves dissemblables armées de soies, de cornes, d'aiguillons ou d'épines : Dicladia (Ehr). Syslephania (Ehr). Goniothecium (Ehr). Cladogramma (Ehr). Hereotheca (Ehr). Stephanogonia (Ehr). Periptera (Ehr). Sijndeudrium (Ehr). Pterotheca (Grun). Syringidium (Ehr). Trochosii-a (Kitt). •204 LES DIATOMEES 17'' Tribu. — Biddulphiees. Dans celte tribu Yendochrome est granuleux, disposé en lignes rayonnantes; les frustules sont simples, très polymorphes, munis ou non d'appendices en forme de cornes ou de soies ; les values ont généralement des formes géométriques régulières, du triangle au Fig. 109. — Biddulphia pidchelîa, Grun. polygone; elles sont rarement elliptiques, mais jamais complètement discoïdes. Cette tribu a, comme nous l'avons dit, des affinités avec les Ch.etocerées par le genre Hemiaulus, et avec les Eupodiscee par le genre Cerataulus. Genres Hemiaulus (Ehr), Anaulus (Ehr). Porpeia (Bail). Janischia (Grun). Terpsinoë (Ehr). Isthmia (Ag). Eucampia (Ehr). Ditylum (Bail). Tricêratium (Ehr). Aïit ph ilel ras (Ehr). Biddulphia (Grun) Cerataulus {Ehr). Fig. 110. — Euppdiscus Argus, Ehb, 18e Tribu. — Eupodiscees. Dans cette tribu Yendochrome est épars ; les frustules sont simples et les valves discoïdes ou lunulées, munies d'ocelli sail- VIII. CLASSIFICATION 205 lants, de tubercules, ou seulement d'un nodule sub marginal ; la surface des valves est cclluleuse, granulée, ou porte des sillons ou rayons moniliformes, ou des stries en forme de barbes de plume. Cette tribu, par le genre Auliscus, se rattache aux Biddulphiées, et par le genre Actinocyclus à la tribu des Héliopeltées. Genres Auliscus (Ehr) (Bail). Monopsia (Grov. et Si). Pseudauliscus (Leud. F). Huttonia (Grov. et Si). Ki'podiscus (Ehr). llcmidiscus (Wall). Euodia (Bail). Rpperia (Grun). Eunotogramma, (Wciss), Cestodiscus (Grev). Çraspedoporus (Grev). Aulacodiscus (Ehr). Actinodiscus (Grev). Actinocyclus (Ehr). 19e Tribu. — Héliopeltées L'endochrôme est formé de granules petits, épars sur les cordons du plasma ; les fvustules sont simples et les valves sont discoïdes, quelquefois ondulées, divisées en segments plus ou moins nombreux, alternativement sombres et éclairés; on rencontre souvent un om- hilic hyalin au centre et des épines submarginales, différemment placées suivant les genres. Fig. 111. — ActinojJtycJius imdulalus, Ehb. Le genre Actinoptychus, qui forme le passage de cette tribu à celle des Eupodiscées, se distingue du genre Actinocyclus par la présence de segments bien marqués sur les valves. 200 LES DIATOMEES Genres Actinoptychus (Ehr). Debi/a (Pantoc). Polymyxus (Bailey). Heliopelta (Ehr). Halionix (Ehr). Truania (Pantoc). /. ep idod isc us(0. Wi t) , 20e Tribu. — Astérolampiiees. Cette tribu, dont nous n'avons pas encore réussi à observer l'en- dochrôme, renferme des Diatomacées à frustules dont les valves discoïdes ou orbiculaires présentent des compartiments marginaux aréoles, plus ou moins nombreux, séparés par des sillons hyalins, qui partent d'une aire hyaline centrale, au milieu de laquelle se trouve souvent un ombilic allongé. Fig. 112. — Asterolampra Weissffogii, Gv, Genres Asteromphalus (Ehr). Asterolampra (Ehr). Âsterùdiseus (Johnson) . 21e Tribu. — Coscinodiscées. D'après la figure donnée par M. Schultz (Micros. Journ. 1859, PL ii, f. 13), du Coscinodiscus centralis (Ehr) vivant, et sur l'affirmative de Borscow (Sussiv. Diat. des S. E. Russlands), l'endochrôme des CoscinodicÉes peut être considéré comme granu- leux, ainsi que celui des autres Diatomées discoïdes. Les frustules sont simples, à valves discoïdes, rarement ellipti- ques ou réniformes, leur surface est aréolée ou granulée; elles pré- sentent parfois des couronnes concentriques de texture différente et rarement des dents ou des petites épines submarginales. Cette tribu a de grandes affinités avec les tribus précédentes par VIII. CLASSIFICATION 207 la texture de ses valves; par le genre Dictyopyxis, elle passe à la tribu des Xaxthiopyxidées. Fig. 113. — Cosciaodisci's leptopus, Grun. Genres : - 1 / achnoïdiscus (Deane ) Coseinodiseus (Ehr). Ile te l 'odictyon ( Grev) . BrightweUia (Ralfs). Craspedodiscus (Ehr). Porodiscus (Grev). Dictyopyxis (Ehr). 22" Tribu. — Xanthiopyxidées Dans cette tribu les frustules sont simples et les valves discoïdes ou elliptiques, fortement bombées, non celluleuses, mais chargées d'aiguillons ou d'épines parfois bifurquées. Cette tribu se rattache d'une part aux Coscinodiscees par le genre Creswellia, et aux Gailloxellees par le Skeletonema mirabile (Grùn). Fig. 114. — Stephnodiscus, Niagarce, Ehb. Genres Creswellia (Grev). Stephanopyxis (Ehr). Stephanodiscus (Ehr). Pyxidicula (Ehr). Xanthiopyxis (Ehr). Strangulonema (Grev). Skeletonema (Grun). 208 LES DIATOMEES 23e Tribu. — Gailloxellées. Dans cette tribu l'endochrôme est épars à la surface interne des frustules, il est souvent sous forme de forts gros granules anguleux. Les frustules sont cylindriques ou globuleux, simples ou réunis en filaments cylindriques ; les valves sont circulaires, quelquefois à Fig. 115. — Hyalodisous stelligcr, Bailey. ponctuations rayonnantes, d'autres fois granuleuses, celluleuses ou ponctuées; on remarque, chez certaines espèces, des épines à la surface des valves, comme dans le Gaillonella setosa (Greville), espèce qui a une grande affinité avec les Xaxthiopyxidées. Genres : Gaillonella (Bory). Podosira (Ehr). Pantocsekia (Griin). Cyclotella (Kùtz). Hyalodiscus (Ehr). C'est avec une certaine hésitation que nous rangeons le genre Hyalodiscus parmi les Gailloxellées. Son endochrôme, disposé en étoile à quatre segments, semble devoir l'éloigner de cette tribu, bien que la forme et la disposition de ses valves paraissent l'y rattacher. Ce genre a besoin d'être étudié plus complètement sur les frustules vivants,. Paul PETIT DEUXIÈME PAUTIE DESCRIPTION DES PRINCIPALES ESPÈCES IX DESCRIPTION DES PRINCIPALES ESPÈCES lM sous-famille : PLACOCHROMATICÉES Eridéchrôme disposé en James à la surface du protojilasma* lre TRIBU ACHNANTHÊES Les Achnanthées ont un endochrôme formé d'une seule lame très épaisse, doublant la face interne de la valve convexe, qu'on appelle aussi valve supérieure ou dorsale. (Fig. 130, 1.) Ces espèces ont, en effet, les deux valves dissemblables, et de plus, le frusiule étant plus ou moins cintré ou plié en genou, lors- qu'on le regarde par la face connective, l'une des valves est convexe et l'autre concave. — La valve concave ou inférieure présente un raphé avec un nodule médian et deux nodules terminaux. La face convexe ou supérieure n'a qu'un pseudo-raphé, sans nodules. Les frustules, indépendamment de la courbure plus ou moins marquée qu'ils présentent, ont, à plat, une forme naviculoïde, quelquefois elliptique ou même presque discoïde. Ils sont parfois resserrés au niveau du petit axe, en forme de semelle. Quelquefois, les frustules restent réunis en séries portées par un pédicelle hyalin. M. P. Petit classe dans cette tribu les genres : 1° Cocconeis, Ehb; 2° Cyclophora, Castr. ; 3° Cymbosira, Kz; 4° Achnanthes, \g. ; 5° Gephyria, Arnott; 6° Eupleuria, Arn.; 7° Rhoïconcis, Grûn. Cocconeis. — Ce genre a les frustules un peu cintrés, quelquefois presque plats, ou un peu gonflés en forme de lentille plan-convexe. Vus par la face valvaire, ils sont elliptiques, assez larges et même quelquefois discoïdes, en bouclier. Les stries, ponctuées, ont une directon généralement transversale ; mais celles qui sont au-dessus 2J2 LÉS DIATOMEES du petit axe se redressent par leurs extrémités vers le pôle supérieur de l'ellipse, et celles qui sont au-dessous de cet axe s'infléchissent vers le pôle inférieur, imitant ainsi la disposition des parallèles au- dessus et au-dessous de l'équateur sur une carte géographique mappemonde. Ce sont, en général, de petites espèces, qui vivent libres ou col- lées à plat, comme des parasites, sur les plantes aquatiques. Le plus commun de tous est le C. pediculus, qu'on trouve appli- qué sur presque toutes les algues d'eau douce et même des eaux saumàtres, comme une punaise, qu'il rappelle un peu par sa forme et sa couleur. Il est fortement courbé. La valve inférieure, qui présente raphé et nodules avec quelques côtes sur les bords, est finement striée de lignes ponctuées transversales, arquées autour des pôles de l'ellipse comme centre: (16 à 17 stries dans 1 centième de mm., V. Heurck). Sur la face supérieure, on voit un large pseudo-raphé, accompa- gné, de chaque côté, de lignes ondulées hyalines, qui coupent les stries perpendiculairement. Cette espèce mesure de 1 1/2 à 3 c. de mm. de longueur. Fig. 116. — Cocconeis pediculus, Ehb. a valve supérieure; b valve inférieure. Le C. placentula, Ehb., commun aussi dans les eaux douces, a à peu près la même forme, un peu plus arrondie par ses deux extré- mités ; sa valve inférieure est bordée d'une zone marginale formée de stries à direction rayonnante, ponctuées, plus espacées que celles de la partie centrale (lo dans 1 c. de mm.). Cette zone est sé- parée de la partie centrale par une ligne ou cadre elliptique hyalin. La partie centrale a 22 stries dans 1 c. de mm. La longueur du frustule varie de 1 1/4 à 3 1/2 c. de mm. (Fig. 130, 2.) Le C. dirupta, Greg, est une jolie espèce marine, finement ponc- tuée, dont le nodule médian, à la valve inférieure, est étalé transver- salement en espace blanc ou stauros, qui fait une croix sur le raphé. Mais l'espèce marine la plus commune est le C. scutellum. C'est le géant du genre, car sa longueur peut aller de 4 1/2 à 6 c. de mm. II est, en outre, très reconnaissable aux stries de sa valve supé- rieure, transversales, disposées comme les parallèles d'une carte IX. DESCRIPTION 213 géographique et formées de gros points. Ces points sont carrés et s'alignent en files longitudinales parallèles, de sorte que la valve pa- rait rayée longitudinalement par les interstries_ Chacune des stries transversales se termine à la zone marginale par un élargissement triangulaire, couvert de très fines ponctuations (7 à 8 stries dans 4 c. de mm.) La valve inférieure présente des stries transversales rayonnantes, formées de points beaucoup plus fins. Elle est bordée, comme dans le C. placentula, d'une zone formée de deux lignes claires concentri- ques, entre lesquelles est une rangée de grosses ponctuations comme les perles de certains cadres. Fig. 117. — Cocconeis scutellum, Ehb. 1, valve supérieure; 2, valve inférieure. Les auteurs signalent encore quelques autres espèces ou variétés toutes exotiques, parmi lesquelles nous citerons le C. salina, va- riété du C. pediculus, dont les lignes flexueuses longitudinales sont moins visibles, et le C. helbetica, très petite espèce, trouvée par M. J. Brun dans les lacs suisses, présentant une bordure formée par une double ligne marginale sur la valve inférieure, et deux ordres de stries, les unes atteignant le nodule central, les autres alter- nées avec les premières et de moitié plus courtes. Cette petite espèce ne mesure que 1 à 2 c. de mm. — Citons encore le C. costata, Grun". jolie espèce californienne. (Fig. 130, 3 et 4.) Achnanthes. — Les Achnanthes se distinguent facilement des Cocconeis en ce que les frustules sont plus nettement courbés en genou, quand on les regarde par la face connective, avec les bords dorsal et ventral généralement parallèles. Les valves, dissemblables, sont plus allongées, naviculoïdes, quelquefois étranglées en semelle ou en violon au niveau d.u petit axe. Les autres caractères pour la disposition de l'endochrôme, le raphé et les nodules sur la valve inférieure concavée, sont les mêmes que dans toute la tribu, mais les nodules terminaux sont moins visibles que dans les Cocconeis Les Achnanthes vivent solitaires, ou réunis par deux ou un petit nombre de frustules ; ils sont portés par un pédicelle hyalin fixé à •J14 LES DIATOMEES l'un des angles du premier frustule. (Fig. 120, 4.) Plusieurs sont marins, d'autres se trouvent dans les eaux douces ou saumàtres. Fig. 118. — Acltnanthes longipes, C. Ag. 13, valve supérieure ; 14, 15, valve inférieure Les valves sont striées de stries formées de points, nettement transversales ou un peu rayonnantes autour du nodule médian. Une des plus belles espèces, marine, l'A. longipes, G. Ag., se distingue tout de suite des autres en ce que ses valves sont mar- quées de côtes transversales entre lesquelles sont deux rangées de points. Le nodule médian de la valve inférieure est dilaté transver- salement en un espace lisse ou stauros et le pseudo-raphé de la valve supérieure est droit. Le frustule, allongé, naviculoïde, environ cinq à six fois plus long que large, est étranglé au niveau du petit axe. La zone connective est finement striée en travers avec quelques plis longitudinaux. Cette espèce mesure de 5 à 18 c. de mm. Les autres espèces présentent des stries transversales ponctuées, mais pas de côtes. Tel est YAchnanthes brevipes, C. Ag., autre grande espèce marine, dont les valves sont plus larges, environ quatre fois plus longues que larges, rétrécies au niveau du petit axe. Le pseudo- raphé de la valve supérieure n'est pas droit, mais courbe, et le nodule médian de la valve inférieure est dilaté transversalement ; la zone connective est comme dans l'espèce précédente. Les stries, au nombre d'environ 7 dans 1 c. de mm., sont formées d'assez grosses ponctuations, dont on compte de 2 à 40 dans chaque strie, suivant sa position sur le frustule. Cette espèce mesure de 7 à 10 cent, de millim. IX. DESCRIPTION 215 VAchnanthes subsessilis, Ehb., diffère du précédent par ses extrémités plus arrondies, sa forme (une ellipse allongée sans cons- triction au niveau du petit axe), ses stries qui sont plus fines et sa taille plus petite. 11 ne mesure que de 3 à 5 cent, de millim. Il est marin. 1 2 3 Fig. 119. — Achnantes brevipes, C. Ag. 1, valv. sup.; 2, valve inf. ; 3, face connective. VA. 2yctrcula, Ktz, marin aussi, est encore plus petit (1 à 1 1/2 cent, de millim.) et ses stries, ponctuées, sont plus fines. Le pseudo- raphé est courbe comme dans les précédents et le nodule dilaté en stauros transversal. Fig. 120. — Achnanthes coarctata, Bréb. 1, valve sup. ; 2, valve inf. ; 3, frustule entier, face connect. ; 4, groupe de frustules pédicelles Nous citerons encore, parmi ces espèces à stauros, les suivantes qui habitent les eaux douces : VA. coarctata, Bréb : valves resserrées en violon au petit axe. 216 LES DIATOMEES légèrement dilatées aux extrémités (capitées), avec un pseudo-raphé très excentrique et des stries ponctuées fine=. Long. : 1 à 4 c. de mm. Les Achnanthes hungarica, Grun., et A. afflnis, Grun., ont un pseudo-raphé droit et ne sont pas resserrés au petit axe; le raphé du premier est bordé d'une zone hyaline, qui forme une croix très apparente avec le nodule central dilaté transversalement. Les stries sont fines, rayonnantes autour du nodule (21 dans un 1 c. de mm). Le second est plus allongé, ordinairement plus petit de taille, à stries non rayonnantes et très fines (27 à 30 dans 1 cent, de mm.) Les espèces suivantes, qui toutes habitent les eaux douces, n'ont pas le nodule médian dilaté en stauros transversal et les deux valves sont semblables quant aux stries, ne différant que par la présence du raphé et des nodules sur la valve inférieure. Aucune n'est rétrécie au niveau du petit axe. L'A. biasolettiana, Grun., aune forme non plus resserrée au petit axe, mais dilatée. Il est très petit (environ 1 cent de millim.) avec des stries un peu rayonnantes autour du nodule et fines : 22 à 28 dans 1 c. de mm. L'A. delicatula, Grun. est relativement plus renflé encore au petit axe et ses extrémités sont pointues (subrostrées). De plus, ses stries sont grosses (15 dans 1 c. de mm.), et son nodule médian est entouré d'un petit cercle hyalin. Il est un peu plus grand que l'espèce précédente. Fig. 121. — Achnanthes exilis, Kz. 1, valves inférieures ; 2, valve supérieure. L'A. microcephela, Kz, est très long, presque bacillaire, avec les extrémités capitées et des stries très fines (30 à 36 dans 1. c. de m.) ; l'A. exilis, Kz, a les extrémités arrondies, mais non capitées (26 à 27 stries) ; l'A. minutissima a les extrémités un peu rostrées, et l'A. linearis, W. Sm., qui lui ressemble beaucoup, est plus arrondi par les bouts et relativement moins long. L'un et l'autre ont de 24 à 27 stries dans 1 c. de mm., mais l'A. minutis- sima est près de cinq fois aussi long que large, tandis que l'A. linearis n'est qu'environ quatre fois aussi long que large. Toutes ces espèces sont fort petites, mesurant de 1 à 2 cent, de mm . , sauf l'A. exilis, qui peut atteindre 3 c. IX. DESCRIPTION 217 Enfin VA. lanceolata, Bréb., petite espèce encore, se distingue tout de suite, non seulement par sa forme en ellipse courte et ses grosses stries (env. 15 dans 1 c. de mm.), mais encore par sa valve supérieure, qui présente au niveau du petit axe, sur un seul de ses côtés, un espace lisse en forme de fer à cheval. Plusieurs auteurs, Kùtzing, Grunow, H. Van Heurck, etc., ont séparé des Achnantlies proprement dits, sous le nom & Achnan- thidium, des espèces ou variétés dont le raphé, au lieu d'être droit ou simplement courbe, est sigmoïde, c'est-à-dire tourné en S. Tel est l' Achnantlies flexel 'la, Bréb., ou Achnanthidium flexel- lum, assez grande espèce d'eau douce (4 à 5 cent, de millim.), à stries rayonnantes, fines et délicatement ponctuées. V Achnanthidium flexellum, avec son raphé sigmoïde, et Y Achnantlies lanceolata avec sa marque hyaline qui interrompt les stries sur l'un des côtés de la valve inférieure, semblent établir le pas- sage aux Cyclophora, classés par Grunow au nombre des Cocconeis et dont M. Castracane a fait un genre, adopté par M. P. Petit. Ce genre Cyclophor a, dont nous ne connaissons qu'une espèce, exotique, a une forme elliptique en écusson, comme les Cocconeis, un raphé et un pseudo-raphé sigmoïdes, comme les Achnanthidium, et sur l'un des côtés des deux valves, une figure lisse comme en présente sur une seule de ses valves l' Achnantlies lanceolata. Cette figure est un petit cercle entouré d'une mince bordure, comme une moulure, avec un gros grain au centre, le tout imitant un bouton de sonnette. Fig. 122. — Achnanthidium flexellum, Bréb. Ajoutons que les valves de ce Cyclophora d'Australie sont perlées, que la valve inférieure ne présente ce bouton de son- nette que sur l'un des côtés du nodule médian, et que la valve supérieure porte de chaque côté de son large pseudo-raphé sigmoïde deux surfaces claires en forme de croissant allongé à concavité regardant le pseudo-raphé. C'est sur l'une de ces surfaces que parait appliqué le bouton de sonnette de cette valve. 