Petite "Bibliothèque Surannée
LOUISE LABE
LES ÉLÉGIES ET LES SONNETS
de LOVÏZE LABÉ
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Précédés d'une notice
PAR
TANCRÈDE DE VISAN Portrait d'après Woëiriot
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Chez SANSOT, Libraire, rue de liiperon, 7"^ 9 près le départ des carrosses
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LES ELEGIES ET LES SONNETS
DE LOUISE LABÉ
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Petite Bibliothèque Surannée
LOUISE LABE
LES ELEGIES ET LES SONNETS
de LOVÏZE LABÉ,
LIONNOIZE
Précédés d'une notice
PAR
TANCRÈDE DE VISAN
Portrait d'après IVoéiriot
A PARIS
Chez SANSOT, Libraire, rue de l'Eperon, 7 et 9,
près le départ des carrosbes
d'Orléans
MCHX
n, A ÉTÉ TIRÉ DE CET OUVRAGE SIX EXEMPLAIRES SUR JAPON IMPÉRIAL NUMÉROTÉS DE I A 6 ET 12 EXEMPLAIRES SUR HOLLANDE NUMÉROTÉS DE 7 A l8.
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11 n'est pas de période, dans l'histoire de notre littérature lyonnaise, aussi prospère, aussi féconde en œuvres et, pour tout dire, aussi brillante que celle qui s'étend des premières années du xvi^ siècle à 1562, date de la publication du Microcosme de Maurice Scève et de la révolte des protestants à l'aide des troupes du baron des Adrets.
M. Ferdinand Brunetière, un des rares critiques officiels qui aient daigné s'occuper de l'école lyon- naise, a donc eu raison d'écrire : « On exagérerait à peine si l'on disait de la ville de Lyon qu'elle était vraiment alors (vers le milieu du xvie siècle^,
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pour la seconde fois dans l'histoire, autant et plus que Paris même, la capitale intellectuelle et poétique de la France. » (i) Le plus récent comme le plus averti des biographes de Maurice Scève, M. Albert Baur, pense de même. (2)
Cette situation littéraire privilégiée est due à plusieurs causes: économiques, sociales et morales, et l'on ne comprendrait rien au tempérament si original de Louise Labé si l'on n'en énumérait ici quelques unes.
(i) Ferdinand Brunetiére : La PUiaie française, L'Ecole lyonnaise, Kevut des Deux Mondes, 15 décembre 1900.
(2) Albert Baur : Maurice Scève et U Renaissance htmnaise. Chaœp'on, Pins 1.9c 6.
II
Par sa position géographique Lyon s'offrit, dès le Moyen Age, comme un centre de commerce de premier ordre. Située aux frontières de la France, du Dauphiné et de la Savoie, sur deux fleuves navigables qui la mettaient en communication di- recte avec la Bourgogne, la Suisse et la Provence, cette ville privilégiée était en même temps la porte principale du commerce italien avec le nord de la France, les Pays-Bas et une partie considérable de l'Allemagne.
Les financiers les plus habiles à cette époque et les plus influents, les Florentins, ne tardèrent pas à fonder à Lyon, dès le milieu du xv« siècle des succursales de leurs banques. Des échanges inces- sants s'établirent avec l'Italie. D'autre part Lyon fut choisie, lors de l'expédition de Charles viir, comme base des opérations. Là se croisaient, en eflfet, les routes par où arrivaient les différentes parties de l'armée du roi de France.
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La cour faisait de fréquents séjours dans la ville. Sous Louis XII elle fut même plus souvent à Lyon qu'à Paris, ainsi que sous François i. Il en résulta une certaine émulation entre lyonnais et parisiens, lesquels considéraient avec jalousie cette préférence. Des fêtes magnifiques s'organisaient, rehaussées par le luxe, la beauté et la multitude des femmes richement parées. Comme la noblesse était en très petite quantité à Lyon, les femmes des bourgeois notables prirent part à ces réjouissances et reti- rèrent de cette vie brillante des manières délicates et une façon distinguée de s'intéresser aux choses de l'esprit.
Par le contact avec la joie et avec l'Italie s'intro- duit ici une nouvelle forme de penser et de sentir. On a très finement remarqué que la Renaissance ne s'est pas implantée à L3'on au moyen de livres et de sociétés pédantes, mais par la vie sociale, « par des rapports directs avec des hommes du monde... et elle s'est développée sous l'influence de l'art et du luxe italien, dans une société qui s'adonnait à la gaité et à des fêtes auxquelles les femmes prenaient part... Voilà pourquoi, ajoute M. Baur, (i) la Renaissance lyonnaise est polie, galante, sans aucune inclination à la gauloiserie du
I) ÂlDert Eâ'ir : »fus ctt p. (.
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Moyen Age, bien différente de celle du nord de la France qui a fait naître Rabelais et la plupart des humanistes français... Voilà aussi pourquoi les femmes prennent une part si vive à la vie littéraire de Lyon, beaucoup plus que dans aucune autre ville de la France. »
On comprend, dès lors, avec quelle force a grandi à Lyon le goût des belles lettres, facilité encore par l'extraordinaire développement de l'im- primerie dans notre ville. Des typographes tels que Seb. Gryphe, Jean de Tournes, Jean Frellon qui hébergeait Calvin, Etienne Dolet correcteur chez Gryphe, François Juste l'éditeur de Rabelais, tout dévoués à l'œuvre de Renaissance, ne pouvaient qu'attirer les érudits et les humanistes.
Ceux-ci affluèrent en grand nombre. Bonaventure des Périers demeurait à Lyon depuis 1535 pour collaborer avec Dolet à la publication des Commen- taires de la langue latine. Rabelais y séjourne depuis l'été 1532 jusque vers la fin de 1538. Il remplit ses fonctions de médecin à l'Hôtel-Dieu avec si peu de zèle qu'il se voit congédié. C'est durant son séjour à Lyon qu'il lui nait un fils naturel — Théodule Rabelais — qui ne vécut que deux ans, mais que son père reconnut en lui donnant son nom. Marot vient en 153e à Lyon. Il est tellement enchanté de
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la société mondaine de cette ville, des amitiés littéraires, des femmes charmantes et habiles en amour — en particulier de Jeanne Gaillarde — qu'il y retourne à plusieurs reprises et que chaque fois il la quitte à regret.
Adieu Lyon qui ne morJs point Lyon plus donz qae cent pu:elles. . .
N'oublions ni Lemaire des Belges, ni Mellin de Saint-Gelais, ni Antoine du Moulin, ni Olivier de Magny, ni notre grand Maurice Scève. Illustres prosateurs ou poètes, érudits ou humanistes, archéo- logues ou artistes, collectionneurs ou mécènes se donnèrent rendez-vous à Lyon où, par surcroit, régnait une grande liberté religieuse et une complète indépendance de pensée.
De ces influences combinées devait naître une doctrine nouvelle qui a beaucoup contribué à l'élaboration d'un idéal tout neuf de l'amour, de la femme, de l'amitié, de la vertu : le Platonisme.
Cette religion de la beauté avait été importée à Lyon par les Florentins. Il y aurait, à ce sujet, une curieuse étude à tenter des différences entre le platonisme lyonnais et celui du nord de la France: celui-ci plus scientifique, plus directement poussé Ters l'hellénisme et l'imitation de Platon ; celui-là
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plus italien, plus enclin aux questions de senti- ment et à la joie de vivre. Le platonisme du nord fut introduit à Lyon par Marguerite de Navarre dont la cour était le foyer de la nouvelle doctrine. Le platonisme lyonnais antérieur ne repose pas d'abord sur l'étude des œuvres de Platon, mais sur l'imitation des usages de la société florentine et sur la connaissance intime de quelques œuvres de la littérature italienne, telle que le Cortegiano (i) de Baldassar Castiglione, Y Hécatomphile (2) de Léon Baptiste Alberti et surtout le Can:{ionere de Pétrarque.
« Le platonisme ne fit que rendre plus vive la vie sociale que l'italianisme et la longue période de fêtes avaient éveillée à Lyon. On se réunissait dans des salons et, chose remarquable, c'est déjà la maîtresse de la maison qui préside aux réunions. » Madame du Perron a eu son cercle littéraire ; Louise Labé et bien d'autres auront le leur, où les gens d'esprit se feront gloire de défiler.
Nous voyons ainsi renaître l'idéal de la galan- terie chevaleresque et un nouveau code d'amour
(i) Lt Cortegiano eut deux éditions lyonnaises en 1557 et 1558. (2) Hècatomfhile, Lyon, Juste, JS34.
