Les Baces Chevalin VVEC UNE ETUDE SPÉCIAUE Chevaux Russes/ Phatograrnrea de Rougerun, Vigne rot Q c" LîWAHUE AGRICOLE DE LA MAISON RUSTIQUE -2ti, rue Jacoh, 2G JOHNA.SEAVERNS i i * JC* u t M * i LES RACES CHEVALINES AVEC UNE ÉTUDE SPECIALE SUR LES CHEVAUX RUSSES TYPOGRAPHIE PIRMIN-DIDOT ET C'e. — MESSIL (EURE). En g ►• g |*i J J kj te 0 K, 5 5 g Ci. Su o '< ^ d tp 1 •i3 È ^ P "S "fl S ^ _ > s g -^ J g 3 '< T- cu -« M C5 nJ "_l <: ^ 5J3 w "S "S > fc-, >«0 5 &-. s ~ ^y LES RACES CHEVALINES AVEC UNE ÉTUDE SPECIALE SUR LES CHEVAUX RUSSES PAR M. le Dr LEONID DE SIMONOFF CORRESPONDANT DE LA DIRECTION GÉNÉRALE DES HARAS RUSSES ET M. JEAN DE MOERDER niRECTEIR DE L'ADMINISTRATION DE LA DIRECTION CÉNÉRALE DES HARAS RUSSES Ouvrage précédé d'une lettre du général baron FAVEROT DE KERBRECH INSPECTEUR GÉNÉRAL PERMANENT DES REMONTES EN FRANCE Orné de 32 planches en chromolithographie d'après les aquarelles de M. Samokisch et de M. Bounine et de 70 photogravures d'après les dessins de M. Samokisch PARIS LIBRAIRIE AGRICOLE DE LA MAISON RUSTIQUE 2 6, RUE JACOB, 2 6 A SON EXCELLENCE M. le Comte VORONTZOW-DAGHKOW DIRECTEUR GÉNÉRAL DES HARAS ET MINISTRE DE LA COUR IMPÉRIALE DE RUSSIE HOMMAGE DES AUTEURS LETTRE DU GÉNÉRAL BARON FAVEROT DE KERBRECH , INSPECTEUR GÉNÉRAL PERMANENT DES REMONTES EN FRANCE A MONSIEUR LE DOCTEUR L. DE SIMONOFF Monsieur le Docteur, Je viens de lire avec le plus vif intérêt les épreuves de l'ouvrage que S. E. M. Jean de Moerder et vous allez publier sur les chevaux de V ancien et du nouveau monde, et je m'empresse de vous remercier de votre communi- cation. Recevez aussi mes félicitations les plus sincères pour la conscience avec laquelle vous avez étudié les diverses races chevalines de la France, de l'Angleterre, de l'Allemagne et des autres pays. Votre livre contient sur celles de la Russie des rensei- gnements d'autant plus curieux qu'ils sont absolument nouveaux pour la plupart des Français , et il permet de VIII se faire une idée des immenses ressources de toute na- ture que renferme votre grand pays. Les portraits en noir et en couleurs qui accompagnent le texte donnent de la vie à vos descriptions et en démon- trent l'exactitude en parlant aux yeux. C'est certainement la plus complète collection de ce genre qui ait jamais été ofjerte au public. Votre remarquable étude, qui s'étend à tous les peuples civilisés, sera consultée avec fruit par les cavaliers et les érudits de toutes les nations. Je suis heureux, Monsieur le Docteur, de saisir cette occasion pour vous renouveler l'assurance de mes sentiments très distingués. Gal FAVEROT. Paris, 19 mars 1894. NOTE DES AUTEURS Le présent ouvrage n'a pu être mené à bonne fin que o-râce à la haute protection du Directeur général des haras de l'Empire de Russie, Son Excellence le Comte Voron- tzow-Dachkow, ministre de la Cour Impériale. Sans cette protection, nous n'aurions pu ni rassembler une collection aussi complète de portraits des différentes races chevalines russes, ni obtenir plusieurs détails les con- cernant, ni avoir des renseignements nécessaires des ad- ministrations des haras étrangers. C'était donc un devoir bien naturel pour nous de nous adresser à Son Excellence le Comte Vorontzow-Dachkow, afin qu'il voulût bien nous autoriser à lui dédier notre tra- vail, et à le placer sous son haut et bienveillant patro- nage. Nous nous croyons tenus d'exprimer publiquement toute notre gratitude à Son Excellence le Baron Frederichs, grand écuyer de Sa Majesté, pour son concours gracieux. Nous nous permettons aussi de remercier chaudement M. P. Plazen, Directeur des haras en France, et M. le gé- néral baron Faverot de Kerbrech, Inspecteur général per- manent des remontes, pour l'accueil favorable qu'ils ont bien voulu faire à notre travail, ainsi que M. H. Vallée de Loncey, dont les conseils amicaux ont beaucoup facilité nos études sur les races chevalines françaises. Nous adressons nos remerciements sincères aux ad- ministrateurs des Imprimeries Lemercier pour la bonne exécution des planches coloriées, et à MM. Rougeron, Vignerot et G 2 M S £ TYPES ET RACES DE CIIEY.UX. 17 Le cheval de Pinzgau est représenté par la figure 12. Sa taille est de lm,65 à lm,70; sa tête est surtout caractéris- tique pour le type : elle est lourde, charnue et massive, avec une prédominance très visible de la face sur le crâne. Les Fig. 12. — Cheval de Pinzgau, étalon à robe tigrée. D*après la photographie faite au concours hippique de Tienne. yeux sont petits, l'encolure courte et épaisse, le garrot bas , les épaules raides , le dos long et légèrement concave (ensellé, la croupe avalée et double, avec la queue attachée bas; les membres vigoureux, les sabots larges, mais pas fragiles. La robe est le plus souvent tigrée, pie, noire ou LE CHEVAL. 18 LE CHEVAL EN GENERAL. baie avec de grandes taches blanches sur les côtés et sur la croupe; les chevaux gris avec la tête, les membres, la cri- nière et la queue noirs ne sont pas rares non plus. Dans les chevaux belles (flamands, ardennais et au- très), dans les boulonnais et les percherons, dans les che- vaux de gros trait danois, anglais et autres, les indices du type occidental sont visibles dans leur corps généralement massif, leur grande taille, dans les dimensions et les formes de leur squelette, leur croupe double et avalée. Mais dans tous ces chevaux on remarque déjà l'influence du croi- sement avec le cheval oriental, influence qui se traduit prin- cipalement par la forme plus noble de leur tête, surtout chez les percherons et les ardennais. Ce qui frappe le plus l'observateur attentif dans le cheval de Pinzgau, c'est juste- ment la conformation originale de sa tête, tout à fait diffé- rente de la tête du type oriental. Le type oriental. Nous avons déjà dit que les chevaux du type oriental pur sont encore nombreux. Le premier rang parmi eux appar- tient sans contredit à la noble race arabe, non seulement à cause de ses hautes qualités physiques et morales, mais aussi parce qu'elle a été la souche principale de toutes les autres races nobles. La taille du cheval arabe n'est pas grande : de lm,4S à lm,55. Mais ce qui distingue le noble cheval arabe, c'est l'é- légance, les belles proportions, l'harmonie de ses formes. Sa tête petite, sèche, au front large, au museau fin et aux na- seaux dilatés, aux yeux grands, suffisamment écartés et pleins de feu, aux oreilles petites, pointues et mobiles, est le modèle TYPES ET RACES DE CHEVAUX. 19 de ce qu'on appelle « tête noble ». Le profil antérieur de la tête est ordinairement droit ou légèrement camus, c'est-à- dire avec une légère dépression sur le chanfrein (1). L'enco- lure longue, bien arquée, fermement dessinée et ornée d'une crinière soyeuse ; le garrot haut et sec ; le rein court, mais large; le dos droit ou légèrement ensellé ; la croupe longue et aussi droite, avec une queue attachée haut et admirable- ment portée ; les épaules longues et obliques ; la poitrine pro- fonde; les membres très secs, comme ciselés en acier, avec les os durs et compacts, les articulations larges, les muscles et les tendons bien dessinés ; les pieds dégarnis de fanons , les sabots petits et très solides ; la peau tellement fine que l'on voit à travers son épaisseur le réseau des vaisseaux sanguins et des nerfs ; les poils ras et luisants ; la robe gris, alezan, bai, plus rarement blanc ou noir et jamais pie; les mouvements souples et élégants ; le caractère très doux. La résistance à la fatigue et à la faim est très grande : on dit que le cheval arabe peut courir d'une traite 28 et même 48 heures, sous un soleil brûlant, sans boire ni manger. Mais toutes ces belles qualités sont loin d'être l'apanage de tous les chevaux nés en Arabie. La plupart des chevaux élevés en ce pays sont moins nobles et beaucoup d'entre eux sont tout à fait ordinaires. C'est le plateau de Nedjed, situé en Arabie centrale, qui, d'après Pa /grave (2), doit être consi- déré comme le berceau des plus nobles représentants de la race arabe ; et il croit que le nombre de ces chevaux est très limité, ne dépassant pas 5.000 têtes, et peut-être est encore (1) Le chanfrein est la partie de la tète qui s'étend du front aux naseaux. (2) G. Pair/rave est un officier anglais qui, il y a trente ans, sous le nom et le costume d'un pèlerin oriental, a eu l'occasion de pénétrer dans les haras d'un des plus puissants chefs des Wahabites, tribu arabe habitant dans la partie centrale de l'Arabie, le Nedjed. 50 LE CHEVAL EN GENERAL. moindre. Ces chevaux sont élevés exclusivement clans les haras de riches chefs de tribus et ne sont jamais vendus hors du pays. Ils n'arrivent donc jamais en Europe; et parmi les Européens il n'y a que quelques rares voyageurs, comme Pal- grave, qui les ont vus. Quelques exemplaires cependant, mais de qualité inférieure , sont de temps en temps envoyés , comme présents, en Perse, en Egypte et à Constantinople. Les chevaux arabes que l'on achète pour les haras euro- péens proviennent ordinairement des troupeaux des Arabes nomades qui, à certaines époques de l'année, quittent l'inté- rieur du pays et s'approchent des endroits visités par les Européens. On cite surtout la tribu Anazeh, que l'on ren- contre parfois non loin des limites de la Syrie et de la Pales- tine, comme possédant des chevaux superbes : au dire de quelques voyageurs, ils ne le cèdent en rien aux chevaux du Nedjed et peut-être même leur sont supérieurs. C'est aux Arabes de cette tribu que les Anglais , pendant la guerre de Crimée, achetèrent les chevaux pour la remonte de leur cavalerie. Beaucoup de ces chevaux ont été ramenés en Angleterre. Les Anglais ont été en général contents de leur acquisition, mais ils n'en ont pas été enthousiasmés. Donc, il n'est pas du tout facile d'acquérir, même pour un gros prix, un cheval arabe véritablement bon, et bien des chevaux arabes qui se trouvent dans les haras européens n'appartiennent pas aux représentants les plus nobles de cette race loin de là! Beaucoup d'échecs dans les essais de régénération des races indigènes par le sang arabe ne s'ex- pliquent-ils pas par l'infériorité des reproducteurs emplovés? D'un autre côté, il ne faut pas oublier linlluence du chan- gement de climat et des conditions d'élevage en général. Le cheval arabe est l'enfant du désert, né et élevé sous un soleil brûlant, dans l'air sec; et il est facile à comprendre que, TYPES ET RACES DE CHEVAUX. 21 transporté en Europe, dans des conditions de sol et de climat essentiellement différentes, il subit peu à peu les transforma- tions correspondantes dans sa constitution et dans ses quali- tés morales. Voilà pourquoi les chevaux pur sang arabes nés Fig. 13. — Cheval arabe pur sant et élevés dans les haras européens, perdent après quelques générations et même assez vite, beaucoup des qualités qui dis- tinguaient leurs ancêtres. Avant tout, s'en va précisément la sécheresse extraordinaire de leurs formes, et avec elle la lé- gèreté de mouvements et la résistance à la fatigue et à la faim. O - La figure 13 représente le cheval arabe du désert, et la 22 LE CHEVAL EN GENERAL. planche II donne le portrait colorié d'un cheval arabe né et élevé au haras du comte Potocky, en Pologne russe. Ils sont beaux tous les deux et se ressemblent sans contredit ; mais on voit tout de suite qu'il y a entre eux aussi beaucoup de dif- férences, précisément dans le sens que nous avons indiqué. Le pur sang anglais , malgré le temps , a conservé beau- coup de ses ancêtres orientaux, et par ses formes rappelle le cheval arabe, mais plutôt le cheval de la planche II que celui de la figure 13. La finesse des formes acquise par l'en- traînement est d'un genre tout à fait différent; elle estle résul- tat de la maigreur et non pas de la sécheresse naturelle de sa constitution. Cette maigreur communique au pur sang- anglais une légèreté et une rapidité extraordinaires pour les courses à petites distances ; mais elle lui ôte la force néces- saire pour résister à la fatigue prolongée. Dans les pays où le sol et le climat ressemblent plus à ceux de l'Arabie, les qualités essentielles des chevaux arabes se conservent plus ou moins intactes. Tels sont, par exemple, les chevaux des Arabes habitant le Sahara (mais pas les che vaux du littoral de l'Afrique : voir plus bas). Dans l'empire russe, ce sont les steppes du sud-est et surtout ceux de la Sibérie méridionale qui sont propices à l'élève du cheval arabe. Dans ces pays, même les métis produits par le croi- sement des étalons arabes avec les juments indigènes con- servent les traits caractéristiques du type arabe , notamment la sécheresse des formes. Le cheval de Téké province du Turkestan russe), représenté figure 25 et planche XIII, en donne une illustration instructive. En Europe occiden- tale, les contrées du sud sont sans doute plus convenables pour l'élevage du cheval arabe que celles du nord. Les che- vaux du midi de la France, les navarrins et même les lan- dais, par exemple, portent jusqu'à présent le cachet du TYPES ET RACES DE CHEVAUX. 23 type arabe, dont ils sont issus il y a déjà plusieurs siècles. (Voir les figures 55, 56 et 57. Le plus proche parent de l'arabe est le cheval persan. On croit même crue le cheval arabe provient du persan. Dans tous les cas, le croisement des deux races en Perse est si fré- Fig. 14. — Khamide, étalon persan; 10 ans; taille im,53 ; gris-clair légèrement pommelé. Des écuries Impériales à Saint-Pétersbourg. D'après la photographie faite par le Docteur L. Simouoff. quent que leur parenté est hors de doute. Les différences qui existent entre elles sont très insignifiantes : la tète du cheval persan est peut-être un peu plus étroite et plus al- longée , l'encolure plus élevée , les membres et le corps en général plus longs que ceux du cheval arabe. Mais ces dif- férences, peu importantes en elles-mêmes, sont loin d'être 24 LE CHEVAL EN GENERAL. constantes, et souvent il est difficile, même à un connaisseur, de dire s'il a devant lui un cheval arabe ou un cheval persan. Dans les chevaux persans représentés par la figure 14 et la planche III, les signes de la race persane indiqués plus Fig. ir>. — Kif-Kif, étalon barbe du Sahara. Premier prix à l'Exposition internationale de 1878. Nombreuses primes pour les courses d'obstacles (en Algérie). D'après la photographie faite par J. Delton ^Photographie hippique). haut sont assez visibles, et cependant tous les connaisseurs non prévenus les prenaient pour les chevaux arabes. Mais en Perse, comme en Arabie, il n'y a que peu de che- vaux de la race noble; ce sont les chevaux des haras du Shah et de riches propriétaires habitant dans les parties de la Perse "S LES CHEVAUX DU TYPE RUSTIQUE. 73 zow-Dachkow, d'améliorer ou plutôt de rétablir nos bitugues avec le sang des chevaux danois, a toutes les chances de réus- sir. Ceux qui ont vu les chevaux amenés pour cela du Dane- mark, seront d'accord avec nous : tellement ces chevaux rappellent les bitugues par leur stature et leurs formes. Et il n'y a là rien d'étonnant, car la race bitugue est proche pa- rente de la race danoise. Gomme nous l'avons dit plus haut, les bitugues sont issus du croisement des chevaux indigènes de paysans avec les chevaux hollandais et les trotteurs d'Or- low, deux races qui contiennent une bonne dose de sang danois. Il est probable même que les chevaux danois ont pris une part plus immédiate dans la formation de la race bi- tugue, car parmi les chevaux hollandais qui au temps de Pierre le Grand ont été amenés dans ce but de l'étranger, il y avait aussi des chevaux danois. Du reste, pour se convaincre de l'affinité du cheval danois avec le bitugue, on n'a qu'à com- parer les figures 26 et 72 et la planche XVI qui représentent les portraits iidèles de deux bitugues et d'un cheval danois. On peut rencontrer les bitugues aux mêmes foires où l'on vend les trotteurs de haras (voir pages 95-96). Les chevaux de Viatka et d'Obva. On donne le nom de viatka s aux chevaux petits de taille, mais robustes, intelligents et très résistants, qu'on élève sur les bords des fleuves Kama et Obva (un affluent de Kama dans les provinces de Viatka, de Perm et dans la partie septentrionale de la province de Kazan. Cette race est issue du croisement des chevaux indigènes avec les kleppers esthoniens , qui furent transportés dans ces con- trées sous les refîmes d'Alexis Mikhaïlowitch et de Pierre le LE CHEVAL. 10 74 LES CHEVAUX RUSSES. Grand ; plus tard le sang des chevaux finois y fut aussi mélangé. Les viatkas, d'une taille moyenne de lm,42, sont forts et bien proportionnés; leurs membres sont robustes, leurs sabots solides; leur apparence est assez belle, leur naturel doux et obéissant; leurs allures rapides. Voir la planche XVII.) Les viatkas élevés sur les bords de l'Obva sont connus sous le nom à'obvinkas, et ceux de la province de Kazan s'appel- lent kazankas. Les meilleurs de tous sont les obvinkas, plus hauts de taille. La taille des kazankas est au contraire plus petite : de lm,25 à lm,35. Outre les provinces nommées plus haut, on vend les viatkas aux foires des provinces voisines de Simbirsk, de Samara et de Penza. Les chevaux de Mézen. Le prince Galitzine, exilé en 1711 à Pinéga, ville de la province d'Arkhangel, y transféra des environs de Moscou son haras de chevaux. Les paysans qui habitaient le long- dès rivières Pinéga et Mézen profitèrent des étalons de ce haras ; et c'est ainsi qu'il s'est formé ici une race améliorée de chevaux indigènes, connue sous le nom de race de Mé- zen. Il y a cependant des hippologues qui croient que celle race a été produite principalement par les étalons danois, envoyés dans la province d'Arkhangel, en 1768, par ordre de l'impératrice Catherine 11. Les chevaux de Mézen étaient de I aille moyenne (environ lm,50), se distinguaient par leur robuste constitution et leurs bonnes allures; par leur extérieur, ils rappelaient les che- LES CHEVAUX DU TYPE RUSTIQUE. 75 vaux finois ou ceux de Viatka. Mais les chevaux de cette race, abandonnés à eux-mêmes, ont été si souvent mélangés avec les chevaux ordinaires des paysans, qu'ils sont devenus peu à peu plus petits de taille et se sont abâtardis à tel point qu'ils ont perdu tous les traits caractéristiques de la race. A Saint-Pétersbourg, surtout pendant l'hiver, il arrive beaucoup de chevaux de la province d'Arkhangel, mais il est presque impossible de trouver parmi eux des chevaux typiques de l'ancienne race. Les kleppers esthoniens. On les élève en Esthonie et dans la partie esthonienne de la Livonie, sur les îles de Dago et d'Œsel. L'origine de cette excellente race de chevaux n'est pas bien connue, mais on suppose qu'elle a été formée par le croisement des chevaux indigènes avec les chevaux orientaux, principalement avec les étalons arabes, qui ont été amenés en Allemagne pendant les croisades par les chevaliers allemands, et de là se sont répandus dans les provinces baltiques Tex-Livonie). Et réellement les indices de l'influence du sanç- oriental existent jusqu'à présent dans la forme gracieuse de la tête, et dans les membres secs du klepper. La tète est ordinaire- ment jolie, petite et sèche, avec un large front et des yeux vifs; l'encolure est épaisse, attachée assez bas et séparée par une dépression du garrot, qui est suffisamment long et élevé; la poitrine est large, le dos court, presque droit; le rein solide, la croupe large, légèrement avalée, avec une queue épaisse, attachée ni trop haut, ni trop bas; les mem- bres secs avec les muscles et les tendons distinctement mar- qués; les paturons courts, les sabots solides. La peau est 7G LES CHEVAUX RUSSES. fine, les poils sont assez longs et touffus en hiver, courts et lisses en été. Les couleurs de la robe sont assez variées, mais le plus souvent claires : isabelle, alezan, bai, etc. D'après la taille on distingue les kleppers et les doppel- Fig. 27. — Klepper esthonien. D'après la photographie faite spécialement pour l'ouvrage. kleppers (c'est-à-dire les kleppers simples et les kleppers doubles). Ces derniers sont plus hauts que les premiers ; leur taille est d'environ lm,50 et même plus; celle des premiers est ordinairement de lm,33 à lm,38 et n'excède pas lm,42. Les très petits kleppers sont connus en Russie sous le nom de poneys esthoniens. Les kleppers se distinguent par leur bon naturel, leur intelligence, leur aptitude à supporter tous LES CHEVAUX DU TYPE RUSTIQUE. 77 les climats et par leur grande résistance. Ils ont de très bon- nes allures; plusieurs sont de vrais trotteurs. Pendant les dernières années le nombre de vrais kleppers a considéra- blement diminué, d'une part, par suite de la grande exporta- tion, et d'autre part à cause de l'appauvrissement des paysans des provinces baltiques et des croisements avec les races in- férieures du voisinage. A présent on trouve les meilleurs kleppers sur l'île d'Œsel et dans le haras de Targuel, près de la ville de Pernau. On vend les kleppers aux foires de Mi- tava, de Riga, de Darpat et autres villes des provinces bal- tiques. (Voir la figure 27 et la plancheXVIÏI.) Les chevaux finois. L'origine des chevaux de cette race, appelés chez nous finkas ou chvedkas, est encore moins connue que celle des kleppers esthoniens. Bien des connaisseurs et même la plu- part d'entre eux croient que les chevaux finois ne représen- tent qu'une variété des kleppers esthoniens; d'autres pensent, au contraire, qu'il n'y a rien de commun entre les kleppers esthoniens et les chevaux finois, et que ces derniers descen- dent des chevaux amenés en Finlande de la Suède. Selon nous , la ressemblance entre le cheval finois et le klepper esthonien est au moins aussi grande que celle qui existe en- tre le klepper et le cheval de Viatka, dont la consanguinité est hors de doute. Pour s'en assurer, il suffit de comparer les figures 27 et 28 et les planches XVII, XVIII et XIX. Nous croyons donc que la parenté des chevaux finois avec les kleppers est très probable, ce qui n'exclut pas cependant la possibilité de l'origine suédoise de leurs ancêtres. Aussi bien 78 LES CHEVAUX RUSSES. que les kleppers et les viatkas, les chevaux finois ne sont pas grands détaille : de lm,42 àlm,o3. Ils sont d'une cons- titution robuste et très musculeux ; leur tête est assez grande et légèrement busquée; leur encolure courte, épaisse, plan- tée assez bas et très disposée à engraisser; la poitrine pro- Fig. 28. — Cheval finois. D'après la photographie faite par le Docteur L. Simonoff. fonde, mais moins vaste que celle des kleppers; le dos est aussi droit, la croupe large et moins avalée ; le toupet et la crinière aussi bien garnis et longs. Les membres vigoureux, mais parfois un peu trop longs ; ceux de devant quelquefois ne sont pas assez écartés l'un de l'autre (en d'autres termes l'a- plomb de devant est un peu trop serré). Les sabots de moyenne grandeur et très solides; les fanons ordinairement LES CHEVAUX DU TYPE RUSTIQUE. 79 longs et touffus. Les poils assez grossiers et longs, surtout en hiver. La robe est le plus souvent alezan, bai-clair, ou isabelle avec une raie de mulet le long du dos. Leurs allures sont sûres; le trot est souvent rapide, mais ordinairement court (pas large). De tous les chevaux finois, les plus estimés sont ceux de Karélie, surtout pour leur taille qui dépasse souvent lm,55 ; sont très bons aussi les chevaux de Kuopio et de Tavastgouse. (Voir la figure 28 et la planche XIX.) Beaucoup de chevaux finois sont amenés annuellement dans la province de Saint-Pétersbourg et surtout à Saint- Pétersbourg même ; on les rencontre aussi souvent dans la province de Pskow, par exemple à la foire de Petchori. En Finlande les foires les plus connues sont celles de Yi- borg, de Kuopio et de Saint-Michel. Les chevaux j mouds. Cette race, originale et utile, existait jadis dans tou- tes les provinces du nord-ouest de la Russie, où elle s'est formée, selon la tradition, du croisement des chevaux indigènes avec les kleppers esthoniens. Mais il y a déjà longtemps que cette race a commencé à disparaître petit à petit, et maintenant elle n'existe que dans les districts de Rossieni, de Kovno, de Ghavli et de Telchi de la province de Kovno. Les chevaux j mouds ont en général bonne mine. Leur corps trapu et robuste repose sur des membres rela- tivement courts et gros, mais secs et nerveux, avec des sabots bien formés et solides. La tête est petite, à profil an- térieur droit, avec des joues charnues, les yeux à fleur de tête et les oreilles courtes et extrêmement mobiles. L'en- 80 LES CHEVAUX RUSSES. colure est épaisse mais plantée assez haut, surtout chez les étalons. La poitrine large, les côtes suffisamment arron- dies, le dos droit, la croupe bien modelée; la queue bien garnie et attachée assez haut, la crinière et le toupet épais et longs. Les poils sont plus longs en hiver qu'en été. Les robes variées : alezan, bai, bai-brun, souris, etc.. La taille de lm,33 à I m,51. Ces chevaux sont vigoureux, d'une grande endurance, et d'un caractère doux et docile. C'est seulement depuis ces derniers temps qu'on com- mence à apprécier les bonnes qualités du cheval jmoud. Les essais qu'ont faits récemment les princes Oguinskis pour améliorer cette race par le choix soigneux des reproduc- teurs ont été très heureux et ont donné de bons résultats en relativement peu de temps. On a obtenu des chevaux plus vigoureux, plus beaux d'aspect et propres non seulement pour les besoins de la campagne, mais aussi pour l'atte- lage de ville. (Voir planche XX.) On vend les chevaux jmouds aux foires et aux marchés des districts de la province de Kovno, que nous avons nommés plus haut ; parmi les foires les plus riches en che- vaux sont celles de Yanichki (district de Ghavli), de Ros- sieni (ville), de Ghkoudi, Pikeli et de Ghileli (tous les trois dans le district de Rossieni). Les chevaux de paysans. La plupart des chevaux appartenant aux six races rus- tiques que nous venons de décrire font aussi partie des chevaux de paysans, car ils sont élevés et employés prin- cipalement par ces derniers. Mais ces chevaux ont des traits caractéristiques qui les distinguent entre eux et des au- tres chevaux, et qui ont permis de les grouper en races LES C HEVAUX DU TYPE RUSTIQUE. 