15 218 LES DIATOMEES i)c TRIBU GOMPHONÉMÉES Les Gomphonemées ont un endochrôme formé d'une seule lame qui repose par son milieu sur un des côtés de la zone connective. Fig. 123. — Gcmiphonema Geminatum, Ag. s'étend de chaque côté de celle-ci de manière à doubler les deux valves jusque vers le milieu de l'autre côté de la zone où ses deux bords se rejoignent. Fig. 124. — Coupe schématique d'un Gomphonema, d'après Borscow. Les frustules, dans cette famille, sont en forme de coin, qu'on les regarde par la face valvaire ou par la face connective, mais surtout par cette dernière. Les valves, très souvent cunéiformes, en effet, ne le sont pas toujours régulièrement et présentent souvent des dilatations et des constrictions transversales, et quelquefois même ont une forme naviculoïde plus ou moins allongée ; mais elles ont toujours uneextrémitéplusélargiequel'autre,quiest plus pointue. Ces valves ont un raphé et sont symétriques par rapport à lui. Elles ont deux nodules terminaux et un nodule central, qui n'occupe ordinairement pas le milieu du raphé, mais est un peu plus élevé vers l'extrémité la plus dilatée de la valve. Elles sont striées trans- IX. DESCRIPTION 219 versalement de stries en points. L'extrémité la plus mince présente souvent une petite surface claire. Les Gomphonémées ont les frustules portés sur un coussinet ou thalame hyalin, ou bien sont fixés par leur extrémité atténuée à l'extrémité d'un pédicelle. Us se détachent d'ailleurs facilement et nagent librement dans l'eau. (Voir PI. II, fig. o et 7.) Cette tribu ne comprend que deux genres : 1° Rhoïcosphenia, Grun. ; 2° Gomphonenm, Ag. Rhoïscophenia. — Ce genre établit le passage- de cette famille à la précédente par ses frustules qui, bien que cunéiformes, sont courbés latéralement en genou comme chez les Achnanthes, et n'ont, comme ceux-ci, de véritable raphé et de nodules que sur la valve concave ou inférieure, la valve supérieure n'ayant qu'un pseudo- raphé. Le Rhoïcosphenia curvata, Grun. est une assez petite espèce, longue de 1 1/2 à 4 cent, de mm., qui vit dans les eaux douces ; on en trouve cependant une variété marine d'une taille ordinairement un peu plus grande. Les valves, vues à plat, ont une forme navicu- loïde, mais avec une extrémité un peu plus pointue que l'autre. La valve inférieure présente un cercle hyalin autour du nodule central et des stries un peu rayonnantes, qui ne vont pas tout à fait jusqu'au Fig. 125. — Rhoïcosphenia curvata, Gr. 1, face valvaire supérieure; 2, face valv. inf. ; 3, 4, face connective. raphé (env. 12 dans 1 cent, de mm.). La valve supérieure a des stries un peu plus grosses, allant jusqu'au pseudo-raphé, et un point clair à chaque extrémité. La membrane connective est lisse, bordée de deux lignes légères qui se terminent à chaque bout par une encoche. Gomphoîiema. — Les Goinphpnema se distinguent facilement des Rhoïcosphenia en ce que leurs frustules, vus par la face con- nective, ne sont point arqués, mais cunéiformes droits, svmétriaues 220 LES DIATOMEES par rapport au grand axe ; ils présentent, d'ailleurs, les caractères généraux de la famille, chaque valve ayant un nodule médian, un peu remonté vers l'extrémité la plus large, et deux nodules terminaux. Les stries, qui sont ponctuées, rayonnent autour du nodule qu'entoure souvent un cercle hyalin ou stauros, et les valves seraient complè- tement symétriques si, dans presque toutes les espèces, on ne voyait sur l'un des côtés delà valve un ou quelquefois plusieurs gros points isolés, près du nodule médian. Ils sont d'ailleurs portés dans leur jeune âge sur un thalame mucilagineux ou sur un pédicelle dicho- tomique. (Voir Fig. 123 et PI. II, Fig. 5, 6,7.) Les espèces sont assez nombreuses, vivent dans l'eau de mer ou dans les eaux douces, et fournissent un grand nombre de variétés. On peut arriver assez aisément à distinguer ces espèces en opérant diverses coupes dans la tribu. Ainsi, deux espèces seulement, parmi celles de nos pays, ne présentent pas de point asymétrique sur le côté du nodule médian. L'une est le Gomphonema olivaceum, Kz, commun dans nos eaux douces, et l'autre, le G. exiguwn, Kz, qui est marin. Fig. 120. — Gomphonema olivaceum, Kz. Le Gomphonema olivaceum a une forme naviculoïde, mais plus atténuée à l'une de ses extrémités. Le nodule médian, remonté vers l'extrémité la plus large, est entouré d'un espace lisse et le raphé bordé d'une mince bande hyaline. Les stries sont légèrement rayonnantes autour du nodule médian, au nombre de 10 dans 1 cent, de mm. L'extrémité atténuée de la valve montre une petite surface claire. Le frustule ne dépasse pas 3 1/2 cent, de mm. Cette espèce fournit une variété souvent mêlée à l'espèce type, G. olivaceum vulgare, un peu plus petite et plus large. Le Gomphonema exiguum, Kz. ressemble beaucoup au précé- dent comme forme et comme taille, mais il est marin et plus allongé. Ses stries sont plus serrées (18 dans 1 cent, de millim.) presque parallèles, laissant ainsi une mince zone hyaline le long du raphé, Mais cette zone s'élargit peu autour du nodule. Les autres espèces présentent un ou quelquefois plusieurs gros points isolés à côté du nodule médian; mais les unes ont un frustule présentant des dilatations et des constrictions quand on les regarde IX. DESCRIPTION 221 par la face valvaire, d'autres ont une forme naviculoide ou lancéolée. Parmi les espèces dont les valves présentent une ou deux constric- tions, nous signalerons les suivantes : Gemphonema constrietwn, Ehb. Vu par la face valvaire, le frustule a la forme d'une tête de marteau, le nodule central repré- sentant le trou du manche. Les valves sont en effet très dilatées au niveau du petit axe, puis resserrées et de nouveau dilatées à l'une des extrémités, qui est capitéc. C'est une jolie espèce, assez commune dans nos eaux douces à cours rapide, remarquable par ses stries rayonnantes autour du nodule et qui, alternativement, atteignent et n'atteignent 1 2 3 Fig. 127. — 1. Gomphonema constrietwn var. subcapitatum, Ehb; 2. Gomphonema constrictum, Ehb. ; 3. G. capitatum, Ehb. pas le nodule ; c'est cette disposition qui produit l'apparence d'un ps endos taur os. Le raphé est, du reste, bordé d'une zone hyaline. L'extrémité atténuée du frustule montre un espace clair au delà du nodule terminal. Les stries sont fortes, finement ponctuées; il y en a 10 à 12 dans 1 cent, de mill. et le frustule mesure de 4 à 6 cen- tièmes de mill. Le G. capitatum, Ehb., est considéré comme une variété du précédent. Il n'en diffère que parce que les valves sont moins étranglées ; c'est-à-dire que, malgré son nom, il est moins capité que l'autre. 1 2 Fig. 128. 1, Gomph. acuminatum, Ehb.; 2, G. acum. laticeps, Ehb. 222 LES DIATOMÉES Gomphonoma acuminatum^ Ehb. Il a la même forme générale en marteau, mais l'extrémité large est beaucoup plus élargie que le milieu de la valve au petit axe. De plus, elle se termine en pointe (rostrée). La bordure hyaline le long du raphé est très marquée, mais très peu dilatée autour du nodule médian, sur le côté duquel on voit un point isolé. La strie correspondant à ce point de l'autre côté de la valve est écourtée. Les stries, finement ponctuées, sont un peu rayonnantes et au nombre de 10 à 12 dans un cent, de mill. Sa longueur est de 1 1/2 à 5 c. de mm. Cette espèce, assez commune dans les ruisseaux et les mares, fournit un grand nombre de variétés, qui ne diffèrent guère que par leur forme plus ou moins large ou longue. Tels sont les Gompho- nema acuminatum laticeps, Ehb., G. acum. coronatum, P. Petit, G. acum. elongatum, P. Petit, etc. Gomphonema augur, Ehb. Il est beaucoup plus large que le précédent, mais ses valves n'offrent pas de constriction ; il est en forme de cerf-volant avec une pointe mousse sur son extrémité large. C'est aussi une espèce d'eau douce, dont les stries ressem- blent à celles du G. acuminatum, et sa taille ne dépasse pas 5 cent, de mill. Fig. 129, — Gomphonema augur, Ehb. Gomphonema geminatum, Ag. Il est ainsi nommé parce que ses frustules se rencontrent le plus souvent groupés deux par deux aux extrémités de son pédicelle ramifié. Ces frustules sont renflés au petit axe, resserrés au-dessus et au-dessous, et dilatés de nou- veau aux deux extrémités, mais beaucoup plus à l'une de ces extré- mités qu'à l'autre. Sur la large surface lisse qui entoure le nodule médian, on voit, d'un côté, de 5 à 8 petits grains isolés. Les stries sont fortes, ponctuées, rayonnantes ; on en compte de 9 à 10 dans 1 cent, de mill. (J. Brun) et le frustule mesure de 8 à 12 cent, de mill. C'est une des plus belles espèces de cette tribu. (Fig. 123.) Gomphonema micropus, Kz. Il a une forme générale navicu- loïde, mais avec une extrémité un peu plus élargie que l'autre, la partie médiane dilatée avec une très légère constriction au-dessus et au-dessous. L'aire hyaline qui longe le raphé est notablement IX. DESCRIPTION 223 élargie en stauros autour du nodule médian; il n'y a qu'un seul point latéral isolé. Les stries sont écourtées à ce niveau et un peu rayonnantes. Il y a 10 stries dans 1 cent, de mill. Le frustule a environ 3 cent, de mill. de longueur. Eaux douces. (Fig. 130, 8.) Les espèces suivantes présentent souvent une dilatation plus ou moins marquée du frustule au niveau du petit axe, mais elles n'offrent plus de constrictions proprement dites ; elles vont en Fig. 130. — 1, Disposition de l'endochrôme et du plasma dans un Cocconeis, d'après Borscow; 2, Cocconeis placentula, Ehb. valve inf. ; 3, 4, Cocc. costata, valve inf. et sup. ; 5, Gomphonema mamilla, Ehb. ; 6, Gomph. gracile, Ehb.; 7, Gomph. Ventrïcosum, var. ornatum ; ■ 8, Gomph,. micropus, Kz. ; 9, Gomph. angustatum, Grun. (Gross. 600 diam.) s'atténuant progressivement vers les extrémités, l'une de celles-ci toujours moins atténuée que l'autre. L'aire hyaline est assez large autour du nodule médian. Ce sont des espèces d'eau douce. Le Gomphonema tenellum, Kz, ressemble beaucoup au G. micropus, et l'un peut être regardé comme une variété da l'autre. Les constrictions au-dessus et au-dessous du petit axe dilaté sont encore moins marquées. Les valves sont un peu plus 224 LES DIATOMÉES larges et moins longues et l'espèce est plus petite. Les frustules ont 15 stries dans 1 cent, de mill. (.T. Brun) et sont portés sur un pédi- celle très court. Gomphonema parvulum, Kz. C'est une espèce assez commune, à valve lancéolée, cunéiforme, assez large, avec une petite pointe mousse sur l'extrémité large (rostréc). Il y a 14 stries dans 1 cent, de mill. et le frustule mesure environ 3 centièmes. Gomphonema gracile, Ehb. Cette espèce a une forme longue nettement naviculoïde, les valves allant en s'atténuant régulière- ment au-dessus et au-dessous du petit axe élargi ; les deux extré- mités sont presque semblables, et ce n'est guère que théoriquement que les valves sont cunéiformes. Elles sont réellement en losange très allongé. La bande hyaline le long du raphé est extrêmement mince, mais elle se dilate beaucoup autour du nodule médian, où elle présente un point latéral isolé. On compte 9 à 10 stries dans 1 cent, de mill. et le frustule peut atteindre jusqu'à près de 10 centièmes. (Fig. 130, 6.) Le Gomphonema dichotomum, W. Sm., est classé par M. Van Heurck comme une variété du G. gracile. Il présente, en effet, des caractères analogues, sauf que les bords des valves sont un peu plus courbes et les extrémités un peu plus obtuses. Le frustule est moitié plus petit et les stries plus fixes (12 à 13 dans 1 c. de mill.) Le Gomphonema intricatum, Kz, est naviculoïde lancéolé, long; le frustule est dilaté à la partie médiane et de là va en s'amincissant presque autant vers les deux extrémités qui finissent par une courbe presque aussi obtuse. La raphé est bordé d'une bande hyaline assez large, notablement élargie au nodule. 8 à 10 stries dans 1 cent, de mm. Le frustule a de 4 à 6 centièmes. Gomphonema angustatum, Kz. C'est peut-être une variété du précédent, plus large, malgré son nom. Il est presque régulière- ment naviculoïde ou quelquefois avec une constriction à peine sen- sible au-dessous de ses extrémités. Les autres caractères sont les mêmes que chez le précédent, mais les stries sont un peu plus serrées (10 à 11 dans 1 centième). Le frustule est ordinairement un peu plus petit. (Fig. 130y 9.) Cette tribu des Gomphonemées contient encore plusieurs espèces et variétés, dont on trouvera la figure dans les Atlas spéciaux (1), et qui sont presque tous exotiques. Nous représentons ci-contre (Fig. 130, 5), le beau Gomphonema mamilla, Ehb., de Fall River dans l'Orégon . (1) Voir H. Van Heurck, Atlas de la Synopsis des Liât, de Belg. IX. DESCRIPTION 225 3e TRIBU CYMBELLÊES Les Cymbellées ont un endochrôme formé d'une seule lame repo- sant par son milieu sur la zone connective, tantôt du côté le plus concave tantôt du côté le plus convexe, suivant les espèces, puis doublant les deux valves adjacentes et se rejoignant sous la zone opposée. En effet, les frustules sont dyssymétriques, renflés d'un côté de manière à présenter un dos (côté convexe) et un ventre (côté Fig. 131. — Schéma de la disposition de l'endochrôme dans un Cymbella ; coupe d'après Pfitzer. concave). Les valves sont gonflées à leur centre, et, comme on dit, cymbi formes ou cintrées ; elles ne sont pas symétriques par rap- port à leur grand axe, mais seulement par rapport au petit axe. Elles présentent un raphé, courbe ou droit, un nodule médian et deux nodules terminaux. Fig. 132. — Cymbella Ehrenbergii, Kz. 1, face valvaire ; 2, face connective. Beaucoup d'espèces de cette tribu sont, à l'état jeune, portées sur un pédicelle simple ou ramifié, ou bien contenues dans des tubes gélatineux. Plus tard, le plus grand nombre des frustules s'affran- chissent de leur support ou de leur enveloppe, et, ainsi libérées, certaines espèces deviennent parfois assez difficiles à distinguer les unes des autres. 226 LES DIATOMEES M. P. Petit fait rentrer dans les Cymbellées les cinq genres suivants : 1° Cocconema, Ehb. — 2° Encyonema, Kz. — 3° Amphora, Ehb. — 4° Epithemia, Bréb. — Cymbella, Ag. En raison des grandes analogies que présentent plusieurs espèces de ces divers genres, certains auteurs ont, comme M. H. Van Heurck, réuni les Cocconema et les Cymbella dans le seul genre Cymbella, et M. J. Brun y a même joint des espèces du genre Encyonema. Fig. 133. — 1, Cocconema lanceolatum, Ehb. ; 2, Cocconema gastro'ides, Kz Cocconema. — Le genre Cocconema, Ehb., contient des espèces à frustule long, peu large, fortement cintré, de sorte que le dos est très convexe et le ventre nettement concave, et ordinairement un peu renflé à la partie médiane, à la hauteur du nodule. Le raphé est courbe, bordé d'une zone hyaline plus ou moins large, plus ou moins dilatée autour du nodule médian. Les valves sont striées de stries perlées, en général robustes et légèrement rayonnantes autour du nodule médian et du raphé. Les frustules jeunes sont portés seuls ou par paire sur un pédi- celle filamenteux simple ou dichotome, ce qui rappelle les Gom- phonemi. Ils forment ainsi par leur réunion des couches mucilagineuses sur les objets submergés, et se séparent plus tard pour nager librement. IX. DESCRIPTION • 227 Nous pouvons donner pour type de ce genre le Cocconema lanceolatum, belle espèce très répandue dans nos eaux douces, présentant d'une manière très nette tous les caractères typiques de ce genre. Le bord dorsal est très convexe, le raphé très arqué, la zone hyaline assez étroite, le nodule médian très grand et allongé. Les stries sont au nombre de sept à huit dans 1 cent, de mm. et la longueur du frustule est de 8 à 15 cent, de mm. Fig. 134. — C. asperum, Ehb, d'après M. P. Petit. Le Cocconema asperum est une espèce très voisine, mais qui se distingue de la précédente par la largeur de la bande hyaline le long du raphé. D'après M. Paul Petit, elle atteint 22 c. de mm. de lon- gueur sur 4 de largeur et présente 8 stries dans 1 c. de mm. (1). (1) P. Petit et Lenduger-Fortmorel. Des Gisements siliceux fossiles de l'Auvergne. {Journ. de Micrographie T. II, 1887.) 228 LES DIATOMÉES Le Cocconema cistula, Ehb, sur lequel M. Paul Petit a étudié le phénomène du rajeunissement des cellules diatomées. (Voir p. 48 et PL I.) est aussi une des espèces sur lesquelles M. Matteo Lanzi pense avoir observé la sporulation ou la formation de germes. (Voir p. 50 et PI. II, Fig. 3 et 4.) Il est relativement moins long et plus large que les précédents. Il est très arqué aussi, mais le ventre est Fig. 135. — Cocconema cistula, Ehb. moins concave, et la zone hyaline le long du raphé est, relative- ment aussi, moins large etplus dilatée autour du nodulemédian. Sur cette partie hyaline, près du nodule médian et du côté ventral, on voit de 2 à 5 granules isolés, ce qui rappelle encore certains Gom- phonema. Il est plus petit de taille, variant de 5 à 9 c. de mm. et ne présente que 7 à 8 stries ponctuées dans 1 cent, de mm. Il est commun dans les eaux douces. Le Cocconema cymbi forme, Ehb, est mince et long, mais très peu arqué; aussi le raphé est-il très peu courbe, et partage-t-il la valve en deux parties presque égales. La bande hyaline qui le borde est étroite, à peine dilatée au nodule médian, avec un grain isolé du côté ventral. La valve est légèrement bombée au centre. Il y a de 8 à 11 stries (J. Brun) dans 1 cent de mm. et lefrustule a de 5 à 10 cent, de mill. Cette espèce, assez commune dans les eaux douces, fournit plu- sieurs variétés, dont une, plus petite de moitié, C. cymbiforme parvum, W. Sm., est assez répandue. Le Cocconema gastroides, Kz, est encore une grande espèce res- semblant assez au C. lanceolatum, mais ayant le côté ventral beau- coup moins concave, presque droit, un peu renflé au centre. Le raphé est par conséquent assez peu arqué, mais la bande hyaline qui le borde est très large, peu dilatée autour du nodule. Les stries sont IX. DESCRIPTION 229 robustes, 8 dans 1 c. de mm. Le frustule peut atteindre jusqu'à 15 cent, de mm. Quant au Cocconema tumidum, Bréb, large et court, avec le dos extrêmement bombé tandis que le ventre est presque plat et que les deux extrémités se détachent comme les deux bouts d'un chapeau bicorne, il nous paraît faire le passage des Cocconema aux Encyonema, bien qu'il soit pédicellé. La bande hyaline du raphé est large, dilatée au nodule et présente quelquefois un ou deux gra- nules isolés. Le nodule médian est ordinairement traversé par un sillon. Il y a 8 à 9 stries robustes dans 1 c. de mm. et le frustule mesure environ 6 cent, de mm. Encyonema. — Ce genre est remarquable par la forme du thalle ou thalame, qui contient les jeunes frustules. C'est un tube mucilagi- neux, hyalin, dans l'intérieur duquel les frustules sont renfermés et où ils se multiplient par division, se poussant les uns les autres en avant et dans des positions alternativement inverses. Les frustules sont ordinairement plus trapus que ceux des Cocco- nema, avec un dos généralement très convexe tandis que le ventre est presque droit, sauf que les extrémités s'infléchissent du côté du ventre. Le raphé est droit et partage la valve en deux parties très inégales ; le nodule médian est grand et les nodules terminaux, éloignés des extrémités, se prolongent dans l'axe, oblique, de ces extrémités. Les stries sont ponctuées et rayonnantes. Fig. 130 — Encyonema prostratum , Ralfs. a, face valvaire, b, face connective ; c, frustules contenus dans leur tube mucilagineux. VEncyonema prostratum, Ralfs, peut être pris pour type. C'est une belle espèce, sur laquelle on voit bien les caractères. Les nodules terminaux se prolongent longuement dans l'axe des extré- mités bien détachées et inclinées du côté ventral. L'aire hyaline autour du nodule central est large et certaines stries, à ce niveau, sont plus courtes que les autres, formant comme les plis autour d'un ombilic. Vu par la face connective, le frustule est large, très brus- 230 LES DIATOMEES quement tronqué aux deux extrémités. Les stries sont très fortes, perlées, 7 à 8 dans 1 cent, de millim. Cette espèce, d'eau douce, habite des tubes toujours simples et mesure de 6 à 9 cent, de mill. de longueur. V Encyonema cœspitorum, Kz, est plus court, plus trapu, a le dos plus bombé, les extrémités moins arrondies et moins inclinée* vers le ventre. L'aire hyaline centrale est petite; les stries sont plu? fines (8 à 12 dans 1 c. de mm.) et le frustule est moitié plus petit. Il habite dans des tubes