.. Library of the University of Toronto C- v ÿ Digitized by the Internet Archive in 2010 with funding from University of Ottawa htip://www.archive.org/details/Imensdezoolo00miin ÉLEMENS DE ZOOLOGIE. ÉLÉMENS DE ZOOLOGIE, où LECONS L'ANATOMIE, LA PHYSIOLOGIE, LA CLASSIFICATION ET LES MOEURS DES ANIMAUX, FAR H. MILNE EDWARDS, DOCTEUR EN MÉDECINE, PROFESSEUR D'HISTOIRE NATURELLE AU COLLÈGE ROYAL DE HENRI 1V ET À L'ÉCOLE CENTRALE DES ARTS ET MANUFACTURES. = ———— “ss << —— — PARIS. CHEZ CROCHARD, LIBRAIRE, PLACE DE L'ÉCOLE DE MÉDECINE, N:- 13. — : 1634. - AT + à Es LL de Er PRET Le » 4 + Pi DE RES - « =» À 7 Riprts AE ‘ 4 DSP EN TEN de RC SL ES ET pcs SN EURENPOR oo LE LL Le. te ès RSR SLR RD SUR SR RD RE LL LAS ANS LAS ARS RAS ARS VIT LR LUE L/8/E AVERTISSEMENT. L'histoire naturelle estune des sciences qui excitent l’in- térêt le plus général; le récit des phénomènes singuliers que présentent une foule d’animaux suffit pour éveiller la curiosité même des hommes les moins éclairés, et l’étude philosophique de la zoologie offre des attraits bien plus vifs encore à ceux dont l'intelligence mieux cultivée a ré- veillé ce desir ardent de savoir qui, au lieu de s’apaiser , augmente à mesure qu'il trouve de nouveaux alimens. L’u- tilité des connaissances qu’elle donne se fait sentir aussi à chaque instant, et se montre même dans des circonstances qui, au premier abord, semblent lui être complètement étrangères ; mais les avantages résultant de son étude ne consistent pas seulement dans cette culture de lesprit con- sidérée en elle-même , ni dans les applications pratiques qu’elle peut fournir : l'influence qu’elle exerce sur nos fa- cultés est peut-être d’une importance encore plus grande. Elle nous accoutume à chercher les causes des effets dont nous sommes frappés , et, plus qu'aucune autre science , l’histoire naturelle exerce notre intelligence dans la mé- thode, partie de la logique sans laquelle toute investi- gation est laborieuse et toute exposition obscure. v] AVERTISSEMENT. Pendant long-temps, cette branche des connaissances humaines a cependant été regardée par la plupart des hom- mes comme propre à satisfaire une vaine curiosité plutôt qu’à exercer utilement l'esprit ou à le préparer d’une ma- mère heureuse pour d’autres études. Aussi s’est-elle trou- vée exclue de l’enseignement destiné à la jeunesse, et est-elle restée presque inaccessible pour tous ceux qui ne voulaient pas en faire leur occupation principale. Les écrits admirables de Buffon, recherchés d’abord comme modèles d’un style noble et pompeux, ont commencé la réforme de ces préjugés , et en dévoilant au public combien Phistoire naturelle offrait un attrait puissant, ils ont commencé aussi à populariser cette science qui, pour être aimée, n’a- vait besoin que d’être aperçue. La tendance générale des esprits vers les idées positives est venue seconder cette im- pulsion, et aujourd’hui l’étude de la nature est reconnue comme un des élémens indispensables dans tout système li- béral d'éducation. L’université, d'ordinaire si peu favorable aux innovations, a elle-même senti la nécessité d’en admettre l’enseignement dans les collèges, et désormais cette science ne pourra rester complètement étrangère, même aux hom- mes qui se contentent de l’instruction élémentaire reçue dans ces établissemens. Cependant les personnes qui veulent acquérir sur l’ana- tomie, la physiologie et l’histoire naturelle des animaux les connaissances que devrait posséder tout homme éclairé, ne trouvent pas toujours dans les ouvrages qu’elles consultent les secours nécessaires à celui qui débute dans ces études et qui ne veut y consacrer qu’une partie de son LE 198 A moins de se servir de traités élémentaires déjà vieillis, elles sont obligées de se contenter de résumés trop abrégés pour satisfaire leur curiosité, ou bien d’avoir recours à un grand nombre d'ouvrages volumineux faits pour avancer la science plutôt que pour la rendre populaire. EE ns AVERTISSEMENT. vi] Il m'a semblé qu'il ne serait pas sans utilité, même pour les progrès futurs de l’histoire naturelle , de combler une partie de cette lacune en donnant au public un manuel de zoologie assez élémentaire pour convenir aux jeunes intel- ligences et aux personnes quine peuvent consacrer à ces études un temps considérable , et cependant assez appro- fondi et assez détaillé pour satisfaire les gens du monde et même les étudians en médecine qui, sans vouloir devenir des zoologistes, sentent journellement le besoin de ne pas rester étrangers à cette branche importante des sciences naturelles. C'est ce que j'ai cherché à faire en publiant cet opuscule où se trouvent reproduites en partie les lecons que j'ai faites l’année dernière à l’école centrale des Arts et Ma- nufactures. La première partie de ce livre est consacrée aux notions de physiologie générale et d’anatomie comparée nécessaires à l'intelligence de l’histoire particulière des animaux. L’âge de quelques-uns des lecteurs qu’il pourra avoir m’a faitpen- ser qu'il convenait de passer rapidement sur certaines fonctions; mais j'espère n’avoir rien omis d’important dans l’esquisse des phénomènes dont l’ensemble constitue la vie. J’ai cherché à y porter autant de concision et de clarté que possible, et d’après lanature de mon ouvrage j’ai dû néces- sairement me borner à exposer des faits et passer sous si- lence les opinions et les hypothèses dont la discussion gros- sit tant la plupart des traités de physiologie. La seconde partie de ces élémens est consacrée à la zoo- logie descriptive; on n’y trouvera pas un système complet de classification du règne animal, ni l’histoire de tous les êtres animés , mais seulement un tableau des principales modifications que la nature a introduites dans Ja structure et le mode d’existence des animaux , l'indication des caractè- res propres à faire distinguer ceux d’entre eux qu’il importe vii] AVERTISSEMENT. le plus de reconnaître , la description des particularités les plus remarquables de leurs mœurs et quelques détails sur leur utilité dans Pindustrie. J'ai pensé que des figures intercalées dans le texte facili- teraient l'intelligence du mécanisme des fonctions, et aide- raient à fixer les idées sur la forme des animaux dont j’aurai à parler et sur les caractères employés dans la classification; j'en ai placé une centaine dans la première partie de mon ouvrage, et dans la seconde ils’en trouve un nombre beau- coup plus considérable : la gravure en a été confiée à des artistes des plushabiles en ce genre, à MM. Andrew, Best et Lenoir. ÉLÉMENS DE ZOOLOGIE. ARS RS AR AR RAT TE Te TR TT TE A AR EUR OUR AU AU AR LR PREMIÈRE PARTIE. ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. NOTIONS PRÉLIMINAIRES. Sujet de ecs L'objet de ces lecons est de faire connaitre les points les plus lecous. ntéressans de l'histoire des animaux, de signaler ceux qui sont utiles ou nuisibles à l'homme, et de montrer l'influence que cha- cun d'eux exerce sur l’industrie et les richesses générales. Pour atteindre ce but il me faudra d’abord exposer les phé- nomènes principaux qui caractérisent leur mode d'existence, et décrire leur forme et leur structure ; indiquer les moyens em- ployés par les naturalistes pour distinguer entre eux et recon- naître avec certitude tous ces êtres dont le nombre est si grand que l'imagination en est presque effrayée ; montrer comment ils vivent , comment ils sont distribués sur les diverses parties de la surface du globe, comment ils contribuent au bien-être de l'homme , et comment ils nuisent à son industrie ; parler enfin des richesses dont ils sont la source et des moyens auxquels nous avons recours pour nous les procurer ou pour tirer parti des pro- duits qu’ils nous fournissent et les approprier à nos besoins. En d’autres mots, ces lecons seront consacrées à l’enseigne- ment de l'anatomie et de la physiologie comparées, à celui des classifications zoologiques, et à celui de l’histoire naturelle et économique des animaux. Le simple énoncé du sujet que je me propose de traiter me semble devoir suffire pour en faire apprécier l'intérêt et limpor- tance. En effet, quel est l’homme dont la curiosité n’a pas été mille fois excitée par la vue des animaux singuliers qui peuplent I 2 ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE,. tout ce qui nous entoure, et qui présentent à chaque instant de leur vie des phénomènes si remarquables et souvent si incom- préhensibles? Comment, en réfléchissant à ces phénomènes et aux actes que nous exéculons nous-mêmes , ne pas éprouver le desir de scruter lintérieur de ces machines compliquées , de connaître par quels agens, par quel mécanisme nous exécutons des mouvemens; d'examiner comment tous les êtres organisés, assimilent à leur propre substance, les substances étrangères dont ils se nourrissent ; et de chercher quels sont les usages des organes divers dont notre corps se compose. Enfin tout homme éclairé doit comprendre aussi que l'histoire des animaux qui produisent les perles, la soie et la laine, qui nous fournissent nos alimens journaliers, Où qui nous prêtent leurs forces , ne peut être d’une médiocre importance; et personne ne peut rester indifférent à la connaissance d’une foule d’autres animaux, qui, s’ils nous sont moins utiles, n’en sont pas moins intéressans par le merveilleux instinct dont la nature les a doués. Il est donc inutile de s'arrêter ici pour prouver que l'étude de la zoologie est un élément nécessaire de l'éducation , ou pour rappeler par des exemples l'intérêt que présente cette branche des connaissances humaines ; et je me hâterai d'arriver à des considérations plus propres à fixer notre attention. Caracteres generaux des êtres vivans. Caractères Lorsqu'on jette les yeux sur la foule immense d'animaux qui ut peuplent la surface du glôbe, on n’est frappé, au premier abord et physiologi- : D ) > » À » ques com- que des différences énormes et sans nombre qu'ils présentent muns aux abi- entre eux; un homme, un poisson, une araignée et une huitre, LE V8 par exemple, n'auront, pour un observateur superficiel, rien de commun. Mais lorsqu'on examine avec soin ces êtres di- vers, on ne tarde pas à se convaincre que , malgré ces diffé- rences , il est un certain nombre de caractères qui ne manquent chez aucun d’entre eux et qui se reproduisent sans exception chez tous les autres animaux. Ces caractères sont de deux ordres : les uns nous sont fournis par la disposition matérielle du corps, et sont par conséquent du domaine de PANATOMIE (1); les autres consistent dans les phénomènes que présentent ces mêmes corps pendant la durée de la vie, et ils appartiennent (x) L’anatomie est la branche des sciences naturelles qui traite de la forme , de la position, de la structure et des qualités des organes dont se composent les corps des êtres vivans. Ce nom est dérivé du mot grec gyarouix dont les racines (va dedans et réuvew couper) indiquent la manière dont doivent être faites les études anatomiques. NOTIONS PRÉLIMINAIRES. 3 à la PHYSIOLOGIE (1), science qui traite des actes et des propriétés des êtres vivans. Ce quigistingue éminemment les animaux et les végétaux de tous les autres corps de la nature, c’est la VIE, mouvement in- térieur, dont la cause est inconnue, mais dont les effets sont fa- ciles à apercevoir. Tous les êtres vivans , et eux seulement, ont la faculté de durer pendant un temps et sous une forme déterminés, en attirant sans cesse dans leur composition, en s’appropriant une partie des-substances environnantes et en rendant au monde exté- rieur des portions de leur propre substance ; en d’autres mots, ces êtres Ont LA FACULTÉ DE SE NOURRIR, et he l'espèce de tourbillon qui détermine le renouvellement des matériaux dont leur corps se mr) 0 s’arrète sans retour, Ce Corps meurt, et ne tarde pas à se détruire complètement; or, ce mouvement a toujours une durée limitée et la MORT est une suite nécessaire de la vie. Pour les corps bruts , tels que les pierres et les minéraux , il en est tout autrement, Une fois formés, ils existent , tant qu’une force étrangère ne vient pas les détruire, et pendant ce temps dont la durée n’a pas de limites nécessaires ; ils ne sont pas le siège d’un mouvement de nutrition. Si leur volume augmente, c’est par simple juxta-position d’un autre corps semblable à eux, et s'ils perdent une partie de leur propre substance, c’est par l’action d’une force agissant en dehors d’eux et complètement indépendant de la cause de leur existence. Le mouvement continuel de composition qui constitue le tra- vailmutritif dont les êtres vivans sont le siège, échappe lui-même à nos sens ; mais l'existence nous en est révélée par des faits nom- breux et faciles à constater. * Le besoin que les animaux éprouvent sans cesse d'introduire dans l’intérieur de leur corps des substances étrangères qui leur servent dalimens, suffit déjà pour faire présumer que ces êtres doivent incorporer continuellement à leurs organes des matières puisées au-dehors , et c’est seulement par cette faculté que peut s'expliquer l'accroissement de volume si remarquable chez tous ces êtres pendant les premiers temps de leur existence. Un enfant en venant au monde ne pèse qu'environ six livres, et vingt- cinq ans après, lorsqu'il est parvenu à l’âge adulte, son poids dépasse cent livres; il est donc évident qu’à cette époque de sa vie , il a déjà puisé, dans des substances qui lui étaient d’abord (1) D’après son étymologie (Lyc, nature, et 15755, discours ), le mot physio- logie devait signifier discours sur la nature ou sctence de la nature, maïs ou ne l'emploie que dans l’acception indiquée ci-dessus. Nutrition. Preuves de l'existence du mouvement nutritif. 4 ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. étrangères, la majeure partie des matériaux dont ses organes se composent. D'un autre côté, l’amaigrissement extrême qui survient à la suite de certaines maladies, montre assez que le corps vivant peut abandonner une portion de la matière dont il était formé, et rendre au monde extérieur une partie de sa propre substance. Les expériences de Sanctorius qui, pour étudier le phéno- mène de la transpiration, passa une grande partie de sa vie dans une balance , prouvent aussi que le corps humain éprouv sans cesse des pertes de poids assez considérabtéiitéertste les alimens sont destinés à réparer. ah Mais, du reste, voici une observation qui ne peut laisser aucun doute sur l'existence du mouvement nutritif, même dans les parties les plus dures et les plus profondessdu corps. Un chi- rurgien anglais, Belchier, ayant mangé par hasard d’un co- chon qui avait été élevé chez un teinturier, remarqua que les os de cet animal étaient rouges, et atiribuant cette particula- rité à ce qu’on l'avait nourri d’alimens colorés de la même manière, il concçut la possibilité de se servir d’un moyen ana- logue pour rendre visibles les effets du travail nutritif, et il entreprit des expériences qui, répétées ensuite par un grand nombre de savans, furent couronnées d’un plein succès. En nourrissant des animaux avec de la garance , pendant un certain temps, on trouva toujours que les os étaient teints en rouge par le dépôt de cette matière colorante dans lépaisseur de leur substance; et, lorsque après avoir nourri ainsi un animal on suspendit l’usage de la garance, on trouva, qu'après un temps déterminé , la matière rouge, qui avait dû se déposer dans la substance de ces organes, ne s’y trouvait plus et en avait été nécessairement rejetée. Or, ces faitsne peuvent s’expliquer que par le mouvement continuel de composition ou de décomposi- tion auquel on donne le nom de nuiritien. . Durée et Nous avons vu plus haut qw’après une certaine durée le mou- Hrao vement nutritif s'arrête toujours, et que tous les êtres vivans, après avoir existé pendant un temps dont la limite extrème est fixée pour chacun d'eux, doivent nécessairement périr; mais cette destruction des individus n’entraine pas la disparition de l'espèce, car un autre caractère commun à lous ces êtres est la faculté de produire des êtres semblables à eux, et de perpé- tuer leur race par le phénomène de la génération. L'origine des corps organisés diffère complètement de celle des corps bruts. Ces derniers ont existé depuis la création du monde ou bien se forment par la combinaison d’autres corps qui ne leur ressemblent en rien. Les corps vivans, au contraire, proviennent toujours d’un être semblable à eux, dun parent - NOTIONS PRELIMINAIRES. 5 à qui ils tiennent d'abord et dont ils se détachent lorsque leur développement est assez avancé pour qu'ils puissent vivre par eux-mêmes. Les êtres vivans ont tous une structure commune. Leur corps est toujours formé par une réunion de parties dissemblables entre elles, et dont les unes sont solides, les autres liquides. C’est un tissu spongieux composé de lames ou de fibres solides et très extensibles qui laissent entre elles des interstices rem- plis de fluides; et ce mode de structure, qui a reçu le nom d'ORGANISATION , est une des conditions essentielles de leur existence. En effet, pour assurer à ces corps une forme quelconque, il leur fallait évidemment des parties solides; et, pour y entretenir le mouvement nutritif, pour faire pénétrer dans leur tissu in- time les substances étrangères destinées à y être incorporées, et pour entrainer au-dehors les particules qui devaient cesser d'y appartenir, il fallait aussi des parties fluides. Celles-ci de- vaient pouvoir pénétrer partout où il y avait vie à entretenir dans l’épaisseur des solides comme à leur surface, et par con- séquent ces parties solides devaient nécessairement avoir une texture spongieuse et aréolaire. Il est donc impossible de con- cevoir l'existence d’un mouvement semblable au travail nutritif, sans un mode de structure tel que celui dont nous venons de parler, et l'observation apprend que cette organisation se re- trouve dans tous les êtres vivans , dans les végétaux comme dans les animaux. Aussi donne-t-on à ces êtres le nom de corps or- ganises, par opposition aux êtres bruts que l’on appelle corps inorganiques. Enfm la nature chimique des matières qui constituentles corps organisés , est également caractéristique. On trouve toujours dans ces corps un certain nombre de substances qui se rencon- trent aussi dans le règne inorganique, et qui n’offrent ici rien de particulier; l’eau est dans ce cas ; mais les produits, qui for- ment la base essentielle de toutes les parties solides des corps vivans, appartiennent en propre au règne organique,et présentent des propriétés fort remarquables. Le nombre de ces substances est très considérable et elles diffèrent beaucoup entre elles; mais cependant elles sont, pour la plupart, formées des mêmes élé- iens réunis en proportions diverses. En général, ce sont des composés de carbone, d’hydrogène et d’oxigène, ou bien des substances résultantes de l’union de ces trois élémens avec un quatrième principe nommé azote. (1) (1) Des chimistes appellent é/émens ou corps simples les substances dont on ne peut extraire que des particules de même nature :le fer, l’or et le soufre, Structure. Composi- tion chimique. odf — Résumé des caractères des êtres organi- sés. Composition chimique. Facultés plus varices que chez les végétaux. 6 ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. Nous voyons donc qu’il existe dans la nature deux classes de corps : les corps organisés et vivans et les corps bruts et inor- ganiques ; eten résumant ce que nous venons de dire sur leurs propriétés, on trouvera que les caractères généraux des premiers, les seuls dont nous ayons à nous occuper ici, consistent dans Zewr mode de structure et leur composition chimique , dans la faculte dont ils jouissent de se nourrir et de se reproduire, dans leur ori- gine et dans la duree limitee de leur existence. Caractères generaux des animaur. Si maintenant nous restreignons davantage le champ de nos observations pour nous borner à l’étude des animaux, nous verrons que ces êtres ont aussi d’autres caractères qui leur sont communs, Mais qui ne se rencontrent pas chez les corps organi- sés appartenant au règne végétal. Et d’abord, la composition chimique de ces êtres n’est pas la même ; les substances qui con- stituent les plantes ne renferment en général que peu ou point d'azote et ces corps ont pour base le carbone. Dans les ani- maux, au contraire, C’est l’azote qui joue l’un des principaux rôles. (1) Chez ces derniers êtres, la vie se montre aussi sous une forme plus compliquée que chez les végétaux. A la faculté de se nourrir par exemple. On en connaît aujourd’hui environ cinquante, et en se combinant entre eux de diverses manières, ils forment tous les autres corps de la nature. Le carbone pur et cristallisé constitue le diamant , tandis que non cristallisé et mêlé à quelques sels, il constitue le charbon ordinaire; aussi, pour se couvaincre de l’existence de ce principe élémentaire dans tous les corps organisés, suflit-il de se rappeler que, lorsqu'on les chauffe fortement à l’abri du contact de l'air, de facon à les décomposer, ils laissent pour résidu du charbon. L’hydrogène , ainsi nommé parce qu'il entre dans la composition de l’eau , se présente, lorsqu'il est isolé, sous la forme d’un gaz ou fluide aériforme d’une légèreté extrême; com- biné avec le carbone, il forme le gaz employé pour l'éclairage et obtenu en distillant du charbon de terre, de l'huile, ete. L'oxigène est aussi un gaz; il forme environ la cinquième partie de la masse de l’atmosphère, et produit par sa combinaison avec un grand nombre de corps le phénomène de la combustion; uni à l'hydrogène , il forme l’eau, et uni au corbone le gaz acide carbonique qui se trouve en grande quantité dans les vins mousseux, la bierre , etc., et se dé- gage du charbon qui brûle. On l'appelle oxigène ( qui veut dire générateur des acides ), parce qu’il entre dans la composition de la plupart des acides. Enfin, l'azote est un gaz qui mélé à l’oxigène constitue l’air atmosphérique. (r) Cette différence dans la composition des substances végétales et animales est facile à constater. Lorsqu'on brûle ces dernières, l’azote qu’elles renferment se combine avec une certaine quantité d'hydrogène , et forme de l’ammoniaque qui se dégage en répandant une odeur piquante particulière. Les substances qui ne conticnnent pas d'azote n’ont pas en brûlant la même odeur. NOTIONS PRÉLIMINAIRES. 7 et de se reproduire, vient s’adjoindre celle d'exécuter , sous Pin- fluence d’une volonté intérieure, des mouvemens qui tendent à un but déterminé , et celle de sentir ou de recevoir desimpres- sions et d'en avoir la conscience. De là est venu le nom d’étres animés que l’on donne aux animaux par opposition aux végé- taux que l’on nomme étres inanimes. S'il fallait définir d’une manière concise ce que l’on entend par Definition du mot ani: le mot animal on pourrait dire qu’il s'applique à tout corps doue 41. de læ faculté de se nourrir , de sentir et d'exécuter des mouvemens spontanes. Des fonctions des animaux et de leurs organes. Les phénomènes divers par lesquels la vie se manifeste sont toujours le résultat de l’action d’une partie quelconque du corps vivant, et ces parties, que l’on peut regarder comme autant d’in- strumens , portent le nom d'ORGANES. Ainsi un animal ne peut exécuter des mouvemens que par l’action de certains organes ap- pelés muscles et ne peut avoir la connaissance de ce qui l'entoure que par l'intermédiaire des organes des sens, Lorsque plusieurs organes concourent à produire un phé- nomène, on désigne cet assemblage d’instrumens sous le nom d'appareil , et l’on appelle fonction l'action d’un de ces organes isc- lés ou de l’un de ces appareils. On dit, par exemple appareil de La locomotion pour désigner l’ensemble des organes qui servent à transporter l'animal d’une place à une autre, et fonction de la locomotion pour désigner l’action de toutes ces parties. Les fonctions des animaux se rapportent à deux objets : la con- servation de l'individu et la conservation de sa race ; mais parmi les premières, ilest unedistinction importante à établir: les unes servent à assurer l'entretien et l'accroissement du corps; les autres, à mettre l’animalen relation avec les êtres quil’environnent.Quant aux fonctions de reproduction, elles ont pour résultat la formation d'êtres nonveaux semblables à ceux dont ils proviennent. Il en résulte que les fonctions ou actes de ces êtres peuvent se diviser en trois grandes classes , savoir : les fonctions de nutrition , les fonctions de relation ei les fonctions de génération. Les fonctions de nutrition et de génération, ainsi que nous l'avons déjà vu, sont communes aux plantes et aux animaux , aussi leur donne-t-on le nom collectif de fonctions de la wie vegetative, mais les fonctions de relation n’existent que chez ces derniers et constituent ce que les physiologistes appellent la vie animale. La manière dont les fonctions des animaux s’exécutent varie extrèmement. Dans les uns ces actes sont peu nombreux, et la Organes. Appareil. Fonctions. But des di- verses fonc- tions. Classifica- tion des fonc- tions. Différences entre les fonc- tions des Gi- Vers animaux. Division da travail vital. Conséquen- 8 ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. vie ne se manifeste que par un petit nombre de facultés; chez d’autres , au contraire, on observe les phénomènes les plus variés, et il existe une multitude de facultés dont les premiers ne sont pas doués. Or, chacun de ces phénomènes , comme nous Pavons déjà vu, est le résultat de l’action d’une partie quelconque d1 corps et l'observation aussi bien que le raisonnement, prou- vent que le mode d'action d’un organe ou instrument dépend toujours de sa nature intime, de sa structure et de ses autres propriétés. Il s’ensuit que l’organisation des différens animaux doit offrir aussi peu d’uniformité que le mode suivant lequel ces êtres remplissent les trois ordres de fonctions dont nous venons de parler. Dans les animaux dont les facultés sont les plus bornées et dont Ja vie est la plus simple, le corps présente partout la même struc- ture. Les parties qui le composent sont toutes semblables entre elles; et, identité d'organisation entrainant un mode d’action analogue, l’intérieur de ces êtres peut se comparer à un atelier où tous les ouvriers seraient employés à l'exécution de travaux sem- blables, et où, par conséquent, leur nombre influerait sur la quan- Üté, mais non sur la nature des produits. Chacune des parties du corps remplit les mêmes fonctions que les parties voisines , et la vie générale de lindividu ne se compose que des phénomènes qui caractérisent la vie de l’une ou l’autre de ces parties. Mais à mesure que l’on s'élève dans la série des êtres , que l’on se rapproche de l’homme, on voit l’organisation se compliquer davantage ; le corps de chaque animal se compose de parties de plus en plus dissemblables entre elles, tant par leur forme et ieur structure que par leurs fonctions; et la vie de lindividu ré- sulte du concours d’un nombre de plus en plus considérable dinstrumens doués de facultés différentes. C’est d’abord le même organe qui sent, qui se meut, qui absorbe du dehors les substances nutritives et qui assure la conservation de l'espèce ; mais peu-à-peu les diverses fonctions se localisent, elles ac- quièrent chacune des instrumens qui leur sont propres et les divers actes dont elles se composent s’exécutent à leur tour dans des organes distincts. Ainsi, plus la vie d’un animal se com- pose de phénomènes variés, et plus ses facultés sont exquises ; plus aussi la division du travail est portée à un haut degré dans intérieur de son corps, et plus la structure de ce corps est com- pliquée. ” Le principe qui semble avoir guidé la nature dans le perfec- tüionnement des êtres est, comme on le voit, précisément l’un de ceux qui ont eu le plus d'influence sur les progrès de l’industrie humaine : /a division du travail. Il est une autre conséquence de cette loi, qui mérite aussi de NOTIONS PRÉLIMINAIRES. 9 nent … ie et qui se présente nécessairement à l'esprit pour ‘°° de ccté peu que l’on médite sur les faits dont nous venons de parler. °” Nous avogs vu que plus un animal était élevé dans la série des êtres , plus les instrumens destinés à produire l’ensemble des phénomènes vitaux sont variés, et plus aussi les fonctions de chacun de ces organes sont spéciales et limitées. Il en résulté’que la destruction d’une partie quelconque du corps doitproduire dans l'économie un trouble d'autant plus grand que l'animal est doué de facultés dus parfaites , et que ces êtres doivent résister d’au- tant mieux aux mutilations que la structure de leur corps est moins compliquée. Or , cette observation conduit à l'explication de plusieurs faits qui , au premier abord , paraissent incompréhensibles ; ét trouve précisément sa confirmation dans certains phénomènes telle- nent extraordinaires qu’on les aurait rejetés comme desfables , s'ils n'avaient été constatés par des hommes dont le témoignage est irrécusable. Ainsi, ilexiste des animaux dont on peut diviser le corps en Expériences une multitude de morceaux, sans y arrêter le mouvement vital ; 2 eu au contraire, chaque fragment prend par cette excitation un °°" développement insolite , et constitue bientôt un nouvel animal, . semblable par sa forme à celui dont il provient, tout aussi parfait dans son espèce, exerçant les mêmes fonctions et vivant de la même manière, Effets des mutilations. Les êtres singuliers que les naturalistes désignent sous les noms de Polypes d’eau douce où d’Aydres , et que l’on trouve souvent sous des lentilles d’eau, offrent ce phénomène bizar- re; en les mutilant de lasorte, loin de les tuer, on les multi- plie. Tremblay, naturaliste ge- nevois du siècle dernier, à qui l’on doit la connaissance de ces faits curieux, a ouvert un de ces petits animaux; puis il Pa étendu et coupé en tous sens; ill’a , pour ainsi dire , haché, et, malgré cet état de division ex- trême, chacun des fragmens est devenu bientôt un animal complet. b (x) Dans la figure 1, on a représenté plusieurs hydres fixées à des lentilles 10 ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE, La Pour comprendre ce ire ; en apparence si contradic- toire à tout ce que nous montrent les animaux supérieurs, il faut , avant tout, examiner le mode d'organisation des polypes dont nous venons de parler. Ces animaux sont trop petits pour être bien étudiés à l’œil nu; mais, lorsqu'on les observe au microscope, on voit que la substance de leur corps est partout identique : c’est une masse gélatineuse, renfermant des globules d’une petitesse extrème ,et dans laquelle on n’aperçoit aucun organe distinct. | Or, comme nous l’avons déjà fait remarquer, l'identité dans | l’organisation suppose nécessairement l'identité dans le mode | d'action , dans les facultés. Il s'ensuit que toutes les parties du | corps de nos polypes , ayant la même structure, doivent remplir les mêmes fonctions : chacune d’elles doit concourir de la même manière que toutes les autres , à la production des phénomènes dont l’ensemble constitue la wie, et la perte de lune ou de plusieurs de ces parties ne doit entrainerla cessation d'aucun de ces actes. Mais, si cela est vrai, si chaque portion du corps de ces animaux peut sentir, se mouvoir, se nourrir et reproduire un nouvel être , on ne voit pas de raison pour que chacune d’elles, après avoir été séparée du reste, ne puisse, si elle est placée dans des circonstances favorables , continuer d'agir comme au- paravant, et pour que chacun de ces fragmens de lanimal ne puisse non-seulement continuer à remplir les fonctions néces- saires à l’entretien de sa vie , mais aussi reproduire un nouvel individu et perpétuer sa race, phénomènes dont lexpérience de Tremblay nous rend témoin. Expériences Appliquons maintenant ce mème principe à des êtres dont la D vers de ctructure est moins uniforme , et dont les divers actes ont déjà des instrumens appropriés à chacun d’eux. Prenons pour exemple le Zombric terrestre ou ver de terre. Chez cet animal cylindrique et effilé, la localisation des fonc- tions est déjà portée assez loin; la nutrition se compose d’une série d'actes exécutés par des instrumens différens ; la digestion s'effectue dans une cavité dont les parois ont des propriétés par- ticulières , il existe aussi un système de canaux servant à conduire les matières nutritives dans toutes les parties du corps, et un appareil qui est devenu le siège principal de la faculté de perce- voir les impressions et de déterminer les mouvemens; enfin on d’eau (a) : ces animaux comme nous le verrons par la suite, ne consistent qu’en un petit tube gélatineux, ouvert par l’une de ses extrémités , et garni d'un cercle de filamens appelée tentacules , à l'aide desquels ils introduisent les alimens dans leurs cavités dégustives. L'un de ces polypes (2) porte sur les côtés de son corps deux petits qui en naissent et qui ne tarderont pas à s'en détacher. NOTIONS PRÉLIMINAIRES. 11 trouve des instrumens destinés uniquement à la locomotion. Aussi ne peut-on concevoir la possibilité de diviser en tous sens le corpsge ces vers comme on l’a fait pour les polypes, sans que la mort ne s’ensuive. Mais lorsqu'on examine la disposition de ces divers appareils qui concourent chacun d’une manière diffé- rente à l'entretien de la vie æ voit qu'ils s'étendent tous unifor- mément d’un extrémité du Corps à l’autre, etque chaque segment transversal de l'animal ne,différe que peu ou point de tous le; autres ; ilen est la répétition et représente , jusqu'à un certain point , l'animal entier, car il renferme tous les organes dont le jeu est nécessaire au mouvement vital, On comprend donc sans peine la possibilité de détacher un certain nombre de ces segmens du reste du corps sans faire perdre ainsi à l’un ou à l’autretroncon aucune des propriétés vitales dont Jouissait lindividu entier, et c’est en effet ce qui a lieu. Si l’on coupe transversalement un ver de terre en deux, trois , dix, vingt morceaux, chacun des fragmens peut continuer de vivre à la manière du tout, et con- stituer un nouvel individu. Mais si l’on s'élève encore davantage dans la série des êtres , Localisation animés , on voit la division du travail physiologique augmenter £°°..0i"ees de plus en plus; les diverses fonctions deviennent lapanage les animaux d'autant d'appareils particuliers ; chacun des actes qui $ y rat- supérieurs. tachent est exécuté par un instrument spécial, et ces divers appareils au lieu d’être distribués uniformément dans toute la longueur du corps, se logent dans des parties différentes ; en sorte que la perte de chaque portion du corps prive lPanimal de quelque faculté , et produit dans l’économie une perturbation d'autant plus grande que cette faculté est plus importante pour l’entretien de la vie. En étudiant les diverses fonctions des animaux, j'aurai à Exemples signaler la manière dont chacune d’elles se complique et se RE N ee perfectionne par suite de cette division du travail; mais je ne j'éude Lei m'arrêterai qu'aux faits les plus importans , et je m’étendrai de fonctions. préférence sur lexamen des phénomènes de la vie, chez les êtres qui , sous ce rapport, occupent le sommet de la série animale. En effet, c’est lorsque chacun de ces phénomènes résulte de action d’un instrument particulier que les divers actes dont la fonction se compose sont les plus faciles à observer, et que les effets de la vie peuvent être les mieux analysés; ce sont aussi les animaux les plus compliqués qui sont les mieux connus des. anatomistes et des physiologistes, et ce sont eux aussi qui nous offrent le plus d'intérêt. Matériaux qui forment les organes. Tissu mus- culaire. Tissu ner- veux. Tissu cel- lulaire. 1 ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. Tissus organiques. Le corps de ces êtres renferme un nombre considérable d’or- ganes différens; mais, lorsqu'on examine comparativement la structure de ces seu parties, onne tarde pas à se COnvaincre que les matériaux dont elles se composent sont bien moins va- riées qu'on ne laurait d’abord supposé. Ce sont, en effet, les mêmes tissus diversement combinés et affectant des formes par- üculières qui constituent la plupart de nos organes. Les principaux tissus organiques sont au nombre de trois, savoir : les tissus musculaire, nerveux et cellulaire. Le tissu musculaire constitue ce que l'on nomme vulgairement la chair des animaux; il est l'agent producteur de tous leurs mouvemens, et consiste toujours en fibres susceptibles de se raccourcir. Quelquefois ces fibres sont, pour ainsi dire, dissé- minées dans la substance de nos organes, d’autres fois elles sont rassemblées en masses et forment des muscles ; mais quelle que soit leur disposition, on les distingue toujours par leur faculté contractile, et dans le corps de l’homme, de même que chez la plupart des animaux, on les rencontre partout où il y a des mouvemens à exécuter. Le tissu nerveux est une matière molle et ordinairement blan- châtre, qui constitue le cerveau et les nerfs, et qui est le siège de la faculté de sentir; en traitant des fonctions de relation nous aurons l’occasion d’en étudier les propriétés et les usages. Enfin, le tissu cellulaire, que l'on nomme ainsi à cause de sa texture aréolaire et spongieuse , est, de ious les matériaux con- stitutifs de nos organes, le plus universellement répandu. Dans les animaux les plus simples , il parait former la presque totalité du corps; et dans ceux qui ont, ainsi que l’homme, la structure la plus compliquée, ce tissu existe en couche plus ou moins épaisse entre tous les organes; il remplit les interstices que ces parties laissent entre elles, et se rencontre aussi dans l’épaisseur de leur substance , où il sert à réunir les diverses portions dont elles se composent, comme au-dehors il sert à unir les divers appareils de l’économie; ilest, en quelque sorte, la gangue de ious les organes, et en se modifiant de diverses manières, il donne naissance aux membranes et à une foule d’autres tissus, enfin , c’est toujours dans son épaisseur que se dépose la graisse , mais les petites poches qui renferment cette matière en sont complètement distinctes. Ce tissu est une substance blanchâtre , demi transparente et irès élastique, qui se compose de filamens et de petites lamelles plus ou moins consistans et réunis irrégulièrement, de façon NOTIONS PRÉLIMINAIRES. 13 à laisser entre eux des lacunes ou cellules de grandeurs varia- bles. Ces cellules n’ont que des parois incomplètes et ne sont séparées les unes des autres que par uneespèce de feutrage spon- gieux; aussi communiquent-elles toutes ensemble et livrent- elles un passage facile aux fluides qui tendent à les traverser ; enfin , elles sont toujours imbibées d'un liquide aqueux chargé de particules sbumineuses et connu sous le nom de serosite. La communication des lacunes du tissu cellulaire entre elles est facile à démontrer : si l’on fait un trou à la peau d’un animal qu'on vient de tuer, et que l’on insufle de l'air dans le tissu cel- lulaire, ce fluide pénètre dans toutes les parties du corps et les distend. C’est ce que les bouchers font tous les jours pour don- ner à leur viande une plus belle apparence, et c’est aussi ce qui a été pratiqué par quelques bateleurs pour déformer, de la manière la plus hideuse, le corps de malheureux enfans, et ex- citer ainsi la curiosité ou la commisération du public. En voici un exemple. Un chirurgien célèbre du seizième siècle, Fabrice de Hilden, nous rapporte qu’en 1593 on montrait, à Paris, un enfant de quinze à dix-huit mois, dont la tête était monstrueuse; les parens de ce petit infortuné le promenaient de ville en ville comme un objet de curiosité, et attiraient un grand nombre de spectateurs; mais un magistrat ayant soup- çonné quelque fraude , les fit arrêter et mettre à la question : ils avouèrent alors avoir fait, sur le sommet de la tête de leur enfant, un trou peau, ety avoir soufflé de l'air à l’aide d’une canule. Chaque jour ils renouvelaient cette opération, et ils étaient'enfin parvenus à donner à la tête de l’enfant un volume prodigieux. De nos jours on a vu cette pratique barbare renou- velée par un bateleur de Brest. Les autres tissus organiques qui concourent avec les précé- dens à former les diverses parties du corps sont les membranes séreuses et muqueuses , les diverses variétés de tissus fibreux, (tendons, aponévroses, etc.) les cartilages , les os, etc.; mais suivant toute apparence ce ne sont que des modifications du tissu cellulaire. En effet nous les voyons se développer souvent d’une manière accidentelle aux dépens du tissu cellulaire; et dans la plupart de ces cas on connait la cause de leur formation : ainsi toutes les fois que le tissu cellulaire est soumis à une pres- sion et à un frottement continuel, il se transforme en une mem brane séreuse ; lorsqu'il est en contact pendant un certain temps avec un liquide qui l’irrite , il revêt tous les caractères des mem- branes muqueuses ; sous l’infiuence du tiraillement et d’une ir- ritation mécanique il donne naissance à des membranes fibreu- ses : et il est à remarquer que toutes ces membranes n’existent d’une manière normale dans l'économie que précisément là où Tissus mu queux, fibreux, osseux, etc. 14 ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE,. agissent les causes propres à déterminer ailleurs leur formation. Quant à l'étude plus approfondie de ces tissus, elle trouvera na- ue turellement sa place dans la suite de ces leçons ; nous ajoute- élémentaire 100$ Seulement ici que tous, de même quesle tissu cellulaire des tissus. primitif, le tissu musculaire et le tissu nerveux, paraissent composés, en dernière analyse, de petits globules visibles seulement à l’aide du microscope, et réunis en chapelets dont la disposition varie. 4 DES FONCTIONS DE NUTRITION. On ne sait rien de précis sur la manière dont s'opère la nu- trition, et il est même probable que, pendant long-temps en- core, le mécanisme de ce mouvement intestin dont nous avons démontré ci-dessus l'existence (1), demeurera un mystère pour les physiologistes; mais si on n’a pu observer directement le travail par lequel les matériaux constitutifs des organes se re- nouvellent sans cesse, on à été plus heureux dans linvestiga- tion des divers actes qui préparent ou qui accompagnent ce phénomène curieux. On sait quel est Pagent#principal dela nutrition , et comment il se distribue aux es LS Éd NN " DE LA RESPIRATION. 57 dépendent de ce que ces deux fonctions opposées se font en gé- néral équilibre ,de manière que leur résultat n’est pas apparent, mais que l'absorption est quelquefois plus active que lexhaktion de l'azote , tandis que d’autres fois la quantité de ce gaz exhalé, excède celle qui est absorbée , d'où résulte tantôt une diminu- tion , tantôt une augmentation dans son volume lorsqu'on le compare avant et après qu’il a servi à la respiration. Enfin il s'échappe aussi du corps, avec les produits de la res- piration, une quantité plus ou moins considérable de vapeur d’eau ; cette exhalation , qui a reçu le nom de transpiration pul- monæire , est même un des phénomènes les plus apparens de la respiration, lorsque , par l’action réfrigérante de Fair ambiant, ces vapeurs se condensent à la sortie du corps et forment un nuage plus ou moins épais. Pendant que Fair respiré éprouve les changemens que nous venons d'indiquer, le sang, qui parcourt les membranes en con- tact avec ce fluide, éprouve également des modifications im- portantes ; il redevient propre à entretenir la vie, et passe d’un rouge noirâtre à un rouge vif et éclatant. Pour bien observer ce fait, on n’a qu'à ouvrir une artère sur un animal vivant, et à comprimer en mème temps son cou de façon à empêcher Pair de pénétrer dans ses poumons , le sang qui s’écoulera de l'artère sera d’abord d’un rouge vif, mais ne tardera pas à devenir noïi- râtre et semblable à du sang veineux. Si alors on permet de nouveau laccès de Fair dans les poumons, on voit ce liquide changer encore de couleur et reprendre la teinte propre au sang artériel. Tels sont les principaux phénomènes de la respiration des animaux. Cherchons maintenant à nous en rendre compte, à en trouver l'explication. Et d’abord, que devient l’oxigène qui disparait, et quelle est l'origine de l'acide carbonique produit pendant l’exercice de cette fonction ? | Lorsqu'on fait brûler du charbon dans un vase rempli d'air, on voit que l’oxigène disparait et est remplacé par un volume égal de gaz acide carbonique; il se fait en même temps un dé- gagement considérable de chaleur. Or, pendant la respiration , les mêmes phénomènes ont lieu, et on observe toujours ur rapport remarquable entre la quantité d’oxigène empioyée par l'animal et celle de l'acide carbonique qu'il produit; dans les circonstances ordinaires , le volume de ce dernier, n’est que de peu au-dessous de celui du premier et les animaux , comme nous le verrons par la suite, produisent tous plus ou moins de chaleur. Il existe donc la plus grande analogie entre les principaux Transpira- tion pulmo- naire. Modifica- tions du saug. Théorie de la respiration. Source de l'acide carbo- nique. 8 ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. phénomènes de la respiration et ceux de la combustion du char- bon; et celte parité dans les résultats a fait penser que la cause des uns et des autres était la même. Et en effet, on ne peut guère douter que la respiration des animaux ne soitautre chose que la combustion, par loxigène de l'air, d’une certaine quantité de carbone provenant du corps de ces êtres. Mais où a lieu cette combustion? est-ce le sang qui vient four- nir à l’air le carbone ainsi brûlé, et cette combustion a-t-elle lieu à la surface de l’organe respiratoire ? ou bien l’oxigène est-il absorbé et porté par le sang dans la profondeur de tous les orga- nes, el acide carbonique se forme-t-il dans ces parties pour être ensuite expulsé par la même voie qui a livré passage à l’oxigène absorbé? La plupart des physiologistes ont adopté exclusivement lune ou l’autre de ces opinions; mais aucune de ces hypothèses ne suffit pour l'explication de tous les faits observés, et il paraïtrait réellement que la transformation de l’oxigène en acide carbo- nique a lieu en même temps aux dépens du sang, au moment du contact de ce liquide avec Pair, et dans la substance des tissus qui composent nos divers organes : en voici la preuve. Si l’on renferme du sang veineux dans un flacon rempli d’oxi- gène et qu'on l’agite, on le voit changer de couleur; une partie de l’oxigène disparait, et il se produit de Pacide carbonique. Tous les phénomènes chimiques de la respiration ont, par con- séquent, lieu indépendamment de la vie et par le seul fait du contact du sang avec l’oxigène. Or, dans le corps des animaux qui respirent, le sang n’est séparé de l'air que par des mem- branes très minces qui ne s'opposent nullement à ce contact. En effet, si l’on injecte dans les veines d’un chien du phosphore dissous dans l'huile, ceite substance, en traversant les vaisseaux capillaires des poumons, se combinera avec l’oxigène de Pair, brülera et sera expulsée au-dehors sous la forme d’une épaisse fumée blanche. Il esi donc évident que le sang doit subir dans organe respiratoire le contact de l'air et y fournir du carbone à l’oxigène de ce fluide tout comme dans l'expérience dont nous venons de parler, et on ne peut, par conséquent, se refuser à admettre que la combinaison directe de l’oxigène de Pair avec le carbone du sang ne soit la source au moins &une partie de acide carbonique produit. Mais, d’un auire côté, si l’on place dans un vase ne contenant pas &’oxigène et rempli d'azote, par exemple, un animal sus- ceptible de résister pendant assez long-temps à l’asphyxie, tel qu'une grenouille, on veit qu'il continue à exhaler de lacide carbonique comme s’il respirait de Pair. Or, dans ce cas, il est DE LA RESPIRATION. 59 impossible d'attribuer la formation de ce gaz à la combustion di- recte eu nous venons de parler, car cette combustion doit néces- sairement cesser aussitôt que l'air respiré ne contient plus d’oxi- gène; il faut donc que l'acide carbonique ait été simplement exhalé par l'organe respiratoire, et qu'il ait été formé ailleurs aux dépens de l’oxigène déjà existant dans Pintérieur du corps de Panimal. L'eau qui s'échappe du corps en même temps que l'acide car- Source de bonique provient également du sang et elle est simplement l'eau expul- exhalée par la surface de l'organe respiratoire. Quelques auteurs pensent que ce liquide se forme de toutes pièces pendant la respiration, et qu’une partie de loxigène employé sert à brûler directement de l'hydrogène fourni par le sang pour donner nais- sance à de l’eau ; ils ont cru pouvoir expliquer ainsi la cause de la transpiration pulmonaire , et en même temps celle de la disparition d’un volume d’oxigène supérieur à celui de acide carbonique formé. Mais l'expérience renverse cette hypothèse, car la transpiration pulmonaire continue lorsque l'air respiré ne con- tient pas d’oxigène , et on peut augmenter à volonté la quantité de vapeur ainsiexhalée en injectant de l’eau dans les veines d’un animal vivant. Toutes les substances volatiles qui sont contenues dans le sang sont également expulsées du corps par l’exhalation dont l’organe respiratoire est le siège. Si l’on injecte du camphre ou de lesprit de vin dans les veines d’un chien, ces substances s’échapperont bientôt avec l’eau qui sort des poumons et seront reconnaissables à leur odeur. Il en est de même lorsqu'on injecte dans une veine de petites quantités de gaz hydrogène; ce fluide est exhalé par l'organe respiratoire. Nous avons vu ailleurs que ces mêmes organes absorbent aussi, avec une grande rapidité, les matières avec lesquelles ils sont en contact, et cette absorption s’exerce sur les gaz et les vapeurs aussi bien que sur les liquides ; en voici un exemple. Dans une des expériences faites sur lui-même, par le physio- logisie Linning', ce savant trouva que son corps avait augmenié en poids de huit onces, sans qu’il eût fait usage d'aucun aliment et seulement pour avoir respiré un air chargé de brouillards épais. Or, des phénomènes analogues à ceux qui se manifesientiei d’une manière accidentelle, ont lieu d’une manière normale dans le travail ordinaire de la respiration. En résumant ce que nous venons de dire sur la nature du tra- vail respiratoire, on voit que ce phénomène consiste : 1° Dans la combustion directe, d’une certaine quantité du car- bone du sang par loxigène de l'air; 2° Dans l'absorption de l’oxigène et l’exhalation d'acide car- bonique ; sec. Récapitula- tion. 60 ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. 3° Dans l’absorption et l’exhalation simultanée d’une petite quantité d'azote; Activité de la respiration. Oiseaux. Mammifères. Animaux in- {éricurs, Influence des animaux et des végétaux sur la compo- sition de l’at- mosphere. Et 4 dans l'exhalation d’eau fourtiie par le sang , comme le sont tous les autres produits expulsés. Nous avons vu que la respiration est indispensable à l’entre- tien de la vie de tous les êtres; mais le degré d’activité de cette fonction varie beaucoup dans les différens animaux. Les oiseaux sont, de tous les êtres animés, ceux dont la res- piration est la plus active; dans un temps donné ils consomment plus d’air que tous les autres animaux, et ils succombent aussi à l’asphyxie avec plus de rapidité. Les mammifères ont également une respiration très active, et on a fait un grand nombre d'expériences pour apprécier la quan- tité d’oxigène que l’un d'eux, l’homme, emploie de la sorte dans un temps donné. Cette quantité varie suivant les individus , les âges et diverses autres circonstances : mais elle paraït être, terme moyen, d'environ sept cent cinquante litres cubes par jour. Or, l’oxigène ne forme que les vingt-et-un centièmes (en volume) de Vair atmosphérique ; il s'ensuit donc que l’homme consomme , pendant cet espace de temps , au moins trois mille cinq cents litres cubes de ce dernier fluide. Les animaux des classes inférieures ont , en général , une res- piration bien plus bornée , surtout ceux qui vivent dans l’eau. Mais néanmoins, si on réfléchit à la consommation énorme d’oxigène, que tous ces êtres doivent faire chaque jour, on voit que l'atmosphère en serait bientôt dépouillé et que tous les animaux périraient asphixiés, si la nature n’employait des moyens puissans pour renouveler sans cesse la quantité de ce gaz répandu autour de la surface du globe. C’est en effet ce qui a lieu, et une chose digne de remarque, c’est que ce moyen est précisément un phénomène du même ordre que celui dont il est destiné à contrebalancer les effets. Cest la respiration des plantes. Les végétaux absorbent l'acide carbonique répandu dans Pat- mosphère ; et sous l'influence de la lumière solaire ilsen extraient le carbone et mettent l’oxigène à nu. Ainsi , c’est le règne vé- gétal qui donne aux animaux l’oxigène qui leur est nécessaire , et c’est la respiration des animaux qui fournit sans cesse aux vé- gétaux l'acide carbonique indispensable à leur accroissement. On voit donc que c’est en grande partie du rapport qui existe entre les animaux et les végétaux, que dépend la nature de lPat- mosphère , et qu’à son tour c’est la composition de Pair qui doit régler en quelque sorte le nombre relatif de ces êtres. (1) (1) D’après cela, on pourrait croire que, dans les villes où un grand nombre DE LA RESPIRATIiON. 61 Il existe toujours un rapport remarquable entre la quantité d'air consommée par chaque animal dans un temps déterminé et la vivacit8 de ses mouvemens. Les animaux dont les mouvemens sont lents et rares ont, toutes choses égales d’ailleurs, une res- piration bien moins étendue que ceux qui se meuvent avec ra- pidité et ne restent que peu de temps en repos. Une grenouille ou un crapaud, parexemple , consomment moins d’air que certains papillons , bien que leur corps soit d’une valeur bien plus consi- dérable que celui de ces insectes ; mais ces reptiles ne se meuvent que peu et lentement, tandis que les papillons exécutent sans cesse les mouvemens les plus vifs. L'activité de la respiration varie aussi chez le même animal, suivant les circonstances où il est placé; et,on peut établir en thèse générale, que tout ce qui tend à diminuer l'énergie du mouvement vital , détermine une diminution soit dans l’absorp- tion de l’oxigène , soit dans la proportion relative de lacide car- bonique exhalé , tandis que d’un autre côté, tout ce qui augmente la force de l'animal , produit un changement correspondant dans l'étendue de la respiration. Ainsi , chez les jeunes animaux, ce travail est moins actif que chez ces mèmes êtres à l’âge adulte. Pendant le sommeil , l'étendue de la respiration est également diminuée. La fatigue, labstinence, l'abusdes liqueurs spiritueuses produisent le même effet. Un exercice modé:é , et l'alimentation activent au contraire cette fonction. Enfin , la chaleur augmente l’étendue de la respiration , et le froid la diminue. Il paraît qu’il existe aussi des variations dans la quantité d'acide carbonique produite aux diverses époques de la journée , et, d’après quelques faits , il semblerait que la pression barométrique exerce aussi une influence assez marquée sur ce phénomène. Appareil de la respiration. Jusqu'ici, nous nous sommes occupés seulement des phéno- mènes de la respiration considérés en eux-mêmes et sans avoir égard aux organes qui en sont le siège. Voyons maintenant quels sont les instrumens destinés à cette fonction importante,et voyons aussi comment ils sont modifiés dans les divers animaux. d'hommes vivent réunis et où il existe très peu de plantes . l’atmosphere doit être moins riche en oxigène que dans les campagnes ; mais ce serait une erreur, L'analyse chimique montre que l’air a partout la même composition , et cette uni- formité doit être attribuée aux courans dont l’atmosphère est continuellement agité. Rapport en- tre l’activité de la respira- tion et la viva- cité des mou- vemens. Circonstan- ces qui in- fluent sur l’é- tendue de la respiration. Peau, Organes spé- Caux. Caractères généraux des urganes respi- ratoires. Différences cn rapport avec le mode de respira- tion. 62 ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. Dans ceux dont l’organisation est la plus simple, la respi- ration n’est l’apanage d'aucun appareil spécial, mais s’effec- tue dans toutes les parties qui sont en contact avec l'élément dans lequel ces êtres vivent et puisent l’oxigène nécessaire à leur existence. L'enveloppe générale du corps ou la peau est aussi le siège d’une respiration plus ou moins active chez la plupart des ani- maux des classes les plus élevées , et notamment chez l’homme ; mais chez tous ces êtres , une partie déterminée de la membrane tégumentaire est plus spécialement destinée à agir sur l'air, et se modifie dans sa structure de manière à mieux remplir cette fonction. Dans les animaux où la respiration commence à se localiser ainsi , elle à pour instrument un certain nombre d’appendices membraneux qui s’élèvent sur la surface de la peau dans une partie quelconque du corps, et affectent la forme de tubercules , de feuillets ou de franges. Chez d’autres animaux où la respiration est plus active, la portion de l’enveloppe générale du corps, devenue le siège princi- pal de cet acte , au lieu de former saillie en dehors, se replie en dedans et constitue des poches ou des canaux dans lesquels Pair pénètre. Du reste, quelle que soit la forme qu’affecte l'appareil respira- toire, on remarque que la partie ainsi modifiée pour agir sur l'air, présente une texture molle, spongieuse et fine; qu’elle reçoit une grande quantité de sang; et qu’elle est disposée de manière à offrir, sous un volume comparativement petit, une surface d'autant plus étendue, que la respiration doit être plus active. On peut établir aussi, en thèse générale , que cet organe sera un instrument autant plus puissant, que son organisation s’éloignera davantage de celle de l'enveloppe générale du corps, et que la respiration qui a lieu par la peau, sera d'autant moins active que celle dont ces organes spéciaux sont le siège, sera au contraire plus étendue. Du reste , la structure des organes respiratoires varie suivant qu’ils sont destinés à être en contact avec lair à l’état de gaz ou à agir sur de l’eau tenant en dissolution une certaine quantité de ce fluide. En effet, chez tous les animaux qui vivent plongés dans l’eau et qui respirent par l'intermédiaire de ce liquide, les instrumens spéciaux de la respiration sont saillans et portent le nom de branchies , tandis que chez les animaux à respiration aérienne il n’y à jamais de branchies, mais bien des cavités intérieures qui servent aux mêmes usages , el que l’on appelle des poumons ou des frachees. DE LA RESPIRATION. 63 Les BRANCHIES, sous leur forme la plus simple , ne consistent Branchics. que dans quelques tubercules qui ont une texture un peu plus molle que celle du reste de la peau, et qui reçoivent une quantité de sang un peu plus considérable ; aussi sont-elles alors bien loin d’être les seuls iustrumens de la respiration et le reste de la peau prend une part très active dans ce travail. Plusieurs vers marins nous offrent ce mode d'organisation ; mais lorsque ces organes doivent être le siège d’une respiration plus active, leur structure se complique, et ils prennent la forme de lammelles minces et plus ou moins nombreuses, ou de fila- mens membraneux simples ou ramifiés. Le premier de ces modes de structure se rencontre chez la plupart des animaux qui constituent avec les crabes et les écre- visses le groupe auquel on a donné le nom de crustacés et chez un grand nombre de ceux qui habitent l’intérieur des coquilles et qui constituent la classe dite des mollusques ; les huitres , par exemple. La seconde modification de branchies se voit chez les poissons , etc. Les cavités intérieures qui servent à la respiration aérienne affectent tantôt la forme de trachées, tantôt celle de poumons. Les TrRACHÉES sont des vaisseaux qui communiquent avee piaclies l'extérieur par des ouvertures nommées s#iymates et se ramifient dans la profondeur des divers organes. Ils y portent ainsi Pair, et c’est par conséquent dans toutes les parties du corps que s’effectue la respiration. Ce mode de structure est particulier aux insectes et à quelques arachnides. Les PouMONS sont des poches plus ou moins subdivisées en pnon. cellules qui reçoivent également lair dans leur intérieur et dont | les parois sont traversées par les vaisseaux contenant le sang qui doit être soumis à l’influence vivifiante de l’oxigène. Il existe des poumons (mais dans un état de simplicité très grande) chez la plupart des araignées, et chez quelques moi- lusques, tels que les limaces. Les reptiles , les oiseaux et les mammifères en sont également pourvus. Dans l’homme (de même que dans tous les autres mammi- poumons de fères), les poumons sont logés dans une cavité nommée fAorax, l'uomine. qui occupe la partie supérieure du tronc et qui est séparée de l'abdomen (ou ventre) par une cloison transversale formée par le muscle diaphragme. Ces organes sont, pour ainsi dire, suspen- dus , dans cette cavité, et sont enveloppés par une membrane mince et très unie qui tapisse également les parois du thorax et qui est appelée plevre (1). Ils sont au nombre de deux, (x) La disposition de la plèvre est analogue à celle des autres membranes séreuses dont il a déja été question ( page 50). Elle forme un sac sans ou- 64 ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE, placés de chaque côté du corps, et ils communiquent au-de- hors à l’aide d’un tube, la frachee-artère, qui monte le long de la partie antérieure du cou et vients’ouvrir dans Parrière-bouche. Fig. 16. (1) Ce conduit est formé par une a série de petites bandes cartila- gineuses placées en travers et affectant la forme d’anneauxin- complets ; à l’intérieur il est ta- pissé par une membrane mu- queuse qui est de la même natu- re que celle de la bouche et qui secontinueavec elle. Enfin à sa partie inférieure la trachée-ar- ière se divise en deux branches qui prennentlenom de Bronrhes et qui se ramifient dans l’inté- rieur de chaque poumon com- d' me les racines d’un arbre dans l'intérieur du sol. Les poumons, comme nous l'avons déjà dit, présentent dans leur intérieur une foule de cellules dans chacune des- quelles s’ouvre un petitrameau de la bronche correspondante. Les parois de ces cavités sont formées d’une membrane très fine et très molle et sont creu- sées d’une multitude de vaisseaux capillaires qui reçoivent le sang veineux de lartère pulmonaire et l’exposent à l’action de Pair. Sous un même volume, la surface par laquelle la respira- tion s'opère sera donc d'autant plus grande et le sang recevra le contact de l’air par des points d'autant plus nombreux que les poumons seront formés par des cellules plus petites. II existe par conséquent un rapport direct entre l'activité de la respi- verture, qui est reployé sur lui-même, et dont la moitié externe adhère aux pa- rois du thorax, tandis que l’autre moitié est fixée sur la surface du poumon correspondant ; la face interne de la plèvre est, par conséquent, partout en con- tact avec elle-même , et comme elle est extrêmement lisse et continuellement lubrefiée par de la sérosité, elle glisse très facilement et favorise puissamment les mouvemens respiratoires. (x) Cette figure représente la trachée-artère et les poumons; l'un de ces organes est resté intact (4), mais de l’autre côté on en à détruit la substance pour mettre à nu les ramifications des bronches ( e ). a Larynx et extrémité supérieure de la trachée-artère ; — à trachée; — c di- visions des bronches; — e ramuscules bronchiques ; — 4 l’un des poumons. DE LA RESPIRATION. 65 ration et la grandeur des cellules pulmonaires; et, en effet, chez les grenouilles , par exemple , où cette fonction ne s’exerce que d’'un&manière faible et lente, les poumons ont la forme de sacs divisés seulement par quelques cloisons, tandis que, chez les mammifères et les oiseaux, où la respirationest la plus active, ces organes sont divisés en cellules si petites, qu'à l'œil nu il est difficile de les apercevoir. Dans l’homme et dans les autres mammifères , les bronches se terminent toutes dans les cellules pulmonaires , et celles-ci sont toujours terminées elles-mêmes en cul-de-sac ; il en résulte que l'air qui entre dans les poumons de ces animaux ne pénètre pas au-delà. Mais chez les oiseaux , où la respiration est encore plus active, quelques-uns de ces canaux traversent les poumons de part en part, et vont s'ouvrir dans le tissu cellulaire qui les entoure, et qui, dans tout le reste du corps, remplit les espaces que les divers organes laissent entre eux; or, les cavités contenues dans ce tissu communiquent toutes entre elles, et l'air qui y arrive pénètre ainsi dans toutes les parties du corps, même dans la substance des os. Mecanisme de La respiration. D’après ce que nous avons dit des altérations que Pair subit par la respiration, il est évident que ce fluide doit être sans cesse renouvelé dans l’intérieur des poumons; c’est ce qui a lieu à l’aide des mouvemens d'inspiration et d'expiration que nous exécutons à tous momens. Le mécanisme par lequel l’air est appelé dans les poumons, ou en est expulsé , est très simple et ressemble en tous points au jeu d’un soufflet, si ce n’est que dans les premiers le fluide pénètre dans l'organe et s’en échappe par le même conduit. En effet, les parois du thorax sont mobiles, sa cavité peut alternativement s’'agrandir et se resserrer, et les poumons en suivent tous les mouvemens ; aussi, dans le premier cas, l'air pressé par tout le poids de l'atmosphère se précipite dans la poitrine à travers la bouche ou les fosses nasales et la trachée-artière , et vient rem- plir les cellules pulmonaires de la même manière que l'eau monte dans un corps de pompe dont on élève le piston. Dans le second cas, lors du mouvement d'expiration, l'air contenu dans les poumons est, au contraire, comprimé et s'échappe en partie au-dehors par la voie qui a déjà servi à Pentrée de ce fiuide. Pour comprendre comment le thorax de l'homme se dilate et se resserre, il est indispensable d’en examiner la structure. Structure du thorax. Dilatation du thorax. Contraction du diaphrag- ane. 66 ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. Fig. 17. (1) 2 a c Cette cavité a la forme cd d’un conoïde dont le som- met est en haut et la base en bas, et ses parois sont formées en majeure par- tie par une espèce de cage 1EË osseuse résultante de l’u- TA de 4 __- ‘ nion des côtes avec une portion de la colonne ver- tebrale ( ou épine du dos) enarrière,etavec l'os ster- F £ num en avant. g Les espaces que les cà- tuer tes laissententreelles sont c’ remplis par des muscles qui s’étendent de l’un de ces os à l’autre; des mus- , cles se portent aussi de la © première côte à la portion , cervicale de la colonne vertébrale; enfin , la paroi : À inférieure de la poitrine ‘à a h est formée par le muscle diaphragme qui s'attache au bord inférieur de la charpente osseuse dont nous venons de parler. La dilatation du thorax peut se faire de deux manières, par la contraction du diaphragme ou par l'élévation des côtes. En effet le diaphragme, dans l’état de repos, forme une voûte élevée qui remonte dans l'intérieur de la poitrine(g), et il est facile de comprendre que la contraction de ce muscle doit di- minuer la courbure de cette voûte, et en l’abaissant agrandir d’autant la cavité du thorax. Le jeu des côtes est un peu plus compliqué; ces os (c et ec”), au nombre de douze de l’un et de l’autre côté, décrivent chacun une (2) Thorax de l’homme. Du côté gauche les muscles sont enlevés, tandis que du côté opposé ils sont en place. a Portion cervicale de la colonne vertébrale ; — 4” portion lombaire de la colonne ; la portion dorsale qui concourt à la formation du thorax est cachée par le sternum, ete. — 2 Sternum ; — c € côtes: — c' fausses côtes; — d clavi- cule;— e muscles intercostaux ; — f dernière fausse côte cachée par l'insertion du muscle diaphragme ; — g voûte formée dans l’intérieur du thorax par le dia- phragme ; du côté droit la continuation de cette voûte est indiquée par une ligne ponctuée ; — k piliers du draphragme s’insérant aux vertébres lombaires ; — 2 muscles élévateurs des côtes. DE SPIRATION.,. 67 courbure dont la convexitéest tournée en dehorsetun peu en bas; leur extrémité antérieure , qui est unie au sternum (à) à l’aide de cartilages intermédiaires, est beaucoup moins élevée que leur extrémité postérieure , et l'articulation de celle-ci avec la co- lonne vertébrale leur permet de s'élever et de s’abaisser. Le premier de ces mouvemens est déterminé par la contraction des muscles de la base du cou (2). Or, lorsque les côtes s’élèvent : ainsi, elles tendent à se placer sur une ligne horizontale; car en même temps que leur extrémité antérieure remonte en entrai- nant avec lui le sternum, elles tournent un peu sur elles-mêmes, de façon que leur courbure ne se dirige plus en bas, mais en- dehors; il en résulte que les parois latérales et antérieure du thorax s’éloignent alors de la colonne vertébrale et que la cavité de la poitrine s'agrandit. Dans le mouvement d'expiration, le diaphragme se relâche, Mouvement et les poumons, à raison de l’élasticité de leur tissu, se res- d'expiration. serrent et entrainent avec eux cette cloison musculaire,au point de la faire remonter en forme de voûte. Lorsque les muscles, qui ont produit l'élévation des côtes et du sternum cessent de se contracter, le poids de ces os et la traction exercée par lélasti- cité des poumons déterminent aussi l’abaissementde ces os ; mais il est également d’autres forces qui peuvent contribuer à déter- miner le resserrement du thorax et l’expulsion de Pair hors des poumons : tels sont la contraction des muscles qui forment les pa- rois du ventre et qui se fixent à la partie inférieure de la poitrine. On remarque plusieurs degrés dans l’étendue de ces mou- Été die vemens et dans la respiration ordinaire, la quantité d’air aspiré poumons. par le thorax ou chassé des poumons n'excède guère la septième partie de celle que ces organes peuvent contenir. On évalue à envi- ron 4580 centimètres cubes la quantité d’air contenu ordinaire- ment dans les poumons, et à655 centimètres cubes celle qui entre dans la poitrine ou en sort à chaque inspiration ou expiration. Le nombre de mouvemens respiratoires varie suivant les indi- Fréquence vidus et suivant les âges; dans l’enfance, ils sont plus fréquens des inspira- que chez l’homme adulte, et chez ce dernier, on compte en gé- 1%: néral environ vingt inspirations par minute. On voit donc que, dans l’état ordinaire , il doit entrer dans les poumons d’un homme environ 13,100 centimètres cubes d'air par minute, ce qui fait, pour une heure, environ 786 litres, et par jour à-peu-près 19,000 litres de ce fluide. Le soupir, le bäillement, le rire et le sanglot ne sont que des Modi£es- modifications des mouvemens ordinaires de la respiration. Le tions des mou- soupir est une large et profonde inspiration dans laquelle une De re - atoires. D. Sur la cir- eulation. 68 ANATOMIE ET P Q IOLOGIE. grande quantité d’air entre peu-à-peu dans les poumons ; aussi ce phénomène ne dépend-il pas seulement des affections morales qui en sont la cause la plus fréquente, et le besoin de sou- pirer se fait-il sentir toutes les fois que le travail respiratoire ne s'effectue pas avec assez de rapidité. Le bäillement est une inspiration encore plus profonde, qui est accompagnée d’une contraction presque involontaire et spas- modique des muscles de la mâchoire et du voile du palais. Le rire consiste en une suite de petits mouvemens d'expiration saccadés et plus ou moins fréquens , qui dépendent en majeure partie de contractions presque convulsives du diaphragme. Enfin le mécanisme du sanglot, diffère peu de celui du rire, bien que ce phénomène exprime des affections de l'âme toutes différentes. De l’influence de la respiration sur Les autres fonctions. Pour terminer ce que nous avons à dire ici de la respiration, nous ajouterons encore quelques mots sur l’influence que les divers mouvemens dont nous venons de parler exercent sur les autres fonctions dont nous avons déjà fait l'histoire. Il est évident que la dilatation du thorax doit produire sur le sang contenu dans les gros vaisseaux qui aboutissent dans cette cavité le même effet que sur l'air contenu dans la trachée-ar- tère. Lors des mouvemens d'inspiration la portion des veines caves, qui est enfermée dans la cavité thoracique, se gonfle par l'abord du sang ainsi aspiré, et, par la même cause , les veines qui pénètrent dans cette cavité, mais qui sont situées au-dehors d'elle et soumises, par conséquent , à l'influence de la pression atmosphérique , se vident plus ou moins complètement. Cette espèce de succion contribue donc à aider la marche du sang dans le système veineux, et elle se fait sentir même dans les artères avec lesquelles ces premiers vaisseaux se continuent par l'intermédiaire des capillaires. Les mouvemens d'expiration suspendent, au contraire , d’une manière momentanée, le cours du sang dans les grosses veines, et l’accélère dans les artères qui partent du cœur et qui se trou- vent alors comprimées. C’est à ces deux phénomènes que l’on doit attribuer le gonfie- ment des veines (surtout celles de la tête et du cou), qui a lieu pendant l’expiration. Dans l’intérieur du crâne, ce gonflement est si marqué, qu'à chaque mouvement respiratoire, les vais- seaux situés sous la base du cerveau, soulèvent ce viscère et y produisent une espèce de pulsation. DE LA CHALEUR ANIMALE. 69 La dilatation de la poitrine parait exercer aussi une influence Sur l’absorp- notable sur l'absorption; en effet , elle agit à la manière d’une tion. pompe Sur tout ce qui environne le thorax, et doit tendre à faire pénétrer du dehors en dedans tous les fluides qui com- muniquent avec son intérieur; mais cette action ne se fait sentir que dans le voisinage immédiat de la poitrine. Enfin l'exhalation abondante , qui a toujours lieu à la surface sur l'exha- des cellules pulmonaires, est déterminée en grande partie par lation pulmo- l’espèce de succion qui accompagne chaque mouvement d’in- vaire. spiration, et qui agit sur les liquides dont les parois de ces cellules sont imbibées, comme elle agit sur le sang des veines caves et normal, sur lair de la trachée-artère. Nous avons déjà vu que, dans l’état, toutes les substances volatiles qui se trouvent dans le sang s’exhalent par celte voie; mais si l’on ouvre le thorax d’un animal vivant, et que l’on pratique la respiration artificielle- ment de manière à ce qu’il n’y ait jamais de succion à la surface des cellules pulmonaires, on arrête presque entièrement cette exhalation, et alors du camphre injecté dans les veines, par exemple, ne s'échappe pas avec plus de rapidité par cette voie que par la surface de toute autre membrane dont le tissu serait aussi vasculaire et aussi permable aux liquides. DE LA CHALEUR ANIMALE. Il existe un autre phénomène dont l'histoire se lie d’une ma- nière étroite à celle de la respiration, et dont l'importance est si grande que nous devons nécessairement y consacrer quelque temps : c’est la faculte de produire de la chaleur. Cette faculté parait être commune à tous les animaux; mais Dh la plupart de ces êtres développent si peu de calorique qu’il qans la tempe- ne peut être apprécié par nos thermomètres ordinaires, tandis rature des ani- que chez d’autres la production de chaleur est si grande qu’on "aux: n'a même pas besoin d’instrumens de physique pour en con- stater l’existence. Pour mieux juger de cette différence, on n’a qu'à placer un lapin et un poisson ayant à-peu-près le même volume dans deux calorimètres, et à les y entourer de glace à la température de 0°; la quantité de ce corps fondu dans un temps donné sera proportionnelle à la quantité de chaleur dé- veloppée par ces deux animaux. Or, dans l’instrument renfer- mant le poisson, la quantité de glace fondue dans l’espace de trois heures, par exemple, ne sera pas appréciable, tandis que, dans celui contenant le lapin, on trouvera, après le même laps de temps, plus d’une livre d’eau liquide, et pour fondre cette Température de mammifi- res et oiseaux. Animaux hi- bernans. 70 ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. quantité de glace, il faut autant de chaleur que pour échauffer depuis la température de la glace fondante jusquà l’ébullition environ trois quarts de ce poids d’eau; or cette chaleur n’a pu être fournie que par l'animal soumis à l'expérience. Cette différence énorme dans la faculté de produire de la cha- leur occasionne des différences correspondantes dans la tem- pérature des divers animaux. Un thermomètre placé dans le corps d’un chien ou d’un oiseau, par exemple, s’élevera toujours à 36 ou 40 degrés (centigrade), tandis que, dans le corps d’une grenouille ou d’un poisson, il indiquera une température à- peu-près égale à celle de l'atmosphère au moment de l’expé- rience. On donne le nom d'animaux à sang froid à ceux qui ne pro- duisent pas assez de chaleur pour avoir une température propre et indépendante des variations atmosphériques; et on appelle animaux à sang chaud Ceux qui conservent une température à-peu-près constante au milieu des variations ordinaires de chaleur et de froid auxquelles ils sont exposés. Les oiseaux et les mammifères sont les seuls êtres qui appartiennent à cette dernière catégorie; tous les autres animaux sont des animaux à sang froid. La température de l’homme et de la plupart des autres mam- mifères ne varie guère que de 36 à 40 degrés : celle des oiseaux s'élève à environ 42° centigrade. Du reste, la faculté de produire de la chaleur varie dans les divers animaux de ces deux classes, et varie aussi dans le même individu , suivant l’âge et les circonstances où il est placé. Ainsi la plupart des mammifères et des oiseaux produisent assez de chaleur pour conserver la même température en été et en hiver el pour résister aux Causes ordinaires de refroidissement , même à un froid très vif. Mais il en est d’autres qui produisent seule- ment assez de chaleur pour élever leur température de 12 ou 15 degrés au-dessus de celle de l'atmosphère; il en résulte que, pendant l'été, leur température est à-peu-près la même que celle des autres animaux à sang chaud, mais que, pendant la saison froide, elle s’abaisse beaucoup; or, toutes les fois que ce refroidissement atieint une certaine limite , le mouvement vital se ralentit toujours, et l’animal qui l’éprouve tombe dans un état de torpeur ou de sommeil léthargique qui dure jusqu’à ce que la température se relève de nouveau. On appelle ani- maux hibernans les êtres qui présentent ce singulier phéno- mène, et, sous ce rapport, ils sont en quelque sorte intermé- diaires entre les animaux à sang chaud non hibernans et les animaux à sang froid. DE LA CHALEUR ANIMALE. 