81 .'■> A. LE CHEVAL. 11 82 LES CHEVAUX RUSSES. ]>lus ou moins typiques. Quant aux chevaux que nous com- prenons sous le nom collectif de clievaux de paysans, c'est un mélange des plus varié de chevaux qui n'ont de com- mun entre eux que le fait de leur élevage par les paysans et d'être la propriété de ces derniers. Fig. 30. — Un lomovik, cheval de paysan amélioré du centre de la Russie. D'après la photographie faite par le Docteur L. Simonoff. Parmi les 19 millions de chevaux rustiques, il n'y a pas plus de un million, probablement moins, de chevaux ap- partenant aux six races mentionnées plus haut. Le reste, c'est-à-dire près de 18 millions de chevaux de la Russie d'Europe, appartiennent à ce mélange incohérent que nous avons appelé les chevaux de paysans. Cependant, outre le lait de leur élevage par les paysans, la plupart de ces clic- LES CHEVAUX DU TYPE RUSTIQUE. 83 vaux ont encore un lien commun dans leur origine plus ou moins récente des chevaux de steppes. Cette transforma- tion des chevaux de steppes en chevaux rustiques se pro- duit en Russie continuellement depuis des temps immé- Fig. 31. — Cheval de paysan de la province de Tambow. moriaux, s'alimentant toujours de l'Orient, c'est-à-dire du côté de la Sibérie. Dans les époques ordinaires cela se fait peu à peu, mais après les épizooties ou les grandes di- settes qui déciment les animaux domestiques par milliers, les chevaux de steppes arrivent dans les campagnes russes par grandes quantités à la fois, pour devenir aussitôt, sans 84 LES CHEVAUX RUSSES. transition, des bêtes de trait et de charrue. Ainsi après la dernière famine de 181) J , le gouvernement russe a été obligé d'acheter pour les paysans plusieurs dizaines de mille de chevaux kirghizes. Les chevaux de paysans ont donc beaucoup de traits Fig. 32. — Cheval de paysan de la province de Pollava. D'après la photographie faite spécialement pour l'ouvrage. communs avec les chevaux de steppes. Ainsi que ces der- niers, ils sont petits de taille et remarcpiables par leur ré- sistance au climat, à la faim et à la fatigue. Leur genre de vie ne diffère pas non plus beaucoup de celui de leurs congénères de steppes. Tant qu'il existe encore quelques restes d'herbe dans les pâturages, la plupart d'entre eux se nourrissent exclusivement d'herbe fraîche. Mais comme les paysans ont beaucoup moins de pâturages, et que la qua- LES CHEVAUX DU TYPE RUSTIQUE. 85 lité de ces pâturages est bien inférieure à ceux des peu- ples nomades, la nourriture de leurs chevaux en été est beaucoup moins abondante et moins bonne que celle des chevaux de steppes. Il est vrai que les chevaux de pay- Fig. 33. — Cheval de paysan de Volhynie. D'après la photographie faite par le Docteur L. Simonoff. sans ne sont pas obligés de chercher l'herbe sous la neige pendant l'hiver; mais aussi leur nourriture hivernale ne con- siste souvent qu'en paille, quelquefois déjà pourrie. En gé- néral, les chevaux de paysans sont habitués dès l'enfance à 8G LES CHEVAUX RUSSES. supporter la faim, le froid et toutes sortes de misères. Quand le paysan devient plus riche, ses chevaux s'embellissent en même temps ; ils engraissent, se développent en largeur et en hauteur sous la seule influence d'une meilleure nourriture et d'un peu plus de soins. Et si, de plus, le paysan pro- Fig. 3'i. — Cheval de paysan de la Pologne russe. D'après photographie. fite, pour la reproduction, des étalons de plus grande taille, pris dans les écuries de monte ou dans les haras privés ou de la couronne, il produit des chevaux améliorés connus sous le nom des lomoviks. La figure J2\) représente un des chevaux ordinaires de paysans de la province de Novgorod; la figure 30, un cheval de paysan amélioré, un lomovik; la figure 31, h h cheval de paysan amélioré, de la province de Tambow; LES CHEVAUX DU TYPE RUSTIQUE. 87 la figure 32, un cheval de paysan petit russien, de la pro- vince de Poltava; la figure 33, un cheval de la province de Volhynie; la figure 34, un cheval de paysan polonais. Malgré cette différence dans leurs formes, et peut-être précisément grâce à cette variété, les chevaux de paysans offrent un élément important, dont , sous l'influence de. la nourriture, des soins et d'une sélection intelligente, on peut obtenir des chevaux pour les usages les plus différents. Les bitugues et tous les chevaux de races rustiques précé- demment décrites sont d'une origine semblable ; ils sont issus tous du croisement des chevaux ordinaires de paysans avec des chevaux de races améliorées. Les chevaux de paysans ne sont point à dédaigner, ne serait ce qu'à cause de leur nombre. L'administration des haras de l'Etat attache une attention particulière à l'amélioration des chevaux de paysans au moyen des étalons des écuries de monte , qui sont fondées maintenant partout dans la Russie d'Europe (voir pages 93-94). CHAPITRE VI. LES CHEVAUX DE HARAS. Notions historiques. La Russie, riche en prairies, a toujours présenté de grands avantages pour l'élevage des chevaux. Nos ancêtres, de- puis un temps immémorial, même à l'époque où on les ap- pelait encore Scythes, s'occupaient de l'élevage des chevaux. Mais l'élevage d'alors était sans doute tout à fait primitif, semblable à celui qui existe maintenant chez les Kirghizes no- mades de Sibérie. Quand les Slaves passèrent de l'existence nomade à la vie sédentaire et surtout après l'arrivée en Russie des Variagues, la manière d'élever les chevaux a dû subir des changements conformes au nouveau genre de vie ; elle est devenue pareille à celle qu'on applique maintenant aux chevaux classés par nous dans la troisième catégorie, c'est-à-dire dans la catégorie des chevaux dont l'élevage fait la transition à l'élève régulière de haras (voir page ;>."> . Mais on ne voit les premiers indices d'un élevage régulier ^'v • s- ~~~~ j :* """ «) < © * = ta* 3 p s S "-* * ? 1 "5 CQ « 3 y c^ LES CHEVAUX DE HARAS. 105 membres sont devenus trop longs, et en général il s'est formé un ensemble qui rappelle souvent plutôt un cheval de course qu'un trotteur de l'ancien type. Pour nous, c'est principalement le résultat de l'abus du pur sang anglais clans la reproduction. Il faut cependant espérer que chez nous, comme en Angleterre, il se fera sous ce rapport une réaction salutaire et que les propriétaires des haras revien- dront tôt ou tard aux principes d'élevage indiqués par le comte Orlow. Les chevaux de selle de haras. Le même comte Orlow-Tchesmenski fut le créateur d'une très belle race de chevaux de selle, race qui a reçu aussi son nom. Parmi les chevaux que le comte fit venir de l'Orient se distinguaient, comme nous l'avons déjà dit, deux étalons ara- bes : le blanc Smétanka et l'alezan Saltan I... Smétanka est devenu la souche de la race de trotteurs; de Saltan I est issue la race de chevaux de selle. De Saltan I et d'une jument arabe naquit Saltan II, un étalon bai, père du cé- lèbre Svirépoï II, sur le dos duquel le comte faisait ses promenades à Moscou les jours de courses. De Svirépoï II et d'une jument anglo-arabe naquit Achonok, dont le fils, Yacluna I h la robe baie dorée (né en 1816), a joué dans la création de la race de selle le même rôle que Bars /dans celle de la race de trotteurs; il fut pendant bien des années le principal reproducteur du haras de Khrenovoyé, et laissa après lui une nombreuse génération de chevaux ayant les qualités caractéristiques de chevaux de selle d'Or- low. Cette race a été formée principalement par le croi- 1E CHEVAL. 14 106 LES CHEVAUX RUSSES. sèment du sang arabe avec le sang anglais; mais, en outre, elle a eu aussi en elle, du sang des trotteurs d'Orlow (et par conséquent une certaine dose de sang danois et hol- landais) et un peu de celui des chevaux indigènes de la Petite Russie. Fig. 38. — Achonok, étalon de la race de selle orlowe. D'après le dessin gravé île M. Svertchkoff. Les chevaux de selle de la race orlowe étaient de taille moyenne (environ lm,60) et d'une très belle apparence. Se- lon l'opinion des connaisseurs, ils représentaient le type su- périeur de chevaux de manège. Ils avaient la tête gracieuse du cheval arabe avec de petites oreilles et des yeux magnifi- ques ; la poitrine assez spacieuse, le dos droit, le rein vigou- reux, la croupe bien développée, avec une queue admira- blement portée; les cuisses fortes ; les membres fins, secs LES CHEVAUX DE HARAS. 107 et musculeux; les paturons bons, les sabots durs et solides; les mouvements très gracieux et élégants, le caractère doux, mais plein de feu. Sur la figure 38 est représenté Aclwnok, le père de YacJima I. Fig. 39. — Fenclla, jument de la race de selle rosloptchiiie. D'après le dessin gravé de M. Svertchkoff. Un autre célèbre haras de chevaux de selle fut fondé par le comte Rostoptchine en 1802, c'est-à-dire peu de temps après la fondation du haras du comte Orlow-Tches- menski. D'abord le haras du comte Rostoptchine fut installé aussi aux environs de Moscou, dans le village Voronovo; un peu plus tard il fut transféré dans la province d'Orel et en 108 LES CHEVAUX RUSSES. 1815 dans le village d'Anne nkovo, de la province de Voro- nège. La race des chevaux de selle de Rostoptchine provenait de quatre étalons arabes : Kadi, Dragoute, Kaïmak et Ri- chane, achetés en Arabie aux environs de la Mecque, et des juments anglaises pur sang, choisies par des connaisseurs. Fig. 40. — Landiche, étalon de selle, demi-sang, du haras de I. OfrossimofU, 7 ans, taille lm,58; alezan. D'apivs la photographie faite au concours hippique, à Samt-rétersbourg. Plus tard on employa aussi, au haras, des étalons persans, turcs et anglais (parmi ces derniers le célèbre Piker). Les chevaux de race rostoptchine se faisaient aussi remarquer par l'élégance de leurs formes et par leurs mouvements LES CHEVAUX DE HARAS. . 10(J distingués, mais ils étaient plus petits de taille que ceux de race orlowe;ils atteignaient rarement lm, 56 ; la majorité ne surpassait pas lm,48 à lm,51. Sur la figure 39 est représenté un cheval de selle de la race rostoptchine. Ainsi qu'il a été dit plus haut, le haras de Khrenovoyé du comte Orlow et celui du comte Rostoptchine furent achetés en 1845 parle gouvernement, et les chevaux du haras Ros- toptchine ont été transférés dans le haras de Khrenovoyé. Dès lors la race rostoptchine fut croisée avec celle d'Orlow et, étant moins constante, se fondit, pour ainsi dire, en cette dernière. Quand la section des chevaux de selle fut supprimée au haras de Khrenovoyé, tous les chevaux de cette catégorie furent transférés au haras de Limarevo (voir page 93). Mais on ne voulut plus maintenir la race pure d'Orlow ; on avait en vue d'autres idéals, et à présent on ne trouve guère de chevaux typiques de cette race. On voit donc que les anglo-arabes furent créés chez nous déjà depuis environ un siècle, et que la méthode si préconisée maintenant par les Français pour la formation des chevaux de selle à l'aide des croisements alternatifs avec les pur sang anglais et arabe ou des croisements sim- ples avec les anglo-arabes n'est pas nouvelle chez nous, car nous la suivons avec assez de succès depuis le temps d'Orlow jusqu'à présent. Achonok et Fenella, reproduits sur les figures 38 et 39, sont des anglo-arabes. Pour donner à nos chevaux de selle modernes plus d'é- toffe et surtout plus de taille, nous ajoutons au sang an- glo-arabe celui d'autres races plus volumineuses, par exem- ple assez souvent le sang de nos trotteurs. Sur la planche XXVIII est représenté un des chevaux de selle demi-sang du type nouveau : Magnat, étalon alezan 110 LES CHEVAUX RUSSES. foncé du haras de l'Etat de Strélétsk. Ce cheval est le produit du croisement du pur sang anglais avec les races arahe et turcomane ; il est moins beau que le cheval de selle orlow, mais il est plus haut de taille (lm,64) et répond mieux aux exigences modernes. La figure 40 reproduit le portrait d'un cheval de selle demi-sang du haras privé de J. Th. Ofrossimoff. Les chevaux arabes et anglais pur sang. Les haras de l'État élèvent les chevaux arabes et anglais pur sang principalement pour leurs propres besoins , dans le but de la production des demi-sang ou, par eux, de l'amé- lioration d'autres races. Les pur sang arabes se trouvent dans le haras de Strélétsk et les pur sang anglais dans ceux de Derkoul et de Yanovo. Sur la planche XXIX est représenté Kouli-Khan, étalon blanc de la race arabe, et sur la planche XXX, Middleton, étalon bai, pur sang anglais. Dans le même but, c'est-à-dire principalement pour la production des demi-sang, on élève des pur sang anglais et arabes dans certains haras privés. Sur la planche II est représentée une jument baie pur sang arabe, Arabella, du haras du comte I. A. Potocky. Les chevaux de gros trait. On peut dire que l'élevage des chevaux de gros trait n'est chez nous qu'à l'état d'essai et que la question qui en fait le point principal n'est pas encore résolue d'une façon défini- LES CHEVAUX DE HARAS. 111 tive, car jusqu'à présent on est incertain sur le type qui serait le plus utile pour la Russie. Gomme nous l'avons déjà dit, on a essayé d'élever les percherons, les sufîolks et les clydesda- les ; maintenant on s'occupe des ar dennais belges. On a essayé aussi le croisement de ces races étrangères avec nos che- vaux de gros trait, les bitugues et les lomoviks. Mais les ré- sultats obtenus clans ces derniers cas n'ont pas été non plus très heureux, non pas sous le rapport de l'apparence des individus produits, mais sous le rapport de leur aptitude aux travaux qu'on exige d'eux en Russie. Ces métis revien- nent presque aussi cher que leurs pères étrangers et sont encore trop lourds pour nos routes non pavées. La seule conclusion logique que l'on puisse tirer jusqu'à présent de toutes ces expériences mal réussies est qu'il faut revenir au type bitugue qui a eu déjà le temps de prouver sa grande utilité pour nous (voir pages 70-73, et qu'il faut se hâter de le faire, car la race va se perdre. Nous avons déjà parlé plus haut des mesures prises dans ce but par le Direc- teur en chef des haras de l'Etat, le comte Vorontzow-Dach- kow, et il faut espérer que les résultats ne se feront pas at- tendre. Parmi les haras de l'Etat c'est au haras de Khrenovoyé qu'on élève maintenant les chevaux de gros trait. Il n'y a pas longtemps on élevait aussi les chevaux de ce type au ha- ras de Derkoul. Sur la planche XXXI est représenté un étalon alezan foncé, Ladlwrse, de la race clydesdale, élevé au haras de Derkoul; sur la planche XXXII un percheron gris pom- melé, Page, du même haras. Mais en 1890 tous les chevaux de gros trait du haras de Derkoul ont été transférés au haras de Khrenovoyé. Dans les haras privés, on s'est très peu occupé jusqu'à 112 LES CHEVAUX RUSSES. présent de l'élevage de chevaux de gros trait et parmi ceux-ci presque exclusivement des chevaux de races étrangères. L'é- levage des bitugues reste toujours principalement entre les mains des paysans de la province de Voronège et en partie de celle de Tambow. La figure 26 et la planche XVI représentent deux che- vaux de la race bituffue. Celui delà planche XVI est surtout typique, car dans le cheval de la figure 26 il y a déjà, peut-être, une certaine dose de sang étranger qui lui donne un aspect plus lourd que ne devrait avoir un bitugue pur. ^ TROISIÈME PARTIE LES CHEVAUX ANGLAIS Avant d'aborder l'étude des races chevalines de la Grande- Bretagne et des autres pays qui composent l'Europe occi- dentale, nous croyons utile d'ajouter quelques observations générales à celles que nous avons déjà faites dans l'intro- duction , afin de constater encore une fois et d'une manière plus claire la différence qui existe dans l'élevage des che- vaux entre la Russie et les pays de l'Europe occidentale. Sous le nom d'Europe occidentale nous comprenons tous les pays de l'Europe à l'exception de la Russie. Le nombre des chevaux de ces pays pris ensemble ne dépasse pas 16 millions ou 16 millions et demi, c'est-à-dire qu'il atteint à peine les deux tiers des chevaux de la Russie d'Europe seule et un peu plus d'un tiers des chevaux de l'Empire Russe considéré dans sa totalité. Environ 13 millions de chevaux sont répartis, à peu près également, entre la Grande-Bre- tagne, la France, l'Allemagne et l'Autriche-Hongrie ; pour tous les autres pays de l'Europe occidentale il ne reste donc pas plus de 3 millions ou 3 millions et demi de chevaux. Nous avons déjà dit plus haut que tous les chevaux exis- tants sont probablement issus de la même source unique, LE CHEVAL. 15 114 LES CHEVAUX ANGLAIS. notamment des chevaux sauvages de l'Asie centrale (voir page 13). Mais tandis que dans l'Asie, dans l'Afrique et dans l'Europe orientale la Russie d'Europe) les différentes races chevalines qui se sont formées depuis, ont conservé les caractères principaux du type primitif, connu maintenant sous le nom de type oriental, — en Europe occidentale elles dégénérèrent en un type tout à fait à part — type oc- cidental ou norique (voir pages 15 et suiv.). C'est probable- ment sur les pâturages plantureux du littoral du continent de l'Europe occidentale que ce dernier type prit naissance et de là il se répandit dans les pays voisins. Il n'y a pas très longtemps et, peut-être encore dans le siècle précédent, il existait en Europe assez de représentants purs du type norique. Maintenant il prédomine sans doute dans tous les chevaux de gros trait, mais il n'est conservé assez pur que dans le cheval de Pinzgau (voir page 17 et fîg. 12). Sauf cette exception (qui n'est peut-être pas absolue), tous les chevaux de l'Europe occidentale sont à présent les produits du mélange plus ou moins varié entre les deux types. L'application large de ce qu'on appelle « amélioration par le croisement », d'abord avec le sang oriental, puis, sur- tout pendant la seconde moitié de notre siècle, avec le pur sang anglais, qui n'est que le sang oriental modifié, a eu pour résultat l'anéantissement presque complet des races originaires. A quelques rares exceptions près, par exemple du poney shetlandais en Angleterre, les races primitives n'existent plus dans l'Europe occidentale, et celles qui ont été créées plus tard sont si peu stables que pour les maintenir l'homme doit employer les plus grands soins. Mais le but de l'éleveur de chevaux moderne n'est pas la création ou le maintien des races ; il n'a en vue que la pro- duction des chevaux utiles, adaptés aux exigences du LES CHEVAUX ANGLAIS. 115 temps , et comme celles-ci changent continuellement avec le progrès rapide de la civilisation, — les qualités des che- vaux produits varient aussi sans cesse. C'est précisément ces caractères essentiellement utilitaires qui distinguent d'une manière si tranchée l'élevage des che- vaux dans l'Europe occidentale de celui qui prédomine en- core en Russie. En Russie, la nature à elle seule suffit encore pour satis- faire aux besoins pressants de la vie ; l'art n'y est pas encore imposé à l'homme par les nécessités urgentes de l'existence et n'y joue jusqu'à présent qu'un rôle secondaire. Dans l'Europe occidentale, au contraire, il y a déjà longtemps que la vie serait impossible sans le concours actif de l'art. Cette différence dans les conditions d'existence se fait sentir en tout et, entre autre chose, dans l'élevage des chevaux. En Russie, l'élevage régulier ou artificiel des chevaux n'est pratiqué que par les riches amateurs et par le gouver- nement qui est et a été toujours le principal promoteur de toutes les améliorations et innovations utiles. Le nombre des chevaux élevés régulièrement ne dépasse pas quelques cen- taines de mille. La grande masse, plusieurs dizaines de millions de chevaux russes sont élevés par la nature seule, sans aucune intervention de l'art ; et ce sont justement ces chevaux qui forment des races très distinctes, très caracté- ristiques et très stables à cause de leur ancienneté et du grand nombre d'individus qui les composent. En Europe occidentale, au contraire, la main sacrilège de l'homme a tout transformé, a tout plié aux besoins im- minents de la vie quotidienne. 110 LES CHEVAUX ANGLAIS. Si la Russie occupe la première place dans le monde par le nombre de ses chevaux et par la variété de ses races chevalines, l'Angleterre doit être mise à la tête de toutes les nations, en ce qui concerne l'élevage régulier des che- vaux et du bétail en général. Tout y est propice. Le sol, riche en pâturages et en produits nécessaires pour la bonne alimentation des animaux herbivores ; le climat, tempéré et très favorable au développement régulier du corps animal ; la prédilection particulière dont le cheval jouit parmi les habitants delà Grande-Bretagne, et, enfin, le génie pratique, le caractère patient et énergique des représentants de la race anglo-saxonne qui savent distinguer le but à atteindre et atteindre ce but, malgré les obstacles. Aucun peuple au monde ne mange autant de viande que les Anglais, aussi ont-ils su créer un bœuf spécial pour la viande, le Durltam, un bœuf dont le corps est si énorme et les membres comparativement si petits que l'animal en- graissé peut à peine se mouvoir. Leurs moutons, leurs porcs et même leur volaille à destination culinaire ne le cèdent en rien à leur bœuf. Si les Anglais participaient aux goûts liippophages des peuples orientaux, ils auraient eu sans doute aussi le cheval de la même espèce. Mais ce qu'ils aiment dans le cheval ce n'est pas tant la matière que la force motrice, et ils emploient tous leurs ('(Torts pour développer cette dernière dans le sens de l'usage qu'ils veulent en faire. Ils ont créé le cheval de courses — un vrai antipode du bœuf Durham par la légèreté de son corps, par la rapidité de ses mouvements et par la prédo- minance en lui, pour ainsi dire, de l'esprit sur la chair. LES CHEVAUX ANGLAIS. 117 — Pour la chasse, pour toutes sortes d'exercices, pour la selle comme pour la voiture, pour le trait léger ou le gros trait, eu un mot pour chaque emploi ils savent produire un cheval spécial. Leur fort et peut-être pourrait-on dire leur faible est précisément dans la spécialisation un peu excessive des animaux d'après leur destination. En cela ils sont l'op- posé de leurs congénères américains cpii eux, au contraire, cherchent l'universel. CHAPITRE PREMIER. ORIGINE DES CHEVAUX ANGLAIS. Les premières notions historiques que nous ayons des chevaux de la Grande-Bretagne nous viennent du temps de la campagne de Jules César dans les Iles Britanniques, 55 avant J.-C. On y parle de chevaux petits de taille, mais robustes, courageux et agiles. Les chevaux plus grands de corps et de taille furent amenés en Angleterre beaucoup plus tard, du continent européen — de la Hollande, de l'Allemagne et de la Normandie. — Un assez orand nombre de chevaux espagnols furent transportés dans la Grande- Bretagne au temps de leur grande renommée comme che- vaux de parade. Alors comme à présent, les Anglais savaient parfaitement profiter de la matière qu'ils avaient sous la main. Au moins cent ans avant la création de leur pur sang, ils surent déjà produire d'excellents chevaux appropriés aux différents usages de leur vie. Les chroniqueurs de cette époque parlent de chevaux de grande taille (1), rapides aux courses et très résistants; à la tête sèche et petite, bien que souvent assez grossière, aux yeux grands, aux narines larges, aux oreilles un peu longues, mais pointues, à l'encolure longue et droite, à la poitrine profonde et assez large, au dos horizontal et (1) Le cheval de chasse (hunier) en 1018 mesurait en moyenne 1"';G0 — lm,G4 (16 hands). ORIGINE DES CHEVAUX ANGLAIS. 