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LETTRE Se

A M' DE JEAN,

DOCTEUR-REGENT

De la Faculté de Médecine , en rUniverfité de Paris.

I. Sur les Maladies de St. Domingue^ I L Sur les Vlantes de la même île. III. Sur le Rémora, & les Halcyons,

PAR

M.Chevalier, Dodeur « Régent , ancîea ProfefTeur de la même Faculté , & ci-devant». Médecin du Roi à St. Domingue,

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A P A R I S i

Ckez Durand Libraire , rue St. Jacques au Griffon & à St. Landry.

M. D C C. L I 1.

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PRIVILEGE DU ROI

LOUIS PAR LA grâce: de Dieu , Roi DE France et de Navarre a nos Ames & féaux Confeillers , les Gens tenans nos Cours de Parlement , Maître des Requêtes ordinaires de notre Hôtel , Grand-Confeil , Prévôt de Paris, Baillis, Séne'chaux , leurs Lieutenans Civils , & autres nos Jufticiers qu'il appartiendra, SALUT. Notre amé Laurent Durand, Libraire à Paris , Nous a fait expofer , qu'il déliroit faire imprimer & donner au Public , Trois Lettres de M. Chevalier , Doâieur-Regsm ^ ancien Profejfeur de la Faculté de Mé- decine en l'Univerfité de Paris ; S'il Nous plaifoit lui accorder nos lettres de permiffion pour ce néçelTaires ; A Ces causes , voulant favorablement traiter l'Expofant , Nous lui avons permis ôc permettons par ces préfentes , de faire imprimer iefdites Lettres en un ou plufîeurs volumes , ôc autant de fois que bon lui femblera , & de les vendre , faire vendre & débiter par tout notre Royaume , pendant ie tems de trois années confécutives , à compter du jour de la datte des préfentes. Faifons defenfes à tous Imprimeurs, Libraires & autres perfonnes , de quelque qualité 8c condition qu'elles foient ^ d'en introduire d'impref- lîon étrangère dans aucun lieu de notre obéïfTance : A la charge que ces préfentes feront enregillrées tout au long fur le regiflre de la Communauté des Impri- meursÔc Libraires de Paris , dans trois mois de la datte d'icelles ; que l'imprefïîon defdites Lettres fera faite dans notre Royaume & non ailleurs, en bon pa- pier & beaux cara(flères,conformément à la feuille im- primée , attachée pour modèle fous le contre-fcel des préfentes , que PImpétrant fe conformera en tout aux reglemens de la Librairie , & nota^mment à celui du

10 Avril 1725* , qu'avant de les expofer en vente , les Manufcrits qui auront fervi de copie à l'impreflîon defdites Lettres , feront remis dans le même état l'approbation y aura été donnée , es mains de Notre très-cher 3c féal Chevalier-Chancelier de France , le Sieur de Lamoignon , & qu'il en fera ènfuite remis deux exemplaires de chacune , dans notre Biblioteque publique , un dans celle de notre Château du Louvre , un dans celle de Notre très-cher & Féal Chevalier- Chancelier de France le Sieur de Lamoignon , & un daiis celle de notre très-cher Féal Chancelier Garde dès: Sceaux , le Sieur de Machault , Commandeur de nôslOrdres ; le tout à peine de nullité des préfentes : Du contenu defquelles vous mandons & enjoignons , de faire jouir ledit Expofant , & fes ayant caufes , pleinement & paifiblement , fans fouffrir qu'il leur fbit fait aucun trouble ou empêchement. VOULONS , qïj% la copie des préfentes qui fera imprimée , tout au long , au commencement ou à la fin defdites Lettres , foi foit ajoutée comme à l'original. Commandons au irremier notre Huiffier ou Sergent fur ce requis , de jfaire pour l'exécution d'icelles tous aétes requis & né- ';èej[raires , fans demander autre permiffion , & nonobf. tanrclameur de Haro , Charte Normande , «Se Lettres à ce contraires. CAR tel eft notre plaifir. DoNNE% à Verfailles le dix-feptiéme jour du mois de Mai l'an de grâce , mil fept cent cinquante-un , & de notre Règne le trente-fixiéme. Par le Roi en fon Confeil ,

SAINSO N.

Kegifiré fur le Kf0re X. de U Chambre Koyale des Imprimeurs é* Libraires de Paris, N^. folio cort- formément aux anciens Réglemem , confirmés par celui d^ %t février 1723. w^ faris U

LE GRAS 5>»^»V.

PREMIERE

L E T T R

SUR LES M AL A QUI REGNEN

A S^ DOMING

Leurs fréfervatifs & leur cure.

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O u S fouhaitez , Monfieur & cher Confrère , que je faffe part au Public des obferva- lions que j'ai faites à St. Do-;

mingue fur les maladies du pays,& fur

la manière de les traiter.

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L A D I E s

V^ous penfez que ces obfervations pourront fervir non-feulement aux Médecins qui fe déterminent à pafler dans les îles Occidentales de rAmé- rique , mais encore à ceux de Fran- ce &c peut - être à ceux de toyte FEu- rope.

En effet., ,plufieurs de ces maladies qu'on peut regarder comme parti- culières & propres à ces îles , parce qu elles y font plus fréquentes , ôcplus dangereufes , paroifTent ici très-fou- vent: telles font les fièvres malignes avec hémorrhagie , le -tétanos , les écr^uelles , la lèpre ôc quelques autres: à l'égard de celle que les Efpagnols ont portée de St. Domingue chez eux, .fout le monde fait qu'elle s'eft na- turalifée dans tous les climats.

Si donc j'ai réuffi à traiter ces mala- dies dans le pays vceuxqui me fuccé- deront , feront à même de faire ce que jVi fait, à moins que des lumierjes

DE St. Domi ngu e. 2

fupérieures ne leur diftent quelque chofe de mieux : fi j'ai guéri par ex^ îinUïon , celles que j ai dit être com- munes à Tun &: l'autre hémifphere ayec moins de dégoût, de peines, perte de forces qu'on n'en éprouve eii fe livrant à la méthode ordinaire 3 il celles que l'on juge incurables , comrtie les Anchylofes , ou prefquç incurables , comme les Exoftofes , le^ Ecrouelles , la Lèpre , ont cédé à la fumigation i je laifle à juger aux grands Praticiens , fi l'on ne peut pa^ fe promettre en France les mcmes fuccès.

Pourquoi le flux de bouche feroit- îl plus nécejQTaire dans un air tempéré que dans les pays chauds ? A l'égard delà fumigation , . tout le monde fait que la Faculté l'a approuvée.

Je vais donc , Monfieur , comment çer par la defcription des maladies c je rapporterai çnfiiite avec toute la

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candeur poffible la manière dont je les ai traitées.

Je fais trois claffes de ces maladies : je place dans la première celles qui font particulières aux Blancs ( c'eft ainfi que dans les îles on appelle les Européens )i dans la féconde, celles qui font particulières aux Nègres 5 dans la troifieme , celles qui font corn-* munes aux uns 6c aux autres.

Prefque tous les Blancs qui arrivent dans rîle, non-feulement d'Europe, mais encore des îles voifines te du continent de l'Amérique , font atta- xjués peu de tems après d'une fièvre maligne , que Ton appelloit autrefois maladie de Siam : on lui donna ce nom , parce qu'elle commença , dit-^ on 5 dans la Martinique , peu de Jours après l'arrivée d'un Bâtiment , chargé de marchandifes qui venoient de ce Royaume i & de laMartinique, elle fc communiqua bientôt à St. Do-

2> È S'T. Do MI NGV E. jf

mingue. Cette maladie étoit Carac- térifëe principalement par des hé- morrhagies , par le nez , par les yeux , par les oreilles ou par d'autres parties du corps, & très-peu en réchappoient. Ce fymptome n eft plus fi commun > du moins à St. Domingue : mais on dit qu'il eft encore très-fréquent à la Martinique 3 dans le cours de onze années je n'en ai vu que deux dans les quartiers de Léogane 6c du Cul-de- fac , prefque les feuls j'aye fait la Médecine: j'en donnerai l'hiftoire.

Les Symptômes les plus ordinaires delà fièvre maligne qui attaque au- jourd'hui les nouveaux venus , font les mouvemens convulfifs, le délire, le Coma , & quelquefois la léthargie : les malades lont fouvent emportés le quatre, ou fur la fin du cinq :1e plus fouvent , le fept, le neuf ôc le treize : ceux qui paflentce terme > quoiqu'ils foiem toujours en danger , même

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jufquaa 25 5 guérifTent ordinàiremefft ie 30 , le 3 3 j j'en a4 vu cependant quelques-uns qui n'ont été guéris que le trente-neuf 3 ce qui arrive aufli en Europe comrne à St, Domingue.

Vous entendez -bien 5 Monfieur , que je parle des malades qui font traités fuivant les règles de la Me^ decine i car ceux que les Chirur- giens fe mêlent de gouverner , auffi- bien que ceux qui ont le malheur d*être relégués dans les Hôpitaux les Frères de la Charité veulent être Apothicaires , Chirurgiens & Méde- cins i ceux-là 5 dis-je , périffent prefque tous.

Les anciens habitant font auflî quel- quefois attaqués de cette fièvre avec \ts mêmes Symptômes , la plupart en guérifTent quand ils font biei> goit^ vernés.

Les maladies particulières aux Nè- gres, peuvent au/G fe divifer en crois

claffes : celles qui arrivent aux nou- veaux débarqués , aux enfans 6c aux adultes.

Il eft rare que les Efclaves qu on apporte de Guinée foient attaqués de fièvre maligne : mais quelques-uns -> principalement les jeunes , jufquà: l'âge de quatorze ou quinze ans font aflez fujets à une maladie que Ton appelle dans le pays mal à'EJlomac, Ils fentent delà douleur à la région épi- gaflrique 5 tout le corps eft péfant , kfommeil les accable , en marchant t en ' travaillant 5 ils voudroient être feoiijours couchas 3 il faut les battre pour les faire lever , àc les outils en travaillant leur tombent des »ainsj Ms ont une faim dévorante , on ne jeut les raflafier.

Les enfans nouveaux-nés des Nègres font fort fujets au tétanos qui leur prend ordinairement avant le huitième jour , âcles fait périr communément en trois

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OU quatre jours. Trè:>-peu en rechap-^ peut, on pourroit peut-être même dire qu'il n'en réchappe aucun: onap- ' pelle cette maladie , mal de mâchoire. Il y a des habitations elle eft plus commune qu'en d'autres i & des Né- greffes dont tous les enfans périffent 5 d'autres dont les enfans n'en font point attaqués.^ Les Adultes fontauffi fort fujets au tétanos : & il en meurt plus que l'on n'en guérit.

Il y a encore une maladie particuliè- re aux Negres:& qui eft fort commune. C'eft le ver de Guinée : il arrive pour- tant quelquefois que Its Capitaines & leurs Equipages qui vont en Guinée acheter ces malheureux , fe trouvent attaqués de ces vers. Les fentimens des Médecins & des Phyficiens anciens & modernes font partagés fur la nature de cette maladie : plufieurs des anciens ont connu l'exiftence de cqs vers qui s'engendrent dans les corps humains i

DE St. DoMîNGve. ^f

^ilslesonc appellés^r^f^, ou dracunculus ferfarum . apparemment parce que c'elt en Perfe qu'on a découvert les premiers. Monfieur Aftruc croit que c'eft une maladie endémique en Ara- bie. De morbis venereis. lib. I. C x I;. La plupart des modernes qui n'en ont jamais vu, & qui n'en ont jugé que fur des oui-dire , penfent que ce^ que Ton a appelle ver , n'eft qu'une^ lymphe concrète , qui s'eft filée , mou- lée & durcie dans les vaifleaux, qui fe fait jour enfuite par la peau, qu'elle perce 5 je ne fai par quelle raifon on l'appelle auflî , 'vena medinenfis.

Voilà , M"^- les maladies particu- lières des Blancs &: des Nègres. Les communes font la vérole , qui en produit d'autres, différentes dans ces deux efpeces d'hommes. Les Nègres font plusfujets aux pullules ^ ou galles véroliques , que l'on apelle des pians, aux écrouelles , à la lèpre j car je re-

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garde ces_ deux dernières maladies^ commela fuite d'une vérole qui a paflé- par plufieurs générations de père en' Ms. Mais les Européens font plutôt' attaques d'obftrudions de rate, de foie^ & de diarrhées opiniâtres, qui en font- périr un grand nombre.

Venons préfentement à la cure de' ces maladies , & premièrement des' nevres malignes. p

_ Lesfievresmalignes qui font très-' irequeiîtes à Su Domingue ne difFe- rent que du plus au moins de celles- qu'on voit en France , principalement en Automne. On doit faigner promp- tement le premier jour au moins deux ou trois fois du bras avant de venir à la faignée du pié ; car dans le com- mencement des grandes maladies^^ lurtout de celle-ci , toutes les parties» du bas-ventre font dans une difpoJ feion prochaine à l'inflammation, ^ette difoofition n'eft autre chofe

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^ù'un faïig qui remplit le^ artères, qm^ y rampe diffiGilement , ou qui s'y ar- rête, qui les étend dans la^ partie fu- périearevles rétrécit par confé^uent dans Tinférieure , ô£ fe ferme à lui- même le pafTage , d'oii nàiflent des €ongefl:îons mortelles.

Gr il eft démontré que les faignées du pi^ foîit dérivatives, à Tégard de toutes les parties qui reçoivent leur fang, tant de Taorte defeendante^que des artères latérales qui en fortent. Il eft encore certain que celui qui fort de la faphenê vient immédiatement du cœur , par un même canal qui change de nom fuivant les parties par il pafle. Il n y a donc que ce canal quifevuide, pendant que toutes les latérale^ avec leurs divifïons ôcfabdi- vifions , fe trouvent gonflées par la quantité de fang qui s y précipite , qu elles ne peuvent tranfmettre avec la même célérité dans les veines qui leur

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repondent, parce que ces vaifTeaux de décharge retrouvent trop pleins.

Je lai , mon cher confrère , & yous ne l'ignorez pas , qu'il ya eu , f qu II y a peut-être encore des Phv- liciens qui nient cette dérivation re- connue par Hippocrate& par tous les. Grands - Maîtres dans l'art de gué- rir i démontrée par M^ Silva * & par d autres Médecins qui ont examiné avec foin l'effet des faignées : mais pour faire revenir ces Meffieurs de leur prévention , il fuffit de leur faire ob- lerver , qu'il n'y a point de Médecin unpeu verfédans la pratique,qui vou- iut faire faigner du pié dans une in^ Hammation du foie , des reins , de la veille, de l'itiems, des intellins, ni de quelque partie inférieure que fe foit. yuelle raifon peut -on apporter de

1. ^^fl^"*? '* '^'^"'^ des Saignées par M. Silva &• les Réflexions critiques fur ce Traite'. '

DE St. DOM IN G V E, l J|

cette conduite , fi ce n'eft, qu'ils crai- gnent d'augmenter l'inflammation? Or la faignee du pié ne peut faire ce mauvais effet que par la dérivation qu'elle fait fur toutes les parties qui reçoivent leur fang de l'aorte infe-

ricurc.

Si dans le cas d'inflammation de ces .parties , on ne doit point faire de fai- 2nées du pié , on n'en doit donc point faire dans l'état d'une grande plé- nitude, wr r Après avoir fuffifamment deiempii les vaifleaux par deux ou trois faignées -du bras , on doit alors faigner du pie. : Mais il faut encore beaucoup de .prudence pour n'en faire qu'autant qu'elles font néceffaires : on ne doit pas fuivre l'exemple de quelques Pra- ticiens qui en ordonnent cinq ou lix tout de fuite^dans la vue, difent-ils , de debarraffer la tête prife , ou d'en pre- .y enir l'embarras. Mais ces Meffieurs ne

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font pas réflexion que pendant Ja fai- gnee du pié, les artères carotides & ymebrales portent très-peu de fan? dans la tête , & moins pendant une Jeconde faignée du pié, que pen- dant la première , moins pendant la troifieme , que la féconde , & ainfi tou- jours en diminuant à proportion de la plénitude qui fe trouve dans le corps. L. elt pour cette raifon que les faignées àa pie font très - falutaires , quand elles font faites avec fage/Te : mais quand elles font trop multipliées , bien loin qu'elles foient propres à dégao-er latete , ellesy occafionnent un engor,. gement mortel. Et en voici la raifon: lorfque les artères dont nous venons de parler , ne font pas alTez pleines , elles ne peuvent embrafler la colonne de fang , m le poulTer avec la force neceflaire pour faire avancer celui qui Je trouve dans les capillaires 5 il ne fait plus xiu',y.ramperj il y féjourjQe^

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D E £r. iD P M i:n g i; e, g |

ill s'y arrêce. Dans cet état , c eft ind^ utilement qu'on tourmente le malade , •par des émétiques ou autres remèdes qui tendent à fouetter le fang 5 toutes ces drogues ne font propres alors qu'à caufer de rérétifme dans les vailTeaux , ,& par conféquent à augmenter le mat, :ôc à faire périr plutôt le malade. ^

Lors donc que Ion a fait quelques faignées du pié , fi la fièvre continue fur le même ton , il faut revenir au bras i ou fi la tête eft prife ou mena- cée de l'être , il faut faire une faignéa ou deux de la jugulaire , qui commui- •nément guériflent le malade. '

Si lafievxe eft accompagnée de mou- •vemens convulfifs , de treffaillemeiis vdans les tendons, le felfédatâf à ta idafe de huit , dix , ou douze grains :dans un verre d'émulfion , &^ réitéré de quatre en quatre heures, ou de fix :en fix heures , rend le c^lMe au ma- lade i & contribue ânfiniment à

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i6 Ma l a d i e s

guérifoii. S'ilfurvieiKuiiG;»^, ou fi le malade afioupi en eft menacé > ce qui eft très ordinaire à St. Domingue 5 il^ faut avoir recours aux emplâtres veficatoires grandes & amples bien chargées de cantharides , appliquées fur la nuque , & qui occupent les épaules: on eft quelquefois obligé d'en appliquer^ encore aux mufcles de la partie intérieure des cuiffes ,& même aux deux gras de jambes.

Il arrive quelquefois qu'un malade qui a befoin d être purgé tombe dans le Coma. Alors , s'il n'y a point de contre-indication , il faut avoir re- cours a l'émétique en forte dofej s'il n'agit point, ou s'il agit trop foible-- ment, on eft obligé de donner, pour hâter fon adion , un lavement avec la décodion d'un ou de deux gros de tabac.

Je ne me fuis trouvé qu'une feule fois dans ie cas de traiter une fièvre

maligne

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V E St. Do m in g ve. ly

maligne de cette façon , le malade guérit contre toute efpérance , & très- proitiptement. Il eft bon de remar- quer que je fus obligé de faire mouil- ler continuellement les lèvres ôc le nez du malade avec du vinaigre , & même d*en faire fouvent tomber quelques gouttes dans les yeux , pour Tempê- cher de retomber dans le Coma, jufqu'x ce que lemétique eût fait fon effet.

Lelendemain du jour qu'il prit rémé- rique , il parut de la difpofition à re- tomber dans le même état: je lui fis prendre dans un feul verre i'infufiotf dune demi-once deféné, avec deux onces de manne. Il guérît, t. Quand j'arrivai à St. Domingue , je trouyai les Chirurgiens dans Tufage de donner 1 emétique , ou le Kermès mi- liéral dans ces fortes de fièvres j il paf^ foit même pour conilant,qu on ne pou- voit les guérir fans ce fecours. Mon exemple, dans les lieux j ai fait la

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inedecine, ôcles leçons que j'ai don- nées à ceux que je recevoisjes ont dé- trompés. Je dis, dans les lieux j*ai pratiqué la médecine 3 car on m'a af- luré qu'au Cap, qui eft environ à quatre-vingts lieues de Léogane , les Médecins & les Chirurgiens prodi- guent l'émétique. Je nefaipas com- ment les malades s'en trouvent : mais je puis vous dire , mon cher Confrère., fans prétendre en tirer vanité , que j'ai exercé ma profeiGon avec quelque fuccès , & que dans le cours de onze années , je n'ai donné ce remède que trois fois : au malade que je vkns de citer 5 à un autre, dans une maladie fînguliere dont j'aurai l'honneur de vous parler 3 & à un troifieme,dans une maladie ordinaire.

Je n'ai jamais non plus tourmenté mes malades ni avec le Kermès, ni avec ces brûlots que l'on apppelle poûons cordiales. Il eil pourtant de« .

D E St. Doming\u e. i ^

cas , mais qui font très-rares, oix cos fortes de remèdes peuvent trouver leur place > ce font ceux de l'atonie de toutes les parties folides : alors j'ai donné avec fuccès un fcrupule d*antimoine diaphorétique,avec deux^,^ trois ou quatre grains de camphre dans une cuillerée de tifanne.

Vousfavez, Monfieur,& tous les Médecins le favent, ce que c'eft qu'a- tonie. Ainfi, ce que je vais en dire n'eft ni pour vous ni pour eux i mais pour ceux qui fans fa voir la Médecine pourront avoir la curiofité de lire ce

m moire^

L'Atonie eft une foiblefTe de nerfs, des artères & des mufcles qui fervent à faire les mouvemens naturels dépen- dans ou indépendans de la volonté. L'homme eft une machine compofée de canaux de difFérens diametres,& de liquides de natures différentes , qui font plus ou moins épais. Laviecon-

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M A LA Vi JE > -^

ftftedans un mouvement de dilata- tion ai de contra£bion du cœur & des artères, qui reçoivent &: pouffent les liquides dans tous les canaux du corps » & qui les font revenir dans la cavité gauche du cœur , d'oix ils font partis : ceft ce qu'on appelle circulation. La fanté confifte dans une parfaite aifance de cette circulation , dans tous les points qui compx)fent les parties du corps.

c La force du cœur, des artères & des rfiufcles eft donc une force de refforc qui fouffre d'être dilaté par l'entrée des liqueurs , & qui les oblige à fe contrac- ter ou reflerrer, lorfqu'ils ont été éten- dus autant que la longueur de leurs fibres a pu leur permettre.

Lorfque ces fibres font trop lâches ou pour avoir été troplongtcms dans une tenfion forcée , ou pour être trop macérées, pour ainfi dire, par l'hu- midité, ou par quelque autre caufe

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DE SVé D(yMlNGVE. il

<jue ce foit, elles ne peuvent plus poufler ces liqueurs , & la machine périt : fi elle ne les pouffe que foi- blement toute la machine languit : les mouvemens ne s exécutent que foiblement & imparfaitement i voilà Fatonie ou défaut de reffbrt.

On parvient fouvent à le rétablir, en diminuant parles faignées le vo- lume des fluides qui oppofent aux fé- lidés une réfiftance qu'ils ne peuvent vaincre: mais il arrive auffi quelque- fois que le reffbrt manque à un point, qu'il ne peut pas même faire fortir le fang par Touverture de la lancette , comme dans le cas fuivant.

Une Demoifelle de 15 à 16 ans {a) d'un embonpoint raifonnable, après une ou deux faignées tomba dans un tel état d'atonie, quelle ne pouvoit faire le moindre mouvement dans fon

(a) Mademoifelle de Marcombe , nièce de Mr» Feron , Confeill^r au Confeil Supérieur de Léogam^^

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OtZ M Al A O t È $

lit fans s'évanouir : le pouls étoîc très-

Eetit & très-lent, la peau feche, fans eaucoup de chaleur. La nature, qui eft le guide du Médecin (h) muette & fans force , ne m'indiquoit point le choix des toniques les plus convenables. La faignée étoit impra- ticable : lefangfautoitparrouverture de la lancette , & puis il n'en couloic pas une goutte. L'émétique me faifoic craindre de jetterla malade dans une fyncope mortelle i ou dans des con- vulfions dangereufes. La fecherefle de la peau ne permettoit pas d'efpérer du fuccès des potions cordiales. Enfin, obfervateur affidu de fon état & de fou poulsj jem*apperçûs que la peau de- venoitun peu plus fouple, & moins feche. Sur ce léger indice , je me dé- terminai pour Tantimoine diaphoré- tique & le camphre. La première dofe

( b ) hfaitura ftimulata f^ impulfa artis peritis ^nid faciendumjit demmjiraf» Hippocrates.

D E St. Domîng ve. 5 ^

procura un peu de moiteur, une fé- conde , quatre heures après , donna une fueur abondante , ôc mit la ma* lade hors de danger.

Voilà , Monfieur & cher Confrère , comment j*ai traité les fievresmalignes. Une crème de riz légère , au lieu de bouillon 5 que la plupart des malades voniifTent, faifoit toute leur nourri- ture. De Teau , de la tifanne , de la limonade , du lait d*amande étoit leur boiflTon.Les lavemens d'eau froide, ou dégourdie , tenoient lieu de tous ks ftimulans que Ton a coutume de don- ner pour tenir le ventre libre.

J'ai eu l'honneur de vous dire , ci- deffus , que je n ai vu que deux ma- lades de cette fièvre maligne , qu on appelle maladie de Siam. Le premier étoit un jeune homme de dix-fejpt ou dix-huit ans : {c) d'une très-foible complexion. Peu de tems après qu^il

{e) Le jeune Bertrand de Nemours en Gadnois»

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24 M A l M D l rE^Sl T

fut arrivé , la fièvre le prit , mais une^ fièvre très-légere,&: qui n'avoit aucune apparence de fièvre maligne. Je le fis faigner une fois du bras le même jour. Le lendemain la fièvre continuoit fans diminution ni augmentation : je fis réitérer la faignée. Le troifieme jour il n'eut point de fièvre , & ne paroif-- foit point abattu. Le foir il avoit faim , je fis mettre une tranche de pain dans fon bouillon : je lui permis une cuil- lerée de vin dans un verre d*eau, qu'il rue demanda.

Le lendemain matin, je le trou- vai dans une agitation extraordinaire, jettant (qs bras , fa tête . tout fon corps ça & 5 & fes draps tout noirs d'une matière qu'il vomiflToit : le pouls étoit petit &convulfifi & il avoit tous les fignes d'une mort prochaine. J'ordon- nai qu'on tînt une jatte prête pour re- cevoir ce qu'il vomiroit : c'étoit du fang noir comme de l'encre. Il mou-

D E- Sf. Do M iNG VE^ 2 J

rut en une demi-heure de tems. Le fe-^ cond étoit un Miffionnaire Jacobin. On vint me chercher le cinq de la ma- ladie fur le foirj il étoit en délire ôc urinoit du lang. Je le trouvai dans un état défefpéré 3 j'annonçai la mort, qui arriva la nuit. -

J'ajouterai ici Thiftoire de deux fièvres double-tierces qui fe termine-- rent bien différemment.

Deux nouveaux débarqués vinrent loger dans la même auberge 3 l'un étoit un ivrogne fieffé, Tautre fage ôc fort tempérant. La fièvre les prit le rnême jour. Après les remèdes ordinaires , je les mis au quinquina. La longueur des accès diminuoit chaque jours de forte qu'ayant commencé à huit heures du matin , elle ne revint du moins à celui qui mourut qu'à trois heures après midi. J'avois caufé avec lui plus d'une heure le matin. Il alla enfuite à la Ville d'où il revint à midi. A

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cinq heures je paflai chez lui , je le trouvai en léthargie d oii il ne me fut pas poffîble de le tirer:, il mourut à minuit {d}^

^ Quelques jours avant, Tivrogne etoit tombé dans des convulfions éton- nantes: une fueur froide , fans pouls , avec une évacuation prodigieufe d*un fang noir par les felles , me fît juger ^u'il n'avoitplus quequelques heures a vivre: le lendemain matin , je le trouvai parfaitement guéri,

Guillaume Pifon (e) a remarqué que ces fortes d évacuations guériflent quelquefois les fièvres aiguës: mais ce •netoit point une fièvre aiguë ni même commue. Elles font encore falutaires dans les gonflemens de la rate (/) 3 le

( i ) J'ai vu mourir un homme de quarante ans , le leptieme ou le huitième accès d'une fièvre tierce après pix-fept heures d'interruption. _ (e) De Medicina Braftlienft, c. 14, ( f ) fj/^^.

*: Voyez PAphorifme 213, feaion VI.. interprété par M. Hecquet. '^

malade n'étoit pas non piu& dans

C2LS»

il ne feroit peut-être pas bien dif- ficile à ceux qui vont dans lesîles , de fe préferver de cette dangereufe mala-

La première précaution qu'il tau* droit prendre , feroit» avant de s^em- barquer , de fe faire faigner , rafraîchir & purger , fi Ton en avoit befoin , & de vivre fobrement avant & pendant le voyage. La mer donne beaucoup d'appétit 5 on mange trop, fi l'on n'y prend garde , ôc Ton accumule infen- fiblementdes fucsqui furchargent le corps , ôc qui ne manquent point de produire cette fâcheufe maladie.

Lorfque la chaleur du climat en augmentant confidérablement la tranfpiration , en excitant même des fueurs continuelles , nelaiffe plus dans les vaifleaux que des liqueurs épaifles, en même tems qu elle diminue le ref-

"à^-'ir-

fort des parties folidesj l'équilibre «î necefTaire pour la faute & pour la vie €lt bientôt rompu. Les liqueurs épaif- les oppofent plus de réfiftance aux iorces mouvantes, que celles qui le *°'î5™o'"!=' elies circulent donc plus ■difficilement. Les folides font plus d effort pour les poulTer , & elles avan- cent moins: elles gonflent les vaif- leaux , elles forcent leurs diamètres , îelles entrent dans des canaux , qui dans l'etar de fanté ne doivent point les admettre j elles dilatent les artères capillaires fanguines& lymphatiques i elles y forment des varices 5 elles ou- -vrent des voies aux hémorrliagies 5 en un mot , elles renverfent toute l'œcor nomie du corps humain,& deviennent une fource de maladies mortelles , & principalement des fièvres malignes. Ceci, Monfieur, eft un avis que je donne a ceux qui paiTent d'un climat •tempère dans un fort chaud. J'ajoû-

ferai en leur faveur que la caufe im- médiate des fièvres malignes eft uit engorgement de fang dans les vifceres, &: principalement dans le cerveau: c'eft; Ce qu'on appelle proprement difpofi-^ tion inflammatoire , iorfque le fangj rampe difficilement dans ces parties 5' ou inflammation , Iorfque fon cours efl: totalement arrêté , foit dans fes pro- pres vaiffeaux feulement , ce qui eft- plus rare, foit dans lesvaiffeaux lym- phatiques ce qui eft très-ordinaire j foit enfin dans les uns & dans les au-^ très , ce qui arrive dans Tinflammatioiï

éomplette.

Un autre effet de rairchaud,c'eft d'ê-^' treplus léger, ôc de comprimer moin^ toute lafurface du corps. La force de l'air du dedans n étant plus fuffifani- ment contrebalancée par celle de Taiî^ extérieur, Tair intérieur fe raréfie à pro"- portion que la compreffion du dehors^ éft diminuée : il occupe plus de plaeè

lil^

M A

t A D 1 B S

& augmente par conféquent le volume des liqueurs.Quand,dans cette difpofw tion , il fe trouve déjà trop de fang dans les vailTeaux , ou faute de s'être fait faigner, ou pour avoir pris trop de nourriture, Us défordres dont nous venons de parler doivent s'enfuivre néceffairement.