71 Dans les premiers temps de la vie, tous les animaux à sang chaud se rapprochent aussi plus où moins des animaux à sang froid ; dêmême que ces derniers, ils ne produisent, en général, pas assez de chaleur pour conserver leur température lorsqu'ils sont exposés à des causes de refroidissement mème très légères. Mais l’abaissement de température, qui est sans inconvénient pour les animaux à sang froid , agit sur ceux-ci d’une manière bien différente ; car toutes les fois qu’il est porté au-delà d’un certain degré ou qu’il dure pendant un temps déterminé, la mort en est la suite. Sous le rapport de la faculté de produire de la cha- leur, les jeunes animaux à sang chaud , qui naissent les yeux ou- verts etqui aussitôt après la naissance peuvent courir et chercher leur nourriture , diffèrent bien moins des adultes que les mam- mifères qui naissent les yeux fermés, ou les oiseaux qui, au sortir de l'œuf, ne sont pas encore couverts de plumes. Si on tient des chats ou des chiens nouveau-nés, par exemple, éloignés pen- dant un certain temps de leur mère et exposés à l'air, même en été, ils se refroidissent au point d’en mourir. Les enfans produisent aussi bien moins de chaleur dans les premiers jours qui suivent leur naissance qu’à une époque plus avancée de leur vie; leur température s’abaisse alors très faci- lement , et l'influence du froid leur est très nuisible ; aussi, pen- dant l'hiver, en meurt-il un bien plus grand nombre que pen- dant le reste de l’année. Tout ce qui agit comme excitant et qui augmente l’énergie du mouvement vital, tend aussi à augmenter la faculté de produire de la chaleur, et tout ce qui affaiblit économie animale exerce, sur la fonction qui nous occupe ici une influence débilitante. Ainsi, l’action d’un froid modéré tend à augmenter la faculté de produire de la chaleur, et pendant l'hiver nous pouvons, par conséquent, mieux résister à des causes de refroidissement que pendant l'été. L'influence de la chaleur, lorsqu'elle ne s’est pas prolongée pendant long-temps, est excitante et augmente la faculté de produire du calorique ; mais à la longue elle affaiblit le corps, et alors elle diminue l’énergie de cette faculté; c’est surtout pour ceïte raison que les personnes ayant habité pendant long-temps les régions tropicales sont si sensibles au froid de nos hivers. Enfin l'exercice augmente momentanément la production de chaleur, et l'accélération des mouvemens respiratoires est suivie du même effet. Pendant le sommeil cette faculté parait être, au contraire, moins puissante que pendant la veille; aussi lorsque des hommes, exposés à l’action d’une température très basse, ont l’imprudence de dormir , succombent-ils bien plus rapi- Influence de âge sur Ja production de la chaleur. Tufluence de la températu- re. Influence de- l'exercice, etc. 72 ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. dement que s'ils se tiennent éveillés et en mouvement. La mal- heureuse retraite de Russie a fourni des exemples nombreux de l'influence funeste du sommeil sur nos soldats affaiblis par la jatigue et les privations de tous genres, et exposés à un froid des plus intenses. Cause de a La cause de la production de chaleur dans le corps des ani- production de maux paraît être l’action que le sang artériel exerce sur les tissus | ns sous linfluence du système nerveux. En effet, il existe un rapport évident entre la faculté de produire de la chaleur, l'intensité de l’action nerveuse, la richesse du sang et la trans- formation plus ou moins rapide du sang veineux en sang ar- tériel. Iufluencedu On a constaté par l’expérience que tout ce qui tend à affaiblir °ystème Rr- considérablement laction du système nerveux , tend aussi à EME diminuer la production de la chaleur. Ainsi, lorsqu'on détruit le cerveau ou la moelle épinière d’un chien, et qu’en imitant, par des moyens artificiels, le mécanisme à l’aide duquel Pair se renouvelle dans ses poumons, on entretient la vie de lani- mal, la production de la chaleur cesse néanmoins, et le corps se refroidit aussi rapidement que le ferait un cadavre placé dans les mêmes circonstances. En paralysant laction du cer- veau au moyen de certains poisons énergiques , tels que l’opium, on produit encore le même effet, et ces expériences , variées de diverses manières , ont mis hors de doute que l’une des conditions nécessaires au développement de la chaleur animale est l’influence que le système nerveux exerce sur le reste du CCrps. lafluencedu D'un autre côté, l’action du sang sur les organes paraît être sang. également indispensable à la manifestation de ce phénomène ; car, la suspension de la circulation de ce liquide, dans une partie quelconque du corps, est suivie du refroidissement de cette partie; et, il existe un rapport remarquable entre la faculté de produire de la chaleur chez les divers animaux et la richesse de leur sang. Les oiseaux, qui sont de tous les animaux ceux dont la température est la plus élevée, sont aussi ceux dont le sang est le plus chargé de particules solides (en général de 14 ou 15 parties sur 100); les mammifères, dont la température est un peu moins élevée, ont aussi du sang plus aqueux; en général, le poids des globules ne constitue que les 9 ou 12 cen- tièmes du poids total de ce liquide; enfin chez les animaux à sang froid , tels que les grenouilles et les poissons, on ne trouve guère au-delà de 6 centièmes de globules pour 94 parties de serum. DE LA CHALEUR ANIMALE. 73 Mais l’action du système nerveux et d'un sang plus ou moins riche en globules ne sont pas les seules circonstances qui in- fluent su la production de la chaleur animale; pour que le liquide nourricier exerce sur l’économie l’action nécessaire à l'exercice de cette faculté, il faut qu’il ait toutes les propriétés qui caractérisent le sang artériel ; et, comme il ne les acquiert que par la respiration, on voit que le développement du calo- rique doit être dépendant aussi de cette dernière fonction. En effet, toutes les causes qui rendent la transformation du sang veineux en sang artériel moins complète ou moins rapide, tendent aussi à diminuer la faculté productrice de la chaleur, et il existe toujours un rapport intime entre elle et l’activité de larespiration. La formation de lacide carbonique, qui est lun des phéno- mènes les plus remarquables de la respiration des animaux, peut même nous expliquer la cause de la production de la ma- jeure partie de la chaleur développée par ces êtres. Si l’oxigène absorbé pendant la respiration est employé à former ce gaz par son union avec du carbone provenant du sang ou des tissus vivans, comme nous avons tout lieu de le croire, cette com- binaison doit être accompagnée d’un dégagement de chaleur de même qu'il s’en dégage lors de la combustion du charbon à air. Des expériences nombreuses, et faites avec une précision ex- trême , montrent que la chaleur que produirait la combustion du carbone contenu dans le gaz acide carbonique, exhalé par les animaux à sang chaud, est égale à plus de la moitié de la quan- tité totale de calorique dégagé par ces êtres. Et, si l’on admet que l’oxigène absorbé, sans être remplacé par de lacide car- bonique, se combine dans l’intérieur du corps avec de l'hy- drogène pour former de l’eau, on voit que la chaleur produite par cette combustion et celle de carbone dont il a déjà été question, équivaut souvent aux neuf dixièmes de celle déve- loppée par l'animal. Le mouvement du sang et le frottement des diverses parties du corps en produisent très probablement le reste. En dernière analyse, nous voyons donc que la respiration est la cause principale de la production de la chaleur animale , mais que l'espèce de combustion occasionée par l’action de l’oxigène sur le sang et sur les organes vivans ne s’effectue que sous lin- fluence du système nerveux. Du reste, cette fonction importante ne s’exerce pas avec la même énergie dans toutes les parties du corps; celles où le sang Influence de la respiration. Temperature des différen- tes parties du corps. Faculté de résister à la chaleur. 74 ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. circule avec le plus d’abondance et de rapidité (et où, par con- séquent, la vie est la plus active), sont aussi celles où il se dégage le plus de chaleur, il en résulte que les organes les plus éloignés du cœur doivent être, toutes choses égales d’ailleurs, ceux qui produisent le moins de chaleur, et qui, par conséquent, se re- froidissent le plus facilement. C’est ce qu’on observe en effet ; la température de nos membres est moins élevée que celle du tronc , et lorsque nous sommes exposés à l’action d’un froid in- tense , ce sont ces parties qui se gèlent les premières. La faculté de produire de la chaleur nous explique pourquoi les animaux à sang chaud ont une température qui peut se sou- tenir au-dessus de celle de Patmosphère dont ils sont environnés. Mais comment se fait-il que ces êtres puissent conserver encore la même température lorsqu'ils sont placés dans de l'air plus chaud que leur corps? Un homme, par exemple , peut rester pendant un certain temps dans une étuve sèche où Pair est échauffé même à un degré voisin de celui de l’eau bouillante, sans que la chaleur de son corps augmente notablement et s’é- lève au-delà de 2 ou 3 degrés. La faculté de résister ainsi à la chaleur dépend de l’évapora- tion d’eau qui a lieu continuellement à la surface de la peau ou dans l'appareil de la respiration, et qui constitue la {ranspira- tion cutanée et pulmonaire, Car l’eau , pour se transformer en vapeur, enlève du calorique à tout ce qui lenvironne et par con- séquent refroidit le corps à mesure que la chaleur extérieure l’'échauffe. C’est par la même cause que l’eau placée dans les vases poreux nommés alcarazas(1),se refroidit si promptement, même au milieu de l'été. Or, la quantité d’eau qui s’évapore ainsi aug- mente avec la température de l'air, et il en résulte une cause de refroidissement d'autant plus puissante que la chaleur de Pat- mosphère est elle-même plus grande. DE LA DIGESTION. Nous avons déjà vu que tous les êtres vivans ont besoin de puiser continuellement dans le monde extérieur des substances (x) Ces vases laissent suinter l’eau qu’ils renferment et ont ainsi une surface constamment humectée, où se fait une évaporation rapide qui refroidit le liquide contenu dans leur intérieur. C’est par la même cause que l’on éprouve une sen- sation de froid si vif lorsqu'on verse de l'éther sur la peau, et que l’on souffle sur la partie ainsi mouillée. DE LA DIGESTION. 75 nutritives, et d'assimiler à leurs organes des matériaux nou- veaux. Nous avons vu aussi comment cette absorption s'effectue, et l'étude de la respiration nous a offert des exemples de ces sub- stances pénétrafites ainsi dans le liquide nourricier, et étant portées par lui dans la profondeur des organes sans avoir subi au- paravant aucune modification préalable. Dans les végétaux, toutes les substances nutritives pénètrent ainsi directement dans les organes. Mais chez les animaux la plu- part des matières nécessaires à l'entretien de la vie ne sont ab- sorbées qu'après avoir subi une certaine préparation, au moyen de laquelle leurs propriétés sont changées et leur composition modifiée ; ou , en d’autres mots , qu'après avoir été DIGÉRÉES. On peut donner le nom d’atèmens à toutes les substances qui, introduites dans le corps d’un être vivant , servent à son accrois- sement , ou à réparer les pertes qu’il éprouve continuellement ; mais en général, on restreint davantage le sens de ce mot, et on ne l’applique qu'aux matières qui ne sont absorbées et ne ser- vent à la nutrition qu'après avoir été digérées. Pour plus declarté, nous ne l’emploierons que sous cette dernière acception. Les alimens ne sont pas moins nécessaires à l'entretien de la Alimens. Phénomènes vie que l’air que nous respirons ou que l’eau que notre corps ab- dépendans du sorbe continuellement , soit à Pétat liquide et sous la forme de manque &'ali- boisson , soit à l’état de vapeur. Lorsque les animaux en sont "°° privés , on voit leur corps diminuer de volume, leurs forces s’af- faiblir et la mort survenir toujours après des souffrances plus ou moins prolongées. Le besoin d’alimens se fait d’abord connaitre par une sensation particulière , qui a son siège dans l’estomac; la faim. Il est aug- menté par l'exercice, par l'influence stimulante d’un froid modéré et par l’action que certaines substances amères, telles que le ca- chou, exercent sur lestomac. Au contraire, tout ce qui tend à ralentir le mouvement vital , limmobilité, le sommeil, etc., tend aussi à rendre ce besoin moins impérieux. Les animaux qui s’engourdissent pendant l'hiver ne prennent aucun aliment pen- dant tout le temps que dure leur léthargie, et les animaux à sang froid, tels que les poissonsetles grenouilles, peuventsupporterune abstinence très longue, lorsque l’exercice de leurs diverses fonc- tions est ralenti par l'influence d’une température très basse. Mais les animaux dont le mouvement nutritif est très rapide , tels que l'homme et la plupart des mammifères , périssent en général très promptement par le défaut d’alimens. Les herbivores , dont le sang est moins riche en globules que celui des carnivores ,succom- bent plutôt que ces derniers , et les jeunes animaux, dont la nu- Faim. 76 ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. trition est bien plus active que celle des adultes (puisque le volume de leur corpsaugmente continuellement au lieu de rester station- naire) , meurent aussi de faim plus tôt que ceux-ci. Ce que le Dante a décrit avec des couleurs si vives dans lcélèbre épisode du comte Ugolin , est donc bien réellement ce qui arriverait si un homme déjà parvenu au terme de sa croissance, et des enfans en bas âge se trouvaient privés en même temps de toute nourriture. . Mort par L’abstinence prolongée occasionne des phénomènes très re- mmitivn. marquables et que l’on peut classer en trois séries, Dans la pre- mière période la faim se fait souvent sentir, et il survient une faiblesse plus ou moins grande, ainsi qu’une altération plus ou moins profonde de tous les traits. Dans la seconde période , les facultés intellectuelles sont troublées : on remarque alors chez l’homme, ainsi que chez les animaux, de l’inquiétude ou même de la fureur; et quelquefois l’aliénation mentale se manifeste par des visions. Enfin , dans la troisième période cette exaltation fait place à un état d’abattement ou à une stupeur complète, et il est à noter que souvent, lorsque l’abstinence a été prolongée au-delà dun certain temps , l’usage d’alimens ne peut plus sauver la vie de l'animal. Dans ce cas ,il meurt presque toujours , soit qu’il continue à Jeùner, soit qu’il reprenne son régime ordinaire. Natire et Les alimens sont tous fournis par le règne organique , et c’est AE A des toujours aux dépens de substances qui ont elles-mêmes fait par- K: , üe d’un être vivant , que la vie est entretenue chez l’homme et chez tous les autres animaux. Du reste, toutes les substances alimentaires ne possèdent pas au même degré la propriété nutritive, et des expériences très cu- rieuses ont fait voir que, pour la plupart des animaux au moins, le concours d’un certain nombre de matières différentes était in- dispensable pour subvenir aux besoins de la vie. Ainsi des lapins, nourris avec une seule substance, tel que du froment, des choux, de Pavoine ou des carottes, meurent , dans l’espace d'environ quinze jours , avec toute l'apparence de l’inanition , tandis que, nourris avec ces mêmes substances, données concurremment où successivement à de petits intervalles, ces animaux vivent el se portent bien. La diversité et la multiplicité des alimens est donc une règle importante d'hygiène , et en cela les préceptes de la science sont parfaitement d'accord avec notre instinct et avec les varia- Uons que les saisons apportent dans les substances alimentaires qui nous sont offertes par la nature. On a constaté aussi que les substances, telles que le sucre, la gomme , l'huile et la graisse, dans la composition desquelles il n'entre pas d'azote , ne peuvent suffire pour la nourriture des DE LA DIGESTION, 71 animaux , même lorsqu'on les varie le plus. L'usage d’une cer- taine quaptité d’alimens azotés , tels que la chair musculaire , le gluten, qui se trouve dans le blé de froment, l'albumine , ete. , paraîtètre indispensable à l'entretien de la vie de tous les animaux. Lorsqu'on compare les qualités nutritives des diverses sub- stances alimentaires , il faut aussi prendre en considération la quantité d’eau qu’elles renferment ; en la déduisant du poids de la masse employée, on arrive à connaitre celui de la matière réel- lement nutritive. Ainsi notre pain ordinaire contient, sur 1000 parties , 250 parties d’eau; la viande de bœuf , environ 700 mil- lièmes ; les pommes de terre , 750 millièmes , et les navets et les choux , 920 millièmes d’eau. Du reste , les diverses substances qui peuvent servir d’alimens aux animaux varient suivant la nature de ces êtres , et ces diffé- rences , Comme nous le verrons par la suite, sont toujours en rapport avec d’autres différences dans l’organisation. D’après l'investigation de l'appareil digestif, on peut comprendre pour- quoi tel animal se nourrit de matières végétales el tel autre de chair musculaire. Mais une chose, dont on ne peut en aucune facon se rendre compte, et qui cependant est bien avérée, c’est la faculté qu'ont certains animaux de se nourrir de substances qui , pour d’autres , sont des poisons violens. Ainsi les chèvres et les moutons peuvent manger impunément de la ciguë, tandis qu’une très petite quantité de cette plante suffit pour donner la mort à l'homme et à une foule d'animaux. La digestion ou le travail par lequel les animaux modifient les pdifearion alimens , de manière à les rendre propres à être absorbés et à des alimens servir à Ja nutrition , consiste essentiellement dans l’action de a la diges- certaines humeurs sur ces matières, action par suite de laquelle ces substances éprouvent diverses ‘altérations et sont séparées en deux parties , lune destinée à pénétrer dans la profondeur du corps, pour subvenir aux besoins de l’animal , et appelée chyle, l'autre impropre à cet usage et devant être rejetée au- dehors sous la forme de fœres. D’après la nature de ce travail , il est évident que la digestion Se doit toujours se faire dans une cavité intérieure du COTPS , POU- travail diges- vant servir de réservoir pour ces humeurs comme pour les ali- tif. mens qu’ils doivent attaquer, et c’est effectivement ce que l’on observe. Tous les animaux sont pourvus d’une carite digestive , et l’exisience de cet organe est un des caractères qui les distin- guent des végétaux , où les substances alimentaires sont absor- bées , sans avoir subi aucune préparation préalable. Chez quelques animaux , dont la structure est la plus simple, Appareil di- gestf, 78 l a ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. cette poche n’est qu’un simple repli de la peau , qui pénètre pro- fondément dans le corps et s’y termine en cul-de-sac. Cela se voit dans les hydres ou polypes d’eau douce ;, dont nous avons déjà eu l’occasion de parler (1) : aussi peut-on retourner un de ces animaux comme un doigt de gant, sans changer en rien sa ma- nière de vivre. La surface , qui était extérieure, devient alors intérieure et forme la cavité où se digèrent les alimens , tandis que la surface qui formait alors cette cavité maïs qui est deve- nue externe , n’agit plus sur ces mêmes substances. Fig. 18. (2) (72 (1) Voyez page 9. (2) Canal digestif et ses annexes, nm La cavité digestive de l’homme et de la plu- part des animaux a la forme d’un long canal qui s’étend d’une extré- mité du tronc à l’autre, et qui se dilate et se res- serre alternativement , de façon à constituer plusieurs espèces de chambres ou de poches, unies entre elles par des conduits plus ou moins étroits. Ce tube est for- mé par une #embranc dite muqueuse, qui a une grande analogie de structure avec la peau, dont elle est la conti- nuation; elle en diffère par plus de mollesse , par une plus grande abondance de vaisseaux capillaires et de folli- cules sécréteurs et par l'absence presque com- plète d’épiderme. Au- tour de cette membrane a L’œsophage ; — D l'estomac; — c le pylore se continuant avec le duodénum ou première portion de l'intestin grèle ; — 4, d intestin grèle; — e cœcum ou première portion du gros intestin dans laquelle se termine l'intestin grele ; — J'appendice vermiforme du cœcum ; — g colon ascendant ; — k colon transverse; — à colon descendant ; — 7 rectum ; — À extrémité du rectum;— / foie ;— m vé- sicule du fiel; — x pancréas; une grande portion de cette glande est cachée derrière l’estomac ; — o rate, | DE LA DIGESTION. 79 se trouve une enveloppe charnue formée par des fibres mus culaires, plus ou moins abondans, et servant, par leurs con- tractions * soit à pousser les substances alimentaires de la bouche jusqu’à l'anus, soit à les arrêter dans leur marche et à les faire séjourner,pendant un certain temps, dans telle ou telle partie de l'appareil digestif. Enfin , dans une grande partie de son étendue , ce tube est encore enveloppé d’une membrane sé- reuse mince et transparente, appelée peritoine, qui sert en même temps à le fixer et à faciliter ses mouvemens. L'appareil digestif se compose de ce tube alimentaire; des or- ganes destinés à diviser les alimens; des diverses glandes servant à former les humeurs nécessaires à la digestion; et des vaisseaux chargés du transport de la matière nutritive ainsi élaborée, de la cavité digestive dans l’intérieur de l'appareil de la circu- lation. Le tube alimentaire prend , dans diverses parties , des noms différens. Sa partie antérieure, élargie et remplissant les usages d’une sorte de vestibule , est appelée bouche. La cavité qui y fait suite se nomme arriere-bouche OU pharynzx ; la troisième partie du canal digestif constitue l’œsophage (a) ; le quatrième l’esto- mac (b); la cinquième léntestin grele (d) ,:et la sixième le gros in- testin (e, h,1) qui se termine à l'anus (4). Chez l’homme et chez la plupart des animaux , qui s’en rap- prochent le plus , les organes qui opèrent la division mécanique des alimens , sont situés dans la bouche et portent le nom de dents. Mais , chez certains animaux, ce travail est confié à d’autres parties , à l’estomac , par exemple , comme cela se voit chez les oiseaux. Les principales glandes de l'appareil digestif sont : les g/andes salivaires , les follicules gastriques , le foie (1) et le pancréas (n). Enfin les vaisseaux qui servent à l'absorption des produits de la digestion sont, chez l'homme de même que chez tous les autres mammifères , les oiseaux, les reptiles et les poissons , des canaux particuliers , appelés vaisseaux rhiliferes Où Lactes. Tous ces organes , à l’exception de la bouche, des glandes sa- livaires , du pharynx et de l’œsophage, sont logés dans une grande cavité, qui occupe les deux tiers inférieurs de tronc, et que l’on nomme abdomen ou ventre. Elle est séparée du thorax par le muscle diaphragme et terminée inférieurement par un bassin formé d’unelarge ceinture osseuse dont le milieu estocenpé par une sorte de plancher charnu. En arrière , elle est bornée par l’épine du dos , et en avant , comme sur les côtés , ses parois sont formées par de larges muscles, qui s’étendent du thorax au bassin dont nous venons de parler. La surface interne de cette cavité est tapissée par le péritoine , et cette membrane forme en outre divers 80 ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. replis entre les feuillets desquels sont renfermés l'estomac, les in- testins, le foie, le pancréas et la rate. Ces replis, appelésmesentéres, naissent tous de la partie postérieure de l'abdomen, et quelques- uns d’entre eux se prolongent beaucoup au-delà de l'organe qu'ils doivent recouvrir et forment ainsi des espèces de voiles ou de tabliers, nommés epiploons. Préhension L'introduction des alimens dans le canal digestif s’effectue de des aïimens. diverses manières , et le mécanisme en est varié suivant que ces substances sont solides ou liquides ; néanmoins elle se fait tou- jours , soit à l’aide des mouvemens de la bouche, soitau moyen des membres supérieurs. Bouche. Pour les anatomistes , la bouche ne consiste pas dans l’ouver- ture qui sépare les deux lèvres , mais dans la cavité ovalaire formée en haut par la mâchoire supérieure et le palais , en bas par la langue et la mächoire inférieure , latéralement par les joues , en arrière par le voile du palais , et en avant par les lèvres. L'ouverture par laquelle elle communique au-dehors peut à vo- lonté s’élargir et se fermer, soit par le mouvement des lèvres, soit par l’écartement ou le rapprochement des mâchoires. Il est donc facile de comprendre comment elle peut servir à la préhen- sion des alimens. Ces organes agissent comme le feraient des pinces , et saisissent les corps qui doivent être introduits dans la bouche. Chez la plupart des animaux , ce sont ces mêmes or- ganes qui vont au-devant des alimens , pour s’en saisir ; mais, chez l’homme et chez quelques autres animaux , la division du travail est en général portée plus loin ; car ce sont les mem- bres antérieurs qui remplissent ces fonctions. La main place les alimens dans la bouche, et les lèvres et les mâchoires ne se rap- prochent que pour les y retenir. La préhension des boissons se fait de deux manières : tantôt le liquide est versé dans la bouche et y tombe par l'effet de sa propre pesanteur ; d’autres fois, il est pompé par cette cavité, soit par la dilatation du thorax, qui détermine aussi l’entrée de air dans les poumons, soit par les mouvemens de la langue, qui ,en se retirant en arrière , agit à la manière d’un piston. Ce dernier phénomène constitue l’action de sucer ou de téter. Séjour des … Les boissons ne séjournent pas dans la bouche et descendent elimens dans @e suite dans l’estomac; maïs les alimens solides y restent pen- la bouche. Gant un certain temps, et y sont soumis à la mastication et à l'insalivation. Mastication. La mnastication ou la division mécanique des alimens est opé- rée , comme nous l’avons déjà dit, par les dents. DE LA DIGESTION. SI Ces organes sont des corps d’une dureté extrême , qui sont Deuts. implantés dans le bord de chaque mâchoire, de manière à agir les uns contre les autres. Ils ressemblent beaucoup à des os ; mais ils en diffèrent sous un rapport très important; car les os sont des parties qui vivent et se nourrissent sans cesse , comme nous l'avons déjà vu par les expériences sur leur coloration (1), tandis que les dentsne vivent pas : elles ne sont pas le siège d’un mouve- ment nutrilif, et les matériaux dont elles sont composées ne se renouvellent pas. En cela, elles ressemblent aux cheveux , aux ongles et même à tous les produits sécrétés par des glandes , tels que la salive, la bile ou l'urine. Seulement , au lieu d’être tou- jours liquides , comme ceux-ci , elles ne tardent pas à se solidi- fier, et acquièrent une dureté très grande. Fig. 19. (2) Et en effet, les dents sont Mode de h e formées par des organes sé- forxation. crétleurs renfermés dans l’in- térieur des mâchoires (4, fig. 18). Ce sont de petits sacs f membraneux (Capsule Ou ma- trice de La dent), au fond des- er ne CAT À quels se trouve un petit noyau 2 _ “ pulpeux, appelé germe, et dans lesquels viennent se ra- mifier des filets nerveux , et un grand nombre de vaisseaux san- guins (#g. 19). Le bulbe ou germe () laisse transsuder ‘une hu- meur gélatineuse, qui remplit la capsule (4), et il. se dépose bientôt à la partie supérieure de sa surface quelques grains de Fig. 20 (3) substance pierreuse (4, d.), d d qui grossissent par l’exsuda- tion d’une nouvelle quantité d 4 de matière, et se réunissent B entre eux de façon à enve- lopper le noyau pulpeux dont ils proviennent. L’enveloppe solide, résultante de cette es- C pèce de cristallisation, se moule exactement sur le germe, et, comme c’est elle qui doit (1) Page 4. (2) Cette figure représente la mâchoire inférieure d'un très jeune enfant; la majeure partie de la surface extérieure de l’os a été enlevée pour mettre à nu les capsules des dents renfermées dans son intérieur ; — a gencive ; —b bord in- férieur de la mâchoire ; — c angle de la mächoire ; — d capsules dentaires ; — e apophyse coronoïde ; — fcondyle de la mâchoire. (3) Coupe d’une capsule dentaire grossie pour montrer la disposition du 6 89 ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. constituer la dent, on voit que la forme de ces corps dépend de celle du germe lui-même. A mesure que cet organe sé- créteur laisse exsuder une nouvelle quantité de matière pier- reuse, celle-ci s’accolle à celle précédemment formée, et consti- tue une nouvelle couche , située au-dessous des précédentes. La dent grossit ainsi par l'addition de couches successives et con- centriques , et le germe se trouve enfin resserré dans un canal qui occupe le milieu de ce corps, et qui diminue à mesure que de nouvelles matières s’interposent entre cet organe et la sub- stance de la dent. Lorsque le germe n’adhère au fond de la cap- sule que par un seul point, la dent ne peut se terminer que par un seul tube ou racine; mais, lorsque cet organe adhère par plusieurs points , la matière pierreuse , sécrétée par lui , pénètre entre les pédoncules , enveloppe le dessous du noyau, et, en se prolongeant , forme autant de tubes ou de racines , qu'il y a de points d’adhérence. Structuredes Cest de la sorte que le corps de la dent se forme et se déve- dents. loppe ; mais , à mesure que la matière pierreuse se dépose ainsi par lames dans son intérieur, sa surface s’incruste d’une autre substance encore plus dure , qui est formée par la capsule, et qui porte le nom d'email , tandis qu’on appelle ivoire la partie centrale sécrétée par le germe. Vers la partie supérieure du sac membraneux , qui enveloppe le germe , on remarque une multi- tude de très petites vésicules , qui sont disposées avec beaucoup d'ordre, et qui sécrètent une liqueur particulière , laquelle s’épanche par gouttelettes sur la dent , s’y épaissit et forme l’es- pèce de vernis dont il vient d’être question. Dans l’homme et dans les animaux carnivores , les dents ne sont formées que de ces deux substances , Pivoire et l'émail ; mais chez les mammifères herbivores , quelques-uns de ces corps présentent une troisième substance , qui recouvre Fémail et que l’on nomme pour cette raison corticale : elle est sécrétée par la capsule et ressemble beaucoup à Pivoire. Conposiren L’ivoire des dents se compose de gélatine mêlée à du phosphate chimique des de Chaux (dans la proportion d'environ soixante pour cent chez dents. l’homme adulte et contenant aussi une petite quantité de carbo- nate de chaux (dix pour cent parties d'ivoire). L’émail ne contient qu'environ vingt pour cent de matière animale et huit de carbo- nate de chaux; soixante-douze centièmes sont formés par du phosphate de chaux. D’après quelques chimistes , on y trouverait aussi du fluate de chaux ; mais l'existence de cette matière ne germe et de la manière dont la matière pierreuse se dépose sur sa surface ; — a capsule; — 2 bulbe ou germe;— c vaisseaux sanguins et nerfs qui pénètrent dans le balbe ; — d, d premiers rudimens de la dent. DE LA DIGESTION, S3 parait pas être constante, et, dans tous les cas, elle ne se trouve qu’en qfantités extrêmement petites. Du reste, ce qui distingue surtout l'émail de livoire , est son Lissu compacte et fibreux, sa couleur, et sa dureté, qui est si grande, que cette substance fait feu au briquet à la manière du caillou. A mesure que la dent grandit par l'addition de nouvelles couches, soit d'ivoire , soit d’émail, elle se rapproche du bord de la mâchoire, puis la traverse , sort de la gencive, dont ce bord est garni, et fait saillie en-dehors , mais la partie inférieure de la dent. qui s’est formée en ne lieu reste dans la mâchoire , et sert à l'y fixer. On donne le nom d’alveole aux cavités osseuses, dans lesquelles les dents sont ainsi implantées, et celui de racines à la partie de la dent qui y demeure enfermée. On appelle cou- ronne de la dent la partie qui fait saillie en dehors, et coZlet le point de réunion ae la couronne avec la racine. Les racines diffèrent aussi de la couronne des dents par l’ab- sence d’émail, dont celle-ci est au contraire recouverte, et la cause de cette différence réside évidemment dans la position de la partie de la capsule, qui sécrète ce vernis pierreux: elle est en rapport avec la partie supérieure de la dent, mais ne descend pas jusqu’au pédoncule du bulbe où se forment les racines. Les dents présentent différentes formes, et leurs usages varient suivant la nature de ces différences : les unes se terminent par une lame mince et tranchante , aussi ,servent-elles à couper les substances introduites entre les mâchoires , et ont-elles reçu le nom de dents incisives (fig. 21, a, b). D’autres sont coniques et chez beaucoup d'animaux s’avancent bien au-delà des dents voisines : elles ne peuvent pas servir à couper les alimens comme les dents incisives , mais à s’y implanter et à les déchirer. On les appelle dents canines (ec). Enfin, d’autres se terminent par une surface large et inégale , et présentent les conditions les plus favorables pour écraser et broyer les alimens ; ce sont les dents molaires ou mu- chelieres (d, e, f,q, h). Lorsque nous nous occuperons de l’étude des animaux, nous verrons comment la disposition des dents varie, suivant que ces êtres doivent se nourrir de substances animales ou végétales, de chair molle ou de petits animaux cachés sous une peau co- riace ou cornée comme les insectes , d'herbes tendres ou de bois plus ou moins durs ; et nous verrons aussi que par la seule in- spection de ces organes on peut arriver à connaitre avec beau- coup de certitude le régime, les mœurs et même la structure générale de la plupart des mammifères. La bouche de l’homme est armée des trois espèces de dents que nous venons de signaler, et la manière dont elles sont im- planiées dans les mâchoires varie aussi bien que la formé de leur 6. Déc veloppe- ment des dents. Forme des cents. Incisives. Canines. Molaires. Première dentition. Seconde dentition. 84 ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. couronne. Les dents incisives (4, b), dont le jeu doit tendre à les entoncer dans leurs alvéoles plutôt que de les en arracher, n’ont qu’une seule racine assez courte. Les dents canines (-)se prolon- gent dans Pintérieur des mâchoires bien plus profondément que les incisives , et les dents molaires (4,e,f,g, h),qui doivent sup- porter les plus grands efforts , présentent deux ou trois racines divergentes qui augmentent la solidité de leur insertion. Fig. 21: (1) MNT mia, / \r + IN nil A l’époque de la naissance, le développement des dents est peu avancé; il est bien rare qu'aucun de ces corps ail encore percé la gencive, et ce n’est communément que de l’âge de six mois à un an que leur évolution commence. Les dents qui se forment alors sont destinées à Lomber au bout d’un petit nom- bre d'années, et à faire place à d’autres. On les appelle dents de lait, ou de la premicre dentition , et on en compte vingt, savoir : à chaque mâchoire, quatre incisives qui occupent le devant de la bouche , deux canines situées une de chaque côté, immédia- tement après les incisives, et quatre molaires placées au fond de la bouche , deux de chaque coté. Vers l’âge de sept ans , ces dents commencent à tomber et à être remplacées par une autre série de dents, qui se sont formées dans des capsules situées plus profondément que celles dont les premières sont sorties ; aussi leurs racines sont-elles bien plus longues et leur insertion plus solide. Les dents de la seconde dentition sont plus nombreuses que celles de la première ; la série complète se compose de trente deux de ces corps, savoir : pour chaque mâchoire, quatre inci- sives , deux canines et dix molaires , dont les deux premières de chaque côté n’ont que deux racines et sont appelées getiles mo- caires (fig. 21, d, e), tandis les trois situées de chaque côté au fond de la bouche sont pourvues de trois racines el appelées grosses molaires (f,q, h). (x) Dents d’un homme adulte; — a première incisive; — à deuxième inci- ‘ve; —c canine ; — det e petites molaires ; — f, g, h grosses molaires. DE LA DIGESTION. 85 Dans la vieillesse extrême, ces dents tombent comme les dents de lait tombent dans lenfance, mais elles ne sont pas remplaëées et les alvéoles s’oblitèrent. Les dents dont nous venons d'étudier le développement et la Muscles de structure , sont les instrumens passifs de la mastication. Elles la mastication. sont mises en mouvement par les màchoires dans lesquelles elles sont implantées. La mâchoire supérieure ne peut se mou- voir sur le reste de la tète , mais inférieure , dont la forme res- semble un peu à celle d’un fer à cheval, ne s'articule avec le crâne que par l'extrémité de ses deux branches, et peut s’écar- Fig. 22. (1) ter en se rapprochant de la màchoire d e supérieure. Un grand nombre de muscles se fixent à cetos ety impriment ces mouve- mens. Son abaissement est déterminé par la contraction de ceux qui se portent de son bord inférieur à l’os hyoïde. L'effet con- . traire est produit par action des muscles HR * 3 qui se portent des divers points de sa sur- dus face aux tempes et à d’autres parties voi- sines de la tête (2). La puissance des muscles élévateurs de la mâchoire est très grande , et lors de leur contraction, les corps introduits entre les dents sont comprimés avec d'autant plus de force que ceux-ci sont placés plus près du fond de la bouche , et par conséquent plus près des points où ces muscles se fixent. Les alimens sont continuellement ramenés entre les dents par la contraction des joues ou par les mouvemens de la langue, et, pressés ainsi entre deux surfaces dures , très inégales, et dont les aspérités s’engrainent, ces substances ne tardent pas à être divisées en portions plus ou moins petites etcomme broyées. L'importance de cette opération est très grande, car plus la jufluence de mastication est complète plus la digestion est facile. Ce qui, du la mastication (1) a Mâchoire inférieure ; — b articulation de la mâchoire inférieure avec le crâne; — c musele masseter ; — d arcade zygomatique —e muscle temporal; — ff muscle orbiculaire des lèvres ; — g muscle orbiculaire des paupiéres ;—h oc- ciput ou partie postérieure du crâne. (2) Les principaux muscles élévateurs de la mâchoire inférieure sont : 1° Le muscle temporal ( e fig. 22 ) qui naît de l’apophyse coronoïde de cet os (voyez fig. 19 €) passe sous l’arcade zygomatique (d), et s’étend sur les côtés de la tête, où il se fixe; 2° le muscle masseter (c), qui se porte de la face externe de l’angle de la mâchoire à l’arcade zygomatique (4); 3° les deux muscles ptérygoidiens , qui occupent, à la face interne de la mâchoire, la place correspondante à celle du masseter, et vont se fixer à la base du crâne, de chaque côté de l'ouverture pos- térieure des fosses nasales. 86 ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. sur la diges- reste, est aussi aisé à constater qu’à comprendre. En effet, si tion. Insal:vation des alimens. Salive. Glandes sa- livaires. l’on fait avaler à un animal des morceaux de viande de diverses grosseurs , et qu'après un certain temps on le tue pour ouvrir son estomac , on trouvera que les fragmens les plus petits sont ceux dont la digestion est la plus avancée , et que la superficie des plus gros aura été à peine attaquée, tandis que les autres seront déjà complètement ramollis. Or, c’est ce qui arriverait éga- lement si on plongeait dans de l’eau des fragmens de grosseurs inégales de tout corps susceptible de se dissoudre dans ce liquide : de sucre, par exemple. Pendant que les alimens subissent cette division mécanique , ils s’imbibent de salive et quelquefois mème se dissolvent dans ce liquide. La salive est un liquide incolore, transparent, légèrement visqueux, qui coule continuellement dans la bouche, dont elle occupe les parties les plus déclives. L'analyse chimique a montré qu’elle était composée d’environ 993 parties d’eau sur 1000; les autres sept millièmes sont formés d’une matière animale parti- culière (environ 3 millièmes); de mucus (1,4); de chlorure de sodium (ou sel marin); de chlorure de potassium ; de tartrate de soude , et d’une petite quantité de soude libre, qui donne à ce li- quide des propriétés alcalines. Le mélange de la salive avec les alimens est une circonstance qui a plus d'importance qu’on ne le croirait au premier abord. Il facilite la mastication, il aide puissamment à la déglutition, et, comme nous le verrons par la suite, il paraît jouer aussi un grand rôle dans la digestion de ces substances. Les glandes qui forment la salive sont situées à lentour de la bouche, et sont composées de petites granulations agglomérées entre elles. Chez l’homme il en existe trois paires placées symé- triquement de chaque côté de la tête : Savoir, les glandes paro- tides, situées au-devant de l'oreille et derrière la mâchoire infé- rieure ; les glandes sous-maxillaires logées sous l'angle de la mà- choire (7, fig. 23), et les glandes sublinguales (2) placées au-dessous de la langue, dans l’espace que les deux côtés de la mâchoire laissent entre eux. Ces glandes communiquent chacune avec la bouche par ün conduit excréteur particulier , et y versent la salive en quantités variables. Lorsqu'on éprouve de Pappétit, la vue des alimens suffit pour en déterminer un afflux plus considérable, et la pré- sence d’un corps étranger dans la bouche, même d'un corps complètement insipide, excite toujours la sécrétion de ce li- D DE LA DIGESTION. 7 quide; il parait que lors de la mastication il devient aussi plus alcalin qu'il ne l’est ordinairement. Tant que la mastication n’est pas achevée l'ouverture posté- Déglutition rieure de la bouche est fermée par le voile du palais qui est des alimens- abaissé et qui s’applique contre la base de la langue. Les alimens ne peuvent donc pénétrer plus avant dans le canal digestif; mais lorsque cette opération est terminée , cette cloison mobile qui sépare la bouche du pharynx s'élève et la déglutition s'opère. Fig. 23 (1) On donne ce nom au passage F des alimens de la bouche jus- que dans Pestomac à travers le pharynx et l'æœsophage. Le pharynx Où arricre-bou- 1 che est une cavité qui fait suite à la bouche , et qui est placée à , la partie supérieure du cou ( fig. 23 et 24 ). Par son sommet , il communique avec les fosses nasales ; eten haut et en avant, il n’est séparé de la bouche que M par le voile du palais. En bas el d en avant, le larynx (e) vient s'y ouvrir ; enfin , en bas et en ar- e rière il se continue avec l'œso- phage (i), tube long et étroit qui n descend le long du cou, ira- verse le thorax en passant en- tre les deux poumons derrière : le cœur, et au-devant de la PONT à colonne vertébrale, traverse le muscle diaphragme et se termine enfin à l'estomac. (1) Cette figure représente une section verticale de la bouche et du pharyex vus du profil; — a le nez; — à la lèvre supérieure, placée au-devant de la voûte du palais, qui se porte horizontalement en arrière , et sépare la cavité de la bouche des fosses nasales ; —c la langue dont la base se fixe à l'os hyoïde (4) — e le larynx suspendu à l'os hyoïde et s’ouvrant dans l'arrière - bouche ; — f portion de la trachée-artère, tube qui se continue avec le larynx d'une part, et se rend de l’autre dans les poumons ; — g portion de la base du crâne à la- quelle est suspendu le pharyux ou arrière-bouche (4); — : commencement de l’æsophage ; — k section du voile du palais; au-dessus de cette cloison on aperçoit l'ouverture postérieure des fosses nasales , et au-dessous deux espèces de piliers entre lesquelles se trouvent les amygdales ; —/ glande sublinguale pla- cée sous la langue, et communiquant avec la bouche par un petit conduit 88 ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. Fig. 24. (1) Le voile du palais, qui sé- RL pare la bouche du pharynx, est une cloison mobile, suspendue transversalement au bord pos- térieur du palais, et libre par son bord inférieur qui se pro- longe au milieu en une pointe appelée la Zuette (fig. 23 L, et TE 24 d. )Ilest formé par un repli de la membrane muqueuse qui f tapisse tout le canal digestif, et il renferme, dans son intérieur, un grand nombre de muscles qui lui permettent d'exécuter plusieurs mouvemens ; de s’a- baisser pour s’appliquer contre la langue, et de s’élever et de se portier obliquement en arrière vers la paroi postérieure du pharynx, de façon à intercepter plus ou moins complètement le passage entre cette cavité et les fosses nasales. Mécanisme La déglutition est en apparence fort simple , et cependant elle de la défluti- est réellement le plus compliqué de tous les mouvemens qu pi La servent à la digestion. Elle est produite par la contraction d’un grand nombre de muscles, et exige le concours de plusieurs organes importans. Tous les muscles de la langue, du voile du palais , du pharynx, du larynx et de l’æœsophage y prennent part. excréteur dirigé en avant ;—» glande sous-maxillaire située en arrière et au-des- sous de la précédente; — n corps thyroïde , espèce de glande imparfaite placée au-devant de la partie inférieure du Jaryux. ( Foy. pag. 53.) (x) Le pharynx vu par derrière et ouvert pour montrer la position relative des ouvertures postérieures des fosses nasales, du voile du palais, du fond de la bouche, et de l'ouverture du larynx; — a base du crâne ; — » apophyse mas- toide de l'os temporal, située sur le côté de la base du crâne derrière l’o- reille ; -— c cloison verticale qui sépare les deux fosses nasales, dont on aper- coit la terminaison à la partie supérieure de l’arrière-bouche ; — d voile du pa- lais faisant suite à la voûte du palais ; au milieu de son bord inférieur on remar- que un prolongement nommé la luelte, et de chaque côté de cet appendice on apercoit la cavité buccale; — e base de la langue; — fextrémité de l’os hyoïde; du côté opposé cet os est entièrement caché par la portion de la paroi posté- térieure du pharynx qui se trouve rejetée en dehors ; — 2 ouverture du larynx ou glotte conduisant aux poumons par Ja trachée-artère ; une espèce de valvule, nommée épiolotte, s'élève au-dessus et en avant de cette ouverture; on la voit ici appliquée contre la base de la langue; — À portion de la trachée-artère ; — : commencement de l’æsophage.—4 l’un des muscles élévateurs du pharynx. DE LA DIGESTION. 89 Lorsqu'elle doit commencer, les alimens sont rassemblés sur le dos desla langue qui s'élève et les presse d’avant en arrière contre le voile du palais; cette cloison s’élève alors pour devenir horizontale, et permet ainsi aux alimens de sortir de la bouche; si elle n’opposait pas un obstacle au mouvement imprimé à ces sub- stances par les mouvemens de la langue, les alimens pénétreraient dans les fosses nasales; mais la direction dans laquelle elle se place les oblige à descendre dans le pharynx. Cette première période de la déglutition est soumise à l’empire de la volonté ; mais il n’en est pas de même de la suite de cette opération, et les mouvemens à l’aide desquels les alimens arrivent à la partie inférieure du pharynx sont involontaires et en quelque sorte convulsifs. Le bol alimentaire (c’est ainsi que lon nomme chaque masse d’alimens avalés) ne franchit alors qu’un espace très court; mais il doit éviter l’ouverture du larynx, ainsi que celle des fosses nasales, où sa présence serait nuisible, et son passage doit être assez prompt pour que la libre communication entre le larynx et l'air externe ne soit que momentanément in- terrompue. Voyons comment la nature est parvenue à ce résultat im- portant. Le bol alimentaire n’a pas plus tôt touché le pharynx, que tout entre en mouvement. Cette cavité se contracte et embrasse le bol alimentaire , pendant que d’un autre côté le larynx s’élève et va au-devant de ce corps pour rendre plus rapide son passage sur ouverture de la glotte. Enfin, pendant ce mouvement, les bords de cette ouverture se ferment exactement , et l’épiglotte, pressée contre la base de la langue , s’abaisse de façon à couvrir l’entrée du larynx. Aussi le bol alimentaire, toujours pressé par la contraction du pharynx, glisse à la surface de l’épiglotte , et parvient à l’æsophage dont les fibres circulaires , en se contrac- liant successivement, le poussent jusque dans l'estomac. 90 ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. L’estomac (fig. 18,b)est une portion élargie du canal alimentaire qui faitsuite à l’æsophage, et quiestle siège du phéno- mène le plus remarqua- ble de la digestion, la transformation des ali- mers en chyme. Cest une poche membraneu- 9 se,qui est placée entra- vers à la partie supérieu- re de l'abdomen , et qui a la forme d’une corne- muse(1).Ilse rétrécitgra- : 4 duellement de gauche à . : droite etse recourbesur lui-même, de façon que son bord supérieur est concave et très court, tandis que son bord in- férieur ( appelé grande courbure de l’estomac ) estconvexe et très long. Vers les deux tiers de l'estomac, il existe, pen- | dant la digestion sur- d x j tout, un rétrécissement qui divise cet organe en deux parties ; lune située à droite , est nommée portion cardiaque de l'estomac; l’autre, située à gauche, estappelée portion pylorique. L'ouverture par laquelle ce viscère communique avec l’œsophage est également appelée ouver- ture cardiaque, parce qu’elle est située du côté du cœur. Celle qui conduit de l'estomac dans les intestins est située à Pextré- mité de la partie pylorique, el se nomme pylore. (2) Estomae, (r} C’est en effet avec l'estomac d’animaux où cet organe ressemble beaucoup à celui de l’homme, que l’on fait le réservoir à air des cornemuses. (2) Le mot pylore est dérivé du grec muxcvgès portier ( æÿxn porte et cbpcs gardien ), et a été donné à l’orifice intestinal de l’estomac pour rappeler les fonctions qu’il remplit; tant que la digestion des alimens n’est pas assez avan- cée pour que ceux-ci doivent passer dans l'intestin, le pylore reste contracté et ne leur livre point passage; mais lorsque les alimens sont transformés en chyme cette ouverture se desserre et se laisse traverser. On donne le nom de DE LA DIGESTION. 91 Les parois de l'estomac sont très extensibles : lorsque sa cavité n'est pas remplie d’alimens, elles se contractent, et on voit alors à leur face interne une multitude de plis dont lenombre diminue à mesure que l'organe est plus distendu. On remarque aussi à la surface de la membrane muqueuse qui tapisse l'estomac, un nombre très considérable de petites cavités sécrétoires , appe- lées follicules gastriques, qui versent sur les alimens le liquide qu'ils forment. Ce liquide, que l’on nomme suc gastrique, est, comme nous le verrons par la suite, l’un des agens les plus importans de la digestion, car c’est son action sur les alimens qui en détermine leur transformation en chyme. Lorsque l'estomac est vide , il ne se forme qu’en très petites quantités; mais lorsque les parois de cette cavité sont excitées par le contact des alimens, et surtout d’alimens solides , le suc gastrique coule en abondance et a tou- jours des propriétés acides très marquées. Cette acidité parait être due en partie à de l'acide hydrochlorique libre , et en par- tie à la présence d’une substance particulièré , qui se rencontre aussi dans le lait et que l’on appelle acide lactique. On y trouve aussi quelques sels , tels que du sel marin, du phosphate de chaux, etc. et environ quatre-vingt-dix-huit centièmes d’eau. Les substances alimentaires qui s'accumulent dans estomac y sont assez fortement pressées par l’action des parois muscu- laires de abdomen , et tendraient à remonter dans lœsophage, si la portion de ce conduit, voisine du cardia , n’était pas fer- mée par la contraction de ses fibres musculaires. Quelquefois celte résistance est vaincue, et les alimens remontent jusque vers la bouche, ou sont même rejetés au dehors , phénomènes qui portent les noms de regurgitation où de vomissement. D’un autre côté, les alimens ne peuvent traverser simplement l'estomac, et pénétrer de suite dans les intestins, çar l’ouverture du pylore est complètement fermée par la contraction énergique des fibres musculaires dont elle est entourée. Les alimens sont donc retenus dans l'estomac, et s’y accumu- lent, principalement dans la partie cardiaque , ou grand cul-de- sac de cet organe. QGuelques-unes des substances ainsi ingérées sont alors simplement absorbées par les parois de estomac , et pénètrent dans le sang sans avoir subi d’altération préalable ; Veau , l'alcool faible et quelques autres liquides sont dans ce valvule du pylore à un bourrelet circulaire qui entoure cette ouverture,et qui est formé par un repli des tuniques muqueuse et musculaire de l’estomac. Suc gastri- que. Séjour des alimens dans l'estomac. Formation du chyme. Mouvemens péristaltiques de l'estomac. Durée de la digestion sto- macale, Cause de la 92 ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE, cas. D’autres substances pénètrent dans lintestin , et sont même expulsées au dehors avec les excrémens sans avoir été altérées ; mais les alimens y sont digérés, et transformés ainsi en une masse pulpeuse et semi-liquide, appelée ckyme. On remarque d’abord que les fragmens placés vers la surface de la masse alimentaire, et près des parois de l'estomac, s’imbi- bent de suc gastrique, deviennent acides comme ce liquide , et se ramollissent peu-à-peu de la superficie vers le centre. Toute la masse des alimens finit par subir la même altération, et par suite de ce ramollissement, ces substances se transforment en une matière molle, pultacée , en général grisâtre , et d’une odeur fade et particulière, qui est du chyme mêlé à des débris d’ali- mens. On remarque aussi qu’il se forme sur les parois de lesto- mac une substance blanchâtre , qui ressemble à du blanc d'œuf légèrement cuit, et qui se mêle aux autres produits de la di- gestion stomacale. Ces altérations ont lieu avec plus de rapidité dans le voisinage de la partie pylorique de l’estomac que dans le grand cul-de-sac, et se propagent de la superficie de la masse alimentaire vers son centre. Pendant que la chymification s’opère, les parois de l’estomac deviennent le siège de contractions circulaires qui se succèdent d’abord de droite à gauche , de façon à pousser le chyme dont la masse alimentaire est recouverte vers le grand cul-de-sac de l’es- tomac; mais, après un certain temps, tous ces mouvemens ver- miculaires , que l’on nomme peristaltiques , se font dans le sens opposé et portent le chyme vers le pylore, puis jusque dans Pin- testin grèle. Toutes les substances alimentaires ne sont pas transformées en chyme avec la même promptitude. Les observations et les expériences, qui ont été faites à ce sujet, montrent que la chair musculaire est beaucoup plus facile à digérer que la plupart des substances herbacées ; que la cuisson influe beaucoup sur ce phénomène; que le veau bouilli, par exemple, est des deux tiers plus digestible que le veau rôti; que la peau et les tendons résistent pendant long-iemps à l’action de lestomae, etc. Du reste, il existe, à cet égard, de grandes différences sui- vant les individus. Le volume des morceaux dalimens avalés influe aussi beaucoup sur leur transformation en chyme, ce qui se comprend parfaitement bien d’après la nature du travail di- gestif. En général, les alimens séjournent pendant plusieurs heures dans l'estomac avant que d’être complètement transformés en chyme. On a fait un grand nombre d'expériences dans la vue de nous DE LA DIGESTION. 93 éclairer sur ce qui se passe pendant la digestion des alimens dans Pestgmac. Les plus remarquables sont celles de Spallan- zani, physiologiste célèbre de Modène. À l’époque où il entre- prit ses recherches , on croyait que ce phénomène n'était autre chose qu'une espèce de trituration , et que le chyme n’était que des alimens broyés de façon à les réduire en pulpe ; mais Spal- lanzani montra qu’il en était autrement. Il fit avaler à des oi- seaux des alimens renfermés dans des tubes et dans des espèces de petites boîtes métalliques dont les parois étaient criblées de trous , de façon à préserver ces substances de tout frottement, mais à ne point les soustraire à l’action des liquides contenus dans lestomac, et il trouva que la digestion s’en était opérée comme dans les circonstances ordinaires. Il en conclut avec raison que le suc gastrique devait être la cause principale de la chymification des alimens, et, pour le mieux démontrer, il eut encore recours à des expériences très ingénieuses. Il fit avaler à des corbeaux et à d’autres oiseaux de petites éponges attachées à une ficelle, au moyen de laquelle il retira ees corps de lesto- mac, après qu'ils y eurent séjournés quelques minutes et qu’ils s’y furent imbibés des liquides contenus dans cette cavité. Il se procura ainsi une quantité considérable de suc gastrique qu’il placa dans de petits vases avec des alimens convenablement divisés; il eut soin en même temps d’élever la température de façon à imiter, autant que possible, les circonstances dans les- quelles la chymification a lieu, et au bout de quelques heures il vit la masse alimentaire, soumise à cette digestion artificielle, se transformer en une matière pulpeuse semblable en tous points à celle qui se serait formée dans l’estomac par suite d’une di- gestion naturelle. Il est donc évident que l’action du suc gastrique sur les ali- mens est la cause principale de leur transformation en chyme. La portion du canal alimentaire, dans laquelle les alimens pénètrent après leur digestion dans lestomac, porte le nom d'éntestin (fig. 18, e, d). C’est un tube membraneux et contourné sur lui-même, dont le diamètre est peu considérable, mais dont la longueur est très grande, étant chez l’homme environ sept fois celle du corps. Chez les animaux qui se nourrissent exclusivement de chair, les intestins sont, en général, plus courts que chez l’homme et les autres animaux omnivores, tandis que chez les herbi- vores , leur longueur est beaucoup plus considérable. Ainsi dans le lion elle n’est que d'environ trois fois celle du corps et dans le bélier elle est souvent égale à vingt-huit fois cette longueur. transforma- tion des ali- mens en chy- me, Intestins. I le. co ti °= ntestin gre Liquides ntenus dans l'intestin grè- le. Foic. 94 ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE.- La raison de ces différences est facile à saisir, car il est évi- dent que les substances herbacées, qui se digèrent très lente- ment et qui renferment une très petite portion de matière réel- lement nutritive, doivent être prises en plus grande quantité, et doivent séjourner pendant plus long-temps dans le canal alimentaire que la chair musculaire dont la digestion est très prompte et dont presque toute la masse est composée de ma- tières nutritives. Les intestins, comme nous l’avons déjà dit, sont logés dans l'abdomen, et renfermés dans les replis du péritoine qui les fixent à la colonne vertébrale. Ils se composent de deux parties dis- tinctes: l’entestin grele et le gros intestin. L’éntestin grele fait suite à l'estomac, et c’est dans son inté- rieur que la digestion s’achève. Il est très étroitet forme environ les trois quarts de la longueur totale des intestins. Sa surface exté- rieure est lisse, les fibres musculaires qui entourent sont serrées les unes contre lesautres, etla membrane muqueuse qui en tapisse l’intérieur présente à sa surface une foule de petits folicules et de petits appendices saillans nommés vi/losites. On y remarque aussi un grand nombre de plis transversaux , nommés valvules conni- ventes. Les follicules sécrètent continuellement une humeur vis- queuse, dont la quantité est très considérable, Les villosités, comme nous le verrons bientôt, paraissent servir spécialement à l’absorption des produits de la digestion et les valvules conni- ventes à retarder la marche du chyme. Les anatomistes distinguent dans l'intestin grèle trois por- tions , le duodenum (1), le jejunum (2) et l'iléon (3); mais cette distinction est de peu d'importance en physiologie. Les matières alimentaires qui pénètrent dans cet intestin s’y mêlent avec les humeurs sécrétées par ses parois, et avec deux liquides particuliers , la bite et le suc pancréatique, qui sont formés chacun dans un organe glandulaire , situé dans le voisi- nage de l’esiomac. Le fose (fig. 18, D), qui est l’organe producteur de la bile, est le vis- cèrele plus volumineux du corps. Il est situé à la partie supérieure de l'abdomen principalement du côté droit, et descend jusqu’au niveau du bord inférieur des fausses côtes. Sa face supérieure est convexe et sa face inférieure irrégulièrement concave. On y dis- tinguetrois lobes, dont le plus grand est situé à gauche, et séparé (1) Ainsi nommé, parce que sa longueur est a-peu-près égale à douze tra- verses de doigts. (2) Le nom de jéjunum a été donné à cette portion de lintestin parce que , dans le cadavre , on la trouve ordinairement vide. (3) Lleum , de 30e, tourner, cntortiller. DE LA DIGESTION. 95 du lobe droit par une échancrure, et dont le plus petit (nommé lobule)est placé au-dessous des deux autres. La c: uleur de cet or- gane est rôge brun à sa surface et jaunâtre dans l’intérieur. Sa substance est molle et compacte, mais traversée par une multi- tude de canaux , et lorsqu'on la déchire, elle paraït être formée par l’agglomération de petites granulations solides, dans les- quelles aboutissent les vaisseaux sanguins, et desquelles nais- sent les conduits excréteurs destinés à porter la bile au dehors. Ces canaux excréteurs se réunissent successivement entre eux pour former des rameaux, des branches et enfin un tronc qui sort du foie par la face inférieure de cet organe pour se por- ter au duodénum, et qui communique aussi avec une poche membraneuse adhérente au foie , habituellement distendue par de la bile et nommée vesicule du fiel. La terminaison du canal se voit dans le duodénum, à peu de distance de l’es- tomac. (1) Le foie présente une particularité très remarquable. La majeur partie du sang qui circule dans cet organe n’est pas artériel, comme dans les autres parties du corps. Le sang veineux provenant des intestins y arrive par la veine-porte, qui s'y ramifie à la manière des artères, et il paraitrait même que c’est principalement aux dépens de ce liquide que la formation de la bile a lieu. La bile est un liquide visqueux, filant, verdâtre et d’une sa- veur très amère. Sa composition chimique est très compliquée, car on y trouve de l'eau, de lalbumine , une matière résineuse, un principe colorant jaune, diverses matières grasses, plusieurs sels et de la soude libre. Elle est toujours alcaline et a quelque analogie avec du savon. $ La bile s'écoule constamment dans l'intestin, mais il paraît que c’est pendant la digestion qu’elle y arrive en plus grande abondance; car, lorsque l’estomac est vide, la vésicule de fiel se remplit, et lorsque la digestion est terminée, on trouve ce réservoir presque vide. Le suc pancreatique a beaucoup d’analogie avec la salive, tant parses propriétés physiques que par sa composition chimique ; la glande pancreas (2) qui le forme ressemble aussi aux glandes sali- vaires. C’est une masse granuleuse divisée en un grand nombre (x) Le conduit excréteur qui sort immédiatement du foie se nomme canal hépati- que, et celui qui vient de la vésicule canal cystique. Enfin, le tronc commux formé par la réunion de ces deux vaisseaux est appelé canal cholédoque(de Lh bile , et de dope , Jui contient. (2) Le mot pancréas signifie tout charnu (de räy, tout , et de #o8xs , Chair), et a été donné à cette glande par les anciens. é Pile. Suc pan- créatique. Panceréas. Séjour du chyme dans l'intestin. Chyle. Gaz intes- tinaux. Gros intes- tin. Cœcum. 96 ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. de lobes et de lobules, de consistance assez ferme et de couleur blanc-grisâtre tirant un peu sur le rouge, qui est placée en travers entre l'estomac et la colonne vertébrale ({g. 18, n). Chacune des granulations qui la forment donnent naissance à un petit conduit excréteur qui se réunit à la manière des veines, et forme ainsi un Canal qui s’ouvre dans le duodénum près de embouchure du canal cholédoque. Nous avons déjà vu comment les mouvemens péristaltiques de l'estomac poussent le chyme dans le duodénum à travers le pylore. Cette ouverture est garnie d’une valvule qui s'oppose au retour de cette matière dans l'estomac, et la présence du chyme dans l’intestin détermine, dans ce tube, des contractions analo- gues à celles de l’estomac, et qui ressemblent exactement aux mouvemens d’un ver de terre qui rampe. A laide de ces mouve- mens vermiculaires, le chyme s’accumule dans l'intestin etavance de plus en plus dans l’intérieur de ce tube. Pendant ce tra- jet, il se mêle avec la bile et les autres humeurs qu’il rencontre, et change peu-à-peu de propriétés ; il devient jaunâtre, amer, de moins en moins acide , puis alcalin, et en même temps il s’en sépare une matière plus ou moins épaisse, tantôt blanche, tantôt grisâtre, suivant la nature des alimens dont elle provient, qui s'attache à la surface de la membrane muqueuse intestinale, et qui porte le nom de cAyle brut. Cette matière est absorbée comme nous le verrons bientôt, et vers le tiers inférieur de l'intestin grèle il ne s’en trouve presque plus; la pâte formée par le résidu du chyme, par la bile et les autres humeurs déjà mentionnées acquiert, dans cette portion du tube alimen- taire, plus de consistance, prend une couleur plus foncée, et passe dans le gros intestin pour être rejetée au-dehors sous la forme d’excrémens. Cest donc dans l'intestin grèle que la digestion s'achève, et pendant ce travail, il se dégage de la masse alimentaire divers gaz qui distendent plus ou moins lintestin. Ces gaz sont prin- cipalement de l’acide carbonique et d'hydrogène pur; quelque- fois on y trouve aussi de lazote. Le gros intestin (fig.18,e,q, h, +), qui fait suite à l'intestin grèleet qui reçoit le résidu laissé par la digestion ,se distingue facilement par les dilatations nombreuses que l’on remarque sur ses parois entre les divers faisceaux formés par ses fibres musculaires. On le divise en cœcum, en colon et en rectum. Le cæcum(1),qui est situé (r) Les anatomistes ont nommé cæœcum la première portion du gros intestin , DE LA DIGESTION. 97 près de l'os de la hanche, du côté droit , se prolonge en cul-de-sac au-delà du point d'insertion de l'intestin grèle, et présente, à son extrémité, un appendice vermiforme. Des replis, disposés en manière de valvules, garnissent l’ouverture de lintestin grèle, et s'opposent à ce que les matières , poussées dans le cœcum , puissent rentrer dans Piléon et retourner vers l'estomac. Le colon (1) faitsuite au cœcum, remonte vers le foie, traverse l'abdomen immédiatement au-dessous de l'estomac, et redes- cend du côté gauche pour gagner le bassin où il se continue avec le rectum, qui se termine à lPanus. Le résidu provenant de la digestion des alimens est poussé peu-à-peu depuis le cæœcum jusqu’au rectum (2), où il s’accumule et séjourne pendant un temps plus ou moins long. En traver- sant ainsi le gros intestin , ces matières acquièrent de la consis- tance, changent de couleur et prennent une odeur particulière. Il se développe en même temps dans cêt intestin une quantité plus ou moins considérable de gaz, qui diffèrent essentiellement de ceux de lintestin grèle par lexistence presque constante d'hydrogène carboné , et quelquefois aussi par la présence d’un peu d'hydrogène sulfuré. Les fibres charnus qui entourent l'anus et qui forment le muscle sphincter de cette ouverture, sont continuellement con- tractés et s'opposent par conséquent à la sortie des matières accumulées dans le gros intestin. En général, pour que leur expulsion ait lieu, il ne suffit même pas de la contraction des fibres musculaires qui entourent cet intestin , il faut aussi que le diaphragme et les autres muscles de Pabdomen concourent au même but, en comprimant la masse des viscères renfermés dans celle cavité. Tels sont les principaux phénomènes de la digestion. Cher- Colon. Marche du résidu de la digestion dans le gros intes- tin. Théorie de chons maintenant , si, dans l’état actuel de la science , il est la digestion possible d'expliquer d'une manière satisfaisante les divers chan- gemens que les alimens éprouvent pendant la durée de ce travail. Les expériences de Spallanzani et de quelques autres physio- logistes montrent que les agens principaux de la digestion sont les divers liquides dont les alimens sont baignés dans les différentes parce qu’elle se prolonge inférieurement sous la forme d’un cul-de-sac (de cœcus, aveugle). (1) On fait venir ce nom de xwA0o , j'arrête, parce que cet intestin retient long-temps les matières excrémentitielles dans ses replis. (2) Cet intestin est ainsi nommé parce qu'il est droit. 98 ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. parties du canal digestif. Ces sucs sont de trois classes : 1° la salive, qui est toujours alcaline ; 2° le suc gastrique, qui est acide; et 5° la bile et le suc pancréatique , qui sont au contraire alcalins comme la salive. Par laction de la salive, les alimens sont quelquefois dissous; mais, dans la plupart des cas , ils sont simplement ramollis , et souvent leurs propriétés physiques ne changent pas beaucoup. Il paraitrait cependant que ce liquide joue un rôle très impor- tant dans la digestion, comme on peut le voir d’après ce qui se passe chez les animaux ruminans. Chez ces animaux , il existe quatre cavités distinctes qui rem- plissent les fonctions de l’estomac unique de l’homme. Les ali- mens sont d'abord introduits dans une vaste poche, appelée panse Où herbier. Ils y séjournent un temps plus ou moins long, puis passent dans le second estomac (Ze bonnet), et sont rame- nés dans la bouche, pour y être broyés par les dents et imbibés de salive ; ils descendent ensuite dans le feuillet ou troisième es- tomac, et de là dans la caillette. Les expériences de MM. Prévost et Leroyer de Genève montrent que les alimens contenus dans la panse , et le bonnet sont imbibés d’un sue alcalin , et que ce suc, en agissant sur eux , dissout l’albumine et quelques auires substances, dont ils sont en partie composés. Si, en les pres- sant , on exprime ce liquide, et qu’on y verse un acide , on voit se former aussitôt un précipité floconneux et semblable à du blanc d’œuf imparfaitement cuit. Or, c’est précisément ce qui a lieu aussi quand la masse alimentaire passe dans le feuillet. Elle rencontre là un suc acide, et il se dépose sur les parois de cette cavité une couche blanchâtre, qui n’est autre chose que du chyme. , D'un autre côté, les expériences de Spallanzani, que nous avons déjà eu l’occasion de mentionner,montrent que les alimens peuvent aussi être attaqués directement par le suc gastrique. Ce liquide peut en effet dissoudre des substances sur lesquelles la salive serait sans action, et les principes , ainsi dissous , doivent à leur tour être précipités à l’état de globules solides , lorsque les sucs alcalins contenus dans l’intestin grèle se mêlent aux pro- duits acides de la digestion stomacale. On voit donc que la digestion des alimens semble résulter de l’action chimique de la salive , du suc gastrique et de la bile sur les alimens et sur les matières extraites de ces substances par l'action du liquide digestif auquel elles ont été soumises avant que de rencontrer l’un ou Pautre de ces deux derniers agens. Ce phénomène consisterait donc essentiellement dans la disso- lution des matières alimentaires , et leur précipitation subsé- quente à l’état globulaire ; maïs , il faut lavouer, il reste encore DE LA DIGESTION. 99 bien des points à éclaircir relativement à la théorie de la diges- tion , et cette question , dont chacun peut apprécier lintérêt et Pimportance , réclame une investigation nouvelle, Pour terminer Pétude de cette fonction , il nous reste encore à examiner comment la matière nutritive extraite des alimens, par le travail digestif, passe du canal intestinal dans la masse du sang, qu’elle est destinée à renouveler. Quelques-uns des liquides introduits dans lestomac sont ab- sorbés directement par les veines qui serpentent dans les parois de cette cavité, et dans celles de l'intestin grèle ; mais le chyle suit une autre route, et pénètre dans un système particulier de canaux destinés à en effectuer le transport. Ces vaisseaux, appelés Fig. 25.(1) chyliferes (ou Lactes, à raison de lappa- rence qu'ils prennent lorsqu'ils sont rem- plis de chyle) ap- partiennent , comme nous avons déjà dit, à l'appareil des vais- seaux lymphatiques. Ils prennent naissan- ce par des orifices imperceptibles à la surface des villosités _ e de la membrane mu- queuse intestinale,et 7 4 seréunissent, à la ma- nière des veines, en branches , plus ou moins grosses qui marchent, entre les deux lames du mé- sentère , vers la co- lone vertébrale. Pendant ce trajet, les vaisseaux lymphati- (1) Portion de l'intestin grèle avec les vaisscaux chylifères qui en naissent, et le commencement du canal thoracique. a Portion de l'intestin ; — # mésentère que fixe l'intestin à la paroi posté- ricure de l’abdomen ; — c radicules des vaisseaux chilifères rampantes sur l’in- testin ; — d glandes mésentériques ;—e vaisseaux chilifères après leur passage à travers les glandes mésentériques ; —fcaval thoracique; — £g portion renfée du canal thoraciqne, appelé réservoir de Pecquet ;— h-h vaisseaux lymphatiques des 7: Absorption du chyle. Vaisseaux chylifères. 100 ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. ques traversent de petits corps de forme irrégulière et d’une couleur rose pâle, que l’on appelle les g/andes mesenteriques(d),et après leur sortie de ces glandes se réunissent en un tronc unique, nommé canal thoracique (f). Ce canal reçoit aussi les vaisseaux lymphatiques de presque toutes les autres parties du corps. Il traverse le diaphragme, et monte au-devant de la colonne ver- tébrale jusque vers la base du cou, où il se termine enfin dans la veine sous-clavière du côté gauche. Il existe dans son intérieur des replis disposés comme les valvules des veines, de façon à permettre le passage des liquides vers la veine sous-clavière, mais à empêcher leur retour vers l'intestin. Lorsqu'un animal est à jeun , ces vaisseaux sont à-peu-près vides, mais lorsque la digestion intestinale esten pleine activité, ils ne tardent pas à se gorger de chyle. Chyle. Les propriétés physiques de ce liquide varient suivant la na- ture des alimens dont il provient, et suivant les animaux où on observe. Dans l’homme et la plupart des mammifères , le chyme esten général un liquide blanc, opaque,ayant à-peu-près l'aspect du lait, d’une saveur salée et alcaline , d’une odeur particulière, Examiné au microscope, on y voit une multitude de globules fort analogues à ceux qui forment le noyau central des glo- bules du sang. Par le repos, il ne tarde pas à se prendre en masse , comme le sang, et au bout de quelque temps, il se sépare en trois parties : un caillot solide qui occupe le fond du vase, un liquide analogue au sérum et une couche très mince qui sur- nage , et qui parait être de nature grasse. Le chyle prend aussi, pendant sa coagulation , une teinte rosée assez vive, et lorsqu'on l’agite avec de l’oxigène, ce phénomène est encore plus marqué. Le chyle provenant d’alimens qui ne renferment point de substances grasses, est beaucoup moins opaque que celui fourni par des matières contenant de la graisse ou de lhuile, et la couche qui, lors de sa coagulation, se forme à sa surface est aussi beaucoup moins épaisse. Le caillot solide, qui se compose principalement de fibrine et de matière colorante, est très peu abondant dans le chyle provenant de la digestion du sucre, de la gomme , etc., tandis que le chyle fourni par la chair muscu- laire en donne beaucoup. Mécanisme Ce sont les villosités dont la surface de la membrane mu- es a queuse de l'intestin est garnie , qui paraissent être spécialement ST chargées de l’absorption du chyle. Aussitôt que ce phénomène commence, on les trouve gonflées et imbibées de ce liquide membres inférieurs, etc., se rendant au canal thoracique ; — à portion de l'artère aorte , à côté de laquelle le canal thoracique remonte pour gagner la veine sous-clavière, DE LA DIGESTION. IOI comme des éponges qui seraient imbibées de lait; quelques ana- tomistes ont cru apercevoir, dans ces espèces de franges, des ouvertures très petites communiquant avec les radicules des vaisseaux lymphatiques, et si cela était, on comprendrait faci- lement comment le chyle peut pénétrer dans ces canaux sans pouvoir être absorbé par les veines. Ce liquide contient , comme nous l’avons déjà dit, des globules qui seraient trop gros pour passer à travers les simples porosités des parois veineuses , tan- dis qu’ils trouveraient un accès facile dans les vaisseaux chyli- fères, à travers les trous dont les villosités paraissent être criblées. Quoi qu'il en soit, le chyle pénètre dans ces derniers vais- seaux, et coule avec assez de vitesse le long du canal thoracique jusque dans la veine sous-clavière gauche; si on lie ce canal sur un animal vivant, on empêche complètement le passage du chyle dans le système circulatoire, et ce liquide s’accumule dans le canal thoracique. La cause de son mouvement ascensionnel dans ce canal, et dans les nombreux vaisseaux chylifères qui représentent les racines de ce tronc, n’est pas bien connue. On observe qu’il persiste pendant quelque temps après la mort, et que le cours du chyle est favorisé par les mouvemens respi- ratoires, les battemens des artères, et tous les mouvemens qui peuvent comprimer d’une manière intermittente le canal tho- racique, Ce qui se comprend parfaitement , à cause des valvules dont nous avons déjà parlé, et dont nous avons expliqué le jeu en traitant de la circulation veineuse. (Voyez pag. 37.) Le chyle , qui se mêle ainsi au sang , sert à réparer les pertes que ce liquide éprouve par son action sur les organes qu’il nour- rit. Mais comment se fait l’hématose ou la transformation de ce chyme en sang? Nous avons déjà vu que ces deux liquides se ressemblent beaucoup , et que , par l'action de Pair sur le chyle, cette res- semblance augmentait encore , parce que la couleur de ce li- quide devient ainsi très analogue à celle du sang. On peut en conclure que c’est dans l’intérieur des poumons et par l’acte de la respiration que s'opère une partie des modifications néces- saires , pour changer le chyle en sang. Mais ilexiste entre ces deux liquides une différence importante dont on ne peut expliquer ainsi la disparition. Les globules du chyle ne paraissent pas être renfermés dans une sorte de vessie colorée comme ceux du sang, et l’on doit par conséquent se demander encore où se forment ces derniers globules. La question n’est pas encore complètement résolue ; mais Pon connait quelques faits, qui tendent à faire penser que le foie est l'organe chargé de ce travail important. Usages du chyle. Appareil urinaire. 102 ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. DE LA SÉCRÉTION URINAIRE. Nous avons déjà vu qu'une partie des substances étrangères absorbées par le corps humain et des matières éliminées de nos organes par le travail nutritif sont expulsées de l’économie, soit parlarespiration, par l’exhalation pulmonaire et par la transpira- tion cutanée, soit par la sécrétion dont la surface intestinale et les autres membranes muqueuses sont le siège; mais les substances inutiles ou nuisibles à l’économie peuvent être encore rejetées au-dehors par une autre voie, par l’excrétion urinaire. Cette fonction a son siège dans les reins, organes qui, chez les animaux de boucherie , sont connus sous le nom vulgaire de rognons. Ce sont deux glandes volumineuses, placées dans Pabdomen , de chaque côté de la colonne vertébrale, entre les muscles de la région lombaire du dos et le péritoine, et entou- rées le plus ordinairement de beaucoup de graisse ; leur couleur est d’un rouge brun et leur forme semblable à celle d’une graine de haricot. Leur parenchyme parait formé de deux substances : l’une, superficielle, appelée corticale ou glanduleuse ; l'autre, intérieure, nommée tubuleuse ou mamelonnée. La substance corlicale est formée de granulations extrêmement petites et d’une foule de canaux capillaires entortillés sur eux-mêmes et réunis en grappes; la substance mamelonnée est composée de canaux qui naissent de la substance corticale, marchent en convergeant vers le milieu du bord interne de la glande et forment, par leur réunion , un certain nombre de cônes dont la base arrondie est enveloppée par la couche corticale. Ces ca- naux viennent tous aboutir au sommet de ces pyramides, dans d’autres conduits plus gros et appelés calices, qui à leur tour se continuent avec le bassinet, petite poche membraneuse située dans léchancrure du bord interne des reins. Ces glandes reçoivent une quantité très considérable de sang par une grosse :rière dont les ramifications se rendent à la sub- stance corticale , où s’opère la sécrétion d’un liquide particulier, l'urine. Ce liquide descend par les canaux dont se compose la sub- siance mamelonnée, et par les calices jusque dans le bassinet, et passe de là dans la vessie en traversant un long tube membra- neux de la grosseur d’une plume à écrire, qui se porte obli- quement du bassinet à la vessie, et se nomme wretere. La vessie est une poche conoïde qui remplit les fonctions de réservoir pour urine, et qui est située à la partie inférieure de labdo- DE LA SÉCRÉTION URINAIRE. 103 men, derrière la portion antérieure du bassin , nommée arcade du pubis. Elle est formée par une membrane muqueuse entourée de fibres charnues, et se continue inférieurement avec un canal étroit qui débouche au-dehors et s’appelle canal de l'urètre. L'urine est un liquide jaunâtre et acide qui, chez l'homme, se compose, dans létat normal , d'environ quatre-vingt-treize cen- tièmes d’eau , de trois centièmes d'une matière particulière nom- mée urée, d’un millième d'acide urique et d’une petite quantité d’acide lactique et de divers sels (tels que du chlorure de so- dium , ou sel marin , du phosphate de chaux, etc.) Dans les mammifères carnivores, sa composition chimique est à-peu-près la même que chez l'homme, si ce n'est qu'on n'y rencontre pas d'acide urique; mais dans les jeunes enfans et dans les animaux herbivores, on y trouve une substance très singulière, l'acide hyppurique, et chez les oiseaux ainsi que chez la plupart des reptiles (les lézards , les serpens ; etc.), il ne renferme guère que de lacide urique; enfin, chez les grenouilles et les tortues, on y trouve de l’urée et de l’albumine. Sa com- position parait être à-peu-près la même chez les poissons ; mais, chez les insectes, on y trouve de l'acide urique. Pendant cer- taines maladies , sa composition change aussi chez l’homme. La rapidité avec laquelle les boissons , introduites dans l’es- tomac, passent dans la vessie et sont expulsées au-dehors par les voies urinaires, est extrême. Chacun a pu en faire la re- marque, et les expériences faites sur les animaux vivans le prouvent également. Mais cependant il n'existe aucune com- munication directe entre ces deux organes, et les liquides ne peuvent parvenir de l’estomac dans la vessie qu'après avoir été absorbés , mêlés à la masse du sang, portés ainsi dans la sub- stance des reins , et séparés par le travail sécrétoire dont ces glandes sont le siège. C’est évidemment dans le sang que les reins puisent toute la partie aqueuse de l'urine , et lorsau’on introduit dans le torrent de la circulation (soit par injection, soit par absorption) cer- taines substances faciles à reconnaitre (telles que de la rhubarbe ou du cyanure jaune de potassium et de fer), on ne tarde pas à les voir expulsées avec les urines. Le sang fournit donc aux reins les matières servant à former l'urine, et la connaissance de ce fait devait naturellement con- x duire les physiologistes à se demander si les divers principes contenus dans ce dernier liquide existaient tout formés dans lesang, et en étaient seulement séparés par l’action des reins, ou bien si ces organes les produisaient par leur action sur d’autres substances contenues dans le sang. Urine. Source de l'urine. Circonstan- ces qui in- fluent sur l’ac- tivité de la sé- crétion. 