-ry (-' : i ^ ^^ i^Tl' ^' M.^. *'*W«* -ï. >. 1 ^,*^, J .<5^4 1^ ^-^^V'" ■ ^*À ^■^'is 1 1^' 1 ^^H^^ Ih ^er^ 2. P. '^ETCALF TRAITÉ ÉLÉMENTAIRE D'ENTOMOLOGIE Le Traité d'entomologie, tome II, comprendra les Orthoptères, Névro- PTÈRES, Hyménoptères, Lépidoptères, Hémiptères,- Diptères, et les ordre» SATELLITES. OUVRAGES DU MEME AUTEUR. Péron, naturaliste voyageur aux terres auMtralen, ouvragt couronné par la Société d'émulation de l'Allier et publié sous ses auspices. Paris, 1857. Motlces entoinologi<|uc!9. :i'ouvelle!S Aoticc» cntomoiogiciues , 1'^'^ et 2<= série. Paris, 1859, 1866, 1869. (Extraits des Annales de la Société entomo- logique de France.) lies Auxiliaires du Ver ù, solo. Paris, 186/i. lies Insectes utiles et nuisibles tk l'Exposition universelle. Paris, 1867. Insectologie agricole (Direction de 1'), 3^ année. Paris, 1869. Mémoires et IVotes au Bulletin de la Société zoologique d'acclimatalion. Etudes sur la chaleur libre dégagée par les aniiuauv invertébrés, et spécialcuicnt par les Insectes. Thèse pour le doctorat es sciences. Paris, 1869. lies Métamorphoses des Insectes, o<= édition. Paris, 187Ûi PABIS. — IMPHIMBRIE BE E. UAnTIMET; RUE 11IG^^0^, 3. LES INSECTES TRAITÉ ÉLÉMENTAIRE D'ENTOMOLOGIE COMPRENANT l'histoire des espèces utiles et de leurs produits des espèces nuisibles et des moyens de les détruire L'Etude des métamorphoses et des mœurs LES procédés de CHASSE ET DE CONSERVATION MAURICE GIRARD Docteur es sciences naturelles Professeur de sciences physiques et naturelles au Collège municipal Rollin Ancien président de la Société Eutomologique de France Membre du Conseil de la Société zoologique d'aeelimatation, etc. Avec plnnchcH colocicei INTRODUCTION — COLEOPTERES PARIS LIBRAIRIE J.-B. BAILLIÈRE et FILS RUE HAUTEPEUILLE, 19, PRÈS DU BOULEVARD SAINT-GERMAIN 1873 Tous droits réservés AVERTISSEMENT DE L'AUTEUR Il existe en France deux espèces de livres consacrés à l'Ento- mologie ou science des Insectes en général. Les uns sont uniquement destinés aux études théoriques. Ce sont, pour la plupart, des ouvrages très-étendus, formant de nombreux volumes, s'occupant d'une manière minutieuse des caractères descriptifs. Ils sont consultés, bien plutôt qu'on ne les lit, par les amateurs de collections. Dans tous ces traités, les plus élémentaires comme les plus développés, les mœurs, la distribution géographique, l'utilité ou les méfaits des Insectes, sont à peine indiqués en quelques mots. D'autre part, certains livres, bien plus souvent des mémoires insérés dans des revues périodiques, des journaux agricoles, font connaître les Insectes utiles, et plus fréquemment, c'est une triste nécessité, les dévastations parfois terribles causées par de trop nombreuses espèces de cette classe, la plus mul- tipliée du Règne animal. Ces travaux sont souvent confus, et même peu exacts au point de vue des déterminations scien- tifiques. Les Insectes y sont passés en revue sans ordre mé- thodique, suivant qu'ils nuisent, par exemple, à un végétal déterminé ; dans les travaux de ce genre faits par les entomo- VI AVEirnSSF.MlNT DK f, AUTEl I^. logistes les plus distingués, on suppose toujours que le lecteur connaît les principes généraux de l'Entomologie et la classifica- tion. A cet ordre d'ouvrages appartiennent, parmi les ouvrages français : les lîîsectes nuisibles de MM. Goureau, Géhin, etc., les mémoires de M. E. Perris sur les Insectes du Pin maritime, la Zoologie agricole de M. E. Blanchard, V Essai sur r Entomo- logie horticole de M. Boisduval, etc. J'ai cherché à réunir dans un ouvrage unique les avantages de ces deux systèmes d'étude si distincts. La classification naturelle forme la partie fondamentale du Traité d'Entomologie. J'ai soin, à mesure que les principaux genrv';'S se présentent à leur place méthodique, d'insister avec détail sur toutes les applications. Les Insectes utiles sont le sujet d'un développement étendu. Les espèces les plus nuisibles sont suivies dans leurs mœurs, de manière à en déduire les seuls procédés rationnels et effi- caces de destruction. J'ai fait connaître tous les moyens de ce genre essayés ou proposés, car c'est ce qui intéresse surtout l'agriculteur et l'horticulteur, et, souvent aussi, les industriels et les ingénieurs, pour la conservation, soit des matières pre- mières, soit des produits manufacturés. En outre les espèces curieuses au point de vue de la biologie, de l'anatomie, de l'habitat, etc., figurent dans l'ouvrage, et j'ai eu soin de réunir les meilleures descriptions des métamorphoses dans tous les ordres. Ce Traité cV Entomologie, conservant la forme didactique, peut être utile aux jeunes gens qui désirent commencer le clas- sement d'une collection, relative à l'ordre des Insectes objet de leurs préférences. Les espèces principales des environs de Paris sont citées et caractérisées en peru de mots, de façon cependant à permettre de les reconnaître et de les nommer. AVEKTISSEMEINT l)L l' AUTEUR. Vil Une introduction à l'Entomologie est placée au début. Elle est beaucoup plus abrégée que les ex'cellents ouvrages sur cet objet publiés par MM. Kirby et Spence, par M. Westwood et par Th. Lacordaire; mais elle ne suppose absolument chez le lecteur que les connaissances générales et très-élémentaires d'histoire naturelle résultant de l'enseignement secondaire. Elle se trouve ainsi à la portée des gens du monde, tandis que les ouvrages dont nous venons de parler, s'étendant sur de nom- breux détails, exigent que l'on connaisse passablement l'Ento- mologie pour les comprendre, et perdent ainsi le caractère véritable d'une introduction. J'ai eu soin d'y joindre une indication complète de la chasse et de la récolte des différents ordres d'Insectes, et d'exposer comment on doit disposer méthodiquement les collections, ainsi que les moyens de conservation conformes aux données les plus récentes de la science pratique. La plus grande partie des planches de l'ouvrage proviennent de V Iconographie du Règne animal de G. Guvier publiée par M. Guérin- Méneville. Elles ont été retouchées en certaines parties pour quelques sujets défectueux. Des Insectes non retrouvés dans les catalogues les plus récents ont été remplacés par des espèces bien authentiques. Les détails anatomiques et le coloriage ont été revus sur nature. Enfin des planches nouvelles ont été ajoutées, soit pour l'anatomie, soit pour les figures d'Insectes récemment décou- verts et curieux, inconnus à l'époque où a paru la publication du savant entomologiste, notamment pour les espèces caver- nicoles. Des citations très-nombreuses renvoient le lecteur qui désire des notions plus approfondies aux livres et aux mémoires originaux les plus modernes, principalement ceux des auteurs français. VIII AVEKTISSEMEINi UL L AUTEUR. L'ouvrage se leraiinera, outre la table méthodique, par une table spéciale comprenant les espèces utiles, domestiques ou industrielles, et l'indication des genres où se rencontrent des espèces nuisibles, soit au bois et aux matières diverses, soit aux cultures agricoles, forestières et de jardin, sous ces rubriques distinctes, de sorte que le lecteur puisse trouver immédiatement les sujets qui l'intéressent d'une façon spéciale. Maurice GIRARD. Décembre, 1872. TRAITE D'ENTOMOLOGIE INTRODUCTION § I. — Définition. Au début de l'étude de chaque ordre de nos connaissances scienti- fiques, alors que les objets à comparer sont encore peu nombreux, l'esprit humain est porté à réunir à côté les uns des autres des faits ou des êtres qui s'éloigneront ensuite de plus en plus. A mesure, en effet, que de nouvellesnotions s'ajoutent aux anciennes, des différences appa- raissent, de petites variations qu'on croyait secondaires, peu importan- tes, seulement spécifiques ou génériques, prennent une plus grande valeur. La précision s'établit peu à peu, des noms nouveaux sont créés pour répondre à des idées nouvelles, et les noms anciens reçoivent une acception plus spéciale et plus restreinte. C'est ainsi que le mot Insecte, qui signifie, cà proprement parler, animal dont le corps est formé de segments {corpus inlersectum), comprenait pour Linna'us, dans sa signi- fication générale, le grand embranchement actuel des Entomozoaires, avec des limites nécessairement moins exactes qu'aujourd'hui. Selon l'ingénieuse et philosophique conception de Dugès, on peut se représen- ter leur type abstrait par. une série d'animaux identiques soudés en ligne droite, chacun formant un anneau ou zoonite, chacun possédant les organes des fonctions végétatives et animales. On voit les représen- tants très-inférieurs du type, comme les Tœnias, obéir à cette formule théorique avec une assez grande approximation. Puis l'analogie des segments s'efface peu à peu, chacun tend de plus en plus à exécuter un travail physiologique distinct, et c'est dans la classe des Insectes, telle que les naturalistes l'admettent aujourd'hui, que les caractères différentiels des Zoonites sont les plus tranchés, surtout chez les êtres adultes. L embranchement des Entomozoaires, en effet, appartient à l'un GIRARD. 1 2 INTRODUCTION . des types élevés de la création animale, et c'est l'adulte qui offre les caractères de la plus haute valeur. Il est bien rare, en effet, qu'on observe ces développements rétrogrades fréquents dans les types infé- rieurs. Nous devons définir avant tout, avec toute la précision possible, les Entomozoaires, auxquels est actuellement réservé le nom d'Insectes, et dont l'étude sommaire, plus spécialement affectée aux espèces utiles et nuisibles, constitue l'objet de cet ouvrage. Nous avons à peine besoin de faire remarquer que certains individus du groupe peuvent ne pas offrir la totalité des caractères de la défini- tion : jamais la nature ne se prête complètement à ces cadres distincts et tranchés, dans lesquels il nous semblerait si commode de les voir rentrer exactement ; toujours, comme pour défier notre impuis- sance, des faits, des êtres, échappent aux formules rigoureuses et nous montrent que nous ne connaîtrons jamais qu'approximalivement les grandes lois dont le Créateur sest réservé le secret. Les caractères extérieurs qui sont immédiatement visibles chez les Insectes sont l'existence de trois paires de membres de locomotion terrestre pour les adultes. Dans cette seule classe des Entomozoaires apparaissent souvent des ailes, ou appendices de locomotion aérienne, toujours fixées à la partie dorsale de certains segments et au nom- bre de deux paires diversement modifiées. Les anneaux se groupent autour de trois centres de coalescence et le corps se partage, toujours chez les adultes, en trois régions : la tête, le thorax, l'abdomen. Ces premiers caractères, les plus apparents, ne sont pas les plus généraux par leur constance. Un certain nombre d'Insectes manquent d'ailes : ce sont les ordres inférieurs de la classe et parfois les femelles de certaines espèces des types supérieurs. Dans les derniers ordres, les Parasites et les Thysanoures, la distinctio:i des trois régions du corps tend à s'effacer, l'abdomen prédomine et semble amoindrir l'importance des deux autres régions, j'égions privilégiées auxquelles appartiennent les sens supérieurs, la vue et l'ouïe. Enfin certaines espèces de Thysa- noures offrent des appendices locomoteurs à l'extrémité de l'abdomen, et d'autres ont des vestiges de pattes abdominales. Un examen plus attentif conduit l'observateur à reconnaître d'autres caractères. Les pièces buccales ou appendices préhenseurs et diviseurs des aliments restent complètement distinctes des membres locomoteurs, tandis que dans le type Gnathopodaire, composé, selon M. Milne Edwards, des Myriapodes, des Arachnides, des Crustacés, certains de ces derniers appendices, raccourcis ou déformés, ser\entj sous le nom de pattes- mâchoires, soit à maintenir les aliments contre les véritables pièces buc- cales, soit cà saisir la proie : ainsi les pinces des Écrevisses et des Scor- pions. Nous devons remarquer que chez certains Insectes, les Mantes, les Mantispes, les membres locomoteurs antérieurs, dits alors pattes ravisseuses, ont été modifiés dans un but analogue. Chez les Insectes, à part un partage exceptionnel entre deux régions du corps chez les mâles DÉFINITION. 3i des F.ibèllules, les organes de la génération ont toujours leur orifice de sortie dans le voisinage immédiat de l'extrémité anale du tube digestif, Il faut dire à ce sujet que certains Myriapodes, les Scolopendrides, par- tagent ce caractère avec les Insectes, Lanatomie intérieure nous fournit un caractère qui est, jusqu'à présent, sans exception ni extension. Dans les Gnathopodaires le sang s'épanche entre les viscères dans des régions plus ou moins étendues du corps ; mais toujours cependant, dans une portion variable de son cours, il est contenu dans des tubes ou vaisseaux clos. Chez les Insectes la circulation est partout essentiellement lacunaire, à l'exception peut- être d'un rudiment d'aorte à la partie antérieure après les cœurs sériés ou organes de l'impulsion du sang. Enfin, comme le remarque M. Milne Edwards, le travail embryogénique paraît différer dans les types Insecte et Gnathopodaire. Chez l'insecte tous les zoonites se forment simulta- nément, ainsi que les articles des membres, tandis que chez les Gna- thopodaires, le développement des zoonites tend à s'efiectuer successi- vement d'avant en arrière, et le nombre des appendicespeut augmenter des premiers états de l'embryon à l'âge adulte. Tous les autres caractères que donnent différents auteurs sont loin d'avoir l'importance distinctive des précédents et ne doivent pas figu- rer dans la définition ou caractéristique de l'Insecte. Ainsi l'absence de squelette intérieur, la forme et la position du système nerveux, consti- tué par des ganglions cérébroïdes, un collier circa-œsophagien et une double chaîne abdominale sous le tube digestif, appartient à l'immense majorité, sinon à la totalité des Entomozoaires. Le sang incolore et dépourvu de corpuscules discoïdes est propre à tous les Arthropodaires ou animaux Entomozoaires à appendices articulés; certaines Annélides seulement, ainsi les Lombrics, les Arénicoles, ont un sang coloré. Les prolongements céphaliques nommés antennes existent, non-seulement chez les Insectes, mais chez les Myriapodes et les Crustacés, avec dédoublement môme dans les représentants supérieurs de cette classe. On ne peut les méconnaître dans les Arachnides, d'après l'origine des nerfs qui s'y rendent ; seulement la fonction a changé et elles devien- nent les chélicères avec glandes vénénifiques. La respiration trachéenne, par des tubes où l'air va chercher le sang et l'hématoser sur place dans toutes les parties du corps, se rencontre chez les Myriapodes et chez une partie des Arachnides, et même chez les Arachnides dites pulmonaires, la respiration s'effectue encore par des trachées, modifiées et localisées. L'existence d'yeux composés, à cornées multiples, se remarque non- seulement chez les Insectes, mais aussi chez beaucoup de Crustacés. La séparation des sexes sur deux individus différents, les femelles ovi- pares et parfois ovovivipares, sont le cas normal de presque tous les Entomozoaires, oùl'liermaphrodisnie, c'est-à-dire la réunion des organes mâles et femelles sur le même individu ne se manifeste que très-ra- rement dans les types les plus dégradés des Vers. 4 INTKODUCTION. On a souvent donné comme formant un attribut essentiel des insectes l'existence des métamorphoses. D'une manière absolue^ tous les animaux, ne passant de l'état embryonnaire à l'état adulte que par une évolution successive de leurs organes, offrent des changements variés de forme ; mais on restreint le nom de métamorphoses à. celles de ces modifica- tions qui affectent les anim lux lorsqu'ils sont déjà sortis des enveloppes de l'œuf. Elles consistent en mues ou successions différentes de l'enve- loppe cutanée, en suppression ou addition d'appendices et même de zoonites. Les anciennes classifications des Insectes montrent toute l'im- portance qu'on a longtemps attaché aux métamorphoses. Certains au- teurs ont même retranché des Insectes les Parasites et les ïhysanoures à métamorphoses nulles ou incertaines. Puis on divisait les Insectes en Insectes à métamorphoses complètes, avec une période d'immobilité et de jeûne, et Insectes à métamorphoses incomplètes, toujours agiles et prenant de la nourriture. Les progrès effectués dans la science ento- mologique ont singulièrement diminué l'importance de ce caractère. On a reconnu dans certains insectes de véritables hypermétamorphoses ou changements supplémentaires; ainsi chez les Éphémères, chez les Méloides, qui cependant n'étaient accompagnées d'aucune modification réelle du type fondamental, on a vu apparaître les métamorphoses dans des classes qu'on en croyait dépourvues : ainsi chez les Myriapodes, chez beaucoup d'Arachnides, chez les Crustacés de types divers, même les plus élevés, comme les Langoustes. Si les métamorphoses ne doivent pas figurer dans la définition des Insectes, elles constituent toutefois un phénomène très-important; et nous aurons continuellement à comparer ces êtres sous divers états au point de vue anatomique et physiologique. Il est donc nécessaire, sans entrer dans aucun des détails qui trouve- ront leur place naturelle dans l'étude de chaque groupe d'Insectes, et seulement pour fixer le sens des mots, d'établir la notion des diverses phases qu'on observe dans l'accroissement de ces êtres. Au sortir de l'œuf, les Insectes sont, appelées larves, et sont alors toujours dépour- vues d'ailes, même à l'état rudimentaire. Le nom plus spécial de che- nilles est donné aux larves des Papillons, et, parfois, à tort aux larves de certains Hyménoptères, plus exactement nommées fausses chenilles. Cette première période est celle de l'accroissement, avec une série de mues ou de changements de peau en nombre variable. Chez les insectes à métamorphoses complètes le nom de larve est excellent, car le mot larva, rûasque, convient parfaitement à un état où se dissimule tout à fait la torme de l'adulte : ainsi les Abeilles, les Papillons. Il convient beau- coup moins aux autres, comme les Sauterelles, les Criquets, les Punai- ses, où la larve ressemble à l'adulte. Dans le second état l'insecte est appelé du nom général de nymphe,, et des rudiments d'ailes, plus ou moins apparents, existent. Ce nom est plus spécialement réservé aux nymphes agiles et prenant de la nourriture, et à celles immobiles et DEFINITION. 5 sans nourriture, mais où les parties bien visibles de l'adulte sont enve- loppées d'une simple membrane : ainsi chez les Coléoptères. On appelle chrysalides les nymphes des Papillons, à peau plus consistante, laissant les parties moins distinctes : ce nom, ou celui d'aurélie, vient des taches dorées ou argentées et dues à de l'air intercalé qu'offrent alors quelques espèces. On a quelquefois désigné par le mot fève ces mêmes états, quand l'aspect est brun et terne. Les pupes sont ces nymphes d'un nombre considérable de Diptères, où les parties sont cachées sous une peau opaque qui est celle de la larve épaissie. Enfin vient l'état adulte ou parfait, dans lequel l'insecte est apte à la reproduction, et pour le- quel il serait à désirer qu'on eut adopté le nom d'image [imago de Lin- nseus), signifiant que l'animal, dégagé des enveloppes qui masquaient son type, ofTre la véritable représentation de son espèce. Ce qui montre avec quelle prudence les métamorphoses doivent entrer dans la carac- téristique des ordres des Insectes, c'est que les Insectes inférieurs, sans métamorphoses, sauf peut-être des mues, doivent se regarder comme des larves avec organes générateurs, et que, dans des ordres à méta- morphoses, tels que les Orthoptères et les Hémiptères, certains genres, par arrêt dans le nombre des mues, demeurent toujours ou à l'état de larve ou à celui de nymphe, avec un développement exceptionnel de l'appareil génital, permettant la reproduction de l'espèce. Bien que la classification des Insectes doive terminer cette introduc- tion, il est cependant indispensable , pour éviter toute obscurité aux lecteurs étrangers à l'entomologie, d'établir en quelques mots les prin- cipaux ordres des Insectes. Sans cela de continuelles confusions nui- raient à l'étude générale des fonctions. Les Coléoptères sont essen- tiellement caractérisés par l'existence de deux paires d'ailes, dont les supérieures dures et coriaces servent d'étuis ou d'élytres aux inférieures membraneuses : tels sont les Carabes, les Cétoines, les Hannetons, les Coccinelles, etc. Les Orthoptères, également à quatre ailes, ont les étuis supérieurs bien moins complets, moins résistants, constituant des pseu- délytres : ainsi les Forficules ou Perce-Oreilles, les Grillons, les Mantes, les Sauterelles, les Criquets, etc. Les Névroptères ont les quatre ailes membraneuses : par exemple, les Libellules ou Demoiselles, les Hémé- robes, les Phryganes, etc. Dans ces trois premiers ordres, les adultes et les larves sont broyeurs, c'est-à-dire coupent et mâchent avec leurs pièces buccales des aliments plus ou moins solides. Viennent ensuite des Insectes lécheurs ou suceurs, du moins à l'état adulte, se nourissant de substances visqueuses ou limpides. On y distingue les Hijménoptères à quatre ailes membraneuses et nues, comme les Abeilles, les Bour- dons, les Guêpes, les Fourmis, les Ichneumons, etc. ; les Lépidoptères à quatre ailes membraneuses, mais couvertes de petites écailles, ressem- blant à une farine colorée : ce sont les Papillons de jour et de nuit ; les Hémiptères, tantôt à ailes supérieures ou hêmélytres à demi coriaces du côté de la base, comme les Punaises des bois et des eaux, tantôt à quatre 6 INTRODUCTION. ailes membraneuses, comme les Cigales ; les Diptères n'olfranl, à la première apparence, que deux ailes membraneuses : ainsi les Cousins, lesTipules, les Taons et l'immense légion des Mouches. Enfin, en négligeant des groupes très-secondaires, nous réunirons provisoirement sous le nom d'Aptères ces Insectes dégradés, totalement privés d'ailes, ou ne gardant que d'inutiles vestiges, comme les Poux et les Puces. § H. — Étude anatoinique et pliys^iologique des fonctions. On sait que les tissus élémentaires des animaux constituent par leur assemblage les divers organes, et qu'on donne le nom de fonctions au\ rôles accomplis par ces organes dans l'évolution vitale. En vertu de la dis- tinction la plus nette que l'esprit puisse concevoir entre les animaux et les végétaux, on partage les fonctions en deux grandes classes, végétatives et animales. Les premières, communes aux deux règnes, sont les grandes fonctions de nutrition., conservant la vie de l'individu, et de génération, assurant celle de l'espèce. Les secondes, plus élevées, spéciales aux ani- maux doués du mouvement volontaire et de la sensibilité, sont celles de locomotion et de relation, mettant l'être vivant en rapport avec le monde extérieur. I. — Fonctions végétatives. Les fonctions végétatives comprennent la nutrition et la reproduction. Nutrition. La fonction générale de nutrition comprend plusieurs appareils dis- tincts qui sont ceux de la digestion, de la circulation, de la respiration, et des sécrétions. Digestion. On désigne par ce nom l'acte au moyen duquel les matières alimen- taires, introduites dans l'intérieur du corps de l'animal, sont modifiées de manière à se subdiviser en deux parties, les matières assimilables destinées, après absorption, à entretenir ou à nourrir les divers tissus, à fournir des produits spéciaux dans les glandes, et les excréments qui doivent être rejetés au dehors comme inutiles. fcette fonction s'accomplit dans un tiibe à parois closes, muni de ren- flements divers, et où sont versés certains liquides, soit par des glandes annexes, soit par des follicules disposés dans le tissu du tube et s'ou- vrant dans son intérieur. Chez les Insectes et chez l'immense majorité des Entomozoaires, les orifices d'entrée et de sortie des aliments sont aux extrémités opposées du corps; c'est un caractère de supériorité, ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. — DIGESTION. 7 car on voil l'anus chez les Mollusques se rapprocher de la bouche; chez les Polypes vrais, un seul orifice existe pour l'entrée et la sortie des matières, et enfin, chez les Spongiaires, tout canal digestif propre disparaît. Le tube digestif des Insectes, de même que chez tous les Arthropo- daires, offre dans sa paroi trois tuniques. A l'intérieur est une mem- brane muqueuse revêtue extérieurement d'une couche musculaire, à deux ordres de fibres, circulaires et longitudinales, de puissance très- variable selon la région du tube. Enfin le tout est revêtu à l'extérieur d'une très-mince tunique péritonéale ou séreuse. Chez certains In- sectes, la tunique interne de la portion postérieure du tube intestinal se sépare et se dégage lors des mues ; ainsi chez le Ver à soie. Cet ap- pareil digestif est situé dans la région médiane du corps, entre le sys- tème nerveux et celui des cœurs sériés ou vaisseau dorsal, soutenu par des amas graisseux, parfois par des brides membraneuses et par de nombreux vaisseaux trachéens, dépendant de l'appareil respiratoire et se ramifiant dans les parois. Il est fort difficile de décrire d'une manière générale l'appareil diges- tif des Insectes à cause de ses modificalions continuelles dans les diffé- rents ordres ; elles nous obligeront à y revenir lors des considérations générales propres à chacun d'eux. Par une loi qui semble appartenir à tout le règne animal, la variation fréquente paraît être la formule rie cet appareil, et c'est pour cette raison qu'il no donne aucun caractère important aux naturalistes classificateurs, à l'opposé des appareils de la circulation et de la respiration beaucoup plus fixes pour chaque type dans leurs détails. Après les pièces buccales, dont l'élude si importante chez les Insectes se rattache à celle du squelette externe et de ses appendices, vient l'orifice buccal présentant chez certains Insectes au fond de sa cavilé une sorte de phariinx, sans la complication nécessitée chez les Verté- brés aériens par le voisinage de l'orifice de l'appareil respiratoire. Ce sont des lobes plus ou moins cornés et poilus : l'un à la face supérieure de la chambre buccale, Vépipharynx, se voit chez beaucoup de Coléo- ptères et à l'état rudimeutaire chez les Orthoptères et les Névroptères; l'autre lobe intrabuccal, plus ou moins bifide, Vhypopliarijnx, ou plan- cher de la bouche, très-développé chez certains Coléoptères, rudimen- taire chez d'autres, se montre développé chez les Orthoptères, les Libellules et d'autres Névroptères. A la suite de ce pharynx, qui n'existe pas chez les Insectes lécheurs et suceurs, se présente l'œsophage, tube de longueur variable, se prolon- geant habituellement jusqu'à l'origine de l'abdomen, surtout quand celui-ci est pédoncule. Il offre à sa suite divers renflements dont les noms ont été empruntés à l'analomie des Oiseaux Gallinacés. Comme certains d'entre eux peuvent manquer, nous devons choisir pour exemple un Insecte à appareil digestif plus complet; ainsi, dans les 8 INTRODUCTION. Orthoptères, la grande Sauterelle verte {Locusta viridissima) ou l'Éphip- pigère des vignes {Ephippigera vitium). L'œsophage se renfle graduelle- ment en un premier réservoir nommé jabot, auquel succède un gésier ou estomac triturant et masticateur, à fortes parois musculaires, avec pièces cornées internes sur plusieurs séries longitudinales ; puis vient un renflement, qui ne manque jamais dans la classe des Insectes, le ventricule succenlurié ou jabot succenturié de Straus-Durckheim (1), ven- tricule chylifique de Léon Dufour. En réalité, c'est un estomac dans le sens ordinaire, à suc gastrique acide, où s'accomplit la chymification et sans doute aussi la chylification, opérations fort peu distinctes chez les Insectes. 11 faut bien noter que le gésier, quand il existe, est avant ce renflement stomacal, et non après, comme cela arrive chez les Oi- seauîi. Le tube digestif se termine par un intestin grêle débouchant dans lin gros intestin ou réservoir stercoral dans lequel les excréments se moulent de manières diverses selon les groupes. Un anus à sphincter le termine, s'ouvrant dans le dernier segment abdominal. On prétend que l'anus fait défaut chez certaines larves vivant parasites dans des tissus animaux ou au milieu d'une pâtée mielleuse. Le jabot et le gésier ne se rencontrent pas dans certains groupes de Coléoptères et chez beaucoup de larves de Diptères. L'œsophage aboutit alors directement à l'estomac. Les larves des Insectes à métamorphoses complètes ne présentent fréquemment pas de jabot; on le voit se déve- lopper peu à peu par dilatation régulière ou irrégulière de l'œsophage à mesure que l'Insect^ approche de l'état adulte. C'est ce qui arrive chez les Hyménoptères et le jabot est surtout prédominant et plus ou moins excentrique chez les Mellifîques adultes. C'est alors un réservoir de miel pompé ou léché dans les nectaires des fleurs, et que l'Insecte dégorge pour la nourriture de ses larves. Les Lépidoptères à l'état parfait ont le jabot transformé en une panse rejetée en arrière, se déta- chant à angle droit de l'œsophage auquel elle communique par un canal étroit, et qui paraît généralement gonflée de gaz. Les physiolo- gistes sont fort indécis sur l'usage de ce jabot modifié. Faut-il y voir un appareil devant faciliter la montée ou la descente de l'Insecte, à la façon du ludion, en faisant varier le poids du corps plongé dans l'air, sans changement de volume, par introduction ou sortie de gaz plus ou moins comprimé ou de liquide ? doit-on, avec les auteurs allemands, y reconnaître une vessie aspiratoire {Saugblase, Saugmagen) destinée à la succion des liquides, parce que son développement semble en rapport avec celui de la spiriirompe? Rien de plus contestable que toutes ces opinions. Les Dipières adultes, sauf les Pupipares dégradés, offrent cette panse, avec un col fort long naissant le plus habituellement près de la bouche ; mais on la trouve souvent pleine d'aliments. D'un autre côté, les Hémiptères et les Puces, qui sont aussi des suceurs, manquent (1) C'est le nom donné par Cuvier à l'estomac à suc gastrique des Oiseaux. ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. — DIGESTION. 9 toujours de cette panse, tout en offrant assez souvent un véritable jabot. Le gésier est incontestablement un organe de mastication interne avec des plaques cornées, des dents tournées en bas empêchant la ré- trogression des aliments, des râpes, des brosses pileuses. Les Coléoptères carnassiers ou [ceux qui vivent de bois durs en sont pourvus; il dis- paraît chez ceux qui se nourrissent de substances molles animales ou végétales. 11 offre son maximum de puissance chez les voraces Ortho- ptères, comme les Sauterelles, les Criquets, les Grillons, les Courtilières, les Blattes, les Mantes, etc.; commence à disparaître chez les Névro- ptères; puissant encore chez les Termites, si destructeurs; très-amoindri chez les Fourmilions, les Panorpes, les Hémérobes; nul chez les autres; devient très-rudimentaire et simple sphincter à la base du jabot chez les Hyménoptères; enfin manque tout à fait, au moins chez les adultes, dans les ordres suivants, en majorité entièrement suceurs. Avant d'arriver au ventricule succenturié ou chylifique, qu'il nous semble plus simple d'appeler uniquement l'estomac, car c'est là où se rencontre le suc gastrique, les aliments passent par un appareil valvu- laire ou sphincter qu'on doit nommer cardiaque, très-net au moins chez les Orthoptères et les Hyménoptères. Dans un grand nombre de larves, surtout dans les Chenilles, l'esto- mac très-long, droit, cylindrique, avec bandes musculaires longitudi- nales, constitue la majeure partie du tubercule digestif et se réduit de plus en plus de l'état de nymphe à l'adulte. Chez certains Coléoptères phytophages ou se nourrissant de fiente, substance peu nutritive, cet estomac reste très-long, mais contourné, intestiniforme. Il est court chez les Coléoptères carnassiers nourris de proie vivante, et chez les Insectes suceurs, sauf chez un certain nombre d'Hémiptères où il est allongé et grêle. Chez un assez grand nombre d'Insectes, une ou plusieurs paires d'appendices, soit globuleux, soit inlestiniformes, toujours aveugles, se remarquent à la partie antérieure de l'estomac. Ce sont les Orthoptères qui présentent le plus grand développement de ces diverticules ; on les rencontre encore chez quelques Coléoptères et Névroptères adultes, chez beaucoup de Coléoptères phytophages à l'état de larve seulement, chez la plupart des Diptères, tantôt en larves, tantôt adultes, enfin chez les Poux. Rien n'indique une sécrétion spéciale dans ces ctecums gastriques, représentant d'une manière très-affaiblie et accidentelle la disposition constante de l'estomac des Arachnides. Enfin, nous devons noter que dans l'estomac la paroi interne, au lieu d'un épilhélium ordinaire, offre un épithélium muqueux à cellules granulées, fréquemment re- nouvelées, avec des séries de rides dues à l'épaisseur variable de la couche musculaire. Il n'existe pas toujours une ligne de démarcation bien nettement 40 INTRODUCTION. marquée entre l'estomac etrinteslin, im véritable pylore. Le plus con- venable est cependant d'appeler région pylorique la portion du canal digestif où débouchent des tubes particuliers dont nous parlerons tout à l'heure sous le nom de vaisseaux malpighiens. Ils débouchent réelle- ment à l'entrée de l'intestin chez les Chenilles, où l'intestin est très- court et chez quelques Hémiptères (Punaise" des lits, Réduve, etc.). l^n général, c'est le contraire qu'on observe ; la région pylorique est à l'extrémité postérieure de l'estomac, et un intestin grêle et cylindrique lui succède. C'est le mode d'organisation de tous les Coléoptères et Orthoptères ; il ne manque que rarement chez les Névroptères, les Hyménoptères, les Lépidoptères, les Diptères ; il existe chez quel- ques Hémiptères (Nèpe, Naucore). Enfin, chez certains Insectes de ce dernier ordre, la région pylorique, intermédiaire, mais distincte entre l'estomac et l'intestin, forme une poche spéciale (Lygéc, Gerris, Scutellère). Par un développement inverse à celui de l'estomac, linlestiu, très- court chez les Chenilles, se transforme chez les Lépidoptères adultes en un tube allongé ; il est très-long chez certains Coléoptères phyto- phages en larves ou adultes. L'intestin grêle est de longueur médiocre chez les Névroptères, la plupart des Hyménoptères et les Diptères ; court chez les Hémiptères, sauf chez les Cigales où il s'allonge beaucoup. Le réservoir stercoral, qu'on peut appeler indifféremment gros iii- iestin, côlon, cœcum, est le dernier renflement du tube digestif. Il est presque toujours plus large que la portion précédente de lintestin, peu allongé et occupant toujours l'extrémité terminale de l'abdomen. Ses parois offrent d'épaisses bandes musculaires entre lesquelles se moulent les excréments, et qui les retiennent, et, entre ces bandes, se voient souvent des boutons charnus, arrondis ou ovalaires, avec un cercle ou papille cornée : ainsi chez les Hyménoptères, chez certains Névroptères et Diptères. Le réservoir stercoral est toujours placé dans l'axe du tube digestif chez les Orthoptères, les Névroptères, les Hyménoptères et chez les Chenilles des Lépidoptères. Chez les Lépidoptères adultes, au contraire, il se développe excentriquement en poche ovoïde avec un col plus ou moins étroit, et de même chez quelques Coléoptères, Hé- miptères et Diptères. Le rectum n'offre rien de particulier et se ter- mine par un anus à sphincter. Chez les Insectes, comme chez les Vertébrés et tous les animaux d'une organisation élevée, la digestion exige pour s'accomplir que, de place en place, les liquides particuUers, exerçant sans aucun doute, ain-si que chez les vertébrés, des actionsspécialeu sur les diverses espèces chimiques d'aliments, soient versés dans le tube digestil'. Des glandes de structure complexe, diversifiées, simples ou conglomérées et munies de canaux excréteurs, retirent du sang des substances dont le mode d'action est encore très-mal connu. NVius retrouvons ici toutes les dif- ficultés de la théorie chimique de la digestion de l'Homme et des ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. — DIGESTION. 11 Vertébrés, singulit'rement augmentées par la peine e\tr(?me qu'on éprouve, vu la petitesse des Insectes, à isoler les liquides actifs et à les recueillir en quantité assez grande pour étudier leur nature chimique, et surtout par l'impossibilité presque absolue de les l'aire agir hors de l'animal pour opérer des digestions artificielles. Pour énumérer les diverses glandes annexées cà l'appareil digestif, reprenons l'exemple de la grande Sauterelle verte. A l'entrée de l'œsophage, la salive s'écoule d'une paire de gvo?:èe?i glandes salivaires rameuses présentant un second organe oblong, cœcal, à conduit déférent, et qui est, ou un réservoir salivaire, mettant en réserve le liquide sécrété constamment par la glande rameuse, ou, plus probablement, une seconde glande salivaire. La pluralité des glandes salivaires et leur diversité de structure se rencontre chez beaucoup d'Insectes et l'on est amené à présenter, par une juste analogie, qu'il peut y avoir plusieurs salives, à rôles dis- tincts, ainsi que M. Claude Bernard l'a établi dans une* de ses belles découvertes, pour les salives des glandes parotide, sous-maxillaire et sublinguale chez l'Homme et les Mammifères. Dans l'intérieur de l'estomac, entre les fibres musculaires des pai-ois sont logées une foule de glandes microscopiques, ayant à 1 intérieur des utricules à granulations qui paraissent fort analogues aux utricules qui sécrètent la pepsine chez les animaux Vertébrés. Ce sont les organes chargés de produire le suc gastrique et qu'on peut appeler glandes ou follicules gastriques. A la région postérieure de l'estomac se voit une sorte de couronne ou houppe constituée par de longs vaisseaux grêles, à extrémité libre fermée, ouverte à l'autre qui débouche dans le tube digestif. Ce sont les vaisseaux de Malpighi, découverts par l'auatomiste de ce nom et dont nous aurons à discuter l'usage. Chez les Locustiens, le tube digestif ne présente plus d'autre glande annexe, mais, pour clore cette nomenclature, nous dirons que, chez certains insectes, des glandes anales wer&cni leur produit près de l'orifice de sortie du réseryoir stercoral, tantôt en matières liquides, tantôt en matières gazeuses. Les glandes salivaires sont encore très-médiocrement étudiées chez les Insectes et constituent un sujet fort intéressant de recherches nouvelles. Le plus habituellement leur sécrétion sert à imprégner et à ramollir les matières alimentaires soumises à l'action des pièces buccales. On voit la salive suinter de la bouche des Insectes quand on les irrite ou qu'on les blesse ; on connaît notamment l'abondance de la salive bru- nâtre que rejettent les Coléoptères carnassiers et qui est mêlée des liquides régurgités. Les plus grandes variations de forme se présentent, chez la plupart des Coléoptères pentamères (1); chez les Libellules, les Ephémères, la salive est fournie par de simples follicules placés sur les parois mêmes du tube digestif ù son entrée. Puis, dans le plus grand (1) A cinq articles aux tarses, — division artilicielle qui sera expliquée au ciia- pitre spécial aux Coléoptères. 12 INTRODUCTION. étal de simplicité, les glandes salivaires se composent de deux longs tubes Ccficaux, grêles, s'ouvrant au fond de la cavité buccale : ainsi chez les Lépidoptères adultes, quelques Coléoptères et Névroptères. beaucoup de Diptères. Par une complication plus considérable les tubes salivaires se ramifient dans leur partie profonde et peuvent se renfler en ampoules, de manière à donner des glandes plus ou moins arbores- centes : ainsi chez les Locustiens, les Grilloniens, les Blattiens, les Man- tiens (Orthoptères). On voit apparaître souvent dans ces glandes ra- meuses de longues ampoules'fermées qui sont, ou des réservoirs de salives, ou des glandes spéciales de structure différente. Chez beaucoup d'Hy- ménoptères, outre des glandes rameuses thoraciques, on rencontre d'autres glandes salivaires à l'intérieur de la tète, bien plus difficiles à voir. On comprend très-bien chez les Hyménoptères nidifiants la néces- sité de nombreuses glandes salivaires pour mêler des liquides, sans doute variés, Soit à la cire, soit au carton des nids, soit à la terre gâchée ou au.v débris divers agglutinés. Les appareils salivaires sont aussi com- plexes et de plusieurs formes, qui correspondent très-probablement à des salives distinctes, chez les Hémiptères qui enfoncent leur trompe droite et rigide dans les parties profondes des végétaux. Parfois la salive de ces Insectes est irritante, fait naître des ampoules à la peau, comme celle des Punaises de lit et des Réduves. Certains Hémiptères, par leur salive acre, déterminent une exsudation végétale constituant des galles où ils se logent, ou font sortir une sève écumeuse qui entoure et pro- tège la larve. Enfin la salive est encore plus détournée de ses usages habituels chez les Chenilles. La paire principale des glandes salivaires forme les glandes cà soie. Leur liquide se solidifie à l'air dans l'intérieur même de la bouche et constitue les fils des cocons. Les glandes à soie sont énormes et occupent toute la longueur latérale du corps dans les espèces à cocons épais. Une seconde paire de glandes beaucoup plus petites, se déversant aussi au bas de la bouche à l'entrée de la filière, sert sans doute à coller les deux fils de soie en un fil unique et peut- être aussi à des usages alimentaires. Les glandes salivaires d'autres Chenilles donnent une glu qui agglutine des grains de terre ou des débris de bois pour former une coque ; de môme chez certaines larves de Coléoptères (Cétoines, Lucanes, Cérambyx, etc.). On doit peu s'étonner de voir ainsi les glandes salivaires remplissant d'autres rôles que ceux propres à l'alimentation, puisque chez les Aranéides (Mygale, Lycose, Épeire, etc.), ces glandes deviennent des organes sécrétant le venin et que leurs connexions constantes, au moins chez les Insectes, sont en partie changées, puisqu'elles s'ouvrent; non plus dans la bouche, mais dans les chélicères ou appendices préhenseurs de la proie vivante de ces Arachnides. Les follicules des parois de l'estomac fournissent du suc gastrique toujours acide quand la digestion s'aecompHt. Si, au contraire, comme cela est arrivé à plusieurs observateurs, on examine ce suc chez des ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE .— DIGESTION . 13 Insectes à jeun, fatigués parla captivité, ce suc s'altère et devient neu- tre ou même alcalin. Le plus généralement ces follicules qui s'ouvrent à l'intérieur de l'estomac se logent en entier dans l'épaisseur de ses parois qui paraissent lisses au dehors; cela arrive chez presque tous les Névroptères, chez les Orthoptères, les Hyménoptères, les Lépi- doptères, les Diptères et chez beaucoup de Coléoptères, principalement phytophages. Chez les Coléoptères carnassiers, au contraire^ et aussi chez quelques familles de cet ordre qui vivent de végétaux, la surface externe de l'estomac paraît hérissée de villosités s'ouvrant à l'intérieur, et qui ne sont qu'une hypertrophie des glandules gastriques des autres Insectes, avec tous les passages au cas de l'estomac lisse. Il règne encore une certaine incertitude sur la fonction des organes glandulaires qui s'ouvrent dans la portion du tube digestif que nous avons nommée la région pylorique. Les tubes minces, longs et flexueux, dont il est question, ont été découverts par l'anatomiste Malpighi, revus par Swammerdam, par Lyonnet, mais sans que ces observateurs aient émis aucune opinion sur leur rôle. Cuvier, ne rencontrant pas chez les Insectes le foie caractérisé des Crustacés et des Arachnides supérieurs, en attribua les fonctions , sans expériences à l'appui, aux tubes de Malpighi, et son assertion, acceptée presque sans discussion par les naturalistes contemporains, fit donner à ces organes le nom de vaisseaux hépatiques ou biliaires. Cependant des indices de sécrétion urinaire étaient constatés chez les Insectes, ainsi par la présence de l'acide urique dans les corps piles des Cantharides, puis dans les excréments des Vers à soie. Straus-Durckheim ayant remis à M. Chevreul une certaine quantité d'une partie de ces tubes rassemblée chez de nombreux Hannetons, M. Chevreul constata dans les liquides de ces tubes la présence de l'acide urique, sans doute à l'état d'urate alcalin ; il obtint en effet par l'acide azotique, puis par l'am- moniaque la coloration rouge de la murexide ou purpurate d'ammo- niaque, c'est-à-dire la réaction caractéristique de l'acide urique. Plus tard, la démonstration fut complétée (Audouin, M. Sirodot) par la dé- couverte dans ces tubes des calculs qui sont chez les Vertébrés des cas pathologiques de la sécrétion urinaire : ainsi des concrétions d'acide urique, d'urates de soude, de chaux, d'oxalate de chaux. Il faut donc nécessairement attribuer aux vaisseaux de Malpighi une fonction uri- naire. Ils concourent à la purification du sang. Qu'une chenille soit nourrie de feuilles auxquelles on a mêlé une matière colorante, comme de l'indigo, le sang, d'ordinaire incolore, se charge de la matière colo- rante ; puis, si l'on cesse ce régime, il se décolore peu à peu, mais la matière s'amasse dans les tubes de Malpighi. Cette expérience assimile ces organes en môme temps aux reins et au foie, la double fonction étant confiée au même appareil, ou peut-être appartenant à deux ré- gions distinctes des tubes ; les Insectes offrant en tout cas, sous ce rapport, une infériorité relative. La présence de la bile dans ces Canaux l/r INTRODUCTION, n'a jamais été constatée chimiqucmeni, peut-être faute de réactifs con- venables et dans l'ignorance de la véritable constitution de la bile des Annelés. La plupart des auteurs, cependant, par un éclectisme entre les deux opinions extrêmes, regardent ces organes comme des vaisseaux urino-biliaires, sécrétant à la fois l'urine et la bile (M. Milne-Edwards) ; d'autres auteurs, ainsi M. Sirodot, leur refusant tout rôle de sécrétion hépatique, en font des vaisseaux nrinaires seulement, enfin, Léon Dufour persistait encore au contraire à n'y voir que des vaisseaux pro- ducteurs de la bile. Nous les nommerons toujours tubes ou vaisseaux malpighiens, atin d'éviter toute décision dans une question encore douteuse. L'anatomie de ces organes laisse également subsister certaines indé- cisions, comme leurrôle physiologique. 11 est très-probable, bien que la démonstration complète n'en ait pas été faite dans tous les cas, que ces longs tubes, très-grêles, contournés sur eux-mêmes, sont toujours des vaisseaux aveugles, ne communiquant avec le tube digestif que par une seule extrémité à la région dite pylorique, soit au fond de l'estomac, soit à la partie voisine de l'intestin grêle. Les canaux seraient donc analogues aux tubes élémentaires des glandes tubuleuses: ainsi des reins, qui leur sont semblables, au moins en partie, par la fonction. Les tubes, au lieu d'être pelotonnés sur eux-mêmes en tissu compact, resteraient distincts et constitueraient ainsi une forme moins parfaite de ce genre de glandes. La structure intime et interne de ces tubes confirme tout à fait cette opinion. On y trouve une couche épithéliale, dont les utricules constitutives se détachent et se détruisent très-faci- lement, en laissant échapper leurs nucléus, ainsi que les divers pro- duits élaborés dans leur intérieur. Il n'y a aucun doute sur la forme cœcale des tubes malpighiens chez les Orthoptères, les Névroptères, les Lépidoptères, les Hyménoptères, la plupart des Hémiptères et des Diptères; car les extrémités fermées sont libres. C'est surtout chez les Coléoptères que des difficultés se pré- sentent à cet égard. Tantôt, ainsi chez le Hanneton, chez beaucoup de Coléoptères hétéromères, tétramères, trimères (i), oulre l'extrémité pylorique, les tubes viennent se coller par l'autre extrémité sur le gros intestin. On a plusieurs fois constaté que cette partie est cfecale, et on peut le supposer dans tous les cas. D'autres fois, on voit des tubes en anses dont les deux extrémités s'ouvrent à la fois dans la région pylo- rique, et on peut admettre, bien qu'on n'ait pu encore le démontrer exactement, que chaque anse est formée de deux tubes aveugles réunis chacun par l'extrémité fermée: ainsi chez les Carabiques. Tout rentre de la sorte dans le cas général. Le nombre des vaisseaux malpighiens est très-variable ; quand il est petit, ils sont toujours pairs et symétriques. Us paraissent manquer (1) Voir aux Coléoptères ces distinctions artificielles mais commodes. ANATOMIE ET {>HYSIOLOGIE. — DIGESTION. 15 chez les Coccus et les Pucerons (Hémiptères dégradés) ; sont toujours en Irès-petit noaibre chez les Coléoptères,, les Lépidoptères, les Hémiptères, les Diptères; en nombre très-variable chez les Névroptères, ordre d'in- sectes qui, au reste, nous présentera pour ses divers groupes le plus de dissemblance sous tous les rapports ; assez nombreuv chez les Hymé- noptères adultes, très-nombreux chez les Orthoptères, à digestion si active. Leur nombre varie de deux paires au minimum, si l'on adopte l'hypothèse pour les tubes en anses, à plus de cent tubes. On peut re- commander, comme exemple anatomique où ces tubes sont des plus nets, les gros Dytiques de nos eaux douces (Coléoptères carnassiers) ; on y voit ces tubes bruns se détachant parfaitement sur la paroi blanche de l'intestin. En général, les tubes malpighiens des diverses pairjs sont tous pareils entre eux, cylindriques, à surface lisse, un peu atténués à l'extrémité fermée. Quelquefois, surtout chez les Diptères, ils présentent des ren- flements ou ampoules, soit à l'extrémité fermée, soit près de leur ou- verture. Enfin leur surface peut dans certains cas devenir verruqueuse ou frangée de sortes de petits cœcums. Il arrive aussi dans quelques cas que tous ces tubes, ou certains d'eux par faisceaux, se réunissent en un canal commun débouchant dans la région pylorique. Les dernières glandes dont nous ayons à parler, et qui manquent chez les Orthoptères, ne sont annexées qu'anatomiquement à l'appareil di- gestif, car leur sécrétion est destinée à d'autres usages qu'aux actes d'alimentation. Certains auteurs les nomment, fort à tort, reins ou glandes urinaires. Le plus souvent elles sécrètent des liquides servant à la défense de l'Insecte, ainsi la liqueur fétide chargée d'acide butyrique (Pelouze) que lancent par l'anus les Carabes, la liqueur ûcre, explosive, volatile qu'émettent les Brachines, et qui leur fait donner les épithètes spécifiques d'explodens, bombarda, sclopeta, etc. Quelquefois elles don- nent la matière d'une soie dont l'Insecte tisse un berceau pour sa pro- géniture, par exemple chez les Hydrophiles (Coléopt.). Nous avons à ajouter une dernière considération pour terminer cette étude générale de l'appareil digestif, qui nous obligera, vu sa compli- cation, à de nouveaux détails, à propos des différents ordres d'Iusectes. On sait que chez les Vertébrés, et particulièrement chez les Mammi- fères, il existe une dépendance constante entre la longueur du tube di- gestif et le régime de l'animal. Quand l'animal est carnassier, il faut que ce tube soit court et l'estomac peu renflé, parce que les madères fortement azotées dont se compose la nourriture sont à la fois très-char- gées de principes nutritifs et facilement putrescibles ; de sorte qu'un trop long séjour dans l'intestin serait et inutile et nuisible. Au contraire, chez les phytophages, un intestin à nombreuses circonvolutions, un estomac dilaté, à renflements successifs, sont nécessités par des aliments très-peu azotés, exigeant de fréquents contacts avec les veines et les vaisseaux chjlifères pour une absorption suftisante, et n'éprouvant 16 INTRODUCTION. d'autre part la putréfaction que lentement et avec difficulté. Toutes les variations de régime, en passant des carnassiers de proie vivante aux omnivores, puis aux frugivores et herbivores, se traduisent de la ma- nière la plus fidèle par les longueurs successivement croissantes du tube digestif; chez les Mammifères, cette longueur passe de plus de trois fois à vingt-huit fois (Mouton) la longueur du corps; chez les Reptiles et les Poissons carnassiers, l'intestin ne vaut plus qu'environ les quatre cinquièmes de la longueur du corps. Les influences de la do- mesticité se manifestent héréditairement dans la longueur de l'intestin, en raison des modifications de régime ; ainsi le tube digestif s'allonge chez le chat domestique comparativement au chat sauvage, se rac- courcit chez le porc et le rat, si l'on met en regard le sanglier et le mulot. On croirait au premier abord pouvoir conclure de tant d'exemples à la généralité de la loi; mais l'étude des Insectes vient au contraire mani- fester des exceptions nombreuses, et nous donner une preuve de plus de cette réserve continuelle avec laquelle l'esprit humain doit toujours procéder dans les sciences d'observation ; la nature suit des procédés plus complexes que nous n'aimons à le supposer, et nos fréquentes er- reurs en ce genre prouvent que, dans nos conceptions théoriques, nous ne faisons pas intervenir toutes les causes réelles des phénomènes dont nous ignorons, d'habitude au moins, une partie. C'est surtout sur l'estomac qui est la portion la plus constante de l'appa- reil digestif,que les modifications de régime se font sentir. Le tube digestif en totalité est habituellement de médiocre longueur chez les Insectes suceurs ; chez les broyeurs se montrent plus de variations, et leur ex- plication est souvent inconnue. Chez les Orthoptères, herbivores par excellence, le canal digestif est cependant court et atteint à peine deux fois la longueur du corps. Les Coléoptères offrent de fréquentes diffé- rences sous ce rapport. Les Carabiques, qui vivent de proie vivante, ont un tube digestif et un estomac très-courts ; mais il en est de même chez les Cérambyx (Longicornes), vivant de bois, régime tout opposé ; l'estomac redevient très-long chez les Lamia de la môme famille, et se nourrissant pareillement. Chez les Copris ou Bousiers, vivant de fiente des Mammifères herbivores, qui contient très-peu de principes nutri- tifs, l'estomac intestiniforme est le plus long ; il a huit ou dix fois la longueur du corps et se replie plusieurs fois sur lui-même, de ma- nière à former un paquet considérable. Les Blaps, les Silphes, qui se nourrissent de charognes et de détritus, ont de longs estomacs, faisant dans l'abdomen des circonvolutions remarquables; chez les Silphes, le tube digestif a quatre fois la longeur du corps ; chez les grands Sla- phylins, nourris de la même manière, il n'a plus que deux fois cette longueur, et il est encore plus court chez les Cantharides et les Méloés phytophages. Chez les Lamellicornes il reprend, au contraire, des di- mensions en rapport avec les aliments végétaux : ainsi, chez les Han- ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE.— CIRCULATION. 17 netons, l'estomac décrit plusieurs circonvolutions dans l'abdomen, et le tube digestif atteint environ sept fois la longueur du corps. Le grand Hydrophile brun adulte {Hydrophilus piceus), qui vit principalement d'herbes, a un estomac très-long et enroulé sur lui-même dans la ca- vité abdominale, tandis que chez sa larve très-carnassiùre {Ver assassin de Réaumur), cet estomac est de grandeur ordinaire et ne décrit que peu de courbures. 11 y a là le changement inverse à celui que présentent les Batraciens anoures , dont les larves {têtards) phytophages ont un très-long intestin contourné en spirale qui se résorbe peu à peu, à mesure des métamorphoses, et arrive à être très-court chez l'adulte carnassier. Nous voyons donc, sans multiplier ces exemples, que ce n'est qu'avec grande circonspection qu'on peut essayer d'appliquer aux Insectes les lois qui régissent les animaux supérieurs. Circulation. Les physiologistes donnent le nom de circulation à la fonction par la- quelle les liquides qui doivent nourrir et réparer les tissus parviennent dans les différents organes et en sortent, sont conduits dans les appa- reils où ils doivent subir l'action de l'air atmosphérique (poumons, bran- chies, etc.), et dans certains filtres spéciaux, destinés à retirer des substances excrémentitielles ou utiles (glandes). Le principal liquide nourricier ainsi porté dans toutes les parties du corps est le sang, avec quelques autres liquides dérivés chez les animaux supérieurs (lymphe, chyle), manquant ou non encore reconnus chez les animaux inférieurs. L'étude de la circulation a été très-longtemps retardée chez les ani- maux inférieurs, et même n'était pas soupçonnée, parce qu'on regardait les animaux autres que les vertébrés comme privés de sang, animalia exsanguia, en raison de l'état habituellement incolore de ce liquide chez eux. Swammerdam, et Cuvier plus tard, appelèrent l'attention sur l'existence d'un sang coloré chez certains de ces animaux dits privés de sang ; ainsi, chez les Annélides (Ânnelés inférieurs, sans membres articulés), on constate un sang rouge clair chez les Lombrics (Vers de terre), et chez la plupart des Sangsues ; jaune-orange chez les Aréni- coles (Vers de sable) ; vert chez les Sabelles, etc. Il devenait dès lors naturel d'admettre l'existence du sang chez tous les animaux, même quand il n'est pas coloré, comme cela a lieu chez les Insectes, les My- riapodes, les Arachnides, les Crustacés. Le sang des Insectes est sensi- blement incolore, d'un blanc jaunêtre ou grisâtre ; verdâtre chez les Vers à soie et les Chenilles nourries de feuilles à chlorophylle verte. On trouve dans ce sang des corpuscules incolores, pour la plupart fusi- formes ou naviculaires, mêlés de quelques globules circulaires. Après leur sortie du corps de l'animal, et surtout par l'action de l'eau, ils se désorganisent très-rapidement. Comparativement à la taille de ces ani- maux, les corpuscules sont très-gros chez les Insectes. GIRARD. 2 18 - INTRODUCTION. De même que les corpuscules du sang des Vertébrés, ceux des Insectes se modifient avec les progrès du développement de l'organisme et éprouvent des métamorphoses à mesure que l'animal passe de l'état de larve à l'état parfait. Chez les larves, ce sont d'abord de simples utricules sans noyau ni granulations intérieures ; parfois ils se chargent bientôt de granules très-fins. Chez les adultes, ils sont pourvus d'un noyau très-disiinct ainsi que de granulations périphériques. Les glo- bules paraissent se renouveler et se détruire successivement. Ils sont nombreux dans le sang des Insectes agiles et actifs, surtout adultes. Ils sont analogues aux globules blancs du sang des Vertébrés et diffèrent tout à fait par l'aspect et les réactions chimiques des globules rouges en forme de disque renflé au centre. Une autre distinction très-impor- tante, c'est que ce sont ces derniers globules qui donnent au sang des Vertébrés sa couleur rouge, tandis que la teinte propre du sang des Invertébrés est due à une matière colorante en dissolution dans le liquide même. Elle peut varier avec la nourriture de l'Insecte ; ainsi M- E. Blanchard a reconnu que sous l'influence de la garance ou de l'in- digo, le sang des chenilles et des larves de Hanneton prend une nuance bleue ou rose. Ce sang doit contenir dans son sérum des substances analogues à Tulbumine et à la fibrine des Vertébrés, peut-être des isomères. En effet, il se coagule rapidement à l'air, et de même le sang des Homards et des Écrevisses. Cette coagulation à l'air indique l'existence d'une fibrine. Le sang contient une albumine, car il se coagule par la chaleur. Enfin il ofl're des sels dissous, puisque si on l'évaporé sur une plaque de verre, il reste des arborisations salines. Nous lîianquous encore d'analyses exactes de ce sang. Le sang doit renouveler continuellement ses matériaux au moyen des principes contenus dans les aliments. Chez les Vertébrés, des vaisseaux absorbants particuliers, les veines intestinales et les chylifères, établis- sent la liaison entre les fonctions de digestion et de circulation. 11 n'existe rien de pareil chez les Insectes; l'intestin, sans cesse baigné extérieurement par le sang, lui donne par endosmose les nouvelles substances. Un système de circulation exige un organe d'impulsion. La nature réalise d'habitude ce phénomène au moyen d'un ou plusieurs muscles creux ou cœurs agissant comme une pompe foulante , mais par un mécanisme différent. Une pompe est un réservoir à paroi inflexible dans lequel se meut un piston qui en fait varier la capacité interne; dans un cœur, cette variation de volume se produit par la contractilité même des parois. Or, si l'on examine une larve d'Insecte à téguments semi-transparents, par exemple, un ver à soie, on voit régner suivant la ligne médiane du corps, à la région dorsale, un tube présentant des étranglements successifs entre lesquels sont des sortes de chambres oll'rant des mouvements de systole et de diastole. On reconnaît immédiatement ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE, — CIRCULATION. 19 uiiCŒurà cavités successivesensérie, ou une suite de cœurs, siFon veut continuer plus complètement la fiction des zoonites soudés. Ces cavités contractiles existent à la partie postérieure ou abdominale du vaisseau dorsal. Elles sont fixées au dos par des brides fibro-musculaires, dites ailes du cœur, en môme nombre que les cbambres contractiles. Ces appendices suspenseurs naissent par une sorte de tendon du bord anté- rieur de l'arceau dorsal de l'anneau correspondant de l'abdomen. La bride mi en s'élargissant vers le cœur et constitue deux lames : l'une supérieure, insérée sur les côtés du cœur; l'autre inférieure, se por- tant à sa face ventrale, et se réunissant à sa congénère, de manière à former une sorte de plancber qui sépare le cœur de la cavité viscé- rale. Ces brides manquent dans thorax ; là le vaisseau dorsal n'est plus contractile, c'est une aorte tubulaire qui n'adhère plus au dos, mais s'applique sur l'œsophage. Elle passe dans la tête sous le cerveau ou ganglion côrébroïdej puis, tantôt tout tube cesse, tantôt l'aorte donne deux courtes branches, chacune se bifurquant encore, dans tous les cas, laissant le sang s'épancher dans la tète. On reconnaît le passage du sang 4ans le vaisseau dorsal et sa sortie à la partie antérieure en injec- tant, au moyen d'un liquide très-fluide, de l'essence de térébenthine colorée, soit le vaisseau dorsal lui-même chez de gros Insectes, soit les lacunes du corps par une ouverture à l'abdomen, le liquide pénétrant de là dans le cœur. Le tissu du vaisseau dorsal est musculaire. A l'in- térieur et à l'extérieur sont deux très-minces tuniques. Entre elles se trouvent des fibres musculaires, les unes longitudinales, formant un cordon médian et deux latéraux. Ces cordons longitudinaux qui ren- forcent le tube se voient à la loupe dans les gros Insectes. Au-dessous sont des faisceaux serrés de fibres transverscs, servant aux systoles. Chez les adultes, le vaisseau dorsal de l'abdomen ou cœur est légère- ment fusiforme, un peu renflé à sa partie moyenne; chez les larves, sa plus grande largeur est à l'arrière du corps. Le nombre des chambres cardiaques contractiles et des ailes membraneuses correspondantes est variable; en principe il doit être de un par segment, mais il peut y avoir des coalescences par soudure, aussi on compte huit, sept, cinq, quatre, une seule cavité même, selon les cas. En poursuivant l'anatomie de ce vaisseau dorsal, nous aurons de nouvelles preuves de son véritable rôle. Un cœur doit présenter une série de valvules jouant dans un seul sens de manière à permettre l'entrée du sang extérieur et son passage dans des cavités successives, sans retour possible en sens inverse. C'est ce qu'on trouve dans le vaisseau dorsal. Entre chaque chambre un repli de la membrane du tube forme une valvule s'aplatissant contre la paroi dans le sens d'ar- rière en avant, de sorte que, par les systoles, le sang est poussé de la partie postérieure du corps vers la tète sans pouvoir rétrograder. Le sang extérieur entre sur les côtés de chaque ventriculite par deux orifices en forme de boutonnières, et dont les lèvres pénètrent eu 20 INTRODUCTION. dedans en forme de bec de flûte. Ces orifices manquent sur les côtés de l'aorte thoracique. Lors des diastoles des ventriculites, ces lèvres s'écartent et le sang extérieur peut entrer; pendant les systoles, au contraire, ces deux lèvres internes, s'appliquant l'une contre l'autre, ferment l'orifice latéral, de sorte que le sang ne peut sortir. Cette struc- ture du cœur a été découverte par Straus-Durckheira et publiée en 1828 . Il ne suffit pas pour que l'existence de la circulation soit démontrée qu'on ait constaté un organe d'impulsion, il faut qu'on puisse voir le sang en mouvement dans les différentes régions du corps. Ce sont les globules du sang qui permettent de vérifier cette circulation, de même qu'ils ont démontré le passage du sang des Vertébrés dans les capillaires en examinant la membrane interdigitale transparente des pattes de la Grenouille. Il y a des Insectes aquatiques dont les larves sont à tégu- ments translucides, ainsi chez les Agrions, les Éphémères. Or, en les plaçant sous le microscope, on peut constater, en suivant des globules, que le sang, sorti antérieurement de l'aorte thoracique qui continue le cœur abdominal, se répand entre les organes, descend le long de la région ventrale et des régions latérales. Les courants principaux sont en communication avec une foule de canaux lacuneux secondaires ménagés entre les muscles et les viscères, de sorte que le sang, après avoir serpenté entre les diverses parties solides de l'organisme, rentre dans quelque courant principal d'où il pourra regagner le vaisseau dorsal. On voit ainsi le sang circuler d'une manière rapide jusqu'à l'extrémité du corps de ces larves, dans les filets caudaux. Cette importante découverte de la circulation du sang chez les Insec- tes est due à M. Carus (1827-1831), et a été depuis vérifiée par divers observateurs, et surtout par M. Yerloren (18Z|7), qui a observé le phé- nomène sur quatre-vingt-dix espèces d'Insectes de tous les ordres. M. Yerloren a surtout combattu les opinions de L. Dufour, très-embar- rassé par le vaisseau dorsal, y voyant tantôt un cordon, tantôt un organe de sécrétion graisseuse, ne pouvant y nier un mouvement contractile, mais le regardant comme sans aucune imporlance. On aperçoit aussi les courants sanguins dans les grosses nervures des ailes des Insectes, lorsque celles-ci sont transparentes et encore molles au moment de la sortie de la nymphe, ainsi chez les Hémérobes. Enfin des courants sanguins circulent dans les pattes, aidés parfois par un mouvement contractile des faisceaux musculaires situés près de l'articulation de la jambe avec la cuisse (M, Behn). Jl reste à constater comment le sang qui a parcouru toutes les régions du corps peut revenir au vaisseau dorsal afin de recevoir de nouvelles impulsions. Newport le premier découvrit autour du cœur ou vaisseau dorsal un péricarde, à tissu lâche, qui l'envteloppe complètement; c'est une véritable oreillette extérieure, et sans dou'e, les fibres musculaires des ailes, en comprimant cette chambre péricardique, aident le sang à entrer dans les ventriculites par les orifices latéraux, lors des dia- ANAÏOMIE ET PHYSIOLOGIE. — CIRCULAT[ON. 21 stoles. Selon M. Ë. Blanchard, il y aurait un système de canaux très- imparfaits, assurant le retour du sang à la chambre péricardique. Un grand canal veineux, à épithélium granuleux, existe de chaque côté du corps, sans paroi bien définie. Vis-à-vis chaque chambre du cœur, il en part un canal lâche, constitué par du tissu cellulaire condensé, adhérent à la face interne de l'arceau dorsal des segments abdominaux, non disséquable. Ces canaux latéraux de retour sont les analogues des canaux branchio-cardiaques des Crustacés et pneumo-cardiaques des Arachnides supérieures. Quelques observations ont été faites par Yersin sur des Insectes Orthoptères pour vérifier les opinions de M. E. Blanchard sur la circulation des Insectes. Il s'est servi de Blattes adultes ou en larves et de jeunes larves de Grillons, en profitant de ce fait que dans les premières heures qui suivent chez ces animaux une mue ou une métamorphose, les téguments sont très-pelles et assez transparents. Par un temps chaud et immédiatement après la mue, Yersin a compté dans deux individus cinquante pulsations du vaisseau dorsal en une minute; sur un autre individu, pendant une matinée froide, le même nombre de contractions a exigé un temps double. Chacun de ces mouve- ments est très-net et provoque une propulsion évidente du sang. On voit dans la contraction du vaisseau ce fluide se porter rapidement de l'abdomen vers la tète, et les globules, isolés ou groupés, parcourir un trajet plus long que le champ d'un miscroscope grossissant de 80 à 120 diamètres. Dans la dilatation, au contraire, toute la masse fluide revient par un mouvement court, mais lent dans la direction opposée. 11 a vu, sur une Blatte femelle adulte, un double courant sanguin de chaque côté du vaisseau dorsal, en sens inverse de celui de cet organe, sans limites extérieures bien déterminables. Sur plusieurs points, à des distances égales à la longueur d'un segment abdominal, on voit seu- lement pendant la dilatation du vaisseau dorsal, le sang passer des espaces latéraux où s'observe le courant inverse dans le vaisseau lui- même. L'existence de replis ou valvules dans l'intérieur du vaisseau dorsal gênant le courant inverse fut démontrée à Yersin par les dépla- cements et halles successives d'un amas de globules arrêté dans sa marche pendant plusieurs contractions, ne pouvant ni avancer ni recu- ler, quoique son diamètre apparent fût inférieur à celui du vaisseau ; il finit cependant par se dégager et paraître entraîné dans le courant dirigé vers la tête. Cette masse solide s'arrêta de nouveau plus loin, puis se dégagea encore et franchit un espace correspondant à la lon- gueur du segment. Yersin reconnut, en dehors du vaisseau dorsal, sur divers points du thorax, des courants sanguins de direction fixe et déter- minée, un mouvement très-distinct des globules à la base des antennes, alternativement de la base vers le sommet, puis du sommet vers la base, avec des intermittences correspondant assez exactement aux bat- tements du vaisseau dorsal. Dans les patlesla circulation n'est distincte qu'à la base, et seulement pendant les mouvements de l'Insecte. 11 n'y 22 INTRODUCTION. a aucune trace de vaisseau limitant l'épanchement sanguin. Le sang pénètre dans les membres en longeant d'abord la partie inférieure de la cuisse où il forme un courant assez large qui s'avance en s'étendant de façon à baigner tous les organes voisins et à rejoindre un second courant, qui du bord supérieur de la cuisse, se dirige vers la base de cet organe et pénètre dans la hanche. Les différences entre les Insectes et les autres Invertébrés sont donc bien moindres qu'on ne le croyait autrefois. Les canaux veineux, très- imparfaits, admis par M. E. Blanchard, n'ont pas de valvules; le sang remonte du ventre au dos par l'action des piliers musculaires allant des parois du ventre à celles du dos; il y a, par leurs contractions, rappro- chement et écartement de ces deux parois et par suite pression faisant remonter le sang au péricarde du vaisseau dorsal, comme par un pis- ton de pompe. Il faut remarquer au reste que nous sommes ici en pré- sence d'un des mécanismes les plus imparfaits employés par la nature pour assurer le retour du sang au cœur, et c'est ce qui nous explique la limite si exiguë assignée à la taille des Insectes. L'absence complète, sauf le rudiment d'aorte, de vaisseaux cylindriques, ne permet que l'ascension par capillarité entre des lames parallèles et inclinées, ascen- sion moins considérable. Les physiciens savent en efl'et qu'entre deux lames parallèles, le liquide mouillant ne s'élève qu'à moitié de la hau- teur qu'il acquiert dans un tube cylindrique dont le diamètre égalerait la distance des lames. Un Insecte qui aurait les dimensions d'un Crabe de grosse espèce ou d'un Homard ne pourrait pas -vivre ; le sang ne reviendrait pas au cœur. La taille beaucoup plus grande des Crustacés se lie à un système de canaux clos assez complet pour les artères et présentant un commencement de veines. Ce qui nous permet aujourd'hui de comprendre sans difficulté la circulation des Insectes, c'est la découverte de la circulation des Crus- tacés (Audouin, M. Milne Edwards) dont le mode s'applique à la grande majorité des Invertébrés, sinon à tous. On a reconnu, en effet, qu'il n'est pas nécessaire pour la circulation du fluide nourricier qu'il soit toujours contenu dans des tubes clos; le sang peut s'épancher au dehors et en vertu d'une impulsion première continuer sa route en divers sens entre les interstices des organes protégés par un tissu cellu- laire. C'est ce mode de circulation mixte qu'on appelle circulation semi-vasculaire, semi- lacunaire. Les Insectes en présentent la limite ex- trême, puisque les vaisseaux clos sont réduits à une courte aorte thora- cique prolongement des chambres du cœur. tes premiers observateurs du vaisseau dorsal, Malpighi, Swammer- dam, Hunter, n'hésitèrent pas, vu ses contractions, à y reconnaître un cœur. C'est à Cuvier qu'appartient la négation nette et complète de la circulation des Insectes par suite d'idées inexactes dont le temps a fait justice. Pour lui, la circulation n'existait que dans des vaisseaux clos qu'il ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE.— CIRCULATION. 23 n'apercevait pas chez les Insectes ; comme il les trouvait, au contraire, dans les Annélides, et qu'il croyait la fonction subordonnée à l'appareil spécial, il n'avait pas hésité à placer ces Annelés dégradés en têie de ses Articulés (Arthropodaires), bien qu'ils manquassent d'appendices articulés, violant ainsi et sa définition et toutes les analogies naturelles. Il était, en outre, entraîné dans cette voie par l'idée fausse des carac- tères dominateurs, certains modes physiologiques ne pouvant exister, selon lui, qu'avec l'exclusion forcée de certains autres. Il voyait l'air, comme nous le dirons, se répandre dans tout le corps des Insectes et produire sur place l'hématose du sang dans tous les tissus; dès lors il crut le sang immobile, le vaisseau dorsal devint un vestige inutile sur lequel il ne s'explique pas. Sur l'autorité de Cuvier, et cette opinion n'est peut-être pas encore complètement abandonnée par tous, on admit en principe que, chez les animaux où il y a circulation générale d'air dans le corps, celle-ci remplace et exclut la circulation générale du sang ou d'un liquide analogue, par incompatibilité de ces deux sys- tèmes circulatoires. On crut à cette explication, sans remarquer qu'il était étrange de voir chez les Insectes l'appareil respiratoire n'être plus, comme d'ordinaire, un annexe de celui de la circulation, mais au con- traire le dominer et l'annuler. Eu présence d'un adversaire d'une réputation aussi éclalanie que celle de Cuvier, il nous paraît convenable de joindre aux preuves di- rectes de la circulation chez les Insectes, précédemment exposées, d'autres arguments, indirects il est vrai, mais de grande valeur. L'orga- nogénie nous apprend, en effet, que la circulation des fluides com- mence toujours par des courants diffus. C'est plus tard que le tissu am- biant, sous l'influence de ces courants, peut s'organiser en vaisseaux; ainsi se forment les vaisseaux de l'embryon dans l'œuf des ûiseuux, ainsi s'établissent des vaisseaux anormaux dans les cas pathologiques, des canaux à parois propres pour des fistules anciennes, qui ont com- mencé par un flux vague de liquide irritant, des vaisseaux sanguins dans certaines tumeurs, toujours avec un système artériel plus complet et plus tôt formé que le système veineux, etc. Il peut donc arriver, chez beaucoup d'animaux, que le système de canaux propres ne se déve- loppe qu'incomplètement, et c'est chez les Insectes que l'absence de canaux clos est portée le plus loin. Une autre raison qui nous amène à voir dans le vaisseau dorsal le véritable organe propulseur du sang, c'est l'étude du môme appareil chez les Myriapodes. Là aussi nous trouvons une série dorsale de ventri- culites, avec les mêmes valvules que chez les Insectes, en nombre nor- mal égal à celui des segments du corps, se soudant deux à deux, de même que les anneaux, dans les Scutigères, à séparation bien marquée dans les Scolopendrides, s'effaçant dans les Iulides, etc. Or, chez ces animaux, on ne peut contester à cet organe le rôle circulatoire, car il s'y joint de nombreuses artères, une antérieure revenant ensuite en 2U INTRODUCTION. sens inverse au-dessous de l'œsophage et deux latérales partant de chaque ventriculite. Les canaux clos manquent encore pour le système veineux qui doit ramener le sang à l'appareil d'impulsion; des rudi- ments de vaisseaux veineux très-incomplets commencent à apparaître dans les classes des Arachnides et des Crustacés. La nature nous présente donc tous les passages entre les Insectes et les Vertébrés où la circulation s'effectue dans un réseau complètement endigué, et la fonction existe partout aussi parfaite, amenant dans tous les tissus le renouvellement du fluide nourricier, l'introduction continuelle de matières nouvelles dues aux aliments et l'expulsion des molécules viciées et inutiles. Le cœur des Insectes dont l'existence nous paraît incontestable, reçoit du sang, probablement hématose, d'une manière partielle, par l'oxy- gène de l'air ; nous reviendrons sur ce sujet dans l'étude de l'appareil respiratoire. On peut supposer que les lacunes de la région abdominale du corps des insectes reçoivent du sang dévivifié, plus ou moins mêlé à du sang ayant déjà subi l'action revivifiante de l'air; la question encore très-obscure est de savoir où s'opère l'hématose complète, si elle existe dans quelque partie, et comment le sang revient aux cœurs par des courants de retour dont l'étude est loin d'être entièrement élucidée. La série des ventriculites des Insectes semble être un appareil agita- teur d'un liquide qui sans lui resterait stagnant ; c'est comme une tur- bine immergée déterminant des courants dans un liquide. Anatomi- quement, le cœur est analogue à celui des Crustacés ; or, chez ceux-ci, le cœur est artériel, recevant du sang révivifié amené des branchies par les canaux branchio-tardiaques, vaisseaux clos. Ne reste-t-il pas quelque analogie fonctionnelle chez les Insectes? Il est incontestable que c'est au voisinage de l'appareil respiratoire que s'opère l'hématose; or, celui-ci est plus développé dans l'abdomen qu'ailleurs et le sang marche de l'abdomen au thorax. Il est assez probable que du sang plus hématose se rend d'arrière en avant, car le thorax et la tête ont besoin d'oxygène pour la contraction musculaire, très-prédominante chez eux en raison de la localisation thoracique des appareils locomoteurs des adultes et de l'excès de chaleur parfois très-considérable que présente la région antérieure du corps. La démonstration expérimentale sera fort difficile, vu la petitesse des insectes, les incertitudes de l'analyse chimique sur une très-faible quantité de sang, la nécessité d'empêcher sur celle-ci une rapide action perturbatrice de l'air ambiant. Il faudrait ponctionner deux volumes égaux de sang, l'un thoracique, l'autre abdo- minal, et constater si le premier contient plus d'acide carbonique et moins d'oxygène que le second. Respiration . La fonction de respiration a pour objet d'introduire dans le sang, soit par dissolution dans son liquide, soit par absorption spéciale dans les ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. — RESPIRATION. 25 globules, de l'oxygène qui conserve ses propriétés comburantes. Ce gaz, amené dans tous les tissus par la circulation du sang, doit y brûler les éléments combustibles, et fournir ainsi une source puissante et sans cesse renouvelée de force motrice et de chaleur. On donne le nom d'hématose au phénomène par lequel le sang dévivifié provenant des tissus auxquels il a apporté les molécules assimilables, laisse dégager l'acide carbonique et la vapeur d'eau, résultats de la combustion générale, et reçoit à leur place l'oxygène atmosphérique. L'appareil respiratoire est l'organe dans lequel s'effectue l'échange de ces gaz. L'appareil respiratoire des Insectes est disséminé dans tout le corps, tant selon l'axe que suivent les appendices. Il est formé par de minces tubes membraneux, nommés trachées, dont les ramifications, en nombre considérable, se répandent partout et s'enfoncent dans la substance des organes, comme les racines chevelues d'une plante pénètrent dans le sol. Ces tubes offrent deux tuniques emboîtées. La tunique interne, pa- reille à l'épiderme ou cuticule des téguments externes, qui rentre à l'intérieur par les orifices respiratoires, est munie de poils microsco- piques et se détache plus ou moins profondément dans les mues. A la surface extérieure de cette tunique, et jouant le rôle d'une tunique moyenne d'artère, se trouve un fil contourné en hélice, de consistance semi-cornée, empêchant la déchirure des tuniques et les maintenant un peu écartées. Le fil et la tunique interne sont formés par cette substance nommée chiiine que nous verrons constituer essentiellement l'enveloppe du corps des Insectes, et dont le caractère chimique est de ne pas être détruite par l'action d'une solution même concentrée de potasse caustique. Le fil élastique des trachées est le plus généralement incolore, tantôt cylindrique, d'environ 1/70 de millimètre de diamètre ; tantôt en ruban aplati ayant parfois jusqu'à 1/7 de millimètre de large. La tunique extérieure ou fondamentale est d'une autre nature, en tissu cellulaire mou, sorte de chorion muqueux, se détruisant par la potasse qui respecte les deux autres parties. Elle ne paraît pas se souder aux bords des orifices respiratoires, mais rester béante à son origine^, selon M. E. Blanchard. Ce naturaliste admet un espace libre entre le fil élas- tique moyen qui adhère intimement à la lame interne, et la tunique externe, et, selon lui, comme ses injections le démontreraient, le sang se répand entre les deux tuniques, de sorte que l'appareil respiratoire des Insectes rentre dans le cas général au lieu de constituer une ex- ception, reçoit à son intérieur le fluide nourricier plus aisément héma- tose par l'air introduit et n'est, comme d'habitude, qu'une annexe de la fonction de circulation. Cette opinion est encore fortement contro- versée, et c'est ce qui ne nous permet pas de nous y étendre longuement et nous a empêché de traiter cette question à propos de la circulation, ne voulant admettre à cet égard que les idées généralement reçues. D'après M. E. Blanchard, une partie du sang des lacunes entre dans l'inter- valle des membranes péritrachéennes par l'interstice qui resterait béant 28 INTRODUCTION. près des orifices aériens, et sort par les extrémités ramifiées, où s'atté" nue et se perd la tunique interne, de sorte que le vaisseau dorso- cardiaque reprend un mélange de sang revivifié sorti des trachées et de sang dévivifié des lacunes ; le cœur, comme chez les Reptiles, pousserait d'arrière en avant un mélange des deux sangs. D'autres au- teurs, admettant l'entrée du sang entre les tuniques trachéennes, le supposent y demeurer en couche stagnante, sans grande importance physiologique, au lieu du mouvement rapide dont il serait animé selon M. E. Blanchard, Kiifin le plus grand nomhre des naturalistes se refusent complètement à celle pénétration périlrachéenne, et regardent l'héma- tose du sang comme se produisant sur place dans les organes, par en- dosmose des gaz à travers les parois des (rachées. Gratiolet pensait que M. E. Blanchard avait pris pour des corpuscules hématiques de très-fins globules d'air, entrés par déchirure dans la paroi trachéenne. L'objec- tion la plus forte qui ait été présentée par M. Joly, puis par des ana- tomistes allemands, ainsi M, Auguste Weismaim, c'est qu'il n'y aurait pas d'espace libre entre les deux membranes de la trachée, mais un espace rempli de cellules, constituant comme partie interne de la tu- nique exti'rioure la membraw péritonéale des Allemands, dont l'existence se prouverait surtout par l'embryogénie de la trachée. Tout récemment, M, Kijnckel a publié qu'il avait constaté un fait complétant et confirmant les opinions de M, E. Blanchard. On sait que, selon ce savant, les cœurs dorsaux enverraient d'arrière en avant du sang mélangé, qui pénétrerait, d'une manière encore inconnue, dans l'interstice péri-trachéon. Les trachées seraient alors pour le sang les véritables artères, où deviendrait complète l'hématose. Ur, en 18/|9, M. Agassiz a annoncé qu'un certain nombre de trachées se terminaient par des petits tubes dépourvus de iil spiral, pénétrant dans les muscles, et qu'il nomme capillaires de la trachée. M. Kùnckel assure avoir vu une fois, sous un puissant microscope, les difficultés de l'expérience étant, dit-il, fort grandes, dans un faisceau musculaire ar- raché à une Eristalis vivante (Diptères, Brachocères, Syrpliiens), les globules sanguins, emprisonnés entre les deux membranes de la trachée, passer dans les fines artères, d'une manière aussi distincte qu'on les aperçoit dans les capillaires du mésentère ou de la membrane inter- digitale chez les Grenouilles. On a fait cette objection que les cor- puscules du sang des Insectes sont très-gros, eu égard à ce genre d'or- ganes, et passeraient bien difficilement dans ces tubes si atténués, qui seraient au bout des trachées la continuation de la membrane externe seule. En outre, la forme de beaucoup d'insectes Diptères et surtout Hymé- noptères (Sphex, Fœne, etc.), où l'abdomcu est uni au thorax par un frès-grôle pédicule, est une objection grave à lidée d'une circulation de sang à gros globules dans la totalité du corps. (Ju'il nous soit permis de faire une remarque générale. Les discor- AISATOMIE ET PHYSIOLOGIE. — RESPIRATION. 'il fiances d'opinion qui se mani Testent au sujet des expériences de micro- graphie très-délicates, comme le sont celles de la circulation des In- sectes, tiennent au défaut capital inhérent à ce genre de recherches. Elles restent toujours personnelles, et souvent chacun interprùte à sa manière ce qu'il voit. Il faudrait un système d'iajections réussissant à coup sûr et rendant le doute impossible. 11 est nécessaire, pour une dé- monslration expérimentale complète, que l'observateur disparaisse et que l'instrument fonctionne seul ; c'est ce qui rend si précieux tous les appareils enregistreurs. (Ju'on ne se méprenne pas cependant à ma pensée. Il y a pour le microscope bien des cas où le doute est impossible et où tous voient la même chose, ainsi pour les organitcs hématiques des Vertébrés, les corpuscules de la maladie des Vers à soie, etc. Comme vérification expérimentale de son opinion, M. E. Blanchard, répétant et complétant une expérience de M. Bassi, a constaté que les trachées se colorent en bleu ou en rose dans des Vers à soie et dans des larves de Hannetons, aux aliments desquelles furent mêlés de l'indigo ou de la garance. Nous avons déjà vu le sang se charger de ces ma- tières colorantes ; or, selon M. E. Blanchard, il y aurait là une démon- stration, par injection naturelle, de l'introduction du sang entre les membranes périlrachéennes. Pour ceux qui admettent la membrane péritonéale pleine, il y aurait imprégnation des matières colorantes par endosmose cellulaire. Il faut remarquer qu'aux mues des larves la tunique interne et le fil spiral se détachent dans une certaine étendue de la trachée, de là, jusqu'à réorganisation complète, un espace acci- dentellement vide, et où des mouvements de liquides peuvent s'opérer dans un tissu qui se reforme. Nous avons tenu à exprimer dans une complète impartialité les opinions diverses qui divisent encore les sa- vants sur une question qui attend de nouvelles recherches. Les tubes respiratoires existent chez tous les Insectes, à tous les états et qu'ils habitent l'air ou l'eau. On les voit paraître d'un aspect argentin dans les dissections sous l'eau, à cause de l'air qu'ils con- tiennent. Le plus ordinairement, les Insectes respirent l'air à l'état de gaz libre. Il entre alors dans leurs trachées par des orifices spéciaux ap- pelés stigmates ; jamais chez eux la bouche ne sert à l'entrée de l'air. Le plus souvent le stigmate est entouré d'un cercle corné de chitine appelé péritrème, très-visible sur des larves à téguments blanchâtres, empêchant par son élasticité l'occlasiou naturelle des orifices aériens. Généralement encore, une membrane percée d'une fente à deux lèvres occupe l'intérieur du péritrème, et des muscles latéraux servent à ou^ vrir cette sorte de boutonnière, tandis que des muscles antagonistes, tirant en haut et en bas, tendent à la fermer. La fermeture du stig- mate, naturellement enlr'ouvert, a lieu par la volonté de l'Insecte. Aussi, lorsque les trachées sont remplies d'air, l'Insecte, fermant ses stigmates, résiste longtemps à l'asphyxie, demeure engourdi et immo- 2g INTRODUCTION. bile, mais sans périr. Beaucoup d'Insectes peuvent ainsi survivre à l'in- troduction dans le vide , à l'immersion dans l'eau ou dans l'alcool aqueux, môme après plusieurs jours. Cette occlusion volontaire des stigmates nous explique la difficulté qu'on éprouve à faire périr les Insectes par les gaz ou vapeurs délétères, comme l'oxyde de carbone, l'acide sulfhydrique, la benzine, le sulfure de carbone, qui agissent promptement sur les Mammifères et les Oiseaux où l'introduction d'air est forcée et continue. En général, l'Insecte ne périt que lentement dans le gaz toxique, et plutôt par asphyxie que par empoisonnement. Un fait curieux, constaté par M. Milne Edwards sur les Charançons qui dévorent les blés, trouve encore facilement sa raison d'être dans cette occlusion volontaire des stigmates. S'il n'y a qu'une petite quantité de gaz véné- neux, l'Insecte meurt promptement, car l'air empoisonné pénètre, en quelque sorte à son insçu, par les stigmates béants ; dans le second cas, au contraire, une impression tactile ou odorante de l'air trop chargé du gaz nuisible amène une fermeture immédiate, et l'Insecte résiste. Il est bon de ne mettre à la fois dans les boîtes des collections d'Insectes, où l'on veut tuer les espèces qui s'y introduisent pour dévorer les sujets conservés, qu'une faible dose de benzine, ou de sulfure de carbone, ou d'acide phénique. De là encore une très-grande incertitude règne nécessairement sur toutes les expériences de chimie physiologique où l'on veut établir une relation entre les gaz inspirés et expirés par les Insecte? vivants, ou bien entre l'oxygène qui leur est fourni et la chaleur que leur corps dégage. On n'est jamais certain que les gaz qu'on leur fournit pénètrent en entier dans leurs trachées ; on ignore dans quelles proportions des plus variables ils peuvent s'y introduire, et l'on ne sau- rait affirmer que les gaz exhalés proviennent de l'appareil respiratoire plutôt que d'une émanation cutanée. D'une manière normale ou théorique, chaque anneau ou zoonite tend à offrir sur ses côtés deux stigmates ordinairement placés entre les deux arceaux, dorsal et ventral, de l'anneau. Il y a toujours par réduction certains anneaux qui en manquent, ainsi ceux de la tète et les derniers de l'abdomen qui portent les armures génitales. Le premier anneau du thorax, qui ne porta jamais d'ailes, offre toujours une paire de stig- mates, qui paraissent manquer au contraire sur les anneaux du méso- thorax et du métathorax, anneaux alifères, pour reparaître sur les an- neaux abdominaux. 11 semble normalement y avoir exclusion entre les orifices stigmatiques et les ailes qu'on pourrait dès lors regarder comme dps sortes de trachées extravasées. M. E. Blanchard est fortement persuadé de l'existence de cette loi, bien que plusieurs auteurs aient annoncé, chez divers Insectes de tous les ordres, l'existence d'une seconde paire de stigmates thoraciques entre le second et le troisième anneau. C'est l'anatomie interne qui peut seule bien décider la question en faisant voir s'il y a une trachée d'origine allant du stigmate au tronc trachéen, ou si celui-ci n'a qu'un vestige imperforé. Il peut arriver aussi, selon ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. — RESPIRATION. 29 M. E. Blanchard, que le premier anneau de l'abdomen, se soudant à l'an- neau métathoracique et apportant son stigmate, fasse croire à une se- conde paire de stigmates thoraciques. Les premiers anneaux de l'abdomen sont pourvus de huit ou de sept paires de ces orifices ; par dégradation ou par des conditions spéciales d'existence, ce nombre se réduit de plus en plus; et, quand l'Insecte, larve ou adulte, vit plongé dans l'eau ou dans des matières molles, sans cesser de respirer l'air en nature, les stigmates peuvent se borner à une seule paire à la partie postérieure de l'abdomen. On trouve quel- quefois alors des stigmates imperforés, vestiges physiologiquement inu- tiles, et dont la signification philosophique atteste la tendance de la nature à l'unité de composition organique. Quand les Insectes, aériens parla respiration, vivent dans l'eau, des artifices spéciaux permettent l'introduction de l'air dans les stigmates ; souvent des tubes aspirateurs ou des trompes caudales, dont l'extrémité aboutit à l'air libre, viennent apporter le fluide aux stigmates posté- rieurs de l'abdomen. Il arrive, dans certaines familles des ordres des Névroplères et des Diptères, que les larves ont une existence encore plus aquatique et demeurent toujours plongées dans l'eau, sans avoir besoin de puiser lair à la surface. La respiration devient alors bran- chiale, mais seulement pour l'appareil d'introduction et de sortie des gaz ; contrairement à ce qui se passe dans les Vertébrés, l'appareil res- piratoire demeure dans sa partie fondamentale ce qu'il est chez les autres Insectes. Le plus souvent, ces branchies sont extérieures, en la- melles, en houppes latérales ou terminales sur les anneaux de l'abdo- men, en simples appendices caecaux, là où des stigmates les remplace- ront chez l'adulte. Dans les larves des Libellules, elles sont à l'intérieur d'une cavité emî)runfée à un autre appareil et où entre l'eau, le rec- tum. Cette sorte de négligence de la nature à créer un organe spécial montre le peu d'importance attachée par elle à cette forme essentielle- ment transitoire. Dans ces délicates expansions cutanées se logent des trachée qui communiquent avec le réseau intérieur de la même façon que les tubes qui s'abouchent aux stigmates, de sorte que ces branchies ne sont que des trachées flottantes imperforées , appropriées à un échange endosmotique entre les gaz intérieurs et l'air dissous dans l'eau ; elles ne remplacent que les stigmates. Dans ces houppes bran- chiales des larves aquatiques se trouve constamment de l'oxygène, dont Dutrochet a cherché à expliquer la présence par les seules forces de l'osmose. M. Rert pense qu'il faut plutôt rapprocher ce fait de la sécré- tion d'oxygène qui s'opère dans la vessie natatoire des Poissons (Biot, A. Moreau, etc.) (1). Le réseau trachéen interne est plus ou moins compliqué. Réduit à sa forme la plus simple, ainsi chez quelques Hémiptères [aptères, ce ré- (l) P. Bert, Leçons sw la respiration, Paris, 1870, p. 198. 30 INTRODUCTION. seau se compose de tubes isolés parlant des stigmates, avec des ramifica- (ioiis allant aux organes \oisins; presque toujours des canaux anasto- motiqucs rattachent ensemble ces arbuscules aériens isolés. Les plus importants sont des canaux longitudinaux reliant les trachées de chaque anneau, de manière à former en général deux troncs aériens de chaque côté du corps, dépassant le plus souvent en diamètre les troncs qui vont aux stigmates. Du stigmate du prothorax parlent deux tubes , l'un allant à la tête jusqu'au bout des antennes, et l'autre descendant se réunir au tube de l'abdomen, Celle disposition est la plus habituelle : c'est celle des larves des Coléoptères, des Hyménoptères, des Lépido- ptères, de beaucoup de Diptères. Dans les cas particuliers où les stigmates abdominaux se réduisent à la paire postérieure , il en part deux gros troncs qui remontent latéralement et se ramifient. Parfois, entre les troncs trachéens longitudinaux sont des canaux de réunion transverse, faisant communiquer l'air des deux moitiés du corps par des sortes d'échelons ; ces dernières commissures sont bien moins fréquentes que les précédentes. Dans leur forme première les trachées sont toujours tubulaires ou cy • lindroïdes dans toutes leurs ramifications. C'est ce qui existe sans ex- ception dans toutes les larves el dans les adultes des familles d'hisectes où le vol est nul ou médiocre, ainsi chez les Insectes aptères, les Cara- biques et la plupart des Coléoptères, la plupart des Orthoptères, les Hémiptères aquatiques, etc.; mais quand l'Insecte doit acquérir la possibilité d'un vol de longue durée ou d'un vol rapide, les trachées tubulaires de la larve commencent à se modifier dès la chrysalide ou la nymphe, et deviennent chez l'adulte, dans une partie plus ou moins considérable de leurs rameaux, des trachées vésiculaires. Un véritable anévrysme normal se produit, la tunique interne renforcée par le fil élastique s'atrophie ; l'autre tunique persiste, mais, cédant à l'action de l'air, se dilate en ampoules. D'une manière générale, sans toutefois prétendre suivre cette loi avec trop de détail, on peut affirmer que le nombre ou la dimension de ces vésicules est en raison directe de l'énergie de la locomotion aérienne. Dans les Lamellicornes, les Buprestes, les Dytiques (Coléoptères), les Libellules, on voit apparaître sur les rameaux aériens de nombreuses et petites ampoules. Chez les Acridiens et autres Orthoptères susceptibles de migrations, quoique habituellement de vol faible, des sacs pneuma- tiques dorsaux se développent aux dépens de tubes anastomotiques transverses. Le plus souvent les poclies à air se trouvent sur les deux gros troncs longitudinaux, ainsi chez les Lépidoptères, les Cigales (Hé- miptères), la plupart des Hyménoptères et des Diptères. Chez les Abeilles et les Bourdons, ces deux troncs sont devenus deux vastes et longues vessies aériennes, et ils se renflent postérieurement en ballons abdomi- naux chez la plupart des Diptères. On avait très-peu compris autrefois le rôle de ces ampoules des Ira- ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. — CHALEUR ANIMALE. 31 chées vésiciilaires. En trouvant dans les larves un appareil aérien lu- bulaire, mais plus ramifié, ou avait même prétendu que leur système respiratoire était plus parfait que celui des adultes, ce qui eût constitué une dérogation formelle au principe général du perfectionnement des org;nismes avec l'évolution. La perfection de l'organe de la respira- tion des Insectes consiste à recevoir une plus grande quantité d'air, à l'accumuler pour produire une hématose plus considérable, en rapport direct avec une force motrice musculaire, et aussi, comme nous le verrons, avec un dégagement de chaleur propre proporlionnel à l'éner- gie du vol. En outre, ces vésicules, chargées d'air, doivent servir à gon- fler le corps, en diminuant sa densité moyenne, à l'alléger, notamment dans ces Coléoptères trapus ou (à grosse tète (Scarabées, Hannetons, Lucanes), qui ont, par leur forme même, le vol difficile. La force du vol est non-seulement en corrélation avec la charge d'air des trachées, mais aussi avec les mouvements nécessaires pour y intro- duire l'air. Ce fiuide entre et sort par le mécanisme du soufflet, et par cette loi si approchée de la force élastique d'un gaz de masse constante inverse au volume qu'il occupe. Des variations de volume se produisent dans les trachées par le jeu longitudinal de segments abdominaux, ou par le rapprochement et l'écartement des deux arceaux des anneaux. De là des inspirations et des expirations en nombre très-variable, 30 à 50, par minute, si l'Insecte, l'Abeille, par exemple, est calme ; de 110 à 130, si elle frémit des ailes en même temps que s'élève la température de la ruche (Nevvport). Chez les lourds Coléoptères, avant de prendre l'es- sor, des mouvements saccadés des élytres un peu soulevées puis abais- sées, servent à charger d'air les trachées (les enfants disent alors que le Hanneton compte ses écus). Les Acridiens se préparent à leurs longues migrations dévastatrices par plusieurs jours d'inspirations répétées, et leurs trachées, ordinairement affaissées comme des rubans plats, deviennent alors gonflées et cylindriques (E. Blanchard). On constate ces mouvements inspirateurs par resserrement et dilata- tion des arceaux de l'abdomen de la manière la plus visible chez ces grandes Libellules (genres ^nao-, ^Eschna, Gomphus, etc.), qui parcourent les allées des bois d'un vol aussi rapide que celui de l'Hirondelle. Il sera possible de rechercher sur de gros Insectes, comme des Sphinx, en emboîtant leur abdomen dans une flexible enveloppe de caoutchouc reliée à un style, d'obtenir un tracé graphique de ces mouvements, et d'étudier leur rhythme dans ses deux périodes, comme M. Bert l'a fait avec tant d habileté pour les Vertébrés de diverses classes. Chaleur animale. Nous n'avons pas à discuter ici l'origine de la chaleur animale. Il est certain qu'elle se rattache d'une manière directe à la combustion res- piratoire opérée dans tous les tissus, et à la quantité d'air introduite 32 INTRODUCTION. dans un temps donné dans la masse du sang. On sait qu'on désigne sous ce nom de chaleur animale la chaleur développée à l'état libre dans les tissus et dans les organes des animaux. On divise habituellement les animaux en deux groupes sous ce rapport : les uns dits à sang chaud ou à température constante très-sensiblement, quel que soit celle du mi- lieu ambiant ; les autres, à sang froid, dont la tempéature variable suit à très-peu près celle du milieu ambiant. On a rangé d'abord les Mam- mifères et les Oiseaux dans la première catégorie, et tous les autres animaux dans la seconde. Rien ne serait plus exact si la perfection extraordinaire des Insectes, malgré leur petitesse, n'introduisait de leur part une exception remarquable dans beaucoup de cas. On a d'abord reconnu que, lorsque les Insectes sont réunis en grande quantité, de manière à offrir une forte masse, leur température s'élève parfois beau- coup au-dessus de la température ambiante, ainsi, au moment de l'ac- tivité des Insectes, dans les ruches, les nids de bourdons, les guêpiers, les fourmilières, ou dans des amas d'Insectes adultes ou à l'état de larve (1). Il résulte évidemment de ce fait que les Insectes isolés doivent (1) Réaumur et Huber ont trouvé une forte élévation tliermométrique dans les ruches d'abeilles, surtout à l'époque de l'essaimage (voy. mon mémoire Sur la chaleur libre dégagée par les animaux invertébrés et spécialement les insectes, Thèse pour le doctorat es sciences de la faculté de Paris, et Annales des sciences naturelles. Zoologie, 1869, t. XI, p. 135). Newport a vu dans une ruche en hiver, après que les abeilles eurent été fortement excitées, un excès de 38° centigr. environ sur l'air ambiant, et, en mai et juin, les excès naturels, sans troubler les abeilles, qui sont alors les plus grands de l'année, peuvent atteindre 15". Dans des nids de Bourdons , sans causes extraordinaires de calorification , il observa des excès de 6° à 8" environ au-dessus de l'air ambiant ; dans des guê- piers des excès de 14" 3 15"; dans des fourmilières des excès d'environ 8°, 11", 12". Juch, en 1800, constata un excès de plusieurs degrés au milieu de Cantha- rides renfermées dans un vase de terre. En 1817, Rengger signala un fait analogue pour des Hannetons dans un vase, mais sans pouvoir apprécier au contraire d'excès pour des amas de Chenilles ou d'Insectes aquatiques. M. Regnault indique, dans ses expériences sur la respiration, un excès de 2° cenligr. pour le thermomètre maintenu au milieu de Hannetons disposés dans un sac à claire-voie, de sorte que l'air pouvait circuler. Les larves mêmes, en amas, peuvent offrir des excès de tem- pérature quelquefois considérables. Les pêcheurs à la ligne savent très-bien que les asticots (larves de diverses Muscides) dont ils se servent pour amorce, leur lont éprouver une sensation de chaleur quand ils les versent de la boîte qui les renferme dans leur main, engourdie parle froid. J'ai constaté, en été, dans une boîte ouverte remplie de ces larves, que le thermomètre s'est élevé de 28" à 32" et est demeuré stationnaire. L'élévation de température la plus remarquable en ce genre est celle que m'ont offert des gâteaux de cire remplis de Chenilles de la Galleria cerella (teigne de la cire). Pendant quelques jours, les excès se sont maintenus à 12", puis, à mesure que les larves grossissaient, à 2û" et même 27°. Le pot de terre contenant les gâteaux et les Chenilles était très-chaud à la main. Aucune altération de la cire par fermenlation n'existait. Il y a là une intéressante relation entie l'ali- ment et la chaleur produite par l'animal qui s'en nourrit ; la cire, matière des plus combustibles, détermine une chaleur propre considérable. Cette expérience fournit un bon argument à l'appui de l'opinion, au reste généralement admise aujourd'hui, que la chaleur animale a pour cause fondamentale, sinon exclusive, la combustion respiratoire. ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. — CHALEUR ANIMALE. 33 dégager de la chaleur; mais aucune comparaison possible ne peut se déduire de semblables expériences. Des Insectes accumulés en vases plus ou moins clos, gênés les nns par les autres, sont dans des condi- tions anormales ; la chaleur réfléchie et diffusée par les parois du vase revient échauffer les Insectes et réagit, en les excitant, sur leur orga- nisme. Les observations sur les Insectes isolés, pour être rigoureuses, exigent des précautions particulières, qui n'ont sans doute pas été prises dans les anciennes observations. Il faut éviter avec soin l'influence du rayonnement du corps de l'observateur, et surtout du contact de ses doigts. On ne doit pas placer les Insectes dans des vases de verre, sub- stance diathermane, soumise aux radiations caloriques extérieures, ni en vase fermé, ce qui amène un trouble dans la respiration. C'est ce qu'on peut reprocher à une ancienne expérience de Haussmann, en 1803: la première, à ma connaissance, sur un Insecte seul. Un Sphinx eonvolvuli, renfermé dans une fiole de verre , avec un thermomètre placé à côté, donna une élévation de 17" à 19" U. Elle fut analogue avec un Carabus horteiisis, probablement par quelque cchauf- fement accidentel dû à la main de l'opérateur. Il est facile de comprendre que la petite masse du corps d'un Insecte amène dans le problème de la mesure de sa chaleur un élément per- turbateur spécial. Avec les animaux de grande masse, et surtout chez les Mammifères et chez les Oiseaux, où la respiration continue et la circu- lation précipitée produisent un dégagement incessant et considérable de chaleur, l'influence du milieu ambiant est habituellement négligeable. Il n'en est plus ainsi assurément pour de petits animaux de très-faible poids et dont la respiration est en général intermittente : c'est cette in- fluence qui ne nous permet de constater sur les Insectes pris isolément que des excès de température en général très-faibles, alors que, réunis au contraire en amas, ils offrent parfois des excès comparables à ceux des animaux supérieurs. En outre, le thermomètre, quel qu'il soit, dont on se sert, otTre une masse bien supérieure le plus souvent à celle de l'animal isolé, ce qui tend à amener un prompt équilibre en abais- sant rapidement la température de la source. Deux classes de thermomètres ont été employées pour les Insectes. Ces instruments indiquent seulement des différences dans la tempéra- ture ambiante, incontestablement liées aux phénomènes de la respira- tion et de la circulation, mais sans aucune corrélation numérique pon- dérable pour les effets chimiques produits. Dans les uns, appareils thermo-électriques, l'effet calorifique est en relation avec le courant électrique développé et avec la déviation de l'aiguille aimantée du galvanomètre qui en est la conséquence ; dans les ihermomètres ordi- naires, principalement à mercure ou à air, l'effet calorifique se traduit par une dilatation d'un corps constant et identique avec lui-même. John Davy (1826) introduisait dans le corps de l'hisecte, fendu par une large incision, le réservoir d'un thermomètre à mercure. Ce pro- GIRARD. 3 3/i INTRODUCTION. cédé produisait chez l'animal la plus violente perturbation, devant sin- gulièrement exagérer le résultat normal ; et, en outre, le liquide s'écou- lant de la blessure et subissant une évaporation pouvait amener un refroidissement Irùs-variable. Aussi Newport, frappé de ces inconvé- nients, dans ses nombreuses recherches sur les Insectes isolés, au moyen du thermomètre à mercure (1837), avait imaginé, au moyen de pinces entourées de laine et de la main gantée de laine, de maintenir l'Insecte en contact avec le réservoir du thermomètre par le plus grand nombre de points de son abdomen, de manière à l'en recouvrir le plus possible. Il se servait de très-petits thermomètres à mercure, dont le réservoir avait à peine le diamètre d'une plume de corbeau. Pour les Insectes très- actifs difficiles à contenir, il s'est en général contenté du moyen, si gros- sièrement approximatif, d'Haussmann. Dans ces expériences, la néces- sité de faire poser constamment l'Insecte sur le thermomètre et de vaincre sans cesse ses efforts pour s'échapper, doit amener chez l'ani- mal un état de trouble violent, qui n'est pas sans influence sur sa chaleur propre. En outre, le rayonnement du corps de l'opérateur, qui peut produire sur des thermomètres très-délicats des variations allant de l/ô"^ à 1 degré centigr., n'est que trop imparfaitement évité dans les expériences du naturaliste anglais, et ôte toute confiance aux nombres absolus, en laissant subsister, il est vrai, les résultats comparatifs, les plus importants du reste, dans la question. Nous inviterons ceux qui veulent répéter les expériences de John Davy ou de Newport à placer l'Insecte, entouré d'une épaisse couche d'ouate ou, mieux, de duvet de cygne, en le tenant par une longue pince de bois, et à appliquer alors le thermomètre intérieurement ou superficiellement. Il est bon de noter que si l'introduction du thermomètre par vivisection amène un trop grand dégagement de chaleur, la masse même de l'instrument, en absorbant une partie, et diminuant par là la chaleur de la source, une compensation, partielle au moins, s'établit entre ces deux causes d'erreur inverses, et les nombres obtenus sont plus voisins qu'on ne pourrait le croire au premier abord de la véritable température inté- rieure et normale des animaux. Une cause d'erreur commune à toutes les expériences précédentes est la nécessité de faire concorder les indications du thermomètre sur lequel agit l'Insecte avec celui qui donne la température de l'air am- biant, continuellement modifiée par la présence de l'observateur. Aussi, un instrument différentiel, protégé par des écrans , observé à grande distance de l'opérateur, nous a paru préférable. Nous avons choisi le thermomètre (à air) différentiel de Leslie, gradué avec le plus grand soin, par comparaison avec le thermomètre à mercure, et donnant aisé- ment ijU^" de degré centigr. L'une des boules a subi une modification importante. Elle offre une profonde cavité intérieure, de sorte que le volume de l'air compris dans la zone concentrique soit sensiblement égal à celui de l'air de l'autre boule. Les boules, revêtues d'une feuille AKATOMIL ET PHYSIOLOGIE. — CHALEUR ANIMALE. 35 d'argent, devenant par suite athermanes et très-peu émissives, conser- vent le plus possible la chaleur interne et n'admettent pas de radia- tions étrangères. Un écran, percé d'une glace devant la colonne graduée, permet de lire à grande distance, sans aucun trouble pour l'instrument. L'orifice rétréci de la boule est fermé par un bouchon muni d'un tube par lequel l'air entre et sort librement. L'Insecte, saisi au moyen d'une longue pince de bois, est placé dans la cavité, y demeure sans éprouver o FiG. 1. — Thermomètre différentiel de Leslie, modifié pour l'étude des faibles sources calorifiques. aucune pression, au repos ou en mouvement volontaire, respirant li- brement dans un air normal. La chaleur superficielle de tout son corps agit sur la masse d'air clos qui l'entoure et qui est bien plus faible que celle d'un réservoir à mercure, avantage incontestable. Elle pousse la colonne liquide indicatrice, de manière que celle-ci se meuve devant la graduation différentielle centigrade. Dans quelques cas spéciaux, avec des Insectes de forte taille et à cavité rectale large et droite, comme pour les grosses Chenilles, le thermo- mètre à mercure peut être employé d'une façon très-exacte, de même 36 INTRODUCTION. que dans la recherche de la chaleur interne des Vertébrés. On peut in- troduire par le rectum un réservoir thermométrique trùs-eflilé, sans aucune lésion, abrité et soustrait aux radiations externes, et obtenir ainsi des résultats exacts et précis, à cause delà différence qu'une puis- sante évaporafion cutanée peut amener entre les températures de l'in- térieur du corps et du dehors. Les fortes Chenilles n'éprouvent pas de trouble par cette épreuve. On les voit continuer ensuite à manger, puis filer leur cocon. Ce sont les appareils thermo-électriques qui, par leur extrême sensi- bilité, bien supérieure à celle des instruments précédents, sont aptes à donner des indications calorifiques dans la majorité des cas. Ces instru- ments se divisent en deux groupes : les aiguilles thermo-électriques, associées de manière à offrir un circuit à deux soudures, formées de fer et de platine, enduites de gomme laque, sauf à l'extrémité aiguisée en pointe de chaque soudure, et les piles thermo-électriques, à barreaux multiples de bismuth et d'antimoine, ou d'alliages encore plus sensibles, assemblés en faisceaux prismatiques, dont les bases sont formées des soudures, d'ordre pair et impair, enduites de noir de fumée. Les aiguilles thermo-électriques ont servi à MM. Becquerel et Breschet pour établir la température des diverses régions chez l'homme et chez les animaux supérieurs. M. Becquerel a soin de prévenir les expérimen- tateurs des difficultés propres à ces instruments et qui peuvent amener de graves inexactitudes entre des mains inhabiles. Il faut s'être assuré d'une parfaite identité dans les deux soudures, éviter tout contact des doigts, se mettre en garde contre les réactions chimiques des milieux sur les métaux des aiguilles et contre les froids dus à l'évaporation des liquides adhérents. Il ne laut jamais négliger de contrôler de temps à autre les expériences au moyen du thermomètre à mercure ; or, ce contrôle est la plupart du temps impossible ou très-grossier pour les Insectes, vu leur petitesse. Les expériences de Dutrochet (1), par cette méthode, présentent de graves défauts qui les rendent fort inférieures à celles de Newport, malgré le peu de précision de celles-ci. Elles sont en outre si peu nom- breuses qu'il n'avait pas un droit suffisant pour en généraliser les con- séquences. Les aiguilles, fer et cuivre, étaient d'abord moins sensibles que les aiguilles fer et platine, inconvénient notable pour des sources aussi faibles que des Insectes isolés. Si les aiguilles donnent de bons résultats pour les gros animaux, c'est qu'elles ne produisent chez eux que des lésions insignifiantes, et que la forte quantité de chaleur des sources rend négligeables les causes d'erreur. Pour les Insectes, la bles- sure de l'aiguille constitue un trouble important, tout à fait comparable à celui qu'on reproche avec raison aux expériences au thermomètre à mercure avec vivisections. En outre, la soudure, toujours enfoncée par (1) Dutrochet, Ann. se. nal., ZooL,, 2^ sér., XIII, 5. ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. — CHALEUR ANIMALE. 37 Datrochet à 5 millimùtrcs, rencontrait, selon la taille des Insectes, les organes les plus divers. Or, ainsi que nous le verrons, la chaleur varie chez les Insectes suivant les régions, et même avec des difTcrences bien plus marquées que chez les Vertébrés à sang chaud. Pour éviter l'in- fluence de révaporation,Dutrochetplacait l'Insecte, attaché à la soudure, sous une cloche, dans une atmosphère saturée de vapeur d'eau, anor- male par conséquent. A l'air libre, en elfet, il obtenait tantôt du chaud, tantôt du froid pour les Insectes les plus analogues, et attribuait ce der- nier à l'évaporation superficielle, sans remarquer que la soudure était toujours dans les parties profondes et non à la surface du corps. li'effel provenait d'erreurs accidentelles, notamment de liquides extravasés, coulant sur la soudure. Les aiguilles ne sont d'un emploi acceptable, dans les expériences sur les Insectes, que si elles sont enfoncées dans des téguments assez durs pour empêcher tout écoulement de liquide. Les aiguilles thermo-électriques ne sont pas assez sensibles pour appré- cier une différence de température, si elle existe, entre les Insectes aquatiques. et l'eau ambiante. La grande capacité calorifique de l'eau peut au reste amener un équilibre qui n'existerait pas dans l'air ; c'est ce qui arrive pour les Vertébrés inférieurs aquatiques. Les piles thermo-électriques, formées de bismuth et d'antimoine, l'em- portent sans contestation sur tous les autres moyens thermométriques par leur extrême sensibilité ', seules elles donnent des indications avec une foule de petites sources calorifiques, inappréciable par d'autres ap- pareils : ainsi elles sont influencées par des Coccinelles dont le poids varie de 0e'',008 à 0S'',011. Bien plutôt pour démontrer la grande sensibilité de leur appareil que pour faire des recherches physiologiques, Nobili et Melloni avaient imaginé flSSl) de disposer des miroirs con- caves de laiton poli de part et d'autre des faces de leur pile, placée horizontalement, et, dans l'intérieur, des fourreaux de laiton qui l'em- boîtent à chaque bout. Au foyer d'un des miroirs était disposé un In- secte isolé, retenu sans lésion dans un réseau de fils de métal. Plus de quarante Insectes, de divers ordres et à divers états de métamorphoses, furent ainsi essayés, et tous, par rayonnement , donnèrent une chaleur sensible à la pile. Les auteurs se contentèrent, sans autre détail, d'énoncer que les In- sectes isolés dégagent de la chaleur par la surface de leur corps, fait important, déjà démontré par Haussmann, mais que Melloni et Nobili étendaient à beaucoup plus d'exemples. Il faut remarquer que les au- teurs opéraient dans une masse d'air confiné beaucoup trop limitée, dont la température, en s'élevant sensiblement, pouvait réagir sur l'animal ; de plus, on ne peut lier d'une manière simple l'effet ther- mométrique de ce rayonnement à distance avec la chaleur de la sur- face du corps des Insectes ; enfin, les auteurs, ne parlant aucunement des précautions à prendre pour placer ces petits animaux, ont peut-être pu les échauffer avec les doigts, car souvent les Insectes ne sont pas '^ê INTRODUCTTON. assez chauds pour influencer notablement à distance la pile thermo- électrique ; leurs résultats ont été très-faibles. Il en est tout autrement si l'on dispose la pile de Melloni et Nobili de façon que l'Insecte agisse au contact même des barreaux ; il suffit de la placer verticale et de laisser tomber l'animal, appuyé par son poids, sur la face supérieure. Un large cône de métal, athermane, met la pile, outre plusieurs écrans, à l'abri de tout rayonnement étranger, et empêche en même temps la déperdition d'une partie de la chaleur de l'animal ; il est ouvert, de sorte que l'Insecte reste toujours à l'air libre sans lésion ni gêne ; il faut y joindre seulement, pour les Insectes très-vifs, un léger diaphragme de fil de laiton qui les empêche de remonter. On ne doit porter les Insectes à la pile qu'au moyen de longues pinces de bois. La forte masse des barreaux tend sans cesse à ramener l'équilibre ca- lorifique ; mais , en raison des dégagements de chaleur de la source vivante, variables selon les contacts avec les soudures et selon des causes inhérentes à l'animal, il se produit des stationnements de l'aiguille du galvanomètre, qui rendent le phénomène tout à fait différent du cas où un corps inerte, de masse analogue et un peu échauffé, est soumis au contact des barreaux et revient à l'équilibre par les seules lois phy- siques de la conductibilité et du rayonnement. Les indications d'une pile donnée sont bien comparables à elles-mêmes, et les rapports qu'on peut déduire des déviations sont précis ; la précision est bien moindre, si, par les procédés approximatifs de graduation empirique que donne la physique, on veut passer à des évaluations en températures centi- grades. Nous devons faire cette remarque générale que , dans les re- cherches sur la chaleur des Insectes, les résultats comparatifs sont les plus importants, et que les causes d'erreur si nombreuses de ces déli- cates expériences donnent toujours une médiocre valeur aux nombres absolus. Quand il s'agit des Mammifères et des Oiseaux, on emploie également pour la mesure de leur chaleur propre une tout autre méthode, celle du calorimètre, où cette chaleur est mesurée en calories. Cette méthode offre l'intérêt considérable de permettre de décider si le nombre de calories produites par l'animal est égal ou non à celui qu'a dû dégager la combustion respiratoire, d'après les poids de carbone et d'hydrogène brûlés par l'animal et obtenus par la pesée des résidus de la combustion respiratoire. Mais les Insectes sont malheureusement les animaux qui se prêtent le moins à l'étude physico-chimique des phénomènes respi- ratoires, parce qu'ils peuvent, comme nous l'avons vu, fermer leurs stigmates, ne pas laisser entrer le gaz ambiant et vivre fort longtemps aux dépens de l'air contenu intérieurement dans leurs trachées. De plus, comme la méthode n'a quelque- exactitude physiologique qu'à la condition d'opérer sur un animal isolé, la petite masse d'un Insecte rend illusoire l'emploi du calorimètre à eau, les corrections devenant aussi fortes que la quantité principale à mesurer. Nous devons donc, ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. — CHALEUR ANIMALE. 3«l pour les Insectes, nous borner aux évaluations thermométriques, et il est très-important de noettre en œuvre, ainsi que nous l'avons fait con- naître, plusieurs moyens thermométriques très-distincts; la concordance des résultats nous donne alors l'assurance que les phénomènes observés sont propres aux Insectes et non pas dus à quelque cause d'erreur inhé- rente à un procédé spécial. Il est en outre absolument nécessaire d'ac- compagner le résultat thermique du poids de l'Insecte mis en expé- rience : cet élément est ici de la première valeur, vu l'influence consi- dérable du milieu ambiant et de la masse du thermomètre; les valeurs obtenues sont toujours des approximations en moins. Que l'on trouve, par exemple, pour la surface du corps d'un Bourdon, en état d'activité musculaire et respiratoire, un excès de 2 à 3 degrés centigr. au-dessus de la température de l'air ambiant, on sera tenté, au premier abord, d'assi- miler le phénomème cà ce qui se passe pour les Reptiles et les Batraciens, pour lesquels le thermomètre donne des résultats analogues ; mais si l'on vient à réfléchir que ce Bourdon ne pèse que 3 à ô décigrammes, on est porté à le rapprocher des animaux supérieurs, à respiration puissante. Les Insectes, en effet, selon les conditions très-variables de leur activité respiratoire, ressemblent tantôt aux Vertébrés à sang chaud, tantôt aux Vertébrés à sang froid. Si nous passons maintenant à l'étude sommaire des résultats consta- tés par divers observateurs, nous remarquerons d'abord que les Insectes, plus qu'aucun autre groupe d'animaux, font ressortir la liaison intime de la chaleur animale et de la combustion respiratoire, de sorte qu'on doit voir dans cette chaleur une conséquence directe de cette combus- tion, tant les variations dans l'activité de la fonction respiratoire se traduisent immédiatement par des variations correspondantes dans la température du corps. La chaleur propre des larves et des nymphes, dans les Insectes à mé- tamorphoses complètes, est inférieure à celle des adultes. Le repos des Insectes, l'abstinence d'aliments, le sommeil, se traduisent immédiate- ment et de la manière la plus sensible par une diminution de la cha- leur propre. Il résulte des observations de Newport et des nôtres sur le Ver à soie, que les larves, au moment des mues, offrent un abaissement dans leur chaleur, fait qui vient justifier le conseil donné aux magna- niers par M. Quatrefages, d'élever la température à l'époque des mues, alors que certains d'entre eux choisissent au contraire ce moment pour éteindre les feux. Les Coléoptères terrestres, ainsi que les Carabes^ ont une chaleur propre moindre que les Coléoptères volants, quoique sou- vent ces Coléoptères terrestres soient très-agiles dans leurs mouvements. La chaleur des gros Sphinx (Lépidoptères) est sensible aux doigts quand on les saisit. Les Diptères, les Sphingides et les Noctuelles en activité (Lépidoptères), les Hyménoptères surtout, ont la chaleur propre la plus considérable, et parmi ces derniers, les Bourdons à corps poilu un peu plus que les espèces à corps lisse. Nous donnerons des nombres quand 40 INTRODUCTION. nous nous oc( uperons des ordres et des familles. Ces faits sont en rap- port remarquable avec les données anatomiques d'un appareil respi- ratoire plus vaste et plus parfait, quoique moins ramifié dans l'adulte que dans la larve, de trachées simplement tubuleuses dans les Cara- biques, vésiculaires chez les Scarabéides, hypertrophiées en ampoules considérables dans certains Hyménoptères et Diptères, etc. D'autre part, l'intermittence dans le développement calorifique chez beaucoup d'In- sectes, selon le vol ou le repos, s'accorde avec une introduction très- variable de l'air dans les trachées. Jamais les Insectes adultes, même dans les états de sommeil ou d'af- faiblissement, ne présentent d'abaissement au-dessous de la tempéra- ture ambiante pour la surface de leur corps, l'air extérieur, librement renouvelé, restant dans ses conditions ordinaires. Ce fait, qui nous est prouvé par plusieurs centaines d'expériences sur les Insectes de tous les ordres, infirme les conclusions de Dutrochet, établies d'après un très- petit nombre d'expériences, et affectées d'erreurs dues au procédé physique de mesure de la chaleur. Les larves et nymphes des Insectes à métamorphoses incomplètes se comportent comme les adultes, pré- sentent toujours comme eux une élévation de température au-dessus de l'air ambiant, ou au moins une température égale, en un mot, à masse égale, se trouvent absolument dans les mômes conditions pour la chaleur propre. Il n'en est plus toujours ainsi pour les Insectes à métamorphoses complètes. Souvent, pour les Chenilles à corps lisse, la surface du corps s'abaisse au-dessous de la température de l'air, ce qui montre que le dégagement de chaleur par la combustion respiratoire peut être insuffisant pour compenser la perte due à l'évaporation super- ficielle ou transpiration cutanée. Le même fait se présente pour les chrysalides, bien entendu lorsque la température ambiante est assez élevée ; l'évaporation cutanée est prouvée dans ce dernier cas de la ma- nière la plus évidente par les pertes de poids croissantes, les chrysalides ne prenant pas de nourriture et ne rendant pas d'excréments. Le cocon, dont un grand nombre de chrysalides de Lépidoptères et d'Hyméno- ptères s'enveloppent, sert à empêcher une dessiccation trop rapide de la chrysalide, qui coïncide avec un refroidissement superficiel funeste. En effet, nous avons constaté, dans un très-grand nombre d'expériences, que les chrysalides en cocon présentent une notable élévation de tem- pérature au moment où on les sort de cette enveloppe protectrice ; puis, laissées à l'air, elles perdent peu à peu de leur poids par évaporation et descendent souvent, pour la surface de leur corps, au-dessous de la température ambiante. En hiver, les Chenilles rases engourdies et les chrysalides reviennent cà la température ambiante ou à de très-faibles exjcès en dessus. Les refroidissements superficiels dus à l'évaporation ne se produisent plus dès que la température devient très-voisine de 0", résultat tout à fait conforme aux données de la physique. Enfin il arrive souvent que, parmi plusieurs chrysalides de même espèce, placées à AiNATOMIE ET PHYSIOLOGIE. — CHALEUR ANIMALE. 41 côté les unes des aulres, il en est qui sont notablement plus chaudes que les autres, absolument dans les mêmes conditions extérieures ; cela indique que le travail de transformation doit s'opérer par inlermittences, avec des périodes de repos complet où la température redevient très- sensiblement celle de l'air ambiant. On sait, en physiologie, que ces intermittences sont fréquentes dans les évolutions organiques. Nous avons pu, au moyen du thermomètre différentiel à air modifié, mesurer la chaleur propre superficielle des Libellules ou Demoiselles (Névroptères), dont le corps grêle et allongé ne se prêtait à aucun des anciens procédés, et constater que, lors de l'activité de leur vol, elles ont une température élevée, un peu inférieure, à poids égal, à celle des Bourdons, et tout à fait analogue à celle des Hyménoptères à corps lisse. Les Hémiptères, négligés par les précédents observateurs^ nous ont donné, pour les Géocorises, ou Punaises terrestres, une faible chaleur propre, bien moindre que celle des Hyménoptères, des Lépidoptères et des Di- ptères. D'une manière générale, la chaleur superficielle des Coléoptères est médiocre, résultat auquel, outre l'état de l'appareil respiratoire, doivent contribuer l'épaisseur et la faible conductibilité des téguments. Les Insectes aquatiques placés dans l'air (les Coléoptères du moins) se comportent tout à fait sous le rapport du dégagement de la chaleur comme les Insectes terrestres de même masse, appartenant au même ordre et de mobilité analogue, ce qui s'accorde parfaitement avec l'identité du mode de respiration. On sait de môme que les Mammifères pisciformes, hors de l'eau, ne présentent pas une chaleur moindre que les Mammi- fères terrestres. Quant aux Insectes aquatiques maintenus au sein de l'eau, leur température ne paraît pas s'élever au-dessus de celle du liquide ambiant, mais ce résultat négatif peut tenir au défaut de sensi- bilité des aiguilles thermo-électriques. Le sexe présente une influence marquée sur le dégagement de la chaleur superficielle dans certains groupes d'Insectes. Ainsi, chez les Bombycides (Lépidoptères), les mâles sont plus chauds que les femelles ; et si, au premier abord, ce fait paraît naturel, en considérant que les mrdes, bien plus actifs, offrent une combustion musculaire plus consi- dérable, on aurait pu toutefois penser qu'une compensation s'établirait eu égard à la masse, habituellement bien plus forte, des femelles. L'expérience seule pouvait décider. On doit bien se garder de géné- raliser un pareil résultat ; nous n'avons pu constater aucune relation sexuelle dans de nombreuses expériences sur les Bourdons, sur les Libellules , ni sur diverses espèces de Phalénides et de Noctuelles (Lépidoptères). On sait que, par des expériences importantes, John Davy, MM. Bec- querel et Breschet, plus tard MM. Claude Bernard et Walferdin, sont parvenus à établir certaines différences dans les températures de di- verses régions du corps des animaux supérieurs, que MM. Becquerel et Breschet notamment ont pu constater chez l'homme un excès d'environ kl INTRODUCTION. 1 degré cent, sur un muscle en contraction comparativement au même muscle en repos. Il était intéressant de rechercher si des faits analogues existent chez les Insectes, d'autant plus qu'il y a là une dépendance spéciale de la disposition du système nerveux, de la présence de cer- taines glandes, etc. Dans les Chenilles, la chaleur n'est pas localisée dans certains anneaux, mais appartient à tous, ce qui concorde bien avec la dissémination analogue des centres nerveux. Elles affectent d'autant plus l'appareil thermo-électrique qu'un plus grand nombre de leurs anneaux sont en contact avec les barreaux. Il en est tout autre- ment chez les Insectes adultes qui présentent une locomotion aérienne puissante ; ils offrent une variation de température entre le thorax et l'abdomen qui atteint des limites tout à fait du même ordre de gran- deur que l'excC»? de température du corps de l'Insecte sur l'air ambiant, de sorte qu'on peut dire que le thorax est le siège d'un véritable foyer calorifique. Le phénomène est donc d'un tout autre ordre, sous le rap- port de ses proportions, que chez les Vertébrés supérieurs. On peut employer pour le mesurer soit les aiguilles thermo-électriques, placées l'une dans le thorax, l'autre dans l'abdomen; soit, si l'Insecte est assez gros, le thermomètre à mercure introduit d'abord dans l'abdomen, puis, lorsqu'il est entré en équilibre, poussé dans le thorax. On constatera avec des Bourdons des déviations considérables de l'aiguille du galvano- mètre, indiquant toutes un grand excès de chaleur du thorax sur l'ab- domen. Ces excès, chez les Sphingides (Lépidoptères à vol très-puissant), atteignent des valeurs de ûà 6 degrés habituellement, parfois même de 8 à 10 degrés, et sont obtenus dans un temps très-court, presque instan- tané. Chez les Insectes, au contraire, de vol très-faible ou nul, il n'y a pas ou il n'y a que très-peu d'excès de chaleur du thorax sur l'abdomen (ex. : Courtilières, Sauterelles). Il faut remarquer combien ce résultat, surprenant par sa puissance, est conforme aux données anatomiques. Dans le thorax se trouvent à la fois, chez l'adulte, les puissants muscles des pattes et des ailes, ces derniers en contraction énergique lors du vol et siège d'une forte combustion ; au contraire, les muscles de l'abdomen sont alors inertes. En outre, suivant l'opinion la plus généralement adop- tée, l'activité de la respiration est plus grande pendant le vol dans le thorax que dans l'abdomen, l'Insecte respirant surtout par les stigmates du thorax quand il vole, et par ceux de l'abdomen lorsqu'il est au repos. Enfin, l'excès calorifique du thorax sur l'abdomen est sans doute lié aussi à la prédominance de masse et à la concentration des ganglions nerveux thoraciques comparativement aux ganglions abdominaux. Il faut bien remarquer que si des Insectes de vol très-puissant ont donné des excès du thorax sur l'abdomen de 6 à 8 degrés, ceux de vol moyen (ainsi les grands Bombycides, Paons de nuit, etc.) n'ont plus que 2 à 3 de- grés d'excès ; et, enfin, l'excès est très-faible chez de gros Insectes, quand le vol est à peu près nul (Sauterelles vertes, Courtilières, etc.), et peut-être, dans ce cas , tient-il à la différence de conductibilité par différence ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. — CHALEUR ANIMALE. ^3 d'épaisseur des téguments des deux régions. On peut donc formuler cette loi générale : Chez les Insectes doués de la locomotion aérienne, la chaleur se concentre dans le thorax en un foyer d'intensité proportionnelle à la puissance effective du vol. La conformation anatomique des Insectes à abdomen pédicule se prête parfaitement au fait du désaccord thermique des deux régions. Si chez le Mammifère et l'Oiseau, c'est-à-dire les Vertébrés comparables aux In- sectes par le perfectionnement des appareils de la vie animale, le corps offre partout de larges sections où de nombreux troncs vasculaires per- mettent une rapide propagation de la chaleur avec le sang, et , par suite, un équilibre à peu prés complet partout, avec quelle difficulté, au contraire, les courants sanguins, si transmission il y a, doivent-ils passer par le détroit resserré que constitue le pédicule d'une Guêpe ou d'un Sphex. La chaleur développée dans le thorax lors du vol peut-elle même passer dans l'abdomen? Quelle différence profonde paraît résulter de ces recherches entre la circulation des Insectes et la circulation rapide des Vertébrés supérieurs, à chaleur promptement disséminée partout! Je dois, pour terminer, faire cette observation que les méthodes d'ob- servation les plus difl'érenfes ont conduit au môme résultat pour l'excès de température d'une région sur l'autre ; pour les Bourdons et les Han- netons, les aiguilles thermo-électriques ont donné le résultat, et, pour de plus gros Insectes, je me suis servi du thermomètre à mercure, soit au dedans des régions, soit au dehors. Rien de plus aisé que de répéter l'épreuve. On prend au vol un gros Sphinx , on le laisse quelques heures dans une salle à température constante. Puis l'insecte est main- tenu sur du duvet par une longue pince de bois. On introduit le réser- voir d'un fin thermomètre dans l'abdomen, et, un premier excès obtenu sur l'air ambiant, on pousse l'instrument dans le thorax. Aussitôt, comme par une flamme, le mercure monte de pusieurs degrés en une fraction de seconde. On peut constater de la manière la plus évidente, sur les Bourdons par exemple, que le dégagement externe de leur chaleur propre est en rapport immédiat avec la production du bourdonnement ; la tempéra- ture s'abaisse dès que l'Insecte cesse de bourdonner, se relève aussitôt que reprend le bourdonnement, et cela un grand nombre de fois con- sécutives ; or, on sait qu'alors l'air des premiers stigmates sort et vient frapper les ailes , en outre une contraction musculaire , et, par suite, une combustion, accompagnent ce bourdonnement. Ce fait est tout à fait lié au précédent. Si la chaleur des Insectes, comme cela est constaté déjà par Newport, est en raison directe de l'activité de leurs mouve- ments, on démontre en outre qu'elle est incomparablement plus forte quand l'agitation des membres, des ailes et du corps est le fait propre et volontaire des insectes, que quand cette agitation provient d'une exci- tation étrangère qui fatigue l'animal et ne le laisse véritablement pas dans son état normal. [\U INTRODUCTION. Chez quelques Insectes de très-forte taille, surtout chez les Chenilles, l'introduction rectale, sans lésions, du thermomètre à mercure, permet d'apprécier des différences considérables entre cette température et celle de la surface du corps, différences sans analogie par leur grandeur avec celles des animaux supérieurs, et dénotant sur les sujets des expé- riences une extrême influence réfrigérante de l'évaporation cutanée. Comme conclusion de ces recherches, si l'on considère d'une part que certains Insectes, dans les cas de très-grande activité de la fonction res- piratoire, peuvent présenter des excès de température très-élevés au- dessus de l'air ambiant, excès considérables, surtout par ce fait que le milieu ambiant et le thermomètre enlèvent une portion notable de la chaleur de sources d'une aussi faible masse ; si l'on remarque, d'autre part, que certains groupes d'Insectes, ou les Insectes à l'état de larve ou de nymphe, n'offrent au contraire que de petits excès de chaleur propre, on est conduit cà faire de cette classe d'animaux un groupe spécial, sous le nom à'anhnaux à température mixte, intermédiaire entre les animaux à température constante, qui sont les Mammifères elles Oi- seaux, sauf les cas d'hibernation, et les animaux à température variable, ne présentant dans toutes les conditions qu'un très-léger excès au-des- sus de la température ambiante; ils comprennent les Reptiles écailleux, les Batraciens, les Poissons et les Invertébrés autres que les Insectes. S'il est incontestable que les Insectes peuvent, dans quelques cas, de- venir de véritables animaux à sang chaud et posséder un excès de tem- pérature considérable, cependant ils se comportent sous certains points de vue comme les animaux à sang froid. C'est ainsi que nous avons déjà signalé leur résistance énergique à l'asphyxie par le vide, l'immersion dans les liquides et dans les gaz, avec occlusion volontaire des stigmates. Ils sont aussi doués d'une faculté puissante de supporter de grandes variations de chaleur et de froid. On doit distinguer ici deux états dif- férents des Insectes. Dans l'œuf ou dans la chrysalide , sorte de second œuf où les organes se reforment aux dépens de tissus mous, les In- sectes sont à l'état de vie latente, avec une très-faible respiration, et, par suite, dans la meilleure condition pour supporter des températures excessives. Spallanzani, dont les expériences sont rapportées par Séne- bier, a fait voir que la respiration est moins active chez les chrysalides que chez les chenilles elles papillons : les chrysalides du papillon blanc du chou ne commencent à dégager l'acide carbonique qu'à -|- à° R. Ces mêmes chrysalides, ainsi que toutes celles qui sont nues, résistent en hiver à des froids considérables, allant à — 20° dans nos climats et à des températures bien plus basses encore pour les Coliades des hautes montagnes et des régions circumpolaires. Selon Réaumur, les chrysalides qui ont l'habitude de s'abriter en terre' ou dans un cocon supportent moins bien le froid et se congèlent plus lot que les chrysalides nues ; au reste, cette congélation n'amène nullement leur mort. Au con- traire, M. Lacordaire rapporte avoir trouvé souvent à la Guyane, le long ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. — CHALEUR ANIMALE. 45 des chemins sablonneux et à la surface d'un sol frappé par Tardent so- leil des tropiques, des chrysalides de Spliinx pleines de vie. Les œufs des Vers à soie peuvent être amenés à -{■ 55° sans périr (l^obinet) ; au contraire, Spallanzani en a exposé à des froids artificiels de — UO" et — 50", sans qu'ils gelassent ni que leur fertilité en eût souffert. Loise- leur Deslongchamps, Bonafous, ont soumis ces œufs impunément aux froids les plus rigoureux de nos hivers; dans les envois de graine du centre de laChine^ avec lesquels nos sériciculteurs cherchent à triompher de la désastreuse épidémie qui Irappe en Occident l'industrie de la soie, il est arrivé plusieurs fois que ces œufs, apportés par caravane, ont tra- versé les plaines glacées de la Sibérie. Les œufs du Liparis dispar, du Bombyx neustria, de YOrgya antiqua (Lépidoptères), etc. , subissent les froids les plus violents des hivers de l'Europe boréale. La résistance 'des chrysalides à de très -basses températures nous explique la faune si variée des Lépidoptères de la Sibérie méridionale, à longs et rudes hivers suivis d'un été court, mais très-chaud. C'est par excellence le climat continental ou excessif. On y rencontre à la fois les espèces septentrionales, certaines du midi de l'Europe, et enfin des espèces véritablement tropicales. Dans leurs autres états de larve ou d'adulte, les Insectes se trouvent au contraire dans les conditions de la vie active ; la plus grande partie des adultes ou des Chenilles qui doivent passer l'hiver entrent en hiber- nation à ia fin de l'automne, à la façon des Loirs, des Hérissons, des Hi- bous, lorsque la température n'est plus que de -f- 3° à -(- W environ ; et, dès lors, leur respiration devient nulle et très-faible. Un grand nom- bre de Chenilles passent ainsi l'hiver entre les fentes des écorces, sous les feuilles sèches, parfois plus ou moins enfoncées en terre. Elles se remettent k manger aux premiers rayons du soleil de printemps ; elles se réveillent dans les hivers doux, et beaucoup périssent alors si elles ne trouvent à leur portée quelque plante basse pour en faire leur nour- riture. On a reconnu que les chenilles de certaines espèces peuvent supporter ainsi les températures les plus basses, ainsi les chenilles de certaines Chélonides {Ch. laponica Quonseli, Cervini), qui habitent la Laponie ou les sommets des Alpes voisins des glaces perpétuelles, et passent sous la neige un hiver long et très-froid. On a depuis longtemps constaté que des chenilles peuvent être congelées et revenir à la vie. Ainsi, M. Boisduval a observé des chenilles de Leucania qu'on eût pu prendre pour des stalactites de glace ; leur cassure était nette, et elles sonnaient en tombant dans un verre. Cependant presque toutes se métamorpho- sèrent au printemps, comme de coutume, et donnèrent ensuite leurs papillons à l'époque habituelle. Ross a vu dans les régions polaires cer- taines Chenilles revenir à la vie, même après quatre congélations à — 42° environ, chacune d'une semaine, et suivies de dégels. Les larves de Pyrale de la vigne, gelées jusqu'à six fois, ont survécu. Dans le Mii- connais, en 1837, le froid a atteint — 17°, et, si la vigne a soulfert, les 46 INTRODUCTION. chenilles ont résisté. Il est un cas où la gelée peut causer la mort des Insectes : c'est quand elle empêche la sortie des adultes dont les chi'y- salides sont en terre, ou la montée des Hannetons éclos sous le sol au printemps. On ne saurait cependant prétendre que toutes les larves puissent ré- sister à de grands froids ; cela n'arrive que pour les espèces prédes- tinées à vivre à de hautes latitudes : ainsi, quand à Hyères se produi- duisenl ces hivers exceptionnels pour le midi de la France, comme celui de 1863 à 1864, qui détruisent oliviers et orangers, les chenilles du Charaxes Jasius, surprises par la gelée sur les feuilles de l'arbou- sier et tranformées en glaçons, meurent et noircissent sans donner leur magnifique papillon. En 1869, un l'ait curieux d'influence du froid fut communiqué à l'Académie des sciences par M. Duclaux. Des œufs de Vers à soie vinrent à éclosion prématurée après une exposition artificielle à la glacière pendant quarante jours, qui avait remplacé le froid de l'hiver nécessaire pour la formation de l'embryon. Une graine maintenue foute l'année à la température habituelle de son éclosion n'éclôt pas, et l'embryon y meurt. De là les insuccès d'éclosion après les hivers doux très-redoutés des sériciculteurs. M. Pasteur a remarqué que l'expérience de M. Duclaux paraît donner la clef d'une pratique des Japonais, qui consiste à placer la graine de \er à soie, au cœur de l'hiver, pendant quelques jours, dans l'eau glacée. La variété avec laquelle procède la nature dans ces questions ne doit jamais être oubliée; on ne peut pas généraliser 1 expérience de M. Du- claux en dehors des races de Sericaria mori à une seule génération par an. D'autres races de la même espèce, destinées aux pays chauds, éclo- sent plusieurs fois par an, sans nécessité de refroidissement des œufs. Un nombre considérable de nos papillons indigènes sont dans le même cas, leur œufs éclosent en été quelques semaines après la ponle. Tels sont, dans le môme grand type que les Vers à soie, les Attacus Cyn- thia vera et Arrindia (Vers de l'allante et du ricin), et nos Paons de nuit {Attacus Pyri, Spini, Carpini). Au contraire, le Ver à soie du chêne du Japon {Attacus ya-ma-mdi) a des œufs qui passent l'hiver, de même le Liparis dispar, le Bombyx neustria, etc. Peut-être, pour certaines de ces espèces, le froid de l'hiver est-il nécessaire au développement complet de l'embryon ? Il faudra expérimenter. Ici encore, gardons-nous de gé- néraliser. Dans la nature, les œufs en bracelet autour des branches du Bombyx neustria donnent leurs petites chenilles au printemps ; mais j'ai constaté, et d'autres avant moi, que si l'on recueille ces pontes, et qu'on les garde à la chambre, à une température moins abaissée qu'au delîors, on obtient l'éclosion anticipée à- la fin de l'automne, par consé- quent sans qu'il y ait besoin absolu du froid hibernal. Des faits d'influence analogue existent dans la science au sujet de l'éclosion de certaines chrysalides ; on sait que les chrysalides sont des se- ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. — CHALEUR ANIMALE. Ul conds œufs où une pulpe, d'abord molle et laiteuse, s'organise en tissus nouveaux. Pour ne citer qu'un seul exemple, prenons un papillon diurne, dont on a fait longtemps deux espèces distinctes, les Vanessa {Araschnia Doubleday) levana et prorsa, ou Cartes géographiques fauve ou brune, selon la couleur du fond. Les premières éelosent en avril et sont dues à des chrysalides qui ont subi le froid de l'hiver ; les autres naissent en juin, et certaines en septembre, de chrysalides développées en été. Si l'on retarde par le froid artificiel, comme l'a fait M. Goossens, l'éclosion des chrysalides d'hiver jusqu'en juin, elles continuent à donner les su- jets à fond fauve, et non ceux à fond brun qui éelosent naturellement à cette époque. Plus anciennement, Pierret avait constaté que, dans des années à été froid et pluvieux, comme en 18Zi5, les secondes éclo- sions tendent à se rapprocher plus ou moins par leur aspect du type levana du printemps, en présentant des formes de passage, et même peuvent devenir presque entièrement semblables, à une époque fort ditférente. L'inQuence de la température est donc des mieux prouvées. Les Insectes adultes offrent également des conditions fort variables dans leur pouvoir de résister aux abaissements de température. On voit la plupart des Coléoptères se mouvoir lentement et avec peine quand la température n'est plus que de + 2" à + 3" ; les Abeilles de- viennent inactives et ne sortent plus de la ruche quand la température extérieure n'est plus que de 8 degrés environ. Spallanzani a fait voir qu'on peut sans danger les porter à un froid de — 00,5 R. ; qu'elles restent plusieurs heures sans se congeler à — 2» R., ou — 3° R., mais meurent ensuite. Lors du rigoureux hiver de 1788-1789, Dubost a vu, dans des ru- ches d'Abeilles, la température de l'air de la ruche descendre à — 5». Les Abeilles, malgré ce froid, restent vives et bien portantes, mais ne se dis- persent plus dans toute la ruche comme en été ; elles se groupent en peloton serré, conservant une température interne de -f 20° environ ; les glaçons qui envahissent la ruche s'arrêtent brusquement autour de ces pelotes d'Abeilles. Il est très-probable que Newport, en Angleterre, qui a cru à l'engourdissement hibernal des Abeilles, obtenait dans ses ruches en hiver des résultats thermiques variés, selon que ses thermo- mètres à poste fixe étaient ou non entourés par les groupes d'Abeilles. La température de la glace fondante nest pas une limite absolue à laquelle ne puissent résister les Insectes adultes. Straus-Durckheim rap- porte avoir observé des Dytiques (Coléoptères) nageant encore avec vivacité dans l'eau d'un bassin couvert de glace depuis quinze jours. Ce sont surtout les Diptères, principalement les Cousins, les Tipules, qui peuvent, à l'état adulte, supporter les froids les plus vifs. De Géer cite des Cousins revenant à la vie après avoir été enfermés quelque temps dans la glace. On voit des Diptères voler quand le sol de nos campagnes est couvert de neige, et ce sont les seuls Insectes qui subsistent aux plus hautes latitudes polaires, bien au-dessous du point de fusion de la glace. C'est en hiver qu'éclosent les Lépidoptères des genres Hihernia, 48 INTRODUCTION. Nyssia, Larentia ; on voit parfois, rassemblés en troupe considérable sur la neige, les NévToplères du genre fiorrpus, et les Cynips aptera (Hyméno- ptères). Il existe un groupe d'Insectes apti-res, de très-petite taille, res- semblant foute leur vie à des larves, qui paraissent avoir pour condition essentielle de leur existence riiumidité et même le froid : ce sont les Podurelies. D'après les expériences de M. Nicolet sur la Podura similata, ces petits Insectes périssent plus ou moins vite dans l'eau ayant de 25 à 38 degrés, et en quelques secondes dans l'air sec à 35 degrés. Ayant été soumis dans l'eau à l'action d'un mélange réfrigérant à — 11°, ils furent con- gelés avec l'eau et se brisaient comme elle. Dégelés lentement douze heures après, ils revinrent à la vie en rejetant par les pores de leur surface de petits globules d'air, et, au bout d'une heure, pleins de vie, s'écliap- pèrent en sautant. D'autres Podurelies, prises par la glace, restèrent gelées pendant dix jours consécutifs, et revinrent à la vie de la même manière. On rencontre souvent, en tas sur la neige et pleins de viva- cité, les individus de la Podura nivalis; VAchorutes tuberculatus vit égale- ment sous les neiges, et la Desoria glacialis n'a encore été trouvée qu'à la surface et dans les fissures des glaciers de la Suisse, jusqu'à plusieurs pouces de profondeur. Il résulte la conséquence suivante de tous ces faits : c'est une opinion parfaitement erronée de croire, avec beaucoup d'agriculteurs, que les hivers longs et froids détruisent les Insectes nui- sibles, qui sont alors engourdis ou dans l'état de vie latente des œufs ou des nymphes. Si, d'autre part, nous pensons à la résistance si longue à l'asphyxie que manifestent les Insectes submergés dans l'eau, nous voyons que les grandes pluies ne sont pas davantage une cause de mort pour les Insectes ; ils peuvent être même entraînés par les eaux et re- venir à la vie, s'ils n'ont pas éprouvé de chocs trop violents; les orages seuls, sans doute en raison de leur électricité, paraissent exercer une ac- tion funeste aux Insectes, surtout aux Chenilles, ainsi qu'on le constate dans les touffes, mortelles aux Vers à soie, si redoutées des magnanier?. Au point de vue opposé , certains Insectes peuvent supporter impuné- ment des températures très-élevées. Ils ofl'rent , comme les animaux supérieurs, un moyen naturel de résister à la chaleur ; par les pores très- nombreux dont leur peau est criblée, surtout aux jointures des articu- lations, ils sont susceptibles de se couvrir d'humidité, dont l'évaporation amène une réfrigération salutaire. Les Chenilles, les larves à peau molle en général, redoutent la chaleur -et surtout l'action directe des rayons solaires. Un grand nombre de Chenilles ne sortent pour manger que pendant la nuit; d'autres, diurnes, se cachent sous les feuiles quand le soleil paraît. Les chenilles de Cheloni a ?,wvion[, à corps couvert de longs poils, ri'iloutent beaucoup le soleil, qui tue en quelques minutes la che- nille de Cheloiiia pudica, et vivent cachées sous les plantes basses. Au contraire, par un de ces contrastes fréquents chez les Insectes, nous voyons la chenille du Dcilephila Ëuphorbiœ se tenir, à l'ardeur du soleil, sur les feuilles à demi brûlées des Euphorbes. Nous avons constaté sur ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. — CHALEUR ANIMALE. U9 des Chenilles placées dans des boîtes peu aérées en été, que leur corps se mouille d'une très-abondante transpiration. Les Insectes adultes sup- portent bien plus facilement l'excès de la chaleur. On sait combien la chaleur s'élève dans les ruches, à l'époque de l'essaimage surtout, au point de fondre parfois la cire des rayons (Réaumur) ; la température se maintient alors habituellement à + 32°. Aussi les Abeilles offrent souvent le corps couvert de sueur, surtout celles qui, en activant leur respiration, développent un excès de chaleur nécessaire pour l'éclosion des nymphes (Nevvport) ; les jeunes Abeilles qui sortent des gâteaux ont également les téguments humides, et ont besoin, pour ne pas périr, de la chaleur de la ruche ; de môme que W. Edwards l'a reconnu pour les Mammifères et les Oiseaux au moment de la naissance, leur pouvoir de calorification est bien plus faible qu'il ne le devient quelques heures après. L'excès de chaleur de la ruche semble souvent incommoder les Abeilles, et on les voit, comme l'ont remarqué Dubost et Newport, se placer à l'entrée de la ruche et la ventiler en y appelant l'air frais du dehors par la vibration rapide de leurs ailes. D'autres Insectes résis- tent encore plus facilement à la chaleur. Nous ne savons s'il faut ac- cepter en toute confiance ces récits de Coléoptères aquatiques vivant au sein de sources thermales à température élevée ; car les assertions analogues émises pour les Poissons ont été reconnues controuvées. On doit signaler avec certitude ces Mélusomes (Coléoptères), qui paraissent avoir pour patrie spéciale les régions les plus brûlantes et les plus arides des deux continents, et vivent à la surface de sables que frappe sans cesse un soleil vertical. On voit voler et sauter les Acridiens sur les ter- rains secs les plus fortement échaufTés, et les Grillons des divers pays y construisent leurs nids. Les Termites élèvent leurs demeures coniques au milieu de plaines frappées par le soleil, ou les fixent sur des poteaux ou des arbres morts, dans des lieux bien découverts. Ces derniers nids, dit M. Lacordaire, sont très-communs sur les plantations de la Guyane et du Brésil. Quoique leur surface soit souvent brûlante, 'au point qu'on y peut à peine appliquer la main quelques instants , les galeries qui en sont voisines ne sont pas moins habitées que celles du centre, et l'on voit les Termites circuler indifféremment des unes dans les autres, Les Polistes (sorte de Guêpes), qui, à Cayenno, infestent par milliers les mai- sons, établissent leurs nids papyracés, non-seulement sous les galeries et autres endroits où elles trouveraient de l'ombre, mais sous les bar- deaux qui forment la toiture, et où la chaleur est intolérable pendant la journée. Il y a, dans ces derniers exemples, des élévations de tempé- rature comparables à celles des étuves sèches où l'homme e1 les Mam- mifères ont pu vivre quelque temps, et il est certain que les Insectes que nous venons de citer y résistent pendant une durée bien plus grande, et que cette chaleur même semble une condition normale de l'existence de certaines espèces. GIRARD. à 50 INTRODUCTION. Sécrétions. Comme tous les animaux de type élevé, les Insectes offrent de nom- breux exemples de sécrétions ; des glandes variées retirent du sang certains matériaux, les moditient, soit pour purifier ce fluide nourri- cier, soit pour des usages spéciaux. Déjà nous avons eu des liquides versés en diverses places dans l'appareil digestif; d'autres fois les glandes salivaires ou les glandes anales projettent au dehors des sub- stances destinées à la défense de l'animal , on voit la salive entourer certaines larves pour empêcher leur dessiccation (Cercope écumeuse), ou se modifier en fils protecteurs de la nymphe dans son cocon. Cer- tains Insectes ollrent la sécrétion de matières musquées, liées sans doute à la reproduction, car elles sont propres aux adultes. Tels sont parmi les Coléoptères le Velleius dilatatus^ rare Staphylinien parasite des nids de Frelons ; chez les Lépidoptères, le Charaxes Jasius, du littoral méditer- ranéen ; les mAles seuls des Sphinx convolvuli et ligustri, les Liparis auriflua et Zerene ulmaria (catalogue des Lépidoptères belges), la Calli- morpha hera au moment de l'éclosion (Fallou), etc. D'autres Insectes répandent des odeurs variées, agréables, de rose ou de jacinthe (Cicin- dèles, Capricorne musquéj, ou repoussantes (Punaises des lits, Penta- tomes), destinées, soit à un attrait sexuel, soit à rebuter des ennemis destructeurs ; des liquides suintent chez certains Insectes de parties di- verses de leur corps, lorsqu'on les saisit (Coccinelles, Méloès, larves de Chrysomèles, etc.). Diverses cires, la gomme-laque, etc., sont des sécrétions d'tnsectes. Il est impossible de rien exprimer de général sur ce sujet, tant ces ap- pareils diffèrent chez les divers ordres. Ils sont au reste encore fort mal connus, et constituent un sujet de recherches futures d'un haut intérêt. Nous devons excepter deux ordres de glandes, constantes chez les In- sectes et constituées sur un plan commun : les testicules, sécrétant, chez les mâles, les spermatozoïdes, destinés à féconder les œufs 5 et les ovaires, produisant chez les femelles ces œufs ou cellules qui doivent contenir et nourrir l'embryon et perpétuer l'espèce. L'étude de ces organes ap- partient à la fonction de reproduction. On doit rattacher aux sécrétions la production delà graisse qui s'accu- mule principalement dans l'abdomen, autour du tube digestif et du cœur, dans une foule de vésicules. C'est surtout chez les larves que se forme cette graisse, due à une absorption de matières sucrées ou féculentes, que le travail nutritif de la larve transforme en graisse. Ainsi, dans les galles des feuilles, au centre est l'œuf ou la larve ; à l'extérieur, une couche ligneuse très-dure ; intermédiairement, un magasin d'aliments amylacés destinés à devenir graisse dans la larve. Le tissu adipeux est formé de cellules grossissant à mesure que se dépose lu graisse et unies en grappes par des ligaments. La rupture de leurs parois rend la graisse libre et propre à nourrir les nymphes immobiles. En outre, ces amas ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. — SÉCRÉTIONS. 51 de graisse constituent des bourrelets protecteurs des précieux viscères qu'ils entourent. Quoique les larves surtout soient pourvues de graisse, elle existe encore en abondance dans certains groupes chez les adultes, ce qui explique la longue résistance à la mort de divers Insectes traversés par une épingle et privés de nourriture, la facilité avec laquelle les corps et les ailes de certaines espèces s'imprègnent de graisse après la mort, et la dessiccation des tissus : ce qu'on remarque surtout dans les Lépidoptères mâles, et principalement dans les espèces dont les lai*ves ont vécu à l'intérieur des tiges des végétaux, au milieu d'une abondante matière amylacée. C'est aux dépens de la graisse des larves, en respec- tant les organes essentiels à la vie, que se nourrissent ces nombreuses larves parasites, déposées dans le corps de leurs victimes par des Hymé- noptères ou des Diptères, et qui sont le plus puissant moyen employé par la nature pour combattre le développement exagéré des espèces phytophages. La graisse des Insectes n'a pas été analysée encore par les chimistes. Elle fond à la chaleur en un liquide jaune clair, transpa- rent, inflammable, tachant le papier comme la graisse des Vertébrés. La graisse, et peut-être encore d'autres sécrétions, servent à modifier à l'intérieur les fluides nourriciers ; de même, chez les Vertébrés, la sé- crétions glaireuse du thymus et du corps thyroïde du foetus, le sucre du l'oie, etc. Ce sont là les sécrétions que les physiologistes nomment récré- mentitielles, dont les organes sont logés à l'intérieur, sans déboucher au dehors. Les Insectes nous présentent aussi un autre groupe de sé- crétions dites excrémentitielles, comme celles des follicules gastriques de l'estomac, des tubes de Malpighi, des glandes anales. Leurs organes sont logés de manière à déverser leurs produits directement ou indirecte- ment au dehors. Ce sont des sécrétions externes de matières hydro-car- bonées, éprouvant à l'air une combustion lente qui nous explique la phosphorescence de certains Insectes. Ce phénomène est trop variable dans son siège et ses organes pour faire l'objet d'une étude élémentaire générale. Qu'il nous suffise de dire qu'on y a reconnu, dans les Insectes phosphorescents les plus communs, les vers-luisants (Coléoptères), la combustion d'un produit de sécrétion, s'avivant dans l'oxygène, le rem- plaçant par un égal volume d'acide carbonique, cessant dans les gaz inertes : sécrétion liée d'autre part à la contraction musculaire et plus ou moins subordonnée à la volonté de l'animal. Nous parlerons plus loin de la fonction de reproduction. II. — Fonctions de la vie animale. Système tégumentaire et muscles. La locomotion des Insectes est assurée par un système de pièces so- lides, de consistance plus ou moins coriace, formées par une peau _ durcie et constituant un véritable scléroderme ou squelette cutané ex- térieur, auquel les muscles viendront s'insérer par-dessus; c'e?^ donc 52 INTRODUCTION. l'inverse des Vertébrés, qui offrent aussi un squelette de pièces dures, mais s'articulant à l'intérieur. Ces pièces tégumentaires limitent en même temps les cavités viscérales qui contiennent les organes de la vie végétative. Une partie des sclérodermites constituent les anneaux ou zoonites, disposés selon l'axe du corps; et d'autres, latéralement placés, forment un système appendiculaire plus ou moins perpendicu- laire au système axile. Parmi ces appendices, certains, destinés à la locomotion, sont les pattes et les ailes; d'autres sont des organes de sensation; il en est qui, ap- propriés à la préliension et à l'introduction des aliments, deviennent les pièces buccales; les derniers, enfin, dépendant des anneaux ulti- mes, sont des armures génitales permettant l'accouplement , la ponte des œufs, certains actes défensifs. , il est naturel d'examiner ensemble ces appendices à fontions si va- riées, vu leurs remarquables homologies ; et, comme ce sont les appen- dices locomoteurs qui présentent le développement le plus complet, ils entraînent philosophiquement dans leur étude les autres appendices plus réduits et d'un tout autre usage. Le tégument des Insectes est formé par une peau divisée en deux couches principales: en dessous, le chorion, assez mou; en dessus, l'épidcrme, dur et épais, se renouvelant par les mues, présentant, soit en dessous, soit extérieurement, une sorte de corps muqueux dont les cellules produisent des matières colorantes variées , des huiles plus ou moins solubles dans l'alcool et l'éfher. Cette peau offre dans sa constitu- tion un principe immédiat fondamental, d'abord étudié par Braconnot, puis par MM.Odier,Lassaigne, etc., la chitine, à propriétés spéciales. La peau des Vertébrés, les cornes, les ongles, les poiis, fondent plus ou moins quand on les calcine, et répandent une forte odeur. Le tégu- ment des Insectes se carbonise en brûlant, et conserve sa forme sans odeur sensible, Les parties tégumentaires des Vertébrés sont profondé- ment altérées par l'action dune solution concentrée de potasse causti- que, et s'y désorganisent; par ce genre de macération, et surtout en chauffant, on détruit dans le tégument des Insectes tout ce qui n'est pas la chitine, et cette substance finit par demeurer intacte en forme de pellicule blanche plus ou moins ép&isse, conservant fidèlement la forme et le dessin superficiel des sclérodermites. La chitine est un ca- ractère essentiel de l'embranchement des Annelés, manque chez les Mollusques, les Rayonnes et les Spongiaires, comme chez les Vertébrés; se trouve en mince pellicule chez les Annélides, plus épaisse dans les Insectes, les Myriapodes, les \rachnides, les Crustacés, durcie chez ces derniers, par une incrustation de carbonate de chaux. On enlève ce sel par une macération dans l'acide chlorhydrique très-étendu d'eau; puis, on traite le Crustacé par la solution de potasse, et l'on voit apparaître la chitine comme chez l'Insecte. Cette insolubilité dans la potasse ainsi que son aspect avaient fait assimiler la chitine à la cellulose, prin- ANATOMIE ET PHYSIOLOGIK. —TÉGUMENTS ET MUSCLES. 53 cipe fondamenlal des tissus végétaux. D'après M. Fremy, la chitine pour- rait se représenter uniquement comme du carbone et de l'eau; mais, cependant, serait profondément différente de la cellulose, en ce qu'elle ne produit pas de glucose par l'acide sulfurique, ni de composé ana- logue au pyroxyle par l'acide azotique. Cette opinion est contredite par les derniers travaux de M. Stadeler, qui considère la chitine comme azotée, de formule C'^Hi^AzO'"^, et pouvant donner du sucre, sous l'in- fluence des acides ou des alcalis. MM. Lehmann et Schmidt regardent aussi la chitine comme azotée. Toutes ces questions ont besoin d'être encore élucidées (1). Le type le plus simple de l'anneau d'une zoonite est un cercle chiti- neux, comme on le voit dans les Annélides apodes ; il se complique fréquemment par l'addition d'une paire, et quelquefois de deux paires d'appendices. Dans ce cas, le cercle se subdivise en deux arceaux, l'un dorsal, l'autre ventral; un appendice ou un stigmate peut s'intercaler entre eux ; le plus souvent, et toujours chez les Insectes adultes, chaque arceau se subdivise encore, et les appendices s'insèrent entre des parties distinctes. Le plus habituellement l'arceau ventral porte les appendices : ainsi les pièces buccales, ainsi les pattes, ainsi les pinces copulatrices ; beaucoup plus rarement, une paire d'ailes, d'origine fondamentale- ment distincte, s'attache entre l'arceau dorsal et les pièces de l'arceau ventral. Pour arriver au cas de la plus grande complication, et pour ne pas être embarrassé par des réductions, nous prendrons comme type l'anneau du milieu du thorax d'un insecte adulte. Les deux arceaux sont formés de chaque côté du plan axile de symétrie par des pièces dont les médianes se soudent intimement. Les sclérodermites de l'ar- ceau dorsal présentent deux tergites qui, en se réunissant, forment le tergum ou notum ; l'arceau ventral est formé au milieu de deux sternites soudées en sternum; puis, sur les côtés, sont deux épislernum, auxquels s'ajoutent en-dessus deux épimèrts , formant la majeure partie des flancs, portant attachées les hanches des pattes de l'anneau. D'après l'analyse des deux arceaux donnée par M. Milne Edwards pour la zoonite des Crustacés, construite sur le même type que celle de l'Insecte, les deux arceaux présentent une symétrie complète dans la composition de leurs sclérodermites, l'arceau dorsal étant formé par le sternum et les épimères de chaque côté, l'anneau ventral semblable- menl par le sternum et les épisternum. M. Lacaze-Duthiers, à l'occasion de ses travaux sur les armures génitales des Insectes, a suivi l'opinion précédente pour la constitution de la zoonite de ces animaux. Beaucoup d'auteurs, au contraire, regardant l'arceau ventral comme plus large que l'anneau dorsal, y joignent les épimères comme limite de ses flancs, l'ensemble du sternum, de l'épisternum, de l'épimère, constituant le pectMs (Kirby) de l'anneau. Telle est, en bornant nos citations à des au- (1) Pelouze et Preray, Traité de chimie, S*' éd., 1864, t. VI, p. 486. 54 INTRODUCTION. leurs français, l'opinion soutenue par Audouin, M. Lacordaire, Jacquelin du Val. Lorsque les ailes existent, elles s'insèrent entre le notum et les épi- mères de chaque côté. On rencontre fréquemment des prolongements durs des sclérodermites qui rentrent à l'intérieur des anneaux : ce sont les apodémes destinés à consolider les soudures, à donner appui aux muscles, à limiter des cavités. En outre, la surface extérieure des an- neaux offre assez souvent des creux, des proéminences, des cornes plus ou moins bizarres, sortes d'ornements dont la signification directe nous échappe, mais qui doivent être en raison de la nécessité de résistances variables des parois pour le jeu régulier des organes internes. Dans aucun état des Insectes il n'arrive jamais que tous les anneaux soient distincts; toujours, même dans les larves apodes les moins avan- cées en développement, les zoonites céphaliques se réunissent de ma- nière à former une sorte de calotte cornée. La coalescence de plusieurs anneaux est évidente, car la tête porte plusieurs séries d'appendices, et nous savons que normalement un anneau ne doit offrir qu'une paire d'appendices par arceau. Il existe aussi des réductions par soudure à l'extrémité opposée du corps ; la petitesse des derniers anneaux de l'ab- domen rend fort difficile à résoudre la question de savoir si le dernier anneau n'est pas formé de deux ou trois anneaux soudés ; mais, chez les larves des Insectes à métamorphoses complètes, il n'y a jamais d'au- tres soudures, et les anneaux du thorax et de l'abdomen sont bien dis- tincts, à une seule paire d'appendices, quand ceux-ci existent, tantôt de longueur et de largeur sensiblement les mêmes partout (larves des Lé- pidoptères, desNévroptères, de certains Coléoptères), tantôt à aimcauxde diamètre décroissant du milieu à l'extrémité de l'abdomen ou parfois vers la tête (larves d'Hyménoptères, de Diptères). La même forme se re- marque chez les Insectes aptères dégradés, qui constituent l'ordre des Thysanoures, ou chez certaines femelles aptères des autres ordres ; on voit toujours alors que la largeur du thorax est peu "différente de celle de la partie qui en est voisine. Cette forme rappelle celle de la classe inférieure des Myriapodes, qui offrent des analogies avec les larves des Insectes. Chez la grande majorité des Insectes, deux neuveaux centres de coales- cence longitudinale des anneaux se manifestent : le thorax et l'abdomen. Là, les zoonites demeurent toujours bien distinctes, surtout par la sépa- ration nette des paires d'appendices; les anneaux centraux tendent, dans chacune de ces deux nouvelles régions, à dominer les autres par leur largeur : parfois l'abdomen s'insère largement sur le thorax, forme qui s'éloigne le moins de celle des larves; parfois, au contraire, un étran- glement prononcé des premiers anneaux de l'abdomen sépare celui-ci du thorax, et devient même, par une sorte d'exagération du caractère, un grêle pédicule dans certains Hyménoptères (Fourmis, Guêpes, Sphex, etc. ) Nous allons examiner, dans une revue rapide, débarrassée autant ANATOMIE ET PATHOLOGIE. — TÉGUMENTS ET MUSCLES. 55 que possible de termes techniques qui compliquent trop une étude élé- mentaire de cette difficile question, les trois régions des Insectes et leurs appendices ; mais, auparavant, nous devons donner une idée générale de la manière dont les anneaux du corps sont articulés les uns aux autres, de leur jeu réciproque par l'action des musles qui s'y insèrent intérieurement, et ajouter quelques notions très-succinctes sur ces muscles. Les appendices, tendant à répéter la forme générale du corps, offrent des fails analogues sous ce rapport. Le système musculaire est très-développé et très-puissant chez les Inseetes. Ainsi des mouches suivent les trains de chemin de fer à grande vitesse, en tournoyant, allant et venant : ce qui indique une excessive vélocité. Le thorax surtout, qui porte chez l'adulte les appendices les plus développés, est presque entièrement rempli de muscles. Ce sont des faisceaux de fibres droites, striées, agglutinées les unes contre les autres, avec une gaîne ou aponévrose très-fine pour les différents muscles. Les muscles sont plus nombreux chez l'adulte que chez la larve, qui est toujours moins mobile : leur nombre augmente par dédoublement de faisceaux. On tomberait au reste dans une erreur énorme au sujet de la quantité de muscles des Insectes, si l'on admettait l'évaluation de Lyonnet, dans son célèbre travail anatomique siirla Chenille du saule (Cossus ligniperda, Lépidoptères), où il trouve ù061 muscles. Les aponévroses très-délicates s'étaient rompues, et Lyonnet comptait à tort comme des muscles les fibres élémentaires facilement séparables. Au reste, on n'est pas même d'accord sur le nombre exact des muscles chez l'homme, vu les partages incomplets de certains faisceaux de fibres musculaires ; de sorte qu'on doute s'il y a un ou plusieurs muscles. Les faisceaux mal divisés sont fréquents chez les Insectes : delà une très-grande difficulté pour comp- ter exactement les muscles. L'étude des mouvements des pièces est peut-être encore plus utile dans ce cas que la simple anatomie. Si la pièce n'a qu'un mouvement peu varié, il ne s'y adapte qu'un muscle, et plusieurs, s'il y a des mouvements de sens divers. Les muscles des Insectes sont constitués par une fibrine spéciale, analogue à celle des Crustacés, pouvant, comme elle et comme toutes les fibrines, durcir et se modifier isomériquement par la chaleur, ainsi, par exemple, que la chair cuite des Crevettes. La chair des Insectes entre même dans les usages alimentaires de certains peuples : telles, les Sauterelles à mi- grations (Acridiens) que mangeaient autrefois les Hébreux, et encore aujourd'hui les Arabes ; les Chrysalides, mangées frites ou grillées, en Chine, à Madagascar, etc. Quand les Insectes ont été tués par certains agents, comme la ben- zine, le chloroforme, etc. , leurs muscles prennent une grande et prompte rigidité, surtout chez les Insectes de vol puissant (1). On observe que (1) Maurice Girard, Annales Soc. entom. de France, 1859, t. VII, p. 172. — Cosmos, 1860, p. 90j 1861, p. 8. 56 INTRODUCTION. les ailes, les pattes ne se prêtent plus à la flexion ni à l'étalement ; les anneaux de l'abdomen deviennent semi-rigides. Cet épipliénomène de l'action toxique de ces substances n'est pas spécial aux Insectes, se con- state aussi sur de petits Mammifères, et principalement sur les Oiseaux. Les muscles des Insectes s'insèrent ordinairement aux sclérodermites par un rétrécissement ou aplatissement; il y a quelquefois un tendon d'origine pour les muscles destinés à l'extrémité des appendices. Ces attaches des muscles ont lieu souvent aux apodèmes ou lames scléro- dermiques intérieurement repliées; ainsi l'^^nio^/ioracc ou pièce en 1\ pro- longement intérieur que le thorax présente en dessous et en avant. On voit aussi les muscles s'insérer en dessous aux arceaux dorsal et ventral des anneaux du corps. Dans les appendices, il arrive parfois qu'une lame apodémique, terminaison d'un appendice, entre dans l'appendice contigu ; ainsi au point où la jambe s'articule sur la cuisse. On verra un exemple très-grossi et très-net de cette disposition, si l'on détache de l'article qui le porte la grosse pince ravisseuse d'une Écrevisse. Des échancrures et des rebords empêchent les rétroflexions des articles des membres. La plupart des mouvements des articles axilcs ou appendiculaires des Insectes sont des llexions dans un seul plan conduit selon la ligne mé- diane des pièces emboîtées, et, par suite, résultent d'articulations par ginglyme. Ces articulations sont très-prononcées pour la plupart des articles des pattes, avec réception d'une éminence variable dans une mortaise ou cavité nettement fermée de deux côtés opposés et plus ou moins incomplète d'un ou de deux autres. Elles sont analogues dans beaucoup de cas pour les anneaux de l'abdomen, qui s'attachent l'un à l'autre par deux points placés sur une ligne perpendiculaire à l'axe du corps. Ce genre d'articulation exige deux séries de muscles antago- nistes : les extenseurs et les fléchisseurs. Pour l'abdomen, on trouve d'un anneau à l'autre, tant suivant la ligne du dos que suivant celle du ventre, des muscles longs et plats, permettant une légère flexion et un chevauchement d'un anneau sur l'autre, avec bien moins d'amplitude toutefois que pour la flexion des pièces appendiculaires. Les muscles ventraux qui sont les fléchisseurs sont plus développés et plus puissants que les muscles dorsaux. qui sont les redrcsseuis, Les abdomens larges et épais des Insectes ont encore besoin d'autres mouvements : ainsi pour dilater et contracter les anneaux, ce qui est très-important pour l'en- trée et la sortie de l'air dans l'appareil respiratoire. Ils sont produits par des muscles, droits ou obUques, allant de l'arceau ventral à l'arceau dorsal d'un même anneau ou d'un anneau différent. On trouve encore chez les Insectes certains mouvemenis rotatoircs,mais sans arthrodie ri- goureusement orbiculaire, comme pour le bras ou la cuisse de l'homme. On trouve un mouvement rotatoire de la tête sur le thorax dans beau- coup d'Insectes. Parfois les anneaux de l'abdomen, outre la flexion, of- frent des rotations plus ou moins prononcées l'un autour de l'autre; ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. — TÊTé:. 57 ainsi chezlesStaphylins(Coléoptères),chezla plupart des Hyménoptères, chez beaucoup de Lépidoptères, etc. Il y a alors une sorte d'arthrodie par surfaces cylindroïdes emboîtées, glissant l'une contre l'autre. Tête. La tête des [nsectes est originairement formée d'anneaux distincts, réunis de bonne heure par une ossification confuse, ce qu'on constate plutôt par analogie, en étudiant Tembryon des Crustacés, que par celui des Insectes mômes, d'un examen très-difficile pour la région céphalique. D'après le nombre des appendices pairs et latéraux, à savoir une paire d'antennes, une paire d'yeux composés et trois paires de pièces buc- cales appendiculaires, le nombre des anneaux dont la soudure forme la tète ne peut être moindre que cinq; il est fort difficile, pour les por- tions sans appendices, de décider si d'autres anneaux primitifs les com- posent. La tète présente plusieurs régions dont nous ne nommerons que les principales. En avant Vépistome, ou chaperon ; il est soudé en arrière inférieurement à Vépicrâne, qui constitue la majeure partie de la tôte. On y distingue une portion antérieure appelée front, limitée latérale- ment par les yeux composés ; la région médiane supérieure de l'épicrâne forme le vertex, la partie postérieure Vocciput; le?, joues sont contituées par les portions latérales antérieures, et souvent aussi inférieures, de l'épicrâne, et les tempes par les régions latérales postérieures. La plupart de CCS noms, empruntés à l'anatomie humaine, ne rappellent que des analogies grossières, sans aucune comparaison possible, et nullement des homologies. Chez certains Coléoptères, Névroptères et Hémiptères, existe un cou, prolongement de l'épiderme entre la tête et le thorax; dans les autres ordres la tète est sessile sur le thorax. L'importance de la tête réside surtout dans les organes qu'elle sup- porte ou qui en sont les appendices ; comme chez les Vertébrés , elle contient les sens supérieurs impressionnés par les vibrations, et à dis- tance, la vue et l'ouïe. Le premier anneau céphalique, ou anneau antcnnaire, porte deux appendices nommés antennes (vulgairement cornes), articulés sur l'épi- crâne, le plus souvent sur le vertex, avec rotation dans divers plans, au moyen d'un bulbe arrondi, reçu dans une cavité analogue, à paroi lisse ; il offre une cavité donnant passage aux muscles et aux filets ner- veux. Ces antennes sont formées d'articles emboîtés les uns dans les autres, peu mobiles dans beaucoup de cas, les uns par rapport aux autres. Leur nombre est des plus variables, ainsi que la longueur totale des antennes, tantôt réduites à une soie à peine visible, tantôt plus longues que le corps, à articles renflés ou élargis. Les articles sont par- fois minces et cylindriques, rétrécis graduellement vers l'extrémité, ou au contraire se renflant ; parfois ils ofl'rent des prolongements latéraux qui donnent aux antennes l'aspect de lames empilées (Hannetons), ou 58 INTRODUCTION. de peignes (papillon de Ver à soie). En général, les deux premiers, par- fois les trois premiers articles de l'antenne, ont une forme spéciale, sont des basilaires pour la série des articles suivants. Les Insectes en mouvement portent les antennes en avant et les écartent plus ou moins ; au repos, les antennes, quand elles sont très-longues, sont ramenées en arrière, le long du corps, soit en dessus, soit en dessous. Sans nous oc- cuper ici de la fonction des antennes, nous devons dire qu'elles sont dans une dépendance manifeste avec la sexualité. Si nous prenons en effet les adultes, toujours les antennes sont plus développées chez les mâles que chez les femelles, soit en longueur ou en grosseur des articles qui s'élargissent par rapport aux autres, soit en présentant un plus grand nombre d'articles, ou des rameaux latéraux, ou des feuillets plus amples et en plus grande quantité ; ainsi, on voit souvent dans les Lé- pidoptères des femelles à antennes filiformes, tandis que dans la même espèce, elles sont pectinées chez les mâles. On peut dire que la variété presque indéfinie est le caractère des antennes : c'est ce qui a rendu si difficile l'explication de leur usage, c'est ce qui empêche de se servir en première ligne des antennes dans la classification ; car elles ne donnent que des caractères de peu de valeur, sauf pour des groupes peu étendus. Chez les larves et nymphes agiles des Insectes à métamor- phoses incomplètes, les antennes sont pareilles, sauf parfois un moins grand nombre d'articles, à ce qu'elles seront chez l'adulte. Les Insectes à métamorphoses complètes ont au contraire des larves ou tout à fait privées d'antennes, ou ne les possédant qu'en tubercules rudimentaires, ou enfin les ayant en général plus courtes que les adultes. Les nymphes et chrysalides ont les antennes formées, mais enveloppées sous la peau plus ou moins épaisse qui recouvre l'animal comme d'un voile et arrête ses mouvements. Nous devons dire, pour terminer l'étude des antennes, que leur test n'est pas partout complètement intègre et solide , comme on l'a cru longtemps. Les articles basilaires n'ofl'rent jamais que des poils roides; les autres articles, surtout ceux des extrémités, les massues terminales, quand elles existent, sont criblées d'une foule de pores. Quand les an- tennes sont munies de dentelures, de peignes, de flabelles, ce sont seulement les parties saillantes qui offrent ces pores, la tige princi- pale en étant dépourvue (Erichson). Au contraire de ce qui arrive pour les antennes, la similitude des parties dans tous les groupes, la certitude de la fonction, sont le carac- tère essentiel des appendices de l'anneau ophthalmique qui succède dans la tête au précédent. De chaque côté de la tête, extérieurement aux antennes, sont des organes globuleux , dits yeux composés, yeux à fa- cettes ou à réseau,, formés par la réunion d'un nombre généralement très-considérable d'yeux simples. Leur structure interne sera décrite quand nous nous occuperons des sens. La forme du périmètre de ces yeux varie, ainsi que leur convexité. D'une manière habituelle, ils sont ANATOMIB ET PHYSIOLOGIE. — TÊTE. 59 plus volumineux chez les mâles que chez les femelles (ainsi dans les Abeilles), en rapport avec une locomotion plus fréquente et plus éten- due, et avec la nécessité de chercher et d'apercevoir la femelle. Tantôt ils sont très-gros et occupent la plus grande partie de la tète; ainsi chez les Libellules (Névroptères), chez beaucoup de Muscides (Diptères) ; parfois, au contraire, ils sont à peine visibles, et peuvent même manquer, en raison d'habitation spéciale, chez des Coléoptères des lieux souterrains, chez les neutres de certaines Fourmis (Hyméno- ptères), chez certains Insectes parasites. Dans quelques cas assez rares, au lieu d'être sessiles, ces yeux composés sont portés sur des prolonge- ments ; mais ceux-ci ne sont jamais mobiles, comme cela a lieu chez les Crustacés supérieurs. Sauf le cas de certains Névroptères, ces yeux com- posés manquent chez les larves des Insectes à métamorphoses complètes. D'une manière moins constante, le vertex des Insectes porte des yeux isolés, lisses, dits ocelles ou stemmates, en général au nombre de trois au plus. Ce nombre est plus considérable chez les Arachnides, où ils de- viennent les seuls organes de vision. Ces ocelles existent chez presque tous les Hyménoptères, Orthoptères et Lépidoptères (très-peu visibles dans cet ordre), chez beaucoup de Diptères et d'Hémiptères, certains Névroptères, un très-petit nombre de Coléoptères; ils manquent chez les autres Insectes. Beaucoup de larves de divers ordres ont de très- petits ocelles, variant de un à six. Les antennes, les yeux des deux sortes peuvent être regardés comme dépendant de l'anneau dorsal des zoonites céphaliques soudés. En efTet, les filets nerveux qui les animent partent des ganglions cérébroïdes, situés à la partie supérieure de la tète, au-dessus de l'œsophage. Au contraire, les appendices buccaux dépendent des arceaux ventraux ; car leurs nerfs prennent leur origine dans le premier ganglion sous- œsophagien, situé dans la région inférieure de la tête. L'étude de ces pièces buccales des Insectes est de la plus grande importance pour la classification et sera réservée pour l'histoire séparée des ordres. Elles sont formées d'abord d'une pièce impaire, le labre ou lèvre supérieure, constituée par la soudure, selon M. Brullé, de deux pièces latérales ar- ticulées avec le bord antérieur de l'épistome. Puis se trouvent deux pièces symétriques, les mandibules, qui, chez les Insectes, ne portent jamais d'appendice latéral. Ensuite nous trouvons les deux mâchoires, également paires, puis la lèvre inférieure, aussi de deux pièces, sorte de redoublement des mâchoires. Ces deux dernières parties sont munies habituellement d'appendices latéraux ou palpes. Ces noms conviennent parfaitement à la bouche des Insectes broyeurs; chez les Insectes lé- cheurs, et surtout chez les suceurs, au premier aspect, la bouche semble très-difTérente du premier type. Par une habile analyse, Savigny a fait voir comment les mêmes pièces, par des modifications de forme et de grandeur relative, peuvent s'adapter aux modes d'alimentation les plus divers ; depuis, M. Milne Edwards a donné une nouvelle confirmation 60 INTRODUCTION. de la sûreté de ces principes analogiques, en rattachant à un type com- mun les pièces buccales des Crustacés, même des Crustacés suceurs pa- rasites, qui présentent les plus grandes déformations. Thorax. Le thorax, ou second centre de concentration des zoonites chez les Insectes, est celui qui offre le moins de réductions et dont l'étude peut se faire dès lors de la manière la plus nette. Les trois anneaux du tho- rax, nommés proi/ioj-ax, «lésof /ioraa:,mefaf/ioraa7, ont été identitiés dans leurs parties par Audouin et Lâchât, ce qui rend leur étude compara- tive très-simple. Suivant l'ordre d'avant en arrière, les arceaux dorsaux prennent les noms de pronotwn, mesonotum, metanotum, et les arceaux ventraux, ayant chacun sur les flancs leur episternum et leur épimère, offrent au milieu le prosternum, le mesosternum , \e metasternum. Le prothorax est très-développé chez les Coléoptères, les Orthoptères, la plupart des Hémiptères, et reçoit alors souvent des entomologistes des- cripteurs le nom de corselet; il se réduit beaucoup au contraire chez un certain nombre de Névroptères, chez les Hyménoptères, les Lépi- doptères et les Diptères, et devient alors un anneau étroit appelé sou- vent collier. Par un balancement naturel la zoonite suivante, ou méso- thorax, devient très-grande chez ces mêmes Insectes, surtout s'il arrive en outre que le troisième anneau, ou métathorax, soit réduit en même temps que le premier ; ainsi le mésothorax est énorme chez les Hy- ménoptères, les Lépidoptères et les Diptères, et forme la presque to- talité du thorax. C'est à lui qu'on donne alors le nom de corselet, mot qui, comme on voit, peut, suivant les ordres, s'appliquer à deux zoo- nites différentes. Le mésothorax est petit chez les Coléoptères et beau- coup d'Orthoptères ; car les premier et troisième anneaux du thorax sont grands; il est plus grand chez les Hémiptères, quelques Or- thoptères et beaucoup de Névroptères, et coexiste avec un prolhorax bien développé, parce que le métathorax s'amoindrit. Enfin le méta- thorax, grand chez les Coléoptères, les Orthoptères, certains Névroptères, commence à diminuer chez la plupart des Hémiptères, et se réduit tout à fait chez les Hyménoptères, les Lépidoptères et les Diptères. Chez les Coléoptères, les Orthoptères, la plupart des Hémiptères, le mésothorax et le métathorak sont cachés par les ailes au repos : le premier de ces anneaux restant quelquefois partiellement visible en son milieu (écusson) ; dans les autres ordres, les trois anneaux du thorax sont à dé- couvert. Les formes et grandeurs comparatives de ces anneaux sont les mêmes en général chez les larves et nymphes des Insectes à métamor- phoses incomplètes que chez les adultes. ' Les Insectes dégradés, aptères toute leur vie, ont les trois anneaux du thorax analogues en figure et en étendue; nous devons dès lors comprendre que le même fait se présente habituellement chez les larves des Insectes à métamorphoses Qomplètes, auxquelles les Insectes aptères ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. — THORAX. 6t peuvent se comparer par arrêt dans le développement et dans le nombre des mues. Après la tête à zoonites soudées comme chez l'adulte, se trouvent les trois anneaux thoraciques, pareils s'il s'agit de larves cy- lindroïdes , comme les chenilles (Lépidoptères) et les fausses chenilles (certains Hyménoptères), allant en s'élargissant du premier au troisième chez les larves oblongues ou biconoïdes (certains Névroplères, Hymé- noptères et Diptères); quand la peau des larves est molle, la distinction des arceaux devient véritablement théorique. Chez certaines larves de Coléoptères et de Lépidoptères, les anneaux du thorax, et aussi ceux de l'abdomen, sont très-convexes en dessus et plats en dessous. Il y a des larves de Coléoptères à prothorax, élargi, prédominant (Bupreste, Sco- lyte, Capricornes, etc.). Le thorax des Insectes adultes porte les pattes ambulatoires au nombre de trois paires. Chacune s'insère sur l'épimère de l'arceau ventral et le bord du sternum, et la composition de leurs parties est identique : ce sont une suite de tubes creux, articulés les uns aux autres, formant ainsi une sorte de répétition du type du système axile, A l'intérieur sont contenus des nerfs, des muscles, des trachées. L'articulation de l'appendice est d'une force très-variable. Elle se rapproche dans les Coléoptères, où elle est résistante et mobile en divers sens, de l'articu- lation d'un condyle dans une cavité cotyloïde ; en général elle est beau- coup plus faible dans les autres ordres, se fait par adhérence sans ca- vité profonde. La première pièce est la hanche, qui est souvent en rapport avec l'épimère par une petite pièce appelée trochantin, rentrant dans le thorax et appartenant, selon Jacquelin du Val, à la patte et non au thorax, ainsi que le pensent Audouin et M. Lacordaire. La pièce sui- vante est le Irochanter, articulé par ginglyme avec la hanche. La cuisse, qui est habituellement l'article le plus robuste de la patte, vient ensuite. Puis, toujours avec la même articulation en ginglyme, nous trouvons la jambe, qui présente une flexion très-étendue sur la cuisse. C'est une pièce allongée, plus mince que la précédente, offrant souvent des échancrures, des dents, des épines, etc. La pièce terminale de la patte ou tarse se compose habituellement de plusieursarticles, dont le nombre varie de un (très-rarement) à cinq. Le dernier article porte des organes de suspension, qui sont presque toujours formés par un ou deux ongles ou crochets, parfois offrant en outre des pelotes ou ventouses, permet- tant l'adhérence aux corps les plus lisses (Mouches). Les tarses sont ha- bituellement poilus ou épineux, surtout en dessous. Un éminent naturaliste, M. Milne Edwards, a cherché à substituer à cette nomenclature arbitraire une nomenclature rationnelle, dont la préfixe indique l'ordre de l'appendice du membre, et la terminaison désigne la fonction. Ces noms, proposés pour les Crustacés, peuvent s'étendre aux Insectes. Pour les pattes, nous aurons, à partir du tronc, les coxopodite (tro- chantin), qui peut manquer, basipodite (hanche), ischiopodite (trochan- 62 INTRODUCTION. ter), méropodite (cuisse), carpopodite (jambe), propodite, deutopodite, tritopodite dactylopodite, pour les articles du tarse. Si l'appendice devient un gnathe ou pièce buccale, les articles successifs prennent la terminaison gnathite ; si c'est une antenne, la terminaison cérite. Dans un livre nécessairement élémentaire, malgré la haute importance phi- losophique de ces assimilations, nous ne pourrons essayer leur emploi. Comme ces noms ne sont pas usités dans les ouvrages publiés sur les Insectes, il en résulterait un embarras continuel pour ceux qui débutent dans les études entomologiques. En outre, quand les appendices offrent des réductions, ce qui se voit surtout pour les armures génitales, il est souvent fort difficile, parfois môme impossible, de déterminer nettement l'homologie d'une pièce, et un nom significatif présente alors l'incon- vénient de donner matière à controverse. Nous pensons donc que dans un sujet déjà ardu par lui-môme, il importe, au début, d'éviter toute complication. Les pattes présentent des modifications nombreuses dans la forme et la fonction. Quand elles sont propres seulement à la marche et à la course, leurs dimensions sont analogues dans les trois paires, leurs ar- ticles, plus ou moins similaires, de formes prismatiques, à section sub- triangulaire. Les pattes antérieures se portent en général en avant, les intermédiaires sur les côtés, un peu en arrière, les postérieures tout à fait en arrière : disposition qui assure à l'Insecte la conservation très- facile de son équilibre, la verticale de son centre de gravité tombant très-aisément à l'intérieur d'un très-large hexagone d'appui. Tantôt la marche est plus ou moins irrégulière et sautillante, et les pattes se lèvent et se posent successivement sur le plan d'appui, sans ordre bien déterminé, mais jamais cependant les deux pattes de la même paire à la fois; tantôt, au contraire, la marche et la course deviennent très-ré- gulières, les deux pattes antérieure et postérieure d'un môme côté, et l'antérieure du côté opposé se déplaçant à la fois , les autres étant alors au repos, et vice versa. On peut prendre les Mouches pour exemple. Certains Insectes offrent à la course une vélocité incroyable, dépassant, à taille égale, celle de tous les autres types animaux. En général les In- sectes agiles à la course ont les pattes longues et assez grêles ; cepen- dant, si elles deviennent trop amincies, le faiblesse de leurs muscles, malgré de longs articles , ne permet plus qu'une marche très-lente, parfois comme incertaine. Certains Insectes courent ou marchent sur l'eau. Des dispositions spéciales leur permettent alors de ne pas être mouillés par l'eau et d'être soutenus par un phénomène de capillarité, l'eau offrant une dépression sous l'extrémité de la patte, comme les li- quides non mouillants à l'égard des solides. De môme une aiguille d'acier, graissée, flotte sur l'eau sans enfoncer , quoique beaucoup plus dense. Les tarses de ces Insectes sont alors enduits d'une sécrétion sébacée ou munis de poils qui retiennent des bulles d'air. Quand les Insectes doivent fouir le sol, en général les jambes de ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. — THORAX. 6S devant s'élargissent beaucoup et deviennent digitées; s'ils doivent saisir une proie^ la jambe se replie contre la cuisse, ces deux articles étant alors munis d'épines. Dans ces cas, les pattes de devant sont dites fouisseuses, ravisseuses, et les tarses se réduisent beaucoup et peuvent devenir caducs. Les membres postérieurs sont autrement modifiés dans certains cas. Si les Insectes récoltent du pollen ou d'autres substances sur les fleurs, les jambes et tarses des pattes postérieures se munissent de brosses et de réceptacles appropriés. Chez les Insectes nageurs, les pattes posté- rieures , élargies, ciliées, comprimées, contournées, agissent comme des avirons pour pousser l'Insecte en avant. Leur forme et leur fonc- tion rappellent les membres de la tortue de mer, le tarse de l'oiseau nageur. Quand elles s'étendent, elles frappent l'eau par leur large sur- face, et, par réaction, le fluide ambiant fait progresser l'Insecte ; puis elles reviennent sous le ventre en coupant alors l'eau par leur tran- chant. Dans les mêmes Insectes nageurs, les pattes des autres paires frappent l'eau dans le sens vertical, afin de produire les mouvements d'ascension et d'abaissement. Enfin le saut des Insectes a lieu par un mécanisme tout pareil à celui des animaux vertébrés. Ce sont les pattes postérieures, à cuisses et jambes renflées, qui en sont principalement chargées. La jambe se replie contre la cuisse, puis, se débandant subi- tement comme un ressort, frappe le plan de position et envoie l'In- secte au loin en avant. Il faut bien remarquer que la force musculaire n'étant pas toujours en raison de la section des muscles, il y a des In- sectes, puissants sauteurs, qui ont cependant les membres postérieurs peu renflés. Dans le saut on doit distinguer deux temps, Vélan, propor- tionnel à la taille de l'animal et composé de toute la portion de mou- vement en avant pendant laquelle l'animal n'a pas entièrement quitté le sol, puis la trajectoire de saut, mouvement pendant lequel la sépara- tion d'avec le sol est complète. Cette dernière est constante, comme l'a démontré Straus-Durckeim, pour des animaux de môme organisation, quelle que soit leur grosseur. De ce qu'une Puce saule environ deux cents fois sa hauteur, il est tout à fait faux de croire qu'un homme, or- ganisé comme la Puce, atteindrait à la hauteur des grands édifices ; son élan seul serait plus considérable, mais son saut total n'atteindrait pas la longueur de 2 mètres. Comme chez les Insectes, vu leur peti- tesse, l'élan est insignifiant, une Puce ne sauterait pas plus haut, en prenant le volume de la Sauterelle, et celle-ci ne perdrait rien de sa projection par le saut en se trouvant réduite à la taille de la Puce. Il est quelques Insectes (chez les Thysanoures) où le saut s'exécute au moyen d'appendices spéciaux, dépendant de l'abdomen. Chez la plus grande partie des larves le thorax porte des pattes comme chez les adultes, sans différence appréciable pour les Orthoptères et les Hémiptères, cà métamorphoses incomplètes. Ces pattes thoraciques, au nombre de six, dites pattes écailleuses, se rencontrent dans toutes les 6U INTRODUCTION. larves de Névroptùres et de Lépidoptères, et la plupart des larves de Coléoptères. Elles se composent des parties indiquées pour les adultes, mais souvent plus ou moins rudimcntaires; de sorte que ces paltes sont habiluellement plus courtes que chez les adultes. Leurs articles cornés sont les fourreaux des articles des nouvelles pattes produites après cha- que mue. Le thorax, non plus que le reste du corps, n'offre pas de pattes dans les larves de la plupart des Hyménoptères et des Diptères, et chez certains Coléoptères(Charançons,Scolytes, etc.). Dans toutes les nymphes des Insectes à métamorphoses complètes, les pattes thoraciques , bien visibles dans certains ordres, les Coléoptères surtout, ne sont pas libres, mais engagées sous le tégument dont l'adulte doit se dépouiller. L'appareil alaire des Insectes, qui n'exisle que chez les adultes, et manque dans certains groupes dégradés, fait exception par rapport à tous les autres organes appendiculaires. 11 appartient à un type spécial et différent ; certains auteurs ont comparé les ailes à ces trachées de- venues extérieures et flottantes qui constituent les branchies des larves aquatiques de quelques Insectes. L'aile est d'abord une vésicule ou poche aplatie, soutenue à l'intérieur par une charpente de tubes de chitine qui deviennent les nervures, quand, par résorption du liquide intérieur, les deux parois s'accolent par une intime soudure, et de- yiennent la membrane alaire. Les nervures sont des tubes creux con- tenant des trachées ; car c'est l'air introduit dans ces trachées qui aide à l'extension des ailes d'abord molles et chiffonnées, alors que l'Insecte adulte éclôt. Dans les ailes en voie de formation, des courants sanguins entourent ces trachées, et la peau chitineuse de l'aile s'épaissit aux points occupés par ces trajets de fluide nourricier. Des vibrations ra- pides de ces ailes, après leur extension, ne tardent pas à dessécher leur surface, à la rendre résistante, propre au vol. Si quelque obstacle est apporté, lors de l'éclosion, au déploiement complet des ailes encore molles, elles demeurent, en se desséchant, en forme de moignons à bords contournés, et l'Insecte infirme ne pourra s'élever dans les airs. Les ailes s'articulent sur la partie dorsale du mésothorax et du mé- tathorax, entre le tergum et l'épimère. L'articulation des ailes s'opère au moyen de petites pièces nommées osselets, donnant à l'aile loute la souplesse désirable, sans qu'elle perde de sa force, en nombre variable, suivant les types, paraissant augmenter selon l'importance de l'aile pour la fonction du vol. D'après Jacquelin du Val, on doit ranger parmi ces osselets deux pièces qui appartiennent aux ailes mésothoraciques, et dont certains auteurs font des pièces du thorax : ce sont les ptértjgodes ou épaulettes, manquant chez les (Coléoptères, Orlhoptères, Hémiptères, développées sous forme de baguettes ou d'écaillés chez les Diptères et les Hyménoptères, recouvertes de poils chez les Lépidoptères. Les nervures ou tubes chitineux contenant les trachées constituent la charpente de l'aile et déterminent sa forme et son contour. On doit réserver ce nom aux principales, surtout celles qui partent de la base ANATOMIE O PHYSIOLOGIE. — THORA\. dS de l'aile, et nommer tiervules les liges intermédiaires plus petites. Entre les nervures et les nervules se trouvent les cellules de l'aile, four- nissant de très-bons caractères de classification. La consistance des ailes est très- variable. Elles sont nues dans beaucoup d'ordres (Névroptères, Hyménoptères, une partie des Hémiptères, Diptères), avec des poils dis- posés surtout le long des nervures. Elles se recouvrent d'écaillés pédi- culées chez tous les Lépidoptères, au moins au moment de l'éclosion de l'adulte. Jamais les ailes inférieures ne deviennent coriaces ; seulement chez les Diptères elles perdent complètement leur forme habituelle. Les ailes supérieures peuvent devenir plus ou moins coriaces. Elles constituent des é/j/fres si leur dureté et leur épaisseur restent sensi- blement les mêmes partout et au\ deux bords, ainsi dans les Coléo- ptères ; des pseiidélytres si la consistance est moindre sans arriver à l'état membraneux des véritables ailes : tels sont les Orthoptères; enfin des hémélytres si elles sont coriaces à partir de leur insertion jusque vers le milieu, puis si elles se continuent par une région membraneuse, ce qui arrive chez les Hémiptères hétéroptères. Ces ailes épaissies sont alors destinées principalement à servir de fourreaux aux ailes inférieures lors du repos, à soustraire aux" déchirures leur membrane délicate. Ciiez les Hyménoptères, une partie des Lépidoptères, une partie des Hémi- ptères, les ailes supérieures entraînent les inférieures dans leur mouve- ment au moyen de mécanismes spéciaux, variant d'un ordre à l'autre. Dans les autres ordres, les ailes des deux paires sont indépendantes. Les ailes des deux paires sont constituées sur le même plan, quoique rarement égales entre elles (certains Névroptères, Agrioris) ; elles s'adap- tent à l'arceau thoracique, qui lei porte par une portion rétrécic nom- mée base ; l'extrémité de l'aile opposée à la base se nomme sommet ou angle externe, dans la partie dirigée antérieurement, et ani/le interne dans sa région postérieure {angle anal pour l'aile inférieure). Le contour com- pris de la base à l'angle externe s'appelle côte de l'aile, bord antérieur, bord externe; celui qui va, à l'opposé de la base, de l'angle externe à l'angle interne, se nomme bord postérieur, et le contour qui de l'angle interne revient à la base forme le bord interne. La région centrale de l'aile, limitée ainsi en tous sens, prend le nom de disque. Si l'on examine avec soin les nervures, on reconnaît que, même dans les élytres les plus épaisses, si on les étudie en dessous, elles sont dis- posées selon un plan analogue, éprouvant quelques variations de détail d'un ordre à l'autre. L'importance de l'étude des nervures a été re- connue par Jurine, qui s'en est servi avec sagacité pour la classification des Hyménoptères ; il a eu toutefois le tort d'employer des noms em- pruntés à l'anatomie du membre antérieur humain, ou plutôt des os de l'aile des Oiseaux, à laquelle Jurine comparait l'aile des Insectes, ce qui semblerait faire croire à des assimilations complètement fausses. Il est bien préférable d'employer des noms spéciaux, comme les choses auxquelles ils s'appliquent. En général, on trouve sur une aile supé- tlRARD. 5 66 INTRODUCTION. rieure, en choisissant un Hyménoptère comme type, cinq nervures prin- cipales. La première, suivant le bord supérieur, est la nervure costale {radius de Jurine), aboutissant au delà du milieu à un empâtement par- ticulier, ou à une tache dite stigma, pterostigma[{carpe de Jurine), et qu'on trouve surtout bien développée un peu plus loin aux deux paires d'ailes de beaucoup de Névroptères. La seconde nervure, longeant la première et se rendant aussi au stigma, quand il existe , est la sous- costale {cubitus de Jurine) . Puis viennent, en se rapprochant successi- vement du bord inférieur de l'aile, les nervures médiane, sous-médiane et anale. D'autres nervures importantes, ou plutôt nervules, car elles ne partent pas de la base de l'aile, sont la radiale {radius inférieur de Jurine), allant de l'extrémité de la sous-costale ou du stigma au som- met de l'aile; l'autre, naissant plus bas, ou de la sous-costale, ou d'un rameau récurrent qui va à la médiane, se nomme la cubitale {cubitus inférieur), et se rend aussi au bord de l'aile, qu'elle atteint un peu au- dessous du sommet. Les aréoles ou cellules, dites basilaires, comprises entre les cinq nervures principales, portent les mêmes noms que celles-ci. Vers le sommet de l'aile, nous trouvons les cellules radiales entre la ner- vule radiale et le bord supérieur, et cubitales entre les nervules radiale et cubitale. Au centre de l'aile, entre les nervures cubilale et sous-mé- diane, sont les cellules discoidales ; enfin, en dehors de celles-ci, entre elles et le bord de l'aile, les cellules postérieures. L'aile inférieure est constituée sur le même plan, souvent avec réductions; car elle est plus petite que la supérieure chez les Hyménoptères. Quand l'aile se réduit, les cellules et les nervures disparaissent, en allant du bord inférieur au bord supérieur, au point de ne plus offrir, dans les types dégradés, que les nervures sous-costale et costale, et môme la nervure costale seu- lement. Dans l'aile des Diptères s'ajoute une sixième nervure principale, dite axillaire ou sous-anale. Le môme type de réticulation se retrouve bien distinct dans l'aile de chaque paire chez les Lépidoptères, la nervure costale disparaissant chez les Diurnes, et toujours, chez tous, aux ailes inférieures, la nervure sous-médiane disparaissant le plus souvent. Si l'on examine les cellules, on est tout d'abord frappé par l'importance d'une cellule centrale, à partir de laquelle partent des nervules peu éloignées du parallélisme. Elle est nommée discdidale dans les descrip- tions des auteurs ; mais, selon Jacquelin du Val, est réellement la cel- lule sous-costale. Elle fournit de très-bons caractères de classification, selon qu'elle est ouverte ou fermée. Le môme type alaire se retrouve dans l'aile à demi-coriace des Hémiptères hétéroptères , dans leur aile infé- rieure, et; plus distinctement, dans les deux ailes des Hémiptères ho- moptères, comme les Cigales. C'est avec plus de difficulté qu'on peut distinguer les nervures principales dans l'aile inférieure membraneuse des Coléoptères, dans les ailes des Orthoptères, dans celles des Névro- ptères et môme dans l'élytre des Coléoptères, vue par dessous. Les cel- ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. — THORAX. 