Quand même ceux qui s'embarquent n'auroient point trop de fang, quand

même ils vivroientfobrement pendant le voyage, & après leur arrivée 5 par la

laifonderépaiffifTement inévitable des liqueurs , & de la raréfadion de l'air qui fe trouve dans toutes les parties du corps mêlé avec le fangj ilfeferoit toujours une fauiTe pléthore, qu'il feroit auffi dangereux de lailler lub- fifter,que fi réellement la quantité du fang & des autres liqueurs étolt aug- mentée au-delà de celle qui peut fubfifter avec la fanté dans l'air tem- jéf é cle France. La néceffité de fe faire

1

D E St. Dom in Gvn. 1 1

faignereft donc évidente quand oii habite un air plus chaud que celui qu'on a quitté. Il cft donc à propos , & prefque indifpenfable de le faire ioriqu*on approche du Tropique : il eft néceffaire par la même railon de réitérer la faignée , quand on eft ar* rivé dans les îles : & on doit être encore plus fur fes gardes contre toute forte d'intempérance.

Mais la plupart de ceux qui vont dans cç^s climats brûlans , veulenc boire , manger , veiller, comme s'ils étoient en France : ils font pis encore i ils fe plongent dans une débauche^ horrible y dont il eft d'autant plus dif- ficile de fe préferver , que les occa- fions en font toujours préfentes.

Je crois vous avoir dit , mon cher Confrère , que je n'éprouvai point cette fièvre maligne, parce que je me fis faigner avant de fortir de Paris , je me fis faigner à la Rochelle, à la Mar«

î^

M Al A D 1 E S

tiniqiie oii nous mouillâmes 5 je fis faigner deux fois ficot que je fus arrivé à St, Domingue : auffi , la première année je n'eus point d'autre incommodité que celle qui m'avoit fait quitter Paris , je veux dire des froids de tête, qui par trois reprifes me donnèrent la fièvre comme j'avois coutume de lavoir ici : depuis j'en ai été quitte : je ne les reffens pas même cet hyver , quoique j'aie la tête beau- coup moins couverte que je n'étois obligé del'avoir, & que je me faffe râ- ler la tête régulièrement tous les mois, ce que je ne pouvois faire dans lafai- fon la plus chaude de l'année. .La faignée feule ne fuffit pas tou- jours pour remédier aux fuites de la plénitude vraie ou fauffe > il faut y joindre affez fouvent la purgation : mais avant de fe purger, il faut être affùré du bcfoin que l'on en a, & qu'on qA dans les difpofitions convenables

pour

DE St. DOMINGVE. JJ

pour en tirer Tavantage que Ton s*en promet»

Il eft encore un autre fecours con- tre la fauffe pléthore , c'efl-à-dire , contre le gonflement du fang & des autres liquides. Ce font les" boiffons rafFraîchiflantes : telles font les émul- fions faites avec les amandes , les fe- mences de melon , de concombre , drc. les limonades avec le limon, le citron, l'orange fauvage , la bigarade , les ananas > les boilTons aigrelettes fai- tes avec les gelées d'ozeille de Guinée, de cerifes 3 les oranges douces man- gées le matin à jeun ôc au delTert après le repas. '

J'ai dit ci-defllis , Monfieur , que les jeunes Nègres nouvellement débar- qués étoientfujetsàune maladie que les habitans de St. Domingue appellent mal d'eftomac. Ceft un epaiffiflement du fang qui engorge les vaiflTeaux des vifceres. Cet ^ épuifement vient do

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l E S

la nourriture groffiere qu'on leur a don* née dans toute la traverfée, car ils ne mangent que des fèves de marais cuites avec du Tel, 6c peut-être quel-* que graifle.

Lacuie de cette maladie confifte en des faignées ^ des purgations , de l'ex- ercice y 6c un travail modéré avec une nouriture plus convenable : il en jpieurt quelques-uns après avoir lan- gui quelques mois. - Le mal de mâchoire > ou le tétanos des ^x\î^a% eft prefque incurable. Il a diiFérentescaufes.La plusordinaire eft le trop de feu que les Négreffes accou* chées font dans leur café 5 à laquelle on peut ajouter fumée continuelle , ^ar elles p'ont point de cheminée. Par la chaleur du feu , les enfans font fou- vent en fueur? & la moindre fraîcheur, foit de la nuit quand le feu s'éteint , foitdumatinquandelles ouvrent leurs portes ) ©u quelles portent leurs en*

DE St. DOMING VE. ^ j*

fans dehors, fait impreflîon fur les nerfs délicats de ces jeunes créatures. Le mal commence par les mâchoires : elles deviennent immobiles. L'enfant ne peut plus prendre le téton. La roi- deur fe communique au dos ôc aux cuiflTes, La circulation eft bientôt ar-» rêtée , ôc l'enfant périt. Il eft aifé de concevoir que la fumée peut faire le même effet.

- Une autre caufe fort ordinaire cette maladie font les paflîons de la mère, & la manière dont elle a vécu dans fa grolTefle : les enfans des Négreffes qui font colères, qui boivent beaucoup d'eau-de-vie de canne que l'on appelle tafia, qui mangent beau- coup de piment , font plus fujets aux mal de mâchoire que ceux des mères plus réglées.

Il fe peut faire auffi que la manière de ferrer le cordon ombilical après l'amputation , y ait quelque part : iorf-

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^6 Ma i a^d I e s

qui! eft ferré outre mefure , il fait de la douleur à renfant , parce que le fil coupe ces vaifleaux > & cette blellure peut caiifer le Tétanos. tetuno ex njulnere Agerh^cpatitur : maxilla con- gelant ur ac rigent ^ os operire non po^ tefi^àorfum riget é*-» crurafieBere nonpo^ tefi [a).

Il y a aulïî de certaines habitations oii prefque tous les enfans meurent du mal de mâchoire , ôc d'autres il$ en font rarement attaqués.

Pour prévenir ce malheur qui caufe beaucoup de perte aux habitans , il faudroit envoyer accoucher les Né- greffes d^ns les habitations les en-» îans font moins attaqués du tétanos. Si cela ne fe peut , il faut tâcher d'é- loigner les caufes qui peuvent le pro- duire. La première précaution feroit d'avoir une café de maçonnerie bien

( a ) Htpp}craîes di intenih AJeêïionibus» ., . . dt âUbuiJHdituUrm .,•••• Ltkrê ds ifiçrbh jo*

V E St. Do min' gue. § 7

clofe pour faire acoucher les Négref- fes3 ôcne point permettre qu elles ayent du feu. Il faudroit qu'un Chirurgien entendu, montrât auxNégrefles accou- cheufes la manière de lier le cardon ombilical. Pour ce qui eft d'empêcher les Négrefles de fe mettre en colère , de boire du tafia , de farcir leurs ra- goûts de piment, la chofe n eft pas fa- cile.Lors qu'une NégrefTe dont les en- fans meurent ordinairement du mal de mâchoire eft accouchée , je crois qu'il faudroit donner à l'enfant dès le premier jour un ou deux grains de fél fédatif dans un peu de lait de fa nour- rice , & reitérer au moins quatre fois dans les vingt-quatre heures : peut- être un peu d'eau de pavot feroit elle le même effet. Si malgré ces précau- tions on voit venir le mal , il faut -augmenter la dofe dufel fédatif, & le donner jufqu'à quatre grains. Je n ai été confulté que deux foî^

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58 M A l A D l Es

pour ces enfans déjà attaqués du mal J'ordonnai alun trois grains de Tel fédatif de quatre en quatre heures dans une cuillerée de lait de la nour- rice , Tenfant reprit le téton, on le crut fauve: je ne fai filon continua comme je Favois confeillé , mais le tétanos revint, & Tenfant mourut.

Dans une autre occafion, jen'avois point de fel fédatif : je fis donner par intervalle , ou du moins j'ordonnai que Ton donnât une goutte de tein- ture anodyne qui ne produifit aucun bien i Tenfant mourut.

Quand au Tétanos des adultes, comme cette maladie demande un prompt fecours , (a) de que les habita.- tions font éloignées les unes des au- tres , je n'ai pas eu occafion d'en voir beaucoup. Les Nègres ont coutume de les traiter d'une manière affez con-

^ ' ( a ) Efi AHtem morhis grA-vis en fiatim curattone o^us haèet. Hip. de internis affe<flioni bus.

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PB 5t, Pp min GVE.

forme à ce qu'Hippocrate ordonne. ta) Ils les frottent avec de 1 huile chaude , & pendant la friaion les membres deviennent fouples ; ^lais ils fe roidiflent aufli-tôt qu'on cefle de les frotter. Ceft ce que j'ai vu amvçî à unç^Mulâtre , qui avoir , me dit-on , mangé des crables. Je foupçonnai qu'elles étoient mauvaifes , cQmme font ordinairement celles déterre , ou qu'elles n'étoientpas affez cuites. Je la euéris avec deux prifes d'orvietan. Après que ces Nègres ont bien trotte le malade, ils le couchent parterre , ôc allument du feu autour de lui ; lui donnent des breuvages que je ne coii- pois point , ( car ils font fort jaloux leur fcience ); avec tout cela ils çn guiriffent peu.

- fa) Huncffvere ùftftet é> f«»^/«» »»?'"" *' ignem , ne» iL frcfe , c»Ufrceu , &c. de mterms affeftionibus.

C iv

^.o Ma l a d 1 ES

Le véritable moyen de les guéri/; c'eft de les faire fuer avec de bonne thériaque dans du vin , à laquelle il faut ajouter quelques gouttes anody- nes. Il faut les faigner quand on peut, & leur tenir le ventre libre par des la- vemens. Il me fouvient d'avoiiautre- fois à Paris guéri de ce mal , un hom- ine , dont tout le corps étoit fi roide qu il n'étoit pas poffible de le faigner. Je lui fis prendre , par intervalles , de la teinture anodyne, jufqua ce que fes bras devenus fouples puflent per- mettre de lui tirer du fang. J'en ai guéri quelques-uns à St. Domingue i iun entre-autres fi fort travaillé de répifl:liotonos , que je fus obligé de le lier à une colonne.

Une autre (c'étoit une jeune Né-- greffe) àquijedonnois trois fois par four de la teinture anodyne. En auo-- mentant toujours, elle enprit jufqu^à i8 gouttes: lorfque la maladie céda.

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D E St. D om in'G ve. 4I

je diminuai la dofe chaque jour , juf- qu à ce qu elle fut réduite à fix gouttes.

L un & l'autre de ces deux malades furent environ dix-huit ou vingt jours à guérir.

Je vous ai parlé autrefois , Monfieur, d un Tétanos dans lequel une cuille- rée d*eau fit un effet fmgulier : ôC vous jugeâtes que ce fait méritoit d'à-» voir place dansmesmémoires.Le voici.

Un jeune homme à qui on avoit fait une opération (a) à caufe d'un farcocele (^),fe porta fort bien les huit premiers jours 5 ôc la plaie alloità merveille. Le neuf il fe plaignit d une douleur de cou. Peu à peu le mouve- ment des mâchoires diminua au point quilne pouvoir prefque point ouvrir > la bouche, ni fléchir les jambes. Le pouls étoit fort , égal &: point dur. Le treizième jour tous les fymptomes de

( a ) exclfus fuerat tefitculus,

( b ) P r opter gonorrhœam maie cmatamt

451 Mal a d i é s

ropifthotonos augmentèrent confîdé- rablement. De tems en tems il jettoit de grands cris , & il tomba de fon lit: tantôt il étoit tourmenté d'ifchurie tantôt de ftrangurie : cela m'obligea de tenter le bain. Dès que fon corps eut touché Teauv tous les membres (^) fe roidirent fubitement. Dès qu'on ieut remis dans fon lit , il eut de vio- lentes convulfions, avec beaucoup d*écume autour de la bouche. Le pouls manqua totalement , on le crut mort. Peu de tems après je fentis une légère pulfation du pouls entre le plis du bras & le poignet. Laconvul-» Son reprit. Je lui mis une cuillerée d'eau dans la bouche , la convulfion CefTai la préfence d'efpritlui revint > fon pouls fe rétablit , il ouvrit faci-» tement la bouche, il parla librement, & cracha avec autant de facilité, que s'il ne lui étoit rien arrivé , ce qu'il

( a ) PcnU i^fe.

St. D 0 M r N c ue. ^|

n'avoit pu faire depuis quelques jours. Cependant, il avoit de raverfionpour tout liquide. Un délire de peu de du- rée reprenoit de tems en tems : tout cela fe pafToit fur les fépt heures^ dit foir. Enfin 5 après une convulfion d'en- viron deux heures , il mourut entre quatre & cinq du matin.

Il y a de Fapparence que le Tétanos qui furvint neuf jours après ropération, n'eut pour caufe que la ligature faite de plufieurs fils cirés , qui venant à couper le cordon firent refFet d'une blefiure.

^ Si cette conjefture a quelque fonde- ment , je penfe qu'en pareil cas il fau- droit fe fervir d'un ruban de fil ou autre matière i parce qu'il n'eft quef- tion que de prévenir l'hémorrhagie, & d'empêcher le fuc nourricier de fe porter au delà de la ligature: or la feule •compreffion fuiSt. Je voudrois qu'on eût la même attention quand on cou-;

M Al A

D 1 E'S

pe le cordon ombilical d un enfant i peut-être n'en périroit-il pas un fi grand nombre du mal de mâchoire. . J ai déjà remarqué , que le Dragon , ouleDragoneau desPerfes, appelle auffi ve^a medinenfis eft un véritable ver , ( que Ion appelle à St. Domingue, ver de Guinqe ) , & non pas une lym- phe concrète , comme on le penfe communément en France, {a,) Il eft rond, d*un rouge pâleôc tranfparent , ftflez femblable aux vers de terre ap- pelles lomhrki ^ mais beaucoup plus long.

- Je ne m'arêterai point à prouver que ce ne peut être une lymphe mou- lée & durcie : qui lui donneroit cette forme ? elle ne pourroit l'avoir acquife que dans les vàilTeaux fanguins ou lym- phatiques , fi cela étoit. Comment en fortiroit-elle ? Quelle puifiance mo- trice lui feroit percer la peau ? Corn-

il*) Voiez la Chirurgie de Monfïeur Col de Vil- arls.

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^•JËl

vn St. D om ïngv -e. 4 f

ment fe trouveroit-elle fbuvent en- tortillée autour des mufcles ? Les rai-' fonnemens font inutiles, quandilne faut que des yeux pour en juger. Jeu ai peut-être vu plus de cent en vie : tous les Médecins , tous les Chirur- giens 5 tous les habitans en voyent tous les jours. Ceft donc un fait qu'on ne peut révoquer en doute.

Ces vers font engendrés dans le corps par les raauvailes eaux que les Neo-res boivent dans quelques endroits de Guinée , & dans la traverfée,quand les Capitaines Négriers enont faitleuî^ provifion dans ces lieux-là.

Un ancien Médecin de St. Domina gue nommé de Pas , a vu un particu- lier à la Rochelle,quife trouva infedé d'un de ces vers , pour avoir été fou- vent dans le navire d'un Négrier de fes amis , ôc avoir bu de Teau qui avoit été apportée de Guinée.

Quand ce ver s'eft fait jour, &: qaon

Mai 4 DIE s

peut en tirer une petite partie , on la roule fur un petit bâton , en prenant bien garde de le calTer. On y revient tous les jours, & on en roule jufqu'à ce qu on fente trop de refiftance > ainfi

dans Tefpace de plufieurs jours on le tire tout entier. S^il fe caffe , comme cela arrive aflez fouvent , il ne faut pas ouvrir la peau pour le fuivre,6c le tirer tout entier , comme quelques-uns le confeillent : il fuffit d'appliquer fur Tendroit par ou il a commencé à for. tir , quelques plantes émollientes : je ne mefuisjamaisfervique d'une feuille d'opuntia ou raquette coupée en lames épaifles d'un doigt, ôcpalTée fur la flamme pour la ramollir. Le ver ref* fort par la même ouverture , bien il fe fait jour par un autre endroit ^ fouvent afTez éloigné du premier. Je n*ai jamais vu arriver aucun de ces ac- cidens qu'en veulent faire craindrç ceux qui confeillent l'ouverture.

VE St. DoMingve. ^f

( a) J'ai vu à une Négrefle Monfieur de Larnage notre Général , un petit trou dans le grand angle d'un œil, que je prislongtemspour unefiftule lachry- male , car il en fortoit de l'eau ôc quel- quefois un peu de pus. Ayant été obligé de faire un voyage aflez longs à mon retour, je demandai des nou- velles de la Négrefle: l'Hofpitaliere me dit, qu'il étoitforti parla joue du même côté, un ver de Guinée, je vis la prétendue fiftule parfaitement

guérie.

Les Nègres n'ont pas fouveiit poul: un feul ver. Il y en a quelques-uns qui en ont un grand nombre , qui avec le tems fortent tous. Je n'ai jamais donné de purgatifs ni de vermifuges. Je penfe qu'il feroit dangereux de les faire mourir > il vaut infiniment mieux leur donner le tems defortir.

{ 0) Minguet dont nous parlerons dans la fuite , dit qve le fuc de Ja fauge mis dans k trou d'un ver die Guinée le fait fortir.

Une me refteplus, Monfieur, qu'à vous entretenir des maladies commu- nes aux Blancs & aux Nègres, oii de la maladie vénérienne.

Il n'y a peut-être point de pays ou la maladie vénérienne foit Ç\ commune que dans ces îles. Tous les Efclaves mâles5c femellesFapportent deGuinée, lesenfansqui en naiflent infedés par conféquent , en engendrent d'autres encore plus viciés qu'eux.

Il y a très-peu de Blancs qui n'^ayent commerce avec ces : NégrelTes , & ce feroit grand miracle qu'elles ne leur communicaflent point leurs mal. Les maris en font préfent à leurs femmes > malt corvi , mdum ovum. Les mifé- .rables enfans qui en viennent portent les péchés de leurs pères. Ceux même dont les parens font fages ne font guère exempts du malheur commun , parce qu'on ne leur donne jamais pour nour- rices que de m,ifér,ables Négreffes. M Peut-

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DE St. Dt)MrN^uE. 45

Peut-être c^uelqu'un penferâ-t*il qu oii pouvoit guérir ces créatures avant de leur donner des enfans à nourrir. Mais quel tems prendroit-on pour les net- toyer? Seroit-ce avant qu elles accou- chent? Cela fepourroit faire abfolu- ment : j'ai traité fans aucun danger de ces femmesgrolTes par la fumigation ^ qui font accouchées heureufement à terme. Mais s'il y a un intervalle entré raccouchement, & le tems qu'on leur donnera l'enfant , qui pourra répondre de leur fagefle ? & quand elles /bX roient fages pendant ce tems, le fe-i ront-elles pendant tout le tems qu'el- les nourriront? Cela n'eftprefque pas poffible: il n'y auroit qu'un moyen de préferver ces innocentes vidimes delà corruption générale : ce feroit de les faire nourrir par des chèvres. J'ai donné ce confeil à tout le monde, perfonne ne l'afuivi: on eft fi fort familiarifé - avec cette infâme maladie, qu'ili^itw

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TO M d t A D l S S

ble qu'on ne la craigne point.

Elle produit des effets différens dans lesBlancs & dans les Nègres. Ceux-ci font ordinairement remplis de pullu- les , ( que l'on appelle des pims ) 5 parce qu'ils ont la peau plus dure , & qu'ils font expofés aux fraîcheurs du matin & du foir, & à la plus grande ardeur du Soleil. LesBlancs ont rarement des pians , par la raifon contraire. . Comme le premier effet de la mala- die vénérienne eft d'épaiffir toutes les liqueursi la tranfpiration doitfe faire plus difficilement êc moins abondam- ment: plus difficilement, parce qu'il faut une plus grande force pour pouf- fer & faire circuler des liqueurs épaif- fes que des fluides. Le cœur & les ar- tères n'ont de force que pour poufler une certaine quantité de liquides tels qu'ils doivent être dans l'état naturel. Lorfque cette proportion ne fe trouve plus , foit par l'excès de la quantité»

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D E Sf^ Do M î NGUE. CJ

foit par celui de répaifleur , il aborde moins de ces fucs dans les vaiffeau^ qui doivent les tranfmettre hors du corps. Si déplus le diamètre de ces vaijQTeaux eft diminué, ce qui arrive néceflairement dans une peau durej s'ils prêtent moins , comme cela doit être encore parlamêmeraifon , il eft évident qu'il fe ferat beaucoup moins de diffipation par cette Voie qu'il ne s'en fait dans l'état naturel. Les fucs les plus groflîers qui ne pourront être chaires dehors , feront arrêtés vers l'extrémité de ces vaifleaux exctétoi* res : ils s'y accumuleront , ai formeroiit ces pullules ou gales véroliques, qui fe-* ront plus ou moins grofles , fuivaiiè qu^un plus grand nombre de puftulei fe joindront enfemble , c'eft-à-dire > que plufieurs tuyaux Voifins les uns deû autres fe trouveront engorgés.

C^s pullules dégénéreront en ulcé-' res, fila force qui pouffe la matierô

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ji Ma t a d i e $

dont iellés font compofées , eft aflèz grande pour déchirer rextrémité des vaifleaux excrétoires , la peau & Té- piderme : fi elle eft trop foible pour produire cet eflfet, les ptiftules refte- ront couvertes de leur peau.

En effet , les Nègres ont de deux fortes de pians ou de puftules : les uns font ulcérés , d'où il fort une farine jaunâtre , ou font fimplement couverts d'une efpece de croûte de même cou* leur > d*autres ne font point ulcérés.

Les Nègres font encore alfez fujets à de grolles gales , que Ton appelle gale de Guinée. Elle eft facile à dif- tingucr des pians. Ceux-ci font durs , calleux , circulaires , foit qu ils foient couverts de leur peau ou non 3 les gales font plus molles, plus élevées , d*une figure moins régulièrement ron- de, & rendent un pus plus épais & eix plus grande quantité, & font moins jaunes , & moins larges.

jD E St. Do min g us. j^f

La vérole invétérée qui a paffe , de génération en génération , des parens aux enfans, dégénère aflTez fouvent en écrouelles ou en lèpre.

J*ai remarqué quatre efpeces de lè- pre. L'une qu'on pourroit appeller ulcérée , parce que le corps eft tout couvert d'ulcères qui répandent au loin une puanteur infupportable.

Une féconde qui défigure par une infinité de tumeurs dures fur le vifage , fur les mains , les bras , les jambes, les pieds , 6c généralement fur toute l'ha- bitude du corps 5 moins fur les join- tures que fur les mufcles.

Une troifieme qui rend la peau écailleufc , principalement celle des jambes. Les Grecs ont appelle cette troifieme cfpecc elephantiajis ^ àcaufe de la reflTemblance de la peau avec celle des Eléphans.

La première & la féconde efpece font quelquefois acccompagnées de

D iij

M A^ h 4 D I M S

€orne3 au front , ce qui les a fait nom- m^t fatirujls.

Il y en aune quatrième efpece plus difficile à connoître dans fon com- mencement 5 que les autres efpeces. Elle ne fe manifefte quelquefois que parla rougeur de la conjondive , fur- tout de la partie qui tapifie ia paupiiT re , par répaiffeur 5 la dureté , la rou- geur de Toreille externe avec un grand inal de tête, ôclacbûte des cils 6c des paupières. Dans la fuite la peau des Nègres devient de couleur de feuil-- le morte dans plufieurs parties , & quelquefois de tout un coté du corps, pendant que l'autre refte noire: enfuite les majins. fe fermtent de manière que le i^alade ne peut les ouvrir : quelques ph,alan;ge5 des doigts des mains §c des pies, fe coupent & tombent.

Les blancs font bien moins fujets 4 ces fort03 de produdions de la vé- lole^.q^je les Nègres., furtout à la

V E Sx* D OMI NGU E. jj J

lèpre {a) : chez eux les fuites ordi-* naires de cette maladie font dcsf obftrudionsde la rate, du foie, des hydropifies ou des diarrhées opiniâ- tres & mortelles.

Il y a plus de deux cens ans (^) que la maladie vénérienne infede toute TEu-^ rope^ôc c eft un fait conftant,que fi elle n'étoit pas inconnuq avant ce tems y elle n étoit pas à beaucoup près fi com- mune , ôcque depuis elle a été accom-^ pagnée de fymptomes qui annoncent plus manifeftement fa préfence & fom origine. Ne feroit~ce point parce que cette maladie communiquée aux Ef- pagnols par les femmes fauvages de St. Domingue , avoit des degrés de ma- lignité que n'avoit point celle que Ton voyoit quelquefois en Europe ï

{a) Je n*ai point vu de François lépreux > j^HîTai vu c^u*un Efpagnol.

{b) Sur la fin du q^uînzieme ftecle.

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Ceqiiieft certain, ceft qufe depuis,' portée par les Efpagnols dans leRoyaii- inede Naples , d ou elle s'eftcommu- aiquée aux François & aux autres na- tions, on Ta vue fe multiplier prodi- gieufement, & par des fign es incon- nus jufqualors, qui lui ont fait don- ner le nom de mal de Naples , enfuite celui de maladie vénérienne, terme qui défigne plus clairement & fa caufe , & la manière de fa propagation.

Au refte , Monfieur , je ne prétends pas décider fi cette maladie eft nou- velle, ni fi elle eft abfolument difFé- rentedela lèpre. Peut-être pourroit- on foupçonner que la lèpre n'a cefle en Europe depuis qu'on a trouvé le moyen de guérir la vérole ^ que parce qu'on n'a pas donné letems a celle- ci de palfer de génération en généra- tion y & que la première , par confé- quent a été étoujETée dans fon bercçau. Quoi qu'il en foit, cette difcuffion n'eft

iiMÉiMii

D JE S¥^ D& MI AT G 17 E. ^f

point de mon fujet : (i quelqu'un ignore ces queftions , il peut confuiter le fa- vant ouvrage de Mr. Aftruc, de Morhis venereis y qui eft auffi traduit en Frao- çois.Il pourroit être vrai que toute forte de lèpre n'eft point une fuite de la, vérole , comme il eft certain que les obftrudions de la rate 6c du foie , les hydropifies ôcles diarrhées fréquen- tes à St. Domingue , n'en font pas tou- tes non-plus.

Ce qui me paroît inconteftable , c'eft que la lèpre auffi-bien que les écrouel- les que j*ai vues & guéries dans le pays étoient une vérole dégénérée. Voici mes preuves : je lésai guéries avec les mêmes remèdes , & de la même ma- nière que la vérole : concluez ) Mon- fieur, A la vérité je me fuis fervi de U fumigation, & j'ai lieu de croire , (ôc j'en donnerai des preuves) que les jfridions merçurielles ne conviennent point dans ces maladies^ comme M*^* Aftruc l'a remarqué.

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Ma l a jf i ES

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Il y a deux méthodes également fûres pour guérir la vérole récente > qui n'a pas fait encore de grands pro- grès , c'eft-à-dire , quin*a produit ni exoftofes, ni auKy lofes (4t) ni ulcères avec déperdition confidérable de fubf- tance , ni de carie aux aux os. Ces deux méthodes font la fumigation & la fridion : mais quand cette maladie eft accompagnée des fymptomesci-def- fus , les fridions ne fujffifent pas, il faut néceflairement avoir recours à la fumigation. Cette vérité eft non-feu- lement certaine par un grand nombre d'expériences que j'ai faites pendant onze ans , mais encore par le témoi- gnage d'un grand nombre deMedecins cités par Monfîeur Aftruc , qui ordon- nent la fumigation quand la fridion

(a) L*exoftofe eft un os groffi contre nature» L'Ankylofe eft un engorgement de la lymphe dans les articulations des membres qui leur ôte le mouve- ment de flexion.

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DE St. Dcminçv^. fg^)

§cles autres remèdes n'ont pas reuffi (4).

Pourquoi > dira quelqu'un , ces Mé- decins ne confeiUoient-ils pas la fumi- gation dans tous les cas par préférence aux friftions ? Eft-il de la fagefle d'un Médecin de faire paffer un malade par des remèdes dangereux, ou du moins très-laborieux , dans l'incertitude s'il guérira , pour revenir enfuite à un autre que le malade, afFoibli , exténue, anéanti , s'il n'eft pas arrivé pis , ne pourra peut-être pas fupporter }

La queftion n'eft pas difScile à ré- foudre. La fumigation telle qu'on la pratiquoit autrefois , étoit encore plus dangereufe que les friâions. On em- ployoit pour cette opération non-fevi-^^ lement des gommes & des refines { ^ ) mêlées avec le mercure , dont le ma- lade avoir de la peine à fupporter la fumée, ai> y ajoûtoit même de véri-

(a) De 'Morèîs Fenereis , L II. r. viij. Ô» faffim,

(b) Uid.

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60 Mal a d i ehst^^

tables poifons {a)i &c quoique les ma- lades eufTent la tête hors du pavillon , ilscouroient rifque d*être empoifon- lîés. Les Médecins jugeoient donc fa« gement qu il étoit à propos d employer d'abord le remède qui faifoit courir moins de rifques aux malades , avant de paflTer à un autre qui pouvoit avoir des fuites encore plus fâcheufes , mais dont leur prudence pouvoit quelque- fois garantir : & ce parti étoit préfé- rable à celui d^abandonner cts mal- heureux à des maux qui les auroient fait périr infailliblement dans des fouf- frances intolérables (^).

Quand je dis que les friftions mer- curielles font auffi fûres que la fumi- gation pour guérir les véroles récentes,, j'entens les friftions par extin6Hon^ c*eft- à-dire faites, non par intervalles. Comme prétendent quelques-uns j

(a) Ih'tà, ( b ) lùUfm

ÉMta

DE St. D ominùv e. 6t

mais réitérées tous les jours , autant qu'on le peut, avec une petite portion d onguent 5 en évitant foigneufement la falivation.

On a cru longtems , & il y a peut- être encore quelques Médecins dans cette erreur , qu'il falloit abfolument faire faliver les malades pour les gué- rir. Les uns vouloient que la quantité de la falive montât jufqu a fix livres ^ans les vingt-quatre heures : il n'y a pas encore longtems que les plus mo- dérés en demandoient au moins deux ou trois livres dans le mêmeefpace de tems. Quelques autres en petit nom- bre, reconnoifloient les dangers delà falivation: mais ils ordonnoient pour chaque friftion une telle quantité d onguent quelle produifoit toujours la falivation , ôc ils croyoient mettre le malade bien en fureté en la fuprimant par des purgatifs, quand elle étoic furvenue. Après la purgation ils fai-

et Maladies

foient frotter de nouveau, le flux de bouche reprenoit 5 ils purgeoient , 6c continuoient ainfi à plufieurs reprifes»

Il eft furprenant que ces Médecins n'ayentpasfenti qu'ils bâtiffoient d'une main & détruifoient de l'autre. A la vérité cette manière de traiter les ma- lades 5 qu'ils appelloient par ^x^/^ff/W, lespréfervoît communément desdan^ gers du flux de bouche : mais outre qu'elle fait pailer par les Telles , le mer- cure qu'on introduit parla peau; fup- pofé qu'elle puifle guérir, elle ruine la fanté bc le tempérament des ma* iades par ces fréquens purgatifs.