ramifiés. (Eaux douces.) V Encyonema ventricosum, Kz, est un peu plus allongé, le bord ventral est droit, les extrémités presque pointues ne se recourbent 1 V 2 Fig. 137. — 1, Encyonema cœspitosum, Kz. ; 2, Encyonema ventricosu m, Kz. pas vers le ventre et restent dans l'axe du raphé. La bande hyaline le long du raphé est très étroite, non dilatée autour du nodule médian. Les stries sont faibles, serrées (42 à 16 dans 1 c. de mm.) et le frustule est fort petit, ne dépassant guère 2 c. 1/2 de mm. Fig. 138. — Amphora ovalis, Kz a, face valvaire : b, face connective. Amphora. — Ce genre se distingue par la forme extrêmement dys- symétrique de ses valves. C'est ainsi que, vus parleurface valvaire, les frustules présentent un côté dorsal plus ou moins bombé ou convexe, avec un côté ventral peu concave ou même tout à fait droit; mais le raphé est très excentrique et situé tout près du bord IX. DESCRIPTION 231 ventral, quelquefois même presque tout à fait sur le bord, de sorte que le nodule médian peut être marginal. Ce nodule médian est quelquefois dilaté en stauros. Les nodules terminaux sont situés tout à l'extrémité des valves. Vus par la face connective, les frustulesont une forme généralement ovoïde, et la zone connective est souvent striée, plissée ou ponctuée longitudinalement. Nous pouvons prendre pour type X Amphora ovalis, Kz, dont le côté ventral est un peu concave, et dont le raphé, courbé dans le même sens, et à double courbure, partage le petit axe en deux parties très inégales qui sont entre elles environ comme I : 2. Le nodule médian, presque marginal, ne se dilate pas en stauros. Les stries, très légèrement rayonnantes, soht robustes, à grosses ponc- tuations, au nombre de 10 à il dans un cent, de mill. Cette espèce, d'eau douce, commune partout, a de 5 à 7 cent, de mm. de lon- gueur. Elle fournit plusieurs variétés, dont l'une, A. ovalis gracilis, Ehb., est plus étroite et plus grêle. La variété A. ovalis a/finis, Kz., qui se trouve aussi dans les eaux un peu saumàtres, est aussi plus petite, avec les extrémités plus pointues et les stries plus fines (42 à 13 dans 1 cent, de mm.). V Amphora minutissima, W. Sm. est une très petite espèce d'eau douce, qui vit en parasite sur d'autres Diatomées, par exemple sur les Nitzschia linearis et N. sigmoïdea (J. Brun). Elle est très renflée et les frustules vus par la face connective sont presque ronds. Le nodule médian est dilaté en un espace lisse qui coupe presque la valve dans toute sa largeur sur le petit axe. Les stries sont très fines, 30 dans 1 cent, de mm. (J. Brun). Sa taille n'est que de 1/2 à 2 1/2 centièmes de millimètre. V Amphora lineolata, Ehb., a un frustule plus allongé, en ellipse longue par la face connective, des stries très fines (23 dans 1 cent, de mm.) et une zone connective marquée aussi de stries transversales très fines, coupées par de nombreux plis longitudi- naux. La longueur est de 4 à o cent, de mm. La plupart des autres espèces sont marines. Parmi les plus remarquables nous citerons les suivantes : Amphora ocellata. Donk. dont les frustules, vus par la face connective, n'ont pas un contour ovale, mais quadrangulaire. Le nodule médian est prolongé en un stauros qui coupe la valve suivant le petit axe. Les stries sont très fines. Le frustule est grand et peut atteindre 9 cent, de mm. Amphora lœvissima, Greg. Cette espèce ressemble à la précé- dente quant au nodule médian prolongé en stauros transversal, 232 LES DIATOMEES mais le frustule est long et mince. Les stries sont extrêmement fines. Fig. 139. — Amphora salina, W. Sra. Amphora salina, W. Sm. Espèce longue, à raphé marginal, sans dilatation transversale du'nodule médian. Les extrémités, légère- ment renflées s'incurvent un peu du côté du ventre. Les stries sont fines, 18 à 21 dans 1 cent de mm. La taille est de 6 à 5 cent, de mm. Fig. 140. — Amphora cingulata, Cl. V Amphora cingulata, Cl. est une grande espèce marine, des mers des Indes et des Antilles, dont le stauros est étendu transver- IX. DESCRIPTION' 233 salement, en ceinture. Elle a environ iï> stries dans 1 cent, de mm. et mesure de 8 à 10 cent, de mm. (La Fig. 140 n'en représente que le contour à un grossissement de 800 diamètres.) Epithemia. — Ce genre a été placé par le prof. Pfitzer et par M. Paul Petit dans les Cymbellees, parce que son endochrôme pré- sente la même disposition que dans les autres genres de cette tribu., c'est-à-dire qu'il est formé d'une seule lame reposant par son milieu sur la zone connective convexe ou dorsale (comme dans les Amphora), s'étendant sous les deux valves adjacentes et allant se joindre sous la zone connective concave ou ventrale, où se trouve la ligne de suture. Les frustules sont, en» effet, gonflés d'un côté du petit axe, comme ceux des genres que nous avons décrits précédem- ment, présentant un dos plus ou moins convexe et un ventre concave. Mais ils se distinguent par l'absence de véritable raphé et des nodules médian et terminaux. C'est en raison de l'absence de véritable raphé queM. H. L. Smith, M. H. Van Heurck et tous les auteurs qui ont adopté le système de classilication fondé sur la présence ou l'absence d'un raphé, ont rangé les Epithemia dans une classe très éloignée des CymuellÉes, (qui, ayant un raphé et des nodules, appartiennent par conséquent au groupe des Raphidées), et les ont placés dans le groupe des Pseudo-Raphidées. qui n'ont qu'un faux raphé et pas de nodules. a b Fig. 141 — Epithemia Argus , Kz. a, face valvaire ; b, face connective Il est évident que, non seulement à cause de la disposition de leur endochrôme, mais encore en raison de leur forme et de leur aspect général, les Epithemia se rapprochent beaucoup des Amphora. Nous avons vu, en effet, que si l'on port des Cocconema, en passant par les Encyonema et les Amphora, on trouve des frustules arqués avec un côté bombé, le côté opposé plus ou moins rentrant, et un raphé qui divise la valve en deux parties de plus en plus dis- semblables, la partie dorsale devenant toujours de plus en plus grande, tandis que la partie ventrale devient de plus en plus petite; si bien que nous avons fini par trouver des Amphora chez lesquels 16 234 LES DIATOMEES le raphé longe presque le bord ventral de la valve et où le nodule médian est porté tout à fait sur la marge. Si l'on suppose que la migration du raphé vers le bord ventral continue au delà de sa position dans les Amphora, on peut admettre qu'il finit par sortir de la valve et disparaître. On a alors un frustule arqué, strié en travers et qui n'a plus de raphé ni de nodule. C'est un Epithemia. D'autre part, si le raphé véritable a disparu, chez beaucoup d'es- pèces on voit apparaître une ligne longitudinale, un pseudo-raphê, droit ou infléchi, qui aboutit souvent à une sorte de nodule médian. Fig. 142 Fig. 143 Fig. 142. — Epithemia turgida, Ehb. Fig. 143. — Epithemia turgida, var. granulata, Grun. Enfin ajoutons, comme détail particulier, que les Epithemia pré- sentent des épaississements internes, visibles à l'extérieur sous l'as- pect de côtes plus ou moins robustes. Ces côtes, que W. Smith considérait comme des canalicules, ont une direction à peu près transversale sur la valve et sont souvent dilatées aux extrémités, c'est-à-dire au bord des valves, où elles forment par leur coupe optique comme une rangée de grosses perles quand on regarde le frustule par la face connective. Entre ces côtes, on voit sur les valves des stries perlées, à peu près transversales et pLus ou moins serrées. Vus par la face connective, les frustules sont souvent gonflés en leur milieu, aux extrémités du petit axe. Les Epithemia ne sont point portés sur des stipes ni dans des tubes, mais ils vivent ordinairement accolés par le côté concave de leur zone connective sur d'autres plantes aquatiques, qu'ils IX. DESCRIPTION 235 recouvrent d'une couche mucilagineuse. Les frustules sont le plus souvent isolés un par un, quelquefois géminés, et forment rarement des séries plus nombreuses. V Epithemia turgida, Ehb., est une des espèces les plus belles et les plus communes sur les plantes aquatiques dans nos eaux douces. Le frustule est long et assez mince, et la valve est environ six fois plus longue que large, bien que la forme de cette espèce soit très variable. Le bord dorsal est assez fortement convexe, mais le bord ventral est presque droit, sauf aux extrémités, qui sont atténuées, un peu capitées et s'infléchissent du côté ventral. Les côtes transversales sont robustes, celles du centre rayonnant autour du milieu du bord dorsal ; il y en a de quatre à six dans 1 cent, de mill., et entre elles est une rangée de grosses perles oblongues composées chacune de deux petites perles rapprochées. Ces perles s'alignent aussi en séries longitudinales, ou plutôt diagonales, en écharpe. Il y a environ huit de ces séries perlées dans la largeur de la valve. Du bord ventral se détache un pseudo- raphé formé de deux lignes courbes venant se couper au centre de la valve sur une demi-côte impaire partant du bord dorsal et qui marque le petit axe. Au-dessus et au-dessous de ce petit axe, les deux demi-valves sont rigoureusement symétriques. La face connective a une section rectangulaire très allongée, un peu renflée au milieu. Fig. 144. — Epithemia soreoc, Kz. (d'après le Dr Van Heurck.) Cette belle Diatomée peut avoir de 7 à 15 cent, de millimètre de largeur. On pense que l' Epithemia Hyndmanni, W. Sm., qui ressemble extrêmement à YE. turgida, mais qui est beaucoup plus grand et atteint 20 cent, de mill., n'est que son frustule sporangial. VEpithemia sorex, Kz, est moitié plus petit, plus trapu, plus arqué, avec un bord ventral très concave, des extrémités atténuées capitées, qui ne s'infléchissent pas du côté du ventre, mais plutôt du côté du dos. Vu par la face valvaire, le frustule a tout à fait la forme d'un petit chapeau bicorne. Les deux lignes courbes qui représentent le pseudo-raphé se prolongent jusqu'au bord dorsal 236 LES DIATOMEES où elles se coupent, embrassant dans leur angle d'intersection un espace clair imitant un pseudo-nodule. Les côtes sont moins robustes que dans YE. turgida ; il y en a (! à 7 dans 1 cent, de Fie. 145. Fis-. 14(1. Fig. 145. — EpUhemia sorex, Hz. d'après M. A. Tmaii . Fig. 146, — Epithemia orellata. Khb. 'î. coun.' mill., et elles comprennent aussi deux rangs de perles très Unes. — Vu par la face connective, le frustule est beaucoup plus épais ei plus bombé au centre que dans YE. turgkla. C'est une espèce d'eau douce, assez commune et qui mesure de 2 à 4 cent, de millim. — On connaît sa forme sporangiale dont le frustule est très analogue, quoique relativement moins large, mais dont la longueur est presque double. Fig. 147. — Epithemia gibberula, Ehb. (d'après M. Paul Petit). h' Epithemia gibberula, Ehb. ne nous parait être qu'une variété de YE. sorex. VEpiihemia gibba, Kz. est encore une espèce d'eau douce très répandue. Elle a un frustule très long et très mince, presque bacil- laire, avec des valves très étroites, dont le bord ventral est droit et le bord dorsal presque droit aussi, sauf une bosse au milieu du dos. Les deux extrémités, pointues, se recourbent en crochet du côté du ventre. Il n'y a p;is de pseudo-raphé formé par deux lignes courbes qui se coupent au centre, mais une seule ligne longitu- dinale qui longe le bord dorsal. Les côtes sont fortes, fi à 7 dans i cent, de mill., à peu près parallèles, sauf aux extrémités. Elles comprennent deux rangées de stries finement perlées. Le frustule peut atteindre 28 cent, de mill. IX. DESCRIPTION 237 V Epithemia gibba fournit quelques variétés, dont YE. gibba ventricosa, Gr., qui est plus petit, plus trapu et plus bossu. (Voir Fig. 148. Fis-. 149. Fig. 148. — Epithemia gibba, Kz. Fa^e connective et face valvaire Fig. 149. — Epithemia gibba ventricosa, Gr. PI. II. Fig. 1,2); et l' E. gibba pa rai lela,Gr., qui est, nu contraire, plus long, plus mince et n'est pour ninsi dire plus bossu du tout sur le dos. Fig. 150, — Epithemia zébra, Kz. h'Epithemia zébra, Kz., est une jolie espèce, plus petite, très peu arquée, presque cylindrique, à extrémités arrondies, non recourbées, zébrées en travers de côtes presque parallèles (3 à 3 1/2 dans 1 cent, de-mill.) comprenant entre elles, non plus deux, mais quatre ou cinq stries perlées. On voit apparaître, près du milieu du bord ventral, deux très courtes lignes courbes qui se coupent tout de suite près de ce bord et représentent un pseudo-raphé trè.S 238 LES DIATOMEES abrégé. Va par la face connective, le frustule donne une coupe optique en rectangle allongé, sans renflement. C'est encore une espèce d'eau douce, mais qu'on trouve aussi dans les eaux sau- màtres et dont la taille varie de 2 à 6 cent, de mill. h' Epithemia Argus, Kz, ressemble au précédent, mais il est un peu plus grand, moins arqué encore, avec des extrémités arrondies, comme un cigare qui serait un peu courbé. Les côtes sont très robustes, presque parallèles, écartées (1 à 2 dans 1 cent, de mm.) contenant entre elles 6 ou 7 stries finement perlées. Le pseudo-raphé règne sur toute la longueur de la valve, formé de deux lignes qui, venant des extrémités, longent le bord ventral et vont par une courbe abrupte se couper sur le bord dorsal. — Vu par la face connective, le frustule montre de chaque côté de la zone une rangée de grosses perles ou ocelles produits par la coupe optique des côtes, très dila- tées à leurs extrémités. Fig. 151. Fig. 152. Fig. 151 — Epithemia Argus, Kz. 1, Frustule vu par la face valvaire ; 2, autre frustule vu par la face connective Fig. 152 — Epithemia Argus, var. amphicephala, Grun. Cette espèce, d'eau douce, a de 4 à 7 cent, de mm. de longueur. Elle fournit des variétés à bords ondulés ou à extrémités capitées, fort élégantes, telles que YEp. Argus amphicephala, Grun. Fig. 153 — Epithemia musculus, Kz'. Ce genre renferme aussi quelques espèces marines, parmi les- quelles nous citerons le joli Epithemia musculus, dont la face IX. DESCRIPTION 239 val va ire est en demi-lune avec des côtes rayonnantes et un pseudo- raphé formé d'une ligne qui longe le bord dorsal et montre un petit nodule médian. La face connective est ovale. Les stries sont fine- ment perlées, et le frustule mesure de 4 à o cent de millim. Cymbella. — Le genre Cymbella, Ag, aux dépens duquel ont été formés les genres Cocconema et Encyonema, tend au retour à la symétrie des valves par rapport aux deux axes. Il forme ainsi le pas- sage des CymbellÉes, asymétriques, aux Naviculées, symétriques. Fig. 151 — • Cymbella Ehrenbergii, Kz. a, Face valvaire; b, Face connective. Ainsi, les Cocconema comprennent des espèces à frustules arqués, à dos convexe et à ventre concave, de sorte que le bord dorsal et le bord ventral sont plus ou moins parallèles; dans les Encyonema, le bord ventral se redresse, il est à peu près droit, sauf aux extré- mités, qui se recourbent souvent de manière à lui conserver une courbe générale concave. En même temps, le raphé se rapproche de plus en plus du bord ventral et les valves sont de moins en moins symétriques par rapport à ce raphé. Dans les Epithemia, le bord dorsal est toujours convexe, le bord ventral tantôt concave, tantôt presque droit et le raphé a disparu tout à fait, parfois remplacé par un pseudo-raphé de forme diverse. Chez les Cymbella, le bord dorsal reste convexe; mais le bord dorsal non seulement n'est plus concave, non seulement n'est plus droit, mais il devient convexe à son tour, de sorte que les deux bords latéraux sont courbés en sens contraire, étant tous deux convexes, mais le dos plus que le ventre, ce qui conserve au frustule une forme encore un peu arquée. Il en résulte que le raphé reparait et tend à prendre la position médiane qu'il occupe normalement dans les frustules réguliers, et, par exemple, dans les Naviculées. Nous pouvons donc donner comme caractères de ce genre la forme lancéolée plus ou moins arquée du frustule, avec le bord dorsal et le bord ventral tous deux convexes, des valves asymé- 240 LES DIATOMEES triques divisées en deux parties inégales par un raphé plus ou moins courbe, présentant des nodules terminaux et un nodule médian excentrique. Pas de fausses cloisons, ni de côtes, mais seulement des stries perlées transversales, souvent plus serrées aux extré- mités que dans la partie médiane. Les frustules. à l'état jeune, sont, 1 2 Fig. 155. — 1, Cymbella anglica. Lag.'; 2, Encyonema prostratum, Kz. fixés, solitaires ou par paires, ou groupés, dans une masse gélati- neuse hyaline formant comme un sac, qui se prolonge quelquefois en pédicelles portant un ou deux frustules (comme nous l'avons décrit pour le Gomphonema olivaceum, d'après M. Matteo Lanzi, Pi. II, Fig. 7). Ils s'en séparent avec l'âge, et c'est à l'état libre qu'on les trouve le plus souvent. Fig. 156. — Cymbella Ehrenberyii, Kz. Nous n'avons à signaler que des espèces d'eau douce. Le démem- brement dont ce genre a été l'objet n'y a. d'ailleurs, laissé qu'un assez petit nombre d'espèces, sujettes, il est vrai, à diverses varia- tions. Il faut avouer, du reste, que certains Encyonema pour- IX. DESCRIPTION 241 raient aussi bien être rangés parmi les Cymbella, s'ils n'étaient dans leur jeune âge contenus dans des tubes hyalins à forme bien définie. (Fig. 155.) Nous donnerons comme type la plus belle et la plus grande espèce, le Cymbella Ehrenbergii, Kz, dont le frustule a des valves largement lancéolées, avec des extrémités un peu atténuées et rostrées, un raphé notablement rapproché du bord ventral, bordé d'une large zone hyaline très peu dilatée autour du nodule mé- dian. Les stries sont fortes (environ 8 dans 1 cent de mm), mais très finement perlées. La longueur du frustule varie de fi à 13 cent, de mi 11. Fig. 157. — Cymbella ruspidata, Kz. Le Cymbella cuspidata, Kz., se reconnaît tout de suite à ses extrémités pointues. La zone hyaline qui borde le raphé, courbe, est étroite, mais très dilatée au nodule médian. Les stries sont grosses (6 environ dans 1 cent, de mm.) mais deux fois plus serrées aux extrémités, finement divisées. Sa longueur ne dépasse pas 8 cent, de mm. Toutes les autres espèces sont de beaucoup plus petite taille. Ce n'est pas là un caractère bien scientifique, mais il permet néan- moins de les distinguer à première vue des deux précédentes. Le Cymbella obtusa, Greg. a une forme naviculée, abord ventral presque droit, un raphé un peu flexueux bordé d'une étroite bande hyaline, faiblement dilatée au nodule médian. Les stries sont au nombre de 12 dans 1 cent, de mm. au milieu, 15 aux extrémités. Le frustule ne dépasse pas 3 cent, de mm. Le Cymbella af'fînis, Kz., a les frustules courts, trapus, à bord dorsal très arqué, à bord ventral un peu convexe, avec un raphé très arqué, parallèle au bord dorsal, bordé d'une zone hyaline étroite. Les extrémités sont rostrées ; les stries médianes sont au nombre de 9 dans 1 cent, de mm. du côté du dos, de 1 1 du côté du ventre. 