Digitized by the Internet Archive in 2011 witii funding from University of Toronto littp://www.arcliive.org/details/lesmerveillesdesOOmill BIBLIOTHÈQUE DES MERVEILLES PLliLlÉE SOLS LA DinECTION DE M. EDOUARD CHARTON LES MERVEILLES DES FLEUVES lîT DES RUrSSlîAIIX ,.A1-.IS. - IMl' HMON KAÇON ET COMP.. I.fE L EUFLI'.TIl, I. BIBLIOTHÈQUE DES MERVEILLES LES MERVEILLES DES FLEUVES ET DES RUISSEAUX C. MILLET ANCIEN ELKVE DE L ECOLE FOnESTIERE, INSPECTEUR DES I-ORKTS, VICE-PRÉSIDENT DE SECTION A LA SOCIÉTÉ d'aCCLIMATATION OUVRAGE ILLUSTRE DE 6C V I G K E T T E S PAR A. M ES IV EL PARIS LIBRAIRIE HACHETTE ET C": BOULEVARD SAINT-GERMAIN, T,i Droits (je propriélé cl de traduction réservés ' iii Ottawa \ BIBLIOTHECA niur (56 ÏNTHODUCTION Quand on examine le «^lobe terrestre, on y voit tout d'abord deux choses : la terre et Veau\ et quand on voit la terre sillonnée dans tons les sens par une infinité de cours d'eau, on est naturellement conduit à rechercher l'origine de ces cours d'eau et le rôle qu'ils jouent dans l'harmonie générale de notre globe; car tout est hai-- moin"e dans l'œuvre de Dieu. i iii:^ini p-u-. Les fleuves de la France. LES MERVEILLES DES FLEUVES ET DES RUISSEAUX " LA PLUIE Par-dessus les conliiienls et les mers, la terre est en- veloppée d'un manteau unilornie et léger qui la préserve du froid, et dans l'épaisseur duquel s'accomplissent des phénomènes du plus haut intérêt. Ce manteau c'est l'ai - mosphére, qui est formée par un fluide parfaitement transparent, l'air. L'ail' contient toujours de l'eau ; et ce point doit être étudié avec quelques détails, car c'est la cause de loys les météores aqueux. Quand on place de l'eau dans une assiette, à l'air libre, on la voit diminuer et disparaître peu à peu, parce qu'elle se change en vapeur, en un gaz aussi incolore et 4 I,1.S MKKVKII,LI.S [)KS FLKHVKS Kl DKS HUÏSSKAI'X. •aussi lraii>|i;ii<'iil fjii.' I iiii ;mrjm'l cll.'sn ïmAIo sans (in'oii cil soii[)(;onii(' l.i pr^soncf* ; cl (•orrmic (('Ile Iraiisfoiina- tion so |)i<)(liiil (•(HiliiiiM'Ilciii.'iit à la sinraciMlc toutes les imv^, (le tous les lacs, de tous les cours d'eau, et de tous les sols ((uaud ils sont couverts d'eau ou qu ils ont 4''té mouillés par la pluie, il eu résulte que charpie lilre d'air aluios[)hérique coiilieiil un poids déterminé de v;:- pcur d'eau. Ce poids varie suivant les cas, mais ne peut jamais dépasser une limite fixe ; cette limite e-t de 5, 9, 18, 35, 58 centigrammes à des températures de 0", 10", "20^ 30«, 40\ Ces nombres font voir que l'aii- peut receler beaucoui» ûe vapeur à 40°, très-peu à 0", par conséquent beau- coup vers l'équateur, trés-peu vers les pôles ou eu liiver. Onand il contient tout ce qu'il peut recevoir de vapeur d'eau, ou dit qu'il est saturé ; généralement il ne l'est pas. S'il est très-loin du point de saturation, on dit qu'il est sec; s'il en est Irés-près, on dit qu'il est humide. H résulte de là qu'un air salure à 0'^ deviendra sec si on le chauffe jusqu'à 40% tandis qu'en refroidissant jusqu'à O'^ un air qui est sec à 40% cet air pourra devenir très- humide, il pourra même être saturé. Si on le refroidit davantage, il sera plus que saturé ; alors une partie de sa vapeur redeviendra de leau à l'état liquide ; c'est là l'origine de tous les météores aqueux. Quand l'herbe des champs se refroidit, elle condense la vapeur à sa surface en gouttelettes de rosée; si c'est l'air d'une vallée, l'eau se réunit en vésicules trop pe- tites pour tomber, mais assez nombreuses pour obscur- dr l'air : c'est un brouillard. Si le phénomène se produit LA PLUIE. 5 dans los couches élevées de ralniosphére, le brouillard, sans changer de nature, preiul un autre nom, celui de nuage. linfin, quand hi condensation s'exagère, les gout- telettes grossissent, et peu à peu le brouillard se change en pluie: Kn comprimant l'air, ou le diminue en volume et on |)roduil le même effet qu'en le refroidissant. Prenons connne exemple deux litres d'air à 20", leuq)ératnre à laquelle chacun de ces litres contient 15 centigrammes de vapeur, ils ne seront point saturés; mais si, en les comprimant, ou les réduit à un litre, ce litre contiendra la totalité de la vapeur ou 50 centigrammes, elauraalors^ dépassé la saturation. En résumé, la compression et le froid agissant en- semble ou séparément amèneront la pluie ; le réchauffe- ment et la dilatation produiront l'effet contraire. Quand l'air se refroidit tout en se dilatant, comme cela arrive quand il s'élève, il é})rouve deux actions op- posées, et suivant que l'une ou l'autre domine, on voit la pluie tomber ou le brouillard se dissiper. Une des causes les plus fréquentes de pluie est le mé- lange de deux vents, l'uri chaud, l'autre froid, qui ne -sont saturés ni l'un ni l'autre, mais qui tous deux sont près de l'être. Le plus chaud se refroidit et par là devient sursaturé ; le plus froid s'échauffe et se desséche ; mais- le premier effet l'emporte toujours sur le second, ce qui amène la pluie. Prenons un exemple : l'un des vents est à 0** et con- tient 4 centigrammes de vapeur, l'autre esta iO°et con- tient 50 centigrammes d'eau. Mêlés en volumes égaux, ils premient une température de 20° et reiderment une- moyenne de 27 centigranunes de vapeur par litre. Or, à 0 IJ.S MIHVI.II I.KS Itl.s 1 1,1 rVI.S I.I DKS ItLISSK.M.X. cotte t('iiij)(''i;iliir(', ils ii'f ii )miiv(miI receler (jiie |X: il v eu a 0 (le hop; eiiaqiK! lilre (Je cet air versera «loue 0 eentif^rnnirncs ou 1)0 inillirrKJtres cubes (Je [jluie. Voilà toute la,j)liysi((ue de ce graucJ [)liéuoui(M;e. La questiou mc'eauifpH; est plus complexe. En f,^t'înéral, c'est le niouvfiueiit (l<,' l'aii- rpii aiurue la pluie ou le beau temps. Si elle t'tait immobile et comme attaclhiC au sol, l'at- luosplRîi'c serait toujours saturée sur la mei', où il pleu- vrait à cliaque refroidissement; elle serait, au contraire, toujours stîche au-dessus des continents, qui ignoreraient la pluie. Le vent fait le métier de j^orteur (Veau; il va la puiser aux contrées chaudes pour la porter sur les pays tempé- rés; et, quand il l'a distribuée, il recommence son voyage. Pour savoir les lois de la pluie, il faut découvrir celles des grands déplacements de l'air; ces deux questions sont connexes, elles ont été parfaitement étudiées et ex- posées par MM. Maury, Piddington, Ijove, l'amiral Fitz- Roy, Marié Davy, Jamin, etc. Je ne puis que prier le lecteur qui voudrait appro- fondir ces questions, de consulter les livres et les mé- moires qui ont été publiés par ces savants et qui ren- ferment des documents d'un grand intérêt, mais dont l'exposé m'entraînerait bien au delà des limites de mon livre. Je dois me borner à dire ici ce que devient la pluie en tombant sur le sol. L\ PLUIK. ORIGINE DES COURS O'EAU Quand la pluie est tombée sur la terre, une partie se vaporise spontanément et retourne dans l'atmosphère ; ime autre partie est absorbée par lés végétaux et les ani- maux; le reste, enfin, est absorbé par le sol. / L'eau qui pénétre dans le sol iorme, d'une part, les nappes sonlerrauies capables de produire les eaux ascen- dantes, et, d'autre part, les sources. I La pluie fait les sources ; Les sources font les ruisseaux; Les ruisseaux font les rivières et les lleuves. Dans les ruisseaux, les rivières et les lleuves, le vo- lume d'eau, depuis la source la plus reculée, est aug- menté d'une manière continue par les affluents qu'ils re- çoivent ou par les sources qui existent dans leur lit, el, d'une manière temporaire, par une portion des pluies qui tombent dans leur bassin et qui s'écoulent à la sur- face du sol. C'est donc, par abstraction pure, qu'on arrrive à con- sidérer un fleuve comme un être isolé. Car, il n'est en réalité que l'ensemble des rivières et des ruisseaux accou- rus de toutes les extrémités du bassin ; il réunit les milliers de fdels d'eau échappés aux glaces ou sortis des veines de la terre; il se compose des gouttelettes innom- brables qui suintent de la terre saturée de pluie ou cou- verte de neige. On peut donc dire que les cours d'eau qui répandent la vie sur tout le globe, et sans lesquels les continents se- raient des espaces arides et complètement inhabitables, ne s I.KS MFHVKII.I.IS DKS FI.KIVKS KT DLS I'.I;ISSKM;X. soiil ;mlrt" cliosc (jn'im syslèrno de veinoN <'t de voinuU's rupi)()il;iiil ;)ii ^^rand réservoir océaiiiqiK' les eaux d»'- Source de rivière. versées sur le sol par le système artériel des nuages ou des pluies. [A PLUIE. 0 On peut se faire une idée de la relation qui existe en- tre la pluie tombée et le débit des coins d'eau, par Texemple suivant : Le bassin de la Seine, en anionl de Paris, a 45,270 ki- lomètres carrés de superficie. 11 tombe annuellement, dans ce bassin, une couche d'eau d(^ 50 centimètres de hauteur, ce qui donne un volume total de 22,1)55 mil- lions de mètres cubes. Le vohune d'eiu, débité annuel- lement par la Seine au pont Royal, étant de 8,012 mil- lions de métrés cubes, n'est environ que le tiers de celui qui tombe en pluie dans le bassin supérieur. MATIÈRES PRECIEUSES CHARRIEES PAR LES EAUX Dans diverses contrées, ïor, le platine et \e diamant se trouvent au milieu des terrains d'alluvion, ou des sables charriés par les cours d'eau. C'est surtout dans les alluvions de l'Amérique, de l'xVsie centrale et de l'Océanie qu'on rencontre une grande quantité d'or en paillettes, en grains ou en pépites. Presque toutes les rivières de l'Equateur, à l'est et à l'ouest de la Cordiliéie, charrient de l'or. C'est à la pré- sence de ce métal, al)on(lant sui'tout dans la partie de l'est, que Léqnateura dùd'éti'e 'dp\)c\è p'dv \cs cuiiquinta- dores le pays de l'or, el pais dorado, ou plus simplement el dorado dont les historiens français et anglais ont fait un seul mot. L'abondance de l'or et de l'argent dans l'équaleur, aux premiers jours de la conquête, faisait dire aux cun- 10 i.i;s Mi;i;vi:ii,i,i,s i»i;s f[i:i:vks kt dks F'.i;(ssf:ai\. ijuishidorcs (jiic, (l;iiis n\ p.'iys^ l(;.s ni(H.'iiiX j)ivci<'UX .><■ (lomiaiciil l;i uniii et, iiiT'hiioit leurs voix pour excitei' jusqu'à l;i (olic l;i convoitisfi des hommes. Dans l.i rc'piihliqiK; ori<;nlalc de l"l;ru*^uay, les cours d'eau qui desceiuleut de In Cuchilla (frande chanieut fous de l'or en poudre, qui donne lieu à des lavaj^'es sulïisamment rémunérateurs. En Italie, l'Arno, leTessin, le Pô, leSerio, etc., char- rient des sables aurifères que l'on recueille, à la suite des crues, sur les rives ; les paillettes d'oi" se trient par le lavage. En France, on trouve aussi plusieurs cours d'eau dont les sal)les sont légèrement aurilércs. L'Ariége, par exemple, qui prend sa source au pic de Framiquet, dans la chaîne des Pyrénées, roule un peu d'or, d'où son nom iVAurigera, et par corruption celui d'Ariége. Au Brésil et aux Indes orientales, le diamant existe, dans les terrains de transport et dans les sables, soit en grains irrégulièrement arrondis, soit en cristaux. On lave les sables diamantifères pour entraîner la plus grande partie des matières terreuses ; on étend ensuite le résidu sur une aire bien battue pour y faire la recherche des diamants. . Le fleuve Behnonte, qu'on nomme aussi Rio Jiquitin- honha, est célèbre par la quantité de diamants qu'il ren- ferme, mais le diamant du Brésil est moins estimé que celui des Indes. On le trouve généralement dans le lit des lleuves et même des petits cours d'eau, tels que le ruisseau ^Z^(7///e; il y en a de teintes diverses; et ceux qu'on désigne sous le nom de diamants noirs étaient au- trefois très-recherchés des Hollandais. Quant au platine^ on le trouve en grains irréguliers I.\ PLUIE. 15 OU pépites dans les sables et les terrains d'alluvion qui renferment également l'or et le diamant. Ces dépôts de métaux précieux ou de diamant sont Lavasc îles salilcs aurifères. bien vite épuisés; et d'ailleurs, le lavage des sables au- rifères ou diamantifères constitue souvent un travail peu rémunérateur. Les cours d'eau charrient et déposent sous les pieds ii LKs M!:i'.vi<:ii,ii:s des n.KiivKs et i»i;> i'.iissealx. do riioiiimî, (liiiis loiil.'s l.'s coiitréos (Jn -lobe Mrs iii;i- lières bioii plus précieusos qii'- l'oi", I"' i)l;'tii>'' ''» '•"'>•'- manl; partout , ils indteiit à sa disposilioii des trùsois inépuisables. Nous verrous bientôt, en effet, b-s licbes^-cs immenses (pie les eaux du .Nil déversent, d.'|)uis un grand nombre de siècles, sur le sol de Tl^^ypte. Ces trésors inépuisables que cliarri.îut les eaux cou- rantes, ce sont les matières qu'elles tiennent en disso- lution ou en suspension, et que l'homme utilise p..u.- les irmjatiom, les cohnatarfc^ et les Umona n.i.i:vKs i;t dus ihisskma lion (le «aie (Mmlim^ n. se sornil jn.n.iH élevée .-.m |,oi„l OM elle s'éleva iiutiefois. (es canaux sont .lérivés de différents points du N,l sm lune cl l'autre de ses hncs, et ils portent les eaux .|o~- (lu'au bord du désert. De distance en distance, à partir de celte Imnle, cha- que canal .lirrii^'ation est barré par des dignes trans- versales (p.i coupent obliquen.cnt la vallée en s appuya,>l sur le lleuve. ,, , Les eaux que le canal conduit contre 1 une de ces digues s'élèvent jusqu'à ce qu'elles aientalleint le n.veau du Nil au point d'où elles ont été tirées. .\n,s, toul es- pace compris dans la vallée entre la pr.se d eau H la digue transversale forme , pendaul 1 inondation , un élan" plus ou moins étendu. Lorsque cet espace est suffisamment submerge, on ouvre la digue contre laquelle linondation s appuie; les eaux se déversent, après celle opération, dans le prolongement du canal an-dessous de celle digne; et elles conlinueraieiil de s'y écouler si, à une distance convenable, elles n'étaient pas arrêtées par nn second barrage contre lequel elles sont obligées de s élever de nouveau pour inonder l'espace renfermé entre cette digne et la première. Onolqnefois un canal d.n^e, im- mèdialemenl du Nil au-ilessous de celle-ci rend celle inondalion plus complète. . , j„ Ces digues transversales que Ion voil se succède, de distance en distance, en descendant le Nil. sont diri- gées ordinairement d'un village à 1 aïKre, et lorment une espèce de chaussée au moyen de laquelle ces vil- lages communiquent entre eux dans tontes les saisons de' l'année . parce ip.elle est assez élevée au-dessus 1J'in- cline brusquennent et présente une échancrure qui met la vallée du iMl eu communication avec un vaste bassin enveloppé d'une ceinture de hauteurs ; c'est le Faijoum, dépression profonde, à peu prés au niveau de la mer et à 16 métrés au-dessous des eaux moyennes du Nil. Pour que la récolte soit bonne, il faut que les inonda- lions du fleuve ne soient ni trop hautes ni trop basses; cette connaissance une fois acquise, le puissant pharaon eut l'idée de construire un immense réservoir afin de les rô<];ulariser. Ce réservoir fut établi dans la partie la plus élevée du Fayoum, à l'ouest de la gorge rocheuse d'illaoun, où passe une dérivation naturelle du Barh-Yousef, qui fut probablement, à une époque géologique antérieure, le principal courant du Ml. Une longue digue, dont on re- trouve encore quelques fragments, n'avait pas moins de r>0 métrés de large et de 9 mètres de haut. On a calculé que, pendant les cent jours de crue, le Barh-Yousef déversait, dans ce vaste réservoir ou lac, une quantité d'eau de 556 métrés cubes par seconde, et que la masse totale de l'eau enfermée, même en tenant compte de l'évaporalion, ne pouvait être moindre de 2 820 000000 de métrés cubes. Cette capacité était suffisante pour diminuer notable- ment les dangers des inondations élevées du Nil, et pour I.i:s IKRFGATIOKS. 21 rendre ensuite l'eau nécessaire à l'irrigalion de 180 00(» hectares. D'après le lénioigiinge d'Hérodote, l'excédant des eaux s'épanchait à l'ouest vers la syrte de Libye, c'est-à- dire qu'après avoir traversé le lac appelé aujourd'hui Birket-el-Keroun, il enij)hssait le lit d'un canal mainte- nant desséché qui portait les eaux du Nil dans les déserts de l'ouest. Ainsi, il y a quarante-cinq siècles, le lac Mœris, doni le niveau changeait incessamment selon les besoins de l'agriculture, était comme le cœur d'où la vie se répan- dait à flots pour nourrir le grand corps de l'Egypte jus- qu'à Memphis. Aujourd'hui l'œuvre est détruite. Il est probable que le limon des eaux, en se déposant, a commencé par en- lever à la longue au réservoir J)eaucoup de sa capacité et de son utilité, et que par suite on a négligé l'entre- tien des digues. Il en est résulté que, par une inon- dation extraordinairement forte, il s'est fait, à une époque très-imparfaitement connue, une rupture vers l'ouest du côté, où le sol du Fayoum a son niveau le plus bas. C'est là l'origine du lac actuel de Birket-el-Keroun, dont les eaux suffisent encore de nos jours à faire de la province entière une des contrées les plus fertiles et les plus florissantes de l'Egypte. Les eaux ne doivent couvrir le sol que pendant un cer- tain temps, afin que les travaux d'agriculture puissent se faire dans la saison convenable. Le dessèchement des terres s'opère nalurellemenl alors parla rupture des digues qui soutenaient les eaux: et c'est après avoir séjourné plus ou moins dans les es- "22 I.KS Mr.nVKII.I.KS liKS KI.MVKS KT iJhS HUISSEAfX. (x'm'Cs (le coiiip.Ji l.iiiieiits ou ùcIk-'Ioms (:OMi[>ri.s cuire l*'.^ di^Mios (îouséculivos, que lo supciflii (J«; I'iiiij:;ilioii va se perdre (l.ins les lacs et marécages qui servent d<' bornes à la partie septenlrionale du Delta. Cette description de l.i disposition respective des ca- naux (^t des digues d • TK^yple supérieure e\pliqu<* sufti- samnient (;oni:rient on peut ;>rroser une étendu»; pinson moins considérable de pays, suivant que la crue du Nil est plus ou moins forte. I.e même système d'ii-rigation est suivi dans la bas*?e Égypie. Les grands canaux dérivés des deux biancbesde Rosette et de Damiette alimentent à leur tour des dériva- tions secondaires, dont les eaux sont soutenues par des digues qui traversent la campagne dans tous les sens, en allant d'un village à l'autre; cbacun d'eux s'élève au- dessus de ces digues comme une espèce de monticule qu'accroissent chaque année les dépôts d'immondices et de décombres que les Égyptiens sont dans Tusiige d'ac- cumuler autour de leurs habitations. Toutefois, dans la basse Egypte en a dû, pour l'époque actuelle, modifier le système d'irrigation. Car les dépôts irréguliers des limons du Nil, en s'accumulant, avaient fini par changer les niveaux des terrains ; le temps et les révolutions avaient détruit l'admirable réseau des canaux et des digues. Au lieu de trois récoltes par an, on n'en o'.itenait plus qiinne seule. Une pareille situation, qui s'aggravait chaque jour, n'échappa pas à la haute sollicitude du vice-roi d'Egypte, i\Iéhémel-Aly, mort depuis quelques années. C'est à lui que revient l'honneur d'avoir rendu au pays son anti- que fertilité. LES IRRIGATIO.NS. 23 C'est lui qui eut riicureuse idée de l'aire tout l'arro- sage de la basse Egypte au moyeu d'un iuunense barrage situé à la pointe du Delta, prés du Caire. Ce \aste projet, dressé et exécuté par uu ingénieur français, est un des plus beaux exemples d'irrigation. A l'extrémité du Delta, sur les deux branches de Ro- sette et de Damiette, sont établis deux ponts écluses : le premier a ib'2 métrés de longueur et se compose de 59 arches ; le second en a 71 pour une longueur totale de o2!2 métrés. Ces arches sont ogivales et ont chacune 5 métri's d'ouverture. La surélévation des eaux, produite par le barrage, est en général de 5 métrés, mais elle peut aller jusqu'à 6'", 5 lorsque les circonstances l'exigent. Ce barrage, en faisant refluer les eaux jusqu'au Caire, permet de compléter le réseau navigable de l'Egypte et d'arroser prés de 100 000 heclares de la basse Egypte. L'arrosage de cette immense surface se fait au moyen de trois canaux, débouchant en amont du bàirage, et servant à la fois à l'irrigation et à la navigation. Le pre- mier se dirige vers la rive droite du Ail, le second au centre même du Delta et le troisième vers Alexandrie. Les deux premiers ont 100 mètres de largeur et le troi- sième 00 seulement. Leur tirant d'eau varie de l"',oà ô mètres. Trois récoltes par an au lieu d'unt^ la cultuie de la canne à sucre, de l'indigo et du cotonnier, telles sont les conséquences immédiates de l'œuvre de Méhémet-Aly. Son petit-fils, Ismaël-Pacha, n'a pas montré moins de sollicitude pour la question du Nil, qui est, en Egypte, une question vitale. ■ ■n i,i;s Mi;i;VK.ii.i,i;s kks ki.kivks et uks ruisstAix. l.;„|S(;r.,(.iivil sepmli.inMmraïu^t.m.M.M-iitfomii- .lal.le que los ocluscs ol les jetées fuient, su, ,,lus,cui~ points, rompues et emportées. i:.i Egypte unemou.lation a des conséquences liienautiemeiit},'raves, ILKLVKS KT I)K.S Itl 1>.>K\< \. La (l»''(:oiiv(M'k! (I(; ce ifioiiuiiumiI flfvnit, en cllH, coii- l)l.> 1 LI-i;VKS I.T 1)1 s [;i:iSSKAL\. sôchoichbc; It's pliisbiisf's, ;ni cmlrMir*', rcroivcnt colles ,,„i ,l,.Minii(l('iil plus (ri)iii.ii(lil''. Des nileiiucs ailin- (•iclles, aliiiHMilùcs i);ir les cnux |)luvial(>s, perinellenl (|'ol)l(>nir,àpeu (le Irais, 1.; mo.l.; diiiTOsagc le plus par- lait : après av.iir liiiriiccté les eiiltiiios sijp«'ricijres, l'eau (lescoiid, p.ir (l<'s «oiidiiils iiigénieuseinonl ména- gés, sur les cullmes intérieures, qui profilent ainsi, non- seulement (!<' la pluie reçue directement, mais encore de l'eau superllue des hauteurs et. des matières entraînées. Grâce à de nombreuses plantations laites sur les crêtes des terrasses, les collines, au lieu de pentes abruptes et de flancs décharnés, présentent à l'œil le merveilleux spectacle d'un amphithéâtre de fruits et de moissons, agréablement coupé par des lignes de verdure. IRRIGATIONS DANS L INOE Dans l'Inde, sous un climat brûlant, des arrosages fréquents et bien ordonnés sont indispensables à l'agri- culture. Aussi la pratique de cet art remonle-t-elle aune haute antiquité, constatée par la loi de Manou, les épo- pées sanscrites et par les ruines de certains travaux hy- drauliques . Diodore de Sicile parle, en différents endroits, des arrosages du sol par des canaux dérivés des rivières . Strabon, après avoir signalé la culture des rizières comme exigeant des arrosages fréquents, dans la Bac- triane et là Babylonie, dit, en parlant de l'Inde : « Les magistrats ont l'inspection des fleuves, de l'arpentage des terres et des canaux, fermés par les écluses, pour LES IRKIGATIONS. 31 conlenil' l'eau nécessaire aux arroaemenls et la distri- buer également à tous les cultivaleurs, comme cela se pratique en Egypte. » En effet, on trouve dans la loi de Manou, parmi les no- tables (le la bourgade, le distributeur des eaux poui' l'arrosement. L'irrigation ne s'opérait pas toujours par des canaux dérivés des rivières. Cha(iue pagode avait son réservoir destiné aux purifications ; nuiis, lorsque les besoins du culte élaient satisfaits, on livrait généralement l'excé- dant des eaux à l'agriculture. Il est assez probable que les brahmanes liraient un bon parti de ces concessions. L'existence de ces i éservoirs ou étangs artificiels était inséparable d'une cultuie étendue et productive. 11 y en avait un nombre Irés-considérable dans toutes les parties de rinde. Quelques-uns étaient très-grands et avaient jusqu'à 8 ou iO kilomètres de circuit. A ré|)oque de la conquête anglaise, tous ces travaux hydrauliques poni" la plupart tombai, nt en ruine, et l'on ne saurait assez admirer la persévéïance et l'énergie avec lesquelles l'Angleterre a travaillé au développement des arrosages indiens, et poursuivi l'exécution de tra- vaux immenses qui seront le plus grand monument de la civilisation britannique dans ces contrées lointaines. Parmi ces grandes entreprises figure, en première ligne, le canal du Gamje, qui a été exécuté sous la direc- tion de l'habile ingénieur sir Proby Cautley. Les conditions dans lesquelles se trouve la contrée qui traverse le can;d lui donnent une très-grande impor- tance ; en effet, dans le norde résigne à ensemencer à inoin- «pic l'on m; piii>>e ai- roscr. Ce canal ^^ij^antescjne porte les eaux du Gange sui la "vaste contrée du Doab, comprise entre les collines Serraliques, le Gange et la Jumna. La prise d'eau a été faite sur un bras secondaire du fleuve» Deux barrages mobiles, l'un sur le canal, l'autre sur le bias du Gange, permettent dérégler l'introduction de l'eau. Après un parcours de pi es de 500 kilomètres, ce canal se divise en deux branches , dont l'une va se jeter dans la Jumna, l'autre dans le Gange à Cownpoor. La longueur totale du tronc et des deux branches est de 840 kilomètres. Trois autres branches dont l'exécution est ajournée compléteront ce vaste système d'irrigation et porteront la longueur totale à 1,450 kilomètres environ. L'étendue de la surface arrosée dépassera îin miUion huit cent mille hectares. L'exécution des travaux a donné lien à d'immenses difficultés. Ici, c'était un torrent qu'il fallait isoler, en relevant les eaux au moyen d'un barrage, là, une mon- tagne à traverser, plus loin, une vallée à franchir sur un remblai de plusieurs kilomètres. Aussi les travaux d'art sont-ils excessivement nombreux ; sans parler des digues, on compte 902 ponts, 297 ponceaux, 16 chutes, 21 éclu- ses et pertuis navigables. La dépense a dépassé le chiffre de quarante millions de francs, bien que dans l'Inde la r.ES IKUIGATIONS. 53 riiaiu-d'œiivre ne soit giièro que le dixième de ce (jnelle est en France, etc. Dès les premières années, l'enlreprise du «gouverne- ment anglais a donné des résultats excessivement re- marquables. Aujourd'hui, les revenus directs du canal et de ses dépendances s'élèvent chaque année à plus de deux millions, et les l'evenus indirecis, résultant de la plus-value de l'inq^ùt l'oncier, sont cinq l'ois plus consi- déi-ables. Ainsi, pour une dépense de quarante millions, le gouvernement en reçoit douze chaque année ; en d'autres termes, le capital engagé dans la canalisation du Mange lui produit un iidèrèl de trente pour cent. Il est diflicile d'im;iginer une opération plus IVuctueuse, sur- tout si on veut bien reinarquer que, du même coup, la richesse du pays s'est trouvée awjmentée dans d immenses proportions. Puisse l'exemple de ce double intérêt conduite à de nom])reuses imitations! Le canal du (îange n'est pas seulement destiné à l'iiji- gation ; il est disposé de manière à servir à la naviga- tion sui' toute sa longueur ; enti c Hurdward et Cownpoor, il remj)lit le rôle de canal latéral, offrant une voie sûre <>t facile ([ui i'em[)la(;(> avanlageusiMuenl celle du lîeuve, dont le jiar'courseslreiulu très-pénible, dans cette partie, |)ar la présence dt^s bas-fonds et des rapides. lindn, ce canal, ({ui reçoil les eaux sacrées du Gange, offre une troisième destination que les Hindous ne regar- dent pas comme la moins importante. Il sert, en effet, aux innondjrables ablutions que com- mande impérieusement la loi religieuse du pays, l^ans ce but, en plusieurs points du canal, d innnenses esca- liers dont (piel({ues-uns n'ont pas moins de 4,000 mètres 7>i l.i:S MKI'.VKII.I.KS DKS KI.KliVKS KT l>KS lUJISSKVrX. (If loii^Miciii', ont i'ir ('tnblis siii* los rivos du flfjiH,'llf's los fa- (|nirs se lieiiiionl, à r(''[)()(jiip des purilic/jlions, pour faire les prières et [)ro\oqu«M- les Hiirnôiies. Le (iaiige est sacir pour lo Iliu.'Ious, surtout [)rv^ Grande ablution des Indous dans le Gange. d'tïurdward, où le fleuve verse, sur le territoire de l'Hin- doustan, les eaux vives des neiges de rilimalaya. Aussi les pèlerins affluent-ils dans cette ville pendant le mois consacré aux purifications. Ces purifications commencent au moment où le soleil en're dans le signe des Poissons; et comme la prioiité du bain est d'une très-grande importance au point de LES IRRIGATIOMS. 35 vue religieux, à l'iuslaut précis fixé par les astronomes indiens, que ce soil le jour ou la nuil, une Coule nonn- breuse se précipite à l'eau. Que de pèlerins étouffés ou noyés dans le désordre qu'amène cet empressement ! En 1819, renlhousiasme insensé de ces fanatiques causa un tel désordre que plus de cinq cents personnes perdi- rent la vie. Les gens sages et riclies évitent les foules et entrent dans le fleuve entre deux brahmanes qui les soutiennent, les dirigent et les immergent avec les prières et les cé- rémonies prescrites ; mais en général les pèlerins plon- gent sans être assistés, hommes et fennnes confondus ensemble. Tous les douze ans, une grande léle religieuse attire un concours exceptionnel ; on n'évalue pas à moins de deux millions le nombre de pèlerins qui se rendent à llurdvvard pour celte fête à l'époque des purifications. L'inégalité de profondeur de l'eau présentait autrefois de grands dangers; avec le canal ce grave inconvénient a diï^paru, et une grille de fer, placée dans l'eau à ^i5 mètres de la rive, empêche les imprudents d'être en- traînés par les eaux. Envisagée simplement au point de vue religieux, la construction du canal du Gange a, pour la domination anglaise, une très-grande importance; cette condescen- dance aux usages religieux du pays conquis aura pour résultat inévitable de paralyser les efloits des fanatiques et d'assurer par suite, mieux qu'une puissante armée, la paix et la prospérité de cette immense contrée, dont les habitants sont trois fois plus nombreux que ceux réunis de l'Angleterre, de l'Ecosse et de l'Irlande. I.KS \lKi;\l-,ll,l,l.v lil.s ll.l-l.\|> i;i ni.v i;i|sshAL\. IRRIGATIONS EN ITALIE €hoz les Romains, ragriciillinc lirait un ^.Maiid paili lies arrosa<^es; on rotrouvo, en Italie, do jionibrcux \cs(if,M;s de travaux d'art, iraqiiedncs, de barra^^es, qni «étaient destinés à diriger les eaux et à les répandre sui- les prairies. (Vest dans le nord de l'ItalitMjno l'art des irrigations eut, en quelque sorte, son époque de renaissance. Dans cette riche contrée, il ne tarda pas à se développer et à s'agrandir, grâce à l'union, chaque jour plus intime, de la science et de la pratique ; les travaux de toute nature, exécutés spécialement pour l'arrosage des terres, prirent un caractère d'importance sociale qui rap- pelle les temps de la splendeur de l'Egypte sous les pha- raons. Dès la fin du douzième siècle, le territoire milanais tut doté de deux grands canaux, encore existants, et qui sont formés par des dérivations du Tessin et de l'Adda. Près de 100 000 hectares de cailloux et de grèves sablon- neuses doivent leur fertilité aux fréquents arrosages que permettent ces cours d'eau, créés par la main de l'homme. Ce qui n'est pas moins remarquable que l'effet obtenu, c'est la persévérance infatigable qu'il a fallu déployer pour arriver au terme de pareils travaux, à une époque où l'art des constructions était encore dans l'en- fance. Pour en comprendre la réussite, il faut se rap- peler que ces canaux sont contemporains des vastes et ;idmirables basiliques chrétiennes, et qu'ils ont eu, I.ES IIUUGATIONS. 57 comme elles, les ouvrages arabes pour modèles, et poui ei'éateurs des architectes religieux. Plus lard, grâce à l'iiiventioii des écluses due à Tillus- Ire Léonard de Vinci, le problème de l'établissement des canaux se trouva notablement simplifié. Les irrigations du teriiloire mibinais lurent complétées sous François Sforza, par l'ouverture de deux autres canaux jjourvus d'écluses. Parmi les travaux hydrauliques les plus récents, ou doit spécialement mentionner le canal Cavour, dérivé du Pô, au-dessous de Ghivasso, qui en extrait dld mètres d'eau par seconde. Ce canal a (iO kilomètres de longueur; il traverse, eu les irriguant, les provinces de Verceil,Novare, ainsi que Lomelliiie. Des travaux d'art magnifiques, })onts, canaux, siphons, ont été nécessaires, car il devait traverser huit rivières; il a coûté 64 400000 fr. Pour le dessèchement de la Toscane, le gouvernemeni a dépensé 5 000 000 fr. dans le lac de Bientina. Dans la province de Davenne, on a déjà obtenu, avec les eaux troubles du Lamone, le colmatage de ^JOO hec- tares de terrains inondés, et l'on continue l'opération poni' les autres 0000 hectares qui restent à dessécher On a fait l'étude de canaux qui, déri\és du lac Majeur et du lac de Lugano, doivent irriguer la partie la plu^ élevée des plaines lombardes ; l'on peut espérer dt voir bientôt mettre cesti'avaux en voie d'exécution. s .-s ILS MKUMJI.I.KS DKS KLEIVES Kl li)> l'.l ISSEAUX. IRRIGATIONS EN FRANCE Lorsque, aj)rès les lloiiiaiiis, les Visi^ullis r^t' liiiL'iil établis dans la Gaule méridionale, ils sijfnalôreiit leur présence par des ti-avaiix dii rigalioii dont (jiielques-im^ subsistent encore. C'est à eux que l'on doit la plupart des petits canaux qui vivifient nos prairies aux pieds des Pyrénées: l'un d'eux porte encore le nom du roi Alaric. Parmi les peuples du moyen âge, aucun n'attacba plus d'importance aux irrigations que les Arabes. Ils dévelop- pèrent en Europe cette première ressource, continuaiitet agrandissant les travaux des Visigotbs en Trau' e, créant en Espagne des aqueducs immenses et de gigantesques barrages, élaborant des règlements extrêmement remar- quables pour l'usage et la disîribution des eaux. Aujourd'hui, on rencontre, en France, des e emp'es d'irrigations par les petits cours d'eau dans un assez grand nombre de départements; elles sontloin cependant d'atteindre les développements que l'heureuse disposition de nos vallées permettrait de leur donner. Les iirigations au moyen des grands canaux sont assez rares ; elles ne se renconlrent que dans quelques départements du Midi. Le plus grand canal d'irrigation qui ait été ouvert sur le sol de la France date du seizième siècle. Il porte le nom de son fondaleur, Adam de Craponne. Cette belle entreprise, qui devait un jour faiie la fortune de ses compatriotes, eut pour lui les conséquences les plus fu- LKS IIUUGATIONS. 59 nestes. Complélemeiil ruiné, il dut se mettro au sor- vice du roi de France, et mourut victime du poison que lui firent administrer des ennemis jaloux de ses talents et de sa probité! Le canal d'irrigation de (^aipenlras, terminé depuis quelques années, prend ses eaux à la Durance, comme leprécédenl; il est destiné à arroser une sui'face totale de 27 000 hectares environ. Le développement de la ligne principale et de ses cinq principales dérivations est de plus de CO kilomélres. Ces travaux» dirigés par d'habiles ingénieurs, entêté exécutés au compte d'un syndicat de propriétaires intéressés, exemple bien digne d'être cité de la puis- sance de l'initiative individuelh; et de l'association. Les travaux d'irrigation exécutés dans la Campine.en Helgique, et dans la Sologne, en France, ont donné de merveilleux résultats; il est donc tiès-désirable de voir metlre prochainement en exéculion les projets étudiés pour la région des Pyrénées, la Dombes, la Ihéme, la vallée de Grésivaudan, etc. IRRIGATIONS EN BELGIQUE Le gouvernement belge vient d'exécuter, en Campine, ►des travaux d'irrigation dont les résultats méritent de ilixer l'attention. La Campine fait partie des provinces d'Anvers et du 'Limbourg. Comprise entre la Meuse et l'Fscaut, dans l'un des points où ces deux fleuves sont le plus lappro- chés, elle est bornée, au noid,par la frontière hollaii- w \.\:s \ii;i',vi;ii I i.s iti> iiKivi-s kt dks miissK\iJ\. (laisc, f'I, ;iii sud |t;ir lii l)\l<' d !<• Iiriucr. (j-ih» vaslc (toiih'rc, à peine |)eii|»lér il y ;i (|ij('|(jiie> ;iiiijée>, jenfoi- inail 120(1 (MKI hrcidics de Ici-ick n ficu fircf^ iiiijirddiic- lives. Le f,M)iivernomeiil hd^c n'.i |t;i> ciiiinl 'r('iilr*'|)M'iHli •• l'amélioralion de ce pays tout entier. Un grand canal, destiné à servir à la fois à la naviga- lion et à rirri<,''ation, porte les eaux de l;i Mcnsf sur nu»' gi'ande paille dn pays. Ce canal ol les rigoles prnicipales ont élé exécutés par l'Etat. La construction des rigoles secondaires et l;i ini-f en culture ont été laissées aux particuliers. La dépense totale revient à 1 !200 fr. environ par hec- tare. Le revenu net, ta partir delà seconde année. n'apa> été moindre de ceïit trente francs. De pareils chiffres dispensent de ton! conimenlaire. Ln présence des résultats obtenus, la valeur des terres incultes s'est élevée rapidement ; tel hectare qui se ven- dait jadis difficilement quinze ou vincjt francs, atteint aujourd'hui le chiffre de deux cent cwfpinnte franco. IRRIGATIONS D'ETE Ln laissant à part les opérations qui ont pour objet de débarrasser le sol des eaux nuisibles et qui comprennent les travaux de curage, de dessèchement, de drainage ou d'endiguement , les utilisations agricoles actuelles se réduisent à V arrosage des terres ; et par cette expression on a toujours presque exclusivement en vue l'irrigation d'été, dont la campagne dure cinq à six mois, et s'ouvre LES ii;r>i(..vnuws. il généralement vers lemiiicn d avril pour finir en fin sep- tombro. Ce procédé est évidennnenl excellent, et il serait bien désirable qu'il put recevoir toute l'extension possil)le. Mais que de difficultés se présentent dans la prati(jue ! ou [)ourrait même ajouter : (Jue d'objections à faire sur les résultats obtenus! Si toutes les contrées se trouvaient placées, à cet égard, dans la situation excepticumelle de la Lombardie. on ne pourrait jamais trop préconiser les irri le suc- cès d'une entreprise d'arrosaj^e. Une objection fondamentale se présente d'abord. Ces! la difficulté d'obtenir les volumes d'eau dont on a besoin sur des rivières soumises à des étiages plus ou moins prononcés, dont tout le débit est alors généralement at- tribué à des usages anlérieiu's. De là des empécbements imprévus, des contestations et des procès, dont les conséquences ont été de faire avorter bien des projets, même avant d'avoir reçu \\\\ conimencenient d'exécu- tion. Dans le nord de l'Italie et autres conti'ées situées au |)ied des plus liantes cimes des Alpes, c'est en été que les eaux sont surabondantes, et en liiver que leurs débits tombent à leur mininmm. C'est pourquoi l'on ne peu! pas emprunter à ces localités des pratiques à introduire dans des contrées dont la situation est totalement diffé- rente. i'2 ILS Ml.r.Vl.ll.ll.s 1»1> ll,hl,\l,.s KT l)l,S l'.I ISSI.M \. Mais, iM(lù[)eiidaiiiin(Mil de co point principal, il y a bien d'anlros causes à placci- en li^MHî (Je compte, connnc pouvant nictlre en question le succès d'une entreprise de ce genre. L'irrigation d'été est ini outil [iuissant, mais dange- reux à mettre dans des mains inhabiles. IJ1(; [x-ul jjro- duire des résultats opposés à ceux qu(î l'on avait en vue d'atteindre. Sous l'action du soleil, l'iiumeclation abon- dante dus plantes de toute natuie les expose à êtie brû- lées. Même en dehors de ce cas extrême, une ii i igalion surabondante produit des fourrages tioj) aqueux, non susceptibles de conservation, et dont l'usage e^t funeste aux bestiaux. Dans le plus grand nombre de cas, l'inob- servation, trop fréquente, de l'obligation fondamentale d'assurer les écoulements, amène en peu de temps la production abondante des plantes marécageuses, et l'on a vu d'excellentes prairies être ainsi complètement dé- tériorées et dépréciées. Je ne mentionne ici qu'un petit nombre des dangers de l'irrigation d'été ; mais ils sont bien connus des cul- tivateurs expérimentés et prudents, qui savent qu'on ne saurait trop réfléchir avant de s'engager dans une en- treprise toujours coûteuse et dont les résultats peuvent être très-mauvais. 11 est incontestable qu'il y a en France un certain nom- bre de très-heureuses applications de ce procédé. Mais elles ne sont pas générales; et si l'on jetait les yeux sur l'ensemble de nos irrigations méridionales, on verrait combien elles sont loin de répondre à ce que l'on devait en attendre. Dans les Pyrénées-Orientales, région la plus chaude de tout le territoire, là où une irrigation régulière pour- LES laïUGATIONS. {3 vait seule entretenir la fécondité du sol, des cours d'eau (jui tarissent presque totalement durant deux ou trois mois, au plus fort de l'été, amènent, pour presque toutes les dérivations, des temps de pénurie pendant lesquels les avantages obtenus dans la première moitié de la cam- pagne sont cruellement compensés. Si l'on procède au même examen dans la région delà Provehce, qui devrait retirer de si grands avantages d'un large emploi des eaux de la Durance ou du Rhône, on (rouve que, pour une entreprise donnant des résultats satisfaisants, il y en a quatre qui n'en donnent que de négatifs. Les unes sont sous le séquestre, d'autres en iaillile ; d'auties enfin qui sembleraient placées dans des conditions très-prospères, voient tous leurs revenus absorbés par les frais d'entretien. Dans le département de Vaucluse notamment, il est incontestable que la plu- part des entreprises d'arrosage sont au moins onéreuses pour les intéressés, auxquels elles imposent des charges hors de })roportion avec les avantages à en retirer. Knfin si, pour compléter cette investigation, on étu- diait, notamment dans les régions du centre et du nord (le la France, les conditions de succès de certaines en- (reprises qui sont notoirement productives, on recon- iiaîtrait qu'elles le doivent non àlemploi estival, mais à la qualité où à la valeur inti'insèque de certaines eaux, riches en piincipes fertilisanls, et que, dès loi's, on trou- verait probablement plus de profit à ne les employer ({u'en hiver en plus grande abondance ou sur de plus grandes superficies. Ce simple aperçu, qu'on pourrait développer bien da- vantage, est suffisant pour établir que, d'après la situa- tion hydrographique de la France, l'irrigation d'été, M li:s MKI'.VI.IIIKs hi;s I I.KI VKS Kl l»l> 151 ISSKAtX. priili(|ii(''(' sur une ^niiidc ('clK'llr, jin-sciilr iWtxiirini - (lif(i('iill(''.s d'(3XL'Culioii, peu! fjiirc courir bc.'iiicoiif) dr I is((U('s cl n'a *f^vAU'Vii\(ui\i'i\l doiiiu'' rpn* des léviill.it- li'(''s-iidV'ri('iirs à ceux (|ii<' l'on espériiil olitrnii . IMiisieni's aj^ronoincs dislin^ués ont lii»- un ti.-- grand parti dos en ont lait lin emploi profital)le. Le fait le fdns eoncinani ù citer dans ce s<'n> r>[ cfliii que présentent les vastes herbages de la iNorniandie. dont plus de 10,000 hectares sont entretenus dans h- maximum de production par le seul effet des submersions naturelles reçues exclusivement en hiver ; l'irrigation d'été étant complètement inconnue dans cette région. Ceci me conduit naturellement à signaler les grande avantages attachés à ce dernier mode d'emploi des eaux. IRRIGATIONS D'HIVER 1. Colmatage. Ce n'est pas seulement l'eau des loi- rents et des rivières que doivent employer les agricul- teurs pour féconder le sol et accroître leurs récoltes, ce sont aussi les matières terreuses charriées par ces cours d'eau et arrachées à leurs rives d'amont. Tous les ans le Nil, en débordant, répand ses eaux sur les campagnes, où il dépose un précieux limon qui est la richesse de l'Egypte. La nature fait, dans cette contrée, ce que les hommes font ailleurs sous le nom de col- matar/e. LES IHRKIATIONS. 15 Cette opération a pour but d'amener des eaux troubles ou limoneuses sur le sol qu'on veut atterrir ; on les y laisse séjourner, le sédiment se dépose ; l'eau claire est évacuée et remplacée par de nouvelles nappes d'eau lroid)le et ainsi de suite jusqu'à ce (pie l'élévation du sol 'soit surtisaiite. On peut ainsi combler de \asles mai'ais, des étangs ou l)as-fonds insalubres existant à des niveaux inférieurs à celui des hautes mers, et qui, par conséquent, ne poui- raient être améliorés par aucun autre procédé. Le c()lmatag:e pernn^t de créer à peu de frais un sol nouveau d'une gi'ande fertilité; et c'est ainsi que la riche vallée (le l'Isère a été concpiise sur les eaux: les rive- lains des rivières et des Heuves peuvent donc puiser 'ians ces cours d'eau la richesse et la prospérité. Prenons l'exemple de la Durance, la rivière française sur laquelle on a fait les étudias les plus sérieuses, et dont It^s eaux et le limon sont le mieux utilisés pour Tirriga- lion et le colmatage des canq)agiies riveraines. Les dix-huit canaux qu'alimente cette rivière torren- tielle peuvent lui empnmter jusqu'à 69 mètres cubes d'eau. V.n sorte qu'aux heures où toute cette masse li(pude est prise à la fois, il reste à l'étiage, dans le lit de la llui'ance, seulement 27) mètres cubes ou le ({uart du débit normal. Cette prise d'eau peut ainsi contribuer, d'une manière efficace, à diminuer les inondations. D'après les observations de M. IIervé-M;ingon, qui ont duré du l^'" novembre 1859 au oi octobre 1800, la masse de limon apportée par la rivière représente, pour toute l'année, une (juantité d'cMivii'on 18 millions de tonnes et de 11 millions de mètres cubes. On peut se faire une idét^ de l'énorme volume des 4r, i.i;s \ii.i;vi.ii,i.i;n dks klkives et oks kuinseaix. limons ;if'r;iilit'vs tous los ans jinri.'i humncr niix torraiii.s sii|)<''i'i''«irs (!<' son hassiii,*-!! S(i f\*^m'àiii VA'iUi inas.^o hous la forfiic d'mi (Mil)e (Jo 2'20 rn»Hrf»s df colr ; (Jéposées uiiiforiii(''in(;iit sur le sol, ces alluvions n;ronvriraieJit eu un an plus de 110,00(1 hectares d'une couche de i cen- timètre d'épaisseur, contenant, dans l'état de combi- naison le plus lavoiahle aux racines des plajiles, plus d'azotiî que 100,000 toinies de <^uano, et plus de (-arhone fpie 49,000 hectares de forêts. Malheureusement, les canaux ne fonctionnant j^uère qu'en vue de l'arrosemenl, les neuf dixièmes des limons sont perdus pour le colmatage, et les cultivateurs achè- tent au prix de plusieurs millions par an les éléments de fertilisation que le torriMiL porte à la Méditerranée, et qu'ils pourraient retenir à peu de frais. L'Italie centrale nous offre le type des premiers grands travaux de colmatage au moyen desquels on a opéré la transformation complète de plus de 20,000 hectares for- mant autrefois des marais pestilentiels. Voici les circon- stances dans lesquelles ces travaux ont été exécutés. 11 paraît incontestable que, du temps des lîomains et durant les premiers siècles du moyen âge, l'Arno se partageait en deux branches dont l'une atteignait directe- ment la mer, tandis que l'autre traversait au sud le val de Chiana pour se déverser dansla Paglia, affluent du Tibre. Lorsque le fleuve Arno, approfondissant graduelle- ment son lit septentrional, eut cessé de couler dans le val de Chiana, les eaux qui tombaient des ravins latéraux dans cette dépression presque horizontale s'épanchaient faibleinent d'un côté dans le Tibre, de l'autre dans l'Arno, et croupissaient le plus souvent en de tristes marécages d'où s'échappait la fièvre. LES lUIUGATIONS. 47 Cependant les marais ont disparu, grâce aux beaux travaux hydrauliques entrepris depuis Torricelli par les ingénieurs toscans pour l'assainissement de la vallée. Au moyen des alluvions apportées de droite et de gauche par les torrents dans les basftins de colmatage, on a su créer une ligne de faite artificielle au milieu de la vallée et donner aux eaux deux pentes bien sensibles, inclinées en sens inverse. Ces travaux, commencés dés le milieu du seizième siècle, mais dont l'achèvement a subi de longs retards par suite de circonstances exceptionnelles, ont fait ces- ser complètt^menl l'insalubrité terrible qui s'accroissait sans cesse et tendait à dépeupler toutes les contrées en- vironnantes; ils ont surtout substitué peu à peu des ter- rains agricoles, propres aux plus riches cultures, à des cloaques infects qui étaient devenus, avec raison, pour les populations voisines, une cause de terreur et de dé- solation. Des travaux analogues, commencés depuis un certain temps par le gouvernement piémontais dans les vallées de l'Arc et de l'Isère, en Savoie, mais restés inachevés jusqu'à l'époque de l'annexion de ce territoire à la France en 1800, ont été depuis lors continués avec au- tant d'activité que de succès par le gouvernement fran- çais, et, en quelques années, les valeurs estimatives de ces terrains, pour la plupart improductifs et insalubres, ont été décuplées. En même temps, la salubrité la plus complète ré- gnait dans cette importante vallée, dont la dépopulation avait suivi, dans la j)ériod(> antérieure, une effrayante progression. Le succès complet de cette opération, réalisée dans. is iKs Mi;iai.MM,^ MIS H.KiivKs CT i.KS iii:isse»i;v ,|..s r,„Hlilio„s .ms>i |„oliUl,les ,,o,„ W y-^)- MH'avanl.v „.„s,.s pour I.' 1H.I^.I '!'■ l'W^t, î- 'l«"^''"„i. I a'lm.n,>- triaion des Iravau. ,.uKli.s ;, en dîo.ln.T mm. antre ana- |o.^M.. pour IVM.lifîM.M t et le colMiatai^e ,1e la nv. .a^che dn Var (Alpes-Mar.lin.es,, .loMt la ^aMalM... avaM. Î80()MC le cédailen rie» à relie de la vallée de Ils,... 