Heureufement aujourd'hui à l'ex- ception des Chirurgiens , prefque tout le monde eft revenu de lanéceffité de fali vation abondante 5 ôt la méthode de Textinclion telle que nous venons de la repréfenter, ne trouve plus que uès^ peu de défenfeurs parmi les Mede-^ cins.

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DE St. Domi]^cve. £^

Il y a quatre ou cinq ans que je lus Touvrage d'un Médecin de Montpel- lier qui m'apprit que tous lesMedecins de cette iiluftre &favante faculté ëvi- toient avec grand foin de donner la falivation 5 j*avois déjà traité 6c fait traiter de cette manière par les Chi- rurgiens, un bon nombre de malades, même un enfant d'un an, qui tous âvoient été heureufement guéris , fans aucune incommodité.

Pour peu qu'on réfléchiffe fur la na- ture de cette maladie, & fur la ma- nière dont elle eft guérie par le mer^ cure 5 on conviendra facilement avec moi que la falivation eft non-feuk*- ment inutile pour parvenir à fa gué- rifon , mais encore qu'elle s'y oppofe , & qu'elle eft un inconvénient du re- mède.

L'effet du virus vénérien eft d'épaif- fir le fang 6c la lymphe t c'eft à cette qualité de ces humcuris, que Ton doit

M A L A D 1 ES -

attribuer les exoftofes, les anKylofes , les ulcères, la carie des os ôc tous les autres fymptomes. Cette lymphe trop épaifle s'arrête & fe coagule dans les articulations, fource des AnKylofes: elle s'arrête pareillement &: s'accumule dans les tuyaux étroits des os 3 de-là les exoftofes : elle croupit dans les ca- naux capillaires du périofte , s'y aigrir, s'y corrompra ronge les os, voilà la carie. Le fang trop épais ne peut par- courir les artères capillaires, il les gon- fle & les déchire 3 il s'y fait des con- geftions. Eft il une caufe plus natu- relle des ulcères ?

^ Le mercure par (es parties infiniment divifibles & mobiles pénètre , defunit, fépare les globules drt fang & de la lymphe, dont plufieurs réunis ne fai- foient plus qu'uni il rend à ces liquides bourbeux leur fluidité naturelle, ôc rétablit ainfi toute l'œconomie de la machine. P^ur produire cçt effet, il

faut

D E St. DOMINGU E. 6$

faut qu'il roule longtems dans le corps^ il ne faut donc pas Ten chaffer par des purgatifs : il ne faut donc pas le lailTer s'échapper par les glandes fali* vaires. Quand il furvient un •dévoie-» ment aux malades que Ton traite, tout le monde convient qu'il faut Tar- rêter 5 parce qu une partie du mercure s*en va par les felles , que cette évacuation afFoiblit les malades, ôc les met hors d'état de recevoir denou- veau mercure. Le mercure pajûTe avec lafalive , c'eft un fait certain y la fa- livation affoiblit le malade ,& le ré- duit fouvent dans un état affreux > il faut donc l'éviter.

Un autre fait confiant , prouve que la falivation n*eft point néceffairepour guérir. Il y a de certains malades aux- quels on ne peut procurer le flux de bouche 5 quelque quantité d'onguent que Ton employé pour y parvenir : ce-» pendant tous les Praticiens conviens-

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nent que ces malades font guéris après avoir ireçu fept ou huit fridions. En faut-il d'avantage poUr prouver Tinu- tilité de cette évacuation ? " On s'imaginera peut-être que la falive épaiffe , gluante , fœtide , puru- lente n'eft telle que parce qu'elle eft chargée du virus véroliquei qu'il faut par conféquent le faire fortir par cette voie : car comment guérir une mala- die , dira-t'on , fans en faire fortir U caufe par quelqu'un des émoncloires > Idées faufles 5 raifohnemens pitoyables. La mâuvaife qualité de la falive vient des ulcères que le mercure fait dans la bouche: que l'on donne le flux à un horhmefain, la falive fera corrompue comme celle de l'homme le plus in* feâé.

A regard du virus que l'on prétend évacuer par la falivation , rendez le fang & la lymphe coulante, &C vous avez détruit virus.

D E St. D 0 MIN G V E. Çf

' Il réfiilte encore un autre avantage confîdérable de la fridion par extinc- tion : c'eft qu'il entre plus de mercure dans le corps du malade, & qu'il y refte plus longtem^ que celui qui a provoqué la falivation pour la procu- rer. On a coutume d'employer à cha- que fridion une demi - once d'on- guent 5 il entre la moitié de mer- cure : or il eft rare que l'on puifle frotter le malade plus de trois fois, ^uand cefluxdê bouche eft une fois venu , il ne fe termine pas conimu-^ nément avant le vingtième ou le vingt-» c^inquieme jour. Quand ce tems eft pafte, dans quel état font les pauvres malades , quoiqu'il n ayent reçu que flx gros de mercure ? Il n'y a que ceux qui les ont vus qui puiiTènt fe le repré- fenter : il n'y a pas moyen de revenir aux fridions. A la vérité,les fymptomes les plus apparens font évanouis : mais pour combien de teitïs? Jene dis pas

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62 M^ t A D I ES

qu'il n'y en ait quelques-uns qui ^ué- riffent véritablement: mais en vérité le nombre en eft bien petit.

Suppofons que Ton donne cinq fric- tions ou l'équivalent , tant pour pro- curer le flux de bouche que pour l'en- tretenir, il fera entré dix gros de mer- cure dans le corps : de ces dix gros , combien en eft il forti par la falivation? ' Par l'extinélion, qu'un malade ait été frotté trente fois , { c'èft le moins qu'il doive l'être ) avec un gros ôc demi d'onguent fait au tiers : le malade re- çoit quinze gros de mercure fans qu'ij. s'en foit perdu un grain , ni par la falivation ni par le dévoiement 3 ces quinze gros ont donc roulé dans le corps du malade pendant plus d'un mois, car il eft rare que l'on puiffe donner trente ou quarante fridions fans interruption. Ces quinze gros de mercure ont donc eu le tcms de re- mettre les liqueurs dans l'état naturel.

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ff Je crois , Monfieur, & cher Coïi-r frère , avoir fuffifamment prouvé l'a- bus de la falivation. Vous attendez de moi , fans doute que je vous expofe de quelle manière j'ai pratiqué les fric- tions par extinftion. La voici.

Après avoir fait faigner , rafraîchir & purger les malades; je les ai fait frotter tout de fuite fans les faire bai- gner , au moins communément.^ Ce n'eft pas que les bains ne foient utiles: mais je ne les crois pas néceflaires , dans les pays furtout ou la tranf- pîration eft abondante, &c par confé- quent ou les pores de la peau font fuf- fifamment ouverts? je ne lésai omis, que quand les malades n'ont pas eu la commodité de les prendre. Pour les Nègres , cela auroit été trop embarraf- fant 3 & pour les Blancs, trop d*appret auroît pu faire foupçonner ce qu'ils avoient intention de cacher 3 en un mot , je VQU5 dis ce que )'ai fait 3 &: noa

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ce qu'il eft bon & à propos de faire.

Je crois donc qu'on peut utilement baigner les malades après la faignée 5 les purger après huit ou dix bains , ôc •faire prendre encore quelques bains après la purgatioa.

Le Médecin de Montpellier , dont j'ai eu l'ouvrage , ordonne la faignée èc Lapurgationi les bains enfuitej après lefquels il fait encore faigner & purger>

Je crois que la première purgatioa eft mieux placée après , que devant les bains 3 & que la féconde aufli-bien que la féconde faignée font communément de trop.

, rnUn ou deux jours après la purgar tion 5 j'ai fait frotter les adultes d'une foible complexion pendant deux ou trois jours avec .un gros d'onguent, ou il n'entre qu'un tiers de mercure. Le troilîeme ou quatrième jour , j'ai fait ajouter un quart de gros 5 le fix ou le fept , un autre quart i & j'ai fait conr

V Er S'r.T PÇMINGV E. ^l

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xinuer tous les jours avec ce gros & demi ( a ). Je n'ai trouvé perfonne qui pûtfupporter la friaion de deux gros fans danger de faliver , au lieu qu'avec un gros àc demi , la plupart ont fouf- fert la fridipn vingt ou vingt- deux jours de fuite. .

L'on peut fans rien craindre , faire la même chofe ici. Il faut avoir foin d'examiner tous les jours la bouchp pour s'affûrer fi le malade n'a point de difpofition àfaliveri c'eft-à-dire , s'il jn'y a point de chaleur au palais, fi les o-encives ne font point gonflées , fi les dents ne font point de mal , fi le ma- lade n'a point de crachottement 3 en ce xas il faut continuer ; fi au contraire ^on voit quelques-uns de ces figiies précurfeurs de la falivation , il faut ,fufpendre le^ fridions jufqu'à ce qu'ils ayent difparu 3 & pour aidgr

( a ) J'ai fait frotter les perfonnes robuftes avec gros & demi dès les premier jour. ^

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à les diflîper , on fera, un gargarifme i avec une décodion de plantain,& dans une chopine on fera diflbudre douxe grains d'alun.

Il faut communément trente fric- tions pour guérir : mais il faut les réi- térer huit ou dix fois après que tous les fymptomes font diflîpés.

Il eft beaucoup mieux de faire les fridions le foir deux heures après un léger fouper^ que dans un autre tems de la journée : le repos de la nuit , la dou ce chaleur du lit aident au mercure âpafTer dans le fang.

Il fuffit de frotter les bras , les jam- bes & les cuifles. Il eft auffi in utile qu'in- décent de frotter les autres parti es 5 pourvu que le mercure entre, il n'im- portjsparoù.

Il eft bonde tenir un réchaut avec de la braife au-defTous des membres que Ion frotte, fuppofé qu'il fafle trop chaud pour faire les fridions auprès du feu.

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Quoiqu'il foitfacile de fe préferver du froid, & même du frais, principa- lement aux riches , il faut autant qu on le peut , ne point traiter ces maladies en hy ver.

On commencera par frotter depuis le bas de la jambe jufqu au milieu. Le fécond jour depuis le milieu juf- qu'au genou 3 le troifieme, depuis le genou jufqu'à la moitié de la cuifTe 5 le quatrième, le refte delacuiflei le cinquième, la moitié du bras 5 le (i- xieme le refte du bras.

Le feptieme on commencera la jam- be, le bras & la cuifle de l'autre côté 5 on reviendra enfuite à la jambe <jui a été ftottée la première , & oii continuera dans le même ordre.

Après la guérifon du malade , il ne faut ni le faigner ni le purger , comme on le fait communément , à moins qu'il n'y ait dans les malades des indi- cations évidentes qui le demandent*

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Pendant tout le tems dés friftîons i le malade ne fortira point , & il évitera avec foin Tair frais.

Les Médecins de Montpellier font vivre les malades «ayec dii lait. L'Auteur que j ai le n eft pas fi rigide. Je penfe avec lui qu'on peut leur permettre le potage , le bouilli , le rôti &: rien de plus. Pour la boif- fon une tifanne fmiple de chiendenp & de régliffe fuffit > on peut même permettre un peu de vin à ceux qui ont coutume d'eji boire.

Je ne veux pas quitter cette ma- tière fans dire un ino^ \de la fuf migation.

L'ufage de la fumigation eft auflî an- cien , & peùt-êire plus que la fridioa. Je dis peut-être plus , car les Chinois qui fuiv^nt le fentiment de M'* Af- truc , ont reçu la vérole des Portur gais 5 ne connoilTent point les ondions mercurielles , & employent la fumir

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vE Sri DpmihJS^e. 71

gàtion. Voyez M»^* Aftruc Liv. II. p, 1 70 5 6c fa difTertation fur la nature la maladie vénérienne qui règne chez les Chinois , ôc fur leur manière de la guérir.

On appelle Fumigation la méthode de traiter les maladies vénériennes par une poudre que Ton fait brûler fur un peu de braife dont le malade reçoit la vapeur par le nez. On devroit plutôt rappeller exhalaifon du mercure, car cette poudre ne doit point faire de fumée 5 mais feulement une petite flamme bleue , qui ne s'élève pas plus haut que deux travers de doigt au- deffus de la braife: ainfi, cette opéra- tion n'efl: pas difficile à fupporrer, &C ne dure que quatre ou cinq minutes. Elle n'efl: néceflaire que dans les cas que nous avons indiqués ci-deflus. Cependant 5 fi les perfonnes du fexe avoient une gonorrhée , ou même des

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fleurs blanches [a], je leur confeilld de la préférer auxfridions 5 auffi-bien ou a tous ceux qui ont des dartres ou éts puftules.

Quant à la matière que l'on doit employer pour fumiger , vous me difpenferez , Monfieur, d'entrer dans le détail de toutes celles dont les anciens Médecins fe font fervis : Monfieur Aftruc lésa rapportées avec beaucoup d'exaditude {h) 5 je ne pouvois que le copier. D'ailleurs mon intention n'eftpas de faire un livre, mais un mémoire le plus court qu*il me fera poflible, & principalement de rapporter ce qui m'a réuffi. >

J'employai d'abord une livre decîn* nabre artificiel, convaincu que c'étoit le remède dont M. Charbonnier avoît

( « ) Hippocrate employoit des fumigations poiuf cette maladie. De Mwbh mulisrum.

{\i) De Morhts venereis» Lib II. cap. viij»

fait des épreuves heureufes aux In- valides , fous les yeux de M" Malouec- alors Médecin de cet Hôtel , & à Bif- fêtre fous la diredion des députés de notre Compagnie : &: quoique tous les malades n'euflent pas été guéris , la Faculté qui connut quec'étoit la faute de celui qui adminiftroit le remède, Sc non pas dvi remède même , ni de la façon de remployer, nelaiflapas d*ea jugerfavorablementjôc de Tapprouvers,

Îerfuadée qu entre les mains de fes )oaeurs , il feroit fupérieur à tous les; autres. J'en fis d'abord l'eflai fur quatre Nègres les plus maléficiés , entre un grand nombre que le Chirurgien de l'Habitation des Mineurs Mithon de- voit traiter par les friélions avec la falivation. Je les guéris dans un mois j §c je fus obligé peu de tems après de faire fumiger prefque tous ceux qui avoient paffé par les mains du Chirur- gien.

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EBAfiOaitaSaBi

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Il eft vrai qu'à run des quatre qui âvoientétéfumiges, il revint des pians peu tems après 3 ce qui me fît ju- ger qu'il falloit continuer le remède encore plus longtems que je n avois fait , après que les malades paroiiTent guéris.

J'eus bientôt épuifé la livre de cin- nabre 5 il auroit fallu au moins cinq oii fix mois pour en faire revenir d'autre de Paris: je fis réflexion que toute préparation de mercure qui pouvoic être prife intérieurement fans danger, pouvoit être propre pour fumiger. Sur ce principe je me déterminai pour F^thiops minéral : mais la prépara- tion ordinaire jette une grande flamme & fe confomme tout d'un coup 5 il fal- lut donc ajouter une matière qui ne fît point trop de fumée , & qui retar- dât la déflagration de VJEthiops , fans diminuer la vertu de ce remède: je choifis l'antimoine diaphorétique 5 je;

D E S '^» Do M 1 NG V E^ J

m'en fervis pendant quelque tems, èC enfin au lieu de cet antimoine j'ajou- tai du metcure crud autant que j'en pus éteindre avec la plus petite portion de fleur de foufre , & je parvins à en éteindre une livre avec quatre onces de fleur. Si Ton met moins de fleur de foufre , la matière ne peut brûler. Si l'on en met plus^elle jette trop de flam- me, brûle trop vite, èc incommode les malades.

Je fis faire un grand fiége en fera cheval, fur lequel huit ou dix Nègres puffent tenir affis. Il étoit entouré d'uii pavillon qui traînoit par terre , & qui étoit élevé environ de deux pies au-def- fus de la tête des Nègres, & dont les deux pans fe croifoient. Je mettois un réchaud entre deux Nègres, qui la bouche ôcles yeux fermés d'un ban- deau, recevoient l'exhalaifon de la poudre dont je mettois environ une petite cuillerée à cafFé dans chaque ré-

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chaud i après avoir refermé le.pavillon j'y laifTois les Nègres fans chemife, ( a ) jufquace quilsfufTent bien enfueur> ce qui arrivoit aux uns après quatre ou cinq minutes, à d^autres après fix ou fept Je les faifois alors reprendre leurs cnemifes , & coucher fur une paillaffe, couverts d'une couverture de laine, pii je les laiflbis fuer au moins deux heures : après ce tems on les changeoit de chemife. Ils faifoient ordinairement deux , trois ou quatre felles par jour. Je vifitois leur bouche tous les ma- tins : s'il paroiflbit quelque difpofition à la falivation , on fufpendoit le re- mède jufqu'à ce que cette difpofition fût pafTée : j'employois alors un gar- garifme,ou avec les plantes aftringen- iQs j comme le plantain , la grenade

( s ) Quand j*ai fait fumiger des Blancs , les hom-i mes étoient en chemife ac en calleçon , les femmes en chemife ôc en juppon»

fauvageit

DE St. Do m ïj^gue. %\

fauvage , ou fimplement queiqires grains d'alun fondus dans Feau*

La falivation furvenoit rarement avant qu'on l'eût prévûeielle étoit tou- jours légère , oc n'étoit gueres qu'un ptyalîfme , ou crachottement i les gargarifmes l'arrêtoient , ou une eau de cafle quand ils ne fuffifoient pas.

Tant que j'ai pu veiller par moi- même àcette opération, les plus mal^ traités de la maladie en étoient déli- vrés parfaitement dans l'efpace de deux mois 5 ceux qui n'avoient que des pians &: des ulcères peu profonds étoient guéris dans trente ou quarante jours. Quand il y avoir carie aux os, exoftofes , anky lofes, perte de la luette ôc des amygdales , il falloit bien plus de tems 5 & encore plus pour les écrouelles & la lèpre. M^is lorfque mes occupations ne me permirent plus de faire faire ces remèdes en ma pré- fence , ôc que je fus obligée d'en char-

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ger le Chirurgien de rhabitation, qui s en rapportoic le plus fouvent au Ne^ gre , chef de la petite Cafc (/z), (parce qu'il a voit auffi fes affaires ) 3 les Nè- gres guérifîbient à la vérité , mais bien plus lentement.

Pour boifTon ordinaire on faifoit une tifanne avec le bois de gayac , ôc récorce de bois de fer. J'ordonhois qu'on y aioûtat de la fquine & de la falfepareille jqui croiflent abondam- ment dans le pays : mais je m'apperçus bien-tôt, que non-feulement on n'a- joûtoit point ces dernières plantes, mais que la plupart de ces Nègres ne vouloient boire que de l'eau ^ ce que je fus obligé de tolérer.

Pour la nourriture des Nègres pen- dant le traitement , je faifois dans les premières années acheter demi - li- vre de viande , êc une livre de pain par chaque Negrc pour la journée,

' (w ) C'^ft ainfi qu'on appelk PHôpkal deftiné àcei

tnaiadies.

DE St. Domingue. 8|

fans compter les potages , & la caf- fave. Dans la fuite , comme cela coutoit trop 5 je me reduîfis à mettre dans une grande chaudière une tête de bœuf avec des patates (a) & du bif^ Guit. Cela fuffifoit pour bien nourrir une vingtaine de Nègres: quand j'en avois davantage à traiter , ( car le nom- bre alloit fou vent jufqu'à trente ) je faifois ajouter deux ou trois pies de bœuf. Ces Nègres engraiffoient con- fidérablement au lieu de maigrir, à mefure qu'ils guériflbient.

Les exoftofes , les anKylofes y la ca- rie des os , les écrouelles , la lèpre ^ ne demandent point de cure particu- lière: je faifois feulement enveloppe^

( 4 ) La patate eil la racine d'une efpece de con- volVulus rampant , qui eil au moins aufïî bonne que le maron. C'eft non feulement la nourriture ordi- naire des Nègres de St. Domingue , mais les habitans la préfèrent fouvent au pain , ô^ l'on en fert fur les Bieilleures tables.

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84 MALADIES Jjj

la partie exoftofée ou aiikyloféeavec remplâtre de Vigo cum 'menurio , & je faifois couvrir les ulcères profonds des écrouelles, Scies autres aveclemême. emplâtre.

Je vous ai promis , Monfieur, une obfervation qui nrafait penfer queles^ fridions mercurielles étoient contrai- res aux lépreux. La voici. Une jeune Négreflede feize àdix-fept ans , étoit couverte d'une lèpre ulcéreufc depuis les pies jufqu'à la tête, d'une puanteur infupportable depuis plufieurs années, qui Tavoit réduite dans un tel état de maigreur , qu'il ne lui paroiffoit plus aucun mufcle : les deux pics étoient fort gros &: couverts d'ulcères , l'un beaucoup plus que l'autre. Elle m'a- voit été envoyée du Cul-de-Sac de Léogane , par un des plus riches habitans du lieu , & par parenthefe , un des plus honnêtes hommes 6: des

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ÉMMiiiâÉinÉÉiHii

DE St. Do MI N GUE.

plus pieux delà Colonie , nommé M'* Aubri. En moins de trois mois elle Teprit chair , 6c les ulcères du corps fu- rent féchés. La tumeur des pies fut plus longtemsàfe diffiper , fa couleur noire revint (a) , les règles parurent pour la première fois de fa vie , de cou- lèrent en quantité convenable. Je né- tois plus occupé que d'un pié, qui etoit prefque réduit à la groffeur de l'autre parfaitement guéri. Ureftoit un petit ulcère fous le talon > il y avoit déjà près dun an > ou plus, quelle étoit dans les remèdes. J'interompois detems entemsla fumigation. Enfin, après avoir cefle de la fumiger, je lui fis frotter pendant quelques mois le deffus du pied deux fois par femaine, avec une très-petite portion d'onguent dans lequel ilentroit un neuvième de mercure. Il lui furvint une fièvre quar-

( » ) Les Nègres malades oat une couleur de feuille jnoits , & redeviennent noirs engaériflant. ■--'

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26 M Al 4 m t B s

tcj quicefTa & revint plufieurs fois: elle maigrit beaucoup , perdit fa cou- leur » ôC il parut un petit crachotte^ ment qui augmenta peu à peu > & qui lui faifoit rendre , les premiers jours , au plus y une demi livre de fali ve 3 dans le plus fort elle n'en rendoit pas deux livres. Je ne mapperçus pas même dabord de ce ptyalifme 5 il dura une vingtaine de jours : elle fut fl mal fur-f tout les premiers jours que je crûs qu'elle mourroit. Au flux de bouche fe joignit un devoiement qui la faifoit aller quatre ou cinq fois dans les 24 heures ; il ceffa èc revint a différentes reprifes. Elle mourut enfin après un dégoût de trois ou quatre jours. J*ai toujours attribué à la friftion faite fur fon pié 5 quoiqu'il y eût longtems qu'on ne la pratiquoit plus , tous les accidens qui lui furvinrent 5 ôc la mort même parce que je n'en ai pu voir d'autre caufe que celle-là.

DE St. Do min EVE.

Je ne dois pas oublier que cette Ne- çrefle avoit deux élévations eonfide- rables au deux cAtés du front, qui re- préfentoient parfaitement les cornes qui commencent à pouffer aux ani- maux qui en portent : l'une s'eflaça après quelques mois 5 l'autre perça, la peau ,& parut fous la forme d'un champienon, dont la tête étoit élevée au-deffus de la peau i & le pie bien diftingué de la tête, étoitadhereiit au. mufcle frontal.Ce champignon s'effaça avec le tems , & la peau fe réunit ft parfaitement , qu'il ne refta point de cicatrice vifible.

De toutes les efpecesde lèpre, le-

cailleufe eft la plus difficile à guerin

M'- Mercier, premier Secrétaire de

M"^- le Général me donna une jeune

Néereffe qui étoit dans le cas : c'ét^iç

prmcipalement la peau de fes jambes

qui étoit épaiffe & dure. Je les rétablis

dans l'état naturel: mais peu de vapis

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BB Maladies

après elles revinrent dans leur premier état. Il mêla renvoya , je la fis fumi- ger de nouveau i je la rétablis comme é lapremierefois. Cette féconde guéri- ^ fon ne fut pas plus durable que la pre- mière. On lui fit prendre quelques gouttes de folution de mercure dans Teau forte: elle guérit, mais je ne fai pas fielle n'ell point retombée.

Voici comment fe fait cette folution, & la manière de s'en fervir.

(a) On fait diJÛToudre une once de mercure dans une quantité fuffifante de bon efprit de nitrê. On la met dans une bouteille avec vingt-quatre onces d'eau. On donne fix ou huit gouttes de ce mélange dans une pinte d'eau que Ton fait prendre tous les matins. J'ai donné à un homme qui n'étoit point Chirurgien , la permiffion de traiter des Nègres avec ce remède , à la foUicitation & fur le certificat de

[a] Fid. Coi, medie, Parif.

VE St; T)oMiN GUE. 8(^;

plufieurs habitans dont il avoit guéri des Nègres, fans qu'il en fût arrivé aucun accident: mais je n'ai jamais voulu m*en fervir.

Après cette efpece de lèpre , celle qui fe manifefte par une grande quan- tité de tumeurs charnues fur toutes les parties du corps , efb la plus rébelle. Le dernier Nègre que j'ai fait traiter fur l'habitation de M'* Fontelaye , ou j'ai demeuré trois ans , fut guéri après trois ou quatre mois : mais cette gué- rifon n'a pas duré deux ans : quelque tems avant que je partifle, pour re- venir, le Chirurgien recommença aie traiter. Il étoit horriblement défiguré par une quantité de tumeurs furie vi- fage5fur les mains , fur les doigts & fur tout le corps. S'il s'étoit montré dès que cts tumeurs commencèrent à re- venir 5 il auroit été facile de le guérir : mais comme il étoit chaffeur ^ on ne le voyoit point. Je ne fçai fi ceChirur- gicn en fera venu à bout.

^o

M A l A D î B s

Pour guérir les écrouelles , il ne faur que fumiger les malades, & couvrir les ulcères profonds , ou les tumeurs avec Templâtre de Vigo cum mercurio^

Quant aux Gonorrhées , aux Bu- bons , aux Rhagades , âux Porreaux , Par très 5 Phymofis, Paraphymofis, voici par quelles méthodes je les ai traité es.

Lorfquela eonorrhée étoit accom- pagnée de la vérole u niverfelle , je fai- fois fumiger les malades, après les avoir fait faigner , purger, rafraîchir & avoir diffipé Finflamm^tion qui accompagne cette maladie > je leur donnois pour boillon ordinaire , la décoftion de la racine de pois puant 3 la vérole univer-» felle &: particulière guériiloienten me-» ine tems.

Quand la gonorrhée étoit feule, la tifanne de cette racine la guérifloiç parfaitement. Pour difpofer les ma- lades à prendre ce>te tifanne > je leur

DE St, Dominçve. ^

faifois ufer d'une autre,faite avec la ré^ gliffe du pays. Un habile Chirurgien m'a affùré qu'il ne donnoit pour gué- rir la gonorrhée que les tifannes rafraî- chiflantes.

Après la guérifon des gonorrhées, il refte aflez fouvent dans l'urethre des cicatrices dures , élevées , qui caufent des dyfuries très - douloureufes , que les Chirurgiens appellent des carnofi- tés,ôc qu'ils guériilent avec des mèches.

J'en ai guéri quelques unes par l'ex- halaifon du mercure introduite dans l'urethre^par le moyen d'un entonnoir^ & cette manière d'effacer ces cicatrices eft plus fûre que les mèches , qui d'ail- leurs font douloureufes 5 au-lieu que la première ne l'eft point du tout.

Avant de finir cet article , je veux, Monfieur , vous faire part de deux ac- cidens fmguliers furvenus à la gonor- rhée fupprimée. Une femme qui avoit

une gonorrhée viririentc,très-abondan- te,tomba malade d'une fièvre maligne, dont elle ne guérit que le trente-neu- vième jour. La violence de la fièvre > ou les faignées &: les autres remèdes fupprimerent totalement le flux. Peu de tems après cette guérifon , elle fe. trouva tellement dégoiitée de tous les alimens ordinaires , qu elle ne fou- haittoit que des porreaux ou des ok gnons crudsjqu elle dévoroit quand el- le pouvoit en attrapper. Ce dégoût fut bientôt accompagné d'une méiancho- lie ou d'tme trifteffe dont on ne pou- voit la diftrairc. Enfin ) elle perdit en- tièrement la mémoire , &: devint imbé- cille. Elle fut trois ou quatre mois dans cet état. Une nuit elle en fut totale- ijient ôc fubitem.ent délivree-.la gonor- rhée avoit paru. Quoique de ce mo-. ment elle eût recouvré fon jugement 6c fon efprit , elle ne s'eft jamais f ou-

VE'Sf. DOMINGV E.

venue "qu'elle avoir été malade.

Une jeune Négreffe de quinze ou feize ans , dont la gonorrhée avoir été fupprimée,apparemmenr par quelques drogues quelle avoir prifes, (car les Nègres fe mêlent de guérir cette nia- ladie) , devint imbécille, & fa vû^ diminua , de forte qu'elle ne voyoit pas a fe conduire. Informé de ce qui lui étoit arrivé , je tâchois de rappeller Févacuation fupprimée : lorfquelle reparoiffoit , la Négreffe fe trouvoic mieux, mais elle étoit médiocre. Se ceflbit fouvent. Comme je ne demeu- Tois plus fur les lieux.y je ne faifi^elle devint plus abondante par elle-même, ou par les remèdes. Elle fut environ un an dans cet état , & je lai vue depuis parfaitement guérie.

Voici qu'elle étoit ma méthode pour les Bubons vénériens.

Lorfque quelqu'un avoir de ces bu- -bonsjje ne le guériffois point autrement

p^, Maladies

queparlafumigatîonjcelaluiépargnoic les douleurs des incifions , la longueur & rennui des émolliens , maturatifs , fuppuratifs , ôc la crainte que le virus renfermé dans le bubon ne fût rentré dans le fang. Si le bubon étoit accom- pagné de vérole , ce qui eft très-ordi- naire 5 j'étois certain d^avoir guéri Tun & l'autre de ces maux en moins de tems qu'il n'en faut pour guérir les bubons.

Quant aux autres fymptômes de la vérole , tels que les Rhagades , les Porreaux , le Phymofis , le Paraphy- mofis, ils fe guériflent par la fumi- gation.