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se composer. Toute femme qui veut passer pour instruite s'essaye à la corresponnance poétique, chante et joue du luth. Ce féminisme de bon aloi est bien une des plus curieuses caractéristiques de notre Renaissance lyonnaise. Dans la préface de ses œuvres parues chez Jean de Tournes avec privi- lège du Roi en 1555 Louise Labé, s'adressant à son amie Clémence de Bourges, s'exprime ainsi : « Estant le temps venu, Mademoiselle, que les « lois des hommes n'empeschent plus les femmes « de s'appliquer aus sciences et disciplines : il me « semble que celles qui ont la commodité, doivent « employer cette honneste liberté que notre sexe « ha autre fois tant désirée, à icelles apprendre : et « montrer aux hommes le tort qu'ils nous faisoient « en nous privant du bien et de l'honneur qui « nous en pouvait venir. » Elle ajoute : « L'hon- « neur que la science nous procurera, sera entiè- « rement notre : et ne nous pourra estre oté, ne « par finesse de larron, ne force d'ennemis, ne « longueur de tems. » Et plus loin : « Ayant passé « partie de ma jeunesse à l'exercice de la Musique « et ce qui m'a resté de tems l'ayant trouvé court « pour la rudesse de mon entendement, et ne « pouvant de moymesme satifaire au bon vouloir « que je porte à notre sexe, de le voir non en « beauté seulement, mais en science et vertu
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passer ou égaler les hommes : je ne puis faire autre chose que prier les vertueuses Dames d'eslever un peu leurs esprits par dessus les quenoilles et fuseaus, et s'employer à faire entendre au monde que si nous ne sommes faites pour commander, si ne devons nous estre desdaignées pour compagnes tant es afaires domestiques que publiques, de ceux qui gouver- nent et se font obéir... Pource, nous faut-il animer l'une l'autre à si louable entreprise. » Bref il s'agit d'un véritable plaidoyer en faveur de la femme écrivain, auquel souscrivent tous les artistes du temps. Chose assez digne de remarque, les relations entre les deux sexes sont si étroites qu'on voit les frères entraîner leurs sœurs,- les amants leurs maîtresses « vers la terre nouvellement découverte : la Renaissance de la beauté, de la poésie et de la science. » Pernette du Guillet va jusqu'à remercier, Maurice Scève son amant, de ce qu'il a fait le jour dans la nuit de son ignorance.
III
Ces considérations nous ont semblé nécessaires pour situer Louise Labé dans son véritable climat psychologique et dans l'ambiance de cette Renais- sance lyonnaise dont elle est le plus délicat parfum.
On ignore la date de la naissance de celle que M™'^ Desbordes-Valmore appelait « la nymphe ardente du Rhône. » La plupart des critiques qui se sont occupés de la Belle Cordière la font naître en 1526. Cette date, dit avec des raisons convain- quantes M. Charles Boy, (i) qui nous a donné la meilleure étude sur la vie et l'œuvre de Louise Labé, doit être rejetée et la naissance de Louise située entre deux dates extrêmes 15 15 et 1524.
Même incertitude sur le lieu de cette naissance. Les uns veulent que Louise ait \'u le jour à Lyon, rue de l'Arbre sec où habitait son père Pierre
(i) Œuvres de Louise Laht publiées par Charles Boy, 2 volumes, Pari», I.çmerre 1887,
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Labé ; les autres la déclarent originaire de Parcieu en Bombes dans la campagne de sa mère, dont elle deviendra propriétaire et où elle sera enterrée.
Son père Pierre Charlin ou de Charlieu, dit Labbé ou Labé, (i) était cordier. Ce commerce semble fort honorable au xvi^ siècle. Plusieurs familles des plus distinguées exerçaient ce genre de négoce. Pierre Labé avait une situation aisée, à en juger par plusieurs maisons lui appartenant en ville, ainsi que des terres aux environs, et suffi- samment d'argent liquide pour cautionner des gens d'ailleurs insolvables. Il fut plusieurs fois marié, d'abord à la veuve Jacques Humber.t prénommée Guillemie ou Guillemette, puis a une certaine Etiennette Roybet. Ces deux unions ne semblent pas l'avoir découragé puisqu'il convole en troi- sièmes noces avec Antoinette Taillard. Il meurt en 1552.
Louise Labé, croit-on, nacquit de la seconde femme, Etiennette Roybet. Douée des plus pré- cieuses qualités de l'esprit elle se consacra de bonne heure â l'étude des arts et belles lettres. Son père lui donna une éducation soignée et des maîtres excellents. Dans sa troisième élégie qui est presque
(j) 'Hous trouvons ce nom écrit L'Aht, L'4ihé ou Iaht\
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une autobiographie, elle nous donne un tableau fidèle des occupations de sa jeunesse :
Lors qu'exerçoi mon corps et mon esprit En mils et mile euvres ingénieuses.
La broderie qu'elle nomme l'art de peindre avec rcsgiiille l'occupe ainsi que la musique
Loaise ha voix qne la musique avoue Louise ha main qui tant bien an luth jone.
Guillaume Paradin, dans ses Mémoires sur l'hi^' toire de Lyon, déclare que Louise « estoit instituée en langue latine dessus et outre la capacité de son sexe. » Elle écrivait aussi en italien et en espagnol.
Dans le même temps se placent ses premières expériences d'amour.
Je n'avois vu encore seize hivers
Lors que j'entraj- en c«s ennuis divers :
Et jà voici le tieiziime esté
Que mon cœur fat par amour arresté.
Elle repoussa un vieux poète italien qui s'en fut mourir en Espagne et elle aima un certain homme de guerre qui, semble-t-il, l'a dédaignée. C'est alors qu'elle entreprend de chanter sa peine en vers tendres et passionnés où l'accent de la plus forte douleur lui dicte les plus belles strophes que
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l'amour ait jamais inspirées à notre Sapho lyonnaise. S'adressant à l'infidèle et, s'examinant devant Dieu, elle dit :
l'ay de tout tems vescn en son service Sans me sentir conlpable d'antre vice Que de t'avoir bien souvent en son lieu D'amour forcé, adoré comme Dieu.
Et plus loin elle semble vouloir sacrifier son amour au bonheur de son amant. Cet élan enflammé lui dicte les beaux vers suivants :
Goûte le bien que tant dhommes désirent : Demeure au but où tant d'autre.^ aspirent : Je ne dy pas qu'elle ne soit plus belle ; Mais que jamais femme ne t'aymera. Ne plus que moy d'honneur te portera.
Ici se place l'aventure de Perpignan qui a tant occupé les commentateurs. La plupart ont cru que Louise Labé avait suivi a cheval l'armée commandée par le Dauphin en 1542 et avait assisté au siège de Perpignan, capitale du Roussillon. La légende est jolie et plus jolie encore le nom de Capitaine Loys que les gentilshommes, émerveillés de la bravoure de notre héroïne, lui décernèrent.
La vérité est tout autre. Il est de fait que Louise savait piquer un cheval et jouer de l'épée à ravir. Elle même a écrit à ce sujet des vers révélateurs.
11 LOUISE LABÉ
Mais quoi ? amour ne pat longuement yoa Mon cœnr n'aimans que Mars et le savoir.
Or ces qualités guerrières ne se montrèrent pas dans une expédition réelle contre les Espagnols, mais dans un tournoi auquel elle prit part sur la place Bellecour à Lyon, lors du passage du Dauphin dans notre ville, se rendant à Perpignan. Montluc déclare qu'il ne vit jamais armée plus brillante, plus luxueusement équipée. La jeunesse lyonnaise, partagée en deux camps, espagnols et français, simula la prise de la capitale du Roussillon. Louise Labé joua son rôle, aux côtés de son frère François Labé, ainsi qu'avaient accoutumé les dames, en ce temps où l'usage du cheval était commun aux deux sexes par suite du peu d'emploi des voitures.
Quoiqu'il en soit l'amour devient sa grande affaire. Très entourée, très désirée la Belle Cordièrc est célèbre pour sa beauté et son esprit. L'un trouve dans son nom l'anagramme de Belle à soy, un autre fait la description de ses charmes, un troisième l'appelle la dixième Muse. Ainsi se forme autour d'elle un cercle d'admirateurs et de beaux esprits qui la visitent, lui dédient des vers, goûtent ses « exquises confitures ». Sa maison est le rendez- vous de la haute société. « Elle y recevait gracieu- sement, écrit du Verdier, seigneurs, gentilshommes
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. autres personnes de mérite, avec entretien de devis et discours ; musique tant à la voix qu'aux instruments ou elle estoit fort duicte, lecture de bons livres Latins et \'ulgaires, Italiens et Espa- gnols, dont son cabinet estoit copieusement garni.» Entre temps c'était son mariage, dont on ne saurait donner la date exacte. Une chose seule demeure certaine c'est que Louise était mariée en 155 1, sans qu'on puisse dire depuis quand. Son époux, Ennemond Perrin, était marchand cordier à Lyon et beaucoup plus âgé que sa femme, car dans un acte daté de 1531, Ennemond Perrin agit comme majeur. De plus, le testament de Louise de 1565 nous apprend qu'il a cessé de vivre, puisque la Belle Cordière y est qualifiée de Veuve de sire Ennemond Perrin, en son vivant bourgeois citoyen de Lyon.
Dans des vers à la louange de Louise Labé on fait la description de son jardin en ces termes :
Un peu plus haut que la plaine, Ou le Rone impetuens Embrasse la Sone hameine De ses grands bras tortueus, Ce la mignonne pucelle Le plaisant jardin estoit.
Ce jardin faisait l'angle de la rue Confort et
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d'une ruelle tendant à Bellecour (i). Le mari Ennemond Perrin possédait sur cet emplacement un jardin et une maison. C'est là que vécut notre héroïne jusqu'au temps où elle se retira à Parcicu, dans sa maison de campagne.
Ici doit prendre place la grave question des mœurs de Louise Labé. Devons-nous croire toutes les accusations d'impudicité dont on l'a accablée, ou essayer, comme s'est efforcé de le faire M. Co- chard, (2) de laver son honneur et de la présenter, daus un siècle assez dissolu, comme un modèle de chasteté ? Disons tout de suite que ce problème, d'ailleurs secondaire, ne sera jamais résolu.