104 ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. L'eau et la plupart des matières expulsées par les voies uri- naires, existent en quantités plus ou moins notables dans le sang, mais dans les circonstances ordinaires , Panalyse chimique n’y décèle pas la présence de l’urée et des autres principes qui ca- ractérisent essentiellement la sécrétion urinaire. On pouvait donc croire que ces matières étaient formées directement par les reins; mais il n’en est rien ; ces organes ne font que les sé- parer du sang au fur et à mesure qu’elles y apparaissent, et pour s’en assurer, il suffit de faire l’extraction des reins sur un ani- mal vivant; car alors la sécrétion urinaire étant interrompue, on trouve de l’urée dans le sang. On voit donc que c’ést réellement dans ce liquide que les glandes urinaires puisent les substances dont se compose l’u- rine , et qu’elles les y trouvent toutes formées. Du reste , diverses circonstances influent sur l’activité de cette fonction, et peuvent modifier, soit la masse des liquides expulsés par les voies urinaires, soit la quantité de matières solides sé- parées du sang par les reins et tenues en dissolution dans la partie aqueuse de lurine. La quantité d’eau expulsée par la sécrétion urinaire dépend en grande partie de celle des boissons ingérées dans estomac. L'eau introduite dans la masse du sang par suite de labsorp- uon s’en sépare plus ou moins rapidement, de façon qu'après un certain temps l’équilibre se rétablit dans économie , quelle que soit la quantité de boissons introduites dans l'estomac , et , c’est par deux voies distinctes que ce liquide s’échappe ainsi de notre Corps , par Pexhalation pulmonaire et cutanée, et par la sé- crétion urinaire. Or,ces deux fonctions se suppiéent en quelque sorte, et la masse des liquides en circulation restant la même, on observe que tout ce qui tend à diminuer lune tend à augmenter l’autre. Ainsi l’action de la chaleur sur le corps tend à augmenter la transpiration, et diminue par conséquent la sécrétion urinaire : aussi cette dernière fonction est-elle plus active en hiver qu’en été(1) , et, lorsqu'on prend une quantité considérable de bois- sons , on peut presqu'à volonté en déterm.ner lexpulsion par lune ou Pautre de ces voies, suivant qu’on se place dans les cir- constances favorables , soit à la transpiration, soit à la sécrétion urinaire. (r) Les expériences curieuses de M. Chossat montrent que dans la saison froide , la masse des urines dépasse souvent celle des boissons ingérées dans l’es- tomac. Dans les mois du printemps, où la température est douce, ce rapport diminue sensiblement, et dans la saison chaude la proportion des urines aux Loissons n’est que d’environ 9/10. DE LA SÉCRÉTION URINAIRE. 105 La quantité de substances solides expulsées par les reins et tenue en dissolution dans la partie aqueuse de l’urine , dépend en grande partie de l'abondance et de la nature des alimens employés. En effet , M. Chossat a constaté que , lorsqu'on se nourrit des mêmes alimens , et qu'on en varie seulement la quantité, la sécrétion de l’urée et des divers principes, autres que l’eau, expul- sée par les reins varie dans la même proportion. Elle diminue à mesure que lon s’assujétit à une abstinence plus rigoureuse , et elle augmente à mesure que l’on fait usage d’une quantité plus grande d’alimens , pourvu toutefois que cette quantité ne de- vienne pas trop considérable pour être digérée. Ce physiologiste a constaté aussi que la sécrétion de ces ma- tières augmente à mesure que l’on se nourrit de substances plus animalisées, c’est-à-dire qui renferment une portion plus considé- rable d'azote. Ainsi , en se nourrissant tantôt de pain seulement et tantôt de chair musculaire , il a vu que , pour des poids égaux d’alimens (abstraction faite de l’eau qu’ils renferment) , la quan- tité de principes solides expulsés sous la forme d'urine était quatre fois plus considérable dans le dernier cas que dans le premier. Si lon compare la quantité de carbone , d'azote, d'hydrogène et d’oxigène, qui entre dans la composition des élémens em- ployés par un homme avec celle des mêmes alimens expulsés sous diverses formes , soit par les poumons et la peau , soit par les reins, on voit que presque tout le carbone, ainsi introduit dans le corps, s'échappe des poumons sous la forme d’acide car- bonique , tandis que l'azote est expulsé presque entièrement par les urines , sous la forme d’urée , d’acide urique , etc. Du reste , l’état de l’économie animale exerce aussi beaucoup d'influence sur les résultats de la sécrétion urinaire , tout ce qui tend à affaiblir paraît tendre aussi à ralentir cette sécrétion et à diminuer lexhalation de l'acide carbonique par la respiration. L’urine laisse quelquefois déposer dans l'intérieur des voies urinaires diverses substances qui s’y trouvent en dissolution , et ces dépôts solides constituent ce qu’on nomme graviers et cal- culs urinaires. Les graviers sont presque toujours formés par de lacide urique et dépendent de la sécrétion trop abondante de ce prin- cipe : aussi cette maladie est-elle aggravée par tout ce qui tend à augmenter la proportion des substances solides tenues en dis- solution dans Purine , le régime animal, l’usage trop restreint des boissons aqueuses , etc. En général ce dépôt se forme dans les reins , et est entrainé au-dehors par les urines. Gravier ct calculs naires. uri-= 106 ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. Les calculs urinaires sont des concrétions plus volumineuses qui se forment aussi quelquefois dans les reins, mais qui en général se développent dans la vessie où ilsséjournent, Ils gros- Sissent peu-à-peu par l'addition d’une nouvelle quantité de ma- tière déposée par lurine , et présentent, à raison de leur mode de formation, des couches concentriques plus ou moins dis- tinctes. Les substances qui entrent dans leur formation sont assez variées. Les unes existent toujours dans l'urine , mais ne s’y trouvent ordinairement qu’en quantités assez petites pour s’y maintenir en dissolution. D’autres sont produites ou rendues insolubles par les altérations chimiques que lurine éprouve lorsqwelle séjourne long-temps à l’air ou dans l'intérieur de la vessie. Enfin d’autres encore sont le résultat d’un mode d’action anormale de l'organe sécréteur lui-même. Les premiers sont l'acide urique , les seconds Purate d’ammo- niaque , le phosphate ammoniaco-magnésien , le phosphate de chaux, les troisièmes l’oxalate de chaux, Poxide cystique, etc. Les calculs de la première classe sont les plus communs, et il arrive souvent que leur présence dans la vessie détermine le dépôt de sels que nous avons rangés dans la seconde catégorie. Il est assez rare de voir ces dernières substances former Le noyau d’un calcul ; mais rien de plus commun que de voir un noyau d'acide urique ou d’oxalate de chaux encroùté de phosphate lerreux. RÉSUMÉ. Nous avons maintenant parcouru les diverses séries de phé- nomènes à l’aide desquelles s’effectue la nutrition du corps des animaux , et, pour embrasser d’un seul coup-d’œil l’ensemble de ces fonctions , nous croyons utile d’en faire ici Pénumération dans un ordre différent de celui que nous avons adopté pour leur étude. Nous avons vu que tous les êtres vivans ont besoin d’attirer continuellement, dans lintérieur de leur corps, de l'eau, de loxigène , et äiverses autres matières alimentaires puisées dans le monde extérieur, et de déposer ces matériaux nouveaux dans le tissu de leurs organes. On donne le nom d'absorption à ce passage du dehors en de- dans et au mélange des matières ainsi pompées par les organes vivans avec la masse du liquide nourricier. Chez les plantes, toutes les substances nutritives sont absor- bées directement et pénètrent dans le parenchyme des organes DE LA SÉCRÉTION URINAIRE. 107 sans avoir subi de préparation préalable. Chez les animaux, certaines substances , telles que Peau et l’oxigène de Pair, sont ke ar la même manière, soit par la peau, soit par la surface tégumentaire interne qui tapisse les voies aériennes et digestives ; mais pour la plupart des matières nutritives, il en est tout autrement, et les alimens ne peuvent servir à l’entre- tien du corps et ne pénètrent dans la profondeur des organes qu'après avoir été transformés en un liquide particulier nommé chyle, transformation qui constitue le phénomène de la di- gestion. Le chyle, absorbé par les vaisseaux lymphatiques, se mêle au sang et fournit les matériaux dont ce liquide se compose. Le sang circule dans toutes les parties du corps et y porte les matériaux nécessaires à leur entretien. À l’aide des principes nutritifs qui leur sont fournis par ce liquide, les tissus vivans incorporent continuellement à leur propre substance des par- ticules nouvelles, et pendant que ce travail d’assimilation s’o- père, ils abandonnent d’autres mollécules qui entraient dans leur composition et dont le renouvellementestdevenunécessaire. Ce mouvement continuel de composition et de décomposition des parties solides du corps constitue le travail nutritif. Lors- que la quantité des matières étrangères ainsi assimilées à la substance des organes dépasse celle des matières éliminées de ces mêmes organes, le corps s’accroit; dans le cas con- traire, il maigrit; et lorsque ces deux phénomènes ont une activité égale , le poids de l'animal reste stationnaire, bien que les matériaux dont son corps se compose se renouvellent sans cesse. Les matières excrémentitielles , séparées de la substance des organes vivans par le travail de la nutrition, doivent être reje- tées au-dehors; elles se mêlent d'abord au sang qui les entraine avec lui, loin des parties dont elles se sont détachées, et à son tour ce liquide s’en débarrasse, soit par la simple exhalation qui a lieu sur toutes les surfaces tégumentaires tant extérieures qu’intérieures , soit par les sécrétions opérées par les glandes dont il traverse le parenchyme. L’eau ainsi expulsée du corps s'échappe principalement par la transpiration insensible des poumons et de la peau et par la sécrétion urinaire. C’est également par les reins que la majeure partie des prin- cipes azotés et des matières non volatiles, en général , sont ex- crétées. C’est, au contraire, par les poumons que s’exhalent l'acide carbonique et les autres principes volatiles qui peuvent se trou- ver mêlés au sang. 108 ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. La respiration est, par conséquent, en même temps une fonc- tion d’assimilation et d’excrétion, car elle sert de voie pour l'en- trée de l’oxigène nécessaire à l’entretien de la vie et pour l’exha- lation de lacide carbonique produit par la décomposition nutritive des organes. Quant à la nature du mouvement nutritif, dont toutes les par- ties vivantes sont le siège, nous le répétons , on ne sait encore rien de positif; on peut seulement présumer qu’ildoit ressembler au travail sécrétoire, et qu’il doit dépendre de laction d’une cause analogue, cause qui parait être l'influence nerveuse, et qui semble avoir une grande analogie avec la force physique qui produit les phénomènes électro-chimiques. Des expériences récentes, faites par M. Becquerel sur l'influence de lélectricité sur la végétation des plantes, viennent à l’appui de cette opi- nion. ne DES FONCTIONS DE RELATION. 109 DES FONCTIONS DE RELATION. En faisant l’énumération des diverses facultés dont les ani- maux sont doués, nous ayons vu que les unes étaient exclusi- vement destinées à assurer lexistence de ces êtres, tandis que d’autres servaient à leur faire connaître ce qui les entoure. Les premières constituent les fonctions de nutrition dont nous ve- nons de faire l'étude; les secondes, les fonctions de relation dont nous allons maintenant nous occuper. Lorsqu'on examine ce qui se passe chez un animal dont la structure est des plus simples et dontles facultés sontles plus bor- nées , on remarque d’abord qu’il se meut et que les mouvemens qu'il exécute sont déterminés et dirigés par une cause inté- rieure. Parmi ces mouvemens, il en est qui se répètent de la même manière , quelles que soient les circonstances où l’animal se trouve, et qui ne peuvent être modifiés par lui. Mais il en est aussi d’autres qui varient suivant les besoins de l'animal et sont soumis à l'empire d’une force intelligente que l’on désigne sous le nom de volonte. Ces deux ordres de phénomènes constituent deux des fonc- tions les plus imporlantes de la vie de relation, savoir : la con- tractilité , ou la faculté d'exécuter des mouvemens spontanés, et la volonté, ou la faculté d’exciter la contractilité et d'en varier les effets dans la vue d’arriver à un résultat prévu par l'animal. Il est une autre propriété inhérente à tous les êtres animés et qui est encore plus remarquable, c’est la sensibilité, ou la fa- culté de recevoir des impressions des objets extérieurs et d’en avoir la conscience. Ces trois facultés sont communes à tous les animaux, mais ce ne sont pas les seules qu’on leur observe. On remarque que, chez tous, il existe une force intérieure qui les porte à faire certaines actions utiles à leur conservation, mais dont ils ne peuvent certainement pas prévoir le résultat, et dont la cause ne dépend d’aucun besoin apparent. Ainsi une foule d’animaux construisent, avec l’art le plus admirable, des demeures desti- nées à loger leur progéniture, et calculées de manière à ré- pondre à tous les besoins des jeunes, et ils le font toujours de la même manière et avec la même habileté, même lorsque éloi- gnés de leurs semblables depuis le moment de leur naissance, ils n’ont jamais vu exécuter des travaux analogues. D’autres, à une époque déterminée de l’année, émigrent vers des pays loin- Contracti- lité. Volonte. Sensibilité. Instinct. 110 ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. tains dont le climat leur sera plus favorable, et s’y dirigent avec assurance, comme si le but de leur voyage était devant leurs yeux. On donne le nom d’instinet à la cause qui porte ainsi les ani- maux à exécuter certains actes déterminés qui ne sont pas l'effet de Pimitation et qui ne sont pas le résultat du raisonnement. Ces espèces de penchant varient, pour ainsi dire, dans chaque animal, et les phénomènes qui en résultent sont tantôt d’une simplicité extrême et tantôt d’une complication qui étonne. lutelligence. D’autres animaux plus privilégiés jouissent encore de facultés intellectuelles, ou du pouvoir de rappeler à l'esprit les idées produites précédemment par les sensations, de les comparer, d'en tirer des idées générales, et d'en déduire des motifs de con- duite. Expression. Enfin, il est aussi quelques êtres animés qui jouissent de la faculté de communiquer à leurs semblables les idées qui les occupent, soit à l’aide de certains mouvemens, soit en produi- sant des sons divers. Les phénomènes variés, à l’aide desquels les animaux se mettent en relation avec les objets qui les environnent, peuvent, comme on le voit, se rapporter à six facultés principales, la sensibilité, la contractilile, la volonté, Vinstinct , l'intelligence, l'expression. Les quatre premiers existent chez tous les ani- maux , les deux derniers chez un petit nombre seulement, et la manière dont les uns etles autres s’exécutent varie presqu’à Pinfini. Chez quelques animaux d’une structure très simple, les polypes, par exemple, les diverses facultés de la vie relative ne sont l'apanage d'aucun organe particulier ; toutes les parties peuvent sentir et se mouvoir sans le concours d’un autre organe; mais chez l’homme et chez l’immense majorité des animaux, lexer- cice de toutes ces fonctions est dépendant de l’action d’une partie déterminée du corps qui porte le nom de système ner- veux. DU SYSTÈME NERVEUX. Tissus ner- Ce système est formé par une substance particulière, molle veux. et pulpeuse , qui est presque fluide dans les premiers temps de la vie, et qui acquiert plus de consistance à mesure que l’homme s’avance vers l’âge mr. Il est aussi à remarquer que, sous ce rapport, les animaux inférieurs ressemblent aux êtres plus parfaits, dont le dévelop- pement n’est point terminé. Chez les grenouilles, par exemple, SYSTÈME NERVEUX. 111 la pulpe cérébrale n'offre pas plus de consistance que chez le fœtus humain , et chez les écrevisses , elle est presque liquide. C'est, du . ék une tendance de la nature dont nous aurons souvent à parler, que celle de faire passer des animaux supé- rieurs par des états transitoires, qui sont analogues à l’état qui est permanent pour d’autres êtres d’une structure moins per- feclionnée. L'aspect de cette substance, que l’on nomme #issu nerveux , varie beaucoup : tantôt elle est blanche, d’autres fois grise ou cendrée; tantôt aussi elle forme des masses plus ou moins con- sidérables, et d’autres fois elle constitue des cordons allongés et ramifés. Ces derniers organes portent le nom de »erfs et les premiers celui de ganglions ou de centres nerveux , Car ils ser- vent de point de réunion pour tous les filamens dont il vient d’être question. Dans l’homme et dans tous les animaux qui s’en rapprochent le plus , appareil nerveux se compose de deux parties appelées systeme nerveux de La vie animale OU rcerebro-spinal et systeme nerveux de La vie organique Où ganglionnaire, et chacun de ces systèmes se compose , à leur tour, de deux parties, lune cen- trale, formée de masses nerveuses plus ou moins considérables, l'autre périphérique , formée de nerfs qui se rendent, de ces centres , à diverses parties du corps. La portion centrale du système nerveux cérébro-spinal est souventdésignée sous le nom d’axe cérébro-spinal ou d’encéphale. Elle se compose essentiellement du cerveau, du cervelet et de la moelle épinière, et elle est logée dans une gaine osseuse formée par le cräne et la colonne vertébrale ou épine du dos. La cavite du crâne occupe toute la partie supérieure et toute Encéphale, Parties pro- la partie postérieure de la tête. Elle est de forme ovalaire et tectrices de présente, à à sa paroi inférieure, un grand nombre de trous des- tinés à livrer passage aux nerfs qui se rendent au-dehors, et aux vaisseaux sanguins servant à la nutrition des parties ren- fermées dans son intérieur. Enfin, dans le point où la tête s’ar- ticule avec la colonne vertébrale qui la porte, il existe une grande ouverture appelée trou occipital, et, par cette ouverture, la cavité crânienne se continue avec un canal qui règne dans toute la longueur de la ligne médiane du dos. l’encéphale, Colonne ver- tébrale. Dure-mére. Arachnoiïde. Pie-mère. 112 ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. Fig.26.(1) Ce Canal est formé par une suite d’anneaux osseux , appelés vertèbres (fig. 26), qui , joints entre eux d’une manière solide , constituent une espèce de tige qui oc- cupe toute la longueur du corps, et est appelée colonne épiniere Ou colonne vertébrale (fig. 27). De chaque côté on y voit une série de trous par lesquels les nerfs passent pour se rendre aux différentes parties du corps. Diverses membranes entourent aussi lencéphale, et servent à fixer ou à protéger cet organe, dont la structure est très délicate et dont l’importance est extrême. La première de ces tuniques porte le nom de dure- mére : C’est une membrane fibreuse, ferme , épaisse, blanchâtre et comme moirée, qui adhère, par plu- sieurs points de sa surface extérieure aux parois du crâne et au canal vertébral , et qui forme autour du système nerveux une gaine très résistante. À sa face intérieure on remarque plusieurs replis qui s’enfon- cent dans des sillons plus ou moins profonds de la masse nerveuse encéphalique et forment des espèces de cloisons qui empêchent ces parties de se déplacer et les souliennent de facon qu’elles ne pèsent point les unes sur les autres, quelle que soit la position du corps. Enfin il existe dans son épaisseur des canaux veineux très vastes , qui portent le nom de sèxnus de La dure-mere, et qui servent de réser- voir pour le sang provenant des diverses parties de lencéphale. En-dedans de la dure-mère se trouve une seconde tunique , nommée arachnoïde, à cause de sa ténacité et de sa transpa- rence , qui l’ont fait comparer à une toile d’araignée. Elle ap- partient à la classe des membranes séreuses et représente une sorte de sac sans ouverture , replié sur lui-même qui enveloppe l’encéphale et tapisse les parois de la cavité de la dure-mère , de la même manière que la plèvre enveloppe les poumons, et le péritoine les intestins. Sa surface intérieure, partout en contact avec elle-même, est lubréfiée par une humeur séreuse et sa lame interne pénètre dans les diverses cavités dont nous aurons à si- gnader plus tard lexistence dans l’intérieur du cerveau. Son principal usage est de fournir un liquide qui baigne cet organe et à en faciliter les mouvemens. Enfin on trouve encore au-dessous de l’arachnoïde une troi- sième tunique cellulaire , qui manque dans certaines parties (1) Fig. 26, l’une des vertèbres du dos vue par sa surface supérieure ; — fig. 27, la colonne vertébrale vue de profil. 4 PS TR. 0 D sons. À. Do _.. DU SYSTÈME NERVEUX. 113 et qui est appelée la pie-mere. Ce n’est pas une membrane pro- prement dite, mais une trame cellulaire et sans consistance , dans laquelle se ramifient et s’entrelacent, dans mille directions différentes, une multitude de vaisseaux sanguins plus ou moins fins et tortueux qui proviennent de l’encéphale , ou qui vont se répandre dans sa substance. En effet, la circulation du sang dans l’'encéphale se fait d’une manière toute particulière. Les artères , avant que de pénétrer dans cet organe , dont la texture est extrêmement délicate , se réduisent en vaisseaux capillaires, et cette division a pour but de modérer la force avec laquelle le sang y arrive. Fig. 28. (1) L d nu, L’axe cérébro-spinal, qua est protégé par ces diverses enve- loppes, se compose , comme nous l'avons déjà dit de plusieurs or- ganes distincts ; mais toutes ces parties sont intimement unies entre elles et peuvent être consi- dérées comme une continuation les unes des autres. Sa partie an- térieure ou supérieure est très volumineuse , et occupe l’inté- rieur du crâne: c’est à elle sur- tout que convient le nom d’en- cephale. On y distingue deux parties principales , le cerveau et le cervelet: l'un et l’autre se continuent inférieurement avec un gros cordon nerveux , logé dans la colonne épinière et ap- pelé la moelle epiniere. Le cerveau (fig. 28, a, ei fig. 29, A ,B,C) est la portion la plus volumineuse de l’encéphale: il occupe toute la partie supérieure du crâne depuis le front jusqu’à locciput. Sa forme est celle d’un ovoïde , dont la grosse extrémité est tournée en arrière ; Sa face supérieure est assez régulière- ment voùtée ; sur les côtés, il est un peu comprimé et en-dessous il est aplati. On y distingue d’a- bord deux moitiés latérales, nom- E 22 s (r) Système nerveux cérébro-spinal vu par sa face antérieure (les nerfs étant 8 Encéphale 114 ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. mées hemisphères du cerveau , et séparées par une scissure pro- fonde, dans laquelle s’enfonce une cloison verticale, formée par un Fig. 29. (1) A f B 1, C 5 J FAT D D 12 Sir 5 LA : | : 14 7 LA 15 : 11910 6 E coupés à peu de distance de leur origine), — a cerveau ; — à lobe antérieur de l'hémisphère gauche du cerveau ;—c lobe moyen ;—d4 le lobe postérieur, presque entièrement caché par le cervelet; — e cervelet ;—f” moelle allongée ; — f moelle épinière ;—1 nerfs de,la première paire ou nerfs olfactifs ;—2 nerfs optiques ou nerfs de la seconde paire ;—3 nerfs de la troisième paire qui naissent derrière l’en- trecroisement des nerfs optiques, au-devant du pont de varole et au-dessus des pédoncuies du cerveau ; — 4 nerfs de la quatrième paire; — 5 nerfs trifaciaux ou de la cinquième paire ; —6 nerfs de la sixième paire couchés sur le pont de varole ; — 7 nerfs de la septième paire ou nerfs faciaux , et nerfs de la huitième paire ou nerfs acoustiques; — 9 nerfs de la neuvième paire ou glosso-pharyn- giens ; — 10 nerfs de la dixième paire ou pneumo-gastrique; — 11 nerfs de la onzième et douzième paires; — 13 nerfs de la treizième paire ou nerfs sous- occipitaux; — 14, 15, 16 trois premières paires de nerfs cervicaux; — g nerfs cervicaux formant le plexus brachial ; — 25 l’une des paires de nerfs de la partie dorsale de la moelle épinière ; — 33 l’une des paires de nerfs lombaires ; __ h nerfs lombaires et sacrés formant les plexus d’où naissent les nerfs des membres inférieurs ;— 2 et 7 terminaison de la moelle épinière appelée queue de cheval ; — k grand nerf sciatique se rendant aux membres inférieurs. (r) Coupe verticale du cerveau, du cervelet et de la moelle allongée. — À lobe intérieur du cerveau ; — B lobe moyen ; — C lobe postérieure du cerveau ; — pe DU SYSTÈME NERVEUX... 115 repli dela dure-mère et appelée, à cause de sa forme, la faux cé- rébrale. En avant et en arrière, cette scissure divise le cerveau dans toute Sa hauteur; mais, au milieu, elle n’en occupe que la par- tie supérieure, et est bornée inférieurement par une lame médul- laire, qui s'étend d’un hémisphère à l’autre, et qui se nomme corps > * fi ou mesolobe (g. 29 ,f). La surface ‘de cet hémisphère est creusée par un grand nombre de sillons tortueux et irréguliers et plus ou moins profonds, qui séparent des éminences arrondies sur les bords, contournées sur elles-mêmes et ayant quelques ressem- blances avec les replis de l'intestin grèle dans l'abdomen. Ces éminences portent le nom de circonvolutions du cerveau , et les sillons qui les séparent et qui logent des replis de la lame inté- rieurede larachnoïdesont appelés anfractuosités. Ils sont plus ou moins profonds, etil est à remarquer que, dans l'enfant naïissantet dans la plupart des animaux, mêmeles plus voisins de l’homme, les circonvolutions sont peu prononcées. A la face inférieure du cer. veau , on distingue encore dans chaque hémisphère trois lobes, séparés entre eux par des sillons transversaux, et désignés sous le nom de lobes antérieurs moyens et postérieurs ; on remarque aussi dans cette partie du cerveau deux éminences arrondies, placées près de la ligne médiane (éeminences memillaires), et deux pédoncules très gros , qui semblent sortir de la substance de cet organe, pour se Continuer avec la moelle épinière (caisses du cerveau ou pédoncules du cerveau). C’est également de cette partie du cerveau que sortent les nerfs auxquels ce viscère donne naissance. La surface du cerveau est presque entièrement formée de substance nerveuse grise; mais dans son intérieur, on ne trouve guère que de la substance blanche. Lorsqu'on incise cet organe, on voit aussi qu’il existe dans son intérieur diverses cavités qui D cervelet ; — E moelle épinière; — f coupe du corps calleux situé au fond de la scissure qui sépare les deux hémisphères du cerveau ; au-dessous de cette bande transversale de matière blanche, se trouvent les ventricules latéraux du cerveau; — g lobes optiques cachés sous la face inférieure dn cerveau ;— 1 nerfs olfactifs; — 2 œil dans lequel vient se terminer le nerf optique dont on peut suivre la racine sur les côtés de la protubérance annulaire jusqu'aux lobes op- tiques ; derrière l’œil on voit le nerf de la troisieme paire; —4 nerf de la quatrième paire qui se distribue, comme le précédent, aux muscles de l’œil ; — 5 branche maxillaire supérieure du nerf de la cinquième paire ; — 5’ branche ophtalmique f;— 5” branche maxillaire inférieure du même nerf; — 6 nerf de se rendant auxwmuscles de l'œil ; — 7 nerf facial; au-dessous e nerf on voit nn tronçon du nerf acoustique ; — 9 nerf de la e ou nerf glasso-pharyngien;— 10 nerf pneumo-gastrique.—.11 nerf de la onzième paire , ou nerf hypoglosse; — 12 nerf de la douzième paire ou nerf spinal; — 14 et 15 nerfs cervicaux. 8. Cervelet. Lobes opt- ques: Moelle épi- nière. 116 ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE.. communiquent toutes au-dehors , et qui sont appelées les ven- tricules du cerveau: (Æig. 29, f.) # Le cervelet est placé au-dessous de la partie postérieure du cerveau (/g. 29 , D, et fig. 28 , e), et n’a pas le tiers du volume de cet organe,même chez l’homme adulte, où ilest proportionnellement plus gros que chez l'enfant. On y distingue, comme au cerveau, deux hémisphères ou lobes latéraux séparés par une rainure et un lobe moyen situé en arrière et en bas, dans l’enfoncement dont nous venons de parler. La surface des hémisphères et du lobe moyen est formée par de la matière grise et ne présente point de circonvolution, mais un grand nombre de sillons à-peu- près droits et placés parallèlement les uns à côté des autres, de facon à diviser cet organe en une multitude de lames disposées comme les feuillets d'un livre. Inférieurement le cervelet se continue avec la moelle épinière au moyen de deux pédon- cules courts et gros, et dans le même point il entoure ce der- nier organe par une bande de substance blanche qui se porte transversalement d’un hémisphère à l’autre, en passant au- devant de la moelle épinière , avec laquelle elle est intimement unie, et qui porte le nom de protubérance annulaire ou de pont de Varole. (1) Lorsqu'on soulève les lobes postérieurs du cerveau on voit, entre cet organe et le cervelet, quatre petites éminences ar- rondies , placées par paires de chaque côté de la ligne médiane (fig. 29, 9). Elles s’élèvent sur la face supérieure des prolongemens médullaires, quise portent du cerveau à la moelle épinière, etcon- stituent ce que les anatomistes appellent les lobes optiques ou tubercules quadrijumeaux , dont nous aurons souvent à parler dans la suite de ces leçons. La moclle epinicre (fig. 28, f, et 29 , E)est en quelque sorte un prolongement du cerveau et du cervelet. Elle à la forme d’une grosse corde et présente, en avant comme en arrière, un sillon médiane et longitudinal qui la divise en deux moitiés latérales et sy métriques. A son extrémité supérieure (à laquelle les anatomistes donnent le nom de moelle allongce), on remar- que divers renflemens appelés corps olivaires, pyramidales et restiformes , et de chaque côté on en voit sortir successivement un grand nombre de nerfs dont les premiers se dirigent direc- tement en dehors , mais dont les derniers descendent de plus en plus obliquement, de façon que la moelle épinière paraît se termineren se divisanten un grand nombre de filamens longitu- dinaux, disposés à-peu-près comme les crins d'une queue de cheval( a 28, j), ressemblance grossière qui a valu à cette partie (1) Ainsi nommé en l’honneur d’un anatomiste celebre, Varoli.- DU SYSTÈME NERVEUX. 117 le nom de l’objet auquel on l’a comparé. Au niveau de l’origine des nerfs, qui se distribuent aux membres thoraciques, la moelle épi- nière présente un renflement bien sensible ; elle se rétrécit en- suite et son volume augmente de nouveau vers la partie d’où naissent les nerfs des membres abdominaux ; enfin son extrémité inférieure est très grèle et se trouve vers la partie supérieure de la région lombaire de la colonne vertébrale. La moelle épinière se compose, comme le cerveau et let, de deux substances médullaires de couleurs diffè ici la matière grise , au lieu d’être située à la surfac en oceupe la profondeur, et c’est la matière blanche q vre. Il n'existe pas autour de la moelle épinière de pie-mère, et la gaine , formée par la dure-mère , n'est pas occupée en entier par cet organe mais est distendue par une quantité considérable de liquide au milieu duquel celle-ci est suspendue, disposition ad- mirablement bien calculée pour la préserver des pressions ou des commotiens qui pourraient résulter de mouvemens trop violéns de la colonne vertébrale ou de toute autre cause , et qui produi- raient sur cette partie du système nerveux des accidens encore plus graves que sur le cerveau. Nous avons dit que la substance qui forme l’axe cérébro-spi- nal était molle et pulpeuse; dans la matière blanche on peut cependant distinguer des fibres, et l’étude de la marche qu’elles suivent conduit à l'explication de certains phénomènes des plus remarquables. La moelle épinière présente, comme nous l'avons déjà dit, deux moitiés qui sont unies entre elles par des bandelettes foi- mées principalement de fibres médullaires transversales; de chaque côté on trouve aussi, dans la substance blanche de cet organe, un grand nombre de fibres longitudinales, qui à la partie supérieure se réunissent en six faisceaux principaux. Quatre de ces faisceaux occupent la face antérieure de la moelle allongée ; ils constituent les renflemens désignés sous le nom de pyramides antérieures et corps olivaires, et ils pénètrent dans le cerveau. Les fibres des pyramides présentent une particularité très remarquable : celles du côté droit se portent à gauche etcelles du côté gauche à droite. Ce n’est qu'après cet entrecroisement qu'elles s’enfoncent dans la protubérance annulaire , et en continuant leur marche en avant constituent les pédoncules du cerveau. Ces fibres divergent ensuite et se répandent dans les circonvolutions inférieures, antérieures et supérieures des lobes antérieurs et moyens du cerveau. Les fibres longitudinales qui sortent des éminences olivaires montent, comme celles des pyramides , à travers la protubérance annulaire, et vont former la partie postérieure et interne des pédoncules cérébraux ; elles Fibres de l'enccphale, Nerfs. 118 ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. - traversent, comme celles des pyramides, «diverses masses de substance grise, augmentent de volume et de nombre;eten sui- vant des directions différentes forment diverses parties du cer- veau, telles que les couches des nerfs optiques,et les corps striés ; enfin elles s’épanouissent dans les circonvolutions dont la masse entière constitue les hémisphères cérébraux; par Pintermédiaire d’autres fibres transversales , les deux moitiés du cerveau com- muni entre elles et ces fibres forment les corps calleux ons déjà parlé, ainsi que plusieurs autres bandes ésignées par les anatomistes sous le nom général sures. Les fibres longitudinales des pyramides postérieures de la moelle épinière se réunissent à quelques fibres venant des parties voisines de la moelle allongée, et constituent ainsi les pédonc ule du cervelet, qui plongent jusqu’au centre de l'hémisphère corres- pondant de cet organe, et envoient vers sa circonférence une mul- titude de feuillets qui se subdivisent et forment, par leur assem- blage, des espèces de rameaux enveloppés de matières grises etap- pelées par quelques anatomistes l’arbre de vie (fig. 29 , D). On dis- üngue aussi , dans le cervelet , des fibres transversales , Qui font communiquer entre elles les deux hémisphères. Une partie de celles-ci entourent la moelle allongée en avant et forment la protubérance annulaire, Les nerfs qui naissent de l’encéphale, et qui établissent la communication entre ce système et les diverses parties du corps sont au nombre de quarante-trois paires (voy. fig. 28, page 313, el fig. 29, page 114). Ils proviennent tous de la moelle épinière ou de la base du cerveau, et on les distingue , d’après leur position , par des numéros d'ordre, en procédant d'avant Fig. 30. (1) en arrière. La plupart d’entre eux sont d’a- bord formés par plusieurs racines ou fais- ceaux de fibres isolés , et présentent, près de leur origine , un renflement » appelé ganglion fig. 30 mi Les douze premières paires naissent de l'encéphale et sortent de la boîte osseuse du crâne par les divers trous situés à sa base. € Les trente-et-une paires suivantes provien- nent de la portion de la moelle épinière , qui est renfermée dans le canal vertébral , et (1) Troncon de la moelle épinière, pour montrer la disposition des nerfs qui en naissent, — « moelle épinière. — À racine antérieure de lun des nerfs spinaux. — c ganglion situé sur le trajet de cette racine. — d racine pos- térieure du même nerf, allant se réunir à la racine antérieure, au-dela du DU SYSTÈME NERVEUX. 119 sortent de cette gaine osseuse par des trous situés de chaque côté entresles vertèbres. (Fig. 27, page 112.) Enfin ces nerfs, à un très petit nombre d’exceptions près, se divisent bientôt en une multitude de branches qui, à leur tour, se subdivisent en rameaux et en ramuscules , et qui se terminent par des filamens d’une ténacité extrême dans la sub- stance des divers organes. Souvent aussi on voit quelques-unes des branches nerveuses se réunir entre elles et former des anas- tomoses (1) ou des plexus. (2) Tous les nerfs spinaux naissent , par deux racines composées de plusieurs faisceaux de fibres. L’une de ces racines provient de la partie antérieure , et l’autre de la partie postérieure de la moelle épinière (voy. fig. 30). Le système nerveux ganglionnaire, appelé aussi nerf grand Système gan- sympatique Où système nerveux de la vie organique ,se compose glionnuire. d’un certain nombre de petites masses nerveuses bien distinctes, mais liées entre elles par des cordons médullaires et de divers nerfs , qui vont s’anastomoser avec ceux du système cérébro- spinal ou se distribuer dans les organes voisins. Ces centres ner- veux portent le nom de ganglions : on en trouve à la tête , au cou , dans le thorax et dans l’abdomen. La plupart d’entre eux sont placés symétriquement de chaque côté de la ligne médiane au-devant de la colonne vertébrale, et forment ainsi une double chaine depuis la tête jusqu’au bassin ; mais on en trouve aussi dans d’autres parties : près du cœur, et dans le voisinage de l’es- tomac , par exemple. Les nerfs du système cérébro-spinal se rendent aux organes des sens , à la peau, aux muscles , etc.; ceux qui font partie du système ganglionnaire se distribuent aux poumons, au cœur, à lestomae , aux intestins, aux parois des vaisseaux sanguins. En un mot les premiers appartiennent spécialement aux organes de relation , les derniers aux organes de nutrition. ganglion. — e tronc commun formé par la réunion de ces deux racines. — f petite branche qui va s'anastomoser avec le nerf grand sympatique. (1) Les nérfs ayant été regardés par quelques anatomistes comme étant des canaux destinés à conduire le fluide nerveux, on a donné le nom d’anastamoses à la réunion de leurs branches ou de leurs rameaux; ce mot, comme nous l'avons déja dit, signifie réellement un abouchement ou une communication entre deux vaisseaux. (2) Plexus (de plecto, j'entreméle) est le nom que l’on donne à une espèce de réunion de plusieurs nerfs ou vaisseaux. Les principaux plexus nerveux sont ceux formés par les nerfs des membres, peu après leur sortie de la colonne vertébrale. (Voyez fig. 28,g et k.) Sensibilité tactile. 120 ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. Telles sont les diverses parties dont se compose l’appareil nerveux de l’homme. Voyons maintenant quels en sont les usages , et OCCupons-nous en premier lieu de l’étude de la sensi- bilité. ’ - DE LA SENSIBILITÉ. La sensibilité , avons-nous dit, est la faculté de recevoir des impressions et d’en avoir la conscience. Elle appartient à tous les animaux; mais le degré auquel elle se développe varie presque pour chacun d’entre eux. À mesure que l’on s’élève dans la série zoologique, et que l’on se rapproche de l’homme, on voit les sen- sations devenir de plus en plus variées ; l'animal acquiert le pouvoir de prendre connaissance d’un plus grand nombre des propriétés que possèdent les objets dont il est environné et d’en mieux apprécier les nuances différentes; les impressions produites deviennent plus vives , et à mesure que la faculté de sentir se perfectionne ainsi , on voit la structure des organes de la vie de relation se compliquer de plus en plus ; car ici , de même que pour toutes les autres fonctions, c’est par la division du travail que la nature arrive à des résultats de plus en plus parfaits. Partout où les sensations , produites par les objets extérieurs, sont un peu variées, il existe un système nerveux distinct, et c’est de son action que dépend la faculté de sentir. La structure en est d’abord très simple , et alors toutes les parties qui le composent paraissen* remplir à-peu-près les mêmes fonctions. Dans le ver de terre, par exemple, c’est un cordon noueux, étendu dans toute la longueur du corps, et dont toutes les parties possèdent les mêmes propriétés; car, si on coupe l’animal transversalement en plusieurs tronçons , on voit chacun des fragmens continuer à sentir et à se mouvoir comme auparavant; mais , dans les êtres dont l’organisation est plus compliquée , et dont les facultés sont plus parfaites, cet appareil se compose , comme nous l'avons déjà vu chez l’homme de plusieurs parties dissemblables , et alors chacune de celles-ci agit aussi d’une manière différente des autres , et remplit des fonctions spéciales. Le phénomène le plus général parmi ceux qui dépendent de Paction du système nerveux est la perception d’une sensation lors du contact d’un objet matériel avec l'un des organes de l'animal. Ces sensations ne sont pas les seules que l’on puisse éprouver, et pour introduire plus de précision dans le langage, il importe de distinguer, par un nom particulier, la faculté dont elles sont dépendantes : on peut l’appeler sensibilité tactile. Toutes les parties de notre corps ne sont pas également douées DE LA SENSIBILITÉ. 121 de cette faculté; quelques organes jouissent d’une sensibilité tac tile des plus exquises , tandis que d’autres peuvent toucher des corps étrangers et être même coupées ou déchirées par eux sans que l'animal en éprouve la moindre sensation. Or, les parties les Parties sen- plus sensibles sont toujours celles qui reçoivent le plus grand ee, “bei nombre de nerfs , et là où il n’y a point de nerfs, il ny a pas "7°" de sensibilité. Si l’on fait une incision à la patte d’un animal vivant, et que l’on mette à découvert le nerf qui se rend à cette partie, on remarque aussi que ce cordon est doué d’une sen- sibilité extrême; pour peu qu’on le pince ou qu’on le pique, l'animal montre tous les signes d’une douleur des plus vives, et les muscles auxquels le nerf ainsi blessé se distribue sont agités par des contractions convulsives. D’après cela, on pourrait déjà deviner que c’est aux nerfs Influence que nos organes doivent leur sensibilité, et pour mettre ce des nerfs sur fait hors de doute, il suffit de détruire l’un de ces cordons; do ET car si l’on pratique l'expérience sur l’un des membres d’un ani- mal vivant, toutes les parties auxquelles le nerf se rendait sont aussitôt frappées de paralysie, c’est-à-dire privées de la faculté de sentir et de se mouvoir. Mais ce nerf dont l’action est indispensable à l'exercice de ces fonctions, est-il chargé lui-même de déterminer les mou- vemens et de percevoir les sensations , ou bien remplit-il seu- lement le rôle d’un conducteur et est-il destiné uniquement à transmettre aux muscles l’influence de la volonté, et à porter à un autre organe, qui serait le siège de la perception des sensa- tions, les impressions résultantes du contact d’un objet extérieur avec la surface du corps ? Pour résoudre cette question, les physiologistes ont eu en- core recours à des expériences sur les animaux vivans. . Si Von coupe, dans un point quelconque de sa longueur, le nerf qui se rend à la patte postérieure d’une grenouille, par exemple, et que l’on pique ou que l’on pince lPextrémité ainsi séparée du reste du système nerveux, on voit qu’elle est com- plètement insensible, tandis que la partie située au-dessus de la section conserve toute sa sensibilité ; les parties du membre qui reçoivent des branches nerveuses du fragment inférieur du nerf sont également paralysées. Un nerf séparé du système dont il faisait partie cesse donc de remplir ses fonctions ; il ne peut, par conséquent, être le siège de la perception des sensations, et on doit nécessairement con- clure qu’il sert à transmettre à l’organe chargé de cette fonction les impressions reçues par les parties douées de la sensibilité tactile. C’est, en effet, ce qui est démontré clairement par toutes les Fonctions de la moelle épinière. Rôle du cer- veau dans la perception des sensa- tions. 122 ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. recherches faites à ce sujet. L’impression produite par le con- tact d’un corps avec le nerf lui-même ou avec la partie dans la- quelle ce nerf se ramifie, ne peut être perçue, et ne peut, par conséquent, produire une sensation si elle n’est transmise par le nerf à d’autres organes. Ce fait une fois bien établi, on est naturellement conduit à se demander où les sensations doivent arriver pour que Pani- mal en ait la conscience, ou, en d’autres mots, quel est l’or- gane chargé de les percevoir? Les nerfs dont nous venons d'étudier les fonctions aboutissent tous à la moelle épinière, et celle-ci se termine dans le cer- veau; il est donc évident que c’est dans une partie quelconque de l’encéphale que doit résider cette faculté. Cherchons par l'expérience, si c’est dans la moelle épinière, dans le cervelet ou dans le cerveau. Lorsqu'on pratique sur la moelle épinière les mêmes expé- riences que celles déjà faites sur les nerfs qui en partent, on remarque d’abord que cet organe est extrêmement sensible: la moindre piqüre produit une douleur vive et des mouvemens convulsifs ; et ,si on le coupe en travers, on voit aussitôt une paralysie complète de toutes les parties dont les nerfs naissent au-dessous de la section, tandis que celles dont les nerfs pro- viennent de la portion de la moelle épinière encore en com- munication avec le cerveau, continuent à jouir de la faculté de sentir et de se mouvoir. En ayant soin d’entretenir artificiellement la respiration de manière à empêcher l’animal ainsi expérimenté de périr as- phyxié à la suite de la paralysie des muscles inspirateurs, on peut constater que toutes les parties de la moelle épinière et de la moelle allongée perdent la faculté de déterminer des mouvemens volontaires et celle de donner naissance à des sen- sations aussitôt qu’elles sont séparées du cerveau , et on en doit conclure que ce n’est pas en eux que réside la faculté de perce- voir les sensations ou de déterminer les mouvemens volontaires. Mais il en est tout autrement pour le cerveau. Si lon met à nu les deux hémisphères de cet organe chez un animal vivant (chez un pigeon, par exemple), et qu’on irrite leur surface avec la pointe d’un instrument tranchant, on est d’abord frappé de leur insensibilité; on peut couper et déchirer la substance du cerveau sans que l’animal donne le moindre signe de dou- leur, et sans qu’il paraisse s’apercevoir de la mutilation qu’on lui fait subir ; mais si, comme la fait M. Flourens, on enlève cet organe, l’animal tombe dans un état de stupeur dont rien ne peut le faire sortir. Tout son corps devient insensible, ses sens n’agissent plus, et s’il se remue, ce n’est que poussé par quelque DE LA SENSIBILITÉ. "123 cause étrangère et sans que la volonté paraisse entrer pour rien dans la détermination de ses mouvemens. On voit par cette expérience que l’action du cerveau est in- dispensable à la perception des sensations et à la manifestation de la volonté, et que c’est à cet organe que les impressions reçues par les nerfs doivent arriver pour que l’animal en ait la conscience. Dans la fonction de la sensibilité, il y a donc une division du travail bien remarquable; les parties qui, par leur contact avec les corps étrangers , sont susceptibles de donner naissance à des sensations ne peuvent pas percevoir elles-mêmes ces im- pressions , et d’un autre côté, l'organe qui a pour apanage ex- clusif la perception de ces impressions, ne peut lui-même en rece- voir directement ; il est insensible et ne peut être excité que par les impressions qui lui sont transmises par l'intermédiaire des nerfs. Ainsi, on peut distinguer dans l’appareil de la sensibilité tac- tile trois propriétés, savoir : 1° la faculté de recevoir au contact d’un corps étranger une impression de nature à donner nais- sance à une sensation; 2° la faculté de transmettre ces impres- sions , du point où elles ont été produites , à l'organe chargé de les percevoir; 3° celle de donner à l’animal la conscience de leur existence ou de les percevoir. Il résulte des expériences de M. Flourens et de quelques autres physiologistes, que chez les animaux qui avoisinent l’homme, tels que les mammifères et les oiseaux, cette dernière faculté réside essentiellement dans les hémisphères du cerveau. La faculté de transmettrejà cet organe les impressions produites par le contact d’un corps étranger appartient aux nerfs du système cérébro-spinal et à la moelle épinière, mais tous les nerfs ne la pos- sèdent pas. Tous ceux qui naissent de la moelle épinière jouissent en même temps du pouvoir de transmettre aux muscles l'influence de la volonté, et de transmettre au cerveau les impressions dont nous venons de parler; ce sont, par conséquent, des nerfs, du mouvement et de ka sensibilité tactile. Mais les racines qui les fixent à la moelle épinière ne présentent pas les mêmes propriétés. Nous ayons déjà vu que tous ces nerfs naissent par deux or- dres de filamens , dont les uns sortent de la partie antérieure , et les autres de la partie postérieure de la moelle épinière, et les expériences intéressantes de M. Magendie ont appris que les premiers servent à la transmission des sensations et les se- conds à celle de l'influence qui détermine les mouvemens vo- lontaires. En effet, si lon coupe les racines postérieures de l’un des nerfs spinaux, on prive aussitôt ce cordon de la faculté de trans- Résumé. Nerfs de la sensibilité et des mouve- mens. Fonctiozs desracines an- térieures et postérieures des nerfs spi- DAUux. Nerfs cé- phaliques. Faisceaux antérieurs et ostérieurs de la moelle épi- niére. Nerf grand sympathique. Sens spé- eiaux. 124 ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. mettre les impressions: la partie du corps à laquelle il se rend devient insensible ; mais les mouvemens restent soumis à lin- fluence de sa volonté, tandis que la section des racines anté- rieures , les racines postérieures restant intactes, détermine la paralysie des mouvemens sans détruire la sensibilité. En coupant les racines postérieures de tous les nerfs spinaux, on n’empêche pas l’animal d'exécuter des mouvemens volon- taires, mais on rend tout son corps (à l'exception de la tête, dont les nerfs naissent dans l’intérieur du crâne) complètement insen- sible. Les racines postérieures sont donc des nerfs de la sen- sibilité et les racines antérieures des nerfs du mouvement, et c’est par leur réunion que le cordon résultant de leur jonction jouit en même temps de ces deux facultés. Parmi les nerfs qui sortent de la portion céphalique de l’encé- phale, il en est qui possèdent les mêmes propriétés que les nerfs spinaux ; ce sont les nerfs faciaux ou nerfs de la cinquième paire; le nerf pneumogastrique ou de la dixième paire, et les nerfs sous-occipitaux ou de la douzième paire. Tous ces nerfs naissent par des racines dont l’une présente un renflement ganglionnaire et appartient à la sensibilité tactile , et dont l’autre ra pas de ganglion et sert aux mouvemens. Les autres nerfs céphaltiques sont peu ou point sensibles , et servent, soit aux mouvemens, soit à la transmission de cer- taines impressions particulières produites par la lumière, les sons , etc., sur lesquelles nous aurons bientôt à revenir. Les différentes parties de la moelle épinière ne possèdent pas toutes , au même degré, la faculté de transmettre les sensations ou d’exciter les mouvemens; la sensibilité est exquise à la face pos- térieure de cet organe et beaucoup plus faible à la face antérieure. Enfin le système nerveux ganglionnaire n’est que peu ou point sensible : on peut pincer ou couper ces ganglions, ainsi que les nerfs qui en partent, sans produire de douleur et sans occasio- ner de contractions musculaires. Il est à remarquer aussi que, dans l’état de santé, les organes intérieurs qui reçoivent ces nerfs ne nous transmettent que des sensations faibles et très confuses, et c’est seulement dans certains états maladifs que leur sensibilité se développe. Dans ce cas, il est à présumer que les sensations arrivent au cerveau par l'intermédiaire des bran- ches qui unissent les nerfs du système ganglionnaire à chacun des nerfs spinaux. Mais ce point de physiologie réclame de nou- velles investigations. Jusqu'ici nous ne nous sommes occupés que des sensations produites par le contact d’un corps matériel quelconque sur DE LA SENSIBILITÉ. 125 nos organes et de la fonction qui nous permet de connaitre l'existence d'objets qui résistent à nos mouvemens et de juger de la consistance, du degré de poli, de la température, et jus- qu’à un certain point de la forme de ces objets. Mais ce ne sont point là les seules sensations que ces objets peuvent réveiller en nous, et nous jouissons encore dela faculté d'apprécier plusieurs de leurs qualités qui échappent complètement à la sensibilité tac- tile, telles que leur saveur, leur odeur, leurs couleurs et les sons qu’ils produisent. Ces facultés constituent les sens spéciaux dont l’homme et la plupart des animaux sont doués. De même que, dans l'exercice de la sensibilité tactile, il faut, pour la perception de ces sensations, le concours du cerveau qui en juge et d’un nerf qui transmet à cet organe la sensation produite ; mais ici la division du travail est portée encore plus loin, car ce nerf n’est pas apte à recevoir lui-même limpression : celle-ci doit être reçue par un instru- ment spécial et transmis , par le nerf de cet organe , au cerveau Ainsi la lumière, pour produire sur nous une sensation quel- conque , doit nécessairement frapper sur une partie déterminée du corps, dont la sensibilité est modifiée , et le nerf qui conduit au cerveau Pimpression ainsi reçue est par lui-même insensible à cet agent. Les nerfs des sens spéciaux naissent tous du cerveau ou de la partie la plus voisine de la moelle allongée , et ne jouissent qu’à un très faible degré de la sensibilité tactile. On peut pincer et couper le nerf optique , par exemple , sans produire de douleur. Mais les organes qui sont le siège de ces sens spéciaux et qui sont tous logés dans la tête, reçoivent des branches du nerf trifacial, et ce nerf leur donne la sensibilité tactile. Ces diverses modifications de la faculté de sentir constituent les cinq sens, à l’aide desquels nous acquérons des idées de tout ce qui nous entoure. Examinons maintenant , d’une manière particulière, com- ment chacune de ces facultés s'exécute , et étudions les instru- mens qui servent, soit à la sensibilité tactile, soit au goût, à lodorat, à l’ouie et à la vue. DU SENS DU TOUCHER. Tous les animaux jouissent d’une sensibilité tactile plus ou moins délicate, et c’est par l'intermédiaire de la membrane dont la surface de leur corps est recouverte, que cette faculté Structure de la peau. Derme. Réseau mu- queux. Epiderme. 126 ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE,. s’exerce. Pour l’étudier, il faut donc avant tout examiner quelle est la structure de la peau. Dans l’homme, la surface extérieure du corps et celle des ca- vités creusées dans son intérieur, mais communiquant axec le dehors, tel que le canal digestif, etc. sont revêtues d’une mem- brane tégumentaire plus ou moins épaisse et bien distincte des parties qu’elle recouvre. Cette membrane est partout en conti- nuité avec elle-même, et ne forme réellement qu’un seul tout ; mais ses propriétés ne sont point partout les mêmes, et on la désigne par des noms différens lorsqu'elle se reploie en dedans pour tapisser des cavités intérieures , ou lorsqu'elle s’étend sur la surface extérieure du corps. La portion intérieure de la mem- brane tégumentaire générale est appelée membrane muqueuse, et la portion externe peau. La peau se compose de trois couches principales: le derme ou chorion, le réseau muqueux et lépiderme. Le derme forme la couche la plus profonde et la plus épaisse de la peau. Cest une membrane blanchâtre , souple, mais assez élastique et très résistante. On y distingue un grand nombre de fibres et de lamelles entrecroisées d’une manière très serrée. Sa face interne est unie aux parties voisines par une couche plus ou moins épaisse de tissus cellulaires, et donne , dans quelques points , attachés à des fibres musculaires servant à la mouvoir. Enfin, sa surface est hérissée d’un grand nombre de petites saillies rougeâtres, qui sont très sensibles, et qui sont disposées par paires , et forment, dans certaines parties du corps, telles que la paume des mains et l’extrémité des doigts, des séries régulières. Ce sont ces corps que l’on désigne sous le nom de papilles de La peau, et c’est le derme de la peau de certains animaux, qui pré- paré par le tannage , constitue le cuir. Le réseau muqueux est un lacis de vaisseaux de consistance molle qui recouvre le derme, et qui est enduit d’une matière pul- peuse et granulée , à laquelle la peau doit sa couleur , et dont la teinte varie, par conséquent, dans les différentes races et même chez les différens individus. Chez les nègres, cette matière colo- rante est noire ; chez les Européens, elle est blanche. Lorsque le réseau muqueux qui la forme a été détruit, elle ne se reproduit pas , et c’est pour cette raison que les cicatrices de la peau sont toujours blanches, même chez les nègres. Enfin, l’epiderme est une espèce de vernis semi-transparent qui recouvre {a surface de la peau sur laquelle elle se moule; ce n’est pas une partie sensible, ni même vivante, mais bien une matière qui est sécrétée par la peau et qui ne prend une cer- taine solidité que par le dessèchement; aussi, dans les parties du corps qui sont soustraites à l’action de l'air est-elle toujours DU SENS DU TOUCHER. 127 molle et peu distincte, et chez les animaux qui vivent dans l’eau, elle ne se solidifie pas, à moins toutefois qu’elle ne s’encroûte de matières pierreuses comme cela a lieu chez les écrevisses et la plupart des autres crustacées. On remarque à la surface de l’épiderme une multitude de pe- titesouvertures appelées pores de La peau. Elles correspondent au sommet des papilles dont nous avons déjà parlé, et livrent passage à la sueur, liquide acide qui est formée par voie de sécrétion, et qu'il ne faut pas confondre avec l’eau qui s’exhale Continuelle- ment par la surface de la peau et qui constitue la transpiration insensible. Ces pores sont d’une petitesseextrôme et ne traversent pas le derme , on doit les considérer comme les conduits sécré- teurs des organes qui sécrètent la sueur. (1) On trouve aussi à la surface d’autres ouvertures plus grandes , dont les unes livrent passage à des poils, sur le mode de forma- tion desquels nous reviendrons par la suite et dont les autres laissentsuinter une matière grasse, sécrétée pardes follicules 1o- gés dans l'épaisseur de cette membrane ; enfin , dans quelques points de la surface du corps, on voit sortir de la substance de la peau des lames cornées, appelées ongles, dont la nature est sem- blable à celle des poils. La sensibilité tactile réside dans le derme et paraît appar- tenir surtout aux papilles dont sa surface est souvent hérissée. Toutes les parties de la peau ne sont pas également sensibles, et ces différences dépendent non-seulement du nombre de nerfs qui s’y distribuent, mais aussi de l’épaisseur de l’épiderme qui la recouvre. En effet, le principal usage de l’épiderme est d’opposer des obstacles de l’évaporation des liquides contenus dans le Corps, et de protéger la peau proprement dite du contact immédiat des corps étrangers, de façon à modérer les impressions produites par ce contact. Nous avons déjà vu que cet enduit solide est par lui-même insensible ; et comme il s’iInterpose toujours entre le derme et les objets extérieurs dont le contact sur cette mem- brane détermine les sensations, il est facile de comprendre que plus la couche épidermique est épaisse, plus aussi le derme doit être soustrait à l’action des corps étrangers , et plus les impressions qu’il éprouve doivent être obtuses. Or, dans (1) La sueur est un liquide acide, comme l'urine et le sue gastrique. Pour s’en convaincre, il suffit d'appliquer sur la peau, humectée par cette sécrétion, un morceau de papier teint en bleu par du tournesol ; car la couleur de celui-ci Passera de suite en rouge, comme cela a toujours lieu par l’action d'un acide, Pores. Sueur. Poils. Ongles. Siege de la sensibilité, Tact et tou- cher. Appareil du toucher, 128 ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. quelques parties du corps, au talon, par exemple, l’épiderme présente une épaisseur considérable, tandis que dans d’autres, à l'extrémité des doigts, sur les lèvres, etc., elle est extrêmement mince.On remarque aussi que, partout où la peau est exposée à des frottemens, son épiderme s’épaissit. Chacun sait combien la couche qui se forme dans la main des forgerons et autres ou- vriers employés à des travaux analogues, devient épaisse, dure et rugueuse. Enfin chez quelques animaux l’épiderme s’encroûte de matières calcaires et devient tout-à-fait inflexible; dans ce cas, il rend la surface du corps complètement insensible. La sensibilité tactile, telle qu’elle existe dans toutes les par- ties de la surface de notre corps, suffit pour nous faire juger de la consistance, de la température et de quelques autres proprié- tés des corps qui arrivent en contactavec elle. Ce sens ne s’exerce alors que d’une manière en quelque sorte passive, qui peut être désignée sous le nom de fact ; mais d’autres fois la partie douée de cette sensibilité joue un rôle actif; des contractions muscu- laires, dirigées par la volonté, multiplient et varient les points de contact avec l’objet extérieur, et on donne alors à ce sens le nom de toucher. Le toucher n’est donc que le tact perfectionné et devenu actif, mais il ne peut être exercé que par des organes disposés de ma- nière à leurpermettre dese mouleren quelque sorte sur les objets que l’on veut palper. Dans l’homme la main est l’organe spécial du toucher , et sa structure est très favorable à l'exercice de ce sens ; lépiderme y est mince, poli et très souple; le chorion y est abondamment pourvu de papilles et de nerfs, et repose sur une couche épaisse de tissu cellulaire graisseux très élastique; enfin la mobilité et la flexibilité des doigts sont extrêmes, et la longueur de ces organes estconsidérable ; or ces circonstances sont des plus avantageuses, car elles tendent à augmenter la sensibilité de cette partie et lui permettent de s'appliquer à tous les corps, quelle que soit lirré- gularité de leur figure. Mais une autre disposition organique qui contribue non moins à la perfection de notretoucher, est la faculté qu’a l'homme d’opposer le pouce aux autres doigts , de manière à pouvoir serrer les petits objets entre les parties de la main qui sont précisément celles dont la sensibilité est la plus exquise. Chez la plupart des animauxles organes du touchersont disposés d’une manière beaucoup moins favorable. Chez les mammifères , par exemple, on voit ce sens devenir de plus en plus obtus, à me- sure que les doigts deviennent moins flexibles ets’enveloppent da- vantage dans les ongles, dont ils sont armés; quelquefois cepen- = DU SENS DU TOUCHER. 129 dant les mains sont remplacées par d’autres organes d’une struc- ture non moins parfaite , tels que la trompe de l’éléphant; enfin ilest des añimaux qui emploient principalement leur langue comme instrument du toucher, et d’autres sont pourvus d’ap- pendices particuliers , qui servent aux mêmes usages, et qui sont appelés tentacules , palpes, etc. Le toucher nous fait apprécier plus ou moins exactement la plupart des propriétés physiques du corps sur lequel il s'exerce; ses dimensions, sa forme , sa température, sa consistance, le degré de poli de sa surface, son poids, ses mouvemens, ete. Ce sens est tellement parfait, que plusieurs philosophes de l’anti- quité et des temps modernes l'ont regardé comme nous étant plus utile que la vue ou que l’ouiïe, et comme étant même la source de notre intelligence; mais ces opinions sont évidem- ment exagérées, Car le toucher n’a réellement aucune préro- gative sur les autres sens ; et, chez quelques singes, dont l’intel- ligence est incomparablement moins développée que celle de l’homme, les organes du toucher sont aussi parfaits que dans le corps humain. DU SENS DU GOUT. Le sens du goût, comme celui du toucher, est mis en jeu par le contact des objets extérieurs sur certaines surfaces de notre corps; mais il nous fait connaitre des propriétés qui échappent au toucher, les saveurs des corps. Toutes les substances n’agissent pas sur l’organe du goùt. Les unes sont très sapides , d’autres ne le sont que peu , et il en est un grand nombre qui sont complètement insipides. On ignore la cause de ces différences , mais on remarque qu’en général les corps qui ne peuvent pas se dissoudre dans leau n’ont pas de saveur, tandis que la plupart de ceux qui sont solubles sont plus ou moins sapides. Leur dissolution parait même être une des conditions nécessaires pour qu'ils agissent sur l’organe du goùt; car, lorsque cet organe est complètement sec, il ne nous donne plus la sensation des saveurs ; et on connaît des substances qui , étant insolubles dans l’eau, sont insipides dans leur état ordinaire, mais qui acquièrent unesaveur forte si on parvient à les dissoudre dans quelque autre liquide , dans de lesprit de vin, par exemple. La connaissance de la saveur des corps sert principalement à diriger les animaux dans le choix de leur nourriture : aussi l'organe du goût est-il toujours placé à l’entrée du tube digestif. 9 Usages de ce sens. Saveur des corps. Siège du goût. Structure de la langue. Nerfs de la langue. 130 ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. C’est la langue qui en est le siège principal, mais les autres parties de la bouche peuvent aussi éprouver la sensation de certaines saveurs. La membrane muqueuse qui recouvre la langue est abon- damment fournie de vaisseaux sanguins et présente, sur le dos de cet organe , un grand nombre d’éminences de formes variées qui rendent sa surface rugueuse. Ces éminences ou papilles sont de diverses natures : les unes lenticulaires , et en petit nombre, consistent en autant d’amas de follicules muqueux, d’autres, fungiformes ou coniques et très nombreuses, sont vasculaires ou nerveuses; les dernières recouvrent les filets terminaux du nerf lingual et paraissent servir principalement au sens du goùt. La langue, dont la masse est formée par un grand nombre de muscles entrecroisés , reçoit les branches de plusieurs nerfs ; les uns servent à y exciter les mouvemens, les autres à conduire au cerveau les sensations des saveurs. Le nerf trifacial ou nerfde la cinquième paire, qui nait à l'extrémité supérieure de la moelle épinière et se sépare de l’encéphale près du bord antérieur de la protubérance annulaire (voy. fig. 29, p. 114), est celui qui remplit ces dernières fonctions. Il sort du crâne derrière l'orbite et se di- vise en trois branches principales, savoir: le nerf ophthalmique qui se rend à l’appareil de la vue, etc., le nerf maxillaire supé- rieur qui se distribue à la mâchoire supérieure et à la joue, et le nerf maxillaire inférieur dont l’un des principaux rameaux porte le nom de nerf lingual et se termine dans la membrane muqueuse de la langue. Si l’on coupe le nerf lingual sur un animal vivant, on ne para- lyse pas les mouvemens de la langue, mais on rend cet organe insensible aux saveurs ; et si on coupe le tronc du nerf trifacial dans l’intérieur du crâne, on détruit le sens du goût non-seule- ment dans la langue, mais aussi dans toutes les autres parties de la bouche. La section des nerfs de la neuvième et onzième paire, qui se rendent également à la langue, ne prive pas l’animal de la fa- culté de sentir les saveurs, mais eniraine la perté du mouvement dans la langue et les autres parties auxquelles ces nerfs se dis- tribuent. Il s’ensuit donc que c’est la branche linguale du nerf de la cin- quième paire, qui est le nerf spécial du sens du goût. DU SENS DE L'ODORAT. 131 DU SENS DE L’ODORAT. Certains corps possèdent la propriété d’exciter en nous des sensations d’une nature particulière , qui ne peuvent être per- cues à l’aide des sens du toucher et du goût, et qui dépendent de l'odeur qu’ils exhalent. Les odeurs sont produites par des particules d’une ténuité extrême , qui s’'échappent des corps odorans et qui se répandent dans l’atmosphère comme des vapeurs. Tous les corps volatils ou gazeux ne sont pas odorans ; mais , en général , ceux qui ne peuvent se transformer facilement en vapeur, ne répandent que peu ou point d’odeur, et , dans la plupart des cas , on voit les substances odorantes le devenir d'autant plus que les circon- stances où elles sont placées sont plus favorables à leur volatili- sation. Du reste , la quantité de matière qui se répand ainsi dans l'air pour produire les odeurs même les plus fortes est extrême- ment petite. Un morceau de musc, par exemple , peut parfumer l'air de tout un appartement pendant un temps considérable, sans changer notablement de poids. Une foule de corps , tels que l’eau , les vêtemens, etc. , peuvent s’imbiber de ces vapeurs et devenir odorantes à leur tour; mais d’autres substances, telles que le verre, s'opposent complètement à leur passage. Nous pouvons sentir l’odeur de corps placés à une très grande distance de nous; mais, pour que notre sens olfactif soit réveillé, il faut toujours que les particules odorantes , émanées de ces corps , arrivent en contact avec l’organe destiné à les recevoir. Et, en cela, le mécanisme de l’odorat est analogue à celui du goût et du toucher, tandis que , pour la vue et louiïe , comme nous le verrons bientôt , il en est tout autrement. L'air, disons-nous, est le véhicule des odeurs : c’est ce fluide Appareil ol- Odeurs. qui les transporte au loin, et qui les fait arriver jusqu’à nous. I factif. est donc évident que l'organe destiné à les sentir doit être tou- jours placé de manière à en recevoir le contact, et l'expérience nous apprend que , pour que cet organe puisse remplir ses fonc- tions , il faut que la membrane, touchée par les odeurs , soit continuellement humectée et enduite d’un liquide propre à ab- sorberles particulesodorantes et à les fixer pendantquelque temps sur la surface olfactive. Si cette surface était extérieure, elle rem- plirait la première de ces conditions , mais non pas la seconde ; les odeurs viendraient la frapper, mais elle ne tarderait pas à se dessécher et à devenir insensible à leur contact. On voit, par 9. 132 ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. conséquent , que l’odorat doit toujours résider dans les parois d’une cavité intérieure du corps, communiquant librement au- dehors , et que plus le renouvellement d'air, qui nous apporte les odeurs , s’y fera d’une manière rapide et régulière, plus aussi les conditions seront favorables à l'exercice de ce sers. C’est effectivement ce qui a lieu, non-seulementchez l’homme, mais aussi chez tous les autres mammifères , chez les oiseaux et les reptiles , le sens de l’odorat a son siège dans les fosses na- sales , et ces cavités sont continuellement traversées par l'air, qui se rend aux poumons , pour subvenir aux besoins de la res- piration. Elles communiquent au-dehors par les narines et s'ouvrent postérieurement dans le pharynx, à peu de distance de la glotte (voy. fg. 23, p. 87): aussi, toutes les fois que la bouche est fermée , est-ce par leur intermédiaire que l'air arrive à cette dernière ouverture, et peut-on les considérer comme la portion antérieure du tube aérifère. Fig. 31. (1) Les fosses nasales sont sépa- k | e ©? rées entre elles par une cloison | | verticale, qui est dirigée d'avant en arrière ,et qui occupe la ligne médiane de la face ; leurs parois sont formées par divers os de la face et par les cartilages du nez, et leur étendue est très considé- rable. Sur la paroi externe, on remarque trois lames saillantes , qui sont recourbées sur elles- pr Fe mêmes , et qui sont appelées les cornets du nez (g,?,k). Elles augmentent la surface de cette paroi, etsontséparées entre elles par des gouttières longitudinales, nom- mées méats(f, h). Enfin ces fosses communiquent avec des sinus plus ou moins vastes ,qui sont Creusés dans l’épaisseur de los du front (2), des os de la mâchoire supérieure, etc. La membrane mu queuse qui tapisse les fosses nasales s’appelle membrane pituitaire; elle est épaisse et se prolonge au-delà des bords des cornets, de m (r) Cette coupe verticale des fosses nasales représente la paroi externe de l’une de ces cavités ;—a bouche ;—4 narine;—c ouverture postérieure des fosses na- sales ;—4 portion de la base du crâne ;—e front ;—/f méat inférieur >—£ cornet inférieur ; —h méat moyen ;—i cornet moyen ; — À cornet supérieur ; — [sinus frontal ; — m sinus sphénoïdal ;—n ouverture de la trompe d’Eustache. s. (2) Les sinus frontaux n'existent pas dans l'enfance , Mais se développent avec l'âge et acquièrent des dimensions très considérables : ce sont ces cavités qui con- tribuent le plus à faire avancer la partie inférieure du front au-dessus de la racine du nez. DU SENS DE L'ODORAT. 133 façon que Pair ne peut traverser les cavités olfactives que par des routes étroites el assez longues, et que le moindre gonfle- ment de cetté membrane rend le passage de ce fluide difficile ou mème impossible. La surface de la membrane pituitaire présente une foule de petites saillies , qui lui donnent un aspect velouté ; enfin elle est continuellement lubrifiée par un liquide plus ou moins visqueux, appelé mucus nasal, qui parait se former € en grande partie dans les sinus déjà mentionnés , et elle reçoit un assez grand nombre de filets nerveux, dont les uns viennent des nerfs «2 la cinquième paire, et les Ah du nerf olfactif ou de la première paire. Le mécanisme de l’odorat est très simple ; il faut seulement Mjéanisme que le mucus nasal s’imbibe des particules odorantes répandues de l'odorat. dans lairqui traverse les fosses nasales,etque ces particules soient ainsiarrêtées sur la partie de lamembrane pituitaire qui reçoit les filets du nerf olfactif. D’après cela, on conçoit facilement quelle est l'importance du mucus nasal pour Pexercice de l’odorat, et on comprend comment les changemens dans la nature de ce li- quide, qui surviennent pendant le coryza ou rhume de cer- veau , peuvent faire perdre momentanément ce sens. C’est à la partie supérieure des fosses nasales que les branches du nerf olfactif sont les plus nombreuses , que le mucus nasal est le plus abondant, et que les routes suivies par l’air sont les plus étroites: aussi est-ce dans cette partie que les odeurs sont le plus aisément et le plus vivement senties. Il paraitrait mème que le principal usage du nez est de diriger vers la voûte des fosses nasales l'air inspiré; en effet , les personnes qui perdent cet organe perdent en même temps presque entièrement l’odorat, et on a vu des cas où , pour rendre ce sens au malade ainsi mu- ülé , 4l a suffi de lui ajuster sur la face un nez artificiel. L'on s’accorde généralement à regarder le nerfoifactif comme KNerfs de étant le nerf destiné à porter au cerveau les impressions pro- l’odorat. duites par les odeurs ; mais il paraît que le nerf de la cinquième paire joue aussi un rôle très important dans cette fonction, car M. Magendie a constaté que sa section rendait la membrane pi- tuitaire insensible aux odeurs les plus fortes. Quant à l’usage des sinus qui communiquent avec les fosses Usages des nasales par des ouvertures étroites, et qui sont tapissées par une sinus. membrane mince, on ne sait rien ‘de positif. On remarque ce- pendant que les animaux chez lesquels ces cavités sont les plus vastes, soni aussi ceux dont l’odorat est le plus fin. 154 ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. DU SENS DE L'OUIE OU DE L’AUDITION. L’audition est une fonction destinée à nous faire connaitre les sons produits par les corps vibrans. Appareil au- L'appareil de l’ouïe est très compliqué; les diverses parties ditif. dont il se compose sont, pour la plupart, d’une petitesse ex- trême; aussi n’occupe-t-il que peu d'espace et est-il renfermé presqu’en entier dans l’épaisseur d’une saillie osseuse qui, de chaque côté de la tête, avance dans l’intérieur du crâne et con- stitue la partie de l’os temporal appelé, à cause de sa grande dureté, le rocher. (Fig. 32 e.) On y distingue trois portions, savoir : l’oreille externe, l’oreille moyenne et loreille interne. Fig. 32. (1) SE [a] ss L >) AS SE Pn a: \TY S ñn 27 (1) Cette figure représente une coupe verticale de l'appareil auditif, dont les parties intérieures sont un peu grossies pour les faire mieux distinguer. a pa- villon de l’oreille ; — 3 lobule du pavillon; — c petite éminence appelée anti- tragus ; — d conque dont le fond se continue avec le conduit auriculaire > — e, € portion de l'os temporal , appelée rocher, dans laquelle est logé l'appareil DU SENS DE L'OUIE. 135 L'oreille externe se compose du pavillon de l'oreille et du Oreille ex- conduit augiculaire. Te Le pavillon de l'oreille (a)est une lame fibro-cartilagineuse,sou- Pavillon de ple et élastique, qui est parfaitement libre dans la plus grande l'oreille. partie de son étendue, et qui adhère au bord du conduitauriculaire. La peau qui le couvre est mince, sèche et bien tendue; sa sur- face se contourne de plusieurs manières et présente diverses éminences et enfoncemens , dont le plus considérable est appelé conque auditive (4). Elle constitue une espèce d’entonnoir très Conduitau: évasé et se continue avec le conduit auriculaire qui s'enfonce riculaire. dans los temporal, et se recourbe en haut et en avant. La peau qui tapisse ce conduit se termine en cul-de-sac à son extrémité interne, et au-dessus d’elle on trouve un grand nombre de petites follicules sébacées qui fournissent la matière Jaune et amère connue sous le nom de cerumen. L’oreille moyenne se compose de la caisse du tympan et des Oreille parties qui en dépendent. moyenne. Fig. 33. (1) La caësse(fig.33h)estune ca Caisse. vité de forme irrégulière, qui est creusée dans la substan- ce du rocher, et qui fait suite au conduit auriculaire dont 1 elle est séparée par une cloi- k _e Son membraneuse , très ten- ”_ dueettrès élastique nommée ; tympan (b).Vis-à-vislouvertu- re dans laquelle le tympan est f <9mme enchässé (c’est-à-dire ” à la partie interne de la cais- se), se trouvent deux autres trous qui sont bouchés de la même manière par une mem- auditif ; — e’ apophyse mastoïde de l’os temporal ; — e” portion de la fosse glenoïdale de l’os temporal dans laquelle s’articule la mâchoire inférieure ; — e” apophyse styloïde du temporal, servant à l'insertion des muscles et des liga- mens de l’os hyoïde ; — e”” extrémité du canal que traverse l’artère carotide interne avant que de pénétrer dans la cavité du crâne; — f conduit auriculaire ; — g tympan; — À caisse dont on a retiré la chaîne des osselets ; — z ouver- tures conduisant de la cavité de la caïsse dans les cellules (7) dont le rocker est creusé ; — sur la paroi interne de la caisse on apercoit les deux ouvertures appelées fenêtres ovale et ronde ; — Æ trompe d’Eustache, conduisant de la caisse dans le haut du pharynx ; — / vestibule ; — » canaux semi-circulaires ; — n limacon ; — o nerf acoustique. (x) Cette figure représente la paroi externe de la caisse , le tympan, les osse- lets de l’ouïe et leurs muscles, le tout grossi. a a Cadre du tympan ; — 2 tym-. Oreille in- terne. 