67', Iules sont plus difficiles à déterminer dans ces mêmes ailes , car elles tendent à s'allonger et demeurent ouvertes. Nous ne pouvons insister, autant qu'il le faudrait peut-être, sur ces minutieux détails ; mais il est d'un grand intérêt de remarquer que, de même que les appendices de l'arceau inférieur des zoonites se rattachent à un seul plan consti- tutif, de même les ailes ou appendices de l'arceau dorsal se rapportent à un tout autre type, mais identique aussi avec lui-même, dans tous les ordres des Insectes. La membrane des ailes est formée de chitine transparente. Quand les ailes sont tout ù fait lisses, elles sont privées d'irisation, phénomène dû à la décomposition de la lumière par les lames minces ; ainsi chez les Cigales, les Criquets, les Libellules, les Lépidoptères à ailes vitrées, et certains Hyménoptères. En général, les ailes irisées offrent des rides courtes ou des stries qui donnent à l'aile l'aspect d'une surface chagri- née ou rugueuse. Cependant il y a des exceptions à ce principe. Les Bour- dons (Hyménoptères) ont les ailes non irisées, quoique fortement striées, et les Hémérobes (Névroptères) ont les ailes lisses et cependant nuan- cées des plus belles irisations. Les ailes à fond jaune, même ridées, sont habituellement sans irisation (certaines Libellules, certains Hyméno- ptères); les ailes violettes, au contraire, ont un vif reflet irisé, ainsi dans les Xylocopes (Hyménoptères, Mellifiques). M. Goureau, remarquant que les ailes sont formées de deux pellicules, accolées, entre lesquelles s'intercalent les nervures, a supposé que l'iri- sation est due à une sorte d'accident normal. Selon lui, de l'air extra- vasé, provenant des trachées des nervures, produirait les rugosités ou stries, et, par suite, l'irisation, quand les épaisseurs d'air sont variables. M. Milne Edwards fait remarquer avec raison, eu égard aux exceptions signalées, qu'on ne saurait admettre de l'air ainsi intercalé par rupture des trachées, caries membranes de l'aile sont soudées très-exactement. Les stries résultent d'élévations alternant avec des dépressions normales et naturelles, comme les enfoncements dans lesquels sont implantées les. écailles colorées des ailes des Lépidoptères. Dès lors l'irisation, quand elle existe, n'est pas un accident d'intensité variable et peu ca- ractéristique, mais une propriété essentielle dépendant de la structure intime des membranes de l'aile, et devant en conséquence intervenir à juste titre dans les caractères spécifiques ou génériques des Insectes. Les organes du vol chez les Insectes', essentiellement différents de ceux des Mammifères et des Oiseaux, nous présentent cependant une analogie parfaite dans la fonction, de sorte que l'explication du phéno- mène est identique. Les auteurs ont comparé habituellement le vol à la natation ; car, dans les deux cas, l'animal s'appuie sur un fluide qu'il refoule avec une vitesse plus ou moins grande, et se déplace en vertu de l'excès de résistance du fluide dans le sens de sa compression sur sa résistance dans le sens où se meut l'animal. De plus, on a admis que l'Oiseau ou l'Insecte emploie ses ailes comme le rameur ses avi- 68 INTRODUCTION. rons pour pousser une barque en avant sur l'eau. Lors de l'éléva- tion de l'aile, suppose celte hypothèse, l'animal la tourne de manière qu'elle présente au courant d'air seulement son bord antérieur, afin de n'en éprouver qu'une faible résistance; au contraire, lors de l'abaissement de l'aile, il lui fait exécuter une rotation inverse pour qu'elle appuie sur le tluide ambiant par toute l'étendue de sa surface. C'est en partant de cette condition hypothétique du mouvement dans un tluide que Navier a cherché à calculer le travail accompli lors du vol des Oiseaux (1), et qu'il est arrivé, notamment pour l'Hirondelle ani- mée de sa plus grande vitesse, à une valeur tellement énorme, plus de quatre mille cinq cents fois le travail d'un homme employant toute sa force à tourner une manivelle, qu'on se demande tout de suite si un pareil résultat, exagéré jusqu'à l'absurdité, ne provient pas de la complication des hypothèses qui servent de point de départ au calcul. Un savant, dont le nom est bien connu des entomologistes , Straus-Durckheim, a le premier fait une remarque qui devait le conduire à une explication plus simple du rôle des ailes. Dans une aile destinée au iiol, ce qui exclut en grande partie les élytres, toujours la partie la plus résistante se trouve placée au bord antérieur, et l'aile, au lieu d'agir activement et comme avec une sorte d'intelligence pour le vol, n'est plus qu'un organe passif, exécutant des mouvements d'abaissement et d'élévation, dans lesquels la partie postérieure moins résistante subit des flexions en dessus et en dessous, tandis que la partie antérieure demeure plus fixe, sans qu'il y ait de rotation préméditée. Lorsque l'aile tourne, c'est seulement comme effet forcé de cette inégale résistance des bords antérieur et postérieur. Chez l'Oiseau et la Chauve-Souris, ce sont les os du membre de devant, placés au bord antérieur, qui réalisent cette (1) On sait que les forces sont employées, dans la nature comme dans l'industrie humaine, à vaincre des résistances qui se renouvellent à cliaque instant, en même temps que les points d'application se déplacent. On appelle travail d'une force, le produit du nombre qui en mesure l'intensité par le chemin qu'elle fait parcourir, dans sa direction propre,- au pomt auquel elle est appliquée. Il est aisé de faire comprendre, sans aucune formule mathématique, dont l'usage serait hors de propos dans un ouvrage élémentaire, qu'il n'y a d'effet utile produit qu'à cette double con- dition. Ainsi qu'un terrassier soulève sa bêche chargée de terre, mais la laisse im- mobile, il ne fera pas plus d'ouvrage que s'il la lance à vide dans diverses direc- tions ; que la lime glisse sans appuyer sur le métal, ou qu'elle le presse sans se mouvoir, il ne se formera pas de limaille. 11 faut réunir et la force et le déplace- ment, et, toutes les fois que leur produit demeure constant, l'une varie inverse- ment à l'autre, ou, comme on dit fréquemment : ce qu'on perd en force on le gagne en vitesse. Une erreur très-vulgaire de langage fait confondre le travail avec la force, qui n'en est qu'un facteur ; quand on dit une machine de la force de 20, 40, 100 chcvauXy c'est du travail qu'on doit entendre. Le cheval-vapeur est une désunîtes du travail et vaut 75 kilogrammètres (autre et meilleure unité), d'après d'anciennes et très-inexactes expériences sur le travail des chevaux vivants. Le kilogrammètrc est le travail nécessaire pour élever en une seconde, d'un mouve- ment continu et sans vitesse acquise antérieure, un poids d'un kilogramme à une hauteur d'un mètre. '' ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. — THORAX. 69 disposition fondamentale de l'aile. Chez l'Insecte, des organes tout dif- férents, les nervures, produisent un effet identique. Toujours, s'il s'agi d'une véritable aile, il existe une forte nervure le long du bord anté- rieur, parallùlenaent au grand diamètre de l'aile, et le disque membra- neux est soutenu par des nervures s'irradiant à partir de la base de l'aile et permettant seulement les flexions dans les deux sens du bord postérieur, aminci et sans nervure qui le circonscrive, tout différent en cela du bord antérieur. Nous croyons devoir expliquer en peu de mots comment la simple diilerence de résistance de deux bords Je l'aile a suffi à Straus-Durckheim pour expliquer le mouvement en avant de l'animal. Supposons l'aile s'abaissant dans le sens vertical ; son bord postérieur étant moins résis- tant que l'antérieur, il en résulte une flexion en dessus de la partie pos- térieure. La résistance verticale de l'air se décompose en une force paral- lèle à elle et sans effet, et une force perpendiculaire au plan occupé par la partie qui a fléchi, c'est-à-dire oblique en haut et en avant. Dans l'élévation de l'aile, au contraire, l'air agit sur sa face supérieure et produit, par suite de l'inégale résistance des deux bords, une flexion en bas et en arrière de la région postérieure : d'où la résistance de l'air agit par une composante oblique dirigée en bas et en avant. Ces deux impulsions, se succédant à un très-court intervalle, se composent dia- gonalement en une force unique perpendiculaire au plan dans lequel se meuvent les centres de force des ailes, ou points d'application des résistances du fluide, c'est-à-dire en une force horizontale dirigée en avant dans notre hypothèse d'un mouvement des ailes dans le sens vertical. Ces simples mouvements successifs suffiraient donc pour la transla- tion horizontale dun animal voilier qui n'aurait pas de poids ; mais, comme il est constamment sollicité par la pesanteur de haut en bas, il doit tendre sans cesse à se diriger, non pas horizontalement, mais obli- quement en avant et en haut, afin de gagner dans le même temps une hauteur égale à celle dont son poids le fait descendre. La nature a em- ployé à la fois plusieurs moyens pour arriver à ce but. Sans parler de ceux qui sont spéciaux aux Oiseaux, et en rapport avec la forme concave en dessous de leurs ailes, nous devons indiquer des artifices communs aux Insectes, dont les ailes sont plates, aussi bien qu'aux Chauves-Souris et aux Oiseaux. Un premier moyen de compenser le poids est, pour l'animal ailé, d'abaisser les ailes de haut en bas, en ramenant leurs extrémités en avant, perpendiculairement au plan de mouvement, c'est-à-dire obli- quement en haut. Si, au contraire, lors de l'abaissement, l'animal tour- nait l'aile de manière à lui faire présenter une plus grande surface, comme l'aviron dans l'eau, l'abaissement aurait lieu de haut en bas, mais en arrière. Or, si l'on examine des Oiseaux à vol lent, des Moineaux et surtout des Corbeaux, on voit parfaitement que, dans l'abaissement, ils ramènent les extrémités de leurs ailes en dessous du corps, en avant 70 > INTRODUCTION. -et non en arrière. On comprend dès lors pourquoi l'animal ailé ne maintient pas son corps vertical, mais incliné d'autant plus par rapport à la verticale qu'il vole mieux : ainsi dans le Cerf-volant {Lucanus ccrvus, Coléoptères), que le poids de ses énormes mandibules oblige^, sous peine de basculer, à placer son corps presque vertical, les ailes ne peuvent que peu s'écarter de la direction horizontale ou d'un plan de mouve- ment vertical, et l'animal, parvenant à peine à équilibrer son poid?, présente un des vols les plus lents qui existent. Un second moyen de compenser le poids consiste à abaisser les ailes plus rapidement qu'elles ne se sont élevées, de sorte que l'impulsion de bas en haut soit plus forte que celle de haut en bas. Cette inégalité dans les mouvements est en raison de la différence de force des muscles qui produisent ces deux mouvements opposés. Ces mêmes principes permettent d'expliquer le vol stationnaire commun aux Oiseaux les plus rapides et aux Insectes les meilleurs voiliers, comme les Libellules, les Muscides, qui abondent en automne dans nos jardins et nos bois. Qui n'a vu ces Insectes en ap- parence immobiles dans les airs, les ailes étendues, soit pour guetter une proie, soit pour se réchauffer au soleil. Qu'on les examine de près, on verra que leurs ailes frémissent par des vibrations précipitées, et semblent élargies dans le sens vertical par la persistance des impres- sions lumineuses sur la rétine. Ces mouvements de peu d'amplitude, mais très- vifs, sont calculés de manière à compenser exactement le poids sans projection en avant. On peut dire que ce senties Insectes qui offrent le plus de variété pour la fonction du vol, depuis ces Tinéites (Lépidoptères) que le plus léger souffle d'air abat dans le vol, jusqu'à ces Mouches d'été qui, attirées par la faim, suivent les convois de nos che- mins de fer et pénètrent dans l'intérieur des wagons, se reposant par intervalles, puis tourbillonnant avec une vélocité incroyable si l'on songe à la rapidité de ces véhicules qu'elles dépassent pourtant dans leur vol. Il faut enfin faire remarquer que la force ou la faiblesse de l'aile, comme organe moteur, est liée à plusieurs faits distincts : à la puissance des muscles, à leur insertion, à l'aire membraneuse de l'aile, à la force des nervures placées au bord supérieur, etc. C'est en analy- sant les variations indépendantes de ces divers éléments qu'on peut ar- river à expliquer pourquoi des ailes, analogues à la première apparence, peuvent différer dans la fonction, ou des ailes de forme différente con- courir, au contraire, au vol avec la même énergie. On est loin toutefois de pouvoir expliquer jencore toutes les variations du vol des Insectes qui fournissent d'excellents caractères distinctifs de tribus, de genres, d'espèces, selon qu'il est rectiligne, saccadé, prolongé , intermittent ; selon que l'Insecte est obligé de toujours agiter ses ailes, ou qu'au con- traire, après des battements rapides qui lui donnent un excès d'impul- sion considérable, il fende les airs comme une flèche, soit en repliant les ailes contre le corps, soit en les étendant en parachute et planant selon une trajectoire presque horizontale. Entre antres causes, ces dif- ANATOMrt: ET PHYSIOLOGlli. — THORAX. 71 férences sont certainement liées au nombre, à la forme, à la solidité des osselets d'articulation des ailes au thorax. [1 est important de constater que ce sont les exemples offerts par l'en- tomologie qui ont conduit Straus-Durckheim à la théorie du vol que nous venons d'exposer. Il a remarqué que chez les Libellules, qui peuvent à volonté planer, tourbillonner, aller dans le vent et contre le vent, caractères des meilleurs voiliers, les ailes sont insérées par deux points, ce qui empêche matériellement l'Insecte de les tourner comme le ra- meur tourne ses avirons ; elles ne peuvent donc offrir que la flexion passive du bord postérieur, tantôt en haut, tantôt en bas. Les Cétoines (Coléoptères) volent parfaitement, cà la façon des Mouches, et cependant leurs ailes, glissant dans une fente longitudinale ménagée entre les élytres immobiles et le corps, sont maintenues fixes suivant une large section qui leur interdit toute rotation active. Nous ne devons pas nous étonner si les Insectes peuvent aussi nous offrir facilement un critérium expérimental pour vérifier la théorie du vol proposée par Straus-Durckheim. On comprend que si l'on peut chan- ger le rapport d'épaisseur des diverses régions dans ce que nous appelons les ailes véritables propres au vol, celles à résistance décroissante du bord antérieur au bord postérieur, on arrivera à constater si cette inégale résistance des bords est une condition absolue de ce genre d'ailes. 11 suffit d'enduire les ailes par places de vernis se desséchant avec rapi- dité. On doit rejeter les \ernis à base d'alcool, d'éther ou de benzine, qui peuvent offrir sur les Insectes un effet anesthésique ou toxique. L'eau gommée ou l'empois fait avec un mélange de fécule ou de gomme arabique remplissent le mieux les conditions voulues. 11 faut les appli- querau pinceau et attendre quelques instants, jusqu'à dessiccation com- plète, avant de rendre la liberté à l'Insecte. En mettant ainsi au pinceau une mince bordure de gomme filante sur le bord inférieur de l'aile de Diptères, de manière à rendre l'épaisseur aussi grande qu'au bord an- térieur, le vol est immédiatement aboli. On pourrait faire l'objection que cela résulte simplement du poids ajouté à l'aile ; mais si l'on met au contraire, sur un autre Insecte de même espèce (les Diptères d'au- tomne des bois et jardins conviennent très-bien), une égale bordure de gomme sur le bord antérieur de l'aile, ce qui ne fait qu'augmenter l'épaisseur d'une région déjà plus épaisse que les autres, on observe que le vol de bas en haut est encore possible, quoique fort ralenti à cause du poids. On peut aussi faire ces expériences sur des Libellules, sur des Agrions (genre voisin de Névroptères). Ils cessent de voler si l'on enduit de gomme les bords, inférieurs des quatre ailes, et se servent seulement alors de leurs ailes étendues comme de parachutes qui leur permettent de descendre en déviant un peu de la verticale. Au con- traire, le même enduit gommeux sur les bords antérieurs ne fait que ralentir le vol sans l'anéantir ; il persiste encore de bas en haut. Il résulte du caractère essentiel des véritables ailes une définition 72 INTRODUCTION. plus exacte que les définilions ordinaires, des élylres, pseudélytres, hémélytres. Les ailes mériteni la dénomination générale d'étuis, quand leurs deux bords, antérieur et postérieur, ont la même épaisseur, et, par suite, ofi'renl la même résistance à l'air. Les diverses sortes d'étuis résultent de la consistance variable. Ce n'est pas à dire toutefois que CCS organes deviennent inutiles au vol, seulement ils ne peuvent jamais seuls suffire à le produire, ce qui arrive parfois pour les ailes véritables, chez lesquelles, dans certains cas, une seule paire suffit à la fonction. Les élytres ou pseudélytres ont deux rôles dans le vol : tantôt elles ser- vent comme parachute, et, avec les pattes et les antennes étendues, à équilibrer le corps de l'Insecte dans le vol : ainsi chez les Coléoptères ; tantôt les élytres agissent en concordance avec la seconde paire d'ailes, seule membraneuse, et forment la portion résistante, les ailes de la se- conde paire constituant alors la partie flexible de l'appareil aérien, mais trop faibles, soit en elles-mêmes, soit par leurs muscles, pour opérer seules le vol. C'est ce qui arrive pour les pseudélytres étroites des Orthoptères, ('e concours simultané des deux paires dans le vol est si vrai chez cet ordre d'insectes, que, dans certaines espèces où les pseud- élytres deviennent nulles ou rudimentaires, les ailes membraneuses de la seconde paire acquièrent à leur bord antérieur un segment d'un tissu coriace et résistant, tout différent du reste de la membrane alaire. On peut rattacher le système de locomotion aérienne des Insectes à trois types. Le premier est celui où les deux paires d'ailes sont propres au vol. Il n'existe dans toute sa perfection que chez les Agrions (Li- bellulides, Névroptères). Chez eux la forme des ailes des deux paires est identique et les insertions égales. Si l'on vient à couper (sans arra- cher, sans lésion) une des deux paires d'ailes, ou antérieure ou posté- rieure, à peu de distance de l'insertion, l'Insecte continue à voler avec la paire conservée : ce sont au reste de très-médiocres voiliers. D'autres Névroptères, les Libellules, les Perles, les Hémérobes, etc., appartien- nent aussi à ce type, mais avec prédominance plus ou moins marquée de la paire antérieure d'ailes. Chez les Lib'ellules, les ailes postérieures seules ne suffisent plus au vol; il continue avec la paire antérieure, dont l'insertion est plus large. Chez les Perles, les Semblis, etc., les deux paires d'ailes sont nécessaires au vol. De même chez les Panorpes (Névroptères). Dans le second type alaire, constitué par les Coléoptères, les Ortho- ptères, les Hémiptères hétéroptères, la paire antérieure, transformée en élytres, ou pseudélytres, ou hémélytres, ne peut jamais suffire seule pour le vol, bien qu'elle puisse souvent prêter, comme nous l'avons in- diqué, un concours indirect pour le vol, à la seconde paire d'ailes of- frait seule le caractère de la résistance, inégale des bords. Parfois cette seconde paire suffit seule. Ainsi, parmi les Coléoptères, les Cétoines volent même rapidement avec leurs ailes inférieures membraneuses, les élytres demeurant closes. Dans les Staphyliniens ou 3rachélylr.es, ANATOM[E ET PHYSIOLOGIE. — THORAX. 73 les élytres, réduites à des moignons rudimenlaires, ne concourent en rien au vol. Les Telephorus, réduits artificiellement à de courts moignons élytraux, peuvent s'élever de bas en haut avec la seule paire inférieure d'ailes; toutefois ils retombent plus vite que ceux qui conservent les élytres étalées en parachutes. te troisième type alaire nous est offert par les Hyménoptères, les Lépidoptères, les Hémiptères homoptères et les Diptères. Chez eux la première paire d'ailes est toujours la mieux appropriée au vol par sa grandeur, la force de son insertion et ses muscles, la résistance de son bord antérieur. La seconde paire d'ailes est toujours accessoire et en- traînée, par divers mécanismes, par la première paire. Jamais elle ne peut seule suffire pour le vol. De grandes variations dans le vol ont lieu quand la première paire d'ailes reste seule. Dans les Sphinx, Lépido- ptères à vol puissant, la première paire, demeurée seule, permet le vol, et de môme quand on enlève le crin qui y rattache normalement l'aile inférieure. 11 serait sans doute seulement bien moins longtemps prolongé. De même dans beaucoup de Noctuelles de grand vol. Chez les Papillons de faible vol, les deux paires sont nécessaires. Les Diptères sembleraient au premier abord, et, comme l'indique leur nom, n'exiger pour le vol que la seule paire d'ailes antérieures. Cependant la seconde paire, transformée en balanciers agités dans le vol par un rapide mouvement vibratoire,, est très-utile pour cette fonction, qui est considérablement affaiblie, parfois même anéantie, par leur ablation, sans arrachement violent, qui doit être proscrit dans toutes les expé- riences d'alisection. Ces balanciers ne servent nullement à équilibrer l'Insecte volant; ce sont les longues pattes étendues qui onlcet usage. U est intéressant de remarquer que les second et troisième types alaires suivent dans la série des Insectes deux progressions inverses, et leur limite commune constitue le premier type qui ne se réalise que dans quelques groupes de l'ordre des Névroptères. Cet ordre, assez hé- térogène du reste, nous offre le troisième type dans les Éphémériens, avec exagération même dans certains genres où la seconde paire d'ailes manque complètement. Au contraire, les Phryganes présentent le se- cond type, à son début en quelque sorte ; leurs ailes antérieures sont de véritables pseudélytres , peu résistantes, il est vrai, mais d'égale épaisseur aux deux bords, tout à fait impropres seules à la fonction du vol, qui exige, chez ces faibles voiliers, la réunion de ces pseud- élytres aux larges ailes membraneuses de la seconde paire. L'ordre des Névroptères comprend à la fois tous les types alaires des Insectes. Des expériences nouvelles et fort curieuses sur le vol des Insectes ont été faites par M. Marey et répétées dans ses leçons au Collège de France en 1868. Il a d'abord cherché à déterminer la rapidité vibratoire des ailes des Insectes pendant le vol. Son procédé est celui du cylindre enregistreur de M. Duhamel, servant à déterminer le nombre de vibra- tions de la verge mobile (}'un diapason, Seulement, comme on ne peut Ih ' INTRODUCTION. songer à munir d'un stylet l'extrémité si délicate de l'aile d'un Insecte, c'est cette extrémité môme qui frotte tr(>s-légèrement contre le papier noirci du cylindre tournant d'un mouvement uniforme. L'Insecte , maintenu par la partie inférieure de l'abdomen, est placé de telle sorte qu'une des ailes, à chaque battement, enlève un peu du noir de fumée qui recouvre le papier mobile, de sorte qu'on obtient un graphique formé d'une série de points ou de courtes hachures. M. Marey a dé- terminé ainsi les nombres suivants de battements des ailes en une seconde, en prenant des oscillations complètes, ou allée et retour de l'aile à son point de départ initial : Mouche commune, 330; Rourdon, 2/!iO ; Abeille, 190 ; Guêpe, 110 ; Macroglossa Stellatarum (Lépid. Sphin- giens), 72 ; Libellule, 28 ; Pieris Brassicœ (Lépid. diurnes), 9. Ces nom- bres ne doivent pas être regardés comme une expression très-exacte de la vérité ; en effet, le vol captif n'est pas identique au vol libre, et, en outre, il y a une diminution due au frottement même de l'aile, tel léger qu'il soit, contre le papier. Aussi les résultats ci-dessus sont en moins. Nous représentons un graphique de cette espèce (fig. 2). AA.'vvwuv f\rJV\jv^j\r^'ord. Les Lépi- doptères des rives de l'Amour présentent un caractère européen selon les latitudes plus ou moins septentrionales de ce fleuve. On retrouve des espèces européennes aux deux extrémités de ce long fleuve; mais, à mesure qu'on se rapproche du milieu de son cours, la faune change subitement, de sorte qu'à sa partie la plus méridionale on remarque des espèces de la Chine et du Japon, comme le PapHio Xuthus, et des espèces nouvelles, à formes tout à fait tropicales, comme les P. Maackii et Raddei. On trouve là aussi des genres de l'Asie méridionale, comme le genre Adolias, et quelques types analogues à ceux de la Californie. Dans la colleclion de Lépidoptères décrite par Ménétriôs, cet auteur indique i5!i formes européennes, 30 formes de la faune spéciale à la Russie et 128 formes étrangères à l'Europe (1). 11 est intéressant de retrouver en Sibérie le Pyrameis CalUrhoe, espèce qu'on a longtemps regardée comme spéciale à Madère et o.ux Canaries, et qui se retrouve aussi dans l'Himalaya. On doit au reste faire cette remarque à propos des Lépidoptères, que ce sont les Insectes les moins caractéristiques des faunes, à cause de la puissance de leur vol et des courants gazeux qui les entraînent. Ils sont à peu près aux autres ordres des Insectes ce que les Oiseaux sont aux Mammifères. Il doit en être de même pour beau- (1) Ménétriès, Lépidoptères de la Sibérie orientale:, et en particulier des rives de l'Amour. Saint-Pétersbourg, 1859. — Otto Bremer, Lepidopleren ost-sibij-iens dÈs Amur- Landes , Saint- Petersburg , 1804 {Mém. Acad. impér. des sciences, 7"= série, t. VIII, n° 1). DISTRIllUTION GÉOGRAPHIQUE. 191 coup de Diptc'res ; mais cet ordre d'Insectes est trop mal connu pour qu'on puisse actuellement le faire figurer utilement dans la géographie entomologique. Les Orthoptères ailés, surtout les Acridiens à migra- tionS;, les Mantes, etc., et d'autre part certaines familles d'Hyméno- ptères, ont aussi des distributions étendues. De même les Libellules, dans les Névroptères, insectes ;\ vol puissant, se trouvent à de très- grandes distances. En outre, ces Insectes à larves aquatiques participent du privilège de tous les Insectes des eaux, celui de la diffusion. Cela doit tenir à l'uniformité de température des eaux douces dans la plu- part des pays, et au maximum de densité de leur fond, qui conserve une foule d'espèces en hiver à l'abri de la congélation. Au contraire, les faunes nous offrent d'une manière bien plus restreinte en superficie les espèces à vol faible, comme les Grillons et Locustes dans les Ortho- ptères, les Hémérobes, les Raphidies, les Mantispes, les Panorpes dans les Névroptères, etc.; ce sont surtout les Coléoptères et les Hémiptères qui sont les Insectes qui donnent aux faunes locales leurs principales différences. Le Japon, formé d'une longue série d'îles volcaniques et correspon- dant à une ligne de fracture de l'écorce terrestre, comprenant, avec les îles Kouriles au nord, environ 15 degrés en latitude, présente des tem- pératures irès-variées. lia été longtemps fermé aux Européens. Dans la première moitié de notre siècle, par une heureuse exception, Philippe de Siebold put y faire un long séjour, d'où résultèrent les plus intéres- santes découvertes; malheureusement, l'ouvrage du savant hollandais n'est pas terminé et ne contient rien sur les Insectes. La faune entomo- logique du Japon est spéciale, ainsi que ses autres faunes zoologiques ; un grand nombre d'espèces sont exclusives, surtout dans les ordres sé- dentaires. Il y a plus de mélange pour les Lépidoptères. On y rencontre un grand nombre d'espèces européennes, mais souvent fortement mo- difiées, de taille et de dessin très-agrandis, comme cela a lieu pour plusieurs Argynnes et Vanesses, pour le Liparis cUspar, etc., au point de constituer des races locales constantes, d'autant d'intérêt que des espèces. Plusieurs espèces de Lépidoptères hélérocères nuisibles sont communes au Japon et à l'Europe (1) : ainsi les Liparis dispar, Lian., Liparis chrysorrhea, Linn., Bombyx Neustria, Linn., qui, sans nul doute, ravagent au Japon, comme chez nous, les arbres fruitiers et les arbres d'agrément; VAgrotis segetum, Hiibn., Ochs., qui dévaste en France les Betteraves; VHadena Brassicœ, ennemi des Crucifères des potagers; le Phm'a gamma, Linn., qui vit sur les Légumineuses fourragères ; VAglossa pinguinalis, qui doit, au Japon comme chez nous, se montrer dans les maisons, car sa chenille se nourrit des graisses animales. Des espèces (1) î)e L'Orza, les Lépidoptères japonais à l'ExposUion internationale de 1867. Paris, 1869. — Maurice Girard, Observations sur la collection entom. du Japon à l'Exposition de 1867. {Ann. Soc. entom. de France, 1868, Bull., p. III.) 192 INTRODUCTION. de la Sibérie, en certain nombre, se retrouvent au Japon, ainsi que certaines de la Chine et même du Bengale. C'est sans doute par impor- tation que le Japon possède le Ver à soie, Sericaria Mon, et les races japonaises sont devenues la dernière ressource des sériciculteurs. Ce pays ofl're aussi VAttacus Cynthia vera, Drury, Guér.-Mén., du nord de l'Inde et du centre de la Chine; VAttacus Pernyi, Guér.-Mén., de la Mandchourie ; et enfin le célèbre Attacus Ya-ma-maï, Guér.-Mén., ou Ver à soie du Chêne du Japon, élevé en partie domestique, en partie sur des Chênes en plein air. Peut-être ces deux dernières espèces ne sont-elles que des races fortement modifiées de VAttactis Mylitta de l'Inde. L'étude des Insectes du Japon n'est pas seulement entreprise par de récents explorateurs européens, il y a des savants japonais qui s'oc- cupent d'entomologie. A l'Exposition universelle de 1867, dans la sec- tion du Japon, figuraient 56 cadres d'Insectes de ce pays, de tous les ordres, piqués sur soie, et montrant pour les Lépidoptères et Névroptères un grossier essai d'étalage. On trouve dans V Encyclopédie japonaise, im- primée à Yeddo il y a près de cinq cents ans, des détails fort curieux et fort exacts sur les mœurs et les métamorphoses de plusieurs Insectes, principalement sur les Lépidoptères et sur les Libellules. Des figures sur bois, dans le genre de celles de Goedart, mais mieux exécutées, sont intercalées dans le texte, à la façon des ouvrages illustrés de nos jours. La fcuine entomologique de la Chine est fort mal connue, tant cet immense empire est encore inexploré. C'est incontestablement là aussi un centre de création spécial, mais avec des passages, au nord à la faune sibérienne, et au sud à celle des Indes. Nous ne connaissons guère que les Insectes vendus aux Européens à Canton par les marchands du pays (1), et pareils pour la plupart cà ceux figurés sur les laques ou peints sur les papiers de Chine par les artistes indigènes. On y trouve surtout, en Coléoptères, des Sagra, des ^/io?/iate, de grandes Cétoines; des Fulgorides dans les Hémiptères ; de belles espèces du genre Papilio, la plupart indiennes, et, parmi les Bombyciens à taches alaires vitrées, le gigantesque Attacus Atlas, le plus grand Papillon connu. La Chine recèle probablement dans son intérieur, volant dans les bois où croît le Mûrier sauvage, le type, encore ignoré à l'état primitif, du Ver à soie. Une domesticité séculaire a fait perdre la trace originelle de cet utile animal, la plus belle conquête entomologique de l'homme, et devenu, suivant l'heureuse expression de M. Guérin-Méneville, comme le chien des Insectes. Peut-être ce type sauvage existe-t-il aussi dans la Perse orientale et sur les pentes de l'Himalaya, où se trouvent des Mûriers à l'état de nature. La région élevée du Tibet a une faune particulière, mais presque inconnue, en raison de la difficulté de parcourir ce pays. On y rencontre, en Lépidoptères, quelques espèces d'Europe répandues des Alpes aux (1) Lacordaire, Inlrod. à l'Entomologie, t .II, p. 607. ClSiniBOTION GÉOGRAPHIQUE. 193 Karpatlies, puis au Caucase, à l'Altaï, à l'Himalaya. On trouve dans les vallées de ces montagnes, les plus hautes du globe, le Parnassius Apollo, le Papillon blanc du Chou, notre Machaon, le Limenitis Aceris de l'Eu- rope orientale, le Cotias edusa, etc. Les deux péninsules indiquées se rattachent à un même centre de création, avec un grand nombre d'es- pèces séparées, selon que l'on considère les régions en deçà et au delà du Gange, ou l'Hindouslan avec l'île de Ceylan et l'Indo-Chine. L'Hindous- tan a été bien exploré par les Anglais, et beaucoup plus étudié que la péninsule à l'orient du Gange. Un nombre considérable d'espèces d'In- sectes, la plupart de riches couleurs, habitent la côte de Malabar;, les vallées himalayennes du Bengale et l'île de Ceylan. Dans les Coléo- ptères, il faut citer d'éclatants Buprestides des genres Sternocera, Chry- sochroa, des Scarabées de grande taille, de beaux Panagœus (Cara- biques), des Sagra (Chrysoméliens) aux couleurs métalliques, etc. Les Lépidoptères ont de belles espèces du genre Papilio, des Piérides, des Nymphalides, etc. Les espèces productrices de soie se rapportent à deux types. VAttacus Mylitta, à cocon fermé, vivant sur les Jujubiers et sur les Chênes dans les régions montagneuses. Il produit la soie tussah, et son cocon pédicule, attaché aux arbres, a été utilisé depuis les temps les plus reculés, car il a donné lieu à cette erreur des Grecs et des Ro- mains, que la soie provenait dans la Sérique (Indes) d'un fruit ramassé au pied des arbres. Un autre groupe contient deux espèces ou plutôt deux races à cocon ouvert : VAttacus Cynthia vera, du nord de l'Hindous- tan; VAttacus Arrindia, Milne Edw., des parties méridionales des Indes. Dans l'Assam se rencontre le Sericaria Huttoni, Westw., voisin du Ver à soie du Mûrier, et qui est peut-être son type d'origine. Nous devons rattacher aux faunes asiatiques, à cause de leur passage par la faune indienne, les faunes de l'Océanie. Les géographes com- prennent sous ce nom ces nombreuses îles du Pacifique parmi lesquelles l'Australie est un véritable continent. On peut dire, dune manière gé- nérale, que rOcéanie a une faune mixte, partagée en trois types : indo- sondaïque, australien et néo-zélandais. L'entomologie de cette vaste région est actuellement plus connue que celle de l'Amérique centrale, et surtout de l'intérieur de l'Afrique, grâce à de récents explorateurs, comme M. Verreaux, les naturalistes de l'expédition autrichienne de la Novara, M. Lorquin, le P. Montrouzier, et surtout M. R. Wallace, pour les îles de la Sonde et les Moluques. Une société entomologique fondée en Australie, à Melbourne, mettra bientôt la faune de l'Australie au niveau des faunes européennes. Un grand fait ressort dès à présent des investi- gations modernes. On peut dire que chaque archipel, et même chaque île un peu étendue, a sa faune spéciale au point de vue des espèces et souvent des genres. De même chaque petite île polynésienne a son per- roquet et son pigeon. Les créations se sont produites postérieurement à l'émersion.de ces archipels, dont certains paraissent encore se soulever de nos jours (Timor, Taïti, etc.). L'étude des faunes s'oppose tout à fait GIRARD. 13 194 INTRODUCTION. à l'idée qu'on aurait dans ces multitudes d'îles les restes des sommité d'un môme continent submergé : on est en présence de formations séparées. La faune indienne, en donnant, bien entendu, à ce mot la significa- tion d'un type très-général, et nullement celui d'une identité des genres et surtout des espèces, se prolonge jusqu'à la Nouvelle-Guinée inclusi- vement. Elle s'étend d'abord immédiatement au sud de Tlndo-Chine sur l'archipel sondaïque constitué par Java, prolongement de la pres- qu'île malaise, Bornéo, Sumatra, Célèbes, Timor, et sur les Moluque (Amboine, Céram, Gilolo, etc.), avec les Philippines au sud-est. On peu comprendre dans ce premier groupe la Micronésie, formée des archipels des Mariannes, des Carolines, de Magellan, Tile Mackensie, l'île Pelew, l'île d'Anson, etc. Les îles de la Sonde, dont Java est la mieux connue, sont le pays du globe qui, avec la vallée de l'Amazone pour des types différents, présente les plus beaux Insectes, les formes les plus diver- sifiées. Gela tient à la végétation luxuriante d'un climat extrêmement chaud et humide. Les Gicindélides, les Garabiques, avec le genre si étrange des Mormolyces, de Java et de la presqu'île de Malacca, les puissants Scarabées, les Gétonides métalliques, d'énormes Lucanes, de splendides Buprestes, des Batocôres, etc., constituent les magnifiques spécimens des Goléoptères. Non moins richement représentés, les Lépi- doptères abondent en Papilio, en Pieris blanches et orangées, en Terias, genre formé de petites espèces à fond jaune s'étendant assez loin dans rOcéanie, en Danaïdes, en Nymphales, etc. Les Vanesses ne se trouvent que dans les grandes îles. Le genre Idœa, de Java, de Bornéo, des Moluques, arrive jusqu'à la Nouvelle-Guinée (i). Parmi les Danaïdes, la section des Euplœa, ou espèces à fond d'un noir velouté et opaque, se voit dans les îles de la Sonde, les Moluques, les Philippines, les Ma- riannes, le Bengale, la Ghine, Maurice, Bourbon, Madagascar, etc. Ge genre, si répandu dans les régions chaudes, est aussi très-commun dans la Polynésie, où il y a peu d'îles, même petites, qui n'en aient une ou deux espèces. Les Danais à fond noir, avec lignes longitudinales et points marginaux d'un vert bleuâtre, existent jusqu'à Yanikoro, mais bien moins abondants que les Euplœa, et les espèces à fond d'un brun fauve {l}'pe?> : Chrysippus, Archippus) ne passent pas la Nouvelle-Guinée. Les Moluques sont le centre de création des splendides Ornithoptera, genre démembré des Papilio. On trouve dans ces îles des espèces in- diennes de Papilio qui se sont modifiées, par exemple en perdant les queues aux ailes inférieures. Les Insectes de Gélèbes ont une plus grande taille qu'ailleurs chez les mêmes espèces, fait analogue à- celui que nous a offert le Japon pour certaines espèces de Lépidoptères d'Eu- ' (1) D' Boisduval, Voyage de l'Astrolabe, Faune entomologique, i^" partie, Lépidoptères, 1832; Coléoptères et autres ordres, 1835. — £. Blancliard, Voyage au pôle sud et dans l'Océanie de l'Astrolabe et de la 'lélée. Insectes, t. IV. Paris, 1853. DISTRIBUTION GÉOGRAPHIQUE. 195 rope. Les îles Philippines ont une faune spéciale (ce qui est au reste aussi vrai pour toutes les îles de la Sonde et des Moluques, qui ont cha- cune beaucoup d'espèces propres), et, dans quelques Insectes recueillis aux environs de Manille par M. Cuming, M. Westwood a reconnu beau- coup d'espèces nouvelles, et a dû créer les genres Scelodonta (Coléo- ptères, Chrysoméliens) et Hymenotes (Locustiens, Orthoptères) (1). Les îles au sud des précédentes commencent à offrir, avec les espèces du type indien qui prédomine, un mélange du type australien : nous voulons parler de la Nouvelle-Guinée avec la presqu ile des Papous, de la Nouvelle-Bretagne, de la Nouvelle-Irlande, des îles Salomon, des Nouvelles-Hébrides, des îles d'Arou, de Woodlark, etc., groupe consti- tuant la Mélanésie, parce qu'il est habité par la race noire australienne. La Nouvelle-Guinée est des plus riches en Lépidoptères du genre Pa- pilio, et offre le curieux genre Cucytia (Boisd.), voisin des Zygénides et volant en plein jour dans les bois. Parmi les Coléoptères, on cite, comme caractéristiques de cette faune, dans les carnassiers, les genres Therates, Tricondyla. Des types très-curieux d'Orthoptères se rencontrent aussi dans cette île torride, au séjour redouté des navigateurs, aux forêts pestilentielles, aux populations farouches : ainsi le genre Eurycantha (Boisd.) ou Karabidion, constitué par d'énormes Orthoptères coureurs bruns, aptères, le plus souvent hérissés d'épines d'un contact redou- table, et le genre Hyperhomala, des sauteurs, voisin des Locustes. Les îles les plus rapprochées de la Nouvelle-Guinée partagent tout à fait sa faune. Ainsi l'archipel des îles d'Arou (2), qui possède comme elle les Oiseaux de paradis et les Casoars noirs, offre dans ses forets, qui rappellent celles de l'Amazone, les Insectes de la Papouasie, les Tri- condyla, Therates, des Cétonides du plus bel éclat des genres Lomaptera (genre indo-sondaïque) et Schizorhina, des Buprestes métalliques, des Curcuîioniens orthocères et gonatocères, des Cérambyciens, comme les Batocera, genre indien et sondaïque qui se trouve aussi aux Nouvelles- Hébrides et à l'île Woodlark. Seulement, si les Insectes sont nombreux en individus, il y a bien moins d'espèces qu'à la Nouvelle-Guinée ; ainsi les Cicindèles manquent. Dans les Lépidoptères, on trouve des Cocyties, rOrnithoptère Priam, le Papilio Ulysses, des Lycénides et Éryci- nides, etc. L'île Woodlark ou Moion, si bien étudiée par le P. Montrou- zier (3) pendant les cinq années de sa mission apostolique, nous don- nera une idée nette du caractère des faunes de l'Océanie, où chaque île (1) Westwood, Characlers of new Insecls from Manilla {Proceed. Zool. Soc. of Lond., 1837, t. V, p. 127-130). (2) Walîace, LeUer from Arou islands {Lepid. and Coleopt.) ; from Balçhian (Moluques) [Trans. Soc. Entom. Lond., ser. 2, 1858, t. IV, proceed. 91-93 ; t. V, 1859, proceed. (il, 66, 67, 70, 71.— roj/ar/e dans rAsie orientale: Coléopl. nou- veaux ou rares, publiés par J. Ttiompson. Paris, 1858. (3) P. Montrouzier, Faune de Vile Woodlark {Ami. Soc. agric. de Lyon, 1855 2« sér., t. VII, p. 1-11/i, et 1856, t. VIII, p. 393-411). 196 INTftODUCTION. a réellement sa population propre, avec le caractère général de la faune des grandes terres voisines. C'est une île basse, peu fertile, d vingt à trente lieues de long sur trois à quatre de large, située enlr la Nouvelle-Guinée et la Nouvelle-Bretagne. Elle n'a presque pas d'In- sectes de cadavres, vu l'absence à peu près complète de Mammifères. En Coléoptères, outre les Tricondyla et Therates, existent des espèces nouvelles et môme des genres nouveaux de Lamellicornes, Serricornes, Rhynchophores et Longicornes. Les Orthoptères ont une Mante, une Bactérie, des Phasmiens, trois espèces des étranges Eurycanthes aptères, dont les membres amputés repoussent et que mangent les naturels en les comparant à des Écrevisses, et V Hyper omala virescens. Les Lépido- ptères sont richement représentés par les Ornithoptera, Papilio, Pieris, Euplœa, Terias, Vanessa, Nymphalis, Limenitis, et, dans les Hétéro- cères, par les Glaucopis, Lithosia, Aganais, Urania, Erebus. En Hémi- ptères, 17 à 18 Pentatomes, la plupart nouveaux. Les Hémiptères sont très-nombreux dans la Mélanésie. Nous avons tenu à donner l'exemple de la petite île Woodlark, pour honorer le courageux missionnaire notre compatriote, et aussi pour faire comprendre l'impossibilité où nous sommes, vu les limites de cet ouvrage, de rendre compte d'une ma- nière aussi complète des faunes des îles océaniques, si diversitiées de l'une à l'autre. Les mêmes types, avec beaucoup d'espèces spéciales et distinctes, ee représentent dans les autres archipels mélanésiens. Dumont-d'Urville remarquait que les Insectes de la Nouvelle-Irlande étaient tout diffé- rents de ceux des îles de la Société , bien que les plantes soient en général les mômes. Un autre type entomologique général apparaît dans le continent australien que les Anglais, au commencement du siècle, appelaient, au dire de Péron, le continent sans pareil, tant les créations animales y diffèrent de celles d'Europe. Cependant nous devons reconnaître que les Insectes n'offrent pas des types aussi profondément modifiés que les Oiseaux, et surtout les Mammifères didelphes ou monotrèmes. Dans les nombreux Coléoptères australiens connus aujourd'hui, on trouve peu de Carabiques et de Brachélytres, en raison de la rareté originelle des Mammifères ; le genre Pamborus y remplace des Carabes et les Calosomes. Les Buprestides sont nombreux en Australie, ainsi le beau genre Rhipi- cera. Le nombre d'Insectes s'accroît beaucoup dans les Phytophages. Les Scarabéiens y présentent les genres spéciaux Diphucephala, Ano- plognathus, Phyllotocus et Xylonichus, ces deux derniers aussi de la Tasmanie, qu'on ne peut séparer de l'Australie au point de vue général. Les Lucanides ont les genres Rhyssonotus et Lamprima, ce dernier aussi tasmanien. Des Mélolonthides d'un riche éclat métallique, les Calonota bu Pyronota, sont communs à, l'Australie et à la Nouvelle-Zélande. Les Lamellicornes coprophages des fumiers et des bouses sont seuls peu abondants ; àe$ Aphodius, communs en Europe, ont été introduits avec DISTRIBUTION GÉOGRAPHIQUE 197 les terreaux umcs des végétaux européens importés en Australie. Les Curculioniens sont pareillement abondants en Australie, et avec de nombreux genres exclusifs. Dans les Longicornes manquent les grands Prioniens et Lamiaires ; on y remarque le genre spécial Tragocerus. Le genre Phyllocharis est également exclusif pour les Chrysoméliens, qui sont aussi richement représentés à tilre de Phytophages. Les Orthoptères de l'Australie et de la Tasmanie offrent beaucoup de Phasmiens bizarres, ailés ou aptères : ainsi des genres Cyjjhocrana, Platycrana, etc., où l'on voit des femelles atteindre 30 centimètres de longueur; le genre Pro- chiius, de l'île aux Kangurous et des côtes arides de l'Australie occiden- tale, intermédiaire entre les Phasmes et les Locustes; les Eurycanthes, forme mélanésienne, sur la côte orientale, etc. Les Lépidoptères de l'Australie ont des formes moins éclatantes que dans la faune indo-son- daïque. Les Papilio se trouvent surtout sur la côte septentrionale, la plus chaude, de l'Australie. On trouve en Australie des Piérides, mais pas de vraies Coliades, ni de Danaïdes ; on y rencontre les Nymphalides et Vanesses, des Lycénides et des Hespéries, des Satyres rappelant les formes européennes. Parmi les Hétérocères, le genre Agarista, le genre spécial Hecatesia, les Achéronties, de grands Bombyciens d'un type propre, sans taches vitrées, des Cossus et des Hépiales ; le genre Chrypto- phasa, se rapprochant des Cossus par les chenilles et des Lithosia par les adultes ; des Lithosia vivant de lichens comme chez nous, etc. Les ex- plorations les plus récentes ont démontré en Australie (1) l'existence des Zeuzères, des Phalénides, et enfin de Microlépidoptères ressem- blant beaucoup à ceux de nos contrées et ayant les mêmes mœurs; des Tortrix, Tinea, OEcophora, ce dernier genre très-nombreux en espèces et dont les larves criblent de leurs trous les stipes des Eucalyptus; des Adela étalant au soleil leurs riches couleurs métalliques, des Pterophorus aux ailes divisées, etc. Les Hémiptères de l'Australie ont beaucoup d'espèces d'un type particulier à ce continent. A l'est de l'Australie et commençant le groupe de la Polynésie, nous trouvons la Nouvelle-Calédonie, possession française récente. Cette grande île a une faune mixte comme genres entre la faune inHienne (ainsi des Mantes, les Terias dans les Lépidoptères, etc.) et surtout australienne, avec beaucoup d'espèces nouvelles et particulières Les Cicindélides nous y offrent un genre caractéristique Caledonica (Chau- doir), ayant aussi une espèce aux Nouvelles-Hébrides ; les genres Dro?/»'- dea et Rhinochila dans les Carabiques; des genres nouveaux dans les Coléoptères aquatiques hydroporides et hydrophilides, dans les Pédi- nites, etc. Les espèces nouvelles des Coléoptères n'ont guère été recueil- lies qu'aux environs de Balade, à cause de l'hostilité des nègres anthro- pophages de la Nouvelle-Calédonie, rameau humain pareil à la race (1) Edw. Newmann, Characlers of a few Auslralian Lepidoptera {Tran$ Soc, Entcm. London, new-series, •185I1-1856, t. III, p. 281). 198 INTRODUCTION. étudiée à la Tasmanie par Labillardière et Péron et détruite aujour- d'hui. Des Hémiptères abondants ont aussi fourni beaucoup d'espèces inédites et déterminé la création de deux genres nouveaux, Ocj/pus dans les Capsites (Hétéroptères) et Carchariacephalus dans les Homoptères (1). Les petites îles des Pins, Art et Lifu, voisines de la Nouvelle-Calédonie, ont une faune analogue, mais moins riche en espèces. Les archipels de la Polynésie ont beaucoup moins d'hisectes que les terres précédentes, et ils se rattachent aussi comme types à la faune de l'Australie et à la faune indo-sondaïque, à cette dernière surtout pour les Névroptères, Hyménoptères et Diptères, avec des espèces distinctes d'un archipel à l'autre. On sait que cette région, située à l'est des îles précédentes, comprend au nord de l'équateur les îles Sandwich, et au sud l'archipel Viti, l'archipel d'Hamoa, l'archipel Tonga ou des Amis, l'archipel de Cook, l'archipel ïaïtiou des îles de la Société, les Pomotou ou îles Basses ; plus à l'est, les archipels des Marquises et des îles Gambier, et enfin tout à l'Orient, et perdue dans l'immensité du Paci- fique, l'île Waïliou ou de Pâques. L'occupation française dans plusieurs de ces îles a eu pour résultat quelques documents entomologiques, encore bien incomplets, sur certains de ces archipels. Selon M. L. Fair- maire (2), les Coléoptères de Taïti et des îles Marquises ressemblent peu aux espèces tropicales ; quoique vivant sous un ciel ardent, au milieu d'une végétation luxuriante et toujours active, leurs couleurs sont tristes, leur taille médiocre ou petite. Un Buprestide d'un vert doré et d'assez grande taille [Chrysodema Tayanti), pris auxMarquises, représente presque seul sa tribu, si nombreuse à la Nouvelle-Guinée et à la Nouvelle-Hol- lande. Les Chrysoméliens sont réduits à deux ou trois chétives espèces. A Taïti, qui offre des montagnes élevées et de nombreux cours d'eau, les espèces sont plus variées ; on y trouve des Carabiques, des Braché- lytres. Aux îles Sandwich, essentiellement volcaniques et présentant à Hawaï le plus grand volcan actif delà terre, les Coléoptères sont à peu près les mêmes qu'à Taïti, mais en très-petite quantité. Ces deux archipels sont sensiblement équidistants de l'équateur, le premier au nord, l'autre au sud. A Tonga-Tabou, terre plaie, sablonneuse, où l'eau est rare, les Carabiques et les Staphylins disparaissent, par compen- sation, les Hétéromères sont plus nombreux et quelques genres indiquent l'approche ùe la Mélanésie et de l'Asie. De même pour les îles Wallis, dont lesproductions sont presque identiques avec celles de Tonga. Dans cette partie de la Polynésie on commence à retrouver des Coléoptères à couleurs métalliques, des types génériques inconnus à la partie orientale, comme les Amarygmus, Otisthœna, Mallodon, etc., mais les faunes des deux zones ont bien des points communs. On peut dire que (1) P. Montrouzier, Essai sur la faune entomologique de la Nouvelle-Calédonie {Ann. Soc. entom. de France, 18G0, p. 229-308, et 1861, p. 59-74). (2) L. Fairmaire, Coléoplères de la Polynésie {Revue et Mag. de zooL, 1849, p. 277, 352, 410, 445, 504, 540, et 1850, p. 50, 115, 181). DISTRIBUTION GÉOGRAPHIQUE. 199 la Polynésie aune faune indécise entre celles des grandes terres voisines; outre des espèces nouvelles, il en est qui se sont conservées identiques ou modifiées en races locales. Les îles polynésiennes ont reçu par les vaisseaux les Coléoptères cosmopolites, et l'on y trouve en outre, mais en petit nombre, par des coïncidences inexpliquées, des espèces identiques avec celles de l'Amérique, de Manille, de l'Australie, des Indes orientales et de la Nouvelle-Zélande, mais très-peu de ce dernier pays, bien isolé du reste du monde par sa faune. Les Lépidoptères de Taïti sont peu nombreux. Dumont-d'Urville rapporte qu'il n'en vit voler qu'une dizaine d'espèces, dont trois Nym- phalides, famille répandue dans les plus petites îles môme de la Poly- nésie. Deux Sphinx y sont sans doute deux races locales de notre MacroglosseStellatarum- et du Sphinx Convolvuli. On sait combien s'étend la distribution de ces puissants voiliers. Il y a aussi à Taïti quelques espèces nouvelles des autres ordres d'Insectes. Un certain intérêt de curiosité s'attache à la Nouvelle-Zélande, qui est la grande terre la plus rapprochée de nos antipodes. Beaucoup d'auteurs re- gardent laNouvelle-Zélande comme une des parties de notre globe le plus anciennement émergées, et rappelant le mieux par sa population animale et végétale les formes des premiers ;1ges de la terre. Cette région se compose de deux grandes îles, celle du Nord, ou Ika-a-Mawi des naturels, celle du Milieu, ou Teioaipoenamu ; puis une plus petite, l'île Stewart, et quelques îlots sur les côtes. C'est un pays volcanique, ayant encore des volcans en activité et qui se soulève actuellement d'une manière continue. Une chaîne de montagnes s'étend du nord au sud dans l'île du Milieu, avec des pics aigus de plus de ZiOOO mètres d'altitude, entourés de neiges perpétuelles. Elle se prolonge dans l'île du Nord, mais avec moins de hauteur. Le climat est froid en hiver dans le sud, et des glaciers y rayonnent des montagnes jusque dans la mer. L'île du Nord a un été long et sec, dont la chaleur est tempérée par de continuelles brises; le printemps et l'automne très-doux; un hiver très-pluvieux, mais dont la température la plus basse est celle des mois d'avril ou d'octobre sur les rivages du nord de la France (1). On comprend que les excellentes conditions climatériques de cette île expliquent le rapide développement de la colonie anglaise qui s'y est fixée. Nos végétaux d'Europe s'y développent avec une facilité prodigieuse : des champs de céréales et de fourrages entourant les fermes remplacent déjà sur bien des points les végétaux indigènes ; les Vers à soie et les Mûriers y pros- pèrent. Aussi les Vertébrés anciens ont déjà presque disparu de l'île du Nord, et l'on ne peut les retrouver un peu abondants que dans le centre inhabité de l'île du Milieu. La destruction des végétaux peu utiles à l'homme qu'offrait le sol delà Nouvelle-Zélande s'effectue avec célérité (1) H. Jouan, Essai sur la faune de la Nouvelle-Zélande (Mém. de la Soc. impér, des se. natur. de Cherbourg, XIV, de la 2<^ série IV, 1869, p. 215). 200 INTRODUCTION. et amènera la mort de la plupart des Insectes; l'étude de la faune de ces îles est par conséquent fort importante. Ébauchée en ce moment, elle sera certainement complétée avant peu parles hommes instruits que la colonisation y amène. Il est probable que la Nouvelle-Zélande n'avait pas de Mammifères à l'origine : l'immigration humaine, qui paraît dater du xv siècle et venir des îles polynésiennes, a sans doute introduit avec elle le Chien et un petit Rat; quant à deux espèces de Chauves-Souris, ces animaux volants peuvent avoir été amenés du nord par les courants atmosphériques. Le fait si curieux de l'absence de tout Didelphe dans cette terre, dont l'Australie et l'Amérique du Sud, possédant toutes deux des Marsu- piaux, sont les régions les plus voisines, doit nous préparera une faune toute spéciale pour le reste des animaux. Qui n'a entendu citer les Dinornis et les Aptéryx, ou les oiseaux les plus aptères que l'on con- naisse, et la singulière famille des Strigops ou Perroquets nocturnes ? La faune actuelle doit être un reste d'une faune plus abondante, car la température de la Nouvelle-Zélande s'est abaissée, et des espèces animales et végétales ont déjà subi autrefois le sort auquel la présence des Européens sur une terre de médiocre étendue condamne forcé- ment les espèces qui restent encore de nos jours, y compris les Maoris, anthropophages refoulés par les colons. La végétation de la Nouvelle-Zélande est peu variée (1). Elle abonde surtout en Fougères; beaucoup de végétaux ont des feuillages grêles, à teintes grisâtres. Il y a peu de fleurs ; le célèbre Phormium tenax croît naturellement dans les lieux marécageux. Cette flore pseudo- primitive doit nous préparer à une faune entomologique pauvre. Comme les végétaux néo-zélandais ont des analogies avec la flore magellanique, c'est-à-dire du sud du Chili, de la Patagonie et de la Terre de Feu, il faudra examiner dans l'avenir si les Insectes offrent les mômes relations ; mais l'exploration entomologique de la pointe S. et surtout S. 0. de l'Amérique est encore à faire. Les Coléoptères sont peu nombreux. Les Cicindélides, les Carabides, les Charançons et les Longicornes sont très-caractéristiques et diffèrent des australiens des mêmes groupes ; presque tous les genres sont autres que ceux d'Europe. On peut citer comme genres spéciaux à la Nouvelle-Zélande les genres Demetrida et Molopsida dans les Carabiques, Atopida des Cébrio- nides, Dendroblax des Lucanides, Zolodinus des Ténébrioniens, Pselo- phax des Curculioniens, etc. Les Cétonides, les Buprestides et les Chry- somélides, si abondants à la Nouvelle-Hollande, manquent au contraire ou sont très-pauvrement représentés à la Nouvelle-Zélande (2). Parmi (1) Raoul, Choix de plantes de la Nouvelle-Zélande. Paris, 1846. (2) A. White, Notes toivards a statistical account of the Fauna of Neio-Zealand and the Auckland islands, so fas as regards Annu'ose Animais {Proceed. Linn. DISTRIBUTION GÉOGRAPHIQUE. 201 les Orthoptères se rencontrent des formes qui rappellent l'Australie : ainsi, un genre aptère dans les deux sexes, de grande taille, Deina- crida, voisin des Gryllons, des Phasmiens aptères, des Mantes et des Locustes. 11 y a une Forficule et des Blattes, ces dernières importées. Les Névroptères présentent une Panorpe, deux Libellules, un Agrion. Dans ces Libellules se trouve le genre Petalura, commun à la Nouvelle- Zélande et à l'Australie, et offrant ce fait curieux qu'il se rapproche beaucoup de l'/EirAna liasina, Strickl., du lias de Stonesfield. Dans les Hyménoptères, on a rencontré quelques espèces de Fourmis peu com- munes. Il y a très-peu de Papillons et pas de Papillons blancs. Il est rare qu'on voie voler des Lépidoptères. Nous citerons deux Vanessides : l'un du type du Vulcain {Pyrameis gonerilla) ; l'autre qui est ce Papillon tout à fait cosmopolite, la Belle-Dame, espèce qui offre de temps à autre des migrations. C'est l'espèce spéciale, ou race antarctica de l'Australie, qu'on a trouvée à la Nouvelle-Zélande; du moins c'est très-probable. Citons un Polyommate, deux Hépiales et deux Sphinx, l'un très-commun, notre Sphinx ConvolvuU, dont la grosse chenille vit sur les feuilles de la Patate douce, et est très-souvent attaquée, quand elle entre en terre pour se chrysalider, par un cryptogame, le Sphœria Robertsia, végétal de genre bizarre, ayant le corps de la chenille pour racine et que mangent les naturels : on le dit d'un goût de noisette. Il y a quelques Hémiptères hétéroptères et des Cicadaires. Parmi les Diptères, encore à peine connus comme dans toutes les îles de l'Océanie, il faut signaler des Moustiques ou Culicides, qui paraissent avoir été importés par les navigateurs, comme à Taïli et aux Marquises, ainsi que le Musca domestica. Plusieurs mouches à viande, ou Calliphora, sont indigènes. De même les Mouches de sable, petits Diptères noirs piquant l'homme et faisant naître des pustules. C'est un fléau de l'été, indiqué autrefois par Cook, et rendant insupportable le séjour de certaines baies. Au sud de la Nouvelle-Zélande se trouve l'archipel des îles Auckland, couvertes de glaces une partie de l'année : la faune est différente et spéciale. Comme le dit M. E. Blanchard (1), les Insectes des îles Auckland représentent, dans l'hémisphère austral, les Insectes du nord de l'Europe, ceux de la Nouvelle-Zélande étant en général analogues aux Insectes d'une région européenne plus méridionale. Les Carabiques des îles Auckland ont nécessité la création de deux genres IJeterodactylus et Pristancylus, voisins des Sphodrus et Pristonychus ; la môme famille offre à nos antipodes nos genres Calathus, Argutor, etc. On trouve en outre des Élatériens, des Hélopiens, un genre spécial de Curculioniens, les Oclandius, etc. Pour terminer l'étude de l'ancien monde, il nous reste à examiner Soc. Lond., 183-81848, 1, p. 306).— W. Stephenson, Remarks on the Entomology of New-Zealand {Trans. Soc. Entom. London, 1847, t. IV, p. 262-267). (1) E. Blanchard, Voyage au pôle sud, loc. cit., p. 22. 202 INTRODUCTION. le continent africain, la moins connue des régions du globe au point de vue des faunes. On n'a de renseignements un peu détaillés, outre la ceinture méditerranéenne se rattachant à l'une des faunes de l'Europe, que pour l'extrémité australe. Quant au reste, ce sont les côtes qui ont été visitées; en outre, quelques explorations dans le nord-est, au Don- golah, au Sennaar, dont la faune se rattache en partie à celle de l'Ara- bie. Le sud de l'Egypte (le delta du Nil appartient à la faune delà Méditerranée) est une région sèche, mal pourvue de Lépidoptères et d'Insectes phytophages, et où dominent en Coléoptères les Graphi- ptères, les Anthies, de brillants Gymnopleures, des Môlasomes amis des sables arides, etc. La Nubie et l'Abyssinie, qui ont une région centrale élevée et riche en cours d'eau, ont des productions plus variées. Les Lépidoptères sont bien plus nombreux, surtout les Pieris, Anthocharis, Argtjimis, Meiitœa, Ltjcœna, etc., constituant une faune réellement mixte, puisqu'on y retrouve un assez grand nombre d'es- pèces d'Europe. A l'extrémité occidentale opposée, le Sénégal présente un ensemble spécial de créations entomologiques, dont on commence à trouver des spécimens au sud de nos possessions algériennes. Les Coléoptères sont très-nombreux dans cette faune. Comme toujours, les Lépidoptères s'étendent fort loin : ainsi ceux du Dongolah sont en grande partie les mêmes qu'au Sénégal, qui en est très-éloigné. Le Gabon, qui nous pré- sente un certain intérêt en raison de nos établissements, a une faune mixte entre celle du Sénégal et des pays circonvoisins (1), offrant, bien entendu, certaines espèces particulières, mais avec un ensemble fort analogue au Sénégal. Parmi les Coléoptères, deux genres sont spéciaux aux régions chaudes de l'Afrique, les GoliathSj offrant les plus gros Insectes connus, et les Cératorrhines, tous deux du groupe des Céto- nides : le Gabon est une de leurs localités. Nous y mentionnerons encore VApis fasciata, ou Abeille égyptienne, répandue dans toute l'Afrique, et un gigantesque Bombycien à taches vitrées, qui ne le cède en gran- deur qu'àïAtlacus Atlas de la Chine. Cette côte occidentale de l'Afrique tropicale possède une foule de riches Papillons des genres Papilio, Danais, Acrœa, etc., les Charaxes parmi les Nymphalides, etc. L'Afrique australe, comprenant la colonie du Cap, la Cafrerie et l'éta- blissement de Port-Natal, est une région bien caractérisée en végétaux, et par suite en Insectes. Les Diosmées, les Protéacées, les Conifères, et sur- tout les Éricacées, dominent. Les émanations odorantes des fleurs annon- cent déjà en mer, près des côtes, une terre privilégiée. Les déserts alter- nent avec les vallées boisées. Sur les sables courent les agiles et cruelles Manticores ; d'autres Cicindélides, également spéciaux, forment les genres Platychile et Dromica. Les Carabiques nous offrent les genres (1) J. Thompson, Archives entomologiques, II. Paris, 1858. — Voyage.au Gabon, histoire naturelle des Insectes et Arachnides, par divers collaborateurs. DISTRIBUTION GÉOGRAPHIQUE. 203 cafres Hystrichopus et Coptoptera; les Scarabéiens, les genres Lepithrix, Anisonyx, Monocheîus, ce dernier avec de très-nombreuses espèces, etc. Les environs de Natal sont la patrie principale des Paussiens, aux antennes renflées, de formes si bizarres, et aussi d'espèces variées de Termites (Névroptères), souvent associés à ces singuliers Coléoptères, Le Cap possède en propre les Pneumorcs (Orthoptères, Acridiens), à abdomen des mâles vésicnleux et sonore sous le frottement des cuisses postérieures. Les Lépidoptères ne sont pas très-nombreux dans l'Afrique australe. Outre les familles européennes, on y trouve des Danaïdes, des Eurytélides, des Acrœa. La partie sud-est paraît bien plus riche en Lépi- doptères que le reste de la contrée, surtout le pays de Natal, oii abon- dent des formes particulières aux régions tropicales (1). Un fait très- curieux relatif à ces espèces de Natal, par 30 degrés lat. S., c'est que beaucoup sont identiques avec les Insectes de Sierra-Leone, à 8" 30' lat. N., et à plus de 2500 lieues de distance : la Guinée, le Sénégal, le pays des Ashantis, c'est-à-dire" toute la côte occidentale d'Afrique, ont des Lépidoptères pareils k ceux de Natal, de Zanzibar, du Mozambique. Cette dernière région a natui-ellement d'assez nombreux Insectes com- muns avec la côte occidentale de Madagascar, fait très-explicable pour les espèces ailées et que les vents doivent transporter entre des rivages peu éloignés. La grande île de Madagascar, qui nous est surtout connue dans sa région orientale, a une faune entomologique propre, comprenant en outre certaines espèces communes avec l'Afrique, comme nous l'avons dit. C'est une des régions les plus riches qui existent en [nsectes, avec nombre d'espèces et de genres spéciaux, surtout dans les ordres des faibles voiliers, il faut citer, dans les Coléoptères, en genres spéciaux, les Vogonostoma (Cicindélides); dans les Scarabéiens, les He.xodon (aussi de Maurice) ; des Bupresiiens à élylres Irès-larges, d'un aspect inconnu ailleurs, formant le genre Pohjbotlirisà. très-nombreuses espèces, toutes exclusives à Madagascar, etc. Cette grande île n'est pas moins bien douée en Lépidoptères qu'en Coléoptères ; ses forêts chaudes et humides sont habitées par des Papillons aux ailes splendides. Les genres tropi- caux prédominent, comme les Papilio, dont les chenilles vivent surtout sur les Orangers; les Danais et Euplœa sur les Nerium, les Asclepias et autres Apocynées; les Acrœa, les Cyrestis, les Xanthidia,le?, Urania. Ce dernier genre présente à Madagascar le plus beau Lépidoptère connu, VUrania Rhipheus, aux ailes dentelées, variées de vert, de pourpre et d'or. Rien de plus anormal que ce genre, dont les adultes ont les antennes filiformes des Nocturnes avec les couleurs métalliques des Hhopalocères diurnes, et dont les chenilles demi-arpenteuses ont des épines, comme celles des Nymphalides, et des tentacules rétractiles, (1) Roland Trimen, Rhopalocera Africœ auslraîis. Cape-town, 1842, 2 vol. in -8°. 204 INTRODUCTION. ainsi que chez les Papîlîo (1). Les Lépidoptères madécasses sont d'un type tout différent de ceux du Cap, et ressemblent au contraire à ceux, trùs-éloignés, du Sénégal et de Sierra-Leone ; il y a même des espèces identiques. En regard des côtes orientales de l'Afrique se trouvent les îles Mau- rice et Bourbon ou de la Réunion (anciennes îles Mascareignes), qui nous intéressent à titre de possessions européennes. Selon la loi géné- rale, ces îles restreintes sont bien plus pauvres en Insectes que les grandes terres. Ce sont des îles volcaniques, probablement d'émersion assez récente, et ayant peu de cours d'eau. A la Réunion, les déboise- ments des hauteurs ont produit le résultat ordinaire : la terre végétale est ravinée, et les plantes diminuent en nombre, ce qui amènera la perte de beaucoup d'Insectes. A part quelques espèces madécasses importées par les vents ou par l'homme, le type général de la faune est indo-sondaïque, et fuit prévoir les formes qu'on retrouve à l'orient de ces îles, au Malabar, au Bengale, à Ceylan, à Java, etc. 11 y a des espèces exclusives et même propres à une seule des deux îles. Le même fait s'est produit dans d'autres embranchements : ainsi pour leDronte de l'île Maurice et le Solitaire de l'île Rodrigue, ces grands oiseaux détruits au- jourd'hui (2). Les Lépidoptères sont peu nombreux; il n'y a ni Pieris, ni Colias, ni Acrœa. Chaque île possède un seul Papilio, d'espèce spéciale de l'une à l'autre, vivant sur l'Oranger ou le Citronnier. On trouve dans les forêts des Nymphalides, mais manquant des genres africains Cyres- tîs, Lexias, Harma, Euryphene. Dans les défrichés, près des habitations, vivent quelques espèces des genres Callidryas, Terias, Euplœa, Danais et quelques Satyrides, Lycénides et Hespérides. Les Sphingides, grands voiliers, sont les mêmes qu'à Madagascar; il n'y a ni Syntomis, ni Glaucopis, et pas de Bombycides proprement dits. On trouve quelques Euchélides et Lithosides, un peu plus de Noctuelles, quelques Phalé- nides. Les Deltoïdes sont abondants. D'après M. Gucnée, le type des Lépidoptères est à la fois indien et américain, et il y a une ressem- blance marquée pour le tiers des espèces avec les formes européennes, et même des espèces tout à fait identiques, comme Pyrameis Cardui et Sphinx Convolvuli (espèces très-répandues), Lycœna bœtica et telicanus, les Sphinx Atropos, Celerio, Nerii, etc. Les Coléoptères ont offert quel- ques espèces inédites, et M. Signoret a créé quelques genres nouveaux pour des Hémiptères de la Réunion. Nous citerons enfin, dans le voisi- nage des îles Mascareignes , les îles Seychelles pour une curieuse espèce de Phasmiens (Orthoptères) du genre Phyllium, qui leur est propre, que les habitants s'amusent à nourrir en captivité dans de petites cages. (1) Boisduval, Faune entomologique de Madagascar, Bourbon et Maurice, Lèfidopt. Paris, 1833, (2) L. Maillard, NoUs sur l'île de la Réunion, Entomologie, II, par divers col- laborateurs. Paris, 1863. DISTRIBUTION GÉOGRAPHIQUE. ÎÎ05 Le continent du nouveau monde est un centre de plusieurs créations entomologiques. La partie boréale a des espèces communes avec le nord de l'Europe, comme cela a lieu pour tous les animaux et les végétaux, en raison de la communication arctique et d'un climat plus chaud, antérieurement aux périodes multiples de l'invasion gla- ciaire. Puis les espèces communes s'éteignent peu à peu, à mesure qu'on descend vers le sud, ou se modifient et deviennent des races constantes, comme cela est arrivé pour les papillons Morio et Vulcain. Une remarque importante domine toute l'entomologie américaine. On sait qu'un axe montagneux, suivant très-sensiblement deux grands cercles de la sphère terrestre, les Andes, puis les montagnes Rocheuses, partage l'immense continent en deux versants. Du côté de l'Europe, se trouvent des côtes plates, de vastes plaines, des températures exces- sives, très-basses en hiver dans le nord des États-Unis, torrides en été, toujours élevées entre les tropiques. Là se trouvent les formes ento- mologiques les plus variées et les plus distinctes de celles de l'ancien monde. L'autre versant est au contraire élevé, et d'une manière brusque, dans la partie comprise du Mexique au Chili, qui correspond à une ligne de fracture terrestre ; les formes entomologiques rappellent davantage celles de l'Europe, car la température a diminué en raison de l'altitude. En outre, un courant d'eau chaude, analogue à celui qui réchauffe les côtes septentrionales de l'Europe, prolonge vers le N. 0. de l'Amérique les isothermes tempérés. Si nous examinons d'abord le versant oriental, de beaucoup le plus étendu, nous trouvons que le Canada et la Nouvelle-Ecosse compren- nent un très-grand nombre de formes génériques pareilles à celles de l'Europe boréale et moyenne, et même certaines espèces tout à fait identiques. La faune est cependant bien distincte dans son ensemble pour les espèces, comme cela a lieu dans tous les embranchements. Il y a des types tout à fait étrangers à l'Europe. Ainsi le Danois Archip- pus, Fabr. (Lépidoptères) se rencontre depuis le Brésil jusqu'au nord de l'Amérique, vivant sur les Asclépiadées, tandis que son congénère de l'ancien monde, le D. Chrysippus, n'a pas pu s'acclimater, môme à l'extrême sud de l'Europe, dans le royaume de Naples. Un certain nombre de genres de Coléoptères, les Scaphinotus, Sphœroderus, sont spéciaux au Canada et y représentent nos Cychrus dans les Carabiques. On retrouve au Canada les Attacus Luna, Prometheus, Polyphemus, Cecro- pia, Bombycides producteurs de soie vivant jusqu'au sud des États- Unis, fait très-important en ce qu'il prouve la possibilité d'acclimater ces utiles espèces dans des régions très-froides (1). On voit paraître dès .les hautes latitudes américaines des types de Névroplères tout à fait (i) Maurice Girard, Nolês Sur Venlomologie de V Amérique du Nord {Ann. Soc. entom. de France, 1868, p. 287). 206 INTRODUCTION. étrangers à l'ancien monde, ainsi le Corydalis cornutus, et les genres Chauliodes et Polystoichotes. Dans les États-Unis, la distinction de la faune s'accentue davantage. La région est moins riche en Insectes que les régions homologues en climat et d'égale étendue de l'ancien monde. On y remarque un mélange de formes européennes avec les formes spéciales à l'Amérique inter- tropicale, et certaines espèces otfrent une extension considérable : ainsi le Fhanœus carnifex de la Floride au Canada. Le genre Plianœus (Sca- rabéiens), essentiellement américain, s'y trouve à côté des Geotrupes, les Rutèles avec les Mélolonthes, les Gymnetis avec les Cétoines. Les Carabiques offrent les genres spéciaux Pasimachus et Dicœlus, s'éten- dant aussi à l'Amérique boréale. Les États-Unis présentent plus d'es- pèces de Papilio que l'Europe, c'est-à-dire d'Insectes d'une forme essen- tiellement intertropicale, et de môme plus de grands Bombyciens du genre Attacus. Elle possède aussi le genre australien Agarista, formé de Lépidoptères intermédiaires entre les Hespéries et les Sphinx. Les États-Unis sont généralement très-riches en Sphinx proprement dits, et en ont quatre à cinq fois plus que toute l'Europe. A partir du Mexique, le versant oriental devient très-prédominant en surface sur l'autre. Trois régions en altitude s'y rencontrent. La cein- ture maritime des terres chaudes possède la faune extrêmement riche de l'Amérique tropicale, et l'on y trouve beaucoup de genres de la Guyane et du Brésil. Les formes tropicales s'étendent eucore dans la région moyenne, et ne disparaissent que sur les hauts plateaux. Il nous est impossible d'énumérer les nombreux genres de Coléoptères spé- ciaux à l'Amérique tropicale. Il y a parmi les Lépidoptères certaines formes inconnues à l'ancien monde et dont nous indiquerons les princi- pales. Les Morpho, tout à fait diurnes, habitent surtout les lieux boisés et descendent peu du sommet des arbres. On les rencontre depuis le Mexique {Morpho Pulyphernus dans les régions moyennes du versant du Pacitique) jusqu'à la province de Sainte-Catherine du Brésil méri- dional. Ce sont ces splendides papillons au vol rapide, aux larges ailes bleues, à reflet métallique chez les mâles, et dont la parure des dames s'est plusieurs fois emparée. Le magnifique Morpho Cypris de Santa-Fé de Bogota a éclipsé l'éclat des pierres précieuses dans la coiifure de l'impératrice des Français. Les Pavonies, dont les ailes ont souvent de grandes taches ocellées,- sont à demi-crépusculaires, au repos pendant le jour sur les troncs d'arbres, ou volant lourdement sous les fourrés épais et obscurs, et le soir dans les broussailles. Les Brassolis volent aussi le soir et le matin. Les Héliconies, cette gloire entomologique de l'Amérique du Sud, ainsi que les appelle M. Wallace, ne se trouvent que dans les grandes forêts, paraissant aimer la solitude et parcourant les airs d'un vol lent et comme distingué. Dans les Lépidoptères hété- rocères, nous devons signaler le genre Castnia, exclusivement améri- cain, etc. DISTRIBUTION GÉOGRAPHIQUE. 2107 L'archipel des Antilles semble vouloir relier en arc les deux conti- nents déjà unis par l'isthme de Panama ; il possède une faune essen- tiellement mixte entre eux, comme on pouvait le prévoir d'après sa situation géographique (1). Les grandes îles ont, comme d'habitude, quelques espèces propres; les petites îles sont très-pauvres. Les collec- tionneurs reçoivent surtout des Antilles le Scarabée Hercule {Dynastes Hercules), le plus gros coléoptère après certains Goliaths. Cette espèce spéciale, si connue, est caractéristique de la faune des Antilles. Une région fort intéressante, et dont nous parviennent chaque jour de nou- velles espèces, est la Nouvelle-Grenade avec les vallées de la Magdalena et du lac de Macaraïbo, ainsi que la province de Caracas, portion du Venezuela, au nord de l'Orénoque. Les Lépidoptères et Coléoptères, en général des mêmes genres que ceux des Guyanes et du Brésil, en sont distincts pour la plupart comme espèces. Nous citerons le beau genre spécial Psalidognathus (Prionides, Cérambyciens). On peut appeler région de la Guyane, bien que les Guyanes anglaise, hollandaise et française n'en forment que la partie côtière, le vaste territoire compris entre l'Orénoque, le rio Negro, l'Amazone et la mer. L'intérieur est en effet à peine connu. Notre colonie de la Guyane a été le sujet de divers .travaux d'entomologie (2). L'ordre des Lépi- doptères y présente les espèces les plus variées, surtout en juillet et août, au début de la saison sèche, ne disparaissant guère qu'en mai et juin, sous les pluies prolongées de Ihivernage. Cayenne, placée dans une île, à peu près au milieu de la côte de la colonie, la divise en deux habitat bien distincts pour cet ordre d'Insectes. La portion dite au vent de Vile, c'est-à-dire au S. S. E., offre en partie des inontagnes assez élevées, parallèles à la côte. Ses Lépidoptères ont un certain nombre d'espèces communes avec le nord du Brésil, qui ne dépassent que très- rarement l'île de Cayenne. L'autre région, celle sous le vent, plate, couverte de savanes entremêlées de quelques bouquets de bois, a des espèces particulières qui lui sont communes avec la Guyane hollan- daise. Les Hyménoptères sont aussi très-abondants et très-diversifiés à la Guyane, surtout les Ichneumoniens, les Formicides, les Fouisseurs et les Apiaires. La plupart des espèces fréquentent le voisinage des habitations. Les terrains sablonneux qui entourent Cayenne, la route (1) Ramon de la Sagra, Histoire physique, poUlique et naturelle de Vile de Cuba, Animaux articulés. Paris, 1857. (2) Lacordaire, Notice sur l'entomologie de la Guyane française {Ann. Soc. entom.de France, 1832, I, p. 348-36G). — Notice sur les habitudes des Lépidoptères diurnes de la Guyane franc. [Ann. Soc. entoni. France, 1833, II, p. 370-397). — ' Essai sur les Coléoptères de la Guyane française {Noav. Ann. du Mus. dhist. «a<., 1833, II, p. 35-9/i ; extrait :y?ei;i(eerî^om. de Silbermatin, 1833, I, p. 95-100). A. Fauvel, Catalogue des Insectes recueillis à lu Guyane française, par M. Deplanclie, cliimrgieu de marine {Bull. Soc. linn. de Normandie, Caen, 1861, V, p. 299-327, et 1862, VI, p. 128-144). 208 INTRODUCTION. coloniale du bord de la mer, fourmillent de Sphex qui y creusent leurs retraites. Les maisons sont remplies de Xylocopes ei de Tripoxylons perçant les poteaux et les poutres. Les Apiaires se répandent sur les fleurs des plantations, et parmi enx les Mélipones sans aiguillon. Dans les bois et les savanes, on trouve de nombreuses espèces de Pompiles et de Vespides, surtout de Guêpes carlonnières, avec des nids de formes aussi variées que les espèces. Par un contraste singulier, dit M. Lacordaire, les Coléoptères sont bien moins abondants à la Guyane qu'au Brésil, qui est le pays du globe le plus riche en cet ordre, et cependant les forêts et les maré- cages de la Guyane offrent une végétation tout à fait analogue. La Guyane est aussi plus pauvre en cet ordre d'Insectes que le Mexique, Madagascar, Java, et peut-être le Sénégal et le Cap, tellement que nos bois dans la belle saison offrent plus de Coléoptères que ceux de la Guyane. Ce n'est qu'en juillet et août, au commencement de la saison sèche, qu'ils sont un peu nombreux. Les Carabiques, les Uloma, les Diapères et les Érotyles, paraissent seuls l'emporter en quantité à la Guyane sur le Brésil, ce dernier pays reprenant une supériorité consi- dérable dans les autres familles de l'ordre, surtout pour les Scara- béiens, les Curculioniens, et encore plus pour les Longicornes, très- multipliés au Brésil, et dont beaucoup d'espèces s'étendent sur la vaste surface comprise de la Guyane à Rio-Janeiro. Les Coléoptères de la Guyane ont, au reste, une grande analogie avec ceux du Brésil, mais près des trois quarts sont distincts comme espèces. La Guyane est éga- lement bien moins riche que le Brésil en Hémiptères. Dans ce dernier pays, certains Hétéroptères (Lygées, Scutellères, etc.) le disputent par la richesse de leurs couleurs et leurs formes bizarres aux Coléoptères mômes. La vallée de l'Amazone constitue pour le nord du Brésil et la répu- blique de l'Equateur le pays du monde le plus abondant en Insectes de tous les ordres, surtout en Coléoptères et Lépidoptères. Elle présente, en effet , la double condition , très-favorable à leur développement rapide, d'une température uniforme et d'une extrême humidité. Pour les Lépidoptères, on trouve des espèces un peu différentes selon qu'on explore : 1° les bords du fleuve, 2° les plantations et jardins de la vallée, 3° les forêts vierges de l'Amazone |l). Cette vallée a beaucoup d'espèces spéciales en outre de celles qui sont communes k toute l'Amérique méridionale, comme certains Cal^ lidryas, le Papilio Polydamas, le Danois Archippus, etc. Les trois séries de localités abondent en espèces du genre Papilio; les Héliconies sont surtout propres à la seconde, et les forêts vierges offrent principalement des Érycines, des Hespérides, de beaux Satyres, les délicats Ithomia, etc. (1) A. Wallace, On ihe Habits ùf the Butterflies of the Amazone Valley {Trans, ofthe Enlom. Soc, of London, new séries, II, 1862-1853). ÛlSTRlBUÎION GÉOGRAPHIQUE. 'i09 Enfin, cette vallée est fort riche en Morpho, Pavonia, BrassoUs, Dynastor, Caligo, etc., tous hôtes des bois. Le rare iWorpfto ffecufta est très-com- mun à l'intérieur, dans les forêts qui bordent le rio Negro. La Bolivie a été explorée au point de vue entomologique par A. d'Or- bigny (1). Les Coléoptères et Lépidoptères ont un aspect brésilien, et beaucoup d'espèces sont identiques avec celles des environs de Rio- Janeiro ou avec celles de la Guyane. Les espèces de Coléoptères propres au pays consistent surtout en Mélasomes. Le Paraguay, le Brésil méri dional, ou provinces de Sainte-Catherine et de Rio-Grande et l'Uruguay, ont des Insectes qui difTèrent en général comme espèces de ceux du Brésil septentrional, qui est plus chaud, surtout à mesure qu'on se rap- proche de la Plata. Les Morpho s'éteignent à partir de la province de Sainte-Catherine, et la province de Rio-Grande a une foule d'espèces inconnues près de Rio-Janeiro, bien que des mêmes genres. A l'ouest de ces régions se trouve le Tucuman, faisant partie du vaste territoire de la Plata. « Cette région, dit M. Lacordaire (2), est la véritable patrie des Mélasomes en Amérique, et notamment des Nyctclia et genres voisins. Elle le doit à son sol aride, sablonneux, salin, qui oiïre ces caractères à un degré d'autant plus prononcé, qu'on se rapproche davantage des Andes. Après la famille en question, les Carabiques y dominent. Les Lépidoptères y sont très-peu nombreux et n'offrent rien de remarquable. » Le savant entomologiste que nous venons de citer a fait de longues explorations dans la province de Buénos-Ayres qui s'étend du sud du fleuve de la Plata aux déserts patagoniens. Le sol est en général argileux et couvert de Graminées pour toute végétation; aussi les Insectes y sont peu nombreux. Les Carabiques, comme en Europe, y dominent dans les Coléoptères. On trouve en Lépidoptères des Pieris, Collas, Vanessa, etc. l\ reste cependant encore quelques formes intertropicales, comme les Phanceus (Scarabéiens) et quelques autres genres en petit nombre (3). Nous ne pouvons rien dire de la Patagonie, sur les deux versants des Andes ; c'est un pays inexploré, dont on n'a que quelques Insectes recueillis sur les côtes, et comme égarés dans les catalogues généraux. Le versant américain occidental n'est connu, plus encore que l'autre^ que pour certaines régions... Ainsi, Eschscholtz a décrit un certain nombre de Coléoptères des îles Aléoutiennes et des rivages de l'Amé- rique russe. On cite quelques types spéciaux dans les territoires des montagnes Rocheuses (territoire Nord-Ouest, Nouvelle-Calédonie, Co- lombie anglaise): tel le genre Omus (Cicindéliens), s'étendant aussi en Californie. (1) A. d'Orbigny, Voyage dans l'Amérique tnéridionaîe {Brésil, Uruguay, république Argentine, Patagonie, Chili, Bolivie et Pérou), partie du tome VI^ Insectes, par MM. Brullé et E. Blanchard. Paris, d845. (2) Lacordaire, Introd. à l'Enlom., II, p. 618. Paris, 1838. (3) Lacordaire, op. cit., II, 618. GIRARD. i4 210 INTRODUCTION. Depuis que les gisements aurifères ont fait affluer les Européens dans cette région, complètement inexplorée il y a peu d'années, son ento- mologie a été l'objet de travaux divers, surtout de la part des natura- listes américains. Un Français, M. Lorquin, y a fait des récoltes qui ont donné quelques notions exactes sur la faune des Lépidoptères (i). Ces Insectes n'ont pas les couleurs splendides et les reflets éblouissants de ceux des régions équinoxiales. Leur tenue plus simple et plus modeste rappelle les espèces des États-Unis, et surtout celles de la Sibérie et du nord de l'Europe. Le cachet européen reparaît, au reste, dans une cer- taine mesure sur tout le versant occidental ou du Pacifique. Au nord de la Californie on a trouvé les genres Parnassius et Limenitis, qu'on croyait n'appartenir qu'à l'Europe et à l'Asie. On peut signaler comme pareils aux espèces d'Europe : lihodocera Rhamni, Vanessa Antiope, Pyra- meis Atalanta et Cardui, elc. Les genres Agarista et Ctenacha (Zygénides) sont au contraire étrangers à l'Europe, ainsi que le genre Danais {Danois Archippus), Les genres américains tropicaux /fe/tconù*, Leptalis, Cybdelis, Morpho, Castnia, etc., manquent entièrement. L'Attacus Ceanothi, aussi des Étals-Unis, est important à signaler en Californie, comme espèce produisant de la soie. Les Mélitées, les Argynnes, les Satyres, les Hespérides, ont en Cali- fornie les mêmes mœurs qu'en Europe, et les espèces, bien que ditfé- rentes, ont des habitudes et des stations analogues. La Vieille-Californie est une presqu'île aride qui parait avoir une faune entomologique spéciale, riche surtout en Mélasomes dans les Coléoptères (2). La zone mexicaine occidentale ressemble pour la faune à l'autre dont nous avons parlé. La bande étroite du Pérou qui règne entre les Andes et le Pacifique est extrêmement aride, sauf dans quel- ques vallées, et l'on y trouve, en rapport avec cette condition du sol, beaucoup de Mélasomes. Le Chili forme, à la suite méridionale de la région précédente, une autre bande un peu plus large. Son entomo- logie est mieux connue, en raison d'une population européenne dans de meilleures conditions de gouvernement et de développement in- tellectuel. Une faune spéciale le caractérise, autre que celle du Tucu- man, qui l'avoisine (3). Un assez grand nombre de genres exclusifs appartiennent aux Coléoptères. Ainsi, dans les Carabiques : Merizodus, Homalodera, Trechisibus, Oxoides,Variopalpm, Plafjiotelum, etc.; dans les (1) D'' Boisduval, Lépidoptères de la Californie {Ann. Soc. entom. de France, 2" série, 1852, X, p. 275). — Lépidoptères de la Californie, br. in-8, Bruxelles, 1869, et Ann. de la Soc. enlom. de Belgique. (2) Lacordaire, op. cit., II, p. 615 et 617. (3) Cl. Gay, Historia fisica y politica de Chile (Paris et Santiago) : Coléoptères, IV, 1849, et V, 1851; Orthoptères, Névroptères, Hyménoptères, YI, 1851; Lépidoptères, Hémiptères et Diptères, VII, 1852. L.Fairmaire et Germain, Coléoptères duChili i,Ann. Soc. entom. de France, iSbS, Pi 709, et 1859, p. 483; Rev. et Mayas, de zool., 1859, p. 350, et 1860, p. 267). DISTRIBUTION GÉOGRAPHIQUE. 211 Scarabéiens, les genres Modialis, Rutélide voisine des Anoplognathes australiens, Lacris, Ptijophis: le genre si curieux des Chiasognathus dans les Lucanides. Le genre Pyrophorus prolonge jusqu'au Chili une l'orme tropicale des Élatériens. On trouve aussi des genres de Coléoptères, qui ont dans l'ancien monde, et surtout en Europe, la grande majorité de leurs espèces, comme les Hydnobius (Dytisciens), Silpha , Clioleva (Silphiens), Trichopteryx, Ptilium, etc., tous genres qui n'ont que peu d'espèces disséminées dans les diverses régions de l'Amérique. Parmi les Lépidoptères, on rencontre au Chili des formes tropicales, les unes amé- ricaines, comme les genres Heliconin, Castnia ; les autres des deux mondes, ainsi les Terias, les Callidryas, et à côté les genres de l'Europe et de l'Asie froide et tempérée, Anthocharis et Colias. Parmi les Ortho- ptères, le Chili présente des Proscopies, singuliers Acridiens aptères, à corps grcle, que leurs cuisses renflées et leurs tarses empêchent de confondre avec les Phasmiens ; ils sont propres exclusivement à l'Amé- rique du Sud, et existent aussi au Brésil. De même on trouve au Chili le genre Tropiiwtus (Truxalides, Orthoptères), qui a d'autres espèces au Brésil et à la Guyane, etc. On peut dire en général et comme résumé de tout ce qui précède, que les espèces de grande taille ou de formes singulières, ou de cou- leurs éclatantes, vivent dans les conditions géographiques de haute température et de grande humidité. En Afrique, où le sol est plus généralement sec, les espèces de cette sorte sont moins abondantes que dans l'Amérique interlropicale et les Indes orientales. Les contrées froides n'ont guère que des espèces de petite taille, où dominent le noir, le grisâtre, le brunâtre (1). II y a quelques espèces d'Insectes, en bien petit nombre, qui pa- raissent cosmopolites par elles-mêmes. Ce sont en général des espèces à vol puissant ou possédant des instincts de migration avec l'aide des vents. Ainsi, certains, comme YAcridiam peregrinum, VOEdipoda migra- toria, etc., promènent leurs nuées dévastatrices dans toutes les régions chaudes de l'ancien monde. La première espèce s'étend du Maroc aux rivages de la Chine, sur près d'une demi-circonférence du globe. La se- conde espèce répand ses ravages des steppes de la Russie d'Asie à la Provence, et quelques sujets isolés viennent s'égarer dans les prairies de notre banlieue parisienne. Plusieurs espèces de Sphingides, ainsi les Sphinx du Laurier rose, du Liseron, Célério, etc., vont de l'Afrique jusqu'en Angleterre. Celui du Liseron s'étend en outre à toute la Polynésie, y compris la Nouvelle- Zélande. Une espèce bien commune dans nos environs, le Papillon Belle-Dame, ou la Vanesse du Chardon, se rencontre aux Indes, en Chine, dans les îles de la Sonde, aux États-Unis, en Californie, au x\Iexi- (1) E. Blanchard;, Sur la distribution géographique des Animaux arlicidés {Comptes rendus Acad. des sciences, 18Û1, t. X.II, p. 1216). 512 INTRODUCTION. que, etc. Le Sphinx à tête de mort, qui jetait l'épouvante dans les cam- pagnes bretonnes du temps de Réaumur, se trouve de l'Angleterre et de la France aux îles de la Sonde et à l'Australie. Ce sont là des exceptions : les espèces d'habitude se restreignent davantage dans leurs localités. On peut faire une remarque assez curieuse sur les Insectes nocturnes, comparés à ceux du même ordre qui vivent à l'ardeur du jour, du moins dans certains groupes. Ainsi les Noctuelles, parmi les Lépidoptè- res, présentent souvent beaucoup d'analogie pour les régions tropicales d'un même grand continent avec les espèces des régions tempérées : les Noctuelles du Gabon, par exemple, ressemblent à celles d'Europe. Les Papillons diurnes, au contraire, offrent des différences très-tran- chées. Cela doit tenir à la fraîcheur des nuits tropicales, amenant une identité dans les conditions thermiques pour des espèces dont les che- nilles, cachées soigneusement pendant le jour, mangent la nuit, et dont les adultes n'ont en général d'activité pour l'alimentation et pour la reproduction qu'à l'entrée et à la fin de la nuit. L'homme, par l'extension de ses races civilisées, a une influence incontestable pour modifier la distribution géographique des Insectes, faire disparaître ou rendre très-rares certaines espèces, en augmenter d'autres au contraire d'une façon prodigieuse par le développement des cultures alimentaires ou industrielles. Les Blattes (Orthoptères), les Dermestes et les Anthrènes étendent maintenant leurs ravages dans toutes les régions de la terre, transportés avec les marchandises parles vaisseaux et par les caravanes ; et certaines espèces sont les mômes partout. Si nous nous restreignons à la France, il est probable qu'avant la conquête romaine, la Gaule, couverte de forêts, devait offrir en abon- dance les Nymphales et les grands Satyres, Lépidoptères qui deviennent aujourd'hui de plus en plus rares. Au contraire, dans le même ordre d'Insectes, plusieurs espèces de Piérides et de Coliades, vivant exclusi- vement de végétaux domestiques, devaient être fort rares ou même in- connues dans les contrées qu'elles infestent maintenant. On remarque que les Papillons blancs de nos Crucifères potagères deviennent d'autant plus abondants , qu'on s'avance vers le sud de l'Europe , sont très- répandus en Itahe, en Grèce, en Egypte même, si stérile en Lépido- ptères. Or, ces pays sont cultivés depuis la plus haute antiquité, et les espèces en question doivent venir d'Orient, berceau de la race cauca- sique, et ont suivi l'homme et ses cultures. C'est en Morée, et sur- tout en Egypte, qu'elles présentent la plus grande taille, et leurs dimensions diminuent à mesure qu'on s'avance vers le nord. Or, les espèces dégénèrent en s'éloignant de leur patrie primitive. C'est l'homme qui multiplie le Hanneton, fléau de ses jardins et de ses cliamps. La terre remuée par de fréquents labours offre à ses larves l'oxy- gène nécessaire à la respiration. On remarque que les arbres des lisières du bois, contre les champs culti- es, sont souvent dévorés par les Han- netons, mais que ces Insectes deviennent plus rares à mesure qu'on ESPÈCES ET CLASSIFICATION 213 s'enfonce dans les profondeurs des forêts, et cessen de causer de véri- tables dégâts au centre des grands bois. De même, le Scarabée rhino- céros {Oryctes nasicornis) est devenu fort commun dans la banlieue de Paris par l'usage que font les maraîchers de la tannée, où vivent les larves, tandis qu'il est assez rare dans les bois éloignés des jardins, où se rencontrent difficilement les écorces et les fibres ligneuses à l'état de décomposition et de séparation nécessaires. Ce sont les défrichements qui font disparaître le plus grand nombre des espèces d'Insectes en substituant les végétaux uniformes de nos cul- tures aux plantes sauvages les plus variées. Les bois dans lesquels on ra- tisse les allées pour la promenade, au lieu de les laisser pleines d'herbes et de broussailles, perdent leur attrait pour l'amateur d'entomologie, car les plantes basses servaient de nourriture et de gîte à une foule d'espèces de tous les ordres. Il y a beaucoup d'Insectes qui semblent re- douter le voisinage de l'homme, troublés dans leur repos par les mille bruits de son travail et de ses plaisirs, péniblement affectés par les odeurs diverses de ses industries et la fumée de ses foyers. Aussi les voit-on s'écarter peu à peu des demeures humaines, puis disparaître, même avant les plantes qui les nourrissent. Les environs de Paris, si diversifiés par l'exposition, la hauteur, les terrains secs ou humides, les cultures variées, en rapport avec les besoins d'une ville immense, les forêts de diverses essences, etc., étaient autrefois d'une grande richesse entomologique. Les constructions de l'homme empiètent de plus en plus sur le domaine de la nature, et il faut maintenant aller chercher à de grandes distances ces nombreuses races d'Insectes que Geoffroy et Réaumur pouvaient récolter et observer autrefois dans la banlieue de Paris et dans les jardins mêmes de la grande cité. § VIII. — E.spèces et classineatfon. La nature, dans les Insectes comme dans le reste du règne animal, ne présente à notre observation que des espèces. Les Insectes de même espèce sont ceux qui peuvent reproduire d'une manière indéfinie, par voie de génération, des individus à peu près semblables. C'est la meil- leure définition connue, bien qu'elle ne soit pas sans objections. L'espèce est soumise à des variations très-limitées. Une observation sévère ne permet aucunement de soutenir la théorie de la variabilité indéfinie de l'espèce. Suivant Lamarck, les circonstances extérieures pouvant modifier les animaux, l'influence de conditions communes finissait par identifier des êtres d'abord distincts. Ainsi l'oie devenait cygne ; la girafe prenait son long cou par suite d'un habitat prolongé dans des pays où les feuilles sont toujours au haut des arbres, et la forme finissait par devenir héréditaire. L'anatomie est formellement contraire à ces idées qui présentaient les formes spécifiques comme 214 INTRODUCTION. vagues, non essentielles et changeantes, sans intérêt profond pour la science. On a aussi supposé, en remarquant que les embryons de cer- tains animaux offrent des ressemblances avec l'état permanent d'autres espèces, que le règne animal provenait d'un fonds unique avec des arrêts successifs de développement constituant les différentes espèces. Une observation exacte fait reconnaître des différences, môme dans les embryons : ainsi, Gratiolet a montré que l'encéphale du fœtus du singe suit dans son développement une marche inverse à celle qu'il offre dans le fœtus humain, bien qu'ils arrivent, à l'état adulte, à une assez grande analogie. Nous n'avons pas à discuter, dans un ouvrage élémentaire, les théories sur l'espèce, ni la sélection naturelle, de M. Darwin, et les idées émises par ce savant comme suite et modifi- cations des doctrines de Lamarclî et de E. Geoffroy Saint-Hilaire. Les principes généraux sont applicables aux Insectes. Leurs espèces paraissent constantes, avec des variations limitées. L'expérience jus- qu'ici ne permet pas de conclure autrement. On observe bien quel- quefois des accouplements entre des espèces voisines; mais ils sont sans résultat, ou bien les hybrides qui en proviennent sont frappés d'infé- condité, ou tout de suite, ou au bout de peu de générations. La fixité n'est pas absolue dans une espèce. Elle peut offrir des changements de couleur, des différences dans la taille de l'adulte, plus étendues qu'on ne l'a cru autrefois, allant môme du simple au double dans certaines espèces, provenant de la nourriture, du climat, d'accidents d'insola- tion, etc. Comme, d'autre part, l'expansion graduelle des espèces à la surface du globe est la conséquence nécessaire de la multiplication des individus, on comprend que, dans certaines localités, surtout aux limites de la distribution géographique d'une espèce donnée, des con- ditions identiques et continues de régime amènent des modifications qui se perpétuent sur place et indéfiniment. De là les races ou variétés aussi importantes que les espèces. Il arrive plus fréquemment, sous l'empire d'une foule de causes plus ou moins connues, que les espèces présentent des sujets parfois très -différents du type, mais sans repro- duction nécessaire, seulement possible et accidentelle. Ce sont les aber- rations. Certaines espèces, ainsi les Coccinelles, les Ero (yles (Coléoptères) , montrent d'une manière presque générale des différences de couleur du fond, le fond prenant la couleur des taches, et réciproquement, le dessin restant constant d'un individu à l'autre. 11 faut rattacher à ce phénomène général des aberrations les monstruosités qui ne se repro- duisent pas par générations. Les monstres les plus fréquents chez les Insectes sont les gynandromorphes semi-latéraux, parfois avec prédo- minance d'un des deux sexes, les monstres avec organes ou parties d'or- ganes surnuméraires (polymélie), certains monstres par scission ou par arrêt de développement, conservant des caractères de larve ou de nym- phe, etc. Tous les passages peuvent se produire entre les formules idéales qui précèdent. On reconnaît que les variétés et les aberrations ESPÈCES ET CLASSIFICATION. 215 rentrent dans l'espèce, en ce que les accouplements avec des sujets ty- piques sont toujours féconds, ainsi que les accouplements des variétés constantes entre elles : cela se voit par exemple pour les races si nom- breuses du Ver à soie, qui est véritablement à la classe des Insectes ce que le Chien est à celle des Mammifères. La fécondité indéfinie des métis peut faire reconnaître des races locales, là où l'on supposait d'abord des espèces distinctes : ainsi pour les Vers à soie du Ricin et de l'Allante, l'un de l'Indo-Chine, l'autre de la Chine. Les différences sexuelles des Insectes doivent entrer en grande considération pour la formation des espèces, et de doubles espèces erronées ont bien des fois été admises par la découverte séparée des deux sexes d'une môme espèce. Souvent le mâle et la femelle sont extérieurement pareils et ne se distinguent que par les organes génitaux, peu apparents à l'extérieur, ou même invisibles à l'état sec. Un abdomen renflé, piriforme, peut être le seul caractère extérieur de la femelle, tandis qu'il est cylin- droïde chez le mâle. Au contraire, les deux sexes sont, dans d'autres cas, facilement distincts : tels sont ces Scarabées nasicornes dont les femelles manquent des curieux appendices céphaliques; ces Papillons nocturnes à antennes pectinées chez les mâles, grêles chez les femelles, ou chez lesquels les mâles étant ailés, les femelles sont mi-aptères ou aptères. De même chez les Lampyres ou Vers luisants (Coléoptères). Enfin, dans les Insectes à ailes colorées, des différences de couleur, bien plus souvent que de dessin, peuvent séparer les deux sexes. En général le mâle s'éloigne de la femelle par hypertrophie, par saillance des caractères du groupe; la femelle, moins éloignée des états em- bryonnaires, ofl're de l'atrophie, de l'avortement dans certains organes. Ces notions bien établies, comme l'observation des générations suc- cessives, qui seule peut donner la certitude de la validité spécifique, manque le plus souvent, on conclut à l'espèce d'après l'observation des formes extérieures et la comparaison avec des espèces bien démon- trées. Comme les variations, bien que limitées, sont nombreuses pour certaines espèces, il est indispensable de réunir des séries d'un assez grand nombre d'individus avant de se prononcer. Si l'on remarque le désir légitime des collectionneurs de posséder des espèces nouvelles, on s'expliquera les continuelles erreurs provenant de la précipitation avec laquelle certains auteurs établissent des espèces sur un sujet unique. Il faut dans ce cas des caractères bien tranchés pour oser se prononcer. Tous ces faits n'altèrent en rien la réalité de l'espèce, son existence ab- solue, naturelle, essentielle, bien qu'une définition parfaite fasse défaut; ils rendent seulement nécessaire la connaissance de ses variations limi- tées. Un caractère, même léger, est-il constant dans la série des types les plus communs, des variétés, des aberrations, il est spécifique; est-il variable, même saillant et remarquable, il n'est pas spécifique. Quelque difficulté que l'esprit humain éprouve à comprendre des espèces créées de toutes pièces, et une fois pour toutes, c'est encore la 216 INTRODUCTION. seule hypothèse qui conduise à des conséquences extrêmes raisonnables et justifiées par les faits. Il faut supposer seulement que l'espèce est susceptible de variations limitées, assez étendues même dans certains cas, conservant toutefois le plan fondamental du Créateur. Si l'on ne res- treint pas les idées de modification et de passage à ces variations d'une seule espèce, on peut, de proche en proche, arriver aux conclusions les plus absurdes, et, avec un peu de bonne volonté, faire descendre l'homme, non-seulement du Singe, mais du Trilobite ou de la Monade. L'espèce reconnue fixe dans certaines limites, le plus souvent assez restreintes, comme le montre l'expérience rigoureuse, est susceptible û'anomalies, en donnant ce nom à tout écart du type normal, c'est-à- dire, en théorie, du plus fréquent, mais parfois simplement en pratique du premier observé et décrit. Rien de plus obscur et de moins connu que les causes de ces anoma- lies, subdivisées en variétés, aberrations et monstruosités, mots que nous avons définis. Nous présenterons seulement quelques observations sur cette question, une des plus importantes que la science ait à ré- soudre dans l'avenir. Ce sont des faits, des pierres encore éparses sur le sol pour un édifice à construire, pas autre chose (1). L'expérience constate d'abord que des espèces, souvent très-voisines, se rencontrent côte à côte dans la nature, ayant les mêmes mœurs, vi- vant des mêmes plantes ou chassant une proie identique. Parfois même des accouplements naturels ont lieu entre ces espèces, comme on le voit chez les Coléoptères pour les Dorcadions, les Coccinelles ; chez les Lépidoptères, pour les Zygènes, etc. Les résultats de ces unions, quand ils existent, sont frappés bientôt d'infécondité. Ces espèces si voisines ne se fondent jamais en une seule, ou du moins la preuve contraire n'est pas faite pour les Insectes ; et les sujets types gardent toujours eurs très-légers caractères dislinctifs, bien moins accusés souvent que les différences que chaque espèce peut offrir avec ses propres ano- malies, montrant ainsi, jusqu'à 'preuve décisive contraire qui n'a pas encore été faite, que, dans la nature, la spécificité est quelque chose de réel, d'essentiel, d'intime, plus môme que la forme. La succession géologique des espèces nous offre les mêmes ordres d'Insectes que ceux qui vivent aujourd'hui ; seulement il y a des espèces qui ont fait leur temps, et qui disparaissent, en vertu de lois encore ignorées (2). La grande majorité des espèces vivantes paraît fixée, et n'offre que de légères différences individuelles ou des anomalies rares, et cela souvent pour des espèces répandues sur de vastes contrées et dans des points éloignés. Il en est même qui se conservent identiques (1) R. Mac Lachlan, Maurice Girard, J. Fallou, Notes générales sur les varia- tions des Lépidoptères {Ann. Soc. enlom. de France, 1867, p. 329). (2) A. Fauvel, De l'espèce et de ses variations. Faune gallo-rhénane, etc. {op. cit., 2^ livr., p. 188 et suiv.), -j ESPÈCES ET CLASSIFICATION. 217 depuis des époques antérieures [aux temps actuels. Ainsi à CEningen, pn'-s du lac de Constance, en Suisse, dans des marnes à minces feuillets de la période miocène supérieure , on rencontre des insectes que M. Heer appelle des formes homologues d'espèces actuelles, car il n'a pas osé les identifier, bien qu'il n'ait pu trouver aucun caractère dif- férentiel : tels sont les Lampyris noctiluca, Geotrupes stcrcorarhis, Coc~ cinella septempu7ictata (Coléoptères), Libellula depressa ( Névroptères), Apis mellifica (Hyménoptères), Aphrophora spumaria (Hémiptères homo- ptères), etc., et, avec eux, des formes spécifiques tout à fait étrangères à l'Europe actuelle, n y a au contraire certaines espèces qui ne paraissent pas encore fixées, tellement qu'on serait tenté parfois de faire autant de races que d'in- dividus. Des faits analogues se manifestent pour certaines familles d'oi- seaux, comme les Éperviers, les Milans, les Buses , etc. Nous citerons dans les Coléoptères, en nous bornant aux espèces de France, les Anisoplia agricola et arvicola, Anomala Vitis, Callidium variabile, Hylo- trupes bajulus, Rhamnusium Salicis, Chrysomela varians, Lina œnea, Coc- cinella variahilis, Propylea ih-punctata, etc., etc., et, à un moindre de- gré, Cicindela germanica, Carabus monilis, Cetonia aurata, etc. Dans ces Insectes la couleur du fond peut parfois avoir toutes les nuances : ainsi, du noir au fauve ou au vert et bleu clair; les points peuvent confluer ou disparaître, ou varier de nombre. Parmi les Lépidoptères, dans un môme groupe naturel, comme les Hibernies, on trouve tous les cas : ainsi les espèces nommées aurantiaria, aceraria, œscularia elpilosaria, constantes ; progemmaria et brumaria, peu variées ; defoliaria et leuco- phœarîa, au contraire, des plus changeantes d'un sujet cà l'autre. Pour- tant toutes ces espèces vivent ensemble sur nos arbres forestiers, et les adultes éclosent à l'entrée ou cà la fin de l'hiver (1). Dans les Zygènes, dans les Chélonies, les types habituellement à fond rouge passent quel- quefois au jaune plus ou moins orangé, et cette anomalie peut en cer- tains lieux devenir aussi abondante que le type : ainsi en Bretagne le Callimorpha liera jaune, ou même le remplacer et constituer une race locale, comme le Callimorpha dominula à fond jaune, dans le Cau- case. Ce remarquable changement de couleur du fond, qui forme des anomalies si recherchées des collectionneurs, ne me paraît pas être un albinisme, comme les furets issus du putois, les serins jaunes déri- vés d'un type vert, etc. Le jaune de ce fond n'est pas le jaune pâle que donne une longue exposition à la lumière, ou l'action du chlore. Il y a là un virement de couleur analogue à celui des réactifs végétaux par les acides et les alcalis. Les rouges du fond deviennent immédiate- ment jaunes par les vapeurs acides, et reprennent la teinte normale peu à peu à l'air ou immédiatement par l'ammoniaque; la nature sait fixer ces virements, et je crois que certains amateurs y arrivent par d es (1) J. Fallou, op, cit., note 12. 218 INTRODUCTION. procédés qu'ils tiennent secrels. Les Lépidoptères exotiques ont aussi des esp(''ces continuellement variables : ainsi le célèbre Ver à soie du Chêne du Japon (Attacus ya-ma-mdi) présente tous les tons, de la cou- leur de la lie de vin au citron pur, en passant par le rose et le gris. Le Papilio Memnon, de la Chine, des Philippines, de l'Indo-Chine et des îles Sondaïques, n'olfre pas deux individus pareils en taille, en couleur, en dessin. Pour un Nymphalide de Chine, de l'Inde, d'Australie, le Diadema lassinassa, M. de l'Orza a pu présenter, à l'exposition des insectes de 1868, jusqu'à trente-deux variétés des deux sexes oll'rant les plus grandes disfcmblances : les unes ornées de belles taches bleues, d'autres ternes, etc., au point qu'on croyait voir des espèces éloignées. Les variations de taille ont surtout pour cause la nourriture : c'est l'ordre des Diptères qui paraît les ofï'rir plus fréquemment, ce qui n'a pas peu contribué à multiplier les fausses espèces dans cet innombrable groupe. Cet efl'et de la nourriture plus ou moins abondaale se conçoit aisément pour les carnassiers de proie vivante ou morte et pour les Ichneumonicns (Hyménoptères), les Entomobies (Diptères), se dévelop- pant en nombre variable à l'intérieur d'Insectes plus ou moins pourvus de matières grasses. 11 semble au contraire que pour les phytophages vivant à poste fixe sur des plantes auxquelles ils ne causent pas le plus souvent de dommage, la taille de chaque espèce devrait rester identique par égalité de nutrition. En général, en effet, les inégalités sont moindres que chez les carnassiers et les parasites ; mais on com- prend que souvent le végétal qui porte une ponte devient malade en entier ou en partie ; de là une moindre nutrition pour les phytophages, une moindre taille. Les éclosions des nymphes, des chrysalides, des pupes à une trop forte chaleur, ainsi par une insolation accidentelle, doivent amener aussi, moins fréquemment, des cas de nanisme. On sait que les em- bryons des œufs d'Oiseaux, dont on force la chaleur d'incubation, don- nent des sujets rabougris. De même, les chrysalides (véritable second œuf) des Vanesses, obtenues et conservées dans une chambre chaude(l), produisent des papillons dont beaucoup ne dépassent pas la moitié de la taille normale. Réaumur a observé des éclosions hâtives d'adultes sur des chrysalides et des nymphes qu'il plaçait dans des œufs de verre couvés par des poules (2). On a encore signalé des influences électriques ou de l'ozone atmosphérique sur les variations des Lépidoptères. Plu- sieurs observateurs alfirment que ce sont surtout les journées orageuses qui donnent des éclosions avec aberration dans les couleurs des ailes (3). (1) Maurice Girard, Note sur des éclosion!~ avec réduciion de laille de Vanessa Urticaî {Léimloplcres) [Ann. Soc. entom. de France, 18G5, Bull., p. 36). (2) Réaumur, Mém. pour servir à l'hisl. des Insectes, II, 1736, p. 12 et suiv. (3) Maurice Girard, Note relative à des expériences sur l'action des courants électriques sur les chrysalides de Lépidoptères [Ann. Soc. entom. de France, 1866, p. 207). ESPÈCES ET CLASSIFICATION. 219 L'influence de la température se manifeste d'une manière fort cu- rieuse en produisant des sortes de générations alternantes. Il y a des Lépidoptères qui ont deux éclosions, l'une au printemps, après que la chrysalide a siibi les froids de l'hiver, l'autre en clé, avec courte période d'incubation. Chez deux Phalénides (Lépidoptères) de notre pays {Mctro- campa margaritaria et Selenia illusiraria) (1), l'éclosion estivale a une taille environ moitié moindre que chez la vernale, ce qui semble ren- trer dans le fait du nanisme par trop de chaleur à l'incubation nym- phale. D'autres fois, les sujets des deux éclosions diffèrent constamment parles taches : ainsi dans les Anthocharis lielia et Belemia, vernales, tan- dis que Âusonia et Glauce sont estivales. Enfin, la couleur du fond peut dépendre de ces deux éclosions distinctes, avec les froids de l'hiver ou sous la haute température de l'été. Nous avons cité (page Zi7) le curieux exemple des deux Cartes (léograjjhiques fauve et brune , dont le docteur Boisduval a le premier reconnu J'identité spécifique et l'alternance. Une influence encore fort mystérieuse des milieux se manifeste chez un grand nombre d'animaux de diverses classes : ils tendent à prendre une couleur analogue à celle des objets qui les entourent; précaution harmonique du Créateur pour les soustraire à leurs ennemis. Dans les régions polaires ou sur les hautes montagnes, des Mammifères et des Oiseaux prennent en hiver des livrées blanches comme les neiges, et, dans les déserts arides, beaucoup de Mammifères, d'Oiseaux, de Rep- tiles, constituent des races constantes à pelage gris ou Isabelle. Les In- sectes présentent les mêmes f.iits, mais satis rien de général ; s'il en est qui tranchent vivement par leurs riches couleurs avec les feuilles sur lesquelles ils se posent; si des Carabiques et des Téncbrioniens noirs courent sur les sables desséchés, on voit au contraire des Mantides, des Phasmiens (Orthoptères) verts, jaunes, bruns dans la même espèce, se confondant ainsi avec les feuilles vertes ou sèches, ou avec les branches des végétaux. Des Orthoptères et des Fourmis des sables s'identifient d'une manière complète avec la couleur des sols où courent ces Insectes; beaucoup de Noctuelles et de Phalénides ont des couleurs grisâtres ou nébuleuses, qui dissimulent leur présence sur les rochers et sur les troncs des arbres rugueux et couverts de lichens. Ce sont surtout chez les chenilles, créatures délicates, peu mobiles et désarmées, qu'on observe le plus souvent des appropriations de couleurs avec les végé- taux. Beaucoup de chenilles de Noctuelles et de Phalènes sont vertes comme les feuilles, ou brunâtres comme les tiges et les mousses, ou blanches, jaunes, tachetées, quand elles vivent dans les fleurs. Ces faits ont été diversement interprétés. Les uns y ont vu des influences de nourritures spéciales; d'autres, comme M. Mac Lachlan, M. Hellins, un pouvoir tVimitation donné aux chenilles de faire varier leurs teintes selon (1) Maurice Girard, Sur le Metrocampa margaritaria de seconde éclosion {Ann. Soc. enloin. de France, 1863, Bull., p. 53). 220 INTRODUCTION. les couleurs des parties végétales qu'elles attaquent. On observe surtout ces continuelles variations sur les petites chenilles des Eupithécies (Phalénides), mangeuses de fleurs, et colorées souvent des teintes les plus diverses dans la même espèce, tandis que les adultes sont au con- traire très-constants. D'après les observations de M. Goossens, nous pou- vons diviser en plusieurs classes les variations de couleur des chenilles. 11 en est qui changent de teinte selon les fleurs dont elles se nourris- sent : ainsi celle de VEupithecia centaureata est verdâtre sur plusieurs Linaires et sur la Tanaisie, jaune sur le Persil en graine, et présente des lignes rouges sur les fleurs rouges deV Eupatorium cannabimim. D'au- tres changent de couleur selon les localités; d'autres, suivant leur âge et les régions des plantes dont elles se nourrissent à leurs diverses mues. II paraît probable que le prétendu pouvoir d'imitation n'est qu'un instinct des femelles, qui déposent leurs œufs sur telle ou telle plante, selon la couleur prédestinée de leurs chenilles. Ainsi M. Goossens assure que le Chesias spartiata, qui vit sur le Genêt, donne des chenilles vertes quand les œufs sont verts, et jaunes lorsque les œufs sont jaunes. Il y aurait donc prédisposition, et non pouvoir d'imitation ou influence de nourriture. II faut ajouter que le plus grand nombre des chenilles variables ont des couleurs sans rapport avec celles des plantes. Des influences sexuelles interviennent pour produire des anomalies. On voit parfois des femelles, sans aucun hermaphrodisme, prendre cer- tains caractères de mâles, notamment la couleur (variétés : femina maris colore). Ainsi, dans la plupart de nos Lycénides (Lépidoptères diurnes), les mâles sont bleus et les femelles brunes; parfois elles de- viennent plus ou moins fortement bleues. Elles acquièrent accidentel- lement, par hypertrophie de développement, les caractères du sexe le plus tranché. U y a là des causes analogues à celles qui nous montrent de vieilles femelles de Gallinacés devenues stériles, s'orner en partie du riche plumage des mâles, des femmes acquérir de la barbe après la ménopause, etc. Il y a des anomalies qui n'affectent qu'un seul sexe, l'autre demeurant constant : ainsi la variété à fond noir du Papillon tabac d'Espagne {Argijnnis Paphia var. Çî^aiesMja), devenant race locale dans le Valais, n'appartient qu'à la femelle. Au contraire, d'après M. Fallou, la variété hospita à fond blanc du Nemophila Plantaginis paraît propre aux mâles, et dans une autre Chélonide, le Chelonia Quenseli, le mâle demeure constant, tandis que les femelles varient beaucoup. On ne peut donc invoquer ici une influence de nourriture, bien qu'on ne puisse nier dans d'autres circonstances cette influence, encore trop peu étudiée pour qu'on doive donner des exemples en toute certitude. Les causes générales qui produisent chez les animaux le mélanisme et l'albinisme se font sentir cliez les Insectes. On a signalé en Ecosse et dans le nord de l'Anglelerre un assez grand nombre d'espèces de Lépi- doptères nocturnes, qui prennent des teintes plus foncées que le type ESPÈCES ET CLASSIFICATION. 22 1 ordinaire, et l'on a attribué ce fait à un climat froid et humide. Cepen- dant ces anomalies existent aussi, mais accidentellement, dans des pays plus chauds, comme en France. M. Fallou a pris à la fois, à Fontaine- bleau, au pied des Pins, les mâles de Fidonia piniaria, les uns à fond jaune, d'autres à fond blanc, tandis qu'en Angleterre les premiers sont des régions du sud et que les seconds appartiennent aux parties sep- tentrionales. Il y a, mais très-rarement, des Insectes chez lesquels l'adulte offre des colorations différentes, suivant l'âge. Ainsi, chez un Névroptère de la famille des Libelluliens, le Caloptenjx virgo, si commun sur le bord des fleuves et rivières, les mâles ont, en naissant, les ailes, ou incolores, ou d'un brun enfumé, ou roussâtres; puis un reflet bleu apparaît à l'âge moyen, se changeant, à l'état tout à fait adulte, en un bleu foncé et opaque. Quant à l'albinisme, il est dû le plus souvent à un arrêt de développement de la matière pigmentaire, à une persistance de la première phase de l'éclosion de l'adulte. On sait que^ chez les Coléoptères sortant de la nymphe, la chitine des téguments est d'abord presque incolore, et que ce n'est qu'au bout d'un ou de plusieurs jours qu'elle se durcit et acquiert les couleurs foncées propres à la plupart des espèces. Beaucoup de difformités qu'offrent les Insectes adultes tiennent à des accidents d'éclosion, à une insolation amenant une trop rapide dessic- cation, à des compressions empêchant une partie de s'accroître, à des enduits accidentels, etc. De là des sujets à ailes très-petites, impropres au vol, offrant une miniature des dessins normaux; de là aussi des ailes très-inégales à droite et à gauche, ou réduites à des moignons informes. Des expériences directes ont permis de constater l'influence de pressions sur la chrysalide (1), analogues aux monstruosités ou aux maladies pro« duites sur l'embryon par des actions perturbatrices exercées sur l'œuf, ainsi que le constatent les anciennes expériences d'E. Geoffroy Saint- Hilaire et celles plus récentes et beaucoup plus variées de M. C. Dareste . Cette question des espèces est encore pleine d'incertitudes et de mys- tères. Bien que les conditions de nourriture soient en général surabon- dantes, il est des espèces multipliées en individus au point de devenir parfois de véritables fléaux et d'autres au contraire, dont les représen- tants, clair-semés, n'apparaissent que çà et là, malgré les plus actives investigations. Il est vrai que souvent la rareté des espèces tient à l'im- parfaite connaissance de leurs mœurs, des moyens de les chasser, de l'époque de leur apparition et des localités favorables; mais il reste certain qu'il y a des différences considérables et originelles dans leur rareté ou dans leur grand nombre. Les entomologistes ont soulevé, d'autre part, de fréquentes discussions sur la valeur des caractères à déduire, soit de l'état adulte, soit des (1) A. Barthélémy, Sur les monslruosilés naturelles et provoquées chez let Lépidoptères {Ann. sciences nat., ZooL., 5** série, 1864; I, p. 225). 222 INTRODUCTION. formes transitoires des larves. Il en est qui semblent préférer les carac- tères tirés des premiers états. 11 nous paraît, au contraire, plus rationnel et plus philosophique de chercher, avant tout, les caractères génériques et spécifiques dans les adultes, et surtout dans la forme des mâles, sexe dans lequel les fonctions de relation sont les plus parfaites, en excep- tant toutefois les espèces niditiantes. La fonction de reproduction, n'exis- tant pas dans les larves, maintient en général celles-ci dans un état de dégradation et d'infériorité. Les larves se ressemblent beaucoup dans la plupart des Diptères et des Hyménoptères, dans les Scarabéiens et les Curculionicns, etc., tandis que les adultes se diversifient en raison des mœurs et des instincts les plus variés. Cependant les caractères obtenus en observant les états antérieurs ne sont pas à négliger dans une classi- fication naturelle ; il y a des exemples de développement récurrent chez les adultes devenus parasites, et surtout chez les femelles (Coche- nilles, etc.), de sorte que, lorsque les adultes ne présentent pas de dis- tinction suffisante, on devra recourir aux premiers états. Nous posons seulement le principe, en admettant, bien entendu, un éclectisme par- fois nécessaire. C'est surtout parmi les Insectes que l'immense multiplicité des espèces nécessite une classification méthodique. On a dû chercher, dès le début de la science entomologjque, à former des groupes de plus en plus élevés, réunissant un grand nombre d'espèces par des caractères com- muns. Ici l'arbitraire domine; la nature n'a point fait de classification. Les principes si bien établis par M. Milne Edwards dans son beau mé- moire sur la classification des Vertébrés s'appliquent à toute l'histoire naturelle. Les rapports entre les êtres ne peuvent s'expliquer que par des groupes constellaires à trois dimensions. Nos classifications par séries, parallèles ou divergentes, ou par groupes en figures planes, ne sont jamais que des approximations. La plus grande partie des animaux forment des réunions naturelles considérables, mais il y a toujours des êtres qui, pareils à ces points singuliers de certaines courbes géomé- triques, se placent hors de série, soit par petites réunions, soit même par espèces absolument isolées. Ils ne se rattachent que d'une manière éloignée aux grands groupes, semblent des chaînons dissociés d'an- ciennes œuvres détruites, ou des pierres d'attente, jalons jetés dans l'immensité par TÉternel Créateur pour un avenir inconnu. Notre raison doit s'incliner devant ces lois mystérieuses. De même, ainsi que nous venons de le dire, pourquoi certaines espèces, au milieu d'une nourri- ture abondante, avec la même atmosphère et le même soleil, demeu- rent-elles toujours représentées par un petit nombre d'individus, tandis que des espèces voisines pullulent et couvrent d'immenses régions de leur multitude? ' Notre intention n'est aucunement d'exposer les anciens essais de clas- sification des Insectes. L'observation de ces animaux date de la plus haute antiquité, surtout à cause des dangers qu'ils font courir à l'agri- CLASSIFICATION. 225 culture. Les Scarabées sacrés, qui enterrent et enlèvent les immon- dices corrupteurs de ratmosph(>re, sont reproduits dans les monuments de l'antique Egypte. L'Evode nous apprend que rÉlernel fil des Saute- relles (Acridiens) une des plus terribles plaies infligées à l'Egypte, qu'elles couvrirent, par son ordre, tout le pays, amenées par un vent d'orient, et ne disparurent, balayées par un vent d'occident, que lors- que le Pharaon, consterné par le fléau^ eut promis de laisser partir le peuple de Dieu. Moïse indique les Grillons, les Truxales et d'autres Or- thoptères au sujet des animaux qu'il est permis ou non de manger. Il y a aussi de très-anciennes observations des Chinois sur les Insectes. Aristote s'est occupé assez longuement de l'entomologie. Les Insectes faisaient partie, pour l'illustre précepteur d'Alexandre, des AnimaUa exsanguia minora. On voit par ses écrits qu'il avait reconnu les princi- paux ordres des Insectes. Il avait séparé les Coléoptères à fourreaux alaires cornés, les Orthoptères sauteurs, les Hémiptères, les Papil- lons ou Psychœ, symbole de l'âme immortelle, les Insectes à quatre et à deux ailes membraneuses, les Insectes à la fois ailés et aptères, comme les Fourmis, les Lampyres, enfin les Aptères complets. Il donne des détails sur le chant des Cigales, et de nombreuses et intéressantes observations sur les Abeilles. Il savait que les piqûres des Insectes sont tantôt causées par la bouche, tantôt par l'aiguillon de l'abdomen; que les premières sont dues à des Diptères, les secondes à des Tétrapfères. Les ressemblances entre les Insectes et les Crustacés lui échappèrent. Les anciens, en etfet, si ingénieux et souvent si fidèles observateurs des mœurs des animaux, sont d'une grande ignorance en fait d'ana- tomic comparée. De plus, Aristote est imbu de cette grave erreur de l'antiquité, celle de la génération spontanée des Insectes. On igno- rait par quelles évolutions peut se rattacher la larve, ou ver rampant sur le sol, à l'adulte ailé, dont la subtile atmosphère devient le do- maine. Un taureau sauvage éventré donnait naissance aux légions laborieuses et guerrières des Abeilles, et du limon impur des marais échauffé parle soleil, des cadavres fétides et putréfiés, sortaient les noirs essaims des Mouches. Les mêmes idées sont celles de Théophraste, le disciple et successeur d'Aristole. Rien n'était plus propre à écarter les observateurs, à empêcher toute étude sérieuse des Insectes, êtres im- mondes par leur origine, objet de dégoût, que ces opinions déplorables qui traversent tout le moyen âge. Redi, puis Vallisnieri, démontrèrent que les Insectes naissent d'un œuf, comme les animaux élevés, et que les larves et nymphes forment leurs premiers états. Redi fit voir en effet que jamais les viandes corrompues, les fruits gâtés, ne produi- sent ces vers devant devenir Insectes, si, par des obstacles, comme des tissus à claire-voie, qui laissent passer l'air seulement et permettent la putréfaction, on empêche les femelles de venir déposer des œufs au sein de l'aliment futur de la larve. Aldrovande avait pubUé une classification des Insectes, qu'il divise en 22Û INTRODUCTION. terrestres et aquatiques, chacun de ces groupes subdivisé en pédigôres et apodes; cet essai grossier comprend tous les Annelés actuels, et, parmi les aquatiques apodes, les Astéries, animaux rayonnes d'un tout autre type. Swammerdam, qui s'était beaucoup occupé de l'anatomie des Insectes et de leurs différents étals, fonda la classification des In- sectes sur leurs métamorphoses, qui n'offrent, en réalité, qu'un carac- tère de valeur secondaire, comme tous ceux tirés des larves. C'est la môme méthode qui guida Ray et Willughby dans leur classification des Insectes, antérieure pour la publication à celle de Swammerdam et plus complexe. On peut résumer comme il suit le groupement de Swammerdam : A. Point de métamorphoses, des mues : Poux, Ricins. • B. Métamorphoses. 1. Incomplète. Larves et nymphes agiles : Orlhoplères, Névroptères, Hémiptères. 2. Complète. Nymphe immobile, à peau autre que celle de la larve, à membres apparents : Coléoptères, Hyménoptères, Lépidoptères. 3. Resserrée. Nymphe immobile, formée dans la peau de la larve sans membres distincts : Diptères (la plupart). Linnœus, mieux inspiré, arriva, par la seule inspection des ailes, à établir les ordres fondamentaux qui composent la classe des Insectes. Nous offrons ici le tableau de sa classification la plus perfectionnée : il . . ( crustacées, avec la suture droite. Coléoptèbes. ^ \ demi-crustacées, incombantes. . Hémiptères. Toutes couvertes d'écaillés Lépidoptères. Membraneuses. \ Poi"t d'aiguillon Névroptères. ( Un aiguillon Hyménoptères. Deux ailes. Des balanciers remplaçant la seconde paireM'ailes . . Diptères. Point d'ailes Aptères. Le groupe des Aptères comprend, pour Linnœus, tous les Arthropo- daires autres que les Insectes. Fabricius parvint à constituer à peu près les mêmes ordres, en se servant seulement de la disposition des pièces buccales. Ce système dé- note une observation plus précise, plus approfondie. Il offre cependant moins de certitude que la méthode de Linnœus; certains groupes, comme les Éphémères, les Phryganes, les Bombycidcs, etc., dans la méthode de Fabricius, ne peuvent se réunir à leurs congénères qu'au moyen d'inductions analogiques, ces Insectes étant, à l'état adulte, privés de pièces buccales par atrophie. En outre, des rapprochements peu naturels se trouvent effectués, et les véritables Insectes sont séparés en deux séries, les broyeurs et les lécheurs, puis les suceurs, et, entre ces deux séries, Fabricius avait intercalé les Myriopodes, les Crustacés, les Arachnides. Les noms proposés par Fabricius ne sont pas restés dans CLASSIFICATION. 225 la science habituelle en France. La juste célébrité de cet entomologiste nous engage à citer ceux de ses ordres qui comprennent les véritables Insectes hexapodes. 1. Eleulherata. Mâchoires nues, libres, palpigères : Coléoptères. 2. Ulouala. Mâchoires couvertes par un lobe obtus : Orthoptères. 3. Synistata. Mâchoires coudées à leur base et soudées avec la lèvre : Névroptères (moins les Libellulides) et Thysanoures. 11. Piezata. Mâchoires cornées, comprimées, souvent allongées : Hyménoptères. 5. Odonata. Mâchoires cornées, dentées, munies de deux palpes : Libellulides. (Intercalation des autres Arthropodaires.) H. Glossata. Bouche munie d'une longue spirale située entre des palpes redressés : LÉPIDOPTÈRES. 12. Rhyngota (1). Bouche formée par un rostre à gaîne articulée : Hémiptères et Puces. 13. i4«une langue roulée en spirale Lépidoptères. G. Cuvier, dans son Règne animal, fait commencer les Insectes par les Aptères, dans lesquels il comprend encore les Myriapodes. Puis vien- nent les ordres des Coléoptères, des Orthoptères, des Hémiptères, des Névroptères, des Hyménoptères, des Lépidoptères et des Diptères. Pen- dant sa longue existence, Latreille adopta successivement plusieurs systèmes de classification, et dans le dernier, publié en 1832, il a le mérite de débarrasser définitivement la science entomologique de cet ordre informe des Aptères, où Cuvier laissait à côté les uns des autres les Millepieds, les Poux et les Puces. On y trouve la tendance à réunir les ordres linnéens en groupes de valeur supérieure. Voici le tableau résumé de cette classificalion : Insectes ou Condylopes hexapodes. ' Pas de métamorphoses | Thysanoures. ^ ( Parasites. Métamorphoses Siphonaptères (Puces). Coléoptères, Broyeurs . Pas d'ailes. Élytroptères. ( I Suceurs. Des ailes... Gymnoplères, Quatre ailes. Deux ailes. Dermaptères (1<"orficules). Orthoptères. Hémiptères. INévroptères. Hyménoptères. Lépidoptères. Diptères (des balanciers). Strepsiptères. CLASSIFICATION. 227 Lalreille connaissait fort mal les Insectes anormaux formant l'ordre des Strepsiptères ou Rhipiptères. Il n'avait pas la notion exacte des ap- pendices mobiles qu'il indique chez eux, et à tort, au prothorax. Ce sont des ailes antérieures, rudimentaires, ou plutôt des élytres subli- néaires, ressemblant un peu aux balanciers des Diptères, chez lesquels l'atrophie atteint au contraire les ailes de la seconde paire. La classification que nous adopterons est celle exposée par M. Milne Edwards dans ses leçons d'entomologie au Muséum. L'idée première est empruntée aux ingénieuses conceptions de Mac Leay, qui arrive à deux groupements analogues pour les Insectes ailés; mais toute idée théorique de groupement circulaire est écartée, pour s'en tenir aux seules données de l'observation. Les diverses sous-classes sont en rap- port avec la conformation anatomique de la bouche des larves et leur mode de nutrition. Dans la plupart des Insectes, elles ont la bouche maxillée, c'est-à-dire pourvue d'organes broyeurs des aliments : chez les unes, cette conformation persiste toute la vie; chez les autres, à l'état adulte, l'Insecte devient lécheur ou suceur par transformation des pièces buccales. Enfin, certains Insectes ont des larves haustelées, à bouche suçante, et ee caractère persiste chez les adultes. De là des ordres d'inégale valeur, comme le montre le tableau suivant : ORDRES Princi]JiUix. . / Ailes supérieures coriaces, ^ I I inférieures membraneu- 9^1 ses, repliées Coléoptères. "^ S \ Ailes supérieures semi-co- •^ J riaces. inférieures niem- 2 .g" ] braiieuses , plissées en £: S / éventail Orthoptères, j « I Les quatre ailes membra- "^ \ neuses Névroptères. Adultes lécheurs, à mandibules dé- veloppées ; ailes membraneuses, nues Hyménoptères. Adultes suceurs, à mandibules rudi- mentaires ; ailes couvertes de petites écailles Lépidoptères. Adultes à deux paires d'ailes de consistance variable ; bouche à lancette dans une gaîne perfo- rante Hémiptères. Adultes à une paire d'ailes membra- neuses, nues, des balanciers; bouche à trompe ou à lancette perforante , Diptères. Satellites. Rhipiptères, Thysanoptères. Aphaniptères. Anoploures. Thysanoures. Outre les ordres principaux, dont mention avait déjà été faite au début de cette introduction, le tableau nous présente, rejetés parallèle 22S INTRODUCTION. ment, certains ordres satellites, composés d'un petit nombre d'espùces affectées, soit de caractères anormaux, soit de dégradation. On ne sait trop, en réalité, où placer les Rhipiptéres, formés par de très-curieux Insectes dont les larves et les femelles aptères vivent parasites, à demi- enfoncées entre les anneaux de l'abdomen de certains Hyménoptères. Nous les rangeons à côté des Coléoptères, parce que la plupart des au- teurs les considèrent, sans raison suffisante peut-être, comme une dé- gradation de ce type, et même, à tort nous le croyons, en ont parfois lait une simple famille de Coléoptères. Nous ne faisons pas d'ordre par- ticulier pour les Forficules ou Dermaptères, ni pour les Phryganides ou Trichoptères; elles rentrent, comme familles un peu divergentes, dans les ordres des Orthoptères et des Névroptères. L'ordre des Thysano- ptères a été établi en Angleterre, par M. Haliday, pour de très-petits Insectes que l'aspect général et la forme aplatie de leur corps avaient fait ranger parmi les Hémiptères. L'emploi du microscope, appliqué à la détermination de leurs pièces buccales, y a fait reconnaître de lon- gues mandibules, organes dont manquent tous les Hémiptères. Comme les Insectes dont il est question présentent certaines ressemblances avec les Orthoptères, c'est comme dérivant de cet ordre que nous les place- rons, d'accord avec M. E. Blanchard. Il n'y a point de difficulté pour les Aphaniptères. Les Puces sont certainement des Hémiptères dégradés, à bouche suçante et perforante, avec deux paires d'écaillés, rudiments des ailes. Les Anoploures, parasites, sans métamorphoses, se lient aux Diptères de la manière la plus intime par les dernières familles de ce grand ordre, affectées aussi de parasitisme et finissant par perdre les ailes. Nous devons remarquer qu'une partie de ces Insectes, les Ricins, reprennent des pièces buccales broyeuses, mais ce n'est nullement une raison pour écarter l'ordre du voisinage des Diptères. Les types dégradés perdent la fixité des caractères des types élevés. Enfin les Thysanoures, également sans métamorphoses, semblent comme un essai de création restreinte et spéciale parmi les Insectes. Leurs organes buccaux rudi- mentaires sont plutôt broyeurs que suceurs. Ils sont réellement hors de série, voisins en partie des Névroptères, en partie des Insectes épizoïques. Enfin, faisons remarquer, en terminant, que, dans la classe des In- sectes comme dans toutes les classes du règne animal, certains ordres sont bien homogènes, mais que d'autres semblent formés de familles rejetées des autres ordres, sans caractères assez tranchés pour constituer des ordres à part. Tels sont les Névroptères, véritable ordre de résidu où l'on retrouve tous les types alaires des différents ordres. Dans l'ordre des Hémiptères se rangent deux types bien séparés, l'un à ailes supé- rieures semi-coriaces, l'autre à ailes de même consistance pour chaque paire. Les pièces buccales seules les rapprochent. Ce sont là des consé- quences forcées de ce que la nature n'a pas fait de classifications. Dans l'étude des ordres des Insectes, nous nous occuperons surtout des genres et des espèces présentant un intérêt pratique par les ser- INDEX. • 229 vices qu'ils nous rendent ou par les ravages dont nous sommes victimes de leur part; nous aurons soin également d'indiquer tout ce qui offrira quelque parlicularité très-curieuse au point de vue de l'organisation ou des mœurs. On comprend dès lors, avec ce plan déterminé, que les subdivisions de l'entomologie pure et la place relative des genres deviennent de médiocre importance. Il nous arrivera même de négli- ger des groupes ayant rang de famille dans les ouvrages de classifica- tion méthodique, lorsqu'ils ne rentreront pas dans le cadre que nous venons d'indiquer. Conformément à tous les auteurs modernes, les noms des tribus et des familles seront choisis dans le nom d'un des genres caractéristique ou important. On évitera ainsi l'emploi d'une foule de mots nouveaux, tels que Brachélytres , Sternoxos, Xylopha- ges, etc., surchargeant la mémoire, et qui ne sont pas toujours en rap- port exact avec Tanatomie et la physiologie des Insectes du groupe considéré. Comme le fait M. E. Blanchard, nous donnerons aux tribus la désinence iens, et ides aux familles, en restreignant le plus possible le nombre de ces subdivisions. Nous terminerons cette Introduction par la liste de quelques ouvrages et mémoires utiles à consulter; à peu d'exceptions près, nous éviterons de citer des auteurs trop anciens. On trouve, en effet, le résumé de leurs travaux et les titres dans les documents plus récents. INDEX SUPPLÉMENTAIRE DE CITATIONS GENERALES RELATIVES A L'INTRODUCTION A L'ENTOMOLOGIE. 1" Anatomie et physiologie. Straus-Durckheim. Considérations sur l'anatomie comparée des Animaux articulés, etc., et en particulier du Hanneton. Paris, 1828. H. Mn,NE Edwabds. Leçons sur la physiologie et l'anatomie comparée de l'homme et des animaux. — Respiration chez les Insectes, II (1857), p. 150. — Circulation chez les Insectes, Hl (1858), p. 21Z|. — Armature buccale des Insectes, V (1859), p. /j98. — Tube alimentaire des Insectes, p. 581. — Chaleur et phosphorescence des Insectes, VIII (1863), p. 71 et 95.— Génération chez les Insectes, IX (1868), p. 166. Cet ouvrage capital, outre l'exposé de l'état actuel de la science, contient un nombre considérable d'extraits et de citations des naturalistes français et étrangers. H, MiLNE Edwaeds. Homologies des appendices des Articulés [Ami. sciences nat., ZooL., 3^ série, 1851, t. XVI, p. 221 et suiv.). 230 ' INTRODUCTION. De Sa VIGNY. Mémoire sur les animaux sans vertèbres. Paris, 1816, 2 aoI. V. AuDouiN. Recherches anatomiques sur le thorax des Animaux arti- culés et celui des Insectes hexapodes en particulier {An7i. sciences nat., l''" série, 182Zi, t. I, p. 97 et Zil6). — Anatomie comparative des parties solides des Insectes {Ann. gén. des sciences fhxjs., 1820, t. Vil, p 396- Zi06). P. Latreille. De la formation des ailes des Insectes et de l'organisation extérieure de ces animaux comparée en divers points avec celle des Arachnides et des Crustacés. Paris, 1820, et Ann. gén. des sciences phys., Paris, 1819, Jacquei.in du Val. Sur la composition du squelette externe des Insectes (Gênera des Coléoptères d'Europe, Introduction, 1857, p. 125etsuiv.). A. DuGÈs. Mémoire sur la structure de l'œil interne des Insectes {Ann. sciences nat, 1830, t. XX, p. 3/il-352). J. Gabnier. De l'usage des antennes chez les Insectes. Br. Amiens, 1860. Brullé. Transformations des appendices dans les Articulés {Ann. sciences nat., ZooL., 3« série, 18Ziù, t. II, p. 271). Herold. Entwickelungs-Geschichte der Schmetterlinge, anatomisch und physiologisch bearbeitet. Cassel und Marburg, 1815. L. DuFouR. Quelques mots sur l'organe de l'odorat et sur celui de l'ouïe dans les Insectes {Ann. sciences nat., 3*^ série, 1850, t. XIV, p. 179; Actes de la Soc. linnéenne de Bordeaux, 2" série, 1850, t. VI, p. 260). G. Newport. On the Use of Ihe Antennœ of Insects {Trans. Entom. Soc. London, 1840, t. II, p. 229-248; Ann. Soc. entom. de France, ISZil, t. X,BulL, p. X). Robineau-Desvoidy. Recherches sur l'organisation vertébrale des Crus- tacés, des Arachnides et des Insectes. In-8°, Paris, 1828. {Bull, de Férussac, 1828, t. XIV, p. 276, 285.— /sis, 1829, VI, p, 665.) L. DuFOUB. Observations sur l'organe digestif de quelques Diptùres {Journal de physique, 1820, t. XC, p. 345-352). — Recherches anato- miques sur les Carabiques et sur plusieurs autres Coléoptères {Ann. sciences nat., V^ série, t. II, p. Zi62; t. III, p. 215 et p. 476; t. IV, p. 103; t. V, p. 265; t. VI, p. 150 et p. Zi27 ; t. VIII, p. 5). — Re- cherches anatomiques et physiologiques sur les Hémiptères (Mém. présentés par divers savants à l'Acad. des sciences de l'Inst. de France, t. IV, p. 129-461, et Ann. sciences nat., 2* série, Zool., t. I, p. 56-84).— Recherches anatomiques et physiologiques sur les Orthoptères, les Hyménoptères et les Névroptères (Mém. présentés, etc., t. VII, p. 265- ,647, 1841). — Explications, notes, etc., à ce sujet. Br., Saint-Séver, 1841 (et Ann. sciences nat., 2^ série, 1835, t. IV, p. 238). — Mémoire sur les vaisseaux biliaires ou le foie des Insectes {Ann, sciences nat., 2" série, ZooL. , t. XIX, p. 145, et C. R. Acad. des sciences, 1843, t. XVI, p. 34) INDEX. 231 S. SiRODOT. Recherches sur les sécrétions chez les Insectes (thèse de doctorat de la Faculté des sciences de Paris, 1859). G. Newport. On the Nervous System of the Sphfnx Ufjmtri, I,., etc. {Philos. Trans., 1832, t. CXXII, p. 383-398, et 1836, t. CXXIV, p. 389- Z|23.) — On the Respiration of Insects {Philos. Trans., 183(i, t. CXXVI, p. 529-566.) — On the Formation and the Use of the Airsacs and dilated Tracheœ {Trans. Linn. Soc. London, 1851, t. XX, p. Zil9-/i23). E. Faivre. Du cerveau des Dytiques considéré dans ses rapports avec la locomotion {Ann. sciences nat., li' série, 1857, t. VIII, p. 2Zi5-275; C. n. Acad. des sciences, 1857, t. XLIV, p. 721-722). — De l'influence du système nerveux sur la respiration des Dytiques {Ann. sciences nat., Ix" série, 1860, t. XI, p. 321). G. Carus. Entdeckung eines einfachen vom Herzen aus beschleunigten Blutkreislaufes in den Larven netzflûgliger Insecten. Leipzig, 1827. (Circulation chez les larves aquatiques d'Ephemera, Perla, Agrion.) R.XVagner. Beobachtungen iiber den Kreislauf des Blutes und den Bau des Rûckengefâsses bei den Insecten. Isis, 1832. (Observations sur la circulation et la contraction du cœur des larves aquatiques.) Verloren. Mémoire sur la circulation dans les Insectes {Méni. des savaiits étrangers de l'Acad. de Belgique, t. XIX, t8/i7). (Structure et contrac- tions du cœur.) Brandt. Mélanges biol. du Bull, de l'Acad, impér. de Saint-Pétersbourg, t. VI, 1866. Admet que la diastole, comme la systole, est duc à une action musculaire. E. Blanchard. Recherches anatomiques et zoologiques sur le système nerveux des Animaux sans vertèbres; du système nerveux des Insectes {Ann. sciences nat., Zool., 18/i6, t. V, p. 273-379). — De la circulation dans les Insectes {Ann. sciences nat.^ Zool., î8/i8, t. IX, p. 359-398; C. R.Acad. des sciences, 18Zi7, XXIV, p. 870-872). — Du système nerveux chez les Invertébrés, dans ses rapports avec la classification de ces animaux. Paris, 1849. — Réponse à, diverses objections touchant la circulation dans les Insectes {Comptes rendus, 18Zi9, XXVIII, p. 575- 761).— Sur la circulation du sang chez les Insectes et sur la nutrition {Revue zool.., 1851, p. Zi92-Zi9Zi; Mém. Acad. de Paris, cet. 1851; C. Il, 1849, XXVIII, p. 76-78 et 185t. .XXXIÎI, p. 367-370). — Nouvelles ob- servations sur la circulation du sang et la nutrition chez les Insectes {Ann. sciences, nat., Zool., 1851, XV, p. 371-376).— Du grand sympa- thique chez les Animaux articulés {Ànn. sciences nat., Zool., 1858, X, p, 5-10; C. R., 1858, XL VIII, p. 992-995). J. KuNCKEL. De l'existence de vaisseaux capillaires artériels chez les Insectes {C. R. Acad. des sciences, séance du 27 juillet 1868). Agassiz. Notes sur les capillaires de la trachée {Ann. sciences nat., Zool., 3" série, t. XV, p. 358-362). 232 INTRODUCTION. JoLY. Mémoire sur l'existence supposée dune circulation péritrachéenne chez les Insectes (C. R., séance du 3 déc 18/i9, et Mém. de l'Âcad. des sciences de Toulouse).— M. Bluncliard et la circulation péritrachéenne des Insectes {Gaz. méd. de Toulouse, févr. 1852). De FiLippi. Annales de l'Académie d'agriculture de Turin, t. V, 1851 Admet l'accolement intime des deux membranes de la trachée. Williams. On the trachéal System of Insects {Ann. of Natural History, 2« série, 1856, t. XVII, p. 3/j9). Même conclusion. Leydig. Lehrbuch der Histologie, 1857. Page 386, noyaux persistants de la couche celluleuse externe pris pour des corpuscules sanguins -, page 433, sur le cœur de la larve de Corethra plumi- cornis (Diptères). A. Weismann. Die Entwickelung der Dipteren (Recherches sur le déve- loppement des Diptères) (Zeitschrift fur wissenschaftliche Zoologie, t. XIII, 1863, p. 190, et t. XIV). Admet la trachée formée de deux couches contiguës, l'externe ou péritonéale formée de cellules soudées, d'abord distinctes, puis confondues les unes dans les autres par la résorption des parois en contact; l'interne d'abord simple pellicule de chitine, dans laquelle le fil spiral se constitue plus tard par un épaississement local de ce cylindre interne primitivement homogène et uniforme. — Die Métamorphose der Corethra plumicornis {ibid., t. XVI, 1866). Considère le cœur tout entier comme formé par un seul faisceau musculaire primitif creux, renfermant de nombreux noyaux. John Davy. Observations sur la température de l'homme et des animaux de divers genres (en particulier des Insectes) {Ann. de phys, et chim., 1826, t. XXXIII, p. 180). Melloni et Nonii.i. Recherches sur plusieurs phénomènes calorifiques entreprises au moyen du multiplicateur {Ann. phys. et chim., 2^ série, 1831, t. XLVIII, p. 198). Becquerel. Traité de physique considérée dans ses rapports avec la chimie et les sciences naturelles. Paris, 18/iZi, t. II, p. 59, 60, 61. Pour ce qui concerne la chaleur propre des Insectes. Regnault et Reiset. Recherches sur la respiration {Aîin. phys. et chim., 3" série, t. XXXVI, 18/i9, p. 299 et suiv.). Pour les Insectes. J. Gavarret. De la chaleur produite par les êtres vivants. Paris, 1855, p. 113 et suiv. Pour les Insectes. Breyer. Observations sur le développement d'une chaleur propre et élevée chez le Sphinx Convolvuli {Ann. Soc. entotn. belge, 1860, t. IV, p. 92). INDEX. 233 C, Ne^port. On the Température of Insects and its connexion with Functions of Respiration and Circulation in this Class of Inverlebra- ted Animais (Philos. Tra7is., 1837, 1. 127, p. 259-338 ; Ann. sciences nat., 2° série, Zool., 1838, t. VIII, p. 12^-127) (extr. trad.). Leu';kart. Micropyles d'œufs d'Insectes, avec mesures micrométriques (Mullefs Archiv., 1855, t. XXII, p. 90, et pi. 7, 8, 9, 10, 11, en alle- mand). Th. SiEBOLD. Parthénogenèse chez les Insectes (Abeilles et Lépidoptères) {Ann. sciences nat., k^ série, Zool., 1856, t. VI, p. 193). 2° Ouvrages généraux, classification, espèces, mœurs, etc. RÉAUMUR. Mémoires pour servir à l'histoire des Insectes, 6 vol. \n-h°. Paris, 173/i-17/i2 (partie d'un 7" vol. dans les Mém. Acad, des sciences, 1753). E. Geoffroy. Histoire abrégée des Insectes qui se trouvent aux environs de Paris. 2 vol., 1'" édit., Paris, 1762; 2-^ édit., 1764; 3" édit., 1799. De Geer. Mémoires pour servir à l'histoire des Insectes. Stockholm, 7 vol., 1752 à 1778. R.ESEL. Der monatlich herausgegebenen Insecten-Belustigung , etc. A vol. Nûrnberg, 17/i6 à 1761. Une édit. hoUand., Harlem et Amster- dam, 176^ à 1768. Encyclopédie méthodique. Les Insectes, avec Discours préliminaires, par Olivier Latreille, Godart, etc. Paris, 1789-1830, 12 vol. in-Zi", 397 pi. Lapobte de Castelnau, Brdllé, e. Blanchard, Lucas. Histoire naturelle des Insectes, Z| vol. 1835-18/il (I et II, Castelnau et Brullé ; III, E. Blan- chard; IV, H. Lucas). E. Blanchard. Histoire naturelle des Insectes. Paris, 18/i5, 2 vol. in-12. C. DuMÉRiL. Entomologie analytique. Histoire générale et classification naturelle et méthodique des Insectes à l'aide de tabletiux synoptiques. Paris, 1860, 2 vol. in-4°. Le Règne animal distribué d'après son organisation. Paris. Insectes, par M. E. Blanchard, pour les planches et leur légende (2 vol.), de La- treille, pour le texte (2 vol.). Le texte est très-antérieur aux planches. V. AuDOuiN et Brullé. Histoire naturelle des Insectes (Coléoptères, Orthoptères et Hémiptères). Paris, à vol., 183Zi à 1838. H. Burmeister. Handbuch der Entomologie, 5 vol. in-8. Berlin, 1832- 1855. Westwood. An Introduction to the modem Classification of Insects, etc. London, t. 1839; t. II, 18/iO. 234 introdcctiotn. Mauricf, Girî\RD. Métamorphoses des Insectes. Paris, 1'''' édi|., 1806-, 2" édit., 1867; 3'' édit., 1870; 1 vol. in-l2. L. Figuier. Les Insectes. Paris, 1867, 1 vol. gr. in-8°. E. Blanchard. Métamorphoses, mœurs et instincts des Insectes. Paris, 1868, 1 vol. gr. in-8°.— La Zoologie agricole. Paris. Ce dernier ouvrage comprenant l'histoire entière des animaux utiles et des animaux nuisibles {^inachevé). — Insectes qui attaquent les plantes d'ornement. Ch. Goureau. Insectes nuisibles aux arbres fruitiers, aux plantes pota- gères, aux céréales et aux plantes fourragères. Paris, 1851 (et 2 br. suppl., 1853 et 1855). — Les Insectes nuisibles à l'homme, aux ani- maux et à l'économie domestique, 1866.— Les Insectes nuisibles aux forêts, 1867. E, Menault. Les Insectes considérés comme nuisibles à l'agriculture. Paris, 1866, in-12. D' BoisDuvAL. Essai sur l'entomologie horticole, comprenant l'histoire des Insectes nuisibles à l'horticulture, etc. Paris, 1867. Maurice Girard (sous la direction scientifique de). L'Insectologie agri- cole, 3" année. Paris, 1869. J. B. GÉHiN. Notes pour servir à l'histoire des Insectes nuisibles dans le département de la Moselle {Journ. de la Soc. d'horticulture de la Moselle, Metz, 1856 ; Bull, des comices, Metz, 1860).— Coléoptères (8» Bull, de la Soc. dliist. nat. du départ, de la Moselle, 3 856-1857).— Orthoptères, Névroptères, Thysanoptères, Hyménoptères, Hémiptères, — Homo- ptères, Diptères (même Bull., 1860). J. CuRTis. British Entomology, etc. London, 1823-18/iO, 16 vol. — Farm Insects, being the natural History and Economy of the Insects inju- rious, etc. London, 1860, 1 vol. in-8. J. Ratzeburg. Die Forstinseklen oder Abbiklung und Beschreibung, etc. Berlin, I, 1839; II, 18Z|0; III, 18Zia. T. W. Harris. a Report on the Insects of Massachusetts injurions to végétation. Cambridge, 18Zil. — A Treatise of some of the Insects of New-England which arc injurious to végétation. Boston, 1852. Brullé. Sur quelques points de la méthode en histoire naturelle, et en particulier sur les liniites du genre et de l'espèce (thèse de doctorat es sciences de la Faculté de Paris, 1839). — Idées nouvelles sur la classification des Insectes (G. R. Acad. des sciences, 18/il, t. XIII, p. 1069, et Rev. zool, 18/il, p. 307). J. Sichel. Sur la fixation des limites entre l'espèce et la variété fondée sur l'étude des espèces européennes du genre Polistes {C. R. Acad. des ' sciences, 1868, t. LXVII, p. 75). Bellier de la Chavignerie. Mémoire sur les variétés accidentelles chez les Lépidoptères (Ann.Soc. entom. de France, 1858, t. VI, p. 299-310). INDEX. 235 MocQUKRYs. Recueil de Coléoptères anormaux. Rouen, 8 livraisons. Keferstein (d'Krfurt). Sur les mœurs et habitudes des Lépidoptères (tra- duit de l'allemand par Silbermann) (Rev. entom. de Silbermann, t. H, iSd[\, lO-^ livr. 183/1, p. 137). 3° Distribution géographique. Latreille. Introduction à la géographie générale des Arachnides et des Insectes, ou des climats propres à ces animaux (Mém. du Mus. d'hist. nat., 1817, t. III, p. 37 à 61, et Cours d'entom., 1831, I, p. 289-305). Klug et Ehrenberg. Symbolsephysicae, seu Icônes et Descriptiones Insec- torum quœ ex itinere per Africam borealem et Asiam occidentalem Fr. G. Hemprich et God. Ehrenbergstud io novœ aut illustratfe redie- runt. Berlin, 1829-183/i. HoPE. On the Entomology of China {Trans. Entom. Soc. London, t. IV, 18/j7. Mac Leay. Catalogue of Insects from Auslralia. London, 1827, II, p. Z|39- /i60 (Voyage du capitaine King). — Illustrations of the Annulosa of South Africa. London, Smith, 1838. — Isis, 18Zi3, XII, p. 929-932. GuÉRiN-MÉNEviLLE. Voyagc autour du monde de la corvette la Coquille : Crustacés, Arachnides et Insectes. Paris, 1830. Pas de généralités. Brullé. Coup d'œil sur l'entomologie de la Morée {Ann. des sciences nat,, 1831, t. XXIII, p. 2Zi6-267). — Insectes dans Louvrage de la Commission scientifique de Morée. Paris, 1832, p. 6Zi à ZjOO, avec 22 planches. E. UoNovAN. The natural History of British Insects. London, 16 vol., 1792-1813. — Epitome of the natural History of the Insects of China. London, 1798. — General Illustration of Ent mology, an Epitome on the Insects of Asia, New-HoUand, New-Guinca, Otaheita, and other islands in the Indian, Southern and Pacific Océan. London, 1805. Adam Wuite. Sur la faune entomologique de la Nouvelle-Zélande {Revue zooL, 18Zi7, p. 87-97; 18/i8, p. 20-2/i, 5/i-56, 76-80, 110-118). Descriptions, pas de généralités. — List of Annulosa found by H. Methuen, during his wanderings in South Africa. {J\Jetliuen's Wanderings in South Africa, VIII, p. 12, Iwo plates). — Description of four Australian Insects. {Etjres Expédition of discovery into central Australia, 1845, I, p. ^32). — The Zoology of the Voyage o[ Erebus and Terror : Insects of Ncw- Zealand. London, 18Zi6. 236 INTRODUCTION. W. F. Erichson. Beilrag zur Fauna von Van-Diemensland {Wiegmanns Archiv., 18/i2, t. VIII, p. 83-287), — Beilrag zur Inscclen fauna von Angola {Wtegmann' s Archw.,lSh'i, t. IX, p. 199-267). — Die Insccten in Schomburgk's Reise in Guiana. Leipzig, 18/i7, t. III, p. 533-617. 13.\TES. Notes of South American Butlerflies {Trans. Soc. Entom. ofLondon, 1859, t. V, p. 1 à 11). — Contributions lo an Insect Fauna of the Amazon Valley {Trans. Soc. Entom. London, 1860, t. V, p. 335-361). H. Lucas. Animaux nouveaux ou rares recueillis pendant l'expédition, dans les parties centrales de l'Amérique du Sud, de Rio-de-Janeiro à Lima et de Lima au Para, 18^3-^7, par F. de Castelnau. — Entomologie. Paris, 1857. Pas de généralités. — Exploration scientifique de l'Algérie. Histoire naturelle des Animaux articulés, 4 vol. in-/i° avec atlas, 18Zi7-18i9. — Essai sur les Animaux articulés qui habitent l'île de Crète {Revue et Magasin de zool., série 2, 1853, 1. V, p. 565; t. VI, 185/1, p. 28, 165, 278, A87, 562). E. Blanchard. Faune entomologique de la Sicile {Aim. Soc. entom., IS'ik, 2, Bull., p. 79-86). G. Gray. The Entomology of Australasia. London, 1833. Wallace. On the Insects used for food by the Indians of the Amazon {Trans. Entom. Soc. London, série 2, 185Z|, t. II, p. 253-26/i). — The Entomology of Malacca {Zoologist, 1855, t. XIII, p. /i336-A339). — Observations on the Zoology of Bornéo {Zoologist, 1856, t. XIV, p. 5113-5117). Beluer de la Chavignerie. Observations sur les Lépidoptères de l'Au- vergne {Ann. Soc. entom., 1850, VIII, p. 73, 81). — Observations sur les Lépidoptères de la Lozère {Ann. Soc. entom., 1851, t. IX, p. 681-695). — Observations sur les Lépidoptères des Basses- Alpes {Ann., 185/i, II, p.29-Zi9; 1856, IV, p. 5-26; 1857,V, p. 587-600; 1859, VII, p. 177-200). — Note sur la faune entomologique des Basses-Alpes (Lépidoptères) (1855, III, Bull., 82, 83). — Observations sur les Lépidoptères des Pyrénées-Orientales {Annales, 1858, t. VI, p. 128-lZi8). — Observations sur la faune entomologique de la Sicile (Lépidopt.) {Ann. Soc. entom., 1860, t. VIII, p. 667-713). Rameur. Faune entomologique de l'Andalousie. Paris, 18/!i2, U livr. — Catalogue des Lépidoptères de l'île de Corse, avec description des 'espèces inédites (/Jnn. Soc. entom. de France, 1832, t. I,p. 2/|5; t. III, 1833, p. 1). LtGLNDES. 237 Légendes des iilnnches de l'Introduction. PLANCHE I. Fie. 1.— Appareil digestif du Pijrrhocoris optera, d'après L. Dufour (Hémiptères, pi. II, fig. 19). FiG. 2. — Appareil digestif du Carahus «?(/•«/(«• (Coléoptères), d'après M. E. Blan- chard [Rèfjne animal, pi. v, fig. 15). Fig. 3. — Appareil digestif du "Ver à soie, chenille du Sericaria Mort, d'après M. E. Blanchard {Métamorphoses des Insectes, p. 123, et d'après le Règne anima/, fl. cxxx, fig. 1). Fig. U. — Appareil digestif du Papillon ou adulte de la même espèce {op. cit., p. 123). PLANCHE H. Fig. 1. — Cœur du Hanneton {Melolontha vuîgaris, Coléoptères), et son artère, vus en dessous, grossis avec les brides fibro-musculaires ; d'après Straus-Durckheim {Considérations sur Vanatomie comparée des Animaux articulés, etc., Paris, 1828, pi. VIII, fig. 7). FiC. 1 a. — Même organe, isole, grossi, vu en dessus {op. cit., p. viii, fig. 9). Fig. 1 b. — Portion plus grossie, en dessous, d'après Slraus-Durckheim {op. cit., pi. VIII, fig 10), et M. E. Blanchard [Règne animal, pi. I, fig. 2). FiG. 2.— Portion de trachée montrant les deux tuniques et le fil spiral. FiG. 3. — Système trachéen tubulaire du Mantis religiosa (Orthoptère coureur), d'après Marcel de Serres (Observ. sur les usages du vaisseau dorsal, etc.; — De l'influence des organes de la rcspAration sur le vaisseau dorsal; — Mém. du Mus. d'hist. nat., t. IV, 1818, pi. xvi, h, de VAnat. des Insectes). FiG. 4. — Système trachéen vésiculaire de l'Abeille {Apis mellifica. Hyménoptères), d'après M. E. Blanchard {Règne animal, pi. cvii, fig. 1, Qi Métamorphoses des Insectes, p. 133). PLANCHE \U. Fig. 1.— Anatomie tégumentaire externe du grand Ca^tricoîne {Ham7naticher us Héros), d'après Jacquelin du Val {Geriera des Coléoptères d'Europe, Introduction, pl. I, fig- 1). Fig. 2. — Aile supérieure d'une Tenthrédine (Hyménoptères) {op. cit., pl. vm, fig. 5). Fig. 3. — Aile supérieure d'une Tipulaire (Diptères némocères) {op. cit., pl. viii, fig. 6). Fig. i. — Aile supérieure de P^eroma/«s inflexus (Hyménoptères chalcidiens), très- grossie [op. cit , pl, viii, fig. 7). 238 INTRODUCTION. FiG. 5. — Aile supérieure très-grossie, de VAphis Juçjlandis (Hémiptères homo- plères) {op, cit., pi. vill, fig. 8). FiG. G. — Ailes supérieure et inférieure du Pieris A'rt;j/ (Lépidoptères Rhopalocères ou Achalinoptères) dépouillées de leurs écailles) {op. cit., pi. vu, fig. 12). FiG. 7. — Aile grossie du Chvysotoxinn arcuatura (Diptères brachocères), d'après , M. E. Blanchard {Règne animal, \, p. 175 bi^, fig. 4). PLANCHE IV. FiG. 1. — Labre de la grande Sauterelle verte {Locusta viridissima, Orthoptères sauteurs), d'après M. E. Blanchard {Mdtamorp/ioses des Insectes, p. 112). Fig. 2. — Mandibules du naême insecte {op. cit., p. 112). FiG. 3. — Lèvre inférieure avec ses palpes labiaux {op. cit., p. 112). FiG. 4. — Une mâchoire avec son palpe maxillaire (op. cit., p. 112). FiG. 5. — Langue ou hypopharynx {op. cit., p. 112). FiG. 6. — Bouche de la chenille du Sphinx du Troène {Sphinx Ligustri, Lépido- ptères hétéroptères ou chalinoptères), d'après M. E, Blanchard {op. cit., p. 115). Fig. 7. — Bouche du Taon des bœufs {Tabanus boviims, Diptères brachocères)^ montrant le labre, les mandibules, les mâchoires et leurs palpes, la lèvre infé- rieure, d'après M. E. Blanchard {Règne animal, pi. CLXXl, fig. 2 a). Fig. 8. — Labre et mandibules rudimentaires de la Zygène de la Scabieuse {Zijgœna Scabiosœ, Lépid. hétéropt. ou chalinopt.), d'après de Savigny {Mém. sur les Animaux sans vertèbres (Paris, 1816, l^e partie, l'='" fascicule, janv. 1816). Fig. 9. — Spiritrompe (moitié) ou mâchoire modifiée du même Insecte avec son palpe {op. cit.). FiG. 10.— Lèvre inférieure très-grossie, avec ses palpes, l'un dénudé {op. cit.). Fig. 11. — Tète, vue en dessous, du Çimex' nigricornis {iiémiplètes hétéroptères), avec le rostre ou trompe droite et articulée {op. cit.). Fig. 12. — Détails du rostre précédent, labre à la base, deux paires de soies ou filets séparés au sommet, représentant les mandibules et les mâchoires {{op. cit.). Fig, 13. — Mêmes filets écartés, avec gaîne (portion basilaire) ou lèvre inférieure et pharynx {op. cit.). P"iG. là. — Tète et bouche du Xylocopa violacea (Abeille charpentier de Réaumur, Hyménoptères), avec mandibules, mâchoires, lèvre inférieure et leurs appendices, d'après Jacquelin du Val {Gênera, pi. vu, fig. 6, Introduction). Fig. 15. — Tète et bouche, vues de coté, du Pyrrliocoris aptera (Hémiptères hétéroptères), montrant le labre, la gaîne articulée du bec ou lèvre inférieure et les filets (mandibules et mâchoires) écartés de la gaîne, d'après Jacquelin du Val {op. cit., pi. vil, fig. 10). Fig. 16. — Mâchoire à lobe externe articulé et palpe (double palpe) du Cicindela gollicu (Coléoptères), d'après Jacquelin du Val {Gênera des Coléoptères d'Eu- rope, 1855, pi. i, fig. 2 a). LÉGENDES 239 PLANCHE V. FiG. 1. — Tête de Névroptère montrant les yeux lisses ou slemmates et les yeux composés (M. E. Blanchard, Règne cmimal, pi. ii, fig. 6). FiG. 2. — (EU composé du Hanneton, coupé par le milieu, grossi, d'après Straus- Durckheim {op. cit., pi. ix, fig, 5). Fig. 3. — Portion Irès-grossie de l'intérieur de cet œil {op. cit., pi. ix, fig. 6). Fig. 4. — Antenne de Nécrophore (Coléoptères), d'après M. Burmeister {Handbuch der Entomologie, pi. iv, fig. 21). Fig. 5. — Antenne du Hanneton foulon {Melolontha ou Polypliylla fvHo ç^ , Coléoptères), d'après M. Burmeister {op. cit.., fig. 23). FiG. 6. — Portion terminale de l'antenne du Pupilio Machaon (Lépidoptère rliopa- locère), d'après M. E. Blanchard {MétamorpJioses, p. 172). FiG. 7. — Antenne de Sphinx du Troène (Sp/a'/jx Zi^MS^/'i^ Lépidoptère hétérocère), d'après M. E. Blanchard {op. cit., p. 210). FiG. 8. — Antennes A'Attacus Cecropia (Lépid. hétér.), d'après M. E. Blanchard {op. cit., p. 210). FiG. 9. — Antenne très-grossie du Volucella zonaria (Diptères brachocères), d'après Jacquelin du Val {Gênera, Introduction^ pi. vni, fig. 2). FiG. 10.— Système nerveux de l'Abeille neutre (Apis meHifica neutre), d'après . M. E. Blanchard {Métamorphoses, p. 85). Fig. 11.— Système nerveux de la larve du même Insecte (E. Blanchard, op. cit., p. 91). FiG. 12. — Système nerveux de l'adulte du Sericarin Mori ou Ver à soie du Mûrier (Lépid. hétéroc. ou chalinoptères), d'après M. E. Blanchard {op. cit., p. 89). PLANCHE VI. Fig. 1. — Appareil génital mâle de l'Abeille {Apis mellifica), d'après M. Berlepsch {Die Bieue unddie Bieyienzucht, von August Baron von Berlepsch, 1860, p. 12). FiG. 2. — Testicule étalé et dégagé de ses enveloppes du même insecte, d'après L. Dufour {Mém. des savants étrangers, 1841, t. VII, pi. v, fig. 54). Fig. 3. — Appareil femelle du Ver à soie adulte {Sericaria Mori), d'après un des- sin inédit de M. Balbiani (cette figure est en partie schématique, les ovaires étant représentés avec moins de développement que dans la nature, comparati- vement aux autres pièces). FiG, 4. — Micropyle de l'œuf de VEristalis tenax (Diptères brachocères), d'après M. Leuckart, Muller's Archiv {Archiv fiir Ajiatomie, Physiologie, etc.), 1855, t. XII, pi. VII, fig. 20). Fig. 5. — OEuf et micropyle de l'.'lcHrt^/tw^- lectularia (Punaise des lits, Hémiptère hétéroptère), d'après M. Leuckart {op. cit., pi. viii, fig. 12). 2ù0 INTRODUCTION. FiG. 6. — Œuf et niicropyle de la Nèpe cendrée (Hémiplère hétéroptère, Nepa cinerea), d'après M. Leuckart (pp. cit., pi. viii, lig. 28). FiG. 7. — Micropyle de l'œuf du Swe;'mgenre Tetracha, Hope), d'un vert mé- tallique, avec une grande tache jaune à l'extrémité des élytres. Elle fut découverte par Olivier sur les bords de l'Euphrate, puis retrouvée sur les rives du Nil. M. Cotty la rencontra en Algérie, près de salines natu- relles des environs d'Oran. Elle se tient sur les bords ou au bas du ver- sant des berges, enfoncée à environ 60 centimètres dans une terre humide et grasse, en des trous à orifice circulaire de la grosseur du corps de l'insecte. La sortie de l'insecte n'a pas lieu la nuit, mais aux heures fraîches de la journée, pendant les mois les plus brûlants, juin, juillet, août. Les Mégacéphales courent rapidement, sans faire usage de leurs ailes, le soir, une heure avant le coucher du soleil, et le matin, une demi-heure avant et après son lever. Ldilarve du Megacephala euphratica [Ann. Soc. entom. de France, 1859, p. 615) a la tête et le prothorax bien plus larges que les larves des Cicindèles. Elle offre quatre ocelles de chaque côté de la tête : deux su- périeurs énormes, deux latéraux très-petits. Ses pattes thoraciqueâ sont fortes, bien développées; le cinquième segment abdominal a en dessus deux paires de forts crochets cornés, au lieu d'une seule qu'ont lea 254 COLÉOPTÈRES. larves de Cicindèle. Ils sont destinés à servir de point d'appui pour l'anûl. La force exlrôme des mandibules, avec la grandeur des pattes, doivent faire des larves de Mégacéphales de puissants chasseurs qui, probablement, peuvent, comme les adultes, courir après la proie. Ge bel insecte existe aussi dans le Caucase, et en Espagne, en juin, entre Totaiia et Murcie, mais nullement dans des conditions pareilles à celles des environs d'Oran, c'est-à-dire au bord de cavités naturelles où le sel cristallise en été par évaporalion spontanée. Il a été trouvé en Espagne dans le voisinage des eaux douces, dans des lieux arénacés, humides, couverts d'herbes, volant ou errant sur le bord des fossés d'ir- rigation, surtout le malin et après le coucher du soleil. 11 est à espérer que des amateurs patients et habiles finiront par le capturer dans le midi de la France, où il y a des localités tout à fait analogues, soit à celles d'Algérie, soit à celles d'Espagne. En 1866, M. Chevrolat a gardé chez lui à l'état vivant, pendant quelque temps, un Megacephala euphratica pris en Algérie aux environs d'Uran ; il le nourrissait avec des mouches. Dans la Transcaucasie , Ménétriès trouva l'espèce près des sources thermales sulfureuses de Saliane, et (Jans l'enceinte même de la ville, dans les trous d'où l'on extrayait de la terre à briques. Chaque insecte vivait isolé dans son trou, mangeant des lombrics et des chenilles, et sortant le soir de son réduit, mais ne s'en écartant pas beaucoup. . La plupart des Mégacéphales sont américaines, et ont les mêmes mœurs, chassant et volant le matin et le soir, et se tenant cachées dans des trous en terre pendant la grande chaleur du jour. Tel est le Mega- cephala carolina, L,, des rives sablonneuses du Mississippi (pi. vn, iig. 7: 2 a, antenne ; 2 6, labre; 2 c, mandibule; 2 d, mâchoire et palpes maxillaires; 2 e, lèvre inférieure et palpes labiaux). — .Une espèce de la Guyane se réfugie sous les bouses sèches, dans les trous profonds creu- sés par les Coléoptères coprophages. Quand on veut la saisir, elle dé- fend l'entrée de sa caverne; mais, dès qu'elle s'aperçoit que sa résistance est inutile, elle se précipite au fond, où il faut introduire une longue paille que ^'insecte saisit dans ses fortes mandibules, se laissant tirer au dehors tans lâcher prise. Il y a en Afrique, au Sénégal, des Mégacé- phales sans ailes, ne sortant que le soir, selon l'habitude du genre, ihais qu'on trouve quelquefois pendant le jour en brisant les mottes de terre dans les champs que l'on prépare pour semer du riz. Le catalogue de MM. Gemminger et de Harold place ces insectes dans deux genres distincts : Meyacephala (ex. : M. senegalensis, Latr.), à espèces d'Afrique, d'Amérique méridionale, d'Australie, et Tetracha (ék. : T. euphratica, carolina), à espèces bien plus nombreuses, surtout des deux Amériques, de l'Australie, sans espèces chinoises ou indiennes, ni africaines, ni des îles soudaïques et polynésiennes. CIClNDÉtlDES. — 0XY<:HE1LA, MANTICORA. î#5 '0X.Y€BE;iIi.%^ Dej. — Tète moyenne, un peu allongée; antennes filîform'esi grêles; yeux petits; mandibules cachées sous le labre. Toutes les espèces de ce genre sont de l'Amérique méridionale chaude et surtout du Brésil. Le type est YOjycheila Iristis, Fabr., dont la tête est représentée pi. vu, fig. 8. C'est la seule commune dans les coUec-: tiens. Les Oxycheiles sont d'assez grands et beaux insectes , ordinairement noirs avec une tache jaunâtre sur chaque élylre. M. Lacordaire a trouvé plusieurs fois 10. tristis dans les environs de Rio-Janeiro, sous des pierres, au bord des ruisseaux, très-agile, mais ne volant pas et faisant entendre un bruit assez fort en frottant ses jambes contre le bord de ses élytres. MAUTlCORil, Fabr. — Mandibules fortes, arquées, plus longues que la tête; antennes minces, filiformes. Élytres très-larges, chagrinées, soudées, sans ailes en dessous. Pattes grandes, à poils roides. Les Manticores sont de bien plus grande taille que les autres Cicin- délides, entièrement noires, courent avec vivacité sur le sable et se ca- chent sous les pierres. Ces insectes sont tous de l'Afrique australe (Cafre- rie. Cap, Mozambique, Port-Natal et N'Gami). Nous citerons le Manticora maxillosa, Fabr., ou tuberculata, deGeer (pi. vu, fig. 6), du cap de Bonne- Espérance. Ce grand insecte, que sa couleur, l'absence d'ailes, ses formes trapues, ses pattes robust'éî et Velues font l'essemble'r à une Araignée du groupte deâ Mygales, est rare dans les collections, car l'extrême rapidité de sa course rend sa capture fort dilficile. Les Man- ticores se réfugient plusieurs à la fois dans des trous circulaires com- muniquant à de nombreuses galeries dont la profondeur dépasse plu- sieurs mètres. Écoutons, au sujet de la chasse aux Manticores, M. dé Castelnau : « Il a été donné ù fort peu d'entomologistes de voir en nature les insectes singuliers qui nous occupent, et ce fut avec un véritable saisissement que, lors de mon voyage en Cafrerie, après avoir traversé la chaîne de montagnes qui sépare le Long-Kloof du Karoo, j'aperçus tout à coup une Manticore immobile au grand soleil. Je fis aussitôt ar- rêter mon wagon traîné par sept paires de bœufs, et je m'approchai de l'objet de ma convoitise; mais, plus rapide que l'éclair, il disparut tout à coup, sans que je pusse me rendre compte de la manière dont il avait opéré sa retraite. Vivement contrarié, je me vis obligé de con- tinuer.ma marche ; mais, le lendemain, et déjà près de l'Olifant-river (rivière des Éléphants), je venais d'arrêter ma petite caravane pour faire préparer le dîner, lorsqu'en me promenant autour du camp, je vis tout à coup, sur un espace découvert laissé par les plantes basses et épineuses qui forment la végétation de ce sol sablonneux, une Manticore immo- bile, ayant le corps penché en arrière et tenant ses formidables man* 256 COLÉOPTÈRES. dibules hautes et ouvertes. Rendu prudent par ma mésaventure de la veille, je n'approchai de mon insecte qu'en me dirigeant de manière que mon ombre ne pût pas l'avertir de ma présence; cependant il parut tout à coup s'apercevoir de quelque chose et prit sa marche ra- pide; mais j'étais assez près pour pouvoir le joindre, et, en me jetant sur le sable, je parvins à le saisir. Je ne saurais dire le plaisir que j'éprouvai à examiner ma proie. » La recherche des insectes n'est pas toujours inoffensive dans les régions chaudes. M. de Castelnau dit plus loin : « Une autre fois je vis une Manticore courir vers moi avec la rapidité ordinaire des mouve- ments de ces animaux ; mais, en m'apercevant, elle s'arrêta tout à coup et dirigea sa marche de manière à former un angle droit avec la direc- tion qu'elle suivait précédemment ; tout à coup, ayant rencontré un monticule de sable, elle s'adossa contre et se mit sur la défensive. J'al- lais presque la saisir, lorsque j'aperçus, à 2 ou 3 mètres de moi, un cobra-capel, le plus dangereux reptile de l'Afrique australe, qui évi- demment lui donnait la chasse ; me trouvant sans armes, je me retirai rapidement et laissai ma brave Manticore se débattre contre son ter- rible adversaire. » On peut terminer les Cicindélides par quelques genres qui n'ont plus d'onglet mobile au lobe interne de la mâchoire, et se rapprochent par là des Carabides, où ce caractère est très-habituel. CTRIVOSTOMA, Klug. — Une petite dent à l'échancrure du menton. Élytres étroites à la base, renflées à l'extrémité. Ce genre renferme surtout des insectes de la Guyane et du Brésil, Sans ailes sous les élytres; à corselet cordiforme; à corps allongé, étroit, de moyenne taille, bronzé et brillant, avec le bout des élytres et une bande blanchâtres. Ils courent très-vite, à la chaleur du jour, sur le sol des bois, les troncs des arbres, les clôtures des plantations. — Ex. : Cte- nostoma ichneumoneum, Dej., du Brésil. — PI. vu, fig. k' Ua, lèvre infé- rieure; kb, antenne; hc, patte antérieure du mâle. — Le nom est tiré de la ressemblance de forme avec un Hyménoptère, ce que présentent aussi d'autres espèces du genre : ainsi, Ct. formicarium, Fabr., de la Guyane. 11 y a une espèce à Mexico, une à Buenos-Ayres, une au Venezuela. ^OCiOWOStTOMA, Klug., ouPsiLOCERA, Brullé, syn.— Élytres allongées, paral- lèles, épineuses à l'extrémité. Antennes et pattes très-longues et très-grêles. Ce genre, dont on connaît onze espèces, est exclusif à Madagascar, et comme parallèle au genre américain précédent. Ce sont des insectes de Couleur uniforme, variant du bleu au noir, Courant avec rapidité sur les feuilles et s'envolant aisément, CARABIDES. 25*7 Famille H. — CARABinES. Celle famille esl beaucoup plus nombreuse que la précédente. La lète est ordinairement plus étroite que le corselet. Les mandibules sont en général peu ou pas dentelées; les palpes labiaux, à trois articles libres, aussi grêles que les maxillaires ; les mûclioires presque toujours dépourvues d'onglet articulé. Les antennes sont, à peu d'exceptions, simples et filiformes ; les pattes, conformées pour la marche sur la terre, robustes, mais longues et sans dentelures, qui gêneraient la course. Leurs formes sont plus lourdes, moins sveltes que celles des Cicindé- lides. Les espèces ailées font peu usage de leurs ailes, et il en est qui manquent d'ailes sous les élytres. Les yeux sont bien développés, sou- vent saillants, on rapport avec la nécessité d'une vision étendue pour la chasse. En outre, cette grandeur de l'organe de la vue est liée pour beaucoup de Carabides à des habitudes crépusculaires ou même noc- turnes. On sait que de nombreux animaux, dans les classes les plus di- verses, ont les yeux grands et saillants, afin de mieux recueillir le peu de lumière des crépuscules. Les Carabides se cachent ea général peadant le jour, à l'abri de la chaleur et de la lumière, dill'érents par ce fait des Cicindélides. On les trouve alors sous les pierres, les écorces des arbres, dans la mousse, sous le sable, sous les racines, quelquefois sur les troncs et rarement sur les feuilles des herbes et des arbres. Certains genres sont spéciaux au bord des eaux ; la plupart aiment à courir dans les chemins, dans les sillons, au milieu des gazons secs. Le tube digestif de ces carnassiers n'a qu'une ou deux fois la longueur du corps; présente un jabot, un gésier avec pièces cornées internes pour la trituration ; un estomac à parois munies d'appendices cœcaux, et à l'extrémité duquel débouchent deux paires de vaisseaux de Mal- pighi; un rectum renflé et court. Les femelles ont des gaines ovi- gères nombreuses, très-allongées, indice d'une ponte considérable. En effet, la vie à découvert, sans abri et sans industrie, de ces insectes, dont un très-petit nombre chasse exceptionnellement à l'embuscade, les expose à la destruction. Les larves dc3 Carabides sont allongées, assez dures, agiles, à six pattes fhoraciqucs bien développées, carnassières. Leur bouche a de fortes mandibules acérées et courbes. Leur corps a douze anneaux, moins la tête, do'it le premier est recouvert d'une pièce écailleuse, et le dernier muni de deux appendices coniques. lîilles ont en général cinq articles aux antennes ci quatre aux palpes maxillaires. On n'en connaît qu'un petit nombre et beaucoup moins encore de nymphes. La vie des larves paraît être longue, peut-être de plusieurs années pour quelques espèces. Les adultes sont surtout communs au printemps et en automne; on en prend au reste en toute saison, même en hiver, dans les fentes des arbres, sous les pierres, dans les feuilles sèches. Tout est approprié chez GIRARD. 17 258 COLÉOPTÈUËS. — CARAIUENS. les larves à une vie de chasse active. Le corps est uniformément cui- rassé en dessus el plus ou moins atténué en arriére. Elles sont d'habi- tude d'un gris noirâtre, et ont à la tète des ocelles, souvent au nombre de six paires sur deux rangs. Les segments de l'abdomen ne différent guère de ceux du Ihorav que par l'absence de pattes. A peu d'exceptions (Calosomes), elles se cachent soLis les pierres et dans la terre avec plus de soin que les adultes, ce qui fait qu'on les rencontre rarement. A part les larves de quelques espèces du genre Pasimachus, elles chassent à découvert, sans abri, sans ruses, et vivent comme les adultes de che- nilles, lombrics, limaces, etc. Certaines espèces paraissent herbivores, par une inversion de régime assez usitée chez les Insectes. Les Carabides, à la différence des Cicindélides, se trouvent partout, et, avec quelques Charançons et Chrysomèles, sont les Coléoptères qui s'avancent le plus près des glaces éternelles, des pôles de la terre ou des sommités des montagnes. Ce sont surtout les régions froides et tempérées du globe qui présentent le plus grand nombre d'espèces de Carabides ; les régions tropicales n'en sont cependant pas dépourvues, et souvent sont habilées par des formes spéciales. Th. Lacordaire établit deux légions dans cette grande famille des Carabides, ou Carabiques des anciens auteurs, partie des Créophages de C. Duméril. Les uns (Grandipalpes de Latreille, Simplicipèdes de De- jean)ont les jambes antérieures entières, avec les deux éperons le plus souvent au sommet; ils se groupent autour des genres Omophron , Ela- phrus, Hiletus, Carabus, Ctjchrus. La seconde légion, bien plus nom- breuse, a les jambes antérieures plus ou moins échancrées au côté in- terne, avec les éperons, l'un anté-apical, l'autre apical.Cela correspond, dans l'ouvrage longtemps classique en France de Dejean, aux ïronca- tipennes, Scaritides, Patellimanes, Féroniens, Harpaliens et Subulipalpes. Cette indication permettra facilement de répartir dans' ces groupes, si on le juge convenable, les genres principaux que nous allons faire connaître. Jacquelin du Val adopte les mêmes divisions, réduites aux genres européens. GENRES PRINCIPAUX. AIVTHIA, Weber.— Tête grande, dégagée ; languette cornée très-longue, saillante entre les palpes labiaux ; second article des pnlpes des deux sortes très-long. Élytres ovales, convexes, tronquées à l'extrémité et laissant paraître un peu l'abdomen. Les espèces de ce genre sont presque exclusivement africaines, quel- q;ies-unes asiatiques, une d'Arménie, une d'Arabie, deux des Indes orientales, A. orientalis, Hopc, et A. si-xfutttata, Fabr. Les Anthies sont de grands l'.arabides noirs, ayant pour la plupart des lâches blanches, en nombre variable, formées par une sorte de duvet. CARABIDES. — GKAPHlPTERUS, HELLUO, CASNOiMA. 259 llshabilent surtout les régious sablonucuscs de l'Afrique australe ;ainsij près du Cap, vivent dans le sable, sous les pierres, non loin des eaux, et répandent une liqueur caustique par l'anus à la façon de nos Carabes. Citons VA. decemgutlata, Linn. (pi. viii, flg. 1, sa bouche), espèce du cap de Bonne-Espérance. UR.%piiipti:ri>), Latr. — Tète ovale, antennes filiformes. Tarses antérieurs simples. Élytres larges et arrondies. Ces insectes, de taille œoyenne et sans ailes, habitent les régions non cultivées des diverses parties de l'Afrique. Ils sont ornés de taches ou de lignes blanches ou cendrées se détachant sur un fond sombre et produisant un très-joli aspect. Ils courent sur le sable à la plus forte chaleur du jour, et, quand on les prend, font entendre, en frottant les cuisses postérieures contre les larges élytres débordant l'abdomen, une stridulation analogue au mot xexé. Trùs-carnassiers, ils se dévorent si on les réunit. — Ex. : G, multiguttatus,0\i\., d'Egypte.— -PL vin, fig. 2 : 2 a, lèvre inférieure et mâchoires ; 2 6, extrémité d'une patte anté- rieure. — Il a été trouvé aussi en Algérie. HKLLl'O, Bonclli. — Tète assez rétrécie postérieurement, antemies moniliformes. Élytres soudées, allongées, tronquées au bout; pas d'ailes. Les insectes de ce genre sont propres à l'Australie, vivent sous les pierres et exhalont une odeur plus forte encore que nos Carabes. Ils comprennent trois espèces de grande taille, dont le type et le plus grand est VH. costatus, Bon. (pi. vjn, fig. 8). PASIMACHTS, Bon.— Antennes courtes et robustes; tète large, subquadrangu- laire. Élytres ovales, rélrécies en arrière, à bords latéraux tranchants. Ce genre est exclusif aux États-Unis, à la Californie, à l'Amérique bo- réale. Ce sont de beaux Coléoptères d'un noir bleuâtre ou violacé, sou- vent avec bordure métallique. Us sont intéressants par les mœurs de leurs larves, exceptionnelleschezlesCarabidL's et indiquées par Leconte. Les unes, de même que chez les Cicindèles en larves, font des trous profonds dans le sol, en ferment l'entrée avec leur large tête, se jetant sur les insectes qui passent. Ainsi se comporte la larve du 7^ elongatus, Leconte, du Missouri. Chez d'autres espèces, les larves vivent sous les écorces des arbres morts, par exemple pour le P. marginatus, Fabr., de l'Apiérique boréale. CASXOlîi.%, Latr.— Tète en losange, amincie en arrière. Corselet en col allongé, cylindrique, Irès-rétréci antérieurement. Antennes beaucoup plus courtes que le corps ; tarses grêles. Ces insectes, des régions chaudes des deux mondes, ont des couleurs métalliques^ vivent dans les endi'oits sablonneux, au bord des mare- 260 COLÉOPTÈRES. —CARARIENS. cages; courent et volent comme les Cicindèles à peu de distance, se posent sur les feuilles. — E\. : ('. senetialcuisin, Lepelletier S.-Farg. et Serv., de Corée (pi. vin, fig. o). Ces Carabiques depelife faille onl un aspect élégant, dû à leur long et svelte corselet; leurs élylres ont souvent des taches blanchâtres ou jaunâtres, rappelant la coloration des Altelabes (Curculioniens). Il eu est deux espèces d'Australie et une d'Algérie, le C. Oliver i, Buquet, trouvé près de Bône, d'un noir brillant, à élylres jaunes, noirâtres à la suture, à pattes jaunâtres. Af;Ri%, Fabr. — Tète ovalaire, très-rétrécie en arrière; antennes filiformes. Cor- selet cylindrique, allongé, rétréci en avant. Élytres longues^ étroites. Ces magnifiques insectes à couleurs métalliques sont rares dans les collections. Les espèces très-nombreuses de ce genre, des contrées tro- picales de l'Amérique, sauf une, comme .perdue à la Nouvelle-Calédo- nie, se trouvent sur les arbres, blotties en général dans les feuilles rou- lées en cornet par d'autres insectes, ayant en avant les antennes et les pattes antérieures, tandis que les autres pattes restent appliquées contre le corps. Si l'on touche à leur retraite, qui est sans doute une embuscade, elles se laissent tomber à terre et courent pour s'échapper en vacil- lant, vu la longueur exagérée de leur corps. — Ex. : .1. splendùla, I.atr., Dejean, à élytres d'un beau vert bronzé, du Pérou.— PI. vm, fig. 10: 10 a, fête de face; 10 6, palpe maxillaire isolé ; 10 c, crochets des tarses; iO d, tarse isolé à quatrième article profondément bilobé. GENRES. isn %€niIVIî«>, Weber. — Antennes séfacées. Élytres nettement tronquées à l'ex- liéaiilé et ne recouvrant pas tout rabdonien ; des ailes sous les élytres. Les P)rachins se rencontrent en sociétés nombreuses sous les pierres. Ce sont d'élégants Carabides, de petite faille dans les pays tempérés, dont le svelte et brillant corselet se détaclic en rouge sur des élytres bien plus larges, vertes ou bleues. Ils sont faibles et ne peuvent vivre que des plus chétives proies. Les gros carnassiers se mettent volontiers à leur poursuite. 0 surprise ! de petites explosions se font entendre, une vapeur corrosivc sort en forme de fumée par l'anus de ces Bra- chins : l'ennemi est mis en fuile à coups de revolver. On assure en outre que la nuit il y a une légère phosphorescence. Les fumées sont très-acides, rougissent le tournesol et répandent une odeur analogue aij gaz nitreux. Llles proviennent d'une paire de glandes abdominales branchues, situées au-dessus du rectum, et s'ouvrant par un pore de chaque côté de l'anus. Un muscle sphincter sert à lancer le liquide volatil. De là le nom de Canonniers ou Bombardiers donné à ces petits CARABIUES. — BRACHINUS, OZiENA. 261 Coléoptères; de là les épitliètes spécifiques : ainsi le B. crepitans, Linii., qu'on trouve dans tou(e l'iuirope, Irès-commun toute l'année aux en- virons de Paris, et qu'on u quelquefois rencontré sur des cadavres de vertébrés; les B. sdopela, Fabre, cxplodens, Dul'I., etc. On a détaché des Brucliins un sous-genre sous le nom d'Apthnis, Bon.^ pour des espèces du midi de la France privées d'ailes sous les élylres, moins larges aux épaules, comme les Carabes par rapport aux Calosomes, de mêmes mœurs, à explosions. C'est sur 1'^. displosor, Du four, ou balista, Germar, d'Fspagne, que Léon Dufour a étudié l'organe explosif : l'insecte in- quiété peut produire jusqu'à douze décharges avec détonation. Les espèces exotiques sont de bien plus grande taille; l'explosion est plus violente et le liquide projeté peut causer des urtications sur la peau. Les espèces très- nombreuses du genre Brachinus proprement dit sont d'Europe, des deux Amériques, de Chine, de Birmanie. Elles man- quent dans les îles sondaïques, l'Australie, la Polynésie. Les Aptinus sont de l'Europe méridionale, de l'Afrique et une espèce de Java. On n'en cite ni d'Amérique, ni d'iVustralie. • Nous ne trouvons dans les environs de Paris que les Bombardiers en miniature, de ^ à 8 millimètres de long, cités plus haut et recon- naissables à leur corps d'un roux clair, à leurs élytres ardoisées. C'est au début du printemps qu'on les cherchera sous les herbes à demi pourries et sous les pierres tombées au pied des vieux murs. Leurs explosions sont faibles, et il faut de l'attention pour les observer. Bien plus forte est l'éjaculation de V Aptinus displosor , qui est plus grand, noir, à corselet rouge et à élytres cannelées. On le trouve dans les lieux secs des montagnes des Pyrénées-Orientales, de l'Aragon et de la Na- varre, et sa vapeur anale rougit le tournesol, brûle un peu la peau et la tache en brun. La poussière acide de ces explosions recouvre l'in- secte quand on le tient entre les doigts, et, après une douzaine de dé- charges, les glandes épuisées ne donnent plus qu'une liqueur jaunâtre qui se fige bientôt. Les espèces de la plus grande taille et de la majeure puissance explo- sive des anciens Brac/imMS, forment maintenant le genre Pheroj^sophus, Solier. Ce sont des Brachins tachés de bandes ou de macules ferru- gineuses sur un fond noir ou brunâtre, et dont la dispositiun relative des ( ouleurs varie beaucoup dans les mêmes espèces. Le P. hispanicus. De}., est propre au midi de l'Espagne; les autres espèces sont des ré- gions chaudes des deux continents.— E\. : P. Jarinei, De']., du Séné- gal (pi. vni, fig. h). OW.JK%\, Oliv. — Tête assez grande; antennes épaisses, moniliformes. Élytres non tronquées recouvrant complètement l'abclomen. Il en résulte pour ces Insectes un aspect différent de celui des Bra- chins. ils sont bien plus élargis. Ils ont, comme les Brachins, la pro- 262 COLÉOPTÈRES. — CARABIENS. priété de lancer par l'anus une vapeur causiique , afin d'éloigner les ennemis. Insectes excliques des deux mondes. On ne comprend plus actuellement dans le genre O-œna (Oliv.) qu'une seule espèce, \'0. dentipes, Oliv., assez grand insecte d'un brun noirâtre, fort rare, de la Guyane. Dans un genre tout voisin, l'achij- teles, Perly, et formé d'espèces de l'Amérique tropicale, plus deux d'Afrique et une des Indes, nous citerons le P. Bogcri, de la Guyane (pi. IX, f]g. 9, antenne grossie). TRICHOGHATHirs, Latr, — Antennes assez longues, à premier article long ; mâchoires ayant à leur base un tubercule poilu. De l'Amérique méridionale, Colombie, Brésil, Guyane. — Ex.: Tr. marfiinipemiis, Latr., de l'intérieur du Brésil.— PI. viii, fig. 5: 5f/, lèvre inférieure et mâchoires, avec les poils des mâchoires visibles derrière les mandibules. — Vivant sous les troncs d'arbres abattus, et très-agiles, G.ALERITA, Fabr. — Antennes très-longues, à premier article très-long ; tarses antérieurs des mâles à trois premiers articles dilatés en dedans. I.a plupart des espèces de ce genre sont des deux Amériques, se pro- longeant même jusqu'à la partie boréale, se tenant dans les vieux troncs d'arbres, sous les pierres, dans les herbes, très-promptes à la course, et ne paraissant pas se servir de leurs ailes; d'assez grande taille, à corps bleuâtre, à tête et corselet souvent d'un rouge ferrugineux, f.eurs antennes sont épaisses à la base, diminuant rapidement vers l'extrémité. Il en est des espèces des régions chaudes de l'Afrique, de l'Hindoustan, do la Birmanie. On n'en connaît pas des îles de la Sonde, ni de l'Australie, ni de la Polynésie. M. Salle a le premier fait connaître les premiers étals très-remarquables du G. Lecontei , de l'Amérique boréale. I.a larve a une forme anormale parmi les larves de Garabiques : sa tète porte une longue corne fourchue, et est armée de grandes mandibules en faucilles; les segments du corps sont très-séparés et à contours très-arrondis, poilus, ainsi que les longues pattes ; le dernier anneau porte deux longs stylets entre lesquels fait saillie un tube anal. Cette larve, qui marche à reculons quand on l'inquiète en avant, vit dans la terre humide. Elle se change en nymphe dans une faible coque de terre retenue par des fils, et la nymphe ofl're les cinq premiers seg- ments abdominaux prolongés de chaque côté en un appendice muni d'une forte épine. I.e type du genre est le G. americana, Linn., de l'Amérique du Nord.— PI. VIII, fig. 6, lèvre inférieure et m'choircs ; fig. 0, tarse antérieur du mâle. — Les éiytres des Galérile? sont tron- quées à l'extrémité, ainsi que dans les genres voisins. CARABIDES. — ZUPHIUM, LEBIA, MORMOLYCE. 263 KIPOUM, Latr. —Antennes filiformes, assez longues. Corselet aplati, cordi- fornie ; pattes moyennes. Insectes de laillc médiocre, d'odeur trùs-forle, vivant sous les pierres. Le type est le Z. olens, Fabr., du midi de la France et de l'Europe (pi. VIII, fig. 7, sa tèle et son corselet). Ce genre appartient aux ré- gions chaudes du globe, à l'Australie, à l'Afrique, à l'Amérique, pour quelques espèces. Outre l'espùce type que nous avons citée, il en est une espèce en Algérie et une autre en Sicile. Ce sont des Coléoptères noirs, brunâtres, ferrugineux ou jaunâtres, qu'on rencontre rarement, ce qui les rend précieux aux amateurs. DnvpT,%, Fabr. — Antennes filiformes. Corselet allongé, étroit, cylindrique. Élytres ovalaires; pattes longues. Ce genre ressemble aux Cicindèlcs pour l'aspect. — Ex. : D. ru- ficoUis, Dcj., du Sénégal. — PI. viu, fig, 9 : 9 a , sa grandeur naturelle. — Ce genre appartient aux régions chaudes de l'ancien monde. L'Europe en possède une espèce, D. dentata, Rossi, ou emarginata, Fabr., qu'on trouve en Italie, en France, en Angleterre, dans les bois humides et marécageux. I.KUI.%, Latr. — Antennes assez courtes, filiformes. Articles des tarses subtriangu- laires; crochets tarsiens dentelés en dessous. Les Lébies sont d'élégants insectes, à corselet cordiforme, à corps aplati, à élytres larges, subrecfangles, tronquées à l'extrémité; se ca- chant sous les pierres ou les écorces; où le bleu et le brun dominent, avec éclat métallique; très-agiles à la course. Nous figurons le L. flavo- maculata, Guév., du Sénégal. — Pi. viii, fig. 11 : fig. lia, lèvre inférieure; 11 f>, mâchoire ; 11 c, patte antérieure du mâle; 11 d; crochet tarsien. — Les espèces de ce genre sont absolument de tous pays et très-nom- breuses. MORMOIiTCE, Hagenbach. — Antennes très longues. Corselet long, dilaté sur les bords. Élytres tronquées à l'extrémité, avec une grande expansion mem- braneuse latérale. Abdomen déprimé. Membres longs et grêles, à articles com- primés. Le genre Mormolyce n'a compiis longtemps qu'une seule espèce, des forêts de l'île de Java, le M . phyllodes, Hag., signalé pour la pre- mière fois aux amateurs en d825. Cette espèce, longtemps fort rare dans les collections, atteignit un prix excessif à cause delà forme singu- lière de ses élytres élargies et débordant le corps à la façon dune feuilliî (pi. X, fig. 7). La larve et la nymphe n'ont été découvertes que récem- 264 COLÉOPTÈRES. — CARABIENS. ment par M. Verhuell. I,a larve se rapproclie lout à fait, par sa forine allongée et presque partout de même largeur, de celles des Carabes et des Calosomes ; elle vit sur les troncs et les racines des arbres de haute futaie, dans les forCts profondes de l'île malaise. La nymphe com- mence ù présenter un élargissement en rapport avec la forme de l'adulte. Voyez en outre pi. x : 7 a, menton et lèvre inférieure; 7 6, labre; 7c, mandibule; 7 d, mâchoire et palpes. Pendant longtemps on ne connut qu'une seule espèce du curieux genre Mormolyce. Grâce aux chasses de M. le comte deCaslelnau, deux nouvelles espèces très -voisines ont été découvertes et publiées par M. II. Deyrolle, sous les noms de M. Hagenbachi, de Sumatra, et Cas- telnaui , de la presqu'île de Malacca. La forme des élylres élargies paraît varier pour chacune des trois espèces, selon les individus et les localités. La taille de l'espèce célèbre, qui est le type du genre, peut diiïérer de 11 centimètres jusqu'à 5. On a cru que les Mormolyces, d'après leur extrême aplaiissemeni, devaient vivre sous les écorces. M. de Castelnau n'a jamais rencontré au- cune des trois espèces connues sous les écorces, mais toujours, dans le voisinage des marais, sous de gigantesques troncs d'arbres tropicaux renversés. Jamais il n'en a trouvé ù l'air libre, ni le jour ni la nuit. Lorsque, à l'aide de vingt ou trente indigènes, un de ces arbres im- menses avait été déplacé , les Mormolyces apparaissaient en dessous, serrés entre le tronc et la terre, restaient un instant immobiles, éblouis par la lumière, et fuyaient bientôt avec la plus grande rapidité, au moyen de leurs longues pattes à articles comprimés, si l'on ne s'était empressé de les saisir. $$l.%G01V.%^ Latr. — Mentoa très-grand ; antennes filiformes, amincies graduelle- ment. Corselet très-iétréci postérieurement. Ces insectes, aplatis, de couleur sombre, sont de l'ancien monde, du continent africain et de l'Hindoustan. On en trouve cinq espèces dans le midi de l'Europe. — Ex. : .S. earop(m, Dej., pi. ix, fig. 1 (1 b, sa grandeur naturelle), assez commun en Sicile. Les Siagones, de taille grande ou moyenne, tantôt aptères, tantôt ailées, et cela parfois dans la même espèce, vivent sous les pierres et dans le sable, dégageant une forte odeur, comme les Ozœna et les Hellao. EUCEIjADUS, Bon. — Caractères de la bouclie et des antennes analogues au précédent. Corselet transversal, forlement cordiforme. Éljtres ovales. Genre fondé sur une seule espèce, de grande taille-, noire, à élytres sillonnées, de la Guyane occidentale et de la Colombie, VE. ;ii!ia!<, Bo- nelli, longtemps très-rare.— PI. ix, fig. k'- Uo, tête en dessous, pour CARABIDES. — OXYSTOML'S, SCARITES. 265 montrer le menloii inarticulé et adliérent à la iùXc par deux sutures longitudinales. OIlISTOMI'»», Latr.— Mandibules très-saillantes, algues; antennes plus courtes que les mandibules. Jambes de devant Irès-digitées. Ce sont des insectes américains, particuliers au Brésil. Il y en a deux espèces, assez grandes, d'un noir brillant, à élytres fortement striées. L'une d'elles est VO. SanctiEilarii Latr., espèce dédiée au botaniste ■voyageur, A. Saint-Hilaire, de l'intérieur du Brésil. — PI. jx, fig. 2:2a, son antenne grossie. SC.IRITKS, l'"abr. — Tète grande ; mandibules très-grandes, arquées; antennes plus longues que les mandibules. Jambes antérieures à trois digitations, propres à fouir. Les Scarites, très-nombreux en espèces, sont des Coléoptères du midi de la France, habitant les plages sablonneuses de la Méditerranée: ainsi près de Cannes, de Nice, etc. On en trouve dans les zones chaudes des deux mondes et en Océanie, près de la mer. Ils sont noirs, avec une tète énorme insérée sur un corselet en demi-cercle et armée de deux fortes mandibules. Ces insectes, très-carnassiers et semi-nocturnes pour la plupart, se creusent des galeries dans le sable, et sortent la nuit pour chasser. Il en est au contraire qui courent pendant la plus forte chaleur du jour. La plus grande espèce française, le 8. (jigas^ Fabr., se tient le corps à demi hors de son terrier, à la façon d'un Grillon, et présente, écartées comme une pince, ses fortes mandibules, tenailles puissantes saisissant les infectes qui passeiit. C'est ainsi qu'il guette à l'airùt les Mélasomes, dont il se nourrit, et qui courent dans la journée sur les sables brûlants. Au contraire, ces grands Scariies sortent pendant la nuit et.les journées sombres, et sur- tout les mâles, bien plus vagabonds que les femelles, qui sortent peu de leurs trous. M. de la Brûlerie nous rapporte leurs combats, observés sur les plages des environs de Malaga, sans doute pour la possession d'une feinelle. « C'était plaisir de les voir prendre champ, et, dressés sur leur première paire de pattes, roides en avant, se mesurer de la dent. Tous deux ensemble ils s'élancent, enlacent leurs mandibules, ser- rent et secouent avec rage. I/un et l'autre font d'inutiles efforts pour blesser son adversaire ou le forcer à lâcher prise, (jrâce aux armes et aux cuirasses égales des deux champions, cette première attaque reste sans résultat. Ils se séparent, reculent de quelques pas et s'élancent de nouveau. Cette fois le plus adroit réussit à saisir l'autre par la taille, c'est-à-dire par le pédoncule étroit qui joint le prothorax au reste du corps. H serre de tout son pouvoir : son intention manifeste est de cou- per en deux son ennemi ; mais c'est en vain, il ne parvient même pas à entamer sa carapace. Alors, au lieu d'user ses forces en pure perle. 366 COLÉOPTÈRES, — CARABIENS. il prend un autre parti. Roidissant en avant plus que jamais ses pattes antérieures, et fléchissant en arrière son prolhcrax, dont l'arliculalion mobile lui permet de donner à ce mouvement une amplitude peu ordinaire chez les Carabiques, il élève verticalement ses mandibules, et lient ainsi son adversaire enlevé de terre. Le pauvre Scarite, privé de point d'appui, agile en vain ses patles, ouvre el ferme sa bouche sans rien saisir que le vide, puis cesse de faire aucun mouvement. Mais le vainqueur inexorable ne se laisse pas prendre à ce stratagème ; il con- tinue à rester immobile et à tenir en l'air son adversaire. >» La chasse de cette curieuse espèce peut intéresser les personnes qui vont passer l'automne ou le printemps sur les rivages au doux climat (Jp VEprope Rjéricjipqale. SCAl»TEnrSj Dej. — Mandibules médiocres; antennes très-courtes. Jambes antérieures offrant quatre dentelures au côté extérieur. Corps long et cylin- drique. Une espèce, S. Guerini, Dej., des Indes orientales, dédiéeàM.Guérin- Méneville.— PI. ix, fig. 3: 3a, patte antérieure; 3 6, tète vue en dessus. — l'ne seconde espèce du même pays. .«€.%!lTIIO§>Cl<:i.l!i, Dej. — Mandibules grandes; antennes un peu plus courtes qu'elles. Jambes de devant très-fortement palmées. Ex. : A. ruficornis, Fabr., noir, à antennes rousses, du cap de Bonne- Espérance.— PI. IX, fig. 8 : 8 o, une des jambes intermédiaires vue en dedans. — Espèce unique du genre. DlsmiRirs, Bon. — Mandibules petites; antennes médiocres. Ces insectes, presq'je tous européens, quelques espèces d'Amérique surloul septentrionale, et deux d'Australie, sont de petite taille, d'une couleur bronzée plus ou moins foncée. Ils courent au soleil sur le bord des eaux, ou, à la moindre crainte de danger, s'enfoncent dans le sol, dont une faible pression les fait sortir. — Ex. : D. thoracicus, Rossi, de toute l'Europe (pi. ix, fig. 6, sa patte antérieure frès-grossie). — Il y a un très-grand nombre d'espèces, ou bien de couleur uniforme, ou bien avec les élyircs ferrugineuses au bout ou tachées de fauve. MORIO, Latr. — Corselet subcarré. Corps plat et lisse. Élytres longues, parallèles. Insectes de couleur noire, à jambes élargies à l'exlrémilé, mais non palmées, vivant sous les écorces. — Ex. : M. simplex, Dej., de la Guyane (pi. IX, fig. 7). — On rencontre le genre Morio dans les régions chaudes de l'Amérique cl de l'Afrique, à Madagascar, à Ceylan, en Australie, aux îles Philippines. Il en est deux espèces aux confins uricnlauv de l'Europe, dans le Caucase et la Colcliide, C/^llABJPEÎî. — DlTOMfJS, CYCLOSOMA. 26Î l»ITO»H'S, Bon. — Antennes filiformes; mandibules courtes très-arquées. Corselet élargi en avant. [,es Difomes, presque (uus du midi de l'Europe, de moyenne taille, de couleur sonibrc, généralement noire, sont peu agiles et se creu- sent des trous dans les lieux chauds et sablonneux'. Par une exception presque unique chez les Carabiens, on les trouve assez souvent sur les végétaux, surtout sur les Graminées : les pollens des anthères contiens nent une matière azotée. Certains mAIes sont curieux par leur tôto prolongée et leurs grosses mandibules échancrées, — Ex, : D. caly^ dutiius, Rossi, du midi de la France (pi. ix, fig. li, tête grossie) et do toute rEi:}rope méridionale, l».%i'|IVC'AmiS, Sol. — Tète rétrécie à la base, arrondie sur les côtés. Élytres soudées. Ex.: P. cyaneus, Tic]., ou cçerul^us, Prullé, de Crimée, de Morée, de Syrie (pi. ix, fig, iO : la figure du f'achycarus esl un peu trop allongée); d'un beau bleu plus ou moins foncé, avec poncttialio» forte ci serrée. .♦POTOMIS, Illiger. — Tête petite; palpes maxillaires très-longs, filiformes, dépassant beaucoup la tête. Corselet globuleux ; tarses longs, filiformes. Les Apotomes d'Europe vivent en société sous les pierres. — Ex. : A. rufusj 0\i\., du midi de la France, d'Italie, d'Espagne — PI. ix, fig. 5: 5 «, mâchoire avec ses palpes; 5 b, lèvre inférieure, et palpes labiaux; 5 c, grandeur naturelle. — Ces Coléoptères, très-curieux par leurs énormes palpes, sont de petite taille, d'un jf^uae ferrugineux ou brunâtre, légèrement puliescent?. Outre le midi de l'Europe, on en a rencontré à Madère, au Sennaar, à Madag-jscar, ù Ccylan, aux Indes orientales et en Australie. Les Carabiens auxquels on peut donner le nom général à'Harpales, très-nombreux, la plupart de petite taille, forment un des groupes les moins bien connus de la tribu. Leur tête est en général plus étroite que lecorselef. Leurs pattes sont robustes, et, quoique assez courtes, propres à une marche rapide, l-es tarses antérieurs sont dilatés chez les mâle:, et munis en dessous de petites écailles ou de poils serrés. Ces insectes sont répandus partout et vivent à terre ; on les trouve au milieu des champs, sur les routes et sentiers, au bas des arbres, et surtout sous les pierres, leur refuge lors des pluies, leur abri dans la saison froide. CYCI.O§iOM.% OU Cyclosomus, Latr. (nom mal fait) ^-Corselet court, en trapèze, fortement échancré en avant; élytres en demi-ovale. Ex. : C. jlexuosus, Fabr., des Indes orientales. —PI. ix, fig. 12 : V2 a, thorax vu en dessous pour montrer le sternum ; l2 6, patte anté- 268 COLÉOPTÈRES. — CARABIENS. rieure du mAle, avec articles du tarse dilatés en dehors; 12 c, mû- choire et palpe?. Les Cyclosomes rappellent les Omophrons par leurs formes arrondies et leurs couleurs jaunâtres; mais ils en diffèrent par leurs jambes antérieures trùs-disfinctement échancrées. Leur aspect, comme celui des Omophrons, peu ordinaire chez les Carabiques, établit un passage aux Dyticiens ou carnassiers des eaux. Les espèces sont des Indes, du Sénégal, de Ceylan et de Port-Natal. BJiIiPAIili!!», Latr. — Corselet subcarré, cordiforme ou trapézoïde ; forme du corps oblongue. Élytres allongées, presque parallèles. Les Karpates sont des Carabiens de taille moyenne ou petite. La plu- part des espèces sont noires ou d'un brun noirâire luisant ; il en est de bleues, d'autres d'un vert cuivreux ou bronzé,: ainsi les H. œneus, Fabr., à élytres finement striées, à pattes et antennes d'un roUge ferrugineux. Cette espèce est si répandue, qu'on la trouve à Paris, dans les cours et dans les moindres jardinets. Une espèce très-commune et très-voisine est le H. distinguendus, Duft., comme l'autre vert ou vert bronzé, mais ayant les appendices noirs. Sa couleur passe quelquefois au bleu violacé, et ses stries sont plus marquées que chez 1'//. œneus. Les mâles des llarpales sont toujours un peu plus brillants que les femelles. Les Harpales courent après leur proie par les champs et les chemins, dans les lieux arides et calcaires, et grimpent parfois à cet effet sur les plantes; ils aiment surtout à se cacher sous les pierres. Si l'on soulève ces pierres, on les voit rentrer dans la ferre, leurs jambes épineuses étant propres à fouir. Les larves, encore mal connues, se tiennent dans la terre. Elles sont cylindriques, un peu aplaties, à peau écailleuse, avec une grosse tête munie de deux tourtes antennes et de deux mandibules presque semblables à celles de l'adulte. Les Harpales se trouvent dans toute la terre, surtout dans les parties tempérées et boréales de l'hémisphère nord des deux continents. On a détaché des anciens Harpalus de Latreille divers genres fondés sur de légers caractères, car les distinctions sont dilficiles chez ces Ca- rabiques. Ainsi le genre l'anf/its, Leçon le, comprenant des espèces de l'Europe orientale, des deux Amériques, d'Afrique et d'Asie. On y place le Pangus (ou Harpalus) speciosns, Dej., ou tricolor, Guér.-Mén. Ce bel Harpale, qui habite le Brésil, et qu'on envoie assez souvent pour les col- lections, a la tète, le corselet et l'écusson d'un rouge cuivreux Irjs- brillants en dcisus, ces parties étant couvertes de points enfoncés et serrés. Les élytres sont d'un beau \ert, co;:\ertes de points enfoncés très-rapprochés , avec neuf stries lisses et étroites. Les antennes sont brunes avec le premier article ferrugineux. Le dessous et les pattes sont noirs.— PI. x, fig. 1 : 1 a ei 1 h,' tarses antérieur et intermédiaire, grossis. GARABIDES. — TRIGONOTOMA, FERONIA. 269 La famille des (larabidcs n'a pas de division plus nombreuse en genres et en espèces que les Férouics, à corps peu épais, à palpes tron- qués à l'extrémité, à jambes antérieures écliancrées vers le milieu, non élargies. Les genres sont établis d'après des caractères peu constants et peu tranchés, ce qui amène de grandes difficultés dans leur étude. Les Férjnies vivent en général dans les lieu.v pierreux, quelquefois près des eaux; elles sont de foutes les parties du monde. Les tarses anté- rieurs des mâles ont les articles triangulaires. TRIGO.VOTOMA, Dej. — Mandibules Irès-arquées et très-aiguës; antennes courtes, filiformes. Corselet subcordiforme. Éljtres longues, ovalaires. Ces insectes sont grands, ornés de belles couleurs métalliques, des régions chaudes indiennes et sondaïques, Java, Chine, Indes orientales. — Ex. : T. viridicollis, Mac Leay, ou indica, Brullé, du continent indien, à corselet d'un vert sombre. — PI. x, flg. 2 : 2 a, menton grossi. F>':RO\l.t, î.atr. — Tète ovalaire ; mandibules arquées et aigui'S à degré variable. Le plus saillant des caractères, celui qui est presque exclusivement propre aux Féronies, c'est d'avoir, au milieu de l'échancrure du men- ton, une dent bifide à Icxtrômité. Les Féronies ont environ quatre cents espèces de tous les pays, des campagnes ou des bois, presque toutes noirâtres, certaines à couleurs métalliques. Elles sont répandues par- tout : on les trouve sous les pierres, les feuilles mortes, surtout dans les régions froides et tempérées de l'hémisphère boréal. Les petites espèces, du groupe des Argiitor de Dejean , aiment les lieux humides, et s'observent surtout au bord des mares ; quelques autres recherchent les forets; un grand nombre vivent dans les montagnes. Elles sont noires pour la plupart, mais quelques-unes brillent d'un riche éclat mé- tallique. Le catalogue de MM. Cemminger et de Harold n'a pas conserve le genre Feronia , par la même difficulté de détermination qui a fait abandonner aux zoologistes l'ancien genre Coluher de Linnœus (Cou- leuvre). Il le subdivise en un grand nombre de genres qui sont réelle- ment des sous-genres. Tels sont : Pœcilus, nonelli; Argutor, Mégerle; Platyderus, Stephens ; Oinaseus, 7Aeg\ev; Sleropus, Mégerle; Platysma, BoneWi ; Pterostichus, Bonelli ; A bax, BoneWi; Homalosoma, Boisduval, formé exclusivement d'espèces australiennes et néo-zélandaises; Perçus, Bcmelli ; Molops, Bonelli, etc. Nous citerons les F. vulgaris {Oma- seus), Linn., ou melanaria, Illiger, noir, de toute l'Europe, très-com- mun dans tous les chemins aux environs de Paris, et , par suite, très- utile (son élytre, pi. x, fig. à, et son tarse, h a): cuprea {Pœcilus), Linn., de toute l'Europe, très-commun, d'un vert cuivré brillant; patruelis {Perçus), Dufour, ou navaricus, Dejean, d'Espagne et des Pyrénées 270 (;OLÉOPTËliL=.— CARAr.lLN'S. orienlalos (son élylrc, pi. x, fig. 3); lonis {Stcropus), Gcrmar, du rup de Bonne-Espérancfi fpalle antérieure, pi. x, fig. 10). BROSCIIS, Panz., ou Cephalotes, Ron. — Crosse tète ov;ilaire ; menton avec une dent simple au milieu de l'i'chancrure. Corselet large, plat, cordiforme. Élytres allongées, ovalaires. parallèles. Ex. : B.nobilis, Dej., ou ruflpes, Guér., d'Orient, de Syrie, à pâlies rougeâtres (pi. x, fig. 5), remarquable {.ar sa couleur bronzée, tandis que les autres espèces sont en général noires. I.e genre Broscus comprend des espèces de l'Europe tempérée et mé- ridionale, d'Egypte, d'Orient, de Tunisie, et une espèce de Mexico. Ce sont des Coléoptères de taille moyenne, de forme assez allongée et élé- gante. On trouve assez communément dans une grande partie de l'Eu- rope le //. cophalotes, Linn., peu agile, vivant dans les champs, sous les pierres. PATnoill'isi, Dej. — Tête triangulaire; menton ayant une dent bifide ; tarses antérieurs des mâles ayant les trois premiers articles dilatés. Les Patrobes sont surtout des contrées septentrionales de l'Europe et de l'Amérique, elvivent au pied des arbres, sous les mousses et les détri- tus végétaux ; ils sont peu agiles, de taille petite ou moyenne, de couleur noire ou brune. — Ex.: P. sepfentrionis, Uejean, ou ru/ipes, Gyll., du nord de l'Europe (pi. x, fig. 6, tarse antérieur du mâle). Ecosse, Eaponio, Suède. Groenland. l»nlSTO!«l'Cnrs, Dej. — Corps allongé ou oblong, en général aptère; yeux peu saillants. Corselet cordiforme; tarses antérieurs des mâles à trois premiers articles dilatés. Ces insectes, noirs, ou violacés, ou bleuâtres, assez grands (ex. : Prist. inœqualis, Panzer, ou terricola, Hcrbst, de toute l'Europe; pi. x, fig. 9, son antenne), vivent dans les lieux obscurs et humides, comme les caves, les souterrains, sous les pierres, etc. ; quelques espèces se trou- vent dans les vieux arbres ou sous les écorces. Ce genre Pristonychus fait le passage par ses mœurs aux vrais Carabiens cavernicoles, et se montre dans la partie antérieure des grottes, pouvant s'avancer sous terre jusqu'à un kilomètre (Lespés). i$t*IIODRIIS, Clairv. — Caractères analogues. Corps déprimé. L'espèce commune de ce genre, le S. Icucophthalmiis, Linn., ôclou]quv Ivoire, de grande taille, la seule de l'Europe septentrionale et cen- trale, se trouve souvent dans les caves des vieilles maisons, sous les tonneaux ou sous les bûches, et est pourvue d'yeux blanchâtres, malgré sa vie souterraine. Ses larves dévorent celles des Ténébrions et des Blaps CARAIUDES. — iVllCROGEPilALUS, AMARA, ZABRUS. 271 qui vivent aux rnùmos endroits, et l'adulte -c nourrit d';inimauxde niOme genre et, de cloportes. l'iusieurs espèces du genre Sphodrits sont deve- nues les hôtes des grottes les plus proTondes de la Carniole et des Pyré- nées ; leur couleur est d'un roux pâle; leurs yeux sont plus petits, et les ailes manquent sous les élytres. — Ex : S. cavicola, Schaum.;, de Styrie etdeCarniole.— M. Schaufl'uss a créé, pour ces espèces cavernicoles et quelques autres, le genre Anti-Sphodr us. Le S. leucophthabnus, curieux par ses yeux blanchâtres, a reçu divers synonymes, selon les pays d'Eu- rope. Le genre a une espèce dans l'Himalaya et une en Guinée. Ml€ROCEPIIAI.lï!ii, Latr. — Tète allongée, petite. Tarses antérieurs des mâles à trois premiers articles dilatés, Syn. : genre Cynthia, de Latreille, dans la dernière édition (1829) du licgnc animal de Cuvier. — Ex. : M. depressicollis, Dej. (pi. x, fig. 13 : 13 a, tarse antérieur du mâle). Habite le Brésil, comme les autres espèces du genre. Ce sont de beaux Coléoptères d'un noir brillant en dessous, bleuâtre ou violet en dessus. Une particularité de mœurs remarquable doit être signalée dans les deux genres ^/nara et Zabrus. Leur régime paraît mixte, comme chez beaucoup de Passereaux (Oiseaux) ; on les voit se nourrir de végétaux et aussi des larves qu'ils rencontrent sur les feuilles, dans les tiges, dans les racines. Leur corps est plus large que celui des Eéronies, et leurs caractères analogues. .