Dans ses Documents historiques sur la Vie et les Mœurs de Louis Labé M. P. M. Gonon s'est plu a réunir tous les textes témoignant pour ou contre la vertu de Louise. Ces documents sont amusants à feuilleter à cause de leur parfaite contradiction. Les uns la défendent de toute faute, les autres l'accusent des pires actes d'immoralité. Il est abso- lument impossible de peser à leur juste poids ces
(1) Notice sur la me Belle-Cordière à Lyon, contenant quelques renset. gnements biographiques sur Louise Labe et Charles Bordes, Lyon J.-M. Barret, 1828.
(2) Cf. U notice sur Louise Labé que M. Cocbard i mise à l'idition de ses oeuvres p»nie chez Durand et Perrin, Lyon 1824.
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documents, et de discerner le vrai du faux. Autant il serait imbécile de refuser tout amant à Louise, comme le veut ce bon Cochard, autant il est peu naturel, par amour du scandale, de transformer cette charmante femme en gouge et en louve ivre. Quoi qu'il en soit, on ne peut citer des noms. Maurice Scève, bossu ou boiteux, et d'ailleurs l'amant de Pernette du Guillet doit être écarté. L'ode de Baif,
O ma belle rebelle
Las, que tu m'est cruelle...
n'est pas une preuve suftisante. Seul Olivier de Magny semble avoir eu des chances et avoir joui des faveurs de ce beau corps. Son rôle en cette, affaire ne fut pas brillant. Il écrivit en 1559 des vers intitulés A sire Aymon où il ridiculise fort malhonnêtement Ennemond Perrin. Etait-ce dépit d'amoureux éconduit, basse vengeance ou nécessité de l'amant qui décoche une flèche au mari avant de quitter le lit de l'épouse ? On ne sait qu'une chose : c'est que cette ode fut une mauvaise action.
Pour bien juger les mœurs de la Belle Cordière, on oublie peut-être trop de se reporter aux concep- tions morales de l'époque où elle vivait. L'idéal de
t
2 6 LOUISE LABÉ
vertu de ce temps était bien différent du nôtre. La virtu italienne est surtout un appel à la puissance, à l'individualisme affranchi de préjugés, à la joie païenne, au libre développement des instincts.
La beauté et l'amour passent alors avant toute autre considération morale, si bien qu'on en vient à glorifier les courtisanes et que, le style lyrique aidant, on vante leur chasteté et leur honnêteté au point que de simples lecteurs peuvent se faire illusion sur la qualité sociale des héroïnes aussi célébrées. Nombre de courtisanes vivaient alors à Lyon où l'argent, rapidement gagné, était plus vite dépensé. Beaucoup d'entre elles étaient fort adroites en l'art de faire des vers et de jouer du luth. Leur instruction était assez étendue et leur conversation digne des plus fins lettrés. Lorsqu'on parle d'elles on dit toujours «la très chaste, très honorable, très vertueuse dame » ce qui déroute un peu. Louise Labé fut-elle du nombre des cortigiana onesîa ? On n'a aucune chance d'éclaircir la question. Le mieux est encore de puiser dans les documents du temps, comme le dit si bien M. Baur, « sans cette galan- terie posthume et cette pruderie sentimentale qui ont si souvent faussé les jugements sur cette femme célèbre ».
On peut semble-t-il alléguer en sa faveur les
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mœurs du temps qui permettent tout écart d'ima- gination et qui acceptent les plus grandes hardiesses de langage. Les admirateurs de Louise ont pu chanter en latin certains détails de sa beauté, comme dans la fameuse pièce imprimée à la suite de ses œuvres, De Abysse Labœx osculis, sans que personne y ait trouvé à redire. Il y a loin, à cette époque, de la parole aux actes.
Il faut aussi noter à sa décharge le rang distingué
O DO
occupé par la Belle Cordière ; l'affection pour son mari qui lui permit d'éditer ses poésies, ce à quoi il n'aurait peut-être pas consenti si ses vers s'étaient adressés à d'autres qu'à des amants imaginaires, comme cela se pratiquait souvent ; son testament du 28 avril 1565 qui respire la plus angélique piété et où nous relevons des dons importants aux œuvres de charité et des legs pour célébrer des messes à son intention ; enfin son amitié pour Clémence de Bourges, jeune fille de haute noblesse, à qui elle dédie son livre. Peut-être n'aurait-elle pas osé se mettre ainsi sous le patronnage de la vertu si elle avait été connue de tous pour une femme de mau- vaise vie. Il est vrai qu'on a reproché à Clémence de Bourges d'avoir été la maîtresse d'un homme que Louise Labé aurait ensuite détourné d'elle à son profit. Mais ceci est une légende. La jeunç
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fiancée de Jean du Peyrat ne lui survécut pas, mourut jeune et entourée du plus haut respect. Ses funérailles furent magnifiques et son corps porté à découvert en grande pompe, le front couronné de fleurs blanches. Quant aux jugements des contem- porains, certains sont évidemment suspects et parmi eux celui de Calvin, ce protestant hypocrite habitué aux calomnies et fertile en injures.
Par contre, presque toutes ces raisons alléguées en faveur de l'honnêteté de la Belle Cordière n'ont rien de probant et pourraient aussi bien être retournées contre elle. C'est ainsi, comme nous l'avons déjà fait pressentir, que le langage des contemporains n'est pas un gage sûr, les épithètes de très chaste, très honnête étant employées à tout propos et s'adressant aussi bien aux courtisanes qu'aux dames respectables. De plus, bon nombre de femmes légères étaient fort pieuses et s'appliquaient à soulager les pauvres et à soutenir des ordres reli- gieux. Enfin des esprits chagrins trouveraient encore à suspecter l'amitié de Louise pour Clémence de Bourges. A l'époque où la Belle Cordière publia ses œuvres de fâcheux bruits commençaient à courir sur ses mœurs, peut-être voulut-elle y couper court en se mettant sous un haut patron- nage, ce qui de sa part était fort habile. — Telles
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sont résumées, assez objectivement croyons-nous, les raisons pour et contre la vertu de cette Ninon du xvi« siècle.
Nous ne savons rien des derniers instants de Louise Labé. Elle vivait depuis plusieurs années dans la retraite de sa propriété de Parcieu, ne venant que peu à Lyon. C'est pourtant à Lyon que « malade et au lit » dans la maison d'habitation de Thomas Fortini, elle dicta son testament. Fortini appartenait à la colonie florentine si importante à Lyon au xvi^ siècle, et nombre de ces riches ban- quiers, «ces messieurs de la nation florentine », avaient du se rencontrer dans les salons de la Belle Cordière. Fortini était presque du même âge que Louise, étant né le 22 septembre 15 13, et semble avoir été son conseiller. Il fut nommé exécuteur testamentaire. Louise lui confie l'administration de ses biens pendant vingt ans, sans aucune reddition de compte. N'ayant pas d'enfants elle élit pour ses héritiers universels Jacques et Pierre Charlin, dits Labé, ses neveux, et leur substitue, s'ils viennent à mourir sans enfants, les pauvres de l'Aumône générale de Lyon, avec défense d'aliéner ses pro- priétés. Heureuse disposition, car Jacques et Pierre Charlin ne survécurent pas longtemps à leur tante, puisque les pauvres des hospices de Lyon étaient
2-
^0 LOUISE LABE
déjà le 4 décembre 1569 en possession des biens qui leur avaient été substitués.
Pernetti place la mort de Louise Labé au mois de mars 1566. M. Brouchoud croit qu'on peut la reculer jusqu'au 25 avril ; enfin sur les registres de Delaforest M. Boy a lu: a Le vendredi jo août ij66, Claude de Bourg, iaiUeur de pierres de Bourg en Bresse, demeurant à Lyon , confesse avoir reçu du sieur Thomas Four lin, présent, la somme de dou\e livres deux sols t., pour avoir taillé une pierre de tombeau et sur icelle fait les escripteaux et armes de la feu dame Loysc Charly pour icelle ériger sur son vase à Parcyeu . n Cette pierre ne nous a pas été conservée.
IV
L'œuvre de Louise Labé est légère. Elle se compose d'une épitre dédicatoire « à Mademoiselle Clémence de Bourges lionnoize », d'un charmant essai dialogué, en prose, intitulé Débat de Folie ci d'Amour, de trois élégies et de vingt-quatre sonnets. Ainsi que cela se pratiquait alors sans vergogne, la Belle Cordière a fait suivre son œuvre des pièces de vers qu'elle avait reçues en hommage, sous -ce titre : Escri\ de divers poètes à la loucnge de Loui^^e Lahc lionnoize.
Nous donnons ici son œuvre poétique entière telle qu'elle parut chez Jean de Tournes en 1555. Quant au Dchal entre Folie et Amour sa longueur nous oblige a le supprimer de cette édition choisie. Et c'est grand dommage, car rien n'est plus gra- cieux que cette fable, h la plus jolie parmi les modernes », au dire de Voltaire, narrée avec entrain et maitrise par la Belle Cordière. Il s'agit de Téter-
32 LOUISE LABÉ
nelle dispute entre la Folie et l'Amour pour connaître qui des deux doit céder le pas à l'autre, dialogue «traité en prose à une époque où tout n'était que ramage d'oiseaux et d'oisillons éveillés par Ronsard et Du Belay », dit un peu sévèrement M. Boy. Mais ce morceau domine tellement son siècle qu'on ne saurait trop l'apprécier. Le style est ferme, très clair, bien différent de celui des contem- porains pétrarquisants, et pour dire le mot, un des chefs d'oeuvre de la langue française. Cette œuvre seule prouverait à quel point Louise Labé diffère de Maurice Scève, dont quelques-uns ont voulu qu'elle ait subi l'influence. Rien de plus faux. A cette époque de formation de la langue on reste étonné de l'aisance du style et de la perfection de la forme. La prose de Rabelais peut seule rivaliser avec celle du Débat.