119 fort, à la croupe arrondie; aux membres vigoureux, secs, bien musclés et articulés. Mais la passion de plus en plus croissante des Anglais pour les courses ne leur permit pas de se contenter d'une rapidité moyenne et les poussa à chercher à produire un cheval dont la vélocité fût hors de concours. Ce qu'ils possédaient ne suffisait pas pour atteindre ce but. On s'a- dressa à l'Orient. Avant cette époque les chevaux orien- taux n'avaient été amenés en Angleterre qu'accidentellement, par exemple par les chevaliers des croisades ; mais pendant tout le dix-septième siècle, à l'époque qui précéda immé- diatement la création du pur sang, les chevaux d'origine orientale affluèrent en Angleterre sans interruption et en grand nombre : on s'en servit pour arriver au but désiré. Vers la fin du dix-septième et au commencement du dix- huitième siècle ce but fut atteint par la création du pur sang anglais, ce cheval de course par excellence. Depuis ce moment le pur sang est devenu le pivot autour du- quel tourne principalement l'élevage des chevaux non seu- lement en Angleterre, mais aussi dans la plupart des autres pays. L'introduction en Angleterre des chevaux orientaux cessa brusquement et ces derniers devinrent même l'objet d'un certain mépris de la part des Anglais, mépris qui est sans doute injuste. Le nombre des chevaux dans la Grande-Bretagne peut être évalué approximativement à 3 millions ou un peu moins : plus de 8,5 pour 100 habitants. Pour la commo- dité de la description nous les divisons en quatre catégories : a) les pur sang; b) les chevaux d'origine mixte — presque tous demi-sang; c) les chevaux de gros trait, et d) les che- vaux de races primitives. La majorité appartient à la seconde catégorie [b). CHAPITRE II LE PUR SANG ANGLAIS. La race du pur sang anglais [thoroughbred) ne vint pas d'emblée ; elle se forma peu à peu pendant le dix-septième siècle. Les courses faisaient déjà la passion des Anglais, et les hommes qui créèrent le pur sang n'avaient pas en vue la race ; leur but unique était d'obtenir le cheval le plus propre aux courses, c'est-à-dire le plus rapide. S'il n'y avait pas de courses, il est très probable que le pur sang ne serait pas créé. L'Angleterre possédait déjà de très bons chevaux, mais ils n'étaient ni assez légers, ni assez rapides. On fit venir des chevaux de la Turquie, de l'Arabie, de la Perse et du Nord de l'Afrique, et, par des croisements entre eux et en partie avec les chevaux indigènes, on essaya d'atteindre le but, c'est-à-dire la rapidité exigée aux courses qui ser- vaient de pierre de touche. On travailla si bien que déjà vers la fin du dix-septième siècle on arriva à un résultat qui dépassa toutes les espérances : on obtint des chevaux dont la rapidité était jusqu'alors inconnue. Ces chevaux formèrent un noyau que l'on tâcha de conserver, de faire fécond et, si c'était possible, de développer même encore dans le sens de la rapidité. s c . ~ c^. '■> - — JJ- 0 5 . *ti ^ ^/ 0 ^s gj 3 -». ;-. ^ ^ as — < ""NI 1 ^ LE PUR SANG ANGLAIS. 121 Du côté de la ligne paternelle, l'origine de la race de pur sang peut être tracée nettement jusqu'aux étalons orientaux. Quant à la ligne maternelle, elle est beaucoup moins certaine ; on affirme que les premiers chevaux de la race naquirent des « juments royales » [royal mares), qui furent amenées de l'Orient (1) sous le règne de Charles II. Mais dans les pre- mières générations on trouve aussi des juments dont le pedi- gree est inconnu et dont plusieurs étaient sans aucun doute d'origine mixte. La race de pur sang n'est donc pas entièrement libre de cette tache [staùi) que les Anglais considèrent maintenant comme diffamante et qu'ils évitent à présent si soigneuse- ment. La quantité de sang plébéien qui fut ainsi infusée dans les veines de la race est néanmoins si minime , et la race elle-même fut maintenue dans la suite dans une telle pureté ," que pratiquement on peut la considérer comme parfaitement noble , aussi noble que ses ancêtres orien- taux . Parmi les étalons orientaux qui ont participé à la créa- tion du pur sang, il y avait des arabes, des turcs, des barbes et des persans. Trois d'entre eux, surtout, laissèrent une postérité glorieuse. C'étaient : le turc Byerley (Byerley Turk), l'arabe Darley Darley's Arabian) et l'arabe Godol- phin (Godolphin Arabian), et principalement les deux der- niers, auxquels remontent les pedigrees de la plupart des chevaux célèbres aux courses. L' arabe Darley était indubitablement de la souche arabe; l'origine de Y arabe Godolphin n'est pas exactement éta- blie : il était arabe ou barbe. Du turc Byerley on sait seu- lement qu'il fut capturé pendant le siège de Vienne par (lj De quels pays de l'Orient? cela reste inconnu. LE CHEVAL. 16 122 LES CHEVAUX ANGLAIS. les Turcs en 1689. Le célèbre Eclipse, né en 1764, descend par la ligne paternelle directement de Darley et par la ligne maternelle de Godolphin. Par son origine, par ses qualités physiques et morales le pur sang appartient franchement au type oriental ; mais sous l'influence d'un autre climat, d'une nourriture plus abon- dante, d'une reproduction et d'une éducation dirigées vers un but connu et choisi d'avance, ce type se modifia graduelle- ment et acquit des caractères particuliers qui sont propres à la race du pur sang anglais et la distinguent de toutes les au- tres races. Les éleveurs de la race, ayant eu en vue princi- palement les succès aux courses, tâchaient surtout de déve- lopper les qualités qui y sont le plus nécessaires : l'énergie et la rapidité. L'énergie ou « le sang », la race l'eut natu- rellement en héritage de ses procréateurs orientaux. Mais la taille, la longueur du corps et des membres de ces derniers étaient insuffisantes pour produire la rapidité désirée ; on les développa par la sélection intelligente des reproducteurs, par l'éducation et par l'entraînement. En agrandissant les di- mensions, on se gardait bien, cependant, de trop charger la musculature et le squelette, car la légèreté est une des con- ditions indispensables pour la rapidité. Finalement on créa un cheval dont les formes ressemblent beaucoup à celles d'un lévrier : le corps long et étroit perché sur quatre membres hauts et grêles, l'encolure longue, déliée et droite, la tête petite et légère. Les os du squelette aussi denses et durs que ceux du cheval arabe, mais plus minces; les muscles et les tendons forts, mais plutôt longs qu'épais. La taille du pur sang varie entre lm,58 et lm,78; la plu- part des chevaux qui se sont distingués aux courses n'a- vaient pas plus de lm,62 ; le célèbre Eclipse mesurait cepen- dant ]"',()(S. L'expérience a démontré que les chevaux de LE PUR SANG ANGLAIS. 123 trop grande taille sont souvent sujets à la pousse. La tête ordinairement petite, sèche et noble, au profil de devant droit ou légèrement busqué ; plus rarement elle est camuse ; les yeux grands, limpides, saillants, espacés et presque tou- jours entourés d'un anneau de peau privée de poils (un des signes distinctifs de la race) ; les oreilles de grandeur moyenne, attachées assez haut; les naseaux larges, mobiles, les lèvres minces. Mais en général la tête du pur sang n'a pas l'homogénéité de formation de celle du cheval arabe : même parmi les chevaux célèbres aux courses, on rencontre des têtes grandes et plutôt grossières que nobles, quelque- fois aux oreilles pendantes. L'attache de la tête à l'enco- lure est généralement bonne. L'encolure longue, déliée et droite ; on ne voit jamais les pur sang ni avec une enco- lure de cerf (renversée) ni avec celle de cygne (rouée). Le garrot long et ordinairement plus élevé que la croupe ; ce- pendant il y a des exceptions : par exemple le garrot d'E- clipse était plus bas que la croupe. Malgré la grande lon- gueur générale du corps, le dos n'est pas trop long; le plus souvent il est horizontal ou légèrement convexe. La croupe longue et avalée, avec la queue attachée assez bas (1). La poi- trine longue et profonde, mais pas large; les côtes longues, assez plates, les flancs le plus souvent retroussés. L'épaule longue, ordinairement bien disposée. L'arrière-main vu de côté est lono- et larç-e, mais vu de derrière est aussi étroit que le poitrail. Les cuisses et les bras, les jambes et les avant-bras longs , les canons au contraire courts — la con- formation nécessaire pour la course rapide. Les paturons assez longs; les sabots petits, étroits et fermes. C'est surtout la longueur suffisante de la ligne qui unit la (1) La croupe horizontale avec la queue attachée haut, comme chez le cheval arabe, serait un défaut pour le cheval de courses. 124 LES CHEVAUX ANGLAIS. tête du fémur (1) avec la pointe du jarret que les Anglais apprécient dans un cheval de courses. Les jarrets et les genoux sont en général les endroits les plus faibles du pur sang anglais ; ordinairement ils sont trop étroits, pas assez solidement articulés et souvent très pré- disposés aux maladies des articulations. La peau du pur sang est fine et transparente comme celle de l'arabe; elle laisse voir à travers son épaisseur les réseaux des vaisseaux sanguins et des nerfs : un des signes carac- téristiques du sang\ Les poils ras et luisants; les crins fins et soyeux. Les différentes nuances de bai et d'alezan sont les robes prédominantes ; le noir et le rouan rares ; le gris ne se rencontre qu'exceptionnellement. Le pur sang anglais est plus grand de taille, et plus ra- pide que le cheval arabe ; mais il est moins beau , moins harmonieux dans ses formes , moins doux de caractère et de beaucoup moins résistant que ce dernier. Il est aristo- crate non seulement par sa naissance, mais aussi par ses habitudes. Sur la planche XXX et la fîg. 41 sont représentés deux étalons pur sang anglais non entraînés, dans l'état de re- producteurs de haras : Middleton (planche XXX) et Tristan (fig. 41); le premier est né en Russie, le second en Angle- terre. La fîg. 42 nous montre un étalon pur sang entraîné pour les courses. Le type général du pur sang anglais est bien visible dans tous les trois; mais considérés en détail, ils ne se ressem- blent pas beaucoup. La différence entre le cheval de la fig. 42 et les deux autres est due en partie à ce que le premier est représenté entraîné et les deux autres non entraînés; (1) Ou l'articulation coxo- fémorale. LE PUR SANG ANGLAIS. 125 mais elle est aussi très grande entre Middleton et Tristan . En général, si les traits caractéristiques du type sont com- muns à tous les chevaux de pur sang anglais , la manifestation de ce type dans les différents individus de la race est très va- Fig. 41. — Tristan, étalon pur sang anglais. D'après la photographie de J. Delton (Photographie hippique). riable, beaucoup plus variable que dans les chevaux de la race arabe, et même plus variable que dans les trotteurs rus- ses de pure race orlow. Les traits communs sont ceux du type oriental, auquel appartenaient tous les premiers repro- ducteurs de la race; la variété dans les détails provient pro- 12G LES CHEVAUX ANGLAIS. bablement de la différence individuelle de ces mêmes repro- ducteurs, différence qui n'a pu encore s'effacer pendant le temps relativement court de l'existence de la race. Précisément à cause de ces circonstances, il est impossible de reconnaître le pur sang d'une manière sûre d'après ses formes extérieures, ou même d'après l'ensemble de ses qua- lités extérieures et intérieures. On peut facilement faire une bévue et prendre un demi-sang pour le pur sang et vice- versa. Le seul moyen sûr c'est de consulter le Stud-Book (1) an- glais, dans lequel sont inscrits tous les pur sang avec leurs pedigrees. Le premier essai de composition d'un stud-book fut fait en 171)1, mais il ne fut régulièrement établi qu'en 1808. D'après ce livre, on peut suivre la généalogie de chaque cheval pur sang jusqu'aux premiers reproducteurs orientaux. Comme nous l'avons déjà dit, les meilleurs che- vaux de courses sont les descendants directs ou de l'arabe Darley, ou de l'arabe Godolpkin, ou du turc Byerley . Les Anglais sont un peuple essentiellement pratique. Ce n'est pas la théorie, mais le sens pratique et l'expérience qui les guident, dans les procédés qu'ils appliquent à l'élevage des bestiaux en général et des chevaux en particulier. Ordinai- rement, ils font très peu de cas de la pureté des races et les mélangent sans façon, quand cela leur paraît utile pour at- teindre leurs buts. Ces mêmes principes, ils les appliquent à l'élevage des chevaux, avec une seule exception pour leur race de pur sang. La pureté de celle-ci, ils la conservent soigneu- sement, — si soigneusement, que la moindre suspicion d'une souillure avec du sang impur fait rayer du Stud-Book. et par conséquenl de la race, les chevaux les plus distingués par (1) Stud-Book veut dire « livre de luiras » : stud, haras; book, livre. LE PI" Il SANG ANGLAIS. 127 leurs qualités physiques et morales. Ainsi furent éliminés du Stud-Book, exclus des haras de pur sang et incorporés parmi les demi-sâng, plusieurs chevaux célèbres, par exemple Fîg. 42. — Etalon pur sang anglais, entraîné pour les courses. D'après photographie. Mambrino, dont le fils Messenger est devenu la souche des trotteurs américains. Cependant, cette exception même en faveur des pur sang n'est qu'une des preuves de l'esprit pratique et clairvoyant des fils d'Albion. Considéré en lui-même, le pur sang ne re- présente un cheval hors de concours que pour le but auquel 128 LES CHEVAUX ANGLAIS. il est destiné, c'est-à-dire pour les courses; pour tous les au- tres emplois il peut être plus ou moins avantageusement remplacé par des chevaux d'autres origines. Son utilité principale n'est pas dans les usages auxquels il est bon lui- même, mais dans l'influence qu'il peut exercer, comme re- producteur, sur les autres races chevalines, influence qui est maintenant prouvée par l'expérience de tout le monde. C'est surtout dans ce but que doivent être conservées in- tactes dans leur pureté les races qui, comme le pur sang an- glais ou le pur sang arabe, possèdent des qualités physiques et morales proéminentes, bien distinctes et assez constantes pour être transmises héréditairement. Précisément à cause de ces qualités bien distinctes et constantes, les éleveurs ont en elles une source sûre et certaine pour améliorer ou modifier d'autres chevaux dans un sens détermine d'avance. Et ce serait impossible, si les races n'étaient pas conservées pures. Avec un reproducteur métissé, par exemple avec un demi-sang, on ne peut agir qu'au hasard ; tandis que d'un reproducteur de race pure on a le droit d'espérer des résultats plus ou moins sûrs. Les propriétaires de haras le savent bien. Pour avoir une idée de l'importance pour les haras des pur sang arabe et anglais, on n'a qu'à se représenter mentalement l'embarras qui s'en- suivrait si ces deux races disparaissaient tout d'un coup. Même importance aurait pu avoir la race des trotteurs russes si nous avions appliqué à la conservation de sa pureté lamême persévérance que les Anglais à celle de leur pur sang. Mais il y a cependant un grand reproche à faire aux An- glais. Depuis que l'intérêt pécuniaire a commencé à jouer aux courses un rôle important, ils lui sacrifient peu à peu l'a- venir de leur cheval, en développant en celui-ci la rapidité et la légèreté, aux dépens de toutes les autres qualités, et en le faisant courir le plus tôt possible, à un âge où son J£ ' { 'o O V '■■'' cf. ;«*W^ VJ« £ '% ►4 PL, 'J ^£ÊÈr+*Sâ < ■ • i i s\y* hï*&J * " m * **'* ■» "- v 4£»jSSfi . "'" J ç 1® aie S s 5 S * S à -« ^ LES PUR SANG ANGLAIS. 129 corps n'est pas assez formé pour supporter impunément les fatigues d'un exercice aussi dur. Si on le compare à ses ancêtres , les chevaux d'il y a quatre-vingts ou cent ans , le pur sang moderne a peut-être gagné en rapidité de 1 à 3 secondes par kilomètre; mais, en revanche , il a beaucoup perdu en solidité , en force et en résistance; et tant perdu, que l'on a été obligé de raccourcir les distances courues et d'alléger le poids porté par le che- val. Ces changements dans les conditions des courses ont dû, à leur tour, contribuer plutôt à l'abaissement qu'au re- haussement des qualités du cheval, car, à courtes distances et avec un poids léger, même les chevaux tarés peuvent ga- gner des prix et être pour cela acquis aux haras comme re- producteurs. Il y a sans doute en Angleterre jusqu'à présent des pur sang- superbes , par exemple , le cheval représenté fig. 41 ; mais le niveau moyen est plus bas qu'il y a quelques dizaines d'an- nées , et il s'abaissera encore si l'on continue à marcher dans la même voie. Heureusement pour les vrais amateurs de chevaux, parmi les pur sang, qui sont produits annuellement dans la Grande- Bretagne, une très grande partie ne va pas aux courses à cause d'une rapidité insuffisante : on en fait des steeple-clia- sers, des hunters, des park-hacks et quelquefois même des chevaux d'attelage élégants, selon les capacités des animaux. Plusieurs de ces chevaux ne sont pas assez rapides, juste- ment à cause de la solidité et de l'harmonie de leur constitution, et c'est parmi eux qu'il faut chercher les meilleurs pur sang anglais, les plus aptes pour créer une excellente postérité. En Amérique et sur le continent de l'Europe, on le sait et on en profite ; mais en Angleterre il est rare qu'un cheval qui n'a pas gagné de prix aux courses aille comme reproducteur aux LE CHEVAL. 17 130 LES CHEVAUX ANGLAIS. haras de pur sang ; il y sert plus souvent pour la production des demi-sang. C'est une faute que font les Anglais et que nous répétons assez souvent en Russie , en n'achetant pour nos haras que les pur sang qui ont gagné des prix, et dont on ne nous vend pas, sans doute, les meilleurs. CHAPITRE III, LES CHEVAUX D ORIGINE MIXTE. A cette catégorie nous rapportons tous les chevaux qui par leurs caractères ne peuvent appartenir à aucune race distincte. Tels sont maintenant tous les chevaux anglais, à l'exception du pur sang, de quelques chevaux de gros trait, et d'une petite quantité de chevaux de races primi- tives, qui sont encore restés dans la Grande-Bretagne. Malgré la grande variété individuelle de ces chevaux , il existe un trait commun qui les unit tous ou presque tous : c'est qu'ils sont à présent tous ou du moins en grande majorité des demi-sang, c'est-à-dire contiennent dans leurs veines une proportion plus ou moins grande de sang pur, qui leur communique à tous un cachet particulier, recon- naissable à l'œil exercé. Mais à part cela, ils sont si peu semblables, qu'il est impossible d'en faire une description générale ou de les grouper d'une manière satisfaisante d'après leurs caractères hippiques. Pour ne pas nous égarer dans des détails inutiles, nous ne voyons d'autre moyen que de les étudier d'après les usages auxquels ils sont destinés. Nous les divisons donc d'abord en deux grands groupes : chevaux d'attelage et chevaux de selle , division qui est strictement observée en Angleterre pour 132 LES CHEVAUX ANGLAIS. les chevaux de qualité , le harnais étant un joug que le cheval, noble animal, ne peut porter sans être dégradé pour toujours. Chevaux d'attelage. Avant les chemins de fer , il y avait en Angleterre une assez grande quantité de chevaux d'attelage massifs , des- tinés aux voitures lourdes de voyage. Les chevaux de même espèce, mais plus majestueux, de plus belle apparence, étaient employés pour les équipages de parade par les sou- verains ou les grands seigneurs. Mais les chemins de fer ont fait disparaître les chevaux de voyage, et quant aux chevaux de parade, il n'en existe maintenant qu'un nombre insignifiant dans les écuries de la cour : un tout petit haras de chevaux hanovriens à la robe couleur crème , et peut-être encore quelques chevaux de la race cleveland , jadis très célèbre. Le haras de chevaux hanovriens, appartenant à la cour, est établi en Angleterre depuis l'annexion du royaume de Hanovre à la Prusse , et est maintenu exclusivement pour les besoins de la cour. Les chevaux de la race cleveland étaient grands, beaux, majestueux et assez bons trotteurs ; la plupart avait la robe baie ; ils étaient probablement issus du croisement de gros chevaux de Yorkshire avec les pur sang. Cette race est au- jourd'hui entièrement disparue. De nos jours, à part les chevaux de gros trait, dont nous parlerons plus loin , on n'emploie aux attelages que des che- vaux beaucoup plus légers, plutôt beaux et élégants que ré- sistants. Les voyages ne se font plus en voitures ; le travail des chevaux d'attelage est limité aux excursions et prome- nades dont l'étendue ne dépasse pas ordinairement quelques LES CHEVAUX D'ORIGINE MIXTE. 133 kilomètres; dans les grandes villes, comme à Londres, par exemple, on sort rarement hors des murs. Et alors même les personnes aisées ont au moins deux attelages travaillant al- ternativement. Les chevaux d'attelage que Ion produit aujourd'hui en Angleterre correspondent parfaitement a ces conditions de travail. Fash ion a pour les Anglais une signification beaucoup plus grande et plus obligatoire que la mode en France. Fasluon sous-entend correetnes (correction), certaines règles qui doivent être strictement suivies par tout gentleman Con- formément à cette fashion, la taille et l'extérieur des chevaux d'attelage doivent correspondre à la voiture pour laquelle ils sont employés. Aux voitures de ville à deux places, coupes, phaetons, etc., conviennent les chevaux dont la taille est d environ !» 88- aux équipages à quatre places, landaws , barou- ches, carrosses, etc., les chevaux de i-,60 à 1- 6b , et seu- lement dans les cas exceptionnels (quand les chevaux sont très beaux) jusqu'à i-,69 ou même 1-.71. Pour les petites voitures , paniers , phaetons légers et bas , etc. on se sert de ponevs de 1-.33 àl-,B3, selon la hauteur de 1 équipage. Le cheval d'attelage doit posséder non seulement une apparence convenable, mais aussi de beaux mouvements - a fine action (belle action) , comme disent les Anglais. Pour les excursions hors des villes il suffit que les mou- vements soient réguliers et sûrs; mais pour les promenades dans les villes la high action (hante action) est indispen- sable, c'est-à-dire que le cheval doit lever les genoux courbes très haut à la manière des trotteurs russes. Naturellement le pas et le trot sont les allures ordinaires. La rapidité au trot de 16 à 19 kilomètres par heure est considérée comme suffisante ; mais de très bons trotteurs doivent 134 LES CHEVAUX ANGLAIS. faire de 21 à 22 kilomètres et demi, rapidité qui est beaucoup inférieure à celle des bons trotteurs russes ou américains. Au pas, la vitesse est de 8 à 9 kilomètres. Les robes préférées sont le bai et l'alezan ; mais en général chaque robe d'une couleur distincte est bonne pour l'atte- lage, même le pie; une seule couleur fait exception ex- ception peu compréhensible), c'est le gris, qui est considéré not fas/t ionable . Parmi les chevaux d'attelage pour les petites voitures, on rencontre des poneys typiques de races primitives, par exemple des poneys shetlandais. Les pur sang en général ne sont pas propres pour l'at- telage, à cause de leurs mouvements peu gracieux et trop rectilignes et de leur constitution trop légère et pas assez solide. Mais, comme de rares exceptions, on trouve parmi les pur sang des chevaux d'attelage magnifiques et que l'on paye très cher. C'est parmi les pur sang exclus de l'hippodrome, à cause de leurs formes trop solides et trop proportionnées, que l'on trouve ces chevaux. Ordinairement les chevaux pour attelages sont fournis par des demi-sang d'origine et d'apparence très variés. Il n'y a qu'un petit nombre de chevaux d'attelage de demi- sang que l'on puisse grouper dans une race à part; ce sont les trotteurs de Norfolk. Les trotteurs norfolks. Les trotteurs de Norfolk sont élevés principalement à Norfolk et à Lincoln; cette dernière localité est probablement leur pays natal. Les premiers chevaux de cette race ont paru il n'y a pas plus de cent ans. On croit qu'ils sont issus du LES CHEVAUX D'ORIGINE MIXTE. 135 croisement de juments hollandaises avec des étalons pur sang. Un de leurs ancêtres les plus célèbres fut P/ienome- non, qui, par sa ligne paternelle, descendait directement de Pretender, fds de Marske qui était aussi père à' Eclipse. Au Fig. 43. — Westminster , trotteur norfolk; étalon au haras du Pin, les fanons coupés. D'après la photographie de J. Delton ( Photographie hippique ). commencement de notre siècle, ce fut Marshland Shales , qui eut une grande renommée comme trotteur ; on dit qu'il par- courait facilement de 27 à 32 kilomètres (de 17 à 20 milles anglais) par heure. Sa taille ne dépassait pas lm,50; par son arrière-main il rappelait le pur sang, par sa tête, son 136 LES CHEVAUX ANGLAIS. encolure et en général par son avant-main, le suffolk- punch. Les norfolks de notre temps sont ordinairement plus grands de taille , laquelle , cependant , dépasse rarement lm,60; ils sont d'une constitution solide et robuste, rappe- lant un peu celle des suffolks. Dans tous les cas, leur exté- rieur est beaucoup moins noble que celui des trotteurs russes ou américains. La tête n'est pas noble du tout; l'encolure longue est attachée assez haut, mais épaisse et charnue ; le garrot n'est pas bas. Ils ont le dos horizontal, la croupe large, longue , robuste et arrondie , avec une queue bien plantée ; la poitrine peu large , mais longue et profonde ; les épaules longues et suffisamment obliquées ; les membres relativement courts, bien musclés et vigoureux; les articulations bien développées, surtout celles des jarrets ; les paturons courts, ornés de petits fanons. Le rouan, le bai et l'alezan sont les robes les plus communes. Le rouan argenté ou vineux est préféré, car c'est la robe héréditaire des trotteurs célèbres. Les mouvements sont assez beaux ; les genoux des membres antérieurs sont plies et élevés suffisamment, les pieds des membres postérieurs dépassent les traces des sabots de de- vant ; mais ni l'un ni l'autre mouvement n'est aussi déve- loppé que chez le trotteur russe. Le trot du norfolk est plus court que celui du trotteur russe ; sa vélocité dépend plutôt de la rapidité que de la largeur des mouvements. A de pe- tites distances il peut trotter avec la rapidité de 2â à 27 ki- lomètres par heure ; pour de grandes distances il est trop lourd. Les Anglais ne sont pas grands amateurs des courses au trot et ils ne tiennent pas les norfolks en grande estime, sur- tout à cause de leurs formes peu nobles. Les Français et les Allemands, au contraire, les apprécient beaucoup et les y L<0 X c ^ 3 ... ? ^ 53 £ ^J LES CHEVAUX D'ORIGINE MIXTE. 