1 le doulde rapport de la slénlisatioM et de 1 M,=a - M-ité;maisdyavaildeplMsieiunHdéreldMnaMl,e ordre, résMl.aulde la eorrosioM toMjours crcssaMte d m lerritoire aussi rare que précieMX ; de so. te .,m a ces d,- vT points de VMe. leulrepr.sc ,ne le- gouverncn.e.U sarde n'avait pu achever, faute de fonds, éta.t devenue Mr-enle et du plus grand niterel. Mal-ré de grandes difricultés d'exécution, le su,:e., obtenu par l' administration française dans celte sec..nde entreprise d'endigue.nent et de >^"'^;]f^J/^^ même qu'en Savoie. Klle a donc complelement justifie, s^ce 'rapport, les vœux et les espérances des popula- lions annexées. . :,ia,.oV.1ps «es entreprises du même genre, monjs con= d abl . mais non moins intéressantes, ont ete effectuée, dans le 'Z de la France, notamment dans '- dèf^-tements e. Bouches-dn-Rhôn... de Vaucluse, de 1 Aud e de 1 ,,„., par les soins et aux frais de -7^^. P»;™ oui bien «ne ne pouvant disposer que de faibles Nolumes r;u lim^neuse'sont cependant a-ivés a des resn entièrement concluants en faveur de utd o co ma tage. En effet, des propriétaires '»'^"f ' '^ «^î J^^^'^^^ ainsi la transformation de plusieurs centaines dbectaies ;.;;:, «ol .^e ou n^arecageux, d'une valeur .nfeneure r,()0 fr., en des terres de première qualité d une valeu, dépassant 3000 fr. LIS llUUGAilUNS. 49 Les procédés d'exéculionsont d'ailleurs simples et «^é- îiéralemont peu coûteux, de sorte que, sauf des cas ex- cepliouuels, ils se résuineut en une dépense ne dépassant pas 500 à 000 fr. par hecture. Dès lors, si l'on lient compte (le la valeur presque nulle des terrains soumis à ce mode (raniélioralion et de la valeur très-élevée des alluvions arlificielles obtenues par le même moyen, on comprend tout de suite l'importance des plus-values à obtenir, surtout quand on peut opérer sur de «grandes superficies. IL Limonage. — L'emploi des limons qui résultent du colmatage, c'est-à-dire leur dépôt en couches épaisses de 0'",.^0 à 0'",40etaudelà, représentant de véritables rem- l)lais de 3,000 à 4,000 métrés cubes par hectare, n'est |tns, à beaucoup pi'és, h; mode le plus *iénéral de leur utilisation. En efiét, il faut des circonstances exceptionnelles pour tju'il se rencontre à la fois, sur un même point : 1'* des étendues considérables de marais, étangs ou bas-fonds insalubres; 2" des eaux riches en limons i)ouvant y être dérivées avec de fortes pentes ; 5" enlin des moyens d'évacuation pour diiigei' les eaux dépouillées vers im bassin inférieur devant leur servir de débouché dé- finitif. Mais ce qu'il importe suitout d(> signaler ici, c'est (pie l'emploi des limons fertiles, en couches épaisses (l(» 50 à 40 centimètres et au delà, pour combler des i)as-fonds insalubres, ou opérer l'assainissement de ma- rais indessécliables par tous autres moyens, n'est qu'un cas particulier et même très-resireint dans l'utilisation générale de ces précieux limons. .le vais expliquer, en peu de mots, en ((uoi consiste sui'- lout cette utilisation. M) i.Ks \ii;i'.vi:ii,i,i:s i)i:s ii.i:rvi> i:t dis i-.iisskmx. IJIc rrsnlto (!<' It'inploi, p.'ir If i/iAino p roc «'•(](', tir^ matières limoiieusos et aulres contenues dans les eau.v eouraiilos, non plus en couches ép.'iisses deslinées ù lormcr, dans le moindre délai possible, de véritables remblais, mais en couches minces, souvent méirie imper- ceptibles, l'ouiiiics [)ai' des limonages périodiques, an- nuels ou bisannuels, (^eiix-ci re[)résentent alors, indé- pendannnent de toute question d'exhaussement du sol. un ])uissant amendement, renouvelable à volonté, el dont les eflels rendus palj)ables par la {ilus-value immé- diate des récoltes, ne pourraient être obtenus, par les moyens ordinaires, qu'à l'aide d'une quantité d'engrais ou d'amendements artificiels représentant une dépense quadruple ou même décuple de celle qui correspond à la pratique du limonage. Des iails nombreux autlicntiquesétablissent que,i)ar la seule puissance des submersions fertilisantes effectuées à divers intervalles dans la durée d'une seule campagne d'hiver pour des sols de toute nature et pour presque toutes les récoltes, les plus-values annuelles varient, sui- vant les circonstances locales, de 150 à 300 fr. par hec- tare ; que, dès lors, elles doivent être assimilées à celles qui résulteraient de la fourniture de 15,000 à 7)0,000 kilogrammes d'engrais d'étable représentant cette même valeur . 111. Simples submersions. — Les eaux courantes, même non limoneuses, renferment encore, dans le jdus grand nombre de cas, des principes fertilisants d'une h uite va leur agricole, dont elles se dépouillent au profit du sol par le seul fait d'une stagnation suTisamment prolongée. Ces eaux étant presque partout surabondantes durant environ six mois d'hiver, et des travaux simples et peu LKS miUGATIONS. Tif coûleux pouvant en piocuicr la dérivation, on voit qu'une extension presque illiniilée peut être donnée à ce mod(' puissant d'amélioration du sol. La prali-f|uc, juscju'aloi's reslreinle à nii petit nonil)re de localités, était inconnue partout ailleurs, et l'estait étrangère aux contrées mêmes qui avaient le plus grand intérêt à en profiter. Ici, comme pour bien d'autres découvertes de premier ordre, ce n'est pas la théorit», mais le hasard qui a t'ail jaillir la lumière. Des propriétaires du Calvados dont les herbages liren? toute leur valeur des submersions périodiques qu'ils iv- çoivent en hiver, ont pu remarquer (pie, si elles avaient lieu accidentellement avec des eaux claires, la plus-va- lue habituelle n'élait pas sensiblement diminuée, tandis que, en l'absence de toute submersion, la force produc- tive de l'herbage déclinait aussitôt d'une manière l'a- pide. Ce fait étant d'une grande portée au point de vue agri- cole, on en a recherché la cause ; et bientôt, avec \c concours de chimistes éminents, son explication a été donnée. On a reconnu, en effet, que les (vuix courantes en gé- néi'al, indépendamment de l'aii' atmosphéricpie, de l'acide carbonique et autres substances analogues qu'elles renferment, sont toujours |)lus ou moins liches en sels minéi'aux, tels (pu^ les carbonates et silicates alcalins. les phos[)hates, etc., sans compler des chlorures, des ni- trates et une foule d'autres principes empruntés aux ré- gions supérieures de leur bassin. Ces substances peuvent, en effet, se dissoudre en quantités notables dans l'eau plus ou moins combinée à .V2 ILS Mr.I'.Vi;iI.|,i:s DI.S I LKIVKS KT des RUISSKAI'X. l'jicidc c.irhoiiiqiH', <'l ("cla sans lroiil)l(*r s;i lim|iidit<''. Mais |):ii' le seul l;iil 'l'un sf'joiir de qiKîWjin's sfiiiaiiies sui' les Icri'aiiis siihiiici'^f'S, elle se (Irpoiiillc, .111 profit (le la V('''4;(''lali()n, de la majeure partie de ces substances dont Taction lerti lisante est é^^'ale à celle des meilleurs amendements. Ce résultat si important a été vérifié de deux manières : d'abord par l'effet direct sur la récolle, ce qui était le j)oint le i)lus important; puis par la composition très- difféi'eiite de l'eau analysée avant et après la submersion. Kn effet, s'il arrive que, par exception, des herbages viennent à être submergés non par des eaux de livière, mais par une simple accumulation d'eaux pluviales, sur- tout de celles provenant des fontes de neiges, alors l'effet produit sur la végétation est à peu près nul, ce qui fournil une nouvelle démonsl ration du fait qui vient d être établi. En généralisant cette observation, on arrive à recon- naître que, sauf de rares exceptions, presque toutes les eaux courantes renferment ainsi en dissolution des sub- stances organiques et surtout minérales dont le dépôt s'opère par le simple repos, et dont l'aclion stimulante sur le développement de la végétation est d'autant plus prononcé que ces mômes substances manquaient à la composition normale des terrains agricoles sur lesquels elles ne peuvent être ainsi amenées et répandues dans les conditions les plus économiques. La question posée, on conçoit tout de suite quel im- mense parti on peut tirer de cette ressource, en quelque sorte illimitée, pour maintenir la fertilité des terrains agricoles, incessamment amoindrie par une succession de recolles plus ou moins épuisantes ; tandis que, par LES lUKIGATIONS. * Sa los moyens ordinaires, on n'obtient (|ii'iine réparation trop souvent insuffisante, à l'aide d'engrais et d'aniendo- inents (jui manquent à notie agriculture, et dont l'emploi devient excessivement onéreux du moment où l'on est obligé de recouiir aux engrais commerciaux aclietés hors des exploitations et sujets d'ailleurs à de nombreuses l'alsifications. Le système préconisé aujourd'hui sous le nom d'en- grais cliimiques (^y^tème depuis longlemps connu, ex- périmenté et jugé en Angleterre), n'étant basé que sur l'emploi de substances actives opérant à l'instar de la chaux, de la marne, du plâtre, etc., ne peut générale- ment Iburnir que des stimulants de la végétation, ef peut, dès lors, après un temps plus ou moins long, aljoulir fatalement à l'épuisement complet du sol; tan- dis que ce que l'on peut appeler, à jusie raison, l'engrais des eaux naturelles ne laisse rien à désirer, parce qu'il renferme généralement l'ensemble des principes organi- ques et minéraux assimilables par les plantes agricoles, .de sorte que son emploi peut être renouvelé indéfini- ment, sur le même sol, sans que l'on ait jamais à crain- dre l'amoindrissement de sa fertilité. S'il en était autrement, comment pourrait-on s'expli- quer le maintien constant de la fécondité des herbages submergés de la Normandie, la(|uelle est représentée par une production annuelle d'en\iron 400 à 500 kilogram- mes de viande à l'hectare, tandis qu'elle tombe immé- diatement si ce mode de bonification leur est retiré? Un autre fuit très-important vient d'ailleurs compléter l'intérêt qui s'attache au même procédé. C'est qu'à la faveur des basses températures (de^ 0" à 5") existant pendant quatre à cinq mois de morte saison, tous ,,i i.,,s Mi.i;vi.ii,i.i.s m> ii.u;vi,s i;r i.i> i'.iissEvi;x. 1,, ..W.l.nx, liK X .... l.ml,a,x-s, ,,.m.v...,I s..|.|-it,.,- ),.ss.,lM...M-^i.."M'c.'«l^"'l "" '^""l« Pl"-'" n..„..s lon^', ^a„s .■■p.-«vo,' a........' alK.-al,.,„ ,la„.l..„ orfe'an.s,,,. --o ,,„i scrail in.possil.l.. .lai.s U saison .lél.'. «I avo.' .les (omnératiircscomprisi^senlrcO'et 1'2". Si Ton se rcd c«...ptf -los .■cs.o.iitc.s ,,...■ p"-^'""" :, «,1 .ward les in.u.„.lnahl..s .-.....-s don,, r,u, s, lo,i,io„l aosca>npag,.cs, avec dos .l.'.l.its touj..u>s al.onda,, s 0,1 l.iver, ol de la.vaslo étendue des régicis submcrsildes a„ profil desq,.olles pe„t èt,e appliqué oc rnod,. . an.o ...- lation, 0,1 <;o,„p.e„d loi.ldc su.lo de quoi .nto> a ,1 .,ple q.,-é.:ono„..que, les f emen s -? " ratëurs dont la d.„>i„..tio,. p.-ogress.ve est un faU .„con- lestable et peut faire «■aiad,-e que, danscerta.nes .eg.ons^ l'on arrive, à une époque plus ou ...o.ns prochaine, voir tarir les sources de toute pioducUon. Résumé - De ces t.'ois modes d a,iiehoral,on du sol, le p.-emicr (eol.mtage) no comporte ëénèrale,r.ent que dei applications assez, restreintes; ma.s les deux ut.os ,li,Bonage, simple submersion ou u-r.gat.on d hiver) sont par leur généralité susceptibles d en recevon- de ti'ès-nombreuses. En effet, les différentes zones a amolioiei pm «e. aivei-s modes se divisent ainsi qu'il suit : 1» Vallées soumises à des submersions natu,-elles; 2» Terrains d'altitude moyenne pouvant recovou-, pai voie de dérivation, des submersions arl.fic.elles ; 5» Terrains élevés ou en pento, susceptibles de . eccvou <1p;jlif)ii poiil ;ivf)ii lien [)!jr l«!S inoyciis l(;s [)Iiis siiiiplf^s. Jo poiii'j ;iis cilci' un •^m'.iikI iioinbir flo piofjriétaires qui. iuMi-s(Milorrienl ont rctirt' iii'liviijiicllcuicnt de décrire, est dij^nie de lixcrau plus liaut degré l'allen- tion du monde agricole. On ne saurait formuler des vœux trop énergiques pour que le gouvernement, d'accord avec les particu- liers, s'occupe promptement , et sur la plus vaste échelle possible, de l'aiiiénagement général des eaux de la France, non-seulement sous le rapport de la navi- gation et des moteurs hydrauliques, mais encore sous le rapportessentiellement agricole du colmatage, du linio- nage et de l'irrigation, ïirricjation hivernale surioui. On constituerait ainsi tout un système de travaux pu- blics d'utilité rui aie qui donneraient enfin une solution sérieuse au problème posé par le dernier gouvernement lui-même, à savoir que l'amélioration des campagnes importe encore davantage à la prospérité générale duparjs ((lie l^ amélioration des villes. Il ne s'agit pas ici d'expériences à faire ; on a des ré- sultats qui sont encourageants au plus haut point. On peut aborder avec la plus entière confiance l'exécution des plus vastes travaux; et il est certain que chaque coup de pioche donné aux frais de TÉtat se multipliera à rintini par les coups de pioche donnés par l'initiative- privée. Ainsi organisés dans ce but de l'aménagement des LES IlUUGATIOiNS. 57 eaux, les ateliers de travaux n'auiont point les dangers de l'agglomération ; ils seront dispersés, éparpillés sur tout le territoire national, et par eux conséquernment se développera l'aisance an village, ce but de tous les gou- vernements qui voudront et sauront prendre racine en France. On a eu mille fois raison de songer à la protection des villes contre les inondations, mais c'est précisément parce que cette partie du })rogramme de nos travaux pu- blics a reçu de très-grandes satisfactions que désormais il est juste, il est prévoyant d'aborder l'œuvre des tra- vaux d'utilité rurale. Aménager les eaux dans ce but, ce sera non-seulement préserver l'agriculture de l'attaque des agents destruc- teurs qui la menacent incessamment, mais ce sera la doter de forces productives nouvelles ; ce sera la mettre à même de récupérer des masses énormes d'engrais et d'amendements, constamment enlevés aux terrains supérieurs ; ce sera porter la salubrité dans des pays ma- récageux et insalubres; ce sera, enfin, conquérir, par voie de simple exliaussement, de grandes étendues de terrains incultes qui décupleront de valeur. Ne laissons donc plus coulei' l'eau sans en avoir ob- tenu tous les effets utiles. Et s'il est vrai qu'il y ait des pays assez favorisés pour développer les irrigations d'été, il est incontestable (pie nous avons, en bien j)lus grand nombre, des pays où l'utilisation des eaux bivernales, toujours surabondantes, peut engendrer la plus haute richesse agricole. En hiver, grâce aux basses températures et aux grandes eaux, l'agriculture tient à sa disposition d'immenses forces naturelles. C'est son rôle de les mettre en œuvre. :,S IIS MKKVKII.I.IS DKS I I.KIVKS KT M S ia:iSSKAtK. S(M.l....r..l .1 n.nl rlr. .n.il.v.lr ,l..,.x choses, (l'abonl pour amener l'eau, eiisiiilr |.o.ii' la lairc évacuer. «•'est, U\ fièvre. . i;(,,U qui s'écoule à soloulé, c\'..L la /r, ///./^% C est la NAVIGATION «» N s I T) i: Il A T I 0 N s c; K N !•; n a i. i: Ail iionibiv dos vôi'ités les moins ('Oiitesléos de la science économique a})pli(iiié(* aux lransj)()rls des ma- lières et des productions de l'industrie, il faut placer rim[)ortance du rôle qui appartient aux voies navigables, dans l'œuvre complexe de la distribution et de la ré})ar- litiou de ce que l'on nonnnc la richesse matérielle d'un pays. Avant ([ue les chemins de fer vinssent occuper, dans le système industriel et comuKM'cial, le rang" qui leur est dû, les voies d'eau étaient regardées comme l'inslru" ment par excellence des transpoils à bon marché. Klles ont été, depuis des siècles, les voies préférées, non-seu- lement pour le déplacement des matières et des produits, mais aussi, sur certaines directions géographiques, pour la locomotion des peisoimes. L'invention des chemins de fer a modifié cet état de l'hoses, et la grande vitesse que l'on est parvenu à donner aux véhicules qui les parcourent de\ait attirera fMix, non-seulement les personnes, mais aussi une énorme 00 i,i;s Mi,iivi.ii,i.i> i)i:s ii,ki\i> i.t I)1> I'.i isskma. ((uaiililr tic uiMlirrcs cl (le piodiiils qui ne coiiipoilci)! {);is les Iciilciii's iiiscj);n;ii)lc.s du mode de hjconiolion ordiiiniro de la jiliipail de nos voies d'eau. Cotic inodificaliou radicale jiih oduilc dans l'ancien systùrno des h-ansporls devait itxarvAtv une •(lande in- ilueiice sur l'esprit des peisomies même les pins versée.^ dans les éludes économiques : on a cru que les (ilnmins de fer allaient se suijstituer aux voies d'eau et que celles- ci ne seraient plus désormais considérées que coin nie des instruments de ciiculation incompatibles avec les nécessités de l'industrie moderne. On a dit, dans un moment d'enthousiasme, que les canaux étaient un vieux mode de transport dont il ne fallait plus se préoccuper beaucoup. On a même vu les plus ardents promoteurs des chemins de fer ne deman- der rien moins que la suppression de toutes les voies d'eau, comme s'il n'était pas plus difficile de remplacer, dans l'ordre économique que dans l'ordre public, une vérité par une erreur; mais, pas plus dans l'un que dans l'autre, les erreurs ne sont durables. Tout ce bruit et toute cette agitation se sont apaisés avec le temps; l'observation pratique, venant en aide à la réflexion, a calmé cette fièvre allumée principalement par la spéculation financière et a contribué, pour une large part, à ramener les esprits dans le droit chemin dont ils s'étaient momentanément écartés. Si de sérieuses perturbations économiques furent pro- voquées par cet élément nouveau et tout à fait inattendu ; si l'opinion publique fut, pendant quelques années, dis- traite et comme absorbée dans ce tumulte qui se faisait autour de lui ; le gouvernement français n'a jamais perdu de vue les véritables intérêts de l'industrie, du NAVIGATION. 01 <'(unmcrce et de ragriciiltiire doiil le dévelo{)})einenl est si inlimement lié à celui des voies iiavi<^ables, ni laissé ci'oire qu'il abandonnait celles-ci comme des instru- ments inutiles et désormais incompatibles avec le déve- loppement de la richesse publique. Loin de là, le gouvernement })oursuit'avec persévé- rance le développement et le perfectionnement de nos voies navigables. La navigation intérieure, en effet, est plus nécessaire en France que dans les pays voisins, parce que les ma- tières prem'éres employées par l'industrie y ont des dis- tances plus longues à parcouiir. L'expérience démontre, d'ailleurs, (jue les voies d'eau peuvent seules procurer, pour le transport des marchan- dises encombrantes et de peu de valeur, le bon marché, (pii est la première condition du su(îcés dans la lutte ouverte avec l'industrie étrangère. Sans doute les chemins de fer rendent, sous ce rap- port, de très-grands services, mais si, sur certaines li- gnes et pour certaines marchandises, ils offrent au com- merce des prix extrêmement réduits et comparables à ceux de la voie d'eau, on peut affirmer que ce résultat est dû à la <:oncurrence des lignes navigables, de telle sorte que ces dernières procui'ent au conunerce un dou- l)le avantag(% et par les bas prix qu'elles lui offrent et par ceux qu'elles lui assurent indirectement sur les che- uiins de fer concurrents. Le gouvernement a toujours pensé et proclamé que îes voies d'eau, connue les voies de fer, étaient indispen- sables à la prospérité du pays, et que la concurrence de <:e5 deux modes de connnunication était la v<';ritable so- lution de la question des tiansports à bon marché, c'est- V)2 l.i;s \li;i;\ 1.(1.1 I..S l)|> II.I.ISKs Kl l)l> l'.CI.SSKVIN. à-dire de l;i (|ii('.^li(ni \il;i|r' du romnirrcc cl de l'iiidii-- liic. Tons ses ac.lcîs oui été coiifoiincs à cclN' (>f»r)sr<'. Aiii."-i, l)i('ii loin de réserver tontes ses syrnpîtlliies. tontes se>» l'avenrs poni' i'iiidu^liic d('>cl)eMiins de fer, il n'a j;iniai> montré pins de sollicihidc, déployé pins d'eCloits prmr l'amélioration des voies navigables qne depuis Tépoqne où les chemins de fer ont commencé à prendre nne place importante dans le système des comnnMiicatioiis inté- rieures. C'est en 1846, après l'ouverture des clieinins de fer de Paris à Orléans, à Tours, à Rouen, à Lille, à Valen- ciennes, que sont autorisés les travaux de perfectionne- ment de nos principales rivières, la Seine, l'Yonne, le Ikhône. En 1849, aussitôt après l'expiration de la concession du canal Saint-Quenlin, et alors que le chemin de fer du Nord était ouvert depuis plusieurs années, l'administra- tion entreprend résolument et mène prornptement à fin les travaux nécessaires pour assurer à la batellerie un tirant d'eau de 2 mètres sur toute la ligne navigable de Mons à Paris. Cette amélioration a été^ pour le com- merce de Paris avec le nord de la France et la Belgique, un bienfait immense, et lui a procuré une économie an- nuelle qui se compte par millions. Le canal de la Marne au Rhin est livré à la naviga- tion en 1855, alors que le chemin de fer de Paris à Strasbourg avait été ouvert l'année précédente. On ter- minait, en 1855, le canal Latéral à la Garonne, de Tou- louse à Castets, et en 1859 le canal de l'Aisne à la Marne qui ouvre le bassin métallurgique de la Haute-Marne aux houilles du Nord et de la Belgique. rs'AVKiATioN. or. Sans mentionner ici les nombreux liavaux d'amélio- ration exécutés, soit sur les anciens canaux, soit sur les rivières navigables, et pour ne citer que les faits les plus saillants, je rapelleiai que le gouvernement a entre- pris, en 1800, à l'aide des ressources reslées disponibles siu' l'emprunt de la guerre de Crimée, les ouvrages qui doivent exercer l'iidluence la plus déc'isive sur le déve- loppement de la navigation intérieure et ouvrir de nou- velles voies au transit, si intimement lié à la prospérité de noire marine. .le veux pailer de la canalisation de la liaule Seine, entre Paris cl Montereau ; de l'Yonne, entre Montereau et Laroche, el de la Marne, entre Paris et Dizy. Les deux premières de ces rivières, dotées d'un tirant d'eau constant, s'imissent, par le canal de Bour- gogne, avec la Saône et le lllione, et forment ainsi une ligne de navigation conliiuie entre la Méditerranée, Lyon et Paris, ligne qui se continue, par la basse Seine et l'Oise, jusqu'aux ports de la Manche et de la mer du Nord. La Marne se relie, à Dizy, avec le canal latéral à la Marne, jusqu'à Vitry-le-François, puis au canal de la Marne au Rhin , et forme ainsi une voie de navigation régulière entre le Havre, Paris el Strasbourg. Le perfectionnement des rivières et des canaux con- stitue incontestablement l'encouragement le plus elïi- cace que le gouvernement puisse offrir à la navigation intérieure. Cependant il est un autre avantage auquel le com- merce attache un grand prix, bien qu'il ne puisse exer- cer sur les Irais de transport une influence aussi marquée que la régularité de la navigation et l'augmentation du tirant d'eau des voies navigables. i;i I.KS MIJ'.VI.II.I.I.s l)l> I l.hlNh.S II DI.N l'.l l>^l.\l \. (Ici avaiila<,M3 est la r«';duclioii (i<;s droih (Jr {i«'îa}^c porçiis au piulit do l'Klat. I')i('ii {|UL' l(îs iiih'rèts du Trésor fussent crij,'agùs dans l;i (juestion, le «gouvernement n'a [las leculé devani un nouveau sacrifice, et, depuis [)lusieurs armées, tous ses actes tendent à l'abaissement pro^i'essif des tarils de navi<5^ati()n. Sons l'action de ces laiils j'éduils, la concurrence d<' la batellerie et des cbemins de ler s'est maintenue. On en trouve la preuve dans l'accroissement du tormage des voies navigables. Cet accroissement était, en 18G0, de G pour 100 sur 1859, et s est élevé en 18(j5, compa- rativement à la même année 1859, à plus de 15 pour 100. La concurrence des voies de fer et des voies d'eau n'a donc pas faibli; sans doute la batellerie a de nouveaux efforts à faire pour maintenir la situation ; elle a des perfectionnements nombreux à introduire dans ses moyens d'action; elle a surtout à étudier les modes économiques de remorquage. Assurément, les facilités et les encouragements ne lui liront pas déi'aut ; mais elle put seule, par ses efforts soutenus, conserver le rôle important qu'elle a à remplir dans le développement de la richesse industrielle du pays. En résumé, si l'on admettait, par une sorte d'anti- thèse, la préexistence des voies de fer, en faisant ab- straction des voies d'eau qui les ont précédées dans l'ordre économique,ilfaudrait inventer celles-ci pour en faire le contre-poids nécessaire et le complément indis- pensable de celles-là, et réciproquement. Le temps, qui remet tout à sa place, justifiera de plus en plus cette proposition, dont le principe est désormais NAVIGATION. 65 sanctionné par une expérience suffisamment prolon<^ée pour qu'il ne reste plus désormais de doutes sur ce théo- rème économique dont les nations industrielles, l'An- gleterre, la Belgique, la Hollande, la Prusse, pas plus que la France, ne méconnaissent la vérité. Les circonstances actuelles rappellent donc avec oppor- tunité la faveur et le courant de l'opinion sur les voies de navigation intérieure. Presque partout on émet des vœux en faveur de la prompte amélioration de nos voies navigables, rivières et canaux ; car, presque partout on comprend la néces- sité dt\ la (concurrence pour le transport des denrées encombrantes qui ont besoin de voyager à petite vitesse pour voyager à bon marché. On ne saurait donc trop encourager le gouvernement à persévéï'ei' dans ses efforts pour rendre nos rivières plus navigables dans la saison des sécheresses, pour les relier et les côtoyer par de bons canaux, pour atténuer les dé.^astres de leurs inondations, et enfin pour exoné- ler la batellerie des tarifs trop élevés. NAVIGATION INTERIEURE , La navigation intérieure comprend les transports- de tout genre qui se font sur les lleuves, rivières, lacs et canaux Tantôt c'est une réunion de voyageurs ou une car- gaison de produits qui passe d'une province dans une autre; tantôt ce sont des bois qui, jetés du haut des mon'agnes, Hottent à bûches perdues, et, plus bas, as- 5 C.f; l.liS MKUYilI.LKS DtS ILKLVKS ET I>KS UUISSEAIX. semblés en Iraiiis ou en ladoaux, snivcnl !>• fil df I *'')ii vers les lieux de coiisoinmatioii ou les poils (reinbafjjuc- ment. Ici, des chargements de produits exotiqiies re- monleul nn flejive; là, des produits indi^r-nes descen- dent veis les côtes pom* j^^agner ensuite d'autres pays. Pour le bon marché, aucune voie de teire n'ei:t com- parable aux fleuves et rivières, puisqu'ils fournissent Barrage. gratuitement la voie et le moyen de transport ; mais ils sont sujets à des inconvénients qui en restreignent Tu- sage Outre les interruptions occasionnées par les gelées ou par la diminution du volume d'eau pendant l'étiage, la débâcle des neiges, les crues ou la fréquence des brouillards créent des périls qui entravent encore la na- vigation. Les sinuosités allongent les voyages, et l'on perd un temps considérable en remontant le cours de l'eau. Puis on ne trouve pas, généralement, sur une longue étendue, le degré de pente et de profondeur NAVIGATION. 07 nécessaire : de la source à une certaine dislance, le vo- lume d'eau ne permet qu'un flottage accidentel ; plus bas, se rencontrent des rapides, ou, à mesure que le Uouve s'êlai'git, le chenal s'exhausse, des bancs de sable le divisent ou le déplacent, et des barres se forment en travers des embouchures par les efforts opposés du cou- rant et de la marée. Il faut que l'art s'efforce de lever ou d'éluder ces obstacles. On diminue l'excès de vitesse par des digues ou des barrages qui partagent le cours d'eau en biefs successifs, et, pour que les bateaux franchissent les chutes formées par ces barrages, on met les biefs en communication par des écluses à sas qu'on préserve des ensablements ou des chocs en les construisant en de- hors du lit du fleuve. On atténue les rapides en élargiit- sant le chenal; on au;^mente la profondeur et la vitesse en resserrant les eaux par des épis, des digues ou des barrages; on prévient les inondations par des digues latérales et d'autres travaux. Quand des parties de liviéres sont trop difficiles à par- courir, on y supplée par des canaux latéraux, et l'on corrige, au moyen d'écluses, les différences de niveau entre les deux points de jonction. L'art fournit aussi le moyen de passer d'un bassin dans un autre, en amenant au point culminant qui existe entre eux un volume d'eau suffisant pour entretenii* une voie de navigation régulière dans l'intervalle qui sépare les deux fleuves. Enfin, lorsqu'une rivière fait un long détour, on peut abréger le trajet au moyen d'un canal qui coupe à tra- vers les terres. Ces voies artificielles, n'ayant pas de courant appré- .;S 11 S ri.F.IVV.S KT W.S nriSSEMX. fiS I.KS MKI'.VKll.l.I uoniiMii, d'eau suint pour ! Se ( UMiwM. .. ..... "■■ ,,.,,. |-,.„,,.,.ii<.n a.'S (luvrag.'s ,,,., , K.paraUo a;^ n^^^^^ (les chômages; W'an ii ariiv». p j Digue pour la navigation, écluse. suffisante; et. dans les p..ys où le f.o.d e t "t^ - >- canaux restent gelés plus lo^g'^-P^^^» ''^; ^Z' L-invention des bateaux ^ -apeur e t ^e, ue au m mencement du siècle, seconder les f«^ '^ ff^,.^;^;^ nieurs et donner aux transports par eau une fe.g.ande •"Ï:;Ïmoyen, on a pu marcher plus régulièrement NAVIGATION. 09 et plus sûrement qu'à la voile, se passer du halage, qui n'est pas toujours [iialicable sur les grands lleuves, re- monter contre le courant tout d'une Iraile, et franchir ainsi jusqu'aux rapides. Néanmoins, la navigation intérieure ne satisfaisait encore qu'imparfaitement aux besoins du commerce, lorsque les cl.emins de fer ont commencé à lui disputer sa clientèle. Si ce nouveau mode de transpoit a été accueilli avec tant de faveur, ce n'est pas seulement parce qu'il permet de parcourir avec rapidité de vastes espaces, c'est aussi parce qu'il fonctionne à heure fixe en toute saison. Avec lui, on n'est pas réduit, comme autrefois, à attendre la réouveiture de la navigation pour recevoir ou expédier dos marchandises ; on n'est point obligé de faiie à l'avance des approvisionnements onéreux, [.es besoins peuvent être satisfaits au moment où ils se font sentir, et l'on voit par ce moyen exécuter des entreprises que les lenteurs et les retards de la na- vigation eussent rendues impossibles autrefois. Les voies navigables conservent les transports de mar- chandises pesantes qui ne sont pas pressées d'arriver à destination, qui ont peu de valeur et demandent peu de soins. Certains trajets d'agrément sont aussi réservés aux fleuves et aux lacs : ainsi, 1rs bateaux à vapeur qui pro- mènent des milliers de touristes entre les rives pitto- resques du Uliin ou de J'Iludson, n ont rien à craindre de la concurrence des chemins de fer. Les deux systèmes ont chacun leur clientèle; on les voit, en certains endroits, se prêter un mutuel appui en contribuant à former de grandes lignes de communica- tion, et, dans les endroits où ils fonctionnent séparé- 70 i.Ks MKiiVKiiir.s i)Ks ri,i:i VES i:t ni.s i-.iisskai \. rrioiil, Iciii' coïK'iirroMco a l'avantîjfj'c de. |)rovoqii<'i' le IKM-fcclioniicrrient do leurs [Ji-océdés cl de. pirseivor h' public dos incoiivénicnls d'iui monopole. NAVIGATION EN FRANCE Le développement total des parties navigables des fleuves et des rivières, en y (comprenant celles des pro- vinces annexées, est d'environ 9,600 kilomètres, et celui des canaux de 1,800 kilomètres. Ces voies naturelles et artificielles coml)iuèes ensemble forment de grandes lignes de navigation qui, traversant les divers bassins, s'étendent d'une extrèmilé à l'autre de la France. C'est ainsi que par la Seine, l'Oise, le canal de Saint-Quentin, l'Escaut et les nombreux canaux qui se rattachent à cette ligne principale, Paris commu- nique, d'une part avec la mer au Havre, de l'autre avec les houillères de la Belgique et de la Flandre française, ainsi qu'avec nos ports du littoral du Nord. Le canal des Ardennes unit le bassin de la Meuse avec l'Aisne, et par cette dernière rivière avec Paris et tout le réseau de la navigation de la Flandre. La Marne et le canal de la Marne au Rhin établissent entre Paris et l'Alsace une voie navigable qui se rattache au système des canaux du Nord par le canal de l'Aisne à la Marne. A Strasbourg, le canal de la Marne au Rhin se relie à celui du Rhône au Rhin, et le dernier, suivant la plaine de l'Alsace jusqu'à Mulhouse, puis franchissant le faite séparatif des vallées du Rhin et delà Saône, forme le NAVIGATION. 71 nœud de la grande artère qui, par la Saône et le Rhône, met l'Alsace et la Suisse en communication avec les houillères du bassin de Kive-de-Giers et avec la Méditer- ranée. Cette même ligne fluviale du lUiône et de la Saône est reliée avec Paris par le canal de Bourgogne, et par l'Yonne et la Seine. Le canal du Centre unit la Saône et la Loire, et sert de débouché aux exploitations houillères do Blanzy. Dans la vallée de la Loire, ce canal vient se joindre, à Digoin, au canal latéral qui, de Roanne à Briarc, sup- plée à l'imperfection de la navigation du fleuve. A Briare, et plus bas, au-dessus d'Orléans, prennent leur origine les deux canaux de Briare et d'Orléans, qui, réunis près de Monlargis, empruntent le cours du Loing canalisé, et viennent aboutir dans la Seine à Moret. A Decize commence le canal du Nivernais qui, après avoir franchi les montagnes du Morvan, si riches en forêts, vient déboucher dans l'Yonne à Auxerrc, et forme ainsi une seconde voie de communication navigable entre la Loire et la Seine. Au-dessous de Nevers, le canal du Bcrry se rattache au canal latéral à la Loire, et après avoir remonté jus- qu'à Monlluçon, descend par les vallées de l'Auron et du Cher, jusqu'à Tours, en coupant le vaste triangle que forme le cours de la Loire entre Nevers et Tours. Les houillères de Saint-Étienne, celles de Comméntry et les forges de Montluçon trouvent dans cet ensemble de voies navigables leur principal débouché vers Paris et la basse Loire. A Nantes commence le réseau des canaux de Bretagne qui mettent toute celte contrée en communication avec VI i,i;s Mi.i;\i ii.u;s i>Ks M,i:i;vKs kt i>ks nrissKM \. la Lofcc, «'I |.;ii' l;i l.oirp avcr lo cfiiliv AVIGADI,E>5 VOIKS FEI.KKES 1800 tonneaux kil. 1,7-2'2,0()(l,()(JO r,;;'),(KM),0()0 1855 — 2,l(;i,00(',n(X) 889,0v>,(XX),(K)i:s n.r.cvKS kt I'Is i;i isseaix pied (les MiM's [)i<'Mrioiil;iiscs, corriinc, j^niico niix canînixjj exi^luiils, il les Iransporlail naguc-re au niili-n MKUVKII.I.KS DES FI.KIVKS KT DKS F'.riSSKAI X. bninc.lu's (le biluicalioii qui voiil jiiMiu'à V.illadolid et lUosoco. Celui de San Carlos de la r.apita, près de l'embouchure de l'Kbre el allmenlé par les eaux de ce fleuve, a seule- ment 10 kilomètres environ. Il y a encore fjuclqui'S canaux d'in i^'ation dus en grande partie à rinlelli-ence et à la culture émérite des Maures, tels que celui du Uoi qui dérive des eaux du .lucar et qui compte jusqu'à 28 navillos provenant des eaux du Turia ; celui d'Urgel, dérivant du Sègré; celui de Louise-Charlotte, provenant du Lobre-at; celui de ■ Tamaritc de Litera, dérivant des eaux de ki Cinca ; celui delauste, provenant de l'tbre ; celui de Murcie, dérivant du Guardal ; ceux de la Yega de Grenade, pro- venant des eaux des Genil, Darro et autres; ceux de Colmenar et Âranjuez, dérivant des eaux du Tage, du Jarama, etc. Les habitants des campagnes et des rives, dans les provinces de Murcie et de Valence, ceuvdes provinces de Grenade , de Navarre et de la plaine de Tarragone se sont fait remarquer par le zèle et l'activité qu'ils ont déployés pour tirer parti des eaux au profit de. l'agriculture, dépensant des sommes considérables pour la faire progresser dans leurs contrées. Depuis plusieurs siècles, les divers gouvernements qui se sont succédés, et des personnes très-compétentes ont étudié les bassins hydrographiques de la Péninsule, afin de pouvoir établir des canaux de navigation et d'ir- rigation dans le but de diminuer le prix du transport 'des denrées et de fertiliser les terres fortes et maigres. Beaucoup de plans divers ont été conçus tant pour des canaux particuliers que pour un réseau général de cana- NAVIG.VTÏON. 81 lisalion ; Antonelli, Sicre, Lcmur et plusieurs autres ingénieurs fort habiles ont laissé à cet égard des projets très-importants et réalisables; cependant, les canaux achevés que l'Espagne possède sont encore en bien petit nombre. Le tableau suivant résume l'état actuel de la navigation intérieure : 'rf ) .Noinl)ie de baleaux NAVIGATION Monihro de kilomètres navi','^al)les à vapeur à rames de lialage Nombre d'hommes employés iNornbre de bêles de somme pour le service de halage Force de vapeur en chevaux Nombre de kilomètres navigables Maleaux Embarcations l Bateaux maichaiids cl au- \ très d»! Iransports. . . . Nombre d'hommes employés . Nombre de bètes de somme j)our le sei vic( de balafre C.mal eu construction, Uiiomt'lies 481 ô £h u 169 115 105 fi:; 281 250 797 2Ô iOl i(r> 19i;i 2 lôo:; 07 i:ô u Ôô") 512 1278 2(1 1157 550 .i2;)8 10 1554 212 250 70 GiG oG2 Dans ces derniers temps, on a senti davantage la né- cessité et l'utilité de la navigation sur les fleuves et les canaux. P^n Espagne, comme dans beaucoup d'autres pays, on a reconnu que le transport par eau est le plus économique et le plus rationnel, surtout quand il est combiné avec l'arrosement des campagnes limitrophes. 82 IVS MKUVKIIXKS lil> II.i:iVI> Il DKSIUISSKAIA. NAVIGATIO N EN PORTUGAL les rivières navigal,!cs sont le Tagc, le Do-Jn. I- MinV.o, la Guadiana et le Mondego ; elles suppléent a,. manque de routes pour transporter vers les coles es produits du pays, ncta.nmcnt les vus ; ma>s des bancs do .^able embarrassent les ernbouduires. V l'unhete, le Tage est large de 500 mètres ; de cet endroit à Lisbonne, il porte de grandes barques, et de Délits bateaux à vapeur y naviguent. ^ L le Douro, les bateaux plats peuvent remonter ju;qu-àTo,a de Moncorvo, à 160 kilomètres de a mer ; c'est par cette voie quOporto reçoit les vms de I mte-. rieur. NAV IGATION EN RUSSIE l 'immensité des dislances et l'insuffisance des routes de r e , jusqu'à un certain point, rachetées en L7e ar l'.endue du rés..u fl..ial^. er. coup.U dans tous les sens cette masse compacte et uia.ticulee, la rend abordable de toutes paris. I lexxeplion de la Vislule et du Niémen, I emp.r russ Po ede tous ses cours d'eau en entier, ce qu. n.e. ah"i à sa disposition les plus larges moyens d ecoule- '"ÏÏKrerÎotlenorddela.ussied-Europe NAVIGATION. 85 sont couverts de lacs et de cours (Veau, de sorte qu'il est impossible de trouver un pays mieux arrosé. On peut faire la même remarque quant à la Pologne et à la Russie du centre. Mais le Sud et le Snd-Est, quoique possédant les plus beaux fleuves du monde, manquent pourtant d'eau. De nombreuses vallées, appelées bal/ias^ sillonant le ter- rain uni de la steppe dans tous les sens et s'ouvrant prin- cipalement danslelitdes fleuves, [)rouvent.(iu'autrefois ce pays n'était pas aussi dépourvu d'eau que de nos jours. Par suite de la destruclion des for.els, les ruis- seaux qui remplissaient autrei'uis ces balkas sont des- séchés. Plusieui's grands fleuves, figuiant sur la carte, n'ont de l'eau que pendant une jai tie de l'année, comme par exemple le Manyisch, affluent du Don, et plusieurs autres. Le pays du Caucase et surtout la Transcaucasie sont très- bien arrosés. La Sibérie présente un grand nombre de lacs et de fleuves magnifiques et ne manque pas d'eau, excepté tou- tefois une partie de la plaine des Kirghiz. Dans quelques parties de la Fiidande, de la Russie d'I-'urope et de la Sibérie, l'abondance des eaux inté- rieures transforme le pays en marais. Les eanx ne trou- vant pas d'écoulement, en raison de l'état et delà nature du sol, deviennent stagnantes et rendent le terrain im- praticable. Telles sont les toiindars, entre le Mésen et la Petscliora, le long de la mer Polaire, plusieurs ter- rains siluésdans la légion des grands lacs, les bords du Pripel et de ses affluents (marais de Pinsk), et enfin quel- ques régions basses des gouvernements de Novgorod et de Twer, situés au pied des hauteurs du Waldaï. Vax Si l.i;s MKI'.VKIM.ES DKS FLKIVKS KT DKS l'.I ISSKAIX. Sibérie, inic |);ii (iclirs-coii.sid/'nihh» dos plninns du Nord, sinloiil sur les ))or.is de l'Obi cl, flu Vônissoi, jirôsonto lo inrine aspect que les louiidias de la l'etscliora et du Méscn. Les lacs de la Hussie se liouvent poui la plupart eu (iominunicatiou directe avec la mer et avec le système lluvial. il est impossible de séparer les lacs des fleu- ves, surtout dans la région des grands lacs du nord- ouest. Un petit nombre des lacs seulement se trouve en dehors du système fluvial ; tels sont : le lac Néro ou de Rostoff, gouvernement de Yaroslaw; son étendue est de 91 kilomètres carrés ; quelques lacs du gouvernement de Vilna, comme le Narotsch, d'une surface de 9i kilo- mètres; de Kowno, comme le lac Drisswiatuy, d'une sur- face de 47 kilomètres; de Yitepsk, comme le lac Ossweya> de 41) kilomètres. Un troisième groupe de lacs, n'ayant pas de commu- nication avec le système fluvial, est formé par les lacs du gouvernement deKherson et de Tauride; ces lacs, pour la plupart salés, se trouvent en communication directe avec la mer. En ne comptant que la partie navigable des fleu- ves et des rivières, on peut estimer que la Russie d'Eu- rope possède près de 50,557 kilomètres de cours d'eau navigahles.La longueur des rivières flottables peut être estimée au double. Dans le royaume de Pologne l'ensemble des rivières navigables et flottables a une longueur de 2061 kilomètres. Pour la Finlande, le Caucase et la Sibérie, on n'a pas de renseignements exacts. En général, le réseau fluvial de la Russie a une impor- N.VVK.ATION. 85 tanco immense, parce qu'il facilite singulièrement les communications et supplée avantageusement au manque de grandes routes. La nature des fleuves eu Russie, ainsi que des plaines traversées par ces fleuves, est telle, qu'il devient facile de réunir les différents bassins par des cours d'eau crétines artificiellemenl. Aussi, pour compléter le système fluvial qui forme la base de toutes les communications , a-t-on éla- bli un vaste système de canaux à l'aide desquels on peut traverser la Russie par eau d'un bout à l'autie. Grâce aux fleuves et aux canaux, toutes les mers limi- trophes de l'empire sont en communication directe entre elles. Les canaux de la Russie apparliennent à trois catégo- ries : Outre les canaux destinés à régler et à déverser les eaux dans l'intérieur de quelques villes, il faut distin- guer les canaux sans écluses des canaux pourvus d'un ou de plusieurs systèmes d'écluses. Les premiers lon- gent ordinairement une partie quelconque d'un lac ou d'une rivière inaccessible ou dangereuse à la navigation, tandis que les autres réunissent directement deux ou plu- sieurs bassins, Leur ensemble présente un développement total de 1,581 kilomètres. Par l'intermédiaire de ces canaux et du système flu- vial, les quatre mers environnant la Russie d'Europe se trouvent en communication directe entre elles. La communication entre la mer Baltique et la mer Caspienne se fait par trois systèmes : de Vyschni-Vo- lotschok, de Tikhvin et de Tlmpératrice-Marie. 80 IJ-S MKI'.VKIMJiS DKS FI.KCVES KT DKS l'.IISSKMX. liQ nior nnlliquc ('oriirnimifjne avoc l;i iiifi- .Noii»; par Irois syslriiins : de lu Dérésiiia, d'O^^iusky rii(' lloy.il. La rncr Hlanclio se trouve réunie avec la mer lîa'liqiie cl la nier (^aspicnnp par le systèinedii Piince-AlfXJiiidre- de-M ùrleniberg^. Grâce au développernciil du n'-sr-aii lliiv);il d ;jii\ nom- breux canaux t-tablis entre les différents bassins , le transport des produits bruts de la Fiussie d'Lurope, des- tinés au commerce en gros, se fait le plus souvent par eau. L'abondance des bois dans les gouvernements du Nord, du Nord-Est et d'une partie du Centre, favorise la construction de barques, et l'usage de démolir ces bar- ques à leur arrivée, pour les vendre sous foruic do bois de chauffage, rend ce genre de transport trés-avanta- geiix. Aussi pour tous les produits d'un certain volume, ou d'un grand poids , on préfère le transport par eau qui, dés lors, joue en Russie un rôle trés-inipor- lant. Les ports intérieurs sont très-nombreux ; les charge- ments s'y font ordinairement au commencement du printemps et à l'époque de la crue des eaux. Les transports par eau sont soumis à une taxe de na- vigation de un quart pour 100 de la valeur déclarée, pour l'entretien des ports, canaux, écluses et chemins de halage. D'après ces déclarations, qui sont générale- ment bien au-dessous de la valeur réelle, la moyenne annuelle, pour la période triennale de 1859 à 18G2, présente les chiffres suivants : NAVIGATION. 87 l'OIDà VALEUn (pouds*) (roubles*) Crirales et eau-de-vio lir>.'29f>,'217 57,K9S,208 Graines oléagineuses et huiles 0,709, 475 o,2!t8,C88 Lin et étoupes de lin I,8.i2,2ii7 3,615,080 Chanvre r>,vrU, 480 ;j,0;xi,86:> Tissus de lin et de ciianvre » 2,?)19,;)87 Colon brut et cotonnades » G, 112. 358 Sucre • 4:i7,482 5,599,000 Tabac 5(lG,(l27 095,371 Goudron, poix, térébenthine 1,1.21,961 9^'6,292 Produits ion^sliers « 10,5!)o,9i9 lîeurre, suit, thandelles, savon, stéarine. 5,643,376 12,276,959 l'eaux, louirures, cuirs » 2,255,348 l.aines et tissus de laine 581,400 2,103,476 i*oisson ot produits dérivés du poisson. 4,596,178 4,325.005 Métaux 14,402,822 16,588,566 l'olerie et vtriei-ie .. 922,024 Sel 17,109,147 5,74N,9S0 Potasse 7110,976 1,051,35!i Briques, pierres, cbaux 57,504,825 1,551,.')90 Divers « 25,545,602 TorAfx 572,004,599 167,558,585 D'après la moyenne des transports par gouvernements, pour la même période triennale (1859-1 86'2), il résulte ({n'en généi'al l'ouest et le sud de la lUissie d'Europe se trouvent dans une position beaucoup inoins avantageuse sous le rapport de la navigat-on fluviale que le reste de l'empire. C'est surtout dans le Nord, dans une partie du (-entre et dans l'Est que cette navigation a le plus grand développement. NAVI3ATI0N EN SUEDE Un grand nombre de lacs dont quelques-uns sont d'une vaste étendue dans les parties planes du pays faci- • I.c poud ou pud égale 16''f,58. * 1/3 rouble éi:ale 4 Irancs environ. ^fx i.i:s MKC.vKii.i.Ks i)i;s ii.MVKs i.T i>i;s i;i [ssi:aia. lilciil, .liiisi (ju(! (J(; pclilcs i-iviùres cl (Jrs rnii;iM\. |.i (îominiiilic'ilioM irU»''ri(Mirfi. Qiinnd ja Suède aura appris h laiic intAïU'v sou in- dustrie des puissants moteurs naturels rpio lui olCreut ses cours d'eau, elle y trouvera certainement Jes élémenls de ricliesses incalculables. Ainsi, par exemj.le, l'on a calcul.: que, à Vencrshor^' seulement, là où le lac a son écoulement, la masse d'eau est de 5,235 hectolitres par seconde, et que sa force est de 200,000 chevaux. Si on évaluait à oOpouriOO .seule- ment la force qu'il est possible d'utiliser dans celte masse d'eau, ce serait encore une force de jr»0,000 che- vaux dont pourrait disposer Tinduslrie suédoise. L'État, du reste, a fait de grands efforts pour facilitei-, à l'aide de voies navigables, les communications dans l'intérieur du pays. L'étendue des canaux et de la canalisation des rivières et des lacs était, à la fin de 1860, de 588 kilomètres. Les plus grands et les plus importants canaux sont ceux de Gota, Trollhœtte, Sœdertelje et Sirœmsholm. Le premier n'est pas seulement imporlant parce qu'il joint entre eux un grand nombre de lacs et de cours d'eau, et réunit la mer Baltique à la mer du Nord, mais aussi parce qu'il a été l'une des plus difficiles entreprises hy- drauliques de l'Europe. Ce canal a, en y comprenant le> lacs, une longueur de 186 kilomètres, dont la moitié environ a été creusée dans le sol, et présente 58 écluses. Le lac Yiken, où le canal atteint sa plus grande hauteur, est situé à 508 pieds suédois au-dessus du niveau de lu mer. Le canal de Trollhœtte, sur lequel la navigation par les écluses avec une pente de 55 mètres passe avec se- NAVKIATION. 80 curité devant les chutes du lleuvc de (Iota, est le plus jmcien ; car il fut conuuencé au seizième siècle. C'est ('('lui sur lequel a lieu le plus grand trafic. La navigation sur les canaux a pris, depuis une tren- taine d'années, un développement considérable. Le pro- grès de la navigation à vapeur se révèle par les résultats suivants : En 1847, sur les 12,981 bateaux des six princi- paux canaux, i,()18 seulement ou 12 et demi pour 100 étaient mus par la vapeur; mais en 18G5, sur les 18,558 bateaux de ces mêmes canaux, 4,052 ou 21,8 pour 100 étaient mus par la vapeur. NAVIGATION EN ANGLETERRE Les principaux fleuves de la Grande-Bretagne for- ment, dans leur partie inférieure, des bras de mer qui reçoivent les bâtiments du plus fort tonnage. Ainsi, à l'ouest, devant Liverpool, la Mersey n'a pas moins de 1 ,000 mètres de largeur quand la mer est haute ; la masse des eaux refoulées aux grandes marées d'équi- noxe est de 595,090,000 mètres cubes par 24 heures. Comme les navires y courraient des dangers s'ils devaient rester exj)osés aux marées et aux vents pendant les char- gements et les déchargements, on a construit de vastes docks où ils sont garantis. De l'autre côté de l'ile, la marée monte jusqu'à Lon- dres, à i20 kilomètres de l'embouchure de la Tamise. A la hauteur du Strand, le fleuve a 411 mètres de largeur et 9'" 14 de profondeur à marée haute. Il a passé, en 1858, à la remonte 9,050 navires jaugeant en- 00 lis Ml r.vi.ii.i.i.s iii> I i.i.i \i s 1,1 I.I.S 1'.(issi:m \ | s('rnl)l(' t>,l()X,.