Quant à ses sonnets on a dit justement qu'ils représentaient en miniature un épisode du poème inépuisable de l'amour. Encore qu'il soit puéril de vouloir chercher dans ces vingt-quatre sonnets les débuts, le nœud et le dénouement d'une crise sentimentale, la pensée se poursuit avec méthode et ordre, et ces poèmes ne semblent plus des mor- ceaux détachés, sans suite entre eux, mais « les assises méthodiquement élevées d'un petit temple réservé au culte d'une divinité. »
NOTICE 33
Celle-ci se nomme Amour. Louise Labé c'est tout l'amour et toute la poésie fervente. Les docu- ments sur cette charmante femme, on l'a vu, manquent ou sont contradictoires. Nous avons précédemment réuni et cité ceux qui donnent le son le plus authentique. Mais qu'avons-nous besoin de confidences ou d'indiscrétions. Le plus précieux d'elle-m.ême, ses trois élégies et ses vingt-quatre sonnets nous restent. Ils demeureront à jamais, car l'humanité est avide d'amour et, s'il nous suffit de dire d'un homme ou d'une femme « ils ont aimé », que dirons-nous d'un poète qui a su enguirlander ses transports de strophes fleuries, tout embaumées d'idéal, et cadencer ses vers au rythme de son cœur ! (i)
T. DE VISAN.
(il du'il me soit permis de remercier ici M. Cantinelli, le distingué bibliothécaire de la ville de Lyon, et M. Desvernay, qui ont bien voulu m'aider de leurs conseils et de leur érudition.
EPITRE DEDICATOIRE
A MADEMOISELLE
CLÉMENCE DE BOVRGES,
LIONNOIZE
STANT le tems venu, Mademoiselle, que les seueres loix des hommes n'em- peschent plus femmes de s'appliquer aus sciences et disciplines ; il me semble que celles qui ont la commodité, doiuent employer cette honneste liberté que notre sexe ha autrefois tant désirée, à icelles aprendre : et montrer aus hommes le tort qu'ils nous faisoient en nous priuant du bien et de l'honneur qui nous en
38 LOUISE LABÉ
pouuoit venir : Et si quelcune paruient en tel degré, que de pouuoir mettre ses concepcions par escrit, le faire songneusement et non dédaigner la gloire, et s'en parer plustot que de chaînes, anneaus, et somptueus habits : lesquels ne pouuons vrayement estimer nôtres, que par usage. Mais l'honneur que la science nous pro- curera, sera entièrement notre : et ne nous pourra estre oté, ne par finesse de larron, ne force d'ennemis, ne longueur de tems. Si j'eusse esté tant fauorisée des Cieus, que d'auoir l'esprit grand assez pour comprendre ce dont il ha ù enuie, ie seruirois en cet endroit plus d'exemple que d'amonicion. Mais ayant passé partie de ma ieunesse à l'exercice de la Musique, et ce qui m'a resté de tems l'ayant trouué court pour la rudesse de mon entendement, et ne pouuant de moymesme satisfaire au bon vouloir que ie porte à notre sexe, de le voir non en beauté seulement, mais en science et en vertu passer ou égaler les hommes : ie ne puis faire autre chose que de prier les vertueuses Dames d'esleuer
ËPITRE DEDlCAtOIRE 39
un peu leurs esprits par dessus leurs quenoilles et fuseaus, et s'employer à faire entendre au monde que si nous sommes faites pour com- mander, si ne deuons nous estre dédaignées pour compagnes tant es afaires domestiques que publiques, de cens qui gouuernent et se font obeïr. En outre la reputacion que notre sexe en receura nous aurons valu au publiq, que les hommes mettront plus de peine et d'estude aus sciences vertueuses, de peur qu'ils n'ayent honte de voir précéder celles, desquelles ils ont pré- tendu estre toujours supérieurs quasi en tout, Pource, nous faut il animer l'une l'autre à si louable entreprise : De laquelle ne deuez eslongner ni espargner votre esprit, ià de plu- sieurs et diuerses grâces accompagné : ny votre ieunesse, et autres faueurs de fortune, pour aquerir cet honneur que les lettres et sciences ont acoutumé porter aux personnes qui les fuyuent. S'il y ha quelque chose recomman- dable après la gloire et l'honneur, le plaisir que l'estude des lettres ha acoutumé donner nous y
4Ô LOUISE LABE
doit chacune inciter : 'qui est autre que les autres recreacions ; desquelles quand on en ha pris tant que l'on veut, on ne se peut vanter d'autre chose, que d'auoir passé le temps. Mais celle de l'estude laisse un contentement de foy^ qui nous demeure plus longuement. Car le passé nous réjouit^ et sert plus que le présent : mais les plaisirs des sentimens se perdent incon- tinent, et ne reuiennent iamais, et en est quel- quefois la mémoire autant fâcheuse, comme les actes ont esté délectables. Dauantage les autres voluptez sont telles, que quelque souuenir qui en vienne, si ne nous peut il remettre en telle disposicion que nous estions : et quelque ima- ginacion forte que nous imprimions en la teste, si connoissons nous bien que ce n'est qu'une ombre du passé qui nous abuse et trompe. Mais quand il auient que mettons par escrit nos concepcions, combien que puis après notre cerueau coure par une infinité d'afaires et inces- samment remue, si est ce que longtems après reprenant nos escrits, nous reuenons au mesme
EPITRE DEDICATOIRE 4I
point, et à la mesme disposicion ou nous estions. Lors nous redouble notre aise : car nous retrouuons le plaisir passé qu'auons ù ou en la matière dont escriuions, ou en Tintelli- gence des sciences ou lors estions adonnez. Et outre ce, le iugement que font nos fécondes concepcions des premières, nous rend un sin- gulier contentement. Ces deus biens qui pro- uiennent d'escrire vous y doiuent inciter, estant asseuree que le premier ne faudra d'acompagner vos escrits, comme il fait tous vos autres actes et façons de viure. Le second sera en vous de le prendre, ou ne l'auoir point : ainsi que ce dont vous escrirez vous contentera. Quant à moy tant en escriuant premièrement ces ieuiiesses que en les reuoyant depuis, ie n'y cherchois autre chose qu'un honneste passetems et moyen de fuir oisiueté : et n'auoy point intencion que personne que moy les dust iamais voir. Mais depuis que quelcuns de mes amis ont trouué moyen de les lire sans que i'en susse rien, et que (ainsi comme aisément nous croyons ceus
42 LOUISE LABE
qui nous louent) ils m'ont fait à croire que les deuois mettre en lumière : ie ne les ay osé esconduire, les menassant ce pendant de leur faire boire la moitié de la honte qui en pro- uiendroit. Et pource que les femmes ne se montrent volontiers en publiq seules, ie vous ay choisie pour me servir de guide, vous dédiant ce petit euure, que ne vous enuoye à autre fin que pour vous acertener du bon vouloir lequel de long tems ie vous porte, et vous inciter et faire venir enuie en voyant ce mien euure rude et mal bâti, d'en mettre en lumière un autre qui soit mieus limé et de meilleure grâce.
Dieu vous maintienne en santé.
Votre humble amie LOUIZE LABE.
De Lion, ce 34. Juillet iS55.
ELEGIES
ELEGIES
y temsqii Aniour, d'hommes et Dieusyainquenr, Faisoit brûler de sa flamme mon cœur, En embrassant de sa cruelle rage
Mon sang, mes os, mon esprit et courage :
Encore lors ie îi'auois la puissance
De lamenter ma peine et ma souffrance.
Eucor Phebus, amis des Lauriers vers,
^'auoit permis que ie fisse des vers :
46 LOUISE LABÉ
^ais meintenant que sa fureur diuine
Remplit d'ardeur ma hardie poitrine,
Chanter méfait, non les hruians tonnerres
De Jupiter, ou les cruelles guerres.
Dont trouble Mars, quand il veut, F Uniuers.
Il rna donné la lyre, qui les vers
Souloit chanter de T Amour Lesbienne ;
Et à ce coup pleurera de la mienne.
O dous archet, adouci moy la voix.
Qui pourrait feindre et aigrir quelquefois,
En recitant tant d'ennuis et douleurs.
Tant de despits, fortu?ies et malheurs.
Trempe V ardeur, dont iadis mon cœur tendre
Fut en brûlant demi réduit en cendre.
le sen défia un piteus souvenir,
Oui me contreint la larme à l'œil venir.
Il m'est a ni s que ie sen les alarmes,
Que premiers i'u d'Amour, ie voy les armes,
Dont il s'arma en venant m' assaillir.
C'estoit tnes yeus, dont tant faisais saillir
T)e traits, à cens qui trop me regardaient^
Et de mon arc asse:;^ nç se gardaient ,
ELEGIES 47
Mais ces miens traits ces miens yeux me défirent
Et de vengeance estre exemple me firent.
Et me moquant, et voyant tun aymer,
L'autre brûler et d'Atnour consommer :
En voyant tant de larmes espandues,
Tant de soiispirs et prières perdues,
le n'aperçu que soudein me vint prendre
Le mesme mal que ie soulois reprendre :
Qui me persa d'une telle furie,
Quencor n'en suis après long tems guérie :
Et meintenant me suis e?icare contreinte
De rafreschir d'une nouuelle pleinte
Mes maus passe:^. Dames, qui les lire:^^,
De mes regrets auec tnoy soupire:^.