%MAR.%, Bon. — Menton à dent bifide, peu saillante. Corselet plus large en arrière qu'en avant. Ces Carabiens, de moyenne taille, presque tous ailés, de couleur métallique ou brune, rarement noire, sont très-nombreux en espèces, répandus partout, et surtout européens et de l'Amérique du Nord, ils se cachent en général pendant le jour dans la mousse, sous l'herbe, sous les pierres, et sortent le soir. Il en est qui courent vivement au soleil dans les lieux secs et arides. On les rencontre fréquemment sur les tiges des Graminées utiles à l'homme, et l'on assure qu'ils en dévorent l'intérieur. Il est probable qu'ils recherciient surtout les larves phytophages qui s'y trouvent, et sont ainsi plutôt utiles que nui- sibles : ce n'est sans doute qu'à défaut de ces proies qu'ils dévorent la substance végétale. Nous devons citer une espèce répandue partout, principalement dans les chemins, 1'^. trivialis, Gyll , d'un vert cui- vreux étincelant. Souvent cet insecte brille comme une parcelle de laiton poli entre les pavés de nos places publiques. XABROi, Clair\ . — Tète olargie en arrière ; menton à dent peu saiilanle. Les Zabres, de taille moyenne ou assez grande, ont le corps beaucoup plus bombé que les Amares, avec lesquels ils ont beaucoup de rapports. 272 • COLÉOPTÈRES. - CARAniENS. Ils sont d'un aspect massif, peu agiles, se tiennent sous les pierres, courent le long des chemins, ou parfois s'enterrent dans le sable ; ils montent sur les Graminées. Il est probable que c'est surtout pour y chasser auv insectes ; mais il paraît, d'après les entomologistes alle- mands, que CCS insectes, carnassiers par organisation, sont aussi phyto- phages et causent dans certaines années de grands ravages dans les blés et dans les seigles: les larves dévorant les racines, et les adultes s'aftaquant aux grains dans les épis. Les Zabres sont principalement de couleur noire ou brune très-fon- cée et uniforme, parfois avec des reflets métalliques. On en trouve des espèces dans l'Europe méridionale, le nord de l'Afrique, l'Arménie, la Syrie. C'est l'espèce type, Z. gihims, Fabr., très-commune dans toute l'Ku- rope, qui est surtout accusée de dégâts. Ce Zabre bossu est long de 12 à 15 millimètres, d'un brun noirâtre, plus clair en dessous qu'en dessus, à-élytres striées, à appendices de couleur ferrugineuse. La larve, allongée, d'un jaune brunâtre, à fortes mandibules, passe le jour dans des tuyaux assez profonds, et sort la nuit pour manger les végétaux. On assure qu'elle .vit trois ans, et se change en nymphe dans une cavité ovale située au bout de son tuyau.— Pi. x, fig. 8 a, la patte antérieure du Z. (jibbii^; 8 h, sa mâchoire. i»i.\SOlsi;i'S, Dej. — Menton sans dent; antennes grêles. Corselet subcarré, séparé du thorax par une partie étranglée. liCs ^fasoreus sont des Coléoptères de petite taille, de couleur noire ou ferrugineuse, de l'Europe surtout méridionale, des Indes orientales, de .lava, de la Guinée, de la Birmanie, de Madagascar. Nous citerons le M. luœatu^, Dej., ou We(terhali\ Gill, nom plus ancien qui doit pré- valoir, (^e petit Carabien bronzé, à appendices fauves, long de U milli- mètres environ, est de toute l'Europe et des environs de Paris, mais rare.— PI. xi, fig. 9:9a, tête vue en dessus ; 9 b, jambe et tarse anté- rieurs; 9 c, tarse postérieur. Les Carabiens qui vont suivre étaient réunis par Laircille sous le nom de PatelUmanes, parce que les premiers articles des tarses antérieurs des mâles sont subquadrilatères, à angles arrondis et non aigus, comme dans les autres groupes ; c'est une palette orbiculaire garnie en dessous de brosses ou de papilles serrées. Les femelles n'ont point ces caractères, et on ne les détermine qu'en comparant leur aspect général à celui du mOle. Un petit nombre de ces Patellimanes est revêtu de couleurs^ obscures ; la plupart ont des bandes ou des taches agréablement dispo- sées sur un fond plus sombre et à reflet velouté, par suite d'un court 'duvet soyeux et doré. Ces insectes-, peu nombreux en genre.'', vivent dans la belle saison au pied des arbres, souvent sous terre, toujours dans les endroits humides et non loin des eaux. CARABIDES. — LICINUS, PAMBORUS. 273 |JC'I.\U<^, Latr. — Menton sans dent; mandibules courtes, arrondies, très-obtuses, antennes filiformes. Elytres planes, allongées. Les Licines sont des Carabiens plats et noirs, très-ponctués en dessus et peu agiles, ressemblant à des Harpales aplatis, aimant les terrains arides et élevés, sous les pierres ou dans les bois; aptères. — Ex. : L. (ujricola, Oliv., du midi de la France. — PI. x, fig. lia, tête, et 11 6, tarse antérieur du mâle. — Les espèces de ce genre se trouvent en Egypte, en Syrie et dans l'Europe presque exclusivement méridionale. Les insectes des trois genres que nous allons citer ont de jolies cou- leurs sur fond noir ou brun, ou le plus souvent vert. Leur tête est peu volumineuse, leur corps moins plat que cbez les Licines; le corselet est plus étroit que les élylres, les mandibules acérées cà l'extrémité. Is-neltemont par leur couleur sur la paroi intestinale. Le caractère le plus essentiellement distinctif, amené par une nécessité physi. logique, est un csecum spirale, terminé par un appendice vermi- forme, inséré par un col rétréci latéralement au rectum; L'air s'amasse Jaiîs cette portion de l'intestin, sorte de vessie natatoire qui rend la région postéiieure de l'animal de plus faible densité moyenne que la partie antérieure, et l'amène hydrostatiquement à la surface de l'eau, quand l'insecte est immobile. Le groupe qu'on peut appeler Dytiques proprement dits est carac- térisé par un corps ovalaire, aplati. Les élytres des femelles ofl'rent gé- néralement des stries longitudinales plus ou moins profondes. Les tarses ont cinq articles bien apparents; les cuisses postérieures sont libres, sans prolongement lamelliforme de la hanche, mais ne pouvant se mouvoir que latéralement. Les espèces sont de taille grande, moyenne et petite. GENRES. DVTISCUS, Linn. — Corps elliptique, à peine dilaté en arrière. Antennes séta- cées. Corselet court; écusson très-apparent. Élytres des femelles à sillons pro- noncés. Tarses antérieurs des mâles à trois premiers articles dilatés en palette arrondie, ciliée en arrière, ayant en dessous des cupules très-petites en avant. Les eaux, comme la terre, ont leurs insectes carnassiers. Les Dytiques offrent les plus grands types des chasseurs aquatiques de proie vivante ; leurs espèces sont de taille grande et assez grande. De même que les Carnassiers supérieurs des eaux, les Épaulards, les Dauphins, les Mar- souins, ils doivent respirer en nature l'air qu'ils seront obligés de pui- ser à la surface de l'eau ; ils ne peuvent se contenter de l'eau aérée, comme les Poissons et les Mollusques. Amis des eaux stagnantes , bour- beuses même, ils nagent avec vélocité au moyen de leurs pattes pos- térieures contournées en rames et rappelant par leur courbure et leur élargissement les membres des Tortues marines. On les observe souvent immobiles et remontant vers la surface, le corps incliné, la tète en bas, à la façon d'un ludion, par la conséquence hydrostatique de la masse d'air amassée dans la partie terminale de leur intestin. De temps à autre ils soulèvent l'extrémité postérieure de leurs élytres, puis les l'e- ferment de manière à englober une bulle d'air. Ce fluide, comprimé par les élytres comme par un piston de pompe foulante, acquiert assez 288 COLÉOPTÈRES.-— DYTICIENS. de force élastique pour écarter les bords des stigmates, et pénètre dans les trachées sans que l'eau y puisse entrer. Les Dytiques sont des insectes à la fois aquatiques, terrestres et aériens. Quand leur voracité a dépeuplé les mares où ils vivent de pré- férence, car leur séjour hors de l'eau ne peut être de longue durée, ils sortent et marchent assez lentement sur le sol; enfin, le soir, dépliant leurs ailes et bourdonnant à la façon des Hannetons, ils gagnent d'autres eaux où ils promèneront la terreur et la mort. C'est ainsi qu'on trouve ces insectes dans les flaques d'eau formées le plus récemment. La vo- racité des Dytiques est extrême : ce sont les Épaulards de la création entomologique, poursuivant tout ce qui nage autour d'eux. Leurs pattes antérieures saisissent la proie et la portent contre les mandibules. Ce ne sont pas seulement les larves de Libellules, d'Éphémères ;, de Cou- sins, d'insectes de leur groupe qui sont leurs victimes: les Mollusques des eaux douces sont pour eux une proie sans défense ; ils s'attaquent aussi aux larves de Grenouilles, de Crapauds, de Tritons (les têtards), et môme aux petils Poissons et au frai. Lue grenouille éventrée qu'on leur jette faii accourir des Dytiques de plusieurs espèces qui s'y attachent avec délices. On les alimente facilement, dans des bocaux remplis d'eau, avec de petits morceaux de viande crue de la grosseur d'une noisette. 11 faut avoir soin de renouveler l'eau corrompue par les restes de viande. On rapporte que l'entomologiste Esper garda plus de trois ans un Dytique bordé si habitué à recevoir sa petite provision de bœuf cru, qu'il arri- vait à la nage aussitôt qu'on la lui présentait, se jetait dessus avec l'avi- dité d'un Félien affamé, et en suçait tout le sang. Ces Dytiques qu'on s'amuse à conserver captifs dans l'eau peuvent servir à un curieux usa-^c. celui de baromètre vivant, comme les Grenouilles, les Rainettes. Le Dytique bordé est très-sensible aux variations de la pression et de l'humidité de l'air, et se tient dans l'eau à diverses hauteurs , qu'on peut observer plus facilement en plongeant dans le liquide du bocal une petite échelle divisée en centimètres. A l'état de larves, les Dytiques ne peuvent vivre que dans l'eau, et, plus voraces encore que sous la forme adulte , se repaissent sembla- blement de proie vivante. La plus commune, celle du Dytique bordé, est allongée, renflée au milieu, brune et comme cuirassée d'écaillés sur le thorax. Elle offre six pattes thoraciques assez longues, poilues. Sa tête offre deux mandibules en forme de pinces acérées, propres à har- ponner ses victimes. En dessous est une bouche difficile à apercevoir, offrant à l'intérieur de petites mâchoires. Cette larve respire en puisant l'air à la surface de l'eau, au moyen de deux petits corps cylindriques, poilus, divergents, placés à la partie anale et communiquant avec les troncs trachéens. Elle nage par de rapides mouvements vermiformes, en frappant l'eau avec la partie postérieure de son corps. On sait qu'en général le nerf optique des Insectes est unique. Chez les larves de Dy- tiques il offre une foule de tilels distincts allant à chaque stemmale; DYTICIDES. — DYTISCUS. 289 ce qui prouve bieti que les yeux composés sont des réunions d'yeux simples. Chez l'adulte tous ces filets se soudent. Quand l'époque de la métamorphose est arrivée, ces larves, exclusi- vement aquatiques, vont au contraire prendre une existence exclusive- ment terrestre. Elles quittent l'eau, s'enfoncent dans la terre molle el humide des bords des ruisseaux et des mares, s'y façonnent une cavité ovale dans laquelle elles se changent en nymphe d'une couleur blanche sale, terminée par deux petites pcmtes. Si la transformation s'est faite dans la belle saison, l'adulte éclôt en quinze ou vingt jours ; si elle n'a lieu qu'en automne, la nymphe passe l'hiver, et c'est le cas le plus habituel. f.es Dytiques adultes vivent longtemps et s'accouplent généralement au printemps. C'est à la copulation que servent les tarses antérieurs dilatés des mâles, caractère propre à beaucoup de Coléoptères. Il s'exa- gère chez les Dytiques, où les trois premiers articles de ces tarses, très- élargis, soudés, déformés, deviennent une vaste cupule, offrant en des- sous des ventouses et des poils courts, et permettant aux mâles de se cramponner sans glisser sur les élytres des femelles. Celles-ci sont pro fondement sillonnées de canalicules longitudinaux, surtout à leur ré- gion antérieure , tandis que les élytres des mâles sont très-lisses. Les Dytiques ont le système nerveux peu centralisé: leurs noyaux mé- dullaires sont gros, faciles à disséquer. Nous recommandons aux ento- mologistes débutants les grosses espèces de ce genre pour l'étude ana- tomique du système nerveux, et en général de tous les appareils, des vaisseaux de Malpighi, etc. Les environs de Paris ont plusieurs espèces de Dytiques. Tels sont surtout \e Dijtiscus marginalis, Linn.^ de 30 à 35 millim., dont la bor- dure latérale plus claire des élytres disparaît par la dessiccation ; les D. circumflexus , Fabr. de 30 millim. de long, plus elliptique , à écusson jaune, et pimctulatus, Fabr., de 28 millim., noir, avec taches rougeàtres sur les côtés de l'abdomen. La plus grande espèce d'Europe, le D. latis- simus, Linn., de ZiO millim. de longueur, n'est pas exclusivement propre ;\ l'Allemagne et à la Suède, comme on l'a cru longtemps ; les amateurs peuvent chercher cet énorme insecte dans les eaux douces du nord-est de la France, car on l'a trouvé dans quelques étangs de la Lorraine 'et de la Champagne et même aux Andelys. Il est remarquable par la forme de ses élytres aplaties et tranchantes sur le bord, et il est assez nuisible aux jeunes poissons. Le genre qui nous occupe a été nommé Dyticua par Geoffroy, Leio- notus par Kirby, Macrudytcs par Thomson. Il est répandu dans toute l'Europe, l'Amérique boréale et russe. On en trouve des espèces isolées aux États-Unis, en Californie, à Mexico, en Sibérie, au Kamtchatka, à Ceylan, à l'île Woodlark. Les Dytiques ont deux crochets égaux aux tarses postérieurs. (IIRAUD. l'J 2il0 COLÉOl'TÉKES. — DYTIClLiNS. El.']lEt-'l'ES», Erichsoii. — Corps en ovale courte plus large en arrièic, déprimé. Élytres de même forme. Cuisses et jambes antérieures fortement ciliées, avec tarses des mâles à cupules. Les Eunectes sont de taille moyenne et ont pour type une espèce très-répandue dans toute l'Europe, l'^". sticlicus, Linn., ou griseus, Fabr., à sculpture des élytres pareille dans les deux sexes. 11 y a quel- ques aulres espèces disséminées dans les diverses parties du monde. ACILIUS, Leach. — Caractères Irès-analogues. Deux crochets inégaux aux tarses postérieurs ; prosternum non caréné. Les espèces d'Europe ont, aux tarses antérieurs des mâles, des cu- pules très-inégales, dont une énorme à la base. Les femelles ont sur es élytres de larges sillons longitudinaux, garnis de longs poils couchés. On trouve aux environs de Paris une espèce très-commune dans toutes les vases de l'Europe, A. sulcatus, Linn, d'un brun grisâtre terne, de IG millim. de longueur, à élytres roussâtres avec points noirs, à abdomen tacheté de jaune, à cuisses postérieures noires à. la base, et 1'^. fascia- tus, de Geer, ou canalicuîatus, Nicolaï, différent du précédent par un abdomen roussâtre et les cuisses postérieures sans taches. Il est surtout propre au nord de l'Europe. Les Aciiius, à corps très-large et déprimé, de taille moyenne ou assez grande, ont encore d'autres espèces dans le nord de l'Europe ou de l'Amérique, en Californie, au Mexique, aux Antilles, à la Guyane et au Brésil. Les larves des Aciiius sont notablement différentes de celles des Dytiscua et des Cybister. Elles ont un corselet étroit , allongé, ter- miné par une petite tête munie de courtes mandibules; elles sont cependant carnassières comme les autres. THOni:§l, Leach, ou Cybister, Curtis. — Corps elliptique, notablement élargi en arrière. Corselet court, écusson apparent. Élytres des femelles à très-petites stries. Tarses antérieurs des mâles à trois premiers articles très dilatés, en palette ciliée en avant, garnie en dessous et en avant de quatre rangs de cupules, en arrière de poils courts. Pattes postérieures plus robustes, compa- rées aux autres, que chez les Dytiques, très-aplaties, à jambes très-courtes. Les espèces sont de taille grande et assez grande. Nous ne trouvons aux environs de Paris qu'une seule espèce de ce genre, le C. virens, Millier, ou C. Ra'seli, Fabr., nom plus connu. Il est de grande taille, 36 millim. environ, a le prosternum terminé en arrière en pointe très- aiguë, tandis qu'il se prolonge en spatule dans les vrais Dytiques, il est, comme euxi d'un noir-olive, avec une étroite borJure jaune, et j vivant, présente dans l'eau un magnifique reflet azuré qui ne se conserve malheureusement pas en collection., La larve ressemble beaucoup à celle des Dytiques: elle est seulement plus cylindrique et terminée par Un simple appendice conique, grêle et cilié; sa tête est armée d'une DVilClDES. — A(;A15US, COL'i .M.'îLTiiS. llUl corne assez courte. Ses mœurs sont celles des larves du j,'eiire \>vc- cédent. Les Cybister n'ont qu'un seul crochet au\ tarses postérieurs et com- prennent d'assez nombreuses espèces. Toutes les parties du monde offrent des Cybister : nous citerons le Lerminieri, Clievr., de la Guade- loupe, une des grandes espèces du genre. 11 est d'un vert-olive en dessus et noirâtre en dessous, remarquable par ses antennes fauves et la bor- dure d'un jaune rougeâtre qu'on observe au chaperon, au corselet, aux élytres. — II est figuré pi xiii, fig. 1 : 1 a, 6, tarse antérieur du mâle en dessus et en dessous. AU.tBlfii, Leach. — Corps ovale. Éljtres ovaiaires, semblables dans les deux sexes. Tarses antérieurs et intermédiaires des mâles à peine dilatés et garnis de cupules. Palfes postérieures larges et comprimées, à janibes ciliées. Les Agabus ont des espèces surtout de couleur noire, ou parfois d'un jaunâtre saupoudré de brun. Ils sont bien plus petits que les Dytiques, el ont comme eux deux crochets égaux et mobiles aux tarses posté- rieurs. Leurs espèces sont nombreuses. II en est en Europe, surtout bo- réale ; de même dans l'Amérique boréale^, l'Amérique russe, l'Orégon, le Kansas, la Pensylvanie, le Mexique, la Californie, la Guyane , Bo- gota, le Brésil, le Chili. D'autre part, on en cite de Mongolie, d'Australie, de la Tasmanie, de la Nouvelle-Calédonie, du détroit de Magellan. Ils manquent en Afrique, sauf en Algérie, région méditerranéenne, aux Indes orientales , aux îles sondaïques et mélanésiennes. Nous citerons VA. serricornis, Payk., de Suède, deLaponie, de Finlande (pi. xni, fig. 2, lète grossie; 2 a, antenne du mâle très-grossie). Cette espèce offre chez le mâle les antennes dilatées à l'extrémité et dentées en scie, caractère qui n'est pas général dans le genre Agabus. L'A. bipustulatu, Linn., d'Europe, d'Algérie, de Syrie, est noir, de 10 millim. de long, avec une tache rousse à l'extrémité de chaque élytre. Il est très-commun partout. — PI. xni, fig ù, son tarse antérieur grossi. Les deux genres qui suivent ont deux < rochets inégaux aux tarses postérieurs. COLTIHltETES, Clairv. — Corps ovalaire. Élytres ovaiaires, le plus souvent semblables dans les deux sexes. Tarses antérieurs et intermédiaires des mâles à trois premiers articles garnis de cupules très-petites. Pattes postérieures larges, comprimées, à tarses ciliés. Ces insectes, de toutes les parties du monde et surtout d'Europe, sont noirâtres, de taille moyenne, et un certain nombre d'espèces sont com- munes dans toutes les mares. Eschscholtz, d'après la forme des article? des tarses antérieurs des mâles et de leurs crochets, a établi plusieurs sous-genres. Dans les Colymbetes propres nous ne trou\ous en Europe 292 COLfiOl'TKUtS. — DYII(;it:L\S. que deux espèces, dont l'une aux environs de Paris, mais assez rare, le C. Grappi, Gyll., Germ.j ou nij/er, Lacord. [.es Cymotopterus ont les cro- chets tarsaux antérieurs égaux dans les deux sexes. On y trouve une espèce extrêmement commune dans toute l'Europe, le C. fuscus, Linn., de 17 millim., ovalaire, non élargi en arrière, à corselet roux, avec une tache noire au milieu, et à élytres d'un brun clair passant au jaunâtre le long du bord externe. Les autres espèces de ce sous-genre sont surtout des régions septentrionales de l'Europe et de l'Amérique, de Laponie, du Groenland, des lacs canadiens, etc. Les Rhantus ont au contraire les crochets des tarses antérieurs inégaux. Une espèce très-commune est le /?. pu/yerosws, Stcph., de 11 millim., oblong, ovalaire, à corselet d'un jaunâtre pâle, avec une tache médiane noire, à élytres déprimées, jau- nâtres, paraissant d'un gris verdâtre par une foule de petites taches noires, ayant la suture et le bord externe jaunâtre et les pattes roussâtres. Lacordaire l'appelle notatus dans sa Faune des environs de Paris. ■LVltli:)!», Erichs. — Corps ovule. Élytres semblables dans les deux sexes. Les autres caractères sont ceux du genre' précédent ; mais les Ilybies ont un aspect difTérent des Colymbètes, sont plus allongés et surtout beaucoup plus convexes^ également de taille moyenne, noirâtres et du même genre de vie. On rencontre souvent dans les eaux des en- virons de Paris Vllybius /^w/fg mos us, Fabr., de 12 millim., d'un brun noirâtre, avec un très-faible reflet métallique et le bord externe des élytres assez largement bordé de roux, et 1'/. ater , de Geer, noir, bordé de roussâtre, avec deux petites taches linéaires rougeâtres sur les élytres. On trouve également dans toute l'Europe les 1. angustior, Gyll., obscurus, Marsh., ou quadriguttatus, Lacord. Les femelles des Iltjbius ont le dernier arceau de l'abdomen échancré et caréné au milieu. Ce genre est assez nombreux en Europe, surtout dans le Nord, en Laponie, en Suède, en Angleterre. Il y a aussi quelques espèces dans le nord de l'Amérique, une en Californie, une dans le Dacota. Le genre Coiymbeles des anciens auteurs comprenait les trois genres actuels Agabus, Colymbètes, Ilybius. Ce sont tous des insectes abondants en Europe, de l'orme très-naviculaire, et dont les larves ont la partie antérieure du corps trèsélargie et les appendices respiratoires caudaux plus longs que chez les Dytiques. î^efERDS, Clairv. — Corps un peu obconique, très-convexe; antennes des mâles dilatées vers le milieu, courtes, rappelant celles des Gyrins ; écusson invisible. Élytres pareilles dans les deux sexes. Tarses antérieurs et intermédiaires des niùles à trois premiers articles dilates et garnis en dessous de petites cupules. Pattes postérieures larges, comprimées, avec tarses ciliés. Le genre Noteras , ainsi que quelques autres, se reconnaît à la di^p^^ rition de l'écusson, cl en particulier aux antennes courtes des mâles, DYTICIDES.— PELOBIUS. 293 à arlicles larges et comprimés, avec le onzième et dernier allongé et pointu. Ils sont de petite taille et ont peu d'espèces. On en signale de spéciales à l'Angleterre, au Danemark, à l'Kurope méridionale, à la Syrie, au Mozambique. Il en est deux répandues dans toute l'Europe et vivant dans les eaux stagnantes : le N- clovicornis, de Geer, et l'espèce type du genre ; le \. semipunctatus, Fabr., ou crassirornis, Sturm, La- cord.,d'un brun fauve, commun partout. — PI. xiii, fig. 6: 6a, antenne; 6 6, patte antérieure vue en dedans ; 6 c, la même en dehors.— Sa larve, brune, avec deux bandes jaunes transverses sur le dos, est des plus singulières par sa tête prolongée en avant en une assez grande corne frontale. PKT.OBirjÂi, Schcinherr, — Tète forte, dégagée du corselet, ressemblant à une tète de Carabique ; antennes courtes. Corselet court, transversal; écusson large, très-apparent. Tarses antérieurs des mâles à trois articles élargis avec petites cupules en dessous; tarses postérieurs à articles très-allongés, à peine compri- més. Ce genre n'a qu'une seule espèce en Europe ; de toute l'Europe et du nord de l'Afrique ; d'un brun roussâlre, mat, avec une grande tache noire occupant la plus grande partie des élytres. On le trouve dans les mares des environs de Paris au début du printemps, et souvent en troupes nombreuses : c'est le P. tardits, Herbst, ou Hermanni , Fabr. (pi. xHi, fig. 5 : 5 fl, antenne; 5 6, tarse antérieur du mille en dessus; 5 c, le mt'me en dessous). M. Blanchard remarque que cet insecte fait entendre en volant un bruit plus fort que la plupart des autres Dy- tiques proprement dits. Quand on le saisit, il produit aussi un son stri- dent assez fort, analogue, avec moins d'intensilé, à celui du Grillon. Une carène oblique existe à la partie inférieure de chaque élytre; elle offre des crt'nelures profondes et serrées qui frottent contre un bour- relet mince, mais très-saillant, du dernier segment abdominal. Qu'on prête l'oreille, arrêté au milieu d'un vaste étang desséché, parfois partent de tous cAtés de petits cris : ils sont dus à des Pélobies enterré^: sous la vase à demi durcie et tout barbouillés de limon. Le genre FeJobius a deux autres espèces en Australie. Fabricius ap- pelait ce genre Hydracna, nom qui n'a pu être conservé, quoique plus ancien, car il appartient à des Arachnides aquatiques vivant en larves sur les Dytiques. Latreille en faisait les Hygrobia Un groupe spécial de Dyticiens est formé par les Hydropores en gé- néral, insectes à corps ovalaire, plus ou moins allongé. Leurs tarses an- térieurs et intermédiaires, à peine élargis chez les mâles, sont garnis dans les deux sexes de brosses soyeuses. Les tarses, en réalité pen- tamères, semblent de quatre articles, le quatrième étant très-petit et caché dans l'échnncrure du troisième. Ces insectes, tous de petite taille •294 COLÉOPTÈRES. - DYIICIKNS. abondent dans les mares de toute l'Europe, aussi bien que dans les eaux rapides. L'écusson est apparent chez les uns, caché chez les autres. Ce dernier cas est celui des genres européens. On a trouvé ces insectes dans les eaux glacées aussi bien que dans des sources thermales. HYOROPORUS, Clairv. — Corps tantôt déprimé, tantôt convexe; antennes sélacées. Pattes postérieures longues, grêles, un peu comprimées, ciliées. Ex. ll.planus, Fabr., de toute l'Europe. — PI. xiii, détails U: k a, patte vue de profil ; h b, tarse antérieur vu en dessus, montrant la réduction apparente <à quatre articles. Les Hydropores ont plus de deux cents espèces, de toutes les parties du monde, d'une étude pénible en raison de leur petitesse, certains ne dépassant pas 2 millim. de long. Le plus souvent ils sont oblongs et peu convexes, parfois au contraire ovalaires et épais, ce qui conduit au\ Hyphydres. Leurs couleurs, peu variées, sont le jaune, le rougeâtro, le noir, mais disposés parfois en dessins assez élégants. On ramène ces insectes en jetant le filet fauchoir au fond de toutes les eaux, douces ou saumàlres, dans les mares stagnantes comme dans les rivières et tor- rents les plus rapides, dans les eaux glacées des Alpes, des Pyrénées et des régions arctiques, aussi bien que dans certaines sources thermales. Ainsi VH. cuspidatus, Germar, a été pris aux environs de Bone en Al- gérie, dans une source cà une température de li2 degrés. HYPHVDRlJ^i, Illig. — Caractères analogues aux Hydroporus et écusson également nul. Corps très-court et très -bombé en dessous. Les espèces de ce genre rappellent par leur forme les Omophrons (Carabiens). Los Hyphydres sont de tous pays, surtout de l'ancien con- linent. Le type est VH. ovatus, Linn., très-commun dans toute l'Europe, d'une couleur rougeâtre plus ou moins foncée, presque mat. Les con- trées méridionales de l'Europe ont une jolie espèce, VH. variegatus, Fabr., noir, tacheté de jaune. Une autre division, celle des Haliples, comprend des insectes aqua- tiques au corps ovalaire, convexe, recouvert de points enfoncés, à élytres avec stries et dépressions longitudinales, souvent terminées en pointe à leur extrémité, à écusson caché. Le caractère principal de ce groupe est offert par les cuisses postérieures, ayant chacune k leur hase une grande lame couvrant la moitié de l'abdomen : c'est la hanche postérieure, recouvrant presque entièrement la cuisse et empêchant tout mouvement de haut en bas. L'usage de ce bouclier ventral est ignoré. Ces insectes sont de taille très-exiguë, sortent souvent de l'eau, se posent sur les plantes aquatiques, ou voltigent aux alentours. Les premiers états sont encore inconnus; il y a là un sujet curieux de recherches. Les -tarses reprennent partout les cinq articles normaux. GYRINIDES. 295 HAIilPLlIf^, Latr. '—Corps ovale, allongé, bombé. Tête étroite; antennes de dix articles. Tarses à trois premiers articles un peu dilatés et munis de brosses Baillantes chez les mâles. Ex. : H. elevatus, Panz., Europe, France. — PI. xiii, fig. 7 : 7 a, abdo- men vu en dessus; Ib, antenne: 7c, palpe maxillaire. — Ces insectes sont surtout d'Europe, avec quelques espt'-ces disséminées dans TAmérique du Nord, le Brésil, la Corée, la Chine, l'Australie. Les espèces se recon- naissent à l'absence d'écusson, à des antennes de dix articles, obco- niques, le dernier long et pointu ; à des palpes maxillaires ayant le der- nier article très-petit et le précédent gros et renflé, à des pattes grêles. Les élytres sont toujours sculptées de rangées de points enfoncés assez gros et très-rapprochés. Les couleurs, comme celles de la plupart des petits Dyticides, sont brunûlres ou jaunâtres. Ils quittent parfois l'eau et grimpent sur les plantes des rives, souvent en sociétés nombreuses. Famille II. — GYRINIDES. Corps ovalaire, aplati en dessous, plus ou moins convexe en dessus. Tôte plus ou moins engagée dans le corselet, avec les yeux composés divisés en deux régions, l'une supérieure, l'autre inférieure, par les bords latéraux de la tète; antennes épaisses, très-courtes, cachées dans une cavité latérale profonde un peu en avant des yeux supérieurs, épaisses, à troisième article prolongé latéralement en oreillette; mandi- bules bidentées, palpes maxillaires internes d'existence contestée (Aube). Corselet transversal ; écusson tantôt caché, tantôt visible. Élytres tron- quées à l'extrémité, ne recouvrant pas tout l'abdomen; prosternum très-court, caréné. Pattes antérieures beaucoup plus longues que les autres, cachées au repos dans un sillon sur les côtés de la poitrine, se projetant en avant, avec brosses soyeuses aux tarses des mâles. Pattes intermédiaires et postérieures rejetées en arrière, courtes, larges, très- compriméès avec cils plats, avec tarses à articles peu distincts; les pattes postérieures logées au repos dans un sillon des hanches. Le tube digestif présente environ (dans l'espèce commune étudiée, . Gyrinus natator) quatre fois la longueur du corps, et l'intestin grêle compte pour deux fois cette longueur. Le cœcum est membraneux, non latéral., et les plis transversaux qu'on y remarque indiquent qu'il peut être gonflé par l'air, d'une manière analogue à ce qui se passe chez les Dyticides et dans le même but. Une première division de ces insectes oflre l'écusson apparent dans toutes les espèces. 29fi COLÉOPTRRI-S. — DYTICIF.NS. GENRES. GYBliVIJjM, Ceoffr. — Corps plus ou moins convexe. Pattes antérieures de nrié- diocre longueur, à jambes et tarses (des mâles) peu élargis à l'extrémité. Les Gyrins sont des carnassiers des eaux dont les mœurs et l'organi- sation offrent de notables différences d'avec les Dytiques. Ils préfèrent les eaux claires, un peu agitées, aux eaux stagnantes et vaseuses. Tout le monde a remarqué ces petits insectes noirs, à reflet bronzé, traçant les plus capricieux méandres à la surface de l'eau. Ils vivent en effet en troupes nombreuses, tournoyant sans cesse et s'entrecroisant sans jamais se heurter, ce qui leur a valu le nom vulgaire de Tourni- quets. On dirait au soleil de brillantes étoiles se détachant sur l'azur liquide. Quand ils plongent brusquement, ils entraînent avec eux une mince bulle d'air qui adhère au ventre et simule un globule de mer- cure ou d'argent. Les Gyrins poursuivent sans relâche les insectes qui, comme eux, vivent à la surface de l'eau, ceux qui viennent du fond pour respirer, enfin les insectes aériens qui y tombent. Uie organisa- tion admirable de l'organe de la vision leur permet de chasser dans l'air et dans l'eau et d'échapper aux dangers qui les menacent dans l'un et l'autre fluide. L'œil composé est séparé en deux moitiés par la partie latérale de la tête, et les courbures des cornéules doivent être fort dif- férentes dans ces deux portions, en raison des indices de réfraction si divers dans l'air et dans l'eau. En effet, l'œil supérieur du Gyrin lui montre les insectes qui sont sur l'eau et le bec cruel de l'hirondelle, à qui il échappe par un plongeon rapide ; l'œil inférieur lui permet d'apercevoir les larves qui nagent sans défense ou le poisson féroce à éviter. La vue perçante des Gyrins et leurs agiles mouvements ren- dent leur capture peu aisée; il faut jeter brusquement le filet de toile au milieu de la troupe tournoyante, et l'on n'en ramène qu'un petit nombre. Qu'on place un de ces insectes dans un verre d'eau, il fait d'abord quelques tours en nageant, puis se pose immobile à la surface du liquide ,- si l'on approche le doigt, il s'enfonce aussitôt. Les Gyrins sautent hors de l'eau pour échapper aux poissons, et peuvent alors s'aider de leurs ailes, qui leur servent aussi le soir à se transporter dans d'autres eaux. Leurs longues pattes antérieures se projettent sur la proie comme un ressort ; c'est pour ne pas gêner la natation rapide du Gyrin, qu'elles se cachent au repos dans des sillons latéraux; ces mêmes pattes antérieures, munies de brosses sous les tarses chez les mâles, leur servent à cramponner les femelles dans l'accouplement. Ces mâles sont plus étroits que les femelles; la copulation s'opère sur le bord de l'eau, dans un endroit calme, soit sur l'eau, soit sur quelque support. Quand on parvient à saisir les Gyrins, ils font suinter par l'ex- trémité découverte de leur abdomen une liqueur laiteuse et puante, sortant de deux pelits mamelons cylindriques rétractiles. Si on les pose GYRINIDES.— GYKINUS. 297 sur le sol, ils exécutent une série de petits sauts par lesquels ils tâchent de regagner l'eau. On ne connaît encore bien les divers états que du Gyrinus natatur, Linn.j l'espèce la plus commune. La femelle dépose sur les feuilles des plantes aquatiques des œufs placés bout à bout, d'un blanc jau- nâtre, cylindriques, et qui éclosent au bout d'une semaine. Les larves diffèrent beaucoup de celles des Dyticides; elles ressemblent à de petites Scolopendres, et leur forme comme leur respiration leur donnent des rapports avec les larves des Semblis (Névroptères). Elles sont longues et étroites, avec une tête ovalaire, avec de petits yeux en groupe, des rudiments de palpes et, d'antennes. Les anneaux du thorax ont de longues pattes grêles, et ceux de l'abdomen des appendices ciliés, avec deux franges de poils flottants presque aussi longs que les pattes. Ces appendices constituent une particularité nouvelle : les larves respirent tout autrement que celles des Dytiques, non pas nécessairement l'air libre, mais l'air dissous dans l'eau. Ce sont des branchies ou extrémités extravasées des trachées, servant à la respiration et peut-être aussi à la nage. Le pénultième anneau porte deux appendices plus longs dirigés en arrière, et le dernier segment, très-petit, offre en dessous quatre crochets courbes que la larve remue continuellement. Ces larves ont acquis leur développement complet au commencement d'août, et, quittant alors l'eau, grimpent sur les feuilles des Roseaux, des Nénufars. Elles se construisent, sans doute avec une sécrétion sorta'nt de leur bouche, une coque ovale, pointue aux deux bouts et dont la couleur et la consistance ont été comparées à du papier gris. Ces larves y deviennent nymphes, d'abord molles, puis prenant de la consistance, et l'adulte se jette à l'eau aussitôt son éclosion et tarde peu à s'accoupler. Les environs de Paris nous offrent plusieurs espèces de Gyrins, presque toutes d'un noir brillant. Ainsi le G. natator, Linn., convexe, d'un noir vernissé un peu bleuâtre, avec le bord réfléchi des élytres et le bout de l'abdomen roux ; le G. marinus, Gyllenhal, de 6 à 7 millim., comme le précédent, mais bordé de noir brillant ; le G. bicolor, Paykull, de S millim., allongé, subparallèle, coloré comme le natator; le G. minutus, Fabr., de petite taille, etc. Dans les parties méridionales de l'Europe et ' septentrionales de l'Afrique, on rencontre des Gyrins plus élégants, à élytres profondément sillonnées et bordées de jaune, ainsi que le corselet : tels sont les G. striatus, Fabr., et concinnus, Klug. Le genre Gyrinus comprend de nombreuses espèces de tous pays. Près des Gyrinus et comme eux à écusson, il faut citer le genre Orectochilus, Lacord., de l'Afrique et des Indes orientales, du Caucase, d'Egypte, de Corse, avec une seule espèce de presque toute l'Europe, ÏO. villosus, Fabr. Le corps est plus fortement bombé et plus pointu aux deux bouts que chez les Gyrins. Comme eux, elle aime les eaux courantes, mais elle ne sort que la nuit pour nager en troupes. Dans 298 COLÉOPTÈRES, ~ DYTICIENS. le jour, elle vit cachée sous les pierres, les plantes aquatiques, les débris flottants. e:ibvurij§>^ Castelnau. — Corps fortement déprimé. Pattes antérieures très- longues, à jambes et tarses (des mâles) très-élargis à l'extrémité. Les espèces de ce genre sont exotiques, et de taille notablement plus grande que les Gyrins. — Ex : Enhydrus sulcatus, Wiedno., du Brésil. — PI. xiii, fig. 8 : 8 a, mandibule et mâchoire avec un seul palpe évident ; 8 6 et 8c, antenne. 11 y a six autres espèces d'Australie. L'écusson est caché dans toutes les espèces d'un autre groupe qui offre plusieurs genres n'ayant que des espèces exotiques. C'est le genre Dineutes, Mac Leay, qui présente les plus grands Gyrinides, atteignant 2 centimètres de longueur, noirâtres, à reflets brillants. Les Dineutes sont répandus dans les régions chaudes des deux continents, et surtout de l'ancien. Une espèce qui se trouve aussi aux Indes, le D. pnemorsus, Fabr., est très-commune dans le petit lac des Salazies, localité située dans les montagnes de l'île de la Réunion et connue par ses eaux miné- rales. Les malades, pour se distraire, mettent à profit la voracité de ces grands Gyrinides et s'amusent à les pécher, comme nos grenouilles, au moyen d'une ligne amorcée d'un morceau de drap rouge sur lequel ces insectes se précipitent avec ardeur. Une autre espèce de ce genre re- monte jusqu'à nos provinces algériennes et a été capturée dans une source thermale, à Lalla-Maghrnia (L. Fairmaire). On trouve dans les parties chaudes de l'Amérique un autre genre de la môme section, les Gyretes, BruUé, aux élytres tronquées, souvent épineuses et ornées de larges plaques soyeuses à éclat métallique et légèrement irisé sur le reste du corps. Voici ce que nous rapporte M. Salle sur leurs mœurs : « J'ai pris le G. sericeus, Laboulb., à Cara- cas, capitale de la république de Venezuela, dans le rie Catucho, torrent très-rapide qiji descend de la Cordillère et qui fournit l'eau à la ville. Comme le lit de ce torrent est semé d'énormes roches, il y a une suite de cascades, et la chute de l'eau forme au bas de ces énormes pierres de petits réservoirs ou bassins dont l'eau est plus ou moins agitée. C'est dans ces bassins qu'on trouve notre insecte par groupes d'une vingtaine au plus, nageant très-vite, avec force, et remontant quelquefois contre le courant. Pendant leur vie, ils ont l'abdomen beau- coup plus allongé que dans l'état sec où nous les conservons dans nos collections ; aussi s'en servent-ils^ lorsqu'ils sont jetés pai* l'eau sur le rivage^ pour d'un bond s'y précipiter de nouveau, en faisant arc -bou- tant avec la pointe, et s'élançant comme un ressort à une hauteur de quelques pouces et parfois d'un pied. Beaucoup d'individus ont sur les élytres un nombre plus ou moins grand de petits Champignons ou Cla- STAPHYLINIENS. 299 vaires noires, d'une longueur de 2 millim., et terminées par un petit bouton. J'attribue la croissance de ce cryptogame sur ces insectes à la vapeur continuelle du torrent qui, dans ses chutes, forme une pluie excessivement fine et qui retombe souvent sur eux. » Tribu des STAPHVliiniIEMS. Dans le grand but harmonique d'assurer l'hygiène de l'almosphèrc, aucun détritus azoté ne doit rester longtemps exposé à la putréfaction. Parmi les insectes chargés par le Créateur de ce véritable service de salubrité figurent les Staphyliniens, dont les plus volumineux chassent aussi les proies vivantes et dépècent les cadavres. Ce nom, proposé par Erichson, auteur d'une excellente monographie de ce groupe {Gênera et Species Staplnjlinorum, 18ZjO), et tiré de l'ancien genre Staphylinus de LinniTeus, doit être préféré à ceux de Microptères (Schœpfl'er), Braché- lytres, Brévipennes (C. Uuméril), parce que le caractère saillant indiqué par ces derniers noms n'est pas exclusivement propre aux Staphyli- niens, mais se remarque dans des Coléoptères d'autres types. Ces in- sectes, en effet, la plupart de pelile taille et dont on connaît plus de dix-huit cents espèces, frappent les yeux à première vue par l'exlrème brièveté de leurs élytres, sous lesquelles néanmoins sont les ailes forte- ment repliées. On dirait qu'ils portent un habit beaucoup trop court, ou une veste laissant à découvert presque tous les anneaux de l'abdo- men. Il y a là évidemment dégradation, persistance de formes tempo- raires de larves et de nymphes. Ce même caractère d'infériorité nous est manifesté par le nombre des articles des tarses. Si les Staphyliniens sont le plus souvent pentamères, il en est d'hétéromères, de tétramères et même de trimères, ce qui a permis aux entomologistes modernes d'en rapprocher les Psélaphiens trimères, qui en étaient si écartés dans la méthode tarsienne. On sait, au reste, que le manque de fixité d'un caractère est un symptôme de dégradation. Les Staphyliniens ont en outre une incontestable ressemblance avec les Forficules, et par la forme et parle genre de vie, et constituent ainsi un passage aux Ortho- ptères, sans qu'on doive pour cela aucunement les placer au dernier rang des Coléoptères. Ces rapports multiples des animaux ne peuvent ' s'indiquer que par des groupements complexes et constellaires, les seuls vraiment naturels. Le corps des Staphyliniens est en général allongé, déprimé, à bords rectilignes et subparallèles, poilu ou pubescent. Un cou rétréci sépare le plus souvent la tète du corselet, et les yeux composés sont latéraux et arrondis. Les mandibules sont aiguës, souvent falciformes, parfois dentées, les mâchoires courtes, avec palpes de quatre articles, les palpes labiaux en ayant trois. Les antennes sont en général filiformes et de onze articles, plus longues que la tête et le thorax réunis, moindres que tout le corps. Les pattes sont assez grêles, d'égale Ion- 300 COLÉOPTkRES. — STAPHYUNIKNS. gueur, les antérieures et les postérieures très-rapprochées à leur inser- tion, les intermédiaires assez éloignées au contraire. Ce que l'anatomie interne des Slaphyliniens offre de plus intéressant, ce sont des trachées toutes tubuleuses, comme chez les Carabiques, et un tube digestif analogue à celui de ces mêmes Carabiques, n'attei- gnant pas deux fois la longueur du corps de l'insecte, ayant un gésier à quatre arêtes cornées et un estomac hérissé de papilles. L'absence de jabot est le caract(^re qui distingue essentiellement cet appareil digestif de celui des Carabiens et des Dyticiens. Les larves établissent un nouveau rapprochement avec les deux tribus précédentes, et ditt'èrent notablement de celles des Silphiens et des Nilidules. Elles ressemblent aux larves des Carabiques par les man- dibules longues, acérées, souvent falciformes, les appendices du dernier segment, le mamelon anal, etc. Dans les larves de petites espèces de Carabiens, le nombre des articles aux antennes et aux palpes diminue: ainsi, chez V.Epus Rohini, quatre aux antennes, au lieu de cinq ; trois aux palpes maxillaires, au lieu de quatre. On est ainsi amené aux larves des Staphyliniens, qui ont des antennes de quatre articles (peut-être cinq pour les genres Staphylimis et Ocypus); des palpes maxillaires de quatre pour les larves des Staphylimis, Ocypus, Xaniholinus, de trois dans celles des genres Queclius, Homalota, Tachinus, Omalium, etc. Ces différences ne sont pas plus étonnantes dans cette famille que celles des tarses des adultes dont le nombre des articles varie de cinq à trois. Ces larves ressemblent aux insectes parfaits, avec absence complète d'ailes et d'élytres, dans les Staphylimis, Ocypus, Xantholiims et quelques PhilontJnis, et, comme eux, dans les 'trois premiers genres, relèvent l'abdomen; mais la ressemblance n'existe plus et l'abdomen ne se relève pas chez les larves des Aleochara, Homalota, Phlœopora, Tachinus, Pœderus, etc. Les larves de certains Dyticiens, ainsi des genres Dytiscus et Colym- betes, sont très-analogues, si elles étaient terrestres, aux larves du genre Ocypus. il y a aussi de très-grands rapports entre certaines larves de Staphyliniens et celles d'Histérides, ainsi des Xantholinus (Staphyliniens) avec les larves de Platysoma et Pegaderus (Histérides). La vie des larves de Staphyliniens n'est pas très-longue, s'opère du printemps à l'automne, et en moins de temps pour les petites espèces, ou de l'été au printemps suivant {Ocypus). Le changement en nymphe se fait dans la terre, le fumier, sous les écorces, sous les feuilles tom- bées. L'état de nymphe dure très-peu, et l'adulte, mou et jaunâtre lors de l'éclosion, ne tarde pas à se colorer et à durcir. Les larves sont peu connues, comme étant en général petites, se cachant au milieu des matières animales ou végétales dont elles se nourrissent pareillement aux adultes, ou sous terre, étant nocturnes et habituellement très- difficiles à élever, surtout celles des pefites espèces. Les Staphyliniens sont répandus dans toutes les régions de la terre, POEUÉRIULS. 301 mais les espèces tropicales sont encore peu connues. Comme les Cara- biens et les Silphiens, ces insectes dégorgent par la bouche une salive ikre, brune, fétide, sécrétion destinée à modifier les aliments, et d'au- tant plus abondante que les Coléoptères se nourrissent plus volontiers de matières cadavériques. Ils répandent le plus souvent des odeurs fortes, parfois élhérées, parfois musquées, dues à deux vésicules rétrac- tiles placées près de l'anus, et éjaculant, comme moyen défensif, une matière volatile, quand l'insecte redresse dorsalement son abdo- men, ce qui arrive pour le plus grand nombre des genres. Beaucoup de petites espèces vivent dans les bouses, les excréments, les fumiers; d autres dans les Agarics et les Bolets; quelques-unes se logent dans l'intérieur des fleurs, d'autres sous les écorces, sous la mousse, sous les pierres humides; d'autres seulement au bord des eaux, sur le sable. Ces insectes sont crépusculaires, courent le soir pour chasser, et même volent si le ciel est bien découvert. Les grandes espèces se plaisent dans les cadavres, surtout, paraît-il, pour s'emparer des larves de Diptères créophages, et dévorent aussi les insectes vivants. De très-curieux Sta- phyliniens vivent dans les fourmilières et les termitières, soit comme ennemis, soit comme véritables animaux domestiques nourris par les fourmis. Les Frelons, hôtes cependant peu traitables, contiennent dans leurs nids le rare Velleius dilatntus, Staphylinien à forte odeur de musc, p.oir, laissant traîner sans le relever son large abdomen à reflets irisés. Nous diviserons les Staphyliniens en deux grands groupes primaires : le premier comprenant les espèces où les stigmates du prothorax sont cachés, à savoir, celles des familles des Pœdérides, des Sténides, des Oxytélides et des Omalides, et le second celles où ces organes sont vi- sibles ; nous y rangerons les familles des Staphylinides et des Tacliypo- rides. Division I. — Stigmates prollioraciques cachés. Famille . — PŒDÉRIDES. Mandibules longues, minces et falciformes ; antennes de onze articles. Tête à cou rétréci. Corselet arrondi aux extrémités; écusson distinct, 'triangulaire. Abdomen allongé, à sept segments allant en se rétrécis- sant. Tarses tous pentamères, les quatre premiers articles des tarses antérieurs plus ou moins dilatés. Les Pœdérides sont des Staphyliniens d'assez petite taille. On les rencontre sous les pierres, sous les débris de végétaux; certains, qui sont les Pœdères proprement dits, vivent sur le sable, au bord dos eaux, et leurs espèces dans tous les pays ofl'rent des couleurs tranchées entre les élytres, le corselet, l'abdomen, les pattes, d'agréables mélanges de noir, de bleu, de rouge, de vert. Les métamorphoses des espèces de ce groupe sont encore peu connues. oU2 COLLOIM Èr.LS. — STAf'll YLIMENS. GENRI.S PRINCIPAUX. B..&TiaK4>UIIl>I; Grav. — Corps fort allongé, linéaire^ parfois filiforme, ailé ilans presque toutes les espèces. Tarses à articles simples, non bilobcs. Ces inseclcs à corps noirâtre, avec mélange de fauve, à anfennes filiformes et non coudées, de petite taille, à corps déprimé et plus ou moins ponctué, vivent dans les lieux marécageux et se trouvent sous les pierres, sous les mousses, sous les feuilles tombées. Le genre Lathrobium est très-nombreux en espèces, surtout d'Europe; on en trouve aussi dans l'Amérique septentrionale, en Colombie, à Montevideo, au Chili, en Cafrerie, à Ceylan, aux Indes orientales, en Chine, en Mongolie, au Kamtchatka. — Ex. : L. elongatum, Linn., à élytres fauves, de toute l'Europe, des environs de Paris. — PI. xiv, fig. h : h a, tète vue de face. PflKBtKRl'S, Fabr. — Corps allongé, ailé ou aptère; antennes filiformes; écusson triangulaire. Quatrième article des tarses profondément bilobé. Le type est le P. riparius, Linn., de l'Europe, du Caucase, de l'Algérie, (rès-commun sur le bord des étangs et des rivières à cours lent, roux, avec la tète et le bout du ventre noirs, les élytres bleues. C'est le Sta- phylin n° 21 de Geoffroy. Nous représentons le P. ruficollis, Fabr., de l'Europe moyenne, du Caucase (pi. xiv, fig. 5 : 5rt, tarse antérieur). Long de 7 millimètres, il est d'un noir bleuâtre, ainsi que les élytres, avec le corselet tranchant par son roux vif. On le trouve aux environs de Paris en société sous les mousses des endroits marécageux. Le genre Pœderus renferme de nombreuses espèces de fous pays. Les amoteurs reconnaî- tront immédiatement les espèces de nos environs à leur forme élégan'e, à leur livrée partie d'un bleu d'acier, partie d'un rouge orange; ils sont vifs et redressent fortement l'extrémité de l'abdomen. sril,l€ïS, Latr. — Tête grande, orbiculaire, attachée au corselet par un pédon- cule grêle et court; anteimes courtes, épaisses. Tarses à quatrième article simple dans les deux sexes. Sous les pierres et les feuilles tombées. — Tarse antérieur d'un Stilicus, grossi, pi. xiv, fig. 9.— Les espèces sont des deux continents; on n'en a pas encore signalé en Australie ni dans les iles océaniennes. PROCIRKtl>>, Erichson. — Tête arrondiej atténuée à la base, avec cou mince; antennes filiformes. Élytres tronquées. Tarses antérieurs à premiers articles faiblement dilatés dans les deux sexes. Ex. : P. Lefebvrei, Latr., pi. xiv, iig. 6, de Sicile et d'Algérie : 6 a, sa fêle; 6 6, tarse antérieur; 6 d, palpe maxillaire. — C'est l'espèce unique du genre, à corselet allongé et cylindroïde. STÉMDiiS. — li:\0E:5THETUS, îsTI-MS. 303 Dans la l'amille des Pœdérides se trouve un genre de Staphyliniens habitant les grottes obscures et représentant cette tribu dans la faune hypogée à la suite des Carabiens; nous verrons de même s'y rattacher d'autres types de Coléoptères, soit carnassiers, soit se nourrissant de détritus azotés, soit même vivant de cryptogames. fjiLVI'TOMERtJ!», Mull. — Corps allongé et linéaire ; yeux composés nuls. Une seule espùce constitue le genre, c'est le G. cavicola, Mûll., on Typhlobium stagophilum, Kraatz. Cet insecte, extrêmement rare dans les collections, est un Staphylinien de grande taille, puisqu'il atteint 1 centimètre de longueur, trouvé £ous des pierres dans diverses ca- vernes en Carinthie. Sa tète, plus large que le corselet, est étranglée en cou, et au lieu des yeux composés oil're deux espaces stigmatiformes sans facettes, munis seulement d'une membrane plus claire. Le corselet est allongé et subcylindrique ; les antennes filiformes et droites, l'abdo- men allongé, subrenflé et bicorne à l'extrémité, qui est pointue. La cou- leur est partout d'un roux de poix brillant; les pattes assez grêles, avec une fine ponctuation sur le corselet; les élytres de l'insecte sont très- courtes. — Nous le représentons pi. xn, fig. 5. Il est probable que cet insecte n'est pas plus réellement aveugle que les prétendus Anophthalmus, et doit rentrer dans le genre Lathrobium, car il présente une forme analogue avec une plus grande taille. Famille IL — STÉNIDES. Mandibules longues, falciformes, fortement unidentées à l'extrémité; antennes longues, de onze articles, courtes, grêles, les ariicles termi- naux s'épaissis;ant en massue. Tête grande, à bords sabparallèles, à cou épais. Abdomen allongé et allant en s'amincissant en pointe. Tarses tantôt de cinq, tantôt de quatre articles. Les Sténides sont noirâtres, de petite taille, à mœurs et métamorphoses inconnues. GENRES PRINCIPAUX. EVOiSTHETUS^ Grav. — Tête grande, presque aussi longue que le corselet; yeux petits, peu proéminents. Tarses tous de quatre articles. Peu d'espèces en Europe, Amérique et Russie d'Asie; dans les boL-, sous les feuilles tombées, et quelquefois dans les prés,— Tête d'Evœsthc- tus, pi. XIV, fig. 7. STEXIS, Lalr. — Corps allongé, ailé ou aptère. Tète plus large que le corselet ; yeux arrondis et proéminents. Corselet plus étroit que les élytres; écusson à peine distinct. Tardes tous de cinq articles étroits. Les Stènes, dont quelques espèces sont sociales, se trouvent en gran 1 nombre sur les bords des étangs et des ruisseaux, et même marche:;! sur la fange; leur couleur est noire ou noire plombée avec de légères 30^1 COLÉOPTÈRES.— STAPHYLINIENS. ponclualions, ot il est très-difficile de distinguer les espèces les unes des antres. [-eur lète, large, munie de gros yeux et débordant le corselet, rap- pelle celle des Cicindèles. Leur coloration terne est relevée, dans beau- coup d'espèces de notre pays, par une petite tache ronde, jaune, au milieu de chaque élylre. Les espèces du genre Stenus sont très-nom- breuses, surtout d'Europe, manquent en Afrique, à l'exception de l'Algérie, et en Australie; elles existent à Madagascar, à Ceylan, à la .Nouvelle-Calédonie, à Tahiti, aux Indes orientales, dans les deux Amé- riques. Un caractère très-curieux des Stènes, c'est que, si l'on presse l'animal entre les doigts, la languette qui, au repos, paraît courte, s'allonge très- fortement en se projetant hors de la bouche, au point d'atteindre en longueur la moitié du corps, et de simuler une trompe à la façon des insectes suceurs. Comme les Pœdères et la plupart des Staphyliniens, les Stènes balancent et relèvent les derniers anneaux de l'abdomen. On les voit aussi s'arrêter brusquement et redresser fortement la tète et le thorax, comme s'ils étaient préoccupés, puis les replacer sur le sol et continuer leur marche ; frotter les surfaces avec les pattes de devant cl les palpes, ceux-ci s'agitant fréquemment pour exercer un tact; essuyer les derniers anneaux de l'abdomen avec les pattes postérieures ou iso- lées, ou croisées en dessus, à la façon des Mouches; faire vibrer les paraglosses ; enfin remuer en tous sens les antennes. Nous citerons le .S. impressus, Germar, avec une variété proboscideus, Germar, propre ci la France et présentant au plus haut degré la curieuse extroversion indi- quée; le S. Juno, Fabr., de U à 5 millimètres, d'un noir mat, avec l'ab- dorften brillant et la base de chaque segment carénée longitudinale- ment; le S. biguttatus, Linn., de toute l'Europe, delà Turquie d'Asie, du Caucase, fréquent aux environs de Paris, de h millimètres 1/2, noir, avec de courts poils argentés et une tache orange- sur chaque élytre. C'est le Stapliylin Junon de Geoffroy, le Po'rfr/T bimoucheté.A'WwxQv. — W est représenté pi. xiv, fig. 8:8a, tète de face ; 8 6, mâchoire; 8 c, men- ton et lèvre inférieure ; 8 f/, un des palpes labiaux isolé: 8 e, tarse antérieur. Famille 111. — OXYTÉLinES. Mandibules fortes, proéminentes. Jambes antérieures inermcs comme les autres ou épineuses. Tarses tantôt de cinq, tantôt seulement de trois articles. Les Oxytélides sont de petite taille; ont les élytres déprimées, avec de très-fines stries longitudinales, le corselet parfois sillonné et dentelé sur les côtés (Oocytclus), la tète rétrécie à la base. Ils volent fréquem- ment le soir, au coucher du soleil, et souvent tombent alors dans les yeux des promeneurs. Répandus dans les diverses régions du monde, ils ^ont noirs ou brunâtres, vivent en général dans les fumiers, les dé- OXYTÉLIDES. — OXYJELUS, COPROPHILUS, MICRALYMNA. 305 trilLis, les matières fécales, parfois sous les écorces, et même au bord des eaux. 1" Genres à dernier anneau de l'abdomen distinct. OXYTEIiUS, Grav. — Jambes antérieures offrant une seule rangée d'épines en dedans ; tarses à trois articles. Les Oxytèles ont des espèces nombreuses, disséminées partout; elles ne sont encore signalées en Afrique que dans la partie australe.— Voyez pi. XIV, fîg. 10 a, patte antérieure de VO. rugosus, Fabr. BI^EDII]§i, Steph. — Antennes brisées. Jambes antérieures épaissie», avec deux rangées d'épines; tarses de trois articles. Ex. : B. tricornis, Herbst, des environs de Paris, mais assez rare, d'Europe, d'Algérie. Sa tête et son corselet^ pi. xiv, fig. 10; 10 6, palpe maxillaire. — Les ^/ec/ms se trouvent en Europe, dans les deux Amé- riques, aux Indes orientales, à Ceylan; ils n'ont pas encore d'espèces indiquées dans les îles sondaïques et polynésiennes, ni en Australie. OHORiriS, Latr. — Mandibules fortes, aiguës^ recourbées; antennes courtes, non épaissies à l'extrémité. Jambes élargies à l'extrémité et dentées ; tarses très- grêles, de cinq articles. Espèces exotiques de Cafrerie, de Ceylan, des Indes orientales, d'Amé- rique, de Madagascar, de Java. — Ex.: O.brasiliensis, Guér.-Mén., de Rio-Janeiro. — PI. xiv, fig. 11 : Ho, tète; H 6, c, d, jambes et tarses. COPROPOILUS, Latr. — Corps allongé, à bords parallèles, un peu déprimé; yeux peu proéminents. Corselet un peu plus étroit que les élytres. Pattes épaisses ; jambes poilues; tarses de cinq articles. Une espèce d'Europe, une de Mésopotamie, trois du Chili. Le type de ce genre est le ('. strintulus, Fabr., de toute l'Europe, petit insecte d'un noir brunâtre, brillant, qu'on trouve assez communément sous les pierres et sous les écorces, dans les lieux ombragés. Des environs de Paris. — PI. XV, fig. 2; 2 a, jambe et tarse antérieur. IMICR.%I.VllIV.'1i (1), Westw. — Jambes toutes mutiques. L'intérêt de ce genre est dans les mœurs curieuses de son type, M. brevipenne, Gyll. Cet insecte fait partie du petit nombre de Coléoptères qui vivent sur les bords de la mer, de façon à se trouver submergés à la marée montante, et à demeurer sans périr pendant plusieurs heures sous l'eau, en retenant sans doute de l'air aux poils de leur corps. On a (1) Schaum et M. de Marseul placent ce genre dans les Omalides, ainsi que MM, Gemniinger et de Harold. GIRARD. 20 306 COLÉOPTEKES. — STAPHyUNlElNS. d'abord trouvé en Suède et en Angleterre ce curieux insecte, puis on l'a rencontré sur les côtes septentrionales de France. Les amateurs peuvent l'observer près du Havre, en face du cap de la Hève, et très-probable- ment aussi à Trouvilie et environs, et sur toute la côte normande, si fréquentée pour les bains de mer. C'est un petit Staphylinien d'un noir assez brillant et couvert d'une courte pubescence serrée, d'un peu plus de 2 millimètres de longueur. Il répand, quand on le saisit, et cela dans les deux sexes , une odeur très-désagréable et très-forte, eu égard à sa petite taille. La larve est inodore. M. le docteur Laboulbène (1) conseille, en août et septembre, pour capturer cette espèce, de fendre les roches déjà fissurées que recouvre la marée montante et que la marée basse laisse découvertes, et de saisir le petit Coléoptère, qui se tient au fond des parois des fentes. Il court assez mal, relève à peine l'abdomen si on l'inquiète, et cherche toujours à se blottir dans quelques fissures ou dans un coquillage. La larve est plus agile. Selon M. Laboulbène, la larve, à poils nombreux, se renfle un peu dans la partie médiane de l'abdomen, et différerait de la larve publiée précédemment par M. Westwood, qui serait celle d'un jEpus, autre genre de Coléoptère immergé à la marée haute. La nymphe, déjà figurée par M. Westvpood, est remarquable par ses fourreaux alaires très-petits, caractère de nymphe de Staphylinien, et surtout par les longs poils qui parlent de la tête et des segments de l'abdomen. iM. La- boulbène a vu que la couche d'air qui enveloppe ordinairement l'insecte submergé n'est pas indispensable à sa vie, car on peut la lui enlever en le brossant avec un tin pinceau, et il se remet en mouvement dès qu'on le retire de l'eau. Il a pu en conserver de vivants après cinq jours d'immersion dans l'eau de mer, fait qui s'accorde avec les expériences de résistance à l'asphyxie des insectes citées dans notre Introduction. Nous représentons le M. brevipenne, pi. xii, fig. 1. — Le genre a encore une espèce au Groenland, une dans la Sibérie orientale, une dans le Maine (Étals-Unis). DRliGASTER, Erich.— Jambes mutiques • antennes fortes, allongées. Abdomen large, fortement bordé. Ce genre a pour type une espèce de toute l'Europe, avec divers noms locaux, le D. dichrous, Grav., placé autrefois à tort dans le genre Lesteva, de la famille des Omalides. Ce Coléoptère doit son nom à l'op- position de la tête et de l'abdomen, noirs, avec les autres parties, d'un fauve vif.— PL xv, fig. 3. Outre l'espèce d'Europe, il y en a une de la Russie méridionale et une de la Californie. .(1) Mœurs et anatomie du Micraljmiia brcvnieuile {Anu. Hoc, cnlum. de France, 3^ série, 1858, t. VI, p. 73 j. O-VIALIDES. — MICRO PEPLUS. 307 2° Genres à dernier anneau de l'abdomen caché. PIESTl'S, Grav., ou Zirophorus, Daim, (nom qui veut dire porle-mitre, à cause des deux prolongements latéraux du front). — Corps assez grand, oblong et déprimé. Gorselet de la largeur des élytres; abdomen obtus à rextrémité. Jambes antérieures crénelées ; tarses de cinq articles. Les Piesles sont des Staphyliniens de l'Amérique du Sud orientale, des Antilles, du Yucatan, du Mexique, d'un noir brillant, vivant dans les écorces à demi décomposées. Le type est le P. bicorm's, Oliv., commun en Colombie. — PI. xiv^ fîg. 12 ; 12 a, patte antérieure grossie. HIAGOWItmi, Kirb. et Sp., ou Prognatha, Latr. — Tête assez grande, ayant de chaque côté, près des yeux, une corne chez les mâles, tandis que le front est arrondi en avant chez les femelles. Jambes antérieures épineuses ; pentamères. Ex. : S, quadricome, Kirb. et Sp., d'Angleterre, de France, d'Alle- magne, vivant sous les écorces. Sa tête grossie, pi. xv, fig. 1. — On l'a trouvé près de Paris. Son corselet et ses élytres fauves, avec tête et abdomen noirs, l'ont fait nommer rufipenne par divers auteurs. Il y a quelques autres espèces des États-Unis et de Ceylan. Famille IV. — OMALIDES. Mandibules courtes et falciformes ; en général, un ou deux ocelles sur le front; antennes droites, filiformes. Tête largement insérée. Abdomen déprimé, élargi, un peu bordé. Jambes tantôt inermes, tantôt à épines terminales très-faibles ; tarses de cinq articles. Les Omalides sont remar- quables en général par leur corps très-aplati. Ce sont de très-petits insectes, de couleur foncée, mal connus, vu leur petite taille et la diffi- culté de bien distinguer les espèces. On les trouve dans les lieux hu- mides, sous les pierres, les mousses, les écorces, et aussi, pour certains genres, sur les herbes et dans les fleurs; ce qui les rapproche, pour les mœurs comme pour l'aspect, des Nitidulides. En effet, dans la plupart des genres, les élytres se sont allongées et ne laissent plus à découvert que l'extrémité de l'abdomen, et celui-ci ne peut plus se relever. Les espèces décrites sont surtout d'Europe. ilftCIlOPEPLli§i, Latr. — Corps subovalaire, épais ; élytres fortement sillonnées, larges, ainsi que le corselet et l'abdomen ; tarses de trois articles. Les Micropèples, remarquables par leurs profondes sculptures, leurs antennes de neuf articles en massue, leurs pattes largement distantes, sont les Staphyliniens qui ressemblent le plus aux Nitidulides par l'as- pect, et ont été longtemps confondus avec eux. Ils sont de très-petite taille et vivent dans les champignons.— Ex. : M. tesseruîa, Curt. (pi. xv, 308 COLlioi'JtKES. — STAPHVLllNJLNS. fîg. /(, et à(h sa lêie), d'Angleterre, de Suède, de France, d'Allemagne et de Russie. Les espèces sont d'Europe, de Sibérie, de la partie septentrionale de l'Amérique du Nord. I.ESTEVA, Latr.— Mandibules à une seule dent; jambes mutiques. Ce genre renferme des espèces d'Europe et des montagnes du Kamt- chatka, du Canada, des États-Unis. La forme oblongue des Lestèves, leurs antennes longues et filiformes, leur donnent l'aspect de très-petits Carabiques. Ils vivent dans les herbes humides et sous les mousses des rivages. AI%'THOPH.%CiIJ§i, Grav. — Mandibules à deux dents ; jambes muiiiiues. On rencontre ces petits insectes sur des matières décomposées, et aussi sur les fleurs, où peut-être ils recherchent d'autres insectes dont ils font leur proie. Ils sont d'Europe, surtout des montagnes d'Amérique boréale et russe. AiVTllOBIlJM, Steph. — Corps très-large, très-court, déprimé ; élytres presque aussi longues que l'abdomen. Les Anthobiiim, bien plus spéciaux aux fleurs que les Omaliutn, ont les jambes simplement pubescentes ou ciliées, et les tarses postérieurs élargis. Ce sont de petits Coléoptères à corps très-large, se trouvant ha- bituellement sur les herbes humides et sur les fleurs. Leurs espèi:es sont d'Europe, surtout des montagnes, d'Algérie, de Sibérie, d'Amérique russe, de Madère. Nous citerons : l'A. Primulœ, Steph., ou llorale, Lafr. (genre Eusphalerum, Kraatz), de 2 à 3 millimètres, d'un noir brillant, avec les antennes et les pattes testacées, d'Angleterre, de France, de Suède et d'Allemagne; VA.Sorbi, Gyll., de toute l'Europe, de 1 milli- mètre 1/2, d'un jaune roussâtre pâle, avec les élytres et les pattes plus claires. IION.%l.ll'Ill ou Omâuum, Grav. — Corps allongé ou oblong, déprimé. Tète plus petite et plus étroite que le corselet. Élytres larges, recouvrant la plus grande partie de l'abdomen ; tarses courts, de cinq articles. Nous signalerons les 0. rivulare, Payk., de 2 à 3 millimètres, d'un noir brunâtre, à pattes jaunâtres, sur les fleurs; 0. rufipes, Fourcroy, ou florale, Payk., de 3 millimètres 1/2, noir brillant, à pattes rousses, dans les bouses, les matières animales putréfiées, se rencontrant assez souvent dans les maisons. Les Omalium abondent en espèces, surtout dans les régions septentrionales de l'Europe, en Laponie, en Islande, dans la partie boréale de l'Amérique, à Ceylan, à Caracas, au Cap. Ils ont les jambes très-finement épineuses, et les quatre premiers articles des tarses postérieurs simples, non dilatés. Ils sont de petite taille, le STAPHYLTNIDF.S. 309 plus souvent d'un noir brillant ; vivent dans les bois ombragés et hu- mides, sur les herbes et sous les écorces des arbres, et répandent une odeur forte et désagréable. Wf.OPHRUM, Erich. — Corps épais, plus ou moins large, un peu convexe, ailé ou aptère : tarses de cinq articles, les antérieurs à quatre premiers articles dilatés. Nous représentons VO. piceiim, Gyll., des environs de Paris, d'Europe, du Caucase (pi. xv, fig.- 7:7a, sa tCte en dessus ; 7 b, tôte en dessous ; 7 c, tarse antérieur; 7 rf, tarse intermédiaire). Cet insecte rappelle par l'aspect une petite Blatte, et montre au maximum que les Omalides, par l'élargissement et la longueur des élytres, indiquent un rapproche- ment entre les Staphyliniens et les Silphiens. C'est pour rappeler cette ressemblance que M. Guérin-Méneville lui donne l'épithôte de blattoides {Icon. de G. -M., texte, p. 33), nom emprunté aux anciens auteurs qui faisaient de cet insecte le Silpha blattoides, Ahrens. La structure des tarses antérieurs dilatés et les jambes simplement pubescentes distinguent le genre Olophrum des autres Omalides. Les Olophrum sont peu nombreux en espèces; vivent sous les feuilles mortes, les mousses, les pierres, principalement dans les lieux humides ou au bord des eaux, ils sont d'Europe, surtout des régions boréales, du Canada, de l'Amérique boréale et russe. Division II. — Stigmates prottioraciques visibles. Famille I. — STAPHYLINIDES. Labre corné, presque toujours bilobé {Fissilabres de Latreille). Abdo- men à dernier anneau rétraclile, souvent caché, les six premiers étant distincts. Palpes simples. Corselet arrondi en arrière ; élytres cachant le ventre à moitié. Tarse tous les cinq articles; ailes repliées longitudi- aalement avec deux plis transversaux. Pattes souvent courtes, les an- térieures à grosses cuisses coniques, à jambes dilatées, crénelées, afin de fouir. Les Staphylinides courent avec vitessC;, et répandent les odeurs que nous avons indiquées. Cette famille renferme les plus grandes espèces de la tribu. Ces insectes vivent dans les cadavres, les excréments, les fumiers, les champignons pourris, parfois ?ous les pierres, les mousses, les écorces. Leur livrée est en général sombre, souvent variée par des poils feutrés ; cependant quelques espèces exotiques des bois pourris ont d'éclatantes couleurs métalliques (genre Sterculia, Cast.). Les larves connues sont coniques, allongées, avec le dernier anneau terminé en tube. Nous indiquerons quelques genres principaux. Ainsi, parmi ceux qui olTrent les antennes dilatées et comprimées vers l'extrémité, les genres ; 310 COLÉOPTÈRKS. — STAPHYLINIENS. «I»x."l['POBlJS, Fabr, (l) — Élytres avec des séries de points; torses courts à articles étroits. Les Oxypores sont de beaux insectes d'un jaune roux brillant, aux élytres plus ou moins tachées de noir, dont la grosse tC-te presque car- rée, armée de mandibules robustes, aiguc-s et saillantes, fait devenir le régime carnassier. Il est très-probable en effet qu'ils vivent de larves de mouches et d'autres insectes habitant les Bolets. En renversant ces champignons, on voit des petites masses de grains noirâtres agglutinés bouchant les issues de cavernes creusées dans la pulpe et où vivent les Oxypores. Ils ont le dernier article des palpes labiaux en forme de croissant. On les trouve surtout dans l'Amérique du Nord, principale- ment dans la partie boréale. Il y en a deux espèces, de toute l'Europe et de la Sibérie. L'un est l'O. maxillosus, Fabr., de 7 millimètres, jau- nâtre, à abdomen rougeâtre, parfois noirâtre, avec la tête, le corselet et la poitrine d'un brun noir; l'O. rufus, Linn., de 7 millimètres, noir, avec le corselet et l'abdomen d'un rouge jaune, l'extrémité de ce der- nier noir, et les élyti'es ayant une grande tache humérale rousse. C'est le Staphy Un jaune, à tête, étuis et anus jaunes, de Geoffroy.— PI. xiv, fig.l: 1 a, tête vue de face ; 1 b, tarse antérieur.— On le trouvera notamment dans la forêt de Compiègne. JMSTIIAIPŒIJS, Grav, — Palpes des deux sortes à dernier article sécuriforme. Une seule espèce, A. Ulmi, Rossi, ou ulmineus, Fabr., le Staphylin de rOrme, parce qu'on le trouve sous les écorces de cet arbre. De l'Europe et du Caucase, rare partout. — Sa tête vue de face, pi. xiv, fig. 2. Parmi les genres à antennes filiformes plus écartées entre elles que les yeux, nous ne signalerons que le genre : STAPHYlilI^'l'S, Linn. (Le nom de ce genre vient d'Aristote et des auteurs an- ciens, et s'applique à un insecte tenant sa queue relevée, et qu'on croyait causer certaines maladies aux chevaux qui l'avalaient.) — Mandibules fortes, croisées au repos, dentées ; éoisson triangulaire arrondi ; tarses antérieurs à quatre premiers articles dilatés, en palette subovale. On a subdivisé ce genre en plusieurs sons-genres. Nous devons citer : Le Stapfujlinushirtus, Linn. {Emus, Curt.), noir, de 2 centimètres, avec de longs poils jaunes, d'un noir bronzé en dessous, à pattes noires. Il a quelque ressemblance avec un Bourdon, quand on le voit s'abattre su'r les fumiers, les crottins, les bouses. Aussi Geoffroy le nommait Sta- phylin bourdon. Le S. maxillosus, Linn. {Creophilus, Steph.), de 13 mil- limètres, noir, avec des bandes cendrées sur le ventre et sur les élytres, d'odeur un peu musquée, grand amateur de cadavres, commun dans les voiries. Le S. olens, Miiller {Ocypus, Steph.), le grand Staphylin noir (A) Les catalogues les plus modernes mettent le genre Oxyporus dans la famille des Oxvtélides. STAPHYMNinF.S. — STAPHYLINIIS. 311 lisse de Geoffroy, d'un noir mat, à tôte plus large que le corselet, à ailes membraneuses fauves ou rousses. Ce Coléoptère, de 18 à 27 millimètres, le plus grand Staphylinien d'Europe, connu sous le nom de Diable, se rencontre très-fréquemment dans les chemins et sentiers de toute l'Europe; il y court avec rapidité, chasse aux insectes jour et nuit, Vivant de rapine. C'est un insecte utile à l'agriculture, comme les Ca- rabes. Au moindre danger, il écarte ses mandibules pour mordre, et relève l'abdomen, d'où font saillie deux vésicules ovoïdes et blanches, lançant une matière volatile d'odeur assez agréable, rappelant l'éther nitreux. Ses métamorphoses ont été étudiées en même temps par MM. E. Blanchard et Heer. La larve est allongée, atténuée vers l'extré- mité, avec deux longs filets divergents et un tubercule en dessous, qui empêche le tube anal de traîner sur le sol. La tête et le thorax sont bruns ; le reste du corps, plus mou, est d'un gris cendré ; les pattes sont longues et grôles. Cette larve a des mœurs analogues à celles des larves de Cicindèles, se tenant à l'affût à demi enfoncée dans un trou en terre pour saisir la proie au passage. Très-carnassière, elle prend souvent à la gorge un autre individu de son espèce et le suce a\ec avidité. Si l'on veut la toucher, elle s'arrête avec courage, relève l'abdomen comme l'adulte, et cherche à pincer en ouvrant ses larges mandibules falquées. Elle s'enfonce en terre vers la fin de mai et se change en nymphe dans une cellule. Celle-ci est d'un jaune-paille foncé, avec la tête repliée en dessous entre les pattes, les ailes sur le côté, très-grosse en avant, puis amincie. Au bout de quinze jours environ, il en sort un insecte jau- nâtre, qui bientôt noircit. Nous figurons une espèce voisine de ce Sta- phylin et noire complètement comme lui, YOcypus tataricus, Pallas, de Tartarie et de Russie méridionale, type et espèce unique du genre Physetops, Mann. — PI. xiv, fig. 3:3a, tarse antérieur; 3 6, tête vue de face, avec disposition des yeux spéciale à cette espèce. On rencontre encore communément aux environs de Paris le S. cya- neus, Payk. (s -g. Ocypus, Steph.), bien plus petit que S. o/ens, ayant de 15 à 20 millimètres, à tête, corselet et élytres d'un bleu foncé ; le S. ery- throptenis, Linn., à élytres et pattes fauves, avec deux taches d'un jaune doré sur chaque segment abdominal. Cette jolie espèce est fréquente, avec la précédente, dans les prairies, sous les bouses de vache desséchées. On trouve aussi ces deux dernières espèces volant par les chemins, ou courant sur les murs. Aussi commun, et du genre Staphylinus pro- prement dit, est le S. cœsareus, Cederh, de 15 à 20 millimètres, d'un noir mat, avec les antennes et les élytres rousses, et les anneaux de l'abdomen d'un velouté doré sur les flancs. Signalons enfin le S. muri- nus, Linn. {Leistotrophus, Perty), noir, avec duvet cendré et pointe de l'abdomen noire [Staphy lin velouté de Geoffroy), se trouvant souvent, avec le S. maxillosus, sous de petits cadavres, et le S. pubescens, de Geer, nommé Staphylin à tête jaune par le plus ancien historien des insectes des environs de Paris. 312 COLÉOPTÈRES. — STAPHYLINIENS. Le genre Staphylinus actuel comprend une centaine d'espèces de tous pays, sauf l'Australie, les îles sondaïques et polynésiennes. Le sous- genre Ocypus a une espèce à Sidney, et manque dans le nouveau monde; le sous-genre Leistotrophus a une espèce à Java. PHILOIVTHCS, Curtis. — Caractères voisins des Staphylinus ; tête plus petite, lisse. Ce genre renferme plus de trois cents espèces de tous pays, sauf la Nouvelle-Hollande; il y a une espèce de Tasmanie. Nous signalerons le Ph. cyanipennis, Fabr., de toute l'Europe, qu'on trouve dans nos bois, dans l'intérieur des Ceps et autres Bolets charnus en décomposition ; il est d'un noir brillant, long de 9 à 10 millimètres, avec les élytres d'un beau bleu d'acier ou violettes ; le Ph. œneus, Rossi, de 8 à 10 millimètres, noir, avec tête et corselet d'un noir bronzé, ponctué sur le corselet, les élytres, l'abdomen. Les Philonthes se plaisent sous les feuilles mortes, sous les bouses, dans les fumiers et les détritus. QIieDiUS, Stephens. (syn. : Microsaurus , Steph., Vellejus ou Velleius, Mannerh.). — Tête largement insérée sur un corselet arrondi. Corps large, aplati, à abdomen atténué à l'extrémité ; tarses antérieurs dilatés. Ce genre est établi sur un rare et curieux Staphylin, de grande taille, de 15 millimètres de long environ, élargi, à abdomen graduellement rétréci en arrière et ne se relevant pas, de manière à traîner sur le sol comme celui d'un petit lézard. Le Q. dilatatus, Fabr., habite les nids de Frelons (res/;aCra6ro), et sa rareté vient surtout des mœurs peu traitables de ses amis. Il répand une forte odeur de musc, et vole le soir en suivant les Frelons à la piste, sans doute pour trouver des nids afin d'y pondre et de dévorer leurs larves. On le trouve aussi parfois occupé à porter le carnage dans le nid des Chenilles processionnaires. Très-probablement ses larves mangent celles des Frelons. Il est noir, peu brillant, avec les élytres mates, le corselet et l'abdomen à reflet soyeux irisé ; les antennes, un peu plus longues que la tète, sont renflées, car les articles 4 à 10 sont prolongés en dedans en une pointe saillante et forment la scie. Dans les champignons se rencontre le Q. lateralis, Grav., de 10 à 12 millim., noir, à tète, corselet et écusson très-brillants, avec des antennes grêles, et le bord réfléchi des élytres roux, ainsi que le premier article des antennes. Le genre Quedius a plus de cent espèces des deux mondes; il y en a une en Tasmanie. Famille IL— TACHYPORIDES. Labre sans échancrure; ocelles nuls ; mandibules peu proéminentes, antennes de dix à onze articles. Écusson petit, triangulaire. Abdomen à si.'^ segments distincts, le septième souvent caché. Tarses de quatre ou TACHYPORTDES. — TACHINUS, P.OUTORKIS. 313 de cinq articles, on tous à la fois ou avec mélange, les postérieurs de cinq, les antérieurs de quatre. GENRES PRINCIPAUX. TACBLimilS, Grav. — Antennes de onze articles, filiformes, épaissies à l'extrémité. Pattes courtes ; tous les tarses de cinq articles. Les Tachines sont des Staphyliniens très-vifs, de petite taille, habitant en général les endroits humides et chauds, principalement les fumiers. Les espèces sont d'Europe, d'Amérique boréale et du Chili. TACHTPORUS, Grav. — Caractères très voisins de ceux du genre précédent; pentamères. Nous citerons dans ce genre le T. Hypnorum, Fabr., ou marginatus, Panz., de toute l'Europe. — PI. xv, fig. 9; 9 a, son palpe maxillaire fili- forme, à quatrième article acuminé et plus court que les autres (carac- tère de genre). — Les Tachypores marchent très-rapidement sur le sol, comme l'indique leur nom, et vivent dans les détritus végétaux, sous les feuilles ou sous les mousses. Espèces d'Europe, de Madère, des Canaries, de Sibérie, d'Amérique boréale, des États-Unis. BOLITOBIUS, Stepti. — Antennes de onze articles, tarses de cinq. Ces Staphylins ne relèvent pas leur abdomen ; au contraire, ils le baissent en dessous. Habitent les bois, sous la mousse, les feuilles pourries, quelquefois dans les bouses, et surtout, comme l'indique leur nom, dans les Agarics et Bolets putréfiés, où l'on rencontre parfois leurs larves par centaines. — Ex. : B. lunulatus, Linn., de l'Europe, du Cau- case, qu'on rencontre aux environs de Paris dans les champignons. —PI. XV, fig. 8; 8 a, palpe maxillaire très-grossi, filiforme, ayant le qua- trième article aussi long que les autres (caractère du genre). — Les espèces de ce genre, qui est le type des Staphyliniens fongicoles et se nourris- sant de la pulpe azotée de cryptogames, se rencontrent en Europe, dans l'Amérique boréale, l'IUinois, le Chili, les Indes orientales et Ceylan. Dans les genres précédents, les antennes étaient insérées sur les bords latéraux du front; dans les suivants, elles sont insérées sur le front, au bord interne des yeux composés. Ces genres comprennent des insectes de très-petite taille, noirs ou ferrugineux, très-rapides coureurs, habi- tant les mousses, les détritus végétaux, les champignons, et, pour cer- tains genres, les fourmilières, où ils servent aux Fourmis de véritables animaux domestiques, avec les mœurs les plus curieuses. 314 COLÉOPTÈRES. — STAPHYLINIENS. MVIl!MEDOIVI.%; Erich. — Corps ailé ou aptère. Corselet déprimé, plus étroit que les élytres. Quatre articles aux tarses antérieurs ; tarses postérieurs de cinq articles. Les Myrmédonies se trouvent en Europe, aux Indes orientales, à Ceylan, dans les deux Amériques, en Algérie, en Egypte, en Cafrerie et au Cap. On n'en cite pas d'Australie, ni des îles de l'Océanie en gé- néral. Elles simulent la mort quand on les touche, et relèvent leur ab- domen de sorte que son extrémité rencontre les élytres. On voit d'ordi- naire ces insectes dans le voisinage des fourmilières, sans qu'on puisse trop présumer dans quel but. Selon les auteurs, ce sont des carnassiers chasseurs. Ils guettent les Fourmis isolées, et leur coupent d'un coup de dent le péliole de l'abdomen, et dévorent celui-ci, qui contient les principaux viscères et le jabot plein de liquide sucré. En hiver, ils pé- nètrent dans les fourmilières, alors que les maîtres de la maison, en- gourdis par le froid, ne peuvent faire grande résistance. Ce sont les Fourmis rousse et fuligineuse qui sont surtout exposées aux attaques des Myrmédonies. D'après M. L. Fairmaire, ce rôle actif des Myrmédonies serait douteux. Les espèces de nos environs ne paraissent pas posséder sur le corps d'organe sécrétant un liquide approprié à la gourmandise des Formi- cides ; mais certaines espèces méridionales, comme M. tuberiventris (de Sicile) et physogaster, Fairm., d'Algérie, ont sur l'abdomen une saillie à poils soyeux, et l'on a trouvé une sculpture analogue à la partie supé- rieur de l'abdomen des mâles des Myrmédonies de l'Amérique du Nord et de Ceylan récoltés dans des nids de Termites. Peut-être y a-t-il là un organe de sécrétion destinée aux Fourmis. — L'espèce que nous figurons, Myrmedonia [Astilbus, Dillwyn) canaliculata, Fabr., ou à cou sillonné, pi. XV, fig. 5, est plus allongée et moins foncée que la plupart des Myr- médonies. Elle est très-commune aux environs de Paris et se trouve dans toute l'Europe ; se rencontre rarement avec les Fourmis, mais plu- tôt avec les Myrmiques (à aiguillon), et plus souvent sous les pierres et les détritus végétaux — Fig. 5a, tarse antérieur; 5 6, tarse postérieur, à articles allongés, de grandeur décroissante pour les quatre premiers (caractère du genre). I.OIMECillîii.%, Grav. — Corps très-large, très-épais, ailé. Corselet de la largeur des élytres; anneaux de l'abdomen plats en dessous, garnis sur les côtés de Jiouquets de poils (1). Tarses antérieurs de quatre articles, postérieurs de cinq. Les Loméchuses sont de véritables animaux domestiques des Fourmis. Elles présentent ce fait bizarre, répandu, comme nous le verrons, dans le monde des Fourmis, d'animaux qui, par paresse ou ignorance, ne savent pas manger seuls. On voit les [,omé*;huses touchant les Fourmis à la (t) Pas assez marq\iés sur la figure. TACHYPORIDES. ■— LOMECHUSA. 315 tête avec leurs antennes el les frappant à petits coups, celles-ci leur dégorger la nourriture. Les Loméchuses, par réciprocité de bons offices, étendent leur large abdomen qu'elles portent habituellement redressé sur le dos, et les poils mis alors à découvert et siège de quelques déli- cieuse sécrétion à l'usage des Fourmis, sont léchés et pressés entre les mandibules de ces dernières. Cependant les Loméchuses sont sans doute des animaux domestiques indociles et vagabonds, et à qui leurs ailes permettent souvent de lointaines excursions ; mais l'impossibilité où ils sont de manger seuls ramène forcément ces insectes aux fourmi- lières — L'espèce représentée pi. xv, fig. 6, est le Lomechusa {Atemeles, Dillwyn) paradoxa, Grav., de toute l'Europe, vivant principalement dans les nids des Formica ruhra et rufa. Fig. 6 a, sa tête.— M. Giiérin- Méneville rapporte avoir trouvé près de Paris, sur la route de Chritillon, un individu de cette espèce tenu par plusieurs Fourmis qui s'efforçaient de le faire rentrer dans leur trou, sans pour cela lui faire de mal. En général, les Staphyliniens ont l'abdomen grand et lourd, par per- sistance des conditions de larve; il se développe beaucoup chez ceux qui fréquentent à divers titres les fourmilières (genres Myrmedonia, Dinarda, Lomechusa), et les Loméchuses ont ce large abdomen très- mobile vers le haut et le portent dressé pendant la course. Nous sommes amenés ainsi à des formes encore plus étranges chez des Staphyliniens du même groupe, trouvés au Brésil dans des termitières de terre gtlchée, à galeries en lacis, sans cellules spéciales pour la femelle féconde ou reine, et fixées aux arbres. Ces parasites de petite taille, de 2 à 3 milli- mètres, offrent ce fait très-étrange, spécial à eux seuls dans l'ordre des Coléoptères, qu'ils sont vivipares. L'abdomen disséqué offrait des œufs et de jeunes larves. L'abdomen est chez eux devenu énorme, très-mou, à anneaux gonflés et toujours relevé sur le dos à partir du premier anneau ; sans cela la locomotion serait impossible, vu la disproportion de cet abdomen avec la tête et le thorax. M. Schiodte a formé avec ces singuliers insectes (1) les genres Corotoca et Spirachtha, ce dernier genre remarquable par ses trois paires d'appendices filiformes, biarticulés, que porte la partie redressée de l'abdomen (voy. pi. xn, fig. 11, S. eury- medusa, Schiodte). Il est probable que ces organes sont pour les Ter- mites ce que sont les poils du corps des Loméchuses et d'autres Coléo- ptères domestiques pour les Fourmis, l'organe de sécrétions aimées. Ces Staphyliniens vivipares n'ont qu'une mobilité très-bornée, des té- guments mous, une bouche faible, des stigmates peu développés et sans péritrème, des trachées très-peu ramifiées, ce qui indique une vie pa- rasitaire en demeures closes. Ces insectes ejifin ont des yeux et des ailes, comme les maies et femelles seuls chez les Termites, les formes neutres étant aptères et aveugles. C'est qu'à une époque donnée, les milles et les femelles, pour la reproduction, sortent du nid, dont les (1) Ann. des sciences nat,, Zoor., i* série, d856, t. V, p. 169. 3I<) LÉOPTËRKS. — STAPHVLINIENS. travailleurs percent l'enveloppe. Sans doute qu'alors les parasites sor- l(Mit aussi dans le même but. Peul-ètre sont-ils ramenés de force au bercail, comme des brebis l'ugitives;, par les Termites neutres, habitués à réintégrer de la sorte les m;*iles et la reine. AliEOC'HARA, Grav. — Corps oblong, assez épais, ailé; antennes épaisses; élytres très-courtes. Abdomen à côtés parallèles, arrondi au bout. Tarses tous de cinq articles. Les Aléochares vivent en général dans les matières animales en dé- composition : ainsi on les trouve sous les petits cadavres en compagnie des Boucliers, des Dermestes, des gros Stapliylins. Ils sont de petite laille et relèvent fortement un abdomen large, plat en dessus, presque globuleux par sa face inférieure. Certains, dit M. L. Fairmaire, s'éloi- gnent de ce genre de vie peu relevé, et font probablement la chasse aux petits Acariens, les uns dans les terriers des Lapins, les autres dans les nids souterrains des Hirondelles de rivage {A. nidicola, Fairm., genre Microglotta, Kraaiz), ou même dans les pigeonniers. D'autres, plus har- dis, ne se trouvent qu'au bord des neiges fondantes, sur les hautes montagnes, tandis que, recouverts d'un duvet soyeux, il en est qui af- frontent les lames sous les monceaux de varechs et de goémons rejetés par la mer. D'autres enfin, en petit nombre, préfèrent les coins obscurs des écuries et des bergeries {A. suturalis, Salilb., genre Microglotta, Kraatz), ou bien les fourmilières (^. inquilina, Miirkel, genre Thiasophila, Kraatz). Plusieurs larves de ce groupe vivent dans les galeries corlicales des Tomicus et détruisent leurs larves lignivores (E. Perris). l>lf.ro<$S.%, Haliday. — Corps allongé, aptère ou ailé. Tète saillante, non rélrécie à la base; yeux petits; mandibules saillantes ; antennes grêles. Corselet plus étroit que les élytres, celles-ci tronquées. Abdomen parallèle. Pattes courles ; larses tous do. quatre articles. L'espèce unique du genre Diglossa (nom fondé sur une observation défeclueuse de la languette) est le D. morsa, Halid., d'un brun noir pres- que mat, finement ponctué sur la tête et sur le corselet, à pattes et antennes d'un brun roussâtre, ainsi que les élytres tronquées, ayant de 1 millim. 1/2 à 1 millim. 3//i de longueur. Ce petit Staphyliuien a été découvert par M. Haliday sur les côtes maritimes de l'Irlande, et retrouvé identique sur les côtes du Calvados par M. A. Fauvel. On le rencontre en juillet et en août, sur le sable très-fin qui s'accumule à l'embouchure des rivières, ou au bord des petites mares, ou dans les sillons laissés par lesA'agues quand la mer se retire. Il est mêlé à des centaines de Cillenum latérale (Carabiens). Tandis que ce Carabique se creuse, avant la marée montante, de petits trous de 3 à Zi centim. de profondeur, où il se retire dès que le flot arrive, le D. mersa, dépourvu de pattes propres à fouir, se laisse submerger derrière les plus légers exhaussements du sable, et dès-lors demeure immobile, couvert de sable, .sans trace de vie et de PSÈLAPHIDLS. 317 mouvement pendant six heures. Son corps, dépour\u de poils, ne peut guère, en effet, s'entourer d'air. On sait que les Coléoptères de toutes les tribus peuvent supporter sans périr des submersions bien plus lon- gues, grâce à l'air en réserve dans les trachées. Quand le flot s'est retiré, le Diglossa ne se montre pas tant que le sable est mouillé, et de môme on ne le voit pas au dehors par les jours de pluie ; mais dès que le soleil a légèrement séché la surface du sable, ces Staphylins courent en grand nombre à la poursuite d'animaux marins microscopiques dont ils font leur nourriture. Cette même espèce;, avec quelques différences de détails, a été signa- lée sous le nom, actuellement de variété, de submarina, Fairm., à la baie de Somme, à la Teste, à Hyères (M. Rey), presque tous les indi- vidus étant ailés. On peut donc dire que cette espèce, à mœurs si curieuses, doit être recherchée par les amateurs sur tous les rivages de France. TRII5U DES P«ÉL.APIIlï<:i\l§. Les petits insectes qui composent ce groupe ont beaucoup embarrasse les classificateurs. Les pièces buccales et les antennes en massue termi- nale rapprochent les unes des autres toutes les espèces de celle tribu; les mœurs, le régime carnassier pour beaucoup d'entre elles, parasites des nids d'autres insectes pour certaines, sont encore une cause profon- dément naturelle de réunion ; mais les unes sont trimères, les autres penlamères, ce qui les séparait autrefois en deux groupes aux extrémités opposées de l'ordre des Coléoptères. Caractères généraux : Palpes maxillaires très-développés, toujours saillants; antennes ayant presque toujours les derniers articles renflés en massue. Pattes longues, cuisses renflées. Taille très-exiguë, de 2 à Zj millim. Coloration ea général foncée, jamais brillante. Deux familles très-nettement distincte?, les Psélaphides et les Scydménides. On trouve les insectes des deux familles sous la mousse, sous les écorces, dans le bois pourri, et certains à l'état d'insectes domestiques dans les fourmi- lières. Les Psélaphiens proprement dits sont souvent en petites troupes, courent rapidement, volent parfois au crépuscule autour des fumiers, et se rendent aussi, dans les soirées de printemps et d'été, sur les herbes des prairies voisines des bois, pour y cliasser les Acares et de très- petits insectes. On en prend beaucoup en fauchant avec un filet sur les herbes des prés, à l'entrée de la nuit. Les métamorphoses et l'unulomie interne de ces petits insectes sont encore ignorées. Famille L — PSÉLAPHIDFS. Palpes maxillaires généralement très-longs, grêles, parfois barbelés ou renflés en poire, de un, deux ou quatre articles ; palpes labiaux de 318 COLÉOPTÈRES. — PSÉLAPHlENS. un à deux articles; languette membraneuse avec appendices ou para- glosses membraneux; mandibules aiguës et dentées en dedans; antennes généralement en massue à l'extrémité, moniliformes. Corselet plus ou moins globuleux ; élytres courtes, élargies en arrière comme un man- telet, atteignant le milieu ou les deux tiers de l'abdomen (ce qui rap- proche cette famille des Staphyliniens). Abdomen de cinq segments ne se relevant pas. Pattes allongées ; tarses de trois articles, le premier très-petit, surtout chez les Clavigères, terminés par un ou deux cro- chets. On a longtemps regardé à tort les Psélaphides comme dimères. On peut consulter, pour cette famille, la Mono(jraphie des Psélaphiens, par M. le D' Aube {Magasin de zool. de Guérin-Mén.^ 183/i, et Ann. Soc. entom. de France j 18/ii, 2'' série, t. H). GENRES PRINCIPAUX. \° Oenres à antennes de onze articles. ME'l'OPlAS», Gory. — Antennes aussi longues que le corps, coudées. Tète ayant un prolongement frontal; deux crochets aux tarses. Une espèce sert de type à ce genre, le J/. curculiomides, Gory (pi. \vj, fig. 6 : 6 a, extrémité de l'antenne; 6 b, tarse postérieur). Cet insecte a été découvert près de Cayenne par M. Lacordaire. Sa couleur est d'un roux châtaigne; il est très-villeux. C'est le plus grand des Psélaphides encore connus, car il atteint environ 5 millim. de longueur. Il y a en outre deux espèces du Brésil. CllEUmiJAI; Latr. — Antennes sans renflement terminal ; deux crochets aux tarses . Une seule espèce, de toute l'Europe, mais très-rare partout, paraissant vivre en société avec certains Formicides. C'est le C. bituberculatum, Latr. (pi. XVI, flg. 7, son antenne grossie). Ce rare Insecte, remarquable par les deux points tuberculeux de sa tète, vit surtout sous les pierres, dans les terrains arides, avec une petite Fourmi d'un brun noir, le Formica cœspitosa. CTEU'ISTKS, Reichenbach. — Palpes maxillaires de quatre articles, très-remar- quables en ce que les trois derniers portent en dehors une apophyse terminée par un petit faisceau de soies membraneuses qui, agglomérées par la dessiccation, forment un prolongement pointu. Ces insectes vivent dans les détritus végétaux, les vieux fagots.— Tète du C. palpalis, Reich., pi. xvi, fig. 8; 8 a, palpe maxillaire.— D'Eu- rope, d'Algérie, du Caucase ; rare aux environs de Paris, plus commun PSÉLAPUIDES. — BYTHINUS, PSELAPHUS, JiATRlSUS. .'il9 dans le midi de la France. Ce genre a ses espèces disséminées en Europe, en Egypte, aux Indes orientales, en Californie, aux États-Unis, en Australie. BYTHIIVCjD, Leach. — Antennes ayant chez les mâles les derniers articles renflés, globuleux, carrés, en croissant, dans le genre des enseignes romaines. En général, les mâles seuls sont ailés, parfois avec des ailes atrophiées, impropres au vol, et les femelles aptères. On trouve les Bythines dans les herbes humides, sous les écorces et les mousses, dans les détritus vé- gétaux.— Ex. : B. bulbifer, Rei :h., d'Europe, du Caucase ; la seule espèce très-commune près de Paris, B. Burelli, Denny, de France, d'Angleterre, d'Allemagne. Antenne d'un mâle de cette seconde espèce, pi. xvi, flg. 9. — Les espèces du genre Bythinus appartiennent à l'Europe, l'Amérique du Nord, l'Australie. PSELAPHIIS, Herbst. — Antennes moniliformes, renflées à l'extrémité, un seul crochet aux tarses. Les Psélaphes (genre très-réduit) vivent dans les prés humides, entre les roseaux, et sortent le soir pour chasser.— Ex. : P. Heisei, Herbst, espèce type, de toute l'Europe, du Caucase, assez commune près de Paris. PI. XVI, fig. 50, mandibule; 10 a, mâchoire et palpe; 10 b, lèvre infé- rieure et palpes. — Cette espèce n'est pas rare au bord des marais et dans les débris de joncs déposés par les inondations : la gracilité des palpes, du corselet et des pattes lui donne un aspect curieux. On doit encore signaler de toute l'Europe le P. dresdensis, Herbst. Le genre appartient à l'Europe, l'Australie, le Bengale, les États-Unis, le Chili. BATRINtlS, Aube. — Antennes assez longues, grossissant à leur extrémité. Corps allongé et convexe; deux crochets aux tarses. Ce genre est très-nombreux en espèces de divers pays, surtout de l'Amérique du Nord. On les trouve aussi aux Indes orientales, à Ceylan, en Australie. Les Batrisus d'Europe sont composés de petits insectes rares, vivant toujours en société avec diverses Formicides {Formica ernav' ginata, cuniculata, Myrmtca lœvinodis (rubra), etc.). Le même genre de vie s'observe pour les Batrisus du Nord des États-Unis, les espèces du Sud se trouvant au contraire sous les écorces. En France, des Batrisus à la démarche lente, au corps robuste et épais, se prennent sous la mousse des gros arbres dans les forêts de Fontainebleau et de Compiègne, au milieu des sillons et des rugosités de l'écorce dans lesquels se pro- mènent de petites Fourmis ; il faut une grande attention pour les voir, car leurs mouvements ne sont pas vifs et leur couleur ne s'harmonise que trop avec celle des écorces. Le genre Batrisus diffère fort peu, par les caractères, du suivant. 32) COLÉOPTÈRES, — PSÉLAPHIENS. .%MAIIROI*°^,75 et larges de 0^^,33. Au bout de cinq jours, ces œufs, ovoïdes et blancs, laissent éclore des larves qui sortent très-lentement, de façon que le sac n'est vide qu'en deux ou trois jours. On trouve, en péchant, ces sachets ovigères de Phithydrus dès la mi-mars. Les larves sont très- semblables a celles û'Ebchares lividus, mais un peu plus grandes. 336 COLÉOPTÈRES. — HYDROPHILIENS. EiiOCBARES, Muls. — Corps ovale oblong ; antennes de neuf articles ; pas de pointe sternale. Ce sont aussi des insectes de petite taille, testacés ou brunâtres, et des eaux stagnantes. Le type est l'E. lividus, Forster, ou griseus, Fabr., de Zj à 6 millimètres, ponctué gris en dessus, brun en dessous, de toute l'Europe, des environs de Paris. Le catalogue Gemminger-Harold réunit au genre Philhy dru s les genres Elochares et Elophilus de M. Mulsant. Les espèces sont d'Europe, d'Amé- rique du Nord, du Chili, de Ceylan, des Indes orientales, des îles Nico- bar, de la Guyane, du Brésil, de Montevideo. La femelle du Philhydrus ou Elochares lividus est intéressante en ce que, à la façon de beaucoup d'Araignées, elle porte ses œufs dans un cocon soyeux qu'elle lient sous son ventre entre ses cuisses postérieures. Dans les premiers jours qui suivent la construction de cette coque, elle y paraît peu attachée, et l'abandonne assez facilement quand elle est poursuivie. 11 n'eu est plus de même quand l'éclosion des œufs appro- che, il devient l'objet de sa vive sollicitude. Si, en captivité, elle ne trouve aucun corps étranger auquel elle puisse confier le berceau de sa progéniture, elle se renverse à la surface de l'eau au moment de la naissance des larves et reste dans cette gênante position jusqu'à la fin de leur éclosion. Quand ces œufs sont devenus bleuAtres, si elle se trouve libre dans ses mares, elle colle ce cocon contre la tige de quelque plante aqua- tique, un peu au-dessus de la surface de l'eau. Les larves, à mâchoires plus longues que les mandibules, marchent à la renverse sous la sur- face de l'eau, en agitant continuellement leurs palpes maxillaires, en quête d'une proie animale. La femelle de VE. lividus lait plusieurs pontes après un seul accou- plement, à six semaines d'intervalle, et de trente à quarante œufs seu- lement. Les larves ont en naissant 1 à 2 millimètres, sont subconiques, allongées et d'un blanc sale, sauf les yeux et les palpes maxillaires, qui sont noirâtres; se tiennent à la surface de l'eau, assez souvent non ren- versées, peu agiles, cheminant tranquillement accrochées aux plantes ou aux parois solides, en maintenant au-dessus de l'eau l'organe respi- ratoire situé à l'extrémité de l'abdomen ; quand elles perdent leur point d'appui, elles exécutent pour le retrouver des mouvements vermiculaires horizontaux en passant vivement la partie postérieure de leur corps par-dessus leur tôte, de côté et d'autre.. Elles ont la même nourriture, mais sont moins voraces que les larves du Spercheus emarginatus, restent larves trente à trente-cinq jours, et atteignent alors une longueur de 9 millimètres. La nymphose s'opère hors de l'eau. La nymphe est sub- ovoïde, de 3'°"',5 de long, hérissée de soies et filets cornés contournés, l'abdomen terminé par deux appendices contournés, beaucoup plus épais et plus longs que les autres. SPH^HIDICM. 337 hPtaMÈtntnt:^ , Fabr. — Corps hémisphérique; Atiietiiiêi de huit articles ^ les trois derniers imbriqués et élaVgis en massue. Ce genre existe en Europe, en Cafrerie, à Madagascar^ à Ceylan, à Java, à l'île Woodlark, au Sénégal. Les Sphéridies ont un genre de vie différent des autres Hydrophiliens, car ils habitent les matières stercoraires des Mammifères herbivores. Leur couleur est en général noire, relevée par des macules rouges ou jaunâtres. Ils échappent facilement aux doigts qui tentent de les saisir, par la vivacité de leurs mouvements, leur forme hémisphérique et le poli de leur corps. Ils se montrent au printemps et en été; volent, dans les soirées chaudes, autour des bouses, dans lesquelles ils entrent et sortent par une multitude de trous dont est percée leur surface dessé- chée, grâce à leurs pattes fouisseuses hérissées d'épines en arrière ; ils forment dans ces matières de nombreuses galeries, et, si on les boule- verse pour les chercher, tâchent de s'enfoncer dans le sol, dans des trous creusés par eux sous les bouses, et où ils restent immobiles. Les larves, étroites et allongées, rappelant celles des Hydrophiles, vivent dans les mêmes substances que les adultes; mais on ne sait encore si elles sont coprophages, ou si elles dévorent les larves des Aphodiens, qui ont le même habitat. Le genre Sphœridium présente plusieurs espèces communes près de Paris. Ainsi le S. scarabœoides, Linn., long de 6 à 8 millimètres, noir et lisse, dont les élytres ont chacune deux taches rouges, l'une humé- raie, l'autre à l'extrémité, et les pattes brunes, fréquent pendant tout l'été dans les bouses de vache, et nommé par Geoffroy, le Dermeste à quatre points rouges, sans stries; et le S. bipustulatum, Fabr., également de toute l'Europe, plus petit, à corselet bordé de jaune, ainsi que les élytres, qui ont en outre, à l'extrémité, une tache lunulée jaune, et souvent une tache humérale jatme. Nous figurons une espèce de Java, le S. diraidiatum, Gory (pi. xvn, fig. 15; 15 a, antenne). Le genre Sphœridium est le type d'une petite famille d'Hydrophiliens caractérisés par un corps convexe, arqué longitudinalement, souvent ovalaire, quelquefois hémisphérique. 11 en est qui vivent dans les eaux de substances végétales : ainsi le Cijclonotum, Erichs., orbiculare, Fabr., noir, sans stries, ou V Hydrophile noir lisse, à point, de Geoffroy, petit insecte des eaux stagnantes, se tenant aussi sous les feuilles amassées au bord des mares. D'autres, très-petits, se trouvent sous les mousses et les pierres humides, les plantes aquatiques pourries, dans les fumiers, les champignons décomposés, etc. Tels sont les genres Cercijon, Leach, formé de petites espèces des bouses, ou des détritus aquatiques, sous les pierres, elc, parfois assez élégamment tachetées ou colorées; Megaster- num, Muls., des bolets; Cryptopleurum, Muls., des fumiers, des bouses, parfois des champignons pourris. On voit donc que dans ces derniers GIRARD. 22 BâS COLÉOPTÈRES. — HYDROPHILIENS. Palpicorncs il y a des transitions naturelles entre les Hydrophiliens vrais et des genres, comme les Sphœridium, qui n'ont plus rien d'aquatique. Le genre Cydonotum est de tous pays; le genre Cercijon a de nom- breuses espèces disséminées dans les deux mondes, et une en Tasmanie ; les Megasternum sont d'Europe, surtout d'Angleterre, de Pensylvanie, du Japon; les Cryptopleurum, d'Europe, du Cap, de Ceylan et du Canada. 2"> Genres clavlcornes, à antennes terminées par une massue variable, à palpes courts. HGTEROCERtJS, Fabr. — Tête transverse, enfoncée dans le corselet; antennes courtes de onze articles, avec massue oblongue, dentée en scie à l'intérieur. Corps subovalaire ou oblong, subdéprimé; tarses simples, de quatre articles apparents. Les classificateurs font de ce genre une petite famille, les Hétérocé- rides. Latreille les place dans la tribu des Acanthopodes de sa famille des Clavicornes. Les Hétérocôres ont de nombreuses espèces, presque toutes européennes, difticiles à distinguer, d'un brun obscur, avec des taches jaunes sur les élytres. Ils vivent au bord des eaux, surtout des eaux calmes, enfoncées dans le sable humide ou la vase. Us fouissent le sable avec leurs pattes robustes, dont les cuisses sont d'autant plus fortes qu'elles sont plus antérieures; ils volent quelquefois dans le jour au bord des eaux, et leur corps est recouvert d'un duvet serré, destiné sans doute à retenir de l'air pour la respiration et à protéger les stig- mates contre l'eau. Ils marchent mal et cherchent toujours à s'enfoncer dans le sol humide. On les regarde comme carnivores. L'espèce type est VH. marginatus, Fabr., de toute l'Europe, de Zi à 5 millimètres de longueur, brunâtre, très-soyeux, avec des maculatures jaunes ou rou- geàtres sur les élytres. — PI. xxu, fig. 11 : lia, antenne; 116, labre, 11 c, mandibule; 11 (/, mâchoire et palpe ; 11 e, lèvre inférieure et palpes ; 1 1 ^ patte antérieure. On -trouve fréquemment cet insecte sur les bords de la Seine; dès qu'on en a rencontré un sur le sable, on en fait sortir beaucoup d'autres en jetant de l'eau sur les parties non mouillées. Les larves vivent aux mêmes endroits, ont la tête et les trois anneaux thoraciques très-larges, et les autres anneaux du corps beaucoup plus étroits et presque cylin- driques. Les Heterocerus sont d'Europe, du Kamtchatka, de toute l'Amérique du Nord et des Antilles, de Mésopotamie, des Indes orientales. POTAMOPHILCS, Germar. — Tête inclinée; antennes de onze articles, avec une massue peu sensible, presque cylindrique. Pattes allongées; tarses de cinq articles. Les Potamophiles refsemblenl ù des Dermestes, revêtus d un duvet POTAMOPHILUS. — PARNUS, 339 soyeux cendré. Ils ne vivent ni sous les pierres immergées, rii dans le sable ou la vase; ils se tiennent à la surface de l'eau, accrochés aux racines des plantes et des arbres aquatiques ou dans les ani'ractuosités des roches, mais toujours à fleur d'eau ; ils ne plongent pas, et, au contraire, volent très-bien, venant souvent se poser sur les épaules des baigneurs. Amis des eaux courantes, on les rencontre aussi bien dans nos fleuves de France que dans les torrents des Cordillères, les ruisseaux des Antilles et de Java. Leurs larves, toutes aquatiques, respirent par des branchies comme celles des Macronyques. Avec les genres Parnus, Elmis, Macronychus et quelques autres, ils forment la petite famille des Parnides. L'Europe ne présente qu'une seule espèce de Potamopliile, de France et d'Allemagne, le P. acumi- natus, Fabr., qu'on rencontre assez rarement près de Paris, à la surface de l'eau courante ou sur des plantes aquatiques, sur des pieux, des bois flottants, dans les îles de la Seine. C'est un petit Coléoptère brun revêtu d'un court duvet roussâtre. Lne espèce de Java est le P. orientalis, Gory, décrit dans le texle de l'iconograplde de M. Guérin-Méneville, p. 70. — 11 est représenté pi. xvii, fig. 1; 1 a, antenne. — Les huit autres espèces sont des Antilles, de Colombie, du Brésil, de la Cafrerie. PAR*X§», l'abr. —Tète assez grande, pouvant s'enfoncer dans le protLorax; antennes courtes, de dix articles, le second très-grand, dilaté en forme d'oreil- lette, les suivants très-serrés en sorte de massue fusifornie. Corps en général oblong ou un peu allongé, revêtu en entier d'une très-fine pubescence soyeuse, et en outre de poils denses dressés. Les Parnes sont de petits insectes oblongs à duvet gris ou roussâtre très-serré en dessus et en dessous, sur lequel l'eau n'a aucune prise. Erichson pense que l'air que les Parnes entraînent en s'enfonçant dans l'eau forme une vésicule s'étendant sous tout le corps, entourée d'une couche huileuse sécrétée par les poils, constituant une sorte de ballon qui tend parfois à entraîner l'insecte en haut et doit servir à sa natation; il eu serait de même des deux hlets d'air qui se trouvent sous les deux bandes de poils de la poitrine des Elmis (genre suivant). Les poils des Parnus garnis d'air leur permettent de s'enfoncer dans la vase sans qu'elle ait prise sur leurs téguments. La vie aquatique de ces insectes est ana- logue à celle de beaucoup de Carabiques du groupe des Bembidium, souvent submergés. Les Parnus, et aussi les Potamophilus, Germ., sor- tent volontairement alors le long de la tige des plantes immergées, et, parvenus à la surface de l'eau, prennent leur vol, qui est assez agile, à la diiférence de leur marche et de tous leurs mouvements en général, qui sont extrêmement lents. Les Parnes ont presque toutes leurs espèces, peu nombreuses au reste, en Europe. On en cite une des bords du Jourdain et une du Brésil. La structure des antennes du genre Parnus rappelle celle des âiO COLÉOPTÈRES. — HYDROPHILIENS. Gyrins. Ils vivent au bord des eaux dans la vase, et leur corps, de couleur foncée, est granuleux et villeux; on les aperçoit sous l'eau par le reflet argentin de l'air retenu par les poils. Leurs premiers états sont incon- nus. Le type est le P. prolifericornis, Fabr., ou Dermeste à oreilles, de Geoffroy. — PL xvii, fig. 2 : 2 a, antenne ; 2 h, labre ; 2 c, mandibule; 2 d, mâchoire et palpe; 2 e, lèvre inférieure.— Il est long d'environ 6 millimètres, d'un brun un peu jauniltre, couvert d'un fin duvet gris, à pattes rougeûtres; habite l'Europe et l'Algérie, et se trouve assez fré- quemment aux environs de Paris. ELMIS, Latr. — Tète arrondie, semblant cachée; antennes presque tiliformes, de onze articles courts, subcylindriques. Pattes allongées, contractiles ; tarses terminés par deux crochets. Les Elmis sont de petits insectes bronzés à corps grêle et allongé, de marche lente, à élytres striées ou sillonnées ou côtelées, avec des poils soyeux en dessous ; vivant dans l'eau, mais ne nageant pas ; aimant les courants rapides, restant accrochés aux plantes, aux racines cheve- lues et flottantes, aux pierres enduites de conferves, etc. La plupart ont des ailes bien développées. On peut s'étonner, au premier abord, de ne trouver ces très-lents insectes que dans les eaux rapides : c'est que chez eux la forme compense la vitesse, et les puissants crochets de leurs tarses, terminés par un long article, leur permettent de résister à la force toujours agissante du courant qui leur amène en outre leur sub- sistance sans qu'ils se déplacent. Les Ehnis fixés aux corps immergés ne lâchent les pattes que l'une après l'autre, quand ils veulent quitter leur position pour marcher doucement sur le sol du fond de l'eau. Par- fois, dit M. L. Fairmaire, en été, ils quittent les eaux pendant la nuit, et on les trouve, non loin d'elles, accrochés aux herbes humides des prairies. Il y a une espèce d' Elmis dans les torrents des Andes, VE. condimen- tarius, Filippi, qui se vend sur les marchés du Pérou, notamment à Lima ; on en fait des boulettes pâteuses servant comme assaisonne- ment d'un mets appelé chupe de chiche. Nous verrons que des Hémi- ptères, aussi aquatiques, du genre Coryxa, ont au Mexique un usage analogue. On trouve le genre Elmis en Europe, aux États-Unis, au Pérou, au Chih, à la Nouvelle-Galles du Sud (Australie). 'On connaît en Europe environ vingt espèces d' Elmis. Une qui se trouve partout est YE. Wolkmari, MulL, dont les détails sont figurés pi. xvii, 3, antenne ; 3 a, labre ; 3 b, mandibule ; 3 c, mâchoire et palpe ; 3d, lèvre inférieure et palpe. Cette espèce se rencontre près de Paris. Le docteur Laboulbène a décrit {Ân7i. Soc. entom. de Fr., W série, 1870, t. X, p. Zi05) les larves des Elmis œneus et Wolkmari, qui ne diffèrent guère que par la taille, la première n'ayant que 2 à 3 millimètres, la seconde plus grande. Elles vivent accrochées sous les pierres, au moyen MACRONi'CHUS. 5tii des ongles puissants de leurs pattes, dans les ruisseaux d'eau courante des environs de Paris et probablement de toute la France. Elles sont oblongues et atténuées postérieurement; ressemblent à de petits Crus- tacés d'un gris jaunâtre, un peu verdâtre en dessus. La tête est petite, le thorax est élargi, et l'abdomen de neuf segments, aplatis sur les bords prolongés en arrirre en pointe latérale, avec des franges folia- cées. Ces segments vont en décroissant régulièrement de largeur jus- qu'au dernier, que ferme un opercule. 11 en sort, sans rhythme précis, à intervalles irréguliers, un élégant éventail à trois branches plumeuses et d'un blanc satiné : ce sont les branchies de la respiration aquatique de ces larves. :5i.*€5iO-^'iX'sar!»j, Mull. — Tête arrondie, enfoncée en partie; antennes de six articles, presque i'iiifornies, le sixième eu longue massue ovale. Tarses de cinq articles, avec deux forts croctiets recourbés et très-aigus. On ne connaît que deux espèces de Macronyques, sans doute parce que ces singuliers insectes vivent toujours entièrement sous l'eau. L'espèce européenne, de France et de l'Allemagne, est le M. quadrituberculatus, Mull., d'un noir brunâtre, à pattes d'un fauve assez vif, avec quatre tu- bercules, deux arrondis au bas du corselet, deux plus gros et oblongs au milieu de la région basilaire de chaque élytre, long de A à 5 milli- mètres, le mâle pareil à la femelle, mais un peu plus petit (représenté pi. xvn, fig. U; U a, antenne), se rencontrant près de Paris, mais rare. Il a été bien étudié par Contarini et L. Dufour. Cet insecte au corps allongé a un aspect aranéiforme par ses pattes grêles, plus longues que le corps et qu'il tient étalées. Bien que ne pouvant nager, il aime les ruisseaux à cours rapide et s'accroche sous les pierres et surtout aux morceaux de bois flottants ; il s'y cramponne avec tant de force, qu'il est difficile de l'en détacher sans rompre des articles des membres; souvent un grand nombre sont accrochés ensemble par leurs tarses. 11 en est d'ailés et d'autres à ailes rudimentaircs, aussi ne sortent-ils pas de l'eau comme \e?>Elmis.'èi l'on retire les Macronyques de l'eau, ils contrefont le mort, non en contractant les pattes sous le corps, comme les Der- mestiens et les Byrrhiens, mais en les tenant roides et immobiles, avec les tarses fléchis sous les jambes, ce qui leur donne une attitude gro- tesque. Il n'est pas d'insectes qui mettent autant de façon, autant de calcul à se mouvoir que ceux-là : ce n'est qu'après avoir successivement déplacé et de nouveau fixé les pattes de devant et celles de derrière, tandis que les intermédiaires appliquent davantage le tronc contre le support, qu'à leur tour celles-ci soulèvent le corps pour le faire avan- cer ou reculer au plus de 1 à 2 millimètres. Quand on retire de l'eau une petite branche ou un morceau de bois sur lequel sont placés des Macronyques, ils ne font d'abord aucun mouvement, et l'on pourrait ignorer leur présence ; mais lorsque la branche commence à se dessé- 3/42 COLÉOPTtpES. — HYDIîOPIlir.li.NS. cher, ils changent de pluce avec beaucoup de lenteur. De même que les Elmis, ils ne vivent pas longtemps hors de l'eau ; si on les replace dans ce liquide, ils eu gagnent le fond en se laissant tomber les pattes éten- dues et immobiles, tantôt en supination, tantôt en pronalion, et mar- chent trè-s-lentement sous l'eau. Un tin duvet garnit leur corps et re- tient des bulles d'air nécessaires à la respiration ; probablement que la respiration se ralentit et que l'insecte s'engourdit, comme les JEpus^ quand il est longtemps submergé. La femelle dépose ses œufs sur les bois flottants, en séries régulières et transversales, formant un amas en losange, retenus par une substance agglutinante. Selon M. Contarini, les larves vivraient dans ces bois, entre l'écorce et l'aubier, et l'adulte paraît aussi vivre de matière ligneuse. Les larvés s'accrochent à ces bois au milieu des filaments avec des ongles tenaces. Elles se meuvent rarement et toujours très-lentement, et ne paraissent vivantes que lors- qu'elles font sortir au dehors des houppes branchiales renfermées dans une cavité à l'extrémité anale et formées de six à huit panaches fasci- cules que la larve reploie brusquement au dedans après quelques secondes d'expansion. Au moment de se métamorphoser, au milieu de l'été, elle sort de l'eau, rampe le long des souches, se glisse dans quelques fentes, y pratique un trou cylindrique avec ses mandibules et se creuse une cellule ellipsoïde ou elle se change en nymphe. C'est dans ce seul état que l'insecte n'est plus protégé par l'eau et peut être atteint par la tarière d'un Chalcidien. Le jeune Macronyque éclos des- cend à pas mesuré le vieux bois qu'avait gravi la larve, et se replonge, pour ne plus le quitter, dans l'élément qui l'avait vu naître. La seconde espèce est le M. glahratns, Say, d'Amériqiie boréale. De nombreux détails sur la larve du .1/. quadritnhereulatm ont été pu- bliés par M. Pérez(^n??. Soc. entom. de Fr., Zi" série, 1863, t. 111, p. 621). Elle vit, ainsi que sa nymphe, entre l'écorce et le bois des vieux troncs immergés. Elle est très-analogue physiologiquement aux larves d'Elmis, ef, comme elles, projette à intervalles irréguliers ses houppes bran- cliiales hors de leur cavité anale fermée par une sorte de clapet. L'as- pect extérieur diffère notablement de celui des larves â'Elmis. 11 n'y a plus du tout ces segments carénés el aigus sur les bords : on dirait un ver grisâtre tout pointillé, à bords du corps lisses, sans franges, s'atté- nuant peu à peu en arrière, et avec six robustes paltes thoraciques. La nymphe est blanche, avec le prothorax muni de quelques soies roides, l'abdomen conique, muni de deux petits appendices mous et inarticulés. Les villosités peu apparentes de celte nymphe l'empêchent d'être en contact immédiat avec les corps qui pourraient la blesser. C'est en juillet, août et septemhre que les larves sortent de l'eau, pour opérer leur nymphose, comme il a été dit précédemment. D'abord blanches, les nymphes se colorent peu à peu et éclosent au bout d'une quinzaine de jours, , SILPHIENS. — HISTÉRIDES. 3^3 GEORYSSl'S, Latr. — Tête cachée en partie par le corselet; aiilenues rétractiles dessous, de neuf articles, les trois derniers en massue solide et globuleuse* Corps globuleux et élytres de môme forme ; tarses de quatre articles partout. Ces insectes, globuleux, mais cependant plus longs que larges, ont un aspect de Pimélies et se rapprochent aussi des Byrrhicns : ils sont courts, épais, très-convexes, plus ou moins sculptés supérieurement; cela, joint à la tétramérie, a déterminé les auteurs à en faire une petite famille, les Géoryssides. Ils sont tous petits, noirâtres, et laissent transsuder une sécrétion gluante qui retient la poussière quand ils sont hors de l'eau et les cache à leurs ennemis, lis vivent dans la vase, le sable humide, parfois sous les pierres couvertes par l'eau; dans le dan- ger, ils retirent la tète entre les pattes antérieures contractées. Le type est le G. pygmœus, Fabr. , de toute l'Europe, surtout du nord, des environs de Paris, d'environ 3 millimètres de long. — PI. xvii, fig. 5 : 5 a, mandi- bules; 5 6, mâchoire et palpe ; 5 c, lèvre inférieure et palpes ; 5 c?, jambe antérieure et tarse; 5 e, tarse postérieur. Les Georyssus se rencontrent en Europe, dans le Caucase, en Sibérie, au Nebraska (États-Unis), à Ceylan et à la Nouvelle-Galles du Sud (Aus- tralie). Tribu des SILPHIEM.S. A l'exemple de M. E. Blanchard, nous rangerons dans cette tribu quatre familles, dont la première et la dernière sont séparées eu tribus distinctes par d'autres auteurs; c'est dire que nous n'avons pas de ca- ractères communs nettement tranchés. Il y a cependant un aspect gé- néral qui confirme ce rapprochement, ainsi que les couleurs habituel- lement sombres, une taille souvent exiguë, des mœurs analogues, car ces insectes vivent sur les cadavres, dans les bouses, les détritus, et, par un contraste singulier, certains genres à petites espèces fréquentent les fleurs. Les quatre familles dont nous ferons l'histoire successive sont celles des Histérides, des Silphides, des Scaphidides et des Nitidulides. La première famille fait partie des Stéréocères ou Solidicornes de C. Du- méril, et les trois autres de ses Hélocères ou Clavicornes, noms qui proviennent de la terminaison des antennes en massue solide ou en tête de clou. Plus tard Lalreille les comprit toutes, avec d'autres, dans ses Clavicornes. Tous ces groupes peu naturels ont dû être disjoints en tribus séparées. , Famille I. — HISTÉRIDES. On reconnaît les insectes de cette famille à leur corps subquadrangle, un peu plus long que large, aplati ou convexe, et même presque glo- 344 COLÉOPTÈRES. — SILPHIENS. buleux dans les petites espèces. Il est lisse et brillant. La tâte est tou- jours plus ou moins enfoncée sous le corselet, de manière à ne laisser bien visibles que les mandibules fortes, saillantes et prolongées en pointe antérieurement. Le corselet, très-grand et très-large, semble avoir refoulé l'abdomen. Les antennes, toujours coudées, sont terminées par une forte massue solide et globuleuse, formée par plusieurs articles intimement soudés. Le prosternum est prolongé antérieurement par un lobe de forme variable. Les élytres, très-dures ainsi que W téguments du corps, sont couvertes de stries et de ponctuations très-variées, ser- vant aux auteurs à, une spécitication souvent fort difficile; elles ne recouvrent jamais l'abdomen en entier (ce qui établit un rapprochement avec les Staphyliniens, dont le genre de vie est analogue;, et les deux derniers segments de celui-ci, non protégés, sont aussi solides en dessus que tout l'abdomen en dessous, tandis que les segments antérieurs sont mous en dessus; il y a de grandes ailes sous les élytres. Les jambes sont larges, aplaties, armées en dehors de dentelures plus ou moins nom- breuses, et ce caractère est surtout prononcé aux jambes antérieures destinées à fouir. Dans le danger, ces insectes contrefont le mort et retirent leurs pattes, qui sont peu allongées, sous la poitrine, sans qu'il y ait toutefois de cavités destinées à les cacher, comme chez les Byrrhes. La jambe antérieure offre un sillon dans lequel se replie alors le tarse; les antennes se logent aussi alors dans des cavités du dessous du corselet ; les tarses sont grêles et de cinq petit-s articles; les pattes postérieures sont plus écartées entre elles à leur naissance que les autres. Ces Coléoptères, connus vulgairement sous le nom d'Escarbots, sont en général de petite taille et souvent d'un noir brillant. Ils vivent dans les charognes ou dans les excréments, certains dans le putrilage des champignons décomposés ou dans des détritus végétaux. On connaît peu leurs larves, à cause de leur petitesse et de leur habitation dégoûtante. On a décrit celles des Hister cadaverinus et merdarius, dont les noms ne sont que trop significatifs. Leur corps, à bords parallèles, est composé, outre leur tête écailleuse, de douze anneaux déprimés, assez mous. Les antennes ont quatre articles; les yeux sont nuls. Les pattes sont courtes, assez grêles, de quatre articles, et le dernier anneau porte en dessous une sorte de mamelon d'appui, au centre duquel est l'anus, et deux longues soies biarticulées formant une queue fourchue. 11 y a neuf paires de stigmates, une prothoracique et huit abdominales. La marche de ces larves a heu surtout par les ondulations des anneaux. Elles vivent surtout dans les bouses très-sèches et s'y transforment en nymphes dans des cellules très-lisses, sans coque propre et sans rejeter entièrement la peau de la larve, ce qui empêche de bien distinguer les deux filets qui persistent quelque temps. La famille des Histérides a fait l'objet d'une importante monographie de M.deMarseuI, publiée par fragments successifs dans lei Annales de la HISTÉRIDES. — HOLOLEPTA, HISTER. 345 Société entomologique de France, et réunie en volume séparé. Nous trou- vons dans ce travail un exemple intéressant des difticultés que présente actuellement l'entomologie par la multiplicité des espèces, qui entraîne la création forcée de nouveaux genres. Le genre Hister a été créé par Linnaîus {Syst. naturœ), et comprenait dans son extension tout ce qui forme la famille des Histérides, comptant aujourd'hui plus de onze cents espèces. Ce nom vient du mot étrusque histrio, parce que ces insectes ont quelque analogie avec un histrion, soit par leurs élytres courtes et souvent bariolées de rouge, soit par leur habitude de se tenir immobiles et de faire le mort. Linnœus en cite quatre espèces; puis Fabricius, Olivier, Herbst, Illiger, portent ce nombre à dix-neuf. EnlSll, Paykull, dans sa monographie, sépare des Hister les espèces aplaties pour en faire le genre Hololepta, et décrit trente-trois espèces du genre Hister. En 1854, Erichson en compte quatre-vingl-une espèces; puis Le Conte et quelques autres auteurs portent ce nombre à cent douze. M. de Marseul, en 1854, publie cent quarante-huit espèces du genre Hister ù sa dernière réduction. 11 en est deux espèces cosmopolites: ainsi H. merdarius, Hofm., se trouvant dans tout l'ancien continent: ainsi H. quadrimaculatus, Linn.; trois en Europe et en Afrique : ainsi //. unicolor, Linn.; deux en Europe et Asie, etc. Enfin, le catalogue Gemminger- Harold compte, en 1868, deux cent cinquante-six espèces de ce genre, GENRES PRINCIPAUX. noiiOIiEPT.^ , Payli. , ou Leionota, Dej. — Tête avancée et rétractile; prosternum sans saillie. Corps très-plat; tous les tarses grêles. Élytres lisses et tronquées obliquement en arrière. Ce sont des insectes d'un noir brillant, vivant sous les écorces pour- ries, ce qui est en rapport avec l'extrême aplatissement de leur corps. L'Europe n'offre qu'une seule espèce de ce genre, dans ses parties méridionales, c'est 1'^. plana, Fuessly. Nous figurons, pi. xvni, fig. h, H. quadridentata, Fabr.,du genre actuel Lioderma, Marseul, du Mexique, de la Guyane. Les espèces sont d'Australie et des régions chaudes des deux mondes. HISTER, Linn. — Tête rétractile, enfoncée dans le prothorax. Corps plus ou moins convexe, prosternum saillant. Élytres sillonnées en long de manières diverses; tarses comprimés. Les Hister sont en général de moyenne taille, ovalaires, un peu bombés, de couleurs foncées ou métalliques, rarement tachés. Ils vivent dans les matières stercoraires, l^s fumiers, les cadavres, les champignons pourris, les végétaux décomposés, le suc qui suinte des vieux arbres. Les différences sexuelles dans le genre Hister sont diverses et en 3iSl6 COLÉOPTÈRES. — SILPHJENS. général peu saillantes. Le mftle est plus luisant, plus lisse et moins arrondi que la femelle ; dans beaucoup d'espèces il est remarquable par le prolongement extraordinaire soit du labre, soit de la mandibule gauche. Les Hister commencent cà paraître dus le premier printemps; on en rencontre encore en automne, mais en petit nombre. Certaines espèces indigènes sont fort communes et Irès-abondantes en individus; cependant on les a peu étudiées, surtout en raison de leur habitation mal- propre, et l'on ne possède que des détails incomplets sur leurs mœurs. Les larves sont carnassières et ont à peu près le même genre de vie que les adultes. Elles se nourrissent volontiers de petits animaux crevés, tels que rats, taupes, etc.; elles se dévorent les unes Içs autres. On a trouvé la larve de VH. merdarius dans des pommes de terre malades, mais elle ne s'en nourrissait pas et y cherchait sans doute des larves d'autres espèces. En général la nymphose a lieu vers le commencement de mai, et l'état de nymphe dure peu. Peut-ûtre certaines espèces ont-elles deux éclosions par an, car M. de Marseul a trouvé, à. la fin du mois d'août, des larves d'Hister au terme de leur développement. Les nombreuses espèces du genre Hister sont des. plus difficiles à sé- parer les unes des autres. Nous figurons, pi. xvin, fig. 5, une espèce de Chine, //. chinemis, Quens., o", à. mandibules grandes et inégales (mœ- quidens). Les espèces de France ont tantôt le corps entièrement noir, tan- tôt les élytres ornées de taches d'un rouge plus ou moins obscurci. Leurs élytres sont marquées eu long de stries plus ou moins avancées vers la base, et le corselet porte, soit deux stries sur ses bords latéraux, soit une seule. Dans les premières espèces nous citerons H. quadrimaculatus, Linn., surfout de l'Europe méditerranéenne (pi. xviii, fig. 6, antenne; 6 a, labre ; 6 6, mandibule ; 6 c, mâchoire et palpe ; 6 d, lèvre inférieure et palpes labiaux); les élytres ont une grande tache rouge en lunule, formant souvent deux taches séparées. Il est long de 9 à 12 millimètres, oblong, subparallèle, noir sur le reste du corps. Parmi les espèces entièrement noires se trouvent: H. unicolor, Linn., ovalaire et court, de 8 à 10 millim.; H. cadaverinus, Hoffm., de même taille, etc. Dans les espèces à une strie au corselet se trouvent les H. sinuatus, Erichson, de 7 millimètres^ avec une lunule rouge à chaque élytre ; H. purpiirascens, Hersbt, de h millimètres, avec les élytres envahies par une tache d'un rouge sombre ; deux espèces noires de 5 millimètres, H. carbonarius, Illiger, et H. stercorarius, Hoffm., à pattes brunes, etc. L'ancien genre Hister de Linnœus a été démembré en genres nom- breux principalement par Leach, Erichson et M. de Marseul. Nous nous bornerons à mentionner le genre Platijsoma, Leach, forme pour des espèces à corps oblong, h côtés parallèles, déprimé en dessus, avec les jambes postérieures unidenticulées en dehors, tandis qu'elles ont deux rangées de denticules chez les Hister. Les Platysomes de notre pays viventj parfois en troupes assez nom.breuses, sous les écorces des Chênes SILPHIDES. ~ SPH^P.ITES. 347 et des Pins. Le P. oblongum, Fabr., vit des larves du Tomicus steno- graphus (Scolytiens), dans leurs galeries subcorticales. Les Saprinus, Erichson, qui connptent aujourd'hui près de trois cents espèces de tous pays, manquent du prolongement du sternum en mentonnière cachant la bouche en dessous, qui existe dans les Hister atlei Platysoma. Ils sont plus épais que les Hisier, ponctués, avec les stries des élytres courtes et obliques, à jambes de devant moins dentelées, à couleur souvent mé- tallique, noire comme dans le S. œneus, Fabr., commun dans les bouses et les charognes, de U millimètres, bronzée dans le S. chalcites, lUig., de 2 à 3 millimètres. Les Saprines habitent, comme les Hister, les cadavres des animaux et leurs déjections, et, en outre, se rencontrent dans les fourmilières, dans les plaies des arbres, cachés dans les sables, au bord de la mer, sous les Algues. La plus grande partie des espèces des Histérides sont exotiques. Famille IL — SILPHIDES. Cette famille, bien homogène, comprend des insectes principalement européens, qui presque tous vivent de matières animales en décompo- sition putride. Ils sont doués de l'odorat le plus subtil et ne tardent pas à arriver d'un vol facile auprès des cadavres, et en général on ne dé- couvre pas autrement leur présence dans une localité. Ils répandent des odeurs désagréables, en rapport avec leur nourriture, mêlées par- fois de sécrétions musquées ; si on les saisit, ils dégorgent par la bouche, comme la plupart des Carabiens et des Staphyliniens, une salive bru- nâtre. Leurs larves, toujours aplaties et plus ou moins élargies latéra- lement, vivent dans les mêmes matières que les adultes. On a reconnu que le tube digestif des Silphides n'offre pas de jabot, mais un gésier ellipsoïde, ayant en dedans des bandes musculaires longitudinales et des soies en divers sens, puis un long estomac replié en anse. Mandibules pointues, non échancrées ; antennes terminées en massue, de quatre ou cinq articles, le plus souvent perfoliés. Pattes non contrac- tiles sous le corps; tarses de cinq articles, les antérieurs souvent dilatés chez les mâles. Face supérieure du corps plus ou moins convexe, en bouclier ; élytres offrant dans la plupart des espèces une gouttière for- tement rebordée au bord extérieur. GENRES PRINCIPAUX. NPn^RlTEi^, Duftschniidt. (Ce genre semble faire le passage de la famille des Silphides à celle des Histérides.)— Corselet subrectangle; élytres larges, un peu bombées, recouvrant tout le corps. Ex. : S. glabratus, Fabr., espèce type et unique, de France et d'AUe- magne (pi. xviir, fig. 7 ; 7 a). 348 COLÉOPTÈRES. — SILPHIENS. ]lE€ROPHORII§i, Fabr, — Corps grand, épais, subrectangle, oblong. Tête rétrécieen forme de col en arrière. Élytres aplaties, élargies, tronquées en arrière, ne recouvrant pas tout l'abdomen. Quand on saisit les Nécrophores, ils font tous entendre un petit bruit par frottement de pièces dures. Une olfaction des plus subtiles est en rapport chez ces Coléoptères avec leur importante fonction harmonique. Aussitôt que le cadavre d'un petit animal gît sur le sol, des émanations odorantes s'irradient dans l'atmosphère, et la troupe funèbre des Né- crophores ou Fossoyeurs ne tarde pas à arriver en volant. Tantôt leur corps quadrangulaire ofTre la noire livrée du trépas; le plus souvent les élytres sont bigarrées par bandes de jaune d'ocre foncé et de noir. Ces insectes bizarres exhalent une odeur à la fois musquée et désagréable. Très-souvent leur corps est couvert de petits animaux articulés, à huit pattes, les Gamascs des Coléoptères. Mœurs étranges! ces chétifs parasites ne semblent nullement vivre de l'insecte qui les porte; ils restent accrochés à ses poils et s'en servent comme d'un véritable omnibus pour se faire conduire là où la table sera de leur goût. On trouve ces petites Arachnides sur les Carabes, les Géotrupes, qui vivent de fientes d'herbi- vores, sur les Bourdons (Hyménoptères), etc. Quand les Gamases sont en contact avec le cadavre d'un animal, ils quittent le Nécrophore et se répandent dans la fourrure ; puis, bien gorgés, reprennent leur véhi- cule ailé qui les transporte de charogne en charogne. D'autre part, tout n'est peut-être pas encore bien connu à ce sujet; j'ai rencontré des Gamases sur de petits Mammifères vivants, des Mulots, ce qui explique peut-être leur premier passage sur les Nécrophores. Autour du petit cadavre s'abattent surtout les femelles. Si elles ne sont pas assez nombreuses, elles vont de tous côtés chercher des aides, et reviennent accompagnées d'une troupe avide. Il y a plutôt ici le résultat de traces odorantes transmises que d'une véritable intelligence avec communica- tion d'idées; tandis qu'on ne saurait refuser ce caractère au fait rap- porté par Gleditsch (1), qu'un crapaud, qu'on voulait à la fois sécher au soleil et soustraire à leurs atteintes, ayant été fiché en l'air au bout d'une petite baguette, les Nécrophores surent, en creusant au-dessous, faire tomber à la fois crapaud et bâton, et les ensevelirent. Ces insectes ne sont pas seulement amenés par l'attrait de leur propre nourriture ; un instinct plus vif et plus touchant les sollicite, celui de préparer le berceau et le repas de leurs enfants, en même temps qu'ils débarrasse- ront l'atmosphère d'une source d'infection, instruments aveugles d'une admirable harmonie. Les larges pattes de devant des Nécrophores, fonc- tionnant comme des bêches, servent à creuser la terre autour du petit cadavre qui s'enfonce ainsi parfois jusqu'à 30 centimètres au-dessous du (1) Citation de Lacordaire, Introduction à l'Entomologie (Paris, 1838, p. 461, t. II). SILPHIDES. — NECROPHORtJS. 3/i9 sol. Après ce travail assidu, la troupe festine et les femelles pondent leurs œufs, de sorte que le dîner des pères servira aux fils. Il sort de ces œufs, au bout de peu de temps, des larves grisâtres, à douze anneaux, plus allongées et plus atténuées aux deux bouts que celles des Silphes, avec la région dorsale écailleuse, la tête brune et dure, armée de fortes mandibules, et les pattes très-courtes, car elles auront très-peu à se mouvoir. Parvenues à leur complet développement, elles quittent le cadavre et s'enfoncent plus profondément dans le sol, à plus de 20 centimètres, s'entourent d'une coque ovalaire de terre enduite de salive gluante et qui durcit bientôt; elles s'y meuvent à l'aide de deux fortes épines de leur dernier segment. Au bout de quinze jours ou un mois l'adulte éclôt de la nymphe. Certaines espèces de Nécropbores pondent et vivent, en larves et adultes, dans les cliampignons pourris. On rencontre aux environs de Paris la plus grosse espèce du genre, le N. germanicus, Linn., atteignant 3 centimètres de long, entièrement noir, dont chaque femelle, dit-on, travaille seule quand elle enterre. Cette espèce est bien plus nocturne que les autres et dédaigne en géné- ral d'enfouir les cadavres, se ruant parfois en bandes sur une petite charogne dont le corps disparaît sous un noir essaim. Elle se glisse aussi dans les excréments des herbivores pour y mettre en pièces les Géo- trupes, car elle a des mœurs belliqueuses qui font anomalie dans son genre. Le N. humator, Fabr., de taille plus petite, 20 millimètres envi- ron, noir comme le précédent, mais avec la massue des antennes rousse; il recherche surtout les gros cadavres, comme les Silphes. C'est le grand Dermeste noir de Geoffroy. Ces deux espèces sont de toute l'Europe et du Caucase. Parmi les espèces bigarrées d'un roux vif avec bandes noires dentelées, on trouve très-communément aux environs de Paris, aussi bien que dans oute la France, l'Allemagne, la Suède, l'Itahe, le Necr. vespillo, Linn., nommé par Geoffroy le Dermeste à point, de Hongrie, à élytres noires, avec deux larges bandes transversales jaunes et ondu- lées, et la massue des antennes rousse, et le N. mortuorum, Fabr., mal nommé puisqu'il ne vit que dans les champignons, plus petit que précédent et lui ressemblant beaucoup pour les couleurs, mais ayant le santennes entièrement noires. Il n'a que 14 millimètres de long, et la dernière bande fauve des élytres est réduite à un point. Le iV. vespillo a le corselet garni de poils dorés ; il en est de même du N. vestigator, Hersch., de 15 à 20 millimètres comme lui, mais ayant les jambes pos- térieures droites et non arquées comme le précédent. Deux autres espèces bigarrées ont au contraire le corselet lisse et les jambes droites: ce sont les A', interruptus, Stephens, ou fossor, Erichs., et A', investigator, Zetterst., ou ruspalor, Erichs. Le genre Nécrophore comprend une quarantaine d'espèces d'Europe, de Sibérie, de l'Amérique russe et boréale et des États-Unis, de Californie, de Perse, de Chine. Il faut remarquer que, dans les régions les plus boréales, les mœurs desNécrophores se modifient, peut-être en raison de 3f>0 COLÉOPTÈRES. — SILPHIENS. la rareté des cadavres de petits animaux : en Laponie, dans le nord de la Suède et de rAmérique,onles trouve très-fréquemment dans les matières slercorales et dans les champignons à demi décomposés. — ^'ous repré- sentons une rare espèce de l'île Sitka, dans l'Amérique boréale russe, le N. maritimus, Eschsch., remarquable par les bandes d'un rouge fer- rugineux de ses élytres et la massue antennaire de même couleur, pi. xviii, fig. 8, et les détails principaux du N. germanicus, Linn., pi. xvni, fig. 9, antenne grossie; 9a, labre; 9 b, mandibule; 9c, mû- ehoire et palpe; 9 d, lèvre inférieure et palpe. ISlIiPaA, Linn. — Tête inclinée sous un corselet arrondi' latéralement et coupé subcarrément en arrière. Élytres plus ou moins convexes, rétrécies en arrière. Les Silphes sont nommés vulgairement Boucliers, à cause de la forme ovalaire de leur contour. En général sombres en couleur, de taille moyenne, d'odeur nauséabonde, dégorgeant en abondance une salive brune pour ramollir les chairs, ils vivent au milieu des cadavres putré- fiés; leur aplatissement leur permet de glisser avec facilité entre les interstices des organes, et leurs larves, également plates, ont les mêmes habitudes. Elles sont ovalaires, de couleur grisâtre, à anneaux amincis sur les côtés, à prothorax presque semi-circulaire, bien plus larges que les larves des Nécrophores, remarquables par les anneaux prolongés en arrière en torts angles latéraux, offrant deux appendices cylindriques autour du tube anal. Elles s'enfoncent en terre pour devenir nymphes. Les Silphes n'enterrent pas les cadavres, et, quand on les dérange de leur utile mais dégoûtante fonction, se sauvent de toutes parts, adultes comme larves, et courent rapidement sur le sol. Si on les saisit, au lieu d'essayer de mordre comme les INécrophores, ils laissent écouler par la bouche et par l'anus un fluide brunâtre et infect, dû à leur genre de nourriture, car ils ne répandent pas d'odeur au moment de la sortie de la peau de nymphe, ni chez quelques espèces à régime végétal. Quand on inquiète ces insectes, ils commencent par dresser la télé et les antennes, puis, comme par une prompte réflexion, baissent et flé- chissent un peu la tête sous le corselet, donnent à leurs pattes une certaine rigidité, sans toutefois les contracter, et restent quelques instants immobiles, JNous mentionnerons quelques espèces communes partout, et notam- ment aux environs de Paris. Ainsi : S., quaclripunctata, Linn., à corps noir, à corselet et élytres d'un jaune ptlle avec une tache sur le corse- let et deux macules circulaires noires sur chaque élytre. Geoffroy, qui a bien décrit ses mœurs, le nomme le Bouclier jaune à taches noires. Différent de ses congénères, il vit exclusivement de chenilles vivantes. On le voit voler au printemps entre les arbres des bois voisins de Paris, surtout entre les Chênes ; il tombe si l'on secoue leurs branches, et par- fois les sentiers sont jonchés de chenilles à demi rongées sur lesquelles SILPHIDES. — SILPHA, NEGRODKS. 351 s'acharnent ces Silphes. Le S. thoraçica, Linn., noir, avec corselet d'un jaune de rouille velouté et trois stries longitudinales sur les élytres, chasse aussi aux chenilles, mais en outre se rencontre dans les gros champignons pourris et dans les cadavres desséchés et exposés à la plus forte ardeur du soleil. A côté de ce Bouclier à corselet jaune de Geoffroy, et souvent dans les mêmes débris, vit le Bouclier noir, à corselet raboteux et à élijtres chiffonnées, du même auteur, ou S. rugosa, Linn. Les bois nourrissent le S. lœvigata, Fabr., tout noir, avec les élytres lisses, fine- ment chagrinées, à rebords très-élevés, ce qui l'a fait appeler la Gout- tière par Geoffroy. Cette espèce grimpe sur les plantes pour dévorer les Mollusques du genre Hélix : ainsi sur tous nos littoraux crayeux des côtes normandes et picardes, Dieppe, Tréport, Mers, etc. Sous les mousses et les écorces se trouve le S. atrata, Linn., et sous les cadavres très-humides le S. sinuata, Fabr., noir, à corselet échancré; raboteux, avec élytres échancrées à leur extrémité libre. Une espèce plus curieuse encore par ses mœurs est le S. oôscum, Linn., d'un noir terne, fine- ment ponctué, avec trois côtes sur les élytres. Nous avons déjà vu chez les Carabiques, par une exception singulière, le Zabrus gibbus, Fabr., et les Amara se nourrir à l'état de larves de céréales et y exercer parfois des ravages. Un renversement pareil de régime a lieu pour le S. obscura, dont les larves mangent les feuilles et les racines de divers végétaux, notamment des Betteraves. M. Blanchard les a rencontrées vivant dans les racines de cette plante lors des dégâts considérables dont souffrit ce végétal en 1865 dans l'arrondissement de Valenciennes, au grand détri- ment de l'industrie sucrière. Il est probable que ces larves devaient dévorer en outre les chenilles des Agrotis, cause principale du mal. On a vu aussi la même espèce, sur le bord de la mer, se nourrir d'Algues et autres plantes marines rejetées par le flot, exhaler l'odeur de marée et dégorger un liquide verdûtre. Il se présente le même fait pour le S. reticulata, Fabr., qui mange des Graminées, et peut, dit-on, nuire aux Blés. Une variété rougeàtre du 5. nigrita, Creut-, dite alpina, Bon., et qu'on rencontre sur toutes les montagnes, mange la Fraise parfumée des Alpes et des Pyrénées.— Nous représentons le S, granigera, Chevr., du Mexique, pi. xvui, fig. 10. JIEC/RODES, Leach. — Caractères très-analogues à ceux du genre précédent, dont il n'est qu'un dédoublement. Nous n'avons en Europe et dans le Caucase qu'une espèce de ce genre, le N. Uttoralis, Linn., noir, avec la massue antennaire rousse, trois côtes longitudinales sur les élytres et une petite gibbosité trans- versale entre la deuxième et la troisième côte. On le rencontre en abondance sur les cadavres des animaux noyés et rejetés sur les bords des fleuves et des rivières, ainsi le long de la Seine au-dessous de Paris. — Ses détails sont figurés pi. xviii : fig. 11, antenne j 11 a, labre ; H 6, 352 COLÉOPTÈRES. — SILPHIEMS. mandibule ; 11 c, mAchoire et palpe; 11 d, lèvre inférieure et palpes.— C. Duméril met cette espèce" dans son genre Peltis, Geoffr., nom qui n'a pas prévalu ici, mais ailleurs, dans les Nilidulides- IVECROPHILCS, lllig. — Tête inclinée. Corselet échancré antérieurement; élj'tres bombées, arrondies. Une rare espèce a été, décrite par M. Chevrolat ; elle est d'un noir brillant, à corselet pointillé etélytres à neuf stries longitudinales: c'est le N. hjdrophiloides, Eschscholtz, rapporté de l'île de Norfolk, dans l'Amérique boréale (pi. xviii, fîg. 12; 12 a, antenne). Elle se trouve dans l'Amérique russe et dans le nord de la Californie, et habite les excré- ments humains. Une autre espèce noire, le N. subterraneus, Dabi., qu'on trouve, mais rarement, dans les montagnes de l'est de la France, vit dans la terre, dans les cbampignons, et surtout dans les coquilles des colimaçons, car il est très-friand de la chair du mollusque si apprécié par les gourmets de la Bourgogne. AGYRTES, Frohl. — Massue des antennes de cinq articles. Corselet subcarré ; élytres ovales, bombées. Peu d'espèces et toujours peu fréquentes. Celles de France ne dépas- sent pas /j à 5 millimètres. Le corps des Agijrtes est plus étroit et plus convexe que chez les Silpha ; les élytres sont sans côtes, à peine rebor- dées. On trouve, mais rarement, dans les sablières aux environs de Paris, r^. bicolor, Cast., espèce qui n'a encore été vue qu'en France, et qui est noire avec les pattes rougeâtres, et 1'^. çastaneus, Fahr., répandu dans une partie de l'Europe, à élytres rougeâtres, piquetées ,en série de points, à pattes de couleur marron (pi. xvni, fig. 13; 13 a, antenne). On trouve les Agyrtes dans la mousse, au pied des arbres, en février et mars, au milieu des larves de Diptères, les Bibions ou Mou- ches de Saint-Marc. Il y a encore deux espèces, l'une de Suède, l'autre de Sibérie. La famille des Silphides présente quelques autres genres qu'il nous paraît utile de citer en raison de l'intérêt de leurs moeurs; ce sont en Outre, pour la plupart, de rares insectes chers aux collectionneurs. lEPTIHUS, Mijller. — Corps ovalaire très-déprimé, aptère; yeux nuls; antennes longues, presque filiformes. Ce genre est fondé sur un petit insecte curieux et très-rare, de 2 mil- limètres environ de long, entièremen.t d'un jaune roux pâle, rencontré d'abord en plusieurs points de l'Allemagne et en Suisse, enfin dans diverses parties de la Normandie. On le prend sous les fagots, sous les pierres, dans les vieux troncs d'arbres, dans les feuilles mortes au pied su PHIDES. — CATUPSIMORPHUS, CHOLEVA. 353 des Hùlres, ses larves vivant peut-être des végétations cryptogamiques de ces feuilles moisies. Des conduits sont pratiqués par les Musareignes dans ces amas de détritus, et c'est sans doute ce qui explique la présence des Leptines sur le corps de ces petits insectivores, courant et se cachant dans les poils, comme Ta reconnu le professeur Waga, de Varsovie. Us y trouvent probablement une température qui leur convient, et peut-être se servent-ils de ces petits animaux comme véhicule pour pénétrer dans leurs terriers où sont sans doute des détritus à leur goût. J'ai de même rencontré les Gamases des Coléoptères (Acariens) sur un Mulot. Il y a une autre espèce de Java et une du Caucase. CATOP§)liionPHl'i§(, Aube, ou Catopomorphus. — Genre très-voisin des Choleva, sauf des antennes robustes, courtes, à massue fusiforme assez renflée. Les Catopsimorphes sont des insectes toujours rares et dont les di- verses espèces isont toujours associées avec des Fourmis. On en indique plusieurs espèces en France, surtout dans le Midi, et celle qu'on aie plus de chancede rencontrer est le C. arenarius, Hampe, ou pilosus, Mul- sant, observé près de Lyon et près de Dijon. M. Rouget, de cette der- nière ville, a pu saisir quelques remarquables particularités de mœurs. Il a trouvé cet insecte dans plusieurs localités, sous les pierres, sur des coteaux calcaires assez arides et exposés au midi, toujours en compagnie de VAtta structor, Latr. Au printemps, la plupart des fourmilières de cette espèce contiennent le Catopsimorphus. Il vit en pleine sécurité au milieu des galeries des Fourmis, et se glisse sans danger pour lui au milieu d'elles dans les passages les plus étroits. Les Catopsimorphes sont carnivores, et M. Rouget les a vus dévorant de la viande bouillie qu'il donnait aux Fourmis concurremment avec celles-ci ; un d'eux cher- chait à dépecer une Fourmi presque morte sans que ses compagnes lui portassent aucun secours. Us doivent vivre aux dépens des provisions amassées dans la fourmilière, et probablement subissent leurs métamor- phoses à l'intérieur, car M. Rouget y a trouvé des exemplaires encore mous et peu colorés, n'ayant évidemment pas été encore expotés à l'air et à la lumière hors de la fourmilière. Les espèces sont de l'Europe méridionale, d'Algérie, de Syrie, de Ceylan. C'IIoriîVA, Latr,, ou Catops, Payk. — Des yeux ; antennes grêles et longues; palpes terminés par un article pointu. Ce sont de petits insectes bruns, très-vifs, très-agiles, à démarche vacillante. Ils vivent sous les pierres, et surtout au milieu des détritus végétaux, mousses, feuilles mortes, bois vermoulu, champignons pour- ris; assez souvent on en observe sous les cadavres et les matières ani- males décomposées ; enfin, il en est qui hantent les fourmilières. On trouve dans les bois des environs de Paris, au premier printemps, le C. depressa, Murray, à l'entrée des terriers de lapins. U faut encore indiquer les C. picipes, Fabr., ou major, Dej., de 5 millimètres, noir, GIRARD. 23 35ù COLÉOPTÈRES. — SILPHIENS. à pattes brunes; C. fusca, Hoffm., ou tristis, Panz., de h millimètres, d'un brun foncé, et une petite espèce de 2 millimètres, ovalaire, un peu dé- primée, à corps d'un brun foncé, très-soyeux, le C. sericea, Fabr. Cette dernière espèce est très-commune. Les espèces du genre Chokva sont très-disséminéeSj car on rencontre des Choleva en Europe, aux îles Canaries, en Algérie, dans l'Amérique du Nord, le Chili, la Californie, la Sibérie, la Tasmauie. Les Choleva nous conduisent à un genre qui ne devrait peut-être pas en être séparé, car nous savons le peu d'importance qu'on doit atta- cher à la disparition des yeux. C'est le genre : ADEIiOPS, Telkampf. — Corps ovale-oblong, aptère, convexe ; yeux nuls. An- tennes assez longues, grossissant graduellement et très-légérement vers l'extré- mité ; tarses de cinq articles, les antérieurs de quatre, au moins chez les femelles. Les Adelops sont de petits insectes aveugles, ou du moins supposes tels, rapproches des Leptinus par le manque d'yeux et d'ailes. Ils sont cepen- dant très-agiles, et il en est qui vivent sous les feuilles mortes, sous les détritus; on les trouve dans les montagnes. Il est une espèce qui se plaît dans le nord de la France et dans le sud de l'Angleterre, c'est VA. VVollastoni, Janson, qu'on trouve souvent en abondance dans les pommes pourries et enterrées. Mais ce qu'offre de plus curieux le genre Adelops, c'est l'existence d'un certain nombre d'espèces propres aux cavernes. Pour eux comme pour les autres insectes cavernicoles, chaque caverne ou chaque groupe de cavernes ayant sans doute des communications est un centre de création spéciale. On sait que la faune hypogée a com- mencé à être explorée en Allemagne dans les grottes célèbres de la Carinthie et de la Carniole, et qu'outre un Balracien, le Protée, on y a trouvé des Mollusques, des Crustacés, dos Insectes presque tous aveu- gles; dans la grotte du Mammouth (Amérique du Nord), sont deux es- pèces de Poissons, des Crustacés, dont une Écrevisse, des Arachnides et des Insectes. Le genre Adelops est représenté dans les deux mondes par des espèces des cavernes; il a été créé pour une grande espèce trouvée dans la célèbre grotte du Kentucky dite du Mammouth: c'est VA. hirtus, Telkampf. Les espèces cavernicoles d'Europe sont de moindre taille, comme en rapport avec des grottes moins grandioses; on en a rencontré deux dans les grottes de Carinthie qu'habitent les étranges Leptoderus, d'autres dans des grottes de Carniole, de Dalmatie ou des Pyrénées et de la France méridionale. Ces insectes vivent souvent à demi-lumière. Nous devons signaler les espèces de nos grottes françaises : VA. pyre- nœus, Lespés, de 3°"", 5 à Ix millimètres, ses congénères d'Europe étant en général de taille moindre, ferrugineux, à corps tout pubescent, (pi. XII, fig. 7) (1), vivant de détritus, de débris de paille pourrie prove- . (1) Lespés, Note sur quelques Insectes des grottes de VAriége, p. 278, et pi. XVII {Ann, des se. nat., ZooL., 4« série, 1857, t. VII). SILPHIDES. — LEPTODERUS. 355 nant des torches des guides, découvert dans des grottes des montagnes de l'Ariége près de Tarascon, les grottes de Niaux, la grotte de Sabart ; — l'A. speluncarum, Delarouzée, de la grotte de Bétharrara (à la limite des hautes et basses Pyrénées), de 3 millimètres de long, trouvé dans une obscurité complète, sous des pierres mouillées constamment par l'eau qui suinte goutte à goutte des stalactites ; — \A. lucidulus, Delar., de 2 millim. de long, rencontré à une grande profondeur sous des dé- bris de paille moisie dans la grotte des Demoiselles, près de Montpellier; — r^. Delarouzei, Fairm., de 1 millimètre à 1"°',5, de la grotte del Rey (Pyrénées-Orientales);— r^.^onuowZom, Jacq. du Val, pouvant atteindre h millimètres et demi, ki plus grande des espèces d'Europe, en entier d'un roux jaunâtre, de diverses grottes des Pyrénées-Orientales; — VA. grandis, Fairm., de 2 millim. de long, d'un roux assez brillant, avec pubescence fauve, de la grotte d'Isturitz (Basses-Pyrénées). LEPTODERU!^, Schmidt, ou Leptodirus, Sturm. — Antennes longues et grêles; yeux nuls. Corselet très-grêle et cylindrique. Élytres soudées, sans ailes au- dessous, ovalaires ou oviformes, convexes, débordant énormément. Pattes très- longues et très-grêles ; tarses de cinq articles, quatre antérieurement chez les femelles. A ces caractères si nets , on ne saurait méconnaître le plus étrange représentant de la faune hypogée, un insecte presque fantastique. On dirait une espèce d'Araignée vésiculeuse, rouss'itre, transparente. Les Leptcdères constituent une des découvertes les plus intéressantes de l'entomologie moderne. Ils vivent exclusivement dans les parties les plus reculées de quelques cavernes de laCarniole où ne pénètre jamais un rayon de lumière. Ce sont eux surtout qui prouvent que le Créa- teur n'a pas voulu laisser sans êtres vivants l'horreur de la profonde nuit des cavernes, de même qu'il a peuplé de Sarcodaires et d'Infusoires à carapaces les sombres abîmes de l'Océan, fermés à tout éclat du soleil. On ne connaît encore que trois espèces de Leptodères, dont la taille varie de Zi à 8 millimètres environ : le L. Hohenwarthi, Schmidt, que nous représentons pi. xn, flg. 8, de la grotte d'Adelsberg, si célèbre par le lac souterrain où vit le Prolée décoloré, aux branchies d'un rouge de sung ; le L. amjustatus, Schmidt, de la grotte de Voleja-Jama, et le L. sericeus, Schmidt, de celle de Cuba-Dol. Comme tous les insectes des cavernes, ils sont d'une couleur uniforme, d'un brun clair ou fer- rugineux. Ils ont la lumière en aversion, et doivent sans doute en per- cevoir une sensation douloureuse à travers leurs téguments car le moindre rayon qui les frappe les fait fuir assez rapidement entre les fentes des pierres, où ils sont fort difficiles à prendre. On les trouve dans les fissures des stalagmites qui recouvrent le sol, ou accrochés à quelque distance de celui-ci aux stalactites qui pendent aux parois. Ils 3r>6 COLÉOPTÈRES. — SILPHIENS. marchent en élevanl leur corps sur leurs longues pâlies, comme sur des échasses ; quand un bruit se fait entendre, ils s'arrêtent, comme étonnés de cette commotion qui trouble l'éternel silence des entrailles de la terre, appliquent leur corps sur le sol en étalant leurs grandes pattes, redressent leurs antennes, et restent immobiles dans cette posi- tion jusqu'à ce qu'on les louche. On dit qu'ils ont pour ennemie une Arachnide du genre Obisium, aveugle comme eux, vivant dans les mêmes profondeurs reculées, et qui paraît en faire une grande destruction. Plus récemment on a découvert quelques espèces des grulles dérivant des Leptoderus, mais avec des formes moins exagérées, qui nous ramè- nent peu à peu aux Choleva; les élytres s'abaissent, le corselet devient plus large et plus court. Nous citerons le genre Pholeuon, Mamp., inté- ressant pour nous parce que, outre des espèces des grottes de Hongrie, il offre une espèce française, le P. Querilhaci (pi. xii, fig. /i), découvert par M. Lespés dans les grottes des montagnes de l'Ariége (grande grotte de Miaux et grotte de Sabarl), de 3™'", 5 de long, à corps pubes- cent, ferrugineux. 11 marche lentement à la surface des stalactites humides. La lumière ne l'impressionne pas, mais au moindre bruit il fuit et se blottit dans quelque petit trou, tandis que les Lcplodères de la Carniole centrefont le mort à la moindre alerte. Comme eux, il se nourrit de divers détritus. A l'Allemagne seule, jusqu'à présent, appartiennent le genre Dri- meotus, Miller, des grottes de Hongrie, notamment celle d'Igriez, dans le comitat de Bichar, et le genre Oryotus, Mill., des grottes de Carniole. Famille III. — SCAPHIDIDES. Mandibules fendues à l'extrémité ou bidentées. Antennes non cou- dées, terminées par une massue allongée de cinq articles. Palpes des deux sortes, à dernier article obconique ; tarses de cinq articles bien distincts, habituellement pareils dans les deux sexes. Corps ovalaire, rétréci aux deux bouts, convexe en dessus, épais au milieu. Corselet élargi en arrière. Pattes non contractiles, allongées, grêles. Insectes de taille médiocre, très agiles, de mœurs mal connues, vivant, ainsi que leurs larves, dans les champignons, les bois pourris, parfois les car- casses desséchées. Principalement d'Kurope. GENRE PRINCIPAL. SrAPHIDIl'M, Oliv. — Antennes de onze articles, les six premiers allongés, les cinq derniers hémisphériques, formant une massue prolongée. Paltes longues et grêles. La seule espèce européenne de ce genre, le 5. quadrimaculatum, Oliv., se trouve en France, notamment aux environs de Paris, en An- NITIDULIDES. 357 gleterre, en Suède et en Allemagne. — PI. xviii, fig. 15, antenne; 15a, labre; 15 6, mandibule; 15c, mâchoire et palpe; 15d, Id.we inférieure et pulpes ; 15 corces, et certains aussi dans des Champignons, en général secs, ou dans les substances desséchées d'ori- gine végétale. Le régime des larves et des adultes est reconnu carnas- sier pour presque tous, au moins d'une manière certaine; ils se nour- rissent de larves lignivores ou de l,eurs détritus azotés : c'est là un caractère général, et qui n'est pas sans valeur au point de vue synthé- tiique. MONOTOMA. 367 La place harmonique de cette tribu est, après les Dermestiens, à la fin des Coléoptères zoophages; les Ips, que nous avons rangés parmi les Nitidules, se lient en outre incontestablement aux Colydiens. Peut- être doit-on les faire suivre immédiatement des Érotyliens, Cucujiens, Coccinelliens, les Chrysoméliens terminant au contraire à l'opposé les Coléoptères phytophages, après les Cérambyciens. L'étude, à peine ébauchée, des mœurs et du régime des Érotyliens et Cucujiens, éclair- cira beaucoup cette question. On comprend que nous ne puissions presque pas formuler de carac- tères généraux. Les antennes ont le plus souvent, et au maximum, onze articles» et se terminent par une petite massue. L'abdomen est toujours formé de cinq segments ; les tarses présentent toutes les variations pour les nombres de leurs articles. Les larves sont le plus souvent oculées, parfois aveugles, toujours douées d'un cer- tain aplatissement pour se glisser dans les moindres interstices, toutes agiles et munies de six pattes thoraciques à un seul crochet ; enfin toutes armées de fortes mandibules et couvertes de poils longs, constitution qui indique un régime carnassier, et surtout une nourriture formée de substances azotées sèches, comme les larves très-poilues des Dermes- tiens. Les variations des caractères étant très-grandes, nous n'attachons aucune valeur sériale aux genres dont l'examen va suivre. Le genre par lequel nous commençons cette tribu forme le type d'une petite famille de place fort discutée, que Jacquelin du Val range dans les (-Cucujiens. La difficulté de bien compter les articles des tarses dans les très-petits insectes a beaucoup contribué à l'hésitation sur la posi- tion à assigner au genre Mo7iotoma. Aube admet U articles partout, • Erichson 3, M. Redtenbacher li aux tarses antérieurs et intermédiaires, 3 aux postérieurs. Enfin Jacquelin du Val, par une observation très- attentive sur plusieurs espèces, s'est assuré qu'ils ont partout 5 articles, le premier très-court et presque en entier caché dans la jambe, ces tarses étant construits sur le plan des Cucujes, les quatre premiers articles courts, le cinquième très-long et portant deux crochets simples. La méthode tarsale, bonne au point de vue des affinités générales, perd toute valeur pour les groupes plus ou moins aberrants, types en quelque sorte de créations inachevées. MO;, Herbst. — Antennes de onze articles, le premier globuleux, le second ovalaire, les trois derniers en massue allongée, les autres cylindriques. Palpes réduits ; lobe externe des mâchoires arqué et pointu au bout. Corselet plus étroit que les élytres, celles-ci oblongues-ovales. Ce genre comprend de nombreuses petites espèces, près d'une cen- taine, ù corps oblong, assez convexe, en général glabre et ailé. Elles se rencontrent dans les substances végétales décomposées, les vieux chaumes des toitures, sous les écorces et sous les mousses, dans les petits Cryptogames, sur le feuillage, les murs, dans les maisons, etc. L'espèce la plus commune est le L. minutus, F.inn., de toute l'Europe du bassin méditerranéen, dont M. E. Perris a fait connaître la larve trouvée dans le chaume d'un toit. Elle est petite, allongée, atténuée à l'extrémité, couverte de longs poils fins, avec cinq ocelles, des antennes de quatre articles, les segments thoraciques plus grands que ceux de l'abdomen, et le dernier de ceux-ci prolongé en un mamelon anal ser- vant à la progression. Pour la nymphose, elle se fixe par ce prolongement anal, et sa dépouille reste adhérente à l'extrémité de la nymphe. Celle- ci est remarquable par ses longs poils terminés en bouton et disposés en groupes symétriques, antérieurement et latéralement. — Nous repré- sentons le L. exilis, Mannerh., ou lilliputanus, Motsch. (pi. xx, fig. 9), à tête et corselet fauves et élytres noires, de France, d'Allemagne, d'Ita- lie, d'Algérie, et les détails du L. elongatus, Curtis, d'Angleterre, de France et d'Allemagne (pi. xx, fig. 10, antenne: 10a, labre; 10 6, mandibule; 10c, mâchoire; 10 d, lèvre inférieure). Les diverses régions de l'Europe, y compris la Laponie et les hautes montagnes, renferment le plus grand nombre d'espèces de Latridius. D'autres sont disséminées sur les points du globe les plus variés : Madère, l'Egypte, l'Anatolie, la Perse, le Caucase, la Sibérie, le Kamtchatka, le Japon, les Indes orientales, Ceylan et le Cap, l'Amérique russe, la Pensylvanie et l'illinois, la Californie et le Brésil, enfin la Tasmanie, la Nouvelle-Zélande et la Nouvelle-Calédonie. Le genre voisin Corticaria, Marsham, dont le nom indique la vie sous les écorces, comprend encore une plus grande quantité d'espèces de tous pays, sauf l'Australie. Les genres suivants, qu'on peut appeler des Colydiens propres, ont certains caractères communs : palpes et mandibules très-courts; pattes courtes, à tarses de quatre articles, simples ainsi que leurs crochets. GIRARD. 24 370 COLÉOPTÈRES.— GOLYDIENS. COLYDIVM, Fabr., et AliIiO!lilIIM, Erichs.— Genres très-voisins.— Antennes de onze articles, les trois derniers en massue perfoliée. Corselet très-long, sub- cylindrique et un peu déprime, rebordé sur les côtés. Élytres très-allongées et parallèles, sillonnées et ponctuées. Pattes courtes. Coléoptères attirent l'attention au premier aspect, et ce qu'in- diquent les noms spécifiques, par leur corps très-allongé, parallèle, sub- cylindrique et glabre. A l'état adulte, ils habitent sous les écorces ou dans l'intérieur du bois en voie de décomposition; on peut aussi les trouver dans les Champignons, et rarement cpigés. Il est fâcheux que leurs espèces ne soient pas plus nombreuses, car ils rendent de véritables services à la sylviculture; leurs larves, en affet, vivent dans les galeries du bois, aux dépens des larves funestes des Apatiens et des Scolytiens, se nourrissant de leur chair et de leurs détritus. Leur corps est allongé, cylindrique, grêle, recouvert d'une peau fine ; elles ont des antennes de quatre articles et cinq stemmates de chaque côté; les segments sont garnis en dessus et en dessous de poils isolés et redressés; le dernier segment abdominal porte en dessus un écusson corné, muni de deux pointes recourbées, et se termine par un court tube anal. La nymphe a, sur le thorax, une couronne de petites épines; à sa partie postérieure sont deux crochets recourbés en dehors, lui servant à se cramponner aux écorces pour faciliter la sortie de l'adulte. M. Ralzeburg avait publié à tort, comme nuisibles aux forêts, les larves des C. elongatiim, Fabr., de toute l'Europe et d'Algérie, surtout des Pins, et C. filiforme, Fabr., de Suède, de France, d'Allemagne, principale- ment sur les Chênes. M. E. Perris a reconnu que la larve de la première espèce dévore les larves du Platijpus cijlindrus; la larve de 1'^. sulcatum, Oliv., de France et d'Allemagne, se nourrit surtout des larves du Sco- hjtus multistriatus, sous les écorces des Ormeaux, et celle de l'A bicolor, Herbst, des mêmes pays, vit sous les écorces des Pins morts, aux dépens des larves du Tomicus Laricis, et d'autres Tomiques. Outre deux espèces d'Europe, dans chaque genre, on compte quelques espèces dans l'Amé- rique septentrionale, au Sénégal, aux îles Canaries et en Tasmanie. DIODENM.%, Latr. — Antennes pubescentes, de onze articles, 1 et 2 un peu plus gros que les suivants, 10 et 11 renflés en massue. Corselet arrondi et denliculé sur les côtés. Élytres ovales, à bords denticulés. Pattes courtes; tarses à trois premiers articles égaux. Ce genre ne comprend qu'un petit insecte, rugueux et couvert de cils, de 2 millimètres de long, entièrement d'un brun fauve, se couvrant pendant la vie d'une efflorescence grisâtre, trouvé d'abord en Autriche et en Carinthie, dans les souches de Hêtres, puis dans le reste de l'Alle- magne, en France orientale, en Russie, en Grèce. C'est le D. subterra- nea, G.-Mén. et Erichson (pi. xx, fig. U; Ua, antenne ; U b, jambe et tarse postérieurs). BITOMA, PSAMMŒCUS. 371 BITOMA, Herbst, ou DiTOMA, Illig. — Menton carré, transversal; languette courte, un peu échancrée en avant; lobe interne des mâchoires petit, l'externe grand, arrondi, cilié. Dernier article des palpes des deux sortes grand et ovalaire ; mandibules bifides au sommet. Antennes de onze articles, les deux derniers en forte massue. Les trois premiers articles des tarses courts et égaux aux quatre pattes antérieures, décroissants aux postérieures. Les Bitomes sont des Coléoptères de petite taille, à corps allongé, déprimé et glabre. On trouve communément dans toute l'Europe et l'Algérie une espèce qui, comme les autres du genre, vit exclusive- ment sous les écorces des arbres. On la prend aux environs de Paris. C'est le B. crenata, Herbst, avec quatre côtes sur le corselet, et de plus fines sur les ély très, celles-ci ornées de taches fauves.— Nous donnons les détails de l'adulte pi. xx : fig. 6, antenne ; 6 a, labre; 6 b, mandibule; 6 c, mâchoire et palpe; 6 d, lèvre inférieure et palpes; 6 e, jambe et tarse antérieurs.— La larve du B. crenata possède les caractères essentiels des larves déjà décrites de la tribu ; elle vit sous les écorces des Pins maritimes et des Chênes, dans les galeries de divers Tomicus (Scolytiens), dont elle fait sa proie. L'espèce précédente est la seule qni existe en Europe. Une vingtaine d'autres sont des plus disséminées aux îles du Cap-Vert, dans l'Amé- rique méridionale et boréale, les Antilles, la Californie, l'Egypte, Cey- lan, la Nouvelle-Hollande, la Nouvelle-Zélande et la Nouvelle-Calédonie. Nous représentons le B. undala, G.-Mén., de Cuba, pi. xx, fig. 5. PSABmcECIJS, Latr., ou Psammoechus, Boudier. — Antennes de onze articles terminées en massue allongée et peu tranchée ; palpes maxillaires à dernier article très-fortement sécuriforme. Corselet plus étroit que les élytres, rétréci en arrière, très-finement rebordé sur les côtés. Tarses subpentamères, très-velus inférieurement, à troisième article bilobé en dessous et recevant dans son échancrure supérieure le quatrième, qui est petit. Corps oblong, peu convexe. Ce genre est fondé sur le P. bipundatus, Fabr. (pi. 1" des Chryso- méliens, fig. 5; 5a, tarse; 5 6, antenne; 5c, terminaison du palpe maxillaire). C'est un petit insecte de 3 millimètres environ, fauve, avec élytres linéo-ponctuées, ayant chacune deux taches noires, une grande et une petite au bout, se rencontrant sur le bord des eaux, au pied des plantes et sur leurs tiges, notamment celles des Roseaux, la larve vivant, d'après Boudier, dans leurs racines. Nous avons encore affaire ici à un de ces genres incertœ sedis, fréquents dans les tribus qui nous occupent. Latreille, probablement par analogie supposée de régime avec les Chry- soméliens aquatiques, les rangeait, avec doute toutefois, dans cette tribu (ce qui explique sa place dans nos planches tirées d'un ouvrage ancien). M. Guérin-Méneville, dans son texte (p. 257), reconnaît, ce qui n'est pas certain, qu'il doit appartenir aux Xylophages. Enfin Jacquelin du Val le fait entrer dans une petite famille spéciale, les Telmatophi- lides, comprenant des insectes voisins des Cucujiens (Psammœchus), des 372 COLÉOPTÈRES. — COLYDIENS. Melyris, des Dermestes, des Mycétophages. L'espèce (ype, F. bipunctatus, est de l'Europe tempérée, avec diverses variétés. Il y a encore deux autres espèces, une de l'île Maurice, l'autre de Ceylan. NYIVCHIT.%, Hellwig, et CICOMES, Curtis. — Genres très-voisins. — Antennes de dix articles, les deux premiers assez gros, les sept suivants se raccourcissant et grossissant peu à peu, le dixième en gros bouton globuleux. Lobe interne des mâchoires petit, l'externe plus large et plus long, tous deux ciliés. Palpes à dernier article ovoïde. Corselet subcarré, rebordé ; élytres allongées, parallèles. Pattes courtes, à troisième article des tarses plus court que les deux premiers. Les Synchites étaient regardés, à tort, comme Xylophages très-probable- ment, parles anciens auteurs. Ce sont de petits insectes à corps linéaire, assez convexe, garni en dessus de cils courts ; ils vivent sous les écorces, et sont restreints comme nombre d'espèces. Nous citerons le C. variega- tus, Hellw., ou Carpini, Curt., espèce des îles Britanniques, de France et d'Allemagne, existant aux environs de Paris, mais rare. Nous figurons une variété trouvée jadis par M. Guérin-Méneville à Sainl-Cloud, en battant des fagots d'orme sur un drap. Longue de U millimètres, elle est d'un jaune de rouille et ondulée de bandes d'un brun noirâtre; d'autres fois c'est la disposition inverse qui se présente. — Cette variété est figurée dans la planche où se trouvent les Scolyliens et les Paussiens, ce qui résulte de la place anciennement assignée à ce genre (fig. 16 : 16o, antenne ; 16 6, labre; 16 c, mâchoire etpalpe; 16d, lèvre inférieure et palpes; 16 e, tarse antérieur; 16/, tarse postérieur).— M. Guérin- Méneville a rencontré le type de Curtis ap milieu du terreau produit par la décomposition des troncs de charmes dans les forêts de Fontaine- bleau et de Compiègne. Pour terminer l'étude des Colydiens, nous examinerons deux genres de la petite famille des Trogositaires ou Trogositides. Ce sont des Coléo- ptères peu nombreux en espèces, celles-ci dispersées partout. Ils ont des antennes de onze articles, les trois derniers en massue lâche, comprimés. Le corselet est toujours plus ou moins distant de la base des élytres, et celles-ci recouvrent toujours complètement l'abdomen. Les paKes, médiocres ou courtes, ont, dans les deux sexes, des tarses de cinq articles, toujours simples, le premier très-petit. Les adultes ne se trouvent jamais sur les fleurs, mais sous les écorces ou dans les plaies humides des arbres, certains dans les maisons ou magasins, vivant au milieu de ' divers fruits secs, surtout de céréales, «e qui les a rendus à peu près cos- mopolites. On peut conclure, de tous les faits déjà observés, qu'adultes et larves, ces insectes sont carnassiers. TROGOSITA, Oliv. — Lobe externe des mâchoires allongé, cilié, l'interne à peine distinct ; mandibules bidentées au bo;it. Dernier article des palpes subovalaire ; massue des antennes perfoliée. Tête subcarrée. Corselet rétréci en arrière; élytres allongées, parallèles. TROiiOSli'A, TEM-NOCUrLA. 3/3 Ces insectes ont le corps long et assez large, déprimé et presque plan en dessus. Tous sont de taille moyenne ou un peu au-deshious, noirs ou brunâtres. Le type est le T. mauritanica, Linn., commun en Europe, en Algérie, dans le Caucase, et qu'on rencontre réellement partout, car il a été transporté parle commerce. Sa larve est oblongue-ovale, déprimée, garnie de longs poils dressés et peu serrés sur les côtés, d'un blanc sale, avec la tâte, la plaque cornée du prothorax et le bouclier du dernier segment abdominal d'un noir brunâtre. Cette larve, parvenue à toute sa taille à la fia de février, a alors 15 millimètres de long sur 2 milli- mètres de large. Elle est aveugle, munie d'antennes de deux arlicles, de mandibules très-robustes, saillantes, à pointe très-aiguë. Les segments du mésothorax et du métalhorax ont chacun deux plaques cornées d'un brun clair,- le bouclier du dernier segment de l'abdomen sepro longe postérieurement en deuxpointcs robustes, et un tube anal termine ce segment. Cette larve, rare dans le >'ord, est commune dans le midi de la France dans les tas de blé. A la fin de l'hiver, elle les quitte et subit sa nymphose dans les troncs et fentes des greniers, la poussière ou la terre. Sous le nom de Cadelle, on la regarde, dans le midi de la France, comme très-nuisible, perforant les grains de blé pour aller de l'un à l'autre, et en gâtant ainsi plus qu'elle n'en consomme. Il est certain, comme le disait déjà Olivier, qu'ainsi que l'adulte, elle mange les larves de Calandre (Coléoptères), de Teigne, d'Alucite (Microlépidoptères), et que les grains de blé qu'elle perfore sont ceux habités par la larve du Charançon : c'est en réalité un très-utile insecte. Le T. mauritanica est l'insecte que Geoffroy nommait la Chevrette brune. C'est une espèce de toute l'Eui'ope, avec diverses variétés de région, et aussi d'Asie et d'Amérique. Nous représentons une espèce analogue des Indes orientales, le T. crenicoUis, Guérin-Méneville, pi. xx, fig. 12 : 12 a, partie antérieure de la tête vue en dessus; 12 6, bouche en dessous; 12c, mâchoire et palpe; 12 f/, antenne. — Les Trogosites comptent /i5 espèces, surtout américaines, quelques-unes de Ceylan et des Indes, une de Tahiti, une de Madère, une de la Nouvelle-Zélande. tem:iochii>.%, Westw., Erichs. — Mandibules Ircs-robustes, assez saillantes, bidentées au bout; massue des antennes lâche, obtusément dentée. Élytres allongées, parallèles, arrondies au bout. Ce genre comprend des espèces de grande et de moyenne taille, sou- vent ornées de belles couleurs métalliques. On trouve, dans le midi de l'Europe et en Algérie, le T. cœrulea, Oliv. (pi. xx, fig. 1), bel insecte d'un bleu verdâtre, parfois violet, légèrement convexe. L'adulte vit sous les écorces et se rencontre aussi dans l'intérieur des maisons, comme le Trogosila mauritanica. Olivier dit l'avoir pris souvent dans le vieux pain, La larve est plus linéaire que celle de la Trogosite ; elle a des mandibule 374 COLÉOPTÈRES. — CUGUJIENii. très-dentées, des antennes de quatre articles et deux ocelles de chaque côté. Elle réside sous les écorces, surtout des Pins, et détruit beaucoup de larves lignivores de Scolytiens, de Longicorncs et de Buprestiens. En Italie est une variété T. virescens, Rossi. Le genre Temnochila compte une vingtaine d'espèces, la plupart de l'Amérique chaude. Les ïrogositaires sont encore un de ces groupes aberrants, difficiles à placer. Jacquelin du Val les met dans une famille dite des Peltid'es, détachée desNitidulides d'Erichson, et adoptée par M. Lacordaire. Celui- ci selon son usage, s'est tiré d'embarras en élevant les Trogositaires au rang de famille séparée. Tribu des Cijcujiews. Les Cucujiens constituent une petite tribu de Coléoptères qui pourra, peut-être, être réunie aux Colydiens, quand on sera plus complètement renseigné sur les mœurs de ces insectes, et surtout en abandonnant tout souci de la méthode tarsale, qui obligerait à créer un grand nom- bre de tribus pour les familles peu homogènes qui prennent place dans ces deux tribus. Ils ont également des rapports avec les Érotyliens par leurs longues antennes filiformes, qui les relient aussi aux Céramby- ciens. Le corps de ces insectes est toujours plus ou moins allongé et aplati, parfois même à un degré considérable. La vie est en relation nécessaire avec cette forme, et se passe principalement sous les écorces, parfois dans le bois en décomposition, et aussi, chez les Sylvanus, dans les interstices des grains de blé, de riz et autres conserves végétales. Les mandibules des Cucujiens sont robustes et sujettes à devenir al- longées et saillantes. Les yeux sont en général petits et peu proémi- nents; les pattes assez courtes, à cuisses fortes. Les tarses varient, tan- tôt de cinq articles, le premier de grandeur normale, tantôt tétramères ou subpentamères, mais d'une manière spéciale, par réduction du pre- mier et non du quatrième article. Chez les Sylvanusy au contraire, c'est le quatrième article qui est nodiforme, à la façon des vrais tétra- mères, les Curculioniens, les Cérambyciens. Ces mêmes Sylvarius, fort difficiles à placer sérialement, ont les antennes terminées en massue, tandis qu'elles sont filiformes dans les autres Cucujiens. M. E Blan- chard fait commencer par eux la tribu des Dermestieus. C'est Erichson qui a rapproché des vrais Cucujiens ce groupe aberrant. Jacquelin du Val place les Sylvanus au commencement des Cryptophagiens. Tous ces insectes faisaient partie pour Latreille de la famille hétéro- gène des Xylophages, ainsi que les Colydies, les Trogosites, etc. Il paraît presque certain, d'après le peu qu'on sait encore des mœurs des Cucu- jiens, que, pas plus que les Colydîens, ils ne méritent cette dénomi- nation. Les larves ne rentrent pas dans un plan complètement identique. SYLVANUS. 375 Elles sont, comme les adultes, allongées et plus ou moins déprimées, pour vivre sous les écorces ou intercalées entre de menus fragments. Elles sont en général oculées, toujours pourvues de pattes thoraciques fonctionnelles, et portent des crochets, des épines, des écussons cornés. Elles se rapprochent des larves de Pyrochroa dans les Cantharidiens, des larves de Colydiens, et, d'une manière plus éloignée, de celles des Dermestiens. Cette conformation générale, ces analogies, tendent à rendre des plus probables l'opinion de M. E. Perris, vériflée pour plu- sieurs espèces, que ces larves sont toutes carnassières et vivant, dans les lieux qu'elles habitent, aux dépens des larves réellement végétivores, et aussi de leurs excréments, de leurs dépouilles. Toute la tribu appar- tient dès lors aux insectes utiles. Voici les caractères généraux des Cucujiens adultes : Languette sail- lante, avec palpes courts et filiformes de trois articles ; mâchoires à deux lobes, à palpes courts et filiformes de quatre articles. Antennes de onze articles, souvent grenues, filiformes, ou terminées par une petite mas- sue de trois articles {Syloamis et genres annexes). Abdomen de cinq segments subégaux, tous libres ;. hanches antérieures et intermédiaires globuleuses et distantes, les postérieures contiguës; tarses simples, tantôt pentamères dans les deux sexes, tantôt hétéromères chez les mâles et pentamères chez les femelles. • GENRES PRINCIPAUX. Nous commencerons l'étude générique de la difficile tribu qui nous occupe par le genre Sylvanus, en raison des analogies de mœurs, de régime et de cosmopolitisme avec les espèces types des Trogosites en général. Les tarses ont cinq articles dans les deux sexes. SYIiVAHUS, Latr. — Tète rétrécie en arrière, tronquée antérieurement. Antennes à peu près de la longueur de la tête et du corselet réunis, se terminant par une massue allongée et assez lâche de trois articles. Corselet allongé, à angles antérieurs très-saillants, puis rétréci peu à peu d'avant en arrière ; élytres allongées et parallèles. Corps long et déprimé. Les petits Coléoptères de ce genre sont conformés de manière à se glisser dans les plus étroits passages; leurs cuisses sont robustes et leurs jambes courbes. Ils vivent dans les écorces, dans les herbes, dans diverses substances végétales sèches. Ces derniers sont devenus par ce fait à peu près cosmopolites, et l'Europe a reçu ainsi une ou plusieurs espèces exotiques qui se sont acclimatées. On se sert, comme caractères spécifiques, du nombre de dents dont les bords du corselet sont souven munis. Nous représentons le S. plaiiatus, Germar, ou S. Zimmermanni, G.-M. (pi. XX, fig. 11), des États-Unis (Sud, Caroline), à corselet n'ayant qu'une dent au sommet de chaque côté, et le S. surinamensis, Linn., ou S. frumentarius, Fabr., ou sexdentatus, Fabr,, de toute l'Europe et d'Al- 376 COLÉOPTÈRES. — CUCUJIENS. gérie, importé par le commerce dans l'Amérique du Nord (pi. xx, fig. 7, moitié antérieure très-grossie, portant six dents de chaque côté du corselet; 7 a, tarse antérieur à quatrième article très-petit). U est d'un brun ferrugineux, de forme svelte et élancée, plat, long de a'"", 5, couvert de poils jaunâtres couchés ; le corselet, plus étroit que les élytres, offre trois carènes longitudinales. La larve, qui atteint 3 milli- mètres, est du type de celle des Cucujus, un peu moins déprimée et plus charnue, terminée par un tube anal, mais au dernier segment dé- pourvu d'appendices ; elle porte six pattes articulées, latérales, uniun- guiculées. Selon Blisson (l), au moment de se changer en nymphe, cette larve se fixe sur un corps solide par l'extrémité de l'abdomen, à l'aide d'une substance visqueuse qu'elle sécrète à cet effet, après s'être entou- rée des détritus environnants. La nymphe est très-remarquable en ce que ses segments thoraciques et les huit premiers de l'abdomen portent sur les côtés des petits appendices très-réguliers, qui la font paraître comme denticulée ; deux: paires d'appendices pointus la terminent, ser- vant à retenir la peau de la larve. Le S. frumentarius, type d'espèces européennes très-analogues, se rencontre d'habitude, ainsi que sa larve, dans les grains de blé, le riz, les figues sèches, le sucre, etc. On l'a trouvé aussi sous les écorces des arbres, ce qui fait penser qu'il ne se nourrit pas de matières végétales, mais des insectes réellement ligni- vores et de leurs larves. M. E. Perris a constaté que la larve d'une es- pèce voisine, le S. unidentatus, Oliv. et Fabr., de toute l'Europe^, vit sous les écorces d'arbres variés, au milieu des détritus laissés par divers insectes, détritus dont elle semble se nourrir. A côté du S. frumentarius se place une espèce, unique en Europe, très-cerlainemciil d'origine exotique, existant dans l'Amérique du Nord et l'on peut dire un peu partout, se rencontrant dans les céréales et autres substances sèches, dans les paquets de plantes ou de résines pharmaceutiques étrangères, la scammonée, le jalap, etc , naturalisée surtout dans le midi de la France et en Algérie. Elle est longue de U millimètres, d'un tout autre aspect que les Sylvanus , de forme oblongue, subparallèle, bien plus large et plus épaisse que l'espèce précédente, d'un brun plus foncé, à corselet sans carènes, ayant quatre pointes aux quatre angles et les bords ondulés plutôt que dentelés. C'est le Nausibtiis, Redt., dcniatus, Marsh., ou denticollis, Dejean, dont le nom de genre indique un insecte trouvé dans la cale des navires. Les Sijlvanus comptent une vingtaine d'espèces Irès-disséminées dans les diverses régions de l'Europe et de l'Amérique septentrionale, aux îles Canaries et du Cap-Vert, en Chine, à Ceylan, à Java et en Tasmanie. Les genres suivants ont les tirses hétéromères chez les mâles, pen fa- mères chez les femelles. (l) Am.'Soc. en lom. de France, 2'' série. 1H49, Vil, p. !():>. PAL.ESTfcS, (;UCL.)US, nRONTES. 377 PAIivEfBTES, Perty. — Antennes médiocres ; yeux globuleux et saillants. Man- dibules robustes et courtes chez les femelles, longues, grêles, saillantes et re- courbées en dedans chez les màles. Corselet transversal et denté sur les côtés. Pattes médiocres. Corps très-déprimé. Nous figurons le mâle de l'espùce type et unique de ce genre, le P. Freyersi, von Heyden fpl. xxi, fig. 1). espèce du Brésil, assez rare dans les collections. CUCUJWS, Fabr. — Menton largement échancré en avant ; languette bilobée ; , mâchoires à deux lobes ciliés. Dernier article des palpes des deux sortes sub- sécuriforme. Mandibules robustes, arquées, saillantes chez les màles. Antennes filiformes, à articles grenus. Élytres allongées, parallèles. Tarses à premier article petit, les autres décroissants. Ces caractères sont représentés dans les détails du C. sanguinolentus, Linn., ou depressus, Fabr. (pi. xxi, fig. 2, tôte du mâle; 2a, antenne; 2 b, mâchoire et palpe ; 2 c, lèvre inférieure et palpe ; 2 d, tarse anté- rieur). Celle espèce, de toute l'Europe, rare, de taille moyenne, très- aplatie, ayant le corselet et les élytres d'un beau rouge, le reste noir, se trouve surtout dans les régions boréales et orientales. En Allemagne et en Russie seulement existe une seconde espèce, très-voisine, long- temps confondue avec la précédente, le C. hœmatodes, Erichson. La larve de cette espèce, très-aplatie, subparallèle, d'un blanc jaunâtre, vit sous les écorces comme l'adulte. Ea tète et le dernier segment ab- dominal sont seuls cornés ; elle a des antennes de quatre articles et cinq ocelles de chaque côté ; les trois segments thoraciques, un peu plus étroits que la tête et les segments abdominaux, portent des pattes laté- rales à un seul crochet; le neuvième et dernier segment abdominal, très-court, est terminé par un tube anal et surchargé d'appendices, à savoir, deux paires de crochets cornés recourbés à son extrémité, et deux paires de saillies coniques superposées dans le pli qui sépare ce segment du précédent. Le genre Cucujus, outre les deux espèces d'Europe mentionnées, en renferme encore cinq du Caucase, d'Amérique boréale, de Californie, de Sibérie et de Ceylan. Les genres suivants ont les tarses pentamères dans les deux sexes : BRO:«TES, Fabr. — Antennes filiformes, grêles, au moins de la longueur de la moitié du corps, à articles cylindriques, le premier allongé. Mandibules courtes, arquées, bidentées au bout. Palpes à dernier article obconique. Élytres allon- gées, parallèles, arrondies au bout. Pattes courtes, à cuisses assez renflées. Ce genre est formé de Coléoptères de petite taille, aussi plats que les Cucujes et vivant comme eux sous les écorces, s'en distinguant tout de suite par des antennes bien plus longues et à articles tout aaîremenl faits; les mâles possèdent en propre une corne grêle, arquée, très aiguë, en dehors de chaque mandibule. 378 COLÉOPTÈRliS. — CUCUJIENS. Nous représentons une espèce de Java, le B. spinicollis, Gory (pi. xxi fig. 3), à corselet garni d'épines, et les dûtails d'une espèce, assez com- mune aux environs de Paris, de toute l'Europe, de l'Algérie, du Cau- case, le B. planatus, Linn. (pi. xxi, fig. U, tête en dessus; lia, lèvre in- férieure et palpes; ti b, mandibule du mâle; U c, mâchoire et palpe; àd, tarse antérieur, à premier article très-court). On connaît les méta- morphoses de cet insecte. La larve ressemble beaucoup à celle du genre Cucujus, mais a tous les segments du corps de même largeur et garnis en dessus et en dessous d'une bande écailleuse; très-agile et lutifuge, elle vit sous les écorces de plusieurs espèces d'arbres, au milieu de Podures, d'Acariens et de Tomicus, faisant sa proie de ces divers petits Articulés (E. Perris). La nymphe est munie de fortes épines et terminée par deux paires d'appendices destinés à retenir la peau de la larve. L'adulte est d'un brun noirâtre, avec les pattes et les pièces buccales d'un fauve clair, curieux par ses antennes épaisses et poilues, aussi longues que le corps, lâchement renflées au bout, avec le premier article très-long et claviforme. Le genre Broutes a encore quelques espèces indiennes, australiennes et des deux Amériques. DEWDROPHAGV!^, Schonher. — Caractères très-voisins de ceux du genre précédent. Le type du genre est un petit insecte très-plat et fauve, de Suède et de diverses régions montagneuses de France et d'Allemagne, existant aussi en Amérique, au nord des États-Unis, le D. crenatus, Payk. (pi. xxi, fig. 5, mâle ayant les antennes environ des trois quarts de la longueur du corps, celles de la femelle étant un peu plus courtes). Il y a un petit nombre d'autres espèces de l'Amérique russe et boréale, des îles Philippines, de la Nouvelle-Zélande et de la Tasmanie. PKO§iTOlfIl§i, Latr. — Mâchoires cachées par des pièces jugulaires longues et grêles, arquées en dehors, très-aiguës à leur extrémité. Palpes grêles ; mandi- bules très- fortes, débordant la tête, presque droites, denticulées en scie intérieu- rement. Élytres allongées, subparallèles, arrondies au bout. Pattes courtes. On ne connaît de ce genre qu'une seule espèce, toujours rare, à corps long et déprimé, de 6 millimètres, d'un rouge ferrugineux, à mandi- bules du mâle très-longues et très-larges, d'où le nom de P. mandibu- laris, Fabr., qu'on trouve en France- et en Allemagne (pi. xx, fig. 13; 13 a, tête du mâle vue en dessous, avec antennes assez longues, à cinq derniers articles déprimés et graduellement élargis). La larve a été trouvée en Allemagne, daus du bois de chêne décomposé, en compagnie de Fourmis. Elle ressemble à celles précédemment citées dans la tribu, mais est dépourvue d'ocelles. Les segments thoraciques sont un peu plus étroits que la tête et que ceux de l'abdomen, et portent des pattes MYCÉTOPHAGIEKS. 579 dirigées latéralement. Le dernier segment est garni d'épines cornées et porte un tube anal. Une seconde espèce est des Indes orientales. PASSAÎIIDRA, Daim. — Mâchoires cachées par des pièces jugulaires planes et largps; mandibules robustes et saillante?. Antennes allongées,- à articles renflés, le dernier élargi. Corselet rétréci en arrière, reborde. Élytres allongées, paral- lèles, largement arrondies au bout. Pattes courtes, robustes, à cuisses compri- mées. Ces Coléoptères, des régions chaudes des deux mondes, vivant sous les écorces des arbres tropicaux, de taille grande ou moyenne, ont les élytres à stries longitudinales, séparées par des espaces lisses ; leur corps est allongé, large, aplani. — Ex. : P. hrasiliensis^ Chevrotât, ou miles (collect. Dejean), noir brunâtre (pi. xx, fig. IZi). Sur les six espèces de Passandra, quatre sont du Brésil, de Cuba et de Rio-Janeiro, deux de la côte occidentale d'Afrique (Gabon et Sierra- Leone). Tribu des mycéTOPHAGIEMS. Sous ce nom de mangeurs de champignons, de moisissures, se trouvent groupés des insectes de petite taille, dont toutes les espèces, très-ana- logues d'aspect, sont oblongues ou oblongo-ovales, médiocrement con- vexes, ponctuées et revêtues d'une fine pubescence couchée; beaucoup ont sur les élytres des taches ou des bandes fauves. Elles vivent dans les Lycoperdon, les Sphœria, les Agarics, les Bolets, etc., et aussi sous les écorces des arbres morts et sous les fagots. Longtemps ou n'a connu d'espèces que des divers pays d'Europe, du Caucase, de l'Amérique bo- réale et des États-Unis. Les découvertes récentes doivent y faire joindre un petit nombre d'espèces de Madère, de Cuba, du Pérou, du Chili, de la Plata, du Cap, de Ceylan, de la Nouvelle-Guinée et de lîle Lifu. Voici les caractères les plus importants des Mycétophagiens : Deux lobes aux mâchoires; languette cornée, saillante. Palpes maxillaires de quatre articles, labiaux de trois. Antennes de onze articles, terminées par une massue d'un nombre variable d'articles, le plus souvent de trois. Abdomen de cinq segments en dessous, tous libres et subégaux. Tarses de quatre articles, avec les antérieurs de trois chez les mâles, rarement subpentamères dans les deux sexes, c'est-à-dire ayant un cinquième article rudimentaire. M. E. Blanchard met en tête de sa tribu des Dermestiens la famille des Mycétophagides, comprenant les Silvanites (Cucujiens), Lalridites (Colydiens) et Mycétophagites. On voit que nous laissons ces derniers à la môme place que lui, avec des changements de titre sans importance: en effet, la tribu des Dermestiens va suivre. 38 COLÉOPTÈRES, — MYCÉTOPHAGIENS. GENRES PRINCIPAUX. iMYCKTOPHAGt^, Hellw. — Corps oblong ou ovale-oblong, médiocrement convexe. Antennes graduellement épaissies vers le sommet, avec une massue lâche, allongée, peu tranchée, de quatre ou cinq articles. Jambes très-légère- ment épineuses, tarses cylindriques. Les Mycélophages ont les élytres ponctuées, striées, avec des taches ou des bandes fouves ou teslacées. Ils vivent dans les Bolets, les Cham- pignons, les vieux bois décomposés, et comptent une vingtaine d'espèces, parmi lesquelles il faut citer : M.quadripustulatus, Linn., elM. variabilis, Hellw. DlPl.ocoBliCjS), G.-Mén. — Corps oblong, peu convexe; massue des antennes de trois articles; deux sillons géminés sur les côtés du corselet en dessus. Élytres arrondies au sommet. Le type de ce petit genre a été découvert par MM. Chevrolat et Gué- rin-Méneville dans la forêt de Fontainebleau, où il est très-commun au printemps. C'est le D. Fagi, Chevr. (pi. xx, iig. 7). On le rencontre sous l'écorce et sous les branches de Hêtres récemment coupées et ayant des feuilles sèches. 11 a été pris aussi en Autriche et dans la Russie méri- dionale. Long de 3 millim., il est fauve ou couleur de poix, pubescent, avec la ièle, les antennes et le corselet rougeàlres. Les élytres sont striées de points, crénelées, sillonnées, étroitement rebordées. Il y a trois autres espèces, une de Sardaigne, une de Cuba, une de l'Amérique boréale. MVCETEA, Steph. — Antennes de onze articles, à massue lâche de trois. Cor- selet rétréci en avant. Corps ovalaire, convexe. Ce genre a fourni à Jacquelin du Val le type d'ime petite famille, les Mycétéides. L'espèce .principale est un insecte de 1""",5, fauve et hérissé de petits poils roides, à corselet impressionné à la base, à élytres rétrécies en arrière avec des lignes de points. C'est le M. /^r^a, Marsh., ressemblant à un Attomaria, et vivant à la façon des Cryptophages dans les caves, au milieu des petites moisissures des murs et des tonneaux. Une seconde espèce est du Cap. Nous ne ferons que citer quelques derniers genres : Litar g us, Erich?,., à'antennes avec massue lâche et oblongue de trois articles : type, L. bi- fasciatus, Fabr.. à élytres avec bandes dentées, transverses, noires et testacées, vivant sous les vieilles écorces, les vieux fagots et dans les maisons. — Typhœa, Steph.: type, T. fumata, Linn., d'un ferrugineux tes- tacé, vivant dans les détritus des étables, sous les écorces, dans les mai- sons, genre toujours ù massue antennaire de trois articles, à corps assez convexe, dont les palpes labiaux portent un petit article additionne], DERMESTIENS. 381 leur donnant l'apparence d'avoir quatre articles (Jacquelin du Val). — Triphyllus, Latr. : type à massue anfennaire de trois articles, T. bipunc- tatus, Hellw.,ou bicolor, Fabr., genre à élytres confusément ponctuées, vivant dans les Bolets. — Diphyllus, Steph., ou Biphyllus, Dej., avec massue des antennes de deux articles : type et espèce unique, D. lunatus, Fabr. Tribu des DERIIESTIEMS. Cette tribU;, détachée des anciens Clavicornes de Latreille, forme un groupe naturel qui n'est pas très-riche en espèces; mais certaine?, malheureusement pour nous, ne sont que trop nombreuses en indivi- dus. Ces insectes appartiennent à ceux qui sont appelés, dans le plan harmonique du Créateur, A faire rentrer dans la masse des éléments les principes qui ont pénétré dans la substance des organes, lorsque les animaux sont privés de vie. Tous, en effet, au moins à l'état de larves, vivent de substances animales desséchées ou décomposées ; on les voit pénétrer dans les cadavres abandonnés après que les fétides Silphiens ont dévoré les chairs putréfiées; elles s'attachent aux tendons et à la peau, et achèvent ainsi l'œuvre de destruction. Les larves nous ofl'rent les caractères suivants : La tête est velue, déprimée ; les mandibules fortes, bidentées à l'extrémité; les mâchoires épaisses, munies d'un lobe droit cilié à l'extrémité; les palpes maxillaires de trois articles, les labiaux de deux, les antennes de quatre articles. Le corps a douze seg- ments, convexes en dessus, un peu moins en dessous, s'atténuant insen- siblement d'avant en arrière. Il y a neuf stigmates, un près du bord antérieur du mésothorax et huit abdominaux ; le dernier segment ab- dominal porte, dirigées en arrière, deux pointes droites, noires, poin- tues; à sa suite est un gros mamelon cyUndrique à extrémité dilatable s'appuyant sur le plan de position, servant aux mouvements de pro- gression de la larve. Sur les anneaux (du moins dans les larves du genre .Dermestes) sont deux séries de poils couchés, les uns, très- longs, inclinés vers la tête, les autres, plus courts et plus nombreux couchés en arrière. Ces poils sont munis, dans toute leur longueur de petits cils coniques, presque couchés et très-pointus. Les pattes sont assez fortes, médiocrement longues, constituées par quatre articles terminées par un ongle crochu. Toutes les matières animales, fromage, lard, \ landes sèches, four- rures, crin, laine, écailles, cordes à boyau, ves?ie, baudruche, etc. peuvent devenir la proie des larves de Dermestiens ; de là de véritables désastres dans les magasins et les collections d'histoire naturelle. Le meilleur moyen de préservation découle, comme d'habitude, d'une bonne observation des mœurs de ces insectes. Les larves aiment le re- pos, et .surtout ont horreur de la lumière. Il faut remuer et secouer les objets attaqués, les exposer à la lumière, ouvrir quelque temps les 382 COLÉOPTÈRES. DERMESTIENS. boîtes, etc. Les préparations mercurielles et arsenicales peuvent s'em- ployer, et surtout les émanations d'acide phénique, les vapeurs de benzine et de sulfure de carbone, qui, malheureusement, ne paraissent pas atteindre l'embryon sous la coque de l'œuf. On s'est servi beaucoup autrefois des nécrentomes, formés d'une double caisse de métal, la caisse intérieure conlenant les objets dans lesquels on veut détruire les Der- mestiens, et la caisse extérieure de l'eau soumise à une ébullilion prolongée. Ce moyen, pénible, est trC-s-efficace, mais altère et rend friables certaines substances animales, notamment les insectes des ordres fragiles conservés en collection. Les Dermestiens ont été signalés dans tous les pays do la terre, et l'on peut dire, pour les espèces qui s'attaquent aux matières utiles àl'homme et transportées par le commerce, qu'elles sont devenues cosmopolites, notamment les Dermestes lardarius, vulpinus, mitrinuSy Attagenus pellio, Anthrenus museorum, Auct., etc. Caractères : Mâchoires à deux lobes distincts ou parfois soudés en- semble. Palpes maxillaires de quatre articles, les labiaux de trois, dont le premier est souvent peu distinct; languette membraneuse avec paraglosses nuls ou réunis. Antennes latérales, courtes, droites, rétrac- tiles, le plus souvent de onze articles, rarement de huit ou même de cinq seulement, terminées par une massue très-variable. Elylres re- couvrant en entier l'abdomen. Corps tantôt oblong, tantôt très-court et plus ou moins convexe. Tarses tous de cinq articles simples, libres, non repliés. GENRES PRINCIPAUX. DEBMESTi:^, Linn. — Point d'ocelle frontal. Antennes de onze articles, les trois derniers aplatis, formant une massue ovale. Les Dermestes volent peu et se cachent aux regards en s'enfonçant dans les matières où vivent leurs larves ; leur marche est lente, timide, incertaine; ils s'arrêient au moindre bruit. Leurs larves attaquent indif- féremment toutes les substances animales sèches. Elles ont cinq ocelles sur deux lignes transversales, trois sur la première et deux sur la se- conde. Ces larves marchent lentement, en s'appuyant sur leurs six pattes, et se servant du tube anal comme d'un levier. De longs poils rougeâtres forment comme une couronne autour de leurs anneaux d'un brun rouge. Le genre compte une cinquantaine d'espèces de tous pays. Les espèces les plus communes sont le D. lardarius, Linn., d'Europe, d'Algérie, du Caucase, noir, de 7 millim., avec une large bande grise à la base des élytres. Cette teinte est due à la présence de très-petits poils blanchâtres, et trois points noirs rapprochés y forment comme une raie sinueuse en zigzag. L'espèce aime les endroits obscurs et malpro- pres, et abonde dans les charcuteries mal tenues. Les larves ne cessent DERMESTES. 388 de dévorer pendant quatre mois, et même se mangent entre elles, si la faim les presse. Pour ?e changer en nymphe, elles se cachent sous l'amas de leurs excréments formés d'une série de petits grains fixés à la suite les uns, des autres, la nymphe conservant pour s'appuyer les deux appendices postérieurs de la larve. M. E. Perris a vu que cette larve perce les cocons de Vers à soie pour manger la chrysalide sèche, et se df'veloppe en grand nombre dans les litières exemptes de dépouilles et ne contenant que des excréments. Beaucoup de larves carnassières, quand l'aliment de prédilection leur fait défaut, y suppléent par des matières excrémentitielles ; les larves de Dermestes ont, pour nourri- ture préférée, les matières animales sèches. Parfois cette larve cause beaucoup de dégâts dans les magnaneries, ainsi que l'a constaté M. Nourrigat à Lunel. Je suis convaincu qu'elle dévore parfois des chry- salides vivantes : elle a détruit à la magnanerie expérimentale du Jardin d'acclimatation, au bois de Boulogne, un grand nombre de chrysalides d'Attacus Cynthia vera (Ver à soie de l'Allante), conservées l'hiver pour l'éducation du printemps suivant. — LeD. vulpinus, Fabr., de 7 millim., d'unbe au noir, lisse en dessus, excepté sur les bords du corselet, qui sont cendrés, avec le dessous du corps d'un blanc mat etune petite épine àla suture des élytres. Cette espèce se plaît surtout dans les pelleteries, où elle cause les plus grands ravages. La compagnie de la baie d'Hudson, dont les magasins à Londres étaient dévastés par cet insecte, avait offert 20000 livres sterl., à qui trouverait le moyen de le détruire.— Le/), mwn- 71US, Linn., de 6 à 8 millim,, à corps épais, noir, paraissant d'un gris de souris, soyeux en dessus, avec des taches noires et blanches, d'un blanc argenté mat en dessous, en raison de la pubescence qui le couvre.— Le D.mustelinus, Erichs., dont la larve vit en hiver^ d'après M. E. Perris, dans les nids des Chenilles processionnaires du Pin {Bombyx pityocampa, Fabr.), se nourrissant des dépouilles et aussi des excréments de ces che- nilles. L'insecte parfait se trouve en mars et en avril dans ces nids.— Le D. carnivorus, Fabr., de l'Amérique méridionale et des Antilles, et aussi des environs de Paris, où il a été importé (pi. xxir, fîg 2; 2 a, antenne; 2 b, tarse antérieur). — Les espèces du genre Dermestes peuvent être divisées en deux groupes, d'après un caractère que présentent les mâles, signalé pour la première fois par Emm. Rousseau. Les uns, ainsi dans le D. lardarius, ont deux mamelons non perforés au milieu et en des- sous du troisième et du quatrième segment ventral, mamelons entourés d'un faisceau de poils érectiles et du centre desquels sort une épine grêle, arquée en arrière et subcornée ; les autres n'ont qu'un seul ma- melon et faisceau pileux au milieu du quatrième segment, sous l'abdo- men. Ces organes servent au mâle à se retenir dans l'accouplement sur le dos de la femelle. Les genres qui suivent ont un ocelle distinct sur le front. 38/i COLÉOPTÈRES. — DliRMESTlENS. MeCiATOMA, Herbst. — Corps oblong, allongé. Antennes avec massue très- courte chez les femelles et très-longue chez les mâles. Ce genre, très-réduit par les entomologistes modernes, ne compte plus que quatre espèces, dont le type est le M. undata, Linn., de Suède, de Grande-Bretagne, de France et d'Allemagne (pi. xxii, fig. 3), qui vit à l'état de larve, sous les écorces, où il dévore les cadavres d'insectes, et qu'on rencontre parfois adulte sur les fleurs. Il est noir, ondulé de bandes d'un blanc bleuâtre. Il y a une seconde espèce en France, une en Sibérie, une en Tasmanie. . ATT.^GEWUS, Latr. — Antennes de onze articles, ayant une massue très-allongée chez les mâles, simplement ovale-oblongue chez les femelles. Élytres convexes, embrassant l'abdomen. Pattes minces; tarses grêles et allongés. Les Attagènes vivent dans les maisons, et quelques espèces sur les fleurs. On en connaît près de quarante espèces, surtout des régions tempérées chaudes, et aussi à Ceylan, à Lifu. Les larves dévorent les matières animales sèches, pelleteries, plumes, etc. Elles diffèrent de celles des Dermestes proprement dits, parce qu'elles sont déliées et por- tent au bou t du corps un pinceau de poils au moins aussi long que lui ; la couleur du corps est obscure, et celle des poils qui le couvrent est d'un jauneun peu rougeûlre. L'espèce la plus commune, \éritable fléau pour les pelleteries, est 1'^. pellio, Linn., de toute l'Europe et de l'Algérie, de 5 millim., noir brillant avec deux points blancs vers la base de chaque élytre, avec poils gris au-dessous du corps : c'est le Dermeste des pelle- teries, le Dermeste à deux points blancs de Geoffroy. Une autre espèce, commune en Europe méridionale, est VA. Verbasci, Linn., ou trifas- cialus, Fabr. PI. xxii, fig. h, antenne du mâle ; h a, de la femelle: li b, labre; /i c, mandibule ; Ud, mâchoire avec palpe ; U e, lèvre inférieure et palpes labiaux ; U f, patte antérieure. TIRESIAS, Steph. — Corps ovale-oblong, assez convexe. Antennes de onze articles, les trois derniers formant une massue ovale, terminées en dents de scie chez les mâles. Ce genre ne comprend qu'une seule espèce, le T. serra, Fabr., des îles Britanniques, de Suède, de France, d'Allemagne— PI. xxii, fig. 5; 5 a, antenne ; 5 6, labre ; 5 c, mandibule ; 5 d, mâchoire avec palpe, 5 e, lèvre inférieure et palpes; 5/", tarse antérieur.— La larve, de forme tra- pue, est curieuse par l'aspect étrange que lui donnent ses poils. Ils sont fauves, très-longs et très-touffus sur les quatre derniers segments, arti- culés, couchés quand la larve est calme, se dressant, si on l'effraye, comme une queue de paon, et formant alors quatre larges panaches transversaux. Enfin, le corps se termine par trois pinceaux de poils bruns, le médian beaucoup plus long que le? deux latéraux. Elle vit ANTHRENUS. 385 dans les vieux troncs et sous les vieilles écorces de Chênes et d'Ormes, et l'insecte parfait ne sort que le soir. M. E. Blanchard a observé cette larve, quelquefois par hasard, dans les collections d'histoire naturelle. Il se présente, pour cet insecte, un fait analogue à celui que nous avons constaté pour le Dermestes mustelinus, à savoir, que des espèces très-nuisibles ont parfois des utilités secondaires. M. le D'' Grenier a rencontré la larve du T. serra, dévorant les œufs, recouverts d'un mon- ceau de poils simulant un tampon d amadou, du Liparis dispar (Lépid. Chalin.), fréquents sur les troncs d'Ormes. La nymphe n'est éclose qu'au bout de treize mois. Il y avait aussi, au même festin, des larves à'Attagemis. AWTBREIHJS, Geoffr. — Tête petite et cachée en partie dans le corselet; antennes très-courtes, reçues dans des cavités du corselet. Corps arrondi, sub- globuleux. Élytres ovoïdes et convexes, recouvertes, ainsi que le corselet, d'écaillés très-faciles à enlever, de couleurs vives, formant de jolis dessins. Pattes courtes, comprimées, contractiles, s'appliquant exactement sous le corps au repos. Jacquelin du Val subdivise en trois groupes les espèces du genre .4ni/!j'enîiS ; 1° celles qui présentent des antennes de onze articles dis ■ tincts, avec massue de trois articles (ex. : A. festivus, capensis, etc.); 2" antennes de huit articles apparents, avec massue ; 3° antennes de cinq articles, le terminal allongé en massue. Les larves ont de fortes man- dibules à Laide desquelles elles détruisent prompfement tout ce qu'elles attaquent. On a vu ces larves perforer du bois et de l'écaillé. M. E. Desmarest pense que ces larves peuvent perforer le calcaire gros- sier, et de même celles des Dermestes lardarius ou vulpinus, car il a trouvé des insectes de ces deux genres et des Anthrènes logés dans des trous d'un mur d'une fabrique de noir animal de la Glacière (Genlilly, banlieue de Paris). Les larves des Anthrènes se distinguent de celles des genres précédents par leurs faisceaux de poils en aigrettes, disposés sur les côtés et postérieurement, et se redressant à la façon des piquants du Porc-épic, quand l'insecte est inquiété. Elles vivent près d'un an, et leurs dépouilles, sauf la fente dorsale, conservent tout à fait la forme de la larve. On doit signaler avant tout un Anthrène dit vulgairement des émisées, devenu cosmopolite, et qui fait le désespoir des entomolo- gistes, car la larve habite de préférence le corps des insectes desséchés en collection, et quelquefois les pelleteries ; sa présence se ti-aduit au- dessous de l'insecte attaqué par unpeu de^poussière. C'est contre elle que les amateurs emploient les divers moyens préventifs, déjà indiqués, plus ou moins insuffisants. M. Leprieur préserve avec succès les Coléoplères de sa collection contre cet Anthrène, en les trempant dans une solu- tion d'acide arsénieux dans l'alcool. Les échanges et les ventes ont trans- porté cet insecte d'Europe dans les collections d'Amérique. A l'état GIRARD. 