*i*)0 l()iiiu';iu\; cl, ;i l.i «IrHcnlc, 4,r>r, imviics (i'.mejan-c collcdivc de ],\l\,x'l'l tonneaux. La Clydo, à ronest de l'Kcosse, ollre un d<'s plus re- marquables exemples de ce (jU(; peut aeeomplir un peuple industrieux. Ce lleuve avait, au dix-sept i<'nie siè- cle, si peu de profondeur que les navires de rpielque liianl d'eau étaient ol)li;,^és de s'arrêter à 'lô kilomètres au-dessous de GlasgoNV, et de transborder leurs cliargi»- ments sur des radeaux ou des barques. .\nj.)ind']nii, des navires de 400 tonneaux remontent le cours de la Llyde et viennent déchar^^er leurs cargaisons sur les quais de la même ville. Les eaux ont été resserrées dans un canal del'22 métrés de large, et d'une profondeur de 4 métrés en morte eau, et de 5 mètres en haute mer. Des ma- chines à draguer ont creusé le lit pendant des années, et elles continuent, avec des cloches à plongeur, à empê- cher la formation de dépôts de sable. Des phares éclai- rent la navigation. Chaque année la dépense s'élève à l,:i50,000 flancs, non compris l'intérêt des 50 millions qu'ont coûtés les travaux de canalisation ; mais cette dé- pense n'est rien si l'on met en ligne de compte les avan- tages qu'en a retirés le commerce de Glasgow. Par le Ilumber s'écoulent vers le continent les pro- duits métallurgiques et textiles du comté d'York. De la ïyne, on voit soi tir à une seule marée jusqu'à 500 navires chargés de charbon, le tiers de l'exportation du bassin entier. Au midi, la Severn offre une ligne navigable de 250 kilomètres; sur un de ses affluents, l'Avon, est situé Bri.tul qui, en 1857, a compté à l'entrée 707 bâtiments de 190,559 tonneaux réunis, et à la sortie 555 bâtiments de 10*2,955 lomieaux. NAVIGATION. 91 Aux fleuves sont soudées des lignes de canaux qui mettent en conimunieation les principnux ports avec beaucoup de villes et d'établissements industriels. Le |)liis ancien canal est le Foss Dykc ouvert du temps des Uoniains et qui, étendu à diverses époques, joint au- jourd'hui le Witliam à la Trente. Le plus célèbre est celui que le duc de l'ridgevvater fit construire en 17«)G poui' amener économiquement à Mam;hester le produit des houillères qu'il possédait à uiUMlistance de 11) Idloniétres. Ce canal iVaiudiit l'Irwell sur un pont-aqueduc de 18G métrés de long, de sorte qu'au point d'intersection de ces deux lignes d'eau on peut voir voguer deux navires au-dessus l'un de l'au- tre. Un système de canaux met Liverpnol en conmiunica- tion avec le poit de Chester, les salines de Nantwich, Lllesmere et Biiniingham, et, par le canal de 225 kilo- mètres qui aboutit à Leeds, Liverpool communique en- core avec lAyr et l'Ouse, par suite avec IluU et la mer du Nord. Mais la principale ligne est celle qui unit la Tamise, la Mersey et la Severn, par conséquent Londres, Liver- pool et Brislol, par un système de canaux dont les plus considérables sont le Grand Jiinction qui a 150 kilomè- tres, et celui de la Trente à la Mersey qui a 107 kilo- mètres. Sans être à beaucoup près aussi fréquentées qu'avant la construction des (îhemins de Çcr, ces voies de naviga- tion sont encore très-utiles, surtout pour le transport des houilles et des sels. On a établi, sur le canal de Drid- i:ewater, un système de touage à la vapeur au moyen noI ; succéder 8 écluses qu'on a surnomn>èesrescalK.r de Ne :::, et qm servent à élever les bât meus au. hauteur de 18 mètres et à les redescendre de 1 autre côté. NAVIGATION EN HOLLANDE Ce pays est celui qui, en proportion de son étendue, renferme le plus grand nombre de voies navigables. On peut comparer les canaux de la Hollande, en nom- bre et en dimensions, aux grandes routes de Angle- terre • de même que celles-ci sont conlmuellement couvertes de voitures et de cavaliers, on voit sur le. canaux, les Hollandais dans leurs barques de plaisance, leurs yachts et leurs bateaux de charge, voyager conti- nuellement et transporter des marchandises, pour h consommation ou l'exportation, des ports de mer dani NAVIGATION. 95 l'inléricur et réciproqnerruMit. Quand les canaux sont ^^elés, les Hollandais y voyagent en patins et pai'courent de grandes distances en très-peu de temps. Les mar- chandises sont également transportées sur la glace dans des traîneaux et même dans des charrettes. Les canaux ont généralement 18 métrés de large et sont soigneusement curés , la vase que l'on en retire fournissant un engrais excellent pour les terres. Ils sont en général de niveau et conséquemment n'exigent pas d'écluses. Comme la i)lu[)art sont élevés au-dessus du sol, on recourt à des moyens mécaniques pour les faire servir de décharge aux eaux qui inondent les champs pendant l'hiver. Le canal le plus considérable est celui de la Hollande septentrionale qui a été construit par Blanken, entre Amsterdam et le Niewdiep, prés du Ilelder. Par cette voie les bâtiments évitent les dangers auxquels ils étaient exposés au milieu des îles et des bancs de sable du Zuyderzée. La Hollande entretient aussi, du côté de l'Allemagne, une navigation fluviale tiès-importante au moyen du lUiin dont elle tient l'embouchure. Sans être maîtresse absolue de cette voie commerciale, comme à la fin de la guerre qui l'affranchit de la domination espagnole, elle sait profiter encore de sa situation, et ses bateaux à va- peur soutiennent sans désavantage la concui'i'ence des chemins de fer allemands et belges. |,|> MLUVKII.LKS DKS ILtl VKS KT I»KS lU ISSKM \ NAVIGATION EN BELGIQUE l'eu (11! pavs cil i;iir<)i>*' sont arioséb aussi uboiulfiFn- i ment que la Belgique. L'Escaut, ((iii traverse son territoire sur une .'tendue de 2i0 kilomètres, (St large à Anvers de 450 mètres, et les passes y ont une profondeur de 9 mètreh que le flux porte à IT). Sur la Meuse, la navigation est moins facile malgré les travaux de canalisation, et, à partir de Liège, elle passe par un canal qui aboutit à celui de Bois-le-Duc. Mais un excellent système de voies artificielles met en communi- cation toutes les villes importantes. La Meuse «'st unie à l'Escaut, par conséquent Liège à Bruxelles, par le canal du Nord; Bruxelles communique avec Anvers par le canal de Willebroeck, et avec Charleroi par le canal de ce nom. Gand, qui est entrecoupé par un grand nombre de ca- naux aboutissant à l'Escaut, à la LiVe, à la Lys et au Moere, est mis en communication avec la mer par le canal de Terneuse, et avec Bruges et Ostende par le canal de Bruges. On a ouvert récemment le canal de la Gainpine qui prend son origine à celui de Maestricht et joint cette ville à Anvers au moyen de la Grande-Nélhe . Par les eaux intérieures, il se fait entre Bruxelles et la Hollande un commerce qui a occupé 115 bateaux en 1856. Enfin, des communications sont établies avec la KVVir.VTION. 95 France au moyen du canal de Mons à Condé, qui sert à transporter des quantités considérables de charbon, du canal de Furnes, qui relie Binées à llunkercfue, et du canal de Roubai^ qui, en joignant à I Fscaut le canal de la Deule, met en communication les villes de Lille e( de Gand. NAVIGATION EN ALLEMAGNE La navigalion sur le Uhin est réglée par des conven- tions entre les Ftats riverains. En amont de Strasbourg, cette navigation ne se com- pose gucrc que de trains de bois ; la rapidité du fleuve, la mobilité des fonds de gravier et de sable, ainsi que le peu de fixité des rives, gênent la navigation, et les transpoits se font de préférence par les voies ferrés et le canal du Rhône au Rhin. C'est au-dessous de Strasbourg que la batellerie a le plus d'activité. Le Rhin est uni au Danube par le Mein, la Regnitz et le canal Louis ; mais celte ligne est peu fréquentée à cause des difhcullés que la navigation rencontre sur les deux rivières. L'Autriche a exécuté sur le Danube, ainsi que sur ses aflluents, de grands travaux qui en ont facilité le par- cours. De liatisbonne à Vienne, ce lleuve porte des ba- teaux de 50 à 100 tonneaux métriques, et, entre Vienne et Belgrade, des bateaux jaugeant riOO tonneaux. LElbe est allemand dans la totalité de son cours, qui a 1148 kilomètres de longueur. De Magdebourg à Ham- bourg, ce fleuve est navigable pour les bateaux d'un ti- rant d'eau de T) à i mètres, et, à partir de Hambourg, il .,0 l,i:sMi:i;V!.III,l.< M> Ml.'^l> '-' '"-^ H'KM.MX. ,sl ac.Tssil)l(' M tous les l)àtii.i.Mil> innn:li;.neu- châtel, de Thun, de Brientz, entre les pomts du rivage les plus fréquentés. NAVIGATION. 07 NAVIGATION DANS L'AMERIQUE DU NORD C'est dans les Etats-Unis que la navigation intérioure <»st organisée sur la plus grande échelle. Dotée par la nature de fleuves magnifiques et de lacs dont les cinq principaux forment dans le Nord une ligne de navigation de 2575 kilomètres de longueur, l'inion a centuplé l'uti- lité de ces voies immenses par un nombre considérable de canaux et d'ouvrages aussi ingénieusement conçus qu'habilement exécutés. Il y a vingt ans, le mouvement de la navigation entre l'intérieur des terres et les côles de l'Atlantique s'opérait principalement pai' une ligne dont New -York et la Nouvelle-Orléans formaient les deux points extrêmes. New-York, principal entrepôt du commerce intérieur et t'xtérieur de l'Union, communiquait avec le lac Érié par le grand canal de ce nom (c'est le plus ancien des ca- naux américains ; il a 580 kilomètres .de long). Au même lac aboutissait la route commerciale, moins im- portante ({u'aujourd'hui, qui passe par le fleuve Saint- Laurent, le lac Ontario et le canal AYelland. Va\ traversant le lac Erié, le lac Saint-Clair, le lac lluron et le lac Michigan, puis en passant par le canal evv-Yor étant relié à Philadelphie par le canal de banian a la Delaware, le commerce de la première de ces villes a même un avantage, pour la distance, à passer par a route de Pensylvanie, au lieu de suivre les voies ferrées ou navigables de 1 État de New-York. On a créé, dans ces dernières années, une grande li<.ne de navigation qui. de Liverpool, en Angleterre, Xnd jusqu'I Saini-Louissur le Mississipi et Cincinnati sur rOhio. De Saint-Louis les marchandises arnven a Chicago par Plllinois et le canal de Michigan, puis elles sont embarquées par des navires à voilesou a vapeur, e par les lacs Michigan, Iluron, Saint-Clair et Erie, pa le caLlWeUaad,lelac Ontario elle Saint-Laurent, elles .aanent Montréal ou Québec où elles sont transbordées. NAVIGATION. 99 en été, sur des bateaux à vapeur qui se diri<^ent vers Liverpool; en hiver, elles sont expédiées à Montréal par un chemin de Ter qui les conduit à Portland dans le Maine d'où elles parlent pour l'Angleterre. De Cincin- nati on gagne, par le canal de l'Ohio, le lac Érié, puis on suit la route indiquée ci-dessus. Dans celte ligne est compris un chemin de fer qui va de Montréal à Détroit en passant par Toronto, et qui reçoit dans cette dernière ville les produils du Nord-Uuest qui arrivent par les lacs Supérieurs dans la baie de Géorgie, puis par le chemin de fer de Coliingwood qui la relie à Toronto. La même ligne sert en sens inverse pour les transports des pro- duits britanniques. Des cnnaux sont combinés de manière à mettre en connriunication le Nord et le Sud le long des col es de l'Atlantique. Le premier, au nord, est le canal de Razitan à la Delawar^, qui forme une ro. te de commerce de 60 kilomètres entre New-York et Philadelphie ; un autre unit la baie de la Delaware à celle de la Chesapeake ; puis un troisième entre la Chesapeake et le Sound d'Al- bemarle, complétera une ligne de navigation intérieure (jui pourrait être fort utile en cas de guerre. D'autres canaux, situés entre les districts houillers de la Pensylvanie et les côtes de l'Atlant-que, servent à liansporter des quantités d'anthracites qu'on évalue à plus de cinq lîiillions de tonnes par année. Les princi- paux sont le canal de Schuylkill long de 174 kilomètres, avec celui de la Delaware à l'IIudson, le canal du Lahigh (ir>5 kilom.) et le canal Morris, curieux en ce que les écluses sont remplacées en grande partie par des plans inclinés le long desquels un bateau est porté par un chariot qui, soutenu au moven d'im^èWMIiç^lisse sur ^^J^^aw;^, ,„„ ,,i,s mki.vk.i,m;s nr.s nu vi.s 1,1 i.i> l'.nssKMX. ,, .„. ,ail> .M l-is .1 -M l--. Il arriv,. en ontn. p.n l„s;.„is ,,ro,ni«rs .le ,-..s can.nx, s .!.• l.n- 4r;. ^oi., a ,....U ..nus .es p..^^^^^^^^^ -mies- IS'JO, TmIIII "■■'"^•- '**•'"' -""""•' )tm \ 1 «-.O. '21 1, 7H7 . ..a navigation à vapeur scnl. ■■ta.l •ï h .son, qui d.-.lKm,l,o clans l'AllanUqu.. , .vau. N.;!yo,U, est l.avisal.1. pour de grands bàUmen.s ,.- ;,„■;, u„e distance de 1 80 kilomètres de son "ml'oud.ure ; .!t les sCooners le ren,ontent jusqu a Iroy, a JO k.lo- is. La largeur, au-dessous d'Alhany, vane d.^2^ à 820 mètres. Les steamers employés au » -P» ^ J^ voya-curs sont construits de mann.re a marche, rap.d^ „ .'• ils sont fort allongés .elativement a leur base . " ont mua Ca.ble ti.ant d'eau, .\ucun nav.re pu . hc n 0 - ■cm plus s.and lu.e d'in^allation el crameul.lemc.t ; 0 re Li .lue Boie et velours, tentures et lap.s s,m.p- Lux- les glaces et les do.-nres brillent de tous cote,. 0 ;averse''de masnif.q..es paysages e.rto.ue de ou co.ifort d'un hôtel de premier ordre; auss, n esl-il pa> rdevoir, pendant les chaleu.-s. des A..er.cau.s .n- siallés en permanence sur les steamers, comme on 1 e.l en Em-ope dans les bains de mer. Les remorqueurs offrent un spectacle non momsc - rieux lorsqu'ils remontent entourés d .,n groupe de ba- a X de différentes grandeurs amarrés à leurs flanc, 7L"is de marchandises. A mesure que cette flotfU , .c lesbateaux se détachent devant les v.Ues auxquel- doivent serendre,etil en reste une dem.-d— autour du remorqueur lorsqu'il arr.ve devant Albany. ^•AVI(;ATlo^■. loi La navigation sur le Mississipi et sos afllnonts est j)li!s rude et plus périlleuse. Ce grand fleuve débite, dit-on, pai' minute 1 ,151 ,'297 mètres cubes au-dessous du con- lluent du Missouri. 11 a 30 à 40 mètres de profondeur au confluent de l'Ohio, et sa largeur est de 2500 mètres à la jonction du Missouri, de 1450 mètres à Saint-Louis, de 2200 mètres au confluenl de l'Ohio, de 1500 mètres à celui de l'Arkansas, de 900 mètres au fort Adams. La pente moyenne est déplus de 1 centimètre par 100 mè- tres. A l'époque des deux crues annuelles, le fleuve s'élève, au-dessus de son niveau ordinaire, de 4 mètres à la Nouvelle-Orléans, de 8 mètres à Bàton-Houge, de 15 mètres entre le fort Adams et l'Ohio, et de Oà 7 mè- Ires au delà. Le cours est très-rapide dans la partie su- périeure; plus bas, la vitesse est évaluée à environ 2 ki- lomètres à l'heure. A mesure que les forêts qui couvraient les rives sont abattues par les défricheurs, on ne voit plus aussi fréquemment qu'autrefois des bouquets d'ar- bres se détacher des bords et former autant d'écueils en suivant le cours du fleuve, ou changer les passes en s'altachant au lit ou au rivage. Cependant il arrive encore de ces îles flotlanles de la partie supérieure. Sur le principal affluent du Mississipi , le Missouri dont la largeur varie de I à 2 kilomètres, les arbres dé- racinés flottent en abondance. L'Ohio est parsemé d'îles verdoyantes, mais dangereuses pour la navigation ; sa vitesse est de 2 kilomètres à l'heure dans la hauteur moyenne des eaux, et sa pente de plus de 2 cenlimètres par 100 mètres à Louisville. Comme le bois abonde encore dans la partie supé- rieure du Mississipi, on y construit, pour le transport des marchandises, des bateaux qui descendent à gré d'eau et lO'i IIS MlIiVI II.IKS DKS FLErVES ET DES RI'ISSEAIX. ne r.'Mioiilciit jarii.iis ; loisfjii'ils soiil. airiviis à destination on l<»s (l(''|)(';c(! (!l on vend h' Ijois. 11 y a, on onlic, snr le Mississipi et ses yfflnenfs, un j^rand n()nil)i(; (hî )>atc'Jinx à va[)onrfpii les dcsceinIfMit ot ic.s remontent inc.ossarntncnt, ; c(Mi\ qni servent an trans- (K)rl (l(!s v()yaj,M!ni's sont connne de grandes maisons ilottanles. Le fond est anssi plat que possible ; sur le pont sont placées les chaudières et les machines, sans entourage ni clôture ; de distance en distanc»', des piliers soutiennent les étages dans lesquels sont renfermés les salons, les chambres et autres compartiments néces- saires au sei'vice; puis, au-dessus du toit, sortent les deux noires cheminées. De même que sur l'IIudson, l'in- stallation et l'ameublement sont magnifiques. NAVIGATION DANS LE CANADA Le Saint-Laurent, qui joint les grands lacs à l'Atlanti- que, forme une ligne de navigation très-importante entre cet Océan et l'intérieur du continent américain. Large de 120 kilomètres à son embouchure et de 40 kilomètres devant la vallée du Métis, ce fleuve l'est encore de 12 ki- lomètres devant Québec à 450 kilomètres de la mer. 11 a 70 mètres de profondeur au confluent du Saguenoy, et il en conserve encore assez à la hauteur de Québec pour porteries plus gros bâtiments. De celte ville à Montréal, sur une étendue de 227 ki- lomètres, les navires à voiles remontent en deux jours à la suite des remorqueurs à vapeur, se croisant avec les canots des Indiens, les embarcations des pêclieurs et les énormes radeaux de bois de charpente. Une grande partie NAVIGATION. 103 des émigrants des îles Britanniques, qui se rendent aux Ktats-Unis, passent par celte voie de navigation. Il existe sur la ligne du Saint-Laurent, entre le lac Érié et Québec, huit canaux latéraux. Le plus remarquable est le canal Welland, au moyen duquel on passe du lac Érié dans le lac Ontario, en tournant la cataracte du Niagara. Il a 45 kilomètres de long, 25 mètres de large à la ligne de floltaison et 1 4 mètres au plat-fond; il rachète par 27 écluses une différence de niveau de 100 mètres entre les deux lacs. Les sept autres canaux construits plus bas, de distance en distance, permettent d'éviter les rapides et les écueils ; les quatre premiers ont une longueur totale de 15 kilo- mètres, et chacun une largeur de 27 mètres à la ligne de flottaison, et de 15 mètres au plat-fond ; ils rachètent une difféience de niveau de 9 mètres. Le canal de Corn- vvall a près de 18 kilomèlres de longueur, 45 mètres de largeur à la ligne de flottaison, et 50 au plat-fond; il rachète une différence de niveau de 14 mètres. Le canal de Welland a été traversé, en 1856, par 3,885 bâtiments ou bateaux portant 2, \ 92,448 tonneaux ; le tonnage total en navires et en marchandises, sur les huit canaux latéraux, s'est élevé, pendant la même année, à 4,801,011 tonneaux. La navigation s'étend, dans l'intérieur du Canada, au moyen des deux principaux affluents du Saint-Laurent, le Saguenay et l'Oltavva. Le premier a 56 mètres de pro- fondeur à son embouchure, et au-dessus de la barre qui s'y trouve, 250 mètres, qu'il conserve sur une grande partie de son cours ; les plus grands bâtiments peuvent le remonter jusqu'à 80 kilomèlres. De l'Oltawa, qui est aussi très-profond, le canal de Rideau, descendant à ii)i ii.s Mi;i'.vi:(i,i,i;s i)i;s ri.Ki vi:s ht dks f.iisskmx. Kin^^sloii, met ce Ilciivc en cornrnunicjjlioii ;ivcc je Ik Oiil.'ii'io. NAVIGATION DANS L'AMERIQUE OU SUD L'OS iiiajestUL'u.v (loiivos de I AmrjiqiK' inriidioii.'»!*' ciTacoiil, par la longueur de leur cours el 1;» largeur de leur lit, tous ceux de l'ancien inonde. Le superbe Amazone revendique le preiniei- rang. Ce ileuve, que les espagnols nomment Marahon, et les indigènes Guihia, ne prend le nom d'Amazone qu'au confluent de deux grandes rivières, le Taurjurarjua et VUcayale, qui ont leurs sources dans les Andes. Le premier Européen qui raitexploré,Orellana, affijina qu'on trouvait sur ses bords des femmes belliqueuses armées d'arcs. Il n'en fallut pas davantage pour renou- veler l'antique tradition des femmes du Thermodente. A cette occasion il convient de remarquer que les voya- geurs du seizième siècle avaient une singulière pro- pension à retrouver, dans le nouveau monde, les fables antiques de la Grèce. Du reste, un récit semblable à ce- lui que rapporte Orellana fut fait à M. de la Condamine. et Ton peut admettre que des femmes indiennes, lasses du joug des guerriers, se seraient soustraites à leur pou- voir pour mener une vie errante et belliqueuse sur les bords du grand fleuve. Depuis son confluent avec le rio Negro jusqu'à l'Océan, l'Amazone a 1,400 kilomètres de cours ; depuis la source du Tanguragua, il a 4,600 kilomètres, y compris ses grandes sinuosités. NAVIGATION. 107 La largeur de ce fleuve varie de 2 à i kilomètres dans la partie inférieure de son cours; sa profon- deur dépasse iOO brasses; mais depuis son conftuent avec le Xingu, et près de son embouchure, il devient semblable à une mer ; l'œil peut à peine découvrir ses deux rivages à la fois. La marée s'y fait sentir à une distance de plus de 1,000 kilomètres. Près de l'embouchure on voit un combat terrible en- tre les eaux du fleuve, qui tendent à se décharger, et les flots de l'Océan qui se pressent pour entrer dans le lit de la rivière. Deux fois par jour, l'Amazone verse ses eaux ou, pour mieux dire, ses mers prisonnières dans rOcéan. Une montagne liquide s'élève à une hauteur de 50 brasses. Elle se rencontre a^sez souvent avec la marée montante de la mer ; le choc terrible de ces deux masses d'eau fait trembler toutes les îles d'alentour ; les pêcheurs, les navigateurs s'éloignent avec effroi. Le lendemain ou le surlendemain de chaque nouvelle ou pleine lune, temps où les marées sont les plus fortes, l'Amazone semble aussi redoubler de puissance et d'énergie. Ses eaux et celles de l'Océan se précipitent au combat comme deux armées ; les rivages sont inondés de leurs flols écumeux; les rochers, entraînés comme des galels légers, se heurtent sur le dos de l'onde qui les porte. De longs mugissements roulent d'île en île; on- dirait que le génie du fleuve et le dieu de l'Océan se disputent l'empire des flots. Les Indiens désignent ce phénomène sous le nom de i)ororoca. Parmi les grands fleuves de l'Amérique méridionale, le second rang appartient au fleuve que les Espagnols los IIS Ml l;VI.II.I,i:s I)i;S [•I.KIVKS KT DKS ItlISSKM \. iioiimiciil lit) (le la l'Idln, on rivi<'T<' (i';ir;,'enl. il est ïoiiiu' \)i\v le coiicoiirs (h' plusieurs grands courants, paririi loscjucls l;i l'arana est regardée coriiiiH* l*; Ih;i> principal ; grossie d'une foule de rivières, eiU; coule à Iravoj's nue conliV-e nionlaj^qieuse. Ce fpi'on -'i|)pelle la grande cataracte de la l'arana, non loin de la ville de Guayia, est un long rapide, où le fleuve, pendant l'espace de 50 kiloiiii'lres, se presse à travers des rochers taillés à pic et déchirés par des crevasses effroyahles. Après avoir reçu plusieurs autres affluents, la rivière de la Plat;) présente un cours majestueux qui égale en largeur celui de l'Amazone; son immense cmhouchure pourrait même être considérée comme un golfe, puisqu'elle approche de la iManchc en largeur. On compte pour le troisième grand fleuve VOrinoa/ ou VOrénoque; mais il est loin d'égaler les deux autres, soit par la longueur, soit par la largeur de son cours. Le courant formé par ce fleuve, entre le continent de l'Amérique du Sud et l'ile de la Trinité, est d'une telle force, que les navires, favorisés par un vent frais de l'ouest, peuvent à peine le refouler. Cet endroit, soli- taire et redouté, s'appelle le goJfe Triste. L'entrée en est fermée par la bouche du Dragon. C'est là que, du mi- lieu des Ilots furieux, s'élèvent d'énormes rochers isolés, restes de la digue antique renversée par le courant qui joignit jadis l'île de la Trinité à la côte de Paria. Ce fut à l'aspect de ces lieux que Colomb fut convaincu, pour la première fois, de l'existence du continent de l'Amérique. « Une quantité si prodigieuse d'eau douce, disait cet excellent observateur, n'a pu être rassemblée que par un fleuve d'un cours très-prolongé. La terre qui donne cette eau doit être un continent, et non pas une KAVltATlON. 109 lie. » Mais ignorant la ressemblance clo physionomie qu'ont entre elles toutes les productions du climat des palmes, Colomb pensa que le nouveau continent était la prolongation de la côte orientale de l'Asie. La douce Iraîcheur de l'air du soir, la pureté éthérée du firma- ment, les émanations balsamiques des fleurs que la bi'ise de terre lui apportait, tout lui lit conjeclui'er (ju'il ne devait pas élre éloigné du jardin d'Éden, ce séjour sacré des premiers humains. L'Oiinoco lui parut un des qua- tre fleuves qui, selon les tiaditions respectables du inonde primitif, sortaient du paradis terrestre pour ai'roseï' et partager la terre nouvellement décorée de j)lantes. L'Orinoco a plusieurs cataractes, parmi lesquelles on dislingue celles de Mai/pures et cVAstures. L'une et l'au- tre ont peu d'élévation et doivent leur formation à un archipel d'îlots et de rochers. Ces rapides présentent des aspects trés-piltoresques. Lorsque du village de Maypuies on descend au bord du euve, en franchissant le rocher de Manimi, on jouit d'un aspect tout à fait merveilleux. Les yenx mesurent soudainement une nappe écumeuse d'un mille d'étendue. Des masses de rochers d'un noir de fer sortent de son tscin comme de hautes tours ; chaque îlot, chaque roche se pare d'arbres vigoureux et pressés en groupes; au- dessus de l'eau est sans cesse suspendue une fumée épaisse ; à travers ce brouillard vaporeux où se résout l'écume, s'élance la cime des hauts palmiers. Dès que le layon brûlant du soleil du soir vient se briser dans le nuage humide, les phénomènes de l'optique présen- tent un véritable eidantenient. Les aies colorés dis- paraissent et renaissent tour à tour; et, jouet léger de 1 1 „ i,i;s Mi;i',vi;ii,i r.s iiKS h.khes ki ih> l'.i i->km >>■ |.,i, |,,„, ,„„,;;,. se bala.H'C sans cesse auKmr «les ro.;, pHés. Leseanx „MM„M,ranl.s .mt, dans les lon);nei sa.- „ns des plu,es, eula.sé des iles ^Oo""F - n„„v(.<; nour prouver que de telles conjonctions des.neu^tb Paient impossibles. Aujourd'hui l'on na plus heso.n n, d'analogie, ni de raisonnements critiques. M. d llu n- boldt a navigué sur ces rivières, et a étudie cette s.n- '■■ulière disposition du terrain. " Il est certain que l'Orinoco et le rio Negro errent sur un plateau qui, dans celte partie, na aucune pente dé- cidée ; aucune chaîne de montagnes ne sépare leurs bas- sins- une vallée se présente, leurs eaux s y écoulent et S'Y réunissent : voilà le fameux bras de Casiqu are au moyen duquel JIM. de Humboldl et Bonpland ont passe du rio Kegro dans l'Orénoque. NAV IG ATI ON DANS LE BRÉSIL Le Brésil possède trois grands bassins, sans en comp- ter beaucoup d'autres de deuxième ordre. Le plus remarquable est celui de 1 .\mazone ; vient ensuite celui du Paraguay (l'un des tributaires du no de la Plata), et enfin celui de San Francisco. NAVIGATION. iH Le majestueux Amazone, qui compte plus de 2,200 ki- lomètres dans le territoire de l'empire, s'enrichit de 18 affluents, dont 9 sur la rive droite, et 9 sur la rive gau- che. Presque tous sont des lleuves de premier ordre, et quelques-uns ont plus de 2,000 kilomètres de cours. Leur étendue totale franchement navigable à la vapeur est de 4,000 kilomètres, en deçà des premières chutes, qui se trouvent sur les limites du Para et de l'Amazone. Le tableau suivant indique l'étendue navigable à la vapeur dans le bassin de l'Amazone brésilien : Amazone 2,000 Bassins de ses principaux affluents. . . . 25,600 Affluenls moindres, lacs et canaux. . . . 4,400 Total en kilomètres. 4,600 Par l'Amazone et ses affluents, on peut arriver aux républiques de la Bolivie, du Pérou, de l'Equateur, de la Nouvelle-Grenade et du Venezuela. Il y a déjà longtemps que des bateaux à vapeur parcou- rent ce fleuve avec la plus exacte régularité, franchissant en dix jours les 2,600 kilomètres qui séparent la ville de Para de Tabatinga, frontière du Pérou. Dans le bassin de l'Amazone, qui est complètement dépourvu de montagnes, les vents de l'est pénètrent à plus de 1,300 kilomètres dans l'intérieur du pays, prin- cipalement de juillet à novembre. Les navires à voile remontent alors facilement le grand fleuve en vingt- cinq à trente jours, de Para à Manaos, franchissant ainsi 1,300 kilomètres. La partie du bassin du Paraguay qui appartient au Brésil a un développement de plus de i,oOO kilomètres. On peut considérer comme des bassins tributaires de iii ii;s MKiivi:iiJ,i.s iji;s ii.i:i:vi:s kt dks ui issealx. c<'liii- pi'ovinces de; Malo Grosso, de Goyaz, de Minas Geraes, de Saiiit-i'aul, de Parana et de San l'edro, du liio Grande du Sud. Naissant dans la province de Mato Grosso, leParaf^uay (îoule, dans la plus ^^ande parlie de son cours, sur le territoire ])résilien, passe ensuite par la réj)id)]ique du Paraguay et la l'épublique Argentine et, s'étant joint au Parana et à l'Uruguay, prend le nom de rio de la Plata sous lequel il se jette dans l'Océan. Il est navigable à la vapeur depuis son embouchure jusqu'à Villa Maria, lieu situé à 180 kilomètres de]Cuyaba, capitale de la province de Mato Grosso, et de là la navi-- gation se prolonge jusqu'à cette dernière ville par ses affluents. Le fleuve San Francisco traverse la partie orientale du Brésil ; il forme la grande et majestueuse cataracte de Paulo Affonso, et, au-dessus de cette chute d'eau, il (îompte encore 1,000 kilomètres de franche navigation. Outre ces grands fleuves, il y en a encore une quin- zaine qui se jettent dans la mer, et parmi lesquels on en trouve quelques-uns qui comptent jusqu'à 400 kilomètres navigables à la vapeur. Le gouvernement, convaincu des grands avantages qui doivent résulter de l'étude des cours d'eau les plus im- portants, fait continuer les explorations, précédemment entreprises, par d'habiles et savants ingénieurs. Pour faire apprécier tout l'intérêt qui se rattache à ces explorations, on fera remarquer que l'Amazone, le >AVIG.\TION. HT) Tapajoz, le Paraguay, le Parana et le l'io de la Plata, l'ont, d'une grande partie de l'Amérique du Sud, une sorte d'We occ'ano-lluriale; qu'il suffirait, pour la com- pléter, de réunir les origines du Tapajoz à celles du Pa- raguay, dont elles ne sont séparées que par une petite étendue de terrain. Si l'on y réussit, presque tout le vaste territoire du Brésil, le Paraguay, une partie de la confédération ArgtMitine et l'État Oriental, seront con- vertis en une île baignée par l'Océan et par ces fleuves. LeL San Francisco, d'autre part, pourra peut-être se réunir au Jaguaribe par un canal, formant ainsi une se- conde île océano-fluviale; et lorsqu'on aura relié le pre- mier de ces fleuves, dans les différentes parties de son cours, à l'Océan par le prolongement des chemins do fer de Don Pedro II, de Bahia et de Pernambouc, les ports de Uio de Janeiro, de Babia et du Bécife seront liés au Cyera par une voie de comnmnication intérieure non in- terrompue. Cette voie fournirait de nombreux débouchés aux produits des provinces qu'elle traverserait. Dans le but de favoriser la grandeur de l'empire, en facilitant de plus en .plus ses relations commerciales, et en encourageant la navigation et le commerce de l'Amazone et de ses affluents, du Tocaiitins et du San Francisco, le gouvernemejit décréta que le fleuve des Amazones sera ouveit à la navigation manbande de toutes les nations jusqu'à la fronlièie du Brésil, ainsi que le Tocantins jusqu'à Cameta, le Tapajoz jusqu'à Santa- rem, le Madiera jusqu'à Barba, le rio Negro jusqu'à Manaos, et le San Francisco juqu'à la ville de Penedo. Il/» ii> Mi:i;\i;ii,i.Ks DKs riixvKs kt dks iinssKAtx. NAVIGATION EN EOVPTE L'Kj^yplc, VA' pa\.s unique. (I;iii.s la iialnic, iiiiiqn»; Vail- les fastes de l'histoire, ratlaclic rACiique au monde civilisé. I/Égypteest une vallée que le Nil arrose après l'avoii en partie formée, et que resserre, à droite comme à gauche, la stérile immensité des déserts. Grâce aux dons de ce fleuve, elle peut se passer du reste de la terre et du ciel lui-même. Le Nil, le plus grand fleuve de l'Afrique et de l'ancien monde, prend sa source dans des régions voisines fit- l'équatcur. Il est principalement constitué par deux grands coui> d'eau, le Ba/ir-el-Abiad ou Nil blanc, qu'on regarde comme le vrai Nil, et le Bahr-el-Azrek ou Nil bleu, qui se réunissent à Khartoum, en Nubie, par io^'ôT de lati- tude nord. Le Bahr-el-Azrek, qu'on a pris longtemps pour le vrai Nil, naît en Abyssinie par 10"59' de latitude nord, et 54°55' de latitude est, traverse le lac Dembea, baigne les provinces de Gojam, Damot et autres contrées abyssiniennes, puis entre dans le Sennaar, et se joint au Nil à 8 kilomètres sud d'Halfay, après un cours d'en- viron 1,600 kilomètres; ce cours est très-rapide, et olfrt^ plusieurs cascades dont une a "25 mètres de hauteur. On a discuté, pendant longtemps, pour savoir laquelle, de ces deux rivières, est le Nil véritable; on s'accorde, aujourd'hui, à donner ce titre au Bahr-el-Abiad. Il ré- sulte, de recherches récentes, que ce cours d'eau es! formé par la réunion de trois rivières : le Keilalh, venant lllli1llllllillH'''''''il''l'liill iliiii'liTi'-!^ii:iilillillii navk;ation. m de rOuost ou du Soudan central; le Saubat, venant de l'Est, des montagnes d'Abyssinie; le Rahr-el-Abiad pro- prement dit, ou vrai Nil, appelé Kir par les nègres, el coulant du sud au nord entre les deux précédents. Les anciens faisaient sortir le j\il des monts Al-Kamar ou montagnes de la Lune dont la place est indéter- minée. De nos jours, les frères d'Abbadie crurent avoir dé- couvert les sources du Nil (1846), et les placèrent au sud derAbyssinie,par 7°49' latitude nord et o4°38' lon- gitude est; mais des recherches ultérieures ont démon- tré qu'ils s'étaient arrêtés à l'un des affluents du fleuve, l'Uma, et que le cours principal venait de plus loin encore. On suppose que ce grand cours d'eau n'est que l'écou- lement d'un vaste lac, le lac Ukérévé ou Nyanza, ex- ploré, en 1862, par les capitaines anglais Speke et Grant, ou qu'il est le produit des neiges éternelles qui couvrent les monts Kombirat, Kénia et Kilimandjaro, placés sous l'équateur ou même au sud de cette ligne. Le Nil traverse la Nubie, arrosant les pays de llalfay Chendy, Damer (où il reçoit par sa droite le Tacazzé ou Atharah), Chaykyè, Dongola, Mahas, Sukkot, Iladjar et Barabras. Il entre en Egypte à Assouan (24° latitude nord), court alors presque directement du sud au nord jusqu'à ce que, par 50"12' latitude nord, il se divise en deux branches, celle de Rosette à l'ouest, près d'Alexandrie, et celle de Damiette à l'est, branches qui elles-mêmes, parleurs ramifications, donnaient lieu chez les anciens à sept bouches. L'espace triangulaiie compris entre ces diverses ,18 iKs Mi:iivi:ii.i.i-,s mes fi.edvks ct ni;s ihisskao. |„,,„,|„.s ,.sl .wAr hrlla, - <-'>>"^ 'l'' >*« ■■cssc>.>l,ln.>c. avftc lu luiMm (k Mlle Ic'Mii' tirvcque. 1.0 cours .l.i Nil .'Si «ncadiv, ;, .lioil.. cl i< gau.:h.s l-n '-nl <■<' .-.onis ; .■Iles dawiil surloul célèbios dans raMlic|ml.. ; la seule .|n. so,l u.u- men. remarquable est cell-' .le l'auccnue I l.il.e, au iourd'hui El-Birl.è, prés d'Assouau, sur les mules .le lÉgvple et de la Nubie; cucore n'a-l-elle .pi.. H. rnetres. D;puis Assouan jusqu'au Caire, le Nil ...ule dans une vall.V. d'une lieue dans sa moyenne largeur, entre deux ebaiues de montagnes, dont l'une s'étend jusqu à la mer llouge, et dont l'autre se termine dans les déserts ,,u au dé- troit D/eW-S.î;-SeWi ; cet espace.d'emiron 0 / kilomètre. do longueur, n'offre sur ses deux rives que Ires-peu de terres cultivables. Quelques îles sont, à cause de leur peu d'élévation, arrosées avec facilite. \u débouché du détroit, la pente transversale porte constamment le Nil sur sa rive droite, qui présente dans beaucoup d'endroits l'aspect d'une falaise coupée a p.. tandis que le sommet des montagnes de la me gauclie est presque toujours accessible par un talus plus ou moins incliné. ., , Les montagnes, qui embrassent le bassin du Nil dans l'Énpte supérieure, s'entre-coupent par des gorges qui comluisent d'un côté sur les bords de la mer Rouge, et de l'autre dans les oasis. . La profondeur et la rapidité de ce fleuve varient selon les lieux et les saisons. Dans un état ordinaire, il ne porte que des bateaux de 60 tonneaux, depuis les em- iwBi(iimiii mif iNAVlGATION. VU boiicliurcs jusqu'aux cataractes. Le hogaz de Damiette a cependant 7 à 8 pieds d'eau dans le lenips des basses eaux : celui de Rosette n'en a que 4 à 5. Dans les hautes eaux, l'un et l'aulre de ces bogaz ont 41 pieds de plus, et les caravelles de 24 canons remontent jusqu'au Caire. La navigation c.>t singulièrement favorisée durant les crues; car, pendant que le courant du (leuvc entraîne les navires depuis les cataractes jusqn'aux bogaz avec une extrême rapidité, les vents du nord, très-violents, permeltent de remonter le ileuve à force de voiles avec une égale rapidité : on fait 1 un et l'autre trajet en 8 ou 10 jours. C'est un spectacle intéressant de voir les nom- breux bateaux se croiser dans leurs courses. Les bogaz sont dilficiles à passer, même dans les hautes eaux : des bancs de sables changeants menacent le navigateur dans toute la longueur du cours. Les cataractes sont quelquefois francliies par l'adresse et l'audace réunies. Les fameuses plaines de l'Egypte ne seraient pas le séjour d'une éternelle feitilité, sans les crues du fleuve qui, en môme temps, les arrose et les couvre d'un limon fécond; la meilleure hauteur de ces crues est de 8 mètres. (\oiv IrrUjat ions.) i\ous connaissons aujourd'hui avc^c certitude ce que les anciens ne pouvaient qu'entrevoir obscurément, sa- voir que les grandes pluies anmielles entre les tropiques sont la seule cause de ces crues, comnumes à tous les fleuves de la zone torride, et qui, dans des terrains bas comme l'Egypte, occasionnent des inondation-». La crue du Nil commence au solstice d'été; le fleuve acquiert sa plus grande élévation à l'équinoxe d'au- tomne, reste permanent pendant quelques jours, puis diminue, mais avec plus de lenteur. Au solstice d'hiver 12-i l,i:S MKI'.VKIM.KS DES FLEIJVKS KT DES l'.l ISSKAI \. il osl (l(\jà lr('s-l)us, ruais il resl«; cucoïc do l'<'.'iii fi;ni^ les <3^run(ls ("anaux. A celte (t\)0(\\H% les terres sont mises en culture. \j' sol se trouve couvert d'une couche de limon plus ou moins épaisse, et dé[)Osée par couches hoiizoïit.ilcs : ce limon a une forte affinité pour l'eau. L'analyse du limon du Nil a fourni piés de l;i moitié d'alumine, un rpiart environ de carbonate de chaux ; le reste en eau, carbone, oxyde de fer, caibonate de ma- gnésie. Sur les bords du Nil, le limon tient beaucoup de hable ; et, lorsqu'il est porté par les eaux sur des terres éloi- gnées, il perd en chemin une quantité de sable propor- tionnelle à la distance du fleuve, de manière que, lorsque cette distance est considérable, on trouve l'ar- gile presque pure : aussi ce limon est-il employé dans plusieurs arts en Egypte. On en fait de la brique excel- lente et des vases de différentes formes : il entre dans la fabrication des pipes : les verriers l'emploient dans la construction de leurs fourneaux, et les habitants des (campagnes en revêtent leurs maisons. Ce limon renferme des principes favorables à la végé- tation. Les cultivateurs le regardent comme un engrais suffisant. La salubrité de l'eau du Nil, vantée par les anciens, paraît reconnue par les modernes avec certaines restric- tions. Cette eau est très-légère et peut, sous ce rapport, mériter l'éloge qu'en fait Maillet : « C'est, parmi les eaux, ce que le Champagne est parmi les vins. » Si Mahomet, disent les Egyptiens, en eût bu, il eût demandé au ciel une vie immortelle pour pouvoir tou- jours en jouir. NAVIGATION. 1*25 L'eau du Nil est purgative, ce qu'on doit attribuer à divers sels neutres dont elle est chargée. Pendant les trois mois d'été qu'elle reste presque sta- gnante, elle devient bourbeuse et ne peut être bue qu'après avoir été clarifiée. Pendant les crues, elle prend d'abord une couleur verte, quelquefois très-foiu'ée ; après 50 à AO jours, cette couleur lait place à un rouge plus ou moins brunâtre. Au Caire, des canaux, que ferment et ouvrent des écluses, reçoivent l'eau excédante, et la donnent à l'agri- culture quand le fieuve n'atteint pas le niveau requis. L'ancienne Egypte avait construit, pour mesurer la hau- teur des eaux du Nil, des échelles remarquables dites iiilomèlrcs, dont j ai parlé précédemment. Il est difficile de fixer le nombre des canaux destinés à porter, sur toutes les portions du sol, les eaux du fleuve. Parmi les voyageurs, l'un l'évalue à 0,000 unique- ment pour la haute Egypte, tandis que Tautre ne recon- naît qu'environ 90 grands canaux, dont 40 à peu près pour la haute Egypte, 28 pour le Delta, M pour les pro- vinces d'Kst, et i5 pour celles d'Ouest. Une aussi grande différence tient à la manière de compter les canaux : l'un ne s'occupe que des grands canaux dont l'entretien est assuré, et l'ouverture déterminée par les règlements du pays ; l'autre s'étend jusqu'aux canaux dérivés de ceux-ci, et dont le nombre varie d'année en année. Les beys des mamelouks détournaient à leur profit l'argent destiné à l'entretien de ces ouvrages publics, desquels dépend la fertilité de PÉgypte ; plusieurs ca- naux étaient même abandonnés par ces barbares qui lai'issaient eux-mêmes les sources de leurs revenus. vu IIS mi;['.vi:iîjj:s dks h,ki:vks kt dks fuisskaix. I.M plus (•(■'l('l)i(' (If (OS livirr-cs nrlificidlcs chl le (:;jii;il (1p Joseph (jiii ;i \)ir> de IX() kilonirlros (Jo lon;( sur niu» largeur de 15 à 100 inèln's ciiNiron. lue jMili.- de ce canal paraît répondre à l'ancien canal d'Oxyiynchus que Slr.il)on,en ynavi^Mjarit, f)ril fioin- le Nil rriêriK;. Le couis total du Nil est évalué à r),SOO kiioniétie!.- ; sa largeur varie de I /iflO à 5,000 mètres. Les égyptiens ont eu, de tout temps, pour le Meuve un respect religieux ; ils le regardent conjme un fleuve sacré. Dans l'antiquité, à l'époque où le Nil sortait de son lit, on célébrait en son honneur une fête pendant laquelle on lui immolait des taureaux noirs. A Nilopolis, on lui avait élevé un temple magnifique avec une statue en marbre noir qui le représentait sous la forme d'un dieu gigantesque, couronné de lauriers et d'épis, et s'appuyant sur un sphinx. NAVIGATION EN AFRIQUE L'Afrique n'envoie qu'un seul grand fleuve dans la Mé- diterranée; ce fleuve est le Nil. Dans l'Océan indien, cinq autres fleuves ont leur embouchure entre le 5^ et le 26^ parallèle : ce sont VOuotmido qui prend naissance au milieu d'épaisses forêts, à 70 journées de marche de la côte; le Motcherfiné qui commence à 95 journées de marche de l'Océan; le Loffi/i, dont on ne connaît pas la source; le Zambéze qui sort d'un grand lac à l'ouest de la ville de Sofala, et qui paraît avoir plus de 1,500 kilo- mètres de cours; enfin le Mafumo ou Lagora qui se NAVIGATION. 125 jette dans la baie de Lorenzo-Marqiiiz, mais dont on ignoie et l'étendue et la source. C'est l'océan Atlantique qui reçoit le plus de fleuves de l'Afrique : nous citerons VOramje ou le Gariep qui a 1,500 kilomètres d'étendue, et qui forme, vers le mi- lieu de sa course, une cascade de 150 mètres de hau- teur sur 490 de largeur; le Cavo^ qui sort d'un petit lac de la Guinée inférieure à 710 kilomètres de son em- bouchure ; le Coanza, qui paraît aussi sortir d'un lac, et dont les eaux profondes et rapides forment une célè- bre cataracte qui retentit à une grande distance; il a, dit-on, plus de 890 kilomèlres d'étendue; le Zaïre ou Coanijo, qui sort d'un lac appelé selon les uns Aqui- iimda, et selon les autres Zambrc ou Mnravi, d'où il parcourt une longueur d'environ 1,500 kilomètres ; le Djold-ba ou Kouara, qui prend naissance dans les mon- tagnes de Lomba, et dont la longueur totale est estimée être de 5,000 kilomètres ; la Gambie, dont le cours sinueux depuis les montagnes de Badet , d'où elle sort, a jusqu'à son eml)ouchure une étendue de plus de 1,800 kilomètres; enfin le Séné(jal ou Bafimj, qui commence au mont Couro et parcourt une lon- gueur de 1,500 kilomètres en formant un grand nom- bre d'iles. Mais ce ne sont pas là les seuls cours d'eau remar- quables de l'Afrique; il en est plusieurs qui ne payent aucun tribut à l'Océan : ils appartiennent au bassin du lac Tchad, celte Caspienne du continent africain. Les principaux sont : le Char y, qui se jette par plusieurs embouchures dans ce lac après un cours d'environ 550 kilomètres, et le ïeoii, qui soiti des montagnes de Dull, ne paraît pas avoir moins de iOO kilomètres d'è- m; i.Ks MKi'.vi;ii,i.h> dks m.kcvks i:t dks I'.iisseaijx. f,(!ii(l(i('. Tril)nl;iiri*s (l'ini l.ic, ils iir |)('uv<'iit [moihIi*' ls-vagues sui- Ici'dc Tchad, (\\w. l'on honora il du litre inexact de in<'r de Nigrilic. Grâce à ces Intrt'pides voyaj^eiirs, on sait aujoiii- d'Iiui qn'il a enviion o'iO kilomètres de lon;,Mjein' de l'esl à l'ouest, et ôO dans sa plus jurande largeur du nord au sud. Ses eaux sont douces, et leur niveau est à 51)0 mrlres au-dessus de celui de l'Océan ; il reçoit toutes les rivières qui appartiennent à son bassin, et cependant il ne paraîl pas avoir d'écoulement; à moins qu'on n'admette comme vrai le rapport des Arabes chouan qui [)orte qu'il sort du mont Tama une rivière qui reçoit plus loin le nom de Bahr-el-Ahiad (livière blanche j, et qui paraîtrait être une des deux branches qui forment le xNil. NAVIGATION EN ASIE Il I >" D 0 r s T A i\ Le gouvernement britannique a établi sur l'Indus ou Sind, et sur le Gange, un commencement de navigation à la vapeur ; cependant les Indous, dans leur attache- ment ordinaire pour les traditions, restent fidèles à leurs bateaux de construction primitive, et le fret par la va- peur est quelquefois si rare qu'on le met aux enchères. La navigation du Sind est interrompue pendant six mois par la sécheresse ; puis, à Rattah, les eaux se divi- sent en de nombreux canaux plus ou moins obstrués par des bancs de sable. >AV[GATION. 127 Mais le Gan^c ol'fre aux navires un parcours de 2,r)0(l kilomèlies pendant la plus grande partie de l'année, et. ses tributaires du Nord sont aussi navigables jusqu'au pied des montagnes. Sa largeur est toujours au moins de 1 kilomètre, et à 700 kilomètres de la mer il a une profondeur de 1 0 mètres qu'il conserve jusqu'aux barres formées à ses embouchures. On évaluait, avant l'insur- rection de 1857, le nombre des mariniers à 500,000 et la valeui' des transports à 500 millions de francs. Sur une de ses branches, l'Ilouglily, est situé Calcutta, à 160 kilomètres de la mer; les navires d'un tonnage do plus de 400 tonneaux ne peuvent y prendre leur charge- ment entier, les eaux n'ayant pas une profondeur suffi- sante; le complément se prend à 50 kilomètres plus bas. Un ouvrage remarquable est le canal du Gange, qui a été construit aux frais de l'ancienne compagnie des Indes et qui sert à l'irrigation en même temps qu'à la naviga- tion. Il commence à Myapoor, et se divise à Nanoon en deux branches, dont l'une se dirige sur le Gange à Gawnpore, et l'autre sur le Jumna, auprès d'Etawah ; sa longueur totale est de 1,452 kilomètres. TURQUIE D'ASIE Les produits de l'Inde qui vont s'entreposer à Bagdad l'emontent jusqu'à Bassora le Chat-el-Arab qui est navi- gable pour des bâtiments de 500 tonneaux. Là, les mar- chandiî-es sont transbordées sur de grandes barques qui les amènent par le Tigre à Bagdad ; le nombre des na- vires est de 150 à 200 f)ar année. 12S I.KS MKI'.M.II.II.^ M-S M-KI VLS Kl Iil,S l'.l ISSI.M \ La iiavii,^ili()ii est aso/ active sur le Meiii;iMi, !•' prin- cipal fleuve (lu iDvaunKî de Siarn. Km fiaricliissant !a barre avec la maire, les navires r-ernoiileril ^rr une Herrri- journée jns(jn'à llankok, la capitale dn j»avs. Leflcuvf et les canaux sont les seuls chemins fréijuenlés; le com- merce se fait sur les bâtiments et les bateaux. Fn 185>^, on a compté pour* la navig^ation européemrc! ^lô bâti- ments, et pour celle du pays 40 à l'entrée et T^'i à la sortie. Le Yang-tsen-Kiang ou fleuve Bleu, le lloang-Iio «mi fleuve jaune, et le canal lrn[)érial sont les grandes ar- tères par lesquelles circu>ent juincipalement les pro- duits des diverses provinces de la Chine. Les deux fleuves, sortant du Thibet, coulent vers la mer Orientale, et sont traversés par le grand canal qui prend son origine dans le Tché-Kiang, devant Ilang- tchéou-fou, et aboutit à Lin-tsing-tcbéou, après un par- cours de 1,040 kilomèlres. Là, un affluent du Pè-lio sert de prolongement au canal jusqu'à ce der-nier fleuve, de- vant Tien-tsin. Pékin est situé en amont sur la rive gauche du Pè-ho qui met aussi cette ville en communication avec la mer Jaune. Les nombreux affluents du Yang-tsen-Kiang et du Hoang-ho, le Chang-lo-hoau nord, le Si-Kiang au midi, ainsi qu'un réseau de plus de 300 canaux, four^ni^;sent des moyens de navigation très-élendus. 1 NAVIGATION. 