136 ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. brane tendue ; on les appelle , à raison de leur forme, fenétres ovale et ronde.A la paroi postérieure de la caïisse,on voitune ouver- Lure qui conduit dans des cellules creusées dans la portion mastoï- dienne de los temporal, età sa paroi inférieure on remarque l’em- bouchure de la trompe d’'Eustache, conduit long et étroit qui vient aboutir à la partie postérieure des fosses nasales, et qui établit ainsi une communication entre l’intérieur de la caisse et l'air extérieur. Enfin cette cavité est traversée par une chaine de petits osselets qui s'étend depuis le tympan jusqu’à la mem- brane de la fenêtreovaleet qui s'appuie, à l’aide d’une branche dirigée de côté, sur la paroi postérieure de la caisse ({g. 33). Fig. 34. (1) Ces os sont au nombre de quatre et portent les ah noms de marteau (#g.34,a),d’enclume (b), d’os len- ticulaire (e)et d’étrier (4). Une petite tige, qui peut être comparée à un manche, et qui appartient au marteau, appuiesurletympan, et la base de étrier sc repose aussi sur la membranede la fenêtre ovale. EN Enfin des petits muscles, fixés à ces osselets , leur d _ impriment des mouvemens par suite desquels ils pressent plus ou moins fortement sur ces mem- branes et augmentent ou diminuent, par con- séquent , leur degré de tension. L’oreille interne, de même que l'oreille moyenne;est renfermée tout entière dans le rocher. Elle se compose de plusieurs cavités qui communiquent toutes entre elles, et que lon nomme le vesti- bule, les canaux semi-circulaires et le limaçon. Le vestibule en occupe la partie moyenne et communique avec la caisse par la fe- nêtre ovale.Les canaux semi-circulaires s’élèvent de la face supé- rieure et postérieure du vestibule; ilssontau nombre detroisetont la forme de canaux arrondis et renflés en forme d’ampoule à une de leurs extrémités. Enfin, le limaçon est un organe très singulier, qui est contourné en spirale , comme la coquille de animal dont il porte le nom ; sa cavité est divisée en deux parties par une cloison longitudinale, moitié osseuse, moitié membraneuse ; pan ; — c manche du marteau dont l’extrémité s'appuie sur le milieu du tympan; — d tête du martcau s’articulant avec l’enclume ;— e apophyse qui naît au-des- sous du col du marteau, et s'enfonce dans la scissure glenoïdale de l’os tempo- ral ; son extrémité donne attache au muscle antérieur du marteau ; — f muscle interne du marteau; — £# enclume dont la branche verticale s’appuie sur les parois de la caisse, et dont la branche verticale s’articule avec l'os lenticu- laire ( k);— i étrier dont le sommet s'articule avec l'os lenticulaire, et dont la base s’appuie sur la membrane de la fenêtre ovale ; — À muscle de l’étrier. (r) Osselets de loreille séparés. — « le marteau ; — à l’enclume ; — € l'os lenticulaire; — d l’étrier. DU SENS DE L'OUIE. 137 elle communique avec l'intérieur du vestibule et n’est séparée de la caisse que par la membrane de la fenêtre ronde. Cette dernière cavité est remplie d'air; l'oreille interne , au contraire , est remplie d’un liquide aqueux, et la membrane qui tapisse le vestibule, ainsi que les canaux semi-circulaires, n’est pas ap- pliquée contre les parois osseuses de ces cavités, mais comme suspendue dans leur intérieur. Le nerf de la huitième paire qui naît de la moelle allongée près du corps restiforme , et qui se sépare de l’encéphale entre le pédoncule du cervelet et la protubérance annulaire , pénètre dans le rocher par un canal osseux nommé conduit auditif in- terne, et vient se terminer dans l’intérieur des poches membra- neuses du vestibule et des canaux semi-Cireulaires ainsi que dans le limaçon. C’est de lui que dépend la sensibilité de l’organe auditif, et on le nomme, pour cette raison, nerf acoustique. Telles sont les parties principales de l'appareil auditif. Voyons maintenant quel est le rôle que chacune d’elles remplit dans l'exercice du sens de l’ouïe. L’audition, avons-nous dit, est destinée à nous faire sentir les sons. Le son résulte d’un mouvement vibratoire très rapide qu’é- Nerf acous- tique. Mécanisme de l’audition. Nature da rouvent les particules des corps sonores. Pour s’en assurer, il son. à suffit de répandre , sur une lame de verre ou sur la table d’un violon du sable fin , et de faire produire à cette lame ou à cet instrument un son quelconque : on verra aussitôt les grains de sable s’agiter et être lancés en l'air avec d'autant plus de force que le son sera plus intense. Les ondulations qu'éprouve le corps sonore se communiquent à l’air qui est en contact avec sa surface, comme ils se sont communiqués au sable dans l’ex- périence précédente; et c’est ainsi, de proche en proche, que les sons se propagent au loin. Or, pour que nous puissions les entendre, il faut que les mouvemens vibratoires dont nous venons de parler arrivent jusqu’à l'oreille interne, et que sous leur influence, le liquide qui baigne immédiatement le nerf acoustique , entre lui-même en vibration. Pour se rendre raison. du mécanisme de laudition, il faut donc suivre la marche de ces mouvemens ondulatoires à travers les diverses parties de Pappareil auditif qui se trouvent interposées entre l'air exté- rieur et le nerf acoustique. Cest d’abord sur le pavillon de l’oreille que viennent frapper les vibrations sonores de Fair. Dans les animaux où cette partie Usage du pa- villon de l’o- reille. Usages du conduit auri- culaire. Usages du tympan 138 ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. a la forme d’un cornet, elle sert à réfléchir les vibrations et à augmenter l’intensité du son qui arrive à son extrémité rétrécie, comme cela est facile à constater par l’expérience. Chacun sait que les personnes un peu sourdes entendent avec plus de fa- cilité lorsqu'elles appliquent à leur oreille un cornet anaïogue ; et si l’on étend sur le sommet ouvert d’un cône en carton une membrane mince, recouverte de sable fin, on verra que les mouvemens de cette poussière seront bien plus intenses lors- que le son arrivera à la membrane par le côté évasé de l’enton- noir que lorsqu'il viendra du côté opposé. Chez l’homme, la conque de l'oreille et le conduit auri- culaire remplissent les mêmes fonctions ; mais les autres parties du pavillon ne sont pas disposées de manière à pouvoir réflé- chir ainsi les sons vers le tympan , et elles paraissent avoir d’au- tres usages. En effet, lorsque des vibrations sonores viennent tomber perpendiculairement sur une surface élastique, les mou- vemens ondulatoires excités dans celle-ci sont bien plus intenses que dans le cas où le son arrive obliquement, et on en peut conclure que les directions variées de la surface du pavillon de notre oreille sont destinées à présenter aux ondes sonores, quelle que soit la direction suivant laquelle elles nous arrivent , un plan ainsi disposé , et servent par conséquent à augmenter la faculté vibrante de cet appendice élastique. Du reste, le pavillon de l'oreille n’est pas d’une très grande utilité, et sa perte n’affaiblit pas beaucoup louïe. Les vibrations , excitées ainsi dans le pavillon de l'oreille , se communiquent aux parois du conduit auriculaire et de là aux par- ties plus profondes de l’appareil de l’ouïe ; mais ces mouvemens ne peuvent être que très faibles , et c’est principalement par l'intermédiaire de l’air contenu dans ce conduit, que les sons pénètrent dans l’intérieur de l'oreille : aussi, en bouchant ce tube avec du coton ou tout autre corps mou, qui s’oppose à leur passage, on en rend la perception très difficile. Le tympan sert principalement à faciliter la transmission des vibrations sonores de l'air extérieur vers le nerf acoustique. En effet, les expériences d’un de nos physiciens les plus habiles, M. Savart , prouvent que les sons, en venant frapper sur une membrane mince et médiocrement tendue, y excitent très aisé- mentdes vibrations. Sil’on tend sur un cadre une feuille de papier, et que l’on en saupoudre la surface avec du sable , on voit celui-ci s’agiter vivement et se rassembler de manière à former des lignes variées, aussitôt que l’on en approche un corps sonore en vibration. Si l’on fait la même expérience avec une planchette de bois ou une feuille de carton , on ne verra pas de mouve- ment semblable , à moins d'employer un son extrêmement in- DU SENS DE L'OUIE. 139 tense; mais , si l’on adapte à ces derniers corps un disque membraneux semblable au tympan , on les verra vibrer facile- ment sous influence de sons qui auparavant n'auraient pro- duit sur eux aucun effet appréciable. Il est donc évident que le tympan doit entrer facilement en vibration , lorsque des sons viennent le frapper, et que sa pré- sence doit augmenter la facilité avec laquelle les autres parties de l'appareil auditif éprouvent des mouvemens semblables. Les vibrations se transmettent de la membrane du tympan aux osselets de l’oreille, aux parois de la caisse et surtout à l’air dont cette cavité est remplie : elles parviennent ainsi à la paroi posté- rieure de la caisse , et là il existe, comme nous lavons vu, des membranes tendues sur des ouvertures conduisant dans loreille interne, à-peu-près comme le tympan est tendu entre le conduit auriculaire et la caisse. Or, ces membranes doivent agir de la même manière que celle-ci, c’est-à-dire entrer facilement en vibration et transmettre ces mouvemens aux parties voisines. La face postérieure de ces disques membraneux est en contact avec le liquide aqueux qui remplit l'oreille interne , et dans ce liquide sont suspendues les poches membraneuses (1), qui, à leur tour, sont distendues par un autre liquide , dans lequel plongent les filets terminaux du nerf acoustique. Les vibrations que ces membranes exécutent doivent donc setransmettre à ce li- quide, se communiquer ensuite au sac membraneux du vestibule et arriver enfin au nerf sur lequel leur action produit la sen- sation duson. On voit, par ce qui précède, que Pair contenu dans la caisse joue un rôle très important dans le mécanisme de laudition ; or, si cette cavité ne communiquait pas avec l'extérieur, cet air ne tarderait pas à être absorbé et à disparaitre , et les vibrations du tympan ne se transmettraient plus à loreille interne que par les parois osseuses de la caisse et n’y arriveraient que très diffi- cilement. Cela nous rend compte des usages de la trompe d’'Eus- tache, et nous explique comment l’obstruction de ce conduit peut devenir une cause de surdité. Le tympan n’est pas indispensable à l'audition, car, lorsque cette membrane est déchirée, les vibrations de Pair contenu dans le conduit auditif se communiquent sans interruption à l'air de la caisse et arrivent ainsi aux membranes de la fenêtre ovale et ronde. On peut donc se demander quelle en est Putilité (1) On les appelle le vestibule membraneux et les tubes semi-circulaires, suivant qu’elles occupent ie vestibule ou les canaux semi-circulaires ; dans le limaçon, il n’y a rien de semblable , et le liquide dont celui-ci est rempli est le même qui baigne le vestibule membraneux. Transmis- sion des sous a travers la caisse. Oreille in- terne. Usages de ’air renferme dans la caisse. Utilité de la caisse. Trompe d'Eustache. Usages des osselets de l’o- reille. 140 ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. et quel désavantage il y aurait à ce que, la caisse n’existant pas, les membranes des fenêtres ovale et ronde fussent placées à l’ex- térieur? Pour répondre à cette question, il faut d’abord se rap- peler que la manière dont les membranes vibrent sous l'influence d’un même son, varie suivant leur degré de sécheresse ou d’hu- midité, leur température , etc. Or, il est probable que deux sons font sur nous la même impression toutes les fois qu’ils font vi- brer de la même manière le liquide dans lequel se termine le nerf acoustique, et pour que le même son agisse toujours sur nous d’une manière identique, il faut, par conséquent, que les membranes qui communiquent directement leurs vibrations à ce liquide soient constamment à la même température, et au même degré de sécheresse. Et, c’est précisément ce qui arrive pour les membranes des fenêtres de l'oreille interne; Pair de la caisse ne se renouvelant que très lentement est toujours complètement chargé d'humidité et à la même température , tandis que, si la Caisse n'existait pas, ou communiquait librement avec le dehors, l’état de ces membranes changerait à chaque instant, suivant qu’elles seraient exposées à l’action d’un air chaud ou froid, sec ou humide, Cela nous explique aussi pourquoi le conduit d'Eustache estlong el étroit chez tous les animaux à sang chaud, tandis que chez les animaux à sang froid , tel que les lézards , il est court et très large; chez les premiers, il faut que l'air ait le temps de se mettre à la température du corps avant que de pénétrer dans la caisse , tandis que chez les derniers , cette température étant la même que celle de atmosphère, le renouvellement brusque de l’air contenu dans la caisse n’a point d’inconvéniens. Nous avons vu que la chaine d’osselets qui traverse la caisse et s'appuie sur le tympan etsurla membrane de la fenêtre ovale, pouvait exécuter certains mouvemens au moyen desquels la pression qu’elle exerce sur ces membranes augmente ou dimi- nue. L’utilité de cette disposition est facile à comprendre : si l’on saupoudre de sable une membrane tendue sur un cadre, et qu’on en approche un corps sonore en vibration, on verra que, sans rien changer à l’intensité du son, on peut augmenter ou diminuer à volonté la force avec laquelle le sable est lancé en l'air, suivant qu’on diminue ou qu’on augmente la tension de la membrane. Dans le premier cas, il exécutera, sous l'influence d’un son de même intensité, des mouvemens vibratoires bien plus étendus que lorsqu'on viendra à le tendre davantage. On peut en conclure que la pression plus ou moins forte, exercée par le marteau sur le tympan, et par l’étrier sur la membrane de la fenêtre ovale, a pour usage d'empêcher ces membranes de vibrer trop fortement sous linfluence de sons très intenses, DE LA VUE. 141 sans les priver pour cela de la faculté de vibrer lorsqu'un son faible vient les frapper. La pression exercée sur la mem- brane de la"fenètre ovale se communique aussi à la membrane de la fenêtre ronde par l'intermédiaire du liquide dont l’oreille interne est remplie; et il en résulte que les osselets de louïe, en appuyant sur les deux membranes auxquelles ils sont fixés, empêchent les vibrations sonores qui arrivent au nerf acous- tique d’être assez intenses pour endommager cet organe délicat. La perte du marteau, de l’enclume et de los lenticulaire af- faiblit louie, mais ne le détruit pas; celle de l’étrier est, au contraire , suivie de la surdité, car cet os, adhérant à la mem- brane de la fenêtre ovale, sa chute détermine la déchirure de cette cloison, et alors le liquide contenu dans le vestibule se perd et le nerf acoustique ne peut plus remplir ses fonctions. Nous voyons donc que toutes les parties qui composent l’o- reille externe et l'oreille moyenne servent à perfectionner l’au- dition sans cependant être absolument nécessaires à l'exercice de ce sens; aussi disparaissent-elles peu-à-peu à mesure que lon s'éloigne de l’homme et que lon étudie la structure de l'oreille chez des animaux de moins en moins élevés dans la série des êtres. Chez les oiseaux, il n’y a plus de pavillon de l'oreille; chez les reptiles, le conduit auditif externe manque aussi ; le tympan devient externe , et la structure de la caisse se simplifie ; enfin, chez la plupart des poissons, il n’y a plus de vertige, ni d'oreille externe , ni d'oreille moyenne. Chez les animaux placés encore plus bas dans la série des êtres, il en est de même pour le limacon , et les canaux semi-cir- culaires, parties dont nous ne connaissons pas bien les usages (1); mais le vestibule membraneux est un organe qui ne manque ja- mais ; partout où il existe un appareil auditif, on trouve un petit sac membraneux rempli de liquide dans lequel vient se terminer le nerf acoustique, et ce vestibule est toujours un instrument indispensable pour l'exercice du sens de l’ouïe. DE LA VUE. La vue est une faculté qui nous rend sensibles à l’action de la lumière , et qui nous fait connaitre, par l'intermédiaire de cet agent, la forme des corps , leur couleur, leur grandeur et leur position. (1) D’après les expériences de M. Flourens il paraîtrait que la destruction des canaux semi-circulaires ne détruit pas l’ouie, mais la rend confuse et douloureuse. Modifica- tions de l'ap- pareil auditif, Appareil de la vision. Globe de l'œil. Selérotique. Cornée. Iris. Chambre an- térieure. 142 ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. L'appareil chargé de cette fonction se compose du nerf de la deuxième paire , de l’œil et de diverse: arties destinées à pro- téger cet organe ou à le mouvoir. Fig. 35. (1) Le globe de l'œil, dont nous ch s er h nous occuperons d’abord , est une sphère creuse, un peu ren- flée en avant et remplie d’hu- meurs plus ou moins fluides. Son enveloppe extérieure se compose de deux parties bien distinctes, l’une blanche, opa- que et fibreuse, nommée sclero- tigue(s); l’autre transparente et semblable à une lame de corne, |! 1: qu’on appelle, pour cette rai- sr vpch son, la cornée (e).Celle-cioccupe le devant de l’œil , et se trouve comme enchâssée dans une ou- verture circulaire de la sclérotique. Sa surface externe est plus bombée que celle de cette dernière membrane , et elle ressemble àaun verre de montre, qui serait appliqué sur une sphère, et qui ferait saillie à sa surface. A une petite distance derrière la cornée, on trouve, dans linté- rieur de l'œil, une cloison membraneuse (:), qui est tendue trans- versalement et fixée au bord antérieur de la sclérotique , tout autour de la cornée. Cette espèce de diaphragme, qui est colorée diversement suivant les individus , est appelée sres , et présente dans son milieu une ouverture circulaire nommée pupille (p). On distingue dans le tissu de cetorgane des fibres musculaires, qui se dirigent, en rayonnant, du bord de la pupille vers la circonférence de l'iris et des autres fibres de même nature, qui sont circu- laires et qui entourent cette ouverture comme un anneau. Lorsque les premiers se contractent, la pupille se dilate, et lorsque les derniers viennent à agir, elle se resserre. L'espace compris entre la cornée et l'iris constitue la chambre antérieure de l’œil (ca) : elle communique par l'ouverture de la pupille avec la chambre postérieure, cavité située derrière l'iris, et elle est remplie, de même que cette dernière chambre, 1 1 1 Lu (r) Intérieur de l’œil ; — c cornée transparente ; — s sclérotique; — s portion de la sclérotique renversée en dehors pour montrer les membranes situées des- sous; — ch choroïde; — r rétine; — x nerf optique ; — ce chambre antérieure de l’œil placée entre la cornée et l'iris, et remplie par l’humeur aqueuse; — iris; — p pupille ; — cr cristallin, placé derrière la pupille; — pe procès ci- liaires; — + humeur vitrée; — b, b portion de la conjonctive qui, après avoir recouvert la partie antérieure de l'œil, s’en détache pour tapisser les paupières DE LA VUE. 143 par l’Awmeur aqueuse , liquide parfaitement transparent et com- posé d’eau tenant en dissolution un peu d’albumine et une petite quantité deS sels qu'on rencontre dans toutes les sécrétions de l’économie animale. On croit cette humeur formée par une membrane qui se trouve derrière l'iris, et qui présente un grand nombre de plis rayonnans, nommés procés ciliaires (pc). Presque immédiatement derrière la pupille se trouve une len- tille transparente, nommée cristallin (er) : elle est logée dans une poche membraneuse et diaphane {la capsule du cristallin), et parait être le produit d’une sécrétion opérée par elle ; Car, lors- qu'on la retire de l'œil d’un animal vivant > Sans détruire sa Capsule , on voit bientôt un nouveau cristallin remplacer lan- cien. On remarque aussi que ce corps se compose d’un grand nombre de couches concentriques, dont la dureté va en crois- sant depuis la circonférence jusqu’au centre, ce qui s'accorde très bien avec ce que nous venons de dire surson mode de formation. Il est également essentiel de noter que la face postérieure du cristallin est beaucoup plus convexe que l’antérieure. Derrière le cristallin, on trouve une masse gélatineuse et diaphane très volumineuse , qui ressemble à du blanc d'œuf et qui esi enveloppée par une membrane d’une ténuité extrême, dont un grand nombre de lamelles se portent en-dedans, de façon à former des cloisons ou des cellules. Cette membrane est nommée Aya loide, et humeur qui s’y trouve Aumeur vitrée (æ). Partout , excepté en avant, où se trouve le cristallin et iris ÿ l'humeur vitrée est entourée par une membrane molle et blan- châtre, nommée retine (r), qui n’est séparée de la sclérotique que par une autre membrane , également mince, qu’on appelle cAo- roïde (ch). Cette dernière est formée principalement par un lacis de vaisseaux sanguins, et est imprégnée d’une matière noire , qui donne au fond de l'œil la couleur foncée qu’on voit à travers la pupille, et qui manque chez les personnes et chez les ani- maux appelés albinos. Le globe de l'œil recoit plusieurs nerfs ; le plus remarquable par sa Srosseur et par ses fonctions est le nerf optique (o) qui tra- verse la partie postérieure de la sclérotique et se continue avec la rétine. Cette membrane ne parait méme être qu’un épanouis- sement du nerf optique. Les autres nerfs du globe de l'œil sont Procès ci- haires. Cristallin. Humeur vi- trée. Rétine, Choroïde: Nerf opti- que, Nerfs ci- excessivement grèles : on les nomme nerfs ciliaires ; ils naissent liaires. d’un petit ganglion formé par la réunion de quelques branches des nerfs de la troisième et cinquième paires (1), et vont se distri- buer à iris et aux parties voisines de l’intérieur du globe de l'œil. (r) Voyez la figure 29, pag. 114. Mécanisme de la vision. 144 ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. C’est par l'intermédiaire de la lumière , avons-nous dit , que les corps placés à l’entour de nous agissent sur notre vue. Ceux qui émettent de la lumière , le soleil et les corps en ignition, par exemple , sont visibles par eux-mêmes ; mais les autres ne le deviennent que lorsque la lumière qui les frappe est réflé- chie par eux de facon à arriver jusqu’à nous. Cet agent se meut avec une vitesse extrême : il ne peut agir sur nos sens qu'autant qu’il vient frapper sur la rétine, située au fond de notre œil; les corps opaques le réfléchissent ou l’absorbent ; mais les corps transparens , tels que l'air atmo- sphérique et l’eau , lui livrent un passage facile. On voit donc que la première condition pour lexercice de la vision est l’absence de tout corps opaque entre les objets exté- rieurs et le fond de notre œil: aussi la cornée qui recouvre la partie antérieure de cet organe, comme un verre de montre, est- elle complètement transparente, et la lumière qui la traverse et qui passe par l’ouverture de la pupille, arrive-t-elle facilement sur la rétine ; car elle ne rencontre sur la route que le cristallin, qui est diaphane et des humeurs qui le sont également. Mais , dans quelques maladies , il en est autrement , et cette perte de transparence entraine toujours la cécité ; dans Paffec- tion , connue sous le nom de cataracte, par exemple, le cristal- lin devient opaque , et s’oppose ainsi au passage de la lumière ; et lorsque des taches blanches ou taies se forment sur la cornée, celte membrane devient une espèce d'écran qui empêche les rayons lumineux de pénétrer dans l'œil, et qui rend la vision impossible. Les parties diaphanes du globe de œil ne servent pas seule- ment à livrer passage à la lumière. Leur principal usage est de changer la direction des rayons qui pénètrent dans cet organe , de facon à les rassembler sur un point quelconque de la rétine ; en effet l’intérieur de l'œil ressemble assez exactement à l’instru- ment d'optique connu sous le nom de chambre noire , et l’image des objets que nous voyons se peint sur la rétine comme sur le rideau placé derrière cet instrument. Pour nous rendre compte de ce phénomène , il est nécessaire d’examiner la marche des rayons [lumineux à travers les corps transparens en général , et d'appliquer les connaissances ainsi acquises à l’étude du méca- nisme de la vision. La lumière marche ordinairement en suivant une ligne droite, et les différens rayons qui partent d’un point quelconque s’é- cartent entre eux de plus en plus à mesure qu’ils avancent dans l’espace. Lorsque ces rayons tombent perpendiculairement sur la surface d'un corps transparent, ils traversent celui-ci sans Changer de direction; mais lorsqu'ils viennent le frapper obli- DE LA VUE. 145 quement , ils sont toujours plus ou moins déviés de leur direc- on primitive. Si le corps dans lequel ils pénètrent est plus dense que celui dont ils sortent, s'ils passent de air dans de l'eau ou dans du verre, par exemple, ils forment alors un coude et se rapprochent de la perpendiculaire au point d’im- mersion ; si, au contraire, ils passent d’un milieu plus dense dans un milieu plus rare, ils s’écartent de cette perpendi- culaire , et ces déviations sont d'autant plus grandes que le rayon frappe la surface du corps transparent plus obli- quement. Ce phénomène , qui est connu sous le nom de réfraction de la lumière , est facile à constater; c’est à cause de ce changement dans la direction des rayons lumineux, lors de leur passage de l'eau dans Pair qu'un bâton droit, plongé à moitié dans ce li- quide , paraît toujours comme s'il était coudé au point d’im- mersion ; et si l’on place une pièce de monnaie (4) au fond d’un Fig. 36. (1) vase vide, de facon à ce que le bord 4 de celui-ci s'élève juste assez haut 4 + _ pour empêcher l'œil de lobservateur /_/" A#* Wapercevoir cet objet, il suffira, pour © 727 le rendre visible, de remplir le vase d’eau, car le rayon de lumière qui part de la pièce, au lieu de marcher toujours en ligne droite , sera réfracté lors de son passage de l’eau dans l'air, et s’éloignera de la perpendiculaire; or, en changeant ainsi de direction, les rayons, qui auparavant passaient au dessus de l’œil de Fobservateur, viennent alors le frapper. Les rayons lumineux, avons-nous dit, se rapprochent de la perpendiculaire au point de contact toutes les fois qu’ils pénè- trent obliquement dans un corps plus dense que celui dont ils sortent. Il en résulte que la forme de ces corps influe beaucoup sur la marche de la lumière qui les traverse ; suivant que leur surface est convexe ou concave ces rayons seront rapprochés ou écartés entre eux. (1) D'après la position de l'œil il est évident que si la lumière marchait en ligne droite, l'observateur ne pourrait apercevoir la pièce de monnaie (4) qu’au- tant que le rayon de lumière 2, c arriverait à son œil; mais les parois du vase étant opaque, ce rayon, ainsi que tous ceux situés au-dessous de la ligne a b et ae, sont interceptés. Or, lorsqu'on remplit le vase d’eau les rayons sont re- fractés en passant de ce liquide dans l'air, et par conséquent l’un des rayons qui , auparavant, passait au-dessus de l’œil, le rayon à d, par exemple, sera dévié de facon à pouvoir arriver à l’observateur. 10 146 ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. Quelques exemples rendront cette proposition facile à com prendre. Supposons que trois rayons divergens , Partis du Fig. 31. point a, tra- e b versent l'air et \ viennent tomber \, sur une lentil- le, dont la sur- face est convexe, commelaligne 2. Le rayon uc frap- pera perpendi- culairement cet- te surface et par conséquent tra- versera la len- tille, sans éprou- ver de déviation; mais le rayon ad, tombant obliquement sur celte surface, sera réfracté et rapproché de la perpendiculaire tirée au point d'immersion : or, cette perpendiculaire aura la direction de la ligne ponctuée e,et,en s’en rapprochant, le rayon lumineux , au lieu de poursuivre sa route vers le point 4, suivra la ligne f. Ilen sera de même pour le rayon ag, qui, en con- ünuant sa marche, se rapprochera de la perpendiculaire 2, et se dirigera vers le point z, au lieu de continuer à se porter en ligne droite vers le point g. Les autres rayons, qui viendraient frapper la lentille, seraient réfractés d’une manière analogue, et par conséquent , au lieu de continuer à s’écarter entre eux, ils se rapprocheront et pourront même se réunir tous dans un même point , que l’on appelle le foyer de la lentille. Si la surface du cristal , au lieu d’être convexe , est concave, les rayons lumineux ne se rapprocheront pas de l’axe du faisceau, Fig. 38. comme dans le cas précédent , mais au Contrai- re divergeront davantage. Le rayon ad, par exemple, devra se rapprocher de la perpendicu- laire au point de contact, laquelle aura la direction de la ligne ponctuée e , et, en se déviant ainsi, ce rayon prendra la direction de la ligne f. La déviation que les rayons lumineux éprouvent, en traver- h b DE LA VUE. 147 sant de la sorte des lentilles convexes ou concaves, est d’autant plus forte , que la courbure de la surface de ces corps est plus grande , et la simple inspection des figures dont nous ve- nons de nous servir suffira pour faire comprendre qu’il doit en être ainsi; car plus la courbure de la surface sur laquelle les rayons divergens viennent frapper, plus les perpendiculaires au point d'immersion s’éloigneront de la direction de ces mêmes rayons. | La physique nous apprend aussi que les corps transparens ré- fractent la lumière avec d'autant plus de force qu’ils sont plus denses (c’est-à-dire que, sous un même volume, il: ont un poids plus considérable) et qu’ils sont formés de matières plus com- bustibles. La lumière qui frappe un corps transparent ne le traverse pas en entier: une portion plus ou moins considérable en est réfléchie, et c’est à raison de cette propriété que ces corps rem- plissent , plus ou moins bien , l'office de miroirs. D’après ce qui précède on voit que, lorsqu'un faisceau de rayons lumineux tombe sur la cornée, une partie doit être ré- fléchie par elle, tandis que le reste la traverse; c’est la lumière ainsi réfléchie par la cornée qui donne aux yeux leur brillant et qui fait qu'on peut se voir dans les yeux des autres. Les rayons qui pénètrent dans cette lame transparente passent dans un corps beaucoup plus dense que Pair; il sont, par conséquent, réfractés et rapprochés de la perpendiculaire ou de l’axe du faisceau avec d’autant plus de force, que la surface de la cornée sera plus convexe ; car plus cette membrane sera bombée, plus les rayons divergens qui viennent la frapper formeront, avec sa surface , un angle aigu. Si, après avoir traversé la cornée, les rayons lumineux ren- contraient de l'air, ils se réfracteraient avec autant de force que lors de leur entrée dans cette membrane, mais en sens contraire ; ils reprendraient , par conséquent, leur direction pri- mitive; mais humeur aqueuse qui remplit la chambreantérieure de l'œil a un pouvoir réfringent beaucoup plus considérable que V’air , de façon qu’en y entrant les rayons s’écartent moins entre eux qu'ils ne s'étaient rapprochés lors de leur passage par la cornée; l’action de ces parties les rend, par conséquent, moins divergens qu'avant leur entrée dans l'œil, et fait qu’une quan- tité plus considérable de lumière arrive dans l'ouverture de la pupille. j Une grande partie de la lumière qui parvient au fondde la cham- Marche de la lumière dans l'œil. Usages de l'humeur aqueuse. Usages de la bre antérieure de l'œil, rencontre l'iris, etest absorhée ou réfléchie pupitte. 10. Ussges du cristal.in. Formation desimages sur la rétine. Usages de la choroïde. 148 ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. au-dehors par elle; celle qui tombe sur la pupille pénètre seule dans le fond de l'œil, et la quantité en est d'autant plus considé- rable que cette ouverture est plus large. Aussi, lorsque la lumière qui arrive à l’œil est très faible , la pupille se dilate-t-elle, tan- dis qu’elle se resserre sous l’influence d’une lumière vive; l'iris, comme on le voit, est le régulateur de la quantité de lumière qui doit parvenir jusqu’à la rétine. Les rayons de lumière qui ont traversé la pupille tombent sur le cristallin, espèce de lentille diaphane, qui change de nouveau leur direction et qui les fait tous converger vers un point nommé foyer, où ils se réunissent. Or, ce foyer se trouve précisément sur la surface de la rétine, et c’est ainsi que les rayons lumineux, envoyés à l’œil de divers points d’un corps placé à distance, sont rassemblés sur cette membrane ner- veuse , de facon à y peindre en petit l’image de objet dont ils proviennent. Il est aisé de s’assurer, par l'expérience, que les images se forment ainsi au fond de l'œil; il suffit de prendre un œil de lapin ou de pigeon dont la selérotique est à-peu-près transpa- rente, ou, mieux encore, des yeux d'animaux albinos, et de placer devant la cornée un objet fortement éclairé, une bougie allumée, par exemple, pour voir distinctement l’image de ce- lui-e1 se peindre sur la rétine. Fig. 39. Les images qui se forment dela sortesont toujours ren- d a versées, et la cause de ce phénomène est facile à trou- ver. En effet, si l’on cbserve la marche que les rayons lumineux, partant des deux extrémités d’un objet(a, ce), doivent suivre pour parvenir à la rétine, on voit qu’ils doivent toujours se croiser avant que d’y arriver, et que, par conséquent, celui qui viendra de l’extrémité supérieure de l’objet (a) se trouvera à la partie inférieure de l’espace occupé sur la rétine par le faisceau entier de raons formant l’image (4), tandis que celui venant de l’extrémité inférieure de l’objet (c) occupera le haut du même espace (d) : il en sera de même pour tous les autres rayons , et il en résultera qu’au fond de lœii l’objet paraîtra renversé. La matière noire qui est située derrière la rétine et qui tapisse tout le fond de l’œil ainsi que la face postérieure de l'iris, sert à absorber la lumière immédiatement après qu’elle à traversé ja rétine ; si cette lumière était réfléchie vers d’autres points de celte membrane, elle troublerait considérablement la vue et empécherait la formation d’images bien nettes au fond de Fæil. ô \ DE LA VUE. 49 Aussi chez les hommes et les animaux albinos où ce pigment manque , + vision est-elle extrêmement imparfaite; pendant le jour ils voient à peine de manière à pouvoir se conduire. Le globe de l'œil sert, comme on le voit, à conduire la lumière et à la concentrer sur la rétine; il remplit l'office d’une espèce de lunette , mais c’est un instrument d'optique plus parfait qu’au- cun de ceux que les physiciens sont encore parvenus à Con- struire : car en mème temps qu’il est parfaitement acromatique et qu'il ne présente point d’aberration de sphéricité, sa portée peut varier considérablement. On appelle acromatisme la pro- priété de dévier la lumière de sa marche sans y dévelop- per de couleur, et, par conséquent, les lentilles acromatiques sont celles qui forment en leur foyer des images incolores ou n'ayant que les couleurs de l’objet représenté. La lumière blanche résulte de la réunion des sept rayons colorés du spectre solaire , et ces divers rayons ne sont pas également réfrangibles. Il en résulte que , lorsqu'on fait passer la lumière à travers un corps qui la réfracte , elle est plus ou moins complètement dé- composée, et les objets qui la projettent paraissent avoir la couleur du spectre solaire. On obtient des lunettes acroma- tiques en combinant différens verres, dont les uns corrigent la dispersion de la lumière produite par les autres, de façon à réunir tous les rayons en un même foyer. Il est probable que l'acromatisme de l'œil dépend de quelque disposition analogue, mais les physiciens ne sont pas d'accord sur l'explication de ce phénomène; les uns pensent qu’il dépend de la diversité des hu- meurs de cet organe, d’autres l’attribuent aux différences de densité qui existent dans les différentes couches du cristallin. L’aberration de sphericite consiste dans la réunion des rayons qui tombent sur différentes parties d’une lentille à des foyers sensiblement différens , d’où résulte un défaut de netteté dans les images; lorsque les lentilles sont très convexes, les rayons qui passent près des bords ne se réunissent pas au même foyer que ceux qui traversent la partie centrale de linstrument, et pour obtenir des images nettes, on est obligé d'intercepter le passage des premiers en plaçant au-devant de la lentille un dia- phragme percé d’un trou. Or, les images qui se forment der- rière le cristallin de l’œil ne sont jamais diffuses, et on attribue cette absence d’aberration de sphéricité à l'iris qui remplit la fonction des diaphragmes placés dans l'intérieur des lunettes. Chacun sait que l’on peut voir d’une manière iout aussi nette des objets placés à quelques pouces de l'œil ou à une distance même très considérable de cet organe. Dans nos insitrumens d'optique, au contraire, l'image qui se forme au foyer d’une lentille avance on recule , suivant la distance à laquelle se trouve Perfection de l'œil, Acromati:s me?, Aberration de sphéricité, Presbytisme. Myopie. * 150 ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. l'objet : on a donc supposé que, pour donner à notre vue des portées si différentes , le cristallin devait se rapprocher ou s’é- loigner de la rétine, suivant les besoins, ou bien que la forme du globe de l'œil devait changer. Mais l'observation directe ne confirme pas ces hypothèses, et jusqu'ici cette particularité n’a pas pu trouver d'explication satisfaisante. Quoi qu’il en soit, l’œil ne possède pas toujours, au même degré, cette faculté précieuse : quelquefois on ne peut voir dis- tinctement qu’à la distance de quelques pieds, plus près toutes les images sont confuses; et d’autres fois, au contraire, la vue ne devient nette que lorsque les objets sont approchés de Pæil à une distance de quelques pouces, et tout ce qui se trouve au- delà parait comme enveloppé d’un nuage. La première de ces infirmités, connue sous le nom de pres- bytisme , dépend d’un défaut de convergence dans les faisceaux lumineux qui traversent les humeurs de l'œil. Les rayons qui ar- rivent à cet organe, d’un objet très éloigné, divergent très peu, et peuvent être rassemblés au point où se trouve la rétine, bien que la force réfringente de l’œil ne soit pas considérable; mais ceux qui viennent d’un objet très rapproché divergent beau- coup, et la force réfringente de l'œil se trouve trop faible pour les rapprocher, de façon à les réunir sur un point déterminé de la rétine. Aussi les presbytes ont-ils ordinairement la pupille contracitée comme s'ils faisaient un effort continuel pour ne laisser entrer dans leur œil que les rayons qui tombent sur le centre du cristallin, et qui n’ont pas besoin d’être beaucoup déviés de leur route pour se rassembler derrière le cristallin au point occupé par la rétine. Ce défaut de pouvoir réfringent dans l'œil paraît tenir, en général, à un aplatissement de la cornée ou du cristallin, cir- constances qui effectivement doivent tendre à produire le pres- bytisme, et qui se montrent presque toujours chez les vieillards. La myopie résulte d’un effet contraire: les rayons qui tra- versent l'œil sont alors déviés de leur route avec tant de force, qu’à moins d’être très divergens ils se croisent avant que d’ar- river sur la rétine. Cette imperfection de l'organe visuel dépend, en général, d’une trop grande convexité de la cornée ou même du cristallin. On remarque que les personnes qui ont la vue trop courte deviennent moins myopes par les progrès de l’âge, et cela se comprend facilement, parce que la sécrétion des humeurs de l'œil devient toujours moins abondante pendant la vieillesse; or, cette diminution, qui tend à rendre la cornée moins con- vexe, rend la vue plus longue; dans la plupart des cas, elle détermine le presbytisme, mais ici elle ne fait d’abord que cor- DE LA VUE. 51 riger les défauts de l’œil et donner à la vue sa portée ordinaire. Il en résulte qu’en général la vue des myopes s'améliore à l’Age où celle @e la plupart des personnes s’affaiblit; mais comme cette diminution dans lPabondance des humeurs de l'œil con- tinue toujours , il arrive un moment où l’œil du myope devient aussi trop peu réfringent, et sa vue, par conséquent, trop longue. Pour corriger ces défauts naturels de l'œil, on a recours à des moyens dont l'efficacité vient confirmer l'explication que nous venons de donner de la cause, soit de la myopie, soit du presbytisme. On place devant les yeux des verres dont les surfaces sont dirigées de façon à augmenter ou à dimi- nuer la divergence des rayons qui les traversent. Les myopes se servent de verres concaves qui tendent à disperser la lu- mière, et les presbytes emploient des verres convexes qui tendent, awcontraire, à rapprocher les rayons divergens de l'axe du faisceau. C’est le contact de la lumière sur la rétine, avons-nous dit, qui détermine la vision, et, effectivement, lorsque cette mem brane est frappée de paralysie (état qui constitue la maladie connue sous le nom de goutte sereine), ce sens est complète- ment détruit. Mais la sensibilité de la rétine est tout-à-fait spé- ciale et ne peut être excitée que par cet agent subtil; cette membrane nerveuse ne jouit que peu on point de la sensibilité tactile, et on peut la toucher ou même la pincer et la déchirer sur un animal vivant, sans que celui-ci manifeste aucun signe de douleur. Du reste, cette sensibilité particulière de la rétine a des bornes: une lumière trop faible est sans action sur cette membrane, el une lumière trop forte la blesse et la met hors d’état d’agir. Mais, à cet égard , l'influence de habitude est extrême : lorsqu'on est resté long-temps dans l’obscurité, une lumière, même très faible , éblouit les yeux, et rend, pendant quelques instans, la rétine incapable de remplir ses fonctions, tandis que les per- sonnes accoutumées à la lumière du jour n’éprouvent ces mêmes effets qu’en regardant les objets les plus éclatans , en cherchant, par exemple, à fixer le soleil. Lorsqu'on regarde pendant long-temps le même objet sans changer de position , le point de la rétine qui en reçoit l’image ne tarde pas à se fatiguer, et cette fatigue, portée au-delà d’une certaine limite, prive, pendant quelque temps, la partie qui l’éprouve de sa sensibilité ordinaire. Ainsi, lorsque nous regar- dons pendant quelque temps une tache blanche située sur un fond noir, et qu'ensuite nous transportons notre vue sur un fond blanc, nous croyons y voir une tache noire, parce que le point Usages de la rétine. Muscles de l'œil. 152 ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. de la rétine, précédemment fatigué par la lumière blanche, y est devenu insensible. (1) La fatigue qw'éprouve la rétine par l’exercice de ses fonctions dépend aussi en partie des efforts que lon fait pour regarder les objets placés sous les yeux. Si l’on cherche à voir avec at- tention des corps très faiblement éclairés , on éprouve bientôt un sentiment douloureux dans l’orbite et même dans la tête. Tous les points de la rétine sont aptes à recevoir l'impression de la lumière; mais la partie centrale de cette membrane jouit d’une sensibilité bien plus exquise que tout le reste , et c’est seulement lorsque les images des corps extérieurs se forment dans cette partie que nous les voyons bien distinctement: aussi, lorsque nous regardons un objet quelconque , avons-nous le soin de diriger sur lui l’axe de nos yeux. Nous pourrions y parvenir à l’aide des mouvemens variés que la tête est susceptible d’exécuter ; mais, afin de rendre ces changemens, dans la direction des yeux plus faciles, la na- ture a pourvu ces organes de muscles destinés spécialement à les mouvoir. } Ces muscles sont fixés à la sclérotique par leur extrémité antérieure , et s’insèrent par leur extrémité opposée derrière © le globe de l'œil (au fond de # l'orbite) , et , comme cet organe d repose sur du tissu cellulaire graisseux , sans y adhérer d’une dde manière intime , chacun de Fu ces muscles ,en se contractant, ge! le tourne de son côté. Ils sont au nombre de six: quatre d’entre eux , appelés muscles (1) La couleur noire dépend de l'absence de la lumière, et les corps qui nous l’offrent sont ceux qui absorbent toute la lumière qui tombe sur eux ; nous ne les apercevons que parce qu'ils sont entourés de corps qui en réfléchissent. (2) Coupe verticale de l’orbite pour montrer la position de l'œil et de ses muscles. — a cornée; — à sclérotique; -— c nerf optique, dont l’extrémité opposée péuètre dans le globe de l’œil; — 4 muscle droit inférieur de l'œil ; — e muscle droit supérieur de l'œil ; — f portion du muscle droit externe de l'œil ; au fond de l'orbite on voit l’autre extrémité de ce muscle, dont toute la partie moyenne a été enlevée pour montrer le nerf optique situé derrière elle ; — gextrémité du muscle petit oblique ; — » muscle grand oblique; dont le tendon passe dans une petite poulie avant de se fixer à la selérotique ; — : mus- cle relevateur de la paupière supérieure; — À glande lacryma'e. DE LA VUE. 153 droits de l'œil , s’insèrent aux quatre points opposés de la cir- conférence de la sclérotique , et se portent directement en ar- rière , de facon à pouvoir diriger l'œil en haut, en bas, à droite ou à gauche, suivant que les uns ou les autres agissent; enfin deux de ces muscles qui portent le nom de muscles obliques de l'œil (4, g) , sont disposés de façon à faire exécuter à cet or- gane des mouvemens de rotation, qui dirigent la pupille en bas et en dedans , ou bien en haut et en dehors. Les nerfs qui donnent le mouvement à ces muscles appar- tiennentexclusivement à l'appareil de la vision : ce sont ceux de la troisième, de la quatrième et de la sixième paires (Fig. 29). Les muscles droits sont entièrement soumis à la volonté ; les muscles obliques agissent souvent indépendamment d'elle, el c’est de leur contraction que dépend le renversement des yeux pendant la syncope. Le nerf optique, qui, en s’épanouissant au fond de Pœil, forme la rétine, transmet au cerveau les impressions pro- duites sur cette membrane par le contact de la lumière : aussi sa section produit-elle immédiatement une cécité complète. Du reste , pour que la rétine remplisse ses fonctions, il faut le concours, non-seulement du nerf optique, mais aussi du nerf de la cinquième paire, que nous avons déjà vu exercer la plus grande influence sur le goût et l’odorat. Lorsqu'on fait la section de ce nerf entre le cerveau et le point où naissent les branches qui se rendent à l’œil, on détruit la vision. L’animal parait encore distinguer lobscurité de la lumière , mais il est réellement aveugle; et,chose singulière, au bout de quelque temps la cornée devient opaque , s’ulcère, et l’œilse vide et s’atrophie. Ce sont les hémisphères du cerveau qui paraissent être le siège de la perception de ces sensations comme de toutes les autres ; car, lorsqu'on les détruit, animal devient aussitôt aveugle ; mais il est d’autres parties de l’encéphale qui exercent aussi la plus grande influence sur ce sens ; ce sont les lobes optiques ou tubercules quadrijumeaux ( pag. 114, fig. 29 g). Si on les détruit sur un oiseau (où ces parties sont très développées), on détermine également la cécité, et il est à noter que les animaux qui ont la rétine la plus développée et les nerfs optiques les plus gros , sont aussi ceux où ces lobes acquièrent le plus de volume et ont la structure la plus compliquée ; on peut même considérer ces or- ganes comme une dépendance des nerfs optiques et comme étant les liens qui les unissent aux hémisphères cérébraux. Mais ce qui frappe le plus dans ces expériences sur l’encé- phale , c’est de voir que la destruction de l'hémisphère cérébral ou du lobe optique d’un côté n’entraine pas la perte de la vue du même côté : c’est l'œil du côté opposé qui devient aveugle, et Usages des perfs de l'œil. Perception des images. Forme des objets. Position des objets. 154 ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. l'anatomie nous donne lexplication de ce fait; car les nerfs op- tiques, peu après leur séparation du cerveau , se réunissent et s’entrecroisent , de façon que celui qui vient du lobe droit se rend à l’œil gauche et vice versü. Nous jugeons de la forme des corps par celle de l’image qu’ils produisent sur notre rétine : aussi, lorsque, par une cause quel- conque , la forme des faisceaux lumineux qu’ils envoient vers cette membrane, vient à être changée avant son arrivée à l’œil, tombons-nous à cet égard dans des erreurs plus ou moins grandes. L'expérience , déjà citée d’un bâton plongé à moitié dans l’eau et paraissant alors coudé, bien qu’il soit réellement droit, est une illusion d’optique de ce genre. Nous jugeons de la position des objets dont nous sommes en- tourés par la direction des rayons lumineux qu’ils nous envoient, et nous les voyons toujours dans le prolongement de la ligne droite, suivie par ces rayons au moment où ils pénètrent dans notre œil. C’estainsi que, lorsque le faisceau lumineux, envoyé par un de ces objets sur une surface polie (un miroir, par exemple), est réfléchi par celle-ci, de façon à faire un angle plus ou moins ouvert et à parvenir à notre œil; nous voyons l’objet comme s’il était placé derrière le miroir dans le prolongement de la ligne droite , suivie par le rayon, pour arriver de cet instrument à nous. Le jugement peut rectifier les conséquences que nous tirons de cette sensation ; mais elle existe toujours. Ceci nous explique aussi pourquoi nous ne nous servons que d'un seul œil, lorsque nous voulons nous assurer si des corps sont exactement alignés entre eux. En effet, lorsque cette con- dition est remplie, et que nous placons l’un de nos yeux sur le prolongement de la ligne occupée par ces objets , le rayon lumi- neux qui se dirige du dernier corps vers notre œil, ne peut y arriver, étant intercepté par l’avant-dernier , et ainsi de suite, de facon que le corps le plus rapproché nous cache en to- talité ou en partie tous les autres, tandis qu’en les regardant avec les deux yeux, la même chose n'arrive que lorsque ces objets sont si éloignés de nous que les rayons qu’ils envoient à nos yeux sont presque parallèles, ou bien lorsque l’objet intermé- diaire est très grand par rapport au dernier ou très rapproché Distance des objets. de lui , et encore la coïncidence ne se voit-elle alors que d’une manière beaucoup moins nette que si l'observateur ne se servait que d’un seul de ses yeux. Pour apprécier la distance qui nous sépare des objets, Paction simultanée des deux yeux nous est, au contraire, d’un grand secours; on peut s’en assurer par l’expérience suivante. Sus- pendez à un fil un anneau, et cherchez à y introduire un cro- DE LA VUE. 155 chet fixé à lextrémité d’une longue baguette: en vous servant des deux yeux vous réussirez facilement à chaque coup; mais si vous fermez un œil, vous aurez Ka plus grande difficulté à enfiler l'anneau : le crochet ira au-delà ou restera en decà,et ee ne sera que par hasard ou en tâtonnant long-temps que vous parvien- drez à l’introduire dans l'anneau. Aussi , lorsqu'une personne vient à perdre un œil, reste-t-elle en général très long-temps sans pouvoir juger sainement de la distance des corps placés près d’elle, et cette privation rend- elle pour toujours cette appréciation beaucoup plus difficile. Du reste l'utilité des deux yeux, dans ce cas, est facile à ex- pliquer d’après les lois de la physique. En effet , lorsqu'un objet est peu éloigné, il faut, pour que son image tombe sur le même point de la rétine des deux yeux, que laxe de ces organes con- verge vers le point regardé, et cette inclinaison, dont nous avons la conscience, est d'autant plus grande que l’objet est plus rapproché de nous. Mais lorsque les objets sont assez éloi- gnés pour qu’en les regardant les axes optiques des deux yeux deviennent sensiblement parallèles, nous n’avons plus de règle sùre pour déterminer leur distance , et nous ne pouvons appuyer notre jugement que sur des considérations plus ou moins trom- peuses, telles que l'éclat de la lumière, la netteté avec laquelle nous distinguons les détails , la grandeur de l’objet lui-même , si elle nous est connue d’avance, etc. Lorsqu'on peut comparer l’objet éloigné à d’autres objets intermédiaires, cette apprécia- tion devient beaucoup plus sûre; chacun sait combien it est difficile de juger de la distance d’une lumière que l’on apereoit au milieu de la nuit, lorsque l’obscurité empêche de voir les autres objets environnans. Le concours des deux yeux est encore utile en ce qu’il fait paraître les objets plus éclairés. Pour s’en convaincre, il suffit de regarder une bande de papier blanc avec lun des yeux, et de placer devant lautre un obstacle qui cache la moitié de l’ob- jet: la partie vue par les deux yeux à-la-fois paraîtra beaucoup plus éclairée que celle qui n’est vue que par un seul. La manière dont nous jugeons de la grandeur des corps dé- Grandeur pend bien plus de l'intelligence et de l'habitude que de laction des objets. même de lappareil de la vision; en effet, ce qui nous guide d’abord est la grandeur de l’image qui se forme au fond de Pæil; mais à mesure que la distance qui nous sépare d’un objet aug- mente, cette image diminue de façon que, pour juger des di- mensions du premier, il faut toujours tenir compte de la dis- tance à laquelle nous le croyons placé. C’est pourquoi, quand on n’apprécie pas exactement son éloignement, on juge difficilement de la grandeur d’un corps qu'on voit pour la première fois ; Mouvement des objets. Éducation du sens de la vue. 156 ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. une montagne, que nous voyons de loin pour la première fois, nous parait en général beaucoup plus petite qu’elle ne l’est réel- lement, parce que nous la croyons près de nous lorsqu’en réalité elle est encore très éloignée. L’estimation du mouvement des corps se fait tantôt par le changement de direction de la lumière qui parvient à l'œil, d’où résulte le déplacement de son image sur la rétine, tantôt par les variations de la grandeur de cetie même image. Pour que nous puissions suivre le mouvement d’un corps, il faut que son déplacement ne soit pas trop rapide, car alors nous ne laper- cevons pas, à moins que la quantité de lumière qu’il projette ne soit extrêmement considérable, et dans ce eas il produit sur nos yeux le même effet que s’il occupait momentanément toute la longueur de la ligne qu'il parcourt. D’un autre côté nous ne reconnaissons , en général, que très dificilement et quelquefois même nous ne pouvons reconnaitre le mouvement des corps dont l’image ne se déplace qu'avec beaucoup de lenteur, soit à cause de la lenteur réelle de leur mouvement, comme cela a lieu pour l'aiguille d’une montre, ou de leur grand éloignement, comme cela a lieu pour les astres. D’après tout ce que nous venons de dire sur la manière dont nous jugeons de la distance et de la grandeur des corps, il est aisé de voir que le sens de la vision a besoin d’une espèce d’édu- cation, et que même il est des circonstances où il doit toujours nous induire en erreur. C’est en tenant compte de ces erreurs, connues en physique et en physiologie sous le nom d’é//usions d'optique , ainsi que des lois de l’économie animale dont elles dépendent, que les arts parviennent à en produire à volonté, à faire paraitre sail- lans et arrondis des surfaces planes et à faire paraitre plus ou moins éloignés des objets placés près de nous. Pour que la vue nous donne les connaissances précieuses qu’elle est susceptible de nous communiquer, il faut à ce sens un long exercice et une véritable éducation. L'enfant qui vient de naïtre distingue tout au plus la lumière de l'obscurité; et bien que son œil présente déjà toutes les qualités physiques nécessaires à la vision (1), il ne commence à voir qu'après quelques se- maines d'existence. Il ne fixe d’abord les yeux que sur les objets les plus éclatans , tel que le soleil , et il ne distingue aucun objet; (1) Dans le fœtus qui n’a pas atteint son septième mois ,il en est autrement ; l'iris n’est pas encore perforé ; mais à cette époque la membrane pupillaire qui occupe la place de la pupille, se rompt et est absorbée de facon à donner accès à la lumiere. DE LA VUE. 157 les premiers qui le frappent sont ceux dont la couleur est rouge ; bientôt il parait distinguer les autres couleurs bien tranchées, mais il n’a erfeore aucune idée ni des distances ni des grandeurs, et on le voit étendre la main pour saisir les objets même les plus éloignés et n'avoir aucun égard à leurs dimensions. Peu-à-peu la vision se perfectionne, et c’est principalement , en corrigeant par le secours des autres sens les erreurs auxquelles celui-ci expose, que l'enfant acquiert la faculté de juger sainement de ce qu'il voit autour de lui. Du reste, pour bien apprécier espèce d'éducation nécessaire à la vision, il suffit de lire l'histoire curieuse d’un aveugle de naissance , à qui Cheselden, célèbre chirurgien anglais, rendit la vue à un âge assez avancé pour que ce Jeune homme püt ana- lyser toutes ses sensations et en rendre compte. « Lorsque ce jeune homme vit la lumière pour la première fois , il était si éloigné de pouvoir juger en aucune façon des distances, qu'il croyait que tous les objets touchaient ses yeux (ce fut l'expression dont il se servit), comme les objets qu’il palpait touchaient sa peau. Les objets qui lui étaient les plus agréables étaient ceux dont la forme était unie et la figure ré- gulière, quoiqu'il ne pût encore former aucun jugement sur leur forme , ni dire pourquoi ils lui paraissaient plus agréables que les autres. Il n'avait eu, pendant le temps de sa cécité, que des idées si faibles des couleurs qu’il pouvait distinguer alors à une forte lumière, qu’elles n’avaient pas laissé de traces suf- fisantes pour qu’il pt les reconnaitre. En effet, lorsqu'il les vit, il disait que les couleurs qu’il apercevait n’étaient pas les mêmes qu’il avait vues autrefois; il ne connaissait la forme d’aucun objet, et il ne distinguait aucune chose d’un autre, quelque différentes qu’elles pussent être de figure ou de grandeur. Lors- qu’on lui montrait des objets qu’il connaissait auparavant par le toucher, il les regardait avec attention et les observait avec soin pour les reconnaitre une autre fois; mais comme il avait trop d'objets à retenir à-la-fois, il en oubliait le plus grand nombre; et dans le commencement qu’il apprenait, comme il disait , à voir et à reconnaitre les objets, il oubliait mille choses pour une qu’il retenait. Il se passa plus de deux mois avant qu’il püt reconnaître que des tableaux représentaient des corps so- lides ; jusqu’alors il ne les avait considérés que comme des plans différemment colorés et des surfaces diversifiées par la variété des couleurs ; mais lorsqu'il commença à concevoir que ces ta- bleaux représentaient des corps solides , il s’attendait à trouver, en effet, des corps solides en touchant la toile du tableau , et il fut très étonné lorsqu’en touchant les parties qui, par la lumière et les ombres lui paraissaient rondes et inégales, il les trouva Parties pro- l'œil. Orbite. 158 ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. plates et unies comme le reste : il demandait quel était donc le sens qui le trompait, si c’était la vue ou si C’était le toucher. On lui montra alors un petit portrait de son père , qui était dans la boite de la montre de sa mère : il dit qu’il reconnaissait bien que c'était la ressemblance de son père, mais il demandait, avec un grand étonnement, comment il était possible qu’un visage aussi large püt tenir dans un si petit lieu , que cela lui paraissait aussi impossible que de faire tenir un boisseau dans une pinte. Dans les commencemens, il ne pouvait supporter qu’une très faible lumière, et il voyait tous les objets extrêmement gros ; mais à mesure qu’il voyait des choses plus grosses , il jugeait les premières plus petites : il croyait qu’il n’y avait rien au-delà des limites de ce qu’il voyait. On lui fit la même opération sur l'autre œil, plus d’un an après la première, et elle réussit éga- lement. Il vit d’abord de ce second œil les objets beaucoup plus grands qu’il ne les voyait de l'autre, mais cependant pas aussi grands qu’il les avait vus du premier œil; et lorsqw’il regardait le même objet des deux yeux à-la-fois, il disait que cet objet lui paraissait plus grand qu'avec son premier œil, mais il ne le voyait pas double, ou du moins on ne peut pas s'assurer qu'il eùt vu les objets doubles lorsqu'on lui eût procuré l'usage de son second œil. » En abordant l’étude de la vision, nous avons dit que l’appa- tectrices de reil chargé de exercice de ce sens se composait d’une partie essentielle, qui est le globe de l'œil et le nerf optique, et de di- verses parties accessoires destinées à mouvoir ou à protéger la première. Nous venons de traiter assez longuement de la struc- ture et des fonctions de l’œil lui-même, et nous avons eu loc- casion de parler aussi des muscles qui y sont fixés: pour ter- miner l’histoire de cette fonction, il ne nous reste donc plus qu’à décrire les parties protectrices de cet organe. Celles que l’on doit signaler d’abord sont les cavités osseuses qui logent les yeux et qui sont appelées orbites. Ce sont des fos- ses profondes creusées dans la face et cloisonnées par divers os de la tête ; elles sont très vastes et ont à-peu-près la forme d’un cône, dont la base serait diri- gée vers l'extérieur, et dont le sommet, tourné vers le cerveau, serait percé d’un trou pour le passage du nerf optique. Chez DE LA VUE. 159 l'homme et les singes, les orbites sont dirigés en avant, et leur paroi extérieure les sépare complètement des fosses temporales ; mais à mesttre que l’on examine des animaux qui, par l'ensemble de leur organisation, diffèrent de plus en plus de ceux-ci, on voit les orbites devenir de plus en plus latérales et se confondre de plus en plus avec les fosses temporales. Du reste, le globe de l'œil est séparé des parois osseuses de l'orbite par ses muscles et par une grande quantité de tissu cel- lulaire graisseux qui l'entoure comme une pelote élastique. En avant l’œil est protégé par les sourcils, par les paupières et par un liquide particulier, les larmes, dont sa surface est toujours baignée. Les sourcils sont des saillies transversales formées par la peau, qui dans ce point est garnie de poils et pourvue d’un muscle spécial destiné à le mouvoir. Ils servent à protéger l'œil contre les violences extérieures , à empêcher que la sueur qui coule du front n’aille irriter la surface de cet organe , enfin à le garantir de l'impression d’une lumière trop vive , surtout lorsque celle-ci vient d’un lieu élevé. Les paupières, chez l’homme et tous les autres animaux mam- mifères, sont au nombre de deux, situées l’une au-dessus de l’autre , et distinguées, par cette raison, en supérieures et en inférieures. Ce sont des espèces de voiles mobiles placés au- devant de l’orbite, et dont la forme s’accommode à celle du globe de l'œil, de facon qu’étant rapprochées, elles couvrent complètement la face antérieure de cet organe. Extérieurement, elles sont formées par la peau qui, dans ce point, est très fine, demi transparente, et soutenue par une lame fibro-cartilagi- neuse (cartilages tarses). Leur face interne est tapissée par une membrane muqueuse nommée conjonctive, qui se réfléchit sur le globe de l'œil, recouvre toute la partie antérieure de la sclé- rotique et se confond avec la cornée transparente. Le bord libre des paupières est garni d’une rangée de cils et présente, der- rière ces poils, une série de petits trous qui communiquent avec les glandes de Meibomius , follicules logés dans l'épaisseur des cartilages tarses et servant à sécréter une humeur parti- culière, qui, lorsqw’elle est épaissie et desséchée, comme cela ar- rive souvent après le sommeil, est connue sous le nom de chassie. Enfin on trouve encore, dans l’épaisseur des paupières, des muscles destinés à les mouvoir; l’un de ceux-ci entoure leur ouverture comme un anneau et les resserre avec plus ou moins de force (fig. 32 k, p. 85); l’autre s’étend de la paupière supérieure jusqu’au fond de l'orbite et sert à relever ce voile (#g. 40, à). Les paupières servent à empêcher l’accès de la lumière à l’œil pendant le sommeil. Pendant la veille , elles se rapprochent ou Sourcils. Paupières. Clignement. Larmes. Appareil ]a- ne parait pas avoir échappée aux anciens ; non- seulement ils ont très bien remarqué que la ligne faciale relevée était un signe d’une nature plus généreuse et un des caractères de la beauté ; mais, dans les figures de leurs héros et de leurs dieux, ils Pont avancée plus qu’elle ne l’est chez aucun homme, et dans quelques statues (tels que celle de Jupiter Olympien), ils l'ont fait incliner un peu en avant. (1) Le vulgaire même est habitué à attribuer de la stupidité aux hommes et aux animaux , dont le front est très fuyant ou le museau très allongé ; et, lorsque quelque circonstance vient à relever la ligne faciale, même sans augmenter la capacité du crâne , nous trouvons aux animaux qui présentent celte dispo- sition un air particulier d'intelligence , et nous sommes portés à leur attribuer des qualités qu'ils n’ont réellement pas. L’éléphant et la chouette sont dans ce cas. La grande étendue des sinus frontaux donne à leur front une saillie considérable ; or, la chouette, comme chacun le sait, était chez les anciens Pem- blème de la sagesse, et l'éléphant porte aux Indes un nom qui indique qu'il a la raison en partage, et cependant ni lun ni l'autre de ces animaux n’est réellement remarquable par le développement de ses facultés intellectuelles. Quoi qu’il en soit, il faut bien se garder d’attacher à ces me- sures une grande importance ; elles ne peuvent donner tout au plus qu’une idée approximative du développement du cerveau, et Jusqu'ici rien ne prouve que l’étendue des facultés intellec- tuelles soit proportionnelle à ce développement matériel de l’en- céphale. Nous venons de voir que le cerveau est le siège de plusieurs Système du fonctions bien distinctes, et, lorsqu'on examine la manière dont docteur Gall. (r) Il serait possible cependant que cette maniere de représenter la Divinité, tint à une autre cause, et füt indépendante de toute notion d’un rapport entre le développement de l'intelligence et l'ouverture de l’angle facial. En effet, on voit que tous les peuples attachent des idées de beauté à l’exagération des particu- larités de structure caractéristique de leur race ; les nègres estiment le plus les peaux les plus noires ; les papous de l’Océanie, dont le nez est remarquable- ment épaté, croient augmenter leur beauté en donnant à cette partie encore plus de largeur , et les Caraïbes, dont le front est extrêmement fuyant, com- priment la tête de leurs enfans afin d’exagérer encore cette disposition caracté- ristique. Or, l’une des particularités de la race causaque, et plus spécialement encore de la nation grecque est le peu d'’inclinaison de la ligne faciale, et par conséquent d’après la tendance que nous venons de signaler, les Grecs devaient vaturellement regarder cette disposition comme étant une condition de beauté, et penser que, pour représenter des êtres supérieurs à nous, il fallait lexagérer. 166 ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. les facultés intellectuelles et affectives s’exercent chez les dif- férens hommes, on ne tarde pas à observer que le plus ou moins grand développement de l’une d’elles n’est pas toujours accompagné d’un développement égal dans toutes les autres. Tel homme, qui sera remarquable par l'amour instinctif qu’il portera à sa progéniture , pourra n'avoir que des facultés intel- lectuelles très faibles, et tel autre , doué des dispositions les plus heureuses pour les sciences de calcul, pourra manquer com- plètement d'imagination ou du talent d'observation. Ces considérations et une foule de faits analogues ont porté quelques philosophes à penser que le cerveau n’était pas un organe unique dont toutes les parties concourent de la même manière à la production des phénomènes de l'instinct et de l’in- ielligence , mais que la nature avait établi dans les fonctions de Pencéphale la même division de travail qu’on remarque dans les autres appareils de l’économie animale toutes les fois que les fa- cultés de ceux-ci se perfectionnent:ils ont pensé que les facultés affectives avaient leur siège dans une partie déterminée du cerveau, les facultés intellectuelles dans d’autres , et en un mot que chaque genre de travail exécuté par le cerveau était le ré- sultat de l’action d’un instrument ou organe particulier, et que ces organes spéciaux étaient différentes portions de la masse nerveuse de l’encéphale. C’estsur cette hypothèse de la localisation desdiverses fonctions de Pencéphale que repose le système pArenologique du docteur Gall. Ce physiologiste pense que chacune de ces fonctions est Papa- nage d’une partie déterminée du cerveau ou du cervelet , et que activité plus ou moins grande de chacune d’elles dépend en majeure partie du développement plus ou moins considérable de la partie qui en est le siège. Or, chez l’homme et la plupart des animaux supérieurs, lencéphale remplit toute la cavité du crâne , et les parois de cette boite osseuse se moulent en quel- que sorte sur cetie masse nerveuse, de façon qu’on peut juger de la grosseur proportionnelle des différentes parties du cerveau par la saillie plus ou moins grande des parties correspondantes de la tête. Et, en admettant que les suppositions énoncées plus hautsoientexactes, on pourrait par conséquent juger, d’après l’in- spection du crâne, des penchans et facultés de chaque individu. Les phrénologistes admettent que les facultés affectives qui donnent aux animaux les penchans qu’on leur remarque et les de- sirs qu’ils éprouvent , ont leur siège dans les parties postérieures et inférieures de lencéphale ; instinct de la propagation réside- rait, d’après eux, dans le cervelet ; amour de la progéniture dé- pendrait de la partie du troisième iobe cérébral qui se voit immé- diatement au-dessus de cet organe; l'instinct qui rend les ani- DES FACULTÉS INTELLECTUELLES. 167 maux plus ou moins sociables résulterait de l’action d’une partie voisine; legourage dépendrait de la partie du cerveau située au dessus et en avant de l'oreille; amour de la destruction de celle placée immédiatement au-dessus des oreilles; enfin le penchant qui porte à employer la ruse et le desir d'acquérir, occuperait les parties voisines. Les facultés affectives d’où dépendent les sentimens de lamour-propre, de la vanité, de la circonspection, de la bienveillance, de la fermeté, de la jus- tice, etc., auraient leur siège dans les parties supérieures et antérieures du cerveau; enfin, les diverses facultés intellec- tuelles seraient lapanage des différentes parties du cerveau correspondantes au front. ” Ce qui vient le plus à l'appui de ces hypothèses, ce sont les particularités qu’on a cru remarquer dans la configuration de la tête des hommes les plus remarquables par certaines qualités de l'esprit ou par la force de quelques penchans, et les dif- férences qu’on observe dans la forme du crâne des animaux dont les instincis sontles plus opposés. Ce que nous avons déjà dit de la ligne faciale s'applique surtout au développement plus ou moins considérable de la partie antérieure du cerveau, et Pexis- tence d’un front déprimé et fuyantsuffit pour donner à toute tête l'aspect de la stupidité. On remarque aussi que, chez les ani- maux Carnassiers qui vivent de chasse et qui montrent le plus de courage et de férocité, la largeur du crâne vers les oreilles est beaucoup plus considérable que chez les herbivores dont les mœurs sont douces et timides. Il est aussi vrai de dire que, chez presque tous les animaux, la partie postérieure de la tête, où les phrénologistes placent l'amour de la progéniture, parait être plus développée chez les femelles que chez les mâles, et chacun sait qu’en effet la tendresse d’une mère pourses petits est une passion bien plus forte que celle du père. Mais si quelques-unes des suppositions dont l’ensemble forme la base de la phrénologie paraissent réellement assez plau- sibles, d’autres ne sont étayées sur rien de convainquant, et doivent même paraitre absurdes pour toutes les personnes ha- bituées à analyser les phénomènes de l'intelligence. Ainsi, il est des phrénologistes qui admettent une faculté particulière qui fait apprécier la pesanteur des corps, une autre qui rend apte à juger de l'étendue des corps , et ainsi de suite. Du reste, nous le répétons , on ne connaît encore aueun fait propre à prouver que cette division du travail existe réellement dans le cerveau, et quelques expériences de M. Flourens ten- draient même à faire penser qu’il en est tout autrement. Contracti- lite. Muscles. 168 ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. DES MOUVEMENS. Les diverses modifications de la faculté de sentir que nous avons étudiées dans les précédentes leçons, rendent l’homme et les animaux aptes à connaitre ce qui les entoure; mais leurs rapports avec le monde extérieur ne consistent pas seulement dans ces phénomènes, en quelque sorte passifs. Ces êtres peu- vent aussi agir sur les corps étrangers , leur imprimer des chan- gemens , se mouvoir et souvent même exprimer &une manière plus ou moins précise leurs sentimens ou leurs idées. Cette nouvelle série de fonctions , dont nous allons mainte- nant nous occuper, dépend essentiellement d’une propriété, qui n’est pas moins générale parmiles animaux que la sensibi- lité , savoir, la contractilite. On donne ce nom à la faculté qu'ont certaines parties de l’économie animale de se raccourcir tout-à-coup et de s'étendre alternativement. Dans quelques animaux, d’une structure extrêmement simple, tels que les hydres , toutes les parties du corps paraissent sus- ceptibles de se contracter ainsi ; mais , pour peu que l’on s'élève dans la série des êtres, on voit cette faculté devenir l'apanage d'organes particuliers , que l’on nomme muscles. Ces muscles, qui sont les instrumens actifs de tous nos mouvemens, forment la majeure partie de la masse du corps et constituent ce que l’on nomme vulgairement la viande ou la chair des animaux. Leur couleur est en général blanchâtre ; chez quelques animaux, ils sont au contraire d’un rouge plus ou moins intense ; mais cette couleur ne leur appartient pas et dépend seulement du sang qu’ils contiennent. Chaque muscle est formé par la réunion d’un certain nombre de faisceaux musculaires , qui sont unis par du tissu cellulaire et qui sont composés de faisceaux plus petits; ceux-ci à leur tour sont formés de faisceaux d’un moindre volume, et de division en division on arrive ainsi à des fibres d’une ténuité extrême, quisont droites , rangées paraHèlement entre elles , et qui, vues avec un microscope puissant, paraissent être formées chacune par une série de petits globules d'environ un trois centième de milli- mètre de diamètre. Après la mort, le tissu musculaire est mou et facile à déchirer; mais , pendant la vie, il est très élastique el très résistant. Enfin il se compose essentiellement d’une matière que nous avons déjà rencontrée dans le sang , et que les DES MOUVEMENS. 169 chimistes appellent f£hrine. On y trouve aussi de l’albumine, de l’osmazone ej quelques sels. Sous l'influence de certaines causes excitantes, les fibres musculaires se raccourcissent , et on voit en même temps les faisceaux qu’elles forment devenir plus gros et plus durs que dans l'état de relâchement. Chacun peut observer sur lui-même ce phénomène : il suffit pour cela d'exécuter un mouvement quel- conque et d'observer les changemens qui surviennent dans les muscles mis en action pour le produire. Que l’on ploie avec force l’avant-bras sur le bras , par exemple, et l’on verra aussi- tôt les muscles de la partie antérieure du bras se gonfler et se durcir. Fig. 44. (1) À l’aide du microscope, on distingue fa- cilement la manière dont cette contraction s'opère. Lorsque les fibres musculaires sont dans l’état de relâchement, elles sont éten- dues en ligne droite (/fg.44); mais, lorsqu'elles se contractent, elles se fléchissent tout-à-coup enzigzag, et présentent aussitôtune multitude d’ondulations anguleuses et régulièrement opposées (#g.45). Enrépétantcetteexpérience, a on ne tarde pas à reconnaitre que les flexions de chaque fibre ont lieu dans certains points déterminés et jamais ailleurs. Lorsque la contraction est faible, ces flexions Fig. 45. sont peu marquées, et, dans les contractions a les plus fortes , elles ne vont que jusqu’à don- ner des angles de 50 degrés. De" hi es OS = © 71) 29 Ainsi , lors de la contraction, les deux M 2:17 extrémités de la fibre se rapprochent, sans 155125 que , pour cela , la longueur totale de celle- c<__ÈAER ci change en rien.Or, ces extrémités sont fixées FT EX aux parties que le muscle doit mouvoir, et, en se déplaçant, elles les entrainent avec b a elles. Cette insertion des muscles sur les parties mobiles ne se fait pas directement , mais a lieu par le moyen d’une substance inter- r 1 ! 7 n 1 L (:) Fig. 44. Portion d’un muscle, dans l’état de repos, vue au microscope pour montrer la disposition des faisceaux de fibres musculaires et la manière dont les filets nerveux s’y distribuent. — a nerf; — à b faisceaux de fibres musculaires disposés parallèlement entre eux et en ligne droite; — c filets ner- veux qui se séparent du nerf a , et traversent perpendiculairement les faisceaux musculaires à des distances égales. Fig. 45. Le même muscle au moment de sa contraction; — les lettres 2, b,e indiquent les mêmes parties que dans la figure précédente. Contractions musculaires. Influence des nerfs. Expériences galvaniques. 170 ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE.. médiaire d’une texture fibreuse , qui pénètre dans la substance de ces organes , de façon à envoyer un prolongement à chacune des fibres dont ils se composent. Tantôt ce tissu fibreux, qui est blanc et nacré, prend la forme d’une membrane , et on l’appelle alors aponevrose ; d'autres fois il ressemble à une corde plus ou moins longue et constitue alors ce que les anatomistes nomment des tendons.(1) Nous avons dit plus haut que la contractilité appartenait exclu- sivement aux fibres musculaires : ce sont en effet les seules par- ties de l’économie qui possèdent la faculté de se contracter; mais , cette propriété, ils la doivent au système nerveux. Chaque faisceau musculaire reçoit un ou plusieurs nerfs. Ces nerfs , qui sont entourés par une espèce de gaine, nommée nevrilème, se composent d’un grand nombre de filamens longi- tudinaux , et ces filamens se répandent dans tout le muscle, en marchant à-peu-près parallèlement entre eux et en passant transversalement sur les fibres musculaires , précisément dans les points correspondans à chacun des angles formés par les plis en zigzag dont dépend la contraction (voy. fig.44et45). Après avoir continué ainsi leur trajet pendant quelque temps, on voit ces fibres nerveuses se recourber, former des anses et retourner vers le cerveau, de façon qu'ils paraissent former avec cet organe un cercle continu. Or, lorsqu’on coupe le nerf qui se distribue ainsi à un muscle, et qu’on sépare de la sorte celui-ci de la masse centrale du sys- tème nerveux, on empêche ses fibres de se contracter: on les paralyse. Il suffit même de comprimer le cerveau d’un animal vivant pour lui faire perdre aussitôt la faculté d’exécuter des mouvemens. | On a fait beaucoup de recherches pour trouver la nature de l'influence que le système nerveux exerce ainsi sur les muscles, lorsqu’il détermine leur contraction. Les plus célèbres sont celles d’un physicien de Bologne, Galvani ; car, en même temps qu’elles ont jeté de nouvelles lumières sur cette question délicate, elles ont conduit à l’une des plus grandes découvertes du siècle der- nier, celle de l'électricité galvanique. Les travaux de Galvani, de Volta et de quelques autres savans, ont montré que toutes les fois que certains corps de nature dif- férente, du cuivre et du fer, par exemple, se touchent, ils déve- loppent de l’eZectricite, et que cette électricité passe avec une grande vitesse à travers certains corps, tels que les nerfs et les métaux que l’on nomme pour cette raison des corps bons con- (1) Ce sont les tendons et les ligamens que l’on appelle vulgairement les uerfs, bien qu'ils n’aient avec ces organes rien de commun. DES MOUVEMENS. 171 ducteurs de l'électricité, tandis qu’elle est arrêtée par d’autres, tels que le verre et la résine. Or, lorsqu'on a paralysé un muscle par la section du nerf qui s'y rend, on peut pendant quelque temps suppléer au défaut de l’actiou nerveuse par de l'électricité et déterminer, à l’aide de cet agent, des contractions semblables à celles qui, dans les circonstances ordinaires, ont lieu sous l’influence de la volonté. La manière la plus commode de faire ces expériences est de dépouiller une grenouille de sa peau et de la couper au niveau des lombes , puis de saisir les nerfs lombaires et de les enve- lopper dans une petite feuille d’étain repliée; on pose ensuite les membres abdominaux sur une plaque de cuivre, et chaque fois que l’étain touche à ce dernier métal, on voit les muscles se contracter; les jambes se replient et s’agitent, et cette moitié de grenouille semble reprendre vie pour sauter. Ces effets sin- guliers peuvent se produire encore assez long-temps après la mort de lanimal et s’observent aussi chez l’homme; car en faisant passer un courant électrique à travers le corps de quel- ques suppliciés, on a vu ces cadavres agitésde convulsions hor- ribles. 4 Un phénomène analogue a lieu, lorsque, après avoir coupé un nerf sur un animal vivant, on pince ou on en bràle la portion restée adhérente aux muscles ; ceux-ci se contractent aussitôt, mais, du reste, cet effet parait dépendre de la même cause que les convulsions produites dans les expériences précédentes, car on a constaté que, dans tous ces cas, il y a production d’élec- tricité. On voit, par ce qui précède , que les courans électriques agissent sur les muscles, de la même manière que l'influence nerveuse et la connaissance de ce fait a conduit à une explica- ion très plausible de la contraction musculaire. La physique nous apprend que, lorsqu'un courant électrique trayerse en sens contraire deux branches parallèles d’une tige conductrice, un fil de fer, par exemple, il tend à les rapprocher. Nous avons vu aussi que les fibres nerveuses, en se distribuant aux muscles , y forment des anses; on doit donc supposer que le fluide électrique qui les a traversées dans toutes les expériences précédentes suit le trajet de ces fibres recourbées , et, par con- séquent, descend par une branche pour remonter par l’autre branche parallèle. Si cela est, ces fibres nerveuses doivent se trouver dans les mêmes conditions que le conducteur métallique dont nous venons de parler; elles doivent se rapprocher, et en se rapprochant, elles doivent entrainer avec elles et plisser les fibres musculaires qu’elles traversent. Or, les mêmes phénomènes s’observent dans les contractions Théorie de la contraction musculaire. Nerfs des mouvemens volontaires. 