25 ;i8(i COLÉOPTÈRES. — DLllMtSTlENS. parfait, il est long de 3 millim. environ, noir, couvert d'écaillés d'un jaune roussâlre, avec trois bandes transversales d'un blanc grisâtre, et quelques petites taches de même couleur sur les élytres. La larve, couverte de poils gris et bruns, subit sa transformation en nymphe dans la dernière dépouille qui l'abrite. La larve du funeste Anthrène des musées {pestis collectùmum) pré- sente des particularités intéressantes. Huit ou dix jours avant de se changer en nymphe, elle reste dans une immobilité complète^, et la peau se fend peu à peu tout le long du dos. C'est dans cette peau, qui persiste comme une sorte de berceau, que doit se faire la transformation en nymphe, puis en adulte. La nymphe reste très-molle et sa pellicule d'une extrême finesse. Elle e?t exposée à des chocs fréquents qui pour- raient la blesser. Voici quelle précaution a été prise à cet effet. La larve pendant sa vie était couverte de fascicules de poils retombant le long du dos et des flancs, et se redressant quand on inquiète l'insecte, comme les piquants du Porc-épic Ces poils-Ià, a reconnu M. Lucas, sont ca- ducs et n'existent plus dans la peau sèche qui entoure la nymphe, non plus que les pattes, qui se flétrissent ; mais il n'en est pas de même des épines de la tète et des parties latérales des segments : elles sub- sistent comme protection. La nymphe, participant à la forme ramassée de ladulte, est bien plus courte et plus large que la larve, et c'est ce qui fait fendre la peau de celle-ci. Une question de synonymie assez compliquée s'offre pour l'adulte. L'espèce nuisible paraît être réelle- ment r.4. uaràts, Fabr. Le véritable A. musœorum, Linn., qui lui res- semble beaucoup, mais est plus rare, a la forme plus allongée et le thorax plus pointu en avant. Les larves de plusieurs Anthrènes vivent dans les maisons ; tous les adultes fréquentent les fleurs. Le genre offre une trentaine d'espèces de diverses régions de l'Europe et d'Amérique septentrionale, du Cap, une de Taïti, une autre d'Adélaïde (Australie). Parmi les exotiques, nous citerons 1*^4. ccipensis, G.-Mén. (pi. xxn, fig. 6; 6 a, antenne; 6 b, tarse postérieur), noir, avec écailles noires ferrugineuses et grises, disposées par taches. Cette espèce, du cap de Bonne-Espérance, ressemble beaucoup àl'^. Scrofulariœ, Linn., de toute l'Europe. TRiliODES, Latr. — Antennes terminées par une massue brusquement formée de trois articles. Corps très-ovalaire, poilu. Une seule espèce européenne, le T. hirtus, Fabr., ou pilosus, Herbst, d'Angleterre, de Suède, de France et d'Allemagne, vit à Uétat parfait parfois sur les fleurs; se prend à Fontainebleau, à Compiègne, etc., et se rencontre aussi sur les vieux troncs de Hêtres et d'autres arbres. Il est figuré pi. xxir, fig. 10 ; 10 a, antenne, et'fait le passage des Dermestiens aux Byrrhiens. Ce petit insecte est remarquable par sa pubescence hérissée. BYRRHIENS. — NOSODENDRON. o87 orphilIj'S, Erichs. — Genre très-curieux par sa tête entièrement reçue dans une forte excavation formée par le corselet et l'insertion des appendices qui en dépendent. Il a été constitué sur une espèce, VO. glabratus, Fabr., qui vit sur les fleurs dans toute l'Europe méridionale, et ressemble, à première vue, à un Anthrène dépouillé de ses écailles colorées. 11 y a deux autres espèces, une d'Amérique boréale, l'autre de Californie. Tribu des BYRRUIEMS. Cette petite tribu a beaucoup de rapports avec les Uermestiens, dont M. E. Blanchard ne la sépare pas; elle offre des genres douteux entre les deux tribus, et a aussi des contacts avec les Histérides et les Nitidu- lides. Les Byrrhiens sont remarquables par leur corps toujours court ou ovalaire, très-épais, plus ou moins fortement convexe. Leur taille est petite, rarement moyenne ; leurs couleurs peu brillantes, noires, brunes ou vertes, parfois avec reflet métallique. Le corps est habituellement couvert d'un duvet plus ou moins serré. Les pattes, à articles élargis et comprimés, sont entièrement contractiles, les jambes se repliant sur les cuisses et les tarses sur les jambes, de sorte qu'à la moindre appa- rence de danger, ces insectes contrefont le mort et demeurent immo- biles, pareils à de petites pilules. Les Byrrhiens restent, en général, cachés pendant le jour et ne courent que le soir, se servant peu de leurs ailes. On les trouve surtout dans les endroits secs ou sablonneux, sous les pierres, les mousses, dans le sable, etc. Leur régime semble être végétal et non carnassier, comme celui des Dermestiens, et leur nour- riture paraît surtout se composer de mousses ; quelques espèces affec- tionnent les bouses desséchées. Caractères : Mâchoires à deux lobes avec palpes de quatre articles, les labiaux en ayant trois. Languette membraneuse ou coriace, à para- glosses nuls ou indistincts. Antennes rétracliles de onze articles, termi- nées par une massue brusque ou s'épaississant peu à peu jusqu'au bout. Abdomen de cinq segments apparents en dessous, les premiers immobiles, le dernier assez grande recouverts en entier par les élytres. Prosternum saillant postérieurement et reçu dans une échancrure mé- diane d'un mésosternum large et court. Hanches fortement transverses. Pattes très-contractiles, et tarses de cinq articles distincts. genres principaux. MO§tOUE:vuR01k, Latr. — Tête libre, avancée. Antennes insérées sous les bords latéraux du front, rétractiles en dessous dans des rainures antérieures du cor- selet, avec les trois derniers articles en brusque massue ovale, perfoliée, 388 COLÉOPTÈRES. — BYRRHIENS. comprimée. Élytres très-convexes. Pattes courtes, contractiles, aux tarses anté- rieurs comprimés. Ce genre a été fondé pour un seul insecte dont Olivier faisait un Byr- rhus, le N. fasciculare, Oliv., de Ix millim., noir, à élytres recouvertes de cinq faisceaux de poils ferrugineux en série. On le trouve dans presque toute l'Kurope et aux environs de Paris, dans les plaies des arbres, et notamment des Aulnes, des Marronniers, des vieux Ormeaux. — Il est représenté dans divers détails, pl.xxii, fig.7, antenne; 7a, labre; 76, mâchoire et palpe ; 7c, lèvre inférieure et palpes labiaux ; 7d, man- dibule.— Il y a trois autres espèces exotiques. BYRRnui^. Linii. — TtHe rétractée au repos et sous le corselet. Antennes de onze articles, graduellement épaissies vers l'extrémité, que termine une massue de cinq articles. Tarses tous rétractiles, re(;us contre la face interne des jambes. Pattes postérieures reçues dans des cavités spéciales plus ou moins marquées du premier segment ventral. L'espèce la plus commune est le B.pikda, Linn., de toute l'Europe, insecte brun, couvert d'un duvet très-serré et présentant quelques lignes longitudinales très-foncées sur les élytres. Ce Coléoptère est un des plus gros Kyrrliiens, ayant 10 à 12 millimètres de longueur sur 8 à 9 de large ; on le trouve souvent à terre, marchant lentement dans les lieux sablonneux ou au milieu des pierres; on le prend aussi grimpé au sommet des Graminées, en fauchant dans les prairies par les temps chauds. L'espèce voisine, à élytres un peu rugueuses, d'un châtain foncé, figurée par M. Guérin-Méneville (pi. xxii, fig. 8) sous le nom de B. al- pinus, Gory, des Alpes suisses, a une variété B. scabripennis, Sleff. , d'Allemagne et des Alpes styriennes. Nous citerons aussi B. Dennyi, Curtis, espèce des îles Britanniques et d'Allemagne (pi. xxu, fig. 9, an- tenne ; 9 o, mandibule ; 9 6, lèvre inférieure avec palpes labiaux ; 9 d, mâchoire et palpe). Les Byrrhes comptent près de quarante espèces, surtout des régions boréales ou des montagnes de l'Europe, quelques-unes d'Amérique boréale et de Sibérie, et une, le B. oustralis, E. Blanch., du détroit de Magellan. On voit que ce sont essentiellement des Coléoptères de pays froids. Des genres à caractères analogues sont les genres Syncatypta, Steph., Curimus, Erichs., formés d'espèces vivant dans les sables, et dont le corps est hérissé de soies en massue : d'où les épithètes spécifiques de selosa, setigera, spiiiosa ; erinaceus. hispidus, etc. De petites espèces à tarses antérieur* rétractiles, mais à tarses pos- térieurs libres, à pattes postérieures en général non reçues dans des cavités spéciales du premier segment ventral, constituent les genres : LIMMCMUS, ASPIDIFHOKLS. 389 Cytilus, Erichs., ainsi le C. varius, Fabr., allcignanl à peine 3 millim., vivant dans les mousses, les bouses sèches, dans tonte l'Europe, la Tur- quie d'Asie, les nionts (Jurais; Pedilophorus, Steflaliny, ou Morychus, Erichs., des pierres, des sables; Simplocaria, Marsham, ù pubescence blanchâtre, des sablonnières. VvKM.'VlCUl^N, Latr. — Tète rétractée au repos sous le corselet. Antennes rétrac- tiles en dessus et non en dessous, comme précédemment. Ce genre renferme de très-petits insectes pubescents qu'on trouve dans les sables, au bord des eaux et autour des racines des plantes. Il comprend aujourd'hui seize espèces. Les types européens sont le L. pyg- mœus, Sturra, et L. versicolor, WallL, ou riparius, Dej. Les espèces sont d'Europe surtout, d'Amérique du Nord, des îles du Cap-Vert, de Ceylan, de Tasmanie. ASPIDIPHORV!*, Latr. — Tête élargie et saillante. Antennes de dix articles distincts, les trois derniers formant une massue très-allongée et cylindroïde. La place de ce genre est fort incertaine. MM. E. Blanchard et E. Des- marest le placent dans les Dermestiens ; Erichson, dans les Ptiniores; MM. de Marseul et Redtenbacher, dans les Byrrhiens; Schaum et Jac- quelin du Val le rejettent fort loin, près des genres Liyniperda, Apate, Cis, etc., dans leur famille des Sphindides. (;e genre a pour type une espèce très-petite, n'atleignant pas 3 milli- mètres, 1'^. orbiculalus, Gyll., trouvée d'abord en Suède, mais existant dans toute la France et môme aux environs de Paris, et en Allemagne, toujours fort rare, vivant dans les endroits plantés d'aibres fruitiers, et paraissant par là s'éloigner des Dermestiens. — Elle est représentée pi. XXII, tig. 1 : la, antenne; 16, labre; le, mandibule; 1 , Mac Leay. — Caractères analogues à ceux des Lucanus; s'en distinguent en ce que le lobe interne des mâchoires est en crochet corné chez les femelles, tandis qu'il reste très-court et pénicillé chez les mâles. Le type est le D. parallèle pi pedus, Linn., que Geoffroy nomme la petiteBîche, existantdans toute l'Europe méditerranéenne et le Caucase. Les femelles, d'après M. Ratzeburg, comme celles des Lucanus, dépo- sent leurs œufs dans un trou pratiqué au moyen des mandibules cà un tronc ou à une tige, opération à laquelle les deux sexes travaillent en commun. Les larves vivent plusieurs années dans les parties molles ou gâtées des troncs et des racines des arbres, et l'on en trouve à la fois de très-petites, de moyennes et de très-grosses. Leur marche dans le bois serpente dans toutes les directions, et les galeries restent obstruées par un épais cordon de poudre de bois. On les rencontre souvent en grande quantité dans les creux des vieux Chênes où il y a du terreau. Longues d'un peu plus de 3 centimètres, elles ont la tête convexe, luisante et jaunâtre, les pattes jaunes, et, au dernier anneau, une sorte de tumeur ovale de chaque côté du sillon anal. La nymphe, logée dans une coque de débris ligneux, offre une petite pointe sur les parties latérales de chaque anneau de l'abdomen. L'adulte éclôt en mai, juin et juillet; reste au repos sur les arbres pendant le jour, et vole le soir. L'indi- vidu le plus long ne dépasse guère 2 centimètres. Il est noir, peu bril- lant et fortement ponctué, et le corps, allongé, assez déprimé, semble subrectangle. La tête est carrée et aussi large que le corselet dans les deux sexes ; les fortes mandibules du mâle, dont la longueur ne dépasse pas celle de la tête, n'ont qu'une seule dent, et la tête porte deux tubercules. L'insecte se trouve dans les vieux troncs cariés, surtout de Saules. Les autres espèces du genre Dorcus n'appartiennent pas à l'Europe. 396 COLÉOPlÈRtS. — LUCANIENS. Une est de l'Amérique boréale, une de Tîle Melville, et environ qua- rante auprc^-s des régions chaudes de l'Asie, des îles Malaises, Philippines et de l'Australie. PEi/tTVCERrs, Geoffr. — Mandibules épaisses, un peu plus courtes que la Icte chez les mâles, plus courtes encore, mais saillantes, chez les femelles. Ex. : P. caraboides, Linn,, de toute l'Europe et du (laucase, de 15 à J8 millimètres de long, assez commun dans les bois de certaines localités, se rencontrant aux environs de Paris. 11 est d'un bleu brillant, quelquefois verdâlre ou violacé, avec les élytres striées longitudinale- ment, les pattes ordinairement noires, quelquefois rousses dans une variété femelle. Il apparaît dans les bois, à l'état adulte, dès le début du printemps, ronge les feuilles naissantes et les bourgeons, sur les- quels il se tient, et se laisse choir au moindre choc. On se le procurera donc aisément en battant les taillis. C'est la Chevrette bleue de Geoffroy. Ce genre n'a que peu d'espèces, d'Europe et d'Amérique, IVIGlDlU^i, Mac Leay. — Tête presque aussi large que le corselet, carrée; antennes médiocres, à massue de trois articles trigones. Mandibules plus courtes que la tète, même chez les mâles, en tenailles, surmontées dès la base d'une corne verticale recourbée en dedans, plus courtes chez les femelles, et n'ayant qu'un tubercule au lieu d'une corne. Élytres allongées, parallèles, arrondies au bout, offrant dix sillons plus ou moins larges et profonds. Ces insectes, glabres et noirs, ressemblant d'aspect à des Passalus, de taille moyenne, allongés et parallèles, couverts de gros points varioles, sont des régions chaudes de l'ancien monde et de Madagascar. — Ex. : N. aiiriculatiis, Gory, du Sénégal (pi. xxiii, tig. /i ; Zi //, lète en dessous). CERUCurs. Mac Leay. — Massue anlennaire de trois articles. Mandibules un peu plus longues que la tète chez les mâles, avec une forte dent les surmontant au milieu, planes et plus courtes que la tète chez les femelles. Les insectes de ce genre ont le corps oblong, parallèle, peu convexe en dessus. Le type est le C. Tarandus, Panz., ou tenebrioides, Fabr., in- secte fort rare, de toute l'Europe, mais des régions montagneuses, des Alpes, notamment à la Grande Chartreuse, paraissant en août; dont la larve vit dans le tronc des Sapins à demi pourris et couchés sur le sol, et se cache profondément à l'intérieur. Il y a deux autres espèces de l'Amérique du Nord. ^S.%l,lîS, Fabr. — Tète inclinée, brusquement rétrécie à la partie antérieure; antennes à massue de trois articles obtus. Mandibules arquées et aiguës, plus courtes que la tête, avec une dent placée au-dessus, manquant chez les femelles. L'espèce unique, V.E. scambœoides, Panz. (pi. xxiii, fig, 2; 2 a, tète PASSA LES. 397 eu dessus), est de petite taille, et le plus petit des Lucaniens. Il a l'as- pect des Trox, est d'un brun rougeâtre brillant, ayant sur les élytres des rangées de petites écailles noires redressées, et des soies jaunâtres sur le corps. On l'a trouvé dans toute l'Europe, mais toujours très-rare, dans les troncs cariés des Chênes et des Châtaigniers. 11 a été pris en France près de Strasbourg, dans la Moselle, à Uriage près de Gre- noble, etc. SlIVOUEîVOROIl', Hellw. — Tète beaucoup plus étroite que le corselet, portant très-antérieurement cliez le mâle une corne relevée, au moins aussi longue qu'elle, et cliez la femelle un tubercule corniforme court. Antennes à massue de trois articles brusquement prolongés. Mandibules petites, en pointe aiguë. Élytres régulièrement cylindriques ; pattes courtes. Le type de ce genre est le ^'. cylindricum, Linn., de l'Europe et du Caucase, mais des régions froides, dont le mâle est figuré pi. xxiir, iig. 1. C'est un insecte de longueur à peine moyenne, d'un noir bril- lant ou quelquefois d'un brun rougeâtre, avec pattes d'un brun foncé. Son nom est dû à son aspect cylindroïde, les bords des élytres étant bien parallèles, et continuant en projection les lignes droites des bords du corselet, surtout chez le mâle, le corselet de la femelle tendant use rétrécir un peu antérieurement. Le corselet offre antérieurement une troncature oblique dont la périphérie s'avance en rebord sinueux, avec saillie moins prononcée et échancrures moins larges chez la femelle. Le S. cylindricum se trouve en France dans les montagnes ou les par- ties septentrionales. On l'a pris au mont Pilât, à la Grande Chartreuse, dans les Hêtres et surtout les Frênes cariés, en Auvergne* dans le Châ- taignier, en Normandie dans le Pommier à cidre. La larve vit dans les mêmes arbres. Le genre compte deux autres espèces, une de l'Amérique boréale, l'autre de Californie. Section lin — t'ASSALES. Les Passales constituent un groupe de Lucaniens exotiques formé de Coléoptères de grande et de moyenne taille, abondants surtout dans l'Amérique intertropicale et tempérée, de couleur noire brillante, parfois d'un brun marron, aplatis en dessus, à élytres offrant toujours chacune dix sillons. Ils s'éloignent des Lucaniens propres par les an- tennes, simplement arquées au lieu d'être coudées, et terminées par trois à six articles formant une massue pectinée plus ou moins velue, et aussi par les pièces buccales. Les mandibules, cornées et assez sail- lantes, sont égales dans les deux sexes et n'ont jamais le développement insolite de celles des Lucaniens propres ; une dent, mobile par des muscles propres, située en avant de la dent molaire de la base, leur 398 COLÉOPTÈhES. — LUGANIENS. sert ù diviser le bois en petits fragments. La tôte, très-inégale, offre des saillies plus ou moins prononcées, et parfois une corne médiane arquée. Le corselet, presque carré, est séparé des élytres par un pédi- cule du mésothorax très-apparent et qui porte l'écusson. Les pattes, assez courtes, sont presque toujours égales. Les Passâtes sont remarquables en ce qu'ils établissent un passage entre les Scarabéiens et les Lucaniens propres. Leur système nerveux paraît intermédiaire sous le rapport de la diffusion des ganglions de la chaîne ventrale. Les larves présentent aussi à la fois des différences et des passages. Leur tête est plus petite et leur corps plus gvùle que chez les larves de Lucaniens propres; les antennes n'ont que trois articles et non cinq, comme les précédentes larves et celles des Scarabéiens. Leurs mandibules n'ont pas de dents, sauf à l'extrémité, et les pattes de la troisième paire sont atrophiées et réduites à deux tubercules pointus et munis de quelques épines. Enfin l'anus des larves de Passales est transversal ou horizontal, comme chez les Scarabéiens, et non pas lon- gitudfnal ou vertical, ainsi que cela a lieu dans les larves de Lucaniens propres. Le groupe des Passales n'a compris longtemps qu'un seul genre. PASSAIiUS, Fabr. (et genres dédoublés). — Antennes robustes, à premier article en massue renflée ; labre saillant^ en carré transversal, arrondi aux angles et légèrement échancré entre eux. Lobes des mâchoires cornés, en forme de griffes. Dernier arlicle des palpes maxillaires subfusiforme, aussi grand que les deux précédents réunis. Premier article des palpes labiaux gros, court, obco- nique, second très-grand, déprimé et arqué, troisième beaucoup plus petit, ovalaire. Les larves de Passales sont très-communes sous les écorces décompo- sées et humideS; qu'elles fouillent en tous sens et qu'elles divisent avec les fortes mandibules dont elles sont pourvues. Elles fréquentent les sucreries, et on les trouve parfois en quantité sous les tiges de cannes à sucre jetées en tas après être sorties de la presse. Le genre de vie des adultes est pareil, et ils se trouvent aux mêmes endroits. Les larves ne s'enterrent pas, elles se font une loge pour la nymphose au milieu des débris où elles ont vécu ; elles s'y changent en nymphe recouverte d'une peau transparente, la tête repliée sous le corselet, les antennes et les pattes collées le long du corps en dessous, l'abdomen légèrement flécly. Les grosses espèces de Passales ne volent presque jamais, mais on voit fréquemment les petites voltiger à l'entrée de la nuit. Toutes, quand on les prend, font sortir de la bouche et du dessous des ailes une liqueur presque incolore , d'une odeur caustique assez faible, qui les inonde entièrement. Ils sont remarquables, dit Lacordaire pour ceux qu'il a observés vivants en Amérique, par la promptitude avec laquelle ils meurent: le plus vigoureux individu survit à peine trois ou SCARABÉIENS. — GÉNÉRALITÉS. 399 quatre heures après avoir été percé d'une épingle. Au contraire, les Lucanes résistent pendant plusieurs jours, et leur vitalité est telle que la tête, séparée du corps, peut encore, après vingt-quatre heures, serrer fortement entre les mandibules le doigt qui l'excite. Les espèces de Passales sont nombreuse» et assez difficiles à détermi- ner, d'après leurs ressemblances de forme et la couleur noire uniforme de leur robe. On peut consulter, à ce sujet, la Monographie des Passales et des genres qui en ont été séparés, par M. Percheron (in-8°, Paris, 1835, 7 pi.), avec deux suppléments dans le Magas. de zool. de Guér.- Mén. (18/il, pi. 77-79, et 18ûi, pi. 131-135). Depuis ce travail, un grand nombre d'espèces nouvelles on été décrites. Nous figurons le P. penta- phyllus, Palis. Beauv., des Etats-Unis (pi. xxiii, fig. 7), et les détails du P. interruptus, Linn. (8, tète vue en dessous; 80, mâchoire et palpe; 8 6, lèvre inférieure et palpes ; 8 c, labre). La première de ces espèces est maintenant du genre raxillus, Mac Leay ; et la seconde, du Brésil, de la Guyane, de la Colombie, du Pérou, appartient au genre Neleus, Kaup., car les Passalus américains ont subi un dédoublement en seize genres ; en outre, plusieurs genres de Passales ont été établis pour les espèces des régions chaudes de l'Afrique, de l'Asie, de l'Australie et des îles qui en dépendent* et le groupe compte actuellement plus de cinq cents espèces. Tribu des SCARABÉiehs. Le grand législateur de l'histoire naturelle, Linnseus, réunit le pre- mier, sous le nom de Scarabées, un nombre considérable de Coléo- ptères, et parmi eux les plus grandes espèces de l'ordre présentant des antennes terminées par une massue constituée par des feuillets ou des lamelles. En 1799, C. Duméril distingua dans ce grand groupe les Lamellicornes ou Pétalocères, dans lesquels les articles terminaux des antennes, tout en variant à certains égards, ne cessent jamais d'être mobiles à la façon des feuillets d'un livre, et les Pectinicornes, Serri- cornes ou Priocères, ayant la massue des antennes constituée, non par des feuillets mobiles, mais par des dentelures fixes. Ce sont nos deux tribus des Scarabéiens et des Lucaniens. Ce n'est qu'en 1817 que Latreille adopta la division si naturelle de C. Duméril, sous les noms de Scarabéides et de Lucanides. Le grand perfectionnement organique des Scarabéiens ne permet de donner aux adultes que les caractères généraux suivants : Antennes insérées en avant et près des yeux sous un rebord de la tête, de sept à onze articles, le premier grand, les derniers élargis en feuillets trans- verses et mobiles {massue terminant le stipe ou funicule). Pattes plus ou moins fouisseuses, surtout chez les femelles, principalement les antérieures ; tarses ayant tous cinq articles. liOO COLÉOPTÈRES.— SCARABÉIENS. Le système nerveux des Scarabéiens présente pour toute chaîne ven- trale une grosse masse nerveuse concentrée dans le thorax, sans gan- glions abdominaux, tandis qu'un nombre plus ou moins grand de ceux-ci reste séparé de la masse unique thoracique dans les Carabiques et la plupart des autres Coléoptères, cette diffusion des centres nerveux étant un caractère d'infériorité. Tandis que les Carabiens n'ont que des trachées tubuleuses, chez les Scarabéiens un grand nombre de vésicules s'adjoignent aux deux troncs trachéens tubuleux, comme le montre la belle tigure de Straus-Durckheim (pi. 7, fig. U) dans sa célèbre anaiomie du Hanneton (Paris, 1828, Considérations générales, etc.). Les trachées vésiculeuses sont un perfectionnement lié à une locomotion aérienne plus aisée, à une chaleur propre plus considérable que chez les Carabiens (Newport), en rapport avec une combustion musculaire plus énergique. Les pattes, au lieu de présenter une suite d'articles cylindroïdes comme chez les Carabiens, où elles ne servent qu'à la course, offrent des élargissements, des courbures, des dents, des épines en rapport avec des fonctions plus variées. Les pièces buccales, bien que bien moins grandes et moins robustes que chez les Coléoptères carnassiers, et en cela adaptées à une nourriture composée de substan- ces liquides ou molles, ou de végétaux, sont bien plus diversifiées dans leurs modifications et dans leurs parties constitutives. Cette division plus grande du travail physiologique dénote une supériorité organique, et c'est pour cette raison que M. E. Bl-anchard, dans ses ouvrages et dans le Catalogue des Coléoptères du Muséum d'histoire naturelle, a placé les Scarabéiens au début de l'ordre des Coléoptères. Nous avons déjà rappelé pourquoi, ne cherchant dans cet ouvrage qu'à étudier les insectes au point de vue principal de l'entomologie appliquée, nous avons dû souvent sacrifier la philosophie naturelle et suivre surtout l'habitude générale. C'est, je pense, surtout par analogie avec l'ordre adopté pour les Mammifères et les Oiseaux, que la plupart des auteurs commencent l'étude des Coléoptères par les Carnassiers. On peut invo- quer aussi des sens et des instincts plus développés pour ceux qui poursuivent des proies vivantes. La variation considérable des organes dans les Scarabéiens ne nous permet pas de nous étendre en considérations d ensemble. Le tube alimentaire est plus ou moins allongé et contourné, et l'estomac muni de nombreuses papilles creuses où séjourne le suc gastrique ; les canaux de Malpighi sont plus longs et plus déliés que chez les Carabiques. L'abdomen présente certains caractères importants : il est muni de sept stigmates de chaque côté, dont la position nous permettra une division des Scarabéiens en deux groupes. La première paire des stig- mates peut sembler manquante, et se cacher dans la fissure qui sépare le métathorax du premier segment. La largeur de l'abdomen égale le plus souvent celle de la base du corselet, quelquefois la dépasse (genre Osmoderma), quelquefois e,st moindre (t^oprides), Le plus souvent les PROPERTY OF SCARABÉIENS. — CÉNÉRALITÉS. 4ô4 éiytres ne recouvrent' pas tout l'abdomen, et laissent à découvert le dernier arceau ou pygidium, qui est corné, ainsi que le segment précé- dent. En dessus^ l'abdomen présente huit segments, mais on n'en voit habituellement que six en dessous, car les premiers arceaux sont anni- hilés par le développement de la poitrine ; les deux derniers, le pénul- tième surtout, surpassent ordinairement les précédents en grandeur. L'aire de l'abdomen est '.rès-divcrse. Elle peut devenir moindre que celle du thorax chez les Onlophages, où le prothorax est très-grand pour l'insertion de très-fortes pattes fouisseuses; au contraire, il s'allonge dans les Phyllophages et les Mélitophiles. Les variations s'étendent dans de très-grandes limites dont le maximun se trouve dans le genre Dynasles et le minimun dans le gearc Lelhrm. Si les caractères des Scarabéiens adultes offrent les plus grandes différences, l'étude de leurs premiers états démontre combien cette tribu est naturelle. Autant la diversiticalion s'opère dans les formes définitives, autant les premiers états se ressemblent ; à une première forme commune succèdent des développements divergents. Les larves sont toutes des vers gonflés, à peau molle, d'un blanc livide ou jaunâ- tre, cylindroïdes, avec une teinte ardoisée dans la région postérieure où s'accumulent les excréments. Ces larves sont courbées en dedans, conformation qui leur interdit la possibilité de s'étendre en ligne droite, rend difficile el pénible la progression sur une surface unie, et les force, dans le repos, à se tenir sur le côté à la façon des Iules. La tête est écailleuse, presque toujours aveugle, munie d'un labre, de robustes mandibules dentées, de mâchoires avec palpes de quatre arti- cles, d'une lèvre inférieure charnue, transversale, à palpes de deux articles, d'antennes de cinq articles, plus ou moins coudées à partir du troisième article exclusivement. Les trois anneaux thoraciques sont plus courts que ceux de l'abdomen et munis de pattes à cinq pièces. Les anneaux du thorax et de l'abdomen sont ridés transversalement, au nombre de douze, après la tète, plus en général un mamelon ou appendice anal considérable, avec une paire de stigmates prothora- ciques et huit paires abdominales, les stigmates de la dernière paire très-grands. Le dernier anneau abdominal est très-volumineux, et sa forme habituelle lui a fait donner le nom de sac. 11 est en général arrondi et épais et courbé sous le ventre, rempli d'excréments souvent ^isibles par transparence, quelquefois rétréci. Les segments offrent des poils longs et flexibles, ou courts et roides, dirigés en arrière, servant à faciliter la progression. A l'exception des Cétonides, le sac est divisé en deux parties par un sillon transverse. Le corps des larves se termine par un anus à fente transversale. Les larves des Scarabéiens copropliages vivent, suit des boules d'ex- créments faites par les parents, soit au milieu du monceau sordide où les œufs ont été déposés, et leur vie est courte. Les autres prolongent au contraire leur existence pendant une ou plusieurs années : tantôt GIRARD, 26 Z|02 COLÉOPTÈRES. — SCARABÉ1E^S. elles rongent sous terre les racines de plantes auxquelles elles arrivent par des galeries souterraines (Mélolonlliides); tantôt elles vivent dans les arbres morts, les troncs caverneux, les débris vermoulus dus à divers insectes, le terreau, l'humus même (Cétonides, Dynastides). Les larves se métamorphosent en nymphes dans le milieu où elles ont vécu, et en se façonnant des coques aux dépens des substances qui les entourent. Les nymphes sont grosses et massives, et c'est chez elles qu'apparaissent les formes si diversifiées des adultes. Elles ont commu- nément à l'extrémité de l'abdomen deux saillies cornées parallèles ou divergentes, et les fourreaux de leurs ailes inférieures débordent tou- jours ceux des élytres (Erichson). Après l'éclosion, les insectes adultes restent un certain temps renfermés dans la coque nymphale, jusqu'à ce que leurs téguments aient acquis assez de dureté pour leur per- mettre de se frayer un passage, et d'affronter les risques de la vie libre. Les Scarabéiens adultes ont des mœurs très-diverses et peu suscep- tibles d'être indiquées dans une formule généi'ale. Beaucoup sont crépusculaires, d'autres se plaisent aux vives ardeurs du soleiL Les uns se nourrissent de substances stercoraires, c'est-à-dire principale- ment de matières végétales modifiées par la digestion; d'autres de substances végétales décomposées par l'action de l'air et de l'eau ; beaucoup au contraire rongent diverses parties des végétaux vivants, très-principalement les feuilles ; enfin certains , recherchent le miel des fleurs ou divers sucs qui découlent des arbres, à l'instar des Luca- niens. C'est sur ces régimes distincts que de Geer (177Zi) s'est fondé pour distribuer en trois familles les Scarabées de Linnœus, en les partageant en. Scarabées de terre, Scarabées des arbres, Scarabées des fleurs. Nous terminerons cette étude générale par la citation d'un passage de M. Mulsantj où cet entomologiste, dans un style image, décrit les aspects variés des Lamellicornes (1) qui habitent la France : « L'inspection de la robe des espèces de cette tribu suffit généralement pour révéler leur condition. Les Oryctes et les Rhizotrogues, condamnés à une vie en partie cachée, sont rougeâtres comme la terris qui leur sert d'asile. Les Coprophages, voués aux travaux les plus vils, portent presque tous les couleurs lugubres adoptées parla douleur. Les espèces crépusculaires ou nocturnes ont aussi communément des teintes obscures comme les ombres, ou noires comme les téni'bres. Celles au contraire qui vivent à la lumière, celles surtout pour lesquelles les fleurs ouvrent tous les trésors de leur sein, ont reçu, pour leur faire la cour, un véritable habit de conquête. Les uns portent un corselet revêtu de velours ; les autres ont des élytres garnies d'écaillés colorées; la cuirasse de plusieurs est encadrée dans du jais ou parée de dessins variés ; celle des autres brille d'une richesse toute métallique. Là c'est le cuivre avec toutes ses nuances ; ici l'argent est uni à l'azur le (i) Mulsant, Lamçllkoines de France, 18/12, p. 2.5. SCAHABÈES DE TERRE. 403 plus tendre ; ailleurs c'est l'or avec son poli et son éclat. Et, comme si ce n'était pas assez du don de la beauté, diverses espèces ont reçu le pouvoir de répandre des odeurs plus ou moins agréables. Celle des Osmodernes est assez forte pour trahir leur présence sur les arbres qu'ils fréquentent; celle d'une Trichie n'est sensible, au contraire, qu'à une faible distance, mais elle est si parfumée, que cette charmante créature semble avoir dérobé au.\ roses leurs arômes les plus suaves. » A l'exemple d'Erichson, nous diviserons la tribu des Scarabéiens en deux sections, en joignant au caractère de rentomologiste allemand quelques autres faits généraux signalés par Lacordaire. La première section {JLaparostictiques) présente les stigmates abdomi- naux situés sur la membrane qui unit les arceaux supérieurs aux infé- rieurs, et par suite sont tous cachés sous les élytres. F-,a languette est toujours distincte du menlon ; les deux lobes des mâchoires sont libres chez les larves. Dans la seconde section {Pleurosticiiques),\e% stigmates abdominaux sont placés, les uns sur la membrane d'union des arceaux; les autres, en plus grand nombre, sur la partie relevée des arceaux ventraux eux- mêmes, ceux de la septième paire étant généralement visibles quand les élytres sont fermées. La languette est, le plus souvent, cornée en partie et soudée au menton ; les deux lobes des mâchoires sont soudés ensemble chez les larves. Section l'e.— SCARABÉES DE TERRE. Les Scarabées constructeurs et rouleurs de boules doivent d'abord appeler notre attention. Tous ces Pilulaires, comme on peut les nom- mer en général, ont les jambes intermédiaires et postérieures grêles et jamais brusquement dilatées: ce sont les pattes de la dernière paire qui servent dans les deux sexes à rouler la pilule ; ils ont les jambes arquées et grossissant peu et régulièrement de la base à l'extrémité ; les tarses sont étroits, partout de même largeur. Les pièces buccales sont lamelleuses, tout au plus cornées sur leur tranche externe, et pro- pres seulement à saisir et à diviser des substances molles, semi-liquides; elles sont cachées sous le chaperon. La tête et le corselet sont dépour- vus de proéminences notables; les antennes ont huit ou neuf articles, dont le premier est très-grand et dont les trois derniers forment la massue. L'abdomen présente en dessous six segments soudés ensemble. Ils volent en tenant les élytres fermées, les ailes étant sorties et éta- lées. La cause obligée de celte sorte de vol est d'abord le mode d'arti- culation des élytres et du mésolhorax. En outre, il est d'autres causes, mais autres que chez les Cétoines vraies, où nous retrouverons un vol analogue. Les Pilulaires n'ont pas, comme celles-ci, les épimères méso- thoraciques saillants, et un é'usson dont l'agencement spécial gêne kOlx COLÉOPTÈRES. — SGARABÊJEXS. l'écartement des élytres, puisque l'écusson manque chez eux ; les ély- tres ont leurs bords internes imbriqués ou sont soudées ensemble. Les Pilulaires ont un front tranchant qui leur sert de bûche pour diviser les matières stercoraires, ^ des pattes antérieures larges et robustes pour fouir. Ils savent élaguer les parties les moins nutritives, les pailles non décomposées par la digestion, et façonnent des pelotes, d'abord humides et grossières, puis acquérant de la solidité et la forme sphériqueà mesure qu'elles sèchent, consolidées à l'extérieur par des grains terreux, en tournant sur elles-mêmes entre les pattes posté- rieures des Scarabées. Quand la boule est devenue assez solide, le Pilulaire la fait rouler, en la tenant entre ses pattes postérieures, bien assujettie entre les forts éperons des jambes, en marchant lui-mOme à reculons sur les quatre pattes de devant, jusqu'à ce que, parvenu au trou qu'il a creusé d'avance, il l'y précipite. Le plus souvent le mâle et la femelle se prêtent un mutuel secours pour cette dernière opéra- lion, l'un tirant avec ses pattes de devant la boule que l'autre pousse avec celles de derrière . Les Pilulaires ne se rencontrent pas au nord de l'Europe, mais plu- sieurs espèces existent au sud, et plus encore dans les régions chaudes. Ils marchent mal, à cause de leurs longues pattes arquées, mais volent bien et d'autant mieux que le soleil est plus ardent. Ils sont attirés de tous côtés par l'odeur des déjections animales aussitôt que celles-ci sont déposées. C'est ordinairement à la fin du printemps et vers le milieu de l'été qu'on les voit former leurs pilules, en travaillant avec d'autant plus d'ardeur que la chaleur est plus forte. On trouve souvent sur une même fiente un grand nombre de ces insectes occupés chacun à la formation de sa boule. Peu fermes sur les quatre pattes anté- rieures, et obligés de marcher à reculons, ces insectes sont renversés fréquemment, pour peu que le terrain soit inégal, et se relèvent avec peine. Ces difficultés, loin de les rebuter, semblent redoubler leur ardeur. Us font concourir leurs efforts à un but commun, et, pour l'obtenir, paraissent fort indifférents au droit de propriété : quand une boule, par la culbute de son possesseur, vient à rouler au loin, un autre s'en saisit, et le dépossédé, relevé de sa chute, prend la pre- mière boule qu'il voit à sa portée, ou s'occupe avec activité à en façon- ner une nouvelle. Chaque boule est destinée à contenir un œuf. La femelle le dépose au milieu du berceau et du garde-manger de la larve future. Celle-ci, constituée sur le type général des larves de Scarabéieris, doit vivre en terre, dans le trou où a été projetée la boule et aux dépens de la ma- tière de celle-ci, puis devenir nymphe dans une coque faite de débris et de terre. L'examen attentif des travaux des Pilulaires doit convaincre Ihomme le plus infatué de la haute intelligence de son espèce qu'il ne peut en refuser une parcelle ù ces chélives et laborieuses créatures, «Souvent, riLLI.AIRtS. 605 dit M. MulsanI (H), fcurtoui parmi les Scarabées qui conslruisenl une pelote beaucoup plus grosse qu'eux, souvent un ami obligeant vient prè(er ses bons offices. Il se place sur le somme! du corps sphérique, et, en se penchant en avant, l'entraîne dans un mouvement de rota- tion. Quelquefois un accident arrive : la boule tombe dans un trou, et y resterait inévitablement sans le secours de nouvelles forces néces- saires pour l'en extraire. Un Pilulaire auquel semblable mésaventure était arrivée se dirigea, dit llligcr, vers un (as de bouse voisin, et revint bientôt avec trois camarades ; fous quatre réunirent leurs efforts pour tirer la pelole du précipice, et ils y parvinrent enfin : ce résultat obtenu, les trois compagnons, dont la tâche éfail accomplie, s'en retournèrent aussitôt à leur ouvrage. >■> Les deux sexes, avons-nous dit, travaillent à construire et à rouler les pilules à œufs ; mais, comme on peut le présumer d'avance, les mâles mettent moins d'activité que les femelles dans ces opérations destinées à assurer le sort de leur postérité. Il est bien rare, chez les insectes, que les mâles viennent en aide à l'autre sexe ; ils ressemblent aux hommes des peuplades sauvages, propres seulement à lu chasse et aux combats. « Les mâles, dit M. Mulsanf ('2) à propos d'un genre de Pilulaires {Sisyphus), montrent un attachement moins vif que l'autre sexe pour ces petites pelotes qui doivent servir de berceau à leurs descendants. Souvent, pour mettre à l'épreuve leur amour maternel, il m'est arrivé de transporter dans la main un couple de Sisyphes avec le fruit de leurs travaux. Dès que je leur rendais la liberté, le mâle en usait pour s'envoler ; la femelle restait ordinairement attachée à la pilule, objet de ses eipérances, et se résignait à la conduire seule. J'ai vu quelques-unes de ces créatures surprises par la nuit avant d'avoir pu enterrer assez profondément leur globule : le lendemain, de grand matin, je les retrouvais le tenant embrassé entre leurs pattes, comme un trésor dont elles n'avaient pu se séparer. » Est-il exact de dire, comme cela parait résulter d une observation superficielle, que les mâles restent spectateurs tranquilles des rudes travaux de leurs compagnes ? Le Créateur ne laisse pas vivre les êtres inutiles à la reproduction, et, chez les industrieux Hyménoptères no- tamment, où tant de femelles nidifient plusieurs mois de l'année, les mâles n'ont au printemps qu'une existence éphémère. Une très-jolie observation de M. P. de la Hrulerie, faite dans le midi de l' Espagne, au printemps de 1866, me paraît donner la clef du rôle exact des mâles. Si chez les Batraciens et les Poissons les mâles sont dans bien des cas les auxiliaires indispensables de la ponte, chez les Pilulaires leur pré- sence est un stimulant nécessaire à l'accomplissement du devoir ma- ternel. Étrange et touchant spectacle que celui offert à l'intelligent (1) Mulsant, Coicoplcrc! de Fra'ur, LAMEi.i;conM;s, i8i2, f. !ii . (2) Mulsant, op. cit. Zi(Hi COLÉOP ! ÈRES. — SCAUABÉIENS. observateur que nous venons de nommer, par VAteuchus cicairico- sus, Luc, qui abondait sur la plage de Malaga, là où l'on parquait les porcs ! « Je le vis, dit-il, rouler ses boules. La femelle seule se charge de ce soin, et, comme les autres espèces du genre, marche à reculons et se sert de ses pattes de derrière pour maintenir son précieux fardeau. Le mâle surveille le travail avec un intérêt visible, mais sans y pren- dre une part active. Qu'un obstacle se rencontre et que la boule qui contient sa progéniture tombe dans une inégalité du sol, il faut voir comme il s'agite, tourne tout autour, pousse sa femelle du chaperon, l'excite, j'allais dire de la voix, mais plutôt en faisant retentir d'un ton désespéré le bruil que produit le frottement de son abdomen contre ses élytres. Si l'observateur prend la femelle et la pose à quelque dis- tance, le mâle redouble son cri plaintif. La femelle l'entend^ elle paraît indécise, consulte les quatre points cardinaux, s'oriente entin, et de sa course la plus rapide revient, tout en trébuchant, ressaisir la boule, objet de sa maternelle sollicitude. Voils accusez le mâle d'être un pa- resseux, jouant le rôle de la mouche du coche! Mouche peut-être, mais mouche indispensable, car, si vous le prenez, la femelle s'arrête et reste la tête baissée sur le sable, de l'air le plus piteux du monde. Elle serre toujours sa boule dans ses pattes de derrière, mais rien ne la fera bouger, et, si l'on ne lui rend son compagnon, je crois qu'elle mourra sur place (1). » Peut-être toutes les espèces de roiileurs de boules n'offrent pas un accord aussi complet dans le ménage; mais certes l'existence prolongée des mâles atteste leur nécessité pour la conservation assurée de la progéniture. On peut dire que les Pilulaires remplissent, dans l'ordre naturel, un but plus important et plus élevé que celui de la propagation de leur race. Il importe que les matières stercoraires, cause d'infection atmos- phérique, soient mêlées au sol le plus promptemenl possible ; là, par une heureuse compensation, elles fournissent aux végétaux l'azote et les sels calcaires, et sont l'agent puissant et eftîcace de la fertilité de la terre. Rien de plus utile que ces petites forces constamment répétées et agissant sur d'immenses espaces : de chétifs insectes deviennent les plus actifs auxiliaires des grandes harmonies, et font partie de ce cycle admirable par lequel la matière, engagée tour à tour dans la vie et dans la mort, tantôt obéit à ces mystérieux archées des anciens philosophes, tantôt subit passivement les lois des corps bruts, sans que jamais, depuis l'origine première du- monde, il n'y ait ni création ni perte. Celui qui a tiré la matière du néant pouvant seul l'y replonger. Nous voyons en effet les Pilulaires abonder dans les régions chaudes, où la putréfaction est si prompte, s'occuper sans relâche de leurs tra- vaux dans les heures diurnes, et d'aul^ant plus activement, que la, tem- (i) P. de la Brûlerie, Ann. Soc. httom. de France^ 1866, p. 522. P1LULA.1RES. — ATEUCHUS. /j07 pératurc est plus élevée et par suite les miasmes plus abondants et plus redoutables. En outre les mâles déploient le même talent que les femelles, font seuls des boules nécessairement stériles, et les femelles en confectionnent aussi où elles ne mettent pas d'œufs, alors que leur progéniture est à l'abri de tout danger. Ces pelotes inutiles sont gar- dées par ces insectes avec beaucoup moins de sollicitude ; un seul individu les roule, et, au moindre accident qui l'oblige à les abandon- ner, se laisse facilement arracher par un autre le fruit de ses peines. Des mœurs tout à fait analogues se manifestent chez certaines espè- ces américaines : ainsi chez le Canthon ou Coprobius volvens (Catesby, Hist. nat. de la Caroline). GENRES PRINCIPAUX. ATEUCHUS, Web. (1) — Chaperon cachant les organes buccaux, sexdenté, semi- circulaire. Antennes de neuf articles, les trois derniers formant la massue. Cor- selet grand, transversal, débordant les élytres. Jambes antérieures fortement tri- ou quadridentées en dehors, servant à fouir ; tarses antérieurs nuls dans les deux sexes. Ce genre est célèbre par la vénération qu'avaient pour certaines de ses espèces les anciens Égyptiens. Aussi l'une d'elles a reçu le nom d'-4. sacer, Linn. C'est un gros insecte d'un noir peu brillant, à chape- ron sexdenté, à tête munie de deux tubercules, à corselet et à élytres lisses. Il se trouve dans le midi de l'Europe, sur tout le pourtour médi- terranéen, dans le Caucase, en Asie Mineure, en Egypte, dans la Tuni- sie, l'Algérie, le Maroc, dans presque toute l'Afrique et au cap de Bonne-Espérance. On le rencontre dans le midi de la France, sur les côtes de la Méditerranée, plus ordinairement eu Provence qu'en Lan- guedoc ; il est commun à Marseille, sur le bord de la mer, du côté de Montredon. 11 déploie, sous l'influence de la chaleur, une activité in- croyable. Il choisit habituellement un terrain en pente pour y placer sa boule. On voit souvent, au printemps ainsi qu'au commencement de l'été, dans les dunes ou sur les sables qui touchent la mer, les Sca- rabées sacrés se livrer au travail d'enfouir leurs boules : ils grattent' avec une grande vivacité la terre, qu'ils amoncellent d'abord derrière leurs pattes postérieures, puis, se retournant et se servant de leur cha- peron comme d'une pelle, ils poussent plus loin les débris qui les em- barrassent. Les pelotes destinées à ne pas nourrir de larves sont enter- rées avec peu de précautions : le lieu dans lequel elles ont été déposées offre, au moins le premier jour, une ouverture béante qui permet de les apercevoir. Les autres pelotes, c'est-à-dire celles qui renferment des œufs ou des larves, sont au contraire complètement enterrées avec le plus grand soin. En creusant le sable, on trouve souvent, avec une (1) Ce nom a prévalu, du moins en France, sur celui, plus ancien, de Scara- bœus, Linn. 408 COLÉOPTÈRES. — SCARABÉIENS. de celles-ci, le couple d'insectes par qui elle a été roulée. On dirait, comme le l'ait observer M. Mulsant, que ces petits animaux restent atta- chés à cet objet, pour veiller à sa conservation, ou pour attendre, près de ce dépôt précieux, la mort qui doit mettre fin à leurs travaux. Latreille s'exprime comme il suit à propos de ces utiles insectes: « Messagers du printemps, annonçant par leur reproduction le renou- vellement de la nature ; singuliers par cet instinct qui leur apprend à réunir des molécules excrémentitielles en manière de corps sphériques; occupés sans cesse, comme le Sisyphe de la Fable, à faire rouler ces corps ; distingués des autres insectes par quelques formes particulières, ces Scarabées parurent aux prêtres égyptiens ofîrir l'emblème des tra- vaux d'Osiris ou du Soleil (1). » Une autre raison de la vénération qu'inspirait cet insecte est que l'on supposait que tous ces Scarabées étaient mâles, et qu'il n'y avait pas chez eux de copulation. Les carac- tères sexuels distinctifs sont, avons-nous dit, presque insensibles chez les Pilulaires. Plutarque dit, à propos des Égyptiens : « Ils honorent l'as- pic, la belette et l'escharbot, d'autant qu'ils voient en eux ne sais quelles petites images reluire de la Divinité, comme nous apercevons le corps du soleil en une goutte d'eau ; car il y en a beaucoup qui cui- dent encore et le disent, que la belette s'accompagne avec son mâle et qu'elle fait ses petits par la bouche, et disent que c'est une figure et représentation de la parole qui se forme et procède de la bouche. Et quant aux escharbots ils tiennent qu'en toute leur espèce il n'y a point de femelle, que tous les mâles jettent leur semence dedans une cer- taine matière qu'ils forment en façon de boule, laquelle ils poussent à reculons, comme il semble que le soleil tourne, le ciel au contraire de lui qui a son mouvement d'occident en orient (2). » Les mêmes opinions sont exprimées par Porphyre, dans son traité de VAbstinfnce de la chair des animaux : il dit que ce Scarabée est honoré comme la figure de l'astre du jour. De tous les auteurs anciens qui ont parlé du Scarabée sacré, Horapollon est celui qui a traité ce sujet avec le plus d'étendue. 11 lui a consacré un chapitre d'un ouvrage mystique {Hiéroqhjphes, liv. I, chap. 10) qui passe pour avoir été traduit de l'égyptien en grec par un nommé Philippe. Voici, d'après un mémoire de [.atreille o), des extraits des principaux passages : « Tous les Scarabées ont trente doigts, à raison du nombre de jours que le soleil met à parcourir chaque signe du zodiaque. On en distingue trois espèces. La première, .ou le Scarabée proprement dit, présente des rayons et a été par analogie consacrée au Soleil...- Tous les (1) Latreille, Cours d'entomologie. Roret, 1831, p. 54. (2) Plutarque, Isis et Osiris, chap. 39, trad. d'Amyot. (3) Latreille, Des Insectes peints nu sculptés sur les monuments antique'j ii VEgiiple {Mem. du Mus.. 1819, t. V, p. 2i9). PILULAIHES. — AIEUCHUS. /i09 individus de ce Scarabée sont du sexe masculin. Lorsque l'insecte veut se reproduire, il cherche de la liente de bœuf, et, après en avoir trouvé, il en compose une boule dont la figure est celle du monde ; il la fait rouler avec les pieds de derriOro, en allant à reculons et dans la direction de l'est à l'ouest, sens dans lequel le monde est emporté par son mouvement ; celui des astres se fait dans une direction opposée ou du vent du couchant vers celui du levant. Le Scarabée enfouit sa boule en terre, où elle demeure cachée pendant vingt-huit jours, temps égal à celui d'une révolution lunaire, et pendant lequel la race du Scarabée s'anime. Le vingt-neuvième jour, que l'insecte connaît pour ôtre celui de la conjonction de la lune avec le soleil et de la naissance du monde, il ouvre cette boule et la jette dans l'eau. U sort de cetfe boule des animaux qui sont des Scarabées. C'est par ces motifs que les Egyp- tiens, voulant désigner un être unigène ou engendré de lui-même, une naissance, un père, le monde, l'homme, peignaient un Scarabée » On a cherché à interpréter cet amalgame d'erreurs et de faits réels. La forme orbiculaire de ses boules de fiente faisait de cet insecte le symbole du monde, ainsi que la manière dont on prétendait qu'il les roule, soit dans le sens direct, d'occident en orient, soit dans le sens rétrograde, d'orient en occident, car on trouve les deux opinions dans les auteurs de l'antiquité. Les anciens voyaient bien cet insecte enterrer sa boule ; mais, convaincus d'une génération spontanée, il leur fallait nécessaire- ment supposer que l'insecte venait ensuite la déterrer et la jeter dans l'eau, élément nécessaire pour produire, selon leurs idées, avec le concours de la chaleur, les êtres qui n'avaient ni père ni mère. Latreille explique les trente doigis par l'observation du nombre des cinq articles des six tarses, dont le produit donne trente, et il cite une pierre gravée, du genre nommé ahraxas par les archéologues, figurée par Montfaucon d'après Kircher, représentant un Scarabée ayant à chaque patte antérieure une main étendue à cinq doigts, il faut toute- fois faire remarquer que cette ingénieuse déduc^tion de Latreille, vraie pour la majeure partie des Scarabées stercoraires, se trouve précisé- ment inexacte pour les Ateuchus proprement dits; ils n'ont pas de tarse aux membres de devant, et cette atrophie est naturelle, et non le résultat d'un accident de collection, comme on l'a cru longtemps. Les fortes jambes de devant de ces insectes leur servent à fouir la terre pour enterrer les boules, et des tarses grêles eussent été nuisibles pour ce travail. On comprend donc pourquoi les monuments, les hiéroglyphes représentent, multipliée de mille façons, l'image du Scarabée sacré. Il est ciselé, quelquefois dans des proportions gigantesques, sur les murs des temples, sur les chapiteaux des colonnes, sur les obélisques, gravé sur les pierres précieuses, sur des médaillons, des cachets, des grains de collier ou de chapelet. Cet insecte, toujours mâle, était sculpté au bas des statues des héros pour exprimer la vertu guerrière. 410 COLÉOPTÈliES. — SCARABÉIENS. exempte de toute faiblesse. L'idée du sexe mâle de tous ces insectes venait de la grande ressemblance entre les deux sexes, et de ce que le mâle travaille aux boules comme la femelle. Selon le docteur Clarke, les femmes mangent encore aujourd'hui, en Egypte, des Atnichus sacer pour se rendre fécondes, car la fécondité est un des attributs du soleil^ dont ces insectes sont l'emblème. Dans le zodiaque de Dendcrah, le Scarabée sacré remplace, dans les signes célestes, le Scorpion des Grecs. Il était aussi le symbole de la transmigration des âmes, et placé dans la tombe des personnes pieuses comme un dieu tufélaire. Une momie rapportée de l'expédition d'Egypte par E. Geoffroy St-Hilaire renfer- mait un Ateuchus sacer parfaitement conservé. On doit s'étonner de l'oubli d'Hérodote, qui ne parle pas de cet insecte dans son livre II, intitulé Ëuterpe, où il traite de la religion et des mœurs des anciens Egyptiens, et cite longuement leurs animaux sacrés, l'ibis, le chat, le crocodile, etc. Comme on doit s'y attendre pour un être doué de tant de vertus, il jouait un grand rôle dans la médecine antique. Les empiriques et les mages, c'est-à-dire ceux qui employaient la magie comme moyen de guérison, s'en servaient contre les fièvres intermittentes. Les monuments antiques du peuple zoophile représentent aussi l'image d'une autre espèce, VA. laticollis, Linn., noire, moitié plus petite que 1'^. sacer, très-commune dans toute l'Europe méridionale, remontant plus haut que l'autre, puisqu'on la trouve dans une bonne partie de la France et de l'Allemagne. Le chaperon a six dents, mais les élytres sont sillonnées et non lisses, double caractère bien sensible sur les amulettes des deux espèces. On le trouve dans diverses parties des environs de Lyon, particulièrement sur les monts d'Or et les coteaux de la Pape. Il est très-rare aux entours de Paris, comme tous les Pilu- laires, si réellement il y a été trouvé ; mais cependant les amateurs ont peut-être chance de l'y rencontrer, si c'est bien l'insecte que Geoffroy a connu et appelé le Hottentot. Enfin il est bien probable qu'une troi- sième espèce recevait les hommages des Égyptiens, et se rattache d'une façon curieuse à leur antique histoire. Horapollon, dans ses récits confus et erronés, dit que le Scarabée sacré lance des rayons analogues à ceux du soleil. Latreille avait d'abord supposé que les six dentelures du chaperon représentaient les rayons de l'astre ; mais une intéres- sante découverte amena une hypothèse plus vraisemblable, et qui nous fait comprendre pourquoi les images de cet insecte nous présentent souvent des traces d'une ancienne dçrure. En 1819, M. Cailliaud, de Nantes, dans son voyage au Sennaar, découvrit à Méroé, sur le Nil Blanc, un autre routeur de boules, retrouvé depuis dans les mêmes pays par M. Botta, ressemblant beaucoup pour la forme aux précédents, mais, au lieu de leur robe obscure, orné d'une éclatante couleur verte, prenant sur certaines parties une teinte dorée, analogue en consé- quence par ses reflets aux rayons de l'astre du jour. PILULAIRES. — ATtUCllUS. 411 « Un jour, dit Cailliaud (1), que je chassais les oiseaux, à une lieue de Sennâr, sur la route de Faybali, le hasard offrit cà mes yeux le fameux Scarabée sacré des Égyptiens. Cet insecte est d'un vert parfois éclatant ; son corselet est nuancé d'nne teinte cuivreuse à reflet métallique, ce qui se rapporte parfaitement à ce que disent Horapollun et Élien, qu'il était doré et rayonnant. Ce Scarabée est fidèlement représenté dans les peintures de plusieurs monuments, et sur les caisses des momies les plus anciennes je l'ai toujours vu colorié en vert et jamais en noir. Cependant un Scarabée qui se trouve aujourd'hui en Egypte, et qui a cette dernière couleur, a été regardé par les modernes comme le vrai Scarabée sacré » MM. Cailliaud et Latreille admirent comme très-probable que les Égyptiens, originaires de l'Ethiopie ou des régions élevées de la vallée du Nil, ont adoré d'abord ce brillant Scarabée; puis que leurs descendants, remontant peu à peu vers le nord à mesure que la population accrue mettait en culture progres- sive le delta du Nil, confondirent dans une vénération commune l'in- secte doré de leurs ancêtres avec son noir congénère qu'ils retrouvaient seul dans la Basse-Egypte. Cependant Ch. Nodier a élevé des doutes sur ce que cette interpré- tation aurait de trop absolu (2). Il croit d'abord que l'insecte de M. Cailliaud n'était pas absolument inconnu des modernes ; mais c'est à tort, car il le confond avec le Gyinnopleurus profanusl Fabr., de la côte de Guinée, également d'un vert brillant. En outre, s'il y a des Scarabées cà amulettes dorés, il en est de verts, de bleus, de rouges, de fauves, ou de la couleur naturelle de la terre de potier ; ces colorations n'auraient donc pas de rapport avec la couleur des espèces réelles. La véritable idée du Scarabée sacré ne se rapporte pas à une individualité distincte, mais à plusieurs espèces. Horapollon en reconnaît trois, et Pline encore plus. Quoi qu'il en soit de ces discussions archéologiques n'intéressant que les érudits, Latreille a donné cà la troisième espèce d'Ateuchus dont nous avons parlé, le nom d'J. /Egijptiorum, Latr. (pi. xxiv, fig. 1). Outre la couleur si caractéristique, l'espèce diffère par divers détails de VA. sacer. La taille de cet insecte varie beaucoup, de 18 à 45 milli- mètres, de longueur. Nous représentons des détails de l'-'l. sacer pi. xxiv, fig. 2, tête vue en dessous; 2 a, labre; 2 6, mandibule; 2 c, mâchoire et palpe; 2 d, lèvre inférieure et palpes ; 2 e, antenne.— En 1856, on a rencontré près de Paris, au mois de mai, mais tout à fait accidentellement, une (1) Cailliaud, Voyage à Méroé, au fleuve Blanc. Paris, impr. royale, 1827, t. II, p. 311, et t. IV, p. 279. (2) Ch. Nodier, Mélanges tirés d'une petite bibliothèque (Paris, Roref, 1829) : « Interprétation des hiéroglyplies. Reclierches archéologiques et entomologiques sur le Scarabée des Égyptiens, etc. » /il 2 COLÊOPTÈRKS. — SCARABÉIENS. quatrième espèce, à Ateuchus , VA. semipunctatus . Kabr., qui est du pourtour méditerranéen et noir. Il se trouvait dans des souches aban- données par l'inondation de la Seine. I.es détritus que laissent après eux les fleuves débordés lors des grandes crues sont une source de riches trouvailles, et l'amateur intelligent ne doit jamais négliger de les explorer. Il y a transport d'espèces d'autres localités, cl en outre certaines espèces, habitant d'or.linaire d'inaccessibles retraite?, ne se présentent à nous que lorsque les eaux les ont violemment arrachées à leurs demeures : de même que ces rares castors du Rhône qu'on trouve parfois éperdus et troublés, sur les quais de quelque ville de Pro- vence, après les inondations redoutables du fleuve. Le genre Ateuchus, qui n'intéresse pas moins l'érudit que le natura- liste, comprend une soixantaine d'espèces, de toute l'Europe méridio- nale, du Caucase, de toutes les régions de l'Afrique, de l'Arabie, de la Tartarie, de la Perse, des Indes orientales et de Ceylan. l^lSYPHl'^i, Latr. — Cliaperon subhexagonal, échancré en avant. Antennes de huit articles, avec massue lamelleuse de deux articles. Arrière-tronc très-court et très-épais, triangulaire, et élytres de même forme. Jambes postérieures extrê- mement longues, courbes en dedans, à cuisses débordant l'abdomen; tarses antérieurs courts, existant dans les deux sexes. Ces insectes, d'un noir mal, des mêmes pays qiie les précédents, avec la Chine en plus, et une espèce égarée du Mexique, S. mi'xicanus, Harold, volent à la façon des Cétoines, en glissant les ailes hors de leurs élytres fermées. Il en est une espèce, très-commune dans toute l'Europe méridionale, et qui se trouve quelquefois, mais rarement, près de Paris. C'est le S. Schafferi, Linn., nommé par Geoffroy le Bousier araignée, à cause de ses longue ^ pattes grêles, noir mat, à élytres striées, de 7 ù i'2 millimètres. La mythologie a fourni à Latreille le nom de ce genre, en souvenir du filsd'Éole ei d'Énarète, condamné à rouler au sommet d'une montagne un rocher qui lui échappait tou- jours au moment où il croyait toucher au terme de ses peines. On peut dire en efï'et, du S'. Schnfferi, qu'il a la monomanie du jeu de boules ; sans relâche on le voit occupé à en construire ou à en rouler, et souvent il satisfait son instinct à peu de frais, avec des crottins de chèvre. Ce noir et bizarre insecte vit dans les matières les plus rebu- tantes, se délecte d'excréments humains, marche gauchement à cause de ses longues pattes postérieures, et se plaît sur les terrains en pente, les coteaux insolés. Les Sisyphes ont fourni à M. .Mulsant d'intéressantes observations. « J'avais placé, écrit-il, des Sisyphes dans un vase recou- vert d'une cloche de toile métallique; je leur avais fourni les maté- riaux nécessaires pour leur travail, rnais ils avaient beau façonner des pilules, ils ne pouvaient les conduire bien loin. L'un d'eux finit par grimper sur le treillis, emportant avec ses pieds postérieurs, et PlLULAÎflKS. — G\.\LNOFLEUaUS, CANTHON. M3 Sun globule, e( la femelle qui lui aidait précédemment à le faire rouler. 11 parvint ainsi, avec plus ou moins de peine, jusqu'au dôme de cette espèce de voûte : là sa petite boule lui ccbappa ; il se laissa tomber aussitôt pour la rejoindre. Plusieurs fois le même fait s'est renouvelé sous mes yeux avec les mêmes circonstances. » On peut consulter, pour l'étude des espèces de ce curieux genre, la Monographie du genre Sisyphe, par Gory (br. in-8°, 1 pi., Paris, 1833), l.%, Lep. et Serv. — Tous les tarses pourvus de deux crochets. Les deux espèces de ce genre, qui sont du Cap, ont de grands rapports avec les Hoplia. Leur corps est épais, court et entièrement couvert d'écaillés d'un beau vert. — Ex. : L. rupicola, Fabr., pi, xxvii, fig. 5. DOPL,I.%, lUig. — Antennes à massue de trois articles, parfois plus allongée chez les mâles, de dix ou neuf articles. Corps épais, velu ou écailleux en partie. Élytres non rétrécies en arrière, subparallèles. Tarses assez robustes ; crochets des quatre antérieurs doubles, crochet des tarses postérieurs toujours unique et très-grand, La majeure partie des espèces du genre Hoplia, au nombre de plus de soixante, est européenne et surtout du sud de ce continent. Il en GIRARD. 28 436 COLÉOPTÈUES. — SCARABÉIENS. est de Madagascar, des Indes, de Chine, de l'Amérique du iNord, etc. Elles ont souvent des couleurs vives, dues à la présence de petites écailles qu'on peut comparer à celles des ailes des papillons. Elles fré- quentent les fleurs et diverses espèces. d'arbres dont leurs mâchoires assez fortes leur permettent d'entamer les feuilles ; quelques-unes de nos pays se réfugient souvent sous les pierres, les bouses desséchées ou dans la terre. Deux sous-genres ont été établis par M. Mulsant pour les espèces de France : 1° Decamera, à antennes de dix articles, quel- quefois de neuf seulement chez les femelles, à crochets des tarses posté- rieurs souvent fendus. Espèces principales : (loralis, Oliv., ou brun- nipes, Bon., du midi de la France, et ■philanthus, Sultz.,ou pulverulenta, Illig., de la France moyenne, espèces brunes ou fauves, à écaillettes d'un blanc verdâtre ou bleuâtre; praticola, Duftschmidt, d'un brun noirâtre, à écaillettes livides, à poils, qu'on trouve dans le nord de la France. — 2*" Hoplia proprement dit. Deux espèces principales, à corps aplati en dessous, couvert de petites écailles, toutes deux de môme taille, de 8 à 10 millimètres de longueur : farinosa, Linn., d'un vert nacré jaunâtre en dessus et en dessous, et le dessous très-bril- lant, dans les femelles comme dans les mâles, les premières pres- que aussi abondantes que les seconds, fréquentant les Heurs, surtout celles des Églantiers et des Ombellifères, commune dans le milieu e il'est de la France, se prenant à la fin de juillet dans les hautes régions de la Suisse, se trouvant à Fontainebleau sur les Ronces; cœrulea, Drury, le mâle d'un beau bleu d'azur avec éclat métallique en dessus et en dessous d'un blanc d'argent, luisant et un peu verdâtre (représenté pi. xxvii, fig. 7; 7 a, lèvre inférieure; 7 b, labre; 7 c, tête en dessus; 7 e, mandibule; 7 f, mâchoire et palpe; 7 g, jambes et tarse postérieurs). La femelle, beaucoup plus rare que le mâle, est brune, à reflet violet foncé, ce qui tient à ce que la couleur du fond n'est presque pas masquée par les écaillettes. Cette Hoplie est le plus brillant des Coléoptères de France. On emploie souvent le mâle, dans les cadres d'ornement, en guirlandes et arabesques d'azur, s'entre- laçant entre des papillons aux vives couleurs. L'espèce est très-com- mune dans tout le midi de la France, dans les prairies au sud de la Loire, et dans les montagnes du Lyonnais; vit sur les plantes qui bordent les ruisseaux des prés, notamment sur les Saules. Elle re- monte assez haut vers le nord et peut se rencontrer accidentellement près de Paris, car Geoffroy connaissait ce superbe insecte, qu'il nomme 'Écailleux violet. SERH^A, Mac Leay.— Antennes de neuf ou dix articles, avec massue de trois ou ualifc, Élytres prolongées, recouvrant le propygidium. Tarses grêles, compri- més allongés, à crochets doubles et biTides dans tous. Le Sériées, peu abondantes en Europe, ont de nombreuses espèces SERICA. 435 de petite ou au plus de moyenne taille, au nombre de plus décent, de tous pays, sauf de l'Australie; la plupart glabres, à reflet soyeux ou opalin, de forme variée, oblongue et subparallèle ou ovalaire et même globuleuse. A mesure que ces changements se prononcent, les han- ches postérieures s'agrandissent, les cuisses et les jambes, surtout les postérieures, s'élargissent et deviennent plus contractiles : l'aspect finit par ressembler beaucoup à celui des Byrrhiens. Les habitudes sont crépusculaires ou nocturnes ; elles sont alors agiles et volent facile- ment sur les fleurs ; pendant le jour parfois ces insectes sont sur le sol ou cachés sous les pierres, ou enfoncés en terre dans les lieux sablonneux. Nous citerons : le S. brunnea, Linn., qui est surtout du nord et du milieu de l'Europe, dont la larve a été trouvée dans la mousse au pied des Pins, et qui s'éloigne, selon Erichson, des autres larves du grand groupe des Hannetons, par un anus longitudinal, un corps. plus velu, le sac poilu et épineux ; la nymphe aurait les saillies postérieures plus longues et plus divergentes que les autres propor- tionnellement. Le S. holosericea, Scop., ou variabilis, Oliv. et Fabr. de toute l'Europe (pi. xxvm, fig. 12, lùvre inférieure; 12 a, labre; 12 ô' mandibule; 12 c, mâchoire et palpe ; 12 d, antenne; 12 e, crochets d'un tarse). C'est le Scarabée couleur de suie de Geoffroy. Sa forme est ovale habituellement d'un noir soyeux, plus foncé en dessus qu'en dessous àélytres striées. C. Duméril dit qu'il est quelquefois de couleur jaune- paille, et se trouve dans les trous pourris de certains arbres. Une inté- ressante histoire des métamorphoses de cet insecte a été publiée par M. P. de la Brûlerie (1). La larve met plusieurs années à se développer car on trouve à la fois des individus à tous les degrés de croissance. Chez les jeunes larves l'extrémité des mandibules est divisée en trois dents mousses presque égales entre elles. Ces larves sont très-communes en août et septembre, sur les collines sablonneuses des environs de St-Florentin (Yonne), et vivent sous les pierres et les bois pourris. Selon l'auteur cité, elles vivent toujours, non de racines de plantes vivantes mais de débris de feuilles pourries qui sont mêlées au sol dans les endroits qu'elles habitent, et, pour se procurer cette nourriture elles creusent dans le sable fin et meuble des galeries sinueuses dont la paroi supérieure est souvent formée par le dessous d'une pierre ou d'un mor- ceau de bois. Elles deviennent nymphes dans des niches de terre com- primée par leur corps et très-fragiles. Les formes de la nymphe rappel- lent exactement celles de l'insecte parfait. Sa couleur est le blanc, qui devient de plus en plus jaunâtre, à mesure que le moment de la der- nière métamorphose approche. Sur le dos des segmenis moyens de l'abdomen est une carène qui la protège du contact des parois terreuses, et l'abdomen est terminé par deux épines aiguës et divergentes de couleur brune. Si on la tourmente, ses derniers segments exécutent des (1) Amu Soc. enlom. de France, 'i"^ série, IcSCi, t. IV, p. (itjG, et pi. x. 436 COLÉOPTfcRES. — SCARABÊIENS. mouvements de rotation assez vifs. Les adultes cclosent à la tin d'août et en septembre, et on les trouve jusqu'aux derniers beaux jours, blot- tis sous les pierres ou enfoncés dans le sable, à petite profondeur. Aux premiers froids, ils descendent plus avant, pour ne reparaître qu'avec la chaleur, ordinairement dans le courant d'avril. Alors commence leur vie active. Le soir, ils grimpent aux tiges des Graminées et s'accou- plent; dans le jour, ils se cachent dans les touffes d'herbe et sous les pierres, où bientôt la femelle fécondée retourne mourir, après avoir déposé ses œufs. SVM.HKEiA, Erichs. — Genre ressemblant a.ux Serica, s'en distinguant par des antennes de huit ou neuf articles, de larges crocliels, et un ou deux articles dilatés aux tarses antérieurs des mâles. Ses espèces, de la taille des Sériées, sont de l'Amérique du Sud, où les Serica sont très-peu nombreux, oblongues, glabres à reOet soyeux plus ou moins vif. Lacordaire dit que les Symmèles du Brésil sont diurnes, se trouvent dans les bois sur lec feuilles, et sont peu communes. Les élytres sont sillonnées. Ace genre se rapporte le S. instabilis, Erichs., var. flavimana, Gory, de Rio-Janeiro (Brésil) (pi. xxviii, fig. 11), de couleur noire irisée, à cuisses et pattes fauves, à tarses noirs (texte Icon. Guér.-Mén., p. 98). UOitlArOPI>l.%, Stephens. — Antennes de neuf articles, la massue de trois, les crochets des tarses bifides. Corps court ou médiocrement allongé. Ces insectes sont de faible taille et revêtus partout d'une fine pubes- cence, tantôt couchée, tantôt droite; ils sont diurnes. Le type est 1'//. ruricola, Fabr., de toute l'Europe et du Caucase, ou Scarabée à bor- dures de Geoffroy. 11 est noir, velu, court et épais, de 6 à 7 millimètres; ses élytres sont testacées ou d'un rouge-brique, striées et bordées de noir. Le genre est d'Europe, de Sibérie, du Caucase, d'Asie Mineure (treize espèces). niPlillCA:PllAli/%, Aud. Serv. — Gliaperon grand, échancré en avant ; antennes de huit articles, la massue de trois. Élytres oblongues, arrondies et rebordées à l'extrémité ; deux crochets robustes et bifides à tous les tarses. Ce genre est formé d'espèces assez petites, très-abondantes et exclu- sives à la Nouvelle-Hollande, et pullulant beaucoup. Contrairement à l'aspect habituel des Hannetons, elles sont d'un riche éclat, d'un vert métallique passant au doré ou au, cuivreux éclatant, tantôt glabres, tantôt à écaillettes en dessus, revêtues en dessous d'écailles blanchâtres. — Ex. D. furcata, Guér.-Mén. (pi. xxvm, fig. 13; 13 a, tête en dessus j CHASMATOPTERUS, PYRONOTA, MACRODAGTYLUS. li^l 13 b, mAchoire et palpe; 13 c, son extrémité vue en dedans ; 13 d, tarse intermédiaire du mâle; 13 e, tarse antérieur du mâle). CHASMATOPTERUS, Aud. Serv. — Antennes de neuf articles, les trois derniers formant une grosse massue subovale. Élytres courtes, subparallèles, un peu dé- hiscentes à l'extrémité. Tarses grêles, tous à deux crochets bifides. Ces insectes offrent quatre espèces en Espagne et une à l'île de Madère, de taille petite ou médiocre, velues, brunâtres, à élytres peu consistantes, et se trouvent en grand nombre sur les fleurs. — E\. : C. villosulus, Illig., mâle, d'Espagne et de Portugal (pi. xxvi, fîg. 5; 5a, tête en dessus; 5 6, antenne; 5 c, crochets tarsiens). Cette espèce abonde au Pardo, à Madrid, et dans les montagnes de l'Escurial. Elle vole en abondance seulement par les jours de soleil, et le matin jus- qu'à onze heures, avec une régularité d'horloge. Les mâles sont très- velus et ont les élytres testacées; les femelles, peu velues, ont les ély- tres noires : on en avait fait à tort une espèce distincte, comme l'a reconnu M. E. Perris. Une seconde espèce, le C. hirtulus, Illig., a dans les deux sexes les élytres testacées et noires sur les bords ; elle se trouve seulement dans les montagnes, ainsi à l'Escurial. Ce genre, sans doute à raison de ses poils, occupe, dans le catalogue Gemminger- Harold, une tout autre place que dans le Gênera de Lacordaire, à savoir dans le groupe des Glaphyres et des Amphicomes. PYROHOTA, Boisduval, ou Calonota, Hope. — Antennes de neuf articles avec massue de trois. Tarses à deux crochets grêles et simples; une longue saillie sternale, conique et aiguë. Nous citons ce genre, représentant nos Hannetons à nos antipodes, Australie et Nouvelle-Zélande, à cause de la magnificence de sa parure. Les Pyronotes sont de petits insectes oblongs, arqués en dessous, ayant de la ressemblance, par la forme et la saillie sternale, avec cer- tains Hydrophiliens, d'où le nom de genre Colymbomorpfia, E. Blanch. Ils étincellent des plus vives couleurs, vertes, cuivreuses et opalines irisées, sans duvet qui les masque en dessus ; le dessous du corps est garni de poils blanchâtres. Il y a trois espèces : le C. festiva, Fabr., de la Nouvelle-Zélande ; le C. refulgens, Boisd., du même pays, et une espèce australienne. !ilACROUACTYE,us, Latr. — Antennes de neuf articles, la massue de trois. Pattes longues et grêles. Tarses grêles, ciliés, les quatre postérieurs très-longs, tous à deux crochets plus ou moins bifides. Les Macrodactyles sont remarquables par leur forme svelte et élé- gante, en harmonie avec les pattes. Leur taille est médiocre, leurs cou- Zi3S COLÉOPTÈRES, — SCARATÎÉIENS. leurs variées, parfois métalliques, les élytres avec des lignes régulières de poils. Leurs espèces sont répandues dans les deux Amériques. Aux États-Unis, le M. subspinosus, Fabr., est regardé comme un des Hanne- tons les plus nuisibles, multiplie extraordinairemenl dans certaines années, et dévore les plantes de toute sorte, mais surtout les Rosacées en arbres ou arbrisseaux, et les Vignes. Citons encore le M, suturalis, Mannerheim, du Brésil (provinces des mines) (pi. xsviii, fig. IZi). Le corselet est roussfttre au milieu, avec deux bandes latérales de poils blancs, les élytres rouges à la base et sur la suture, avec une ligne blanche le long de celle-ci, les pattes rougeâtres à tarses noirs. DICRAHIA, Lep. St-Farg. et A. Serv. — Antennes courtes de neuf articles, avec massue ovale de trois. Élytres recouvrant imparfaitement l'abdomen. Tarses à deux forts crochets bifides. Les Dicranies sont en général d'assez grande taille et habitent les parties chaudes et orientales de l'Amérique du Sud. Ex. : D. velulina, Cast., du Brésil, à élytres fauves, lisses et luisantes, le corselet, les pattes, le dessous du corps d'un brun fauve, mais cou- verts d'un duvet jaune très-serré (pi. xxvii, fig. 6 ; 6 o, tarse anté- rieur du mâle). On remarque, dans cette espèce, que le premier ar- ticle du tarse antérieur du mâle porte à son extrémité une courte et robuste épine crochue, utile sans doute pour l'accouplement et devant manquer aux femelles. rEHASPIS, Lep. et Serv, — Antennes de neuf articles, la massue de trois. Corselet muni à sa base d'une dent reçue dans une échancrure correspondante de l'écusson. Élytres subrectangles, laissant le pygidium à découvert. Tarses longs, à crochets bifides aux antérieurs, inégaux aux autres et le plus gros entier, au moins chez les mâles. LesCéraspis sont propres aux régions chaudes, orientales et occiden- tales de l'Amérique du Sud, avec une espèce au Mexique ; ils sont revôLus d'écaillés serrées formant une marqueterie variée. — Ex. : C. décora, Gory, du Brésil (pi. xxviii, fig. 8), à tête, corselet et élytres d'un brun foncé, avec une ligne longitudinale sur le corselet et deux taches d'un blanc jaunâtre à ses angles postérieurs, la base des élytres blan- châtre avec des macules d'un noir velouté, le dessous du corps d'un blanc jaune argenté et les pattes grises. C. hivulnerata , Germar (pi. xxvni, fig. 9, bord postérieur du corselet et base des élytres avec l'écusson, pour montrer le caractère remarquable du genre; 9 a, an- tenne du mâle), aussi du Brésil. PLECTRTS. APOGOMA, RHIZOTROGLS. ^39 PLECTRIS, Lep. et Serv. — Antennes de huit, neuf ou dix articles, les trois derniers formant une massue grêle. Élytres oblongues ou ovales, parallèles. Tarses grêles, à crochets plus ou moins inégaux, fendus au bout, le plus gros parfois entier. Les Plectris sont d'assez grande taille, oblongs ou courts, subparal- lèles, épais, bruns ou rougeâtres, parfois métalliques, mais toujours couverts de poils couchés et serrés, le plus souvent entremêlés d'au- tres redressés, formant chez quelques espèces des touffes élégantes. Ils sont presque exclusifs à l'Amérique du Sud, une espèce au Mexique. Le type est le P. tomentosa, Lep. et Serv.. du Brésil (pi. rs;%'n, fig. 1; 1 a, jambe et tarse antérieurs ; 1 6, jambe et tarse postérieurs du mâle; 1 e, tarse intermédiaire et ses crochets inégaux). L'éperon externe de la jambe postérieure est aplati, dilaté et crochu à son extrémité, carac- tère spécial au mâle et à l'espèce figurée. 4POGOXIA, Kirby. — Antennes courtes de dix articles, les trois derniers formant une massue oblongo-ovale. Corps court ; élytres parallèles. Tarses médiocres, à crochets gros, arqués, fendus au bout. Les Apogonies sont au plus de moyenne taille, à téguments ponctués en dessus, avec lignes de points sur les élytres; elles sont presque toutes de couleur métallique foncée et assez brillante. — Ex :A. rauca, Fabr., ou gemellata, Kirby (pi. xxvra, ûg U; Ua, mâchoire et palpe ; U b, labre ; U C: lèvre inférieure et palpes; U d, antenne; h e, crochets tarsiens). L'espèce est de Coromandel et de Java. Les autres espèces du genre sont de la côte occidentale d'Afrique, du Bengale, de quelques îles de la Polynésie, de Java, de Sumatra, de Chine (vingt-deux espèces). RHlZOTROerS, Latr. — Antennes de neuf ou de dix articles, la massue de trois. Élytres oblongues ou ovales, tronquées à leur extrémité, celle-ci munie d'une bordure membraneuse parfois peu distincte. Abdomen non prolongé en pointe. Tarses grêles, avec deux crochets simples, ayant en dessous, à leur base, une petite dent. Les Rhizotrogues sont très-nombreux en espèces, plus de cent trente, surtout dans l'Europe méditerranéenne, s'étendent en Asie jusqu'en Sibérie et à Ceylan d'autre part, existent dans l'Afrique du Nord, en Abyssinie, au .Mozambique, manquent en Amérique, et l'Australie n'en a qu'une espèce, R. tasmanicus, Burm. Leur taille est moyenne ou assez grande. Les uns sont un peu déprimés en dessous, les autres convexes au contraire dans celte partie du corps. Leur couleur est d'habitude le fauve testacé, uniforme ou varié de brunâtre. Les élytres sont glabres, mais la poitrine, et souvent la tête et le corselet, sont revêtus de poils ^^lO COLÉOPTÈRES. — SCARABÉIENS. mous. L'abdomen, qui ne se prolonge pas en pointe en dessous, et les pattes postérieures des mâles, ont assez souvent des cils épineux qui manquent aux femelles, et celles-ci sont en outre plus grosses et plus massives. On a établi plusieurs sous -genres dans les Rhizotrogus. Ainsi les Geotrogus, Guér.-Mén., d'Algérie, de Sicile, de Sardaigne, aptères dans les deux sexes, sans poils dans certaines espèces, dont les femelles vivent en terre, d'où elles ne sortent que peu ou pas, tandis que les mâles marchent avec lenteur sur le sol. Les Àpterogijna, Reiche, tous algé- riens, ont les milles ailés et les femelles aptères. Les espèces ailées et dans les deux sexes se trouvent aussi dans le jour cachées en terre, sous les pierres, dans les creux d'arbres, et ne sortent que le soir, pour voler en essaims autour des arbrisseaux, les mâles en beaucoup plus grand nombre que les femelles. Les Rhizotrogues sont bien plus crépuscu- laires que les Hannetons proprement dits, ne volent qu'à une lumière très-affaiblie, après le coucher du soleil ; ce n'est que très-accidentelle- ment qu'on peut voir quelque mâle voler dans le jour. On doit citer le B. solstitialis, Linn., du sous-genre AmphimaUus, Latr., à neuf articles aux antennes, de 16 à 18 millimètres, nommé par Geoffroy le petit Hanneton d'automne. Les élytres, le corselet, le corps, sont d'un jaune testacé et cendré par le duvet jaunâtre, avec cinq nervures aux élytres, l'abdomen obtus. Cette espèce, de toute l'Europe, abonde dans les prai- ries, où elle voltige au jour tombant. Selon G. Duméril, le point où ces insectes s'abattent sur le gazon est presque toujours celui qui a reçu quelque excrément d'oiseau, remarquable par sa couleur blanche, et qui est de l'urate d'ammoniaque très-odorant. A Paris, on trouve cet insecte en quantité à la fin de juin, dans nos jardins publics, autour des arbrisseaux des parterres. Sa larve aime surtout les terres sablonneuses et légères. H dévore les feuilles d'Orme, de Peuplier, de Saule, de Ilètre et même de Pin. Il est remplacé à Paris, dans les jardins, en juillet, parle R. œstivus, Oliv., à corselet d'un fauve livide, à élytres d'un /auve jaune luisant, passant au brun rouge sur les bords, sans nervures. Cette espèce non poilue paraît dans le midi de la France dès la fin d'avril. Elle appartient aux vrais Rhizotrogus, Latr., à dix articles aux antennes. Il en est de même du R. œquinoctialis, Herbst. Nous figurons (pi. xxviii, fig. 7) l'antenne du mâle du R. Pini, 0\i\., s.-g. AmphimaUus, du midi de la France, d'Espagne, d'Algérie. Les larves des Rhizotrogues, ressemblant beaucoup à celles des Melolontha, produisent d'assez grands dégâts dans nos cultures, car elles vivent deux ou Irois ans et dévorent les racines des plantes herbacées et des arbres. illEL.oiiOIlTHj%, Fabr. — Antennes de dix articles, la massue de sept longs feuillets cLcz les mâles, oblongue au repos, bien plus courte chez les femelles, ovalaire tu reoos, ayant cinq feuillets subégaux. Élytres allongées, subparaK LE HANNETON. Util lèles, ne recouvrant pas le pygidium. Abdomen prolongé en pointe recourbée. Tarses munis en dessous, près de leur base, d'une petite dent droite dans les deux sexes, à crochets simples. Le genre Melolontha est restreint aujourd'hui aux espèces au nombre d'une vingtaine, toutes d'Europe et d'Asie , très-voisines de l'espèce essentiellement dévastatrice, le M. vulgaris, Fabr., le Hanneton, Geofl'r., nommé Bardoire dans le Lyonnais, etc., existant dans toute l'Europe et dans le Caucase, Ce Coléoptère trop connu a la tête et le corselet d'un noir légèrement bronzé ou verdùtre, les élytres et pattes testacées; à ces élytres cinq nervures et comme poudrées de poils courts et cendrés. Il y a des variétés à élytres plus ou moins poilues, d'autres à corselet d'un rouge brunâtre, d'autres à élytres brunes ou d'un brun noirAtre, et même à reflets violacés, et à pieds bruns. On a signalé aussi des monstruosités : des sujets à corselet divisé en deux ; la massue anten- naire avortant et remplacée par un bouton formé des derniers articles soudés; l'hermaphrodisme bilatéral plus ou moins complet, bien aisé à reconnaître à la dissemblance des antennes, etc. — Nous figurons les riutennes des deux sexes de l'espèce commune (pi. xxvjii, fig. 6, antenne du mille; 6 a, de la femelle, la longueur de la massue variant beau- coup selon les sujets). Le canal alimentaire est assez long, l'estomac garni de franges à suc gastrique, l'intestin grêle suivi d'un côlon, les canaux de Malpighi à replis multiples. L'appareil reproducteur interne est très-développé chez le mâle, le testicule formé de six capsules orbiculaires, ayant chacune un conduit tubuleux inséré vers le milieu, et l'ovaire de la femelle offre de nombreuses gaines avec des œufs en chapelet. Le nom de Mélolonthe, donné à l'insecte qui nous occupe par Fabri- cius, vient du nom grec, Mélolonthe ou Mélonthê, d'un Coléoptère qui servait de jouet aux enfants. Aristophane dit : « Donnez l'essor à votre esprit, laissGz-le voler où il voudra, comme le Mélolonthe attaché par la patte cà un fil. {Nuées, v. 761.) On le trouve encore cité dans cette sentence, attribuée à Pythagore, et qui mérite de demeurer toute mo- derne : « Législateurs, laissez au peuple la liberté du Mélolonthe retenu par un fil. » Selon d'autres scoliasles d'Aristote, le Mélolonthe serait un Chrysocantharus ou Scarabée doré, c'est-à-dire le Cetonia fastuosa, affi- m's ou aurata. 11 est probable que ces divers insectes se partageaient le triste privilège d'amuser les enfants des Grecs. Quant à notre mot Hanneton, c'est un terme de basse latinité, provenant du bruit que fait l'insecte avec ses ailes en volant [alisonans^ alitonans, alisonus). Nous emprunterons à divers auteurs, notamment à C. Duméril, à MM. Ratzeburg, Mulsant, E. Blanchard, Desmarest, Vibert, etc., et à quelques observations personnelles, un historique un peu étendu con- cernant ce terrible insecte, fléau de l'agriculture. En général, les Hannetons commencent à paraître en France à la mi- 442 COLÉOPTÈRES. — SCARABÉIENS. avril, et durent, à l'état parfait, jusqu'à la fin de mai. Quand ils sont très-nombreux, ils dévorent les feuilles des arbres et arbrisseaux dans les jardins, les vergers, les haies, à la lisière des bois : ils aiment beau- coup le feuillage des Ormes, dont les enfants désignent les samares sous le nom de pain de Hanneton. Les arbres, dépouillés de leur verdure, prennent l'aspect qu'ils ont en hiver et restent longtemps malades; ceux des vergers ne donnent plus de fruits quelquefois pendant deux années. Dans les bois, on voit les Chênes dégarnis, d'abord au sommet, de préférence aux Bouleaux et aux Peupliers, qui ne sont attaqués que dans les années de grande abondance de Hannetons. Ce n'est qu'à défaut d'arbres que les Hannetons adultes attaquent les plantes basses, et le moins possible les Crucifères. Ces insectes se tiennent endormis sous les feuilles pendant la forte chaleur du jour, qu'ils redoutent beaucoup. La trop vive lumière les gêne, et parfois les oblige à prendre leur essor pour chercher de l'ombre ; mais le soir presque tous, surtout les mâles, s'élancent dans les airs, à la recherche de la nourriture ou pour la reproduction. Ils commencent par gonfler d'air leurs trachées vésiculeuses, en soulevant et abaissant leurs élytres et faisant mouvoir les anneaux de leur abdomen dans des inspirations précipitées. Les enfants disent alors qu'ils comptent leurs écus, et s'em- pressent de répéter l'antique chant traditionnel : Hanneton, vole, vole, vole! Le vol des Hannetons est accompagné d'un bourdonnement mo- notone; il est lourd, mal dirigé, se fait généralement vent arrière; ils tombent au moindre choc et ne savent pas éviter les obstacles ; d'où le proverbe : Étourdi comme un Hanneton. Malgré cette locomotion défectueuse, l'instinct oblige quelquefois les Hannetons, comme les Criquets, à de désastreuses migrations, quand, ayant ravagé le pays, ils se jettent par bandes innombrables sur d'au- tres localités. Ainsi, en 1688, les Hannetons détruisirent toute la végé- tation du comté de Galvvay, en Irlande, de sorte que le paysage prit l'aspect désolé de l'hiver. Le bruit de leurs multitudes dévorant les feuilles était comparable au sciage d'une grosse pièce de bois, et le soir le bourdonnement de leurs ailes résonnait comme des roule- ments éloignés de tambours. Les habitants avaient de la peine à retrou- ver leur chemin, aveuglés par cette grêle vivante. Les malheureux Irlandais furent réduits à cuire les Hannetons et à les manger. En 1804, des nuées immenses de Hannetons, précipitées par un vent violent dans le lac de Zurich, formèrent un banc épais de cadavres amoncelés sur le rivage, dont les exhalaisons putrides empestèrent l'atmosphère. Le 18 mai 1832, à neuf heures du soir, la route de Gournay à Gisors (Eure) fut envahie par une telle myriade de Hannetons, qu'à la sortie du village de Talmoutiers, les chevaux de la diligence, aveuglés et épou- vantés, refusèrent opiniâtrement d-avancer et forcèrent le conducteur à revenir sur ses pas. En 1841, rapporte M. Mulsant, ils ravagèrent les vignobles du MAconnais, et certaines de leurs nuées s'abattirent sur LE HANNETON. 443 MAcon, au point qu'on avait grand'peine à s'en garantir, en passant sur le pont, par les moulinets de canne les plus rapides, et qu'on les ramassa à la pelle dans certaines rues. M. E. Blanchard rapporte qu'une année, dans les environs de Blois, quelques enfants en recueil- lirent iU 000 en peu de jours. A partir du milieu de mai s'opère l'accouplement, qui dure des journées entières. Le mâle monte sur le dos de la femelle et s'y cram- ponne. Le pénis du mâle, mou mais érectile, est entouré d'un gorgeret dilatateur formé de deux valves cornées, sortant du cloaque comme une sorte de tube rigide, mousse à l'extrémité. Après l'intromission dans le cloaque de la femelle, les valves sont maintenues écartées par des muscles tout le temps nécessaire, et les deux insectes sont for- tement accolés. On observe quelquefois des accouplements contre na- ture entre deux mâles, excès d'ardeur garantissant la conservation de l'espèce. Le mâle, un peu plus petit que la femelle, est très-vif dans les préludes de la copulation; mais, une fois l'intromission opérée, tombe dans une sorte d'engourdissement léthargique, et la femelle le transporte avec elle, renversé, le dos en dessous et traîné à la re- morque les pattes en l'air. Il périt après l'acte, de faiblesse et de faim. L'existence isolée des Hannetons adultes est au plus de vingt jours ; mais on en voit quelquefois pendant plus de deux mois, car leur éclo- sion à cet état ou sortie de terre se prolonge sur une durée de plus de trente-cinq jours. Avant la fécondation, les œufs sont visibles dans le corps de la femelle comme de petites vessies plates, vides et agglomérées ensemble, ne se remplissant qu'après la fécondation et différant beaucoup de grosseur et d'avancement; cela tient à ce qu'une même femelle peut faire plu- sieurs pontes. Un plus ou moins grand nombre d'œufs demeurent infé- conds, selon que la femelle a été plus ou moins nourrie. La femelle survit quelques jours à l'accouplement, et donne tous ses soins à la ponte. Elle quitte les arbres, et, presque exclusivement pendant la nuit, creuse la terre avec ses pattes de devant; là, au fond d'un canal de 1 à 2 décimètres, elle dépose environ trente ou trente-cinq œufs au plus, car on ne trouve guère que trente à trente-cinq œufs féconds par femelle; ils sont ovales et de la grosseur d'un petit grain de chènevis. Cette femelle donne une grande importance au lieu où elle dépose ses œufs. Elle ne s'adresse pas aux terres compactes et battues que les jeunes vers ne pourraient sillonner de leurs galeries, mais choisit les terres fumées, légères et aérées, ameublies par des labours récents et riches en racines : un instinct merveilleux lui fait pressentir que sa progéniture a besoin d'une habitation saine, ouverte aux influences de l'air et du soleil, exempte d'humidité. Elle fuit l'ombrage des grands arbres, les lieux marécageux, les terres fortes ou qui reposent sur un fond de glaise. Les Hannetons peuvent dévorer les feuilles des forêts, lifiU COLÉOPTÈRES. -— SCARABÉIENS. mais ne pondent pas dans leur intérieur ombreux ; les taillis serrés, les cultures touffues, sont exempts de larves par la même raison. Un arbre isolé peut préserver un certain nombre de plantes; dans les jardins, les groseilliers, les cassis et les arbustes dont les branches et les feuilles descendent jusqu'à ferre, échappent en général aux larves. La direction du vent a aussi de l'influence : les pontes se font bien en France par les vents du sud etde l'ouest, et mal par les autres. La prudence conseille donc aux cultivateurs de terrains légers et secs, de s'abstenir de fumer et labourer au printemps ; il vaut mieux remettre ces travaux après la ponte. Les œufs éclosent au bout de trois semaines, selon M. Vibert, d'un mois à six semaines, selon d'autres, et donnent la larve connue sous une foule de noms, suivant les pays {Ver blanc, Ver des jardins, Ver de blé, Ver matis, Ver turc ou Turc, Engraisse-poule, Ton, Man, Meunier, Terre, etc.). Fille est contournée en demi-cercle, comme toutes les larves de Scara- béiens, obèse, à segments boursouflés, d'un blanc un peu jaunritre, ;i pattes plus longues que n'ont d'habitude les larves de cette tribu, plus propres à s'accrocher qu'à marcher. Sur la partie médiane du corps on aperçoit le vaisseau dorsal, dont les mouvements se distinguent parfai- tement sous la peau, qui est assez transparente ; la partie postérieure du corps et le sac semblent noirâtres. Sur les parties latérales de chaque anneau, sauf le second, le troisième et le dernier, on aperçoit un stig- mate, rendu très-visible par son péritrème corné, dont la couleur rouge tranche fortement sur la peau, blanche. La tête est écailleuse ; les pattes sont d'un rouge brunâtre, ainsi que les pièces buccales; seules les mandi- bules sont noires à l'extrémité (voy. pi. xxvni, fig. 5, réduite). Les ravages des larves sont bien plus redoutables que ceuxcausés par les adultes, sur- tout à cause de la longue existence de celles-ci. Elles font peu de dégâts dans leur première année, qui est celle de leur naissance. De même que beaucoup de jeunes chenilles, elles sont alors sociales pendant plu- sieurs mois, jusqu'à leur première mue, par l'instinct naturel aux êtres faibles et timides, et restent cantonnées près des trous où furent dépo- sés les œufs. Au début de juillet, les petites larves ont environ 18 milli- mètres de long. Dans les deux premières semaines, elles ne vivent que de terreau, et même on peut les garder vivantes pendant deux mois dans du terreau seul. Au bout d'un mois, elles commencent à attaquer les jeunes semis, mais on ne s'aperçoit de quelque ravage qu'à la fin de septembre de cette première année. A la fin d'octobre, elles ont de 27 à 80 millimètres de longueur et sont à peu près de la grosseur d'une petite plume d'oie. Au début du mois de novembre, et môme plus tôt, elles s'enfoncent en terre, à 40 ou 50 centimètres, pour échapper aux gelées de l'hiver, et font une petite cellule ronde et aplatie où elles restent engourdies, placées sur le côté et en cercle. Elles remontent au prin- temps de la seconde année, au commencement d'avril, et le besoin LE HANNETON. kU5 d'une nourriture plus abondante les oblige à se disperser. Elles creu- sent des galeries souterraines dans toutes les directions, et attaquent, alors surtout les racines des plantes annuelles et bisannuelles, céréales, colzas, betteraves, etc. Dans les jardins, elles recherchent d'abord, avec prédilection, les racines des fraisiers, des salades, des rosiers, surtout ceux des quatre saisons. Des pépiniéristes plantent des salades pour les attirer et protéger les jeunes arbres ; bientôt tout est atteint, et, dans leur voracité, les larves rongent même les bois morts, les bouts d'écha- las. Les plantes atteintes ont les feuilles desséchées et flétries, viennent à la main dès qu'on les tire, le chevelu et le pivot de la racine n'exis- tant plus. Les dévastations sont quelquefois incroyables. Des champs entiers de betteraves, de luzerne, dévastes prairies jaunissent et péris- sent sur pied ; des champs de blé ou d'avoine perdent le tiers ou la moitié de leurs épis, dont les chaumes tombent avant la maturité. Une nouvelle hibernation a lieu à la fin d'octobre. Les larves, parvenues aux quatre cinquièmes de leur taille, s'enfoncent sous terre; puis, au prin- temps de la troisième année, elles remontent encore et recommencent leurs ravages. Les larves, plus fortes, ne bornent plus leurs dégâts aux végétaux herbacés, mais elles s'attaquent aussi aux racines des plantes vivaces; il semble que leur corps contourné en arc soit prédisposé à entourer les racines des arbres. On voit tomber flétries les pousses nouvelles qui correspondent aux racines latérales, et l'arbre entier peut mourir si la racine principale est attaquée. A voir les racines cou- pées, on croirait à des morsures de rats, si l'on n'apercevait, pendants, des filaments irrégulièrement déchirés. Les plantes potagères, fraisiers, salades, etc., sont d'ordinaire coupées au collet. On a quelquefois ramassé un décalitre de Vers blancs autour d'une même souche. En 185Zi un seul pépiniériste de Bourg-la-Reine (banlieue de Paris) évaluait à 30 000 francs les pertes que lui causait cette terrible larve. D'après M. Ratzeburg, un semis considérable de bois fut détruit en 1835, dans les dépendances de l'Institut forestier de Prusse. M. Deschiens rapporte qu'en cinq ans trois semis successifs de Chênes furent anéantis, sur six hectares de terrain, etc. Aussi ne doit-on pas s'étonner si les foudres de l'Église furent autrefois lancés sur les Vers blancs, et nous ne sommes pas beaucoup mieux armés contre eux qu'au temps de ces naïves et pieuses croyances. Un procès fut fait en Auvergne aux Hanne- tons, avec menace d'excommunication majeure. Les Vers blancs, cause d'une famine, furent cités en 1479 devant le tribunal ecclésiastique de Lausanne. Un avocat de Fribourg fut mandé pour les défendre; il fut sans doute trop peu éloquent ou* trop mal à l'aise devant les méfaits de ses clienls, car le tribunal, après mûre délibération, les bannit du territoire. Cliaque hiver les larves se sont engourdies dans une loge terreuse qui les abrite. C'est dès la fin de juillet qu'elles commencent à s'enfon- cer, soit pour changer de peau, soit pour hiverner et faire leur mue 446 COLÉOPTÈRES. — SCARABÉIENS. au réveil printanier , car les auteurs ne paraissent pas bien fixés sur ce point. Elles cessent de manger lors des mues. Enfin, à l'ordinaire après trois mues, à partir de la fin de juin de leur troisième été, leur peau devient d'un jaune terne, surtout sur le dos, et elles s'enfoncent plus profondément qu'elles ne l'ont encore fait, de 50 à 60 centimètres en hiver, pour se changer en nymphes. Elles commencent par se vider de leurs excréments, mais restent très-gonflées de graisse. Si l'on incise leur peau, il en sort une masse d'un tissu blanc comme de la crème, donnant par la chaleur une huile qui surnage si l'on fait bouillir ces larves: cette graisse est destinée à nourrir l'insecte pendant les six mois environ qui précèdent la sortie de terre de l'adulte. Le changement en nymphe se fait en août, septembre ou octobre, selon la température. La larve se construit une coque ovale, en terre gâchée et mêlée de salive glutineuse, mais sans fils de soie, comme l'ont dit à tort Latreille et quelques autres. La nymphe est d'une couleur p;île, d'un jaune rous- sâtre uniforme, avec deux petites pointes à l'extrémité du corps. C'est au bout de quatre à six semaines que l'adulte fend la pellicule nymphale et s'en débarrasse : mais il est.d'abord mou et jaunâtre ; peu à peu ses téguments se durcissent et se colorent, et il remonte lentement vers la surface du sol , attendant une chaleur suffisante pour sortir. On trouve des Hannetons éclos dès octobre, et même avant et pendant tout l'hiver, dans les labours et les plantations en verger. On comprend alors comment il peut se faire qu'on voie, dans les années chaudes, des Hannetons voler en automne, ainsi qu'on en fit la remarque en 1865, sur beaucoup de points de la France, et même dans les hivers très- doux, ce qui fut constaté dans le Wurtemberg et en Suisse, en janvier 183/1 ; mais, le plus généralement, les adultes ne commencent à remon- ter que dans le courant de février, pour sortir en avril et mai : ils sont en conséquence appelés Scarabées de mai par les Allemands. On voit donc que la durée totale de la vie du Hanneton est de trois ans, du moins en France, en Suisse et dans les provinces rhénanes, ce qui explique comment on a tous les trois ans une année à Hannetons, ceux des années intermédiaires provenant de quelque génération qui a subi un retard et dont la périodicité s'est déplacée. On ne doit guère comp- ter sur ces trois ans que quinze mois d'activité, c'est-à-dire de dégâts, car il faut déduire neuf mois pour trois hivernages et environ six mois pour la nymphose. Dans d'autres pays, par suite de causes mal expli- quées et tenant sans doute aux températures moyennes de l'hiver, le développement est plus lent et dure quatre années : ainsi dans la Fran- conie et le Brandebourg. La vie entière du Hanneton, qui est en France de trois ans, peut se répartir à peu près de la manière suivante, les dates n'ayant, bien entendu, qu'un sens approximatif: LE HANNETON, ^47 TEMPS DE DOMMAGES OU DE VIE ACTIVE DES LARVES. Première année, à partir de l'éclosion des œufs, du l^^' juillet au 1" novembre 4 mois. Seconde année, du 1*^^ avril au l'^'' novembre 7 — Troisième année, du l^"" avril au 1^' juillet 3 — Total lit mois. TEMPS d'engourdissement, SANS NOURRITURE. Cinq mois, en automne et hiyer des deux premières années, du l^r novembre au 1*^'' avril Total de l'existence en larves .... temps de vie latente ou DE NYMPHE. Du i^' juillet au 1'='' mars de la troisième année Hannetons adultes éclos, demeurant en terre. . . 80 jours. Hannetons hors de terre et dévorant les feuilles . 20 — En œufs 20 — 120 jours. 10 mois. 24 mois. 8 mois. !l mois. Durée de la vie totale avec toutes ses métamorphoses. 36 mois. Le plus grand inlérôt que présente l'étude du M. vulgaris consiste à rechercher les moyens de le détruire. Malheureusement pour lui, comme pour beaucoup d'insectes nuisibles, l'homme est le premier auteurdu mal dont il est la victime nécessaire. Le Hanneton devait être assez rare dans la Gaule sauvage et couverte de forêts. Il a peine à percer une terre dure, et la charrue du laboureur ne met pas à décou- vert de Vers blancs dans les terres qu'on défriche. Au contraire les terres anciennement cultivées, riches en engrais, et par suite en racines de plantes, meubles et aérées par les procédés de la culture intensive, où les larves peuvent vivre et étendre leurs galeries, sont infestées de Vers blancs. On observe, dans les années où les lisières des bois contre les champs cultivés sont dévastées par les Hannetons, que le centre de la forêt n'est jamais ravagé, et que le Hanneton diminue à l'intérieur, à mesure qu'on s'éloigne des cultures, et môme devient peu commun. Pour parler notamment de la Brie, pays de grande culture où j'ai pu faire des observations personnelles, il y a une trentaine d'années les Vers blancs étaient peu répandus et leurs dommages médiocres. En effet, dans la culture de ce temps, une partie du sol se trouvait en jachère à l'époque delà ponte, et trop dur pour que les femelles fissent 4/t8 COLÉOPTÈRES. — SGAHABÉIENS. facilement leurs trous à œufsj actuellemeat ils abondent dans les mêmes localités, parce que les fourrages nécessités par un bétail beau- coup plus nombreux ont obligé les fermiers à ne pas laisser la terre inactive un seul instant, et qu'au printemps, à côté des blés, se trou- \ent des colzas, des betteraves, des prairies artificielles, dont le sol meuble et riche en racines sollicite l'instinct maternel des femelles. Ce sentiment, on peut le dire, joue un très-grand rôle dans la multi- plication de la race dévastatrice. Souvent on ne s'explique pas au premier abord comment il se fait que, de deux champs limitrophes, dans les mêmes conditions de voisinage de bois ou de vergers, l'un est infesté de Vers blancs, au point de perdre sa récolte, tandis que l'autre en est presque dépourvu et couvert d'une riche végétation : cela tient à ce que, lors d'une grande ponte, à la fin de mai, le premier était en prairie, abondant en racines, l'autre en jachère, labouré depuis long- temps en grosses mottes dures et sans plantes : les femelles se portent à ■ l'envi sur le premier terrain et évitent le second, qui ne leur paraît pas pouvoir fournir la subsistance de leur progéniture. Les meilleurs moyens opposés à la propagation des Hannetons sont ceux fournis par la nature même, en raison des circonstances météoro- logiques. Ainsi les sécheresses du printemps mettent obstacle à la sortie de terre des adultes; ils s'épuisent en efforts pour percer une terre trop résistante, et beaucoup meurent; les gelées tardives du printemps, alors qu'ils sont près du sol, en font aussi périr beaucoup : mais comme elles ne sont pas moins nuisibles aux végétaux pleins de sève, l'avantage est plus que compensé. Les sécheresses prolongées de la fin de l'été sont funestes aux larves, dont beaucoup, selon M. Mulsant, s'enfoncent alors pour changer de peau, ne peuvent remonter, maigrissent et meurent ; d'autres, plus robustes, prolongent d'un an leur état de larve, et vivent quatre années. Enfin les chaleurs anormales de la fin de l'automne empêchent les Vers blancs de s'enfoncer assez profondément, et môme les attirent près du sol, de sorte qu'une gelée subite les fait périr. Les Vers blancs ont l'instinct de s'enfoncer plus ou moins, selon les conditions atmosphériques, afin de se mettre à l'abri de la gelée, du sec, de l'humide. Ils ne peuvent exister dans une terre trop sèche ou trop mouillée, et ils vivent des racines qui se trouvent dans la couche où ils sont condamnés à rester. Les pluies ou les arrosements les rapprochent de la surface du sol, sans que jamais ils s'exposent à l'air, laissant tou- jours plusieurs centimètres de distance entre eux et le sol. Lors des 'sécheresses, les Vers blancs s'enfoncent à environ 30 centimètres de profondeur. En général, les Vers blancs placés hors de'terre, et surtout exposés à l'insolation, meurent. D'habitude les gens employés à la ré- colte des Vers blancs se contentent, pour les détruire, de les jeter en tas sur les chemins d'exploitation des champs, à surface dure et battue. Les Vers blancs n'ont pas la force de creuser ce sol, se débattent, deviennent maigres et jaunes, et meurent. M. Vibert observa, à la fin de LE HANNETON. Zi/i9 décembre, par une forte gelée, sur la terre dure où du l'eu était allumé, que les Vers blancs, trompés par cette chaleur faclice, se rapprocbèrent très-près du sol échauffé. L'étude de ces funestes larves offre encore des faits inexpliqués. M.Vibert rapporte avoir vu des Vers blancs vivant en quantités énormes dans des terres en jachère n'ayant que quelques racines desséchées, à trop peu de profondeur pour les nourrir, car ces vers, par la séche- resse, étaient forcés de rester loin du sol. Il a conservé pendant plu- sieurs mois, sans dépérissement sensible, des Vers blancs dans des pots remplis uniquement de terre prise assez profondément pour qu'elle ne contînt que très-peu de matière végétale décomposée. Les Hannetons adultes sortis de terre sont très-sensibles au froid, supportent difficilement les petites gelées du printemps; beaucoup périssent par les variations subites de l'atmosphère et par les pluies froides et prolongées. C'est le printemps qui décide du plus ou moins grand nombre de Vers blancs que les Hannetons nous laissent; les gelées tardives, les pluies prolongées, les vents de nord et d'est, en détruisent beaucoup ou les refoulent sur d'autres lieux. On peut dire, en général, dans le milieu de la France : Année de Vers blancs, année d'abondance; car ils sont le résultat de la douceur du printemps, qui décide souvent de l'année. Les gelées printanières changent parfois le retour triennal régulier des Hannetons en produisant une destruction insolite. Dans un tout récent travail, présenté à l'Académie des sciences au commencement de 1868, M. J. Reiset s'est fortement préoccupé des ravages du Hanneton en 1865 et 1866 dans un département, la Seine- Inférieure. 11 n'hésite pas à évaluer le désastre pour ce seul départe- ment, en 1866, à plus de 25 millions, et, dans le rapport du préfet au conseil général, la perte est évaluée à 2 638 702 francs pour cent soixante et une communes seulement. M. J. Reiset a étudié les diverses profon- deurs occupées par l'insecte en larve ou en nymphe, en constatant, au moyen de thermomètres, les uns dans l'air, les autres enfoncés en terre, avec quelle exactitude les mouvements ascendants ou descendants des larves sous le sol sont liés aux élévations ou aux abaissements des températures. Les larves se tiennent en hiver à une profondeur où le thermomètre marque toujours une température supérieure à zéro degré, même alors que la neige couvre la terre et que l'air accuse des froids intenses de — 15 degrés. C'est ce qui fait qu'on ne peut nullement compter sur les gelées normales pour amener la destruction de ces funestes insectes, et cela est vrai au reste pour tous les insectes nuisibles. Ou bien ils résis- tent à des abaissements énergiques de la température, ou bien ils savent se mettre à l'abri. C'est ainsi que les Vers blancs montrent une véritable prévoyance instinctive. Comme l'a vu M. J. Reiset, ils devan- cent les indications du thermomètre quand ils quittent les couches GIRARD. 29 Zl50 COLÉOPTÈRES. — SCARABÉIENS- superficielles du sol pour exéctiter leur mouvement de migration vers les profondeurs. Ainsi, en octobre 1866, ils commencèrent à descendre, alors que le thermomètre souterrain, enfoncé à 50 centimètres, marquait encore -j- 10 degrés, et remontèrent en février 1867, alors qu'il ne marquait que -f 7 degrés, après être descendu en janvier à -f- 2°, 8. M. J. Reiset conseille aux agriculteurs de se préoccuper beaucoup de la température, et, par suite, de l'enfouissement correspondant des Vers blancs au moment d'entreprendre un travail agricole, et de faire auparavant pratiquer quelques fouilles d'essai, pour savoir à quelle profondeur se trouve l'insecte qui existe dans sa terré. Supposons le cultivateur préparant les terres qui devront recevoir le blé et le colza en septembre et en octobre. A cette époque, la presque totalité des Vers blancs se trouve encore à la surface ; un premier labour très-super- ficiel, suivi d'un hersage énergique, peut assurer dans ce cas une des- truction considérable, tandis qu'un labour profond, pratiqué dans ces conditions, aurait pour résultat de renfouir tous les insectes et de les soustraire ainsi au ramassage. Au contraire, les cultures données à la terre en février et en mars, pour les céréales de printemps et les raci- nes, ne peuvent généralement mettre à découvert les larves qui ne sont pas encore remontées assez près de la surface. Si une fouille d'essai indique un grand nombre d'insectes stationnant au-dessous du labour, on ne devra pas hésiter à reculer le travail de quelques semaines, afin d'atteindre un ennemi qui, sans cela, saurait choisir le moment pro- pice pour attaquer une récolle confiée trop tôt à la terre. M. J. Reiset préconise le ramassage à la main; il est vrai qu'il s'effraye de la pénurie croissante des bras pour l'agriculture. Les remèdes multiples à un état de choses aussi alarmant sortent du domaine de l'Entomologie appliquée. Nous ne pouvons passer sous silence le moyen proposé par M. É. Ro- bert sous le nom de piège à Hannetons, mais qui ne peut rendre quel- que service que dans les pays où les champs cultivés alternent avec des bois. Considérant la prédilection des Hannetons adultes pour les lieux plantés d'arbres, M. É. Robert conseille de fumer et de cultiver avec soin tout autour des forets et des pépinières une bande de terrain de quelques mètres de largeur où les femelles de la contrée viendront en foule déposer leurs œufs ; de sorte qu'un labour fait alors que les larves encore jeunes et sociales, c'est-à-dire n'ayant que quelques mois, ne sont pas encore dispersées, en fera périr une multitude. L'auteur a été conduit à imaginer cette méthode en constatant que les environs de Vincennes soulfraient beaucoup plus des Hannetons depuis qu'on avait multiplié les défrichements sur des espaces autrefois boisés. Les bois de Meudon et de Montmorency, au contraire, ont peu de Hannetons et ne nuisent pas par ce fait aux propriétés voisines; cela lient à ce que le sol argilo-siliceux de ces forêts et des terres d'alentour durcit beau- coup pendant les années sèches. ' LE HAWJNETON. 1^51 M. Hecquet d'Orval a été tellement effrayé des ravages du Ver blanc en Picardie, qu'il n'a pas hésité à proposer, comme moyen radical de destruction, une année entière de jachère intercalée entre les assole- ments, et où cinq labours et de nombreux hersages amèneraient les larves à la surface du sol, où le soleil et les oiseaux en feraient prompte justice. En outre, la jachère fertilise le sol par les éléments réparateurs de l'atmosphère, les pluies à sels ammoniacaux, et les labours l'aèrent et le débarrassent des plantes parasites. On peut répondre avec raison que la perte d'une année de récolte, avec frais de main-d'œuvre, est un dommage énorme, et que les cultures de plantes sarclées et les engrais commerciaux sont préférables à la jachère pour la bonification du sol. Aux causes naturelles ou artificielles de destruction du Hanneton, il faut ajouter l'action continue de certains animaux avides des larves, les Porcs, les Taupes, qui, malheureusement, gênent la culture par leurs amas de terre et leurs galeries , les Musaraignes, les Corneilles et les Pies, les Courtilières, les Carabes, que les jardiniers ont le grand tort de tuer. La destruction insensée des Taupes, près de Paris, a beaucoup accru le nombre des Vers blancs. Les adultes ont pour ennemis les Renards, les Fouines, les Belettes, les Blaireaux, les Hérissons, les Chauves-Souris, les Engoulevents. D'après l'examen des estomacs par Florent-Prévost, c'est l'Engoulevent qui consomme le plus de Hannetons adultes, et cet oiseau, beaucoup trop rare et que la loi devrait protéger, nous débarrasse aussi de Lépidoptères nocturnes très-nuisibles. Puis viennent les Geais, les Mésanges, les Pies, les Pies-grièches, les Étour- neaux, les Perdrix et quelques Échassiers. 11 ne faut pas méconnaître les services, contre les Vers blancs, de beaucoup de petits Passereaux, Rossignols , Fauvettes , Rouges-gorges , Hirondelles, Bergeronnettes, Loriots. Les Choucas nourrissent leur jeune couvée des Hannetons adultes qu'ils saisissent; et, au pied des vieilles tours où ils nichent, on peut voir les nombreux débris de tôtes et d'élytres. Parmi les autres oiseaux qui s'en repaissent, on doit encore citer les Moineaux, utiles au prin- temps seulement, et les oiseaux de basse-cour, friands aussi des larves. L'homme est bien mal armé contre ce redoutable insecte. Beaucoup de cultivateurs font suivre les laboureurs par des femmes et des en- fants qui ramassent les Vers blancs à mesure qu'ils sont à découvert dans le sillon. Dans l'été si pluvieux de 1866, où les Vers blancs dévas- tèrent les récoltes dans la Brie, j'ai vu jusqu'à huit femmes employées par un fermier dans un seul champ ; on peut juger de la dépense. Il est vrai que cette année fut une des plus mauvaises; des champs d'avoine et de betteraves furent retournés en certains endroits, la récolte étant entièrement perdue. On a essayé aussi, suivant une ancienne et théo- rique indication de Parmeatier, de faire suivre la charrue par un trou- 452 COLÉOPTÈKES. — SCAHAKÉIENS peau de Dindons, très-avides de Vers blancs ; mais ces Dindons ne peuvent guère s'employer qu'assez près des fermes ; il faut un conduc- teur, et ces volailles sont d'élevage difficile. Ce moyen a été perfectionné par un cultivateur habile, bien connu par ses succès dans les comices agricoles, M. Giot, de Chevry-Cossigny, canton de Brie-Comte-Robert (Seine-et-Marne), réalisant ainsi l'idée de Parmentier. Je crois utile d'entrer ici dans quelques détails sur l'emploi des pou- laillers roulants de M. Giot, qui figurèrent à Paris, à l'Exposition agricole de 1860 et à TExposition universelle de 1867, et qui peuvent servir contre les larves terricoles des insectes nuisibles aux champs. J'ai étudié longuement sur place ce système dans l'exploitation de M. Giot. Les Poules sont enfermées la nuit dans une voiture divisée en comparti- ments pour la ponte et munie de perchoirs. Elles sont lâchées tous les matins, la porte s'abattant en pont-levis, qui leur permet d'entrer et de sortir sans fatigue. On roule la voiture de place en place, soit après la moisson pour nourrir les Poules avec les grains échappés, soit lors des labours, alors que les Vers blancs son mis à découvert, d'abord par la charrue, puis par la herse. On voit toujours un certain nombre de Poules, plus affamées que les autres, suivant immédiatement la charrue dans le dernier sillon tracé. C'est du grand matin jusqu'à midi qu'elles sont avides de ces larves; passé cette heure, elles mangent beaucoup moins, et leur usage est bien moins efficace. Les Poules sont, en outre, inégalement friandes de ces larves ; il est important que le poulailler soit assez nombreux. Les mouvements que font les Vers blancs excitent beaucoup la gloutonnerie des Poules, qui ne mangent pas aussi volon- tiers les animaux morts ; on peut s'en convaincre en voyant avec quelle avidité ces oiseaux se jettent sur une grenouille ou sur une souris vivante, tandis qu'elles n'y touchent que dédaigneusement si ces bètes mortes ne remuent plus. L'emploi des Poules contre les Vers blancs est très-avantageux avant la moisson, alors que les Poules ne sont pas gor- gées de grains dont la digestion est lente ; les Vers blancs, au contraire, sont proraptement digérés, et les déjections de ces Poules sont peut- être la meilleure manière d'employer les Vers blancs comme engrais. Il faut bien remarquer que les Poules se dégoûtent vite des Hannetons ou des Vers blancs qu'on leur apporte à la basse-cour et qu'on leur jette comme nourriture exclusive. Il a été reconnu, sur des Poules aux- quelles on donnait à la ferme des Vers blancs comme seul aliment, qu'au bout d'une quinzaine de joxirs de ce régime , se déclarait une grande mortalité, sans doute en raison de l'état plus ou moins avarié de ces larves, et que la perte cessait en supprimant les Vers blancs ; mais il n'en est pas de même avec les poulaillers roulants : car, aux champs, les Poules, rendues, en outre, vives et robustes par le grand air, mêlent aux Vers blancs de l'herbe et des graines, et varient ainsi leur régime, condition importante d'hygiène ; de plus, les Vers blancs, qui sont daiîs un étal de bonne santé parfaite, et mangés avec LE HANNETON. /i53 d'autres aliments, ne Jonuont pus à la chair et aux œufs le mauvais goût qu'ils acquièrent quand les Poules se nourrissent d'insectes morts, plus ou moins putrétiés, conime cela arrive dans les départements du midi de la France, où, pendant l'éducation des Vers à soie, on nourrit les volailles uniquement avec les vers morts de maladies, les chrysa- lides étouffées et les papillons ayant servi au grainage. En 1866, les deux poulaillers roulants de M. Giot t'onclionnaient depuis cinq ans, et les bons résultats constatés par divers cultivateurs avaient amené la commande de six voitures destinées à cet usage. On peut établir, pour 750 francs, une voiture pouvant contenir 300 Poules, et qu'un seul cheval peut traîner dans les terres : cette condition de légèreté est très-importante, car la place du poulailler roulant doit être fréquemment changée pour que les Poules aient une nourriture suffi- sante. L'achat de voitures hors de service, comme d'anciens omnibus, est une mauvaise opération, car il faut les transformer en poulaillers, et l'inconvénient capital est leur poids, qui exige un charroi dispen- dieux dans les terres labourées. Tous les prétendus spécifiques contre les Vers blancs, qu'on devait mêler aux terres avec l'engrais, ont été reconnus ou insuffisants ou dan- gereux, comme amenant en même temps la mort des plantes. Nous ne saurions toutefois omettre le moyen indiqué par M. P. Audouin afin d'éloigner des champs les femelles en quête d'une terre meuble pour la ponte. Il faut employer la naphtaline brune, solide et volatile, odo- rante, extraite des huiles de goudron de houille des usines à gaz, et à trùs-bas prix. On jette par hectare ZiOO à 500 kilogrammes de naphtaline mêlée à trois fois son poids de terre sèche ou de sable, proportions que l'expérience a démontrées inoffensives pour les végétaux. Nous enga- geons les agriculteurs à faire de-; essais sérieux de cette substance, qui a donné de bons résultats à M. E. Pelouze contre les Attises (Coléoptères chrysoméliens). Le mieux qu'il y aurait à faire, pour délivrer notre agriculture du lourd impôt de la dévastation des Hannetons, serait de suivre le conseil donné par l'entomologiste Duponchel, et qui diminuerait beaucoup le nombre de ces ennemis, qui se verraient, au bout d'un certain temps, confinés dans les bois : « Il n'existe, à notre avis, qu'un seul moyen qui pourrait être employé avec succès pour la destruction des Hannetons, si une loi le rendait obligatoire pour tous les propriétaires de terrains en- vahis par ces insectes destructeurs. Ce serait de faire en grand, pen- dant tout le temps de l'apparition des Hannetons, du 15 avril au 15 juin, ce que les enfants font en petit, lorsqu'ils veulent s'en procurer pour leur amusement, c'est-à-dire de secouer fortement les branches sur lesquelles les Hannetons sommeillent pendant le jour, et de recueillir tous ceux qui en tomberaient pour les faire périr n'importe par quel procédé. Ce moyen est bien simple, et la seule objectioi; qu'on puisse y faire, c'est qu'il exigerait l'emploi de beaucoup de bras dans les loca- 454 COLÉOPÏÈilES. — SCARABÉIENS. lités d'une grande étendue ; mais, dans tous les cas, il serait plus effi- cace et moins dispendieux que tous ceux qu'on pourrait employer pour la destruction des larves : plus efficace, en ce que la mort d'une seule femelle avant la ponte empêche la naissance de trente larves au moins ; moins dispendieux, en ce que, pour atteindre celles-ci, on est obligé de bouleverser les terrains qui les recèlent, c'est-à-dire d'employer un remède pire que le mal, attendu qu'elles se tiennent de préférence dans les terrains les mieux cultivés et en plein rapport. » Voici quelques chiffres qui donnent l'idée de l'importance de ce moyen. En 1867, à la Caisse départementale de la Seine-Inférieure, à la suite de primes de 20 francs, puis seulement de 10 francs pour 100 kilogrammes d'adultes, on a payé 80 000 francs, qui ont produit la destruction de 1 milliard 1^9 millions d'insectes, d'où seraient nées 23 milliards de larves l'année suivante. C'est à l'aube du jour, avant l'évaporation de la rosée, que les battues ont la plus grande efficacité. Il faut remarquer, pour ces battues, que les Hannetons vont toujours se poster pour dormir sur les végétaux les plus élevés des lieux où ils se trouvent, sur les haies dans les champs, sur les plus hauts arbres des lisières de bois ou des vergers. Dans l'ancien canton de Berne, chaque propriétaire était obligé à fournir un nombre de boisseaux de Hanne- tons proportionné à l'étendue de ses propriétés. Les riches les ache- taient à de pauvres gens. Une contrebande singulière se faisait par le lac Léman ; et, de la Savoie, on transportait des sacs de Hannetons dans le pays de Vaud (G. B. Say, Économie politique, Paris, 1826, t. l, p. 282). En France, des arrêtés préfectoraux ont tenté plusieurs fois, mais en vain, de réaliser cette si utile mesure. En France, les paysans seuls, qui ne font pas les lois, ne rient pas du Hanneton, et l'esprit de facétie, compagnon de l'ignorance, fait plus de mal que tous les in- sectes dévastateurs. On peut citer comme exemple un spirituel préfet du roi Louis-Philippe, M. Romieu, qui, effrayé des dommages dont il était témoin, rendit un arrêté contre les Hannetons. Il devint la proie des petits journaux, et fut représenté dans le Charivari avec des élytres et des antennes. Il faut remarquer pour les Hannetons, comme pour la Pyrale de la vigne, les Chenilles, en un mot tous les Insectes nuisibles, qu'une loi sévèrement obligatoire peut seule apporter un secours sérieux. Si un particulier isolé, à force de soins et de dépenses, est parvenu à débar- rasser ses propriétés de la dévastation, bientôt les insectes qui ont ra- vagé les récoltes de ses voisins apathiques, trouvant des plantes fraîches pour remplacer une végétation usée par leurs atteintes, se portent de toutes parts sur les endroits sains, au point que le propriétaire intelli- gent, mais mal entouré, finit quelquefois par souffrir plus que tout autre. Cependant le mal est immense, et nos législateurs s'épuisent en logo- machies désastreuses ! Payen affirme, d'après des moyennes bien con- LE HANNETON. 455 statées, qu'en certaines années les Hannetons ont coûté à la France la somme énorme d'un milliard (Revue des deux mondes, 1868, t. lxxvi, p. 652). En Suisse, dit-il, des règlements spéciaux et bien appliqués ont à peu près fait disparaître le Hanneton, dont les dégâts étaient devenus redoutables. Qu'on regarde, par contre, chez nous, combien peu les autorités des campagnes tiennent la main à l'échenillage, exé- cuté en outre, le plus souvent, quand il l'est, beaucoup trop tard, et alors que les petites chenilles ont quitté leurs toiles, abri de l'hiver, on sera convaincu que la destruction des insectes malfaisants, qui font perdre au pays plusieurs centaines de millions chaque année, ne pourra être entreprise d'une manière sérieuse qu'après la promulgation d'un code rural, et surtout l'établissement d'une police rurale efficace par l'embrigadement des gardes champêtres, soustraits à l'omnipotente ignorance des maires de village et mis à l'abri des rancunes de clocher. Il serait fort heureux que l'utilité à retirer des Hannetons pût con- courir à assurer leur recherche et leur mort; mais les quelques essais tentés dans cette voie n'ont malheureusement pas eu grand succès. On dit qu'en Hongrie on a retiré des Hannetons concassés une huile bonne pour graisser les essieux des voitures, et M. Mulsant rapporte qu'on est parvenu à utiliser pour la peinture le liquide noir que renferme leur tube digestif. On peut introduire dans le fumier les Hannetons ou les Vers blancs récollés, et s'en servir comme engrais, ou obtenir un bon compost en les mêlant avec de la chaux et de la terre. D'après les ana- lyses de M. J. Reiset, conformes à celles de Payen, 100 kilogrammes de Vers blancs à l'état naturel contiennent 1 kilogr. 337gram. d'azote, pro- portion qui, comparée à celle du guano, représente une valeur de 3 fr. En défalquant cette somme du prix du ramassage des larves, soit 11 fr. 80 c. par 100 kilogrammes, il reste une dépense de 8 fr. 80 c, qui peut sauver de la ruine plus d'un hectare de champ, et qui ne forme pas 2 pour 100 de la valeur de la récolle. A poids égal, les Vers blancs valent, en azote, deux fois et demie autant que le fumier de ferme; les Hannetons quatre fois, ou une fois et demie autant que la poudrette ordinaire. Les Hannetons desséchés forment un engrais de valeur ana- logue au guano du Pérou. 11 importe donc de tuerie plus prompfement possible les Hannetons adultes apportés dans des sacs. Si l'on cherche à les écraser sous des meules ou à les jeter dans des eaux de purin ou dans des fosses cà chaux, beaucoup s'envolent quand on ouvre les sacs ou les paniers. Quand on a à sa disposition des chaudières à eau bouil- lante, on y immerge les sacs : ainsi dans les sucreries de betteraves. Le meilleur moyen, quand l'eau bouillante fait défaut, est celui indiqué par M. J. Reiset. Enfermez les Hannetons en sacs dans des tonneaux, avec 0,02 de leur poids de naphtaline brute, ils sont asphyxiés en cinq heures, et même mis hors d'état de s'échapper au bout de deux heures. Une seconde espèce de Hanneton que nous devons citer est le ^56 COLÉOPTÈRES. — SCARABÊIENS. M. Htppocastani, Fabr., qui manque dans les régions méridionales de l'Europe. La tête et le corselet sont testacés et à longs poils blancs ; les pattes sont testacées ou brunâtres chez certains individus, noires chez les autres. En général, ce Hanneton est bien moins abondant que le M. vulgaris ; cependant M. E. Desmarest dit l'avoir vu plusieurs fois faire de grands ravages dans la forêt de Fontainebleau. Près de Lyon, on l'appelle Roi péteret (petit Roi), nom qu'on donne aussi au Roitelet. Quelques personnes, et l'entomologiste Rœsel a par- tagé cette erreur, pensent à tort que les M. vulgaris et Hippocnstani ne forment qu'une seule espèce , avec des variétés annuelles al- ternes. On a séparé des anciens Mélolonthes le genre Anoxîa, Casteln., formé avec des espèces, principalement du contour méditerranéen, n'ayant plus le pygidium prolongé en pointe, et dont les massues antennaires n'ont que cinq feuillets chez les mâles, au lieu de six à sept. On en trouve deux espèces, dans le midi de la France, de la taille du Hanneton ordi- naire : A . villosa, Fabr., noir ou fauve, avec poils cendrés courts, formant trois bandes sur le corselet ; A. australis, Schonh., un peu plus allongé, plus roussâtre, n'ayant qu'une seule bande de poils sur le corselet. Les deux espèces ont les élytres parsemées de poils. POLYPBYLIijt, Harris. (Ce genre a été détaché du genre Melolontlia d'après un petit nombre de caractères.) — Antennes analogues, à feuillets très-développés chez les niâtes ; pygidium non prolongé en pointe. Tarses munis en dessous d'une dent longue, arquée et basilaire chez les mâles, courte et submédiane chez les femelles. Ce genre présente une particularité dans la manière dont ses tégu- ments sont ornés. En dessous, la poitrine seule offre des poils ordi- naires ; l'abdomen, les pattes, les élytres et le corselet sont couverts de poils modifiés, changés en écailles, et constituant ou des marbrures, ou des bandes, ou un revêtement uniforme. Le type du genre, et la seule espèce réellement européenne, est le M. fullo, Linn., le Foulon de Geoffroy, le plus grand des Hannetons de France. Sa taille est double de celle du Hanneton commun ; sa couleur est d'un rouge marron clair. Le corselet offre trois bandes blanches, dont les deux latérales discontinues; les élytres sont parsemées de points et de taches blanches irrégulières, mais symétriquement répétées. Cet insecte se plaît dans les lieux secs et sablonneux, et se trouve sur toiit le pourtour de la Méditerranée et sur quelques points du pourtour de l'Océan : il semble préférer les localités peu éloignées de la mer. Il se montre en divers points dans toute la France, et mange les feuilles des arbres, comme les Melolontha. On le trouve, en Provence, dans les montagnes du Lyonnais, sur les Cerisiers. M. Mulsant dit qu'il est commun près de Lyon, dans le lieu appelé la SPARMANNIA, ELAPHOGERA. h51 Mouche, où sa larve vit des racines des arbiùsseaux. C. Duméril signale sa présence à Fontainebleau et en Picardie, près de Marquenterre; il dit ne pas l'avoir trouvé dans les environs immédiats de Paris. On y rencontre cependant des individus isolés : ainsi, au bois de Bou- logne (M. Lucas, Bull. Soc. entom. de France, 1865). M. E. Blanchard a pris cette espèce en abondance dans les dunes de Dunkerque, à la fin de juillet et au commencement d'août. Le Foulon peut quelquefois causer des dommages : d'après Frisch, il dévasta en 1731 la Marche de Brandebourg. Cet insecte vole le soir en produisant un bourdonnement très-fort. En outre, et cet exemple est unique dans le groupe qui nous occupe, il fait entendre une stridulation très-aiguë par le frottement de l'abdomen contre les élytres. Les quinze espèces du genre Polyphylla, outre l'espèce d'Europe, sont répandues en Syrie, en Arménie, en Perse, en Sibérie, et aussi dans les diverses régions de l'Amérique septentrionale. §iP.«RMAMlVIA, Cast., ou LEONTOCHiETA, EHchs.— Antennes comme dans le genre Melolontha. Tarses à crochets robustes, arqués, ayant cliacun deux fortes dents au-dessous. Corps épais, très-velu, sauf sur les élytres, les jambes et les tarses. Le type de ce genre, spécial à l'Afrique centrale, S. alopex, Fabr., est un grand Hanneton du Cap, très-curieux par les longs poils du cor- selet, qui ressemblent à une crinière de lion, d'un blanc grisâtre, avec des élytres d'un brun marron brillant, avec une large bande fauve et arquée. L'abdomen est très-volumineux et déborde les élytres de toutes parts, surtout chez les femelles. Les derniers insectes du groupe des Hannetons sont remarquables par des caractères de dégradation des pièces buccales, et souvent de l'appareil alaire. Les mandibules sont petites, lamelliformes, trigones, obtuses au bout, sans dent molaire à leur base; le lobe externe des mâchoires est complètement atrophié, le labre est distinct et le menton petit. Les espèces dont les habitudes ont été observées sont souterraines et crépusculaires. Il est probable que les adultes ne peuvent attaquer que les parties les plus molles des végétaux, et même on ne sait s'ils pren- nent de la nourriture et si leur vie ne se borne qu'à l'acte de la repro- duction. EÏ.APHOCEIIA, Gêné. — Antennes de dix articles. Tarses très-longs et grêles chez les mâles. Pattes postérieures très-robustes chez les femelles et à tarses courts. Les mâles ont des ailes sous les élytres; les femelles n'ont que des ^58 COLÉOPTÈRES. — SCARABKIEAS. élytres sans ailes. Ce genre, qui a près de vingt espèces, est propre au pourtour de la Méditerranée, et nous engageons les amateurs zélés à le rechercher dans l'extrême raidi de la France, où il n'a pas encore été trouvé. Ces insectes sont revêtus en dessous et sur les côtés de longs poils. Les mâles ressemblent aux Rhizotrogues. Ils aiment les lieux sablon- neux et sont nocturnes ; on les trouve en copulation sur le sol par les temps pluvieux. On peut consulter, pour ce genre curieux, la mono- graphie de Rambur {Annales Soc. entomol. de France, 2^ série , t. I, p. 329), P.%CHYPUS, Latr. — Antennes de huit articles, les cinq derniers formant une massue. Cuisses postérieures très-robustes ; tarses très-longs et grêles chez les mâles, courts chez les femelles. Dessous du corps hérissé de longs poils. Élytres des mâles courtes, arrondies, rétrécies. Les Pachypes sont remarquables au plus haut degré par leurs femelles privées d'élytres et d'ailes, à forme ventrue, analogues à celles des Driles et de plusieurs espèces de Lampyres. Elles sont très-rares dans les collections, et, d'après les observations de M. Grohmann, en Sicile, se creusent au pied des Oliviers des trous qu'elles ne quittent jamais, tandis que les mâles voltigent au crépuscule, et plus rarement le matin, autour des feuilles de ces arbres^ auxquels ils se tiennent accrochés pendant le jour. Les espèces, très-voisines, sont d'un brun rougeâtre et se trouvent sur le pourtour de la Méditerranée ; elles ha- bitent les endroits sablonneux et rocailleux. Nous croyons devoir présenter un court historique de ce genre inté- ressant et dont la recherche préoccupe les amateurs. La première espèce connue, par son mâle seulement, fut découverte en Calabrc par Jules Candida, et décrite et figurée, en i787, par Vincent Petagna : c'est le P. Candidœ, Petag. Une autre espèce, P. cornutus, Oliv., de Corse, fut décrite, pour là première fois, par Olivier {Entom., t. I, 5, pi. vu, flg. 7Zi). La femelle demeura longtemps inconnue. Découverte en Corse par M. Vieux, elle fut décrite en 1835 par M. Gêné (Acad. de Turin), et à tort sous le nom de P. excavatus, qui avait été donné par Fabricius à l'espèce de Candida. Elle fut communiquée, en 1836, par Feisthamel, à la Société entomologique de France {Ann., V" sér., 1837, t. VI, p. 257, et pi. vni, fig. 14 et 15). Audouin reconnut sur la femelle, en désarticulant le corselet, des élytres rudimentaires, consistant en deux petites écailles cornées, situées à la partie postérieure du corselel {Ann. Soc. entom., loc cit., note). Le P. cornutus est assez commun en Corse, sur les collines près de Bonifacio ; on l'a trouvé à Bône, en Algérie. Il est très-rare sur la France'continentale. Selon Duponchel, le mâle y fut rencontré, pour la première fois, à Biarritz, près de Bayonne, en 1810, par M. Bardot, médecin militaire. ANATISTA. 459 Nous figurons le P. impressus, Erichs., mâle, de Corse, de Sardaigne et d'Espagne (pi. xxix, fig. 6; 6 a, tôte vue en dessus ; 6 6, tête vue en avant). Enfin, une quatrième et dernière espèce, de Sardaigne et de Sicile, est le P. cœsus, Ericbs. Les entomologistes modernes, afin de mettre un peu d'ordre dans la complication des genres des Scarabéiens, ont formé un groupe avec un certain nombre de genres qui se lient d'assez près aux Hannetons, ce mot pris dans ?on sens très-général, et qui avaient été auparavant con- fondus avec eux. On peut les nommer, d'une manière sommaire, les Rutèles, du nom d'un de leurs principaux genres. Ce sont des insectes dont les métamorphoses sont à peu près inconnues et les mœurs à peine mentionnées. La plus grande partie est d'Amérique et d'Austra- lie ; certains genres sont cosmopolites. Leur taille est en général moyenne, et, parmi les espèces exotiques, beaucoup sont douées de vives couleurs métalliques. Les espèces d'Europe sont moins richement ornées, et en général de couleurs uniformes, verte, fauve, brunâ- tre, etc. Presque tous sont diurnes et se rencontrent posés sur les feuilles et les fleurs ou voltigeant autour des végétaux pendant la cha- leur du jour. Voici les caractères les plus distinctifs de ce groupe. Antennes de neuf ou dix articles, la massue constamment de trois. Yeux peu divisés par des canthus incomplets et grêles. Bouche ro- buste, à labre distinct, non soudé au chaperon, à mandibules cornées, le plus souvent munies, au côté interne, d'une étroite et courte mem- brane ciliée, à mâchoires à lobe externe presque toujours denté ou caréné, à languette toujours cornée et soudée au menton, jamais mem- braneuse et libre. Tarses à crochets inégaux, les externes généralement fendus au bout ; un seul éperon aux jambes antérieures, comme dans le grand groupe Hanneton. Segments abdominaux presque toujours non soudés; les trois dernières paires de stigmates abdominaux divergeant fortement en dehors. Les différences sexuelles sont du même ordre que pour le grand groupe des Hannetons, et portent sur les mêmes organes. On ne con- naît pas d'espèce munie d'un appareil stridulant. GENRES PRINCIPAUX. Aïl'ATlSTA, de Brème. (Genre de transition entre les deux groupes.) — Antennes de dix articles, à massue extrêmement grande et large chez les mâles. Chaperon très-allongé et rebordé dans ce même sexe. Nous citons ce genre à cause de sa rareté. Il constitue, dit Lacordaire, une des plus belles découvertes entomologiques faites en Colombie. Il /»60 GOLÉOPTi:r.ES.— scarabéiens. est fondé sur un grand et superbe insecte pris un soir, au vol, sur le Quindiù, dans les Andes de la Colombie, par le voyageur feu Justin Goudot. Il en rapporta deux sujets mâles. La femelle, inconnue, a pro- bablement le chaperon et les antennes moins développés. Le dessous du mâle est d'un \er[ métallique, le dessus d'un brun rougeâtre bril- lant, avec des reflets verts ; les élytres ponctuées, rugueuses, irréguliè- rement striées, et la poitrine recouverte de fins poils roux. L'yl. Lafertei, de Brème, fut publié en iShk dans les Annales de la Société entomolo- gique de France (IX, 306, fig. 1). AIVISOPlvlA, Aud. Serville. — Chaperon acuminé en avant et retroussé en saillie verticale. Élytres oblongues, subparallèles, peu convexeSj sillonnées, munies d'une bordure membraneuse; tarses à deux crochets très-inégaux. Les Anisoplies, au nombre d'une trentaine d'espèces, sont de taille moyenne, à corps oblong, finement velu, sauf souvent en dessus, et se trouvent sur les fleurs, surtout des Ombellifères et des Graminées [A. Tri- tici, Kiesen., segetum, Herbet., bromicola, Germ., farraria, Erichs., etc.). Elles habitent surtout l'Europe méridionale et orientale, et l'Asie occi- dentale, et manquent en Amérique. Les espèces les plus communes dans le centre de la France sont A. agricola, Fabr., de 8 à 10 millimètres, d'un noir bronzé, avec poils blanchâtres, à élytres rousses, bordées et tachées de noir; A. arvicola, Fabr., d'un noir moins bronzé et à élytres plus rouges; enfin une espèce analogue, mais plus grande, atteignant là millimètres, A. tem- pestiva, Erichs., du midi de la France, avec une variété en Angle- terre. Nous figurons une espèce qui appartenait aux Anisoplia, et est actuellement d'un genre voisin, le Gnatholobis suluralis, Cast., du Séné- gal (pi. xxvii, fig. 3), à milieu de la tête et du corselet verts et les bords jaunes, élytres jaunes, striées, avec bord et suture d'un vert foncé, et pattes fauves. PHYM^OPERTHA, Stephens. — Chaperon non acuminé, ni retroussé. Corps très-peu convexe; antennes de neuf articles. Même aspect que le genre précé- dent ; crochets des tarses médiocrement inégaux. Les deux espèces les plus communes se trouvent souvent sur les fleurs. Ce sont le P. horticola, Linn., de toute l'Europe et du Caucase, qui 'occasionne souvent de grands dégâts, surtout dans les jardins. Il est long de 8 à 10 millimètres. La tête et le corselet sont d'un bleu ou d'un vert métallique, avec poils allongés, les élytres d'un rouge-brique ou fauves-jaunâtres ou fauves livides, luisantes, sans taches, le corps d'un vert noirâtre bronzé. C'est le fetit Hanneton à corselet vert de Geoffroy, nommé encore Hanneton de la Saint-Jean, Hanneton des jar- dins,e{c., dévorant les feuilles des arbres fruitiers et de diverses sortes, ANOMALA. ^61 parfois les tleurs, sa larve mangeant les racines des chou\ , des pins, etc. Le P. campestris, Latr., du midi de la France, plus grand et plus large, à élytres d'un fauve brillant, tachées et bordées de noir. Les Phylloperlha ont une distribution plus étendue que les Anisoplia, avec moins d'espèces, une quinzaine. Outre l'Europe centrale et le pourtour méditerranéen, on en trouve en Chine, au Japon, en Sibérie, au Mozambique, au Cap, et enfin au Mexique. AilfOMAïiA, Samouelle. — Antennes de neuf articles, à massue feuilletée de trois. Élytres avec une fine bordure membraneuse occupant le sommet et la majeure partie du bord latéral. Corps notablement convexe. Tarses à crochets variables. Les mâles des Anomala ont la massue antennaire plus longue, le cro- chet interne de leurs tarses antérieurs dilaté et plus robuste ; ils sont parfois autrement colorés : par exemple chez VA. aurata, Fabr., de Carniole, d'Italie, de Hongrie. Les Anomala sont des Coléoptères luisants, plus ou moins verts ou bleuâtres, voltigeant pendant le jour autour des arbrisseaux, dont ils dévorent les feuilles. Ils peuvent devenir nuisibles par leur multipli- cation. C'est ce qui arrive surtout pour une espèce très-commune, VA. œnea, de Geer, ou Frischi, Fabr., de l'Europe, de l'Afrique du Nord et du Caucase, de 12 à lu millimètres, d'un vert foncé ou cuivreux en dessous, à élytres vertes, bleues ou testacées, très-variables, abondant dans les sautées et au bord des ruisseaux. Nous citerons encore VA. Vitis, Fabr., d'Europe et d'Algérie, d'un beau vert métallique bordé de jaunâtre, avec les élytres profondément sillonnées, espèce distincte ou seulement variété de la précédente, causant quelquefois d'assez grands ravages dans les vignes du midi de la France, dont elle dévore au prin- temps les jeunes feuilles. Nous représentons une grande espèce exo- tique du genre, VA. viridis, Fabr., de la Chine et du continent indien (pi. xxvii, fig. h;hb, antenne ;Zic, labre; lif, mandibule; lia, mâchoire et palpe ; h d, lèvre inférieure et palpes ; Ix e, tarse antérieur). M. Perroud a signalé {Ann. Soc. entom., 1852, Bull., p. 70) des mœurs spéciales et analogues à celles des Rhizotrogues terricoles, chez VA. devota, Rossi, de la France méridionale, de l'Espagne et de l'Italie. Cette espèce vit cachée dans le sable, et les mâles sortent vers quatre heures du soir pour rechercher les femelles, qui se montrent une heure plus tard, et restent sur le sol ou se posent sur les tiges des Graminées, autour desquelles volent les mâles. Jacquelin du Val confirme ce mode de vivre pour plusieurs espèces. Il y a des espèces d'Aanomala qui res- semblent parla taille, la forme, la couleur testacôe ou brunâtre, à des Rhizotrogus qui seraient presque sans poils. Le genre Anomala compte 250 espèces de toutes les régions des deux continents, surtout de l'ancien, et manque en Australie. Û62 COLÉOPTÈRES. — SCARABÉIENS. POPliiLiA, Aud. Serville. — Antennes de neuf articles, avec massue assez forte, presque pareille dans les deux sexes. Épimères du mésotliorax ascendants, c'est-à-dire remontant en avant du bord antérieur des élytres en s'appUquant contre lui, mais sans s'épaissir ni devenir visibles de dessus, comme lorsqu'ils forment la pièce axillaire des (Cétoines vraies. Tarses à crochets peu inégaux en longueur. Élytres à bordure membraneuse externe. Les Popillies sont au plus de moyenne taille et comptent plus de 60 espèces, non sans ressemblance avec les Trichies^ ayant des couleurs variées, souvent métalliques, glabres en dessus, poilus en dessous, avec des élytres striées. Elles appartiennent aux régions chaudes de l'Afrique et de l'Asie, au continent indien et à aes archipels. — Ex. : P. nitidicollis, Gory, du Népaul. — PL xxvii, fig. 2 ; 2a, crochets du tarse antérieur ; 2 b, crochets du tarse postérieur ; 2 c, dessous du corps montrant la saillie du mésosternum. — Ce riche insecte, à élytres d'un marron cuivreux et à corselet, tète et écusson d'un rouge cuivreux, paraît n'être qu'une des variétés du P. cupricollis, Hope, du continent indien. PttOPOMACRU^, Newm. Genre de place incertaine établi sur une seule, espèce qui se range parmi les insectes les plus rares qui existent dans les collections, le P. bimucronatus, PalL, à tête et corselet noirs, le reste d'un brun marron foncé. 11 est de grande taille et très-curieux par les pattes antérieures du mâle, qui sont au moins aussi longues que le corps, tandis qu'elles sont longues seulement comme au moins la moitié du corps dans la femelle. Ce Scarabéien a été trouvé trois ou quatre fois dans les vieux troncs de Chêne aux environs de Constanlinople et dans l'Asie Mineure. A côté se place le genre Euchirus, Kirby, fondé pour trois espèces de rindo-Chine, des Philippines, de Java et d'Amboine. LAdiOCDii^Ë, Hoffm. — Antennes de dix articles, à massue oblongue. Élytres sans bordure membraneuse externe ; épimères du mésothorax non ou à peine ascendants ; crochets des tarses peu inégaux. 'Les Lagochiles sont des Coléoptères- de l'Amérique tropicale du Sud, parés de brillantes couleurs, souvent métalliques. — Ex.: L. bipunctata, Mac Leay ou brurmea, Aud. Serv. et Perty, du Brésil. — PI. xxix, fig. 4; U a, tête en dessus ; àb, lèvre inférieure; U c, labre ; U d, mâchoire et palpe ; Ixe, f, mandibule des deux côtés ; U g, antenne; Ix h, jambe an- térieure et tarse ; k *, tarse postérieur. ANTICHIRA, RUTELA, PELIDNOTA. 46â AMTICHIRA, Eschscholtz. — Antennes de dix articles. Écusson énorme, en triangle rectiligne, de la longueur au moins du quart, souvent de la moitié et plus des élytres. Les Antichires voltigent dans les bois des régions chaudes de l'Amé- rique, autour des arbres en fleur, et se posent sur leurs feuilles. — Ex. : A. splendida, Fabr., de la Guyane et du Brésil. — PI. xxix, fig. 3 ; 3 a, corps en dessous, montrant la saillie mésosternale. CHEMIDA., Kirby. — Antennes de dix articles. Chaperon acuminé, terminé par deux dents retroussées. Épimères du mésothorax ascendants et visibles entre les élytres et les angles postérieurs du corselet, formant une pièce axillaire, comme chez les Cétoines. Ex. : C. retusa, Fabr., de la Guadeloupe et de la Guyane (pi. xxix, fig. 5). Une seconde espèce du Brésil. RUTEliA, Latr. — Chaperon étroit triangulaire. Antennes de dix articles avec deux courtes dents obtuses. Tarses à crochets subégaux, entiers dans les deux Les Rutèles sont de brillants Coléoptères, ne comptant même pas dix espèces, ornés de couleurs riches et variées, de taille moyenne, de forme courte et robuste, peu convexes en dessus. On les trouve sur- tout sur les fleurs et aussi sur les feuilles, aux Antilles et dans l'Amé- rique du Sud (régions chaudes). l'KLIDliOT.%, Mac Leay. — Chaperon confondu avec le front, le plus souvent arrondi. Antennes de dix articles. Tarses à crochets faiblement inégaux, entiers. Les Pélidnotes, autrefois confondues avec les Rutèles, de taille moyenne et grande, vivent sur les feuilles et les fleurs. Une seule es- pèce se trouve aux États-Unis, le P. punctata, Linn., ou lutea, Oliv., et est commune au point d'occasionner des dégâts sérieux en certaines années, en dévorant les feuilles des Vignes cultivées ou sauvages. Les autres espèces, enrichies de splendides couleurs, souvent métalliques, sont de TAmérique du Sud, centrale et méridionale, et du Mexique. Ex. : P. nitidissima, G.-Mén., ou cyanitarsis, Gory, Cast., du Brésil intérieur.— PI. xxix, lig. 2 ; 2 a, labre vu en dessus; 2 b, id. en dessous; 2 c, lèvre inférieure et palpes; 2 d, mandibule vue de tranchant; 2 e, id. à plat ; 2 /", mâchoire et palpe. Elle est du plus riche vert cui- vreuxi 464 COLÉOPTÈKES. — SCAKABÉIENS. CHRYN01*I10K.%, Aud. Serville. — Chaperon arrondi aux angles, un peu sinué en avant. Antennes de dix articles. Tarses à crochets entiers et médiocrement inégaux dans les deux sexes. Le genre est fondé sur une magnifique et unique espèce, le C. chrij sochlora, Latr., d'un vert doré en dessus, à reflets cuivreux en dessous, avec les tarses bleus. Les élytres sont criblées d'excavations confluentes qui les rendent très-rugueuses. Les pattes postérieures des mâles, par la grosseur des cuisses et les jambes un peu arquées, semblent propres au saut. Nous figurons le mâle de ce splendide Coléoptôre, pi. xxix, dejx, fig. 1, dessus et dessous ; 1 a, lèvre inférieure et palpes ; 1 b, mâchoire et palpe; 1 c, labre et mandibule ; 1 d, antenne ; 1 e, tête vue en dessus. On ne connut pendant longtemps, en P>ance, que deux ou trois indi- vidus de cette espèce, rapportés par l'illustre de Humboldt, de Loxa, dans le haut Pérou ; ensuite, elle fut retrouvée en Colombie par un voya- geur français, M. Lebas, qui envoya une douzaine de beaux exemplai- res. On l'a reçue depuis de ce dernier pays, de manière à la rendre assez commune dans les collections. HOProuiVATHU^, Mac Leay. — Chaperon plus ou moins prolongé en avant, fortement rebordé de toutes parts. Antennes de dix articles. Élytres très-convexes, oblongues ou subovales. Tarses à crochets très-inégaux, entiers. Ce genre est fondé sur deux espèces du Brésil.— Ex. : H. Kirhyi, Mac Leay, pi. xxviii, fig. 10 ; 10 a, mâchoire et palpe ; 10 6, labre. Bel insecte d'un vert bronzé, chatoyant en rouge en dessus, d'un testacé clair, à reflets verts en dessous. AIMOPL.OCi;ilATBUiS, Mae Leay. — Chaperon à bord antérieur prolongé et relevé chez les mâles, arrondi ou tronqué chez les femelles. Antennes de dix articles. Tarses à crochets très-inégaux et entiers. Corps presque toujours glabre en dessus, souvent métallique. Les Anoplognathes, au nombre d'une vingtaine d'espèces, sont exclusifs à l'Australie et se nourrissent des feuilles des Eucalyptes (Myrtacées). Velus en dessous, ils sont en dessus ornés de riches couleurs à reflets, et de grande taille. Certaines espèces sont très-communes. Le type de ce beau genre est 1'^. viridi-œneus, Donov., ou Lalreillei, Gyllenh., long d'environ Zi5 millimètres, remarquable par ses fortes cuisses postérieures et sa couleur d'un vert métallique à reflets dorés et d'un rouge de feu.— PI. xxvm, fig. 2, labre et lèvre inférieure ; 2 6, mâchoire et palpe ; 2 c, crochets du tarse antérieur. AMBLYTËRUS, LEUCOTHYREUS, GENIATES. Û65 AMBLiVrERUS^ Mac Leay.^Chaperon demi-circulaire, peu rebordé. Antennes de dix articles. Élytres oblongues, parallèles, convexes, à bordure membra- neuse. Ce genre est fondé sur une seule espèce australienne, de taille moyenne, à longs poils en dessous et sur le pygidium, glabre en dessus, brune à reflets métalliques, avec des points en séries sur les élytres : c'est 1^4. cicalricosus, Gyllenh., ou geminatus, Mac Leay. — PI. xxix, fig. 7, mâle ; 7 a, mâchoire et palpe ; 7 b, extrémité du lobe externe très-grossi ; 7 c, lèvre inférieure et palpe ; 7 d, antenne ; 7 e, tarse postérieur. LEIICOTHVREI'S, Mac Leay. — Antennes de dix ou rarement de neuf articles. Élytres oblongues, élargies en arrière, munies d'une bordure membraneuse externe. Tarses à quatre premiers articles dilatés dans les deux sexes, surtout chez les mâles. Les espèces de ce genre, au nombre de 50, sont des parties chaudes de l'Amérique du Sud, des Antilles et une de Taïti. Ex : L. flavipes, Eschscholtz, du Brésil, pi. xxviii, fig. 1 ; la, antenne; 1 6, tète vue en dessus ; 1 c, mâchoire et palpe ; 1 d, jambe et tars antérieurs. La tête et le corselet sont ponctués, d'un brun verdâtre à reflets rouges, et les pattes de même couleur, les élytres jaunes, avec la marge et la suture finement bordées de vert foncé. GEil'lATES, Kirby. — Chaperon semi-circulaire, rebordé. Antennes de neuf articles (rarement de dix). Élytres avec bordure membraneuse externe. Crochets externes fortement fendus à tous les tarses. Les insectes de ce genre, dénués de couleurs métalliques, presque tous de l'Amérique du Sud, surtout du Brésil, qui en renferme plus de vingt espèces, sont en entier d'un testacé ou d'un brun rougeâtre uni- forme, ou mélangés de ces deux couleurs ou d'une et de noir. Ex : G. barbatus, Kirby. — PI. xxviii, fig. 3, mâle; 3 a, antenne; 3 6, mâchoire et palpe ; 3 c, lèvre inférieure et palpes ; 3 d, tarse antérieur. Il y a une espèce de Montevideo et une d'Australie. Le troisième grand groupe des Scarabéiens, qu'on peut désigner sous le nom de Scarabées proprement dits, contient les espèces de la tribu les plus grandes et les plus massives, et même, à la seule exception des Goliaths du groupe suivant, les plus gros insectes connus. La difficulté du retour du sang au cœur, qui ne se fait que par la capillarité entre les organes accolés et non par des vaisseaux propres, empêche la taille GIRARD. 30 466 * COLÉOPTÈRES. — SCARABÉIENS. des insectes d'acquérir les proportions considérables des crustacés. L'ab- domen a pris de fortes dimensions, comparé aux régions antérieures. Les couleurs sont rarement métalliques, mais d'une livrée uniforme, variant du noir au fauve. Les différences des sexes sont en général prononcées, et outre les mêmes organes que dans les deux grands groupes de la seconde section qui précèdent, portent surtout sur les armures variées de la tète et du corselet. Il existe très-communément des organes de stridulation, fort rares au contraire dans les autres groupes des Scarabéiens. En général, ils consistent en rides transver- sales ou flexueuses, quelquefois en rugosités situées sur le pygidium, et sur lesquelles frotte le bord postérieur des élytres pendant les mouve- ments de l'abdomen. Ce bord est glabre quand il y a stridulation, et au contraire babituellement muni d'une frange de poiis cuurts et égaux lorsque les organes de la stridulation n'existent pas, car cette frange gênerait la friction des élylres. Exceptionnellement (genres Phi- leurus, Ligyrus), la position des organes stridulants se renverse, et ils sont à la face interne des élytres. La grande majorité des Scarabées adultes est crépusculaire; certains sont diurnes et vivent sur les fleurs (genres Agaocephala, Cyclocephala). Leur vol est très-lourd, et s'opère les élytres soulevées, mais non écar- tées complètement. Les larves, à mâchoires à un seul lobe, sont inter- médiaires entre celles des Hannetons et des Cétoines ; comme les premières, elles ont un sac sus-anal et des sillons transverses bien mar- qués, et, comme les secondes, une forme plus courte, des mandibules dentées et munies en dehors de stries transversales, une tête plus étroite que le tronc. En outre des petites épines servant à la progres- sion dont elles sont munies, comme toutes les larves de Scarabéiens, elles sont plus ou moins velues. On ne connaît, au reste, d'une manière complète et précise, que celle de VOryctes nasicornis, Linn., si commune dans la tannée des couches des jardins maraîchers. Ces larves vivent plusieurs années et se transforment en nymphes dans une coque de débris agglutinés par une bave spéciale ; jeunes, elles se contentent de végétaux décomposés dans le terreau et l'humus, mais plus âgées, cer- taines peuvent s'attaquer aux racines et causer des dégâts, surtout en raison de leur grosseur. Le chaperon des adultes est le plus souvent acuminé; le menton, au- quel la languette cornée est toujours soudée, tantôt acuminé, tantôt 'tronqué ; le lobe interne des mâchoires est toujours atrophié, et l'ex- terne variable, en général robuste et denté. Les mandibules, débordant en général le chaperon, sont cornées et munies à l'intérieur, avant leur dent molaire, d'une courte frange de poils. Le labre est important à considérer, car il est toujours plus ou moins coriace ou membraneux et caché sous le chaperon, tandis' qu'il est toujours visible dans le groupe des Rulèles. Les tarses ont les quatre premiers articles renflés à l'extrémité et non cylindroïdes, comme chez la très-majeure partie HEXODON, CYCLOGEPHALA. 467 des Rutèles ; leurs crochets sont simples et égaux, au moins chez les femelles. Il y a certaines difficultés à distinguer les Scarabées des Ru- tèles, avec lesquelles il y a de nombreux et insensibles passages ; en vertu des affinités naturelles toujours multiples, il y a aussi un passage aux Hannetons par le genre Pachypus. Les antennes sont presque tou- jours de dix articles, le premier long et renflé, les suivants variables; la massue de trois, en général pareille dans les deux sexes. L'écusson est constant, médiocre, en triangle curviligne. Les trois dernières paires de stigmates abdominaux divergent fortement en dehors; les hanches antérieures sont transversales, enfouies dans leurs cavités cotyloïdes, et les intermédiaires subcontinues. Notre groupe des Scarabées vrais correspond aux Xylophiles de La- treille, moins les Rutèles qu'il y joignait ; ce n'est autre chose qu'un nom plus simple et plus vulgaire donné aux Dynastides de Mac Leay, Erichson, Lacordaire. M. Burmeister a conservé le nom donné par Latreille. GENRES PRINCIPAUX. HEYonoiV, Oliv. — Tête et corselet inermes dans les deux sexes. Élyires ovales^ débordant le corps, rebordées. Tarses grêles, épineux, à crochets petits ; pas d^organes de stridulation. Ce genre, tout à fait anormal par son aspect, qui l'éloigné des autres Scarabées, est composé de deux espèces de Madagascar, et une de l'île de France, d'assez grande taille, noires en dessous, brunâtres ou grisâ- tres et chagrinées en dessus, avec des côtes ou un réseau saillant irré- gulier sur les élytres. Elles ne vivent pas sur les arbres, comme le pen- sait Olivier ; mais, ainsi que l'a reconnu un oflicier de marine, M. Luczot, se trouvent enfouies dans le sable de la plage, qu'il faut fouiller pour s'en emparer, sans qu'il ait pu les voir ni voler, ni courir à terre. — Ex. : H. reticulatus, Oliv. — PI. xxx, fig. 6; 6 a, mâchoire et palpe ; 6 6, mandibule ; 6 c, lèvre inférieure et palpes. Circi.oei:PHAl>A, Latr. — Genre de résidu, comprenant beaucoup d'espèces encore inédites, et auquel M. Lacordaire déclare ne pouvoir assigner que des caractères négatifs, comparativement aux genres voisins du groupe général des Cyclocéphalites. — Tête et corselet inermes dans les deux sexes : antennes de dix articles. Corps oblong; pas d'organes stridulants. C'est surtout à l'aspect qu'on reconnaît ces insectes peu caractérisés, au nombre de près de cent espèces, répandus des États-Unis au Chili, et abondants surtout dans les régions intertropicales de l'Amérique du Sud. Un petit nombre otfre la couleur noire uniforme; la plupart ont un fond fauve brillant, testacé ou rougeâtre, avec des macules noires Zj68 GOLÉOPTÈRliS. — SCAKABÉIEWb. OU brunes.— Ex. : C. frontalis, Chevr., de Cuba (pi. xxx, tig. 7), jaunâtre, à tête et corselet ponctués, la première ayant sur le front une tache cintrée et noire, les élytres avec des stries ponctuées, rextrémité des cuisses, des jambes et les trois dents extérieures des jambes de devant noires. DYSCIilîETUS, Harold, ou Chalepus, Mac Leay. — Tête et corselet inermes dans les deux sexes ; antennes de dix articles. Tarses antérieurs épais chez les mâles ; les autres grêles. Ces insectes, des régions chaudes, surtout de l'Amérique du Sud, sont américains, de forme assez courte, noirs, ponctués en dessus, à élytres plus ou moins striées. — Ex.: D. dubius, Oliv., ou geminalus, Fabr. (pi. xxx, fig. 8; détails : 8a, 8 6, mâchoires ; 8c, tète en dessus; 8f/, lèvre inférieure et palpes ; 8 e, jambe et tarse antérieurs). De la Guyane et du Brésil. C'est un Coléoptère noir et glabre, à corselet ponctué, ainsi que les élytres, celles ci étant en outre marquées de stries géminées ; la tête est lisse et noire. PEUTODOnr, Hope. — Tête portant un ou deux tubercules, semblable dans les deux sexes; mâchoires à lobe externe robuste, muni de cinq dents aiguës. Organes de stridulation couvrant le milieu du propygidium sous forme de rides ; de petits points transverses, visibles à l'œil nu, parfois disposés en deux larges rangées. Nous citons ce genre parce qu^il est représenté dans la France méri- dionale par des Coléoptères courts, épais, glabres en dessus, villeux sur la poitrine, d'un noir brunâtre assez brillant, à élytres fortement ponc- tuées par rangées gemellées. Il serait intéressant de rechercher le genre de vie et les métamor- phoses encore inconnues de ces insectes. Les espèces d'Europe ont les crochets des tarses antérieurs simples et égaux dans les deux sexes. On rencontre, dans le midi de la France, le P. punctatus, Villers, de 20 millimètres environ, d'un noir luisant, à tête bituberculée, et le P. moiiodon, Fabr. Ces insectes errent le long des chemins; parfois se trouvent sous les bouses ou volent au crépus- cule. Il y a une vingtaine d'espèces de l'Europe méridionale et orien- tale, d'Algérie, d'Afrique propre, de Mongolie, et une d'Australie. CAl.E.ICilEMIS, Cast. — Tête inerme; antennes de huit articles. Élytres et ailes dans les deux sexes. Pattes postérieures très-fortes, à grosses cuisses ovales, à jambe* très-évasées au bout ; pas d'organes de stridulation. Corps oblong. - Ce genre est fondé sur une seule espèce, le C. Latreillei, Cast., propre au littoral méditerranéen, de moyenne taille, d'un jaune testacé, avec PHYLLOGNATHUS. 469 le corselet et la suture des élytres rougeâtres, le dessous du corps revôfu de poils roux. Elle fut découverte en Italie, puis retrouvée en Espagne, en Algérie et dans les parties les plus méridionales de la France, près de Fréjus, etc. Cette espèce est îrès-rare partout et vole au crépuscule. Elle a quelques affinités avec les Pachypus, par ses pattes robustes et sa bouche. La larve, découverte aux environs d'Alger, a été étudiée par M. le docteur Laboulbône (1). Elle vit sous le sable du littoral, là où il contient des détritus de bois charriés par les rivières débordées et enfouis. Elle se plaît à ronger, à environ ■30 centimètres sous le sol, ces débris ligneux humides, et de loin en loin recouverts par les eaux de la mer; on en trouve souvent quatre ou cinq après un fragment. Sur la fin de mars et au commencement d'avril, l'insecte parfait, mêlé à ces larves rongeuses, se trouve assez près de la surface du sol et généralement accouplé. Les larves sont d'un blanc jaunâtre, fortement recourbées en arc, très-convexes en dessus, presque planes en dessous, à douze segments, non compris la tête et le mame- lon anal très-développé ; leurs antennes sont fortement coudées pendant la vie. Elles ont des mouvements lents, et se tiennent sur le flanc quand on les tire du sable ; posées sur une table, elles relèvent lentement la tête et la partie supérieure du corps, mais elles retombent bientôt dans le décubitus latéraL Au reste, ce sont là les mouvements habituels des larves de Scarabéiens. PHYl,l,OGIVATHUN, Eschscholtz. — Chaperon portant une corne chez les mâles, tubercule ou simple chez les femelles; antennes de dix articles. Corselet des mâles diversement excavé en dessus, celui des femelles simple ou bituberculé. Point d'organes stridulants, ce qui est le caractère distinctif le plus saillant d'avec le genre Oryctes. Les espèces du genre, tel qu'il est réduit maintenant, au nombre de cinq, sont des Indes, du Cap, de Sénégambie, et le type, le P. Silcnus, Fabr., de tout le pourtour de la Méditerranée. On le trouve dans les montagnes du Lyonnais. Il vole le soir, le long des chemins, autour des fumiers, etc. Il est d'un brun marron clair, à élytres finement pointil- lées, à corselet très-excavé en avant, de taille moitié moindre que VOryctes nasicornis, Linn., et d'une couleur pareille, mais moins foncée. Nous figurons le P. abderus, Sturm, à corselet très-convexe en arrière, et muni d'une saillie horizontale et bifide, très-commun aux environs de Montevideo et de Buenos-Ayres^ et aussi du Brésil (pi. xxx, fig. 3, mâle; 3 o, son profil). Il forme actuellement le genre Diloboderus, Reiche. (1) Ânn. Soc. entom. de France, li^ série, 1861, t. I, p. 607, et pi. 16, fig. 5. 470 COLÉOPTÈRES. — SCARABÉIENS. ORVCTES, lUig. — Tête munie d'une corne simple et arquée chez les mâles, sans corne et tuberculée chez les femelles. Corselet des mâles à vaste excava- tion, impressionné ou entier chez les femelles. Organes de stridulation occupant toute la partie médiane du propygidium. L'espèce type de ce genre est VO. nasicornis, Linn., de toute l'Europe, du Caucase, le Moine de Geoffroy, nommé vulgairement Rhinocéros, Licorne, volant le soir, en juin et juillet, dans les jardins des environs de Paris. C'est un gros Coléoptère d'un brun marron, à corselet tronqué en avant, avec une éminence tridentée, moins marquée chez la femelle, une corne recourbée sur la tête du mâle seulement, les élytres lisses et polies, avec une seule strie près de la suture. Il y en a des variétés de petite taille, car celle-ci varie de 27 à 36 millimètres, et à petite corne. J'ai trouvé abondamment les sujets de petite taille à Compiègne, dans le parc, en 1871. La larve de cette espèce, blanchâtre, plus grosse que celle du Hanne- ton, à pattes plus courtes, vit, à l'état de nature, dans de vieux troncs pourris ou dans des bois très-décoraposés. Au bout de trois à quatre ans, elle se change, en avril et mai, dans une coque agglutinée, en une nymphe d'un jaunâtre pâle et sale, avec les caractères sexuels bien apparents, et d'où sort l'adulte au bout d'un mois à six semaines. C'est l'homme qui, au moins dans le Nord, a singulièrement multiplié cette espèce, en lui fournissant, dans la tannée du terreau des couches des jardins et des serres, les écorces de chêne très-divisées. La femelle pond dans le terreau des œufs blanchâtres, de la grosseur d'un grain de chè- nevis, qui éclosent au bout de quarante jours. Les jeunes larves sont d'abord inoffensives en ce qu'elles ne vivent que de détritus; mais plus tard elles s'attaquent aux racines et même aux parties ligneuses et peuvent nuire à des arbres précieux, ainsi dans le midi de la France à l'Olivier; aussi l'horticulteur doit tueries individus qu'il rencontre, larves ou adultes. Les Musaraignes et quelques insectes carnassiers dé- truisent ces larves, et, dans le Midi, un gros Hyménoptère, le Scolia hortorum, Fabr., leur fait la guerre. Signalons encore VO. Grypus, Illig., plus grand, tout à fait lisse, du pourtour de la Méditerranée, et une espèce de grande taille, de l'île de France, l'O. Tarandus, Oliv. (pi. xxx, 6g. 1 ; 1 a, mandibule ; 1 b, mâchoire et palpe). Les larves de l'O. Simiar, Coquerel, font à Madagascar de grands ravages dans les plantations de Cocotiers. Elles se trouvent par milliers dans les troncs vermoulus qui couvrent la terre ; à l'aide de leurs fortes mandibules, elles les percent en tous sens et les convertissent en terreau, et, comme par l'incurie et la paresse des Malgaches et môme, des colons, les arbres attaqués ne sont pas enlevés, les insectes adultes vont pondre sur les arbres sains et propagent le mal de plus en plus. Deux espèces de Scolia s'attaquent à ces larves. A l'île Bourbon ou de la Réunion, M. Coquerel a reconnu SCARAlî^US, XYLOTRUPES. 471 que les Oryctes insularis. Coq., et Tarandus font les mrmes ravages que VO. Siraiar à Madagascar. F-es femelles pondent leurs œufs le soir dans le bourgeon terminal du Cocotier, et les petites larves descendent dans le chou du sommet, puis dans le bois; les immenses feuilles sortent en- tamées, ce qui dénote les arbres attaqués. Le genre Oryctes exisie sur- tout dans l'ancien continent, en Europe, en Afrique, aux îles Canaries, aux Indes, à Madagascar, à Sumatra. On le rencontre aussi à la Nouvelle- Hollande et aux îles Gallapagos. SCARAB^US, Linn. , ou Dynastes, Kirby. — Vertex armé chez les mâles d'une corne généralement très-grande, arquée et plus ou moins dentée, unitube roulé chez les femelles. Corselet muni chez les mâles d'une corne horizontale plus ou moins longue et velue en dessous, chez les femelles inerme. Élytres tou- jours lisses chez les mâles, tantôt rugueuses, tantôt lisses chez les femelles. Les quatre espèces de ce beau genre sont de grands et remarquables Coléoptères, dont le plus connu, figurant fréquemment dans les cadres d'insectes pour ornement, est le S. Hercules, Linn.. de Colombie, des Antilles, de la Guyane, commun à la Martinique et surtout à la Guade- loupe, descendant au sud jusqu'aux environs de Rio-Janeiro, où il est très-rare, avec ses variétés Perseus, Oliv., et Alcides, Fabr. Le mâle est d'un beau noir d'ébène, ayant les élytres et une partie du corselet d'un gris verdâtre olivacé, comme vernissé, avec taches noires. Le corselet se prolonge en une corne presque aussi longue que le corps, recourbée à l'extrémité et un peu bifide ; la tète offre également une longue corne relevée, bidentée à la base et unidentée à l'extrémité. La femelle a les élytres rugueuses brunes, un peu vernissées de verdStre en arrière. Les autres espèces en comprennent deux de coloration analogue, mais à fe- melles à élytres lisses, les S. Hyllus, Chevr., du Mexique, et Tityus, Linn., des États-Unis du Sud, et une dernière à coloration noire uni- forme, le S. Neptunus, Quensel, avec la variété Jupiter, Buquet, de la Colombie. On est loin de connaître suftisamment les mœurs de ces su- perbes insectes; on sait seulement qu'on les rencontre dans les troncs d'arbres décomposés où leurs larves ont vécu. D'après Lherminier, le S. Hercules recherche la sève qui coule des arbres meurtris ou abattus ; il aurait, comme certains Longicornes, la singulière habitude de couper de jeunes pousses, et même de petites branches, en les saisissant entre la corne de sa tète et celle du corselet, puis prenant son vol circulairement. Le S. Tityus a été trouvé dans un tronc de Cerisier abattu par le vent. XYliOTRlPES, Hope. — Front muni chez les mâles d'une grande corne re- dressée, arquée et comprimée, bituberculé chez les femelles ; antennes de dix articles. Corselet des mâles surmonté en arrière d'une grande corne arquée, hT2 COLÉOPTÈRES. — SCAIÎABÉIENS. dirigée en avant et munie à sa base de deux petites cornes antérieures ; celui des femelles simples. Ce genre appartient à la Chine, à Ceylan, aux îles de la Sonde et Philippines. — Ex. : H. Gideon, Linn., de Java, pi. xxx, fig. U, sa tête en dessous ; h a, mandibule ; U b, mâchoire et palpe ; li c, antenne. — Neuf espèces. ]tiEGA§lOiii.%, Kirby, ou Megalosoma, Burm. — Front muni chez les mâles d'une corne robuste, redressée, fourchue au bout, souvent dentée à sa base, celui des femelles unituberculé. Corselet ayant chez les mâles deux cornes latérales et souvent une troisième médiane, toutes antérieures, rugueux chez les femelles. Les espèces de ce genre américain sont de tous les Coléoptères, sauf es Goliaths, les plus volumineuses et les plus massives, par le dévelop- pement considérable de l'arrière-tronc. Il en est à corps glabre, les M. Actœon, Linn., de la Guyane, et Mars, Reiche, de Colombie, d'au- tres revêtues en entier d'une fine pubescence fauve, couchée, assez caduque, les M. elephas, Fabr., du Guatemala, Typhon, Fabr., du Brésil, Hector, Gory, du Brésil. — Huit espèces. AGAOrEPHytl..^, Aud. Serville. — Tête munie chez les mâles, au-dessus des yeux, de deux cornes trigones et courtes, inerme chez les femelles. Corselet tantôt cornu, tantôt simple chez les mâles, toujours simple chez les femelles. Les Agaocéphales sont des Coléoptères du Brésil intérieur et de la Guyane, au nombre actuel de sept espèces, à cornes bien moins fortes que dans les genres précédents, et dont les couleurs, par exception chez les Scarabées vrais, sont métalliques, d'un vert bronzé brillant comme teinte dominante. Cette riche livrée est en rapport avec des habitudes diurnes, et ces insectes fréquentent les fleurs. Les femelles sont beau- coup plus rares que les mâles. Nous figurons (pi. xxx; flg. 2) le mâle de r^. Mannerheimi, Cast., à corselet, dessous du corps et pattes d'un cui- vreux bronzé, avec élytres d'un châtain un peu verdâtre. Le corselet offre une petite corne courbée en avant très- faiblement bifurquée à l'extrémité. PHlliEVRllS, Latr. — Tête munie de tubercules plus faibles chez les femelles. Corselet et élytres variables. Les Phileures, au nombre d'une trentaine d'espèces, habitent surtout les parties chaudes et semi-lempérées'des deux Amériques, et aussi la Chine, le Bengale, le Sénégal. Ils ont des téguments toujours plus ou moins ponctués, une taille moyenne, des contours plus ou moins allon- CÉTOINES EN GÉ^ÉRAL. /iTS gés et parallèles, très-peu de poils, une convexité très-variable. Lacor- daire a découvert chez eux des organes de stridulation d'une disposi- tion exceptionnelle et spéciale : ce sont de petites aspérités formant une bande plus ou moins large, selon les espèces, à la face interne de chaque élytre, le long du bord externe, et qui s'étend presque depuis la base de ces organes jusqu'il l'angle suturai, les aspérités étant d'au- tant plus serrées qu'elles sont plus voisines du bord externe de l'extré- mité des élytres. Les Phileures sont des insectes communs qu'on voit parfois voler à l'entrée de la nuit, qu'on trouve sous les écorces et dans l'intérieur des arbres pourris. Par une aberration de régime, une espèce, fréquente à Buenos-Ayres, le P. vervex, Burm., aussi du Brésil et de Colombie, se trouve dans les cadavres à demi desséchés, avec des Trox. Nous représentons le P. cribratus, Chevrotât (pU xxx, flg. 5), de l'île de Cuba. Il est de couleur de poix, à tête déprimée portant quatre tubercules. Les derniers représentants de la tribu des Scarabéiens, qu'on peut nommer d'une manière générale les Cétoines, sont des insectes à corps assez court, parallèle ou graduellement rétréci en arrière, plus ou moins déprimé en dessus, orné de couleurs vives et variées, souvent métalliques, ce qui dénote des habitudes diurnes, par suite d'une har- monie naturelle (non sans exception, comme le montrent beaucoup de Papillons de nuit, à couleurs éclatantes, mais très-altérables au jour) entre la richesse des téguments, la solidité de leur couleur et l'intensité de la lumière à laquelle ils seront exposés. A l'état parfait, le plus grand nombre de leurs espèces vivent sur les fleurs, dont elles dévorent le pollen, qu'elles recueillent à l'aide des pinceaux de poils dont sont munies leurs mâchoires : aussi le nom de Scarabées des fleurs s'appliquait spécialement à ces Coléoptères dans la classification de de Geer. Celles où ces organes possèdent des dents ou des griffes attaquent des sub- stances plus solides, telles que les étamines, les pétales des fleurs et peut-être les feuilles. Les larves, qui vivent environ trois ans dans le bois décomposé, le terreau, les vieilles racines, se transforment en nymphes dans une coque de débris agglutinés. Elles diffèrent des larves des autres groupes de Scarabéiens en ce que le dernier segment abdominal ou sac n'est pas divisé en deux par un sillon circulaire, de sorte qu'elles ont douze segments sans l'énorme mamelon anal des autres, que la tête est moins large que le corps, les segments moins profondément sillonnés en tra- vers, le corps plus velu sur toute sa surface. Ce corps est un peu atté- nué en avant, épaissi en arrière, se terminant par une extrémité arron- die, ù poils plus longs sur les anneaux du thorax que sur ceux de l'abdomen. L'anus est fendu transversalement, et les péritrèmes stigma- Ulh COLÉOPTËRES. — SCAHARÉIENS. tiques très-petits. Le premier segment thoracique est rétréci en avant, ceux de l'abdomen divisés dorsalement en trois bourrelets étroits, munie despiiiules roides; le pénultième n'en a que deux, et le sac est recouvert de poils courts entremêlés de poils mous plus longs. Les mandibules sont fortes, dentées à l'extrémité, munies d'une dent molaire à la base, plus ou moins sillonnées sur leur face externe ; les mâchoires, à un seul lobe, courtes et charnues, sont armées à leur extrémité, qui est entière, de deux petites épines; les palpes maxillaires ont trois articles, les labiaux deux. Écoutons M. Mulsant au sujet des habitudes des insectes de cette sec- tion : « Parmi les larves de ces Lamellicornes, les unes minaient les troncs cariés; les autres vivaient, soit de la vermoulure échappée des flancs de ces derniers, soit de substances encore plus pauvres en élé- menls nutritifs. Mais, après leur dernière transformation, des destinées plus heureuses sont réservées à ces insectes. Plusieurs, enchaînés par leurs premiers penchants, semblent craindre de s'éloigner des lieux où s'est écoulée leur enfance; ils demandent aux arbres qui les ont cachés la nourriture de leurs derniers jours, et souvent une retraite pour y fuir en sûreté la lumière qui les blesse {Dendrobies de M. Mulsant, genre Valfjus, certains Trichiaires). Les autres, complètement dépouillés de leurs habitudes grossières, justifient plus spécialement par leurs goûts délicats le surnom de Mélitophiles qui leur a été donné (partie des Tri- chiaires, Cétoines). Ces derniers quelquefois aussi recherchent l'abri protecteur des grands végétaux, et vont, à laide de leurs mâchoires en pinceau, recueillir sur leurs troncs brunis le liquide mucilagineux que laissent fluer leurs blessures; mais, le plus souvent, folâtres comme le papillon et brillants comme lui, ils volent, à son exemple, des corymbes du Sureau à ceux de la Spirée, ou 'viennent puiser le nectar le plus par- fumé dans la coupe embaumée des Roses (1). » Il paraît exister une ex- ception à ce régime pour quelques Cétoines exotiques, du Sénégal et de l'Afrique australe, des genres Rhyxiphlœa, Burm., Rhinocœta, Burm. , et Diplognatha, Gory et Percheron, qui vivent, dit-on, sous les bouses de vache desséchées : on les reçoit souvent couvertes d'un enduit terreux qui indique des habitudes souterraines. Les caractères généraux des adultes sont les suivants : Tête médiocre et penchée. Chaperon confondu avec le front, carré ou parabolique, avec son bord antérieur très-souvent sinué, fendu ou bilobé ; antennes de dix articles, insérées à découvert au bord antérieur des yeux, à premier article grand, les six suivants très- variables, la massue de trois articles, quelquefois plus allongés chez les mâles. Labre et mandibules cachées sous le chaperon, celles-ci formées d'une partie externe cornée et d'une interne membraneuse. Mâchoires fortement pénicillées, à lobe externe très-variable, à lobe interne manquant ou remplacé par une dent (1) Mulsant, Coléoptères de France, Lamellicornes, 1842, p. 24. TRICHIAIRES. Ù75 cornée; menton sinué et souvent bilobé antérieurement, avec languette soudée et cornée, non rétréci en avant, avec palpes insérés sur les côtés. Palpes maxillaires de quatre articles, labiaux de trois ; la forme de ces deux sortes de palpes presque invariable dans le groupe, avec der- nier article fuSiforme et plus long que le précédent. Corselet le plus souvent trapézoïde, ou subhexagonal, ou suborbiculaire, à base sinuée ou échancrée ; écusson variable. Élytres recouvrant simplement l'ar- rière-corps et laissant le pygidium à découvert. Abdomen à six arceaux ventraux, non soudés, mais peu mobiles. Hanches antérieures cylin- drico-coniques, saillantes; très-souvent une saillie sternale entre les hanches intermédiaires ; les trois dernières paires de stigmates abdomi- naux divergeant fortement en dehors. Pattes courtes ou médiocres, généralement égales dans les. deux sexes ; tarses à articles cylindroïdes, non renflés au bout, à crochets simples et égaux. Différences sexuelles très-peu marquées, portant sur le chaperon, les pattes antérieures, les tarses postérieurs, la massue antennaire. Pas d'organes de stridulation encore connus. Rien n'est plus difficile que l'étude spécifique des Cétoines, à cause du peu de différence des nombreuses espèces et de l'existence de beau- coup de variétés. On doit consulter, parmi les ouvrages français, la Monographie des Cétoines et ge7ires voisins, par Gory et Percheron (in-S", Paris, 1833, 77 planches), et, comme travail beaucoup plus récent, le Catalogue, malheureusement resté au début, des Coléoptères du Muséum d'histoire naturelle de Paris (deux livraisons gr. in-8°, Paris, 1850 et 1851), par M. E. Blanchard. On doit recourir aussi à ce dernier ouvrage pour les Hannetons et une partie des Rutèles. Deux groupes très-naturels se rencontrent dans les Cétoines : ce sont les Trictiiaires et les Cétoines vraies. 1° TRICHIAIRES. Les Coléoptères de ce groupe ont les épimères du mésothorax ascen- dants, mais non visibles de dessus, les élytres non sinuées latérale- ment, l'écusson médiocre et en triangle à côtés courbes, et presque jamais de saillie sternale. Le corselet est très-rarement trapézoïde et ne s'applique pas exactement contre la base des élytres ; celles-ci sont en général plus convexes que chez les Cétoines vraies, plus arrondies en arrière et parfois très-courtes (genre Trichius, Valgus). L'abdomen est souvent assez épais, ce qui rend le pygidium plus allongé. Les tarses sont fréquemment longs et grêles, avec des articles un peu noueux à l'extrémité. Les larves se distinguent de celles de l'autre groupe par leur tète plus grosse et dont le diamètre égale presque celui du corps; leurs habitudes sont les mômes La manière dont les adultes volent varie selon les genres. ^76 COLÉOPTÈRES.— SCAIURÉIF.NS. GENRES PRINCIPAUX. eiVORIMCS, L. Saint-Farg. et A. Seiv. — Élytres larges, assez courtes, arrondies sur les côtés. Pattes assez longues, peu robustes ; jambes intermédiaires très- arquées chez les mâles. Vol normal^ les élytres écartées. Dessus du corps glabre. l/esp(!'ce type est le G. nohilis, Linn., le Verdet de Geoffroy, existant dans toute l'Europe ; de 16 à 20 millimètres; assez rare aux environs de Paris, des parties froides et tempérées de la France; se prenant aussi en Angleterre; vivant sur les montagnes dans le Midi, rarement en plaine; Irès-commun à la Grande-Chartreuse; fréquentant les fleurs, surtout les grandes Ombellifères, les Sureaux, les Chardons. Il est d'un vert métallique brillant, à reflets cuivreux, ainsi que le dessous du corps et les pieds. Les élytres offrent des stries légères et quelques taches blanches; les palpes et la massue des antennes sont d'un noir violâtre. La larve a d'abord été trouvée par Rœsel dans le tronc pourri d'un Prunier; elle vit aussi dans l'Aune et dans d'autres arbres, notam- ment le Cerisier; se change en nymphe à la fin d'avril, et l'adulte éclôt à la fin de mai. On le trouve jusqu'à la fin d'août. Citons aussi le G. va- riabilis, Linn., de toute l'Europe, de même taille que le précédent, noir avec des points jaunes. M. Roulard l'a rencontré en Vendée, dans le Bocage. Le genre Gnorimus a sept espèces d'Rurnpe, d'Arménie, de Sibérie, d'Amérique boréale. STEGOPTERUS, Schaum. — Élytres assez allongées, parallèles. Pattes assex longues et assez fortes. Ce genre représente les Gnorimus dans l'Afrique australe. — Ex. : .S. m«aOllOTHRi!S, Esclisch. — Antennes coudées, à troisième article long. Corps élargi. Elytres fortement lobées à leur base, à nervures bien marquées et ayant chacune deux impressions plus brillantes ; écusson régulièrement triangu- laire et aigu en arrière. Crochets des tarses simples. STur plus de cent cinquante espèces de ce genre, vivant surtout dans les régions chaudes de toute la terre, même en Australie, l'Europe ne compte que trois espèces, le C. chnjsostigma, Linn., le C. affinis, Fabr., assez commun partout sur les Chênes, de 11 à 15 millimètres, d'un brun bronzé peu brillant en dessus, avec les fossettes des élytres cui- vreuses ; le C. Solieri, Cast. et Gory, du midi de la France et de l'Alle- magne, d'Espagne, d'Algérie, de D millimètres, plus étroit, plus doré AGRILUS. ^93 et moins rugueux que l'espèce précédente. Ce sont les larves de Chryso- bothris qui présentent au plus haut degré, parmi les Buprestiens, l'élargissement considérable du thorax en forme de pilon aplati. La larve du C. Solieri a été étudiée par M. E. Perris {Ann. Soc. entomol. de France, 1852, 156). Elle vit dans les tiges des jeunes Pins de 5 à 15 cen- timètres de diamètre, et dans les branches des vieux. Elle se tient d'abord sous l'écorce, et y pratique une galerie sinueuse qu'elle laisse derrière elle remplie de détritus blancs et d'excréments d'un roux brunâtre, puis, aux approches de l'hiver, enfonce sa galerie dans le bois. Lorsque le moment de se transformer est venu, elle se retourne dans sa galerie, et subit sa métamorphose, quelquefois à plus de 2 cen- timètres de la surface. La nymphe, au lieu de papilles saillantes, n'a que des mamelons latéraux et dorsaux à peine visibles. L'adulte éclôt en juillet, et se trouve sur les jeunes Pins récemment abattus et exposés au soleil. AGRiLlljii, Stephens. — Tète verticale^ à front plan, avec antennes insérées à dis- tance notable des yeux, dans des cavités très-grandes; un écusson triangulaire. Forme en général linéaire et grêle, avec corselet cylindroïde. Elytres très-souvent débordées par l'abdomen, arrondies à l'extrémité. Tarses de longueur normale à crochets dentés ou appendiculés. Le genre Agrilus contient beaucoup d'espèces, plus de quatre cents, qui, dans les contrées chaudes seulement, acquièrent une grande taille, des couleurs variées, une pubescence plus épaisse. Ils sont répandus sur toute la terre, dans le nord comme dans le midi. Les espèces d'Eu- rope sont de petite taille, au plus médiocre, très-voisines les unes des autres, vertes, bleues ou bronzées. On les trouve sur les feuilles des végétaux et les bois morts, sous les écorces. Les mâles ont une forme plus allongée et les élytres plus épaisses que les femelles. Les larves des Agrilus ont la forme de celles des Buprestiens en général, mais avec les anneaux de devant médiocrement dilatés, et l'anneau anal terminé par une espèce de tenaille à deux branches dentées en dedans et dont la conformation varie selon les espèces. La femelle dépose ses œufs, plusieurs ensemble, sous l'écorce de l'arbre aux dépens duquel vit l'espèce. Les jeunes larves creusent leurs galeries dans l'épaisseur de l'écorce, et entament même le bois. Ces galeries s'entrecroisent et se dirigent en divers sens. Elles sont remplies de vermoulures fines, au bout desquelles se tient la larve, la tète tournée vers le point à percer. La vie évolutive est de deux années. La même espèce attaque souvent plusieurs espèces d'arbres : ainsi VA. viridis, Linn., de la plus grande partie de l'Europe, offrant de nombreuses variétés, vit dans le Chêne, le Hêtre, le Bouleau, et l'adulte se trouve souvent en grand nombre sous les écorces, en particulier des jeunes plants. Les Agrilus sont les plus communs de tous les Buprestiens, après certains Anthaxiu. On 694 COLÉOPTÈRtS. — BUPKtSTlENS. rencontre près de Paris, outre l'espèce précédente, VA. cœruleits, Rossi, ou cyanescens, Ratz., de 6 à 8 millimètres", bleu ou bleu verdâtre, à élytres à peine élargies en arrière, saillantes aux épaules ; 1'^. augus- tulus, Illig., de 5 millimètres, d'un vert bronzé, avec les élytres sensi- blement élargies en arrière, vivant sur les jeunes Chênes. Cette espèce se trouve en France, en Allemagne, en Suède, en Angleterre, dans le Caucase, en Perse. Un genre très-voisin, Corœbus, Cast. et Gory, aussi de toute la terre, a les mômes mœurs et métamorphoses que les Agrilus. Les espèces sont plus isolées, plus rares, plus méridionales. Le C. Rubi, Linn., de 12 à ik millimètres, d'un beau bronze verdûîre, remonte assez au nord; je l'ai pris plusieurs fois dans la forêt de Compiègne, en été, volant au soleil. On trouve aussi, dans les environs de Paris, le C. undatus, Fabr., de môme taille, d'un bleu noirâtre, à reflets violacés ou bronzés, moins allongé et atténué en arrière que le précédent, avec des fascies transversales grisâtres, en zigzag sur les élytres, vivant sur les Chênes. Un trouve très-abondamment dans les bois de Chênes verts du Var une magnifique espèce de ce genre, le C. bifasciatus, Oliv., qui constitue même une espèce nuisible. Il se trouve en larve dans les branches dont les feuilles sont tachées de jaune, et devient adulte dans le courant d'avril. .%PH.4IVfl§TIC!IJlS, Latr. — Corps plus ou moins allongé et étroit, ou même subcylindrique ; écusson très-petit. Tarses très-courts, chacun avec un crochet unique. Tête avec un large sillon médian ; yeux rapprochés , Cuisses très-dilatées, tranchantes en dedans, recevant les jambes dans une coulisse. La forme allongée et sublinéaire de ces insectes est caractéristique. Les plus grands dépassent à peine à millimètres, et leurs téguments, de couleur métallique ou noirs, sont glabres. On en connaît de pays variés, sauf de l'Amérique méridionale ; ceux d'Europe vivent dans les prairies marécageuses, en général sur les Joncs. — Ex. : A. emarginatus, Oliv., de h millimètres, grêle, presque parallèle, d'un noir bronzé assez bril- lant, existant aux environs de Paris et dans toute l'Europe, dans les prairies, sur les Joncs (pi. xxxu, fig. 5 ; 5 a, antenne) ; A. pusillus, Oliv., de 2™'",50, de même couleur que le précédent, plus élargi, à bords non parallèles. TRACHVH, Fabr. — Corps court, trigone. Corselet très-large. Tarses très-courts, à crochets dentés. Les espèces de ce genre, de petite taille, sont d'Europe, de l'ancien monde, et aussi du Brésil, se trouvent sur les broussailles et sur les fleurs. On en rencontre aux environs, de Paris, mais assez rarement (T. minuta, T. pygmœa). Ce qui caractérise essentiellement ce genre, ce sont les larves dont le mode de vie exige une locomotion plus parfaite TRACHYS. — THROSCIDES. 1x95 que celle des autres larves de Buprestiens. Aussi elles ne sont plus apodes. Dans la larve du T. minuta, Linn., les six pattes thoraciques sont remplacées par de petites fovéoles faisant l'office de ventouses et permettant à la larve de s'avancer ; les trois premiers segments sont très-larges et le quatrième très-étroit. Cette larve vit en mineuse dans les feuilles des SalLv caprœa, aurita, etc., où elle s'ouvre une galerie en forme d'ampoule, commençant à la pointe de la feuille, s'avançant ordinairement vers la nervure médiane, grande, irrégulière, verte d'abord, puis devenant d'un brun jaunâtre par l'amas des déjections. A la pointe de la feuille, en dessus, est une tache noire brillante, sous laquelle est l'œuf. La larve se trouve en août et septembre. La nymphe est d'un noir brillant, immobile et ressemble beaucoup à l'adulte. La nymphe ou l'adulte hiverne dans les feuilles tombées, et l'adulte pa- raît autour des Saules dès la fin d'avril et attaque les feuilles. Comme on le trouve aussi en juillet et août, il a sans doute deux générations. La larve du T. nana, Payk., vit de même en mineuse dans les feuilles du Convoivulus arvensis,et celle du T. pygmœa, Fabr., dans celles des Mauves. On recherchera sur les taillis de Chênes le T. minuta, de 3 mil- limètres, d'un noir brillant un peu bronzé, ayant sur les élytres quatre bandes transversales ondulées de poils blanchâfres, et sur les feuilles des Malvacées (Rose trémière, Guimauve, etc.) le T. pygmœa, de S""", 50, à tête et corselet d'un cuivreux doré, à élytres d'un bleu par- fois verdâtre, avec les pattes et le dessous du corps d'un bronzé brillant. Nous représentons une espèce appartenant à un genre très-voisin, le genre Brachys, Solier, constitué avec des espèces américaines, et aussi de Ceylan et du Japon, de taille un peu plus grande que les Trachys, souvent ornées de belles couleurs métalliques. Cette espèce est dési- gnée par M. G.-Mén. (Icon., texte, p. 35) sous le nom de B. cruentata, d'Haïti (pi. xxxii, fîg. 6; 6 a, antenne). Celte espèce, probablement non retrouvée, ne figure pas dans le catalogue Gemminger-Harold. Les genres Trachys et Brachys comptent chacun plus de soixante espèces. Après les Buprestiens proprement dits peut se placer un petit groupe, dont on a fait une famille sous le nom de Trixagides ou Throscides, contenant une centaine d'espèces. Chez les Buprestes propres le pro- thorax est immobile ; aussi, bien que le prosternum soit prolongé en arrière par une saillie, celle-ci reste intimement soudée à la fente mésosternale qui la reçoit. Les Throscides ont le prothorax encore exactement appliqué au mésothorax, mais un peu mobile, et ne sautent pas plus que les Buprestes, parce que le sillon mésoslernal ne possède pas la petite fossette qui doit servir de point d'appui et où joue libre- ment la saillie. La saillie du prosternum présente cependant un organe, qu'on appelle le mucro saltatorius, et qui paraît être destiné à modérer lésant. La saillie est partagée en deux parties, l'une inférieure, l'autre Zl96 COLÉOPTÈRES. — BUPRESTIENS. supérieure, plus ou moins dirigée en arrière et en haut (le mucro), formant comme un étage supérieur. Chez les Throscides, il reste fixe et immobile dans le mésosternum, ce qui empêche le saut de se produire. La petite famille des Throscides établie par Lacordaire a des rapports avec les Buprestiens, les Élatérides, les Eucnémides et même les Byr- rhides. Elle ressemble aux Buprestes par le rapprochement intime du prothorax et de l'arrière- corps et l'absence de la faculté de sauter, qui paraît admise, bien qu'en aient dit certains auteurs ; c'est ce qui nous détermine à les placer à la fin de la tribu des Buprestiens, dont ils ont l'aspect général. Us s'en distinguent surtout par le prosternum prolongé en avant en mentonnière cachant la bouche, comme chez la plupart des Élatérides; mais la faculté du saut et la configuration du prothorax en rapport avec elle séparent suffisamment ceux-ci^ aussi bien que les Eucnémides, qui manquent, en outre, de la mentonnière. Le rapport avec les Byrrhes est éloigné, et consiste en ce que les Throscides ont les pattes contractiles. Le corps des Throscides est en général oblong ou ovale-oblong ; leurs tarses sont de cinq articles, certains lamelleux en dessous. Ils ont un écusson triangulaire ou cordiforme. Les antennes, de onze articles, sont, ou dentées en scie, ou en massue, et toujours reçues inférieurement, au repos, dans des sillons propectoraux. Les es- pèces sont surtout d'Europe et d'Amérique, tantôt foncées et concolores, tantôt variées de bandes ou de taches vives, rouges ou jaunes (genres Drapetes, Redtenb., et Lissomus, Daim.). On les trouve sur les feuilles ou sous les écorces et au pied des plantes. Leur régime n'est pas connu, non plus que leurs métamorphoses, lacune fâcheuse, qui permettrait de mieux marquer leur place sériale. TRI^KAGU^;, KugeL, ou Throscus^ Latreille. — Antennes de onze articles, terminées par une forte massue de trois articles. Prothorax exactement appli- qué contre l'arrière-corps, les cavités cotyloïdes antérieures étant en partie creusées dans le mésothorax (rapport avec les Buprestiens^ séparation d'avec les Eucnémides et Élatérides), Pas de trochantins aux hanches antérieures; men- tonnière au prosternum ; sillons propectoraux recevant au repos les antennes (caractères de rapports inverses). Ce genre de transition a servi de type à une petite famille étudiée par M. H. de Bonvouloir (1). Ce sont des insectes ressemblant beaucoup à des Élatérides de petite taille, généralement de couleur brune ou ferrugineuse, finement pubescents de poils gris soyeux, et à élytres striées. 11 y en a peu d'espèces en Europe. Elles ne sautent pas, de même que les Buprestiens et probablement certains Eucnémides, sont de mœurs peu connues; vivent le plus souvent sur les feuilles des arbres et des plantes herbacées, mais parfois aussi sous les écorces et sous les détritus végétaux, notamment dans le voisinage des étangs (1) Essai monographique sur la famille des Throscides. Paris, 1859. ÈLATÊRlEiNS. 497 salles de la Provence. Les diverses parties de l'Europe, l'Orient, l'Algé- rie, l'île de Madère, les Canaries, l'Amérique septentrionale, le Brésil, les Indes orientales et l'Australie possèdent des Throscus. Nous devons remarquer que les cuisses sont creusées d'un sillon longitudinal rece- vant les jambes au repos, et celles-ci également d'un fin sillon où se logent les tarses. Les deux espèces qu'on peut trouver près de Paris sont le T. elateroidesy Heer, de 2 millimètres, d'un brun ferrugineux, rencontré notamment soijs des écorces de Platane, existant dans toute la France, mais rare, et le type du genre, le T. dermestoides, Linn. (pi. xxxni, fig. 7, tête et corselet grossi?), d'Algérie et d'Europe, de 3 à U millimètres, d'un brun ferrugineux, à appendices rougeiitres, se trouvant partout, et parfois assez commun, sur les fleurs, les feuilles des plantes basses, le bois mort, à la racine des plantes ou simplement sur le sol. Les yeux ont une dépression antérieure dans leur milieu. La larve paraît vivre dans le bois de chêne carié. liliiSOUlUS, Daim. — Tète engagée sous un corselet demi-circulaire. Nous représentons, pi. xxxui, fig. S, la tête et le corselel, vus en dessous et grossis, d'un Lissomus de l'Amérique du Sud. Les espèces sont toutes ou du Mexique, ou des régions chaudes de l'Amérique mé- ridionale. Tbibu des ÉLATÉRIEMiii. Cette tribu faisait partie de l'ancien groupe des Sternoxes et le carac- térisait essentiellement, car les pièces sternales y ont acquis une im- portance exceptionnelle. Les pièces buccales sont au contraire réduites comme chez les Buprestiens et sans variations, recouvertes presque tou- jours par une mentonnière ou prolongement du prosternum. La forme du corps des Élatériens est presque toujours plus ou moins allongée, et le prosternum au-dessus du corselet a en général les bords latéraux tranchants et les angles postérieurs aigus et divergents. Le prothorax est mobile sur l'arrière-corps, et le prosternum est prolongé en arrière en une pointe comprimée, pouvant pénétrer dans une fossette située à la base du mésosternum, entre la base des pattes intermédiaires. Quand ce mouvement s'exécute à la volonté de l'insecte, il en résulte un organe spécial de saut, non d'arrière en avant, comme d'habitude, mais du dos au ventre, l'insecte couché sur le dos étant lancé en l'air comme par un ressort, et retombant en général, par retournement, sur ses pattes. Cette faculté d'un mode de saut tout particulier ne peut cependant être acceptée comme un caractère général des Élatériens, bien qu'ils en tirent leur nom, car il y a des genres où elle manque, et l'énergie de ce saut varie beaucoup, sans rapport avec la configura- tion de son appareil, dépendant sans doute surtout de la disposition GIRARD, 32 498 COLÉOPTÈRES. — ÉLATÉRIENS. interne et de la puissuiv^^e des muscles thoraciques. Les Coléoptères dont il s'agit ont le corps trop allongé et les pattes trop courtes pour pouvoir se retourner quand ils tombent sur le dos. Le corps retourné se cambre, dégageant la pointe sternale de sa fossette, et prend deux points d'appui par la tête et par l'extrémité de l'abdomen ; alors un brusque effort musculaire, qui a besoin de ces deux points d'appui pour se produire avec l'énergie nécessaire, fait entrer la pointe pro- sternale dans sa fossette, de sorte que le milieu du dos de l'animal, brusquement refoulé, vient heurter avec force le plan d appui, et, par réaction, l'animal est lancé eu l'air, et recommence sa manœuvre, jusqu'à ce qu'il retombe sur ses pattes. De là le nom de Scarabées à ressort des anciens auteurs. Les noms vulgaires de Taupms, de Maré- chaux, proviennent du bruit sec que fait la base du corselet en choquant le plan d'appui. Les Élatériens sont de tous les pays, et l'on en compte, avec les sous-tribus annexes, plus de 3000 espèces, dont beaucoup ne sont pas décrites. Pour rendre les descriptions des genres plus méthodiques, nous éta- blirons trois familles dans la tribu des Élatériens : les Eucnémides, les Élatérides, le^ Cébrionides. I. — EUCNÉMIDES. Nous commencerons l'élude descriptive des Élatériens par le groupe des Eucnémides, établissant un passage avec les Buprestiens, et dont les auteurs modernes, dans la classification systématique, font une petite tribu distincte. Les Eucnémides ont le corps oblong ou subcylin- drique, quelquefois très-allongé; des antennes de onze articles, subfi- liformes, dentées ou pei'tinées, insérées assez loin des yeux sous un rebord du front; les pièces buccales très-réduites, un labre nul ou in- distinct presque toujours ; les mâchoires à deux petits lobes, avec palpes de quatre articles; une languette membraneuse, sans paraglosses, avec palpes labiaux de trois articles. Le prothorax a son articulation libre sur le mésothorax; le prosternum, presque toujours tronqué en avant, est dépouvu de mentonnière (excepté dans les genres Ceratogonys et Cerophytum). Il se termine postérieurement par une saillie plus ou moins forte, ayant au-dessus d'elle un petit prolongement ou épine du saut [muçro saltatorius de M. Schiodte), servant à régler le saut, presque toujours cachée, pour peu que le prôlhorax soit incliné, et pénétrant librement dans une cavité antérieure du mésosternum. L'abdomen offre en dessous cinq segments apparents dont le dernier est en général le plus o'rand. Les pattes, non fouisseuses, ont les tarses de cinq articles, et les hanches postérieures (sauf dans le genre Cerophijtum) sont pour- vues de lames bien plus développées que chez les Élatérides et recou- vrant les cuisses au repos. EUCNÊMIDES. — MELASIS. U99 Les Eucnémides ont lait l'objet d'une monographie importante de M. H. de Bonvouloir {Ann. Soc.entomol. de France, !x^ série, 1871, t. X, partie supplém.). Le catalogue Gemminger-Harold en compte plus de Zi60 espèces. On trouve chez eux le saut propre aux Élatériens, ce qui nous a en- gagé à les laisser dans cette tribu, mais avec une bien moindre éner- gie. M. de Bonvouloir pense qu'il n'y existe pas d'une manière générale. Les larves et les nymphes ne sont encore connues que dans très-peu d'espèces. Elles n'ont de général que leur tête très-petite, enchâssée dans le prothorax et cornée, et l'absence de pattes. On peut dire que par la forme, la consistance variable des téguments, elles offrent une série de passages entre celles des Buprestiens et celles des Élaté- riens propres. D'après M. E. Perris, et contrairement à l'opinion de M. Schiodte, elles sont essentiellement lignivores et creusent dans le bois des galeries pleines de la fine poussière résultant de la digestion des fibres ligneuses, ce qui ne veut pas dire qu'elles ne puissent acci- dentellement dévorer des larves d'autres espèces dont elles rencontrent les galeries. En l'état actuel des collections, le plus grand nombre des espèces proviennent d'Amérique, d'Australie et de l'archipel Indien ; l'Afrique ainsi que l'Europe n'en fournissent que la minorité. Les Eu- cnémides sont en général oblongs ou allongés, assez souvent cylin- droïdes, parfois conoïdes. Ils rappellent certains Buprestiens et surtout les Élatérides. La position verticale de leur tète, qui est assez enfoncée dans le prothorax, tandis qu'elle n'est que penchée chez les Élatérides, leur donne un aspect spécial qui permet de les reconnaître facilement. Leur taille arrive rarement à 30 millimètres, et reste en général assez petite ou moyenne. Leur couleur, le plus souvent assez sombre et uni- forme, devient quelquefois claire, et même s'accidente de dessins va- riés, mais elle ne prend que très-rarement les teintes métalliques. Les Eucnémides ne comptent que très-peu d'espèces en Europe, tou- jours rares, dans le bois mort des troncs d'arbres, sous les écorces, à l'entrée des galeries où les larves se sont métamorphosées, jamais sur les fleurs, parfois sur les feuilles, où l'on peut les récolter en fauchant ou en battant. Lacordaire suppose que la rareté de ces insectes dans les collections tient à ce que, peut-être, ils sont nocturnes : il est certain que la rareté de certaines espèces provient surtout de ce que nous ne connaissons pas suffisamment les localités, les mœurs, l'habitat. GENRES PRINCIPAUX. MEEiASiS, Oliv. — Tête verticale, très-enfoncée dans le prothorax ; épistome trapéziforme, continuant directement le front (caractère de la plupart des Eucné- mides). Corselet court, subcylindrique, graduellement rétréci en arrière, avec les anirles postérieurs aigus et saillants. Pattes robustes, larges, comprimées, surtout chez les mâles. 500 COLÉOPTÈRES. — ÉLATÉRlI■^S. Outre quatre espèces américaines, nous trouvons dans ce genre une espèce d'Europe, le M. buprestoïdes, Linn., nommé par Geoffroy le Richard noir chagriné, existant en Suède, en Angleterre, en France, en Allemagne, en Italie, en Sicile (pi. xxxii, fig. 7 ; 7 a, antenne du mâle). Il est noir, à élytres striées régulièrement, de taille moyenne, le mâle beaucoup plus petit que la femelle. La longueur varie en effet de 5 à 10 millimètres. On connaît sa larve, qui s'éloigne beaucoup de celle des Élatériens propres et ressemble à celle des Buprestiens ; elle est aveugle, apode, allongée et linéaire, sauf un brusque élargissement antérieur, assez molle et souple, en pilon aplati à peau fine et blanche, bien plus longue que ne sera l'adulte. Elle creuse dans le bois récemment mort du Châtaignier, du Bouleau et surtout de l'Aulne, des galeries perpendiculaires aux fibres, à parois nettes, et s'y retourne pour se changer en nymphe dans une partie de la galerie qu'elle arrondit. Ces galeries ont 5 millimètres de largeur sur un seulement de hauteur ; arrondies sur les côtés, elles ont les parois supérieure et inférieure planes et parallèles, et sont remplies de déjections ligneuses pulvérulentes, signe certain du régime de la larve. Les trous de sortie de Tadulfe sont ronds. La larve a la tête cornée et brune, très-encha- tonnée dans le prothorax, en losange transversal, munie antérieure- ment d'un bord arrondi, à quatre dentelures arquées en dehors, sorte de râteau qui doit aider la larve à. creuser la galerie par un mouvement horizontal de la tète. En dessous, et en partie cachées, sont deux man- dibules noires, robustes, cornées, profondément bidentées ; les autres pièces buccales sont soudées et très-réduites. Enfin, de chaque côté de la tète sont deux très-courtes antennes, rétractiles, de trois articles. La longueur du tube digestif n'est, comme chez les Élatérides, que celle du corps, et non pas près de trois fois, à la façon des larves de Bupres- tiens. Cette observation de M. Schiodte ne prouve rien au sujet du ré- gime, car les larves d'Élatérides sont, les unes carnassières, les autres rhizophages ou xylophages. On doit chercher l'adulte, qui n'est pas rare aux environs de Paris, dans le courant de juin, sur le Hêtre, le Saule, le Bouleau, l'Aulne et le Chêne. Il est déjà métamorphosé en hiver, et on le prend quelquefois à cette époque enfoncé très-profon- dément dans le bois. EUCU'EMlS, Ahreiis. — Corps oblong, médiocrement convexe supérieurement. Tête très-convexe en avant, assez profondément enfoncée dans le protliorax ; antennes un peu dentées intérieurement. Corselet graduellement rétréci en avant. Élytres graduellement rétrécies en arrière. Pattes courtes et assez grêles. Ce genre ne renferme qu'une seule espèce, de 5 à 7 millimètres, VE. capucina, Ahrens, d'un noir de poix, avec les appendices ferru- gineux. Elle est représentée pi. xxxui, fig. 1. Est répandue dans une EUCNÉMIDES. — PTEHOTARSUS, GABBA, CRYPTOSIOMA. 501 grande partie de l'Europe, car on l'indique de Suède, de Danemark, de Pologne, d'Autriche et d'Allemagne. On la recherchera en France d'avril à juin, selon les latitudes. M. G.-Méneville dit en avoir pris quatre ou cinq individus à Paris, au Champ de Mars même, sur le tronc d'un Orme. Les amateurs parisiens peuvent capturer cette espèce, rare pour leur faune, en visitant les troncs cariés des Ormes, des Chênes, des Hêtres, des Peupliers et des Tilleuls. L'insecte saute comme un véritable Élatéride, mais beaucoup moins. La larve de VE. capucina, longue de IZi à 15 millimètres, commence à se rapprocher par sa consistance de celles des Ellatérides. Elle est linéaire, subdéprimée, roussâtre, subcornée, glabre et assez luisante. La tête, très-plate, de couleur ferrugineuse, offre en avant un rebord ayant sept dentelures de chaque côté. Il n'y a pas d'ocelles. Le thorax est dépourvu de pattes, et le corps a douze segments, outre la tête, ayant la plupart du temps une petite aréole elliptique transversale. Us sont subégaux, sauf le segment anal, qui est élargi et orbiculaire, plus corné que les autres, muni d'une plaque veloutée et d'aspérités rousses. Cette larve vit de bois ramolli et a été trouvée entre les feuillets d'un Orme attaqué de pourriture sèche. Elle se meut au moyen du râteau céphalique et d'un grand nombre de plaques et de lisières veloutées des segments, qui sont des brosses de très-fines spinules serrées et in- clinées en arrière. La nymphe se forme là où vivait la larve, et porte quelques poils fins sur la tête, le thorax et les élytres. PTEROTAR§>r!S, Eschscli. — Écusson assez grand, oblong. Élytres acuminées au bout. Tarses munis de longues lamelles ; antennes fortement flabellées. Insectes ornés de couleurs vives, des régions chaudes de l'Amérique du Sud orientale. — Ex. : P. histrio, G.-Mén., du Brésil (pi. xxxiii, fig. 2; 2 a, antenne ; 2 6, tête et dessous du corselet). — Treize espèces. UAliBA, G.-Mén. — Caractères voisins des précédents. Espèces des îles malaises et mélanésiennes et de la Nouvelle-Calédo- nie, ornées de couleurs vives dues en partie à des poils soyeux à. reflets satinés. — Ex. : G. marmorata, G.-Mén., de la Nouvelle-Guinée (pi. xxxui, fig. 3, corselet vu en dessous ; 3 a, tarse antérieur; 3 6, antenne). CRVPTOSTO.UA, Latr., ou Ceratogonys, Perty. — Antennes longues, robustes, subgéiiiculées, h premiers articles carénés et dentés ; une mentonnière. Le type est le C. spinicorne, Fabr., qu'on trouve à la Guyane et au Brésil sur les feuilles dans les bois (pi. xxxm, fig. 9 ; 9 a, tarse anté- rieur). Espèces de la Guyane, du Brésil, delà Nouvelle-Grenade. 502 COLÉOPTÈRES. — ÉLAÏÉRIENS. iVElUATODES, Latr. — Élytres très-allongées, graduellement atténuées d'avant en arrière, peu convexes. Corps très-allongé, déprimé ; antennes filiformes. Le type est le N. filum, Fabr. (pi. xxxiii, fig. 11; 11 a, antenne grossie), noir, à pattes et antennes rougeâtres, du midi de la France, d'Autriche, d'Espagne, de Portugal. Les autres espèces de Russie, de Sumatra et des deux Amériques, surtout des régions chaudes. PHYI.I.OCERUIS, Lepell. et A. Serv. — Antennes dont les articles, à partir du quatrième, émettent de longs rameaux. Ex. : P. flavipennis , G.