129 Mais la grande insurreclioii qui a désolé le pays pen- dant plusieurs années a nui eonsidérablemcnt au service des canaux, et notannnent du canal Impérial ; les frais de la guerre ne laissant pas de ressources suffisantes pour l'entretien de cette voie artificielle, elle s'était dé- gradée sur plusieurs points. FLOTTAGE Le moyen le plus simple cl le plus économique de transporter les bois, depuis les forêts jusqu'aux lieux ou ils doivent être employés ou livrés au commerce, est .le les confier à des cours d'eau qui les conduisent presque sans frais jusqu'au lieu de leur destination. Cette opération qui constitue le flottage se divise en deux modes : • , -i Le flottage à bûches perdues, qui consiste a jeter, pêle- mêle, les bûches appartenant à divers marchands, saul aies distinguer ensuite, au moyen de h marque impri- mée aux deux bouts ; le flottage en trains ou radeaux, c'est-à-dire en bois réunis ensemble au moyen de per- ches et de liens, nommés vulgairement étoffes. On comprend que le premier mode ne peut guère s'appliquer qu'aux bois à brûler ; tandis que le second sert aussi aux bois à oeuvrer. FLOTTAGE EN FRANCE I. Flottaye à bûches perdues. Saint-Yon qui écrivait en 1610 explique, ainsi qu'il suit, la découverte du flottage, du moins en ce qui touche FLOTTAGE. 15! rapprovisionnemcnl de Paris : « Le premier qui a fait venir du bois flotté du pays de Morvan en la ville de Paris, a été Jean Rouvct, marchand bourgeois de ladite ville, lequel en l'année 1 549 seulement trouva l'invention, en retenant par écluses, es saisons plus commodes, les eaux des petits ruisseaux et rivières qui sont au-dessous de Gravant, de leur donner la force, en les laissant peu après aller, d'emmener les bûches que l'on y jette à bois perdu, jusqu'audit port de Gravant où on le recueille et accommode par trains sur la rivière d'Yonne, en la sorte qu'on les voit arriver en ladite ville de Paris. » Ge passage aurait dû mettre d'accord les écrivains qui, d'une part, ont attribué à deux autres marchands, Tour- nouer et Gobelin, la découverte du système à bûches perdues, et qui, d'autre part, ont contesté à Jean Rouvet l'honneur d'avoir imaginé le système des trains. 11 résulte clairement du passage emprunté à Saint-Yon que l'honneur de la double invention revient tout entier à Jean Rouvet. Toutefois, il convient de faire remarquer que le pro- cédé de flottage à bûches perdues a existé de tout temps et dans toutes les contrées oij il était utile et possible de le pratiquer. Les bois qui servaient à l'approvisionnement de Rome, du temps des empereurs, provenaient en grande partie des forêts de la Toscane d'où les rivières les charriaient jusqu'à la Méditerranée i)Our les livrer aux galères qui les transportaient à Home, en remontant le Tibre. Il est probable que la pensée de réunir une certaine quantité de bûches ou de pièces de bois est venue natu- rellement à tous ceux qui ont essayé du transport par bûches perdues. ,5.^ i,i,s Ml :',vi;m.i.ks df.s fi>xvf.s et des uiisseux. Co .nrnlo .1. traMsporl sur l.s dilf.Tonts ,nis..anx ot nolilcs nvi,M'os allb.ml ;mx rivim^s nav.g.lilcs M I ol- nblos solaitf;(Mnkalcmcnl|.MiMl,.sn|.agiucssi.males. Tous' l'os bois Mos .lifforc.ls propriélair.s, a|.r.s avoir ac frnppos -le leur .nnrr,no particuli.'rc, sont jKes a •eau cl 'ouli^s à la survoillan.e des préposes de chaque eompagnie. Toulelois, le floUagc sur cerlains ruisseaux se f il pr dos propriélaircs agissanl chacun dans on nllrêl parlicuUcr. Dans tous les cas. VopéraUon du flol- ta-e esl ordinairement confiée à un entrepreneur qui se charge, à ses risques et périls, de faire parvenir les ho.s jusque sur les ports flottables. H. _ FloUarje en trains. Ce mode de floltagc comporte deux espèces de trains : le train de bois de chauffage, et le train do bois a œiivr6r. j Chaque train de bois de chauffage se compose de 18 coupons, en doux parties distinctes, par tète et queue, de chacune 9 coupons, ayant 4-,547, ce qui donne près de 82 mètres pour le tram tout entier. Un train est toujours à fleur d'eau ; son épaisseur ou profondeur varie de 40 à 60 centimètres. Les frais de construction consistent en achat d'étoffes (perches, osiers, ferrures, futailles), et en main-d œuvre de six ■"les'ïrains de bois à œuvrer diffèrent peu des trains de bois de chaulfage. Seulement, la largeur est propor- tionnée à celle des perluis, et la longueur doit s accom- moder aux sinuosités de la rivière, parce que ces trams ont moins d'élasticité que les premiers et sont d une manœuvre plus difficile. FLOTTAGE. 1Ô5 Un train contient de 200 à 400 arbres. On peut distin^^mcr les trains de charpente, de sciage et de grume en trois espèces : 1" les trains dits de Cham- pagne, établis sur la Marne, et ceux de basse Seine, de Flottage en trains. Monlereau, en aval de Paris, ayant en moyenne iOO mè- tres de long, 7 mètres de large et 8 coupons ; 2" les trains établis sur le grand Morin, l'Ourcq, la haute Seine, de Marcilly à Monlereau, et sur l'Aube, de 100 mè- tres de long sur un peu plus de 5 mètres de large, avec 12 coupons ; o"" les trains, dits écluses de la Loire et des canaux, ayant, en moyenne, 28 mètres de longueur sur 5 mètres de largeur, avec o coupons. Le prix de con- r.i ii:s Mi:iivi;ii.i.i:s dks ffjjives et des ki:isseaix. r.'clioii (les liMiiis (1(; iiicniiiii est plus /îl(»vé d'un (jii;iil (|uc ('('lui des luiiii^ de l)oi- à liiûN'i . L.'i coiidiiil'' c>\ ô^aleinenl i)liis cIkto, à cause de la difficnil»' d.- rjmUt- iiir le rncrrain entre les perches pendant le Irajcl. La p()lic(; des rivi(''r('s et rint('Mèl g«'Mi«'ral de la navi- gation exiu^enient (ine les Iruins, cfjrnine les bateaux, ne pi-issentpas un tirant d'eau trop fort, eu («g-rd à la pro- lbn l'.IISSE\i:X. r.i(lif*r est ;iii iiivciii du sol ou df'S alUTrisscfM^'nls ; il «-si eu ouli»' Iri^rrcriiciit inrliiK' {)Our rucililcr r.Moulrinciit. .Ml li'inps (!<', cliôni.'i^M'. Ij'S parois en sont ;:;wMi(!s de pièces équarrics bien assciiihlées, disposées dans le sens du courant et forinaiil voûle en liant pour résist<;r à la pression des matériaux. La porte cpii ferme l'orifiee est placée en aiuoiit et construite de façon à s'oiiviir brusquement, sans cepen- dant se détériorer sous l'effort de l'eau qui se précipite dans l'ouverture. A cet effet, elle est formée dr forts madriers de mélèze bordés de liens de fer. Elle tourne autour de deux pivots verticaux solidement reliés à la cliarpente de l'ouvrage. La porte, en s'ouvrant, va se loger dans un encastre- ment pratiqué dans la paroi du conduit de vidange ; elle est ramenée au moyen d'une chaîne qui s'enroule ^nr un treuil et que les bûcherons font mouvoir depuis la partie supérieure du barrage. La porte, une fois fermée, est fixée à l'aide d'une pièce en mélèze mobile autour d'un axe vertical. Cette pièce butte contre le rebord interne de la porte et s'arrête à l'aide d'une détente. Une per- che traverse le barrage dans sa hauteur et permet à un moment donné de faire sauter la détente ; la porte man- ({uant de point d'appui s'ouvre spontanément sous la pression de l'eau. Enfm, un escaher construit dans l'épaisseur du bar- rage permet de descendre derrière la porte, soit pour la fermer, soit pour les réparations ou la surveillance. Les portes des barrages étaient primitivement fermées de vannes que l'on soulevait depuis le haut au moyen de treuils. On a renoncé à ce système qui présente plusieurs inconvénients; sous l'énorme pression de l'eau, la vanne FLOTTAGE. 159 adhérait fortement contre le barrage, la manœuvre en devenait à la fois lente et difficile; l'eau s'écoulait peu à peu à mesure que la vanne était soulevée ; elle n'arrivait pas en masse et subitement comme cela a lieu avec le système actuel. Enfin, plusieurs hommes suffisaient à peine au travail qu'un seul exécute aujourd'hui avec facilité. La porte décrite {)lns haut est quelquefois mobile au- tour d'un axe horizontal qui alors est situé au bas de l'orifice. Ce système s'ouvre avec plus de facilité que relui de Pimnevveggio, car le poids de la porte se joint à la pression extérieure pour en accélérer l'ouverture. Les modes de fermeture, du reste, sont très-variables ; mais toujours ils reposent sur un système de détente permettant hi sortie subite de l'eau et offrant un manie- ment facile. L'ouverture des barrages est pratiquée de façon à don- l'.er le débit nécessaire au flottage. Il peut être plus faible (|ue celui des grandes crues du torrent ; dans ce dernier cas l'ouverture est trop petite et ne suffit plus à l'écou- lement. Pour parer à ce danger, on a pratiqué, dans le barrage, un second orifice semblable à celui déjà dé- crit, mais de dimensions plus faibles, que l'on ouvre en «'inps de chômage et que l'on ferme au moment du llollage ; on donne au radier de co déversoir supplémen- taire une inclinaison de 10° à 15", et on le ferme au moyen d'une vanne simple qui se lève lorsque le barrage est vide. Enfin il peut arriver qu'à la suite d'une crue excep- tionnelle, les deux orifices se trouvent insuffisants, le niveau s'élève alors et l'eau passe sur le barrage qui ré- siste grâce à sa solidité ; pour surcroit de précautions, lio ILS Mi.iiVi.ii.i.Ks i)i:s II.I.I vi:s i;t ijks l'.rissEAix. on M i\u'\i',\<^i', îi la paiti(! suj)(''ri(jun', un fanal à cifl on- v(>^t,^^•)^li do più(u;s[)Ia(:<''0.sloi)^ntu(Jinal(;nient. IJ iacilih' on onfin l'i'conlomonl du dojHpliîin, lorsfjnc des circon- stances inipréviics l'orcfiit à suiseoir an flolla;:c. Ce type snijit une l'oulc d(! modifications qui dépen- dent de l'état des lieux, de la nainre des matéiiaux, de l'importance des iJioduits et, enfin, de la science du constructeur. Dans plusieurs barrages nouvellement élablis, on a disposé verticalement les pièces formant le hordage d'amont; ailleurs, on les a recouvert d'une toiture qui sert d'abri aux ouvriers en temps d'orage et garantit la construction contre les intempéries. Quelquefois les pentes des réservoirs sont assez ra- pides pour donner lieu à des érosions sur les bords, et compromettre la solidité de l'ouvrage : on établit alors, sur les parties qui peuvent être attaquées, des lignes de fascinage se coupant de manière à former un damier dont les cases vides se remplissent bientôt de terre, ce qui donne naissance à un nouveau lit d'une grande soli- dité. Ce travail s'exécute de la manière suivante : on commence par tracer des lignes espacées de l mètre, se coupant à angles aigus, sur lesquelles on plante des piquets de 5 centimètres environ de diamètre sur 60 à 80 de long, enfoncés de 40 à 50 et espacés de 50 centi- mètres. Puis on relie ces piquets par des branchages flexibles entrelacés obliquement et dont le gros bout est fiché en terre. On voit, au col du Drenner, ce système de fascinage employé avec un succès complet à la fixation des terrains sablonneux dénudés et offrant des pentes très-rapides sur 100 à 150 mètres de hauteur. Entre chaque losange FLOTTAGE. lil on a semé des graines fourragères (seigle, avoine et sainfoin mélangés) et planté d'épicéas de deux ans qui s'élèvent à l'abri des mottes de gazon rapportées ; on a de la sorte pu reboiser et fixer des terrains qui, par leur chute en temps d'orage, encombraient la voie du cliemin de fer. Mais malgré la certitude de succès qu'assure un semblable travail, le prix en est trop élevé pour que l'on puisse songer à l'appliquer sur une grande échelle. Un essai dnns lequel le bois employé ne coûtait rien a exigé une dépense moyenne de 10,000 fr. par hectare. Il est très-difficile, sinon impossible, de faire flotter des pièces entières en les abandonnant au courant du torrent. Aussi les découpe-t-onentroncs de4 à 5 mètres, c'est-à-dire de la longueur des planches marchandes du pays. Ces troncs sont amenés au bord du torrent en aval du barrage, par des couloirs ou tout autre mode de transport. La porte du barrage est fermée, quelques fagots de menus branchages garnissent l'encastrement afin qu'en s'ouvrant violemment celle-ci ne soit pas brisée par le choc. Les bois sont descendus sur le lit du torrent et rangés dans le sens du courant; un ouvrier en poussant la per- che fait sauter la détente, la porte s'ouvre, l'eau se pré- cipite, soulève les troncs qu'elle va déposer contre une grille placée à la hauteur du chantier. Beaucoup de pièces s'arrêtent en chemin ; on ne s'en inquiète pas tant qu'il reste des bois auprès des réser- voirs ; mais dès que cette provision est épuisée, on s'oc- cupe de faire rejoindre les retardataires au moyen de •crues spéciales. Nous venons de voir comment on approprie au flottage ii'2 ILS Mi:i'.vi:ii.i.i:s i)i;s ri.Ki vks kt iii> ui is^i;\i \. les petits cours (l'dJiu à déhil varialile; il le^leà iiidifjiier par cpiel [irocédé on arrête les bois flottés et on les i e- tire de l'cni. On arrive à ce résultat nu moyen d'un hairago spéci»! à claire-voie ou grille, Coriné d'un système de perches régulièrement espacf'^es et disposées verticalenK.'ut dans le lit, de lacoii à arrêter les pièces tout en permettant à l'eau de s'écouler. La force de ces perches ou barres varie avec les di- mensions des bois flottés et avec la rapidité du courant. On conçoit en effet que le choc des bûches propres au chauffage est moins redoutalile que celui des lourdes Ironces destinées aux scieries. Généralement on emploie, pour arrêter ces dernières, des barres de 8 à 15 centi. mètres de diamètre, tandis que pour le menu jjois on peut réduire ces dimensions à 8 ou 10 centimètres. La hauteur des grilles dépend de la profondeur de l'eau, et doit être telle, que leur bord supérieur dépasse d'au moins 1 mètre le niveau de l'eau pendant le flot. Le gros bout des pièces est taillé en pointe et enfoncé dans le sable du lit. Barrages fixes. — Les barrages fixes sont établis dans les vallées qui renferment de grandes exploitations fo- restières, parce que leurs frais d'établissement sont con- sidérables. L'emplacement est généralement commandé par la présence d'une ville, d'une usine, d'une gare de chemin de fer ou même d'une route. Il en résulte que l'espace sur lequel on peut établir l'ouvrage est fort limité ; on doit cependant rechercher un point où la rivière a uu lit bien fixe, sous peine de le voir un jour ou l'autre se transporter à côté du barrage. Si cette première condi- FLOTTAGE. 143 tion n'est pas remplie, il faut, à moins que l'importance des produits à transporter ne motive des travaux consi- dérables, renoncer à un barrage fixe et se contenter d'ouvrages volants qui pourront, à peu de frais, suivre les caprices du cours d'eau. En général, un barrage fixe est foimé de culées en maçonnerie établies sur les rives et encastrant les ex- trémités des traverses qui servent d'appui aux barres. Lorsque la rivière est trop large pour permettre de placer ces pièces d'une seule portée, on établit des piles en bois ou en maçonnerie. Le bai'rage établi à Payerback, en basse Autriche, pour desservir les forêts de la vallée de la Schwartza, est un type des barrages fixes présentant la plus grande simplicité. Ce barrage, construit et entretenu par l'État et le comte Hoyoss, se compose de culées en maçonnerie établies sur chaque bord de la rivière, qui est endiguée sur une dizaine de mètres en amont et en aval de l'ou- vrage. Deux fortes traverses jumelles en mélèze relient les culées, et coupent la direction du courant suivant une ligne oblique; elles sont percées à mi-bois de mor- taises dans lesquelles passent les barres qui viennent au fond (lu lit s'appuyer contre un seuil également en bois, reposant sur un péré en maçoimerie et charpente de quel(|ues mètres de largeur. Cet ouvi'age est, comme on voit, fort simple; sa longueur est de 15 à 20 mètres; les barres placées en temps de flottage sont enlevées aux époques des crues. Le barrage de Bressia-Paal (Styrie), qui sert à la vi- dange d'environ 10,000 hectares de forêts appartenant au prince de Schwarzenber^, présente une construction à lii (.i:s .Mi:i;vi.ii,i.i.s dks fi.ei:ves et des ukisseal'X. jM-upirs soiril)lMl)le .m l)arra-c (lu l»ay(Ml)a(k ; .-lie m (lilÏÏMv >('uh'iiimil .-M <•.■ (jne la -rillft nst i.lacûe sur uiift l'clusr, oi\ rnaçoimeric. reliée par des pièces de liois ; en outre, elle est nnmie d'une vanne de déciiar-e -rillée (pii permet de mettre à see le lit de la rivière en anionl ou qui sert à l'écoulenient des eaux d'orages. LE TRAVAIL DES EAUX COURANTES ALLUVIONS, ATTE RR IS S EM EN TS , DELTAS Sur la terre, Teau symbolise le raouvemenl par excel- lence; elle coule et coule toujours, sans répit, sans fati- gue. Qui dit mouvement, dit aciion : il ne suffit pas à l'eau de descendre dans un lit tout creusé, elle ronge, elle mine, elle érode, elle entraîne, elle soulève inces- samment les terres et les rochers qui la contiennent ou qui s'opposent à son cours ; caillou à caillou, grain de sable à grain de sable, elle porte les montagnes dans les vallées et dans la mer; elle n'est pas seulement un chemin qui marche, elle est aussi une masse continen- tale en voyage. ^Les ruisseaux, les rivières et les fleuves établissent la circulation des solides aussi bien que celle des fluides. A l'époque de la fonte des neiges, ou à la suite de pluies abondantes, les cours d'eau augmentent de volume et de vitesse ; souvent ils débordent, et se répandent dans les vallées où ils étalent une large masse liquide (jui dépose une couche de limon, et forment ainsi des alluvions. Quand les eaux tombent dans des lacs, elles y abandon- 10 \w i.Ks Mi;r.vi;ii.i,i;s i)i;s ri,i:i:vES kt dks nrissEArx. iKMil ;iiis>i les ifiMléiTiiix ((u'ollcs cli.'iniciil ot (Joniiciit ainsi iiîiissaiico à une couclic de vase jilus ou iiioinr^ épaisse, et à dtîs altcrrissernents. l'^nfin, (jiiaiid les Meuves arrivent, à la irirr, et qn*- la ra[)iditê di; leiii- eoiiis vient à cesser ou à diiniiuier, les matériaux se déposerd à l'tîndiouchure, et finissent [iar v former des leriains (pii [iiolon^n-nt la côte et qui au^aneii- tcjit le domaine deriiomme. / Parmi les fleuves où les atterrissernents se sont pro- duits avec une intensité remarquable, on peut citer en première ligne le iNil, le Pô, le Gange et le lUiône. Si on en croit Hérodote, les anciens savaient déjà que le sol de l'Egypte avait été entièrement formé par les al- luvions du Nil. Ce mode de formation d'ailleurs résulte clairement des fouilles faites dans la vallée jusqu'à une certaine profondeur. Partout on rencontre des couches alternatives de sable ou de limon qui ont été déposées par les inondations périodiques. Des temples et des sta- tues antiques qui étaient à l'abri des eaux, il y a trente siècles, disparaissent aujourd'hui sous une épaisse couche de limon. Par la raison que le Nil dépose son limon dans les terres, il n'accroît pas rapidement le grand Delta situé à son embouchure ; cependant quelques branches de ce fleuve, mentionnées par des géographes anciens, sont actuellement fermées, obstruées par la vase. Du temps dllomère, la distance de l'ile de Pharos à Egyptus était égale à celle qu'un navire pouvait par- courir en un jour par un vent favorable. Aujourd'hui, un nageur pourrait en quelques brasses aborder cette île unie au rivage par une digue artificielle. En Italie, le Pô fournit un exemple non moins remar- quable. La ville d'Adria, bâtie depuis près de trois mille ' LE TRAVAIL DES EAUX COURANTES. 149 ans sur les bords de la mer à laquelle elle a donné son nom, et qui, sous Auguste, recevait dans son port les galères romaines, se trouve aujourd'hui reculée à 52 kilomètres dans l intérieur des terres, par suite des atterrissements formés à l'embouchure du Pô. D'après cela, la marche des terrains transportés par ce fleuve serait d'environ 8 kilomètres par mille ans. Or l'examen de toute la par- tie supérieure delà vallée, depuis la mer Adriatique jus- qu'à Turin, montre que celte vallée était primitivement un golfe profond, et que son sol actuel, sur un espace de plus de oOO kilomètres, est entièrement formé par les maté- riaux charriés par le fleuve. On peut en conclure qu'il a fallu une période de quarante mille ans aux eaux du IV) pour combler cette immense cavité avec les sables, les cailloux et les argiles arrachés par elle aux pentes des Apennins et des Alpes. D'autre part, la rivière Isonzo qui, par suite de ses dé- pôts d'alluvion, a été forcée d'abandonner son lit, coule aujourd'hui à plus de 4 kilomètres à l'ouest de son an- cien canal. Aux environs de Ronchi, on a trouvé un an- cien port romain enfoui sous le limon de cette rivière. Dans l'Inde, une plaine immense a été créée par les atterrissements successifs du Gange et du Drahmapou- tra, ces deux fleuves jumeaux qui descendent du versant méridional des monts Himalaya. La surface du territoire que les dépôts accumulés de- puis plusieurs milliers de siècles sont parvenus à élever au-dessus du niveau de l'océan Indien, n'a pas moins de 70,000 kilomètres carrés. Quant à la profondeur des cou- ches de ce terrain d'alluvion , elle dépasse en moyenne 150 mètres; c'est donc plus de iO,000 milliards de mè- tres cubes de matériaux qui ont été roulés par les flots. ,:,o ,,,;> Mr,i',vi;ii,n:s i.i;s m.itvks kt nr.s uiisstA.x. |.„„,,niv,rài.,i .vsnllal aussi pnMli;;ionx, pni.lunt ,„„,,i,„ de sié..les a dû .•.■x..<-or, sans la .no,M.lr« ,..- twrnplion, ceUo, acliori (r.'iitraiiwincnt <\cs eaux • 0,1 peut s'en faire une i.léo par les ealru s suivanl^ : Le ('auge déverse daus la mer, au ru.,rn..u. des orW^ erues, une masse deau de 2,850 louues par secou, e. En èl; eomp.e .le la quantité de sable fin et de Innon ,,,r,l charrie, ce lleuve jette daus l'Océan un k.lomeire Lu de matières solides en dix jours, l.ans les U ps ordinaires, quand les crues sont '"<>^"' '''''' ^l^}^^ mètre cube de matériaux solutés est en rame dans 1 es- pace de trois semaines. La masse totale du bmon charr e par le Gange en une année dépasserait au.si, en po.ds et en volume, quarante-deux des grandes pyramides d-É'-vpte, et celle qui est eiitraînée en quatre mois, a l'époc ue des fortes crues, serait égale à quarante pvra- m de . Cette masse est tellement considérable que la mer perd sa transparence jusqu'à 1 80 kilomètres en avant des côtes- et c'est là nn signe auquel les raarms reconnais- emqu Is s'approchent du golfe de Bengale. L'espr.t se eie à concevou- la grandeur de l'échelle suivant - quelle un fleuve tel que le Gange opère un semblable transport; à voir couler lentement les eaux de ce puis- sant fleuve, aies voir traverser majeslueusernent a p me ,1'alk.vion qu'elles sillonnent, on devinerait jW^-' «'"^"^ la puissance du travail qu'elles accomplissent. Que d'efforts il faudrait à l'homme pour réaliser un sein- blab e transport! il faudrait une flotte de 80 a 100 vais- seaux de la compagnie des Indes, charges chacun de 1 iOO tonnes de sable et de limon, pour transporter de ù partie supérieure du bassin du Gange jusqu a son em- bouchure, une masse de matériaux égale a celle que le LE TRVV.VTL DES EAUX COIIHANTES. 151 grand fleuve entraîne bien facilement pendant les quatre mois de ses plus fortes crues ! En France, le lUiOne est un de ces fleuves qui forment, Delta du lUiône. à leurs embouchures, des deltas plus ou moins grands^ eX qui empiètent peu à pou le domaine de l'Océan en soumettant les découpures des côtes à de profondes et fréquentes variations. La description que nous a laissée Strabon du delta de 15'2 I.i:s MKI'.VKII.I.I.S I)I.S I l.i: I V1.S KT [)K.s lillShtAI \. (!(* flouvc (l;ms l.'i M(''lus eurs lignes de tours et de si- gnaux nautiques qui avaient été certainement élevés sur les bords mêmes de la mer. D'autre part la presqu'ib- de Mége, décr^ite par Pornponius Mêla, est enterrée dans les continents l)ienloin des livages de la Méditerranée. Enfin la tour de Tignaux, élevée en i757 sur la côte, en est aujourd'hui éloignée de 1 ,000 métrés. En remontant le cours du Rhône jusqu'à Genève, on trouve un exemple remarquable de la tendance qu'ont les tleuves à combler les lacs qu'ils traver-ent. Jadis, le lac Léman qui a la forme d'un croissant s'étendait bien ccrlainement en amont jusqu'à l'endroit où se trouve aujourd'hui la ville de Bex, à 18 kiloméli-es du fond du lac, et se prolongeait en aval, par d'étroits bas- sins, jusqu'au fort l'Ecluse à 45 kilomètres du déversoir actuel des eaux. La ville de Poitus Valisiœ (Port-Valais) qui était assise, il y a huit siècles, sur le rivage même du lac, en est actuellement séparée par une langue de teiTe de 2 kilomètres. Le sable et le limon, déposés parles eaux, ont formé ces vastes territoir^es ; et de nos jours on voit s'acci^oître, sur les bords du Léman, un grand nombre de petits deltas qui tendent incessam- ment à l'ètrécir l'étendue du lac. C'est ainsi que plusieurs bassins lacustres ont été graduellement comblés dans leur entier. LE THAVAIL DtS EAUX COURANTES. 153 • Le lac Supérieur, le plus grand lac du monde/ qui dans l'Aniériquedu Nord occupe une superficie presque égale à celle de la Francejdépose des quantités considé- rables de substances terreuses qui lornientdes sédiments épais. Ce lac, comme les autres lacs du Canada, offre sur ses rives des indications précieuses qui nous montrent l'ancien travail accompli par ses eaux, et nous prouvent que celles-ci atteignaient autrefois un niveau très-élevé./ jOn rencontre, en effet, à une grande distance des rives actuelles, des lignes parallèles de cailloux roulés, des bancs de coquillages qui forment, les uns au-dessus des autres, des couches superposées analogues aux gradins d'un ampliithéàtrey Ces lignes de galels rassemblés par les eaux, ces collections de coquilles réunies par le mou- vement des flots, offrent une grande analogie avec les bancs qui se déposent autour d'un grand nombre de baies; elles s'élèvent quelquefois à une hauteur consi- dérable, et on peut en observer sur des terrains situés à plus de 15 mètres au-dessus du niveau actuel. CRUES ET INONDATIONS CON>lDÉnAriONS GÉNÉlULEà La masse liquide de chaque rivière ne cesse de varier depuis le commencement du printemps jusqu'à lafinde l'hiver ; elle s'accroît pendant les saisons pluvieuses et à l'époque de la fonte des neiges; elle diminue au con- traire lorsque le tribut des nuages, des névés et des glaciers n'égale pas en abondance toute l'eau qu'ont bue r,4 i.KS Mi,i',v::ii.i,r.s i.i:s n.ixvKs kt i.ks ni'issK.MX, les tcncs cl les racin.s (1.S pl.nles el ccll. M.oul r.-,U évaporer les vents el la el.alei.r. Sous nnlluenn. ,1e -xs divers pl,enorne>,es .yu h . 1 . venl ou rabaiss..Ml, le niveau .le d.aque nvn.re o.i lh;uve ;iille eonslamn,enl entre la m<. el l'e7.,,r-l--''<' des basses eaux). i,,,.^ ,1p l-i La quanlilé d'eau roulée par le Meuve e.l. lo.s de 1. crue, cinq, dix, Irenle, einquanle ou même cent lo,s plus considérable qu'à l'éiioqne de l'eliagc. L'abondance des pluies étant la prmopalc cause du gonllemenl des rivières, les crues doivent n,'^';;',^^;";;^- menl se produire dans tous les cours d eau a 1 époque des saisons pluvieuses. Dans les régions tropicales, où les zones de nuage e d'averses se déplacent régulièrement du nord au sud du sud au nord pendant le cours ^e »"-«> «^ « ' lations du niveau des fleuves peuvent être, ans» b e^ nue les saisons elles-mêmes, calculées el pre, ,les d a- vance d'après la marche du soleil sur 1 ec .pt,que. Lorsque cet astre bnlle au-dessus de l'hem.si^bere mé- ridional et que les sécheresses régnent au nord del equa- leur les cours d'eau de la zone tropicale du noid s'abaissent, el plusieurs même tarissent completen^nt Durant l'hivernage, au contraire, alors que e so e.l a ramené vers le nm-d les nuages de tempête et les pu, es on voit les ruisseaux, les rivières et les fleuves se go.Jler de nouveau el couler à pleins bords. Les men^s p Ino- vnènes s'accomplissent, en ordre mverse. da- s ' ' er«- sphére austral. Ainsi, le niveau des eaux courant s ose le aUernativement, au nord et au sud de 1 '^'^^'^^'^ nière à former une sorte de marée annuelle compa.able p!!; sa régularité aux marées diurnes de 1 Oceau, sauf LE TRAVAIL DES EAUX COURANTES. 155 quelques exceptions résultant du relief du terrain, des remous aérions eld'auliTS eauses incidentes qui influent sur la précipitation des eaux de pluie. Dans la ré(jion tnterliopicale le Nil est, parmi tous les cours d'eau de cette zone, celui dont les crues ont la plus grande célébrité. Le cours inférieur de ce fleuve ne reçoit pas un seul tributaire; il traverse un pays aride, rarement abreuvé par les pluies ; un soleil ardent en l'ait évaporer les eaux ; et cependant, vers lecomnience- îuent de juillet, sans cause apparente, le niveau fluvial s'élève tout à coup ; la nappe liquide monte, et d'août en octobre elle recouvre les bancs de sable, s'étale sur les rives, inonde les berges et se déverse en strates ré- gulières. Au ])lus liant de sa crue, le fleuve roule souvent une masse d'eau vingt fois supérieure à celle qu'il porte à la mer lors du plus bas étiage ; et cependant le ciel égyptien n'a peut-être pas laissé tomber de plusieurs mois une seule goutte de pluie. Cette énorme masse d'eau provient des neiges et des pluies que les nuages répandent en abondance sur les montagnes de l'Ethiopie et d'autres contrées de l'Afrique équatoriale. Les cours d'eau dont les crues se produisent avec au- tant de régularité que celles du Nil sont assez nombreux dans la zone intertropicale ; mais il n'en est pas de plus curieux sous ce rapport que les grands fleuves du bassin de l'Amazone. Ce père des eaux coule à peu près sous l'équaleur et reçoit à la fois les affluents des deux lié- misphéres. Grâce à cette disposition du réseau fluvial, les crues des rivières du Nord ont lieu en été et en au- tomne, tandis que les tributaires méridionaux débor- dent durant l'hiver de l'atmosphère boréal. Quant au fleuve principal et au Madeira, ils sont principalement 156 LKS MKUVKII.I.KS I)KS FI.EIVKS ET DES lU ISSEAl X. gonflrs jt;ii les pluies (l'éciuiiioxc, ( t leurs crues ont lieu au piinl('nij)S et en été. Une véiituble compensntion s'é- lal)lil(lans le lit inféiieurdes Amazones entre lesadluents (le la rive dioite et ceux de la rive gaucln.' ; les uns Mjnl à l'étiage, lorsque les autres coulent à pleins bords. En dehors de la zone tropicale, les rivières offrent moins de régularité dans leurs crues annuelles, parce que les pluies elles-mêmes sont plus iiréguliéremenl dis- tribuées dans les diverses saisons. Toutefois, un orrlre incontestable ne cesse de se manifester chaque année dans la précipitation de l'humidité atmosphérique, et cet ordre se retrouve toujom^s danS l'oscillation cor- respondante du niveau des fleuves. Ainsi par exemple, dans les régions à pluies d'iiiver, de printemps et d'été, comme le nord de la France, les crues ont lieu en général du 15 octobre au 15 njai; c'est uniquement à cause de la rapide évaporation qui se pro- duit pendant la saison des chaleurs que les crues esti- vales sont très-rares. Dans les contrées méditerranéennes, où prédominent les pluies d'automne, les couis d'eau s'enflent vers la fin de l'année, etc. Plusieurs cours d'eau de la zone tempérée présentent, dans leurs oscillations de niveau, un phénomène de compensation semblable à celui des Amazones. Ce sont les fleuves qui reçoivent à la fois des rivières alimentées par des eaux de pluie et des torrents grossis par la fonte des neiges et des glaciers. Les variations des rivières de plaines étant, suivant les saisons, précisément inverses des variations que subissent les tributaires descendus de la montagne, le niveau du fleuve reste à une hau- teur à peu prés normale. Les affluents d'eau de pluie diminuent de volume à l'époque où grossissent les LE TRAVAIL DES EAUX COURANTES. 157 affliunils descendus dés glaciers, c'est-à-dire en clé, en hiver et au printemps, au contraire, les glaciers ne don- nent que très-peu d'eau, tandis que les pluies inondent la plaine et rempli-ssent les rivières jusqu'aux bords ; c'est ainsi que la richesse d'un affluent fait équilibre à la pauvreté de l'autre. On peut citer, à cet égard, l'exemple du Rhône et de la Saône : pendant les chaleurs de l'été, celle-ci roule en moyenne cinq fois moins d'eau qu'en hiver ; de son côté, le Rhône supérieur est beau- coup plus élevé dans la même saison ; mais, en aval de sa jonction avec la Saône, la hauteur moyenne de ses eaux est à peu près la même dans toutes les saisons de l'année. L'ŒUVRE DES EAUX La grandeur de l'œuvre géolog-irjuc accomplie par les crues et les inondations , peut s'apprécier principale- ment sur les rives fluviales qui n'ont pas encoie été mises en état de défense par le travail de l'homme. Quand il déborde, le fleuve des Amazones forme en certains endroits, avec les marécages de ses bords, une mer de 100 ou même de 200 kilomètres de large; les animaux cherchent alors un refuge au haut des arbres, et les Indiens qui habitent la rive campent sur des ra- deaux. Vers le 8 juillet, lorsque le fleuve commence à baisser, l'eau rentrant dans son lit mine en dessous les bords longtemps détrempés , les ronge lentement, et tout à coup des masses de terre de plusieurs centaines ou de plusieurs milliers de mètres cubes s'écroulent dans les flots, entraînant avec elles les arbres et les ani- maux qu'ils portaient. Les îles mêmes sont exposées à une destruction soudaine ; quand les rangées de troncs échoués qui leur servaient de brise-lames viennent à céder à la violence du courant, il suffit de quelques heures ou même de quelques minutes pour qu'elles dis- paraissent, rongées par le flot ; on les voit fondre à vue d'œil, et les Indiens qui y travaillaient paisiblement à L'ŒUVRE DES EAUX. 159 recueillir les œufs de (oi'tue ou bien à sécher le produit de leur pêche, sont obligés de s'enfuir précipitamment pour échapper à la mort. C'est alors que passent au 111 du courant ces longs radeaux de troncs entrelacés qui se nouent, se dénouent, s'accumulent autour des pro- montoires, s'entassent en plusieurs étages le long des rives. Autour de ces immenses processions d'arbres qui roulent et plongent lourdement sous le poids du cou- rant, comme des monstres marins ou comme des carènes renversées, flottent de vastes étendues d'herbe (canna rana) qui font ressembler certaines parties de la surface de l'eau à d'immenses prairies. Aussi comprend-on la terreur éprouvée par les voyageurs qui pénètrent dans le fleuve des Amazones, quand ils voient à l'œuvre ces tourbillons jaunes de sable rongeant les rivages, ren- versant les arbres, emportant les îles pour en construire de nouvelles, entraînant de longs convois détrônes et de branches. « Le grand fleuve était effrayant à contempler, dit l'Américain llerndon; il roulait, à travers les solitudes, d'un air solennel et majestueux. Ses eaux semblaient colères, méchantes, impitoyables; l'ensemble du paysage réveillait dans l'ame des émotions d'horreur et d'effroi semblables à celles que causent les solennités funéraires, le canon toimant de minute en minute, le hurlement de la tempête ou le sauvage fracas des vagues, alors que tous les matelots se rassemblent sur le pont pour ense- velir les morts dans une mer agitée. « Dans ri<]urope tempérée, les simples inondations sont très-redoutables à cause des villes , des villages , des usines et des riches cultures dont les bords sont cou- verts. 100 i,i;s Mi:i'.vi;ii.i,i:s dks hj:ivks kt dks p.iisskai x. Los livciaiiis de lu Loire se ra[)|)ell(Mit <'ii<:or<* avoc eflroi l("S d'jsastriîs qtin L*s grandes crues execjjlifjiinelles ont causés, désastres qui, d;iiis une seule; anjiéc, celle de 185G, ont emporté des rouliîs et des ouvrages de défense [)Our uni; valeiu' de iTi millions de francs. Dans la mênn; année, les désastres furent à jieine moindres [)Our la vallée du liliône. En 18G0, l'une de ces catastrophes que la France ne voit heureusement se reproduire; qu'à (Ut longs inter- valles, l'inondation est venue ravager trente et un de nos départemenis. Une souscription ouvertepar les soins du gouvernement a produit une somme de 5,877,009 fr. 60 c. La commission centrale, à laquelle le décret du l"oc- tobre 1866 a confié le soin de répartir le montant des fonds recueillis, n'a rien négligé pour accélérer la dis- tribution des secours aux victimes du terrible fléau. Les bases adoptées pour cette délicate opération se résument ainsi : Classement des départements admis au partage des secours ; Répartition des perdants en catégories, suivant l'état de fortune auquel l'inondation avait réduit ses vic- times ; Fixation des proportions des secours pour chaque na- ture de pertes. Vingt-six départements sur trente et un ont été consi- dérés comme atteints exceptionnellement, et ont formé, à ce titre, la liste des départements secourus. Les inondés ont été classés en quatre catégories, elles doux premières, comprenant les perdants réduits à une exirême détresse et ceux restés dans une position néces- L'ŒUVRE DES EAUX. 161 siteusc, ont été seules admises au partage des souscrip- tions, alors (|ue les deux dernières, c'est-à-dire les per- dants restés dans l'aisance et ceux pour lesquels les dommages sont insignifiants, soit à raison de leur fortune, soit par suite de la médiocrité de la perte, ont été ex- clues de toute participation à la distribution. En outre, les perdants de la seconde catégorie ont reçu moitié de l'indemnité allouée à ceux de la première. Enfin les pertes en capital ont donné droit à une indemnité calculée sur les neuf dixièmes du dommage ; o.elles affectant le mobilier, à un secours calculé sur les huit dixièmes, et celles qui portaient sur les récoltes, à mie indemnité établie sur la moitié. D'après ces bases, le secours qu'il a été possible de distribuer a été réparti dans la proportion de 45 pour 100 du chiffre net des pertes, toutes réductions opérées, et a donné pour les trois natures de dommages et pour les deux catégories de perdants une indemnité égale, en moyenne, au quart des pertes à très-peu de chose près. Ce qui accroît la valeur de cette indemnité, presque double de celle accordée en 1850, c'est la rapidité avec la(iuelle elle a été mise à la disposition des intéressés. En offet, dès le 1 1 décembre 1800, une première répartition, égale aux 55 pour 100 du chiffre net des pertes, a été faite par les soins delà commission, et le 12 février sui- vant une seconde allocation, égale aux 10 pour 100 du chiffre net des dommages, a été disli-ibuée. Quatre mois ont donc suffi pour effectuer cette opéra- tion, et ce délai se justifie par la nécessité d'attendre l'encaissement des souscriptions, dont une partie venait des pays étrangers. Il L'ŒUVRE DE L'HOMME Liîs livcrains des rivières et des fleuves d'une grande partie de l'Europe n'ont pas seulement à redouter, conrnne leurs ancêtres, les pluies exceptionnelles causées par les révolutions atmosphériques ; ils doivent également s'at- tendre à une irrégularité d'autant plus grande dans le régime des eaux et à des inondations d'autant plus sou- daines que les marécages et les étangs sont plus complè- tement desséchés, et que les pentes des montagnes sont plus déboisées par la hache de l'homme ou dégazonnées par la dent des chèvres et des moutons. Ils ont à craindre aussi les effets immédiats des canaux souterrains de drainage qui déversent rapidement l'eau de pluie dans les rivières, et ceux du curage des petits cours d'eau; enfin chaque année les eaux qui s'écoulent à la superficie du sol se précipitent plus brusquement vers les plaines à cause du nombre de plus en plus considérable des fossés soi- gneusement entretenus qui bordent les routes et les chemins, dans lesquels viennent déboucher les rigoles des propriétés particulières. L'entretien des cultures, sous l'application du drai- nage, dans les zones avoisinant les cours d'eau, permet à la terre de s'imbiber plus profondément, et diminue L'ŒUVRE DE L'HOMME. 105 par conséquent la hauteur des crues : c'est là ce que prouve l'exemple du lacd'Aragua, dans leYenezuela. Au commencement du siècle, alors que la })lus grand(; par- tie des campagnes avoisinantes était en culture, le niveau des eaux du lac était relativement bas, mais il s'éleva peu à peu pendant la guerre de l'indépendance à cause de la dévastation du pays par les armées en lutte et du retour des campagnes à l'état de forêts vierges ; depuis, de nouveaux délrichemenls ont pour la seconde fois abaissé les eaux du lac. Sous l'aclion de toutes ces causes qui influent diverse- ment sur l'économie des fleuves, les uns, comme l'Oder, depuis 1778, et l'Elbe, depuis 1828, ont perdu de leur volume, bien que, d'après les registres météorologiques, la pluie tombant dans leurs bassins n'ait certainement pas diminué; d'autres cours d'eau, comme le Dhône et la Loire, paraissent n'avoir rien perdu de l'abondance de leurs eaux, mais en revanche leurs inondations sont beaucoup plus dangereuses qu'autrefois. La Seine qui, d'après le témoignage de l'empereur Julien, roulait de- vant Paris, il y a 1500 ans, à peu près la même quan- tité d'eau dans toutes les saisons, offre actuellement un écart de 10 mètres environ entre le niveau de l'étiage et celui des grandes eaux ; mais la série de ses crues es! assez uniforme depuis des siècles. Knftn, quelques fleuves, tels que la Garonne, semblent avoir été jadis plus redoutables que de nos jours. Lapins forte inonda- tion connue de la Garonne fut celle d'avril i770. A Cas- tets, lieu où vient s'arrêter le flot de marée, le niveau de la crue atteignait près de 15 mètres (12"\97) au- dessus de l'étiage, c'est un niveau supérieur de 2 mètres à celui des plus hauts débordements de notre siècle. u)i I i;s Mi:i;vi:ii,i.i.s ni.s i-lkcves et des huisskm \. (hioi (jn'il en soit, qiiolques-unos dd (mîs irioiid.'itioiis j)i(Mim'iil (le telles propoilions, qu'elles sont d«î vérily- l)l('s cataclysmes pour les contrées riveraines. L'cîxoiriple (II' trois petites rivières, le Doux, l'Krienx et l'ArdèclH!, conleuiies, de leur source à leur embou- chure, dans les limiies d'un seul département, p(îut donner une idée du gonflement rapide des eaux de crue. Le 10 seplenil)!'!' I8Ô7, et s trois cours d'eau, qui d'or- dinaire coulent paisiblement sur leur fond de rocher ou de cailloux, et n'afjporlent au Rhône qu'une masse li- quide d'une vinj^^aint; d(; métrés cubes, déversaient alors dans le fleuve un volume total de 14,000 mètres, plus que le Gange et ri'^uphrate réunis ne portent à la mer. S'épanchant dans leuis vallées respectives à 15 et 18 mètres au-dessus de l'éliago, ces rivières débordées rasaient les maisons, arrachaient les cultures, déraci- naient les ai'bres. Tant de milliers de troncs furent en- levés en un seul jour, qu'en aval de l'Érieux et du Doux toute la surface du ISIiône Jic j'iisentait, d'une rive à l'autre, qu'un vaste train de bois sur lequel, semblait-il, un homme audacieux eût pu se hasarder pour franchir le fleuve. Et cependant de pareilles iuv^.ndations peuvent être dépassées; car, le 9 octol)r;^ l^ÔT, l'Ardèche s'est élevé, au pont de Gournier, à 2r",ir) au-dessus de l'é- tiage, c'est-à-dire à prés de 5 mjlros d^ \i uteur de plus qu'en 1857. On a un autre exemple du gonflenicut citraordinaire des eaux de crue. En amont des l'orlcs-'J ,-l"e:', certaines crues du Danube ont fait g0i;fl''r le Il?uve à plus de 18 mètres au-dessus de l'étiage. Heureusement, dans le bassin (ruii fleiiv/, la coïnci- dence exacte des crues de plusieurs aniuci^.ls est un fait L'ŒUVRE DE I/HOMME. 165 rare, et l'on n'a pas encore vu tous les tri hiil aires se gon- ller à la fois. En effet, lorsqu'un vent pluvieux pémMre dans une vallée, il se décharge de son humidité, tantôt sur l'un, tantôt sur l'antre versant du bassin, et les divers cours d'eau qu'il fait grossir débordent successivement après le passage des nuées d'averse. Ain^i, dans la vallée du Rhône, quand les vents de pluie viennent se heurter contre lesCévennes, les pentes des Alpes tournées vers le fleuve sont abritées contre l'orage, et c'est peu à peu seulement que la traînée d'a- verses remonte des Cévennes vers les montagnes d'An- nonay. Si tous les afiluents du Rhône devaient grossir à la fois, et celte cohicidence n'est pas impossible, ce lleuve roulerait une formidable masse liquide de ])lus de 100,000 mètres cubes (Veau! Ce serait un autre courant des Amazones; et pourtant, lorsqu'il apporte à la mer 12 ou 15,000 mètres par seconde, les dégâts qu'il commet sur les rives sont déjà des plus effrayants. L'homme ne peut rester ainsi sous le couj) de la ter reur; il doit trouver les moyens de prévenir les inon- dations. Depuis des centaines et des milliers d'années, et sur- tout pendant notre siècle d'activité industrielle, on a projeté et mis ta exécution bien des plans de défense contre les débordements des tleuves ; mais trop souvent ces travaux sont restés inutiles ou même ont produit des résultats tout contraires à ceux qu'en attendaient les in- génieurs et les riverains. C'est qu'en se mettant à l'œuvre, on n'a pas toujours su tenir compte des lois feydrologi- ques. Pour que l'homme s'empare des forces de la nature 100 F.i:s Mi;nvKiij,i:s i)i:s i i.i:i:ves kt dks riisseaix. et les l'a.sbi', travailler à sou profil, l.i jircinirit' roiidilirni est qu'il les coinproniK;. Avant de cherclicrli' utinrAtt à iiii iii;il, il l;iiil eu l;i(Mi étudier la cause. Or d'où viennent les crues suhites de nos grands lleuves? Elles viennent de l'eau tombée dans les rnon- lagnes, et Irès-peu de Teau tombée dans les jilaincs. Cela est si vrai que, pour la Loire, la crue se fait sentir à Roanne et à Nevers 20 ou 30 heures avant d'arriver à Orléans ou à Blois. Il en est de même pour la Saône, le lUiône et la Gironde, et, dans les dernières inondations, le télégraphe électrique a servi à annoncer aux popu- lations, plusieurs heures ou plusieurs jours d'avance, le moment assez précis de l'accroissement des eaux. Ce phénomène est facile à comprendre : quand la pluie tombe dans une plaine, la terre sert, pour ainsi dire, d'épongé; l'eau, avant d'arriver au fleuve, doit tra- verser une vaste étendue de terrains perméables, et leur faible pente retarde son écoulement. Mais, lorsque indé- pendamment de la fonte des neiges, le même fait se représente dans les montagnes ou le terrain, presque toujours composé de rochers nus ou de graviers, ne retient pas l'eau, alors la rapidité des pentes porte toutes les eaux tombées aux rivières, dont le niveau s'élève subitement. C'est ce qui arrive tous les jours sous nos yeux quand il pleut : les eaux qui tombent dans nos champs ne forment que peu de ruisseaux, mais celles qui tombent sur les toits des maisons et qui sont recueillies dans les gout- tières forment à l'instant de petits cours d'eau. Eh bien, les toits sont les flancs des montagnes, et les gouttières les vallées. L'ŒUVRE DE L'HOMME. • 167 Or si nous supposons une vallée de 8 kilomètres (2 lieues environ) de largeur sur IG kilomèlres (4 lieues environ) de longueur, et qu'il soit tombé en vingt- (juatre heures 10 centimètres d'eau sur cette surface, nous aurons dans ce même espace de temps 12,800,000 mètres cubes d'eau qui se seront écoulés dans la rivière, et ce phénomène se renouvellera pour chaque aflluent du fleuve; ainsi, supposons que le Rhône et la Loire aient dix grands affluents, nous aurons le volume immense de 128 millions de mètres cubes d'eau qui se seront écoulés dans le fleuve en vingt-quatre heures ; mais si ce volume d'eau peut être retenu de manière à ce que l'écoulement ne se fasse qu'en deux ou trois fois plus de temps, alors, on le conçoit, l'inondation sera rendue deux ou trois fois moins dangereuse. Tout consiste donc à retarder l'écoulement des eaux. Le moyen d'y parvenir est d'élever dans tous les affluents des rivières ou des fleuves, au débouché des vallées et partout où les cours d'eau sont encaissés, des barrages qui laissent dans leur milieu un étroit passage pour les eaux, les retiennent lorsque leur volume aug- mente, et forment ainsi, en amont, des réservoirs qui ne se vident (jue lentement. 11 faut faire en petit ce que la natuie fait en grand. Si le lac de Constance et le lac de Genève n'existaient pas, la vallée du Uhin et la vallée du Rhône ne forme- raient que deux vastes étendues d'eau ; car, tous les ans, ces deux lacs sans pluie extraordinaire, et seulement parla fonte des neiges, augmentent leur niveau de 2 ou 7) mètres; ce qui fait pour le lac de Constance une augmentation d'environ 2 milliards et demi de mètres cubes d'eau, et pour le lac de Genève de 1,770,000,000. 10K lj;S MKUVKFLLKS DES FLKUVES KT DES HIISSKM X. On ('((iicoil (|iit' ccl iiimiriisr voliiiuc d'eau, s'il n'élaif pas l'elniin par l(3s iiio)ila;:iH's qui, au (lrl)r>ur|ir do ces doux lacs, ranôtcul cl n'en [jcrfiiollcnt rrcoulciiH'iil que suivant, la lar'f^MMU- cl, la piolondeur du Meuve, une ellroyable iiiundalion auiail ]i<'U tous les ans. Kli bien, on a suivi cette indication naturelle, il y a plus de cent cin(|uanl(' ans, en élevant dans la l.fuic un barra^^e d'eau dont l'utilité est démontrée pai- le rapport fait à la Chambre, en 1847, par M. Collignon, alors dé- puté de la Meurtbc. Voici comment il en rend compte : « La digue de Pinay, construite en 171 1 , est à 12 kilo- mètres environ en amont de Roanne. Cet ouvrage, s'ap- puyant sur les rochers qui resserrent la vallée et enve- loppant les restes d'un ancien pont que la tradition fait remonter aux Homains, réduit en cet endroit le débouché du fleuve aune largeur de 20 mètres; sa hauteur au- dessus de l'étiage est également de 20 mètres, et c'est par cette espèce de pertuisque la Loire entière est forcée de passer dans les plus grands dèl)ordements. « L'influence de la digue de Pinay est d'autant plus digne d'attention qu'elle a été créée, comme le montre l'arrêt du conseil du 25 juin 1711, dans le but spécial de modérer les crues et d'opposer à leur brusque irrup- tion un obstacle artificiel tenant lieu des obstacles na- turels, les terrains gazonnés et boisés, qui avaient été imprudemment détruits dans la partie supérieure du fleuve. Eh bien, la digue de Pinay a heureusement rem- pli son office au mois d'octobre 184G ; elle a soutenu les eaux jusqu'à une hauteur de 21''S47 au-dessus de l'é- tiage ; elle a ainsi arrêté et refoulé dans la plaine du Forez une masse d'eau qui est évaluée à plus de 100 mil- lions de mètres cubes, et la crue avait atteint son maxi- L'ŒUVRE DE L'HOMME. 