242 LES DIATOMEES C'est une petite espèce d'eau douce et qui ne dépasse guère 2 1/2 cent, de millim. Fig. 158.' — Cymbella af finis, Kz. Fig. 159. — Cymbella amphicephala, Nœg. Le Cymbella leptoceras, Kz, aies extrémités atténuées, le dos très arqué, le ventre gonflé avec un raphé non pas courbe, mais un peu flexueux, bordé d'une large zone hyaline. Environ 8 stries dans 1 cent, de mm. Espèce d'eau douce, longue de 2 à 3 c. de mm. Signalons encore le Cymbella stomatophora, Gr. , espèce exotique signalée par M. P. Petit aux environs de Paris, et qui se distingue de toutes les précédentes par la présence d'un ou deux points isolés dans l'aire hyaline près du nodule central, du côté le moins courbe de la valve, et par un léger étranglement au-dessous des extrémités des valves. Il y a 8 à 9 stries dans 1 cent de mm. et le frustule a 7 à 8 cent, de mm. de long. Fig. 160 Fig. 161 Fig. 160. — Cymbella gracilis, Kz. Fig. 161. — Cymbella sabcequalis. Grun. Les Cymbella amphicephala, Nseg, et C. gracilis, Kz, sont encore deux petites espèces de 1 4/2 à 4 c. de mill., dont la première est remarquable par ses extrémités capitulées, et la seconde par sa forme grêle. Le Cymbella. subœqualis, Gr., a une forme naviculoïde avec un raphé presque droit, qui partage la valve en deux parties presque égales. C'est une forme de passage des Cymbella aux Navicula. Les stries sont un peu plus serrées que dans le précédent, 10 dans 1 cent, de mm. au milieu et 14 aux extrémités. Petite espèce d'eau douce, de 2 à 3 cent, de mm. X DESCRIPTION DES PRINCIPALES ESPÈCES TRIKU NAVICULEES § 1. — Caractères La tribu des Nayiculees présente ce caractère remarquable que l'endochrômeest formé de deux lames séparées, dont chacune repose par son milieu sur la zone connective et se relève plus ou moins sur les valves adjacentes jusqu'au voisinage du raphé. (Fig. 162, 3.) l 3 Fig. 162. — Navicula major, Kz. 1, face valvaire. 2, face connective. 3, Coupe transversale montrant la disposition de l'endochrôtne. Cette tribu, la plus nombreuse de toute la'famille des Diatomées, comprend des espèces dont les fruslules ont des valves presque tou- jours symétriques par rapport au grand axe, et le plus souvent même par rapport aux deux axes. Le grand axe, marqué par un 244 LES DIATOMÉES raphé, peut être droit ou sigmoïde ; U présente toujours un nodule médian et deux nodules terminaux. Il y a toujours des stries, dis- posées quelquefois en systèmes compliqués, le plus souvent perlées, mais parfois réunies en côtes plus ou moins robustes. Les frustules ont une forme régulière, naviculaire ou fusiforme, (en navette, en nacelle ou en fuseau), elliptique plus ou moins allongée, quelquefois resserrée au milieu, en guitare, ou présentant des dilatations et des constrictions successives, mais symétriques des deux côtés. Quelquefois enfin, le frustule, plus ou moins fusi- forme, est sigmoïde c'est-à-dire tordu en S. Quelques espèces ont, dans le jeune âge, les frustules renfermés dans des tubes mucilagineux hyalins, d'autres dans des masses géla- tineuses amorphes; d'autres encore ne sont recouverts que d'une couche de coléoderme, pour ainsi dire individuelle. Dans tous les cas, la plupart paraissent se débarrasser de très bonne heure de leur thalame pour nager librement dans l'eau ambiante, et c'est parmi les Naviculées qu'on trouve les espèces douées des mouve- ments les plus rapides et les plus persistants. Cette tribu, avons-nous dit, est la plus nombreuse de toutes; elle renferme une longue liste de genres, presque tous très chargés d'espèces, et d'autant plus chargés que les diatomistes, cherchant avec raison la simplification, ont supprimé, dans ces dernières années, certaines coupes génériques qui n'étaient peut-être pas toutes bien nettement caractérisées, mais dont quelques-unes, au moins, facilitaient la détermination des espèces. M. Paul Petit admet les 44 genres suivants : Navicula, Bory. Stauroneis, Ehb. Schizonema, Ag. Scoliopleura, Gr. Brebissonia. Grun. Pleurosigma, W. Sm. Mastogloia, Ag. Donkinia, Ralfs. Stigmaphora, Wall. Toxonidea. Donk. Stictodesmis, Grun. Berkeley a, Ehb. Diadesmis, Kz. Àmphijplçura, Kz. La tribu des Cymbelléessc rattache à celle des Naviculées par le genre Cymbella, dont certaines espèces, comme le Cymbella si'bœqualis, ont les frustules presque droits et les valves presque symétriques par rapport à leur grand axe, et se rapprochent beau- coup de certains Navicula. D'autre part, il y a dans le genre Navicula quelques espèces qui se rapprochent spécialement de certains Cymbella, par exemple le Navicula sphœrophora, dont l'endochrôme est disposé comme celui des Çymfyella et dont les valves ne sont pas tout àfnit symétriques par rapport au grand axe. X. DESCRIPTION 245 en raison de l'absence des stries sur l'un des cotés du nodule central. D'autre part, les Naviculées, par les genres Donkinia et Toxoïiidea, se rapprochent de certains Epilhemia, avec lesquels leurs frustules ont d'évidentes analogies d'aspect. Nous ne pouvons ici, comme on le comprend, qu'indiquer les principales espèces de cette très nombreuse tribu, et parmi celles-ci nous choisissons de préférence celles qu'on rencontre en Europe, et particulièrement en France, en Belgique, en Suisse, en Allemagne, en Italie ou en Espagne. S -2. — Genre Navicula. Le grand genre Navicula comprend des espèces dont les frustules ont une forme en nacelle ou en navette, naviculaire, — car c'est Fi Navicula viridis, Kz. Montrant la disposition des valves, l'endochrôme, le plasma et le noyau. A, face valvaire; B, face connective, coupe longitudinale faite suivant le raphé, montrant la cyclose des globules huileux (d'après E. Strasburger) de cette forme même que la tribu a pris son nom, — ordinairement beaucoup plus longue que large, quelquefois cependant assez large- ment ellipsoïde. Les valves présentent un raphé droit avec deux 246 LES DIATOMEES nodules terminaux et un nodule médian ; elles sont symétriques par rapport à leurs deux axes, et sont marquées deeôtes plus ou moins robustes, parfois lisses, c'est-à-dire non résolubles en perles, mais le plus souvent divisées en travers ou composées de grains ou perles séparables au microscope. La face connective du frustule a ordinairement une forme bacil- laire plus ou moins allongée, montrant sur ses bords l'extrémité des stries et au milieu, de chaque côté, l'encoche produite par le nodule médian. (Fig. 162 et 163.) Elle peut présenter des dilatations ou des étranglements en différentes parties. Les espèces de ce genre sont ordinairement libres et douées de mouvements très actifs. Pour nous guider dans la description de ces espèces, nous sommes obligés de pratiquer parmi elles des coupes, souvent arti- ficielles, qui nous aideront à les classer. C'est ainsi que nous séparerons d'abord toutes les espèces dont les valves présentent les stries transversales robustes que nous avons appelées côtes, et qui ne sont point divisibles en segments ni réso- lubles en perles ou grains séparés. Ces côtes paraissent, en effet, réellement lisses, étant formées par la soudure des grains qui doi- vent résulter de la structure aréolaire commune, à ce qu'il semble, aux valves de toutes les Diatomées, ainsi que nous l'avons expliqué antérieurement. (Voir p. 75.) Quelquefois, cependant, ces côtes ne sont pas absolument lisses, et présentent des divisions, très peu marquées il est vrai, mais encore résolubles, indiquant que si les grains aréolaires sont soudés, ils ne le sont pas d'une manière complète et peuvent encore être discernés. Néanmoins, même dans ce cas, il s'agit encore d'une côte montrant des divisions légères et non une strie perlée, c'est-à-dire formée d'une succession de grains nettement séparés les uns des autres. Les espèces qui présentent ce caractère formaient l'ancien genre Pinnularia d'Ehrenberg, genre que l'on n'a peut-être pas eu raison de rayer des classifications méthodiques. Elles ont toutes une forme longue avec les extrémités arrondies, forme en bâton très caractérisée, et une physionomie très spéciale. Elles ne forment plus maintenant, dans le genre Navicula, que le sous-genre Pinnu- laria ou le groupe des Navicules Pinnulariées. Elles se distinguent tout de suite, par leurs côtes, de toutes les autres espèces, qui sont munies de stries divisibles ou perlées, plus ou moins fines, plus ou moins parallèles ou rayonnantes et qui constituent les autres groupes des Naviculees. Examinons d'abord les Pinnulariées. Nous avons dit qu'elles ont une forme longue, en bâton, mais elles peuvent être plus ou moins gonflées aux deux extrémités ou au X. DESCRIPTION m: milieu, sur la face valvaire ; quelquefois même le bord des valves présente deux ou trois ondulations ou festons. Le raphé, quoique droit dans sa direction générale, peut éprouver quelques flexuosités. On les divise en grandes et petites espèces ou, comme on dit, en majeures et mineures. Les majeures peuvent atteindre jusqu'à 40 et 50 centièmes de millim. en longueur, tandis que les mineures ne dépassent guère 10 à 15 cent, et encore pour un très petit nombre d'espèces, car la plupart n'ont que de 4 à 7 centièmes. Fig. 164 Fis. 165 Fig. 164. — Navicula (Pinnularia) nobilis, Ehb. Fig. 165. — Navicula (Pinn). major, Kz. Cette distinction empirique est d'ailleurs très défectueuse, car même les grandes espèces, comme le N. viridis, peuvent présenter de très petits individus, n'ayant par exemple que 5 centièmes de milli- mètre de longueur. Quoi qu'il en soit, le groupe des Pinnulariées majeures renferme quatre des plus belles espèces d'eau douce, et quelques-unes marines un peu plus petites. Le Navicula (Pinnularià) nobilis, Ehb, est une magnifique f>48 LES DIATOMEES Diatomée, en bâton, légèrement dilatée au milieu, sur la face val- vaire, et très légèrement gonflée aux deux bouts. Les côtes, très grosses, ne vont pas jusqu'au rapbé; il y on a 5 à (5 dans 1 cent, de mm. Cette espèce, d'eau douce, qui a de 20 à 40 cent, de millim. de long, donne une variété encore plus grande, le Navicula {Pinnn- laria) dactyhis, moins gonflé encore au milieu et aux extrémités, à côtes encore plus grosses, et qui peut atteindre 50 centièmes de mm. de long, c'est-à-dire un demi-millimètre. Le Navicula (Pinnularia) major, Kz., autre belle espèce d'eau douce, un peu plus petite (Fig. 49, 103, 105), est plus ou moins renflée au centre, mais non aux extrémités. Les côtes, robustes, s'approchent assez près du raphé, mais laissent un large espace oblong autour du nodule médian. Il y en a de 5 à 7 dans I cent, de mm. et le frus- tule a de 18 à 30 cent, de mm. Le Navicula (Pinnularia) viridis, Kz., ne présente plus aucun gonflement ; il a la forme d'une ellipse très allongée, avec des côtes au nombre de 7 env. dans 1 c. de mm., laissant un certain espace le long du raphé, mais moins autour du nodule médian que dans l'espèce précédente. Il est plus petit, mais de taille très variable, allant de 5 à 20 cent, de mm. (Eau douce.) (Fig. 103, 107). Cette espèce est une de celles où l'on réussit le mieux à voirie mouvement intracellulaire des globules d'apparence huileuse autour du noyau. 1 2 3 Fig. 166. — 1. Nav. (Pinnu.) viridis, var. coinnmtata, Gr. 2. Stauroneis anceps, H. 3. Nav. (Pinn.) bicapitata, Lag. d'après A. Truan. Sa variété N. (Pinn.) viridis ôommutàta (Fig. 100, 1), Gr., a les côtes beaucoup plus fines et les deux valves ne sont pas semblables. Sur l'une, les côtes laissent un espace beaucoup plus large que sur l'autre autour du nodule médian. (Eau douce.) La dernière espèce d'eau douce que nous signalerons est le Navi- cula (Pinn.) cardinales , Ehb. Elle est quelquefois un peu dilatée au centre, gonflée aux extrémités, mais souvent aussi ne présente aucun gonflement, avec des côtes au nombre de 5 env. dans 1 cent. de mm., laissant une large zone hyaline le long du raphé sinueux et un vaste espace lisse autour du nodule médian, qui foraient une X. DESCRIPTION 249 grande croix sur la valve. Ces côtes sont notablement rayonnantes autour du nodule médian, et tout à fait autour des nodules termi- naux. Les frustules mesurent de 15 à 20 centièmes de mm. Fig. 167 Fig. 108 Fig. 167. — Navicula (Pinn.)viridis, Kz. Fig. 108. — Nav. (Pinn.) cardinalis, Ehb. Parmi les espèces marines, nous signalerons le Navicula (Pin- nularià) rectangulata, Greg. qui ressemble au précédent, avec les extrémités largement arrondies, et un gonflement médian ; mais les côtes, beaucoup plus serrées, rayonnantes aussi autour des nodules, ne laissent qu'une étroite bande lisse le long du raphé et un petit espace autour du nodule médian. Vu par la face connective, le frus- tule est tronqué à angle droit à ses extrémités et resserré au niveau du nodule médian. Cette espèce ne dépasse pas 7 cent, de mm. Les Naviculées Pinnulariées dites mineures ont, les unes, les bords unis, sans ondulations ni constriction au milieu; les autres ont, au contraire, les bords bi ou tri-ondulés et une constriction manifeste au niveau du nodule médian. Parmi celles dont les bords sont unis, nous citerons les suivantes i Le Navicula (Pinnularia) latà, Brcb. C'est encore une espèce 17 250 LES DIATOMEES d'assez grande taille, et formant, pour ainsi dire, le passage des « majeures » aux « mineures ». Elle a des côtes très robustes, 4 ou 5 dans un centième de mm,, n'atteignant pas le raphé et lais- sant un espace hyalin autour du nodule médian; elles sont un peu rayonnantes dans la partie médiane autour de ce nodule. Le frus- tule a une face valvaire elliptique longue, tronquée aux extrémités, une face connective rectangulaire à angles mousses. Cette Diatomée vit dans les eaux douces des montagnes et mesure de o à 11 cent, de mill. Elle présente plusieurs variétés qui la relient à l'espèce suivante. i lis Fig. 169 Fig. 169. — 1, Navicula (Pinn.) borealis, Ehb. Fig 2, Le même montrant les lignes de points Le Navicula (PinnulariaJ borealis, Ehb., a une forme ellip- tique sur la face valvaire avec des côtes assez fortes, o h 6 dans un cent, de mm., mais entre lesquelles on distingue des lignes de points, plus ou moins nettement, suivant les échantillons. Les côtes, un peu rayonnantes, atteignent presque le raphé, et laissent peu d'espace lisse autour du nodule médian. Cette espèce, dont la lon- gueur varie de 3 à 6 cent de mill., habite les eaux douces, mais on la trouve aussi sur les mousses qui couvrent les rochers et les murs humides. Fig. 170. — Nav. (Pinn.) Brebissonii, Kz. Toutes les autres espèces de ce groupe ont les côtes beaucoup plus serrées, tout en ne présentant pas de bords ondulés ni de constriction médiane. Chez certaines, les côtes laissent un espace hyalin très marqué le long du raphé et autour /i,W.Sm., espèces marines, très jolies, mais rares. Dans la première, les stries ne for- Fig. 199. — ■ Navicula elliptica, Kz. ment qu'une bande ou un cadre autour de la valve ; elles sont à direc- tion rayonnante, au nombre de 6 à 7 dans! cent, de mm., et formées de gros granules. Le long du raphé, les stries reparaissent "compo- X. DESCRIPTION 265 sées de quelques gros points. Les sillons sont transformés en deux larges dépressions, demi-elliptiques, dont le fond est 'parsemé de points épars, et qui coupent ainsi la striation en deux parties, l'une marginale, l'autre axiale. Le nodule médian est entouré d'une zone hyaline. Vu par la face connectivc, le frustule est étranglé au milieu et la zone conneclivc est striée de 6 lignes longitudinales, formées de fins granules et disposées par groupes: une, deux, deux, une. Le frustule mesure de 7 à 9 cent, de mm. (1, Fig. 192.) LeiV. Hennedyi, W. Sm. est un peu plus petit, avec les stries plus serrées, formées de granules fins, et le fond des dépressions qui re- présentent les sillons lisses est très finement granulé. Dans les espèces suivantes, les sillons longitudinaux prennent une autre disposition : ils forment une double courbe, comme deux accolades qui se regardent, et dont les milieux se rejoignent par un espace lisse, un stauros, autour du nodule médian ; de sorte que leur ensemble forme comme deux lyres, plus ou moins larges, opposées par leur base et dont le raphé représente les cordes. C'est ce qui a fait donner par Ehrenberg, le nom de Navicula lyra, à l'espèce type de ce groupe qu'on désigne sous le nom de Naviculées Lyrèes. Fis;. 201. Fig. 200 Fig. 201 Fig. 203. — Navicula lyra, Ehb. - Nav. lyra, var. elliptica (d'après A. Truan). Le Navicula lyra, Ehb. est une belle espèce marine et rare qui, outre la disposition des sillons que nous venons d'indiquer, présente une forme elliptique large, à extrémités un peu rostrées. Les stries arquées, comme dans les précédentes espèces, autour du nodule médian comme centre, sont au nombre de 7 à 9 dans 1 cent, de mm. et composées de granules; quelquefois, elles se continuent, affaiblies, au fond des sillons qui, souvent aussi, sont lisses. Le frustule peut atteindre 12 cent, de mm. Le Navicula forcipata, Grev., espèce marine moins rare que la 18 266 LES DIATOMEES précédente, est plus petite et a les branches des lyres plus droites, moins fermées, un peu en forme de pince à sucre par suite de l'élar- gissement en travers de leur base, c'est-à-dire du stauros autour du nodule médian. Les stries sont beaucoup plus fines: 14 à 15 dans 1 cent, de mm. — La valve sèche est brune. 'Le N. abrupta, Greg., aies branches des lyres ou des pinces brusquement interrompues avant d'atteindre les extrémités; il est elliptique sans rostration, et sa valve sèche est hyaline. Il y a 9 à 10 stries par cent, de mm. Espèce marine et rare. Le N. Truanii, Pantoc., trouvé par M. A. Truan dans le dépôt de Moron, en Espagne, et par M. J. Pantocsek (1), dans ceux de Szent-Peter, en Hongrie, appartient à ce groupe. Nous ferons remarquer, avant d'aller plus loin, que toutes ces es- pèces distribuées dans les groupes des Didymées, Ellipticées, Prse- textées (ou Hennedyées) et Lyrées peuvent se rattacher à un type commun qui, pour nous, serait le type Ellipiicè. La forme géné- rale de la valve est une ellipse qui, dans les Didymées, subit une dé- formation par étranglement au petit axe, et une autre, dans les Lyrées, par un allongement rostre aux bouts du grand axe. Toutes présentent deux sillons longitudinaux sur leur valve, sillons qui prennent différents aspects et des formes diverses. Toutes ont un large nodule médian qui sert de centre aux côtes ou aux stries des deux demi-valves supérieure et inférieure, stries qui figurent comme des ondes quasi-concentriques, et plus ou moins courbes, autour du nodule médian. Il est évident que cet ensemble de caractères, très topiques malgré les modifications qu'ils éprouvent, constitue à toutes ces espèces un certain « air de famille », qui permet de les rapprocher en un seul et véritable groupe naturel. Nous placerons à la suite des espèces que nous venons de décrire, un groupe composé de Navicules qui ont aussi un air de famille très évident. Comme les précédentes, elles ont une forme générale- ment elliptique, mais avec les extrémités pointues, en nacelle, ou bien terminées par une capilation ou une rostration obtuse qui en émousse la pointe. Elles ont toutes des stries fines, perlées, rayon- nant plus ou moins autour du nodule central comme centre. Elles présentent toutes autour de ce nodule un large espace lisse, ellip- tique, naviculaire ou losangique, qui occupe quelquefois près de la moitié de )a surface de la valve, réduisant les stries â une zone mar- ginale. Nous pensons qu'on peut prendre le Navicula palpebralis, (1) Pantocsek, Fossilen Bacillatien Ungarns, 1887. X. DESCRIPTION 267 de Brébisson, pour type. Nous proposons donc de désigner sous le nom de Palpêbrêes les espèces qui composent, cette sous-tribu (1). Dans ce groupe, nous citerons plusieurs bellesespèces, dont certai- nes présentent encore des sillons longitudinaux et font ainsi le passage de ces Navicules à celles du groupe précédent. Mais ces sillons, qui dans ces dernières avoisinaient plus ou moins le raphé, ont, dans le groupe qui nous occupe, émigré vers le bord des valves et sont presque marginaux. De plus, ils deviennent très étroits. Chez les autres, les sillons ont tout à fait disparu. Parmi les espèces qui présentent encore des sillons, nous signale- rons les suivantes : Fig. 202. — Xavicula formosa, Greg\ Fig. 203. — N. permagna, Bail. Le Navicula formosa, Greg., belle espèce marine et d'eau sau- màire, dont la valve est elliptique, avec des extrémités atténuées mais obtuses. Le raphé est entouré d'une large bande hyaline, 'ellip- tique, avec un nodule médian latéral. Un sillon étroit, parallèle au bord latéral et encore éloigné de ce bord, coupe les stries vers leur moitié. Ces stries sont faiblement rayonnantes, et au nombre de 10 environ dans 1 cent, de mm. Le frustule peut mesurer 14 c. de mm. (1) Nous y faisons rentrer les sous-tribus des Formosèes, des Palpèbra- lés, des Abréviées, des Pcrstrièes, des Sculptées, des Affinées et des Limo- sées établies par M. H* Van Heurck dans sa Synopsis. 