-Mén., de Dalmatie, d'Italie méridionale, de Sicile; assez rare. — PI. xxxm, fig. 16, antenne grossie. Nous signalerons quelques autres genres, à cause des métamorphoses partiellement connues. Un des genres d'Eucnémides les plus nombreux en espèces, des deux Amériques, d'Australie, de Madagascar, de l'archi- pel indien, le genre Fornax, Cast., a quelques larves connues. Elles ressemblent beaucoup à celle de VEucnemis capucina, sont roussâtres, subcornées et subdéprimées, sensiblement linéaires, avec plaques ve- loutées et aréoles elliptiques, et le dernier segment ponctué et muni d'aspérités; il n'y a que des différences légères dans les dentelures an- térieures de la tète. Le genre Xylobius, Latr., ne compte que deux espèces, toutes deux d'Europe, surtout des montagnes, le X. Alni, Latr., et leX humeralis, L. Dufour. La larve de ce dernier, longue de 8 à 10 millimètres, d'un blanc roussâtre, est linéaire, subdéprimée et sub- cornée. Le râteau céphalique a quatre dents de chaque côté. Le corps apode offre douze segments subégaux, outre la tête, munis d'aréoles elliptiques rousses, le dernier segment rétréci, villeux, et ayant en dessous une dépression couverte d'aspérités rousses. Elle vit dans les Sapins pourris des forêts des Pyrénées, la femelle pondant ses œufs sur les Sapins debout ou abattus, morts depuis longtemps, dont le bois est ramolli et décomposé par les intempéries. Les larves creusent des galeries transversales cylindriques, et se nymphosent à leur extrémité un peu élargie. Leur régime est inconnu. Entre ces larves, affiliées de près à celles des Élatérides, et la larve du Melasis, qui est du type Bupreste, se place intermédiairement u^ie larve des plus curieuses, où M. E. Perris a découvert une hyper- métamorphose. Elle appartient au Farsus, Jacq. du Val, unicolor, Latr., Eucnémide de la France méridionale et de l'Italie. Elle est lignivore, et creuse des galeries cylindriques, perpendiculaires aux fibres du bois, dans les vieux troncs de Chêne ramollis par la carie. Sous sa pre- mière forme, cette larve atteignant? millimètres, est elliptique, très- ventrue, apode, d'un blanc presque mat, charnue, assez ferme, parfaite- ment glabre et lisse, même au microscope. Sa tiHe est très-petite, sub- CEROPHYTUM. — ÉLATÉRIDES. 503 convexe et blanche comme le reste du corps, avec les pièces buccales rudimentaires. Les segmenis du corps, au nombre de douze, sont très- inégaux et bien plus bombés et boursouflés du côté ventral que de l'autre. Us portent au milieu, en dessus et en dessous, une petite aréole roussâlre et elliptique. Après la mue, cette larve se modifie tellement, qu'on croirait avoir aflaire à un insecte d'un tout autre groupe. Elle reste, comme la pré- cédente, apode, de douze segments outre la tête, garde les mêmes stig- mates et les mêmes aréoles elliptiques, sauf sur les deux segments ex- trêmes ; mais la taille s'est accrue de 10 à 11 millimètres, à peu près celle de l'adulte, avec beaucoup de sujets bien plus petits; la forme est devenue allongée, presque cylindrique, un peu rétrécie antérieurement et surtout postérieurement, d'une manière graduelle. Le corps s'est cou- vert de très-fines spinules inclinées en arrière, et la tête de la première larve, charnue et peu apparente, s'est changée en un prisme ou groin ferrugineux, découpé antérieurement en six dentelures. Cette seconde larve devient uae nymphe nue, sans coque, dont la taille diffère de 10 à 3 millimètres, portant quelques poils fins. L'insecte adulte sort du bois par un trou circulaire, et saute faiblement à la façon élatérienne j sa taille varie de 10 millimètres à 2'"™, 50. CEROPHYTliM, Lalr. — Front forlement gibbeux en avant; antennes insérées sur cette gibbosilé, tiès-rapprochées à leur base, munies en dedans chez les mâles, à partir du troisième article, d'un long rameau clavifornie, obtusément dentées chez les femelles. Proslernum prolongé en avant en mentonnière. Hanches postérieures enfouies dans leurs cavités cotyloïdes, sans aucune lame supérieure. Corps oblong, subconvexe. Les caractères anomaux de ce genre avaient décidé Lacordaire à en faire une petite famille, celle des Cérophytides. Les espèces sont des deux Amériques, et le type de France, d'Allemagne, d'Italie, se prend au printemps en battant les Saules marsaults, et aussi sur les Peupliers. C'est le C. elateroides, Latr., noir, assez petit (pi. xxxni, fig. 6, mâle ; 6a, palpe maxillaire; 6 6, tarse antérieur). Cet insecte se trouve aux environs de Paris, mais rare, dans les arbres ou sur les troncs. On a signalé dans une espèce de l'Amérique du Nord un mode de saut autre que celui des Élatérides propres. C'est en rapprochant du prothorax les pattes antérieures, puis les débandant d'une manière subite, qu'elle serait lancée à une plus ou moins grande hauteur. IL — ÉLATÉRIDES. Les genres qui suivent constituent le groupe des Élatérides ou Éla- tériens proprement dits. Ils ont les antennes insérées près des yeux, un 50^ COLÉOPTÈRES. — ÉLA.TÉRIENS. labre distinct et variable, la saillie prosternale postérieure, avec un mucro saltatorius nul ou rudimen taire, bien mobile dans la cavité du mésosternum, de sorte que le saut, dont nous avons décrit le méca- nisme, est plus développé que chez les Eucnémides, et que la plus grande partie des genres présenlent la faculté saltatoire dont toute la tribu tire son nom. Presque toujours une mentonnière prosternale en avant, des pattes linéaires, à petits éperons, non fouisseuses. A ces caractères se joignent ceux-ci : Tête le plus souvent inclinée, plus rarement verticale ; mâchoires à deux lobes ciliés avec palpes de quatre articles; languette en général saillante, avec palpes de trois ar- ticles, sans paraglosse ; antennes de onze articles (douze chez quelques exotiques), plus ou moins dentées en scie intérieurement ou môme pectinées, insérées près du bord antérieur des yeux. Prothorax à arti- culation libre en dessous contre le mésothorax, souvent prolongé aux angles postérieurs. Corps en général plus ou moins allongé, plus ou moins aplati en dessus et subcaréné en dessous, ovalaire ou subcylin- drique. Écusson ovale et médiocre. Élytres do la largeur du corselet en avant ou un peu plus étroites, généralement très-allongées et plus ou moins rétrécies en arrière, à extrémité fréquemment spiniforme, plus rarement échancrée. Abdomen offrant inférieurement cinq seg- ments apparents distincts ; hanches antérieures en général globuleuses, sans trochantins apparents. Tarses de cinq articles. Le système nerveux des Élatériens est très-allongé, les noyaux du thorax et de l'abdomen étant irès-espacés,avec trois centres distincts dans le thorax. Il établit une grande différence entre cette tribu et celle des Buprestiens, et la distinction se complète par la forme des larves et leur structure. Les Élatérides ont été étudiés dans un ouvrage important de M. Can- dèze [Monogr. des Élatérides, /i vol., 1857 à 1860, extrait des Mém. de la Soc. royale de Liège). Leur forme est caractéristique, par l'élargissement du corselet, puis par le corps atténué graduellement en arrière; parfois ils sont étroits et linéaires. Leur taille est très-variable, de 70 à 80 millimètres {Tetra- lobus flabellicornis) à 2 à 3 millimètres seulement. Leurs téguments sont assez durs, sauf chez quelques Campijlus, où ils restent mous et flexibles à la façon des Malacodermes. Ils oifrent le plus souvent des couleurs uniformes et sombres, voilées en partie par des poils cou- chés, gris ou jaunâtres, ou par des écailles; certains ont des couleurs vives et tranchées, les unes pour le corselet, les autres pour les élytres, ou métalliques comme les Buprestes. Les Élatérides adultes sont herbivores, au moins pour l'immense majorité ; peut-être les Cryptohypnus, insectes ripicoles qu'on trouve souvent dans des lieux sans végétaux, sont-ils carnassiers. Beaucoup sont diurnes et se tiennent en général sur les feuilles et aussi sur les fleurs, parfois sous les écorces, ou entre leurs fissures, où ils boivent la /•LATÉRIOl-S. 505 séve, dans les troncs, sous les pierres. Lorsqu'on veut les saisir, ils se laissent tomber en contractant leurs pattes sous le ventre, et si, par cette chute, se trouvent placés sur le dos, ne tardent pas, dès qu'ils sont un peu rassurés, à faire usage de leur faculté de sauter. Ils ne volent guère qu'à l'ardeur du soleil, d'un vol assez facile, mais dont l'essor n'est pas immédiat. Il est certaines espèces de divers genres, même dans notre pays, qui sont crépusculaires ou nocturnes, et en . mérique ce n'est qu'à l'entrée de la nuit que les Pyrophores se met- tent en mouvement, et tracent dans l'air, entre les arbres, des giran- doles de lumière. Les larves des Élatérides les distinguent bien nettement de celles des Buprestiens, et môme des Eucnémides. Elles sont munies de pattes allongées, revêtues d'écussons cornés sur les segments qui suivent la tête, tantôt grêles et subcylindriques {Elater, Agrrotes, etc.), tantôt déprimées, mais sans renflements {Agrypnus, Athoiis, etc.), avec de rares poils roides entre les anneaux. La dureté de la peau et leur aspect les ont fait nommer par les Anglais et les Allemands Vers fils de fer. Leur forme extérieure établit un vague rapport avec les larves des Mélasomes et des Ténébrions (l'ers de farine), mais elles s'en distinguent par la lête, les pièces buccales, les pattes, non moins que les adultes par leur forme et leur structure; ce qui est le cas habituel des familles naturelles où la séparation typique se montre aux divers états de déve- loppement. D'après M. Candèze, le caractère général qui sépare essen- tiellement ces larves de celles des autres Sternoxes consiste en ce que les mâchoires et le menton, plus ou moins allongés et logés dans une profonde échancrure de la face inférieure de la tête, sont soudés entre eux dans toute leur longueur, et ne forment plus ainsi qu'une seule pièce, présentant sur sa face externe deux sutures longitudinales. La mâchoire offre un lobe externe à deux palpes, comme chez les larves de Carabus. Les organes buccaux offrent d'incontestables analogies avec les larves des Carabiens dont les rapproche le régime habituel, et chez les larves déprimées d'Élatériens l'aspect général est le même. L'épistome et le labre sont soudés, ainsi que le menton et les mâchoires ; les palpes maxillaires ont quatre articles ; les mandibules sont arquées et acérées, quoique moins que dans les larves de Carabiens. La tête aplatie porte de courtes antennes. Les segments du thorax ne diffèrent pas en longueur et en largeur des segments de l'abdomen, sauf le prothorax, qui est un peu plus long; ils portent des pattes courtes, épaisses et robustes. Les stigmates sont comme à l'ordinaire. Elles se divisent en deux catégories, suivant que le dernier segment abdominal, qui porte l'anus, est divisé en deux saillies cornée?, {Agrypnus, Lacon, Alaus, etc.), ou qu'il reste inerme et entier {Elater, Ludius, Agriotes). Le régime des larves des Élatérides est varié. La plupart sont carnas- sières. L. Dufour, M. Ratzeburg, les ont vues dévorer diverses larves, et 506 COLÉOPTÈRES. — ÉLATÉRJENS. mùme des larves de leur propre espèce. M. E. Perris a nourri en partie les larves des Élatérides du Pin maritime, qu'il élevait en captivité pour les étudier, avec des larves de Longicornes. Outre les proies vi- vantes, elles se repaissent aussi de matières animalisées, excréments et dépouilles, qu'elles trouvent en abondance dans les vermoulures des végétaux altérés où elles serpentent. On les élève bien avec de la ver- moulure de troncs cariés dans laquelle on intercale quelques larves. Il en est certaines, au contraire, qui semblent essentiellement phyto- phages, par un renversement de régime dont les Carabiens et les Syl- phiens nous ont déjà offert des exemples {Zabrus, Amara, Silpha obscura, etc.). Les larves des divers Agriotes dévorent les racines des céréales, les légumes des jardins, les fourrages-racines, et spécialement l'espèce Agriotes Uneatas ou segetis. Le mieux, pour les détruire, est d'opérer une alternance de culture amenant une plante que l'insecte ne mange pas et qui produit sa mort par famine, car ces espèces voyagent peu et restent cantonnées là où elles naissent ; malheureuse- ment VAgi-iûtes lineatus ou segetis s'attaque à beaucoup de plantes diffé- rentes. La larve du Lacon murinus dévaste les racines des arbustes et des arbres à fruits. Peut-être certaines larves d'Élatériens qu'on trouve dans des bulbes, dans des racines de céréales, n'y sont-elles en réalité qu'à la chasse de larves de Diptères phytophages. De grandes incerti- tudes régnent encore sur la durée de la vie des larves des Élatériens. Dans les circonstances ordinaires, croit M. Perris, pour les larves de notre pays, elles accomplissent leurs phases en deux ans. On peut s'étonner comment des insectes larges comme les Élatériens sortent de larves eftilées qu'ils excèdent tant de fois en grosseur. La larve parvenue à son terme s'enferme dans une cellule façonnée avec les matières où elle a vécu ou la terre qui entoure les racines; bientôt elle devient immobile, se raccourcit et se dilate au milieu, et prend peu à peu une forme ellipsoïdale, avec les flancs très-bombés et large- ment blanchâtres. Puis la peau se fend sur le thorax et sur une partie de l'abdomen, la nymphe paraît, et en quelques instants refoule son maillot à l'extrémité du corps. Cette nymphe, contrairement à celle des Buprestiens, est mobile, et, à l'aide des épines de son dernier segment et des ondulations de son corps, peut facilement se retourner dans sa cellule. GENRES PRINCIPAUX. AOELOCERA, Latr. — Corselet en général plus long que large, sillonné et bossue, à angles postérieurs médiocres et divergents. Elytres allongées, dépri- mées. Antennes courtes, peu robustes, reçues au repos dans des sillons pro- sternaux profonds. Les Adélocères sont de taille moyenne, revêtus de poils squameux ou d'écaillés formant des marbrures sur une livrée sombre. Ils sont de ÉLATÉRIDES. — LACON. 507 toutes les régions, sauf de l'Afrique propre et l'Australie; vivent sous les écorces, dans le bois en décomposition, parfois sous les pierres. — Ex. : ^. Chabannei, G.-Mén., de l'intérieur du Brésil. — PI. xxxiii, fig. /i; U a, tête et corselet vus en dessous. LACOJV, Lap. de Cast. — Caractères analogues, avec forme élargie et courte. Antennes reçues inférieurement-, au repos, dans des sillons prosternaux profonds. Le genre Lacan, comprenant plus de cent espèces absolument de tous pays, n'en a que trois en Europe, et encore deux sont plus réellement caucasiennes. Le type est le L. murinus, Linn., de 16 millimètres de long sur 5 de large, d'un brun noirâtre, recouvert de poils courts, serrés et couchés, de deux couleurs, blanchâtres et bruns, formant en dessus et en dessous des nébulosités marbrées. Les élytres sont con- vexes, à fines stries ponctuées visibles sous les poils. On trouve l'adulte très-communément sur les feuilles et les gazons dans toute l'Europe, dans le Caucase, en Sibérie. La larve est très-nuisible aux racines des arbres fruitiers et arbrisseaux. M. Westwood dit qu'elle se plaît dans la mousse. Il l'a figurée et décrite [Introd. tothe modem classif. of Insects, 1839, l, 233); elle a aussi été figurée par M. E. Blanchard (Règne anim. de Cuv., Insectes, pi. 15, fig. 7, la, 18/i5). Dans un genre voisin, Agrypnus, Esch., nous devons mentionner 1'^. carhonarius, Oliv., ou atomarius, Fabr., Élatérien abondamment répandu en Europe et en Algérie. Sa larve a été étudiée et représentée par M. Lucas {Ann. Soc. entomol. de France, 1852). Elle est longue de 28 millimètres environ, à tête et prothorax d'un brun marron brillant, le reste du corps d'un testacé luisant, ainsi que les pattes courtes et robustes. La région postérieure de la larve est fort remarquable. Le dernier segment, allongé et très-étroit, est terminé par une plaque cornée, relevée, en forme de fer à cheval, avec la partie postérieure profondément échancrée; elle est armée de longs poils et de robustes épines; l'anus s'ouvre au bout d'un pseudopode allongé, muni de deux forts crochets. Cette conformation est en rapport avec le mode d'existence de cette larve, qui vit dans le bois mort des Pins presque réduit en poussière, et se plaît dans les sillons creusés par d'autres larves, notamment celles du Buprestis Mariana. Elle remonte très-rapidement ces sillons. Pour cela, elle s'accroche d'abord avec ses pattes et ses mandibules; puis, courbant son corps en arc de cercle, elle cherche un point d'appui, soit avec la plaque épineuse du dernier segment, soit avec les crochets du tube anal. Elle lâche alors la place où tenaient ses organes anté- rieurs et les projette plus loin en avant, puis s'appuie de nouveau sur la région postérieure, etc., et cela avec promptitude. Les adultes se rassemblent au nombre de douze à quinze, pressés les uns contre les 508 COLÉOPTÈRES — l-LVfÉRIENS. autres sur l'aubier, et se laissent tomber les uns après les autres, si l'on cherche à saisir l'un d'eux. TETR/tliOBUii, Serv. et Lepell. — Antennes dont les articles émettent, à partir du quatrième, de très-longs et larges rameaux chez les mâles, et sont simple- ment dentés chez les femelles. Ce beau genre se compose de grandes espèces de l'Afrique australe et de la Nouvelle-Hollande, pouvant atteindre près d'un décimètre de long, jamais métalliques, noirs ou d'un brun rougeâtre, avec une fine pubescence cendrée ou fauve. — Ex. : T. flabellicornis, Linn., de toute la côte occidentale d'Afrique, aussi de la Cafrerie et du cap de Bonne- Espérance. — PI. xxxiii, flg. 12, fête et antennes du mâle. LOBODKRlJj^, G.-Mén. — Tête petite, à front arrondi et caréné en avant. Cor- selet transversal, arrondi sur les côtés, à angles postérieurs arrondis, non saillants. Ce genre est fondé sur une seule espèce, un rare insecte de la pro- vince de Saint-Paul, au Brésil, le L. appendiculatus, Perty (pi. xxxni, fig. 10, tête et corselet vus en dessous et grossis). Il est d'un brun rou- geâtre, à élytres striées et couvert d'une pubescence jaunâtre. La figure est d'une femelle. ATHOUS, Eschsch. — Antennes point ou très-incomplétement reçues dans des sillons prôsternaux (ce caractère se retrouve dans les genres suivants). Corselet à angles postérieurs courts et robustes. Corps allongé, plus large et plus con- vexe chez les femelles. Ces insectes sont riches en espèces, plus de cent. Elles sont pour la plupart de livrée uniforme, finement pubescentes, quelques-unes avec bandes flexueuses sur les élytres. On trouve sur les montagnes l'A. rufus, de Geer, long de 25 à 30 millimètres, sur 6 à 8 de large, un des plus grands Élatérides d'Europe, rare, d'un rouge ferrugineux assez luisant, crépusculaire, dormant le jour sur les troncs ; et partout l'A. niger, Linn., ou hirtus, Herbst, d'un noir brillant, à pubescence grise, peut-être le Taupin en deuil, n° 13, de Geoffroy; et surtout, très-commu- nément, A. hœmorrhoidalis, Fabr., de 10 à 12 millimètres, allongé, assez convexe, d'un brun foncé, ou d'autres fois d'un rouge brunâtre, couvert d'une pubescence grisâtre, et il. iJîftofMS, Fabr., à peu près de môme taille, variant beaucoup, subparallèle, peu convexe, brun, à corselet bordé de roussâlre, à élytres roussâtres, avec une bande suturale et une bande externe d'un brun noirâtre. On rencontre encore aux envi- rons de Paris l'A. longicoUis, Oliv., à corselet fauve, à élytres testacées, vivant sur les Graminées. Les Athous se prennent sur les plantes. Les emelles diffèrent assez fortement des mâles, sont plus grandes, plus ÉLATÉRIDliS. — PACHYDERES, ELATER. 509 larges et plus bombées, à téguments plus luisants et ordinairement d'une teinte plus claire. Les espèces de ce genre sont de diverses régions de l'Europe, de l'Amérique russe, de toute l'Amérique septentrionale, de Sibérie, du Japon, deCeylan. PACHYDEREi^, Latr. — Corselet de forme exagérée, plus large que les élytres, à angles postérieurs très-grands, divergents et carénés. Nous représentons le mâle d'une rare espèce des îles de la Sonde, à corselet rouge, écarlate sauf aux angles postérieurs, à antennes et pattes noires, à élytres noires, parfois rouges. C'est le P. nificollis, G.- Mén. (pi. XXXIII, fîg. 5; 5 a, tâte vue en dessous ; 5 b, palpe maxillaire ; 5c, tarse antérieur; 5d, antenne). — Quatre espèces indo-sondaïques. EliATER, Linn. — Genre très-difficile à spécifier, ayant les élytres en entier ou en partie d'un beau rouge sanguin ou jaunâtres; écusson ovalaire. Les noms spécifiques désignent eu général cette particularité : ainsi, dans ceux répandus par toute l'Europe, E. sanguineus, Linn., sanguino- lentus, Schrank, crocatus, Stepli., prœustus, Fabr., lytropterus, Germ., cinnaberinus, Eschsch., etc. L'E sanguineus, de 12 à 17 millimètres de long, est un bel insecte noir brillant, à poils noirs, avec les élytres d'un beau rouge de cinnabre clair. C'est le Taupin à étuis rouges, n° 2, de Geoffroy, répandu dans toute l'Europe, le nord de l'Afrique, et jusque dans les régions occidentales de l'Asie, vivant -a' l'intérieur des Saules. V E . sanguinolentus a une tache noire fusiforme sur la suture de ses élytres rouges ; il est un peu plus petit, se rencontre aussi dans les Saules, et n'est peut-être qu'une variété du précédent. h'E. cinnaberinus a une pubescence d'un fauve doré, vivant dans le Hêtre. Enfin VE. prœustus, surtout du nord de la France et de l'Allemague, a les élytres rouges avec le bout noir. Les Élatères se trouvent surtout dans les vieux troncs et sous les écorces des arbres morts, parfois sous les pierres. Ils sont en général d'une taille un peu au-dessous de la moyenne, noirs ou parés de cou- leurs vives variant entre le rouge et le jaune, sans reflet métallique, d'aspect souvent mat ou médiocrement luisants, toujours pubescents. Les régions froides et tempérées des deux continents sont surtout leur patrie; on en cite aussi du Japon, d'Australie, de Patagonie, des Indes orientales, de la Nouvelle-Calédonie et de Taïti. Nous ferons cette re- marque que les E. sanguineus et crucatus, et probablement d'autres, restent endormis pendant le jour, ne s'éveillant et ne s'agitant que le soir. 510 COLÉOPTÈRES. — I L^TÉRIliNS. CIUDIORHIMUiS, Eschscholtz. — Corselet plus long que large, à angles posté- rieurs robustes, carénés, divergents. Antennes grêles. Elytres allongées, gra- duellement et fortement rétrécies en arrière. Labre grand, sillonné, paraissant bilobé. Les insectes de ce genre sont sveltes^ finement pubescents, rà élytres striées, noirs avec les bords du corselet rouges ou fauves, et des bandes longitudinales d'un jaune fauve sur les élytres. Us abondent dans les régions chaudes de l'Amérique du Sud, et y caractérisent la faune des Élatérides, surfout au Brésil ; ils vivent sur les plantes basses. — Ex. : C. plagiatus, Germar, du Brésil (pi. xxxiii, fig, IZi; l/i a, antenne). Les taches ou bandes jaunes ou rouges peuvent prendre la couleur noire du fond, et vice versa. PYROPHORUS, Illig. — Tète carrée et excavée. Yeux très-gros. Corselet en général transversal et convexe, à angles postérieurs robustes et carénés, pré- sentant le plus souvent à leur base une vésicule phosphorescente (qui manque dans quelques espèces). Tarses filiformes, comprimés. L'intérêt considérable qui s'attache à ces insectes est expliqué par leur nom vulgaire de Taupins lumineux. La sécrétion phosphorescente est plus intense que celle des Lampyres et son siège est différent. Quoiqu'il n'y ait pas eu sur ces insectes d'expérience directe, comme sur les Lampyres européens, nul doute qu'elle ne soit due à la combus- tion lente d'une matière carburée. Chez les grandes espèces, la lueur est aussi intense que celle d'une petite chandelle, et permet de lire à distance. Les Pyrophores sont exclusivement propres à l'Amérique, et l'on en compte quatre-vingts espèces répandues depuis les parties méridionales des États-Unis, existant dans les Antilles, abondantes sur- tout dans les régions chaudes de l'Amérique du Sud, et s'étendant jus- qu'à la confédération Argentine et le Chili. Sauf un petit nombre d'es- pèces, comme les P. forniosus, Germ., du Brésil, cAncticollis, Germ., du môme pays, les insectes de ce genre sont peu brillants, leur teinte variant du brun noir au rougeâtre testacé. Leur taille est grande ou moyenne. Les vésicules phosphorescentes du corselet manquent chez quelques espèces, qui se rattachent au genre par le reste des caractères. Quelques espèces, sinon toutes, outre ces vésicules, principal organe lumineux, possèdent encore un troisième foyer lucifère sur la face in- férieure du corps, à l'union du mésothorax avec le métathorax. D'après M. Candèze, les Pyrophores à très-gros yeux sont les mâles d'espèces où les femelles ont la tête normale. Les Pyrophores des Antilles sont, en général, reconnaissables à leur taille plus svelle que les espèces du continent. Ils ne volent guère que la nuit, et, paraît-il, très-rapidement. Lejour, ils se tiennent cachés sous les feuilles et au pied des arbres. Comme chez les Lampyres, l'éclat phosphorescent est un appel à la ÉLATÉRIDES. — PYROPHORUS. 511 recherche des sexes, car les Indiens, au milieu des i'orèls qu'ils font étinceler sous leurs flammes animées, les attirent en balançant en l'air un charbon incandescent attaché au bout d'un bâton. Ils s'en servent pour s'éclairer dans leurs marches nocturnes, en les attachant sur leurs orteils. On rapporte que, lors de la conquête espagnole, une troupe nouvellement débarquée et en hostilité avec les aventuriers déjà établis dans le pays, crut voir dans les Pyrophores brillants à travers le feuil- lage les mèches d'arquebuses d'une nombreuse cohorte prête à faire feu, et n'osa engager le combat. Dans les Mémoires de l'ancienne Académie des sciences, 1766, nous trouvons une notice détaillée sur un de ces insectes, qui causa une vive frayeur dans le faubourg Saint-Antoine, en parcourant pendant la nuit un atelier, et projetant une lueur qu'on attribuait à quelque revenant : il sortait d'un morceau de bois des Iles, car les larves de ces insectes vivent dans le bois. Les Pyrophores, et surtout ceux de l'espèce commune, P. noctilucus, Linn., de la Guyane, du Brésil, de la Guadeloupe, sont nommés Cucujos dans l'Amérique espagnole, et sont employés pour la parure comme des bijoux vivants, bien autrement éclatants que les gemmes du plus grand prix. Les femmes indigènes en forment des colliers de feu et des pen- dants d'oreilles. Les dames les introduisent le soir dans des petits sacs de tulle léger qu'on dispose avec goût sur les jupes. 11 en est d'autres à qui on passe, sans les blesser, une aiguille entre la tête et le corselet, et on la pique ensuite dans les cheveux pour maintenir la mantille, en les entourant de plumes d'oiseaux-mouches et de diamants, ce qui pro- duit une éblouissante coiffure. On transporte pour cet usage les Cucujos, contenus dans de petites cages, dans des régions plus septentrionales que celles où ils vivent librement. Ils servent de jouets aux dames créoles de la Havane. Souvent, par un charmant caprice, elles les placent dans les plis de leur blanche robe de mousseline qui semble alors réfléchir les rayons argentés de la lune, ou bien elles les fixent dans leurs beaux cheveux noirs. Cette coiffure originale a un éclat magique, qui s'harmonise parfaitement avec le genre de beauté de ces pâles et brunes Espagnoles. Une séance de quelques heures passée de la sorte fatigue ces pauvres insectes, ce qu'atteste la diminution ou la disparition passagère de leur lueur. On les secoue, on les irrite pour la ramener. C'est le fait général chez les animaux phosphorescents, que la sécrétion de matière combustible est liée aux mêmes causes que celles qui produisent la contraction musculaire. Au retour de la soirée où ils ont fait valoir ses charmes, la maîtresse prend grand soin de ses Cucu- jos, car ils sont extrêmement délicats. Elle les jette d'abord dans un vase d'eau pour les rafraîchir, précaution indispensable si Ion veut les garder vivants en captivité, car ces bains d'eau fraîche remplacent pour eux les rosées du soir et du matin. Puis elle les place dans une petite cage de fils de métal où ils passent la nuit à jouer et à sucer des morceaux de canne à sucre, brillant alors constamment pendant tout 512 COLÉOPTÈRES. — ÉLATÉRIENS. le temps qu'ils s'agitent, de sorte que la cage, comme une veilleuse vivante, répand une douce clarté dans la chambre. Des Pyrophores au fin pelage cendré, P. strabus, Germar, furent rapportés vivants du Mexique, et remis au Muséum par la commission scientifique envoyée dans ce pays lors de l'expédition française. M. E. Blanchard réussit à en conserver des sujets vivants pendant plusieurs mois. Leur lumière était verdâtre, comme celle des lanternes de certaines voitures pu- bliques, et, outre les deux taches ovalaires du corselet, apparaissait aussi entre les anneaux de l'abdomen. PHOTOPHORlIN, Candèze. — Caractères analogues à ceux des Pyrophorus. Mésosternum autrement conformé. Tarses à articles 2, 3, 4, courts, dilatés en cupule au-dessous. Ce genre représente les Pyrophores dans la Polynésie. F-a phospho- rescence dépend des mômes organes. Il compte trois espèces des Nou- velles-Hébrides, des îles Viti, de l'île Lifu. CORYMBITES, Latr. — Antennes dentées à partir du troisième article, ou même flabellées chez les mâles. Elytres variables. Pas de carène frontale, ce qui les sépare des Athous. Ce genre est très-nombreux en espèces, plus de cent soixante, de tous les pays, principalement des régions tempérées et froides de l'hémi- sphère boréal, des deux continents, avec très-peu d'espèces intertro- picales. On trouve ces insectes sur les fleurs, sur les feuilles des plantes basses, et de préférence sur les Graminées; aussi certaines espèces sont très-nuisibles. Ils sont presque tous de taille moyenne, à téguments pubescents ou glabres, généralement brillants, ornés de couleurs va- riées, quelquefois tachetés, offrant souvent le reflet métallique, comme l'indiquent certains noms spécifiques : ainsi C. œneus, Linn., C. cupreus, Fabr., C. virens, Schrank, etc. Il y a des espèces où les antennes sont simplement en scie dans les deux sexes. On trouve communément par- tout, surtout dans les endroits humides, le C. tessellatus, Linn., de 13 à 15 millimètres, d'un bronzé brunâtre, à peine cuivreux, avec poils bruns mêlés de poils gris en taches arrondies; le C. latus, Fabr., de 11 à 15 millimètres, épais, élargi, d'un bronzé verdâtre ou brunâtre, avec pubescence grise, très-commun dans les blés et très-nuisible, de l'Europe centrale, du Caucase, de la Sibérie. Une belle et rare espèce de ce groupe, ù rechercher à Fontainebleau, est le C. cruciaius, Linn. , de 12 millimètres, noir, avec deux bandes rougeâtres au corselet, les élytres jaunes et noires crucialement. Dans un autre groupe les an- tennes sont longuement pectinées chez les mâles et fortement dentées chez les femelles. On trouve près de Paris le C. pectinicornis, Linn., d'un vert bronzé cuivreux, à pubescence grisâtre, de 12 à 15 millim., ÉLATÉRIi.ES. — AGRIOTES. 513 à antennes noires, le Taupin brun cuivreux de Geofl'roy ; le C. castaneus, Linn., de 10 cà 12 millimètres, à longs poils d'un jaune doré, à élytres d'un beau jaune^, un peu noires au bout, le Taupin à corselet velouté de Geofl'roy. Citons enfin le C. purpureus, Poda^ ou hœmatodes, Fabr,, de 11 à 13 millimètres, noir, avec corselet brun et les élytres d'un beau rouge de sang, couvert de poils rouges donnant des reflets (pi. xxxin, fig. 13, antenne du mCile), de France et d'Allemagne méridionale, d'Ita- lie, s'étendant en Orient jusqu'à l'Himalaya. AGRIOTES, Eschscli. — Front coupé carrément, rétréci par les cavités anten- naires. Corselet convexe, à carènes latérales fléchies, à angles postérieurs peu prononcés. Élytres allongées et rétrécies en arrière. Ce genre, de l'hémisphère boréal des deux continents, compte en Europe de nombreuses espèces, peu distinctes, brunes ou obscures, va- riant du noir au brun rougeâtre, ou testacé, qu'on trouve sur les plantes et sous les pierres. Les larves de certaines d'entre elles sont très-nui- sibles à diverses cultures, au point d'exiger parfois une alternance de plantes qu'elles ne mangent pas. Quelques espèces d'Agriotes, toutes d'un aspect gris jaunâtre ou brunâtre, ont des larves qui dévorent, surtout aux racines, les légumes de jardins, salades, etc., les fourrages- racines, et principalement les céréales. M. E. Perris dit avoir souvent trouvé des larves d'Agriotes en fouillant à la racine de très-jeunes pieds de MaïS;, qui se flétrissaient peu de jours après leur apparition (1), et qu'on nourrit très-bien en les enfermant dans un bocal avec des grains de maïs qu'elles perforent. J'ai vu, au village de Chevry-Cossigny (Seine-et-Marne), une prairie qu'on tentait de convertir en jardin maraîcher, et où la récolle de légumes fut presque perdue la première année, parce que le terrain était infecté de larves d'Agriotes. Il est im- portant de se tenir en garde, par des fouillés préalables, contre les mécomptes de ce genre. D'après Bjerkander, les larves de VAyriotes lineatus ou segetis se nourrissent de racines de Blé, d'Avoine, d'Orge, etc.; d'après lui, elles vivent cinq ans avant de parvenir à la forme adulte : aussi leurs dégâts sont considérables, au point d'obliger parfois à faire de nouvelles semailles. Elles dévorent aussi l'intérieur des Laitues, les racines des Choux, des Iris, des Lobelia, etc., la partie centrale des navets, l'intérieur des carottes et des pommes de terre. On a proposé de placer des laitues ou des tranches de pommes de terre comme pièges destinés à attirer ces funestes larves. M. E. Blanchard a figuré et décrit cette larve {Ann. de l'agric. française, 4"= série, 18/i7, I, 218), et a fait connaître ses ravages en Italie, en Angleterre, en Suède, mais sans indiquer les moyens de la détruire. Il fait remarquer avec raison que (1) E. Perris, Sur ks mœurs, carnassières et phytophages, des larves des Éla- térides {Ann. Soc. entomoL de France^ 185/1, p. 151). GIRARD. 33 514 COLÉOPTÈRES. — ÉLATÉRIENS. ces moyens doivent ressortir, ce qui est général pour les insectes nui- sibles, de l'élude approfondie et complète de l'espèce, et résulteront de la connaissance exacte de l'époque de la ponte de l'adulte et de la partie du végétal où les œufs sont déposés. La larve de 1'^. lineaius chemine assez rapidement par une sorte de glissement, la partie posté- rieure de son corps se recourbant en S sur un côté. Les Taupes détrui- sent des quantités considérables de ces larves, et les Faisans, qui en sont avides, contribuent aussi à nous en débarrasser. Parmi les espèces très-communes et dévastatrices, nous citerons : VA. lineatus, Linn., ou segetis, Bjerkander, ou striatus, Fabr., ayant de 8 à. 10 millimètres, à élj'lres paraissant rayées, oblong, d'un brun plus ou moins clair, à pubescence grise ; VA. sputator, Linn., plus petit, brun, à pubescence grise, à élytres rougeâtres ou jaunâtres, avec des variétés noires : ces deux espèces très-abondantes dans toute l'Europe, le nord de l'Afrique, l'Asie Mineure, la Sibérie. L'A. ustulatus, Schaller, ou gilvellus, Lacord., oblong, plus grand, plus parallèle et moins bombé que le sputator, noi- râtre, à élytres testacées en totalité ou en partie, dont l'adulte fré- quente les fleurs des Ombellifères ; VA. galUcus, Lacord., assez commun dans les bois près de Paris, de 6 à 8 millimètres, étroit et allongé, parallèle, noir ou brun ou testacé : les larves de ces deux espèces nui- sent aux Graminées, et sont citées par M. Dagonet comme ayant ravagé des champs de Froment (Ann. Soc. d'agric. de la Marne, lSài).h'A. oh- scurus, Linn., ou variabilis, Fabr., noirâtre, presque mat, à forte pu- bescence grise, très-commun dans toute l'Europe et en Sibérie, se trouvant sur le sol, et, surtout pendant le jour, caché sous les pierres. Enfin, dans la plus grande partie de l'Europe, surtout au nord et en Sibérie, est une espèce dont l'adulte vit surtout au printemps sur les taillis de Chênes et sur les Pins, et dont la larve est très-nuisible, d'après M. G. Caroff : c'est VA. aterrimus, Linn., de 12 à 13 milhmètres, allongé, d'un noir foncé peu brillant, à pubescence obscure, à pattes d'un rou- geûtre obscur. Le genre Agriotes a deux espèces isolées dans l'hémisphère austral, aux îles d'Arou et à la Nouvelle-Hollande (E. Blanchard); il est rem- placé dans les régions chaudes de l'Amérique méridionale par le genre Cosmesus, Eschsch., et dans celles de l'Asie par le genre Agonischius, Candôze. C!Ïlt'PTOIIYl».\lî!s», Eschsch. — Front- granJ, rebordé eu avant; antennes filiformes. Écusson grand. Pattes grêles, à tarses filiformes, à ongles simples. Oorps ordinairement assez luisant, plus ou moins pubescent. Ce genre est constitué par les plus petits Élatérides connus, ses géants n'atteignant qu'environ 6 millimètres et les plus petites espèces dé- passant à peine le millimètre. Leur système de coloration est uniforme : presque tous sont d'un bronze obscur ou d'un brun plus ou moins noir. ÈEATÉRIDLIS. — ALAUS, CAMPYLUS. 515 Quelques espèces ont dos taches ou des points jaunes. Ils sautent avec une grande vivacité, et à une hauteur très-grande relalivement à leurs dimensions exiguës. Ils sont presque tous propres aux régions septen- trionales des deux continents, et ne descendent guère en plaine au delà do oO degrés lat. N., sauf dans les montagnes; il en est dans les pays les plus boréaux et près des neiges perpétuelles. Il n'y a que trois espèces faisant exception, des pays chauds, Java, Bornéo et Madagascar. Ils vivent au bord des eaux ; on les trouve pendant le jour sous les pierres, sous les mousses, sous les troncs d'arbres, ou enfouis dans le sable. Ce n'est que le soir qu'on les prend sur les plantes ou au vol. Nous signalerons deux espèces: C. pulcheUus, Linn., de /i à 5 millimètres, noir, à élytres tachetées de jaune, vivant au bord des rivières, sous les pierres et dans les racines de certaines plantes, spécialement du Chien- dent [Triticum repens), aux dépens desquelles la larve se nourrit peut- être; outre l'Europe, il existe dans quelques parties des États-Unis, peut-être par importation d'Europe. Le C. riparius, Fabr., de 5 à 7 mil- limètres, se trouvant, outre l'Europe et l'Asie, dans les terres polaires de l'Amérique septentrionale, large et bombé, d'un noir un peu bronzé, parfois bleuâtre. Il est de toutes les monlagnes d'Europe ; la larve a été décrite (R. Perris, Mém. Soc. des sciences de Liège, X, 236). Elle fut trouvée en abondance, avec la nymphe, sous les pierres, au bord du lac de Gaube, près de Cauterets (Hautes-Pyrénées). AB, aB^S, Escliscli. Nous citons seulement ce genre, à raison d'une magnifique espèce, récemment découverte, le plus grand Élatéride d'Europe, atteignant 36 millimètres de longueur et près de 12 en largeur, 1'^. Parreijssi, Steven, de Grèce, de Crimée, de Perse, d'Asie Mineure orientale, sous les écorces de Pins, rare. Il est noir, avec des écailles d'un gris brillant, et deux ocelles noirs sur le corselet du mâle. liËPTt'ROlUEiBi , Herbst, ou CampYlus, Fischer. — Mandibules saillantes; prosternuni dépourvu de nieutonnière en avant. Antennes dentées ou pectinées chez les mules, du troisième au dixième article, dentées chez les femelles. Corselet petit; forme étroite par suite d'élytres allongées, parallèles, déprimées; téguments mous. Tarses pubescents en dessous. Ce genre constitue un passage des Élatérides aux Cébrionides et aussi aux Malacodermes. Il n'a que peu d'espèces, surtout des régions sep- tentrionales d'Europe et d'Amérique, et des parties montagneuses. Ce sont des insectes assez rares, vivant sur les feuilles et les fleurs de l'Aubépine, dit-on, pour les espèces d'Europe. Le type est le L. linearis Linn., d'Europe, de Sibérie, noir, à corselet rouge et élytres testacées ou noires avec bordure testacée, de 10 à 12 millimètres. Sa larve 516 COLÉOPTÈRES. — ÉLATÊRIENS connue (Chapuis et Candèze, Mém, Soc. des sciences de Liège, VIII). Nous figurons le L. rubens, Piller et Mitterp., ou denticolHs, Fabr. (pi. xxxni, fig. 15, mâle), noir, avec corselet et élytres d'un rouge jaunâtre, ou bleuâtre ou brun, ces dernières parfois entièrement d'un noir opaque chez la femelle, le dessous du corps, les antennes et les pattes noires, de 12 à l/j millimùtres. Cette espèce habite les régions montagneuses du centre et du sud de l'Allemagne, le nord de ritalie, la Turquie et la Syrie; elle est rare en France. Le mâle est plus répandu que la femelle dans les collections. m. — CÉBRIOiNIDES. Les Cébrionides forment le passage entre les tribus des Élatériens et les Malacodermes. Us sont pentamères; ont le corselet librement articulé en dessous sans mentonnière, les mandibules saillantes en tenailles, ce qui les rapproche du genre Rhipi<;era; les téguments flexibles, les élytres assez molles, avec six ou sept segments eu dessous à l'abdomen (rapport avec les Téléphores). Leurs pattes sont plus ou moins robustes et fouisseuses; les jambes comprimées, dilatées vers l'extrémité, plus ou moins élargies, à éperons terminaux bien dévelop- pés (différence notable avec les Élatérides), Le coi'ps est épais et oblong. Pas de saut. I»HVSOI»ACï'VI.l'S, Fisch. — Corselet rétréci en avant, à angles postérieurs dirigés en arrière. Élytres allongées, assez convexes, rétrécies en arrière. Les insectes de ce genre, dont les trois espèces appartiennent au Brésil, sont rares, et doivent vivre dans les détritus des arbres décom- posés.— Ex. : P. Henningi, Fisch., du Brésil (pi. xxxiv, fig. 1; la, patte antérieure; 16, antenne), d'un noir brillant, avec le corselet ferru- gineux. CEBRIO, Oliv. — Ciiez les màles, longues antennes de onze articles; élytres presque aussi longues que l'abdomen, graduellement atténuées en arrière; des ailes ; tarses longs. Chez les femelles, antennes très-courtes, un peu en massue ; élytres notablement plus courtes que l'abdomen et déhiscentes ; pas d'ailes ; pattes Irès-robusles, tarses courts. Les Cébrions sont des insectes de taille moyenne et assez grande^ comprenant plus de soixante-dix espèces, dont les couleurs sont le noir brunâtre et le jaune ferrugineux, soit seuls, soit combinés, mais sans former de dessins. Presque toutes les espèces sont du pourtour médi- terranéen, quelques-unes d'Amérique septentrionale, du Cap, de Ca- frerie, et une de Port-Jackson (Australie). Les Cébrions sont rares dans les collections, surtout les femelles, eu raison de leurs mœurs. — Ex.: CRBRIONIDES. — ANELASTES, CALLIRHIPIS. 517 C. fuscus, Fabr., mâle, du cap de Bonne-Espérance (pi. xxxiv, fig. 2), et C. gigns, Fabr. (pi. xxxiv, flg. 3, antenne de la femelle). Cette dernière espèce est la mieux connue, se trouve dans le midi de la France et sur tout le littoral méditerranéen. Lalreille avait créé avec la femelle un genre faux, le genre Hammonia. M. Guérin-Méneville, le premier, reconnut les deux sexes et leur accouplement. La métamorphose a lieu en terre, que la femelle ne quitte pas. Elle se contente de faire sortir par un trou l'extrémité allongée de son abdomen. Les mâles volent autour de ces trous et s'accouplent sans voir les femelles, de même que, chez les Lépidoptères, les mâles des Psychés, dont les femelles restent enfermées dans le fourreau de la chenille; Les mâles volent le soir, surtout en automne, et après les pluies continues paraissent eu abondance dans certaines localités ; il faut, en effet, que la terre soit humectée pour que les mâles puissent sortir et les femelles venir contre la surface. La larve du C. gigas est encore plus allongée que celle des Élatériens, parfaitement cylindrique et parallèle, aveugle, couverte d'écussons résistants, à pattes courtes, surtout la première paire, épineuses, rapprochées de la ligne médiane. Elle vit dans des terrains secs, paraissant se nourrir de racines, et exige, dit-on, plu- sieurs années, peut-être trois, pour être au terme de sa croissance. Alors elle se pratique en terre une loge où se fera la nymphose. Les genres suivants sont des genres de passage, ballottés par les auteurs d'une famille à l'autre ou constituant de petites familles. AXEliASTKS, Kirby. — (Les auteurs les plus modernes placent ce genre dans les Eucnémides.) Antennes courtes, filiformes. Corps oblong, peu convexe, Aspect des Agrioles. Ces insectes, de taille au plus moyenne, sont d'un jaune ferrugineux ou d'un brun noirâtre, à élytres striées. — Ex. : A. Druryi, Kirby, des Étals-Unis (pi. xxxiv, fig. h, antenne grossie). U y a une autre espèce du Brésil et une d'Algérie, €.%TXlRHllPI^, Latr. — Antennes de onze articles, flabellées en rameaux grêles à partir du troisième. Les Callirhipis, rares dans les collections, et exotiques des deux con- tinents, sont de taille supérieure à la moyenne, en général noirs ou bruns.— Ex. : C. Goryi, G.-Mén., du Brésil (pi. xxxiv, fig. 5), et C. Dejeani, Latr., d'Amboine et de Java (pi. xxxiv, fig. 6« cl 6 b, fnr.-e antérieur de profil et de face ; 6 c, mâchoire et palpe). 518 COLÉOPTiiliES. — ÉLATÉRIENS. BSUlPlDOCER.% OU Rhipicera, Latr. — Antennes de plus de onze articles très- serrés, flabellées en éventail chez les mâles, pectinées chez les femelles. Mandibules robustes, saillantes, arquées au bout. Corselet convexe, rétréci en avant, bisinué à la base. Corps épais, subcylindrique. Kx. : IL cyanea, Caslelnau, à corselet bleu, du Brésil intérieur (pi. XXXIV, fig. 7, mâle). Une antenne de femelle de cette espèce est re- présentée grossie (pi. xxxiv, fig. 8). Les Rhipicéres sont du Brésil et de l'Australie, et se trou\ ont sur les feuilles dans les bois et sur les plantes basses. P'B'EliOD.lCTYIi.%, Latr. — Antennes très-allongées et très-grêles, filifornies, simples ou légèrement dentées chez les femelles, avec de grêles rameaux chez les mâles. Pattes longues. Corps ovale, peu convexe. Les Ptilodactyles sont des insectes américains, surtout des régions chaudes, de taille assez petite, d'un brun noirâtre ou d'un fauve jau- nâtre, vivant sur les feuilles, à la surface desquelles ils marchent len- tement, se laissant tomber au moindre danger, en simulant la mort par la flexion des antennes et des pattes ramenées le long du corps. Ils volent assez bien. — Ex. : P. elaterina, lllig., mâle, de l'Amérique du Nord (pi. xxxiv, fig. 9). Il y a une espèce de Java. BELOOES, Latr. — Antennes longues et grêles. Corselet rétréci en avant, arrondi sur les côtés, Élylres larges, ovales ou elliptiques. Les insectes de ce genre, de petite taille, au nombre d'environ quatre- vingts espèces de tout pays, ont des téguments minces et flexibles dont la couleur varie du brun noirâtre au jaune tcstacé dans la même es- pèce. Les espèces d'Europe vivent sur les plantes qui croissent au bord des eaux, et dans les prairies humides, recherchent l'ombre et sont peu agiles. Nous représentons l'espèce la plus commune, existant dans toute l'Europe, se trouvant aux environs de Paris, VH. minutus, Linn., ou pallidus, Fabr. (pi. xxxiv, fig. 10; 10 a, antenne ; 10 b, tarse antérieur). La larve de cette espèce est aquatique et à régime végétal, ovale, graduellement atténuée en arrière, et ressemblant beaucoup à celle des Silpha. Les pattes sont courtes; une peau coriace déborde les segments de l'abdomen. Elle rampe lentement sur les pierres et les plantes submergées. Erichson pense que les stigmates sont remplacés par une rangée de sept lamelles membraneuses, disposées en arc de cercle sur le bord de l'anus et enveloppées d'une bulle d'air. r.AMPYRlENS OU iMALACODERMKS. 519 SCIRTES^ Illig^, — Cuisses postérieures très-larges^ brièvement ovales et tri's- cjpai-ses ; jambes postérieures terminées par deux éperons, l'interne très-long. Le fait important qui caractérise ce genre, ce sont les cuisses posté- rieures propres au saut, à la façon des Altises et avec autant de force par repli de la cuisse contre le corps et contraction subite des muscles, d'où débandement du ressort. On trouve les Scirtes dans les mûmes lieux que les Helodes, sur les feuilles des plantes et des arbrisseaux. L'espèce la plus commune qu'on trouve près de Paris et dans toute l'Europe, est le S. hemisphœricus, Linn. (pi. xxxiv, fig. 11, patte posté- rieure). Les Scirtes sont surtout des régions chaudes des deux mondes, sauf l'Australie. RUBRI.%, Germar.— Antennes assez longues^ grêles. Corselet transversal, Irès- rétréci en avant et arrondi sur les côtés. Élytres ovales, largement arrondies à l'extrémité. Corps convexe, en court ovale. Ce genre est fondé sur une seule espèce, E. palustris, Germar, très- petit insecte (pi. xxxiv, fig. 12; 12 o, antenne; 12 6, tarse postérieur), de France, d'Allemagne, d'Italie; à téguments assez solides; d'un noir brillant, souvent rougeâtre, avec élytres fortement sillonnées. Il est assez rare et vit sur les plantes aquatiques. Les trois genres Helodes^ Scirtes, Euhria, d'habitat pareil, sont plus rapprochés des Malacodermes que des Élatériens , sans appartenir nettement à l'une ou Tautre de ces tribus. Cela montre seulement que ces divisions n'ont pas de limites exactes, et qu'il faut se contenter d'une très-vague approximation pour ne pas trop multiplier les coupes et faire rentrer les petits groupes satellites dans les tribus fondamen- tales. Les genres PtUodactyla, Helodes, Scirtes et Euhria sont compris, par les auteurs les plus récents, dans la petite famille des Dascillides. Tribu des LAIIPYRIEWS ou ll^liACOa^ERllES. Pour demeurer fidèle à la règle adoptée maintenant, et suivie no- tamment par M. E. Blanchard, et afin de ne pas multiplier les noms nouveaux, de désigner les groupes par un nom emprunté à un genre fondamental, nous appellerons Lampyriens les insectes de la tribu ac- tuelle, du nom du genre le plus remarquable par la phosphorescence de ses espèces. Nous ferons toutefois remarquer que les insectes de cette tribu, au nombre actuel de plus de 2000 espèces, sont plus habituellement désignés par le terme de Malacodermes. Cette tribu des Malacodermes réunit des Coléoptères dont les téguments, ainsi que leur nom l'indique, sont en général minces et flexibles. Ils se lient par plusieurs caractères, notamment par la mollesse des téguments, 520 COLÉOPTÈRES. — LAMPYRIENS. aux Cantharidiens, mais s'en séparent par le nombre des articles des tarses. La bouche de ces insectes offre des mandibules courtes, des palpes maxillaires de quatre articles et labiaux de trois; une languette membraneuse ou coriace, avec des paraglosscs invisibles ou nuls. Les antennes sont presque toujours de onze articles et de forme très-va- riable. Les élytres n'embrassent que faiblement l'abdomen ou le re- couvrent en le débordant plus ou moins ; parfois elles se déforment et se rétrécissent ; alors les ailes ne se replient pas et se voient au dehors ou manquent, et parfois aussi les élytres chez les femelles. L'abdomen ofl're six ou sept segments ventraux libres. Les pattes sont en général assez longues; les hanches antérieures sont contiguës, lés postérieures transverses, sans lames supérieures distinctes. Les tarses ont cinq ar- ticles, sauf de rares exceptions, sans lamelles au-dessous, avec crochets tantôt simples, tantôt bidentés à leur extrémité. Les Malacodermes n'ont pas de prolongement au prosternurn, ni en avant, ni en arrière, comme chez les Buprestiens et les Élatériens. Leur taille est médiocre ou petite, et leurs espèces se trouvent en tous pays, le plus souvent à l'état adulte sur les fleurs ou les feuilles. Sauf les fe- melles aptères de certains genres, ils sont en général agiles et volent bien. On est mal fixé sur le régime des adultes ; toutefois beaucoup sont carnassiers. Les larves sont carnivores, attaquant d'autres larves ou divers petits animaux sous les écorces ou dans, la terre. Ce groupe de Coléoptères est d'une étude ardue; beaucoup d'espèces sont encore inédites, et il est mal limité ; certains de ses genres même ne présentent guère l'amincissement des téguments qui leur a fait donner par Latreille le nom de Malacodermes. Plus d'un quart de siècle auparavant, C. Duméril les avait nommés Apaly très ou Mollipennes, noms qui ont absolument la même signification ; malgré cette incon- testable priorité, nous avons dû conserver le nom de Latreille, parce qu'il est beaucoup plus connu des entomologistes. Nous diviserons les Malacodermes en trois groupes : les Lampyrides, les Téléphorides et les Malachiides, chaque groupe tirant son nom du genre le plus caractéristique. L — LAMPYRIDES. Les Lampyrides se subdivisent en trois types distincts, groupés autour de^ genres Lycus, Lampyris , Drilus. Le type moyen possède seul, chez beaucoup d'espèces, le phénomène de la phosphorescence. La tète des Lampyrides est enfoncée en entier ou en partie dans le corselet ; les antennes ont onze articles (du moins dans les genres d'Europe), de forme variable, très-souvent dentés ou même flabellés, et sont insérées généralement sur le front ou sur la base du rostre, presque toujours rapprochées ou subcontiguës. Le corselet est petit. L'abdomen offre en dessous sept segments libres, et parfois huit chez les femelles, et LAMPYRIDES. — LYGUS, DICTYOPTERA, EROS. 521 même chez certains mâles, ayant rarement les segments 6 et 7 sou- dés et confondus. Les tarses ont toujours cinq articles. Le corps est oblong ou allongé, à téguments flexibles, parfois larviforme chez les femelles. GENT.ES P^.I^CIPAUX. I.YCUS, Fabr. — Antennes en dents de scie, rapprochées à leur base, insérées entre les yeux sur le front ou sur la base du rostre. Corselet petit, rétréci en avant, foliacé sur les côtés. Élylres très-minces, lâches, débordant souvent l'abdomen, élargies et sculptées chez les mâles dans certaines espèces. Tête prolongée en un rostre grêle. Les Lyms et les genres du même type habitent surtout les régions chaudes. Ils se trouvent sur les fleurs, les broussailles, et se plaisent dans les bois. Quand on les saisit, ils simulent la mort en contractant leurs pattes et fléchissant leurs antennes. Il est probable, vu la faiblesse de leurs pièces buccales et leurs mandibules trés-grêles, que leur ré- gime est végétal, ou qu'ils mangent à peine ta l'état adulte. Ce genre compte une soixantaine d'espèces des régions chaudes des deux mondes, surtout de l'ancien et d'Australie. — Ex. : L. trabeatus, G. -M., mâle, du Sénégal (pi. xxxv, fig. 1; la, tête vue de face.) »ICTYOPTB3RA, Latr. — Antennes insérées à la base du rostre. Élytres graduellement élargies en arrière. Ce genre ne comprend qu'une espèce, d'Europe, le D. sanguinea, Linn., ou villosa, de Geer, à élytres et côtés du corselet d'un beau rouge, le reste noir, long de .3 millim., se trouvant sur les fleurs dans tous les pays de l'Europe (pi. xxxv, fig. 2, tête vue de face). C'est le Ver luisant rouge de Geoffroy. Sa larve est allongée, très-déprimée, à pattes et à dessus du corps d'un noir mat, vivant sous les écorces des Chênes morts, où elle fait la guerre aux diverses larves qui s'y trouvent. Elle ressemble aux larves des Lampyres, dont nous parlerons plus loin, mais en diffère par sa tête non rétractile, ses mâchoires sans lobes, sa languette soudée au menton. Le genre est curieux par sa tête prolon- gée en bec. Le corselet est presque carré, les élytres unies. Il y a une vingtaine d'espèces. On en trouve ù Ceylan, en Chine, en Pensylvanie, en Colombie, au Brésil et aux îles Aléoutiennes. GROS, Newmann. — Antennes filiformes ou légèrement dentées. Tète sans rostre, en partie recouverte par le corselet. Dans ce genre sont aussi des espèces rouges, de taille moyenne, pe- tite et très-petite, qu'on trouve sur les fleurs, surtout dans nos régions du Nord, de l'Est et dans les montagnes. 11 diffère du précédent par la 522 COLÉOPTÈRES. — LA.MPYRIENS. tête dépourvue de museau, les antennes insérées entre les yeux, le cor- selet à fossettes et à côtes, el les élytres à côtes fines et saillantes. Les espèces sont noires, avec les élytres rouges. Citons : E. coccineus, Linn . ou Aurora, Herbst, d'Europe et d'Algérie, de 9 millimètres, à corselet rougerure ; E. afjin/s, Payk., de 6 à 8 millimètres, de Suède, de France, d'Allemagne, à. corselet et antennes noirs, et une petite espèce, E. mi- mitus, Fabr., de toute l'Europe, de 5 millimètres de longueur environ. Le genre Eros comprend quarante-cinq espèces d'Europe, des États- Unis et de l'Amérique russe, du Mexique, de la Guyane, du Brésil, do la Colombie et de l'ile Woodlark. HOMAMSUS, Geoffr. — Tète dt'-gagée; antennes subfiliforme?, à articles Lien accusés. Corselet non foliacé, tranchant sur les bords. Élytres planes, paral- lèles, débordant faiblement un abdomen de six segments. Ces insectes, de forme allongée, parallèle, très-déprimée, à élytres en plus ou moins grande partie d'un rouge sanguin, se trouvent sur les liges et les feuilles des herbes. — Ex. : H. sutiiralis, Fabr., de France, d'Allemagne, d'Italie (pi. xxxv, fig. 3, son antenne). C'est VOma- lise de Geoffroy, trouvée à Fontainebleau. Le corselet, à angles pos- térieurs très-aigus et recourbés vers les élytres, rappelle celui des Élalériens. Les élytres sont d'un rouge safrané aux bouts et sur les bords, avec une large bande suturale noire. La taille est de 5 milli- mètres. Cette espèce est assez commune dans les haies et dans les bois. Deux autres espèces du midi de la France, de Dalmatie, d'Italie. CL.%DOl>IBORï'f§i, Guér.-Méii. — Antennes très-longues, très-grêles, filiformes, velues, dont les articles émettent un rameau linéaire et velu beaucoup plus long qu'eux. Corps linéaire, très-allongé. Ces insectes sont propres à la Nouvelle-Guinée. — Ex. : C. nifcollis, G.-Mén., ou crocicolUs, Boisd., d'Offack, terre des Papous (pi. xxxv, fig. 9, tète vue de face; 9a, antenne; 9 b, tarse antérieur, face et pro- fil). Trois autres espèces des mômes régions. Ii.%MPYRl§i, r.eoffr. — Antennes rapprochées à leur base, insérées entre les yeux, sur le front. Mâle ailé et élytré; femelle aptère et larviforme, sans élytres, à taille plus grande que le mâle ; tète très courte, fortement rétractile ^dans la cavité du corselet, qui la recouvre. L'appareil de la phosphorescence, si important comme physiologie, ne peut être d'aucun secours pour la classification des genres, car il varie, même d'une espèce à l'autre, pour le nombre des segments qu'il occupe dans l'abdomen, à partir du dernier en dessous. Les Lampyres, dont les femelles et les larves sont connues sous le noiïi de Vers luisants, sont des insectes nocturnes demeurant entièrement cachés, pendant le LAMPYP.IDES. — r.AMPYRIS. 52o jour, sous les feuilles et dans les gazons. T.e soir, les femelles se tiennent dans les buissons ou parmi les plantes, souvent rampant sur le sol, no- tamment dans les lieux frais et humides, jetant un éclat plus ou moins vif, suivant les espèces. Les mâles volent à leur recherche, et émettent une lueur beaucoup plus faible, ou même presque nulle, qui échappe à une observation inattentive. Les larves ont]a propriété phosphores- cente, mais à un degré moindre que les femelles. Ces larves sont car- nassières et vivent surtout de mollusques terrestres. Il faut ramasser les Vers luisants dans la campagne, et les porter dans les jardins. Les adultes, au contraire, semblent phytophages, et peut-être, surtout les mâles, ne prennent-ils pas de nourriture, comme les Lycus. L'espèce la plus connue et fréquente aux environs de Paris et dans tout le nord de la France, que Geoffroy nomme le Ver luisant à femelle sans ailes, est le L, noctiluca, Linn., de toute l'Europe et du Caucase. Les insectes adultes paraissent d'habitude à partir du mois de juin, et quelquefois, dans les années très-chaudes, dès la seconde quinzaine de mai. I^e mâle est d'un jaune très-brunâtre, avec une tache aoire con- fuse sur le corselet, les élytres grisâtres, finement ponctuées, ayant trois côtes longitudinales. La femelle est d'un noir brunâtre, avec les anneaux bordés d'un peu de jaune. C'est elle qui est le Ver luisant commun, et qui offre un puissant appareil lumineux sous les trois derniers segments ventraux; le'mâle est un peu lumineuxauxdeux'derniers segments. Les larves sont très-déprimées, recouvertes en dessus et en dessous de pla- ques cornées qui deviennent très-solides par dessiccation. La tête (et ces détails s'appliquent en partie aux femelles) est très-petite, horizon- tale, complètement retirée dans le prothorax, et en outre comme inva- ginée dans un repli membraneux qui cache les organes buccaux. Les mandibules sont arquées et très-aiguës. Les trois segments thoraciqucs ne sont pas plus larges que ceux de l'abdomen, mais sont plus longs, surtout le prothorax, qui s'avance en bouclier arrondi antérieurement et recouvre la tête, comme chez les adultes. Il y a un ocelle de chaque côté de la tête et de courtes antennes de trois articles. L'abdomen s'atténue graduellement en arrière, et son dernier «egment est pourvu d'un appendice anal peu saillant. Il peut en sortir, à la volonté de la larve, une houppe de filets blancs qui sert à l'animal à nettoyer ses pattes et ses stigmates pour se débarrasser des mucosités des mollusques dont elle fait sa nourriture. Les pattes sont très-robustes. Les larves hi- vernent et achèvent leur développement au retour de la belle saison. Lors de la mue nymphale, la peau se fend, non pa?, comme d'habitude, eu dessus et au milieu du thorax, mais en deux fissures de chaque côte (de Geer). La nymphose ne dure qu'une semaine environ. Les nymphes des mâles sont immobiles et offrent emmailloltés les organes de l'adulte ; elles ont deux points phosphorescents. Les nymphes des femelles aptères restent larviformes, agiles, phosphorescentes comme les larves et les femelles : ce qui veut dire qu'il n'y a plus de distinc- 52/i COLÉOPTÈRES. — LAMPYRIENS. tion nette des (rois états ; seulement la femelle est apte à reproduire et offre l'appareil phosphorescent à son maximum. Les œufs sont aussi phosphorescents. C'est principalement sur le L. nociiluca, Linn., que quelques expériences ont été faites au sujet de cette phosphorescence, de sa cause, de son organe. Nous parlerons à ce propos de tout ce qui concerne la phospho- rescence des Lampyrides en général. On peut dire, sans exception cer- taine, que chez tous les insectes phosphorescents connus [Lampyridc?, Élalérides, peut-être Fulgores (Hémipt), peut-être quelques Diptères], les organes de phosphorescence sont localisés d'une manière variable, et dépendent du tronc et non des appendices. L'organisation anatomique des organes lumineux du t. noctiluca, bien étudiée par M. Kolliker, est analogue chez les autres Lampyrides. La paire d'organes qui est sous le huitième anneau ou segment terminal est beaucoup moins dévelop- pée que celles qui occupent la face inférieure des sepiième et sixième segments. La lumière émane d'un tissu pulpeux et jaunâtre qui se trouve appliqué contre une portion transparente du squelette tégu- mentaire. Des tilets nerveux se distribuent dans l'intérieur de ces amas d'utricules; des trachées s'y ramifient en très-grand nombre et y for- ment des anses, tubes à air très-certainement destinés à fournir le comburant de la phosphorescence. Au microscope, on reconnaît deux sortes de cellules, arrondies ou polyédriques par compression : les unes, à nucléus et contenant des granules pâles, ce sont les cellules photo- gènes, paraissant contenir une matière albumineuse ; les autres, à granules blancs, qui semblent être des concrétions d'urate d'ammo- niaque. On a constaté chez tous les Lampyrides que toute excitation nerveuse, mécanique, chimique, calorifique, provoque l'émission de lumière. En outre, cette émission varie beaucoup à diverses époques, selon la volonté de l'animal. La lueur disparaît, ou à peu près, quand l'insecte est effrayé par le bruit ou par un choc brusque, et la lueur diminue graduellement à partir du point le plus éloigné de l'extrémité du corps. La phosphorescence semble s'interrompre dans l'intervalle des éclats, bien qu'en réalité une observation attentive montre toujours qu'une faible lueur persiste dans la partie de l'abdomen qui correspond aux organes de phosphorescence. Quand l'insecte brille fortement, il y a aussi des intermittences dans ce phénomène ; mais les décharges lumi- neuses se succèdent alors avec une très-grande rapidité, et l'on peut compter de quatre-vingts à cent de ces éclairs en une minute. Ces faits concordent complètement avec ceux observés par M. de Quatrefages pour les Noctiluques, qui produisent sur nos côtes, par certaines soirées chaudes de l'été, la phosphorescence 4e la mer. Elle s'opère par étin- celles, liées à la contraction de leur tissu, provoquées par l'agitation et par tous- les excitants habituels de la contraction musculaire. Il en est de même chez les Annélides et les Molluscoïdes phosphorescents, si abon- LAMPYRIDES. — LAMPYRIS : PHOSPHORESCENCE. 5'25 dants dans les mers des régions chaudes , tellement que les navires tracent dans la mer un long sillon de feu, soulevant contre leur bor- dage comme une myriade de boulets incandescents. La phosphorescence des animaux vivants est due, très-probablement toujours, à une combus- tion lente de matières sécrétées, sous l'action de l'oxygène de l'air. Or, comme on sait d'autre part, par les expériences de plusieurs physiolo- gistes, que la contraction musculaire est toujours accompagnée d'une combustion, on doit penser que cette combustion est la cause triple et générale de la force mécanique des muscles, de la chaleur libre des ani- maux, et aussi de la phosphorescence dans les cas spéciaux où elle existe. Chez les Lampyres, la combustion lente est démontrée dans la phos- phorescence par les expériences deMacaire sur la femelle du L. noctiluca, et de M. Matteucci sur les deux sexes du Luciola italica. Celles de ce der- nier physicien sont les plus nombreuses (1). Il est bien constaté que les segments phosphorescents séparés de l'animal conservent quelque temps leur propriété ; que dans les gaz inertes la matière phosphores- cente cesse de luire après une certaine durée qui s'explique par la con- servation de l'air dans les ramifications trachéennes de l'organe ; que dans le gaz oxygène la vivacité de la phosphorescence, soit pour l'ani- mal entiei', soit pour les segments isolés, est notamment plus considé- rable que dans l'air atmosphérique et dure presque trois fois plus de temps; que la portion d'oxygène absorbée par les segments lumineux (autre que celui de la respiration) est remplacée par un égal volume d'acide carbonique ; que les excitations mécaniques avivent la phos- phorescence de ces animaux, surtout quand elles portent sur les or- ganes photogènes ; que la chaleur, graduellement augmentée jusqu'à 30 degrés environ, accroît la phosphorescence au point de la rendre continue et sans intermittence, mais qu'une trop forte température, UO degrés et au-dessus, l'éteint et tue l'animal ; qu'un abaissement au contraire au-dessous de la glace fondante la fait disparaître : tous résultats qui s'expliquent par les influences calorifiques sur les contrac- tions des tissus vivants ; que lorsque les segments ont perdu leur faculté lumineuse, ou par un trop fort échauffement, ou par un temps suffi- sant après la mort de l'insecte, la matière ne brûle plus dans l'oxygène. M. Matteucci n'a pu constater aucun dégagement de chaleur sensible lors de la phosphorescence de ces animaux ; mais, comme il est bien prouvé qu'il y a combustion, cette expérience négative doit tenir à l'im- perfection des thermomètres, et je suis persuadé qu'on observerait de la chaleur en se servant de soudures bismuth-antimoine, ou d'alliages encore plus sensibles, comparativement portées sur l'organe phospho- rescent, et sur une région autre non lumineuse, par exemple sur les (1) Macaire, Ann. j)hijs. ei chim., 1"^ série, 1821, t. XVII, p. 251. — Mat- teucci, Leçons sîir les phénotn. chim. des corps vivants, l''^ édit., 1847, p. 1C3. — Milne Edwards, Leçons de phys. et d'anat. comp., 1863, t. YIII, p. 93 et suiv. 526 COLÉOPTÈHES. — F,AMPYnil-NS. faces dorsale et ventrale de l'abdomen, la petite pile diflerentielle étaiii reliée à un galvanomètre très-sensible. Macaire a reconnu que la phosphorescence du Vor luisant ordinaire dure deux ou trois jours après la mort, mais peu intense et à la condi- tion de chauffer l'animal ; que dans le vide la lueur diminue peu à peu, puis cesse entièrement, pour reprendre avec éclat si l'on rend l'air; que la lueur continue quelque temps dans le chlore, mais, au lieu d'être jaune verdâtre, devient rosée et môme rouge, puis s'éteint. De mémo, le chlore change en rouge la lueur de la flamme d'une bougie. La lueur des insectes s'éteint dans les gaz hydrogène, acide carbonique, acide sulfureux, hydrogène carboné et bioxyde d'azote. 11 a étudié en outre (les expériences précédentes ayant porté sur les insectes vivants et entiers) la matière lumineuse séparée du corps, a vu qu'elle est d'un blanc jaunâtre légèrement translucide. Chauffée dans l'air, elle aug- mente peu à peu d'éclat, jusqu'à environ ZjO degrés, puis diminue et devient rougeûlre, et enfin cesse vers 50 degrés, étant alors blanche et opaque, comme de l'albumine coagulée. Macaire la regarde comme de nature albumineuse, car elle est coagulée par les matières qui préci- pitent l'albumine. L'alcool, l'éther, les sels de cuivre, la solution de bichlorure de mercure, font cesser sur-le-champ la phosphorescence, en rendant la matière blanche et opaque. Dans le vide, elle s'éteint et se ranime si l'air rentre ; de même elle reluit si l'on introduit de l'oxygène dans un gaz inerte où elle a cessé de briller. Le chlore, le bioxyde d'azote, l'acide sulfureux, détruisent sans retour sa faculté phospho- rescente. La matière phosphorescente ne contient pas de phosphore, ainsi que M. Matteucci s'en est assuré par les réactifs ; très-probablement elle doit sa propriété à une sorte d'huile ou d'essence, c'est-à-dire à un hydrocarbure (le carbone est prouvé par l'acide carbonique formé ; il reste à constater l'eau). Cette sécrétion retirée des organes des insectes demeure quelque temps phosphorescente à l'air, laissant des traces lumineuses sur les doigts ou d'autres objets, aussi bien pour les or- ganes des Lampyrides que pour ceux des Èlatérides ou Taupins lumi- neux de l'Amérique ; le même fait se produit pour le mucus phospho- rescent qui s'écoule des Sj////s(Annélides), pour les traînées lumineuses que laisse suinter le corps des Pholudcs (MoU. acéph. lamellibr., dails de Héaumur), etc. 11 faut bien remarquer que pour prouver la com- bustion de la matière phosphorescente, il faut opérer toujours sur les organes isolés, et non sur les animaux entiers, car alors on pourrait attribuer la combustion à la respiration générale. Le genre Lampijris, tel qu'il est restreint par les entomologistes mo- dernes, comprend une cinquantaine d'espèces d'Europe, de Sibérie, de Perse, du Caucase, des Indes orientales, de Ceylan, de l'Afrique australe, d'Abyssinie et d'Océanie. I.AMinniDES. — I.AMPRORHIZA, CRATOMORPHL'S. 527 Ii.%!MPRORIIIX.%, Motsch. — Mâle clytré et ailé, à appareil luntiiiieux très- variable selon les espèces; femelle égale en laillc au mâle, aptère, mais à clylres en écailles rudimentaires ; tête entièrement rétraclilc. L'espèce type est le L. splendidula, Linn., de toute l'Europe, mais surtout fréquent^dans sa partie méridionale, et du Caucase, dont les mœurs sont analogues à celles des Lampyris, et dont les femelles et les larves sont aussi appelées Vers luisants. Le mille offre deux paires d'or- ganes phosphorescents sous-ventraux, aux sixième et septième anneaux. Il en est de môme chez la femelle, avec duplicité de l'organe phospho- rescent du sixième anneau, et en outre il y a de petites sphérules phosphorescentes sous les anneaux précédents de l'abdomen. Les adultes de cette espèce paraissent plus tard que ceux du L. noctiluca, seule- ment à la fin de l'été. Il y a sept espèces du genre, répandues dans le midi de l'Europe et dans le Népaul. l*IIO!^Pll/X:i«rS. ruficollis, Fabr., du midi de la France, de même couleur dans les deux sexes, qui ne diffèrent que par la forme du corselet et les antennes plus courtes chez la femelle et in- distinctement dentées. Le S. tricolor, G.-Mén., de l'intérieur du Brésil (pi. xxxv, fig. 10). Les Silis ont l'aspect des Téléphores, mais s'en distin- guent facilement par la tête enfoncée dans le prothorax, étroite et très-courte en avant, et par la structure du corselet chez les mâles, échancré ou denté sur les côtés, vers les angles postérieurs. Ce genre compte une vingtaine d'espèces d'Europe, d'Amérique, de Sibérie, du Bengale. Itl.'tl.THllvr^, Latr. — Tète large, rhomboïdale, fortement rétrécis en arrière. Élytres déhiscentes à l'extrémité, atteignant à peine le bout de l'abdomen. Ce genre (et plus encore le genre Mallliodes, Kiesenvvetter) est formé de Téléphores dégradés par la faible taille, la brièveté des élylres que MALACHIIDES. DJJ dépassent les ailes, et l'extrême mollesse des téguments. Ce sont de pe- tits insectes de forme allongée, qu'on trouve sur les feuilles des végé- taux, et notamment dans les bois, sur divers arbustes. Le choix de cer- taines plantes par des insectes carnassiers, comme les Téléphorides, doil indiquer une nourriture d'insectes phytophages propres à ces végétaux. Nous représentons le M. biguttatus, Linn., ou biguttulus Payk. (pi. xxxv, fig.ll), des environs de Paris et de toute l'Europe, avec deux tache.'; jaunes au bout des élytres. Les Malihines, peu nombreux en Europe, de forme allongée^ sont au nombre de cinquante espèces, de pays va- riés, manquant en Australie et dans l'Afrique propre, sauf une espèce d'Abyssinie. Le genre Malthodes, qui compte le double d'espèces, a un aspect et des mœurs analogues aux Malthinus, et ses espèces sont bien plus nombreuses en Europe. Elles sont surtout de ce continent, dans les régions centrales, en Suède, sur les montagnes, dans le bassin médi- terranéen, et quelques-unes sont de l'Amérique septentrionale. m. - MALACHIIDES. La tète est toujours plus ou moins à découvert, et le labre distinct, l'épistome étant séparé du front par une suture, ce qui n'a pas lieu chez les autres Malacodermes. Les antennes ont onze articles, rarement dix, et varient de forme ; elles sont fréquemment dentées à l'intérieur, écartées à leur base, presque toujours insérées sur les côtés en avant des yeux. L'abdomen a six segments apparents en dessous et libres ; les tarses sont de cinq articles, mais parfois de quatre aux antérieurs chez les mâles. Le corps a des téguments le plus souvent mous et flexibles. Ces Coléoptères, qui abondent surtout dans les régions tempérées, sont en général de petite taille, de couleurs variées et élégantes. Leurs larves sont carnassières, mais ne vivent pas de Mollusques et ne se cachent pas en terre ; elles séjournent sous les écorces, dans le détritus des arbres vermoulus, les vieux chaumes des toitures, faisant la guerre aux larves et aux petits insectes qui habitent les mOmes lieux. Ou est moins fixé sur le régime des adultes. Certains auteurs les regardent comme carnassiers ; mais il est bien plus probable qu'ils se nourrissent des parties les plus tendres des fleurs sur lesquelles on les trouve pres- que exclusivement. M. E. Perris a vu les Malachius œneus, Linn., espèce de toute l'Europe et du Caucase, qui abonde en mai dans les Landes, dévorer les étamines des épis de Seigle, et le Malachius pulicarius, Fabr., d'Europe et d'Algérie, se repaître d'anthères de Graminées tenues entre ses pattes antérieures. Ce groupe n'est pas aussi homogène que les précédents et présente deux types bien distincts. Le premier , qui a pour expression vulgaire le genre Malachius, présente de très-singuliers caractères. Le long des flancs de ses es- 536 COLÉOPTtRES. — LAMPYRIENS. pèces sont doux paires de caroncules, pouvant rentrer sous les tégu- ments ou sortir à la volonté de l'animal : ainsi quand il va prendre son vol, ou qu'on l'effraye en cherchant à le saisir. On dirait des crûtes de chairs saillantes, et le vulgaire les nomme cocardes, en appelant Cocar- diers les Coléoptères pourvus de ces singuliers appendices. Les caron- cules exsertiles existant au prothorax et à l'abdomen ont une apparence charnue ou membraneuse, sont plus ou moins déchiquetées sur leurs bords, d'un volume ordinairement considérable, eu égard à celui de l'insecte, et de couleur rouge ou orangée ; celles du prothorax sont situées près du bord antérieur de cette partie du corps, immédiatement en avant et en dehors des trochantins de la première paire de pattes, dans une cavité triangulaire qui paraît comme une large incision ; les autres sortent sur les côtés de l'abdomen, derrière les hanches posté- rieures, près de la base de l'abdomen. L'usage de ces singuliers organes n'est pas encore bien connu. Selon M. Curtis, l'expansion de ces caron- cules servirait à modifier les conditions statiques de ces insectes pen- dant le vol, car ils déplacent alors un plus grand volume d'air sous le même poids, ce qui diminue leur densité moyenne apparente ; on ob- serve en effet que ces caroncules font saillie au moment où l'insecte va prendre son essor. Kirby et Spence pensent qu'elles sont destinées à effrayer les ennemis par leur étrange et subite apparition. M. Westwood et Lacordaire supposent qu'elles font partie d'un appareil glandulaire qui émet, disent-ils, dans le même but, une odeur désagréable. M. La- bûulbène {Nute sur les caroncules thoraciques du Malachius bipustulatus, Ann. Soc, entom. Fr., 1858, p. 5'22) a fait de dernières et intéressantes observations sur ces singuliers organes. La forme des caroncules cépha- liques ou abdominales diffère ; la caroncule antérieure est trilobée, l'autre bilobée. Elles ont à leur base un sillon bien marqué pendant leur reirait, s'effaçant pendant la distension extrême. Le procédé de sortie de ces prolongements est le même que celui des Hélix et Li- maces pour les tentacules oculaires ; les insectes refoulent au dehors une sorte d'extrémité de doigt de gant qui serait rentrée en dedans. La constitution anatomique de la caroncule est la suivante : 1° une enveloppe externe complexe formée d'un épiderme, puis d'un pig- ment à fines granulations rouges, enfin d'une double série de fibres musculaires, les unes transversales ou annulaires, servant probable- ment à produire la sortie des caroncules, tandis que leur rétraction serait produite par la contraction des fibres longitudinales antagonistes ; 2" comme contenu interne, un liquide subhyalin, avec das granulations et des amas adipeux. Quant à l'usage des caroncules, M. Laboulbène y voit des moyens dé- fensifs, et suppose qu'il s'en échappe une odeur appréciable pour les in- sectes ennemis, bien qu'on n'ait pu saisir d'odeur sur un grand nombre de Malachius bipustulatus contenus dans un tube de verre, et qui, ef- frayés, faisaient fortement saillir leurs cocardes. Il regarde ces organes MALACHIIDES. — MALACHICS. 537 comme analogues aux vésicules odorantes des grands Slaphylins , ainsi de VOcyjms olens, Linn., et des bourses abdominales en csecum des Blaps (Coléopt. Ténébrioniens). Les Coléoptères du groupe des Malachies se montrent surtout au printemps. Ils ont des téguments flexibles et peu velus. Leurs diffé- rences sexuelles sont variées, portent sur les tarses, l'abdomen, les an- tennes, les élytres, qui, chez certains mâles, sont comme chidbnnées ou appendiculées à leur extrémité. Il y a un certain nombre de genres dont les femelles sont aptères et ont les élytres élargies et déhiscentes. Il est incontestable que les insectes de ce groupe ont beaucoup d'ana- logie avec les Téléphores, à côté desquels les place M. E. Blanchard, GENRE PRINCIPAL. !ll.%l..%ClllIJ!^, Fabr. — Dernier article des palpes acuminé. Corselet arrondi sur les côtés, Élytres allongées, parallèles, souvent chiffonnées ou impressionnées à l'extrémité chez les mâles. Femelles parfois aptères; caroncules exsertiles. Le genre Malachius a, par exception, les antennes insérées à la partie antérieure du front. Les larves, qui ressemblent à celles des Télé- phores, sont d'nn rose pelle, avec les appendices céphaliques roux, de fortes mandibules dentées, des palpes maxillaires de trois articles, la- biaux de deux, des antennes de quatre ; l'abdomen, de neuf segments, est terminé par un segment de deux pointes coniques et offrant en des- sous un mamelon pseudopode, charnu, rétractile, au centre duquel est l'anus ; la tête et tout le corps sont couverts en dessus et en dessous de poils courts et rouss.lfres ; les pattes sont longues et velues, terminées par un grand ongle. L'aspect et la structure de ces larves indiquent qu'elles sont carnassières, et l'expérience l'a vérifié : ainsi M. E. Perris a trouvé la larve du M. œneus, Linn., dans les toitures de chaume des bergeries des Landes, où elle vit de diverses larves, et celles de VAttalus (genre très-voisin) lateralis, Erichs., sous les écorces des jeunes Pins morts, où elle vit des larves du Tomicus ou Bostrychus hidens, Fabr., et peut-être au besoin de leurs excréments. Les nymphes des Malachius se forment dans une niche que fait la larve au milieu des détritus, plutôt que dans une véritable coque, sont rosées, hérissées de quelques poils, avec deux longues papilles divergentes, qui terminent l'abdomen et retiennent la dépouille de la larve. Nous figurons (pi. xxxvi, fig. 1 ; 1 a, antenne ; 1 h, mâchoire et palpe ; 1 c, lèvre inférieure et palpes) une variété AuM.ruficollis^Oliw, qu'on trouve surtout dans le midi de la France ; l'espèce est de France et d'Allemagne. Les espèces les plus communes sont le M. bipustulatus, Linn. , de G à 7 millim., vert, avec l'extrémité des élytres d'un jaune rougeâtre, et deux petites taches rouges aux angles antérieurs du corselet, à élytres des mâles simples à l'extrémité, très-abondant en mai et juin, près de Paris, dans les ce- '538 COLÉOPTÈRES. — LAMPYRIENS. réaies, sur les haies, etc. Le M. œnrus, Linn., de même taille, d'un vert métallique, à élytres rouges, avec une large bande suturale verte, les côtés du corselet rouges, les trois premiers articles des antennes élargis en une dent jaune pâle chez les mâles. Le M. marginellus, Oliv., d'un vert brillant, de 5 millimètres, à côtés du corselet et extrémité des élytres d'un jaune rougeâtre, les mrdes ayant les antennes dentées dans leur milieu, et les élytres plissées et épineuses à l'extrémité. Le M. puli- carius, Fabr., de très-petite taille, etc. Il y a plus de cent espèces de Malachies, celles d'Europe principalement du pourtour méditerra- néen, les autres à Madère, en Californie, dans l'Afrique australe, en Perse, à Ceylan, au Japon, en Sibérie. Le second type des Malachiides, représenté surtout par les genres Dasi/tes et Melyris, offre les élytres non abrégées et pareilles dans les deux sexes. 11 se compose d'insectes en général plus grands, plus ob- longs et surtout plus hérissés de poils que les Malachies ; ils n'ont pas de caroncules exsertiles, et, par suite, pas d'incision aux angles antérieurs du corselet. Ce dernier caractère, la villosité, et souvent le plus de consistance des téguments, qui deviennent assez durs dans le genre Melyris, les rapprochent des Clériens. C'est par eux que M. E. Wan- chard commence l'étude de cette tribu. GENRES PRINCIPAUX. ASTYCUSS, de Cast. — Antennes an peu dentées en scie. Corselet convexe et ar- rondi sur les côtés. Élytres assez convexes, d'abord parallèles, puis arrondies obliquement à l'extrémité. Ces insectes, principalement des régions chaudes de l'Amérique du Sud, et une espèce de Patagonie (vingt espèces environ), sont d'une li vrée très-élégante. — Ex. : ^4. trifasciatus, G.-Mén., du Chili (pi. xxxvi, fig. 2; 2 a, antenne grossie; 2 6, tarse postérieur; 2c, crochets des tarses à élytres rouges, avec trois bandes transvcrses, et suture d'un noir verdAtre). KVUIA, Fabr. — Crochets des tarses bifides. Les autres caractères comme le genre Melyris, dont il n'est pas distinct,' selon MM. Gemminger et de Harold. Exemple : Z. oblunga, Fabr., de tout le pourtour de la Méditerranée (pi. XXXVI, fig. 3 ; 3 a, antenne du mâle ; 3 6, antenne de la femelle ; 3 c, tête vue de face; 3 d, crochets des tarses très-grossis : tous les deux sont bifides ; mais, dans la figure, l'un est vu dessus, ce qui cache la dent du dessous). Cet insecte existe dans la France méridionale, et se trouve, disent les auteurs, à l'intérieur des maisons. MALACHTIDES. — MELYRIS, PELECOPHORUS, DASYTES. 539 HIELTRl!^, Fabr. — Antennes à articles dentés en scie à partir du quatrième. Téguments cornés et sculptés, beaucoup plus résistants que chez les autres Malachiides. Quelques espèces de ce genre sont de l'Europe australe ; la plupart sont exotiques, d'Egypte, d'Arabie, d'Abyssinie, des Indes orientales, de Cafrerie et du Cap. — Ex. : M. viridis, Fabr., du cap de Bonne -Espé- race (pi. xxxvi, fig. h, antenne) ; et M. abdominalis, Fabr., du Sénégal (pi. xxxvi, fig. 5, antenne). Les Melyris sont d'assez grande taille pour la tribu actuelle ; les pattes sont en général fauves ; le corselet et les élytres sont verts, bleus ou noirs; des points tuberculeux existent entre les côtes des élytres, et le corps est peu poilu. Vingt espèces environ. PEliECOPHORi'S, Latr. — Antennes un peu dentelées; dernier article des palpes sécuriforme. Corselet transversal ; élytres allongées, subparallèles. Cro- chets des tarses simples, avec lamelles en dessous. Ce genre est surtout des îles Maurice et Bourbon. — Ex. : P. nùjro- lineatus, G-.Mén., de Maurice (pi. xxsvi, fig. 6; 60, mâchoire et palpes; 6 6, tète vue en dessous; 6 c, tarse antérieur; 6 d, tarse postérieur). Le nom de cet insecte vient de ce que ses élytres ont la suture et deux lignes longitudinales d'un noir vif ; elles sont fauves, ainsi que le corselet, et ces organes couverts d'un duvet soyeux doré. Outre deux espèces de ces îles, il en est une troisième des Indes orientales. DASl'TEiS, Paykull. — Corps plus ou moins velu. Élytres peu convexes. Ce genre abonde en espèces répandues surtout en Europe dans les régions du pourtour de la Méditerranée. On les trouve sur les fleurs, quand ils sont à l'état adulte. Leur coloration est uniforme, souvent d'un riche éclat métallique. On connaît quelques larves du genre Da- sytes, qui sont très-voisines de celles du genre Malachius. Seulement leur corps, au lieu d'avoir les bords parallèles, s'élargit peu à peu en arrière, et les poils dont il est revêtu sont plus longs et plus abondants. Les mandibules sont simples, et il y a cinq stemmates de chaque côté, dont trois sur la môme ligne et les deux autres en dessous, ce qui rapproche ces larves de celles des Clériens. Elles sont blanchâtres, avec des taches obscures et non rosées, comme celles des Malachies. Le corps se termine par deux petites pointes aiguës. Elles vivent sous les écorces ou dans les arbres vermoulus. On trouve la larve du B. serri- cornis, Parreys, dans le Poirier, d'après M. Waterhouse. Les nymphes sont pareilles à celles des Malachius. Il faut citer, comme commun partout, le D. cœruleus, de Geer, de 5 millimètres, d'un bleu d'acier, parfois verdâtre, à appendices noirs, à élytres subaplalies et très-ponc- 5hO COLÉOPTÈRES. — CLÉRIENS. tuées. Il y a plus de cent espèces du genre Dasytes. Oulr.^ l'Europe, on les trouve au\ Canaries, en Sibérie, en Abyssinie, en Syrie, en Perse, en Californie, au Nouveau-Mexique^ au Chili et à Adélaïde (Australie). Tribu des CliERlE^S. Le petit groupe auquel nous restreindrons le nom de Clériens, au nombre de près de sept cents espèces, se trouve être assez homogène, à la condition d'en retrancher les insectes groupés autour des genres Melyris et Dasrjtes, et d'autre part les types Lymexylon, Ptinus, Anobium, à larves lignivores, série d'insectes qui forment la tribu des Clériens pour M. E. Blanchard, avec les vrais Clériens, à larves carnassières. Les caractères généraux deviennent très-peu nombreux avec toutes ces réunions hétérogènes. Latreille avait du reste donné le premier exemple du groupement actuel ; plus tard il réunit les Clériens aux Malaco- dermes : les affinités, assez grandes pour les larves, sont médiocres pour les adultes. Caractères : Mâchoires bilobées, avec palpes de quatre articles ; lan- guette membraneuse ou coriace, à paraglo.sses nuls ou cachés, avec palpes de trois articles. Antennes presque toujours de onze articles, ordinairement dentées ou en massue, insérées sur les côtés du front au devant des yeux. Corselet assez long et plus étroit à sa base que les élytres. Corps à téguments assez solides, le plus ordinairement allongé ou oblong, et fréquemment plus ou moins subcylindrique ; hanches antérieures très-rapprochées, les postérieures transverses, sans lames supérieures distinctes. Tarses pentaraèrcs ou subpentamères, munis de lamelles inférieures plus ou moins développées et ayant l'avant-dernier article apparent bilobé ou échancré. Abdomen ayant cinq ou six seg- ments apparents et libres. Le caractère du corselet donne aux Clériens un aspect spécial, et les tarses, qui n'ont souvent que quatre articles visibles en dessus, consti- tuent un second point important. C. Duméril les range dans son sous- ordre des Coléoptères tétramérés. Ce sont de jolis insectes, peu abondants en espèces en Europe, répandus surtout en Amérique ; quelques espèces des genres Coryneles et Necrobia sont devenues cosmopolites par le fait de leur régime. Les Clériens ont en général des téguments de médiocre consistance, toujours villeux, des couleurs vives, fréquemment dispo- sées par bandes transversales. On les rencontre pour la plupart sur les fleurs, et plus souvent encore sur le vieux bois, les écorces, au moment de l'éclosion ou de la ponte. Leur régime à l'état d'adulte est mal connu; il en est de phytophages et d'autres carnassiers, en raison de la force de leurs mandibules, entre lesquelles, dit M. E. Blanchard, on les voit sou- vent.tenir les insectes dont ils viennent de s'emparer. L'accouplement GYLIDKUS. 5Ui desClériens se fait à la façon habituelle des Coléoptères et de beaucoup d'insectes, le mâle se cramponnant sur le dos de la femelle .Les femelles de la plupart des espèces, trop grosses pour entrer dans les trous creusés par les larves lignivores, introduisent seulement leur abdomen, qui s'allonge en oviscapte dans le trou de l'écorce, et pondent ainsi à l'in- térieur de la galerie. Les larves des Clériens ont toutes des mœurs carnassières. Celles de la plupart des espèces habitent sous les écorces, dans les galeries des insectes xylophages dont les larves deviennent leur proie ; d'autres se rencontrent dans les nids des Hyménoptères mellifiques; enfin certaines, comme leurs insectes parfaits, rongent les cadavres, les pelleteries, les substances animales desséchées. Toutes les larves connues des Clériens sont identiques par les organes, et ne diffèrent que par la taille et Tin- tensilé de la coloration. Toutes sont charnues et velues, rosées, d'un gris rougeâtre ou rouge, plus ou moins déprimées, un peu élargies en arrière. Les mandibules sont fortes, les mâchoires et le menton soudés, les antennes de quatre articles, les palpes maxillaires de trois, les palpes labiaux de deux. Il y a cinq ocelles de chaque côté sur deux rangs obliques de trois et de deux. Les segments thoraciques sont cui- rassés en dessus, et portent des pattes cylindriques et assez grêles de quatre articles ; les anneaux abdominaux ont des bourrelets latéraux et des boursouflures rétractiles, et le dernier est corné, au moins en partie, et terminé par deux crochets servant à retenir la peau de la larve lors de la nymphose ; au-dessous est l'anus, au centre d'un ma- melon pseudopode servant à la progression. Ces larves se changent en nymphes dans une cellule au milieu de la vermoulure, et la tapissent d'une sorte de vernis comme le mucus des Limaçons, qui paraît suinter de leur corps ; elles le recueillent en raclant leur abdomen avec les mandibules, puis badigeonnent avec les pièces buccales ainsi impré- gnées les parois internes de la cellule. Les nymphes sont parsemées de nombreux poils fins, et le dernier segment est terminé par deux pa- pilles divergentes, coniques, peu allongées. On devra consulter pour ce groupe V Essai monographique sur les Clérites, par M. M. Spinola (en fran- çais, Gênes, 18/i/j). GENRES PRINCIPAUX. CiYIilDRtJS, Latr. — Tète grande et convexe. Corselet en cône régulier renversé. Élytres un peu plus courtes que l'abdomen ; antennes à articles déprimés allant en s'élargissant. Ces insectes, allongés, subcylindriques, à couleurs variées, mais uni- formes par organes, sont d'Afrique et de la Polynésie, de Madagascar, des lies Sondaïques. Quatorze espèces. — Ex. : C. Buqueti, G.-Mén., du Sénégal (pi- xxxvi, fig. 7; 7 a, tête avec une antenne; 7 6, tarse posté- rieur: 7 c, ses crochets vus en dessous). 562 COLÉOPTÈRES. — CLÊRIENS. DIMOPS OU Denops, Steven. — Caractères très-analogues aux Cylidrus. Une seule espèce constitue ce genre, répandue sur tout le pourtour méditerranéen et s'avançant beaucoup dans l'intérieur : c'est \eD. albo- fasciata, Charp., ou personata, Aragona, d'un rouge sanguin, avec les élytres traversées par une bande blanche. Sa larve se trouve dans la Vigne morte, où elle dévore les larves de Xylopertha sinuala. TiLlitliS, Oliv. — Antennes terminées par une massue en scie ou pectinée, le onzième et dernier article acuminé. Élytres arrondies à l'extrémité. Les Tillus sont répandus dans toutes les parties du monde et se trou- vent sur les vieux bois, leurs larves faisant la guerre à celles des in- sectes xylophages. — Ex. : T. rubricollis, G.-Mén., du Sénégal (pi. xxxvi, fig. 8 ; 8 a, antenne grossie) ; T. unifasciatiis, Fabr., de l'Europe cen- trale et méridionale, jusqu'aux environs de Paris (pi. xxxvi, fig. 9, antenne grossie; 9a, mâchoire avec palpe à dernier article ovoïde; 9 b, lèvre inférieure avec palpe à dernier article en très-grand triangle : ces caractères des palpes sont génériques). Une vingtaine d'espèces d'Europe, des deux Amériques, de l'Afrique chaude, des Indes, de l'Australie, des Philippines, de l'île Woodlark. PRIOC'ERA, Kirby. — Dernier article des palpes labiaux très-grand, en forme de fer de hache; dernier article des palpes maxillaires allongé, déprimé, obtus au bout. Insectes des régions chaudes de l'Amérique, surtout méridionale, de grande taille, à téguments solides, brillants, ornés de couleurs vives et variées, à pattes hérissées de longs poils. — Ex. : P. variegata, Kirby, du Brésil (pi. xxxvi^ fig. 10, palpe labial ; 10 a, palpe maxillaire; 10 6, tarse antérieur vu en dessous avec ses lamelles). Une vingtaine d'espèces. AXIMA, Kirby. — Derniers articles des palpes maxillaire et labial en triangle subéquilatéral. Il y a deux espèces brésiliennes, à forme cylindrique. — Ex. : ^. ««rt- lis, kirby (pi. xxxvi, fig. 11, palpe maxillaire; 11 b, palpe labial ; 11 a, tarse antérieur. Habite le Brésil intérieur. OPIIiO, Latr.,ou QpiLUS, Schonh. — Corps allongé, déprimé, pubesceat. Ce genre est jusqu'ici exclusif à l'ancien continent, surtout des ré- gions chaudes de Madagascar, de l'Australie, de la Tasmanie. Il a pour couleurs habituelles le brun noirâtre et le fauve jaunâtre ; ses larves carnassières se nourrissent des larves lignivores. M. E. Pcrris a vu la larve d'un jaune clair et testacé de l'O. mollis, Linn., espèce de toute THANASIMUS, CLERUS. 5i|3 l'Europe et de l'Algérie, détruire dans les sarments de Vigne morte les larves de Xylopertha sinuata, dans les jeunes pousses mortes des Pins les larves de VAnobium molle, et sous l'écorce des mêmes arbres les larves des Tomicus bidens et Laricis. Enfin, M. Perris a pris cette lar\e dans les maisons, courant sur les planchers et entrant dans les trous des Vrillettes pour dévorer leurs larves. On trouve aussi dans les bois des maisons TO. domesticus, Sturm., de France el d'Allemagne, dont la larve fait aussi la guerre à celle des Anobium. TnAjlASHMl'S, Lalr. — Ne diffère des Clerus que par une massue antennaire terminale à peine accusée. f>e3 mœurs des Thanasinim sont analogues k celles des Tillus ; ils se trouvent comme eux sur les bois morts. Doués d'instincts très-carnassiers, ils font sous leurs divers états une guerre acharnée aux larves des in- sectes xylophages, notamment à celles des Scolytiens, et ont droit, à ce titre, à toute notre reconnaissance. La larve du T. mutîllariiis, Fabr., d'une partie de l'Europe méridionale, d'un beau rouge, bien plus vif que chez le T. formicariiis, se trouve dans le Chêne et l'Orme, et vit de lar- ves de Tomicides et de Longicornes. Le T. formkavius, Linn., de toute l'Europe et du Caucase, est, d'après M. Ratzeburg, un insecte très-utile : adulte, il recherche les insectes lignivores sur l'écorce et dans ses anfrac- tuosités, et sa larve, de couleur rose, dévore leurs larves sous les écorces. M. E. Perris l'a rencontrée dans les galeries du Tomicus steno- graphus, du Melanophila tarda, de VjEstytwmus œdilis, etc., où se forme sa nymphe d'un rose tendre. Le T. quadrimaculatus, Fabr., a sa larve d'un gris livide, teint ou marbré de rougeàtre, mangeant sous les écorces de Pins les larves de Scolytiens et les chenilles de Tinéites. Les espèces types de ce genre doivent leur nom à ce que leur aspect rappelle un peu les grandes Mutilles femelles aptères (Hymen.), comme Mutilla maura. Le T. formicarius, de 7 millimètres, a la tète noire, avec le corselet rouge, ainsi que la base des élytres, le reste des élytres noir, avec deux bandes sinueuses d'un blanc grisâtre ; il est commun sur les tas de bois de chêne. Le T. mutillarius, un peu plus grand, plus large et plus velu, vit sur les Pins ; il est noir, avec la base des élytres d'un rouge orangé, le reste des élytres analogue au précédent. Nous repré- sentons les détails du T. formicarius {p\. xxxvi, fig. 16, lèvre inférieure et palpes; 1/ia, mâchoire et palpe; ik 6, antenne; lUc, tarse anté- rieur de profil). rLERUS, Geoffr., ou Trichodes, Herbst. — Antennes terminées par une massue trièdre, déprimée et tronquée au bout. Corps allongé. (MM. Gemminger et de Harold séparent ces deux genres très-voisins.) (:c sont de beaux insectes à corps villeux, à élytres ornées le- plus. sou- vent d'éclatantes fascies transvcrscs rouges ou jaunes sur un fond noir, bkU COLÉOPTÈRES. — ÇLÉRIENS. OU vice versa. Leurs larves, du moins pour les espèces dont les mœurs sont le mieux connues, vivent dans les nids de divers Hyménoptères mellifiques. Nous citerons le C. bombycinus, Chevr., du Mexique (pi. xxxvi, fig. 13); le C. alvearius, Fabr., de toute l'Iiurope et du Caucase, dont la larve, connue de Réaumur, vit dans les nids en terre dure, criblée de loges, des Abeilles maçonnes (pi. xxxvj, fig. 17, tête vue en dessous ; 17 a, antenne ; 17 6, tarse postérieur; 17 c, tarse antérieur); le C. apia- rïus, Linn., également répandu, dont la larve, nommée Ve7- rouge par les apiculteurs, se trouve dans les ruches de l'Abeilie domestique. M. K. Perris a rencontré la larve rouge du C. alvearius sous l'écorce du Pin maritime, dans le» galeries du Tomicus Laricis. 11 y u là une sorte de contradiction avec les mœurs habituelles ou supposées; mais l'étude de ces larves a besoin d'être reprise. D'après M. Haraet, le Clairon des ruches, contrairement à l'opinion commune, ne serait pas un ennemi des Abeilles. La larve ne touche pas aux produits des ruches saines, ni aux larves vivantes. Elle y glisse son cocon entre les parois et les gâ- teaux, et dans les rayons gâtés par l'humidité, ainsi qu'au milieu des cadavres d'Abeilles amoncelés et en putréfaction. Elle vit de miel altéré, et non de miel sain, et de diverses matières animales en décomposition, en particulier de débris d'Abeilles et de larves, peut-être de leurs excré- ments. Cette manière de voir concorde avec l'observation de M. E. Perris. Le C. alvearius, de 12 à 15 millimètres, est d'un bleu assez brillant, à reflet verdâtre, avec les clylres rugueuses et ponctuées, d'uu beau rouge, avec trois bandes d'un noir bleu, et une tache carrée de même couleur entourant l'écusson : c'est le Clairon a bandes rouges de Geoffroy. Le C. apiarius, généralement un peu plus petit, manque de la tache carrée autour de l'écusson, et ressemble au précédent. A l'état adulte, ces beaux insectes se prennent sur les fleurs, surtout celles des Oignons et des Ombellifères. Les Clerus et Trichodes renfer- ment plus de cent trente espèces d'Europe, surtout méditerranéenne, de Syrie, d'Egypte, de Barbarie, d'Arabie, de Perse, de Sibérie, des deux Amériques, des Indes, de Java, du Sénégal, de Cafrerie et d'Aus- tralie. U faut encore indiquer le C favarius, lUig., du sud-est de l'Eu- rope, avec beaucoup de va:riélés, et le C. Olivieri, Chevr.;, rapporté de Perse par Olivier (pi. xxxvi, fig. 16). Dans les Clerus, il arrive souvent que les mâles ont les cuisses postérieures épaisses et le dernier anneau ventral très-développé. TARSOSTEaxs, Spin. — Élytres très-allongées, parallèles, arrondies etl arrière. Tarses subpentamères à premier article petit. Corps linéaire, grêle. Le type de ce genre est le T. univittatus, Rossi (pL xxxvi, fig 15, tarse antérieur), petit insecte d'un noir brunâtre assez brillant, avec une bande blanche ou jaunâtre sur les élytres, découvert d'abord en Italie, existant dans toute l'Europe, l'Algérie et le Caucase, et probablement PELONIUM, CORYNETES, NEGROBIA. 545 cosmopolite, car on le cite aussi des États-Unis et du Cap, se trouvant dans les appartements. Sa larve se rencontre dans les bois de Chône, où elle poursuit les larves du Lyctus canaliculatus . 11 y a une autre espt^'ce probablement polynésienne, et une troisième de l'île Art. PELOIVlIIM^ Spin. — Antennes terminées par une massue lamelliforme. Tarses subpentamères par atrophie d'un article. Ces insectes sont des diverses régions de l'Amérique méridionale, jusqu'au détroit de Magellan. — Ex. : P. viridipcnne, Kirby, du Brésil in- térieur (pi. XXXVI, fig. 20; 20 rt, lète vue en dessous; 20 6, antenne; 20 c, tarse antérieur). Environ cinquante espèces ; une de la Nouvelle- Zélande. €ORY:i'f:TElS, Herbst. — Antennes courtes, terminées par une petite massue non lamelliforme, de trois articles. Palpes à dernier article en triangle. Tarses subpentamères. Le type de ce genre est le C. cœrulcus, de Geer, de Suède, d'Angle- terre, de France, d'Allemagne, de ti 1/2 millimètres, d'un bleu ver- dàtre très-brillant. Les mœurs des larves de ce genre et du suivant ne sont pas encore suffisamment connues. On trouve le C. cœruleus dans les matières animales, sur les fleurs, sur les vieux troncs d'arbres, et aussi très-communément dans les vieux bois des maisons. Il est pro- bable, dit Jacquelin du Val, que la larve vit aux dépens des larves xylo- phages; elle se trouve dans les mêmes matières que l'adulte. IVECROBIA, Latr. — Genre très-voisin ou même section du précédent. — Massue antennaire plus grande et déprimée. I*alpes terminés par un article allongé et tronqué au bout. Les Necrobia recherchent, pour la plupart, les substances animales desséchées et en décomposition, les cadavres, etc. 11 reste à bien établie si leurs larves sont réellement saprophages, et si elles ne dévorent pas plutôt les larves d'autres insectes saprophages. Nous représentons le N. violacea, Linn., de toute l'Europe, d'Asie, d'Amérique (pi. xxxvi, fig. 18; 18a, palpe maxillaire; 18 6, antenne), et des détails du N. rufi- collis, Fabr., d'Europe, d'Algérie (pi. xxxvi, fig. 19, mâchoire, avec palpe; 19 a, antenne). Il est d'un noir violacé, avec le corselet et la base des élytres noirâtres. Cette espèce est devenue cosmopolite, ainsi que le A'', rufipes, de Geer. Le N. violacea est en entier d'un riche bleu brillant; c'est le Clairon bleu de Geoffroy, de 5 millimètres environ au maximum, avec sujets bien plus petits, qu'on prend sur les fleurs et souvent dans les maisons, et dont la larve, dit Geoffroy, mange les charognes. On l'a rencontrée aussi dans les peaux sèches et dans des Champignons. Le N. rufipes est de taille analogue, bleu, avec les pattes, GIRARD. 35 5Zj6 COLÉOPTÈRES. — ■ CLÉRIENS. la base des antennes et les pièces buccales d'un rouge leslacé. Le .V. ru- ficollis présente un intérêt touchant, en ce que cette espèce a sauvé la vie au célèbre entomologiste Latreille. Il dit lui-même, dans son His- toire naturelle des Insectes : « A l'époque de ces jours affreux que firent eclore en France et l'ambition de quelques hommes et le fanatisme ré- volutionnaire, l'insecte que je viens de décrire se trouvait à Bordeaux sur les murs de la prison où j'étais détenu. Renfermé dans un bouchon de liège cacheté et envoyé à M. Bory de Saint-Vincent, cet insecte de- vint l'occasion de ma délivrance. » Aussi Latreille, en créant le genre Necrobia dans sa reconnaissance, lui donnait la signification de vie du mort, et non pas vivant sur les cadavres, bien que cette interprétation lui convienne aussi. .\ous croyons que le curieux récit publié par M. Brullé {Hist. nat. des Ins., t. VI), d'après les documents transmis par Bory de Saint-Vincent, est de nature à tempérer l'aridité de tant de détails descriptifs, et justifiera cette digression. « Latreille n'était connu, avant 1792, que par des communications d'insectes nouveaux faites aux entomologistes de l'époque, et par des mentions de Fabricius et d'Olivier. Prêtre à Brives, il fut arrêté avec les curés du Limousin qui n'avaient pas prêté serment, et, quoique ne desservant pas de paroisse, il ne dut pas être compris dans la catégorie. Les malheureux ecclésiastiques, avec ceux qu'on recruta en chemin, furent conduits à Bordeaux sur des charrettes^, pour être embarqués et déportés à la Guyane. Us arrivèrent vers le mois de juin, et furent déposés à la prison du grand séminaire, en attendant qu'un navire fût préparé pour les transporter. En ce temps, quoique fort jeune (c'est Bory de Saint-Vincent qui parle), je m'occupais déjà beaucoup de sciences naturelles, et je recueillais surtout des insectes. Le 9 ther- midor, qui arriva, fit suspendre la déportation des prêtres; cependant les prisons ne se vidèrent que lentement, et les condamnés à la dépor- tation ne devaient pas moins être expédiés ; mais leur départ fut re- tardé jusqu'au printemps, et Latreille demeura ainsi détenu à la prison du grand séminaire. Latreille occupait la même chambre qu'un vieil évoque malade^, dont un chirurgien venait chaque matin panser les plaies. Pendant une de ses visites, un insecte sort de quelque fente du plancher. Latreille le saisit, l'examine, le pique avec une épingle sur un bouchon, et paraît tout content de sa trouvaille. « — C'est donc rare? » dit l'élève chirurgien. — Oui, répond l'ecclésiastique. — En ce cas, » vous devriez me le donner. — Pourquoi? ~ C'est que je connais une )) personne qui a une belle collection et à laquelle il ferait plaisir.— » Eh bien ! portez-lui cet insecte, diteè-lui comment vous l'avez eu, et » priez-le de m'en dire le nom. » Le jeune homme accourut chez moi, me remit le Coléoptère, et, malgré toutes mes recherches;, je ne pus le dé- terminer. Le lendemain, quand l'élève revint savoir ma réponse, je lui dis que je croyais le Coléoptère non 'décrit. Ayant ouï cette décision, Latreille vit que j'étais un adepte, et, comme on ne donnait pas aux PTINIENS.— LYMËXYLONIDES. 547 détenus de plumes ni de papier, il dit à notre intermédiaire : « Je vois » bien que M. Bory doit connaître mon nom. Vous lui direz que je suis » l'abbé Latreille , qui va aller mourir à la Guyane avant d'avoir publié » son Examen des genres de Fabricius. » Quand ceci me fut rapporté, j'ob- tins, après de nombreuses démarches, que Latreille sortirait de prison, sous caution de mon oncle de Dargelas et de mon père, comme conva- lescent, et qu'on le représenterait quand l'autorité le réclamerait. La- treille appareillait déjà, lorsque nos démarches parvinrent à obtenir sa sortie providentielle, car le bâtiment sur lequel il était embarqué som- bra en vue du rivage, et les marins seuls purent se sauver. C'est ainsi que le Necrobia ruficollis fut le sauveur de Latreille, car, peu de temps après sa sortie de prison, on obtint sa radiation de la liste des déportés. » Tribu des ptimiems. Si nous poursuivions la chimère des groupes naturels égaux, nous devrions subdiviser les Ptiniens en trois tribus correspondantes aux trois types : Lymexylon, Ptinus, Anobium. Une grande uniformité de régime réunit les insectes de ces groupes ; ils vivent de substances desséchées, soit animales, soit le plus souvent végétales, et, peu nuisibles à l'état adulte, causent souvent de grands dégâts sous la forme de larves. Leurs couleurs sont ternes, peu variées, se rattachant au brun noirâtre, au fauve enfumé, au jaune testacé ; parfois des poils ou des écailles re- couvrent les téguments ou y tracent quelques dessins peu diversifiés. Les caractères généraux communs à ces trois types sont en petit nombre : Mâchoires à deux lobes ciliés. Palpes maxillaires de quatre articles, labiaux de trois ; languette coriace ou membraneuse, à para- glosses nuls ou cachés. Antennes variables, insérées sur le front en de- dans des yeux. Tarses tous de cinq articles développés. L - LYMEXYLONIDES. Ces insectes ont des rapports avec les Malacodermes par la présence des trochantins antérieurs, le peu de solidité des téguments et le nombre variable des segments de l'abdomen, et avec les Clériens par un corps allongé et cylindroïde. Latreille, sous le nom de Lime-bois ou Xylotrogues, en faisait une tribu de ses Malacodermes. C. Duméril, bien auparavant, comprenait le genre Lijmexylon dans sa famille des Térédyles ou Perce-bois, en y joignant les genres Anobium, Ptinus, Pti- linus, etc. La tète des Lymexylonides est entièrement dégagée du corselet et suborbiculaire. Chez les mâles, le troisième article des palpes maxil- laires porte un grand appendice flabellé, d'usage inconnu. Les an- 548 COLÉOPTÈRES. — PTINIEINS. tennes ont onze articles. L'abdomen présente en dessous six ou sept seg- ments apparents et libres. GENRES. A'B"R.%CTOCl3Hl.'S, Paliss. Beauv. — Antennes courtes, robustes, fusiformes. Élytres Irès-courles et squamiformes. Ailes plissées au repos en éventail et plus courtes que l'abdomen, élargi et déprimé, de six segments. Ce genre, si bizarre d'aspect et ressemblant à des Névroptères, com- prend dix espèces disséminées dans les zones tonides des deux conti- nents. Il est ligniperde, sauf quelques espèces du Brésil vivant dans les Bolets. Les ailes fermées sont très-analogiies aux ailes pointues des Cour- tilières (Orthoptères). Nous représentons Fespèce la plus commune au Brésil, A. brasiliensis, Lepell. et Serv, (pL xxxvii, fig. 8), qu'on prend le soir à l'intérieur des maisons, où la lumière l'attire. BVIiŒt'KTlf!», Latr. — Antennes courtes, robustes, dentées. Élytres recouvrant labdonien, parallèles, acuminées à l'extrémité. Abdomen de six segments et sept chez le mâle. Le type de ce genre est un insecte d'un rouge fauve mêlé de noir, l'if. dernu'Stoïdes, Linn., à mâle beaucoup plus petit que la femelle, à corps noir, tandis qu'il est jaune chez la femelle, commun dans le nord de l'Europe, beaucoup moins répandu au centre, vivant dans le Chêne, le Bouleau, le Pin. La larve est allongée, cylindrique, recourbée en ar- rière, à peau molle, mais âpre par des spinales. La tête est rétractile dans un prothorax renflé en capuchon, et les organes buccaux pareils à ceux des larves d'Anobium. Il n'y a pas de stemmates, et il existe trois paires de pattes. Les segments sont transversaux, et le dernier de l'ab- domen se prolonge supérieurement en une très-longue saillie conique, terminée par deux petits crochets cornés, et présentant sur ses côtés des aspérités de même nature. 11 y a neuf paires de stigmates, une pro- thoracique, huit abdominales, comme à l'ordinaire, Nous représentons une espèce très-voisine, VH. javanicus, Chevr., de Java (pi. xxxvii, fig. 9; 9 a, son antenne). U y a neuf espèces d'Europe, des deux Amériques, du Gabon et de Java. LYMEX-YliOI*', Fabr. — Antennes grêles, filiformes. Élytres molles, un peu plus covu'les que l'abdomen, celui-ci de cinq segments. Les forêts de Chênes de l'Europe septentrionale nourrissent en abon- dance le L. navale, Linn., fort rare au contraire aux environs de Paris. Plus petit que l'espèce précédente, il est jaunâtre, avec l'extrémité des élytres brune. La larve est encore plus 'grêle et plus allongée que celle àeVJl. dermestoïdes, e[ sa peau est plus lisse. Ses segments sont plus LYMEXYLON. — PTINIDES. 5^49 larges que longs, et le dernier segment se renfle en forme d'ampoule arrondie en arrière. La nymphe est allongée et svelte comme l'adulte. Cette larve, ainsi que la précédenle, attaque les arbres abattus ou encore debout, mais malades, et y creuse des galeries horizontales, profondes de près d'un décimètre, dont elle élargit l'entrée au moment de la nymphose, afin d'assurer une sortie facile à l'adulle. Les deux larves vivent exclusivement de bois. LeL. navale âoH son nom à ce que sa larve cause parfois les plus grands dommages dans les objets de chêne des arsenaux maritimes. On a proposé, pour la détruire, les fumi- gations, les substances volatiles, comme le sulfure de carbone, moyens peu efficaces contre les insectes enfoncés dans des galeries et fermant leurs stigmates. Le mieux est de préparer à l'avance les bois, soit parle procédé Boucherie, où l'absorption des substances préservatrices se fait sur des tiges vivantes^ au printemps, lors de la montée de la sève ; soit par injection par la pression atmosphérique déterminée par la machine pneumatique. On introduit ainsi dans les bois de construction la créosote, le sulfate de fer ou d'alumine, des solutions arsenicales, etc. Nous figurons de nombreux détails du L. navale (pi. xxxvn, fig. 10, adulte ; 10 a, antenne du mrde ; iO f, antenne de la femelle ; 10 6, la- bre ; 10 c, mandibule du mâle ; 10. r/, id. de la femelle ; 10 cl, mâchoire du mâle, avec appendice flabellé ; 10 h, id. de la femelle ; 10 e, lèvre inférieure du mâle ; 10 i, id. de la femelle), il y a une seconde espèce d'Amérique septentrionale, une troisième de Taemanie. H. — PTINIUES. Latreille avait réuni ce groupe au suivant, sous le nom de Ptiniores: mais ces deux groupes diffèrent par l'aspect et par plusieurs caractères notables. Les Plinides sont de petits insectes, de forme généralement subovalaire, allongée ou oblongue, et plus rarement courte et forte- ment gibbeuse. On les trouve dans les maisons, dans les vieux troncs d'arbres, dans les branches mortes, sous la mousse, les lichens, les pierres, etc. Ils sortent après le coucher du soleil et également avant son lever (.lacquelin du Val). Leur nourriture se compose de matières animales desséchées, de débris et détritus divers. La tête des Ptinides est infléchie ou verticale, plus ou moins enfon- cée dans le corselet, le plus souvent invisible d'en haut. Les antennes sont filiformes et presque toujours de onze articles. Le corselet, obli- quement coupé en dessous dans sa partie antérieure, et plus ou moins en forme de capuchon, n'offre pas de lignes latérales de suture. L'ab- domen a en dessus cinq segments apparents, et les hanches postérieures ne sont pas excavées pour recevoir les cuisses au repos. On consultera pour ce groupe, qui ne renferme pas loin de quatre cents espèces, une monographie de Boïeldieu (Ann. Soc. entom. de France., 1854, bull. LXXVH, et 1856, p. 285). 550 COLLOPTÈRES. — PTINIENS. GENRES PRINCIPAUX. PTIH'CS, Linn. — Élytres de forme variable, mais non comprimées latéralement, toujours ponctuées et pubescentes. Jambes peu ou point comprimées, non frangées. Les Ptines ont des espèces nombreuses et très-répandues dans les ha- bitations, sous les mousses et les vieilles écorces, et très-souvent sous les pierres dans les pays chauds. Les femelles d'un assez grand nombre d'espèces sont aptères. Certaines espèces communes sont un grand fléau pour les collections d'histoire naturelle. C'est surtout le cas du P. fur, Linn., nommé par Geoffroy Bruche à bandes, qu'on trouve dans les granges, les greniers, les poulaillers, les colombiers, où il ha- bite les nids, etc. 11 se rencontre en Europe et dans l'Amérique septen- trionale. Le mâle est cylindrique et allongé, la femelle plus ou moins ovale. Sa larve ressemble beaucoup à celle des Anobium. Le P. fur, long de 3 1/2 millimètres environ, est d'un brun plus ou moins roussâtre, ayant sur les élytres deux taches de pubescence blan- châtre. Non moins nuisible aux collections est le /'. lalro, Fabr., d'un roussâtre obscur, de 3 millimètres, de même forme qne le précédent dans les deux sexes, sans taches. Une espèce plus rare est représentée pi. xxxvn, fig. 1 : c'est le P. italicus, Aragona, de l'Italie centrale. Les soixante-seize espèces connues du genre Ptinus sont d'Europe, de Madère, d'Algérie, d'Egypte, de Cafrerie, de l'île de France, de Sibé- rie, du Kamtchatka, de Ceylan, des îles Wallis, de Taïti, de l'Amérique septentrionale, de la Havane, du Venezuela, du Brésil, du Chili, de Tas- manie et de la Nouvelle-Zélande. Dans un genre très-voisin, /M/o6/rt, Latr. (qui vit dans les mai- sons), se trouvent sept espèces d'Europe, d'Algérie, de l'île de France et du Mexique. Nous citerons H. iinperialis, Linn., de 3 à U millimètres, d'un brun noirâtre, à corselet caréné, bidenté en arrière, à élytres subrectangles, ayant chacune une tache sinuée et argentée en pubes- cence blanchâtre, de sortéque les deux taches réunies simulent grossiè- rement l'aigle à deux tètes. GIBBll'M, Scopoli. — Élylres ampuUacées, comprimées latéralement, très-lisses et glabres. Jambes comprimées, fortement et très-densément frangées sur leur bord externe. Les insectes de ce genre sont des plus singuliers parmi les Coléo- ptères, par la forme bossue de leur corps, leur corselet très-court, an- guleux en arrière dans son milieu, les cuisses longues et très-renflées, contournées. Le type est le G. scotias, Fabr., ou la Bruche sans ailes de Geoffroy, offrant assez bien la couleur et l'aspect d'une gouttelette de sang desséché, ou d'une très-grosse puce, de 3 millimètres, d'un brun ANOBIIDES. — ANOBIUM. 551 rougeâtre très-brillant, assez rare, d'Europe et d'Algérie, se trouvant parfois en grande quantité à la fois dans les parties vieilles et malpro- pres des habitations, dans les vases, les cuvettes placées dans les coins obscurs. Ses hanches postérieures s'insèrent dans des cavités cotyloïdes closes de toutes parts et hémisphériques ; ses élytres emboîtent pres- que entièrement l'abdomen et se soudent ; il n'y a ni écusson ni ailes dans les deux sexes ; enfin, les diverses parties de la bouche offrent des poils composés très-curieux, ressemblant à de petites plumes. Cet étrange insecte a été trouvé plusieurs fois en Egypte, en quantité con- sidérable, dans des vases antiques contenant des matières résineuses qu'on suppose l'y avoir attiré. Il est représenté pi. xxxvii, fig. 6 (6 rt, labre; G 6, mandibule ; 6 c, mâchoire; 6(1, lèvre inférieure et palpe; 6 e, antenne). Trois autres espèces delà Turquie, de la Havane, de Co- lombie. III. —ANOBIIDES. Nous n'exposerons que les caractères par lesquels les Anobiides dif- fèrent des Ptinides, les autres non mentionnés étant communs aux deux groupes. Les pattes sont moins longues que chez les Ptinides, et les cuisses débordent à peine les élytres. Le corselet, de même forme, a une ligne latérale de suture. Les antennes sont dentées ou flabellées chez les uns, terminées par une massue lâche, parfois très-longue, mais peu tranchée chez les autres, variables quant au nombre de leur articles ; les hanches postérieures sont cxcavées pour recevoir les cuisses au repos. Les Anobiides sont des insectes de très-petite taille, de couleur tout à fait sombre et terne, se contractant fortement à la moindre apparence de danger et simulant plus ou moins obstinément la mort, et cela surtout chez les espèces à corps court et subarrondi (genre Dorcatoma), qui possède cette faculté à un aussi haut degré que les Byrrhus, tandis qu'elle est moins prononcée chez les espèces à corps cylindrique (la plu- part des genres). Ils vivent de diverses substances végétales, et plu- sieurs, surtout dans le genre Anobiuin, sont pour nous de véritables fléaux par leurs dégâts, à l'état de larves, dans les bois ouvrés de nos habitations et de nos meubles. GENRES PRINCIPAUX. AliOBlUM, Fabr. — Mandibules larges et bidentées. Antennes de onze articles, les trois derniers formant une massue lâche et longue, surtout chez les mâles. Corps pubescent, cylindroïde ainsi que les élytres. Les adultes des Anobium, du moins ceux qui vivent dan les maisons, sont nommés Vrillettes, k cau&e des trous que font les larves dans le bois, et qui ressemblent à des trous de vrille. Chacun connaît la téna- 552 COLÉOPTÈRES. - PTINIENS. cité que la plupart d'entre eux mettent à simuler la mort, mùme si on les jette dans l'eau ou si on les brûle, et le bruit que diverses espèces produisent contre les boiseries : ce sont de pelils coups secs, réitérés, suivis de temps de repos, que font ces Coléoptères, fortement accrochés par les pattes, en frappant avec le vertex contre les bois (C. Duméril), et non avec les mandibules, comme le dit Latreille. Ce moyen d'appel des sexes a fait encore donner aux Anobium des maisons la désignation d'Horloges de la mort, ces avertissements venant à notre oreille dans le mélancolique ennui des insomnies. On devrait plutôt les appeler Hor- loges de Vamour, dit M. Mulsant, qui ne craint pas le badinage entomo- logique {Lettres a Jidie sur l'EntumoL, I, 239). Les deux espèces les plus funestes et les plus communes dans les maisons sont 1'^. pertiiiax, Linn., de Zi millimètres, d'un brun foncé, pubescenf, avec le corselet relevé postérieurement en tubercule pointu; et VA. paniceum, Linn., d'Europe et des États-Unis, de o millimètres, d'un marron fauve, à cor- selet uni. Une plus grande espèce, VA. tessellatuin, Fabr., ou pidsator, Schall, atteint 61/2 millimètres, d'un brun presque mat, à corselet et élytres unis, avec nombreuses petites taches d'une pubescence rous- sâtre. Les larves des Anobium ont le corps court, blanc, charnu, renflé en avant, recourbé en arrière comme celui des larves de Lamellicornes, et entièrement recouvert de petits poils très-fins. La tète, demi-cornée, lisse, arrondie, très-petite, porte deux très-petites antennes, d'au moins deux articles, et à coté de chacune un très-petit stemmate sphérique (les larves des Ptines sont aussi oculées). La bouche offre un labre saillant, des mandibules courtes, arquées, tri- ou quadridentées, des mâ- choires unilobées avec palpes de trois articles, une lèvre inférieure ar- rondie à palpes de deux articles. Les pattes sont assez longues, de quatre articles, hérissées de longs poils ; les stigmates comme d'ordinaire. Les segments thoraciques et abdominaux sont couverts de plis fins, trans- versaux et munis de spinules, et le dernier segment abdominal porte en dessous un petit mamelon pseudopode au centre duquel est l'anus. La plupart de ces larves sont ligniperdes et attaquent le bois mort en- core sur pied. Elles creusent alors leurs galeries dans l'écorce, sans aller ordinairement plus loin, et, pour la nymphose, se font une coque de vermoulure. Selon M. E. Perris, elles se développent en un an et non en trois ou quatre, comme le croyait M. Ratzeburg. L'accouplement des adultes a lieu presque aussitôt après l'éclosion, la femelle restant dans la galerie où elle est née, le mâle en dehors. n'est des Anobium, du genre actuel Ernobius, Thomson, d'Europe et d'Amérique septentrionale, qui attaquent les jeunes tiges et les pousses des arbres vivants {A. molle, Linn.); d'autres les bois ouvrés et secs : ainsi A. pertinax (pi. xxxvii, lig. 7, antenne; la, labre; 7 b, mandibule; le, mâchoire et palpe; 1 d, lèvre inférieure €t palpes; le, tarse antérieur). Cet insecte, dont le nom est dû à la ténacité à simuler la mort, est la ANOBllDES.— OCHINA, PTILINUS, XÏLETINUS. 553 Vrillette fauve de Geoffroy, perforant nos meubles, les planchers et les lambris de nos maisons, en décelant sa présence par de petits tas de Irès-fine vermoulure pulvérulente. Enfin certains Anobium (paniceum) ravagent les bibliothèques, les archives, les herbiers; dévorent les racines sèches des herboristes, les restes secs de pain, les pains azymes, les pains à cacheter, les biscuits, même dans des boîtes qu'on croit bien closes. Les espèces domestiques sont nécessairement répandues dans toute l'Europe ; eu général, on trouve les adultes dans le voisinage des substances où ont vécu les larves, et parfois, pour certaines espèces, sur les fleurs. M. Lucas a vu que VA. paniceum détruit le liège, la moelle de l'Agave, la réglisse en bâton, la peau de baleine, etc. OCHIA'A, Slurm. — Genre Irès-voisiu des Anobium. Antennes de onze articles, grêles, longues, légèrement dentées en scie. Tarses grêles. Corps en ovale oblong, finement pubescent. L'espèce type, 0. Hederœ, de toute l'Europe, ne se trouve que sur les liges mortes du Lierre, dont le bois nourrit sa larve. Cet insecte, de 2 1/2 millimètres, d'un brun nîarron, a les élytres couvertes d'une pu- bescence cendrée, avec deux bandes brunes à la base et au milieu. Nous figurons VO. Latreillei, Bonelli, ou sanguinicollis, Duft., de France et d'Allemagne (pi. xxxvn, fig. h). Pas d'autres espèces certaines. PTILIUl'S, Geoffr. — Antennes de onze articles, flabellées fortement chez les mâles, peclinées chez les femelles. Forme cylindroïde. Ces insectes \ivent dans le bois mort, qu'ils perforent de petits trous ronds. 11 y a douze espèces d'Europe, de Madère, du Sénégal, de Ceylan et de l'Amérique septentrionale. L'espèce la plus commune est le P. peclinicornis, Linn., de Ix millimètres, noirâtre, à pattes et antennes fauves, de toute l'Europe (pi. xxxvn, fig. 2 ; 2 a, antenne du mille; 2 6, antenne de la femelle). Assez commun dans les maisons et les chantiers. ^l'I.KTlMl'S, Latr. — Antennes de onze articles, fortement dentées. Languette très-échancrée, à lobes étroits ; mandibules larges et bidentées. Dernier article des palpes sécuriforme, Élytres très-allongées et cylindriques. Ces insectes commencent la série des Anobiides à forme raccourcie, à tâte et à pattes très-rétractiles. Leurs élytres sont striées. Ils vivent en lar\es dans le bois mort, sur lequel on les trouve à l'état parfait, et de même sur les fleurs et le feuillage des végétaux. Ce genre ren- ferme environ trente espèces d'Europe, d'Algérie, des Canaries, de l'île de l'Ascension, de Sibérie, d'Amérique septentrionale. Nous repré- sentons le X. pallens, Germar (pi. xxxvn, fig. 3; 3a, tête vue en des- sous), de France, delà Russie méridionale, du Caucase et aussi d'Amé- rique. 11 constitue l'espèce unique d'un genre démembré, A'erordlwbius, 554 COLÉOPTÈRES. — PTINIENS. iMorawitz. A côlé se trouvent les détails du X. pecAinatus, Fabr. (3 6, son antenne; 3c, mandibule; 2d, mâchoire et palpe; 3e, lèvre infé- rieure et palpes). Cette dernière espèce est d'Allemagne. DOKCATOMA , Herbst. — Antennes curieuses, de dix articles ou moins^ le pre- mier très-grand et dilalé en oreillette, les autres petits et serrés, les trois derniers très-grands, fortement comprimés, formant une énorme massue lâche, plus longue que le reste de l'antenne. Corps convexe, ovale, pubescent. Les Dorcatoma n'ont que peu d'espèces en Europe, vivant dans les Bolets et dans le vieux bois envahi par les productions cryptogamiques. Leurs larves, tout à fait analogues à celles des^no6mm, se trouvent dans les souches ou les racines de divers arbres, notamment le Chêne, ou dans les Champignons ligneux, et se métamorphosent également dans une coque. Il y a environ vingt espèces d'Europe, des États-Unis, de Californie, du Chili, de la Plata. — Ex. : D. rubens, Hoffmann, du genre actuel Anitys, Mulsant, fondé sur deux espèces d'Europe (pi. xxxvii, fig. 5; 5a, antenne). On le prend à Fontainebleau, sous l'écorce des Chênes. Nous placerons ici un genre très-ambigu, véritable point singulier, comme il s'en présente de temps à autre dans tous les modes approxi- matifs de la classification, le genre Ciipes. Latreille, par une simple ana- logie de forme, le mettait cà tort parmi les Cucujiens ; c'est encore des Plinides que ces insectes se rapprochent le pUw. La plupart des au- teurs tranchent la difficulté en en formant une famille à part, procédé dont on doit être fort sobre, si l'on veut conserver la simplicité et la clarté. CUPES, Fabr. — Antennes de onze articles, cylindriques ou un peu en scie. Tête petite et rétrécie ; organes buccaux dans une profonde échancrure du menton. Élytres allongées, subparallèles ou élargies en arrière, plus larges que le corselet. Abdomen de cinq segments en dessous. Tarses médiocres, à quatrième article bilobé. Ces insectes, presque tous américains, ont un aspect bien tranché par leur sélytres munies de côtes à intervalles ponctués ou gaufrés, leur corps allongé, déprimé en dessous, couvert presque toujours d'écaillés d'un blanc jaunâtre, paraissant un enduit,- tant elles sont serrées, avec des taches brunâtres plus ou moins distinctes sur les élytres. Les mœurs des Cupes sont peu connues, mais ces Coléoptères sont très-probablement ligniperdes, car Say dit que le C. cinerea, Say, ou concolor, Westwood, des États-Unis, est commun dans le& vieilles maisons construites en bois. Le C. capitula, Fabr., du même pays (pi. xxxvii, fig. 11; li«, APATIENS.— CAS. 555 tarse anlérieur, noir, avec la tête rougeâtre), a, par exception, e corps simplement villeux. Il y a encore une troisième espèce, d'Amérique septentrionale, puis une du Chili et une des îles Philippines. ÏRIBU DES APATÎEMS. Nous formerons, sous le nom à'Apatiens, une tribu circonscrite, aux dépens des Xylophages, si peu définis, des anciens auteurs, constituée par des Coléoptères de taille petite ou médiocre, et qui se rapprochent des Pliniens ; cependant ils n'en ont pas les antennes filiformes ni les cinq articles tarsiens bien développés (pentamères complets). Beaucoup d'auteurs donnent à cette tribu ou famille le nom de Bostricliiens ou de Bostricbides. Geoffroy avait établi le genre Bostri- chus pour le Derinestes capucinus de Linnœus. Bien plus tard, Fabri- cius donna ce nom à un groupe d'insectes d'une autre tribu, celle des Scolytiens, en créant le genre Apate pour les Bostrichus de Geoffroy. La confusion commencée ainsi s'est encore accrue. M. Guérin-Méneville, imité par Lacordaire, établit à la fois dans la tribu actuelle les genres Apate et Bostrichus. M. E. Blanchard y conserve le genre Bostrichus, en le supprimant pour les Scolytiens, et c'est au contraire chez ceux-ci que MM. Fairmaire et de Marseul le maintiennent. Pour faire cesser toute difficulté, nous abandonnerons le mot Bostrichus dans les deux tribus. Voici les principaux caractères de la tribu des Apatiens : Tète ordi- nairement défléchie et invisible ou peu visible en dessus. Antennes in- sérées auprès du bord antérieur des yeux, ayant huit, neuf, dix ou onze articles, terminées par une massue brusque et comprimée de trois ar- ticles. Palpes maxillaires de quatre articles et labiaux de trois. Corselet surplombant la tète en avant. Abdomen de cinq arceaux inférieurs ap- parents, très-rarement de six chez les mâles. Tarses de cinq articles, dont le premier, le plus souvent, est très-petit, peu marqué ou caché dans la jambe (Lyctas), ou avorté et manquant (Fsoa, Cis),ce qui donne des tarses de quatre articles. Pour la forme du corps et les mœurs, les Apatiens se rapprochent beaucoup des Anobium et des Scolytiens. Ce sont, d'une manière géné- rale, des insectes vivant, surtout à l'état de larves, dans les vieux bois, les branches desséchées, sous les écorces, dans les Bolets ligneux, etc. GENRES PRINCIPAUX. CIS, Lalr. — Antennes de dix articles, le premier grand, les autres petits, les trois derniers très-gros. Jambes mutlques. Dans ce genre, les mrdes se distinguent en général des femelles par le front bituberculé, et parfois par le corselet prolongé et bidenté en 556 COLÉOPTÈRES. — APATIENS. avant. Ce sont dft petits insectes en général régulièrement cylindriques, glabres ou finement pubescents, de couleur uniforme variant du brun noirâtre au jaune ferrugineux. Ils vivent dans les Bolets et les Cham- pignons des arbres, substances dont la dureté est eu rapport avec leurs fortes mandibules, et sous les vieilles écorces, où on les trouve le plus souvent en sociétés plus ou moins nombreuses. Leurs larves ressemblent à celles des Cryptophagiens, mais cette analogie ne se soutient pas pour les adultes, par suite de diversité du développement ultérieur, comme cela a lieu pour les Buprestiens et les Cérambyciens. Klles sont allon- gées, cylindriques, charnues, peu poilues; ont la tête arrondie, avec des mandibules robustes et unidentées, des palpes maxillaires de trois articles et labiaux de deux ; les antennes ont trois articles, le dernier surmonté d'une longue soie ; il paraît y avoir trois stemmates de chaque côté. Les segments du thorax et de l'abdomen sont pareils, sauf le pro- thorax, qui est un peu plus grand ; le dernier segment de l'abdomen est subcoriace, déclive ou concave, et terminé par deux courtes épines cornées parallèles, ou par un tube corné et dentelé, Ces larves se creu- sent des galeries dans les Bolets ligneux et s'y changent en nymphes munies de deux papilles terminales semi-cornées. Le genre C-is et les genres annexés ont été étudiés d'abord par M. Redtenbacher en Allemagne, dans sa Faune d'Autriche (18/i7), puis monographies par M. Mellié en France {Revue de zooL, mars 18Zi7, Ann. Soc. entom. de France, I8Z18, p. 205 et 313). Ce dernier auteur dit que les Cis sont en général recouverts d'une pubescence d'écaillés larges et courtes; que leurs téguments olfrent une fine impression de petits points noirs et creux sur les élylres ; que les sujets récemment éclos sont de couleur plus claire ; qu'on les rencontre quelquefois réunis en grand nombre sous le chapeau des Dœdalea et des Polyporus, dont ils rongent la substance membraneuse sans attaquer la surface, extérieure qui les cache. On les trouve depuis le commencement du printemps jusqu'à l'entrée de l'hiver. S'ils se prennent sur le bois coupé ou mort, on ne larde pas à se convaincre qu'ils y ont été adirés par des ciiam- pignons qui croissent sous l'écorce; on les observe souvent sur les souches de divers arbres abattus. Leur fécondité paraît très-grande, cL l'on voit parfois, au bqut d'un an ou deux, que des Bolets ligneux qu'on a rapportés chez soi pour les conserver, et qui contenaient accidentellement quelques Cis, sont mis en poussière par des centaines de ces insectes. La fonction des Cis, dans l'économie générale de la nature, paraît donc être de détruire quelques espèces des Champignons qui croissent sur les' arbres. Nous citerons, parmi les espèces les plus répandues, le C. Boleti, Scop., vivant en familles nombreuses dans le l'olyporus versicolor, commun aux environs de Paris et dans toute l'Europe, rencontré en Algérie, trouvé en Russie dans le Pulyponis suaceulens. Celte espèce varie de grandeur et de couleur ; elle est' ordinairement d'un brun noir, plus clair après l'éclosion, et même quelquefois alors d'un jaune pille ; OROPHIUS, APATE. 557 les points des élytres sont diversement accusés et peuvent s'efFacer. Les antennes et les pattes sont moins colorées. Il y a des variétés rougeâtres ou jaunâtres. Nous représentons des détails d'une espèce de Suède, de France et d'Allemagne, le C. bidentatus, Oliv. (pi xxxviii, fig. 14 6, mâchoire et palpe ; IZt c, lèvre inférieure et palpes labiaux). Le dernier article des palpes maxillaires est ovale et acuminé au bout. OROPHIIJS, Redt. — Caractères voisins des Cis. — Antennes analogues de forme, mais de huit articles. Le genre est fondé sur une seule espèce, de toute l'Europe, assez rare partout, VO. ynandibularis, Gyll., dont nous représentons le mâle, re- marquable par ses mandibules très-fortes et très-saillantes (pi. xxxviii, fig. 1/j ; IZia, antenne). APATE, Fabr., syn. BOSTniCHUS, Geoffr. — Antennes de dix articles, les médians courts et obconiques, les trois derniers en massue assez lâche. Dernier article des palpes subcylindrique, rét«'»"ci au bout. Mandibules simples à leur extrémité, avec une petite dent médi." ** interne. Jambes tantôt denticulées, tantôt inermes ; tarses de cinq articles rmaux. Les insectes de ce genre ont le corps allongé, épais, subcylindrique ou un peu déprimé en dessus ; le corselet très-convexe et rugueux^ sou- vent muni en avant de deux cornes redressées ou non. Les couleurs sont foncées, à peu d'exceptions près. Les mœurs sont essentiellement ligniperdes, et, parmi les espèces exotiques, il en est de grande taille, 1'^. terebrans, Pall., d'Afrique, 1'^. francisca, Fabr., d'Espagne et d'Al- gérie, qui doivent faire beaucoup de tort aux arbres dont elles s'em- parent. Cette dernière espèce attaque les Mûriers en Espagne. Les es- pèces du centre et du nord de l'Europe sont peu nuisibles en général, en raison de leur petite taille et d'une fécondité médiocre. Le type est Y A. capucina, Linn., de toute l'Europe et du Caucase, commun en France, noir, à corselet bicornu en avant, très-rugueux, variant en taille de 5 à 12 millimètres, avec des élytres rouges. Il est très-com- mun en avril et mai sur les échalas des Vignes des environs de Colmar. Sa larve, vivant dans le bois et munie de très-petites pattes écailleuses, ressemble à celles des Ptiniens des genres Anoblum et Dorcatoma. Elle en diffère par des antennes de quatre articles et l'absence complète de stemmates. Le corps, moins ridé transversalement, a ses segments plus distincts ; les derniers ont quelques poils. La nymphose a lieu au mi- lieu de la vermoulure ligneuse, mais sans coque, tandis que les larves des Ptiniens en font une. h' A. capucina est remarquable, ainsi que d'autres espèces du même genre, par la force incroyable de ses man- dibules, qui lui permet de perforer des métaux. Déjà en 1833 M. Emy 558 COLÊOPrÈRES. — APATIENS, avait signalé des toitures de plomb percées par des Apate ; en iSkli, M. E. Desmarest fit connaître une observation encore plus curieuse, celle de clichés typographiques, formés d'un alliage d'antimoine et d'étain bien plus dur que le plomb, perforés en deux points, sur plus d'un centimètre de profondeur, par V Apate capucina, avec nombreuses traces de l'action des mandibules. Deux insectes adultes se trouvaient dans les clichés. Les larves, vivant dans quelques morceaux de bois re- couverts par les clichés, se sont transformées, et les adultes, cherchant cà sortir, ont rongé les plaques métalliques dans les trous desquels on les a trouvés morts. Ce ne sont pas là les seuls exemples de ces perfo- rations de métaux par les insectes, et, sans sortir de l'ordre des Coléo- ptères, on cite plusieurs cas où les adultes du Callidium sanguineum (Cérambyciens) ont percé des plaques de plomb. C. Duméril dit avoir souvent trouvé en juin VA. capucina sur les racines des arbres mises à découvert dans les endroits sablonneux des forêts de Saint-Germain et de Fontainebleau. Nous représentons les détails de VA. capucina (pi. xxxvui, fig. 13 a, labre ; 13 b, mandibule; 13 c, mâchoire et palpe ; 13 rf," lèvre inférieure et palpes labiaux; \3e, antenne; 13 f, tarse an- térieur). La flgure 13 de la même planche est celle de 1'^. varia, Illig., syn. Dufouri,gallica, du midi de la France, d'Italie, d'Algérie. Le genre Apate (en y réunissant les Apate et Bostrichus du catalogue de MM. Gemminger et de Harold) comprend près de trente espèces, d'Eu- rope, d'Algérie, des deux Amériques, des régions chaudes de l'Afrique occidentale, de l'île de France, de Madagascar, des îles Woodlark et Lifu, d'Australie. SI\OVYI.O.\, Duftschmidt. — Genre très-voisin des Apale. Nous citons seulement ce genre, qui comprend douze espèces d'Eu- rope, d'Amérique, d'Afrique chaude, des Indes, en raison de l'intérûl de deux espèces, à corselet noir, avec élytrcsd'un brun fauve. Le S. sex- dentatum, Oliv., du midi de l'Europe et d'Algérie, de 5 millimètres, à corselet noirâtre, avec granules très-pointus, à élytres rugueuses, est parfois fort nuisible aux vignobles du midi de la France, sa larve vivant dans les sarments de Vigne. La femelle pénètre dans le sarment presque toujours par un bourgeon, et y pratique une galerie circulaire entourant le sarment. Là se fait l'accouplement, puis la femelle s'en- fonce en creusant une galerie parallèle à l'axe du rameau, et y dépose ses œufs. Les larves criblent le sarment de galeries longitudinales et le réduisent en poudre. Elles sont blanches, molles, glabres, à segments thoraciques très-larges relativement à la tête, et munis de pattes ciliées. Les autres segments vont en diminuant de largeur, et les derniers sont repliés en dessous en forme d'hameçon. Une partie des adultes qui sor- tent de nymphes sans coque percent Içs sarments en août et septembre, passent l'hiver cachés sous les écorces, les autres ne sortant qu'au prin- LYCTUS. 559 temps suivant. Cet insecte se jetant de préférence sur les Vignes faibles, il faut leur donner de la force par la culture, les engrais, les arrose- ments, et supprimer et brûler toutes branches envahies par les larves. La même espèce attaque aussi les Mûriers, surtout les multicaules, les Figuiers et les Robiniers. Dans le Tyrol, les Vignes souffrent beaucoup des ravages d'une autre espèce, de mêmes teintes, de taille presque double, le S. muricatiim, Fabr.; les larves pratiquent également des galeries longitudinales. Une troisième espèce, de plus petite taille que les précédentes, d'un genre très-voisin, le Xylopertha sinuata, Fabr., de couleur noirâtre, a des larves qui font aussi des galeries longitudinales dans la partie médullaire des Vignes du midi de la France. Au lieu de se métamorphoser avant l'hiver, comme celles du S. sexdentatum, elles continuent à se développer pendant la mauvaise saison, et ne devien- nent nymphes qu'en mai et juin ; les adultes sortent en juin et juillet. 11 faut prendre pour les Vignes les précautions indiquées précédem- ment. LYCTl'S, Fabr. — Antennes de onze articles, les deux derniers en brusque massue. Élylres allongées, subcylindriques, arrondies en arrière. Tarses sub- pentamères, à premier article très-réduit. Ce genre est très-difficile à placer en série ; aussi beaucoup d'au- teurs emploient le moyen commode d'en faire une famille à part. Les adultes participent par leur forme des Cryptophagus, Cohjdium, Apate, Cis, et, de ces deux derniers en outre, par leurs mœurs. Les larves, au contraire, sont dégradées et analogues à celles des Scolytiens et des Cur- culioniens. Elles sont charnues et blanchâtres, cylindriques, arquées, apodes et aveugles. La tête est écailleuse, les mandibules sont recour- bées et simples; les palpes maxillaires de deux: articles, les labiaux d'un seul, les antennes de deux articles. Les segments sont tous semblables, avec des bourrelets latéraux, l'anal plus petit, arrondi au bout. La nym- phose s'opère sans coque dans la vermoulure des galeries que ces larves se creusent dans le bois. On trouve dans une partie du nord et du centre de l'Europe (Grande-Bretagne, Suède, France, Allemagne), et aussi en Algérie, le L. canaliculatus, Fabr., parfois trop commun, de petite taille, environ 3 millimètres, d'un gris brunâtre, avec sillon profond sur le corselet, à élytres striées, dont la larve vit dans l'intérieur du bois des Chênes abattus, et se propage souvent dans les poutres servant à la construction de nos maisons. C'est le Dermeste lévrier à stries de Geoffroy. Cette espèce avait détérioré considérablement les bois em- ployés au Jardin des plantes pour bâtir la galerie de minéralogie. Nous représentons le L. brunneus, Steph., du nord de l'Afrique, de France et d'Angleterre, sans doute par importation (pi. sx, fig. 3); sa larve, a vu M. Chevrotât, vit dans le bois de Réglisse débité dans le commerce, et le réduit en poussière. 560 COLÉOPTÈRES. — PHALAGRES. Les Lyctus renferment une vingtaine d'espèces, d'Europe, de Madère, de Ceylan, de divers pays d Amérique, de l'île de Woodlark. Quelques genres, formés d'insectes sans importance au point de vue des applications entomologiques, doivent être mentionnés brièvement. Certains constituent pour les auteurs modernes une petite famille, les Phalacrides, qu'ils placent entre les Histérides et les Nitidulides. Ils étaient rangés par Latreille dans les Érotyliens, en raison de leurs tarses subpentamùres, à trois premiers articles velus en dessous, le quatrième très-petit, reçu dans une échancrure du précédent. Les an- tennes ont onze articles, se terminant par une massue de trois. Il y a un écusson. Les élytres recouvrent en entier l'abdomen, celui-ci de cinq segments inférieurs libres. Le corps est ovalaire, convexe. Le mot Phalacre (chauve) vient du poli du corps. Ce sont des insectes de petite taille. PHAl.A€Ri:$$, Payk. — Corps en général rourtement ovalaire, plus ou moins convexe, glabre. Pâlies robustes, à cuisses * 'ambes élargies et comprimées. Espèces noirâtres, au nombre de prè 'î'une trentaine, très-voisines les unes des autres, se trouvant sur Icf uilles et les fleurs. Il y en a quelques-unes d'Europe, les autres très-disséminées, aux îles du Cap- Vertj aux Indes, dans l'Amérique septentrionale, à Cuba, à Buenos- Ayres, à Ceylan, dans la Nouvelle-Calédonie, à l'Ile Lifu. Les mâles des Phalacrus d'Europe semblent pareils aux femelles ; d'après Erichson, ceux des espèces américaines diffèrent de l'autre sexe par des mandi- bules inégales, la gauche plus longue et saillante en pointe simple. XOL.YPHl'S, Erichs. — Corps ovale-oblong, convexe. Corselet transverse. Cuisses et jambes étroites à la base, puis s'élargissant en triangle; tarses tous sem- blables et égaux. On connaît quatre petites espèces de l'Europe méridionale et d'Al- gérie. Le type, du midi de la France et très-rare^ est le T. granulaïus, G.-Mén., de 2 millimètres environ, à élytres striées, noir, avec cor- selet et élytres à reflets d'un bleu verdâtre, les appendices bruns. Il est figuré dans la planche de la tribu des Érotyliens (fig. 6; 6 a, partie antérieure de la tète: 6 6, antenne; 6cetf/, tarse postérieur; 6e, tarse atitérieur). OlilBRl'S, Erichs. — Caractères mixtes. Corps ovalaire ou ovale-oblong, plus ou moins convexe. Tarses postérieurs plus longs que les autres. Ces insectes, au nombre de plus de quarante espèces, sont des îles Canaries, du cap Vert, des Indes, d'Amérique septentrionale, du Cap, RHYSODES, CORTICUS. 561 du Pérou, de Cejian. En outre, il y a un assez grand nombre d'espèces en Europe, de couleur noire, brune ou fauve, vivant sur les fleurs et les feuilles, et, en hiver, dans la terre, cachés au pied des plantes ou sous les écorces, y subsistant sans doute de productions cryptogamiques. Les mâles ont le corps plus étroit en arrière que les femelles, et le deuxième article des tarses antérieurs plus ou moins dilaté. Nous cite- rons, comme se rencontrant aux environs de Paris, ÏO. bicolor, Fabr., noir, avec un point rouge peu visible à l'extrémité de chaque élytre ; sur les fleurs : c'est VAnthribe à deux points rouges au bout des étuis de Geoffroy, de 3 millimètres 1/2 de long ; VO. corticalis, Pauzer, ou affinis, Sleph., tout noir, de taille moitié du précédent. On prend ces espèces en fauchant ou en battant les plantes sur le parapluie. Les auteurs systématiques, selon leur habitude, ont fait encore une petite famille, les Rhysodides (rugueux) avec un genre embarrassant, que Jacquelin du Val place entre les Colydiens et les Cucujiens. Elle comprend deuK petits genres ejcotiques et un genre en partie euro- péen. RHYi§iODE§>, Dalman. — Tèle triangulaire, munie d'un cou brusque et court ; antennes assez fortes, moniliformes, de onze articles. Corselet oblong, à trois sillons. Élytres sillonnées. Tarses de cinq articles, simples, cylindriques. Ce genre ne comprend que sept espèces, les unes d'Europe, surtout méridionale, les autres du Brésil, du. Cap, de Java. Elles sont rares dans les collections, et vivent dans les troncs d'arbres morts ou décomposés par maladie. Les élytres recouvrent en entier l'abdomen, qui offre en dessous six segments, les trois premiers soudés ensemble. Le type d'Europe est le R. sulcatus, Fabr., ou europœus, ou exaratus, Dalman, se trouvant en France, en Allemagne, en Suède. Nous figurons le /{. costatus, G.-Mén., du Brésil (pi. xxxvii, fîg. 12 ; 12 a, mandibule du R. sulcatus; 12 6, mâclioire et palpe; 12 c, lèvre inférieure et palpes). On a longtemps rangé dans les Hétéromères deux genres qui font partie maintenant des Colydiens. Ce sont les genres : CORTICI'S, Latr. — Antennes non rétractiles, de onze articles, les deux derniers en très-petit bouton ; écusson très-petit, indistinct. Élytres ovalaires ou ovales- oblongues. Ce genre comprend cinq espèces aptères, souvent à élytres tubercu- leuses, vivant sur le sol, de Dalmatie, de Grèce, de Sicile, de Russie GIRARD. 36 562 COLÉOPTÈRES. — DIVERS. méridionale. — Ex. : C. vcltis, Germar, de Ualmalie (pi. xmi, fig. 3; 3 o, tête en dessus, 3 6, antenne). ORTHOCERtiS, Latr., ou Sârrotrium, lUig. — Antennes non rétractiles, de dix articles apparents, fortes, épaisses, fusiformes, à articles intermédiaires transverses, sétuleux, perfoliés. Corselet impressionné ou fovéolé. Élytres avec des côtes élevées. Ce genre renTerme quatre espèces de diverses régions de l'Europe, de petite taille, vivant sous les mousses et dans le gazon, principalement dans les endroits sablonneux, et assez fréquemment dans les sablon- nières. Le type est l'O. clavicornis, Linn., ou hirticornis, de Geer, ou jtmticus, Linn. (pi. xm, fig. U, antenne ; li a, lèvre inférieure et palpes; Ub, mâchoire et palpe), espèce des environs de Paris. C'est un très -joli insecte, de couleur noir de suie, de 5 millimètres de long, de forme al- longée et svelte, avec les élylres côtelées, plus larges que le corselet et allant en s'élargissant, et de superbes antennes noires, verticillées. Les tarses ont des articles poilus, cinq aux tarses 1 et 2, quatre au tarse 3. Le genre suivant a été également ballotté entre diverses familles, en raison de l'ignorance où l'on a longtemps été du régime de ses espèces. Jacquelin du Val mettait ce genre dans une famille dite des Peltides) et dans la tribu des Trogositaires, près des genres Temnochila et Trogo- sita. Il était autrefois placé, comme du reste les genres indiqués, dans les Xylophages, parce que ces insectes vivent sur les arbres. IVEllIOiiOMA, Latr. — Corps linéaire, grêle, cylindrique. Tète grande, sillonnée, des sillons antennaires ; antennes de dix articles (peut-être de onze dans quelques espèces), avec massue lâche, comprimée, oblongue, de trois articles. Corselet allongé. Élytres un peu plus courtes que l'abdomen. Tarses de cinq articles simples. Le genre Nemosoma, que le catalogue Gemminger-Harold met dans la famille des Trogositides^ ne comprend que six espèces d'Europe oc- cidentale, de Russie, des États-Unis. Elles vivent toutes sous les écorces, et sont remarquables par leur forme très-allongée et cylindrique, ce qu'indique le nom du genre (corps en fil). Le type, de toute l'Europe, 'est le iV. elongatum, Linn. (pi. xxxvni, fig. 15), rare dans les environs de Paris, se trouvant dans toute l'Europe, à chercher sur les Ormeaux, et vivant dans les galeries des Hylesinus (Scolyfiens), où il fait la guerre à leurs larves lignivores : c'est donc un insecte utile. — 16 a, antenne ; 156, labre ; 15c, mâchoire; 15 r/, lèvre inférieure; 15e, tarse antérieur. AINISOTOMA. — PAUSSIENS. 563 La méthode tarsale avait fait placer dans nos Ténébrioniens actuels un genre que ses autres caractères rangent dans la tribu des Silphiens. AH'ISOTOMl, lllig. — Corps plus ou moins ovalaire ou oblong. Antennes de onze articles, les cinq derniers en massue allongée, peu serrée, interrompue à son deuxième article, très-court et lenticulaire. Corselet transverse, rebordé, ponctué à sa base ; élytres striées ponctuées. Tarses antérieurs et intermédiaires de cinq articles, les postérieurs de quatre. Ce genre comprend plus de cinquante espèces d'Europe, des Cana- ries, du Kamtchatka, de l'Amérique russe, du Canada, des Étals-Unis, de Californie. Les nombreuses espèces d'Anisotomes sont d'une étude difficile, compliquée en raison des variations de certaines d'entre elles. On les trouve dans les Champignons, sur le gazon, courant sur le sqI ;' elles sont en général peu communes. Les différences sexuelles consis- tent le plus souvent en ce que les mâles ont les pattes postérieures allongées^ les cuisses de la même paire plus fortes et dentées inférieu- rement, les jambes postérieures arquées, et les quatre tarses antérieurs plus ou moins dilatés. Nous représentons une des espèces typiques, entièrement d'un roux-cannelle, VA. cinnamomea, Panz., de France et d'Allemagne (pi. xliji, fig. Zi, mâle; h «, tète en dessus et antenne). Tribu des PAUSSIEWS. Les entomologistes restent dans une grande incertitude au sujet de la véritable place des petits et étranges Coléoptères de cette tribu ; elle forme un de ces points singuliers que présentent çà et là toutes les clas- sifications, et que les naturalistes, selon leur prédilection pour tel ou tel caractère, peuvent rattacher comme satellites aux groupes fonda- mentaux les plus différents. Leur petite taille, leurs antennes renflées et anormales, et surtout ce qu'on sait des mœurs de quelques-unes de leurs espèces qui vivent sous les pierres en compagnie de petites espèces de Fourmis, ont déterminé beaucoup de naturalistes, ainsi MM. Jacquelin du Val, Schaum, de Marseul, L. Fairmaire, à les placer à la suite des Staphyliniens et des Psélaphiens. MM. E. Blanchard, de Castel- nau, E. Desmarest, au contraire, les laissent à côté des Scolyliens, Coléo- ptères xylophages,- en faisant remarquer la grande réduction de leurs pièces buccales, et en s'appuyant sur ce fait que la cohabitation avec les Fourmis n'indique pas nécessairement des carnassiers. Cela est surtout vrai en considérant que certains genres de parasites domestiques ne savent pas manger et sont nourris de liquides dégorgés par les Fourmis. Erichson les mettait près des Nilidulides, et M. Burmeister dans les Ca- rabiques, à côté du genre exotique Ozœna, qu'ils rappellent par le fa- ciès, les tubercules latéraux des élytres, les trochanters postérieurs et 566 COLÉOPTÈRES. — PAUSSIENS. la faculté ci-épitante. Nous devons l'aire remarquer, à propos de leur rang parmi les Coléoptères xylophages, qu'un caractère fondé sur une réduction des pièces buccales est de Aaleur médiocre, car les types les plus divers peuvent arriver de la sorte à se confondre ; nous croyons que les mœurs de ces insectes permettent difficilement de les séparer des Psélaphiens, comme eux commensaux des Formicides. Les formes étranges des Paussiens et leur genre de vie ont appelé l'attention des entomologistes plus qu'elle n'est portée d'habitude sur les petites espèces étrangères à l'Europe. Ce sont surtout les travaux de M.Westvvood qui les ont fait connaître (Trans. of tJie Liiin. Soc. yWi, p. 607; XVIII, p. 581; XIX, p. Zi5.— Trans. oftheEntom. Soc, II, p. 84. — The Entom. Magaz., V, p. 500. — Arcana EntomoL, II, p. 1, 37, 73 et 161. — Proceed. of the Linn. Soc, juin ISZiO. — Trana. of the Entom. Soc, 2« série, II, p. 8Zi, travail complet de classification). On peut consulter aussi, pour les mœurs, les observations du capitaine X. Boys, dans le Journal of the Asiatic Society of Bengal, new séries, n° 54. M. Boys y dé- crit les métamorphoses du Paiissus bifasciatus. Les Paussiens sont des insectes nocturnes, vivant sous les pierres et dans les nids de Formicides, ou en compagnie de celles-ci, du moins pour les espèces sur lesquelles nous avons quelques détails de mœurs. Découverts à Sierra-Leone par Afzelius, les Paussiens ont été retrou- vés dans diverses parties de l'Afrique, aux Indes orientales, eu Austra- lie ; enfin, une espèce existe au Brésil, et quelques espèces en Europe. C'est dans la structure des antennes de ces insectes que la nature sem- ble s'être livrée à toute la fantaisie des inventions bizarres. Les tines, renflées en vessie, paraissent deux lanternes ; les autres, triangulaires et pointues, affectent la forme d'un fer de lance ; d'autres sont larges et aplaties, tantôt entières sur les bords, tantôt dentelées ; d'autres res- semblent à des cornets épineux, à des cornues, etc. Le corselet est aussi hérissé de bosses, coupé de sillons profonds, ou étranglé. La taille varie de Zi à 8 millimètres, et rarement, pour quelques grandes espèces, de 12 à 15. Les Paussiens sont nocturnes ; on en prend quelquefois ac- cidentellement le soir dans les maisons, où la lumière les attire, et par- fois le jour au vol, sur des plantes, des amas d'engrais et sous les écor- ces ; mais ces rencontres sont accidentelles, car ces insectes vivent habituellement au milieu des Fourmis. Leur vol est rapide et ac- compagné d'un bourdonnement spécial; leurs ailes inférieures sont très-grandes. Ils s'arrêtent dans ce vol très-brusquement et replient leurs ailes sous les élytres avec tant de rapidité, qu'ils semblent tomber à l'endroit où ils se posent. Ils restent quelques instants immobiles, comme étourdis, puis se mettent en marche à pas lents, mais soutenus, les antennes dirigées en avant et oscillant de temps à autre dans le sens vertical. La côte de Natal, dans l'Afrique australe, semble surtout affectionnée par les Paussiens. Ils y ont été observé? par Guenzius. " Port-Natal, PAUSSIENS. 565 dit-il, paraît riche en Paussiens, car, outre un Pentaplatarthrus et quatre espèces de Ceraptems, j'ai trouvé ici neuf espèces de Paussus. Toutes sont parasites des l'^ourmis, que les nids de ces dernières soient dans la terre, sous les pierres ou dans les vieux arbres. Les plus grandes espèces vivent chez les grandes Fourmis, les plus petites chez les petites. Toutes sont nocturnes et volent au printemps, c'est-à-dire du milieu d'octobre jusqu'en décembre, surtout dans les temps orageux, de neuf à onze heures du soir. » Il ajoute : « Dans un après-midi très-chaud, entre quatre et cinq heures, immédiatement avant un orage, je vis sur une élévation boisée une longue bande de Fourmis qui couraient Çcà et là avec ardeur sur le sable rougCfltre du chemin ; je remarquai parmi elles un Pentaplatarthrus que plusieurs Fourmis avaient saisi par les antennes et ramenaient dans les rangs. Ma première idée fut qu'il était entraîné violemment contre son gré, mais j'y renonçai en voyant le fait se renou- veler le même jour et plusieurs autres fois dans la même circonstance d'un orage imminent. J'avais avec moi un jeune Cafre qui récoltait les insectes avec zèle et adresse; comme je lui faisais remarquer ce fait, il regarda avec de grands yeux celte escorte singulière, et s'écria : — Par notre grande reine ! les Fourmis ont un chef et le mènent promener. » Les Paussiens sont formés de genres et d'espèces presque exclusive- ment exotiques, surtout de l'Afrique australe, de l'Australie, de Ceylan, de Java, des Indes, du Brésil, des côtes occidentales d'Afrique. Une curieuse propriété a été constatée, au moins pour les Paussiens de l'Afrique tropicale et australe. Ils émettent par l'anus , avec explo- sions répétées trois ou quatre fois, mais chaque fois plus faiblement, un fluide caustique, d'odeur iodée, analogue à celui des Carabiques des genres Brachinas et Ozœna. Entîn, une espèce de la côte de Guinée, le Paussus sphœrocerus, a été signalée comme ayant les massues des antennes phosphorescentes (Afzelius, Observations sur le genre Paussus, in Traiis. of the Linn. Soc, 1798, t. IV, p. 261); mais le fait n'est pas certain. Corps oblong, déprimé, aplati antérieurement. Bouche inférieure; mâchoires petites, n'ayant généralement qu'un seul lobe; languette ordinairement grande et saillante. Palpes robustes, les maxillaires de quatre articles, les labiaux de trois. Antennes très-grosses, de deux, six ou dix articles apparents, le premier petit ou médiocre, les autres for- mant brusquement une massue très-considérable de forme plus ou moins bizarre. Élytres larges, parallèles, tronquées postérieurement, offrant vers le sommet, près de leur angle externe, un petit repli ou papille tuberculiforme, émettant, selon du Boys, un fluide laiteux, jaunâtre. Abdomen de quatre segments ; trochanters postérieurs forte- ment saillants au côté interne des cuisses. Tarses de cinq articles, par- fois de quatre apparents seulement. 566 COLÉOPTÈRES. — PAUSSIENS. GENRES PRINCIPAUX. PAIISSUS, Linn. — Corps assez épais. Antennes de deux articles, de forme va- riable, le second toujours très-grand. Élytres laissant légèrement à découvert le bout de l'abdomen. Tarses de cinq articles. Deux espèces habitent l'Europe. La première, la plus intéressante, parce qu'elle existe en France et que sa capture est une heureuse for- tune pour les amateurs, est le P. Favieri, Fairm. (pi. xxwiii, fig. i ; 1 f, antenne très-grossie), toujours trouvé sous les pierres en com- pagnie du Formica pallidula, Nyl,, d'abord dans le Maroc, près de Tanger, puis en Andalousie, en Algérie, sur les coteaux qui envi- ronnent Mers-el-Kébir, et enfin dans le midi de la France, par Dela- rouzée, près de Collioure (Pyr. -Orient.). Ce département des Pyrénées- Orientales est le seul où l'on ait encore trouvé en France le P. Fa- vieri ; il y a été repris à Perpignan, sur les glacis des fortifications, par M. le capitaine Martin, et à Saint-Martin du Canigou, au-dessus de Vernet- les-Bains,parM. Stableau. Ce Coléoptère, long de 31/2millimètres, pro- pre sans doute à tout le littoral méditerranéen, est d'un roux testacé, assez brillant, de forme allongée, à second article de l'antenne trigone, épais, enflé au bout, denticulé en dedans. La seconde espèce, des monts Balkans, en Turquie d'Europe, est le P. turcicus, Friwaldsky. Parmi les espèces exotiques, nous citerons le P. armatus, Westw., ou P. ci/rc/corn/s, Chevr., du Sénégal (pi. xxxvni.flg. 8; 8 a, tête et corselet vus de profil) ; le P. microcephalus, Linn., l'espèce la plus ancienne- ment décrite, de la côte d'Afrique occidentale(île des Bananes)(pl. xxxvui, fig. 9, tète, antenne et corselet; 10, tête vue en dessous; 10a, labre; 10 6, mandibule; 10 c, mâchoire et palpe; 10 rf, lèvre inférieure et palpes). Le genre Paussus, avec les espèces nouvelles décrites par M. Westwood, et celles qu'on découvrira certainement, ne compte guère moins de cent espèces, qui sont, outre les régions déjà indiquées pour les Paussiens en général, de Sierra-Leone, d'Abyssinie, de Nubie, de Chine, du Maroc. PE.ATYRIIOPAI^U§i, Westw. — Corps déprimé. Antennes énormes, en large massue, de deux articles, le premier comprimé, le second très-large, fortement déprimé. Ex. : P. Mellyi, Westw., du Malabar (pi. xxxviii, fig. H; lia, tarse postérieur). Sept espèces indiennes. PE11T.%PL.%T.%RTHRUS, Westw. — Tête petite ; antennes de six articles, les cinq derniers élargis en massue. Le type et espèce unique est le P.paussoides, Westw., assez grande espèce, probablement de l'Afrique australe (pi. xxxvui, fig. 10 e, lèvre inférieure et palpes; iO f, tête, antenne et thorax). TÉNÉBRIONIENS. 567 tEHATOPTERl'S OU Cerapterus, Swederus. — Antennes très-épaisses, pubescenles, de dix articles. Pattes très-aplaties et très-larges. Le type des espèces de ce genre, assez grandes pour les Paussiens, est le C. latipes, Swed., de Ceylan (pi. xxwjit, fig. 12, son antenne), il y a deux autres espèces de Java et une de Port-Natal (Afrique australe). Tribu des témébriomiems, La tribu des Ténébrioniens, comme bien d'autres, n'a pas de limites très-tranchées, et correspond sensiblement aux genres Tenebriu de Lin- nceus; aux genres Phnelia, Bhips, etc., de Fabricius; aux Mélasomes, Taxicornes et Hélopiens de Latreille; aux deux familles des Lygophiles ou Ténébricoles (élytres libres, des ailes), et des Photophygcs ou Luci- fuges (élytres soudées, pas d'ailes) de C. Duméril (1806). Nous lui don- nerons plus d'extension que Latreille et M. E. Blanchard, en y réunis- sant, surtout d'après la ressemblance des larves, les Piméliens, Diapé- riens, Hélopiens de ce dernier auteur, et suivant en cela l'exemple d'Krichson, de Lacordaire, de Jacquelin du Val. Cette tribu forme la tête du grand groupe des Coléoptères hétéromères, isolés au milieu des autres, et montrant combien le système tarsal, bien qu'artificiel, cor- respond souvent à de véritables affinités zoologiques. Caractères généraux : Antennes variables, le plus souvent grenues ou moniliformes, presque jamais pectinées ni flabellées ; de onze ar- ticles, ou plus rarement de dix, insérées latéralement en avant des yeux, sous un rebord plus ou moins notable de la tête. Tète non rétrécie en cou ; mandibules courtes, robustes, arquées, échancrées à l'intérieur ; mâchoires à deux lobes ciliés, dont l'interne est souvent muni en outre d'un crochet corné au sommet, avec palpes de quatre articles ; menton dans une échancrure ou porté sur une sorte de pédoncule, avec languette variable, à paraglosses très-accolés ou soudés, et palpes de trois articles. Abdomen de cinq segments inférieurs bien distincts, dont le pénultième est en général plus court que les autres. Hanches toujours plus ou moins séparées, et cavités cotyloïdes des antérieures fermées en arrière. Jambes et tarses variablement épineux et ciliés, en raison directe des habitudes fouisseuses ou de l'agilité à la course des espèces. Tarses hétéromères, les postérieurs offrant quatre, les autres cinq articles, le pénultième étant presque toujours entier, non excavé, les crochets toujours simples. Téguments généralement durs et épais. Élytres parfois soudées, ailes manquant souvent. L'appareil digestif des Ténébrioniens est long, atteignant dans les Pimelia trois fois la longueur du corps. Il offre un jabot, un estomac al- longé flexueux, le plus souvent hérissé de papilles ; il y a parfois un ap- pareil salivaire. Le système adipeux est Irès-développé, ce qui explique r)()8 coLf:opri:RES. — Tf:\f:RRTOiNii:NS. la persistance prolongée de la vie sans nourriture chez cesdoléopttTcs ; on a vu des espèces vivre six mois, le corps percé d'une épingle. Les Ténébrioniens ont pour la plupart des couleurs noires uniformes, qui ont valu à la majeure partie de la tribu le nom de Mélasomes ; parfois les couleurs, toujours uniformes, sont d'un gris blanchâtre ou jaunâtre ; dans un petit nombre de genres on trouve des couleurs rou- ges ou même variées de taches ou de bandes, et enfin rarement mé- talliques (D/a/)er«Sj, Helops). D'une manière très-générale, la nourriture des Ténébrioniens consiste en matières animales ou végétales desséchées ou décomposées; beaucoup moins souvent en excréments (Akis), ou môme en larves molles vivantes, en débris d'animaux [Phaleria), en fa- rine à gluten azoté {Tenebrio), enfin en cryptogames, surtout des grou- pes des Bolets {Bolitophagus, Diaperis), et très-exceptionnellement sur les fleurs (Nephodes). Les espèces diurnes vivent au soleil, quelques- unes sur les troncs et le feuillage (Sfron(/î///um), la plupart, qui sont aptères, dans les lieux arides et sablonneux, les ruines, les déserts, les rivages marins et terrains salés {Zophosis, Pimelia, etc.), et l'on a peine à comprendre souvent comment ils peuvent y trouver assez de matière azotée pour leur nutrition. Elles sont par conséquent aux autres Coléo- ptères, comme le dit Lacordaire, ce que les Cactées et les Ficoïdes sont aux végétaux phanérogames. Les espèces lucifuges se trouvent sous les pierres, dans les souterrains, sous les écorces, dans les souches et les troncs décomposés, dans l'intérieur des Bolets. Les femelles des Téné- brionides pondent leurs œufs dans les matières animales altérées ou dans les bois en décomposition, ou dans le sol ou le sable. M. E. Blanchard fait remarquer avec raison qu'il y a des affinités manifestes entre cette tribu et celle des Carabiens, avec des différences typiques essentielles. Dans les classifications parallèles, affectionnées par Is. Geoffroy St-Hi- laire, ces insectes formeraient un échelon correspondant aux Carabiens pentamères. La subdivision des Ténébrioniens en familles et en genres est fort difficile, vu la modification extrême des formes, la variété des mœurs, la simihtude d'aspect avec des insectes d'autres tribus. Ainsi .lacquelin du Val établit vingt-deux familles pour les seuls genres européens. Mais, si l'on considère les larves, on est au contraire immédiatement frappé, comme chez les Scarabéiens si diversifiés, de l'identité de leurs formes et de leurs caractères gétiéraux. C'est là le signe certain que le classificateur rencontre un groupe suffisamment naturel ; l'homologie des premiers états fait place peu à peu aux différences, à mesure que s'opère le développement progressif. Bien que les adultes aient souvent une forme courte, élargie ou renflée [Akis, etc.), les larves des Téné- brioniens sont toutes très-allongées, grêles, subcylindriques ou un peu déprimées ; elles ont un aspect rigide, par suite d'écussons cornés ou parcheminés qui revêtent les segment» tant en dessous qu'en dessus; il y a (rès-peu de différence entre les segmenis du thorax et de l'ab- l'IMI I.IDES. — PIMIÎLIA. 569 domen. Les pattes, de cinq pièces, de longueur médiocre, sont plus ou moins épineuses, et le dernier segment de l'abdomen ofTre le plus sou- vent deux crochets terminaux, et en dessous un mamelon pseudopode rétractile. Mais il ne sert pas à pousser le corps en avant, il agit passi- vement pour l'empêcher de rétrograder; les pattes, en efi'et, sont seules employées à la progression en avant ; la rigidité des segments empêche les larves de distendre leur corps, comme le font les larves charnues, et la partie postérieure du corps semble inerte et traînée à la remorque par l'antérieure. Un certain nombre de ces larves manifestent une sorte d'industrie lors de la nymphose en s'entourant de coques formées des débris au milieu desquels elles vivent. Les nymphes ont des tubercules piligères sur le prolhorax, et des saillies variables sur les côtés de l'ab- domen^ parfois assez bizarres et qui leur sont presque exclusivement propres dans l'ordre des Coléoptères. Les Ténébrioniens sont inutiles à l'homme directement ou indirecte- ment, et quelques-uns même lui sont nuisibles (genres Blaps peut-être, et surtout Tenehriu). L'habitat des espèces diurnes est immédiatement limité par cette condition, qu'elles exigent à la fois un sol sec et une température élevée. Elles ne sont abondantes en Europe que dans le pourtour de la Méditerranée, surtout dans les terrains imprégnés de sel, manquent dans le nord de l'Europe et presque entièrement dans sa partie moyenne. Elles sont en grand nombre en Afrique, sur le pla- teau central de l'Asie, et en Amérique, sur le plateau occidental de la chaîne des montagnes Rocheuses et des Andes, jusqu'au bout de la Pa- tagonie. Les Ténébrioniens lucifuges des cavités, des écorces, des vieux arbres, des Bolets, sont au contraire distribués partout, surtout dans les régions chaudes de l'Amérique méridionale. Pour aider l'étude de cette tribu, nous la subdiviserons avec Latreille et M. E. Blanchard en trois groupes fondamentaux : les Pimélides, les Blapsides et les Ténébrionides. I. - PIMÉLIDES. Corps privé d'ailes sous les élytres. Palpes ayant le dernier article plus ou moins épais, mais non complètement sécuriforme. GENRES PRINCIPAUX. ~PI1IKI,I.%, Fabr. — Menton transversal, anguleux latéralement, fortement échan- cré en avant. Palpes à dernier article subtriangulaire ou subcylindrique et for- tement tronqué; labre saillant, rectangulaire. Antennes de onze articles cylin- droïdes, le troisième très-long, le onzième petit; les quatre jambes postérieures comprimées, quadraugulaires. Les Pimelia, offrant environ cent quarante espèces, sont de taille grande ou moyenne ; leurs élytres offrent les sculptures les plus varia- bles. L'aspect de ces insectes est lourd et massif; cependant ils sont agiles 57U COLÉOPTÈRES. — TÉNÉBRIONIENS. et cherchent leur nourriture dans les heures les plus chaudes de la journée. Ils habitent les régions centrales de l'Asie, les bords de la Méditerranée et ses îles, les Canaries et le nord de l'Afrique, jusqu'au Sénégal inclusivement. Les espèces de Pimelia sont encore incomplète- ment connues et contiennent des doubles emplois. — Ex. : P. velutina, Klug, ou vpstita, Gory, du Sénégal (pi. xxxix, fig. 1) ; P. sericea, Oliv., de Grèce et d'Egypte (pi. xxxix, fig. 2, bouche vue en dessous; 2a, mâ- choire et palpe; 2 6, labre et mandibules; 2c, antenne); enfin, P. bi- punctata, Fabr., commun dans le midi de la France et de l'Espagne. On ne rencontre cette espèce que dans les lieux très-secs, et sa robe noire et peu luisante est toujours couverte de poussière. Elle est longue de 15 millimètres, à corselet granuleux, à élytres carénées sur tous les bords et ayant trois côtes sur chacune. On s'est souvent demandé comment peuvent vivre les Pimelia, qui affectionnent les lieux les plus arides et dépourvus de toute végétation. Sur les plages sableuses de Malaga, M. P. de la Brûlerie a vu les Pimelia s'attacher autour des excréments d'oiseaux, et il a été encore témoin du même fait pour le P. monticola, Rosenh., sur les sommets de marbre, sans végétation ni terre, de la Sierra-Nevada. En pays civi- lisé, les Pimelia s'attaquent volontiers à des déjections plus substantielles que celles des oiseaux ; mais un pareil festin est pour elles une occasion exceptionnelle. Si l'on réfléchit que la nature a surtout départi à ces insectes le rôle de peupler les déserts et les îles les plus sèches, de sim- ples rochers même perdus au milieu de l'Océan, on admettra facile- ment que les excréments d'oiseaux ont une large part dans leur régime ordinaire. ERODIlJjS, Fabr. — Menton transversal ei échancré. Palpes à dernier article élargi. Antennes de grosseur variable, de onze articles allant un peu grossissant, lé dernier spongieux. Élytres convexes, à côtes, granuleuses, carénées latérale- ment. Insectes très-agiles, bien qu'à corps épais et massif, inoffensifs, ser- vant de proie aux carnassiers, des mêmes localités que les Pimelia. — Ex.: E. gibbus , Fabr., de Turquie, de Grèce, d'Egypte, de Syrie (pi. xxxix, fig. 3; 3a, bouche vue en dessous; 3 b, labre ; 3c, antenne). Environ quarante espèces du bassin de la Méditerranée et de Séné- gambie. 'Z0PH0ISI<§, Latr. — Tête courte, rétrécie, tronquée en avant, fortement enfoncée dans un corselet très-transversal ; antennes de onze articles, grêles, subcylin- driques, à dernier article ovalaire et acuminé. Pattes postérieures très-longues, à éperons très-longs et très-grêles. Pas d'écusson. Ces Coléoptères, glabres, de taille petite ou moyenne, de couleur noire, quelquefois avec reflets bronzés, ont des ressemblances de forme et de PIMÉUDES. — GYRIOSOMUS, NYGTELIA, HÏPEROPS. 571 structure avec les Dytisciens. Ils varient de la forme convexe et briève- ment ovale à la forme elliptique, allongée, peu convexe, et sont très- agiles. Ils s'étendent en Afrique plus loin que les genres précédents, jusqu'au Cap, et se trouvent aussi en Asie occidentale et dans les par- ties les plus méridionales de l'Europe. A. Deyrolle a publié une mono- graphie de ce genre {Ann. Soc. entom., W série, 1867, p. 8i). Nous représentons le Z. testudinarius, Fabr., du Cap. (pi. xxxix^, fig. Zi ; 4o» labre et palpes des deux sortes; U 6, antenne). Gl'RIOSOMliS, G.-Mén. — Menton tiansversal, pédoncule, échancré; dernier article des palpes maxillaires légèrement triangulaire. Antennes très-poilues, de onze articles, les derniers subglobuleux. (Exactement, Gyriosoma.) Les Gyriosomes, au nombre de quinze espèces, sont de grands insectes au corps large, propres au Chili et au Pérou, d'habitudes analogues à celles des genres précédents, d'un noir brillant, otfrant sur les élytres des sillons obliques remplis de poils blancs, courts et couchés. — Ex. : G. Luczoti, Solier, insecte publié pour la première fois par M. G,-M., dans son Icon. (pi. xxxix, fig. 5; 5a, bouclie vue en dessous; 5 6, labre). MVCTECIA, Latr. — Menton subcordiforme, échancré. Palpes maxillaires à der- nier article échancré en demi-cercle. Jambes antérieures avec angle apical ex- terne saillant et dentiforme. Tarses épineux. Le type de ce genre est le A^ nodosa, Germ., Coléoptère noir, à pattes quelquefois brunes ou fauves, assez convexe, à élytres carénées latéra- lement, avec stries et rides, du littoral atlantique de la république Ar- gentine. (Détails, pi. XXXIX ; 5 c, sa tête vue en dessous; 5c/, lèvre infé- rieure et palpes ; 5 a, antenne.) Beaucoup d'autres espèces plus grandes, ■ plus larges, plus convexes, du Cliili et de la Patagonie, en général de la motié australe de l'Amérique du Sud. HYPEROP^, Eschscb. — Mandibules épaisses. Palpes maxillaires robustes, à dernier arlicle subcylindrique et tronqué. Antennes robustes, filiformes, à ar- ticles cylindriques et serrés, décroissant peu à peu. Corselet rétréci à la base. Élytres allongées, oblongues, échancrées à leur base en demi-cercle. Insectes d'un noir mat, avec petits points creux disposés en stries sur les élytres. Les espèces des Indes ont en général le corselet trans- versal, tandis qu'il est allongé chez celles d'Afrique. — Ex. : H. tage- nioides, Eschsch., d'Algérie et du Sénégal (pi. xxxix, fig. 6 ; 6 a, menton et mandibules d'une espèce voisine; 6 6, tête vue en dessus ; 6c, an- tenne). Douze espèces d'Hyperops : Egypte, Algérie, Sénégal, Mozam- bique, Indes orientales. .">72 COLÉOPTÈRES, — TÉNÉBRIONfEKS. MESOSTESiA, Eschch.— Tête saillante et carénée. Corselet fortement rétréci en arrière. Élytres à base échancrée, ovalaires, rétrécies en arrière. Les espèces de ce genre sont de forme sveKe et convexe, avec tégu- ments durs, d'un noir très-brillant. Presque toutes sont d'Afrique. — Ex. : M. anguskita, Fabr., ou pimctipennis. Sol., d'Egypte et de Nubie- (pi. XXXIX, fig. 7), ainsi nommé en raison des rangées régulières de points creux qu'offrent les élytres, ce qui est du reste un caractère du genre. i\euf espèces d'Egypte, des Canaries, d'Algérie, de Syrie. ACIS OU Akis, Herbsl. — Antennes de onze articles, les trois derniers très-petits. Corselet fortement échancré en avant, aminci et relevé sur les côtés, avec angles postérieurs saillants et aigus. Élytres épaisses, ciirénées. Ces insectes, méditerranéens et asiatiques, au nombre d'une tren- taine d'espèces, sont lucifuges, à démarche lente, se cachant pendant le jour sous les pierres, au pied des vieux murs, dans les parties souter- raines des ruines, vivant exclusivement, à tous leurs états, d'immondices et d'excréments les plus abjects. La larve de VA. Bacarozzo, Schrank, ou punctata, Thunb., du sud de la France et de l'Espagne, d'Italie, d'Algérie, est aveugle, d'un blanc jaunâtre, hérissée de poils roux, avec le dernier segment excavé en dessus et muni sur le bord de quatre saillies brunâtres relevées. Nous représentons VA. Gorxji, Sol., du nord de l'Afrique, en particulier de Bône (pi. xxxix, fig. 8; 8a, bord anté- rieur de la tête). \JA. punctata, de 15 à 20 millimètres, est d'un noir brillant, à corselet et élytres granuleux et plissés, celles-ci carénées au bord externe. C'ACiCes, Sol. — Antennes longues, assez robustes, filiformes. Corselet arrondi, très-convexe. Élytres beaucoup plus larges que le corselet, assez courtes. l*attes très-longues, surtout les antérieures. Ex. : C. amen'canus, Lacord. (pi. xxxix, fig. 9), des environs de Buenos- Ayres, de Mendoza, etc., genre établi sur une seule espèce, consti- tuée par un grand insecte qu'on prend parfois à l'intérieur des maisons. Lacordaire, qui a étudié cet insecte vivant, dit qu'il émet un son assez fort. M. Goureau a pu reproduire ce bruit en partie par le frottement des cuisses postérieures contre les côtes Iransverses des lianes des élytres. HEl.E.\OPiloni'0.\0BA*9lf^, Sol. — Caractères très-analogues à ceux du genre précédent. Élytres ovales, arrondies latéralement. Ces Coléoptères, plus petits et plus rugueux que les Eurychora, sont également africains, mais ne remontent pas aussi au nord et n'existent pas en Algérie. — Ex. : P. rugomla, G.-Mén,, ou opativides, Sol., du Sénégal (pi. xxxix, flg. 10). Cinq espèces, .%DE£,oc!iTOM.%, Duponchel. — Tête dégagée du corselet, carrée ; antennes de dix articles, courtes, robustes, cylindriques, velues. Corselet caréné sur les côtés, bicaréné sur le disque. Élytres tantôt côtelées, tantôt rugueuses. Pas d'ailes. Le genre a été fondé sur VA. sulcatuiu, Dup., découvert à Cadix, re- trouvé en Algérie, en Syrie, se cachant sous les pierres. Les espèces, noires et de petite taille, se trouvent dans la partie la plus australe de l'Europe méditerranéenne, en Egypte, en Asie Mineure et en Afrique, jusqu'en Guinée. — Ex. : A. rugosum,, Gory, du Sénégal (pi. xxxix, fig. 12 ; 12 a, tête vue en dessus ; 12 6, tète vue en dessous; 12 c, an- tenne grossie). Six espèces. STEU'OSIS, Herbst.— Tète très-allongée, rétrécie en anière; dernier article des palpes allongé. Antennes robustes, de onze articles, allant en se rétrécissant et s'élargissant. Élytres allongées, oblongo-ovales, plus larges que le corselet. Pas d'ailes. Les Stonosis sont de petits insectes à corselet et élytres sans cotes, simplement rugueux ou ponctués en creux, d'un noir mat, plus rare- 57^ COLÉOPTÈRES. — TÉNÉBRIONILNS. ment rougeàtres, propres au midi de l'Europe, et notamment répandus autour du bassin méditerranéen. On les trouve dans les lieux secs, au pied des plantes, sous les pierres, le long des vieux murs, et souvent réunis en sociétés plus ou moins nombreuses. — S. orientalis, Brullé, de Turquie, de Grèce, d'Algérie (pi. xl, fîg. 1; la, tête grossie, mais dans le dessin de laquelle n'a pas été reproduite la ponctuation propre à l'espèce ; 1 b, bouche vue en dessous). On trouve dans le midi de la France les S. coarctata, Gemminger, et intennedia, Sol. Le genre com- prend plus de trente espèces, du midi de la France, de Corse^ de Bar- barie, de Grèce, d'Egypte, de Palestine, de Crimée et de la Géorgie russe. PSAMIMETICOliS, Latr. — Antennes assez longues, robustes, cylindriques, de onze articles, le dernier plus petit. Tête dilatée et relevée en avant, avec col épais. Corselet subcordiforme. Élytres embrassant fortement l'abdomen. Ces insectes, du Chili et du Pérou, sont d'un noir mat. Le type est le P. costatus, G.-Mén., des deux pays cités, ayant des côtes fines et tranchantes sur les élytres (pi. xl, fig. 2 ; 2 a, bouche vue en dessous ; 2 6, tête en dessus). Trois espèces. SCAURIJ!!*, l'abr. — Antennes de onze articles, le dernier très-long et atténué au bout. Tète dégagée -, corselet tronqué en avant, arrondi sur les côtés. Élytres oblongo-ovales, très-déclives en arrière. Pas d'ailes. Par exception à la règle habituelle, les mâles des Scaurus sont plus grands que les femelles et ont les jambes antérieures arquées et les cuisses antérieures plus épaisses et plus dentées, sans doute pour quel- que particularité de l'accouplement. Ces insectes, noirs, de mêmes mœurs que les Akis, de taille grande ou moyenne, gros, épais, assez convexes, à élytres anguleusement arrondies aux épaules, se trouvent sur le littoral européen et africain de la Méditerranée ; on les prend. sous les pierres, au pied des vieux murs. — Ex. : S. riigulosus , Sol. (pi. XL, fig. 3 ; 3a, bouche vue en dessous: 3 b, antenne), espèce à ély- tres côtelées, de l'Espagne méridionale. Le genre comprend vingt- quatre espèces, dont plusieurs se rencontrent dans le midi de la France : ainsi S. atratus, F ahr., de 10 à ili millimètres, à élytres sans côtes; S. tristis, Oliv., ou catcaratus, Fabr., d'un noir presque mat, de 15 à 18 millimètres, à élytres ayant chacune trois côtes saillantes. SCOTOUllIS, Germer. — Palpes robustes, le dernier article des maxillaires sub- triangulaire; antennes de onze articles, à derniers articles piriformes et moni- liformes. Élytres arrondies aux épaules, brusquement déclives en arrière, souvent côtelées. Ces Coléoptères, noirs, souvent de grande taille, au nombre d'une trentaine d'espèces, sont répandus du'Pérou à la Patagonie, dans toute PIMÉLIDES. — VIETA, TRACHYNOTUS, PSAMMODES. 575 l'Amérique du Sud. — Ex. : S. yranosus, Lacord., du Tucuman et du Chili (pi. XL, fig. h; ka, tête vue en dessus; h b, bouche en dessous ; Zic, antenne). VIETA, de Cast. — Antennes de dix articles apparents, les deux derniers soudés. Corselet très-largement caréné au milieu et saillant au-dessus de la tête, avec fortes épines latérales. Élytres à carènes latérales fortement denticulées. Ce genre, du nord de l'Afrique, de la Sicile, du sud de l'Espagne, est constitué, ainsi que le genre Sepidium, Fabr., très-voisin et des mêmes régions, par de beaux insectes à corps oblong, jaunâtre ou d'un jaune rougeâtre, à corselet et à élytres hérissés de pointes carénées, couverts d'un duvet écailleux très-serré. Nous représentons le V. senegalensis, Klug, ou vestita, Solier, du Sénégal, de couleur cendrée par le fait de sa pubescence (pi. xl, fig. 5; 5 a, même espèce de profil ; 5 6, tête vue en dessus; 5 c, bouche en dessous; 5 d, antenne). On compte trois espèces de Vieta, du Sennaar, du Sénégal, de l'Arabie et de l'Egypte, et dix-sept de Sepidium, d'Espagne, de Sicile, de Barbarie et d'Egypte. TRACHT'lîOTUS, Latr. — Dernier article des palpes maxillaires subtrianguiaire ; antennes de onze articles, les derniers un peu plus renflés. Corselet dilaté et aminci sur les côtés. Élytres oblongo-ovales, carénées et rebordées latéra- lement. Ces insectes, de taille moyenne, sont du cap de Bonne-Espérance et de Mozambique. — Ex. : T. vittatus, Fabr. (pi. xl, fig. 6; 6 a, tète vue en dessus; 6 6, antenne). Habite le Cap. PSAMMODEiS, Kirby. — Corselet tranchant sur les côtés, subcordiforme, convexe, mais non globuleux en dessus. Élytres amples, voiitées, très-déclives en arrière. Antennes de onze articles, filiformes. Palpes épais. Les mâles ont une tache arrondie, formée par des poils tomenteux jaunâtres, et située sur le dernier arceau abdominal. Dans les deux sexes les élytres ont des côtes, ou des tubercules, ou des rides. Une cinquantaine d'espèces du Cap, de Mozambique, de Sierra-Leone, du Zambèze, d'Angola. — Ex. : P. scaher, Fabr., du Cap (pi. xl, fig. 7 ; 7 a, bouche en dessous ; 7 b, tète en dessus ; 7 c, antenne). H. - BLAPSIDES. Corps aptère. Palpes maxillaires à dernier arlicle fortement sécuri- fornie. 576 COLÉOPTÈRES. — TÉNÈBRIOMENS. om.Yl.iR.% OU OxURA, Kirby. — Antennes grêles, de onze articles, Tèle dégagée et saillante; très-grand écusson transversal. Élytres en ovale allongé, déhiscentes, carénées laléralenientj relevées à rexlréniilé. Le lype est VO. nctotia, Kirby, d'un brun rougeâtre, habituellement enduit d'une couche de matière terreuse, en rapport avec sa vie luci- fuge, à travers laquelle percent des poils courts et redressés, dont les insectesdece genre sont re\êtus. Du Cap (pi. xLi,fig. 1 ; 1 a, son antenne). Deux espèces du Cap. AClPIiTHOMERA, Latr,, ou Psorodes, Sol. — Corps tuberculeux en général. Antennes très -longues et filiformes ; écusson très-transversal. Corselet transversal et arrondi sur les côtés. Pattes fortes ; cuisses antérieures munies d'une dent aigur, au moins chez les mâles. Les insectes de ce genre, d'assez grande taille, constituent huit es- pèces propres au cap de Bonne-Espérance, ordinairement glabres, avec des rangées régulières de tubercules ou de stries. Il y a des poils re- dressés chez le /'. (jralilla, Herbst (pi. xij, fig. 2). MlPOli.%MFC!ii, Latr. — Antennes de onze articles, grossissant peu à peu ver? l'extrémité. Corselet échancré en avant, subcylindrique et voûté ; pas d'écusson. Élytres courtes, cylindrico-ovalaires. Corps glabre. Tous les insectes de ce genre sont d'un noir foncé, brillant ou mat, finement ponctués. Ils appartiennent au sud de l'Espagne et du Portu- gal, à l'Algérie, au Maroc. — Ex. : M. gibbulus, Herbst, d'Espagne et de Portugal (pi, xli, fig. 3 ; 3o, antenne). Huit espèces. BIjAPS, Fabr. — Tête dégagée; antennes de onze articles, les derniers globuleux. Corselet subcarré ; élytres atténuées et souvent mucronées à l'extrémité. Pattes longues, à cuisses canaliculées. Les Blaps comprennent un grand nombre d'espèces répandues sur- tout dans l'Europe orientale, l'Asie, le bassin de la Méditerranée. Ce sont de grands Coléoptères, d'un noir généralement mat, à élytres sou- vent sillonnées. On les trouve dans les caves, dans tous les lieux hu- mides et obscurs, dans les latrines du rez-de-chaussée, sous les pierres, sous les plantes mises en tas et pourrissant dans les jardins, sous les tonneaux, les solives, les planchers. Pendant le jour, ils demeurent cachés et ne sortent guère que la nuit. Leur marche est très-lente, et de là vient le nom du genre. Ils dégagent par l'anus un fluide qui paraît de couleur verte dans les glandes anales qui le sécrètent et laisse après les doigts qui saisissent l'insecte une odeur persistante désagréable. Les mâles sont plus étroits que les femelles et ont la pointe terminale BLAPSIDLS. — r.LAPS. 577 des élytres plus aiguë, quand elle. existe. En général ils ontsous le second segment abdominal une touffe de poils roux, analogue aux organes des mâles des Dermestes, et devant servir sans doute dans la copulation. Parfois il existe en même temps, sur la saillie intercoxale du premier segment de l'abdomen, un tubercule tronqué dont les mâles se servent, dit-on, pour frapper sur divers corps afin d'appeler les femelles. C'est à tort que certains auteurs ont au contraire attribué ces caractères aux femelles. Les larves des Blaps ressemblent beaucoup à celles des Ténébrions. M. E. Perris a étudié celles des B. fatidica, Sturm., et gigas, Fabr., qu'il trouva, à une profondeur de 20 centimètres environ, dans la terre noirâtre, formée d'humus mêlé de bois, qui constituait le sol d'un bû- cher où il rencontrait les adultes; c'est donc dans la terre des caves, des celliers, des remises, des écuries, qu'on doit rechercher les larves de nos espèces communes. Elles sont de grande taille, lisses, luisantes, subcornées, de couleur Isabelle, cylindriques à l'abdomen, demi-cylin- driques au thorax. Leurs mandibules sont larges, crochues, noires ; leurs mâchoires fortes, cylindriques ; les palpes maxillaires ont trois articles, les labiaux deux et les antennes quatre. Les pattes, médiocre- ment longues, comprimées, robustes, fouisseuses, ont quatre articles ; deux poils se voient de chaque côté des anneaux. Il y a neuf segments à l'abdomen, le dernier subconique, avec des rangées de petites épines en dessous de l'anus, qui s'ouvre au milieu d'un mamelon à peine ex- tractile ; les stigmates sont comme à l'ordinaire. Les nymphes se forment dans une grande cellule subarrondie en terre. Elles ?ont blanches et nues, avec de petites aspérités rouisâtres sur la région dorsale, des crêtes ferrugineuses cornées et tranchantes sur le bord des anneaux, une pubescence roussâtre ; deux appendices coniques, subcornés, de couleur ferrugineuse, avec la pointe noire, ter- minent le dernier segment. Ces aspérités servent aux évolutions de la nymphe couchée sur le dos dans sa large cellule; elle éclôt au bout d'un mois environ. Selon M. E. Perris, les larves des Blaps doivent vivre de déjections animales, de crottins de rats et de souris, etc. M. E. Des- marest les regarde comme nuisibles pour nous, en ce qu'elles con- courent à la destruction des bois dans les caves et celliers. D'autres entomologistes regardent au contraire les Blaps adultes comme utiles, mangeant les limaces des caves, à l'instar des Sphodrus. Leurs pièces buccales peu développées ne doivent leur permettre que des proies assez molles et des détritus. On les conserve longtemps vivants en cap- livitc, même à jeun ou percés par l'épingle, fait en rapport avec un régime carnassier. On doit signaler parmi lés Blaps le B. inortisaga, Linn., de toute l'Europe et du Caucase (pi. xli, fig. /i), nommé Scarabée puant par les anciens auteurs, Ténébrion à prolongement par Geoflroy. il est noir, de 20 à '25 miUimèlres, ovalaire-oblong, avec les élyires et le corselet GIRARD. 37 578 COLÉOPTÈRES. — TÉNÉRRIO^MENS. à fins points saillants, plats et mâme déprimés, et une pointe au bout des élytres. On dit qu'attiré par la chaleur, il se glisse parfois dan? les lits des paysans qui habitent des cabanes humides et malpropres. Son aspect répugnant, sa fétidité, lui ont valu les surnoms de Présage-mort] Porte-malheur, Sorcière de la mort. Il faut encore citer le B. similis, Lalr., ou faticlica, Sturm., d'Europe et d'Algérie ; le /?. gages, Linn., ou gigas, Fabr., à corselet bossu au milieu, à élytres très-lisses, atteignant prés de U centimètres de longueur, du sud de la France et de la Russie, d'Ks- pagne, d'Italie, d'Algérie ; le B. sulcata, Fabr., d'Algérie et d'Egypte, de Sardaigne, du Maroc, à élytres sillonnées de neuf stries sur chacune. Ce dernier insecte est en Egypte le sujet de préjugés populaires et entre dans la pharmacopée domestique; les femmes le mangent cuit au beurre, afin d'engraisser, ce qui est une question très-importante pour le beau sexe en Orient; on le préconise aussi pour guérir les douleurs d'oreilles, la morsure des Scorpions, etc. — Nous représentons, pi. xli, fig. 5, la bouche de cette espèce vue en dessous ; 5 a, son antenne. — A consulter : de Brome, Monographie de quelques genres de Coléoplères héléromères de la tribu des Blapsides (Paris, Lachèzc, 1842). ClOIVOPl'tii, Latr. — Antennes courtes et robustes, de onze articles. Corselet for- tement cordiforme et rebordé. Élytres courtes, largement ovales et arrondies en arrière. Pattes robustes, corps glabre. Ce genre, de l'Afrique australe, Cap et Mozambique, a pour type un insecte noir du Cap, le G. tibialis, Fabr. (pi. xli, fig. 6), assez répandu dans les collections. Cinq espèces. AU'OMALIPITS, G.-Mén. — Antennes courtes et robustes, de onze articles, les derniers déprimés. Corselet échancré circulairement en avant, Irès-arrondi sur les côtés, rétréci et rectangle eu arrière. Élytres subparallèles, brusquement arrondies en arrière, carénées sur les bords. Pattes robustes, avec les jambes antérieures bidentées. Les insectes de ce genre, propre comme le précédent à l'Afrique aus- trale, Cap et Mozambique, sont de grands Coléoptères d'un noir terne, qu'on reçoit habituellement couverts d'un enduit terreux , indiquant des mœurs hypogées. — Ex. : A. dentipes, Fabr. (pi. xli, flg. 7; 7a, bouche vue en dessous; 7 b, antenne). Habite le Cap. Cinq espèces. 1II.%CHL<.%, Herbst. — Antennes de onze articles reçues au repos dans des sillons ' du corselet ; menton recouvrant complètement les mâchoires et la languette. Les Machla sont des insectes assez rares, au nombre de sept espèces, du cap de Bonne-Espérance, d'un noir terne, ayant ordinairement les téguments couverts de petits poils écailleux, et en outre, dans quel- ques espèces, de longs poils redreâsés : ainsi dans M. villosa, Herbst (pi. XLI, fig. 8. son corselet; 8 a, bouche en dessous); liLAPSlDES. — SGOTINUS, ASIDA, HOPATUINUS. 579 SCOTIMCS, Kirby. — Antennes courtes, de dix articles. Corselet très-échancré en avant et caréné sur les bords. Élytres ovales, carénées latéralement. Corps épais, tomenteux en dessous. On rencontre ces insectes au Brésil, marchant lentement dans les lieux sablonneux ou cachés sous les feuilles ou troncs d'arbres renver- sés. — Ex. : S. tuberculatus, Eschsch. (pi. xli, Qg. 9; 0 a, bouche vue en dessous; 9 6, antenne). AlilD.%, Latr. — Palpes à dernier article fortement sécuriforme. Antennes libre» au repos, de onze articles, les derniers élargis, surtout le dixième. Les Asides constituent un genre nombreux en espaces, plus de cent vingt, d'une séparation difficile, habitant surtout l'Europe méridionale et le nord de l'Afrique, et quelques espèces des États-Unis et du Nouveau- Mexique. Ce sont des insectes d'une démarche lente, se plaisant principa- lement dans les lieux secs et arides, et se cachant le jour sous les pierres, sous les plantes, sous les feuilles mortes, au pied des arbres, etc. Les es- pèces sont tantôt glabres, tantôt finement pubescentes, de sculpture très variée ; les mfiles ont les contours latéraux plus parallèles, sont peu con- vexes ou môme déprimés, les femelles ovalaires et plus convexes, au point qu'on en a quelquefois fait des espèces distinctes. On trouve près de Paris 1'^. sabulosa, Goeze, ou grisea, Fabr., ou rugosa, Fourcroy, de France, d'Allemagne, d'Italie, Coléoptère grisâtre, long de 12 à IZi millimètres, avec quatre lignes élevées et sinueuses sur les élytres, souvent couvert de terre. Citons encore VA. lœvis. Sol., d'Espagne (pi. xli, fig. 10, tôte en dessous; 10a, antenne). BOPATRIISU!^ ou Opatrinus, Latr. — Tête fortement échancrée en avant; an- tennes de onze articles, les derniers subglobuleux. Corps ailé chez la plupart. Ces insectes, au nombre déplus de vingt espèces, d'une taille moyenne, ont les élytres striées; les mâles offrent les quatre premiers articles des tarses antérieurs dilatés. Us habitent les parties chaudes de l'Amé- rique, de l'Afrique, Madagascar et Tonga-Tabou. — Ex. 0. ^fe/ne/toti/s, OUv., de la Guyane (pi. xu, fig. 11, tarse antérieur du mâle; 11 a, an- tenne ; 11 b, tête en dessous). iNous ferons remarquer que ce genre n'est plus placé aujourd'hui, comme par Latreille, près du genre Opatrum, mais près des genres Fedinus et Platyscelis ; il appartient réellement aux Blapsides par la majorité des caractères, bien que, par exception, il ne soit pas aptère. 580 COLÉOPTÈKI-S. — TÉNÉnRIONIENS. ilEMOPATE!^, Muls. — Tarses antérieurs des mâles dilatés, avec brosses de poils en dessous, et jambes iiUermédiaires et postérieures ciliées de longs poils fauves. Ce genre est assez nombreux en espèces, difficiles à distinguer, du midi de l'Europe, de Barbarie, de Turquie, de Perse, de Sibérie , de Chine. — Ex. : H. lusitanicus, Herbst, d'Espagne et Sardaigne (pi. xu, fig. 12, patte antérieure du mâle). Plus de quarante espèces. 11 faut citer H. gibbus, Fabr., de 8 à 10 millimètres, oblong, peu con- vexe, d'un noir assez brillant, à élytres striées et ponctuées, très-com- mun sur les plages sablonneuses de la Manche et de l'Océan. B>E:»liVi:«ii, Latr. — Tète semi-enfoncée, à yeux rentrés. Corselet transversal, échancré en arc à sa base. Corps oblong ou court, convexe et comme arqué en dessus. Les Pédines sont des Coléoptères de taille moyenne, répandus prin- cipalement dans le midi de l'Europe, et dont quelques espèces remon- tent dans l'Europe centrale. Les mâles ont les tarses antérieurs dilatés, avec brosses de poils en dessous. — Ex. : P. helopioïdes, Ahrens, d'Al- lemagne, de Grèce, de Dalmatie (pi xu, fig. 13; 13 a, patte antérieure du mâle). DIiAPSTIi%lJS, Latr. — Tête transversale, largement échancrée en avant. Tarses antérieurs dilatés chez les mâles. Corps quelquefois ailé sous les élytres. Les espèces de ce genre sont des parties chaudes et tempérées de l'Amérique. Ce sont des insectes de taille médiocre, d'un noir quelque- fois bronzé, avec des élytres ponctuées. — Ex. : B. punctatus, Fabr., des Antilles (pi. xu, fig. l/i, tête; ilxa, larse antérieur du mâle; 1^6, tarse intermédiaire; ilxc, tarse postérieur). Plus de vingt espèces. PliATYSCEIilS, Latr. — Tète très-transversale, un peu voûtée ; antennes grêles, de onze articles, les derniers subglobuleux. Tarses antérieurs et intermédiaires des mâles dilatés, avec brosses en dessous, simples chez les femelles. Les Platyscelis sonl propres à l'Europe orientale, à l'Asie Mineure, à la Sibérie, tantôt presque aussi grands que quelques Blaps, tantôt, au €ontraire, de taille très-moyenne ouniême assez faible. Certains, ainsi P. gages, ont un faciès de Crypticus, Ténébrioniens du groupe suivant. — Ex. : P. gages, Fisch,, de Sibérie et de la Russie méridionale (pi. xli, fig. 15; 15a, tète en dessus ; 15 6, antenne; 15 c, tarse intermédiaire du mâle; 15c?, tarse antérieur du même sexe). Douze espèces. TÉNÉRRIONTOES. — CRYPTICUS, HOPATRLM, CHlUOSCELFS. 581 111. — TÉNÉBRIONIDES. Corps pourvu d'ailes sous les élytres. Dernier article des palpes sécurilbrmes. CRYPTICUS, Latr. — Tête demi-circulaire en avant, à yeux débordant. Corps ailé ou aptère ; antennes grêles^ de onze articles. Les Crypticus sont des insectes de taille assez peiite ou médiocre, noirs ou d'un ferrugineux brillant, glabres ou pubescents, parfois avec des stries peu marquées. On les trouve courant le jour, d'une manière assez agile, dans les lieu.v sablonneux ou arides et exposés au soleil. Le type, un des plus petits et des plus allongés, est le C. quisquilius, Linn., de l'Europe méridionale et d'Algérie, d'un noir peu brillant, de 5 à 6 millim. — Nous représentons le C. gibbuhis, Quens., de la France méridionale et du bassin de la Méditerranée (pi. xlh, fig. 1 ; 1 a, télé en dessus; 1 6, antenne). Outre l'Europe méditerranéenne, les Cana- ries, Ceylan et l'Arkansas. Plus de vingt espèces. HOPATRUM ou Opatrum, Fabr. — Tète transversale, arrondie en avant et for- tement échancrée en triangle; antennes de onze articles, grossissant un peu à leur extrémité. Élytres parallèles, largement arrondies en arrière. Tarses simples dans les deux sexes. Les Opatres ont, selon les espèces, des ailes nulles, rudimentaires, développées , des formes et une sculpture variées, tantôt glabres, tantôt revêtues de poils ou de cils couchés, d'un fauve jaunâtre, tantôt courts et subconvexes, tantôt allongés et déprimés. Leurs espèces sont nom- breuses dans les lieux sablonneux et arides de l'Europe méridionale, sous les pierres, au pied des plantes, ou vaguant çà et là pendant la plus forte chaleur du jour. Ce sont des insectes de taille moyenne ou petite, souvent couverts de poussière. Le type du genre, l'O. sabulomm, Linn., de 8 millimètres, d'un brun noir mat, slrié et granuleux, est très- commun aux environs de Paris et dans toute la France ; on le trouve dans toute l'Europe, l'Algérie, le Caucase. C'est le Ténéhrion à stries de7itelées de Geoffroy. — Nous représentons l'O. elo7igatum, G.-Mén.., du Bengale (pi. xui, fig. 2; 2a, tète en dessus ; '2 b, antenne). Près de cent trente espèces de toutes les régions de l'ancien monde, quelques-unes de Polynésie et de l'Australie. CHIROfivCEl.lfii, Lam. — Lèvre inférieure large el en croissant ; antennes très- robustes, à articles arrondis, le dernier en massue. Jambes antérieures très- fortement triangulaires, à cinq digitalions. Le genre Chiroscelis est formé de très-grands Coléoptères noirs en bruns. Il paraît propre à la côte de Guinée et à l'Afrique australe. Nous 582 COLÉOPTÈRES. — TÉNÉBRIOXIENS. figurons une célébrité entomologique, sujet ou espèce, encore unique dans les collections, nommée C6//enes^ra,Lam. (1), et rapportée en 1803 par Pérou, du voyage aux Terres australes. On trouve sur le second seg- ment abdominal des dépressions ovales que Lamarck prit pour dés or- ganes de phosphorescence, comme les taches orbiculaires du corselet des Pyrophorus. C'est certainement une erreur, car j'ai vu très-bien à la loupe, sur le sujet uiiique du Muséum, que la surface de ces taches n'est pas une fine membrane, mais est recouverte de poils formant un feutrage épais (2). Ces organes paraissent génériques, car on les trouve comme apanage des femelles dans les diverses espèces connues du genre (M. Westwood). Le C. hifenestra fut rapporté dans les collections envoyées à l'avance sur le vaisseau le Naturaliste, qui revint un an avant Pérou, il semble fort douteux que l'espèce soit d'Australie; elle a très- probablement été trouvée dans quelque relâche au Cap ou à la côte d'Afrique, peut-être donnée dans le séjour aux Canaries au début du voyage. Lacordaire et M. Guérin-Méneville pensent que l'insecte décrit par Lamarck n'est qu'une variété du Chiroscelis {Tenebrio) digitatiis, de Fabricius, de la côte de Guinée. — Nous représentons ce bel insecte, pL XLii, fig. 5; 5a, tète vue en dessus; 5 b, palpe maxillaire Irès- grossi. TOXICUM, Latr. — Corps cylindrique. Tête bicornue ou quadricornue chez les mâles, iriernie chez les femelles ; antennes grêles, avec les quatre derniers articles brusquement élargis. Ces insectes, de taille moyenne, d'un noir profond et velouté, sont _ propres aux Indes orientales et à l'Afrique. —Ex. : T. curvicorne, Chevr., du Sénégal (pi. xLir, fig. 6; 6a, tête du mâle vue en dessus; 6 6, lèvre inférieure ; 6 c, antenne de face et de champ, afin de montrer dans cette seconde position l'aplatissement des articles terminaux élargis). BIUS, Muls. — Mandibules bifides ; antennes de onze articles, les cinq derniers déprimés et élargis progressivement. Corselet subcarré. Le type est un insecte de taille médiocre, finement ponctué en des- sus, à corps ailé, allongé, parallèle, déprimé, le B. thoracicus, Fabr. (pi. xi.ii, fig. 7; 7 a, lète vue en dessous; 7 6, antenne). Il habite le nord de l'Europe et les montagnes de ce continent, et se trouve sous les écorces des arbres. Une seconde espèce est de Cilifornie. (1) Ann. du Muséum, t. III, p. 260. (2) Maurice Girard, Péron, naluralisle voyageur aux Terres australes. Paris, J. B. Baillière et fils, 1857, p. 170. Tt.XÉBRlOINIDES. — CALCAR, NYCIORATES, TENEBRIO. 583 !i!$lTOPII.%GU^, Muls. — Genre très-voisin. Le type est le S. Solieri, Muls., trouvé à Marseille et Irès-probable- ment importé, causant des dégâts dans les grains. Il y a quatre autres espèces, de Madère et d'Amérique. CAI.CMR; Latr. — Menton plan, faiblement échancré ; dernier article des palpes maxillaires fortement sécuriforme ; antennes de onze articles, les derniers sub- monilifornies. Corps très-allongé, linéaire, déprimé, ailé. Ce genre est formé d'insectes épigés, d'assez petite taille, d'un brun noirâtre, très-finement pointillés, et de la faune méditerranéenne. L'espèce la plus connue est le C, elungatum, Herbst (pi. xlii, fig. 8; 8 a, chaperon et labre en dessus ; 8 6, bouche en dessous; 8c, antenne). Cet insecte est répandu au sud de la France et de l'Espagne, au Maroc, en Algérie et à Madère, en Russie méridionale et en Sibérie. Six espèces. UPIS; Fabr. — Corps ailé, allongé; antennes de onze articles, les cinq derniers élargis. Corselet plus long que large. Le type du genre est un insecte de l'Amérique boréale, de la Suède, de la Laponie, VU. ceramboïdes, Linn. (pi. xui, fig. 9; 9 a, tête en dessus; 9 b, antenne ; 9 c, lèvre inférieure; 9 c/, id., vue de profil). Celte espèce, d'un noir brillant, d'assez grande taille, vit, dit-on, dans les Bolets des troncs d'arbres et particulièrement des Bouleaux. Elle est remarquable par ses élytres couvertes de fortes rugosités confluentes ; les mâles ont les jambes antérieures arquées et bisinuées intérieurement. 1%1'CTOB.tTE!*, G.-Mén. — Caractères très-voisins de ceux du genre Upis. Les Nyctobates, au nombre de près de trente espèces, sont des régions chaudes des deux continents, de taille au moins moyenne, parfois très- grande (iV. gigas, Linn., maximus, Germ., de l'Amérique du Sud). La plupart des espèces sont d'un noir profond, quelques-unes ont des cou- leurs métalliques; les téguments sont sillonnés ou striés, et en général revêtus d'une efflorescence fugace et veloutée. Elles vivent sous les écorces. Lacordaire a reconnu que les grandes espèces d'Amérique lancent par l'anus, quand on les saisit, à plus de 30 centimètres de dis- tance, une liqueur caustique, d'odeur aussi pénétrante que celle qui est lancée par les Carabus, et où Pelouze a reconnu l'acide butyrique. TO'KURIO, Linn. — Tète subrbomboïdale; menton convexe, trapézifornie ; antennes de onze articles, les derniers moniliformes et grossissant peu à peu. Corps allongé, parallèle, peu convexe. Les Ténébrions sont des insectes de taille moyenne, de couleur obs- cure, noire ou brune, et rendue terne par une foule de petits points 58h GOLÉOPTÈHES.— TÉNtBRIONIENS, en creux ; les tarses sont ciliés en dessous ; les jambes de devant sont arquées chez les mules. Ces Coléoptères recherchent les lieu\ obscurs, ne sortent et ne volent guère que la nuit. Les espèces du genre réduit sont peu nombreuses et propres à TEurope, à l'Afrique, à l'Amérique boréale. On trouve les unes dans les parties cariées du tronc des arbres, les autres dans les boulangeries^ chez les meuniers, dans les écuries, etc. Une espèce fort nuisible, d'Europe, d'Algérie, du Caucase, est le T, mo- /îtor, Linn. (pi. xui, fig. 10, bouche vue en dessous; 10 a, antenne). 11 est long de 15 millimètres, d'un brun noirâtre, avec les élyfres souvent d'un brun rougeâtre, fortement striées de neuf ou dix stries; son nom de Ténébrion est fort ancien et se trouve dans l'ouvrage de Varron De re rustica.On en rencontre souventdes débris dans le pain. Sa larve, longue, cylindroïde, d'un fauve clair luisant, avec le dernier anneau du corps muni de deux petites pointes crochues, est connue sous le nom de Ver de farine. Ver des meuniers. Elle est recherchée comme appât pour cer- taines pêches, et s'emploie par les amateurs d'oiseaux insectivores pour nourrir les habitants de leurs volières. Elle sert surtout à élever les jeunes Rossignols et à prendre les adultes vivants dans les pièges. Elle vit de farine, et cause souvent de grands dommages aux farines conservées, et aussi aux provisions de biscuit de mer sur les navires, concurremment avec les Blattiens. Les caractères anatomiques de cette larve ressemblent beaucoup à celle des larves deBlaps ; les mandibules sont fortes, mais non saillantes et terminées par une extrémité bifur- quée. Les segments thoraciques sont recouverts d'écussons cornés; les segments abdominaux, égaux en largeur, ce qui donne à ces larves la forme cylindroïde, sont partagés en deux par des écussons parchemi- nés, les dorsaux très-dévcloppés, les ventraux moins larges. Une se- conde espèce, plus grande, de 15 à 18 millimètres, aussi Irès-répandue, d'Europe, d'Algérie, du Caucase, le T. obscurus, Fabr., à stries des clytres bien moins marquées, a sa larve vivant surtout de débris d'origine animale. Nous représentons (pi. xtn, fig. 12) sa lèvre infé- rieure. 11 faut remarquer que le T. imlitor a un régime analogue en réalité, car la farine contient du gluten, substance très-azotée. On comprend que cette espèce soit devenue cosmopolite par le fait des transports résultant de son régime. HETEROTAR!#lS, Latr. — Quatre articles aux quatre tarses antérieurs, trois aux postérieurs. Anleiines de onze articles, les derniers transversalemeat , élargis. Corselet transversal, arrondi sur les côtés; grand écusson. On n'a d'abord déciit {kon. de Guér.-Mén., texte p. 121) qu'une es- pèce du Sénégal, \'H. tenehr ioïdes , G. -M. (pi. xlu, fig. 11; lia, tète; Il h, antenne ; lie, tarse antérieur ; 11 d, tarse postérieur). Il existe dans les collections d'autres espèces encore nominales du même pays et des Indes orientales. On en a décrit une seconde de Java. TÊNÉBRIONIDES. — DIAPERIS, IIYPOPHLOEUS, TR\CHySCRr.IS. 585 DlAPERl!