137 achètent volontiers pour en faire des reproducteurs dans leurs haras. On a essayé et on essaye encore d'annoblir les norfolks par le pur sang ; mais l'expérience a démontré que le croi- sement avec le pur sang diminue les qualités du trotteur et souvent même les anéantit entièrement. Toutes ces causes réunies font que la race s'appauvrit graduellement en quantité et en qualité , de sorte qu'il est fort probable que l'heure de sa disparition n'est pas très éloignée. La lis-. 43 donne le portrait d'un beau norfolk. Les chevaux de selle. Les chevaux de selle sont les chevaux de prédilection des habitants d'outre-Manche. Ils ne dédaignent pas les beaux chevaux d'attelage, mais les chevaux de selle sont leur passion. La promenade en voiture est pour eux un plaisir; la course à cheval, une jouissance, h laquelle aspire tout le monde ! Leur génie hippophile est donc surtout dirigé vers la production de bons chevaux de selle. La spécialisation , c'est-à-dire la production pour chaque usage d'animaux spéciaux , se fait sentir dans les chevaux de selle d'une manière encore plus évidente que dans les chevaux d'attelage. Pour les courses plates il y a le cheval de course pur sang; pour les courses à obstacles — le steeple-chaser; pour la chasse — les hunters de différentes espèces; pour les voyages à cheval — les hacks ou road- sters ; pour les promenades dans les parcs — lespark-Itacks ; pour les personnes solides de corps et tranquilles d'esprit — les cobs; pour les enfants — les poneys. Les chevaux de courses plates [race-horses sont toujours 18 LE CHEVAL. 138 LES CHEVAUX ANGLAIS. des pur sang. Pendant quelque temps on laissa courir aussi des demi-sang, mais maintenant cette arène leur est fermée. Même parmi les pur sang on n'admet que les plus légers et les plus rapides. La fig. 4:2 représente un pur sang entraîné pour les courses. Les steeple-chasers , c'est-à-dire les chevaux employés pour les courses à obstacles [steeple-chase) , sont ordinai- rement ou des pur sang ou des demi-sang avec une abondante infusion du sang pur. Les obstacles à franchir et les distan- ces plus grandes à parcourir (jusqu'à 4 milles anglais ou envi- ron 6 kilomètres et demi) exigent pour le steeple-chase des chevaux d'une constitution plus robuste et d'une résistance plus grande que pour les courses plates. C'est pourquoi les pur sang les plus vigoureux et les mieux constitués se trou- vent justement parmi les steeple-chasers ou encore plus sou- vent parmi les huniers. Par la même raison pour le steeple-chase ne conviennent que des chevaux adultes, c'est-à-dire n'ayant pas moins de 5 ou 6 ans. Les h un fers ou les chevaux de chasse sont les chevaux les plus utiles de la Grande-Bretagne. La majorité appar- tient aux demi-sang; parmi les pur sang ce sont les indi- vidus très robustes qui seuls sont capables de supporter le travail des hunters; ils se recrutent parmi les pur sang de la même espèce qui fournit les steeple-chasers. Plusieurs steeple-chasers deviennent après des hunters. Mais en géné- ral le limiter doit être encore plus vigoureux et plus résis- tant à 14 kilomètres par heure. Pour Les personnes dont le corps est lourd et qui aiment dans leur monture les allures égales et tranquilles , il n'y a pas de cheval meilleur que l<" cob. L'Irlande en produit de très bons. LES CHEVAUX D'ORIGINE MIXTE. 143 La fîg\ 45 donne le portrait d'un cob excellent. Les poneys. — Le mot « pony » veut dire en anglais « cheval de petite taille ». Mais « la petite taille » n'est pas comprise de la même manière dans les différentes par- ties du royaume britannique. En Yorkshire, où les che- vaux indigènes sont ordinairement très grands, on appelle « pony » tout cheval dont la taille est moindre de lm,58; à Nottingham , seulement les chevaux ayant moins de 1'", 47, et pour les habitants de Devon et de Sommerset un « pony » ne doit pas excéder lm,22. Dans un sens plus res- treint on comprend sous le nom de « poneys » de petits che- vaux de races primitives qui sont élevés à l'état demi-sauvage dans certains endroits montagneux ou marécageux de la Grande-Bretagne ; tels sont les poneys shetlandais ou les poneys d'Exmoor, dont nous parlerons plus bas. Ces po- neys dépassent rarement lm,22. CHAPITRE IV. LES CHEVAUX DE GROS TRAIT. Gomme nous l'avons dit plus haut (page 118), les chevaux indigènes primitifs de la Grande-Bretagne étaient de petite taille. Des chevaux plus grands et plus massifs furent ame- nés en Angleterre du continent européen : de l'Allema- gne, de la Hollande et de la Normandie. Ce n'est que de la fin du dix-septième ou du commencement du dix-huitième siècle que date l'élevage systématique des chevaux de gros trait en Angleterre. Les chevaux lourds de Hollande à la robe noire servirent de première base. Le climat, la nourriture et les exercices aidant, les Anglais arrivèrent, en moins d'un siècle, à créer par des croisements intelligents leurs races typiques de gros trait, devenues presque aussi célèbres que le pur sang. Au commencement de notre siècle, l'Angleterre possédait environ six races distinctes de gros trait. Dans la suite, ces races se fusionnèrent graduellement en trois : les dray-horses, les su [folks et les clydesdales, qui existent encore mainte- nant, mais dont la fusion se continue, de sorte qu'il est pro- bable que dans un temps plus ou moins prochain les traits dislinctifs qui les séparent disparaîtront à leur tour. Déjà de nos jours la plupart des chevaux de gros trait en Angle- * y £ 3\ £ - ^ ... . te ^ ~^ S. ■*" £ LES CHEVAUX DE SELLE ET DE TRAIT LÉGER. 201 grande utilité, bons pour tous les usages. Tandis que les chevaux de Tarbes ne conviennent ordinairement que pour la cavalerie légère, ceux des Basses-Pyrénées servent sou- vent pour les remontes de la cavalerie de ligne. La figure 58 représente un cheval des Basses-Pyrénées (amélioré). Les chevaux du département de VAriège sont de la même origine, que ceux des Hautes-Pyrénées, mais, passant leur vie sur des hauteurs , ils ont acquis toutes les qualités de chevaux de montagnes. Ils sont moins grands de taille, plus grêles et moins bien constitués que ceux des Hautes-Pyré- nées, mais sont excessivement résistants, très sûrs et très légers dans leurs mouvements. Cependant , sous l'influence des mêmes reproducteurs que nous avons nommés plus haut, la variété de l'Ariège perd peu à peu ses caractères clis- tinctifs et se confond de plus en plus avec le type navarrin. Grâce aux dépôts d'étalons de l'Etat et aux efforts éner- giques et patients de l'Administration des haras, la même transformation assimilatrice se propage progressivement des Pyrénées dans les autres contrées de la France méri- dionale. Sans doute elle se fait sentir beaucoup plus dans les départements voisins. Tandis que dans les départements du Gers, de la Haute-Garonne et dans la partie méridionale des Landes l'assimilation est presque complète et que les che- vaux diffèrent maintenant peu de ceux du type navarrin; dans les départements situés plus au nord elle n'est qu'à l'état de fermentation : les signes du même type commencent déjà à prévaloir, mais considérée en détail la population chevaline est encore très hétérogène. Les départements de Test des deux moitiés de la France sont à peine effleurés par le progrès de l'assimilation : là règne encore un chaos hippique complet. LE CHEVAL. 26 202 LES CHEVAUX FRANÇAIS. Les chevaux corses. Les chevaux corses ressemblent par leurs formes aux lan- dais et aux camargues, aussi bien qu'aux chevaux de la Sar- Tig. r>9. — Kif-Kif, étalon barbe de la variété de Sahara. Premier prix à l'exposition internationale de 1878. Nombreuses primes pour courses d'obstacles (en Algérie). D'après la photographia faite par J. Delton {Photographie hippique). (Reproduction de la flg-. 15.) daigne. Ils sont très petits, leur taille ne dépassant pas ordi- nairement lm,35 et descendant parfois jusqu'au-dessous de 1 mètre; grêles, mais d'une nature ardente, très sobres et ré- sistants. La plupart sont noirs ou alezans, quelquefois bais et LES CHEVAUX DE SELLE ET DE TRAIT LEGER. 203 rarement gris. Ils mènent dans les maquis une vie demi- sauvage, pareille à celle des landais ou des camargues. Fig. GO. — Cheval barbe d'Algérie monté par un officier indigène (de spahis). D'après la photographie faite par J. Delton {Photographie hippique). (Reproduction de la fig. 16.) Les chevaux barbes. Les chevaux barbes sont élevés en Algérie, où, selon les statistiques officielles, il y en aurait de nos jours environ 150.000 têtes. Ce sont les mêmes chevaux qui furent impor- 204 LES CHEVAUX FRANÇAIS. tés dans la France méridionale lors de l'invasion des Arabes, et y servirent de base à la création de la population che- valine (voir page 161). Pendant longtemps les chevaux barbes furent en usage dans la cavalerie française ; puis ils servirent à la remonte des officiers d'infanterie. Aujourd'hui ils ne sont utilisés qu'en Algérie et dans quelques colonies, bien qu'un certain nombre de chevaux barbes soient introduits annuellement en France. En 1891, on a importé d'Algérie en France 1.173 chevaux dont 932 étaient étalons. Les chevaux barbes ont été déjà décrits plus haut, page 26. La fîg. 59 représente le cheval se rapprochant très près du vrai type barbe (celui du Sahara), devenu maintenant fort rare. La fîg. 60 nous montre le cheval barbe ordinaire. CHAPITRE VI LES ANGLO-NORMANDS. La population chevaline de la Normandie, ainsi cpie de toute la région qui est située sur le littoral nord de la France, descend des chevaux du type occidental qui furent amenés dans ces contrées à la fin du neuvième et au commencement du dixième siècle par les Normands. Peu à peu, sous l'in- fluence des conditions locales, les chevaux normands se sé- parèrent des boulonnais et parmi eux-mêmes se formèrent des variétés : dans le département de la Manche et princi- palement dans la presqu'île du Cotentin la variété de grands carrossiers et dans le pays du Merleraut dans le département de l'Orne la variété plus légère des chevaux de selle. La va- riété augeronne du Calvados tenait le milieu entre les deux. A la fin du règne de Louis XV, la comtesse Dubarry in- troduisit la mode des chevaux danois à la tête fortement busquée ; des étalons de ce type furent envoyés en Nor- mandie et communiquèrent leur difformité à la plupart des chevaux normands; il fallut plus tard se donner beau- coup de peine pour les en débarrasser, et on n'y réussit qu'imparfaitement, car la tête busquée est jusqu'à présent encore assez répandue parmi les chevaux de Normandie. 20G LES CHEVAUX FRANÇAIS. À la fin du dernier siècle , par ordre du prince de Lambesc, grand écuyer de Louis XVI, vingt-quatre étalons demi-sang furent importés d'Angleterre en Normandie (au haras du Pin). Ces étalons peuvent être considérés comme les premiers fon- dateurs de la race anglo-normande actuelle. Mais l'œuvre si bien commencée fut bientôt grandement endommagée par la révolution. Sous le premier empire on essaya d'amé- liorer les chevaux normands par toutes sortes de reproduc- teurs étrangers, à l'exception des anglais, car l'Angleterre était alors fermée pour la France ; on y introduisit sur- tout beaucoup d'étalons du nord de l'Europe occidentale. Les résultats ne se firent pas attendre : les traces laissées par les étalons anglais disparurent presque complètement. Quel- ques reproducteurs anglais pur sang que l'on envoya en Normandie pendant la restauration, ne firent aucun bien appréciable, car l'affaire fut menée sans ensemble ni système. Vers le commencement du règne de Louis-Philippe le cheval normand était une bête très peu harmonieusement bâtie. Elle avait la tête lourde, horriblement busquée et stu- pide ; l'encolure courte, épaisse, commune et chargée d'un coussin de graisse sous la crinière ; le dos bas et foulé ; le rein long et mou ; la croupe horizontale , ornée d'une queue sans vigueur ni ressort; la poitrine se relevant en carène de vaisseau; les épaules courtes; les membres grêles, aux articulations faibles et aux jarrets courbés en faucille. Avec cela la peau épaisse, les poils grossiers et le tempérament mou. La figure 63 de l'Atlas de Eug. Gayot et L. Moll donne le portrait du cheval normand de cette époque. La vraie régénération du cheval normand , en même temps que sa transformation progressive dans l'anglo-normand, ne commence qu'après 1830. C'est depuis cette époque seule- ment que la Direction des haras appliqua d'une manière sys- LES ANGLO-NORMANDS. 207 tématique les principes de l'amélioration chevaline par les reproducteurs anglais demi-sang et pur sang. Les résultats se firent sentir bientôt. Déjà après vingt ans les chevaux normands étaient presque entièrement régénérés et commen- çaient à présenter le type de l'anglo-normand actuel. Le même sytème conduit sans interruption jusqu'à nos jours , ne fit qu'accentuer davantage la transformation. Maintenant tous les chevaux de la Normandie sont améliorés. Cependant, s'il n'y avait pas d'interruption dans le système, il y avait par moments des entraînements dans son applica- tion; ainsi, en voulant trop améliorer, on abusait souvent du reproducteur anglais pur sang qui communiquait au pro- duit plus de finesse et de noblesse , mais en revanche lui ôtait autant en étoffe, en force et en résistance. Les abus de cette espèce, commis à la fin de la cinquième et au com- mencement de la sixième dizaine de notre siècle, causèrent un grand dommage à la population chevaline de la Nor- mandie, en créant parmi elle des individus trop minces, trop grêles et trop faibles pour les usages auxquels ils furent destinés. Ces abus se répètent quelquefois encore maintenant par les amateurs trop anglomanes. Mais la Direction des ha- ras tient ferme ; dans ses dépôts d'étalons elle emploie lar- gement les reproducteurs demi-sang et , au contraire , très sobrement les pur sang (voir page 167 et 171). Parmi les reproducteurs demi-sang c'étaient d'abord des clevelands et ensuite des norfolks qui jouaient le rôle principal; mais à présent ils sont presque partout remplacés par les demi-sang français, par l'élite des anglo-normands mêmes. Les anglo-normands de nos jours sont très connus et sou- vent recherchés non seulement en France, mais aussi dans d'autres pays de l'Europe. En majorité ce sont des chevaux de grande taille, robustes et propres à tous les usages, 208 LES CHEVAUX FRANÇAIS. des chevaux « à deux fins », comme on dit en France. Les anciennes variétés du Merleraut, du Cotentin, etc. ont dis- paru en se fusionnant. Gela ne veut pas dire cependant que les anglo-normands sont devenus des animaux d'une conforma- tion homogène. Bien au contraire, la variété individuelle parmi eux est telle qu'il serait tout à fait impossible non seulement de les considérer comme appartenant à une seule race définie, mais même d'en faire une description générale. Il y en a qui, par leur extérieur, se rapprochent du pur sang anglais; tels sont, par exemple, beaucoup de trot- teurs actuels et les plus élégants parmi les chevaux de selle. D'autres rappellent les chevaux de chasse [hunters] d'An- gleterre ou d'Irlande, variété très estimée par les officiers de remonte de la cavalerie de liime et de réserve. D'autres encore ont toutes les qualités d'un cheval d'attelage pour les équipages de ville ; on en voit beaucoup à Paris aux prome- nades des Champs-Elysées et du Bois de Boulogne; ce sont ordinairement des chevaux de grande taille et très solide- ment bâtis, pas très nobles, mais souvent magnifiques. Pour nous, les chevaux de cette dernière catégorie sont les meil- leurs et les plus utiles représentants du type anglo-normand, et ce sont précisément eux qui en ont fait la renommée. La figure 61 reproduit le portrait d'un de ces chevaux. Enfin, il y a des anglo-normands dont les formes, bien qu'indubita- blement anoblies par une certaine dose de sang pur, les font classer parmi les chevaux de gros trait; nous en avons vu plusieurs aux dépôts d'étalons de l'Etat qui ressemblaient beaucoup aux percherons et aux boulonnais; quelques-uns avaient môme la croupe double ; l'influence du pur sang ne se voyait que dans la tête. Entre ces quatre catégories il existe des transitions à tous les degrés, et il faut avouer qu'il y a encore une masse de ■<1 *2 ■''"'* 3 LES ANGLO-NORMANDS. 209 chevaux décousus, c'est-à-dire dos chevaux dans lesquels les éléments qui les composent ne se sont pas suffisamment fu- sionnés, ce qui leur donne l'aspect d'animaux soudés de deux pièces différentes. Fig. 61. — Niger, anglo-normand; élalon au haras du Pin. D'après la photographie Je J. Delton (Photographie hippique). Cependant, malgré cette différence individuelle de for- mes, il existe dans tous, ou du moins dans la majorité des anglo-normands, des traits qui les font reconnaître d'un coup d'œil par un connaisseur. LE CHEVAL. 27 210 LES CHEVAUX FRANÇAIS. La robe la plus répandue est le bai de toutes nuances : depuis le bai -foncé-noirâtre jusqu'au bai-très-clair-doré; plus rarement alezan. On commence à produire des che- vaux noirs ; les gris ne se rencontrent guère. Nous avons déjà plusieurs fois insisté sur le rôle impor- tant que le reproducteur anglo-normand joue et est destiné à jouer dans la régénération de la population chevaline de la France, notamment dans sa moitié septentrionale, car dans le Midi c'est l'influence des reproducteurs anglo-arabes et na- varrins qui domine jusqu'à présent. Cependant, les domaines de l'anglo-normand deviennent de plus en plus étendus ; tan- dis que les anglo-arabes et les navarrins sont presque con- finés dans la partie méridionale de la France, l'anglo-normand pénètre graduellement partout. Pour s'en convaincre il ne faut que consulter la statistique annuelle des étalons natio- naux, approuvés et autorisés. On peut dire qu'à présent il n'existe dans la moitié nord de la France aucune race chevaline qui soit entièrement exempte de l'influence du reproducteur anglo-normand. En Normandie les anglo-normands ont entièrement remplacé les chevaux de l'ancienne race. Les chevaux bretons et la race poitevine se transforment principalement sous l'influence des anglo-normands; ceux qu'on appelle anglo-bretons et anglo-poitevins ressemblent à s'y méprendre aux anglo-nor- mands. Môme les boulonnais et les percherons ne sont plus exempts du sang anglo-normand. C'est dans les provinces de l'Est que l'influence de l'anglo-normand se fait encore le moins sentir; mais ce n'est qu'une question de temps. Si tout va comme jusqu'à présent, il faut s'attendre que dans quelques dizaines d'années et peut-être même plus tôt toute la population chevaline de la moitié septentrio- nale de la France sera reconstruite d'après le type anglo- LES ANGLO-NORMANDS. 211 normand, lequel probablement subira lui-même une transfor- mation et ne sera plus le même. Et ce sera un grand service rendu à la France par la Di- rection des haras, car il est hors de doute que toute cette ré- génération de la population chevaline de France, dont nous avons parlé, est due principalement aux efforts persévérants et intelligents de cette Direction , argument très puissant contre ceux qui prêchent l'émancipation complète de l'é- lève des chevaux du contrôle du gouvernement. CHAPITRE VII. LES TROTTEURS FRANÇAIS. Nous ne voudrions pas finir sans dire quelques mots des trotteurs français, genre de chevaux qui nous intéresse par- ticulièrement et qui est encore si nouveau en France. L'élevage systématique des trotteurs français fut com- mencé sous Louis-Philippe, mais c'est seulement sous Napo- léon III que leur fut accordée la protection officielle du gou- vernement. Le gouvernement actuel a déclaré l'élevage des trotteurs d'utilité publique et pour l'encourager accorde pour les courses au trot une subvention annuelle d'environ 300.000 francs. Gomme un des ancêtres principaux des trotteurs français on nomme Kurde, un étalon qui, sous Napoléon Ier, fut amené du Kurdistan par le général Sébastiani, à cette époque am- bassadeur à Gonstantinople. Kurde était sans doute du pur sang oriental, mais, par ses formes, il se rapprochait plutôt du type turcoman. De Kurde et d'une poulinière arabe na- quit la jument Étincelle 1817) et de l'accouplement de cel- le-ci avec l'étalon pur sang anglais Tigris naquit Leda (1827). De cette dernière et de l'étalon demi-sang anglais LES TROTTEURS FRANÇAIS. 213 Performer est issu Eclipse, étalon de petite taille (lm,53), mais Je belles formes et très rapide au trot (1). Éclipse et quelques autres descendants de Kurde servirent de base à la création des trotteurs français. Plus tard, pour obtenir une plus grande célérité, on eut recours et très lar- gement au pur sang anglais ; mais comme le résultat laissait encore à désirer, on chercha des reproducteurs parmi les trotteurs russes et américains. D'abord on préférait les rus- ses ; maintenant ce sont les américains qui commencent à prévaloir. En résumé, les trotteurs français contiennent dans leur veines une certaine dose de sang oriental, un peu de sang normand, beaucoup de pur sang anglais et maintenant sou- vent plus ou moins de sang du trotteur russe ou américain ou de tous les deux. Ils sont ordinairement plus petits de taille que les autres anglo-normands, mais ont des formes plus nobles et souvent très belles. Leur manière de trotter tient le milieu entre celle des trotteurs russes et celle des trotteurs américains : ils plient les genoux et relèvent les pieds de devant plus que les trotteurs américains, mais beaucoup moins que les trot- teurs russes. Leur rapidité, dans des cas exceptionnels, est assez grande; la jument Capucine, par exemple, a pu faire 1 kilomètre en 1 m. 36 sec. (2); mais en général elle n'est pas encore assez développée pour permettre aux trotteurs français de rivaliser heureusement avec les meilleurs trot- teurs russes ou américains. Pour nous la cause en est princi- palement en ce que les Français ne savent pas encore bien élever et dresser leurs trotteurs pour les courses. (1) C'est à cause de cela probablement qu'il a reçu le nom du célèbre cheval anglais. (2) Rapidité moyenne des trotteurs russes de premier ordre. 214 LES CHEVAUX FRANÇAIS. Il se trouve un certain nombre de trotteurs parmi les éta- lons nationaux des dépôts; quelques-uns sont d'origine russe; nous n'y avons pas encore vu de trotteurs améri- cains. Il existe maintenant en France beaucoup de haras privés destinés spécialement à l'élevage des trotteurs. La plupart sont en Normandie. Un des plus anciens et des plus connus est celui du duc de Vicence, à Gaulaincourt. Parmi les haras fondés pendant les dernières années et employant principalement les reproducteurs russes on doit nommer le haras de Gunsbourg, à Chambaudoin, et celui de Abel et Berenger, à Marly-le-Roi. Les hippodromes pour les courses au trot sont assez nom- breux en France , surtout en Normandie ; aux environs de Paris, il en existe deux : un à Vincennes et l'autre à Neuilly- Levallois. La plus importante des sociétés qui patronnent l'élevage des trotteurs est « la Société d'encouragement du demi- sang », qui a son siège à Caen et à Paris. CINQUIÈME PARTIE LES CHEVAUX ALLEMANDS En 1883, l'Empire allemand comptait 3.522.545 chevaux ou environ 7,8 sur 100 habitants. Aujourd'hui, après une paix de plus de vingt ans, ce nombre doit s'être sensible- ment accru. Le climat et le sol de l'Allemagne sont peut-être moins propices que ceux de la France pour l'élevage des chevaux; mais en revanche les Allemands, et surtout les Allemands de Test, s'intéressent aux chevaux et les connaissent plus que les Français. En outre, en Allemagne, comme héritage des temps féodaux, s'est conservée une assez grande quantité de propriétés foncières considérables qui furent toujours très favorables à l'élève des chevaux. Il existe encore à présent en Allemagne un grand nombre de haras privés plus ou moins importants ; entre autres plusieurs haras appar- tenant aux princes régnant dans les principautés et les royau- mes qui composent l'Empire allemand. Pour tous ces motifs l'initiative privée a beaucoup plus de part à l'élevage des chevaux en Allemagne qu'en France. A ce point de vue, l'Allemagne tient le milieu entre l'Angleterre, où l'élève des chevaux est entièrement entre les mains de l'industrie pri- vée, et la France où le gouvernement dirige tout. CHAPITRE PREMIER. ORIGINE DES CHEVAUX ALLEMANDS. Les chevaux primitifs de l'Allemagne étaient petits. César les trouvait forts et résistants, mais plus petits que les chevaux gaulois (voir page 161). Autrefois existaient en Allemagne des troupeaux de chevaux sauvages semblables à ceux de steppes russes. On trouvait encore à la fin du der- nier siècle des restes de ces troupeaux, non seulement en Prusse, mais aussi en Westphalie et dans les provinces du Rhin. Ils faisaient l'objet de chasses dont l'une, probablement la dernière, a eu lieu en Westphalie en septembre de 1829. Cependant, à cette époque reculée, le nombre des chevaux ne devait pas être très grand en Allemagne, car juscpu'à l'arrivée des Francs les jnierriers teutons faisaient leur service toujours à pied. C'est seulement sous Charles-le-Grand, au commencement du neuvième siècle, que nous voyons paraître la cavalerie allemande. Pendant le moyen âge, au temps du système féodal, les chevaux allemands s'accrurent considé- rablement non seulement en nombre, mais aussi en qualité. La chevalerie et les croisades eurent la même influence en Allemagne, qu'en France et en Angleterre. Les chevaliers créèrent des destriers massifs et de grande taille; les croisés importèrent en Allemagne beaucoup de chevaux du sang oriental. En Prusse et notamment dans sa partie orientale, les chevaliers fondèrent plusieurs haras et les approvi- oj ■- ^ -~ 7 * - ORIGINE DES CHEVAUX ALLEMANDS. 