268 LES DIATOMEES Le Navicula permigna, Bailey, a la même taille à peu près, mais il est un peu plus large, avec les extrémités plus aiguës. La bande hyaline s'étale en s'arrondissant autour du nodule médian. Les stries sont un peu plus serrées, et le sillon, plus près de la marge de la valve, parait double parce qu'il est constitué en réalité par une dépression dont on voit les deux bords. Cette espèce vit dans les eaux saumàtres. 1 2 3 Fig. 204. — 1. Navicula amphisbœna, Bory. 2. Naviculu subsalina, Donkii. 3. N. limosa, Kz. Le Navicula auipliisbœna, Bory, est une jolie espèce, très ancien- nement connue. Elle a la forme d'une ellipse quadrangulairedont le grand diamètre est environ double du petit, mais aux deux extrémités de laquelle s'ajoute une rostration arrondie qui coiffe le grand axe (raphé) comme le bouton d'un fleuret. Le raphé est droit, avec un espace hyalin losangique, très large, autour du nodule médian qui est latéral. Un sillon parallèle au bord des valves, sub-marginal, coupe les stries, qui sont nettement rayonnantes et au nombre de 44 dans 1 cent, de mm. Cette jolie espèce, très mobile, qui a 6 ou 7 cent, de mm. de long, vit dans les eaux douces ou légèrement salées. Le Navicula subsalina, Donkin, ressemble complètement au précédent, sauf que les extrémités sont capitulées, mais atté- nuées, obtuses, imitant l'angle interne d'un œil, et la Diatomée, regardée transversalement, rappelle beaucoup la forme d'un œil vu de face. C'est de cette Navicule que nous voudrions faire le type de ce groupe. Mais elle est considérée comme une variété du N. amphis- bœna, et elle fournit elle-même d'autres variétés. (Voir PI. V.) Le Navicula Baûmlcri, Pant., du dépôt fossile de Szent-Peter, est extrêmement voisin de N. subsalina et se présente tantôt avec un sillon sub-marginal, tantôt sans sillon. Au nombre des espèces qui se rattachent aux précédentes, mais qui n'ont plus de sillon sub-marginal, tout en conservant le large espace hyalin central, nous compterons : X. DESCRIPTION 269 Le Navicula palpjebr ails , Breb., qui ressemble au N. subsalina, mais a les extrémités tout à fait pointues, bien qu'il fournisse une variété à extrémités obtuses légèrement capitées, avec nodule mé- dian latéral. {N.palpebralis obium); il imite aussi la forme d'un œil. Mais outre qu'il n'y a pas de sillon, l'espace hyalin central est elliptique très long, ayant son bord parallèle aux bords mêmes de la valve. Les stries sont au nombre de 10 dans 1 cent, de mm. et le frustule ne mesure que o cent, de mill. Cette espèce fournit aussi des variétés, peu différentes du type. Une de ces variétés, cependant, a une tout autre forme; elle s'élargit carrément tout en conservant des extrémités atténuées, obtuses, et établit un passage aux Navicula humerosa, N. granulata, N. marina, N. brevis, etc. Fig. 205. — 1. Navicula jçalpebralis, Bréb. 2. Nav. marina, Bréb. 3. Nav. granulata, Bréb. Le Navicula humerosa, Bréb., a toujours le raphé droit des espèces précédentes, mais sa forme est largement elliptique sub- quadrangulaire, avec extrémités brusquement atténuées obtuses, et l'espace hyalin central est considérablement diminué, dilaté non plus en long, mais en travers. Les stries, rayonnantes, composées de gros grains, sont au nombre de 9 environ dans 1 cent, de mill. La valve sèche est incolore. Cette espèce, marine, atteint 7 cent, de mm. de long. Fig-. 206. — Navicula humerosa, Bréb. Le Navicula granulata, Bréb., ressemble beaucoup au précé- dent; l'espace hyalin central, assez restreint, est élargi transversa- 270 LES DIATOMÉES lement, les stries sont un peu moins serrées et les grains plus gros. La valve sèche est d'un bleu purpurin. La taille est un peu plus grande (7 à 9 cent de mm). Espèce marine. Le Navicula marina est nettement elliptique, large, avec des extrémités un peu atténuées obtuses. L'espace hyalin est plus petit encore, les stries plus serrées (10 à 11 dans 1 cent, de mm). Le frustule a de 6 à 7 centièmes. Espèce marine. Le Navicula brevis, Greg., dérive comme forme du précédent. L'ellipse est plus allongée, l'espace hyalin plus grand, nettement arrondi; les stries beaucoup plus fines (14 dans 1 cent, de mm). C'est une espèce marine de 6 à 7 cent, de mm. Cette espèce est encore une forme de passage et se rallie aux Navicula palpebralis eimèmeauN. amphisbœna, cor leDr H. Van Heurck dit qu'elle présente souvent des sillons longitudinaux. Du reste, toutes ces espèces donnent un grand nombre de variétés qui les rattachent manifestement les unes aux autres. C'est ainsi qu'on peut encore rapprocher des espèces précédentes celles qui suivent; elles ont évidemment une affinité avec le type amphisbœna et leurs caractères se modifient graduellement pour passer à un autre type. Le Navicula sculpta, Ehb., a la valve elliptique avec extrémités atténuées obtuses, en forme d'oeil, semblable à celle des N. palpe- bralis ou subsalina, un raphé droit bordé d'une ligne hyaline, et, de chaque côté, une large dépression régnant sur toute la longueur de la valve et qui interrompt les stries de manière à ne laisser qu'un seul rang de perles le long du raphé ; les stries reparaissent du coté du bord, n'ayant plus guère que la moitié de leur longueur normale. Elles sont très peu rayonnantes, formées de grosses perles et serrées (15 à 16 dans 1 cent, de mill). Sur l'un des côtés de la valve, il y a aussi une dé- pression transversale, perpendiculaire au raphé, au niveau du nodule médian, et allant jusqu'au bord de ce côté. Au fond de cette dépres- sion les stries marginales sont affaiblies. Cette espèce vit dans les eaux douces et saumàtres, et mesure de 7 à 8 cent, de millim. Le Navicula sphœrophora, Kz, a une forme analogue, mais les extrémités sont pkis capitées, comme dans le N. amphisbœna: il est relativement un peu moins large que le précédent; il présente la même dépression transversale, unilatérale, lisse; mais la dépres- sion longitudinale, qui dans le N. sculpta règne de chaque côté du raphé, est remplacée par plusieurs dépressions étroites ou rides parallèles, dans le creux desquelles les stries manquent, tandis qu'elles persistent sur les crêtes, disposition qui aligne les perles X. DESCRIPTION 271 sur le milieu de la valve en séries longitudinales. Ces stries, qui reparaissent entières du coté marginal, sont extrêmement peu rayonnantes, presque parallèles et serrées (16dansun cent, de mm). C'est une espèce d'eau douce, de 6 à 8 cent, de mm. de long. Cette espèce présente cette particularité, et nous penchons à croire que les espèces voisines la partagent plus ou moins, d'avoir l'endochrôme disposé en une seule lame, comme chez les Cymbel- lées (P. Petit) ; comme le N. .sculpta, elle présente une certaine asymétrie en raison de l'absence de stries médianes sur un côté de la valve. On peut donc la considérer comme une forme de passage des Naviculées aux Cymbelleés. (Voir PI. V.) Fig. 207 —Navicula serians, Bréb. Dans le Navicula serians, Bréb., nous trouvons une valve elliptique longue, nettement naviculaire, dans laquelle le raphé est bordé d'une bande hyaline élargie autour du gros nodule médian. Il n'v a plus de dépression transversale, et les dépressions longi- tudinales sont devenues des sortes de rides très peu profondes, ou d'espaces qui segmentent les stries sur toute la valve et alignent les perles en quatre ou cinq séries longitudinales ondulées. Les stries sont très peu rayonnantes, composées de grains allongés transver- salement, fines et serrées (24 dans 1 cent, de mm). Vu par la face connective, le frustule est assez large et dilaté au milieu. Cette Navicule habite les eaux douces, les marais tourbeux, et atteint 8 cent, de mm. de longueur. A côté de cette espèce s'en placent plusieurs, comme le Navicula exilis, Grun., dans lesquelles les stries deviennent de plus en plu fines, les rides disparaissent ; l'espace hyalin le long du raphé et autour du nodule devient de plus en plus petit, les extrémités pren- 272 LES DIATOMEES nent quelquefois une forme capitée ou sub-capitée. Ces transforma- tions successives nous amènent aux espèces suivantes. Le Navicula cuspidata, Kz ; la valve est lancéolée naviculaire, à peu près quatre fois aussi longue que large, avec les extrémités atténuées, presque pointues. Toute la valve est couverte de stries atteignant presque le raphé, elles sont à peu près perpendiculaires au raphé, par conséquent parallèles et non rayonnantes, au nombre de 14 dans 1 cent, de mm., coupées en travers par de fines stries longitudinales plus serrées. C'est une élégante espèce d'eau douce, assez commune, et qui peut atteindre jusqu'à 14 cent, de mm, (J. Brun) (Fig. 208. 1.) Fig. 208. — 1 . Navicula cuspidata, Kz. 2. Navicula serians, var. minor, Gr. 3. Navicula àmbigua, Ehb. 4. Schizonema floccosum, Kz. 5. Navicula ràdiosa, var. acuta. Le Navicula ambigua, Ehb. est considéré par le Dr H. Van Heurck comme une variété plus petite, avec des extrémités prolon- gées et plus ou moins capitées. Les stries sont parallèles, perpendi- culaires au raphé (16 à 19 dans 1 c. de mm. (Fig. 208, 3.) Le Navicula iridis, Ehb., est une grande espèce d'eau douce, en forme de navette, six fois aussi longue que large, dont le raphé, droit, aies bouts centraux tournés en crochet en sens opposés, avec une bande hyaline élargie autour du nodule médian un peu oblique. Les stries sont fines (16 env. dans 1 cent, de mm.), presque X. DESCRIPTION 273 parallèles, formées de perles allongées et interrompues près des bords par un sillon submarginal profond. Sa longueur atteint 17 cent, de mm. \ Mm ml k Fig. 209.— Nav. Iridis, Ehb. Fig. 210. — 1. Nav. amphirhynchus , Ehb. 2. Nav. firma, Kz 3. Nav. bicapitala, Lag. Le Navicula firma, Kz, est une variété plus petite de cette espèce avec 23 à 28 stries dans 1 cent, de mm. ; ainsi que le N. amphigomphus, Ehb., belle forme d'eau douce aussi, qui a 18 stries dans 1 cent, de mill. et peut atteindre plus de 9 cent, de mm. en longueur. Fig. 211. — Nav. Iridis amphigomphus, Ehb. Le Dr H. Van Heurck donne aussi le Navicula producta, W. Sm. comme une variété du Navicula Iridis. Cette variété 214 LES DIATOMEES revient à la forme d'ellipse avec les deux capi talions extrêmes et les deux sillons submarginaux. Les stries sont perpendiculaires au raphé et formées de grains allongés. (4, Fig. 483, p. 258.) Le Navicula amphirhynchus, Ehb., est encore, pour le Dr H. Van Heurck, une variété de N, Iriclis, remarquable par ses extrémités largement rostrées, tandis que le Navicula af/înis, Ehb. reproduit pour sa forme le Navicula producta et le type amphisbœna. Toutes ces espèces, d'eau douce, dérivent, quant à la forme, du type amphisbœna. Les stries deviennent de plus en plus parallèles entre elles, perpendiculairement au raphé, et les sillons dégénèrent peu à peu en des lignes longitudinales qui coupent les stries, deviennent à leur tour de plus en plus nombreuses et serrées, et forment des stries longitudinales qui chez le Navicula producta sont au nombre de 44 dans 4 cent, de millimètre. Fig. 2i2. — Nav. limosa, Kz. C'est ainsi "que, graduellement, nous arrivons d'une part au Navicula limosa et à ses congénères, d'autre part au Navicula bacillum et à ses analogues. Le Navicula limosa, Kz. est une jolie espèce d'eau douce, de forme bacillaire allongée, renflée au milieu comme certains Pinnularia. Le raphé est toujours droit, entouré, sauf aux extrémités, d'un espace hyalin elliptique très allongé, avec un nodule médian un peu latéral et des stries presque perpendiculaires au raphé, sauf dans le milieu où elles sont un peu rayonnantes autour du nodule central. Il y en a 46 à 47 dans 4 cent, de millim; mais elles sont coupées non loin du bord par un sillon parallèle à ce bord. Le frustule a 7 à 8 cent, de mm. de larg. (Fig. 204, 3, p. 268 et Fig. 242.) Le Navicula ventricosa, Ehb. ne nous parait être qu'une variété du précédent, car tous les détails de structure sont absolument iden- X. DESCRIPTION* 275 tiques, et la différence ne porte que sur la dilatation médiane des valves, dilatation qui est moins marquée et se fait d'une manière progressive, le frustule, vu par sa face valvaire, ayant une forme presque complètement bacillaire. Le Nai'icula bacillaris, Greg., a une forme tout à fait bacillaire, surtout dans la variété Nai\ bacillaris thermalis, Grun. , et présente des stries partout perpendiculaires au raphé, parallèles par consé- quent, fines et serrées, mais manquant souvent sur un des côtés de la valve au niveau du nodule médian, disposition qui reproduit ce que nous avons déjà vu chez les Navicula sculpta, sphœro- phora, etc. Fig. 213, — Nav, bacillaris, var, thermalis, Grun, Avec le Navicula liber, W. Sm., nous arrivons à une forme tout à fait bacillaire, avec des stries exactement perpendiculaires au raphé, atteignant presque le raphé et laissant un espace hyalin étroit, elliptique, autour du nodule médian. Les nodules terminaux, très marqués, sont assez éloignés des extrémités, et les stries extrêmes rayonnent autour d'eux comme dans beaucoup de Pinnu- •lariées. Un sillon, partant de ces nodules, suit les bords de la valve en s'arquant un peu au niveau du nodule médian. Les stries sont fines, serrées (18 dans 1 cent, de mm.). L'espèce est marine et longue d'environ 8 centièmes. Fig. 214. — Navicula bacillum, Ehb. Enfin, le Navicula bacillum, Ehb., représente un bâtonnet court, 3 fois 1/2 aussi long que large, avec des stries très faiblement rayon- nantes, mais plus serrées aux extrémités qu'au centre (17 aux extrémités, 14 au centre, dans 1 cent, de mm.) 276 LES DIATOMÉES Pour terminer ce que nous avons à dire sur le genre Navicula nous n'ajouterons que quelques mots relatifs à une série de très petites espèces que le Dr H. Van Heurck réunit sous le nom de Minu- tissimées. La plupart ne dépassent guère 2 cent, de millim. en lon- gueur et beaucoup n'atteignent pas cette dimension. Tels sont les Navicula atomus, Naegeli ; N. atomoïdes, Grun. ; N. minima, Grun. ; N. binodis, W. Sm. ; N. exilissima, Grun. Ces deux der- nières espèces sont intéressantes en ce qu'elles constituent des « tests » assez difficiles. Le N. binodis présente 30 stries, et le N. exilissima 40 stries environ dans 1 cent, de millim., très délicates et peu visibles , même avec les objectifs homogènes. (H. V. Heurck.) Nous n'avons pu, dans cet examen rapide de ce nombreux genre, que signaler les principales espèces ; mais on voit qu'on peut les répartir en quelques groupes qui se distinguent aisément par des caractères dominants, lesquels, en se modifiant, donnent des espèces de passage. On ne peut, en effet, s'empêcher de reconnaître certains types importants, autour desquels se groupent, par des variations diverses portant tantôt sur un caractère, tantôt sur un autre, des séries plus ou moins nombreuses de formes pour ainsi dire dérivées, et quelques autres un peu aberrantes. Nous avons indiqué plus haut les divisions qu'on peut établir parmi les espèces Pinnularièes et Radiosèes ; parmi les autres, on voit combien celles qui appartiennent aux types crabro (ou didyma), elliptica, lyra, se rapprochent d'une manière étroite et passent aux types suivants : amphisbœna, serians et bacillaris qui, eux aussi, sont alliés de très près. Beaucoup d'espèces exotiques ou très rares, que le cadre de cet ouvrage ne nous a pas permis de signaler, trouveraient toutes à se placer auprès de l'un ou de l'autre de ces types originaux. Parmi les types que nous considérons comme aberrants, nous devons citer le Navicula aspera, Ehb., pour lequel M. H. Yan Heurck a créé un groupe à part, celui des Àspêrèes, à la suite des Naviculèes lyrècs, dont le type est le Navicula Lyra, Ehb. Nous pensons, comme nous l'expliquons plus loin, que cette espèce doit être distraite de ce genre, et nous l'avons jointe aux Stauroneis comme faisant le passage au genre Scoliopleura. § 3. — Vankeurchia, Schizonema, Mastogloia, Diadesmis. A la suite du genr autres genres qui s'y A la suite du genre Navicula proprement dit se placent divers es genres qui s'y rattachent de très près et offrent avec celui-ci, X. DESCRIPTION 277 entre eux, et avec les genres voisins, de nombreuses formes de pas- sage. Vanheurckia. — Tel est, par exemple, le petit genre Van- heurckia, dédié par M. de Brébisson au savant botaniste d'Anvers, le Dr H. Van Heurck. Ce genre est composé de quelques espèces d'eau douce, remarquables par la finesse de leurs stries, et qui cons- tituent des tests intéressants. On trouve quelquefois les frustules réunis dans des tubes, comme les Schizonema et les Collelonema; il faut donc les considérer comme ayant un thalame tubulaire qu'ils abandonnent de bonne beure. En réalité, ce sont des Schizonema, plutôt que des Navicula. Ces espèces ont les valves elliptiques lancéolées avec des stries parallèles, quelquefois seulement un peu rayonnantes autour du nodule médian, atteignant le rapbé qui forme une double ligne droite. Le nodule médian est plus long que large et les nodules terminaux, compris dans la double ligne du raphé, sont assez éloignés des extrémités. Tel est le Vanheurckia rhomboïdes, Bréb., le Navicula rhomboïdes d'Ebrenberg, jolie espèce qui vit dans les eaux douces, les tourbières, et atteint 6 à 7 cent, de millim. Ses stries sont très délicates, environ 24 à 28 dans un centième de millim. ; elles sont formées de fines perles qui s'alignent en stries longitudinales. Les valves sont un peu resserrées au-dessous des extrémités. Fig. 215. — Vanheurckia rhomboïdes, Breb. (1) Fig. 216 — 1. Vanheurckia rhomboïdes, Bréb. 2. Vanh. crassinervis. Le Vanheurckia crassinervis est le Navicula crassinervia de (1) La partie supérieure est'résolue en stries transversales, et la partie infé- rieure en stries longitudinales formées par l'alignement des perles composant es stries. 