Il n'en eft pas de même des dartres, principalement de celles des Nègres : quoiqu'elles fe diffipent communé- ment , non-feulement il s'en trouve quelques-unes dont on ne peut pas ve- nir à bout 5 mais quelquefois après la guérifon des pians, & même delà vé-

St. Dômïngue. pi

fole> il envient de farineufes à ceux qui n'en avoient point, le fquellesréfif- tent longtems , ou toujours , aux to- piques de toute efpece : les émoi- liens , la pierre infernale , les eaux mercuriellesjles pommades avec le fu- blimé , tout enfin devient inutile con- tre cette maladie de la peau. J'en ai trouvé une entre-autre qui n'a pu en être délivrée qu'en buvant longtems Teau mercurielle décrite ci-deflus.

Voilà , Monfieur , de cher Confrère, ce que j'avois à dire fur les maladies particulières de St. Domingue. Mais on peut faire une réflexion fur toutes celles qui font particulières aux Blancs dans ce climat & dans ceux qui lui font femblables: c'eft quelles participent toutes des maladies d'automne dont parle Hippocratte. Lorfque dans un mime jour , dit ce Prince delà Mede-* cine 5 {a) il fait tantôt chaud^tantvt froid ,

( a ) Quando eadem c'ie modo cala , modo frigfisft , éUptHtnnaUi mon 9$ gx^eâare oprttt* Aphoi. 4 led. 3.

^6 Maladies

on doit attendre des maladies d'automne. Voilà précifément ce qui arrive dans rîie 'S>t, Domirjgue: les foirées, les nuits, les matinées font fraîches ^ ou froides, comparées aux chaleurs exceffives des autres heures du jour. Toutes les ma- ladies doivent donc être femblables à celles que l'on voit en Europe dans rAutomne- Or dans TAutomne [a) les maladies font très- aiguës & très- dangereufes.

Les maladies de l'automne qu'Hip-

pocrateaobfervées,fontr.plufieursdes maladies de l'été : œs maladies de Tété font des fièvres continues , des fièvres ardentes j . plufieurs tierces & quartes , <Iesvomi{remens, des cours de ventrp. 2°- Les maladies particulières à Tau- tomne , outre les fièvres quartes U. ^r- rantes , font principalement les gonflemens de rate , les hydropifies , les phthtfies , les

( a) In^ autumno morhi acutijfimi ^ omnino morttferi. Aphor. ^. feCt. 3.

flrangurjes ^

DE St. DOMINGVË. gj

firmguries , les lienteries^ lesdyjfenteries ^ les efc^uinancies ^les ajlhmes^{a).

Toutes ces maladies régnent com- munément à St. Domingue , mais dans le même degré qu elles ont en Europe dans Tautomnei c'eft-à-dire , qu'elles doivent être la plupart très-aiguës , ôc toutes très-dangercufes*

Pour éviter ces maladies cauféespar les variations de Tair, les habitaris devroient fe vêtir fuivant le degré de chaleur, com.me on fait en Europe dans les différentes faifons: mais en touttems, ils font également couverts, c'ejft-à-dire, qu'ils ne le font prefque point. Unevefte de bafîn , ou d étoffe encore plus légère , & toujours débou- tonnée , fait tout leur habillement dans toutes les heures du jour, même

( a ) Antumno autem ^ ex &jl'wîsmulti , ^ febres quâirtam é* erronés. , iQ* fflenes , ^ hydropes , ^ t^- hesi^ urinS'fiillicidm , ^ UenteriA , ^ infanU , ç^ dy^ yinteri y ^ arigimi é* '^fthmatà, dcc, Aphor. zx. led. |,

G

aux mois les moins chauds de Tannée, qui font Janvier , Février & Mars : bien plu$ , la plupart couchent fans couverture &: fans draps. Cette mau- vaife habitude eft la caufe la plus ordinaire desgonflemens de rate, des 4iai'rhées &C des dysenteries fi commu- nes dans ce pays.

Je vous ai promis , Monfieur &cher Confrère , dès le commencement de ma lettre5de vous parler d'une maladie fmguUere dans laquelle je fus obligé de donner lemétique. Un homme de quarante-deux ans , aflez chargé d'em- bonpoint j, d'un |:empérament phleg- matique, après avoir traîné pendant près d'un mois fans fièvre apparente , au moins pendant le jour, luivant le rapport des voifins & du Chirurgien , tomba dans un tel état d'atonie, qu'il ne pouvoit ni fe foùtenir fur fesji^m- bes, ni porter un gobelet afa bouche. Comme il n'écoit pas en état de fe

D B St. Do min GUE.

faire gouverner chez lui/ M'* Fonte- laye habitant du Cul-de-Sac, le fît venir fur fon habitation,où je demeu- rois alors 5 je dois lui rendre ce té- moignage & à Madame Fontelayefon époufe , que c^étoient les gens les plus charitables que j'aye jamais connus ; leur îliaifon étoit un afyle ouvert à tous les malades , & pendant plus de dix ans j'y en ai toujours vu quelqu'un , dont ils avoient le même foin que fi c'eût été leurs enfans.

Le malade 5 qu'ils avoient envoyé chercher dans leur chaife arriva le foir.

Le lendemain matin je lui fis pren* dre fix grains de tartre ftibié dans un verre d'eau , ôc deux heures après trois autres grains. Et comme iln'etoit que foiblement évacué 3 je lui fis donner furies quatre ou cinq heures du foir , un lavement avec une décodion or- dinaire5à laquelle je fis ajouter environ deux gros de tabac. L'évacuationt fut

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fÔO M AL À D î É> ^

abondante. La fièvre le prit peu de tems après 5 c'elVee que je fouhaitois, comme un moyen de rétablir la force des artères Se des autres parties folides. Je la lailïlii fubfifter pendant vingt oa vingt-quarré heures 5 après ce tems je lefis faigner. Le lendemain je le pur- geai fortement i lefur-lendemain jele fis faigner du pie*

Le Chirurgien qui n'eft pas tout-à- fait ignorant 5 parût fort étonné de la manière dont je m'y étois pris : je Finf- truifîs des raifons qui m'avoient dé- terminé. Le lendemain de la faignée du pié le malade fut guéri 5 ôc en état de fe promener : cependant je trouvois que fon efprit n'étoit point dans fon affiette ordinaire.

Huit ou dix jours après , il fe déran- gea totalement. Ce dérangement fe manifefta d'abord par des chants, des ris immodérés, des difcoursplaifans, 'dans lefquels il imitoitle langage des

Nègres avec une guaieté & un facilite .qu'il n'avoit point auparavant. Il nous couchoit en joue les uns après les au- tres, avec fon oreillerjfaifant de grands .éclats de rire. Il fit cent autres extra- .vagances : mais dès le jour même on fut obligé de le lier , ôc dans la fuite de lui mettre une chaîne au pié pour le -moins incommoder. . Dans ce tems-là couroit une maladie inconnue jufqu alors , qui enleva un grand nombre d'efckvesi elleprenoit par un gros rhume de cerveau & une toux violente qui duroit toute la ma- ladie : le corps fe couvroit de petits boutons durs , fou vent dès le premier jour,avecla fievre,&: quelque- fois auffi fans fièvre : à mefure que ces boutons féchoient, il furvenoit un dévoiement violent qui duroit fept ou huit jours •plus ou moins 5 quelques-uns mou- roient pulmoniques , &le_plus grand pombre par la diarrhée. Dans unç

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ÏÔ2 Ma l a d 1 é &

habitation de deux cens Nègres, iieii tomboit malades chaque jour jufqu*à vingt & trente.

Elle attaquoit auflî quelques Blancs , principalement des enfans : on Tap- T^çiioijarempion ou falempion , nom Ef- pagnolj difoient quelques-uns, ou Provençaljfuivant d'autres.Cétoit une efpece de rougeole boutonnée , & elle n*en difFéroit qu en ce que la peau n'é- toitni élevée ni enflammée. J'ai pour- tant vu quelques enfans blancs avec CQs deux fymptomes.

Notre malade en fut attaqué le cinq ou fixieme jour de fon délire , mais fans rhume de cerveau ni de poitrine , & avec peu de fièvre : il n'en fortit que quelques grains au vifage , aucoU & aux mains. A mefure que les puC- tules fécherent , fon délire diminua. Il en reparut d'autres dix ou douze jours après : le délire augmenta. A peine cc^ fécondes furent-elles féchées , qu'il en

revint de nouvelles aux mêmes en- droitsi le délire fUt moins fort qu avant 6c pendant la féconde éruptibii. Elle fit encore au moins trois ou quatre fois. Pendant tout ce tems qiii fût environ de deux mois , le délire ne ceffa point entièrement: mais à chaque éruption il étoit moins violent qu'à la précédente > quand il ne s'en fit plds du tèut, le malade revint dans fonbon fens.

Il y avoit plus de trois mois que la fanté du corps 6c de Tefpric étoit réta- blie 5 quand il en reparut de nouveau . Jufqu à troisreprifes. A la première , le malade parut morne , Tefprit & la mé- moire s'afFoiblirent un peu 3 à la fé- conde & troifieme, qui fut enfin la dernière, le corps ni Tefpritne fouf- frirent point. Le malade n'eut point de dévoiement dans aucun tems , ma^is feulement le ventre plus libre après chaque éruption, lorfquelespuftutes commençoient à fécher. Pour fuppléer

G iv

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fi 04 Mal. de St. Dôm;^

à cette évacuation critique , je le pur- geai deux ou trois fois avant qu'il pa- rût de nouvelles puftules.

J'ai l'honneur d'être j&c.

Fip^ de la première Lettre,

SECONDE

L E T T RE.

SUR LES PLANTES

DE St. do min GUE.

O u S m'avez paru content , Monfieur, de ce que je vous ai écrit fur les maladies de St. Domingue , & vous m'ex- hortez à communiquer auffi ce que j'ai remarqué fur les Plantes du même pays.

Je ne fai fi je pourrai vous fatisfairc fur cet article : jo n'en ai décrit que

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P LA

N T E S

quelques-unes dont les qualités fingu- lieres font ignorées ou peu connues i & quelques autres dont \qs defcrip- tions données parles Auteurs de ma- tière médicale, fontfauflTes ou impar- faites. ^

J'ai été détourné d'en décrire un plus grand nombre, parce que j'ai fup- pôle quon trouveroit dans le P. Plu- mier tout ce quon pou voit fouhctiter fur cette matière. Mais de retour ici , quand j'ai examiné Touvrage de ce favaiit Religieux, il mVparu que ni IQS Médecins du pays ni ceux d'ici n'en^. jTourrôient pas tirer un grand fecôtirs ^ pour les maladies , parce qu'il n'indi- que ni its vertus médicinales des plan- tes, ni le nom qu'elles portent à St. Do^^ lîiingue. Si l'on vouloit quelque chofe de parfait en ce genre , il faudroic qu'un Médecin uniquement cxrcupe dd cet objet parcourik les difFérens quar- tiers de cette îleiqu'îl s'informât exac-

VE Sf. DoMi^cvE. Î07

tement du nom de toutes les plantes qu*on y emploie avec fuccès, qu'il en fît une defcription exade : enfnitc il les rangeroit , ou les communique- roit aux Botaniftes de profeffion qui lesrangeroient dans les clafles auxquel- les elles appartiennent, ou qui en for- meroiént de nouvelles. Mais on nc^ doit pas attendre ce travail d'un Mé- decin occupé à traiter les malades.

Ainfi quand j'aurois fu ce qui man- que à l'ouvrage du P. Plumier , il m'au- roit été impoffible d'exécuter ce que je viens de propofer.

Pour faciliter ces recherches, je crois qu'on pourroit fe fervir utilement d'un manuicrit que j'ai entre les mainé qui a pour titre :

Livre des fimples de l'Amérique fervans au corps humain , décou- verts par André Minguét, tant en Médecine, que Onguens. A la côte de St. Domingue, l'an de grâce 1 7 1 p

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i)R». fit

X08 P LA N TE 5r2

; Ce manufcric eft fort rare , je n'eix ai vu qu une copie , qui appartenoit à M^'- Duhamel Médecin du Roy 5 faite fur l'original que poffédoit M^'- Depas, auffi Médecin du Roi, & qui! voulut; bien me communiquer. . Vous voyez , Monfieur , par le feul titre,queMinguet étoit un homme fans lettres. Auffi n'étoit-il ni Médecin , ni Chirurgien, ni Apothicaire. Ce-, ' pendant tout ignorant qu'il étoit, il a eu une grande réputation dans lepay^ pour la guérifon des maladies tant im ternes qu'externes. Cela n'eft poinç étonnant , vous favez le proverbe, au pays des Aveugles les Borgnes font Rois,

^ Aux portes de Paris , pour ainfi dire > n'avons-nouspas vûun payfan, connu fous le nom à^Medecm deChmdrai.q^uQ Ton alloit confulter de dix lieues à la. ronde, & de Paris même? Quelques, cures faites au hafard , par le moyeu

DE Sr. DOMÏN GVE. {Q^

de quelques plantes qu*il ne connoif- foit 2;ueres mieux que les maladies, 5c qu'il ordcmioit pour toute forte de maux 5 fans diftindion d âge , de fexe, & de temperamens , lui don- nèrent une réputation qu'un bon Mé- decin n'auroit peut-être pas pu acqué- rir. La raifon en eft, que pour faire honneur à ces fortes de gens , on ne compte que ceux qu'ils ont guéris ou foulages, & non ceux qu'ils ont manques, ou à qui il eft arrivé quelque chofedepis.

Tel étoit apparemment ce Minguet dans un pays qui n'a voit peut-être pas encore vu de véritables Médecins. Quoiqu'il en foit, fon ouvrage, tout imparfait qu'il eft, peut apprendre au moins le nom desplaotes de cette île 5 &: quant à ce qu'il dit de leurs vertus, les deux Médecins dont j'ai parlé , n'y ont rien trouvé à redire 5 &: M'* Dulia- •^mel grand Botanifte , qui a corrigé

5 ' I

1 lO

Plantes

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une vingtaine de dénominations plantes , n'a pas corrigé un feui mot fur les qualités qui font attribuées tant à celles que j*ai extraites de fon nianufcrit, qu'à toutes les autres dont je n'ai point parlé.

Je les ai auflî prefque toutes emplo- yées , & quand j'en rapporte quel- qu'une dont je ne me fuis pas fervi , ou que je ne connois point, je ne manque pas d'en avertir: c'eftun aveu que je ne fuis pas caution de ce qu'il avance. 4

J'ai cru ne devoir rien changer dans le ftyle de Minguet , puifque c'eft fon ouvrage que je donne &; non le mien. Son texte eft diftingué de ce que j'y ajoute par des guillemets , ou par le caradere italique.

Entre les plantes que j'ai choifies dans ce recueil , j'ai remarqué celles que M''* Lepoupée des Poxtes , Méde- cin du Roi au Cap , a fait entrer dans

■;"^fl^'':

D E St. DOMÎNGU E. Ht

les formules pour THôpital dont il étoit chargé. J'ai même cité le P. La- bat quand j'ai trouvé qu'il avoit bien décrit quelque arbre ou quelques plantes dont parle Minguet. Enfin , Monfieur , je n'ai rien oublié de ce que j'ai cru qui pouvoir contribuer à donner une connoiflance plus parfaite des plantes de St. Domingue & de leurs vertus.

POINCILLADE,

Toi^ciama , Jlore pulcherrimo,

LaPoincillade eft un arbrifleau épi- i;ieux qui croît à la hauteur de lîx oii fept pies. Il a tiré fon nom du Com-* mandeur de Poincy , Gouverneur Gé- néral des îles du Vent , c'eft-à-dire , Général de la Martinique , 6l des îles qui en dépendent {a). Ses feuilles re&

( a ) C'eft lui , qui ayant découvert quelque amer* tUiTiedans cette fleur, jugeaqu*eliepouvoit être bonne

ïlâ P l AN t Ê i? ^

femblentàcelle deTacacia, ou delà réglifTe da pays, rangées vis-à-vis l'une de Tautre, fur une côte qui donne une épine formée en hameçon à la balTc de chaque feuille. Ses fleurs font à cinq pétales. Il y en a quatre d'une égaie grandeur difpofés en croix, gau-- dronnés à leur bord, qui eft d'un beau jaune , le refte eft de couleur de feu : la partie inférieure des feuilles de la fleur eft rouge, étroite comme celle de l'œillet : cette couleur rouge s'étend jufqu'au milieu de chaque feuille , comme par autant de petites 'artères qui portent ce fuc rouge juf- qu'aux bords qui deviennent auflîroir- ■ges , quand la fleur n'eft cueillie qu'a- près vingt-quatre heures ou environ. Ces quatre feuilles font foutenues

pour la fièvre , il en efTaya & il reuflîr. Me. dcLar* nage m'apprit qu'à ia Mar.inique on en donnoic Pinfu- fion dans du vin , pour les fièvres quartes. J'en guéris deux ; ce qui me donna occafion de l'eflayei: en infur fion dans l'caii bouillaiue. '

chacmK

DE St. Domin gv e. h^

chacune par une autre plus épaiffe , faite en cuilleron , qui n'eft autre cho- fe que la feuille d\in calice découpé jufqu'à fa bafe en cinq parties. La cinquième feuille de ce calice , faite auffien cuilleron plus profond que les au tres^eft placée dans un intervalle que luilaiflent deux des grandes feuilles de la jfîeur , vis-à-vis la cinquième feuille : celle-ci s'élève hors du rang des qua- tre autres plus proche du centre ? com- me une efpece de cylindre prefqu aufli haut que les bords des quatre grandes feuilles: elle s'évafe en une feuille moitié plus petite que chacune des quatre, fa forme eft prefque ronde a gaudronnée comme les autres , prefque toute jaune 5 on apperçoit quelques veines rouges 5 & en reftant fur lar- briiTeau elle devient tout à fait rouge. Du centre , entre cette petite feuille Scelle du calice qui lui eft oppofée , fortent dix étamines rouges qui s'éle-

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î 14 ^ ^^ N T Ë s

vent feeancoLip au-deflus delà fleur de qui font un peu courbées : elles en- y ipDnnent l'embryon qui fe termine en un filet de la même hauteur que les éta- mines. Cet embryon devient unefiii- queplatc,diire,de couleur de châtaigne en delîors $ blanchâtre en dedans , formée de deux coffes qui renferment huit ou neuf femences., larges, cpaifles comme les plus groiîes lentilles , de figure prefque qiiarré€,ou approchante dun cœur applatti, fogées chacune dans une foflfe féparée l'une de l'autre. Les feuilles du calice font de cou- leur de feu en dedans,&en dehors d'un rouge mQJ4iis£oncé me le de jaune ôc de verd.

Les boutons delà fleur font rangés en épi ferrés, attachés par de courts pé- dicules fur une tige fans feuilles , gros en bas &: plus petits à mefure qu'ils s'approchent de la fommité. Les pé- dicules s'allongent en longue queue,

DE St. Domïn gve. ii|

àmefureque les boutons groffiflents: il ne s'en épanouit gueres que quatre chaque nuit 5 & ainfi de proche en proche du bas en haut de la tige , qui croît auflî jufqu a un certain point , de manière qu'il yen a qui donnent plus de cent fleurs > enfuite cette tige fe feche.

Il y a peu de branches de rarbrifleau qui ne produifent en même tems plu- fieurs grappes ou épisi mefure que les tiges fechent, il en renaît d'autres , en grande quantité pendant près de neuf mois , & toiijours quelques-unes pendant toute l'année , plus ou moins, lui vaut qu'il y a plus ou moins de pluie. Les mois de fecherefle , font Décem- bre , Janvier , Février , Mars , quel- quefois Avril. Il naît allez fouvent une fleur dans l'aifiTelle de quelques feuilles.

Les fleurs de la Poincillade pri- fes , comme du thé , avec un peu de

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IJ^ P L A N TE S

fiicre , font fudorifîques béchiques vulnéraires. J'ai guéri par leur fe- Gours trois perfonnes qui avoient un ulcère au poumon. M'^' Alais Méde- cin de la Rochelle , à qui j'en en- voyois tous les ans , m'a écrit, qu'il avoit p-uéri plufieurs vieillards de tu- berculesaupoumon5&rétablilapoitrine de quelques Avocats de Paris,auxquels il en avoit envoyé. Je m'en fuis fervi avec fuccès pour les petites véroles, les rougeoles accompagnées de toux ferines , 6c dans tous les rhumes. On en met une pincée dans une pinte de tifanne convenable ou d'eau bouil- lante. Elles font auflî un excellent fé- brifuge, données dans une forte infu- fion. Il faut en mettre une petite poicrnée dans un pot j on verfe par- deflus une pinte d'eau bouillante , on couvre le pot : on en donne au ma- lade deux , trois , Se quatre taffes bien chaudes avec du fucre, une heure ou

r> E St. Do min gu e, u j

deux avant l'accès. Ordinairement le malade fue beaucoup , ôcle troifie- me accès ne revient point.

Elles ont cet avantage fur le quin- quina, que Tonn'eftpas fuj et aux ré- cidives, 6c qu'elles lont agréables à prendre.

Je les ai auflî données avec fuccès , pulvérifées , en opiate , dans les fiè- vres rebelles , principalement les quar- tes.

Il faut les cueillir tous les matins

quand le Soleil a féché la rofée qui etoit deffus 3 les faire fécher à Tom- bre , avoir foin de les retourner tous les jours , 6c les enfermer enfuite dans une boîte.

Tois fuant.

Le pois puant, {^) eft une plante qui jette plufieurs rameaux forts dui^s^

( a ) Les Botaniftes difent quq c'eft une efpecç de cafle.

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P Z A

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& eomme ligneux, à la hantear de trois OU' quatre pies. Les feuilles font oppofées deux à deux fur une côte , oblongues , pointues , vertes en def- fus , blanchâtres en-delTous, fort puantes: fes fleurs font à cinq feuilles alfez reflemblantesà celles du genêt. Elles font fuivies de gonfles longues d'un doigt, prefque rondes de la grof- feurd'un gros tuyau déplume. Elles contiennent plufieurs femences noi- râtres, groffes comme des pépins de raifins , applaties dans le milieu , & un peu pointues par rextrémité qui était attachée à la gonfle avant de fécher. U y a des gonfles qui en ren- ferment plus de cinquante.

On aflTure que les femences ro- « tîes & broyées prifes en guife de cafFé, " font bonnes pour lapaffionhyfl:érique, & quelles font emménagogues.

Les feuilles en layemen}; , font fort efficaces contre les vapeurs , & dans

DE St. Dqmingve. h^

les cataplafmes refalutifs. U) La ra- cine eft excellente pour guérir les go- jiorrhées3 on les donne en tifanne poux toute boiflon 5 elle eft um.peu amese.

Il faut auparavant faire préeéder les faignées néceffaires> &: les tifam-ies rafraîctiiflantes , j;ufquà ce que les douleurs foienx paffées. Pendant: to%îU le tems que j'ai été à St Domingoe « je n ai point employé d'autres remèdes^.

On peut conjecturer que cette ti- fanne conviendroit également dans les fleurs bdanckes.

Il y a une autre efpece de p^i^ puant 5 q^i ^"'^ diffère delà première que par fes feuilles qui font prefque rondes & d'un ver plus clair: je nai point ùàt ïïkfage de,C€tte Çecoade.

L'arbre nommé Immortel (^) efl

(;^) MonCewiT Lepouçé-e DefpoFtes, Medeem du Rûi au Cap , daaisks focmuksd'Hô-pita].

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L 4 N T E S

épineux jufqu*à ce qu*il ait acquis la grofleur de la jambe : à niefure qu^il croît & groflît , il perd fes épines , ôc il n'en refte que fur les jeunes branches. Il a été ainfi nommé, parce qu'on peut , dit-on , le dépouil- ler de toute fon écorce , fans qu il pé- rifle ( 45 ). Il a une cavité , comme le fureau : mais elle eft plus étroite àc a moins de moelle par conféquent.

Ses feuilles font en cœur, non échancrées par la bafe , difpofées comme celles des pois , trois fur une longue queue. Elle tombent vers le mois de Décembre , & font place à la fleur.

pelle immortel , fort différent de celui-ci.

(a) J'en ai fait dépouiller fix , qui n'avoienr pas deux ans, depuis le bas du tronc jufqu'à la divifion en branches. Les feuilles n'en changèrent pas de cou- leur. ^Ils portèrent des fleurs à l'ordinaire : il n'en mourût qu'un après avoir porté fes fleurs. Il efl: auflî connu fous le nom d'Arùor Maurepajta * le Maurepas; que je lui ai donne' à caufe de fes excellentes qualités.*

D E St. Do mi ng ue. 121

Les fleurs forment u ne infinité de gros bouquets compofés de boutons cour- bes, au nombre de cinquante ou foî- xante , de la longueur du petit doigt, fur une grolfe tige. Ils font enveloppés d'une gaine ou calice, qui fe fend en long par le milieu, & laifle voir une portion de la fleur de couleur de feu. Chaque bouton a une queue lon- gue de quatre ou cinq lignes. Quand il s'épanouit , il paroît une feule grande feuille droite , longue d'un demi doigt à peu-près en fer de pique allongé 5 à Toppofite paroît le calice formé en long cuilleron. Au milieu du calice & au-deflbus de la feuille de la fleur , on voit une petite fleur à quatre feuilles difpofées en grelot. Du centre fort le piftil , enveloppé d'une gaine , qui fe divife en dix étamines. Le piftil eft l'embryon du fruit. Toutes les parties de cette fleur repréfentent alTez bien un cafque.

I2Z P L A N T E S

Le fruit ell une goufle courbe con- tenant fix ou fept fèves, groffes , (avant qu'elles foient deffëchées ) comme une fève de marais.

Les feuilles , leur queue , & Fécorce de cet arbre font le plus grand remède qui foit connu pourTafthme: on en met un gros dans cinq demi- feptiers d'eau que Ton fait réduire à une pinte avec du miel i ou bien on met du fucre en la prenant chaude- ment. Pendant Taccès on en peut prendre tant qu'on veut: ce remède, n'échauffe point , & ne fait d'autre effet que de procurer Texpedoration, {a) pour prévenir l'accès, il fuiSt d'ea prendre plein une petite jatte matin & foir.

La même décodion eft auffi fort bonne dans les rhumes de poitrine. On fait avecla fleur un firop excellent pour les poitrines échauffées.

^ ( ^ ) Il m^4 pourtant paru un peu laxatif & diuré- tiq e.

t>£ St. DOMINGUE. I2J

Cet arbre eft fort commun , furtout depuis que je l'ai multiplié: il vient de graine 6c de bouture , ôc croît environ de fix lignes en vingt-quatre heures 5 en forte 5 qu'en moins de deux ans il a des branches qui ont plus de dix pies de haut.

Les Botaniftes ^ d'après le P. Plu- mier , l'appellent cor dlodendr on y vciot grec, qui fignifie arbre de Corail*

Il y a à St. Domingue un autre arbriflbau qui vient dans les haies, dont les fleurs font affez femblables à celles du chevrefeuil, que l'on appel- le arbre de Corail ; on fait avec fes feuilles des bains eftimés pour guérir la galle.

Cachiment ou cœur de bœuf.

Il ne faut pas confondre CQt arbre & fon fruit avec celui qui eft décrit dans le Didionnaire de Lemery, Cet

i 14 P ^^ N T E s

Auteur parle d'un arbre qu'il nomme gmabâne ou cœur de bœuf. '< C'elc , dit- " il) un grand & bel arbre des Indesi il w porte un fruit très-beau , gros ordi- » nairement comme un melon médio- cre , & quelquefois comme la tête d'un enfant. L'écorce de ce fruit '> efl verte , & femble diftinguée par »• certaines écailles, comme la pom-

« me dcJPin Sa chair elt fort

•' blanche ôc d\in goût très-délicat . »»

L'arbre qu'il décrit , s'appelle à St. Domingue, Coroflblier, & le fruit Co- roflol. Ce n'eft ni un grand, ni un bel arbre 3 fon fruit n'eft pas d'un goût fore délicat. Lés Nègres &: quelques fem- mes Créoles en mangent , mais fans en être friands. On en fait une gelée ai- grelette affez bonne.

Le P. Labat a fort bien décrit le Co- roffolier , un autre arbre , que l'on ap- pelle le pommier de canelle , Se le cœur ce bœuf. Les Planches qu'il 3 fait

DM St. Do mingve, 12 f

graver , répréfentent parfaitement ces trois arbres avec leur fruit. L'arbre dont le fruit s'appelle cœur de bœuf , ou cachiment cœur de bœuf, eft comme le précédent, un petit ar- bre ordinairement tortu & fort mal fait 5 de la hauteur d'un néflier. Ses feuilles reiTemblent à celles du pêcher. Je crois que celles du ganabane font faites de même , fnion qu'elles font plus vertes 5 auffi-bien que celles d'un autre arbre que l'on nomme cachi- ment Efpagnol ou pommes de canelle qui ont beaucoup de reflemblance avec le corroflol par la figure , par la chair membraneufe , les pépins de les écailles, fi ce n'eft qu'elles font plus petites.

Je n'ai pu voir la fleur du cœur de bœuf 5 parce qu'il n'y en a point dans les quartiers ou j'ai demeuré: elle paroît vers le mois de Décembre.

Son fruit eft gros comme^ une groffe

126 P L A ^ T JE ^

poire de bon chrétien > il a la fi(>ure approchante d'un cœur vert au com- mencements d'un jaune brun, quand il a acc|ais fa groiïeur, & de couleur de rofe quand il eft mur. Sa pulpe eft blanche alors , & de confiilance de bouillie: les Nègres & quelques fem- mesCréoles en mmgentjellen'eft point aufli délicate queleditle Diftionnaire de Trévoux y {a) mais elle n'eft pas de- fagréable.

Quand il a acquis à peu près fa grof- feur, je le fais cueillir avant fa matu- rité , je le coupe par tranches & le mets fécher à Fonibre.

Nous n'avons point en europe de remède fi prompt &:fi afliiiré contre les diarrhées & les dyflenteriesi après les fiîgnées convenables, & les pùrga- tions> fi elles fojit néceffaircs, lorf-

(a) Il y efl dir , que c'ait un friût de Siam. j'ai connu ces jours-ci un Chirurgien qui venoit desGraa- des-indes , qui m'a die qu'il j en a voit vu.

DE St. Do min g ve. 127

qu'il n'y a point de fièvre ni de dou- leurs dans le ventre : le ténefme feul ne doit pas empêcher de s'en fervir. On fait bouillir deux gros de ce fruit mis en poudre dans une chopine d'eau, ou d'une décoâion émoliiente réduite à moitié. On donne cette décoclion avec la poudre. Le malade garde ce lavement le plus qu'il peut.

Si le ténefme eft violent ou fré- quent 5 il eft bon de faire bouillir la poudre dans la décoftion d'une tête de pavot écrafée , & de pafTer la décodion avant d'y faire bouillir la poudre > ou bien dans la décoftion de la pou- dre faite dans l'eau , ou dans une dé- coûion émoliiente 3 on ajoutera un gros de thériaque nouvelle, ou bien quelques gouttes de teinture anodyne. On réitère ces lavemens fuivant le befoin.