122 ‘ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. musculaires produites par suite de l’influence nerveuse et dans celles déterminées par l’électricité; on peut donc supposer que, dans les deux cas, la cause qui les produit est, sinon la même, du moins très analogue, et que dans l’état normal ces contrac- tions dépendent du passage d’un fluide nerveux ayant, à cet égard, les mêmes propriétés que le fluide électrique. Dans cette hypothèse, que l’on doit à MM. Prévost et Dumas, les fibres musculaires ne joueront qu’un rôle tout-à-fait passif dans le phénomène de la contraction, et ce seraient les anses nerveuses qui seraient les véritables agens moteurs. Une cir- constance à l’appui de cette opinion, qui du reste a été étayée par un grand nombre d’expériences délicates, est le rapport constant déjà mentionné entre le point où ces fibres nerveuses traversent les fibres musculaires, et celui où ces dernières se fléchissent en zigzag; les nerfs se trouvent toujours au sommet des angles formés par ces plis , et ce serait effectivement la place qu’ils occuperaient, si leur rapprochement était la cause de ces courbures. m2 Quoi qu’il en soit, nous voyons que la contraction ne peut avoir lieu que dans le tissu musculaire, et que l'action du sys- tème nerveux en est la cause déterminante. Cherchons mainte- nant quels sont les rôles que les diverses parties de ce système jouent dans la production de ce phénomène important. Les muscles présentent entre eux des différences très grandes, les uns ne se contractent que sous l'influence de la volonté, d’autres sont également soumis à l’empire de cette force, mais leur contraction a lieu aussi indépendamment d'elle; enfin il en est d’autres encore sur les mouvemens desquels la volonté n’a aucune influence. Les muscles des membres, etc., appartiennent à la première de ces trois classes, ceux de l'appareil respiratoire à la seconde , et le cœur, etc. , à la troisième. Les muscles dont les mouvemens peuvent être déterminés par la volonté reçoivent tous des nerfs du système cérébro-spinal. Mais tous les nerfs de ce système ne remplissent pas ces fonc- tions ; quelques-uns, comme nous l'avons déjà vu, appartiennent exclusivement à la sensibilité. Les nerfs cérébraux dela troisième, quatrième, sixième, septième, neuvième et onzième paires (fig. 29) paraissent, au contraire, être exclusivement affectés aux mouve- mens ; enfin les nerfs cérébraux de la cinquième et de la dixième paires et tous les nerfs qui naissent de la moelle épinière , rem- plissent ces fonctions en même temps qu’ils servent à la sensibi- lité; leur racine postérieure , comme nous l'avons déjà vu , leur DES MOUVEMENS. 173 donne la faculté de transporter les sensations au cerveau; et c’est par leur rag@ine postérieure que l'influence nerveuse , nécessaire pour déterminer les mouvemens volontaires, se propage du cerveau aux muscles. En effet, lorsqu'on coupe, sur un animal vivant, les racines postérieures des nerfs spinaux , On prive les parties auxquelles ces nerfs se distribuent de la faculté de se contracter, tout comme si l’on coupait leurs deux racines. Lorsqu'on divise la moelle épinière, on détruit également les mouvemens de toutes les parties dont les nerfs naissent au- dessous dela section, tandis que celles dont les nerfs sontencore en communication avec le cerveau continuent à se mouvoir. Mais si, au lieu d’expérimenter ainsi sur la moelle épinière, on agit sur le cerveau, qu'on l’enlève ou qu’on le comprime de manière à l'empêcher de remplir ses fonctions, on paralyse en même temps tous les muscles des mouvemens volontaires. Il paraïtrait aussi que certaines parties du système nerveux exercent sur les mouvemens une influence d'une autre nature. Ainsi M.Magendie a constaté que, lorsqu'on coupe la portion du cerveau , désignée par les anatomistes sous le nom de corps stries, Panimal ainsi mutilé ne reste plus maitre de ses mouvemens, mais semble poussé en avant par une puissance intérieure à la- quelle il ne peut résister; 1l s’élance en avant, court avec rapidité et s’arrête enfin, mais ne parait pas pouvoir reculer. Si, au con- traire , on blesse les deux côtés du cervelet chez un mammifère ou un oiseau (1), on le voit aussitôt marcher, nager ou même voler en arrière , sans jamais pouvoir se porter en avant. Lorsqu'on ne pratique ces lésions que d’un seul côté, on ob- serve d’autres phénomènes qui, au premier abord, paraissent être des plus singuliers, mais qui sont des conséquences des effets dont nous venons de parler. Ainsi lorsqu'on coupe ver- ticalement l’un des côtés du cervelet , ou de la protubérance annulaire, l'animal se met aussitôt à rouler latéralement sur lui- même , en tournant du côté blessé et quelquefois avec une telle rapidité, qu’il fait plus de soixante révolutions par minute. D’après ces expériences curieuses, et, d’après les recherches sur le même sujet, faites par M. Flourens et par quelques autres physiologistes , on voit que le cervelet et les parties voisines de l’encéphale ont , entre autres usages, celui de régler les mouve- mens de la locomotion. Les mouvemens qui, tout en étant soumis à l'empire de la volonté, se font aussi indépendamment de son influence, pa- (1) D’après les expériences de M. Magendie, il paraîtrait que les’mémes effets ne s’observent pas chez les reptiles et les poissons. Fonctions de la moelle épiniere. Du cerveau. Des corps striés. Du cervelet. Mouvemens respiratoires. Fonctions de la moelle allongée. Mouvemens #nvolontaires. Lois -de la contraction musculaire. 474 ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. raissent dépendre alors de l’action de la moelle allongée. En effet, lorsque le cerveau ne remplit plus ses fonctions, et que, par conséquent, il n’y a plus de volonté, les muscles de lappa- reil respiratoire continuent à agir comme lorsque leurs mou- vemens pouvaient être réglés par la volonté; mais lorsqu'on détruit cette portion de la moelle, tout en laissant le cerveau intact , on les arrête aussitôt. Quant aux muscles dont les contractions sont entièrement indépendantes de la volonté, ils reçoivent leurs nerfs du sys- ième ganglionnaire, et c’est dans ce système que réside leur principe d'action; car si lon maintient la respiration par des moyens artificiels, on peut détruire tout l’encéphale, ainsi que la moelle épinière, sans arrêter les battemens du cœur ou les contractions péristaltiques des intestins. La contraction de la fibre musculaire est un phénomène es- sentiellement intermittent. Les muscles ne peuvent rester dans un état de contraction permanent, et au bout d’un temps plus ou moins long, ils se relâchent nécessairement. Ainsi le cœur, dont l’action ne s’arrète qu’avec la vie, se contracte et se repose alternativement ; mais pour les muscles des mouvemens volon- taires , ces mêmes contractions interrompues par des repos plus ou moins rapprochés, ne peuvent être continuées au-delà d’un certain temps, car elles produisent un sentiment de lassitude qui augmente jusqu’à ce qu’enfin ces mouvemens deviennent impossibles et cette sensation ne se dissipe que par l’inaction. La promptitude avec laquelle la fatigue musculaire se mani- feste varie beaucoup, suivant les individus ; mais, toutes choses égales d’ailleurs, elle est en raison de l'intensité des contrac- tions , de la durée de chacune d’elles, et de la rapidité avec la- quelle elles se succèdent. La force déployée par la contraction d’un muscle dépend de la texture de cet organe et de l’énergie nerveuse de l'individu. Les muscles les plus gros, les plus fermes et les plus rouges sont susceptibles de se contracter avec plus de force que les mus- cles grèles, flasques et pâles; mais c’est seulement lorsque ces conditions sont réunies à une puissance de volonté très forte, queces organes peuvent produire les plus grands effets , et presque toujours elles sont en sens inverse. Par la seule in- fluence de Vaction ‘du cerveau, l'énergie des contractions musculaires peut être portée à un degré extraordinaire; on connait la force d’un homme en colère et celle des maniaques; et lorsque, dans l’état ordinaire de l’économie, une énergie nerveuse analogue se réunit à un grand développement ma- tériel du système musculaire, il en résulte des effets étonnans, dont les anciens nous ont transmis des récits en parlant de DES MOUVEMENS. 175 leurs athlètes, et dont les bateleurs de nos jours nous rendent aussi quelquefois témoins. La contraction musculaire a joué un grand rôle dans plusieurs des fonctions dont nous avons déjà fait l’histoire ; mais le sujet dont nous allons maintenant nous occuper s’y rattache d’une manière encore plus directe, car nous allons aborder l'étude des mouvemens généraux et partiels de notre corps, dont dé- pendent les attitudes, la locomotion, et une foule d’autres phénomènes entièrement mécaniques. Chez les animaux les plus inférieurs, les muscles s’insèrent Organes pas- tous à la membrane tégumentaire qui est molleet flexible; et c’est sifs des mou- en agissant sur elle qu’iis modifient la forme du corps, de façon *emens. à le faire mouvoir en totalité ou en partie; mais chez les ani- maux d’une structure plus parfaite, l'appareil moteur se com- plique davantage et se compose non-seulement de muscles, mais aussi d’un système de pièces solides servant à augmenter la précision , la force et l'étendue des mouvemens, en même temps qu’il détermine la forme générale du corps et protège les viscères contre les violences extérieures. Cette espèce de charpente solide, à laquelle les muscles s’at- Squelette. tachent , porte le nom de squelette. Dans certains animaux, tels que les insectes et les écrevisses, elle est située à l'extérieur et ne consiste que dans une modification de la peau; mais chez l’homme et tous les animaux qui s’en rapprochent (savoir, les autres mammifères , les oiseaux, les reptiles et les poissons), il est situé à l’intérieur du corps, et se compose de parties qui lui appartiennent d’une manière spéciale. Chez quelques poissons (tels que les raies), le squelette est Cartilages. formé d’une substance blanche, opaline, compacte, en appa- rence homogène, très résistante et très élastique, que l’on nomme cartilage. Il en est de même pour le squelette de l’homme et des autres animaux dans les premiers temps de la vie; mais cet état qui est permanent chez les poissons dont nous venons de parler, n’est ici que transitoire, et les cartilages du squelette ne tendent pas à s’encroûter de matières pierreuses de nature calcaire qui les rend raides, cassans et très durs, et qui les fait passer à Pé- Os. tat d'os. Pour s'assurer que les os ne sont que des cartilages durcis par le dépôt de sels calcaires dans leur épaisseur, il suffit de les faire macérer pendant quelque temps dans un liquide par- ticulier appelé acide muriatique ou hydrochlorique ; ce liquide a la faculté de dissoudre les matières pierreuses contenues dans Développe- ment des os. Structure des os. Forme. 176 ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. les os, mais r’attaque pas le cartilage, de façon qu’on sépare ainsi ce dernier des sels qui en masquaïient les propriétés. (1) L’ossification du squelette commence par une multitude de points qui s'étendent de plus en plus; il en résulte que le nombre de pièces osseuses distinctes est d’abord immense ; mais par les progrès de lossification, plusieurs d’entre elles se réunissent, äe sorte que, chez l’animal adulte, on trouve beaucoup moins d'os distincts que chez le jeune, et que, dans la vieillesse extrême , on v. it souvent plusieurs os se souder entre eux, et des parties, qui jusqu'alors étaient restées cartilagi- neuses, s’encroùter de matières calcaires. L’utilité de ce mode de développement est facile à comprendre : pour que la char- pente solide du corps ne s’oppose pas à ses mouvemens, il faut toujours qu’elle se compose d’un grand nombre de pièces mo- biles, mais c’est surtout lorsque toutes ses parties doivent se prêter à l'accroissement des organes situés dans son intérieur, que cette division est le plus nécessaire. La surface des os est toujours recouverte d’une couche mem- braneuse à laquelle on donne le nom de perioste, et leur sub- stance se compose de fibres ou de lamelles faciles à distinguer. Lorsque ces organes doivent occuper peu de volume et doivent présenter beaucoup de solidité, comme cela a lieu pour les os plats qui recouvrent la plupart äes viscères les plus importans et les plus délicats , le tissu osseux est extrêmement compacte ; mais lorsque les os doivent occuper un long espace, et qu’ils nuiraïent aux mouvemens si leur poids était considérable fes tissu n’est dense et serré que vers la surface , et dans leur intérieur il existe de grandes cellules ou même des canaux appelés médullaires , parce qu’ils sont remplis de moelle. La forme des os varie beaucoup : on les distingue en os longs, os courts et os plats. Les premiers seulement présentent une cavité médullaire et sont toujours à-peu-près cylindriques. On remarque souvent aux uns et aux autres des éminences qui donnent attache aux muscles ou à d’autres parties, et qui, toutes les fois qu’elles font une saillie considérable, sont désignées par (x) D'après l'analyse de M. Berzelius, les os du squelette humain , parfaite- ment dépouillés de graisse sont composés , sur 100,00 de cartilage 32.17; vais- seaux 1,13, sous-phosphate de chaux, avec un peu de fluorure de calcium, 53,04 ; carbonate de chaux 11,30, phosphate de magnésie 1,16, et soude, avec un peu de chlorure de sodium, 1,20. Dans les os de bœuf ce chimiste a trouvé la même proportion de matières animales, mais beaucoup moins de carbonate de chaux. La partie cartilagineuse des os est composée de gélatine, aussi Les emploie-t-on dans les arts et dans l’économie domestique pour la fabrication de la colle-forte et la préparation de bouillons économiques. DES MOUVEMENS. 177 le nom d’apophyses. Les os présentent aussi à leur surface des dépressions plus ou moins profondes qui servent à loger des parties molle ou à recevoir d’autres os qui doivent se mouvoir dans ces cavités , et dans beaucoup d’endroits , on leur voit des trous destinés à livrer passage à des vaisseaux sanguins ou à des nerfs. On donne le nom d’artieulation à union des divers os entre eux. Les moyens de jonction que la nature à employés à cet usage varient beaucoup, suivant que les os doivent conserver toujours entre eux les mêmes rapports , et rester fixes , ou bien exécuter des mouvemens plus ou moins étendus. Lorsque D. des os n’est pas destinée à permettre des mouvemens, elle peut avoir lieu de trois manières: par juxta- position , par engrenage Où par èmplantation. Les articulations par simple juxta-position des surfaces articulaires ne se voient que dans certaines parties du squelette , où la position des os est telle, qu'ils ne peuvent se déplacer. Dans les articulations par engrenage (ou par suture) , les surfaces articulaires offrent une série d’aspérités et d’enfoncemens anguleux , qui se reçoivent réciproquement : aussi ces articulations peuvent-elles avoir beau- coup de solidité É 2 que leurs surfaces soient étendues. Enfin les articulations par implantation sont celles où un os estenchässé dans une cavité creusée dans la substance de l'os qui leur sert de base: ce sont les articulations les plus solides, mais elles sont rares. (1) Dans les articulations mobiles , les os ne sont pas unis direc- tement entre eux , mais sont maintenus en contact par des liens qui s'étendent de lun des os à l’autre. Tantôt ces surfaces articulaires sont unies par une substance " cartilagineuse ou fibro-cartilagineuse intermédiaire, qui adhère EE — fortement à l’une et à l’autre , et ne leur permet de se mouvoir qu’à raison de son élasticité (c’est ce qu'on nomme articulation par continuite); d’autres fois les surfaces articulaires glissent Fune sur l’autre , et ne sont maintenues en rapport que par des Z:- gamens (2), qui les entourent, et qui sont disposés de manière à poser des bornes à leurs mouvemens. Ce mode de jonction constitue ce que les anatomistes appellent articulation par con- tiguite et se voit toujours là où les mouvemens doivent être très étendus. Les surfaces , qui s’articulent ainsi sont toujours extré- (r) Les dents, qui ne sont pas de véritables os, sont les seules parties qu s’articulent ainsi avec les os. (2) On donne le nom de ligamens à des faisceaux de fibres analogues à a ceux des tendons , très résistans , arrondis ou aplatis, et d’un blanc nacré, qui lient entre eux les os. 12 Articula- tions. Action des museles sur les os. 178 ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. mement lisses et encroùtées d’une lame cartilagineuse qui en augmente encore le poli; mais Ce ne sont point là les seuls moyens employés par la nature pour diminuer le frottement dans ces jointures ; car elle y a placé une espèce de poche mem- braneuse, appelée bourse synoviale , qui a de l’analogie avec les membranes séreuses , et qui est remplie d’un liquide visqueux , qui permet à ces surfaces de glisser facilement l’une sur Pautre. Tous les muscles destinés à produire les grands mouvemens du corps sont fixés au squelette par leurs deux extrémités. Il en résulte que , lors de leur contraction , ils doivent déplacer los qui leur présente le moins de résistance, et l’entrainer vers celui qui reste immobile et qui lui sert de point d'appui, pour mouvoir le premier. Or, dans la plupart des cas, les os sont d'autant plus mobiles, qu’ils sont placés plus loin de la partie centrale du corps : aussi les muscles qui se fixent à deux d’entre eux agissent-ils en général sur celui qui est le plus éloigné, et voit-on toujours les muscles , destinés à mouvoir un os, s’étendre de cet organe vers le tronc ; ainsi les muscles servant à remuer les doigts occupent la paume de la main et l’avant- bras ; ceux qui fléchissent l’avant-bras sur le bras occupent le bras , et ceux qui meuvent le bras sur l’épaule sont placés dans l'épaule. Dans certaines circonstances cependant ces muscles déplacent les os qui, dans les cas ordinaires , leur servent de point d’ap- pui. Lorsque le corps est suspendu par les mains et que l’on cherche à s'élever, les muscles fléchissans de lPavant-bras ne pouvant déplacer celui-ci, en rapprochent le bras et entrainent ainsi tout le corps. Le genre de mouvement déterminé par la contraction d’un muscle dépend en général, d'une part, de la nature de larticula- tion de l’os qu’il déplace, etde autre, desa position par rapport à ces os : il l’entraine toujours de son côté et le rapproche du point auquel son extrémité opposée se trouve fixée. Ainsi les muscles qui font fléchir les doigts occupent la face palmaire de la main et de l’avant-bras , tandis que ceux destinés à les étendre sont situés du côté opposé du membre. Souvent plusieurs muscles sont disposés de facon à pouvoir concourir à la production d’un même mouvement : on les ap- pelle alors congeneres, et on appelle l’antagoniste d'un muscle celui qui détermine un mouvement contraire. On désigne aussi les muscles, d’après leurs usages , sous les noms de fléchisseurs et d’extenseurs, d’adducteurs et d’'abduc- ieurs , de rotateurs, etc. DES MOUVEMENS. 179 La force avec laquelle un musele se contracte dépend de son volume, de la puissance de la volonté et de quelques autres cir- constances , dont il a été déjà fait mention ; mais l’effet produit par cette contraction dépend aussi en grande partie de la manière dont il se fixe à l'os qu’il doit mouvoir. Ainsi, toutes choses égales d’ailleurs, le mouvement déter- miné par la contraction d’un muscle sera d’autant plus puissant, que ce muscles’insérera moins obliquement sur l'os mobile : lors- qu'il s’yinsère à angle droit, toute sa force estemployée à déplacer celui-ci; mais, dans le cas contraire , une partie plus ou moins considérable de cette force est perdue. Fig. 46. En effet, si le muscle #, dont n à nous supposons la force égale à 10, est fixé perpendiculairement à los Z, dont l'extrémité « est mobile sur le point d'appui r: il n’aura à vaincre que le poids de cet os, et le portera de la posi- tion ah dans la direction de la us HÙ ligne & , ec ,en faisant parcourir au point auquel il s’insère un espace que nous représentons encore par 10 ; mais, si ce muscle agit obliquement sur los , dans la direction de la ligne x h, par exemple, il en sera tout autrement; car alors il tendra à le porter dans la direction hnet par conséquent à le rapprocher de la surface articulaire r,sur laquelle l'extrémité de l'os repose; mais, celui-ci étant une tige inflexible , ce déplacement ne peut avoir lieu ; los ne peut que tourner sur ce pointr comme sur un pivot, et la contraction du muscle » , sans rien perdre de l’énergie que nous lui avons supposée, ne pourra porter cet os que dans la direction 44 , et ne produire par conséquent qu’un déplacement pour lequel le quart de la force aurait suffi lors de sa première position perpendiculaire à los. Or, dans l’économie animale , les muscles ne s’insèrent pour la plupart que d’une manière très oblique et par conséquent d’une manière très peu favorable à l'intensité du résultat de leur con- traction. Souventilexiste cependant une disposition qui tend à di- Fig. 47. Fig.48. minuer l’obliquité de ces insertions : c’est RE le renflement qui se trouve à l’exirémité 5h r “"r de la plupart des os longs, et qui sert principalement à donner à leurs articu- i WT. lations plus de solidité. Les tendons (2) des - , muscles(m) situés au-dessus de Particula- tion s’insèrent en général immédiatement au-dessous de ce renflement, et arrivent ainsi sur los mobile (5), 12. Force muscles. des Leviers. 180 ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. en suivant une direction qui se rapproche davantage de la per- pendiculaire , comme on peut s’en convaincre , en comparant la disposition du muscle» dans la figure 48, où ces renflemens exis- tent avec la figure 47,où on a représenté les extrémités articu- laires sans renflement semblable. La distance qui sépare le point d'attache du muscle du point d'appui sur lequel los se meut , et de l'extrémité opposée du levier que cet organe représente , influe aussi de la manière la plus puissante sur les effets produits par sa contraction. Pour expliquer ce fait, il est nécessaire d’avoir recours à la méca- nique. Les os , disons-nous , représentent des Leviers, nom que lon donne en physique à toute verge inflexible qui se meut sur un point fixe , que lon appelle le point d'appui. La force qui met le levier en mouvement se nomme la puissance , et celui qui s’op- pose à son déplacement se nomme la resistance. Enfin on appelle bras de levier &e la puissance, ou de la résistance, la distance qui sépare le point d'appui de celui où sont appliquées lune et l'autre de ces forces. Or, la longueur de ces bras de levier influe extrèmement sur la force nécessaire pour faire équilibre à une résistance donnée. Pour s’en convaincre , ilsuffit d'observer le mécanisme de la balance, connue sous le nom de romaine (#g. 49). Le fléau est Fig. 49. partagé en deux parties, de longueur a inégale, par le point d'appui a. A lextré- mité de l’une des branches(r), qui est très courte, se trouve la résistance (ou r P_ l’objetque l’on veut peser), et sur l’autre (p) glisse un poids quelconque , qui fait équilibre à une résistance d’autantplus considérable, qu’on l’éloigne davantage du pointd’appui,et qu'on allonge par conséquentle bras de levier de la puissance, celui de la résistance restant toujours le même. Chacun sait aussi combien est grande la-différence dans la force qu'un homme peut déployer lorsqu'il cherche à soulever un fardeau avec le bras fléchi ou tendu. Or, dans ces mouve- mens, ce sont les mêmes muscles qui agissent, et le bras de levier de la puissance reste le même, c’est seulement le bras de levier de la résistance, représenté par la distance qui sépare l’épaule de la main, qui s’allonge. La mécanique nous apprend que, pour qu’il y ait équilibre dans un levier quelconque , il faut que la résistance et la puissance soient réciproquement proportionnelles aux longueurs de leurs bras de levier, c’est-à-dire que, multipliées par leurs bras de leviers respectifs, elles donnent toutes deux le mème produit. DES MOUVEMENS. 181 Ainsi, pour faire équi- libre à une résistance (r) égale à 10, qui serait appliquée à l'extrémité d’un levier (ab) d’une longueur de 20, il fau- drait que la puissance (p),sielieétaitappliquée au même point , et par conséquent également éloignée du point d’appui(a), fùt aussi égale à 10; mais si elle était appliquée au point ce , elle devrait être, pour produire le mème effet, égale à 20, car la résistance que nous avons supposée égale à 10 étant multipliée par la longueur de son bras de levier (20), donnera pour produit 200, et, d’un autre côté, le bras de levier de la puissance (e, a) n'étant égale qu’à 10, celui-ci devra être multiplié par une force égale à 20, pour donner ce même produit de 200. Enfin, en plaçant la puissance encore plus près du point d'appui, au point 4, il faudra lui donner une force égale à 100 ; car son bras de levier ne sera plus que de 2, et 2 X 109 —200. La disposition des leviers influe autant sur la rapidité des mouvemens produits que sur leur force; et si, en employant une puissance comparativement faible, on peut vaincre ainsi une résistance beaucoup plus forte, on peut aussi, en em- ployant une force motrice d’une vitesse quelconque, obtenir, à l’aide de ces instrumens, un mouvement plus lent ou plus rapide. Fig. 51. Ainsi supposons que la puis- sance ?p agisse sur le levier ar, de facon à faire parcourir au point d'insertion « un espace de 5 dans une seconde, il dé- placera en même temps l’ex- trémité r du levier et le fera <20 arriver en À avec une vitesse DCE qui sera égale à 25', car la dis- tance , parcourue à des temps égaux par ce point, sera cinq fois plus considérable que celle parcourue par le point 4. Avec une force dont la vitesse n est que de 5, on produit donc, en s'appliquant au point e,le même résultat que si on appliquait directement au point r une force dont la vitesse serait égale à 25. Mais, d’après ce que nous avons dit plus haut, on voit que tout ce que l’on gagne ainsi en vitesse se perd en force, car c’est surtout en rendant le bras de levier de la résistance plus long que celui de la puissance qu'on arrive à ce résultat. & Squelette. Colonne ver- tébrale. 182 ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. Or, dans l’économie animale , presque tous les leviers repré- sentés par les os sont disposés de facon à favoriser ainsi la rapidité des mouvemens aux dépens de la force nécessaire pour les produire. Ainsi, lorsque l’on abaisse le bras tendu, si la vitesse avec laquelle ses muscles se contractent est telle que leur insertion soit déplacée de trois pouces dans une seconde, Pextrémité du membre s’éloignera de sa position primitive avec une vitesse de près de trois pieds par seconde. Ces notions préliminaires sur la mécanique animale étant acquises, nous pouvons maintenant nous livrer à l’étude des di- verses parties de l'appareil du mouvement, que nous examine- rons de préférence chez l’homme. Le squelette, ainsi que nous l'avons déjà dit, se compose d’un grand nombre d’os unis entre eux; il se divise, comme le corps, en trois parties , la tête, le tronc et les membres. La partie la plus importante du squelette, celle qui sert de soutien à toutes les autres et qui diffère le moins chez les divers animaux , est la colonne vertébrale ou colonne épiniere. On donne ce nom à une espèce de tige osseuse qui règne dans toute la longueur du corps et qui se compose d’un grand nombre de petits os appelés vertèbres, qui sont placés bout à bout et solidement unis entre eux. Fig... 37. Cette colonne (fig. 27), que l’on appelle aussi l’épine du dos, occupe la ligne médiane et postérieure du corps, et supporte à son extrémité antérieure la tête , qu’on peut considérer comme en étant la con- tinuation. Dans l’homme , on y compte trente-trois vertèbres , et on y distingue cinq portions, savoir : une portion cervicale composée de sept vertèbres, une portion dorsale composée de douze de ces os, une portion lombaire , formée de cinq vertèbres, une portion sacrée qui en présente également cinq, et une portion coccygienne, où l’on en voit quatre. Elle présente plusieurs courbures et augmente de grosseur depuis son extrémité antérieure ou supé- rieure Jusqu'au commencement de la portion sa- crée. Vers le moment de la naissance, toutes les vertèbres sont parfaitement distinctes et sont sim- plement articulées entre eux ; mais bientôt après les cinq vertè- bres sacrées se soudent entre elles et ne forment plus qu’un seul os nommé sacrum(s). Fig. 52. — SQUELETTE DE L'HOMME. 183 Os froutal. Os parictal. : Re But Us Mâchoire infer, ------—-- Vertèbres SO Clavicule. cervicales. | : Omoplate Ro D —— ne fr Ut Nr, VPRPSRERR Vertébresÿ, |: #4 lombaires, VAUT. VD Os iliaque. . . . ED a ___os iliaque. +5 PP TRE Re: 2. O5 du 4 ER Osdu métacarp = SET Phalanges. L PR PRES PAIN SE) 4 N+ Rotule. ER . Lis) RU ul: Tarse. , Métatarse. ” Phalanges. ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. Le caractère essentiel des vertèbres est d’être traversé par un trou qui, en se réunissant à Ceux des autres vertèbres , forme un canal qui s’étend depuis le crâne jusque vers l’extrémité du corps et qui loge la moelle épinière; dans homme, les vertèbres coccygiennes ne présentent cependant point de canal semblable, car elles sont réduites à un état rudimentaire et ne consistent qu’en autant de petits noyaux assez solides. Sur les côtes, ce canal vertébral commu- nique au-dehors par une série de trous appelés trous de conjugai- son , parce qu’ils résultent de la réunion de deux échancrures pratiquées sur les bords supérieurs et inférieurs de chaque ver- tèbre, de façon à se correspondre lorsque ces os sont unis. Ces trous , comme nous l’avons déjà vu, livrent le passage aux divers nerfs qui naissent de la moelle épinière et qui vont se distribuer aux différentes parties du corps. On distingue dans chaque vertèbre un corps et diverses apo- physes. Le corps de La vertebre (fig. 28, a) est un disque épais situé au-devant du canal vertébral (ou au-dessous, si la colonneest dans une position horizontale, comme chez la plupart des animaux) et servant à donner de la solidité à larticulation de ces os entre eux. Les deux faces de ce disque sont à-peu-près parallèles, et chacune d’elles est unie à la surface correspondante de la ver- tèbre voisine par une couche épaisse de fibro - cartilage qui adhère à l’une et à l’autre dans toute l'étendue de ces surfaces articulaires, et ne leur permet de s'éloigner entre elles qu’à raison de l’élasticité dont elle est douée. L’articulation des ver- tèbres entre elles est encore fortifiée par l'existence de quatre petites apophyses qui sont situées sur les côtés du canal verté- bral et qui s’engrènent avec celles des vertèbres voisines. Enfin, en arrière de ce canal, il existe une apophyse appelée épineuse (b), qui concourt au même but, en limitant la flexion de la colonne en arrière, et des faisceaux de fibres aponévre- üques s'étendant encore d’un os à l’autre de façon à les lier entre eux. L’articulation des vertèbres entre elles est, comme on le voit, extrêmement solide; aussi les mouvemens que chacun de ces os peut exécuter sont-ils, en générai, extrémement hbornés ; mais ces petits mouvemens, s’ajoutant les uns aux autres, don- nent à l’ensemble de la colonne assez de flexibilité sans nuire à sa force. Du reste, cette mobilité varie beaucoup dans les dif- férentes parties de l’épine du dos ; au bas elle est presque nulle, aux lombes elle est, au contraire, assez marquée, mais c’est dans la portion cervicale de la colonne qu’elle est la plus pro- | | !| DES MOUVEMENS. 185 noncée; aussi, dans ces parties; la couche fibro-cartilagineuse qui doit se prèter à ces déplacemens est-elle plus Le qu’au dos , et les &pophyses épineuses sont-elles plus écartées l’une de l’autre, de façon à permettre une courbure plus considé- rable de la colonne avant qu'elles ne viennent à se rencontrer. Le poids du corps tend continuellement à courber la colonne vertébrale en avant; aussi y a-t-il, pour résister à cette flexion et pour redresser la colonne, des muscles puissans qui s’in- sèrent le long de sa face postérieure; et, afin de rendre leur action plus puissante, la nature a disposé leur point d'attache de facon à les faire tirer perpendiculairement sur un bras de levier assez long. En effet, la plupart d’entre eux se fixent à l'extrémité des apophyses dites épineuses , qui forment une crète saillante dans toute la longueur de lépine, et d’autres prennent leur pointd’attache sur deux autres apaphyses (c), qui sont égale- ment très saillantes et que l’on nomme , à cause de leur direc- tion , apophyses transverses. Il est à remarquer aussi que, dans les portions de la colonne où ces muscles doivent déployer le plus de force, comme aux lombes, ces apophyses sont bien plus longues, et, par con- séquent, forment un levier bien plus puissant que dans les parties où toute cette force n’est pas nécessaire, au cou, par exemple. Par la suite nous aurons aussi l’occasion de voir que, chez les animaux dont la tête est pesante et se trouve à l’extré- mité d’un cou long et horizontal, ces apophyses prennent un accroissement extrême au dos où elles servent à lattache des ligamens et des muscles destinés à soutenir ces parties et à relever le cou. Les mouvemens de flexion de la colonne en avant ne néces- sitent presque aucun déploiement de force , et les muscles em- ployés à les produire, et situés au-devant du corps des vertèbres, sont , par conséquent , grèles et en petit nombre. La première vertèbre du cou, nommée atlas, est beaucoup plus mobile que toutes les autres; elle a la forme d’un simple anneau et tourne autour d’une espèce de pivot formé par une apophyse qui s’élève du corps de la vertèbre suivante (ou arts). C’est même dans cette articulation que s’effectuent presque en- üèrement les mouvemens de rotation exécutés par la tête. Les liens qui unissent ces deux vertèbres sont incomparablement moins forts que ceux des autres vertèbres; et en effet, dans la position ordinaire du corps, le poids de la tête pressant sur l’atlas tend plutôt à les maintenir en contact qu’à les séparer; mais lorsque c’est la tête qui supporte tout le poids du corps, comme cela a lieu chez les personnes pendues, il en est tout autre- ment; ces deux vertèbres se séparent alors facilement, et leur 186 ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. luxation produit une mort presque instantanée par suite de la compression de la moelle épinière, précisément sous le point où naissent les principaux nerfs de l’appareil respiratoire. C’é- tait dans la vue de déterminer cette dislocation du cou , et, par conséquent, d’abréger les souffrances des criminels condamnés à périr sur la potence, que les bourreaux avaient autrefois l’ha- bitude d'appuyer, avec le pied, sur l'épaule des suppliciés , au moment où ils les lançaient de leur échelle la corde au cou; et, c’est par la même cause qu’on a vu quelquefois une mort subite arriver au milieu de jeux imprudens dans lesquels on sou- lève les enfans en les tenant, avec les deux mains, suspendus par la tête. La colonne vertébrale , comme nous l’avons déjà dit, sup- porte en quelque sorte toutes les autres parties du corps. Par son extrémité supérieure elle s'articule avec la tête, chacune des vertèbres dorsales s'articule avec une paire de côtes, et le sacrum est enclavé comme un coin entre les deux os des hanches. l La tête se compose de deux portions principales, le crâne et la ace. Le crâne est une espèce de boite ? osseuse de formeovalaire qui occupe Fa toute la partie postérieure etsupérieu- re de la tête, et qui loge, comme nous l'avons déjà vu, le cerveau et le cer- velet. Huit os se réunissent pour en L former les parois, savoir : le frontal ou =, coronal(f) en avant, les deux parié- ù NX taux (p) en haut, les deux temporaux b mij az © ta (f)sur les côtés, loccipital (o)en ar- rière, etle sphénoïde (s) et lethmoïde en bas; tous ces os, à l’'excep- tion du dernier, ont la forme de grandes lames minces et d’une texture très compaete, et tous s’articulent entre eux de manière à être complètement immobiles et à donner au crâne une grande solidité. Ces articulations sont même très remarquables en ce qu’elles varient de forme dansles différentes parties du crâne, afin de mieux résister aux violences extérieures qui pourraient tendre à désunir ces os,etqui doivent produire des eftets différens, sui- vant le point sur lequel elles agissent. Ainsi, lorsqu'un coup (1) f Os frontal ou coronal ;—p pariétal ;—+# temporai ;—o occipital ;—s sphé- noïde ;— x os nasal ; — "ns maxillaire supérieur; — 7 os jugal ou os de la pom- mette ;—72 à maxillaire inférieur ;—n a ouverture antérieure des fosses nasales; — La trou auditif, — az arcade zygomatique formée par une portion des os temporal et jugal; — a, b, ce, d lignes indiquant l’angle facial. DES MOUVEMENS. 187 porte sur le sommet de la tête, le mouvement se propage dans ‘ous les sens et tend à écarter les os pariétaux et à chasser en avant ou ên arrière les os frontal et occipital; aussi tous ces os sont-ils unis entre eux par des sutures engrenées des plus solides. Mais quand le crâne reçoit un choc sur le côté, Peffort agissant sur le temporal tend à enfoncer ces os, et, pour em- pécher cet accident, la nature a uni le temporal aux os voisins, non pas à l’aide d’engrenures propres seulement à empècherleur disjonction, mais à l’aide d’un bord articulaire taillé très oblique- ment , de façon à rendre cet os extérieurement beaucoup plus grand que l’espace dans lequel il se trouve comme enchässé. La voùte du crâne ne présente rien de remarquable; mais, à sa base, on voit une multitude de trous qui servent au passage des vaisseaux sanguins du cerveau et des nerfs qui naissent de l’encéphale ; un de ces trous, creusé dans l’os occipital et beau- coup plus grand que tous les autres , est traversé par la moelle épinière, et il existe près de son bord et de chaque côté une apophyse large et convexe appelée condyle, qui sert à larti- culation de la tête sur la colonne vertébrale. La tête est presque en équilibre sur cette espèce de pivot, mais cependant la por- tion située au-devant de l'articulation est plus volumineuse que celle qui est située en arrière et qui tend à faire contre-poids à la première; aussi les muscles qui se portent de la colonne vertébrale à la partie postérieure de la tête, et qui servent à redresser celle-ci, sont-ils bien plus nombreux et plus puissans que les muscles fléchisseurs placés de la même manière au- devant de la colonne; et lorsque les premiers se relâchent, comme cela arrive dans le sommeil , la tête tend-elle ordinai- rement à retomber en avant et à s'appuyer sur la poitrine. Sur les côtés de la base du crâne on remarque encore deux apophyses très grosses, appelées mastoïdes, auxquelles s’in- sèrent deux muscles qui descendent obliquement vers la poi- irine à la partie antérieure du cou, et qui servent à faire tour- ner la tête sur la colonne vertébrale (1). Enfin, immédiatement en avant de ces apophyses, se trouve l’ouverture du conduit auditifexterne, qui, de même que les diverses parties de loreille moyenne et de l’oreille interne, est creusée dans une portion de los temporal appelé rocher à cause de sa grande dureté. La fuce est formée par la réunion de quatorze os de formes très diverses , et présente cinq grandes cavités destinées à loger les organes de la vue, de l’odorat et du goût. Tous ces os, ex- cepté celui de la mâchoire inférieure, sont complètement im- mobiles et s’articulent entre eux ou avec les os du crâne. Les (&) On les nomme , à raison de leurs attaches #uscles sterno-mastoïdiens. Face. 188 ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. deux principaux sont les os maxèllaires superieurs(ms), qui con- stituent la presque totalité de la mâchoire supérieure, et qui s’ar- ticulent avec le frontal, de facon à concourir aussi à la forma- tion des orbites et des fosses nasales; en dehors, ils s’articulent avec les os jugaux Ou os des pommettes (j), et en arrière avecles os palatins, qui à leur tour se joignent au sphénoïde. Les orbites, comme nous l'avons déjà vu ailleurs, sont deux fosses coniques dont la base est dirigée en avant; la voûte de ces cavités est formée par une portion de los frontal et leur plancher par les maxillaires supérieures; en dedans, c’est l’eth- moïde et un petit os appelé /acrymal, qui complètent leurs pa- rois, et en dehors, elles sont formées par l'os jugal et le sphé- noïde , qui en occupe aussi le fond où se trouvent les ouvertures servant au passage du nerf optique et des autres branches ner- veuses appartenant à l'appareil de Ta vision. A la voûte de l'orbite on remarque une dépression qui loge la glande lacry- male, et à sa paroi externe se trouve un canal qui descend verticalement dans les fosses nasales et livre passage aux larmes. Le nez est formé en majeure partie de cartilages ; aussi dans le squelette l'ouverture antérieure des fosses nasales (n a) est-elle très grande, et la portion osseuse du nez, formée par deux petits os , appelés nasaux (2), est-elle peu saïllante. Les fosses nasales sont très étendues ; supérieurement , elles sont creusées dans l’os ethmoïde , dont tout l’intérieur est rempli de cellules ; inférieu- rement , elles sont séparées de la bouche par la voûte du palais, qui est formé par les os maxillaires supérieurs et par les deux os palatins; enfin, elles sont séparées sur la ligne médiane par une cloison verticale formée supérieurement par une lame de leth- moiïde,etinférieurement par un os particulier nommé vomer.On trouve encore, dans l’intérieur de ces fosses, deux os distincts qui forment les cornets inférieurs, et on y remarque l’ouverture des sinus frontaux, sphénoïdaux et maxillaires, cavités plus ou moins vastes creusées dans l'épaisseur des os dont elles portent les noms. C’est dans los maxillaire supérieur que sont implantées toutes les dents de la mâchoire supérieure; dans le jeune âge, il est formé de plusieurs pièces, et chez la plupart des animaux, on en distingue toujours une portion antérieure qu'on appelle Pos intermaxillaire. La mâchoire inférieure de l’homme ne se compose que d’un seul os , car les deux moitiés dont elle est formée chez un grand nombre d'animaux se soudent entre elles de très bonne heure et se confondent complètement. Cet os, appelé maxillaire infé- rieur, a une ressemblance grossière avec un fer à cheval, dont les extrémités coudées s’éleveraient beaucoup. Il s'articule avec DES MOUVEMENS. 189 les os temporaux par un condyle saillant situé à chacune de ses extrénités , et reçu dans une cavité nommée glenoïdale (c) ; enfin au-devänt de ces condyles s'élève, de chaque côté, une apo- physe nommée coronoïde, qui sert à l’insertion de un des muscles relevexrs de la mâchoire(le muscle temporal); ces muscles (#)se fixent tous vers l'angle de la mâchoire et à peu de distance du point d'appui sur lequel ce levier se meut. Dans la plupart des Cas c'est, au contraire, vers la partie antérieure des mâchoires qu'est appliquée la résistance qne ce même levier doit vaincre pendant la mastication ; aussi ces muscles > quoique très puis- sans, ne peuvent-ils alors produire que des effets très faibles, et, pour écraser entre les dents les corps les plus durs > est-On obligé Fig. 22. de porter ceux-ci aussi loin que possible z t vers le fond de la bouche, de manière à : raccourcir le bras de levier de la résistance etàle rendre égal ou même plus court que celui dela puissance.Ces muscles, se fixent à la face interne aussi bien qu’à la face ex- terne de la mâchoire, et vont prendre leur point d'appui sur les côtés de la tête jus- ec qu’au haut des tempes, en passant entre les parois latérales du crâne etune arcade osseuse nommée zyg0- matique (2) qui s’étend de la pommette jusqu'à l'oreille , et qui sertaussi à insertion de ces organes. La tête, comme on a pu le voir, se compose essentiellement de vingt-deux os; mais leur nombre est réellement plus considérable; car, dans l’intérieur de chaque os temporal > il existe , ainsi que nous l'avons dit ailleurs, quatre osselets appartenant à Pappa- reil de l’ouïe , et on peut aussi considérer comme une dépen- dance de la tête los Ayoïde , qui est suspendu aux os temporaux par des ligamens , et qui est placé en travers de la partie supé- rieure du cou , où il sert à porter la langue et à soutenir le larynx. Les vertèbres cervicales ne s’articulent qu'entre elles ou avec la tête et la première vertèbre du dos ; mais chacune des douze vertèbres dorsales porte une paire d’arceaux très longs et aplatis, qui se recourbent autour du tronc , de façon à former une sorte de cage osseuse destinée à loger le cœur et les poumons. Ces ar- Ceaux sont les côtes, dont le nombre est par conséquent de douze de chaque côté du corps ; leur extrémité postérieure est articulée avec le corps de la vertèbre correspondante et avec lune des apophyses transverses ; Pauire extrémité se continue avec une tige cartilagineuse, qui, chez certains animaux (les oi- SEaUX, par exemple), est toujours ossifiée et porte alors le nom de côte sternabe. Les cartilages des sept premières paires de côtes, que Thorax. Côtes. Membres supérieurs. Omoplate. Clavicule. Muscles de l'épaule, 190 ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. l’on appelle les vraies côtes , viennent se joindre au sternum , os impair qui occupe en avant la ligne médiane du corps et sert à compléter les parois de la cavité thoracique; les Gnq der- nières paires de côtes n'arrivent pas au sternum, mais se pignent aux Cartilages des côtes précédentes; onles distingue sous nom de fausses côtes (voy. fig. 17, p. 66). C'est sur la cage osseuse dont nous venons de parler, que se fixent les membres superieurs. On distingue , dans chacun de ces appendices , une portion basilaire , qui peut être compa- rée à un soc, sur lequel s’insère la portion essentiellement mo- bile du membre , celle qui représente un levier, auquel la pre- mière sert de point d'appui. Cette portion basilaire se compose de deux os, lomoplate et la clavicule. L’omoplate esi un grand os plat, qui occupe la partie supé- rieure et externe du dos: sa forme est à-peu-près triangulaire , et il présente en haut et en dehors une cavité articulaire assez large , mais peu profonde , destinée à recevoir l'extrémité de los du bras (fosse glénoïdale de lomoplate). A son bord supé- rieur , on remarque une apophyse saillante , appelée cora- coïde, et sur sa face externe se trouve une crète horizon- tale très saillante , qui vient se terminer au-dessus de lParticu- lation de l'épaule, en formant une apophyse , nommée acro- mion , à l'extrémité de laquelle s'articule la e/avieule. Ce dernier os est grèle et cylindrique : il est placé en travers à la partie su- périeure de la poitrine , et s'étend , comme un arc-boutant , du sternum à l’omoplate. Son principal usage est de maintenir les épaules écartées : aussi se brise-t-il très souvent, lorsque , dans les chutes sur le côté, cette partie est poussée avec violence vers le sternnm, et, chez les animaux qui doivent porter avec force le bras vers la poitrine (comme les oiseaux le font pendant le vol), cet os est-il très développé, tandis qu’il manque complè- tement chez ceux qui n’exécutent jamais de mouvemens sem- blables et qui ne meuvent leurs membres que longitudinalement, comme les chevaux, etc. Des muscles nombreux fixent lomoplate contre les côtes. L’un des principaux d’entre eux est le grand dentele , qui se porte de la partie antérieure du thorax au bord postérieur de cet os, en passant entre lui et les côtes. Chez l’homme, il est peu développé ; mais, chez les animaux qui marchent à quatre pattes , il est extrêmement fort et constitue avec celui du côté opposé une espèce de sangle qui supporte tout le poids du tronc, et qui empêche les omoplates de remonter vers la colonne ver- tébrale. Dans l’homme, le muscle trapeze , quis’étend dela partie cervicale de la colonne vertébrale à lomoplate, a aussi des DES MOUVEMENS. 191 fonetions très importantes; car il sert à relever l'épaule et à sou- tenir le poids de tout le membre thoracique : aussi est-il très développé. La portion du membre thoracique qui constitue le levier au- quel Pomoplate sert de point d'appui, se compose du bras, de l’avant-bras et de la main. Le bras est formé par un seul os, long et cylindrique, nommé humérus. Son extrémité supérieure (ou téte) est grosse , arrondie et articuléé avec la cavité glénoïde de l’omoplate , dans laquelle elle peut rouler dans tous les sens. Les museles destinés à mou- voir l’humérus s’insèrent au tiers supérieur de cet os et s’atta- chent par leur extrémité opposée à l'omoplate ou au thorax. Les trois principaux sont le grand pectoral , qui porte le bras en dedans, en même temps qu'il Pabaisse ; le grand dorsal, qui le porte en arrière et en bas; et le deltoïde, qui le relève. L’extrémité inférieure de lhumérus est élargie et a la forme d’une poulie , sur laquelle Pavant-bras se meut comme sur une charnière. Deux os longs, placés parallèlement , forment cette portion du membre thoracique : c’est le cubitus en dedans et le radèius en dehors. Ils sont unis entre eux par des ligamens et par une cloison aponévrotique , qui s'étend de l’un à l’autre dans toute leur longueur ; mais cependant ils sont mobiles, et le radius, qui porte à son extrémité la main , peut tourner sur le cubitus , qui lui sert de soutien. D’après les usages différens de ces deux os , on peut prévoir quelles doivent être les principales différences de leur forme générale. Le cubitus , pour s’articuler d’une manière solide avec lhumérus, doit présenter à son extré- mité supérieure une certaine grosseur et une surface articulaire étendue , tandis qu’à son extrémité inférieure , où il doit servir de pivot au radius , il doit être grèle et arrondi. Le radius au contraire doit être , pour la même raison , grèle à son extrémité supérieure et très large à son extrémité inférieure, à laquelle est suspendue la main : c’est effectivement ce qui a lieu , et on re- marque aussi que ces deux os ne se touchent que parleurs deux extrémités , ce qui rend plus faciles les mouvemens de rotation du radius sur le cubitus. Le cubitus, qui entraine avec lui le radius, ne peut se mouvoir sur lhumérus que dans un sens : il n’exécute que des mouve- mens de flexion et d’extension, et, dans ces derniers , il ne peut former avec l’humérus qu'une ligne droite; car il présente au-delà de sa surface articulaire une apopñyse , nommée o/e- crane , qui s’appuie alors sur l’humérus , et oppose ainsi un ob- stacle invincible à toute extension ultérieure. Les muscles extenseurs et fléchisseurs de Pavant-bras s'étendent de Pépaule Humérus. Cabitus et radius. Main. Carpe. Métacarpe. Phalanges. 192 ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. ou de la partie supérieure de l’humérus à la partie supérieure du cubitus : il en résulte qu’ils sont disposés d’une manière fa- vorable à la rapidité des mouvemens de l’avant-bras , mais très défavorable au déploiement d’une grande force ; car le bras de levier de la puissance, représenté par l’espace compris entre l'articulation du coude et leur insertion est très court, tandis que le bras de levier de la résistance, qui est égal à toute la longueur du membre, à partir de la même articulation ; est au contraire très considérable. Les mouvemens de rotation du radius et de la main sur le cubitus sont effectués par des muscles qui sont situés à l’avant- bras et qui se portent obliquement de extrémité de lhumérus ou du cubitus à l’une et à l’autre de ces parties. La main se divise en trois portions, le carpe , le métacarpe et les doigis. Le carpe ou poignet est formé par deux rangées de petits os courts, unis très intimement entre eux , de façon que Pensemble de cette partie jouit de quelque mobilité, quoique chacun des os dont elle se compose ne se déplace qu’à peine, disposition qui est de nature à donner à leurs articulalions une solidité très grande. On en compte huit. Quatre de ces os , savoir: le scaphoïde, le semi-lunaire, le pyramidal et le pisiforme , composeni la pre- mière rangée ; les quatre autres , que l’on nomme trapeze , trape- zoide, grand os et os crochu , en forment la seconde. Il est à re- marquer que ces divers os sont disposés de façon à protéger les vaisseaux et les nerfs qui se rendent de l’avant-bras à la main ; ils forment à cet effet avec des ligamens un canal qui est tra- versé par ces organes et qui peut supporter, sans s’aplatir, la pression la plus forte. | Le meétacarpe se compose d’une rangée de petits os longs , pla- cés parallèlement entre eux et en nombre égal à celui des doigts, avec lesquels ils s’articulent par leur extrémité. Quatre de ces os sont unis entre eux par leurs deux bouts, et sont à peine mobiles ; mais le cinquième , qui porte le pouce, ne s’ar- ticule qu'avec le carpe et se meut librement sur celui-ci. Enfin les doigts sont formés chacun par une série de petits os longs, joints bout à bout et appelés phalanges. Le pouce n’en présente que deux; mais tous les autres doigts en ont trois. La der- nière phalange, que l’on appelle aussi phalangette, porte longle. Les doigts sont tous très mobiles et peuvent se mouvoir indépen- damment les uns des autres. Leurs muscles fléchisseurs et exten- seurs forment la majeure partie de la masse charnue de lavant- bras, et se terminent par des tendons exitrèmement longs et grèles , dont les uns se fixent aux premières phalanges , les autres aux phalangettes. DES MOUVEMENS. 193 Lorsqu'on considère ensemble des membres thoraciques , on remarque que les divers leviers, joints bout à bout pour les former, en progressivement de longueur. Ainsi le bras est plus long que l’avant-bras ; celui-ci est plus long que le poi- gnet, et chacune des phalanges est plus courte que celle qui la précède. Or, l'utilité de cette disposition est facile à comprendre. Les articulations nombreuses et rapprochées , que l’on voit vers l'extrémité du membre , permettent à celui-ci de varier sa forme de mille manières et de l’accommoder à celle du corps qu'il doit saisir ; tandisque les leviers allongés, formés par le braset l’avant- bras , nous permettent de porter rapidement la main à d'assez grandes distances. Ce sont principalement les mouvemens de l’'humérus sur Pomoplate , qui déterminent la directien générale du membre ; larticulation du coude a surtout pour usage de per- . mettre à celui-ci de-s’allonger ou de se raccourcir. La structure des membres inférieurs a la plus grande analogie Membresin- avec celle des membres thoraciques , et les principales diffé- férieurs. rences qu’on y remarque sont celles nécessaires pour leur donner plus &e solidité, aux dépens de leur mobilité , et pour en faire, au lieu d'organes de préhension , des organes de locomo- tion. On y distingue aussi une portion basilaire , qui est le repré- sentant de l'épaule, et qu’on nomme kanche,et un levier articulé formé de trois parties principales, la cüisse , la jambe et le pied , qui répondent au bras , à Pavant-bras et à la main. La hanche ou portion basilaire du membre abdominal est Os iliaque. formée par un grand os plat:, nommé os iliague (du mot latin ilia, flanc) ou os coxui (du mot cora, qui en grec signifie hanche). Cet os résulte de la soudure de trois pièces principales , toujours distinctes dans le jeune âge, que l’on peut comparer au corps de l’omoplate , à l’apophyse coracoïde de cet os, et à la clavicule. Les os iliaques ne trouvent point, comme les os de l'épaule, de côtes et de sternum , pour s’y appuyer ; étant destinés à soutenir tout le poids du corps, ils doivent cependant être fixés de la manière la plus solide au tronc : aussi les voit-on s’articuler en arrière avec la portion de la colonne vertébrale , appelée le sa- crum , et en avant se réunir entre eux , en formant une arcade, nommée pubis. Ils sont complètement immobiles , et il résulte de l’union de ces deux os entre eux et avec le sacrum, une large ceinture osseuse , qui termine inférieurement l’abäomen, et qui , à cause de sa forme évasée , est appelée bassin (fig. 52, P. 183). Cette espèce d’anneau est bouché inférieurement par des muscles et livre passage à l'intestin rectum et aux organes génito-urinaires. Sur les côtes et en dehors, on remarque sur chaque os iliaque une cavité articulaire , à-peu-près hémisphé- rique, qui sert à loger la tête de l’os de la cuisse. Enfin la plupart 13 Fémur. Tibia, pé- roné etrotule. Pied. Tarse . 194 ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. des muscles servant à mouvoir la cuisse et la jambe prennent insertion sur le bassin , et les muscles , qui cloisonnent , comme nous l’avons vu ailleurs, la cavité abdominale , s’y fixent pour s'étendre de là au thorax. La cuisse , comme le bras, ne se compose que d’un seul os, que l’on nomme fémur. Son extrémité supérieure est coudée en dedans, ei sa tête , qui est arrondie, est séparée du corps de l’os par un rétrécissement, appelé co du fémur. Au bas de ce col et dans le point où il se joint au corps de los , en formant un angle ouvert , on remarque plusieurs grosses tubérosités, qui peuvent être senties à travers la peau , et qui servent à l'insertion des principaux muscles moteurs de la cuisse ; enfin son extrémité inférieure est très grosse et présente deux condyles comprimés la- téralement etarrondies d'avant en arrière, quiglissent sur la sur- face articulaire du principal os de la jambe et ne permettent à celui-ci que de se ployer en arrière ou de s'étendre, tandis que le fémur lui-même peut se mouvoir sur le bassin dans tous les sens. La jambe diffère davantage de lavant-bras. Outre le perone et le tibia, qui sont les deux os principaux dont cette partie du membre se compose, comme l’avant-bras se compose du cu- bitus et du radius, on trouve au-devant du genou un troisième os appelé rotule, qui peut être considéré comme l’analogue de lapophyse olécrane du cubitus, et qui sert principalement à éloigner du genou le tendon des muscles extenseurs de la jambe et à rendre son insertion au tibia plus oblique, dispo- sition qui, ainsi que nous l'avons déjà vu, doit tendre à aug- menter la puissance de son action. Le pied ne devant pas exécuter des mouvemens de rotation comme la main, et de- vant, pour soutenir tout le poids du corps, présenter dans son articulation beaucoup de solidité , les deux os de la jambe ne sont pas mobiles lun sur l’autre, et celui d’entre eux qui s'articule avec le fémur et qui représente le cubitus (le tibia), est aussi celui qui porte le pied à son extrémité opposée. Le péroné , qui est grèle et situé du côté externe du tibia, ne sert, pour ainsi dire, qu’à maintenir le pied dans sa position naturelle et à l'empêcher de tourner en dedans. Son extrémité supérieure est appliquée contre la tête du tibia, et son extrémité inférieure constitue la malléole externe. Le pied se compose , ainsi que la main , de trois parties prin- cipales, savoir : le iarse, le métatarse et les doigts. Il y a sept os au tarse , et son articulation avec la jambe ne se fait que par l’un d’entre eux, l’astragale, qui s'élève au-dessus des autres et présente une tête en forme de poulie, destinée à s’em- boiter dans la cavité formée par la surface articulaire du tibia et DES MOUVEMENS. 195 les deux malléoles (1). L’astragale repose sur le calcaneum, qui se prolonge beaucoup plus loin en arrière, et constitue le talon; enfin un troisième os, appelé scaphoïde , termine la première rangée des os du tarse , et la seconde rangée se compose , comme à la main, de quatre petits os, dont trois ont reçu le nom d'os cuneiformes , et le quatrième, placé en dedans , est appelé os cuboïde. Les os du métatarse , au nombre de cinq, ressemblent exacte- ment à ceux du métacarpe : seulement ils sont plus forts et moins mobiles, surtout l’interne, qui est disposé comme les autres. Il en est de même pour les orteils ; on y compte le même nombre de phalanges qu'aux doigts de la main : mais ces os sont plus courts et beaucoup moins mobiles. Le gros orteil n’est pas détaché des autres , et ne peut leur être opposé , comme le pouce s’oppose aux autres doigts. Du côté interne du pied, les os du tarse et du métatarse forment une espèce de voûte , destinée à loger et à protéger les nerfs et les vaisseaux qui descendent de la jambe vers les orteils. Lorsque cette disposition n’existe pas , et que la plante du pied est plate, comme cela arrive quelquefois , ces nerfs sont com- primés par le poids du corps, et la marche ne peut être conti- nuée long-temps sans douleur. Du reste , le pied pose sur le sol dans toute son étendue , et forme une base de sustention large et solide ; il ne peut se mouvoir sur la jambe que dans le sens de sa longueur , et les muscles , servant à cet usage , entourent le tibia et le péroné. Les extenseurs du pied , qui forment la saillie du mollet , se fixent au calcaneum par un gros tendon , appelé tendon d'Achille, et sont disposés d’une manière favorable à leur action ; car leur insertion a lieu presque à angle droit, et se trouve plus éloignée du point d’appui que ne Pest la résistance qu'ils doivent vainere lorsque le poids du corps, pressant sur l’as- iragale , est soulevé par le pied. Tous les mammifères , les oiseaux, les reptiles et les poissons Métatarse. Phalanges. Muscles de la jambe. Animaux ont un squeletie intérieur plus ou moins semblable à celui de ;,antun sque- l’homme , composé à-peu-près des mêmes os, et mu également lette inté- , po P P , : 5 va par des muscles placés entre cette charpente solide et lenve- "tr: loppe tégumentaire. C’est ce squelette qui donne à leur corps sa forme générale, et c’est de sa disposition et de l’action des muscles fixés à ses diverses parties que dépendent les attitudes, aussi bien que les mouvemens de ces animaux. Un petit nombre de ces êtres posent habituellement sur le (1) La malléole interne est une apophyse du tibia ; l’externe est formée par le péroné. 13. Station. 196 ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. sol par toute la longueur de leur corps et ne se déplacent « que par les ondulations de leur tronc; mais les autres sont ordi- nairement soutenus sur leurs membres, et on donne le nom de station à cet état dans lequel un animal se tient de la sorte sur ie sol, dressé sur ses jambes. Pour que les membres puissent rester fermes et soutenir ainsi le corps, il fant que leurs muscles extenseurs se maintiennent contractés , car, sans cela, ces organes fléchiraient sous le poids qu’ils supportent eten détermineraient la chute. Nous avons déjà vu que les muscles se fatiguent d'autant plus vite que chacune de leurs contractions dure plus long-temps; aussi, chez la plupart des animaux, la station est-elle à la longue plus fatigante que la marche, pendant laquelle les muscles extenseurs et fléchisseurs se relaient mutuellement. ‘ette condition n’est pas la seule qui soit indispensable à la station ; pour que le corps reste debout sur ses membres ainsi raidis, il faut qu’il soit en équilibre. L'équilibre s'établit non-seulement lorsqu'un corps pesant appuie sur un objet résistant par toute l’étendue de sa surface la plus large; mais aussi, lorsqu'il est placé de telle façon que , si une partie de sa masse s’abaissait vers la terre une partie opposée, également pesante , s’éleverait d'autant; le poids d’une partie sert alors à contrebalancer celle de l’autre, et on appehHe centre de gravite le point autour duquel toutes ces parties se font réciproquement équilibre, et qu’il suffit de soute- nir, pour maintenir en place la masse entière. Or, pour soutenir le centre de gravité , il suffit que la base de sustention (c’est-à- dire l’espace eccupé par les points par lesquels la masse s’appuie sur un objet résistant ou celui compris entre ces points), soit si- tuée verticalement au-dessous de lui. Pour que le corps d’un animal reste en équilibre sur ses pattes , il faut par conséquent que la verticale, passant par son centre de gravité , tombe dans les limites de l’espace que les pieds laissent entre eux ou recouvrent elles-mêmes, et plus cette base de sustentation sera large par rapport à la hau- teur à laquelle se trouve le centre de gravité , plus son équi- libre sera stable, car plus aussi il pourra être déplacé sans que la ligne de gravité, dont nous venons de parler, cesse de tomber dans les limites de cette base. Il est aussi à noter que plus l'équilibre sera difficile à conserver, plus la contraction muscu- laire , nécessaire pour la maintenir, devra ètre intense , et plus la position de l'animal sera fatigante. D’après cela, on peut voir que, lorsqu'un animal pose à-la- fois sur ses quatre membres , la station devra être en général plus ferme , plus solide et moins fatigante que lorsqu'il ne pose DES MOUVEMENS. 197 que sur deux , et que, dans ce dernier cas , il sera encore dans un état d'équilibre plus stable que lorsqu'il ne pose que sur une seule jambe ar l'étendue de la base de sustentation deviendra ainsi de plus en plus étroite. Quand un animal se tient sur ses quatre pieds, l'espace compris entre eux est très considérable et ne peut être que peu modifié par l'étendue plus ou moins grande Fig. 54. Fig. 58. de la surface de ces organes. Les rendre très larges aurait donc augmenté leur poids, sansajouter véritablement à la solidité de la base de sustentation : aussi, chez la plupart des quadrupèdes , les membres ne touchent-ils le sol que par une extrémité à peine dilatée, et voit-on le nombre des doigts diminuer de plus en plus, sans nuire à ces organes Comme instrumens de locomotion : le pied du cerf et celui du cheval nous en offrent la preuve (fig. 53 et 54); mais , lorsque l'animal ne pose que sur deux de ses pieds, quel que soit leur écartement, la base de sustentation ne peutaŸoir de solidité d'avant en arrière qu'autant que ces organes tou- chent le sol dans une étendue considérable, comme cela a lieu pour le pied de l’homme ; et , lorsqu'un animal se tient facile- ment sur une seule patte , ainsi que le font les oiseaux, il faut que la nature ait donné à ses pieds encore plus de largeur aussi bien que de longueur. Pour qu’un animal puisse se mettre en équilibre sur une seule de ses jambes, il faut aussi que le pied sur lequel il pose se place verticalement au-dessous du centre de gravité de son corps, et que ses muscles soient disposés de façon à lui permettre de maintenir alors ce membre inflexible etimmobile. L'homme y parvient ; car le centre de gravité de son corps se trouve vers le milieu de son bassin , et, en se plaçant dans la position verti- cale , il lui suffit de se pencher un peu du côté qui ne pose pas, pour que la ligne de gravité tombe sur la plante du pied du côté opposé; mais , pour la plupart des quadrupèdes, la chose est impraticable. La plupart de ces derniers animaux ne peuvent même se lenir dressés sur leurs pattes postérieures, à Cause de la direction de ces membres, relativement au tronc; et, s'ils y parvien- Locomotion. 198 ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. nent pour un instant, il leur est impossible de maintenir l'équilibre, parce que leur base de sustention est très étroite, le centre de gravité de leur corps est placé très haut ( vers la poitrine), et les muscles qui servent à leur faire prendre cette attitude, sont obligés de se contracter avec une violence qui nécessite un prompt repos. Pour l’homme et un petit nombre d’autres mammifères , la station verticale sur les deux membres abdominaux, est au contraire plus ou moins facile; car ces membres peuvent aisément se placer dans la direction de l’axe du corps, le centre de gravité est situé très bas, et la base de sustention , formée par les pieds, est assez large. Chez l’homme surtout , cette attitude est rendue solide par la largeur du bas- sin , la forme des pieds et d’autres particularités d'organisation dont nous aurons à parler par la suite. Dans la station verticale , les muscles de la partie postérieure du cou se contractent pour maintenir la tête en équilibre sur la colonne vertébrale et le, muscles extenseurs de cette colonne entrent aussi en action pour l'empêcher de céder sous le poids des membres thoraciques et des viscères du tronc, qui tendent à les courber en avant. Tout le poids du corps se transmet ainsi par la colonne vertébrale au bassin et du bassin au fémur. Abandonnés à eux-mêmes, ces derniers os se ploieraient sur le bassin , et le tronc itomberait en avant; mais la contraction de leurs muscles extenseurs les maintiennent étendus. Les muscles extenseurs de la jambe empêchent en même temps les genoux de fléchir , et les muscles extenseurs du pied maintiennent la jambe dans la position verticale, de façon que le poids du corps se transmet de la cuisse à la jambe , de la jambe au pied et du pied au sol. La position assise est moins fatigante que la station, parce que le poids du corps se transmettant alors directement du bas- sin à la base de sustention, il n’est pas nécessaire que les muscles exlenseurs des membres abdominaux se contractent pour main- tenir léquilibre. Enfin, lorsque l’homme est couché sur le dos ou le ventre, le poids de chaque portion mobile de son corps se transmet directement au sol , et par conséquent , pour se maintenir de la sorte, il n’a besoin de contracter aucun de ses muscles. Les mouvemens progressifs par lesquels l’homme et les ani- maux se transportent d’un lieu à un autre exigentqu’une vitesse déterminéesoitimprimée, dans une certaine direction, au centre de gravité de leur corps. Cette impulsion lui est donnée par le déploiement d’un certain nombre d’articulations plus ou moins fléchies , et dont la position est telle que , du côté du centre de gravité, leur déploiement est libre , tandis que, du côté opposé, DES MOUVEMENS. 199 il est géné ou mème impossible, de facon que la totalité ou la plus grande partie du mouvement produit a lieu dans la première de ces directions. Il se passe alors la même chose que dans un ressort à deux branches, dont lune des extrémités est appuyée contre un obstacle résistant , et dont les deux branches, après avoir été rapprochées par une force extérieure , sont rendues à leur liberté primitive : à raison de leur élasticité , elles tendront à s’écarter également jusqu’à ce qu’elles soient reve- nues dans la position qu’elles avaient avant que d’être compri- mées ; mais , celle appuyée contre lobstacle ne pouvant le for- cer, le mouvement se fera en entier dans le sens opposé , et le centre de gravité du ressort s’écartera de cet obstacle avec une vitesse plus ou moins grande. Dans le corps des animaux , les muscles fléchisseurs de la partie employée dans chaque sorte de mouvement représentent la force qui comprime le ressort, les muscles extenseurs représentent lélasticité qui tend à en écar- ter les branches, et la résistance du sol ou celle du fluide , dans lequel ces êtres se meuvent représente l’obstacle qui s'oppose à l'extension de l’une de ses branches. La marche est un mouvement sur un sol fixe, dans lequel le centre de gravité est mu alternativement par une partie des organes locomoteurs et soutenu par les autres , sans que jamais le corps ne cesse complètement de reposer sur le sol. Cette der- nière circonstance la distingue du saut et de la course, mouve- mens dans lesquels tout le corps quitte momentanément le sof, et s’élanceen Pair. Dans la marche sur deux pieds , chez l'homme et les autres animaux à qui ce mode de locomotion est possible, lun des pieds estporté en avant, tandis que l’autre s’étend sur la jambe; et, comme ce dernier membre appuie sur un sol résistant, son allongement déplace le bassin et projette en avant tout le corps; le bassin tourne en même temps sur le fémur du côté opposé qui le soutient, et la jambe qui était d’abord restée en arrière se fléchit, se porte en avant de l’autre, puis se re dresse et sert à son tour à soutenir le corps pendant que l’autre membre , en s'étendant, donne une nouvelle impulsion au centre de gravité. A l’aide de ces mouvemens alternatifs d'extension et de fiexion, chaque jambe porte à son tour le poids du corps, comme elle le ferait dans la station sur un seul pied, et à chaque pas le centre de gravité est poussé en avant; mais on voit qu'il doit se porter en même temps alternativement à droite el à gau- che pour se trouver directement au-dessus de chacune de ses bases de sustention. La plupart des quadrupèdes, lorsqu'ils marchent, se servent principalement des pattes de derrière pour pousser leur corps Marche Natation et vol. 200 ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. en avant, et des pattes antérieures pour se soutenir dans la nou- velle position que chaque pas leur donne. Quand ces mouve- mens se font à-la-fois par les deux pieds de chaque paire, l’ani- mal se trouve, pendant un instant, suspendu en entier au-dessus du sol, et on donne à ce mode de locomotion le nom de galop. Dans la marche, deux pieds seulement contribuent à la forma- tion de chaque pas, un de devant et un de derrière; en général, ce sont ceux des deux côtés opposés qui se lèvent simultané- ment, d’autres fois ceux du même côté; cette dernière allure est connue sous le nom d’amble. Le saut se fait par un déploiement subit des diverses articula- tions des membres servant à lalocomotion quiauparavantavaient été fléchis plus que de coutume. L’étendue de l’espace que lani- mal parcourt ainsi dans l’air dépend principalement de la vitesse qui est imprimée à son corps au moment du départ, et cette vitesse, à son tour, dépend de la longueur proportionnelle des os de ces membres, et de la force de leurs muscles ; aussi les ani- maux qui sautent le mieux sont-ils ceux qui ont les cuisses et les jambes de derrière les plus longues et les plus musculeuses. La natation et le vol sont des mouvemens analogues à ceux du saut, mais qui ont lieu dans des fluides dont la résistance remplace, jusqu’à un certain point, celle du sol äans les phéno- mènes dont nous venons d'exposer le mécanisme. Les membres qui, en s’étendant et en se reployant en ar- rière, doivent pousser le corps en avant, s’appuient dans ce cas sur l’eau ou sur l'air, et tendent à refouler ces fluides avec une vitesse plus ou moins grande; mais si la résistance que Pair ou que l’eau présente dans ce sens est supérieure à celle qui s’oppose au mouvement de l’animal lui-même en sens contraire, ces fluides fourniront au membre un point d'appui, et le mouvement pro- duit sera le même que si ce ressort touchait, par son extrémité postérieure, un obstacle invincible, mais ne se débandait qu’a- vec une force égale à la différence existante entre la vitesse qu’il déploie et celle qu’il imprime au fluide ambiant en le refou- lant en arrière. Or, moins le fluide dans lequel Panimal se meut est dense, moins le point d'appui qu’il lui fournira ainsi sera résistant, et plus la force nécessaire pour dépasser de vitesse le déplacement de ce point d’appui et pour pousser le corps en avant sera considérable; aussi le vol nécessite-t-il une puissance motrice bien plus grande que la natation, et l’un et l’autre de ces mouvemens ne pourraient être effectués avec la force qui suffit pour déterminer le saut sur une surface solide. Mais ce grand déploiement de force motrice n’est pas la seule condition nécessaire à la locomotion aérienne ou aquatique ; comme Pani- mal, qui est plongé dans un fluide , trouve de toutes partis une DE LA VOIX. 201 résistance égale, la vitesse qu’il aurait acquise en frappant en arrière ce fluide , serait bientôt perdue par celle qu’il serait obligé de déplacer en avant, sil ne pouvait diminuer considéra- blement la surface des organes locomoteurs immédiatement après s’en être servi pour donner le coup. C’est effectivement ce qui a lieu , et l’un des caractères de tout organe de vol ou même de natation est de pouvoir changer de forme et de présenter, dans la direction perpendiculaire à celle du mouvement qu’il produit, une surface alternativement très large et fort étroite. Quant à la structure des organes &e locomotion aérienne ou aquatique, nous aurons l’occasion d’en parler dans la suite de ces leçons; aussi ne nous y arrêterons-nous pas dans ce mo- ment: nous dirons seulement que chez les animaux supé- rieurs ce sont presque toujours les membres thoraciques qui servent uniquement au vol, et que leur transformation en ailes Fig. 55. a lieu, soit par lallongement extrême des doigts et l'existence d’une membrane qui s'étend entre ces appendices et se fixe aussi aux flancs (comme chez les chauves-souris | fig. 55}, ou bien par implantation de plumes longues et rai- des sur toute l'étendue du membre, qui devient alors long et étroit (comme chez les oiseaux ). Les membres abdominaux et thoraciques peuvent également Fig. 56. servir à la natation, et lorsqu'ils sont complètement transformés en nageoi- res , On remarque, en général , que leur partie terminale devient très large, et que la portion qui représente le bras et lavant-bras se raccourcit, de facon -que lPanalogue de la main parait naitre immédiatement du tronc : cela est surtout facile à constater chez les phoques (fig. 56) et les cétacés. \ DE LA VOIX. Pour terminer l’histoire des fonctions de relation, il nous reste encore à traiter de la production des sons, faculté qui, chez l’homme, est d’une importance extrême, car c’est d’elle que dépend la voix et la parole. | Chez les animaux les plus inférieurs , il n’y a aucune trace de Larynx. 202 ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. cette faculté, et chez les énsectes, le bruit monotone que Pon nomme le chant de ces petits êtres, ne résulte que du frotte- ment de leurs ailes ou de quelques, autres parties de eur en- veloppe tégumentaire les unes contre les autres; mais les ani- maux supérieurs peuvent presque tous faire entendre des sons plus ou moins variés, et la production de ceux-ci dépend du passage de lair dans une partie déterminée du conduit respira- toire, disposée de facon à faire vibrer ce fluide. Chez l’homme et chez les autres mammifères , ce phénomène a lieu dans la portion du conduit aérifère qui est située au haut du cou entre le pharynx et la trachée-artère, et appelée Zarynx (voy. fig. 16, a; p. 64; fig. 28, e, p. 87; et fig. 24, g, p. 88). En effet, une ouverture, faite à la trachée au-dessous de cet or- gane , en permettant à l'air expiré de.s’échapper au-dehors sans le traverser, empêche complètement la production des sons; on cite des exemples de personnes qui, ayant au cou une ou- verture semblable produite, soit par une blessure , soit par une maladie, perdirent aussitôt la voix, mais recouvraient la faculté de parler en mettant autour de leur cou une cravate serrée, de façon à boucher cette plaie et à forcer, par conséquent, l'air à suivre sa route ordinaire. D’un autre côté, une ouverture analogue ne détruit pas la voix lorsqu'elle est située au-dessus du larynx; d’où on peut conclure avec certitude que c’est dans cet organe qu’a lieu la production des sons. Fig. 57. (1) Le larynx est un tube large et court, qui l est suspendu à l’os hyoïde (2), et qui se conti- nueinférieurementavec la trachée-artère. Ses parois sont formées par diverses lames cartila- gineuses , désignées sous les noms de cartilage thyroïde (t), de cartilage cricoïde {e)et de carti- lages arythenoïdes; en avant on y remarque la saillie connue sous le nom vulgaire de pomme d’ Adam (a); et à l’intérieur, la membrane mu- queuse qui le tapisse, forme vers son milieu deux grands replis latéraux, dirigés d'avant en arrière , el disposés à-peu-près comme les lèvres d’une bou- tonnière. Ces replis sont appelés les cordes vocales Ou ligamens (1) Larynx de l’homme vu de profil ;—k os hyoïde ; — / corps de l'os hyoïde qui donne attache à la base de la langue ;—1 cartilage thyroïde ; —a saillie formée en avant par le cartilage thyroïde , et connue sous le nom vulgaire de pomme d'Adam : le cartilage thyroïde est uni à los hyoïde par une membrane ;—c car- tilage cricoïde ; — tr trachée artère ; — 0 paroi postérieure du larynx en rapport avec l’œsophage. pe © DE LA VOIX. 203 inférieurs de La glotte; ils sont assez épais; leur longueur est d'autant plus considérable que la partie antérieure du cartilage thy- roïde (ou pomme d'Adam) est plus saillante, et, à l’aide des contractions d’un petit musele logé dans leur épaisseur et des mouvemens des cartilages arythénoïdes auxquelsils sont fixés en arrière, ils peuvent se tendre et se rapprocher plus ou moins, de façon à agran- dir ou à diminuer l’espèce de fente (louver- ture de la glotte) qui les sépare. Un peu au- dessus des cordes vocales se trouvent deux autres replis ana- logues de la membrane muqueuse du larynx; on les nomme Fig. 59. (2) ligamens supérieurs de La glotte, et on appelle a a ventricules du larynx les deux enfoncemens t _, latéraux qui les séparent des ligamens infé- rieurs. L'espace compris entre ces quatre re- Fig. 28. (1) an + 4 2 { plis constitue ce que l’on nomme la géotte ; 2° —.— = « . PRE qu enfin on remarque encore , au-dessus de cette € ouverture,une espèce de languette fibro-car- 77 {rtilagineuse appelée épiglotte, qui est fixée par + sa base au-dessous de la racine de la langue, É et qui s’élève obliquement dans le pharynx, mais qui peutcependant s’abaisser et couvrir la glotte, comme nous l’avons déjà dit en traitant de la dégluti- lion ; cettesoupape est appelée epiglotte (fig. 58, e). Dans l’état ordinaire , l'air, expulsé des poumons, traverse librement le larynx , et n’y produit aucun son; mais , lorsque les muscles de cet organe se contractent et que le passage de l'air devient plus rapide, la voix se fait entendre. Une expé- rience , faite par Galien , montre la nécessité de ces contrac- tions pour la formation des sons. Il coupa sur des animaux vivans les nerfs, qui se rendentaux muscles du larynx (3); et cette opération, qui détermina la (1) Coupe verticale du larynx.