217 sionnèrent avec des reproducteurs qu'ils firent venir de la Hollande, du Danemark et de la Thuringe. Ces haras eurent une très grande influence sur l'élève des chevaux en Prusse; la réputation de ces derniers date de cette époque. Plus tard, on introduisit en Allemagne, comme partout en Europe, beaucoup de chevaux napolitains et espagnols qui, sous Charles Quint ^au commencement du seizième siècle], jouèrent un rôle prépondérant comme reproducteurs. Mais déjà au dix-septième siècle, après l'introduction dans les troupes des armes à feu, on se vit forcé de renoncer aux chevaux de selle massifs et de les remplacer dans la cavalerie par des animaux plus légers et plus agiles. Les anciens destriers durent plier le cou sous le harnais. L'Allemagne avait toujours été assez riche en haras ; mais depuis le dix-septième siècle, notamment après la guerre de Trente ans qui décima fortement sa population chevaline, les nombre de haras s'accrut considérablement. Pendant le dix- huitième siècle furent fondés les plus célèbres haras de l'État ou de la couronne : en Prusse en 1732 le haras de Trakeh- nen non loin de la frontière russe) et celui de Frédéric- Guillaume, à Neustadt en Brandebourg); en Bavière le haras de Zweibrûcken (175(1 et en Hanovre le haras de Herrenhausen. C'est après la guerre de Trente ans que fut créée dans le Meklembourg, cette race de chevaux qui, après avoir joui d'une célébrité universelle, a maintenant dis- paru entièrement. Les guerres de Napoléon Ier produisirent une dévastation énorme; mais, avec la paix, l'activité se ranima et prit, pour ainsi dire, un nouvel essor. Maintenant l'Allemagne est un des pays les plus riches en chevaux. Depuis la création du nouvel Empire, la prépondérance de la Prusse s'y fait sentir même dans la reproduction chevaline. 28 CHAPITRE II. CONTROLE ET PARTICIPATION DE L'ÉTAT DANS LA PRODUCTION CHEVALINE. Les moyens par lesquels le gouvernement allemand exerce son influence sur l'élève des chevaux sont les mêmes qu'en France et dans d'autres grands pays de l'Europe con- tinentale. Nous reproduisons en abrégé l'organisation de la direction des haras en Prusse. Aussi bien qu'en France, la Direction des haras [Gestiit- verwaltung) en Prusse dépend du Ministère de l'Agriculture. Les dépôts d'étalons et les haras de l'Etat sont les moyens principaux par lesquels le gouvernement agit sur la produc- tion chevaline. Mais en Prusse l'influence des haras est plus grande, car ils y sont plus nombreux et plus fournis de chevaux qu'en France. En Prusse, l'Etat possède trois grands haras [Hauptgestùté] : à Trakehnen , à Graditz et a Be- bcrbeck, et environ quinze dépôts d'étalons [Landgestùté). En 1883 il y avait dans les trois haras 6o0 poulinières, et dans quinze dépôts environ 2.000 étalons (chiffre régle- mentaire). A peu près la moitié des étalons est fournie aux dépôts par les trois haras de l'Etat ; le reste (la plus grande partie) est achetée chez des éleveurs particuliers du pays et en partie à l'étranger. Comme en France, les étalons de CONTROLE ET PARTICIPATION DE L'ETAT. 219 dépôts sont, à une certaine époque de l'année, distribués parmi les différentes stations pour y servir, à prix modérés, à l'usage des éleveurs. De même, il y a en Prusse des étalons approuvés, recevant des primes pour leur exercice, et tous les étalons destinés à la monte publique sont soumis à l'examen des commis- sions sanitaires. L'Etat accorde aussi des primes pour les chevaux qui se distinguent aux concours hippiques, pour les poulinières productives et pour les poulains bien nés. Dans deux des trois haras appartenant à l'État, ceux de Trakehnen et de Beberbeck, on élève des chevaux demi- sang contenant dans leurs veines le pur sang arabe et an- glais, mais celui-ci en plus grande quantité. On peut ad- mettre que dans les chevaux de Trakehnen il y a au moins 50 % de pur sang anglais, environ 25 % de sang arabe et autant de sang indigène. Les proportions du mélange sont approximativement les mêmes dans les chevaux de Beber- beck (1 ; cependant, le pur sang anglais doit y être en- core plus abondant. Le troisième haras de l'État, celui de Graditz, ne produit maintenant que des pur sang an- glais. Il est donc évident que tous les reproducteurs que les haras de l'État envoient aux dépôts d'étalons, c'est-à-dire environ la moitié du nombre total de ceux-ci, sont, ou demi- sang très riches en sang anglais (la majorité) ou pur sang* anglais la minorité). La plupart des haras privés, qui four- nissent l'autre moitié des étalons aux dépôts et tous les étalons approuvés , suivent l'exemple de l'État, en produi- sant principalement aussi ou des demi sang très riches en (1) C'est dans ce haras que furent transportés tous les chevaux du ci-devant haras de Frédéric-Guillaume, fermé il y a quelques années. 220 LES CHEVAUX ALLEMANDS. sang anglais ou des pur sang. C'est seulement depuis les dernières années que commencent à se former quelques haras privés pour l'élevage des chevaux de gros trait ; mais jus- qu'à présent ce ne sont que de rares exceptions. Ainsi , la régénération de la population chevaline en Prusse s'accomplit, de même qu'en France, principalement sous l'influence des reproducteurs demi-sang. En Prusse, le rôle des demi-sang est même encore plus décisif qu'en France, car dans ce dernier pays le quart des étalons de dépôts et approuvés appartient aux races de gros trait; pour la moitié nord de la France le gros trait fait même presque la moitié des étalons employés. C'est le type de Trakehnen, ou est-prussien, qui domine parmi les demi-sang, c'est-à-dire le métis, contenant dans ses veines environ 50 % du pur sang anglais, 25 % du sang oriental et 25^ du sang indigène. Donc, par sa nature, aussi bien que par son extérieur, il diffère beaucoup de l'anglo- normand français et se rapproche, au contraire, du repro- ducteur du midi de la France, du tarbien. Le demi-sang est-prussien, comme reproducteur, joue en Prusse le même rôle que F anglo-normand au nord et le tarbien dans le midi de la France. Peu à peu il assimile à son type la population chevaline de toute la Prusse. On peut dire, que dans la Prusse orientale l'assimilation est déjà un fait accompli, car il y reste maintenant très peu de chevaux de race indigène (voir plus bas , et c'est précisément pour cela qu'on a donné au demi-sang dont nous parlons le nom générique (ï est-prussien (Ost-preussen). Dans la Prusse occidentale et dans le Posen l'assimilation a fait aussi de grands progrès ; elle s'avance en Silésie orientale , tandis que dans la moitié occidentale de cette province prédomine L'élevage des chevaux propres à l'agriculture. Au contraire, CONTROLE ET PARTICIPATION DE L'ÉTAT. 221 la régénération marche très lentement en Brandebourg (bien que cette province soit le cœur de la Prusse), en Poméranie, dans la Saxe prussienne, dans la liesse-Nassau, en Westpha- lie et dans les provinces rhénanes ; la population chevaline de toutes ces contrées est encore fort mêlée et très hétérogène. En Hanovre et à Sleswig-Holstein les chevaux appartien- nent aux types tout à fait indépendants de l'est-prussien. L'influence prépondérante de la Prusse se fait sentir aussi dans l'élève de chevaux des autres Etats qui composent l'Em- pire allemand; les commissions militaires de remontes sont les intermédiaires très puissants de cette influence, qui doit être d'autant plus grande que plus des deux tiers de toute la population chevaline en Allemagne appartient à la Prusse. De tous ces Etats il n'y a que l'Oldenbourg et le Wurtem- berg qui méritent une description à part ; partout ailleurs l'élève de chevaux reste encore très peu développé. A l'ex- ception de la Prusse , aucun pays ne possède de haras de l'Etat ; quelques-uns ont des haras de la cour, mais dans presque tous existent des dépôts d'étalons [Landgestûte . De toutes les anciennes races de l'Allemagne, dont quel- ques-unes furent célèbres autrefois, il ne reste plus que quelques débris épars, dont nous parlerons à la fin de ce chapitre. Presque tous les chevaux sont transformés par les croisements avec les pur sang ou les demi-sang, pendant ces derniers temps principalement avec ceux de la race anglaise. De nos jours, il n'existe presque pas en Allemagne de che- vaux de gros trait, si nécessaires pour l'agriculture et pour les besoins des transports. Tout récemment, on a commencé à réagir contre cet état de choses ; mais le mouvement n'est pas encore assez développé pour qu'on puisse en attendre 222 LES CHEVAUX ALLEMANDS. à bref délai des résultats satisfaisants. Le seul but de toutes les aspirations de l'État est de créer le plus grand nombre possible de chevaux propres au service militaire ; il agit dans ce sens très énergiquement, et par cela même empê- che la production des chevaux d'autres types, l'initiative privée étant encore trop faible pour résister à ce courant. Jusqu'à présent l'Allemagne est obligée de faire venir ses chevaux de gros trait de l'étranger, de la France, de la Bel- gique et de l'Angleterre. Parmi les chevaux plus ou moins typiques qu'on élève main- tenant en Allemagne on peut nommer : les pur sang anglais, arabes et anglo-arabes, les demi-sang de l'est de la Prusse (est-prussiens), les chevaux de Hanovre, d'Oldenbourg, de Sleswig Holstein fie seul cheval allemand de gros trait), et enfin, quelques restes peu nombreux et épars des chevaux indigènes primitifs. La race de chevaux mecklembourgeois, qui était célèbre encore au commencement de notre siècle , n'existe plus : elle a disparu entièrement par suite de l'abus inconsidéré des croisements avec le pur sang anglais. CHAPITRE III. LES PUR SANG ARABES, ANGLAIS ET ANGLO-ARABES. Les trois pur sang sont élevés d'abord par les trois ha- ras de l'Etat, principalement pour servir à la création et à l'amélioration des demi-sang. Le pur sang anglais domine dans tous ces haras; celui de Graditz, comme nous l'avons déjà dit, est destiné exclusivement au pur sang anglais. Puis, les mêmes trois pur sang sont élevés dans beaucoup de haras privés dispersés par toute l'Allemagne, mais très nombreux surtout dans les provinces du royaume prussien. Il y a des haras qui élèvent les trois sangs, mais il y en a aussi qui produisent exclusivement ou les arabes, ouïes pur sang anglais. Autrefois, les premiers dominaient, mais à pré- sent le nombre des derniers est beaucoup plus grand. Parmi les haras des pur sang arabes, le haras du Wur- temberg fut très célèbre dans son temps. Il avait été fondé au commencement de ce siècle par le roi Guillaume aux envi- rons de Stuttgart. Pendant quarante-cinq ans, on importa dans le haras 38 étalons et 36 juments arabes, choisis par de vrais connaisseurs et achetés sans regarder à la dépense. Dans l'élevage on tâchait d'imiter les éleveurs arabes jusque dans les plus petits détails; par exemple, à la ration jour- 224 LES CHEVAUX ALLEMANDS. nalière d'avoine on ajoutait pour chaque cheval d'un quart à un tiers d'orge. Dans ces conditions, le haras acquit bien- tôt une réputation universelle. La postérité la plus remar- quable fut laissée par l'étalon Bairactar et les juments Has- foura , Elkanda, Shakra, Muraiia, Geyran et Abululu. Mais après la mort du roi Guillaume, le haras commença à dépérir et à se dissoudre graduellement ; maintenant il n'en reste que des débris. A côté du haras des pur sang arabes, il existait, près de Stuttgart, un autre haras de la cour, dans lequel on élevait de magnifiques chevaux de trait pour les écuries royales, de trois robes distinctes : bais, gris et noirs. Les chevaux bais étaient issus du croisement des étalons arabes avec les juments an- glaises demi-sang du type limiter; les gris, des étalons ara- bes et des juments d'Irlande et de Yorkshire, et les noirs, du mélange du sang arabe, anglais, hanovrien et de Trakeh- nen. Après la mort du roi Guillaume, pour agrandir la taille des chevaux, on introduisit dans le haras des reproducteurs anglo-normands; on atteignit le but, mais aux dépens de la noblesse et de la beauté des formes. ■ s ■ a s ex — . ^ CHAPITRE IV. LES CHEVAUX EST-PRUSSIENS. Les est-prussiens sont des chevaux demi-sang à environ 50 % de pur sang anglais, 25 % de sang arabe et 25 % de sang- indigène (lithuanien). L'expression supérieure de leur type se trouve dans les chevaux de Trakehnen , qui furent créés les premiers et, comme reproducteurs, servirent à transformer, en se l'as- similant, la population chevaline de la Prusse orientale; aujourd'hui l'assimilation est presque complète et le type peut porter ajuste titre le nom de Y est-prussien (Ost-preus- sen). Ce sont aujourd'hui non seulement les chevaux de Tra- kehnen, mais les est-prussiens en général qui servent de re- producteurs-assimilateurs dans les autres provinces de la Prusse. Il faut cependant remarquer que les vrais trakehnen jouissent toujours d'une grande supériorité. Gomment va la régénération chevaline dans les autres par- ties de la Prusse, nous l'avons déjà dit plus haut (page 220). Le cheval est-prussien jouant un rôle prépondérant dans la régénération des races chevalines en Prusse et le haras de Trakehnen étant le berceau de ce cheval , il est très inté- ressant d'étudier d'un peu plus près l'histoire de ce haras. LE CHEVAL. 2^ 226 LES CHEVAUX ALLEMANDS. Le luiras de Trakehnen est situé, comme nous l'avons déjà dit, non loin de la frontière russe (près d'Eydtkuhnen) ; il fut fondé en 1732 par la réunion de plusieurs petits ha- ras (Gestûthofe) de la localité, et avait, au commencement, 513 poulinières et au total 1101 chevaux dont la plus grande partie appartenait aux races indigènes améliorées parles che- valiers de l'ordre prussien (voir pages 216-217); on y ajouta quelques étalons achetés chez des éleveurs particuliers. Dix ans après, en 1742, on amena de la Bohême et on introduisit dans le haras 281 chevaux de la race napolitaine , qui ont laissé des traces très sensibles dans leur postérité ; encore un peu plus tard, on acquit pour le haras quelques étalons turcs, anglais et danois. Trakehnen élevait alors principalement des chevaux d'attelage, robustes, résistants et assez ra- pides. Pendant le règne de Frédéric-Guillaume II, le haras fut complètement débarrassé des éléments malsains ou incom- patibles avec les exigences de la production ; on les rem- plaça par des étalons acquis en Orient, en Angleterre et à Zweibriicken(l). L'invasion de Napoléon Ier détruisit le haras à tel point qu'après la paix il fallut le refaire entièrement; pour cela, on fit venir un assez grand nombre d'étalons et de poulinières de l'Angleterre, de la Turquie et de l'Orient. En résumé, pendant la dernière moitié du siècle dernier et au commencement de notre siècle, c'était le sang oriental qui devenait de plus en plus dominant au haras ; depuis ce temps et jusqu'à nos jours c'est, au contraire, le pur sang anglais qui joue le premier rôle. Nous avons déjà constaté le résultat définitif : environ 1)0 % (plutôt plus que moins) (l)Le haras de Zweibrucken (fondé en 1750, on Bavière) fut célèbre à cette époque par ses chevaux issus du croisement des races indigènes avec les étalons turcs et arabes. LES CHEVAUX EST-PRUSSIENS. 227 de pur sang anglais, 25 % de sang oriental et 2o % de sang indigène. Il y a onze ans, on comptait à Trakehnen lo étalons repro- ducteurs [Hauptbesclïàler] et 300 poulinières; depuis, le nombre de celles-ci fut augmenté de 50. Fig. 6'2. — Cheval de Trakehnen. Variété noire d'attelage. On élève à Trakehnen les cinq variétés suivantes : chevaux de selle légers, chevaux de selle plus massifs, chevaux d'attelage noirs, chevaux d'attelage bais, et chevaux d'attelage alezans. Les chevaux de Trakehnen sont, comme nous l'avons dit, les meilleurs représentants du type est-prussien. 228 LES CHEVAUX ALLEMANDS. Nous donnons, figure 62 , un dessin de la variété noire ittelage. Pour distinguer les trakehnens des autres, on leur imprime, Fig. 63. — Jument est-prussienne d'un haras privé de la Prusse orientale. Variété de selle. Gris-pommelé. D'après photographie. sur la cuisse droite, au fer rouge une marque en forme de branche de corne d'élan (sur la figure 62 la marque n'est pas reproduite). Los chevaux est-prussiens appartenant aux éleveurs par- ticuliers, mais issus des juments saillies par des étalons de LES CHEVAUX EST-PRUSSIENS. 229 Trakehnen, portent au même endroit la marque d'une cou- ronne arrondie en bas (1). Les est-prussiens qui ne descen- dent pas directement d'un étalon de Trakehnen ne sont pas marqués du tout. La figure 63 représente un de ces derniers chevaux variété de selle). Le cheval est-prussien est d'une taille assez élevée, de lm,60 à lm,70; d'une construction forte et harmonieuse, d'un tempérament doux et docile, très apte au service mili- taire, résistant et assez rapide. En Prusse, les connaisseurs prétendent que les proportions du mélange de différents sangs (voir page 225) dans l'est-prussien sont juste ce qu'il faut pour un bon cheval de cavalerie. Un peu plus de pur sang anglais, et ce serait déjà trop. Dans le même sens que le haras de Trakehnen, mais avec beaucoup moins de succès, travaillait autrefois le haras de Frédéric-Guillaume, à Neustadt (en Brandebourg); depuis 1877 il est transporté à Beberbeck (en Hesse-Nassau) où ses affaires sont loin d'être prospères. Moins utile encore peut-être est le troisième haras de l'Etat, à Graditz, car tandis qu'il élève presque exclusivement des pur sang anglais , les habitants du pays où il est (la Saxe prussienne) n'ont besoin que de chevaux de labour. (1) Dans la Prusse occidentale le cheval issu d'une jument privée et d'un étalon du haras de l'État, est marqué d'une couronne limitée en bas par une ligne hori- zontale. CHAPITRE V. LES CHEVAUX HANOVRIEXS. Les pays de l'Europe continentale situés sur le littoral de la Mer du Nord sont riches en prairies succulentes et par cela même très propres à l'élevage des chevaux massifs et de grande taille. Le Hanovre, l'Oldenbourg, la Hollande, le Danemark et le Sleswig-Holstein sont depuis longtemps con- nus par les chevaux de ce type. C'est précisément ces pays qui fournirent les premiers chevaux de gros trait à la Belgi- que, à la France et à l'Angleterre. La partie occidentale du Hanovre située entre la Hollande et l'Oldenbourg, et connue sous le nom de Frise orien- tale (1), était déjà renommée par ses chevaux massifs pen- dant le moyen âge. Mais c'est surtout au dix-septième siècle que devinrent célèbres les grands chevaux d'attelage du Hanovre. A la fin du même siècle et pendant le siècle sui- vant on créa des chevaux de selle de grande taille, par les croisements avec les reproducteurs importés d'Angleterre. Plus tard encore les reproducteurs anglais et surtout les pur sang furent employés aussi pour l'amélioration des chevaux (1) La partie limitrophe de la Hollande porte le nom de Frise occidentale. LES CHEVAUX HANOVRIENS. 231 d'attelage qui devinrent plus nobles et plus beaux, mais perdirent en masse et en force. Mais comme l'œuvre de l'amélioration fut dirigée par des mains habiles , qui sa- vaient profiter des relations intimes du Hanovre avec l'An- gleterre, le cheval hanovrien échappa au sort de celui de Fig. 64. — Jument hanovrienne; alezane. Figurait au concours hippique de Berlin. Mecklembourg; il se transforma en conservant sa physiono- mie typique. Après l'annexion du Hanovre à la Prusse l'élève des che- vaux de selle, qui fut surtout l'œuvre des rois de Hanovre, diminua en nombre et en qualité. Mais la production de chevaux de harnais prospère toujours. Il existe encore en 232 LES CHEVAUX ALLEMANDS. Hanovre un haras de l'État, celui de Hérrenhausen (à quel- ques kilomètres de la ville de Hanovre), qui, sous les rois de Hanovre, appartenait à la cour. Mais il n'a jamais joué un rôle important dans la production chevaline du pays. Celle- ci, au contraire, fut toujours et est jusqu'à présent très in- fluencée par le dépôt d'étalons [Landgestùt) de Celle, fondé en 1735 et possédant un contingent annuel de plus de 200 étalons. Les grands haras privés manquent en Hanovre, et l'élève des chevaux se trouve presque exclusivement entre les mains des petits propriétaires. Gomme nous l'avons dit, on élève maintenant en Hanovre principalement des chevaux d'attelage de grande taille ; il y a parmi eux des chevaux de trait ordinaires, mais aussi des chevaux très élégants. Le portrait d'un de ceux-ci est reproduit par la figure 64. Ils sont beaux, mais un peu mous et peu résistants; leur principal défaut est la lenteur de leur croissance : ils ne se développent entièrement qu'à l'âge de 6 ou 7 ans. Des chevaux plus lourds, propres au gros trait, sont four- nis par la partie occidentale du Hanovre, connue sous le nom de Frise orientale (voir page 230;. On trouve encore, au haras de Hérrenhausen, quelques restes des variétés de chevaux de luxe qui furent autrefois spéciales au Hanovre, notamment des carrossiers noirs et des carrossiers entièrement blancs. X X _i (X. 4 6 CL ^0 -3 2 ^ "a ciiaimtiii; VI. LES CHEVAUX OLDENBOURGEOIS. Les chevaux oldenbourgeois sont suns doute issus de la même source que ceux «In Hanovre. Les conditions du cli- mat, du sol cl, le système d'élevage -oui aussi les mêmes dans les deux pays, car dans l'unetl'autre c'est principa- lement lu dusse laborieuse des petits propriétaires fonciers qui s'occupe du lu production chevaline. Mais dans l'Oldenbourg ou n'essaya pus d'anoblir la race indigène pur le pur sang anglais; on se contenta de demi- sang, et le cheval oldenbourgeois resta plus rustique que le hanovrien. Leschevaux actuels d'Oldenbourg sont les produits du croi- sement <\'-> chevaux indigènes avec des reproducteurs anglais demi-sang. Un étalon bai-châtain, d'origine inconnue, importé de l'Angleterre en IS^o, eut une très grande influence; plus lard furent introduits des étalons clevelands et de Yorkshire. Les chevaux oldenbourgeois sont moins nobles que les ha- novriens, mais [dus forts et encore plus grands. Leur taille esl de lm,7S à lm,8b\ La tête ordinairement droite au chan- frein, mais parfois légèrement busquée; l'encolure d'une lon- gueur moyenne, un peu large, mais assez élevée; la poitrine LE CHEVAL. 30 234 LES CHEVAUX ALLEMANDS. ample et profonde; le garrot bas, le dos long et plutôt mon; la croupe arrondie, avec une queue attachée assez haut; les épaules bien placées ; les membres solides , mais les sabots Fig. 65. — Cheval Oldenbourg eois , bai. D'après photographie. larges et fragiles. La musculature en général bien développée. La robe baie prédomine. Le tempérament est doux et docile; les allures sont belles, et pour les petites distances vives et assez rapides. A Tencontre des lianovriens, les chevaux oldenbourgeois LES CHEVAUX OLDENBOURGEOIS. 235 croissent vite. Il y en a très peu parmi eux qui soient aptes à la selle. On les élève tous pour l'attelage. Ils font bonne mine comme chevaux de harnais; mais des travaux lourds et des voyages longs les usent vite. La figure 60 représente un bon cheval oldenbourgeois. Les chevaux du Sleswig-Holstein. Dans le Sleswig-Holstein on élève des chevaux de gros trait, semblables à ceux du Danemark dont un échantillon est représenté sur la figure 72. On les vend même souvent sous le nom de danois. A l'ouest du Holstein on élève aussi des carrossiers d'une conformation assez noble. CHAPITRE VII LES RESTES DES RACES INDIGENES PRIMITIVES. Il reste bien peu Je sujets desraces indigènes en Allemagne. Dans la partie de la Prusse orientale habitée par les Ma- zures, et aux environs de Memel et de Tilsit, il existe encore un certain nombre de chevaux de l'ancienne race indigène , la race lithuanienne. Ce sont de petits chevaux d'une assez belle apparence, à la tète relativement grande et à l'encolure courte. Ils viennent probablement de la même source que les chevaux des provinces limitrophes de la Russie. Il est très douteux néanmoins qu'on en puisse en- core trouver beaucoup entièrement purs. Dans tous les cas, leurs jours sont comptés. A l'autre bout de l'Allemagne, dans bipartie méridionale de la Bavière, nous retrouvons les chevaux de Pinzgau, ces re- présentants relativement purs du type primitif occidental dont nous avons déjà fait la description au commencement de ce livre voir page 16 et ligure 12), et auxquels nous reviendrons encore en parlant des chevaux autrichiens. En Bavière aussi, dans le village de Feldmoching, près de Munich, s'est miraculeusement conservé un petit groupe de chevaux primitifs appartenant au type entièrement oppose, c'est-à-dire au type oriental. C'est tout ce qui reste maintenant en Allemagne des an- ciennes races primitives. SIXIÈME PARTIE LES CHEVAUX AUSTRO-HONGROIS Le chiffre de la population chevaline de l'Autriche-Hongrie s'élève à plus de 8.500.000, ce qui fait à peu près 10 che- vaux par 100 habitants. De ce nombre environ 2 millions ou presque les deux tiers appartiennent à la Hongrie et seu- lement un peu plus d'un tiers, soit 1.548.197 chevaux I , à l'Autriche. Et comme la moitié des chevaux autrichiens revient à la Galicie et à la Bukovine à la Galicie seule envi- ron 700,000), on peut compter que la moitié orientale de l'Empire, celle qui confine à la Russie, contient environ les six septièmes de toute la population chevaline de l'Autri- che-Hongrie. (1) Recensement de 1800. CHAPITRE PREMIER. ORIGINE DES CHEVAUX AUSTRO-HONGROIS, La majorité des chevaux indigènes de l'Autriche-Hongrie sont de la même origine orientale que les chevaux russes. En Hongrie, en Galicie, en Bukovine, en Silésie et en Mora- vie ils rappellent les chevaux de paysans russes (voir les fi- gures 29, 32, 33 et 34), par leur petite taille (de lm,24 à 1 m, 50 ), leurs formes anguleuses et sèches ou plutôt mai- gres faute d'une nourriture suffisante ), leur peu de force joint à une résistance et une énergie extraordinaires dans un corps aussi chétif. La ressemblance est d'autant plus compréhensible, que les ancêtres de la plupart de ces che- vaux sont venus de l'est, c'est-à-dire de la Russie, et que l'importation des chevaux russes dans les pays mentionnés a lieu annuellement, et se continue sans interruption jusqu'à présent. En Bohême et dans l'Autriche proprement dite (dans l'ar- chiduché d'Autriche), le caractère des chevaux change. Ils sont plus grands de taille et d'une autre conformation. Sous Charles Quint et ses héritiers , pendant l'union dynastique de l'Autriche avec l'Espagne et l'Italie, la population chevaline de ces deux provinces subit fortement l'influence des chevaux ORIGINE DES CHEVAUX AUSTRO-HONGROIS. 