Dans les diarrhées ^ les dévoie- Biens y il faut ufer , pour boillon or-

' »».^*^^..

128 Plantes

dinaire d'une tifanne faite avec ce fruit coopé par morceaux. On en fait bouillir un gros dans cinq demi feptiers d'eau , que 1 on fait diminuer eiîYÎron d'un quart, ou jufqu'àce que ia reiotore foit de couleur de rofe , ou à\in vin clairet i on peut y ajouter de ia régliffe. Si le malade a coutume de boire du vin , s'il eftfoible , ou fi la diarrhée eft invétérée , il peut en met- tre environ un quart fur trois quarts de la tifanne.

Du Alap^gle rouge,

îi Y a trois ou quatre efpeces de Mangle. [a) Je ne connois les vertus que de celui qu'on appelle mangle rouge. Il vient comme les autres fur le bord de la mer. Il croît d'une fa-

{a ) Voyez le Diclionnaire de Lemeiy , article Man^s 542. ii en fait de trois efpeces ; de blanc , A^-<ftxA^ & d'une autre efpece » dont il ne dit point lacoueiir. Ilfe trompe fur prefque tous les articles ; ce qiii approche le plus duvrai, efl: 1^ remarque tirée

de ia relation de Monfieur Froger.

con

I

DE St. Domïngve. i^^

çon finguliere. Le premier jet qui fort de terre en produit d'autres à les cotés 5 qui au lieu de s'élever en Tair fe recourbent vers la terre , & y pren- nent racine, enforteque dans cetétac il repréfente un trépié. A mefurc que la première tige qui efl: la princi- pale, ôc qui devient arore , s'élève , elle produit d'autres rejettons , qui fe re- courbent comme les premiers , & pren- nent auflî racines i ainfi cet arbre tient par une douzaine , ou plus, de ces pies qui deviennentgros & forts , aux- quels les huîtres s'attachent ( a ), LorC- que le tronc eft parvenu à la hauteur de trois ou quatre pies, il fe divife en plufieurs branches, à la hauteur de huit ou dix pies. Je ne l'ai point vu en

( » ) Les huîtres de St. Domîngue , iûrtout dans les quartiers que j*ai habités, font fort petites, <Sc beaucoup moins bonnes que celles de France. Plu-, fîeurs écailles fe tiennent enfemble & forment comme des efpeces de petits rochers autour du bois.

IJO P L 4/N T E S

fleur, fes fruits font des goufles, mais qui n'égalent pas la groiJeur d'un tuyau de plume , fes feuilles font allez fem- tlables à celles du laurier.

Le P. Labat fe trompe fur Tarticle du mangle rouge, comme fur bien d'autres : mon intention n'eft pas de le redreller. Ce qu'il eft important pour la médecine, defavoir, c'eflque fon écorce , qui eft rougeâtre , féchee , réduite en poudre & prife enfubflance ell un fébrifuge aufS affùré que le quinquina , furtout quand elle eft jointe avec la poudre du convolvulu$ câthartkus. Je ne l'ai point éprouvé en 4écoâ:ioi.i: mais jeprenois un gros de poudra de mangle avec un fcrupule pu un demi gros, (félon que je vou- lois purger plus ou moins ) de poudre des tiges de convolvulus féchéesy j'en formols une opiate avec laquelle je guérijQTois ^n deux ou trois prifes toutes les fièvres tierces des Nègres:

V E St. D 0 MINGVE. i>£

ce que j'ai pratiqué pendant plus de fîx ou fept ans : enforte que pendant ce tems on n*a pas employé un grain de quinquina dans Thabitation des Mineurs Mithon , il y a 300 Nègres.

Liane à médecine de Minguet.

Convolvuius Catharticus Americanus , Jive fcAmmonïa Amcricana.

Cette efpece de liferon que Minguet appelle liane à médecine (4), eftpré- cifément la même chofe que la plante de Syrie , que Ton appelle Icammonée, fi ce n'elt que fa racine n'elt pas à beaucoup près fi longue ni fi grofle que M^' Lemerylediti qu'elle n'eiè point iaiteufe ; ôc par conféquent la fcam- nionée qu'on employé , n eft point le fuc concret de la racine , mais de 1^

( 4 ) A St. Domîngue , tous les convolvulus , & toutes les plantes farmentcufes s'appellent liane , parc$- quelles fervent à lier*

I ij

LAN TE S

tige 3 à moins qu on ne veuille dire que la fcammonée de Syrie eft telle qiî elle eft décrite dans le didionnaire des drogues fimpks , &. que celle de St. Dominguenelui eftfemblable que par fes tiges , fes fleurs & {es feuilles. Mais cet Auteur fe trompe fi fouvent dans la defcription qu'il donne des plantes de St, Domingue , qu'il peut bien fe tromper auffi dans celle des au- tres plantes étrangères. - Quoi qu'il en foit , cette plante pouffe plufieurs tiges longues, groffes prefque comme le petit doigt, qui s'at- tachent aux arbriffeaux voifins : (es feuilles font larges d>c longues comme la paume de la main , pointues par leur extrémité , & du côté de la queue échancrées èc formées en cœur. Ses fleurs font en cloche. Je n'ai point vu lès fruits 5 car cette plante ne vient .|ue dans les montagnes.

Ses tiges vertes font laiteufesi 6c

DE St. DdMlNGVE. Ï2Z

quand elles font feches , elles font remplies de réfine brillante quand on les cafiTe.

Les Nègres eoupent ees tiges vertes en bifeau , de la longueur d'un demi- doigt. Ils arrangent ees morceaux dans un plat. Le lait en fort &: il s epaiffit en une belle raifine blanche 5 ou bien cefuc feehe à Textrémité de ces pe- tits morceaux , & avec une lame de couteau on le gratte & on en fait d€ petites malTes.

On employé ceconvolvulus en in- fufion 5 en firop , en extrait. Les ha- bitans du pays qui le donnent en in- fufion déterminent la dofe parla lon-^- gueur des deux bras de ceux qu'ils veulent purger. Cette préparation a deux défauts: le remède eftmaldofé, & Tinfufion ou décoftion eft fort acre. Le firop eft encore trop acre. L'ex- trait, à la dofe d'un gros n eft pas mauvais , il purge & eft un bon vermî-

I iii

Plan t s s

fuge. On donne aaflî laréfine jufqu'à dix ou douze grains en bol aux enfans: cette dernière manière de remployer, eftla moins bonne , parce que fou vent la refîne s'attache aux parois du ven- tricule ou des inteftins , caufe des fu- perpurgations , des tranchées, ôc même des convulfions.

On pourroit faire avec cette réfine une poudre ^^ tribus: & parce que cette poudre caufe fouvent des fuper- purgations & des tranchées , pour re- médier à ces incon véniens , voici com- me je la fais faire.

Prenez de l'antimoine diaphoréti- que , du diagrede , de Txthiops mi- nera ^parties égales:non-feulement elle ne donne ni fuperpurgations ni tran- chées, mais c'eftun excellent fébrifuge.

Mais la meilleure manière de fe fervir du convolvpilm catharticus , c'eft de mettre fes tiges feches en poudre & de l'employer dans les éleAuaire^ l'on fait entrer la fcammonée.

VE St. Do min GUE, ijj:

Herbe au Charpentier,

Uherbe au charpentier , ( ceft ainfi qu'on Tappelle à St. Domingo e , au lieu deTherbe du charpentier ) eft une petite plante qui jette beaucoup de rameaux rampans remplis de nœuds de diftance en diftance 5 d'où fortenc des racines capillaires par le moyen defquelles elle s'étend beaucoup. Elle a deux feuilles à chaque nœud > op- pofées l'une à l'autre en fer de pique.

Les fleurs naiffent à l'extrémité de: chaque rameau , qui fe divife alors en; plufieurs autres plus petits» fans feuil- les. Elles font d'un violet clair ^ ens <yueule5 & très-petites. Ce font des tiuyaux évafés en deux lèvres i,ruaeT fupérieure, l'autre infétrieuarc. La fu- périeure eftrenverfée en dehors,échan- crée en trois parties. Les deux des côtés font un peu plus étroites ôcplus; hautes que celle du milieu. Depuis, le

I iv

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1^6 P L A N TE S

commencement de celle-ci jufqu'aux échancrures , il paroît quatre petits filets blancs couchés à roppofite les tins des autres de chaque côté , & deux qui s'avancent vers la troifieme partie: ils ne fe féparent pas facile- ^Hient de cette feuille. Ils m ont paru les ramifications d'un nerf blanc qui règne furie dos de laJevre fupérieure depuis le commencement du tuyau |ufqu aux bords de la partie moyenne. La lèvre inférieure eft une petite feuille pliée en cuilleron , qui ne s'é- lève guère plus haut que la petite plat- te-formeque fait la lèvre fupérieure en fe renverfant.

En ouvrant le tuyau on apperçoit trois ou quatre étamines blanches qui entourent un piM blanc. Elles font ordinairement couchées & renfermées dans la duplicature de la lèvre infé- rieure.

calice de^ la û^ur eft très - petk ,.

1

VE St. DôM IN G UE. 157

divifé jiifqua fa bafe en plufieurs petites pointes , il ne monte pas au quart du tuyau. Le piftil fort du fond du calice, au lieu que les éta- mines naiffent du fond du tuyau. En arrachant la fleur toute entière , le piftil feul refte adhérent au fond du calice, §c le tuyau femble n'être percé que pour laifler pafler ce piftil y qui paroît pofé fur un embryon très- petit 5 qui devient apparemment une femence ou une capfule très-petite , que mes yeux n'ont pu reconnoître , même à l'aide d'un microfcope.

Le plus grand mérite de Therbc au charpentier , eft qu'on en fait un firop excellent pour le goût, & très- bon pour le rhume de poitrine 3 il a l'odeur & le goût d'amandes. tiM'^* Lepoupée Defportes en confeille l'infufion dans la cachexie. Il fait en- trer les feuilles dans les cataplafmes émolliens ôcréfolutifs.

On dit que la plante pilée & appli- quée fur une plaie récente , la guérit enpeudetemsi ôcqueceft par cette raifon quonlui a donné fon nom.

On alTiire encore qu elle eft emmé- nagogue > eJleeft certainement aphro- difiaque , & fon ufage échauffe.

On peut la prendre auffi eninfufion après une légère ébuliition., ' Cmîficier ou Cdjfier. On donne à St. Domingue, cts deux noms àfarbre qui porte la caflTe. II eft grand & gros^fes feuilles viennent oppofées Tune à l'autre au nombre de dix ou douze , ôi finirent par deux fur une tige longue d'environ un pié.

Ses fleurs' font à cinq feuilles, jau- nes , prefque rondes , longues de dix! ou douze lignes , fur une autre tige de' mênie longueur, depuis vingt-quatre jufqu'à trente , avec de longues queues, ce qui forme de gros bouquets, enforte | que cet arbre fleuri eft dune grande ^ beauté.

1.

DE St. Do min g ve. i^gj

Les cloifons des filiqiies ont fort peu de pulpe : on ne peut pas les mon- der. On eft obligé d'écrafer les bâtons & de les mettre infufer ou bouillir> de plus , rarement peut-on les avoir mûrs. Les Nègres les volent prcfque encore tout verds , ou les maîtres les cueillent avant leur maturité , crainte d'être prévenus par les efclaves. Il ar- rive de-là, que plufieurs ont des co- liques, & rendent des glaires fân-^ glantes , pour un feul verre de cette décodion.

Lacafle de la Martinique eft meil- leure 5 la pulpe eft plus épaifle fur les cloifons. M""' Lemery a raifon d'à-* vertir , que la cafle du levant eft la meilleure* La defcription que je viens de faire eft peu différente de celle qu'on trouve dans cet Auteur : mais il fe trompe lourdement , quand il af* fùrc avçc tous les Botaniftes de l'Eu- rope , que la partie de la falfepareillc

t^O Mal a d i e s

dont on fe fert, eftla racine dune ef- pece de fmilax.

Sdfefareille,

La Salfepareille, eft une plante quipouiTe de fa racine plufieurs tiges longues, farmenteufes , qui fe fendent aifement , blanches en dedans , bor- dées de deux raies rouges, moelleufes, quand elle font fendues. Il y en a de deux efpeces , l'une grifâtre , nouée de diftance endiftance, unie, (fi ce n'eft quelquefois Textrémité la plus proche de la racine qui eft ridée & plus grolTe que le refte). Elle .eft garnie de tenons ou mains,avcclefquelles elle s'attache aux arbrifleaux voifins i en un mot telle que nous la voyons ici , excepté qu on en a ôté les tenons. Je n'en ai jamais vu qu'un dans celles que l'on nous apporte. Il s'en faut beaucoup que it^ feuilles ayent la lon- gueur que M^- Lemery leur donne :

DE St. Do min g V e. i^ï

elles n'ont pas plus de trois ou quatre doigts y elles ont des oreilles 5 c'eft-à- dire , quelles font découpées ( ordi- nairement profondément) de chaque côté vers le milieu , enforte qu'elles repréfentent trois fers de pique > parce que chaque portion fe termine en une pointe. Cette plante croît dans les lieux pierreux & fabloneux, avec les ha- liers. J'en ai pourtant vu dans les bois, mais la terre étoit fabloneufe.

Les tiges fortent quelquefois d'une tête grofle comme un œuf [a)) le refte de la racine n'eft pas plus gros que la tige , longue tout au plus d'un demi pié 3 elle fort aufll de la même tête. L'autre efpece eft noirâtre^ridée, rem- plie de petites racines capillaires,parce qu'elle rampe parterre. Je n'ai jamais vu ni feuilles^ni fleursjui fruits de cette efpece. Il y a apparence qu'elle croît dans des lieux marécageux 3 ôc que

(a ) Sa fubftance approche de celle de lafquine d«. St. Domingue , qui e& plus dure que celle qui nous vient des Indes Orientales.

^4^ P l ^ N T E s

ces tiges ne trouvant point a s'accro- cher, rampent parterre, & y jettent la grande quantité de racines capillaires

Sue Ton y voit, & qui ont donné lieu e croire qu elles font elles-mêmes des racines. La blanche en jette aulîî quand elle ne trouve rien pourfe foû-^ tenir. -

Il fort des aiflclles des feuilles de petites q-jeuesqui foiitiennent la fleur: elle elt en étoile à cinq feuilles,ôc non en grappe. Ce calice dans fon com- mencement eft fermé 5 dans la fuite U s'épanouit, & fait voir un difque, autour duquel il y a deux rangs de filets très -courts comme deux cer- cles concentriques. Le plus grand a auflîdes filets, plus longs, dont la poin- te eft un peu recourbée vers la fleur ou le calice : le plus petit qui envi- ronne le difque eft compofé de filets très - courts , qui ne reffemblent pas inalà une frange. Du milieu du difque

i> E St. DoMiNCv E. 14,3

fort un piftil qui devient le fruits quand la fleur elt paflee. Autour de Tembryon qui eft élevé fur la pointe du piftil (^), on voit trois ou quatre étamines qui naiflent de la bafe de l'embryon i il y en a deux qui reflem- blentàuncompas ouvert dont le fom- met porte fur le haut de Tembryon , &: les branches pendent en bas, '

Entre Textrémité fupérieure du piftil & lembryon naiflent trois ou quatre étamines , qui par leur difpofi- tion s'emblent auffi un compas ou- vert , dont le fommer porte & fur l'ex- trémité du piftil & fous, la bafe de l'embryon , & les branches pendent en bas. Il y a encore fur la pointe de Tembryon trois ou quatre autres éta- mines pofées de la même façon en compas , dont le fommet couvre la

( ^ ) Dans les fleurs ordinaires , le piftil porte communément fur Tembryon : dans celle-ci , l'em- bryon eft fur le fommet du piftil qui fait iVfficç de pédicule , & qui foûtiçnt le jeune fruit.

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144 Plantes

partie fupérieure de Tembyron , & les branches pendent en bas far le difque. Le fruit de la falfepareille rejGTemble parfaitement parle dehors à un grain de raifin , verd avant fa maturité , noir quand il efl: mur. Il contient un fuG rouge , comme celui des mûres > Se renferme pkiiieurs graines ou pé- pins comme ceux de la grofeille. Le nombre n eft pas égal , on en trouve douze, quinze, dix- huit , peut-être plus.

Le féné eft une herbe, non un arbrifleau. 11 pouffe de fa racine des tiges longues de deux ou trois pies , foibles & pliantes , groffes comme l'extrémité du petit doigt 5 elles ont befoin d'être foûtenues ,fans quoi elles ramperoient par terre : les feuilles naiiient oppofées deux à deux , au nombre de quatorze fur une côte. Les

fleurs

J>E St. DOMINGUE. JA^

fleurs naiiTent fur une autre qui n'a point de feuilles , & qui fort de l' aifTelle de la première : elles font jaunes à cinq feuilles , & repréfentent un gre- lot avant d'être épanouies. Il leur ^ic- cède des goulTes , qui font connues ious le nom de follicules : chaque tige en porte cinquante ou foixante 3 & chaque follicule renferme huit femen- ces dans autant de loges: ces femen- ces font a peu femblables aux pépins de railins. ^

Ses racines font fort longues , un peu plus grolTes que les tiges quifortentde terre. J en ai vu qui avoient près de deux pies.

Le féné que je viens de décrire eft la féconde efpece dont parle Lemerv ^en^M itdtcafi-ve foins obtufis. J'en ai peuplé dans le tems de la guerre, les quartiers de Léogane & du Cul-de-fac. Il m a paru purgermoins que celui de la 1 alteice quipeut veniraulfijde ceque je

K

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Plantes

ji'ai cueilli les feuill es qu*après la parfaî- ce iTiaturité des follicules. Je fuis confir- mé clans cette penfée par la remarque 4e Minguer 3 qu'il faut les faire fécher à Pombrei & par celle que j*ai faite, xjue les foUicuLes qu'on nous apporte du Levant , ont été cueillies avant leur maturité, ce qui eftprouvé par leurs femences , qui n'ont pas leur grojQTeur ordinaire.

On m'obje£kera peut-être , qu'il ne s'enfuit nullement que le féné dont nous nous fervons ne foit pas les feuilles d'un arbriffeau , parce que ce- lui que j'ai cultivé eft un herbe 5 on alléguera pour preuve , que cet arbrif- feau eft dans le jardin du Roi.

A cela trois réponfes. La première , qu'il n'eft pas vraijGTemblable qu'une plante foit herbe dans un pays , & ar- briffeau dans un autre. La féconde qu'au moins cette féconde efpece n'eft pas arbxiffeau i 6c que le Didionaire

DE St. DomiNGUE. t^j

des drogues iimplesnc fait point cette diftinAion. Latroifieme , querarbrif* feau dn Jardin du Roi, n'elt peut-être pas lefénc) Ton ne peut s'en ailurer que par les follicules , & on ma dis qu'il n'en portoit point. Quoi qu'il en foit, il eftaiféd'écl'îircir cet article. Je dis ce que j'ai vui & l'on auroit tore de douter démon témoignage.

Noms & vertus de plufieurs fiantes dont on fait ufage k St. Domingne,

Je choifirai les plus utiles & les plus curieufes dans le recueil de Mino-uet Se dans les formules que M''. Lepoupée Defportes, Médecin du Roi au Cap, avoit faites pour l'Hôpital dont il était charge.

Avocatier.

L'avocatier eft un arbre fruitier , qui croît fort haut, qui s'étend peu. Ses

K ij

148 P ^^ N r E s

fruits font gros comme une poire de virgouleLife,oblongs,clunverdqui jau- nit un peu en miirifrant. Il pend à rextrémité des branches par une queue longue comme la moitié du doigt , le noyau eft fort gros^rond^extrèmement amer. On n'en fait aucun ufage. Il couvert d'une chair blanche , tirant fur le jaune , qui a la confiftance de beurre frais dur 5 & il en a prefque le goût. On le mange avec du fel 6c du poivre. Communément les nouveaux débarqués ne le trouvent pas bon d'a- bord: mais ils s'y accoutument aifé- nient , & en mangent avec plaifir.

Minguet alTureque ce fruit eft bon pour le flux de fang. Je ne l'ai point éprouvé.

On fe fert journellement de {es bourgeons en infufion , pour rétablir récoulement desregles,ôc dans les fup- preffions qui arrivent après les couches. On s'en fert auffi après les chûtes ou les

2?B ST^Dô'MÏI^àVE. t^^

contLifions , poiir diffbudre le fang cail- lé. M^ Lepou pée Defportes les ordonne dans les tifannes apéritives, & emmé- îîàgogues. '

, J'en ai fou vent fait de la limonade

f'>OLir Ids fièvres ardentes & mêmç ma- ignés. ^ On le coupe par tranches minces , que Torit met dans Feau avec un pëtrdc fucre. Je crois quïl eft pré- férable au Gitroil du pays , qui eft fore acre.

:Miriguêt le recommande pour l'hyV 4ropifie , les gonfliemens de ratte , & la gravelle. Je^ n^ Tai point v^ûjçm^ plpyer J> &je ne rn'É^n fuis jamais fervi int-érjieurement. Ses feuilles coupées par tranches §^ appliquées fur larorti-^ lure font excellentes.

Bois Laiteux,

-Xiè bois laiteux elt un arbriflTeau

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pifif.wpip

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donc les feuill<?s &: les jeunes branches ont beaucoup de lait. 0.i met infufer au foleil une grande quantité de ces feuilles dans une baignoire. Ce baijii guérit fouvent la fiev-re des enfans & même des grandes perfonnes.

Minguet dit que ce, Uit arrête Vhé-r morrhagje d'une bleiTure. Il le faifoit entrer dans la compofition des onguem. ;

comnie Muhylon, de fontfes termes..,

■- . . •■ - - . - - . ,<

Çalebajji de' Bûiis, ^

La calebafle eft le fruit d'un petiV ar- bre extraordinairement couvert de feuilles qui vien^nerit fur toutes les branches, même \^s plus groflfès. Ld foait eft ^ndôcgrc^s cornme unepom-me de* rainette; Son écorce eft duré & li^ gneufeà peu-près comme celle du co^ et) , toujours ve^te : il eft rempli' d^iiiiéf pulpe blanche.

Minguet dit, que le fuc quon en tirc>. purge comme l&.meUl£ur& médecine.

DE St. DoiiÊiNGVE. ffi

Il ajoute qu'a demi mûr , il entre dans les 'tifannes pour lliydropifie & les maux d€ ratte. Il avertit qui! faut prendre garde qu'il ne foit piqué de vers 5 parce qu alors c'eft un poifon.

Je n'ai point entendu parler de cette précaution i ni qu'on l'emploie autre* ment que comme un excellent vuliié- raire. Pour cet effet on le fait cuireious la cendre , on en exprime le jii^ pouf* prévenir ou réfoudre le fang caillé après une chute. On en fait pendre auffi pouf le^ abfcès & ulc€re:s internet ' Je ne m'en fuis iamaisfefrvi , parce qud ce remède échauffe beaucoup y & que j'en ai va arriver de mauvais dSctSf^ probablement par ^'impéride de cèiïîe'^

qui remployent. J^ai toujours préfère- les fleurs de poindllâde,

Ga trouve dans^ leDididnaî^^è dé^ drogues fimples la defcriptîoh dufrùit^ d'un arbre des îles de Mmériqu^? qui eft appelle mâcha -mona 3 en

K iy

ti 1 .1

1^2 P L:^iîir(ri^^ s Hfî

François , calebafle de Guinée, qui ref- lemble beaucoup à celui de la cale- bafle Efpagnole. Celle-ci eft très-com- mune à St. Domingue. Elle croît com-^ me la citrouille : elle ,eft aufli grof- fermais ordinairement plus longue. Les Nègres s'en fervent pour mettre deTeauou autre boiflTon. Lorfque ces calcbafltsfont au quart de leur groffeur, on en mange comme des concombres y elles ont un goût aigrelet fort agréable. Ceft peut-être celle que Minguet ap- pelle calebafl^e douce. Il parle" encore de deux efpeces de grofles calebafles , Tune qu'il appelle calebaflTe à gourde j fa femence eft une des froides. (Par con/^fue^; ceft U courge ),Lçs Elpagnols s'en ferveiTt pour leurs voyages, L au- tre çalebaffe eft aniere>elle fert de feau poûf mettre de feau ou pour faler de la viande: apparemment qu'il n'apa^ connu l'arbrç dont parle Lemery.

p B St. Do min g ue. i^f

Câprier,

Defcription de Minguet. ,, Il a la 55 feuille comme le pourpier, courant 55 fur la terre. Il porte une graine qui 55 a trois à quatre pointes piquantes, 55 avec une fleur jaune. Il croît abon- ,5 dam ment dans [esfavanes(a).Ceik un 55 pâturage excellent pour les bœufs. 5, Sa racine s'emploie dans les tifannes 55 apéritives. Mingoèt ajoute quefes 5a feuilles pilées , font bonnes pour ôter rinflammation 5 & pour mû- 3,^ rir les abfcès. Ses racines font vraiement a:péritives, ôc s'employent joLirnellemenc.

Bois épineux iAune.

Minguet affure 5 que récorce de ce bois eft auflîpuilTante contre les mala-

(/») Les Tavanes font les prairies de St. Donaingue que l'on ne fauche jamais. Aufli n*y vienr-il point de foin , mais différentes herbes; comme clïica-dent,pié de poule , câprier , &c.

it'tî!

! I

TJ^ P I, -A N T E S'

dies vénériennes que le Gaiac. M^ Defportes Temploie dans les tifannes aftringentes.

Collet à Dame.

, Cette plante eft ainfi nommée , à ee qu'on m'a dit , parce que fa feuille eft grande , ronde , avec une échan- crure du coté delà queue ^ comme un collet que les payfannes portoient autrefois. Je ne Tai jamais vue. Le Plumier rappelle , fmrurus folHs amplis rotundhs é" umbilicAtis,

Il y en a de deux fortes , Tune qui a la feuille plus douce & plus fine que l'autrerMinguet appelle celle-ci/euille à collet bâtarde. Sa racine, dit cet Auteur , eft excellente en' tifanne , pour la ftrangurie récente & les go- ,y norrhées, On n'entend pas bien ce qu'il veut dire par ftrangurie récente.

5, Sa feuille eft très-bonne en cata- 3,i pkfme> elle attire beaucoup.

) Mafofi' rouge,

Ceft un gra-nd & gros arbre, qui s'itendbeaucGupi il eft fort commun, la fleur eft blanche, il lui fucced^, yy une grolîê poire remplie de coton. >>3 Minguet.. Ce qu'il appelle poire , eft. une coque grofTe comme celle du mar- rpnier, remplie dame foie jaune exr trèmemenc finer &; douce au toucher l^ j'en ai envoyé à Paris. Oa^rreripem, rien faire 3 elle eft trop epu^te pour; cÊre filée r:i m\ efflaya^ d'ejt fa^ire des chapeaux,) elle ne pevtt pais, fé; lier en-v femble 3 m^lëe^'avec leeaftor , elle: ner prend pointlateinture. . Il.es habitans; de St. Domingue fo]ii:Ç lin© tifanne^i aviec ioA^écorce pour l^rQuge:Qfe&lar: petite vérole. J'ai trouvé que cette] tifanne eft trop diaiiider & qu^plle 4onne des-miaux de gprge* J'ai tourf jours préféré les fleurs de poincillade fèche : une pincée fur deux ou trois

:;!;;.^ :i!l:,

pintes d'eau de chien-dent (a). Goyavier.

'"Le goyavier eft un arbre d'une gran- deur moyenne. Son fruit eft fort bon & fort eftimé. Il y eii a de trois fortes. Les goyaves aigres qui fervoient à faire une gelée excellente, ceft la plus petite efpece: elle eft ronde, greffe' cbiiime f\m greffe pomme d apis j-^ lâ^chair en éll Vouge , remplie de petits" pépiiis fort teûidres, -^ < -i ^

- La goyave Efpagnole èft k ^plds ëf. timée, elle eft oblongue , groflfe à peu- près comme une poire de virgbuleufe, verte dàbord, .jaune q^iaiid elle eflîl rftûre. Les habitans du pays la man- gent crue-: elle eft fort bonne en com- potes ^^U\J ,

*>'Lk; goyave de Guinée ift de la mêMe figure & de la mêrile orroffeuf,

«•« ^ . ' ' '^r, . J . .,- . ■',,,!'

•J i ■■' . '- i . V » ^v 'y ^ , , ■, ,.. ^ î ' ,

i ^.) ^^ y a un: ;tpapou gris ^ gros qu'pn en fait de grands canots, '

î> E St. Do mi n au e, îyir

a peu -près que U précédente: la chair en eft rouge, on la mange com- me la goyave Efpagnolej mais elle n'eft pas fi délicate.

L'eau exprimée des bourgeons pi* les, efface les taies des yeux , félon Minguet: bouillis dans Feau ils entrent dans les gargarifmes pour les chancres 5c les ulcères de la bouche , fuite de la falivation.

Le fruit avant fa maturité , encore mieux au tiers ou quart de fa grof- feur, eft aftringent, & convient dans les diarrhées 5 en tifanne. M'^* Defpor- tes fait entrer la racine de goyavier dans les tifannes aftringentes {a).

Herbe h Blé.

Ainfi nommée, dit Minguet, a j, caufe de la reffemblance qu'elle a j, avec le blé. Elle croît de même, à la hauteur de trois ou quatre pies ^

( } Le Pcic Labat décriç aflez bien le goyavier.

iy8 P i^ Jt N T E *

elle porte un long épi , dans lequel je n'ai vu ni grain iii feiiience. Un demi- verre de jus exprimé de l'herbe pilée , eft fort purgatif) on le mcLeavec au- tant deau de caire. On emploie com- munément fa racine dans les tifannes rafraîchilTantes avec le chien-dent & la ^racine de pié de poule, herbe égale- 3!nent communcc Les vertus que Min- guet donne à l'herbe à blé font d'être feonnes dans topite s fortes d'onguens: dins Ia compofitian de toutes fortes d'eaux pour les cancers é" ulcères > & dans les tifan^ nés pour maux vénériens. Il ne parle pi)int de fa vertu purgative. Je ne m'en luis fer vi qu'en tifanne: mais un Ha- bitant chez qui j'ai demeuré trois ans , pi'a affuré que pendant plufieurs an- nées il ne s'étoit pas fervi d'autre çhofe pour purger ks Nègres.

Herbe à mille pertuis.