Possible, un iour le feray le semblable.
Et ayderay votre voix pitoyable
A vos trauaus et peines raconter,
Au tems perdu vainement lamenter.
Quelque rigueur qui loge en votre cœur,
Amour s'en peut un iour rendre vainqueur.
Et plus aure^ lui esté ennemies,
Pis yous fera, vous sentant asseruies,
4^ LOUISE LABÉ
N'estune:^ point que Ion doiue blâmer
Celles qua fait Cupidon enflanier.
Autres qm nous, nonobstant leur haufesse,
Ont enduré Vamoureuse rudesse :
Leur cœur hautein, leur beauté, leur lignage.
Ne les ont su p-eseruer du seruage
De dur Afnour : les plus nobles esprits
En sont plus fort et plus soudein espris.
Scmiramis, Royne tant renotnmee.
Qui mit en route auecpues son armet
Les noirs squadrons des Ethiopiens,
Et en montrant louable exemple aus siens
Faisoit couler de son furieus branc
Des ennemis les plus braues le sang,
Ayant encor en nie de conquerre
Tous ses voisins, ou leur mener la guerre,
Trouuu Amour, qui si fort la pressa,
Qu armes et loix vaincue elle laissa.
Ne nieritoit sa Royalle grandeur
Au moins auoir un moins fascheus malheur
Quaytmr ssn fils ? Royne de Bahyhnne,
Ou est ton cœur qui es combai resonne ?
ELEGIES 49
Quest deuenu ce fer et cet escu, Dont tu rendais le plus braue veincu ? Ou as tu mis la Marciale creste, Qui obotnbroit le blond or de ta teste ? Ou est l'espée, ou est cette cuirasse. Dont tu rompais des ennemis Vaiidace ? Ou sont fuii tes coursiers furieus, Lesquels trainoient ton char victorieus ? T'a pu si tôt un foible ennemi rompre ? Ha pu si tôt ton cœur viril corrompre. Que le plaisir d'armes plus ne te touche : Mais seulement languis en une couche ? Tu as laissé les aigreurs Marciales, Pour recouurer les douceurs géniales. Ainsi Amour de toy fa estrangee, Qu'on te dirait en nue autre changée, Banques celui lequel d'amour esprise Pleindre me voit, que point il ne tnesprise Mon triste deuil : tAmour peut estre, en brief En son endroit n'aparoitra moins grief. Telle i'ay vu qui aux)it en jeunesse Blâmé Amour : après en sa vieillesse
50 LOUISE LABE
Brûler d'ardeur, et pleindre tendrement L'apre rigueur de son tardif tourment. Alors de fard et eau continuelle Elle essayoit se faire venir belle, Voulant chasser le ridé labourage. Que Vaage avait graué sur son visage. Sur son chef gris elle avait empruntée Quelque perruque, et asse:^ mal antee : Et plus estoit à son gré bien fardée. De son Ami moins estoit regardée : Lequel ailleurs fuiant nen tenait conte, Tant lui semblait laide, et auoit graïuï honte Uestre aymé d'elle. Ainsi la poure vieille Receuoit bien pareille pour pareille. De maints en vain un temps fut réclamée, Ores quelle aynu, elle n'est point aymee. Ainsi Amour prend son plaisir, à faire Que le veuil d'un sait à l'autre contraire. Tel nayme point, qu'une Dame aymera : Tel ayme aussi, qui aytné ne sera : Et entretient, neammins, sa puissance ^t sa rigueur d'une vaine espérance^
II
'vN tel vouloir le serf point m désire La liberté, ou son port le naiiire, ^ Comme lattens, helas, de iour en iotir De toy, Ami, le gracieus retour. La, lauois mis le but de ma douleur, Qui fineroit, quand laurois ce bon heur De te reuoir : mais de la longue atente, Helas, en vain mon désir se lamente. Cruel, Cruel, qui te faisoit promettre Ton brief retour en ta première lettre ? As tu si peu de mémoire de moy. Que de m'fiuoir si tôt rompu la foy f
52 LOUISE LABÉ
Comme ose tu ainsi abuser celle
Qui de tout tems t'a esté si fidelle ?
Or que tu es auprès de ce riuage
Du Tau cornu, peut estre ton courage
S'est embrasé d'une nouuelle flaim.
En me changeant pour prendre une autre Dame
là en oubli imonstamment est mise
La loyauté, que tu m'atwis promise.
S'il est ainsi, et que desia la foy
Et la bonté se retirent de toy :
Il ne me faut emerueiller si ores
Toute pitié tu as perdu encores.
O combien ha de pensée et de creinte.
Tout à par soy, l'ame d'amour estante !
Ores ie croy, vu notre amour passée.
Qu'impossible est, que tu m'aies laissée :
Et de nouuel ta foy ie méfiance.
Et plus quhumeine estitne ta constance.
Tu es, peut estre, en chemin inconnu
Outre ton gré malade retenu.
le croy qu£ non : car tant suis coutumiere
Défaire aus Dieus pour ta santé prière,
ELEGIES 5 3
Que plus cruels que tigres ils seraient, Quand maladie ils te prochasseroient : Bien que ta foie et volage inconstance Mériterait auoir quelque soufrance. Telle est ino foy, qu'elle pourra sufire A te garder d'auoir mal et martire. Celui qui tient au haut Ciel son Empire Ne me saurait, ce nu semble, desdire : Mais quand mes pleurs et larmes entendrait Pour toy prians, son ire il retiendrait. Vay de tout tems vescu en son seruice, Sans me sentir coidpahle d'autre vice Que de f auoir bien soutient en son lieu D'amour forcé, adoré comme Dieu. Desia deusfois depuis le promis terme De ton retour, Phebe ses cornes ferme, Sans que de bonne ou tnauuaise fortune De toy, Ami, i'aye nouuelle aucune. Si toutefois, pour estre énamouré En autre lieu, tu as tant demeuré. Si say ie bien que t'amie nouuelle A peine aura le renom d' estre telle,
54 LOUISE LABE
Soit en beauté, vertu, grâce et faconde,
Comme plusieurs gens sauuans par le monde
M'ont fait à tort, ce croy ie, estre estimée.
Mais qui pourra garder la renommée ?
Non seulement en France suis flàtee.
Et beaucoup plus, que m veus, exaltée.
Ld. terre aussi que Calpe et Tyrenee
Auec la mer tiennent enuironnee.
Du large Rhin les roulantes areines,
Le beau pais auquel or te promeines,
Ont entendu (tu me l'as fait à croire)
Que gens d'esprit 7ne donnent quelque gloire.
Goûte le bien que tant d'hommes désirent :
Detneure au but ou tant d'autres aspirent :
Et croy qu'ailleurs n'en auras une telle.
le ne dy pas qu'elle ne soit plus belle :
Mais que iatimis femtne ne faymera,
Ne plus que nioy d'honneur te portera.
Maints grans Signeurs à mon amour prétendent.
Et à me plaire et seruir prêts se roulent.
Joutes et ieus, maintes belles deuises
En ma faueur sont par eux entreprises :
ELEGIES 55
Et néanmoins tant peu te m en soucie,
Que seulement ne les en remercie :
Tu es tout seul, tout mon mal et mon bien :
Avec toy tout, et saus toy ie nay rien :
Et n ayant rien qui plaise à ma pensée.
De tout plaisir me Ireuue délaissée.
Et pour plaisir, ennui saisir me vient.
Le regretter et plorer me conuient,
Et sur ce point entre en tel desconfort,
Que mile fois ie souhaite la mort.
Ainsi, Ami, ton absence lointeim
Depuis deus mois tne tient en cette peine.
Ne viuant pas, mais mourant d'un %Amour .
Lequel m'occit dix mile fois le iour.
Reuien donq tôt, si tu as quelque enuie
De me reuoir encor' un coup en vie.
Et si la mort auant ton arriuee
Ha de nwn corps l'aymante ame priuee.
Au moins un iour vien, habillé de deuil,
Enuironner le tour de mon cercueil.
Que plust à Dieu que lors fussent trouue^
Ces quatre vers en blanc marbre engrarn:^.
5^ LOUISE LABÉ
Par toy, Amy, tant vesqvi enflammée ov'en langvissant par fev s vis consvmmee, ovi covve encor sovs ma cendre embrazee, Si ne la rends de tes plevrs apaizee.
TII
^^^^VAND VOUS lire^, ô 'Dames Lionnoises,
vi^^^i Ces Diiens escrits pleins d'amoureuses noises,
^§J^^ Quand mes regrets, ennuis, despirs et larmes
M'orrei chanter en pitoyables carmes,
Ne veuille:^ point condamner ma simplesse,
Et ieune erreur de ina joie ieunesse,
Si c'est erreur : mais qui desscnis les Cieus
Se peut vanter de nestre vicieus ?
L'un nest content de sa sorte de vie,
Et toujours porte à ses voisins enuie :
L'un forcenant de voir la paix en terre,
Par tous moyens tache y mettre la guerre :
58 LOUISE LABÉ
Vautre croyant pureté estre vice,
A autre Dieu quOr, ne fait sacrifice :
L autre sa foy pariure il cmploira
A deceuoir quelcun qui le croira :
L'un en menta^it de sa langue le~arde.
Mile hrocars sur l'un et Pautre darde :
le ne suis point sous ces planettes me,
Oui mussent pu tant faire infortunée.