169 mum de hauteur à Pioanne, quatre ou cinq heures avant que cet immense réservoir fût complètement rempli. (( Si la digue de Pinay n'avait pas existé, non-seule- ment la crue serait arrivée beaucoup plus vite à Roanne, mais encore le volume d'eau roulé par l'inondation aurait augmenté d'environ 2,500 mètres cubes par se- conde ; la durée de l'inondation aurait été plus courte, mais l'imagination s'effraye de tout ce que cette circon- stance aurait pu ajouter au désastre déjà si grand dont la vallée de la Loire a été le théâtre. « D'ailleurs, l'élévation des eaux en amont de la digue de Pinay n'a produit aucun désordre, bien loin de là : la plaine du Forez ressentira pendant plusieurs années Vaction fécondante des limons que l'eau, graduellement amoncelée par la résistance de la digue, y a déposés. « Tel a été le rôle de cet ouvrage qu'une sage pré- voyance a élevé pour notre sécurité et pour nous servir d'exemple. Or il existe dans les gorges d'où sortent les affluents de nos fleuves un grand nombre de points où Pexpérience de Pinay peut être renouvelée économique- ment si les points sont bien choisis, utilement pour mo- dérer l'écoulement des eaux, et sans inconvénient, et, le plus souvent, avec un grand profit pour l'agriculture. « Au lieu de ces digues ouvertes dans toute leur hau- teur, on a proposé de construire aussi des barrages pleins, munis d'une vaime de fond et d'un déversoir su- perficiel. Les réservoirs ainsi fermés, pouvant retenir à volonté les eaux d'inondation, permettraient de les affecter, dans les temps de sécheresse, aux besoins de l'agriculture et au maintien d'une utile portée d'étiage pour les rivières. » L'édit de 1711, dont parle M. CoUignon, indique par- 170 MIS MKP.VKff.LKS DKS FLKI VKS ET DKS HI'ISSEAIX. faifciiiciil l)i('ii If! iV)l(î (jiic les dif^Mics sfjiil .ippeléos à jouer'. On y litlo passa*^e suivaiil. : a II ost indisponsabicrricnt iK'îcessaire do faire trois di- •,ni(3S dans rint(!rvall(( du lit de. la rivière où les batoaux ne passeiil, poini : la [)rnrni(*'re aux piles de l'inay, la se- conde à l'endi'oitdu eliàleau de la hoehe, et la troisième aux piles et culées d'un ancien pont qui était construit sur la Loire au bout du village de Saint-Maurice; et avec le secours de ces digues, les passages étant resserréSi lorsfpi'il y arrive de grandes crues, les eaux qui s'écou- laient en deux jours auraient peine à passeï- en quatre ou cinq. Le volume des eaux, étant diminué de pins de la moitié, ne causera plus de ravages pareils à ceux qui sont survenus depuis trois ans. » En effet, en 1856, comme en 1846, les digues de Pinay et de la Roche ont sauvé Roanne d'un désastre complet. Remarquons en outre que, suivant M. Roulangé, ancien ingénieur en chef du département de la Loire, la digue de Pinay n'a coûté que 170,000 fr., et celle de la Roche 40,000 fr., et il ne compte qu'une dépense de 5,400,000 fr. pour la création de cinq nouvelles grandes digues et de vingt-quatre barrages dont il propose la construction sur les affluents de la Loire. D'ailleurs, M. Polonceau, ancien inspecteur divisionnaire des ponts et chaussées, qui admet en partie le même système, pense qu'on pourrait faire ces mêmes digues en gazon, en planches et en madriers, ce qui serait encore plus économique. Maintenant, comme il est très-important que les crues de chaque petit affluent n'arrivent pas en même temps dans la rivière principale, on pourrait peut-être, en L'ŒUVRE DE L'IIO^lMl!]. 171 mullipliant dans les uns ou en restreignant dans les autres le nombre des barrages, retarder le cours de cer- tains affluents, de telle sorte que les crues des uns arri- vent toujours après les autres. D'aprèg ce qui précède et d'après l'exemple de Pinay, ces barrages, loin de nuire à l'agriculture, lui seront favorables parle dépôt de limon qui se formera dans les lacs artificiels et servira à fertiliser les terres. Là où les rivières charrient des sables, ces barrages auraient l'avantage de retenir une grande partie de ces sables, et, en augmentant le courant au milieu des rivières, d'en rendre le thalweg plus profond. Mais quand même ces barrages feraient quelque tort aux cul- tures des vallées, il faudrait bien en prendre son parti, quitte à indemniser les propriétaires, car il faut se ré- soudre à faire la part de Veau comme on fait la part du feu dans un incendie, c'est-à-dire sacrifier des vallées étroites, peu fertiles, au salut des riches terrains des plaines. Ce système ne peut être efficace que s'il est généralisé, c'est-à-dire appliqué aux plus petits affluents des ri- vières. LeMississipi offre le curieux exemple d'un grand cours (feau que l'homme a récemment annexé à son domaine et dont il a pu modifier l'action géologique dans l'espace i.iis MF:r'.vi;ii.i.i;s r)i:s i i,i;i;vks i:t dks iuissealx. à r(Mitr(3ti(;ii do l;i vif clic/ tons los clros vivants rlc noire «,dob(i. Les plantes qui vivent dans l'eau ne peuvent respirer [)ai' le même mécanisme organirpje que les plantes aé- riennes. Dans c(!S dernières, l'air circulant ;i travers les méats intercellulaires des feuilles agit directement sur le contenu des cellules du p.'irencliyme. l)ans les j)lantcs aquati(pies, les feuilles dépourvues d'c[)iderme et en général li'és-minces empruntent Taii' à l'eau fjui le lient en dissolution ; de telle sorte, que les plantes submer- gées respirent par un mode analogue à celui que pré- sentent les poissons et les autres animaux qui respirent par des branchies. Ces plantes, d'ailleurs, absorbent l'a- cide carbonique que certaines eaux renferment en forte proportion, et produisent de l'oxygène. Elles contri- buent ainsi à maintenir, dans les eaux, les conditions d'équilibre delà vie. La renoncule aquatique présente à la fois des feuilles aériennes qui flottent à la surface de l'eau, et desfeuilles trés-divisées qui sont submergées. Les feuilles aériennes, munies d'un épiderme pourvu de stomates, offrent un parencbyme dont la structure ne s'écarte point sensi- blement de celle des feuilles aériennes. Les feuilles aquatiques n'ont pas d'épiderme proprement dit. Des cellules parenchymateuses vertes, pressées les unes contre les autres, y constituent un parenchyme unifor. mément dense, creusé çà et là de cavités aérifères isolées. Chez une autre plante de nos eaux douces, la sagit- taire flèche-cVeau, la forme des feuilles est complète- ment modifiée par le courant. En effet, si la sagittaire se trouve dans les eaux tranquilles d'un lac ou d'un LES PLANTES AQUATIQL'ES. 177 étang, elle développe t\u-dessus de l'eau dos feuilles qui ressemblent à des (lèelies ; si, au conlraire, elle est soumise à l'action d'eaux rapides et courantes, ses feuilles restent submergées et ne forment que de longs rubans. Une plante exotique, Yanachavis du Canada^ offre un inlérèt tout particulier en raison d'abord de son mode de reproduction, et ensuite do son acclimatation acci- dentelle en Europe. Transportée dans les eaux de la Tamise, probablement avec des cbarpentes du Canada, l'anacharis y a pris, en quelques années, un développement trés-considérable. Détachée du fond des eaux, elle peut encoi-e continuer longtemps sa végétation en flottant au gré des vents ; et comme une portion do tige seulement suffit pour la re- produire, il arrive souvent qu'au bout de quelques mois elle entrave la navigation des canaux. Parmi les plantes d'eau douce, il enest une qui, ajuste titre, excite l'admiration dos naturalistes et de toutes les personnes qui l'observent à l'époque delà floraison. Cette plante, c'est le vallisnérie, qu'on trouve assez ré- pandu dans les eaux tranquilles de l'Italie et du midi de la France. Son mode de fécondation, qui est tout à fait extraordinaire, l'a rendu trés-célébre. Voici ce qui se passe : Chez le vallisnérie, les organes mâles et femelles ne sont réunis ni dans la mémo fleur, ni sur le même pied ; les deux sexes se trouvent sur des individus dis- tincts. La fleur femelle a un prédoncule très-long qui affecte la forme d'un fil tordu en spirale; quelques jours avant la fécondation, la spire se déroule de manière à ce que la fleur puisse monter à la surface de l'eau, où elle reste flottante. La fleur mâle, au contraire, a un 12 17S i.i:s Mi;r.vKii,i.i.s l'i.s ii,i.ivi:s ki I)I:s hiisseaix. pùdoiKUile l,n's-iourt„ dont, la loriin; d la iialiir.' 'lail- Icurs ne penrx'ltciil aiicum' oxlciisioii ; mais les •'•l.'i- mincs sont renlennées dans une espèce de pclil ^'lobule transpareiil, (jiii d«'viciil liltiv en se dcHaelianl d<' >oii pé- doncule On voit alois monter, à la sinfaee de 1 eau, de jolies petites perles hlanclies rpii viennent s'ouvrir près des fleurs lernelles. La l'êcondatiou une fois opéiée, le pédoncule de la Heur femelle s'enroule en spirale à tons serrés et ramène cette fleur au lond de l'eau où les graines mûrissent dans l'ovaire. Les plantes aquatiques contriijuent souvent à clian^^er l'aspect de la terre. Dans les marais, ce sont d'abord les hippnris, les utri- culariœ, les aquiselum et divers joncs qui forment, avec leurs racines entrelacées, un tissu flottant sur l'eau boueuse ; ensuite le sphagnum palustre se répand sur toute la surface, aspire l'eau comme une éponge et crée un lit aux bruyères et aux licbens qui, tous les ans, exhaussent le terrain par leurs dépôts. D'autres fois, une baie tranquille se peuple de nymphéa, d'arundo phragmites et d'autres plantes qui retiennent les parties terreuses rejetées par les eaux du dehors. Dés que ce limon a pris un peu de solidité, on voit se développer des saules, des aunes et d'autres arbres appartenant aux espèces qui aiment les terrains humides. LES INFUSOIRES Les eaux douces et les eaux salées sont peuplées de légions innombrables de petits êtres dont les dimensions sont si faibles qu'on ne les voit pas à l'a^il nu. Ces ani- malcules sont tellement petits qu'une (jouUe iVeau peut en contenir plusieurs millions. Los fleuves en cbarrient constamment des quantités énormes dans la mer ; le Gange, par exemple, en déverse dans l'espace d'une an- née une masse égale à six ou huit fois le volume de la plus grande pyramide d'Kgypte. C'est aux infusoires que le limon duîSil et d'autres dépôts fluviatilesou lacustres doivent leur prodigieuse fertilité; et ce sont eux qui colorent i)arfois en vert ou en rouge soit des mares, soit même des étangs assez étendus. En raison de leur pe- titesse et de leur abondance, ils contribuent, dans une très-notable proportion, à la nourriture des jeunes pois- sons du moment où ces derniers sont privés de leur sac nourricier, la vésicule ombilicale. Les infusoires sont ordinairement de forme ovoïde ou arrondie. Ils sont généralement munis de cils vihratiles disposés sur leur corps en nombres considérables et servant à la fois au mouvement de translation de l'ani- mal, à sa nutrition et à sa respiration. J8() l,l,> Ml.r.VhlI.M,^ l)I.S II.IIVKS IJ liKS l'.lISShALX. Ils pfMivciil SH rcprodiiifc do tiois in.'inièrfs (lifK;- iciilcs, soit 011 cnielUuit des houvtjcoiu i\ peu pirs corririic les V(''g(Haiix, soit pnr reproduclion sexuelle (il v n, clicz ces petits êtres, des individus mAles et remellos), soit (Mifiii ])ar f}ssij)arUe\ c'est-à-dire pai- lu diNJsioii sponta- née de r.iniin-'d en deux individus nonveaux. Ce dernier mode, (jui est le plus fréqnejit, présente des par ticula- rités vraiment merveilleuses : un étran|,^lement se pro- duit au milieu du c^orps, et bientôt le segment inférieur se garnit de cils vibratiles à l'endroit même où sera la . nouvelle bouche. Dès que cette nouvelle bouche est dis- tincte, l'infusoire se coupe en deux parties. Au bout de peu de temps, chacune d'elles ressemble à ranimai pri- mitif. Par conséquent, chez les infusoires, le fils est la ?noi- t'ié de sa mère, et le petit-fils le fjitart de son grand- père ! Ce mode de génération des infusoires peut donner une idée de leur merveilleuse fécondité. On a pu calculer que la progéniture de deux stylonichiées s'élevait, au bout d'un mois, à plus de 1,048,000 individus; et qu'une seule paramécie avait produit, en quarante-deux jours, plus de 1,584,000 formes semblables à elle. Il suffit donc d'un seul germe pour produire en trés-peu de jours, quand il est placé dans de bonnes conditions, des myriades d'infusoires. La durée de la vie de ces animaux n'est que de quel- (fues heures. Mais certains infusoires ont la faculté de renaître après avoir été desséchés. Ils peuvent, à l'état de poussière, être enlevés par le vent et transportés à des distances très-considérables, et demeurer inertes pendant très-longtemps. La vie, suspendue depuis des LES INFUSOIRES. 181 années entières, reprend son cours au contact d'une goutle d'eau ! Ouolques personnes ont pensé que les infusoires pou- vaient, dans certains cas, se développer par (jenération spontanée^ c'est-à-dire sans parents et sans germes, fjcur opinion était surtout appuyée sur cette circon- stance que les infusions fournissent des myriades de ces animaux après qu'elles ont subi une haute température capable de détruire tous les germes qu'elles auraient pu contenir. Mais quand l'eau des infusions est absolument pure et que les matières organiques qu'elle renferme sont soustraites au contact de l'atmosphère, il ne se produit plus aucini infusoire. 11 en est de même quand on l'ait entrer de Tair dans le vase de l'infusion , si l'on a pris la précaution de faire préalablement passer cet air dans un tube chauffé au rouge, ou de le recevoir, avant de l'introduire, dans un bain d'acide sulfurique. C'est donc l'air de l'almosphére qui fournit la semence des infusoires. L'atmosphère, en effet, est une sorte de mer chargée de particules vivantes qui n'attendent, pour se dévelo})per comme des œufs ou des graines, que des circonstances favorables à leur germination. LES MOLLUSaU ES Dans les eaux douces, les espèces de mollusques sont ])ien moins nombreuses que dans la mer, et n'ont ja- mais ni l'élégance ou la bizarrerie de formes, ni la beauté ou l'éclat des coquillages marins. On n'en utilise aucun pour la nourriture de l'bomme ; mais les insectes et les oiseaux aquatiques, ainsi que les poissons, en font souvent une grande consommation, surtout quand les autres aliments viennent à manquer. 1. Bryozoaires. — On trouve assez communément, dans les eaux pures et stagnantes, sous les feuilles de nym- phéa, de potamots, ou sous des fragments de bois sub- mergés, des animaux bryozoaires que l'on désignait au- trefois sous le nom de polypes à panaches. Ce sont les liiimatelles, petits êtres diaphanes constituant des co- ionies qui ressemblent à de petits arbustes rameux et microscopiques, formés de menus tubes entés les uns sur les autres. Ils offrent de quarante à soixante ten- tacules rétractiles qui s'épanouissent, comme les pétales d'une ileur, et qui sont garnis de cils vibratiles dont le mouvement suffit pour amener les aliments à la bouche. Un autre genre, qu'on trouve dans nos étangs de Franxie, «st la crislatelle. Les habitants delà colonie sont LES INFUSOIIŒS. 183 l'éunis, en Irès-grande quantité, dans une enveloppe commune ; ce sont de longs filaments de la grosseur d'une plume de cygne. Leur aspect rappelle assez bien celui des cordons de passementerie qu'on appelle che- nille. Ces cordons sont tantôt libres en partie, tantôt complètement adbérents aux racines, aux tiges des pe- tites plantes aquatiques. Les tentacules sont d'une belle couleur hyaline, et le corps est coloré en brun. If. Anodontes. — Ces coquillages à deux valves sont Moulo d'eau douce. vulgairement connus sous le nom de moules (Vélang; on les trouve dans le sable ou la vase des cours d'eau, des lacs et des étangs, et on les distingue facilement des autres mollusques d'eau douce par la supério- lité de leur taille. Les coquilles sont nacrées à l'inté- rieur et offrent extérieurement une teinte noire ver- dàtro. L'anodonte des cygnes [anodonta cijgnea) a des valves grandes, profondes et légères ; dans le nord de la i«4 Ils Ml i'.vi:iijj:s dks ii.kivks kt dks p.rissKAix. I' r.'iiicc, on s'en sert sous le Jiom (ïtûaffjUcs jjoiir éciv- jiKM' le lait. III. MulcUes. — Ces mollusques bivalves, eonnussous le nom de moîiles de rivière, liahitenl eomrne les nno- (lontes les Fonds vaseux des eaux douces. L'exléiiciir de la coijuille est vert uoirâlre ; l'iritéiicur est nacré avec des nuances poupres, violettes et irisées. Les espèces les plus importantes qui vivent dans nos eaux douces sont : 1° La mulettc du Pdiin ou sinuée {tinio simiala), grand coquilla^rodout la nacre est employée pour paruies; 2" La inulelte littorale {wiio liltoralis); "ô" La mulette des peintres {unio pictoritm), coquillage oblong et mince, qui sert à contenir des couleurs. La chair de ces animaux, qui est coriace et fade, n'est pas mangeable. Les mulettes produisent quelquefois des perles peu recherchées en général. Toutefois, la perle lose est une rareté trés-estimée et de grande valeur. Pour provoquer la formation des perles, il suffit de pratiquer un petit trou dans la coquille, de faire une légère blessure au mollusque, ou d'introduire entre les deux valves, un corps étranger de très-petite dimension. On dépose en- suite les animaux dans un \ivier ou un étang; et, au bout de quelques années, ils donnent quelquefois des perles. Il faut beaucoup d'habileté pour manier et pré- parer le coquillage; car les nombreux essais' qui ont été faits n'ont généralement donné que des résultats peu sa- tisfaisants. J'ai trouvé quelquefois, dans la mulette sinuée, des perles d'un assez bel orient. C'est dans les eaux des possessions sibériennes que les mollusques produi- 1 l'Iiysj. "1 Amimllaiia. 5 l'ianorbis. i l.iiiiiiea striata 5 Ainpiillaria cornuarielis. G Limnea. LES MOLLUSQUES. 187 sent la merveille des merveilles, la rarissime perle rose. III. Llmiiées. — Les animaux qui appartiennent à ce groupe, et qu'on désigne vulgairement sous le nom de colimaçons d'eau douce, ne peuvent rester longtemps dans l'eau sans venir respirer à la surface ; ils sont, comme les dauphins et les phoques parmi les mammi- iëres, obligés de respirer l'air atmosphérique. A cet effet, la limnée se renverse à ileur d'eau, et rampe dans cette position comme si elle était à la surface d'une glace. La limnée des étangs {limnea stagnalis) est renfermée dans une coquille mince, diaphane, dont les tours des spires sont assez allongés; sa tète est large et aplatie, et sa bouche est munie de petites dents et dune langue de consistance assez dure. Cette organisation lui permet de couper et de broyer les plantes aquatiques dont elle fait sa nourriture. Les limnées pondent au printemps; on trouve sou- vent, à celte époque, adhérant aux plantes ou aux corps lloltanls dans les rivières, de petites masses glaireuses et transparentes comme du cristal : ce sont des agglomé- rations d'œufs de limnées. IV. On trouve aussi, dans nos eaux douces, d'autres mollusques de formes très-variées tels que : planorbes, physes, iridines, (impullaires, mijcëtopodes. Les planorbes ont une organisation analogne à celle des limnées avec lesquelles on les rencontre communé- ment dans les eaux des étangs, des marais, des ruisseaux ou des rivières. Leur coquille est mince, légère, en forme de disque, enroulée dans un mémo plan, de ma- nière à rendre tous les tours de spire visible en dessus comme en dessous. La plus grande du genre est le pla- m i.i:s MMivi:ii,i,i:s dks FLKrvES kt dks iîiisseaux. „„,))(• c.onir (i,ln„mhh corncus), ln--co,iiinini dans nos rivicTOS de France. Les physcs ont la coquille ovale, oMoii-ne ou presque ; Iridiae uvale. globuleuse, l.ès-mince, très-fragile, l.sse a ouverture bngitudinale rètrécie supérieurement,avec le bord droit tranchant et le dernier tour plus grand que tous les autres. La physe marron (physa castanea, est commune dans nos eaux douces. LES ANN ÉLIDES Toutes les sangsues sont voraces ; les unes avalent de petits animaux, les autres sucent le sang des verté- brés. L'espèce type est la sangsue médicinale (hirudo me. dicinalis) bien connue de tout le monde : elle habite les eaux douces de l'Europe et de l'Afrique septentrionale; on connaît plusieurs espèces étrangères : 1" La sangsue truite {hirudo trocllna) de l'Algérie; on l'emploie concurremment avec la sangsue médicinale sous le nom de dragon en France, et de trout-leeck en Angleterre ; 2" La sangsue granuleuse (hirudo grannlosa) de l'Inde; elle est employée par les médecins de Pondi- chéry. Ces sangsues se nourrissent en suçant le sang des vertébrés. Leur digestion est peu active ; il en résulte, ((u'après s'être gorgées de sang, elles peuvent rester plusieurs mois et même plusieurs années sans prendre de nourriture. ' Les sangsues médicinales ont la bouche garnie de trois i)elites mâchoires dentelées en scie avec lesquelles elles entament la peau des animaux sur lesquelles elles 100 I,l> .MI.IiVi.ll,l.l> l)i;s II.I.I \I.s l.I |)I.S RrrssEAi"X. .s';i|»|»li(jiiriil . Leur sciiloii-r hurc.ilc, (jiioifjuc j/joiiidro ((110 (îoUo (|u"(ll('s ont ,1 1,1 j);ii(it' postôricîunî (Ju corps, leur pci'iiicl. en onde dfî sucer le san;^ en pr;jli'jij;iiil le vide autour de la plaie laile par- leiir^ rnàchoiies. La peiife eieairiee éloilée (pii subsiste aux <'U(li(tii> fjii'cllcs Sangsue médicinale. ont piqués est duc à Faction de ces trois mâchoires. Quand on dissèque une sangsue médicinale, on est surpris de voir le rapport qui existe entre la symétrie des parties extérieures et celle des organes intérieurs. Par chaque fragment de cinq anneaux, elle offre un organisme complet^ c'est-à-dire tout ce qui est nécessaire pour constituer un individu. On pourrait LES ANNÉUDES. 191 la comparer à une série d'animaux symétriquement alignés et soudés. La sangsue est donc un être mul- tiple. On peut se demander pourquoi un quadru- pède auquel on coupe la tête meurt presque instantané- ment, tandis qu'une sangsue, après une semblable mu- tilation, vit encore j)lus dune année. Ce fait e^t facile à expliquer. Le quadrupède n'a qu'un seul centre sensitif, un cerveau, contenu dans la tète : si vous le retranchez, l'animal doit périr. Chez la sangsue il y a plusieurs cen- tres de vie, et vous ne faites mourir que l'organisme sur lequel vous agissez. Si l'on coupe en deux une sangsue aux trois-quarts gorgée et encore attachée à la peau, la moitié antérieure continue de sucer, et l'on voit le sang couler par son extrémité ouverte. Quand on coupe ou qu'on lie le cor- don médullaire, dans la partie moyenne du corps, on produit et l'on isole deux animaux multiples ; il se crée à l'instant deux volontés bien distinctes, et les phéno- mènes sensitifs etlocomotifs qui se passent dans la moi- tié antérieure n'ont rien de commun avec ceux de l'autre moitié. On a conservé, pendant plus de deux ans, une sangsue soumise à cette opération. Rien n'était plus singulier que le conflit des deux volontés entre les deux demi-sangsues , lorsque la ventouse de chacune se trouvait fixée aux parois du vase; on voyait s'engager une lutte dans laquelle chaque moitié se montrait tour à tour contractée ou tiraillée, suivant qu'elle était ou plus forte ou plus faible. Cette lutte durait jusqu'à ce que l'une des deux vint à céder ; alois la moitié victo- rieuse la traînait à sa suite. Si l'on coupe une sangsue de manière à isoler plusieurs fragments, chacun vivra même pendant un temps considérable. On a conservé 102 US MKI'.VKHJ.KS hl.S I I.KI'VES KT F»KS ÏU'ISSEAI'X. (I(;s Ironçoiis sans nom rihiif jx-uduil (|ii;Urc, ciiifj cl douze mois et rriêine plus. L'lia;rno|)is, ou la sfiiifjsiic de rlicval, se trouve dans les (!aux douces de rKuiope, iriais plus pai liculi«*ieinent dans les eonln-es nirridionales d(i ce confina ut et dans ^•3sa^ 1. Sangsue vulyaire. — 2. Sangsue verdàtre. 5. Haemopis chevaline. l'Afrique septentrionale. Sa bouche n'étant passuffisam ment armée pour percer la peau des animaux vertébrés, elle se fixe aux membranes muqueuses de leur bouche ou même de leur gosier. Elle a souvent causé des acci- dents graves chez les hommes ou les animaux qui l'ont avalée en buvant; on en trouve quelquefois plusieurs LES ANNÉLIUES. 193 fixées à l'intérieur de la bouche et du gosier des bœufs abattus pour le service de la boucherie eu Algérie. Une autre espèce, beaucoup plus petite, a été trouvée fré- quemment sous les paupières et dans les fosses nasales des hérons, à la Martinique. L'aulastome {A. gido) est très-commune en France dans les eaux douces stagnantes ; elle dévore, en les ava- lant, les vers, les nais, les larves d'insectes aquatiques et divers autres petits animaux. La néphilis {N. octoculata) a les mêmes mœurs. La trochete (T. .uibviridis) a les mêmes habitudes; elle a, de plus, la faculté de pouvoir quitter momenta- nément les eaux douces pour aller à terre et y chasser les lombrics qu'elle dévore avec avidité. Les clepsines (GlosslpJwnia) sont incapables de nager; elles vivent en suçant le sang des mollusques d'eau douce. La piscicole (Piscicola) vit, à l'état de parasite, sur les poissons d'eau douce, en Allemagne. Toutes les sangsues sont hermaphrodites ou pourvues de deux appareils sexuels distincts, maie et femelle ; elles se reproduisent exclusivement par des œufs. — Les clep- sines et la piscicole pondent des œufs isolés; mais les clepsines conservent leurs œufs adhérents à la face ven- trale excavée de manière à former une poche incuba- trice; ces œ^ufs sont globuleux, jaunâtres ou verdàtres ou rosés. Les œufs de la piscicole qu'on trouve fixés sur les poissons d'eau douce sont ovoïdes, rouge brun et marqués de sillons longitudinaux. Toutes les autres hi- rudinées d'eau douce l'enferment leurs œufs dans une coque ou capsule, nue pour la néphélis et la trochete, et revêtue d'un tissu spongieux qui lui a fait donner le 15 lOi i.Ks Mi;i;vi.iM,i:s dks fm;i;vi;> kt iu:s I'.uisseaix. nom (le cocon, |)()iir la saii^^-u*' nir(ii<:iii;ilc. l'iHfMiiojiis et l'aiilasloiiic. Les saii^^siKîS qui rahrifjiifiit, dfîs cocons icdiorcluMil, pourpoiidro, la Icno liiimidi; et si)on},M(!Uso, vX nolain- ment les lencs tourboiiscs. Ceux de la san-^suc médici- nale ont à peu près la forme et le volume des cocons du ver-à-soie ; ils sont lonj,^s de 20 à oO millimètres et larj^es de i'2 à 18; leur enveloppe extérieure, qui a l'aspect du tissu d'une épon^^e fine, est épaisse de '2 à o millimètres. Les eaux des marcs contiennent souvent des sangsues que les animaux avalent avec l'eau quand ils ^if'nnelll s'abreuver. On a, en effet, trouvé en diverses circon- stances, dans l'œsophage de bo'ufs de boucherie, un très-grand nombre de sangsues avalées vivantes à l'état presque microscopique, et depuis lors attachées à la membrane qui était devenue leur demeure. Quelquefois ces animaux prospèrent si bien dans les voies respira- toires que leur avidité finit par leur être fatale ; gorgés de sang, ils empêchent l'air de circuler dans les bron- ches, et, amenant la suffocation de leurs hôtes, ils ne tardent pas eux-mêmes à périr, \ictimes de l'hospitalité involontaire dont ils ont abusé. En Egypte, en Espagne, en Algérie on a été souvent obligé d'opérer des soldats suffoqués par ces petits habitants des eaux stagnantes. LES CRUSTACES On trouve des crustacés d'eau douce dans les diffé- rentes parties du monde. Parmi ces animaux, les écre- visses sont incontestablement les plus utiles. I. Écrevmes. — ^Les écrevisses habitent les lacs et les cours d'eau de plusieurs parties du globe, notamment de l'Europe. — L'écrevisse ordinaire ou lluviatile (Astacifs fluvlatlUs) est l'espèce type. Ses pinces sont rouges en dessous. Avec cette espèce, nous en avons deux autres en France : Vécrevisse longicome (A. long Ico mis) ^ dont les antennes ont une longueur considérable, et Vécrevisse paKipède (A. pallipes ou albipes) dont les pinces sont blanchâtres en dessous. On désigne vulgairement ces es- pèces sous les noms d'écrevisses à pattes rouges et d'é- crevisses à pattes blanches. Ces animaux sont très-recherchés dans tous les pays; mais généralement ils sont un mets de luxe parce que le prix en est, pros((ue partout, assez élevé. A Paris, on tient en grande estime les écrevisses provenant de Stras- bourg et du bassin de la Meuse, dont les qualités, du reste, se retrouvent chez celles qui vivent dans des eaux claires et courantes où les aliments sont variés et abon- dants. l'.Mi l,i:s MHUVKfU.KS DES FLKIVKS II !)!> l'.I ISSt.VlX. Les écrevisses ne sont pas, (l'ailleur.s, aussi abondantes <|u'on pourrait lo di'siier, par("<; que leur croissance est très-lente, et leur nnjJtiplieiilion assez lestieinte ; en ef- let, l'accroissement n'a lieu ([u'à l'éporpie de la mue, Écrevisse graine e. quand l'animal renouvelle complètement son enveloppe ou carapace une seule fois chaque année après le premier âge ; et, d'autre part, ces crustacés n'ont pas la prodi- gieuse fécondité des poissons, la femelle ne pondant qu'un nombre d'œufs peu considérable, une centaiue environ pour une écrevisse de taille moyenne. LES CRUSTACES. 197 La ponte est accompagnée de circonstances très-cn- rieiises : Avant d'émettre ses œufs, la femelle présente, après TaccoLiplement, entre les dernières pattes du thorax, un dépôt vermicelle de couleur blanchâtre. On doit considérer comme fécondées toutes les écrevisses qui offrent ce dé- pôt. C'est peu (le temps après son apparition que les œufs vont se fixer sous l'abdomen qu'on désigne vulgai- rement et improprement sous le nom de queue. Ces œufs sont fixés contre les fausses pattes par une substance visqueuse provenant d'une matière blanche laiteuse dont se sont préalablement chargées ces fausses pattes et la face inféiieure dos ligaments de l'abdomen. La pré- sence de cette matière blanche est un signe certain de la maturité des œufs. Ces derniers, reçus dans l'espèce de sacque forme l'abdomen en se repliant, sont enduits de celte matière visqueuse qui s'élire en un long fil, très- délié d'abord, mais en même temps élastique et résis- tant, et qui grossit plus lard, en se tordant sur lui-même pour former le pédicule de l'œuf. La femelle porte ses œufs, qui forment des espèces de grappes, jusqu'à leur éclosion. On la voit, durant cette période d'incubation, étendre fréquemment son abdo- men en l'agitant pour laver et aérer lesa'ufs. Cette solli- citude, toute maternelle, s'explique parles exigences de la respiration de l'embryon, dont le cœur, dés qu'il s'est montré; bat avec vitesse ; j'ai compté 180 à 185 batte- ments par minute. Cette action respiratoire pourrait à elle seule donner l'explication des insuccès que l'on a éprouvés en tentant de [)ropager des écrevisses dans des eaux peu vives ou peu aérées. Quand le moment de l'éclosion est arrivé, la coque de 108 I,i;s MKKVKILLKS F)i:s FI-KTJVKS KT DKS IMFSSEArX. l'oMir s'onvic, pur h; milieu cl se divi f r-ii deux j).ji1,i(».s (jui i;i|)[)oll('ii(. ime corinillc l)iv;ilv<' r>iiverlc. La jeune êcrcvissc ;i \r dos Mpplifjiié coiilrc lOuvi rtmc», et f.iit, de temps à antre, d<' légers rrioiiveinfiils fjiii hndrut à la l'aire sortir. Klle. dé^^'^ge d'ahoid la partie ajitcrieiire de sou cor[)s, le jeste vient ensuite. I.e })elit animal fjui n'a alors que 11 millimètres environ de lou^nieur sur T) de largeur, reste allaché à son œuf par sa membrane vi- Écrevisse mâle. teUlne ; les deux valves de cet œuf qui se sont rétractées l'etiennent une portion de la membrane dans leurs re- plis, tandis que cette dernière adhère fortement à la nageoire caudale ou au pourtour de l'anus. La base des pinces, le bord radial de la main et rextrémité de la jambe sont rouges, le reste des membres est pâle. La (!arapace affecte une couleur verdâtre marbrée de rouge. C'est pendant qu'elles sont encore fixées sous l'abdomen que les petites écrevisses subissent leur première mue. Quand celle-ci est terminée, elles deviennent entière- LES CRUSTACÉS. 199 nient libres et nagent alors avec beaucoup de vivacité. 11. Crabe fluviatUe on thelphuse fluviatile {Thelphusa flu- inatilis). — Ce cruslacé habile les bords des lacs, des cours d'eau et des torrents de plusieurs parties de l'Italie, de la Sicile et de la Grèce ; les gens pauvres s'en nour- Crevellc des ruisseaux. — Crabe fluviatile. rissent surtout pendant le carême. C'est le crabe que l'on voit souvent représente sur des médailles anti- ({ues. 111. Creveltines. — Plusieurs crevellines vivent dans nos eaux douces, comme la cieveltine des ruisseaux {Ganmiarus /luviatilis} et la crevelline puce (Gammarus piilex). On les trouve, surtout la première, dans presque '200 i,i;s :\ii:i'.vi.i[.i.i::^ di.s iii.i vi.s m |)|.s i'.m.sskai \. Ions les iiiissoaux, (l;iijs les sour<;(;s cl k;s foiilaiiios. IV. A])uci(l(^s.— Ces jxîlils cnjslac«'îs, qui .'iltci^Micul à |)(Mi prèsTjS millirruHrcs (Jo lonj;, so troiivcDl fjiir|(|iiofois par milliers dans nos cinix douces staj,aiaiil<'s ; ils ont le dos couvorl d'uno cai apaco en forme do |jf>u(:lioi-, et portent des palles-mâclioires leur servant de rames, et des pattes branchiales au nombre de soixante paires environ. V. Branchi])ides. — Ces animaux n'ont pas de Ijon- clier; leur corps est ^^rèle et allongé. Le brancliipe des étangs (Brancliipus stagnalis) qui liabite nos eaux douces, n'a que 10 à 12 millimètres de longueur; il naît avec une forme très-différente de celle de l'adulte. VI. Monoculides . — Ces animaux, d'une petitesse ex- trême, sont principalement caractérisés par l'existence d'un œil unique situé sur la ligne médiane, à la partie antérieure et supérieure de la télé. La femelle pond un nombre assez considérable d'œufs qu'elle conserve el porte avec elle, pendant toute la durée de l'incubation, dans une ou deux grosses poches placées sous l'abdo- men. Les jeunes, après leur éclosion, affectent la forme circulaire et n'ont qu'une paire d'antennes et deux pai- res de pattes natatoires ; ils ressemblent alors très-peu à leurs parents. Ce n'est qu'au bout de plusieurs mues qu'ils prennent la forme des adultes. Le cyclope fait partie de la famille des monoculides. La seule espèce connue est le cyclope commun (Cyclops vulgaris) qui n'a pas plus d'un millimètre et demi de long. 11 habite en grand nombre dans nos eaux douces stag- nantes. Ce petit crustacé est tantôt blanchâtre ou ver- dâtre, tantôt brunâtre ou rougeâtre. 11 subit de curieuses métamorphoses : après l'éclosion, il est presque sphéri- LES CRUSTACES. 201 que ; au bout de quelques jours , la portion postérieure du corps s'allonge. La première mue a lieu du vinglième au vingt-huilième jour ; le jeune cyclope prend alors une forme elliptique ; l'abdomen devient bifide et pré- sente une paire de pattes déplus ; une douzaine de jours Daphnia pulcx et Cypris fusca. après, après avoir encore mué, il prend la forme qu'il doit conserver. VII. Daphnides. — Ces pet ils animaux qui sont revê- tus d'une carapace formée de deux valves, ont le corps terminé par deux grands crochets cornés dirigés en dessous. L'œil est sphérique, mobile et de couleur noire. '202 IIS mi;i'.vi;ii,m;s dks ii.i.im.n i.i m.s i;i isskai x. Les glandes jintcntns on rames sont les seuls organes (J«; locomofion. Les (laj)lnii(l('s sonl aljondannniîiit lé^jandus dajis les eaux slagnanles, et s'y trouvent parfois en si grande quantité, que l'eau prend la eouleui de Icin- corps, La daphnie puce (Dajjlinia jmle.r) longue de 7) à 4 millimètres et dont la couleur est rouge, a quelquefois donné li<'n de croire (\uv. l'eau s'était changée en sang. Durant la helle saison, les daphnides circulent dans l'eau ; mais, pendant l'hiver, ils se blottissent dans la vase. On a vu souvent des mares se dessécher complète- ment, sans faire périr ces petits animaux qui restent en- terrés, en attendant qu'ils puissent reprendre leur acti- vité dés que les pluies auront mouillé et recouvert le sol de ces mares. Les mâles n'apparaissent que dans une saison de l'an- née; mais un seul accouplementdonne lieu, comme chez les Pucerons, à plusieurs générations de femelles qui toutes peuvent pondre des œufs productifs sans avoir besoin d'être fécondées de nouveau. Vlll. Cyprides. — Ces petits crustacés dont la cara- pace ressemble à une coquille, habitent les eaux tran- quilles où ils se nourrissent de conferves, et de substances animales mortes, mais non putréfiées. Ils ne portent pas leurs œufs sur le dos ou sous le ventre, mais les dépo- sent souvent en commun, sur un corps solide, en amas de plusieurs centaines, etles fixent à l'aide d'unematiére filamenteuse ressemblant à une mousse verte. Ces œufs éclosent au bout de peu de jours ; les jeunes qui en sor- tent ne subissent aucune métamorphose. Les cyprides ont la faciîlté de pouvoir, comme les daphnides, s'enfoncer dans la vase humide des mares LES ANNELIDES. 205 o\ des étangs qui se dessèchent. Au retour des pluies, ils sortent de leur prison et reprennent toute leur acti- vité. Ils peuvent, du reste, mourir enfouis dans la vase, et y laisser des œufs qui écloscnt dés que le sol se re- couvre d'eau. On connaît un très-grand nombre d'espèces de cypris Aselle d'eau douce. dont plusieurs vivent en compagnie des daphnis. La cypris brune (Cypris fusca) est très-commune en France et en Angleterre. IX. On trouve aussi dans les eaux douces, en France et en Amérique, d'autres petits crustacés désignés sous le nom dWselles. L'aselle vulgaire [Aselus vulgaris) est très-commun en France. LES ARACHNIDES Dans la classe des arachnides, on rencontre des ani- maux doués des plus curieux inslincl» et même d'une intelligence qui se manifesle par les actes les mieux réfléchis. De ce nombre est VArgijronète. Cette araignée établit son domicile dans les petites rivières; mais, comme elle e?t conformée pour une respiration aérienne, elle se construit une cloche qui est une véritable cloche à plon- geur. Voici comment elle procède à la confection de cette cloche. L'argyronèle se tient fréquemment à la surface de l'eau sur les plantes aquatiques. Quand elle veut con- struire sa demeure, elle plonge et entraîne avec elle une certaine quantité de bulles d'air retenues par le duvet qui couvre son corps. Arrivée à un endroit convenable, elle se frotte le corps pour en détacher ces bulles d'air qui se groupent sous une plante aquatique. Après avoir fait plusieurs voyages pour amasser l'air qui lui est né- cessaire, elle secrète des fils de soie avec lesquels elle forme un réseau pour retenir cet air qu'elle emprisonne ensuite en donnant au réseau une consistance plus ser- LES. ARACHNIDES. 205 rée sous la forme d'un dé à coudre. C'est dans ce domi- cile que l'araif^née s'établit et se blottit pour guetter au passage les insectes aquatiques dont elle l'ait sa nourriture. LES INSECTES D'EAU DOUCE Les insectes d'eau douce constituent une partie consi- dérable et intéressante du règne animal ; ils sont répan- dus partout autour de nous, sur la terre, dans l'air et dans les eaux. La plupart de ces petits êtres subissent des méta- morphoses avant d'arriver à leur état parfait. A la sortie de l'œuf, l'insecte ressemble à un ver : c'est la larve; celle-ci devient, au bout d'un certain temps, nymphe ou chrysalide, et garde, dans ce nouvel état, une immobi- lité complète ; puis l'insecte apparaît sous sa forme dé- finitive. Dans les eaux douces, les insectes ainsi que leurs œufs, leurs larves et leurs chrysalides servent do nour- riture à un grand nombre de poissons et d'oiseaux. Leurs transformations ont, d'ailleurs, quelque chose de mer- veilleux. I. Hydrophiles. — Ces insectes sont de gros coléo- ptères de forme ovalaire, qu'on trouve dans les eaux douces des diverses régions du globe. L'hydrophile brun [Hydrophilus piceus]es{ commun en Europe; c'est le plus grand, car il a au moins 6 centimètres de longueur. La manière dont il vient respirer à la surface de l'eau : LES INSECTES D'EAU DOUCE. '207 est très-inléressantc à observer. Son corps trop massil ne lui permet pas de se maintenir sur l'eau dans une po- sition horizontale pour mettre ses orifices respiratoires au contact de l'air. 11 ne sort de l'eau que le bout de sa tête, et repliant ensuite contre le corps ses antennes llydropliile brun, larve et coque. dont cbacune est terminée par une massue en partie ca- naliculée, il redescend dans l'eau et entraîne des bulles d'air qm, glissant sous le corps garni d'un duvet de poils serrés, peuvent arriver jusqu'aux orifices respira- toires. L'animal, pendant cette manœuvre, semble en- touré d'une robe d'argent. La manière dont la femelle procède à sa ponte n'est 208 I f;s MI.IIVKILLKS DES FLKKVES ET DES RriSSE\L'X. [)iis moins iiit(''rossaiil(!. C<'t(o r(îni(;llfi osl pomviK; rie •,^landes abdoniirialos rjiii prodiiisciil iiiio mali(!r(;soy(;u.se. Au rriomoril (I(î la \)0\iU\ Mt s'acc^roclin sous uiio fVîuillo ([u'cllc couiho, I('j,M*'r(îirient, vA file sous ce dôuio une co- que où elle déjjose ses œufs, puis elle la ferme en fa- çonnant une jioiiilc relevée au-dessus de ïc.wi . t nconr- bée. A l'aide d(; celle pointe le berceau peut s'accrocher aux corps flottants dans le cas où la feuille à laquelle ii est fixé vient à se détacher. Au bout d'une quinzaine de jours, il en sort de petites larves fort agiles qui grimpent sur les plantes. — Elles sont à la fois herbivores et carnassières.; car elles se nourrissent de végétaux et surtout de petits mollusques à coquille mince, tels que lymnées et physes, qu'elles saisissent par-dessous et dont elles brisent la coquille en les pressant contre leur dos pour en dévorer le mol- lusque. En cas d'attaque on de danger, elles rendent par l'anus une liqueur noire qui trouble l'eau et leur permet d'échapper à leurs ennemis. L'intestin de ces larves s'allonge peu à peu à mesure que leur ré- gime devient herbivore. L'adulte préfère la nourriture végétale aux matières animales. Ce n'est qu'au bout de deux mois que la larve sort de l'eau et s'enfonce dans la terre pour se transformer en nymphe qui devient insecte parfait vers la fin de l'été. Pendant l'hiver, l'animal reste engourdi au fond de l'eau. II. Perles etnémoures. — Ces insectes voltigent au bord des eaux; et, comme leur vol est faible, ils se posent fréquemment sur les pierres, les buissons elles plantes placés à proximité des eaux. La perle bordée {Perla marginata) est une des espèces les plus répandues ; on la voit à Paris, au commence- LES INSECTES D'EAU DOUCE. 209 ment d'avril, sur los parapets des quais ol des ponls, et contre les maisons des rues voisines. Les femelles sont beaucoup plus fortes que les mâles, et pondent dans l'eau des œufs associés en paquets, mais se séparant aisément. Leurs larves sont toujours nues, sans fourreaux et vi- 11. vent dans l'eau, où elles se cachent sous les pierres ; elles recherchent les eaux courantes, et se plaisent à proxi- mité des chutes et des cascades; on les voit alors balan- cer leur corps, en se tenant fixées par leurs pattes contre um) pierre ou un caillou. Elles sont exclusivement car- nassières, et dévorent les petits insectes, les larves d'é- 211) i.Ks Mi:i!Vi:iM,i:s dks flei:ves et des iuisskaix. pIi(''niùros ot rnênifi celles d'espèces de leur jrenre. four guellci' leur pioic, elles se caclient sous l<'s pierres ou dans la vase. (^es larves restent, en cet él;il, j)r'jHlaiil toiil I hiver, et ne deviennent nymphes cpi'an printemps, aj*)ès avoir subi une mue ; il leur pousse alors des indirnenls d'ailes. Tour se métamorphoser, elles soricnt de l'eau et at- tendent, en se séchant, qu'une couche d'air soit v(;nuo s'interposer entre l'ancienne peau et la nouvelle ; alors, la peau se f(;nd au milieu du thorax. L'adulte ne vit que peu de jours, car sa bouche n'est pas organisée pour manger. Les larves ont, au bout du corps, deux longs filets qui restent aux adultes des Perles, mais pas à ceux des nc*- moures. III. Libellules. — Ces insectes sont répandus dans le monde entier. Leur type est la libellule déprimée (Libel- lula depressa) qui est très-commune en Europe. Parmi celles qui habitent les environs de Paris, YOEshne est la plus grande ; elle atteint un décimètre de longueur ; et son vol dépasse en vélocité celui de Ihirondelle. Les libellules volent avec rapidité en repassant sans cesse aux mêmes endroits. La grâce de leurs mouve- ments, leur forme élancée, leurs fraîches couleurs, leur ont valu le nom de Demoiselles. Elles sont très-carnas- sières, soit à l'état de larve ou de nymphe, soit à l'état d'insecte parfait. Grâce à leurs yeux énormes, elles em- brassent tout l'horizon, elles saisissent au passage et poursuivent avec ardeur les mouches et les papillons qu'elles déchirent avec leurs puissantes mandibules. On voit souvent des libellules planer au-dessus de l'eau ; ce sont des femelles dont l'extrémité de l'abdo- LES INSECTES D'EAU DOUCE. 2M inen se replie et vient eflleurer l'eau pour laisser lombei- les œufs au fond. Il en sort des larves qui vivent sur la vase ou dnns la fange ; là, elles guettent les insectes, les mollusques et les petits poissons. Quand une proie passe Lil)clliilo, larve el nymphe. à leur portée, elles débandent, connue un ressort, une arme fort singulière qui est le)u^ lèvre inférieure. C'est une sorte de masque muni de forles i)iuces dentelées et porté par des pièces articulées. Ce masque fonctionne a la fois comme une lèvre et comme un bras ; car, après 2,c, |.i;s Ml i;vi ii.i.i:s mes fi,ei;ves et des iii:isseai;x. avoir snisi l:i proir au passogc, il ra..M'n<- à 1. Imm,.!,.. 1, ,,.s|,iri.li"n .le ces lancs esl loi .-l.a.igc ; >•! - ^_,.^,^^ ^^,,.,., ,,,,,,;,,,, ,,^M.HnMla,,s la i.a.lictormmalc. .Iulul.c(lii;«slil(|ui(-I l.rs-éla,i;,c cl >lo„l h- paroi. Ube\lule, insecte al.audonnant sa dépouille de nymphe. présentent un réseau de délieates '"■anch.es eonum- luant avec les trachées. Cette eau sort ^-^"^^^f^^ hrusquement, et la larve s'avance par un efl de reçu La nymphe est un peu plus allongée que la lane présen e des moignons d'ailes. Pour se transformer elle LES INSECTES D'EAU DOUCE. 215 sart do l'eau et s'adaolie par les patles à une plante. Peu à peu le soleil sèche la peau cpii se fend en long sur le dos, et la libellule sort de son fourreau. Elle reste molle Libellule, insecte i)arlait. pendant quelques heures ; puis, ses téguments s'étant raffermis, elle prend son essor. IV. Phryijanes, ou moiiches-caddis . — Ces insectes Irès-nombreux en espèces dans les climats tempérés, ressemblent beaucoup aux papillons de nuit ; ils sont généralement d'un gris jaunâtre ou brunâtre, et volent •21 i IIS Mr.f.vi.iiir.s i)i;s ri,Ei:vES et des isiisseaix. I«! soii', s()ii\('iil cil iiiirc^ ('-[iMisses, au liord (l(-> ri\i«'?rcs et (les ('Inii^s. 1*( iidaiit le jour, ils I'O^UmiI accroupis sou l(3sr(Miill('s on sur les imir.iillcs et les Ironcs rl'.'ii Ijiy's. Les ("orriollos Inissciit loiiilxîr Inurs O'ufs (l;iiis l'eau; <îOs œufs sont l'cureirnés dans dos Jioules gélalineusos et collantes qui j^ajndent dans l'eau et s'atlàclienl en jj;i- quets aux pierres et aux plantes aquatique^. La fnati«'re gélatineuse maintient l'œuf dans un état convenable d'iiuniidilé, quand les mares ou les ruisseaux sont ;"i sec pendant l'été. La larve éclôt au bout de peu de jours ; c'est dans cet état surtout que les pbryganes sont intéressantes. La larve est omnivore mais très-carnassièie ; et comme son corps est formé de téguments mous, elle sent le besoin de le mettre à l'abri ; dés sa naissance, elle se fabrique, avec des corps étrangers réunis avec une matière soyeuse, un étui ou un fourreau qu'elle traîne avec elle, et dans lequel elle rentre et se blottit quand on l'inquiète ou qu'un danger la menace. Chaque espèce travaille à sa fa- çon : les pbryganes proprement dites construisent des éluis mobiles ; d'autres espèces ne bâtissent que dt s abris fixes contre le sol et les pierres. Si les larves à étuis mobiles se trouvent dans des eaux stagnantes, elles circulent dans l'eau ou marchent au fond ; mais si elles vivent dans des eaux coinçantes, elles ont la précaution de fixer leurs étuis par quelques fils de soie. Ces larves vivant constamment dans l'eau portent, sur les côtés de l'abdomen, des houppes molles et cou- chées transversalement de manière à pouvoir se placer commodément dans l'étui; ce sont des sacs branchiaux communiquant avec les trachées intérieures et servant LES INSECTES D'EAU DOUCE. 