— os hyoïde ;—+{ cartilage thyroïde ;—c, c car- tilage cricoïde ;—a cartilage arythénoïde ;— + ventricule de la glotte, formé par l’espace que laissent entre eux les cordes vocales et les ligamens supérieurs de la glotte ; — e épiglotte. (2) Larynx vu de face : le contour de la paroi intérieure est indiquée par les lignes 4,a,b,b; — li ligamens inférieurs de la glotte ou cordes vocales ;— 1s ligamens supérieurs. Les autres parties sont indiquées par les mêmes lettres que dans les figures précédentes. (3) Les nerfs paeumogastriques qui naissent de la partie latérale de la moelle allongée ct sortent du crâne pour descendre de chaque côté du cou ,et pénètrent 204 ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. paralysie de ces organes, entraina en même temps la perte de la voix. D’autres expériences prouvent en outre que c’est spécia- lement de l'action des ligamens de la glotte, que dépend la production des sons. Lorsqu'on coupe les replis supérieurs, on affaiblit considérablement la voix , et lorsqu’on coupe les replis inférieurs ou cordes vocales , on la détruit. Mécanisme La plupart des physiologistes regardent le larynx comme ES agissant dans la production de la voix de la même manière qu’un instrument à anche : ils pensent que, l’air expulsé des poumons écarte les lèvres de la glotie jusqu’à ce £que ces cordes élastiques reviennent sur elles-mêmes et ferment mo- mentanément le conduit respiratoire , pour s’écarter ensuite de nouveau, de façon à produire des mouvemens de vibration assez rapides pour donner naissance à des sons , à-peu-près de la même manière que les choses se passent lorsqu'on souffle dans lanche d’un hautbois. Mais , d’après les recherches récentes de M. Savart, il paraitrait que la production des sons vocaux ne dépend pas d’un mécanisme semblable à celui des instru- mens à anche , et a lieu de la même manière que dansles petits instrumens , dont les chasseurs se servent pour imiter le chant des oiseaux. Ces instrumens , nommés appauzx , sont ordinairement con- siruits en bois ou en métal, et consistent en un petit tuyau Cy- lindrique très court et fermé à chacune de ses bases par une lame mince, percé à son centre d’un trou. Pour en tirer des sons , le chasseur place l’appau entre ses dents et aspire Pair à travers les deux ouvertures, dont celui-ci est percé. Le courant, qui traverse ainsi l'instrument , entraine avec lui une partie de l'air contenu dans sa cavité, et celle-ci, étant raréfiée , cesse bientôt de faire équilibre à la pression de l’atmosphère , qui, en réagissant sur elle, la refoule et la comprime jusqu’à ce que, par sa propre élasticité et par l'influence du courant , elle su- bisse une nouvelle raréfaction , suivie d’une seconde condensa- tion et ainsi de suite. La petite masse d’air renfermée dans l’ap- pau entre ainsi en vibration , et donne naissance à des ondes sonores , qui se répandent dans latmosphère. En modé- rant ou en accélérant la rapidité du courant, on produit des sons plus graves ou plus aigus , et on les varie encore davan- tage ,en agrandissant ou en resserrani les ouvertures de linstru- ment , en variant sa forme , en rendant ses parois plus ou moins dans le thorax et dans l’abdomen, donnent naissance immédiatement après leur entrée dans la première de ces cavités à une branche qui remonte de chaque côté le long du cou et va se ramifier dans le larynx; on la nomme nerf recurrent à cause de la direction qu’elle suit. DE LA VOIX. 205 élastiques et en y adaptant des tubes de diverses longueurs. Il paraitrajt que c’estaussiau moyen de modifications sembla- bles du larynx que les sons produits par cet organe deviennent graves ou aigus. A mesure que la voix monte, les lèvres de la glotte se tendentet se resserrent davantage, de façon à diminuer de plus en plus létendue de l'ouverture qu’elles laissent entre elles. La contraction des fibres musculaires répandus autour des parois des ventricules du larynx et celle des muscles de Parrière- bouche donnent en même temps à toutes ces parties un degré de tension favorable au développement du son produit, eton observe que le larynx lui-même s'élève à mesure que les sons devien- nent plus aigus, circonstance qui s’explique d’après les lois de l’acoustique, car elle détermine le raccourcissement du conduit que les sons traversent pour arriver au-dehors , et l’on sait par- faitement bien que, dans nos instrumens de musique ordinaire, la longueur de ce conduit a la plus grande influence sur la ra- pidité des vibrations sonores ; quand on veut tirer de l’anche d’une clarinette ou d’un hautbois, par exemple, une suite de sons , on allonge ou on raccourcit le tube formé par le corps de l'instrument, en fermant ou en ouvrant les trous dont ses parois sont percées. L’intensité ou le volume de la voix dépend en partie de la force avec laquelle lair est expulsé des poumons, en partie de la fa- cilité avec laquelle les différentes parties du larynx entrent en vibration , et de l'étendue de la cavité dans laquelle les sons se produisent. La même personne ne peut pas faire entendre, avec une égale force, tous les sons que son larynx produit, parce que les diffé- rentes parties de son appareil vocal ne sont pas disposées d’une manière également favorable à leur production. Lorsqu'un homme est affaibli par la fatigue ou par la maladie, sa voix perd de son intensité, parce que les muscles qui chassent lair des poumons ne peuvent plus lexpulser avec leur force ordinaire. Enfin, c’est au volume plus considérable du larynx, chez l’homme, qu’on doit attribuer en partie la différence qui se re- marque dans la force de sa voix et celle de la voix d’une femme ; et c’est de l’exisiencede grandes cavités, en communication avec cet organe , que les singes hurleurs , et quelques autres animaux doivent la faculté de faire entendre à une distance immense leurs cris assourdissans. Le timbre de la voix parait tenir en partie aux propriétés phy- siques des ligamens de la glotte etdes parois du larynx ,eten partie à celle de la portion suivante du tuyau vocal. On sait, par expé- rience, que le timbre des instrumens de musique varie beau- Coup, suivant qu’ils sont construits en bois , en métal, etc.; et Voixacquise. Chant. 206 ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. on a remarqué une coïncidence entre certaines modifications de la voix humaine et l’endurcissement plus ou moins grand des cartilages du larynx. Chez les femmes et les enfans , dont la voix à un timbre particulier, les cartilages du larynx sont flexi- bles et n’ont que peu de dureté, tandis que chez les hommes, et chez les femmes dont la voix est masculine, le cartilage thyroïde est remarquable par sa force et par son ossification plus ou moins complète. La forme de l’ouverture extérieure de l'appareil vocal influe aussi sur le :imbre des sons produits. Lorsque les sons traversent les fosses nasales seulement , ils deviennent désagréables et nasillards ; quand la bouche est largement ouverte , la voix ac- quiert au contraire de la force et de l'éclat, et il paraïîtrait que le degré de tension du voile du palais et des autres parties de l’arrière-bouche exerce une influence non moins grande sur la manière dont les sonsse modulent. D’après ce que nous avons dit sur le mécanisme de la produc- tion des sons , on doit prévoir que le diapason de la voix doit dépendre en majeure partie de la longueur et de l'épaisseur des cordes vocales. La voix de l’homme, comme chacun le sait , est beaucoup plus grave que celle de la femme; aussi, chez l’homme, où le larynx fait, à la partie supérieure du cou, une saillie considérable , connue sous le nom vulgaire de pomme d'Adam, ces replis sont-ils beaucoup plus longs que chez la femme, où le diamètre antéropostérieur de cet organe est si petit , que l’émi- nence dont nous venons de parler se distingue à peine. Les sons produits par l'appareil vocal n’ont pas toujours le même caractère et se distinguent en cris , chant et voix ordi- naire. | Le cri est un son ordinairement aigu et désagréable , qui n’est que peu ou point modulé, et qui diffère principalement des autres sons vocaux par son timbre: c’est leseul que puissent former la plupart des animaux, et sous ce rapport , l’homme ne diffère de ces derniers que par l'effet de l'éducation. L’enfant qui vient de naïitre ne sait pousser que des cris,et, quandil est privé du sens de louïe, sa voix ne change pas; mais, lorsqu'il entend ce qui se passe autour de lui, il apprend de ses sem- blables à la moduler et à produire des sons d’une nature parti- culière. Cette soir acquise diffère du cri par son intensité et par son timbre; mais elle n’est formée de même que de sons dont l’o- reille ne distingue pas nettement les intervalles et les rapports harmoniques. Le chant, au contraire, se compose de sons ap- préciables où musicaux dont l’oreille compte , pour ainsi dire, le nombre relatif de vibrations. DE LA VOIX. 207 L'homme possède aussi la faculté de modifier, d’une manière particulière, les divers sons de sa voix, il peut articuler ces sons , et on Dune à cet acte le nom de prononciation. Les organes de la prononciation sont le pharynx, les fosses na- sales et les différentes parties de la bouche; et, suivant qu’ils agissent de telle ou de telle manière, le son produit par le larynx prend tel ou tel caractère, et constitue un son articulé parti- culier. On divise les sons articulés en deux grandes classes, les voyelles et les consonnes: les premières sont des sons permanens et sim- ples qui ne peuvent se confondre en s’alliant à d’autres, et pen- dant la production desquels l'appareil deda prononciation con- serve la méme disposition; les consonnes sont, au contraire, des sons articulés qu’il est impossible de prolonger comme des voyelles , et qui nécessitent, pour leur production, des mouve- mens particuliers de l'appareil de la prononciation , mouveémens à la suite desquels cet appareil prend nécessairement la dispo- sition à l’aide de laquelle il forme une voyelle; aussi les con- sonnes ne peuvent-elles être articulées qu’en y joignant un son de voyelle. On les distingue en consonnes labiales, dentales, nasales , etc., suivant que les mouvemens des lèvres, de la lan- gue , etc., jouent le principal rôle dans le mécanisme de leur prononciation. L'homme n’est pas le seul animal ayant la faculté d’articuler les sons et de prononcer ainsi des mots; mais il est le seul qui attache un sens aux mots qu’il prononce et à arrangement qw’il leur donne; lui seulement est doué de la parole. Articula- tions des sons. Création des animaux. 208 ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. DES FONCTIONS DE REPRODUCTION. Les divers phénomènes vitaux dont nous nous sommes occu- pés jusqu'ici avaient tous rapport à la conservation de la vie des animaux ou à leurs relations avec ce qui les entoure. Ceux dont il nous reste à parler sont d’un autre ordre ; car ils ont pour objet la multiplication des individus et la conservation des espèces. Nous n'avons encore étudié ces êtres que tout formés; maintenant nous allons rechercher quelle est leur origine et leur mode de développement. La création première des êtres organisés est un sujet qui , de prime abord, doit paraïtre inaccessible à Ia science ; maisle génie dun de ces hommes, dont la France doit s’enorgueillir, de Cuvier (1) , a dissipé une partie des ténèbres profondes qui entouraient ce grand mystère , et nous a appris, au moins, dans quel ordre les divers animaux se sont montrés suecessive- ment à la surface de notre globe. La terre n’a pas eu toujours la configuration que nous lui voyons aujourd’hui. Ses diverses parties ont été, à plusieurs reprises, envahies et abandonnées par les eaux, et lors de chaque inondation, il s’y est déposé des matières solides qui, par la suite des temps, ont formé des couches plus ou moins puis- santes de pierre, d'argile, de sable, etc., placées les unes au- dessus des autres, suivant l’ordre de leur formation plus ou moins récente. Dans les terrains qui sont situés au-dessous de tous les autres , etqui sont, par conséquent, les plus anciens , on ne trouve aucune trace de débris d'êtres organisés; mais, à mesure que l’on s'élève davantage, et que l’on exploite des couches d’une formation plus récente , on y rencontre, à l’état fossile, des bois et des feuilles, des coquilles et des ossemens de formes les plus diverses ; quelquefois ces débris se trouvent en si grande abon- dance , que la pierre qui les renferme semble en être entière- (r) M. George Cuvier, dont nous aurons fréquemment l’occasion de citer le nom dans le cours de cet ouvrage , est né à Montbelliard en 1769, et mort à Paris en 1832. Ses principaux ouvrages sont : ses Recherches sur les ossemens fossiles , en 5 vol. in-4°; ses Lecons d'anatomie comparée, en 5 vol. in-8o; sa classificaion générale des animaux, intitulé le Règne animal, distribué d’après son - organisation (5 vol.in-8°); et ses Mémoires sur l'anatomie des mollusques, 1 vol. in-4°; mais il a enrichi la science d’une foule d’autres travaux du plus grand intérêt. DES FONCTIONS DE REPRODUCTION. 209 ment formée, et leur conservation est souvent si parfaite , qu’on peut facilement déterminer à quelles plantes ou à quels animaux ils ont dù appartenir. Or, l'étude de ces débris échappés à toutes les grandes ca- tastrophes qui ont si souvent bouleversé la surface de la terre, montre que notre globe , d’abord dépourvu de tout être vivant, a été primitivement peuplé de végétaux seulement, et que les premiers animaux qui y ont apparu étaient des êtres d’une struc- iure très inférieure, dont les espèces sont depuis long-temps détruites; c’étaient des animaux aquatiques ayant de l’analogie avec les cloportes, et nommés par les naturalistes des frilobites ou bien des mollusques marins, vivant dans de grandes co- quilles, et appelées ammonites ou cornes d'Ammon. À une époque plus récente, notre globe a été habité non-seulement par des conchifères ayant plus d’analogie avec ceux qui existent aujour- d’'hui, mais aussi par une foule d'énormes reptiles dont les formes étaient souvent des plus bizarres. Les mammifères ne se sont montrés que bien long-temps après ,et ceux qui ont successive- ment peuplé la terre se sont rapprochés de plus en plus des es- pèces qui y vivent actuellement. Enfin l’homme parait avoir été la dernière , comme ilest la plus parfaite , de ces créations, car on ne trouve nulle part de ses ossemens à l’état fossile. On voit donc que la nature a toujours été en compliquant et en perfectionnant ses œuvres, et que c’est par une foule de degrés intermédiaires qu’elle s’est élevée de la production d’une plante à la création de l'homme. A chaque grande catastrophe de la nature , plusieurs des espèces existantes ont été complètement détruites et ont été remplacées par des espèces nouvelles, de sorte que chacune des époques de Flhistoire antidiluvienne de notre globe est caractérisée par une population particulière ; mais d’autres espèces paraissent avoir survécu à ces bouleversemens; et, suivant fopinion de certains naturalistes, quelques-uns des animaux qui apparurent alors, ne seraient que des espèces déjà existantes, mais modifiées dans leur structure par l’in- fluence des conditions nouvelles où elles se sont trouvées placées. Quoi qu’il en soit de ces créations entièrement nouvelles, ou de ces transformations d’êtres déjà existans, il est évident que, depuis les temps historiques les plus reculés, les animaux se sont succédés avec les mêmes fornies ; on trouveencore de nos jours, dans les catacombes de l’ancienne Égypte, des momies d'hommes, de crocodiles et de plusieurs autres animaux qui ysont ensevelis depuis deux ou trois mille ans, et qui ressemblent en tous points aux individus actuellement existans. 14 Générations spontanées. Génération normale. Génération par boure geons. 210 ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE, Ce qui explique jusqu’à un certain point cette reproduction des formes identiques pendant une longue suite de siècles , lors- que les êtres qui les présentent périssent tous au bout d’un petit nombre d’années, ou ne vivent même que quelques jours, c’est la manière dont ils naissent. En effet , ils forment d’abord partie du corps d’un autre être organisé qui leur transmet la vie, et qui est en quelque sorte le modèle d’après lequel ils se constituent. Jadis on croyait que la matière placée dans des conditions physiques favorables pouvait s'organiser d'elle-même, devenir le siège d’un mouvement vital, et donner ainsi spontanément naissance à des animaux même très compliqués, tels que les mouches des cadavres, etc.; mais aujourd’hui on sait, à ne pas en douter, que dans immense majorité des cas, sinon toujours, les animaux ne peuvent provenir que de parens semblables à eux; et que si les générations spontanées sont possibles, ce n’est certainement que pour les êtres dont la structure est la plus simple, comme les monades qui apparaissent dans les infusions de matières végétales et animales, et qui ne semblent être que des globules organiques agglomérées , en plus ou moins grand nombre, et douées du mouvement. Dans la suite de ces leçons, nous reviendrons sur ces êtres singuliers ; pour le moment, il nous suffit de dire que leur mode de formation est une ques- tion disputée par les naturalistes; suivant les uns, ces infusoires, ainsi que beaucoup d’autres animalcules microscopiques , fe- raient exception à la loi commune; et se formeraient spon- tanément , tandis que, d’après d’autres, ils naïîtraient toujours de germes provenant d’individus semblables à eux, répandus avec abondance dans presque toutes les substances organiques, et ne pouvant se développer que dans certaines circonstances favorables. Mais s’il est de l’essence des êtres organisés de naître de parens semblables à eux, la manière dont cette reproduction s’effectue varie beaucoup chezles différens animaux, et ce phénomène nous fournira un exemple frappant de Papplication que la nature semble avoir faite du principe de la division du travail, lorsqu’elle a voulu perfectionner successivement les êtres qu’elle a créés. Dans les animaux les plus simples, la fonction importante de la génération ne paraït être confiée spécialement à aucun organe en particulier; toutes les parties de la surface du corps d’un de ces animaux jouissent de la faculté de donner naissance à de petits bourgeons qui grossissent et qui deviennent bientôt de nouveaux individus semblables en tout à celui dont ils pro- viennent. Les polypes d’eau douce, dont nous avons déjà eu Poc- casion de parler (fg. 1, p. 9), se reproduisent ainsi par bourgeons ; DES FONCTIONS DE REPRODUCTION. 211 mais ce mode de propagation de l'espèce ne se voit que chez un très petit ngmbre des animaux les plus inférieurs, et dans tous les autres le germe qui, en se développant, doit constituer le jeune individu , se forme dans un organe particulier appelé ovaire. Lorsque ces organes commencent à se montrer dans la série des animaux, ils ont une structure très simple; ce sont, en général, des vaisseaux glandulaires, et les germes qu’ils pro- duisent sont aptes à se développer sans le concours d’aucun autre appareil; mais bientôt la division du travail est portée plus loin; et la reproduction est confiée à deux organes dis- tincts , dont le concours est nécessaire à la naissance d’un nouvel individu. Ces deux appareils , servant l’un à la production , Pautre à la fécondation du germe, etappelés appareil femelleetappareil mâle, sont d’abord réunis chez le même individu, qui à lui seul est chargé de toutle travail de la reproduction. Les huîtres, les moules et un grand nombre d’autres animaux inférieurs présentent ce mode de génération. Chez d’autres, où les sexes sont encore réu- nis, les limagçons, par exemple, l’'hermaphrodisme est cependant moins complet : car la fécondation des germes ne peut être opé- rée par l'individu qui les a produits. Mais , lorsqu'on s'élève davantage dans la série des êtres, on voit la nature pousser plus loin encore la division du travail; car alors les sexes sont toujours séparés. C’est en effet, ce qui a lieu chez tous les ani- maux supérieurs, quadrupèdes, oiseaux, poissons , elc., et même chez les insectes , les araignées , les crustacés et quelques mol- lusques. Chez la plupart des poissons et même chez quelques reptiles, la fécondation des germes n’a lieu qu'après la ponte et est en quelque sorte confiée au hasard; mais, chez tous les animaux supérieurs , elle est mieux assurée et a lieu avant leur expul- sion au-dehors. En général , le germe , après s’être détaché de l'ovaire et avoir été fécondé, n’a plus besoin du secours de ses parens pour se développer. Abandonné à lui-mème, il donne naissance à un nouvel individu , et il porte avec lui les matières nécessaires pour nourrir celui-ci pendant toute la du- rée de sa vie embryonnaire ; mais, chez les oiseaux, l'œuf, qui se compose du germe , des substances nutritives dont nous venons de;parler, et des membranes servant à les renfermer, ne se déve- loppe quesous l'influence d’une température élevée, que la mère y entretient ordinairement en lé couvant de son corps. Enfin, chez d’autres animaux, la série des phénomènes de la reproduction se complique encore davantage ; car le germe ne porte pas avec lui sa nourriture , et, pour vivre après s'être détaché de l'ovaire et avoir été fécondé , il a besoin de contracter de nouvelles 14. Génération ovipare. Génération vivipare. Développe- ment du jeune. 212 ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. adhérences vasculaires avec les parois d’une poche particu- lière, nommée matrice, qui est destinée à loger le jeune individu jusqu'à ce que tous ses organes se soient formés. Les animaux dont les germes ne tirent pas ainsi leur nourri- ture du sang de leur mère sont appelés ovipares ; ceux qui pré- sentent ce dernier mode de reproduction sont dits wivipures, parce qu’en effet , au lieu de se développer dans un œuf, ils naissent vivans et tout formés. Tous les animaux inférieurs qui nese reproduisent pas à laide de bourgeons , tels que les vers, les mollusques , les crustacés, les insectes, etc., sont ovipares : il en est de même des poissons, des reptiles et des oiseaux ; mais l’homme et tous les animaux qui s’en rapprochent le plus, tels que les quadrupèdes domes- tiques , etc., sont vivipares. Lorsque le jeune individu commence à se développer dans le germe , il n’est pas, comme on pourrait le supposer, la minia- ture de ce qu’il sera plus tard. II ne ressemble pas encore à ses parens , et il n’a ni la forme ni la structure qu’il aura par la suite. En effet ses organes n’apparaissent que successivement , et ils éprouvent, pendant leur évolution , des changemens des plus remarquables. On peut dire d’une manière générale que l’ensemble de l’organisation de lembryon, ainsi que chacune de ses parties, considérée isolément , passe par une série d’états transitoires, qui rappellent jusqu’à un certain point ce qui existe d’une manière permanente chez d’autres animaux moins élevés dans la série. L’embryon humain , par exemple, ne pré- sente , dans les premiers momens de son existence , qu’un corps arrondi et privé de membres, ayant quelque analogie de structure avec certains animaux très simples; car on n’y trouve encore ni cerveau, ni cœur, ni os, ni muscles distincts. Lecœur n’est d’a- bord comme celui de quelques vers , qu’un simple vaisseau , qui bientôt après se courbe et présente deux dilatations , qui devien- nent le ventricule gauche et l’oreillette du même côté. Le cœur présente alors le mode de conformation qui est analogue à celui propre aux poissons; l'oreillette estensuite divisée en deux cavités par une cloison incomplète, ce qui rappelle la structure du cœur chez la plupart des reptiles ,et un peu plus tard, une seconde cloison , qui s’élève du fond du ventricule , sépare celui-ei en deux, de manière qu’alors le cœur présente les quatre cavités qu'on y trouve chez les animaux supérieurs ; mais cependant la circulation du fœtus se rapproche encore de celle des reptiles ; car les deux oreillettes communiquent par une ouverture ap- DES FONCTIONS DE REPRODUCTION. 213 pelée trou de botal, et l'artère pulmonaire se joint à l'artère aorte par une grosse branche anastomotique ; de façon qu’une petite portion seulement du sang , chassée du ventricule droit , se rend au poumon , tandis que le reste se mêle avec le sang destiné à nourrir immédiatement les organes. C’est dans l'œuf du poulet, que le développement de lem- bryon est le plus facile à observer: aussi le choisirons-nous comme exemple pour l'étude de ce phénomène curieux. Les oiseaux n’ont pas, comme la plupart des autres animaux supérieurs , deux ovaires : on ne leur en trouve qu'un seul qui est fixé dans la cavité abdominale au-devant de la colonne vertébrale par un repli péritonial, et qui consiste en un paquet de petits sacs membraneux, arrondis, plus ou moins dévelop- pés et réunis en grappes. Les parois de ces poches sont très riches en vaisseaux sanguins , et sécrètent les ovules, qui se forment dans leur intérieur et qui consistent en une matière jaune , en- veloppée dans une membrane très mince. Ces corps grossissent peu-à-peu , et, lorsqu'ils ont acquis le volume que doit avoir le jaune de l’œuf parfait, le sac ovairien , dans lequel chacun d’eux se trouve renfermé , se fend et les laisse échapper dans la cavité du pavillon, espèce d’entonnoir membraneux qui s'applique sur l'ovaire et qui conduit au-dehors par loviducte , tube de même nature dont l’orifice inférieur se voit dans le cloaque, près de l’anus. Au moment où l’ovule descend ainsi dans lovi- ducte, il ne se compose que du sétellus ou jaune, enveloppé dans un sac membraneux, sur un point duquel on aperçoit une petite tache blanchâtre, qui est appelée cécatrieule, et qui mérite d’être signalée, car c’est äans son intérieur que par la suite l'embryon se développera; mais, à mesure que lovule descend , 1l se recouvre d’autres substances sécrétées par les parois du canal qu’iltraverse. Vers la pariie moyenne de Fovi- ducte , il s’'enveloppe d’une matière épaisse et glaireuse , qui est le blanc de l’œuf, et un peu plus bas, il se forme autour de cette nouvelle couche une membrane épaisse , dont Le feuilletexterne finit par s’encroûter d’un dépôt terreux , et constitue ainsi la coquille de Fœuf. C’est dans cet état que l'œuf est pondu. Lorsqu'il n’a pas été préalablement fécondé, il ne subit aucun changement impor- tant ; mais , dans le cas contraire , il devient le siège d’un tra- vail actif du moment où sa température se trouve convenable- ment élevée. 4 Enexaminantalors, au microscope, le cicatricule qui a environ * 214 ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. six millimètres de diamètre, on remarque vers le centre un petit corps blanc et allongé qui peut être considéré comme le rudiment du germe, et qui présente une ligne moyenne blanchâtre et arron- dieau sommet; ce trait marque la place où se développera le cor- don cérébro-spinal, et, suivant quelques physiologistes, ce serait même le premier vestige du système nerveux. Autour du germe, on voit une espèce de disque membraneux et transparent qui, à son tour,est borné par une zone plus obscure et par deux cercles concentriques d’un blanc mat. Vers la dix-huitième heure de l'incubation, le germe se rétrécit, prend à-peu-près la forme d’un fer de lance, s’arrondit à sa partie supérieure et il s’y forme un pli qui se rabat comme une toile au-devant de l’extrémité céphaliqre de la ligne cérébro-spinale; sur les côtés de ce trait longitudinal, on remarque aussi deux petits bourrelets qui le renferment comme dans une gouttière. Bientôt après ces bour- releis se réunissent par leurs extrémités inférieures et com- mencent à se rapprocher de facon à cacher la ligne qui les sépare; enfin, vers la vingt-quatrième heure, on y voit appa- raitre trois paires de points arrondis qui sont les premiers ru- dimens des vertèbres, dont le nombre augmente ensuite rapi- dement. Le pli transversal que nous venons de voir se rabattre sur lextrémité antérieure du germe est le premier vestige de la tête qui tend bientôt à se détacher et à devenir distincte. Vers la irente-sixième heure de l’incubations, on commence à aperce- voir les yeux du poulet; peu de temps après, la partie posté- rieure du corps se dessine également et l'embryon se recourbe un peu sur lui-même. Pendant le troisième jour, la tête devient de plus en plus distincte; son extrémité pointue , qui corres- pond au bec, se reploie sur la poitrine, et l’on voit apparaitre, sur les côtés de la colonne vertébrale, sous la forme de petits tubercules blanchâtres, les premiers vestiges des membres su- périeurs ; bientôt après les membres inférieurs se forment de la mème manière; deux petits appendices fixés sous le cou se mon- trent aussi et constituent, en se développant, la mâchoire in- férieure ; enfin les yeux se colorent en noir. Le cinquième jour de l’incubation , les membres, qui ne ressemblent encore qu’à des moignons presque informes , commencent à exécuter quel- ques légers mouvemens, et vingt-quatre heures après, ils sont déjà assez développés pour que l’on puisse y distinguer les jambes des cuisses et l’avant-bras du bras : la forme générale du petit individu commence aussi à se rapprocher un peu de ce qu’elle sera par la suite; vers cette époque le cœur rentre dans la cavité de la poitrine et les parois de l'abdomen se complètent. Le sep- tième jour les pieds se forment, et vers la fin du neuvième jour DES FONCTIONS DE REPRODUCTION. 215 on aperçoit , sur la peau de l'embryon , des petits pores qui sont les ouvertures des Capsules destinées à sécréter les plumes, les- quelles confmencent à se montrer à la fin du dixième jour, et recouvrent tout le corps dans l'espace de vingt-quatre heures. Le volume de la tête, d’abord excessif, diminue proportion- nellement à celui du reste du Corps, ebles yeux, qui étaient remarquables par leur grosseur, croissent ensuite plus lente- ment que les autres parties; les membres, au contraire, se dé- veloppent plus rapidement, de façon que l’ensemble du petit poulet se rapproche de plus en plus de celui de Panimal parfait. Considéré sous le rapport de sa forme extérieure seulement, l'embryon présente, comme on le : , de véritables métamor- phoses; mais la partie la plus curieuse de l’histoire de son dé- veloppement est celle qui montre la manière dont les différens appareils les plus importans à la vie se forment successivement dans l'intérieur de son corps. Vers la vingt-septième heure de l'incubation on aperçoit, à la face antérieure du poulet, et précisément dans le point cù se termine la membrane qui se rabat au-devant de la tête, un petit nuage transversal , qui s’élargit à ses deux extrémités, et va se perdre insensiblement sur laire transparent au milieu duquel le germe est placé. Ce nuage est le rudiment de oreillette gauche du cœur. Trois heures après, le centre de cet organe se trouve surmonté d’un vaisseau droit qui se dirige vers la tête et qui est le ventricule gauche; bientôt après un troisième ren- flement se montre au-dessus de celui-ci; c'est le bulbe de laorte qui disparait plus tard, mais qui se voit toujours chez certains reptiles, tels que les grenouilles ; le cœur s’allonge ensuite et se recourbe ; un rétrécissement s'établit entre l'oreillette et le ventricule , et, vers la trente-sixième heure, la première de ces cavités commence à remonter vers le sommet de l'appareil : à cette époque le cœur commence à battre, mais il ne contient pas encore de sang et n’est rempli que par un liquide incolore. Dès les premières heures de l’incubation, l'air transparent qui environne le germe présente aussi des modifications importantes; la membrane qui le forme se divise en deux feuillets entre les- quels se développe une lame de tissu spongieux qui, vers la trentième heure, commence à s’épaissir en certains endroits et à prendre une teinte jaune; ce tissu s’étend peu-à-peu sur toute la surface du jaune , et des espèces d’iles, remplies d’un liquide rougeâtre,se forment ensuite dans son épaisseur; enfin ces la- cunes ne tardent pas à se mettre en communication entre elles et à former un réseau vasculaire qui entoure l'embryon et en- voie le sang au cœur par deux vaisseaux dont l'extrémité se perd dans l'oreillette gauche. C’est dans cette membrane vas- 216 ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. culaire et loin de lembryon que le sang se forme d’abord; et lorsqu'il commence à se montrer, ses globules sont circulaires. La circulation est alors facile à suivre: le sang passe au travers du ventricule, arrive dans la bulbe de l'aorte, et se rend de là dans l'aorte descendante , qui bientôt se divise en deux bran- ches , qui sortent du @orps du fœtus et vont se perdre dans l'aire vasculaire dont il est environné; le sang qui part ainsi à droite et à gauche du poulet se divise dans un lacis de vaisseaux ca- pillaires, puis arrive dans un vaisseau général qui le ramène en haut ou le dirige en bas, d’où il revient au cœur. Entre le troi- sième et le quatrième jour de l’incubation, on distingue nette- ment le ventricule droit qui se monire sous la forme d'une petite poche placée au-devant du ventricule gauche, commu niquant librement avec la cavité de l'oreillette, et se continuant avec un vaisseau dont l’extrémité se dirige vers le point qu'oc- eupent les poumons. Dès le deuxième jour l'oreillette droite commence aussi à se former par suite du développement d’un repli annulaire qui divise l'oreillette gauche en deux parties distinctes. Enfin, vers le sixième jour, on commence à aper- cevoir dans le sang des globules elliptiques, et le neuvième jour ceux-ci ont remplacé en entier les globules eireulaires qui d’a- bord y existaient seuls; leur apparition coïncide avec celle du foie et avec l’oblitération des vaisseaux de la membrane du jaune où nous avons vu la sanguification commencer; aussi a-t-on des raisons de croire que ce viscère est le siège de la sécrétion de ces corpuseules. Les poumons commencent à se développer vers le quatrième jour; ils consistent d’abord en deux tubercules oblongs et pres- que transparens placés derrière le cœur; ils prennent bientôt une couleur rouge , mais ils ne servent pas à la respiration avant que le poulet n’ait rompu sa coquille. Cette fonction s'exécute cependant d’une manière active dès les premiers momens de Pincubation; et si lon empêche Pair de pénétrer dans lPœuf, le poulet meurt presque aussitôt. Au moment de la ponte, lœufest complètement rempli par le blanc et le jaune , mais peu-à-peu ces liquides perdent par évapora- tion une certaine quantité de leur eau, et il se forme ainsi sous la coquille un vide qui se remplit dair;de jaune subit en même temps des modifications qui le rendent plus léger que le blanc, de façon qu’il vient occuper la partie la plus supérieure de l'œuf, quelle que soit la position de celle-ci; et la sérosité qui s’accu- mule pendant le second jour de lincubation, au-dessous du cicatricule, produisant le mème effet sur celui-ci , le fait flotier de manière à être en contactavec l'air dont nous venons de par- ler. La respiration de l'embryon s'effectue d’abord par son contact RE On DES FONCTIONS DE REPRODUCTION. 217 de l'air qui a pénétré ainsi sous la coquille ou par la membrane du jaune, mais bientôt après cette fonction devient l'apanage d’une membrane nouvelle appelée aZ/lantoide. Celle-ci com- mence à se montrer vers la quarante - cinquième heure de l'incubation sous la forme d’une vésicule membraneuse et transparente , de la grosseur d’une tête d’épingle, placée dans la région abdominale du poulet. Cette poche se développe rapidement , s'étale sur la surface supérieure du jaune, et finit par envahir toute la surface interne de la coquille contre la- quelle elle se trouve appliquée ; enfin son feuilletexterne ne tarde pas à se couvrir d’un magnifique réseau vasculaire qui reçoit le sang veineux venant de l'embryon, et le met en contact avec l'air pour le transformer en sang artériel. Le canal intestinal paraît naître de deux replis de la lame interne de la cicatricule , qui ressemblent d’abord à des enton- noirs ouverts par une de leurs extrémités, et situés au-dessus de la colonne vertébrale, à l’opposite l’un de l’autre; ces replis se rétrécissent graduellement et se ferment; mais leur cavité reste encore en communication avec le jaune, qui peu-à-peu y pénètre et sert à nourrir le fœtus; aussi le voit-on diminuer de plus en plus, et vers la fin de l’incubation est-il entrainé dans l’intérieur de l'abdomen. Enfin le système nerveux éprouve, en se développant, une série de modifications encore plus remarquables que toutes celles que nous venons de signaler; et les formes transitoires qu’on lui voit ont la plus grande analogie avec celles auxquelles les mêmes parties s'arrêtent pour toujours chez des animaux moins élevés dans la série zoologique. La plupart des animaux ont, en venant au monde, à-peu- près les formes et le mode d'organisation qu’ils doivent con- server pendant toute la durée de leur vie, mais il n’en est pas ainsi de tous ; on en connait beaucoup qui, après leur naissance, subissent encore des changemens analogues à ceux qu’ils ont déjà éprouvés pendant la durée de leur développement em- bryonnaire, et quelquefois ces changemens sont si complets, que l’animal subit de véritables métamorphoses avant que d'ar- river à l’état parfait. Les grenouilles, et surtout les insectes, nous fourniront par la suite des exemples remarquables de ces transformations. A re à NW? "M tu T4 sui YE di Rr e an see Jin 1 san cuire Po 1 Eh Lu ÿ Bic en 2 jrs te EN le Dons r DATES. cs si Fe , PT ie reg - NAT, | rt CE Le LS ' Sen 2e 7 ‘Pa Lu RL Le N1 mé a ag # f FAT vi ryaf “ani Ld rl nina ide Mas à oc Or SERRE" AE | Er À dois TH tarte A Fe 2e LÉ "A L > M PATATE a ei; di: , #4 1 r SAM eet 4 pe of 4 MTS CET & ÉLÉMENS DE ZOOLOGIE. RS SR RE RE Te ET Te AT TE Te ET Te ET Te Te TT TE Te A Te Te A UT A DEUXIÈME PARTIE. ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. La zoologie descriptive (1) est la branche de l’histoire naturelle des animaux qui nous en fait connaître les formes, les pro- priétés et les mœurs , et qui nous apprend à les distinguer entre eux. Pouvoir distinguer les objets que l’on étudie, et pouvoir les Nécessite faire reconnaitre avec certitude aux autres, est une condition des classifica- sans laquelle les connaissances acquises ne sauraient se trans- "9 mettre , et sans laquelle il n’y aurait point de science. Or, pour y arriver, il ne suffit pas de donner à chaque objet un nom parti- culier, il faut aussi donner à chäcun de ces noms une définition telle qu'on puisse toujours en connaître la valeur et en faire la juste application. On voit donc que, pour étudier les animaux, il est nécessaire d’en dresser un grand catalogue, dans lequel tous ces êtres portent des noms convenus, et d’indiquer pour chacun d’eux les caractères propres à les faire reconnaître. Il est également évident que ces caractères doivent être tirés de la conformation des animaux; car, pour être toujours appli- cables, il faut que ceux-ci les portent avec eux; des propriétés ou des habitudes dont l’exercice ne serait que momentané, ne . pourraient remplir cette condition. (x) Le mot zoologie qui signifie discours sur les animaux, est formé de deux ) racines grecs , Écoy ( animal } Àcy0c ( discours. ) 15 299 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. Mais il n’est aucun animal qui puisse être reconnu par un seul des traits de sa conformation; les caractères qui le dis- tinguent des uns lui sont communs avec d’autres , et c’est seulement par la réunion de plusieurs de ces caractères, dont l’ensemble n’existe pas de même ailleurs, qu’il diffère de tous les autres animaux. Plus les objets qu’il importe de reconnaitre sont nombreux, plus il faut accumuler de caractères ; et comme le nombre des animaux est immense, il en résulte que, pour distinguer un de ces êtres pris isolément, il faut presque se rappeler sa description complète. Or, il n’est point de mémoire assez forte pour suffire à de pareils efforts; et si l’on ne possédait les moyens d'arriver au même but par une route plus facile, l'étude de lhistoire natu- relle resterait éternellement dans l’enfance. Mais en établis- sant parmi les animaux des divisions et des subdivisions, qui elles-mêmes sont nommées et caractérisées , une grande partie de ces difficultés disparaissent, car, à l’aide d’un petit nombre de traits et de noms, on arrive à circonserire à un tel de- gré le champ de la comparaison que, pour reconnaître l’objet dont on s'occupe, on n’a enfin qu’à le distinguer de ceux dont il diffère à peine. Cet échafaudage de divisions, dont les supérieures contiennent les inférieures , est ce que l’on appelle une CLASSIFICATION ; C’est une espèce de dictionnaire où les objets que l’on cherche sont rangés d’après leurs propriétés , et dans lequel, pour découvrir leurs noms, on a recours à leurs caractères. Pour faire saisir lutilité &es classifications, il suffira de quel- ques exemples. Si l’on voulait, sans se servir de moyens sem- blables, définir le mot Lièvre, il faudrait faire une longue énu- mération de caractères, et pour appliquer cette définition, il faudrait comparer la description ainsi tracée à celle de plus de cent mille animaux différens ; mais si l’on dit que le lièvre est un animal vertébré , de la classe des mammifères, de l’ordre des ron- geurs, du genre Zepus, on saura, par le premier de ces mots, dont la définition est connue, que ce ne peut être ni un insecte, niaucun autre animalsans squelette intérieur ; par le second, on excluera de la comparaison ious les poissons ‘tous les reptiles et tous les oiseaux ; par le troisième, on distinguera de suite le lièvre des neuf dixièmes des mammifères, et lorsqu'on aura déterminé de la même manière le genre auquelil appartient, on n’aura plus qu’à le com- parer à un très petit nombre d’animaux dont il ne diffère que par quelques traits plus ou moins saillans ; pour le faire distinguer avec certitude , il suffira donc de quelques lignes. Il existe ici la même différence que celle qu’il y aurait à chercher, d’après son uniforme et son signalement, un soldat dans une armée, dont tous CLASSIFICATION DES ANIMAUX. 223 les rangs seraient mélés , ou dans une armée bien ordonnée, dont chaque division, chaque brigade, chaque régiment, chaque bataillon et chaque compagnie se trouverait à la place qui lui appartient , et porterait avec lui des signes distinctifs. A l’aide des classifications zoologiques , on arrive à appliquer à un ani- mal le nom qui lui convient , de la même manière que l’on par- vientà trouver la personne que l’on cherche, d’après l'adresse de sa demeure; dans ce dernier cas, ons ’enquiert d’abord de son pays, puis de la province, de la ville , du quartier, de la rue, dela maison, et enfin de l’étage qu’elle habite; et dans le premier cas on se demande d’abord à quelle grande division du règne animal appartient l'espèce que l’on observe, puis à quelle classe, à quel ordre, à quelle famille et à quel genre il faut le rapporter ; or, ces questions résolues , le travail est presque achevé. La classification des animaux peut être fondée sur des con- sidérations très variées; mais la marche à suivre, dans cette distribution , est loin d’être une chose indifférente. Tantôt les classifications ont été fondées sur les modifications que pré- sente un seul organe choisi arbitrairement et considéré dans toute la série de ces êtres ; d’autres fois, au contraire, sur l’en- semble de l’organisation de ces êtres. Les premières de ces classifications , que l’on nomme des syste- mes artificiels , sont, en général, dans la pratique, d’une applica- tion facile ; mais souvent elles ne font rien connaitre d’important que les noms des objets. Supposons, par exemplé”, que l’on prenne pour base de la classification des animaux le nombre des mem- bres dont leur corps est pourvu : on placera, dans la division des quadrupèdes , les bœufs , les grenouilles, les lézards, etc. , tandis qu’on séparera ces derniers des serpens et de quelques autres rep- tiles ayant avec eux la plus grande analogie , mais auxquels lune des paires de membres manque; certes, on parviendra ainsi à distinguer ces animaux; mais les différens pas que l’on aura fait successivement pour y parvenir n’auront presque rien appris sur leur nature ; jusqu’au dernier moment on aura à com- parer les choses les plus disparates, et on ne pourra s’élever à des considérations générales dignes de quelque intérêt. Les secondes de ces classifications , que l’on appelle des me- thodes naturelles, sont destinées à être, en quelque sorte, le tableau synoptique de toutes les modifications que la nature a introduites dans l’organisation des animaux. Dans ces méthodes, les diverses classes, familles et genres sont fondés sur l’ensemble des caractères fournis par chaque animal, rangés d’après leurs degrés d’importance respective; aussi chacune de ces divisions ne renferme-t-elle que des élémens homogènes : les êtres dont 15. Classifica- tions artifi- cielles. Classific2- tious naturel: les. 224 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. un groupe se compose, se ressemblent par des points d'autant plus multipliés , que ce groupe lui-même est d’un rang moins élevé dans la hiérarchie des classifications , et en connaissant la place qu’un animal quelconque y occupe, on connait aussi les iraits les plus remarquables de son organisation et la manière dont ses principales fonctions s’exécutent. Dans ces classifications, on donne le nom d’espece à la réu- nion des individus qui se reproduisent entre eux avec les mêmes propriétés essentielles. Ainsi les hommes, les chiens, les chevaux constituent , pour le zoologiste , autant d’espèces distinetes. Quelquefois une espèce diffère considérablement de toutes les autres ; mais, en général, il en existe un nombre plus ou moins considérable qui se ressemblent beaucoup et qui ne se distin- guent que par des différences peu importantes; le cheval et Pâne, le chien et le loup sont dans ce cas, et dans les classi- fications naturelles, on réunit ces espèces voisines dans des groupes appelés genres, et on joint à leur nom spécifique un nom générique qui leur est commun : ainsi on dit lézard gris, lézard piqueté , lézard ocellé, etc., pour désigner les différentes espèces du genre lézard. Chaque animal a , comme on le voit, deux noms qui peuvent être comparés au nom de famille et aux noms de baptème des hommes ; seulement l’ordre dans lequel on les place est l’inverse de ce qui a lieu pour ceux-ci ; le nom du genre précède toujours le nom de l’espèce. Les genres qui ont entre eux le plus d’analogie sont réunis en tribus ou en familles ; et celles-ci, d’après les mêmes principes, sont réparties en groupes d’un rang plus élevé, auxquels on donne le nom d'ordres. Les ordres sont, à leur tour, réunis en cZasses, et les classes sont elles-mêmes des divisions des grands embranchemens dont le règne animal se compose. Chacune de ces divisions et de ces subdivisions porte un nom particulier et se distingue des autres par l'existence de certains caractères propres à tous les animaux dont elle se compose. Les parties qui varient le moins dans les divers animaux sont toujours celles qui sont les plus importantes et dont les modifi- cations entraînent le plus de changemens dans le reste de l’or- ganisation. Celles qui présentent, au contraire, les différences les plus multipliées ne remplissent qu’un rôle secondaire. Il en résulte que les caractères communs à une série très considé- rable d'animaux et propres par conséquent à faire distinguer, dans les méthodes naturelles, une classe ou un ordre des autres divisions de même rang, sont en même temps des traits de con- formation d’une haute importance pour l’histoire des animaux ; CLASSIFICATION DES ANIMAUX. 225 tandis que ceux qui varient d’un genre à un autre genre voisin ne sont en général que d’un médiocre intérêt. Par cela seul que l'on connait la famille , l’ordre , la elasse et l’embranchement auxquels Fun de ce es appartient, on connait par conséquent tout cites Lo organisation présente de plus intéressant , et, comme les fonctions etgles mœurs d'un animal sont toujours dépendantes, ou du moins en harmonie avec le mode de con- formation de ses o es , On peut déduire de cette connaissance celle de tous les poïnts les plus importans à son histoire. L'introduction dés mét s naturelles pour la classification des êtres vivans est l’un des services les plus grands que lon ait rendus à lhistoire naturelle : elle a changé la face de cette science , et a donné un puissant intérêt à la partie de la bota- nique et de la zoologie, qui , jusqu'alors, avait été la plus aride: aussi ne pouvons-nous omettre de citer les savans à qui l’on doit cette innovation heureuse. Ce furent les plantes que l’on rangea d’abord en familles na- turelles. Jusque-là on ne les classait que d’après le nombre de leurs étamines et de leurs pistils, ou d’après tout autre caractère, choisi arbitrairement et sans avoir égard à leurs analogies ; mais un botaniste français, Bernard de Jussieu (1), eut lheureuse idée de les distribuer d’après l'ensemble de leur organisation , et de les répartir en groupes naturels; et son neveu , Antoine-Laurent de Jussieu, compléta sa méthode , qui aujourd’hui est adoptée par tous les naturalistes. Ce fut à une époque encore plus récente que les principes des méthodes naturelles ont été pris pour base de la classification des animaux , et c’est en majeure partie à M. Cuvier qu'appar- tient la gloire de cette application. En rangeant ainsi les animaux d’après les divers degrés de Division da ressemblance qw’ils ont entre eux et d’après les différences plus règne animal ou moins considérables qui les distinguent , on remarque d’abord ©" 447e #2 qu’il existe dans ie règne animal quatre types principaux, d’après lesquels la nature semble avoir construit tous ces êtres : aussi les range-t-on en quatre grandes divisions ou embran- chemens. Les uns ressemblent à l’homme par l'ensemble de leur organi- sation : leur corps est soutenu par un squelette intérieur ; leur système nerveux se compose , outre les nerfs et les ganglions, (r) Ce fut en 1759 que Bernard de Jussieu , en établissant le jardin botanique de Trianon , y fonda sa série des ordres naturels des plantes ; mais ce ne fut qu’en 1788 que l’on eut un ouvrage complet sur la méthode des familles patu- relles ; Antoïne Laurent de Jussieu , nevea de Bernard, publia alors son Genera plantarum. branchemens. Animaux vertébrés. Animaux articulés. 296 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. d’un cerveau ( fig. 60 « ) et d’une moelle épinière (#2), situés au- dessus du canal digestif (b , 2) et renfermés dans une enveloppe osseuse , formée du crâne et des vertèbres ; leur sang est rouge ; leur cœur est musculaire et composé au-moins de deux cavités : ils ont pour la vue, l’ouie, l’odorat et le goût, des'organes distincts , logés dans la tête. La forme. de leur corps est symé- trique ; ils n’ont jamais plus de quatre membres. Les sexes sont toujours séparés, et il règne des analogies plus ou moins grandes dans la structure de toutes leurs parties. On les dis- tingue sous le nom d’ANIMAUX VERTÉBRÉS , et on peut citer comme exemple de ce mode d'organisation , Phomme, les oiseaux, les poissons, etc. Fig. 60. (1) b s A Dans le second groupe , on trouve un plan de structure tout autre. Le corps est encore d’une forme symétrique : mais il n’est plus soutenu par un squelette intérieur, analogue à celui des animaux vertébrés. Le squelette est extérieur, et ces animaux y Fig. 61. (2) sont renfermés comme dans un étui. Cette char- pente solide n’est formée que par la peau plus ou moins modifiée dans sa ? nature et danssa consis- tance, et se compose tou- jours d’une suite d’an- neaux mobiles les uns sur les autres. C’est pour rap- (1) Cette figure théorique est destinée à indiquer la position relative des grands appareils organiques dans l’embranchement des animaux vertébrés, et plus particulièrement dans la classe des mammifères. b cavité buccale formant l’entrée du tube alimentaire , dont l’ouverture opposée se trouve à l’extrémité postérieure du corps; — zintestin; — f foie; — t trachée artère ; — p poumons; — s Cœur ; — c cerveau ; — "7 moelle épinière. (2) Coupe idéale du corps d’une écrevisse. — e estomac, au-dessous duquel CLASSIFICATION DES ANIMAUX. 227 peler cette disposition remarquable , qu'on a donné à tous ces ètres le nom d’ANIMAUX ARTICULÉS ; mais les particularités de structure que nous venons designaler ne sont pas les seules qui les caractérisent. Leur système nerveux se compose d’unedouble chaine de ganglions , dont une partie occupe la tête (#g. 61, c), et le reste (g)se trouve sur la ligne médiane de la face ventrale du corps au-dessous du tube digestif(e, ) , de manière à former autour-de l’æsophage un collier médullaire. La portion cépha- liquede cette espèce de chapelet peut, jusqu’à un certain point, se comparer à un cerveau; mais il n’y a ici rien qui ressemble à une moelle épinière. Le sang est presque toujours blanc, et souvent le cœur est réduit à l’état d’un simple canal longitudi- nal. Les organes des sens sont moins nombreux et moins parfaits que chezlesanimaux vertébrés, et quelquefois ils manquent tous ; enfin les membres sont en général très nombreux, et il existe , dans lastructure de ces êtres , une foule d’autres particularités dont nous aurons à nous occuper par la #4 Ce mode de conformation nous est offert par les insectes, les écrevisses , les crabes , etc. Fig. 62. (1) Chez d’autres animaux, il n'existe ni squelette intérieur ni squelette exté- rieur. La peau forme une enveloppe molle et contractile : elle sécrète sou- vent une matière pierreuse ,qui forme des espèces de plaques , nommées co- quilles ; mais elle ne constitue jamais une suite d’anneaux mobiles analogues à ceux des animaux articulés. Le sys- tème nerveux (fig. 62, ec , g) se compose de plusieurs masses éparses , réunies par des filets nerveux. Le sang est blanc et le système circulatoire assez complet. Il n’existe jamais d’organe spécial pour l’odorat : celui de Pouïe ne se montre que dans une seule fa- mille , et, dans un grand nombre de ces animaux , il n’y a point d’yeux; enfin ils n’ont presque jamais de membres pour la 1o- se voit l’æsophage et la bouche; — : intestin ; — f foie ; — c ganglions nerveux céphaliques , situés au-devant ou au-dessus de l’æsophage ; — g ganglions nerveux thoraciques et abdominaux , situés au-dessous du canal alimentaire. (1) Coupe idéale du corps d’un mollusque céphalopode. — # bras ou tentan- cules, qui entourent la tête ; — # bouche ; — z canal alimentaire ; — à anns : — f foie; — c et g ganglions nerveux ; — p branchies; — s cœur; — 0 appa- reil reproducteur ; — +» vésicule de l’encre ; — y yeux. Animaux mollusques. 228 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. comotion, et la structure de toutes les parties se dégrade de plus en plus. Les limaçons et les huîtres appartiennent à cette grande divi- sion du règne animal, qui est celle des ANIMAUX MOLLUSQUES. Animaux Îans Ces trois groupes, les organes du mouvement et des ragonnés. Caractères communs. sens sont disposés symétriquement aux deux côtés de la ligne Fig. 63. médiane et longitudinale du corps, dont les deux faces anté- rieure et postérieure sont dissem- blables , et il existe toujours, comme nous l'avons vu , un sys- tème nerveux distinct. Dans la quatrième grande division du rè- gne animal, rien de cela n'existe. Les organes dont nous venons de parler sont disposés comme des rayons autour d’un centre , et, lorsqu'il n’y en a que deux séries, les deux faces opposées du corps sont semblables. On ne trouve jamais de système nerveux distinct ni d'organes spéciaux des sens bien reconnaissables. Le sang est blanc comme dans les mollusques et les insectes. S’il existe des organes de circulation, ils sont des plus incomplets; et Pappareil digestif devient d’une simplicité extrême. Enfin quelques-uns de ces animaux ne semblent être formés que d’une pulpe homo- gène , mobile et sensible. On donne à ces êtres d’une structure si simple le nom d’AnI- MAUX RAYONNÉS , et on les appelle aussi des ZOOPHYTES ou ani- maux plantes ; Car plusieurs d’entre eux vivent fixés au fond des eaux, et au premier abord ressemblent plus à des végétaux qu’à des êtres animés. Les polypes dont nous avons déjà eu Poccasion de parler, les étoiles de mer et les actinies ou anémones de mer (#g. 63), peuvent donner une idée de l’ensemble de cette division. La PREMIÈRE GRANDE DIVISION DU RÈGNE ANIMAL. ANIMAUX VERTÉBRÉS. Les animaux vertébrés sont de tous les êtres animés ceux dont les facultés sont les plus variées et les plus parfaites; et, ANIMAUX VERTÉBRÉS. 229 comme on pouvait le prévoir, d’après le principe que nous avons déjà établi relativement à la division du travail dans l’économie animale , cé"sont aussi ceux dont les organes sont les plus nom- breux etles plus compliqués. L'existence d’une charpente solide dans l’intérieur du corps leur permet d’atteindre à une taille que les animaux articulés, les mollusques et les zoophytes n’ont jamais , et la nature de ce squelette, dont toutes les pièces sont liées les unes aux autres, donne à leurs mouvemens une précision et une vigueur qu’on ne voit que rarement chez les autres animaux. La portion ruelettes qui ne manque jamais , qui varie le moins d’un animal à un autre, et qui est en même temps la plus importante de toutes, est la tige osseuse qui renferme lencéphale , et qui est formée par le crâne et la colonne verté- brale. Sa conformation est partout essentiellement lamème que chez l’homme, où nous l’avons déjà étudiée (pag 182). La face varie davantage; mais on y retrouve artout la plu- part des mêmes os chien les cavités des organes de la vue et de l’odorat, et formant les deux mâchoires ,quisonttoujours placées l’une au-dessus de l’autre, sur la ligne médiane du corps. Les côtes ne manquent que ‘très rarement : il en de même du sternumet des os des membres ; mais le nombre et la forme de ceux-ci varient suivant les mouvemens qu'ils sont destinés à exécuter. En effet, tantôt les membres se terminent par des mains ou des pieds , et d’autres fois ils ont la conforma- tion d’ailes ou de nageoires. Le système nerveux est bien plus développé chez les animaux vertébrés que dans les autres divisions du règne animal, etc’estsa partie centrale qui est surtout remarquable par son volume. La sensibilité de cès animaux est en rapport avec ce mode d’organi- sation , et leur intelligence dépasse celle de tous les autres. La plupart des nerfs du corps naissent toujours par deux racines de la moelle épinière , qui se termine antérieurement à un cer- velet et à un cerveau plus ou moins volumineux. Les sens exté- rieurs sont toujours au nombre de cinq, et les organes qui en sont le siège offrent , à peu de chose près , la même disposition que chez l'homme. L'appareil de la digestion ne présente aussi dans celte grande division du règne animal que des différences assez légères ; et le chyle est toujours transporté de l'intestin dans les veines par des canaux particuliers appartenant au système des vaisseaux Iym- phatiques (pag. 99). Le sang , qui est toujours rouge, et qui est bien plus riche en globules que dans les animaux inférieurs , arrive au Cœur par les veines : il pénètre d’abord dans une oreillette, et passe ensuite Squelette. Système ner- veux, Appareil di- gestif. Circulation, Respiration. Sécrétions. Principales différences. 230 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. dans un ventricule , d'où il se rend en totalité ou en partie à l'appareil de la respiration ; en général ce liquide nourricier revient ensuite au cœur avant que de se rendre aux diverses parties du corps; mais quelquefois il se porte directement à celles-ci. La respiration a toujours lieu dans un appareil parti- culier, situé dans une cavité intérieure du corps ; mais elle n’est pas toujours aérienne comme chez l’homme. Parmi les organes sécréteurs dont nous avons signalé l’exis- tence chez l’homme , il en est deux qui ne manquent jamais : ce sont le foie et les reins. Le pancréas existe également chez la plupart des animaux vertébrés, et on leur trouve aussi une rate plus ou moins développée. La nature semble donc avoir suivi le même plan dénéral dans la création de tous ces êtres : cependant ils diffèrent tous entre eux, et quelques-unes de ces différences sont même d’une grande importance dans lPéconomie. Ainsi, chez les uns, les jeunes se forment dans une espèce de poche appelée matrice, aux parois de laquelle ils adhèrent par des vaisseaux, de façon qu'ils tirent leur nourriture du sang de leur mère; ils naissent vivans, et, pendant les premiers temps de leur existence la mère les alimente d’un liquide par- ticulier, le lait, dont la sécrétion s'opère dans des glandes mam- maires. Chez les autres animaux vertébrés, les petits proviennent d'œufs; ils se développent sans adhérer à leur mère, et avant leur naissance ils tirent leur nourriture d’une matière renfer- mée avec eux dans les enveloppes de l’œuf(1); enfin il n’existe point de mamelles chez Ces animaux , et, par conséquent, ils n’allaitent point leurs petits. Un certain nombre de ces vertébrés ovipares ont la respiration aérienne, mais chez d’autres cette fonction à lieu aux dépens de l'air dissous dans Peau , et s’effeetue par des branchies. Enfin, parmi les ovipares à respiration aérienne, il en est qui sont des animaux à sang Chaud, et qui respirent par toutes les parties de leur corps aussi bien que par leurs poumons, car l’air passe de ces organes jusque dans l’intérieur de leurs os, tandis que chez d’autres la respiration est très bornée et n’a lieu que dans les poumons, dans lesquels tout le sang veineux ne passe même pas avant que de retourner aux parties dont il pro- vient. Ces différences coincident avec d’autres modifications éga- lement importantes dans la conformation des animaux vertébrés ; aussi, pour que la classification de ces êtres soit en quelque sorte Division la représentation des principales ressemblances et différences (1) C'est le jaune de l'œuf. I PE ANIMAUX VERTÉBRES. 231 qui se remarquent entre eux , faut-il les diviser en quatre classes, savoir : les mammifères, les oiseaux , les reptiles et les poissons. Pour se {ôrmer une idée exacte des caractères propres à ces quatre grandes divisions des vertébrés, il suffira de jeter les yeux sur le tableau suivant. MAMMIFÈRES. OISEAUX. REPTILES. POISSONS. Ovipares. | - *. OU LU gs » » © + à ° FE Point de mamelles. L LE) À citcilairés 4 Sang à globules éliptiques. | | | | | | ] . Sang chaud. Sang TENTE | . : . | | | Branchies. | Respiration Respiration simple. double. Respiration simple. Éretlnr nes RE: complète. Circulation double Circulation double)£ . incomplète. | complète. | TT — =. ——— — | f La 4 D . . : Cœur à quatre loges. ue .ordinaire- Cœur à deux loges|} ment à 3 loges. Peau garnie de : Peau nue ou garnie d’écailles. poils. . Membres organi- | Membres anté- sés en général rieurs organisés pour la marche. pour le vol. Membres organi- sés en général pour la marche. Membres organi- || sés pour la nage. | plumes. | | | | | | en quatre classes. Forme gé- nérale. Squelette. 232 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. DE LA CLASSE DES MAMMIFÈRES. La classe des mammifères se compose de l’homme et'de tous les animaux qui lui ressemblent par les points les plus ipor- tans de leur organisation; elle se place naturellement en tête du règne animal comme renfermant les êtres dont les mouve- mens sont les plus variés, les sensations les plus délicates, les facultés les plus multipliées et l'intelligence la plus dév. oppée ; et elle nous intéresse aussi plus que toute autre, car elle nous fournit les animaux les plus utiles’, soit pour Ste nourriture , soit pour nos travaux et pour les besoins de notre industrie. Il est, en général, facile de distinguer, au prémier.eoup-d’œil, un mammifére d’un oiseau, d’un reptile, d’un Ross, ou de tout autre animal, par la seule considération de sa forme exté- rieure et de la nature de ses tégumens ; car les. mammifères sont les seuls animaux dontle corps est couvert de poils, et ordi- nairement leur forme générale ne s’éloigne que peu de celle des espèces que nous avons continuellement sous lésyeux , et que nous prenons naturellement comm e types de ce. groupe ; mais quelquefois ils ne se reconnaissent pas 2 à un examen aussi superficiel, car il en est dont la péau est. complète t nue et dont le corps, au lieu de ressembler à celui en, d’un cheval, ou d’un autre mammifère TS présente les formes’ propr es aux poissons. La tête est, en général, plus grosse proportionnellement au reste du Corps que celle des oiseaux, mais ne présente que ra- rement des dimensions aussi considérables que chez les pois- sons ; elle est séparée du troncspar un cou plus ou moins allongé ; et ordinairement bien distincte ; lorsqu'il existe une queue, elle est presque toujours grèle et cylindrique : enfin , dans l’immense majorité des cas, les” membres sont au nombre ‘de quatre, et ne présentent entre eux que des différences légères ; presque tou- jours ils sont conformés pour servir à la marche; et souvent ils peuvent être aussi des organes de préhension; mais quel- quefois ils affectent la forme de nageoires, comme cela se voit chez les phoques, les dauphins et les baleines, et d’autres fois (chez les chauves-souris) ils se transforment en ailes Le squelette ne présente dans cette classe que des modifica- tions en général légères; toujours il ressemble beaucoup à celui de l'homme (D, + et ce n’est guère que dans la structure des (1) Voyez fig. 52, p- 183. CLASSE DES MAMMIFÈRES. 233 me et dans le développement plus ou moips considérable de la e que l’on remarque des différences importantes. La ee la tête osseuse varie beaucoup, suivant que la face. d plus ou moins dextension , ou bien que le crâne se d ppe davantage, et l'étude de ces différences de propor- tions n’est pas sans intérêt; çar, ainsi que nous l'avons déjà vu, il existe, en général, un rt assez direct entre le degré d'intelligence dont un animal doué et les dimensions rela- tives de la portion erânienne de sa tête (1). A mesure que l’on s'éloigne de l’homme, on voit le crâne diminuer, les mâchoires et les fosses nasales prendre plus d'extension, les orbites se diriger de plus en plus en dehors et devenir de moins en moins istinctes des fosses temporales ;enfin, le trou occipital, qui livre passage à la moëlle épinière, et les deux condyles par lesquels la tête s’artieule avec la colonne vertébrale , au lieu d’être pla- cés vers le milieude la face inférieure du crâne, se portent de plus en plus en arrièreet finissent par en occuper la face postérieure, de façon que les mâchoires , au lieu de former un angle droit avec la colonne vertébrale, deviennent parallèles à l’axe du corps. Du reste, on trouve partout à-peu-près les mêmes os, et le mode d’articulation de la mâchoire inférieure est caracté- ristique de la classe des mammifères; cet os se fixe immédia- tement au crâne par deux condyles saillans et la portion du temporal qui le reçoit est confondue avec le rocher, et entre dans la composition des parois du crâne, tandis que, chez les vertébrés ovipares, cette màachoire est suspendue à un os inter- médiaire entre: lui et le rocher. Les vertèbres ont les mêmes caractères que chez l’homme, et la colonne épinière présente aussi presque toujours cinq parties distinctes. La portion cervicale varie beaucoup d’éten- due ; chez la girafe, par exemple, elle est d’une longueur extrême, tandis que, chez les baleines, elle est à peine dis- tincte, mais néanmoins elle se compose presque toujours du même nombre d'os; chez tous les mammifères , excepté un seul, il y a sept vertèbres cervicales; l'ai en a neuf. En général, le cou est d'autant plus court que la tête est plus grosse, et, par conséquent , plus lourde : la longueur de ces deux parties réunies est ordinairement égale à celle du train de devant, cir- constance sans laquelle les quadrupèdes, qui ne portent pas leurs alimens vers la bouche à l’aide de la main ou d’une trompe préhensile , ne ‘pourraient , à moins de se coucher à terre, ni paître ni boire. Les vertèbres dorsales, qui s’articulent avec les côtes ,sont au nombre de douze à quinze chez la plupart des (x) Voyez pag. 163. Tête. Vertébres. Thorax. 234 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. mammifères , mais chez quelques-uns de ces animaux on en trouve davantage : le cheval en a dix-huit et l'éléphant vingt. Les différences que lon remarque dans la forme de ces os dépendent , en majeure partie, du développement plus ou moins considérable de leur apophyse épineuse ; ces apophyses donnent attache au ligament cervieal qui sert à soutenir la tête ; aussi sont-elles d'autant plus longues , plus droïtes et plus fortes, que celle-ci est plus lourde ou qu’elle est portée sur un cou plus long. C’est principalement dela longueur de la portion lombaire de la colonne vertébrale que dépend la taille grèle ou ramassée des quadrupèdes , et cette longueur tient au nombre de vertèbres placées entre le dos et le bassin; chez la plupart des mammifères, il en existe six ou sept, et leur nom- bre s’élève quelquefois à “neuf, tandis que d’autres fois on n’en compte que quatre, trois ; ou même deux. Dans les cétacés, on ne peut les distinguer des vertèbres sacrées, qui, chez les quadrupèdes, se réunissent aux os des hanches pour former le bassin. Le nombre de ces dernières vertèbres variebeaucoup ; dans le lori, le phalanger, le galéopithèque et quelques autres mammifères , on n’en trouve qu’une seule ; chez un grand nom- bre d’autres, il y en a deux , trois, ou même quatre, et quel- quefois on en trouve jusqu’à sept; en général, le sacrum est, proportion gardée, plus large dans les espèces qui ont lha- bitude de se tenir debout que dans les autres; mais il ne présente, chez aucun quadrupède , autant de largeur ni une position aussi favorable à la solidité de la station que chez l’homme ; chez tous les autres mammifères , ilforme , avec l’épine dorsale, une seule ligne droite. Enfin les vertèbres coccygiennes manquent complètement chez un petit nomore de mammifères les roussettes , par exemple) , et varient beaucoup chezlesautres; dans quelques espèces on en compte plus de trente. Elles sont de deux sortes : les unes conservent un canal pour le passage de la moelle épinière, les autres n’en ont plus; enfin leurs apophyses sont d'autant plus saillantes que la queue est plus forte et plus mobile; chez la plupart des mammifères cet organe ne sert que peu aux mouvemens , mais chez d’autres il devient un insiru- ment puissant de locomotion. Ainsi dans les kanguroos, les ger- boises, eic., la queue forme, avec les pieds de derrière, une espèce de trépied sur lequel l'animal se pose et s’élance; chez un grand nombre de singes de l'Amérique, elle est préhensile et sert à ces animaux comme une €cinquième main pour se suspendre aux branches; enfin , chez les cétacés , elle prend un aceroissement énorme et devient l’agent principal de la natation. La conformation du thorax varie peu chez les mammifères ; le nombre des côtes est le même que celui des vertèbres dor- _ CLASSE DES MAMMIFÈRES. 235 sales, et leur disposition ne diffère pas notablement de ce que nous avons vu chez l'homme. Le sternum est, en général, étroit et allongé het se compose toujours d’un certain nombre de pièces disposées en série longitudinale. Chez les chauves-souris , où les muscles abaisseurs de laile doivent avoir une grande puissance et trouver sur cet os une large surface pour leur in- sertion, il présente, sur la ligne médiane, une crète élevée qui ressemble un peu au bréchet des oiseaux. Dans les quadrupèdes qui n’ont pas de clavicule, la poitrine est comprimée sur les côtés, et le sternum forme en avant une saillie plus ou moins marquée. Enfin , chez tous les animaux de cette classe, la ca- vilé thoracique est séparée de l'abdomen par une cloison com- plète formée par le muscle diaphragme (voy. fig. 30, p. 160). Les membres sont au nombre de quatre €hez tous les mam- mifères ordinaires, mais chez les cétacés il n’y en a que deux, car les abdominaux n'existent pas. De même que chez l’homme, ces Ôrganes se composent toujours d’une portion basilaire et d’un levier articulé qui se divise en trois parties principales, savoir : le bras ou la cuisse, l’avant-bras ou la jambe, et la main ou le pied ; mais le mode de conformation de ces diverses parties varie un peu, suivant les usages auxquels elles sont destinées. La portion basilaire du membre thoracique , ou Pépaule, se compose essentiellement d’un grand os plat qui est appliqué sur les côtes et qui donne attache au bras : c’est l’omoplate ou sca- pulum. Cet os est d'autant plus étendu dans le sens parallèle à la colonne , que l’animal fait avec ses bras des efforts plus violens ; et,en effet, cette conformation fournit aux muscles destinés à por- ter le membre contrele tronc des points d’insertions plusétendus. Chez les mammifères qui se servent de leurs membres thora- ciques comme d’organe de préhension ou de vol, et qui les portent avec force en-dedans vers la poitrine, lomoplate est maintenue dans sa position normale à l’aide de la clavicule qui, par l’une de ses extrémités, s'articule avec elle, et par l'autre s'appuie sur le sternum en manière d’arc-boutant ; mais chez les quadrupèdes qui n’exécutent que peu ou point de mouve- mens analogues, et qui ne font guère usage de ces membres que pour la marche ou la nage, la clavicule manque complètement ou n'existe qu'à l’état de vestige ; tous les quadrupèdes à sabots et plusieurs autres sont dans le même cas. Les fonctions de la portion basilaire des membres abdomi- naux varient moins que celles de l'épaule, aussi le mode de conformation de cette partie est-il plus constant. Excepté chez les cétacés, où le bassin n’existe qu’à l’état de vestige, les os des hanches s’articulent toujours d’une manière immobile au sacrum, et se réunissent entre eux par leur extrémité infé- Membres, Epaule, Hancles, Bras et jam- bes, 236 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. rieure, de façon à former un anneau complet et plus ou moins évasé. La forme et les dimensions de cette ceinture osseuse varient beaucoup; et il est à noter que, tontes choses égales d’ailleurs , la position verticale sur les membres abdominaux est d'autant plus facile que le bassin est plus large. Le bras et la cuisse me présentent, chez tous les mammifères, qu’un seul os, l’humérus ou le fémur. Les os de l’avant-bras et de la jambe sont généralement les mêmes que chez l’homme ; mais chez les chauves-souris , il existe, aux membres antérieurs aussi bien qu'aux membres postérieurs , une rotule distincte. Lorsque la main devient un organe de locomotion et non de préhension , le radius ne peut plus tourner sur le cubitus et finit par s’y soudersi intimement, qu’on ne peut plus l’en distinguer ; il en est.de même pour le péroné, qui se confond avec le tibia chez la plupart des quadrupèdes à sabots. La conformation de la main et du pied varie beaucoup dans cette classe d'animaux. Le nombre des doigts ne dépasse jamais Fig. 64. (1) cinq; mais lorsque les membres ne doivent servir que de soutiens à l’animal, il y en a souvent beaucoup moins. Dans ce cas , ils sont en général courts et peu mobiles , et les os du métacarpe ou du métatarse se réunissentsou- vent pour former une seule pièce désignée communément sous le nom de canon (ec). Lors- que la main devient un organe de préhension, les doigts s’allongentetacquièrentune grande mobilité; enfin, pour transformer ce membre en aile, la nature donne à ces appendices encore plus de longueur et les réunit par un pas de s’écarter beaucoup entre eux; et, pour en faire une nageoire , elle le raccour- cit, l’élargitet enveloppe tous les doigts dans une peau commune sans apporter, du reste, aucun changement important dans la struc- ture de ces parties. Pour s’en convaincre, il suffit de comparer les membres thoraciques de l'éléphant , de l’homme, de la chauve-souris et d’un cétacé (voyez page 201). Il est seulement à noter que, dans les nageoires des baleines, le nombre des pha- langes commence à augmenter ; on en compte jusqu’à sept à l’un (x) Jambe postérieure du cheval ; —# tibia ; — #a première rangée des os du tarse ; — ta’ deuxième rangée de ces Os; — c métatarse On canon; —s stylet formé par un rudiment de doigt latéral; — p phalange ; — pi phalangine; — Pt phalangette enveloppée par le sabot. prolongement de la peau , qui ne les empêche CLASSE DES MAMMIFÈRES. 237 des doigts, et cette disposition conduit évidemment à celle que nous trouverons dans les membres des poissons. Le degrêde flexibilité des doigts et la nature de leurs mou- vemens influent sur leursusages , non-seulement comme organes de locomotion et de préhension, mais aussi comme instrumens du sens du toucher. Lorsqu'ils ne peuvent embrasser les objets pour les palper, et que la main ne peut se mouler en quelque sorte sur leur forme, le tact doit être nécessairement très im- parfait; et ce qui tend à lPémousser encore davantage, c’est lorsque longle, au lieu de laisser à découvert la plus grande portion de l’extrémité du doigt, l'enveloppe en entier et prend la forme d’un sabot. Or, la perfection plus ou moins grande de ce sens influe à son tour sur le développement de l'intelligence, et on peut dire avec vérité que, dans l’immense majorité des cas, sinon toujours, les facultés des mammifères sont d’autant plus élevées que leurs membres sont mieux conformés pour saisir et pour palper. La peau, qui, ainsi que nous avons déjà vu, est le siège du sens du toucher, présente, chez la plupart des mammifères, des particularités remarquables ; chez un petit nombre de ces animaux elle est nue, mais chez la plupart elle est garnie de poils servant à la protéger, et à conserver la chaleur développée dans l'intérieur du corps. L'existence de ces appendices tégu- mentaires est même tellement caractéristique de cette classe, qu’un des zoologistes les plus habiles de l’époque a proposé de remplacer le rom de mammifère par celui de Pilifere, lequel contrasterait avec les mots pennifères et de squammifères qu’il voudrait faire adopter pour désigner les oiseaux et les poissons. Les poils, de même que les dents, sont produits par de petits organes sécréteurs logés dans l'épaisseur du derme ou immé- diatement au-dessous de lui. Chaque poil se forme dans ume petite poche ovoïde, à parois blanches et résistantes, qui communique au-dehors par une ouverture étroite, et qui est appelée capsule. L'intérieur de cette cavité est revêtu d’une membrane tantôt rougeâtre, tantôt diversement colorée, qui parait être une continuation du réseau muqueux de la peau, et à sa partie inférieure se trouve une papille conique ou Zouwr- geon qui recoit un nerf et des vaisseaux sanguins et qui sécrète le poil. Celui-ci, d’abord demi-fluide, se moule sur le bour- geon et se trouve poussé hors de la capsule par l’accumulation de nouvelles couches à sa base. La substance dont les poils sont en majeure partie composés a la plus grande analogie avec du mucus desséché. En les examinant au microscope, on voit quelquefois très distinctement qu’ils sont formés d’une foule de petits cônes ou cornets emboîtés les uns dans les au- 16 Poils. 