278 LES DIATOMÉES Brébisson, le Frustulia saxonica de Rabenhorst; c'est un test célèbre, un peu plus petit que le précédent (5 cent, de millim.) dont il n'est qu'une variété. Ses stries sont très fines et très difficiles à résoudre : 34 à 3o dans 1 cent, de mm. Le Vanheurckia virïdula, Breb., est un Sehizonema viri- dulum. Brébisson en avait d'abord fait un Colletonema riridulum . On trouve souvent les frustules réunis dans des tubes. Il atteint jusqu'à 11 cent, de millim. et présente 28 à 30 stries, finement perlées, dans 1 cent, de millim. Fig. 217. — Yanh. rhomboïdes, fragment résolu en perles sous un gross. de 1800 diamètres, d'après une photog. du Dr Woodward. Enfin, le Vanheurckia vulgaris, V. Heurck, est le Colletonema vulgare de Thwaites. Il a les bords plus arrondis, les extrémités plus obtuses, les lignes du rapbé écartées, interrompues avant d'at- teindre le nodule médian. Les stries médianes rayonnent un peu; elles sont plus fortes et plus écartées (24 dans 1 cent, de mm.) que les stries terminales (34 dans 1 cent, de mm.) Cette espèce, d'eau douce, ne dépasse guère 5 cent, de mm. Sehizonema. — Le genre Sehizonema est composé de Navicules qui, à l'état jeune au moins, ont leurs frustules renfermés dans des tubes mucilagineux, comme les Encyonema, qui appartiennent à la tribu des CymbellÉes. Nous y rattacherons l'ancien genre Colle- tonema, qui possède aussi un thalame tubulaire, et qui établit plus particulièrement encore un passage aux Encyonema, parce que les valves ne sont pas tout à fait symétriques par rapport au grand axe. Les Sehizonema sont ordinairement des espèces marines à valves peu silicifiées. Ils ont un raphé droit où, dans certaines espèces, on peut reconnaître une double ligne. Les stries sont à direction généralement parallèle, quelquefois un peu rayonnantes autour du nodule médian ; elles atteignent le plus souvent le raphé, mais non le nodule médian, autour duquel règne parfois une zone hyaline. L'une de ces espèces, le Sch. Smithii, C. Ag., possède de véri- tables côtes ou du moins des stries très fortes, relativement espacées (13 dans 1 cent, de mm.), finement divisées, rayonnant dans la par- tie médiane, laissant une étroite bande claire le long du raphé et une X. DESCRIPTION 279 zone élargie autour du nodule médian, et convergeant vers les bords delà valve aux extrémités. L'espèce mesure 6 cent, de mm. de long. Le Schizonema crucigerum, W. Sm., est très allongé et très étroit avec les extrémités aiguës. Les stries sont serrées (24 dans 1 cent, de mm.), presque parallèles, divisées en perles qui s'alignent en stries longitudinales très iines. Pas de bande hyaline le long du raphé, mais un espace élargi autour du nodule médian, espace qui porte deux fortes stries. La longueur du frustule varie de 7 à 8 eent. île mm. Fig. 218 Fig. 218. — Schizonema Smithii, C. Ag. Fig-. 219. — Sch. ramosissimum , C. Ag. Le Schizonema ramosissimum, C. Ag., est elliptique lancéolé ; les valves sont couvertes de stries perlées, sans espace lisse, dont les divisions s'alignent en stries longitudinales. 11 y a environ 14 stries dans 1 cent, de mm. et le frustule mesure o centièmes de long. - Le Sch.floccosum, Kz., est une forme voisine. (4, Fig. 208, p. 272). Le Schizonema amplhis, Grun., est une espèce un peu plus forte, de même forme, mais à stries plus grosses, dont les divisions forment aussi des lignes longitudinales, (o, Fig. 183, p. 258.) Fig. 220 — Schizonema lacustre, C. Ag. Le Schizonema lacustre, C. Ag., est le type de l'ancien genre Colletonema, dont les frustules se forment aussi dans des tubes mais ne sont pas toujours complètement symétriques par rapport à la ligne médiane. Dans l'espèce qui nous occupe, ainsi que dans 280 LES DIATOMÉES celles qui s'y rattachent comme les Schizonema (Colletonema) neglectum, Thw., Schizonema (Collet.) Thwaitesii, Grun., les e tries sont plus grosses, atteignant le raphé sauf au niveau du nodule médian où, plus courtes ou plus espacées, elles laissent un espace lisse élargi transversalement. Ces stries sont très rayon- nantes autour du nodule médian et autour des nodules terminaux qui sont placés loin des extrémités. Il n'y en a que 9 dans 1 cent, de mm. ; elles sont finement divisées en travers. C'est une espèce d'eau douce longue de 3 à 5 cent, de mm. Nous passerons rapidement sur plusieurs petits genres qui se placent à la suite de ceux que nous venons de décrire et qui pré- sentent moins d'intérêt, étant peu riches en espèces, assez rares d'ailleurs et souvent peu connues. Mastogloia. — Le genre Mastogloia, Thwaites, se distingue par un caractère très curieux. Il se compose d'assez petites espèces, de forme naviculée elliptique, dont les valves présentent à l'inté- rieur, le long de leurs bords, une rangée de grosses cellules formées par des lames siliceuses internes adhérentes à la face profonde des Fig. 221. — Mastogloia Braunii, Gr. valves. La surface supérieure de celle-ci est marquée de stries ordi- nairement assez fines. Ces espèces vivent dans l'eau douce ou l'eau saumàtre ; les frus- tules se forment au sein d'une masse gélatineuse plus ou moins volumineuse. L'une des plus remarquables est le Mastogloia Brautiii, Gr., dont les cellules ou logettes sont nombreuses ; les stries, finement ponctuées, au nombre de 18 dans 1 cent, de mm., un peu rayon- nantes, sont interrompues par une ligne lisse se réunissant au nodule médian de manière à former un dessin en double lyre, comme dans le Navicula lyra. Les autres espèces ne présentent pas ce sillon lyre ; tels sont les Mastogloia Smithii, Thw., M. lanceolata, Thw, M. exigua Lew., dont les bords sont courbes, de sorte que la rangée des cel- X. DESCRIPTION 281 lnles qui les ourle est en ligne courbe aussi ; les deux premières espèces ont des cellules nombreuses, la dernière n'en a souvent que trois (H. van Heurck). Les Mastogloia Dansei, Thw. et M. Gre- villei, W. Sm., ont les côtés assez recti lignes, dans une partie de leur étendue, pour que la rangée de cellules, qui ne borde que cette partie, soit elle-même rectiligne. Toutes ces espèces sont de petite taille et n'ont que de 3 à 5 cent, de mm. de long. Diadesmis. — Les Diadesmis, Kz, sont des espèces encore plus petites, caractérisées surtout par ce que les frustules restent réunis les uns aux autres en longs rubans, sans être enfermés dans des tubes. Celles que nous connaissons habitent les eaux douces. Une de ces espèces présente une disposition qui rappelle les Mastogloia, c'est-à-dire que le long des bords règne une rangée de grosses perles, mais ce ne sont pas des cellules placées sous la valve. Il s'agit du Diadesmis gallica, W. Sm., qui montre, en outre, des stries très fines, un peu rayonnantes, au nombre de 28 dans 1 centième de mill. Le frustule est elliptique allongé, à extrémités obtuses, et un peu élargi au milieu. Il y a un petit espace lisse le long du raphé et autour du nodule médian. Fig. 222. Fig. 223. Fig. 222. — Diadesmis gallica. W. Sm. (1000 diam.) Fig. 223. — Diad. confervacea, Gr. ^1000 Diam). Le Diadesmis confervacea, Gr., est une jolie petite espèce à stries rayonnantes, avec bande hyaline et aire lisse autour du raphé et du nodule médian. Ces espèces ne dépassent guère 1 cent, de millimètre 4/2. 19 XI DESCRIPTION DES PRINCIPALES ESPÈCES (Suite) NÀVICULÉES (Suite) § 1 . — Stauroneis Le genre Stauroneis a été créé en 1843, par Ehrenberg, pour des Naviculées dans lesquelles le nodule médian s'est dilaté trans- versalement jusqu'aux deux bords des valves en un large espace Fig. '224. — 1. Stauroneis phœnicenteron, Ehb. 2. Stauroneis gracilis, W. Sm. 3. Stauroneis spicula, Hickie. 4. Stauroneis aspera, Ehb. lisse ou stauros. Comme le raphé est le plus souvent bordé d'une bande hyaline plus ou moins large, la valve paraît marquée d'une grande croix suivant ses deux axes. Les valves sont couvertes de stries perlées. Les deux lames d'endochrôme qui forment les chromatophores XI. DESCRIPTION 283 des Stauroneis sont toujours ondulées sur leurs bords, ce qui dis- tingue ces espèces de celles du genre Navicula. Le type de ce genre est le Stauroneis phœnicenteron, Ehb., ainsi nommé parce que son centre parait souvent rouge, par un jeu de lumière diffractée. Il a une forme lancéolée longue, progres- sivement atténuée vers les deux extrémités, qui sont obtuses arron- dies. Le raphé est droit, formé de deux lignes qui se réunissent en atteignant les nodules terminaux et le nodule médian, bordé d'une bande hyaline assez large qui se croise avec le stauros résul- tant de la dilatation du nodule médian. Ce stauros est ordinairement plus large sur les bords de la valve qu'au centre. Les stries sont délicates, linement perlées, légèrement rayonnantes, au nombre de 1 1 environ dans 1 cent, de mm. C'est une espèce d'eau douce, assez commune, et longue de 10 à 17 cent, de mm. i Fig. 225. — Stauroneis acuta, W. Sm. Le Stauroneis acuta, W. Sm., a les valves plus aiguës aux extrémités, parce qu'à partir du petit axe, jusque vers les bouts, les bords'de la valve se creusent en courbe concave et les deux demi- valves forment un peu comme deux fers de flèche opposés par la base, qui est le stauros. Le raphé est double aussi vers le milieu des deux demi-valves, simple en approchant des nodules. La bande hyaline le long du raphé et le stauros médian, élargi sur les bords, ont le même caractère que dans l'espèce précédente, mais les extré- mités sont doublées à l'intérieur d'un épaississement qui les coiffe d'un en-bout hyalin (lumen). Les stries sont délicates, formées de perles peu serrées, très peu rayonnantes et au nombre de 12 environ dans 1 cent, de mm. Cette espèce, d'eau douce, longue de 8 à 15 cent. 284 LES DIATOMEES de mm., se trouve par groupes de 2 à 6 individus. La zone connec- tée montre des plis portant des lignes perlées. Les frustules mesu- rent de 5 à 16 cent de mm. Le Stauroneis gracias, W. Sm., est plus petit, sans épaississe- ments aux extrémités, avec un stauros plus étroit, moins dilaté du côté des bords de la valve qu'il n'atteint pas le plus souvent. Les stries sont fines, perlées, assez rayonnantes. Le frustule ne mesure que de o à 8 cent, de mm. Il vit dans les eaux douces, les tourbières, etc. (2, Fig. 224.) Le Stauroneis spicula, W. J. Hickie, est très étroit, à bords presque droits, en losange très allongé, avec des extrémités pointues. Le raphé n'est double en aucun point, bordé d'une bande hya- line très étroite; le stauros est très étroit aussi, non dilaté aux bords de la valve. Les stries sont à peu près perpendiculaires au raphé, délicates, finement perlées et très serrées (28 dans 1 cent de mm). C'est une espèce d'eaux saumàtres dont la taille est de 9 à 10 cent, de mm. (3, Fig. 224 ci-dessus.) Fig. 226 Fig. 226. — Stauroneis anceps, Ehb. Fig. 227. — 1. Nav. viridis, v. commutata, Gr. 2. Stauroneis anceps, var. amphicephala, Kz. 3. Nav. bicapitata, Lag. Quelques espèces ont les bords plus ou moins ondulés. Le Stau- roneis anceps, Ehb., par exemple, est une jolie petite Diatomée d'eau douce à valves elliptiques avec les extrémités brusquement contractées, c'est-à-dire rostrées ou rostrées-capitées. Le stauros est relativement large, dilaté vers les bords de la valve, la bande hyaline le long du raphé très visible, les stries très rayonnantes, au nombre de 20 dans 1 cent de mill. Le frustule a de 4 à 6 cent de mm. de long. Comme la plupart des espèces à capitations ou rostrations, celle-ci fournit diverses variétés dépendant de la forme et de l'ampli- tude des capitations. Telles sont les Stauroneis anceps var. linea- ris, Kz, et St. anceps var. amphicephala, Kz. Ces variétés ont les côtés parallèles, et, chez la première, les extrémités sont brusquement atténuées, mais non rostrées ; dans la seconde, elles sont brusque- XI. DESCRIPTION 285 ment atténuées, mais rostrées (1). L'une et l'autre se trouvent mêlées au type dans les mêmes localités. Elles ont à peu près la même taille. (2, Fig. 227.) Les bords des valves peuvent être très ondulés. Tel est le Stau- roneis legumen, Ehb, autre petite espèce d'eau douce, de 3 cent, de mm. de longueur, dont les côtés sont ondulés comme ceux d'une gousse qui renfermerait trois graines, celle du milieu plus petite. Les extrémités, rostrées, sont doublées d'un épaississement inté- rieur. Le Stauroneis Smithii, Gr. n'en diffère que par son stauros un peu plus étroit et parce qu'il ressemble à une gousse dont la graine du milieu serait la plus grosse. Nous signalerons encore plusieurs petites espèces d'eau douce, comme les Stauroneis pumila, Kz., le Stauroneis truncata, Schum, qui a 4 cent, de mm. de long, sur 1 1/2 de large ; et le Stau- roneis Cohnii, Hilse, jolie petite Diatomée ovale, de 3 cent, de mm. environ de long sur 2 de large et qui présente 24 à 25 stries dans 1 centième de millimètre. Quant au Stauroneis aspera, ou Navicula aspera d'Ehrenberg, il n'est pour nous un Stauroneis qu'en raison de son endochrôme, dont les lames sont ondulées sur les bords, comme chez tous les Stau- roneis, autrement nous le classerions parmi les Seoliopleura ; mais il forme évidemment le passage de l'un à l'autre genre. Nous avons déjà indiqué plus haut que nous considérions ce Navicula aspera comme une forme très aberrante et, à notre avis, égarée parmi les Navicula proprement dits dans lesquels il formait à lui tout seul un groupe à part, les groupes des Aspèrèes. (H. Van Heurck.) D'ailleurs, Ehrenberg et W. Smith, à l'époque où les genres étaient plus larges et leurs diagnoses moins serrées', avaient déjà été embarrassés pour classer cette espèce, et ils en avaient fait tantôt un Stauroneis, tantôt un Stauroptera. C'est une belle Diatomée longue, à côtés presque parallèles, avec des extrémités arrondies, des valves déprimées au centre, un raphé un peu flexueux partageant la valve à peu près par le milieu et bordé d'une bande hyaline qui s'étale, au niveau du nodule médian, en une zone lisse formant une ceinture transversale parfois complète, élargie sur les bords de la valve et au milieu de laquelle le nodule, grand et rond, est difficile à distinguer. Tout le reste des valves esteou- (1) Les stries sont mal représentées dans la figure 227,2: elles doivent être rayonnantes et non perpendiculaires au raphé. 286 LES DIATOMEES vert de lignes rayonnantes composées de gros grains allongés. Ces grains font, en réalité, partie de stries interrompues et sont divisés en travers par des lignes difficiles à voir. Il y a 9 à 40 de ces stries Fig. 228. — Stauroneis aspera, Ehb. interrompues dans un cent, de mm. Le frustule, vu par la face con- nective, est contracté au milieu, épais et tronqué aux extrémités. Il a de 10 à 18 cent, de mm. de long et sa valve est 6 à 8 fois plus longue que large. xi. Description 287 § 2. — Scoliopleura Le genre Scoliopleura a été créé par M. Grunow pour des Navi- culées à frustules libres, à surface convexe, et un peu tordus en spi- rale de manière à rendre la zone connective et le raphé un peu sigmoïde. Nous ne connaissons dans ce genre que deux espèces, marines : Scoliopleura latestriata, Gr., et Se. tumida, Rab. Nous nous permettons d'en ajouter plusieurs, en donnant quelque extension à la caractéristique du genre telle qu'elle a été établie par M. Grunow. I ■; . Fig. 229. — Scoliopleura latestriata, Gr. 230. — Se. tumida, Rab. C'est ainsi que nous rapportons à ce genre Scoliopleura, tel que nous le définissons, plusieurs espèces appartenant à un genre Alloioneis, créé en 1867 par le naturaliste viennois J. Schumann (1), et qui n'a pas été conservé. Ce sont les Alloioneis Antillarum, Cl. et Gr., A. Kurzii, Gr., A. Grundleri, Cl. et Gr., et A. curvi- nervia, Gr. (2). Dans ces conditions, nous pouvons définir ce genre en disant qu'il se compose de Naviculacées à frustules libres, parfois un peu tordus, à valves très convexes, marquées de stries perlées, s'ali- gnant quelquefois en plusieurs systèmes, avec un raphé plus ou moins flexueux ou sigmoïde et ne divisant pas toujours la valve en deux parties symétriques. Les Scoliopleura forment ainsi le passage des Navicula et autres Naviculacées symétriques, comme celles que nous avons étudiées (1) J. Schumann. Die Diatomeen der hohen Tatra, 1867. (2) P. T. Clève. Diatoms front the West Indian Archipelago, 1878. 288 LES DIATOMEES usqu'à présent, aux Naviculacées asymétriques ou sigmoïdes, comme la plupart de celles qui nous restent à examiner. Ajoutons que toutes ces espèces sont marines, aussi bien celles dont nous avons parlé d'abord que les dernières. Le Scoliopleura Antillarum, (Cl. et Gr.) Pell., a une forme elliptique lancéolée avec des extrémités subaiguës ; la valve est un peu déprimée au centre et bombée près des extrémités, ce qui rend Fig. 231. — Scoliopleura Antillarum (Cl. et Gr.) Pell. le raphé flexueux. Celui-ci est bordé sur une grande partie de sa longueur d'une bande hyaline très étroite ou même absente d'un côté, mais large de l'autre. Du côté où elle est le plus étroite, elle se dilate en une aire hyaline triangulaire qui embrasse le nodule médian, peu visible. Les stries sont rayonnantes, formées de gros grains interrompus, mais nous ignorons si ces grains sont divisibles en parties plus fines. Ces stries, du côté du raphé, sont d'inégales lon- gueurs. Le frustule a 12 cent, de mm. de longueur (Grunow). C'est 'Alloioneis Antillarum de Clève et Grunow. XI. DESCRIPTION 289 Le Scoliopleura tumida, Rab, a une forme elliptique lancéolée, avec des extrémités ordinairement assez aiguës. La valve est déprimée au centre, bombée vers les extrémités, ce qui rend le raphéflexueux. Il est bordé d'une mince bande hyaline qui se dilate en ellipse à grand axe longitudinal autour du nodule médian, difficile à voir. Les stries, au nombre de 10 environ dans 1 cent, de mm., rayon- nantes au milieu, un peu courbes à cause de la forme de la valve, -.'■:■. fÉPf Il _ = I ;.■--! Fig. 232. — Scoliopleura tumida, Rab. sont continues, mais finement perlées. Elles sont souvent de longueur inégale dans la région médiane. Le frustule mesure de 10 à 16 cent. de mm. de longueur. Le Scoliopleura Kurzii (Gr.) Pell., est YAlloiône/s Kurzii de Grunow. Il a des frustules elliptiques larges à extrémités atténuées. Sa longueur est environ trois fois sa largeur. Le raphé est flexueux et ne partage pas la valve en deux parties égales ; il est bordé d'une bande hyaline plus étroite d'un côté que de l'autre et brusquement 290 LES DIATOMEES dilatée du coté plus étroit autour du nodule médian, en raison de ce que les stries médianes restent très courtes de ce côté et à ce niveau. De l'autre côté, les stries, formées partout d'assez grosses granulations, paraissent laisser le long du raphé et autour du nodule médian une surface lisse plus large, mais ce n'est qu'une appa- Fig. 233. PiR. 231. Fig. 233. — Scoliopleura Kurzii (Gr.) Pell. Fig. 234. — Scoliopleura Kurzii. Détails : b. Frustule entier (montrant lapartie sup. et la partie inférieure). c. Perles décussées, lumière centrale; gross. 3040 diamètres. d. Les mêmes, éclairage oblique; gross. 