Cette herbe a la feuille percée > dit

VE St. DoMiisi c^e. j^é

Minguet.,îMâchée , elle appaife les dou- 5,leursdedents,enlaifrantlemarcleplus j, longtems qu'on peut „. Il confeille aiifli pour les maux d'oreilles d'enfaire tomber le jus dedans, & de mettre du marc par defTiis 5 pour la fièvre, d'en faire infufer une poignée dansun veire d'eau , &: de le boire avant l'accès. Monfieur du Hamel {a) avec lequel j'ai vécu quelques années à Léogane, àc qui y elt mort il y a cin,q ou fix ans , fort regretté non - feulement à caufe de fa probité & de fes grandes con- noiffances , mais encore à caufe de [es recherches immenfes fur la botanique , êc les curiofités naturelles, qui deyien» dront peut-être inutiles , parce que fa mauvaife fanté dans les dernières an- nées de fa vie ne lui a pas permis de les mettre en ordre: M''* Duhamel > dis-je, dans fes remarques , fur le ma*

{a) il étoit Correfpondant de l'Académie des fcieaceç»

ï6o Plante r

iiufcritde Minguec, die de Tlierbe i mille pemiis 5 que ceft uneaftéride, qui a très- forte odeur, les feuillesten- dres , fucculentes , d'un gouc de- fagréable , mais fouverain en décoc- tion pour la fièvre. Les fe menées font aigrettées : elle n'eft nullement du genre du mille pertuis.

Herbe h ulcère.

Elle efl: fort connue , & vient dans les haies. L'eau que Ton en expri- me , ditMingnet , mife dans unul- cere , le guérit.

La feuille feule appliquée nettoie l'ulcère de Çqs chairs baveufes. On rap- pelle herbe à ulcère de Minguet, tout le monde la conncîc. Les fleurs Scies fruits viennent en ombelle {a).

Minguet décrit deux autres efpeces d'herbe à ulcère i lune à feuille ron-

( a ) Les fruits font des baies , qui reffemblent à Celles du fureau.

de,

Itl^ ^.^^^^at^t^g^a^tto^

DE St, Do min GUE. i^i

de, l'autre à feuille longue.

Herbe k ulcère k feuilles rondes,'

55 Ainfi nommée parce que j*en 55 guéri des ulcères de quatre ou cinq ans. Je m'en fuis fervi dans la corn- pofition des onguens i elle y a fort- bien fait. Elle eft bonne dans les bains aromatiques, pour gens acca- blés de douleurs j & perclus de leufs membres. Elle croît dans les pays vieux habités , & porte une petite fleur par grappe, avec une feuille dentelée.

5>

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3>

53 J5

Herbe k ulcère k feuilles longues,

55 Elle croît dans les vieilles habita- 35 tions comme une mauve , porte trois 55 feuilles 6t un bouquet au bout delà branche. Sa fleur eft double, à trois ou quatre tirets au milieu. Elle

eft d'un blanc terne.

Il confeilie de laver Tulcere avec

L

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lill

1^2 Plantes

l'eau de la plante > d'y tremper un plu* maffeau , de l'appliquer fur Tulcere. Je Ile eonnois point ces deux efpeces.

Herèâ k Taîts.

Je tië lâ'cëhiiôis point. La fleur, dit Miriguèt , éft violette, avec trois ou quatrfe tîret§. Elle a la feuille dentelée, tin peu rude & chargée poils. L'eau que Ton tire de feuille écraféé dans la main , ôcinfu- jfée dans lés yeux qui ont des taies nouvelles , l'es giierit. Elle entré dans lèis ëâitx diftiilées.

Autre herbe à taies y marjolaine fri fée.

Son jus inftillé dans une taie Ij la gilérit.Ellë entré 'à%h$ lé^ ènguens. ; y, Sa fleur eft blanche , fa féuilè den* ^s tfelé'e^ & graine gi'olTè comme un ^ \\ pbis. Je lié cbrinois poi-nt âon plus cette fec'éii'dé èf|)èeé.

Herie fenfMe. I

C'eïl la ÏQXiÇimQ mimofa.

^)

)3 » » >3

DJ5 St. Dominùve. 1^9

Minguet en décrit de deux fortes, Tane blanche oc Fautre rciige.

La blanche , dit-il , eft une efpece d^ipécacuana pour fes vertus , en in- ij flifion . pour les diarrhées & flux de >, faiig. Elle croît dans les pays arides, i, & ou il y a des fapins. Elle vient comme Une ha?^e avec des feuilles coupées j courant fur la terre: elle fleurit blanc. Sa feuille touchée fur le midi , fe fanne.

Herbe fenfihle ^ rouge,

5, Ainfi nommée , parce qu'étant 5, touchée la feuille fe ferme.

La même chofe nàrriveroit-elie point à la blanche ?

La racine en infufion eft bonne 55 pour diarrhée &: flux de fang. On peut s'en fervir faute d'ipécacuana. Je n'ai point vu de fenfitive dans les quartiers de St. Domingue, j ai ha- bite i il y en a appareniment dans le

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11^4 Plantes

quartier du Cap. J'en ai vu beaucoup à la Martinique.

Herbe h pians,

5, Elle eft faite comme TabAnthe , & croît dans les pays vieux habités. L'eau que l'on en extrait feche les pians que l'on en frotte: fa racine en tifanne eft bonne pour les maux vé- nériens. Elle eft appellée aufli ab- finthe.

Dans les lieux que j'ai habités elle eft fort commune : on l'appelle abfînthe j marone , qui veut dire bâtarde. C'eft une efpece de matricaire. Je ne m'en fuis jamais fervi 5 que pour faire une eau vulnéraire, &: jene l'ai vu em- ployer par perfonne.

Houx de l^ Amérique.

3, Il reflemble à celui d'Europe. Il 55 faut y faire une entaille fort pro- j, fonde pour en tirer une gomme

55 35

VE St. DOMINGVE. i6^

^5 verte, d'une odeur merveilleafe ôc 5, excellente pour lesonguens, corn- 3, me le betoniea Sc autres.

Je n'en ai vu qu'en arbre , un peu plus gros parle tronc qu'un cerifier. Ses fleurs viennent fur une tige fans feuilles afiez longuesielles rcfTemblent à celles du pêcher.Ses feuilles font fem- blables à celles du houx d'Europe: mais les pointes ne font pas fi dures. Le tronc n'eft pas flexible ( a ). Cet ar- bre eil aflez rare : je n'en ai vu que deux.

Le Jat

yy II a autant dq, vertu que celui qui 3, vient d'Europe, dcc. Sa fleur eft 35 fort petite.

Celui que j'ai vu à Leogane , il y en a beaucoup dans les jardins , efl: très-peu réfnieux y inférieur par con- féquent à celui qu'on apporte en Eu* rope.

(s) Di6lion. des drogues. L ii)

1*1

i66 Plantes

Ceft la racine des belles de nuit. U y en a à fleur rouge & à fleur blanche > ce font des tuyaux é vafés en eatonnoir. &c. Voyez le Didionnaire des drogues fimples. Quant à la racine , celles des rouges & des blanches , des jeunes ôc des plus vieilles , n'ont pas plus de ré- Cne les unes que les autres.

Peut-être celles qui viennent dans le quartier du cap 5 oudemeuroit Min-* guet 5 font d'une autre efpece, ou font plus réfmeufes.

Ipecacuam.

3, Il porte une fleur comme une 3, cloche de couleur violette.... fa racine eftd'un blanc jaunâtre.

Je nen ai vu qu'une fois fur terre » qui n'étoit pas en fleur. Sa racine étoic ridée , tortue , de couleur brunejmoin? grofl*e qu'une plume à écrire. Il croît fur les montagnes.

35

VE St. DoMiNGu e. i éf

Manille bâtard^'

Elle porte une goufle comme la manille franche , & croît le long des arbres comme une liane verte fron- de. C*eft le fondement de l'eau pour les cancers > ulcères bi chancres. Elle 5, fait plus d'effet que le vitriol U, la ,5 pierre infernale, mangeant les mau- vaifes chairs, nourriflant & faifant revenir les bonnes. ,, M'* Duhamel dans ïts remarques fur le manufcrit de Minguet, ditque cette manille bâtarde eft Varam repens , extraordinairemenc cauftique. J'ai entendu dire à Min- guet, ajoute-t'il, qu il en faifoit un onguent pour les ulcères , ôc qu'il avoit la force de faire fauter le cul de la chaudière ie fer ou on le fait.

Monhin , ot^ Manhin.-

Eft un arbre des plus gros , fortconitt mun. Minguet dit que la racine en

L iv

ÉtÉiÉ

1^8 Plante s

tifanne guérit la diarrhée ôc la dyfTen- terie. Je ne Fai point vu employer à cet ufage.On fe fert communément des feuilles pour les bains. On appelle fou fruit prunes de monbin. Elles font jaunes , ont fort peu de chair fur le noyau {a ). Les Nègres mêmes ne font pas fort curieux d'en manger. Quelques habitans en font une gelée , que ion dit être bonne.

Medecimer,

Le medecinier eft un grand arbrif- feau. Son fruit cfl; gros comme un. maron^par bouquets de trois ou quatre, fur de longues queues. On l'appelle noix de médecine. L'amande renfer- mée dms une coque eil de fort bon gouc:. mais c'eft un violent émétique & purgatif Elle l'eil beaucoup moins

( «» } 11 s'en faut beaucoup qu'elles foienr auflî oroiTes que Jes prunes de Sîe. Cachçiiae , comine \ P. Laljat le dit.

DE St. Do mi n GUE. i ^a

quand on en a ôté le germe & la pel- licule qui fépare les deux lobes. Je crois qu'on pourroit en tirer parti , en ajoutant une amande ou deux dans une émnlfion. On m'a même fou vent exhorté a tâcher d'en trouver la dofe : mais je crois , quand on a des purgatifs fûrs, qu'il ne convient point à un mé- decin d'en elTayer de douteux: il doit laiffer faire cqs épreuves aux autres, 6c en profiter (a).

Le P. Plumier appelle ces efpeces de pignons , ou noix de médecine , ri ci no ides gofjipii folio.

Il me paroit que l'article ricînus dans le Didionnairedes drogues fimples de Lemery eft fort embrouillé. Il parle de quatre efpeces de ricins ou pignons

( ) Le Père Labat a d'écrit affez bien , ( à quelque chofe près } le medecinier, & fes noix. Il dit que quatre ou cinq , félon Page & le tempérament des perfonnes fuffifent pour purger très - bien : mais que qjuand on en prend une plus grande quantitéj'ons'expofe 4 des vomifleraens cruels à des évacuations trop grandes.

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70

Plantes

dinde. Dans le premier il déerit le falma ckrifiL

Dans le fécond, c*efl: le medecinie^ qui porte une amande, comme il le dit , plus groffe que celles des grains de ricin 5 c'ell-à-dire plus grofTe que celle du palma chriftt. C*eft celle que je viens de décrire , ou Tappelle à St. Domingue , noix de médecine.

Il parle dansle troifieme d'un autre ricin, qu'on appelle pignon d'Inde, en latin grana tilli , grana tilliA. Je crois que ce font les mêmes que les pignons du pdma chriflï.

Enfin il en ajoute une quatrième efpece , qu'il appelle medecinier d'Ef- pagne, ou la noifetté purgative. Je crois que c'eft le fruit qui eft décrit dans le fécond article. Ainlî il n'y au- roit que deux efpeces de ricins ou pignoris d'Inde 3 ceux du F aima, Chrijiiy 6c ceux du medecinier.

Je n'ai vu à St. Domingue que le

ï>£ St. Domi n que. 171

palmachriJH , & le medeciiiier , dont il y a trois efpeces , fuiyant le Père Labat.

Quoi quil en foit, il eft facile de Véclaircir fur cette matière.

Minguet ne parle que de Tamande du medeeinier. Elle eft ^ dkAl , purga- tive ^ mais danger eu fe , parce quil eft bien difficile d'en trouver la dofe. Elle purge haut & bas ^ fi on n^en ote pas le , germe»

Enôtant le germe & la pellicule qui fepare les lobes , elle eft moins vprni* tive , mais elle l'eft toujours.

Nandiroga 5 ou Contrepoifon de l'Amérique,

5, Je nomme kinfi ce fîmple , die 3, Minguet, à caufe de fon fruit, ou j, graine, grande comme une pièce ^5 de huit (4î), ronde & faite comnie ^, la noix. On en peut tirer Thuile

{n) Ceft une piaflre valant huit efcalins;

Plantes

comme de Tolive , 6c en faire pren- yy dre à une perfonne empoifonnée ,

cela la guérira. Elle entre dans la t.ï compofition des ongiiens , comme

beaucoup attractives elleeft encore 5> bonne pour les éréfipelesy elle croît 3> le long des arbres. Elle porte une 35 fleur blanche. ^, Je ne connoispoint fes vertus. Le Père Plumier Tappelle nb^niiroba fcandens foliis hederaceis an- gulofis,

Mariacobl ou Mariacobo.

35 II croît ordinairement fur le mû- 5, rier , par le moyen des oifeaux qui 5j y portent la graine : cette plante eft 55 pleine de piquans & fort tendre > 5> fon fruit eft bon à manger ,& pour ,, arrêter les cours de ventre. Il eft

martelé , & fon écorce eft fembla- 55 ble à celle de Tananas. Il eft rempli 53 de petites graines noires.

Je n'ai point vu de ces fruits.

Î>E Sr, DOMIN CUE. 175

Quand Mingiiet dit que cette plante vient fur lemûrieri il ne faut pas croire que ce foit des mûriers femblables aux nôtres: il n y en a point à St. Domin- gue. L orme de St. Domingue , qui reflemble aflez à ceux d'Europe, porte un fruit fait comme une mûre verte au commencement, noire quand elle eftmûrei mais dure. C'eft une bonne nourriture pour les chevaux , bœufs , moutons , ôcc,

^ Monfieur Duhamel aiTûre que; le mûrier de Minguet eft le bois jaune du Cul-de-fac, qu'il eft bon pour la teinture.

Orange aigre.

5, Le fruit entre dans la compofi- tion des eaux & des onguenspour les ulcères les plus vilains & les plus vieux. On fait de fon écorce féchée au foleil une poudre à vers fort

5>

amere. Sa feuille & fes bourgeons

174 P i ^ N t E s

entrent dans les bains aromatiques | 5j fa racine dans les tifannes potir les j, maux vénériens*

Il a oublié de dire que les efclâvês fe fervent de ces oranges pour blàii*- chir le linge, ôcc. & que hoiicd^éeif ^ comme on parle à St. Domingue , c'eft^ à-dire un peu cuites fur les charbons , on s'en fert journellement pour les bleffures des chevaux , de même pour nettoyer les ulcères des Nègres.

Ces orangei-s viennent en grande quantité dans les bois. On en met de dillance en diftance dans les haies de citronniers, que Ton taille commô la charmille dans nos jardins, 6c que Ton cercle très-foigneulement 3 ce qui rend les chemins , qui ont environ foixante pies de large , d'une extrê- me beauté 5 car ces orangers font toû- jouts chargés de fruit & de fleurs.

t>E St. D omingv e. 17J

Orme.

9> De fes bourgeons & de fon fruit, 3> on fait une boilTon fort agréable, 5, & purgative. Elle maintient ceux qui en boivent gras & frais , comme 3, s'ils yenoient d'Europe. Toute forte d'animaux s'en nourrirent. Sa cen- ii dre eft bonne pour faire du fa von. j5 Sa fleur eft blanche. Cet arbre entre iy dans Igs tifannes pour gonorrhées 33 (^)& galanteries.

Il ne dit point quelle partie.

J ai beaucoup entendu parler de cette boilfon : mais je n'en ai point vu.

Le P. Plumier appelle cet arbre gmjumn arhor ulmi folio ^fru^lu ex ^ur- furânigro.

Thihé. >, C'eft un pbîfon d'autant plus dan-

( » ) Je fai que quelques Kabitans fe fervent "dç rccorcc pour les gonorrhées.

/.,

75 Planter

i

55 gereux que Ton en meurt pour peu 35 qu'on en mange, ou que l'ayant 3, manié on ne fe lave pas les mains. 55 On ne change point de couleur , on 5, n'enfle point. Il empoifonne les 5, chiens 5 les chevaux en meurent fi- 55 tôt qu'ils en ont mangé. 55 Minguet fe trompe.

J'ai guéri des mulets , dont l'un entre-autres étoit empoifonne dès la Teille 5 ^ fort enflé. Je leur faifois avaler une demi-once d'orvietan dans une cfaopine de vin.

Cette herbe vient dans lesruifTeaux. , M'* Duhamel appelle cette plante 5 ra puncultis aquâticus foliïs cichorii , ^ore dho , îuhulo longî(fimo. Le P. Plumier la nomme trachelium fouchi folio , fiore albo

tubulo longifjimo.

Quenique*

5, S 1 graine eft de couleur de cendre : ,5 bonne dans les tifannes pour les go-

nor-

ÙE Sf, DôMINGV E. IjJ

rhées. Il croît au bord de la mer armé de piquaiis,& produit une gouf- comme un pois jaune. Je ne connois point cette plante*

Rofeau.

i, racine efï bonne dans les tîfan^ nés pour gonorrhées. Il croît au bord des rivières comme une canne à _ fucre-Jl porte uii pehnache pour j, fleur au bout de la tige. Ce pen-^ nache eft àffez femblable a la fleur des cannes à Hicre que Ion appelle flèche* ^ On fe fert très-communément de la racine dans les tifannes rafraîchif'- tantes*

Ce peut-être une efpece debanbou, 'ou rofeau des Indes Orientales. Il n'eft ni fi beau , ni fi gros , ni fi haut.

3>

■A- ^

RégliffPdt^ Amérique, -

î, Ceft une liane qui a la même

M

ijg Plantes

odeur 5 ( ^ ) que la régliffe véritable i elle eft bonne pour les maux véné^ 55 riens. Sa feuille eft fort douce , la 5, fleur d'un blanc fale , fon écorce

55

»

55 crrife.

On l'appelle liane , parce qu'elle porte des tiges menues , pliantes 6c fort longues. Ses feuilles font aflezfembla-' blés à celles de l'acacia, ou de lapoin^ cillade , rangées par paires. Son fruit eft un petit pois rouge, avec un point noir dans une gou0e fort courte. On en apporte dans les ports - de mer : les Religieufes en font des chapelets i le peuple en fait des colliers pour les enfans. Il n'y a que fa feuille & fa tige qui ait le goût de la réglijïe, la racinç ne Ta point. On pourroît la "nommer Glycyphylloj^ Americanum,

On l'employé dans les tifannes, ou feule ou mêlée avec d'autres plantes. Je m'en fervois dans les commence-

[ }' lia voulu dire k même goi3c»

DE St, Domingue^ ijù

mens des gonorrhées jufqua ce que la douleur rut paflee.

Le P. Plumier l'appelle Orcbus fruSiu soccineo nigrâ macula nofato.

Ronce de l* Amériques

5, Cette plante croît k long des montagnes : elle eft fort épineufe , & jette plufieurs pommes enfemble^

j, le long de hs branches. Le deflTous eft par barre j &fa pomme eftgrife. Elle entre dans les tifannes pour les maux vénériens : on la coupe par morceaux. Le P. Plumier la nomme , FereskU

nculeata , fiore Mo , fruBu flavefcente. Je ne la connois point.

Rai f nier du bord de la mer.

5, On fait de la racine une tifanne bonne pour le flux de fangôc cours de ventre. Son raifin bouilli avec un peu de fucre & coulé , eft boa

M i j

5>

3>

^80

F L A NT E S

>•)

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pour les mêmes maladies. Il fleurit violet {a).

. Raquette.

Min guet dit que la fleur entre dam les tifannès four galanterie ; que fin fruit efl rouge : que fa feuille cuite fous .. la hraife , àé fouillée àe fa première feauy ^fpii^uée fur apoflumes , y fera bon effet. Il n'en dit rien d'avantage.

Ses feuilles ( que Ton appelle patte de raquette ) , boucanées ^ c'eft-à-dire 5 paflées fur la braifé , appaifent les in^^ llammations 5 mûriiTçnt les abfcès, ap-^ pliquées deflTus.

En lavemens , elles font excellentes pour les douleurs de ventre , la dyflçn- terie &: la diarrhée. ,

On mange fon fruit en comporte : on dît quil elt aftringent 5 il eft un peu fade.

( ) Cec arbre n'eft point le naangle rouge , comme le P. L abat le dit. :

V

V E Sf. Do M ï N'CV E. t S I

' Le P. Plumier îïpelle la raquette, Opî^ntia major validijjimis Jpinis mu'^ fiit^^ Je ne fai s*il a donné ce nom à la raquette bafTe. Il me femble qu'à caufe du terme , major ér validijjimis fpinis munita^ il conviendroit mieux à l'arbre. Il femble auflî que c'eft l'arbre qui eft défigné par les Auteurs rapportés dansleDîdionnaire des dro- gues fimples.

' Quoi qu'il en foît , la raquette arbre, eft garnie d'épines plus longues & plus dures que la raquette baiïe 5 elles oc- cupent le troncjles branches &comma- némentles feuilles. Ces. feuilles de ta raquette balTe font longues d'env.irôh un demi-pié, plattes, en ovale ^ épaîf- fes tout au plus comme le doigt ( ^ ) 5 celles de l'arbre font moins longues. 11 y en a de plattes , de triangulaires ôc

( ^ ) Il y en a une efpece toute garnie d'épines blan- châtres , comme le tronc de l'efpece qui elt arbre : liijaç autre toute Tçrtc,âvec quelques tubercules épineux»^

M iij

Pl 4 H t Ê s

de quadrangulaires. Le fruit eft le même dans Tune & Taiitre efpece. Je ne fai fi Ton mange celui de l'arbre. Je n*ai vu employer que la bafle, que l'on pourroit appeller, Opuntia mimr humilîs , folïts \ terra, exfurgentihus^

Il y a une efpece de cette dernière que l'on appelle raquette Efpagnole , qui n'a point d'épines , dont on fait un firop fort bon pour la toux, pour les poitrines feches, échauffées, &c.

SaugCé

,5 Elle croît le long des rivières {a) elle a l'odeur de la fauge de l'Eu-

5, rope. La fleur eft blanche par pe- tits bouquets. Elle reffemble à la

grande fauge, nommée parquelque$

Botaniftes falvia latifolia. Le P. Plumier l'appelle , camaraarho'-

rejcens falvia folio.

( <f ) Il devoir ajouter comme un petit arbriflcau qui A beaucoup de tiges.

»

3>

»

t>n St. Do min g ve. i8|

Sauge blanche.

55 Elle croît dans les vieilles faranes, n'a point tant d'odeur que l'autre > fa feuille eft plus petite & plus blanche ; fa fleur efl blanche, entre-

coupée en trois. Elle pouffe une

3, feule tige fort petite. ,, Je n'en ai jamais vu.

Surelle ou Ozeille de Guinée,

Elle eft bonne dans lafoupe &

dans les bouillons des malades ( a).

Son fruit bon pour faire gelée , & vin qui enivre.

Son truit eft une coque épaifle, ten- dre , qui fuccedé à une grande fleur , en cloche : on en fait des compottes & de la gelée fort bonnes : on la prend avant qu'elle commence à fécher.

[ii] M. Defportes en employoit les bourgeons dans les tiUnnes lafiâkhiâantes»

M ir

33

9>

m

li y en a de blanche & de rouge. La blanche eft moins fure que la rouge 5 on la préfère pour les' com- portes,

La plante vient comme un grand ' arbrilleau ,fort touflupar la multitude des branches quifortenc dune feule racine.

Seguine rouge,

5> Purgative & fudorifîque. Elle ^> croît dans les montagnes : fa tige 3> eft noûeufe comme un rofeau i'ar- 3, mée de petits pîqu ans, &c, ,, Ceft . la fquine ou Tef^uine. Sa racine eft comme Lemery Ta écrite, mais beau^ coup plus grofle & plus longue. Il y en a qu on eft obligé couper pour la tirer de terre. AuiG Minguet ^ . dit , que chaque fié en fourmi plus c^un baril. Il y en a de difrérerîte groffeur. Elle eft plus dure, plus çompade & plusJi- gneufe que celle qui.nous vient de k Chine*

DE St. Do MIN ^Ve. ïg|

Je n'ai point reconnu de vertu pur* gative dans cette racine: peut-être 1^ perd-elle en féchant 3 il y en a même qui la font fécher au four ayant de s'en fervir. Je me contentois de i'ex- pofer à l'air pendant trois ou quatre mois.

Elle pouffe une tige qui monte & s'attache dans les arbres : elle eft d'un verd brun , couverte de petites épines > comme le rofier: mais elles ne font pas fi fortes , elle a des nœuds en dif^ 'tances inégales, faits comme ceux du rofeau. Cette tige principale en pro-^ duit d'autres qui fe fectient ôc qui tom- bent. Elle porte des feuilles rangées alternativement fur des queues affez longues. Ordinairement il fort une ï Htige commune à trois feuilles , donc l'une eft portée fur une queue plus courte, les deux autres fur deux queues bien plus longues. Ces feuilles font oblongues & fe terminent en une

tB6 P L À N T E S

pointe un peu allongée 5 mais qui ne pique pas.

Scolopendre double.

5, J'ai découvert ce fimple depuis peut '^ elle eft fort rare & croît fur des ar- 5, bres pourris. On en fait un firop j, excellent pour toutes fortes de mala- dies de poitrine 5 comme afthme ^ ,, rhume &: autres. Elle entre dans t, les tifannes pour Thydropifie & maux 9, de ratte. Minguet parle encore de deux autres efpeces: il appelle Tune fcolopendre jaune , qui vient auprès des Arbres é* fur des arbres & contre des bois pourris.

Il appelle l'autre ^^fcolopendre rouge ^ qui croît par bouquets le long des arbres. Cette troifieme a les feuilles plus grandes avec des efpeces de piquans aux deux côtés. Il leur attribue les mêmes vertus , avec cette obferva- tion que la dernière en a moins que les deux autres. 3^

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»

31

9}

DJff St. DOMINGVIË. ïijt

Je ne connois point ces efpeces de fcolopendre.

Sep^é bâtard.

i, Très'bon dans les lavemenscom- i, poféspour hydropifiei&lorfqu'ileft lec 5 dans les bains aromatiques*

Sa fleur eft jaune & d*un rouge mourant. Il porte une cofïe fort pe- tite & platte aprochant du fené du Levant. Il croît ordinairement dans les favanes , meurt dans les fe- cherefles , & reverdit dans les tems humides, & en fi grande quantité, que Ton a de la peine àpaCTerou il y en a. Ses feuilles font un peu lon- j, gués, oppofées vis-à-vis Tune de ), l'autre , non terminées par une ïm* paire.

Séné de r Amérique.

i; Plus fort que celui du Levant i ij très-propre en infufion> furtoutpour

9>

Mi

»5 l> 3) >>

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fgg .'']P JS j ïyr f B £ Cl

hydropifie, pourvu que coupé on le fafle fécher à lombre. Sa fleur eft petite, ronde, d'un blanc blafard. Sa cofle eft ronde & longue con- tenant fa graine. Il croît ordinai- rement dans les endroits élevés, terres autrefois défrichées Se aban- 3, nées.

; Je n'ai jamais vu de féné dans les quartiers ou j'ai demeuré. Celui que j'ai cultivé venoit de graine que l'on avoit apportée du Cap.

Trompette»

' II y a un arbre à St. Domîngue qu'on appelle bois trompette, qui croît fore haut , & qui a peu de branches. C'eft apparemment de cet arbre que notre Auteur veut parler fous le même nom de trompette: du moins n'en connois- ^:pas d'autre. ::i, Sf & racines fbnt^diD-iljécartéçs i elles

VE St. Doj^^^PV^ 189

5, entrent dans les tifannes pour go-

norrhées Sa fleur ell blanche ,

^5, [a) par trois queues de rat , fa graine

3, bonne à manger.

M'* Defportes employé fon écorcé dans les tifannes apéritives.

Trefè.

it

5

Bon en-tifanne pour difficulté d'urine. Sa racine eft très -bonne auffi: mais il en faut ufer médio- crement, car elle feroit piÏÏer juA /.' qu'au fang. Sa feuille entre dails les 5, tifannes pour maux vénériens. Les 5, gou {les font en grappe 5 fa feuille. rondej&l la fleur pale : il croît le long ^^ des chemins Se favanes.

Selon M"^- Duhamel ce que Mi h- guet appelle trèfle, eft une efpece de pois chiche fort peu diffemblable | celui d'Europe.

-'(a) Il y a quelque chofe de louche : il y manfii^ apparemment le mot terminer.

IpÔ P L A N T E ê

Bois fifieux y ou hois h flot.

,5 Son bois eft extrêmement léger. ,, Sa feuille fort grande, fa fleur blan- 5, che , fa gouffe longue , des femen- cts petites , noires & rondes , fon cotton d'une finelle incomparable.

Je ne la connois point.

Bois major^

Ceft un petit arbrifleau. Je me fuis fervi de fa racine pour les gonorrhées , lorfqu'on netrouve plus de pois-puant, qui meurt dans la faifon des fccs (a). Il eft fort connu.

Minguet n'en parle point.

( ) Dans les îles de St. Domîngue & autres, fîtuées entre le tropique du caiicer & l'équateur , on ne compte que deux faifons : la faifon des pluies qui commence dans le mois de Mai, & finit vers la fête de tous les SS. & la faifon des fecs , depuis Novembre jufqu'au mois de Mai , parce qu'il pleut tout au plus une fois le mois pendant tout ce tems , au lieu que dans les autres, il pleut prefquetoUslçs jours»

^E Sr^ Do MIN GUE. ïpi

Bois Mary ou d'Almarie.

» Cet arbre eft bon en mâture de " vaifTeaux, mais fortpefant, fa fleur » eft blanche i les oileaux mangent w fon fruit.... lien fort vme gomme » d'un très-beau vert , elle entre dans « les onguens.

J'ai vu à St. Domingue pendant la guerre , de belles bougies vertes , ap- portées 5 à ce qu'on diloit, de la nou- velle Angleterre. Elle étoit certaine- ment faite avec une gomme , mêlée peut-être avec quelques-unes de ces huiles du pays qui fe figent, ou bien avec un peu de cire. N'étoit-ce point avec cette gomme (/î) ? C'eft à caufe de ce foupçon que j'ai parlé de cet .arbre, qui d'ailleurs n'entre point dans l'objet que je me fuispropofé.

( M ) J'en ai vu d'autres faites avec le blanc de ba* lene ôc c[uelqu'autre matière grafle.

W%

ip2

L A N t[E^é

Bois Capitame,^

. C'eil: unarbrijGTeau. Ses feuilles font p^Lvàedus vertes & cuifaintes , pardef- fous blanchâtres , remplies de petites pointes très -fines qui relient dans icà doigts quand on les touche. // porfè un fruit comme une cerife , bon k manger \ dit Minguet. Sa fleur eit blanche.

Comme f ai été àttrappé une fois à fa feuille 5 je ri'ai pas eu curiofité coûter fon^fruit.

' Le P.' Pîamiér a nommé cet arbri<^ feau , Màlptghia latifolia^ folio JubtUs

' Bois âe fer^

.. -Min-à . . ' -^

^^'•ii Son fi'Oit eft gros Ki^ond comnie

^iî le petit doigt. Son bois eft fort amer^:

i, il cafle les meilleures haches lorf-

» qu'on veut couper. » ^

Minguet n en dit pas davantage.