138 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. tres, mais, en général, ils ont l’apparence d’un simple tube corné, dont l’intérieur parait être rempli d’une matière pulpeuse. Chez la plupart des animaux, ils sont cylindriques et plus gros à leur base qu’à leur sommet; souvent ils sont plus ou moins aplatis; on en connait qui sont tout-à-fait lamelleux et sem- blables à des brins d’herbe; tantôt leur surface paraït être par- faitement lisse, et d’autres fois elle est cannelée ou garnie de petites aspérités , ou bien présente un aspect moniliforme; en- fin leur grosseur, leur forme et leur élasticité varient aussi beaucoup d’un animal à un autre, ainsi que dans les différentes parties du corps d’un même individu. Les noms par lesquels on désigne les diverses variétés de poils différentsuivant les propriétés de ces filamens cornés et suivant les parties où ils croissent. Ainsi on les appelle piquans lors- qu’ils sont très gros, pointus, très raides et qu’ils ressemblent à des épines, et soies, lorsqu'ils sont moins gros et beaucoup moins résistans , mais encore très raides , excepté vers leur ex- trémité; les crèns ne diffèrent guère des soies que par un peu plus de souplesse et moins de grosseur; en général, ilssont droits comme elles, mais cependant ils sont quelquefois ondulés, sur- tout lorsqu'ils sont très longs. La Zaine est une espèce de poil long, très fin et contourné en tous sens; enfin, le duvet ou la bourre se compose de poils d’une finesse et d’une mollesse ex- trême, qui, en général, se trouve caché au-dessous d’une couche plus ou moins épaisse de poils ordinaires, que lon désigne sou- vent sous le nom de jar. La couleur des poils varie beaucoup, mais peut presque tou- jours se rapporter à des modifications du blanc, du noir, du brun-roux ou du jaunâtre; elle parait dépendre de Pexistence. d’une graisse colorée qui est soluble dans l’esprit de vin bouil- lant; et lorsqu'on extrait cette huile par l’action du liquide dont nous venons de parler, les poils prennent tous une teinte gris-jaunâtre. Dans les cheveux blancs, on a trouvé aussi une huile blanche, qui, dans les cheveux roux est remplacée par une huile rougeûtre , et dans les cheveux noirs on a constaté l’exis- tence d’une huile teinte en noir-bleuâtre par du sulfure de fer (1). Tantôt les poils ont, dans toute leur longueur, la même cou- leur; tantôt ils sont plus foncés à leur extrémité qu’à leur base, et quelquefois aussi 1ls présentent une série d’anneaux blancs et colorés. Du reste leur couleur varie, presque toujours dans (1) existe aussi dans, les différentes espèces de cheveux, du soufre qui peut facilement se combiner avec le plomb et quelques autres métaux pour former des sulfures colorés ; c’est de la sorte qu’on parvient à les teindre en noir par l'application de sels de plomb, de mercure, ete : le sulfure qui se forme alors dans la substance du poil étant de cette couleur. CLASSE DES MAMMIFÈRES- 239 les différentes parties du corps, et la disposition générale de ces teintes consiitue ce que lon nomme le pelage des animaux. En général les couleurs sont beaucoup plus foncées à la face supé- rieure qu'à la face inférieure du corps; et lorsqu'elles forment des taches, celles-ci sont toujours disposées symétriquement de chaque côté, à moins toutefois que les animaux ne soient ré- duits à l’état de domesticité , car alors leur pelage présente sou- vent la plus grande irrégularité. Le pelage est ordinairement le même dans les deux sexes, et, en général, ne varie que peu aux différens âges. Dans quelques espèces cependant, les jeunes ont des taches etdes nuances variées qui disparaissent chez l’adulte , et souvent il arrive que la cou- leur des mammifères change avec les saisons. Dans les pays froids , on en voit un grand nombre devenir entièrement blancs ou gris pendant l’hiver, et quelquefois aussi le même effet est produit accidentellement par des maladies ou par des causes que nous ne connaissons pas. En général, les poils tombent à une époque déterminée de Pannée et sont remplacés par d’autres; cette #ve a lieu le plus souvent au printemps ou en automne. Tantôt elle s’opère sans que la couleur du pelage soit modifiée; d’autres fois elle en- traine des changemens très considérables, soit dans la cou- leur, soit dans l’abondance et la nature des poils. En hiver, la fourrure des animaux est ordinairement beaucoup plus épaisse qu’en été , et on y trouve, sous les crins ou poils plus ou moins soyeux qui la composent en partie , une quantité beaucoup plus considérable de duvet. L'influence de la température se fait sentir de la même manière sur les animaux qui habitent des climats différens ; ceux des pays froids ont une fourrure épaisse et abondamment fournie de duvet, tandis que ceux des pays chauds n’ont guère que des poils courts, secs, raides et peu nombreux. Lorsque les bulbes des poils sont extrêmement rapprochés, les filamens cornés qu’ils produisent sesoudent en quelque sorte entre eux et forment des lames solides; c’est de la sorte que paraissent naïtre les espèces d’écailles qui recouvrent tout le corps de cer- tains mammifères très singuliers, connus sous le nom de Pan- golins ; et les anatomistes s'accordent à regarder les ongles et la corne comme ayant la même origine. Quant à la structure de la peau, elle ne présente, chez les mammifères , rien de très particulier. Les organes des autres sens offrent aussi, dans tous les ani- . Appareil de maux de cette classe, à-peu-près le même mode d'organisation l'odorat. que chez l’homme. Dans ceux qui sont remarquables par la finesse de leur odorat (et ce sont les carnassiers plus que tous 16. 240 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. les autres), les fosses nasales et les sinus frontaux prennent un accroissement très considérable, et les cornets, qui font saillie dans l’intérieur de la cavité olfactive, se développent beaucoup ; dispositions dont lutilité est facile à comprendre, car elles tendent toutes à donner à la membrane pituitaire , siège de ce __ sens, une surface plus étendue. FE san Les yeux sont, en général, plus gros proportionnellement chez les mammifères nocturnes que chez ceux qui cherchent leur nourriture en plein jour; et chez les premiers, la pupille, en se rétrécissant sous l'influence de la lumière, au lieu de conserver sa forme circulaire, prend ordinairement l'apparence d'une fente. Chez ceux qui sont condamnés, par leur vie souter- raine, à une obscurité complète, les yeux deviennent extré- mement petits, et n’exisient quelquefois qu’à l’état de vestiges ; enfin, chez les mammifères qui vivent dans l’eau, le cristallin est plus sphérique que chez ceux qui vivent dans Pair, et cette disposition était nécessaire pour augmenter le pouvoir réfrin- gent de l'œil, qui, toutes choses égales d’ailleurs, doit pouvoir rassembler les rayons de lumière avec d'autant plus de force qu’il est placé dans un milieu plus dense. On remarque aussi que chez beaucoup de ces animaux, il existe au fond de Pæil, sur la choroïde, une tache colorée d’une manière très vive que lon nomme fapis, mais on en ignore les usages. Plusieurs ont aussi une troisième paupière très développée et placée verticalement à l'angle interne des deux autres. Enfin la direction des yeux varie beaucoup; chez l’homme, ils sont dirigés presque direc- tement en avant; mais à mesure que l’on descend dans la série des mammifères, vers ceux dont les facultés sont moins déve- loppées, on voit ces organes devenir de plus en plus latéraux, au point que, chez plusieurs, la sphère de la vision est extré- mement différente pour chaque œil, et que Panimal ne peut voir directement devant lui. Appareil L'appareil auditif présente aussi, chez les mammifères, quel- auditif, ques modifications qui paraissent être en rapport avec les mœurs de ces animaux. Chez ceux qui vivent dans l’eau ou sous la terre , la conque auditive est, en général, très petite ou même tout-à-fait rudimentaire, et à mesure que l’on descend depuis l'homme jusqu'aux herbivores, on voit cette partie de loreille prendre de plus en plus la forme d’un cornet acoustique, se détacher de plus en plus de la tête, et devenir de plus en plus mobile. On remarque aussi que, dans les quadrupèdes nocturnes, la membrane du tympan occupe en général plus d'espace et se Système ner- L'OUVE plus à fleur de tête que chez les diurnes. veux. Quant au système nerveux , il ne diffère chez les divers mam- mifères que par le développement plus où moins considérable CLASSE DES MAMMIFÈRES. 241 de certaines de ses parties, Chez tous ces animaux , la masse nerveuse encéphalique est très considérable , soit proportion- nellement au volume du corps, soit relativement à la grosseur des nerfs; mais tous les organes qui la composent ne concourent pas également à ce développement : ainsi les hémisphères céré- braux sont très volumineux , tandis que les tubercules optiques sont fort petits ou même presque rudimentaires, et ces hémi- sphères sont réunis entre eux parune large commissure, que nous avons décrite ci-dessus sous le nom de corps calleux où deméso- Lobes(1); par la suite nous verrons que, chez les oiseaux, les rep- tiles et les poissons, il en est tout autrement. Le cervelet est aussi assez volumineux chez la plupart des mammifères; il se compose toujours d’un lobe médian. (pro- cessus vermiculaire supérieur), de deux hémisphères qui ont la forme de feuillets séparés par des sillons transversaux, et d’une commissure qui entoure la moelle épinière en dessous et qu’on nomme la protubérance annulaire (2). Du reste, le aéveloppement de ces parties varie beaucoup chez les mammifères, non-seule- ment sous le rapport de leur volume , mais encore sous celui des sillons et des circonvolutions de leur surface. A mesure que l’on passe de l'homme aux singes, de ceux-ci aux carnassiers , et des carnassiers aux rongeurs et aux animaux herbivores, on voit, en général, le cerveau devenir de plus en plus petit et de plus en plus lisse. En général, la face se développe en sens contraire, de l’encéphale et du crâne, de façon qu'on peut, jusquà un certain point, juger de la conformation de l’une par eelle de autre, et apprécier, d’une manière approximative, par la comparaison de ces deux parties de la tête, l'étendue des facultés intellectuelles et morales. Les fonctions de nutrition s’exécutent chez tous les mammi- fères à-peu-près comme chez l’homme; aussi la structure des organes qui sont destinés à leur exercice ne varie-t-elle que fort peu dans cette grande classe d'animaux. C’est Pappareil digestif qui présente les différences les plus importantes. Presque tous les mammifères sont pourvus de dents destinées à diviser leurs alimens, mais le nombre et la forme de ces or- ganes varie suivant le régime de l'animal. Chez ceux qui se Fig. 65. nourrissent de chair, les molaires ( fig. 65) sont comprimées et tranchantes, de facon à agir les unes contre les autres, comme le font les lames d’une paire de ciseaux; chez ceux qui vivent d'insectes, ces denis (ff. 66) sont (r) Page 115. (2) Voyez fig. 28 et 29, pag 113 et 114. Fonctions de nutrition. Appareil di- gesti e Cireuiation etrespir ation. 242 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. hérissées de pointes contiguës qui se correspondent, de ma- Fig. 66. nière que les unes s’emboitent dans les inter- valles que les autres laissent entre elles. Lors- que la nourriture de ces animaux consiste prin- cipalement en fruits mous, ces dents ( fig. 67 et 68) sont simplement garnies de tubercules mousses, et lorsqu'elles sont destinées à broyer des substances végétales plus ou moins dures, elles sont terminées par une large surface aplatie et rude comme celle d’une meule ( fig. 69 ;. De toutes les dents, les molaires sont générale- ment les plus utiles, aussi leur existence est- elle plus constante que celle des incisives ou des canines; celles-ci sont nécessaires pour saisir et dévorer une proie vivante, et ne man- quent, par conséquent, chez aucun carnassier ; mais elles sont moins utiles aux herbivores, et les unes ou les autres manquent chez plu- sieurs des mammifères qui ont un régime vé- gétal. Quelquefois aussi elles ne servent plus à la mastication, mais prennent un grand dé- veloppement et constituent des défenses plus ou moins puissantes. La conformation de l'estomac varie aussi beaucoup; en géné- ral, cet organe est simple comme chez l’homme, mais quelque- fois il se compose d’une série nombreuse de poches distinctes, et, dans ce cas, il arrive ordinairement que les alimens, après avoir séjourné un certain temps dans une première cavité stomacale, remontent dans la bouche pour y subir une mastication plus complète, avant que de passer dans les portions suivantes du tube digestif : phénomène que l’on désigne sousle nom de rumination. L’intestin, comme nous l'avons déjà dit, présente des diffé- rences très considérables dans sa longueur et dans son ampleur, suivant que les alimens qui doivent y pénétrer sont fournis par le règne animal ou par le règne végétal; ainsi, dans beaucoup de carnassiers, sa longueur n’est que d'environ trois ou quatre fois celle du corps tandis que, chez les herbivores, elle est ordinairement de dix à douze fois, et quelquefois de près de vingt-huit fois cette longueur (dans le mouton, par exemple), Enfin les glandes salivaires, le foie, le pancréas, le péritoine et les autres annexes du canal digestif ressemblent presque tou- jours à ce que nous avons vu chez l'homme. Il en est de même de lappareil de la circulation et de celui de la respiration : Le cœur présente partout quatre cavités bien dis- tinctes; savoir, deux oreillettes et deux ventricules ; toujours CLASSE DES MAMMIFÈRES. 243 les poumons renferment aussi un nombre immense de très petites cellules , et ne laissent point passer l'air de leur intérieur | dans les différentes parties du corps, ainsi que cela se voit chez les oiseaux. Le mode de reproduction des mammifères, comme, nous | Reproduc- l'avons déjà dit, est caractéristique de cette grande division ‘02: des animaux vertébrés. L’embryon se développe toujours dans une poche nommée matrice, aux parois de laquelle il adhère par l'intermédiaire de vaisseaux sanguins, de façon que le sang de la mère sert toujours à sa nutrition, et après la naïs- sance , le jeune tire encore sa nourriture du corps de sa mère ; car celle-ci est toujours pourvue de mamelles au moyen des- quelles elle l’allaite pendant les premiers temps de sa vie. Tantôt les petits naissent les yeux ouverts, et peuvent de suite courir et chercher eux-mêmes leur nourriture ; mais un grand nombre d’autres mammifères viennent au monde les yeux fermés, et dans un état de faiblesse telle qu’ils peuvent à peine se mou- voir ; il en est même qui naissent en quelque sorte avant terme, car leur corps est à peine ébauché, et ils ne pourraient vivre s'ils ne se greffaient en quelque sorte à la tétine de leur mère, où ils restent suspendus pendant un temps considérable. Cette naissance prématurée parait dépendre de la structure de la ma- trice qui, au lieu d’avoir un seul orifice, en présente deux et n'offre aucun obstacle à la sortie de Pembryon. Chez la plupart | des animaux qui naissent dans cet état d’imperfection extrême, la peau du ventre forme, au-devant des mamelles, une poche servant à loger et à protéger les petits. Les mamelles ne servent à l'allaitement des jeunes que chez Appareilde les femelles , mais elles existent aussi chez le mâle. Leur position de la varie beaucoup : tantôt elles sont fixées sur la poitrine, d’autres ro fois sous le ventre ou même aux aines; enfin leur nombre est, en général, à-peu-près en rapport avec celui des petits dont se compose chaque portée. Le produit de la sécrétion de ces glandes, ou le lait, est un liquide blanc et opaque formé par de l’eau tenant en dissolution du sucre de lait , quelques sels , et un peu d’acide lactique libre, et tenant en suspension des globules de matière caséeuse et de beurre. Ses qualités varient un peu chez les différens ani- maux et peuvent être modifiées par les alimens dont ceux-ci font usage ; en général il laisse, par l’évaporation, 10 à 12 pour 100 de parties solides, mais sa richesse peut varier beaucoup, comme nous le verrons, du reste, lorsqu’en faisant l'histoire de la vache nous reviendrons sur son étude. lacta- Classics tion des mam- miféres. 244 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. La classe des mammifères est très nomhreuse et se compose de plusieurs groupes d'animaux qui présentent des types d’or- ganisation bien distincts et qui forment autant d'ordres diffé- rens. La plupart de ces groupes sont si nettement séparés de tout ce qui les entoure , qu’on ne peut avoir de doute sur ieurs limites, et que tous les zoologistes s’accordent à les admettre comme formant autant de divisions naturelles ; mais dans d’au- tres, le type principal se modifie tellement, qu’il se fait un passage presque insensible des uns aux autres, et que la ligne de démarcation devient très difficile à établir. Tel mammifère, par exemple, a tout autant d’analogie avec le iype qui repré- sente l’ordre des quadrumanes qu'avec celui des édentés, et on peut , avec autant de raison, le placer dans l’une ou lautre de ces divisions. Les différences qu’on rencontre , dans ces séries d'animaux plus ou moins dissemblables , ont aussi paru à quel- ques naturalistes plus importantes qu'à d’autres, et les ont portés à répartir ces êtres dans un nombre d’ordres plus con- sidérables : aussi les auteurs n’adoptent-ils pas tous les mêmes bases pour la classification des mammifères, et ne sont-ils pas d'accord sur le mode le plus naturel de les distribuer. La méthode que nous suivrons ici, est celle de M. Cuvier ; on peut bien, il est vrai, lui reprocher quelques imperfections, mais elle est généralement considérée comme la plus naturelle qu’on ait encore proposée , et elle a été adoptée par la plupart des zoologistes. Cette classification repose principalement sur la considération des organes du toucher et de la manducation, dont les modifi- cations entrainent toujours avec elles une foule de différences plus où moins importantes dans la structure des autres parties du corps , dans les mœurs et même dans l'intelligence. La mo- bilité des doigts , et la manière plus ou moins profonde dont leur extrémité est enveloppée dans l’ongle ,indiqueni le degré de per- fection des organes du toucher, d’où dépend le plus ou moins d'adresse de Panimal , et la disposition de ses dents fait connaitre son régime et par conséquent les points les plus importans de ses mœurs. Mais ces caractères ne suffisent pas entièrement pour la distribution des mammifères en ordres naturels, et il faut aussi tenir compte du nombre des membres et du mode de reproduction. La classe des mammifères se divise de la sorte, en neufordres, dont les principaux traits distincüfs se trouvent résumés dans le tableau ci-joint, Page 244. TABLEAU SYNOPTIQUE DE LA CLASSIFICATION DES MAMMIFERES. Mammifères ordi- ad Deux paires de membres; peau pilifère; point de nageoires à l'extrémité de la queue. CLASSE des MAMMIFÈRES, | | | Mammifères ongui- culés. Ongles plus ou moins petits, ne for- mant pas de sabot et n’enveloppant pas en entier la partie du doigt qui touche à terre ou qui sert au toucher, (Doiïgts plus ou moins flexibles et pouvant se ployer autour des ob- jets pour les saisir. ) Mammifères ongulés. Extrémité des doigts ORDRES, EXEMPLES, Des mains aux membres tho- l pe Dee 5 te des Rd) seulement; les mem- ! membres dont le pouce est fbres abdominaux n'ayant pas ; | opposable aux autres doigts, Île pouceopposable al PIMANES, { L'Homme. Mede de repro-| et dont la conformation les / doigts etétant conformés pour duction normal; les} rend propres à servir d’or-|\la station verticale. jeunes naissentavec} ganes de préhension et de tous leurs organes] toucher. ( Système dentaire! Des mains aux membres ab- déjà formés, et ne | complet.) dominaux , aussi bien qu'aux Ÿ QUADRUMANES. {| Les Singes se griffent pas à la membres thoraciques. { E tétine de leur mère. Système dentaire complet , És'Ou c’est-à-dire composé de trois CARNASSIERS. Les/Chate sortes de dents : incisives , Ca- = è Les Phoques. nines et molaires. Point de dents canines. Les incisi- x ves extrémement à Les Écureuils. Point de mains ; le pouce See développées et dis- RONGEURS. Les Rats. n'étant pas opposable aux entaire loosées pour ron- Les Lièvres. autres doigts. IMCOM= ser des corps durs. plet Ne Point de dents quant de |suyrle devant de la ps bouche (les cani- : LesF dl ou GIn- Vues et les molaires ÉDENTÉS. es Fourmillers. cisives. ) Les Tatous. aussi bien que les incisives). Les Sarigues. Les Kanguroos. Mode de reproduction anomal : les jeunes naissent daus un état d’imperfection extrême, et en général se développent ensuite dans une poche où ils sont en quelque sorte greffés à la tétine de leur mère. MARSUPIAUX. peuvent manquer l ) entièrement L'énvel0n- Mode de digestion normal. Les alimens après avoir été avalés ne remontent pas L'Éléphant. pée par l'ongle qui dans la bouche pour subir une nouvelle masticatiou. Estomac en général très | PACHYDERMES. ? Le Cochon. constitue un sabotet y simple et formant une seule poche. Le Cheval. { émousse complètement le tact. (Doigts entière- : Dent ee de RE Mode de digestion anomal. Les alimens, après avoir séjourné dans un premier Le Bœuf. eulté de se ployer pour penee: remontent dans la bouche pour être ruminés, et redescendent ensuite RUMIN ANS. Le Mouton. palper les objets et de dans d’autres cavités stomacales. Quatre estomacs bien distincts. Le Cerf. ‘les saisir.) Mammifères pisciformes. Une seule paire d bres: : - Sheverr É Le Dauphin. | paire de membres; une nageoire horizontale à l'extrémité de la queue, peau nue. } CÉTACÉS. LalBaleine. ORDRE DES BIMANES. 245 ORDRE DES BIMANES. LI L'ordre des himanes, facile à distinguer du reste de la classe des mammifères par lexistence de mains aux membres thora- ciques seulement, et par plusieurs autres Caractères anato- miques, ne se compose que dun seul genre, formé à son tour par une espèce unique : L'HOMME. Notre organisation ne diffère que peu de celle d’un grand nombre d’autres mammifères; les fonctions de la vie de nutri- üion s’exécutent de la même manière chez eux et chez nous, et la structure de nos organes des sens ne présente que peu de particularités; mais cependant l’homme se trouve à une dis- lance immense de tous les autres animaux, et ce qui l'en dis- lingue surtout c’est l'intelligence admirable dont la nature Pa doué. Les actions des animaux sont presque entièrement diri- gées par l'instinct; la faculté du raisonnement est chez eux nulle ou du moins extrêmement bornée , et ils ne peuvent, comme nous, représenter leurs idées par des signes et se les commu niquer entre eux (1); aussi les observations faites par l’un de ces êtres, et l'expérience qu’il peut avoir acquise, ne profi- tent qu'à lui seul, et sont sans résultat pour le reste de sa race; tandis que, dans l'espèce humaine , ces connaissances se transmettant par la parole et par l'écriture, se perfectionnent de plus en plus, et par leurs progrès réveillent en nous de nou- velles facultés ; Phomme, en un mot, est, de tous les animaux, le plus intelligent et le seul qui soit doué de perfectibilité et sus- ceptible de civilisation. Le cerveau , comme nous lavons déjà vu, est le siège des fa- (1) L'homme seul possède un langage assez précis et assez varié pour in- fluer sur le développement de l'intelligence; mais c’est peut-être a tort que la plupart des naturalistes se refusent à admettre l’existence de quelque chose &'a- naloguc chez certains animaux. Lorsque nous étudierons les mœurs des insectes, uous verrons des phénomènes qui semblent indiquer que les fourmis, les abeilles , etc. , ont la faculté de se communiquer certaines idées ; du reste cette faculté, lors même qu’elle existerait, serait trop bornce et trop incomplète pour pouvoir étre comparée à la parole Supériorité de l'homme sur les ani- maux, Cerveau. Mains. 246 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. cultés intellectuelles : on doit donc s’attendre à trouver cet organe plus développé et d’une structure plus parfaite chez FPhomme que chez tous les autres animaux, et c’est , en effet , ce qui parait résulter des recherches des anatomistes. Les hémi- sphères cérébraux sont plus volumineux proportionnellement chez nous que chez presque tous les autres mammifères ; les circonvolutions et les anfractuosités dont leur surface est sil- lonnée sont plus marquées et plus nombreuses, et le lobe pos- tériéur se prolonge en arrière de façon à recouvrir le cervelet, tandis que chez la plupart des animaux, il ne le cache que très imparfaitement ou n’existe même pas. La hauteur de la partie antérieure des hémisphères cérébraux est aussi très remarquable chez l’homme, et cette disposition donne à son front un degré de saillie que les autres mammifères sont loin de présenter : les dimensions de la face sont en même temps moins considérables chez nous que chez ces derniers, et il résulte de ces deux cir- constances que notre angle facial est bien plus ouvert même que celui des animaux auxquels nous ressemblons le plus. (1) Du reste, ce n’est pas seulement à l’organisation de son cer- veau que l’homme doit sa supériorité sur tout ce qui l'entoure; il présente encore d’autres particularités de structure qui, en le rendantle plus adroitde tous les animaux , contribuent aussi au développement de ses facultés, et le mode de conformation de ses membres est de ce nombre. Les membres thoraciques sont disposés de la manière la plus favorable pour l’exercice de leurs fonctions comme organes de préhension et de toucher; les doigts sont longs et flexibles ; ils ont tous , excepté quelquelois annulaire, des mouvemens séparés, ce qui n’a pas lieu chez les autres animaux ,même chez ceux qui sont pourvus de mains. Le pouce , qui leurest opposable , est plus long à proportion que chez les singes, et, par conséquent, peut s'appliquer plus facilement contre l'extrémité de la face pal- maire des autres doigts et mieux saisir les petits objets. Les ongles, qui sont larges et plats, ne garnissent que la face dorsale de l'extrémité des doigts, de manière à prêter un appui au tact, sans rien lui ôter de sa délicatesse; la main en entier peut exécuter des mouvemens de rotation des plus étendus, et le bras qui la porte trouve une attache solide à notre large omoplate et à notre longue clavicule. Mais , sous ce rapport, ce ne sont pas là les seuls avantages que présentent notre mode d'organisation ; ia division du travail exécuté par les membres est portée plus loin que chez les autres mammifères, et nous savons déjà que c’est en divisant ainsi le travail que la nature perfectionne tou- (1) Voyez ce qui a déja été dit à ce sujet page 163. EE ORDRE DES BIMANES. 247 jours le jeu des organes. Chez tous les mammifères, l'homme excepté, les membres antérieurs servent aux mêmes usages que les membres postérieurs et sont toujours employés à la loco- motion, lors même qu’ils sont conformés de manière à pouvoir agir en même temps comme organes de préhension ; chez l’homme , au contraire , les membres postérieurs servent exclu- sivement à la station et à la locomotion , tandis que les membres antérieurs restent libres pour agir comme instrumens de pré- hension et de toucher, différence qui suffirait déjà à elle seule pour les faire remplir leurs fonctions avec un degré de perfec- tion bien supérieur à tout ce qu’on voit chez les singes et les au- tres mammifères. La position verticale qui, sous une foule d’autres rapports encore , est si favorable à l’homme, a été considérée par quel- ques auteurs comme ne lui étant pas naturelle et comme étant seulement le résultat de l'éducation; mais c’est une erreur. Quand même il le voudrait , l'homme ne pourrait marcher ha- bituellement à quatre pattes ;ilest, detous les mammifères , ce- lui dont les membres postérieurs sont conformés de la manière la plus favorable pour servir de soutiens au corps, et tout, dans son organisation, est disposé pour la station verticale, En effet, la conformation des membres suffirait déjà pour rendre la position horizontale extrêmement incommode; chez les quadrupèdes , le tronc est soutenu en avant sur une espèce de sangle charnue très forte qui se fixe aux omoplates et qui est formée par les muscles grands denteles ; la poitrine est en même temps étroite, de façon qu’il suffit d’une légère déviation du corps pour que l’équilibre ne soit pas rompu lorsque lani- mal lève une de ses pattes de devant; enfin, l'extrémité de ces membres présente un degré de solidité qui est incompatible avec une grande flexibilité, mais qui est très utile pour la loco- motion. Chez l’homme, au contraire, le muscle grand dentelé est extrêmement faible, les épaules sont très écartées, et la main ne fournirait pas au Corps un appui solide; enfin , le peu de flexibi- lité du pied sur la jambe et la longueur de la cuisse ramenerait continuellement le genou contre terre. La tête des quadrupèdes est soutenue par un ligament appelé cervical, qui s’étend de l’occi- put aux vertèbres de la base du cou, et ces vertèbres sont dispo- sées de façon à les empêcher de se fiéchir en avant et à donner une grande puissance aux muscles releveurs de la tête. Mais chez l’homme, il n’existe pas de ligament cervical, et les vertèbres ne présentent pas de disposition semblable, bien que la tête soit proportionnellement plus pesante que chez aucun autre animal; aussi, dans la position horizontale, pourrait-il tout au plus la maintenir sur la même ligne que l’épine du dos, et alors Position ver- ticale. 248 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. ses yeux étant dirigés contre terre, il ne pourrait voir devant lui. Du reste, celte position ne serait pas seulement génante, elle serait impossible à conserver long-temps; car les artères qui vont au cerveau de l’homme ne se subdivisent point comme dans beaucoup de quadrupèdes , et leur volume étant très consi- dérable (1), le sang s’y porterait avec tant de force qw’il en résul: terait des apoplexies fréquentes. Dans la position verticale et bipède, au contraire, tout dans le corps humain est admirablement bien calculé pour rendre la station solide et les mouvemens faciles. Le pied est très large et disposé de façon à appuyer sur le sol dans presque toute l’étendue de sa surface inférieure; les divers os qui le forment sont solidement unis entre eux, et la jambe pose verticalement sur lui; le genou peut s’étendre complètement, de sorte que le poids du corps se transmet directement du fémur au tibia; les muscles qui étendent le pied et la cuisse sont remarquables par leur volume et leur force , et leur mode d’insertion est favorable au déploiement d’une grande puissance; car le talon fait une sail- lie considérable en arrière de larticulation du pied , de manière que le bras delevier de la puissance, représenté par cet organe, est beaucoup plus leng que celui de Ia résistance ; le bassin est beaucoup plus large que chez les autres animaux, ce qui, en écartant les cuisses et les pieds, augmente l’étendue de la base de susientation; la courbure brusque de lextrémité supérieure du fémur contribue aussi à produire le même effet ; enfin, la tête est presque en équilibre sur le tronc , parce que son articulation est alors sous le milieu de sa masse, et les yeux sont dirigés en avant, précisément dans la direction où ils doivent être les plus utiles. Pieds. L'homme est le seul mammifère vraiment himane et hipede. Les singes , qui , sous beaucoup d’autres rapports , lui res- semblent extrêmement , ont bien les membres antérieurs dis- posés comme les siens; mais leur pied est très différent : c’est une véritable main propre à saisir et à grimper, tandis que notre pied ne peut, en aucune façon, servir d’organe de préhension ; car ses doigls sont peu flexibles, et le pouce, qui est plus gros que les autres orteils et placé sur la même ligne , ne leur est point opposable. Apparcil vo. Un autre caractère , qui distingue l’homme des mammifères cal. en général, esi la perfection de son appareil vocal: c’est le seul animal de cette classe qui puisse articuler les sons , et c’est à celte faculté qu’il doit la parole. Pablesse Mais l’homme , qui est si favorisé du côté de l'intelligence et (1) Voyez ce qui a été dit de l’influence du caïbre des vaisseaux sur la rapi- dité du cours du sang, pag. 58, ORDRE DES BIMANES. 249 de l'adresse , ne l’est point du côté de la force. Sa vitesse à la course est beaucoup moindre que celle des animaux de sa taille , et la nature ne l’a pourvu d’armes ni pour attaquer, ni pour se défendre. Une grande partie de son corps n’a même pas de poils pour le protéger contre l’intempérie des saisons , et il est de tous les animaux celui qui est le plus long-temps à prendre les forces nécessaires pour se suffire à lui-même. Si la nature n'avait pas donné à homme Pinstincetde la socia- bilité et la puissante intelligence qui le distingue, il aurait été un des êtres les plus misérables qui habitent la surface de la terre, et probablement sa race en aurait bientôt disparu ; mais cette impulsion instinctive , jointe au sentiment de sa faiblesse, Pa porté à vivre associé avec ses semblables , et alors ses facultés intellectuelles lui ont permis de tirer parti de tout ce qui Fen- tourait, pour assurer sa subsistance et son bien-être: aussi s’est-il multiplié presque à Pinfini et s’est-il répandu sur tous les points de la surface du globe. (1) D'après cela seul que l’homme est évidemment destiné à vivre en société , on devait présumer qu’il était fait pour se nourrir de substances végétales plutôt que de chair. En effet les mammi- fères carnivores sont presque toujours solitaires ; car, pour trou- ver une proie suffisante, il faut qu’ils se répandent au loin, et, s’ils étaient rassemblés en troupes nombreuses , ils se nuiraient entre eux, tandis que les herbivores, trouvant une nourriture plus abondante , n’ont pas besoin de se la disputer et peuvent (rx) Le nombre des hommes qui peuplent aujourd’hui la surface de la terre est loin d’être conuu avec exactitude ; mais d’après les calculs les plus récens des statisticiens , il paraïîtrait qu’on peut l’évaluer à environ sept cent trente-sept millions, répartis de la manière suivante: Habtains par mille carré, de 60 au degré. Europe sesssssssssessssesessssse 227,700,0009e°9.e.e .. S2 Asieterossesssevessessesssenesessse 390,000,000° ve... 32 Afriquersssssesssssssssssssssses 60,000,000%---#99 7 Amérique. sssssssssesessesssssss 39,000,000vee+.e 3 = Océanie (y compris les îles de la Sonde, etc )sesmsssesseserenses 20,000,0C00°°°°5999° 6 54 100 % Population. La population plus ou moins nombreuse d’un pays dépend moins de son climat que de la civilisation et des richesses de ses habitans: Dans l'empire bri- tannique , on compte 257 habitans par mille carré ; dans l’empire français, 208 pour la même superficie du sol; dans l'empire prussien , 155 ; dans l'empire russe , 35. Dans les possessions asiatiques de cette dernière puissance , il n’y a guère plus de 8 habitans pour dix fois cette étendue de terrain ; et dans la Nouvelle-Hollande orientale, on n'évalue leur nombre qu’a environ 4 pour cent milles carrés , c’est-à-dire pour un espace , qui, en France , serait peuplé par plus de 20,000 âmes. Régime. Diverses par- cuiarités. 250 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. vivre paisiblement en société. Du reste, la disposition de lappa- reil digestif montre aussi que l’homme est fait pour se nourrir principalement de fruits et de racines. Ses dents sont conformées de la même manière que celles des autres mammifères fru- givores. Son estomac est simple; son canal intestinal assez long, et son gros intestin volumineux. Ses mâchoires courtes et de force médiocre, et ses canines, égales aux autres dents, ne luipermettraient guère de dévorer de la chair, s’il ne prépa- rail ses alimens par la cuisson ; mais il s’accoutume facilement aux matières animales ainsi modifiées par le feu , et leur usagé, joint à celui des substances végétales , parait même plus favo- rables au développement de ses forces et à la conservation de la santé , qu’un régime exclusivement végétal ; ainsi, lors même que l’homme aurait été primitivement frugivore , il est évident que , dès les premiers momens de sa civilisation, il est devenu essentiellement omnivore. Les détails dans lesquels nous sommes entré relativement à la structure de l’homme , en traitant de la physiologie et de l'anatomie, nous permettent de ne pas revenir ici sur l’ensemble de son organisation , et, pour compléter l’énumération des par- ticularités les plus importantes qu’il nous offre , nous nous bor- nerons à rappeler qu’il a trente-deux vertèbres , dont sept cer- vicales, douze dorsales, cinq lombaires, cinq sacrées (soudées en une seule pièce) et trois coccygiennes, cachées sous la peau : douze paires de côtes , dont sept de vraies côtes et cinq de fausses côtes : le crâne composé de huit os (1), et la face de quatorze (2) : point d’os intermaxillaires distincts comme chez la plupart des mammifères , le nez et le menton saillans : seize dents à chaque mâchoire, savoir: quatre incisivestranchantes placées au milieu de la bouche , deux canines pointues , mais ne dépassant pas les autres dents , situées aux coins de la bouche , enfin diximolaires à couronne tubereuleuse, placées en arrière,cinq de chaque côté (3): le foie divisé seulement en deux lobes et un lobule : le pancréas congloméré et non partagé en branches comme chez la plupart LA des mammifères : le cœcum garni d’un appendice grèle; Péprploon (1) Savoir : l’occipital, les deux temporaux , les deux os pariétaux , l’os fron- tal , l'os ethmoïde et l'os sphénoïde (voyez fig. 41, pag: 186). Dans le jeune âge, la plupart de ces os sont formés de plusieurs pièces distinctes , qui, plus tard, se soudent entre elles ; le frontal , par exemple, est séparé en deux moitiés. Il est ainsi à noter que, dans les deux premiers temps de la vie, ces os laissent entre eux des espaces vides , que l’ou nomme fontanelles. (2) Savoir : les .deux os nasaux , les deux os maxillaires supérieurs , les deux os lacrymaux , les deux os jugaux , les deux os palatins , les deux cornets, le yomer et l’os maxillaire inférieur (voyez fig. 41 , pag. 186). (3) Voyez fe 21, pag. 84. ORDRE DES BIMANES. 251 pendant , comme un tablier, au-devant des intestins jusqu’au bassin : le rein gauche placé plus haut que le droit, tandis que l'inverse se remarque chez les autres mammifères : l'urine conie- nant de Pacide urique, aussi bien que de l’urée : enfin le poumon droit divisé en trois lobes, et le poumon gauche en deux. Naissances. La portée ordinaire de l'espèce humaine n’est que d’un petit; mais cependant les jumeaux ne sont pas rares. D’après des re- cherches récentes , il paraîtrait qu'il y a une couche double sur environ quatre-vingts à cent accouchemens ordinaires. On cite aussi des exemples de portées plus nombreuses ; mais elles sont très rares ; des cas de couches triples ne se présentent pas, terme moyen, plus d’une fois sur trente mille naissances. Pour la plupart des animaux , les jeunes ne naissent qu’à une époque déterminée de l’année , qui en général est la plus favo- rable à leur développement. Dans l’espèce humaine il en est autrement ; les naissances ont lieu en tout temps, mais cepen- dant l’influence des saisons se fait encore sentir sur ce phéno- mène, car elles sont beaucoup plus nombreuses à certaines époques äe lannée qu’à d’autres. En France, c’est en hiver, depuis décembre jusqu’en mars qu’elles sont les plus fréquentes, et c’est dans les mois de juin, de juillet et d’août qu’on en compte emoins. Vers le nord, les époques du maxièmumet du minimum des naissances arrivent plus tard; et dans les pays chauds, au contraire , elles se remarquent plus tôt dans l’année. Les consé- quences à déduire de ces faits sont faciles à saisir. Le nombre des enfans de lun et l’autre sexe n’est pas le même; partout il naït plus de garçons que de filles; et, chose bien re- marquable , la proportion est toujours à-peu-près la même. Dans tous les pays où les registres des naissances sont tenus avec assez d’exactitude pour pouvoir servir à des calculs sem- blables , on a trouvé qu’il venait au monde, au moins, vingt-et- un garçons pour vingt filles; en France, cette proportion est même plus forte ; elle s'élève à seize garçons pour quinze filles. (1, Mais de ce qu’il naïît plus de garçons que de filles, il ne faut pas en conclure qu’il existe plus d'hommes que de femmes, car ce serait une erreur. Les chances de mortalité sont plus fortes pour les premiers, et, à un âge un peu avancé, il y a réellement plus de femmes que d'hommes. (x) Dans les quinze années comprises entre 1817 et 1551, il est né en France 7:490 951 garcons et 7,041,247 filles (ou terme moyen, 409,395 garcons et 469,416 filles par an), c’est-à-dire environ un seizième plus de garcons que de filles. Ce rapport ne varie que très peu. Pendant ce laps de temps , sa valeur n’a jamais dépassé 2 et n’a jamais été au-dessous de — à. D. Ds VV. Premier äge. Dévelop- pement des dents. Taille de l'homme. 252 BOOLOGIE DESCRIPTIVE. La durée de la gestation est de neuf mois; c’est à quatre mois et demi environ que le fœtus commence à exécuter des mou- vemens, et il est susceptible de vivre lors même qu’il nait à sept mois. En venant au monde lenfant peut ouvrir les yeux, mais il ne parait pas encore jouir du sens de la vue, et ce n’est, en général, qu’au bout de quelques semaines qu’il com- mence à diriger ses regards vers les lumières les plus vives; bientôt après il fixe les objets dont les couleurs sont éclatantes, et il ne tarde pas à distinguer tout ce qui lentoure ; mais pen- dant long-temps il n’a aucune idée ni des distances ni des gran- deurs. Ses autres sens ont également besoin d’une sorte d’édu- cation ; pendant les cinq ou six premiers mois il ne fait entendre que des cris; il acquiert ensuite la voix ordinaire et commence à articuler les sons vers la fin de sa première année. Les muscles des reins et des membres inférieurs sont d’abord trop faibles pour que lenfant puisse se soutenir sur ses jambes; mais ces organes se fortifient peu-à-peu, et vers l’âge d’un an il com- mence à marcher. A l’époque de la naissance, les dents se forment, mais elles serit encore cachées dans l’intérieur des mâchoires et elles ne sortent au-dehors que plusieurs mois après. Le moment de Papparition des premières dents, ei la durée totale du travail de la dentition varient beaucoup; mais ,en général, les premières dents percent la gencive vers l’âge de six à dix mois; le plus ordinairement, ce sont les incisives du milieu qui se montrent d’abord, puisles in- cisives latérales , les canines et les premières molaires ; vers deux ans, toutes les dents de lait, au nombre de vingt, sont sorties de leurs alvéoles, et vers la septième année, elles commencent à Lom- ber pour faire place à celles de la seconde dentition, dontquairese sont déjà développées au fond de la bouche, deux ou trois ans auparavant. A neuf ans à-peu-près, une autre grosse molaire vient se placer derrière les vingt-quatre déjà existantes , et plus tard, quelquefois à vingt ou vingt-cinq ans même , il en apparaît encore quatre, auxquelles on donne vulgairement le nom de dents de sagesse, à cause de leur formation tardive. La taille moyenne de l’homme parait être d'environ cinq pieds, mais il existe, à cet égard, de grandes différences. Quelques peuplades de la Patagonie, les habitans des iles des Naviga- teurs, les Caraïbes, etc., sont remarquables par leur stature élevée ,qui , au dire des voyageurs les plus exacts, est, en géné- ral, d'environ un mètre huit à neuf décimètres (c’est-à-dire cinq pieds neuf à dix pouces) ou même plus; tandis que les Esquimaux et les Bochismans montagnards ne paraissent avoir guère plus d’un mètre trois décimètres (quatre pieds); et si, au lieu de s’en tenir à l'observation des masses, on descend à des ctshbis:s ORDRE DES BIMANES. 253 cas exceptionnels , on trouvera une inégalité bien plus grande encore; Car On à vu des géans qui avaient à-peu-près une fois et demie læ taille des peuples les plus grands(c’est-à-dire envi- ron deux mètres huit à neuf décimètres , ou près de neuf pieds), et des nains, qui n'avaient guère plus de la moitié de la hau- teur de la taille moyenne des plus petites races humaines (en- viron six décimètres , ou deux pieds). Chez les peuples de moyenne taille, les femmes sont d’envi- ron un seizième moins grandes que les hommes ; mais chez les peuples très petits cette différence diminue, tandis que chez ceux qui sont remarquables par leur grande taille, elle devient plus sensible encore. Ces inégalités dans la taille des hommes dépendent, d’une part, des races auxquelles ils appartiennent, et, de l'autre, des circonstances où ils sont placés. L'influence des races devient surtout évidente lorsqu'on com- pare entre eux certains peuples ayant des mœurs analogues et habitant le même pays. Dans la Patagonie, par exemple, il existe des peuplades nomades d’une taille très élevée, d’autres dont la taille est médiocre ; et à une très petite distance, dans la Terre de Feu, on en trouve qui sont au-dessous de la taille moyenne. Les peuples de la plus grande taille habitent, pour la plupart, dans l’hémisphère austral, soit dans l'Amérique du sud, soit dans plusieurs des archipels de l'Océan austral, depuis les iles Marquises jusqu’à la Nouvelle-Zélande. Les peuples les plus petits se trouvent, en général, dans les parties les plus reculées de l'hémisphère boréal ; on en trouve aussi presque sous l'équateur (quelques hordes de Papous à Waigiou), et dans le voisinage du cap de Bonne-Espérance, où le climat est loin d’être rigou- reux; mais néanmoins on ne peut révoquer en doute qu’un froid très vif ne tende à arrêter le développement de la taille de l’homme; car, dans les deux hémisphères , les contrées les plus froides ne sont peuplées que de races extrêmement petites. Un froid modéré paraït au contraire favorable au développe- ment de l’homme. En France et dans la plupart des autres par- ties de l’Europe où le climat est le plus doux, les hommes sont, en général, moins grands que dans les parties froides de notre continent, telles que la Suède , la Finlande et même la Saxe, l'Ukraine, etc. Mais la température exerce peut-être moins d'influence sur la stature de l’homme que ne le fait le bien-être ou la misère. On peut poser en principe que sa taille moyenne devient d'autant plus élevée et que sa croissance s'achève d'autant plus vite, que, toutes choses égales d’ailleurs, le pays où il vit est plus 17 254 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. riche , et que les peines et les privations qu’il éprouve pendant sa jeunesse sont moins grandes. Les preuves de la vérité de cette loi physiologique abondent; nous pourrions Citer comme telles les observations faites par un de nos voyageurs les plus infatigables, M. Gaimard, sur la population des îles Sandwich, qui est divisée en deux classes bien distinctes, les chefs et le peuple : les hommes de la pre- mière de ces castes ont une nourriture abondante , et ne sont jamais obligés de se livrer à des travaux excessifs; aussi sont- ils grands, forts et bien constitués, tandis que les hommes du peuple, qui vivent dans la misère, sont généralement d’une taille inférieure et d’une force moindre. Mais voici des faits en- core plus concluans. | Chacun sait combien ilexiste d’inégalité de richesses entre dif- férentes parties de la ville de Paris ; dans les trois premiers arron- dissemens , comprenant toutes les parties nord-ouest de cette vaste capitale , la misère est rare, tandis que dans d’autres arron- dissemens, tels que le sixième,le onzième, et surtout le douzième, elle est presque générale. Or, dans cette première portion de la ville, sur cent jeunes gens appelés pour le service militaire, il s’en trouve quarante-cinq qui sont réformés pour défaut de taille, difformités ou maladies, etc. ; et la taille moyenne des cin- quante-cinq conscrits est de 1m. 690 mm. (ou 5 pieds 2 pouces 5 lignes), tandis que dans les quartiers pauvres dont nous ve- nons de parler, les réformes s'élèvent à cinquante-deux sur cent, et la taille moyenne des quarante-huit conscrits, jugés aptes au service, n’est que de 1 m., 678 mm. (ou 5 p. 1 p. 11lig.) L'influence de la misère se fait sentir de la même manière lorsqu'on examine la taille moyenne de l’homme dans les différens départemens de la Franée. C’est dans le nord-est de ce royaume que la taille est la plus élevée , et c’est aussi là que les richesses sont les plus grandes ; en Bretagne, où l’agriculture et l’industrie sont peu avancées, les hommes sont plus petits que dans toutes les autres parties de la France. (1) (x) D’après les mesures prises sur les conscrits du temps de l’Empire , on voit que la taille moyenne des jeunes gens de vingt ans était alors, en France , con- sidérée dans son étendue actuelle, de 1 mètre 615 millimètres (ou 4 pieds 11 pouces 8 lignes) et que, sur cent conscrits, on comptait environ 28 ayant moins de 1 m. 570 mm. (ou 4 pieds 10 pouces); 25 ayant de 1 m. 57o mm. à 1 m. 62%, mm. (ou 5 pieds); 26 ayant de 1 m. 624 mm. à 1 m. 678 mm.(ou 5 pieds 2 pouces); 16 ayant de 1 m. 678 mm. à 1 m° 759 mm.(ou 5 pieds 5 pouces); Et 2 d’une taille plus élevée. Aujourd’hui on ne toise que les conscrits jugés aptes au service militaire, de facon qu’on ne peut connaître la taille moyenne de la population entière ; mais ; ORDRE DES BIMANES. 255 C’est dans les premiers temps de la vie que la croissance est Lois de la la plus rapide. En Belgique, par exemple, où la taille de Phomme croissance. est un pe@ plus élevée qu’en France , l'enfant, au moment de la naissance , a, terme moyen, à-peu-près 490 millimètres (ou 18 pouces), et dans la première année grandit d'environ 2 déci- mètres (ou 7 pouces 5 lignes); c’est-à-dire d'environ la seizième partie de son accroissement total; tandis que, dans la seconde année , sa croissance devient moitié moins rapide, et que de l’âge de quatre à cinq ans jusqu’à celui de la puberté, elle n’est, dans le même espace de temps , que d’environ la vingt-et-unième partie de l’accroissement total. Après l’âge de la puberté, l’homme continue encore à grandir, mais toujours de plus en plus len- tement, et pendant les dernières années de sa croissance, elle devient si faible qu’elle échappe à l'observation ordinaire. La figure ci-jointe ({g. 70) donnera une idée encore plus exacte de la manière dont la croissance de l’homme se fait aux différens âges; elle est due à des recherches nombreuses publiées récem- ment par un des savans les plus distingués de la Belgique, M. Gué- telet ,etelle représente la taille moyenne de homme, depuis le moment de la naissance jusqu’à l’âge adulte, calculée pour une population dont la taille est, terme moyen, de 1 m. 684 mm. Fig. 70. 30. 19,18.17. 16 15.14,13.12.J1.10. 9.8. 7. à en juger par celle du contingent fourni chaque année pour l’armée , il parai- trait que , depuis la paix , elle tend à s'élever un peu ; ce qui s’expliquerait par- faitement bien par l'augmentation du bien-être et des richesses générales. En effet, sur cent conscrits du contingent de 1816 à 1815, il n’y en avait que qua- rante-Cinq ayant plus de 1 mm. 65t mm.(5 pieds 1 pouce); depuis 1818 jus- qu’en 1823, on en comptait de quarante-huit à quarante-neuf, et de 1824 à 1827, de quarante-neuf à cinquante sur cent. En 1828, la taille moyenne des conscrits jugés aptes au service était, pour les trois départemens les plus reculés de la Bretagne (Finistère, Côtes-du-Nord et Morbihan), de 1 m. 625 mm (ou 5 pieds) . 5 4 Age de la puberté. 256 ZOOLOGIE DESCRIPTIVYE. D'après cette courbe, on voit qu’au moment de la naissance la taille n’est que d'environ un quatorzième de la taille défini- tive, et qu'à l’âge de trois ans l'enfant du sexe masculin a déjà plus de la moitié de la hauteur qu’il aura à l’âge adulte. En venant au monde, les garcons sont déjà un peu plus grands que les filles: ils ont, terme moyen, un millimètre de plus, et cette différence augmente avec l’âge, car les filles grandissent moins que les garcons, et leur accroissement s'arrête plus tôt. À l’âge de deux ans et quelques semaines elles ont déjà à-peu- près la moitié de la taille définitive. Du reste, la loi de croissance de l’homme est loin de nous étre connue d’une manière générale et absolue. Il est une foule de circonstances qui viennent influer sur la marche de ce phé- nomène , et jusqu'à ce que la statistique nous ait fourni les docu- mens nécessaires pour reconnaître et mesurer ces causes de per- turbation,nous ne pouvons avoir, à ce sujet, aucune idée précise. Il parait que, dans les pays très chauds ou très froids, le développement de la taille s’arrête plus tôt que dans ceux dont la température est modérée. Dans les villes, le terme de laccroissement arrive plus tôt que dans les campagnes , et dans les plaines basses plus tôt que dans les hautes montagnes où le climat est rigoureux. Enfin, la misère et la fatigue tendent aussi, d’une manière puissante, à retarderla croissance et à augmenter le nombre des difformités. 17820 Le développement du corps humain en largeur et en épaisseur est plus lent que son accroissement en hauteur. Au moment de la naissance, le poids d’un enfant n’est que d'environ le vingtième de celui qu’il doit prendre par les progrès de M et c’est vers quarante ans pour l’homme et vers cinquante pour la femme, que ce maximum arrive (1). Pendant la première annéeson ac- croissement n’est guère que d'environ un dixième de lPaugmen- tation définitive que son poids doit subir, et de quinze à vingt ans cet accroissement est même plus considérable que pendant les cinq premières années de la vie. 4 PA Lorsque l’homme a presque terminé sa croissance, il passe de l’enfance à l’âge de la puberté; ses muscles prennent plus de force, sa voix devient plus grave, et sa barbe se développe. et pour les départemens du Nord, Pas-de-Calais, Somme, Oise, Aisne et Ar- dennes, de r m. 682 mm. (ou à pieds 2 pouces). {r) D’après des observations récentes, faites à Bruxelles, il paraîtrait qu'a l'époque de la naissance, le poids moyen des garcons est de 3k.20 (au moins six livres trois onces), et celui des filles de 2k.91 (près de six livres). À quarante ans ,le poids de l’homme est, terme moyen, de 63k. 67 ou 128 livres 13 onces (maximum moyen), et à cinquante ans, celui de la femme de 56k: 16 ou environ 190 livres (maximum moyen). ORDRE DES BIMANES. 257 Chez les femmes cette modification de l'organisme se reconnait aussi par des signes extérieurs faciles à distinguer, tels que l'élargisseent du thorax et du bassin, des changemens considé- rables dans la taille, etc. L'époque de la puberté arrive toujours chez elles deux ou trois ans plus tôt que chez l’homme, mais varie beaucoup, suivant le climat, etc.: dans les pays chauds, c’est pour les femmes à dix ou onze ans, et dans les pays froids, vers dix-sept ou dix-huit. Dans la vieillesse, les forces physiques et intellectuelles s’a- baissent plus ou moins rapidement,etil survient dans la texture même des organes des changemens considérables ; les cartilages tendent à s’ossihier, et souvent on voit alors des os, qui, à l’âge adulte, étaient simplement articulés entre eux, se souder de fa- çon à ne plus former qu’une seule pièce; les organes perdent leur souplesse et leur élasticité; le poids du corps diminue d’une manière sensible, et le travail de lassimilation ne se fait plus qu'avec difficulté ; enfin le principe de la vie parait s’af- faiblir, et à la fin 1l s’éteint complètement. Mais la mort, par l'effet seul de la vieillesse, est extrêmement rare, et un grand nombre de faits bien avérés prouvent que, dans des circonstances favorables, la vie humaine peut se prolonger bien au-delà de son terme ordinaire. Je ne citerai pas ici les exemples extraordinaires de longévité rapportés par Moïse, dans son histoire des premiers temps du monde; car il est bien pro- bable que la manière de compter les années n’était pas alors la même que celle qu’on emploie aujourd’hui , et qui est basée sur les révolutions du soleil ; mais jen rapporierai d’autres moins éloignés de nous. Le fait le plus remarquable est peut-être celui d’un pauvre pé- cheur du Yorkshire, en Angleterre, nommé Henri Jenkins, mort en 1670, et qui , suivant les auteurs contemporains, avait alors cent cinquante-sept ans. On l’appela un jour en témoignage pour un fait passé depuis cent quarante ans, et il comparut avec ses deux fils, dont lun avait cent deux ans et l’autre cent ans. On cite un certain nombre d’autres exemples d’une lon- gévité presque aussi grande ; mais la plupart remonient à une époque où les registres de l’état civil n'étaient pas tenus avec exactitude, ou bien ont été observés dans des pays où les mêmes irrégularités existent encore aujourd’hui : aussi ne sont-ils pas, en général, assez bien avérés pour mériter une confiance entière. Il est certainement rare de voir l’homme atteindre cent dix ans, et on ne compte même que très peu de centenaires. D’après les relevés de mortalité de la ville de Londres, faits en 1751 et en 1762, sur 47,000 personnes décédées, il y avait 15 centenaires; ét en France, pendant ces trois dernières années, Vicillesse. Durée possi- ble de la vie. Loi de la mortalité. 258 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. sur 2,434,993 décès, 1l y avait 439 personnes réputées centenaires , c’est-à-dire 1 sur environ 5,500 décès. Du reste, peu de personnes arrivent même à une grande vieillesse, et c’est un spectacle bien pénible que de voir la ma- nière dont les hommes sont moissonnés dès leur entrée dans la vie. En France, par exemple, près du quart des enfans, qui viennent au monde vivans, meurent dans la première année, et la moitié seulement atteint l’âge de vingt à vingt-et-un ans; environ les trois quarts de la population périt avant l’âge de cin- quante-six ans, etsur cinq mille enfans nouveau-nés ,on n’en compte,tierme moyen, qu’un seul qui arrive à l’âge de cent ans. Ce qui influe le plus sur la durée moyenne de la vie, c’est l’état de bien-être ou de misère, Pour s’en convaincre, il suffit de comparer la proportion des décès dans les classes riches et dans les classes pauvres d’un même peuple. Prenons, par exemple, la population de Paris : dans le premier arrondissement de cette ville, qui est l’un des plus riches, les décès sont dans le rap- port d'environ 1 sur 41 habitans; et dans le douzième, il meurt chaque année 1 habitant sur 34 (1). L'influence meurtrière de la pauvreté se montre aussi d’une manière évidente lorsqu'on compare, comme l’a fait M. Villermé, la mortalité dans les dé- partemens les plus riches et les plus pauvres de la France ; dans les premiers on trouve qu’il meurt dans une année, terme moyen, 1 habitant sur 46, et dans les derniers cette proportion est de 1 sur environ 33, quelquefois même de 1 sur 30. Parmi les enfans que la misère ou linconduite de leurs parens a fait abandonner à la charité publique, la mortalité devient bien plus effrayante encore. Nous avons vu que, pour la popu- lation en masse, la moitié des enfans parvenait à l’âge de vingt-et-un ans. Dans l’hospice des Enfans-Trouvés, il en meurt dans la première année environ quatre sur Cinq. Tout ce qui augmente le bien-être des hommes, disons-nous, diminue pour eux les chances de mort: il s’ensuit que lun des bienfaits de la civilisation doit être de prolonger la durée (r) Dans ces calculs on a compris les décès à domicile et les décès dans les hôpitaux; mais on arrive à des résultats analogues lorsqu'on ne prend en considération même que les décès à domicile. Ainsi dans les trois premiers arrondissemens de Paris où l’on ne compte qu’un indigent sur environ 13 ha- bitans , la mortalité annuelle a été , depuis 1817 jusqu’en 1821, de 1 sur 6o ha- bitans, tandis que dans les trois arrondissemens les plus pauvres ( savoir, le douzième, le neuvième, et le huitième) où il existe 1 indigent pour 5 habitans, il est mort chaque année , pendant ce même laps de temps, près de 1 sur 40 ha- bitans , et dans la rue de la Mortellerie , l’une des plus pauvres et des plus sales de Paris, les décès à domicile se sont élevés à 1 sur 33 habitans , quoiqu’une grande partie de cette population soit nécessairement allé mourir à l’hôpital. ORDRE DES BIMANES. 259 moyenne de la vie, et c’est effectivement ce qui est arrivé. A Genève, par exemple , où les registres des décès ont été conservés"avec soin depuis 1561 jusqu’à ce jour, on a constaté que la durée moyenne de la vie a considérablement augmenté pendant cet espace de temps. Dans le seizième siècle , la moitié des enfans y mourait avant l’âge de cinq ans, et, dans le dix-hui- tième au contraire, la moitié de la population parvenait à l’âge de trente ans. Quoi qu’il en soit, c’est toujours dans les premiers temps de la vie , que les chances de mortalité sont les plus grandes. Ainsi, il meurt en France environ vingt-trois enfans sur cent pendant la première année de leur existence; environ douze dans la se- conde, etsept dans la troisième. A l’âge de dix à onze ans, la pro- portion des décès n’est plus que de huit sur mille naissances, et c’est alors que la vie probable est la plus longue. (1) Des races humaines. Il n'existe dans le genre humain, avons-nous dit, qu’une seule espèce ; mais cependant ious les hommes sont loin de se ressembler , et les principales différences qu’ils présentent se transmettent sans interruption de génération en génération : aussi ne peut-on se refuser à admettre dans cette espèce unique plusieurs variétés bien distinctes. L'étude des races humaines est de nature à nousintéresser au plus haut degré ; mais elle présente de grandes difficultés et n’a fait encore que peu de progrès. Pour la cultiver avec succès, il faut joindre à l'observation des formes physiques, la compa- raison des langues et les données que nous fournissent les tra- ditions historiques ; depuis quelque temps plusieurs savans s’y livrent avec ardeur, et on est en droit d’espérer que bientôt cette branche de lhistoire naturelle cessera d’être en arrière de presque toutes les autres; mais il y règne encore trop de vague et d'incertitude pour que nous puissions en traiter ici avec détail. Les peuples qui habitent l’ancien monde paraissent apparte- Races de nir à trois variétés principales, désignées par les naturalistes l’ancien conti- sous le nom de caucasique , de mongolique et d’ethiopique. (1) Nous avons vu qu'au moment dela naissance, la vie probable n’est que de vingt ans un tiers ; mais, pour les enfans qui ont échappé à la mortalité des trois ou quatre premieres années , elle surpasse quarante-cinq ans. nent. Varicté cau- : casique. Races sémi- tiques. 260 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. | La VARIÉTÉ CAUCASIQUE se distingue par la beauté de l’ovale Fig. 41. (1) que forme sa tête, par le développe- a ment de son front, l’ouverture de l'angle facial (#g. 41), la position hori- zontale de ses yeux, le peu de saillie de ses pommettes et de ses mâchoi- res, et la couleur blanche ou du moins blanchâtre de sa peau; elle est re- marquable aussi par sa perfectibilité ; car c’est elle qui a donné naissance à tous les peuples les plus civilisés de la terre. Elle occupe l'Europe, l'Asie occidentale et la partie la plus septentrionale de PAfrique, mais on la croit descendue primitivement des montagnes situées entre la mer Caspienne.et la mer Noire ,et c’est pour cette rai- son qu’on l'appelle caucasique. Cette grande division de l’espèce humaine se compose d'un nombre considérable de races plus ou moins distinctes, dont les unes ont conservé assez intacte la conformation physique qui leur est propre, pour que le naturaliste puisse la recon- naître, mais dont la plupart se sont entremêlées au point d’avoir perdu en partie leur cachet primitif, et d’être aussi difficiles à classer qu’à distinguer. A défaut d'observations zoologiques assez nombreuses et assez précises pour permettre aux naturalistes de saisir les différences et les rapports que ces diverses races peuvent avoir entre elles, on a eu recours, afin de les classer, à l'étude comparative des langues qui leur sont propres. Il existe une grande analogie entre les différentes langues connues sous les noms de chaldéen, de syriaque ou araméen , d’hébreu et d’éthiopien ; l'arabe parait appartenir à la même famille, et peut-être devra-t-on y rapporter aussi l’ancien égyp- tien. Les peuples auxquels appartiennent ces langues dites semitiques, Ont aussi d’autres caractères qui leur sont communs: leur style est toujours figuré et plus ou moins bizarre, ils sont inclins au mysticisme, et ont fondé les religions les plus univer- sellement répandues sur toute la surface du globe; enfin ils ont en général ovale de la figure long et un peu étroit , les pommettes peu saillantes et le nez caréné, plus ou moins busqué et grand; en peut donc les considérer comme appartenant, sinon à la (-\ a - : = (1) Tête osseuse appartenant à la race caucasique : — 2, à, c, d, lignes ser- vant a mesurer l'angle facial, qui est ici ordinairement d’euviron 85 degres. ORDRE DES BIMANES. 261 méme race , du moins à une mêmé branche ou famille que lon est assez généralement convenu d'appeler la branche arameenne ou semitique. Les Phéniciens appartenaient à cette famille, et d’après quel- ques auteurs, il faudrait y rapporter aussi les Étrusques, qui oc- cupaient jadis la portion moyenne de Fltalie , les Ibères, répan- dus dans une grande partie de l'Espagne et du midi de la France, et même les Celtes qui habitaient la Gaule et la Grande-Bre- tagne, et qui, refoulés vers l’ouest et le nord par les invasions d’autres peuples , sont aujourd’hui confinés à l’extrémité de la Bretagne, dans le pays de Galles, dans les montagnes de l'Écosse et en Irlande; mais jusqu'ici on n’a pu faire, à ce sujet, que de simples conjectures. Les analogies de langage conduisent aussi à regarder comme Races indo- appartenant à une même branche de la variété caucasique la germaniques. plupart des peuples de l'Inde et de l'Europe, et à les repartir en cinq divisions principales, suivant qu’ils parlent, 1° le sanskrit et les dialectes qui en dérivent et qui sont répandus dans presque tout l'Indoustan ; 2° l’ancien zend ou médo-persan , souche des dialectes de la Perse et de l'Arménie ; 3° l’ancienne langue des Pélages, mère commune du grec, du latin et de toutes les lan- gues du midi de l'Europe ; 4° le gothique ou tudesque, d’où sont dérivées les langues du nord et de l’ouest de l’Europe, telles que l'allemand, le danois, le suédois, le hollandais et Panglais; 5° enfin , le slave d’où descendent le russe , le polonais, le bo- hémien , etc. Il serait difficile dans l’état actuel de la science, d’assigner à cette branche indo-européenne des caractères phy- siques propres à la distinguer des autres rameaux de la variété caucasique, et dans chacune des subdivisions que nous ve- nons d'indiquer, on découvrira peut-être plusieurs races dif- férentes. Les Finnois, qui jadis occupaient exclusivement le littoral oriental de la Baltique , ainsi qu’une grande partie du nord de la Russie et de la Sibérie, paraissent appartenir à une bran- che bien distincte des deux précédentes ; on y rapporte une partie des habitans actuels de la Finlande , du voisinage des monis Ourals et de la Sibérie jusqu'aux confins de l’Yenis- sei. Les Hongroïs paraissent être une branche en quelque sorte égarée de cette race finoise , et on peut en rapprocher les Tur- comans originaires de l'Asie centrale, et une partie des TFa- tares nomades qui errent entre la mer Caspienne et les rives de VIrisch. La VARIÉTÉ MONGOLIQUE diffère à plusieurs égards de la variété caucasique ; ici la face est aplatie , le front bas, oblique et carré, Races scy- thes. Variété mon- golique. 262 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. les pommettes saillantes , les yeux étroits et obliques, le menton légèrement saillant, la barbe grèle , les cheveux droits et noirs, et la peau olivâtre. Les langues propres aux races mongoliques ont aussi des caractères qui leur sont communs, et qui les sépa- rent nettement de celles des peuples caucasiques : les mots qui les forment sont tous monosyllabiques. Cette variété de l’espèce humaine est répandue à lorient des régions occupées par les races caucasiques; on la rencontre d'abord dans le grand désert de l'Asie centrale, où se trouvent les Calmoucks ; les Kalkas, ainsi que d’autres tribus mongoliques en- corenomades, et presque toutes les peuplades de la partie orien- tale de la Sibérie lui appartiennent ; mais la nation la plus remar- quable, formée par les hommes de cette race, est celle des Chinois, dont le vaste empire a été , de toutes les parties du monde, le plus anciennement civilisé. La Corée, le Japon , les iles Philip- pines, les îles Mariannes, les iles Carolines et toutes les autres terres qui s'étendent au nord de l'équateur , depuis le premier de ces archipeles jusqu’au 172° degré de longitude orientale, sont aussi peuplées par des races mongoliques. Enfin, les habitans des iles Aleutiennes et de la partie voisine de la côte occidentale de l'Amérique , se rapportent aussi à cette grande division de Pespèce humaine. Les Malais, qui occupent l’Inde au-delà du Gange et une grande partie de l'archipel asiatique, constituent, suivant quel- ques naturalistes une variété distincte de la mongolique et de la caucasique ; mais la plupart des auteurs les regardent comme provenant d’un mélange de ces deux variétés. Un des nombreux voyageurs qui, depuis quelques années, ont enrichi la zoologie d’une foule de découvertes , M. Lesson , a cru pouvoir rapporter à celte race , en quelque sorte métis , non - seulement les Malais proprement dits qui habitert la presqu’ile de Malacea, et les îles de Sumatra, de Java, de Celèbes, de Timor, etc., mais aussi le rameau océanien, répandu sur les iles innombrables si- tuées à l’est de la Nouvelle-Zélande jusqu'aux archipels des iles des Amis, des îles Basses , etc. Enfin, les races mongoliques paraissent s’être étendues dans les régions hyperboréennes des deux hémisphères ; car c’est avec elles qu'ont le plus d’analogie toutes ces peuplades abâtardies que l’on rencontre depuis le cap Nord en Europe jusqu’au Groenland , et que l’on connaît sous le nom de Lapons , de Sa- moyèdes , d'Esquimaux , etc. Une troisième branche bien distincte de Pespèce humaine est ORDRE DES BIMANES. 263 la VARIÉTÉ ÉTHIOPIQUE OU NÈGRE, caractérisée par son crâne com- primé , son nez écrasé, son museau saillant, son angle fa- cial aigu (/g. 42), ses grosses lè- vres, ses cheveux crépus et sa peau plus ou moins noire. Elle est confinée au midi de l'Atlas, et parait se composer de plu- sieurs races bien distinctes , telles que la mosambique, la bochismanne el la hottentote. La population primitive de lAustralasie et des archipels nom- breux de l'Océanie est aussi une race noire , qui a beaucoup d’analogie avec celle des nègres mozambiques ; mais dont les cheveux , quoique rudes , sont lisses ; du reste, ces peuplades barbares et misérables , auxquelles on a donné le nom d’Alfou- rous , ne sont encore que peu connues ; Car, dans la plupart de leurs iles , d’autres races conquérantes sont venues les détruire ou les refouler à l’intérieur des terres et au milieu des mon- tagnes. On les trouve dans le plateau central de la Nouvelle- Guinée , dans la plupart des iles Molluques , etc. , et ils errent par petites troupes dans l’intérieur de l’Australasie. Une autre race nègre se trouve aussi dans les iles de POcéanie : c’est celle des Papous. Elle diffère de la race des Alfourous par la chevelure très épaisse et médiocrement laineuse, par le vi- sage assez régulier dans l’ensemble des traits, quoique le nez soit un peu épaté, etque les narines soient allongées transversa- lement , par le front élevé et par plusieurs autres caractères physiques. Elle a beaucoup d’analogie avec les nègres de Mada- gascar , et parait être originaire de l’Afrique. Les Papous occu- penti tout le Hitioral de la Nouvelle-Guinée et se sont répandus sur les îles situées plus à l’est , et connues sous les noms de Nouvelle-Bretagne , de Nouvelle-Irlande , de Louisiane , de Sa- lomon , de Nouvelles-Hébrides et de Nouvelle-Calédonie. On les retrouve encore mélangés à d’autres races jusque dans les iles Fidji et dans les iles des Navigateurs , et, par leur union avec les Malais , ils forment la masse de la population du littoral des iles Waigiou , Battenta , etc. Enfin les indigènes des deux Amériques sont regardés par quelques naturalistes comme ne pouvant être rapportés à au- cune des trois variétés de l’espèce humaine , dont l’ancien monde est peuplé. Ils sont en général remarquables par leur teint rouge de cuivre , leur barbe rare et leurs cheveux longs et noirs ; mais ils différent beaucoup entre eux. Les uns ont la plus grande analogie avec les races mongoliques de PAsie ; Variété éthiopique. Races amé- ricaines, Caracteres. distinctifs, 264 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. d’autres au contraire se rapprochent un peu des formes euro- péennes. Leur nez est aussi saillant que le nôtre , et leurs yeux sont grands et ouverts. Les langues de ces peuples ne peuvent pas non plus se rapporter à une souche commune , et diffèrent extrêmement de celles des races mongoliques. Les mots , au lieu d’être monosyllabiques et de ne pouvoir prendre des terminai- sons variées , sont en général composés d’un grand nombre de syllabes , et présentent des modifications terminales et des changemens de structure presque infinis. Toutes les langues américaines ont ce caractère remarquable ; aussi, malgré les dif- férences de leurs racines , ont-elles une physionomie commune, etles désigne-t-on par un nom commun, celui de Langues polysynthetiques. 2 ORBRE DES QUADRUMANES. L'ordre des quadrumanes se compose d’un assez grand nombre d'animaux, qui , plus que tous les autres mammifères , ressemblent à l’homme, et sont caractérisés principalement par l’existence de mains aux membres abdominaux aussi bien qu'aux membres thoraciques. Chez quelques-uns d’entre eux, le pouce des mains antérieures devient rudimentaire ; mais il n’en est jamais ainsi pour celui des mains postérieures , et si le nom de quadrumanes ne convient pas rigoureusement à tous ces animaux , celui de pédimanes le serait sans aucune exception. Quelques marsupiaux et même quelques édentés ressemblent aux quadrumanes par la conformation de leurs membres ; mais si l’on joint à l’existence d’un pouce opposable aux quatre mains un petit nombre d’autres caractères faciles à constater, on pourra toujours distinguer au premier coup-d’æi1l les animaux dont nous nous occupons ici, de tous les autres mammifères. De même que les bimanes , les quadrumanes ont des dents incisives aussi bien que des canines et des molaires. Leurs yeux sont dirigés en avant ou du moins obliquement, et leurs mamelles sont situées sur la poitrine. On pourrait ajouter encore que leur cerveau ressemble beaucoup à celui de l’homme et se compose, pour chaque hémisphère, de trois lobes, dont le postérieur recouvre le cervelet, et que leurs vis- cères abdominaux diffèrent à peine des nôtres. La conformation des membres postérieurs, chez les quadru- manes , est éminemment favorable à la préhension des objets; ORDRE DES QUADRUMANES. 265 mais la flexibilité dont ces parties sont douées nuit à leur soli- dité et les rend moins propres à soutenir le corps dans une po- sition verti@ale : aussi tous ces animaux sont-ils essentiellement grimpeurs; et voit-on la plupart d’entre eux passer leur vie entière perchés sur des branches d'arbres et y déployer lagilité la plus grande , tandis qu’à terre, ils ne marchent et ne se tiennent debout qu'avec peine. Certains quadrumanes , comme nous l'avons déjà dit , res- semblent à lhomme de la manière la plus remarquable; mais il n’en est pas de même de tous, et on observe, parmi ces ani- maux , une sorte de dégradation qui conduit insensiblement des formes presque humaines à celle des quadrupèdes ordinaires. . Le museau s’allonge ; le corps prend peu-à-peu la position hori- zontale ; la queue se développe , et à ces changemens physiques se joint un abaissement plus grand encore dans les facultés in- tellectuelles et instinctives. Il est même des quadrumanes que l’on distingue à peine de certains édentés , qui semblent devoir être rangés parmi les plus stupides des mammifères. Ces modifications dans l’organisation et d’autres particulari- Classifica- tés de structure , que nous ferons bientôt connaître , ont con- tion des qua- duit les naturalistes à diviser l’ordre des quadrumanes en trois familles : les singes, les ouistitis et les lémuriens. Le tableau suivant Contient le résumé des caractères distinctifs les plus saillans de ces trois groupes. { Quatre dents éincisives , verticales à chaque mâchoire ; les molaires garnies seulement de tu- Singes. bereules mousses. — Ongles des doigts aplatis (excepté dans le genre ÆEryode ) et tous de même forme. Dents incisives , au nombre de quatre à chaque mâchoire , comme chez les singes, mais obliques et prochives , surtout à la mâchoire supérieure. — Ongles comprimés , arqués et crochus comme des griffes. — Pouces des mains antérieures assez mo- biles et à peine opposables. Dents incisives en plus grand nombre , ou dis- posées autrement que chez les singes. — Ongles Lémuriens. { plats , excepté celui du premier ou des deux pre- miers doigts de derrière , qui est pointu et relevé, — Narines terminales et sinueuses. Ouistitis. *:Tumanes, ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. FAMILLE DES SINGES. Les singes sont des animaux de moyenne ou de petite taille, doni le crâne est presque toujours arrondi, le museau médio- crement prolongé, le nez peu ou point saillant, le cou court, le corps svelte et les membres grèles et longs. La face dorsale de leur corps est couverte d’un poil assez serré, long et soyeux, au-dessous duquel on ne trouve pas de bourre. La partie antérieure du corps est moins velue , et quelquefois elle est même presque nue. La face l’est presque toujours, et souvent elle est colorée d’une manière bizarre. Tantôt elle est d’une couleur de chairlivide, tantôt noire, d’autres fois rouge de cuivre, et quelquefois orné de taches blanches, bleus ou rouges, qui rappellent jusqu’à un certain point Îes peintures gros- sières dont beaucoup de sauvages se barbouillent le corps. La ressemblance de ces animaux avec l’homme est quelquefois extrème, et il en est qui , dans leur jeunesse, ont l’angle facial moins aigu que beaucoup de nègres; mais, par les progrès de l’âge , leur museau devient toujours beaucoup plus saillant , et chez quelques singes cette partie de la face se développe au point de ressembler à celle d’un chien. Les gestes et les allures de ces animaux ont souvent beaucoup d’analogie avec les nôtres. Plusieurs se tiennent facilement dans une position presque ver ticale, surtout lorsqu'ils peuvent s’aider d’un bâton, comme Fig. 71.(1) nous nous servons d’une canne, et on en voit qui marchent de la sorte, mais ce n’est jamais d’une manière aussi sùre que l’homme ; car leurs mains de derrière ne posent sur le sol que par leur bord extérieur (#g- 71); l'articulation de leur genou est très lâche, et leur bassin est étroit, circonstances qui toutes nuisent à ce mode de station ou de progression. Ainsi que nous l'avons déjà dit, ils sont au contraire admirablement bien orga- nisés pour grimper de branche en branche. La longueur et la flexibilité de leurs membres , existence d’une main à lextré- mité de tous ces organes, la grande énergie de leur système (1) Patte de singe du sous-genre des chimpanzés. FAMILLE DES SINGES. 267 musculaire leur permettent de déployer alors une agilité éton- nante , et la nature a en outre pourvu plusieurs de ces animaux d’une longue* queue prenante, qui leur sert comme d’une cin- quième main, pour se suspendre aux branches, se balancer dans les airs et prendre leur élan, lorsqu'ils veulent sauter dun arbre à un autre. Les singes qui présentent ce mode particulier de con- formation sont presque toujours en mouvement , et, lorsqu'ils veulent se reposer, ils se bornent en général à s’accroupir, en plaçant sous eux leur queue et en s’y appuyant quelquefois ; ceux qui n’ont la queue ni prenante ni extrêmement touffue , comme celle des singes du Nouveau-Monde , passent au con- traire une grande partie de leur temps assis à la manière des hommes, et, afin de leur rendre cette position plus commode, la nature a donné aux tubérosités ischiatiques de leur bassin beau- coup de largeur, et a recouvert ces parties d’une peau presque toujours nue et Calleuse. Les singes sont essentiellement frugivores et leur système dentaire a la plus grande similitude avec celui de l’homme. Leurs incisives sont en même nombre et présentent la même disposition que les nôtres. Leurs canines , il est vrai, dépassent les autres dents et fournissent à Ces animaux une arme qui nous manque ; mais leurs molaires ressemblent en général aux nôtres et sont souvent en même nombre : chez les singes du nouveau conti- nentseulement, ilen existe de chaque côté et à chaque mâchoire une de plus que chez homme, c’est-à-dire six. Ces animaux se tiennent presque toussur les arbres et ne vien- nent que rarement à terre; en général, ils vivent en troupes, composées d’une ou plusieurs familles. Les femelles font un et quelquefois deux petits par portée; elles soignent leurs jeu- nes avec une grande tendresse jusqu’à ce qu’ils puissent man- ger seuls, les transportent partout dans leurs bras, et leur donnent une espèce d'éducation qui consiste principalement à leur apprendre à voler avec adresse. Les jeunes singes sont, en général, doux et intelligens ; un grand nombre d’entre eux peuvent même être facilement apprivoisés et dressés à imiter nos gestes et nos actions; le penchant à l’imitation est même un des traits les plus caractéristiques de ces animaux; mais, par les progrès de l’âge, la plupart d’entre eux deviennent moins faciles à dompter, et souvent ils sont alors tout-à-fait intrai- tables. Leurs mœurs varient suivant les espèces; mais le plus ordinairement les singes sont remarquables par la ruse qu’ils déploient pour s'emparer de ce qu’ils convoitent, par la vi- vacité de leurs mouvemens, par leur curiosité et par la mobilité extrême de ieurs idées; souvent ils passent instantanément, et pour ainsi dire sans motif, de la plus parfaite tranquillité à la co- Distribu- tion géogra- phique. Classifica- tion. 268 ZOOLOGIE DESCRIPTIVYE. lère la plus violente, et ils se laissent dominer par toutes leurs sensations. Les singes sont propres aux pays chauds; une seule espèce vit sauvage en Europe, sur les rochers de Gibraltar; et lors- qu’on les transporte dans les pays froids comme le nôtre, ils périssent, en général, au bout de quelques années, victimes de la phthisie pulmonaire. On les trouve très répandus dans les régions intertropicales des deux hémisphères, et, chose bien remarquable , non-seulement les mêmes espèces m’existent pas à-la-fois dans l’ancien et le Nouveau-Monde , mais ,comme Va très bien remarqué l’illustre Buffon (1), toutes celles qui ha- bitent l’un de ces grands continens ont des caractères qui les distinguent de ceux qui sont propres à l’autre hémisphère. Ces caractères zoologiques , si bien en harmonie avec la dis- tribution géographique des singes, a fait diviser ces animaux en deux tribus : les singes de l’ancien monde et les singes d’Amé- rique. À l’aide du tableau suivant, on pourra comparer les prin- cipales différences qui existent entre ces deux groupes naturels. Dents molaires , en même nombre que chez l’homme, c’est-à-dire cinq de cha- que côté et à chaque mâchoire. Presque toujours des callosites ischia- tiques. Jamais de queue prenante. Narines ouvertes en-dessous du nez et séparées par une cloison étroite. Souvent des ahbajoues ou poches creu- sées dans les joues et communiquant avec la bouche. | Dents molaires , au nombre de six de chaque côté et à chaque mâchoire. Jamais de callosites. Singes du nouveau Queue en général prenanie. continent. Narines presque toujours séparées par une large cloison, et ouvertes sur les côtés du nez. Jamais d’abajoues. Singes de l’ancien continent. (t) Buffon, dont chacun connaît les écrits, est né à Dijon, en 1707 ‘il s’occupa d’abord des sciences mathématiques et physiques; mais, nomme, en 1730, intendant du Jardin du Roi, ilse livra entièrement à l’histoire natu- relle, et s’occupa sans relâche de son grand ouvrage. Il mourut, en 1788, a Montbart , où il faisait de fréquentes résidences. SINGES DE L'ANCIEN MONDE. 