^, Geoffr. — Corps globoso-ovalaire. Tête atténuée en avant ; antennes de onze articles, les huit derniers élargis et transversaux. Ce genre comprend des Coléoptères ailés, au nombre de quatre es- pèces, d'Europe et d'Amérique, à téguments brillants, comme vernissés, à couleurs variées, ornés en général de bandes fauves transverses sur les élytres. On les trouve sous les écorces et dans diverses espèces de Bolets que leurs larves creusent de galeries irrégulières. De ces larves, les unes vivent dans l'intérieur de Bolets croissant à l'air libre, et sont aveugles : ainsi la larve blanchâtre et charnue du D. Bolsti, Linn., es- pèce de toute l'Europe moyenne et méridionale, du Caucase, d'Algérie, subit sa nymphose dans un sphéroïde qu'elle a détaché du Bolet nour- ricier. Les autres, appartenant à des genres très-voisins du genre Dia- peris actuel, rongent les Bolets qui croissent sous les écorces, ont trois ou quatre ocelles de chaque côté de la tète, et se métamorphosent sim- plement sous les écorces. Toutes ces larves sont conformées sur le type général des Ténébrioniens, et ont de spécial la faculté de se renfermer dans une coque soyeuse. — JNous figurons le D. bipustulata, Cast. et Brull . , d'Espagne et d'Algérie (pi. xliii, iig. 1 ; la, antenne; 1 b, palpe maxil- laire). Le D. Boleti, long de 6 à 7 millimètres, très-convexe, est d'un noir brillant, avec trois grandes taches jaunes sur chaque élytre. BirPOPlirH^ROTI:n, Kirby. — Antennes de onze articles graduellement élargis et déprimés à l'extrémité. Élytres arrondies, le plus souvent sculptées, parfois lisses. Ces Coléoptères, des parties chaudes des deux Amériques, ont les mœurs des Helops d'Europe. Le S. curvipes, Kirby, du Brésil (pi. xi.iv, fig. 2), a la forme courte, le corselet très-convexe, les élytres ventrues et couvertes de fossettes en rangées. Il est d'un bronzé brillant, ce qui est la couleur de la moitié des espèces du genre, les autres étant noires, brillantes ou mates. Huit espèces. PŒClliKSTHUS, E. Blanch. — Antennes assez longues, à massue déprimée. Corselet transversal, subcarré. Élytres un peu plus larges que le corselet. Pattes longues et grêles. Ce genre, comme le précédent, comprend desinsecles de l'Amérique tropicale, vivant sur les feuilles. — Ex. : P. suturaUs, Germ., du Brésil (pi. XLiv, fig. 3). Dix espèces. EIHVI»!», Kirby. — Antennes de onze articles, quatre à dix en scie ; dernier article des palpes maxillaires et labiaux très-grand et très-aplati, en triangle renversé subéquilatéral. Tarses liéléromères, avec pénultième et antépénultième 591) COLÉOPTt.liS. — TÉiNÉIÏalO.MENS. article de tous très-élargis ^large pied), et le pénultième échancré et cilié à son extrémité, le dernier article à deux ongles. Ce genre esl de place peu certaine. Kirby et Spinola le mettent dans lesClérites (Spinola, Monogr. des Cléritps,su[fp\., II, 176); MM. Gemmin- ger et de llarold, d'aprL's Klug, dans les Ténébrioniens, car ses pièces buccales et ses tarses conviennent peu aux Clériens. Il comprend quatre espèces, toutes du Brésil, dont le type est 1'^. ru/jc/is, Kirby (pi. xxxvj, fig. 12, labre ; 12a, palpe maxillaire ; 12 h, palpe labial; 12c, tarse an- térieur). Long de 9 millimètres environ, ce Coléoptère a les antennes noires à base rougeâtre, et le reste des organes d'un testacé rougeâtre, avec des bandes noires sur les élytres. HELOPN, Fabr. — Tête trapézoïdale, tantôt enfoncée^ tantôt dégagée; antennes de onze articles grêles. r,orps oblong, un peu convexe, ailé ou plus souvent aptère. Les Helops sont des insectes de taille moyenne ou petite, se cachant le jour sous les ccorces, dans les troncs d'arbres abattus, au pied des plantes. Leur couleur uniforme est noire, ferrugineuse, tcstacée, bron- zée, bleue, verdâtre, violette. Leurs larves, xylophages, vivent dans les vieilles souches décomposées de diverses espèces d'arbres. On dit que les rossignols et les fauvettes les recherchent. Elles sont du type habi- tuel des larves de Ténébrioniens, jaunâtres, cylindriques, et ont le der- nier segment très-court et armé de deux crochets cornés fortement recourbés en haut. Ce genre est très-nombreux en espèces, deux cents, la majeure partie de la région méditerranéenne de l'Europe et de toutes ses îles, de Syrie, de Perse; d'autres du Gabon, d'Amérique septen- trionale, des îles Vancouver, de Polynésie, d'Australie. Nous citerons les /f. drialus, Fourcr., ou carabonles, Panzer, des environs de Paris, commun en Allemagne et en France sous les ôcorces et- les mousses, où il passe l'hiver, fréquent près de Paris dans les bois de Clamart et de Meudon, d'un brun bronzé rougeâtre, de 8 à 10 millim., finement strié sur les élytres; H. lanipes, Linn., de toute l'Europe tempérée, allongé, convexe, de 10 à 12 millim. (pi. xuv, fig. à, bouche vue en dessous; /t«, antenne; M), mâchoire et palpe). C'est le Ténébrion bronzé n° 5 de Geoffroy, commun sous les pierres au printemps ; il n'est agile que le soir et vit sous les écorces des Hêtres. Il est noir en dessous et d'un bronzé brunâtre en dessus, avec les élytres un peu prolongées en pointe et les pattes velues. Sa larve, qu'on trouve sous les mousses et les écorces aux environs de Paris, a été étudiée par M. E. Blanchard. Ajoutons les //. qu>f:qiulinx, Fabr., de l'Europe méridionale; H. ccerulcus, Linn., ou violaceus, Samouelle, allongé, convexe, de 13 à 18 millim., d'un bleu un peu cuivreux, à élytres striées, de l'Angleterre et surtout dans les vieux Châtaigniers, de l'Europe méridionale, que C Duméril dit avoir pris dans la forêt de Fontainebleau. Les mâles des Helops diffèrent des TÉNÉBRIONIDES, - AlIHODlS, HOPLOPTLRA, CISTELA. 591 femelles par une forme plus svelte, des antennes et un corselet plus longs, et surtout par leurs tarses antérieurs et intermédiaires plus ou moins dilatés. IVEPHODEN, E. Blanch. — Corps allongé, peu convexe, ailé. L'espèce type du genre, le N. metallescens, Kust., ou villigcr, Rosenh., d'un brun obscur, avec pubescence blanche, se trouve en Espagne, en Corse, en Sardaigne et en Algérie, dans la province d'Oran. D'après M.Rosenhauer, on le rencontre en plein soleil, volant sur les fleurs, sur- tout celles des Malvacées, mœurs remarquables et exceptionnelles dans la tribu des Ténébrioniens. Une seconde espèce de Lambessa (Algérie). L.*;i\A^ Latr. — Antennes de onze articles, non perfoliées. Pas d'ailes. Corps allongé oblong ; corselet plus étroit que les élytres. Tarses antérieurs très- légèrement élargis chez les mâles. Bien qu'aptère, ce genre se rapproche plus des Hclops par l'ensemble de ses affinités que du groupe des Blapsides. Il est formé d'insectes de taille moyenne ou petite, revêtus d'une Irès-fine pubescence, dé- primés et fortement striés et ponctués sur les élytres. Ils sont rares. Le type est le L. viennensis, Sturm., ou Pimelia , DuPtschm. (pi. xliv, fig. 5), qui se trouve en Autriche et en Illyrie, et qui, d'après M. Ro- senhauer, vit dans les bois de Hêtres, sous les feuilles. Six espèces, d'Allemagne, d'Angleterre, du Caucase, de Ceylan. HOPIiOPTERA, Chevr.— Antennes longues, de onze articles anguleux. Élytres plus larges que le corselet, obtuses aux épaules, très-allongées et terminées cliacune par une épine. Pattes longues et peu robustes. Ce genre américain renferme une quinzaine d'espèces de la Guyane et surtout du Brésil. Le typo, H. serraticornis, Chevr., est un grand et long insecte du Brésil (pi. xliv, fig. 7), d'un noir brunâtre, avec points serrés sur le corselet et élytres à reflets métalliques verts, avec dix stries ponctuées et cuisses d'un fauve rougeûtre à la base. CISTELA, Fabr., et CTEiWIOPIlS, Solier, — Tête rhomboïdale, à yeux trans- versaux; antennes de onze articles, filiformes. Corselet transversal, aussi large à la base que les élytres ; celles-ci oblongo-ovales, souvent arquées en dessus. Tarses hétéromères à crochets dentelés. Les Cistèles de Fabricius ont formé pour Lacordairc et d'autres au- teurs une petite famille, les Cistélides. Le genre Cistela comprend environ soixante-dix espèces d'Europe, des États-Unis, du Gabon, de Madagascar, d'Australie; et, dans le genv& détaché Cteniopus, sont une dizaine d'espèces d'Europe, surtout orientale et méridionale, du Cau- case, de Sibérie et de la Floride (États-Unis du Sud). Les Cistèles sont 592 COLÉOPTÈRES. — TÉNÉBRIOMENS. de taille au plus moyenne, et leurs couleurs sont variées, mais sans des- sins. Elles sont diurnes, très-agiles, et se trouvent sur les fleurs et sur le feuillage ou dans le voisinage, fait exceptionnel dans la tribu, déjà offert par les Nephodes. Les larves sont Irès-grèles, cylindroïdes, avec un seul stemmate, ayant le dernier segment abdominal conique, e\cavc en dessous et muni à la base de l'excavation d'une saillie lamelliforme dirigée en arrière, recouvrant plus ou moins l'anus et terminée par deux appendices grêles, de forme variable selon les espèces. Elles vi- vent dans le vieux bois, les arbres cariés de diverses essences, et di- rigent leurs galeries en tous sens. On ihdique celle du C. atra, Fabr., ou nigra, de Geer, du genre Enjx, Steph., comme se renfermant pour la nymphose dans une coque de débris ligneux agglutinés par sa salive, tandis que les autres se font seulement une loge par refoulement des détritus à l'extrémité de la galerie. Les nymphes ont sur les côtés de l'abdomen ces appendices singuliers dont nous avons parlé en général pour les nymphes des Ténébrioniens. 11 faut citer le C. cerainixjules, Linn., de France et d'Italie, noir, de 10 millimètres, à antennes den- tées en scie, avec les élytres fauves, ayant huit séries de points en- foncés : c'est la Mordelle à étuis jaunes de Geoffroy, qu'on trouve dans les bois, sur les arbres et les fleurs. Une espèce très-voisine est figurée, le C.scrrata, Chevr., de Hongrie, à tête noire, avec corselet, écusson, élytres et bords de l'abdomen d'un jaune d'ocre (pi. xuv, fig. 9 ; 9 a, tête vue en dessus; 9 6, extrémité d'un tarse). Ou trouve fort communé- ment en France, surtout sur les fleurs de Tilleul, le C. flava, Scop., ou sitlfuroa, Linn., ou lutea, Fourcroy, du genre actuel Cteniopus, Sol., existant aussi dans la Russie méridionale, l'Algérie, le Caucase. Ce Coléoptère, entièrement d'un jaune-soufre pâle, à élytres striées, de 7à 9 millimètres de longueur, est le Ténébr ion jaune de Geufîroy. Enfin le C. murina, Linn., de toute l'Europe, du genre actuel /so?7iîrrt, Muls., est noir, avec les pattes et les élytres striées jaunes. Geoffroy nommait cette espèce parisienne la Mordelle à étuis jaunes soufrés. L'espèce offre de nombreuses variétés. Les mâles des Cistela ont le corps plus étroit que les femelles, les an- tennes plus longues et plus dentées, les tarses antérieurs plus allongés, les yeux Irès-gros et très-saillants, et assez voisins sur le front. Les genres qui suivent constituent pour les auteurs systématiques une petite famille, les Pythides, formée de Coléoptères hétéromères à tarses lililormcs et à crochets simples, à lêle sans rétrécissement ni col, souvent allongée eu museau et même en rostre, rappelant les Cur- culioniens. Los antennes sont de onze articles, soit presque munili- formes, soit grossissant peu à peu vers l'extrémité, soit formant une massue distincte. Le corps est le plus touvent convexe, glabre, métal- liquCj les élytres embrassant faiblement l'abdomen. PYTHO, RHINOSIMUS. 593 Pl'THO, Latr. — Antennes filiformes, de onze articles, les derniers transversaux et déprimés. Élylres plus larges à la base que le corselet. Corps allongé, très- aplati. Ce genre est fondé sur un insecte qui varie heaucoup dans sa colora- lion, tantôt noir, avec les élytres d'un noir bleuâtre et les pattes et an- tennes fauves , tantôt tout entier d'un fauve jaunâtre. C c%t le P. depres- sus, Linn. (pi. xliv, fig. 8; 8 a, antenne), de Finlande, de Suède, du nord de la France et de l'Allemagne, surtout dans les parties monta- gneuses et froides. On le trouve adulte sous les écorces des Sapins ou à leur extérieur, sur les troncs d'arbres abattus, les tas de fagots, etc. La larve est allongée, à contours parallèles, très-déprimée (ce genre, on le voit, ne se rattache que d'une manière Irès-indécise aux Ténébrioniens), avec les segments arrondis sur les côtés, d'un jaune sale, avec quelques poils redressés et isolés. Elle a cinq stemmates de chaque côté, des antennes de trois articles, des palpes maxillaires de trois articles et la- biaux de deux; tous les segments sont couverts d'écussons cornés plus larges en dessus qu'en dessous, et le dernier segment de l'abdomen est armé supérieurement de deux fortes saillies et en dessous de dente- lures. 11 y a une autre espèce de Finlande et quatre de l'Amérique boréale. Quelques genres ont la tête saillante, formant en avant un museau parfois court, souvent prolongé en rostre déprimé, le corps plus ou moins convexe, jamais déprimé. Ces insectes vivent dans les bois, et se prennent souvent en battant les vieux fagots. Il en est, comme le Salpingus casta7ieus, Panzer, Europe, qui affectionnent les Pins, et qu'on obtient en secouant les branches de ces arbres ; d'autres passent leur existence sous les écorces : leurs mœurs sont peu connues. Le genre Salpingus, Gyllh., est formé de Coléoptères à tète prolongée en avant en un rostre large et déprimé, rappelant les Platyrhinus chez les Curculio- niens. Ce sont des insectes d'un brun ou d'un noir brillant. Sur une vingtaine d'espèces de Salpingus, il en est d'Europe, y compris la Fin- lande, et d'autres du Chili, de la Californie, de l'Amérique russe, du Canada, des États-Unis, de Madagascar. BnSi\OSlI*Il'S, Lalr. — Antennes de onze articles ; lèle tantôt en museau court, lanlôt en rostre allongé. Corselet subcordil'orme plus étroit que les élytres. Corps obloiig, peu convexe. Ces insectes sont des contrées froides et moyennes de l'Europe, et sont rares dans les parties chaudes ; leurs couleurs sont métalliques, claires et brillantes. Les anciens auteurs, trompés par la tête, en faisaient des Curculioniens. Dans deux espèces, le II rufirollis, Linn., de Suède, de GIRARD. 38 594 COLÉOPTÈRES. — CANTHARIDIENS. France et d'Allemagne, et le R. viridipennis, Stcph., d'Angleterre, de France, d'Allemagne, le corselet et le rostre sont d'nn rouge testacé. Nous représentons (pi. xlv, fig. 11) cette seconde espèce, qui se trouve aux environs de Paris. Il y a des auteurs qui mettent cette espèce dans le genre Salpingus. Les Rhinosimes comprennent une dizaine d'espèces qui, outre l'Europe, se trouvent au Chili, dans la Nouvelle-Guinée, à l'île Woodlark. .H0.\'0.>fM.4, Klug. et Cast. — Corps elliptico-ovalaire. Tète assez grande, enfon- cée dans le corselet jusqu'au bord des yeux; antennes de onze articles, en mas- sue. Pattes médiocres, contractiles, à cuisses robustes et comprimées; tarses filiformes et hétéromères, ayant cinq articles aux antérieurs et intermédiaires. Les Monomma sont de petits insectes noirs, bruns ou ferrugineux ou mêlés de ces deux teintes, avec une fine pubescence couchée, dont les mœurs et les métamorphoses sont inconnues. Réduit à sa signiOcation actuelle, ce genre est exclusif aux régions chaudes de l'ancien monde, et habite surtout Madagascar. La place de ces Coléoptères est fort in- certaine. On s'accorde habituellement càen faire une petite famille, les Monommides, rangée près des genres Pytho et Cistela, c'est-à-dire dans les Coléoptères hétéromères (Ténébrioniens ou Cantharidiens, selon les auteurs), par MM. E. Blanchard, Lacordaire, Thomson ; près des Élaté- riens par M. de Marseul; dans les Érolyliens, à. côté du genre Triplax, par M. Guérin-Méneville, qui en a méconnu le caractère tarsal. On peut consulter Lacordaire [Gen. des Coléjpt., t. V, p. 736), et une bonne monographie de M. Thomson {Ann. Soc. entom. de France, S'' sér., 1860, t. VIII, p. 5), d'une latinité un peu trop audacieuse toutefois. Nous re- présentons le M. brunnipps, Chevr., mss. G.-Mén., de Madagascar, de 6 millimètres de long, planche des Érotyliens, fig. 3. 11 est noir, brillant, glabre, finement ponctué, à élytres elliptiques ovales, atténuées en ar- rière, avec les appendices et le rebord antérieur du corselet d'un brun rougeàtre. Citons encore le M. syriacimi, Thoms., de même taille que le précédent, de Syrie, et qu'on trouvera peut-être dès lors dans l'extrôme sud-est de l'Europe et le nord-est de l'Afrique. 11 est d'un noir terne avec quelques reflets brun rougeâlre sur le bord du corselet et les appen- dices. Les élylres des Monomma présentent constamment des rangées très-régulières de points en creux, d'ordinaire très-petits. Tnmu DES CAMTIIAIIIDIEMS. Nous aurons à donner très-peu de caractères généraux pour cette tribu formée d'une réunion de groupes assez distincts. On peut dire que leur tête ne s'enfonce pas dans le corselet, comme cela a souvent lieu chez les Ténébrioniens, qu'elle en est toujours plus ou moins nettement CANTilÀRIDIENS. 595 détachée, et forme ordinairement par son rétrécissement en arrière une sorte de cou. Les tarses sont hétéromères. Enfin, à l'exception du pre- mier groupe, les Lagriides, se rattachant en cela aux Ténébrioniens, les cavités cotyloïdes des hanches antérieures sont ouvertes en arrière. La consistance des téguments est en général molle, principalement pour lesélytres, qui sont souvent flexibles. Ces Coléoptères sont presque tou- jours ailés et sont phytophages presque exclusivement à l'état adulte, se tenant sur les fleurs ou sur les feuilles, et pour la plupart diurnes, très-vifs et très-agiles, surtout par le3 journées chaudes et au soleil. Le nom de la tribu provient de l'espèce la plus intéressante d'un des groupes où une partie des genres sont doués de propriétés vésicanles. Un autre motif de chercher dans ce groupe la dénomination de la tribu, c'est le singulier mode de parasitisme des larves, qui vivent sur des in- sectes d'autres ordres et dans leurs nids ; et ce qui montre bien qu'il y a là un caractère de haute valeur, c'est qu'on retrouve cette tendance au parasitisme dans certaines larves d'autres groupes de la même tribu, et qu'il est fort probable que les découvertes futures ne feront qu'étendre à un plus grand nombre d'insectes ce genre de mœurs, qui paraît propre aux Hétéromères qui nous occupent. Les métamorphoses compliquées de ces insectes et leur alimentation les séparent tout à fait d'autres Coléoptères parasites des nids, comme les Velleius, Claoiger, Alcochara, Myrmedonia, etc., et qui ont aussi des régimes variés et autres que celui des larves parasites de Cantharidiens. C. Duméril, en 1800, en publiant les Leçons iVanalomie comparée de G. Cuvier, y joignit des tableaux de classification des hisectes, dans les- quels les Coléoptères hétéromères sont partagés en deux familles, les Lucifuges à élytres dures, et les Vésicants à élytres molles, groupes ré- pondant en grande partie à nos Ténébrioniens et Cantharidiens avec certaines adjonctions. Plus tard, dans son Entomologie analylique, il subdivisa davantage. 11 établit les familles des Epispastiques ou Vésicants, en y comprenant, outre des genres réellement vésicants, les genres La- gria, Anthicus, Dasytes, Zonitis, des Sténoplcres pour les genres Sitaris, Œclemera, Mordella, etc. ; enfin les Ornéphiles ou Sylvicoles, avec un mélange de genres des deux grandes tribus des Hétéromères, comme les genres Pyrochroa, Horia^ à côté des genres Serropalpus, Cistela, Helops, etc. M. Mulsant a conservé, à tort selon nous, dans la science moderne, le nom de Vésicants, fort improprepour des genres sans action vésicante ; les noms de Cantharidiens ou de Méloïdes sont bien préfé- rables. C'est en définitive, dans nos classifications nécessairement im- parfaites, puisquelles ne peuvent rendre la grandiose complexité des rapports réels des êtres, le procédé le plus rationnel et le plus com- mode de tirer le nom de la tribu d'un genre ou même d'une espèce principale, sans autre préoccupation. 596 COLÉOPTÈRIiiS. — CANTHARIDIENS. I. — MÉLANDRYIDES. Télé sans cou en arriùre, penchée ou perpendiculaire, souvent invi- sible d'en haut, plus ou moins enfoncée dans le corselet. Antennes de onze articles, très-rarement de dix, filiformes ou légèrement épaissies vers le sommet, parfois cependant en massue. Mandibules courtes Palpes maxillaires longs et robustes, souvent dentés en scie, à dernier article fortement sécuriforme ou cultriforme. Corselet de la largeur de la base des élytres, tranchant sur les côtés, à bord postérieur aminci et appuyé sur la base des élylres, celles-ci assez consistantes et recouvrant tout l'abdomen ; toujours un écusson. Abdomen de cinq segments en des- sous. Pattes de moyenne longueur; tarses hétéroirières, à crochets presque toujours simples. Les Mélandryides sont de taille en général petite, au plus moyenne. Ils sont pour la plupart rares dans les collections, et tous leurs genres, sauf un seul Synchroa, Newm., de l'Amérique du Nord, sont représentés en Europe. Presque tous sont ailés, et, à l'exception des Osphya, Illig-, ou Nothus, Ôliv., qui se trouvent, dit-on, sur les fleurs, ils vivent dans les vieux troncs d'arbres, les branches mortes, le bois décomposé, sous les écorces ou dans les Bolets ligneux; beaucoup ont des habitudes lucifuges. GENRES PRINCIPAUX. STEU'OTttACHELl'S, Latr. — Antennes très-longues et grêles, de onze articles. Élytres très-allongées, parallèles, isolément arrondies au bout. Pattes grêles ; tarses très-longs, à crochets très-fendus, longs et grêles. Le type de ce genre est une espèce très-rare et d'assez grande taille, de Laponie et de Finlande, le S. œneus, Payk. (pi. xliv, fig. 6; 6 a, antenne; 6 6. extrémité d'un tarse). Cet insecte, brun en dessous, d'un bronzé foncé et brillant en dessus, avec une foule de points enfoncés et serrés, vit sous les écorces des arbres morts. Le genre Stenotrachelus a une autre espèce de Russie méridionale et une troisième de l'Amérique boréale. n.4L,LOIHi;]VI]§>, Panz. — Dernier article des palpes labiaux ovoïde, celui des maxillaires déprimé et tronqué ; mandibules bifides. Antennes subfiliformes, de onze articles. Tarses grêles, à premier article des quatre postérieurs Irès-allongé. Les HaJlomènes sont des Coléoptères de petite taille, de l'I'^urope et de l'Amérique boréale, à corps oblong et médiocrement convexe, dont la couleur varie du brunûlre au ferrugineux. Le type est ÏH. humcralis, Panz., ou binolatus, Quensel, de Suède, de France et d'Allemagne (pi. xliv, fig. 10; 10 o, antenne; 10 b, mandibule; 10 c, madioire et palpe; 10 d, •lèvre inférieure et palpes; 10 e, labre ; 10 /, tarse postérieur). La larve MÉLANDRYIDES. — ORCHESIA, DIRCSA. 597 de cette espèce a été étudiée par M. Ë. Perds. Elle rappelle pour la forme es larves deTénébrioniens.Elle existait en abondance dans des galeries sinueuses creusées dans les parties minces du Pohjporus maximus, Brotero, champignon qui croît sur les vieilles souches de Pins. Elle est allongée subcylindrique, charnue, avec des poils roussâtres clair-semés; présente de chaque côté de la tête cinq stemmates sur deux rangs et un épistome distinct. Les antennes ont quatre articles dont le dernier est bifide, les palpes maxillaires trois, les labiaux deux. Les segments thoraciques, peu difl'érents de ceux de l'abdomen, portent des pattes grûles de quatre pièces. Elle est d'un blanc jaunâtre avec le dernier segment de l'abdo- men roux et armé de deux crochets médiocrement arqués. La nymphe est munie de poils rousi>ritres et de spinules sur les segments dorsaux de l'abdomen, dont le huitième est en outre terminé par deux appen- dices coniques et très-courts. L'H. humeralis el VH. fuscus, Gyll., seconde espèce d'Europe, vivent tous les deux aux dépens des substances crypto- gumiques qui poussent sur les troncs d'arbres, 3t surtout ceux des Pins et des Sapins. Ils exécutent de petits sauts. ORCilKj^lA, Lalr. — Antennes de onze articles, les quatre ou cinq derniers élargis transversalement en massue. Tarses antérieurs épaissis, fortement villeux en dessous. Pattes postérieures Irès-allongées, cuisses comprimées. La forme du corps àcàOrchesia, assez allongé, plus ou moins atténué en arrière, arqué en dessus, les rapproche des Mordelles, et, comme celles-ci, ils ont des mouvements vifs, brusques, giratoires et peuvent exécuter des espèces de sauts assez grands. On les trouve dans les sub- stances cryptogamiques qui s'attachent aux troncs d'arbres et aussi dans le bois pourri de ceux-ci. L'espèce type est l'O. micans, Panz, , de toute l'Europe et d'Algérie. Sa larve, qui ressemble beaucoup à celle du genre précédent, est d'un rose pâle, avec la tôle et les pièces buccales brunes, et vit dans les Bolets des arbres. Elle offre quelques rides transversales sur les segmenls abdominaux, arrondis latéralement, et portant, à la place ordinaire, les stigmates au sommet de tubercules charnus. Le dernier segment abdominal est court, arrondi, et prolongé inférieure- ment en un tube très-court que couronnent six mamelons et au centre desquels s'ouvre l'anus. Nous représentons quelques détails de l'adulte (pi. XMv, fig. 11, antenne ; 2 a, patte postérieure). Une vingtaine d'es- pèces de l'Europe boréale, plusieurs de Laponie, de Sicile, du Chili, du Brésil. lllRCi1î:A, Fabr. — Antennes de onze articles, grossissant peu à peu vers l'extré- mité ; palpes maxillaires à dernier article très-grand et cultriforme. Tarses anté- rieurs fortement élargis et déprimés. Corps allongé. Les types de ce genre, le D. quadriguttata, Payk., et le D. quadri- maculata, lllig., sont do beaux insectes à corps noir, de 8 millimètres 598 COLÉOPTÈRES. — CANTHARIDIENS. environ, avec quatre taches d'un jaune pSleou orangées sur les élytres, vivant sous les écorces et dans les vieux troncs. On les trouve en France, surtout dans le midi. Nous représentons le D. lœvigata, Hellenius, ou discolor, Fabr., de Suède et Laponie, des îles Britanniques, de France, d'Allemagne, du Tyrol (pi. xlv, fig. 1 ; 1 a, palpe maxillaire ; 1 6, an- tenne). Ily a quelques autres espèces d'Europe et de l'Amérique septen- trionale. MELAlVDR'l'A, Fabr. — Corps allongé, suboblong, assez large, médiocrement ou peu convexe. Antennes de onze aiticles_, filiformes ou légèrement épaissies vers le sommet. Ongles des tarses simples. Les espèces de ce genre, presque toujours noires, d'assez grande taille, luisantes en dessus ou parfois bleuâtres sur les élytres, sont glabres, avec de petits points enfoncés, très-serrés, et des élytres sillonnées. Elles sont lucifuges et se trouvent sur les vieux troncs d'arbres. — Ex. : .1/. flavi- cornis, Duft., ou rufipes, Chevr., de France et d'Allemagne (pi. xlv, fig. 2), avec les antennes, les pièces buccales et les pattes d'un jaune ferrugi- neux ou orangé. Outre l'Europe, on cite des Mélandryes de Sibérie, du Kamtchatka, de l'Amérique boréale. TETRATOMA, Fabr. — Antennes terminées par une grande massue de quatre articles. Tète fortement rétrécie antérieurement en un museau quadrangulaire, très-inclinée. Ce genre est formé de petits insectes à téguments brillants et ponctués en dessus. Le type est d'un jaune ferrugineux, avec les élytres bleues ou vertes : c'est le T. Fungorum, Fabr., de Suède, de France et d'Alle- magne (pi. XLiii, fig. 5 ; 5 o, tète vue en dessus). Les Tétratomes vivent dans les Bolets des arbres, les vieilles écorces, les troncs pourris. Ily a sept espèces de divers pays d'Europe, du Kamt- chatka, des États-Unis. §)E:rropai.P1JS, Hell. — Corps très-allongé, étroit, subcylindrique. Antennes de onze articles, très-grêles et filiformes ; palpes maxillaires très-longs et très- robustes, dentés en scie intérieurement. Le type de ce genre est un insecte d'assez grande taille, à élytres lé- gèrement striées, d'un brun plus ou moins clair, revêtu d'une pubes- cence soyeuse assez abondante, se trouvant dans toute l'Europe, sur les Pins et surtout sur les Sapins, mais fort rare partout. C'est le S. slriatus, Hell., ou harbatus, Schall. (pi. xlv, fig. '3; 3 a, palpe maxillaire ; 3 b, "•^'enno). On trouve aussi ce genre au jChili. CONOPALPUS, SCRAPTIA, — LAGRHDES. 599 COKOPALPl'S, Gyll. — Antennes de dix articles, filiformes. Palpes maxillaires longs, à dernier article grand, comprimé, très-long, fortement cultriforme; palpes labiaux allongés, à dernier article très-grand, comprimé, en fer de hache longuement transverse ; premier article des tarses allongé. I.e type de ce genre est le C. testacens, Oliv., de Grande-Bretagne, de Suède, de France et d'Allemagne (pi. XLv, fig. ù; Zi a, mâchoire et palpe, li b, lèvre inférieure et palpes labiaux ; h c, tarse antérieur ; U d, an- tenne). Cet insecte, fort rare partout, trouvé près de Paris dans les vieux troncs de Chênes, est détaille moyenne, d'un jaune ferrugineux brillant, devenant souvent brunâtre, à téguments ponctués, avec les antennes noires au bout. Il est,, dit-on, crépusculaire, et vit dans les branches pourries et le bois décomposé. En Allemagne est une seconde espèce, C. brevicoUis, Kraatz. SCR APTI.%, Latr. — Tête courte, verticale, brusquement resserrée en arrière en un cou étroit et court, engagé dans le corselet, et terminée par un court mu- seau transversal ; antennes filiformes, de onze articles. Corselet très-transversal, à peine moins large que les élytres, allongées, subparallèles, subdéprimées. Les Scraptia sont de petits insectes assez mous, à élytres flexibles, finement chagrinées; la couleur est brune ou teslacée ; les téguments sont revêtus d'une très-fine pubescence couchée. Ce genre, d'Europe et d'Amérique du Nord, se trouve sur les herbes, en fauchant, ou dans les détritus des vieux arbres. — Ex. : S.fusca, Latr., ou dubia,0\ïy., nom plus ancien, de France, d'Allemagne, d'Espagne (pi. xi.vi, fig. 8; 8 a, tcte). On trouve cette espèce près de Paris, mais assez rarement. Le genre Scraptia est de place très-incertaine. C'est à l'exemple de M. E. Blanchard que nous terminons par lui le groupe des Mélandryides; certains auteurs, selon leur habitude trop commode en pareil cas, en font un groupe à part, moyen de signaler, mais non de résoudre la dif- ficulté dans des classifications toujours approximatives. On compte vingt- cinq espèces de Scraptia, d'Europe, surtout méditerranéenne ou orien- tale, du Chili, des Étals-Unis, de Ceylan. IL — LAGRIIDES. Antennes de onze articles. Mandibules courtes etrobustes ; mâchoires à deux lobes inermes et ciliés ; languette saillante et coriace, à paraglosses soudés contre elle. Hanches antérieures à cavités cotyloïdes fermées en arrière (comme dans la tribu des Ténébrioniens; elles sont ouvertes dans les autres groupes de Cantharidiens). Tarses hétéromères, à cro- chets toujours simples. Ce groupe n'offre en Europe que le genre Lagria, auquel M. Mulsanl réunit les genres Pytho et Pyrochroa pour former son groupe des Lati- pennes, en raison de la largeur des élytres. ^00 GOLÉOPTtRES. — CANTHARIDIE.NS. GENRES PRINCIPAUX. LAGm.lL, Fabr. — Élytres beaucoup plus larges que le corselet. Palpes ii.axil- laires à dernier article comprimé et fortement sécuriforine. Tarse; à premier article le plus long, avec le pénultième court, un peu élargi, excavé, échancré en dessous. Les Lagria sont trùs-agiles et se trouvent sur les feuilles des haies et des bois, sur les plantes basses, plus rarement sur les fleurs. Presque tous ces Coléoptères sont finement pubescents ou hérissés de poils fins, avec les élytres testacées pour les espèces d'Europe, en général métalliques dans les espèces exotiques. L'espèce la plus commune, de 5 à 7 millimè- tres, se trouvant surtout sur les Ombellifères et les Caryophyllées, est le L. hirta, Linn., de toute l'Europe et du Caucase, noire, à élytres jaunes : c'est la Cantharide n° G de Geoffroy. Sa larve a été très-bien étudiée par M. E. Perris. Elle est allongée, à côtés subparallèles^ convexe en dessus et d'un fauve testacé, maculée de taches noirâtres et hérissée de longs poils fauves sur le milieu des segments. Les appendices buccauv et cé- pbaliques offrent deux articles aux palpes labiaux, trois aux maxillaires, quatre aux antennes ; les mandibules, un peu bidentées, ont deux grosses dents au côté interne ; il y a quatre ocelles de chaque côté de la tète. Le prothorax est double de chacun des deux segments suivants; les pattes, courtes, très-velues, de cinq pièces; les segments abdominaux, égaux, portent leurs stigmates sur un bourrelet latéral, et le dernier, conique, ayant en dessous un mamelon pseudopode au centre duquel s'ouvre l'anus, est terminé par deux petites saillies droites, parallèles, acérées. Cette larve se trouve en hiver sous les feuilles mortes et les débris ligneux, au pied des vieux Chênes. M. Wcstwood l'a trouvée dans les haies d'Aubépine. Elle se change sans aucune coque ou cellule en une nymphe blanche, à papilles latérales charnues et à longs poils fins rous- sâtres. On soupçonne que cette larve, dont l'aspect rappelle les larves des Silpha et des Derinesles, vit de proies animales ou au moins de dé- tritus de cette nature, régime qui est aussi celui de diverses larves de Ténébrioniens, de telle sorte que le régin^e des larves, ainsi que le ca- ractère des cavités cotyloïdes des hanches antérieures, indique dans les Lagriides un passage à la tribu précédente, ce qui a déterminé M. E. Blanchard à les placer en tète des Cantharidiens. — Nous représen- tons une espèce cxo!ique du genre Lagriu, le L. gigas, de Cast. , des In- des orientales et de Java (pi. xi.vi, fig. 1; i cr, palpe maxillaire, 1 6, tatse postérieur). Il existe plus de soixante espèces de Lagria, répandues, outre l'Europe, dans les régions chaudes de l'ancien monde, l'Australie, la Polynésie, Madagascar. STATIRA. — ANTHICIDES. — ANTHFCU , GOl ^TATIR.4, Latr. — Antennes de onze articles, le dernier trcs-allon^é. Tète munie d'un cou en arrière. Corselet allongé, cordiforme, cyliadroïde. Élytres longues. Ces insectes, au nombre de plus de quarante espèces, sont des deux Amériques, surtout de leurs régions chaudes, à élytres sculptées de stries, de côtes, de ponctuations, et rappellent par l'aspect le genre Agra des Carabicns. Leurs habitudes, du moins pour les espèces observées par Lacordaire dans l'Amérique du Sud, sont celles de nos Lagria d'Europe. — Ex. : S. caraboïdes, G.-Mén., du Brésil intérieur (pi. xlvi, fig. 2; 2 a antennes). III. - ANTHICIDES. Tète trigone ou subovalairc, inclinée, toujours resserrée postérieure- ment en un cou étroit ou large. Antennes de onze articles, filiformes ou graduellement épaissies vers le sommet, très-rarement subdentées. Corselet plus étroit à sa base que les élytres. Pattes en général longues et grêles; tarses hétéromères, avec pénultième article presque toujours excavé, échancré en dessous ou subbilobé, et crochets simples. Les Anlhicides sont des insectes de petite taille et de forme élégante, ofl'rant un certainaspect extérieur de Sc(/dmœn«5, mais sans aucune ana- logie réelle. Leur élargissement postérieur, joint à un corselet svelte et à une tète globuleuse portée en général sur un cou bien dégagé et vi- sible de dessus, leur donne une apparence de Fourmis, ce à quoi con- tribue aussi leur pelile taille et la vivacité de leurs mouvements. Leurs couleurs sont variées, mais non métalliques. La plupart des espèces se trouvent au bord de la mer ou près des eaux douces, dans les lieux sablonneux ; on en rencontre aussi sur les fleurs, les plantes basses, les bois abattus, les arbres et même les fumiers. Leurs premiers états ne sont pas encore connus; on n'est pas bien fixé sur leur régime, mais, d'après diverses observations, on est porté à supposer qu'il se compose de substances animales, ce qui est un point de rapport avec certains Ténébrioniens. M. E. Blanchard ne fait de ces insectes qu'un groupe des Lagriides. Une bonne monographie des Anthicus et genres voisins (in-8, 16 pi. col., Paris, 18Zi^) a été publiée par M. delà Ferté-Séncclère. GENRE PRINCIPAL. .^liTHlCC^, Pajk. — Corps plus ou moins allongé ou suboblong, plus ou moins convexe, presque toujours ailé. Tête trigone, ovale ou subquadrangle ; antennes subtiliformes, graduellement épaissies vers le sommet. Les Anthicus sont de petits insectes très-répandus, très-nombreux en espèces, pas loin de trois cents et de tous pays, se trouvant sur les végé- 602 COLÉOPTtRES. — CAMHARIDTENS. taux, au pied des plantes, dans leurs détritus, sous les piôEfes, dans le3 lieux sablonneux, etc. L'A. floralis, Linn., d'Europe, d'Algérie, de Syrie, brun et lisse, avec la base des élytres ferrugineuse, affectionne les fu- miers, dans lesquels on peut le prendre l'été, par milliers, chezles maraî- chers des environs de Paris. Nous représentons une espèce de la France et de l'Allemagne méridionale, de l'Espagne, de l'Italie, de la Grèce, 1'^. a/)î«/s, Laferté, ou fasciatus, Chevr. (pi. xlvi, fig. 9; 9 o, antenne). Citons encore l'A. antherinus, Linn., d'Europe, d'Algérie, du Caucase, de l'île de Chypre, noir, de 3 millimètres , à pattes rousses, à élytres à deux bandes jaunes, dont la première est interrompue, VA. flavipes, Panz., de l'Europe et du Caucase, noir, avec les antennes et les pattes jaunes, les élytres fauves, dont la base et la suture sont noires, etc. Ces petits insectes se conservent habituellement, dans les collections, sur carte ou sur mica. Dans le genre Anthicus, le corselet a la forme normale ; dans quelques genres très-curieux des Anthicides {Notoxus, Geoffr., Mecynotarsus, la Ferté-S.), il est concave antérieurement au-dessus de la tète et prolongé en une sorte de corne horizontale et denliculée. Les plus communs et qu'on trouve près de Paris, sont le Notoxus cornutus, Fabr., de toute l'Europe et d'Algérie, fauve, de 3 millimètres de long, les élytres ayant trois bandes noires, et le N. monoceros, Linn., ou cucullatus, Fourcroy, de 3 à 5 millimètres, d'un roux prde, les élytres ayant un point scutel- laire et une ligne arquée noirs. Ce joli petit Coléoptère, que Geoffroy nommait la Cuculle, est aisé à reconnaître par le capuchon de son cor- selet terminé en pointe noire au-dessus de la tôle. On le recueille en fauchant en juillet, en août, avec un filet de gaze, sur la sommité des herbes. C. Duméril dit que les Notoxus, bien que se trouvant sur les tleurs, paraissent se nourrir de Tlirips et de petites larves. Les Xotoxus comptent près de cinquante espèces d'Europe, 4e Sicile, d'Algérie, d'Egypte, de Syrie, du Sénégal, du Cap, d'Australie, d'Amérique sep- tentrionaleetde Colombie. Dans le genre voisin et aussi bizarre, le^Meoy- notarsus, sont une quinzaine d'espèces des Canaries, d'Egypte, de Syrie, des Indes, deCeylan, de Sumatra, d'Australie, avec une espèce d'Europe, M. rhinocéros, Fabr., de 2 millimètres, à corselet rougeàtre prolongé en corne, à élytres brunes ou grisâtres. IV. — PYROCHROIDES. Tète trigone, un peu inclinée, portée sur un cou bien marqué- An- tennes de onze articles, en scie, pectinées ou flabellécs intérieurement, et plus fortement chez les mâles. Élytres plus larges que le corselet. Tarses hétéromères, avec le pénultième article excavé-échancré en des- sous et les crochets simples ou subd^ntés à la base. Corps subdéprimé, ailé, à téguments assez mous et flexibles. pypocnr.o^, — iMonDtixiDts. 603 GENRE PRINCIPAL, PVnocnnoA; Geoffr. I,e nom de ce genre vient de ce que les beaux insectes dont il se com- pose sont toujours d'un rouge vif, écarlate ou ferrugineux, en totalité ou au moins en notable partie, avec des élytres imponctaées tril's-finO' raent chagrinées ; le corps en dessus très-finement pubescent ou comme soyeux. Quand on saisit les Pi/roc/iroa, ils simulent la mort pendant quelques instants, mais sans contracter les antennes ni les pattes. Le genre, d'une dizaine d'espèces, existe à peu près partout, sauf jusqu'à présent dans l'Amérique du Sud et en Australie. Nous figurons le P.coc' cinea, Linn., des îles Britanniques, de Suède, de France, d'Allemagne et du Caucase (pi. xui, fig. 3; 3 a, antenne du m'ile; 3 6, palpe maxil- laire; 3 c, tarse postérieur). La larve de cette espèce, qui est la plus ré- pandue, vit sous les écorces ou dans le bois en décomposition des arbres morts et des vieillessouches. Elle offre la plus grande ressemblance avec les larves du genre Pijtho (Ténébrioniens); seulement la tète est tout à fait dégagée du prothorax, trois des cinq ocelles sont moins apparents que les autres, et quelques différences existent pour les deux derniers segments de l'abdomen, dont le pénultième est plus long que les autres et le dernier de forme irrégulière. Les adultes diffèrent au contraire complètement, et le rapprochement qu'on serait tenté d'établir par les larves ne peut exister, car la forme adulte (sauf les cas exceptionnels de récurrence) doit prévaloir pour la classification, la division du travail physiologique étant portée à son maximum par le développement de tous les organes. Les mœurs apportent ici une nouvelle preuve de dis- tinction : les Pijtho adultes sont lucifuges et se cachent sous les écorces ; les Pyrochroa diurnes volent sur les feuilles et même les fleurs. La larve de P. coccinea paraît vivre trois ans; elle est allongée, déprimée, d'une couleur brune fauve, brillante, presque glabre, avec la tête orbiculaire, munie de fortes mandibules et de petites antennes quadriarticulés. Le dernier segment est profondément divisé et forme deux fortes pointes. C'est surtout dans le détritus subcortical des Chênes et des Peupliers qu'on trouvelesnymphesoblongueSjd'unblancjauuâtre, avecdesépiues en rangées régulières et le dernier segment divisé en deux pièces coni- ques à pointe cornée. Le P. coccinea adulte a 12 à 15 millimètres; il est en dessus d'un beau rouge de sang, avec la tête et l'écusson noirs, et assez commun dans les montagnes. Dans presque toute la France est une autre espèce plus petite, de 10 à 12 millimètres, toute rouge en dessus, y compris la tête, mais d'un rouge moins vif, le P. rubens, Fabr. V. — MORDELLIDES. Organes buccaux très-variables, parfois atrophiés, sauf les palpes labiaux. Tête infléchie ou verticale, venant s'appuyer, au repos, contre les ùOh COLÉOPTÈRES. — CANTHARIDIENS. hanches antérieures, munie postérieurement d'un cou très-brusque et Irrs-élroit, mais entièrement engagé dans le corselet et invisible exté- rieurement. Antennes de onze articles, très-rarement de 10, filiformes, •dentées en scie, pectinées ou même flabellées, d'insertion variable. Corselet plus ou moins atténué en avant, et postérieurement de la lar- geur de la base des élytres. Élyfres variables, parfois déhiscentes ou même abrégées, avec les ailes inférieures dans ce cas non repliées sous elles, rarement les unes et les autres nulles chez les femelles. Tarses hétéromèresj àpénultièmearlicie variable, à crochets variables, simples, dentés, pectines ou fendus également. I.es Mordellides constituent un groupe très-naturel et répandu dans toutes les régions du globe. Si les mœurs sont variées à. l'étal de larve, on peut dire qu'à l'état adulte, à part quelques espèces qu'on ne trouve que sur le tronc des arbres ou dans le détritus de leur intérieur, les Mordellides fréquentent les fleurs, et surtout, en Europe du moins, les Ombellifères. Ce sont des insectes très-vifs et très-agiles, sautant aisé- ment et se retournant brusquement sur eux-mêmes, de manière à échapper très-facilement aux doigts qui veulent les saisir. L'aspect gé- néral est très-constant et frappe les yeux par la forme voûtée du corps ; la taille est au plus médiocre, souvent petite ; le corps allongé, épais, régulièrement rétréci d'avant en arrière et arqué en dessus, avec le corselet et la tête inclinés, invisibles ou à peu près d'en dessus. Les téguments sont solides et revêtus d'une fine pubescence couchée et soyeuse; les couleurs ne sont pas métalliques, sont souvent uniformes, et les dessins, quand il en existe, sont des taches ou des bandes blanches ou jaunâtres, et pouvant s'offrir à la fois sur les élylres, le corselet et les flancs. GENRES PRINCIPAUX. MORDElil.A, Linn. — Yeux non échancrés. Palpes maxillaires allongés, à second article long, à quatrième article sécuriforme. Tarses antérieurs et intermédiaires à pénullicnie article plus ou moins échancré au sommet ; leurs crocliels fendus en deux branches subégales, l'une d'elles dentée; pygidium prolongé en une saillie conique. Les Mordellessont nombreuses en espèces, plus de cent, et répandues en Europe, dans les deux Amériques, à Ceylan, aux îles Woodlark et Lifu, à la Nouvelle-Guinée, en Australie, à la Nouvelle-Zélande. Leur taille est au plus moyenne, petite et très-petite ; leur couleur noire, assez brillante, mais voilée parde fins poils couchés et que relèvent parfois des taches ou des bandes argentées ou jaunâtres. On les prend sur les vieux troncs d'arbres et sur les tleurs. Leurs élytres sont étroites acuminées, consistantes. On a étudié quelques larves de ce genre. Leur corps est charnu, allongé, un peu atténué aux deux extrémités, plan en dessous, convexe en dessus, glabre. La tète est subécailleuse, porte des ocelles en nombre variable, des antennes de quatre articles, des MORDELLIDES. — MORDELIJSTENA. 605 palpes maxillaires de trois, adaptés à des mâchoires unilobces, de très- pelits palpes labiaux de deux articles. Le prolhorax est couvert d'un écusson corné, et les segments thoraciques, à peu rpùs égaux à ceux de l'abdomen, ont des pattes très-courtes, à articles peu distincts, dirigées, obliquement en arrière; le dernier segment de l'abdomen, âpre, ru- gueux, corné, est prolongé en une saillie conique sous laquelle s'ouvre l'anus, sans pseudopode. En raison de leurs pattes, ces larves marchent lentement, et tombent sur le côté quand on les sort des galeries dont elles perforent les liges ou les troncs de divers végétaux morts ou maladifs, ainsi les Vignes, les Peupliers, les Chênes, etc.; elles s'y changent en nymphes sans coque. Nous représentons une espèce exotique, le M.picta, Chevr., de Cayenne (pi. xlvi, fig. 7; 7 a, tète en dessus ; 7 b, tarse anté- rieur ; 7 c, crochets de ce tarse très-grossis). Les deux espèces qu'on ren- contre communément aux environs de Paris, et qui sont de toute l'Eu- rope , l'Algérie et du Caucase, sont le M. fasciata, Fahr., de 6 ù 8 millimètres, noir, allongé, à élytres ornées de deux bandes transver- sales de poils roux, soyeux, d'un jaune faible, doré et chatoyant, et le M. aculeala, Linn., de 5 cà (\ millimètres, tout noir et non satiné, figuré par Geoflroy, pi. vi, n° 7, t. 1. Quand on les prend sur les fleurs, ces insectes deviennent immobiles et tombent ,• ils se blottissent avec facilité dans les moindres creux, où la forme de leur corps les fait rouler facile- ment, car ils se courbent sur eux-mêmes en rapprochant la têle de leur abdomen pointu. MonDElXD^TK'VA;, Costi. — Caractères des Mordella, avec jambes et tarses postérieurs munis de hachures sur la tranche dorsale. Les mœurs sont celles des Mordelles ; la forme du corps est un peu plus étroite. U faut indiquer le M. humeralis, Linn., noir, avec la bou- che, les bords du corselet et les pattes jaunâtres, de l'Europe et de l'Al- gérie, se trouvant aux environs de Paris; et le M. pumila, Gyll., d'Eu- rope et d'Algérie, dont la larve a été trouvée dans les tiges de diverses plantes, ainsi l'Armoise commune, le Marrube vulgaire, etc., allongée, cylindroïde, avec le dernier anneau du corps plus petit que les autres, pointu et terminé par deux courtes épines. Il y a près de cent espèces de ce genre en Europe, en Sicile, aux Canaries, à Ceylan, dans l'Amérique du Nord. Nous laisserons, à l'instar des anciens auteurs, les genres suivants dans le groupe des Mordellides. On les place actuellement dans une famille séparée, les Rhipiphorides, d'après des différences dans les pièces buc- cales et dans les antennes, qui sont de onze ou dix articles, pectinées ou flabellées chez les mâles, le plus souvent dentées en scie chez les femelles. On connaît trop imparfaitement les premiers états pour en tirer des caractères séparateurs certains. 606 (:0LÉ0PTÈnL:s. — cantiiauidiens. EVjtXiOCERA, G.-Mén., OU Ptilophorus, Gerstâck, ou Pelecotoma, Latr.— Corps oblong ou suballongc. Tète assez grande, ovalaire, arrondie en avant ; antennes des mâles à articles longuement flabellés à partir du troisième, dentés en scie che?; les femelles. Écusson bien marque. Élytres entières, recouvrant l'abdomen et les ailes inférieures, un peu atténuées en arrière chez les mâles. Ce genre n'a que peu d'cspùces, d'Europe, d'Algérie, de Sibérie, du Cap, d'Ausfralie. Le type est VE. Dufourt, Latr., de mœurs mal con- nues, des régions méridionales de l'Europe et du nord de l'Afrique, se prenant en mai et juin sur les Chênes-liéges, et principalement sur leurs branches mortes ; mais toujours rare. Le m;lle est figuré pi. xlvj, fig. 6. Les espèces de ce genre sont couvertes d'une pubescence blan- châtre. UlYODITEfsl, Latr. — Tête très-large^ transverse, déprimée antérieurement; antennes courtes, chez les mâles, billabellées à partir du second article, uni- flabellées chez les femelles. Élytres très-courtes, squamiformes, déhiscentes, laissant tout l'abdomen et la majeure partie des ailes inférieures à découvert. Écusson bien dégagé. Le type de ce genre est un insecte singulier, le M. suhdiptcrus, Fabr. , de la France méridionale, de l'Espagne, de l'Analolic, ayant au pre- mier abord un peu l'aspect d'un Diptère ou d'un Hyméuoplère. Jac- quelin du Val dit l'avoir toujours trouvé exclusivement, dès les pre- miers jours d'août, sur les fleurs de VEryngiam campestre, au pied des coteaux, dans les Pyrénées-Orientales. Nous figurons le M. fasciatus, Say, de l'Amérique du Nord (pi. xlvi, fig. 5). Les femelles de ce genre ont l'abdomen terminé par un oviducte corné très-saillant. Il y a neuf espèces, d'Europe, d'Amérique septentrionale^ de Cafrerie, du Chili. ttlllPII»HOKft'!»»j Fabr., ou Emexadia, Cast. — Tète grande, saillante, ovale ou ovale-oblongue, arrondie en avant; antennes courtes, de dix articles, longuement bidabellées chez les mâles, fortement unipectinées chez les femelles. Élytres à peu près de la longueur de l'abdomen, fortement acuminces chacune poslé- rieurement et déhiscentes. Les insectes de ce genre, de petite (aille, ont une livrée où se com- binent le noir, le rouge orangé, le jaune ferrugineux ou testacé ; leurs tarses sont allongés, à articles tous entiers, avec des crochets fortement fendus au sommet. Ils sont des régions méridionales de l'Europe et se plaisent sur diverses fleurs quand ils sont adultes. Nous représentons le R.prœastus, Gebl., ou ruiipennis, Chevr., delà France méridionale, d'Ila- lie, de la Russie orientale, de Sibérie (pi. xlvi, fig. li, femelle ; Ub, tarse postérieur). La figure [\a montre le profil du môme insecte; son corse- let atténué et déclive en avant, avec son lobe médian très-saillant ; l'abdomen épais, comprimé latéralement, fortement rétracté et comme Ml-IOECUS, iilllPlDIUS. 607 largement tronqué postérieurement, du moins après la mort, ofl'rant cinq arceaux: apparents, dont le premier très-grand; les pattes allon- gées, surtout les postérieures. Jacquelin du Val dit avoir pris cet in- secte dans les Pyrénées-Orientales, sur les fleurs de VEryngiumcampestre, et, aux mômes lieux, sur une espèce de Menthe. Citons aussi le R. flabel- latus, Fabr., espèce de la France méridionale, d'Espagne, d'Italie, d'Al- gérie. Le fait très-curieux à noter sur cette espèce, et sans doute sur d'autres du même genre, c'est que, rapporte M. E. Blanchard, la femelle paraît pondre dans les nids des Guêpes, où se développent les larves. Il y aurait donc chez ces Hétéromères la première apparition des mœurs si curieuses qui semblent un caractère général du groupe suivant, les Méloïd.es. On dit que la larve d'une troisième espèce, le R. larvatus, Schrank, ou bimaculatus, Fabr., de toute l'Europe méridionale et d'Al- gérie, a été trouvée dans un canal creusé au centre de la racine de VEryngium campestre, mais peut-être y était-elle parasite d'une autre larve. Une cinquantaine d'espèces de toutes les régions des deux mondes. TtiWlveECVS, Gerst. — Dégradation dans les pièces buccales. Élytres déhiscentes à partir du milieu et très-aiguës au bout. Le type et espèce unique est le M. paradoxus, Linn., de l'Europe moyenne et méridionale, de couleurs mêlées de noir et de ferrugineux. Les mœurs précédentes continuent, car on trouve cet insecte le plus ha- bituellement dans les nids du Vespa vuhjaris, où la larve a subi sa mé- tamorphose, et moins souvent sur les fleurs des Ombellifères, ou sur les troncs d'arbres couverts de mucilages dus à un état maladif. miIPIDlIJS, Thunb. — Bouche atrophiée. Antennes longuement pectinées chez les mâles, filiformes chez les femelles. Élytres des mâles très-abrégées et déhis- centes, laissant en grande partie à découvert les ailes inférieures; ni élytres ni ailes chez les femelles, qui sont larviformes et bien plus grosses que les mâles. Les insectes de ce genre, extrêmement rares en collection, présentent un fait de parasitisme unique chez les Coléoptères. La femelle passe sa vie sur le corps des Blattes, et se présente comme un sorte de ver allongé, segmenté, graduellement rétréci en arrière et terminé par un long oviducte. On ignore comment elle s'accouple et comment elle pond dans le corps des Blattes des œufs d'où naissent des larves qui se développent à l'intérieur, et ne diffèrent des femelles que par des an- tennes rudimentaires et l'absence d'oviducte. Les mâles, longs de 2 à 3 millimètres au plus, n'ont sur les Blattes qu'un parasitisme accidentel et temporaire. Le type est leiî. pectinicornis^ Thunb., ou Blattarum, Sun- dewall, îrouvé sur le Blalta yermanica {Phyllodmmia), en Angleterre, en Autriche, en Allemagne et aux Indes. (]es mœurs rappellent les Méloïdes, et encore plus l'ordre des Rhipiptères, satellite de celui des (J08 COLÉOPTtRES. — CANTHARTDIEXS. Coléoptères. Les larves des Rhipiptères passent leur existence dans le corps de divers Hyménoptères, et les femelles, apodes et sans antennes, restent toute leur vie en partie engagées dans le corps de l'insecte qui les porte. 11 est probable au conlraire que la femelle du R. pectinicornis, oculée et anlennée, se déplace sur le corps des Blattes, et n'est que cramponnée aux poils, cherchant par instinct les meilleures places pour être aperçue du mâle et pour la ponte la plus efficace. U y a là un beau sujet de recherches, et qui exigera d'examiner un nombre énorme de ces hideux Blattiens qui infestent certains magasins et les vaisseaux, afin de retrouver ou cette espèce ou ses analogues. Une autre espèce est de Portugal et une de Port-Natal. M.— MÉLOIDES. Mandibules robustes; mâchoires à deux lobes, inermes, ciliés. Anten- nes de onze arliiles, très-rarement de neuf, tantôt assez épaisses, clavi- formes, ou dilatées irrégulièrement, tantôt allongées, presque monili- formcs, parfois sétacées- Tète trigonc ou ovalaire, parfois verticale, le plus souvent penchée en dessous, brusquement resserrée postérieure- ment en un cou étroit, bien marqué. Corselet à peu près de la largeur de la tête. Élylres très-variables de forme, peu solides ; le plus souvent des ailes. Abdomen de cinq à sept arceaux inférieurement, développé, de consistance molle, parfois comprimé sur les côtés. Cuisses ordinai- rement comprimées ; jambes terminées par deux éperons ; tarses hété- romères, à articles entiers, à crochets toujours bifides, la partie supé- rieure la plus forte et souvent dentelée. Lacordaire a imposé à ce groupe le nom de Méloïdes en souvenir de Linnœus, qui a donné le nom de Melue à tous les insectes de ce type dont il a eu connaissance. Ce sont des Coléoptères de taille assez grande ou moyenne, se rattachant à deux formes générales ; les Méloés et les Cantharides. On peut affirmer, quoiqu'on n'en ait pas encore la dé- monstration complète pour tous les genres, que les larves des Méloïdes vi\ent toutes en parasites dans les nids des Hyménoptères, dont elles dévorent les œufs et les larves ; une partie des genres sont vésicants et doués d'une odeur forte. Ces insectes constituent les Vésicants dû M. Mulsanf, les Épispasiiques et une partie des Sténoptères de C. Du- méril. IifF.l.01i, Linn.— Antennes de onze articles, grenues, en chapelet, souvent sub- ccudécs au milieu. Élylres imbriquées ou se recouvrant à la base (du moins el.ez les espèces d'Europe), déhiscentes après la moitié de leur longueur, à bord interne légèrement arqué, plus courtes que l'abdomen ; pas d'ailes. Corps mou, allrngé ; (cusson in\inble. Abdomen Irès-développé, Irès-gonllé chez les femelles. Les Méloés sont des Coléoptères de forle taille, le plus souvent pa- raissant au printemps ; aimant les terrains sablonneux et secs, riches MÉLOÏni.S. — MliLOf. 609 en nids d'Hyménoptères; marchant lentement dans les prairies au mi- lieu des herbes, car leurs pattes, longues et grêles, ont peine à porte en avant un abdomen énorme dont les anneaux semblent distendus par l'obésité et la quantité de sucs ou de matières molles qu'ils renferment. Ils sont presque toujours d'un noir à reflet bleu ou violet, rarement bronzé, doré ou rougeutre. Quand on les saisit, ils simulent la mort, et laissent en même temps suinter par les articulations des pattes un li- quide jaune ou blanchâtre, d'odeur à la fois fade et pénétrante, destiné par la nature, selon C. Duméril, à éloigner les attaques des oiseaux et des petits mammifères qui seraient attirés par la succulence du corps des Méloés, très-grands mangeurs de plantes basses et d'herbes, à l'état adulte, recherchant les Renoncules, les Léontodons, etc. C'est ce qui explique l'épithèle de grassouillet donnée par quelques auteurs anciens à ces insectes (îXaicîtâvôapc.;, pinguiculus ; OH Beetle,OilClock, des Anglais). On se sert en Espagne, dans la médecine vétérinaire, du Meloe prosca- rabœus; dans l'Hindoustan, d'après le docteur Fleming, on emploie comme vésicantle M. trianthpmœ, qui vit sur des fleurs de Cucurbita- cées. Lavini et Sobrero ont retiré de la canlharidine (sans doute des isomères) de plusieurs espèces du genre Meloe. Létymologie du nom de Méloé, emprunté par Linnœus àParacelse, est fort incertaine. Peut-être ce nom vient de |i.sXaç, à cause de leur cou- leur noire ; selon Moufet, il serait tiré de la propriété qu'ont ces insectes d'émettre par les articulations des pattes une liqueur comme mielleuse, a melloso sudore affatim pxstiUante. Les Méloés figurent dans l'ancienne pharmacopée, et entraient dans la composition de plusieurs médicaments auxquels on attribuait de grandes vertus, ils participent sans doute à la propriété de la plupart des espèces de Cantharides d'agir sur les voies de la sécrétion des reins, car Agricola dit, en parlant de leur emploi : « Urinam patenter pellunt, secl unà sanguinem. ) Cette action provient de l'inflammation de la membranne muqueuse qui tapisse les uretères et la vessie. C'est sans doute à ces insectes, et non aux Buprestes actuels, qu'il faut attribuer la propriété de faire enfler le bétail qui les avale par mégarde avec l'herbe des prairies. Nous trouvons principalement aux environs de Paris le M. autumnalis, 01iv.,dc toute l'Europe et d'Algérie, à antennes épais.-ics au milieu, d'un noir lisse, avec quelques points enfoncés sur les élytre?, qu'on voit en automne el au premier printemps, ainsi dans les fortifications de Paris; le M. majalis, Linn., plus spécial au midi de la France, à antennes non épaissies au milieu, dont l'abdomen est d'un rouge cuivreux, el surtout le Âl. proscarabœvs, Linn., de toute l'Europe, de l'Algérie, du Caucase, de la Sibérie, de l'isthme de Suez, espèce très- commune dans les prairies reverdissantes, alors que la primevère étale sa corolle citron aux rayons du soleil de mars, au début du prinlemps. Il est d'un noir bleuâtre ou violacé, avec la surface des téguments cha- grinée ; les mâles, comme cela a lieu dans la plupart des Méloés curo- CIRARD. 30 610 COLÉOPTËRLS. — CANTHARIDIENS. péens, ont les articles des antennes noueux et dilatés vers le milieu, où ces organes sont coudés. On trouve les plus grandes différences de taille, non-seulement d'un sexe à l'autre, les femelles pouvant à peine traîner leur énorme ventre, mais entre sujets du même sexe, ce qui doit tenir à des nutritions très-variables des larves. Cette espèce abonde, à la fin de mars et au commencement d'avril, dans les prairies qui sont près du pont d'Ivry, le long de la Seine, près de son confluent avec la Marne. On trouve aussi dans cette localité une espèce très-voisine, plus bleue, spéciale à la France, le .W. cijaneus, Muls., et aussi le M. viola- ceus, Marsh., à corselet plus étroit que le proscarabœus. On y rencontrait jadis une espèce beaucoup plus rare, d'un riche bronzé éclatant au soleil, le M. variegatus , Donovan, ou scahrosus, Marshara, fortement rugueux, qui existe isolé, au premier printemps, dans les prés voisins de Paris et dans les fossés des fortifications. Les travaux du chemin de fer et la création du village d'Alfort-ville détruisent pour les entomologistes les intéressantes prairies du confluent de la Seine et de la Marne, ce qui arrive aussi pour tant d'autres lieux des environs immédiats de Paris (1). Nous citerons encore le M. breci- collis, Panz., de toute l'Europe, dont nous donnons les détails caracté- ristiques du genre (pi. xi.vii, flg. 7, antenne du mâle, avec le deuxième article très-court, les suivants obconiques, les articles médians noueux et irréguliers : ce qui n'est propre qu'à certaines espèces; 7 o, mâchoire avec palpe assez long, avec chaque article rétréci à la base et le der- nier tronqué ; 7 6, lèvre inférieure, avec palpes courts, à dernier article ovale ; 7 c, mandibule ; 7 d, labre, transversal, sinué en avant, avec les angles arrondis; le, tarse postérieur, avec crochets fendus en deux parties égales non pectinées). Nous figurons une espèce exotique, le M. Cordillerœ, Chevr., trouvé sur le haut plateau du Mexique, à Sainte- Croix, près d'Orizaba, sur des montagnes élevées (pi. xlvii, fig. 6). Il est d'un noir peu brillant, crevassé de petites lignes longitudinales, à ab- domen très-développé en longueur, à antennes cylindroïdes , à articles égaux : ces deux derniers caractères appartiennent aux Méloés amé- ricains. Les métamorphoses du genre Meloe sont maintenant presque com- plètement connues. On peut facilement conserver les adultes dans des pots contenant de la terre et recouverts d'un treillis métallique, en les nourrissant de salades et de plantes basses. J'ai vu vivre ainsi plus de deux mois certaines femelles du Meloe proscarabœus. On observe, même en captivité, qu'elles font plusieurs pontes en avril et mai, et, à cha- cune d'elles, creusent en terre un trou où elles déposent un grand (1) C'est en recherchant ce rare Coléoptère que, en 1843, je crois, un amateur trouva pour la première fois, si près de Paris, le Nijssia zonaria (Lépidopt. Phal.), espèce rare jusqu*alors, et qui, rencontrée à Ivry en abondance, alimenta toutes les collections fr.-jnçaises. MÉLUÏDES. — iMÈLOE : HYPERMÉTAMOUPHUSE 611 nombre d'œufs jaunes, agglutinés, oblongs, en forme de cylindres ter- minés par deux iiémisphôres. Le M. proscarabœus en pond plus de qua- tre mille, d'après Newport. Ils sont recouverts de terre, à moins qu'ils ne soient pas fécondés. Au bout de trois à six semaines, il sort de ces œufs de petits êtres jaunes, pédiculiformes. Ils furent aperçus par l'en- tomologiste hollandais Goedart en 1700 , puis étudiés par de Geer {Mém., t. V, p. 31). Ces observateurs constatèrent les détails qui pré- cèdent; mais ils ne tardèrent pas à voir périr ces espèces de petits poux jaunes nés des œufs de Méloés. Ce sont leurs premières larves ou larves primitives. Réaumur a figuré, sans la reconnaître, cette larve fourvoyée sur un Eristalis (Dipt.) {Mém., t. IV, pi. 31, fig. 17). Elle fut depuis ren- contrée plusieurs fois sur des Hyménoptères, et prise pour un insecte aptère épizoïque; probablement le Pediculus Apis, Linn., n'est-il que cette larve, et c'est certainement la première morphose vue par Goe- dart et de Geer, que Kirby lit connaître en 1802 pour un parasite, sous le nom de Pediculus Melittœ, rencontré sur des Andrènes, et L. Dufour en 1828, sous celui de Triuntjulinus Andrenetarum, toujours pour un in- secte trouvé sur les Andrènes. Ces petits animaux sont cramponnés aux ailes, ou au dos de leurs porteurs, et surtout fixés dans les jointures. L'histoire exacte des métamorphoses dugenrc jl/c/oe, particulièrement de l'espèce M. cicatricosus, Leach, de toute l'Europe, fut commencée eu 18/i5 par Newport {Trans. of the Linn. Soc, t. X\, p. 297), et presque complètement achevée par M. Fabre en 1858 (J/m. se. nat., t. IX, p. 265). La larve du 31. cicatricosus fut trouvée par Newport dans les nids de VAnthophora retusa; M. Fabre la rencontra également dans les nids des Anthophora parietina ou pilipes, dernière espèce hantée aussi par les Sitar is. Ces premières larves, très-agiles, ressemblant à de petits poux jaunes, sont allongées, parallèles, un peu déprimées; leur tête offre de chaque côté un stemmate arrondi et saillant, et des antennes de trois ar- ticles terminées par une soie : leurs mœurs exigent en effet des sens bien développés. Les mandibules sont courtes et arquées. Le thorax est divisé en trois segments bien séparés, subtriangulaires et subégaux. Ils portent des pattes assez longues, de cinq pièces, la dernière en forme d'onglet flanqué de deux crochets un peu plus courts, ce qui explique le nom de Triongulin deL. Dufour. L'abdomen, oblong, allongé, finement pu- bescent, offre neuf segments égaux, le dernier muni de quatre soie? terminales, et en dessous, de deux courts mamelons rétractiles. Dans les premiers moments qui suivent l'éclosion, ces larves restent immobiles et serrées les unes près des autres, comme les œufs d'où elles sortent; puis, comme réveillées par la chaleur et la lumière, elles se meuvent avec vivacité et se répandent sur les plantes, surtout des fa-^ milles des Composées et des Renonculacées. Newport avait supposé avec justesse, mais sans observation complète, que les jeunes Méloés, nés loin des nids des Abeilles maçonnes où ils doivent vivre, grimpent, au sortir du terrier natal, dans les fleurs des Composées, principalement 612 GOLÈOPTÈRliS. — t:A.NrHARlDIElNS. des Pissenlits, et y attendent les Hyménoptères qui butinent. M. Fabre a vérifié complètement cette assertion en examinant sur un talus de la route qui va de Carpentras au mont Ventoux, et couvert de nids de V Authophora parietina^ les premières larves du M. cicatricosus grimpant sur les fleurs des Séneçons, des Camomilles, etc., et s'y tenant immo- biles, en embuscade dans les fleurons. Il n'y en avait pas sur des Co- quelicots et d'autres fleurs non composées. En outre, et près des nids des Anlhophores, où les femelles de Méloés avaient eu l'instinct de pon- dre, couraient sur le sol des milliers de larves inquiètes, non encore gîtées. Si l'on vient à loucher les fleurs où sont ces larves, aussitôt elles se précipitent et s'accrochent aux objets qu'on leur présente, drap, velours, coton, beurre, etc., mais ne cessent de s'y mouvoir, ne se sen- tant pas à leur convenance. Au contraire, sur des insectes vivants cap- tifs, des Anthophores, des Diptères, des Abeilles, des Papillons, et aussi sur des Araignées, les petits Méloés se précipitent dès qu'il y a un con- tact avec la fleur, mais restent immobiles, rassurés. De même, Newporl avait vu ses larves dans un flacon recouvrir le corps d'un Malachius bipuslulatus qu'il leur jeta et s'y tenir en repos. Elles se tiennent aussi immobiles sur des cadavres d'insectes, même très-secs, tandis qu'elles s'agitent sans cesse sur tout objet inanimé d'autre r)rigine. M. Fabre a vu pareillement les larves de Sitaris s'attacher indifféremment à tout insecte velu. Souvent on trouve des larves de Méloés sur des mâles, d'où elles passeront aux femelles dans 1 accouplement. Dans les observations de M. Fabre, les Anthophores prises au vol, ainsi que les Mélelcs et les Cœlioxys parasites de leurs nids portaient toutes de petits Mé- loés ramassés sur les fleurs composées ; des Diptères {Eristalia, Calli- phora), dont les larves vivent de matières putrides, mais dont les adultes se posent sur les fleurs, avaient aussi des premières larves de Méloés, de môme qu'une Ammophile, chasseresse de chenilles : il y avait là aberration de l'instinct, et ces jeunes Méloés devaient périr ; il en est de même en général pour ceux qui se portent sur les Abeilles neutres ou les Bourdons neutres qui ne pondent pas, à moins qu'ils ne passent au contact dans les nids sur des mâles ou des femelles fécondes. M. Mul- sant, d'après MM. Drewsen et Schiœdte, a donné une liste des Hyméno- ptères sur lesquels on a trouvé ces premières larves. On y voit figurer les genres Odynerus, Andreim, Panurgus, Nomada, Anfhidiwn, Megachile, Eprolus, etc., et aussi Bonibus et Psithyrus. Ces auteurs citent aussi quatre espèces de Tentliré.liniens, Hyménoptères ù larves phytophages, qui devaient certainement laisser périr les imprudents Mélués. De même ceux qu'on a vu se fourvoyer sur des Scolies (Hymen.) non mellifiques périssent ; les Nomades, les Psilhyres (Hymen.) et les Vo;ucelles(Dipt.), parasites des nids de Bourdons, peuvent en conduire au but désiré, etc. Il est certain que l'extrême fécondité des Méloés s'explique, parce que beaucoup de ces premières larves sont destinées à périr. Newport croyait à tort que ces larves primitives mangeaient le miel MÉLOÏDES.— MILOE : HYPERMÊTAMORPHuSE. 613 destiné aux larves des Hyménoptères mellifîques dont elles sont les pa- rasites ; il n'en est rien, chaque larve passe sur l'œuf au moment où il est pondu et en dévore peu à peu la substance sans toucher au miel. M. Fabrc a réussi à voir dans une cellule d'Anthophore une larve jaune de Méloé posée sur une pellicule ridée flottant sur le miel, c'est-à-dire sur l'enveloppe d'un œuf mangé. M. Fabre trouva aussi une seconde laroe (deuxième morphose) vivant de miel ; après que l'œuf est détruit, c'est l'aliment réservé à la postérité de l'Anthophore qui sert à nourrir le Méloé. Deux autres secondes larves furent encore rencontrées ensuite. Cet élat était seulement connu d'une manière vague par NewporI, qui avait trouvé la dépouille de la seconde larve adhérente à la pseudo- chrysalide dont nous allons parler. Les secondes larves, très-différentes du petit pou jaune si agile, sont aveugles, molles, recourbées, à treize segments, ayant quelque ressemblance avec des larves de Lamellicor- nes, à pattes courtes, mais plus robustes et plus développées que chez les secondes larves de Sitaris, dont elles diffèrent encore par les man- dibules munies d'une large dent interne. Puis vient une troisième mor- phose donnant une pseudo-chrysalide {Ivès-hien connue de Nevvport,qui la nommait pseudo-larve) , simplement à demi invaginée dans la peau fendue de la seconde larve et non complètement recouverte, comme cela a lieu chez les Sitaris dont la pseudo-chrysalide est assez voisine. Elle est immobile, inerte, sans nourriture, et offre de spécial une forme arquée en dessus et atténuée aux deux extrémités, treize segments bien apparents, un bourrelet latéral de chaque côté; il y a trois paires de tubercules au thorax. Il est probable que ce troisième état dure près d'un an. Newport croyait à tort qu'à cet élat succédait la nymphose. M. Fabre a vu qu'il y a auparavant (quatrième morphose) une troisième larve ressemblant beaucoup à la seconde larve qui mangeait le miel, avec mandibules et pattes un peu moins robustes ; elle est à demi in- cluse dans les téguments pseudo-chrysalidiens fendus, comme ceux-ci le sont cà leur tour dans la peau de la seconde larve, tandis que chez les Sitaris le double revêtement est complet. Puis \ient une nymphote ordinaire (cinquième morphose), et enfin l'adulte (sixième morphose). On voit donc que chez les Méloés il y a quatre mues avant la nymphe, et dans ces quatre mues le tube digestif et le système nerveux restent pareils; celui-ci ne se concentre qu'à la cinquième nymphose pour la nymphe. Ue môme chez les Sitaris. I10RI.4, Fabr , et CISSITES, Latr. — Antennes de onze articles, droites et filiformes ; dernier article des palpes ovalaire. Élytres allongées, parallèle?, arrondies à rexlrcmité, recouvianl l'abdomen. Crochets des taises robustes, fendus, à division supéiieure crochue et pectinée. (^cs genres, de peu d'espèces, sont étrangers à l'Europe ; les mâles ont les cuisses postérieures plus renflées que les femelles. Le type est le C. testaceus. Fabr., des Indes orientales, grand insecte tout entier 61^4 (OIÉOPTËRES. — CANTHARIDIENS. d'un rouge marron brillant, représenté pi. xlvi, fig. 10 (10 a, palpe maxillaire ; 10 b, pâlie posiérieure de la femelle ; 10 c, patte postérieure du mâle ; 10 d, crochets grossis d'un tarse). D'après les observations faites aux Antilles par Guilding, il paraît que les larves des Coléoplères de ce genre vivent en parasites dans l.es nids que certaines Abeilles charpentières construisent, à la façon de nos Xylocopes, dans les matières ligneuses, remarque tout à fait vraisemblable en présence des mœurs de plusieurs genres européens. Les Horia sont du Brésil, de la Guyane, de Java, de Sumatra ; les Cissites, du Sénégal et des Indes. ri^ROCOM.^, Geotfr. — Corps allongé, subparallèle, déprimé en dessus. Antennes courtes à articles dilatés, échancr'és, épineux ou vésiculeux chez les màles^ simples et fortement en massue chez les femelles^ le dernier très-grand, léni- forme et comprimé. Les Cérocomes sont d'un vert métallique brillant, passant au doré ou bleuritre ; les antennes des mâles ont les formes les plus bizarres qui existent, plus singulières encore que celles des Paussus : elles sont dans ce sexe presque toujours jaunes, ainsi que les pattes, et noires chez les femelles. Ils sont méditerranéens et asiatiques, et remontent peu vers le nord ; adultes, ils se trouvent sur les fleurs, surtout sur celles des Composées exposées an soleil et dans les lieux secs. On peut s'en em- parer aisément, car, en plongeant la tète dans les corolles pour sucer le miel des nectaires qu'ils recueillent avec leurs mâchoires allongées et soyeuses, ils ne voient pas le danger. Ils suspendent tout mouvement au moment où on les saisit, marchent peu et volent avec facilité par les journées chaudes. Leurs larves, probablement de mœurs parasites et carnassières, sont encore inconnues. L'espèce qui remonte le plus au nord, jusqu'en Belgique, et qu'on trouve parfois aux environs de Paris, au mois de juin, en nombre, sur les Pâquerettes en fleur dans les prés, est le C. Schœfferi, Linn. (pi. xlvii, fig. 1, antenne du mâle; la, de la femelle), à dernier article des antennes ovoïde, de couleur vert doré comme la Cantharide des boutiques, de 10 millimètres, pubescent, à antennes et pattes jaunes, avec la tète et le corselet noirs, et labdomen d'un bleu azuré ou bronzé. On rencontre près de Paris, beaucoup plus r.irement, le C. Schreheri, Fabr., analogue au précédent, mais dont les premiers anneaux de l'abdomen sont jaunes et le dernier article des antennes des mâles triangulaire. niVIiAlsniiS, Fabr. — Corps allongé, convexe, ordinairement velu. Antennes de onÉe, dix, neuf ou huit articles, grossissant un peu en massue vers l'extrémité, avec le dernier article grand, tronqué, terminé en pointe obtuse. Élytres allon- gées, parallèles, convexes, largement arrondies à l'extrémité. Les Mylabres offrent un nombre considérable d'espèces propres à l'Eu- rope méditerranéenne, à l'Asie, à l'Afrique. Les espèces d'Europe ont MÉLOÏmiS. — MYr.APJlIS. 015 onze articles aux aniennes. La couleur est noire ou plus rarement d'un bleu brillant, avec des bandes ou tacbes jaunes ou rouges sur les élytres; parfois, par une inve'rsion analogue à celle des Coccinelles et des Ero- tyles, les élytres sont jaunes ou rouges, tachées de noir. Le dessin des élytres varie beaucoup et peut disparaître ; de là une foule de variétés et une inextricable confusion dans les espèces, où il y a sans doute des doubles emplois. La taille des Mylabres est quelquefois très-grande et au moins moyenne. Les larves, non encore étudiées, doivent vivre aux dépens des Hyménoptères, et, assez probablement, d'Hyménoptères sociaux, car, ainsi que cela a lieu pour les Cantharides,on trouve les My- labres par espèces d'essaims sur les fleurs ou accrochés aux Graminées, peu actifs et plus lourds que les Cantharides, et ne devenant un peu plus agiles qu'à un soleil ardent. Les Grecs paraissent avoir employé les Mylabres comme vésicants. On cite comme usité encore de cette façon, dans l'Hindoustan et dans diverses parties de l'Orient, le M. variabilis, dont Robiquet a retiré de la cantharidine ; en Chine, on se sert pour cet usage du M. pustulata, Thunb., d'après M. Fumouze. Farines indique comme énergiquement vésicant le M. i2-punctata, Oliv., ou cymiescens, lllig., du midi de la France, des Pyrénées, d'Espagne, d'Italie. Selon M. Mulsant, la plupart des auteurs ont réuni le même insecte sous les noms de M. variabilis ou Cichorii, qui ne serait pas le véritable Meloe Cichorii de Linnœus, auquel le naturaliste suédois assigne à la fois pour patrie la France méridionale, la Chine et le cap de Bonne- Espérance, et qui est de taille différente. L'insecte linnéen est, ou mentionné inexactement, ou non encore retrouvé dans le genre confus des Mylabres. Il est probablement de Chine seulement. L'espèce la plus intéressante pour nous, très-abondante dans l'Europe méridionale, est le M. variabilis, Pallas, ou Cichorii, Dorlhes, qu'on trouve aussi en Algérie et dans le Caucase. Il est noir, de 10 milUmètres, et, dans le type habituel, les élytres sont d'un jaune terne un peu fauve, avec trois bandes noires, dont une à l'extrémité. On trouve cette espèce à Fontainebleau, dans la Touraine et même parfois aux portes môme de Paris. Ainsi M. Stableau l'a prise une fois eu abondance le soir, dans la plaine de Grenelle, au repos dans des fleurs de Coquelicot. Il est probable que quelque accident atmosphérique avait, à une époque pré- cédente, amené des Hyménoptères de points plus méridionaux, chargés dans leurs poils de premières larves. M. Stableau a remarqué dans la même localité un de ces insectes sortant de terre dans une sablière, sur un talus exposé au soleil, et, ayant creusé le sol en cet endroit, il en a découvert onze prêts à sortir et qui provenaient certainement de nids d'Hyménoptères. Nous citerons encore le M. decempunctata, Fabr., des régions méditerranéennes et du Caucase, noir, avec les élytres d'un jaune très-pâle, ayant chacune cinq points noirs ; on le trouve dans le midi de la France. Enfin, nous figurons des espèces exotiques : l'une de taille petite pour le genre, du Cap, le M. guttata, Cast., ou id-gut- 616 COLIiOPIÈRES.— CANTHARIDIENS. tata, Billberg el Chevrolal, à antennes de huit articles, le dernier très- gros, s. -g. Aclenodia, Cast. (pi. xLvir, fig. 1 ; 1 a, antenne grossie); el une espèce, au contraire de la plus grande taille, le M. myops, Chevr., du Cap (pi. xLvji, fig. i), noir, avecles antennes orangées à l'extrémité, une tache fauve à la base de l'élytre, puis deux larges bandes d'un fauve orangé. Les Mylabres ont plus de deux cent cinquante espèces, de toutes les régions de l'ancien monde. Manquent en Amérique et en Australie. CORYIV.%, Billb. — Ce n'est réellement qu'une section du genre précédent. — Antennes de neuf articles, le neuvième gros, ovoïde, arrondi. Nous représentons l'antenne du C. 12-punctata, Chevr., du Sénégal (pi. xLvir, fig. 3). On trouve dans le midi de la France, eu Espagne, en Italie, en Algérie, le C. Billberyi, Gyll., à corps oblong, convexe, de co- loration noire et jaune, de l'aspect d'un Mylabre. Plus de vingt espèces de l'ancien monde. ŒîIl.%S, Latr. — Antennes droites, ni arquées ni épaissies à l'extrémité. Élytres à suture droite, peu consistantes, non déhiscentes. Le type de ce genre est VOE. afer, Liiin. (pi. xlvii, fig. 5, son antenne), du sud de l'Espagne et de l'Italie, de Grèce, d'Asie Mineure, très-vési- cant, à corps allongé, parallèle, assez convexe. Les autres espèces de Barbarie, d'Asie Mineure, d'Angola. TETR.%o:i'VX, Latr. — Corps à téguments de consistance normale, finement pubescent ; corselet transversal. Élytres subparallèles, assez convexes, conjoin- tement arrondies à l'extrémité. Ce genre est exclusivement des deux Amériques. — Ex. : T. ventralis , Chevr., du Brésil, de Colombie (pi. xlvh, fig. 8), noir, avec corselet fauve taché de noir, jaune en partie en dessous , les élytres larges et noires. Une trentaine d'espèces des deux Amériques, surtout des régions chaudes. €.%llTnARI§>, Geofifr., ou Lytta, Fabr. — Antennes droites, assez longues ou médiocres, non épaissies. Tète triangulaire; labre échancré, rétréci à sa base ; palpes des deux sortes, à dernier article tronqué. Jambes longues; tarses grands, à crochets bifides, mais simples, non pectines. Ce genre comprend l'insecte vésicant qui offre pour nous le plus d'in- terOt. Les insectes vésicants ont été en usage dès une haute antiquité. Hippocrate en recommandait l'emploi interne dans l'ictère, l'apoplexie, l'hydropisie. On attribue à Archigène, médecin de la fin du premier MÉLOÏOliS. — (.,.\.NTHARIS. 617 siècle de noire ère, la découverte de leurs vertus épispasiiques. I,e nom de Cantharis était donné par les anciens à beaucoup d'insectes dif- férents. Linnseus nomma la Cantharide officinale, qui constitue l'es- pèce principale du genre actuel, Meloe vesicatorius, pour la distinguer des Cantharis non vésicants. Geoffroy rétablit le genre Cantharis, en y adjoignant malheureusement les Telephorus , trompé par une gros- sière analogie dans la forme extérieure et la mollesse des téguments, sans faire attention aux tarses, au mépris de sa propre méthode. Fa- bricius donna le nom de Lytta, et Dejean à'Epicauta, aux Cantharides vésicantes. De Geer, Latreille, Audouin, G. Duméril, conservèrent le genre Cantharis, maintenu avec raison par MM. Lacordaire, Mulsant, de Marseul, L, Fairmaire, etc., pour les espèces glabres à couleurs mé- talliques. Les Gantharides ont le corps allongé, parallèle, convexe; les élytres très-flexibles, un peu plus larges que le corselet; les couleurs métal- liques et parfois à bandes longitudinales jaunes ou cuivreuses. L'éclat métallique se trouve dans l'espèce la plus commune, le C. vesicatoria, Linn., de toute l'Europe moyenne et méridionale et du Gaucase, à an- tennes et tarses noirs (pi. xlvh, fig. 10, mâchoire avec un long palpe ; 10 a, labre ; 10 b, lèvre inférieure et palpes ; 10 c, tarse antérieur). G'est l'espèce uniquement employée en France, en Angleterre, dans le nord de l'Furope comme vésicant, et que l'on connaît vulgairement sous le nova de Cantharide officinale, ou des boutiques, ou encore de Mouche d'Espagne, car c'est ce pays qui la fournissait principalement autrefois au commerce de la droguerie. Les Gantharides sont d'un vol vif à l'ardeur du soleil, qui fait reluire les cuirasses d'or de leurs essaims bourdonnants, tandis qu'elles soiit engourdies le matin et le soir. Les mules sont de moitié moins volumi- neux que les femelles, dont le long abdomen, lorsqu'il est gonflé d'œufs fécondés, déborde beaucoup l'extrémité des élytres, de sorte que leur vol est trèi-lent. La taille des cantharides varie de 15 à 20 et 25 milli- mètres de longueur. Files dévorent les Frênes, les Lilas, surtout lesLilas de Perse, les Troènes, et beaucoup plus rarement lesSyringas, lesGhèvre- feuilles, les Sureaux, et même les Bignonia?, les Peupliers, les Saules, parfois les céréales. Sous ce rapport ce sont des insectes nuisibles. On peut très-bien observer ces insectes aux environs de Paris. Tous Ici quatre ou cinq ans, ce qui dénoie une Irès-longue \ie à l'état de larves et de nymphe?, vers les premiers jours de juin, on les voit tout à coup paraître par troupes énormes, se portant de préférenceà tout au're arbre sur les Frênes cultivés dans les jardins, et dvorant les feuilles avec vora- cité à partir du haut, au point de dépouiller parfois complètement ces arbres. Une odeur pénétrante et désagréable décèle leur présence, et l'on entend un bourdonnement confus aux heures chaudes de la jour- née. Les mâles du Cantharis cesicatoria ont le premier article du tarse antérieur profondément échancré,et le crochet de la jambe, eu s'y abat- 618 COLÉOPTi'P.EF. — CANTMARIDIENS. lanl, on fait un anneau. Pour s'accoupler, le mâle monte sur le dos de la femelle et fait entrer les antennes de celle-ci dans cette écliancrure, puis, abaissant son crociiet, relient celle-ci captive pur les antennes. Il la frappe alors tant qu'elle s'agite, avec ses antennes libres et l'extrémité de son abdomoii, jusqu'à ce que l'accouplement ait lieu. Les mâles périssent presque aussitôt aprùs la fécondation, et les fe- melles survivent de quelques jours pour la ponte. Elles creusent un trou dans le sol avec leurs pattes de devant (Ratzeburg, Die ForstinseUen, Berlin, 1837, t. I, p. 89), et y pondent leurs œufs, qu'elles recouvrent de terre, absolument comme les Méloés ; il y a de même sans doute plu- sieurs pontes, car une grosse femelle renferme plusieurs milliers d'œufs. Ceux-ci, en forme de cylindre arrondi aux deux bouts, éclosent envi- ron quinze à vingt jours après la ponte. Il en sort des premières larves encore inconnues dans le dernier siècle, car Geoffroy dit n'avoir pu les rencontrer. Elles sont très-voisines decelles des Méloés, élancées, apla- ties, hexapodes, à longues antennes sétacées, à mandibules crochues. Leur corps, de douze segments, outre la tête, se termine par deux soies caudales divergentes. Elles ont la couleur jaune-citron au moment de leur naissance, et peu de temps après sont déjà plus foncées. M, Ratze- burg ne croyait pas au parasitisme de ces larves sur des Hyméno- ptères;, car, dit-il, comment se rassembleraient les essaims de Cantha- rides. Tout s'explique avec le transport dans les nids, dont on n'avait alors aucune idie. Olivier (Encyclopédie méthod.) paraît avoir vu la seconde /ort;e des Canlharides, qu'il décrit comme molle, d'un blanc jaunâtre, à treize segments, avec une tète plate et ronde, deux courtes antennes filiformes, deux mandibules assez solides, six pattes courtes écailleuses, vivant en terre. 11 suppose, sans doute à tort, qu'elle se nourrit de racines ; il est à croire que sous cette deuxième forme elle mange les provisions des nids d'Halictes qui sont creusés dans un sol horizontal. Il est presque certain que les larves des Cantharides doivent vivre dans des nids d'Hyménoptères. M. Lichlenstein a vu les premières larves de la Cantharide écloses dans des boîtes s'attacher -dux'Halictus de préférence à d'autres. Hyménoptères. On pourrait s'étonner de voir les essaims énormes des Cantharides naître de nids d'Apides solitaires, si l'on n'observe que les régions un peu septentrionales; mais, dès le parallèle moyen, on est frappé du nombre énorme de ces nids sur tous les talus, et, au soleil levant surtout, on croirait à des ruches, tant est grande la population qui bourdonne au dehors, bien que chaque insecte soit propriétaire d'une habitation isolée. On comprend comment peu- Vent apparaître subitement tant de Cantharides, sorties probablement ù la fois de cette multitude de nids voisins les uns des autres. Il est prouvé que les ruches d'Abeilles, les gâteaux des sociétés de Bourdons ou de Guêpes, n'ont pas de Cantharides ; notre hypothèse est donc plau- sible. Des recherches d'un haut intjérêt sont encore à désirer sur ce point, car la démonslralion n'est pas faite. "\iî-inïnF5. — GANTiTAPiis : usage. 619 Tout le monde connaît en Franco l'usage de la Cantharide officinale, dont on se sert comme médication énergique, soit pour une suppura- tion à établir, soit pour exciter la sensibilité dans une région, soit pour détourner l'inflammation qui s'est produite dans un organe essentiel. On pulvérise les Cantharides sèches et ou les mêle avec parties égales d'axonge et de cire, de manière à composer un emplâtre épispastique, ou bien on étend cette poudre mêlée de cire sur du tafTetas, qu'on trans- forme ainsi en sparadrap vésicant. On applique la préparation sur la peau, et on l'y maintient de douze à vingt-quatre heures; puis on dé- tache avec précaution, de manière à ne pas déchirer l'épiderme sou- levé en ampoule remplie de sérosité. Si l'on n'a voulu qu'un vésicatoire volant, on se contente de percer la peau pour faire écouler le liquide, et l'on panse avec du beurre frais ou du cérat,* si, au contraire, on cher- che à obtenir une suppuration permanente, on coupe tout autour avec des ciseaux la peau de l'ampoule, ou même on l'arrache, si l'on veut produire une irritation plus vive. On entretient la plaie artificielle par un pansement avec une pommade contenant des Cantharides pilées. Il est donc nécessaire de se procurer ces insectes. Le commerce retire aujourd hui les Cantharides principalement de l'Ukraine, et aussi delà Hongrie et de la Valachie, et les droguistes les nomment alors Cantha- rides d'Allemagne, parce qu'elles leur arrivent par l'intermédiaire des négociants de ce pays. L'Italie, la Suisse surtout, en fournissent une certaine quantité ; on en récolle très-peu en France , ce qui est à re- gretter, car elles y sont aussi bonnes qu'ailleurs. Autrefois on les obte- nait en abondance de l'Espagne ; mais ce trafic y est abandonné, et au- jourd'hui les pharmaciens de ce pays les font venir d'Italie ou de Russie. On opère d'habitude la récolte de ces insectes en prenant quelques pré- cautions, comme masques et gants, pour garantir les yeux et les mu- queuses de l'action irritante qu'elles causent ; ces précautions, du reste, ne seraient nullement nécessaires, selon M. Berthcud (thèse de phar- macie, école de Paris, 1856). On place, le matin, des draps sous les Frênes chargés de Cantharides et dont on secoue les branches ; les insectes tombent engourdis et ne s'envolent pas, à cause de la fraîcheur de l'air. On les tue aussitôt, soit en vase clos par les émanations du goudron de houille, soit en lesplaçant dans des tamis de crin au-dessus d' un vase dans lequel bout du vinaigre, et on les fait sécher. Ou bien on leur donne la mort au four chaud. Leur poids diminue beaucoup, au point qu'il en entre 6Z1OO individus dans 500 grammes. On réduit en poudre les insectes secs. Cette poudre est d'un gris verdâtre et toujours parse- mée, quelque fine qu'elle soif, de points brillants, à reflets métalliques, le plus souvent d'un vert doré, quelquefois bleuâtres ou rougeâtres, et qui sont des fragments des téguments extérieurs et des élytres. La poudre a une odeur nauséabonde et une saveur acre, et, projetée sur des charbons ardents, répand en brûlant l'odeur d'empyreume repu- 620 COLÉOPTÈRES. — CANTHARIDIENS. gnanle qu'offrent les substances animale?. Dans presque tous les échan- tillons de Cantharides du commerce se rencontrent fortuitement des Cétoines dorées, tombées des Frênes, quand on les secoue pour la récolte des Cantharides. Il est bon que les pileurs de Cantharides prennent quelques précautions, comme de bien entourer le pilon d'une peau flottante, assujettie d'autre part autour du mortier: sans cela, on a vu quelquefois survenir aux yeux de violentes inflammations. M. Mulsant regarde comme imprudent de se reposer et surtout de s'endormir sous un Frêne très-chargé de Cantharides. Bretonneau et Robiquet père ont les premiers isolé le principe vésicant du Cantharis vesicatoria, connu des chimistes sous le nom de cantharidine, substance non azotée, de formule C'^H'^O*, blanche, cris- tallisée en petites lamelles d'aspect micacé, inodores, insoluble dans l'eau, très-soluble dans le chloroforme et l'acétone, peu soluble dans l'alcool froid, plus soluble dansl'alcool bouillant ; l'éther même bouillant la dissout mal, mais elle est soluble dans les corps gras, et, ;\ chaud, dans les acides acétique et sulfurique. Elle donne des vapeurs dès 120° à 125°, complètes vers 210°, et se condense, après cette sublimation, en petites lames, transparentes comme le verre, sans résidu, si l'on opère sur très- peu de matière, avec résidu charboncux,si l'on sublime 15 à 20 grammes. Quand on veut démontrer enpeu detompsl'existenced'un principe vési- cant spécial, on procède comme ilsuit,ct celle petite expérience cslgéné- rale pour les insectes épispastiques. On fait macérer dans un petit tube la poudre avec del'étherou mieux du chloroforme, et l'on jette le tout sur uneboulettede coton qu'on presse avec une baguette de verre, de manière à filtrer la partie soluble. On fait tomber la liqueur à la surface de l'eau tiède, l'éther ou le chloroforme s'évapore ; on enlève avec une barbe de plume mouillée lesgoufleletteshuileusesqui nagentù la surface dei'eau, on les porte sur un papier buvard qui absorbe l'eau, et il reste des pe- tits cristaux de cantharidine. Une parcelle de cette matière portée sur la muqueuse de la lèvre inférieure détermine à l'instant même le sou- lèvement de l'épiderme et une vésicule remplie de sérosité. Pour l'extraction delà cantharidine on a d'abord employé le procédé de Thierry (1835), qui n'est autre que le dosage quulilalif précédent. On épuise la poudre de Cantharides par la macération dans l'alcool, suivie d'une expression du marc ; puis on distille la teinture ainsi obtenue et on laisse reposer le résidu : la cantharidine se dépose en petits cristaux qu'on purifie à plusieurs reprises par traitement à l'alcool bouillant suivi de refroidissement. L'alcool a l'inconvénient de dissoudre assez mal la cantharidine et de dissoudre avec elle d'autres matières, tellement qu'un quart de l'extrait est formé par une matière colorante rouge. Un meilleur procédé (W. Procter) est d'épuiser la poudre par le chloroforme, qui ne dissout pas la matière rouge et dissout mieux la caiitharidine Mais on avait eu'ore l'inconvénient d'obtenir la cantharidine mêlée de matières grasses et résineuses que dissout avec elle le chloroforme. MÉLOÏDES. — CANlllAlilS : CANTIlARlDliNt;. 621 M. Fiimouze (l) a modifié la méthode comme il suit : On a laissé macérer avec le chloroforme la poudre de cantharides ; on sépare par la presse la teinlure du marc, on distille au bain-marie,et l'on a ainsi un extrait chloroformique. On le mélange avec un volume égal de sulfure de carbone dans lequel les graisses et résines se dissolvent, la canthari- dine se précipite: on la lave au sulfure de carbone, puis on la fait cris- talliser à plusieurs reprises au chloroforme bouillant. La difficullé de l'extraction de la canlharidine provient de ce qu'elle n'existe chez l'in- secte qu'on petite quantité, car l'extrait chloroformique le plus riche en cette substance n'en contient environ que la soixantième ou même la quatre-vinglième partie de son poids. Les Cantharides perdent une partie de leur principe actif si on les sèche à une température trop élevée; le mieux est de les sécher au four, dans une étuve, et non à l'air libre, car c'est alors surtout que les insectes et Acariens nuisibles viennent y pondre leurs œufs. On sophistique les Cantharides soit avec des Cantharides altérées ne contenant plus de can- lharidine, fraude que di^céle seulement un dosage comparatif, soit avec de l'huile pour augmenter leur poids, ce qui se reconnaît au toucher gras. Les Cantharides saines sont sèches, non brisées, de vives couleurs et d'odeur vireuse caractéristique. La cantharidine se trouve exclusivement dans les parties molles et réside surtout dans les abdomens ; il en existe à. peine dans les tètes, thorax et cuisses et en raison d'un peu de parties molles que ces organes renferment; elle manque dans les pattes, les antennes, les élylres, les téguments durs, parties qui ne '.ont pas vésicantes. Cela a été reconnu en expérimentant comparativement sur desrégions isolées (Farines, M. Cour- bon), et cela est vrai pour tous les Coléoptères à propriétés analogues. [.es Cantharides, comme tous les insectes desséchés, sont attaquées par plusieurs insectes destructeurs, les mêmes qui en général dévorent les substances animales dures. Ainsi on a signalé parmi les espèces qui les réduisent en vermoulures et dissocient leurs parties, les Anthrenus varius, Fabr., le même qui fait le désespoir des collectionneurs d'in- sectes ; Ptinus fur, Linn., Dermestes lardarius, Linn. , insectes auxquels M. Fumouze a reconnu qu'il faut joindre les Anobium paniceum, Fabr., Cryptophagus cellaris, Scopoli, et Attageims pellio, Linn. M. Fumouze a le premier étudié les Acariens ou Miles des anciens auteurs qu'on ren- contre aussi dans les Cantharides sèches; il a notamment signalé cinq espèces différentes, et il doit encore en exister d'autres. Ce sont, dans les Sarcoptide?, les Tyroglijphus longior, Gerv., et T. sicidus, Robin et Fu • mouze, espèce nouvelle trouvée dans des Cantharides de Sicile et aussi moins fréquente; les T. siro et T. entomophagus, Acariens de toutes les collections d'insectes ; leèGlycyphagus cursor, Gerv. ; et G. spinipes, Hoch.; (1) D'' A. Fumouze, De la Caniharide officinale, thèse de pharmacie, école de Paris, 1867. 622 COLÉOPTÈRES. — CANTHARIDIENS. et enfin, parmi les Cheylétides. le Cheijletus eruditus, Lalr., Acarien<]e3 vieux livres et manuscrits. Au reste, comme on va le voir, les insectes destructeurs n'ont pas grande importance au point de vue industriel. S'il paraît vrai que cer- tains animaux n'ont pas .'i soufTrir du principe actif des Cantharides, qui seraient dévorées avec avidité par les Hérissons, les insectes ne pa- raissent pas avoir le même privilège, et respectent dans leurs ravages la cantharidine, substance qui n'existe au reste qu'en faible quantité dans la Cantharide officinale, ainsi que nous l'avons déjà établi, de sorte qu'il reste aux destructeurs une nourriture trop suffisante. Il y a déjà long- temps que Limousiu-Lamothe annonça à la Société de pharmacie que les vermoulures de Cantharides étaient vésicantes, et Dubuc, de Rouen, fit la môme remarque, pourvu, disait-il, que les vermoulures aient été gardées en lieu sec. Audouin et C. Uuméril sont de la môme opinion. Ce dernier dit que l'action des Cantharides se conserve très-longtemps, et qu'il a expérimenté de la poudre de ces insectes gardée en magasin depuis plus de vingt-quatre ans et encore trés-efficace en emplâtres vésicants. 11 pense dès lors que les larves des insectes destructeurs qui attaquent les Cantharides sèches ne mangent que les parties inertes. M. Fumouze a repris celte question d'une manière plus rigoureuse par des dosages chimiques. Il retira des vermoulures assez récentes, de deux ou trois ans au plus, sensiblement autant decimtharidine que du même poids de parties molles séchées et non atteintes par les larves. Il con- state en outre un fait curieux et encore en partie inexpliqué, exigeant de nouvelles recherches. Il vit que des Cantharides bien sèches et très-ver- moulues, datant de dix à douze ans, faisaient de bons emplâtres vési- cants, comme les Cantharides de C. Duméril, et cependant il ne put retirer de cantharidine de leur extrait chloroformique. Il est probable que, par le temps, la cantharidine, tout en conservant son action épi- spastique, se modifie sous le rapport chimique en quelque composé pro- bablement isomère, rebelle aux agents ordinaires. La cause habituelle de destruction du principe actif des Cantharides dans les pharmaciei est l'humidité, dont on doit les garantir avec soin. Le mieux, et ce moyen les préserve aussi des insectes destructeurs des parties molles, est de les placer dans des caisses de bois bien calfeutrées avec des bandes de papier et tenues en lieu sec.Sans ces précautions, elles se couvrent de moisissures et dégagent l'odeur ammoniacale : c'est l'incurie des pharmaciens qui explique pourquoi les emplâtres vési- cants faits avec les vieilles Cantharides ont en général peu d'effet. ' Malheureusement l'action de la poudre de Cantharides provoque aussi de très-graves efTets toxiques. Prise à l'intérieur, elle amène une constric- tion de la gorge avec ardeur et sécheresse de la langue et soif très-vive. Puissurviennent des vomissements sanguinolents, des coliques violentes, d'affreuses douleurs à l'épigastre et d;in3 les hypochondres ; et enfin le malade, atteint quelquefois même d'une sorte d'hydrophobie par suite MÉLOÏDES. — CANTIIAIU^: EFFlil TOKinUE, EXPERTISE. ~ LYTTA. 623 de la difficulté extrême àavaler, succombe au milieu de convulsions, de délire et de grandes souffrances. En outre l'ingestion de cette poudre détermine des émissions d'urines sanglantes et une grande irritation des organes génitaux, avec priapisme opiniâtre, et souvent délire vénérien insatiable. Aussi celte poudre est fréquemment entrée dans des prépa- rations, comme pastilles, opiat, etc., destinées à assouvir la lubricité, et parfois à procurer des surprises criminelles. De là le plus généralement les empoisonnements par cette substance sont accidentels, et résultent de son emploi imprudent à titre d'apbrodisiaque. A l'autopsie, on trouve la muqueuse digestive d'un rouge noirâtre et ecchymosée ; on décèle la poudre dans les matières vomies, ou sur la muqueuse stomacale et in- testinale, par un examen à la loupe qui montre les parcelles brillantes dont elle est parsemée. Les exiraits de teinture de Cantharides détermi- nent les mêmes accidents que la poudre; il me parait bien difficile, en l'absence de réactifs spéciaux et vu l'altération très-probable de la can- tharidine absorbée, de constater l'emploi d'une teinture qui n'offre pas les points brillants. La poudre de Cantharides appliquée à l'extérieur peut amener l'empoisonnement avec les mêmes phénomènes nerveux, et la même inflammation de la muqueuse vésicale et des organes gé- nito-urinaires, ce qu'on observe parfois lors des larges vésicatoires ap- pliqués aux régions inférieures; seulement le canal digestif est alors rarement altéré. Pline rapporte que le chevalier romain Cossinus fut tué par l'absorption interne de Cantharides ou de Mylabres d'après les ordonnances d'un médecin que Néron, dont il se croyait l'ami, lui avait envoyé pour le traiter. On ne trouve- en France, du genre Cantharis proprement dit, que l'espèce commune, autour de laquelle se groupent diverses espèces d'un vert doré ou d'un beau bleu, d'Algérie, deSardaigne, de Sicile, de Grèce. Nous représentons le C. sulcifrons, Che\r., du Brésil, noir, avec élytres jaunes à trois lignes noires (pi. xlvu, fig. 9; 9 a, sa tête vue de face). Les genres Cantharis et Ltjtta comptent environ deux cents trente espèces des deux mondes, surtout des régions chaudes, non signalées à Madagascar, en Australie, en Polynésie. Ll'TTA, Fabr., ou EpiCAUTA, Dej. — Antennes filiformes, amincies vers l'extré- mité, jjarfois épaissies au milieu. Corps allongé, parallèle, convexe. Ce genre, restriction de l'ancien genre Lytta de i'abricius, bien que très-voisin des Cantharis, s'en distingue, dit M. L. Fairmaire, par la forme des mâchoires, les antennes, et surtout par un aspect un peu dif- férent. Les Cantharis sont métalliques, brillants ; les Lytta sont des in- sectes couverts d'une fine pubescence qui les rend mats ; le corselet est moins court et les élytres un peu élargies en arrière, surtout chez les femelles. Ij'Europe n'a que pe i d'espèces de ce genre, confinées surtout G2.'l COr.ÈOPTËllES. — CANTHARIDIENS. dans la région S. l^. En France, on trouve dans le Midi le L. rudiforsum, Goeze ou verticalis lllig., qui vole trùs-peu quoique ailé, et se trouve courant à terre ou arrête sur les végétaux dont il se nourrit. Certaines espèces américaines de ce genre nous présentent beaucoup d'intérêt. En Amérique septentrionale on emploie comme vésicant le L. atomaria, Germar, ou punctata, Klug, qui se trouve aussi à la Guyane et au Brésil, et vit sur les fleurs de Pomme de terre. A Montevideo se montre trcs- abondamment une autre espèce qui a été l'objet de très-remarquables expériences de la part du docteur Courbon (1). C'est le L. adsperna Klug, ou vulgairement la Cantharide pointillée, longue de 13 à 16 mil- limètres au plus, ayant les élvtrrs, le corselet, la tète, l'abdomen d'un gris cendré et uniformément criblés de petits points noirs ; les antennes sont noires et les pattes roussâtres. La couleur grise est due à de petites écailles pulvérulentes qu'enlève un frottement un peu rude, et alors l'insecte devient noir. On le trouve sur la Bette {Beta vulgaris) et cou- vrant parfois la plante au point d'en faire disparaître les feuilles à la vue, en décembre, janvier, février, mars, été et automne de ces régions. C'est malheureusement ce qui explique pourquoi le L. adspersa s'est jeté sur la Betterave nouvellement introduite, au point d'en compro- mettre la culture de la manière la plus grave (2). C'est en janvier et février qu'on doit recueillir ces insectes, le soir ou le matin, alors qu'ils sont moinsagiles et restent engourdis sur la plante. On secoue les Bettes au-dessus d'un sac de toile à large ouverture, garni de feuilles au fond, et l'on fait périr ces Coléoptères en les exposant à la chaleur solaire dans un flacon de verre bien bouché, ou en soumettant le sac de toile fermé qui les contient à la vapeur du vinaigre bouillant. La propriété vési canle est plus forte que celle de la Cantharide officinale ; mais le point capital reconnu par M. Courbon, c'est que jamais, comme cela arrive parfois avec les emplâtres ordinaires de Cantharide pilée, elle ne déter- mine la moindre irritation sur les organes génilo-urinaires. Cela fut bien constaté dans son emploi on poudre pour amener des vésicatoires loco dolenti dans des cas d'hépatite chronique, de sciatique rebelle, de bronchite chronique et de pneumonie. On comprend dès lors combien cet insecte peut devenir précieux en raison de son action épispaslique considérable et de l'inutilité de toute tentative pour d( s emplois crimi- nels ou lubrique?, et il serait facile, vu son extrême abondance dans les régions de la Plata, de le demander au commerce d'exportation, de ma- nièie à alimenter toutes les pharmacies d'Europe, à l'exclusion de toutes les espèces non innocentes. 1) (ÀVipl. rend. Acad. cks sciitncs, 1855, t. XLI, p. 1003. ^2) Maurice Girard, Ânn. Soc. cnlomol. de France, 18G0, Bull., p. 73 MtLOÏOES. — SPASTJCA, NEM0GNA.TI1A, LEPTOPALPLS, ZONMTIS. 625 SPASTICA, Lacord. — Antennes longues, grêles, filiformes, de onze articles. Crochets des tarses fendus, à division inférieure très-grêle, la supérieure non peclinée. Les insectes de ce genre, à corps finement pubescent, constituent un genre très-voisin des Lyita, et formé par quelques espùces de l'Amérique du Sud, de taille moyenne, de couleur variable, dont une partie est encore inédite. IS'ous figurons le S. flavicollis, Chevr., du Brésil (pl.xLvn, tîg. l/i; ilx a, antenne; iU b, crochets d'un tarse). Les genres de Méloïdes qui suivent ne sont plus doués de la propriété vésicante. IVEIIIOGIVATHA, Illig. — Tête acuminée en museau ; lobe externe de la mâchoire prolongé en lanière velue, grêle et filiforme, moitié plus longue que le palpe; antennes filiformes. Crochets bifides des tarses pectines à la division supérieure. Ces insectes ont un rebord externe aux élytres, et celles-ci sont déhis- centes après le milieu et atténuées à l'extrémité. Une espèce, de la faune méditerranéenne, se trouve dans le midi de la France : c'est le N. chry- somelina, Fabr. (pi. xlvii, fig. 12; tète du mâle vue de face ; 12 a, an- tenne ; 12 b, crochets d'un tarse). E,EPTOPALiPU§>, G.-Mén. — Palpes maxillaires très-longs, presque collés au corps, dépassant l'insertion des pattes postérieures ; lobe externe de la mâchoire en pinceau cilié dépassant les mandibules, mais n'atleignant pas le second ar- ticle du palpe. Les genres Nemognatha et Leptopalpus comptent près de quarante espèces de l'Europe méridionale, d'I^gypte, de Sibérie, des régions chaudes ou tempérées des deux Amériques. Le genre Leptopalpus a les mandibules arquées, aiguës, saillantes, etoflre la plupart des caractères du genre Nemognatha : mais il en difl'ère, ainsi que du genre Zonitis, qui a aussi le lobe externe de la mâchoire très-grèle, parce que les élytres sont convexes et non déhiscenles en arrière. Nous représentons le^rostratus, Fabr., d'Algérie et du sud de l'Espagne (pi. XLvri, fig. 13; 15 a, tète vue de face ; 13 6, mâchoire et son palpe isolée; 13 c, crochets d'un tarse). Z©:%ïTïS, Fnbr. - Tèlc ovalaire, acuminée à l'extrémité; antennes droites et filiformes. Lobe externe des mâchoires anomal, en filet grêle, dépassant les mandibules. Palpes allongés. • Les Zo?H'h"s sont -des Coléoptères à corps allongé, presque parallèle, convexe, avec les élylrcs allongée?, convexes et flexibles, atténuées seu- lement ù rcxticmilé, où elles ironi déhiscenles, sans rebord. La colora- tion tes espèces d'i'uiope Cbt peu vaiitc, noire et fauve pâle ou rou- GIRARI). ^0 (i2fi COLÉOPTÈRES. — CAINTHAIUDIENS. geâfre, les élytres de cette derniCre couleur, avec quelques bandes et macules noires, qui peuvent ou disparaître, ou au contraire s'agrandir au point que les élytres peuvent devenir entièrement noires. Dans les espèces exotiques il en est de métalliques. Les Zonitis d'Europe sont de la région méditerranéenne. On les trouve adultes sur les fleurs, parfois réunis en groupes et immobiles, comme presque tous les insectes de la famille. Ils doivent y pondre des œufs d'où naissent de premières larves qui s'accrocheront aux poils des Hyménoptères. En effet, par une récente observation, M. Giraud a vu que le Z. mutica, Scriba, espèce du midi de la France et de l'Allemagne, d'Espagne et d'Algérie, est parasite des nids de VOsmia tridentata, et offre des pseudo-chrysalides tout à fait sem- blables à celles des Sitaris. Citons encore le Z. prœusia, Fabr., de toute l'Europe méridionale, d'Algérie et du Caucase, d'un jaune pâle ou tes- tacé, avec les antennes et l'extrémité des élytres noires. Nous figurons (pi. XLvn, fig. 11) le Z. puncticollis, Chevr., insecte qui faisait partie de la collection d'Olivier, et était indiqué par lui comme recueilli dans son voyage en Mésopotamie. Il a le dessus du corps et les élytres d'un noir bleuâtre, le corselet rouge, avec un point médian bleuâtre. Cet insecte ne me paraît pas avoir été retrouvé. Les Zonitis comprennent une quarantaine d'espèces de l'Europe mé- ridionale, de Syrie, des Indes, du Gap, d'Australie, d'Amérique septen- trionale, de Timor, de l'île Art. SITAlftli*», Latr. — Mandibules arquées et aiguës; mâchoires normales. Antennes filiformes, à articles allonges. Élytres déhiscentes à partir d'une longueur va- riable, le plus souvent fortement sinuées aux bords interne et externe, et alors très-atténuées à l'extrémité, comme d'étroites lanières. Tarses à crochets bifides et variables. Les Sitaris ont le corps épais et assez convexe ; leurs couleurs sont le noir et le jaune testacé, cette dernière couleur étant d'habitude celle des élytres. Les mâles ont la taille plus petite que les femelles, les ély- tres plus courtes, plus rétrécies en arrière, et le dernier segment de l'abdomen profondément échancré. Ces insectes, au nombre d'une dizaine d'espèces, sont propres à l'Europe méridionale et au nord de l'Afrique. L'espèce la plus commune et que nous trouvons dans toute la France, surtout très-commune dans le Midi, aux environs d'Avignon et en Provence, est le S.humeralis, Fabr., ou mieux muralis, Forster, noire, à l'exception des élytres, dont la base est jaune et comme coupée transversalement. C'est la Xécydale humérale de Fabricius et la Cantha- ride à bandes jaunes de Geoffroy, ce qui montre qu'on rencontrera l'in- secte aux environs de Paris. Il est figuré pi. xLvii, fig. 15 (15 a, an- tenne; 15 6, tarse antérieur). On sait depuis longtemps que les larves de cette espèce vivent en pa- rasites dans les nids de ces Mellifiques solitaires qu'on appelle en général Abeilles maçonnes. On prend parfois les adultes par centaines surde vieux MÈLOÏDES. — SlTAUrS : HYPERMÉTAMORPHOSE. 627 murs de ferre; on les trouve souvent en grand nombre à l'entrée des nids, immobiles, comme engourdis. C. Duméril dit, à l'arlicle Sitaride du Dictionnaire des sciences naturelles, p. 3i3 : « Nous avons trouvé très-souvent cet insecte dans les nids d'Abeilles construils dans l'argile, ou dans les murs d'enceinte faits avec de la terre. Il est surtout très- commun à Amiens. Il est probable que la larve est élevée en parasite et qu'elle dévore celle des Abeilles. » Foudras, en 1810, trouva les larves dans les nids d'Anfhophores ; j\.udouia en 1835, et M. Mulsant en 18Zi9. Celui-ci observa la ponte, l'éclosion, et vit que les larves tuent celles des Anthophores au printemps suivant. Les mœurs de ces larves et leurs curieuses transformations, ou hypormétamorphoses, ont été étudiées avec grand soin par M. Fabre {Ann. des sciences nat., If série, Zool., 1857, t. VII, p. 299, et 1858, t. iX, ,p. 265), dans des mémoires encore plus re- marquables par l'élégance du style que par la complète nouveauté des faits, car, sous ce rapport, l'auteur a surtout étendu et précisé les obser- vations plus anciennes de Newport sur les larves des Méloés. Sur les nombreux talus que présentent les coteaux arides du midi de la France, dans des tubes creusés dans la ferre sècbe et dure, se trou- vent, dans la même retraite, les nids des Anfhopbores et des Osmies ; aufond sont les cellules des AnÛ\o])\\OTe?>{Antlwphorapilipes), régulières, à parois lisses, présentant chacune une larve nue, et, vers l'entrée, des cellules d'Osmies [Osiaia tricornis) en terre gâchée, grossières, avec des larves filant un cocon. Aux cellules à larves d'Anfhophores sont jointes des cellules du même insecte, mais contenant, au lieu de la progéniture normale, des larves de Mélectes {Melecta armata), Hyménoptères parasites des nids. Enfin il en est qui contiennent une coque ovoïde, fine, ambrée, où se trouve la nymphe du Sitaris humeralis ou muralis. Tout autour des orifices des dépouilles de Sitaris pendent enroulées aux toiles d'A- raignée, des milles se promènent dans l'espoir de s'accoupler, des femelles fécondées enfoncent leur gros abdomen à l'entrée d'une galerie et y disparaissent à reculons. Dans le milieu de l'été, les femelles des Sitaris, qui, comme leurs mâles, ne vivent que peu de jours et sans prendre de nourriture, déposent à l'entrée des trous une masse de petits œufs blancs, ovales, agglutinés. Un mois plus tard, dans le courant de septembre, sortent de ces œufs des larves très-petites, d'un millimètre de longueur seulement, cuirassées, à neuf segments abdominaux s'affé- nuant peu à peu, à antennes terminées par une longue soie, à mandi- bules arquées ; elles sont très-agiles et ont des pattes assez robustes terminées par un ongle aigu et très-mobile ; l'avanf-dernier segment abdominal oiîre latéralement deux crochets cornés et redressés, et le der- nier se termine par deux longues soies recourbées, pareilles à la longue soie que porte chacune des cuisses. Enfin cette larve est très-bien pourvue sous le rapport de la vision, car elle a quatre ocelles, deux de chaque côté. Telles sont les premières larves, qui passent l'hiver sans prendre de nourriture, immobiles et entassées sans ordre^ comme les 628 COLÉOPTÈRES. — CANTHARIDIENS. œufs. Au mois d'avril, éclosent les Anthophores mâleS;, qui précèdent environ d'un mois l'apparition des femelles : avec prestesse et au pas- sage les larves s'accrochent à leurs poils, et se pendent ainsi la tète eu bas ; de là elles passent sur les femelles, soit par un séjour intermédiaire sur les fleurs, soit plus probablement lors de l'accouplement. La femelle construit pour la postérité qu'elle ne verra pas éclore des cellules qu'elle remplit d'un doux miel; la larve parasite, jusqu'alors toujours à jeun, lors de la ponte de l'œuf, se laisse tomber sur celui-ci, en évitant avec soin le lac mielleux où elle se noierait; elle ouvre l'œuf avec ses mandibules acérées, mange l'intérieur, et se sert de la coque alTaissée comme d'un radeau flottant. Puis au bout de huit jours environ, la peau de la première larve se fend par le dos, et il en sort une secojide larve,hien différente de lapremière. Elle est aveugle, blanche, n'a que des pattes atrophiées, ne posant pas, des pièces buccales rudimentaires, et un énorme ventre renflé, surtout dans la partie ventrale qui doit plonger dans le miel, les stigmates relevés en dessus, hors du liquide. Ue Carni- vore, le régime est devenu mellivore ; ici aucune peine pour trouver l'aliment, aussi les organes des instincts ont disparu. Cinq à six semaines sont employées à consommer le miel amassé dans la cellule parl'An- thophore, et la larve devient pseudo-chrysalide, corps inerte, segmenté en treize parties, ovalaire, privé de tout mouvement et revêtu de tégu- ments cornés, de couleur jujube. Sur ces téguments se dessine un mas- que céphalique sans parties mobiles et distinctes, six tubercules indices des pattes, neuf paires de stigmates, et postérieurement un disque cir- culaire. Cet état ditTère de la nymphe ou vraie chrysalide par l'absence des sculptures des parties de l'adulte, et son immobilité, le manque presque total de reliefs, la font ressembler à une pupe de Diptère; mais le tégument n'est pas la peau de la seconde larve, mais une peau nou- velle plus interne, car la pseudo-chrysalide reste recouverte par une pellicule transparente et continue, mais bien distincte, qui est précisé- ment celle peau, comme dans une outre close. La pseudo-chrysalide passe habituellement l'hiver. Au printemps elle devient unetroisième iart;ereproduisant à peu près la forme de laseconde larve, et contenue dans uiie double enveloppe formée de la peau cornée delà pseudochrysalide et de la dépouille de la seconde larve. Sous cette troisième forme, le Si (or /s ne prend aucune nourriture; ses mouve- ments, très-lents, se bornent à des contractions et à des dilatations, la marche ne pouvant s'etrectuer sur ses pattes trop faibles. Peu après une dernière mue change cette larve en nymphe, pareille à celle de tous les Cpléoptôres, c'est-à-dire avec les organes de l'adulte développés, les pattes et les antennes repliées sous le ventre, le tout emmaillotlé d'une mince peau. Au bout d'un mois éclôt Y adulte; de sorte que la vie totale du Sitaris humeralis est de deux ans. Cependant il n'est pas certain que cette évolution soit exactement celle de tous les Silaris. Ainsi, pour le S. Solieri, Pecchioli, espèce de OEDÉMÉRIDES. — CA.LOPUS. 629 l'extrâme midi de la France, d'Italie, d'Espagne, Audouin rapporte avoir observé pr<^s de Pise ses œufs déposés sur des Romarins, agglutinés entre eux et éclosant; il faut alors que les premières larves de cette espèce, comme celles des Méloés, passent sur les Hyménoptères butinant sur les fleurs. Les métamorphoses des Silaris sont les mieux connues de colles des genres du groupe des Méloïdes; il peut se présenter des différences in- téressantes d'espèce à espèce, comme le montre l'exemple précédent. II reste un \aste champ de recherches à explorer pour les autres genres et surtout pour ces insaisissables Cantharides dont on n'a fait qu'entre- voir les larves primitives. On a trouvé sur des Osmies et des Andrènes des larves noires, pédiculiformes, ressemblant aux larves primitives jaunes des Meloe et devant appartenir à d'autres genres. Espérons dans l'avenir ! Observateurs, à l'œuvre ! VII. — OEDÉMÉRIDES Antennes de onze ou douze articles, presque toujours filiformes et grêles. Tête géni'ralement en museau rétréci, mais sans cou brusque. Corselet plus élroit que lesélylres, presque toujours rétréci à sa base et non exactement continu aux élytres; écusson assez grand. Élytres géné- ralement de consistance peu solide, souvent atténuées en arrière et déhiscentes. Abdomen de cinq segments libres en dessous (six chez quelques mâles : ex. Calopus). Tarses à crochets toujours simples. Corps allongé et svelte. Avec les Mordellides et quelques Méloïdes non vési- cants, ce groupe constitue les Sténoptères de C. Duméril. Les Œdémérides vivent en larves, soit dans le bois de différents arbres, sur lesquels l'adulte se tient parfois dans la même attitude que plusieurs Cérambycidcs au repos, soit dans la tige de plantes herbacées. On les trouve parfois à l'état adulte sur les bois morts dans lesquels ont vécu leurs larves, et le plus habituellement sur les fleurs. Quelques espèces ne viennent s'y poser qu'au crépuscule ou même pendant la nuit. Us sont répandus partout. Les Calopus et Ditylus sont des contrées froides ou montagneuses; lesOEdemera, et surtout les A7'. rostratum, Fabr. ou cœruleum, Petagna (pi. xlv, fig. 8; 8 a, tête vue en dessus et antenne), vivant au bord de la mer, sur les Eryngium. 632 COLÉOPTÈRES. — SCOLYTIENS. WVCTERUS, Clairv. — Tête prolongée en museau ou rostre épais, de longueur variable. Corps épais; convexe, recouvert d'une pubescence serrée, ruusse ou grisâtre. Antennes filiformes. Tarses hétéromères. Ce genre anormal touche par ses caractères multiples aux genres OEdemera dans les Canlharidiens, Pytho et Rhinosimus dans les Tén6- brioniens, et enfin à la tribu des Curculioniens télramères. M. E. Blan- chard le place dans les Curculioniens, ainsi que les Rhysodes à côté. Ce sont des Coléoptères au plus de taille moyenne, noirs ou d'un bronzé obscur, à téguments finement chagrinés. Outre la pubescence, ils sont recouverts à l'élat vivant, (i linstar des Larinus (Curculioii.), auxquels ils ressemblent un peu, d'une poussière farineuse jaune ou rousse, qui se renouvelle si on l'enlève. On les trouve sur les fleurs, surtout celles des Ombellifôres. — Ex. : M. curculionoides, Fabr., de France, d'Allemagne, d'Algérie, du Caucase (pi. xlv, flg. 9 ; 9 a, tète). Cet insecte, de h à 7 mil- limètres, est d'un brun noirâtre, couvert d'une pubescence très-fine, cen- drée ou roussûtre, à élylres sans stries, se tenant immobile sur diverses plantes, surtout les Chardons, remontant jusqu'en Angleterre, mais plus commun dans le midi delà France, principalement au bord de la mer. Des auteurs ont fait de ce genre la petite famille des Myctérides. Il y a six autres espèces d'Europe orientale, de Sardaigne, de Turquie, de^ États-Unis. Tribu des SCOI.YT1EI1S. La tribu des Scolytiens présente des affinités incontestables avec celle des Apatiens, surfout par les mœurs et l'aspect extérieur, car il y a plutôt analogie que ressemblance réelle. Les larves des Apatiens, à galeries irrégulières, sont bien difierentes : les antennes ont d'autres nombres d'articles, les mâchoires ont deux lobes ; les tarses ne sont pas tétramères de la même façon, car chez les Apatiens c'est le premier article qui est le plus petit de tous, et le quatrième, au contraire, chez les Scolytiens. Il est bien plus difficile de séparer nettement les Scoly- tiens des Curculioniens, avec lesquels Erichson les réunit; cependant ceux qui ont un rostre bref, mais aussi long que celui de certains Cur- culioniens, s'en distinguent par des jambes denticulées ; ceux qui se rattachent au type du genre Tomicus ont une tète bien différente des Charansons,car elle est brièvement conique ou subglobulouse et cachée en partie dans le corselet. Les antennes, bien que sur le même plan que celles des Charansons, c'est-à-dire oflrant un scape (premier article), un funicule et une massue terminale, ont des nombres d'articles plus variables, ceux du funicule pouvant se réduire beaucoup et ceux de la massue se souder. On peut dire que les Scolytiens, surtout parleurs larves, forment une tribu annexe des Curculioniens. C Duméril plaçait les, Scolytiens dans sa famille hétérogène des Cy- lindriformes, avec les genres Clerus, Corynetes, Apale. Certains auteurs SCOLYTIËiNS. 65» leur conservent exclusivement le nom de Xylophages, qui leur con- vient essentiellement par leur régime, mais quia l'inconvénient d'(ître trop général, et qui s'appliquait, dans les ouvrages de Latreille, à ces insectes et à d'autres types. l'Jifin nous rejetterons pour cuv le nom de Bosirichides, comme prêtant à une confusion déjà expliquée. Voici les caractères généraux des Scolytiens adultes : Pièces buccales réduites, avec mâchoires "unilobées et palpes des deux sortes de trois articles. Tête variable, parfois en museau ou rostre court, ou bien élar- gie et courte, ou bien subglobuleuse et cachée. Antennes de trois à douze articles, courtes et coudées, insérées dans une petite fossette en avant des yeux ou rudiment de scrobe. Corselet très-convexe en avant et couvert de fines aspérités serrées. Élytres presque toujours très-con- vexes, à stries plus ou moins distinctes, souvent tronquées et impres- sionnées à l'extrémité, avec quelques dents ; cavités cotyloïdes des han- ches antérieures fermées en arrière, avec abdomen de cinq segments en dessous. Pattes courtes, à jambes comprimées, parfois denliculées, avec tarses létramères ou plutôt subpentamôres, avec le troisième ar- ticle bilobé et le quatrième ayant à la base un article rudimentaire ; crochets simples. Corps de forme générale allongée et plus ou moins cylindriqi:e. Les Scolytiens sont de petite taille et de couleurs le plus souvent uni- formes, noires, ferrugineuses, rarement testacées, très-rarement mé- talliques. On les trouve sur les végétaux qu'habitent leurs larves ou volant aux alentours, et cela pendant toute la belle saison, car leur multiplication est rapide et permet plusieurs générations dans la même année, du moins pour beaucoup d'espèces. Les Scolytiens comptent à juste titre parmi les insectes les plus nui- sibles, et s'attaquent d'une manière presque exclusive aux végétaux ligneux, aux arbustes et surtout aux arbres, pénétrant ou dans la partie interne de l'écorce, ou dans le bois, de la tige, et, pour certaines est pôccs, des plus minces rameaux. Les forestiers se préoccupent avec rai- son des ravages terribles de ces animaux, qui peuvent amener en peu d'années la mort des plus grands arbres de nos bois, de nos plantations, de nos promenades. Les Scolyles proprement dits ne nuisent pas aux arbres résineux, mais aux Amentacées, aux Ulmacées, aux arbres frui- tiers, etc. La plupart des autres, au contraire, vivent de Conifères, tantôt exclusifs aux Pins, ou aux Sapins, ou aux Thuias, tantôt inditférents à divers genres. Au printemps, on rencontre en li'oupes énormes et à toutes les heures du jour, les Scolytes et les Hylésines; mais les Tomi- ques et les Hylurgues ne se rencontrent guère qu'au déclin de la jour- née, et c'est lii soir principalement, et peut-être la nuit, qu'ils se livrent à leurs ébats: en elfet, on trouve souvent le matin, criblés de trous d'entrée, des arbres qui, la veille, n'offraient pas la moindre trace d'in- vasion. La forme cylindroïde du corps des Scolytiens, la râpe d'aspérités de leur corselet et du bout de leurs élytres; leur tête solidement attachée; 634 COLÉOPTÈRES. — SCOLYTir.NS. leurs mantlibulcs courtes, fortes, dentelées ; leurs antennes courtes et pouvant se replier sous la tète; les pattes aplaties, souvent dentées ou en râteau, les rendent propres à creuser des galeries, à s'y maintenir et à y cheminer, à rejeter au dehors les déblais. Les femelles déposent dans leur galerie, dite galerie de ponte, des œufs gros comme des graines de pavot, qu'elles recouvrent de poudre de bois ; souvent les mîlies creusent aussi ces galeries. On ne connaît pas bien les détails de l'accouplement de ces petits insectes. Il paraît probable qu'il a lieu surtout dans la galerie de ponte. Les femelles des Scolytes proprement dits font, dit-on, sortir la partie postérieure de leur corps à l'orifice du trou d'entrée, de manière à s'offrir à l'organe du mâle qui erre sur l'écorce, cherchant à remplir la mission pour laquelle, il est né. On a trouvé des Hylurgues {H. Piniperda) des deux sexes accouplés dans la galerie de ponte, en position telle que le mâle et la femelle avaient dû, pour s'unir, s'approcher l'un de l'autre à reculons. Il est des espèces de Scolytiens qui pénètrent dans les branches in- férieures desSapinsj et les larves les perforent et amènent la dessiccation du rameau : ce qui faisait appeler ces espèces par Linnœus jardiniers de la nature, se chargeant d'élaguer des rameaux trop nombreux. D'au- tres espèces, bien plus pernicieuses, attaquent les slipes et les grosses branches, et pénètrent jusqu'à l'aubier des Conifères. C'est ainsi que le Tomicus fypographus, Linn., e?t un des fléaux les plus redoutables des grandes forêts de Sapins du nord de l'Europe. Les feuilles acicu- laires jaunissent et l'arbre meurt en commençant par la cime. Souvent les prêtres ont imploré dans les églises la clémence divine pour mettre un terme aux dévastations de ce clièlif insecte. Dans les forêts du Harz les ravages sont signalés dès 1665. De 1757 à 1783 le fléau reparaît dans ces mêmes forêts, avec diverses intermittences, et en 1783 le mal était à son comble, et les arbres malades furent évalués en nombre à un million et demi. Ces masses de Sapins, naguère d'un superbe vert foncé, n'offraient plus à la vue qu'un aspect jaune terne et portant l'em- preinte de la mort. Les larves des Scolytiens (avec certaine exception pour le genre Piaujpus) sont tout à fait du même plan que celles des Curculioniens. Elles sont, comme celles-ci, aveugles, apodes, à corps courbé en arc, à tête petite, coriace, rentrant dans le premier anneau thoracique, avec la même réduction des antennes et des pièces buccales, à premiers anneaux boursouflés par des mamelons latéraux : la forme arrondie du bord inférieur des anneaux et les fines aspérités du corps servent k lar reptation dans les galeries. La femelle a espacé dans la galerie de ponte, qui a la largeur de son corps, les œufs, un à un en général, cha- cun dans une petite entaille, à droite et à gauche. De chaque œuf sort une larve creusant une galerie à peu près perpendiculaire à celle de la mère et s'élargissant à mesure que la larve s'accroît; si la larve meurt, la galerie inachevée reste courte. Au fond de sa galerie, dans ECOi-TTIIiNS : GILCIUES. G35 une sorte d'ampoule terminale formant la région la plus large, la larve, parvenue à tout son développement, s'entoure de poudre de bois agglu- tinée et devient nymphe. Au bout de peu de temps^ l'adulte sort en per- çant l'écorce d'un trou circulaire. Cliaque larve a creusé toujours droit devant elle, de sorte que les galeries des diverses larves ne viennent pas se couper. Ces précautions instinctives amènent dans les galeries de la mère et des tarses une régularité qui leur donne souvent la forme d'élégantes arborisations, dont les dimensions, en rapport avec la taille des espèces et les dessins constants pour chaque espèce, constituent d'im- portants caractères de celles-ci, et offrent pour les Scolytiens une excel- lente preuve qu'ils se séparent naturellement des Curculioniens à gale- ries des larves, quand elles sont lignivores, toujours confuses et sans or- dre. 11 faut remarquer, principalement pour les Tomiques, que certaines espèces pénètrent dans les bois, d'autres ne s'adressent qu'aux vieilles ccorces, d'autres aux écorces minces, et enfin d'autres à celles seule- ment des plus jeunes pousses ; de sorte qu'un môme arbre peut can- tonner quatre espèces différentes. Ce sont surtout les écorces dans leur liber qui sont attaquées par le plus grand nombre des Scolytiens, et c'est ce qui explique la gravité de leurs ravages en détruisant une région aussi essentielle pour la vie des arbres. On observe que ceux qui se logent dans les écorces épaisses creusent toutes leurs galeries dans sa partie profonde, mais que les espèces qui s'en prennent aux écorces minces établissent, tant adultes que larves, les galeries avec deux seg- ments de leur circonférence, l'un à l'intérieur de l'écorce, l'autre à l'extérieur de l'aubier; de sorte qu'en détachant l'écorce, on observe deux épreuves en creux des mêmes dessins^ l'un sur l'écorce, l'autre sur le bois. C'est afin, sans doute, de ne pas compromettre, en appro- chant trop de la surface, le fragile abri qu'offre une mince écorce. M. E. Perris (ses intéressants travaux sur les Scolytiens se trouvent dans les Ann. de la Soc. entoin. de France, années 1852 et 1856) a divisé les espèces de Scolytiens en catégories importantes pour les forestiers, d'après la forme des galeries et la partie de l'arbre qu'elles affectent. Les plus nombreuses espèces font des galeries subcorticales. Tantôt la galerie de ponte est longitudinale, et alors les galeries des larves sont transversales ou selon des arcs de circonférence, mais peuvent devenir longitudinales avec flexion, si le diamètre de l'arbre ne se prête pas à tout leur développement transversal; tantôt la galerie de ponte est transversale, ordinairement en accolade à partir du trou d'entrée, et les galeries des larves longitudinales ; enfin, il peut y avoir plusieurs galeries de ponte rayonnantes ou étoilées à partir du trou d'entrée, et alors les galeries des larves sont perpendiculaires aux rayons. Un petit nombre d'espèces font des galeries qui pénètrent dans le bois, soit per- pendiculaires à l'axe de l'arbre, soit formant avec sa circonférence comme la corde d'un arc. Les galeries des larves se détachent comme d'habitude à angle droit de part et d'autre de la galerie de ponte, et 63G COLÉOPTÈRtS. — SCOLYTIENS. lantùt chaque larve fait sa galerie séparée, tantôt une galerie sert à plusieurs. Une question divise les naturalistes et les forestiers au sujet des dé- gâts commis par les Scolytiens. Les Allemands se sont partagés à cet égard en deux camps. Les uns, parmi lesquels il faut comprendre les anciens entomologistes, Gmelin et lUiger et M. Ralzeburg, dont l'ouvrage sur les insectes nuisibles aux forêts offre une magnifique iconographie devenue classique, regardent les insectes comme un fléau direct et du premier degré, en admettant qu'ils se jettent sur les arbres sains et en pleine vigueur et détruisent en eux les organes de la vie, de sorte que les arbres succombent. L'autre école soutient que les arbres deviennent d'abord malades, en raison de diverses causes, et qu'alors les insectes, averlis par leur instinct et sans doute par un odorat des plus subtils, s'aperçoivent de l'état de faiblesse des végétaux, alors même qu'il n'est pas encore visible pour nous, se portent sur ces plantes, et achèvent leur destruction sous d'innombrables lésions. Dans un arbre très-vigou- reux, l'excès de sève les rebute en bouchant constamment les trous et les entailles qu'ils pratiquent , les œufs demeureraient emprison- nés dans des tissus de nouvelle formation, et la sève extravasée noierait les larves. On a pris des écorces mortes, criblées d'insectes; elles furent appliquées à la place de lambeaux égaux d'écorce enlevés à des arbres en pleine vigueur , et les larves n'ont pas envahi l'écorce saine voisine. Dans l'été extraordinairement sec de 1835, qui détruisit 50 000 pieds d'arbres au bois de Vincennes, il fut constaté que près de la moitié n'avaient pas été atteints par les Scolytiens : ainsi 10 000 pieds de bois blanc et 10 000 de Chênes. Des arbres abattus et criblés de Sco- lytcs furent débités eu bûches amoncelées près de jeunes Chênes bien portants, et aucune trace de Scolytiens éclos par milliards au prin- temps de 1836 ne fut remarquée sur ces Chênes distants de quelques mètres. M. E. Perris a constamment observé des faits analogues dans les forêts de Pins maritimes des Landes. Aussitôt qu'un arbre sain est ren- versé, il est perforé dès le lendemain. M. E. Perris a fait enlever au prin- temps l'exlrémité de toutes les branches déjeunes Pins vigoureux, et les Toinicus et les Pissodes les ont fait périr auesilôt, avant que les bour- geons adventifs aient eu le temps de réparer le dommage. Les Pins sont parfois altaqués par une maladie inconnue et contagieuse qui se pro- page par les racines, et le seul remède est d'isoler les arbres atteints du reste de la forêt par une tranchée circulaire ; ils sont achevés en quelques mois par les Scolytiens. On peut dire que les insectes ligni- vorês se comportent comme les Mousses et les Lichens, qui ne s'alla- chent qu'aux troncs des arbres qui commencent à s'affaiblir par la maladie ou la vieillesse, tandis que les troncs robustes conservent une écorce lisse. En France, selon notre habitude pourles questions modestes et utiles, o:] s'e-t peu occupé de cette discussion, et même elle est restée long- SCOLYTIliNS : KAVA(;t;S, RLMJiDtS, 637 temps ignorée. On s'esl contenté, en général, de la solution la plus di- recte, sans aucune observation approfondie, comme si la chose allait de soi, en admettant que lorsqu'on voit périr des arbres et qu'on y trouve des insectes lignivores, ceux-ci sont la cause immédiate du dommage. C'est ainsi qu'en 1835 on attribua au Pissodes notatus la perte des Pins de la forêt de Rouvray, au Scohjtes pygmœus celle des arbres du bois deVincennes, au Scolijtrs ?/iw/fes moyens curalifs ont très-peu de valeur, si, comme tout porte à le penser, ces insectes ne font que hâter la mort des arbres déjà faibles et malades. Le lavage des troncs à l'eau salée ou à la chaux n'a pas grand effet. On emploie à Paris depuis plusieurs années, pour guérir les Ormes des pro- menades publiques, le moyen suivant : l'écorce est enlevée à tous les points envahis par les Scolytiens. On tue ainsi les larves en les exposant à l'air, et l'on brûle toutes les écorces détachées. On couvre de goudron noir ou coaltar toutes les parties décortiquées, et l'on empêche ainsi l'évaporation de la sève j cette opération se fait en juin et juillet. Les arbres ne sont du reste sauvés que pour peu de temps; on tue bien les insectes, cause secondaire de la mort de l'arbre , mais on n'a pas obvié aux causes premières de la maladie, et celles-ci continuent à agir et amènent la destruction. La grande mortalité des arbres du bois de Vincennes avait amené, sur les indications de M. E. Robert , l'essai d'un procédé que son peu d'efticacilé a fait depuis abandonner. On dé- cortiquait les troncs par bandes longitudinales, de manière à ne con- server que certaines régions d'écorce. La sève afflue davantage dans 638 COLÉOPTËIŒ?. — SCOI.YTJEN'S. l'écorce conservée, et, disail-on, en môme temps que les Scnlyliens ne peuvent plus vivre dans les parties décortiquées, la sévc surabondante les chasse du reste de l'écorce, et les bourrelets de cicatrisation sont trop durs pour être entamés par leurs mandibules. L'expérience n'a pas justifié ces espérances. Les branches non décortiquées demeurent toujours la proie des Scolytiens, puis l'arbre s'affaiblit en raison de la décortication partielle qu'il asubje,et bientôt les Scolytiens, plus achar- nés que jamais, détruisent les parties où l'écorce a été conservée. M. E. Perris fait remarquer que la pratique contredit tout à fait cette méthode pour les Pins maritimes desLandes. Ces arbres sont entaillés par les résiniers, et l'on observe, dès qu'ils sont n:alades, que les Scolytiens et les Longicornes viennent^récisément faire leurs pontes sur les iu- tervalles garnis d'écorce et sur les bourrelets. En outre, l'aisselle des rameaux, où les fibres de liber et d'aubier se contournent d'une ma- nière comparable à celle des bourrelets de cicatrisation, sont des points très-exposés aux attaques des Scolytiens. L'étude attentive et prolongée pendant de nombreuses années, de ces forets de Pins desLandes, n'in- spire à M. E. Perris que peu deconflancc dans tous les moyens tentés par l'homme contre les insectes. On n'a que des palliatifs, et encore à la condition du concours simultané de tous les agriculteurs ou sylvicul- teurs d'un pays. Il a observé que, dans ces landes où aucune précaution n'est prise, les Tomiques et les Hylurgues sont toujours sensiblement en même nombre. Ce sont les parasites et les phénomènes atmosphériques, la sé- cheresse, la grêle, la gelée prin tanière, qui sont les grands moyens destructifs que la nature emploie pour limiter le nombre des espèces. Cependant M. E. Perris fait remarquer qu'il ne faut pas cesser de re- chercher avec sollicitude les moyens humains de détruire les insectes, et que les entomologistes seuls, par une étude attentive des mœurs et des habitudes, peuvent amener à une solution partielle ou complète de ces importants problèmes. Les moyens préventifs dont les forestiers se servent surtout contre les Scolytiens consistent à abattre dès le principe tout arbre attaqué et à enlever radicalement l'écorce, à écorcer et à carboniser les arbres ma- lades abattus, si l'on ne peut les enlever immédiatement ; enfin, à laisser des arbres-piéges destinés à recevoir la majorité des pontes et à les écorcer après. Dans l'opinion si probable que les Xylophages respectent les arbres bien portants et ne font périr que ceux dont une maladie ou un accident a affaibli l'énergie vitale, le meilleur moyen préventif estr de planter les arbres dans les meilleures conditions possibles de terrain, et de les maintenir en état de vigueur par des labours au pied, des arrosements, des fumures, des engrais liquides et, au besoin, une taille rationnelle. Il est très-important d'opérer un échenillage actif, car les chenilles, dévorant les feuilles.ou les tiges, affaiblissent l'arbre elle préparent aux ravages bien plus graves des Scolytiens. C'est ainsi SCOLYTILNS : RAVAGES, IIEMÈDES. 63y que sur les Ormes on a remarqué que les Xylophages envahissent les sujets à la suite des dommages réitérés des chenilles de deux Lépido- ptères, le Cossus Ligniporila dans le tronc et les branches, le Liparis Chrij- sorrhea sur les feuilles. En 1835, eut lieu une destruction de la plupart des arbres du bois de Vincennes, et il n'y eut pas plus de la moitié des arbres qui succombèrent qui présentèrent les traces des Scoly tiens. La cause principale du dommage fut l'extrême sécheresse de l'été, qui offrit plus de trois mois consécutifs sans pluie. On peut dire ici, surtout au sujet des arbres plantés en quinconce ou en allées, pour ombrager et embellir les parcs et promenades publics, que l'homme contribue pour une part considérable à la propagation de ses ennemis, ainsi que nous l'avons déjà vu pour les Hannetons. La destruction inconsidérée des oiseaux dans les bois voisins des grandes villes a amené la multiplica- tion des chenilles, qui affaiblissent énormément les arbres par la perte des feuilles, organes de leur respiration, et dès lors les Scolytiens par myriades détruisent les parties vitales où circule la sève. 11 faudrait in- terdire avec sévérité le dénichage et la vente pour la cage des petits passereaux. Remarquons toutefois que l'utilité des oiseaux est diminuée en ce qu'ils détruisent aussi des insectes zoophages. Pour les promenades publiques, l'homme opère sur les arbres des tailles irréfléchies. On les étête afin de les disposer en berceaux, et, par suite, on les affaiblit en les mettant hors de leurs conditions naturelles. Les taillis, où les arbres croissent en quelque sorte à leur volonté, sont toujours les parties des forêts les plus épargnées par les insectes. Les Ormes surtout aiment à croître isolés et libres dans les champs ; dès qu'on les plante en avenues et qu'on les taille pour cet usage, ils souffrent de l'afflux de sève qui résulte de la formation de nouveaux bourgeons adventifs, se couvrent d'ulcères, et bientôt sont envahis par les insectes. Les allées sablées s'opposent à la péiiétration facile des eaux pluviales dans les racines ; les feuilles tombées qu'on enlève en automne privent l'arbre d'un précieux aliment naturel. De même dans les vergers, les arbres fruitiers sont mutilés par une taille qui les amène à produire un petit nombre de gros fruits, mais qui les affaiblit et les prédispose aux attaques des insectes. Près des grandes villes, les Sco- lytiens abondent dans l'écorce des arbres, qui ne respirent qu'un air vicié par les émanations des usines et la fumée ; dans l'intérieur des villes, les fuites des conduits du gaz à éclairage imprègnent le sol de goudrons très-nuisibles aux racines, surtout pour les Ormes. Aussi on a recours pour les plantations urbaines aux essences exotiques : le Mar- ronnier d'Inde, l'Ailante, le Platane, le Robinier; car si ces arbres souf- frent comme nos végétaux indigènes des causes générales que nous venons d'indiquer, ils ne sont pas envahis, bien qu'affaiblis, par les Scolytiens européens auxquels leurs principes incrustants ne convien- nent pas, et résistent ainsi bien plus longtemps, car le pro[ire des Sco- lytiens est d'amener rapidement la mort des arbres déjà maladifs. On 660 COLÉOPTÈRES. — SCOl.YTILNS. est arrivé depuis quelques année?, pour les jardins publics et squares de la ville de Paris, à pratiquer Texcellente opération en élé, à de fré- quents intervalles, de bêcher une aire circulaire autour de chaque arbre, en relevant la lerre en petits talus à la circonférence, puis de faire un arrosage à grande eau, en couche profonde. Ce moyen de ra- viver les arbres est un remède efficace, en même temps qu'un préser- vatif contre les dévastations des Xylopbages, non pas qu'on les détruire par là s'ils existent, mais parce qu'on ralentit leur action. GENRES PRINCIPAUX. SC«I.TTrs, GeofTr. — Funicule des antennes de sept articles, massue ovoïde illoiigée. Lobe des mâclioires en fer de hactie oblique, un peu plus court que le palpe. Corps épais, peu convexe. Tôle en museau court. Corselet aussi long que les cljtres, celles-ci striées, aplaties à rexlrcmité. Jambes non denticulées au bord externe et munies d'un fort crochet à l'extrémité. Les Scolytes n'attaquent pas les bois résineux. Plusieurs espèces sont Irès-nuisibles. Ainsi l'Orme en nourrit quatre espèces: leS. dcslruotor, Oliv., le Scolyle de Geoli'roy, le plus grand, de 6 à 5 millimètres, à cor- selet noir luisant, à élytres d'un fauve rougeâtre sombre, s'attaquant ;ui 1ionc(i;l. xxxvjj], fig. la, antenne; 16, mandibule; le, mâchoire ci palpe ; i d, lèvre inférieure et palpes ; 1 e, jambe et larse antérieurs). C'est aussi dans le tronc que \it le S', mxdlistrialus, Marsh., de toute l'Europe, plus petit. On trouve dans les branches le S. Uhni, Redl.,et le S.pygmœits, Herbst, qui nuit aussi beaucoup aux Chênes. Ces quatre espèces, de teintes analogues, ont des galeries de ponte subcorlicales et longitudinales. Il en est de même pour les S. rugulosus, Knoch, et l'ritni, Ralz.j qui vivent sous les écorces des Poiriers, Pommiers, Pru- niers et Abricotiers malades. Le S. intricatits, Ralz., dévaste les Chênes «n'aiblis, établissant sous l'écorce une galerie de Jponle transversale en accolade, les galeries légèrement imprimées dans le bois. Bll'B.anGlS, Lalr. — Funicule antcnuaire de f-ix articles, massue ublongo ovale à quatre divisions nettes. Tète en museau court. Corselet ponctué, plus court que les élytres, celles-ci fortement déclives à l'extrémité. Jambes denticulées en dehors. Corps épais, cylindroïde. 'Ce genic comprend des insectes rongeujs très-nuisibles aux Coni- fères. Le plus redoutable est VH. Piniperda, Linn., de toute l'Europe e du Caucase (pi. xxxvui, fig. '2, anlcnne ; L'c, patle antérieure). 11 a près c'e 6 millimètres de long, est noiiâtre, finement pubescent, avec les clyties sou-sent fenugineuses en toltilité ou en partie. Cette espèce vit cxclufci\c'u:ciil iur les Pins,, dont elle est le llcau, ro^ageant dans le HTLURGUS, HYLESINUS. ' 641 Nord les Pins sylvestres, dans le Midi les Pins maritimes. On voit pa- raître les adultes de bonne heure , en mars dans le Nord , en janvier dans le Midi, et aussitôt ils perforent les écorces des Pins abattus ou malades, ainsi que les souches restées en terre, décelant leur présence par de petits tas de vermoulure rejetés des galeries ; souvent la résine se concrète en tube autour des trous d'entrée. Ceux-ci sont obliques, et la galerie de ponte s'étend en long sous l'écorce, sans entamer le bois, avec une petite courbe à l'entrée, puis devenant droite au-dessus et au-dessous. Le développement des larves ne devient rapide qu'en mai, et les adultes prennent leur essor en juin et au commencement de juillet. Ils trouvent moyen d'être nuisibles d'une autre manière que leurs larves. Ils cherchent un refuge et une nourriture dans les jeunes pousses de pin de l'année, et y creusent un canal en long. La jeune branche se flétrit et pend, prête à céder au vent ; on dirait des coups de ciseau donnés par ces jardiniers de la foret qui font souvent tomber les flèches du sommet des jeunes arbres. L'F. piniperda n'a qu'une gé- nération par an, ainsi qu'une espèce plus petite des mêmes arbres, VH. niinor, Hartig. Il est probable, dit M. E. Perris, que c'est là le fait général pour les genres Hylurgus et Hylesinus. Nous citerons encore VH. ligniperda, Fabr., oblong, d'un brun fauve, également très nuisible aux Pins. Tous les Xylophages des Pins trouvent pour leurs larves un ennemi acharné dans la larve du Tillus formicarius ou Thanasimus (Clériens), qui leur fait la guerre sous les écorces. HiriiESmus, Fabr. — Funicule des antennes de sept articles. Corps cylindrique ou oblongo-ovale. Les caractères de ce genre sont très-voisins du précédent. Les espèces sont nombreuses et dévastent divers arbres : ainsi H. Thuiœ, E. Perris, H. bicolor, Brullé, le Thuia; H. cittatus, Fabr., l'Orme; H. oleiperda, Fabr., de très-petite taille, 3 millimètres, le Frêne, le Lilas et l'Olivier. Cet insecte noirâtre, recouvert de poils roux, loge ses œufs dans l'écorce et l'aubier des petites branches des Oliviers. Les branches rongées se distinguent par des taches rousses, ou violacées, ou d'un gris brunâtre ; elles languissent et meurent bientôt après. En avril elles sont en outre percées de petits trous ronds par où sortent les adultes. Ces insectes, dans le midi de la France, reçoivent les noms de Ciron ou Taragnon. Ils se jettent de préférence sur les Oliviers malades, et leur présence est un indice que le sujet souffre. Il faut donc soigner l'arbre, augmen- ter sa vigueur par les labours, les engrais, les arrosages, et de plus, il faut enlever en mars toutes les branches tachées et les brûler. Les Hylésines nous offrent encore deux espèces très-nuisibles aux frênes, 177. Praxini, Fabr., detoute l'Europe et du Caucase, de 3 millimètres de long, ovale, noir, marbré de grisâtre, à pubescence cendrée, à antennes fauves ; VH. crenatus, Fabr., un peu plus grand, d'im brun de poix, à GIRARD. 41 dUl COLÉOPrÈRES. — SGOLYTIENS, élyfres profondément striées et à crénelures aiguës. F.es deux espèces dessinent sous l'écorce des galeries de jjonte transversales et en acco- lade, avec galeries de larves longitudinales. Les galeries sont admira- blement nettes, vu la dureté du bois de Frêne. Ces insectes se montrent en avril et en mai, et se jettent par myriades sur les Frênes affaiblis ou sur ceux qui sont abattus. CAMPTOt'RRUj^, Latr. — Funicule des antennes de sept articles, sans filets chez les femelles, dont les articles ont chez les mâles de longs filets grêles et aigus au côté interne, avec massue globuleuse, indivise. Corps subovale, convexe. Ces Scolytiens de l'Amérique du Sud sont remarquables par leur éclat. Le type est le C, œneipennis, de la Guyane, à corps d'un noir brillant, avec des élytres bronzées. Nous figurons les antennes de cette espèce pi. xxsviii, fig. 3, mâle ; 3 a, femelle. PHIiŒOTRIUIJS, Latr. — Corps court, trapu, cylindroïde, à pubescence héris- sée. Tête courte. Antennes à scape très-long et en massue, à funicule de cinq articles avec massue de trois articles en longues lamelles internes. Le type du genre est le P. Oleœ, Fabr. Ce petit insecte (2 millimètres environ de longueur) est noirâtre, revêtu d'un duvet grisâtre, avec an- tennes rousses. Il est représenté pi. xxxvm, (ig. Zi;/ia, antenne très- grossie; Ub, tarse antérieur. Il est probable qu'il peut vivre sur d'au- tres arbres que les Oliviers, car on l'a rencontré près de Paris, sans doute par suite d'importation, comme bien d'autres insectes. De môme que l'Hylesinus uleiperda, il se jette sur les Oliviers affaiblis, et les re- mèdes sont pareils. Il cause à ces arbres des dommages sérieux et se trouve répandu comme eux dans toute la région méditerranéenne. Il existe en Algérie. Il se loge de préférence à l'enfourcliure des branches, où les larves vivent et où la femelle perce l'écorce pour faire sa ponte. 11 découle des ouvertures pratiquées une substance gommeuse, assez semblable à de la manne. Le moindre vent fait rompre les rameaux ainsi rongés. C'est surtout avec les mortalités, lorsque les jeunes rejets encore faibles repoussent des vieilles souches, que ce Scolylien fait le plus de mal. TOMICE'N, Latr., ou BosTRlCHus, Fabr. (Nous rejetons le second nom du genre par un motif de confusion déjà expliqué.) — Corps très-cylimlrique. Tète très- ' courte et rentrée dans un corselet très- convexe en avant, couvert antérieure- ment d'aspérités ou de granulations, sans impressions latérales pour recevoir les jambes. Élytres cylindriques, plus ou moins excavées à leur extrémité, avec les bords de l'excavation dentelés. Tarses courts. Ce genre comprend les espèces lés plus nombreuses de Scolytiens, dont certaines sont fort nuisibles. Les ïomiques sont hérissés de poils TOMIGUS. 6Z|3 fins, et leur livrée varie du jaune ferrugineux au noir brunâtre assez brillant. Nous représentons (pi. x.xxvui, fig. 5) l'antenne du T. bispinus, Ralz., de France et d'Allemagne, espèce qui vit dans les tiges de Clé- matite; antenne avec scape très-long et en massue, court funicule de cinq articles, massue arrondie, avec traces de sutures arquées, ou flexueuses dans d'autres espèces. Les femelles en général diffèrent très- peu des milles; cependant, dans beaucoup d'espèces, elles sont plus al- longées et ont les élytres moins denticulées à l'extrémité. Plusieurs espèces de Tomicus s'attaquent spécialement aux arbres résineux. Nous sigalerons les suivantes, à galerie de ponte subcorticale et longitudi- nale : T. typographus, Linn., de Suède, de France, d'Allemagne, du Caucase, ayant 3 millimètres de long ; le mâle et la femelle se logent ensemble sous récorce^ en creusant une chambre nuptiale d'où par- tent les galeries de ponte, offrant des trous à air recouverts seulement de la plus fine pellicule de l'écorce ; une première éclosion d'adultes a lieu en mai, puis une seconde au bout de deux mois, dont les sujets hivernent sous la mousse et dans les crevasses du bois, pour reproduire au printemps ; cet'e espèce est exclusive aux Sapins et les attaque sur- tout à la partie supérieure de la tige, là où de fortes branches se sé- parent du slipe. On a vu des forêts entières périr sous leurs attaques, il faut enlever les chablis, les branches rompues ; écorcer les arbres malades, faire des tranchées par où circulereront l'air et la lumière, et, parfois, laissant sa part au dommage, isoler du reste de la forêt, par une large abattue circulaire, les premiers arbres atteints ; l'ennemi le plus redoutable de cette espèce est la larve du Clérien déjà cité qui dévore les Scolytiens des Conifères, et divers Draconiens et Chalcidiens (Hyménoptères). T. stenographus, Duft., de France, d'Allemagne du Tyrol, un peu plus grand que le précédent; il s'attaque aux Pins des diverses espèces ; de la chambre nuptiale partent plusieurs galeries de ponte en haut et en bas ; chacune ayant d'habitude un mâle et une femelle; les galeries des larves sont faiblement indiquées sur l'aubier il y a deux générations par an. T. Laricis, Fabr., de foute l'Europe et d'Algérie, sur les mélèzes et sur les pins ; il a 3 millimètres de long et offre trois générations dans l'année ; de la chambre nuptiale partent des galeries en haut et en bas, moins longues et beaucoup plus étroites que celles de l'espèce précédente; une seule femelle existe dans la chambre nuptiale creusée par elle et par plusieurs mâles, et chacun de ceux-ci, dit-on, creuse une galerie de ponte. T. viUosus, Fabr., nuisible aux Chênes. D'autres Tomiques font des galeries de ponte transversales, toujours sous l'écorce seulement. Nous citerons le T. curvidens, Germ., d'Alle- magne, de France, spécialement dans les forêts des Vosges, attaquant surtout le Sapin blanc, mais aussi le Sapin rouge et parfois le Pin; sa longueur est en moyenne de 2 millimètres ; ses galeries sont en acco- lade un peu oblique à partir du trou d'entrée, et celles des larves s'élè* 6&Û COLÉOPTÈRES. — SCOLYTIENS. vent verticales au-dessus et au-dessous, en serpentant ; il n'attaque que les plants maladifs et dépérissants, et est moins nuisible que les espèces précédentes; T. bicolor, Herbsl, des îles Britanniques, de Suède, de France, d'Allemagne, s'attaquant aux Chênes et aux Hêtres. Enfin, certains Tomicus, à galeries toujours sous l'écorce, ont les ga- leries de ponte en rayons autour du trou d'entrée. Tels sont les T. chal- cographus, Linn., de toute l'Europe, Aivant dans les Sapins ; T. hidens, F'abr., exclusif aux Pins des espèces du Nord et du Midi ; il ne recher- che que les jeunes sujets de 5 à 10 ans, ou les branches supérieures des arbres plus âgés; aussi sa taille est très-petite, ne dépasse pas 2 millimètres; chacune des galeries rayonnantes contient un mâle et une femelle, de sorte qu'un seul groupe de galeries renferme cinq à six ménages, avec une antichambre commune à tous; il a au moins deux générations par an; T. Saxeseni, Ratz, que M. E. Perris n'a ren- contré en France que sur l'Aulne et le Chêne, mais qui, en Allemagne, selon M. Ratzeburg, attaque aussi les arbres verts. Les derniers Tomiques que nous avons encore à mentionner entrent dans l'inférieur du bois. Le T. eurygrapfius, Erichs., pénètre dans les vieux Pins nouvellement abattus. Sa taille varie de 2 à 3 millimètres; la femelle creuse d'abord une galerie dans l'aubier, en rejetant au de- hors des petits tas de sciure blanche, puis perce une double galerie transversale se détachant de chaque côté de la galerie d'entrée ;-il n'y a qu'une seule génération dans l'année ; on trouve plusieurs larves dans la même galerie. C'est aussi ce qui arrive pour le T. monographus, Fabr., de France, d'Allemagne, d'Algérie, perçant les bois de Chêne, d'Aulne, de Peuplier. On ne trouve qu'une larve par galerie pour une autre espèce de l'intérieur du bois, le T. dispar, Fabr., du Châtaignier, du Marronnier, du Robinier ; le nom de cette espèce vient de ce que la femelle ayant la forme cylindrique ordinaire, le mâle est court, avec les élytres presque globuleuses. Le T. dryôgraphus, Erichs., perfore spécialement le bois de Chêne. Dans un genre très-voisin, le genre Xylolerus, Erichs., se trouvent deux espèces dont la première surtout est parfois fort nuisible au bois de service, c'est-à-dire à celui qui est destiné aux constructions navales, et qui a des dimensions assez fortes pour être débité en madriers et en pièces propres aux grosses charpentes de toute espèce. En avril et mai elles percent l'écorce de plusieurs trous, et entrent à plusieurs centi- mètres dans le bois, môme jusqu'au cœur dans les jeunes tiges. Il y a une seule larve par galerie, se détachant à angle droit de la galerie de ponte. Ces insectes sont noirs, à corps allongé et cylindrique, avec les élytres d'un rouge obscur et noirâtres sur les bords latéraux el la suture. I/espèce la plus nuisible est le A", domesticm^ Linn., de presque toute l'Europe, s'attaquant aux futaies d'arbres résineux, surtout aux Sapins blancs et aux Épicéas ou gros bois hollandais, de telle sorte que les arbres sont percés comme un crible ; il faut exécuter les coupes au CURCULIONIENS. 645 prcQiier printemps, un peu avant la montée de la sève, et écorcer aus- sitôt les arbres, qui se couvrent d'une couche de résine et que l'insecte n'attaque pas. La seconde espèce, un peu plus petite , le X. lineatus, Oliv., est propre aux Hêtres. PI..%TVPr§», Herbst. — Forme du corps et des élytres allongée et cylindrique. Palpes maxillaires de quatre articles. Antennes de six articles apparents, dont quatre au funicule avec massue en forme de palette compacte et tomenteuse. Tête libre du corselet, celui-ci excavé latéralement pour recevoir les cuisses antérieures. Ce genre s'écarte assez notablement des autres Scolytiens; l'Europe n'en nourrit que deux espèces ; les autres sont surtout d'Amérique et des Indes Orientales. Les larves, toujours apodes et aveugles, ne sont plus courbées comme celles des autres Scolytiens, mais cylindriques, droites, à tète plus forte et plus saillante, et avec le dernier segment abdominal tronqué obliquement et terminé par une petite épine cor- née. L'espèce la plus commune, de France, d'Allemagne et d'Algérie, qui perce dans l'intérieur du bois de (-hêne des galeries communes à plusieurs larves, est le P. cylimlrus, Fabr., de 5 à 6 millimètres, d'un brun noirâtre, à appendices roussâtres (pi. xxxviir, fig. 7, mâchoires et palpe; 7a, lèvre inférieure); les élytres sont ponctuées et fortement striées. Nous représentons en outre une espèce de la Havane, le T. Poeyi, G.-Mén., avec les élytres atténuées et prolongées à l'extrémité (pi. xxxviii, fig. 6; 6o, antenne; 6b, jambe et tarse antérieurs; Go, jambe antérieure de femelle vue en dehors). On doit remarquer que les cuisses et les jambes sont larges, et que la face externe des jambes an- térieures est pluricarénée chez les femelles; au contraire, les tarses sont giêles et à premier article aussi long que les suivants réunis. TRIBU DES CURCLLIO^IEMS OU CHARAUSOMS. La tribu des Curculioniens est une des plus naturelles de l'ordre des Coléoptères, ce qui explique les grandes difficultés qu'on éprouve ù la subdiviser. On les nomme vulgairement les Charunsons. Elle corres- pond nettement aux genres Bruchus, Attelahus et CurcuHo, de Linnteus; aux Rhinocères ou Rostricôrnes , dont C. Duméril formait au commen- cement de ce siècle la première famille de son sous-ordre des Coléoptères tétramérés; aux Charansonites de Lamarck^ aux Rhynchophores ou Porte-Becs établis plus tard par Latreille. C'est qu'en effet le caractère qui frappe immédiatement les yeux au premier aspect de ces insectes est fourni par le prolongement de leur tête en une sorte de bec, quelque- fois assez court, parfois très-long, tantôt épais, tantôt grêle, droit courbé et que Lalreille nommait probosnroHrp ,\iO\ïv le distinguer du véritable ti^O COLÉOPTÈRES, — CURCLLIONIENS. rostre des Hémiptères, organe constitué par les pièces buccales. Cepen- dant on lui donne habituellement le nom de rostre, pour abréger. Quel- quefois cette tète prolongée en bec n'offre pas de sillon latéral ou scrobe ; dans le plus grand nombre des genres existe ce scrobe destiné à loger le scape ou premier article de l'antenne, qui est généralement allongé. Les antennes sont le plus habituellement de onze à douze articles (de six à douze), parfois droites, le plus souvent coudées à partir du second article, terminées ordinairement en massue , parfois filiformes , ou épaissies en dehors, ou dentées en scie, ou même pectinées. Elles sont toujours insérées sur le rostre, à son extrémité s'il est court, vers son milieu ou près de sa base s'il est allongé. Par un balancement organi- que naturel, la tête si développée a des pièces buccales Irès-réduites ; la bouche, toujours placée à l'extrémité du rostre, ne présente d'appa- rentes au dehors que des mandibules fortes, mais courtes, comme il convient à des pièces destinées souvent à entamer des substances végé- tales dures, tandis que les mâchoires, les palpes, la lèvre inférieure, très-peu développés, restent cachés en toute ou en partie dans la cavité buccale. L'écusson très-variable , toujours petit, peut exister ou dispa- raître. Le corselet est en général beaucoup plus étroit que les élytres, qui, le plus souvent, recouvrent complètement l'abdomen; celui-ci offre en dessous cinq segments. Les tarses, qui terminent des pattes ordinairement très-robustes et assez courtes, ont presque toujours quatre articles à tous les membres, très-rarement cinq, et leur pénultième ar- ticle est habituellement bilobé. Le corps est, dans la grande majorité des cas, renflé et trapu, sa forme pouvant varier au reste depuis un aspect allongé et presque linéaire jusqu a l'état ovoïde et même globu- leux ; il est tantôt ailé, tantôt aptère, avec des élytres parfois soudées. Les hanches antérieures ont toujours leurs cavités cotyloïdes fermées en arrière. Les Curculioniens vivent de végétaux sous leurs deux états actifs. On rencontre les adultes sur les fleurs, les feuilles, les tiges, quelques-uns sous les écorces; d'autres dans les endroits sablonneux, plusieurs sur les murailles, certains sous les pierres, etc. Ces derniers, qui vivent ainsi sur le sol, sont habituellement aptères et à élytres soudées, et ce sont eux qui ont les téguments les plus durs, au point qu'on a souvent beau- coup de peine à les percer d'une épingle pour les mettre en collection. La résistance des téguments et des élytres recouvrant tout l'abdomea paraissant le moyen de défense le plus certain de tous les Curculioniens qui sont peu agiles, surtout sur les surfaces planes, mais grimpent avec vitesse et surtout se cramponnent très-fortement aux végétaux; ceux qui possèdent des ailes s'en servent peu. Les couleurs de ces insectes varient beaucoup, avec un corps tantôt poilu, tantôt glabre; beaucoup n'ont que des teiutes sombres, grises, brunâtres, noirâtres, il en est qui étincellent de couleurs métalliques, ou uniformes, ou relevées par des dessins. Il en est, dans les genres exotiques surtout, qui sont ornés de CURCULIONIENS. àkl splendidps nuances dues à des écailles qui peuvent s'enlever, el qui sont analogues à celles des ailes des Papillons ; sous ces écailles sont des téguments lisses et ternes; mais, grâce à elles, on voit les plus splendides combinaisons : ainsi des gouttes d'or sur fond vert, des gouttes d'argent sur azur. En outre, beaucoup de Curculioniens laissent suin- ter une efflorescence qui se renouvelle pendant la vie, si on l'enlève, et ressemblent aux enduits cireux des prunes, aux sécrétions de cer- tains Pucerons. Il est Irés-important pour les collectionneurs d'avoir, les Curculioniens récemment éclos et non frottés. Leur taille varie beaucoup , depuis certaines gigantesques Calandres des pays chauds jusqu'aux si minimes Apions qu'on ne peut conserver que sur carte ou paillette de mica. Les Charansons n'ont d'autre défense que de se lais- ser tomber quand on veut les saisir, et de se cacher dans les herbes ou dans les interstices du sol, en simulant la mort pendant quelques instants et en retirant leurs pattes. Leur organisation interne a été étudiée par L. Dufour. Leur tube di^ gestif est a>sez allongé, comme chez tous les iusectes phytophages. Chez les Orthocôres (voyez plus loin pour ces mots) il est moins long que chez les Gonatocères, et les premiers n'auraient que deux canaux de Malpiglii, tandis qu'il en existerait six chez les seconds. Les résultats ne sont pas généraux, et de nouvelles études sont nécerssaires. Les Curculioniens se rencontrent dans toutes les contrées, avec prédo- minance dans les régions chaudes, surtout en Amérique et principa- lement l'Amérique du Sud; ils sont le plus souvent solitaires, mais certains, comme les Apions , se pressent sur la même plante les uns contre les autres, en sociétés nombreuses. Les horticulteurs qui ont sou- vent à se plaindre des Charansons leur ont donné des noms vulgaires qui varient d'une province à l'autre ; les plus usités pour les localités du voisinage de Paris sont ceux de Lisette, Bécare, Bêche, Becmare, etc. Si quelques Curculioniens adyltes sont nuisibles aux végétaux, c'est surtout à l'état de larves qu'ils sont souvent de désastreux fléaux pour les champs, les jardins, les bois, les amas de céréales; malheureusement on n'a contre eux que fort peu de moyens de préservation. Toutes les parties des plantes sont sujettes aux atteintes de ces larves. Il en est qui vivent à découvert sur les feuilles {Hijpera ou Phytonoiuua , Conia- tus, etc.), et qui sont alors colorées, le plus souvent d'un verdâtre pâle ou jaunâtres. Elles progressent au moyen des mamelons inférieurs la- téraux de leur corps et par un segment anal, gros et charnu, pseudopode. Elles sont très-solidement fixées sur les parties des plantes qu'elles ha bitent, au point de résister aux coups de vent les plus violents. On ad- met d'ordinaire que leurs mamelons laissent suinter une humeur vis- queuse qui les fait adhérer au plan de position. Selon M. Goureau, elles marchent et se maintiennent sur ce plan au moyen de ventouses des mamelons pseudopodes inférieurs. _ Au terme de leur croissance elles se tissent un cocon rond ou ovale à l'aide d'une matière visqueuse qui bZl.S COLÉOPTÈRES. — CUHCULIONIENS. est, selon M. E. Perds, la même que celle qui servait à leur adhésion, ot qui proviendrait, selon quelques auteurs, de glandes salivaires in- ternes 6^ d'une tilière buccale. Tantôt les coques sont faites d'un feu- trage compacte de iils entremêlés en tous sens, tantôt d'un réseau à mailles d'inégale grosseur ; le tissu est toujours assez transparent pour laisser voir l'insecte à l'intérieur, et reconnaître s'il est larve, nymphe ou adulte. Deux ou trois jours après la confection du cocon la larve ■ devient nymphe, et celle-ci, au bout de dix à vingt jours, suivant les espèces, se change en insecte parfait qui sort de son enveloppe protec- trice en pratiquant un trou à l'une de ses extrémités. La plupart des larves de Curculioniens vivent à l'intérieur des plantes ou au moins cachées à la lumière; elles sont alors molles, d'un blanc laiteux ou jaunâtre. 11 en est qui se cachent dans les feuilles roulées en cornet {Rhynchites), ou les minent entre leurs deux épidermes {Or- chestes, Brachonyx) ; certaines vivent dans les boutons qu'elles font avorter en dévorant les organes reproducteurs (Anthonomus) ; celles d'un très-grand nombre de genres {Balaninus, Catandra, etc.) rongent les fruits dans leur intérieur, en respectant l'enveloppe, de sorte que leur présence n'est pas soupçonnée ; beaucoup de larves se trouvent dans les tiges herbacées (^pton, Lixus, etc.), parfois avec des renfle- ments galliformes, ou sous les écorces {Hylobius, Pissodes,e[c.), ou dans le bois {Anthribus, Cryptorhynchus.elc), ou dans la moelle (^pïon, Lixus, Gymnetron, Ceutorhynchus , etc.). Enfin, les racines peuvent être ron- gées à leur surface (OhoWii/nc/ius), dans leur intérieur (Ceu/or%nc/iU5, Calandra, etc.), ou en les déformant par des protubérances (Baridius) contenant les larves. Les Charansons des lieux arides et sablonneux vivent de racines. Les larves des Curculioniens sont d'un type plus dégradé encore que celui des larves des Scarabéiens, et pareil à celui des larves des anciens Xylophages et particulièrement; de celles de la tribu des Scolytiens, si funestes aux arbres. TJn caractère important de mœurs plutôt que de conformation les sépare ; les galeries creusées par les larves de Curcu- lioniens sont irrégulières en tous sens, sans plan préconçu instinctive- ment, tandis que celles tracées par les larves des Scolytiens affectent des dessins déterminés et même spécifiques. Nous ne pouvons exposer que les caractères les plus généraux de ces larves; leur corps est le plus souvent recourbé et un peu atténué en arrière, la tête cornée, munie de mandibules brunâtres, courtes et robustes, souvent obtusément den- tées au bout, de mâchoires arrondies et ciliées, avec palpes de deux ou trois articles, d'une lèvre inférieure éçhancrée, avec palpe bi-articulé. Les antennes sont presque toujours un tubercule rudimentaire portant une soie. Ces larves sont d'habitude aveugles, ce qui se comprend par leur vie dans des galeries obscures ; celles qui vivent à découvert ont un petit nombre d'ocelles, trois, deux ou un de chaque côté. Les trois anneaux du thorax se distinguent à peine des neuf segments de Tab- CURCULIONIENS. %!i9 tlomen, dont le dernier est presque toujours arrondi e( sans pseudo- pode. A part les larves se rattachant au type du genre Ânthribus et quel- ques autres larves où existent des rudiments de pattes au thorax, en forme de tubercules calleux sétigères, la progression ne s'effectue d'or- dinaire que par des mamelons disposés en séries sur les côtés des divers segments et entourés de poils; il y a, selon la loi commune, une paire de stigmates prothoraciques et huit paires abdominales, portées par les anneaux h à 11. La nymphe n'offre rien de particulier, disent les au- teurs. Il y aurait un grand intérêt à rechercher anatomiquement com- ment la tète courte et ronde de la larve se transforme en un rostre par- fois si long et si grêle, et comment se développent les antennes et les yeux. Les Curculioniens forment une des tribus les plus nombreuses en es- pèces de tout le règne animal et ne peuvent se comparer sous ce rapport qu'à certaines tribus de l'ordre si mal connu des Diptères. Schœnherr (1833 — 18/i5) en décrivit ou indiqua plus de 7000 espèces, et, en 1865, M. H. Jekel, un des entomologistes qui ont le plus étudié les Curculio- niens, évalue le nombre des espèces des collections décrites, nominales ou inédites, à 25000, ce qui permet, si l'on songe combien de contrées sont encore peu explorées, de fixer le nombre 30 000, comme celui des espèces de celte tribu dans la création actuelle. Le catalogue Gem- minger-Harold (i«71) indique dans les Curculionides propres aciuelle- ment décrits plus de 10 000 espèces. Les classificateurs se sont donné beaucoup de peine pour introduire un peu d'ordre dans une telle exubérance de la vie, et l'on peut dire que, s'ils ont médiocrement réussi, la faute en est surtout à la confusion des caractères chez des êtres rendus subsimilaires par l'analogie des conditions d'existence, tant est intime et forcée la liaison des organes et des mœurs. Bien que nous ayons fort peu de goût pour tout ce qui touche aux divisions et subdivisions des entomologistes, il est indispensable ici de dire en quel- ques mots, avec le moins possible de termes techniques, comment les principaux auteurs ont compris le groupement des Curculioniens; nous épargnerons par là aux lecteurs de longues et pénibles recherches, en leur donnant la clef des divergences de classification, afin de leur per- mettre, s'ils veulent se livrer à une étude approfondie, de faire concor- der les grands ouvrages entrepris à ce sujet. Dès l'origine on reconnut qu'on pouvait séparer les Curculioniens en deux groupes, suivant qu'ils ont les antennes droites : d'où les genres lhuchus,Attelabus, Linn.; ou coudées : (kircuiio, Linn. Les anciens au- teurs créèrent encore dans les premiers les genres Rhinomacer, Geoffr., Rhijnchites et Ainun, Herbst., Anthribus et Brmtlnis, Fabr., Ramphus, Clairv.; et dans les seconds les genres Bracliycerus et Lixus, Fabr., Ca- landra et Cossonus, Clairv. Tout au commencement du siècle, C. Duméril, dans sa Zoologie ana- lytique [1199), donne un tableau des genres de ses Rhinocères, dans le- 650 COLÉOPTÈRES. — GURGULIONIENS. quel il se sert partiellement du caractère anteunaire, et établit la série des genres : Raraphe , Orchestes , Lixe , Charanson (genres actuels Ca~ landra et bien d'autres), Brachycère, Attelabe, Anthribe , Oxystome (syn. des Apions), Bruche, Brenthe et Becmare (syn. de Rhinumacer). Germar (1818 à 1826) est le premier, parmi les entomologistes moder- nes, qui revisa et compléta l'étude des Curculioniens, précédant ainsi un auteur suédois, Schœnherr, qui leur consacra trente ans de sa vie, et dont le dernier travail est un véritable monument élevé aux Charan- sons {Gênera et species Curculioniduin, Parisiis, 1833-18Z|5, 8 vol. in-8°). Nous remarquerons en passant que cet ouvrage, composé par un col- lectionneur exclusif et dominé par une préoccupation constante, décrit les plus minutieux détails des Curculioniens adultes, sans un seul mot sur leurs métamorphoses, leurs mœurs, les végétaux dont ils se nour- rissent, leurs ravages. lia eu soin toutefois d'indiquer la distribution géographiqiie. Schœnherr, reprenant les deux grandes divisions des anciens auteurs, sépare ses insectes en Orthocères (les Recticornes de Latreille) et Gonatocères(Fracticornes, Latr.). Les premiers sont subdi- visés en familles dominées par les genres Briichus, Anthribus, Âltelabus, Rhinomacer, Apion, Ramphus, Brenthus. Les seconds sont plus nombreux, et Schœnherr a adopté pour eux une subdivision indiquée par Latreille, et qui remonte à Linnceus, selon la grandeur de leur rostre ; il n'a fait que changer en noms grecs les noms latins. Ses Brachyrhynques ou Brévirostres comprennent, comme types fondamentaux, les genres Brachijcerus, Brachyderes, Cleonus, Byrsops, Oliorkynclms, et dans ses Mécorhynques ou Longirostres sont tous les Charansons groupés autour des genres Erirltinus, Cryptorhynclius , Cionus , Calandra, Cossonus et Dryophthorus. Ce qui montre bien toute la difficulté d'établir des groupes dans cette tribu si naturelle, ce sont les divergences dans lesquelles tombent les auteurs contemporains de Schœnherr ou ceux qui le suivent. M. E. Blanchard (i8/i5) conserve les groupes fondamentaux de Schœnherr et dans le même ordre, sans indiquer la division en antennes droites ou coudées; ses Curculioniens sont placés entre deux tribus démembrées des anciens Xylophages, les Bostrichiens (nos Apaliens) et les Scolytiens. Jacquelin du Val conserve aussi, a\ec peu de modifications, la classifi- cation de Schœnherr {Gênera des Colécpt., 1855), et il en est de même de M. K. Desmarest {Coléopt. EncycL, Chenu, 1860, b^ vol.). L'homogénéité du régime, nous l'avons déjà dit, produit les grandes ressemblances qu'olfrent les Coléoptères tétramères ou plutôt subpen- 'tamères (M. Westwood), car le quatrième article des tarses normaux subsiste d'ordinaire en vestige (complet chez les Dryophthorus, tout à fait mil au contraire chez la plupart des Brachycerm); de là de conti- nuels désaccords chez les auteurs. Ainsi, parmi les entomologistes voués à l'études des seuls Coléoptères européens, M. Redtenbacher établit, dan? le grand groupo qui nous occupe, trois subdivisions d'égale valeur : CURCULIONIENS. 651 les Bnuhes (y compris les genres groupés autour de Anthribus et de Bhinumacer), les Charansons (avec les Brenthes) et les Scolytes; Schaum (1862) érige en familles les lîruches, les Charansons (avec lesquels il comprend les Anthribes), les Scolytes et les Brenthes, et Erichson ne sépare pas les Scolytiens des Curculioniens. M. Grenier (Calai des Co- léopt. de France, Paris, 1863) reproduit à trc-s-peu près la série des genres de M. E. Blanchard, c'est-à-dire l'ordre suivi par Schœnherr, sans indi- quer une division en deux légions, selon la forme des antennes, ne trou- vant pas, sans doute, la séparation assez tranchée pour certains genres. Lacordaire (1863 — 1866) a pensé devoir rejeter tout groupement fondé sur les antennes et sur le rostre. Il sépare d'abord tout à fait des Curculioniens les genres associés aux types Brenthus, Briichvs et Anthri- bus (ces deux derniers distingués surtout par la présence du labre), et les Scolytiens. Il déclare contraire aux affinités naturelles le groupe- ment antennaire, et reconnaît, avec Herbst, qu'il est impossible d'éta- blir une séparation précise entre les espèces brévirostres et longirostres. C'est là, je crois, malheureusement ce qu'on peut reprocher à toutes les classifications que ce soit, pour peu qu'on s'adresse à un groupe vrai- ment naturel ; c'est une difficulté insoluble tenant à l'essence même des choses. Lacordaire, suivi par M. de Marseul, a donné la préférence à deux caractères qui sont moins commodes à vérifier par la petitesse des organes et de la plupart des sujets que les précédents pour les entomo- logistes qui débutent ; ce n'est pas une objection au point de vue de la philosophie de la science, car réellement ils offrent une distinction plus précise que ceux adoptés par Schœnherr ; mais cela constitue un in- convénient grave pour notre ouvrage qui n'est nullement destiné aux spécialistes et nous empêchera de les adopter. Lacordaire établit chez les Curculioniens deux légions : la première, sous le nom d'Adélognathes, comprend tous les genres dont les mâchoires sont en totalité ou en ma- jeure partie (ceci laisse encore de Titidécision) cachées par le menton, et dont les principaux sont les genres Brachyderes , Naupactus, Cijphus, Otiorhynckus , Phyllobius, Brachycerus , etc. La seconde légion, bien plus nombreuse, les Fhanérognathes , est formée par les Charansons, chez lesquels les mûchoires sont tout à fait à découvert, et leurs genres fondamentaux sont les suivants : Byrsops, Htjpera ou Pliytonomus , Cleo- nus, Lixus, Hijlobius, Pissodes, Bayous, Brachonyx, Apion, Attrlabus, Rhi- nomacer , Maydalinus , Balaninus , Anthonomus, Orchestes, Cionus, Bari- dius, Cryptorhijnchus , Acalles, Rhamphus , Ceutorhynchus , Gxjmnetron, Calandra ou Sitophilus, Cossonus. Il y a là des genres à antennes droites ou coudées ; cette classification prend pourpoint de départ un seul caractère, comme celle de Schœn- herr, et peut aussi par cela même dissocier des affinités naturelles. On arriverait, dit Capiomont [Aîih. Soc. ent. de France, 1867, p. 1^1), à des divisions plus naturelles en groupant les Curculioniens d'après l'en- semble de leur organisation extérieure ; c'est là le rêve idéal de toutes 652 COLÉOPTÈRES. — CURCULIONIENS. 1rs classificaliQiis, qui demeureront toujours forcément plus ou moins artificielles. M. H. Jekel n'a pas suivi les idées de Lacordaire, et a beaucoup plus diminué encore le nombre des Charansons vrais, il partage les Sub- pentamères Rhyncbophores en huit familles d'égale valeur ; sept se groupent autour des genres Bruchus, Anthribus, Attelabus, Calandra, Cossonus, Scolytus et Brenthus, et, avec tous les insectes qui ne rentrent pas dans ces types, il forme les Curculionides vrais, en n'y admettant qu'à l'état de familles aberrantes les genres formés d'espèces épigées des types des Brachycerus, Byrsops et Amycterus. Pour les autres, géné- ralement épiphytes, il les partage en trois grandes sections. Dans la première, les femelles ont de plus grandes dimensions que les mâles ; dans la seconde, les deuv sexes sont sensiblement égaux sous ce rap- port ; enfin, le troisième groupe offre des mâles supérieurs en taille aux femelles, ou au moins égaux. Cette classification, fondée sur les caractères sexuels, est compliquée, exige la connaissance des deux sexes " des sujets, pour les trois divisions ei aussi pour leurs subdivisions, et n'ofl're pas une séparation nette entre les second et troisième groupes, ni entre les groupes plus détaillés ; en outre, M. H. Jekel semble affec- tionner les mots techniques, et fon travail est certainement d'une lec- ture ardue qu'on ne doit pas recomniancler aux débutants. Le travail de cet habile spécialiste est toutefois important à consulter pour les lecteurs d'une instruction approfondie dans l'étude des Coléoptères [Ann. Soc. ent. Fr., 186/i, p. 537-5S6). Un autre travail de cet auteur bon à consulter est son Catalogus, en latin, des genres et espèces de Schœnherr (Paris, 18Zi9). Nous suivrons à peu près l'ordre adopté par M. E. Blanchard, et avec toute l'extension qu'il donne aux Curculioniens, sans autre prétention que d'offrir surtout l'exposition des genres les plus tranchés et l'indi- cation des espèces les plus nuisibles, avec les moyens proposés pour re- médier à leurs ravages, faisant passer les applications utiles avant toute théorie scientifique, et évitant avec soin les difficultés propres à décou- rager quand on les aborde au début des études. I. — ORTHOCÈRKS ou RECTICORNES. Anlenues non coudées au second article; parfois pas de sillon la- léral. ,KRUCHU§>, Linn. — Tète penchée, terminée par un bec court et large sans scrobes. Antennes de onze articles, déprimées, dentées en scie ou pectinées, insérées devant des yeux grands, convexes, réniformes ou en fer à cheval. Éiytres laissant à découvert le dernier arceau abdominal ou pygidium. 1.05 Bruclies, par leur museau le' plus court que présentent les Cur- culioniens, et par le développement de leurs pièces buccales, se rappro- OllIHOCÈKES. — BRUCHUS. 653 chent notablement de la tribu des Chrysoméliens. A l'état adulte on les reconnaît à leur corps court, à leur rostre très-peu saillant, à leurs teintes ternes, souvent duveteuses ; on les trouve sur les fleurs et les feuilles des plantes attaquées par leurs larves, ou dans le voisinage, et il en est qui hivernent dans la mousse et les fentes des écorces. Les larves sont ou aveugles ou parfois à stemmates, apodes pour les espèces d'Europe, courtes, charnues, blanches et glabres, à antennes de deux articles, le dernier sétiforme, avec bourrelets transversaux aux segments de l'abdomen et du thorax, et les stigmates portés sur des mamelons latéraux ; on signale des pattes très-courtes chez les larves des grandes espèces exotiques qui paraisssent rechercher les fruits à enveloppe ligneuse de divers arbres de la famille des Palmiers. En Eu- rope, les larves connues des Bruchus vivent dans les graines des Légumi- neuses. La femelle pond à la surface des gousses encore jeunes et ten- dres, dans lesquelles les petites larves entrent aisément pour aller se loger à l'intérieur des graines. Le plus souvent, après s'être nourries des cotylédons, elles se changent en nymphes, sans précaution spéciale, dans l'intérieur de la graine. L'insecte parfait perce une pellicule mé- nagée d'avance par la larve en un point de la graine, et ne sort, dans nos climats, qu'au printemps, après avoir passé l'hiver dans la graine, si la saison est trop avancée; aussi ces insectes sont sujets à être trans- portés au loin par l'homme avec les graines, et la Bruche des pois est devenue cosmopolite de cette façon ; parfois certaines espèces ont des larves qui sortent des graines pour la nymphose, en s'enveloppant d'un cocon formé en partie de leurs excréments, habitude qui rappelle cer- taines larves de Chrysoméliens. Ceux de ces insectes qui vivent des graines de nos Légumineuses potagères sont désignés par les grainetiers et épiciers sous le nom absurde de Pucerons. Le B. /'/s^■, Linn., de France, d'Allemagne, de l'Espagne méridionale, d'Algérie et du Caucase, vit dans les Pois de toutes variétés. Long de 5 millimètres, il est noir, mais paraît gris par suite d'un duvet blan- châtre, a les élytres variées de blanc, et l'extrémité visible de l'abdo- men blanche avec deux points noirs. Ordinairement il n'y a qu'une larve par pois, et l'on reconnaît la sortie de l'insecte à un trou rond dont la graine est percée ; quand il est encore dans le pois, on voit un cercle un peu plus foncé qui indique la sortie future alors qu'il aura rongé la pellicule. Quand les pois doivent servir pour purée, on conseille, pour détruire les Bruches, de chauffer la graine au four vers 60°; mais on n'en mange pas moins les débris d'insectes ; au reste, on avale au prin- temps dans les pois verts un nombre énorme de très-jeunes larves : l'adulte vit depuis le printemps où il éclot jusqu'en juillet. En jetant les pois pour semence dans l'eau, on voit d'habitude surnager ceux qui sont atteints. 11 est bon de ne pas les semer, car ils lèvent d'habitude comme les autres, la larve respectant à l'ordinaire l'embryon ; mais le jardin est alors infesté pour l'avenir. Les Lentilles, cultivées dans toute 65/i COLÉOPTÈRES. — CURGULIONIENS. la moitié méridionale de la France, sont attaquées encore plus que les pois par diverses espèces de Bruches, de taille bien plus petite que la Bruche du Pois, en général d'un gris jaunâtre varié de noir et de blanc, par effets de pubescence. Parfois certaines localités sont tellement ra- vagées qu'on n'a d'anire moyen de détruire les Bruches que d'in'errom- pre pendant plusieurs années la culture des Lentilles. Dans les lentilles qu'on mange en automne ou à l'entrée de l'hiver existent très-souvent des larves dont on ne soupçonne pas l'existence et qui se mêlent par la cuisson à la purée de lentilles ; vers le carême, au contraire, les adultes sont éclos, et l'on voit leurs petits corps noirs quand on écrase les Len- tilles et on les sent craquer sous les dents. Je puis citer au moins quatre espèces vivant dans les lentilles : B. Lentis, Bohm. , de France, d'Alle- magne, d'Italie, d'Egypte; d'après M. Heeger, quand la larve a con- sommé une lentille, si la môme gousse ne lui en fournit pas une se- conde à sa convenance, elle se laisse tomber le soir à terre, rampe sur le sol , privée de pattes, à l'aide de ses mandibules , puis atteint une nouvelle gousse où elle trouve la seconde lentille nécessaire à son dé- veloppement complet. A cette espèce il faut ajouter B. pallidicornis, Bohm., à antennes d'un jaune testacé, du midi de la France, d'Espagne, de Dalmatie , et entin deux espèces du midi de la France , B. tristis, Bohm., et B. Ulicis, Muls. : cette dernière espèce prise en abondance par M. Grenier dans les champs de Lentilles. Le B. tristis attaque aussi le Pois chiche ou Garvance, cultivé dans le midi de la France et en Espagne, et très-estimé pour les purées. La Fève est rongée par une Bruche plus grosse que celles des Lentilles, presque aussi forte en taille que la Bruche des Pois, c'est le B. rufiinanus, Bohm., de toute l'Europe et du nord de l'Afrique, de à millimètres, à pu- bescence gris jaunrdre, avec point blanc au corselet. Comme la Fève est une graine très-volumineuse, chacune sert souvent de refuge et de nourriture à deux Bruches. Nous citerons encore, parmi les très-nom- breuses espèces du genre Bruchus,\es B. fiavimanus, Bohm., ou afpnis, Frœhl., qui vit dans le sud de la France dans la Gesse ou Pois vivace; B. Viciœ, Oliv., et B. nubilus, Bohm., de 2 millimètres 1/2, noir, à pu- bescence blanche, de France, d'Allemagne, d'Espagne, de Russie mé- ridionale, attaquant toutes deux la Vesce, mais ne faisant tort qu'aux semences et non aux fourrages : B. mar(jindlus, Fabr., de France, d'Al- lemagne, de Russie méridionale (pi. xlviii, tig. 1; If/, tête vue en des- sus et antenne). M. E. Blanchard a fait connaître, sous ses divers états, une grande espèce exotique de Bruciius à cuisses postérieures très-ren- fljées (du sous-genre Pachymerus de certains auteurs), venant de Mada- gascar dans des graines de Pandanus, d'où son nom de B. PanJani. Elle fut étudiée sous ses trois états; elle est entièrement grisâtre et longue de 5 à 6 millimètres ; plusieurs individus habitent souvent la même graine. ORTHOCÈRES. — ANTHRIBUS, BRACHYTARSUS, CHORAGUS. 655 ;%!l'THKlBU!i», Geoffr, — Rostre élargi, muni de scrobes. Antennes droites, de onze articles, terminées par une massue allongée de trois. Tarses de quatre articles, le troisième très-petit et enfoui entre les lobes du second. Ces insectes et ceux des genres analogues sont à corps oblong et poilu , à livrée assez sombre, assez souvent uniforme ou à taches nuageuses. On le? trouve sur le bois mort, les troncs pourris des vieux arbres, les Champignons ligneux, plus rarement sur les feuilles et les fleurs. Le type est r^.a/6mws, Linn., de toute l'Europe, sur le Châtaignier, l'Orme, le Saule, le Rouleau. Sa larve, aveugle, à pattes très-courtes, vit dans les branches. Bn.%CHVTAnjs>iIJ*^, Schœnh. — Caractères analogues. Pattes courtes, robustes, larges. La livrée des espèces consiste en une marqueterie due à de petites taches noires sur un fond variable. Nous citons ce genre à cause des mœurs curieuses et exceptionnelles de ses larves aveugles, munies seu- lement de pseudopodes thoraciques très-contractiles ; on les trouve dans les coques qui sont la peau desséchée des Cocciis femelles (Hémipt.), sans qu'on sache au juste si elles ont vécu en parasites de la substance de l'insecte, ou si elles s'emparent de la dépouille, comme d'un abri, après la mort du Coccus et la dispersion de sa ponte. On doit citer les B. scabrosus, Fabr., et varius, Fabr., de presque toute l'Europe. Le premier, de 3 à Zi millimètres, a les élytres d'un brun rouge, tachetées de blanc et de noir ; le second, de 2 millimètres 1/2, est noir, à élytres tachetées de gris. Les Brachytarses ont le corps épais, très-convexe, as- sez court, à tarses larges, cà élytres subcarrées, souvent munies de côtes. CHOR.tGUi», Kirby. — Cuisses très-épaissies, en massue, propres au saut. Le type est le C. Sheppardi, Kirby, d'Angleterre, de France, d'Alle- magne et d'Italie. Les larves, aveugles et apodes, rongent, d'après L. Dufour, l'intérieur des tiges mortes de l'Aubépine, et les adultes se trouvent sur les branches du même arbuste, et sautent vivement pour fuir la main qui tend à. les saisir ; on les trouve aussi sur l'Aulne et sous les écorces des arbres fruitiers. Nous représentons cet insecte dans la seconde planche des Chrysoméliens (fîg. 11; lia, tête). STEliOCÉRU!"*, Schœnh. — Rostre plus long que la tète, élargi et situé en avant. Antennes grêles, de onze articles, les trois derniers en massue allongée et lâche. Yeux très-grands, convexes, oblongo-ovales. Corps massif, oblong, pubescent. Nous figurons le S. Garnoti , Boisduval , de la Nouvelle -Guinée (pi. xr.vm, tig. 'ô; oa, tète grossie vue en dessus; 3 h, antenne; 3c, tarse 656 COLÉOPTÈRES. — CURCLLIONIENS. antérieur, avec le troisième article enfoui). Selon Lacordaire, celte espèce devrait fornaer un genre nouveau, afin de ne laisser dans le genre Stenocerus que des espèces américaines répandues du Brésil au Mexique. RHYllCUlTEm, Herbst. — Tête allongée, subcylindrique, avec rostre tantôt long filiforme et un peu arqué, tantôt médiocre ou court, robuste, parfois un peu dilaté au sommet. Antennes terminées en massue allongée. Élytres plus larges que le corselet, presque carrées, arrondies chacune au sommet, un peu déhiscentes et laissant plus ou moins à découvert le dernier segment abdo- minal (1). Ce genre, de 75 espèces de tous pays, sauf de l'Australie, comprend en Europe de nombreuses espèces, dont les adultes fréquentent de pré- férence les feuilles et les fleurs des arbustes. Ils ont des couleurs uni- formes et d'un éclat métallique : bleues, vertes, cuivreuses, dorées, etc. Certaines espèces sont fort nuisibles et partagent, avec d'autres Curcu- lioniens à long bec, les noms de Lisette, Bêche, liecmare, Hécare, etc., que leur donnent les agriculteurs et les jardiniers. Un certain nombre d'espèces s'attaquent aux feuilles des arbres et les roule en cornet, non en cylindre. Tels sont le R. Betulœ, Linn.. de toute l'Europe, d'un noir bleuâtre, vivant sur l'Aulne, le Charme, le Bouleau, le Hêtre; le R. Populi, Linn., de France, d'Allemagne, du sud de la Russie, d'un vert bronzé avec riche reflet pourpre, se trouve sur les Peupliers et les Trembles; le R betuleti, Fabr., ou Alni, MûU., ou viridis, Fourc, de toute l'Europe, de 5 à 6 millimètres, très-redouté des viticulteurs sous les noms d'Urbec, Diableau, Velours-vert; le mâle est vert, la femelle verte ou bleue ; celle femelle roule les feuilles de Vigne et y fait des piqûres où elle dépose ses œufs; puis elle coupe en partie le pétiole de ces feuilles, de façon à arrêler la sève, afin de permettre aux petites larves de mordre plus aisément les feuilles roulées , atten- dries, à demi mortifiées ; les rouleaux flétris finissent par tomber sur le sol, alors que les larves à toute leur croissance les quittent pour se changer en nymphes dans la terre ; une partie des adultes sortent en automne, et les autres n'éclosent qu'au printemps suivant. Cette espèce se trouve aussi sur les Poiriers, les Bouleaux et les Hêtres, et roule les feuilles de la même manière ; sur les grands arbres elle ne produit que peu de dommages, à cause du nombre considérable de leurs feuilles. Les mœurs des Curculioniens rouleurs de feuilles donnent les moyens de les détruire, en particulier pour l'espèce actuelle. L'insecte est très- timide, tombe au moindre choc, les pattes pliées, faisant le mort. Ou étend des linges sous les ceps ou au pied des treilles ; on secoue les branches, on ramasse les adultes. On coupe en juin les feuilles en cor- net contenant les œufs et les larves, et l'on a soin, non pas do les laisser (1) Moriogr. par M. besbrochers des Loges, Abeille, V, 1868, p, 317. ORTHOCÈRES. — RHYNCHITES. 657 sur le sol, ce qui ne détruirait rien, mais de les livrer aux flammes vengeresses. Dans les vergers se frou^ve un très-pelit Rhynchite, bien connu des jardiniers sous le nom de Coupe-bourgeons. Il appartient à un autre groupe par ses mœurs. Les femelles, dans ce groupe, piquent les bourgeons réservés pour donner des fruits, et y pondent, en y faisant un petit Irou oblique avec leur rostre armé à l'exlrémité de deux petites dents agissant comme des ciseaux. Puis, après avoir percé autant de bourgeons qu'il y a d'œufs à pondre, elles descendent un peu sur le rameau et le coupent circulairement aux trois quarts avec les mandi- bules aussi nettement qu'avec un couteau. On a prétendu que ces in- sectes ont enseigné aux arboriculteurs le pincement des arbres fruitiers. La sève s'arrête, la petite branche pend, noire et desséchée, puis tombe sur le sol, et la larve conlinue à ronger le bois pourri, puis se change en nymphe dans une petite coque terreuse. Certains adultes éclosent en septembre, mais la plupart seulement au printemps suivant. C'est le petit R. conicus, lllig., long de 3 à Zi millimètres, y compris le bec, qui produit sur les jeunes Poiriers les rameaux flétris qu'on voit pendre eu mai et juin ; il s'attaque aussi aux Pommiers, Pruniers, Abricotiers, même à l'Aubépine; vole aisément d'un arbre à l'autre, comme tous les Rhynchites nuisibles ; est d'un bleu foncé et tombe sur le sol au moindre choc. Il faut enlever en mai et juin les rameaux flétris tous les deux ou trois jours et les brûler. La même espèce se nomme encore R. Icosan- driœ, Scop., ou R. AlUariœ, Fabr., d'un bleu violet, pubescent, à élytres ponctuées : c'est le Becmare bleu à poils de Geoffroy, qui se trouve dans toute l'Europe. La construction des cônes ou des cylindres de feuilles enroulées de plusieurs Rhynchites indigènes a été décrite en détail par P. Huber {Mém. Soc. phys. et hist. nalur. de Genève, 1839, t. VIII, p. /i55). Il est d'autres Rhynchites dont la femelle perce les jeunes fruits, y dépose un œuf, puis entaille le pédoncule, de sorte que bientôt le fruit se détache et tombe. C'est ainsi qu'on trouve en France et dans une partie de l'Europe le R. cupreus, Linn,, vivant dans les prunes, à long duvet, très-bronzé, à rostre bleu au bout, et le R. Bacchus, Linn., de taille moindre, li à. 5 millimètres 1/2, d'un rouge cramoisi, avec une teinte de vert doré, moins bronzé que le précédent, le rostre et les an- tennes noirs, couvert de duvet. Il paraît que c'est à tort qu'on lui a donné un nom qui laisse croire qu'il nuit à la Vigne ; on le trouve au contraire, comme le dit M. Géhin {Soc. hist. nat. de la Moselle, 8" bull., 1856-J857), dans les vergers, sur les Pommiers et surtout sur les Poi- riers. Il se montre adulte au premier printemps sur les arbres en fleur, et la ponte a lieu en juin, après le nouage des fruits. La femelle perce sur les petites poires un trou avec son rostre, de 3 à 4 millimètres de profondeur, et y pond un œuf blanchâtre qu'elle pousse au fond avec son rostre ; puis elle ferme l'orifice du trou avec une matière gluti- neuse qu'elle lisse avec son abdomen. Au bout de huit jours éclôt une petite larve apode, d'un blanc rosé, à tète noire, écailleuse. Elle perce GIRARD. 42 658 COLÉOPTÈRES. —CURCULIONIENS. tout le fruit et déverse ses excréments par un trou opposé à celui de ponte. Au bout d'un mois environ, le fruit tombe, la larve en sort et se change en nymphe, qui doit donner l'adulte au printemps suivant, lors de la floraison des Poiriers et Pommiers; il se nourrit des feuilles jus- qu'à son accouplement. Il faut avoir soin, pour éviter des dégâts qui peuvent diminuer beaucoup la récolle des poires, d'enlever tous les jeunes fruits piqués, à cicatrice gommeuse, et de les brûler. EUOPS, Schœnh. — Caractères analogues au genre précédent. Yeux plus grands et contigus en dessus. Les huit esp(!;ces de ce genre sont de l'Australie, des Indes, de Ceylan, de l'Afrique australe, de Madagascar. — E\. : E. falcatus, G.-Mén., de l'Australie (pi. xlvhi, fig. Zi ; lia, tète vue en dessus, avec les yeux et une antenne). C'est dans le voyage de la Coquille que cette espèce a été trouvée pour la première fois à la Nouvelle-Hollande. RHIMOTIA, Kirby. — Rostre plus long que la tête, subtransversal, cylindrique, arqué. Antennes longues, de onze articles, les derniers un peu plus grands. Corps linéaire et pubescent, comme velouté. L'aspect habituel des espèces de ce genre propre à l'Australie et à la Tasmanie est d'oifrir des élylres finement rugueuses, en totalité ou en partie d'un beau jaune orangé, avec deux bandes latérales de même couleur sur le corselet. Le type est le R. hœmoptera, Kirby (pi. xLvni, fig. 5; 5a, antenne). EUROTMCHU*, Schœnh. — Tête cylindro-conique, avec rostre deux fois plus long, arqué, un peu dilaté au niveau des antennes, celles-ci de onze articles avec massue allongée de trois articles, le dernier très -long. Ces insectes australiens et polynésiens, d'assez grande taille, offrent un peu de poils blanchâtres ou fauves, se détachant facilement; la tête et le corselet sont lisses et les élylres striées.— Ex. : E. scabrior, Kirby (pl.xLvnr, fig. 6; 6 a, antenne). ClfIjAS, Latr. — Rostre droit, de longueur variable. Antennes de dix articles, le dernier très-allongé en massue au moins aussi longue que le funicule chez les mâles, moindre chez les femelles. Corps oblong, aptère. Ce genre, si curieux par les antennes, ne se compose que d'un petit nombre d'espèces rares des Indes, de Java ou de la côte occidentale d'Afrique. — Ex. : C. longicollis, Chevr., du Sénégal (pi. xLvin, fig. 10; 10 a, antenne du mâle). Ces espèces, de taille petite ou médiocre, ont les téguments lisses, de couleur uniforme brune, noire ou bleuâtre. ORTHOCÈRES. — KHIMOMACEK, DIODYRHYNGHUS, APION. 659 nuilVOM.^CER, Fabr., et DIODTRllViUrcni'^i, Mégerle. (Caractères com- muns.) — Rostre allongé, dilaté à l'extréniité. Tête courte, transverse ; antennes allongées, grêles, de onze articles, insérées dans une fossette vers le milieu du rostre. Élytres recouvrant tout l'abdomen. Corps allongé. Une espèce d'Europe, du premier genre, 7?. lepturoides, Fabr., de forme sublincaire, vivant, dit-on, sur les fleurs, et une autre du second genre, D. attelaboides, Fahr., à rostre plus long, surtout chez la femelle (tûte du mâle, pi. xi.v, fig. 10), insecte long de 5 millimètres environ et qu'on trouve adulte sur les Pins. Il pond ea mai sur les cônes mâles des Pins maritimes, et la larve, d'un blanc un peu roussâtre, ressem- blant beaucoup à celle du Balanin des noisettes, dévore les étamines, le pollen et l'axe du cône (E. Perris). APIo;V, Herbst. — Ce nom vient de la forme de poire qu'offrent ces insectes, à cause de leur tête conoïde terminée par un rostre effilé, tandis que l'abdomen est toujours très-renflé, ovoïde ou subglobuleux. C'est le genre Oxysloma de C. Duméril. — Rostre long, arqué, tantôt cylindrique, tantôt filiforme à l'extré- mité, plus long chez les femelles, où il sert à la ponte, que chez les mâles. Tête allongée; antennes de onze articles, d'insertion variable, terminées par une massue de trois articles. Élytres plus ou moins convexes, ovales ou sphéroïdes, recouvrant complètement l'abdomen. Corps piriforme. Ces Coléoptères constituent les plus petits Curculioniens, leur taille variant en général, rostre compris, entre -2 et 5 millimètres, et sont d'une élude difficile par leur faible taille, le grand nombre de leurs espèces, plus de deux cents pour l'Europe, et pas loin de quatre cents en tout, et les dissemblances de couleur qui peuvent exister entre les deux sexes d'une même espèce. Les élytres sont presque toujours striées, avec les intervalles entre les stries costiformes, les couleurs d'ordinaire uniformes, noires, bleues, rouges ou fauves, vertes ou cuivreuses. Ces insectes ont été rencontrés partout, excepté jusqu'à présent en Australie et à Madagascar. Tantôt ils sont glabres, tantôt recouverts d'une pubescence formant parfois quelques taches ou bandes. Les Apions ont été décrits récemment dans une monographie de M. Weucker {Abeille, t. I, i86i). On les trouve surtout sur les végé- taux dans lesquels vivent leurs larves. Nous indiquerons seulement les espèces qui peuvent causer des dégâts en s'attaquant à des végétaux utiles. Un premier groupe comprend celles qui vivent à l'intérieur des graines ou des fleurs, principalement dans la famille des Légumi- neuses. Tantôt elles se métamorphosent dans le fruit : ainsi, une es- pèce d'Europe, d'Algérie, du Caucase, attaquant les Légumineuses cul- tivées, VA. Pomonœ, Fabr., atteignant 3 ou 3 millimètres 1/2, de cou- leur noire, bleue ou verdâtre, avec pubescence blanchâtre ; — VA. Craccœ, Linn.,espèce plus petite, de toute l'Europe, d'un noir terne, dont la larve 660 COLÉOPTÈRES. — CURCULIONIENS. ronge les graines de Vesce ; — 1'^. Trifolri, linn., noir, à reflet verdâtre, d'Europe, d'Algérie, de Syrie, dont la larve vit dans les gousses de Trèfle; l'A. Viciœ, Payk., de toute l'Europe et d'Algérie, dans les gousses des Vesces et des Lentilles, ovoïde, terne, noir à pubescence grise ;—rj4. Ervi, Kirby, de toute l'Europe, à larve dans les Lentilles ; — VA. flavo-femora- twn, Herbst, d'Europe et d'Algérie, ayant sa larve vivant aux dépens du Trèfle incarnat ; — l'.d. Pisi, Fabr., d'Europe, d'Algérie, du Caucase, ayant sa larve dans les gousses de Pois, de Vesce, de Trèfle, ovale, noir, court, presque globuleux, à élytres d'un bleu noir peu brillantes: Tadulte peut se jeter sur divers végétaux, ainsi je l'ai trouvé mangeant en société les feuilles d'Oseille. Ou bien la transformation a lieu dans l'inférieur des fleurs ou des boutons ; c'est ce qui arrive pour deux espèces communes et nuisibles d'Europe et d'Algérie : 1'^. Fagi, Linn., ou plus exactement apricans, Herbst, ovale, convexe, noir, à élytres noires, avecléger reflet verdâtre, exerçant de grands ravages dans les Trèfles conservés pour semences, la larve vivant dans la fleur, en rongeant la jeune gousse et ses ovules, l'aduKe sortant fin juin et juillet par un trou à la base du calice ; — I'^. Carduorum, Kirby, variant beaucoup de taille, surtout en longueur, noir, pubescenf, élytres noires, bleues ou verdatres, de forme allongée, qui l'a fait nommer le Becmare allongé par Geoffroy, attaquant les capi- tules des Chardons et les feuilles charnues de l'involucre des Arti- chauts. D'autres larves rongent l'intérieur des tiges dès végétaux herbacés, surtout la moelle, sans déformation extérieure, et, pour la nymphose, se font une coque grossière de détritus. Ainsi on observe sur les Mal- vacées, Guimauves, Roses frémières, etc., les A. œneum, Fabr., ovale, noir, convexe, à élytres bleues, vertes ou cuivreuses, espèce d'Europe, d'Algérie, de Syrie, du Caucase, faisant souvent dans les jardins beau- coup de mal aux Roses frémières, l'adulte rongeant les bourgeons, la larve la moelle ; — A. radiolus, Kirby, de la même distribution géogra- phique, pareil de couleur, mais bien plus petit; — A. Malvœ, Fabr., d'Eu- rope et d'Algérie, long de 2 millimètres, allongé et comprimé, roux foncé, couvert d'un duvet cendré, à élytres et pattes rousses, le Bec- mare puce de Geoffroy. — On trouve sur les Luzernes 1'^. tenue, Kirby, de loute l'Europe, très-petit et très-étruit, noir, assez brillant, la larve vi- vant dans les tiges de cette plante fourragère, sur les arbres fruitiers, les Lilas, et beaucoup de plantes basses des jardins ; — 1'^. œthiops, Herbst, de toute l'Europe, de l'Algérie, du Caucase, noir, à élytres d'un bleu noir, plus allongé que VA. Pisi, avec lequel on le confond quelque- fois.— Une espèce vraiment polyphage est 1'^. vorax, Herbst, d'Europe et d'Algérie, ovale-oblong, noir, convexe, à élytres d'un noir bleuâtre, rendu terne par une pubescence grise assez épaisse. Il est très-com- mun sur les Pois, les Vesces, et sur divers arbres, le Frêne, le Sapin, le Noisetier, etc. Enfin, l'Oseille cultivée est attaquée par une espèce ORTHOCÈRES. — APION, BRENTHUS. 661 du groupe qui nous occupe, 1'^. viulacenm, Kirby;, d'Europe et d'Algé- rie, faisant au reste peu de tort, car sa larvç se loge dans les grosses liges de l'Oseille, qu'on rejette pour la_ cuisine, et aussi dans les tiges de la Patience. Il peut seulement faire périr quelques porte-graines. Il est ovale, allongé, noir, assez brillant, de 3 millimt'tres, à élytres bleues ou verdâtres. Les larves se placent chacune dans une galerie longitudinale creusée dans la moelle de la tige, surtout aux nœuds d'où partent les feuilles. On peut donner ces larves comme type de celles du genre Apion : ce sont les mieux étudiées (D"' Laboulbène, Ann. Soc. entom. de France, 1862, p. 565). Elles sont allongées, atténuées en arrière, peu arquées, d'un blanc jaunâtre, à tâfe fauve, avec antennes de deux articles et un ocelle noirâtre, t-e corps n'a que très-peu de poils; le thorax offre une paire de ventouses de progression par anneau, et l'ab- domen a à peine trace de mamelons. La nymphe, blanchâtre et allon- gée, se forme sans préparation dans la galerie, présente des yeux noirâtres, des antennes noueuses, de petites saillies sur les anneaux, et l'abdomen terminé par deux appendices divergents recourbés en arrière. D'autres larves d'Apions vivent aussi dans les tiges ou les feuilles de végétaux, mais en y déterminant la formation de galles, visibles exté- rieurement, dans lesquelles elles demeurent jusqu'à leur dernière trans- formation. C'est ce que fait VA. hœmatodes, Kirby, entièrement d'un rouge plus ou moins foncé, commun sur les Oseilles. Sa larve et sa nymphe, ressemblant à celles de l'espèce précédente, mais de couleur orangée, se logent au centre de petits renflements de la tige, parfois les deux par galle. Enfin, un très-petit nombre de larves d'Apions vivent aux dépens des racines et y font naître, par l'extravasation de la sève, des nodosités et des crevasses : ainsi 1'^. basicorne, lUig., de France , d'Allemagne, pour racines de Bardane. On peut dire que l'homme est désarmé contre les Apions, surtout en raison de leur petitesse, qui rend leur recollage impossible; de très-pe- tits Hyménoptères, des Clialcidiens surtout, sont nos meilleurs auxi- liaires. En raison de ces rotations connues entre les espèces carnivores et phytophages, les Apions disparaissent certaines années presque en- tièrement dans une localité, ayant fourni une immense pâture à leurs ennemis ; mais ceux-ci, s'étant reproduits outre mesure, meurent eu grande partie de faim, et Apions de reparaître. A cette action, on peut dire normale, se joignent les vicissitudes atmosphériques auxquelles les insectes et adultes sont très-sensibles au moment de leur éclosion, alors que leurs organes sont encore mous. BREMTHIS, Fabr. — Rostre souvent très-long, à grandes scrobes, dilaté en général antérieurement ctiez les mâles, filiforme chez les femelles; antennes de onze articles, sans massue nelle. Corps toujours allongé, très-souvent linéaire 662 COLÉOPTÈRES. — CURCUMONIENS, et très-étroit. Tête en généra] unie au corselet par un cou bulbiforme avec étranglement. Les Coléoptères de ce genre et des genres dérivés sont exotiques, des régions chaudes de l'Asie et de l'Amérique. D'habitude glabres, parfois de couleur uniforme, ils ont en général sur les élytres des bandes ou des taches fauves formées de la réunion de linéoles calleuses sur un fond noir ou brunâtre, ce qui leur donne un aspect spécial parmi les Curculioniens. Lacordaire a étudié à la Guyane les habitudes des Bren- thes de ces régions. Elles vivent toutes dans le bois, sous les écorces sèches ou à demi décomposées, parfois en sociétés nombreuses ; cer- taines espèces aiment à s'enfoncer dans le bois décomposé. On les ren- contre aussi quelquefois grimpant contre le tronc, d'où elles se laissent tomber quand on veut les saisir. Leur attitude est curieuse. Le corselet étant mobile sur le segment suivant, cette partie du corps et le long rostre qui la précède tombent sur le plan de position à chaque pas que fait l'insecte. Les mâles en marchant agitent continuellement leurs antennes, à la façon des Tenthrèdes et des Ichneumons (Hyménoptères), et les deux sexes, quoique pourvus ordinairement d'ailes, n'en font jamais usage. AiUORPUOCEPHALUS, Sclicenh. — Corps linéaire. Tète ayant sur le vertex une grande fossette radiée très-profonde, et, sur le front, à la base du rostre, une grande plaque élevée, cordiforme, sous laquelle s'insèrent des antennes moniliformes de onze articles. Cuisses en massue. L'intérêt de ce genre est que l'espèce typique est européenne et le seul représentant dans ce continent du groupe des Brenthes. C'est 1'^. coronatus, Germ., du midi de la France et de l'Allemagiie, d'Italie, de Sicile, et dont l'habitat s'étend jusqu'en Nubie. On le trouve sous les écorces d'arbres, et, d'après Latreille, il y vivrait en compagnie de cer- taines Fourmis. Chez le mâle, le rostre est court, inégal en dessus, por- tant des mandibules arquées très-saillantes. Chez la femelle, il est étroit et cylindrique, et porte dés mandibules courtes et droites. C'est ce sexe que nous représentons pi. xlvhi, fîg. 7 ; la, tète et rostre en dessus ; 7 6, antenne. DlliRU^, Pascoe. — Tête allongée et cylindrique et cou bulbiforme; rostre très- long, plus court chez les femelles, dilaté à la base puis cylindroïde ; antennes de onze articles. Élytres allongées, isolément prolongées au bout en une tige longue et grêle (ce qui a valu au genre son nom : Deux-Queues). Ces insectes sont revêtus d'écaillés et sont de couleur, soit uniforme, soit variée par des bandes longitudinales. Le genre appartient aux îles de la Malaisie et aux Moluques. — Kx. : D. farcillutus, Schœnh., fe- melle (pi. XLVJII, fig. 8). ULOGERUS, RHAMPHUS.— GONATOGÈRES.— nRAGHYCERUS. 663 VLOCERIIIS, Daim. — Antennes de neuf articles plus ou moins difformes et hérissés de grosses écailles. Ce genre est propre aux régions chaudes de rAmériquo. — Ex. : U. immundus, Daim., du Brésil (pi. xlviii, fig. 9, son antenne). Rn.%lIPHUS, Clair. — Pattes postérieures propres au saut en raison de leurs cuisses très-renflées. Rostre infléchi, allongé, linéaire ; antennes de onze ar- ticles, terminées en massue ; éljtres recouvrant entièrement l'abdomen. Les Coléoptères de ce genre, peu éloignés des Apions, sont de très- petite taille et ressemblent beaucoup aux Orchestes, qui sont de l'autre légion des Curculioniens. Comme eux ils sautent vivement et au même degré que la Puce commune; on les trouve sur divers végétaux, tels que l'Aubépine, les jeunes Peupliers et Bouleaux. Les larves vivent en mineuses dans le parenchyme des feuilles et s'y changent en nymphes dans une petite loge, de même que celles des Orchestes. On a observé sur le Pommier, le Poirier, le Bouleau, la larve du /?. flamcornis, Clairv., de Suède, de France, du Tyrol ; elle est apode, ovale, d'un jaune bril- lant, et, après avoir hiverné, se change en nymphe, dont les segments ab- dominaux sont très-mobiles. La même feuille en nourrit tantôt un seul, tantôt plusieurs individus. U y a trois autres espèces de diverses régions de l'Europe méridionale. II. — GONATOGÈRES ou FRAGTICORNES. Antennes plus ou moins fortement coudées au second article. Rostre muni de scrobes pour recevoir le scape. BKACHYCERi:§>, Fabr. — Rostre court, épais, défléchi ; antennes courtes, à peine coudées, terminées en massue. Corps très-dur, épais, gibbeux, ovalaire. Pas d'ailes; élytres grandes, soudées, très-convexes. Ces Curculioniens ont les téguments inégaux et sculptés d'une ma- nière très-variable ; ils sont de taille grande ou moyenne, et marchent lentement sur le sol dans les lieux sablonneux, et parfois sur des plan- tes basses dont ils mangent les feuilles. Les nombreuses espèces du genre sont de l'ancien continent, surtout de l'Afrique australe, et celles d'Europe du bassin méditerranéen. Nous citerons le B. polyophthal- mus, Schœnh., du cap de Bonne-Espérance (pi. xlix, fig. 1 ; 1 «, antenne; 1 6 et 1 c, tarse, sous deux aspects), à élytres bordées d'ocelles. Un certain nombre de genres, formés aussi d'espèces aptères, épigées ou épiphytes, se rangent à la suite : ainsi le genre Brachyderes, Schœnh., 664 COLÉOPTÈRES.