Onques ne fut nwn œil marri, de voir
Chéi mon voisin mieux que che^ moi pleuuoir.
Onq ne mis noise ou discord entre amis :
A faire gain iamais ne me samnis.
Mentir, tromper, et abuser autrui.
Tant m'a desplu, que mesdire de lui.
Mais si en moy rien y ha d'imparfait,
Ou on Manu Anwur : c'est lui seul qui l'a fait.
Sur mon verd aage en ses laqs il me prit.
Lors quexerçoi mon corps et mon esprit
En mile et mile euures ingénieuses.
Qu'en peu de tems me rendit ennuituses.
Pour bien sauoir aiiec l'esguille peindre
l'eusse entrepris la renommée esteindre
ELEGIES 59
De celle là, qui plus docte que sage, Aiiec Pallas comparait son ouvrage. Oui must vu lors en armes fiere aller, Porter la lance et hois faire voler, Le deuoir faire en l'estour furieiis. Piquer, volter le chenal glorieus, Pour Bradamante, ou la haute Marphise, Seur de Roger, il must, possible, prise. Mais quoy ? Amour ne put longuernent voir. Mon cœur naymant que Mars et le sauoir : En me voulant donner autre souci. En souriant, il me disoit ainsi : Tu tenses donq, ô Lionnaise Dame, Pouuoir fuir par ce moyen ma famé : Mais non feras, lai subiugué les Dieus Es bas Enfers, en la Mer et es Cieus. Et penses tu que naye tel pouuoir Sur les humeins, de leur faire savoir Qu'il n'y ha rien qui de ma main eschape ? Plus fort se pense et plus tôt ie le frape. De me blâmer quelquefois tu n'as honte. En te fiant en Mars, dont tu fais conte :
6o LOUISE LABÉ
Mais meintenant, voy si pour persister En le sinuant me pourras résister. Ainsi parlait, et tout eschaufé d'ire Hors de sa trousse une sagettc il tire, Et décochant de son extrême force, Droit la tira contre ma tendre escorce : Foibk harnais, pour bien couurir le coeur, Contre l'Archer qui toujours est vainqueur. Jm hresche faite, entre Amour en la place. Dont le repos premieremeut il chasse : Et de trauail qui me donne sans cesse, Boire, îuanger, et dormir ne me laisse. Il ne me chaut de soleil ne d'ombrage : le nay qu Amour et feu en mon courage. Qui me desguise, et fait autre paroitre. Tant que ne peu moymesme me connoitre. le nauois vu encore sei^e Hivers, Lors que i'entray en ces ennuis diuers : Et là voici le trei:^iéme Esté Que mon cœur fut par Amour ar resté. Le iems met fin au s hautes Pyramides, Le tems met fin ans fonteines humides :
ELEGIES 61
Il ne pardonne aus hraues Cotisées,
Il met à fin les viles plus prisées :
Finir aussi il ha acoutumé
Le feu d'Amour tant soit il allumé :
Mais, las ! en moy il setnble qu'il augmente
Avec le tems, et que plus rm tourmente.
Paris ayma Oenone ardamment,
Mais son amour ne dura longuement :
Medee fut aymee de lason,
Oui tôt après la mit hors sa maison.
Si meritoient elles estre estimées,
Et pour aymer leurs uimis, estre aymees.
S' estant aymé on peut Amour laisser,
N'est il raison, ne l'estant, se lasser ?
N'est il raison te prier de permettre.
Amour, que puisse à mes tourmens fiii mettre ?
Ne permets point que de Mort face espreuue.
Et plus que toy pitoyable la treuue :
Mais si tu veus que tayme iusqu'au bout,
Fay que celui que i estime mon tout.
Qui seul me peut faire plorer et rire,
Et pour lequel si sonnent te soupire,
4
é2
LOUISE LABE
Sente en ses os, en son sang, en son ame. Ou plus ardente, ou bien égale flame Alors ton faix plus aisé me sera, Quand auec moy quelcun h portera.
FIN DES ELEGIES.
SONNETS
SONNETS. — I.
Non haiiria Ulysse o qualunqualîro niai P'm accorto fù, da quel diuino aspetto Pien di gratie, d'honor et di rispetto Sperato quai i sento affanni e guai.
Pur, Amor, co i begli ochi tu fait' hai Tal piaga dentro al niio innocente petto, Di cibo et di cal or gia tuo ricetto, Che rimedio non ve si tu nol' dai.
O forte dura, che mi fa esser qtiak Punta d'un Scorpio, et domandar riparo Contr el velen d'aW istesso animale.
Chieggio li fol' ancida questa noia, Non estingua el désir a me si caro, Che niancar non potra ch' i non mi muoia.
()(, LOUISE LABÉ
II
O heaus ycus bruns, ô regards destournez, O chaus soupirs, ô larmes espandms, O noires nuits vainement s attendues, O jours luisans vainement retourne:^ :
O tristes pleins, ô désirs obstine:^, O tems perdu, ô peines despendues, 0 mile morts en mile rets tendues, O pires maus contre moi destine:^.
O ris, ô front, cheueus, bras, mains et doits O lut pleintif, viole, archet et vois : Tant de flambeaus pour ardre une femelle !
De toy me plein, que tant de feus portant. En tant d'endrois d'iceus mon cœur tatant, J^'çn est sur toy volé qucï(jue estiuçfJk,
SONNETS 67
III
0 longs désirs, ô espérances vaines, Tristes soupirs et larmes coutumieres A engendrer de nwy maintes riuieres, Dont mes deiis yens sont sources et fontaines :
0 cruauté:^ ô durte:^^ inhumaines, Piteus regars des célestes lumières : Du cœur transi ô passions premières. Estimez-vous croître encore mes peines ?
Quencor Amour sur moy son arc essaie.
Que nouueaus feus me gette et nouueaus dars ;
Qu'il se despite, et pis qu'il pourra face :
Car ie suis tant nauree en toutes part. Que plus en moy une nouuelle plaie. Pour m'enipirer ne pourroit trou uer place,
68 LOUISE LABÉ
mi
Depuis qu'Amour cruel empoisonna Premieretnent de son feu ma poitrine, Tousiours bruJay de sa fureur diuine, Qui un seul tour mon cœur n'abandonna.
Quelque trauail, dont asse:^ me donna, Quelque menasse et procheine ruine: Quelque penser de mort qui tout termine, De rien mon cœur ardent ne s'estonna.
Tant plus qu'Amour nous vient fort assaillir.
Plus il nous fait iws forces recueillir.
Et tousiours frais en ses conéats fait estre :
Mais ce n'est pas qu'en rien nous fauorise, Cil qui les Dieus et les hommes mesprise : Mais pour plus fort contre les fors paroitre.
SONNETS ^9
V
Clere Venus, qui erres par les Cieus, Entens ma voix qui en pleins chantera, Tant que ta face au haut du Ciel luira. Son long trauail et souci ennuieus.
Mon œil veillant satendrira bien miens, Et plus de pleurs te voyant gettera. Mieus mon lit mol de larmes baignera, De ses trauaus voyant témoins tes yeus.
Donq des humains sont les lasse:^ esprits De dous repos et de somrneil espris. l'endure mal tant que le Soleil luit :
Et quand ie suis quasi toute cassée. Et que me fuis mise en mon lit lassée. Crier me faut mon mal toute la nuit.
70 LOUISE LABÉ
VI
Dens ou trois fois bienhcurcus le retour De ce cler Astre, et plus heureus encore Ce que son œil de regarder honore. Que celle là reccuroit un bon iour,
Quelle pourrait se vanter d'un bon tour Qui baiseroit le plus beau don de Flore, Le mieus sentant que ianiais vid Aurore, Et y fcroit sur ses leures seiour !
C'est à moi seule à qui ce bien est du. Pour tant de pleurs et tant de tems perdu Mais le voyant, tant luy feray de feste.
Tant emploiray de nies yeus le poumir. Pour dessus lui plus de crédit auoir. Qu'en peu de tems feroy grande conqueste.
SONNETS 7 I
VII
^
On voit mourir toute chose animée, Lors que du corps l'ame sutilepart : le suis le corps, toy la meilleure part : Ou es tu donq, ô ame bien aymee ?
Ne me laisse:;^ pas si long tcms pamec, Pour me sauner après viendrois trop tard. Las, ne mets point ton corps en ce ha:(art Rens lui sa part et moitié estimée.
O^aisfais, Ami, que ne soit dangereuse Cette rencontre et reuuë amoureuse, L'acompagnant, non de seuerite.
Non de rigueur : mais de grâce amiable. Qui doucement me rende ta beauté, ladis cruelle, à présent favorable.
72 LOUISE LABE
VIII
le vis, ie meurs : ie me brûle et me noyé, l'ay chaut estreme en endurant froidure : La vie m'est et trop molle et trop dure, l'ay grans ennuis entrejmski de ioye :
Tout à un coup ie ris et ie larmoyé, Et en plaisir maint grief tourment i' endure Mon bien s'en va, et à iamais il dure : Tout en un coup ie seiche et ie verdoyé.
Ainsi Amour inconstamment me mdne : Et quand ie pense avoir plus de douleur, Sans y penser ie me trcuuc hors de peine.
Puis quand ie croy ma ioye cslrc ccrteine, Et estre au haut de mo?i désiré heur. Il me remet en mon premier malheur.