Son écorpe entre dans les ti fa unes

fudorifiques

VE St. Do mi noue, ip^

fudorifîques avec le gayac. V^oyez le Diclionnaire des drogues fimples, Arc. lignumfcrri.

Cœur de bœuf,

Noas en avons parlé ci-deflTus. Voici ce que Mingaet en dit; »Son fruit eftfemblable au cœur d'un M bœtif ) jaune en dehors , lorf qu'il »» eft imxr ( a ), blanc en dedans^ & reiîi^ » pli de petites graines. Il eft bon à »' manger , ôc fon ufage peut arrêter " un cours ventre. » C'eft fur fon témoignage que je m en fuis fervi,âvec un fuccès incroyable. Il ajoute : « Sa *5 fleur eft jaune tirant fur le blanc. >*

Chêne i

Minauct parle de deux efpeces de

chêne, il appelle Tune chêne à gland.

*• Ce chêne eft gris. Le bois en eft

in ) Je n'en ai vu que de couleur de rofe.

N

IÇ'^ ^ HA M TE 3

>v bon pour la conftrudion des mou* »^ Mns à fucre , & lorfqu'il eft mis en » œuvre 5 il a l'odeur de la rofe. Sa M fleur eft à trois feuilles & autant d'é* w tamines.... Son fruit eft femblable aix gland de FEurope. Les Sangliers M le mangent. >>

Selon M'' de la Lande y homme cl'efprit , très- curieux ôc grand Ingé- ni^m j e'eft le bois de rofe. Voyez Lemery , Art, kois de rofe^

Chêne noir.

» Bon à faire planches bâtir , » niçiUeur que celui d'Europe , parce »». que le vei: n y donne pas . , . , Sa fleur « eft blanchcja quatre feuilles, fuivie »> d'une longue goufle remplie de fi- *> lafle. »

Cet arbre reflemble affez au chêne d'Europe par fa feuille & par fon écor- Ce. Les gonfles ne font pas plus groflès qu'une aiguille à tricotten Elles onc

VE St. Do min g ve. jpr

bien un pie &:demi , ou deux pies de long. C'eft: la Bignomà arbor foUo (m^u^ lari ^filiquis lonQ^tjJlmis (^ â^^ufliillmis du P. Plumieri C'ait uniquement pour faire connoîcre la Bigmma , que j'ai rapporté ces deux derniers articles*

CroquC'^mùilier,

« Sa fleur eft blanche & foarcliuei fon fruit eft noir^ gros comme le * poucejèc couronné .... Il eft aftrin- w gent. Prenez-en quantité pour le i> faire bouillir &i diminuer en confif- ^> tance de firap, pour le fluxdefangi qui fera arrêté en 24 Iieures^ H croît au rivage de la mer ^ 6c pays filineux. Sa feuille eft armée de »* piquans comme celle du petit houx.» Je n'ai vu cet arbre que de loin en voyageant.

Frangipane,

C*eft un arbre de moyenne grandeur

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jq6 Plantes

êchauteur,dont lesbranches font toutes tortues , fa fleur eft à cinq feuilles, va- riée de rou^e & de blanc. Elle eft épaif- fe. On en fait un firop foft bon pour les poitrines écliaufFées (a),

« Ainfi nommé, parce que fa feuille .> reffemble à celle d'Europe. Il eft fort » haut ôc droit , propre à faire du mer- « rain. Son fruit eft gros comme le •^ pouce, prefque de la figure de lo- live5 fervant de nourriture aux fan- M gliers ôc aux oifeaux.

Son fruit n eft pas plus gros que les olives fauvages. Il eft verd avant de mûrir , il eft noir quand il eft mûr : il vient par bouquets fur de longues queues/ Il a fort peu de pulpe : elle eft pâteufe. Il renferme un noyau fort dur

( a. ) Quand les fleurs font tombées , il s'engendra deffus une chenille qui mange les feuilles & tour ce qu'il y a de verd. Ces chenilles font Yertes,tort groliei ac d'une grande beautés

-^

VE St. DOMIN GUE. l^J

dans lequel il y a une amande très- amere. J'en ai fait tirer de Thuile. Une livre d'amande çn doi;ine quatre onces. Il faut la laver dans plufieurs eaux pour ôter fon. am^ertume. Alors elle eft fort bonne à manger. Elle fe fige comme fait ici l'huile d'olive en hy- yer^ elle eft fort blanche.

Indigo marron^.

Il vient fans culture. On le cultive aujourd'hui comme le franc , auquel plufieurs habitans le préfèrent.

Selon Minguet, (a racine entifanne eft bonne pour les gonorrhées.

Quelques -un3 employent auflî la décoftion de toute la plante pour l'atthme : elle eft fort défagréable, 6C peu en ufage, apparemment par cette raifon, ou parce que cette vertu n'eft pas bien connue, ou parce qu'elle ne réuffit pas ordinairement.

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nHai

Plante 4?

aane a caconne.

» Sa fleur eft d'un blanc jaune, elle- •» produit une gouffe garniç d'un poil » roux. La fève qu'elle contient eft » grofle comme une châtaigne , de la V même couleur, mais platte, ronde « & peinte d'un cercle noir dans fa » rondeur. Elle eftamere , quoique " les fangliers la mangent fort bien.

J'ai vu de ces eouffes : 6c l'on m'a dit- que cette ëfpece d^ maron qui eft fore gros, étoit unboncontre-poifon.

Le P. Plumier lui a donné le nom de fhafeolusjîliqms: làtis , hiffidis , (^ r/^-»

Lime h çhi^u'e.

» Sa graine eft par grappes, comme »» le mifîn, blanche quand elle eft M mûre , 6c a fur le bout de chaque •!» graine , tïn petit œil. Elle 'croît le « long des rivières , elle eft bonne

»»^..— ,'^^nn.j»'; i

j)E St. Do mi 0 "ùve. i^^

»> à manger , contenant d^ petits ^ grains, comme des têtes d épingle. JA" Defportes en employé kraciae dans les tifannes apéritives..

Lia^e à bouton, >• Elle produit une pomme dans la- y^ quelle eft ua bouton couvert d'un « poil noir 3, doux comme fatin^, dans ^ lequel font plufieurs petites graines > » il n y a point de fleur. Elle eft bonne »> pour guérir des ulcères.» Lés tiges &: les feuilks entrent dans les tifannes apéritivesdeM'^* Defîportes.

Unne À hosufs^

.. Elle croît dans les montagnes,, 5c rapporte la châtaigne de meryâinfi nommée, parce que les rivières dé- -- bordant Ten traînent à la mer. Cette »»chataigne,quieftfortgroiïe&:en£orme ^ de cœur,fert à faire des tabatieresXes u fangliers la mangent. Pulvérifée&

N vi

««^

200 Plantes

P infufée pendant une nuit, elle eft boû-^ »* ne pour un fébriGitant.Cette lianne eft ?* fort greffe, court d'arbre en arbre, «quelquefois plus dune demi -lieue. "Son pie çft ordinairement ou il y a ^'de Teau. Sa feuille eft fort petite i •'les bœufs l'aiment beaucoup. >> ^

Je ne connois ni cette lianne ni fa vertu.

hianne À tonnelle,

'"Il eft certain que deux pies bier^ w entretenus peuventfervir à une ton- « nçlle de demi -lieue: elle produit »> tant d ombrage , §c fon épaifleur »- eft telle que l'on y peut parer un «grain de pluye. Son fruit eft gros »^ comme un œuf, ayant trois quarts »> & trois noyaux. Sa fleur eft jaune, ^ en forme de cloche , avec quatre éta- » mines dans le milieu. »v

C-efi le convoivulus polyphyllos flore. lutèoé^fruUu maximis du P. Plumier.

DE St. DOMINGVE. 2QI

J'ai vu dans la Ville de Léogane une de ces tonnelles.

Âda^gle du ^ard dehM&r,

V H produit une gouffe fort allons i> o-ée , fa feuille eft ronde ( a ). Sa fleur n eft de couleur de feuille-morte. Son écorce eft bonne en infofion , pour w une perfonne enflée , avec cette

*M précaution de prendre le côté le ^> Soleil réchaufFe le plus. Il faut zw^x i> choifir récorce ta plus fine de fes ?' jambes ou racines hors de terre , ou »' d'eau. Il porte une graine que les \> ramiers mangent. »a M'* Defport§s i'employe avec le quinquina, Técorce ^Q fucrier &: d'amandier.

Voyez ci - deftus que nous en avons dit.

Mûrier,

V La fleur eft petite & blanche > fui-

( a ) Minguet fe trompe : elle eft oblongue comme nous l'avons dit, approchant de celle da laurier»

■Mm

M

|lOà P l A J^ T E s

» vie d'un fruit gros comme le pouce ^ >' comparable à la fraife pour fon boa »» goût.. Son pépin eft fort petit, toutes. »* fortes d'oi féaux s'en nourriflTent, "

Le bois jaune du Cul^de-fa^ y eft fans*^ doute le marier de Atinguet, Cet arbre eft bon four la teinture ; je fuis fur pris quil nefafte pas mention de cette particu^ tarit é^, F eut-être ne eonnmjfoit - il pas le hois jaune ; peut-être aùjft quil favcit pas fon ufage, M'^" DuhameL

J*ai demeuré trois ans au Cul-de- fac : & je n'ai jamais entendu parj.er ni de ce mûrier ni de fon fruit > d'où je conclus qu il.neft pas fort commun^

Perroquet.

» Dans le mûrier & autres arbres ; » croît le perroquet > qui contient »* quatre ou cinq pots d'eau bonne à »> boire: on perce la plante avec la

VE St. Dûminùve. '^jt)^

V baguette 4u boucanier [a), >*

Noifettes.

w Le noifèttier vienc fort haut. Sa » feuille eft petite g^ fort fine.. Il naît " dans les pays arides, &: produit un »,» fruit gros comme le pouce , rondôc » bon a manger y ayant beaucoup de *? faveur : fa coque eft' fort fine : mais ^ fi-tôt que cette noifette efl vieille»

V elle fe rancit. Elle feroit bonne à »A faire de rhuite.

Je ne connois point cette efpece de noifette. Je n'en ai pas même en-* tendu parler: mais il y a dans quei^ ques jardins de Léogane un grand arbre dont Técorce eil blanchâtre y qui porte pas un grand nombre de branches , & dont les feuilles font auffi blanchâtres & fort grandes , il ne me fouvient pas de fa fleur. On rappelle

( 4 ) C*eft un fulil plus gros 5c plus long que les fulik ordinaires.

noifeccier. Il porte un fruit gros com^ me une pomme de grofTeur médio^ cre : la peau eft verte, ôç la pulpe qui eft deffous eft jaunâtre.. Elie couvre trois eros noyaux, dans cliacun def- quels il y a une amande grofTe comme jno5 noifettes , & auiîî bonne. J'en ai fait faire de rhiiile excellente,

Marrom^

»j Lianne grife , qui porte une feuille w ronde,rapporte un fruit gros comn>e A' une orange &: de la.même couleur , -w quand il eft mûr 5 s'ouvrant pa'^r » le milieu , pour laiffer fortir trois '»» grains femblables aux marrons •» d'Europpe 3 même écorcç &: même •c goût. Peu de perfonnes la connoif- >? fenti elle grimpe dans les noyers. »t

Je ne connois point cette lianue.

Noyer, » Il porte des noix , femblables i

DE St.Î)OMÎNCVÈ. 2Ôf

0 celtes d'Europe i mais la coque eft M plus épaiffc &plus dure , ôc ramande *> moins grofle. Il croît dans les mon- »> tagnes arides 5 fa feuille reffemble » à celle du frêne d'Europe* "

Je neconnois point cette efpece de noyer: mais j en ai entendu dire c0 que Mingueten rapporte.

Sucrier de montagne , ou hbis cochon.

Sa gomme eft excellente pour les » coups de fer* Il faut laver la plaie »» avec de Teau fraîche , y infmuer du w baume avec Unpeu de charpi, u\m n comprefle avec un bon bandage ^> pardeflTus: la plaie fe ferme au bout n de 24 heures. »'

Ce qu'il a appelle gomme^il l'appelle baume 5 c'eft fon véritable nom. On l'appelle encore huile , parce qu'il en a la confiftance. Ce baume participe du baume de copaû &: de l'huile de téré- benthine. Il eft bon d'avertir qu'il n^.

w\ï

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Plantes

faut pas iïiettre du eharpi dans plaie j coîilme il le dit , mais un peu de baume ^ & pardetTus un plumaffeau qui en fera imbibée «« Son écorce eft »* bonne dans les tifànnes pour les pians^ >i^ parce que fa gomiHe elt purgative. >* ( Je ne je^ois pas de fi^ wvis , elle efi trop chaude, ). » Son écorce eit encore » bonne en tifanne pour les gens at- *> taqués du poumon j ou de Tafth- « mes Si fi partiegauche n'eft point y^ attaquée 5 cela fauve la vie; ckofe ** éprouvée* ( U îH^a Pair d^Un- mAîivâ,H ohfer'Vdteur fur ceP article ^t*- On Pappelle •• bois cochon 1 parce que le cochon {Marrvn<^ oufangUerde cepays-lk) « étant *> blefle y va mordre cet arbre , en fait « forcir la gomme 5 y frotte fa plaie bL » la o-uérît. »»

Un des meilleurs ufages qu'on peut faire de cette écorce , c eft de la faire entrer dans une eau vulnéraire faite au foleil , dans le goût de celte que

m^>m

D E St. Do mi noue. 20 f

je compofoisil y a une trentaine d'an- nées^qui eft aujourdliui fort commune dans Paris, èc connue fous le nom d'eau rouge , ou d'eau de vie rouge.

J'en ai fait auflî à St. Domingue avec les plantes vulnéraires du pays , par Tufage de laquelle j'ai fauve à des Nègres leurs mains écrafées par les moulins à fucre 5 que Ton avoit cou- tume de leur couper. Depuis le pre- mier jour jufqu'au dernier, je ne les faifoispanfer qu'avec cette eau-devie. M'^* Defportes fait entrer cette écorce dans les tifannes apéritives,

Citronmer,

»Sa racine eft bonne dans les tifannes pour galanteries. Son fruit fert à »' faire l'onguent noir avec lequel on ne manque jamais de guérir quelque »> ulcère que ce foit. Il eft fi violent !• qu'il fait plus de douleur que la

» pierre infernale : c'efl: pourquoi on « rappelle auffi l'onguent du diable 5 « il mange les mauvaifes chairs , nour- w rit êc fait venir les bonnes, ôc pré- i> férve de la gangrené. >>

L'onguent noir fe fait avec du mâ- che-fer > de ia fuie &: du jus de citron. Il eft fort en ufage 5 on l'applique chaud 5 ceft pourquoi il fait tant de douleur. » Ses pépins piles font mou- ii rir les vers des enfansi »>

M" Defportes fait entrer fon écorcej- avec celle d'oranger fauvage dans les opiates aperitives^

Cerifes de t Amérique.

» Rouges grappues , groffes comnic .!- celles d'Europe , pâteufes ôc alté- « rantes. Cet arbre a la feuille large « & grande comme le coudre. » Le P. Plumier l'appelle MdpigU rmli ■punici facie* Je ne connois point cet arbre , 6: je

ïi'en

DF St. Domin gve, 209

ti*€n ai jamais entendu parler.

, Le véritable cerifier de St, Domingue,

Cell un petit arbre épineux à petites feuilles rondes , avec quelques échan- crures: fon fruit efl: rouge & gros com« me une cerife : mais i) eil à quatre petits coins. Au lieu de noyau , on trouve au milieu trois petits morceaux d*une fubftance membraneufe & co- riace.

Ce fruit cru eft fort acide & âpre. Quelques-uns pourtant le mangent faupoudré de fucre. En comporte il eft excellent: il a le goût des cerifes & des framboifes d'Europe : on en fait auilî une gelée parfaitement bonne.

Ici finit MingHcf,

210

Plan

T E ^

Bois cCInde»

Minguet ne parle point d'un grand, arbre des îles , que Ton nomme bois d'Inde» Quoique je n*en aie pas fait dans le pays une defcription exade, je vais en dire ce que j'en fai.

Il ne faut pas le confondre comme a fait Lemery , avec le bois de la Ja- maïque ou bois de Gampêche. Celui- ci eft un bois fort épineux , dont on^ fait des haies à St. Domingue depuis peu detemsi il vient mieux que le ci- tronnierôc garnit davantage.

Quand on le laiffe croître , il devient un grand arbre , dont on envoyé le cœur en France , pour les teintures. L'erreur de Lemery , vient apparem- ment, de ce qu'autrefois, avant que l'on connût le nom de bois delà Ja- maïque & de Gampêche en France, on l'appelloit purement 6c fimplement, bois d'Inde^ Cette partie de l'arbre eft

v.,,/i-

DE St. Domîn^ve. 2l\

rouge: il ne porte point de baies, nuis une petite follicule mcmbraneufe , minet 5c platte,à peu-près comme celle du frêne : ces baies , non plus que les feuilles , n'ont ni l'odeur ni legoiit de la feuille & des baies du bois d'Inde, cette petite goulfe renferme des fe- mences.

Le bois d'Inde de St. Domingue & de plufieurs autres îles, eft un grand arbre, ôc peut-être le même, qui félon Lemery , croît en Cambaya , dans les Indes Orientales {a). Les feuilles de celui dont je parle font grandes comme celles* du laurier, liiTes & de couleur verte.

Elles ont uneodeur mêlée de poi\Te, de girofle 6c de lauriers. Ainfi elles font les mêmes que iefclium I^dum^que[*on fait entrer dans la thériaque , avec cette différence que celles de$ Indes Orientales , vendues en France , n'onc

( a ) Voyez htmçTj , Arc. MAlaèatram p, y^^j,.

212

P l À N t E $

prefqiie plus aucunes des qualités que les Auteurs demandent > les baies {a ) poffedent ces trois qualités plus émi- nemment que les feuilles.

Dans les oaies du bois dinde de Jamaïque, le poivre dominé. C'eft par cette raifon qu'on les appelle poivre de de la Jamaïque.

Lemery fe trompe encore , quand il dit ) que Técorce de ce bois elt la ca- iielle blanche (h), La canelle blan- che eft récorce d'un autre petit ar- bre , du moins je n'en ai vu que de petits à la Martinique. Je n'en ai point vu àSt. Domingue.

Il y a fixou fept ans que j'envoyai à M''* Laborye , Apothicaire fort connu par fa capacité 6c fa probité , une boîte de feuilles de bois d'Inde , pour être employées dans lathériaque.

{a) Ces baies font aflfez bien décrites dans Tarti- cle ci-defTus ; Malahatrum.

{é) Article , bois d'inde. ^. 502 1 .•

î>E St. DômîncveI 215

Le P. Labat a déerit affez bien le bois d'Inde 3 qu il appelle auiîî laurier. Il dit qu'il porte deux fois Tannée de petites fleurs blanches , qairougif- fent un peu vers leurs extrémités 3 elles font par bouquets.

Voilà 5 Monfieur 5 & cher confrère ma tâche faite, &je vous envoyé ce que je vous ai promis. J'ai pourtant envie d'y joindre quelque chofe fur le -bananier , le palmifte &: le ktanier. Je n'ai pas rapporté ci-delîiis 5 ce- que ■je connois de cqs arbres 3 parce qu'il n'y a rien ou peu à gagner , pour la matière médicale. Mais toute réflexion faite , je crois qu'ils méritent de trou- ver place dans ce recueil, à caufe de leurfingularité. Vous en jugerez.

Bmjtnier ( a ), Il y en a de deux efpeces , qui ne

[a] Mftfaarhf PalmahumiUs Ungis latif^Hefoliih Toma Fftradifi, ^c. Voyez Lemery.-

G iij

différent gueres que par leur fruit. Le fruit de Tun s'appelle banane > le fruit de l'autre s'appelle figue banane.

Le ba-iianier n eft autre chofe que plufieurs feuilles roulées les unes fur les autres , qui forment une efpece de tronc , toujours tendre , toujours verd, de la grofleur du corps d'un homme ordinaire , ôc qui croît jufqu'à la hau- teur de fix ou fept pies. Si on doit l'ap- peller arbre ou plante, je le laiffe à décider aux Botaniftes de profeffîon.

Sa racine eft unegroffe bulbe blan- che , qui produit plufieurs cayeux, qui avec letems pouffent des rejettons autour du tronc.

Voici fa manière de croître.

Il fort d'abord de terre deux feuilles roulées qui s'élargiffent pour faire place à deux autres , qui viennent du centre : ces fécondes font place à une troifieme paire 5 la troifieme à une quatrième. Etainfi des autres. Ces

VE St.DoMINGUE. 21 f

feuilles s'appliquent fortement les unes contre les autres de prefque toute leur longueur, qui peut être d'un pie & demi ou de deux pies : enfuite leurs pointes qui fe recourbent vers la terre , fe feclient Se tombent.

Quand le bananier eft arrivé à la hauteur que nous avons dit , fes feuil- les, d'un beau verd, fortent abfolu- ment hors du centre , & s'étendent en l'air 5 prefque toutes en lignes direftes, peu écartées les unes des autres. Com- me elles font fort pefantes àcaufe de leur longueur , qui eftaumoins de cinq ou fix pies , 6c de leur largeur qui en a deux ou environ , elles penchent un peu vers la terre : elles y tornberoienc en peu de tems , fi elles n'étoient pas foutenues par une fortgrofle queue, ronde d'un côté & platte de l'autre , qui règne , en diminuant , jufqu'au bout de la feuille , & diftribue des nervures pour la foûtenir. Malgré ce

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21$ ^ Z A N T E S

fecours , elles font fort faciles à dé-^ chirer, & pour peu que le vent foit fort, îl les fépare en une iufinité de bandelettes > de la largeur d'un pouce* Il ne faut que neuf mois au bananier pour faire fa crue : alors , du milieu de fcs feuilles , on voit naître une grolTe Se (one tige ligneufe longue de trois ou quatre pies > qui fe termine en un gros bouton oblong , aprochanc delà ligurç coniquç» de couleur de eris de lin^ Cette ti^e eft diftino-uée de diftance en diftance, par des efpeces d'anneaux environnés de petits bou-* tons: ce font les embryons des fruits qui y font collés 5 à mefure qu'ils grof- fiflent , on apperçoit un pédicule li- gneux auquel ils font attachés quatre ou cinq enfemble.

Chaque anneau porte plufieurs d^ ces pédicules, enforte que la tige efl toute couverte de ces fruits i longs À\m demi pié , de la groffeur du brajj

pw St. Do min a ve. 2tf

d'un enfant de cinq ou fix ans , rele- vés de trois coins , couverts d'une peau verte qui devient jaune , de qui s*éleve facilement de toute fa lon- gueur en trois parties, quand le fruit eftmûr.

Il en vient communément {^)> cinquante, foixante ou même da- vantage fur la tige 3 qui ainfi chargée s'appelle un régime.

Les fruits font fort bons. Leur chair eft jaune ôc ferme à peu-près comme la poire de virgouleufe , leur centre dans toute la longueur eft garni de petites graines tendres , attachées à de petits filets, on les mange avec le fruit.

Ce fruit fe mange cru , en compot- tes y bouilli avec du bœuf falé 5 frit , coupé en tranches minces de toute fa longueurs boucanné, c'eft-à-dire >

( a ) Lemery dit deux cens , c'eÛ. trop : le P. La- bat , depuis trente jufqu'à cinquante , ce n»eft pas ^ffez.

2iR Plan tes

cuit fur le gril ou fur les charbons. C'eft une fort bonne nourriture &: d'un grand fecours quand le pain manque , comme il arrive fouvent en tems de guerre. On plante 1 oignon de bana- nier 5 ou fesrejettons avec lescayeux dont ils font fortis, le Ion o- de ca- naux qui conduifent Téau dan^ les ha- bitations.

Voici les qualités que Minguet at- tribue au bananier.

» L'eau du corps, ou du tronc eft » bonne pour le cours de ventre , pour » nettoyer les yeux chaffieux 3 Teau >? du bouton pour déterger les ulcères. » L ecorce du fruit verd, réduite en charbon & pulvérifée , guérit les ul- » ceres ôcles crables {a).»;

Du h manier qui porte U figue bmme. Toute la différence qu'on peut re-

{a.) Ce font des fentes qui viennent fous la plante 4es pies des Nègres.

VE St. DOMINGVE. 21^

marquer entre ces deux efpeces d'ar- bres avant qu'ils portent leur fruit, c eft que le bananier proprement dit a le tronc vcrd , & que celui du bana- nier-figuier tire un peu fur le gris de lin. Mais le fruit nommé figue banane eft fort différent de la banane : il eft plus court , moins gros ôc moins droit. La Subftance cuite de quel- que manière que ce foit eft plus fondante §c a un autre goût. Elle ne fe mange guère autrement que rôtie fur la braife , avec du fucre, en tourte , & en beignets, ou elle approche du goût de la pomme de reinette.

Minp-uet appelle cette efpece deba- Xianier , bana?iter?nujqué, 11 ait, qu une feule grafpe ( c'eft-à-dire , une tige ou régime ) , porte quelquefois plus de cent fruits 5 ôc il a raifon.

On a donné au bananier en géné- ral le nom de pommier de paradis & de figuier d'Adam 5 parce que quel-

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t%6 P l A N T s S^

qiies Théologiens croyencque fon fruit eftie fruit défendu: '(mais c'eft peut- être mal deviner) & que nos premiers pareas fe couvrirent de fa feuille i ( ce qui eft plus vraiffcmblable ). [a\

Du^ fdmïfte*

Le Palmifte eft un arbre de trente: ou quarante pies de haut , fort droit ,. fans branches^ fans écorce,ôc. couronné de dix ou 1 2 feuilles, qui font comme une efpece de pennache. Elles font beaucoup moins longues &: moins lar- ges que celles du bananier.

Il eft foûtenu par une infinité de ra-^ cines qui ne font pas fi groftes que le petit doigt 5 qui forment au bas du tronc tout autour une groife mafle toute ronde.

life forme, comme le bananier de

{a) On appelle le bananier figuier d'Adam , oa pommier de Paradis , comme c'étoit l'arbre du fruit défeadu qu'Adam mangea. Dictionnaire de Trévoux.

Î>È St. DOMINGV E. Z2t

quelques feuilles qui forcent de terre éc fe roulant les unes fur les autres , font un petit tronc verd qui fe durcit & devient grifâtre à mefure que Tar- bre croît : ainfi la partie fupérieure eil: toujours verte & l'inférieure grife. Au lieu que le trône du Bananier eft toujours tendre & verd , celui du pal- mifte eft extrêmement dur & lifle.

Il eft ordinairement moins gros par le pie, que par le milieu. Dans cette dernière partie il égale lagroflTeur d'un homme ordinaire 5 il revient enfuite à peu- près à la groffèur du pie , qu'il conferve jufqu'àla partie d'où fortent les feuilles, La partie fupérieure eft toujours verte, quelqu'âge qu'ait l'ar- bre 5 elle s'appelle chot^. Je croirois pourtant qu'il eft d'autant plus court que l'arbre eft plus vieiuc &: qu'il ceile de croître. C'eft une obfervation que je n'ai pas faite , & qui ne m'eft pas venue dans Tefpri tant fur les lieux:

M

22%

L A N t E S

quoi qu'il en foit , la parcie verte eft ordinairement haute de trois ou quatre pies*

Quand on en a déroulé deux ou trois lames , donc la première eil épaiffe à peu^près de quatre ou cinq lignes, & toutes les fuivan'tes plus minces à proportion^ on trouve les autres fort blanches avec un rouleau au cœur ou milieu , auffifort blanc & fort tendre.

Ce chou palmifte eft auiîî bon que nos choux-îleurs 5 on le mange , non- feulement comme eux au beurre , au jus , à rhuile 6c au vinaigre ou comme des artichauds à la poivrade 3 on en met auffi dans les potages gras 6c mai- gres ou feul ouavec d'autres légumes.

Lorfqu ona enlevé ce chou , l'arbre meurt. On fait du tronc qui refte , des pieux pour des entourages, pour bâtir des cafes,ou des planches po-ir les fer- mer , au lieu de maçonnerie.

Ce bois eft un peu creux, rempli

jdê St. Do min GUE. 21%

de fibres fortes & mobiles , comme le gros fil que Ion appelle fil de bre- tagne , qui s'étend d une extrémité à l'autre de larbre. Je foupçonne qu'elles fervent à foûtenir Tarbre con- tre les grands vents , de peur qu'il ne fe cafie.

Cette efpece de palmifte s^appellepal- mifte franc.

^ Je ne veux pas omettre , qu a la Mar- tinique on mange de gros vers blancs , que l'on trouve , ou plutôt que l'on fait venir dans le tronc du palmifte après l'avoir abbattu : je vais copier ce qu'en dit le P. Labat, tomepremier,: pag. 225.

Ver de palmijte.

» C'eft un infede qui fe produit dans » le cœur de cet arbre {du palmifte). « quand il eft abattu. Ces ycts font ^ de la grofleur du doigt & d'environ » deux pouces de longueur. Je ne>

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puis mieux les comparer qui un « pelotton de graifle de chapon enve- m> loppé dans une pellicule fort tendre ^ èc fort tranfparente. On ne remar- n que dans le corps de ranimai aucune ,, partie noble , ni entrailles ni intef-. ., tins, dit moins à la vue, car on M voit autre chofe avec une loupe de « cryftal , quand on a fendu Tani- M mal en deux parties : la tête efl ,• noire 6c attachée au corps fans au- H cune diftindion de cou, ^

o La manière de les apprêter, elk •. de les enfiler dans une brochette ^ de bois pour les tourner devant ^le .. feu. Quand ils commencent à se- ., chauffer, on les faupoudre avec de H la croûte de pain râpée , mêlée avec du fel : cette poudre retient toute - la o-raifTe qui s'y imbibe : quand ils .. fon^'t cuits , on les fert avec un jus. d'orange ou de citron Celt un p très-bon manger &: tres-deiicat.

f> 11

^ Il y a encore une autre manière de »' les accommoder 5 c'eft de les mettre « dans une calTeroUe ou dam un petit *> canaris, avecdu vin, des épiceries, w un bouquet d'herbesiines, quelques •> feuilles de bois d'Inde, &des écor- »* es d'orange. » Voici , continue le PcLabac comment ces vers naiflent dans les palmiftes 2

>' Lorfque le ^almiile eft abattu , »* & qu'on n*a pas befoin du tronc , •» on y fait avec la ferpe ou la hache » plufieurs entailles le long du tronc, » afin que certaines groffes mouches ^ qui produifentlesvers dont je viens » de parler , puiflent entrer dans le « cœur de l'arbre , en manger la » moelle , & y laifTer leurs œufs , qui « s'éclofent & forment ces vers. li >^ faut avoir foin d'aller au bout de fix femaines voir Tarbre qu'on a en- ^ taillé. On le fend dans toute fa 1oa|:

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99 o-ueur , & on trouve ces vers dans fa n moelle. Quand on néglige d'y aller »' environ ce tems4à, on ne trouve ^> plus de vers. Il faut qu'ils ayent w changé défigure, comme les vers w à foie , &: qu'ils foient devenus des mouches.