— CURCULIONIENS. à corps allongé, à antennes bien coudées, de douze articles, avec mas- sue de quatre, à rostre courl, épais, subhorizonlal, dont le espèces vivent sur les Pins, les Chênes, les Bouleaux, etc. Ce genre com- prend quelques espèces nuisibles : tels sont le B. incanus, 1Jnn., de 7 à 9 millimètres, un peu déprimé en dessus, à antennes rousses, noir, avec une pubescence cendrée, tantôt fondue , tantôt en bandes peu distinctes, avec de fines stries ponctuées sur lesélytres,de toute l'Europe, principalement du nord, fréquent sur les Pins, où vit surtout sa larve, les Sapins' et parfois les Bouleaux ; attaque également les feuilles et les bourgeons : c'est le Charanson strié et sans ailes de GeolTroy, commun partout, dans le midi de la France, en Espagne, en Algérie ; —le B. pu- bescens, Bolim-, ronge les bourgeons des Pins; — le B. lusitanicus, Fabr., ceux des Pins et des Chênes. Long de 10 à 12 millimètres, il est brun, avec un enduit grisâtre et des écailles cuivreuses nacrées ou verdâtres, formant une bande. ClJRCIJIilO, Linii., ou Entimus, Germ. — Rostre un peu plus long que la tête, à scrobes profondes; écusson en triangle. Élytres très- convexes, amples, com- primées latéralement, très-larges et très-saillantes aux épaules. Corps atténué en arrière, subconoïde, naviculaire, couvert d'écaillés. Pattes allongées, à longs poils fins, à cuisses renflées. Ce genre comprend quelques magnifiques espèces du Brésil, connues depuis longtemps. Leurs belles écailles sont tenaces, et l'on emploie ces insectes pour la parure, mêlés aux fleurs artificielles. On se procure partout VE. iinperialis, Linn., de taille très-variable, ordinairement de 16 à 30 millimètres, noir, avec séries longitudinales de points enfon- cés, garnies d'écaillés d'un vert doré. On le reçoit sans cesse du Brésil, où il est très-abondant, au point, dit Lacordaire, que ses légions font plier les branches des Mimosas sous leur poids. Moins commun est VE. nobilis, Oliv., de taille un peu plus petite que le précédent, lui ressemblant beaucoup, mais d'un ton plus vert et avec séries un peu sinueuses d'écaillés vertes sur fond noir. Enfin le rare E. splendidus, Fabr., de la taille de ÏE. i'mperialis, brille d'un plus riche éclat; une vestiture analogue étant rehaussée par des taches confluentes et un beau reflet cuivreux. Cl CliOMUS, Schœnfi. — Rostre couTt, très-robuste, un peu renflé et tronqué. Élytres oblongo-ovales, convexes, arrondies aux épaules et atténuées en arrière. Ce genre est formé d'espèces de l'Afrique australe, dont beaucoup sont encore inédites, de taille moyenne, de couleur noire ou fauve, avec des poils, le corselet rugueux et des élytres munies de côtes remplies d'as- pérités. — Ex. : C. coronatas, Schœnh., du Cap (pi. xlix, flg. 2). GONATOCÈRES. — TYPHUS, JNALPACTUS, PACHYRHYNCHUS. 665 CVPHI.'S, Schœnh. — Rostre aussi large que la tête, épais, subparallèle, sillonné au milieu; antennes assez longues, avec massue oblongo-ovale, articulée. Élytres convexes, à épaules obtusangles débordant beaucoup le corselet. Pattes robustes, -tarses larges, spongieux en dessous^ Les espèces de ce beau genre américain sont en général de grande taille et ornées, par leurs brillantes écailles, de magnifiques couleurs. — Ex. : C. Latreillei, Schœnh., de l'intérieur du Brésil, rapporté d'abord par A. Saint- Hilaire ; d'un beau bleu pâle, avec corselet noir et macules noires sur les élytres (pi. xux, fig. 3). Nous citerons encore du Brésil une espèce commune, le C. Germari, Schœnh., de 20 à 30 millimètres, d'un vert blanchâtre, avec macules noires entourées d'une bordure cuivreuse éclatante, et le splendide C. sumptuosus (nom de.collect., Muséum), rare espèce de môme taille, tout entière du plus beau vert doré cuivreux chatoyant, glacé de re- flets d'azur. PI..%TYOMl'fi, Schœnh. — Rostre très-épais, excavé en dessus; antennes à mas- sue acuminée et articulée. Élytres à épaules très- saillantes et anguleuses. Ce genre est formé de très-brillants insectes ailés, la plupart brési- liens, de taille moyenne et assez grande, à couleurs très-vives, mais mates, avec dessins très-variés. Nous figurons (pi. xlix, fig. U) le P. Dal- mani, Schœnh., du Brésil, couvert d'épaisses écailles argentées, d'un blanc bleuâtre, avec les pattes, le rostre, les antennes, le contour du corselet, les épaules des élytres et une bande à leur extrémité, revêtus d'écaillés dorées ; les élytres sont fortement acuminées à leur extrémité. MAUPACTUS, Schœnh. — Rostre épais, plan, canaliculé en dessus ; antennes longues et très- grêles, à massue allongée, acuminée, articulée. Pattes anté- rieures plus longues que les autres, à cuisses renflées et fusiformes. Corps ailé ou aptère, le plus souvent allongé. Les parties chaudes de l'Amérique du Sud abondent enNaiipaclus, qui s'étendent jusqu'au Chili et à Buenos-Ayres ; ils se trouvent sur les ar- bres et les arbustes, les buissons, etc. Leur couleur est, ou uniforme, ou d'un dessin confus et peu constant dans la même espèce. — Ex. : N. macilentus, Schœnh., de couleur noire, habitant le Brésil (pi. xlix, fig. 5). PACBfBHVH'CBUS, Germ. — Tête convexe, avec rostre très-court et épais, plan en dessus ; antennes robustes, à forte massue ovalaire, indistinctement articulée. Corselet ovalaire; élytres très-convexes, ovalaires, échancrées en arc à leur base, soudées. Pas d'ailes. Le corps de ces insectes est robuste, dur, ovoïde, de taille médiocre, avec des téguments le plus souvent lisses et dont une partie est recou- 666 COLÉOPTÈRES. — CURGULIONIENS. verte d'écaillés cuivreuses, dorées, vertes, bleues. On les trouve en Australie, aux Indes orientales, dans les îles de la Polynésie, à la Nou- velle-Guinée et surtout aux îles Philippines. Nous représentons une espùce à corselet noir, à élytres et pattes de riche couleur de bronze, avec tarses jaunes, le P. profanus, Esch. , des environs de Manille (pi. XLIX, fig. 6). SYKYGOPS, Schœnh., Latr. — Antennes un peu grêles, à massue oblongue peu épaisse; rostre court, épais, réfléchi. Yeux subarrondis, proéminents, placés au milieu du front, presque accolés. Corselet oblong, arrondi sur lés côtés. Élytres brièvement ovales et convexes. Ces Curculioniens, si curieux par la disposition des yeux (genre Cy- clopus du Calai, de Dejean), sont d'une circonscription géographique restreinte, ne se trouvant que dans les îles Maurice et Bourbon. Leur corps est renflé, de taille médiocre, privé d'ailes, garni, ainsi que les pattes, de poils roides. Nous représentons le S". Cyclops, Schœnh., de l'île Bourbon (pi. xlix, fig. 7 ; 7 a, tête vue de face; 1 h, id. de profil; le, antenne ; 7 d, tarse antérieur). La couleur est d'un fauve testacé, plus pâle sur les antennes et les pattes ; elle est variée sur le corselet et les élytres par un enduit d'écaillés blanchâtres. g»YIlTllO€ïS, Schœnh.— Rostre arqué et épais ; antennes très-courtes. Corselet rétréci en avant; élytres subcarrées. Pattes courtes et très-robustes. Les espèces de ce genre sont africaines. Nous représentons le S. trun- catus, (>hevr., du Sénégal, d'un noir grisâtre, avec les bords du corselet fauves, et ayant deux bandes fauves à la base et au sommet des élytres (pi. XLIX, fig. 8). Les espèces de ce genre sont de taille moyenne, avec les téguments en général écailleux. CllLOnOPII.%IVU&>, Germ. — Corps ovale oblong ; rostre déprimé, caréné au milieu, échancré au. sommet ; antennes imparfaitement brisées. Les Chlorophanus sont des Curculioniens dont la couleur habituelle est le verl, ainsi que l'indique le nom du genre. Us vivent sur les arbres et afl'ectionnent surtout les Saules. Une abondante efflorescence jaune, sécrétion qui se renouvelle quand on l'enlève, recouvre leurs téguments. Ils sont surtout abondants dans le sud-ouest de l'Europe, et l'espèce la plus commune de tout ce continent est le C viridis, Linn. (pi. xux, fig. li, mandibule, lèvre inférieure et mâchoire), de 8 à 10 millimètres, tout couvert d'écaillés vertes. POLTDKOiSUlii, Germ. — Corps oblong, -en général ailé, écailleux ou pubescent, à téguments peu consistants, très-convexe. Antennes longues et grêles ; rostre GONATOCtRLS. — POLYDROSUS, CLEONUS. 667 échancré à l'extrémité, à scrobes se courbant en dessous et se rejoignant presque. On trouve sur les feuilles des herbes, des arbustes et des arbres ces pe- tits Coléoptères, surtout sur les lisières des bois ; ils sont fréquemment polyphages. Leur livrée est uniforme, souvent brillante et métallique : on dirait qu'une rosée les recouvre, par le peu de cohérence de leurs écailles. Ce sont des insectes mous, oblongs, très-convexes. Plusieurs es- pèces de ce genre sont nuisibles. On rencontre communément, pendant les mois de mai et de juin, sur les feuilles des arbres fruitiers et surtout des Poiriers, de petits insectes d'une belle couleur verte ou dorée, due à de petites squamules des téguments, à rostre court et épais. Ils per- cent de petits trous le parenchyme des feuilles, et le mal peut être grave quand ils s'attaquent aux jeunes greffes, et détruisent les bour- geons. Ce sont le P. sericeus, Schall, de Suède, de France , d'Alle- magne et de Russie, noir, de 5 à 7 millimètres, couvert d'écaillés d'un vert tendre, à antennes et pattes jaunes; — et le P. inicans, Fabr., de Zi à 9 millimètres, de toute l'Europe, noir, couvert de petites écailles cou- leur feu-doré, à antennes et pattes rousses. Cette espèce attaque aussi les Hêtres, les Chênes, les Bouleaux, les Coudriers. — On trouve encore dans les bois, sur les feuilles des mêmes arbres, le P. ceroinus, Linn., de toute l'Europe. Ces Curculioniens sont du reste peu nuisibles aux arbres forestiers. Les Polydrosus sont surtout d'Europe, et principalement de sa partie boréale, et certaines espèces des deux Amériques. Ils ont des téguments assez mous, le corselet petit et tronqué aux deux bouts, les élytres à épaules obtusément angulées, avec des stries régulières. Us vivent en troupes nombreuses dans les bois, sur les feuilles des arbres, des buissons, des plantes basses, et leur corps noir est d'ordinaire revêtu d'écaillés d'un vert gai, parfois à reflet métallique, sans dessins. On prend en abondance aux environs de Paris, en fauchant sur les buissons, deux espèces vertes, qui voltigent au soleil en tournoyant et se posant fréquemment à terre, le P. planifrons, GylL, et le P. pteryguinalis, Bohm., de plus petite taille. CLEOIVïiS, Schœnh. — Corps oblong, souvent aptère. Roslie peu allongé, épaissi au bout, le plus souvent caréné ou canaliculé en dessus. Corselet subconique ; élytres allongées ou ovales-oblongues, à épaules peu saillantes et obtusément subangulées. Ces Curculioniens, de taille grande ou moyenne, sont répandus dans l'ancien monde, de la Sibérie au cap de Bonne-Espérance ; on les ren- contre pour la plupart le long des chemins, sur la terre, sur les murs, sous les pierres ou au pied des plantes. Ils aiment les lieux secs et arides. 668 COLÉOPTÈRES. — GURCULIONIENS. Les Cleunus figurent parmi les plus gros Charansons de noire pays ; ils sont épais et convexes, et à téguments si durs, que les épingles ont beaucoup de peine à le traverser. On trouve pn'is de Paris et dans toute l'Europe et le Caucase le C. sulcirostris, Linn., de 12 à 15 millimètres, à rostre très-sillonné, d'un brun noir, avec petits grains noirs brillants et fascies obliques de poils gris ; — le C. marmoratus, Fabr., plus petit, également aptère, existant aussi en Algérie, d'un brun noir, marbré de poils gris ouroussâlres et couverts de grosses granulations. L'Europe, surtout dans le sud et l'est, le Caucase, l'Algérie, en comptent une quarantaine d'espèces. Citons C. lacryinosus, Schœnh,, de Natal, du cap de Bonne-Espérance (pi. xlix, fig. 9). BARVJIOTUS, Germ. — Corps ovalaire, aptère, revêtu de lines écailles. Rostre assez épais, subparallcle; cuisses renflées en massue. Ces Coléoptères, de taille moyenne, ont, pour la plupart, une livrée sombre, grise ou maculée de gris, de brun, de ferrugineux. On les trouve en général sous les pierres. Les auteurs anglais en citent deux espèces comme étant très-nuisibles aux jardiniers-fleuristes de leur pays, demeurant tapies le jour près des racines, et sortant le soir pour ronger les feuilles des Polyanthus, des Oreilles-d'ours, des Pensées, des Renon- cules, et aussi des Fèves et des Trèfles. Ce sont les B. obscurtis, Fabr., et B. mœrens, Fabr., de l'Europe occidentale et septentrionale. BYLOBlU§i, Germ. — Rostre plus long que la tête, subcylindrique, un peu arqué, déprimé et élargi au bout; antennes à massue ovale, acuminée, articulée. Élytres oblongues, convexes, à épaules saillantes ; cuisses en massue, jambes renflées. Corps oblong, ailé, partiellement pubescenl. Les Hylobies sont surtout propres aux pays froids et tempérés de l'hé- misphère boréal; leur corselet et leurs élytres sont tuberculeux, et celles-ci ont des rangées régulières de points enfoncés. De taille au moins moyenne, ces Coléoptères ont, sur un fond noir ou ferrugineux, des mouchetures, des bandes, des points formés par des poils blancs ou jaunâtres. Ceux dont on a observé les mœurs vivent aux dépens des Conifères, et plusieurs sont nuisibles. Ainsi : 1'//. Abietis, Linn., des Pins et Sapins, noir, de 8 à 13 millimètres, à élytres chargées d'un du- vet gris et jaune, et à stries ponctuées en chaînettes : le Charanson tigré de Geoffroy; — VH. Pineti, Fabr., plus grand, moins commun, à cuisses dentées comme le précédent, taché de gris jaunâtre, à élytres à stries profondes, avec des points quadrangulaires, se rencontrant surtout sur les Mélèzes : ces deux espèces, de toute l'Europe, ayant leurs larves vivant à l'intérieur du bois; — 1'//. Pinastri, Gyll., propre à l'Angleterre, à la Suède, au nord de l'Allemagne, à la Finlande, ne se trouvant pas en France. GONATOCÈRES. — PISSODES. 669 PISSODES, Germ. — Rostre grêle, cylindrique, filiforme, un peu arqué ; an- tennes courtes, à massue ovale, acuminée. Élytres oblongues, peu convexes, saillantes aux épaules, calleuses el atténuées vers l'extrémité. Jambes compri- mées. Corps oblong, recouvert en dessus de squames piliformes. Ce genre comprend une quinzaine d'espt'ces d'Europe, de Sibérie, de l'Amérique du Nord, des espèces encore plus nuisibles que le précédent, et de mœurs pareilles, détruisant les arbres résineux. Les femelles déposent leurs œufs dans les crevasses de l'écorce, et les larves gagnent surtout la partie inférieure du stipe de l'arbre ou les premières racines, et creusent dans les couches de l'écorce et de l'aubier leurs vastes et funestes galeries. Les adultes se trouvent sous les écorces avec les larves, ou sur le feuillage qu'ils dévorent ; ils sont de taille moindre que le genre précédent, moyenne ou petite; leurs téguments rugueux ont des taches blanches ou jaunes, formées de squamules, sur un fond brun rougeâtre ou ferrugineux. Nous citerons particulièrement deux espèces. L'une est le P. Fini, Linn., de toute l'Europe, long de 12 à 15 milli- mètres, avec deux bandes maculaires trausverses d'un gris roussâtre sur les élylres, le corps et la tète d'un brun marron. On le trouve, selon les régions, en mai, juin, juillet, dans les forêts de Pins et de Sapins, aimant surtoutàronger les bourgeons terminaux et les petites branches des jeunes plants. Une partie de la ponte devient adulte en automne, et se cache sous la mousse pour hiverner jusqu'au printemps, de sorte que ces sujets précèdent ceux qui éclosent des larves ou nymphes ayant passé l'hiver. Il est lourd et ne paraît pas se servir de ses ailes, se lais- sant tomber sur le sol en contractant ses pattes, si l'on cherche à le saisir. Par le mauvais temps, il reste au repos sous les branches, et il descend se cacher dans les herbes pendant les grandes chaleurs du jour et la fraîcheur des nuits. On observe tout à fait les mêmes mœurs dans une espèce un peu plus petite, non moins funeste, le P. notatus , Fabr., d'Europe et d'Algérie, d'un brun marron, avec taches roussâlres sur le corselet et les élytres. Les adultes paraissent en mai et juin, et les larves ou les nymphes, couvertes de spinules e;» général, passent l'hiver dans le bois, et parfois donnent en automne des adultes qui hivernent. C'est là un fait fréquent pour un très-grand nombre d'insectes, et qui dépend de la température de la belle saison. L'observation des raœ,urs de ces deux pernicieuses espèces a donné les moyens de diminuer leurs ravages. Comme ils aiment à se cacher dans les abris du sol, on place sur la terre fraîchement remuée des écorces d'appât, dont le côté convexe est tourné en haut, et le matin on envoie des femmes ou des enfants lever ces pièges et ramasser les Cha- ransons blottis. On dispose aussi sur le sol des fagots et des bûches d'ap- pât formés de branches fraîchement coupées et destinés à appeler les femelles pour la ponte. Enfin, comme celles-ci aiment pour cette opé- ration les souches et la base des arbres languissants et malades, il faut 670 COLÉOPTÈRES. — CURCULIONIENS. avoir soin d'enlever immédiatement les écorces des vieilles souches qu'on laisse sur le sol et celles de tous les arbres renversés ou cassés par le vent. HYPER.%, Germ., ou Phytonomus, Schœnh.— Corps le plus souvent ailé, parfois aptère, ovale-obloiig ou ovalaire. Antennes de douze articles, avec massue en général de quatre. Élytres en général assez convexes, à épaules arrondies et saillantes, dilatées sur les côtés, arrondies au sommet ; téguments couverts à la fois d'écaillés, de poils, de soie. Les Curculioniens de ce genre ont tantôt le rostre aosez robuste et pubescent, tantôt grêle et filiforme ; ils ofi'rent un petit écusson trian- gulaire ; les mâles sont plus petits et moins larges que les femelles, ont le rostre plus court, l'abdomen plus plat. Ils se trouvent sur le feuillage de beaucoup d'herbes, sous les pierres, dans les chemins. Les larves vivent à découvert sur les feuilles qu'elles rongent, se recouvrent d'une couche de matière visqueuse, et fabriquent une coque légère pour devenir nymphes. M. E. Perris est parvenu à faire filer sous des verres de montre les larves du P. Viciœ, Gyll., et les a suivies construisant leurs coques à larges mailles, et prenant avec les pièces buccales la li- queur visqueuse sortie d'un mamelon situé à la base dorsale du douzième segment. Ces insectes sont surtout de l'Europe, de l'Asie occidentale et du nord de l'Afrique ; l'étude très-difficile de leurs espèces est expo- sée dans une récente monographie des Ilypérides par Capiomont {Ann. Soc.entom. France, iS<51 , p. Û17, et 1868, p. 73), avec d'intéressantes généralités. Nous n'indiquerons que quelques espèces communes partout : /'. punctatus , Fabr. , de 7 à 10 millimètres, très-variable de teinte, gris d'habitude, avec fascicules de poils ou taches noirâtres, parfois blanchâ- tres ou fauve ocreux, ou brun, ou même noir. — P. fasciculatus, Herbst, de 6 à 7 millimètres, habituellement gris cendré fascicule de roux, par- fois blanchâtre, rougeâlre, brun, noir, avec sujets de couleur uniforme, vivant sur des Carottes sauvages {Daucus), de toute l'Europe, du nord de l'Afrique, d'Abyssinie, du Dongola, de l'île de Madère. — P. rariabilis, Herbst, oblong ou trapu, de à à 5 millimètres, variant beaucoup, noir, brun, ferrugineux, rouge, testacé, avec squamules plus claires, de toute l'Europe, du nord de l'Afrique, de Madère, de l'Asie méridionale et occidentale. — P. murinus, Fabr., de 5 à 7 millimètres, de couleur analogue et variée comme l'espèce précédente, avec taches brunâtres, dont la larve vit sur la Luzerne; de toute l'Europe et du bassin mé- diterranéen, de Madère. — P. nigrirostris, Fabr., petite espèce de 2 à 3 millimètres, des mêmes localités,, vivant sur les Ononis, très-commun, avec poils écailleux d'un beau vert, suture rousse aux élytres, rostre et pattes bruns, etc. On trouve très-abondamment près de Paris, rampant sur les capi- tules, les bractées et les feuilles du Trèfle, les larves du P. Mêles, Fabr., GONATOCÈRES. — CONIATL'S , PHYLLOBIUS. 671 var. Tnfolii, Herbst. Longues de 7 millimtitres , elles sont vertes ou jaunâtres, et ressemblent à de petites chenilles. Comme les larves d'au- tres Phijtonomus, elles adhèrent aux feuilles, sur lesquelles elles se dé- placent au moyen d'une humeur visqueuse qui suinte du dessous de leur corps, et deviennent nymphes dans des coques élégantes en façon de filet à mailles lâches, ovales, comme faites de dentelles ou de tulle blanc, ou un peu ambré (1). Probablement que, outre les Ichneumo- niens parasites, d'autres Hyménoptères, des Fouisseurs, emportent ces larves comme proies dans leurs nids, de même qu'Audouin a vu près de Paris VOdynerus spinipes alimenter sa progéniture avec les larves vertes, vivant sur la Luzerne, du P. variabilis, Herbst. COAIATU^, Germ. — Caractères analogues aux Phyionomus. Corps ailé. Yeux globuleux plus convexes, scrobes s'effaçant en arrière. L'intérêt de ce genre est le riche éclat de ses espèces, qui rappellent dans leur petite taille les splendides livrées des beaux Charansons exo- tiques Entimus, Cyphus, etc. Les Coniatus vivent dans le midi de l'Eu- rope et le nord de l'Afrique sur les Tamarix, et nous engageons les jeunes amateurs à les recliercher sur ces arbres, où ils brillent au soleil comme des perles de feu. Tels sont les C. Tamarisci, Fabr., de lia. 5 milli- mètres, d'un vert clair métallique, avec deux bandes cuivreuses bor- dées de noir sur les élylres, pouvant passer au ferrugineux ou au rouge doré éclatant, les jambes rousses; — C. répandus, Fabr., de 2 à û milli- mètres, d'un ton carné brillant, avec bandes brunes sur le corselet et les élytres, se trouvant aussi, outre les régions indiquées, sur les bords des torrents alpestres, sur les rives du Rhin (L. Fairmaire); — C.suavis, Schœnh., de 3 à i millimètres, des landes maritimes, d'un vert bleuâ- tre, avec fascies cuivreuses et noirâtres. En Algérie, cet insecte est d'un vert brillant doré, avec taches cuivreuses très-éclalanles. C'est le C. chrysochlora, Lucas, variété locale d'après Capiomont. I^qtixobiIjS, Germ. — Corps allongé ou oblong, ailé. Antennes de douze ar- ticles ; rostre assez court, épaissi, presque droit. Élytres à épaules obtusément angulées et saillantes. Ces Charansons vivent sur les plantes et les feuillages, et nous offrent plusieurs espèces nuisibles. On rencontre fréquemment sur les Pom- miers et les Poiriers une espèce de forme allongée et étroite, le P. ar- gentaius, Lion., de toute l'Europe, couvert de squamules d'un vert ar- genté brillant ou d'un bleu verdâtre argenté. On y rencontre aussi le P. Piri, Linn., de France, d'Allemagne et du sud de la Russie, revêtu d'écaillés d'un vert tendre, soyeux, passant quelquefois au verdâtre : (1) A. Laboulbène, Ann. Soc. entomol. de France, 1862, p. 569, 672 COLÉOPTÈRES. — CURCULIONIENS. c'est le Charansun à écailles certes et pattes fauves de Geoffroy ; — le Phyll. oblongus, Linn., se trouvant en Espagne en outre des mômes pays que l'espùce précédente, fauve et couvert d'un duvet griscltre; le Charanson à étuis fauves de Geoffroy, dévorant en mai et juin les feuilles des Poi- riers, Pommiers, Cerisiers et autres arbres, très-dangereux pour les greffes de l'année. — Enfin, le P. Betulœ, Fabr., de France et du sud de l'Allemagne, couvert d'écaillés d'un vert doré luisant, est commun sur les Poiriers dans certaines localités ; on le trouve aussi sur le Coudrier et le Bouleau. On n'a d'autres moyens de délivrer les arbres frutiers des attaques des Charansons argentés [Phtjllobhis et Polydrosus) que de saisir ces petits insectes sur les feuilles, ou de les faire tomber le matin sur un drap, et de les écraser ou de les brûler. OTIORHYIVCHIIS, Germ. — Corps aptère, oblong-ovale ou subovalaire. Rostre droit, épaissi à l'extrémité et éctiancré en triangle ; antennes longues et grêles, de douze articles. Corselet arrondi au milieu. Élytres à épaules arrondies, non saillantes, écusson nul ou très-petit [{). Ce genre est le plus nombreux en espèces de la tribu des Curculio- niens ; d'après Lacordaire, ses espèces s'élèvent à environ quatre cents. Leur taille est moyenne ou assez petite, leurs couleurs en général peu brillantes, et les dessins sans intérêt. Les téguments sont très-durs. On les rencontre sur les rameaux et les feuilles des plantes, sur les che- mins, dans les lieux sablonneux, contre les murs, sous les pierres. Il est naturel que, dans ce nombre considérable d'espèces, certaines nous causent des dommages. L'O. sulcatus, Fabr., de Suède, des îles Britan- niques, de France et d'Allemagne, entièrement noir, assez grand, à élytres sillonnées, avec les intervalles variés de petites teintes grisfltres, s'introduit dans les serres et sous les châssis ; sa larve, très-nuisible aux jardins, ronge les racines des Fraisiers, des Cinéraires, des Saxifrages, des Primevères de Chine, etc. Il faut rempoter les plantes malades et bien nettoyer les racines. — L'O. Ligustici, Linn. (de laLivèche), de toute l'Europe et du Caucase, est très-commun aux environs de Paris. C'est un gros Charanson noir, de 12 à là millimètres, à élytres bombées, ovales, fortement striées, à côtes ponctuées et couvertes d'écaillés d'un gris terreux. Il est fort nuisible aux cultures des Pêchers, dont il ronge les fleurs elles jeunes pousses, et aussi aux Vignes en Bourgogne. M. Bois- duval rapporte que les jardiniers des environs de Paris, qui le nomment Bécare, sèment de la Luzerne près des arbres pour l'attirer. Il mange la nuit et a le crapaud pour grand ennemi. C'est le Charanson à étuis réunis et chagrinés de Geoffroy. — Une espèce, de taille moindre, ana- logue de couleurs, a élytres striées, soudées, parsemées de taches grises, VO. raucus, Fabr., des îles Britanniques, de Suède, de France et d'AUe- (1) Stierlin (trad.). — Monogr. des Oliorhynchus d'Europe {Ann. Soc. entom, Fr., 1864, p. 159.) GONATOCÈRËS. — OTIORHYNCHUS, TROGLORIIYNCHUS. 673 magne, ronge dans les jardins des environs de Paris les jeunes bour- geons des Poiriers et des Vignes de treille. Il est curieux qu'on ne con- naisse pas encore les larves des deux espèces que nous venons de citer. Elles se montrent en avril et mai, et aiment beaucoup à grimper le long des murs des jardins pour se chauffer au soleil printanier: c'est là qu'il faut les recueillir pour les mettre à mort. On trouve dans le midi de la France et de la Russie, en Espagne, en Italie et en Algérie, VO. meridionalis, Gyll., noir, avec léger reflet roux dû à des poils, de la grosseur d'un pois, un des insectes les plus funestes aux Oliviers, dont il vient la nuit ronger les feuilles et les bourgeons, tandis qu'il reste pendant le jour caché en terre, contre les racines. En raison de celte habitude, le meilleur moyen de lui faire la chasse est de fouiller le sol au pied des Oliviers, et de ramasser tous les Otiorhynques mis à décou- vert. L'O. picipeSj Fabr., de 7 à 8 millimètres, à élytres chagrinées, mar- brées de brun rougeâlre et de gris, est un grand fléau depuis quelques années pour les vignobles de Saint-Émilion. Il ne se montre pas pendant le jour, mais pendant la nuit il s'introduit dans les bourgeons naissants, les dévore et les anéantit ; il disparaît dès que le soleil se montre. En ] 868, le propriétaire du vignoble en fit prendre et détruire 37 000 dans des chasses nocturnes. C'est le vrai moyen d'en finir avec cet ennemi ; comme il est privé d'ailes, il ne peut revenir d'un autre vignoble voisin. Les Otiorhynchus sont des insectes essentiellement nocturnes, et qu'on rencontre accidentellement pendant le jour. (A. Rouget, Catal. des Co- léopt. de la Câte-dVr, Dijon, 1854-1860, p. 208.) TROGLORllTiliCHIJS, Schiœdte. — Antennes longues. Yeux nuls ; écusson nul. Corps allongé, oblong, revêlu de poils rares, aptère. L'intérêt de ce genre, très-voisin zoologiquement du précédent, ré- side dans l'absence des yeux, et surtout dans le séjour dans des grottes obscures. La nourriture de ces Curculioniens cavernicoles doit consister en cryptogames très-inférieurs. On est porté actuellement à restreindre les genres des insectes caver- nicoles, à les faire rentrer dans les genres à vie ordinaire; à voir chez les insectes de celte sorte seulement des espèces créées pour la vie sou- terraine ou modifiées par elle, ayant pris la couleur rousse uniforme, perdu les ailes, et où les yeux deviennent nuls ou dégradés (1). M. Seid- (1) Une curiosité toujours croissante s'attache, parmi les amateurs, à la recherche des Coléoptères et des autres Articulés des grottes ; aussi pensons-nous devoir donner quelques détails généraux sur leur chasse. On comprend qu'elle peut se faire toute l'année, car l'égalité de température des lieux souterrains permet une reproduction continuelle de leurs espèces, dont la fécondité, du reste, semble assez restreinte ; de sorte que les chasses réitérées épuisent les cavernes. Le printemps paraît toutefois être notablement la meilleure saison pour la récolte de ces singulières espèces, les GIRARD. 43 67/l COLÉOPTÈRES. — CURCLLIONIENS. lilz ne voit dans les Troglorhynchus que des Otiorhynchus sans yeux. De même on paraît amené à supprimer les genres Machœrites et Aphœ- nops, à ne trouver dans ces derniers que des Anophthalmus, ce soiis-genre des Trechus étant restreint aux espèces à œil sans pigmentum noir. Une espèce, le T. anophthalmus, Schiœdte, d'un rouge ferrugineux brillant, avec téguments ponctués (pi. xu, fîg. 3; 3 a, rostre et antenne de profil), a d'abord été découverte dans des grottes de la Carinthie, puis une seconde fort voisine dans le Tyrol. Enfin, en France fut découverte une troisième espèce, le T. Martini, L. Fairm., très-analogue d'aspect aux précédentes, de U millimètres de longueur, dans la grotte de Ville- franche (Pyr.-Orient.). lillLUS, Fabr. — Rostre très-variable. Élytres allongées, cylindroïdes, à peine ou pas plus larges que le corselet, en général arrondies à l'extrémité, mais parfois acuminées ou déhiscentes. Corps allongé, ailé, pubescent et pulvérulent. Ces insectes vivent à l'état de larves dans les tiges des plantes dont ils rongent la moelle ; sous la forme parfaite, on les rencontre sur les plantes et parfois cachés sous les pierres. Ils présentent de très-nom- breuses espèces, dont quelques-unes de très-grande taille parmi les exotiques, répandues sur tout le globe, vivant sur des végétaux très-va- riés, principalement sur les plantes basses en Europe, et au contraire presque exclusivement sur les feuilles des arbres dans les régions în- tertropicales de l'Amérique, dit Lacordaire. Nous citerons le L. paraplecticus, Linn., d'un brun roussâtre, de toute l'Europe, dont la larve vit dans les tiges Hsluleuses du Phellandrium aguaf/cu;» (Orabellifères). Le nom de cette espèce, assez rare près de Paris, vient de la croyance erronée qu'elle occasionnait la paraplégie infiltrations de l'eau de la fonte des neiges les expulsant d'une foule de petits ré- duits et les amenant dans les grandes salles. Ce sont surtout les grottes humides et à stalactites qui contiennent des insectes, et souvent dans les parties les plus profondes : ainsi les Leptdderus. Cependant la première salle, la mieux aérée, est d'ordinaire la meilleure. Il faut être patient et persévérant ; visiter surtout les par- ties humides pour saisir les espèces courant à terre ou sur les parois ; relever toutes les pierres, même celles enfoncées profondément ; fouiller les excavations, les monceaux de pierres, au milieu de la boue, qui est ordinairement calcaire comme les montagnes où abondent les grottes. On fera bien d'attirer par un peu de fumier , ou des os décharnés, une tête de mouton par exemple, les espèces carnassières (M. Stableau). Aux premières visites, on ne trouve d'ordinaire rien, faute d'expé- rience. Il ne faut pas se décourager. Il importe de se munir de tubes, de bougies, qui éclairent mieux que la lanterne, et d'allumettes. Comme on est souvent forcé de se traîner en rampant dans des couloirs étroits, au milieu de la boue et du guano humide des chauves-souris, il est bon d'avoir un vêtement superficiel de •grosse toile. L'explorateur des cavernes doit s'attendre à de grandes fatigues, GONATOCÈRES. — LIXUS. 675 chez les chevaux qui avaient le malheur d'avaler la larve avec la plante qui la contient ; mais on sait aujourd'hui posilivement que c'est au suc vénéneux de cette plante marécageuse qu'est due la paralysie qui frappe les animaux. Le L. paraplecticus a les élytres prolongées en pointe aiguë et diver- gente ; elles ne divergent pas chez le L. turbatus, Gyll., ou gemellatus, de toute l'Europe, surtout méridionale, et du Caucase, trôs-analogue au précédent par la taille, de 10 à 15 millimètres, et à coloration d'un brun roux, due à des poils, mais plus gros et plus court, vivant sur la Ciguë. On trouve dans toute la France, mais rarement dans le nord, le L. angustaïus, Fabr. , plus grand, allongé et cylindrique , d'un brun noirâtre, avec une exsudation ferrugineuse, se trouvant sur les Mauves, les Fèves de marais et sur les Saules marceaux en août et septembre, et leZ. jiliformis, Fabr., plus étroit encore, de 8 millimètres, noir, avec bandes et taches de pubescence rousse, dont la larve vit sur les Char- dons, où l'on trouve l'adulte. Les larves de Lixus ont des mamelons, des poils, des callosités qui leur permettent de cheminer dans l'intérieur des tiges de végétaux, où elles vivent en nombre variable, et leurs nymphes sont épineuses à l'extrémité. Les adultes sortent par un trou qu'ils percent dans la tige. Nous représentons le L. vittiger , Chevr. (pi. xLix, fig. 10), d'un blanc de neige, avec des bandes longitudi- nales noires, trouvé en Crimée. Les Lixus sont recouverts à l'état vivant d'une substance pulvérulente, blanche, jaune ou rougeâtre, selon les espèces; examinée au micros- cope, elle offre l'aspect de filaments mêlés de granules ronds, de sorte qu'on a pu croire à un mycélium de cryptogames avec des sporules. Ce ne sont pas des substances extérieures accidentelles, comme des pol- lens, retenues par l'insecte, car la poussière se reproduit sous l'action vitale et chez les insectes enfermés dans des boîtes. Les cryptogames même parfois à de véritables dangers ; mais c'est un aiguillon de plus pour ceux qui aiment la science avec ardeur, un plus vif désir de récolter les animaux sou- terrains. Il ne faut pas oublier de porter une chemise de flanelle, de se garnir le dos et la poitrine d'un plastron, et de ne pénétrer dans la caverne froide et humide qu'après un temps d'arrêt nécessaire pour arrêter la sueur causée par une montée pénible, souvent sous un soleil brûlant. Si l'on ne connaît pas bien la grotte à visiter, il faut prendre un guide ou se munir du peloton de ficelle d'Ariane ; bien se ren- seigner sur les salles à éboulements fréquents et les éviter; et, si l'on manque de documents à cet égard, bien étudier les débris tombés de la voûte, pour voir s'ils sont récents, et s'il peut y avoir péril à pénétrer plus avant. Enfin l'entrée de beaucoup de grottes n'est pas de plain-pied, surtout dans les Alpes. On y pénètre par des galeries verticales, qui exigent qu'on se munisse d'une corde à nœuds ou d'une échelle de cordes, qu'on ait quelque habitude de la gymnastique, des chaus- sures de montagne empêchant de glisser, et surtout, et principalement, du calme et de l'attention. 676 COLÉOPTÈRES. — CURCULIONIENS, qui envahissent les insectes ne sont jamais normaux, et finissent par amener la mort des sujets qui les portent. Les filaments qu'on voit dans l'enduit pulvérulent ne sont jamais articulés ni pourvus d'organes de fructification. Chez certains insectes, cette exsudation se produit par places régulières et déterminées, entrant dans le dessin tégumentaire, ce qui éloigne encore toute idée de végétation parasite : ainsi chez plu- sieurs Cétoines, notamment Cetonia stictica (voy. p. /i8/i). Comme le fait remarquer M. Ch. Robin dans son résumé de cette question (1), bien qu'il n'y ait pas de glandes spéciales, il s'agit ici d'une sécrétion de matières cireuses ou résinoïdes par les tissus eux-mêmes, qui jouis- sent de la propriété de sécrétion comme de celle d'absorption. Outre le genre Lixus, les mêmes faits s'offrent chez le genre suivant, Larinus, chez diverses Cétoines, chez plusieurs Buprestiens européens et exoti- ques: ainsi chez l'Ancylochira rustica. Lion., recueilli en Suisse par M. J. Fallou, revêtu d'un superbe glacis vert ; chez plusieurs chrysa- lides de Noctuelles, où l'enduit est bleuâtre, etc. Il faut joindre à ce genre de sécrétion la poudre jaune dont est saupoudré le cocon du Bombijx Neustria, Linn. (Lépidopt.): les poussières ou filaments cireux blancs des Fulgora, Phenax, Lystra (Hémipt. homopt.), et sans doute aussi les exsudations cireuses de certains Pucerons et Cocciis : ainsi de la Cochenille sylvestre, le suintement résineux d\i Cocçus qui produit la gomme-laque, etc. IiARII*X'S, Germ.— Caractères analogues aux Lixus. Corps jamais cylindroïde, mais oblong ou brièvement ovale avec tous les passages, pulvérulent; scrobes du rostre confluentes en dessous, tandis qu'elles sont séparées chez les Lixus. Les Larinus ont une taille très-variable, depuis quelques millimètres jusqu'au-dessus de la moyenne ; ainsi L. Cmarcp, Fabr., d'Europe et d'Al- gérie. Leurs nombreuses espèces sont de l'ancien monde et de l'Amé- rique du Nord. Comme les Lixus, leurs téguments sont très-durs, mais leur forme est toute différente, car ils sont épais et ovalaires. Une sé- crétion pulvérulente, ordinairement jaune ou rousse, et qui se renou- velle pendant la vie, suinte également de tout leur corps. Il est impor- tant pour les collectionneurs de conserver cet enduit caractéristique. Aussi, de même que pour les Lixus, il ne faut pas jeter ces insectes dans le flacon de chasse, mais les piquer immédiatement, chose diffi- cile, vu leur dureté. On ne peut les tenir entre les doigts, qui enlève- raient l'enduit ; on les pose à plat sur la main, ou mieux on les main- tient contre un objet avec une pince très-fine. C'est surtout sur les Carduacées de tous les groupes qu'on recherchera les curieux Larinus. Ils sont bien plus rares dans le nord de la France qu'au midi. On prend (1) Ch. Robin, Hist, nat. des végétaux' parasites qui croissent sur l'homme et sur les animaux vivants, p. 686. Paris, J. B. Baillière et fils, 1853. GONATOGÈRES. — LA.RINUS, PERITELUS. 677 sur la Centaurée, et aussi sur le Carduus nutans, le L. Jaceœ, Fabr., de 7 à 8 millimètres, noir, parsemé de petites taches de pubescence grise ; sur les Carlines (genre de Chardons), en Europe et Algérie, le L. Ursus, Fabr., de 8 à 10 millim(''tres, brun foncé, avec bandes de poils gris ou roussâtres. Sur ces mêmes plantes, notamment le Carlina vulijaris, qui est commun dans les lieux secs et pierreux, et sur le bord des chemins, on récoltera le L. Carlinœ, Oliv., espèce des environs de Paris, de forme suballongée, noire, à écailles grisâtres. Sa larve, grisâtre, très-courbée, tout à fait apode, mamelonnée sur les côtés, a été trouvée dans les capi- tules de Serratula arvensis et de Cirsium palustre, et s'y construit une coque brunâtre en paillettes accolées provenant des enveloppes des graines. Elle s'y change en une nymphe blanchâtre, glabre et lui- sante, sans prolongements postérieurs, et l'adulte éclôt en août. (Laboul- bène, Ann. Soc. entoin. de France, 1858, p. 278.) Les larves des Larinus vivent en général dans les capitules des Sy- nanthérées et s'y font des coques en tibrilles végétales agglutinées, tandis que les larves des Rhinocyllus, Germ., genre voisin, qui ont le môme habitat, se font des coques noirâtres uniquement d'une sub- stance visqueuse solidifiée. Les larves des Larinus, très-sédentaires, manquent de poils, et les nymphes sont moins épineuses postérieure- ment que celles des Lixus. En Orient, existent des Larinus dont les larves collent leurs coques aux rameaux des Onoporclon et des Echinops sur lesquels elles ont vécu. Ces coques sont employées dans le pays sous le nom de tréhala, pour guérir les aiïections catarrhales, au moyen d'un mucilage sucré qu'elles donnent en se dissolvant dans l'eau bouil- lante. M. Berthelot a découvert dans cette substance un sucre spécial, la tréhalose (1). PKRlTELlJS, Germ. — Corps ovale-oblong ou subovalaire, revêtu de squa- mules; antennes allongées, assez fortes. Corselet court, tronqué aux deux extré- mités •, pas d'écusson. Élytres à épaules arrondies, non saillantes. Les Peritelus se trouvent en général sur les pierres, à terre dans les chemins, au pied des arbres et aussi sur les plantes. Le type du genre est le P. griseus, Oliv., de 6 milllimètres, en entier d'un gris jaunâtre, maculé de noir sur les élytres à grosses côtes, avec corselet pointillé. Cet insecte est polyphage, et depuis quelques années ravage les Mû- riers des environs de Paris au premier printemps. La larve vide les bourgeons en respectant les écailles extérieures, au point que les Mû- riers, perdant tous leurs bourgeons, sont retardés d'un mois et ne don- nent de feuilles que par les bourgeons adventifs. Cette nuisible espèce (1) Guibourt, Berthelot, C. R. Acad. des sciences, XLVI, 1858, p. 1213 et 1276. — l\ Gervais et van Beneden, Zool. méd., I, 312, texte et figures du tréhala et de son insecte. 678 COLÉOPTÈRES. — CURCULIONIENS. n'est pas mentionnée au nord de la France (de Norguet, Catal. des Co- léopt. du départ, du Nord, Lille, 1.863, p. 154). En Lorraine, cette espèce ravage les Pommiers et Poiriers (M. Géliin), surtout les jeunes pousses et greffes; il faut secouer les arbres, recueillir l'insecte aptère et brûler, AWTno^'OllFS, Germ. — Corps ovalaire ou ovale-oblong, convexe. Bec cylin- drique et filiforme, très-peu arqué, prolongeant une tète obconique ; antennes à massue pointue. Corselet subconique très-rétréci en avant; élytres plus larges que le corselet à leur base, à épaules obtusément angulées, couvrant presque toujours entièrement l'abdomen. Pattes assez longues avec cuisses renflées (i). Comme l'indique le nom de ce genre, les larves vivent dans les fleurs, et les adultes sur le feuillage des arbres ou sur les fleurs, occupés à la ponte. Les espèces d'Europe sont de taille assez petite, à élytres striées ou ponctuées, avec un mélange de couleurs mates , sans dessin bien arrêté. Parmi les nombreuses espèces d'Anthonomes, cent, de tous pays, il en est deux très-nuisibles aux arbres fruitiers. Le premier est VA. pomorum, Linn., s'attaquant aux fleurs des Pommiers. Il a 5 à6 millim. de longueur, y compris le rostre. Sa couleur, corps et appendices, est d'un brun noi- râtre ; il est couvert d'un court duvet gris, serré et couché, et les élytres, ' ferrugineuses, ont une tache postérieure blanche cerclée de noir. Au commencement du printemps, quand les fleurs de Pommiers sont en boutons ou bourres à fruit, les femelles, qui ont hiverné sous les écorces, percent chaque bouton d'un petit trou où elles déposent un seul œuf; bientôt naît une larve qui dévore les étamines et le pistil : aussi jamais ces boutons ne donnent de fruit. Ils ne s'ouvrent pas , prennent une teinte rousse et ressemblent à des clous de girofle. Si on les ouvre, on voit au milieu un petit ver blanc couché en rond. Les gens de la cam- pagne attribuent ces dégâts à de mauvais hdles, à des vents roux soufflant en mai. Les adultes passent engourdis et cachés l'été, l'automne et l'hiver, pour s'accoupler au commencement du printemps suivant. Les fleurs des Poiriers sont détruites en France par une espèce spéciale à ce pays, très-voisine comme coloration de la précédente, un peu plus pe- tite, VA. Piri, Kollar, dont les mœurs et les époques d'apparition sont absolument les mêmes. On trouve en avril sa larve, appelée Ver d'hiver, Ver des bourgeons à fleur, et aucun bouton attaqué et roussi ne fleurit. Un cercle noir se forme à sa base, puis il noircit tout entier, se dessèche et tombe. La nymphe, ainsi que celle de l'espèce précédente, se loge et sô transforme dans le bouton. Depuis une douzaine d'années les jar- dins à fruit des environs de Paris sont envahis parce Charanson, presque inconnu autrefois, et qui est devenu un fléau pour les Poiriers en que- (1) Monograpbie par M. Desbrochers des Loges {Ann. Soc. entom. de France, 1868, p 411). GONATOCÈRES. — ANTHONOMUS, ORCHESTES. 679 nouille ou en espalier. Nous n'avons pas de bons moyens pour détruire les Anthonomes du Pommier et du Poirier. On pourrait bien enlever les boutons roussis au printemps et les brûler ; mais il serait fort à craindre qu'on se donnât une peine inutile, car ces insectes volent très-bien, et ceux des jardins voisins reviendraient continuellement. Le mieux est d'attendre les bons services de divers Ichneumoniens qui viennent per- cer les boutons attaqués et pondre leurs œufs dans le corps de la larve qui les dévore. Il faut respecter avec grand soin ces insectes, et bien se garder de les tuer quand on les voit voler au-dessus des fleurs de Pom- miers et de Poiriers. Une troisième espèce pond au printemps dans les boulons des fleurs des Cerisiers et des Merisiers, et les rend stériles ; mais cette espèce ne cause que des dégâts limités. C'est VA. druparum, Linn., de toute l'Europe, d'un jaune roux, avec les élytres ornées de taches brunes, le Charanson damier de Geoffroy. On dit qu'il se rencon- tre aussi sur les Pêchers et les Pruniers. Nous citerons encore les A. Ulmi, de Geer, de toute l'Europe et du Caucase, sur l'Orme ; A. Rubi, Herbst, de toute l'Europe, sur les Ronces et parfois sur les Rosiers, A. Sorbi, Germ., d'Allemagne, sur le Sorbier; A. pedicularius, Linn., de toute l'Europe, sur l'Aubépine, etc. ORCDE^iTES, lllig.— Corps ovalaire ou oblong. Rostre grêle, allongé, infléchi, replié en dessous au repos. Élytres arrondies et plus larges que le corselet. Cuisses postérieures renflées, propres au saut, souvent denticulées (1). Ces Curculioniens, dont le nom signifie sauteur, sont de petite taille et des deux continents. Ils comptent près de cinquante espèces, surtout d'Europe et d'Algérie, d'Amérique méridionale, du Cap, du Kamt- chatka. Ils vivent sur les arbres, et possèdent, comme les Ramphus, la faculté du saut ; ils s'en distinguent par un rostre plus allongé et par les antennes brisées. Nous citerons d'abord 0. Quercus, Linn., de toute l'Europe et du Caucase, à cuisses postérieures énormes et brièvement ovales, sur le Chêne et l'Aulne. Long de 3 millimètres 1/2, il est rougeâtre, avec une pubescence fauve, des bandes dénudées sur les élytres et le dessous brun. Il est très-commun dans la partie septen- trionale de la France. On trouve sur les Ormes l'O. rufus, Oliv., d'un roux testacé, à pubescence et poils grisâtres. Sa larve, étudiée par Réaumur et de Geer, est un ver mineur du parenchyme, vivant entre les deux épidermes des feuilles d'Orme, et formant près des bords comme des vessies renflées de chaque côté, là où vit la larve et où elle file sa coque, la partie minée prenant bientôt la couleur de feuille morte. Vu l'absence de filière buccale, M. Laboulbène pense {Ann. Soc. entom.Fr., 1858, p. 286) que la matière de la coque brune est prise à l'extrémité (1) Monographie par M. H. Biisout de Barneville [Ann. Soc. entcm. de France, 1865, p. 253). 680 COLÉOPTÈRES. — CURCULIONIENS. anale, comme chez les Phytonomus. 11 a pu en tirer, après ramollisse- ment à l'eau bouillante, non de vrais fils de soie, mais de gros fila- ments. La larve, d'un jaune clair, a des poils couris sur le bord des segments, et la nymphe, jaunâtre, en a encore plus, notamment sur la tête, le thorax, les bords externes des cuisses et des segments de l'ab- domen. Ces poils doivent servir, dans les deux étals, de points d'appui pour divers mouvements. Il faut ajouter à cette espèce \'0. Alni, Linn., de toute l'Europe, noir, couvert de petits poils blonds, à corselet et élytres jaunâtres, ces der- nières chargées de deux taches noires. Cet insecte, nommé par Geoffroy Charanson sauteur à taches noires, se rencontre sur les Aulnes et surtout sur les Ormes, comme l'espèce précédente. On remarque souvent, au commencement de mai, des Ormes dont beaucoup de feuilles sont ta- chées au bord ou à l'extrémité d'une couleur de rouille. En examinant les taches de près, on voit qu'elles occupent les deux épidermes, et qu'entre ceux-ci se trouve une petite larve courbée, apode, d'un blanc jaunâtre, qui dévore le parenchyme. Elle se change en nymphe contre le bord de la feuille en s'enveloppanl dans un cocon sphérique de fine soie roussâtre. Pour faire ce cocon, la larve, couchée sur le dos ou sur le côté, met en mouvement continuel sa tête et l'extrémité de son ab- domen qui concourent ensemble à la confection du tissu. En cerlaines années les feuilles de Hèlre offrent des taches semblables à celles dont nous venons de parler. Elles sont dues aux galeries creusées dans le pa- renchyme par la larve d'un Orchestes dont la femelle, au mois de mai, a percé avec son rostre un des épidermes de la feuille de H(ître récem- ment épanouie, et a déposé un œuf dans le parenchyme. I/aspect de la larve et sa nymphose sont pareils à ce que nous venons de dire. L'espèce nuisible au Hêtre, répandue dans toute l'Europe, est l'O. Fagi, Linn., ayant 3 millimètres de long, noir, à élytres striées, avec rostre filiforme appliqué au repos contre la poitrine, couvert d'une pubescence jau- nâtre. Quand cet insecte est très-abondant, il peut causer du dommage aux Hêtres, qu'il prive en partie de l'usage de leurs feuilles. On n'a d'autre moyen, pour diminuer les dégâts des deux Orchestes dont nous avons parlé, que d'arracher les feuilles tachées, de les écraser ou de les brûler, moyens qui ne sont praticables que sur de petits arbres. Un certain nombre de Draconiens et de Chalcidiens de petite taille (Hyménopt.) détruisent les larves de ces Orchestes, en les perçant dans la feuille au moyen de leur tarière de ponte, et introduisant ainsi dans leur corps des œufs d'où naîtront des larves carnassières. Nous devons ajouter à ces citations l'O. Salicis, Linn., de toute l'Europe, testacé, à élytres striées, sur le Saule et l'Osier ; le Charanson sauteur brun de Geoffroy. 11 y a des Orchestes chez lesquels les cuisses sont peu renflées et de forme normale. Pour vivre en mineuses des feuilles, les larves de ce genre sont suballongées, atténuées en arrière, sans mamelons. GONATOGÈRES. — BALA.NINUS. . 681 B.%L-%WIWUS, Germ. — Corps ovalaire. Aatennes longues et grêles ; rostre très- long et très-grêle, filiforme, arqué à l'extrémité. Corselet conique; élytres sub- cordiformes, à épaules saillantes, mais arrondies, trèsrétrécies en arrière et laissant plus ou moins à découvert l'extrémité de l'abdomen. Les Curculioniens de ce genre, ayant une quarantaine d'espèces dis- séminées partout [i), sont d'une étude difficile, par la ressemblance de forme et de couleur des diverses espèces, à corps épais et court, comme biconique, et les grandes variations de taille que peut of- frir une même espèce, d'après le plus ou moins de nourriture pris par la larve. Les mœurs et les métamorphoses sont pleines d'inté- rêt. Nous devons étudier d'abord une espèce qui nous est nuisible, appartenant aux grandes espèces du genre, le B. nucum^ Linn., de toute l'Europe et du Caucase, dont la taille varie de 10 à 12 millimètres et môme plus ; le Charanson trompette de Geoffroy, en raison de son long rostre recourbé, aussi long que la moitié du corps, d'un jaune verdâtre nuancé de gris par l'effet d'un duvet jaune sur un fond brun, à pattes fauves (figuré pi. l, flg. h; k h, mandibule ; h c, lèvre inférieure ; tx d, mclchoire et palpe ; h a, antenne, montrant un très-long scape, un fu- nicule de sept articles, dont les deux premiers sont les plus longs, et que termine une massue ovale allongée, articulée et acuminée). On sait qu'en certaines années la plupart des noisettes sauvages des bois ou des avelines cultivées des jardins sont véreuses, et ont un goût amer dû aux déjections. Il en résulte un préjudice notable, car les noisettes, outre leur vente comme comestible, servent pour faire de l'huile et pour la confiserie. Le ver dodu, blanc, courbé en arc et tout ridé, qu'on trouve dans l'amande de la graine est la larve du B.nucum, à tête ronde, écailleuse, d'un jaune brun, à fortes mandibules. En juin ou fin mai, la femelle perce les jeunes noisettes avec son long rostre effilé, et dé- pose dans chacune un seul œuf, d'où naît promptement une larve vo- race. Elle atteint sa croissance dès la seconde quinzaine d'août, et la noisette attaquée se détache en général et tombe sur le sol. La larve perce la coque du fruit d'un trou rond égal en diamètre à celui de la tête cuirassée, et par lequel les anneaux, plus gros et gonflés, sortent en se rétrécissant par effilement. La larve entre en terre à quelques centimètres de profondeur, s'enferme dans une boulette de fines par- celles, et passe engourdie l'automne et l'hiver. Réveillée aux premières chaleurs du printemps, elle se change en nymphe au mois de mai. Dans les jardins isolés des bois où Ion cultive des noisettes ou des ave- lines, on peut arrivera diminuer beaucoup les ravages de ce Charanson en ramassant dès le milieu d'août et jusqu'à la récolte du fruit tous les fruits véreux tombés sur le sol au pied des arbustes, et les brûlant avec (1) Monographie par M . Desbrocliers des Loges {Ann. Soc. enlom, de France, 1868, p. 331). 682 COLÉOPTÈRES. — CURGULIONIENS. leurs larves. En Suède, en France, en Allemagne, se trouve une espèce plus petite, de k millimètres, le B. cerasorum, Herbst, dont la femelle perce les petites cerises qui viennent de nouer, et dont la larve ronge l'amande contenue dans le noyau . Elle vit aussi dans les noyaux du Prunellier, L'insecte est cendré, avec une tache transversale blanche à l'extrémité des élytres. Une grande espèce, de 6 à 7 millimètres, le B. glandium, Marsh., d'Angleterre, de France, d'Allemagne et de Russie, roux, à écusson gris, marbré de brun aux élytres, se comporte à l'égard des glands du Chêne comme la première espèce pour les noisettes. En- fin il y a des Balanins de mœurs fort singulières, dont les femelles per- cent les galles formées sur les feuilles par des Cynipsiens (Hyménopt.), de sorte que les larves vivent d'un afflux de sucs destinés à d'autres : ainsi les B. crux, Fabr., et Brassicœ, Fabr., ou salicivorus, Payk.,5urles Saules; les B. villosus, Fabr., et pyrrhoceras, Marsh-, sur les Chênes. PHYTOBiuiD, Schœnh. — Corps brièvement ovalaire, finement pubescent et écailleux. Rostre assez court, épais, subcylindrique. Élytres amples et arrondies aux épaules. Tarses à troisième article spongieux en dessous et bilobé. Ces Curculioniens se trouvent au bord des eaux, sur les plantes, ou à leur pied dans le sable; nous les citons pour les mœurs de leurs larves, qui vivent en plein air sur les feuilles, protégées par une couche vis- queuse sécrétée par un mamelon du segment terminal, et sur laquelle viennent se répandre les excréments, ce qui est analogue à ce que nous verrons pour certaines larves de la tribu des Chrysoméliens. Leurs mé- tamorphoses se font dans une petite coque. Nous représentons le P. Comari, Herbst, de la plus grande partie de l'Europe septentrionale, très-petit Charanson noir vivant sur le Comarum palustre et le Chœro- phyllum hirsutum (pi. li, fig. 6 ; 6 6, antenne avec funicule de sept ar- ticles, et massue ovale-oblongue à articulations distinctes; 6 o, jambe et tarse antérieurs). Les Phytobius comptent quinze espèces d'Europe, des États-Unis, de Perse, du Kamtchatka. POKPUAGl!^, Schœnh. — Corps oblong, un peu déprimé en dessus. Une espèce, le P. Nasturtii, Germ., de presque toute l'Europe et de l'Algérie, uniformément d'un vert bronzé et couverte d'un duvet gris, ce qui lui donne un aspect vert pâle mat, vit dans le Cresson de fon- taine, plante alimentaire cultivée dans des ruisselets artificiels ou cres- sonnières, près des grandes villes, où elle est l'objet d'une consomma- tion considérable. On trouve en juin la larve dans une galerie occupant le milieu des tiges, et souvent au-dessous du niveau de l'eau. Elle se tient étendue droite dans sa galerie, progressant par ses anneaux gon- flés et munis de mamelons, et se courbe en arc lorsqu'on l'en soft. Vers le milieu de juin, elle se change en nymphe dans un cocon ovale, court, arrondi aux deux bouts, formé d'une soie grossière, blanchâtre BAGOUS, GONATOCÈRES. — BRACHONYX, HEILIPUS. C83 à l'intérieur et revêtu extérieurement de débris de moelle et d'excré- menls. L'adulte sort à la fin de juin et au commencement de juillet. U y a une seconde espèce, le P. Sisymbrii, Fabr., d'Allemagne. BAGorSi, Germ. — Corps oblong, allongé. Rostre médiocre, assez robuste, cylin- drique, à scrobes droites; antennes insérées au milieu du rostre, avec fimicule de sept articles et une massue ovale assez forte ; écusson très-petit. Élytres obtusément angulées aux épaules, arrondies au sommet. Tarses étroits, à ongles simples. Les Bagous aiment, comme les genres précédents, les lieux humides ; on les trouve sur les plantes aquatiques et sur le sol près des eaux ; leurs couleurs, variant du fauve clair au brun noirâtre, sont souvent voilées par de la vase ou une sorte d'enduit mucilagineux. Le type est le B. binodulus, Herbst, des îles Britanniques, de Suède, de France et d'Allemagne, de petite taille, avec deux tubercules vers le sommet de chaque élytre (pi. l, fig. 2; 2 a, tête et antenne ; 2 b, tarse postérieur). On le trouve en juin près de Paris. Ce genre a une quarantaine d'espèces, surtout d'Europe, puis d'Algérie, de Cafrerie, de Sibérie, de Calcutta. îj,KMOS.aCCU!S(, Schœnh. — Rostre court, cylindrique; antennes courtes, à fu- nicule de sept articles. Corselet transversal et convexe. Élytres laissant à décou- vert le dernier et parfois une partie de l'avant-dernier arceau abdominal supé- rieur. Ces insectes, au nombre d'une vingtaine d'espèces, sont d'Amérique méridionale, de Tasmanie et d'Australie. — Ex. : L. Chevrolati, G.-Mén., du Brésil, noir, à élytres rugueuses, canaliculées, d'un brun rougeâtre (pi. L. fig. 1; la, tète et antenne). BRACHOliYX, Schœnh. — Corps allongé, subcylindrique, finement velu. Tête courte; rostre peu allongé, filiforme, un peu arqué. Pattes et tarses courts, le troisième article des tarses englobant le quatrième ; crochets très-petits. Ce genre est fondé sur une seule et très-petite espèce, le B. indigena, Herbst, entièrement brunâtre ou ferrugineuse, ou mélangée de ces deux couleurs (pi. l, fig. 3; ocr, tarse). Cette espèce, de Suède, de France, d'Allemagne et du Tyrol, vit sur les Pins, et sa larve, par une particularité de mœurs remarquable, ronge l'intérieur des feuilles aci- culaires de ces arbres. nEIIilPU§( ou HiLiPUS, Germ. — Antennes médiocres. Corselet arrondi sur les côtés, très-rétréci en avant. Élytres oblongues, à épaules obtusément angulées. Pattes robustes ; des ailes ; téguments durs et écailleux. Ces insectes, très-nombreux en espèces, plus de deux cents, de taille assez grande ou moyenne, sont de l'Amérique, surtout méridionale, et 684 COLÉOPTÈRES. — CURCULTONIENS. semblent y représenter, dit Lacordaire, nos Hylobius et Pissodes. Ils vivent sur les troncs d'arbres, souvent cachés dans les fentes et cavités de l'écorce; quand un danger les menace ou qu'on les saisit, ils ne simu- lent pas la mort, mais se cramponnent aux écorces. Nous figurons 17/. peplus, Sc.bœnh. , du Brésil (pi. l, fîg. 5), noir avec une bande latérale jaune formée par des écailles, et les élylres finement striées et ponc- tuées. Il y a une espèce du Japon. .%LCIDE§>, Daim. — Corps oblong, convexe, écailleux par places, ailé. Rostre épais, droit ou un peu arqué. Corselet renflé et arrondi au milieu; élytres ren- flées à la base, subcylindriques ou ovales-oblongues. Pattes antérieures en général très-longaes et fortes. Ce genre, dont beaucoup d'espèces sont encore inédites dans les ca- binets des amateurs, est répandu au Cap, au Sénégal, dans les Indes orientales et leurs archipels, à Madagascar, dans la Mélanésie. Nous représentons (pi. l, flg. 6) VA. prœustus, G.-Mén., de la Nouvelle-Gui- née, rapporté lors du voyage d'exploration de la Coquille, châtain, sub- cylindrique, à tète et pattes noires, ayant le thorax et une partie du bout des élytres comme couverts d'une poussière soufrée. MYORHIIVU*^, Schœnh. — Corps ovalaire et convexe, finement écailleux. An- tennes grêles à massue articulée ; tète et rostre continus, comprimés sur les côtés. Élytres convexes, oblongo-ovales, non saillantes aux épaules. Pas d'écus- son; pas d'ailes. Pattes assez longues; cuisses ea massue. Ce genre, répandu du midi de l'Europe jusqu'à l'extrémité de l'Afri- que, comprend de petites espèces d'un vert doré cuivreux, ou d'un vert blanchâtre. Leurs élylres sont toujours striées et ponctuées. Les mœurs sont inconnues. — Ex. : M. albolineatus, Fabr. , du midi de la France, delà Russie et de l'Allemagne, de la Hongrie (pi. L, fig. 7; la, tète de profil et antenne). CHYI»TORllYJ%'C'm,'ii, ■ Illig. — Corps ovule-oblong, convexe. Bec infléchi, arqué, subcylindrique, se logeant dans un sillon de la poitrine, entre les hanches antérieures. Corselet très-rétrcci en avant, arrondi sur les côtés; élytres con- vexes, obtusément angulées aux épaules, recouvrant complé:ement l'abdomen. Ce genre, très-nombreux en espèces, environ deux cent vingt, et de couleurs très-diverses, se trouve dans toutes les parties chaudes et tempérées du globe. L'Amérique possède à peu près autant d'es- pèces à elle seule que toutes les autres régions prises ensemble. L'Europe n'en a qu'une seule espèce, répandue partout, le C. Lapathi, Linn., de 6 millimètres, noir, avec bande grise à la base des élytres, et grande tache grise vers le bou^. Ce Charanson, dit de la Patience, se trouve sur les Saules, les Aulnes, les diverses espèces de Peupliers, GONATOCÈRES. — CRYPTORHYNCHUS, BARIDIUS. 685 et sa larve creuse des galeries sinueuses, profondes dans les troncs de ces arbres. On peut le regarder comnie très-dangereux pour les pépinières de Peupliers, ou pour les jeunes sujets plantés à demeure. C'est à la tin de juillet et au commencement d'août que les adultes éclosent, et la femelle pond ses œufs à la partie inférieure des liges, perçant le bois et l'écorce avec son rostre allongé, et déposant un œuf dans la blessure. Les petites larves étendent leurs galeries de bas en haut, d'abord prés de l'écorce, puis de plus en plus dans l'intérieur du bois; quand elles restent près de l'écorce, celle-ci brunit et se fissure sur leur chemin. Le bois, percé longitudinalement de plusieurs galeries, perd de sa force, et le vent peut casser l'arbre ; les larves achèvent alors leur croissance, soit dans le tronc debout, soit dans la tige couchée à terre. La nymphe est placée dans une cellule creusée dans le bois et fermée aux deux extrémités avec des fibres pressées ; celte cellule est peu éloignée de l'écorce que perce l'adulte pour sortir. BAI&ID1U§>, Schœnh., ou Baris, Goureau. — Corps oblong ou ovale-oblong. Poitrine sensiblement plane, sans canal pour recevoir le rostre. Les larve& de ces Charansons vivent dans les tiges ou les racines de diverses plantes, près du collet, parfois produisant des galles, et l'on trouve les adultes sur les feuilles, ou au pied sur le sol. Une espèce, assez commune aux environs de Paris, est quelquefois fort nuisible aux Choux. Elle s'attaque surtout aux espèces à haute tige : Chou cavalier, Chou à vache, Chou de Bruxelles, et peut se rencontrer aussi dans les espèces basses, comme le Chou pommé, le Chou de Milan, etc. C'est le B. chlorizans, Germ., qui se rencontre en France et en Allemagne, d'un vert sombre et terne, un peu luisant au cor- selet, à élytres finement striées, long de h millimètres. Les femelles percent avec leur rostre les tiges de Choux près du collet, et y in- troduisent de trois à six œufs. Les larves creusent dans la tige des galeries longitudinales qui s'élèvent de bas en haut ; elles rongent les parties succulentes, en laissant derrière elles les parties fibreuses mêlées à leurs excréments. Au commencement d'août, parvenues à toute leur taille, elles se font une loge ovale, plus large que la ga- lerie, tapissée de fibres courtes et tassées, et s'y changent en nymphes. Quand cinq ou six larves sont ainsi logées dans une même tige de Chou, celui-ci languit et finit par périr, ses feuilles jaunissant. Les adultes paraissent en septembre, s'engourdissent en hiver, s'accouplent et pon- dent au printemps. Il est probable qu'une partie est restée sur les tiges de Chou pour ne sortir qu'au printemps suivant. Il serait bon d'arra- cher et de brûler les tiges de Choux aussitôt après avoir récolté les feuilles ou la tète, au lieu de les laisser sur place ou de les jeter sur le fumier : on détruirait ainsi beaucoup de ces nuisibles Charansons. Il se- rait bon aussi de consommer de préférence les choux qui commencent 686 COLÉOPTÈRES. — CURCULIONIENS. à languir et ne pas attendre leur mort. Ce même Curculionien se ren- contre aussi dans les plantations de iS'avette, cultivée pour l'huile des graines de ses siliques. Les larves minent l'intérieur des tiges et passent ensuite dans les racines, où elles se changent en nymphes et en adultes Elles tamponnent la cellule aux deux bouts avec des fibres hachées et pressées avant de subir la nymphose. On cite une seconde espèce du même genre, le B. cldoris, Fabr., de France, d'Allemagne, du midi de l'Espagne, de Hongrie et du Cau- case, d'un bleu un peu verdâtre en dessus et noir en dessous, qui fait quelquefois beaucoup de mal dans les plants de Colza, les larves perfo- rant de leurs galeries la moelle des liges. Le genre comprend près de deux cent cinquante espèces de tous les pays de la terre. (Monographie par M. H. Brisent de Barneville, Ann. Soc. entom. de France, 1870, p. 31 et 287.) ACAliliES, Scbœnh. — Corps aptère, ovalaire et convexe. Rostre infléchi, allongé, logé dans un sillon pectoral ; antennes médiocres, à funicule de sept articles et massue ovale-oblongue. Corselet rétréci en avant, arrondi sur les côtés et à la base; pas d'écusson. Élytres ovalaires, convexes, arrondies, plus larges que le corselet. Pattes robustes ; tarses courts, à quatrième article assez grand, ainsi que ses crochets (1). Ce genre, nombreux en espèces, plus de cent, est assez richement représenté en Europe par des espèces de petite taille, de livrée terne, sans véritable dessin ; les téguments sont écailleux, le corselet granu- leux ; les élytres ont des stries peu profondes, avec intervalles tuber- cules. Ces Curculioniens offrent, comme intérêt physiologique, un ap- pareil stridulant analogue à celui de certains Scarabéiens, formé par des stries du pygidium et de la surface interne des élytres, produi- sant un bruit aigu par leur frottement. La même disposition se ren- contre chez le Cryptorhij nchus Lapathi, inscclc de type analogue. Nous représentons VA. ptinuiden, Marsh., des îles Britanniques, de France et d'Allemagne, qu'on trouve aux environs de Paris (pi. u, fig. 10 ; 10 a, patte antérieure; 10 6, tête vue de profil et antenne). Les métamor- phoses sont inconnues. On trouve les Acalles d'Europe dans les bois, sous la mousse, sous les écorces, surtout des Chênes, dans leurs bran- ches, ou en secouant des fagots sur un drap, et aussi sous les pierres et sur les Chardons. Outre l'Europe, les espèces sont d'Algérie, des Cana- ries, de Madère, du Caucase, du Brésil, du Chili, du Mexique, des An- tilles, de Java, d'Australie, de Tasmanie et de Polynésie. (1) Monographie par M. H. Brisout de Barneville [Ann. Soc. entom. de France^ 18GÛ, p. lilii). GONATOCÈRES. — CEUTHOIiHYNCHUS. 687 CEliTMORHl'il'OHUS, Germ. — Corps courtement ovalaire. Antennes médiocres et grêles, à massue oblongue, insérées au milieu du rostre; celui-ci cylindrique et plus ou moins arqué, appliqué au repos sur la poitrine. Corselet rétréci en avant; pas d'écusson. Élytres peu convexes, subdéprimées, plus larges que le corselet à la base, obtusément angulées aux épaules, arrondies au sommet et laissant un peu à découvert le bout de l'abdomen (rostre caché). Les insectes de ce genre sont de petite taille, finement pubescents ou écailleux, surtout répandus dans les régions froides et tempérées, ayant ou une teinte uniforme, ou des taches blanchâtres, mal limitées sur un fond sombre. Ils comptent plus de deux cents espèces, de tous pays, sauf Madagascar, l'Australie et la Polynésie. Ils vivent sur un grand nombre de végétaux^ s'e trouvant sur les feuilles et les fleurs. Il en est qui sont funestes à des Crucifères cultivées. De ce nombre est le C. sulcicollis, Payk., d'Europe et d'Algérie, noir, avec quelques poils grisâtres et un sillon longitudinal sur le corselet, dont la femelle pique le liant de la graine des Navets et dépose autant d'œufs qu'elle fait de trous; chaque larve vit dans une galle formant nodosité sur la racine, qu'elle épuise. Il faut avoir soin de nettoyer les navets ainsi atteints et qu'on veut conserver ; et de brûler les racines de choux tubercules, car ce Charanson s'attaque aussi à cette plante, mais lui est moins nuisible qu'aux Navets et aux Turneps. — Le C. Napi, Gyll., de France, d'Allemagne, d'Algérie, à peu près moitié plus petit que le précédent et recouvert d'écaillés d'un gris jaunâtre, s'est beaucoup répandu depuis quelques années dans les environs de Paris. La larve ronge les tiges des Colzas et des Choux, et les jeunes feuilles du cœur de ceux-ci, se métamorphose en terre, et produit l'adulte en juillet. <— Enfin; le C. assimilis, Payk., de toute l'Europe, de 2 1/2 milhmètres de long, noir, avec un duvet blond, introduit ses œufs et ses larves dans les siliques de Navette et de Colza, et les graines sont dévorées. Cet in- secte, étudié par M. Focillon, fait d'assez fréquents ravages aux envi- rons de Paris et aussi dans le nord de la France. Les larves de ces Ceu- thorhynchus des Crucifères quittent pour la nymphose la plante qui les nourrit, s'enfoncent dans le sol et s'y construisent une coque. Un certain nombre de larves de Ceuthorhynchus yi\enl dans des galles végétales qui se développent autour de l'œuf, à la façon des Cynipsiens (Hyménopt.), et fournissent à l'insecte une accumulation de nourriture suffisante à son développement complet, car l'insecte sorti, la galle est vide. Déjà nous avons cité ce fait pour le C. sulcicollis. M. Guérin-Méne- ville a recueilli les galles assez grosses que sa larve fait développer à la racine des Choux, au-dessous du collet. Les larves, parvenues à toute leur croissance, quittent ces nodosités, s'enfoncent en terre, et y de- viennent nymphes dans une coque terreuse ronde;, dont l'adulte sort en mai pour monter sur les feuilles et les liges des Choux et en ronger lé 688 COLÉOPTÈRES. — CURCULIONIENS, parenchyme. Les femelles déposent leurs œufs sur les racines, ou en été, ou après hibernation, point qui reste à éclaircir. On a trouvé aussi la larve du C. sulcicollis dans des galles du Sinapis arvensis. Une autre espèce, le C. contractus, Marsh., de 1 1/2 à 2 milli- mètres, ovalaire, noir, un peu bronzé parfois, avec élylres bleuâtres, rarement verdâfres, a sa larve vivant dans des galles sur diverses plantes, sur les racines du Navet, du Sinapis arvensis. Aux environs de Paris cette larve a été rencontrée dans des renflements de la tige du Draba verna, Linn. (Crucifères, Sinapacées), en forme de poire conique, immédiate- ment au-dessus de la touffe des racines, au point de la réunion des feuilles en rosette. Ces galles paraissent au premier printemps et n'empêchent pas la petite plante de fleurir et de fructifier. Elles sont d'un vert foncé comme les feuilles de la plante, avec une teinte rougeûtre et violacée sur un des côtés. Elles sont formées de cellules végétéiles, condensées surtout à l'extérieur, et avec des trachées comme on en Irouve aussi à l'intérieur des noix de galle du Chêne. Dans ces galles sont des larves blanchâtres, molles, glabres, courbées en arc, de douze segments, outre la tête bru- nâtre, ayant un ocelle noir de chaque côté et un rudiment d'antennes (I). Vers la fin du printemps, ces larves sortent des galles, s'enfoncent en terre de quelques centimètres, et deviennent nymphes dans une coque formée de grains de sable agglutinés par une substance insoluble dans l'eau, sans aucune trame soyeuse. La coupe de celle coque représente un ovale court, largement et un peu obliquement ouvert à l'un des bouts après la sortie de l'adulte au mois de juin. Elle ressemble beaucoup, mais avec dimensions moindres, à la coque terreuse du C. sulcicollis. M. E. Cussac a étudié les métamorphoses d'une espèce très-commune aux environs de Lille, le C. Raphani,Fahv. La femelle, à la fin de mai, pond sur les tiges du Symphytum officinale {Borraginées), ou grande Con- Eoude, plante commune dans les prairies humides, le long des ruis- seaux et des fossés d'irrigation. Les œufs sont ovales, réunis par grou- pes de trois à quatre, et assez espacés pour que les larves ne se nuisent pas réciproquement. Elles s'enfoncent dans les tiges et restent toujours dans leur moelle humide ; atteignent 8 à 9 millimètres, sont allongées, atténuées aux deux extrémités, assez molles, d'un blanc sale, sauf la tête etleprolhorax, semi-cornés et d'un jaune ferrugineux,; une double série de mamelons charnus à la face inférieure des segments et des poils ser- vent à la progression dans les tiges. La nymphe, blanchâtre, ovale, de 3 millimètres seulement, munie de quelques appendices sur la tête et le thorax, estformée surplace sans enveloppe, dans la moelle humide, à Ja fin de juin, et l'adulte éclôt une quinzaine de jours après. (Ann, Soc. entom. France, 1855, p. 2ûl.) (1) A. Laboulbène, Métamorphose d'un Cenihorhynchus qui produit une galle sur lel Draba verna [C. Drahœ, sjn. contractus). {Ann. Soc. entom. de France^ 1856, p. 1Û5.) GONATOCÈUES. — CtUTHORIlYNCllIDiCS, GENrUINLS. 689 CËKTHORHVIV€BIDIUi^, J. (lu Val. — Caractères du genre précédent, sauf le funicule des antennes, qui n'a que six articles au lieu de sept. Comme pour le genre précédent, les insectes de ce genre vivent sur les feuilles et les fleurs de beaucoup de plantes. Nous représentons le C. terminatus, Herbst, des îles Britanniques, de Suède, de France et d'Allemagne (pi. li, fig. 5; 5a, tète de profil et antenne; 5 6, jambe et tarse postérieurs). Il a été pris abondamment en juillet près de Paris, sur le Siuin nodiflorum (Ombellifères). Le genre a une quinzaine d'espèces toutes d'Europe, sauf une de Cafrerie. CnOLlJS, Germ. — Tête courte et arrondie avec rostre long et assez robuste. Corselet arrondi sur les côtés, très-rétréci en avant; élytres fortement et gra- duellement rétrécies en arrière. Pattes assez longues, surtout les antérieures, à cuisses renflées en massue. Corps rliomboïdal ou oblongo-elliptique, lisse, plus ou moins pubescent. Les espèces de ce genre, au nombre d'une vingtaine, propres à l'Amé- rique du Sud chaude, présentent sur un fond obscur des bandes d'ua jaune plus ou moins foncé. — Ex. : C flavo-fasciatus, Chevr., du Brésil (pi. LI, fig. 1). EIIRHII%'1j!!>, Schœnh. — Antennes courtes et très- robustes, à funicule de sept articles et massue courte, subconoïde. Corselet très-convexe, très-rétréci en avant; élytres courtes, isolément arrondies à l'extrémité, pas plus larges que le corselet. Pattes médiocres et robustes. Corps court et rliomboïdal, glabre, brillant. Ces beaux Charansons, propres à l'Amérique interiropicale, brillent d'un riche éclat, bleu, vert, cuivreux, etc. — Ex. : E. flatuarius, Germ., du Brésil (pi. li, fig. 2; 2a, antenne). Douze espèces. CEWTRIWIJS, Schœnh. — Corselet convexe, très-rétréci et tubuleux en avant ; élytres à épaules calleuses, fortement rétrécies et conjointement arrondies en arrière. Corps plus ou moins rliomboïdal. Ce genre, à nombreuses espèces inédites, se trouve répandu depuis le Chili et Bnenos-Ayres jusqu'au centre des États-Unis. Le catalogue Gemminger-Harold relève cent soixante-six espèces. Nous donnons comme exemple le C. curvirosfris, Bohem., Chevr., du Brésil, noir, à corselet bordé de taches jaunes, à élyires striées et munies de deux bandes (pi. i.i, fig 3; on, tète de profil et antenne), espèce curieuse par ses antennes et son rostre si grêles, celui-ci très-long et recourbé en dessous. GIRARD. 44 69U COLÉOPTÈRES.— CURCLLIONIENS. COPTlJRlIi), Schœiih. — Antennes longues et très-grêles. Corselet fortement blsinué à sa base ; élytres planes, échancrées à la base, à épaules obtusémenl saillantes, laissant le pygidium un peu découvert. Pattes grêles, à cuisses caré- nées et épineuses. Ces insectes, de couleurs varices, au nombre de quaranle-cinq espèces, souvent doucement nuancées et d'un aspect velouté, se ren- contrent du sud du Brésil au milieu des États-Unis. — Ex. : C. rubri- collis, Gyll., de Cayenne, à corselet d'un fauve rougeâtre (pi. li, fig. U; k a, tête de profil, montrant un rostre long, recourbé en dessous et dont le bout atteint le bord antérieur du mésosternum, où se trouve souvent une dépression pour le loger). Une espèce de la Nouvelle- Guinée. DIORVMERUS OU DiORYGOMERUS, Scliœnh. — Corselet transversal, brusquement et brièvement tubuleux en avant; élytres très-convexes, courtes, fortement et régulièrement rétrécies en arrière. Pattes assez robustes, avec tarses à troisième article large et spongieux en dessous. Corps très-épais, globoso-ovale ou sub- rhomboïdal, glabre. Ces Charansons sont de l'Amérique du Sud chaude, surtout du Brésil, et habituellement ou d'un rouge fauve ou noir, ou bien avec ces deux nuances associées et fondues; le corselet et les élytres sont tantôt lisses, tantôt ponctués et striés. — Ex. : D. angulicullis, Bohem., du Brésil (pi. u, fig. 7), ou D. altus, Germ. Environ quarante espèces. MECOPUS, Schœnh. — Antennes grêles, à funicule de six articles, avec massue à premier article très-long, en cône renversé, les autres formant un petit cône spongieux et aigu. Rostre grêle, ayant chez les mâles les deux tiers de la lon- gueur du corps, d'abord droit, puis arqué en parabole. Yeux contigus, convexes, occupant toute la partie antérieure de la tête. Corselet tubercule, tubuleux en avant ; élytres planes, rétrécies et isolément arrondies au bout. Pattes très- longues et grêles, les antérieures beaucoup plus grandes que les autres. Ces Charansons, de caractères si curieux et si tranchés, ont le corps oblong et couvert d'écaillés. Leurs espèces, dont beaucoup ne sont pas décrites, habitent le sud de l'Asie, du Bengale aux îles occidentales de la Polynésie, et aussi la Cafrerie et l'Australie. Nous figurons le M. tri- iineatus, G.-Mén., de la Nouvelle-Guinée (pi. li, fig. 8 ; 8a, yeux conti- gus; 8 6, tête de profil et prosternum muni de deux longues épines aiguës et redressées au bout (caract. gén.); 8 c, antenne très-grossie). Cet insecte, dont le nom vient des trois lignes que porte longitudinale- ment le corselet, a d'abord été rapporté du voyage d'exploration de la Coquille. Environ quinze espèces décrites. GONATOCÈÎtES. ~ GRATOSOMUS, TACHYGONUS, CIONUS. 691 CRATOSOMUS, Schœnh. — Rostre tantôt plat, large et droit^ tantôt arqué, élargi, caréné en dessus. Yeux grands, convexes, rapprochés et souvent sub- coatigus sur le front. Corselet rétréci en avant; écusson grand, arrondi ou acuminé en arrière ; élytres oblongo-ovales, à épaules calleuses débordant le corselet. Pattes assez longues et robustes, avec cuisses en massue et dentées. Corps pubescent ouécailleux. Ces Curculioniens atteignent une taille souvent gigantesque pour la tribu. Ils sont répandus dans les parties les plus chaudes de l'Amé- rique, du Mexique au sud du Brésil, avec nombreuses espèces à la Guyane. Nous représentons le C. bispinosus, Chevr. (pi. u, fig. 9), de Cayenne, d'un noir assez brillant, à élytres striées de points rudes, iné- galement recouverts de squamules blanchâtres. Ses élytres sont isolé- ment mucronées aux extrémités, caractère qui se retrouve chez beau- coup d'espèces du genre. Environ soixante espèces. TACnYGOJlUS, Schœnh. — Tète saillante et obconique, à rostre court et ro- buste; antennes peu coudées. Corselet arrondi et tronqué en avant; élytres amples, cordiformes, à épaules très-arrondies, bien plus larges que le corselet et échancrées à la base. Pattes comprimées, denticulées^ les postérieures très- élargies et très-longues. Ce genre est formé de Charansons aberrants, de très-petite taille, se rencontrant des États-Unis au Brésil et à la Guyane, à corps brièvement rhomboïdal, déprimé, hérissé de longs poils fins, à élytres sillonnées de grosses côtes, de couleur noire uniforme ou relevée par du jaune. 'Nous figurons le type du genre, T. Leconfei, GylL, ou horridus, Chevr. (pi. i,, fig. 9), de Philadelphie. Il simule la mort avec obstination quand on le saisit, et n'a pas la faculté du saut, comme on pourrait le croire à pre- mière vue, d'après sa conformation. Il vil sur le Chêne et se tient sous la face inférieure des feuilles. Il voltige autour de ces feuilles et s'y pose souvent, ce qui lui est facile par ses longues pattes postérieures. Au moment où ces insectes s'approchent de la feuille, ils font une cul- bute et la saisissent au moyen de leurs longues pattes postérieures. A cet instant, ils abaissent leurs élytres, et le corps reste suspendu un moment la tète en bas, jusqu'à ce qu'ils aient pu s'accrocher à la feuille avec leurs autres paltes. L'espèce n'a que 3 millimètres de long sur 2 de large. Six espèces. CiOXlJS, Clairv. — Corps ovalaire, très-convexe. Antennes assez courtes, insérées vers le bout du rostre, avec funicule de cinq articles et massue de trois ou quatre. Corselet subtransverse ; élytres plus larges, brièvement ovalaires, subrectangles. Les couleurs des Cionus se composent d'habitude de petites taches rondes sur un fond variable ; leur taille est minime. On les trouve, sou- 692 COLÉOPTÈRES. — CURCULIOiME.NS. vent en assez grand nombre, sur diverses plantes, principalement des groupes des Verbascées et des Scrofulaires. Les larves, Irès-bien étu- diées par M. E. Perris, appartiennent au type des larves de Curculio- niens vivant à découvert sur les feuilles. De forme ovale-allongée, très- mamelonnées, adhérant fortement aux feuilles par des bourrelets ven- traux des segmenis antérieurs, elles complètent leur consolidation au moyen d'une matièrcvisqueusedont leur corps est enduit, et que sécrète un tube rétractile situé en dessus de la base du dernier segment. Cette matière gluante dégoûte les oiseaux, empêche l'évaporation du corps de la larve par la chaleur solaire; lors de la nymphose, elle se forme en abondance et constitue une loge solide dont l'insecte sait, en con- tractant son corps, se détacher à l'intérieur, et sous laquelle s'opèrent ses deux dernières mues. La nymphe paraît ne durer qu'une semaine environ. L'espèce représentée est le C.pulvereus, Gyll. (pi. l, fig. 8; 8a, antenne), d'un gris de poussière, de Grèce et de Dalmatie. Elle oITre, sur la suture des élytres une forte tache noire, caractère qui se re- marque chez beaucoup d'espèces du genre Cionus- Les deux genres sui- vants ont la plupart des caractères des Cionm. Les Ckmus comptent une trentaine d'espèces, surtout d'Europe, des Canaries, d'Afrique australe, de Sibérie, de Perse. ]%.%l%'OPllYEi§, Scliœiih. — Corps ovalaire ou ovale-oblong, Irès-convexe ou même un peu gibbeux, attéimé anlérieuremeiit. Les insectes de ce genre vivent dans un très-grand nombre de plantes. On a découvert aux environs de Paris, en fauchant sur des plantes basses, le N. flavidus, Aube, petit Charanson entièrement testacé en des- sus, de 2 millimètres. Dans le midi de la France, plusieurs espèces de ce genre se trouvent sur les Tamarix. Suivant M. P. Gervais, la larve du N. Tamarisci, Gyll., vit dans les ovaires des Tamarix, et, renfermée dans le fruit, peut le faire sauter à plusieurs reprises. La science offre plu- sieurs exemples de fruits sautants dus à une cause analogue : ainsi par une chenille de far^wcc/^Ma (Lépidopt.) américaine (,11. Lucas); ainsi di- verses galles à Cynipsiens (docteur Giraud). il y a une quarantaine d'es- pèces de Nanoplujcs, surtout d'Europe (1). ClYMilE'rnojV, Schœnli. — Corps ovale, courtement ovalaire ou ovale-oblong-, peu convexe ou subdéprimé supérieurement. Ce genre a des mœurs analogues au précédent; ses espèces sont éga- lement assez nombreuses en Europe, vivent sur les plantes; leurs larves en dévorent les fleurs, et elles paraissent subir leurs métamorphoses dans les fruits. Une monographie de ce genre a été publiée par M. H. Brisout de Barneville [Ann. Soc. enlom. de France, 186'2, p. 625). On (1) Mono^r. du genre Nanopliyes, par M. H. Bris, de Barn., Abeille, VI, 1869, p.. 305. GONATOCÈRES. — RHINA, APHIOCEPHALUS. 693 récolte ces insectes en fauchant sur les prairies humides, au hord des ruisseaux, eu visitant les Verbascum et les Linaires. On a décrit quel- ques larves vivant dans des galles, sur le Veronica Beccabunga, sur la Li- naire vulgaire, au collet de la racine (G. Linariœ, Panzer, de toute l'Eu- rope, assez rare près de Paris), sur diverses Campanules. Dans toute l'Europe se trouve le G. Campanulœ, Linn., commun dans le midi de la France, rare près de Paris, se prenant à Mantes, à Fontainebleau. M. A. Laboulbéne a trouvé sa larve à la Grande-Chartreuse, prés de Grenoble, dans les fleurs renflées inférieurement du Campanula rhomboi- daiis (An7i. Soc. etitom. Fr. , 1858, p. 900). Elle se loge dans un gonflement de l'ovaire, dont elle détruit les graines dans la partie qu'elle occupe. Elle est blanchiltre, molle, courbée en arc, pourvue de pseudopodes ou de mamelons sous-thoraciques, rétractiles, vestiges de pattes, analogues à ceux observés chez les larves du Toraicus stenograplms, de VApion basi- corne, Illig., etc. La nymphe est brunâtre avec un reflet vert bronzé, et se trouve, comme la larve, dans l'ovaire renflé, mœurs qui difTùrent de celles des Ceuthorhijnclms , où la larve quitte sa galle pour se nympho- ser en terre, l/adalte sort de l'ovaire par un trou rond. Il est noir, subdéprimé, à. long rostre grêle, recouvert de poils courts d'un cendré blanchâtre, disposés en séries sur les élytre^. Le mâle est très-remar- quable par deux saillies qui terminent l'abdomen et qu'on voit déjà sur sa nymphe. Les Gymnetron ont cinquante espèces, presque toutes d'Eu- rope, surtout méridionale, de Perse, de Cafreric, du Cap. KHIIV.%, Latr. — Tète subglobuleuse et saillante, avec rostre 'droit, dilaté au milieu, puis déprimé, villeux en dessus et sur les côtés ; antennes submédianes, assez longues et peu robustes. Corselet tronqué à la base et rétréci en avant; élytres allongées et cylindroïdes. Pattes grêles et longues, surtout les antérieures. Ce genre, de forme si tranchée, est composé de neuf grandes espèces de Charansons du Mexique, des Antilles, de l'Amérique du Sud, et aussi dans l'ancien monde, des côtes occidentale et orientale d'Afrique. Leur corselet est toujours couvert de gros points enfoncés et les élytres for- tement sillonnées; la couleur est d'un noir assez brillant. — Ex. : lî. barbirostris, Fabr., du Brésil (pi. lu, fig. 2), dont le nom rappelle un des principauv caractères du genre. .%PmoCEl»llAixiS, Lacord., ou Conocephalus, Schœnh. — Tête en cône al- longé, avec rostre long, robuste, dilaté et échancré au bout ; antennes avec funicule de six articles et massue terminée par une partie spongieuse. Corselet allongé, subarrondi; élytres planes ; pygidium triangulaire, très-découvert. Pattes robustes et comprimées avec tarses à troisième article trigone et spongieux. Ce genre est fondé sur de très-belles espèces de Madagascar, à corps allongé, subelliptique, revêtu d'une efflorescence veloutée, de grande 69i COLKOPTËRES. - CURGlUJONIliNS. taille, à élytres creusées de sillons profonds, d'un beau rouge ou à dessins rouges élégants sur fond noir. Nous représentons une de ces riches espèces recherchées des amateurs, VA. Guerini, Klug. (pi. i.n, flg. 3; 3a, antenne). On le trouve sur les Vaquois, et sa taille varie de 26 à ùO millimètres de long. Trois espèces décrites, deux de Madagascar, une de Maurice. CAI/AIVDRA, Clairv., ou Sitophilus, Scljœnh. — Rostre légèrement arqué, cjlin- droïde; antennes insérées vers sa base, à funicule de six articles, avec massue solide, biarticulée. Corselet allongé-oblong, rétréci antérieurement; élytres oblongues, obtusément angulées aux épaules, atténuées en arrière, laissant à découvert le pygidium. Ce genre funeste offre certaines espèces de petite taille, à élytres striées et ponctuées, de couleur noir brunâtre, pouvant passer au rouge ferrugineux, ou offrir un mélange de ces deux couleurs. La seule espèce originaire d'Europe, et qui s'est répandue partout où se trouve le fro- ment, est le C. granaria, Linn. (pi. lu, fig. 1 a, tète de profil, avec rosire et antennes ; 1 b, élytre avec granulation différente de C. Orijzœ qui n'a pas de points entre les côtes; 1 c, tarse antérieur du mâle). Le corps est allongé, oblong, subdéprimé, de 3 millimètres de longueur, brun, ainsi que les appendices; la femelle, comme dans les autres espèces du genre, a le rostre plus long et plus grêle que le mâle. Les anciens connaissaient cet insecte : populatque ingentem farrix acervum Curculio (1) dit Virgile {Géorgiques, I, V, 185, 186). On le nomme Charanson du blé, Calandre, Cosson, Goitssoii, etc. On le trouve sur les murs et dans les fentes des planchers des greniers, des granges et des magasins de blé, où il multiplie quelquefois en nombre prodigieux et cause des dommages considérables. Les autres céréales ne souffrent pas de ses attaques. Dès le commencement du printemps, les femelles fécondées entrent dans les tas de blé, et font un trou à un grain avec leurs mandibules, ordinairement dans le sillon où le tégu- ment est plus tendre; chaque grain reçoit un œuf, adhérent par son vernis naturel. Au bout de peu de jours naît une larve qui ronge peu à peu toute la farine, ne laissant, comme les Bruches pour les graines de légumineuses, que la pellicule inaltérée. Cette larve est un ver blanc, mou et glabre, apode, à corps ridé parles segments, à tête ronde et jaunâtre. C'est dans le grain que se forme la nymphe, et l'adulte éclôt de quarante à cinquante jours après la ponte. Il ronge aussi le blé, mais fait bien moins de tort que sa larve. Les grains rongés semblent (i) Le Charanson ravage un vaste tas de blé.., CALAWDRA : CONSEUVATTON DES GRAINS. 695 à la vue parfaitement sains; maiSj comme ils sont devenus bien plus légers que les autres, ils surnagent si l'on jette une poignée de blé dans l'eau, moyen qui fait reconnaître le désastre. Les générations se succè- dent sans interruption pendant l'été et l'automne ; à l'entrée de l'hiver, les Charansous quittent les grains et se réfugient dans toutes les fentes et trous, dans les planchers, sous les toitures, passent engourdis la sai- son rigoureuse, pour s'accoupler au printemps, et reprendre leurs dé- vastations. Bien des moyens ont été proposés contre ce fléau, souvent inefficaces, parfois ridicules. Il y a des moyens préventifs destinés à écarter les Ca- landres. On a sérieusement conseillé de jeter des écrevisses sur les tas de blé, leur odeur devant éloigner les Calandres ; on ne retire aucun effet appréciable de diverses plantes fortement aromatiques, comme le chanvre, les hièbles, les camomilles, les pyrèlhres, etc. Peut-être le mieux, comme odeur éloignant ces insectes, serait, à en juger par le bon effet produit dans les collections, l'emploi de l'acide phénique im- prégnant des chiffons qu'on suspendrait au-dessus des tas de blé. Le gou- dron chaud, dont on peut enduire le bas des murs, empêchera bien pendant quelque temps les Charansons de monter, mais les rejette dans le blé sans les faire périr. On a proposé de maintenir dans le grenier, au moyen d'un ventilateur, une basse température, au plus de 10°, de manière à empêcher l'accouplement et la ponte ; mais ce procédé ne serait sérieusement praticable qu'en hiver, saison où les Calandres ne font que peu de mal. On a dit : Battez le blé de bonne heure, et met- tez-le en lieu bien clos, comme silos, sacs, tonneaux. Il faut remarquer qu'il n'y a dès lors plus de surveillance possible, et que, si quelques œufs étaient déjà pondus, tout le grain sera avarié. Plus nombreux sont les procédés de destruction, la Calandre ayant agi, la plupart, il faut le dire, peu commodes et trop coûteux. On a recommandé d'enfermer dans les greniers infestés des oiseaux exclu- sivement insectivores, comme les mésanges et les bergeronnettes. On a imaginé de suspendre au-dessus des tas de blé des toisons en suint, dont l'odeur attire les Calandres qui s'empêtrent les pattes dans la laine grasse ; de temps à autre on les retire et on les secoue au-dessus d'un brasier : ce moyen ne peut détruire qu'une partie des adultes et laisse dans les tas de blé toutes les larves et nymphes. Les fumigations de ta- bac brûlé ou d'acide sulfureux ont peu d'effet sur l'intérieur des tas, ne font guère qu'étourdir les insectes pendant quelques jouis et peu- vent communiquer au blé une odeur fâcheuse. Un procédé assez em- ployé est le criblage ou le pelletage. Les Charansons aiment le repos et l'obscurité, et se répandent, inquiétés de la sorte, dans le grenier. On a soin de laisser intact un tas d'appât, où ils ne tardent pas à se réfugier en grand nombre, et qu'on inonde alors d'eau bouillante. On peut aussi soumettre le blé attaqué aux ventilateurs ou aux tarares, ainsi à la tarare Herpin, en réglant le vent de telle sorte que le maître blé, plus 690 COLFOPTÈRES. — CURCULIONIENS. lourd, tombe, tandis que les grains attaqués sont projetés plus loin, et qu'on soit ainsi à même de les rassembler et de les brûler. On se sert encore d'appareils fondés sur la force centrifuge ; les grains tombent dans des godets de métal animés d'une rapide rotation, sont heurtés avec force contre les parois, ce qui détache les œufs, tue les larves et les adultes, et la ventilation produite sépare ceux-ci des grains sains. Ainsi est l'appareil Nicaud, exposé en 1868 au concours régional d'Or- léans et à l'exposition des insectes à. Paris. Les appareils à choc^ le tue-teigne, la machine à battre, etc., ne peu- vent pas garantir une destruction complète de la Calandre ou d'autres insectes nuisibles aux céréales, de sorte qu'il reste après leur emploi un blé encore suspect, capable de reproduire, avec le temps et après emmagasinage, la cause du mal. Mais ces procédés ont l'avantage d'employer des machines portatives et d'être à l'abri de toutes les pré- ventions commerciales qui peuvent nuire de la manière la plus grave à la vente des grains qui ont subi un ensilage ou un chauffage. On indique aussi de placer le blé dans un tonneau ou dans un silo rempli aux deux tiers, et de laisser quelques jours en présence une corbeille contenant de la filasse ou des chiffons imprégnés de sulfure de carbone, liquide à bas prix, dont les vapeurs tuent les adultes, les lar- ves, les nymphes, mais peuvent bien parfois, comme les expériences sur les collections d'insectes le montrent, ne pas agir sur les œufs. Kn outre, ces vapeurs, sans certaines précautions, sont dangereuses pour l'homme, très-combustibles et capables de former avec l'air de terribles mélanges explosifs. La méthode des silos a eu pour défenseur ardent un naturaliste voué d'abord aux études théoriques et à l'enseignement, et qui a compris ensuite que les applications sont le but principal et réel- lement le devoir du savant. Dans notre climat humide, les silos présen- tent des difficultés de construction qui ne s'offrent pas dans des pays chauds et plus secs, ce qui explique leur grand usage chez les Ro- mains, et leur emploi actuel dans le sud de l'Espagne et chez les popu- lations du nord de l'Afrique. Doyère fait remarquer qu'un ne trouve jamais de Charansons dans les silos de l'Eslramadure, si ce n'est dans le col où l'air pénètre par filtration à travers la terre. Ces insectes pé- rissent promptement dans les silos bien fermés de Rota. Il arrive sou- vent qu'il Cadix des négociants anglais vendent des cargaisons de blé échauffés et avariés par un trop long voyage dans la Méditerranée. Les habitants de Rota les achètent et les ensilent, et en trois mois de séjour dans les silos, les grains sont rafraîchis et les Charansons détruits. Doyère s'est occupé de la construction des silos pour préserver le blé non-seulement de la Calandre, mais aussi de deux Microlépidoplères très-nuisibles, la Teigne des grains et surtout l'Alucite. Pour le climat humide, qui est celui de la plupart des régions de la France, il recom- mande la construction de silos de tôle, vernissés à l'extérieur contre l'oxydation, et entourés d'une maçonnerie de béton qui porte toutes CALANDRA : CONSERVATION DES GRAINS. 697 les charges (1). Les principes rationnels de la conservation sont les sui- vants : 1 " Les grains, pour se conserver dans les silos ou ailleurs, doivent être secs, 2° Les silos ne doivent donner accès ni à l'hùmidilé ni à l'air atmosphérique. 3" Les silos doivent être souterrains, parce qu'une tem- pérature basse, comme celle des caves et des puits, ne favorise ni le développement de la fermentation, ni l'activité et la multiplication des insectes. Comme le blé bien sec n'altère pas l'air des silos, on pouvait craindre que les Charansons et autres insectes n'y continuassent leurs ravages. Il y a peu de danger de ce côté aux environs de Paris et plus au nord, où les silos, enfoncés à 2 mètres, ne s'élèvent jamais à 15", ce qui amène vite la mort des insectes, peu actifs ni enclins à se reproduire ; mais en Espagne, en Algérie, la température des silos peut atteindre 20° jusqu'à Zi à 5 mètres de profondeur, et les insectes dès lors peuvent s'y mul- tiplier. Comme la fermeture hermétique des silos suggère l'idée des substances asphyxiantes, on a essayé, sur la proposition de Doyère, le sulfure de carbone. Les expériences de ce genre furent faites à Alger en 1857 par la Commission supérieure des subsistances militaires, sur des silos remplis d'orge ou de blé, noirs de Charansons. Il fut reconnu qu'avec 15 grammes de sulfure de carbone par hectolitre de blé, dé- pense insignifiante, l'effet insecticide a lieu en vingt-quatre heures ; que les Charansons et leurs larves périssent, desséchés, fragiles et comme carbonisés, et que les œufs même sont anéantis, résultat qui nous paraît avoir besoin d'un nouveau contrôle. Avec des doses moin- dres de sulfure de carbone, les insectes ne meurent pas aussi vite, mais s'engourdissent et cessent aussitôt leurs ravages. Le liquide, très-volatil, disparaît immédiatement dès qu'on retire les grains des silos, et celui-ci n'a perdu aucune de ses qualités pour la germination ou pour la pani- fication. 11 en est de même pour l'orge et l'avoine destinées aux ani- maux ; et enfin, aux faibles doses employées, la manipulation de cette substance est sans danger pour les hommes chargés de l'assainissement des silos : aucune autre substance ne réunit tous ces avantages au même degré. Un troisième moyen à essayer est le chautTage des grains, très-discré- dité en raison d'expériences faites sans précautions convenables, et qui (1) L. Doyère, Recherches sur Z'Alucite des céréales, l'élendue de ses ravages et les moyens de les faire cesser, suivies de quelques réflexions relatives à l'ensilage. (Paris, Ann. de l'Inst. agronomique, 1852, p. 269.) Ce mémoire, très-important à consulter pour les agriculteurs, comprend trois séries de méthodes de conserva- tion des grains décrites et discutées : 1° le chauffage des grains; 2° la ventilation et le choc; 3° les silos. — Mémoire sur l'ensilage rationnel, système nouveau pour conserver les grains d'après les données positives de la science et de la pra- tique, etc. Paris, 1856, br. in-8°, Paul Dupont. — Conservation des grains par l'ensilage, avec les documents o/}ioiels. Paris, 1862, Guiilaumin et C". 698 COLÉOPTi-iîliS.— CURCULIONIENS. exige, pour reprendre son crMit, une surveillance rigoureuse et une observation formelle des prescriptions que nous allons indiquer. Ce n'est pas autre chose qu'une application industrielle de l'ancien nécrenlome des entomologistes pour débarrasser les boîtes de collections des larves funestes. Avec les blés du commerce, dont la dessiccation est toujours imparfaite, on ne ]»eut pas dépasser 70° centigr. sans altérer la faculté germinative des blés de semence, et, pour la pratique en grand, c'est sensiblement vers les mômes températures que des altérations se pro- duisent relativement à la panification. Vers 70" et au-dessus, l'enve- loppe du caryopse devient fragile et friable, et, réduite en poussière sous la meule, communique à la farine un teinte grise ; en outre, le gluten, substance albuminoïde, tend à se coaguler, effet qui augmente graduellement de 75° à 85°, de sorte qu'il ne donne plus qu'une pâte courte, mal liée, comme celle que produirait un mélange de fécule ou de sable. Il est vrai qu'on peut rendre aux farines, en grande partie au moins, leurs propriétés panifiantes en les hydratant après le chauf-. fage ; mais on comprend combien le commerce de la boulangerie peut frapper de dépréciation, souvent irréfléchie, les grains qui ont subi un chauffage appréciable parles effets précédents, il est indispensable dans la pratique agricole de ne pas même atteindre les températures extrê- mes, et de se contenter, dans l'intérieur des tas, de 55" à 60°, ce qui suffit pour tuer les insectes au bout d'un certain temps, qu'il faut ré- gler selon le cas par expérimentation préalable. Les adultes au dehors des grains sont tués promptemenc ; mais il faut plus de durée de la chaleur pour atteindre les œufs et les larves cachées dans le grain. Les insuccès fréquents des appareils de chauffage et leur discrédit s'expli- quent par leurs imperfections. Dans les procédés où le grain n'était pas remué, il fallait chauffer très-fortement la partie externe des tas pour obtenir à l'intérieur des grains les températures nécessaires pour tuer les insectes; de là un mélange de blés altérés et infertiles très-préjudiciable pour le marché. Il est nécessaire de produire une agitation dans le blé chauffé, afin que tous les grains puissent atteindre à la même température sans la dé- passer. Le thermomètre est d'un emploi très-utile à cet efl'et, et la sen- sation de chaleur à la main, fort variable selon l'habitude, ne le rem- place que bien imparfaitement. Au milieu du xvni^ siècle, lors de leur mission dans l'Angoumois ra- vagé par l'Alucite, Duhamel et Tillet y trouvèrent établie la pratique du cliauffouraije, ou introduction des grains avariés dans les fours du boulanger pour tuer les insectes. Us y joignirent la recommandation de remuer le blé et de ne pas trop chautfer ; mais ce moyen, ainsi que l'usage de la vapeur d'eau à 100°, altère gravement les céréales par un excès de chaleur. Les vrais principes du chauffage des grains furent mis en œuvre dans l'étuve rotative,* ou hélice insecticide de M. Terrasse- Pesbillons. Le grain est ballotté dans des spirales d'xVrchimèdc placées CALANDRA : GONSERVATIOiN DES GRAINS. 699 dans une caisse à air échauffé par un fourneau de tôle. Doyère remplaça les spirales par un cylindre incliné et tournant, où glisse le grain, et se servit du thermomètre plongé dans une boîle de bois où se rendent les grains. La difficulté de ces appareils est de bien régler la tempéra- ture de l'air chaud, qui ne doit varier au plus que de 55 " à 65", et mieux de 57° à 62" ; on y arrive par l'ouverture graduée du registre du calori- fère, par une vitesse de rotation variée, par une introduction plus ou moins rapide de blé froid. Le dernier système de chauffage des grains et le plus perfectionné, est celui du docteurVergier,d'Argentan-sur-Creuse (Indre), récompensé par une médaille de bronze à l'Exposition de 1867. Le principe nou- veau de M. Vergier est d'employer la vapeur d'eau, source à tempéra- ture bien constante, pour produire l'échauffement de l'air dans lequel séjourne le grain, ce qui permet de bien mieux régler la chaleur. Il y a deux appareils différents. L'un, destiné à la petite culture, à fonction continue (1). Il est formé d'une trémie qui doit toujours être remplie de blé, placée au-dessus d'un cylindre fixe de tôle, dans lequel un ser- pentin double fait passer un courant de vapeur produite par un géné- rateur quelconque, ainsi celui d'une locomobile, d'une machine à battre, etc. Inférieurement, le cylindre contient une hélice tournante à axe horizontal (emprunt à l'appareil Terrasse-Desbillons), qui, en vi- dant peu à peu le cylindre, produit dans le blé un mouvement conti- nuel, soumettant également tous les grains à une chaleur de 55° à 60°. La vapeur du serpentin se condense, en dégageant à l'état libre sa cha- leur de mouvement, et l'eau s'écoule par un robinet. Cet appareil peut servir non-seulement pour les céréales infectées par la Calandre ou l'Alucite, mais pour les légumes en graines sèches, pois, haricots, len- tilles, etc., contenant des Bruches ; pour les graines de colza, navette, moutarde, etc., contenant des larves de Charansons, et également pour dessécher rapidement les substances alimentaires sèches avariées par l'humidité (2). L'autre appareil Vergier, destiné plus spécialement aux grandes fer- mes, se compose de deux cylindres concentriques, pouvant tourner ensemble autour d'un axe horizontal. Il n'y a plus de serpentin ; la va- peur d'eau, que fournit un générateur, circule dans l'enceinte annulaire. Une trémie supérieure contient le grain, qu'on fait tomber dans le cylindre médian lorsque ses parois ont été amenées par la vapeur ;'. environ 100°. On remplit celui-ci à moitié seulement; alors les deux cy- lindres concentriques sont mis en rotation autour de leur axe commun, afin que les grains puissent venir par couches successives en contact (1) Maurice Girard, Génie rural, elc, Inseclologie agricole, 'à'-' année, 18G9, p. 291. Paris. Donnaud. (2) Cet appareil a été mis en dépôt à Paris, à la maison Pellier, 10, rue Fontaine- au-Rol. 700 COLÉOPTÈr.ES. — CURCULIONIENS. avec la paroi cliaufFée, et cela jusqu'à ce que la masse, dont la tempé- rature s'était abaissée à liO° par l'introduction du blé froid, ait acquis 50° à 60°. La durée de l'opération est de quatre à six minutes, selon l'es- FiG. 20. — Étuve Vergier pour les grains atlaijués (1). pèce de grain ou graine. Le grain chaud est vidé dans le baquet infé- rieur où l'on a soin de laisser s'entasser les grains, afin de les maintenir chauds le plus longtemps possible, ce qui est indispensable pour bien tuer les insectes, surtout les Calandres, qui, a vu M. Vergier, résistent (1) 0, trémie à blé ; CV, cylindre extérieur à vapeur ; B, cylindre intérieur à blé ; T, n', tuyaux de conduite de la vapeur ;• XX, axe de rotation; m, manivelle; M, M, supports. Un compteur à secondes est joint à l'appareil. CALANDRA : CONSERVATION DES GRAINS. 701 à une chaleur de 80", si elle ne dure que peu de temps, les grains re- froidis sont secs et coulants, sans aucune altération. Pour la grande industrie, soit afin d'assainir les grains attaqués, ou afin de dessécher les farines destinées à l'exportation, on peut combi- ner les doux systèmes, c'est-à-dire la double enveloppe et le serpentin à vapeur au milieu de la substance à chauffer; on peut alors, selon la saison, assainir en deux ou trois minutes un hectolitre de blé. L'épreuve a été faite en ce genre en 1862, et des échantillons présentés à l'empe- reur Napoléon III, les uns de blés chauffés devenus parfaitement sains, les autres des mêmes blés horriblement avariés dans les flacons, soit par les papillons, soit par les Calandres. il est utile, quand les greniers sont atteints par la Calandre, de ré- duire au plus vite le blé en farine, puis de passer à la chaux les murs et les poutres; de faire un balayage minutieux, de couvrir les murs d'un enduit lisse, de boucher toutes les fentes, et de laisser quelque temps la salle sans recevoir de nouveau blé, afin que lesCharansons qui resteraient encore cachés aient le temps de mourir de faim. La propreté constante des greniers est le meilleur préservatif. La nature nous a donné quelques auxiliaires contre cette fatale en- geance. Le meilleur est un petit Chalcidien (Hyménoptères) du genre Pteromalus, d'un vert bleuâtre foncé, à antennes noires, à pattes blan- châtres, ù yeux rougeâtres. Il est parfois si nombreux, que les tas de blé et les' sacs qu'il recouvre paraissent verts ; le fermier peut alors se ré- jouir, certain de voir disparaître son ennemi pour quelque temps. On doit encore ciler un petit Coléoptère brun, allongé et plat, qui abonde dans les granges et greniers : le Sylvanus sexdentatus ou frunientnrius, Fabr. (voy. p. 375), importé, dit-on, de Surinam ; il donne, ainsi que sa larve, la chasse aux larves de Calandres. Il faut lui adjoindre dans ce service le Trof/osita mauritanien, Linn. (voy. p. 373), regardé ù tort dans le Midi, sous le nom de Cadello, comme nuisible. La Calandre des grains atlaque le blé en paille dans les granges et dans les meules, mais moins que lorsqu'il est baltu et en tas. Ses ra- vages sont encore assez sensibles dans le midi de la France, à pratiques agricoles routinières, mais diminuent de plus en plus dans le Nord. Ils sont devenus presque insignifiants aux environs de Paris. Cela tient à une raison d'économie générale, qui fera peu à peu disparaître la Ca- landre. Autrefois les fermiers conservaient longtemps les grains ou les blés en paille, les accaparaient même dans les années d'abondance, afin de revendre à fort bénéfice lors des disettes. Aussi il n'était pas rare, dans le commencement du siècle, de voir des blés conservés cinq à six ans en greniers, et parfois les ravages des Calandres ruiner leurs détenteurs. Aujourd'hui l'intérêt du fermier n'est pas de conserver long- temps ce capital improductif et sujet à avarie : en cas de pénurie, les blés étrangers, entrant en franchise et circulant rapidement par mer et par voies ferrées, détruisent tous les calculs fondés sur les grandes ré- 702 COLÉOPTËKES. — CLIICLLIONIENS. serves. Aussi maintenant le blé est vite vendu et soumis à la mouture; on exécute un battage rapide, à mesure des demandes. Autrefois, au contraire, le battage était si lent, qu'il prenait une partie de l'année, et obligeait à amasser en tas des grains que l'on ne pouvait, sans cela, ré[jondre d'avoir disponibles à jour fixe. On ne garde donc plus aujour- d'hui les blés en greniers ou en meules que le moins de temps possible ; l'eflet disparaît avec sa cause, le long emmagasinage. Une seconde espèce de Calandre, originaire des Indes orientales, et répandue maintenant partout, est le C. Oryzœ, Linn. (pi. lu, tig. 1), es- pèce voisine de la précédente, un peu plus petite, de 2 1/2 à 3 milli- mètres, avec les élytres à stries et d'un aspect différent du C. cjranaria, plus épaisse, brune, avec quatre taches rougeâtres mal limitées sur les élytres, qui sont au contraire unicolores dans l'espèce du froment. Cette Calandre est très-commune dans le riz avarié, et attaque aussi le mais. Le chauffage, de peu d'inconvénient pour le riz, est le meilleur moyen de détruire cet insecte. M. Boisduval {bisectol. agric, 3<= année, 1869, p. 99) a vu le C. Onjzœ sortir en abondance des fruits du Nelum- bium speciûsum envoyés de Chine en bocaux. Or, toutes les Calandres dont on connaît les larves vivent exclusivement de graines de Monoco- tylédones. Cet instinct de l'insecte, selon M. Boisduval, est peut-être une raison qui doit militer en faveur de l'ancienne opinion de A. Ri- chard, qui plaçait les Nymphéacées dans les Monocotylédones, d'après la structure de l'embryon. Le genre Culandra proprement dit comprend une vingtaine d'espèces exotiques des deux mondes, sauf l'Australie. Il est fort difficile de con- naître l'origine première du C. granaria, qui doit se lier à celle du froment. Nous figurons une espèce de Calandre exotique, de deux couleurs, le C. taitensis, G.-Mén., de Taïti (pi. ui, fig. U; lia, tête de profil; Ul>, an- tenne). Elle est très-voisine des C. exarata, de Bourbon, et subfasciata, de Java, espèce de Schœnherr. Ce dernier auteur range le C. taitensis, G.-Mén., dans les espèces douteuses, mais seulement parce qu'il ne l'a pas vue. On a détaché du genre Calandra des anciens auteurs le genre Rhyn- chophorus , Herbst, pour des espèces des régions chaudes des deux continents, au nombre actuel de vingt, constituées par des Charansons de grande taille. Le type est la Calandre des Palmiers, ou R. Palmarum, Linn., noir, terne et comme velouté en dessus, brillant en dessous, à écussou très-allongé, avec les cuisses et les jambes toutes couvertes en dessous de cils noirs. Le mâle a le rostre portant une crête en dessus et antérieurement, et muni de soies noires serrées ; chez la femelle il est glabre et atténué aa bout. Ce grand insecte, ù élytres sillonnées, est commun aux Antilies, à la Guyane, au nord du Brésil, etc. Sa larve, grosse et dodue, d'un blanc sale, vit dans les troncs de Palmiers qu'elle détériore cousid rablement. Au moment de lu nymphose, elle THIGONOTARSUS. — MliC APUUCTLS. 703 se façonne une coque ovale, formée de filaments de bois détachés par elle dans ce but. Les stipes perforées sont celles du Palmier sagou [Sa- (JUS Raphia, Lam.), arbre précieux par ses amas internes de fécule ou sagou, au milieu desquels s'engraisse la larve ; par ses fruits, son vin dû à la sève ; dont les feuilles servent de couverture aux cases des nègres et des indigènes, dont les folioles acérées leur fournissent pour la pêche des sagaies redoutables. Lherminier a observé à la Guadeloupe que la femelle ne pond ses œufs dans les Palmiers que lorsque la cime, ou choux palmiste, a été coupée, et il rapporte que dans cette île on trouve la larve dans le centre médullaire de VAreca oleracea. Au Vene- zuela, dit M. A Rojas, on prend cette espèce sur plusieurs genres de Palmiers, et aussi, à l'ardeur du soleil, suçant le lait du Carica Papaya, ou Papayer, quand on vient de couper les branches d'où suinte un suc propre à vertus énergiques. On trouve aussi l'insecte dans les terres chaudes, sur le tronc du Cocotier {Cocos nucifera, Linn.). La Calandre des Palmiers, très-commune dans les collections, a été figurée sous les trois étals par M. E. Blanchard {Hist, des Ins., 18li5, pi. 15, et Métam. des Ins., 1868, p. 5/i7). La larve de cette espèce doit se ranger parmi les in- sectes comestibles. Sous le nom àfi ver palmiste, elle fait les délices de certains colons, imitateurs des convives de Lucullus pour d'autres lar- ves, et avalant la matière liquide interne comme une crème délicate ; les dames surtout en sont très-friandes. Les indigènes de la Guyane re- cherchent beaucoup ces larves, qu'ils nomment gusanos, et les mangent rôties et enfilées sur des brochettes. TRMiiOXOTAKSDS, G.-Méii. — Rostre assez long et droit, épaissi et subqua- drangle à sa base. Antennes à funicule de six articles. Corselet allongé, rétréci en avant ; écusson grand et triangniaire ; élytres légèrement rétrécies et arron- dies en arrière, laissant à découvert le pygidium. Pattes longues et robustes, avec tarses à trois premiers articles obcouiques ou subtriangulaires, et le qua- trième très-grand, ainsi que ses crochets. Ce genre, qui ne comprend qu'une espèce, est fondé sur un gigan- tesque Charanson de l'Australie, décrit pour la première fois par M. Bois- duval dans sa faune de l'Océanlej et vuisin des grandes Calandres tru- picales. C'est le T. rugosus, Boisd., ou caluudroides, G.-Mén. (pi. lu, fig. 9; 9 a, tête de profil), d'un noir presque mat et criblé d'un réseau de gros points enfoncés sur le corselet et les élytres, celles-ci en outre assez fortement sillonnées. Le corps est oblongo-ovale et glabre. MECiAPROCTl'S, Scliœn., ou Oxypygus, Lacord. — Rostre allongé, grêle, cylindrique; antennes grêles à funicule de six articles. Corselet en cône allongé ; élytres planes laissant à découvert un long pygidium en triangle acutangle. Ces iiisectes, au nombre de cinq espèces, sont du continent indo- chinois et des grandes îles voisines. — Ex. : M. acutus, Fabr., ou elonga- 70^ COLÉOPTÈRES. — CURC;UL10l^lE^S. tus, Dej., ou ocellatits, G.-Mén., de l'île de Java (pi. lu, fig. 5 ; 5 a, corps de profil ; 5 b, antenne), esp(>ce devant son nom à un ocelle à l'extré- milé de chaque élytre. CERC'IU0€ER|.'§>, Schœnh. — Rostre assez long, robuste, foitement arqué; antetiHes courtes, robustes, à funicule de six articles, avec massue transversale- ment linéaire ou triangulaire, trois fois au moins et jusqu'à six fois plus large que longue, à bord tranchant, recouverte d'une masse spongieuse (cette massue est bien plus fêduite chez les femelles). Corselet allongé, rétréci et brièvement tubuleuxen avant; élytres déprimées, rétrécies en arrière, laissant à découvert un pygidium déclive. Tarses longs. Corps oblong, subelliplique, le plus souvent revêtu d'un enduit ou d'une efflorescence veloutée. La forme exceptionnelle de la massue antennaire fait immédiate- ment reconnaître ce dérivé du type des Calandres ; il est propre à l'indo- Chine et aux îles Malaises. — Ex. : C. securifer^ Gaede, ou nigro-lateralis, (Î.-Mén. (pi. LU, fig. 6; 6a, corps de profil; 6 6, antenne), de Java, jaune, avec large bordure noire. Les genres par lesquels nous terminerons l'immense tribu des Cur- culioniens constituent un passage manifeste aux Scolytiens par leur petite taille, leur aspect, et surtout par la forme et les mœurs de leurs larves. tOSSO.lil'S, Clairv. — Rostre fortement épaissi et dilaté vers l'extrémité, qui porte des antennes courtes, à funicule de sept articles, avec massue indistincte- ment articulée ou subsolide. Élytres allongées, linéaires, tronquées à la base, arrondies ensemble au sommet; écusson bien distinct. * Les Cossunus sont le fype d'une famille de Charansons de forme li- néaire, cylindroïde, déprimée, en rapport avec une vie sous les écorces ou dans les vieux ti'oncs d'arbres, à la façon des Xylophages. Les yeux ont une tendance à se rapetisser ei même à disparaître; les téguments sont en général glabres ou couverts de poils fins et redressés. Certains insectes de ce type sont épigés et arénicoles, s'enfonçant dans les sables au bord de la mer ; la plupart vivent dans les bois, et les larves prati- quent des galeries dont la forme varie suivant les espèces, et où elles se changent en nymphes. Deux larves d'un genre très-voisin habitent dans le Pin maritime et les bois de charpente qui en proviennent ; ime autre, aussi d'un genre rapproché, creu.se des galeries longitudinales dans l'aubier des Sapins. La livrée du genre Cossonus est noire ou ferru- gineuse, rarement mélangée de ces deux couleurs; les élytres ont des stries droites et ponctuées. Le genre Cussonus, sauf l'Australie, paraît cosmopolite. On trouve surtout ses espèces dans les régions chaudes des deux continents, et aussi aux îles Sondaïques, à Madagascar, à la C08S01NLS, RAYMONDIA, DRYOPHTHORUS. 705 Nouvelle-Calédonie, à Tonga-Tabou, aux îles de France et Bourbon, à Ceylan, à l'île Saint-Vincent, aux Antilles. Il y en a trois espèces en Europe, parmi lesquelles nous citerons le C. linearis, Fabr., de 6 à 7 mil- limèlres, d'un brun noir brillant, avec le corselet très-ponctué, et les çlytres parfois rougeâtres, à stries de forts points. Cette espèce se trouve dans les souches de Peupliers en décomposition ou sous leurs écorces. Nous représentons le C. ephippiger, G.-Mén., de Java (pi. ui, fig. 7 ; 7 a, antenne; 7 6, jambe et tarse antérieurs). Cette espè£e semble porter une selle d'un noir bleu adaptée à un insecte rougeûtre, et couvrant toute la région antérieure des élytres, celles-ci striées de points, avec intervalles lisses. RA YMOiVDI A , Aubé. — Tête petite et globuleuse; rostre assez allongé et cylin- drique; antennes à funicule de sept articles. Yeux nuls ; écusson nul. Élytres oblongo ovales, pas plus larges que le corselet. Pattes courtes. Corps oblong, atténué en avant, légèrement pubescent. Ce genre dégradé constitue un nouvel exemple de Curculioniens aveugles, souterrains, dont les larves vivent probablement de racines ou de provisions végétales des fourmilières. Il est Irès-probable que le nerf optique manque, ainsi que M. Lespés l'a constaté pour diverses es- pèces aveugles, cavernicoles et autres {Ann. sciences nat., 5"^ sér., Zool., 4868, IX, 63). La première espèce découverte dans le Var, sous une pierre profondément enfoncée, est le R. fossor, Aubé, atteignant à peine 2 millim. de long, d'un jaune testacé clair, couvert de gros points. On a trouvé depuis quelques autres espèces : ainsi le R. Delaroitzei, Ch. Brisout de Barneville, dans les Pyrénées-Orientales, en compagnie de petites Fourmis, et le R. Marqueti, Grenier, près de Toulouse, sous des couches d'argile. Ce sont là des raretés de collectionneurs d'un grand intérêt phy- siologique par adaptation de la structure aux mœurs. Il y a des espèces de la France méridionale, du nord de l'Italie, de Corse et de Sardaigne. DRYOPATHORtlS, Schœnh. — Corps allongé, peu convexe. Rostre assez long, subcylindrique, peu arqué, à scrobe courte et profonde ; antennes courtes, à funicule de quatre articles, avec massue grande, subsolide. Yeux petits. Corselet oblong, rétréci antérieurement ; élylres allongées, oblongues, un peu plus larges que le corselet à la base, obtusément angulées aux épaules. Tarses grêles, de cinq articles, par développsment insolite du quatrième article. Le type de ce genre et la seule espèce d'Europe est le D. lymexylorif Fabr., de Suède, de France, d'Allemagne, du Caucase (pi. m, fig. 8 ; 8 a, tête de profil et antenne ; 8 b, jambe et tarse antérieurs ; 8 c et 8(/, un tarse figuré dans diverses positions pour bien montrer la pentamérie). Cet insecte, de petite taille, 3 à U millimètres, assez commun, d'un brun rougeâtre terne, rugueux, avec fines côtes tranchantes sur les élytres, vit sous les écorces et dans les détritus de vieux troncs d'arbres, notamment dans le Pin maritime, le Chêne, le Coudrier, le Peuplier GIRARD. A5 71)6 COLÉOPTÈRES. — GÉRAMBYCIENS. du Canada, recherchant ' le bois sec ou qui a subi un commencement de décomposition. Ses larves, longues de 5 à 6 millimètres, le criblent de galeries. De môme que les autres larves du type Cossonus, elles res- semblent aux larves des Scolytiens. Comme celles-ci, elles ont le corps recourbé en arc, revêtu de courts poils redressés et de petites spinules visibles aux instruments grossissants, et leur servant à cheminer dans les galeries; les palpes des deux sortes sont biarticulés, les antennes très-courtes. Ces larves sont aveugles et sans pattes, celles-ci étant rem- placées par des mamelons et deux bourrelets de chaque côté. L'espèce n'a qu'une génération par an ; les pontes se font en mai et en juin. Les adultes, éclos en automne, demeurent la plupart dans le bois jusqu'au printemps, la plupart sous les écorces. Ils s'attaquent exclusivement aux troncs et souches des vieux arbres, même dépouillés d'écorce, ce que ne font pas les Scolytiens. Ils pénètrent dans les profondeurs de l'au- bier, y creusent des galeries sinueuses, en partie verticales, en partie obliques, en partie transversales, y pondent des œufs, et les larves ron- gent le bois transversalement. Les insectes reproduisent sur place pen- dant plusieurs années, et le bois est alors percé de trous comme un crible, se brise sous le moindre effort, et finit par n'être plus qu'un composé de fibres et de vermoulures (E. Perris). Le genre Dryophthorus a sept autres espèces disséminées aux États- Unis, à Madagascar, aux îles Sandwich, à Ceylan, à la Nouvelle-Calédo- nie, à l'île Lifu et à la Nouvelle-Zélande. Ces affinités étroites des derniers Charansons avec les Scolytiens sont une des preuves multiples de la complexité des rapports naturels, de l'impossibilité des classifications exactes que nous ne cessons de pro- clamer ; nous devons nous contenter d'approximations. Le Créateur n'a pas mesuré ses lois grandioses, et dont les harmonies ne nous sont qu'en partie visibles, à notre faible intelligence ! Tribu des CÉaAlIBYCIE^S ou LOWGICORMEIS. Les Coléoptères qui forment actuellement la tribu des Cérambyciens, d'après le nom du genre Cerambyx, un des mieux caractérisés, avaient reçu de C. Duméril la dénomination de Xylophages ou Lignivores {Ta- bleaux d'anat. comp. de G. Cuvier, 1799 ; Zool. anatyt., 1805). En 1817, Latreille changea avec raison ce nom en celui de Longicornes , mieux approprié au caractère le plus important de ce groupe ;, taudis qu'un mot désignant le régime ligneux permettait de les confondre avec les Scolytiens ou Cylindriformes de C. Duméril, qui vivent d'une façon analogue. Latreille eut au contraire le tort de conserver ce nom vague de Xylophages pour ces derniers insectes, et pour d'autres séparés d'eux et des Cérambyciens par les affinités zoologiques. Les mœurs des Cérambyciens sont peu variées, et cela tient à l'unifor- mité- de leur régime. On les trouve en général sur les végétau-x, princi- GÉRAMBYCIENS. 707 paiement ligneux, dont l'intérieur a nourri leurs larves ; c'est surtout ce qui a lieu pour les grandes espèces. Les petites espèces sont moins sédentaires, volent sur les fleurs dans les champs, les prés et les clai- rières des bois, cherchant de préférence les fleurs en ombelles, en corymbes, en épis. Beaucoup de Cérambyciens sont peu agiles et ne se servent pas de leurs ailes par les temps froids et sombres ; mais il en est autrement à l'ardeur du soleil. Ils volent alors assez vivement, même les grosses espèces, échappent ainsi à la main qui cherche à les saisir, ou se laissent tomber entre les branches en étalant leurs ailes enlr'ouverles comme un parachute. La plupart, quand on les prend, font entendre un bruit qui ressemble à une plainte, par le frottement du bord inférieur du corselet contre le mésolhorax, les surfaces respec- tives étant garnies de rides très-fines, visibles à une très-forte loupe. Les Prionides et quelques Cérambycides sont privés de l'appareil stri- dulant; dans ce second groupe la stridulation manque chez quelques genres à système alaire rudimentaire ou aberrant {Vesperus, Necydalis, Molorchiis). Les femelles ont un oviducte plus ou moins prolongé, sou- vent saillant, et l'introduisent pour pondre entre les fentes des tiges, ou le glissent sous les écorces. Les unes s'adressent aux Chênes affaiblis et crevassés, les autres aux jeunes Peupliers et Saules à bois encore très-tendre. D'autres pondent dans les racines ou les souches stériles, et les larves hâteront leur mise en terreau. Par des préférences instinc- tives, inexpliquées pour nous, souvent certaines souches sont épargnées au milieu d'autres atteintes, ou bien un arbre n'est perforé par les larves que sur une moitié, les femelles ayant respecté l'autre. D'après le genre de vie des larves, les chantiers sont un excellent lieu de chasse des Cérambyciens. Les espèces lucifuges, ou celles que l'absence d'ailes ou leur état ru- dimentaire condamne à vivre sur le sol (genres Dorcadion, etc.), ont en général des couleurs foncées ou ternes. Les Phytœcies sont verdâtres, fait remarquer M. Mulsant, comme les plantes sur lesquelles on les trouve. Les Jîdiles et les Rhagies sont gris et nébuleux comme l'écorce des Pins dont ils sont les hôtes fidèles. Au contraire, les Cérambyciens diurnes comptent parmi les plus beaux Coléoptères par l'élégance de leur forme svelte et allongée, et souvent la richesse et Téclat de leur coloration. Ils étincellent de teintes métalliques ou sont d'un jaune vif, ou d'un rouge carmin. Des poils luisants simulent des galons qui se détachent sur un fond sombre, ou bien semblent revêtir l'insecte d'un manteau de velours vert ou de satin couleur de feu. Lacordaire dit que les Longicornes sont revêtus de poils à la façon des AntribeSj et que celte vesliture est des plus constantes, au point qu'il n'y a qu'un seul genre {Heterolepis) qui offre de vraies écailles ; les écailles au contraire étaient très-fréquentes chez les Curculioniens. Il faut notamment re- Inarquer les poils longs et fins dont sont fréquemment hérissés les an- tennes, les pattes ou même le corps entier. M. Schiœdle les regarde comme 708 COLÉOPTÈRES. — CÉRAMBYCIENS. des poils volants (pili volatiles) destinés à alléger le corps dans le vol par le grand volume d'air déplacé, avec une très-faible augmentation de poids : il y aurait quelque chose d'analogue à l'émission de fils très-lé- gers, moins denses que l'air môme, qui paraissent servir au transport aérien de très-petites Araignées, et expliquent le prétendu vol de ces Articulés. Parfois des odeurs suaves ou pénétrantes s'échappent du corps des brillants Longicornes (genres Aromia, Callichroma , Trachy- deres, etc.). Selon M. Schiœdte, l'odeur est due à un liquide sécrété par une paire de grosses glandes aplaties et bilobées, situées dans la région métasternale et s'ouvrant au dehors par deux pores étroits placés dans un pli des angles postérieurs du métasternum. Les larves des Cérambyciens appartiennent au type dégradé de la plupart des larves lignivores, et ressemblent à celles des Buprestiens, tandis que les adultes sont tout à fait différents. Elles ont l'aspect de gros vers allongés, blanchâtres ou jaunâtres. Le corps offre souvent un contour subquadrilatère ou la forme d'un prisme à six pans; il est élargi et déprimé antérieurement, avec un prothorax dépassant en grandeur les autres segments, ce qui est aussi un caractère des larves de Buprestiens. Les anneaux sont souvent revêtus en dessus de sortes d'écussons garnis de rugosités. La tête est cornée, plus étroite que le prothorax, parfois sinueusement découpée antérieurement, armée de mandibules fortes, cornées, souvent dentées, capables d'entamer les bois les plus durs. La bouche présente en outre un labre transversal, semi- circulaire ou cordiforme.des mâchoires à un seul lobe avec palpes fili- formes de trois articles, une languette avec palpes labiaux de deux ar- ticles. La tête des larves de Buprestiens, plus enfoncée dans le prothorax que celle des larves de Longicornes, est plus dégradée pour les appen- dices, puisque les palpes maxillaires n'ont que deux articles, et que les palpes labiaux sont rudimentaires. Les antennes sont courtes, de quatre articles, le dernier sétigère, coniques, décroissants, rétractiles les uns dans les autres comme les tubes d'une lunette. Il y a parfois de chaque côté de la tête de un à quatre ocelles, peu distincts, ou bien les larves sont aveugles. Le corps comprend douze segments outre la tête ; il est parfois apode, et les anneaux sont alors chargés de tubercules en gé- néral rétractiles, facilitant la progression dans les galeries. Il est des larves qui ont des pattes écailleuses très-courtes , paire par paire aux trois anneaux du thorax, et en outre divers mamelons. Il y a neuf paires de stigmates, la première sur le pli, entre le prothorax et le mésotho- rax, les autres sur les segments de quatre à onze. Toutes ces larves vivent dans l'intérieur des tiges ou des branches des arbres, arbrisseaux, et môme des herbes et céréales pour quelques- unes. Comme les Cérambyciens sont souvent d'une grande taille, leurs larves peuvent être fort nuisibles et entraîner la perte des arbres dans lesquelles elles creusent d'énormes galeries. Certaines rongent l'écorce en rampant sur l'aubier, d'autres entament le bois, d'autres la moelle. CÉRAMBYCIENS. 709 11 en est qui perforent les racines. Toujours les galeries sont à couvert et obscures ; le contact de l'air fait d'habitude périr les larves molles de tous les insectes qui vivent dans l'intérieur des végétaux ou de leurs fruits. Les galeries peuvent s'approcher beaucoup de l'extérieur, en ne laissant qu'une mince couche intacte : il y a des larves qui rongent tout l'intérieur d'une branche en ne respectant qu'une légère écorce ; elles tiennent leurs anneaux rétrécis à mesure que la branche diminue de diamètre. Les débris ligneux sont façonnés en canal sur les parois des galeries. Celles-ci sont sans ordre, comme chez les Curculioniens lignivores, etleur largeur augmente à mesure que la larve qui les creuse grossit. Selon M. Mulsant, les larves dont les galeries viennent à se ren- contrer se dévorent. La vie à l'état de larve varie selon les espèces, dure un, deux ou trois ans. Parfois un retard d'une année se produit. Si 1 on enlève de sa ga- lerie une larve près de se changer en nymphe, et qu'on l'entoure de morceaux humides du bois dont elle se nourrit, elle maigrit quelque temps, puis se remet à manger, mais reste larve une année entière, jusqu'à ce qu'elle ait retrouvé l'époque habituelle de la nymphose de son espèce. Il y a là un fait inexpliqué qui n'est pas sans analogie avec celui que nous ofl'rent les chrysalides de certains Bombyciens (Lépido- ptères), prolongeant leur vie latente de toute une année, une fois que, par circonstance inconnue, est passé le moment ordinaire de l'éclosion. Les larves de Longicornes s'élèvent facilement en captivité, en mettant les débris végétaux dont elles se nourrissent dans un pot contenant de la terre et recouvert d'une toile métallique ; il faut avoir soin d'hu- mecter de temps en temps, si l'on veut qu'elles ne se dessèchent pas, surtout quand elles passent à l'état de nymphes. Nous avons pour auxiliaires naturels contre ces larves, dont certaines détériorent fortement des bois utiles, des animaux divers : les Pies et les Grimpereaux les saisissent sous les écorces avec leur langue dure et effilée ; les Fourmis ligniperdes les dévorent dans leurs galeries, et les Ichneumoniens à longue tarière vont pondre dans leur corps,au milieu des couches ligneuses, des œufs d'où naîtront des larves carnassières. Lorsque les larves des Cérambyciens sont prêtes à se transformer en nymphes, la plupart creusent au bout de leur galerie une celluleovoïde, et s'y entourent de vermoulure de bois agglutinée et pressée, ou de fibres ligneuses entrelacées. Celles qui demeurent dans les tiges bou- chent avec des tampons ligneux les deux extrémités du tuyau où elles vivent, afin de soustraire les nymphes aux attaques venant du dehors. Certaines espèces, dont les larves étaient sous les écorces, s'enfoncent pour la nymphose dans le bois, afin d'y trouver un abri plus profond et plus certain ; d'autres, au contraire, dont la vie s'est passée dans la moelle du végétal, se rapprochent de l'extérieur, afin que l'adulte ait plus de facilité à sortir. Il s'opère dans la dernière période d'existence de la larve un travail d'organisation considérable, et qui mériterait 710 COLÉOPTÈRES. — CÉRAMBYCIENS. d'être étudié en quelque sorte d'heure en heure, comme le fit Hérold pour les métamorphoses de la chenille du Chou, afin de voir surtout comment les antennes rudimentaires de la larve se transforment en ces appendices si variés chez l'adulte, et parfois beaucoup plus longs que le corps. Ces grandes antennes apparaissent formées chez les nym- phes, couchées et recourbées sous la poitrine; la tête est infléchie, les élytres raccourcies et déhiscentes, les pattes soit repliées au dessous du corps, soit saillantes sur les côtés. Parfois l'abdomen de la nymphe se termine par des crochets destinés à lui permettre de se cramponner aux parois de la coque ou de la galerie, lorsque l'adulte sortira de l'en- veloppe nymphale. Souvent certains segments sont munis de spinules. Les nymphes des Cérambyciens remuent vivement leurs segments ab- dominaux quand on les touche. Pour la plupart, l'éclosion a lieu au bout d'une à deux semaines ; il arrive quelquefois que les adultes n'ont pas la force de percer avec leurs mandibuLes le fond de la galerie afin de s'ouvrir un passage, et qu'on les trouve morts et desséchés dans les tiges. Dans ses Etudes sur les insectes nuisibles aux Pins maritimes des Landes, M. E. Perris donne des indications pleines d'intérêt sur la tribu des Cérambyciens. Ce sont, dit-il, des insectes peu nuisibles aux forêts, c'est-à-dire aux arbres vivants, et ne pouvant, sous ce rapport, se com- parer aux différents groupes de Scolytiens. En effet, ils ne pondent en général leurs œufs que sur les arbres morts ou sur les parties mortes des arbres vivants, sans amener dès lors la mort de ceux-ci. Ils sont au contraire dangereux pour le bois en grume déposé sur le sol forestier et pour les bois ouvrés appropriés à l'usage de l'homme. Les galeries souvent larges et profondes des larves rendent les bois, peu résistants et imprègnent d'humidité leurs couches internes. M. E. Perris regarde le treizième segment des larves de Longicornes et de Buprestiens comme un mamelon anal, mais placé dans l'axe du corps et non dessous; ce qui fait rentrer ces larves dans le cas presque général de douze segments pour les larves de Coléoptères. Elles se dis- tinguent immédiatement des larves de Buprestes par leur forme en prisme à six pans à arêtes obtuses, et par un état moins imparfait des organes céphaliques. Au contraire, l'aspect de pilon aplati signale tout de suite une larve de Bupreste. Les larves de Longicornes ont parfois des pattes coniques, arquées, écartées et très-courtes ; certaines en sont dépour- vues, sans que rien explique cette différence, puisque le genre de vie et l'habitat restent les mêmes. Cela prouve que les pattes ont peu d'im- portaiice dans cette tribu, et leur brièveté; quand elles existent, justifie cette assertion. Il en est de même pour les ocelles, dont la plupart des larves manquent, tandis que quelques-unes en ont une ou plusieurs paires : les yeux semblent peu nécessaires à des larves destinées à vivre dans l'obscurité. La forme des galeries des larves de Buprestiens et de Cérambyciens GÉRAMBYCIENS. 711 les sépare encore. Celles des Buprestes, qui vivent sous l'écorce, sont très-sinueuses, et les détritus et excréments sont refoulés derrière les larves en couches concentriques. Quant aux larves de celte tribu qui habitent l'intérieur du bois, les galeries ont. une section très-surbaissée en rapport avec l'aplatissement du corps. Les larves de Longicornes, au contraire, rongent les couches inférieures de l'écorce sur de larges sur- faces et très-irrégulièrement ; les galeries de celles qui pénètrent dans le bois sont à section elliptique, sensiblement plus renflée que pour les Buprestes. M. E. Perris a reconnu dans la dernière métamorphosé de ces larves un état intermédiaire que Réaumur et L. Dufour avaient déjà constaté pour certaines larves de Muscides (Diptères). Le passage à la nymphe n'est pas brusque et immédiat. La tète de la larve s'incline et n'est plus rétractile; les organes buccaux se raccourcissent et deviennent immobiles, ainsi que les pattes ; les segments se dilatent, se dépriment ; leurs divisions et leurs appendices charnus s'effacent. Les stigmates s'obstruent et la trachée latérale se détache. Le dernier segment laisse apercevoir l'extrémité postérieure de la nymphe comme dans un four- reau. Le corps, dont l'aspect était luisant et un peu rougeâtre, devient d'un blanc mat uniforme. Au lieu des mouvements vifs de la larve, c'est déjà la lenteur de la nymphe faisant au plus une simple rotation. Puis la peau se fend au dos du thorax, et la nymphe apparaît après avoir re- jeté, soit en peloton, soit tendue comme un fourreau, la dépouille de la larve, avec l'enveloppe cornée de la tète, les antennes et les pièces buc- cales. Sur cette dépouille persistent les deux trachées latérales qui unissaient les stigmates, sous l'apparence de deux lignes nacrées. Les caractères généraux des Cérambyciens adultes sont les suivants : Antennes en général longues, le plus ordinairement de onze articles, rarement de douze, exceptionnellement d'un plus grand nombre. Tête de formes diverses, souvent engagée en partie dans le corselet, parfois saillante et portée sur une sorte de cou. Mandibules robustes; mâ- choires inermes à deux lobes ciliés, parfois l'interne ou tous deux ru- dimentaires ; labre petit. Palpes variés, maxillaires de quatre articles, labiaux de trois; languette membraneuse, coriace ou cornée, à para- glosses existants ou nuls. — Yeux de grandeur variable, le plus souvent échancrés en dedans, et entourant la base des antennes. Corselet varia- ble; écusson toujours visible; élytres le plus souvent grandes et allon- gées, et débordant la base du corselet, rarement réduites ou soudées, et alors absence d'ailes. — Abdomen de cinq segments, rarement de six chez les mâles, souvent échancré à l'extrémité chez les mâles, portant un oviducte chez les femelles. — Tarses de quatre articles (subpentamérie), dont le quatrième présente à la base un nodule rudiment de cinquième article, et dont le troisième est en général bilobé ou cordiforme ; les arti- cles tarsaux garnis en dessous de brosses veloutées, à crochets ordinaire- ment simples. Corps en général allongé, jamais très-plat ni globuleux. 712 COLÉOPTÈRES. — GÉRAMBYCIENS. Les antennes, par leur longueur, toujours plus considérable chez les mâles que chez les femelles, constituent le principal caractère des Cé- rambyciens adultes ; cependant il y a des genres à antennes raccour- cies;, qui offrent des passages insensibles avec certains Chrysoméliens des genres Orsodacna et Donacia, et des genres exotiques du type des Galéru- ques. Les larves rendent, il est vrai, la confusion impossible ; car, chez les Chrysoméliens, elles ont des pattes écailleuses bien développées au thorax, et vivent en général à découvert sur les feuilles qu'elles dévorent, et, si quelques-unes vivent en mineuses à l'intérieur des plantes, elles n'ont, outre la'téle, que onze segments apparents au lieu de douze. Les antennes, organes si variés chez les insectes, n'échappent pas à la loi commune de la diversité chez les Longicornes. Elles sont ordi- nairement aussi longues que le corps, et peuvent le dépasser plusieurs fois (genres jEdilis, etc.); ou bien, au contraire, atteignent à peine la base du corselet (genres Spoiulylis, Rhagium, etc.]. Le plus souvent les articles sont simples, lisses, tantôt cylindriques, tantôt noueux, fusi- formes, obconiques ; parfois ils sont uniformes de grosseur, parfois vont en s'amincissant vers le bout. Il peut arriver que ces articles soient du- veteux ou munis de poils en franges ou en touffes; l'article basilaire est toujours le plus volumineux. Les antennes sont en général portées sur des tubercules saillants ; parfois, surtout chez les Prionides, elles offrent des fossettes ou sillons porifôres, analogues à ceux découverts par Erich- son chez les Buprestiens et visibles seulement à de forts grossissements. Ils consistent, selon M. Schiœdte, en dépressions hémisphériques ayant au fond un poil très-court et translucide. Les yeux, rarement entiers, sont, ou à fins granules, ou à gros gra- nules, avec quelques passages, ce qui doit être en rapport avec une vision diurne ou crépusculaire. Les pièces buccales des Longicornes ont été très-bien étudiées dans un travail sur l'organisation anatomique des Cérambyciens du Dane- mark, par M. Schiœdte. Ce travail a été traduit partiellement en anglais dans les Ann. and Magaz. of natur. Hist., sér. 3, 1865, XV, p. 182, et analysé en français par M. Thomson {Pliysis, I, p. 5). Le labre, soudé à l'épistome chez les Prionides, est libre dans les autres groupes ; les mandibules varient beaucoup. Les mâchoires ont le plus souvent deux lobes parfois très-réduils {Sjwndylis). Le plus important, l'externe, sub- siste seul chez presque tous les Prionides, et devient très-grôle chez beaucoup de Cérambycides et même très-long dans quelques genres (CalUchroma). Les palpes maxillaires et labiaux ont le dernier article acicùlé chez les Lamiides, tandis que cette forme n'existe pas chez les autres groupes. La languette est importante ; elle est membraneuse et distincte dans l'immense majorité des Cérambycides, et pourvue de paraglosses consistant en deux lignes saillantes et velues, situées à la face interne et allant en divergeant de la base au bord antérieur (La- cordaire). Chez les Prionides et certains (Cérambycides, elle est cornée, GÉRAMBYGIENS. , 713 sans paraglosses soudées aux pièces basilaires; les Lamiides la présen- tent très-développée, coriace, cordiforme et sans paraglosses. Le pronotum du prothorax est séparé des flancs par des arêtes pu lignes saillantes chez tous les Prionides et chez quelques Cérambycides, et les autres genres n'ont rien de pareil ; l'écusson, très-grand dans les genres qui se rapportent au type Trachyderes, est en général médiocre et en triangle curviligne. Les ailes existent presque toujours, mais les élytres peuvent être raccourcies en arrière, laissant à découvert un nombre variable d'arceaux de l'abdomen, ou bien en écailles, ou amincies en lanières (subulées) : quelques Saperdes, dans les Lamiides, sont les seuls où cette réduction ait lieu. Elle est au contraire fréquente chez les Cérambycides à yeux finement granulés et chez certains PriO' nides. Les cuisses et les jambes sont d'ordinaire inermes dans les Céram- byciens, offrant des épines dans certains types aberrants, comme le genre SponJylis et chez divers Prionides. Les crochets des tarses, sont simples, à l'exception de quelques genres du type Saperda. Les jambes se terminent par deux éperons qui d'habitude ont peu d'importance; ils ne sont bien développés que dans le groupe des Leptures, insectes floricoles et agiles, qui ont en même temps la tête mobile, allongée en avant, rétrécie en arrière, tandis qu'elle est robuste et subcarrée chez les Prionides normaux, où elle doit porter de fortes mandibules. Lacordaire évalue le nombre actuel des Cérambyciens existant dans les collections à huit mille espèces en moyenne. On les rencontre dans toutes les régions du globe ; mais on peut dire d'une manière générale qu'ils sont plus abondants dans l'Indo-Chine, les îles Malaises et l'Amé- rique méridionale; car ces pays chauds et humides présentent une grande exubérance de végétaux ligneux, nourriture la plus habituelle des larves des Longicornes. Linnœus n'établissait dans cette grande tribu que trois genres : Ce- rambyx, Necydalis, Leptura. Geoffroy créa les genres Stencore et Prione; Fabricius, les genres CaUidium , Spondylis, Lamia , Saperda, Molor- chus, etc. En France, Latreille, d'après les organes buccaux, les subdivisa en quatre groupes autour des genres Lamia, Cerambyx, Necydalis, Leptura- Audinet-Serville, en se ï^ervant des bases de Latreille {Aiin. Soc. entom- de Fr., 1^« série, 1832, 1833, 183/1 et 1835), a beaucoup contribué à per- fectionner l'étude de classification et de description des Longicornes, et l'on doit citer, parmi les travaux les plus récents, les Longicornes de M. Mulsant (Paris et Lyon, 1839, et 2« édition, 1862-1863), et les Céram- bijcides de M. L. Fairmaire (1864-1865, t. IV, 2« partie, Gênera des Coléo- ptères d'Europe) : ces deux auteurs pour les espèces indigènes ou euro- péennes. Un travail général sur la tribu, comprenant les genres de tous pays, est la classification des Cérambycides par M. J, Thomson [Systema Cerambycidarum, Liège, Dessain, 186/j). M. Thomson, adoptant en partie 714 - COLÉOPTÈRES. — CÉRAMBYCIE^S. la classification plus anciennement publiée d'un de ses compatriotes, M. Le Conte {Journ.de l'Acad. des sciences de Philadelphie, 1852 et 1862), divise les Cérambyciens en deux légions. La première, formée unique- ment de la famille des Lamiides, présente les jambes antérieures sillon- nées obliquement à l'intérieur vers le sommet ; la seconde a les jambes antérieures non sillonnées eu dedans, et comprend les grands groupes des Spondylides, Prionides, Cérambycides et Lepturides. Le travail de M. J. Thomson, malheureusement d'une rédaction très-compliquée, est excellent pour la fidélité des diagnoses, réduites aux caractères fon- damentaux. Lacordaire a couronné son œuvre entomologique par la publication des Longicornes {Gênera, 1869 et 1871, posth.). 11 reconnaît que les tra- vaux modernes amènent les auteurs à grouper ces Coléoptères de clas- sification si difficile autour des genres Priomis, Ceramhyx, Lamia et Leptura. Il se range à l'opinion de MM. Le Conte et Schiœdte, fondée surtout sur l'examen des formes exotiques de passage, et fait rentrer le type Leptura, comme sous-type, dans les dépendances du type Ceram- hyx. 11 en résulte l'adoption de trois familles dans la tribu : les Prio- nides, les Cérambycides et les Lamiides : celles-ci, selon l'idée de M. Schiœdte, devant terminer la tribu comme se rapprochant le plus des Chrysoméliens (type Donacia), forme inférieure des Phytophages. \. — PRIONIDES. Dernier article des palpes des deux sortes non aciculé. Jambes anté- rieures sans sillon oblique interne. Languette cornée. Pronotum distinct des flancs du prothorax ; hanches antérieures fortement transversales. GENRES PRINCIPAUX. Nous commencerons l'étude des genres principaux des Cérambyciens par un genre aberrant rejeté avec d'autres, par M. J. Thomson, dans les Subcérambycides, par Lacordaire dans les Prionides aberrants, c'est-à- dire dans un groupe de résidu formé d'espèces presque exclusivement exotiques et qui n'ont qu'une partie des caractères des Cérambyciens. P.\R.%MDR.%, Lair. — Corps déprimé, parallèle. Antennes courtes; mandibules des mâles grandes et horizontales ; mâchoires unilobées. Abdomen court. Jambes dilatées au sommet ; tarses à peine munis de brosses. Les Parandra se distinguent des vrais Cérambyciens par leur lan- guette cornée et en forme de segment de cercle très-court, le troisième article des tarses simplement échancré et non bilobé, et le quatrième PRIONIDES, — PARANDRA, HYPOCEPHALUS. 715 et dernier ayant entre ses crochets un appendice sélifère. Leur aspect rappelle à la fois les genres Passandra et Lucanus; les anciens auteurs les plaçaient dans les genres Âttelabus, Scarites, Tenebrio. Ce genre est surtout composé d'espèces américaines, parmi lesquelles nous citerons le P. lineolata, Gory, de couleur marron, de la Guadeloupe (pi. xxi, fig. 7 ; 7 a, tète du mâle en dessus; 7 6, tarse antérieur subpentamère). 11 y a aussi des espèces asiatiques, et une d'entre elles devient même à demi européenne, se rencontrant dans le Caucase, le P. caspica, Ménétriès. Les Parandres sont presque pentamères, le nodule du qua- trième article du tarse étant fortement développé, lis sont surtout d'Amérique, et quelques espèces sont de la côte d'Afrique, de l'Asie centrale, de la Polynésie. En général assez "grands, ils ont une livrée uniforme d'un fauve ferrugineux brillant, souvent avec le bout de la tète, les tarses et les antennes noirs ; ils sont ponctués en dessus d'une manière fixe le plus souvent et sans ordre. HYPOt'EPHALli^i, G. Desm. — Antennes très-courtes, de onze articles, en partie nioniliformes. Deux lobes aux mâchoires. Corselet oviforme, formant presque la moitié du corps; écusson cordiforme, assez grand, aigu en arrière. Élytres soudées, très-convexes, acuminées et un peu recourbées en arrière. Pas d'ailes. Abdomen très-petit, acumlné en arrière. Pattes très-robustes, surtout les posté- rieures, à tarses pentamères, filiformes, sans brosses en dessous. Corps oblongo^ ovale, presque glabre. Le grand et curieux insecte sur lequel est fondé ce genre avait frappé G. Desmarest, qui Ta décrit le premier {Magas. de zool., 1832, Insectes, pi. 2^), par sa ressemblance grossière de forme avec une Courtilière (Orthopt.), en raison de son vaste corselet ovale. Sa longueur est de 6 à 7 centimètres. Sa vie est probablement souterraine; on Ta observé mar- chant lentement à terre, et, dit-on, dans les carcasses desséchées d'ani- maux. Les classifîcaleurs l'ont promené à toutes les places. G. Desma- rest le plaçait dans les Silphiens, à côté des iNécrophores. On en a fait un Cucujien, un Lamellicorne même, quoique ses antennes soient le plus loin possible de ce type. M. E. Blanchard {Hist. des Ins., 18Zi5, II, 135) en fait une tribu spéciale, les Hypocéphaliens, voisine des Céram- byciens. M. .1. Thomson et Lacordaire ne vt)ient en lui qu'un Céramby- cien aberrant, offrant une exagération des caractères de cette tribu et non un assemblage de caractères hétérogènes. Les antennes sont au mi- nimum celles des Longicornes par leurs articles cylindriques. Il est en- tièrement d'un brun foncé et sans éclat, avec quelques points enfoncés ïur la tète et le corselet, et les élytres légèrement rugueuses , avec trois côtes peu saillantes. On ne l'a encore trouvé que dans l'intérieur du Bré- sil, d'abord dans la province de Minas-Geraes, puis dans celle de Bahia. Les individus recueillis près de cette ville auraient, dit-on, un reflet d'un vert olivâtre. Peut-être y a-t-il là une espèce distincte ? VH.armatus, 716 COLÉOPTÈRES. — CÉRAMBYCIENS. G. Desm., est très-rare dans les collections. M. E. Blanchard rapporte que le premier individu qui vint à Paris en 18i0 fut payé aux enchères publiques, pour la collection du Muséum, la somme de 305 francs, et que depuis, deux individus mutilés furent vendus chacun 80 francs. On peut grouper un certain nombre de genres autour du type Prionus, et les caractériser comme il suit, de manière à n'avoir plus à répéter ces généralités : Yeux transverses, à peine échancrés, n'entourant pas la base des antennes. Mâchoires unilobées par atrophie du lobe externe. Corselet toujours rebordé latéralement, semblant composé de quatre pièces ; hanches antérieures très-transverses. Nodule des tarses tou- jours plus ou moins apparent, le troisième article parfois non bilobé, mais seulement échancré, le dernier plus ou moins allongé. PRIONUS, Geoffr. — Antennes courtes, beaucoup moins longues que le corps dans les deux sexes, ayant douze articles ou plus, car leur nombre varie, ceux- ci dentés et subimbriqués, surtout chez les mâles. Corselet armé de trois dents de chaque côté. Jambes antérieures graduellement et fortement dilatées. Corps ample et convexe. Pattes robustes. Les femelles ont le corps et surtout les élylres plus larges que les mules, celles-ci n'atteignant pas l'extrémité de l'abdomen. Les Prionus sont des insectes crépusculaires qu'on reconnaît facilement aux épines qui bordent le corselet. On trouve en Suède, en France, en Allemagne et dans le sud de la Russie le P. coriarius, Linn., qui se rencontre aux environs de Paris. On le voit parfois à l'état parfait sur les troncs des arbres. Il est de grande taille, 25 à 35 millimètres, et ne sort que le soir des flancs caverneux des arbres, où il reste caché le jour. Les Chau- ves-Souris, les Engoulevents, les Rapaces nocturnes en font leur proie. On le reconnaît à ses trois larges épines de chaque côté du corselet, à ses antennes robustes chez les mâles et de douze articles imbriqués, tan- dis qu'elles n'ont que onze articles grêles chez les femelles ; à sa poi- trine couverte de poils gris serrés. Sa livrée est sombre et en rapport avec les ténèbres; il est d'un brun de poix et rougeâtre en dessous, à élytres rugueusement ponctuées, chargées de trois lignes élevées, ob- solètes. La larve vit surtout dans les troncs des Chênes, des Hêtres, et aussi dans les Cerisiers et dans divers autres arbres. Sa tête est d'un brun châtain, son prothorax de couleur safran, le reste blanchâtre ; de larges mamelons régnent du quatrième au dixième segment ; les deux derniers anneaux sont étroits, lisses, allongés, et le dernier terminé par un bou- lon faiblement rétractile. Pour la nymphose, elle se fait une coque dans le bois où elle a vécu. Elle a six patins très-courtes, comme toutes les larves de ce groupe, vivant toutes dans les troncs et les souches des PRIONIDES. — CALOCOMUS, CEROCTENUS, ANACOLUS. 717 grands arbres, et y perçant des trous profonds. Le genre Prionus a de nombreuses espèces presque toutes propres à l'hémisphère boréal, sur- tout américain, analogues de couleur, de forme et de taille au P. coria- rius, la seule espèce d'Europe. €Al.OCOMi:§l, Aud.-Serv. — Antennes du mâle toujours plus courtes que le corps, ayant de onze à vingt-deux articles, la plupart pectines et comprimés. Tête munie d'un cou très'court; grand écusson très-angulaire. Corselet crénelé et épineux ; élytres allongées normalement. Pattes subégales, les jambes anté- rieures légèrement dentées chez les mâles^ inermes chez les femelles. Ce genre est de l'Amérique du Sud. Le type est un grand et bel in- secte du Tucuman et de la Patagonie, rapporté d'abord par Lacordaire, brun, avec bout des antennes rougeâtre et deux bandes jaunes sur cha- que élytre, le C. Desmaresti, G.-Mén. (pi. xsi, fig. 8; 8 a, bouche vue en dessous; 8 6, tèle en dessus; 8c, id. grossie et les mandibules écar- tées). Depuis on a découvert six autres espèces de ce beau genre dans diverses parties de l'Amérique du Sud, espèces très-rares dans les col- lections ; de grande taille, sans couleurs métalliques, ayant tous les articles terminaux des antennes d'un beau rouge vif, avec un nombre total d'articles variant d'espèce à espèce. CEROCTEXUS, Aud.-Serv. — Tète et pattes comme dans le genre précédent; antennes du mâle courtes, subpectinées. Corselet muni d'une petite épine après la moitié postérieure ; grand écusson en triangle allongé longitudinalement. Le type de ce genre américain est un insecte de taille moyenne, à élytres élargies à la base et saillantes aux épaules, un peu acuminées à l'extrémité, du Brésil, le C gagalinus, Germar. La variété figurée pi. LUI, fig 1 (la, thorax vu en dessous) a le corselet globuleux, noir luisant, ponctué, les élytres noires, avec une large tache d'un rouge de corail de chaque côté de l'écusson ; la poitrine, l'abdomen, la moitié des cuisses intermédiaires et postérieures sont du même rouge. On avait fait des espèces avec d'autres variétés : ainsi l'une entièrement d'un noir luisant ; une autre, au contraire , à élytres rouges ondées de noir; etc. Les espèces de ce genre paraissent spéciales au Brésil. Elles sont de taille moyenne ou assez petites, d'un noir brillant sujet à de- venir rougeâtre, assez souvent avec taches ou bandes rouges, et parfois avec un mélange mal arrêté des deux couleurs. Il est difficile de limiter les espèces, qui varient beaucoup. AMACOLUS, Latr., Aud.-Serv. — Tête sans cou; antennes courtes, peclinéeâ Corselet transversal, non crénelé, avec une épine latérale; grand écusson. Élytres peu consistantes, très-courtes chez les mâles, dans le genre de celles des 718 COLÉOPTÈRES. — CÉRAMBYCIENS. Nécydales, plus longues chez les femelles, mais n'atteignant pas l'extrémité de l'abdomen et débordées par les ailes Jambes antérieures inermes dans les deux sexes. Ce genre, de l'Amérique du Sud chaude, a les yeux finement granu- lés, ce qui indique des insectes diurnes ; les mâles ont le corps allongé el étroit, celui des femelles est au contraire court et large. L'espèce type est VA. lugubris, Aud.-Serv., du Brésil. Elle offre beaucoup de variétés, différentes d'un sexe à l'autre, ce qui a amené la création de beaucoup de fausses espèces. D'après M. Thomson, l'individu femelle que nous figurons est une variété de ce sexe, à corselet et élylres rouges (var. Ç sanguineus, A.-Serv.) (pi. xxi, fig. 9; 9 a, tarse antérieur vu de profil; 9 b, id. de face; 9c, antenne). Cette espèce serait réellement unique, d'après M. Thompson. PRIOXAPTERIS, Aud.-Serv. — Tête sans cou. Corselet très-transversal; grand écusson. Pattes postérieures allongées ; tarses grêles, allongés, cylin- driques, à troisième article seulement très-échancré, mais non bilobé. Ce genre est fondé sur un insecte de couleur brune très-foncée, ren- contré à Cordova, dans l'Amérique intertropicale du Sud (Tucuman) (pi. XXI, fig. 10; 10 6, tête en dessus; 10 6, tarse antérieur). C'est une femelle à corps large, privée d'ailes, à élytres beaucoup plus courtes que l'abdomen, lisses, à deux fines côtes assez saillantes, de sorte que l'aspect rappelle les Méloés et les Staphyliniens larges et déprimés. C'est le /'. staphylinus, G.-Mén. Le mille, probablement ailé, est encore inconnu. La couleur est partout d'un noir mat. M. J. Thompson fait re- marquer avec raison que ce genre se trouve sur la limite des Céram- byciens. Par la forme des tarses, le troisième article est, pour ainsi dire, afin de ne pas compromettre la solidité de l'organe, mis dans l'im- possibilité d'être bilobé ; il n'est plus dès lors que profondément échan- cré. Une seconde espèce ou variété, du même pays, le P. flavipennis, G.-Mén., a les élytres d'un fauve vif à reflets soyeux. ERCl.lTES, Aud.-Serv. — Antennes à premier article court et épais, plus longues que le corps chez le niàle, plus courtes chez la femelle, grêles, non dentées. Corselet dissemblable dans les deux sexes, lisse chez les mâles et divisé en deux, rugueux chez les femelles; élytres parallèles, non dilatées latéralement. Le type de ce genre est l'^. faber, Linn., de Suède^ de France, d'Al- lemagne et d'Algérie, gand Coléoptèrp de 30 à 38 millimètres, d'un brun noir ou d'un brun rougeâtre, à corselet unidenté chez les fe- melles, à élytres pointillées irrégulièrement, coriacées, avec deux lignes longitudinales élevées. Les larves de ces insectes vivent dans les souches de Pin, et, par leur grosseur,^ produisent des trous qui dété- riorenl beaucoup les planches et charpentes. Elles sont communes dans PRIONIDES. — ERGATES, ÏITANUS, vEGOSOMA. 719 les forêts de Pins des Landes, et servent de nourriture aux Blaireaux, qui en sont friands. Elles ont six pattes courtes, et, du quatrième au onzième anneau , sont garnies de larges mamelons marques chacun d'une impression en forme de triangle transversal. Le dernier segment est terminé par un mamelon faiblement rétractile. L'adulte se trouve surtout dans les endroits montagneux du midi de la France. La larve de VErgates faber vit dans les arbres verts, notamment les Pins maritimes des Landes. La durée de la vie de l'insecte est de deux ans. De la mi-juillet à la mi-septembre, la femelle, avec son oviscapte corné, introduit ses œufs dans l'écorce des souches et des tiges mortes. La jeune larve s'enfonce dans l'aubier du bois et des racines, et y creuse de larges galeries. Elle acquiert une longueur de 60 à 65 millimètres, est munie de quatre ocelles de chaque côté, de pattes roussàtres, écar- tées et courtes, et offre six saillies dentiformes au bord antérieur de la tête. Elle se rapproche de l'écorce pour devenir nymphe dans une cellule ellipsoïdale. La nymphe est munie d'épines et d'aspérités qui lui per- mettent de se retourner dans sa loge. L'éclosion de l'adulte a lieu en juillet, août et début de septembre. Il y a quelques autres espèces du Nord de l'Afrique, d'Asie occidentale et des deux Amériques. TITAHUS, Aud.-Serv. — Antennes courtes, ne dépassant pas la moitié de la lon- gueur du corps. Corselet muni latéralement de trois épines de chaque côté; élytres amples, subdéprimées. Jambes des mâles ayant en dessous deux séries d'épines, inermes chez les femelles. Le type du genre est une espèce unique et de taille énorme , de l'intérieur de la Guyane, assez rare, anciennement connue des collec- tionneurs ; de couleur brune, à corselet lisse sur le disque et rugueux sur les côtés, à élytres rugueuses, avec quatre lignes saillantes sur cha- cune : c'est le T. (jiganteus, Linn., qu'on trouve au pied des arbres. Un genre voisin, des mômes localités, est curieux par le très-grand développement de ses mandibules horizontales, pluridentées en dedans, et a pour type le Macrodontia, Aud.-Serv., cervicornis, Linn., de la Guyane et du Brésil. Il y a plusieurs autres espèces de ce genre, de très-grande taille comme le type. Il est le seul commun dans les collections, les autres Macrodontia étant au contraire très-rares. Ce genre est spécial aux ré- gions les plus chaudes de l'Amérique du Sud. iCfiOSOMA, Aud.-Serv. — Corps très-allongé, étroit, finement pubescent. Tête saillante ; antennes filiformes, couvertes de fines aspérités. Corselet transversal ; élytres déprimées, très-allongées, subparallèles, un peu plus larges que le cor- selet à leur base. Pattes longues, surtout les postérieures. Le type de ce genre est une grande espèce de la majeure partie de l'Europe tempérée et méridionale, \'M. scabricorne, Scop., deZiO à 60 mil- 720 COLÉOPTÈRES. — CÉRAMBYCIENS. • limètres, d'un brun roussâlre mat, plus clair sur les élytres et les pattes. On le prend, surtout dans le Midi, sur les vieux Tilleuls, les Or- mes, les Hêtres, les Peupliers, les vieux Noyers. Il est assez commun en Bourgogne, de la fin de juillet au commencement de septembre; se tient caché pendant le jour dans l'intérieur des troncs, à l'abri de la lu- mière, et sort le soir. On le prend aussi le matin par les temps humides et couverts, et plus rarement dans le jour, si le ciel est nébuleux et l'atmosphère orageuse. Les antennes sont un peu plus longues que le corps chez les mâles, et seulement un peu plus longues que la moitié chez les femelles. Il y a quelques autres espèces d'aspect analogue, plus petites pour la plupart, parfois plus sveltes, et répandues dans la Chine, l'Hindoustan, Ceylan, l'Indo-Chine et les archipels indiens. [I. — CÉRAMBYCIDES. Dernier article des palpes non aciculé. Jambes antérieures sans sillon oblique interne. Languette en général membraneuse. Pronotum très- rarement distinct des flancs du prothorax; hanches antérieures très- variables. Ce groupe offre assez fréquemment la tête prolongée en un museau plus étroit, ce qui né se rencontre pas chez les Lamiides et très-rarement chez les Prionides. Les larves des Cérambycides, comme celles des Prionides, sont pourvues de pattes vesligiaires thoraciques, tandis que ces organes manquent dans les larves connues du grand type qui se rattache à l'ancien genre Lamia. GENRES PRINCIPAUX. Nous commencerons l'étude des Cérambycides par un genre aberrant, à jambes comprinïées et dentées eu dehors, et non inermes, comme d'habitude ; à tête courte, non rétrécie en arrière. SPOWDVMS, Fabr. — Têle courte; yeux à gros granules, à peine échancrés, non proéminents. Antennes courtes, plus longues que la tête, non entourées à la base par les yeux. Mâchoires très-petites, à deux lobes atrophiés. Palpes al- longés. Corselet subglobuleux, non rebordé sur les côtés. Pattes assez courtes, subpentamères. Ces insectes sont à la limite des Cérambyciens par la forme de leifrs tarses qui semblent pentamères, le troisième article ayant à sa base un nodule très-apparent; les jambes sont dilatées au sommet, surtout les postérieures, et dentées extérieurement. Le corps est convexe et subcy- Jindrique. L'unique espèce d'Europe, répandue dans tout le continent, est le S. buprestoides, Linn., dont l'auteur suédois faisait à tort un Curcu- lioniendu genre Attelabus. Il est représenté pi. xxi, fig. 6, (6a, bouche en dessous ; 66, mandibule; 6 c, lèvre inférieure ; 6 d, tarse antérieur). Les antennes ont les premiers articles moniliformes, les derniers com- CÉRAMIîYCLutS. — SPOMDYLIS, MEGADLUUS. 721 primés. Cet insecte, de 16 à 20 millimè(res,d'Lm noir assez brillant, cha- griné et glabre en dessus, couvert en dessous d'une pubescence fine et serrée, a le corselet très-arrondi sur les côtés, et les élytres ornées de deux lignes longitudinales élevées ; en outre, elles ont des côtes obso- lètes chez la femelle, qui est plus grosse que le mâle. Il est nocturne et demeure caché le jour dans les souches des Pins et Sapins, ou sur leurs stipes renversés. Il vole le soir avec bruit et rapidité, parfois en trou- pes assez nombreuses. Les mandibules mordent assez fortement. La larve, décrite par M. Ratzeburg dans ses Insectes nuisibles aux forêts, vit dans l'intérieur des Pins et Sapins, surtout dans les souches ; elle est pourvue de six pattes très-courtes, avec l'anneau prothoracique plus rétréci que chez les autres larves de Longicornes. L'espèce s'étend sur une zone considérable, de la Suède à la Méditerranée, d'après ce fait assez général pour les insectes des Conifères qui partagent l'extension de l'habitat de leurs arbres ; elle est des plaines dans le nord de l'Europe et des montagnes dans le sud. Dans les Landes, la femelle du S. buprestoides pond ses œufs en juillet dans l'écorce des souches des vieux Pins récem- ment abattus; la larve est aveugle et vit un an. Il y a deux autres es- pèces analogues de livrée et de sculpture, dans l'Amérique du Nord. Les genres qui se rattachent au type Cerambyx ont les caractères généraux suivants : yeux échancrés, à granulation grosse ou fine. Mâ- choires bilobées; palpes le plus souvent comprimés, à dernier article souvent triangulaire. Corselet non rebordé latéralement ; hanches an- térieures arrondies. Jambes filiformes, sans sillons ; cuisses postérieures souvent allongées et renflées en massue (du moins dans les genres eu- ropéens). Ces insectes ont une grande force musculaire et un vol assez soutenu par les temps chauds et au soleil ; dans les beaux jours de la fin du printemps et du début de l'été, on les voit dans les bois, le long des chemins ombragés, ou des Saules qui bordent les ruisseaux, leurs an- tennes, quand ils exécutent leurs courses aériennes, dirigées en avant, comme de longs tentacules. Un petit nombre sont crépusculaires et ont des teintes sombres ; les autres, en plus grand nombre, sont diurnes et munis de riches couleurs, ou ornés de dessins capricieux, d'arabesques élégantes. La plupart se tiennent sur les arbres ; certains aiment les haies et les arbustes des jardins, ou butinent sur les fleurs, surtout celles en ombelle, sur les Fenouils, les ombelles odorantes des Oignons culti- vés dans les jardins champêtres, etc. lMiIGADKRlj'|h$^ Lalr. — Antennes à premier article grêle, assez longues ctiez les mâles, courtes étiez les femelles. Corselet très-large, aplani, muni latéralement d'une pointe obtuse après son milieu. Elytres larges à la base. Pattes grêles. Le type de ce genre, très-commun dans les collections, est leiW. stigmUi Fabr. (pi. un, fig. 2, femelle ; 2a, thorax vu en dessous), de la Guyane, CIRÀKD. 46 722 r.OLÉOPTÈKES. — CÉIUMBYCIENS. du Brésil et de plusieurs contrées de l'Amérique du Sud. il exhale, d'après Lacordaire, un odeur très-forte. Il doit son nom à une bande jaune transverse sur des élylres noires. Il y a une seconde espèce, plus petite, du Mexique et du Texas. Lacordaire rejette ce genre Megaderus très-loin des Trachtjderes, dont les auteurs l'ont habituellement rap- proché, en raison de la grandeur de l'écusson. Il le place à la fin des Cérambycides, près du genre Tragocerus. THACHYUERES;, Dalman. — Antennes à articles simples, peu épais, le troisième allongé, ayant presque deux fois la longueur du corps chez les mâles, plus courtes et plus robustes chez les femelles. Corselet tuberculeux en dessus, allant en s'élargissant de chaque côté et épineux au milieu de chaque côté 5 grand écusson triangulaire. Pattes robustes. Ce genre contient des Coléoptères à couleurs vives et variées, à cor- selet raboteux, propres à l'Amérique méridionale. D'après d'Orbigny et Lacordaire, on les trouve sur les troncs d'arbres, où ils se tiennent fixés, les antennes ramenées sur le dos, ou bien encore autour des plaies des arbres. Quand on veut les saisir, ils s'envolent aussitôt ou se laissent tomber sur le sol. Les genres et espèces groupés autour du genre Trachyderes ont été étu- diés par Dupont {Munogr. des Trachy dérides, dans Mag.de zool., Ins., I806, pi. Ul-16/1 ; 1838, pi. 186 et 20Zi-22/i, et Suppl., 1840, pi. 28-38). Ce sont des Coléoptères du Mexique et de l'Amérique méridionale, de taille qui dépasse d'ordinaire la moyenne, le plus souvent glabres en dessus et sans ponctuation, avec des couleurs vives et variées, mais jamais métalliques. Nous représentons le 2'. variegatus, Perty (pi. lui, fig. 3, femelle), du Brésil, agréablement nuancé de jaune fauve et de noir sur la tête, les élytres, les pattes et les antennes. Le type du genre est une espèce très-commune, de la Guyane et du Brésil, T. succinctus, Linn., noir, avec une bande transversale jaune sur les élytres. Quelques en- tomologistes, ainsi le célèbre collectionneur Dupont, ont fait diverses espèces avec ses nombreuses variétés. — Détails : PL un, fig. h, bouche du T. succinctus; Ixa, mâchoire bilobée et son palpe; hb, lèvre infé- rieure et palpes ; kc, labre et mandibule ; k d, corselet de profil. ^PUiCiVOTIlECIJS, Dupont. — Antennes peu robustes, deux fois plus longues que le corps. Corselet convexe, arrondi au railieii; rétréci aux extrémités. Élytres à angle externe saillant, graduellement atténuées et tronquées d'une manière variable en arrière ; écusson assez grand, en triangle allongé. Pattes longues, surtout les postérieures. Corps allongé. Ce genre est formé par quelquesLongicornes du Mexique^ assez grands^ d'un noir brillant avec une pubescence fauve couchée, formant des bandes longitudinales sur le corselet et les élytres. — Ex* :S* bivittatus^ Dupont (pi. Lvi, fig. 9). CÉRAMBYCIDES. — LOPHONOCERUS, ROSALIA, CALLIGIIROMA. 723 liOPflOiliOCKRUSI^ Aud.-Serv. — Corps allongé, déprimé. Antennes des mâles très-longues et très-robustes, avec les cinq premiers articles barbus. Corselet quadriépineux de chaque côté ; grand écussou ; élytres arrondies au sommet. Cuisses cylindriques. Nous ligurons le mâle de l'espèce type de ce genre américain , le L. barbicornis, Fabr.,(pl. lui, fig, 5), très-beau Longicoruc de la Guyane et du Brésil. Trois espèces de ces régions, avec mélange de fauve et de noir. RO§t.%LIA, Aud.-Serv. — Tète avancée en avant, à front déclive, subconcave. Yeux petits ; antennes des mâles beaucoup plus longues que le corps, présentant plusieurs articles, en nombre variable, ornées à leur sommet de houppes de poils. Corselet fortement bituberculé, inerme sur les côtés. Pattes postérieures un peu allongées ; cuisses en massue. L'espèce type de ce genre, de toute l'Europe et du Caucase, le R. al- pina, Linn., de 20 à 28 millimètres de long, est un de nos plus élégants Longicornes, toujours recherché pour les collections. Le corps est un peu déprimé, les élytres flexibles ; rien de plus gracieux que les houp- pes noires des antennes. La couleur est d'un cendré bleuâtre pâle, avec une tache noire veloutée près du bord antérieur du corselet , et trois autres de même couleur sur les élytres, celle du milieu occupant toute leur largeur. Il est difficile de se procurer sur place cette belle espèce, dont la larve vit dans le Hêtre, sans visiter des localités froides et éle- vées : ainsi en France, les Alpes, les Pyrénées, les monts du Cantal, le mont Lozère, la Sainte-Baume, etc. On la trouve aussi plus aisément dans les chantiers des villes approvisionnées par les plus hautes régions. DISTICnOCERA, Kirby. — Antennes courtes, ayant chez les mâles, à partir du quatrième, chaque article prolongé en deux rameaux simples ou seulement dentés chez les femelles. Corselet prolongé latéralement en arrière. Pattes et tarses postérieurs allongés. Ce genre australien doit son nom à ses curieuses antennes (pL lvi, fig. 6, antenne du* mâle de i). maculicollis, Kirby). Six espèces; les mâles en général noirs en entier, les femelles en partie rouges ou jaunes. CAIiLlClinOMA, Latr» — Corps allongé, peu convexe, un peu atténué en arrière. Antennes très-longues, grêles, non noduleuses à la base, ayant chez les mâles le dernier article très-allongé. Corselet transversal, muni latéralement d'un tubercule épineux. Cuisses comprimées, entières et mutiques dans les deux sexes. La grande majorité des espèces de ce genre est propre aux parties chaudes du continent américain ; quelques-unes seulement sont origi- 724 COLÉOPTÈRES. — CÊRAMBYCIEiN'S. nairee d'Afrique. Ce sont des insectes très-éléganls, à riches couleurs souvent métalliques. — Ex. : C. spcciosum, Gory ou Goryi, Lacord., du cap de Bonne-Espérance (pi. lui, fig. 6, femelle, avec tête, corselet,, ély- treset dessous du corps d'un beau vert brillant et velouté, antennes, pattes et côtés de la poitrine d'un brun rouge). AROMI.l, Aud.-Serv. — Genre très-voisin du précédent, détaché pour quelques espèces d'Europe, remarquable par l'odeur suave qu'elles exhalent. Antennes du mâle presque d'un tiers plus longues que le corps (rien de particulier pour le dernier article), aussi longues chez la femelle. L'espèce type est le Capricorne à odeur de rose de Geoffroy, VA. mos- chata, de Suède, de France, d'Allemagne, de llussie, intéressante par une forte odeur d'essence de roses un peu musquée. La larve vit dans les troncs des Saules et des Osiers, et l'on trouve l'adulle sur ces arbres en juin et juillet. Le corps est d'un vert brillant, de 15 à 25 millimètres, cuivreux ou bleuâtre, le dessous et les appendices d'un bleu foncé ; les élytres très -finement ponctuées. Dans le Midi, les antennes et les pattes sont d'un bleu plus vif, et parfois on trouve des variétés à élytres foncées. Une espèce voisine, dont quelques auteurs ne font qu'une variété, est 1'^. Rosantm, Lucas, d'Espagne et d'Algérie, ayant le corselet orné de chaque côté d'une tache rouge pourprée de grandeur variable. Dans le midi de la Russie et dans le Caucase, se trouve VA . ambrosiaca, Stev. COLOBIJf^, Aud.-Serv., ou CoLOBORHOMBUS, Thomson, le nom de Colobus étant employé pour un genre de Quadrumanes. — Antennes courtes, dentées. Corselet armé latéralement; élytres réduites, n'atteignant pas la moitié du corps. Pattes postérieures très-longues. Ce genre, curieux par la brièveté des élytres, est de la faune indienne. Le type est le C. hemipterus, Fabr. (pi. lui, fig. 10, sa bouche ; 10 a, mâ- choire bilobée et palpe ; 10 b, palpe maxillaire plus grossi), de l'île de Java en particulier, et remontant jusqu'au nord de la Chine. Mâle inconnu. PURPI'HICEUHS, Aud.-Serv. — Antennes à troisième article plus long que le suivant, très-longues chez les mâles, courtes chez les femelles, non noduleuses rà la base. Corselet transversal, subglobuleux, avec tubercule latéral. Corps oblong, épais, presque parallèle, finement velu. Cuisses cylindriques. Le nom de ce genre vient de ce que les espèces européennes les plus communes ont les élytres d'un rouge vermillon, et que cette couleur peut envahir le corselet : ainsi le P. Éœhleri, Linn., de France et d'Alle- magne, de 15 à 20 millimètres, existant aux environs de Paris, et nommé CÉRA.MBYG1DES. — PURPURICENUS, CERAMBYX. 725 par Geoffroy le Capricorne rouge. La variété sans tache noire sur la su- ture des élytres est la plus fréquente près de Paris. Sa larve vit dans les Saules et dans les vieux Pins. On trouve l'adulte en été sur les arbres et aussi fréquemment sur les fleurs, surtout celles des Oignons, Aulx, Poireaux, et de môme pour les autres espèces du genre. On rencontre, surtout dans le midi de la France, de l'Allemagne, de la Russie, en Es- pagne, en Algérie, en Grèce, dans le Caucase, le P. budensis-, Goëze (pi. LUI, fig. 8, bouche; 8 a, antenne). Nous représentons une espèce du Sénégal, le P. decorus, Oliv., à corselet rouge, avec trois taches noires (pi. LUI, fig. 7, femelle). Legenreest nombreux en espèces répandues sur tout le globe. CERAHIBVX., Linn. — Antennes de onze articles plus longues que le corps chez les mâles, plus courtes chez les femelles ; à premiers articles courts et noduleux au sommet, 3, 4, 5 subégaux, les suivants plus longs. Corselet très-rugueux, armé d'une épine latérale. Pattes subégales ; cuisses comprimées. Les Coléoptères de ce genre sont de grande et moyenne taille. On les nomme Capricornes, à cause de leurs énornes antennes, ce qui est ana- logue à l'étymologie du nom de ce genre, corne-bœuf. Malgré la couleur noirâtre qui revêt tous ces insectes, ils plaisent aux yeux par l'élégance de leurs formes. Les grandes espèces vivent sur les Chênes et disputent aux Lucanes, aux Cétoines, aux Frelons, les fluides qui découlent des plaies de ces arbres. Elles sont ordinairement faciles à capturer et vo- lent surtout le soir. Dans le jour, s'il fait chaud, si le soleil darde ses feux, elles s'envolent aisément, et trompent la main qui cherche à les saisir, ou se laissent tomber de branche en branche en entr'ouvrant leurs ailes comme un parachute à demi déployé. La plus grande espèce de France, qui se trouve dans toute l'Europe, dans le Caucase, en Analolie, est le grand Capricorne noir de Geoffroy. Elle passe dans plusieurs contrées pour la femelle des insectes appelés Cerfs- volants, et a regu, fort à tort, le nom de Biche. Le dessus du corps est d'un noir brunâtre ; les élytres passent insensiblement au marron vers leur extrémité, et sont munies d'une épine à leur sommet interne ou angle suturai, épine moins marquée chez les femelles ; l'écusson est sinueusement triangulaire. Le nom scientifique prête à la confusion : c'est le C. Cerdo, Linn., plus connu sous le nom de C. héros, Scop., Fabr., auct. (pi. lui, fig. 9, antenne de femelle). Sa longueur est de 30 à 50 millim. Sa larve vit dans les troncs et racines des vieux Chênes, dans lesquels elle creuse d'énormes galeries, de manière à causer des dégâts considérables dans certaines forêts. Elle atteint une longueur de 5 à6 centimètres sur plus d'un centimètre de largeur maximum, et l'on juge par là du dommage causé aux poutres et planchers. Elle est d'un blanc jaunâtre, avec des plaques rugueuses sur chaque anneau. Elle a des pattes thoraciques vestigiaires très-peu visibles, avec un 726 COLÉOPTÈRES. — CÉRAMBYGIENS. petit ongle pointu. Il est probable que cette larve, avec celle du Lucanus Cervus, constituait le Cossus dont les Romains étaient si friands, et qu'on trouvait, au dire de Pline, dans les Chênes. Selon M. Mocquerys, cette larve vit aussi en Normandie dans les Pommiers. C'est au mois de juin, vers sept heures du soir, qu'il faut chercher l'adulte dans les forêts de Chênes. Autrefois on le prenait à Paris à la mare d'Auteuil. Si l'on pique ces robustes insectes à côté les uns des autres dans la boîte de chasse, on court le risque qu'en se débattant, ils ne brisent leurs grandes an- tennes, ou se les coupent de l'un à l'autre avec leurs mandibules. On les rapporte intacts en les mettant dans un sac de toile rempli de feuilles de Chêne. Une seconde espèce commune, de taille moitié moin- dre, le petit Capricorne noir de Geoffroy, se nomme C. Scopolii, Laïch., ou plus ordinairement C. Cerdo, Scop.,Fabr., auct. Elle est entièrement noire, avec un léger duvet blanchâtre ; les élytres sont sans épine à l'angle suturai du sommet. Cet insecte est commun dans les jardins et sur les haies, sur l'Aubépine, les Spirées et autres fleurs en corymbe et en ombelle. Il est d'Europe, du Caucase et d'Algérie (variétés). La larve ronge surtout le pied du Pommier et aussi du Groseillier rouge et de divers arbrisseaux ; on la trouve, d'après MM. Chapuis et Candèze, sous les écorces des Cerisiers et des Chênes morts, etc. Cette espèce est très-nuisible aux Pommiers dans la Normandie. M. Mocquerys suppose que le bouchon de fine sciure, agrégée par la salive de la larve, qui se trouve placé par elle avant le point où l'adulte percera son trou de sor- tie de forme ovale, est destiné à nourrir celui-ci avant cette sortie. Il dit en effet avoir observé que déjà en octobre et en novembre les adultes sont éclos dans la galerie qu'ils ne doivent quitter que cinq à six mois plus tard. Beaucoup de Coléoptères, ainsi les Hannetons, nous offrent des faits analogues d'éclosions prématurées. HAMATICHERIJ;^, Aud.-Serv. — Antennes du mâle plus longues que le corps, à troisième article beaucoup plus long que le suivant, les articles 3 à 7 épineux extérieurement. Corselet ridé transversalement, armé sur le côté d'une épine. Pattes subégales. Ce genre, démembré de l'ancien genre Cerambyx, est formé d'in- sectes de l'Amérique du Sud. — Ex. : 11. plicatus, Oliv., ou rufipennis, Gory, de la Guyane et du Brésil (pi. liv, fig. i ; 1 a, tête vue de face). COSMlsoiil.%, Aud.-Serv. — Antennes plus longues que le corps, à troisième article plus long que le suivant, le sixième très-fréquemment muni d'une houppe de poils. Corselet allongé. Pattes postérieures plus longues que le corps. Genre américain. — Ex. : C. speculiferum, Gory, de la Guyane (pi. uv, fig. 2 ; 2 a, tarse postérieur grossi). Espèce remarquable par une tache rectangle argentée comme un miroir sur chaque élytre. CÉRAMBYCIDES. — COREMIA, OREGOSTOMA, CALLIDIUM. 727 rOREUIA, Aud.-Serv. — Antennes du mâle presque de la longueur du corps, grêles, à troisième article de longueur égale à. celle des deux suivants. Pattes intermédiaires allongées ; pattes postérieures très-longues, avec jambes munies au sommet de longues houppes de poils. Genre de l'Amérique du Sud, comprenant deux espèces. — Ex. : C. hirtipes, Oliv., de ia Guyane, dont le nom rappelle le curieux carac- tère des pattes postérieures (pi. liv, fig. 3 ; 3 6, tarse postérieur). ORE«o*i>TOM.%, Aud.-Serv. — Corps suballongé, subparallèle; antennes dont la longueur dépasse seulement (chez le mâle) celle de la moitié du corps, à troi- sième article du double plus long que le suivant, les autres comprimés, sub- dentés. Faites postérieures allongées. Espèces de l'Amérique du Sud. — Ex. : 0. rubricorne, Aud.-Serv., du Brésil (pi. L!v, flg. 7 ; 7 a, tête vue de face ; 7 6, antenne). CALl,lDlIJM, Fabr. — Antennes suballongées, inermes. Corselet non tuberculeux, presque inerme souvent sur les côtés; élytres planes ou subdéprimées. Cuisses renflées brusquement et fortement en massue. Corps subdéprimé. Les Callidies sont diurnes, et beaucoup attirent les regards par leur beauté ; plusieurs brillent d'un éclat métallique ou étincellent d'un rouge à la fois ardent et satiné ; il en est que des bandes lactées trans- versales font paraître comme ceints d'une ou deux écharpes blanches. On les voit dans les bois, parfois immobiles, mais ordinairement courant sur les vieux arbres ou sur les troncs renversés, d'autant plus agiles que le soleil embrase l'air de plus vifs rayons. Souvent les amateurs d'insectes vont les chercher dans les chantiers, soit sortis des bois qui les recelaient, soit trompés par l'instinct et désirant pondre ; il est rare qu'ils fréquentent les fleurs. Nous représentons une espèce bronzée et métallique, le C. hungaricum, Fabr., ou insuhricum, Germ., du sud de la France et de l'Allemagne et d'Italie (pi. i.iv, flg. h)- L'espèce la plus remarquable de ce genre est le C. sanguineum, Linn., de (oufe l'Europe, du Caucase, de l'Algérie, Co- léoptère d'un beau rouge de feu, de 10 millimètres de long, avec anten- nes et pattes noires, complètement couvert d'une pubescence soyeuse et serrée : c'est laLepture veloutée couleur défende Geoffroy. Il est extrême- ment commun dans l'Europe tempérée, rare dans le nord et l'extrême sud. Sa larve vit dans l'aubier du Chêne, et l'on voit très-souvent l'in- secte parfait éclore au printemps dans les chantiers, les bûchers, les appartements parquetés. Il faut citer dans le môme genre le C. Alni, Linn., varié de noir et de brun fauve, avec deux bandes blanches sur chaque élytre, très-abondant dans les chantiers, dont la larve vit dans les Chênes, de sorte qu'au début du printemps les troncs des Chênes 728 COLÉOPTÈRES. — CÉRAMBYGIEiNS. sont parfois couverts en abondance de ces Longicornes. Ajoutons' e C. violaceam, Linn., de toute l'Europe, de 12 millimèlres, à élytres ponc- tuées, bleues ou d'un bronze violet, dont la larve vit dans les Sapins; le C. unifasciatum, Fabr., d'Allemagne, d'Italie, remarquable par une seule bande transversale blanche sur les élytres, vivant dans les tiges de la Vigne. Le genre restreint n'a que quelques espèces d'Europe et d'Amérique du Nord. Dans un sous-genre très-voisin P/i.i/?natorfes, Muls.,se trouve une espèce curieuse par ses continuelles variations d'individu à individu. C'est en quelque sorte une espèce non encore fixée, comme nous en trouvons dans tous les ordres des insectes, selon la théorie de Lamarck, d'E. Geofl'roy Saint-Hilaire, de M. Darwin. Le P. variabilis, Linn., d'Europe, du Cau- case, dont la taille change de 10 à 15 millimètres, offre les élytres d'un noir violet, ou verdâtres, ou ardoisées, ou de ces couleurs, avec le cor- selet et partie des pattes et antennes d'un rouge terne {la Leplure noire à corselet roiigeâtre de Geoffroy), ou avec les élytres fauves en tout ou partie, enfin avec les élytres d'un jaune livide {la Lepture livide à cor- selet lisse de Geoffroy). Ce Coléoptère protéiforme est très-commun dans toute l'Europe, et se trouve, importé ou originel, dans l'Amérique du Nord; sa larve vit dans le Hêtre, surtout le Chêne, et diverses autres essences. On rencontre souvent l'adulte dans les maisons, comme le C. sanguineum. Le genre Phymatodes est assez nombreux en espèces et répandu partout. llYE.OTRlIPE§i, Aud.-Serv., plus exactement Xylotrupes. — Antennes courtes, à peine aussi longues que la moitié du corps, même chez les mâles, subfili- formes. Corselet transverse, inerme latéralement, bituberculé sur le dos. Ovi- ducte saillant chez les femelles. L'espèce type de ce genre, X bajulus, Linn., d'Europe, d'Algérie, du Caucase, est un insecte très-commun, couvert d'une fine villosité blan- châtre. 11 est remarquable par la gracilité de ses pattes fragiles, qui res- tent souvent dans les doigts cherchant à le capturer. 11 varie beaucoup de couleur et de taille ; le plus souvent il a la tête, les pattes, les an- tennes, le corselet noirs, les élytres de couleur lie de vin ou fauve, ou testacées, avec trois mouchetures blanchâtres pouvant disparaître. Les mâles sont notablement plus étroits et plus petits que les femelles. Les larves vivent surtout dans les Pins et Sapins, et aussi dans d'autres arbres. Souvent elles rongent les bois et les meubles de nos maisons, d'où le nom du genre qui signifie perce^bois. L'adulte se rencontre un peu partout ; c'est la Lepture brune à corselet rhomboYdal de Geoffroy. L'espèce existe dans l'Amérique septentrionale, et accidentellement dans les localités les plus diverses par importation. Il y a une seconde espèce d'Australie. Dans un genre très-voisin se trouve le Sijmpiezocera, Lucas, Laiirasi, CÉRAMBYCIDES. — XYLOTRUPES, SYMPIEZOGlîRA, GLYTUS. 729 f^ucas, rencontré d'abord en Algérie, très-beau Longicorne d'environ 15 millimètres, ponctué, à tête et corselet noirs, les élytres testacées, avec deux larges bandes noires, une au milieu, lautre au bout. Depuis, l'espèce fut reprise sur les Genévriers en Corse et àVernet-les- Bains (Pyrénées -Orientales). L'espèce est de la faune méditerranéenne et remonte jusqu'aux environs de Paris. En effet, un couple d'individus vivants de ce genre fut trouvé en 1855 par M. de Bonvouloir dans le bois d'Auteuil, et regardé comme provenant de quelque bois exotique de l'Exposition universelle. Un sujet mort fut rencontré bien plus tard en hiver dans la forêt de Fontainebleau, par M. le docteur Marmottan. En avril 1872, M. Grouvelle reprit l'espèce dans les mêmes bois, et re- cueillit un assez grand nombre de sujets morts récemment. Cette cap- ture intéressante se fit en écorçant des troncs de Genévriers vieux et affaiblis. Le bois paraissait percé de trous bouchés par de la poussière ligneuse et invisibles sur l'écorce, orifices de galeries s'enfonçant à un centimètre, où restaient çà et là des sujets morts sans avoir pu sortir. Il est probable que l'éclosion se fait de très-bonne heure, dès le mois de mars, et en outre qu'une seconde éclosion a lieu en juillet, époque où M. Léveillé a trouvé un sujet vivant (1872). Nous devons à la com- plaisance de M. Grouvelle de pouvoir figurer un mâle encore inédit (pi. Lv, flg. 9). On voit quel intérêt s'attache, pour les amateurs pari- siens, à cette rare espèce. Elle existe probablement à Lardy, localité analogue à Fontainebleau pour ses grès, son aridité et sa flore, et beau- coup d'insectes méridionaux se trouvent à la fois dans ces deux pays. Nous espérons qu'on publiera sa larve. Le genre a une seconde espèce au Japon (Lacordaire). CEiYTUS, Laïcharting. — Tête inclinée, à front grand, vertical; antennes courtes. Corselet oblong, subglobuleux. Pattes grêles et allongées, surtout les posté- rieures, avec cuisses plus ou moins en massue. Corps allongé, convexe. Les Clytus sont des Longicornes qui fréquentent les fleurs au milieu du jour, surtout celles en ombelle et en corymbe ; ils sont très-agiles par les temps chauds, soit au vol, soit à. la course appropriée à leurs pattes longues et minces. D'une manière grossière, ils ont de loin, dans leur mélange de jaune vif et noir, quelque chose qui rappelle les Po- listes et surtout les (luôpes solitaires (Hyménoptères). « Ils sont généralement remarquables, dit M. 31ulsant, par l'élégance de leur parure. Les uns, sur leurs élytres de velours jaune, portent des points ou des bandes d'ébène ; plusieurs, sur un fond obscur, montrent des espèces de signes hiéroglyphiques, des lignes courbes ou flexueuses, des chevrons ou des croissants d'argent ; les autres, sur leurs corps de jais, semblent chamarrés de galons d'or, comme nos hommes de cour. » Ils sont répandus dans toute l'Europe, mais surtout dans les parties mé- dianes et australes. Nous allons citer et décrire brièvement les espèces parisiennes les 730 COLÉOPTÈRES. — CÉRAMBYCIENS. plus communes, dans l'intérêt des collectionneurs au début. — Le type du genre est le C Arietis, Linn., de 9 cà 15 millimùtres, dont la femelle est plus grande que le mâle, ayant deux bandes de duvet jaune au cor- selet, l'écusson jaune velouté, et quatre bandes jaunes sur les élytres, la seconde sinuée comme les cornes d'un bélier, les cuisses postérieures ferrugineuses. C'est la Lepture à trois bandes dorées de Geoffroy. Cette espèce est très-commune dans toute la France pendant l'été, et se trouve très-souvent dans les chantiers. L'adulie se prend aussi sur les ombelles, les haies, au bord des bois ; la larve vit dans les jeunes tiges et les branches de divers arbres, perfore surtout les bois d'Orme et de Hêtre, et aussi de Chêne, Pommier, Mûrier, Sycomore, Merisier à grappes, etc. — LeC. massiliensis, Linn., la Lepture à raies blanches de Geoffroy, de plus petite taille, se trouve sur les fleurs en ombelle ; il a une étroite bande de duvet blanc sur le corselet, et trois bandes blanches sur les élytres, la première arquée. — Le C. Verbasci, Linn., est rare aux environs de Paris, bien que connu de Geoffroy {la Lepture jaune à bandes noires); il est surtout du midi de la France et de l'Europe, et se prend sur les Car- duacées et les Ombellifères. On le reconnaît à sa couleur jaune verdâtre, avec trois courtes bandes sur les élytres. — Le C.quadripunctatus, F ahr., de 10 à 12 millimètres, ou Lepture velours jaune de Geoffroy, offre, sur un duvet velouté jaune verdâtre, quatre points noirs, deux par élytre. Cette espèce, dont la femelle est bien plus forte que le mâle, fréquente rarement les fleurs, mais se voit sur les arbres et, dans les maisons , sur le bois à brtàler ; la larve vit dans divers arbres forestiers et de jardin, le Bouleau surlout, le Sycomore, le Noyer, etc. Mentionnons enfin le Carcuaifis, Linn., de toute l'Europe et d'Algérie (pi. Lv, fig. 6), ressemblant beaucoup au C. Arietis, mais en général de taille plus grande et surtout plus robuste, noir, avec divers dessins d'un jaune vif, tels que double bordure au corselet, écusson jaune, et en outre trois points jaunes à la base et à la suture des élytres, bande sur les élytres, comme chez Arietis, mais la bande arquée moins oblique et parfois remplacée par des points, les appendices roux, les antennes bien plus fortes ; très-commun sur les Chênes récemment coupés, et se pre- nant fréquemment dans les villes, à cause des poutres de construction. Lacordaire restreint le genre Chjlus à un nombre assez borné d'espèces d'Europe, d'Algérie, d'Asie Mineure, des États-Unis et du Mexique. Dans un sous-genre très-voisin, Anaglyptus , Mulsant, à antennes des mâles presque aussi longues que le corps, à élytres bibosselées à la base, nous devons signaler 1'^. nnjsticus, Linn., de toute l'Europe et du Caucase, à élytres d'un rouge brun, ornées de trois raies courbes dues à des poils blanchâtres, opposition de couleurs qui le fit nommer par Geoffroy la Lepture arlequin. Ce Clyte se trouve surtout dans les parties septentrionales ou froides de la France ; on le capture en juin sur les fleurs d'Aubépine, de Spirée, etc. Sa larve perfore de nombreux trous les bois de Hêtre. CÉRAMBYCIDES. — OBRIUM, GRAGILIA. 731 OBRIl'M, Latr., Aud.-Serv. — Antennes grêles, pubescentes, assez longues. Corselet étroit, cylindrique, unituberculé latéralement. Pattes subégales ; cuisses en massue. Le type de ce genre est VO. cantharinum, Linn., de Suède, de France, d'Allemagne (pi. liv, fig. 6; 60, jambe el tarse postérieurs; 6 6, labre; 6c, lèvre inférieure et palpes; 6d, antenne; 6e, mâchoire et palpe; Gf, mandibule). C'est un Longicorne de petite taille pour la tribu et rare, tout d'un fauve ardent. Europe, Amérique du Nord, Afrique. CiRACII.IA, Aud.-Serv. — Corps allongé, déprimé. Antennes filiformes, glabres, plus longues que le corps. Corselet subarrondi latéralement et inerme. Cuisses en massue très-renflée. Ce genre contient des Longicornes faibles, de petite taille, des plus exigus de la tribu. Comme beaucoup de petites espèces, leur multiplica- tion est considérable en raison de leurs chances de destruction. Le type du genre est un insecte nuisible, le G. pygmœa, Fabr., d'un brun plus ou moins rougeAtre, de Suède, de France, d'Allemagne, du Caucase (pi. LIV, fig. 10). La larve vit dans le bois mort du Châtaignier, du Saule, du Bouleau, etc. Elle ronge les bois des treillages, les vieux paniers d'osier quelle réduit en poussière, les cercles des tonneaux. Les adultes sont parfois très-abondants sur ces matières, et, dans les maisons ou ma- gasins qui les renferment , on les a vus couvrant de leur multitude des portions de muraille. Dans certains greniers, elles viennent mourir sur les appuis des fenêtres, dans les toiles d'araignée. Une autre espèce aux États-Unis, peut-être la même par transport. Les Longicornes auxquels le genre Leptura peut servir de type géné- ral nous offrent les caractères distinctifs suivants : Tête souvent oblon- gue ou trièdre, souvent brusquement rétrécie en cou. Yeux subarrondis ou échancrés, le plus souvent finement granulés. Palpes le plus sou- vent comprimés ; mâchoires bilobées. Corselet non rebordé latérale- ment. Hanches antérieures coniques; jambes antérieures filiformes, non sillonnées en dedans. C'est dans ce groupe que se trouve la plus grande quantité de Cérambyciens à forme étroite et allongée. L'im- mense majorité des espèces appartient au continent européen, à l'Asie et à l'Amérique boréales ; au contraire , le sud de l'Asie et de l'Amé- rique et le continent africain n'en comptent qu'un petit nombre d'es- pèces, ainsi que l'Australie. Les espèces d'Iiurope sont, dans les Longi- cornes, les plus fréquentes sur les fleurs. Les larves connues ont la tête à peu près libre, des pattes et un bourrelet transversal sous les seg- ments du prothorax. 732 COLÉOPTÈRES. — CÉRAMBTCIENS. CARTAIil.UM; Aud.-Serv. — Corps assez convexe. Antennes grêles, à peu près de la longueur du corps chez les mâles. Corselet obtusément armé sur les côtés. Cuisses en massue. Ce genre est placé par beaucoup d'auteurs, dans le groupe précédent, à côté des genres Obrium et Gracilia. M. J. Thomson et M. L. Fairmaire l'en séparent à cause de ses yeux finement granulés, comme ceux des genres qui suivent, et des cavités cotyloïdes antérieures angulées en dehors. II est formé d'une espèce de petite taille, le C. ebulinum, Linn., à corselet roux, à élytres vertes (pi. liv, fig. 5), qu'on trouve sur les fleurs dans le midi de la France et de l'Allemagne, en Espagne, en Italie, en Algérie, dans le Caucase. 8TE]«OPTERliS, lUig. — Antennes moins longues que le corps dans les deux sexes. Corselet tuberculeux, inerme sur les côtés; élytres déprimées, plus ou moins rétrécies et déhiscentes en arrière, parfois un peu plus courtes que l'ab- domen. Cuisses fortement en massue. Les insectes de ce genre sont faciles à reconnaître à leur corps déprimé en dessus et velu, et surtout à leurs élytres atténuées et déhiscentes en arrière, de sorte qu'ils ont une certaine ressemblance avec les OEt/émera, de la tribu des Cantharidiens. On les trouve ordinairement en été sur les fleurs en ombelle ; et l'espèce commune près de Paris est le S. ru- fus, Linn., de France, d'Allemagne, de Grèce, du Caucase, la Lepture à étuis étranglés de Geoffroy; les élytres, les antennes, les cuisses posté- rieures sont fauves, le corselet noir. Nous figurons une espèce d'un genre assez voisin, Odontocera, Aud.-Serv., gracilis, Klug, du Brésil (pi. Liv, fig. 9), genre fondé sur des espèces des régions chaudes de l'Amérique du Sud. ]«E:CYDy%I.I!S, Linn. — Antennes robustes, bien moins longues que le corps. Élytres très-courtes, atteignant à peine la base de l'abdomen,- ailes bien déve- loppées, non repliées sous les élytres. Pattes postérieures plus longues que les autres ; cuisses en massue médiocre. L'aspect de ces Coléoptères est très-étrange, surtout quand ils volent : on dirait de grands Ichneumons. Nous figurons l'espèce type, la grande Nécydale (N. major, Linn.), de Suède, de France, d'Allemagne (pi. liv, fig. 8), à tête et corselet noirs, élytres fauves, pattes rousses, ailes rous- sâtres, hyalines partout. Selon M. Chevrdlat et d'autres auteurs, il y aurait une seconde espèce très-voisine, de taille un peu plus grande, le A^. Ulmi, Chevr., propre à la France seulement, assez rare partout, présentant sur le corselet et les élytres un duvet doré, à ailes roussâtres comme l'autre, mais obscures ou noirâtres à l'extrémité. Sa larve se trouverait dans les arbres à bois dur : Orme, Chêne, Charme, etc., le môme arbre CÉRAMBYGIDES. — NECYDALIS, MOLORCHUS, VESPERUS. 733 renfermant souvent une nombreuse nichée. On trouve l'adulte en été sur les troncs, surtout au point du jour. On le prenait aisément il y a une trentaine d'années sur les Ormes des boulevards extérieurs de Paris et du Champ de Mars ; il est presque introuvable aujourd'hui aux envi- rons immédiats de PariS;, qui offrent si peu de vieux arbres. La larve de la première espèce vivrait au contraire dans les arbres à bois tendre, Saule, Tremble, Peuplier. La distinction des deux espèces avait été pres- sentie par Buettner, d"après le régime diflerent des larves. Peut-être n'y a-t-il réellement que deux races ? Les Necijdalis ne comprennent que peu d'espèces, sveltes et de grande taille, d'Europe et d'Amérique du Nord, à couleurs mélangées de noir et de fauve. MOLORCHlJl^, Fabr. ~ Antennes en général plus longues que le corps, grêles. Élytres assez déprimées, très-courtes, ressemblant à des écailles, fortement dépassées par les ailes. Cuisses fortement en massue. Ces insectes à corps allongé, déprimé, un peu velu, sont analogues à ceux du genre précédent, mais de taille bien moindre. Ils affectionnent les régions froides, et plusieurs espèces sont des montagnes, leurs larves vivant dans les Sapins. L'espèce des plaines, de toute l'Europe, dont les larves se trouvent dans divers arbres, est le M. Umbellatarum, Linn., dont l'adulte se prend au vol en juillet sur les fleurs des Ombellifères et des Spirées. Il est de petite taille, à élytres sans taches, à antennes plus courtes que le corps, à cuisses peu renflées, à antennes de onze articles dans les deux sexes. On prend dans les montagnes une espèce plus grande , le M. minor, Linn. (par opposition à Necydalis major), de 8 à 10 milli- mètres, à antennes de douze articles chez les mules, bien plus longues que le corps, brun, à élytres avec une raie blanche à l'extrémité. Les ilio/orc/uts, confondus longtemps avec les Necydalis, ont une livrée variant du brun au fauve livide, souvent avec un trait ou une tache blanchâtre sur les élytres. On en trouve en Europe, en Chine, en Aus- tralie, aux États-Unis. VJESPERl'S, Latr. —Tête forte, renflée, rétrécie à la base. Yeux grands, à gros granules ; antennes grêles et longues. Corselet conique. Élytres longues, sub- parallèles, recouvrant l'abdomen chez les mâles ailés, courtes et déhiscentes chez les femelles à ailes nulles ou imparfaites. Ces insectes, dont trois espèces de l'extrême midi de la France, sont crépusculaires, à teintes livides, brunâtres pour la tête et le corselet, jaunâtres pour les élytres ; dans les deux sexes les élytres sont très- molles et bien plus larges à la base que le corselet. Les femelles ,, dont les élytres écartées et le large abdomen rappellent l'aspect des Méloés, s'éloignent peu des bois ; les mâles volent le soir avec un bruit qui les 73^ COLÉOPTÈRES. — GÉRAftlBYCIENS. décèle. Nous mentionnerons le V. strepens, Fabr., de la Provence , des environs de Grasse et de Draguignan, dont la larve vit dans le Pin ; l'adulte se trouve souvent dans les appartements, sortant des bois de construction, et le mâle entre le soir, attiré par les flambeaux. Une es- pèce très-voisine est le V. luridus, Rossi (pi. lv, fig. 2, mâle; 2 a, fe- melle; 2 6, tête vue de face; 2c, id., vue en dessus). Celte espèce est de diverses parties de la Provence , notamment des environs de Mar- seille et aussi de l'Algérie. La femelle est quelquefois enlacée dans les toiles des Araignées, et le mâle est attiré le soir par les lumières. Il pa- raît que la nymphose de cette espèce s'opère en terre, dans une coque sphérique formée de petits grains agglutinés. La vie souterraine a été exactement constatée pour la troisième espèce de France, le V. Xatarti, Muls., par M. Lichtenstein ; la larve, trapue et non arquée, mais pour- vue de petites pattes, vit sous terre de racines, ce qui a lieu pour quel- ques autres Longicornes. Nous remercions M. H. Lucas de pouvoir figu- rer, grâce à lui, cette larve inédile (pi. lv, lig. 10). On indique encore une espèce d'Espagne, et quelques autres du Maroc, d'Asie Mineure. Les deux sexes sont d'un testacé livide pouvant passer au brunâtre; les élylres des mâles sont finement pointillées, celles des femelles rugueuses et à lignes saillantes. UE^iUlociERt:*^, Aud.-Serv. — Antennes courtes, à articles noueux, le troisième plus long que le suivant. Corselet trapézoïdal, à angles postérieurs aigus. Pattes médiocres. Ce genre, de l'Amérique du Nord, a pour type le ï). cyaneus, Fabr. (pi. LV, fig. 1 ; 1 a, tête vue de face ; 1 b, base d'une antenne). Deux autres espèces. jiTEIlOCORtIS, GeofTr., ou Rhagium, Fabr. — Antennes moins longues ou à peine aussi longues que la moitié du corps, à troisième article pas plus long que le suivant. Tête quadrangle, rétrécie brusquement à la base. Corselet armé latéra- lement. Corps oblong, subdéprimé en dessus, assez épais. Pattes assez grandes, à cuisses renflées. Les larves de ces Longicornes vivent dans les Pins et les Sapins, sur- tout les souches, ce qui met les espèces communes au nombre des insectes nuisibles aux forêts. Ainsi le S. bifasciatus, Fabr., de toute l'Eu- rope (pi. LV, fig. 3 ; 3 a, tôle de face; 3 b, base de l'antenne), de 15 à 20 millimètres, noir, avec élytres rugeuses, rougeâtres au bout et parées chacune de deux taches ou deux bandes jaunes, avec beaucoup de va- riations : c'est le Stencore lisse à bandes jaunes de Geoffroy; — le S. inqui- sitor, Linn., de toute l'Europe et du Caucase, de môme taille, le Sten- core noir velouté de jaune de Geoffroy, revêtu d'un duvet flavescent, disposé par mouchetures sur les élytres j celles-ci avec deux bandes transverses couleur de chair, séparées par une grosse tache noire. Les CÉRAMBYGIDES. — UHA.GIUM, KHA\^^'USlUM, TOXOTUS. 735 Stencores volent avec bruit à la grande chaleur du jour, et quel- ques milles présentent d'énormes tètes; on les prend surtout dans les bois, sur les troncs et les feuilles, parfois sur les fleurs, ainsi d'Aubépine, de Ronce, etc. Les Stencores ou Rhagies (à l'exception d'une espèce des États-Unis et d'une autre du Cap) sont propres aux régions tempérées de l'Europe et de l'Asie. Leurs élytres sont ponctuées ou rugueuses et à fines côtes, leur taille au moins moyenne, leurs couleurs nuageuses, à bandes transverses fauves ou noires sur un fond variable. RUAiUMtliilUllI, Latr. — Antennes à peu près de la moitié de la longueur du corps, à troisième article à peine plus long que le suivant. Corselet transverse, armé latéralement. Élytres subparallèles, arrondies à l'extrémité. L'espèce type est le R. Saîicis, Fabr., ou 6/co/o>- (Schrank, d'Allemagne, du Tyrol, de presque toute la F'rance (pi. lv, fig. h; lia, tête de face ; k b, antenne). C'est un bel insecte de 15 à 20 millimètres de longueur, à tête courte, large, inclinée, sillonnée au milieu; à tête, corselet, corps et appendices d'un rouge pûle ou jaunâtre. Parfois les élytres sont aussi d'un rouge testacé, ce qui rend alors l'insecte concolore; mais plus ha- bituellement, aux environs de Paris, les élytres sont d'un noir bleuâtre, ou d'un bleu violet (var. glaucopfcruin). Cet insecte se prend sur les Saules, les Peupliers, les Tilleuls, les Ormes, etc., et sa larve vit dans ces différents arbres. On doit le ranger dans les espèces nuisibles. Il y a une vingtaine d'années, ce Stencore rouge à étuis violets de Geoifroy était encore extrêmement commun sur les Ormes de la banlieue de Paris et des boulevards extérieurs : on ne pouvait secouer une branche en été, sans en faire tomber. Sa larve, avec celle du Cossus Ligniperda (Lépidoptères), commençait l'attaque de ces arbres, qui, affaiblis, étaient ensuite achevés par les Scolytes. Il y a deux autres espèces de Grèce et d'Asie Mineure. 'ÏOVOTIS, Aud.-Serv. — Antennes grêles, à troisième article plus long' que le suivant. Corselet le ptus souvent armé sur chaque côté d'un tubercule épineux DU obtus. Élytres obtusément saillantes aux épaules, puis s'atténuant peu à peu et fortement vers les extrémités. Pattes allongées. Les espèces de ce genre et des genres contigus sont surtout du Nord et des montagnes. Le type est le T. meridianus, Linn. (pi. lv, fig. 5; 5 a, base de l'antenne), de toute l'Europe, des environs de Paris, ayant 15 à 20 millimètres de longueur, se trouvant dans les grandes forêts, et aussi sur les arbres fruitiers et les Aubépines en Heur. La tête, le corselet, les appendices, sont d'un roux plus ou moins brunâtre ; les élytres va- rient beaucoup, tantôt d'un noir ardoisé, tantôt fauves, ou rousses, ou blondes, et toujours avec un duvet court et soyeux. Une autre espèce des montagnes d'Europe, et plusieurs de l'Amérique du Nord et du centre de l'Asie. 736 COLÉOPTÈRES. — CÉRAMBYCIENS. P.4CBVTA, Aud.-Serv. — Antennes du mâle presque aussi longues que le corps, moindres chez les femelles, à troisième article un peu plus long que le suivant. Élytres débordant fortement le corselet, ordinairement subtronquées à l'extré- mité. Pattes allongées. Les Longicornes de ce genre, de taille médiocre, sont reniarquables par une forme courte et trapue ; ils sont surtout des contrées boréales d'Europe, d'Asie et d'Amérique et des hautes montagnes. La seule es- pèce qu'on rencontre quelquefois aux environs de Paris est le /*. collaris, Linn.j du sous-genre Acmœops, Le Conte, à tête, antennes, poitrine et pattes noires, corselet ordinairement d'un rouge cerise, rarement noir, ventre d'un rouge jaune, élytres d'un noir bleuâtre.: c'est le Sten- core noir à corselet rouge de Geoffroy. Nous représentons (pi. lv, fig. 6 a) l'antenne d'un Pachyta. SYLlilTUS, Pascoe, ou Fterostenus, Mac Leay, ou Stenoderus, Aud.-Serv., genres identiques ou très-voisins. — Antennes plus courtes que le corps, à pre- mier article bien plus long qu'aucun des autres. Corselet dilaté latéralement. Pattes médiocres. Corps étroit, linéaire. Le type de ce genre est une espèce australienne de la Nouvelle-Galles du Sud, remarquable par une bande noire longitudinale et en rec- tangle très-allongé à la suture des élytres, et qui a été décrite bien des fois comme nouvelle, sous les noms de S. ou P. suturalis, Oliv., abbre- viatus, Fabr., ceramboides, Kirby, dorsalis, Boisd. (pi. lv, fig. 7; 7 a, antenne). Ce genre est d'Australie et aussi du Chili. LEPTURA, Linn. — Tète brusquement rétrécie postérieurement ; antennes simples, au moins aussi longues que la moitié du corps. Corselet à angles pos- térieurs non prolongés latéralement. Élytres atténuées vers l'extrémité, qui est échancrée ou tronquée. Pattes allongées, à cuisses non renflées. Le genre Leptura est extrêmement nombreux en espèces. Il diffère des Stenocorus par un corselel înerme et campanuliforme, et des Toxotus par la tête constamment tronquée en arrière des yeux et portée sur un cou distinct. Les Leptures paraissent confinées dans les parties froides et tempérées de l'hémisphère boréal des deux continents, descendant, d'une part jusqu'à l'Algérie, la Perse méridionale et la Syrie, d'autre part, jusqu'à la Californie, l'Orégon et le Nouveau-Mexique. Leurs élytres sont en -général rétrccics de la base à l'extrémité, qui est tronquée ou échan- crée. Dans la plupart des Leptures, l'extrémité de l'abdomen dépasse les élytres comme une queue pointue. Ce sont des Coléoptères, en partie des plaines, en partie des montagnes. Leurs larves hâtent la destruction des arbres déjà malades, et contribuent à réduire les souches en ter- reau. (( Dans la dernière époque de leur vie, dit M. Mulsant, quelques- CÈRAMr.YGIDES. — I.I-PTURA, STfiANGALIA. 