215 à la respiration par l'eau aérée qui pénétre dans l'étui. Chaque espèce travaille à sa façon, mais choisit aussi ses matériaux : ainsi, la phrygane rhombifére ou rliom- bique {Vhnj(jana rhomhica) dispose transversalement des brins de bois ou des débris de plantes aquatiques ; d'au- tres espèces disposent ces mêmes matériaux longitudi- nalement, et d'autres en spirale. La phrygane flavicorne ou à antennes fauves (Phrygana flavicornis) choisit de Plnygaiie poilue. grosses bûchettes et emploie souvent des coquilles de mollusques et même de jeunes planorbes vivantes. La phryganc brune (Plirijgana fusca) fabrique un tuyau central avec de petits graviers et le garnit, à l'intérieur, avec des fétus d'une grande longueur. Il convient de constater ici que chez les phryganes l'art de construire est j)erfectible et qu'il dénote parfois une véritable intelligence : ainsi, par exemple, une larve qui a l'habitude de faire son étui avec des pailles ou des feuilles, placée dans un vase où il n'y a que de petites '■lUi' ir.s Mi:i'.vi;i(.i.i;s i)i:s ii.i rvi.s u di.s p.i in.skalx, picri'cs, (iriil par s'en servir pourconslruire sa demeure. I)'aiili(î pari, si on place une larve une sur un fond sablé de petites pieiiailles, on la voit laiie la reconnaissance et le choix des niatériaux dont elle a besoin. Klle connnence à construire uiu^ voûte avec d(!ux ou trois pieires plates soutenues et reliées enlie elles par des fils du soie, el se place en dessous; puis elle choisit les [)ierr<'s une ;i une, Phrygane rhombique. les prend entre ses pattes el les présente, absolument comme le ferait un maçon, de manière à ce qu'elles en- trent dans les intervalles des autres et que le^ surfaces planes soient intérieures. Quand la pierre est bien placée elle la fixe, par des fils de soie, aux pierres voisines. Au terme de sa croissance, la larve se transforme en nymphe, immobile, complètement incapable de se dé- fendre. Il faut alors un surcroît de précautions; aussi, avant de se transformer, cette larve a le soin de fermer les deux ouvertures de son étui par des fils de soie qui forment de véritables grilles fortifiées, d'ailleurs, par LES LNSECTES D'EAU DOUCE. 217 des brins de bois, pnr dos herbes et des pierres, mais laissant passer l'eau à travers relui. Au bout de quinze à vingt jours, la nymphe rompt l'une des grilles, et sort de sa prison. Elle est alors blanchâtre, et vient nager sur l'eau jusqu'à ce qu'elle rencontre un support auquel elle s'accroche pour sortir de l'eau. Au contact de l'air, elle se boursoufle, sa peau se fend sur le dos, et l'insecte paii'ait s'en échappe. LES POISSONS Les fleuves, les rivières et les ruisseaux, ainsi que les lacs elles étangs d'eau douce, sont peuplés d'un grand iionibre d'espèces de poissons. Mais ces diverses espèces ne se trouvent pas indifféremment dans toutes les eaux ; car les unes recherchent les fonds pierreux ou sablon- neux et les eaux froides, vives ou courantes : les autres se plaisent sur les fonds limoneux ou vaseux et dans les eaux tranquilles, stagnantes ou dormantes. Toutefois, quelle que soit la nature du fond ou du terrain, l'influence prédominante parait être la température de l'eau, dans certaines limites de froid ou de chaud. Ainsi, par exem- ple, le Saumon franc ou commun, qui est très-abondant dans les régions septentrionales, ne se rencontre pas dans les latitudes méridionales; le Barbeau, au con- traire, ne s'avance pas très-loin dans les régions septen- trionales ; il préfère les rivières tempérées et même celles des latitudes méridionales. Les mœurs de certaines espèces de poissons d'eau douce présentent des particularités qui méritent d'être signalées. On croit généralement qu'au moment de la ponte le poisson ne prend aucun soin, soit pour déposer ses LES POISSONS. 219 œufs, soit pour les proléger. C'est la une grave erreur; car toutes les espèces de poissons, sans en excepter une seule, recherchent etexplorenl les endroits les plus conve- nables pour recevoir leurs œuls ; il en est même quel- ({ues-unes qui font de véritables nids. riayOïc iialuioUe de la pcrclie. La carpe, au moment de la fraie, recherche les en- ci loits retirés, les anses, les gares, les étangs et les ma- rais où elle trouve une eau tranquille et douce que les rayons solaires peuvent porter à une température tiède, lies mâles et les femelles se réunissent en groupes nom- breux et battent l'eau avec bruit; au fur et à mesure que les œufs s'écoulent, les mâles les fécondent, en agitant 220 I,i;S MKliVIII.I.KS liKS I I.I.I VKS KT DKS ItClSSKAIX. cf (,'n l);ill;iiit \\>.\i\ ; le poisson cfiipùclio les œufs de s'îii^^loiiicrercît IcsdissrmiiK'siir lt;s corps «Mivifoiin;ii)ls, notiiiiiiiKMil sur Il's V(''j,m''1;iii\ ;if|u;ilifpi('s oii ils .irlln'- rciit irriiiK'dialnirKîiit. I.a jicrchc ('oiidiihik! on de rivi(''i(; (l'ercfi /lurifililiH) est le plus ])eaii poisson des eaux douces de l'Kurope ; on la trouve aussi dans une partie de l'Asie. C(f joli poisson aime les eaux claires et se rcnnit souvent en bandes nombreuses au milieu des plantes arpiaiiques ; il est Irès-prolifique, car j'ai souvent compt»^ pkis de 250,000 œufs dans un individu de taille moyenne. A l'époque de la ponte, vers le mois d'avril, la perche s'éloigne autant que possible des eaux courantes, recher- che les rivages les plus tranquilles et garnis de plantes aquatiques ; elle prélére les canaux, les fossés, les anses à eaux stagnantes. Elle dépose ses œufs, agglutinés en ruban rappelant une jolie guipure, sur des corps soli- des, et enroule presque toujours le ruban autour des végétaux aquatiques ou de menues branches immergées. Sous l'influence de la chaleur, et notamment des rayons solaires, les nappes d'œufs qui, au moment de la ponte, sont d'un blanc verdàtre, prennent une couleur plus fon- cée, et bientôt l'on voit s'agiter les jeunes perchettes en- core à l'état embryonnaire. La matière mucilagineuse, qui retient les œufs soudés les uns aux autres, ne tarde pas à se désagréger, et l'on voit nager en tout sens de jolis petits poissons à l'œil brillant et transparents comme du cristal. En parlant de la perche, il importe de dire ici quel- ques mots d'un poisson de la même famille, qu'il serait intéressant d'introduire dans les eaux douces de la France. LES POISSONS. 221 Le sandre commun {Perça lucioperca) est la grande perche des rivières de l'Allemagne. C'est un poisson plus allongé que la perche conunune, mais ne l'égalant pas en beauté. On ne trouve le sandre ni en Angleterre, ni en Trance, ni en Italie. 11 atteint de fortes dimensions Samlic dans les lacs de la Suéde et les cours d'eau delà Prusse, ainsi que dans le Danube et l'Oder, où il prend souvent l(^ ])oids de 10 kilogrammes. Il y est recliei'ché pour les (pialités de sa chair. On ne peut que désirer voir inti'O- I.KS MIJlMJI.I.L.s ULS 1 l.l.l \l- Il J)L^ l'.l IhSLAl \. POISSONS N ( O I F I C AT E U BS I. La Imite, ninsi qiin los snlmonirlcs on gf'MKM.'il, iait mi vùiiiable nid. KUe choisit un lit de j^ros jrraviers ou de cailloux lavés par des eaux claires et vives : elle les remue et les nettoie pour en faire sortir toutes les ma- tières ténues, toutes les substances étrangères déposées par l'eau ; puis, au milieu de ces matériaux, elle creuse (les trous dans lesquels elle dépose ses œufs. Au fureta mesure de rémission des œufs, le mâle, qui accompag^ne toujours la femelle, les féconde. Ces poissons recoir vrent ensuite le nid avec les matériaux déplacés et for- ment ainsi des tas ou monticules que l'on reconnaît au premier coup d'œil. IL Le silure d'Europe ou glanis (Silurm (jlanis) est le plus grand des poissons d'eau douce de l'Europe ; et c'est en raison de sa taille et de sa gloutonnerie, qu'on le nomme, dans certaines contrées, la baleine ou le re- quin des eaux douces. 11 a la tête aussi large que la poi_ trine ; sa gueule est arquée et occupe toute la largeur du devant de la tète ; ses mâchoires sont armées d'un grand nombre de dénis petites et recourbées ; et, au fond de cette gueule, se trouvent quatre os hérissés de dents aiguës. On en a péché en France, dans le Rhin et quelques- uns de ses affluents; en Suisse, en Russie et en Allema- gne, il est très-abondant dans certains lacs et quelques cours d'eau. Le glanis appartient au groupe des poissons nidifica - LES POISSONS. 223 teurs. « Parmi les poissons de rivière, dit Aristote, le Glanis maie prend beaucoup de soin de sa progéniture, La femelle dépose ses œufs et s'en va ; le mâle les sur- veille, les garde, chasse les poissons qui veulent les dé- vorer ; il prolonge celte surveillance pendant trente à Siluro. (ITairope. quarante jours, jusqu'à ce que l'alevin soit devenu assez fort pour fuir ses ennemis. » Dans les grands fleuves, tels que le Volga et le Danube ce poisson atteint souvent une taille de 0 mèlres ; on en a péché un qui pesait GO kilogrammes. Une organisation de cette luUure rend le silure d'au- tant plus redoutable qu'il a des instincts très-voraces ; aussi, dans plusieurs localités on l'a fait disparaître des lacs et des grandes pièces d'eau où il détruisait les 22i- i.Ks >ii;[;vi:ii,i,i.s i»i.s i i.i.i vi.s i.i i)i:s fm'isskaix. nioill(Miis cl. l(;s plus ^mos jjois.soiis. Cc.^ iiiconvt''iii*;iits iK* sont compenses ni p;ir nii accroissement rapide, ni \),ïv les (jii;ilil(''s de l;i cliaii'. On a lait en France divers essais d'acclimafalion de ce poisson. — Les individus rapportés de Prusse par. M. Va- lencieniics avaient été déposés dans l'un d(;s bassins des eaux de Versailles ; ils ne s'y sont pas re|»rodnits ; et ceux que j'ai revus en 1865 n'avaient pris, au bout de longues années, qu'un très-faible accroissement. M. Cosle en avait introduit quelques-nns de forte taille dans les lacs du bois de Doulognc ; ils y ont tous péri, à l'excep- tion d'un seul du poids de i\ kilogrammes qui a figuré, en 1801, à un dîner officiel, sur la table du préfet de la Seine. Les personnes qui en ont mangé m'ont dit que la chair de ce silure, d'un goût peu agréable, rappelait beaucoup celle du congre. En Suisse même, ce poisson ne jouit pas d'une grande estime ; car, dans son tiavail sur les poissons du lac de Neufchâtel, M. Paul Vouga s'exprime ainsi : « Mais comme leur chair est grossière et d'un goût désagréable, les pêcheurs les laissent ordi- nairement bien tranquilles enfoncés dans leur vase, et ne les prennent que par hasard. » Néanmoins, l'établissement de pisciculture de la So- ciété d'acclimatation de Londres a fait venir, dans ces dernières années, plusieurs jeunes silures provenant de Valachie. A ce sujet, le journal le Buihler faisait remar- quer que, d'après l'opinion d'une notoriété scientifique, le Silure est le seul poisson qui mérite d'être introduit dans les eaux de l'Angleterre, particulièrement dans les lacs où la tourbe abonde, parce que son accroissement est rapide, et que sa chair est de bonne qualité. Je ne puis partager l'opinion de cette notoriété scien- LES POISSONS. 225 lifiquc; car, d'après tous les faits qiu; j'ai rapporlùs, riiilroduction du glanis dans les rivières et les lacs de l'Angleterre qui nourrissent les meilleures espèces de poissons, le saumon et la truite, aurait iufaillii)lement les plus funestes conséquences; d'une paît, le glanis, en raison de sa voracité, absorberait une masse considé- ralde d'excellents poissons pour ne laisser à la consom- mation qu'un produit bien inférieur en quanlilé et sur- tout en qualité ; et, d'autre part, il deviendrait bientôt un obstacle très-sérieux à la propagation des bonnes espè- ces. Je rappellerai, à cet égard, que la lofe que l'on peut assimiler à un silure de petite taille, a été introduite dans le lac de Genève où elle s'est propagée au point d'être devenue une des plus puissantes causes de des- truction de cette grande et excellente truite connue sous le nom de truite du Léman. Ces circonstances appelleront sans doute l'attention des acclimatateuis de Londres sur les inconvénients de l'introduction du glanis dans les eaux anglaises et particulièrement dans les lacs peuplés de Salmonidés. Ce ne serait pas, en effet, faire une bonne acclimatation que d'introduire dans les eaux des espèces nuisibles ou inférieures en qualité à celles qui y existent. Quand j'ai émis cette opinion au sein de notre Société d'acclimatation de Paris, M. de Quatrefages a adliéré complètement à ma manière de vou', et n'a pas liésité à déclarer que la chair du silure était peu délicate et peu agréable au goût. D'un autie coté, M. Sacc, l'un de nos plus zélés acclimatateuis, a eu fréquemment l'occasion de reconnaître que ce poisson est détestable sous tous les rapports ; enfin, d'après M. Martin de Mussy, qui a exploré les embouchures des fleuves et des rivières d'Amérique où les silures sont très-abondants, ces pois- 'iw, i,i:s Mi,i;\i,ii.i,i.s i)i;s ru:! vi;s kt dks iaissi;.\!\. sons ne. ^()iil.Mi;iii;^(''s (jnr- pai' l(;.s classes les plus iiialli(;u- l'Ciiscs (Ifi la popiil.'ilioij. Le siluic riccti iipic li;il)il(' les fleuves (le l'iiilérieur (le rAf"ri(pi('. (Voir Poissons f'oudroijantH.) III. Les ('pinoclies doivent leur nom aux éijines dont lour corps est arme';. Klles sont communes dans les eaux claires et coui'anles des ruisseaux el des petitt-s rivii-res où des herbes acpiatiques se développent en abondance. Ces petits poissons vivent ordinairement par troupes, et forment souvent de longues colonnes. Les épinocheltes sont plus petites encore et plus effilées. Leur abondance dans nos eaux douces a permis d'é- tudier leurs mœurs, et particulièrement leur nidi- fication. Vers le mois de mai ou les premiers jours de juin, le mâle change de couleur et prend un éclat tout particu- lier. Les parties du corps qui sont habituellement pâles et presques ternes deviennent d'un bleu vif ou d'un rouge cramoisi ; c'est un prétendu qui revêt son habit de noce. 11 choisit alors un endroit à sa convenance, et s'y installe ; puis il va chercher des brins d'herbe ou de racines très-ténues pour en former, entre les tiges ou les branches d'une plante de son habitation, une boule dont il a englué et entrelacé toutes les parties, et dans laquelle il pénétre par le milieu en la traversant de part en part pour y pratiquer deux ouvertures; il appro- prie ensuite trés-confortablement l'intérieur de cette espèce de manchon à l'aide des mouvements de son mu- seau, du jeu de ses épines et du frottement de son corps, (^e manchon, c'est le nid. Dans l'arrangement de celte charmante couchette, le mâle a l'attention délicate de LES POISSONS. 227 n'inlroduiie que d(;s brins Irès-souples et particulière- ment les fibres les plus déliées des conferves, afin de la rendre plus soyeuse et plus moelleuse. Ces préparatifs terminés, l'heureux propriétaire exalte encore la richesse et la viyacilé des couieui's de sa pa- Épinochcllc cl son nid. riire, et se met à la recherche d'une compagne. 11 se rend alors au milieu d'un groupe de femelles, et fixe sou clioix sur l'une de celles qui paraissent étie dispo- sées à pondi'e. Pendant plusieurs jours consécutifs, il ramène au nid la feinelle qui y complète sa jK)nte, ou bien va chercher d'autres femelles dont les œufs i-éuiiis forment une '2-lH I.KS MiJ;VI,ll,I KS I):s I I.KIVKS Ki ï)i:s l'.IISSKMX rriassf! nssiv/. coiisidi'i.'ihic ; il ;i le soin dr IVicoiidci- !<•- œufs au fur o(. à mosiiro (!(? c.liafjiKî ponte. (Jiiiiiid l;i coiicliclh' lui |);ii;iil sufïisaiiimciil •^■.mnc, il s'élal)lit en sciiliiK'llc \i;^il;inh' ;"i rt'iiln'M' fie liiii'! ries portes, après avoii- en le soin de ferniei r;iii(re; celte précaution est nécessaii-e, ear, seul, il ne poiiji;dt ^^'^r■ der deux portes ouvertes, et repousser les «'inierni^ du deJiors qui se présentent pour entrer dans le nid et dé- vorer les œufs. Aussi dévoué à sa progéniture qu'il était tout à riieui'e empressé auprès de ses femelles, ce ridie pacha reste seul, al)soIument seul, pour garder le pré- cieux dépôt. Les femelles, après la ponte, reprennent leurs ébats et vont folâtrer dans toutes les directions. L'épinochette, qui ne devient pacha que par nécessité et momentanément, est en réalité un bon père de famille qui reste chez lui, qui berce les enfants, qui leur donne au besoin le biberon, pendant que madame va se pro- mener et folàtier au dehors. Dans cette surveillance active et incessante, il ne se borne pas, en effet, à garder les œufs, il en favorise en- core l'incubation et l'éclosion par des courants qu'il provoque en agitant ses nageoires, à l'entrée du nid, pour renouveler l'eau à l'intérieur. Au bout d'une douzaine'de jours l'éclosion commence et les jeunes épinochettes sortent du nid en nuées aussi nombreuses que celles de ces insectes éphémères à peine saisissables à l'œil; elles semblent être faites de cristal, et être soutenus au milieu de l'eau par un léger ballon diaphane. L'heureux père paraît content et snùsfait> mais il est trop inquiet pour jouir d'un bonheur complet. Ses en- fants, en effet, ont comme tous les jeunes poissons sor- LES POISSONS. 229 tant de ïœui une énorme poche ou vésicule appondue au ventre ; c'est leur sac nourricier pendant le premier âge. Mais ce sac, pourvu d'aboiulanles provisions, est lourd et ne laisse {)as aux nouveau-nés (jui le jiorlent assez d'agilité pour pouvoir échapper à la poui suite des insectes carnassiers. Aussi le bon père surveille-t-iltous leurs mouvements avec la plus tendre sollicitude ; il ne les perd pas de vue un instant et les ramène près du nid quand ils s'en éloignent. Jeunes <;ens qui lisez ces lignes, n'oubliez jamais le nid de l'épinochette ; il vous rappellera que la jeunesse est entourée de périls et de dangers, et que pour les éviter il ne faut pas s'éloigner de la maison paternelle ou s'af- Iranclurde la tutelle d'un bon père. Les épinoches ne suspendent pas leurs nids aux branches des plantes 4\qualiques; elles les établissent sur le fond môme de l'eau. Après avoir creusé dans la vase une petite cavilé, le mâle y apporte des brins d'herbes aquatiques dont il forme une sorte de tapis. Mais comme ces matériaux pourraient être entraînés par les courants, il a la pi'évoyance de les fixer par une couche de sable dont il a rempli sa bouche; puis, pour donner aux fondations une certaine cohésion, il les presse du poids de son coips et les enduit d'un mucus qui suinte de sa peau. D'ailleuis, pour s'assurer de la solidité de ces fondations, il agile rapidement ses nageoires pecto- rales et pioduit des courants (ju'il dirige contre le nid. S'il s'aperçoit que les matériaux })i'ésenfent peu de ré- sistance, il les tasse avec son museau, les aplanit et les englue de nouveau. 11 va chercher ensuite des matériaux plus solides, telles que racines, pailles, etc. qu'il fiche dans l'épaisseur ou à la surface de la première construc- '2.'(> IKS MI.F'.VKIIJJ-S DES II.KIVKS KT KKS RL'ISSE.VI'X. lion. Il les |)()S(! (I;ms le s(Mis l<)ii;:ilii(liii;il (!•• iii.iiiièrc» <|ii<' rime (le leurs oxlr<';iiiilt''s coiTosjiDiirlr.i |)lll^ hird il rciilrùc, et l'antto à la soitie de son doinicilc. Après avoir CorriK'î In pIniirJior ot Ips pnioi- latérales, il s'occup(3 d(! la loiliire (pj'il eoiistjiiit av(M: les niêincs maléi'iaux et à l'aide des mêmes manoeuvres. II a soin d'v réserver une ouverture bien circonscrite (loiil j*^ bord est artistement englué et uni. Ainsi consliiiit, le nid de répinoclie forme une voûte arrondie de 10 centimètres environ de diamètre. Mais il ne reste pas longtemps muni d'une seule ouverture. Le mâle ou la femelle en fait biejilot une seconde, en traversant le nid de part en part. IV. Le gourami (Osphromeniis olfax) est un poisson d'eau douce originaire de la Cochincbine, d'où il a été importé successivement à Penang, à Malacca, aux îles xMaurice et de la Réunion, à Cayenne, au cap de Bonne- Espérance et en Ausiralie. La nature l'a pourvue d'un appareil labyrintbiforme. Cet organe, comme cliez tous les poissons de la famille des labyrinthides, peut con- tenir une certaine quantité d'eau suffisante pour humec- ter les branchies intérieures, et leur permettre d'aérer le sang et de maintenir la respiration du poisson lors- qu'il se trouve en deliois de son élément naturel. Les poissons de cette famille peuvent, par suite de cette conformation particulière, sortir de Veau, parcourir une petite distance, et même, dit-on, avec l'aide des épines de leurs nageoires et des opercules, sauter sur les ar- bustes voisinsj dans le but d'y chasser les insectes ou d'y boire l'eau qui se trouve dans le replis de quelques feuilles. Le gourami est un des poissons les plus exquis des - LES PCISSUNS. 251 Indes, où il ost servi sur les tables les plus opulentes et les plus somptueuses. Il peut atteindie des dimensions considérables; dans sa patrie d'origine, on en a vu qui mesuraient plus de 2 mètres de longueur et qui [lesaient plus de 20 kilogrammes. En Cochincbine, on le trouve comnmnémeutdans les fleuves, les lacs et les étangs; mais il l'éussit aussi bien dans les eaux un peu fangeuses que dans les eaux claires. On a remarqué, toutefois, que les eaux qui lui con- viennent le mieux sont celles qui, tout en étant stag- nantes, contiennent des plantes aquatiques et dont les bas-fonds recèlent des retraites ou a])ris. On peut ad- mettre, eu général, que dans les localités où vit et pros- père ce poisson, la température moyeinie amuK^lIe varie de 24 à 27 degrés, la tenipératui-e moyenne d'été de 26 à 30 degrés, la température moyenne d'hiver de 21 à 20 degrés, avec une variation moyenne de 7 à 8 degrés. Le gourami est essentiellement herbivore, ainsi que l'indique la longueur extraordinaire de son intestin. Dans les Indes, il se nourrit de préférence des plantes de la famille des aroïdées, telles que les caladium es- culentum, violaceiim^ pictum ; les arwn campanulalnm, conlifolliim, macrorrhizum qui croissent dans les eaux de ces contrées et dont il sait habilement saisir les feuilles,, même à une petite dislance du rivage. Outre ces })lantes, il mange avec plaisir des choux, des lai- tues, des feuilles de navet, de betteraves, du liz cuit, du maïs, des patates, des carottes, enfin un grand nom- bre d'autres substances végétales et farineuses. Mais il dévore aussi avec avidité, des vers, des insectes, des grenouilles et même des petits poissons. A l'époque de la ponte, le mâle et la femelle se met- 252 LKS .MI.IiVi;iM.i;s I)LS I J.i:i VKS KT DES P.IISSEAIX. teiit, à la rcclinrclie d'une j)l;i(;c* (:oii\oiinl)lo pour v con- struire un nid. Ils c)joisi.ss(,'iit un eiidroil coiilcuJiul des plîuiles et de la boue pour faiie eeiiifl, cl de- lieihes aquatiques pour la iiourrituic de leur lamilh'. Gourami. On trouve les nids tantôt dans un coin du vivier, tantôt sur les plantes du rivage, ou bien au milieu de celles qui couvrent la surface de l'eau. La forme est spliérique et la longueur de 14 centimètres environ; les maté- riaux qui entrent dans leur composition sont de la boue et des plantes fluviales parmi lesquelles le poisson pa- raît préférer le Panicum jinnentorum. Le travail est fait par le mâle et la femelle, et terminé en cinq ou six LES POISSONS. 233 jours. Le nid achevé, la femelle y dépose de 800. à i,000 œufs. Tendant lincubalion les parenls veillent ntlenti- ment sur ce berceau. Les jeunes restent dans le nid où Is trouvent un abri contre les dangers qui menacent le premier âge des poissons, et une nourrituie qui convient à leur délicate constiUUion et que leur procurent les herbes macéréesdu nid. Ils essayent ensuite leurs forces sous la prote(ilion de leur mère, en utilisant deux ap- pendices qui existent à la paitie antéiieure du ventre et qui, l'aidant fonctions de balanciers, leur permettent de conserver l'équilibre. L'île de France ou de Maurice t st l'une des premières localités où fut importé le gourami, en 17G1, par des officiers de la marine royale. Il y fut d'aboid élevé dans des viviers d'où un certain nombre d'individus s'échap- pèrent et gagnèrent les étangs et les fleuves de l'île, où ils vivent actuellement en pleine liberté. C'est vers 1795 qu'on l'introduisit à l'ile française de Bourbon ou de la Réunion, dans des \iviers du littoral où il se développa et se propagea parfaitement. Ce poisson, complètement naturalisé aujourd'hui, est devenu un véritable l)ienl"ait pour la population. Les fleuves de Sainte-Suzanne, de Saint-.lean et de Saint-Benoît en contiennent un grand nombre qui ont des dimensions colossales. L'unique pro- priété de quelques créoles delà vallée consiste en un vi- vier de gouramis. Le long du littoral de Saint-Paul, chaque famille riche possède aussi un vivier. On ne doit pas désespérer de pouvoir introduire et ac- climater, soit en France, soit en Algérie, ce précieux poisson, quoique les tentatives faites jusqu'à ce jour n'aient pas réussi. V. Lemacropode paradisier (Macropodiis venusliis). — 'iôi m:s MRI'.VKII.I.KS DKS FLFJVFS KT DFS ItlISSFAI \. Ln CIlinoost le pays des merveilles. D.'iiis ces dernière- .'muées, 011 a la if, de nombreuses tcnfalivc^ poiii' inho- diiiie en IVaiiee |i|iis'eiirs espèces de ces utiles et jolis poissons (jui vivent à l'état sauva^ie on à l'état domesti- que, dans cet immense empire où ils sontrfîflirrcliès, les uns comme poissons comestibles, les antres comme pois- sons de ln\e. Ces tentatives n'ont pas été absolument infructueuses; car on est parvenu à en importer un certain nombre jusqu'à Pai'is même ; et, il y a quelques années, l'airivée d'un pêcbeur Chinois avec une cargaison de petits pois- sons eut un grand retentissement. Que sont-ils devenus? Ils étaient destinés au jardin d'acclimatation du Bois de Boulogne; mais ils restèrent entre les mains de M. le professeur Coste. Pauvres petits poissons dont on espérait tant de merveilles; ils ont eu le même sort que les saumons et les huîtres du savant professeur ; les prodiges accomplis n'existent que sur le papier ! Cette fois, du moins, les nouveaux venus confiés aux soins d'un bon pialicien se portent parfaitement et se sont même reproduits. Voici les circonbtances dans les- quelles s'est effectuée celte importation. Au mois dé juillet 1869, M. Simon, consul de Franceà Ning-Po, arrivait à Paris rapportant de ces lointaines contrées un certain nombre de poissons vivants, presque inconnus de nos naturalistes. M. Simon, dont le zèle et le dévouement sont bien louables, avait trouvé, pour cetle longue et difficile traversée, un auxiliaire aussi zélé qu'intelligent en M. Gerand, officier à bord de V Impéra- trice. Péchés dans les eaux des rizières des environs de Can- iMacropodo paradisier. LES POISSONS. 257 ton, ces poissons ont été placés dans des bocaux de verre d'un litre et demi environ, et alimentés durant la tra- versée avec du vermicelle pilé qui donnait à l'eau une teinle et une consistance laiteuses. Dans ces conditions peu favorables, sur une centaine de poissons pris.au dé- part, il n'en restait plus que vingt-deux à l'arrivée à Paris. Ils furent remis, en grande partie, à M. Carl)onnier qui a pu en conserver une quinzaine pendant plusieurs mois. Ils appartiennent tous au même genre, celui des macï'opodes, et présentent à l'Age adulte, une longueur de 7 à 8 centimètres. Les femelles, qui étaient au nombre de cinq, accusè- rent au bout de dix jours un embonpoint que l'on aurait pu attribu 'r à la nature et à l'abondance de la nourriture, mais qui n'était, en réalité, que le prélude de la fraie ; car, dans la matinée du onzième jour, il se manifesta un changement notable dans l'aspect et les allures des habi- tants de l'aquarium. Chez les mâles, les bords des nageoires s'étaient colo- rés en jaune bleuâtre, l'épine qui prolonge chacune des nageoires pectorales était d'un jaune safrané; ces pois- sons faisaient la i^oue, absolument comme les paons et les poules d'Inde, et semblaient par leur agilité, leurs bonds saccadés, et l'étalage de leurs vives couleurs, chercher à attirer l'attention des femelles ; celles-ci ne restaient pas indifférentes à toutes ces agaceries; car elles nageaient avec grâce et d'une façon presque volup- tueuse vers les mâles, et paraissaient se complaire dans leur voisinage. On eut bientôt un indice ceitain d'une ponte pi'O- chaine; caries mâles se disputaient les femelles. 'r>s i.i:s Mi.i'.vKii.i.Ks dks fi.i:ivi:s it lii ^ hiisskaix. |);iiis l;i iiialiiK'c du '■Il juillet, i»; jiialc (jiii pjir.'iissMil l{; plus vij^ouicux In! jilacé, avec une feiiuîilf, dans un aquarium spécial l'oirné d'ardoises sur trois fac(,'s,éclaiié par uiu\ seule {,^lace, et contenant enviion 40 litresd'eau avec sable fin et toulfc^s de plantes afjuatiqucs. La tenipéraliuT, de r<'au s'élevait à L^'J degrés centi- grades. Au l)out de dix minutes environ, le mâle après avoir exploré son nouveau domicile vint se placer contre la face transparente, tout à fait à la surface de l'eau ; et là, aspirant puis expulsant des bulles d'air, il forma une sorte de plafond d'écume flottante, d'aljord d'un dia- mètre de 5 centimètres, puis d'une surface d'un déci- mètre carré, qui se maintint sur l'eau sans doute à la faveur d'une matière mucilagineuse que la bouche de plusieurs espèces de poissons, telles que les épinoclies, sécrète à l'époque de la fraie. Chaque bulle d'air, après avoir roulé dans la bouche du mâle, devenait ainsi un petit ballon recouvert d'un enduit imperméable. Bientôt, la femelle s'étant rapprochée du mâle, on vit ce dernier développer ses nageoires et arquer son corps; puis la femelle, qui se tenait verticalement la tête à fleur d'eau, vint en oscillant placer la partie inférieure de son corps dans le demi-cercle formé par le mâle ; celui-ci, ployant et contractant ses longues nageoires, l'appliqua contre l'un de ses flancs, et, pendant une demi-minute au moins, fit d'évidents efforts pour la renverser. Rien de plus gracieux que les mouvements de ces jolis poissons revêtus de leur parure de noces, et se laissant tomber de la surface de l'eau à 15 ou 20 centimètres de pro'ondeur, puis continuant les mêmes manœuvres et les renouvelant toutes les dix minutes environ, de- LES POISSONS. 230 puis onze heures du matin jusqu'à trois heures du soir. Pendant les intervalles, le mâle ne cessait de travail- ler à son plafond d'écume, et hii donnait, sur un déci- mètre carré, un centimètre d'épaisseur au centre. Dans la matinée et la première partie de Taprès-midi du 21 juillet, les rapprochements successils du mâle et de la femelle hâtèrent vraisendjlahlement la maturité des œufs et surtout de la laitance ; car ce n'est qu'à partir de trois heures que les accouplements devinrent effectifs ; alors le mâle serrant sa femelle avec plus de vijiueur la renversa entièrement, et la pressant contre lui provoqua une premièie ponte. Les j)artics génitales se trouvant on contact presque innnédiat,les œufs étaient imprégnés, au fur et à mesure de leur émission, des principes fécon- danls de la laitance. Le rapprochement commence à la surface de l'eau, s'accomplit vers le milieu, et se termine avant que les poissons aient atteint le fond ; ceux-ci alors se séparent, et les œufs flottent çà et là abandonnés à eux-mêmes; mais bientôt le mâle les recueille dans sa bouche, et, bien loin de les dévorer, va soicjneusement les déposer dans le plafond d'écume ou de bulles d'air qui devient ainsi une véritable frayère. Jusqu'à sept heui'os du soir on vit, à diverses reprises se reproduire les mêmes faits : accouplement, ponte, fécondation et récolte des œufs. Alors le mâle chassa sa femelle ; celle-ci, pâle et déco- lorée, se réfugia dans un coin de l'aquarium où elle resta immobile; le mâle se chargea seul des soins néces- saires à la bonne incubation des œufs; on le voyait reconstituant le plafond d'écume dés qu'une lacune s'y j)roduisait, prenant dans sa bouche quelques œufs là où 'i'.O l.i;s MI.I'.VKII.I.Ls IjKS IM;I VLS Kl U\.> l'.l j>.^K\l \. ils rluiciil ;ij,^^l()iri(''rrs eu trop ^thikI r.orrilin' [)r)iii' jps (Ji'posiîr sur un point \nocju\u't, (ionn;iii( un couj) de U'tU» dans los parlies où la couclif (Wn-Aunc lui sr-nihlait trop sorn'O pour (!ii ('parpillcr le contenu ; criliti, remplis- sant tous les vides en y projetant de nouvelle", huiles d air. Il travailla ainsi pendant dix jours conséculils, sans prendre d(; repos, pas rnêriK! d(; nourriture. .^u bout de soixante à soixante-cinq heuies, l'éclosion comnience. Immédiatement après léclosion, l'emlirvon a l'aspect d'un têtard, La partie postérieure est complè- tement ^dégagée; mais la tête et la vésicule ombilicale restent enfermés dans la cocpie de l'œuf; elles ne s'en débarrassent que vers le troisième jour ; au bout d'une buitaine de jours, la vésicule est résorbée, et le petit animal a la forme d'un poisson. Pendant toute cette période de transformation, le mâle veille sur sa progéniture avec la plus tendre sollicitude. Si quelques-uns de ses jeunes s'échappent du plafond d'écume, il va à leur recherche, les happe avecla bouche et les rapporte dans le nid; on le voit ainsi en recueillir une dizaine dans une seule chasse. Enfin, les échappées deviennent assez nombreuses et assez fréquentes pour lasser sa p^atience et lui faire com- prendre que sa tutelle est désormais inutile ; il aban- donne alors sa progéniture à elle-même. Ce mode d'ificubation des œufs dans une écume flot- tante à la surface de l'eau, mode qui est vraisemblable- ment commun à plusieurs autres espèces de poissons de la Chine , est très-intéressant au point de vue de l'iiis- toH^e naturelle ; il donne, d'ailleurs, l'explication d'un fait relaté anciennement par les voyageurs qui ont pu pénétrer en Chine, mais qui avait trouvé bon nombre LES POISSONS. 241 d'incrédules, sur la manière de récoller une très-grande quantité d'œufs fécondés, en barrant les cours cV eau avec des claies et des nattes. Le père Jean-Raptiste Duhalde, jésuile, est le premier auteur français ((ui ait fait connaître la manière dont s'opère celle récolte. Voici son récit: ({ Dans le grand fleuve Yang-lse-kiang, non loin de la ville Kieou-kin-fou, de la province de Kiang-si, en cer- tains temps de l'année il s'assemble un nombre prodi- gieux de barques pour y acheter des semences de poissons. Vers le mois de mai, les gens du pays barrent le fleuve en différents endroits avec des nattes et des claies dans une étendue d'environ neuf ou dix lieues, et laissent seulement autant d'espace qu'il en faut pour le passage des barques. La semence du poisson s'arrête à ces claies; ils savent la distinguera l'œil où d'autres per- sonnes n'aperçoivent rien dans l'eau ; ils puisent de celte eau mêlée de semences et en remplissent plusieurs vases pour les vendre; ce qui fait que, dans ce temps-là, quantité de marchands viennent avec des barques pour l'acheter et la transporter dans diverses provinces, en ayant soin de l'agiter de temps en temps. Ils se relèvent les uns les autres pour cette opération. Celte eau se vend à tous ceux qui ont des viviers et des étangs domestiques. Au bout de quelques jours on aperçoit, dans l'eau, des semences semblables à des petits tas d'œufs de pois- sons, sans qu'on puisse encore démêler quelle est leur espèce ; ce n'est qu'avec le temps qu'on la distingue. Le gain va souvent au centuple de la dépense; car le peuple se nourrit en grande partie de poisson. » (His- toire de l'empire de la Chine, 1755, tome 1", page 55.) 16 242 i,i;s Mi.i'.vi:iMi;s i)i;s i i.i.i vi:s i.i di.s i-.i issi.\i \. \jO, Mdcrojxxlc i)ara(lisii'r^\u\\u)i[r. nii Tr.'i ri cjî par M, Si- mon, me paraît ne pas devoir anj,qiieiiler le nombre de nos espèces comestibles, (;t ne pouvoii- êhc qn'iin pois- son (i(^ luxe, ni;iis un poisson rpii s(îra saii> .iiifim di.iiti' Irès-reclierclié pour orner les aquariums ; il prom^d même de devenir aussi commun que le jjoisson roiufc. (Cyprin dore); car il est d'une «grande fécondité. L'abdo- men de la femelle, flasque et comprimé après la ponte, se renfle de nouveau en cinq ou six jours, et la ponte semble devoir être intermittente et se renouveler tous les huit jours pendant la belle saison. Les quatre femelles que possédait M. Carbonnier ont fait six pontes en trois semaines, malgré les fatigues dun long voyage et les conditions peu favorobles dans lesquelles elles se trouvaient placées. Les résultats obtenus dans ces conditions permettent d'espérer que l'on introduira prochainement en France une ou plusieurs des espèces de poissons qui entrent, en proportion notable, dans ralimenlation du peuple Chinois. FECONDATION ARTIFICIELLE Abandonnés à eux-mêmes, soit dans les eaux libres, soit dans les eaim captives, les poissons ne sont pas tou- jours placés dans des conditions favorables à la repro- duction. Par suite, en effet, des variations survenues, soit dans l'état de l'atmosphère, soit dans le régime des eaux, la fraie ne s'effectue pas dans de bonnes condi- tions. Quelquefois aussi le cours des rivières, modifié LES 1'01SS0^'S. '213 par la main do l'homme et les obstacles créés par son imlustrie, ne permettent pas À certaines espèces de pois- sons d'établir leurs i'rayères dans des stations convena- bles; alors le poisson ne fraye pas, ou bien la fraie est perdue. C'est pour parer à ces chances d'insuccès que l'on a Fécondation ailificielle (œufs libres). eu recours à la fécondation arti/icielle. Les ])remiers essais connus remontent à une époque déjà éloignée. Ce mode d'opération consiste à récolter les œufs et la laitance en bon état de maturité, et à mettre les œufs en contact avec la laitance, de manière à les féconder. Les poissons, selon les espèces, donnent les uns, comme la truite et le saumon, des œufs libres et non adhérents, et les autres, comme la carpe et le barbeau, 24i IIS .Mi:i:vi;ii,i.i;s iii:s 11.1:1 vi.> 1.1 i.i.> j;i i>>hAi\ (les (l'iils ((III se colleuL on sdlUichent iiiiiiiôrli;jtornoiit, jiprôs liMir expulsion, crnihe, l.s ol)jcts fMiviioiiiiaiits. Poiij' los poissons il o'nls liliies, on pn*nitiid<> des diverses espèces de poissons à l'époque de la [ioiit»-. Voici, du reste, les dispositions à piendre : i" Truites, saumons, etc. — On choisit des pièces d'eau ou des rigoles alimentées, soit par des sources, soit par des bras de rivières ou des ruisseaux dans les- quels l'eau ne gèle pas, reste claire, vive et courante, et se maintient en liiver à peu près au même niveau. Si le lit est garni de graviers ou de cailloux, on utilise ces matériaux surplace; on se borne alors à les remuer avec une pelle ou un râteau pour en former, sous l'eau, des tas, des monticules ou de petites digues en pente douce. 11 est essentiel de bien approprier les matériaux pour les débarrasser de toutes matières étrangères. F.n les re- muant avec un râteau à (juelques centimètres de pro- fondeur, on arrive facilement à les nettoyer complète- ment : car le courant entraîne immédiatement toutes les matières les plus ténues et les plus légères. 11 faut sur- tout que la frayère ne présente pas de ces végétal ions aquatiques, de ces espèces de mousses ou de conferves qui tapissent quelquefois la surface des pierres et des cailloux. On ménagera, à proximité des frayères, quel- ques trous ou cavités sous les berges, des touffes de plantes aquatiques, des bois ou des fascines, des planches immergées, etc., sous lesquels le poisson aime à se ré- LES rOISSONS. 247 fugier et à se reposer. Toutes ces disposilions ont pour but d'attirer et de letenir le poisson sur les points que l'on a choisis ; rap})ropi'iation des frayères a, d'ailleurs, [)our objet d'épargner au poisson un travail souvent long et pénible dans le nettoyage des matériaux. Frayères arlificielles pour Cyprinides et Salmonidés. Si le fond ntî présente pas de graviers ou de cailloux, s'il est, par exemple, formé de terre, vase, etc., on y introduit du gros gravier, des cailloux ou des pierres ayant, en général, la grosseur d'une noisette à celle d'un œuf de poule; cpielques brouettées sulfisent pour former plusieurs fiayéres. La nature des matériaux est à peu prés indifférente (silex, granits, grés, calcaires) ; 2i8 II.S Ml.r.M.II.I.I ^ 1)|.>, ll.l.l\l.> J.1 1)1.- r.ll>M.Al\. (:('|)(Mi(l.'iiit on (l(!via doiitUM' \i\ |)ii'IV'r«MW'<' m\\ cailloux (ralliivioii cl ^(Miùialcinciit, aux iiial«''rianx (Joiit les arclcs sont ùmouss«M;s on ai'ioiidics par ('rosioii, parce que les angles Irop ai^j^us et les arêtes ti'op vives i)lessejit et latif^Mieiit le poi>soii (juaiid il creuse ifS trous et quand il les recouvre. Ces cailloux oflreiil d^iillrui^, dans leur superposition, des intervalles et des vides qui pirseiileiit de bonnes (conditions pour rincubatioii et l'éclosion des anifs, et pour le développement des jeunes poissons dans le premier âge. L'élablissemenl des frayères arlificielles a, paiini beaucoup d'autres avantages, celui de retirer les truites et les saumons dans les cours d'eau ou à proximité des cours d'eau que l'on veut repeupler. Ce résultat est très- important pour les fermiers, les riverains et les pro- priétaires qui sont exposés à voir chaque année, à l'épo- que de la ponte, les poissons des eaux dont ils ont la jouissance se diriger dans les affluents ou autres lieux, et aller frayer sur des points quelquefois assez éloi- gnés où ils sont péchés soit par les riverains de ces lo- calités, soit par les braconniers. Ces frayères ont aussi l'avantage d'assurer la repro- duction dans des rivières et, en général, dans des eaux où la fraie naturelle était impossible. Il faut avoir le soin, et c'est là une règle générale, d'organiser les frayères quelques semaines avant l'époque habituelle des pontes^ et de les nettoyer au râteau avant que le poisson com- mence à les explorer. On peut les établir à des profon- deurs très-variables, soit à quelques décimètres, soit à plusieurs mètres sous l'eau ; mais il faut toujours avoii' la précaution de les placer hors de l'atteinte des canards, des oies,des cygnes et, en généi'al,des oiseaux aquatiques. LES POISSONS. 249 2" Carpe, brème, tanche, etc. — Ou dispose les frayères dans une eau tranquille et douce que les rayons solaires peuvent porter à une température tiède Les bassins ou réservoirs doivent être en cuvette; et lesbords en pente douce doivent être garnis çà et là de plantes aquatiques, notamment dherbes fines, déliées, mais à liges résistantes. On peut établir des frayères mobiles formées de clayoïmages, de fascines, de bottes de joncs, de balais de bouleau ou de bruyères, etc., que l'on pose sur les bords en plans peu inclinés. On les tient enfon- cés dans l'eau à l'aide de pierres ou de gros gazons, et on les retient au rivage à l'aide de piquets. On se sert aussi avec avantage, notamment pour la brème et le (jardon, d'une cage ou caisse à claire-voie dans laquelle on renferme les poissons mâles et femelles avant la ponte, après y avoir placé des ramilles. Quand la ponte est terminée, on fait sortir les pois- sons reproducteurs en ouvrant un des côtés de la cage, et on conserve, à l'abri de leurs ennemis, les œufs fécon- dés qui couvrent les ramilles, ou bien on les enlève pour aller les déposer dans d'autres eaux. 5*> Perche. — Dans les étangs, les lacs et les cours d'eau, on peut récolter des œufs de perche sur des fa- gots ou fascines plongés dans l'eau, soit à quelques cen- timètres de la surface, soit à de plus grandes profon- deurs. Il suffit souvent de piquer sur les rives, à une profondeur de quelques décimètres, des branches gar- nies de légers rameaux. On recueille facilement les œufs, car il suffit de soulever les rubans avec un bâion ou une petite fourche, et de les dégager du point où ils sont déposés. Mais il ne faut pas attendre que la période (fin- cubation soit trop avancée, car alors les rubans d'œufs 250 fi:s Mi:i'.vi;i[,i,i;s i>f;s fi.ki vf:s kt dks iu isskm \. si; (l<''sagr(''«^fiiit ;in nioiinln' coiil.ici. |';ir- ces iiioyons, on pout ais(';ni('iit dtîplaccr et liansporlor ics œufs IV'Cou- d(''s ; on pcul aussi les di'lruiif ou (îu (liriiiiiucr l.juflletpour injecter dans l'eau lair nécessaire aux exigences de la respiration des diverses espèces de poissons. Dans la pratique, pour ne point tourmenter le poisson et pour diviser l'air autant que possible, on adapte à l'extré- Transport du poisson vivant (emploi d'un soulflet). mité du tuyau insufflant soit un autre tuyau roulé en spirale et percé d'un grand nombre de petits trous, soit une espèce de pomme d'arrosoir, ou une boite cri- blée de petits trous. Si le transport s'effectue à l'aide de plusieurs cuves ou tonneaux, on étaljlit un tuyau principal qui, par des raccords, distribue l'air insufflé dans chaque compartiment. Pour le transport d'une grande quantité de poissons qui nécessite l'emploi d'un grand nombre de cuves ou tonneaux, je me suis servi avec succès d'une pompe qui prend l'eau dans le der- nier tonneau, et la rejette, par une pomme d'arrosoir, dans le premier de la série; les tonneaux sont mis en LES POISSONS. 253 rapport eiili'c eux à l'aide de petits tuyaux placés à la partie inférieure ou à l'aide de siphons. Je me suis servi de ces moyens de transport, avec un plein succès, dans un gi'and nombre de circonslances ; et l'application en a été faite sur une grande échelle par plusieurs personnes pour le transport soit des poissons d'eau douce, soit des poissons de mer. C'est, du lesle, à l'aide de ces moyens que j'ai pu faire arriver à Paris les Tiaiisporl (lu pois-on vivant (oiiiploi d'uno pompe). poissons vivants de la famille des Salmonidés qui ont figuré dans mes appareils, soit à l'exposition universelle de l'industrie en 1855, soit au concours universel agri- cole de 1856. J'en ai, d'ailleurs, fait l'objet d'une notice spéciale lue, d'une part, dans la séance du 9 juillet 1850 de la Société centrale d'agriculture de France, notice in- sérée par extrait dans le tome XI, 2'' série du bulletin de cette société, et, d'autre part, dans la séance du même jour de la Société d'encouragement pour l'industrie na- tionale; ma communication a été insérée, par extrait, dans le bulletin du mois d'octobre 1856. 254 l,i;S MI.liVI.II.I.KS bis I I.KI VKS I.I I)I.S lil ISSLAIX. Cf^ [)iin('i[)(; (l';i('!ialioii dn l'eau a rcrii, depuis cfîlte époque, (le jiornl)reuses apjjlicatioris pratiques, et a rnèrne été l'objet de brevets (iinvention pris [)ar diverses personnes. RESERVES POUR LA REPRODUCTION Dj POISSON On s'occupe, depuis lon^^emps et particulièrement depuis une vingtaine d'années, des moyens de rempois- sonner les cours d'eau et les canaux. On a cru avoir trouvé ces moyens dans l'emploi de la fécondation artificielle des œufs de poisson; et, pour bon nombre de personnes, la culture de l'eau se résu- mait en entier dans la pratique de cette méthode. Dés l'année 1854, j'ai nettement exprimé mon opinion à cet égard ; voici ce que je disais : « La pisciculture, ainsi que l'indique son nom, a pour objet la culture ou l'élevage du poisson. Dans ces der- niers temps, on a cru généralement que la pisciculture consiste uniquement à féconder artificiellement des œufs de poisson ; c'est une erreur. La fécondation artificielle, au lieu d'être une partie essentielle de la pisciculture, n'en est au contraire qu'un accessoire assez restreint ; car, dans ses applications pratiques, on ne peut l'utiliser que pour un certain nombre d'espèces de poissons ; et, pour ces espèces mêmes, elle donne généralement des résultats moins avantageux que ceux de la fécondation naturelle, quand cette fécondation est aidée ou favo- risée par des moyens artificiels. C'est un fait dont la réalité se confirme de jour en jour pour tous les expéri- LES POISSONS. '253 mentateurs intelligents et consciencieux qui recherchent ce qui est vrai et utile. C'est le résultat des ohservalions que j'ai faites depuis plus de vingt années sur la fraie naturelle, et d'expériences comparatives que j'ai entre- prises, depuis l'automne de 1848, sur les frayéres na- turelles ou artificielles, et sur la méthode des féconda- lions artificielles. » (Conférence Mole, 13 mars 185i; imprimerie Léauley.) Les faits qui se sont produits depuis celte époque ont pleinement confirmé ma manière de voir. Dés cette époque aussi, j'ai indiqué les mesures qui me paraissaient les plus propres à assurer le repeuple- ment de nos eaux douces. Au nombre de ces mesures, il en est deux qui sont l'objet de décrets impériaux sous les dates des '25 jan- vier 18G8, 'J5 janvier, 17 mars et 17 juillet 18G9. Ces mesures concernent, l'une l'établissement de ré- iierves pour la reproduction du poisson dans les cours d'eau et les canaux, et l'autre l'interdiction de laisser vaguer les canards et autres oiseaux aquatiques dans l'étendue de ces réserves. Voici ce que je disais à cet égard dans ma conférence du 15 mars 1854 : (( Pour assurer la conservation elle repeuplement, on désignerait, dans chaque cantonnement ou portion de ri- vière, une certaine étendue de bras, fossés, luisseaux, noues, gares, etc., en communication avec ces rivières, dans lesquelles on favoriserait la fraie naturelle, soit par une active et incessante surveillance, soit par des fraycres artificielles. La pêche y serait interdite pendant toute la durée de la fraie des diverses espèces et même pendant toute Vannce, afin de ne pas endommager les '2Î)0 I.KS MKI'.VKIM.KS DKS I [,KI VKS KT DKS lUISSKALX. jrny('i(îs (;l de ikî j);is lioublcr l(;s jfMiiw's poissons dans lt*s Kîlrailcs où ils liouvcnl ;i se icposcr cl ii s'.iljritcr. » « Au siij(;l (les .'