239 espagnols et napolitains, beaucoup plus sensible là que dans aucun autre pays de l'Europe. Les traces visibles de cette influence ont persisté jusqu'à nos jours. En Bohême, les chevaux du haras de Kladrub conservent jusqu'à présent entièrement intacts tous les traits caractéris- tiques des anciens chevaux espagnols (voir pages 244-245 . La Bohême est renommée pour ses chevaux de harnais, forts et de grande taille. Les meilleurs sont élevés dans l'arrondissement de Chrudim 1 ; ils contiennent dans leurs veines non seulement le sang espagnol et napolitain, mais aussi celui des reproducteurs anglais , mecklembourgeois et holsteinois. Dansl'archiduché d'Autriche les chevaux de trait de Mardi- feld sont très connus ; ils sont assez hétérogènes de formes, mais grands et rapides ; on en rencontre beaucoup parmi les chevaux de fiacres, à Vienne. Dans la région de Salzbourg, en Styrie, Garinthie, Tyrol, et en partie dans l'Autriche supérieure dominent les chevaux de gros trait de la race de Pinzgau que nous avons déjà décrits en détail en parlant des chevaux du type occidental ou norique (voir pages 16 et 17). C'est la seule race de gros trait en Autriche-IIono-rie. Un des meilleurs exemplaires des chevaux de Pinzgau est reproduit fig. 66. Parmi les autres races indigènes plus ou moins typiques on peut mentionner les jolis petits poney s élevés en Dalmatie et dans l'île Veglia, appartenant àl'Istrie; les ancêtres de ces derniers furent au dix-huitième siècle importés de la Corse. Les petits chevaux de montagne, trapus et résistants, connus sous le nom de huzules Iluziilen) et élevés sur les (1) Chrudim et Kladrub sont situé* dans le voisinage de Pardubilz. 240 LES CHEVAUX AUSTRO-HONGROIS. Carpathes en Bukovine et dans les parties limitrophes de la Galicie ; leur taille est de lm,24 à lm,3o. Un peu plus grands, mais très ressemblants par leur constitution et leurs qualités morales sont les chevaux de Hafling, en Tyrol, près de Meran; on croit qu'ils descendent des chevaux amenés ici, sous Charles IV (en 1342), de la Bour^o^ne. Les chevaux de haras — voir pages 243 et suiv. Les habitants de l'Autriche- Hongrie sont en o-énéral grands amateurs de chevaux, mais surtout les Hongrois et les Slaves. Le gouvernement autrichien d'abord, puis le gouver- nement austro-hongrois s'est toujours distingué par les soins particuliers avec lesquels il a traité la question de la produc- tion chevaline. Mais la composition hétérogène de l'Empire ne laissa pas d'avoir une grande influence sur la direction qu'y a prise l'élève de chevaux. Il y manque cette unité de système qui a permis, en France et en Prusse, de créer des types généraux d'après lesquels se transforme progressivement toute la po- pulation chevaline du pays. En Autriche-Hongrie, les haras de l'Etat et beaucoup de haras privés produisent des chevaux excellents. Mais chaque haras travaillant d'après son propre programme, les résultats obtenus sont très variés. C'est pourquoi, en Autriche-Hongrie, on n'a pu, jusqu'à présent, créer des types semblables à l'anglo-normand français ou à l'est-prussien de l'Allemagne. Il faut ajouter encore qu'en Autriche-Hongrie l'élément amateur joue toujours un rôle trop grand, môme dans les haras de l'Etat. En cela elle res- semble plutôt à la Russie qu'à la France ou à l'Allemagne. Le but principal du gouvernement austro-hongrois est le même qu'en France et en Allemagne; c'est de créer des chevaux aptes au service militaire. Il n'y a pas longtemps encore, la direction des haras (Hait entièrement entre les mains du Ministère de la guerre; tous les haras de l'Etat 6 kl ORIGINE DES CHEVAUX AUSTRO-HONGROIS. 241 étaient des haras militaires ' Militargestùte) et tous les dé- pôts d'étalons des dépôts de remontes [Beschàlremonti- rungs-Depots). Ce n'est qu'en 1869 que la Direction des haras fut confiée au Ministère de l'agriculture Ackerbau Fig. GG. — Cheval de Pinzgau, étalon à robe tigrée. D'après la photographie faite au concours hippique de Vienne. (Reproduction de la fig. 12. ministerium), les haras militaires furent transformés en haras de l'Etat [Staatsgestùtè) et les dépôts de remontes en dépôts d'étalons de l'État Staatshengsten-Depots). Mais le personnel dirigeant dans les dépôts est resté jusqu'à présent militaire, car c'est toujours les dépôts qui achètent et gardent, pendant un certain temps, les chevaux destinés à l'armée. LE CHEVAL. 31 242 LES CHEVAUX AUSTRO-HONGROIS. Tous les moyens d'encouragement de la production usités en France et en Allemagne sont aussi employés en Autriche- Hongrie : l'approbation avec primes des étalons privés, l'examen de tous les étalons destinés à la monte publique, la distribution des primes aux concours hippiques, etc. L'Autriche et la Hongrie possèdent chacune une direction des haras indépendante ; en outre la Groatie-Slavonie a une administration des haras autonome. Mais les règles de la di- rection sont les mêmes dans ces trois parties de l'empire. CHAPITRE II LES HARAS ET LES DEPOTS D ETALONS, L'Etat possède à présent six haras : quatre en Hongrie et deux en Autriche. En Hongrie : le haras de Mezohëgyes, dans l'arrondissement (comitat) d'Aras ; celui de Babolna , dans l'arrondissement de Komorn; celui de Kisber, non loin de Babolna et, depuis 1874, celui de Fogoras, en Transylva- nie. En Autriche : le haras de Radautz, dans la Bukovine et celui de Piber, en Styrie. En outre il y a en Autriche deux o-rands haras de la cour : un à Kladrub, en Bohême et l'autre à Lippiza, aux environs de Trieste. Le haras Mezohëgyes est le plus grand de tous les haras de l'État. Par son importance et son système d'élevage, il cor- respond au haras de Trakehnen en Prusse, à l'instar duquel il produit des chevaux d'attelage et de selle de quatre robes di- stinctes : bais, alezans, noirs et gris; mais ces chevaux sont plus riches en sang oriental que ceux de Trakehnen. Il y a quelques années le haras possédait environ 700 poulinières et 25 étalons : des pur sang et des demi-sang anglais et arabes, des anglo-arabes, des normands, des norfolks, quel- ques-uns de la race de Lippiza et de celle de Kladrub. Le haras de Babolna (170 poulinières et 12 étalons) élève 244 LES CHEVAUX AUSTRO-HONGROIS. exclusivement les pur sang et les demi-sang arabes, et le haras de Kisber (195 poulinières et 12 étalons) les pur sang et les demi-sang anglais. Le haras de Fogoras fut fondé, en 1874, avec des pouli- nières de Lippiza (voir page 245) et des étalons issus du sang espagnol. Le haras de Iladautz, en Bukovine, fut créé en 1792 avec des chevaux indigènes et des chevaux importés de la Petite Russie, des plaines du Don, du Caucase et de la Perse ; plus tard on y ajouta des reproducteurs turcs, de Lippiza et un étalon barbe. Mais c'est seulement après l'introduction de quelques étalons arabes que le haras a acquis sa physiono- mie actuelle. A présent il possède 350 poulinières et 20 éta- lons; en 1877 les 348 poulinières se répartissaient ainsi : 145 demi-sang arabes, 118 demi-sang anglais (1), 6 pur sang- arabes, 3 pur sang anglais, 48 de Lippiza et 28 anglo-nor- mands. Le haras de Piber, qui avait été supprimé en 1878, est rétabli depuis cinq ans; on l'a peuplé avec des étalons et des juments venus de Radautz. Les deux haras de la cour, à Kladrub et à Lippiza, fu- rent créés avec les chevaux de l'ancienne race espagnole. Au /taras de Kladrub, en Bohème, fondé il y a plus de 200 ans, l'ancienne race espagnole s'est conservée jusqu'à présent dans toute sa pureté, bien que, pour prévenir l'in- fluence dégénératrice de la trop proche parenté , on fût obligé d'introduire parmi les reproducteurs quelques étalons de sang étranger ; mais on tachait de choisir des individus d'une conformation analogue et d'origine semblable ; tels furent, par exemple, l'étalon gris qui fut acquis pour le ha- (1) Parmi ces derniers 28 norfolks. LES HARAS ET LES DÉPOTS D'ÉTALONS. 245 ras en 1843 de l'attelage du Pape, et l'étalon noir du haras Mezohëgyes, transporté à Kladrub en 1865. Gomme nous l'avons déjà dit, la race de Kladrub conserve jusqu'à présent tous les traits caractéristiques des anciens chevaux espagnols. Taille de im,70 à lm, > Fig. 69. — Coco, élalon ardennais, acheté en Belgique pour les haras de l'État russes. D'après photographie. que l'on pourrait appeler belge. Mais il y a plusieurs varié- tés : flamande, brabançonne, ardennaise, celle du Hainaut et autres dont les principales sont : la variété flamande et la variété ardennaise. La première est propre aux LES CHEVAUX BELGES. 259 contrées basses, la seconde est, au contraire, élevée dans les parties montagneuses de la Belgique. Le cheval flamand est un des chevaux de gros trait le plus grand et le plus lourd. D'une conformation mas- Fîk. 70. — Cheval des enviions de Namur. sive et d'une taille de lm,75 à lm,82, il a la tête assez noble, le plus souvent droite au chanfrein, mais en compa- raison avec le corps, disproportionnellement petite; l'enco- lure, au contraire, est lourde, épaisse, large et courte; le garrot bas (plus bas que la croupe), le dos aussi bas et or- dinairement ensellé ; la croupe courte, large, double et avalée 260 LES CHEVAUX DES AUTRES PAYS DE L'EUROPE. avec la queue attachée bas. La poitrine ample, les épaules droites, charnues et souvent chargées de graisse. Les mem- bres de l'arrière-main sont assez bien bâtis, musculeux et robustes ; ceux de l'avant-main ont la musculature plus fai- ble, les genoux un peu étroits et trop plats, les canons grêles et trop ronds. Les paturons droits et courts, les sabots lar- ges. Leur tempérament mou et leurs allures lentes les font propres seulement pour les travaux au pas. La croissance rapide est une de leurs qualités ; on commence à les em- ployer dès l'âge de deux ans. Le cheval ardennais est du même type, mais d'une taille plus petite, de lm,60 à lm,65, et d'une constitution beaucoup plus ramassée et plus harmonieuse. Ses membres sont plus secs, plus solides et doués d'une musculature bien développée. Le caractère du cheval est plus vif et ses mouvements plus rapides ; il trotte facilement et est bon non seulement pour les travaux de trait ou d'agriculture, mais aussi comme car- rossier. C'est le meilleur cheval belge ; mais son exportation à l'étranger est si grande qu'il devient rare même dans sa patrie. La figure 69 reproduit le portrait d'un excellent che- val ardennais. Aujourd'hui on élève en Belgique plus souvent des varié- tés moyennes entre la flamande et l'ardennaise. Un échan- tillon d'une de ces variétés est représenté figure 70. On trouve beaucoup de chevaux de cette variété dans les ré- gions de Namur et de Liège. Leur taille est de lm, 65 à lm,70. La robe des chevaux belges est variée ; on rencontre beau- coup de rouans. En 1880 la Belgique possédait 271,974 chevaux. Les chevaux de races belges , surtout de la variété ar- dennaise, sont élevés aussi dans le Luxembourg , dont la population chevaline est d'environ 20,000 têtes. CHAPITRE III LES CHEVAUX HOLLANDAIS. En Hollande, aussi bien qu'en Belgique, il n'y a ni haras de l'État ni grands haras particuliers, et la production che- valine est exclusivement l'œuvre de la population agricole du pays. Comme en Belgique et dans presque tous les pays où l'élève des chevaux reste entre les mains de cette classe la- borieuse, on ne produit dans la Hollande que des chevaux uti- les, c'est-à-dire plus ou moins grands et gros. Mais le type des chevaux hollandais est autre que celui de la Belgique, à l'exception cependant des régions limitrophes à celle-ci où le type hollandais se confond avec le belge. L'origine des chevaux hollandais est très obscure. Il est certain cependant qu'il y a dans leurs veines beaucoup de sang de l'ancienne race espagnole , et peut-être une dose plus ou moins grande de sang danois. Dans notre siècle on leur a infusé du sang anglais. On voit encore à présent les traces de l'ancienne race espagnole, dans la conformation du carrossier hollandais. Par exemple, les formes du cheval hollandais représenté figure 71 ressemblent en plusieurs points à celles du cheval mexicain reproduit par la figure 74, et le cheval mexi- 262 LES CHEVAUX DES AUTRES PAYS DE L'EUROPE. cain est, comme on le sait, le descendant direct de l'an- cienne race espagnole. Au dernier siècle, la Hollande était célèbre par ses trotteurs Fig. 71. — Cheval hollandais. D'après la photographie de J. Delton ( I'hotograjhie Mimique). le plus souvent à robe noire. Ils servirent de base pour la création des trotteurs russes (page 96) et des norfolks (page 4 34). Mais on ne s'occupe plus en Hollande de l'élevage spé- cial des trotteurs. Ceux que l'on y rencontre maintenant ne sont que les restes plus ou moins dégénérés de l'ancienne race. Nous reproduisons, figure 71, le portrait d'un des che- vaux hollandais modernes. LES CHEVAUX HOLLANDAIS. 263 Sa conformation est typique, mais sa robe est exception- nelle : sur le fond alezan, des taches blanches d'un dessin bizarre. Dans le nord de la Hollande, en Frise et Gronimnie, domine le type carrossier reproduit figure 71. La taille est de lm,69 à lm,75. La tète longue, étroite et légèrement busquée; l'encolure longue, élevée et bien arquée; le dos long, souvent un peu ensellé ; l'a croupe courte et arrondie, avec une queue attachée bas. Les membres relativement longs et assez grêles, rarement bien musclés ; les paturons mous, les sabots grands et plats. La crinière, la queue, le toupet et les fanons longs et touffus (les fanons du cheval représenté par la figure 71 sont coupés). Le tempérament plutôt mou, mais les mouvements libres, larges et souvent très rapides. La robe noire prédomine encore, mais d'autres couleurs ne sont pas rares non plus. Au sud de la Hollande il y a plus de chevaux de gros trait; dans les régions voisines de la Belgique ils se confondent avec les races belges. En 1889 la population chevaline de la Hollande s'élevait à 276,245. CHAPITRE IV. LES CHEVAUX DANOIS. Pendant les deux derniers siècles les chevaux danois avaient une réputation universelle et étaient exportés dans tous les pays de l'Europe. Les chevaux indigènes primitifs du Danemark n'étaient pas grands, mais robustes. Ils devinrent plus grands sous l'influence des reproducteurs de l'ancienne race espagnole et par suite des soins judicieux apportés à leur élevage. De tous les haras qui existaient autrefois en Danemark le plus important était sans contredit le haras de Frederiks- borg (près de Copenhague), qui fut fondé, en 1562, avec des chevaux de l'ancienne race espagnole auxquels furent ajou- tés des chevaux napolitains, turcs, anglais et frisons. Des chevaux espagnols on forma deux variétés : une noire et l'au- tre baie; des chevaux anglais, une variété grise et plus tard, avec le concours de deux étalons blancs (un de Wurtemberg et l'autre de Courlande), une sous-variété entièrement blan- che (1). Le haras de Frederiksborg était célèbre au dix- huitième siècle. Mais dès les premières années du siècle (1) Qui à son tour servit de base pour la création de la variété blanche en Hanovre. LES CHEVAUX DANOIS. 263 courant il commença à péricliter et fut enfin fermé en 1862. La décadence de la production chevaline dans le pays suivit à peu près la même marche. Le dernier coup lui fut Fig. 72. — Étalon danois, à robe baie, acheté en 1891 en Danemark pour les haras de l'État russes. D'après la photographie faite par le Docteur L. Simonoff. donné par l'annexion du Sleswig-Holstein à la Prusse, car avec ces deux provinces furent séparés du Danemark non seulement des terrains très favorables à l'élève de bestiaux, mais aussi un grand nombre des chevaux cpii appartenaient précisément au type le plus utile. LE CHEVAL. 3i 266 LES CHEVAUX DES AUTRES PAYS DE L'EUROPE. Aujourd'hui la population chevaline du Danemark est as- sez mélangée; en 1888 elle s'élevait à 375,533. Dans le Jutland, surtout dans sa partie septentrionale, on élève des chevaux de trait semblables à ceux de Sleswiû' a voir page 235). La figure 72 reproduit le portrait d'un de ces chevaux. Par la grandeur de leur taille et leur conformation, ils se rapprochent beaucoup du bitugue russe (voir page 70 et com- parer la figure 72 avec la figure 26 et la planche XVI . Les couleurs des robes sont variées. Dans le Seeland et dans toutes les autres îles du Danemark les chevaux sont plus petits de taille, d'une constitution plus ramassée et trapue, à l'encolure courte et épaisse, à la tête large et cunéiforme ( se rétrécissant rapidement vers le museau). Dans certaines contrées du littoral, on trouve de tous petits chevaux, le plus souvent gris, ressemblant aux poneys is- landais et, comme eux, vivant en pleine liberté dans un état demi-sauvage. Quant aux poneys (F Islande (1), ils ont la même conforma- tion que les poneys shetlandais (voir page 153), mais sont un peu plus grands détaille : de lm,20 à lm,24. L'élève des chevaux en Danemark est aussi principalement entre les mains des petits propriétaires fonciers. (1) L'île d'Islande appartient au Danemark. CHAPITRE V LES CHEVAUX ITALIENS. De tous les pays de l'Europe, l'Italie et le Portugal ont la population chevaline la plus clairsemée , un peu plus de 2 chevaux pour 100 habitants (1). Dans aucun autre pays de l'Europe la proportion ne tombe au dessous de 3,75 % (en Suisse); dans la plupart, elle est beaucoup plus élevée. Le rapport ne devient pas plus favorable si l'on compare le nombre de chevaux avec l'étendue territoriale de l'Italie : on arrive au chiffre 2 par kilomètre carré. Cette pauvreté numérique dénonce déjà l'état peu floris- sant de l'élève de chevaux en Italie ; mais il apparaît encore moins favorable si l'on considère les cpialités des chevaux élevés. L'Italie n'a jamais brillé d'un très grand éclat dans sa production chevaline ; mais pendant le seizième et le dix- septième siècles elle avait de bons chevaux, parmi lesquels la première place appartenait aux napolitains, qui descen- daient directement des chevaux importés en Italie de l'Espagne et ne représentaient qu'une variété de l'an- cienne race espagnole. La population chevaline actuelle de l'Italie est excessi- (1) Le chiffre de la population chevaline en Italie en 1890 était évalué approxi- mativement à 720.000, tandis que le nombre d'ânes n'était pas moindre de 1.000.000 et celui de mules atteignait 300.000. 2G8 LES CHEVAUX DES AUTRES PAYS DE L'EUROPE. vement hétérogène, très dégénérée et en majorité de petite taille. Quelques haras à Polesina (1) et aux environs de Ferrare possèdent encore un certain nombre des descendants directs de la race napolitaine transformés en chevaux d'attelage. Ils sont de grande taille, à la tête busquée, à l'arrière-main plus large et plus fort que l'avant-main, aux allures lentes, mais grandioses — tous les signes distinctifs des anciens chevaux napolitains. Les carrossiers noirs des cardinaux romains, élevés spé- cialement pour ce service aux environs de Rome, sont de la même origine et ont les mêmes formes et les mêmes qua- lités. En dehors de ces chevaux, il n'existe en Italie qu'une seule race indigène caractéristique, la race des poneys élevés dans l'île de Sardaigne. Ce sont de jolis petits chevaux de lm,30 à lin,40, le plus souvent bais, très résistants, harmonieu- sement et solidement bâtis ; par leur conformation et leurs qualités ils ressemblent aux chevaux corses (voir page 20:2 dont ils ont probablement la même origine orientale. Aussi bien que les corses, ils mènent dans leur île une vie indépendante, demi-sauvage. Une assez grande quantité de ces chevaux est importée annuellement sur le continent de l'Italie, où ils sont très goûtés. Ordinairement on les emploie attelés à de petites voitures , le plus souvent dans des carrioles à deux roues. Mais ils sont aussi très bons pour la selle. Parmi les chevaux de chasse favoris de feu Victor Emmanuel il y avait des poneys de Sardaigne. Comme partout en Europe, on a commencé en Italie à améliorer la population chevaline par des reproducteurs de- (1) Localité située près de la mer Adriatique entre le Pô et l'Adigc. LES CHEVAUX ITALIENS. 260 mi-sang et pur sang anglais. Il y a des haras qui élèvent des chevaux pour cela, il y a des dépôts d'étalons... mais tout se fait avec une indolence telle que le progrès se fera encore longtemps attendre, d'autant plus que la masse de la population italienne préfère les ânes, qui sont, en Ita- lie , peut-être moins nombreux qu'en Espagne , mais tou- jours beaucoup plus nombreux que les chevaux. La Direction des haras dépend du ministère de l'Agricul- ture ; en 1881 elle avait dans ses dépôts pour toute l'Italie 334 étalons, parmi lesquels 69 étaient pur sang et 206 demi- sang anglais, 46 pur sang et 13 demi-sang arabes. Les chevaux de gros trait manquent totalement ; ils sont remplacés par des bœufs et des mulets. Pour les travaux légers on emploie plus volontiers des ânes. CHAPITRE VI. LES CHEVAUX ESPAGNOLS. L'Espagne fut jadis célèbre par ses chevaux; mainte- nant ce sont les mulets et les ânes qui y jouent le rôle principal. Môme la plupart des voitures de ville sont or- dinairement attelées avec des mulets. Ces derniers avaient, il est vrai, toujours été préférés pour l'attelage , car les che- vaux célèbres de l'ancienne race étaient élevés exclusive-- ment pour la selle. Aujourd'hui le nombre des mulets est au moins deux fois, et celui des mulets et des ânes pris ensemble quatre fois plus grand que celui des chevaux. Quand, au huitième siècle, les Arabes conquirent l'Es- pagne, ils y introduisirent d'Afrique une grande quantité de chevaux légers du type oriental, les mêmes qui, quelques années plus tard, peuplèrent le midi de la France (voir pages 161 et 196). Ces chevaux se répandirent dans la moitié méridionale de l'Espagne , tandis que dans les montagnes du nord et surtout du nord-ouest domina tou- jours la race indigène de chevaux, plus lourds et plus grands di' taille, dont nous voyons jusqu'à présent les échantillons plus ou moins dégénérés dans les Pyrénées occidentales de l'Espagne <-l de la France. LES CHEVAUX ESPAGNOLS. 271 Mais les chevaux magnifiques qui, pendant le seizième et le dix-septième siècle, faisaient la gloire de l'Espagne n'ap- partenaient ni à la race arabe (barbe), ni à la race indigène du nord. Ils s'étaient formés probablement de croisements heu- Fig. 73. — Cheval espagnol (cl carnero). D'après la photographie de J. Delton {Photographie hippique, à Paris ). reusement combinés des deux. C'étaient des chevaux de taille moyenne , plutôt grands que petits ; ils avaient la tête bus- quée , l'encolure épaisse , mais fièrement relevée et arquée ; la poitrine et tout l'avant-main assez étroits, mais l'arrière- main ample et fort ; le dos long et mou ; la croupe courte , large et légèrement avalée. Le corps perché haut sur les membres bien musclés et robustes; les genoux loin de 272 LES CHEVAUX DES AUTRES PAYS DE L'EUROPE. terre et les jarrets fortement coudés; les paturons mous. La crinière et la queue longues et touffues. Les allures fières, grandioses, mais lentes. Le cheval levait les pieds de de- vant très haut et pliait les membres fortement sous le corps. C'était l'idéal du cheval de selle de haute école. On ne peut le comparer avec aucun des chevaux actuels de l'Espagne ; mais le cheval mexicain, reproduit figure 74, le rappelle beaucoup , parce que les chevaux mexicains sont des descendants plus directs de l'ancienne race espa- gnole que les chevaux qui existent en Espagne à présent. En Europe, la race est conservée presque pure au haras de Kladrub en Autriche (voir page 244] . Maintenant les chevaux espagnols sont très dégénérés. Dans le Midi dominent toujours les chevaux légers du type barbe ; ils ont beaucoup de traits communs avec les chevaux navarrins du midi de la France. On les appelle genettes. Plus au nord on rencontre des chevaux moins nobles, mais plus étoffés et plus robustes, connus sous le nom de elcarnero. Leur taille varie de lm,52 à lm,60; la tête lourde, busquée, ressemblant à celle du mouton (de là le nom de el caniero); l'encolure épaisse et courte, mais élevée, ornée d'une lon- gue crinière; la poitrine large et les épaules charnues; l'arrière-main, au contraire, étroit; le dos souvent mou; la croupe assez maigre et légèrement avalée , la queue bien fournie. Les membres relativement longs et pourvus de muscles rarement suffisamment développés. La robe de couleurs variées, souvent isabelle ou café au lait. Le tempé- rament ardent. La figure 73 offre le portrait d'un cl carnero. Il y a en Espagne quelques haras privés, qui élèvent des chevaux meilleurs, dont quelques-uns rappellent la célèbre race ancienne ; d'autres sont plus ou moins améliorés avec LES CHEVAUX ESPAGNOLS. 