3040 diam. (P. T. Clève). rence : les stries se continuent de ce côté jusqu'au raphé et presque jusqu'au nodule médian, seulement elles ne sont plus ponctuées et passent, dans cette partie, à l'état 'de côtes. Quant aux stries ponc- tuées elles-mêmes, elles sont disposées de manière à s'aligner en trois systèmes (ou décussées), un système transversal et deux systèmes obliques qui se croisent. Les stries transversales sont plus XI. DESCRIPTION 291 serrées que les stries obliques et au nombre de 10 à 11 dans 1 cent, de mm. (Grunow.) Le frustule mesure de 9 à 10 cent, de mm. Le Scoliopleura Grundleri (Cl. et Gr.) Pell., est une espèce un peu plus petite, à frustule bacillaire par sa face valvaire, avec les côtés parallèles et les extrémités presque arrondies mousses. Il est environ quatre fois plus long que large et parait un peu déprimé au milieu. Le raphé est flexueux et partage la valve en deux parties Fig. 235. — Scoliopleura Grundleri (Cl. et Gr.) Pell. très inégales. Les stries sont transversales, atteignant le raphé des deux côtés, mais elles laissent un petit espace lisse, en ellipse transversale, autour du nodule médian. Elles sont composées d'assez gros grains et au nombre de 11 dans 1 cent, de mm. Le frustule n'a que 7 1/2 cent, de mm. de long. Le Scoliopleura curvinervia (Gr.) Pell., a une forme elliptique lancéolée, régulièrement atténuée du milieu aux extrémités. Le frustule est quatre fois aussi long que large et parait gonflé au centre ; le raphé est flexueux et ne partage pas la valve en deux parties tout à fait égales ; il est bordé par une bande hyaline qui va en s'élargissant des extrémités vers le milieu, où elle se dilate autour du nodule médian, plus d'un côté que de l'autre. Les stries sont rayonnantes et ont l'aspect de côtes, mais avec un fort grossis- 292 LES DIATOMEES sèment, on reconnaît qu'elles sont formées de perles très fines et difficiles à voir. Il y a de 8 à 9 stries dans 1 cent de mm. (Grunow) et elles sont interrompues par un sillon très net, à peu près paral- lèle au bord de la valve, qui les coupe de chaque côté du raphé, à près de la moitié de leur longueur. Lefrustule mesure de 7 à 11 i/2 cent, de mm. (Fie. 23(i.) Fig. 236. — Scoliopleura curvinervia (Gr.) Pell. Le Scoliopleura latestriata, Gr., a une forme bacillaire longue avec les côtés parallèles et les extrémités peu à peu atténuées. Le frustule, environ six fois aussi long que large, parait un peu bombé vers l'une de ses extrémités et un peu déprimé vers l'autre, ce qui donne au raphé une forme non seulement flexueuse, mais sigmoïde. Celui-ci est bordé d'une très étroite bande lisse, qui s'élargit légè- rement autour du nodule médian. Les stries se présentent sous forme de côtes robustes, 7 à 8 dans 1 cent, de mm., mais entre ces côtes on reconnaît, avec un bon objectif, deux rangées de perles alternées, très fines et difficiles à voir ; ce qui, avec le système transversal, constitue trois systèmes croisés. Ces stries sont inter- rompues de chaque côté, dans le voisinage du raphé par un sillon XI. DESCRIPTION 293 très marqué parallèle à ce raphé. Cette Diatomée a de 10 à 15 cent, de mm. de longueur. Telles sont les espèces à nous connues qui nous paraissent devoir être rapportées dans un même genre, lequel à notre avis doit plutôt être le genre Scoliopleura que tout autre. Nous avons peut-être insisté un peu trop longuement sur les quelques formes que nous y Fig 237. — Sc> latestriàta, Gr. réunissons et dont quatre sur six sont rares et appartiennent aux mers de l'Inde ou du Mexique ; mais nous tenions à faire ressortir les points de contact, nombreux et variés, qui les rapprochent natu- rellement et nous paraissent justifier le remaniement que nous avons fait subir à ce genre. Nous ferons encore remarquer à ce sujet que la position systéma- tique de ces espèces est bien où nous l'établissons, car nous les voyons par leur raphé flexueux, quelquefois décidément sigmoïde, et même par certains détails de leur striation, offrir un passage naturel aux Pleurosigma, qui les avoisinenten effet dans le tableau de classification des Naviculacées. De plus, les lames d'endochrôme, du moius dans les espèces où elles ont été observées, présentent 294 LES DIATOMEES un lobe saillant vers le nodule médian, comme chez les Bleuro- sigma. Et même, nous y voyons apparaître l'approche de la famille suivante, celle des amphiprorees, dans les espèces dont les valves sont bombées vers leurs extrémités, et particulièrement dans le Scolio- pleura latestriata, dont la valve est bombée dans une de ses moi- tiés et déprimée dans l'autre. Cette disposition est, d'ailleurs, bien Fig. 238. — Pleurosigma hippocampus, Ehb. (stries rectangulaires). plus accentuée dans une forme qui appartient aussi aux mers des Antilles, le' Rhoïcosigma Antîllarum, Cl. et Gr., dont nous par- lerons plus loin. § 3 — Pleurosigma Le genre Pleurosigma, créé par W. Smith, est un des plus beaux de la famille des Diatomées. Ses caractères nettement tran- chés, et qui permettent de distinguer à première vue les espèces qui le composent de celles de tous les genres voisins, en font un des groupes les plus naturels que les diatomistes aient établis. Ces espèces sont souvent de très grande taille, très élégantes de forme et marquées d'admirables systèmes de stries, qui depuis fort long- temps ont fait de quelques-unes des tests très pratiques, très usités et très utiles. Les frustules sont naviculaires, en général allongés, mais plus ou moins tordus en S quand on les regarde par la face valvaire. XI. DESCRIPTION 295 Le raphé suit naturellement cette courbe, niais il est souvent plus sigmoïde, d'autres fois moins, que la valve elle-même. Ces valves ne sont ordinairement pas planes, mais un peu bombées dans le sens transversal. Les frustules vus par la face connective sont droits. M. Otto Millier a étudié d'une manière spéciale l'endochrôme de certains Pleurosigma et a trouvé qu'il est formé, comme dans toutes Fig. 239. Fig. 240, Fig. 239. — Pleurosigma angulatum, W. Sra. (1) Fig. 240. — Pleurosigma inter médium, W. Sm. (Stries décussées). lesNaviculées, de deux plaques ou chromatophores qui reposent par leur ligne médiane sur la ligne médiane de la zone connective, mais leurs bords sont déchiquetés, avec un lobe qui s'avance vers le nodule médian, et leur surface présenterait des perforations régu- lièrement disposées. (1) Dans les figures que nous donnons des Pleurosigma, on comprend que nous n'avons pas pu représenter les stries à leur véritable distance. Elles sont, en général, deux fois plus serrées sur les valves naturelles que dans nos dessins, excepté dans les reproductions d'épreuves photographiques. 296 LES DIATOMÉES Les Pleurosigma se trouvent le plus ordinairement à l'état de frustules libres; cependant il parait qu'on les rencontre quelquefois dans des tubes gélatineux. Les stries, si remarquables, qui ornent leurs valves peuvent être disposées de deux manières. Elles sont composées de perles, qui s'alignent souvent en deux systèmes perpendiculaires l'un à l'autre. Les stries sont alors dites « rectangulaires ». Mais, d'autres fois, les perles sont disposées en quinconce et s'alignent en trois direc- tions, une transversale et deux obliques, qui se croisent sous des Fig. 241. — Pleurosigma angulaium, résolu et photographié à la lumière électrique par le Dr H. Van Heurck. angles un peu variables, l'une de lignes obliques étant dirigée de droite à gauche et l'autre de gauche à droite. Dans ce cas, les stries sont dites «décussées ». Suivant le mode d'éclairage que l'on emploie et la direction de la lumière oblique que l'on dirige sur la valve, on peut faire apparaître à volonté le système des stries transver- sales, l'un ou l'autre des systèmes obliques et même parfois un qua- Irième système, longitudinal, comme en le comprend en examinant le schéma que nous en avons donné. (Voir Fig. 52, p. 73.) Résolues en perles, comme on dit, les stries paraissent formées par des grains hexagonaux, mais M. Alfred Nachet a fait voir jadis qu'il s'agit là d'une illusion d'optique produite par l'entrecroise- XI. DESCRIPTION 297 ment des trois systèmes d'interstries et que les grains sont arron- dis. C'est ce qu'il est facile aujourd'hui de vérifier avec les objectifs que nous possédons (.{).. Cette diversité dans la disposition des stries permet do diviser d'une manière très simple les Pleurosigma en deux groupes : ceux qui présentent des stries décussées et ceux qui ont des stries rectangulaires. Fis 212. 243. Fig. 242. — Pleurosigma angulatum var. quadraticm, \V. Sm. Fig. 243. — Pleurosigma angulatum var. JEstuarii. W. Sm. Parmi les espèces à stries décussées, la plus remarquable de toutes est le fameux Pleurosigma angulatum, W. Sm., qui sert de test, depuis bien des années, pour les objectifs moyens. Il a une forme lancéolée un peu élargie au milieu, avec un raphé dont la cour- bure suit à peu près celle de la valve. Ces stries, au nombre de 18 à 20 dans 1 cent, de rnillim., ont la même force dans tous les sens et sont orientées dans les mêmes directions sur toute la valve. Les stries obliques sont un peu moins serrées que les stries transver- sales. Woodward a obtenu autrefois de magnifiques photographies de ce Pleurosigma résolu en perles, à la lumière solaire mono- chromatisée, avec les objectifs de Prazmowsky et de Powell et Lealand, et le Dr H. Van lleurck a donné aussi récemment d'admi- rables épreuves réalisées à l'aide de l'éclairage électrique. Cette belle espèce marine peut atteindre jusqu'à 15 centièmes de (2) Voir J. Pelletan, Le Microscope, son emploi et son application, p. 577. 20 298 LES DIATOMEES • millimètre de longueur. Elle fournit un assez grand nomore ue jolies variétés, dont les plus importantes sont les suivantes : D'abord, une forme plus grande, qui peut atteindre 22 cen- tièmes, le PL angulalum, forma major, et que beaucoup de dia- tomistes considèrent comme le type, désignant alors celle que nous venons de décrire sous le nom de PL angulalum, forma minof. Le PI. angulalum var. quadralum est beaucoup plus large, a une forme losangique anguleuse tordue, un raphé plus flexueux. Il y a des espèces qui diffèrent moins l'une de l'autre que cette ce variété » ne diffère du type. Fig. 244. — Pleurosigma, rigidum, W. Sm. Le Pleurosigma angulalum var. JEsluarii, W. Sm. se rap- proche davantage du type, quoique plus petit, plus large, avec des extrémités un peu rostrées et un raphé plus sigmoïde que la valve elle-même, aussi devient-il tangent à l'un des bords vers chacune des extrémités. M. H. Van Heurck donne encore comme variétés du type PI. an- gulalum, le PL delicatulum, W. Sm., très long et très étroit, à stries un peu plus serrées, moins atténué aux extrémités; l'énorme PL strigosum, qui peut atteindre 1/3 de millimètre de long, non anguleux, et obtus; le PL elongatu?n, très long, très mince et dont les stries se croisent sous un angle plus aigu. XI. DESCRIPTION 299 Le Pleurosigmq affine, Gr. est une espèce voisine, lancéolée large, à peine tordue, mois dont le raphé est plus sigmoïde que la Fig. 245. Fig. 246. Fig. 245. — Pleurosigma formosum, W. Sm. Fig. 246. — Pleurosigma décorum, W. Sm. valve. Les stries obliques se coupent à angle droit, vers le milieu de la valve, où elles sont flexueuses, et à angle aigu aux extrémités, 300 LES DIATOMEES 18 à 20 dans 1 cent, de mm. C'est encore une espèce marine qui peut atteindre 20 à 22 cent, de mill. Le Pleicrosigma inter médium, W. Sm., est très peu courbé, très étroit et très long, avec un raphé presque droit. Les stries se coupent partout sous le même angle et les stries transversales sont plus serrées (20 à 2-4 dans 1 cent, de mm). Le frustule mesure de 13 à 30 cent, de mm, et les plus petits individus sont les plus sigmoïdes. (Grunow.) Espèce marine. (Fig. 240.) Ha Fig. 247. — Pleitrosigma balticum, W. Sm. Le Pleicrosigma rigidum, W. Sm., se distingue tout de suite à sa forme, qui est droite, le raphé seul est très légèrement sigmoïde. Les extrémités sont brusquement obtuses. 11 a des stries compa- rables à celles des espèces précédentes; c'est aussi une espèce marine, longue de lo a 26 cent de mm. (Fig. 224.) Nous citerons encore les deux espèces suivantes, dont le raphé est beaucoup plus tordu que les valves et, par conséquent, coupe celles-ci en deux parties très inégales vers les extrémités. Les stries XI. DESCRIPTION 301 obliques sont plus fortes et moins serrées que les stries transversales qui sont assez fines : « Pleurosigma formosum, énorme espèce marine qui atteint 1/2 millimètre dans les forts individus, et dont les stries obliques se coupent à angle droit. Il y a 15 à 17 stries transversales fines et 10 à 12 obliques dans 1 cent, de millimètre. (Fig. 245.) Pleurosigma décorum, W. Sm., autre grande espèce marine, de 20 à 25 centièmes de millimètre, étroite, longue, pointue, très sigmoïde, à raphé plus flexueux que la valve, et dont les stries obliques, fortes, se coupent presque (?) à angle droit, au nombre, de 14 environ dans 1 centième de millimètre, tandis que les stries transversales, fines, sont au nombre de 18. (Fig. 246.) 248. Fi?. 249. Fig. 248. — Pleurosigma acuminatum, Grun. Fig-. 249. — Pleurosir/ma scalprum, Gr. Les espèces qui n'ont que deux systèmes de stries, rectangu- laires, c'est-à-dire des stries transversales et des stries longitudi- nales perpendiculaires les unes aux autres, sont assez nombreuses. Les plus remarquables sont les suivantes : Le Pleurosigma ballicum, W. Sm., est une grande espèce marine, longue de 20 à 36 centièmes de millimètre, moyennement large et dont les longs côtés sont droits et parallèles, la courbure ne se produisant qu'aux extrémités. Le raphé est ordinairement 302 LES DIATOMKKS ])lus sigmoïde que la valve et flexueux au voisinage du nodule médian. Les stries longitudinales s'incurvent un peu autour de ce nodule et elles sont à peu près aussi serrées que les stries trans- versales, environ 15 dans 1 cent, de millim. (Fig.. 247.) Le Pleurosigma scalprum, Gr., est une espèce d'eau saumàtre ou salée, à valves assez larges, avec les extrémités atténuées et recourbées, le reste de la valve restant sans flexion. Les stries lon- gitudinales et transversales sont de même valeur, comme dans l'espèce précédente, mais plus délicates. Le frustule n'a que 10 à 15 cent, de mm. (Fig. 249.) Fig. 250. Fig. 251. Fig. 250. — Pleurosigma attenuatum, W. Sm. Fig. 251. — Pleurosigma hippocampus. W. Sm. Le Pleurosigma acuminatum, Gr., est une espèce d'eau douce, assez commune, ayant de 13 à 17 centièmes de millimètre, assez sigmoïde, avec un raphé qui partage la valve en deux parties presque égales. Il est un peu renflé au milieu avec des extrémités légèrement acuminées. Les stries longitudinales et transversales sont également marquées et serrées : 18 environ dans 1 cent, de mill. (Fig. 248.) Dans le Pleurosigma attenuatum, W. Sm., les striés longitudi- nales sont dominantes, sans doute parce qu'elles sont moins serrées ; il n'y en a, en effet, que 10 environ dans 1 centième de mm., tandis qu'il y a 14 à 16 stries transversales. Elles s'incurvent un peu con- XI. DESCRIPTION 303 centriquement nu nodule médian. Le frustule est plus grêle que dans l'espèce précédente, moins large et s'atténue insensiblement depuis le milieu jusqu'aux extrémités. Le raphé partage la valve en deux parties sensiblement égales. C'est encore une espèce d'eau douce, longue de 4/5 à 1/4 de millimètre. Le Pleurosigma hippocampus, W. Sm., ressemble beaucoup au précédent pour le nombre et la disposition des stries, dont le système longitudinal domine; mais il est plus trapu, plus court et plus large, sa longueur ne dépasse pas 16 centièmes de millim. Il vit dans les eaux saumàtres, à l'embouchure des fleuves. Fig. 252. Fig. 253. Fig. 252. — Pleurosigma curvuïum, Gr. Fig. 253. — Pleurosigma Kutzingii, Gr. Le Pleurosigma curvuïum, Gr., est une petite forme d'eau saumàtre, longue de 8 à 12 centièmes de mm., assez grêle, neuf à. dix fois plus longue que large, sigmoïde, et dont les stries longitudi- nales sont plus serrées que les stries transversales, contrairement à ce qui a lieu dans les espèces précédentes. Il y a 24 à 25 stries longitudinales et 21 à 22 transversales dans 1 cent, de mm. Le Pleurosigma Kûtzingii, Gr., d'eau douce, est un peu plus grand, car il peut atteindre 14 centièmes do mill. ; il est aussi relativement plus large, avec les extrémités plus atténuées. Sa lar- geur, en effet, n'est guère que six à sept fois plus petite que sa longueur. Les stries longitudinales sont un peu plus serrées que les transversales : 22 1/2 des premières pour 20 1/2 des secondes dans 1 cent, de mm. Enfin, le Pleurosigma nocliferum, Gr., ressemble par sa forme générale au PL hippocampus, c'est-à-dire qu'il est presque droit, avec les extrémités seulement infléchies ; mais il est plus petit, 304 LES DIATOMEES n'ayant que de 8 à 12 cent, de mm. de longueur et environ 1 à 1 1/2 de largeur. Son raphé est assez sigmoïdc et il présente la môme disposition que les précédents pour les stries, dont le système lon- gitudinal est plus serré (22 à 23 stries pour 1 cent, de mm.) que le système transversal (17 à 20 stries). Il offre cette particularité intéressante qu'il y a un très petit espace hyalin coupant oblique- ment le nodule médian, et que les stries transversales médianes sont un peu rayonnantes autour de ce nodule. Il vit dans l'eau douce. Fij?. 254. Fig. 255. Fig. 254. — Pleurosigma nodiferum, Gr. Fig. 255. — Pleurosigma Parkeri, Harr. Le Dr H. Van Heurck réunit ces trois dernières formes : Pleuro- sigma curvulun, PL Kiitzingii, PL nodiferum et quelques autres voisines au Pleurosigma Spencerii, W. Sm., espèce d'ean douce, dont elles ne seraient que des variétés. Fig. 256. — Pleurosigma fascîola, Ehb. Mais le Pleurosigma Parkeri, Harr., présente une disposition particulière des stries médianes, plus remarquable encore que celles dont le PL nodiferum, Gr., nous a donné un exemple, disposition caractéristique. Ici, ce sont les stries longitudinales qui, à la hauteur du nodule médian, décrivent de petites courbes qui se coupent en formant au frustule une ceinture de petites figures elliptiques. XI. DESCRIPTION 305 C'est, d'ailleurs, une petite espèce d'eau douce, de 8 à 10 cent, de mm. de long, assez large, à extrémités un peu brusquement atté- nuées et fléchies, avec un raphé qui divise la valve en parties iné- gales. (Fig. 255.) Quant au Pleurosigma fasciola, Ehb., il présente, exagérée, l'at- ténuation brusque des extrémités, qui se prolongent en deux rostres minces et fléchis en sens contraire. Le raphé partage la valve en deux parties égales et les stries sont disposées comme dans les espèces précédentes, c'est-à-dire que ce Pleurosigma appartient au groupe dont les stries longitudinales sont plus serrées que les stries transversales, comme 23 est à 21, dans 1 cent, de mm. C'est une espèce marine, longue de 10 cent, de mm. et très caractérisée. Fig. 257. Fig. 258. Fig. 257. — Pleurosigma scalproides, Rab. Fig. 258. — PL eximium, (Thw. Les Pleurosigma scalproides, Rab. , et PL eximium, Thw. , sont deux autres petites espèces, longues de 8 à 10 cent, de mm., appar- tenant encore à ce groupe par la disposition des stries longitudinales plus serrées. Ils ont la forme épaisse, à corps droit, avec les côtés parallèles et les extrémités seules fléchies, en lame de scalpel. Le PL scalproides habite les eaux douces; il a 6 à 7 cent, de mm. de long et les stries longitudinales sont aux transversales comme 29 est à 22, dans 1 cent, de mm. Le PL eximium, qui est marin, ou d'eau saumàtrc (embouchures), n'a que 5 1/2 cent, de mm. avec 28 stries longitudinales pour 24 transversales dans 1 cent, de mm. Ces deux dernières espèces sont remarquables par ce détail par- ticulier que leurs frustules se forment dans des tubes gélatineux, comme les Schizonema. Aussi, le Pleurosigma eximium de H. Van Heurck avait-il reçu de Brébisson le nom générique à'En- dosigma eximium, le préfixe Endo rappelant X intérieur des tubes. D'autre part, Ehrcnberg en avait fait un Gloionema sigmoïdeum, indiquant ainsi le filament glaireux formé par le tube et la forme du frustule. Thwaites en fit tout simplement un Schizonema exi- 306 ' LES DIATOMEES mium et Sullivnnt le plaça avec raison dans les Pleurosigma, mais sous le nom de PL obtusatum. C'est le Dr H. Van Heurck qui a rectifié cette désignation en Pleurosigma eximium. Telles sont les principales espèces et variétés de Pleurosigma ; nous devons ajouter que les unes et les autres sont sujettes à d'innombrables variations dans la forme et la taille, mais la dis- position des stries ne change pas, et leur nombre dans un espace donné ne varie que dans des limites très étroites et qui ne suffisent pas à modifier l'aspect de la striation. En résumé, on voit que ce beau genre, dont les espèces passent presque insensiblement de l'une à