«ninianx nuisiblos, il ni' Idut pjis [>or- dro (le vue, (jiic, les oies et les cfuiards, .'ilj.iridonnt'S en tout temps sur les cours d'eau, y d«'*truisent un*.' grande quantité de frai dans les herbes, ou liicn le dévorent ainsi que l'alevin. Il y aurait lieu (ïhUerduc V entrée de certains cantons de rivières aux canards et aux oies, pendant le temps de la fraie et du développement de l'alevin. )> J'ai reproduit ces conseils dans les deux rapports que j'ai lus à la Société d'acclimatation, les 28 marsiSof) et 21 avril 18G5. En adoptant les conclusions de ces deux rapport-, la société décida que des exemplaires en seraient adressés- aux ministres, aux préfets et aux autres fonctionnaires dans les attributions desquels sont placés les cours- d'eau et les canaux. D'autre part, d'après les propositions que j'avais fai- tes lorsque j'étais chargé du service des pêches à la di- rection générale des forêts, l'administration prit l'initia- tive de l'organisation de réserves affectées à la repro- duction du poisson dans les cours d'eau navigables et flottables. Je me bornerai à citer ici l'article 7 des clauses spé- ciales du 50 novembre 1858 relatives à l'adjudication du droit de pêche dans le département de Seine-et-Marne : « Dans l'intérêt de la reproduction naturelle ou artifi- cielle des poissons, l'administration fera réserve, dans les fleuves ou cours d'eau, de toutes les parties ou bras de rivières qu'elle jugera les plus favorables à cette amélioration. lilS POISSONS. 257 « Ces parties expressément désignées sur les affiches lors des adjudications seront délimitées par des po- teaux indicateurs plantés aux frais des fei'miers de la pêche sur les points qui en détermineront les limites sur les deux rives. « Il est formellement défendu à tous fermiers, cofer- miers ou permissionnaires de pécher sur ces places ainsi distraites de la chose louée. (( L'administration pourra faire exécuter, sur les pla- ces ou bras de rivière, tous les travaux jugés propres à propager soit natureUement, soit artificiellement la re- production des diverses espèces de poissons. » Les conseils que je donnais dès l'année 1854, que je renouvelais avec l'appui de la Société d'acclimatation en 185G et 18G5, que l'administration des forêts, sur mes indications, mettait en pratique dès l'année 1858, ont enfin éveillé l'attention du gouvernement. Car la loi du 51 mai 1805 qui complète celle du 15 avril 1829 relative à la pèche fluviale, contient les disposi- tions suivantes : « Article 1*^'". Des décrets rendus en Conseil d'État, après avis des conseils généraux des départements, dé- termineront : l*" les parties des fleuves, rivières, canaux et coui's d'eau réservés pour la reproduction^ et dans les- quelles la pèche des diverses espèces de poissons sera absolument interdite pendant Vannée entière... « Artic'e2. L'interdiction de la pèche })endant l'année entière ne pourra être prononcée pourune période de plus de cinq ans. Cette interdiction pourra être renou- velée. » Les prescriptions de celte loi ont reçu leur exécution. Quatre décrets en date des 25 janvier 18G8 et 17 mars 17 'liiH l.l> Ml.liM.ll.l.l.^ l)hN I l.l.l \l.^ 1.1 1)1.- r.l I.SSLVI \. 1X(i!l (IrlcriiiiiK!!)!. rciiipliicciiicut des ii'îsorvos dans les (ujuis (rc.iii (In l);issiii (if l;i Seine et de divor.s l),'is.sins secondaires; un dccrcl du 10 scplcnjbrc 1>^()8 fix(; cns réserves pour le bassin de la Garonne ; deux antres dé- crets en dale des 7)0 jaiiNicr et i 7 juillet J80'J concer- nent les bassins de la Loue et du Iilnjne. Chacun de ces sept décrets contient les dispositions suivantes : i" La p(M:lie des diverses espèc(;s de poissons est absolument interdite pendant l'année (Mitiéie dans les emplacements réservés ; cette interdiction est pro- noncée j)()ur une période de cinq ans à pai'lir du 1" jan- vier 1809. 'i" Chaque année, au mois de janvier, des pu- blications seront faites dans les communes pour rappe- ler les emplacements réservés. 5" Pendant les périodes d'interdiction de la pèche, fixées conlorniément à Tarti- cle 26 de la loi du 15 avril 1829 et à l'article 4 de la loi du 31 mai 1865, il est interdit de laisser vaguer les oies, les canards, les cygnes et autres animaux aquatiques susceptibles de détrurre le fiai du poisson dans l'éten- due des réserves. En faisant le résumé des divers tableaux annexés aux décrets précités, on trouve que ces réserves sont au nombre de 1299, et qu'elles présentent un développe- ment total de plus de 1 ,896 kilomètres. Répartis dans les divers bassins, les emplacements réservés peuvent contribuer, d'une manière trés-efficace au rempoissonnement des eaux, s'ils ont été bien choisis, s'ils sont convenablement aménagés, et s'ils sont soumis à 2uie active surveillance. Mais on peut craindre que ces conditions de succès ne se trouvent pas, en général, réunies dans le personnel chargé du service de la pêche fluviale, et que, dès lors, les résultats de rempoisson- • LES POISSONS. 259 nement ne soient pas partout très-satisfaisants, et que même, sur certains points, les réserves ne soient impu- nément dévastées par les maraudeurs. LES POISSONS FOUDROVANTS l'iie des plus curieuses particularités que présente rorganisation des poissons est, sans contredit, la pro- priété que possèdent certains d'entre eux de pouvoir dé- <^ager de l'électricité, soit pour foudroyer leurs ennemis, soit pour paralyser les mouvements des animaux qu'ils veulent dévorer. Dans la mer, les torpilles, poissons voisins des raies, jouissent de cette propriété. On en trouve sur nos côtes de l'Océan et principalement de k Méditerranée. Dans les eaux douces, il existe aussi des poissons qui produisent de l'électricité ; ce sont 1° les gymnotes, dits anguilles de Surinam, dans les régions les plus chaudes du nouveau monde; leurs décharges réunies sont assez puissantes pour teirasser les grands quadrupèdes ; cette particularité est connue depuis longtemps des habitants de ces régions ; pour s'emparer plus aisément des che- vaux qui vivent à l'état sauvage, ils les poussent dans la direction des marécages peuplés de gymnotes ; 2^^ les malaptémres, silures électriques, dans le Nil et plusieurs autres grands lleuves d'Afrique. Sur les bords du Nil, les Arabes les désignent par le nom de raascJi, signifiant tonnerre. 1. Gymnote électrique. — Les gymnotes sont des pois- sons d'eau douce propres à l'Amérique du Sud. 2G() I.KS MKIIVKII.I.KS l)i;s M.KIVKS KT I)i:s l'.CISSEAlX. On en c.omiaît plusieurs cspèccîs ; mais la plus célèbre! est l(î (jijmiwte cleclr'uiue. Ce poisson, dont h; corps est frcs-alloii^M' (!t, |)rosfjii(î cylindrique!, rappelle la forme de ranf^nilie. Une longue et large nageoire règne au- dessous de la queue (jui est très-longue relativement aux autres parties du corps. Il varie de couleur selon l'âge, la nourriture et surtout la nature de l'eau plus ou moins bourbeuse dans laquelle il se trouve. On le reconnaît, du reste, facilement par la couleur de la tète dont le dessous est d'un beau jaune orangé. Ses propriétés électriques furent reconnues poni- la première fois par van Berkel dans les environs de Cayenne. Plus tard, en 1671, l'astronome Richer envoyé à Cayenne par l'Académie des sciences de Paris, pour s'y li- vrer à des travaux de géodésie, fit connaître, dans les ter- mes suivants, les remarquables propriétés de ce poisson : « Je fus très-étonné de voir un poisson long de trois ou quatre pieds, ressemblant à une anguille, priver de tout mouvement, pendant un quart d'heure, le bras et la partie la plus voisine du bras de celui qui le touchait avec son doigt ou avec son bâton. Je fus non-seulement un témoin oculaire de l'effet que produisait son attou- chement, mais je l'ai senti moi-même en touchant un jour un de ces poissons encore vivant, quoique blessé par un crochet au moyen duquel des sauvages l'avaient lire de l'eau. Ils ne purent me dire comment on l'appe- lait ; mais ils m'assurèrent qu'il frappait les autres poissons avec sa queue pour les engourdir et les dévorer ensuite ; ce qui est très-probable lorsqu'on considère l'effet que son attouchement fait sur les hommes. » Cette observation, pourtant claire, nette et précise, ne -LES POISSOiSS. 2G1 rencontra qne des incrédules parmi les savants de l'Eu- rope, notamment parmi les physiciens. Soixante-dix ans plus tard environ, la Condamine, le célèbre explorateur de rAmérique, appela Tattention sur un poisson qui produisait les mêmes effets que celui dé- crit par l'astronome Richer. En 1750, on eut de nouvelles notions sur ce poisson, . parle physicien Ingram, qui attribuait ses propriétés à une atmosphère électrique dont il le croyait enveloppé. Un autre physicien, le hollandais S'Gravesande, écri- vait en 1755 : « L'effet produit par ce poisson est le même que celui de la bouteille de Leyde , avec* cette seule différence, qu'on ne voit aucune étincelle sortir de son corps, quelque fort que soit le coup qu'il donne : car si le poisson est grand, ceux qui le touchent en sont terrassés et sentent la secousse par tout le corps. )) Plus tard, le docteur Williamson fit des expériences en jetant quelques petits poissons dans un bassin où se trouvait un gymnote ; ces petits poissons* furent bientôt engourdis et tués. Enfin, dans leurs grandes et célèbres explorations en Amérique, de Ilumboldt et de Bonpland ne manquèrent pas d'étudier les curieuses et singulières propriétés du gymnote. Leurs observations sont l'objet d'un mémoire sur VAnyiilllc clectriqne. lu, en 1806, à l'Institut de France, par l'illustre de Ilumboldt ; j'en extrais les pas- sages suivants : « En traversant les plaines immenses (lianes) de la province de Caracas, pour nous embarquer à San-Fer- nando de Apure et pour commencer notre voyage sur rOrénoque, nous nous arrèlames pendant quinze jours '202 ir^ Mi:iivi:ii,ij:s dks i i.ki:vi:s kt i»ps luissKAfX, à C;il.il)(»/,(». I.c jjiit. (I(! (;(; srjoiir liit. (J(i iir)us occuper des f^yiiiiiolcs, (loiil iiiM! iiiiiornbrable (ju;iiiliN'' se trouve dîiiis les cjiviroiis, « Ou m'a assuré qiui, près d l.iiUirn, im.- joiilc! jadis fréquenlée a été abandonnée à cause des poissons élec- triques. Il l.ilbiL passera gué un i uisseau dans le(juel annuellenieut beaucoup de mulets se jioyaient étourdis par les commotions que les gymnotes leur faisaient éprouver. « Après trois jours de vaines attentes dans la \ille de Calabozo , nous résolûmes de nous transporter nous- mêmes sur les lieux et de faire des expériences eu plein air, au bord de ces mares dans lesquelles les gymnotes abondent. Nous nous rendîmes d'abord au petit village appelé Hustro de Abosco.De là, les Indiens nous'condui- sirent au Cano de Bera, bassin d'eau bourbeuse et morte, mais enlouré d'une belle végétation de clusia rosea, de l'hymenaea combaril, des grands figuieisdes Indes et de quelques mimosa à fleurs odoriférantes. « iXous fûmes bien surpris lorsqu'on nous dit^qu'on irait prendre une trentaine de chevaux à demi sauvages dans les savanes voisines pour s'en servir à la pèche des anguilles électriques. (( L'idée de celte pèche, que l'on appelle Emharhos- car con caballos (enivrer par le moyen des chevaux) est en effet bien bizarre. Le mot de harhaho désigne les ra- cines de lacquinia, du piscidia ou de toute autre plante vénéneuse par le contact desquelles une grande masse d'eau reçoit dans |un instant la propriété de tuer ou du moins d'enivrer et d'engourdir les poissons. Ces derniers viennent à la surface de l'eau quand ils ont été empoi- sonnés par ce moyen. Comme les chevaux chassés çà et LES POISSONS, 203 là dans une maro causent lo mémo offet sur les poissons alarmés, on embrasse, en confondant la cause et reflet, les deux sortes de pèches sous la même dénomina- tion. (( Pendant que notre hôte nous expliquait celte ma- nière étrange de })i'endre le poisson dans ce pays, la troupe de chevaux et de mulets arriva. Los hidiensen avaient l'ait une sorte de battue et, en leS serrant de tous les côtés, on les força d'entrer dans la mare. « Je ne peindrai qu'imparfaitement le spectacle inté- ressant que nous offrit la lutte des anguilles contre les chevaux. Les Indiens, munis de joncs très longsctde har- pons, se placent autour du bassin; quelques-uns d'entre eux montent sur les aibres, dont les branches s'élan- cent au-dessus de la surface de l'eau; Ions empêchent, par leurs cris et la longueur de leurs joncs, que les che- vaux n'atteignent le rivage. Les anguilles, étourdies du bruit des chevaux, se défendent par des décharges réi- térées de leurs batteries électriques. Pendant longtemps elles ont l'air de remporter la victoire sur les chevaux et les mulets; partout on en vit de ces derniers qui, étourdis par la IVéquence et la force des coups électri- ques, disparurent dans l'eau; quelques chevaux se rele- vèrent, et, malgré la vigilance active des Indiens, gagnè- rent le rivage ; excédés de fatigue et les membres en- gourdis })ar la force des commotions électriques, ils s'y étendirent par terre tout de leur long'. (( J'aurais désiré qu'un peintre habile eût pu saisir le moment où la scène était le plus animée. Ces groupes d'Indiens entourant le bassin; ces chevaux ((ui, la cri- nière hérissée, l'eifroi et la douleur dans l'œil, veulent l'îiir l'orage qui les surprend ; ces anguilles jaunâtres et 204 LIS .Mi:i;vi:ii.i.i:s nr.s ri.r.rvF.s i:t mis ia'issi:\Lx. livi(l(;s qui, s('nil)l;il)l('.s à do ^'raiids .serpcMils îiqualifjuos, uaj^M^iit à la surlacc; de l'eau et poursuivnit leur ciiiif.'ini: tous CCS objets olTruient saus doute renheuiijic l(; [)lus pittoresque. « En moins de cinq minutes, deux chevaux étaient déjà noyés. I/anguille, ayant plus de cinq pieds de Ion;;, se glisse sous le ventre du cheval ou du mulet; elle fait dès lors une décharge dans toute l'étendue de son organe électrique; elle attaque à la fois le cœur, les viscéies et surtout le plexus des nerfs gastriques, il ne faut donc pas s'étonner que Teffet que le poisson produit sur un grand quadrupède surpasse celui qu'il produit sur l'homme qu'il ne touche que par une extrémité. Je doute cependant que le gymnote tue immédiat<'ment les chevaux; je crois plutôt que ceux-ci, étourdis parles commotions électriques qu'ils reçoivent coup sur coup, tombent dans une léthargie profonde. Privés de toute sensibilité, ils disparaissent sous l'eau ; les autres che- vaux et les mulets leur passent sur le corps, et peu de minutes suffisent pour les faire périr. « Je ne doutais pas de voir noyer peu à peu la plus grande partie des mulets; mais les Indiens nous assu- rèrent que la pêche serait bientôt terminée, et que ce n'est que le premier assaut des gymnotes qu'il faut re- douter. En effet, soit que l'électricité galvanique s'accu- mule par le repos, soit que l'organe électiique cesse de faire ses fonctions lorsqu'il est fatigué par un trop long usage, les anguilles, après un certain temps, ressem- blent à des batteries déchargées. Leur mouvement mus- culaire est encore également vif, mais elles n'ont plus la force de lancer des coups bien énergiques. « Quand le combat eut duré un quart d'heure, les mu- ^ LES POISSONS. '205 lels et les chevaux parurent moins effrayés; ils ne héris- saient phis la crinière ; leur œil exprimait moins la dou- leur et l'épouvante. On n'en vit plus tomber à la ren- verse; aussi les anguilles nageant à mi-corps hors de l'eau, et fuyant les chevaux au lieu de les attaquer, s'ap- prochèrent elles-mêmes du rivage. « Elles sont prises avec une grande facilité. On leur jeta de petits harpons attachés à des cordes ; le harpon en accrochait quelquefois deux à la fois. Par ce moyen on les tire hors de l'eau sans (jue la corde, très-séche et assez longue, communiquât le choc à celui qui la tenait. « Quand on a vu que les anguilles renversent un che- val en le privant de toute sensibilité, on doit craindre sans doute de les toucher au premier moment qu'on les a sorties de l'eau. Cette crainte est effectivement si forte chez les gens du pays qu'aucun d eux ne voulut se ré_ soudre à dégager les gymnotes des cordes du harpon ou à les transporter aux petis (rous remplis d'eau fraîche que nous avions creusés sur le rivage du Cano de Bera. Il fallut bien nous résoudre à recevoir nous-mêmes les premières commotions qui certainement n'étaient pas très-douces. Les plus énergiques surpassaient en force les coups électriques les plus douloureux que je me sou- vienne jamais d'avoir reçus, fortuitement, d'une grande bouteille de Leyde conij)létenient chargée. Nous conçû- mes dès lors que, sans doute, il n'y a pas d'exagération dans le récit des Indiens lorsqu'ils assurent que des per- sonnes qui nagent se noient, quand une de ces anguil- les les attaque par la jambe ou parle bras. Une décharge aussi violente est bien capable de priver l'honnne jiour plusieurs minutes de tout l'usage de ses membres. « Si le gymnote se glissait le long du ventre et de la li(i(i 'l.[:S MKIiVI n.If.S Dl.s ||.I.I\|> Il 1)1. > l'.Ll.^ht.VLX. poili'iiK!, la mol! pom r.iil. inr-rnc suivie iii^l.'iiil;iii<''iti('nt la commotion. « Il oxislc |)(îii (le poi.s.soiis (l'eau douces (jui .soient aushi Hombi'ou.x que les ^^mnoies électriques. Dans les plaines immenses on savanes (|ue r On trouve, dans la niei', divers poissons électriques; mais le gymnote les surpasse tous en grandeur et en {Orce. On en a péché dont la longueur dépassait 1"',70. Ce poisson donne des décharges électriques par toutes les parties du corps ; mais surtout quand on le touche sous le ventre et aux nageoires pectorales. Cette faculté est cntic'îremenl subordonnée à la volonté de l'animal. Quelquefois un gymnote blessé ou tourmente })cndant longtemps ne donne plus que de faibles commotions; mais tout à coup, au moment où on le croit épuisé et inoffensif, il fait sentir à celui qui le touche une très- forte commotion. Cette propriété dépend tellement de la volonté du poisson que, si on l'irrite avec deux baguettes métalliques, la commotion se transmet tanl(jt par l'une, tantôt par l'autre de ces baguettes, quoique leurs extré- mités soient très-voisines. Ce dégagement d'électricité est produit par un organe particulier qui règne tout le long du dessous de la ({ueue dont il occupe près de la moitié de l'épaisseur. LES rOISSONS. 2C7 Il est divisé en qualre faisceaux loiigiludiiiaiix ; deux grands en dessus, et deux plus petits en dessous et con- tre la base de la nageoire anale. Chacun de ces faisceaux est composé d'un grand nombre de lames membraneu- ses parallèles, très rapprochées entre elles, et à peu prés horizontales. Ces lames aboutissent d'une paît a la Silure (Hoctrique (Malaplcruie) . peau, de l'autre au plan vertical moyeu du poisson. Elles sont unies l'une à l'autre par une infinité de lames plus petites, verticales ou dirigées transversalement. Les pe- tits canaux prismatiques et transversaux, interceptés par ces deux ordres de lames, sont remplis d'une matière gélatineuse. Tout cet appareil organique reçoit beau- coup de ncifs. En résumé, rorgane électrique du gjm- note présente des dispositions analogues à celles qu'on rencontre chez la torpille, ce curieux poisson qui res- 208 I.KS MEUVEIMJ'S DES FLEUVES ET DES TtUISSEAUX. sonil)Io l)eaucoii|) ;'i iiik; raie cl qui existe sur nos rotes (le la Médileiranée (!t iht l'Océan, li possède aussi la pro()riélé de produin; de violentes commotions électri- ques, pour écarter ses ennemis et pour engourdir sa proie. II. Silure éleclrujue. — Le Silure électrique, ou /nala- plérure , est assez commun dans plusieuis des grands lacs de l'intérieur de l'Afrique. C'est un poisson gros, court, au tronc arrondi et à tète déprimée. Sa taille peut atteindre GO centimètres. Son appareil électrique est situé immédiatement au- dessous de la peau. Il est double : chacun est séparé de l'autre par une cloison qui règne tout le long du dos et du ventre. Il est formé de plusieurs couches superposées que l'on peut séparer sans trop de difficulté. Chaque couche est représentée par des lames qui, adossées, for- ment de véritables reliefs séparés par des sillons. Placées les unes sur les autres, elles semblent se recouvrir à la manière des tuiles d'un toit. Ces lames se dirigent du dos de l'animal vers le ventre. Les effets produits par le gymnote peuvent donner une idée de la puissance de ces appareils électriques chez les poissons qui en sont munis. LES POISSONS VOYAGEURS OU MIGRATEURS I. Le saumon commun (Salmo salar) est un migrateur par excellence ; car, chaque année, il quitte la mer du Nord et l'Océan pour remonter, souvent à des distances LES POISSONS. 2G9 considérables, les fleuves et les rivières qui se déchar- gent dans ces mers. Dans ces migrations, il devient pour les populations riveraines une sorte d'industrie, de commerce et de bien-être. Ce poisson ne peut se reproduire qu'en eau douce ; car j'ai démontré, par une série d'expériences trés-concluan- tes, que l'eau de mer, môme à un degré de salure assez faible, paralysait les mouvements des animalcules de la laitance, et exerçait sur l'œuf une perturbation telle, que tout développement de l'embryon devenait impossible. Mais il ne prend un fort et rapide développement que dans les eaux de la mer, à l'embouchure des fleuves et des rivières. Lorsque l'époque des pariades est arrivé, les saumons se réunissent par couples ; chaque femelle a son mâle. Ils choisissent, d'un commain accord, l'endroit destiné à recevoir la ponte, et creusent alors, dans le gravier, des trous ou des sillons dans lesquels la femelle dépose ses œufs en se frottant le ventre sur le gravier ; le mâle s'empresse de les imprégner de sa laitance ; puis le coui)le, travaillant encore en commun, recouvre le pré- cieux dépôt d'une couche de cailloux ou de gros sable. C'est entre les interstices de ces matériaux que les œufs subissent toute leur évolution. Les jeunes, en sortant de l'œuf, portent sous le ventre une énorme vésicule qui sert à les nourrir pendant un mois et demi à deux mois et même plus, selon la t(Mnpérature de l'eau ; ils restent enfouis dans la frayére et n'en sortent que quand la vé- sicule est presque entièrement résorbée. C'est alors seulement qu'ils se mettent à la recherche de leur nour- '■iii) LIS .Mi;i;vi:ii,i.Ks dks ii.i: i;ves et uks rl'issealx. liliiifî (jiii se (M)iripo.s<; (raiiiniiilculos liù.s-lemi(;s, de lar- ves d'iiisceles, de pelils ci'uslacés. PendniiL luui année au moins, le ])elil saumoneau conserve les couleurs ternes qui caractériseni Ij livrée du premier Aj,^e. C'est le parr des An^Hais ; sur nos cours d'eau, ouïe désigne sous les noms de Saumoneau, Sainnonclle, Tacon, Uené. Un brusque changement ne tarde pas à se produire ; Jeune saumoneau ^Parij. tout le corps prend un magnifique éclat métallique ; le jeune poisson devient le smolt des Anglais, ou saumo- neau du second âge. A l'état de parrs, les jeunes saumons restent isolée: et ne cherchent pas à se réunir; mais devenus smolts, alors qu'ils ont revêtu leur costume de voyage, ils se rapprochent, se .forment en troupes, et profitent des crues pour descendre les rivières e^. les fleuves jusqu'à^ mer. Au bout de quelques mois, la plupart de ces jeunes LES POISSOiNS. 271 poissons reviennent dans ces mêmes cours d'eau; ils ne sont plus reconnaissables ; ce sont les (jrihcs des An- glais ; ils présentent alors les caractères de véritables saumons. Pendant tout le temps de son séjour en mer, le sau- mon, à l'état de smolt ou de gi'ilse, croit avec une rapi- dité extraordinaire. Kn effet, le smolt qui a séjourné dans l'eau douce Saumoneau (sftiolO. pendant d(Hix ou ti'ois ans, n'y atteint que la taille de i20 centimètres environ et le .poids d'une centaine de granmies , tandis qu'an bout de deux ou trois mois de séjour dans l'Océan il a acquis un accroissement d'environ 2 kilogranunes. Les grilses restent quelque temps dans les eaux douces, et retournent ensuite à la mer où ils ne séjournent souvent que deux ou trois mois ; après ce court espace de temps, ils reviennent dans les cours d'eau à l'état de véritables saumons, ayant alteinl un poids de T) à (> kilogrammes. Leur '272 m:s mi:i'.vi.ii i.ks dks I i.i:i;vks m 1)Ls I'.i:issi:.m \. jiccioissoïKîiil, (In l'osUî, est toujours on rnpjjort avoc la m.s ri.Ki:vKs ct m:s nmssR*iix. sc'„onl n-a pas encore co.nplélen.enl cUs,.., ,. M.' L' l'I"- pariac nos llcuvcs cl de nos r.vièrcs. Il Les aloses hal.itenl les mers des cole> .ll.i.ope, .(•Afriqne, de l'Inde el de l'Amérique. Au prmtcmps. Alose avant et après la ponte. elles se rapprochent des rivages et remontent le cours des neuves et des rivières qui communiquent avec la Leur type est l'alose commune qui vit dans toutes les mers des' ccMes de l'Europe et ^^- ^^'^f^^'^^^^^l Seine, la Loire, le Rhin, la Garonue, le \o ga, 1 Eli e e Tihre, etc. On en trouve deux espèces dans nos couis LES POISSONS. 275 d'eau : l'alose commune (Alosa vulgaris) et l'aloso fiiUo {Alosa finla) que l'on confond souvent entre elles. Il est cependant facile de reconnaître la finte, qui se distingue de la première par la forme plus allongée du corps, par des taches noires sur les flancs et par des dents plus fortes ; elle ne remonte nos cours d'eau que beaucoup plus tard que l'alose commune. Il est important, du reste, pour le consommateur de pouvoir à première Alose niUc. vue reconnaître la finte ; sa cliair hérissée d'une grande ({uantité de petites aréles est bien moins estimé que celle de l'autre espèce. III. Les anguilles se trouvent partout en Europe, ex- cepté peut-être dans le Danube et dans les cours d'eau qui se déversent dans la mer Noire ou dans la mer d'Azoff. Les eaux douces de la France nourrissent une très- grande quantité d'anguilles que Ton peut chissiM- en plusieurs espèces ou variétés. Voici la classification S. 277 d'iino manière iiisoiisible jusqu'au l)Oiil du inusoau qui est ainsi Irès-êlroit ; 5'^ Anguille àl)PC obiong- (AnguiUaohlonçjirostris) qui est, quant à la l'oiine de- la lùle , inlermédiaire entre l'anguille à long bec* et l'anguille à bec moyen ; 4" Anguille à long bec (AngiiiUa acutirostrls), Schop- Nosed-Eel des Anglais, qui présente presque toujours un corps proporlionnellenient plus elfilé que cliez les précédentes. Sa tète est grêle, étroite même à la bauteur des yeux, et continue à s'amincir jusqu'au bout du mu- seau. L'anguille vit indifféremment dans les eaux courantes ou stagnantes. (Juand les eaux deviennent trop cbaudes, ou quand elles ne présentent plus d'aliments en suffi- sante quantité, l'anguille émigré; elle s'eugage alors dans les ruisseaux ou les plus minces fdets d'eau; et, si ces moyens de transport lui font défaut, elle rampe sur les rives peu déclives et voyage sur terre en recherchant les sols humides et herbeux parles nuits les plus obscu- res. Dans des conditions favorables elle franchit, sur terre, des espaces assez considérables en dévorant les vers, les insectes, les grenouilles, les mollusques qu'elle trouve sur son passage. J'ai pu, en différentes circonstan- ces, constater ces migrations. On peut, dés lors, expli- quer comment les anguilles apparaissent ou disparais- sent soudainement des eaux (jui ne sont point en rap- port avec les cours d'eau. D'après toutes les observations que j'ai faites, l'an- guille ne se reproduit jamais dans les eaux douces, mais seulement sous l'influence de l'eau de mer. Les jeunes, après leur naissance, sont réunies en petites pelotes pendant quelques jours ; ils se séparent ensuite et se" 278 I,i;s MKP.VKIM.KS DKS FI,i:UVES KT DKS l'.IJISSEAI X. iioiirris.sf'iil des dùlriliis ot des {jiiirn;il( iilcs qu'ils trou- vent sur Ift Jiuion des eaux saiirnjHres aux eniboucliures des cours d'eau. Quand ils ouf. acquis assez de force, ils rernonlenl, cji i)audes serrées, ces cours d'eau où ou les désigne sous le nom de monlcea, civellcn, boui- Montée d'anguillettes. vons; ils ont alors 20 à 50 millimètres de longueur et i à o millimètres de tour. La colonne ou cordon que forme la montée renferme un nombre incalculable d'anguillettes qui se dirigent tou- jours vers la source, en se tenant, en raison de l'état de l'atmosphère, soit à proximité de la surface, soit au fond de l'eau. Quand la colonne rencontre un affluent ou un LtS POTSSO^S. 279 filet d'eau quelconque, elle se divise pour se disséminer dans les rivières, les ruisseaux, les lacs, les étangs, les marais et les canaux, partout enfin où les obstacles ne sont pas insurmontables. Il ne faut pas perdre de vue que les angnilleltes font toujours leur première apparition aux embouchures ou à proximité, dans les eaux salées ou sauniàtres, et ja- mais dans les eaux douces; et que la montée s'effectue toujours (le la mer dans l'intérieur des terres. Au fur et à mesure que l'on s'éloigne des embouchu- res, les anguillettes sont moins abondantes, mais tou- jours de plus en plus fortes, de sorte que l'on ne trouve jamais l'anguille à l'état de montée ou civelle dans les parties supérieures des fleuves et des rivières. hjifin, dans les eaux douces, que!s que soient leur état et leur nature, on ne trouve jamais d'anguilles ayant des œufs développés. Les populations riveraines de nos grands cours d'eau font, à l'époque de la montée, une Irès-giande consom- mation de jeunes anguilles. On les fait bouillir dans i'enu, ou bien on les prépare en salaisons. Kn raison de leur organisation, les anguillettes peu- vent être conservées assez longtemps en vie hors de l'eau ; aussi, quand les distances à parcourir ne sont pas tro}) considérables, on les transporte soit dans des sacs mouillés, soit dans des corbeilles plates garnies d'her- l)es fraîches, pour en peupler les eaux douces, notam- ment les lacs, les étangs et les mares. A Monaco, et dans d'autres pays méridionaux où l'on recueille l'eau de pluie dans des citernes, on a l'habi- lude de jeter, dans cette eau, quelques petites anguilles qui s'y nourrissent dini'usoires et autres animalcules '2X0 MIS MKI'.Vr.II.I.KS I)i;s 1 I.KCVES ET DKS KUISSEAI.X. (loiil l;i l'irhciicc |)oiiir;ii|. gâter l'caii. An boni (!<' Iiois on (juulic mis, cais .'iiiguillellos oui ),)i< nu .-iccroisse- mcnl iiolnl)ln ol donnoil une cli.'jji* (!(• Ijoiiiio fju.'ililé. Les animalcules et les délrifiis qui nur;ii(!ut pu être un danger pour la santé des liabilanls sont convertis, par l'intermédiaire dus anguillelles, en aliments sains et subslaiili(^ls. Lamproie de mer ou grande lamproie. ly. La grande lamproie ou lamproie de mer (Petro- myzonmarinm) est propre à l'Océan et à la Méditerranée. C'est un poisson dont la taille atteint quelquefois 1 mè- tre, et dont le corps cylindrique est marbré de brun sur un fond jaunâtre. On voit, de chaque côté du cou, sept ouvertures branchiales qui forment deux lignes longitu- dinales. Ce qu'il y a de plus remarquable encore chez la LES POISSONS. 281 lamproie marine, c'est sa bouche complétemenl circu- laire formant une énorme venloiise et pourvue, sui* toute sa face interne, de plusieurs rangées circulaires de fortes dents. La lamproie remonte, au printemps, nos fleuves et nos rivières où on la pêche quelquefois en très-grande quantité. Sa chair qui est grasse et délicate est généralement 6^^ ^ -^r^^^:yj^^''M Politc lainproio, ou laniproio. de l'iaiier. estimée. Au douxiéme siècle, le roi d'Angleterre. Henri I*'", mourut aux environs d'Klbcuf, pour en avoir mangé une trop grande quantité. La lamproie fluvialile (Velvomyzon fliivialilis) res- semble beaucoup par sa conformation générale à la grande lamproie ; mais elle en diffère par sa taille qui est beaucoup plus petite et par Tarmature de sa bouche qui n'offre qu'une seule rangée circulaire de dents. Ce poisson se trouve assez fréquennnenl dans la plupart des fleuves et rivières de France. Autrefois, on en p^. 'JS2 I.KS Mi:i;\ 1,11. LIS IiKS I I.KI'VI.S KT DI.S l'.LISSEAl'X. rUiùi aiiiiiicliciiiciit ))liis (riin rriillioii d'iiKlivifliis (i.ins la Taniiso. La lamproie de Planer (Petromijzoîi l'ianeri) ne. quitte jamais les eaux douces; on la connaît sous les noms de 31uçe céphale: petite lamproie de rivière, sucet, chatouille ou satouille. C'est un poisson de 25 à 30 centimètres de longueur, vivant dans presque toutes les rivières de lEurope, dans les ruisseaux peu profonds, au milieu des pierres. 11 n'a pas, dans les deux ou trois premières années de son existence, les caractères de l'adulte ; car il subit des mé- tamorphoses quand il a atteint à peu près toute sa crois- sance. A l'état de larve, la lamproie de Planer est l'am- LES POISSONS. 283 iiiocete branchiale [Ammocœtes branchialh) ou vulgaire- ment le lamprillon des pécheurs. V. Les muges sont des poissons de mer ; mais ils re- montent, chaque année, les fleuves et les rivières où ils s'engagent souvent à des distances assez considérables des embouchures. Ces poissons qu'on désigne, dans certaines localités, sous les noms de mulets, meuils, sont reconnaissables, à première vue, par la forme de leur bou('he qui ne res- semble à celle d'aucun a\itre poisson. Ils sont doués d'une grande agilité, et réussissent souvent, en sautant au-dessus de l'eau, à éviter les filets des pêcheurs. Leur chair est très-recherchée pour la table. Le muge céphale (Mugll cephaliis) ou grand muge at- teint une taille de 50 centimètres environ, et le poids d'au moins A kilogrammes ; il est abondant sur toutes les cotes de la Méditerranée ; et, au printemps, remonte le Rhône quelquefois jusqu'au delà d'Avignon. C'est l'es- pèce la plus estimée pour la table. Le muge capiton {Miigil capito) fréquente les cours d'eau qui se jettent dans l'Océan, la Manche et la Médi- terranée. On le voit souvent remonter en grandes ban- des dans la Seine, la Loire et la Gironde. Les essais que j'ai faits pour élever les muges dans des étangs ireau douce ont donné des résultats très-satis- faisants. '284 Li;s Mi;iiVEifjj:s dks ) i.klvks et dks iu;issi: m \ ECHELLES POUR POISSONS MIGRATEURS Los poissons voyn^^ciirs qui, cliaqiif jhiim'c, n'iiionteiit de la mer dans la Loire, et de là dans la Vieniie, pour frayer vers les sources et dans les affluents de celte ri- vière aux eaux vives et j)ures, se trouvaient brusque- ment arrêtés, il y a quelques années encore, par le bar- rage de la manufacture d'armes de Cliâtellerault. C'était un spectacle curieux que celui des efforts faits par les saumons pour sauter dans le bief supérieur; on les voyait s'élever d'un coup à 1 mètre ou 1 mètre oO cen- timètres et quelquefois davantage, au-dessus de l'eau, puis retomber à demi-brisés, autant par la dépense de force musculaire que par la liauteur de leur cbute. Il était extrêmement rare, si ce n'est au moment d'une crue, que le poisson pûtfrancliir la crête du barrage. Aussi, de- puis sa construction c'est-à-dire depuis plus de quarante ans, le saumon, très-abondant jadis dans la Vienne en aval de Chàtellerault, avait disparu en amont, au grand détriment, soit de la reproduction naturelle de cet excel- lent poisson, soit de l'industrie de la pêche des popula- tions riveraines.' Cet état de choses existe sur un grand nombre d'au- tres cours d'eau où les poissons rencontrent souvent des obstacles naturels ou artificiels qu'ils ne peuvent pas toujours franchir. Les obstacles naturels sont formés par les cataractes, les cascades des fleuves et des ri- vières, et même par les chutes d'eau des ruisseaux qu'on trouve dans les pays de montagnes. Quant aux obstacles LES POISSONS. 285 artificiels, on les rencontre dans les barrages qui sont construits pour les besoins de la navigation, de l'agri- culture et de l'industi'ie. Cette situation tendant chaque jour à s'aggraver par suite du développement et de l'extension de la naviga- tion, du flottage, des irrigations agricoles et des établis- sements industriels, le peuplement des cours d'eau en bonnes espèces de poissons était, de jour en jour, plus gravement compromis. Les fleuves et les rivières, en ef- fet, ne donnent, par la pèche desyjo/s.'?o?2s sédentaires, que des produits très-limités; ils n'alimentent la consomma- tion générale d'une manière un peu sensible que, quand ils sont fréquentés, chaque année, par des troupes de poissons voijcKjeurs, tels que les saunions, les aloses, les esturgeons, les anguilles, etc.. La pisciculture fluviatile doit donc avoir spécialement pour objet la propagation de ces précieuses espèces, no- tamment du saumon et de l'alose qui, chaque année, remontent les fleuves et les rivières après s'être engrais- sés à la mer. Ces cours d'eau deviennent ainsi les che- mins (V exploitation de la mer. Mais quels moyens à employer pour atteindre effica- cement et pratiquement ce but? Je les ai indiqués, à plusieurs reprises , dans mes conférences • de pisciculture pratique; et je les ai re- produits dans un rapport lu à la Société d'acclimata- tion le 28 mars 185i). Voici ce que je disais à cet égard : (( Sur un grand nombre de cours d'eau, on construit soit des usines, soit des barrages, écluses, etc., qui ne permettent pas au poisson de circuler librement, et sur- tout d'aller frayer dans des endroits convenables. 11 en résulte nécessairement que la reproduction de plusieurs 280 m;s mi;i'.vi:im,ks dks ri.KuvKs et des ruisseai:x. ospi'ciis (Icvic.iil iinpossil)l(! ou du moins in suffi sa nie ol (juc, par suite, le dépeuplement des eaux s'op«''re très- lapidenient. « Sans {)orter aucune entrave au service re'fjulier des usineSy de la navirjation et du fJotlaffc, on priit facile- ment concilier les exig-ences de ce service avec celles de la re[)i'odu(;tion naturelle du poisson. Il suffirait, en effet, d'établir sur les points où la libre circulation et surtout la remonte du poisson sont devenues impossibles, soit des passages libres toujours faciles à franchir par la truite et par les migrateurs, tels que saumon, alose, lamproie, etc., soit âosplans inclinés n\ec barrages discontinus qui feraient l'office de déversoirs, ou qui serviraient à l'é- coulement des eaux surabondantes, soit enfin des écluses que l'on tiendrait ouvertes à l'époque de la remonte ou de la descente. (( L'organisation de ces passages naturels ou artificiels devrait être rendue obligatoire, l*' pour l'avenir, à l'égard des constructions, barrages, écluses, etc., qui seraient établis sur les cours d'eau, et. qui, par leur situation, pourraient empêcher ou entraver la libre circulation, et notamment la remonte et la descente du poisson ; 2^ dés à présent, à l'égard des établissements de cette nature qui existent sur les cours d'eau dont l'entretien est à la charge de l'État. » J'ai reproduit ces considérations dans les instructions pratiques pour le repeuplement des cours d'eau que la direction générale des forêts a publiées en mai J860, in- structions dont la rédaction m'avait été confiée lorsque j'étais chargé du service des pêches à l'administration centrale. Plus tard, en avril 1865, je les ai encore reproduites LES POISSONS.. 287 dans le rapport que j'ai lu, à la Société d'acclimata- tion, sur les mesures relatives à la conservation et à la police de la pêche. En adoptant les conclusions de mes rapports de 1856 et de 1865, celte société décida que des exemplaires en seraient adressés aux ministres, aux préfets et aux fonc- tionnaires dans les attributions desquels sont placés les cours d'eau et les canaux. Les principes que j'avais posés et les considérations que j'avais fait valoir, dés l'année 1856, sur l'utilité et l'opportunité de lever les obstacles à la libi'c circulation des poissons voyageurs, ont enfin éveillé l'attention des savants, des ingénieurs et du gouvernement. D'une part, en effet, dans la 2'' édition (année 1862) de son rapport relatif à son voyage d'exploration sur le littoral de la France et de l'Italie, M. le professeur Coste, membre de la société d'acclimatation, a fait connaître les moyens employés dans la Grande-Bretagne poui' per- mettre au saumon de franchir les barrages naturels ou artificiels. D'autre part, en 1865, dans son rapport sur la pisci- culture et la pêche fluviale de la Grande-Bretagne, M. Coumes, ingénieur en chef des ponts et chaussées, a décrit les divers systèmes d'échelles à saumons établis en Angleterre, en Ecosse et en Irlande. Enfin, la loi du 51 mai 1865 est venue compléter celle du 15 avril 1829 relative à la pèche. Cette loi contient les dispositions suivantes : (( Article 1". Des décrets rendus en conseil d'État, après avis des conseils généraux des départements, dé- termineront : les parties des fleuves, rivières, canaux et cours d'eau, dans les barrages desquels il pourra être ft '288 I,KS MKItVKIfJ.KS DKS M.KIJVES ET DES Piï'ISSEALX. «''lal)li, npnVs cinjurlc, iiii juissaf^^e ;ij>|)('lr rChclh; (jcstin/' M assurer la libre rirculalion du jjoisson. u Jo suis lioiirciix de voii* le ^M)iiv(M'jieirieii( français prendre en lrès-sérieus(; (:onsid«Mation les jnoprositions que j'ai faifes, il y a drjà uihî diz.iirie d'aiiDées, sur cette importante (piestion. Avant d'indicpier ici le système d'échelles ou de plans inclinés adoptés, en France et à l'étranger, jtoin- le pas- sage des poissons migrateurs ou voyageurs, il inc parait utile d'en retracer un court histoiique. L'invention de ces appareils remonte à une épofjue peu ancienne; car, c'est en 1854 que M. Sniilli, pro- priétaire d'usines en Ecosse, désirant s'afTrancliir des pertes d'eau considérables que causait l'ouverture des vannes pour le passage du poisson, imagina d'établir un plan incliné sur lequel s'étendait une nappe d'eau peu épaisse. Ce plan était muni de cloisons transversales in- terrompues à l'une de leurs extrénntés de njaniére à laisser une ouverture alternant avec celle de la cloison qui précède et celle de la cloison qui suit. Par celte dis- position le courant, forcé de faire le lacet, était ralenti et ne causait qu'une faible dépense d'eau. Le plan incliné formait donc une sorte d'escalier ou d'échelle mettant deux biefs en communication. L'expérience ne tarda pas à montrer que le poisson n'hésite pas à sintroduire dans ces passages, et qu'il les franchit si les dispositions en sont bien calculées. L'inclinaison des plans doit être modérée , celle qui paraît la plus favorable est du huitième, c'est-à-dire que la base du plan doit être huit fois plus grande que la hauteur à franchir ; pourtant l'inclinaison peut être por- tée jusqu'au cinquième sans inconvénient. LES POISSONS. 289 Les plans inclinés peuvent être construits en bois ; mais ce genre de construction a si peu de durée qu'on a préféré les construire en maçonnerie; il faut que les pierres soient jointes i)ar un bon ciment bydraulique, mais il n'est i)as nécessaire qu'elles présentent des surfaces bien taillées; les moellons grossiers suffisent. Les cloisons transversales sont faites en dalles en. chassées dans la maçonnerie ; elles doivent avoir environ 0'",50 d'élévation au-dessus du plan incliné. «loupe d'une échelle pour poissons migrateurs. La largeur des échelles doit être de l'°,50 ; l'intervalle des cloisons de l'",20 à l'",r)0, et l'ouverture de ces cloi- sons de 0'",r)0. La prise d'eau doit correspondre au thalweg du biet supérieur, et être garnie de plusieurs vannes pour qu'on puisse régler l'écoulement de l'eau selon les besoins, et pour que l'une, de0"',50 de largeur, soit complètement ouverte à l'époque du passage. La direction du {)hin incliné peut varier selon les exi- gences des localités ; il peut être droit, oblique, replié comme un escalier, pourvu ou privé de paliers aux 19 200 i.i:s Mi;i'.vi;ii,i.i.s i)i.> ri.Kivi.s i.i i)i> i'.ii.y^lalx. louriiaiits ; mais il ost in(Jis|H'iisalil('iri(Mit nécessaire quf* son OMVorlurc inCéricui'C! soit j)lacéo au jioirif on l'eau lourbilloiHie et où clio a in jilus de profondeui' : cette condition est de la [)lus ri*^onreuso nécessité. Sur la rivière de Ballysadore, uïw. échelle .ivail été faite en ligne droite, et son entrée inférieure se trouvait à 80 mètres de la chute; aucun poisson n'y pénéira. Ou en chaugea la disposition, de manière à ramener sou entrée près du point où la- cascade tombait sui- les ro- ches, et ce changement a produit les meilleurs résultats. Il est facile de domier l'explication de ces faits : les saumons, dans leur ascension périodique, choisissent les eaux qui leur conviennent le mieux; mais, si dans les rivières qu'ils ont suivies ils rencontrent un obsta- cle, ils ne rétrogradent pas pour pénétrer dans un autre cours d'eau ; ils stationnent devant l'obstacle, en se pla- çant au point où l'eau est le plus agitée et le plus pro- fonde, où s'ouvrent les vannes, où se précipitent les cou- rants. Leur instinct semble les avertir que c'est là que se présentera un passage libre, que c'est là, s'il survient une crue, qu'ils trouveront une nappe assez forte pour qu'ils puissent s'y élever, et ils attendent. Si leur attente est déçue, ils s'épuisent souvent en ef- forts impuissants jusqu'au moment où, ne pouvant ré- sister aux lois de la reproduction, les femelles déposent leurs œufs dans des conditions qui en compromettent l'existence. Mais si dans les lieux où ils s'arrêtent et qu'ils explorent, les poissons trouvent une issue, ils s'y engagent sans hésiter, et arrivent rapidement dans les biefs qu'ils veulent atteindre. A l'origine, on crut utile de creuser d'espace en es- pace, sur le plan incliné, des excavations en forme d'au- LES POISSONS. 291 ges que l'eau remplissait, et où le })oisson pouvait sé- journer. On a reconnu que cette disposition était inutile. Le saumon francliit avec une grande rapidité les échelles ; il semble qu'il ne se sente pas en sûreté dans ces défilés, et il ne s'y arrête pas. La nappe d'eau qui descend sur le plan incliné ne doit pas être fort épaisse ; on a vu remonter ces poissons dont une partie du dos était hors de l'eau . Le courant peut élre interrompu sans inconvénient»' car, quand les vannes sont fermées, le poisson stationne pour saisir une occasion favorable ; il reprend son voyage quand l'ouverture des passages le lui permet. Quelque rapide que soit son ascension, il ne passe pas cependant avec une telle vitesse qu'on ne puisse l'a- percevoir ; on peut compter ceux qui suivent le chemiîi qu'on leur a ouvert, et savoir conséquemment à l'avance si la reproduction sera abondante et la pêche fructueuse. Ainsi, à Gollooney, en un jour de novembre, on a noté qu'en une heure 267 poissons avaient remonté l'é. chelle. On a voulu quelquefois, en certains lieux, con- stater rigoureusement le nombre des poissons franchis- sant ensemble les échelles; à un moment donné on fer- mait les vannes; on a pris en une seule fois 27 saumons, et une autrefois 81 au mois de décembre. Il n'est donc pas permis de douter de l'efficacité des échelles pour assurer la remonte des saumons vers les frayères naturelles ; les résultats sont acquis. On s'empressa de tirer parti de l'invention de M. Smith ; des échelles ont été établies sur plusieurs rivières de l'Ecosse; mais c'est surtout en Irlande que ce système a été employé avec le plus de succès. On peut citer particulièrement la pêcherie de Gai- :i!)2 i.Ks Mi;i'.\i:ii.i.i.s i)i,s ii.i:rvi> i;i dls I'.i.jsslaux. way, dans la(]ii(!ll(i uikî rclicllr; pciiiK'l aux poissons de la ))ain (Jo c.o nom d'anivcr dans lo lac ^.onil), (;n sur- montant ini liarrage de; l'",^;) de; liauU'Ui-; uno autre /iclielle leur permol ensuite de passeï- du lar, < j)i rilj dans 4îelui de Malk dont le niveau esta 12 mètres au-dessus du premier. La pêcherie deBallysadore a deux êelielles : l'une f'ran- diissant une cascade de 0 mètres, l'autre une cascade de 4'", 50. Elles conduisent le saumon de la baie de Bal- lysadore dans la rivière formée par la réunion de l'Arrow ci de rOwenmore; une troisième échelle franchit une cascade de 5'", 50. Voici quelques-uns dos résultats obtenus dans les pê- cheries de l'Irlande : celle de Ballysadore, située au nord de cette contrée, a[)parlient à M. Cooper, ancien membre du parlement britannique; elle mérite de fixer l'attention tant à cause des difficultés vaincues que des produits obtenus. Antérieurement à l'année 1857, la pêche portait sur les poissons qui entraient dans la baie de ce nom, d'une longueur de l'2 kilomètres environ, jusqu'au pied d'une .cascade de 9 mètres de chute verticale, limitant la ma- rée à l'embouchure des deux rivières de TOwenmore et de l'Arrow. A la faveur des hautes marées, quelques sau- mons parvenaient quelquefois à franchir cette cascade; mais, à une distance de 400 mètres plus loin, ils arri- vaient au pied d'un second obstacle d'une hauteur de 4"%20, puis d'un troisième de 5"^, 50. Les poissons ne pouvaient frayer dans cette zone, parce que le fond ro- cheux et la rapidité du courant présentaient des condi- tions défavorables. Pour permettre au saumon de pénétrer dans des eaux LES POISSONS. 