273 du sang anglais. Mais en général la production chevaline est dans un triste état. Cependant, au dire des connaisseurs, il existe en Espagne tout ce qu'il faut pour créer, avec le concours des reproducteurs anglais et arabes , de très bons chevaux. Il ne manque pour cela que la bonne volonté ! Le gouvernement possède des dépôts d'étalons, mais pau- vrement fournis; quant aux habitants ils sont plus qu'indif- férents au progrès de leur production chevaline. Des chevaux du Portugal il n'y a rien à dire, d'autant plus qu'on les connaît très peu. Là aussi dominent les mulets et les ânes. LE CHEVAL. 3:. CHAPITRE VII. LES CHEVAUX SUISSES. Les chevaux de la Suisse sont loin d'avoir la réputation de ses vaches. Cependant, ils ne sont pas à dédaigner; et même pour un pays dont le territoire est presque entièrement occupé par de hautes montagnes , le chiffre de la population chevaline est relativement élevé : plus de 100,000 têtes pour 2,846,000 habitants , ce qui fait environ 4 chevaux pour 100 habitants. Pour un pays plat ce serait peu, mais pour la Suisse c'est plus que suffisant. L'élève de chevaux se trouve entre les mains de la popu- lation agricole et s'exerce d'une manière assez intelligente. On ne produit que des chevaux utiles , des chevaux de trait plus ou moins grands et lourds. La plupart de ces chevaux appartiennent au même type occidental ou norique que l'on trouve dans les parties voi- sines de la Bavière et de l'Autriche (voir le cheval de Pinz- gau, pages 16, 236 et 239). Il est vrai que ce type en Suisse est moins pur, étant déjà plus ou moins mélangé avec le type oriental, surtout dans les cantons français. La taille des chevaux varie entre lm,50 et lm,70; la tête est carrée, ordinairement lourde et charnue, mais quelque- LES CHEVAUX SUISSES. 275 fois, au contraire, légère et sèche ; l'encolure courte ; le garrot bas; le dos et les reins sont longs, souvent ensellés; la croupe est double et avalée , avec la queue attachée bas ; la poitrine large, mais pas assez profonde; les côtes sont bien cerclées et le ventre est parfois volumineux. Les épaules sont droites; les membres solides, bien que leurs muscles ne soient pas toujours suffisamment développés et que leurs articulations manquent souvent de force ; les canons ordinai- rement trop empâtés ; les paturons peu inclinés ; les sabots grands et plats. Les allures ne sont pas assez larges, parfois irrégulières, et la résistance n'est pas très grande. Les robes sont variées, mais le bai et le gris prédominent. On distingue plusieurs variétés ; les plus connues sont : la variété de Fribourg ou du Jura, dans les cantons occiden- taux , la variété d'Erlenbach , dans la partie supérieure du canton de Berne et à Emmenthal, et la variété de Schwyz, dans les cantons de Schwyz, cle Lucerne, d'Uri et de Saint- Gall. Jusqu'à ces derniers temps la Suisse n'élevait que des che- vaux du type indigène ; mais à présent on a souvent recours aux reproducteurs étrangers : aux demi-sang anglais, aux anglo-normands, etc. CHAPITRE VIII. LES CHEVAUX DE LA PENINSULE BALKANIQUE. Il n'y a pas grand'chose à dire des chevaux des pays qui composent la presqu'île balkanique. Ils appartiennent tous au type oriental; par leur taille et la variété de leurs formes ils peuvent être comparés aux chevaux de paysans russes (voir page 80), avec lesquels ils ont probablement la même origine — des chevaux de steppes russes. Les écuries du sultan et des hauts dignitaires turcs possè- dent, sans doute, des chevaux supérieurs; mais ils viennent tous de l'Arabie ou de la Syrie. Après la guerre de Grimée beaucoup de Gircassiens du Caucase et de Tartares de la Crimée ont émigré avec leurs chevaux dans la Turquie d'Asie et d'Europe , et contribué ainsi à une certaine amélioration de la population chevaline de la péninsule balkanique. En Grèce, on compte environ 100,000 chevaux et autant de mulets et d'ânes. Le type du cheval y a dégénéré en de tout petits poneys, dont la taille, sur quelques îles helléniques, par exemple sur l'île de Scyros, est même inférieure à celle des poneys shetlandais. HUITIEME PARTIE. LES CHEVAUX DE L'AMÉRIQUE ET DE L'AUSTRALIE. Avant d'être découvertes par les Européens ces deux par- ties du Nouveau Monde n'avaient pas de chevaux. On trouve aujourd'hui en Amérique des restes fossiles de squelettes qui donnent le droit de supposer qu'autrefois y avaient existé des animaux ressemblant au cheval. Mais de- puis cette époque tant de siècles s'étaient écoulés que les indigènes du pays n'en conservaient plus aucun souvenir et contemplaient les chevaux amenés par les Espagnols avec effroi et admiration. En Australie, avant sa colonisation par les Européens, le kangourou était le seul quadrupède de grande taille. CHAPITRE I LES CHEVAUX AMERICAINS. C'est lors de la conquête de l'Amérique par les Espagnols que les premiers chevaux y furent importés, notamment en Floride, au Mexique et aux bords du Rio-de-la-Plata. Une partie de ces animaux s'évada dans les pampas de l'Amé- rique du sud et dans les savanes de l'Amérique du nord, et s'y multiplia avec une telle rapidité que déjà, quelques di- zaines d'années après, on y trouva des troupeaux entiers de chevaux sauvages, connus maintenant dans l'Amérique du Sud sous le nom de cimarrones et en Amérique du Nord sous celui de mustangs. De la Floride et du Mexique les mustangs se répandirent ù l'ouest vers la Californie et au nord jusqu'au Canada. Les ciniarrones envahirent toutes les prairies de l'Amérique du Sud, mais surtout les pampas de l'Uruguay, du Paraguay et de la République Argentine; au sud ils descendirent jus- qu'aux confins méridionaux de la Patagonie. La population chevaline de l'Amérique du Sud compte plusieurs millions de têtes ; dans la République Argentine et en Uruguay seulement elle atteint le chiffre d'environ G millions. LES CHEVAUX AMERICAINS. 279 Dans l'Amérique du Nord , les États-Unis possèdent plus de quinze millions et le Canada plus de deux millions et demi de chevaux. Dans l'Amérique du Sud et dans les parties méridionales Fig. 74. — Le cheval mexicain, blanc. D'après la photographie de J, Delton (Photographie hippique). de l'Amérique du Nord, notamment dans le Mexique, les chevaux sont d'origine espagnole. Les troupeaux sauvages de mustangs et de cimarrones font la majorité. Comme tous les chevaux sauvages, ils ont les formes assez grossières et anguleuses et sont plus petits que les anciens chevaux espagnols dont ils proviennent. Parmi les chevaux domesti- 280 LES CHEVAUX DE L'AMERIQUE ET DE L'AUSTRALIE. qués, dans les villes, on rencontre des animaux plus beaux d'apparence et plus grands de taille, qui par leurs formes, leur dressage et même par leur accoutrement rappellent les anciens chevaux espagnols beaucoup plus qu'aucun de ceux qui existent actuellement en Espagne. Aux chevaux de cette catégorie appartient le cheval mexicain reproduit fig. 74. Plus on s'éloigne du Mexique vers le nord et surtout vers le nord-est, plus les chevaux d'origine espagnole deviennent rares. Dans les territoires éloignés de l'Ouest, où la civili- sation a rejeté les Indiens sauvages, prédominent encore les mustangs ; mais à l'est des Etats-Unis et dans le Canada la population chevaline provient d'une autre source et a un tout autre aspect. Dans les régions intermédiaires on rencontre des métis issus du croisement des mustangs avec des chevaux du Ca- nada ou des Etats de l'Est. Les poneys indiens du bassin de Grand-River appartiennent à cette sorte de métis. CHAPITRE II LES CHEVAUX DES ETATS-UNIS, Avec la Russie, les États-Unis sont le pays le plus riche en chevaux. D'après le recensement fait en 1891 la popula- tion chevaline des Etats-Unis s'élevait au chiffre de 15.498.140, c'est-à-dire qu'il y avait plus de 25 chevaux pour 100 habitants. Mais les Etats-Unis se rapprochent encore de la Russie pour les qualités des chevaux qu'ils élèvent. Dans l'élevage naturel leurs mustangs correspondent à nos che- vaux de steppes sauvages ou demi-sauvages; quant à l'élève régulier, ils ont la même spécialité que nous, notamment la production des trotteurs et en général des chevaux de trait plus ou moins rapides. Nous avons déjà parlé de l'origine espagnole des mustangs et de leur propagation surtout dans les territoires du sud- ouest des Etats-Unis. Le centre de la production des che- vaux élevés régulièrement dans les haras est la Nouvelle- Angleterre , c'est-à-dire les Etats situés au nord-est de la république (1). Mais avec l'accroissement de la population ce centre s'élargit de plus en plus en allant à l'ouest jus- qu'à la Californie. (1) On a donné le nom de Nouvelle-Angleterre aux territoires occupés par les premiers colons anglais; elle comprend les États du Maine, New-Hampshire, Vermont, Massachusetts, Rhode-Island et Connecticut. LE CHEVAL. 36 282 LES CHEVAUX DE L'AMÉRIQUE ET DE L'AUSTRALIE. C'est entre 1608 et 1635 que les premiers chevaux furent introduits clans la Nouvelle-Angleterre. Les colons anglais amenèrent des chevaux anglais par Jamestown, en Virginie, et par Boston, en Massachusetts; les Hollandais importè- rent avec eux au Nouveau-Amsterdam, débaptisé plus tard en New-York (4), des chevaux hollandais et un certain nombre de chevaux danois. Les chevaux anglais prédominaient sans doute , d'autant plus crue leur importation continuait toujours avec l'arrivage de nouveaux colons de l'Angleterre. Avec cet ensemble , auquel probablement fut ajoutée une certaine dose du sang espagnol de mustang, les Américains créèrent les sortes de chevaux qui leur furent nécessaires. Parmi ceux-ci les chevaux ambleurs de Narragansett, en Rhode-Island, se distinguaient déjà en 1680 par leur grande rapidité qui fut presque égale à celle des trotteurs d'aujour- d'hui. En effet, on cite des narragansetts qui faisaient un mille en moins de 2 min. et demie (un kilomètre en 1 min. 33 sec. un quart] . Les chevaux que les colons anglais amenèrent en Amé- rique étaient de cette excellente race indigène anglaise qui existait en Angleterre immédiatement avant l'époque de la création des pur sang anglais (voir page 118). Quant aux chevaux de pur sang, on commença à les importer seulement depuis 1750 ; mais, jusqu'à la fin de la guerre pour l'indépen- dance, leur importation fut si peu importante qu'ils ne purent avoir une influence sensible sur la production chevaline en Amérique. Au contraire, pendant les vingt ou vingt-cinq ans «lui suivirent la séparation définitive des Etats-Unis de l' An- gleterre après 1783) l'importation des pur sang devint si (1) New- York fut fondé parles Hollandais en 1613 sous le nom de Nouveau- Amsterdam] il n'a reçu son nom actuel qu"en 1GG4 quand il fut conquis par les Anglais. LES CHEVAUX DES ÉTATS-UNIS. 283 considérable et leur influence sur la production chevaline si grande que les chevaux américains se transformèrent pres- que tous en demi-sang. Les ambleurs narragansetts dispa- rurent et on ne peut trouver maintenant leurs derniers des- cendants que dans les territoires de l'ouest, au Canada et dans les îles des Indes occidentales où ils furent transportés de l'Amérique. Certaines qualités intrinsèques de ces che- vaux étaient cependant si bien fixées, si constantes qu'elles furent transmises et se transmettent de nos jours encore à leurs descendants devenus depuis longtemps demi-sang. C'est précisément par cette transmission héréditaire que s'explique la manifestation si fréquente de l'amble parmi les trotteurs américains (voir page 285). Après la création de leurs trotteurs , les Américains sont devenus beaucoup moins enthousiastes pour les pur sang anglais, l'importation annuelle de ceux-ci diminua progressi- vement et à présent elle est d'autant plus limitée que, pour les besoins des courses, les Américains produisent leurs pro- pres pur sang anglais (voir plus loin). En résumé, la population chevaline actuelle des États- Unis est composée : des mustangs sauvages ou demi-sau- vages habitant les prairies et les savanes et représentant une race à part d'origine espagnole , et d'une quantité con- sidérable de demi-sang, n'appartenant à aucune race dé- finie. En outre, on élève un certain nombre des pur sang anglais. Mais ce qui caractérise la production chevaline des Etats- Unis , ce qui lui donne un cachet spécial ; ce sont leurs trot- teurs. Cependant le mot « trotteurs » a un sens trop étroit pour exprimer la vérité entière, car la spécialité des Amé- ricains est de produire non seulement des trotteurs ra- pides, mais aussi des ambleurs plus rapides encore. 284 LES CHEVAUX DE L'AMERIQUE ET DE L'AUSTRALIE. On peut dire que dans ce sens élargi ladite spécialité embrasse tout ce qui concerne l'élève régulier des chevaux aux États-Unis. Elever un cheval qui puisse courir plus ou moins vite, voilà le principe qui s'applique non seulement à l'élevage de tous leurs chevaux de trait léger, mais aussi à celui de leurs chevaux de gros trait. Leurs chevaux de gros trait sont aussi trotteurs, mais trotteurs plus lourds et par conséquent moins rapides: presque tous sont en même temps de bons carrossiers. Les Yankees ne sont pas grands amateurs des voyages ou promenades à cheval ; ils préfèrent l'équipage , et ils n'élèvent pas de chevaux de selle spéciaux. Mais la plu- part de leurs chevaux sont « à deux fins », c'est-à-dire peu- vent servir aussi bien pour l'attelage que pour la selle. L'expérience a démontré que même parmi leurs chevaux de gros trait on peut trouver de quoi remonter des régi- ments de cavalerie (1). A l'inverse des Anglais, les Américains tendent à créer non pas des chevaux spéciaux pour chaque usage, mais plutôt des chevaux universels, bons à tous les emplois. On parle et on écrit beaucoup en Europe sur les trotteurs américains , on admire leur rapidité extraordinaire ; mais ce dont on ne parle pas du tout et qui est, pour nous, encore plus remarquable dans la production chevaline des Etats- Unis , ce sont les ambleurs américains. Il existe des che- vaux ambleurs partout ; en Russie il y en a même beaucoup ; mais nulle part, à l'exception des Etats-Unis, ils ne font l'objet d'une production spéciale. Pendant assez longtemps les Américains négligèrent leurs (1) A l'époque de l'insurrection du Canada, le lor régiment anglais de dragons des gardes fut monté sur des chevaux de Vermont (chevaux de gros trait — voir page 300), et les cavaliers trouvèrent leurs montures excellentes. LES CHEVAUX DES ETATS-UNIS. 285 ambleurs, et tâchèrent même de les anéantir en les transfor- mant en trotteurs , leur refusant l'honneur de participer aux courses, et tout cela à cause de leur allure irrégulière! Mais rien n'y fit. L'allure irrégulière triompha de tout, ce qui prouve d'une manière incontestable qu'elle fut assez natu- relle pour être transmise héréditairement avec une opiniâtreté désolante. Par un retour d'atavisme, l'amble se manifestait parmi les membres des familles les plus respectées des trot- teurs; des ambleurs naissaient de pères et de mères qui avaient toujours été des trotteurs réguliers, parce que dans leurs veines avaient été transmises quelques gouttes de sang de leurs lointains ancêtres, ambleurs narragansetts. On a fini par accepter les ambleurs, et, les ayant acceptés, on commence déjà à en être fier, car les ambleurs sont en général plus rapides que les trotteurs et promettent pour l'avenir un développement de vélocité qui probablement ne pourra jamais être atteint par les trotteurs. Nous verrons plus loin que les trotteurs américains sont , du moins en partie, redevables de leur rapidité à leur parenté avec les ambleurs. Les ambleurs (pacers). L'amble des ambleurs actuels est l'héritage que leur ont laissé leurs ancêtres primitifs, les ambleurs de Narragansett qui, comme nous l'avons dit, naquirent des croisements des chevaux anglais de l'ancienne race avec des chevaux hol- landais, et peut-être aussi, danois ^voir page 282); mais les chevaux anglais, parmi lesquels il y avait sans doute beau- coup d ambleurs, formaient la base principale (1). Plus tard le (1) Il est étonnant que maintenant on ne trouve presque pas d'ambleurs dans la Grande-Bretagne. Tous ont disparu. 286 LES CHEVAUX DE L'AMÉRIQUE ET DE L'AUSTRALIE. type narragansett fut détruit par les croisements avec les pur sang et demi-sang anglais ; les chevaux sont devenus demi- sanir de différents degrés. Plusieurs furent transformés en trotteurs; mais beaucoup, malgré tous les efforts, restèrent ambleurs. Aujourd'hui, en Amérique, il existe aussi des courses pour les ambleurs et ceux qui y prouvent une certaine rapidité sont, de même que les trotteurs, inscrits dans les regis- tres comme standard liorses. Mais comme les ambleurs sont en moyenne plus rapides que les trotteurs, on a tâché d'égaliser les chances, en relevant proportionnellement le standard pour les ambleurs. Ainsi pour devenir standard horse le trotteur doit avoir parcouru un mille au moins en 2 minutes 30 secondes et l'ambleur au moins en 2 minutes 25 secondes. Et les éleveurs ne trouvent même pas cette dif- férence suffisamment favorable au trotteur et exigent qu'on relève le standard pour les ambleurs jusqu'à 2 minutes 20 secondes. Les registres annuels des chevaux qui ont couru prouvent que les ambleurs sont en général plus rapides que les trotteurs. En 1891 les deux chevaux les plus rapides de l'année étaient les ambleurs Direct (représenté fîg. 75) et JoJinston. Le premier a parcouru un mille en 2 minutes 6 secondes et le dernier en 2 minutes 6 secondes et demie ; tandis que le plus rapide trotteur de cette même année, Sunol, n'a franchi la même distance qu'en 2 minutes 8 secondes et demie. En 1892, les deux chevaux les plus rapides étaient l'am- bleur Mascot et le trotteur Nancy Hanks; tous les deux ont fait un mille en 2 minutes 4 secondes. Mais huit ambleurs ont parcouru dans cette même année un mille en moins de jL minutes 7 secondes et demie, tandis que parmi les trot- LES CHEVAUX DES ÉTATS-UNIS. 287 teurs Nancy Hanks seule a obtenu le même résultat. Les ambleurs et les trotteurs étaient à peu près dans les mêmes rapports numériques pour les autres grandes vitesses obte- nues. Fig. 75. — Direct, célèbre ambleur américain; noii D'apris la photogravure île Clark'» Horse Revieic. Il y a, en Amérique, beaucoup de chevaux qui possèdent au même degré les deux allures, le trot et l'amble. C'est ordinairement à l'amble qu'ils courent le plus vite. Par exem- ple, Jay-Eye-See a pu faire un mille au trot en 2 minutes 10 secondes et à l'amble en 2 minutes 6 secondes et demie. Par leur extérieur, les ambleurs ne diffèrent en rien des 288 LES CHEVAUX DE L'AMÉRIQUE ET DE L'AUSTRALIE. trotteurs; comme ces derniers, ils sont pour la plupart des demi-sang. La fîg. 75 reproduit le portrait d'un des plus célèbres coureurs de notre temps, de l'ambleur Direct. Jadis, quand on négligeait les ambleurs, on s'occupait peu de leur éducation et de leur dressage. Alors on rencontrait souvent des ambleurs dont les allures n'étaient pas assez belles. Mais aujourd'hui les ambleurs sont ordinairement bien dressés et ne le cèdent plus en rien aux trotteurs, même à ce point de vue. Les ambleurs sont assez communs aux Etats-Unis, mais c'est surtout dans le Tennessee, Kentucky, l'Illinois, l'In- diana, l'Ohio et le Missouri qu'on les trouve le plus souvent. Outre de nombreux petits éleveurs , il y a maintenant quel- ques propriétaires de grands haras élevant spécialement des ambleurs ; tel est, par exemple, le haras de Campbell Brown, dans le Tennessee . Il naît annuellement un assez grand nombre d'ambleurs dans les haras de trotteurs, de parents trotteurs, en vertu de cette loi d'atavisme dont nous avons déjà parlé plus haut (page 285) et à laquelle nous reviendrons encore au sujet des trotteurs. Presque dans chaque famille de trotteurs américains, on voit de temps en temps apparaître ces am- bleurs, que les Américains désignent sous le nom de trot- tin g-bred pacers (ambleurs nés trotteurs). Plusieurs sont ainsi célèbres par leur généalogie, qui remonte souvent jusqu'à Hambletonian 10 (voir page 291). Les trotteurs (trotters). 11 n'y a pas plus de vingt-cinq ou trente ans que l'atten- tion de 1'Lurope s'est portée sur les trotteurs américains ; LES CHEVAUX DES ÉTATS-UNIS. 289 mais en Amérique la prédilection pour les trotteurs et, en général, pour les chevaux courant vite, date encore du temps des narragansetts (voir page 282. Après l'importation de Messenger (voir page 290) et la création de certaines familles de trotteurs, la prédilection est devenue une passion. L'origine des trotteurs américains est beaucoup moins connue que celles des trotteurs russes qui tous descendent de la même race créée avec des éléments connus Voir page 9Gj. Quand on parle des trotteurs américains, on désigne ordi- nairement comme leur procréateur l'étalon anglais Messen- ger, importé à Philadelphie en 1788, et, sans autres préam- bules, on en conclut que les trotteurs américains proviennent des pur sang anglais et que c'est précisément grâce à cette circonstance qu'ils sont doués d'une rapidité aussi extraordi- naire... Donc, pour augmenter la rapidité de nos trotteurs européens, il faut leur infuser le plus de pur sang anglais possible! En raisonnant ainsi, les éleveurs français onttrans- formé leurs trotteurs presque en pur sang. En Russie on était jusqu'à présent moins hardi, mais on a fait déjà assez dans ce sens pour miner la solidité et amincir les formes de plusieurs de nos trotteurs, sans cependant arriver pour cela à augmenter sensiblement leur rapidité. Il y a aussi en Amé- rique quelques éleveurs qui croient à la toute-puissance du pur sang anglais, par exemple le propriétaire du haras Palo Alto, en Californie. Mais l'opinion générale en Améri- que est que l'infusion du pur sang anglais est plutôt nuisible qu'utile au trotteur. En réalité le pur sang anglais n'a joué aucun rôle dans la création des trotteurs américains. Des trotteurs et des ambleurs très rapides existaient dans la Nouvelle Angleterre non seulement avant Messenger, mais avant l'arrivée en Amérique d'aucun cheval de pur sang (voir page 282). LE CHEVAL. 37 290 LES CHEVAUX DE L'AMERIQUE ET DE L'AUSTRALIE. Il est hors de cloute maintenant que les trotteurs américains primitifs ont été formés des mêmes éléments que les am- bleurs de Narragansett, c'est-à-dire du croisement des che- vaux anglais de l'ancienne race indigène (avant les pur sang) avec des chevaux hollandais et peut-être aussi des danois (page 282). Il est plus que probable, même, que la majorité ou du moins beaucoup de ces trotteurs sont issus directement des ambleurs narragansetts, l'allure de ceux-ci ayant été transformée en trot par l'éducation et le dressage. Dans tous les cas, la source primitive des trotteurs et des ambleurs américains est la même. C'est la seule raison qui puisse expliquer les rechutes fréquentes dans l'amble parmi les trotteurs (pages 285 et 288), et la facilité avec laquelle les trotteurs sont transformés, par l'éducation, en ambleurs et, réciproquement, les ambleurs en trotteurs. Le célèbre am- bleur Direct, représenté fig. 75, naquit de l'ombleur Direc- tor; mais il était d'abord trotteur et fut transformé en am- bleur seulement à l'âge de 6 ans. Des transformations inverses se pratiquent plus fréquemment (1). Il existe beaucoup de chevaux qui sont en même temps bons trotteurs et excel- lents ambleurs (voir plus haut Jay-Eye-See, page 287). L'arrivée en grand nombre des pur sang et des demi-sang anglais, après 1783, eut pour résultats, comme nous l'avons déjà dit, la transformation de la majorité des chevaux en de- mi-sang et la disparition presque complète du type narra- gansett (voir page 283). Cependant, aucun de ces chevaux n'exerça une influence visible sur la production des trotteurs, à l'exception de Mes- senger, importé à Philadelphie en 1788. C'est dans la combi- naison du sang de celui-ci avec ce qui était resté des anciens (1) A cause de la préférence qu'on a donnée jusqu'à présent au trotteur. LES CHEVAUX DES ÉTATS-UNIS. 291 narragansetts qu'il faut chercher la source des trotteurs américains actuels. Mais, précisément, Messenger n'était pas du tout un pur sang anglais. Il était fils de Mambrino, né d'un étalon arabe et d'une jument anglaise d'ancienne race indigène (celle qui existait avant la création du pur sang, voir page 118). L'ori- gine de la mère de Messenger reste inconnue. Par leur exté- rieur, Mambrino et Messenger ne ressemblaient pas du tout aux pur sang anglais. Le portrait de Mambrino rappelle plu- tôt un robuste trotteur russe, par exemple un de ceux qui sont reproduits sur les planches XXI, XXII et XXVI. Quant à Messenger, c'était un cheval gris, de lm,57 de hauteur, d'une constitution solide, à l'encolure courte, à la tête grosse et légèrement busquée, ornée de longues oreilles. Son ap- parence n'était pas belle, mais empreinte d'une grande enero-ie. o Messenger fonctionna comme reproducteur pendant vingt ans et laissa plusieurs fils dont les plus célèbres par leur pos- térité ont été Bis/toj/s Ilambletonian et Mambrino. Toutes les familles plus ou moins connues des trotteurs américains tirent leur origine de ces deux fils de Messenger. La famille de Ilambletonian 10 est considérée comme la plus célèbre de toutes. Cet Hambletonian 10 était un éta- lon bai, de lm,57 et d'une forte constitution. Il naquit en 1849 iïAbdallach, fils de Mambrino et petit-fils de Messenger, et d'une jument qui était fille de Bellfounder (1) et par sa mère portait dans ses veines un mélange du sano» indigène avec celui de Bishop's Ilambletonian. Dès l'âge de deux ans Hambletonian 10 fut mis aux haras, pendant sa vie il saillit (1) Bellfounder, importé d'Angleterre, n'était pas pur sang, mais un cheval de route (roadster) ou, peut-être, norfolk. 