737 uns restent encore enchaînés, par un penchant instinctif, prùs des troncs qui les ont nourris on qui doivent loger leurs descendants; mais la plupart vont dans les prés voisins recueillir dans les godets des Myr- rhis, des Buplèvres et des Héraclées les sucs que les nectaires de ces plantes semblent sécréter tout exprès pour ces heureux habitants des déserts. Les fleurs en ombelles, pour lesquelles ils ont une préférence marquée, contribuent par leur bl.mcheur lactée à faire ressortir la beauté de leurs corps. Chez les uns, il est revêtu de velours vert ; dans un grand nombre, il présente les teintes plus vives du minium ou les nuances les plus variées du jaune ; chez d'autres, il est paré de poils brillants auxquels la lumière permet de reproduire le poli de l'acier ou l'éclat plus riche de l'argent ou de l'or. » On peut capturer ces insectes au vol sur les fleurs qu'ils aireclionnent, ou les saisir le malin endor- mis sur les corolles, attendant la chaleur du soleil pour se remettre en mouvement. Nous signalerons les espèces les plus communes, qu'on rencontre aux environs de Paris pour la plupart : ainsi le L. testacoa, Linn., de France, d'Allemagne, d'Algérie, noir, de 15 à 18 millimètres, à élytres jaunes chez les mâles et fauves chez les femelles, qui sont plus grandes (pi. Lv, lig. 8, femelle avec oviducte saillant), se rencontrant dans tous les lieux couverts de Pins ou de Sapins, dont sa larve attaque les parties mortes; — \e L.hastata, Fabr., noir, de 15 millimètres, avec élytres d'un rouge de sang, portant une tache triangulaire noire sur la suture de chacune, comme un fer de lance renversé, opposition de couleurs pa- reille à celle des bedeaux des églises (au village aujourd'hui), qui le fit ap- peler par Geofl'roy le Stencore bedeau; — le L. fulva, de Geer, ou tomentosa, Fabr., pubescent, noir, de 10 à 12 millimètres, avec élytres d'un jaune roussftlre à bouts noirs, de toule l'Europe, commun dans les régions tempérées ; le Stencore noir à étuis jaunes de Geofl'roy; — le L. lœvis, Fabr., du genre Grammoptera, Aud.-Serv., Muls., à tête plus courte, à élytres plus élargies que les Leptures propres, de 5 millimètres environ, petite espèce très-commune sur les Ombellifères, noire, à pubescence soyeuse, à élytres tronquées obliquement, d'un roussâlre li\ide, avec suture, bord externe et extrémité noirs : c'est le Lepture qu'on prend le plus souvent en fauchant aux environs de Paris. STllAS€iAIil.%, Aud.-Serv. — Corselet à angles postérieurs prolongés latérale- ment en pointe étendue au devant des épaules des élytres. Les autres carac- tères des Leplura. Dans ce genre, les élytres sont souvent échancrées et épineuses à l'extrémité, et ornées de bandes transversales noires. Nous avons à ciler le .S. atra, Fabr., entièrement d'un noir un peu terne; le Stencore tout noir de Geoffroy, surtout des parties froides ou septentrionales de la France; — \q S . maculata,Voù.ix, des régions froides ou tempérées de toute GUlAKi». 47 738 COLÉOPTÈRES. — CÈUAMlîyCIENS. l'Europe, d'un jaune d'ocre, avec taches noires et deux bandes noires sur chaque élylre, dont la larve vit dans le Bouleau et dans divers ar- bres : c'est le Stencore jaune à bande noire de Geoffroy; — le S. melamira, Linn., de France, d'Allemagne, du Caucase, de 8 à 9 millimètres, d'un noir luisant, avec élytres d'un rouge terne chez les mâles, d'un rouge lisse foncé chez les femelles, à suture et bouts noirs, la larve rougeâtre, vivant dans le Chêne; — \eS.nigra, Linn., de même taille, de France, d'Allemagne et du Caucase, se prenant sur les lisières des bois, tout noir, avec la moitié postérieure de l'abdomen rouge, etc. Les Strangalia adultes aiment à butiner au soleil de mai et de juin sur les fleurs des prairies et des allées de nos bois, et se repaissent de pollen. Il arrive parfois, en se plongeant dans les fleurs d'Orchidées à pollens soudés et glulineux, que ces insectes emportent adhérentes aux pièces de la tète des houppes jaunes de ces pollens, que M. Ch. Robin nous apprend à bien distinguer des productions cryptogamiques(l). Ainsi M. J. Kûnckel a pris dans les bois de Verrières deux sujets de S. melanura, affectés de la sorte ; j'ai capturé au vol, dans la forêt d'Armainvilliers, en juin, le S. nigra et le S. atra, s'ébattant sur YOrchis maculata dans les allées humides, offrant à la tête de ces pollens, ce qui n'empêchait pas l'ac- couplement. On eût dit que ces sveltes Coléoptères noirs, en volant au soleil parmi les herbes, portaient en avant de la tête un l'anal étin- celant. TRAGO€ERl'<^, Aud.-Serv. — Antennes mates, presque aussi longues que le corps. Corselet convexe, un peu rétréci en avant. Élytres sinuées en dedans des épaules, subparallèles ou graduellement rétrécies en arrière, tronquées et plus ou moins échancrées au bout. Pattes assez fortes, à cuisses graduellement et faiblement en massue. Ce genre australien, de place très-discutée, que M. Thomson met près des Callichroma, est formé de quelques espèces de taille moyeinie ou assez grande, d'un jaune mélangé de rougeâtre plus ou moins foncé, avec une pubescence jaune, la tête et le corselet obscurcis, et souvent des bandes obscures peu régulières sur les élytres, et des bandes jaunes ou rougeàtres. La pubescence abonde en dessous, les élytres sont lisses, avec quatre fines côtes longitudinales et entières. —Ex. : T. bidentatus, Donovan, ou australis , Aud.-Serv. , de la Nouvelle-Hollande (pi. lvi, fig. 8). m. — LAMIIDES. Tête en général perpendiculaire au corps en avant, son front formant m\ angle droit ou aigu avec le vertex ; dernier article des palpes fusi- (1) Ch. Robin, Histoire nalurelie des végétaux parasites, etc. Paris, 1853, J. B. BailUère et fils, p. 622, G40, 084.-^ Maurice Girard, Ami. Soc. cnlom. de France, 186/i, p. 153 ; Bull., 1866, p. 37; Bull. 1869, p. 31. LAMIIDES. — TMLSlSTElîNUS. 739 forme ou aciculé; jambes antérieures munies d'un sillon oblique in- terne. Cette troisième famille des Longicornes est de l'étude la plus compli- quée, car elle renferme à elle seule plus d'espèces que les deux familles qui la précèdent, et les auteurs y ont multiplié les genres, surtout depuis les travaux de MM. Pascoe et W. Bâtes sur les Longicornes de la Malaisie et de la vallée de l'Amazone, ces deux régions tropicales si riches en fo- rêts et, par suite, en insectes lignivores. Les mâchoires ont deux lobes, mais l'extrême variation des pièces buccales les rend peu utiles pour la classification. Les antennes sont toujours insérées loin des mandibules dans une échancrure de l'œil, et n'offrent jamais de pores. Le prono- tum, sauf dans le type Tmexisternus, manque d'arêtes latérales et se confond avec les flancs du prothorax. Le mésonotum est muni de l'ap- pareil de stridulation déjà indiqué. Cette famille, enfin, offre les seuls Longicornes ayant des crochets tarsaux bifides, dentés ou appendiculés. La plupart des genres de ce groupe ont une forme renflée ou trapue. Ces insectes constituent la première légion des Cérambyciens de MM. Le Conte et J. Thomson, groupée autour du vieux genre Lamia. A l'état adulte, beaucoup de leurs espèces se tiennent immobiles sur les écor- ccs, qu'elles imitent, comme moyen de protection naturelle^ par leurs couleurs et leurs rugosités. Les larves connues des Lamiides ont un de- gré de dégradation encore plus prononcé que celui offert par les deux premières familles des Longicornes ; on n'y trouve plus vestige de ces pattes thoraciques très- réduites, impropres à la locomotion, insérées près des bords latéraux des segments, pouvant parfois aider la larve à se cramponner dans les galeries ; en outre, la tête est- petite et plus ou moins invaginée dans le prothorax. Quelques-unes vivent et subissent leurs métamorphoses dans des herbes ; mais le plus souvent la vie évolutive se passe au sein des végétaux ligneux. M. .L Thomson et Lacordaire sont à peu près d'accord au sujet des groupes secondaires de cette vaste famille. On peut les rapporter aux types suivants: 1° Tmcsislcrnm., pronotum muni d'arêtes laté- rales ; tête anormale, rappelant celle des Cérambycides ; les autres types sans arêtes latérales au corselet, à tête presque toujours normale, les uns à crochets des tarses simples se divisant en deux types. 2° Dor- cadio7i, à corps presque toujours aptère, à métasternum toujours très- court. 3° Lamia^ à corps presque toujours ailé, à métasternum rare- ment court. Enfin, dans le dernier type, Ix" Plujtœcia, les crochets des tarses sont fendus, dentés ou appendiculés. GENRES PRINCIPAUX. 'ïiIlKSISTERU'US, Latr. — Tète plus étroite que le corselet, peu rcticcie on arrière; antennes grêles et sétacées, à peu près aussi longues que le corps chez Ifes mâles, moindres cliez les femelles. Corselet ayant de chaque côte un faible 7/|0 COLÉOPTÈRES. — CÉRAMBYCIENS. tubercule antérieur, vestige d'arête. Élytres assez allongées, atténuées en ar- rière, débordant un peu le prothorax. Pattes courtes, à cuisses renflées. Corps allongé, plus ou moins pubescent. Ce genre comprend de nombreuses espè.ces localisées, ainsi que celles des genres annexes, dans l'archipel des Moluques (Céram, Amboine, Timor, etc.), dans la Mélanésie , surtout la Nouvelle-Guinée, dans la Polynésie occidentale, ainsi la Nouvelle-Calédonie. Ces insectes sont rares en collection et recherchés des amateurs. — Ex: T. trivittalus ou bizonulatus, G.-Mén., ou hicinctus, lîoisd. (pi. lvi, fig. 7, mâle), de la Nouvelle-Guinée. Al'ROCII%X'*i, Illig. — Front plat ; antennes à premier article médiocre et plus court que le troisième. Yeux à gros granules. Corselet épineux latéralement; épaules des élylres très-épineuses. Pattes antérieures extrêmement longues ; cuisses étroites. Corps déprimé, allongé, large. Le type et espèce unique de ce genre américain est un Longicornc de très-grande taille, dont les pattes de devant atteignent une longueur démesurée, surtout chez les mâles. C'est VA. longimanus, Linn., qui se trouve en médiocre abondance à la Guyane et dans toutes les régions chaudes de l'Amérique du Sud, se tenant sur le tronc des arbres, d'une marche lente et d'un vol lourd. Il atteint environ un décimètre de long. C'est un des insectes que les marchands vendent fréquemment auv amateurs, sous le nom de grand Arlequin de Cayenne, à cause de ses belles taches noires et rouges sur un fond gris verdàtre. îlIACBOPOPIiOIlA, Thomson, au lieu de Macropus, Aud.-Serv., nom déjà em- ployé.— Caractères du genre précédent; seulement pattes antérieures beaucoup moins longues (très-longues cependant), et corselet et épaules des élylres seu- lement obtusément épineux. Geiu'c également améi'icain, ayant pour type le AL trocldearis, Linn., de la Guyane et de la vallée de l'Amazone (pi. i.vi, fig. 1). Une se- conde espèce du Brésil et du Venezuela. ASTYHOMl'S, Redt., ou ACA.NTH0C1NUS, Steph., ou iîlDiLis, Aud.-Serv. — Corps peu convexe. Antennes extrêmement longues, ayant environ la longueur du corps chez les femelles, et de trois à cinq fois cette longueur chez les mâles. Corselet tuberculeux en dessus, obtusément éiiineux latéralement. Oviducte tres- saillant chez les femelles. Les insectes de ce genre ont les antennes et les pattes annelées de noir et de cendré, le corps nébuleuY ou grisâtre, avec des séries de bandes plus obscures, teintes qui les rendent difficiles à distinguer des écorces des Conifères sur lesquels ils se tiennent. Ce sont les Longi- LAMIIDES. — ASTYNOMUS. 7^1 cornes les plus extraordinaires par la longueur démesurée de leurs an- tennes ; il est certain que les mâles seraient gênés dans leur locomotion par ces appendices, aussi restent-ils sédentaires tout le jour sur les troncs. L'espèce principale est VA. œdilis, Linn., ou vwntanns, Muls. Elle est couverte d'un duvet gris cendré, avec quatre points jaunâtres sur le corselet, les élytres marquées de lignes onduleuses, avec deux bandes obliques brunâtres. On prend les adultes en automne et au prin- temps sur l'écorce des Pins, surtout morts ou renversés. L'espèce est de toute l'Europe, surtout du nord, où elle est très-commune et nui- sible aux Pins, dont sa larve perfore l'intérieur. Nous recommandons aux jeunes amateurs parisiens la foret de Fontainebleau, dans les par- ties plantées en Pins, pour capturer ce curieux insecte. Il faut prendre les plus grandes précautions d'isolement pour éviter que ces Longicornes ne se coupent les antennes les uns aux autres, s'ils sont vivants, et pour ne pas briser soi-même leurs fragiles articles. La larve de 1'^. œdilis est entièrement apode et aveugle , à tête roussàtre, à corps d'un blanc jaunâtre revêtu de poils très-fins un peu roussàtres. La nymphe est couverte de poils roussàtres et de groupes d'épines rousses. Il est curieux de voir comment sont chez elle dispo- sées les antennes. Cette espèce offre vraiment l'exagération du type Longicorne^ puisque les antennes sont près de trois fois aussi longues que le corps dans les femelles, et jusqu'à cinq fois aussi longues chez le mâle. La nymphe du mâle offre ces antennes en peloton avec une admirable symétrie. Elles passent d'abord sous le corps, entre les pattes intermédiaires et postérieures ; puis, arrivées vis-à-vis du dernier segment, se contournent, décrivent trois quarts de circonférence, remontent sous le corps, passent au-dessus de la tête pour occuper toute la région dorsale, et se courbent pour se croiser près du dernier segment. La femelle, au moyen de son oviscapte saillant et conique , pond ses œufs dans les souches et les tiges des Pins de trente ans et au delà ré- cemment morts. Cette ponte a lieu en août et septembre, aussitôt après l'éclosion des adultes, et lorsque l'hiver arrive, les larves ont ordinaire- ment atteint près de la moitié de leur grosseur. La durée de la vie de cette espèce est d'un an. Les larves rongent sur de larges surfaces les parties intérieures de l'écorce, en laissant derrière elles des détritus et des excréments. Un instinct parfait les guide dans leur travail. Elles creusent soit l'écorce, soit l'aubier, de telle sorte que l'insecte parfait n'ait pas une trop grande épaisseur ligneuse à perforer de ses mandi- bules pour sortir, et que cependant la larve conserve une protection suffisante. Elle subit la nymphose dans une cellule qu'elle s'est creu- sée et dans laquelle elle se retourne de façon que la nymphe ait la tête en haut. Il y a quelques autres espèces d'Europe et d'Amérique du Nord. 762 COLÉOPTÈRES. — CÉRAMBYCIENS. DOH€.%Dlo\\ Dalman. — Antennes plus courtes que le corps, surtout chez les femelles, à premier article très-gros, les autres allant en diminuant de grosseur. Corselet convexe, plus ou moins dilaté et tubercule latéralement. Élytres snb- ovales, parfois soudées, à épaules effacées ; pas d'ailes. Pattes robustes. Corps convexe. Ces insectes aptères, do taille moyenne, courent sur le sol dans les lieux secs, leurs larves vivant sans doute dans les racines et les souches. Ils représentent, dans, le type des Cérambyciens , les Curculioniens privés d'ailes. Leur corps, le plus souvent couvert d'un duvet velouté, est gé- néralement brun et paré de longues lignes blanches, comme un habit de deuil chamarré de galons d'argent. Parfois les femelles sont fort différentes des mâles et semblent former des espèces distinctes. Nou^ trouvons assez fréquemment dans les environs de Paris le D. fuligina- tor, Linn., de France et d'Allemagne , le Capricorne ovale cendré de Geof- froy, atteignant une taille de 15 millimètres, à corselet portant latéra- lement une pointe obtuse, noir, avec élytres revêtues d'un duvet cendré blanchâtre, ayant à la suture une ligne blanche, et ornées chacune de deux lignes blanches. On prend cette espèce en abondance dans la se- conde quinzaine d'avril, du côté sud de Paris, sous les pierres dans les fortifications, le long des murs, ainsi à la porte de Gentilly et en bien des points des environs, mais toujours par places en grande quantité. Elle paraît rare en Bourgogne et manquer au nord de la France. La larve doit vivre dans les racines des Légumineuses basses, Trèfles, Lu- zernes, Sainfoins, etc., peut-être dans celles des gazons, et il importe de la rechercher, car elle paraît encore inconnue dans ces localités où abonde l'adulte. Les sujets varient beaucoup : tantôt les lignes blan- ches sont à peine visibles sur un fond gris blanchâtre ; tantôt ce fond passe au café au lait clair, puis foncé, au brun, puis au noir mat, car fond et lignes sont d'une fine pubescence couchée ; les lignes blanches vont jusqu'au bout des élytres, ou s'arrêtent en route avec tous les pas- sages. Les sujets tigrés s'accouplent ou entre eux ou avec des sujets unicolores. Cela ne prouve rien, du reste, car on sait que des espèces bien distinctes peuvent donner des métis féconds, mais sans parvenir à fixer une forme spécifique intermédiaire, avec retour à l'une des espèces de départ après quelques générations, comme on l'a vu pour les métis des Bombyces de l'Allante et du Hicin ; pour les Léporides, métis du Lièvre et du Lapin, espèces si fortement distinctes. On a fait des espèces avec des variétés du D. fuliginator, comme mendax, Muls., moiiticola, méridionale, etc. Selon M. Chevrolat, le D. mendax serait des lieux éle- vés, et le D. fuliginator des lieux bas. Les accouplements entre espèces distinctes de Dorcadion ont été constatés : ainsi M. P. de la Brûlerie, dans les montagnes de l'Escurial, a vu de fréquents accouplements entre les D. hispanicum, Muls., et Gruëlhi, Chevr. : d'où résultent des hybrides souvent mal conformés. LAMIIDiS. — PAR.MIiNA, MESOSA. Ih2> Les Dorcadion offrent un nombre considérable d'ospL^'os, avec des doubles emplois nombreux probablement, répandues de la Mongolie aux plateaux du continent indien, et descendant de l'Europe tempérée au nord de l'Afrique. Les régions moyennes et méridionales de l'Espagne paraissent un habitat de prédilection pour des espèces variées de Dorcadion, qui y abondent en outre en individus. (Juaud on saisit les Dorcadion, ils font entendre un bruit assez fort, comme une plainte, par le frottement du corselet contre l'écusson. S>.%ISNE}!^'A, Latr. — Caractères analogues au genre précédent. Corps oblong, très-convexe, velu ; épines latérales du corselet réduites à un tubercule peu saillant. Élytres soudées ; pas d'ailes. Ces insectes, de faible taille, ressemblent à de petits Dorcadion poi- lus. Ils sont propres aux contrées méridionales de l'Europe, nocturnes, privés d'ailes, de couleurs ternes, bruns, avec des fascies moins ou plus foncées. On les trouve sous les pierres, sous lesécorces, dans l'intérieur des Euphorbes et des Lierres, cachés parmi les bois entassés, ou fixés im- mobiles contre les branches des arbres. Nous citerons une espèce du midi de la France et de l'Algérie, le P. Solieri, Mnh., ou pilosa, Sol., dont la larve vit dans les tiges de YEuphorbia Characias {Atm. Soc. cntom. Fr., 1835, p. 123, pi. in). D'après Lacordaire, c'est la seule larve encore décrite du type général Dorcadion. L'adulte, de 8 à 10 millimètres, est d'un brun assez foncé, avec poils gris soyeux, les antennes ciliées^ ics élytres ayant parfois une bande médiane noirâtre. On trouve en Bour- gogne, mais rarement, le /*. fasciata, Villers, sur les arbres garnis de lierre, où probablement vit la larve, MESOSA, Aud.-Serv. — Tète large et aplatie ; antennes du mâle beaucoup plus longues que le corps, aussi longues chez les femelles. Corselet non épineux latéralement; élytres convexes, larges, subparallèles, arrondies à l'angle externe. Pattes robustes, assez courtes. Ce genre a pour type un très-beau Longicorne, de Suède, de France, d'Allemagne et d'Algérie, assez rare aux environs de Paris, toujours estimé des amateurs, le M. curculionoides, Linn., de i'2 millimètres. On l'appelle vulgairement Saperde ij eux de paon. Il faut le chercher, de mai en août, dans les bois, parcs et grands jardins, non sur les fleurs, qu'il ne fréquente pas, mais sur les arbres morts, parfois sur les murs. On le trouve souvent en cassant les branches mortes. La larve vit dans le Chône, le Peuplier, le Noyer, le Cerisier, le Tilleul, etc. L'adulte a le corps large, court et convexe, revêtu en dessus d'un duvet gris de plomb, parsemé de petites ondulations jaunes, orné sur le corselet de quatre, et, sur chaque élytre, de deux taches ocellées noires, entou- rées d'un iris jaune, la plus petite étant la plus rapprochée de la base : ces lieaux dessins rappellent certains Charansons richement colorés. Ih't COLÉOPTËIU.S. — CKIlAiMBVCIliNS. Les amatours peuvent trouver cette belle espèce dans les bois de Saint- (Jermaiu et de Fontainebleau, et dans les chantiers. Citons encore M. nubila, Oliv., de môme taille, de France, d'Allemagne, d'Alfi^érie, sans taches noires sur les élytres, avec une grande tache grisâtre et des fascies grises, jaunâtres et noirâtres. Les Mcsusa sont d'ICurope, de Chine, des Indes, de Ceylan. ■..%NI.%, Fabr.? auct. — Antennes plus courtes que le corps, même chez les mâles, à premier article renflé, puis les autres s'atténuant ; front lar^e. Corselet épi- neux latéralement ; élytres planes, à épaules très-saillantes et tuberculeuses, déhiscentes en arriére. Pattes courtes, robustes, égales ; tarses robustes. Nous prenons comme type de ce genre, comme le font les auteurs les plus nombreux, le L. textor,lAnn., de toute l'Europe et du Caucase, de 17 à 25 millimètres, brun, ou d'un noir grisâtre, en raison d'un court du- vet, avec des marbrures irrégulières jaunâtres, à corselet pointu etélytres très-chagrinées par des points en relief, surtout à leur base. Ce Capri- corne noir chagriné de CeofTroy est nuisible par les trous énormes que ses larves creusent dans l'aubier et le cœur des Saules et des Osiers sur pied. D'après M. J. Thomson, qui prend cette espèce pour type de son gem'e Morimidus , le véritable genre Lamia de Fabricius est fondé sur un Longicorne du Sénégal, L. gigas, Fabr., à antennes des mâles ayant plus de deux fois la longueur du corps. PHllY.\'ET.4^, de Cast. — Front concave entre les yeux, ceux-ci grands, à gros granules; antennes courtes, beaucoup moins longues que le corps. Corselet tuberculeux sur le dos, épineux latéralement. Corps large. Ce genre , de la faune africaine et de Madagascar , est représenté fpl. Lvi, fig. 2 ; 2rt, tête de profil; 2 6, id. de face) par une belle et grande espèce du Sénégal, noire, avec deux larges bandes dorées sur les élytres, le P. aurocincta, Gory, ou IJaoocincta (Cat. Dejean). B.%TOmR.%, de Cast. — Antennes du mâle plus longues que le corps, plus courtes chez la femelle, à articles granuleux ou épineux, le troisième plus long qu'aucun des autres. Yeux grands. Corselet et épaules des élytres épineux, t'attes antérieures des mâles allongées. Ce genre, de la faune indienne, comprend des Coléoptères de grande taille, les plus grands des Lamiides< dont le type est le U. rubus, Linn., il corps atténué chez le mâle, cylindrique chez la femelle, atteignant une longueur de 50 milUmètres. Ce Coléoptère, d'un brun noirâtre, est extrêmement commun aux Indes orientales, et se trouve aussi, par importation, à 1 ile de France et dans l'Afrique orientale. On se le pro- cure avec facilité pour les coUcclious, et, de, même, sa nymphe, rappe- lant tout à fait les formes de l'adulte, et sa grosse larve charnue, apode. r.AMlIDES. — BATOCERA, ONCIDERES. 1U5 qui eût fait les délices des Homains s'ils avaient pu la connaître. Elle est longue de 70 millimètres, et a pour largeur au protliorax 20 milli- mètres, dimensions qui montrent les dégâts que ses galeries creusent dans les pièces de bois. A Ceylan, les immenses plantations' de Coco- tiers, qui sont une des principales richesses de cette île, ont cette larve pour ennemi principal ; elle pénètre dans les stipes encore tendres des jeunes arbres, les perfore dans toutes les directions, et amène promp- tement leur mort. Le genre Batocera est propre aux régions chaudes de l'ancien monde. On le rencontre en Australie, au Gabon et même au nord de la Chine, qui réunit des faunes de climats très-éloignés ; mais le centre de création des Batocères est éminemment indo-sondaïque, comprenant les deux péninsules indiques, la Malaisie, les Moluques, la Mélanésie et ses ar- chipels, l'île Woodlark, etc. L'espèce de la plus grande taille, attei- gnant 8 centimètres, le B. Wallacei, Thoms., est de l'Ile d'Arou. La li- vrée des Batocères n'est pas ce qu'on pourrait attendre de ces régions où les ardents rayons du soleil développent si fréquemment les riches couleurs ; ce sont des fonds brunâtres, gris ou verdàlres, uniformes, ou avec des taches blanches ou fauves. OMrinEREfiï, Aud.-Serv. — Yeux longitudinaux, séparés chacun du bord interne du front par une carène longitudinale. Antennes des mâles Irès-longues. Corse- let presque inerme sur les bords ; épaules des élytres assez saillantes. Tarses robustes, à dernier article le plus long. Nous citons ce genre, propre aux régions chaudes de l'Amérique du Sud , à cause des particularités de mœui^s intéressantes qu'il nous offre. On doit signaler les 0. saga, Daim., ou vomicosa, Germ., et 0. am- putator, Fabr., du Brésil. Les larves vivent dans l'intérieur des branches d'arbres appartenant aux Mimosas, et s'y transforment en nymphes dans un cocon formé de parcelles de bois détachées. Les adultes, par ce môme instinct que nous avons vu chez divers Curculioniens des ver- gers, afin de donner plus de facilité au travail interne de leurs larves en arrêtant l'afflux de sève, entaillent les branches par une incision circulaire à leur base, de sorte que, lorsque le vent souffle avec force, on voit de tous côtés tomber des branches brisées. Dans un genre voi- sin, mais différent par les antennes, nous citerons le Periergates Rodri- guezi, Lacord. (coll. Candèze), de 12 à 15 millimètres, très-commun au Guatemala, où il fait parfois des dommages sérieux dans les planta- tions de Cafiers, en coupant les jeunes branches de ces arbrisseaux. Le genre Oncideres et ses annexes sont américains et comptent parmi les plus nombreux Lamiides de ces régions. Le genre Oncideres a des espèces abondantes dans les deux Amériques chaudes , surtout celle du Sud. Elles offrent, sur un fond de nuance variable, des gouttelettes ou des marbrures confluentes de couleur fauve ou blaiiche. 7/l6 COLtOPTÈUiS. — Ci-RAMBYCII-NS. SAPKROA, Fabr. — Antennes au plus un peu plus longues que le corps, à troi- sième article plus long que le suivant. Corselet latéralement inernie. Élytres planes ou peu convexes, à épaules saillantes, atténuées en arrière ou parallèles. Corps allongé, pubescent. Le corselet, sans épine ni tubercule latéral, dislinyuc toul de suite ce genre des Lamia. «Les Saperdes, dit M. MulsanI, offrent, les unes, comme une cuirasse, la peau chagrinée des Squales; d'autres étalent sur leur dos la richesse soyeuse du satin. Celles-là brillent des nuances les plus tendres du vert d'eau et du vert azuré ; celles-ci ont l'air d'être vêtues d'un habit chamarré de galons. Elles restent sur les arbres, à la ruine desquels plusieurs semblent attachées. » En effet, plusieurs espèces sont très-nuisibles. Ainsi la larve du 5. Carcharias, Linn., genre Anœrea, Muls., commet dans les Peupliers et dans les Trembles les mômes dégâts que le L. textor dans les Saules, et dévaste souvent les jeunes plantations. L'adulte, d'assez forte taille, 22 à 25 mil- limètres, a le dessus du corps recouvert d'un duvet cendré jaunâtre, les antennes cendrées, avec l'extrémité des articles noire, les élytres subdéprimées, très -larges aux épaules, chagrinées ou parsemées de gros points noirâtres élevés , d'où le nom de Lepture chagrinée de Geoffroy. Les femelles pondent, en juin et juillet, dans les gerçures des écorces des Peupliers et des Trembles qui ne sont pas âgés de plus de vingt ans, et aussi dans les semis des cinquième et sixième années. Les larves pénètrent jusqu'au cœur du bois et broient les fibres. Elles vivent deux ans, et atteignent 32 millimètres de long sur 8 de large ; sont d'un blanc jaunâtre, déprimées, épaisses, atténuées en arrière, munies de mamelons sur le dos et de poils sur les côtés, tout à fait apodes. Elles deviennent nymphes, lisses et sans épines terminales, dans une cellule tamponnée avec des fibres de bois aux deux bouts. On reconnaît les arbres attaqués aux débris ou petits copeaux encore liumides qui se trouvent à l'entrée du Irou d'entrée de la galerie. On peut confondre avec les dégâts des Sésies (Lépidoptères) ; mais le remède est le même. Il faut couper et emporter les tiges attaquées, et, pour les troncs, les enduire jusqu'à 2 mètres environ au-dessus du sol d'une couche de terre glaise pétrie avec de la bouse de vache, ce qui empêche les pontes. Une seconde espèce, de plus petite taille, dont la larve exerce ses ravages dans les Trembles, les Peupliers, les Saules, est le S. populnea, Linn., de 10 à 12 millimètres, de foute l'Europe et d'Algérie, à corps cylindroïde, à élytres arrondies à l'extrémité et convexes. C'est la Lep- ture à corselet rond et taches jaunes de Geoffroy. Les antennes sont anne- lées ; le fond de la couleur est d'un gris noir, avec duvet cendré jau- nâtre ; le corselet offre deux lignes de duvet jaune fauve, et les élytres ont quatre nu cinq gros points un .peu en zigzag, dus à un duvet roux. LAMIIUES. — SAPEUDA, TETROPS. lUl Cette Saperde du Peuplier paraît à la fni de mai et en juin, et opère sa ponte, non sur les tiges, mais sur les branches des jeunes Peupliers et Trembles, surtout quand ils croissent dans les terrains maigres et qu'ils ont peu de vigueur. Les larves creusent des galeries en pratiquant de place en place descliambres rondes où elles séjournent avec prédi- lection ; ces chambres ont pour paroi une mince couche d'aubier voi- sine de l'écorce. Cette couche grossit peu à peu, et, refoulée par la ca- vité de la larve , forme un renflement , de sorte que les branches, devenues noueuses, changent de direction, souffrent et souvent péris- sent. La larve emploie deux ans à prendre toute sa croissance, et devient nymphe au mois d'avril du second printemps. Un Ichneumonien et un Diptère (Entomobie, Tachinaire) sont les principaux ennemis qui nous servent d'auxiliaires contre cette nuisible espèce. Le S. scalaris^ Linn., de toute l'Europe, de 15 millimètres, à élytres tronquées et déprimées, est noir, avec les antennes annelées de noir et de jaunâtre, le corselet et les élytres avec taches jaunes ou verdâtres, parfois confluentes, le fond noir paraissant entre les taches comme des échelons. On le trouve sur les Bouleaux, les Sycomores, les Cerisiers, surtout dans les parties froides et tempérées de la France. C'est aussi un insecte nuisible aux vieux Poiriers, et les larves, de couleur vineuse, avec deux taches jaunes au premier anneau, creusent leurs galeries dans les couches intérieures de l'écorce; pour la nymphose, elles se façonnent une loge dans l'aubier. Elles paraissent vivre trois ans, et les adultes éclosent en juillet. Selon M. Goureau, on doit écorcer dans les vergers tous les vieux Poiriers abattus, atîn de détruire les larves qui s'y réfugient. Citons encore deux Saperdes couvertes d'un duvet vert tendre, et ornées de points noirs, S. Treinulœ, Fabr., et S. punctata^ Linn.; celle-ci de 12 à 15 millimètres, avec six points noirs sur le corselet, six; taches sur chaque élytre et une rangée de points noirs sur chaque côté de l'abdomen. Elles vivent sur les Trembles et les Ormes. Le genre Saperda réduit est médiocrement nombreux en espèces, confinées dans les régions froides et tempérées de l'hémisphère boréal des deux continents. Dans un genre assez voisin, présentant les yeux divisés en deux, nous devons signaler le Tetrops, Steph., prœustus, Linn., de toute l'Europe (g. Polyopsia, Muls.), à bouts des pattes d'un jaune livide, ainsi que les élytres ; celles-ci noires à leur extrémité, de même que le reste du corps. Les crochets des tarses sont lobés à la base (passage aux Phytœ- cies). La larve vit dans le Chêne, le Charme, le Poirier, l'Orme, et l'on trouve l'adulte sur les mêmes arbres. C'est la Lepture noire à étuis jaunes de Geoffroy, de 4 à 5 millimètres de long. Ces insectes, rangés par Lacordaire dans les Phyiœcies, sont les plus petits de ce groupe, ne dépassant pas 5 millimètres. Les Tetrops sont noirs, avec les élytres très-ponctuées, souvent testacées ou fauves, 7Ù8 COLÉOPTÈRES. — GÈUAMOYCIENS. ainsi que la tête, le corselet et les pattes. Us sont d'Europe et de l'Amérique du Nord, jusqu'au Mexique. AU'iPAiVTlllA, Aud.-Serv. — Antennes de douze articles et plus longues que le corps chez les mâles, presque aussi longues chez les femelles. Élytres rétrécies à l'extrémité, un peu convexes, déclives latéralement par degrés. Pattes allon- gées, surtout les postérieures, à crochets des tarses divergents. Ces insectes ont une forme élégante par leur corps allongé et hérissé de poils fins, leurs longues antennes souvent divisées en anneaux alternativement clairs et foncés, leur corps orné d'un duvet velouté, parfois varié de bandes. Les larves vivent pour la plupart dans l'in- térieur des tiges ou des bulbes de Carduacées et de Liliacées, et les adultes volent sur les fleurs. Nous citerons une espèce des Char- dons, A. sufuraUs, Fabr., de 12 millimètres environ, hérissée de poils noirs, de teinte bronzée, obscure, finement ponctuée', avec une raie médiane d'un blanc jaunâtre sur la tête et le corselet, et une ligne de cette couleur à la suture de chaque élytre. Ces Coléoptères, peu répandus dans le Nord, comptent une quinzaine d'espèces, d'Europe, d'Afrique boréale et d'une grande partie de l'Asie. Leur couleur géné- rale varie du bronzé plus ou moins obscur au bleu, souvent uniforme, parfois relevée par une bande suturale ou des mouchetures sur les élytres. CAIjAMOBIUS, g. -Mén.— Antennes de douze articles, plus longues que le corps dans les deux sexes. Pattes peu robustes, très-courtes, surtout les postérieures. Corps très-allongé, svelte^ finement pubescent. Ce genre est fondé sur une espèce unique, longtemps comprise dans les Agapanthia, très-nuisible dans le midi de la France, et qui doit à ce titre appeler toute notre attention. C'est le (7. gracilis, Creutzer, ou marginetlus, Fabr., qu'on rencontre dans le midi de l'Allemagne, en Espagne, en Italie, en Turquie, en Algérie et aussi en France, sur- tout dans sa région méridionale, remontant en certains endroits au centre et môme un peu dans le nord. L'adulte, de 6 à 10 millimètres, est noir, revêtu d'un duvet cendré jauuàtre, a une tête proéminente, un corselet subcylindrique, des élytres linéaires, avec une bande jau- nâtre à la suture, des antennes unicolores, très-grêles et très-longues. Cet insecte, objet des études de M. Guérin-Méneville, vit aux dépens dé nos céréales les plus précieuses. Il éclôt lors de la floraison des fro- ments ; la femelle perce un petit trou dans le chaume, près de l'épi, et y dépose un œuf. La larve ronge circulairement la tige creuse, en ne laissant intact que l'épiderme, de sorte que l'épi tombe bientôt au premier souffle du vent. 11 reste une tige ressemblant à un aiguillon, ce qui fait donner le nom à'Aiguillonnier h cette funeste larve. Celle-ci, r.AMIIDES. — CALAMOr.lUS, PHYTOECIA. 749 l'épi tombé, descend dans le chaume, à 5 ou 6 centimètres du sol, passe l'hiver; devient nymphe au printemps suivant, et bientôt adulte. Ce petit Longicorne a quelquefois fait perdre le si.vièmc et même le quart de la récolte. Heureusement ici que les mœurs de l'espèce ont appris le remède au mal. En arrachant les chaumes, après l'enlève- ment des gerbes, et en les brûlant, on garantit la récolte suivante, si elle est encore en céréales; ou bien on alterne la culture, et l'insecte meurt de faim. On peut encore couper le blé très-près de terre, et em- porter ainsi les larves à la grange, où elles périssent par la dessicca- tion, ou sont écrasées lors du battage. C'est là un nouvel exemple à citer, entre tant d'autres, de l'intérêt olTert par l'étude théorique de ces chétifs animaux qui nous ruinent en détail. Combien sont insensés ceux, trop nombreux, qui croient faire preuve d'esprit en tournant en dérision ces minutieuses investigations des entomologistes. L'utihté de ces recherches patientes échappe à la foule frivole qui s'intitule le monde. Hélas ! ses arrêts, dictés par la suprême ignorance, ne sont que trop écoutés des puissants ! 1»I1VTCECIA, Mulsant. — Antennes de onze articles, le troisième plus long que le suivant, robustes à la base, souvent atténuées à l'extrémité, plus longues que le corps ou égales chez les mâles, plus courtes chez les femelles. Corselet cylindrique ; élytres sans carènes latérales, en général un peu rétrécies d'avant en arrière, surtout chez les mâles. Crochets des tarses bifides. C'est àM. Mulsant qu'on doit la connaissance du principal caractère de ce genre et de quelques autres, d'avoir les crochets des tarses divisés en deux au moins, munis à la base d'une large dent obtuse : c'est excep- tionnel chez les Cérambyciens. A l'état de larve, les Phytœcies vivent dans les tiges d'arbres, d'arbrisseaux ou de plantes herbacées. Les adultes se trouvent sur les mêmes végétaux. Presque tous ont les élytres variant du gris verdàtre au noir ardoisé, parfois avec le corselet et les pattes rouges ou jaunes. Elles sont surfout des parties méridionales de l'Europe. On trouve près de Paris le P. cylindrica, Linn., ou cinerea, de Geer, espèce àla fois des régions froides et chaudes de l'Europe, d'Algérie, du Caucase, noire, avec un court duvet ardoisé, la Lepture ardoisée de Geoffroy. Nous représentons les détails d'une autre espèce du Nord, spéciale aux îles Britanniques, le P. Atkinsoni, Curtis (pi. lvi, lig. 5 a, labre ; 5 6, mâchoire et palpe ; 5 c, mandibule ; 5 d, lèvre inférieure et palpes; 5e antenne), et, fig. 5, tarse et crochets de P.virescens, Fabr,, espèce commune d'Europe et d'Algérie, qu'on trouve sur la Vipérine. Dans un genre très-voisin (Oberea, Muls.), aussi à crochets des tarses bifides, à antennes en général un peu plus courtes que le corps, se ren- contrent des espèces à élytres allongées , parallèles , glabres , parse- mées de gros points noirs, et à corselet d'ordinaire jaune, avec deux points noirs. On doit citer VO. oculata, Linn., de toute l'Europe et du Cau- 750 COLÉOPTi:HES. — CÉKAMBYCJENS. case, de 15 à 18 millimètres, à pattes, écusson et corselet d'un beau jaune, celui-ci avec deux gros points noirs, à antennes noires, à élytres cendrées, dont la larve vit dans l'Osier et le Saule ; et VO. lincaris, Linn., de 13 millimùtres de longueur, à corps cylindrique, très-étroit et très- allongé, à tète et corselet noirs, à pattes jaunâtres, à élytres rousses sur le bord, obliquement échancrées à l'extrémité, couvertes de lignes longitudinales de gros points presque carrés. La larve de cette espèce, de Suède, de France, d'Allemagne, vit dans les rameaux des Noyers et surtout des Noisetiers. Elle est nuisible à ces derniers arbrisseaux, dans les jardins et dans les bois. La larve creuse au centre d'un rameau une galerie longitudinale partant d'un bourgeon de l'extrémité, et toute la partie atteinte meurt. Elle met deux ans à prendre tout son accroisse- ment, en remontant sans cesse vers le tronc principal qui porte le ra- meau. Elle est rugueuse, atténuée vers l'extrémité, et n'a que des ru- diments de pattes thoraciques, impropres à la marche. Elle hiverne en bouchant la partie libre de la galerie avec des fibres de bois , devient nymphe au mois de mai de la seconde année. L'adulte sort au milieu de juin en perçant la branche, voltige sur les Noisetiers, s'accouple aus- sitôt, et la femelle pond un œuf par bourgeon, à son extrémité. Les Phytœcia comptent de nombreuses espèces, surtout d'Europe tem- pérée et méridionale. On en rencontre aussi dans l'Afrique boréale et l'Asie occidentale. Les Oberea ont longtemps été regardés comme confi- nés en Europe, en Asie et dans le nord de l'Afrique et de l'Amérique ; mais les découvertes récentes de M. Wallace ont montré que le centre de création le plus abondant réside dans les archipels indiens, c'est-à- dire les îles Sondaïques et Moluques, qui comptent à elles seules plus d'Oberea que toutes les autres régions du globe réunies. Les deux genres suivants, par lesquels nous terminerons la tribu des Cérambyciens, ont les ongles des tarses divisés ou appendiculés, de ma- nière à simuler quatre ongles. AST.%THES, Newmaii, ou Tetrâophthalmus, E. Blanch.— Corps large, court, massif, brillant, hérissé de poils fins peu abondants. Antennes pubescentes, à peu près de la longueur du corps. Élytres à épaules très-saillantes, courtes, parallèles, arrondies au bout. Pattes médiocres, à cuisses larges. Ce genre est riche en espèces répandues du Japon aux îles de là Sonde, et du nord de la Chine à Siam. Il a pour caractère singulier de pajaitre posséder quatre yeux, chacun étant complètement séparé en deux disques à facettes d'aire inégale par la base de l'anteinie. Nous figurons une espèce de Java, r.4. dimidiatus, Gory, et probablement btpartitus (Catal. Dejean), de Java, à pattes et élytres d'un jaune pâle, avec mie large tache bleue à la base de celles-ci, tète, corselet et antennes d'un jaune vif (pi. lvi, flg. 3; '3 a, tète vue de profil; 3 6, id. de face). CIII'.YSOAIKMENS. loi On réserve actuellement le nom de Tetraopes, Daim., à un genre analogue comme caractère oculaire, et voisin à d'autres égards. Ses espèces paraissent vivre sur les Asclépiadées, et sont spéciales à l'Amé- rique du Nord, s'étendant de l'océan Atlantique à la Californie, et du Canada au sud du Mexique. illRUiVIC.^ (diverses collections^ Tliomson). — Antennes un peu plus longues que le corps, poilues, à premier article un peu plus long- que le troisième, et celui-ci que le suivant. Yeux grands. Élytres épineuses à l'extrémité. Pattes grêles. Ce genre est du Brésil. — Ex. : ^E. canescens, Klug., d'un blanc un peu verdàtre, avec quelques lignes brunâtres (pi. lvi, fig. /|). Quelques autres espèces du même pays. Tribu des €llRY<$OllÉlilEm^ ou PIIYTOPILIGES, Les tribus précédentes des Cérambyciens et des Scolytiens vivent presque exclusivement des parties ligneuses des végétaux, et très-rare- ment des parties tendres ; les Curculioniens se nourrissent d'une ma- nière mixte, des semences, des tiges et des feuilles; les Chrysoméliens au contraire attaquent les organes verts des végétaux phanérogames, presque toujours les feuilles, dont ils enlèvent le parenchyme, parfois les tiges succulentes et les racines tendres. Les larves de ces Coléoptères causent souvent des dégâts considérables. Les adultes se trouvent comme elles sur les feuilles et volent en outre sur les fleurs ; ils sont souvent ornés de vives et brillantes couleurs et de reflets métalliques. La tribu des Chrysoméliens se compose d'espèces de taille moyenne et petite, variant de 20 millimètres environ {Sagra, Megamerus) à 1 mil- limètre chez certaines espèces d'Altises, c'est-à-dire descendant aux Microcoléoptères, par une réduction analogue à celle des Psélaphiens, des Trichoptenjx, des Scydmœnus. Les téguments sont assez durs, à l'exception du type Galleruca, mais n'atteignent pas la rigidité presque pierreuse de certaines espèces des groupes des Hister, des Piméiies et des Charansons. Le corps est le plus souvent oblong, parfois circu- laire, renflé le plus souvent. Il est allongé et déprimé en dessus chez certaines Donacia. Les élytres emboîtent presque toujours tout l'abdomen, et ont dans certaines familles, ainsi que le corselet, un rebord ou une expansion latérale. Elles recouvrent des ailes, en mettant à part quelques cas d'avortement de celles-ci chez des Chrysomèles. Les pattes offrent les particularités suivantes. Les postérieures de- viennent propres au saut dans certains genres, et cette faculté n'est pas en rapport nécessaire avec la grosseur de leurs cuisses. Les tarses, tétra- mères, ou plus exactement subpentamères, se terminent au quatrième ou cinquième article par deux ongles ou crochets dont les modifi- cations fournissent de bons caractères de classification. 752 C.OLÉOPTÈRLS. — CHRYSOMÊLIENS. Les caractères des Chrysoméliens peuvent être résumés ainsi : Tête médiocre ou petite, le plus souvent engagée eu totalité ou eu partie dans le corselet. Antennes ayant /j, 8, 9, 10, 11 articles (dans les genres euro- péens 11, rarement 10) filiformes ou grossissant un peu de la base à l'extrémité. Yeu\ latéraux, presque toujours finement granulés, c'est-à- dire à vision diurne, souvent sinués en dedans. Mandibules robustes, courtes, échancrées ou fendues au sommet cliez la plupart ; mâchoires à deux lobes, languette variable. Palpes des deux sortes, de quatre et trois articles, peu développés. Corselet transversal, parfois trés- convexe en dessus, le plus souvent de la largeur des élytres à sa base. Élytres oblongues ou globuleuses, rarement soudées, très-rarement rac- courcies. Écusson presque toujours visible. Abdomen de cinq segments eu dessous. Pattes de longueur médiocre ou petite, à tarses de quatre articles visibles, réellement subpeutamères, avec quatrième article du type complet rudimentaire, mais distinct, les trois premiers dilatés avec brosses en dessous, le troisième bilobé ou entier (rarement) et alors cor- diforme. La science possède quelques indications sur lauatomie interne de ces insectes. Le tube digestif, d'après la dissection de 16 espèces, est plus long, d'une manière générale, que celui des Coléoptères carnassiers, selon la loi habituelle des animaux herbivores. L'œsophage ne débouche pas dans un gésier, qui manque en raison sans doute de l'absence d'ali- ments très-durs, mais se rend à un estomac le plus souvent lisse, parfois couvert de papilles ciecales (Cr/ocer/s, Donacia), auquel succède un in- testin cylindrique et grêle, renflé à son extrémité en une ampoule rec- tale. On n'a pas trouvé de glandes salivaires dans les espèces étudiées k l'état adulte. Des canaux de Malpighi s'abouchent à l'estomac, au nombre de quatre chez les i)onac/a, de six dans les autres, dont deux plus grêles; lisse replient, à l'autre bout sur le rectum, mais sans y pénétrer, et se terminent en cul-de-sac. D'après L. Dufour, la graisse abonde chez les lourds Cycliques de Latreille, et n'existe presque pas chez les Eupodes. Une marque d'infériorité organique des Chrysoméliens est le peu de centralisation de leur système nerveux, en admettant toutefois qu'on puisse généraliser les observations faites sur deux espèces {Timarrim tenehricosa, GiColaspidema atrum). Les larvesont 13 paires de ganglions, y compris le cérébroïde, et les adultes 8, allant jusqu'au milieu de l'ab- domen. Examinons les affinités zoologiques des Chrysoméhensavec lesautres Tétramèresou Su])pentamères. Les Erotyliens s'en distinguent par leurs antennes en massue, leur odeur ammoniacale, leur régime fongicole. Les antennes, les impressions sous-abdomhiales, les tarses en éloignent les Coccinelliens, qui s'en rapprochent au contraire par leurs larves hexapodes, surtout pour les espèces ^)hytophages. Il y a certains rap- ports avec les Curcuhoniens à rostre très-court, mais les larves sont ici CHRYSOMÉLIENS. 753 très-diflérentes. En outre, les pièces buccales, les antennes filiformes et le pygidium recouvert par les élytres ne permettent pas la réunion avec certains Anthribes ni avec les Bruches. Ce sont, comme nous l'avons déjà dit, avec les Cérambyciens adultes qu'il n'y a pas de séparation nette. Beaucoup de Donacides aplaties, à antennes allongées et filiformes, ressemblent à des Leptures. Cependant, d'une manière générale, les antennes des Chrysoméliens sont moins longues et plus épaissies à l'ex- trémité, le lobe externe des mâchoires est souvent biarticulé, et un certain nombre de leurs genres ont la faculté saltatoire refusée aux Cérambyciens. Une distinction très-nette s'établit par les larves, que nous devons décrire. Les larves des Chrysoméliens sont plus ou moins charnues, épaisses et recouvertes d'une peau fine, parfois cornée sur le dessus des segments thoraciques. Leur forme est ovalaire, oblongue ou allon- gée ; quelques-unes sont cylindriques et recourbées postérieurement, à la façon des larves de Scarabéiens. Souvent la peau, au lieu d'être blanchâtre, est grisâtre ouvcrdâtre ou de couleur métallique, en rapport avec une vie à la lumière. La plupart, eu effet, vivent à découvert sur les feuilles dont elles se nourrissent ; certaines se recouvrent d'une façon variée de leurs excréments, et enfin il en est qui sont mineuses à l'inté- rieur des feuilles ou des rameaux, ou des racines. Elles ont toutes 13 seg- ments, y compris la tète, qui est cornée et pourvue de deux courtes an- tennes, de stemmates, de pièces buccales développées. Le fait important qu'offrent toutes ces larves, c'est que les segments thoraciques sont pourvus de trois paires de pattes écailleuses, tantôt allongées, tantôt assez courtes, mais toujours propres à la locomotion, tandis que les larves des Cérambyciens, endophytes et lignivores , sont toujours apodes , ou n'ont que des pattes rudimentaires et non fonctionnelles. Les autres segments sont souvent couverts de tubercules ou de mamelons charnus, parfois d'épines. Il n'est pas rare que le dernier segment porte en dessous un pseudopode ou fausse patte anale. Plusieurs de ces larves sécrètent un fluide visqueux qui contribue aies fixer aux végétaux, et il en est qui laissent sortir de pores de la peau un liquide acre et fétide devant contribuer à leur défense, en rebutant les oiseaux et les insectes carnassiers. Le régime de ces larves est celui des adultes, et au point de vue restreint, c'est-à-dire que le même végétal nourrit une espèce depuis sa sortie de l'œuf jusqu'à l'insecte parfait inclusivement. Les larves sont très-voraces et croissent rapidement ; elles ne paraissent pas pouvoir supporter de longs jeûnes, fait général et harmonique chez les animaux herbivores; aussi peut-on souvent détruire des espèces nuisibles en sacrifiant la première récolte des végétaux qu'elles infestent, ou en opé- rant une alternance de culture, si elles sont exclusives à une plante. Il parait que la plupart des larves de Chrysoméliens hivernent, et non les œufs. GIRARD. ^^ 15U COLÉOPTÈRES. — GHRYSOMÉLIENS. La plupart des larves s'enveloppent pour la nymphose d'une coque papyracée, soit sur les feuilles, soit en terre, et alors la consolident par des grains réunis par de la viscosité. Les nymphes ont, comme à l'ordinaire, les organes repliés le long du corps, le tout entouré d'une mince membrane. LatreilleetLacordaire ont essayé de classer les Chrysoméliens d'après la forme et la physiologie des mœurs des larves. Nous ne parlerons pas ici de cette question, réservant ces détails pour l'histoire des genres. Nous croyons que la classification des insectes adultes doit avant tout reposer sur les sujets mêmes qu'on étudie, et qu'en outre, sauf des cas exceptionnels de récurrence, la forme adulte présente plus de dif- férences que l'état de larve, par suite de la division et du perfection- nement du travail organique. Nous résumerons en peu de mots ce qu'il est nécessaire de connaître à propos de l'histoire de la classification des Chrysoméliens. Linneeus n'avait établi que les genres Hispa, Cassida et Chrysomela. Il avait placé un Donacia dans ses Leptura, erreur très-permise par l'absence de caractères nets entre les Cérambyciens et les Donacia, groupe de passage. Fabricius, lUiger et Latreille ajoutèrent un certain nombre de genres. La tribu est constituée, dans les Coléoptères tétramères, sous le nom de Phytophages ou d'Herbivores, par C. Duméril. Bien que les insectes dont il est question soient de tous les Coléoptères ceux dont le régime est le plus fixe, il était préférable de les désigner, comme le firent Latreille et Lamarck, sous le nom de Chrysomélines, car ce nom ne comporte aucune signification absolue. Dans ses publications suc- cessives, Latreille divise la tribu en deux groupes, les Eupodes (types : Sagraet genres annexes, Donacia, Crioceris, etc.) et les Cycliques (types : Hispa, Cassida, Clythra, Cryptocephalus, Bromius, Colaspidema, ChrysO' mêla, Altica, Galeruca). 11 en sépara toujours, comme groupe de même valeur, les Clavipalpes ou Erotylénes. Ce sont ces trois groupes dont Dejean forma en 1821 ses Chrysomélines, ne faisant plus que quatre familles dans les Tétramères : Curculionites, Xylophages, Longicornes et Chrysomélines. La réunion des Eupodes aux Cycliques est bonne, et se trouve conservée dans la tribu des Chrysoméliens de M. E. Blanchard, mais il faut en séparer la tribu des Érotyliens (Clavipalpes de Latreille), et démembrer les Xylophages, réunion artificielle dont le nom est faux en partie. M. E. Blanchard (18Zi5j établit cinq familles dans la tribu des Chrysoméliens, en tirant leurs noms des genres Crioceris, Hispa, Cas- sida, Chrysomela et Galeruca, la cinquième famille renfermant les AUfses et les Galéruques. Lacordaire (1845-1848) a subdivisé ses Phy- tophages en deux légions, la première comprenant les genres dont les antennes sont écartées à la base, et la seconde ceux où ces organes se rapprochent au point d'insertion. M. L. Fairmaire reproche à cette divi- sion d'offrir beaucoup d'exceptions, et 'de séparer les Chrysomèles des Galéruques, tandis qu'il y a bien plus d'affinités entre elles que des DONACIA. 755 Galéruques aux genres Hispa et Cassida, la méthode de Lacordaire exigeant la réunion de ces trois types. Lacordaire avoue ne savoir où placer les Altises, dont la plupart toutefois se rattachent aux Galé- ruques. M. L. Fairmaire ne voit de séparation nette qu'en deux séries des plus inégales quant au nombre des genres, et dont l'aspect général fournit un caractère très-facile à saisir. L'une (et encore à une excep- tion près, le genre Leptispa, Baly) comprend les Chrysoméliens, dont le corps est couvert d'épines ou offre de larges expansions membraneuses {Hispa, Cassida); l'autre réunit tous les autres genres, à corps sans épines ni expansions latérales. Ces divisions sont donc plus ou moins artificielles, et nous croyons devoir, à l'exemple de M. E. Blanchard, de M. E. Desmarest, ne pas les adopter, et exposer seulement l'histoire des genres principaux, en donnant quelques caractères généraux de fa- milles. Au reste, nous ne saurions trop le répéter, toutes ces discussions, si intéressantes au point de vue de l'entomologie pure, sont sans impor- tance dans un ouvrage où l'on cherche avant tout cà faire connaître les espèces des insectes utiles ou nuisibles, ou présentant quelque intérêt exceptionnel sous le rapport de l'anatomie, de la physiologie et des mœurs. Nous n'avons encore en France qu'un petit nombre de travaux sur les Chrysoméliens. Outre des monographies de Suffrian (traduction), de Fondras, de M. AUard, de M. Joannis, qui seront indiquées cà leur place, nous devons citer l'ouvrage de Lacordaire, malheureusement inachevé, comprenant les Eupodes de Latreille et une partie seulement de ses Cycliques (types Clythra et Cnjptocephalus) : c'est la Monographie des Coléoptères subpentamères de la famille des Phytophages, traitant des espèces de tous pays {Mémoires de la Société royale des sciences de Liège, t. III, 1845, et t. V,1848). Les Chrysoméliens d'Europe, au point de vue des genres seulement, font l'objet du travail de M. L. Fairmaire, dans le dernier volume du Gênera des Coléoptères d'Europe de Jacquelin du Val. Le premier groupe des Chrysoméliens, par lequel tous les auteurs commencent l'histoire de la tribu, a des larves aquatiques, et des nym- phes immergées, renfermées dans des coques fixées aux tiges des végé- taux (Donacw, Hœmonia). GENRES PRINCIPAUX. DOWACIA, Fabr. — Corps allongé. Tête saillante, dégagée du corselet; antennes assez longues et filiformes, rapprochées à la base. Corselet beaucoup plus étroit que les élytres. Tarses médiocres, dilatés, villeux en dessous, à troisième article profondément bilobé, à quatrième plus court que les précédents réunis ; cro- chets simples. C'est comme passage aux Cérambyciens que nous commençons par ce genre l'étude de détail des Chrysoméliens. Ces insectes, ressemblant par 756 COLÉOPTËRES.— CHRYSOMÊLlE^S. l'aspect à des Longicornes, sont peu convexes et couverts, surtout en dessous, d'une fine pubescence satinée, destinée à empêcher l'action de l'eau dans laquelle ils seront souvent plongés, à dessein ou par accident. La plupart des espèces offrent de belles couleurs métalliques, mais très- variables, et pouvant, dans la même espèce, passer du noir bronzé au cuivreux et au doré le plus éclatant. Ce genre et le suivant sont les Phy- tophages des végétaux aquatiques. Ils vivent sur les plantes qui sortent plus ou moins de l'eau, et parfois sur celles qui croissent dans les prés et les bois humides. Les deux crochets très-aigus et très-arqués qui termi- nent leurs tarses sont destinés, comme des ancres, à les maintenir cram- ponnés aux feuilles avec force. Les Donacies volent peu, lourdement et dans une courte durée, seulement par la plus forte chaleur du jour. Elles restent d'habitude posées et immobiles, contractant leurs pattes et se laissant tomber quand on veut les saisir. Les sexes se distinguent très- difficilement, et l'accouplement observé ne donne pas une certitude abso- lue, car on cite d'assez nombreux exemples de copulation entre espèces voisines de Donacies. En général, les femelles sont plus grandes, plus robustes, à antennes plus courtes, à cuisses postérieures plus faiblement dentées ou inermes. On voit souvent ces jolis insectes réunis par groupes sur les tiges des Typha et des Sagittaires, et sur les larges feuilles des Nénufars. Les larves sont allongées, subcylindriques, blanchâtres, et vivent très- probablement à l'intérieur des végétaux aquatiques. Elles sont mame- lonnées en dessous, ayant les premiers segments cornés en dessus. Au moment de la nymphose, ces larves se renferment sous l'eau dans une coque qu'elles sécrètent, et qu'elles fixent aux racines ou aux tiges sub- mergées des plantes aquatiques, de sorte que l'adulte sorti de la nymphe doit traverser, pour venir au jour, une certaine épaisseur d'eau. Il importe aux amateurs de savoir que les Donacies doivent être piquées à l'épingle noire inoxydable ou à l'épingle ordinaire enduite de vernis de graveur. Sans cette précaution, l'épingle, s'empâte de sels cui- vreux, verts et gras, fait fréquent pour les insectes dont les larves vivent dans les tiges, surtout celles des plantes aquatiques ainsi : les Nonagria (Lépidoptères), presque tous les Microlépidoptères, etc. Nous devons indiquer brièvement quelques espèces de ce beau genre. Une des plus répandues de toute l'Europe, existant aux environs de Paris, est le D. crassipes, Fabr., de 10 millim., avec deux dents en épines aux cuisses postérieures, la base des articles des antennes et le dessous des. pattes rougeâtres, ordinairement d'un vert bronzé un peu obscur, avec un reflet violet ou bleu, à corselet tubercule et sillonné, à élytres striées de points. Il faut la rechercher en bateau, en enfonçant brus- quement dans l'eau les feuilles de Nénufar sur lesquelles ont voit cette Donacie posée, de manière à saisir l'insecte nageant ; la larve vit en effet dans les deux Nénufars {Nymphœa alba et Nuphar luteum). Les œufs, eUiptiques, sont appliqués à la face inférieure des feuille? DONACIA. 757 nageantes de ces végétaux, entourant des ouvertures arrondies faites à ces feuilles probablement par les mandibules de la femelle. Les coques nymphales sont iixées aux racines des Nénufars, en forme de cylindre terminé par deux calottes sphériques, d'un tissu papyracé composé de deux couches et de couleur d'un brun marron clair. D'après Lacordaire, cet insecte est le Leptura aquatica spinosa de de Geer, à cause des épines des cuisses postérieures, et l'on a l'habitude d'y rapporter comme syno- nymie le Leptura aquatica de Linnœus et le Stencore doré de Geoffroy. Le D. bidens, Oliv., aussi avec deux dents aux cuisses postérieures, est plus petit, 7 millimètres, plus court, à corselet bien plus rugueux, au reste de môme coloration. On trouve ses coques nymphales attachées aux racines des Potamogelon. Le D. Lemnœ, Fabr., a le dessus du corps en général d'une couleur de bronze avec léger reflet cuivreux, tantôt uniforme, tantôt avec une bande marginale plus métallique. Le corselet est muni de tubercules et les élytres impressionnées et à dix rangées de points. L'espèce est de toute l'Europe, sauf les parties les plus boréales, du Caucase, de la Sibérie, de la Perse et du nord de l'Afrique. Une espèce moins commune, de l'Europe et du contour méditerranéen, ressemblant beaucoup à la pré- cédente, d'un beau vert doré à reflets soyeux, est le D. Sagittariœ, Fabr. (pi. Lvii, fig. 7, tête en dessus; 7 o, antenne; 7 6, tarse postérieur). On le prend à Paris, et cette espèce, comme la plupart des Donacies, n'a qu'une seule dent en épine aux cuisses postérieures. On observe encore, et aisé- ment aux environs de Paris, le D. Mimjanthidis, Fabr., de toute l'fclurope, de 8 à 10 millimètres, allongé, d'un beau vert un peu doré, à élytres arrondies au bout, avec les antennes et les pattes rousses. Une espèce très-rare est le D. fennica, Payk., découvert d'abord en Finlande et en Suède, puis dans le nord de l'Allemagne, de moindre taille, d'un rouge fauve plus ou moins foncé (pi. Lvn, fig. 6), à pattes bronzées. Bien plus communs sont les D. linearis^ Hope, allongé, d'un vert bronzé ou d'un rouge cuivreux; D. simplex, Fabr., bronzé, à reflets dorés, de 5 à 6 millimètres, à antennes et pattes brunes, ces deux espèces de toute l'Europe ; le D. Typhœ, Brahra, très-voisin du D. linearis, de toute l'Europe et d'Algérie. Enfin, avec la môme extension géographique, mais plus rare, il faut citer le D. sericea, Linn., de 7 à 8 millimètres, qui varie du bleu clair au bleu noirâtre ou violet, et du vert doré au bronzé obscur, avec toutes les nuances intermédiaires imaginables, d'où le nom de protea donné à l'espèce par quelques auteurs. Toutes ces Donacies ont le corselet tubercule, et les élytres striées de points. Les métamorphoses du genre Donacia, soupçonnées par Linnœus, qui avait découvert la nymphe du D. crassipes dans sa coque fixée aux racines des Nénufars, ont été étudiées par M. MulsantsurleD. linearis, puis, avec plus de développement, par M. E. Perris, pour le D. Sagit- tariœ (Ann. Soc. entom. France, i8kS. p. 33). La larve a été trouvée entre 758 COLÉOPTÈRES. — CHRYSOMÉLIENS. les feuilles engainantes, au collet des racines du Ruban d'eau ou Spar- yanium ramosum (Typhacées), ressemblant au premier aspect à une larve de Syrphe (Dipt.), en ovoïde allongé, atténuée en avant, à tète rousse, à depii contractile, longue de 1/i millimètres, d'un blanc mat, assez ferme, avec antennes de quatre articles, mandibules courtes, bidentées, palpes maxillaires de deux articles et labiaux d'un. Le thorax porte des pattes courtes, roussâtres, coniques, de trois articles, le dernier ongulé, visi- bles de profil. Elle a onze segments au corps, le dernier peu apparent, muni de deux disques stigmatiformes, fermés par une membrane, et où débouchent deux tubes trachéens, correspondants à l'intérieur avec un tronc bilatéral, formant arceau de réunion à l'extrémité de l'abdomen, et émettant des rameaux nombreux ; à ces disques correspondent deux crochets ferrugineux, devant servira cramponner la larve à la plante, lors de l'agitation des eaux. Lors de la nymphose, la larve colle aux racines une coque elliptique, non soyeuse, lisse, d'un brun rougeûtre, parcheminée, imperméable à l'eau, et s'y change en nymphe, molle et d'un beau blanc, refoulant la peau de larve k son extrémité anale. L'adulte sort de sa coque sous l'eau, en rongeant la calotte supérieure, et grimpe le long de la plante, tout entouré de bulles d'air retenues par ses poils hydrofuges. Il passe l'hiver dans sa coque, si la saison est trop avancée ; d'autres, sortis plus tôt, hivernent cachés sans doute sous les herbes du rivage. H/EMOMI A, Megerle, Dej . — Caractères analogues au genre précédent, sauf pour les pattes, qui sont grêles, avec tarses allongés, presque nus en dessous, à troisième article entier, et le dernier plus long que les précédents réunis, très-grêle à la base et armé de deux forts crochets arqués et entiers. La curieuse structure des tarses des Hœmonia n'a de pareil que ce que nous ont ofTert des Pentamères, les Elmis, les Macronychus, vi- vant attachés par leurs crochets aux bois flottants, et aussi certains Apions des Tamarix. Les Hœmonia sont des Chrysoméliens véritable- ment aquatiques, se trouvant sous l'eau, accrochés aux tiges submer- gées, comme celles des Potamogeton , et dont les larves iixent leurs cocons également sous l'eau, à la partie inférieure de ces plantes. Il y a des espèces des eaux douces, rivières ou mares et fossés, et d'autres des eaux de la mer, et qu'on rencontre parfois rejetées en grand nom- bre au milieu des plantes marines, sur les rivages de la Baltique et de la mer du .Nord. On comprend que ces mœurs rendent la recherche de ces Coléoptères pénible, aussi sont-ils rares dans les collections. Ils soiU très-lents dans leurs mouvements. ; leur corps, oblong, est revêtu d'une très-fine pubescence ou d'un enduit hydrofuge. Les couleurs ne sont pas métalliques, se ressemblent beaucoup dans les diverses espèces, et sont d'un jaune pille ou ocreux, avec deux fascies noirâtres sur le disque du corselet. Les élytres ont de fortes stries ponctuées de noirâtre, avec les intervalles alternativement relevés, et l'extrémité HiEMONlA. 759 tronquée et épineuse. Les mules, du moins dans les espèces d'Europe, ont le premier segment abdominal plus ou moins largement et profon- dément excavé. Jusqu'à présent on ne connaît d'espèces de ce genre que des régions froides et tempérées des deux continents. L'espèce la plus répandue géographiquement, des îles Britanniques, de Suède, de France, d'Allemagne et de Suisse, est l'H. Equiseti, Fabr., la plus grande des espèces d'Europe, de 5 à 6 millimètres pour les mâles, de 7 à 8 1/2 millimètres pour les femelles, à antennes et petit écusson noirs, à corselet bifascié de noir, jaunâtre, ainsi que les élytres et les pattes. Le H. Zosterœ, Fabr., de Suède et de France, est plus petit. Il se trouve sur les plantes marines (pi. lvii, fig. 8, tarse postérieur). C'est à tort que les Hœmonia sont regardés comme rares ; il ne s'agit que de savoir les récolter. On ne trouve que difficilement les adultes, qui ne paraissent pas sortir de l'eau, et adhèrent si fortement aux feuilles et aux tiges submergées, que les secousses les plus énergiques données par le filet à pécher ne parviennent pas à leur faire lâcher prise ; en outre leur couleur se confond avec, celle des dépôts vaseux, de sorte qu'il faut souvent éplucher les plantes feuille à feuille, avant de découvrir un adulte cramponné. On doit s'attacher au contraire à la recherche des premiers états. Les fonds de sable et de gravier et les eaux courantes sont peu propices pour rencontrer des larves d' Hœmonia. Il faut opérer au contraire ses investigations dans les eaux calmes et à fond vaseux, et arracher à la main, et en plongeant le bras profondé- ment, les touffes de plantes aquatiques avec le chevelu de leurs racines, surtout les Potamogeton, les Myriophyllum, les Equisetum. On voit alors, et parfois en abondance, agglomérées autour de ces racines, des coques d'un brun rougeâtre, très-semblables d'aspect à des pupes de Diptères, et qui sont les coques nymphales des /fœmonm. On élève très-facilement les larves et les coques avec les plantes immergées dans l'eau, celles- ci môme commençant à se décomposer. On connaît très-bien maintenant les métamorphoses de l'H. Equiseti. var. Mosellœ, Bellevoye (1). La larve, atténuée en avant, ressemble beaucoup à celle de Donacia Sagittariœ, mais est plus petite, de 8 à 10 millimètres, à tête petite, roussâtre, ayant des antennes de quatre articles et en arrière cinq points brunâtres en deux séries transversales, qui sont sans doute des ocelles. Le corps, convexe en dessus, n'a que onze segments couverts de petites soies spinuliformes. Le dernier, plus petit que les autres et aplati, est muni à sa partie supérieure de deux disques ferrugineux, représentant les péritrèmes de la neuvième paire de stigmates. De même que chez la larve de Donacia, ce sont là les prin- (1) Leprleur, Bull. Soc. hist. natur. de Colmar, 10<= année, 1869. — Bellevoye, Observations sur les mœurs de plusieurs espèces de Coléoptères qui vivent sur les plantes aquatiques, etc. (XII^ Bul. de la Soc. d'hist. natur. du départ, de la Moselle, Metz, 1870). 760 COLÉOPTÈRES. — CHRYSOMÉLIENS, cipaux orifices respiratoires, en rapport de chaque côté avec un tronc trachéen considérable, ayant un arceau de réunion à l'extrémité de l'abdomen; ces disques sont clos extérieurement, sans qu'on sache encore d'une manière exacte si c'est une membrane qui laisse pénétrer les gaz par endosmose, ou si c'est un clapet s'ouvrant par intervalles, lin outre il y a huit petits stigmates, ronds et ferrugineux, aux places ordinaires. Les trois segments thoraciques portent chacun une paire de pattes très-courtes d'un roux clair, armées d'un ongle brun très- robuste et hérissées de soies plus fortes que celles du corps. Des disques ferrugineux du onzième segment partent de haut en bas deux crochets assez forts, dont voici l'usage (M. Leprieur) : D'habitude la larve s'attache aux plantes par les ongles de ses courtes pattes, qui ne servent guère à la locomotion, celle-ci s'opérant par une sorte de repta- tion. Lors des crues de l'eau, les larves, pour ne pas être entraînées, se fixent aux tiges ou aux racines par les deux crochets postérieurs, leurs pattes ne touchant plus à l'appui, de sorte que les larves se tiennent droites et roides, à l'instar des chenilles de Phalénides. Les larves, observées dans des bocaux, ne cherchent pas à gagner la surface de l'eau pour atteindre l'air libre ; elles sont d'une extrême lenteur dans leurs mouvements, mettant plusieurs heures pour se dépla- cer de quelques centimètres. Elles enfoncent la tête et une partie plus ou moins grande de leur corps dans la tige des Potamogeton, qu'elles creusent avec leurs mandibules pour se nourrir, soit de parenchyme, soit de sève. Au moment de la transformation, la larve s'accroche aux tiges ou aux racines des végétaux, et y colle solidement une coque ellip- soïdale, dont la longueur varie de 8 à 9 millimètres sur 2,5 à 3 de large (celles du Donacia Sagittariœ ont 12 millimètres.). La coque est due à un liquide sécrété, ayant la propriété de durcir sous l'eau, comme un ciment hydraulique. En traitant successivement ces coques par des solu- tions afTaibhes d'acide chlorhydrique et de potasse, pour dissoudre les sels minéraux et les matières organiques azotées, il reste finalement une sorte de trame d'une blancheur éclatante, très-mince, conservant la forme primitive de la coque, et dont les caractères sont ceux de la cellulose. Les coques portent un sillon correspondant à la partie de tige qui les porte et moulé sur elles. Perméable à l'air dissous qui doit servir à la respiration, leur tissu ne se laisse pas traverser par l'eau, et, lorsque celle-ci y pénètre par quelque fissure, elle tue la larve en- gourdie ou la nymphe. Les coques sont lisses, d'une consistance par- cheminée, d'une couleur variant du jaune-paille au jaune brunâtre, et quelquefois même presque noire et- opaque, dans les fonds très- vaseux contenant des sulfures métalliques. La transpai'ence, en raison inverse de la coloration, est en général assez grande pour qu'on puisse distinguer la nymphe ou l'adulte. Les nymphes sont molles, d'un blanc éclatant, placées la tête en haut et refoulant au bas la peau plissée de la larve. HJEMONIA. 761 La durée totale de l'évolution des Hœmonia est de quatre à cinq mois entre la ponte des œufs et l'éclosion de l'adulte. Elle se renouvelle de mai à octobre, où l'on trouve cà la fois les trois états, ce qu'explique le peu de variation des températures de l'eau ; très-probablement un certain nombre de nymphes et d'adultes hivernent en léthargie. L'in- secte demeure environ six semaines dans la coque, partie en larve, puis en nymphe, puis en adulte, attendant que ses téguments aient pris la consistance nécessaire. Alors il ronge circulairement la calotte supé- rieure de la coque, et va s'accrocher aux tiges des plantes sans sortir de l'eau, et ne paraissant pas d'ordinaire enveloppé d'air. Ces adultes ont une grande tendance à s'accrocher à tout et partout, et, quand on les conserve captifs dans des vases, il n'est pas rare d'en voir des groupes de huit ou dix cramponnés les uns aux autres. Ils marchent lentement sur les plantes, et restent immobiles des heures entières, agitant seulement un peu les antennes. Quand ils perdent leur appui, leur démarche est bien plus vive, et ils remontent et descendent aisé- ment dans l'eau, non mouillés, en raison de leur pubescence soyeuse. Ils ont de l'air sous leurs élytres, mais dont on n'observe pas le renou- vellement, à la façon, soit des Dytiques, soit des Hydrophiles. Il y a sous les élytres des ailes membraneuses diaphanes, très-développées et plus longues que les élytres; mais, tandis que les Donacia volent bien au soleil pendant le jour, on ne voit jamais voler les Hœmonia, et des sujets vivants ont vécu une quinzaine de jours en vases secs, et s'y sont accouplés sans paraître souffrir du manque d'humidité, mais sans écar- ter leurs élytres ni étendre leurs ailes. Il est possible que les Hœmonia soient nocturnes et volent le soir, pour se poser sur les feuilles à fleur d'eau ou sur les fleurs et les fruits des Potamogeton, qui se dressent verticalement hors de l'eau ; peut-être les ailes ne servent-elles que dans les cas exceptionnels où l'instinct de ces insectes les oblige à des migrations. Lors de l'accouplement, le mâle, qui est toujours plus petit que la femelle, monte sur le dos de celle-ci, et la tient fortement enlacée avec ses quatre pattes antérieures, les postérieures restant étendues. La femelle se promène sur les tiges des Potamogeton, en transportant le mâle avec elle, ou bien elle y reste accrochée dans une longue immo- bilité, le mâle toujours sur son dos, les antennes du mSle et de la femelle s'agitant de temps à autre. Après qu'ils se sont ainsi livrés à leurs amours pendant dix k douze jours, le mâle se sépare de la femelle, et ils ne tardent pas à mourir tous les deux, le mâle presque toujours le premier. On n'a pas observé la ponte ni les œufs d'une manière certaine. L'ignorance où l'on est des métamorphoses des genres exotiques qui suivent laisse subsister une certaine incertitude sur leur place sériale. 762 COLÉOPTÈRES. — CHRYSOMÉLIENS. MEGALOPUS, Fabr. — Mandibules à pointe entière ; dernier article de tous les palpes allongé et acuminé. Yeux grands, fortement échancrés. Antennes grossissant plus ou moins de la base à l'extrémité, insérées à la base des échan- crures oculaires. Corselet cylindrique ou subglobuleux, sillonné. Corps allongé, élroit, pubescent ; crochets des tarses simples. Les insectes de ce genre sont de l'Amérique équatoriale. Ainsi que pour les genres annexes, formés aux dépens du genre de Fabricius, les mœurs, observées à la Guyane et au Brésil parLacordaire, sont les sui- vantes : « Toutes les espèces vivent sur les plantes et les arbrisseaux peu élevés ; leur vol est lourd, et n'a lieu que pendant la plus forte chaleur du jour. Quand on les saisit, ils fléchissent un instant leurs antennes et répandent par les articulations des pattes une liqueur jaune, d'une odeur analogue à celle des CoccineUa. Us produisent comme les Lema un bruit aigu par le frottement de leur prothorax contre le pédoncirie du mésothorax. » Ces insectes ne sautent pas, bien que leurs cuisses postérieures soient souvent très-fortes. Lacordaire suppose que leurs larves, d'ailleurs inconnues, sont, d'après l'analogie des adultes avec les Clythra, renfermées dans des fourreaux portatifs, et ont les mômes habitudes. MASTOSTETnus, Lacord. — Corps large et court, glabre en dessus, parallèle ou subparallèle. Antennes à troisième article grêle (comme aussi le genre pré- cédent), les six derniers serrés et transversaux. Corselet trapézoïde ou quadran- gulaire, non sillonné. Ce genre, démembré de l'ancien genre Megalopus et offrant la plupart de ses caractères, est, comme lui, américain. Ex.: M. tibialîs,Fa.hT., de la Guyane, d'un ferrugineux vif, avec tibias et tarses postérieurs noirs, et de larges macules noires sur les élytres déprimés (pi. lvh, fig. 1; 1 fl, tête grossie avec les yeux échancrés, les mandibules, les palpes maxillaires; 1 b, antenne). SAGR.%, Fabr. — Tète peu allongée; antennes robustes, filiformes ou grossissant un peu à leur extrémité. Corselet moitié plus étroit que la base des élytres. Cuisses postérieures très-grosses dans les deux sexes, toujours dentées en des- sous chez les mâles. Corps oblong ou allongé, massif, glabre ; crochets des tarses simples. Ces insectes, les plus grands parmi les Chrysoméliens, sont l'ornement des collections par leurs formes et leurs couleurs. Chez certains elles sont sans reflet; chez d'autres elles ont un éclat métallique éblouissant, avec la teinte d'un rouge pourpre, ou violette, ou bleue, ou verte ou cuivreuse. Leurs espèces sont propres aux régions les plus chaudes de SAGRA, ORSODACNA. 763 l'ancien continent ; leurs métamorphoses sont inconnues. On suppose qu'elles vivent sur les feuilles, comme nos Criocères. Les énormes cuisses postérieures renflées en massue des Sagra ne sont pas propres au saut, et ne présentent pas, comme les Attises, de cavité interne des- tinée à loger la jambe dans la flexion, de sorte que l'extrémité termi- nale de cette cuisse ne peut jamais porter sur le plan de position et ne peut prendre appui que sur la jambe. Les cuisses des mâles dépassent beaucoup les élytres, et ont en général en dedans des poils serrés, en môme temps qu'elles sont dentées en dessous. Chez les femelles ces cuisses, tout aussi grosses, sont plus courtes, débordent à peine les élytres, et les dents des mâles sont remplacées par une simple crête denticulée. En outre, les mâles de presque toutes les espèces ont en dessous le premier segment abdominal couvert de poils, destinés sans doute, lors de l'accouplement, à faciliter leur adhérence sur le dos lisse et poli des femelles. Un des Sagra les plus communs dans les collections est le S. splen- dida, Weber, des parties méridionales de la Chine, où il doit être très- commun, car il figure toujours dans les boîtes d'insectes que les mar- chands de Canton vendent aux Européens. Cette riche espèce est d'un rouge pourpré clair, très-vif et très-brillant, avec des reflets violets éclatants ; parfois elle devient d'un violet pourpré ou bleuâtre. Nous représentons des détails de cette espèce (pi. Lvn, fig. 3, bouche en dessous; 3a, mâchoire; 36, antenne). Au Sénégal, à Sierra-Leone se trouve le S. cyanea, Dalman, beaucoup plus petit que les autres espèces du genre (pi. Lvn, fig. 2), mâle, d'un bleu foncé ou d'un bleu violacé, avec les élytres striées de points. L'île de Java nous otfre de magnifiques espèces de Sagra ; ainsi le S. speciosa, Dcj., dont les couleurs ont, surtout en dessous, une magnificence incomparable, d'un vert doré, éclatant, à reflets pourprés vifs, passant au rouge de feu le plus beau sur la poi- trine et les pattes ; le rare S. Buqueti, Lesson, d'un beau vert métallique très-brillant sur l'abdomen, mat sur les autres parties, avec les élytres ornées à la suture d'une bande dorée étincelante, bordée de pourpre. On comprend que ces teintes splendides doivent ranger les Sagra parmi les espèces à employer dans la parure, ainsi qu'on le fait du reste pour diverses Chrysomèles. OR§>ODAC!V.%, Latr. — Tête large; palpes à dernier article ovalaire, parfois sécu- riforme ; antennes de onze articles assez grêles. Cuisses ordinaires, les posté- rieures à peine plus grosses que les autres ; croctiets des tarses bifides. Corps allongé, peu convexe ou même déprimé, pubescent, couvert en dessus de points enfoncés. Les insectes de ce genre se rencontrent en Europe et dans les par- ties septentrionales de l'Asie et de l'Amérique. Les couleurs sont très- variables, par grandes masses, souvent mal arrêtées et confuses, ce qui rend la spécification difficile. 766 COLÉOPTÈRES.— CHRYSOMÉLIENS. Le type, de toute l'Europe et de la Sibérie, est l'O. Cerasi, Fabr., de 5 à 7 millimètres, assez commun sur le Cerisier. Les couleurs présentent toutes les variations, par le mélange du jaune, du ferrugineux, du roux, du noir et du bleu noirâtre, et parfois une seule de ces couleurs domi- nant. Rien n'est plus dangereux pour les jeunes amateurs que ces espèces à coloration non fixée ; ils se font de fréquentes illusions en croyant à des découvertes. On reconnaît l'espèce unique à l'absence complète de pubescence en dessus, à son corselet couvert de points bien moins serrés que chez les autres espèces, et subitement et fortement rétréci après le milieu. Nous représentons l'O. humeralis, Latr., des iles Britanniques, de France et d'Allemagne, d'un bleu foncé et violacé presque noirâtre ; les élytres ont parfois à la base une tache rouge, et le corselet a quelquefois des traces de deux macules rouges. Cette espèce, toujours assez rare, se prend au mois de mai, aux environs de Paris, sur les fleurs de l'Aubépine. Elle est figurée pi. i.vii, flg. U (ha, tête; k b, an- tenne). Elle est longue de Zi à 5 millimètres, plus grêle et plus dépri- mée que l'espèce précédente. Les genres de Chrysoméliens que nous allons étudier sont caracté- risés par un détail de mœurs commun de leurs larves, à savoir, de se servir de leurs excréments comme d'un moyen plus ou moins complet de protection. On peut, à ce point de vue, réunir les types Clythra, Cryptocephalus, Cassida, Crioceris, Lema, formant une série où ce carac- tère va en se dégradant de plus en plus dans la perfection de cet appa- reil protecteur, s'opposant à la dessiccation de la larve. l'n premier type, le plus perfectionné sous ce rapport, est constitué par des larves allongées, subcylindriques, blanchâtres, mamelonnées, recourbées sur elles-mêmes à leur extrémité postérieure, logées dans des fourreaux portatifs qui les entourent complètement dans toute la région postérieure aux pattes, fourreaux formés de leurs excréments, soit seuls, soit plus ou moins associés à des substances végétales, vivant tantôt sur les plantes , tantôt dans l'intérieur des fourmilières. Les nymphes subissent leurs métamorphoses dans les mêmes fourreaux et dans les mêmes lieux. Ce sont les genres Clythra et Cryptocephalus qui fournissent les principaux exemples de ce premier type. M. Chevrolat (Catal. Dejean) eut le premier l'idée de réunir ces deux genres et leurs genres annexes en une seule famille, les Tubifères, constituée par les Chrysoméliens à larves porte- fourreaux. De même, M. E. Blanchard (lâ/i5) réunit dans sa famille des Clylhrides les Clythra et Cryptoce- phalus, avec les annexes des auteurs précédents. CLiYTHRA, Laicharting. — Corps épais, oblong, convexe des deux côtés, sub- cylindrique. Tête incomplètement enchâssée dans le prothorax, visible de dessus ; antennes écartées à la base, libres au repos, dentées à partir du quatrième ou CLYTHUA. 765 cinquième article-, mandibules dentées à l'extrémité, souvent développées chez les mâles en forme de tenailles. Corselet aussi large que les élytres; pygidium plu sou moins découvert. Pattes ou subégales, ou très-développées chez les mâles à la paire antérieure, les postérieures jamais plus fortes ni plus longues que les autres ; crochets des tarses simples. Les Clythra, outre des caractères sexuels dont nous allons parler, se séparent d'abord immédiatement des genres Chlamys et Lamprosome par l'absence de rainures prothoraciques destinées à loger les antennes ; leur tôte peu engagée, leur prosternum nul et le mésosternum étroit les distinguent des Crijptocephalus. Les Megalatosmis ont le prosternum saillant, et les Babia des crochets tarsaux appendiculés ou bifides, au lieu des crochets simples des Clythra. Les différences sexuelles sont très-importantes. Chez les deux cinquièmes des espèces, les différences de sexe ne consistent qu'en des tarses un peu plus faibles, surtout les antérieurs, et une fossette sur le dernier segment abdominal des fe- melles, existant aussi chez les mules de certaines espèces ; mais, chez les trois autres cinquièmes des espèces, les deux sexes sont plus ou moins dissemblables, avec une combinaison variée de différences. Parfois les mâles offrent seulement un grand allongement des pattes antérieures. Il peut s'y joindre l'agrandissement de la tète, et cette grosse tête est accompagnée de mandibules saillantes en tenailles, de mâchoires et d'une lèvre inférieure agrandies et repliées dans la cavité buccale, et d'yeux relativement plus petits, car ils ont conservé la même dimension que chez les femelles ; enfin le corselel est plus allongé que celui des femelles, et la grandeur de la tète et du corselet donne aux élytres une apparence plus courte. Le genre Clythra appartient à l'ancien continent pour le plus grand nombre de ses espèces, et surtout à l'Afrique. Les espèces, assez abon- dantes en Europe, sont principalement de la région méditerranéenne, avec des espèces de l'Asie occidentale. Elles diminuent beaucoup à mesure qu'on remonte au nord de l'Europe. Il n'y en a que peu en Amérique, et la plupart de petite taille, et très-peu en Australie. Les insectes parfaits se rencontrent parfois accrochés aux tiges de diverses plantes, des Chardons notamment. Il s'en trouve aussi sur divers arbres, les Noisetiers, les PeupUers, les Bouleaux, les Aulnes et surtout les Chênes. Ils semblent préférer les arbres et les arbustes aux végétaux herbacés. Enfin il en est qu'on trouve sur le sol ou sous les pierres, d'autres sur les fleurs, d'autres sur les Graminées. Les genres et les espèces sont très-difficiles à établir, car la taille varie beaucoup dans la même espèce ; le dessin peut passer d'une grande comphcation à zéro; enfin la forme peut diirérer beaucoup pour les mâles, et toutes les femelles se ressemblent. Le mieux est de n'accepter qu'à titre de soas-genres les nombreux genres établis par Lacordaire. Dans le sous-genre Labidostomis , Lacordaire. nous trouvons ie 766 COLÉOPTÈRES. — CHR YSOMÉLIENS. C. tridentata, Liiin., à pattes antérieures du mâle médiocres, de sorte que la femelle en diffère peu. Cet insecte, long de 6 à 7 millimètres, est d'un bleu verdàtre foncé, ou d'un bleu noir, ou d'un vert bronzé, avec les élytres d'un jaune-paille, toujours dépourvues de points huméraux noirs. De toute l'Europe et la Sibérie, sur le Noisetier, le Bouleau, le Saule, le Chêne, etc. Le C. longimana, Linn., a les pattes antérieures très-longues chez le mâle, qui y joint la grosse tête et les mandibules saillantes. C'est une des plus petites espèces, variant de 2 à 3 millimètres, de la Sibérie et de toute l'Europe, sauf les parties les plus boréales. C'est la Mélolonthe lisette de Geoffroy (du nom de genre donné aux Clythra par cet ancien auteur). Il est d'un vert bronzé ou bleuâtre, avec une fine pubescence blanchâtre, le corselet très-ponctué, avec les élytres d'un jaune testacé, ayant un petit point humerai brun, qui manque souvent. On le trouve sur les céréales. Les Lahidostomis sont, presque sans exception, d'un vert bronzé, tantôt foncé, tantôt clair, et passant souvent au bleu pur, avec les élytres blanchâtres, d'un jaune-paille ou d'un rouge ochracé ; leur dessin se réduit presque toujours à un point humerai, noir ou brunâtre, plus ou moins gros. Les espèces, très-difficiles à distinguer, sont de la faune méditerranéenne, de l'Europe et du nord de l'Asie. Le caractère essen- tiel du sous-genre est la forme du prothorax, transversal, à bords laté- raux se redressant en arrière, avec des angles postérieurs saillants et relevés, surtout chez les mâles. Le sous-genre Lachnœa, Lacordaire, a le corps massif, presque toujours villeux, sauf sur les élytres, les pattes allongées, les antérieures très- variables selon les espèces, chez les mâles. On y trouve le C. longipes^ Fabr., à corselet villeux, d'un noir bleu ou verdàtre, à élytres d'un testacé pâle, chacune avec trois points d'un noir bleuâtre, et d'un beau jaune de terre de Sienne très-clair dans une variété. Cette grande espèce, de 8 à 11 millimètres, est surtout de l'Europe méridionale, mais remonte assez haut, jusqu'en Angleterre et en Pologne. Sur les contours de la Méditerranée, se rencontre le C. palmata, Lacordaire, ou pubescens^ L. Dufour, d'un noir bleu, pubescent, à élytres jaunes, maculées de noir. Il vit sur le Chêne dans le Midi de la France et en Espagne. Les tarses antérieurs du mâle, très-longs, larges et déprimés, expliquent l'épithète de palmata. Citons encore le L. vicina, Dejean, d'Algérie et du sud de l'Espagne^ Les Lachnwa sont presque exclusifs à la faune méditerranéenne. ^n sous-genre Crabronitcs, Lacordi, se rapporte une espèce de la Cafrerie, le C. equestris, Dalman (pi. lvhi, fig. 8, femelle, et 8 a, an- tenne), où le mâle a la tète forte, les mandibules saillantes et les pattes antérieures très-longues. Le corps est allongé, subcylindrique, bleu avec un duvet blanchâtre, les élytres jaunes, avec deux larges bandes bleues, dilatées extérieurement et n'atteignant pas les bords, et une tache bleue carrée commune au sommet; Dans cette belle espèce la grosse tête sub- CLYTHRA. 767 orbiculaire du mâle, très-dégagée du corselet, ressemble à celle des Crabro (Hyménoptères fouisseurs), d'où le nom du genre. La femelle a la tête toute différente, mais, à part cela, conserve assez bien les carac- tères du mâle pour le reste, surtout pour la longueur des pattes anté- rieures. Dans le sous-genre Clijthra proprement dit, les espèces sont très-lisses et très-cylindriques, les antennes courtes, très-dentées, les pattes pa- reilles dans les deux sexes. L'espèce type est le C. quadriputiclata, L'mn., s'étendantde la Sibérie et de la Laponie jusqu'au sud de l'Europe, de 6 à 10 millimètres, à corselet d'un noir bleu, avec les élytres d'un beau jaune, ayant chacune deux taches noires, qui, par variation, peuvent se conjoindre ou manquer. Sur les Chênes, Noisetiers, Aubépines. Bouleaux. C'est la Mélolonthe quadrille à corselet noir de Geoffroy. Une espèce très-voisine, autrefois confondue avec celle-là, est le C. Lœvius- cula, Schaeffer, d'Europe et d'Asie Mineure, plus commune que l'autre au centre de l'Europe. Au sous-genre Gynandrophthalma, Lacordaire, à antennes grêles, à sexes le plus souvent pareils, parfois dissemblables à la façon connue, se rapportent le C. cyanea, Fabr., de la plus grande partie de l'Europe, du Caucase et de la Sibérie, de 4 à 6 millimètres, d'un noir bleu, avec avec pattes fortes, peu allongées, d'un jaune fauve, ainsi que le corse- let et la base des antennes, les élytres d'un bleu brillant, ou verdàtres, ou violacées; la Mélolonthe Muette de Geoffroy, assez commun sur diverses plantes, dans le gazon et sous les pierres et les écorces aux environs de l'arrière- saison; — le C. aurita, Linn., du Caucase, de toute l'Europe, sauf les parties les plus boréales, de même taille que le pré- cédent, d'un noir bleu, pubescent, avec les tarses, les jambes, les côtés du corselet largement bordés d'un jaune fauve, pareil dans les deux sexes, avec la femelle plus grande, parfois double du mâle; sur le Noisetier, le Tremble, le Bouleau, le Saule marsault ; — le C. concolor, de 3 millimètres, d'un bleu d'acier ou verdatre brillant, très-ponctué, sur les orges, les blés ; — leC. a/fînis, Panzer, onmusciformis, Goeze, d'Algérie, de toute l'Europe, jusqu'en Finlande même. Enfin, dans le sous-genre Coptocephala, Lacordaire, les sexes sont très-dissemblables, les mâles à tête grande, large, aplatie, à longues pattes antérieures; les antennes sont peu dentées, le corps cylindrique, un peu déprimé. Toutes les espèces ont une coloration analogue, d'un jaune plus ou moins fauve, avec la tête et des taches sur les élytres d'un noir bronzé ou bleuâtre. Elles appartiennent à la faune méditerranéenne. Une d'elles remonte jusqu'il Paris, le C. scopolina, Linn., ou rubra, Oliv., noir bleu ou verdatre, avec le corselet dun rouge fauve, les élytres fauves, chacune avec deux bandes ou taches d'un noir bleu; J^a Mélo- lonthe quadrille à corselet rouge, comme l'appelle Geoffroy, a beaucoup de variétés, dont certaines ont fait des espèces, comme quadrimaculata , Linn., se trouvant depuis le Caucase et l'Asie Mineure jusqu'en Suède 768 COLÉOP I ÈRES.— CHRYSOMÉLIENS. et Sibérie, et/Zora/«>, Oliv., avec un point humerai et une seule bande bleue sur chaque élytre, des mêmes localités. C'est probablement à une variété qu'il faut encore rapporter le C. lœ- viuscula, Ratz, de 10 à 12 millimètres, à corselet d'un noir bleu, à ély- tres rouges avec quatre points noirs, des plus communs dans les ose- raies près de Paris. Le grand intérêt du genre Cbjthra est physiologique. 11 réside dans l'instinct qui préside à ses métamorphoses. Latreille fit connaître le premier que les larves des Clythra vivent dans des fourreaux qu'elles traînent avec elles, mais dont il ignorait l'origine. L. Dufour, M. Che- vrolat, M. Gêné (1), et enfin MM. Rosenhauer et H. Lucas, ajoutèrent de nombreux et nouveaux détails. On a observé les métamorphoses des C. quadripunctata, quadrisignata, lœviuscula, vicina, palmata, pubicollis, Rosenh., humeralis , longimana et quadrimaculata , parmi les espèces européennes. Toutes les larves ont le corps allongé et cylindroïde, re- courbé postérieurement en arc de cercle, avec un prolongement anal au dernier segment. Le corps s'élargit graduellement a partir du point où il se recourbe sur lui-même. Ily a treize segments, y compris la tête, écailleuse et d'un brun foncé ; les autres segments sont d'un jaune plus ou moins rougeâtre , et ont , çà et là , quelques poils redressés. Les pattes sont bien développées, et varient comme chez les adultes, c'est-à-dire que les antérieures sont allongées ou non ; le sexe appa- raît donc, par ce caractère, dès la larve. Toutes ces larves vivent dans des fourreaux portatifs à une seule ouverture, qui les entourent complète- ment. Ils sont formés par les excréments, convertis par la dessiccation en une matière noire et friable ; ils ne sont ni en terre , ni en dé- bris de bois agglutinés. Us varient plus dans leurs formes que les larves, et peuvent fournir des caractères spécifiques. Ils sont cylin- droïdes, mais avec des sculptures extérieures variées. Ces fourreaux abritent aussi la nymphe. Ily a quelques variations pour leur mode de clôture et le moyen de sortie de l'adulte. Il est très-probable que, de même que M. Gêné s'en est assuré pour les Cryptocéphales, les excré- ments sont recueillis et façonnés par les mandibules de la larve ; ceci explique pourquoi la partie postérieure du corps de la larve est recourbée en arc dans le fourreau; c'est non- seulement afin de maintenir ce corps dans le fourreau sans lien d'adhérence, mais en- core afin que les matériaux fournis par l'anus soient immédiatement en rapport avec les mandibules qui les utilisent. La tête est toujours disposée de manière à fermer exactement l'entrée du fourreau, et la larve ne peut faire sortir de ce dernier qu'environ la moitié antérieure de son corps, cette entrée étant trop étroite pour donner passage à la partie recourbée. De là vient que, bien que ces larves n'adhèrent nuUe- (1) Gêné, Mém. pour servir à l'hist. valu/, des Cryplocéyhales et des Clylhres [Ann, des sr. nat., V série, 1830, p. XX, t. 143). CLYTHUA : MÈTAMORPHOStS. 769 ment à leur coque , un éprouve une résistance assez Ibrte lorsqu'on veut les en extraire, et qu'elles peuvent les traîner à leur suite, sans les perdre en route. M. Rosenhauer pense que ces larves, à mesure qu'elles grossissent, doivent de temps en temps abandonner les coques pour en construire de nouvelles, car on ne voit sur les plus grandes de ces coques rien qui indique un allongement graduel du même fourreau, comme cela a lieu pour les fourreaux de certaines chenilles de Teignes. A chaque mue, comme au moment de la nymphose, les larves ferment la partie ouverte du fourreau, au moyen d'un opercule qui n'est pas sans analogie avec l'épiphragme au moyen duquel beau- coup de Gastéropodes terrestres closent leur coquille pour la protéger contre le froid de l'hiver. Cela a lieu aussi chez les Chlamys. Les larves de C. quadripunctata, recueillies par Rosenhauer en décembre et par Schaller en avril, avaient le fourreau operculé, comme celles de C. pal- mata observées par L. Dufour, en février, sur les montagnes de Girone, en Catalogne. L'opercule placé, la larve se retourne, de sorte que la partie postérieure de son corps se trouve là où était la tète, et vice versa. Ceci s'explique par la plus grande largeur du fourreau dans son fond, largeur suffisante pour livrer à l'insecte parfait un passage qui eût été bien plus difficile par la partie operculée plus étroite. En éclosant, l'adulte détache le fond du fourreau avec ses mandibules, ou peut-être le fait sauter par pression. Il parait probable que la vie des larves des espèces européennes est d'une année. Dans les Clythra proprement dits, les œufs ,sont déposés sans ordre. Chez le C. quadrimaculata (Coptocephala), ils sont fixés aux plantes par un long pédoncule. Le C. longimana (Labidostomis) pond une vingtaine d'œufs en masse, légèrement unis avec une humeur glutineuse, qui les attache aussi aux branches ou aux épines des plantes. Leur forme est cylindrique, un peu allongée ; ils sont enduits d'une matière jau- nâtre, mince et lisse. M. Gêné a vu que, d'une manière générale au reste, pour tous les Clythra, cet enduit est de la matière excrémenti- tielle déposée par la femelle sur l'œuf à sa sortie. La mère saisit l'œuf cylindrique entre ses pattes postérieures, et le recouvre d'une couche uniforme de ses excréments qu'elle applique par petites portions ; ce travail dure environ une demi-heure. La larve, rompant une des extré- mités de l'œuf pour sortir, rompt aussi l'enveloppe et s'en entoure comme d'un fourreau protecteur. C'est au bout d'une douzaine de jours que les petites larves de C. longimana étaient sorties et marchaient vivement en tirant chacune après elle son petit étui. Les fourreaux, avons-nous dit, sont spécifiques. Le fourreau de C quadripunctata {Clythra propre) est, dans le jeune âge, recouvert de lamelles imbriquées qui lui donnent l'aspect d'une petite pomme de Pin ; puis ces lamelles sont remplacées par des côtes saillantes, en chevron, formant de petites dents à l'orifice; le bout fermé est arrondi avec deux faibles tubercules transverses. Chez le C. palmata {Lachnœa) GIRARD. û9 770 COLÉOPTÈRES. -— CHRYSOMÉLIENS. le fourreau est. rugueux, obloiig, d'aspect terreux, sans Côtes saillantes, à ouverture oblique, avec deux mamelons au fond, le tout ressem- blant, dit L. Dufour, à une crotte de brebis un peu allongée. Le four- reau de C. longimana (Labidostomis) est de forme un peu plus ovoïde que les précédents, et il est recouvert de prolongements piliformes qui lui donnent un aspect velu. Un fourreau indéterminé, décrit par Fuessly, est ovoïde, à ouverture tronquée, à fond avec deux gros mamelons accolés. La manière de vivre des larves varie selon les espèces et probable- ment le» groupes d'espèces. La larve de C. quadripunctata, Fabr., a toujours été trouvée dans les fourmilières de Formica rufa. Selon M. Clievrolat, qui croit les larves de Chrysoméliens porte-fouireau lignivores, elle vivrait des amas de bois recueillis par cette grande Fourmi qui amoncelle des tas de petits rameaux au pied des arbres de nos forêts. M. Hosenliauer regarde au contraire les larves de Clythra propres, qui vivent dans les fourmilières, cumme ayant une nourriture animale, composée d'insectes et même de chair de Mammifères. A ce propos, Erichson fait observer que beaucoup d'insectes phytophages ne montrent aucune répugnance pour les substances animales, et il cité à ce sujet les observations de M. Ratzeburg sur la larve d'un autre Chrysomélien phytophage, le Lina Tremulœ. Les larvcîs de Clythra ne dévorent pas les Fourmis mortes, ce qui rend probable que, pendant leur vie, ces dernières leur procurent quelque nourriture au moyen des débris qu'elles apportent. La larve de C. longimana {Labidostomis) a été trouvée sous les pierres, dans le voisinage des fourmilières, mais non dans leur intérieur, et aussi sur les feuilles ; celle de C. palmata [Lachnœa), sous de grosses pierres. Celles des Coptocephala paraissent vivre exclusivement de vé- gétaux. Enfin, des larves d'espèces exotiques ont été trouvées sur le sol et sur les feuilles. Lors de ses explorations en Algérie, M. H. Lucas a eu l'occasion de compléter par d'intéressantes observations les faits déjà connus sur les métamorphoses des Clyihru d'Europe (i). Il rencontra en avril, près de Médéah, au milieu des matériaux de fourmilières du Mijrmica testaceo- pilosa, Lucas, des fourreaux longs de 10 à 12 millimètres sur 4 à 5 de large, bruns, avec une bande longitudinale noire inférieure, et, sur les côtés, des saillies régulières, en minces losanges serrés (pi. lvhi, iîg. 2 a). Ils contenaient des larves d'un noir roussàtre, recourbées postérieu- rement et munies au douzième segment d'un prolongement anal en (1) H. Lucas : Observations sur les métamorplioses du Tilubœa (Clythra) octo- sigtiata, Fabr. {ânn. Soc. enlomol. de France, I8bl, séance du 9 oct. 1850). — Nouvelles Observations sur les fourreaux de Titubœa (Clythra) octosignata, Fabr., et de Lachnœa vicina, Lacord. (op. cit.^ séance du 24 sept. 1851). — Observations sur les métamorphoses de Lachnœa vicina (Hevue et Magas. de zool., sept. 1851). CLYTHRA : MÉTAMORPHOSES. 771 sorte d'ancre destiné à retenir la larve dans son fourreau quand elle cherche sa nourriture. Quand les larves marchent, on ne voit à l'exté- rieur que la tête, le prothorax corné et les fortes pattes roussâtres ; de sorte qu'elles n'ont rien à redouter, vu la dureté de ces parties, des Myrmiques avec lesquelles elles semblent vivre en bonne intelligence. Si l'on retire la larve de son fourreau, on voit qu'elle présente une grande analogie de forme extérieure générale avec certaines larves de Lamel- licornes : ainsi des Oryctes. Privée de son habitation, cette larve paraît d'abord très-embarrassée, ce qui se manifeste par les mouvements inso- lites de tout son corps ; mais elle ne tarde pas à rentrer dans son four- reau au moyen de son dernier segment anal, qui est prolongé et forte- ment recourbé en dessous, et surtout au moyen des contractions qu'elle fait, éprouver aux segments médians abdominaux, qui sont gibbeux, mous et très-flexibles, à peu près comme les Pagures (Crustacés déca- podes) rentrent dans la coquille protectrice dont on les a retirés. A ces curieux détails, M. Lucas a ajouté l'importante observation que les fourreaux sont parsemés çà et là de poils roussâtres formant une villo- sité très-manifeste et de cause tout à fait inconnue, fait bizarre que nous retrouverons chez certains genres exotiques. Les larves de Clythra octosigaata, Fabr., dont nous parlons, ont de courtes antennes de trois articles, des mandibules robustes, noires, triangulaires, des palpes maxillaires de trois articles, et labiaux de deux. Parvenues à tout leur dé- veloppement, elles ferment avec un couvercle un peu convexe la région antérieure ouverte du fourreau, qui est taillée en biseau oblique en dessus. L'opercule et le fourreau sont faits d'excréments, auxquels se joignent de petits grains de sable agglomérés, et l'opercule est collé par une matière visqueuse. La nymphe se forme alors, ayant à peu près les dimensions delà larve ; puis l'adulte sort d'ordinaire par la partie postérieure du fourreau, ce qui a dû forcer la larve à se retourner avant la nymphose. Également en avril, dans la vallée du Mazafran, aux environs de Co- léah, M. Lucas trouva, sous de grosses pierres humides, des fourreaux du Lachnœa {Clyihra) vicina, Lacord., contenant des larves testacées, à tête et prothorax d'un brun roussàtre, longues de 10 millimètres envi- ron. Ces fourreaux, glabres, sans poils, rugueux à l'extérieur, lisses à l'intérieur, sans trace des débris de l'œuf, étaient longs de IZi milli- mètres et larges de 6, n'ayant qu'une fine carène longitudinale et quelques saillies dorso -latérales en chevrons, sans véritables côtes. Il s'y forme, après fermeture, une nymphe d'abord d'un jaune clair, puis brune, avec les segments abdominaux épineux en dessus, le septième très-relevé postérieurement, afin de fournir un point d'appui à l'adulte quittant la peau nymphale. Celui-ci, long de 8 à 12 millimètres chez les mâles, de 7 à 10 chez les femelles, est d'un noir bleu ou verdà- tre, avec pubescence grisâtre, et les élytres rousses ou jaunâtres, avec trois points noirs variant de grandeur et pouvant s'effacer. Cette espèce, 772 COLÉOPTÈRES. — GHRYSOMÊLIENS. des environs d'Alger et d'Oran, est aussi européenne, car on la retrouve au sud de l'Espagne. On peut résumer comme il suit les caractères des fourreaux des larves : ceux des Labidostomis principalement sont recouverts exté- rieurement de prolongements piliformes qui leur donnent un aspect velu; ceux des Lachnœa sont glabres, rugueux, striés ; ceux desClythra, Tituhœa, Coptocephala, ont au côté dorsal des côtes saillantes formant une double série de chevrons. — Consulter K. Lefèvre, Monogr. des Clythrides d'Europe et du bassin de la Méditerranée {Ann. Soc. entom. de France, 1872, p. /i9). On doit rattacher au groupe des Clythra deux yeiires exotiques, types d'autres genres annexes, d'Amérique et surtout du Brésil, dont nous ferons une simple mention. L'un, le genre Babia, Clievr., à tète le plus souvent fléchie en dessous, est d'une coloration très-constante. Dans près des quatre cinquièmes des espèces, sur un fond noir ou métallique, il y a sur chaque elytre deux bandes ou taches fauves, l'une à la base, l'autre au bout; parfois ces taches sont remplacées par une bordure de même couleur, ou bien elles s'agrandissent au point de former le fond de la couleur des élytres, par une de ces inversions pigmentaires fré- quentes chez les Coléoptères tachetés, comme les.Erotyles, les Cocci- nelles, etc. Le corselet n'a jamais de dessins. Les autres espèces sont de couleur uniforme, métallique ou non. Les Megalostomis, Chevr., sont encore plus voisins des Clythra, la tète des mâles étant très-développée, ainsi que les organes buccaux, mais les pattes antérieures gardent les proportions ordinaires. On trouve ces insectes adultes sur les feuilles des buissons, principalement dans les taillis, les bois peu fourrés et le voisinage des plantations. Us sont en_ core plus lourds que les Clythra, et Lacordaire n'a jamais constaté chez eux la locomotion aérienne. Les métamorphoses des Babia et des Megalostomis sont inconnues, ce qui est fâcheux, car on serait mieux fixé sur leur position sériale. C'est peut-être, selon Lacordaire, à l'un des genres de ces insectes qu'il faut rapporter des fourreaux très-étranges, trouvés au Brésil par ce savant, et dont les larves ressemblaient beaucoup à celles des Chlamys. Ces fourreaux excrémeutitiels, un peu recourbés, au contraire de ceux observés en Europe, vont en se rétrécissant de leur ouverture à leur sommet, et l'ouverture est ovoïde et beaucoup plus large que la tète des larves ; de sorte qu'eUe ne peut être formée qu'incomplètement par elle, et que l'on comprend peu comment les larves les traînent. Le plus curieux, c'est que ces fourreaux sont couverts d'un feutrage de poils roux ou jaunâtres, de structure pareille à celle des poils de Mammi- Jères, rameux comme des andouillers de Cerf. Rien de plus singulier CHLAMYS, POROPLEURA. 773 que ces poils sur une coque faite d'excréments. Est-ce l'effet d'une production cryptogamique? Le type des curieux Coléoptères qu'on peut désigner sous le nom de Chlamydes présente pour l'écusson une particularité intéressante à si- gnaler. Il est tout différent du plan habituel de sa structure chez les Co- léoptères, où cet organe se rétrécit d'avant en arrière. Chez les Chlamy- des il est rétréci d'arrière en avant, et, ce qui est encore plus singulier, c'est l'existence de deux écussons chez une espèce mexicaine de ce groupe {Diaspis paradoxa, Lacord.), le métascutellum s'étant développé et interposé entre les élytres, comme le mésoscutellum le fait ordi- nairement, et en outre de celui-ci. C'est le seul Coléoptère connu qui soit dans ce cas. COtAlUVS, Knoch. — Antennes dentées du troisième au septième article, et reçues, au repos, dans des rainures du prothorax qui se prolongent jusqu'au métathorax. Tête enchâssée dans l'ouverture antérieure du prothorax. Corselet plus ou moins bossue; élytres diversement sculptées, laissant le pygidium à dé- couvert. Pattes d'égale longueur, contractiles, se logeant, au repos, dans des excavations de leurs segments thoraciques respectifs. Crochets des tarses presque toujours appendiculés ou bifides. Les caractères sexuels des Chlamys se bornent à la présence d'une fossette plus ou moins profonde sur le premier segment abdominal ; les mâles en sont dépourvus ou l'ont peu marquée. Quant au reste, les deux sexes sont pareils, sauf la taille plus grande chez la femelle. Les Chlamys sont très-remarquables par leur coloration , et certains peuvent rivaliser pour l'éclat avec les Coléoptères les plus brillants. A l'état parfait, ils vivent isolés ou épars en petit nombre sur les feuilles, dont ceux de couleur sombre paraissent souvent, au premier abord, vu leurs bosselures, n'être que des excroissances. Leur démarche est très- lente, et ordinairement ils restent complètement immobiles. Quand on veut les saisir, ils se laissent tomber, et simulent la mort dès qu'on les touche. Lacordaire ne les a jamais vus volant, quoique . leurs ailes inférieures soient bien développées. Ce genre est formé principale- ment d'espèces américaines, avec quelques-unes du Cap, de l'Inde et de Java. POROPLEURA, Lacord. — Caractères voisins des Chlamys. Dernier segment de l'abdomen avec une fossette grande chez les mâles, énorme chez les femelles ; un gros tubercule arrondi de chaque côté du premier segment abdominal. Cro- chets des tarses simples. Ce genre comprend les insectes les plus remarquables parmi le Chlamydes, en raison de leur taille, qui est très-grande, comparée à celle des autres espèces. Les couleurs -sajicnt du cuivreux plu nu COLÉOPTÈRES. — CHRYSOMÉLTENS. OU moins éclatant au bleu et au violet. Le corselet est surmonté d'une forte élévation tuberculeuse, ou pourvu de crêtes sur les côte's, et les élytres sont très-inégales. Nous représentons, du Brésil et de la Guyane, le P. bacca, Kirby (pi. Lviii, fîg. 9), long de 8 millimètres environ sur 5 à 6 de large. Le corps est noir et le dessus d'un cuivreux doré très-brillant. Le corselet est surmonté d'une élévation très-forte, subquadrangle, excavée en des- sus, avec bords crêtes et bidentés ; les élytres ont chacune neuf tuber- cules, avec une carène latérale ; le pygidium est plan, pointillé et terminé par deux fossettes. Cette curieuse espèce est maintenant com- mune dans les collections, et les mâles y sont moins rares que dans une autre espèce des mômes pays, le P. monstrosa, Oliv., d'un bleu foncé et velouté brillant, avec le corselet très-bosselé et les élytres offrant des excavations irrégulières sur quatre rangées. La larve et le fourreau d'excréments de cette espèce ont été décrits par M. Burmeis- ter. On la rencontre aux environs de Rio-Janeiro, en décembre et jan- vier (été de ces régions), rampant ou immobile au pied des arbres, sur la terre ou sur de petites branches. Elle paraît vivre de mousses ou de lichens. Lors du moment de la nymphose, elle fixe sa coque au point de jonction de deux petits rameaux, et l'adulte éclôt en février et mars (fin de l'été et automne). La coque, formée d'excréments en couches concentriques, est très-singulière. Elle a la forme d'un cœur à pointe rétrécie, obtuse et recourbée en avant, graduellement élargi en ar- rière, très-convexe sur sa surface dorsale, élargi et déprimé à la base, avec un large sillon, et prolongé de chaque côté en une sorte d'aileron triangulaire, chacun avec une large ouverture destinée à donner pas- sage aux excréments de la larve. Sa tète, en effet, correspond à la pointe de la coque, et sa partie postérieure à la portion élargie. Celle-ci est fixée aux branches lors de la métamorphose, et la larve bouche les ouvertures des ailerons. L'adulte détache, pour sortir, le tiers antérieur du fourreau, par une incision parfaitement circulaire. liAMPROSOMA, Kirby. — Antennes reçues au repos dans des rainures du cor- selet, très-grêles, ayant leurs cinq derniers articles un peu élargis. Corps glabre, arrondi, globuleux. Crochets des tarses appendiculés. Ces insectes. sont pour la plupart des régions chaudes de l'Amérique, du Brésil, de la Guyane, de la Colombie, du Mexique, de la Californie, et sont remarquables par leurs couleurs éclatantes et leur aspect piluli- formç. Les différences sexuelles sont nulles. La tête est complètement enfoncée dans le corselet ; celui-ci court, très-rétréci et déclive en avant, aussi large à la base que les élytres. Nous représentons (pi. lviii, fig. 10) une espèce commune, de la Guyane et du Brésil, le L. corruscum, Gory, à tête, corselet et extrémité des élytres d'un rouge de feu, avec la région postérieure du corselet et la base des élytres d'un bleu foncé LAMPROSOMA, CRYPTOCEPHALUS. 775 OU d'un noir violet brillant. En Europe, ce genre ne comprend qu'une seule espèce aptère, de tout le continent et des îles Britanniques, le L. concolor, Sturm, du genre Oomorp/ms, Curtis, Brullé (pi. xxii, fig. 12, jambe et tarse antérieurs), entièrement d'un noir bronzé brillant, for- tement ponctué, de 2 millimètres environ, vivant dans les Mousses, sous les pierres, aimant les endroits frais. Les caractères énoncés pour le genre expliquent l'erreur qui avait fait placer l'espèce d'Europe, chrysomélien et phytophage, dans le genre Byrrhus. Le vert métallique, le rouge cuivreux ou le cuivreux doré, puis le bleu, sont la parure ordinaire du type Lamprosoma ; un petit nombre ont d'autres couleurs, comme le noir, le vert-olive, etc. Ces couleurs sont généralement uniformes, et, quand il existe un dessin, il est com- posé de couleurs métalliques brillantes. Lacordaire a observé à la Guyane et au Brésil que les adultes des Lamprosoma marchent lente- ment à la surface dos feuilles, ou volent lentement à la chaleur du jour dans les bois. Quand on veut les saisir, ces insectes contractent leurs pattes et se laissent tomber en simulant la mort. Les métamorphoses, très-incomplétement connues, paraissent analogues à celles des Chla- mys. M. Westwood a signalé des coques de Lamprosoma du Brésil res- semblant à des bourgeons morts. La larve, avant la nymphose, fixe l'ou- verture du fourreau excrémentitiel contre une branche et se retourne ensuite, de façon que l'adulte sorte par la partie opposée. • CRYPTOCEPHAIiCS, Geoffroy. — Corps court, épais, convexe, presque tou- jours glabre en dessus. Tête large, aplatie en avant, rentrant complètement dans le corselet, invisible de dessus; antennes grêles, longues, filiformes, à ar- ticles simples. Corselet grand, très-convexe en avant ; pygidium grand, décou- vert. Pattes antérieures de grandeur normale. Ce genre, avec quelques genres annexes, renferme les Coléoptères nommés vulgairement Gribouris. Ce groupe se distingue du type Clythra par une forme plus raccourcie, des antennes ordinairement filiformes, et surtout un large prosternum et mésosternum, et des Eumolpes par le pygidium découvert. Les femelles ont toujours une fossette sur le dernier segment ventral, au-dessous de l'ouverture de l'anus, et les mtlles l'ont très-souvent. En outre, chez certains mâles, le quatrième segment abdominal présente en dessous une fossette entourée d'épines ou de lames saillantes, ou simplement un espace dénudé, plus brillant que le pourtour : il s'agit sans doute de quelque organe servant à main- tenir le mâle sur la femelle lors de la copulation. Les nombreuses espèces de Cryptocéphales ont une coloration très- variée, depuis le vert métallique jusqu'au noir foncé, avec toutes les nuances de jaune et de rouge en certaines parties, comme aux anten- nes, aux pattes, etc. Elles sont difficiles à classer par groupes bien li- mités, à cause des transitions qu'on y rencontre. Elles se nourrissent 776 COIÉOPTÈRES. — GHRYSOMÉLIENS. de plantes variées. Les unes se trouvent sur les fleurs des Composées, des Légumineuses, etc.; la plus grande partie sur les Chênes, les Peu- pliers, les Saules, en général les Amentacées ; un petit nombre seule- ment préfère les Conifères. Les larves, comme celles des Lamprosomes et des Clythres, s'entou- rent de fourreaux protecteurs formés de leurs excréments. Ces four- reaux sont d'un travail moins parfait que chez les Clythra, mais supé- rieur à celui des Criocères et des Cassides , car le fourreau régulier entoure toute la larve et protégera également la nymphe, qui reste sans abri chez les Criocères et les Cassides. M. Gêné a étudié en détail les métamorphoses du C. duodecimpunc- tatus, Fabr., de France, d'Allemagne, d'Italie, de Russie. La femelle pond six ou sept œufs, peu tenaces, sur les feuilles du Noisetier aveline {Corylus Avellana). L'œuf reste environ six heures au passage, temps né- cessaire là la femelle pour accumuler sur l'œuf les matières fécales qui seront le premier fourreau de la larve naissante, et c'est hors de l'anus, sur la partie de l'œuf saillante, que l'enduit est déposé. Cet œuf, long d'un millimètre avec son enveloppe, est ovale, avec cinq rangées de proéminences destinées à retenir l'enduit excrémentitiel. La larve se nourrit de feuilles de Chêne, a treize anneaux, y compris la tête, sortant du fourreau, ainsi que le thorax, le reste y étant renfermé. Elle a des antennes de trois articles, des mandibules échancrées au sommet, le prothorax recouvert d'une plaque 'cornée, les autres anneaux mous, blanchâtres, ridés. Les pattes sont très-longues, minces, terminées par un ongle très-aigu, très-propres à cramponner la larve aux troncs et aux feuilles. Le fourreau, qu'aucun ligament n'attache au corps de la larve, a la figure d'un dé à coudre, fermé au bout le plus large, ouvert à l'autre, ce qui est en rapport avec la forme recourbée de la larve, dont l'anus se rapproche de la tête, car les excréments, qui sont les matériaux du fourreau, sont assemblés par les mandibules. Le fourreau est noi- râtre, rugueux à la surface, résistant à la pression du doigt, ayant 7 mil- limètres de long sur k de large. M. Gêné s'est assuré qu'il n'est ni de terre ni de bois agglutiné, mais uniquement formé d'excréments. Eu effet, en élevant des larves dans une boîte sans terre, et cassant le four- reau, il vit la larve le raccommoder, et la pièce, d'abord verdâtre comme les excréments frais, noircir peu à peu. Lors de la nymphose, qui a lieu en mai, la larve ferme la partie ouverte du fourreau avec un opercule d'excréments perpendiculaire à l'axe. Puis elle se retourne dans le four- reau, devient nymphe, rejette la peau de larve contre l'opercule, et l'adulte sort par le fond opposé au couvercle, dont il enlève un mor- ceau circulaire, de môme que cela a lieu chez les Clythra. M. Chevrotât regarde les larves de Cryptocéphales comme vivant de bois, les a vues rongeant des bûches et s'y traînant à la manière des Li- maçons. On rencontre beaucoup de larves de ce genre sur les feuilles sèches de Chênes dans la forêt de Saint-Germain en Laye, et prohablti- CRYPTOGEPHALUS. 777 ment, dit-il, elles y trouvent de petits morceaux de bois. Elles rappellent un peu, en raison de leur courbure, celles des Lamellicornes, ainsi que l'avait vérifié de son côté M. E. Blanchard. M. Tappes a constaté que la plupart des larves de Cryptocéphales, sinon toutes, quand elles arrivent au terme de leur croissance, vont se fixer sur une feuille ou un brin d'herbe, qui leur sert à clore l'orifice de leur fourreau et k les tenir hors des atteintes de l'humidité, qui au- rait bientôt ramolli et pourri cette enveloppe. Pour augmenter l'adhé- rence, elles percent le plus souvent la feuille, et forment de l'autre côté une espèce de rivet qui les en rend inséparables. Le gros bout, qui doit donner passage à l'adulte, est relevé, et fournit de cette ma- nière à la larve qui s'est retournée une position plus commode pour accomplir ses métamorphoses, et à l'adulte, pour couper l'opercule qu'il doit soulever pour sortir. Les Cryptocéphales d'Europe sont très -nombreux dans sa zone moyenne, surtout dans ses régions les plus chaudes, diminuent beau- coup vers le Nord , et sont aussi moins abondants dans les parties les plus australes du continent européen. Il y a des espèces dont le corps est noir ou d'un noir bleu, avec les élytres d'un jaune tes- tacé ou rouge , tachetées de points noirs. Tel est le C. imperialis, Fabr., de 5 à 7 millimètres (pi. lvui, tig. 2), particulier à l'Europe occi- dentale, à corselet glabre, avec les élytres finement ponctuées, ayant chacune cinq points noirs. L. Dufour a observé à Saint-Sever (Landes) le fourreau de sa larve, de 10 millimètres environ, ovoïde, oblong, un peu courbé, noirâtre, lisse en dedans, arrondi et convexe au gros bout, le petit bout tronqué perpendiculairement, entouré d'un bourrelet, sé- paré du disque operculaire de la nymphose par une gouttière. Après l'éclosion, on voit très-bien la calotte du gros bout opposé à l'opercule, détaché par l'adulte. Des fourreaux analogues, plus courbes, plus pe- tits, de 6 millimètres, appartenaient au C. fulcratiis, Gcrmar. D'autres Cryptocéphales sont d'un bleu d'acier, avec les pattes noires : ainsi le C. violaceus, Fabr., de 5 millimètres, à élytres rugueuses, rele- vées en bosse de chaque côté de l'écusson, très-rarement d'un bleu violet, le plus souvent bleu noir; d'autres, d'un vert métallique un peu bleuâtre ou un peu doré : tels le C. sericeits, Linn., de 7 millimètres, ru- gueux et pointillé, d'un vert doré, bleu violet ou rouge pourpré, à yeux et antennes noirs, le Velours vert de Geoffroy, commun, sur les fleurs ; leC. Hypochœridis,Lina., déliai 5 millimètres, moins rugueux et à points plus fins, commun dans les prés, sur les fleurs de Pissenlit. Ces deux espèces sont de toute l'Europe, surtout occidentale et méridionale. On peut consulter, sur les Cryptocéphales en général, le travail de Sufîrian sur les espèces d'Europe {Linnœa entomologica, t. II, III), qui a été traduit en résumé par M. L. Fairmaire {Ann. Soc. entom. de France, 1848, p. 285; 18Zi9, p. 1Z|3, et 1850, p. 271); et un mémoire de M. Tappes {op. cit., 1869, 1" trim., p. 5, et 1871, p. 253), et avec plus de développe- 778 COLÉOPTÈRES. — CHRYSOMÉLIENS. ment dans l'Abeille. Nous figurons une antenne de Crijptocephalus (pi. Lvni, fig. 7). Le groupe des Cassides nous offrira des larves où la protection par les excréments est moins complète que chez les Tubifères. Ces larves sont ovalaires, larges, épineuses, portant leurs excréments en parasol sur une fourche fixée à la face supérieure du segment anal. Les nym- phes sont épineuses, subissant leurs métamorphoses dans une coque fixée aux végétaux. CASj^lDA, Linn. — Corps oblong, ovalaire ou hémisphérique, plus ou moins convexe, non épineux. Corselet et élytres dilatés sur les bords en expansion membraneuse recouvrant la tète et tout le corps. Antennes contiguës. Tarses larges et velus en dessous. Ces Coléoptères sont remarquables par leur forme presque arrondie, avec bords amincis, qui les fait ressembler, quand elles sont collées aux feuilles par le dessous plat de leur corps, à des Tortues d'eau des genres Cishido, Emys, etc. Les élytres sont fortement ponctuées ; le dessus du corps a parfois des teintes ou des bandes dorées et opalines, qui disparaissent quelque temps après la mort. Les espèces sont nom- breuses et répandues à peu près également dans toute l'Europe, avec prédominance dans le sud et le sud-est. Elles vivent sur diverses plantes. Les larves sont des plus singulières et caractéristiques. Elles sont apla- ties, larges, grisâtres, avec tout le corps garni de longues pointes très- ciliées. La face supérieure du segment anal se prolonge en un appen- dice fourchu, et l'anus s'ouvre de façon que les excréments viennent se déposer sur cette fourche. Quand ces larves sont au repos ou non efTrayées, elles laissent tomber la fourche et traînent en arrière ce paquet stercoral ; mais au moindre danger qui les menace, ou si le soleil les incommode, elles relèvent la fourche et son fardeau, qui de- vient ainsi pour elles un parasol. La larve ainsi abritée se promène en sûreté à la surface des végétaux dont elle dévore le feuillage ; elles échap- pent de la sorte aux oiseaux, qui ne les voient pas ou qui n'éprouvent que de la répugnance. Par un mouvement brusque elle rejette à volonté l'amas d'excréments. Chez une espèce américaine d'un genre voisin, le Cyplioptera ampulla, Oliv., les excréments sortent liés les uns aux autres en petits filets articulés qui simulent une perruque. Les larves se fixent a'ux plantes lors de la nymphose, et façonnent des coques où chacune se change en une nymphe épineuse. Les adultes vivent sur les mêmes végétaux que les larves ; les femelles volent déposer leurs œufs sur les feuilles et les abritent sous des excréments. Nous avons en France, et spécialement aux environs de Paris, quatre espèces à signaler dans le genre Cassida. La première, qu'il nous CASSIDA. 779 importe surtout de faire connaître, parce qu'elle est parfois nuisible aux potagers, est le C. viridis, Fabr., de toute l'Europe. D'après M. de Mar- seul, c'est la même espèce que le C. rubigino.ta, Ulig. Le dessous du corps est noir, le corselet et les élytres verts, les pattes jaunâtres avec une partie des cuisses noires. On trouve la larve et l'adulte sur les Chardons, ce qui explique comment l'espèce peut causer un grand pré- judice 'aux Artichauts. C'est vers le mois de juillet qu'on rencontre la larve sur ces légumes ; chacun de ses segments offre une épine ho- rizontale branchue. Le mamelon anal redressé porte de chaque côté deux filets caudiformes un peu moins longs que le corps et consti- tuant les deux branches de la fourche sur laquelle s'accumulent en grains humides les déjections mêlées à la vieille peau de la mue. Cette larve broute le parenchyme des feuilles, et les perce jusqu'à leur face inférieure, ce qui fait dessécher la plante. Pour la nymphose, elle se fixe sur la feuille, et la peau fendue de la larve reste rejetée à l'extré- mité. La nymphe, toujours verte, est bien plus raccourcie et déprimée que la larve ; elle a perdu ses deux queues. Le corselet a pris la forme large et semi-circulaire qu'il aura chez l'adulte. Il est garni d'épines à son bord antérieur et sur les côtés : le ventre est muni d'épines latérales, larges, plates et dentées. Au bout d'une quinzaine de jours éclosent les adultes, qui mangent aussi les feuilles d'Artichaut. Proba- blement que les derniers éclos passent l'hiver et vivent jusqu'en juin, où ils pondent. Il n'y a d'autre moyen de détruire cette espèce nuisible que de faire la chasse aux adultes et aux larves, et de les écraser. — Une espèce très-voisine, le C. equestris, Fabr., de 8 millimètres, de toute l'Europe, a le dessous du corps noir, le dessus vert, les pattes et cuisses jaunâtres. Elle vit sur la Menthe, et lors de la nymphose les larves se rassemblent, et les coques des nymphes sont acculées les unes contre les autres, fixées à une tige. Quand les deux espèces qui précèdent, toutes vertes, sont immobiles sur les feuilles, on dirait des excroissances de celles-ci. On a signalé comme nuisible aux feuilles de la Betterave rouge, et aussi aux Navets, aux Radis, le C. nebulosa, Linn., d'Europe et d'Asie, long de 5 milhmètres environ. Les antennes et les pattes sont noires, les élytres rougeâtres, tachetées de noir ; elles ont été vertes dans les premiers jours. Les larves se tiennent sur les feuilles, qu'elles criblent de petits trous ronds. Elles sont d'un joli vert taché de blanc, et ont les côtés du corps armés d'épines barbelées. La nymphe, à corselet en bouclier, est ovale, déprimée, avec segments épineux. Elle est d'un vert vif et luisant, avec les bords du thorax et de l'abdomen blan- châtres et deux raies jaunâtres sur le dos. — Citons encore le C. thora- cica, Kugel., de ^ à 5 miUimètres, de l'Europe et de l'Asie, vivant sur l'Année des prés, à élytres vertes, à corselet brun, à pattes fauves, la Casside verte à corselet brun de Geoffroy, — le C. nobilis, Linn., d'Europe, d'Algérie , du Caucase, ayant environ 5 millimètres, qu'on rencontre 780 COLÉOPTÈRES.— CHaYSOMÉLIENS. sur diverses plantes, fauve en dessus, à élytres striées, ornées près de la suture d'une bande d'or, la Cassicle à bandes d'or de Geoffroy ; — le C. vit- tata, Fabr., d'Europe et du Caucase, fauve, avec des dessins marginaux noirs pour le corselet et les élytres et les appendices noirs, etc. Parmi les espèces exotiques nous représentons (pi. lviii, fig. 5), le C. palliata, Fabr., de la Guyane, vert, avec le pourtour des élytres rouge, et une longue tache d'un rouge vif au milieu de chacune. 11 y a une Casside exotique recherchée pour la parure, sa forme per- mettant aisément de la monter en broches, boutons de manches, pen- dants d'oreilles. C'est le C. variolosa, Fabr. (genres actuels Oxynodera, Hope, ou Dhcomorpha, Chevr., ou Desmonota, Bohem., ou Polychalca, Chevr. in Dej.), qui arrive en grande quantité du Brésil, d'un riche vert brillant, avec des séries de gros points creux sur le corselet et les ély- tres, analogues à des marques de variole, le tout avec une bordure d'un bronzé rouge. L'avantage de cette |espèce est d'avoir les tégu- ments très-durs et très-résistants, les contours des élytres de la plu- part des autres Cassides ne résistant pas au sertissage. Un genre voisin, Mesomphalia, Hope, est très-curieux par ses élytres relevées au milieu, vers la base, en une bosse pointue unique. U offre certaines espèces brésiliennes d'un aspect à la fois élégant et bizarre, comme M. gibbosa, Fabr,, M. vestita, Dej., M. stigmata, Dej., à fond d'un vert très-sombre et mat, relevé par des taches ou des semis pulvé- rulents d'un jaune ptlle ou ocreux, à reflet doré. Le Brésil a encore d'autres Mesomphalia de même ornementation. On consultera, pour le type Cassida et genres annexes, l'ouvrage latin de M. Ch. Boheman, Monographia Cassidarum (Stockliolm, aux frais du Roi, k vol., 1850, 1854, 1855, 1862). OMOPl>.%T.%, Hope. — Antennes à articles d'abord grêles, puis aplatis et plus ou moins élargis. Corselet presque conique, Élytres à angles huméraux ordinaire- ment prolongés. Ce genre, démembré des Cassides, est formé entièrement d'espèces de l'Amérique du Sud. — Ex. : 0. spinifex, Fabr. (pi. i.viii, fig. 6, mâ- choire et son palpe ; 6 a, lèvre inférieure et palpe ; 6 6, mandibule ; 6 c, labre). Cette espèce est de couleur ferrugineuse, avec les élytres pré- sentant une épine à l'angle antérieur humerai ; le corselet offre aussi de chaque côté une épine transverse. A§iPlDOMORPilA, Hope. — Antennes courtes, ayant leurs six premiers articles très-grêles, les suivants un peu plus épais. Corselet et élytres parfaitement orbiculaires. Ce genre offre des élytres très-convexes, devenant gibbeuses derrière l'écusson. La plupart des espèces sont .américaines, et l'on avait créé pour elles le genre Deloyala (Chevr, in Calai. Dej.). Il y en a des espèces aux LEMA. 781 Indes prientales, en Afrique, en Australie, etc., et deux au sud-est de l'Europe. Selon M. L. Fairmaire, ce genre doit rentrer dans les Casuida, le caractère tout superficiel de la convexité des élytres présentant tous les passages. Le dernier degré de dégradation dans la protection excrémenlitielle des larves nous est ofTert par celles des types Lema et Crioceris. Elles sont courtes oblongues, de couleur brunâtre, non mamelonnées, sans instrument particulier pour porter leurs excréments. Les nymphes subissent leurs métamorphoses sous terre. liEMA^ Fabr. — Tête non rétrécie; antennes écartées à la base, variables; mandi- bules bifides au sommet. Corselet plus étroit que les élytres à sa base et sil- lonné à sa base; écusson en trapèze. Élytres subparallèles. Crochets des tarses soudés à leur base. Ce genre est très-riche en espèces répandues sur tout le globe, et le nouveau continent en a plus du double que l'ancien. Nous devons signaler d'abord le L. melanopa, Linn., de toute l'Europe, de l'Algérie et du Caucase, de Sibérie, des îles Canaries. L'espèce devient d'autant plus rare, qu'on s'avance plus au nord, et paraît manquer en Laponie. C'est le Criocère bleu à corselet rouge de Geoffroy. Le corps est d'un bleu d'acier, le corselet, les élytres et les pattes d'un rouge ferrugineux, les antennes et les tarses noirs. La longueur est de Zi à 5 millimètres. La larve de cette espèce, ovalaire, d'une couleur rougeàtre très-pàle, pa- reille de forme et de mœurs à celle des Crioceris que nous décrirons, vit sur les feuilles des Graminées, de diverses Céréales, et surtout no- tamment de l'Orge et de l'Avoine. Les larves se rencontrent en mai et juin, et deviennent nymphes au pied des chaumes dans une coque ter- reuse, d'où sort l'adulte au commencement d'août. Au reste, cet insecte n'est que faiblement nuisible. Dans toute l'Europe et l'Algérie se trouve encore le L. cyanella, Linn., entièrement d'un bleu brillant, tantôt clair, tantôt foncé, parfois virescent, avec les appendices noirs. Ce Criocère tout bleu de Geoffroy est commun et vit sur un grand nombre de plantes et parfois sous les pierres ou sous les écorces. On trouve encore en France, mais surtout dans les parties orientales de l'Eui'ope, en Hongrie, en Australie, le L. flavipes, Sulfrian, de petite taille, bleu, à antennes noires, à pattes d'un fauve assez vif, vivant sur les jeunes pousses de Millet. Parmi les espèces exotiques du genre Lema, il en est qui sont remarquables par la grosseur considérable des cuisses posté- rieures ; cependant, pas plus que les Sagra, elles ne possèdent la faculté de sauter, ainsi que Lacordaire l'a constaté sur des sujets vivants du L. violacea, Dej., du Brésil. Nous représentons une espèce de ce type, le L. crassipesy Oliv., de Madagascar (pi. lvii, fig. 9,9a, tête ; 9 b, an- tenne). C'est le mâle qui est figuré, d'un fauve uniforme peu brillant, 782 COLÉOPTÈRES. — CHRYSOMÉLIENS. avec les antennes, les jambes et les tarses noirs. Les cuisses postérieures sont très-renflées et ont une dent en dessous. CRIOCERIS, Geoffr. — Corps tantôt oblong et convexe, tantôt allongé et un peu déprimé. Antennes robustes, grossissant souvent vers l'extrémité (corne de bélier, nom du genre). Ëlytres à lignes de points plus ou moins gros. Cuisses renflées ; crochets des tarses libres et simples. La distribution géographique des Criocères n'est pas tout à fait la' même que celle des Lema. Les espèces, moins nombreuses, se trouvent dans tous les pays, mais ne dominent plus en Amérique comme les Lema; on en connaît seulement du Mexique sur ce continent. Les mœurs des larves sont fort singulières. Elles sont courtes, épaisses et charnues, oblongues, non mameloimées, en général de couleur terne. Leur peau est fine et délicate. L'ouverture anale, au lieu de s'ouvrir en dessous du dernier segment, est rejetée en dessus, de sorte que les excréments, très-humides, à mesure qu'ils sortent, sont poussés successivement en avant. Ils ne sont portés par aucun instrument particulier, mais forment un amas sur le dos de la larve, amas irrégulier et n'entourant pas le corps comme un fourreau. 11 sert à protéger l'animal contre le soleil, et à dégoûter les insectes carnassiers et les oiseaux insectivores. Ces larves sont lentes dans leurs mouvements, et, parvenues à leur crois- sance, se laissent tomber à terre, s'y enfoncent, et se pratiquent une loge ovale, enduite à l'intérieur de leur salive, dans laquelle elles deviennent nymphes. Les adultes éclosent au bout d'une quinzaine de jours. Quand on les saisit, ils font entendre un bruissement dû au frottement du corselet. Les espèces du genre Crioceris ont beaucoup d'intérêt, car certaines sont fort nuisibles à diverses plantes. 11 en est d'abord dont les couleui^s dominantes sont le rouge cocciné. Ainsi le C. 7nerdigera, Liun., de toute l'Europe, noir, avec le corselet et les élytres rouges. C'est le Criocère rouge du Lis de Geoffroy. Cette espèce vit sur la Fritillaire impériale et sur les divers Lis des jardins et Hémérocalies, surtout les Lis blancs. Les larves rongent les feuilles et les perforent en tous sens, puis les tiges. Elles se recouvrent de petits tas de matière gluante et verdàtre ; si on les dépouille de cet enduit protecteur, elles se mettent à manger avec voracité, et en deux heures ont réparé le désordre de leur toi- lette. Comme ces insectes et leurs larves sont très-visibles, il faut visi- ter les Lis, enlever et écraser les Criocères. Le Criocère du Lis devient rare dans le nord de l'Europe. On l'indique comme commun en Sibérie. Il a été transporté et s'est naturalisé dans l'Inde et au Brésil. — Une se- conde espèce très-voisine, le C. brunnea, Fabr., d'un rouge plus vif et plus persistant à l'état sec, ayant un peu de noir sur les bords du corse- let, le bout de l'abdomen et les pattes en partie rouges, vit, dit-on, sur les Muguets (Cy/iya//arïa). Elle est nuisible parfois aux plantations en CRIOGERIS, SYNETA. 783 jardin de Ciboule, d'Ail et d'Oignon, couvrant les tiges de milliers de petits œufs d'un rouge pâle, et bientôt de larves salissant les feuilles et dégoûtant profondément les ménagères par les amas humides d'excré- ments qui les recouvrent. Le meilleur remède est de prévenir l'inva- sion du mal, en surveillant eu avril les sujets d'hibernation qu'on trouve accumulés sur les plants, le mâle cramponné sur le dos de la femelle ; on les enlève et on les écrase. Cette espèce paraît, au contraire de l'autre , commune dans le nord de l'Europe ; elle est rare près de Paris. Les feuilles aciculaires des Asperges, dans les plants cultivés pour graine, ont souvent beaucoup à souffrir de deux Criocères à larves et mœurs pareilles à ce que nous avons dit pour le C. merdigera. Leurs larves sont d'un vert jaunâtre. L'une de ces espèces est le C. Asparagi, Linn., de toute l'Europe et du Caucase, d'un bleu verdàfre, avec le corselet d'un roux ferrugineux*, orné de deux taches noires, les élytres bleues, avec deux macules d'un jaune blanchâtre sur chacune. L'autre, le C . duodecimpunctata, Linn. (pi. ux, fig. 3), de l'Europe, et du Caucase, est d'un roux ferrugineux, avec six points noirs sur chaque élytre. Ces deux Chrysoméliens nuisibles ont été nommés par Geoffroy le Criocére porte-croix de V Asperge et le Criocére à points noirs. C'est au mois de juin qu'abondent les adultes de ces deux espèces. Pour remédier au mal, le mieux est de secouer le matin les Asperges au-dessus d'un parapluie renversé, ou d'un filet de toile à large ouverture, et de brûler tous les Criocères qui y tomberont. L. Dufour a fait l'anatomie des C. merdigera et Asparagi, et a vu que le canal digestif a en longueur environ trois fois celle du corps ; que l'estomac est allongé et divisé en deux parties, l'antérieure en massue, la postérieure ovoïde {Asparagi), ou cylindrique {merdigera). Le premier renflement est lisse, le second revêtu de papilles externes. L'intestin, assez long, se renfle graduellement en ampoule. Nous représentons une espèce exotique du genre, le C. Doryca, Boisd., d'un jaune ferrugineux vif, avec l'écusson et les élytres d'un vert bronze obscur très-brillant (pi. Lvn, fig. 10, du havre Dorey, à la Nouvelle- Guinée ; 10 a, extrémité du palpe maxillaire). STMETA, Eschsch., Dej. , Lacord. — Tète orbiciilaire, élargie dans son milieu ; j'eux petits, subarrondis, entiers. Corselet plus étroit que la base des élytres, rétréci en arrière et en avant, un peu dilaté et denticulé sur les côtés. Crochets des tarses bifides. Ce genre n'est représenté en Europe que par une seule espèce, le S. Betulœ, Payk., d'abord trouvée en Suède, Norvège, Finlande, Lapo- nie, puis en France. Elle vit sur le Bouleau et existe aussi en Sibérie. Les couleurs sont mal arrêtées et tendent à se fondre insensiblement. Le corps est d'un noir brunâtre. Chez le mâle, les élytres ont une même bande jaunâtre au contour, couleur qui, chez la femelle, couvre les élytres, sauf à la suture, et parfois tout le dessus du corps. Les pattes 78^1 COLÉOPTÈRES. — CHRYSOMÉLIENS. sont jaunâtres. Nous représentons (pi. i.vii, fin. 11, cette variété femelle; lia, tète et corselet grossis ; 11 6, extrémité du palpe maxillaire ; 11 c, antenne ; 11 OlllELA, Linn. — Corps ovalaire ou oblong, parfois presque globuleux, glabre. Tôle enfoncée dans le corselet ; antennes écartées à la base, insérées près des yeux, grossissant souvent vers l'extrémité. Corselet transversal, un peu 790 COLÉOPTÈRES. — CHRYSOMÉLIE.NS. rétréci en avant, en général aussi large à sa base que les élytres. Pattes ro- bustes, à cuisses fortes, avec tarses à troisième article cordiforme, mais non bilobé, et crochets simples. Le nom de ce genre, qui avait autrefois une extension considérable el qui comprend encore beaucoup d'espèces, vient de pomme d'or, à cause des couleurs éclatantes d'une grande quantité des espèces. En général ces couleurs sont métalliques, variant du cuivreux au vert doré, ce qui explique pourquoi on recherche ces insectes pour la parure, soit entiers, soit en fragments imitant des gouttes de feu. 11 en est de noires, parfois avec une bordure rouge ; certaines ont les élytres d'un rouge brique. Les femelles se distinguent par un corps plus massif, plus bombé, les antennes, les tarses et les palpes moins développés, et une fossette au dernier segment ventral. On peut consulter pour l'étude de ce genre le travail de Suffrian [Linnœa entomologica, t. V). Il a établi des subdivi- sions d'après la forme du corps, la sculpture des téguments, les cou- leurs, l'habitat, etc. ; mais il y a tous les passages. Les larves des Chrysomèles, souvent sociales, peu mobiles, vivent à découvert sur les feuilles, qu'elles trouent de manière à n'y laisser que les grosses nervures, sans fourreau, ni enduit. Elles sont épaisses, colo- rées, à sécrétions visqueuses, et munies d'un pseudopode anal qui leur permet de se fixer pour la nymphose, la nymphe adaptée au végétal conservant la dépouille de la larve adhérente à l'extrémité du corps. Les Chrysomèles sont nombreuses dans les régions chaudes du globe ; elles vivent sur les plantes basses. On en trouve dans toute l'Europe, mais surtout dans la région de pourtour de la chaîne de toutes les Alpes ; il y a beaucoup d'espèces spéciales aux parties les plus chaudes du continent européen, tandis que l'extrême Nord est très-pauvre en espèces. Nous avons à indiquer un assez grand nombre d'espèces, car elles abondent. On se sert comme ornement d'espèces d'Europe d'un riche éclat métallique, telles que le C. Graminis, Linn., de toute l'Europe, du Caucase, du Maroc, de 7 à 8 millimètres, à corps oblong, très-convexe, à corselet dépourvu de sillons latéraux, peu rétréci en avant, très- abondant dans les herbes des clairièrçs des bois, d'un vert bleuâtre, brillant, à élytres légèrement ponctuées, le grand Vertubleuàe Geoffroy ; — le C. Menthastri, Suffr., commun dans les lieux humides, sur les feuilles des Menthes en France et en Allemagne, espèce ressemblant beaucoup à la précédente, mais d'un beau vert brillant un peu doré, non cuivreux, à corselet très-rétréci en avan,t; — le C^ fastuosa, Linn., d'Europe et du Caucase, le petit Vertubleu de Geoffroy, se trouvant sur les Blés, d'un vert doré ou bronzé brillant, employé pour la parure comme le C. Graminis, avec la suture des élytres bleue et une bande parallèle de même cou- leur sur les élytres : on le prend parfois communément à Lardy ; — le C. Cerealis, Linn., de France, d'Allemagne, du sud de la Russie, des Alpes CHRYSOMELA, DORYPHORA. 791 et d'Algérie, se trouvant sur les Genêts, de 7 à 8 millimètres, doré, orn de trois bandes bleues sur le corselet et de cinq sur les élytres, l'Arle- quin doré de Geoffroy; — le C. americana, Linn., du pourtour méditer- ranéen, accidentellement près de Paris, la Chrysomèle à galons de Geof- froy, d'un vert bronzé, à élytres ornées de cinq stries rouges, à ailes rouges, vivant sur les Labiées. Ces deux espèces ont sur les élytres des lignes ponctuées géminées. Les espèces où les couleurs métalliques ne dominent plus nous offrent: le C. sanguinolenta^ Linn., d'Europe et d'Algérie, de 7 à 8 mil- limètres, à corselet épais et séparé par une longue impression assez large et ponctuée, la Chrysomèle noire à bordure rouge de Geoffroy, très- commun sur les Crucifères, noir, à élytres très-chagrinées, ornées d'une épaisse bordure rouge ; — le C. poUta, Linn., d'Europe et du Cau- case, à dessous du corps d'un vert obscur, la tête et le corselet dorés, celui-ci lisse, avec tme longue impression ponctuée de chaque côté, les élytres d"un brun jaunâtre, sur le Saule, la Chrysomèle rouge à corselet doré de Geoffroy ; — le C. lurida, Linn., des mêmes régions, noir, à élytres rouges striées près de la suture, la Chrysomèle rouge à corselet noir de Geoffroy. Les jeunes amateurs feront bien de rechercher dans nos montagnes des Alpes et des Pyrénées, sur les plantes basses. Séneçons, Tussilages, Cacalies, etc., de très-belles Chrysomèles oblongues, moins coriaces, qui y vivent en familles nombreuses : ainsi le C. superha, Oliv. (pi. lix, fig. 6), de 8 à 11 millimètres, d'un vert métallique, avec les élytres d'un rouge cuivreux, et deux bandes d'un beau bleu à la suture ; — le C. Sene- cionis, Schum ou Cacaliœ, Schrank, de 7 à 8 millimètres, allongé, bleu, avec une bande plus foncée sur les élytres ; — le C. nigriceps, L. Fair- maire, de 8 à 9 millimètres, allongé, parallèle, d'un rouge-brique, avec la tête noire, à Gavarnie, dans les Pyrénées, etc. Ces Chrysomèles mon- ticoles constituent le sous-genre Oreina de M. Chevrotât. nORYPHORA, Illig. — Antennes filiformes, de longueur moyenne; tête assez grande, inclinée. Corselet transversal, très-échancré en avant; élytres grandes et convexes. Slernum avancé en une pointe forte et souvent recourbée. Pattes assez grandes. Corps arrondi, convexe, ailé. Ce genre est formé par des Chrysomèles ornées de belles couleurs, de taille au-dessus delà moyenne, des régions chaudes de l'Amérique. Un groupe de Doryphores a de riches couleurs à reflet métallique. Ainsi D, viridis, Dej., du Brésil, d'un vert passant au bronzé ; — D. pijro- ptera, Germar, du Brésil, à corselet violet, à élytres vertes à reflet bleu, ou d'un cuivré ardent; — D.Langdorfii, Germar, du Brésil, rare, à cor- selet d'un vert vif et brillant, ainsi que les bords suturaux et externes des élytres, dont le milieu est d'un rouge de feu violacé, d'un éclat incomparable ; — D. saphirina, Forster, de la Guyane, totalement dun 792 COLÉOPTÈRES. — CHRYSOMÉLIENS. bleu splendide. Cette espèce a été essayée pour la bijouterie, maia abandonnée comme trop sombre après le montage. On se sert pour les tons bleus d'un Buprestien, le Stigmodera amœna, du Brésil, bleu, bande jaune, très-brillant aux lumières. Un autre groupe de Doryphores n'a pas de reflets métalliques; le fond est en général d'un jaune mat, de l'ocreux au testacé pâle, avec des points noirs ou des macules noires très-variés. Nous figurons dans type D. multipunctata, Chevr. (pi. ux, fig. 7, profil), montrant la poinie antérieure sternale, espèce du Brésil, de Bolivie, de Colombie. A consulter : C7îrj/some/ic?es de l'Amérique, latin et français, par Sta ^2 vol., Upsal, 1863). PBŒDOIV, Latr. — Corps ovalaire, convexe, métallique. Antennes peu épaissies au bout; palpes terminés en pointe. Élytres à bord réfléchi, mais presque uni, non en gouttière. Ces Coléoptères ont une coloration bronzée, un corps globuleux, très-dur. Ils vivent presque tous sur le bord des eaux, et surtout sur les Crucifères. Une espèce est souvent très-nuisible aux cultures du Cresson (Sisymbrium Naslurtium) dans des ruisseaux artificiels, ou cresson- nières, que la consommation de cette plante salubre fait établir près des grandes villes. Au mois de juin, on trouve souvent ses larves dans le cresson mal épluché des tables de restaurant. C'est le P. Cochleariœ, Fabr., de France, d'Allemagne, du Caucase, de 3 millimètres 1/2 (pi. lix, 11, antenne; lia, tarse antérieur; 11 6, palpe maxillaire ovale), court, convexe, d'un bleu verdâtre luisant, à dessous du corps noir, à antennes et pattes d'un noir bronzé. Les œufs, jaunes et cylindriques, sont pondus au commencement de mai, et chacun collé dans une petite fossette sous la feuille. Les larves, qui atteignent 5 à 6 millimètres de long, sont ovales-allongées, un peu atténués postérieurement, à la tête arrondie, noire, avec deux antennes coniques noires. Le corps est d'un vert noi- râtre avec rangées de tubercules noirs, surmontés d'un poil court, blan- châtre. Vers le milieu de juin, les larves se changent en nymphes d'abord d'un blanc jaunâtre, puis devenant noirâtres, ovales, convexes, garnies de ligues longitudinales de soies noires. A la fin de juin, com- mencent à paraître les adultes, et il se trouve encore des larves non métamorphosées ; une partie des adultes doit hiverner. Il faut citer encore le P. Betulœ, Linn., de toute l'Europe, vivant sur diverses Renon- cules, sur le Veronira Beccabunga, le Phellandrium aquaticurn, etc., la Chrijsomèle bleue du Saule de Geoffroy, arrondi, noir en dessous, bleu en dessus, avec des rangées de points sur les élytres. PLAGIODERA, PRASOCURIS. 793 PLAGiODElit, Redt. — Corps très-brièvement ovalaire, très-plat eu dessous, convexe en dessus. Pattes très-courtes. L'espèce-type ressemble beaucoup aux Phœdon, mais a les téguments mous et non durs. C'est le P. Armoraciœ, Linn., de toute l'Europe, de l'Algérie, du Caucase, noir en dessous, à base des antennes rouge, d'un bleu violacé et métallique en dessus, ayant l'aspect d'une Coccinelle. Cet insecte vit dans les lieux humides sur une foule de plantes très- diverses, le Cresson, le Plantain, le Cochlearia Armoracia, les Ranun- culus, les Saules, les Peupliers et même les Hêtres. Les élytres ont sur le bord un repli en gouttière profonde. PRA§)0€IiniS, Latr., ou Helodes, Payk. — Tête médiocrement enfoncée dans le corselet ; antennes à premiers articles cylindriques, les cinq derniers courts et très-élargis. Corps allongé, parallèle, déprimé en dessus. Les Prasocuris, répandus dans presque toute l'Europe, sont propres aux végétaux des localités humides. Nous citerons le P. Beccabungœ, Illig., ou violacea, Fabr., de toute l'Europe, de ti millimètres de lon- gueur, à corps oblong, à élytres striées de petits points, partout d'un bleu verdûtre uni. Il vit sur la Véronique aquatique {Veronica Becca- bunrja), plante spontanée dans les ruisseaux et les terres imprégnées d'eau, ayant des propriétés médicinales, dont on mange les feuilles cuites et assaisonnées ou crues et en salade. Elles ont un goût de cresson, avec moins d'âcreté, et peuvent avantageusement être mêlées à lui, lors de sa floraison, et le rendre mangeable. Vers la fin de mai, les feuilles offrent souvent des larves couvertes de tubercules pilifères, d'un vert noirâtre, allongées, allant en s'atténuant, qui creusent les feuilles en mille endroits et dévorent tout le parenchyme. Les femelles déposent leurs œufs dans des galeries qu'elles creusent en long à l'intérieur des tiges. Les larves en sortent, et chacune, dans la seconde quinzaine de juin, rentre dans la tige en y creusant une galerie cen- trale au fond de laquelle elle se change en nymphe oblongue, allon- gée, d'abord blanchâtre, puis noirâtre. Si l'on juge dans quelque propriété la Beccabunga assez utile, soit comme aliment, soit pour ses jolies grappes de fleurs bleues, pour qu'il soit bon de détruire son in- secte ennemi, il faut profiter des mœurs de celui-ci. On coupera les tiges à fleur d'eau vers le 20 juin, et on les fera sécher, ce qui fera périr et les œufs et les larves qu'elles récèlent. Citons encore le P. marginella, Linn., de Suède, de France, d'Allemagne et des Alpes, d'un vert bronzé, à corselet et élytres bordés de jaune, vivant sur les Renoncules aquatiques. Nous représentons une espèce voisine de P. Beccabungœ, le P. Hannoverana, Fabr., vert noirâtre, bordé de jaune (pi. Lix, fig. 8 ; 8 a, tarse antérieur ; 8 6, ses crochets), espèce de Suède, de France, d'Allemagne et de Suisse. 794 COLÉOPTÈRES.-— CHRYSOMÉLIENS. GA§iTROPHVi^.%, Redt. — Corps ovalaire, épais, convexe ; élytres finement marginées, fortement ponctuées. Dans ce genre, l'abdomen des femelles prend un développement énorme, ce qui indique un passage aux Galéruques, que nous avons également trouvé chez le Colaspidema atrum. On trouve dans toute l'Eu- rope et le Caucase le G. Polygoni, lànn., d'un bleu verdâtre, avec corse- let et pattes rouges, la Chrysomèle verte à corselet rouge de Geoffroy. En Allemagne et dans le midi de la France, se rencontre le G. Raphani, Fabr., qui nuit souvent aux potagers, particulièrement aux Navets. La larve est noirâtre et garnie de tubercules piligères, et la nymphe récente est blanchâtre, raccourcie, ovalaire. I.IIVA, Redt. — Antennes ayant les cinq derniers articles élargis. Palpes terminés par un article large. Corselet notablement plus étroit à la base que les élytres, court, largement écliancré au bord anlér'eur ; élytres amples^ plus ou moins élargies en arrière. Le genre Lina a été détaché des Chrysomela, à cause de ses pattes plus courtes, de ses antennes moins longues, épaisses et comprimées vers l'extrémité, du corselet plus étroit, etc. 11 est formé d'espèces propres aux parties froides ou montagneuses de l'Europe, paraissant vivre exclusivement sur les arbres et arbustes de la famille des Amen- tacées. Les larves sont d'aspect tout autre que celles des Chrysomela. Au lieu d'être lisses et métalliques, ellessont rugueuses, mates et ornées de couleurs variées. Deux espèces causent parfois de grands dégâts aux jeunes planta- tions de Peupliers, de Trembles et de Saules marsaults, dont les feuilles sont réduites en véritable dentelle de nervures par des larves vivant en famille et provenant d'œufs que les femelles pondent en mai à la face supérieure des feuilles. L'espèce la plus répandue, de toute l'Europe et du Caucase, est le L. Populi, .Linn. (pi. î.ix, fig. 5), atteignant 11 mil- limètres, ayant les appendices noirs, la tète, le dessous du corps et le corselet d'un vert bleu noirâtre, les élytres d'un rouge-brique ou d'un fauve rougeâtre, avec une petite tache bleuâtre commune à l'extrémité. Une seconde espèce est très-voisine, moins étendue géographiquement, de France, d'Allemagne, de Russie, est le L. Tremulœ, Fabr., plus petit, plus allongé, à élytres plus arrondies au bout, d'un rouge plus terne, moins cocciné, à ponctuation plus forte, n'ayant pas la tache bleuâtre de l'extrémité des élytres. Le rouge de ces deux espèces se ternit en collection, comme celui des Criocères. Les larves des deux espèces sont pareilles, subcylindriques, s'atté- nuant postérieurement, d'un gris blanchâtre, mais couvertes de tuber- cules noirs, à savoir, un grand écusson noir luisant sur le prothorax, LINA. 795 des rangées dorsales et latérales de tubercules noirs sur le mésothorax et le métathorax, des rangées latérales sur les segments abdominaux. Il existe un pseudopode anal rétractile, faisant fonction de patte, outre les six pattes thoraciques noires. Ces larves sont très-peu agiles, mais, dès qu'on les inquiète, font suinter de chacun des mamelons latéraux du corps une goutte de liqueur blanche, comme laiteuse, très-fétide, dont l'odeur reste sur les doigts qui touchent la larve. Cette sécrétion est une défense contre les oiseaux et les insectes ennemis. Les gouttes de liqueur rentrent bientôt après dans les mamelons sans laisser trace sur le corps de la larve. Pour la nymphose, les larves se fixent sous les feuilles au moyen d'une substance visqueuse sortant du mamelon anal. La peau de la larve reste attachée postérieurement, et les nymphes sont jaunâtres avec plusieurs lignes de taches noires. L'insecte a au moins deux éclosions d'adultes par an, en mai et juin, puis en août et septembre, et l'on trouve tou- jours des larves et des nymphes concurremment avec les insectes par- faits. Les individus qui doivent reproduire l'espèce au printemps passent l'hiver cachés sous les mousses ou entre les feuilles sèches. Comme ces deux espèces sont très-nuisibles aux plants forestiers qu'elles attaquent, il faut, au printemps et en automne, battre les bran- ches au-dessus d'un parapluie renversé, ou les faucher avec le filet de toile, ou les secouer sur l'appareil propre à recueillir l'Eumolpe de la Vigne. L'homme a pour auxiliaire contre elles une Entomobie (Diptères brachocères, Muscides), YExorista dubia, pondant un œuf sur chaque larve, et dont la larve entre dans le corps de la larve de Lina et vit de son tissu adipeux. Les deux espèces si voisines, L. Populi'ei L. Tremulœ, vivent souvent côte à côte, ainsi sur les rejets de Peupher ou de Tremble qui partent des souches après les coupes ; cependant elles restent bien distinctes, ne se fusionnent pas par accouplement, et semblent s'isoler sur pieds ou sur rameaux séparés. C'est un de ces nombreux exemples en faveur de la fixité des espèces. On peut encore citer, dans le genre Lina, le L. œnea, Linn., de 5 à 7 millimètres, d'un vert métallique, parfois doré ou bleu, à élytres ovales, à fines lignes de points, rebordées tout autour, vivant sur les Aulnes. On trouve, dans un genre voisin, Gonioctena, Redtenb., à jambes dentées et à crochets des tarses dentés, une petite espèce très-abondante sur les Genêts, de h millimètres, le G. litura, Fabr., court, très-con- vexe, jaune, tantôt sans taches, tantôt à bandes longitudinales noires sur des élytres fortement striées de points. Cette espèce est d'Europe et d'Algérie. 796 COLÉOPTÈRES.— CHRYSOMÉLIENS. Les genres qui vont suivre, et qu'on peut définir d'une manière géné- rale les Galéruques et les Attises {Galérucides isopodes et Galéruddes anisopodes, les premiers à pattes ordinaires, les seconds dont les pattes postérieures sont propres au saut), ont les antennes distantes des yeux et rapprochées ;à la base, mais à insertions toujours séparées par une carène saillante. Les Galérucides isopodes vivent tous sur les plantes. Leurs œufs sont allongés, pointus à un bout et collés sur deux rangs à côté les uns des autres, la pointe en l'air. Les larves, comme les adultes, mangent les feuilles des végétaux phanérogames. Il en est de courtes et larges, comme l'insecte qu'elles doivent produire (ex. : {Agelastica Halensis) ; d'autres, au contraire, allongées {Galeruca Cratœyi).Les espèces d'Eu- rope, du nord de l'Afrique et de l'Asie ont été étudiées par M. L. Joannis dans une monographie {Abeille, t. III, 1866). GAE.c;kIJC.%, Geoffr. — Tête ronde. Antennes de onze articles, filiformes, à in- sertions subcontiguës chacune dans une cavité; palpes acuminés à l'extrémité. Corselet deux fois aussi large que long, impressionné sur le côté. Élytres sub- parallèles, subdéprimées, de moitié plus longues que larges, arrondies au bout prises ensemble. Crochets des tarses dentés au milieu ou fendus. Corps allongé et couvert d'une fine pubescence couchée. Ce qui frappe au premier abord chez les Galeruca (tranquille), et chez les genres dérivés, Adimonia, Agelastica, etc., c'est la lenteur de leur marche et leurs mouvements, et en même temps le peu de solidité de leurs téguments, et la tendance de l'abdomen à se gonfler et à se déformer chez les femelles fécondées. Les mâles, dans ce type, diffè- rent des femelles, outre la forme plus étroite de l'abdomen, par le dernier segment de celui-ci, qui est échancré. Toutes les espèces vivent sur les plantes, ainsi que les larves, et un certain nombre préfèrent les végétaux aquatiques. Les couleurs sont mêlées de noir et de jaune plus ou moins terne. Beaucoup d'espèces sont aptères. . L'espèce la plus intéressante est le G. xanthomelœna, Schrank, ou Cratœiji, Forster, ou calmar iensi s, Fabr., de 6 millimètres, la Galéruque de l'Orme de Geoffroy, d'un jaune sale un peu verdâtre, avec des points noirs sur le corselet et les élytres bordées de noir (pi. ux, fig. 9). Les larves vivent en société sur les feuilles des Ormes, ainsi que les adultes, et ces arbres sont quelquefois entièrenient dépouillés de leurs feuilles. Il n'y a d'autre moyen de destruction que de secouer les branches sur des draps, recueillir et brTder les adultes. Cette espèce nuisible est de toute l'Europe et du Caucase, et commune en France. On trouvé sur les Nénufars {Nymphœa alha et Nuphar luteum), le G. Nymphœa, Linn., de 6 millimètres, de forme oblongue, à élytres [GALERUCA, ADIMONIA. 797 brunes, jaunâtres au bout et sur les bords, le reste du corps testacé, espèce de l'Europe boréale et centrale, la Galéruque aquatique de Geoffroy ; et sur les Lythrum ou Salicaria, plantes dicotylédones des marais ou du bord des ruisseaux, le G. calmar iensis, Linn., ou Lythri, Gyllh., entièrement testacé en dessus, noir en dessous, à élytres très- larges et saillantes aux épaules, de Zi à 5 millimètres, de toute l'Eu- rope, de l'Algérie, du Caucase, de la Sibérie. Nous figurons l'antenne de G. Viburni, Payk. (pi. lix, fig. 9 a), espèce de France, d'Angleterre, d'Allemagne, de Suède. ADIMOXIA, Laïcharting. — Corps ovalaire, élargi en arrière, assez convexe, glabre ou à peine pubescent. Élytres plus ou moins courbes sur les côtés, élar- gies et arrondies en arrière. Crochets des tarses bilides. Tous les insectes de ce genre marchent lentement, à la façon des Timarcbes et des Chrysomèles, sont très-timides, se laissent tomber des plantes sur le sol et simulent la mort, dès qu'ils croient à quelque danger. Les mâles ont le dernier segment ventral profondément échancré. M. L. Fairmaire subdivise en trois groupes les espèces de ce genre. Il en est où les élytres, très-courtes, n'atteignent pas le milieu de l'ab- domen, même chez les mâles. Cet abdomen presque entièrement dé- couvert donne aux femelles un aspect de Méloés à corps aplati : ainsi l'A. brevipennis, lUig., à petits mâles, de 5 millimètres environ, à grandes femelles, de 10 millimètres, d'un noir plombé, avec le corselet et les élytres bordés de jaune, à longues antennes, d'une figure triste (d'où le nom du genre). Ce singulier insecte est du midi de la France. D'autres espèces ont les élytres à gros points, souvent côtelées, con- vexes, bien développées, recouvrant l'abdomen môme chez les femelles, presque toujours des ailes, mais parfois atrophiées. Le type est l'A. Ta- naceti, Fabr., de 7 millimètres, la Galéruque brunelte de Geoffroy, en entier d'un noir assez brillant, très-commun sur la Tanaisie. Les fe- melles sont parfois tellement remplies d'œufs, que les élytres soulevées dépassent à peine la moitié de l'abdomen, dont les trois derniers seg- ments sont alors à découvert, et que les membranes interannulaires sont distendues et près de se déchirer. Enfin, et tels sont les A. rufa, Germar, A. optera, Bonelh, etc., il y a des espèces aptères, à élytres re- couvrant et dépassant l'extrémité de l'abdomen, peu convexes, à sur- face unie, simplement ponctuée. Nous citerons encore une petite espèce, qu'on trouve sur les Aubé- pines en fleur, A. sanguinea, Fabr., de toute l'Europe, de 3 à /i milli- mètres, entièrement rouge, et A. Capreœ, Linn., de toute l'Europe et du Caucase, de même taille, vivant sur les Saules, à tète et corselet en partie noirs, à élytres rousses. On trouve les Adimonia sur les plantes basses, et beaucoup, surtout 798 COLÉOPTÈRES. — CHRYSOMÉLIENS. les espèces aptères ou à ailes avortées, sur le sol et sous les pierres. Ils sont répandus dans toutes les parties tempérées de l'Europe. AGCliASTlCA, Redtenb. — Corps ovalaire, élargi en arrière comme chez les Adimonia, assez convexe. Corselet large et étroit ; élytres larges, ventrues au bout. Crochets des tarses dentés. Ces insectes, dont les espèces européennes sont répandues dans toutes les régions tempérées et un peu froides, ont les téguments plus coriaces que les genres voisins, luisants, polis, d'une coloration mé- tallique bleue ou verte. Les mâles ont l'extrémité du dernier segment de l'abdomen trisinuée, et dans les deux sexes les Cavités anten- naires sont très-marquées, et leurs rebords très en relief. L'espèce la plus commune est l'A. Alni, Linn., vivant en troupe ainsi que ses larves (nom du genre), nuisible, dépouillant entièrement les Aulnes de leur feuillage. Cet insecte est long de 6 à 7 millimètres, ordinairement d'un bleu violacé, brillant avec reflet un peu rougeàtre sur les élytres. il y a des variétés noires ou d'un noir bleuâtre, d'autres d'un violet très-rouge. 11 en est d'un bleu pur, avec très-peu de reflet violet, et enfin d'un noir verdàtre bronzé, avec la suture des élytres bleue. De toute l'Europe. La femeUe a souvent le ventre très-gonflé. Citons encore 1'^. Halensis, Linn., un peu plus petit, fauve, avec les élytres d'un vert métallique parfois bleuâtre. LUPERUS, Geoffr. — Corps allongé, sensiblement parallèle ; téguments mous. Élytres très-finement ponctuées, à bord réfléchi bien marqué. Pattes grêles, jambes postérieures ayant un petit éperon. Les Luperus sont des Galérucides nombreux en espèces, remar- quables par le peu de consistance de leurs téguments et la longueur de leurs antennes, grêles, dépassant parfois l'étendue du corps cbez les mâles. Le corselet est plus étroit que les élytres, arrondi généralement sur les côtés avec les angles postérieurs formant une très-petite dent ; les crochets des tarses sont munis à leur base d'une dent aiguë. Ils sont des parties tempérées et chaudes de l'Europe, vivent sur des plantes assez variées et semblent préférer les Aulnes et les Saules. Nous cite- rons : le L. circumfusus, Marsh., ou Brassicœ, Panz. (pi. lix, lig. 12, an- tenne), à antennes plus longues que le corps chez les mâles, d'un noir brillant, à corselet et élytres en partie d'.uu jaune très-clair, de 2 milli- mètres 1/2, très-commun sur les Genêts dans toute l'Europe ; — le L. flavipes, Linn., d'un noir brillant, de 3 à Zi millimètres, avec le corselet et lies pattes d'un jaune testacé, ayant chez les mâles les yeux très-gros et saillants, et les anteiuies beaucoup plus longues que le corps, com- mun sur les Aulnes d'Europe et du Caucase; — le L. rufipes, Fabr., de ALTICIDES : SAUT. 799 û à 5 millimètres, entièrement noir en dessus, avec les pattes et la base des antennes rousses, très-commun. Mêmes régions. Les Âlticides, ou Galérucides anisopodes, correspondent à l'ancien genre AUica, que les auteurs modernes ont subdivisé en un grand nombre de coupes, dont la plupart ne sont que des sous-genres. Lacor- daire en fait une division à part, au point de vue de sa classification fondée sur les larves, en ce que celles-ci sont allongées, subcylindriques, sans mamelons latéraux, et que leurs nymphes prennent cet état, ou dans les galeries internes des feuilles où vivait la larve, ou en terre. On devra consulter, pour l'histoire des Attises en général, un Mé- moire sur les Attises d'Europe par Fondras, inséré dans VHist. nat. des Coléopt. de France de M. Muisant (Paris, Magnin, Blanchard et C*, 1859), et une Monographie des Alticides d'Europe par M. Allard [Ann. Soc. en- toin. de France, ib60, p. 39, û67, 539, 785, et plus complètement, Abeitle, t. 111, 1866). L'important travail de Fondras nous présente une intéressante étude sur le saut des Attises et des Coléoptères en général. Comme cette fa- culté caractérise essentiellement le groupe de Chrysoméliens qui nous occupe, nous devons avant tout examiner la question physiologique qui s'y rapporte. On est porté à supposer, au premier abord, que la grosseur des cuisses postérieures est en raison directe de la faculté saltatoire. Cepen- dant un examen plus exact fait reconnaître qu'il y a des espèces où ces cuisses n'ont qu'un développement médiocre, et qui sautent très- bien, ainsi les Puces; qu'au contraire, dans les Chrysoméliens, par exemple les Sayra et certaines Donacia ont les cuisses postérieures énormes, et cependant ne sautent pas. Une particularité manque à ces gros fémurs, existant au contraire chez les Attises. Leurs cuisses posté- rieures sont plus ou moins renflées et de forme lenticulaire, la face externe plus convexe que l'interne. Une excavation longitudinale com- mence sur cette face au bord inférieur sur lequel elle empiète, et s'élargit en se rapprochant plus ou moins du bord supérieur, qu'elle n'atteint jamais. Elle est très-lisse, et s'élargit et s'approfondit ordinai- rement près de l'articulation de la jambe, s'atténuant et se rapprochant du trochanter. Cette structure est développée au maximum dans les genres i'5i///îO(ies et IHectroscelis; elle est moins forte dans les sous-genres Aliica ou Graptodera que dans le sous-genre Phyltotreta, etc. Chez l'immense majorité des Coléoptères, où n'existe pas cette dispo- sition, la eu sse li'offre à sa région inférieure qu'un sillon plus ou moins large, formant la séparation régulière de ses deux faces. Elle est for- cée, dans la flexion des articles du membre, de s'appuyer directement sur la jambe, et dès lors eile ne peut contribuer qu'à un simple mou- 800 COLÉOPTÈRES. — CHRYSOMÉLIENS. vemeiit ambulatoire. Dans les Altises prêtes à sauter, la jambe se replie contre la cuisse et se loge dans l'excavation qui la reçoit, de façon que le bout terminal de la cuisse peut porter en même temps que la jambe sur la surface d'appui. La contraction des muscles de la cuisse et de la jambe contribue simultanément adonner au saut, dû au débandemenl brusque des deux ressorts, son intensité et sa direction. La cuisse pos- sède une force indépendante de la jambe, et l'on en a la démonstra- tion en observant que des Altises privées de leurs jambes, bien qu'affai- blies par cette mutilation, sautent encore cependant quand elles sont excitées. Ce saut est réduit à de très-courtes distances ; mais il donne la preuve que la cuisse postérieure peut l'exécuter sans le secours de la jambe. La même structure de la cuisse se rencontre chez un Coléoptère pentamère et sauteur, le Cyphon hemisphœricus, Fabr., et chez un té- tramére , le Hamphus flavicor?iis , Clairv. (Curculioniens). Deux genres de Coléoptères hétéromères confirment encore les observations précé- dentes, et prouvent que la disposition fémorale suffit pour indiquer la faculté de sauter. Les Mordelles, qui sautent très-fort, ont la jambe insérée à la base et au fond d'un canal de la cuisse, dont le rebord extérieur est très-saillant, tandis que chez les Anaspes, qui ne sautent pas, mais se contentent de marcher rapidement sur le sol , on ne voit pas de sillon sous le fémur, le tibia restant entièrement découvert dans la flexion. Quant aux espèces du genre Orchestes (CurcuUoniens), qui sont pa- reillement sauteuses, dans la flexion la jambe paraît plus rapprochée de la surface d'appui que la cuisse, qui semble ne pas porter ; mais le bord inférieur de celle-ci est armé d'épines ou de dentelures qui peuvent arriver jusqu'à l'appui en même temps que la jambe. Les Orchestes sans tibia sautent encore, mais avec peine. On voit donc, en résumé, que, d'après l'explication que donne Fondras du saut des Co- léoptères, il faut, pour qu'il s'exécute, que la cuisse et la jambe puis- sent, n'importe par quel mécanisme, s'appuyer ensemble sur la sur- face d'appui, et se débander par une contraction simultanée de leurs muscles. Chez les Altises, la faculté du saut varie suivant les genres et les espèces, en raison du poids du corps et de sa forme, ou rétréci e et al- longée, ou au contraire courte et épaisse. Les Phyllotreta, déprimés et étroits, s'élancent plus facilement que les espèces dont la largeur et la convexité sont un obstacle au parcours aérien. Les Altises des sous-genres Podagrica, Argopus, Apteropoda et Mniophila ne sautent pas à une aussi grande distance, et ne peuvent continuer cet exercice qu'avec peine. Les variations de température influencent en raison directe la force musculaire du saut. Excitées par un soleil ardent, les Altises n'attendent même pas que la main cljerche à les saisir ; le moindre geste ou bruit les détermine à s'élancer, et la parabole de leur saut a DESTRUCTION DES ALTISES. 801 d'autant plus d'amplitude, que l'air est plus chaud. La fraîcheur au- tomnale diminue petit à petit la force du saut des Attises, et le froid glacial les en prive tout à fait. Les sexes des Alticides se distinguent assez facilement : chez plusieurs espèces, les mâles se reconnaissent à la dilatation de certains articles des antennes ou du premier article des tarses antérieurs ; chez toutes, . les mâles ont une fossette bien prononcée au bord postérieur du der- nier anneau abdominal inférieur. La multiplication énorme des Attises dans les jardins et dans les champs, surtout dans toutes les cultures de Crucifères, et les dégâts très-sérieux qu'elles causent, nous font un devoir, à l'égard des agro- nomes de tout genre, de passer en revue les moyens de destruction de ce fléau. On peut les diviser en deux sortes, chimiques et mécani- ques. Ils doivent être mis en œuvre contre toutes les espèces du genre Altica et des genres annexes Psylliodes, Plectrosçelis, Longitarsus, etc. Les méthodes de destruction sont de deux espèces, ou récolte mé- canique des insectes, suivie de leur mort, ou préventives, fondées sur l'emploi de substances chimiques éloignant ces pernicieux Coléoptères et empêchant les pontes. Les Attises exercent de grands et fréquents ravages dans les cultures de Colza de la Normandie et du nord de la France. Un mécanicien d'Ypreville-Biville, canton de Valmont (Seine-Inférieure), M. Bénard, a imaginé un appareil secoueur pour la récolte de ces insectes, qu'il nomme à tort épuceronnière. Elle est destinée à prévenir la destruction des siliques de Colza altérées dans la fleur par les morsures des larves des Attises, devenant stériles, noueuses et difformes. Cette machine, destinée aux Colzas plantés à distance, en rangées latérales, ne peut s'employer pour les Crucifères oléagineuses basses, comme les Navettes, pour lesquelles on peut se servir de la machine Badoua, décrite à pro- pos du Colaspe des Luzernes. L'appareil Bénard doit exercer les se- cousses dans deux plans parallèles à la direction du mouvement et non plus dans un plan perpendiculaire. Un homme entre deux brancards ' pousse l'engin dans la raie entre deux sillons de colza. A l'extrémité opposée et antérieure de la machine se trouve la roue motrice, comme une roue de brouette. Au-dessus et de chaque côté de cet^e roue sont deux guides de fort fil de fer, légers, mais solidement attachés et con- tournés à angles arrondis en dehors , afin d'agir en même temps sur les colzas de deux rangées, qu'ils embrassent dans leur contour. Un pignon denté, concentrique à la roue motrice, transmet le mouvement circulaire de celle-ci, sm. moyen d'une chaîne articulée, à une poulie munie de six cames. Celles-ci secouent un montant vertical qui est en relation, au moyen d'une bascule, avec deux ressorts reliés à une barre horizontale qui occupe l'axe de l'appareil. Elle porte quatre bras courbes destinés à transmettre les secousses alternatives aux supports des gui- des. C'est donc une transformation de mouvement circulaire continu GIRARD. 51 802 COLÉOPTÈRES. — GHRYSOMÉLIENS. en rectiligne alterné. En outre, les supports des bouts des guides sont réunis par des barres hoizontales à deux bras, montant ou descendant dans des coulisses, de façon à régler, selon les colzas, la hauteur d'ac- tion et l'écartement des guides (1). Cet appareil secoueur agit sur les plantes sans chocs violents, de manière à ne pas les briser, mais assez fortement pour détacher des fleurs les insectes surpris, car tous ces petits êtres timides simulent la mort par instinct, et se laissent tomber sur le sol dès qu'ils sont inquiétés. Ils sont recueillis dans leur chute sur une trémie au fond de laquelle est un crible. La poulie à cames transmet aussi , par une bascule , une série de secousses à cette région inférieure de l'appareil, toujours grâce au mouvement générateur de la roue motrice. Les secousses ont pour objet d'empêcher les insectes de se cramponner aux parois de la trémie et de remonter ; ils arrivent alors, toujours contractés et simulant la mort, à deux entonnoirs disposés en dessous du crible et aboutissant par leurs tuyaux de descente dans une boîte fermée, où ils s'amassent et d'où on les retire pour les brûler. Cette boîte plate est vitrée en dessus dans son milieu. Il était en effet à craindre que, lors des arrêts de l'instrument, les insectes rassurés ne cherchassent à sortir et ne finissent par remonter au-dessus des tuyaux de descente. Or, ils voient la lumière à travers le vitrage de leur tombeau, et, trom- pés par ce faux orifice de salut, s'entassent avec acharnement sous le verre perfide, sans s'occuper des tuyaux obscurs, et attendent là paisi- blement la mort. Un appareil analogue a aussi été construit pour les Lins. M. Bé- nard m'a envoyé des insectes vivants recueillis sur les Colzas en fleur au moyen de son appareil. Outre plusieurs espèces d'Altises , ainsi {Phyllotreta) melœna, Illig., et Lepidii, Hoifmannsegg, il y avait un Gur- culionien, le Ceuthorhynchus assimilis, Paykull, et, dans les Silphiens, le Meligethes œneus, Fabr., qui dévore les anthères azotées. La machine de M. Bénard, manœuvrée au moyen d'un relais de deux hommes, peut nettoyer en neuf ou dix heures trois hectares de colza, en ramassant jusqu'à six litres d'insectes à l'heure. Il faut que le plant de colza soit motte, parfaitement disposé en lignes, ayant au moins 30 à 35 centi- mètres d'écartement. Il est indispensable de guetter au printemps la première apparition des Altises, et d'opérer au début, afin d'atteindre les insectes non fécondés avant la ponte. D'après les certificats que j'ai soys les yeux, on peut, en fonctionnant en temps opportun, sauver les trois quarts, ou au moins les deux tiers de la récolte. Dans certaines années, les ravages des Altises des Colzas sont immenses, et, en 1869, beaucoup de cultivateurs des environs d'Yvetot et de Rouen furent (1) Maurice Girard, Génie rural, etc. : Insectologie agricole. Paris, Donnaud, 3« année, 1869, p. 243 et planche. DESTRUCTION DES ALTISES. 803 obligés de labourer à nouveau des pièces entières de Colzas, où toutes les fleurs étaient devenues stériles. Une méthode toute différente consiste à écarter ou à détruire les Attises à leurs divers états par l'emploi de substances chimiques. Celles-ci doivent remplir les conditions essentielles qui suivent : 1° être d'un prix très-peu élevé, afin de pouvoir trouver usage dans une culture d'une certaine étendue ; 2" ne pas avoir d'action destructive sur les tissus végétaux, car elles causeraient alors plus de mal que les insectes ; 3° être inoffensives pour les personnes chargées de leur emploi, et ne pas laisser sur les récoltes destinées à l'alimentation de l'homme et des animaux des produits de nature toxique ; Zi°, enfin détruire l'insecte nuisible, ou du moins l'éloigner ou entraver singulièrement sa multi- plication. Les moyens chimiques sont incontestablement les plus effi- caces à priori contre les Aitises, c'est-à-dire contre des insectes spéciaux à certaines cultures, leur multiplication surabondante résultant de la grande agglomération des végétaux qui forment leur alimentation pré- férée, et étant hors de toute proportion avec la faible quantité d'insectes qui trouvent la mort par les façons données à la terre : le labour, le her- sage, le sarclage, etc. Les substances chimiques insecticides sont d'abord , d'une manière indirecte, les engrais chimiques, le sel marin, les sels ammoniacaux et surtout la chaux, qui n'agissent pas seulement en fournissant à la plante les prmcipes nécessaires à son développement, mais la débar- rassant aussi d'un bon nombre d'insectes. On a fréquemment employé contre les insectes le goudron de houille seul ou mélangé à d'autres matières. Les résultatsobtenuspar les agriculteurs ont été très-complexes. Cela tient à ce que le goudron de houille, mélange de substances va- riées, peut avoir des actions différentes et opposées, selon que tel ou tel produit y prédomine. Ainsi il produit des effets désastreux sur la vé- gétation s'il est trop riche en huile de houille et en acide phénique ; au contraire, il est très-peu actif ou même inactif, si, par une distillation prolongée, il a été presque entièrement transformé en brai, c'est-à-dire ne contient plus guère que du carbone. Le principe immédiat le plus avantageux qu'il renferme est la naphta- line, substance blanche, neutre, cristallisée, de formule C^^H^, retirée par distillation du goudron, sans aucune action sur les tissus et pou^ vant être impunément maniée ; enfin, point capital, elle ne coûte que 8 à 10 fr. les 100 kilogr. En 1863, M. Marsaux s'en était servi avec succès dans Seine-et-Oise pour détruire les Vers blancs par enfouissement dans le sol. De là M. E. Pelouze a eu l'idée d'essayer cette substance contre les ravages des Aitises (1). Les expériences, encore trop peu nombreu- ses, comme il le déclare lui-même, l'ont conduit à un résultat favo- (1) E. Pelouze, Sur la destruction des insectes nuisibles à l'agriculture {Soc. d'encouragement pour l'industrie nationale, séance du 22 novembre 1867). 80Zl COLÉOPTÈRES. — CHRYSOMÉLIENS. rable, mais dans un autre sens que celles de M. Marsaux. Un mé- lange intime, bien pelleté, de 50 kilogr. de naphtaline blanche, avec 500 kilogr. de sable Cn, fut jeté à la volée sur la moitié d'un champ de Rutabagas (1) déjà envahi par l'Altise. Les insectes ne furent pas détruits, mais émigrôrent sur la partie du champ sans naphtaline, et les plantes reprirent de la vigueur. Sur un autre champ des mômes plantes, le mélange fut projeté avec plus de soin sur la totalité, sauf une bande étroite et latérale. On ne trouva que très -peu d'insectes morts ; la partie principale du champ n'avait plus que des Attises comparative- ment peu nombreuses, et, sur les plantes accidentellement exemptes de naphtaline, il offrait l'aspect d'une végétation aussi saine que possible. Au contraire, la bande de Rutabagas non saupoudrée de naphtaline était abondamment couverte d'Altises, et les feuilles profondément mangées. La naphtaline pure, parfaitement inoffensive aux végétaux, avait donc agi, non en tuant les insectes, mais en les contrariant dans leurs habitudes et les forçant à chercher ailleurs leur nourriture. Nous devons maintenant passer en revue les genres principaux des Attises dans le sens général. AliTlCA, Geoffr. — Corps ovalaire ou oblong-ovalaire, plus ou moins convexe en dessus, plat en dessous. Tête enfoncée dans le corselet ; antennes de onze ar- ticles, filiformes, rapprochées à la base. Corselet à peu près aussi large que les élylres; ailes existantes ou rudimentaires. Cuisses postérieures plus ou moins renflées et propres au saut ; tarses insérés à l'extrémité de la jambe, à crochets dentés. Ce genre comprend de très-nombreuses espèces de petits Chrysomé- liens à couleurs soit métalliques, soit mates, mais vives et variées. Plusieurs espèces sont très-nuisibles par leur voracité et leur extrême multiplication. Elles ont frappé tout d'abord l'attention des jardiniers et des agriculteurs par leur faculté de sauter, ce qui leur vaut les noms vulgaires de Tiquets, Puces de jardin, Puces de terre, Pucerons, Puce- rottes, etc. Elles criblent les feuilles de milliers de petits trous, et nuisent ainsi fortement à la végétation. Les Attises aiment beaucoup les Cruci- fères et dévastent les champs de Colza et de Navette, dévorant surtout les organes reproducteurs des fleurs, ce qui fait avorter les siUques ou les rend noueuses, contournées, malades. Les Asperges en graine sont aussi ravagées. Dans les jardins, beaucoup de semis sont dévorés dès qu'ils se lèvent, et il est des jardins où les Attises rendent impossible d'élever sur couche les Giroflées, les Choux-fleurs, les Radis, sans qu'une grande partie soit anéantie par ces insectes. Elles attaquent aussi des plantes d'ornement, les Roses trémières, les Juliennes, la Corbeille- (1) Le Rutabaga est une race, à racine volumineuse, du Navet, Brassica Napus (Crucifères). ALTICA. 805> d'or [Alyssum saxatile), les Myosotis, les Résédas, les Œillets, etc. Les plantes aquatiques elles-mâmes, cultivées dans lesbassins, ne sont pas à l'abri de leur voracité. Les larves des Attises sont allongées, subcylindriques, atténuées à leurs deux extrémités, forme qui facilite le parcours dans les galeries du parenchyme des feuilles. Elles sont charnues, le plus souvent pâles ou d'une couleur jaune doré; les segments thoraciques portent des pattes formées de trois articles et d'un ongle terminal ; les autres segments offrent dessus et dessous deux rangées longitudinales de tu- bercules ou de plaques écailleuses qui sont munis d'un ou deux poils roides. La tête est ronde, brune, impressionnée ; les antennes sont co- niques et très-courtes, brunes, ainsi que les palpes et les mandibules; le dernier segment, fortement rebordé, offre en dessus un mamelon pseudopode, point d'appui pour la progression en avant. Ces larves ressemblent beaucoup à celles des Galéruques, mais ne vivent pas en société. Parfois elles vivent à découvert sur les feuilles, mais, ou elles attaquent les organes des fleurs, ou, le plus souvent, elles sont mineu- ses et dévorent le parenchyme dans des galeries contournées entre les deux épidermes, bien visibles quand ces épidermes sont séchés ; c'est ce qu'elles font dans leurs premiers âges, puis elles trouent les feuilles en entier et les criblent de points et de dentelures. Parfois elles se changent en nymphes dans les galeries des feuilles, mais le plus souvent se laissent tomber sur le sol et se nymphosent en terre. Les nymphes sont entièrement d'un jaune pâle , passant peu à peu au jaune d'ocre ; les yeux et les antennes brunissent peu à peu, devenant noirs chez les adultes ; la tôte, le corselet, l'abdomen présentent des tubercules poilus. L'état de nymphe dure d'habitude une vingtaine de jours ; du reste, la vie des larves et des nymphes s'accélère quand la température s'élève. C'est au printemps que les femelles s'accouplent ; elles pondent sous la face inférieure des feuilles des œufs très-petits, lisses, de forme ovale-allongée et jaunâtres. La plupart des espèces ont au moins deux générations par an. Une partie passe l'hiver sous les feuilles sèches ou sous les écorces, pour propager l'espèce au début du mois de mai, et bien plus tôt sous les bâches et les châssis, où les gé- nérations semblent se succéder sans interruption. Nous figurons une jambe et un tarse postérieurs du genre Altica (pi. lix, fig. 13). Examinons maintenant les principales espèces du genre Altica, Geoffr. M. L. Fairmaire y établit deux groupes. Dans le premier, le corselet présente en dessus, avant la base, une impression transversale plus ou moins marquée, parfois limitée par des sillons longitudinaux. Nous y trouvons le sous-genre Altica, Fondras, ou Graptodera, Chevr., ailé, à ponctuation fine et confuse, dont les larves ne sont pas mineuses, comme celles de la plupart des Attises, mais vivent librement à la sur- face des feuilles. La coloration des adultes est peu variée, et passe du bleu noir au bleu verdâtre, au verdâtre métallique et un peu doré. Le 806 COLÉOPTÈRES. — CHRYSOMÉLIENS. type est l'A. oleracea, Linn, de 3 à 3,5 millimètres, l'Altise bleue de Geoffroy, atténué en arrière, à élytres criblées de points plus ou moins profonds, bleu, ou vert, ou cuivré, brillant. Cette espèce est très-com- mune partout, toute l'année, et souvent très-nuisible, dans les potagers, sur les Haricots, les Choux, dans les champs sur les Luzernes, dans les bois sur les Coudriers, les jeunes Chênes, etc. Elle se trouve dans toute l'Europe et le Caucase. Les femelles pondent sur les feuilles des œufs ovales-allongés, d'un jaune ferrugineux. Il en sort des larves d'un jaune sale, avec des taches écailleuses plates et peu saillantes, d'un brun verdâtre, portant des poils ou soies allongées. Elles vivent environ vingt jours, et cette durée peut être augmentée ou diminuée, selon la température. Ces larves rongent la feuille à découvert, d'abord le pa- renchyme seulement d'un côté, puis, plus âgées, mangent toute la feuille à la façon des chenilles. D'après Foudras, elles s'enfoncent en terre et y deviennent nymphes, entièrement d'un jaune pâle, passant au jaune d'ocre. Une espèce voisine, l'A. ampelophaga, G.-Mén., d'un vert brillant, cause parfois des dégâts assez sérieux dans les Vignes du midi de la France. L'adulte éclôt en avril, au moment où la Vigne commence à pousser, et dépose ses œufs sur les jeunes feuilles, dans le cœur des bourgeons. Il en sort des larves étudiées par M. Guérin-Méneville. Elles sont noires, avec leurs plaques écailleuses presque noires, et ne portant que quelques poils courts. Elles rongent de préférence les feuilles basses des Vignes et les jeunes grappes. Arrivées à tout leur développement vers le milieu de juin, elles descendent au pied des Vignes, s'introduisent dans la terre et s'y nymphosent. Dans le même groupe se trouve le sous-genre Hermœophafja, Foudras, formé d'Altises oblongues, très-convexes, dont le corselet a les deux séries d'impressions. Elles comprennent en Europe trois espèces : une d'un roux brillant et deux bleues, ces dernières vivant exclusivement sur les diverses espèces de Mercuriales, ces plantes dioïques qui infes- tent tous les terrains incultes. Le sous-genre Crepidodera, Kutsch., a des espèces ovalaires dont le corselet offre les deux séries d'impres- sions, dont les antennes grossissent vers l'extrémité ; les espèces sont très-difficiles à classer. Il faut citer, dans ce groupe, A. helxines, de 3 à' Zi millimètres, d'un vert doré métallique très-brillant, très-commun sur les Saules, les Aulnes, etc. Le sous-genre Podagrica, Foudras, a le corps peu convexe, le corselet avec sillons longitudinaux, mais sans impression transverse, les ailes le plus souvent avortées. Toutes les es- pèces ont une coloration analogue, la tête et le corselet d'un roux tes- tacé, les élytres d'un bleu d'acier, ou un peu verdâtre, ou bronzé; toutes vivent sur des plantes de la famille des Malvacées (Mauves, Roses trémières, etc.) Il faut citer : A. Malvœ, de 3 millimètres, sur diverses Mauves ; A. fuscicornis, de 3 à Zi millimètres, à antennes rousses, sur les Roses trémières; A. fuscipes, Fabr., de 2 1/2 à 3 millimètres, noir, ALTICA. 807 àélytres bleues ou d'un bleu vert, striées, à base des antennes rousses; V Attise de la Mauve de Geoffroy, à pattes brunes, vivant principalement sur le Malva sijlvestris, toute l'année, d'Europe et d'Algérie. Les ailes sont souvent incomplètes ou nulles chez les femelles. La larve, étudiée par Foudras, a des mœurs différentes de celles des autres larves d' At- tises. Les anneaux sont jaunes, lisses et brillants, avec des poils roides ; on ne voit pas d'yeux. Elle ne mange que la nuit, vit environ un mois avant la nymphe, et reste pendant le jour cachée en terre ou sous les débris des végétaux dont elle se nourrit. Les œufs sont pondus par la femelle dans le terreau ; ils sont ovales, jaunes, beaucoup plus courts que ceux d'^. oleracea. La nymphe est jaune comme la larve, très-bos- suée et impressionnée sur les segments, le dernier terminé par deux appendices allongés, coniques, épineux, avec deux petits mamelons en dessous. C'est dans le sol qu'elles donnent éclosion à l'adulte, qui sort bien coloré, mais reste mou pendant plusieurs jours. Enfin nous cite- rons le sous-genre Balanomorpha, Foudras, à cause de son aspecf très- caractéristique, le corps étant presque parallèle et également arrondi aux deux extrémités ; les antennes se terminent par une petite massue allongée ; les élytres ont des stries ponctuées, régulières et entières, et recouvrent des ailes. A mentionner dans ce sous-genre, VA. rustica, de 2 à 3 millimètres, d'un noir bronzé bleuâtre ou verdâtre, avec la base des anteimes, les pattes et le bout des élytres roux, se trouvant sur les terrains secs, se prenant souvent, après la pluie, dans les ornières des chemins. Le second groupe des espèces du genre Altica offre le corselet sans impressions transversales. Un sous-genre important par quelques espèces très-nuisibles est celui des Phyllotreta, Foudras, à tète petite, à antennes grêles, plus longues que la moitié du corps, avec front à carène saillante entre elles, à élytres sans stries. Les espèces sont nom- breuses et paraissent vivre exclusivement sur les Crucifères ; certaines, par leur extrême multiplication, deviennent un fléau pour les potagers, pour les champs de Navette, etc. D'après la coloration, les espèces peu- vent se partager en deux séries. Les' unes sont noires, avec des bandes ou des taches jaunes. Ainsi A. Brassicœ, Fabr., n'atteignant pas 2 milli- mètres, l'Altise à points ronges de Geoffroy, d'un noir un peu bronzé et dont les élytres ont chacune une bande rousse souvent étranglée en deux taches, les jambes et les antennes rousses, très-commun sur les Choux cultivés, en France, en Allemagne, en Angleterre ; VA. nemorum^ Linn., de 2 à 2,5 millimètres, noir à reflet verdâtre, avec les jambes, tarses et base des antennes roux, les élytres elliptiques plus larges que le cor- selet, ayant chacune une large bande d'un jaune-soufre, l'Altise à bandes jaunes de Geoffroy. Cette espèce, de toute l'Europe, vivant toute l'année, est la plus commune sur les diverses Crucifères des potagers. Ses larves, à anneaux bordés de jaune verdâtre, avec tubercules bruns, vivent dans l'intérieur des feuilles de Crucifères, et les évident à la manière des 808 COLÉOPTÈRES. — CHRYSOMÉLIENS. chenilles de Microlépicloptères que Réaumur nomme Teignes mineuses de feuilles, ne laissant subsister que les deux épidermes. Elles se chan- gent en nymphes en terre, et demeurent dans cet état pendant une quinzaine de jours. Dès les premiers jours d'avril, et aussitôt éclos, l'A. nemorum se porte sur les Crucifères ; on le voit se promener sur les cotylédons ( et les premières feuilles | des Choux qu'il ronge : les entailles qu'on remarque sur ces feuilles sont toujours l'œuvre de l'adulte. D'autres Phyllotreta ont les élytres unicolores, noires, bleues, vertes, avec ou sans reflet cuivreux. Les Crucifères champêtres, notamment les Colzas du nord de la France et de la Normandie, sont souvent rava- gées par l'yl. Lepidii, Hoffmannsegg, à corps oblong, subdéprimé, entiô-, rement d'un vert brillant, parfois bronzé, parfois à reflet bleuâtre, à an- tennes et pattes noires, de 2 millim. environ, avec la variété nigripes, de toute l'Europe et du Caucase. Les Crucifères de France, d'Espagne, d'Angleterre, souffrent aussi beaucoup de l'A. melœna, de toute l'Eu- rope, et d'une autre espèce noire, A. atra, im peu plus grand, très-fré- quent aux environs de Paris sur les Choux, les Radis, etc. EiOUfGITARStTS, Latr. — Antennes longues et grêles jusqu'au bout; tête assez saillante. Élytres à points confus, recouvrant presque toujours des ailes. Pattes postérieures allongées, avec cuisses très-fortes, à profond sillon pour recevoir la jambe, celle-ci longue et creusée d'un sillon où se loge le tarse inséré à l'ex- trémité de la jambe ; tarse à premier article très- long. Les Longitarses sont des Alticides très-sauteurs, comme l'indique la configuration des pattes postérieures. Les antennes sont plus longues que la moitié du corps, et parfois presque aussi longues que lui chez les mâles. Les espèces de ce genre sont nombreuses et difficiles à classer, à cause de leur ponctuation et de leur coloration très-variable, quoique de nuances peu variées. On trouve sur le Bouillon-blanc le L. Verbasci, de 3 à 3,5 millimètres, très-convexe, d'an fauve pâle brillant, ayant parfois les élytres bordées de brun, et sur la Vipérine, le L. Echit, de même taille, d'un bleu d'acier variant au brun bronzé, avec base des antennes et jambes fauves. Nous figurons le L. dorsalis, Fabr., bordé de jaune, de France, d'Allemagne, d'Espagne et d'Algérie (pi. Lix,fig. 10; 10 a, jambe et tarse postérieurs). SPmBRODERllA^, Steph. — Corps presque hémisphérique, très-convexe. Élytres arrondies sur les côtés et au bout ; des ailes. Cuisses postérieures courtes, ren- flées ; premier article de tous les tarses dilaté chez les mâles. Ces insectes sont facilement reconnaissables à leur forme semi- globuleuse, à leur corps lisse, à leur couleur uniforme, d'un rouge- brique brillant. Les jambes postérieures ne sont pas sillonnées, et les SPH^RODERMA, PLECTROSCELIS, PSYLLIODES. 809 tarses ne peuvent se renverser sur la jambe. Aussi ces espèces sautent moins bien que celles des autres Alticides. Elles paraissent vivre spé- cialement sur les Chardons. — E\. : S. tastaceum, de 3 millimùtres, fauve, à yeux noirs, l'Altise fauve sans stries de Geoffroy, PI.ErTRO§>rKi.lS, Redtenb. — Corps ovalaireou ovale-oblong. Élytres à stries ponctuées ; presque toujours des ailes. Les deux premiers segments de l'abdomen soudés. Cuisses postérieures grandes et larges, fortement creusées en dedans pour recevoir les jambes, celles-ci creusées d'un profond sillon bordé de cils serrés; tarses à premier article de longueur normale. ■ Les Plectroscelis ont chez les mâles le premier article des tarses dilaté, très-large et épais ; les tarses postérieurs ne peuvent entrer complètement dans le sillon de la jambe, et forment avec elle un angle plus ou moins aigu. Le P. chlorophana, de 3 millimètres, un peu allongé, d'un vert métallique brillant, parfois bleucltre ou doré, avec les appendices roux en partie, très-ponctué, se trouve dans les endroits arides, sur les Gra- minées. Les insectes de ce genre vivent sur des plantes très-variées, • mais généralement assez basses ; ils sont plus nombreux en espèces dans les contrées méridionales de l'Europe, de même que les PsyUiodes qui vont suivre. PSlfI.I.IODE:§i^ Latr. (apparence de Puce.) — Corps ovalaire ou elliptique, souvent atténué en arrière. Antennes de dix articles un peu comprimés, s'élar- gissant et grossissant vers l'extrémité. Élytres à stries ponctuées régulières ; presque toujours des ailes. Cuisses postérieures très-grosses et très-canaliculées ; jambes postérieures sillonnées pour recevoir le tarse inséré avant leur extrémité. L'insertion du tarse postérieur sur le côté de lajambe (pi. ux, fig. IZi, jambe et tarse postérieurs d'un PsyUiodes) , dont le bout se prolonge en- suite en une sorte de cuillère étroite, à bords denticulés, et le nombre des articles des antennes, qui n'est plus de onze, comme d'habitude, dis- tinguent complètement ce genre parmi les autres Alticides. Les Psyl- i/odes vivent sur des plaates très-variées, mais surtout sur les Solanées, les Carduacées et les Crucifères. Dans le nord de la France, les Colzas ont parfois à souffrir beaucoup des P. chrysocephala, de 3 millimètres, elliptique, très-convexe, d'un vert bronzé brillant, à appendices roux en partie, et P. nigricollis, de même taille, noir faiblement bronzé, à pattes et élytres rousses. Sur les Radis, les Navets des jardins, on trouve dans toute l'Europe le P. Napi, GylL, avec sa variété Rapœ, Redtenb., plus méridionale, de 2 à 3 millimètres de long, d'un bleu foncé brillant, ou bleu verdûtre, ou plus rarement v£rt bronzé ou cui- vreux, avec la base des antennes et les pattes d'un jaune testacé. Les deux sexes ont des ailes. L'espèce fréquente encore divers Brassica et 810 COLÉOPTÈRES. — ÊROTYLIENS. Sinapis; les plus grands individus sont des prairies marécageuses et des lieux ombragés. Les derniers genres d'Alticides ne méritent de notre part qu'une mention, car leurs espèces vivent dans les bois et ne sont pas nuisibles. LesApteropoda, Redtenb., sont oviformes, très-convexes, subglobuleux. Ils manquent d'ailes, et ont la tête très-inclinée en dessous et à peine visible en dessus ; leur prosternum est élargi et arrondi en sorte de men- tonnière. Les cuisses postérieures sont épaisses et canaliculécs, les jambes dentelées comme chez les Psylliodes. Ces insectes sont tous d'un vert bronzé plus ou moins brillant, vivent dans les localités un peu humides, dans les bois sombres, ce qui est en rapport avec leurs yeux grands et convexes. Il est des Alticides qui habitent au milieu des Mousses, surtout dans les régions fraîches des pays montagneux : tels sont les Hypnophila, Foudras, à corps subglobuleux, à gros yeux, à abdomen très-convexe, comme le genre précédent, mais sans mentonnière prosternale, et à cuisses postérieures moins fortes, et le genre Mniophila, Steph., à corps globuleux, tête cachée en dessous, antennes ayant leurs trois derniers articles épaissis et formant une massue oblongue. Une espèce noire, à pattes et antennes fauves, de très-petite taille, un millimètre, le M. Mmcorum, Hoffmannsegg, a l'aspect d'un Agathidium. Tribu des érotyi^iems. Les limites exactes de la tribu des Érotyliens sont difficiles à préciser, comme cela n'arrive que trop souvent en histoire naturelle. Nous sui- vrons l'exemple de M. E. Blanchard, en y plaçant deux groupes dont la plupart des auteurs font des familles séparées, les Endomychides et les Érotylides. Ce sont surtout les analogies complètes de mœurs qui auto- risent cette réunion. Tous ces insectes vivent en effet de ces végétaux très-azotés qui sont une espèce de nourriture animale, les Agarics, les Bolets, les Lycoperdon, etc., et ces productions fongueuses variées qui envahissent les écorces mortes ou malades. Les larves sont pourvues de pattes thoraciques fonctionnelles, le plus souvent blanchâtres, en raison d'une existence cachée à la lumière, et cyhndroïdes ; elles ont le môme régime que les adultes et se trouvent dans les Cryptogames. La place des Érotyliens n'est nullement celle que leur donnait La- treille à la suite des Chrysoméliens, et que nous conservons pour obéir à l'habitude de la plupart des entomologistes ; cela tenait à une influence exagérée du système tarsal. Il faut complètement mettre de côté cette considération, si l'on veut avoir des affinités naturelles pour les Érotyliens. Ils se lient à des Coléoptères carnassiei's, ou du moins vivant de détri- tus animahsés, comme les genres Mycetœa, Cryptophagus, etc., et l'on ENDOMYCHIDES. 811 peut les placer après les Colydiens et les Cucujicns. On terminera les groupes de ce type par les Coccinelllens, tribu qui offre pour presque tous ses genres des carnassiers de proie vivante. Au contraire, un groupe formé de Coléoptères phytophages les plus essentiellement tétramères qui existent comprendra les Curculioniens, les Cérambyciens, les Chry - soméliens. Les Érotyliens, comme nous les admettons, ne sont pas aussi étendus que dans la tribu de ce nom de M. E. Blanchard, qui y réunit d'autres types, ainsi les Ips, les Trogosita, les Monotoma, etc., que nous ran- geons dans la tribu des Colydiens. Les Érotyliens comptent peu de représentants en Europe, mais beaucoup de leurs genres^ dans les Erotyles proprement dits, sont de la région médiane du double conti- nent américain. Voici les caractères généraux : Corps le plus habituellement oblong, ovale ou elliptique, plus rarement allongé et subparallèle, ou au con- traire subhémisphérique. Tète petite, enfoncée dans le corselet, ré- trécie en avant en museau court et tronqué. Antennes de onze articles, non rétractiles, les trois derniers en massue. Mandibules courtes et fortes ; mâchoires à deux lobes ; palpes maxillaires et labiaux de quatre et trois articles. Écusson visible. Élytres recouvrant tout l'abdomen; presque toujours des ailes. Abdomen de cinq segments en dessous. Pattes de longueur variable. Tarses ayant en dessous des poils ou des brosses, offrant trois, quatre ou cinq articles apparents, terminés par des crochets simples. Outre les ouvrages généraux, on peut consulter pour la tribu des Érotyliens {pro parte) la Monographie des Érotyliens de Lacordaire, (Roret, Paris, 18Z|2), comprenant les espèces de tous pays, et un travail de M. Bedel {Abeille, 1868) sur les Érotylides européens. L — ENDOMYCHIDES. Caractères spéciaux : Dernier article des palpes maxillaires oblong ou ovoïde. Corselet à côtés minces et un peu aplanis, presque aussi large en avant qu'en arrière, avec deux sillons très-marqués en arriéré, ce qui explique le nom de Sulcicolles donné à ces insectes par certains auteurs. Élytres non striées, souvent atténuées en arrière. Pattes grandes, à cuisses sans sillon interne ; tarses de trois articles, le troi- sième ayant à sa base un très-petit nodule peu distinct. Corps oblong. Les larves connues ont la tête subarrondie et aplatie, les yeux petits, des antennes courtes, coniques et rétractiles, de trois ou quatre articles. Les mandibules sont multidentées et cornées à leur extrémité. Le corps est mou, oblong, formé de douze anneaux, dont les trois premiers, plus développés, portent des pattes assez allongées, ayant un ongle court. Sauf chez les Endomychus, où les larves vivent moins cachées, elles ont 812 COLÉOPTÈRES. — ÉROTYLIENS. des couleurs d'un blanc terne et livide. Les n^Tuphes ont le corps sou- vent muni d'épines courtes et presque membraneuses. Ces Insectes à leurs premiers états se trouvent, les uns emprisonnés dans les Lycoperdon épars sur le sol, les autres cachés dans les plis des Agarics ou dans l'intérieur des Bolets implantés en parasites sur les troncs malades ou morts des Bouleaux, des Peupliers, des Saules ou des Sapins ; enfin plusieurs se réfugient sous les écorces de divers arbres, trouvant leur nourriture dans les productions fongueuses qui y végè- tent. Malgré la vie retirée de ces larves, des Carabiques savent les at- teindre dans leurs retraites pour les dévorer, et des Ichneumoniens pour déposer leurs œufs dans leur corps. Les adultes sont tantôt bruns, tantôt d'un fauve mêlé de jaune et de rouge ; parfois ils ont des couleurs plus vives, comme du corail obscurci ou même de l'écarlate. Les uns ont des taches ou gouttes noires symé- triquement répétées (les Endomychus), d'autres une ceinture {Lycoper- dina succincta) ou une croix noire {Mycetina cruciata). Dans le jour, on les trouve sur les productions cryptogamiques où ont vécu leurs larves, et ils ne s'envolent pas et se cachent souvent ; le soir, ils prennent leur essor, k la recherche de la nourriture. Ils aiment la fraîcheur des forêts, et sont surtout des régions froides ou tempérées et des montagnes. Leur rôle harmonique est de détruire les végétaux parasites, dans lesquels les femelles vont de'poser leurs œufs. Peut-être en outre, suppose M. Mulsant, par une harmonie contraire, ces insectes contribuent à transporter et à disséminer les imperceptibles spores des Cryptogames dont ils sont saupoudrés. Les anciens auteurs, qui du reste connaissaient à peine d'Endomy- chides, les rangeaient parmi les Chrysoméliens, soit dans les Chryso- mela, soit avec les Galeruca. C'est Helwig, cité par Panzer, qui créa le genre Endomychus. Il comprenait d'abord tous ces insectes. C. Duméril n'admet que ce genre unique dans ses Coléoptères oHgomérés ou pauci- tarses. Latreille, après avoir placé les Endomychides dans les Cocci- nelliens, y établit plusieurs genres, et en fit ensuite la famille des Fon- ' gicoles, nom qui ne peut être conservé comme tous ceux qui désignent un régime, les mœurs des insectes étant trop variées pour que les types les plus divers ne soient pas réunis au point de vue de leur alimen- tation. La sous-tribu actuelle ne renferme que peu de genres. GENRES PRINCIPAUX. ElintORPHIJS^ Weber. — Antennes longues, de onze articles, trois très-allongés, neuf à onze dilatés en large massue comprimée. Élytres relevées au milieu en carène. Cuisses renflées à la jointure tlbiale ; jambes arquées. Ces insectes, qu'on regarde comme .fongicoles, sont exotiques, du continent indien et des îles qui s'y rattachent. Ce sont les plus grands ENDOMYCHIDES. — EUMORPHUS, DAPSA, ENDOMYCHUS. 815 Eiidomyques, curieux par le relief de leurs élytres eu profil triangu- laire, avec un rebord plan chez la plupart des espèces. Ils ont en général un fond sombre relevé par des taches brillantes. Nous représentons l'E. hamatus, G.-Mén., de Java(pl. lx, fig. 7; 7 a, antenne grossie). Cetinsecte est d'un noir terne ; les élytres portent chacune trois tubercules lisses et rouges, une forte carène tranchante à l'épaule, une autre sur le tu- bercule rouge du milieu, celle-ci oblique et terminée en arrière par une pointe en crochet. Des formes tranchées sont l'apanage des Eumor- phus. Les deux espèces les plus anciennement connues sont 1'^. immar- ginatus, Fabr., de Sumatra, à corps noir, à élytres noires, non bordées, ayant chacune deux taches jaunes, et YE. marginatus, Fabr., de la Nou- velle-Calédonie, un peu plus grand que le précédent, noir, à élytres violettes, bordées chacune avec deux points jaunes. DAPi^A, Latr. — Corps oblong, pubescent, convexe. Antennes assez grêles, avec massue allongée, peu marquée. Corselet plus étroit que les élytres, celles-ci ovales - oblongues , obtusément arrondies à l'extrémité. Pattes assez fortes, à cuisses presque claviformes. Nous figurons une espèce de ce genre, le D. denticollis, Germ. (pi. lx, fig. 8 ; 8 a, patte antérieure du mâle), d'Allemagne. Elle est fauve, avec macules noires au bout des élytres. On la trouve surtout en Hongrie, sous les écorces des Bouleaux. Le corselet est muni de chaque côté d'une dent arquée, ce qui la distingue d'une autre espèce, D. trimaculata, Motschoulsky, à corselet inerme, assez commune dans le Midi de la France, existant aussi dans l'Allemagne, la Russie méridionale et le Caucase. t:i!KDOAlA'€Hi:<^, Panzer.— Corps ovalaire, assez convexe. Antennes terminées par une massue oblongue et comprimée de trois articles. Corselet trapézoïdal, rétréci en avant, plus étroit que les élytres, celles-ci ovalaires, arrondies sépa- rément à l'extrémité, finement marginées. Jambes inermes ; tarses à pénultième article grand, subcordiforme, le dernier le plus long, terminé par deux crochets grands et simples. Ces insectes ont le corps orné de brillantes couleurs, où le noir tranche sur le rouge ou le fauve vif. Le type est l'^. coccineus, Panzer, de l'Europe et du Caucase. On le voit surtout dans les parties froides. Il est assez rare ; mais quand on rencontre quelque Bolet ligneux hanté par cette espèce, on en prend d'ordinaire un assez grand nombre d'individus. C. Duméril dit qu'il le trouvait communément en famille sous les écorces et au pied des Bouleaux, dans la foret de Saint-Germain, der- rière les Loges ; je crois qu'on le chercherait vainement aujourd'hui dans cet endroit. Ce Coléoptère est d'un beau rouge vermiUon, avec une tache noire sur le corselet, et deux autres noires sur les élytres. S\U COLÉOPTÈRES. — ÉROTYIJENS. La larve, décrite par MM. Curtis et Westwood, rappelle par ses anneaux larges et aplatis celles des Silplies et des Lampyres. Elle est d'un brun rougeàtre, à tète petite, inclinée, avec les antennes courtes et filiformes. Les anneaux de l'abdomen sont terminés latéralement de chaque côté par un appendice arque en arrière, et sont munis de taches jaunes sur les bords, ce qui rappelle les larves de Coccinelles. La nymphe est d'un jaune clair et saupoudrée d'une poussière farineuse. Nous représen- tons (pi. Lx, fig. 9), une espèce exotique, de Mexico, VE. tihialis, Chevr. ou circumdatus du Catalogue deDejean, d'un jaune fauve, avec grandes taches noires sur le corselet et les élytres, et appendices mi-partie jaunes et noirs. IlJ3- *¥' '■^,*iri r ^■ . .--^