l'antre, se divise naturellement en deux grands groupes : 1° Espèces à trois systèmes de stries (décussées) ; 2° Espèces à deux systèmes de stries (rectangulaires). Le premier groupe se subdivise en deux types : A. Type à stries toutes pareilles, se croisant sous un angle aigu, plus ou moins voisin de 60°. Les espèces se distinguent alors par ta forme : PL angulatum, PL quadratum, PL œstuarii, PL in- termedium, PL rigidum, etc. B. Type à stries obliques se croisant à angle droit. On distingue les espèces par la forme : Pleurosigma formosum, PL décorum. Les espèces de ce type à trois systèmes de stries, dont deux per- pendiculaires ou rectangulaires, forment la transition aux espèces du second groupe. Ce second groupe comprend, en effet, les espèces à deux systèmes de stries, rectangulaires. Il se divise à son tour en trois types. C. Type à stries également marquées ou distantes dans les deux sens ; on distingue les espèces à la forme, (PL bqlticum, PL acu- minatum, PL scalprum, etc.). D. Type à stries longitudinales dominantes, parce qu'elles sont moins serrées. Les espèces se reconnaissent à la forme (PL atténua- tion, PL hippocampus, etc.). g E. Type où les stries transversales sont dominantes parce qu'elle sont moins serrées. Les espèces se distinguent à leur forme, à diverses particularités caractéristiques de la valve ou à leur forma- tion dans des tubes (PI. Spencerii, PL curmUum, PL Kùtzingii, PL fasciola; PL nodiferum, PL Parkeri; PL eximium, PL scalproïdes, etc). XI. DESCRIPTION 307 § 4. — Donkinia, Toxonidea, etc. C'est ici que devrait se placer la description de diverses formes de transition qui relient les Pleurosigma aux familles voisines; malheureusement, le plus grand nombre sont assez peu connues, exotiques d'ailleurs, et très rares. Aussi, nous citerons seulement pour mémoire les deux suivantes. /£ Fig. 259. — Rhoïcosigma Antillarum, Cl. Le Rhoïcosigma Antillarum , Cl., que nous avons déjà signalé à propos des Scoliopleura, est une espèce à forme pleurosigmée dont le raphé, très sigmoide, forme une crête très saillante dans une moitié de la valve et plonge, au contraire, en, dépression profonde dans l'autre moitié. La valve est distinctement striée transversalement, de 14 à 15 stries dans 1 cent, de mm. Lefrustule n'a que 4 1/4 cent, de mm. Nous n'avons pas d'autres détails. Du reste, cette espèce n'est pas unique, et M. Grunow en a décrit plusieurs autres. Ces formes se rapprochent beauconp des Donkinia, si même on ne doit 308 LES DIATOMÉES les classer dans ce genre, qui fait une transition très marquée aux Amphiprorees, ou dans les Amphiprorees elles-mêmes. Les Donkinia, constituent 'un petit genre créé par Ralfs, en 1860, et qui contient quelques espèces chez lesquelles le raphé forme une crête saillante ou carène, sigmoïde, au milieu de laquelle est le nodule médian, et le frustule vu par la face connective est fortement contracté au milieu. Tel est leBonkinia recta, Gr., dont le frustule vu parla face val- vairc est droit, à côtés parallèles, à extrémités en lancette obtuse, traversé en écharpe par un raphé saillant. La valve est couverte de stries, sans aires lisses, à deux systèmes, rectangulaires, 21 stries environ dans 1 cent, de mm. L'espèce, marine, mesure 8 à 9 cent, de mm. ■ Fig. 260. Fig. 261. Fig. 260. — Donkinia recta, Gr. Fig. 261. — Toxonidea insignis, Donk. C'est un Pleurosigma droit, à raphé saillant et formant deux crêtes ou carènes, l'une dans la demi-valve supérieure, l'autre dans la demi-valve inférieure, avec un nodule médian déprimé. Donkin, qui l'a découvert, l'avait nommé Pleurosigma rectum. Quant aux Toxonidea, Donkin, ils représentent encore des Pleuro- sigma déprimés, Ainsi le Toxonidea insignis, Donkin, est un Pleurosigma droit qui a une énorme fluxion sur un côté. Il en résulte une Diatomée asymétrique à raphé courbe, partant du bord droit et y revenant en passant par un nodule médian excentrique. Les extrémités se sont rostrées par suite de la tuméfaction unilaté- rale du frustule. Les stries sont restées celles d'un Pleurosigma à trois systèmes (décussées), 21 environ dans 1 cent, de mm. C'est IX. DESCRIPTION 309 une espèce marine, rare, mais que l'on trouve, comme la précé- dente, sur les moules et qui atout à fait l'aspect d'un Epithemta.Ce serait une forme de passage auxCYMBELLEES. Une autre forme de transition a été trouvée par M. L. Reinhard, naturaliste russe, dans des récoltes faites par M. Mereschkowsky dans B ,(>:■ Fig. 262. — AchnanthosigmaMereschoicskii, Reinh. A. face valvaire; B, face connective ; e, endochrôme, n noyau. la mer Blanche. Sous le nom d1 Achnanthosigma Mereschkowskii, il en a fait le type d'une espèce et d'un genre nouveaux. Cette Diatomée, vue par la face valvaire, est évidemment un Pleur o- sigma, mais par la face connective, le frustule est courbé comme un Achnanthes, d'où le nom que 31. Reinhard lui a donné. 310 LES DIATOMÉES C'est une Diatomée marine, àfrustules libres, avec un endochrôme formé de deux plaques et un noyau placé contre la valve concave. Sa taille est de 17 1/2 centièmes de millimètre. Elle est d'une grande transparence, mois la disposition de ses stries n'est pas connue (1). Cette forme, qui s'est trouvée en grandes quantités dans les récoltes deM. Mereschkowsky, établirait une transition des Pleuro- sigma aux Achnanthes, ou des Naviculées aux Achnanthees. § 5. — Berkeleya — Amphipleura. Les Berkeleya constituent un petit genre créé autrefois par Greville, et dans lequel M. H. Van Heurck ne cite que deux espèces : le Berkerleya micans, Lyngb. et le B. Dilhvynii, Ag., qui vivent dans l'eau de mer. Fig. 263. — Berkeleya micans, Lyngb. Le caractère le plus remarquable de ce genre est de présenter un nodule médian extrêmement allongé dans le sens longitudinal, s'effaçant dans la partie médiane et ne faisant saillie qu'à ses deux extrémités, de sorte qu'il paraît dédoublé (2). (1) L. Reinhard. — Les Bacillar lacées de la mer Blanche. Bull, de la Soc. I. des Nat. de Moscou, et Journal de Micrographie, 1883. (2) La figure ci-dessus du Berkeleya micans n'est pas très claire ; néan- moins, on reconnaît, avec un peu d'attention et une loupe, les deux points extrêmes a et b du nodule médian dédoublé. XI. DESCRIPTION 311 Le Berkeleya micans est extrêmement long et mince, environ 20 fois plus long que large. Sa longueur varie de 8 à 9 cent, de millimètre. Il présente des stries fines et parallèles ; 26 dans 1 cent, de mill. Le Berkeleya Dilwymi est beaucoup plus petit, long de 3 cen- tièmes de millim. environ, et elliptique, 4 fois moins large que long. Il présente 30 stries dans 1 cent, de mm., rayonnantes aux extré- mités, parallèles au centre. Amphipleura. — Les Amphipleura constituent un genre, établi par Kutzing en 1844, très pauvre en espèces, mais qui n'en est pas moins un des plus célèbres de la famille des Diatomées, grâce à \Amphipleura pellucida, Kz. , l'une des plus intéressantes petites plantes qui soient au monde. Nous ne croyons pas qu'il existe un seul organisme qui ait autant exercé la patience des micrographes, ait été l'objet de plus de recherches et de plus d'efforts, qui ait plus contribué aux progrès de la construction du microscope et des objectifs, au perfectionne- ment des artifices d'observation et de la technique des préparations de Diatomées, que Y Amphipleura pellucida. Pendant de longues années, la plupart des diatomistes n'ont connu les stries de Y Amphi- pleura que par oui-dire, et nous ne craignons pas d'avancer que le jour où ils ont éprouvé leur plus grande joie est celui où, pour la première fois, ils ont vu apparaître sous leur objectif ces stries délicates dont la résolution avait été si longtemps pour eux impos- sible et chimérique. Aujourd'hui, avec les moyens perfectionnés que nous possédons, la résolution des stries transversales de cette petite Naviculée csi beaucoup moins difficile, mais celle des stries longitudinales est encore très épineuse ; elle exige non seulement d'excellents instru- ments, mais de plus une grande habileté dans leur maniement ; et) en somme, Y Amphipleura pellucida est restée le plus difficile de tous les tests. C'est elle qui forme encore le vingtième et dernier numéro du fameux test de Moller (1). Ce petit genre, qui n'a longtemps compris qu'une espèce, celle dont nous venons de parler, n'en contient encore que deux, que nous sachions. Ses caractères génériques résident dans la disposition du (1) Le* tests de Moller sont maintenant remplacés avec avantage par les magnifiques préparations-types de Ch.^J. Tempère, 168, rue Saint-Antoine, à Paris, préparations qui surpassent de beaucoup celles de Moller, et coûtent infiniment moins cher; — Elles contiennent de 3 à 200 espèces» 312 LES DIATOMEES raphé, qui est droit sans nodule médian, mais se dilate vers les extrémités pour embrasser des nodules terminaux, très allongés et occupant souvent près du cinquième de la longueur de la valve. Les valves sont fusiformes, très allongées, à extrémités atténuées et presque aiguës ; elles sont de 9 à 11 fois aussi longues que larges et présentent, d'après Borscow, une ligne saillante longitudinale de chaque côté du raphé et un peu plus loin de ce raphé que du bord de la valve. Cette disposition n'est visible que quand on voit le frusUile en coupe optique transversale. V Amphipleura pellucicla est une espèce d'eau douce, assez commune, dont la longueur varie de 8 à lo centièmes de millimètre. Elle présente un système de stries transversales qui vont du bord jusqu'au raphé, qu'elles entament même sur ses côtés. Le nombre de ^§=Cfcgx Fig. 204. — Coupe transversale schématique de VAmphipleura peU.ucida, Kz, d'après Borscow. ces stries dans 1 centième de millimètre est représenté par des chiffres assez différents, suivant les- divers auteurs. Nous en avons compté 40 et M. Castracane 52. Le Dr H. Van ïleurck n'en indique que 37 en moyenne. C'est à ce chiffre qu'à notre avis on doit s'ar- rêter, car plus que tout autre il mérite confiance, M. Van Ïleurck ayant (au mois de novembre 1884) réussi à résoudre en perles et à photographier V Amphipleura pellucicla. Du reste, le chiffre donné par lui n'est qu'une moyenne et n'infirme pas absolument celui qne nous avons trouvé. Quant à celui de M. Castracane, nous le croyons certainement trop fort. Ce n'est pas, en effet, parce qu'elles sont très serrées que ces stries sont difliciles à résoudre, mais parce qu'elles sont extrêmement délicates. D'autres Diatomées ont une striation plus serrée, quoique beaucoup plus facile à voir. Ces stries sont formées de perles dont l'alignement donne nais- sance à des stries longitudinales. Celles-ci, d'après M. H. Van Heurck, ne sont pas plus serrées que les stries transversales, mais elles sont encore plus délicates et plus difliciles à résoudre. XI. DESCRIPTION 313 Ajoutons que la manière la plus facile de résoudre les stries de Y Amphipleura pellucida consiste à éclairer la Diatomée oblique- ment par la lumière solaire monochromatique, en faisant passer le i 2 3 Fig. 265. — 1. Amphipleura pellucida, Kz. 2 et 3. Amphipleura Lindheim'erii, Gr. Var. Truani. H. v. H. rayon de soleil à travers une petite cuve à faces parallèles contenant une solution de sulfate ou d'azotate de cuivre ammoniacal, comme nous l'avons indiqué plus haut. (Voir p. 173.) M. Grunow a désigné sous le nom & Amphipleura Lindhei- merii une nouvelle espèce d' Amphipleura provenant du Brésil et du Texas. Elle est plus grande, mesurant de 16 à 22 centièmes de millimètre. Sa forme est à peu près la même, sauf que les nodules terminaux sont plus robustes et encore plus longs, occupant chacun plus du quart, quelquefois près du tiers de la longueur de la valve. Celle-ci est, du reste, moins étroite et plus naviculoïde que celle de VA. pellucida, car elle n'est que de 6 à 8 fois aussi longue que large. Le raphé décrit à son milieu une petite ondulation laté- rale qui indique comme un rudiment de nodule médian. • Cette espèce présenterait non seulement des stries transversales* 21 314 LES DIATOMÉES mais un système de stries obliques inclinées à environ 45° sur les premières, et dans un seul sens, c'est-à-dire d'un bord de la valve à l'autre en franchissant le raphé. La résolution de ces stries est difficile. Enfin, M. A. Truan a trouvé, en 1883, dans des dépôts d'eaux ferrugineuses, dans la Trubia (Espagne), une dernière forme <¥ Am- phipleura à laquelle il a donné le nom $ Amphipleura trubiana A. Tr. Elle présente les caractères de l'espèce brésilienne, A. Lin- dheimeriï, Gr. ; M. H. Van Heurck la considère comme une variété de cette dernière. Le savant diatomiste belge pense, d'ailleurs, que cet Amphipleura Lindheimerii, var, Truani, pourrait être la forme sporangiale de Y Amphipleura pellucida. TABLE ALPHABÉTIQUE DES MATIÈRES A Pages ACHNANTHÉES ; 192, 211 Achnanthes . 192, 213 Achnanthidium, Bréb 217 Achnanthosigma, Reinh 308 Actinella, Grev 199 Actinocyclus, Ehb 205 Actinodiscus , Grev 205 Actinoptychus, Ehb 206 Amphicampa, Ehb 199 Amphipleura, Kz 195, 311 Amphiprora, Ehb t 196 Amphiprorée 197 Amphitetras, Ehb 204 Amphora, Ehb 194, 230 Anaulus, Ehb 204 Anomalies des Diatomées 65 Appendices et dispositions particulières 84 Arachnoïdiscus, Deane 207 Asterionella, Hass 198 Astcrodiscus, John 206 Asterolampra, Ehb » 206 ASTÉROLAMPRÉES 206 Asteromphalus, Ehb 206 Attheya, West 205 Aulacodisctts, Ehb , 205 Auliseùs, Ehb 202 3Hl TABLE DES MATIERES B Pages Bacillaria, Gmel. ' . . . . 197 Bacteriastrum, Lauder 203 Baumes, vernis, résines 119 Berkeleya, Ehb 'l95, 310 Biblarium, Ehb. . . 202 Biddulphia, Grun 204 Biddulphiées . 204 Brebissonia, Kz 195 Brigldxccllia, Ralf. 207 Campylodiscus, Ehb . 197 Campylosira, Grun ...... 199 Cerataulus, Ehb 204 Cestodiscus, Grev 205 Ch^tocérées* 203 Chœtoceros, Ehb 203 Cladoyramma, Ehb • 203 Classifications . . 187 Classification de M. H. L. Smith 61, 188 Classification de M. P. Petit 189 Clavularia, Grev 199 Climacosphenia, Ehb 201 Cocconeis, Ehb 193, 211 Cocconema, Ehb 194, 226 COCCOCHROMATICÉES 192, 199 Condensateurs et appareils divers 165 Condensateur achromatique 167, 171 Condensateur d'Abbé 172 Condensateur de Dujardin 166 CoscmoDiscÉEs 206 Coscinodiscus, Ehb 207 Craspedodiscus, Ehb 207 Craspedoporus , Ehb 205 Creswellia, Grev 207 Cyclotella, Kz : . 208 Cyclophora, Cast 193, 217 Cylindrotheca, Gr 203 Cymatopleura, W. Sm 197 Cymatosira, Gr 199 Oymbella,Ag > 194, 239 TABLE DES MATIERES 317 Pages Cymbellées ... 194, 225 Cymbosira, Kz. 193 D Debya, Paut 206 Déduplication des Diatomées 3 Denticula, Kz 199 Diadesmis, Kz 195, 281 Diatoma, Ag % 199 Diatomella, Grev 202 Dicladia, Ehb 203 Dictyopyxis, Ehb 207 Dimeregramma, Ralfs. 200 Ditylum, Bail 204 Doigt mécanique 133 Bonhinia, Ralfs. 195, 306 Eclairage 175 Eclairage d'Abbé 172 Eclairage électrique 178 Eclairage solaire monochromatique , 175 Encyonema, Kz 194, 229 Epithemia, Bréb. * 194, 233 Eucampia, Ehb. 204 Eunotia, Ehb . . 199 Eunotiées „ . 198 Eunotogramma, Weiss 205 Euodia, Bail. 205 Eipodi.scées 204 Eupodiscus j 205 Fragilaria, Lyngb 199 Fragilariées 199 Gdillonellà, Bory 208 Gaillonellées ...*.. . . 208 318 TABLE DES MATIERES Pages Gephyria, Arn 193 Glyphodesmis, Grev »... 200 Gomphogramma, Braun 202 Gomphonema, Ag 194, 219 Gomphonémées •....,. 194, 218 Gonlothecium, Ehb 203 Grammatophora, Ehb 202 H Halionyx, Ehb 206 Heliopelta, Ehb. ......# 206 HÉLIOPELTÉES 205 Hemiaulus, Ehb 204 Hemidiscus, Wall 205 Hercotheca, Ehb ' 203 Heterodictyon, Grev 207 Himantidium, Ehb. ' . 199 Histoire naturelle des Diatomées , . 20 Historique H Euttonia, Gr. et St 205 Hyalodiscus, Ehb , 208 Hyalosira, Kz 202 Instruments et produits pour le montage 118 Introduction : 1 Isthmia, Ag. . • 204 Janischia, Gr 204 Lipidodiscus, O. Witt 206 Licmophora, Ag '.".. 201 Licmophorées 201 Liquides conservateurs 122 TABLE DES MATIERES 319 M Pages Màstogloia, Thw 195, 280 Meridion, Ag • 199 Microscopes 138 Microtomes 181 Milieux à haut indice % . 121 Mode de végétation des Diatomées 52 * Monopsia, Grov. et St 205 Montage des Diatomées 118 Montage à sec 122 Montage dans les baumes. 124 Montage dans les liquides 127 Mouvements des Diatomées 0, 31 Moyens d'étude 138 Multiplication des Diatomées 36 Multiplication par conjugaison 43 Multiplication par fissiparité 3, 36. Multiplication par rajeunissement. .' 43 N Navicula, Bory 195, 245 Naviculées 195, 243 Nettoyage des Diatomées 36 Nitzschia. Hass . 197 Nitzschiées 196 Nombre des stries g 82 Noyau 89 o Objectifs 148 Omphalopsis , Grev 200 Opephora,?. P 201 Pantocsekia, Grun 208 Periptera, Ehb 203 Peronia, Bréb ' 201 Pinnularia, Ehb 246 320 TABLE DES MATIERES Pages Placochromaticées 192, 211 Plagiogr anima, -Grev. . . 200 Plagiogrammées • 199 Pleurosigma, W. Sm ; 195, 294 Podocystis, Kz 197 Podosira, Ehb 208 Eodosphenia, Ehb 201 Polymyxus, Bail 206 Porodiscus', Grev *. 207 Porpeia, Bail 204 Préparations systématiques . 128 Préparations systématiques (procédé Rataboul) 131 Préparations dans la naphtaline monobromée 136 Principaux gisements des Diatomées 96 Procédé de nettoyage par l'acide nitrique . . ' 107 Procédé de nettoyage par l'acide sulfurique et le chlorate de potasse . 109 Procédé de nettoyage par le permanganate dépotasse et l'acide chlorhy- drique 110 Procédé de nettoyage pour les dépôts marins (M. Kitton) . . . . 111 Procédé de nettoyage pour les guanos, les sondages marins et les fossiles. >I. Kitton) 112 Procédé de nettoyage pour les guanos et les vases marines. (M. J. Brun) 112 Pseudauliscus, Leud. F 205 Pseudo-Eunotia, Ehb 199 Pterotheca, Grev. 303 Pyxidicula, Ehb. . 207 • R Raphé, pseudo-raphé 59 Raphoneis, Ehb 199 Recherche et récolte des Diatomées 93 Récolte . 99 Reproduction des Diatomées 7 Reproduction par conjugaison. . . ...... .• c- '•'. • 43 Reviviscence des Diatomées . . ...... . . . . . 55 Rhabdonema, Ehb ...... . . 202 Rhizosolenia, Ehb 203 Rhizosoleniées, Ehb 202 Rhoïconeis, Grun .' 193 Rhoïcosigma 306 Rhoïcosphenia, Grun 194, 219 Roperia, Grun 205 TABLE DES MATIERES 321 S Pages Sceptroneis , Ehb 201 Schizonema, Kz 195? 278 Scoliopleura, Grun 195. 287 Skeletonema, Grun 207 Stauroneis, Ehb 195) 282 Staurosira, Ehb 198 Stephanodiscus , Ehb 207 Stephanogonia , Ehb 203 Stephanopyxis, Ehb * 207 Stictoclesmis, Grev 195 Stigmaphora, Wall • 195 Stranyulonema, Grev 207 Striatella, Ag ... 202 Stries 79 Structure intime des valves 66 Structure microscopique des Diatomées 57 Surirella, Turp 197 SURIRELLKES ■ 197 Syndendrium, Ehb 203 Synedra, Ehb 198 Synédrées 198 Syringidium, Ehb 203 Systephania, Ehb*. > 203 Tabellaria, Ehr 202 Tabellariées 201 Technique des coupes ' 181 Technique des Diatomées 105 Terebraria, Grev . • 199 Terpsinoë, Ehb 204 Tessella, Ehb 202 Tetracyclus, Ralfs. 202 Thalassiothrix, Ehb 198 Toxarium, Bail 198 Toxonidea, jDonk 195, 308 Trachysphenia, P. P 201 Trachysphéniées 200 Triage des Diatomées (M. Kitton) 117 Triage des Diatomées (M. H. L. Smith) 115 Triceratium, Ehb ' 204 Trochosira, Kitt ' . . . . 203 322 TABLE DES MATIERES Pages Truania, Pant 206 Tryblionella, W. Sm 197 V Valves 57 Valves secondaires 89 Vanheurckia, Bréb 277 Vernis, baumes, résines 119 X Xanthiopyxidées 207 Xanthiopyxis, Ehb 207 ■H ■i MÊÊËÈÊÊ '!*]>}( h'Ui' iililitïitiit il if frit i^^uttUiiilîiUiifttîututlAiuStii^iijfjtMiti ■ï >I'C »! ™* '?f ***** Ii/?é f*yj r*Fl?f TÎ }A if Jf Itlf l'if I^ïfïfNj il* 7«?*J*Jf Jîll/TMîJT?7*?i Bi^^BBH^^^BBfl! luHuiilHl uU IfoHÏ wUliUiÛfli *li/î Jf « Jf «I/3f ït 'rît il »MW« î»if tf if/ïlîlf t« yiîtitJiittiiiiiiiiiiyi ■ : fJ»J Fi ■ • F ' .'■ ■ ' !f '' '* .' ;; F.8 '• S *• 2 :'* ***;' HViiiifitëiifi