292 LES CHEVAUX DE L'AMERIQUE ET DE L'AUSTRALIE. 1800 poulinières et produisit plus de 1,300 poulains. C'est le plus grand chef de famille des trotteurs américains, non seulement à cause du nombre, mais aussi à cause des qua- lités supérieures de sa postérité. On trouve maintenant du sang hambletonian clans presque tous les trotteurs et dans toutes les familles de trotteurs plus ou moins célèbres. La famille de Mambrino Chief occupe la seconde place après celle de Hambletonian 10. Mambrino Chief naquit en 1844 d'une jument inconnue (probablement indigène; et de Mambrino Paymaster, fds de Mambrino et petit-fds de Mes- senger. La postérité laissée par Mambrino Chief est beau- coup moins nombreuse que celle de Hambletonian 10, mais d'une très bonne qualité aussi. On apprécie surtout la des- cendance de Mambrino Patchen, lils de Mambrino Chief. Il faut ajouter encore la famille de Clay qui est cependant beaucoup moins importante que les deux premières. Elle fut fondée par Andrew Jackson, né en 1828 d'une jument ambleuse indigène et de Young Bashaw, fils de Grand Bashaw, étalon arabe importé de l'Angleterre, et d'une ju- ment qui était petite-fille de Messenger. D'Andrew Jackson et d'une jument inconnue naquit en 1837 Henry Clay qui produisit plusieurs autres Clays, dont Ilarry Clay, Cas- sais M. Clay Jr. et Kentucky Clay, sont devenus chefs de sous-familles assez connues. La famille de l'étalon indigène Justin Morgan , né en 1793, fut autrefois assez célèbre, mais à présent elle ne produit plus que de bons chevaux d'attelage qui ne sont pas assez rapides pour figurer aux courses. Les trois familles citées plus haut ont formé une grande quantité des branches ou sous- familles dont les plus impor- tantes sont : Les Wilkes, descendants de Georges IVilkes, lils de LES CHEVAUX DES ETATS-UNIS. 293 Hambletonian 10 et de Daily Spanker, de la famille de Glay. Les Bel monts, descendants de Belmont, fds d'Alexander's Abdallah, qui naquit de Hambletonian 10 et de la jument Belle, de la famille de Mambrino Ghief. Le fds de Belmont, Nutwood, a déjà réussi à fonder une sous-famille de Nut- woods. Les Electioneers, descendants à'Electioneer, fds de Ilam- bletonian 10 et de Green Mountain Maid, jument de la famille de Clay. Electioneer, né en 1868, fut pendant les douze der- nières années de sa vie (il est mort en 1890) le reproducteur principal au haras du sénateur Stanford, à Palo Alto, en Ca- lifornie, où on le faisait saillir principalement des juments anglaises pur sang et demi-sang. Ses descendants sont donc très riches en pur sang. Parmi eux trois se sont distingués : Palo Alto, Sunol etArion. La plus grande rapidité des deux premiers était 1 mille en 2 minutes 8 secondes un quart et celle du dernier 1 mille en 2 minutes 10 secondes trois quarts. Ces descendants directs d'Electioneer ont dans leurs veines encore assez de sang de Hambletonians. Que sera la posté- rité plus éloignée? C'est le secret de l'avenir. Après celles-ci, les sous-familles les plus connues sont celles de Volunteer, de Director (père de Direct, représenté fig. 75), d'Alexander's Abdallah, de IJappy Médium — tous les quatre fds de Hambletonian 10; de Mambrino Patchen fds de Mambrino Chiefj et plusieurs autres. Nous voyons que presque dans toutes les sous-familles domine le sang de Hambletonian 10, mélangé ordinairement, le plus souvent par la ligne maternelle, avec le sang de l'une de deux autres familles , celles de Mambrino Chief et de Clay, quelquefois avec le sang de toutes les deux. Les Américains ne font pas cependant grand cas de '294 LES CHEVAUX DE L'AMERIQUE ET DE L'AUSTRALIE. la pureté de race ou d'origine et introduisent volontiers dans leurs familles de trotteurs des chevaux qui n'ont aucun pedigree, si ces chevaux courent vite et sont d'une constitution acceptable. Nous avons vu des poulinières d'origine inconnue figurer dans les trois principales familles de trotteurs. La même chose arrive, le cas échéant, avec les sous-familles. Il n'y a pas longtemps encore, un étalon ambleur du Ca- nada, Pi lot, accouplé avec une jument d'origine inconnue, a produit une famille de Pilot, dont on croise volontiers les membres, renommés par leur rapidité, avec les descendants de Mambletonian 10, de Mambrino Chief, etc. Et les ré- sultats sont excellents. La mère de Jay-Eye-See, que nous avons mentionné plus haut (page 287), était la fille de Pilot; dans NuUvood (fils de Belmont, page 293) il existe aussi une certaine dose du sang de Pilot. Voilà le résumé des règles générales d'après lesquelles agissent les éleveurs américains : Accoupler entre eux les chevaux les plus rapides et les mieux constitués, sans faire trop d'attention à leur origine (1). En accouplant, choisir les juments avec non moins de soin que les étalons, et même avec plus de soin les premières que les derniers, car, selon leur opinion, basée sur l'expé- rience, les juments exercent sur la postérité plus d'influence que les étalons. Plusieurs hippologues américains croient (1) Cela ne veut pas dire, cependant, que les Américains ne font aucune atten- tion aux pedigrees de leurs reproducteurs. Ils apprécient beaucoup leurs célèbres familles de trotteurs et choisissent leurs reproductears principalement parmi les descendants de ces familles; mais ils préféreront volontiers un reproducteur d'o- rigine basse ou inconnue, mais très rapide et bien constitué, au reproducteur des- cendant d'une famille célèbre, mais n'ayant pas d'allures rapides; et, si c'est nécessaire, ils accoupleront, sans cérémonie, le plébéien éprouvé avec le cheval de la plus haute descendance. LES CHEVAUX DES ÉTATS-UNIS. 29ô qu'il serait plus juste de désigner les familles d'après les noms des juments que d'après ceux des étalons. Commencer l'éducation du cheval du jour de sa naissance et ne l'élever jamais dans l'oisiveté; ne pas se contenter des exercices nécessaires pour le dressage, mais lui assigner journelle- ment un lot de vrai travail correspondant à ses forces. Nourrir le cheval bien et suffisamment, mais sans l'en- graisser. Le traiter avec douceur et autant que possible se passer du fouet. Le but de la majorité des grands et petits éleveurs est de produire des trotteurs (ou ambleurs), mais des trotteurs bons non seulement pour les courses, mais aussi et même princi- palement pour les travaux utiles. Ceux qui sont aptes pour les courses sont choisis après. C'est pourquoi la plupart des trotteurs que l'on voit se distinguer aux courses ne sont pas les résultats d'un élevage spécial (i), mais sont des chevaux de trait ordinaires. Et le plus souvent ils ne com- mencent à courir qu'après avoir déjà suffisamment travaillé ailleurs, rarement avant l'âge de six ans et quelquefois beau- coup plus tard. Depuis quelque temps, cependant,, il existe en Amérique des haras dont le but principal est d'élever les trotteurs pour les courses. Après tout ce que nous avons dit, il est évident que les trotteurs et les ambleurs américains ne peuvent pas avoir cette homogénéité relative des formes qui distingue les trotteurs russes. Ils sont tous ou presque tous demi-sano-. Les uns ressemblent par leur extérieur aux trotteurs russes, les autres aux anglo-normands français, d'autres encore aux demi-sang ou même aux pur sang anglais; il y en a qui rappellent les chevaux de trait ordinaires. (1) A l'exception sans doute de l'entraînement nécessaire pour préparer aux courses les chevaux qui y sont destinés. 290 LES CHEVAUX DE L'AMERIQUE ET DE L'AUSTRALIE. La taille des trotteurs et des ambleurs américains varie beaucoup : de lm,54à lm,64; la robe est de couleurs diverses, mais le plus souvent baie de différentes nuances. Le trot du trotteur américain n'est pas le même que celui du trotteur russe. Le trotteur américain ne plie les genoux que très légèrement et ne lève pas haut les pieds de devant ; au contraire, il les jette devant lui très près de terre, comme s'il glissait sur eux. Ceux qui croyaient que les trotteurs américains descendaient plus ou moins directement du pur sang anglais attribuaient cette forme de trot préci- sément à l'influence héréditaire du pur sang qui, comme on sait, meut aussi ses pieds très près de terre. Mais pour qui connaît la véritable origine des trotteurs américains, il est beaucoup plus probable que la forme de leur trot est le résultat de leur descendance des anciens ambleurs, et souvent même le résultat de la transformation directe, par l'éducation, de l'amble en trot. La rapidité des trotteurs américains actuels est sans con- tredit plus grande que celle des trotteurs russes. Tandis que la rapidité moyenne de ceux-ci est estimée à 1 kilo- mètre en 1 min. 36 sec, en Amérique le trotteur qui ne peut pas faire 1 mille en 2 min. 30 sec. ou 1 kilomètre en 1 min. 33 sec. un quart n'est pas même inscrit au registre de standard Iiorses. Nous n'avons pas eu jusqu'à présent de trotteurs de la rapidité de Nancy Hariks (1 mille en 2 min. 4 sec. soit 1 kilomètre en 1 min. 17 sec.) ni même de celle de Sunol (1 mille en 2 min. 8 sec. 1/4, soit I kilomètre en 1 min. 19 sec. 3/4) . Il est vrai que, même en Amérique les trotteurs de celte force sont encore très rares. Mais là, il est plus que pro- bable que même la rapidité de Nancy Ilanks sera bientôt dépassée et qu'on arrivera enfin au record de 1 mille en il ni in. LIC CHEVAL, 33 298 LES CHEVAUX DE L'AMÉRIQUE ET DE L'AUSTRALIE. (1 kilomètre en 1 min. 14 sec. 3/5). Ce qui est plus impor- tant encore, c'est que la rapidité moyenne s'accroît pro- gressivement en Amérique, tandis que chez nous, en Russie, elle reste stationnaire, malgré tous nos efforts pour l'augmen- ter par l'infusion du pur sang anglais... Gela prouve une chose, c'est que le moyen est mauvais. Il est possible que la race ancienne de Narragansett, qui a servi de fondement à la création des trotteurs américains, soit pour quelque chose dans leur rapidité croissante , car cette race avait été très rapide elle-même (voir page 282); mais, pour nous, le secret des Américains git surtout dans leur manière d'élever, de dresser et d'entraîner les chevaux, aussi bien que dans les qualités supérieures de leurs drivers (conducteurs) et dans Les soins minutieux qu'ils prennent pour soulager le coureur, soins qui se révèlent dans l'aménage- ment du sol et le tracé de la piste de l'hippodrome, dans la construction du sulky (1), clans la forme et le poids du har- nais et dans mille autres détails qui paraissent mesquins au premier coup d'œil, mais qui ont une grande valeur, quand la victoire ou la défaite dépend d'une demi-seconde ou même d'un quart de seconde. La figure 7G représente Flora Temple, une jument trot- teuse qui dans son temps était une grande célébrité, car elle réussit à parcourir 1 mille en 2 min. 19 sec. (1 kilomètre en 1 min. 27 sec), mais qui serait à présent rangée seu- lement parmi les trotteurs américains de vitesse moyenne. La course au trot est le sport favori des Américains. Il existe de 1500 à 2000 hippodromes de trotteurs aux Etats- Unis. (1) Voiture à deux roues excessivement légère, spécialement construite pour l'hippodrome. La fig. 76 reproduit la voiture de course du modèle ancien qui est hors d'usage maintenant. LES CHEVAUX DES ÉTATS-UNIS. 299 En 1871 fut établi un stud-book consacré spécialement à l'inscription des trotteurs. Il est rédigé par M. Wallace (à New-York) sous le titre de Wallace s American Trottine Régis ter Depuis 1882 l'inscription des trotteurs dans ce livre se fait d'après une réglementation spéciale arrêtée par la National Association oftrotting horse-breeders . La performance de 1 mille en 2 min. 30 sec. sert de base à cette réglementation. Pour les détails, lire le Rapport de M. l'Inspecteur général des haras, de la Motte-Rouç-e fl Les chevaux américains de gros trait (draught-horses). Les Etats-Unis ne produisent pas de chevaux lourds dans le genre des boulonnais français ou des flamands belges. Mal- gré la grande taille (de lm, 6o à lm, 78) et la constitution suffi- samment massive et forte de plusieurs d'entre eux, ils sont généralement beaucoup plus légers dans leur conformation, plus rapides dans leurs allures et plus vifs de tempérament que la plupart des chevaux européens de la même sorte ; tous trottent bien et au besoin peuvent être employés non seule- ment comme carrossiers, mais même comme chevaux de selle (voir page 284). En un mot, ils ne font pas exception à la majorité des chevaux américains , en ce qu'ils sont aussi élevés pour être bons à tous les usages. Leur origine est la même que celle de tous les autres che- vaux de la Nouvelle Angleterre (page 282), et ils appartien- nent aussi aux demi-sang, c'est-à-dire qu'ils ont dans leurs (1) Voir Bulletin du Ministère de lAgriculture (Direction de IAgricuIture) 1890, n» 4. 300 LES CHEVAUX DE L'AMÉRIQUE ET DE L'AUSTRALIE. veines une certaine dose de pur sang anglais. Leur taille plus grande et leur corps plus massif sont principalement le résultat de la sélection des reproducteurs et en partie du croisement avec quelques chevaux de gros trait amenés d'Angleterre. Mais ils ont acquis surtout leurs traits dis- tinctifs sous l'influence de l'élevage et de l'éducation à l'a- méricaine, qui a toujours en vue la production des trotteurs ou du moins de chevaux qui puissent bien courir (voir page 284). Par conséquent les chevaux de gros trait améri- cains ne se distinguent des trotteurs que par leur plus grand poids. Dans les formes transitoires qui existent à tous les degrés les deux variétés se confondent entièrement. En cela ils ressemblent aux bitugues russes, qui eux aussi peuvent être considérés comme une variété lourde des trotteurs. Les plus renommés sont les chevaux de Vermont et de Conestoga. Les chevaux de Vermont, comme l'indique leur nom,, sont élevés principalement dans l'Etat de Vermont. Ce sont des animaux fortement bâtis, avec des membres robustes, mais relativement courts, d'une taille allant jusqu'à lm,70; très ré- sistants et assez rapides. La robe la plus fréquente est baie- foncée ; beaucoup plus rarement alezane. Autrefois on em- ployait les vermonts comme chevaux de poste; ils servent aujourd'hui principalement pour le transport des fourgons chargés; on en voit beaucoup h New- York; mais ils sont aussi bons carrossiers et, le cas échéant, peuvent même être utiles comme chevaux de cavalerie (page 284). Les chevaux de Conestoga , élevés en Pennsylvanie, sont plus grands que les vermonts : leur taille est de lm,7S à lm,78. Ils sont aussi ordinairement bais ou bais-bruns, sou- vent pommelés, plus rarement gris-pommelés. Pendant la dernière moitié du siècle courant, une assez LES CHEVAUX DES ETATS-UNIS. 301 grande quantité de chevaux de gros trait a été importée an- nuellement de l'Europe, notamment de l'Angleterre, de la Belgique et de la France. Les clydesclales furent d'abord en vogue, mais à présent les Américains paraissent préférer les percherons dont l'importation annuelle atteint et sou- vent dépasse le chiffre de 1000 têtes. Il y a même aux Etats- Unis quelques haras pour l'élevage des percherons purs, par exemple le haras de C. W. Dunham à Oaklawn (Illi- nois) possédant 500 percherons. On a établi un stud-book spécial pour les animaux de race percheronne pure. Mais en général les chevaux de gros trait ne sont impor- tés d'Europe que pour être croisés avec les chevaux indi- gènes; pour cette raison on importe principalement des étalons. On peut dire qu'à notre époque il se fait en Amérique un mouvement assez sensible vers la production de chevaux de trait plus lourds. Outre les États de Vermont et de Pensylvanie, on les pro- duit maintenant dans plusieurs autres Etats, par exemple dans l' Illinois, dans le Colorado, etc. Dans l'État de Colorado il existe des haras de chevaux de trait élevés à l'état demi-sauvage. Le plus grand de ces haras est celui de C. T V. Dunham (le même à qui appartient le haras des percherons à Oaklawn) ; il est composé de 4200 chevaux dont 3000 juments environ. Les chevaux indigènes de ce haras ont de lm,o4 à im,58 et les produits du croise- ment avec les percherons arrivent généralement à la taille de lm,60 à lm,62. 302 LES CHEVAUX DE L'AMERIQUE ET DE L'AUSTRALIE. Les pur sang anglais en Amérique. Les courses plates et à obstacles à la manière anglaise se pratiquent aux Etats-Unis; mais comme le nombre d'ama- teurs de ces courses y est relativement restreint, l'élevage des pur sang anglais est aussi plus limité. Cependant et dans cette branche de la production chevaline les Améri- cains ne se sont pas montrés inférieurs. Les premiers pur sang furent importés dans les Etats de Maryland et de Virginie : d'abord Spark (en 1750), puis Selima, Othello (en 1755) et quelques autres. Gomme nous l'avons déjà dit, pendant les vingt ou vingt-cinq ans qui suivirent la proclamation de l'indépendance, le nombre des pur sang importés en Amérique fut très grand (page 282); mais depuis ce temps l'importation diminue progressivement et ne dépasse pas maintenant quelques chevaux par an. Les pur sang élevés en Amérique ne diffèrent pas par leur extérieur de leurs congénères d'Angleterre ; mais on af- firme que, sous l'influence du système d'élevage plus démo- cratique, et du climat plus sec des Etats-Unis, ils sont de- venus plus solides et plus résistants. Le nombre des chevaux de pur sang existant aux Etats- Unis, en y comprenant les étalons, les mères, les chevaux à l'entraînement et les jeunes poulains, s'élevait en 1886 à environ 15,000 têtes. Les principaux établissements d'élevage de pur sang sont dans les Etats de Tenessee et de Kentucky. CHAPITRE III. LES CHEVAUX CANADIENS La population chevaline du Canada se forma du mélange des chevaux du type normand importés par les colons français et des chevaux anciens de l'Angleterre et des Etats- Unis. La plupart sont aussi des demi-sang. Il reste encore au Canada bon nombre de chevaux ressemblant aux anciens narragansetts par leur extérieur et leur disposition à l'amble. Les ambleurs canadiens sont connus en Amérique. Ils pro- viennent sans doute de la même source que les ambleurs nar- ragansetts et sont probablement même des descendants directs de narragansetts importés au Canada du Rhode- Island (voir page 283). Au fond, les chevaux canadiens appartiennent aux mêmes types que ceux des Etats-Unis, mais étant élevés dans des conditions plus primitives, ils sont plus rustiques. Rarement leur taille dépasse im,60; ordinairement elle reste au-dessous. Ils ont généralement une constitution ro- buste, des membres de fer et sont peu sujets aux maladies; ils sont fort résistants et énergiques, pas très rapides, mais infatigables et d'allures sûres. Il y a cependant des ambleurs canadiens qui courrent excessivement vite. 304 LES CHEVAUX DE L'AMÉRIQUE ET DE L'AUSTRALIE. La queue et la crinière touffues et onduleuses sont consi- dérées comme caractéristiques pour les chevaux canadiens. On élève les chevaux au Canada principalement pour l'at- telage; mais, comme ceux des Etats-Unis, ils sont bons à tous les usages. Les officiers anglais affirment que la cavale- rie peut être très bien remontée au Canada. CHAPITRE IV. LES CHEVAUX AUSTRALIENS. Les premiers chevaux d'Australie furent importés du Gap et de Valparaiso (Chili) ; mais après la conquête de l'Australie par les Anglais, ce fut l'Angleterre qui y envoya des che- vaux annuellement. Le climat et le sol de l'Australie sont très propres à l'é- lève des bestiaux, et les chevaux importés se multiplièrent rapidement et y formèrent des troupeaux demi-sauvages, pareils à ceux qu'on rencontre dans les pampas et les sa- vanes de l'Amérique. Mais comme ces chevaux demi-sauvages, ou bush-horses, proviennent d'une autre source, principalement des chevaux anglais, leur type diffère beaucoup de celui des mustangs et des cimarrones américains qui, comme nous le savons, sont d'origine espagnole. Les busli-liorses sont incontestablement meilleurs. Ils ont en moyenne lm,60 et sont vigoureuse- ment bâtis ; ont les membres solides, les crinières longues, le tempérament énergique, mais sont peu dociles. Outre les bush-horses, il y a maintenant en Australie beaucoup de chevaux élevés régulièrement aux haras, tous de provenance anglaise. l.E CHEVAL. 39 306 LES CHEVAUX DE L'AMERIQUE ET DE L'AUSTRALIE. Les courses à la manière anglaise et l'élevage des pur sang prospèrent à Queensland, à Nouvelles-Galles du Sud, à Victoria, en Australie-méridionale, sur l'île de Tasmanie et dans la Nouvelle-Zélande. En Amérique on apprécie beau- coup les pur sang australiens. Il y a une vingtaine d'années on a importé en Australie plu- sieurs reproducteurs arabes de premier ordre. Quels résul- tats on a obtenu nous ne le savons pas ; mais le climat et le sol de cette partie du Nouveau Monde sont très propices à l'élève des arabes. D'après le recensement de 1891 la population chevaline de l'Australie et des îles qui en dépendent s'élevait au nombre de 1.786. G44; notamment: 1.543.333 en Australie, 211.040 dans la Nouvelle-Zélande, 31.312 en Tasmanie et 959 dans les îles Fidji. TABLE DES PLANCHES Pagee. PI i. _ Attelage de Sa Majesté l'Impératrice de Russie Fronstipiee pi h. __ Arabella, jument arabe X[ PI. III. — Pacha, étalon persan ! PI. IV. — Skakounia, jument kirghize 9 PI. V. — Kalmouk, étalon kalmouk I7 Pl# vp _ Bachkir, cheval (hongre) bachkir ^ PI. VII. — Joupel, cheval (hongre) de l'Oural 33 PI. VIII. — Roubine, cheval (hongre) du Don 41 PI ix. — Krimc, cheval (hongre) nogaï (Crimée) 40 PI. x. — Karabagh, étalon karabagh (Caucase) 57 PI xi. — Abbas, cheval (hongre) cabardien (Caucase) 05 PI. XII. — Lesguiue, cheval (hongre) lesguine (Caucase) "^ PI. XIII. — Tékinetz, étalon turkomane-teké (Turkestan) 89 PI. XIV. — Boukharetz, cheval (hongre) de Boukhara 97 PI. xv. — Serko, cheval (hongre) de Cosaques de l'Amour 105 PI. XVI. — Silny, étalon bitugue 113 PI. XVII. — Viatka, cheval (hongre) de Viatka 121 PI. XVIII. — Ixe, klepper esthonien 129 PI. XIX. — Suomi, jument finoise lo/ pi XX. — Zméy, étalon jmoud PI XXI. — Bcsimianka, étalon trotteur russe lo3 PI. XXII. — Pravdine, étalon trotteur russe 1G1 PI. XXIII. — Podaga, étalon trotteur russe l69 PI. XXIV. — Aldia, jument trotteuse russe 1/7 1S5 PI. XXV. — Vor, étalon trotteur russe 308 TABLE DES PLANCHES. Pages. PL XXVI. — Sckval, étalon trotteur russe 193 PI. XXVII. — Tcharodey, étalon trotteur russe 201 PL XXVIII. — Magnat, cheval de selle demi-sang, étalon du haras Stré- létsk 209 PL XXIX. — Kouli-Khan, étalon arabe 217 PL XXX. — Middleton, étalon pur sang anglais 225 PL XXXI. — Ladhorse, étalon clydesdale. . 233 PL XXXII. — Page, étalon percheron 241 TABLE DES GRAVURES l'ag.s. Fig. 1. — Tarpan 2 Fig. 2. — Cheval de Przevalsky 3 Fig. 3. — Hémione 4 Fig. 4. — Dauw ^ Fig. 5. — Ane domestique de l'Europe centrale G Fig. 6. — Ane sauvage d'Afrique 7 Fig. 7. — Ane domestique d'Egypte 8 Fig. 8. — Mulet 9 Fig. 9. — Bardot 10 Fig. 10. — Calharine, mule arabe H Fig. 11. — Kroumir, fils d'un étalon barbe et d'une mule arabe 12 Fig. 12. — Cheval de Pinzgau 17 Fig. 13. — Cheval arabe pur sang 21 Fig. 14. — Khamide, étalon persan 23 Fig. 15. — Kif-Kif, étalon barbe du Sahara 24 Fig. 16. — Cheval barbe d'Algérie 25 Fig. 17. — Poi-thos, cheval de Uongola (Nubie) 27 Fig. 18. — Tarpan 37 Fig. 19. — Tarpan deChatiloff 38 Fig. 20. — Cheval de Przevalsky 39 Fig. 21. — Hémione 41 Fig. 22. — Cheval kalmouk 52 Eig. 23. — Cheval bachkir de plaine 50 Fig. 24. — Cheval du Don 00 Fig. 25. - Cheval turcoman de Téké 00 Fig. 20. — Bourny, étalon bitugue 72 310 TABLE DES GRAVURES. Pages . Fig. 27. — Klepper esthonien 76 Fig. 28. — Cheval finois 78 Fig. 29. — Cheval de paysan de la province de Novgorod 81 Fig. 30. — Lomovik 82 Fig. 31. — Cheval de paysan de la province de Tambow 83 Fig. 32. — Cheval de paysan de la province de Poltava . . 84 Fig. 33. — Cheval de paysan de Volhynie 85 Fig. 34. — Cheval de paysan de la Pologne russe 86 Fig. 35. — Bislroléte, étalon trotteur orlow 98 Fig. 36. — Troupe depoulinières du haras du comte J.Vorontzow-Dachkow. 101 Fig. 37. — Tabor, étalon trotteur du haras de Koublitsky 103 Fig. 38. — Achonok, étalon de la race de selle orlowe 10G Fig. 39. — Fenella, jument de la race de selle rostoptchine 107 Fig. 40. — Landiche, étalon de selle demi-sang, du haras de J. Ofrossimoff. 108 Fig. 41. — Tristan, étalon pur sanganglais 125 Fig. 42. — Étalon pur sang anglais entraîné pour les courses 127 Fig. 43. — Westminster, étalon trotteur norfolk 135 Fig. 44. — Hunter anglais demi-sang 139 Fig. 45. — Flora, jument cob 141 Fig. 46. — Sterling, dray-horse 140 Fig. 47. - Suffolk 148 Fig. 48. — Clydesdale 150 Fig. 49. — Jenny, poney shetlandais 154 Fig. 50. — Capi laine III, anglo-arabe 177 Fig. 51. — Picquigny, étalon boulonnais 180 Fig. 52. — Courgeon, étalon percheron 183 Fig. 53. -- Vidocq, étalon percheron 185 Fig. 54. — Etalon breton 1