295 offrant des frayères convenables, M. (looper construisit trois échelles dans les parties élevées de l'Owenmore et del'Arrow. Les passages furent libres en 1855; l'on y vit monter des saumons même avant l'époque de la fraie. La ponte se fit dans d'excellentes conditions ; car, au mois d'avril 1850 et dans le courant de l'année, on vit une très-grande quantité de jeunes saumoneaux. Les an- nées suivantes, l'alevin ne fut pas moins abondant. On put faire une série d'expériences trés-intéressantes sur les migrations et l'accroissement du saumon. Dans ce but, on pèclia plusieurs saumoneaux au moment de leur descente à la mer, au printemps do chaque année, et avant de les remettre à l'eau on les marqua en coupant une partie de leur nageoire adipeuse. Celte marque permit de constater, plus tard, le retour dans les mêmes eaux, et l'accroissement acquis en mer. Quant aux produits obtenus, les résultats sont très-si- gnilicatifs : en effet, en 1854, le produit brut de la pê- che n'était que de 500 saumons au plus, d'un poids de 1,500 livres anglaises et d'une valeur de 1,050 francs; et, en 1862, le produit s'éleva à 4,382 saumons d'un poids de 20,891 livres, et d'une valeur de 18,824 francs. D'où il résulte qu'au bout do six à sept ans, le rende- ment de la pêcherie est devenu dix-neuf fois })lus consi- dérable par le fait seul de l'établissement des échelles; résultat qui en justifie complètement l'utilité et l'op- portunité. ECHELLES EN N 0 R W E G E En Norvvége, les cascades sont trés-multipliées ; pres- que tous les cours d'eau sont accidentés de chutes ou de i!U m;s mkuvi.ii.i.i.s r>i:s im:i;vi:s et dks p.i.fssealx. I);in;i^n's natiiicls (jiii oui (jut'lqiii;loi>. uni' linutcui' trop coii.si(l('îralj!c pour [)(îrmc*ttre aux saunions do les Iran, cliir; (l'aulro [)art, les sciorios (Hablios dans plusieurs localités ont nécessité, pour les retermes d'eau, la con- struction de barrages qui interdisent à ces poissons l'ac- cès des j)arties sn[>érienres des rivières qui présentent de bonnes IVayéres. Pour parer à ces graves inconvénients, on a construit, avec le bois de sapin qui est très-commun dans cette (îontrée, des échelles à saumon qui assurément ne sont pas comparables, pour l'élégance et la solidité, à celles d'Ecosse et d'Irlande, mais qui rendent aussi de bons services, car on a reconnu que, dès les premières an- nées, le produit des pêches a quadruplé sur les cours d'eau où elles ont été établies. Ces échelles sont formées de caisses de bois de 2"", 60 de long sur 1"',95 de large et l'",60 de profondeur, com- miniiquant entre elles par des canaux, également de bois ; elles sont disposées de façon à ne pas être placées vis-à- vis l'une de l'autre pour rompre la puissance du courant. Pour éviter les avaries que la gelée ne manquerait pas d'y causer, on empêche l'eau d'y circuler pendant toute la saison des froids. On a pu constater, dans ces appareils, que le saumon monte facilement une pente de l'",oO, et même plus forte en été, époque où ils ont plus de vigueur ; on a de plus reconnu que l'alevin des régions élevées est meilleur et plus beau que celui des parties basses des . rivières. LES POISSONS. 295 i; c n !■: I, I. K s AU c a \ a n a Le système des appareils destinés à faciliter la re- monte du saumon a été importé d'Irlande au Canada, et appliqué sur un grand nombre de rivières où les barra- gesnécessités par les besoins de l'industrie avaient fait disparaître ce précieux poisson. Là aussi, on a pu constater que l'établissement des éclielles avait immédiatement ramené le saumon dans les cours d'eau qu'il avait été forcé d'abandonner, parce qu'il ne pouvait plus pénétrer dans les parties qui pré- sentaient de bonnes frayères naturelles. ECHELLES EN F It A N C E On voit aujourd'hui, en France, un certain nombfe d'échelles sur les cours d'eau fréquentés par le saumon. On en a établi sur le Tarn, sur le Blavet, sur la Dordo- gne (barrage de Mauzac), sur la rivière de Vienne, à Châtellerault. Voici la description de cette dernière : L'échelle est construite à 25 mètres de la berge droite de la rivière, dans le barrage en maçonnerie de la manufacture d'armes de Châtellerault. Ce bar- rage, dont la crête est à 2'", 50 au-dessus de l'étiage d'aval, est perpendiculaire à l'axe de la Vienne; il a 112 mètres de longueur entre les rives; l'épaisseur au couronnement est de 4'", 50, et le nuu* de chute est ver- tical sur toute sa hauteur. Le système adopté pour l'échelle est celui à gradins et 20r) M s MKHVEII.LKS MS FLEUVES ET DES HUISSEAI X compartiments successifs, avec ouvertures contrariées. L'oiivra^a; est en maçonnerie et se compose d'nii ra" diei' (l«î deux hiijoycrs verticaux parallèles à l'axe, (]<• deux murs d(î tête Taisant suite en amont à ces bajoyers, et se recourbant l'un vers l'antre en forme d'avant-boc, d'un mui' de pied en retour d équerre sur les bajoyers, et de six écbelles parallèles au mur de pied. La longueur totale, depuis l'orifice de la prise d'eau entre les deux murs de tête, jusqu'à celui de sortie dans le mur de pied, est de 10 mètres; la lonj^nieur hors- d'œuvre est de 5 mètres. L'axe de l'échelle est perpen- diculaire à la direction du barrage. Ce barrage était le seul obstacle à la remonte des poissons voyageurs ; car à peine l'échelle était-elle ter- minée qu'à leur première migration les saumons en franchissaient les gradins ; on en prenait d'une taille considérable dans un fdet d'expérience tendu à l'orifice d'amont; on en constatait la présence, non-seulement dans le bief de la manufacture, mais encore en divers points du cours supérieur de la rivière, et même au- dessus de Limoges. Une fois frayé, le passage de l'échelle a été, depuis lors, fréquenté par un nombre toujours croissant de poissons voyageurs, tels que saumons, aloses et lam- proies; en sorte que le rempoissonnement de la Vienne, dans toute sa partie en amont de Châtellerault, semble désormais assuré. C 0 >• C L U s 1 0 X s On ne peut méconnaître aujourd'hui l'utilité des échel- les ou plans inclinés pour la libre circulation des pois- LES POISSONS. 207 - sons alternatifs, c'est-a-dirc de ces espèces voyageuses 'qui vont alternativement de la mer dans les eaux douces, ou des eaux douces dans la mer. Les essais faits en Eu- rope et môme en Amérique ne laissent, à cet égard, au- cune incertitude. On ne saurait donc trop encourager et favoriser l'établissement de ces appareils partout où les cours d'eau offrent des obstacles naturels ou arliliciels à la circulation des poissons voyageurs. La propagation de ces espèces de poissons a un intérêt tout particulier pour l'industrie des pèches. D'une part, en effet, en parcourant chaque année, dans presque toute leur étendue, les Ueuves et les rivières, elles don- nent à l'industrie des pèches une puissante impulsion, et mettent, sous la main des po})ulations riveraines, une matière alimentaiie très-abondante et très-substantielle; d'autre part, elles offrent le précieux avantage de ne revenir dans les cours d'eau qu'après s'être développées et engraissées à la mer, par conséquent sans avoir rien prélevé sur les aliments nalurels des espèces sédentaires qui vivent habituellement dans ces cours d'eau. Les échelles, du reste, contribuent aussi à la propa- gation de ces deinières espèces qui ne trouvent pas tou- jours, dans des cantonnements où elles vivent, les con_ ' dilions favorables à la ponte ; car elles peuvent, à l'aide des échelles, changer de stations à l'époque de la fraie, et choisir les endroits les plus propres à recevoir leurs œufs, soit dans les cours d'eau eux-mêmes, soit dans leurs affluents. LES BATRACIENS Les Batraciens, à Télal adulte, sont des animaux à sang froid, à circulation incomplète, à respiration peu active ; leur peau est nue. A leur naissance, ils respirent par des branchies et ressemblent, par conséquent, aux poissons. A l'état adulte, ils ont des poumons et dès lors une respiration aérienne. Les représentants des diverses familles de Batraciens dans les eaux douces, senties Grenouilles, les Triions ou Salamandres aquatiques, et les Axolotls. l. Grenouilles. — Les grenouilles sortent souvent de l'eau, soit pour cltercher leur nourriture, soit pour se chauffer au soleil; elles se nourrissent de vers, d'insec- tes, de petits poissons et de petits mollusques. Elles choisissent toujours une proie vivante et en mou- vement, et se mettent à l'affût pour la guetter; quand elles la voient, elles fondent sur elle avec vivacité. Dès le mois de mars, les grenouilles restées à Tétat de torpeur au fond de l'eau commencent à s'agiter; c'est à cette époque qu'elles se multiplient. Chaque femelle peut pondre de six cents à douze cents œufs, formés d'une sphère glutineuse et transparente, au centre de LES POISSONS. 299 1 aqiielle est un petit globule noirâtre. Au bout de peu de temps, ce globule qui étnit l'embryon et qui s'est déve- Développement du lélaid. i. Œuf do grenouillo. 2. Œuf fécondé et eiitouio d'une vésicule. 3. Premier ;igo du têlard. 4. Apparition des Ijianclues respiratoires. 5. Développement des lirancliies du têtard. 6. Formation des pattes postérieures du télard. 7. Formation des pattes antéiieurcs; suppression graduelle des branchies. 8. y. Développement des poumons; réduction delà queue, grenouille. loppé à l'intérieur de l'œuf se dégage et s'élance dans l'eau : c'est le têtard de grenouille. -,00 I.I.S MKi'.vKii.i.r.s iii:s mxvF.s kt des huisseaix. Son ...rps, qni se lonnin.. p^m iim' lonf.'"C quono a,,!.- lielonnanl une vorilol.le nageoire, nn point «le pattes. Uc cl.aque côté du cou se trouvent .l.mx grandes bran- Grenouille. chie. en forme de panaches qui bientôt se nétrisseii sans que la respiration cesse d'être aquatique, car le tard possède aussi des branchies intérieures comme I poissons. Peu de temps après, les pattes postérieur commencent à se montrer, et acquièrent une gran LES POISSONS. 301 longueur. Les pattes postérieures se développent sous la peau qu'elles finissent par percer. Enfin, la queue se flétrit, s'atrophie peu à peu de façon à disparaître com- plètement diez l'animal parfait. Vers la même époque, les poumons se développent et commencent à fonction- ner. Nous avons, en Europe, deux espèces de grenouilles : Salamandre aquatique ou Tnton. [^ La grenouille verte habite les eaux courantes et dor- mantes : 2^* La grenouille rousse, un peu plus petite que la précédente, habite les lieux humides, dans les champs et les vignes. Elle ne se rend dans l'eau que pour se reproduire ou pour hiverner. II. Tritons ou Salamandres aqiiatujues. — Ces ani- maux qui sont essentiellement aquatiques viennent ra- 302 LES MERVEILLES DES FLEUVES ET DES RUISSEAUX. l'cment à terre; on les trouve dans les fossés, les rnarai- et les étanj^s. Ils sont très-earnassiers, et se nourrissen' de rnouclics, de divers autres insectes, du irai de j^re nouille, et même des individus de leur propre espèce La femelle pond des 03ufs isolés qu'elle fixe au-dessous des feuilles des véj^^étaux aquatiques. Les Jeunes têtard.*: naissent une quinzaine de jours après la ponte, et con- servent longtemps leurs branchies. Les tritons peuvent vivre longtemps dans une eai très-froide, et même au milieu de blocs de glace. Lors- que les glaçons se fondent, ils sortent de leur engour- dissement et reprennent leurs mouvements en même temps que leur liberté. Ils présentent un autre fait non moins remarquable dans la facilité avec laquelle ils réparent les mutilations qu'ils ont subies. Non-seulement leur queue repousse quand elle a été coupée ; mais leurs pattes même se re- produisent de la même manière et plusieurs fois de suite. IIL Axolotls. — Ces Batraciens, qui sont propres aux lacs de Mexico, subissent une métamorphose analogue à celle des tritons. Cependant, ils sont déjà capables de se reproduire pendant leur état branchifère. Lorsqu'ils se sont transformés, ils offrent tous les caractères du genre américain de salamandres auquel on a donné le nom d'Ambystomes. LES OISEAUX AQUATIQUES Les oiseaux réunissent tous les degrés d'organisation; car ils volent, marchent, nagent et plongent. Ils se dis- tinguent, parmi tous les autres êtres vivants, par la fidé- lité de leurs amours. On voit fréquemment un mâle s'attacher à une femelle, et vivre avec elle jusqu'à la mort de l'un d'eux. A l'époque de la ponte, la femelle modifie ses habi- tudes. Elle enchaîne sa liberté, et reste souvent sur son nid malgré la faim ou [le péril. Le mâle, du reste, lui prodigue les soins les plus tendres et pourvoit générale- ment à sa nourriture ou la remplace sur le nid pour couver les œufs. Leur sollicitude pour leurs petits est incomparable. Certaines espèces d'oiseaux aquatiques fournissent à l'homme une nourriture très-recherchée et très-estimée. Mais les oiseaux sont surtout utiles à l'homme en détrui- sant, pour s'en nourrir, une foule d'animaux nuisibles et notamment les insectes qui ravagent les champs ou les forêts. I. Aigles pêcheurs ou P y y argues. — Les pygargues sont des rapaces diurnes qui se distinguent des aigles proprement dits par leurs tarses eniplumés seulement à r.()4 Mis Mi;i;VEILLhS lU.S I I.KLVKS El DKS i;ui.s>i:.\L'X. |a [);uiin siipéi'ieiir(! ; i(Mjr iiouriilur**, d'ailleurs, secorn- [)ose prescjuc exciusiveriicnt de poisson. Ils cliasseiit aussi, sur le bord des eaux où ils se tiennent habituelle- ment, de petits mammifères et des oiseaux aqnatifjues. Ils sont doués d'une vue dont la portée est très- <,Tande ; car un pygargue [)lauant à une hauteur consi- dérable distingue très-nettement un poisson, même de dimension moyenne, dont le dos vient efileurer la sur- face de l'eau ; il fond sur lui et le saisit avec ses serres qui sont très-puissantes. J'ai vu souvent, sur les lacs et les fleuves, un de ces oiseaux attaquer soit un gros brochet dormant au soleil au milieu des plantes aquatiques, sOit une forte truite ou un saumon venant happer des insectes à la surface de Teau. Il enfonce alors ses serres dans la chair du dos, et parvient, en s'aidant de ses ailes, à amener le poisson sur le rivage où il le dépèce. Mais il est'quelquefois vic- time de son audace ^t de sa voracité. Un poisson très- vigoureux et de fortes dimensions peut plonger e1 entraîner avec lui, au fond de l'eau, le pygarguequi périt alors asphyxié. L'orfraie ou pygargue d'Europe est un grand et be oiseau, qui atteint presque la taille de l'aigle roya c'est-à-direun mètre environ. On le rencontre danstout( l'Europeet en Afrique. Il passe sur nos côtes, en automne en poursuivant les bandes d'oies et de canards qui èmi grent vers le Sud ; et on le revoit au printemps lors qu'il retourne vers le Nord. Le pygargue à tête blanche, nommé vulgairement aigl à tête blanche, habite l'Amérique septentrionale. Il es doué de beaucoup de force et d'adresse. C'est peut-êtr pour ce motif qu'il est représenté comme emblème su LES OISEAUX AQUATIQUES. 507 l'étendard des États-Unis. Ce choix déplaisait à l'illustre Franklin. « C'est un oiseau d'un naturel bas et méchant, « disait-il; il ne sait point gagner honnêtement sa vie. « En outre, ce n'est jamais qu'un lâche coquin. Le petit « roitelet, qui n'est pas si gros qu'un moineau, l'attaque « résolument et le chasse de son canton. Ainsi, à aucun Grèbe huppé. « titre, ce n'est un emblème convenable pour le brave « et honnéle peuple américain. » Dans l'Inde et le Bengale, le pygargue garanda ou py- gargue des Grandes Indes est l'objet de la vénération des brahmes, comme oiseau consacré à Vishnou. II. Grèbes. — Ces oiseaux vivent sur la mer, mais ils préfèrent le séjour des eaux douces où ils se nourris- r,os m:s Mf':r.vEiiJj:s dks riKcvKS i:t I)Ks KUIs^5LALx. seul, de vê^MHaux aquatiques, d'insectes, de vers, de mollusques et de petits poissons. Ils nagent aveeune égale facilité à la surface des eaux comme entre deux eaux ; dans cette dernière natation, ils se servent des ailes et semblent voler dans l'élément liquide; ils plongent longtemps, voyagent et émigrent sur les eaux. Sur terre, leur démarche est gauche et gênée ; ils se tiennent presque constamment dans une attitude verti- cale, appuyés sur le croupion, les doigts et les tarses étendus latéralement ; mais ils sont trés-élégants dans l'eau où ils plongent et nagent admirablement. On les trouve dans l'ancien et le nouveau continent; leur dépouille y est utilisée comme fourrure ; et on fait des manchons d'un blanc argenté avec la peau de leur poitrine dont le duvet est serré, ferme et lustré. Le grand grèbe ou grèbe huppé (Podiceps cristatus) est assez commun sur les cours d'eau et les étangs les plus profonds du midi de la France où il arrive en automne et reste jusqu'au printemps. Les plumes de la tête sont longues et divisées, sur l'occiput, en forme de deux cornes de couleur noire vers le bout. Je n'ai souvent trouvé, dans l'estomac de cet oiseau, que des pelotes de plumes dont il avait dépouillé son abdomen pour lui servir de lest ou d'aliment à défaul d'autre nourriture. Le petit grèbe (Podiceps minor), grèbe de rivière ou grèbe castagneux, est sédentaire sur les cours d'eau, les étangs et les marais du midi de la France ; sa chair > devient fort grasse, et d'un meilleur goût que celle ai ses congénères. JNid de grèbe castagneux. LES OISEAUX AQUATIQUES. 311 11 construit, dans les roseaux et à la surface de l'eau, un nid dans lequel la femelle pond cinq ou sept œufs oblongs, d'un blanc verdatre ombré de brun. Ce nid est un véritable radeau qui vogue à la surface de nos étangs ; il est formé d'un amas de grosses tiges de plantes aqua- tiques habilement enlremôléeset Irès-serrées ; et comme celles-ci contiennent une notable quantité d'air dans leurs cellules, et qu'en se décomposant elles produi- sent divers gaz, l'ensemble devient plus léger que l'eau. Si la femelle est menacée d'un danger quelcon- que, elle plonge une de ses pattes dans l'eau et s'en sert comme d'une rame pour transporter ailleurs le berceau de sa progéniture. Le nid entraîne souvent avec lui une grande nappe d'herbes aquatiques, et ressemble alors à une petite île flottante. III. Poules (Veau. — Les poules d'eau sont répandues sur une partie du globe, au milieu des marais et des étangs, aux bords des lacs et des rivières. Ce sont des oiseaux trés-gracieux qui se tiennent habituellement parmi les roseaux, et se promènent quelquefois sur les larges feuilles des nénuphars. Quoique leur vol ne soit ni élevé, ni rapide, elles sa- vent néanmoins éviter le chasseur avec beaucoup d'a- dresse. Harcelées de trop prés, elles se jettent à l'eau, plongent et ne reparaissent que quelques pas plus loin, en ne montrant de leur tête que ce qui est strictement nécessaire pour respirer et étudier la situation ; elles ne s'envolent que lorsque tout danger a disparu. Dans certains pays, elles sont sédentaires; dans d'au- tres, au contraire, elles accomplissent des migrations et, dans ce cas, elles varient leurs plaisirs en voyageant tantôt à pied, tantôt à la nage, tantôt à tire-d'aile. Elles r,i2 U'S mi:rvkii,lks des fleuves et des rlisseai x. suivciil, (Ikujik' niiiirc, In irirrrif. route, (ît rc.viciiiicjil ('lahiii- l(Mir nid an lieu où ellos font K-in pK^rnièio ponto. Les œuls sont couvés altornativomojil [>nv h; rnâlo et la loniollo qui on^ la précaution, lorsqu'ils s'cloi^^nonl, de ]'(!Couvrir d'herbes leur piécieux li-ésor, afin de le sous- traire aux recherches de leurs ennemis, et surtout à la voracité des corbeaux et des pies. La poule d'eau ordinaire {Gallimila cliorojms) hal)ite l'Europe où on h\ trouve surtout en France, en Itahe, en Allemagne et en Hollande. Elle est d'un naturel timide, et reste cachée, pendant le jour, au milieu des roseaux. Son nid est construit trés-babilement avec des débris de roseaux et de joncs entrelacés. Immédiatement après leur éclosion, les petits sortent du nid et suivent leurs parents. Ils ne sont alors revêtus que d'un duvet rare et grossier ; mais ils courent avec vitesse, comme de petits rats, sur les plantes aquatiques, nagent et plongent pour se cacher à la moindre apparence de dange^. lY. Martins-pêcheurs . — ■ Ces oiseaux sont les Alcyons des anciens, et ont été l'objet de fables ridicules. On leur attribuait, par exemple, la propriété de faire sécher le bois sur lequel ils s'arrêtaient. On accordait à leur corps desséché la propriété d'indiquer le vent, d'écarter la foudre, de donner en partage la beauté, d'amener la paix et l'abondance. Aujourd'hui encore, dans certaines provinces, on croit que leur dépouille préserve les draps et autres étoffes de laine de l'attaque des teignes. Les martins-pêcheurs sont répandus sur toute la sur- face du globe. On en trouve un grand nombre d'espèces surtout dans les régions chaudes de l'Afrique et de l'Asie. Le martin-pêcheur alcyon [Alcedo ispida) est un de nos plus beaux oiseaux ; son plumage ne le cède en rien pour JNid de poule d'eau. LES OISEAUX AQUATIQUES. 515 la \ivacilé des nuances à celui des plus riches espèces des tropiques. Si les oiseaux de proie, habitants des grands bois, sont considérés comme nuisibles pour le chasseur, le martin-pêcheur, sur le bord des eaux, peut être regardé Marlin-pôcheur d'Europe. par le pêcheur comme oiseau essentiellement nuisible. Semblable à ces voleurs du grand monde, il porte la brillante livrée d'un gentilhomme, son plumage bleu et vert le fait respecter et aimer par ceux qui devraient lui vouer une haine implacable ; mais il est si beau quand il vole, les couleurs de son habit jettent de si joyeux re- flets que vraiment ce serait dommage d'en vouloir à ses 510 LES MEI;VEIIJJ:S des TEEUVES et des laiSSEALX. jours, cl pour Jin point p.'issci' pour Ijnrli.'iic on le laisse vivre paisihlcrruiuL Vrai braconnier de rivière, toujours à l'affût, toujours en chasse, il fait une énorme consonrirnation de petits poissons; voyez-le perché des heures entières sur la même branche ; on le prendrait pour un philosophe rê- veur, tant il est immobile, tant il parait détaché des choses de ce monde; mais attendez, il tourne la tête, baisse les yeux, c'est qu'il aperçoit une proie, objet de sa convoitise ; dés qu'il juge le moment propice, il se jette à l'eau, où il plonge et reparait presque aussitôt tenant en son bec un petit poisson tout frétillant. Pour le consommer il vole à terre où il le tue avant' de le manger. Gomme le canard, il est vorace, et comme lui il fait vite sa digestion ; aussi son appétit est insatiable, et, à peine son repas achevé, il se remet à la recherche d'une nouvelle victime. En changeant de place, s'il aperçoit quelque proie fa- cile, il s'arrête tout à coup dans son vol rapide, s'élève, plane quelques instants, et se laisse tomber comme un plomb sur le poisson qu'il manque bien rarement. Son organisation est telle, qu'il ne peut rester vingt- quatre heures sans manger; aussi lui faut-il une nourri- ture énorme par rapport à sa taille. J'ai pu constater qu'un martin adulte consommait par jour de 150 à 160 grammes de poissons, ce qui fait par an 54 à 58 ki- logrammes ! C'est beaucoup pour un si petit être, mais ce n'est pas tout. Les poissons qui composent ces 54 à 58 kilogram- mes sont tout petits et seraient devenus, si Dieu l'eût voulu, pour la plupart grands, car le martin choisit ses LES OISEAUX AQUATIQUES. il7 mets. 11 aime les fins morceaux et dédaigne souvent le l'retin commun. Le marlin-pêcheur joint la hardiesse à l'habileté. Il va pécher dans les viviers, dans les parcs d'éclosion ; je l'ai même vu venir prendre le poisson jusque dans le pa- Marlin-pêcheur d'Afrique. nier du pécheur quand celui-ci était éloigné et attentit à suivre lés mouvements de son bouchon. V. Cincle plongeur ou Merle d'eau. — Cet oiseau est connu dans quelques localités, particuUérement en Sa- voie, sous le nom de Religieuse à cause du large plastron blanc qui lui couvre toute la gorge, le devant du cou et la poitrine, où il forme une espèce de rabat d'autant 7>1S I.l'S .M1l1{VEI1.L1:S DLS l'LLUVhS KT DLS IILISSLALX. plus apparent rpje le lostc du pluiringe csl Ijiiin ou mémo noirâlre; cosl aussi, pour ce rnotil', (pje quelques per- sonnes l'appellent ironiquement le procureur. Par SCS mœurs franchement aquatiqucîs, le cincle con- stitue une curieuse exception dans l'ordre des passe- reaux; car il est toujours sur les bords ou au milieu des eaux, à la recherche des insectes, des mollusques et des petits poissons dont il fait sa nourriture. Quoiqu'il n'ait pas les doigts palmés môme rudimentairement, il plonge et se meut entre deux eaux, en étendant les ailes et s'en servant comme de nageoires. Souvent aussi il rase, dans son vol, la surface de l'eau pour saisir les insec- tes ailés. . Pour chercher ses aliments dans l'eau, il y descend d'abord jusqu'aux plumes du ventre, ensuite il laisse pendre ses ailes en les agitant durant l'immersion, et continue de marcher, la tête haute jusqu'au fond; là il se promène, va et revient sur ses pas, en cap- turant des larves, des vers, des mollusques et de petits poissons avec la même aisance que sur la grève. C'est dans cet état que son plumage serré et comme imprégné d'une matière huileuse paraît quelquefois entouré de bulles d'air produites par le mouvement de trépidation que les ailes impriment pendant l'immersion et qui lui donne un aspect argenté. D'autres fois, il passe comme un rat à la surface de l'eau, d'un bord à l'autre, ou il y flotte avec les ailes étendues en se laissant aller au courant à la poursuite des insectes et du menu fretin. Les oiseaux plongeurs sont forcés de remonter fré- quemment à la surface pour renouveler l'air de leurs poumons ; le cincle sait renouveler sa provision d'air LES OISEAUX AQUATIQUES. 321 au sein môme de l'eau. On le voit, en effet, après une immersion de 25 ou 30 secondes dans les eaux claires et transparentes, s'arrêter un instant, relever la tête en laissant échapper de son bec quelques bulles d'air, puis fouiller rapidement sous ses ailes légèrement écartées du corps et reprendre sa marche, tandis que des centaines de petites bulles d'air s'échappant de dessous les rémi- ges viennent crever à la surface. 25 ou 50 secondes après, il recommence et ne revient à l'air libre que lorsqu'il ne remonte plus un seul globule, la provision étant épuisée. On peut conclure de là que, sous l'écartement des ai- les, au moment où le cincle entre dans l'eau et qu'il s'ébroue, il s'amasse une cerlaine quantité d'air dont l'oiseau s'empare en partie lorsqu'il a rejeté celui qui n'est pas respirable, et que c'est par ce renouvellement d'oxygène aspiré qu'il peut demeurer immergé pendant une minute et demie, et quelquefois même plus long- temps. Le cincle est essentiellement montagnard ; il recher- che les lieux qui lui offrent des rivières, des torrents, des ruisseaux d'eau limpide coulant sur des graviers. Mais, au commencement de l'automne, il se rapproche de la plaine pour s'établir sur les bords des lacs hérissés de rochers, ouïe long des ruisseaux ou bien à la source des rivières. Quand il a choisi son canton, il ne le quitte pas et n'empiète sur les parties voisines que forcé par de graves circonstances ; mais s'il respecte la propriété du voisin, en revanche il veut être maître chez lui. 11 y vit en famille, et ne supporte pas les étrangers ou les in- discrets. 2i ,,, ,,.. s M|..r,M:H,l.KS 1.KS FLEUVES ET DtS l'.USSEAa. ' VI FanvelU:. de., roseaux. Ces jolis el gra.-.cux omeaux presque exclusivement que d'msecles. BousseroUe tuidoidc U rousserollc turdoide jc^l'^-ol.r^J^^ ; connue vulgairement sous ^e--™ f ^^ je tout. ,.ais ou de cm, .m; elle ^^ '^P^^.^' rance que ve, celles connues en Europe, ^,^^^'^'^'' ^,. i„s ta. ,, rur f-il pour enrep. .r^^^ a^^^^^^^^^ ^^ I:t::rlit;";:He^.Me. Le m.ie p^^^ LES OISEAUX AQUATIQUES. 325 tuellement quelques jours avant la femelle. Il commence à chanter dès les premiers jours de mai, et débute ordi- nairement par les syllabes cra, cra, cara, cara, dites lentement et d'un ton enroué; il continue ensuite par celles-ci : Irel^ tret^ treu, hûy, répétées avec un peu plus de vivacité. Il chante jusqu'au commencement de juillet slirtout le matin et le soir, et même durant la nuit. Pour établir son nid, la grosse rousserolle choisit lea points les plus chargés de roseaux dont le pied baigne dans l'eau. On l'y voit grimper avec preslesse le long de leurs cannes, saisir en même temps les insectes qu'elle y découvre et poursuivre au vol les mouches et les libel- lules. Le maie et la femelle commencent à confectionner leur nid vers le milieu de mai. Ils ramassent, à cet effet, une grande quantité de tiges et de feuilles sèches, sur- tout de petits joncs et de roseaux, dont ils composent tout leur ouvrage à l'extérieur, après avoir entortillé les premiers brins autour de trois, quatre ou cinq cannes trés-rapprochées les unes des autres, de sorte que le nid se trouve assujetti à peu prés dans toute sa hauteur, et placé généralement à 1 métré au-dessus de l'eau, quel- quefois sur la vase ou la mousse des marécages. L'inté- rieur est garni avec des têtes ou panicules sèches de roseaux ; et pour en faire une couchette très-moelleuse, ils garnissent le fond avec le duvet satiné des saules et des peupliers. Après la mue, qui a lieu à la fin de l'été, la chair de la rousserolle se couvre de graisse et devient d'un goût exquis qui ne le cède en rien à celui de la poule d'eaip poussin, connue vulgairement sous le nom de pou- lette. ~rl{) LKS .MKliVKIl.M.S DKS ITKIVKS LT DKS l'.l.IhM.Al \. La petite roiisserolle dite. elTorvalte ou licc-fiii (j<îs l'o- seaux (calmnoherpe anivdinacca) est un cliarrriaiil polit oiseau qui habite plusieurs eonlrées de l'Kurop(.', où il est généralement très-commun. Sans cesse on mouve- ment, il grimpe le long des tiges de roseaux en faisant entendre un chant continuel tran^ Iran^ trin, tria, khi, Idri, hauijs, hanijfi, qu'il n'interrompt pas même quand on l'approche de très-près. Au printemps et en été, il chante même la nuit. La petite rousserolle arrive en France au printemps, et nous quitte dans le courant d'octobre. Elle construit son nid en forme de panier allongé, entrelacé à trois ou quatre tiges de roseaux. La fauvette aquatique ou fauvette des marais (calamo- lierpe aquatica) se trouve dans plusieurs contrées du centre et du midi de l'Europe. Elle séjourne, en hiver^ dans le midi de la France, sautillant au milieu des ma- rais dans les buissons et les tamaris. Le mâle a un petit gazouillement fort doux, et fait entendre un petit cri : tré-kré, tré-kré. Cet oiseau construit son nid avec art, en l'entrelaçant aux tiges des plantes aquatiques. La fauvette des joncs ou bec-fni phragmite (calamo- herpe phragmitis) habite, comme les précédentes, les étangs, les marais, les bords des lacs et des cours d'eau. Son nid est entrelacé dans les roseaux. Cet oiseau se trouve en France, en Angleterre et en HoL lande. La fauvette ou bec-fm à moustaches noires (sylvia melanopogon) est propre aux contrées méridionales ; elle est sédentaire dans le midi de la France, et recherche les pays inondés et couverts de roseaux. Cet oiseau est Fniivollo dos marais. LES OISEAUX AQUATIQUES. 329 : peu farouche ; il se cramponne aux cannes de joncs, les j parcourt de bas en haut et aime à marcher sur les plan- tes aquatiques. Le maie, pendant l'été et les beaux jours d'hiver, fait entendre un petit ramage très-agréable, qu'il commence par les syllabe^ kiii-tui. LES MAMMIFERES Parmi les mammifères des eaux douces, il en est quel- ques-uns dont les mœurs sont vraiment merveilleuses et ne sont encore connues que d'un petit nombre de personnes. I. Ornithorhynque ou taiLpe de rivière. Rien de plus étrange que cet animal, qui ressemble à une taupe énorme avec un bec de canard. I! tient à la fois de Toi- seau, du reptile et du mammifère. Sa] bouche, en effet, se termine par une espèce de bec corné ; ses excréments et les produits de la génération s'évacuent, comme ceux des oiseaux, par un orifice commun nommé cloaque. Son épaule présente, comme chez les sauriens, une dou- ble clavicule. Par tous les autres côtés, il est un vé- ritable mammifère. Ses mamelles sont peu apparentes et privées de tétines ; mais elles sécrètent une liqueur lactée destinée à nourrir les petits. On ne connaît qu'une seule espèce d'ornithorhynque, V ornithorynque paradoxal^ animal de la grosseur d'une petite loutre, désigné par les colons australiens sous le nom de taupe de rivière^ qui habite les bords des lacs et des rivières de la Nouvelle-Hollande et de la terre de Van-Diemen. Il se nourrit de larves aquatiques, de vers, LES MAMMIFÈUES. 351 de mollusques et, au besoin, de détritus végétaux ; il vit, par couple, dans des terriers qu'il creuse sous les ber- ges et dont il ne sort habituellement que la nuit ou pen- dant le jour pour nourrir sa famille. C'est au fond de ces terriers garnis de racines entrelacées que la femelle dépose ses petits; peu d'heures après leur naissance, elle les conduit à l'eaupaur les allaiter. Les petits vien- nent à tour de rôle opérei- une pression sur les glandes lactifères de leur mère ; le lait se répand à la surface de l'eau, sous la forme d'une huile bleuâtre ; et c'est alors que les petits s'empressent de la humer en poussant de petits grognements. Ce mode d'allaitement, qui n'a d'ana- logue dans aucun ordre des mammifères, suffirait à lui seul pour faire de l'ornitliorliynque une des plus éton- nantes bizarreries de la nature. II. Desmans. — Ces animaux sont spécialement orga- nisés pour une existence aquatique. Leurs pattes de der- rière sont palmées et leur queue est aplatie, dans une certaine portion de sa longueur, de manière à servir de rames. Leur corps est allongé et recouvert de poils soyeux. Ils vivent sur les bords des lacs et des rivières, et vont chercher dans l'eau les insectes, les mollusques, les grenouilles et même les petits poissons. On n'en connaît que deux espèces, qui sont propres à l'Europe : 1" le desman moscovite habite la Russie ; sa taille esta peu près double de celle de notre rat d'eau. L'odeur qu'il exhale est si pénétrante, qu'elle se commu- nique à la chair des poissons assez voraces pour se nour- rir des cadavres de cette espèce. Les gros poissons ava- lent parfois les desmans qui vont chasser dans l'eau. III. Ondatras ou rats musqués, — Ces mammifères, dont la taille égale celle d'un lapin, sont très-communs 332 LKS MEF(VEILI,ES DES FLELVES ET I>ES ItllSSEAlX. dans l'Amérique du Nord, spécialement au Canada. Leurs pieds de derrière sont à demi palmés et boidés de poils roides à chaque doigt; et leur queue, presque aussi longue que le corps, est comprimée et couverte d'écail- lés. Grâce à ces dispositions, ils s'élancent et se jouent avec aisance dans l'eau, leur élément naturel. Ils son^ pourvus d'une glande qui sécrète un liquide laiteux d'une odeur musquée excessivement pénétrante : de là le nom de rat musqué, qu'on leur donne quelqufois. Ces animaux sont de véritables architectes ; ils ont l'esprit de construction très-développé; ils ressemblent, à cet égard, aux castors, et savent mettre en pratique le principe d'association pour la garantie et le bien-être de chacun. Ils réunissent, en effet, leurs efforts pour édi- fier des villages où ils trouvent un abri assuré contre le froid et contre leurs ennemis. Lorsqu'une colonie d'on- datras s'est formée, elle se transporte sur le bord d'un lac ou d'un cours d'eau tranquille, et cherche un endroit dépourvu d'escarpement. Le choix fixé, chacun se met à l'œuvre et les huttes s'élèvent rapidement. Elles ont extérieurement la forme d'un dôme, et se composent de joncs préalablement enfoncés en terre comme des pieux, puis réunis les uns aux autres par d'autres joncs solide- ment entrelacés. Les interstices sont ensuite remplis avec de la terre glaise pétrie au moyen des pattes de de- vant et appliquée, à l'aide de la queue, d'une façon très-satisfaisante. Une dernière tresse de joncs couvre ce revêtement et porte l'épaisseur de la muraille à Contre la crue des eaux et l'envahissement possible de son domicile, l'ondatra ne néglige pas les précau- tions. 11 dispose des gradins dans l'intérieur de la hutte LES MAMMIFERES. 535 et peut ainsi s'élever progressivement selon le niveau de la rivière. Cet animal est doué, d ailleui's, d ui» degré d'observa- tion bien remarquable ; car les gradins supérieurs ne sont jamais atteints par les eaux, excepté dans los crues tout à fait extraordinaires. La grandeur des cabanes varie selon le nombre de leurs habitants. En général, elles ont de 0"',00 à 0"',70 de diamètre intérieur, el peuvent abriter sept à huit in- dividus; mais on en trouve de beaucoup plus vastes. Di- verses galeries les font communiquer par-dessous la ri- vière avec la rive opposée. Ces galeries sont destinées soit à servir de refuge en cas de danger, soit à permettre aux ondatras d'aller chercher, durant l'hiver, les racines dont ils se nourrissent. Dans cette saison, en effet, l'en- trée de leur demeure est obstruée par l'eau, et ils vivent dans une obscurité complète. Les huttes' des rats musqués sont quelquefois réunies en nombre considérable ; elles présentent, ainsi agglo- mérées, le singulier aspect de maisons en miniature ; C'est là que les industrieux rongeurs se confinent pen- dant les mois rigoureux. Dès les premiers jours du printemps, ils sortent de leur demeure souterraine, se répandent dans les terres et s'accouplent. Aussitôt qu'elles ont été fécondées, les fe- melles regagnent le logis; mais les mâles continuent à vagabonder dans les champs. A la fin de l'été, mâles et femelles se réunissent de nouveau en plus ou moins grand nombre et vont fonder une nouvelle colonie ; car on affirme que ces animaux n'occupent jamais deux années de suite le même cam- pement. 334 LES MKriVEILLES DES EEKIJVES ET DES l'.IISSEAIX. Dans la construction des digues otsurlout des lovées de défense contre les inondations, l'homme doit prendre des précautions contre les animaux rongeurs ; car, plus d'une fois, les levées du Pô ont été percées par les tau- pes, et celles du Mississipi par les rats musqués. IV. Castor. — Les mœurs et l'intelligence de cet ani- mal l'ont rendu célèbre dans le monde entier. On le trouve dans les régions septentrionales des deux conti- nents; en Europe, dans le midi de la France, dans la Russie, la Pologne, la Prusse et l'Autriche; en Asie, dans la Sibérie et la Grande Tartarie. Mais on ne le ren- contre plus en grandes colonies que dans les solitudes de l'Amérique du Nord, principalement du Canada, où il recherche les régions entrecoupées de lacs et de cours d'eau; car il est essentiellement aquatique. Vers le mois de juin, les castors se réunissent en troupes de deux cents à trois cents individus pour se livrer à la construction de leurs demeures ; ils choisis- sent alors un endroit convenable, et donnent générale- ment la préférence à un cours d'eau assez considérable pour supporter le flottage des bois dont ils ont besoin pour leurs travaux. Car, avant de bâtir leurs demeures,, ils construisent une digue destinée à mettre ces demeures à l'abri des inondations. Toute la troupe prend part aux: travaux ; les uns, à l'aide de leurs tranchantes incisives, coupent et ébranlent un gros arbre dont ils savent di- riger la chute de manière à ce qu'il tombe en travers de la rivière ; les autres attaquent des arbres plus petits et, après les avoir débités en pieux, les amènent sur l'eau, où ils les font flotter jusqu'à l'emplacement de la digue. D'autres travailleurs enfoncent ces pieux dans le lit de la rivière, et les relient ensuite entre eux avec des bran- LES MAMMIFÈRES. 535 clics llexibles. Ce n'est pas tout; les castors ne sont pas seulement d'habiles charpentiers, ils sont aussi de bons maçons. En eiïet, les castors vont sur la rive, gâchent de la terre avec leurs pieds, la battent avec leur queue, et en font des pelotes pour maçonner les pilotis. Après ce travail, la digue est terminée; elle a quelquefois de 30 fi 35 mètres de longueur, sur 3 à 4 mètres d'épaisseui' à la base. La construction de cette chaussée dénote chez les cas- tors plus que de l'instinct ; car elle exige un grand nom- bre d'actes réfléchis. Et ce qui prouve encore qu'ils n'a- gissent pas machinalement, c'est que si, dans leurs explorations, ils trouvent un lac convenablement placé et dont les eaux ne sont pas sujettes à de fortes varia- tions de niveau, ils ne construisent pas de digue parce qu'ils n'ont pas à redouter l'inondation de leurs caba- nes. Celles-ci sont bâties sur pilotis près du bord de l'eau. Pour leur édification, la troupe des castors se fractionne en petites compagnies dont chacune travaille pour son compte. Les (îabanes affectent une forme ronde ou ovale, et ont intérieurement deux à trois mètres de diamètre ; elles présentent deux, quelquefois même trois étages; Tinfé- rieur ouïe rez-de-chaussée sert de magasin pour la pro- vision d'hiver, qui se compose décorées et de branches de saules, de peupliers, d'aunes et autres bois tendres, dont les castors font leur nourriture favorite ; l'é- tage supérieur est plus spécialement consacré à l'habi- tation. Les murs ont quelquefois 0'",60 d'épaisseur et se terminent par un plafond en forme de dôme. Cette maçonnerie est complètement imperméable, et résiste aux coups de vents les plus violents ; elle est faite de 330 i>ES MKUVKILLES DES FLEUVES ET DES P.l'ISSEAUX. bois, (le pierres, de sal)los vA. de limon, le tout cimenté par un mortier que l'iiahile maçon applifjue avec sa queue, comme avec une truelle. Chaque cabiine a deux issues : Tune, cachée par l'eau, s'ouvre dansje magasin et permet aux habitants de s'échapper (mi plonj,^eant ; l'autre est percée dans le mur de l'étage supérieur pour l'entrée et la sortie. Le nombre des habitants d'une même cabane est généralement de quatre ou six, accou- plés deux à deux, et va quelquefois jusqu'à dix-huit ou vingt. Habituellement, les différents couples vivent à côté les uns des autres, dans une harmonie parfaite, et ce n'est que par exception qu'ils se retranchent dans des compartiments particuliers. La même harmonie règne dans toute la colonie. Si un castor soupçonne un danger quelconque, il bat immé- diatement l'eau avec sa queue, et produit un bruit qui, se transmettant rapidement sur l'eau, se propage dans toutes les cabanes. Leurs habitants se mettent de suite en mesure d'échapper au péril ; les uns plongent, les autres se blottissent dans leur demeure, où l'homme seul pourrait les atteindre. Le castor cesse de bâtir quand il se trouve dans des conditions qui ne lui présentent plus assez de sécurité. Cet animal s'est maintenu sur notre sol jusqu'à la fin du moyen âge. Mais l'homme abuse de tout ; en perfection- nant ses armes et ses procédés de chasse, il a fait au castor une guerre d'extermination. Alors les colonies et les familles se sont dispersées; d'architectes et de con- structeurs qu'ils étaient, les castors sont devenus fouis- seurs ; et, au lieu de se bâtir une cabane bien confortable pour y vivre en commun, ils se tiennent dans l'isole- ment et sont réduits à se creuser un long terrier abou- LES ^lAMMlFEr.ES. 337 lissant à la berge d'un cours d'eau. On les appelle, pour eette raison, castors terriers. On trouve encore, quelquefois en France, des castors terriers sur le cours méridional du Rhône et à l'entrée de ses principaux affluents, tels que l'Isère, le Cardon et la Durance. On pourrait aisément et à peu de frais favoriser la jtropagation et la multiplication du castor dans les im- menses marais de l'est el du nord de l'Europe. Cette entreprise deviendrait, en peu d'années, une soui'ce de richesses pour ces contrées. Les castors fournissent de précieuses fourrures, que l'Kurope achète en Améri- que à des prix très-élevés. t>2 CON.CLUSION On peut apprécier, par tout ce qui précède, le rôle important que remplissent sur la terre les fleuves, les rivières et les ruisseaux. Ce rôle est essentiellement sub- ordonné à l'existence des massifs boisés, surtout de ceux qui couvrent les montagnes et les flancs des vallées. Sachons respecter ces grands régulateurs du régime des eaux ; et, au lieu de chercher à les détruire, faisons au contraire tous nos efforts pour les protéger et les conserver, et pour accroître encore leur action par lere- gazonnement et le reboisement des montagnes. Car, ainsi que je l'ai dit en commençant ce livre , tout est har- monie dans l'œuvre de Dieu. TABLE DES GRAVURES Ablution des Indons dans le Gaiif;c 54 Aigle plongeur 505 Alose comininic , 974 Alose finie 27r) Anguille à large bec 276 Anguillcltes (Montée d') 973 Asclle d'eau douce ':;05 Barrage (navigation) ^^) Cai-te de la France. ... I Cincle plojigeur et son nid 5I9 Coquillages d'eau douce ^85 Crevette et crabe -19«) Dapbnie et Cypris 901 Delta du lUiùne j5j Digue pour navigation, écluse Oj^ Kcbelle pour poisson migrateui- | . 28() Écrevisse grainéo ,|f)[l Écrevisse mâle joj^ Kpinochettc et son nid . 927 Fauvette des marais. 597 Fauvette rousserolle ' " rj^- Fécondation artificielle (œufs libres '.....'. "243 Fécondation artificielle (œufs adbéiriil^; ^ 244 Flottage en trains * " ' a-- ,, , 100 rrayercs artificielles 247 Frayère naturelle de la percbe 2l!> 17 502 185 182 200 278 213 285 184 59 «;•; 70 7>> 78 S2 82 87 89 92 94 95 96 97 104 102 MO 114 124 126 120 127 128 128 208 119 ii:i 2o 0 Œuvre des eaux (L') — de l'homme (L'j Oiseaux aquaticpies. . Ondatras Ornilliorhyn(jue. . . . V Parr (jeune saumoneau).. . . Perche (IVayére de la perche). Perles Pliyses Phryganes Planorbes Plantes aquatiques Pluie Poissons — nidificateurs — foudroyants — voyageurs ou migra- teurs — voyageurs (Échelles pour) — (Héserves pour la re- production desi. . . Poisson vivant (Transport du). Poules d'eau Poule d'eau (INid de) Portugal (IS'avigation en).. . . Pygargue, aigle pêcheur. . . R i-;8 102 505 551 550 270 219 208 188 215 187 17i 5 217 222 259 268 284 254 250 511 515 82 505 Bats musqués Renoncule aquatique Réserves pour la reproduc- tion des poissons Rhône (Delta du) Roches usées par l'eau. . . . Roussei'olle turdoïde ^ — (petite) Russie (Navigation en). . . . Sables aurifères (Lavage des) Sagittaire flèche d'e-iu. . . Salamandre aquatique. . . 551 176 254 151 147 522 526 15 176 501 340 TADLI:: ALPHABETIQUE Sandro corniiiun. ...-•• ^''il Siii.^'suos i"^:^ Saumon coiiiiriuii ^'j^ _ du Danube '^'^ Siam (navigaliou). ....•■ J^^^ Silure f^^' — électrique • • ^-[^ SmoU(jeune saumon) 2<0 Source de rivière ^ Suède (Navigation en) ^'' Suisse — "'^ T Taupe de rivière 5^0 Têtard de grenouille .... Thelphase lluviatile Transport du poisson vivant. Travail des eaux courantes. . Triton Tiiiite Turquie d'Asie (navigation). . Voyageurs (Poissons). W 1'.)'.) u;i 501 y -22 1-27 2^;H Wallisnérie. TABLE DES MATIÈRES * Introduction 1 La pluie Orig^inc des cours d'eau Matières précieuses charriées par les eaux Les irrij^aiions 15) Historique . 15 Irrigations en Egypte 15 Nilomètres 25 Irrigations en Chine , 29 Irrigations dans l'Inde 30 ' Irrigations en Italie 36 Irrigations en France 38 Irrigations en Belgique 39, Irrigations d'été v_4.Q) Irrigations d'hiver 44> Navigation 59 Considérations générales 59 Navigation intérieure .... 65 Navigation en France 70 Navigation en Italie 75 Navigation en Espagne . . 78 Navigation en Portugal 82 Navigation en Russie . 82 Navigation en Suéde. 87 Navigation en Angleterre 89 Navigation en Hollande 92 Navigation en Belgique 94 Navigation en Allemagne 05 Navigation en Suisse 96 Navigation dans l'Amérique du Nord 97 348 TABLE DES MATIÈHES. ?îavigal ion dans In Canada 102 Navij^alioii dans l'Ariioj'iquf du Sud. . , . . . 104 Navigation dans lo IJrésil, 110 Navigation on \'/^\\^\(: . .... lli Navigation on AiViquo i'24 Navigation en Asio \i(> Ilindoustan 1-JG Turquie d'Asie 127 Siam. . I2^i Chine 1 iX Flottage I.jO Flottage en France. ... 150 I. Flottage à bûches perdues 130 IL Flottage en trains 132 Flottage en Autriche AH^ Le travail des eaux courantes O^ Alluvions, atlerrissements, deltas Ji5 Crues et inondations .- l.jô^y Considératioiis générales loi. L œuvre des eaux Cjl^^ LV'uvre de l'homme T^ Les plantes aquatiques 174 Lo>, Infusoires. 179 L. 'S Mollusques 182 Les Annélides 189 Le- Crustacés • 195 Lcî Arachnides 204 Les Insectes d'eau douce 206 Les Poissons 218 » Poissons nidificateurs 222 Fécondation artificielle 242 Frayères artificielles 245 Transport du poisson vivant 250 liéserves pour la reproduction du poisson 254 'os poissons foudroyants : . . 259 >es poissons voyageurs ou migrateurs 268 Fchelles pour poissons migrateurs 284 Échelles en Norwége 293 Echelles au Canada 295 Échelles en France 295 :.es Batraciens. 298 les Oiseaux aquatiques 303 îes Mammifères ^JîSÛ.^ Conclusion ( 339.^ TARIS. — IMP. SIMON IlAÇON ET COMP., nuE d'ERFCRTH, 1. B18LI0TKECA ) La Bibliothèque Université d'Ottawa Échéonc« The Library University of Ottowo Dote due UL 2 3 197a té d'Ottawa éance Tho, llbKOAij University of Ottawa Date Due «r> UJ > w 3 K tu 00 -J - LL -ûl • iX>l PO ! ^ O to O ' PO 1 e 3 tu 001 «• Œ O o POI m o ] o 1 e • «/) 1 • O UJ PO 1 oi -J M »- -J .PO 1 O •- »-l . _l q: CO l-l UJ o