SOX'NETS
/ :>
IX
Tout aussi toi que ie coimnence à prendre Dens le tnol Ut le repos désiré, Mon triste esprit hors de nioy retiré S'en va vers toy incontinent se rendre.
Lors tnest auis que dedens imn sein tendre le tiens le bien, ou i'ay tant aspiré. Et pour lequel i'ay si haut souspiré; Que de sanglots ay sonnent cuidé fendre.
0 dous sommeil, ô nuit à moy heureuse ! Plaisant repos, plein de tranquilitc. Continue'^ toutes les nui:(^ mon songe :
Et si iamais ma poure ame amoureuse
Ne doit auoir de bien en vérité.
Faites au moins qu'elie en ait en mensonge.
LOUISE LABE
X
Quand i'aperçoy ton blond chef couronné Uiin laurier verd, faire un Lut si bien pleindre, Que tu ponrrois à te suiure contreindre Arbres et rocs : quand ie te vois orné,
Et de vertus dix mile enuirofiné, Au chef d'honneur plus haut que nul atteindre : Et des plus hauts les louenges estcindre : Lors dit nwn cœur en soy passiœiné :
Tant de vertus qui le fojit estre aynié,
Qui de chacun te font estre estimé,
Ne te pourroient aussi bien faire aymer ?
Et aioutant à ta vertu louable Ce nom encor de m' estre pitoyable. De mon amour doucement t'enfiamer ?
SONNETS
75
XI
O dons regars, â yens pleins de beau te, Petis iardins, pleins de fleurs amoureuses Ou sont d'Amour les flesches dangereuses, Tant à vous voir mon œil s'est arresté !
0 cœur félon, ô rude cruauté. Tant tu me tiens de façons rigoureuses, Tant i'ay coulé de larmes langoureuses. Sentant l'ardeur de mon cœur tourmenté I
Donques, mes yeus, tant de plaisir auei. Tant de bons tours par ses yeux receue^ : Mais toy, mon cœur, plus les vois s'y complaire,
Plus tu langui^, plus en as d-e souci,
Or deuine:^ si ie suis aise aussi.
Sentant mon œil estre à mon cœur contraire.
7^ LOUISE LAsé
xn
Liif, compagnon de ma calamité, De mes soupirs témoin irréprochable, De mes ennuis controlleur véritable, Tu as sonnent aiiec moy lamenté :
Et tant le pleur piteus t'a molesté, Que commençant quelque son délectable. Tu le rendais tout soudein lamentable, Feingnant le ton que plein auoit chanté.
Et si tu veux efforcer au contraire. Tu te dtstens et si nu contreins taire : ïKais me voyant tendrement soupirer,
Donnant fauueur à ma tant triste pleinte. En nu's ennuis me plaire suis contreinte, Et dons mal douce fin espérer.
SONNETS 77
XIII
Oh si i'estois en ce beau sein rauie
De celui là pour lequel vois mourant :
Si auec lui viure le demeurant
De mes cours iours ne m'empeschoil enuie,
Sf m'acollant me disoit, chère Amie, Contentons nous l'un l'autre, s'asseurant Que ta tempeste, Euripe, ne Courant 'Nje nous pourra desioindre en notre vie :
Si de mes bras le tenant acollé. Comme du Lierre est l'arbre encercelé, La mort venait, de mon aise enuieuse :
Lors que souef il me baiseroit.
Et mon esprit sur ses leures fuiroit,
Bien ie mourrais, plus que viuante, heureuse.
78 LOUISE LABÉ
XIIII
Tant que mes yens pourront larmes espandre, A leur passé aiicc toy regretter ; Et qu'ans sanglots et soupirs résister Pourra ma voix, et un peu faire entendre :
Tant que ma main pourra les cordes tendre Du fnignart Lut, pour ces grâces chanter : Tant que l'esprit se voudra contenter De ne vouloir rien fors que toy comprendre :
le ne souhaitte encore point mourir. Mais quand mes yens ie sentiray tarir. Ma voix cassée, et ma main impuissante,
Et mon esprit en ce mortel seiour
Ne ponuant plus montrer signe d'amante :
Priray la mort fwircir mon pins ckr iour.
SONNETS 79
XV
Pour le retour du Soleil honorer,
Le Zéphir, l'air serein lui apareille :
Et du sommeil l'eau l'eau et la terre esueille,
Qui les gardoit l'une de murmurer
En dous coulant, l'autre de se parer De mainte fleur de couleur nompareille. la les oiseaus es arbres font Jiicrueillc, Et ans passans font l'ennui iiwderer :
Les Nymfes ia en mille ieus s'eshatent
Au cler de Lune, et dansans l'herbe abate?it :
Feus tu Zéphir de ton heur me donner.
Et que par toy toute me renouuelle ? Fay mon Soleil deuers nioy retourner, Et tu verras s'il ne me rend plus belle.
80 LOUISE LABÉ
XVI
Apres qu'un tems la gresk et le tonnerre Ont le haut mont de Caucase batu. Le beau iotir vient, de lueur reiiétu. Qiia7id Phebus ha son cerne fait en terre,
Et l'Océan il regaigne à grand erre Sa seur se montre avec son chef pointu. Quand quelque tems le Parthe ha combatu, Il prent la fuite et son arc il desserre.
Un tems t'ay vu et consolé pleintif, Et dcfiant de mon feu peu hatif : Mais maintenant pue tu m'as embrassée.
Et fuis au point auquel tu nu voulois. Tu as ta jlame en quelque eau arrosée, Et es plus fr oit questre ie ne soulois.
SONNETS
XVII
le fuis la vile, et temples et tous liens, Esquels prenant plaisir à fouir pldndre, Tupeus, et non sans force, me contreindre De te donner ce questitnois le mieus.
Masques, tournois, ieus me sont ennuieus, Et rien sans toy de beau ne me puis peindre Tant que tachant à u désir esteindre. Et un nouuel obget faire à mes yeus,
Et des pensers amoureus me distraire, Des bois espais sui le plus solitaire : Mais i'aperçoy, ayant erré maint tour.
Que si ie veus de toy estre deliure,
Il me conuient hors de moymesme viure.
Ou fais encor que loin sois en stiour.
82 LOUISE LABÉ
XVIII
Baise m'encor, rehaisc moy et baise : Donne m'en un de tes plus sauoureus, Donne m'en un de tes plus amourcus : le t'en rendray quatre plus chaus que braise.
Las, te pleins tu? ça que ce mal t apaise. En t'en donnant dix autres doucereus. Ainsi meslans nos baisers tant heureus louissons nous l'un de l'antre à notre aise.
Lors double vie à chacun en suiura. Chacun en soy et son ami viura. Permets m' Amour penser quelque folie :
Tousiours suis mal, viuant discrettetnent Et ne me puis donner contentement. Si hors de moy ne fay quelque saillie.
SONNETS 83
XIX
Diane estaîit en l'cspesseur d'un bois, Apres avoir mainte beste assenée. Prenait le frais, de Nynfes couronnée: Fallois resuant comme fay maintefois,
Sans y penser : quand i'ouy une vois. Qui m'apela, disant, Nymfe estonnee. Que ne t'es tu vers Diane tournée ? Et me voyant sans arc et sans carquois.
Qu'as tu troiiué, ô campagne, en ta voye. Qui de ton arc et flesche ait fait proye ? le m'animay, respons ie, à un passant,
Et lui getay en vain toutes mes flesches Et l'arc après : mais lui les ramassant Et les tirant me fit cent et cent bresches.
84 LOUISE LABÉ
XX
Prédit me fut, que démit fermement Un iour aymer celui dont la figure Me fut descrite : et sans autre peinture Le reconnu quand vy premièrement :
Puis le voyant aymer fatalement, Pitié ie pris de sa triste auenture : Et tellenunt ieforçay ma nature. Qu'autant que lui aymay ardentemcnt.
Qui nust pensé qu'en famur deuoit croitre Ce que le Ciel et destins firent naitre ? Mais quand ie voy si nubileus aprets.
Vents si cruels et tant horrible orage : le croy qu'estaient les infernaus arrêts, Qui de si loin m' ourdissaient ce naufrage.
SONNETS 85
XXI
Quelle grandeur rend l'homme vénérable ? Quelle grosseur? quel poil ? quelle couleur ? Qui est des yeux le plus emmieleur ? Qui fait plus tôt une playe incurable ?
Quel chant est plus à l'homme conuenable ? Qui plus pénètre en chantant sa douleur ? Qui un dous lut fait encore meilleur ? Quel naturel est le plus amiable ?
le ne voudrais le dire assurément, Ayant Amour forcé mon ingénient : V\iCais iefay bien et de tant ie m'assure,
Que tout le beau que Ion pour r oit choisir. Et que tout l'art qui ayde la Nature, Ne me sauraient acroitre mon désir.
°^ LOUISE LABÉ
XXII
Luisant Soleil, que tu es bien heureus. De voir tousiours de t'Amie la face : ' Et toy, sa seur, qii'Endimion embrasse, Tant te repais de miel amoureus.
Mars voit Venus : Mercure auentureus De Ciel en Ciel, de lieu en lieu se glasse : Et Jupiter remarque en mainte place Ses premiers ans plus gays et chaleureus.
Voilà du Ciel la puissante harmonie.
Qui les esprits diuins ensemble lie :
Mais s'ils auoient ce qu'ils ayment lointein.
Leur harmonie et ordre irreuocable
Se tourneroit en erreur variable.
Et comme vwy travailkroient en vain..