»» Je n'ai vu ces vers qu'à la Mar- tinique, quoi qu'il y ait des palmif- ies à choux , dans toutes les autres lies,. . .Ileft vrai que je n'y ai point vu ces efpeces de mouches* »> Il y a encore deux efpeces de palmif- tes , dont l'une s'appelle palmifte épi- neux 5 l'autre palmifte à vin. , Le palmifte épineux eftainfi appelle, parce que félon le P. Labat , &: Min- guet , Ton tronc 6c (qs feuilles font toutes couvertes d'épines. Il porte des bouquets de petites noix ^ dit le P. La-: bat 3 grofles comme des châtaignes , qui font remplies d'une fubftance blanche ôc oiéagiaeiife. Son chou , dit-

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99

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1

îl encore , efi plus délicM que celui fdmifte franc.

Le P. Plumier l'appelle ,ptm^ dac< tilîfera. acîileata mimma, ^ Le palmifte a vin eft ôrdinairenieHc beaueoup plus gros par léiîiîlieu que par fa partie inférieure ou fupérieiife. Minguet dit 5 qu'on n^xx mange poiilc le chou 5 mais qu on en tire la moelle , qu'on en exprime le fuc 5' qu'on le gardé dans des bouteilles , & que cette li- queur devient un vin ^ o[m damlëcm^ mencement furge beaucoup ^ ^ ehgraijfek ^ne d'œil ; que fi l'on avm quelque mauvais md dans le corps , le fer oit for tir , & quil ote l^appétitl

Je n'ai point eiitendu dife qu'on faffe de ce vin à St. Domingue. Peut- être y en faifoit-^on avant qu'on eii apportât de France»

Le P. plumier appelle cette efpece>^ fâlma dadilifera & viniferk

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L À 2sr f ^ i

Du Latanier.

Le latanier ne diffère du palmîfte que par fes feuilles. Il fort de terre de la même manière , il devient de la même hauteur également gros par tout. Ses feuilles font au fommet , elles repréfentenr parfaitement un éventail ouvert , de la longueur d'en- viron un pie ou un pié ôc demi , &: un peu moins de largeur. Elles font dé- coupées profondément en plufieurs bandelettes épaiffes, roides, terminées en pointe, pliflTées par en bas , 6c réunies fur une petite queue , grofle comme une plume à écrire , longues d'environ un pié ôc demi tout au plus , & non pas de trois ou quatre , com- me lé P. Labat Ta écrit. Cet arbre fert aux mêmes ufages que le palmifte. Minguet compte quatre efpeces de lataniers. Le petit, que le P. Plumier appelle, palmada^ilifera. radiât a major

ii

mÊÊÊ

DE Sf. DOMINGUE, 22 0

glabra : le franc que le même Père nomme Palma da5î^tlifera radiât a minor glabra: {q y latanier à fcie > & le 4^;^ latanier épineux.

J'ai Thonneur d'être, 5cc.

Fin de U féconde Uttrel

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V i

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LE T T R E

R O I s I É M E.

Sur le Rémora & les. Hakfons»

E comptoîs 5 Monfieur ^ &:

\ cher Confrère 5 être quitte

É; avec vous après avoir fait ce

que vous m'aviez demandé fur le* maladies qui régnent à St. Domin- gue 5 ôc fur les plantes de cette île, jVîais vous m'avez entendu parier du Remo» ra & de THalcyon d'une manière fort différente de ce qu'on en penfe 5 & vous m'exhortez à écrire ce que .. \*tn ai vu j & ce que d'habiles Marims

P ÏY

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a 32 DU Rémora

m'en ont appris. Je ne fai fi beaucoup de gens font curieux d'approfondir ce qu'il y a de vrai Ôc de faux , dans les anciennes fables du remord ér des hdcyons. N'importe, dites-vous, cette connoilTance eft du refforc de l'Hif- toire naturelle? il s'en trouvera tou- jours quelques-uns qui feront bien aifes de favoir à quoi s'en tenir. A la bonne heure , Monfieur , je vous obéirai. Mais n'attendez pas de moi que j'aille courir les bibliothèques , lire des ca- talogues ôc feuilleter bien àt^ volu- mes, pour rapporter ce que les Au- teurs modernes, (s'il y en a) ont écrit fur Qç^vi^ matière : je me contenterai de rapporter ce que Pline écles autres Auteurs anciens nous en ont laiffé , & je tâcherai de développer ce que l'on en doit croire.

»> le rémora , dit Pline eft un txhs" 5* petit poilTon 5 qui fe trouve fur les *> rochers ; quand il s'attache à ta

ET DES H ALCYONS. 2 2^

» quille des navires 3 on croit qu'ils en »» marchent plus lentement.Ce qui lui » a fait donner le nom de rémora (a). Il rapporte enfuitele fentimentdes an- ciens, ^y Ariftote, dit-il jCf) croit qu'il a des pies, de la manière dontlamul- w titude de fes nageoires eft difpofée. Mutianus penfeque c'eft le murex , coquillage plus grand que \ç,purpura[c}. Le même Auteur rapporte, qu'il s'en

( a ) Echeneh efi parvus admodum pfiis ajfuetus feim- hoc carims adhârente naves tarditts ire creduntur : inâe mmine impofitff, Lib. I X. c. x x v. è nofiris quidun^ latimsremoram appellavere eum, Lib. XXXil. c. i.

(b) Pedes eum habere arhkratur Arifioteles ^ hapojitâ flnnarum multiiudine

( f ) Le murex cil un coquillage dont la liqueur ferv'oit à teindre ; les Latins n'appelloienr pas cette teinture y purpura^ mus murex ccn:hiliata , v^fiistinâa muircc , vsl conchiltata.

Le Purpura eft un coquillage qui fervoit auflî au ■mêmcufage. Ce qui écoit teint delà liqueur de cette cfpece de coquillage s'appclloit purpura , que nous ap- pelions auflî la pourpre Virruve a cru que le

coquillage appelle Purpura , avoit une couleur difFé-^ icntc , iuivant la différence du fol oii on le trouvoif;

'ïB 54 ^ ^ R E M Ô R A

étoit collé une fi grande quantité fotVs un Vaideau que Périandre , Tyran de Corinthe envoyoit [a) avec ordre de mutiler inhumainement trois cens en- fans nobles de Corcyre {l^)y qu'il ne put jamais avancer, quoique les vents enflafTent toutes les voiles 3 & que Ton honoroit à Gnide dan^ le temple de Venus ^ les coquilles qui avoiçnt opéré cette merveille {c). Enfin ,Trebius Niger {d) , dit , que ce

que celui de Tyr av-oit une couleur rouge ; que celui ^'Afrique l'avoit d'aa rouge foncé tirant fur ie violer» Il y a des Auteurs qui afliîrent que les Latins fe fonc trompés^ en croyant quelacouleur pourpre venoit à'mx coquillage: ils prétendent , que ce qui feryoit à teiii- dre en pourpre, écoic le fan g d'an petit infe£le , què l'on appelle cochemlU.

(a) A Alyatte Roi de S:\Tae*

( b ) . Muîianûs murtam effe latiorem purpura conchd^ , ntroque latere fefe collîgente , quibus inh&rentibus , plenam 'uentis Jietijfe navem portaniem nanties a Periandro ut cetf-, irarentur nobilespueri^ Conchafque quA idprAjiitennt apud Gniàiorum Venerem Coli,

( c ) Hérodote ^ Livre UT.

(d) Trebius Niger , pedaiem effe-é* crajpmdme ^um^fte d^korum : naves mffrari.

ST ^Es Halcyôns. ^^f

poiflbn eft long d'un pie & épais de cinq doigts i & qu'il retarde la marche des iVaiffeaux.

Nous voyons ici les fentimens par- tagés fur la nature du rémora : les uns penfent que c'eft un poifTon 5 d'autres que c'eft un coquillage. Arif- tote femble éloigner cette idée en lui donnant des pies , ou du moins en fup- pofant que fes nageoires lui en ferventf car les coquillages proprement dits ^ n'ont ni pies ni nageoires. Il faut join- dre Trébius Niger à Ariftote: onpour- roit 5 ce femble , attribuer ce même fentiment a Pline. Mais on fera dé- trompé quand on lira ce qu'il en a dit dans le livre trente-deux , ou il parle en Déclamateur plutôt qu'en Hiftorien de la force immenfe de ce petit poiffon.

»•» Qu'y a-t'il de plus fort que la mer , I* les vents & les tempêtes {a) dit- il,

l a ) ^ijd vhUntim mari vmljve, ^ mr^méus é^

^^6 ^ ^ R E M 0 R Â

^ lorfque leur puiffance fe réunit à pouflTer un Navire ? ôc cependant »» un petit poifTon commandé à cet »» élément , &: à la fureur des vents , " ôe le retient en un même lieu. Ce w que les chaînes les plus fortes^ &les »> ancres les plus péfantes ne peuvent w faire j unfeul petit poifTon envient w à bout fans peine , fans travail , non en tirant, mais en s'y attachant. O w vanité des hommes , s'écrie-t'il ! ils

ffocellh? tamen omnla h&e pariter ebdem împel- lentia , unus ac parvm admodum pifciculus , eche- Tteîs appeUaîus y infetenet» Huant vent i licet ^ f&viant frocelU , imper at furori , virefque tantas compefcit ^ eogitfiare navigia. Quod non vincula ulla , non anchorsb pondère irrevecaifilis jaéis. , infr&nat impetus ^ domat mundirahiem^ nullo fuo labore non retinendo ^ aut aliê modo quam adh&rendo Hac tantilla ejifatis contra tôt iw fétus , ut vetet ire navigia

Sed armatA claffes imponunt fibi turrîum propugnacuU ut in mari quoque pugnetur njelut e mûris. Heu 'vanitas humana cumroflra illa Are ferro'^ue ad iSîus armatafe* Tnipedulis inhiber e pojftt ac tenere devint a pifciculus .Fertur A£iiaco marte tenuijfe prAtoriam navim Antonii tenuit nofirA memoriâ Ca'ù principis Ah Afturà, Antinmxt' Ammis>

^

Kr l^ns HalcyôUs. i0

w bâtiflent des tours & des forterefTes » fur des Vaifleaux afin de fe battre »> au milieu de la mer , comme ils » feroient fur terre de defliis des mu- »' railles 5 & un poiffon diin demi-pie , 9> peut arrêter à fon gré ces machines énormes, armées de fer & d*airain a> pour les combats:il a arrêté le Vaif- « feau Amiral que montoit Antoine « dans la bataille d'Aftium : il a ar- M rêté , de notre tems , celui du Prince Caïus (a) lorfqu'il revenoit d'Af-* w ture à Antium. Comme de toute la » flotte ( ^ ) 5 fon VailTeau à cinq rangs

{a) Caligula,

( b ) Cum e tota cîajfe qulnquerenits foîa non proficenf 'i €Xilientihus protinus qui id quâLVerent cîrca navim , inve* nere adha/rentem gubernaculo ofienderuntque Caioindig-^ nanti hocfuijfe quodfe revocaret , quadringentorumque re" ynigum obfe qui 0 contra fe intercederet. Qui tune pojîeaquê videre , eum limaci magns.fimilem ejje dicunt Nos ptu" rium opiniones pofuimus , in naturâ ft^uatiUum , cum di 90 diceremus ISIec dulfitamus demvalere mnr a gênera^ l fubaadi , concharum ] cptm c$Ubn ^ s.nfecrato ctmjfê

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I g ^ ^ R E M 0 R A

» de rames , ëtoit le feul quin'avan-^ çoit point 3 des gens fautèrent du » vailTeau pour chercher toiît au tour •' ce qui pou voit caufer ce retarde- p* ment 3 ils trouvèrent ce poifTon »> collé contre le gouvernail y &: le »> portèrent à Caïus qui fut fort indigné i»» que fi peu de chofe eût pu rarrêter,6c «* l'emporter fur les iotccs àt quatre- •> censrameurs.Ceuxqtiile virent alors, 3, ôc qui lont vu depuis, ont dit qu'il ^i étoit femblable à un grand limaçon; ja, Nous fommes perfuadés, ajoûte-t'il> p, que toute forte de coquillage ont la 5, même force 3 ceux qui font confa- 3, crés dans le temple de Venus à Gnidc 3, en font une preuve bien éclatante 5 & ne nous permettent pas dendou- g, ter „. Ilparoît donc que l'opinion commune 6c celle de Pline , étoit due le r^>^d?r/ï eft un coquillage.

t^émfh , *pud Gnîdiam vençrem^ ççnchas ^ho^U9 ejtif^ diftn pQtentiê credi neeejjefiti

Examinons préfentement ce qu'il y a de vrai & de faux dans ce fentimenc des anciens. Deux chofes font Tob jet de notre recherche i Tune , quelle eft k nature du rémora j l'autre, quelles font les forces qu'on peut raifonnabie- ment lui attribuer.

Entre les avis difFérens de plufieurs Auteurs 5 le bon fens veut que nous préférions le plus vraiiOTemblable. Donc , quand l'un me dira qu'un feul petit poiiron,d\in demi-pié, ou d'un^ pié enfe collant contre un navire , lar-; rête tout courte je ne puis donner mon confentement à cette propofition 3 par conféquent, le fentiment de Trébius Niger 5 & celui d'Ariftote me paroiffenc évidemment faux. Mais celui de Mu- rianus peut être vrai.

Il fenfuit donc, i«- Qu'en bonne critique , un feul petit poiffon ne peut pas retarder la marche d'un navire;

^S: Qu'il en faut un grand nombre^

pu Re Mo n4

3°" Que ce doit être des coquillages^ parce qu'un poiflon ordinaire feroic bientôt écrafé par le froiflenient de Teau, quiefttel 5 quand le vent eft favorable, que la mer paroît nuit tout en feu autour du navire , par la quantité prodigieufé d'étincelles qui en fortent. Ainfi, première vérité , le ré- mora doit être un coquillage. Mais quelle force doit avoir ce coquillage l

Vous favez , Monfieur, que la plu- part des fabl es , & peut-être toutes , ont pour fondement quelques vérités hif- toriques. Celle-ci n auroit jamais été. imaginée , fi Ion ne s*étoitpas apperçu qu'il s'attachoit quelquefois des co- quillages fur la furface inférieure d'un vaiffeau. Ce fait a été altéré, changé, exagéré , en paffant de bouche en bouche. La multitude des coquillages a été réduite à unfeul: ad coquillage y on a fubftitué un petit poiflon. Du re- tard de la marche , on a fait un arrêt

total

nr DES HaICYO NS. îiAtI

total. Pour mettre cette vérité dans tout fonjour, il n*eft queftion que de fa voir fi efFedivement il s^amafTe quel- quefois une fi grande quantité de co- quillages fous la quille dun navire que fa marche en foit retardée : c'eft un fait certain , & connu de tous les Marins , qui ont fait des voyages de long cours.

En revenant de St. Domingue, comme je confidérois une plante ma- Tine , que l'on nomme raifip^i du, trofiq»e. {a). Mon Capitaine m*en fit tirer de k 3iier une poignée : elleétoit remplie de petits coquillages de la largeur & de la longueur de longle du pouce 5 il

( ^ ) On en voit affez fourenc des battïcs longs A€ t.0 & 30 pics , larges de huit ou dix pouces , détachés 'des rochers par les vagues dont ils font battus. Ils font emportés de PEft 4 PQueft & du Nord au Sud. En allant ii St. Domingue « je n'en vis que proche du tropique. Cette plante portoit.des baies grofTes comme un grairt 'deraifin. J'en goûcii , Je les trouvai fort fades. Enre- ^venant , je n'en vis qu'à deux ou trois cens lieues ca* ;4ega dg JPil^açç ; gljc î^'M^ii poiûl de baies.

^4^ JJ t? R Ê M 0 k A

m'aflura que quand des navires font iono-tems dans de certaines rades oa ports voifins des rochers , il s'en atta- choit fous la quille une fi grande quan- tité 5 que leur marche en étoit confi- dérablement retardée^parce que ce co- quillage devenoit de la grofTeur des plus groflTes moules. Peut-on ne pas reconnoître à ce récit le rémora des an- ciens ?

On conçoit aifément , que quand la quille d un navire eft plus ou moins çr^mie de ces coquillages^ cette furface étant devenue rabotteufe &fillonnée , elle gliffe plus difficilement fur Teau 5 c'eft'ce qu aflïïrent tous les Auteurs 5 ^tardius ire treduntur'y nxves morark

Ce que M^ de Laly y Gapitainé"; qui m'a ramené , m'a dit, n'eft pas le féntiment d'un feul homme : je ne m'en fuis pas tenu à fon fetii témpi-^ gnage. J'ai prié M'' Nicolas Charetv mon correfpondànt à Nantes,' fi coii^u

en Europe& eh Amérique par fa pro- bité & fa piété ,- de s'informer des'an- aens Mariniers, de ce que m'avoh dit Moniieur de Laly , \oici , Mon_ iieur, la reponfe qu'il m'a faite : •^ i égard du fettt coquillage que M> de Laly -vous a dit croître de la aroL feur d une grojfe moule, qui fe collet J a

retarde la marche, le fait efl Irai ce coqmllage s^ appelle des BerJches '

, il eit donc aifé préfentementde dif tmguer ce qu'il y a de fabuleux dansie. récits .que Plme èli^s autres Auteurs

IT\Z\T^''^'T'' RetrancC en tout le merveilleux , & nous en aurons une jufte idée. Nous demeu rerons convaincus que le Rémora ne peutctre m un petit poilTon, ni mêmi

. une multitude de poifrons 5 Ai uS coqui âge, mais une multitude^ coquillagesi qu'un vailTeau dont ^ quille i^ra gamie^exes xoquiH^e^!

9- ij 2 '

lu

Pu R « M 0 « /

pourra bien à la vérité marcher moiilf vîte qix'un autre , mais qu'il ne pourra réfifter aux vents qui le poufleront.

Ajoutons que ce coquillage fe tient probablement fur cette plante dont Us avonsparlé,qu vient fur es rochers: que quande le en eftdeta-, rhée & qu'elle vient a pafler pardel- foas des vaifTeaux qui font en repos dans une rade ou dans un port elle s y arrête ; que les petits coquillages fe collentcontrelaquille,s'ymulnpl.ent

& s'v grofliffent J que fion n a pas le foin de les détacher avant de mettre les Vaiffeaux en route , ils marchent plus

lentement. ,

Ceux qui ne font pas contens de mes preuves , ou de mes conjeaures îomme on voudra les appeller , pour- ront confulter les Marins , qui foiTC îcsfeulsenétatde les confirmer, &

çeut-être d'ajouter de nouvelles preu- ves, aux miennes, .r» ^(. o, SivQUS êtes fatisfait, Monlieur

À

Miiilliiliiii

ET DES HaLCYONS^ 245

cher Confrère , ce fera pour moi un heureux préjugé que le public le fera auffi : & je doute fort qu'il prenne pour le Rémora , le petit poiObn que Ton m'a dit , qu'un certain curieux garde précieufement 3 ni la lamproie , qui au rapport du P. Hardouin , s'étant at- tachée au gouvernail d'un VailTeau ; fur lequel étoient le Cardinal de Tournon , èc M""' Pellicier Evêque de Montpellier , l'empêchoit de marcher i quoiqu'on cite Rondelet , comme té- moin oculaire de ce fait ( a ).

On doit faire le même jugement du poifTon que M'' Gantier Médecin, apporta en France en 1 7 1 7. Il avoit été envoyé par Monfeigneur le Duc d'Orléans , Régent du Royaume , fur la Méditerranée , pour y faire des ob- fervations. A l'embouchure du Nil on prît unpoiflbn à bord du Touloufe, commande par M'^' du Quêne , qu'on

C * ) Voyez le Pline du P. Hardouin fur le KémarA»

Qiij. V

Ti'

t^6 Du Rémora

dit être le Rémora. Il étoit de couleur brune, long d'environ un pie: il avoit fur le dos tranfverfalement des efpeces de filions qui répréfentoient affez bien un efcalier, dont les marches diminuoient de hauteur à mefure qu'elles approchoient de la queue. Tous ces poiffbns n'ont du Rémora que le nom qu on leur a donné. Il ne me refte plusv-Monfieur, qu'à vous dire lin mot fur les Halcyons.

Les Halcyons font des oifeaux ma- rins très -fameux dans l'antiquité , ôc lefujet d'une métamorphofe {a) dans Ovide: Ciçeron les a célébrés par un Poëme dont il ne nous refte que deux vers 5 l'Empereur Gordien , par un au- tre , dont il ne'nous refte rien du tout;

Les merveilles que les Naturaliftes & les Hiftoriens en ont contées ., ont paru fi certaines à un des plus refpec- tables Pères de l'Eglife , ( c*eft St. Am-

(^) Métamorphofe L. XL

^

ET VES^ HaLCYÔ^ Si 245^

broïfe), qu'il n'a point fait difficulté de les rapporter auflî férieufement qu'il auroit pu faire la vérité la plus connue.

» L'Haï cy on, ^/>- //, dépofe fes ,5 œufs au milieu de l'hy ver dans le 55 fable {a) du bord de la mer : dès ce 5v moment les vents tombent , la mer devient tranquile §c .ce calme dure quatorze jours, parce qu'il en faut fept à cet oifeau pour couver {ts qeufs & les faire éçlorre , & fept au- 5, très pour élever fes petits.

5, Le Créateur a deftiné à ces petits oifeaux pour faire leur nid la faifon' la plus orage ufe , afin de rendre , par cette ferénité fubite , la faveur

3>

î>

5)

S)

(*) St. Ambroifc en conîgeant Ovide, qui dit, que l'Haicyon fait fonniclfur les eaux de la mer , penden- tihus ê^ucre nidis, affoiblit beaucoup le miracle qu'il reconnoît , que le ciel fait en fa faveur : Dieu peut aufîi-bein commander à la mer , de fouffrir que Poifeau lafle Ton nid fur fes eaux , que defe tenir tranquille.

248 Du Rémora

5, qu il leur fait , plus fenfible & plus 3, éclatante,

5, Les Marins n'ignorent pas un li grand bienfait jils appellent ces jours 5, Halcyomdes , Sc ils ont grand foin j5 d'en profiter , parce qu'ils font cer- tains qu'ils n'auront point de tem- pêtes à effuyer pendant tout tems4à (^). «

35 35

( a ) Halcyone eft avis mantima. qu&. in Utanhus fxtut ftio^ edere folet , itf^ ut in arenis ûva depQnat medio ferè hyemh ; nam idtemporisfovendis hahet âeputatum partu- hm , quando maxime infurpt mare , liîoribufque yefje^: T^enùor fla^us ilUditur , qu)> ntagii repentiziA placidita-^ tîs fQlemnitate avis hujus elucer et gratta. Islamque nbi itndofumfuerit mare , pofiiis ovisfubit'o mitefcit , é* ^^"^ nés cadunt ventonim proeelU . v âonee ovafovet Hal^, €.yone'fi4^., Septem dies fœtus funt y quibus decurfis educU fuUos : illico aîios feptem adjmgit dies , quibus tnutriat fAYtmfms, donec incîpiant adolefcere. Tantum autem ^eneficium avicula hAc ^ divinitus fibi àatum y habet y ni quatuor decim dies nauticiprAfumpt&ferenitatis obfervent , ^UQS ^ Halcyonidai vacant , quibus lulla^ motus procellojl^ iernpeftatis horrefcant. Hinc poetA anfam fabulandi arri^ puerunt Halcyonem filiam /Eoli fuijje qui ingratiamfiliA ^ 4um, illa in litore ova parit ^ frtm e^Hcat 9 vmQi û'^^ çlufosfirvah

mt^

ET VES H ALCYON Si x^

Des oifeaux qui ont un beau pri- vilège doivent avoir une origine bien iiluftre : auflî les Poètes leur en don- nent-ils une divine. Les Halcyons ti- rent leur nom à'HalcyoTte , fille d'Eole : elle étoit femme deCeyx, petit fils de Jupiter. Ceyx périt en allant par mer , malgré les réprefentations de foa Epoufe , confulter Apollon fur Tétat de fon Royaume : elle fe précipita dans la mer à la vue du corps de fou mari qu'on lui rapporta , d'autres di- fent que les flots le rejetterent fur le bord de la mer {a)\ les Dieux par corn-» mifération les changèrent en oifeaux > qui furent appelles Halcyons. Eole voulant pourvoir à lapoftérité de fa fiUe^renfermeles vents pendant qu'elle fait fon nid, qu'elle pond, qu'elle couve , qu elle élevé {qs petits.

LaifTons la Fable , Se voyons ce que

(a) Voyez Ovide |k iM*

tjo Z> V R M M 0 n 4

c'eft que les H^lcyons. Pline (a) nous dit, que ce font des oifeaux un peu ,, plus gros qu'un moineau , de couleur 5, Dleue> poi^r la plus grande partie, & que leufs aîles fonj: variées d'un peu debianp & de pourpre, quils 5, ont le cou menu &: iong> le bjsc ver- ,, dâtre long & effilé. ,,

Ariftote ( h ) dit qu il y en a de deux cfpeces, l'une qui chante, & qui fe tient parmi les rofeaux: l'autre qui eft, muette & plus groflTe.

La defcription de Pline eft aflez |ufl:e : Thalcyon vu d'un peu loin , (sft tout à fait femblable à l'hirondelle > & la remarque d'Ariftote eft vraie au^ moins en partie 5 on n'a jamais entendu riialcyon , ni chanter , ni rendre le moindre fon : je ne fâche perfonne

( a j J/>/^ avis fauVo crajjior pajfere^ colore Cymeo ex f»rte majore iantum , purpHre's e^ candidh admi/iii fennîs , coîlo gracili ae frocero ; rofiro fubvindi , lon^9 ^ tenui , raro vifam. Plin. de Halcyonibus.

( ^ ) Livre VlII. des Animaux*

ET DES HalcYONS. 2^1

qui ait vu l'autre efpece.

Les halcyons ne vont jamais que par bandes, & ils ne paroilTent que* pen- dant les tempêtes : ils fuivept les na- vires i je penfe que c eft pour fe mettre à couvert du vent 3 car on ne les voit jamais ni devant ni à côté , mais tou- jours derrière , éloignés de la poupe d'environ quarante ou cinquante pas : ils ne s'élèvent point dans Tair , ils volent fort vite à un pié ou deuxau-» dcffus deTeau, comme en tournant & fe coupant les uns les autres. Ils ne fe repofent point; feulement, de tems en tems ils frifent l'eau , probablement pour mouiller leurs ailes i comme les poiflbns volans /qui fans ce fecours ne pourroientpas voler longtems, ni évi- ter d'être pris par la Dorade qui les pourfuit.

Je n'en ai vu que dans les mers du Nord , en revenant de St. Domingue , & point dans celle du Sud en y allant.

ap D V REMORA

Je ne voudrois pourtant pas afiurer qu'il ne s'y en trouve point ; parce que dans les mauvais tems qui nous prirent entre les îles Canaries & les Açores , je fus fi incommode du mal de mer, que je ne pus me promener fur le Vaifleau. .

Un ancien Officier du Navire de M'- de Laly , qu'on appelle le Maître, parce qu'il fait faire la manœuvre avix Matelots , m'a affûré , qu'il avoit eu ces oifeaux entre les mains j qu'ils n ont point de plumes , mais feulement du poil &c des aîles membraneufes,comme les chauves-fouris , & les poiffons vo- lans : je le croirois volontiers , (quoi- qu'àla diftaticequ'on peut les voir, ils paroiflent de véritables oifeaux) parce que s'ils avoient des plumfes aux ailes, il femble qu'ils ne pourroient pas voler toujours , ni fi vîte , fans être ta- tiaués par les tuyaux ; & qu'en mouil- lant leur aîles , bien loin que 1 eau tut

4

KT DES HAICYONS. 2ff

un fecourspour les aideràvoler , ce i^roit plutôt un obftacle.

Je ne dois pas diffimuler que M'^- Charet que favois prié de s'informer de ces particularités , m'a mandé qu'ils ont des plumes ôc des pattes de ca- nard. Ce dernier article ne meparoîc pas vraiffemblable , puifqu'ils ne na- o-ent point» On lui a ditauflî qu'il ref- femblent à l'hirondelle pour la figure , la grofleur & le plumage i qu'on n'en a jamais entendu chanter 5 qu'on en trouve beaucoup dans les baies brades de la Bretagne , quand il y a des an- nées venteufes 5 qu'ils font leur nid dans les îles d'Origny , près de Gre- nezai & Nolaine , près .Ouellant , qui font inhabitées.

On peut inférer de-là , que ces oifeaux ne font pas leurs œufs dans le fable, ni leur nid furie bord de la mer , encore moins fur l'eau quand la mer eft calme , comme on le croie (çomniunémcnt.

Voilà , Monjfîeur &cher Confrère ,' tout ce que je fai des Halcyons 5 du moins en ai~je dit aflez pour exciter la curiofité des Naturaliftes à les connoître plus parfaitement , en confultant ceux qui font à portée d'en voir tous les jours i & à s'aflurer furtout , ces oifeaux font à poil ou à plume.

J'ai rhonneur d'être, &c.

Fm de la troijiéme & dernière Lettrel

iiiiiiillÉ

APPROBATIO

De U Faculté de Médecine de Pdris;;

iM OUS, foufiîgnés Dodeurs* Regens ea Médecine delà Faculté de Paris, nommés par elle,, pour examiner un Manufcrit de M. G H E VAL I E s^, notre C©nfi'ere , intitulé,- JLettres-^ &c. Avons lu cet Ouvrage; & nous croyons rendre témoignage à la vérité , ea afîûrant qu'il eil également inftrudif & cu^ rieux.

Donné à Paris , ce cinq Février , mil fept cens cinquante -un.

M E R Y.

T. BARON.

OUi le rapport de M«- François Mery & Théodore Baron , Commifîaires nommés par la Faculté, pour Pexamen d'un Livre intitulé, Lettres fur les Maladies & les PlameB des îles de St. Domîngue , &c, Compofé par M. Jean-Damien Chevalier, notre Confrère ; la Faculté confent , que ledit Ou- vrage foit imprimé. Fait 6c arrêté aux Ecoles de Médecine de Paris , en l'affemblée eu 5 Février 175 1.

SAâON, Doyen.

Oi--t-;(

J'A I lu par ordre de Mônfeîgneur le Chari- celier un Manufcrit intitulé , Lettres de M. Chevalier , DoUetir - Relent , ancien Pre-^ feffeur delà Faculti de Médecine en ÏUmverfite de Paris, &e. a M. De Jean , &c. Je penle qu'on en peut permettre l'imprefTion.

G U E T T A R D.

A Paris, ce onzième Mars, 1751.

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