SONNETS 87
XXIII
Las ! que me sert, que si parfaitement Louas iadis et ma tresse daree, Et de mes yeux la beauté comparée A deus Soleils, dont Amour finement
Tira les trets cause^ de ton tourment ? Ou estes vous, pleurs de peu de durée? Et Mort par qui deuoit estre honorée Ta ferme amour et itéré serinent ?
Donques cestoit le but de ta malice De m'asseruir sous ombre de seruice ? Pardonne moy Ami, à cette fois.
Estant outrée et de despit et d\ire :
Mais ie m'assure, quelque part que tu sois,
Qu'autant que moy tu soufres de martire.
88 LOUISE LABÉ
xxiin
Ne reprenez, Dames, si i'ay aymé : Si i'ay senti mile torches ardantes, Mile tratiaus, mile douleurs nwdantes : Si en pleurant i'ay mon temps consumé,
Las que mon nom n'en soit par vous blâmé. Si i'ai failli, les peines sont présentes. N'aigrisse^ point leurs pointes viokntes : Mais estime^ qu'Amour, à point nommé.
Sans votre ardeur d'un Vulcan excuser,
Sans la beauté d'Adonis acuser,
Pourra, s'il veut, plus vous rendre amoureuses.
En ayant moins que moy d'ocasion,
Et plus d'estrange et forte passion.
Et gardes^ vous d'estre plus malheureuses.
FIN DES EVVRES DE LOVÏZE LABE I.IONNOIZl
ESCRIZ DE mVBJiS POETES
A LA LOVENGE DE LOVIZE LABÉ LIONNOIZE
\
ESCRIZ DE DIVERS POETES
A LA LOVENGE DE LOVIZE LABE LIONNOIZE
EN GRACE DV DIALOGVE D AMOVR ET DE FOLIE, EVVRE DE D. LOVÏSE LABE LIONNOIZE (l)
Amour est donq pure incUnacion Du Ciel en nous, mais non nécessitante : Ou bien vertu, qui nos cœurs impuissante A résister contre son accion ?
(i) Ode attribuée à Maurice Shie dont la devise mystiriewse non si non \t, se relroiivç dans k MicioçosiRÇ,
92 LOUISE LABÉ
C'est dotiq de famé une alieracion De vain désir légèrement naissante, A tout obiet de V espoir périssante, Comme muahle à toute passion ?
la ne soit crû, que la douce folie
D'un libre Amant d'ardeur libre amollie
Perde son miel en si amer Absynthe,
Puis que Ion voit un esprit si gentil Se recmiurer de ce Chaos sutil, Ou de Raison la Loy se laberynte.
NON SI NON LA.
ESCRIZ DE DIVERS POETES 93
DES BEAVTEZ DE D. L. L. (l)
Ouprint V enfant Amour le fin or qui dora En mile crespillons ta teste blondissante? En quel iardin print il la ro:{e rougissante Qui le lii argenté de ton teint colora ?
La douce granité qui ton front honora, Les deus rubis balais de ta bouche alléchante. Et les rais de cet œil que doucement tn enchante. En quel lieu les print il quand il t'en décora ?
D'où print Amour encor ces filets et ces lesses, Ces haims et ces apasts qtie sans fin tu me dresses Soit parlant ou riant en guignant de tes yeux ?
Il print d'Herme, de Cypre, et du sein de V Aurore,
Des rayons du Soleil, et des Grâces encore.
Ces attraits et ces dons, pour prendre hommes et Dieus.
(i; Sonnet t Olivier de Uagn^,
94 LOUISE LABE
A ELLE MESME(!)
0 ma belle rebelle, Las que tu ni es cruelle! Ou quand d^un dous soic^ris Larron de mes esprits, Ou quand d'une parole Si mignardenient mole. Ou quand diin regard d'yeus Traytrenient gracieus, Ou quand d'un petit geste Non autre que céleste. En amoureuse ardeur Tu tn enflammes le cœur.
0 ma belle rebelle, Las que tu tues cruelle ! Quand la cuisante ardeur Qui me brûle le cœur,
•
(l; OdidtBuij,
ÊSCRIZ DE DIVERS POETES 95
Veut que ie te demande A sa brûlure grande Vn rafrechissement D'un baiser seuleme7it.
O ma belle rebelle, One tu serais cruelle! Si d'un petit baiser, Ne voulais V apaiser, Au lieu d'alegement Acroissant mon tourment. Me puisse-ie un iour, dure, Vanger de cette iniure : Mon petit maitre Amour Te puisse outrer un iour Et pour moy langoureuse. Il te face amoureuse. Comme il nia langoureus Pour toy fait amoureus. Alors que ma vengeance Tu auras connaissance Que vaut d'un dons baiser Vn Amant refuser.
$6 LOUISE LABÉ
Et si te te le donne, Ma gentile mignonne, Quand plus foi't le désir En viendrait te saisir : Lors après ma vengeance. Tu aurais connaissance Quel bien fait, d'un baiser L Amant ne refuser.
TABLE
TABLE
P«g6S
Notice 9
A Mademoiselle Clémence de Bourges ....'. 37
Elégie I
Au tems qu'Amour, d'hommes et Dieus vainqueur 45
Elégie II
D'un tel vouloir le serf point ne désire .... 51
Elégie III
Quand vous lirez, ô Dames Lionnoises. ... 57
^^0 LOUISE LABÉ
Sonnets
I Non hauria Ulysse o qualunqu'altro mai
jj O beaux yeux bruns, ô regars destouraez
in O longs désirs, ô espérances vaines.
IIIl Depuis qu'Amour cruel empoisonna
V Clerc Venus, qui erres par les Cieus \
VI Deus ou trois fois bienheureus le retour
VII On voit mourir toute chose animée
VIII le vis, ie meurs : ie me brûle et me noyé iX Tout aussi tôt que ie commence à prendre A Quand i'aperçoy ton blond chef couronné
XI O dous regars, ô yeus pleins de beauté
XII Lut, compagnon de ma calamité
XIII Oh si i'estois en ce beau sein rauie! XIIII Tant que mes yeus pourront larmes espandri
XV Pour le retour du Soleil honorer
XVI Apres qu'un tems la gresle et le tonnerre
XVII le fuis la vile, et temples, et tous lieus.
XVIII Baise m'encor, rebaise moy et baise
XIX Diane estant en l'espesseur d'un bois .
XX Prédit me fut, que deuois fermement \
XXI Quelle grandeur rend l'homme vénérable
XXII Luisant Soleil, que tu es bien heureus .
XXIII Las I que me sert, que si parfaitement. XXIIII Ne reprenez, Dames, si i'ay aymé .
ElBUOTHrCA
6s 66 67 68
69 70
7i 72
73 74 75 76
77
78
79
80
81
82
85 84 8S 86
87 88
TABLE
lOI
Escri:( de diuers Poètes
En grâce dv dialogve d'Amovr et de Folie
Des Beavtez de D. L. L
A elle mesme
91 95 94
\
LE
Imprimerie Lucien Volle Privas.
*/ -^ JL
2
60
La Bibliothèque
Université d'Ottawa
Echéonce
05 ilAR
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uoesjuiLm!
The Library
University of Ottawo
Date due
a39Q03 002 1 63995b
CE PQ 1628 ,L2A17 1910 COO LABE. LOU ACC# 1387209
ISE LES ELEGIE
Y
PETITE PJRLinTffÈnnE SflRANN^
uoïc, is, miE oc stvncs.
Cha(|ue ouvrage forme un voluoe petit iD-18 raisin à 2 fr.
PIERRE CORNEILLE Galanteries, précédées d'une Vie amoureuse de Pierre Corneille p.ir E. Sansot-Orlanm).
M--^ DESHOULIÈRES Les Amours de Grisette. Notice par E. Sansot-Oki.anp.
VOITURE Stances. Sonnets. Rondeaux et Chansons, choisi? et précédés d'une noiice par Alexandre Arnoux. Portrait-frontispice.
MARUUIS DE MONTAUSIER La Guirlande de Julie, augmentée de pièces nouvelles et inédites. Notice de Gaignières et de Bures. Notes et éclaircisse- ments par AD. VAN Bever. Portrait-frontispice.
JOACHIM DU BELLAY Les Regret». Introduction, notes et index par ROBERT de j Beaiplan. agrégé de l'Université. ('
.MADELEINE DE SCUDÉRV ;
Histoire de la Poésie françoise jusques à Henry quatrième. ' Introduction, notes et index, par G. MiCHAUT, docteur es-lettres. Portrait-frontispice.
M"'= de TE.NCIN Mémoires du Comte de Comminge. Introduction par G. Potez, doctiiir ès-leit'-es. Ponrait-froniispice.
LE PARNASSE ROYAL Poèmes choisis des monarques françois et autres person- nages royaux, recueillis et commentés par Gauthier Fekkièkes.
DOUX.MÉNIL Mémoires pour servir à l'histoire de la Vie de M»« de l'Enclos, i
.\\ertisîement et notes, par G. -M. Naiv, docteur ès-lettres. i
FRANÇOIS DE .MAYNARD Œuvres poétiques choisies. Notice par Pierre Fo.ns. Portrait- frontispice.
nON'ORE DURFE j
Œuvres poétiques choisies, et précédés d'une introduction par i
G. MlCHAi/T. maître de coniérences à la Faculté des lettres de ,
Paris. Portraii-froniispice. J
PARADIS DE .MONCRIF j
Histoire des Chats. Edition ornée d'un portrait frontispice avec une introduction par GEORGES GraHPE.
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