269 : TRIBU DES SINGES DE L'ANCIEN MONDE. (Fig. 72, MANDRILL.) Les singes de l’ancien monde sont àssez nombreux et semblent former une série qui conduit, par degrés , de l’homme aux qua- drupèdes ordinaires; la position de leur corps, d’abord presque verticale, devient peu-à-peu tout-à-fait horizontale ; leur museau s’allonge, et on remarque en même temps que leurs passions deviennent de plus en plus violentes et brutales. Ceux qui, par l’ensemble de leur organisation, se rapprochent le plus de l’homme, et que l’on pourrait appeler les singes an- tropomorphes , sont complètement dépourvus de queue, et for- ment deux genres bien distincts , les Orangs et les Gibbons. Les singes de l’ancien continent, dont le corps se termine par une queue plus ou moins longue , ont été divisés en six genres : les guenons, les semnopithèques , les macaques, les magots, les cynocéphales et les mandrills. Pour les distinguer entre eux, il faut tenir compte de la forme de leurs dents molaires, de leur queue, de leur museau, etc. Parmi les singes de l’ancien continent , ceux du GENRE ORANG (Sèmia) sont les seuls qui manquent complètement de callosités ischiatiques, ou qui n’en présentent que de très petites. Les uus, appelés par Cuvier Orangs proprement dits, ont les bras si longs qu’étant debout leurs mains touchent à terre; les autres, chez lesquels les membres thoraciques ne descendent que Jus- qu'aux genoux, sont distingués par le même naturaliste sous le nom de Chempansés et sont considérés par M. Geoffroy Saint- 18 Classifica- tion, Genreorang. 270 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. Hilaire/comme devant former un genre distinct, nommé par lui Troglodyte. Orangs pro- Les orangs proprement dits ne sont encore qu’imparfaitement prement dits. Connus, et n’ont guère été observés que dans le jeune âge. Il en existe dans les parties les plus orientales de l'Inde, à Java, à Malacca, à Bornéo, etc., une espèce très remarquable, l'ORANG- Orang-ou- OUTANG (Simia satyrus), qui passe pour être , de tous les ani- tang. maux, celui qui ressemble le plus à l’homme. Dans le jeune âge, en effet, le front est haut et convexe, et la figure de ces singes se rapproche beaucoup de celle d’un enfant qui n’aurait pas le nez saillant, et dont les lèvres seraient avancées comme lorsqu'on fait la moue ; mais par les progrès de l’âge, le mu- seau devient plus proéminent et cette ressemblance diminue beaucoup. L’orang-outang a le corps couvert de gros poils roux et la face nue et bleuâtre; il atteint la taille d’environ sept pieds, et possède une force et une agilité extrêmes ; sa demeure est dans les forêts les plus sauvages, et il se tient habituellement sur les arbres; il y grimpe avec la plus grande rapidité, et s’élance d’une branche à l’autre avec autant de facilité et d’adresse que le font les petits singes d'Amérique , que l’on promène dans nos villes pour amusement du public; sur la terre , au contraire, il ne marche qu'avec difficulté, et il est obligé de s'appuyer sur un bâton ou de poser fréquemment ses mains à terre; quel- quefois on le voit se servir de ses longs bras pour se soulever et se lancer en avant, comme un homme se servirait de béquilles. On a constaté que ces animaux se construisaient , au haut des arbres, des espèces de huttes ; mais On ne sait que peu de chose de leurs mœurs. Dans l’âge adulte, il est très difficile de s'emparer de l’ou- rang-outang :ilse défend de la manière la plus courageuse ; dans le jeune âge, au contraire, il est aisé de le prendre et même de l’'apprivoiser; il montre alors assez d'intelligence, s’attache aux personnes qui ont soin de lui , et parvient facilement à imiter un grand nombre de nos actions. On ne connait qu’une seule espèce d’orangs à bras courts, c’est le CHIMPANSÉ ou froglodyte noir, appelé aussi pongo et jocko par quelques auteurs, qui habite la Guinée et le Congo. On assure que la taille de ces animaux dépasse celle de l’homme ; ils vivent en troupes dans des bois dont ils défendent lentrée à coups de pierre et de bâton contre les hommes et même contre les élé- phans, qu’ils cherchent à effrayer aussi par leurs hurlemens : leurs mœurs paraissent ressembler beaucoup à celles de orang- outang ;et lorsque, dans le jeune âge, on les élève en domesticité, on les trouve assez dociles pour être dressés à nous imiter. Chimpansé. SINGES DE L'ANCIEN MONDE. 271 Le GENRE GIBBON (#zlobates) se distingue des orangs par les Genre gib- grosses callosités dont la partie inférieure de leur bassin est bon. garnie ; ces singes ressemblent aux orangs-outangs par la lon- gueur de leurs bras, et se rapprochent, par la forme de leur tête , des chimpansés, dont le front est extrêmement fuyant. Ils vivent dans les parties les plus reculées des Indes et de leur archipel, et se tiennent, comme les orangs, dans les forêts les plus épaisses. Avec leurs longs bras , ils se balancent aux bran- ches , et , en s’aidant de l’élasticité de ces dernières , plusieurs d’entre eux s’élancent avec tant de force qu’on les voit quelquefois franchir, plusieurs fois de suite , des espaces de plus de quarante pieds. Les uns vivent par paires, les autres en troupes plus ou moins nombreuses. Ils ne sont guère susceptibles d'éducation, et la domesticité semble même leur faire perdre leurs facultés. Parmi ces singes si actifs, le plus remarquable par son agilité paraît être le gibbon cendre, qu'on nomme aussi le rcowwou, et qui se tient au milieu des roseaux et des bambous, dans l'ile de Sumatra. Le siamang(H. syndacty lus) diffère des autres gib— Siamang. bons par la manière dont la première phalange du deuxième etdu troisième doigt des pieds de derrière sont unis à l’aide d’une mem- brane , et il mérite d’être cité pour la singularité de ses mœurs. Il vit en troupes nombreuses, qui paraissent guidées par des chefs plus agiles et plus robustes que les autres individus de la commu- nauté; durant le jour, ces singes se tiennent en silence, cachés dansle feuillage , mais au leveret au coucher du soleil, ils poussent des cris épouvantables ; ils peuvent à peine se trainer lorsqu'ils sont à terre, et ils ne grimpent même qu'avec lenteur et dif- ficulté, mais ils sont d’une vigilance qu'on met rarement en défaut. On assure qu’un bruit qui leur est inconnu, et qui se fait entendre à la distance d’un mille , suffit, quelque léger qu’il soit, pour les faire fuir aussitôt. Mais si leurs petits sont en danger, les femelles semblent changer aussitôt de caractère ; on les voit s'arrêter pour partager les périls dont ils sont menacés et se précipiter sur leurs ennemis. Dans les cir- constances ordinaires , les femelles montrent aussi pour leurs petits une tendresse et une sollicitude remarquables , elles leur prodiguent les soins les plus délicats; et, comme l’a observé un Jeune voyageur, victime de son amour pour la science (M. Du- vencel), c’est un spectacle curieux que de voir ces animaux porter leurs petits à la rivière, les débarbouiller malgré leurs plaintes, les essuyer, les sécher, et donner à leur propreté un temps et des soins que , dans bien des cas, les enfans de homme pourraient envier. Une particularité de lorganisa- üon des siamangs , à laquelle semble tenir l'intensité de leurs cris, est l'existence d’un sac membraneux, en communication 18. Singes à queue. ‘ Genre sem- nopithèque. Genre gue- non, 272 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. avec le larynx. Dans l’orang-outang, on remarque une disposi- tion analogue. Les singes de l’ancien continent, qui sont pourvus d’une queue plus ou moins développée, diffèrent de l’homme bien plus que les précédens; non-seulement leur corps prend une position qui se rapproche de plus en plus de la direction horizontale , et la forme de leur tête se rapproche de celle des quadrupèdes ordi- naires , mais on trouve aussi, dans la structure intérieure de leur corps, des modifications que l’on ne rencontre ni dans l’homme, ni dans les singes sans queue. Ces derniers animaux ont los hyoïde, le foie et le cœcum, de même que presque toutes les autres parties du corps, semblables à ceux de l’homme; tandis que, dans les singes dont nous avons maintenant à nous oc- cuper, l'os hyoïde a la forme d’un bouclier ; le foie est divisé en plusieurs lobes, et l'intestin cœcum est gros, court et dépourvu d’appendice : en général ils ont aussi des abajoues. On les divise, comme nous l’avons déjà dit, en semnopi- thèques, guenons, macaques, magots, cynocéphales et mandrills. Les SEMNOPITHÈQUES (Semnopithecus )se rapprochent beaucoup des gibbons par la forme de leur corps, les proportions gé- nérales de leurs membres et les traits de leur figure; mais leur queue, qu’ils tiennent ordinairement relevée et qu’ils emploient comme un balancier pour s’aider dans leurs mouvemens, est Fig.68. extraordinairement longue ,etleur dernière dent molaire inférieure(fig. 68), au lieu de n’offrir que quatre tubercules , est allongée en arrière par un cinquième tubercule impair. Ces singes sont propres à l'Asie méridionale , et vivent en grandes troupes ; ils sont adroits et agi- les , mais paraissent ordinairement calmes et circonspects. Lors- qu’ils sont jeunes, on les apprivoise avec beaucoup de facilité, et dans l’Indeils jouissent d’une sorte de vénération ; les adorateurs de Brama respectent particulièrement une espèce de semnopi- thèques appelée entelle; ils lui permettent de venir dévaster leurs jardins et piller leurs tables; la visite d’une troupe de ces singes est même considérée par eux comme un grand honneur. Les GUENONS ( Cercopithecus) sont connus vulgairement sous le nom de singes à queue. De mème que les semnopithèques, ils ont une longue queue , les membres allongés , les formes sveltes, la tête arrondie et le museau cependant assez saillant ; leur angle facial est de 50 à 60 degrés ; mais ils n’ont pas, comme eux, la der- nière dent molaire d’en bas différente des autres, et ils sont pourvus de larges abajoues qui leur servent de magasin pour les fruits dont ils dépouillent en toute hâte les jardins, et qu'ils SINGES DE L'ANCIEN MONDE. 273 ne mangent qu'après avoir regagné leurs retraites habituelles. Ils n’acquièrent qu’une taille médiocre, et déploient , dans les sauts qu'ils font d’une branche ou d’un arbre à un autre, une agilité extrême , mais ils ne marchent que peu et difficilement. Ils sont d’une vivacité extravagante , et ont encore plus de mo- bilité dans les idées que dans les mouvemens; rien ne les fixe ; au milieu d’une occupation qui semble absorber toute leur attention, ils se laissent distraire par la moindre chose, et à chaque instant on les voit changer de sentimens et d’occu- pation : aussi éprouve-t-on quelques difficultés à les apprivoi- ser. Malgré la similitude des formes, les guenons diffèrent, par conséquent, beaucoup des semnopithèques ; ils appartiennent aussi à une toute autre région, car ils sont propres à l’Afrique. Ils y vivent dans les forêts en troupes nombreuses, et font sou- vent, dans les jardins et les champs cultivés, des dégâts con- sidérables. On assure qu'ils montrent, dans leurs excursions de maraude, une prudence et une intelligence singulières; les plus âgés forment l’avant et l’arrière-garde de la troupe, la conduisent, veillent à sa défense, et, s’il faut combattre, s’ex- posent les premiers aux coups; arrivés au lieu de pillage, ils établissent sur les points les plus élevés des sentinelles pour les avertir du moindre danger, et se placent ensuite sur un ou plusieurs rangs pour se jeter de main en main les fruits ou les plantes arrachées par les individus placés en tête de chacune de ces chaines; en peu de temps ils transportent ainsi tout une récolte à une distance considérable; car la dévastation terminée , ils s’enfuient en toute hâte, et vont former une nou- velle chaine dont la tête se trouve au point où se terminait la première ligne, et ils recommencent le même manège jusqu’à ce que leur butin soit déposé dans leur retraite habituelle. Les MACAQUES ( Macacus) se rapprochent des semnopithèques par la forme de leurs dents , et des guenons par l’existence d’aba- joues bien développées. Leurs membres sont mieux propor- tionnés pour la marche à quatre pattes , et la queue, qui est en général courte, reste toujours pendante, et ne sert pas même comme de balancier pour les aider dans leurs mouvemens. Leur museau est aussi plus saïillant (angle facial 40 à 45°), et ils sont en même temps moins intelligens et moins dociles. Dans Île jeune âge cependant , on peut ès apprivoiser, et il est même une espèce , le mamion, que les insulaires de Sumatra dressent à monter sur les arbres , au commandement, et à en cueillir les fruits. En général, les habitudes des macaques sont à-peu- près les mêmes que celles des guenons. La plupart habitentiles Indes; mais il en existe aussi en Afrique. Cette dernière région est aussi la patrie originaire des MAGOTS Genre ma- caque. Genre wma- got. Genres Cy- nocéphale et mandrill. 274 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. ({nuus), qui se distinguent des macaques, en ce que leur queue est réduite à un'simple tubercule ; mais ces singes se sont naturalisés à l'extrémité méridionale de l'Espagne, sur les parties les moins accessibles du rocher de Gibraltar. Ce sont les seuls quadru- manes qui habitent l’Europe , et ce sont aussi les plus ancienne- ment connus. On les désignait jadis sous le nom de pithecus , et ce sont ces animaux qui ont servi à Galien pour les recher- ches anatomiques qu’il a faites, dans la vue d’éclairer les méde- cins sur la structure du corps humain , dont la dissection était inierdite par les dogmes religieux des anciens. Les magois se trouvent dans tout le nord de l'Afrique. Lorsqu'ils sont jeunes, on les dresse facilement , par la crainte des châtimens , à exécu- ter différens tours d’adresse , dont les bateleurs profitent pour exciter la curiosité du public ; mais, de même que les macaques, ces singes sont très capricieux et grimaciers, et lorsqu'ils de- viennent vieux , ils sont méchans et taciturnes.. Les CYNOCÉPHALES ou singes à tête de chien (qu’on désigne fréquemment sous le nom de papions) ressemblent aux ma- caques par la disposition du système dentaire et de l’appareil de la locomotion ; mais ils ont le museau extrêmement allongé et comme tronqué au bout, de facon que les narines , au lieu de s'ouvrir en arrière, sont situées en avant, mode de conformation qui donne à leur tête l’aspect de celle d’un chien plutôt que de celle d’un singe ordinaire. La longueur de leur queue varie, et on leur trouve des abajoues très développées. (Fig. 72, MANDRILL.) Les MANDRILLS sont des cynocéphales dont le museau s’est encore allongé davantage, et dont la queue est très courte. SINGES DE L'ANCIEN MONDE. 275 Tous ces singes à museau si allongé sont les plus brutaux et les plus férocessdes animaux de cette famille , et, après les singes anthropomorphes, ce sont aussi les plus grands et les plus forts ; leurs dents canines sont aussi robustes que celles des carnassiers les plus sanguinaires ; leurs membres sont trapus et la marche quadrupède est leur mode habituel de progression. Ils grimpent facilement aux arbres et déploient dans leurs sauts la plus grande agilité; mais cependant ils ne se tiennent pas habituellement dans les forêts, et préfèrent en général les montagnes hérissées de rochers ou les coteaux boisés. Ils vivent de fruits et de légumes et s’entr'aident comme le font les guenons, pour piller les jardins et les champs cultivés. Leur force et leur férocité les rend dan- gereux, même pour les hommes. Presque tous ces singes habitent l'Afrique: ils y vivent en troupes ,et chaque société s’établit dans un canton particulier, qu’elle n’abandonne qu’à la dernière extrémité , et dont elle défend l'accès contre tous les autres ani- maux. Si quelque intrus s’aventure sur leur domaine, ces singes s’appellent entre eux , se réunissent et cherchent à l’éloigner par leurs cris et par leurs menaces; ces moyens sont-ils insuffisans , ils assaillent leurs ennemis de pierres, de branches d'arbres, et ne se laissent point effrayer par le bruit des armes à feu. Ce sont aussi les plus lubriques des animaux. On assure qu’il est dange- reux pour des femmes de s’exposer près des lieux qu’ils habitent, et qu’on en a vus enlever des négresses et les retenir pendant plu- sieurs années prisonnières dans des cavernes, où ils les nour- rissaient avec soin. Dans l’état de captivité, les mandrills et les cynocéphales se refusent à l’éducation et montrent dans toutes les circonstancesileur méchanceté brutale : ils ne s’atta- chent pas même à ceux qui les nourrissent, ainsi que le font les lions et les tigres, et ils semblent animés d’une haine aveugle contre tout ce qui existe. On connaït plusieurs espèces de cynocéphales; par exemple, le papion noir , qui est propre aux environs du cap de Bonne-Es- pérance ; le papion ordinaire et le babouin , qui se trouvent en Guinée ; le singe de Moco Où papion à perruque , qui habite l’Ara- bie et l'Ethiopie. Chez les anciens Egyptiens , ces animaux étaient le symbole du dieu Tôt ou Mercure , et on en voit très fréquemment la représentation parmi les figures hiéroglyphiques dont ce peuple singulier a couvert tous ses monumens. 12 =] © ZOOLOGIE DESCRIPTIVE, TRIBU DES SINGES DU NOUVEAU-MONDE. (Fig. 73, SAJOU À GORGE BLANCHE.) Caractères Les singes de l'Amérique , comme nous l’avons déjà dit, se dis- zoologiques. tinguent tous de ceux de l’ancien monde par un ensemble de caractères qui leur sont communs, et qui ne se retrouvent pas chez ces derniers. Le nombre de leurs dents molaires , absence de callosités et d’abajoues , la disposition des narines suffit pour les faire reconnaître au premier abord, et même la plupart de ces animaux se distinguent plus facilement encore des premiers par la faculté préhensile de leur queue, dont la conformation ajoute à leur agilité, en leur permettant de se servir de cet organe, comme d’une cinquième main, pour se suspendre aux branches et se lancer d’un arbre à un autre. Du reste , leurs mœurs sont essen- tiellement les mêmes que ceux de leurs analogues de Fancien continent. assifica- Tous les singes du Nouveau-Monde ont une queue très longue; mais elle n’est pas chez tous susceptible de s’enrouler autour des objets et de les saisir. Ceux dont la queue est préhensile sont en général désignés sous le nom collectif de sapajous , et les autres sout appelés sagouins ou sahis. SINGES DU NOUVEAU-MONDE. 277 Les sapAJOUS forment plusieurs genres bien distincts : chez la plupart , la portion prenante de la queue est nue et calleuse en- dessous ; chéz d’autres, elle est vélue comme le reste , et ce carac- tère suffit déjà pour séparer ces singes en deux petits groupes. Parmi les sapajous à queue nue et calleuse, les alouates et les atèles méritent surtout de fixer notre attention. Les ALOUATES (Mycetes), connus aussi sous le nom de singes hurleurs, ont la tête pyramidale et le visage oblique, la mâchoire inférieure extrêmement grande , les membres d’une longueur moyenne , et pourvus chacun de cinq doigts bien développés ; mais ce qu'ils présentent de plus remarquable est l'immense étendue de leur os hyoïde , dont le corps est transformé en une caisse osseuse à parois minces et élastiques , qui loge deux poches membraneuses en communication avec les ventricules du larynx. L’air s’introduit dans ces cavités et donne à la voix rauque et désagréable de ces animaux une force qui les a rendus célèbres et leur a valu le nom de Aurleurs. Leurs cris, au dire des voyageurs , se font entendre à plus d’une demi-lieue à la ronde et ont quelque chose de si effrayant , qu’on pourrait les prendre pour le bruit occasioné par l’écroulement des monta- gnes. C’est surtout au lever et au coucher du soleil, ou bien à lap- proche d’un orage, qu’ils font retentir les forêts de ces hurlemens épouvantables , et il paraît qu’ils y ont quelquefois recours pour éloigner leurs ennemis. Un auteur estimé , Margraff, qui a beau- _coup étudié les animaux de l'Amérique méridionale , attribue à ces singes des mœurs très singulières : il assure qu'ils ont l’ha-- bitude de se placer en cercle autour de l’un d’eux et de l’écouter dans le plus grand silence, pendant qu’il leur débite , avec une volubilité extrême , une espèce de discours assourdissant , et qu’aussitôt que l’orateur s'arrête et fait un signe de la main, tous ses auditeurs se mettent à crier ensemble jusqu’à ce que le premier, par un autre signe , réclame de nouveau le silence, pour reprendre son discours , après lequel la séance se lève. Du reste, ce sont des animaux tristes , lourds et farouches. Dans quelques forêts de l'Amérijue , le nombre de ces singes hurleurs est immense. Au Brésil et dans les Cordillières , on se sert quelquefois de leur peau , pour recouvrir le dos des mulets : mais on n’en fait que rarement la chasse; car ils se tiennent toujours sur les branches les plus élevées des grands arbres, où les flèches et les armes à feu peuvent seules les atteindre , et s’ils ne sont pas tués sur le coup , ils ne tombent pas au pouvoir des chasseurs ; car, se sentant blessés , ils s’accrochent si bien avec leur queue, qu’ils restent suspendus à une branche même après leur mort. Les ATÈLES sont remarquables par l’extrème longueur de Sapajous. Alouates. Ateles. Sapajous proprement dits. Sagouins. Saimiris. 278 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. leurs membres grèles et flexibles : ils diffèrent de la plupart des singes par l’état rudimentaire des pouces de leurs mains anté- rieures. Leur conformation leur a fait donner le nom de singes- araignées et leur fait prendre , lorsqu'ils marchent, des allures analogues à celles des orangs. Ils sont doux, craïintifs et paresseux. A voir la lenteur ordinaire de leurs mouvemens , on les croirait malades; mais, lorsqu'ils en ont besoin , ils déploient beaucoup d’agilité etfranchissent par le saut de grandes distances. Ils vivent en troupes sur les branches élevées des arbreset paraissent avoir beaucoup d'intelligence et d'adresse. On assure qu’ils se nour- rissent d'insectes , de mollusques et de poissons , aussi bien que de fruits, et qu’à la marée basse on les voit aller à la pêche des huîtres , dont ils savent briser la coquille entre deux pierres; mais cette particularité n’est pas ce que leur histoire offre de plus singulier. Il paraïtrait que, lorsque les atèles veulent pas- ser une rivière Ou se transporter, sans descendre à terre, d’un arbre à un autre arbre trop éloigné pour l’atteindre d’un bond, ils s’attachent les uns aux autres à l’aide de leurs longues queues, et forment ainsi une sorte de chaîne, qu’ils font oscil- ler jusqu’à ce que son extrémité inférieure arrive assez près du but , pour que le dernier individu puisse s’y accrocher et tirer ensuite à lui ses camarades. Les sapajous à queue entièrement velue forment le genre SAJOU Ou sapajou proprement dit ( Cebus). Ils sont vifs, remuans, doux , facilement éducables et pleins d'adresse et d’intelligence. jomme les autres sapajous, ils vivent en troupes sur les bran- ches élevées des arbres, et se nourrissent principalement de fruits, mais ils mangent aussi des insectes et des mollusques. À l’époque du rut, ils répandent une odeur assez forte qui les a fait appeler, par les voyageurs, singes musques; le ton plaintif de leur voix , lorsqu'on les tourmente , leur a valu aussi le nom de singes pleureurs. Ils sont très répandus dans la Guyane et le Brésil, et on nous en apporte en Europe un grand nombre. Les singes d'Amérique, dont la queue n’est point préhen- sile, sont désignés par plusieurs naturalistes sous le nom col- lectif de SAGOUINS. Les sAÏMIRIS ou fitis appartiennent à cette division , et éta- blissent en quelque sorte le passage entre elle et le groupe des sapajous; ils ont la queue déprimée et garnie de poils courts, la tête ronde et la face aplatie; ce sont peut-être de tous les singes ceux dont l’encéphale est le plus volumineux : aussi donnent-ils des signes d’une intelligence très développée. Un des voyageurs modernesles plus célèbres , M. de Humboldt, a re- marqué plusieurs fois que ces animaux reconnaissaient évidem- SINGES DU NOUVEAU-MONDE. 279 ment des insectes dont ils voyaient le portrait même sur des gra- vures non enluminées, et qu’un discours suivi, prononcé devant eux, les ocêupait au point que tantôt ils fixaient attentive- ment leurs regards sur l’orateur, et que tantôt ils cherchaient à s'approcher de lui pour toucher de leurs doigts ses dents ou sa langue. La physionomie du saïmiris, dit cet observateur habile, est presque celle d’un enfant ; c’est la même expression d’innocence, quelquefois le même sourire malin, et constamment la même ra- pidité dans le passage de la joie à la tristesse; il ressent aussi vivement le chagrin et le témoigne aussi en pleurant. Il est recherché par les habitans des côtes de l'Amérique méri- dionale pour sa beauté, ses manières aimables et la douceur de ses mœurs; il étonne par une agitation continuelle : cepen- dant ses mouvemens sont pleins de grâce; on le voit sans cesse occupé à jouer, à sauter et à prendre des insectes, et sur- tout des araignées, qu’il préfère à des alimens végétaux. Une particularité remarquable des mœurs de ces animaux est aussi le grand attachement des petits pour leur mère: quand celle- ci est frappée, ils tombent avec elle et restent attachés à son cadavre. C’est même de la sorte que les Indiens les pren- nent pour les élever et les vendre aux habitans des côtes; et il n’est pas sans intérêt de noter que, chez ces animaux, la portion postérieure du cerveau où Gall place l'instinct de la philogéniture , est développée au plus haut degré. Les saïmiris sont assez communs au Brésil et à la Guyane; ils vivent en troupes de dix à douze dans les forèts de cette partie du Nou- veau-Monde. Les sAKIS que l’on nomme aussi des singes à queue de renard, se distinguent facilement des précédens par les poils longs et touffus dont leur queue est garnie , et par leurs dents incisives plus saillantes que chez les autres singes. Ils vivent comme les sapajous , dans les grandes forêts de l'Amérique ; mais n'ayant pas la queue préhensile, ils ont moins d’agilité que ces animaux : souvent ils sont obligés de leur abandonner le séjour des arbres et de se réfugier dans les broussailles; où les sajous les suivent pour leur voler leur nourriture et les maltraitent encore après les avoir ainsi dépouillés. À Cayenne, on les appelle souvent singes de nuit ; mais ils ne méritent pas complètement ce nom, car, après le crépuscule, ils gagnent leurs retraites. Des singes complètement nocturnes et remarquables, comme le sont presque tous les animaux qui ont des mœurs analogues, par la grosseur de leurs yeux, sont les NOCTHORES Ou néctipi- thèques , dont une espèce , appelée le douroucouli, a été nommée aussi titi-tigre, à cause de son cri qui est assez fort, et ressemble Sakis. Nocthores Caractères généraux. Moœurs. 280 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. un peu à celle du jaguar. Ils habitent les forêts voisines de lOrénoque, et se cachent, pendant le jour, dans des trous de vieux arbres vermoulus. FAMILLE DES OUISTITIS (aretopithecus). (Fig. 74, OUISTITI A PINCEAU). Ce petit groupe, qui pendant long-temps a été confondu avec celui des singes, est propre au Nouveau-Monde, et cepen- dant les ouistitis diffèrent encore plus des singes d'Amérique que de ceux de lPancien continent : comme ces derniers , ils n’ont que vingt dents molaires. Ce sont de petits animaux ayant les formes agréables, la tête ronde, le visage plat, les narines latérales, point de callosités ni d’abajoues , et la queue touffue et non prenante. Aux membres antérieurs, leur pouce est à peine opposable ; et tous leurs doigts, excepté le pouce des membres postérieurs, sont armés d’ongles com- primés et pointus comme des griffes; c’est même à l’aide de ces ongles qu’ils grimpent sur les arbres comme le fe- raient des écureuils , car la conformation de leurs mains ne leur permet pas de se saisir des branches à la manière des singes à qui le nom de quadrumanes est bien mieux appliqué. Ils vivent sur les arbres, et passent pour être gais, capricieux, irascibles , et toujours en mouvement. D’après des observations faites par M. Audouin, sur ces animaux en captivité, 1l parai- trait qu’ils ont assez d'intelligence pour profiter des leçons de l'expérience et un instinct qui leur fait reconnaitre , au premier abord , les insectes dont ils ont à redouter la piqüre. M. Audouin a suvcessivement renfermé , dans la cage où ils étaient retenus, divers insectes : lorsque c’étaient des hannetons, des sauterelles, des mouches , etc., ils se jetaient dessus avec avidité et les dévo- raient avec délices. Mais une guëpe ayant été placée auprès de FAMILLE DES LÉMURIENS OU MAKIS. 281 ces animaux qui, nés en domesticité, n’en avaient jamais vu et ne pouvaient par expérience connaitre le danger de ses pigères, ils furent saisis de crainte et s’enfuirent au fond de leur cage pour y chercher un refuge ; la vue d’une gravure représentant cet insecte suffisait même ensuite pour leur causer une frayeur manifeste. Les ouistitis paraissent même capables de profiter de lexpérience ; car le même observateur remarqua que lun de ces animaux, ayant un jour lancé du jus de raisin dans son œil pendant qu’il mangeait un grain de ce fruit , ne manqua plus de fermer les yeux toutes les fois qu'il lui arriva d’en manger de nouveau. On connait plusieurs espèces d’ouistitis qui habitent l’'Amé- rique du Sud. FAMILLE DES LÉMURIENS OU MAKIS. St (Fig. 795, MAKIS À FRONT BLANC AVEC SON PETIT. Caractères Les animaux dont se compose la famille des lémuriens ont généraux. Makis. Indris. 282 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. les quatre pouces bien développés et opposables aux autres doigts ; mais en général ils s’éloignent des singes et des ouistitis par leur forme, qui se rapproche davantage de celle des carnas- siers , ainsi que par la disposition ou le nombre de leurs dents ; et un caractère qui suffirait seul pour les en distinguer, c’est lexistence d’un ongle pointu et relevé au premier ou aux deux premiers doigts de derrière , tandis que ceux des autres doigts sont tous plats. Les lémuriens ontaussi les narines découpées et sinueuses , et le pelage laineux. Leurs membres postérieurs, au lieu d’être plus courts que les membres antérieurs, comme cela a lieu chez beaucoup de singes, sont en général plus longs, et leur développement est souvent assez considérable pour faire de ces quadrumanes des animaux essentiellement sauteurs. Ils habitent les bois et se nourrissent principalement de fruits ; mais cependant ils poursuivent avec ardeur les oiseaux et les petits quadrupèdes, dont ils mangent la chair avec avidité. Ils sont par conséquent plus carnivores que les autres animaux du même ordre : aussi leur organisation se rapproche-t-elle davantage de celle que nous aurons bientôt à étudier dans l’ordre des carnassiers. Leurs dents molaires commencent à montrer des tubercules aigus qui s’engrènent les uns dans les autres, comme chez les insectivores ; leur langue est rude et papilleuse, et leur voix tient un peu du rugissement du lion; de même que les chats , ils aiment à être caressés et font alors entendre un ron- flement particulier. Cette famille se compose des makis, des indris, des loris , des galagos et des tarsiers, et elle tient par des liens étroits aux édentés de la famille des paresseux, dont nous aurons à parler par la suite. Les MAKIS PROPREMENT DITS(Lemur), habitent exclusivement l'ile de Madagascar, où ils paraissent remplacer en quelque sorte les singes. On les a nommés, à cause de leur tête pointue , des singes à téle de renard, et on les distingue facilement par la forme générale de leur corps (fig. 75), par leurs incisives , au nombre de six en bas et de quatre en haut, par leur queue longue et touffue, et par légal développement de leur tarse et de leur métatarse. Ils vivent en troupes , se nourrissent de fruits et sont à demi nocturnes. Les invRIs (Lichanotus)sont également propres à l’île de Mada- gascar et ressemblent beaucoup aux makis ; mais ils n’ont que quatre dents incisives en bas. Leur queue est courte, et leurs jambes de derrière, presque deux fois aussi longues que les anté- rieures , leur permettent de franchir, en sautant, des distances considérables. Ils sont doux et assez intelligens. Les habitans de la partie sud de Madagascar les apprivoisent ei les dressent pour la chasse de la même manière que nous le faisons pour le chien. ORDRE DES CARNASSIERS. 283 Les LORIS (Stenops), appelés vulgairement singes paresseux , Ont reçu ce nom , à cause de l’excessive lenteur de leur marche. Ils habitent les des Orientales et se reconnaissent à leur corps grèle, à leur museau court comme celui d’un doguin, à leurs yeux gros et saillans et à l'absence de toute espèce de queue. Plusieurs particularités de leur organisation les rapprochent des vrais paresseux , et il n’est pas sans intérêt de voir que, chez les uns et les autres, ilexiste une disposition dans les artères des membres, qui peut , jusqu’à un certain point , nous expliquer la lenteur de leurs mouvemens. Dans la première partie de ce cours , nous avons vu que les muscles , pour agir avec force ;, doivent rece- voir beaucoup de sang , et, d’un autre côté, que ce liquide arrive dans une partie quelconque avec d’autant moins de rapidité, que, toutes choses égales d’ailleurs, le tronc artériel, qui le porte, s’est subdivisé davantage (1). Or, chez les loris , de même que chez les paresseux , les artères des membres commencent par se diviser en une infinité de rameaux qui ensuite se réunissent en un tronc d’où partent les branches ordinaires; il en résulte que , chez ces animaux, la circulation du sang doit se faire avec moins de force dans les membres que chez ceux dont les artères ont la disposition normale. Les GALAGOS et les TARSIERS sont aussi des animaux nocturnes. Les premiers se trouvent en Afrique; les seconds aux Mollu- ques. Ils sont remarquables par la longueur démesurée de leurs membres postérieurs et la grandeur de leurs yeux. Les galagos présentent une particularité qui mérite d’être signalée. De même que les chauves-souris , ils ont les oreilles extrêmement grandes et peuvent les tendre de façon qu’elles soient très élastiques, ce qui doit augmenter la finesse de leur ouïe, et, de même aussi que ces animaux, ils peuvent à volonté se rendre presque sourds; car ils peuvent froncer la base de leur oreille et la replier de manière à la rendre presque invisible et à boucher exactement le conduit auditif. ORDRE DES CARNASSIERS. L'ordre des carnassiers ne se compose pas seulement, comme son nom semble l'indiquer, d'animaux qui se nourrissent habi- tuellement de chair: on y range aussi d’autres mammifères, dont le régime est végétal, il est vrai, mais dont l’ensemble de l’organisation ne diffère que peu de celle des animaux essentiel- lement carnivores. Les caractères qui distinguent ces mammi- fères de tous les autres animaux de la même classe sont d’être onguiculés comme les bimanes et les quadrumanes, d’avoir (1) Voy. page 86. Loris. Galagos et tarsiers, Caractères généraux, Membres. Appareil di- gestif. 284 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. aussi la bouche armée de trois sortes de dents , et de naïtre, comme eux, de la manière ordinaire , mais de ne pas avoir le pouce opposable aux autres doigts. Le mode de conformation de leurs membres est peu favorable à l’exercice du tact : aussi ce sens est-il bien moins parfait que chez les animaux plus élevés dans la série zoologique, et ne peut-il donner que des notions très vagues sur la forme des objets soumis à son investigation. Chez les carnassiers , le tou- cher paraît servir surtout à avertir l’animal du contact d’un corps étranger avec ses organes , et à lui faire juger de sa tempé- rature et de sa consistance. Sous ce rapport , le sens du toucher acquiertquelquefois une délicatesse telle que nous avons peine à le concevoir, et il paraïîtrait que , chez plusieurs de ces animaux, ce ne sont pas les membres, mais bien la partie de la peau où s’insèrent les moustaches, qui en est le siège principal. N'ayant pas de mains, ils ne peuvent se servir de leurs membres antérieurs , pour porter leur nourriture dans la bouche ; mais cependant ces organes sont encore employés à la préhension des alimens. En général c’est à l’aide de leurs pattes de devant, que les carnassiers saisissent leur proie et la fixent contre le sol, pendant qu’ils la dévorent, et quelquefois même la déchirent en lambeaux : aussi l'extrémité de ces membres doit-elle con- server une mobilité assez grande ; et en effet les doigts sont en général bien flexibles , et, dans la plupart des cas , l’avanti-bras peut encore exécuter quelques mouvemens de rotation. D’après le genre de vie de la plupart de ces animaux , on peut prévoir que leur canal intestinal doit être moins volumineux et moins long que chez les mammifères qui se nourrissent de sub- stances végétales. Les carnassiers , pour saisir et dévorer une Fig. 76.(1) proie , qui en général se débat contre eux , ont besoin d’une force considérable dansleurs mà- choires: aussi les muscles ser- vant à rapprocher ces organes sont-ils très volumineux, et, pour les loger, il existe entre les côtés du crâne et l’arcade zygo- matique un espace considérable, ce qui donne à la tête de ces ani- maux beaucoup de largeur. En général , leurs mâchoires sont en même temps très courtes , ce qui (1) Fig. 56. Tête osseuse de lion vue en-dessus : — c crâne ; — f os frontal ; ñn OS nasaux ; — Z arcade zygomatique. ORDRE DES CARNASSIERS. 285 diminue l'inégalité qui existe ordinairement dans ces leviers, entre la longueur des bras de la puissance et de la résistance , et Fêg. 77. (1) favorise par conséquent le dé- ploiement des forces. Le mode d’articulation de la mâchoire in- dique aussi que les dents sont 9 destinées à couper de la chair ou à écraser des insectes, mais non « pas à broyer de lherbe ou des racines : elle est dirigée en tra- vers et serrée comme un gond, de façon à s’opposer à tout mou- vement latéral, et à ne permettre à la bouche que de s’ouvrir et de se fermer, comme le feraient des branches de ciseaux. Dans l’ordre des carnassiers , l'appareil de lodorat est en gé- néral très développé. La membrane pituitaire s’étend ordinai- rement sur des lames osseuses très multipliées ; chez plusieurs de ces animaux , les cornets sont tellement multipliés et subdivisés, que les fosses nasales paraissent en être entièrement remplies, et que l'air, pour arriver aux poumons , est obligé de traverser une espèce de crible où il dépose les particules odorantes , dont il est chargé. Il en résulte que, chez ces animaux , ce sens est très développé; et en effet , si la nature ne les avait pas doués de la faculté de suivre à la piste les êtres dont ils doivent se nourrir, il leur aurait été souvent impossible de pourvoir à leurs besoins. Les organes de la vue ne présentent dans cet ordre rien de très remarquable. Il est seulement à noter que les yeux deviennent de plus en plus latéraux, et que, dans le squelette, les orbites ne sont plus séparés des fosses temporales par une cloison com- plète , comme chez les bimanes et les quadrumanes. Le cerveau des carnassiers , comparé à celui de l’homme et des quadrumanes, présente des signes d’une dégradation bien sensible. Sa surface est encore creusée de sillons bien marqués ; mais , de même que dans tous les mammifères inférieurs, dont il nous reste à parler, cet organe ne présente plus de troisième lobe et ne recouvre plus le cervelet; chez ces animaux, toute la masse cérébrale est en même temps peu développée : aussi le front est-il peu élevé, et l'angle facial très aigu (30 à 40 degrés). L’articulation de la tête avec la colonne vertébrale se fait par la face postérieure du crâne et non point par sa face inférieure, comme chez l’homme et quelques singes, et il en résulte que, (1) Fig, 77. La même, vue de profil: — a condyles de l’occiput, servant à l'articulation de la tête avec la colonne vertébrale; —o crête occipitaie ;—+t fosse temporale , servant à l'insertion des muscles de la mâchoire; — y orbites. 19 Odorat. Vue. Cerveau. Articulatiou de la tête. Classifiea- Caracteres comauns,. 286 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. pour soutenir le poids de l’extrémité céphalique , et pour y don- ner la force nécessaire à l’animal , lorsqu'il déchire sa proie ou qu’il l'emporte dans sa gueule, le cou des carnassiers est ordi- rement plus court et muni de muscles puissans pour l’attache desquels il existe à locciput une crête très élevée. Le ligament cervical , destiné à empécher la tête de retomber en avant, est également très développé, et les apophyses épineuses des pre- mières vertèbres dorsales sur lesquelles il se fixe , sont grandes etsaillantes. Du reste, les formes et les mœurs de ces animaux varient beaucoup, et l’ordre des carnassiers est loin d’être aussi homo- gène et aussi naturel que celui des quadrumanes. Les zoologistes sont même très divisés sur les limites à assigner à ce groupe. Suivant les uns, il faudrait en exclure tous les insectivores, pour en former un ordre distinct, et ce n’est que depuis peu que l’on s'accorde généralement à en séparer, comme nous Pavons fait ici, les animaux à bourse, dont le mode d'existence dans les premiers temps de la vie est si anormal. M. Cuvier, dont nous avons cru devoir suivre ici la classifica- tion, divise l’ordre des carnassiers en trois grandes familles , d’après les caractères présentés dans le tableau suivant. Des espèces d'ailes , formées par un repli de la peau qui prend aux côtés du cou, et s’étend en- treles quatre pieds etleurs doigts. me Ordre Dents molaires à courenne plate des < ou hérissées de pointes coniques. Carnassiers. Pointdere-; Dents molaires plis cutanés | hérissées de poin- >INSECTIVORES. en forme d’ai-{ tes coniques. les surlescô-} Dents molaires tés du corps. \tranchantes. earmvores. FAMILLE DES CHÉIROPTÈRES. La plupart des Chéiroptères sont des animaux organisés pour le vol plutôt que pour le mode de locomotion ordinaire dans cette classe de vertébrés. Chez ces mammifères , même chez ceux qui n’ont pas de véritables ailes, il existe, de chaque côté du corps une espèce de grande voile , formée par un repli de la peau, qui s'étend depuis le cou jusqu'aux pattes postérieures, et qui, étendue et mise en mouvement par les membres de l’animal, remplit les fonctions d’un parachute, à l’aide duquel il peut FAMILLE DES CHÉIROPTÈRES. 287 se soutenir en l'air, lorsqu'il s’élance d’un point élevé. Ce mode d'organisation exigeait beaucoup de solidité et de force dans les membres antérieurs : aussi, chez les chéiroptères , lavant-bras ne peut-il exécuter de mouvemens de rotation, qui auraient af- faibli la force avec laquelle il doit frapper l’air, et les muscles pectoraux , ainsi que les os de l’épaule , sont-ils très développés. D'un autre côté , quelques particularités de leur organisation les rapprochent plus que les autres carnassiers des quadrumanes et de l’homme: ainsi ils ont les mamelles pectorales, tandis que, chez les insectivores et les carnivores , ces organes sont situés sous le ventre. Tous ces animaux ne sont pas également bien organisés pour Classifica- le vol, et on peut, d’après cette considération, les répartir, tion. comme il suit, en deux tribus. Doigts des membres anté- rieurs excessivement longs | et formant, avec la membra- | #4 7 > CHAUVE-SOURIS. ne qu’ils soutiennent , des ailes aussi étendues que cel- Famille les des oiseaux. fax vù dé _Doigis des membres anté- | rieurs , tous garnis d'ongles tranchans et pas plus allon- gés que ceux des membres postérieurs , de façon que la membrane latérale ne rem- plit que les fonctions d’une | espèce de parachute. / / Chéiroptères. GALÉOPITHÈQUES. TRIBU DES CHAUVE-SOURIS. (Fig. 78, OREILLARD COMMUN.) Ces singuliers animaux semblent, au premier abord, tenir autant de l'oiseau que du mammifère, car ils sont pourvus, tion 19. Organisa- 288 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. comme le premier, d’ailes puissantes, et ils sont organisés pour voler dans les airs plutôt que pour marcher sur la terre; mais si on examine avec plus d'attention la structure de leur corps, on voil que, dans la réalité, elle ne diffère que très peu de celle des mammifères ordinaires, et que ses anomalies ne dépendent guère que de l'allongement extrême de toutes les parties des mem- bres antérieurs. Les ailes elles-mêmes, qui semblentrapprocher les chauve-souris des oiseaux , diffèrent extrêmement des ailes de ces animaux, et ont la plus grande ressemblance avec la main de l’homme et des autres mammifères. Chez les oiseaux, la main est réduite à une sorte de moignon sur lequel sont fixées les grandes plumes raides qui constituent Fespèce de rame re- présentée par laile ; chez les chauve-souris , au contraire, c’est Fig. 55. (1) cette main elle-même, dont les doigts acquièrent une longueur extrême et sont unis par un prolongement de la peau, qui frappe l'air pendant le vol ft et soutient l'animal dans ce fluide \ mobile. L’os métacarpien de ces doigts, transformés de la sorte en baguettes destinées à soutenir la membrane ai- laire, ressemble à une première phalange, de façon que ces doigts paraissent naître immédiatement du carpe. L’étendue de la sur- face des rames ainsi formées est très considérable, et elles sont mises en mouvement par des muscles puissans : aussi les chauve- souris volent-elles très haut et très rapidement , et on re- marque, dans la disposition de leur sternum et de leurs cla- vicules des particularités qui sont en rapport avec ce mode de locomotion, et qui se retrouvent à un bien haut degré encore chez les oiseaux; ainsi leur sternum présente, dans son milieu, une arête qui sert à donner attache aux muscles pec- toraux , et qui est analogue au brechet des oiseaux; et leurs clavicules forment des arcs-boutans puissans qui empêchent Pépaule d’être entrainée en dedans par les muscles pectoraux,, lors de la construction violente de ces organes nécessaires pour l’abaissement de Paile. | Du reste, les membres antérieurs des chauve-souris ne sont (1) Membre antérieur d’une chauve-souris. TRIBU DES CHAUVE-SOURIS. 289 Fig. 79. pas destinés uniquement à la locomotion aérienne comme le sont les ailes des oiseaux ; lorsqu'ils sont reployés, ils servent aussi à l'animal pour ram- per ou pour se suspendre à quelque corps saillant , et, à cet effet, leur pouce reste libre , court et armé d’un ongle crochu, com- me celui de la plupart des autres mammifères, tandis que les autres doigts s'allongent outre mesure, perdent leur dernière phalange ainsi que leur ongle , et sont enveloppés dans le repli de la peau, qui s'étend des côtés du cou aux pattes postérieures , ou même jusqu’à la queue. Les membres postérieurs conservent leur dimension ordi- naire et sont très faibles : aussi les pieds de derrière sont libres ; on y compte cinq doigts, petits, égaux entre eux, et Lerminés par des ongles crochus. La marche est extrêmement pénible pour ces animaux, et a lieu au moyen dune suite de culbutes obliques qui les fatiguent beaucoup : aussi n’ont-ils recours à ce mode de progression que lorsqu'ils y sont forcés. On les voit même rarement se poser sur le sol, car, à moins de se lancer d’un point élevé, ils ne peuvent que difficilement prendr eleur vol. Lorsqu'ils cherchent le repos , ils se suspendent à une branche d'arbre ou à quelque saillie de la voûte d’une caverne, en s’y accrochant par les pattes postérieures, la tête en bas, position dans laquelle ils n’ont qu’à lâcher prise et à étendre leurs ailes pour reprendre leur vol. Les chauve-souris sont des animaux crépusculaires ou même nocturnes. Pendant le jour et pendant toute la saison froide, ils se tiennent cachés dans des cavernes obscures et sont plon- gés dans un sommeil léthargique. La plupart des mammifères nocturnes ont les yeux volumineux; chez ies chauve-souris, au contraire, ces organes sont d’une petitesse excessive et ne pa- raisseni pas leur être nécessaires pourse diriger. On les voit voler dans l'obscurité la plus profonde avec une précision extrême, éviter les obstacles et se diriger sans hésitation dans ious les recoins des labyrinthes où ils errent. Les expériences de Spal- lanzani prouvent aussi que la vue ne les guide pas alors; car, après avoir eu les yeux crevés, ces animaux se dirigeaient avec la même assurance et s’échappaient sans hésitation par la plus 290 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. petite ouverture. Cette faculté, que Spallanzani attribuait à un sixième sens, parait tenir au grand développement de la sensi- bilité tactile de la peau des ailes et des oreilles, organes sur lesquels la membrane tégumentaire est nue, très fine et présente une surface très étendue : en effet, les chauve-souris semblent sentir le voisinage d’un corps solide sans lé toucher et par la seule diversité des impressions de l'air sur la surface de leur corps. L'ouïe est également d’une sensibilité exquise chez ces ani- maux : le pavillon de leur oreille acquiert quelquefois des di- mensions énormes ; et comme si la nature avait craint que cette délicatesse trop grande de l'audition ne nuisit au repos néces- saire aux chauve-souris , elle les a douées de la faculté de la diminuer à volonté , et de se soustraire ainsi à un bruit impor- tun. À cet effet la'partie du pavillon, désignée sous le nom de tragus , prend un développement extrême et constitue un second entonnoir placé dans l’intérieur de celui que forme le pavillon , et susceptible d'agir à la manière d’une soupape pour fermer le méat auditif. Il'existe aussi, au-devant des narines de beaucoup de chauve- Souris, une disposition analogue à l’aide de laquelle ces ani- maux peuvent empêcher les odeurs d'arriver à l’organe olfac- tif: au-devant des narines, on leur voit des espèces de feuilles plus ou moins compliquées , formées par des prolongemens de la peau , et susceptibles de se froncer de manière à fermer ces Ouvertures. La susceptibilité des organes des sens forcent les chauve- souris à fuir le bruit et le jour; pendant les nuits d'été, on les voit voler avec activité à la recherche de leur nourriture, et souvent elles deviennent alors la proie d’oiseaux nocturnes ; mais pendant le jour, elles se tiennent cachées dans des cavernes ou dans d’autres retraites obscures. La faculté productrice de la Chaleur est moins développée chez ces animaux que chez la plupart des mammifères , et lorsque la température de l’atmo- Sphère s’abaisse beaucoup, celie de leur corps ne se soutient pas à un degré assez élevé pour que leurs fonctions puissent s’exer- cer de la manière ordinaire ; ils tombent alors dans un engour- dissement qui dure pendant toute la saison froide. Le nombre de chauve-souris que lon voit suspendues ainsi, dans un sommeil léthargique, aux votes des cavernes, est sou- vent inmense, et la quantité de matières fécales qu’elles dé- posent dans ces antres est si considérable qu’on a attribué à sa décomposition le nitre qui se forme spontanément dans cer- taines grottes de l'ile de Ceylan, du Brésil , etc. Si cette opinion élait fondée, les chauve-souris seraient, d’une manière in- directe, très utiles à l'industrie, mais, du reste, elles ne nous TRIBU DES CHAUVE-SOURIS. 291 rendent aucun service, et dans quelques pays occasionnent, au contraire , des dégâts considérables. La portée ordinaire des chauve-souris est de deux petits qu’elles tiennent cramponnés à leurs mamelles et qu’elles mettent souvent à l’abri dans une sorte de poche formée par un repli de leurs ailes. Le régime des chauve-souris varie : les unes se nourrissent de fruits, les autres d'insectes, et ces différences sont accompa- gnées d’autres particularités dans leur organisation, et sont caractéristiques de deux groupes naturels formés par ces ani- maux : aussi les divise-1-on en chauve-souris frugivores et en chauve-souris insectivores. Les CHAUVE-SOURIS FRUGIVORES sOnt connues aussi sous le nom de ROUSSETTES. On les distingue facilement à leurs dents mo- laires dont la couronne est plate , à l'existence d’une troisième phalange pourvue, en général, d’un petit ongle au doigt indica- teur ou deuxième doigt, et à l'absence ou à l’état rudimentaire de la queue. Elles sont propres à PAsie méridionale , à l'archipel Indien , à la partie sud de l'Afrique, et sont les plus grands de tous les animaux de cette famille ; on en connait qui ont jusqu’à quatre pieds d'envergure. Pendant le jour, ces chauve-souris se tiennent accrochés, par groupes, aux branches des arbres les plus élevés, et elles ne commencent à voler qu’à l'approche de la nuit. Elles mangent beaucoup de fruits , surtout des bananes, des dattes et autres fruits pulpeux ; mais cependant on les voit aussi poursuivre les petits oiseaux pour s’en nourrir. Leur chair est généralement estimée et employée comme aliment dans les pays qu’elles habitent. Les CHAUVE-SOURIS INSECTIVORES sont bien plus nombreuses que les précédentes. Toutes ont de chaque côté et à chaque mà- choire trois dents molaires hérissées de pointes coniques et pré- cédées de plusieurs fausses molaires ; leur doigt index n’a jamais dongle, et, un seul genre excepté, leur membrane ailaire s’é- tend toujours entre les deux jambes. Il est aussi à noter que la plupart de ces animaux ont, comme certains singes , des aba- joues dans lesquelles ils déposent les insectes dont ils s'empa- rent, afin de les manger plus à leur aise après qu’ils ont terminé leur chasse. Chez les uns, il existe au doigt médian trois phalanges ossi- fiées : ce sont les MOLOSSsES , les NOCTILIONS et les PHYLLOSTOMES, qui appartiennent pour la plupart à Amérique. Ces derniers ne se Contentent pas de vivre d'insectes, ils atiaquent les gros ani- maux endormis pour en sucer le sang qu’ils font sortir de la peau en lincisant avec les papilles cornées dont leur langue est Régime et classification. Chauve-sou- ris frugivores. Cluure-sou= ris insectivos res. l'hyllosto- mes, etc Rhinolophes. Vespértii- lons. Creillards. Cäracteres généraux. 292 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. armée. L'un de ces phyllostomes qui habite l'Amérique méri- dionale, et qui est de la grandeur d’une pie, est connu sous le nom de vampire ; on Va accusé de faire périr les hommes et les animaux en suçant leur sang, mais cela paraît peu probable, car les plaies qu’il fait sont très petites. Les autres chauve-souris n’ont qu’une phalange ossifiée à index et deux aux autres doigts; elles forment un grand nombre de genres parmi lesquels nous citerons les RHINOLOPHES , les VESPERTILLONS et les OREILLARDS. On trouve très communément en France deux espèces de RHINOLOPHES , qui Sont connus sous le nom vulgaire de chauve- souris fers-à-cheval, à raison des crêtes et membranes qui sont fixées sur leur nez et qui représentent à-peu-près la figure d’un fer-à-cheval. On les voit souvent suspendus dans les carrières et complètement enveloppés dans leur membrane ailaire comme dans un manteau. Les vESPERTILLONS Ou chauve-souris communes n’ont point de feuilles nasales et ont les oreilles de grandeur médiocre. On en connaît six ou sept espèces qui habitent la France, savoir : la chauve-souris commune et la serotine, qui se trouvent dans les clochers et les vieux édifices ; le noctule , qui se cache dans le creux des vieux arbres; la pipistrelle, qui est commune dans les combles des habitations rurales, etc. Enfin, les OREILLARDS diffèrent des précédens par le grand développement de leurs oreilles. Une de ces chauve-souris ha- bite nos maisons (voy. fig. 78 et 79). TRIBU DES GALÉOPITHÈQUES. Les galécpithèques ont été désignés , par les voyageurs, sous les noms de singes volans, de chats volans, de chiens volans, etc. ; et, en effet, ils ressemblent un peu à ces animaux par la forme générale de leur corps, et méritent l’épithète de volans à cause de l'espèce de parachute formé par un grand repli de la peau qui s’étend depuis les côtés du cou jusqu’à la queue, et qui, tendu par les membres sert à soutenir lanimal lorsqu'il saute d’une branche à une autre. Ils n’ont pas, comme les chauve- souris, la main engagée dans cette membrane ni allongée en manière d’aile; leurs doigts sont libres, garnis d'ongles tran- chans et semblables à leurs orteils. Ces animaux habitent l'archipel Indien, et vivent sur les arbres, où ils poursuivent les insectes et les petits oiseaux. On n’en connait distinctement qu'une seule espèce. FAMILLE DES INSECTIVORES. 293 FAMILLE DES INSECTIVORES. La famille des insectivores se compose des carnassiers, dont les dents molaires ou mâchelières(f#g. 80), comme celles de la plupart Fig. 80, des chéiroptères sont hérissées de pointes coni- ques, mais dont la peau des flancs ne se prolonge &® pas de facon à former un parachute ou des es- Caracteres pèces d’ailes. Ce sont des animaux faibles et de généraux. petite taille. Leurs pieds sont courts ,et, en mar- chant , ils en appuient la plante tout entière sur le sol. La plu- part se creusent des retraites souterraines , dont ils ne sortent que la nuit , et, dans les pays froids , beaucoup d’entre eux pas- sent l'hiver en léthargie. Ainsi que leur nom l'indique , ces ani- maux se nourrissent principalement d'insectes : ils forment huit genres, savoir : les hérissons, les tenrecs , les cladobates, les musaraignes, les desmans , les chrysochlores, les taupes , les condyures et les scalopes. Les HÉRISSONS (Zrinaceus) sont de petits animaux qui, sans avoir l'instinct de se creuser des retraites inaccessibles à leurs ennemis , sans avoir l’agilité nécessaire pour se soustraire à leur poursuite ni la force pour les combattre , peuvent cependant se défendre avec avantage et punir leurs adversaires de leurs atta- ques imprudentes ; mais, pour les douer ainsi , la nature n’a pas créé en leur faveur des organes nouveaux, elle s’est bornée à mo- difier légèrement les poils dont leur dos est recouvert et à donner à certain de leurs mouvemens plus d’étendue que chez les qua- drupèdes ordinaires.En fléchissant la tête et les pattes sous le ven- tre, les hérissons peuvent se rouler en boule, et ils ont aussi la fa- culté de tirer la peau de leur dos, de façon à s’en envelopper comme dans une bourse : or, les poils dont cette portion de l’enve- loppe tégumentaire est garnie, au lieu d’être flexibles et soyeux , sont gros, raides et acérés, et, lorsque la peau est ainsi tendue, ces piquans se redressent, s’entre-croisent dans tous les sens et héris- sent de toutes parts la surface de l'animal comme autant d’épines prêtes à déchirer la gueule et les pattes de l’agresseur. Cette ar- mure puissante met les hérissons à l'abri des atteintes de la plupart des carnassiers , dont , sans elle , ils deviendraient facilement les victimes ; les renards cependant ne se laissent pas rebuterpar ces obstacles et parviennent souvent à s'emparer de cette proie dan- gereuse. Ces animaux ont ies formes épaisses et la démarche pesante. Il existe à tous leurs pieds cinq doigts armés d’ongles fouisseurs , et ils ont une queue. La disposition de leur système dentaire est également caractéristique ; sur le devant de la bouche , on leur Hérissons. Tenrecs. €ladobates. Musarai- ÿues. 294 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. voit. deux incisives longues et saillantes , qui sont suivies de deux autres plus petites. De chaque côté, on trouve trois fausses mo- laires , trois molaires hérissées de pointes et une tuberculeuse. Les hérissons se nourrissent principalement d'insectes , mais mangent aussi des fruits et se montrent même très avides de chair. Ils vivent dans les haies et ne sortent guère que pendant la nuit; dans le jour, ils se tiennent cachés entre les pierres ou les racines des vieux arbres , et, pendant l'hiver, ils se retirent dans des trous où ils restent plongés dans un état d’engourdis- sement léthargique. Le hérisson d'Europe est assez commun dans nos bois et dans nos haïes , et se distingue par la petitesse de ses oreilles d’une autre espèce qui habite depuis le nord de la mer Caspienne jus- qu’en Égypte (H. à longues oreilles ). La chair de ces animaux n’est pas employée; autrefois on se servait de leur peau, garnie de ses piquans , comme d’une carde pour peigner le chanvre. Les TENRECS (Centenes) ressemblent beaucoup aux hérissons; ils ont aussi le corps couvert de piquans, mais ils n’ont pas, comme eux, la faculté de se rouler complètement en boule; ils n'ont pas de queue , et leur système dentaire est très différent. Ces animaux habitent l’île de Madagascar, et l’un d’eux a été na- turalisé à l'Ile-de-France; ils passent une partie de l’année en léthargie, et on assure que c’est pendant les plus grandes cha- leurs qu’ils dorment ainsi. Les CLADOBATES ne présentent, dans leur structure, rien de très intéressant, mais nous ne pouvons les passer sous silence, car leurs mœurs sont très différentes de celles des autres ani- maux de cette famille; au lieu de se tenir toujours à terre ou dans des souterrains , ils montent sur les arbres avec lagilité des écureuils. Ce sont des animaux couverts de poils, ayant la queue longue, velue et relevée, et le museau extrêmement pointu ; ils habitent l'archipel Indien. Les MUSARAIGNES (Sorer)nous intéressent davantage, car elles vivent près de nous. Ce sont de très petits animaux (#g. 81) dont Fig. 81. l'aspect rappelle, en général, celui des souris, et qui doivent leur nom à cette ressemblance (mus araneus). Leur museau à la forme d’un cône allongé ;leur corps est couvert d’un pelage doux et épais ; leurs pattes cour- tes, pourvues de cinq doigts ar- més d’ongles crochus, sont con- formées pour la marche; sur FAMILLE DES INSECTIVORES. 295 chaque flanc on leur trouve , sous les poils ordinaires , une bande de soies raides et serrées entre lesquelles suinte une humeur odorante, séerétée par une glande particulière ; leurs oreilles sont très grandes , et, à l'entrée du conduit auditif, il existe un petit opercule disposé de façon à pouvoir fermer ce canal et s’op- poser au passage des ondes sonores ; enfin leurs dents incisives, moyennes, supérieures, crochues et dentées à leur base, sont sui- vies de cinq petites dents, de trois molaires hérissées et d’une petite tuberculeuse , tandis que les incisives inférieures, cou- chées et prolongées, ne sont suivies, de chaque côté, que de deux petites dents et de trois molaires hérissées. Ces animaux vivent dans des trous , dont ils ne sortent guère que le soir, et se nourrissent de vers et d’insectes. Ils se trou- vent dans toutes les parties du monde, et on en connaît un nombre considérable d’espèces. La plus répandue en Europe est la musaraigne commune Où musette, qui se trouve dans les bois et dans les prairies. Elle se tient habituellement cachée dans des'troncs d'arbres, sous des feuilles ou dans des trous EE en hiver se réfugie souvent dans les écuries et les granges , où l'odeur forte qu’elle répand la fait découvrir. Cette odeur n’em- pêche pas les chiens et les chats de tuer les musettes, mais leur fait refuser d’en manger la chair. Il existe dans les campagnes un préjugé assez répandu, relativement à ces petits animaux : c’est d’en croire la morsure venimeuse et de lui attribuer une maladie souvent mortelle , qui se développe quelquefois avec une grande rapidité chez les chevaux et les mulets; mais des observations nombreuses prouvent que les musaraignes ne sont pour rien dans l'apparition de cette espèce de charbon. Le carrelet est une autre espèce de musaraigne , qui vit à-peu- près dans les mêmes lieux que la précédente et qui doit son nom à la forme de la queue, qui est quadrilatère et terminée tout- à-Coup par une pointe fine. La musaruigne d’eau se trouve également en France ; elle fréquente de préférence le bord des ruisseaux : elle est un peu plus grande que la musette, et nage avec facilité au moyen d’une disposition particulière de ses pieds , qui sont bordés de poils raides. Les DESMANS (Mygale) ont de l’analogie avec les musaraignes, mais ils sont remarquables par leur long museau en forme de trompe, leur queue écailleuse et aplatie latéralement, et leurs pieds palmés. Ce mode de conformation en fait des animaux essentiellement aquatiques. Le desman de Russie, qui est fort commun sur les bords des lacs et des rivières de la Russie méridionale, et qui est à-peu-près Desmans, 296 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. de la taille de nos hérissons , est connu aussi sous le nom de rat musque de Russie. Son odeur musquée provient d’une ma- tière grasse sécrétée par des follicules situés sous la peau , et est si tenace, qu’elle se communique même à la chair des brochets qui mangent ces animaux. Les desmans se creusent dans la berge des retraites qui com- mencent sous l’eau et qui s'élèvent de manière que le fond reste à sec au-dessus du niveau des plus hautes eaux: ils vivent prin- cipalement de vers , de larves d'insectes, et de sangsues. Une petite espèce de ce genre se trouve dans les ruisseaux des Pyrénées. Les TAUPES sont des animaux essentiellement souterrains et fouisseurs; aussi le mode de structure ordinaire des insecti- vores a-t-il été profondément modifié, afin de mieux adapter les organes de cet animal à ce genre de vie. (Fig. 82, TAUPE.) La tête de la taupe, très longue comme celle de la plupart des autres insectivores, est terminée par un boutoir ou par une sorte de trompe que l’animal emploie crdinairementcomme une tarière Fig. 83. (1) pour percer et soulever la terre, mais qui est aussi un organe du toucher. Les mem- bres antérieurs, très rapprochés de la tête, sont remarquables par leur brièveté, par leur force, par le grand développement de la patte qui les termine, et surtout par la conformation de ce dernier organe. Le sternum présente, en avant, une crête saillante , destinée à fournir, aux muscles abaisseurs du bras, { (1 Fig. 83. Humérus de la taupe. FAMILLE DES INSECTIVORES 297 Fig. 84. (1) de larges insertions ; la clavicule est grosse et courte; l’omoplate est très longue , et l’humérus (fg. 83), qui est très court, semble avoir gagné en largeur ce qu'il a perdu en lon- gueur, et présente ainsi les disposi- tions les plus favorables au dévelop- pement d’une grande puissance mus- culaire ; lavant-bras est également court et robuste , et la main, extré- mement large et solide , est dirigée en dehors (f#g. 84); on y distingue à peine les doigts tellement ils sont courts et enveloppés dans l'énorme ongle plat et tranchant qui les termine et qui sert à déchirer la terre et à la lancer en arrière de chaque côté du corps. A l’aide de ces organes, les taupes se creusent , dans le sol, avec une rapidité extrème et avec un art admirable , de longues gale- ries ayant de nombreuses issues rangées autour du gite principal. De distance en distance elles forment une espèce de soupirail connu sous le nom de taupinière et servant à rejeter au dehors les déblais qui obstruaient le passage , et elles ont soin de pra- tiquer, entre les diverses galeries principales, de nombreuses communications. C’est surtout en poursuivant des larves d’in- sectes dont ces animaux font leur nourriture , qu’ils creusent de la sorte de nouveaux souterrains, et, suivant que la saison ou la nature du terrain porte leur proie à s’enfoncer profondé- ment dans le sol ou à se rapprocher de la surface, on les voit se frayer des routes dans des couches différentes. Leur demeure ne communique Jamais directement avec l'air extérieur; et, s’ils sortent de leurs galeries, ce n’est que pour choisir un point convenable pour recommencer de nouveaux travaux. En effet, leur train de derrière est très faible , et sur la terre ils se meuvent aussi péniblement qu’ils le font avec facilité en dessous; la vitesse avec laquelle ils fouissent est quelquefoissi grande qu'ils semblent en quelque sorte nager dans la terre. Ces animaux, comme on le voit, sont destinés à vivre dans (1) Fig. 84. Avant-bras et main de la taupe: — c cubitus ; — 4 surface articu- laire par laquelle cet os se joint à l'humérus ; — r radius ; — © apophyse olécrane du cubitus, qui est d’une longueur remarquable et fournit aux muscles extenseurs de l’avant-bras un levier puissant ;— ca l’un des os du carpe, qui se développe au point de border la main de facon à en renforcer la paume ;— d doigts envelop- pés daus leurs ongles, Cbrysoch'o- ECS: Condy'ures, Scalopes 298 ZOULOGIE DESCRIPTIVE. une obscurité profonde; aussi leurs yeux sont-ils réduits à un état de’petitesse extrême et ne paraissent-ils pouvoir distinguer que la lumière de l'obscurité. Ces organes semblent même manquer d’un nerf optique proprement dit, et ne devoir leur sensibilité qu’à une branche du trifacial. L'organisation de la taupe présente encore un grand nombre d’autres particularités d’un grand intérêt pour les physiolo- gistes, telles que la disposition du bassin et des organes qui ordinairement traversent cette ceinture épaisse, et qui ici pas- sent en partie au-dessous. Chacun connaît la forme trapue de ces animaux dont le ventre traîne à terre, et dont la tête se confond presque avec le corps. Leur pelage est remarquable par son aspect velouté; enfin on leur compte, de chaque côté et à chaque mâchoire , onze denis, dont les trois dernières sont hérissées. La taupe commune de nos campagnes, qui est ordinairement d’un beau noir, est répandue dans toutes les contrées fertiles de l’Europe. En général, on la poursuit avec acharnement comme nuisant beaucoup à l’agriculture; les taupinières , formées par les déblais provenant des travaux souterrains de ces animaux sont, en effet, incommodes dans les prairies, dont l’herbe doit être fauchée aussi ras que possible , et déparent les jardins d'agrément ; mais cependant nous sommes portés à croire que les taupes sont plutôt utiles que nuisibles, car elles détruisent un grand nombre de larves d'insectes, et ces larves elles-mêmes font souvent de grands ravages en rongeant les racines des plantes. Les CHRYSOCHLORES ressemblent beaucoup aux taupes par leur organisation et leurs mœurs , mais s’en distinguent par le nombre et la disposition des denis, l'existence de trois ongles. seulement aux pieds de devant, etc. Le chrysochlore du Cap, appelé vulgairement taupe dorée, est remarquable par son pelage d’un vert changeant en couleur de bronze ou de cuivre; c’est le seul mammifère connu qui présente de ces beaux reflets métalliques , dont brillent tant d’oiseaux , de poissons et d’in- sectes. 01 Les CONDYLURES ressemblent encore davantage aux taupes ; mais ce qui les en distingue le plus , c’est que leurs narines sont entourées de petites pointes cartilagineuses et mobiles , qui , en s’écartant , représentent une étoile. On les tronve en Amérique , où habitent aussi les scaLOPEs, que l’on prendrait pour des taupes , à moins d'examiner leur appareil dentaire. Eu ——— FAMILLE DES CARNIVORES. 299 | FAMILLE DES CARNIVORES. Cette famille renferme tous les mammifères les plus essen- & cire tiellement carnassiers ; mais le nom de carnivores , qui convient généraux. parfaitement bien à la plupart d’entre eux , ne peut ètre appliqué avec autant de justesse à tous ; Car tous ne se nourrissent pas habituellement de chair, et il en est qui peuvent se contenter d’un régime purement végétal ; mais tous , lorsqu'ils sont pous- sés par la faim , dévorent d’autres animaux , et, comme chez eux , l'appétit sanguinaire se joint à la force nécessaire pour y subvenir , ils ne sont pas réduits , comme les carnassiers des familles précédentes, à vivre d'insectes ; ils attaquent des mam- mifères et emploient la violence aussi bien que la ruse, pour s’en emparer : aussi leurs dents molaires ne sont-elles pas héris- sées de pointes coniques , comme celles des insectivores et de la plupart des chéiroptères , mais plus ou moins tranchantes, suivant qu’ils sont eux-mêmes plus ou moins exclusivement carnivores , et leurs dents canines, au nombre de quatre (deux à chaque mâchoire), sont longues , grosses , écartées et propres à déchirer une proie vivante. Il est aussi à noter que, dans cette famille , les dents incisives sont toujours au nombre de six à chaque mâchoire (fig. 85). Le régime plus ou moins carnivore ou frugivore de ces ani- maux se décèle par le rapport qui existe entre l’étendue de la partie tranchante de leurs dents molaires et celle de la surface tuberculeuse de ces mêmes dents. Les ours qui peuvent se nourrir de végétaux seulement ont toutes leurs dents tubercu- leuses , tandis que , chez les lions , les tigres, les chats, toutes, à l'exception d’une seule , sont au contraire tranchantes. On voit donc qu’il importe d'étudier avec soin les caractères fournis par la forme des dents de ces animaux, et , afin d’en faciliter la description , on a donné à ces organes des noms différens , et on Fig. 85. (1) les distingue en dents fausses molaires, car- nassières et tubercu- leuses. Les fausses mo- laires (e, f, g) sont celles qui suivent la canine(d) et qui sont petites et tranchantes ou poin- tues; la dent carnas- (x) Dents de la mâchoire supérieure du chien, vues du côté interne: — x ,8 , c 500 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. siere de la mâchoire supérieure (4)est une dent qui, plus grosse que les autres et ordinairement pourvue d’un talon tubercu- leux , est placée après les fausses molaires ; celle qui lui répond en bas porte le même nom; enfin les fuberculeuses (i,j) sont des molaires , en général plus petites et presque entièrement plates, qui se trouvent au fond de la bouche, derrière les carnassières et qui servent à mâcher l'herbe, que ces animaux avalent quel- quefois. | Dans cette famille, les membres antérieurs ne servent guère qu’à la locomotion ; ils n’exécutent pas des mouvemens variés comme chez l’homme ou les quadrumanes , et ne sont pas desti- nés à se porter habituellement en dehors et en dedans comme chez les chéiroptères et les taupes : aussi leur clavicule est-elle rudimentaire , et ne sert plus, comme d’un arc-boutant, pour maintenir les épaules écartées. Quant à la conformation de leurs membres, elle varie beau- coup,et ces modifications entrainent des différences très grandes dans les mœurs de ces animaux. Chez les uns, les membres sont transformés en nageoires , et chez ceux où ils servent à la marche, c’est tantôt la plante entière du pied de derrière, qui posesur le sol, tantôt le bout des doigts seulement. Or, ces diffé- rences, auxquelles s’en joignent d’autres, soit dans la confor- mation intérieure des carnivores , soit dansles habitudes , servent de base à la division de cette famille en trois tribus, ainsi qu’il suit : Pieds postérieurs dont la plante tout entière d 4 PLANTIGRADFS. s'appuie sur le sol et est Pieds disposés pour | dépourvue de poils. L la marche. Pieds postérieurs dont , CARNIVORES 1 , les doigts seuls appuient DIGITIGRADES. sur le sol ; tarses relevés, garnisde poils en dessous, ‘ Pieds disposés essentiellement pour la natation, } \ : à AMPHIBIES. vet ressemblent à des nageoires. $ TRIBU DES CARNIVORES PLANTIGRADES. Les plantigrades ressemblent aux carnassiers de la famille précédente , non-seulement par la manière dont leurs pieds dents incisives ; — d dent canine; — e, f, g fausses molaires; —h dent carnas- sière, — 7,7 dents tuberculeuses. TRIBU DES CARNIVORES PLANTIGRADES, 301 posent à terre , mais encore par la lenteur de leur démarche habituelle etgpar leur vie nocturne. La plupart de ceux qui ha- bitent les pays froids passent aussi l’hiver en léthargie. Le nombre de leurs doigts est partout de cinq. Cette tribu se compose des ours, des ratons, des pandas, des ictides, des coatis , des kinkajons , des blaireaux et des gloutons. (Fig. 86 , OURS BRUN.) Les ours (Ursus) sont des animaux de grande taille, à corps trapu , à membres épais , à queue très courte. Leurs allures sont lourdes ; mais ils ont beaucoup d’intelligence et sont doués d’une force prodigieuse. Leur régime varie avec les circonstances : ils s’accommodent aussi bien d’alimens végétaux que de la chair des animaux; mais , dans la plupart des cas, ils sont frugivores et recherchent de préférence les fruits, les racines succulentes et les jeunes pousses des arbres: ils aiment le miel avec une sorte de passion ,et pour s’en emparer, ils s’exposent à la piqûre des abeilles de toute une ruche. Ce n’est guère que lorsque la faim Îles presse , qu’ils attaquent les animaux : aussi leurs dents molaires sont-elles moins tranchanies, que celles de tous les autres carnas- siers. De chaque côté, on leur trouve trois grosses dents entière- Fig. 87.(1) ment tuberculeuses , précédées d’une dent un peu tranchante (la carnassière ) et d’un nombre va- riable de petites fausses molaires. La conformation de leurs mem- bres , peu favorable à la course, (x) Dents molaires de l’ours. Ours. 302 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. leur permet de se tenir facilement redressés sur les pattes de derrière , et de grimper avec agilité sur les arbres , dont ils peu- vent embrasser le tronc et les branches. Quelques-uns sont aussi très bons nageurs , et ils doivent en partie cette faculté à la quantité de graisse dont leur corps est ordinairement chargé. Leur odorat est extrêmement fin et leurs narines sont entourées d’un mufle très mobile. Ces animaux aiment la retraite et la solitude; la plupart d’entre eux habitent ies forêts les plus sauvages et établissent leur demeure au milieu des rochers , dans quelque caverne, ou bien dans des anires, qu’ils creusent avec leurs ongles forts et -crochus. On les voit même se construire avec des branches et des feuillages des cabanes dont l’intérieur est soigneusement garni de mousse; mais il en est qui vivent toujours au milieu des glaces des mers polaires. En hiver, ils s’engourdissent plus ou moins profondément , et, lorsque le froid est vif , ils tombent dans une léthargie complète. Pendant toute la durée de ce som- meil hibernal , ils ne prennent pas de nourriture, mais parais- sent vivre aux dépens de la graisse dont ils étaient surchargés à la fin de l'automne : aussi , lorsqu'ils sortent de leur retraite , sont-ils d’une maigreur extrême. La prudence fait le caractère principal de l'ours. Lorsqu'il le peut, il s'éloigne de tout ce qu’il ne connaït pas, et lorsqu'il est forcé de s’en approcher, il ne le fait que lentement et avec la plus grande circenspection; cependant ce n’est pas le courage qui lui manque, et il ne parait pas susceptible de peur. On ne le voit pas fuir : il oppose la force à la force , et, lorsque sa vie est menacée ou que ses petits sont en danger, sa fureur et ses efforts devienneni terribles. La fourrure de ces animaux est épaisse et se compose de poils brillans et très longs : aussi est-elle recherchée et forme-t-elle un objet important de commerce. C’est en hiver et dans les pays les plus froids, qu’elle est la plus belle et la mieux fournie, et par con- séquent, c’est aussi en hiver qu’on fait aux ours la chasse la plus active. Leur poursuite n’est pas sans danger. L’usage des armes à feu permet au chasseur de s’en rendre maître, sans exposer beaucoup sa personne ; mais il est des contrées où il attaque ces animaux Corps à corps, et en se servant seulement d’un pieu , qu’il cherche à enfoncer dans le ventre de lours au moment où celui-ci se lève sur ses pattes de derrière pour se jeter sur son ennemi et l’étouffer entre ses bras. Souvent aussi on cherche à découvrir les retraites où ces animaux se sont endormis et où leur capture devient facile ; d’autres fois on leur tend des pièges, dans lesquels on les aitire à l’aide de miel ou de quelque autre substance propre à exciter leur gourman- TRIBU DES CARNIVORES PLANTIGRADES. 303 dise naturelle. C'est principalement du nord de la Russie et de l'Amérique , que les fourreurs tirent les peaux d’ours employées dans l'indusrie. Depuis qu’on s’en sert pour coiffures mili- laires , on évalue que, chaque année, il s’en vend, en Francæ, environ trois à quatre mille. On trouve des ours dans toutes les parties du monde ei sous toutes les latitudes , excepté dans l'Afrique méridionale et dans l’Australasie, et on en distingue plusieurs espèces. L’ours brun d'Europe atteint environ quatre à cinq pieds de long sur trois de haut , mesuré au garrot. Il est assez commun dans les Alpes , et se rencontre dans toutes les hautes mon- tagnes et les grandes forêts de l’Europe et d’une grande partie de l'Asie. On remarque , il est vrai , quelque différence dans le pelage de ceux des Alpes, des Pyrénées , de la Norwège et de la Sibérie ; mais ce ne sont probablement que des variétés d’une seule espèce. Tout ce que nous avons dit sur les habitudes des ours en général est applicable à celui-ci. Il niche quelquefois très haut dans les arbres et vit toujours solitaire. Il n’attaque l’homme que lorsqu'il est provoqué, et est alors fort dangereux ; il cherche à écraser son ennemi avec ses pattes , ou à l’étoulfer entre ses bras et le déchire avec ses ongles , mais ne se sert que peu de ses dents. C’est en sautantsur leur dos, qu’il attaque les quadrupèdes , et il paraît que les chevaux et les taureaux ne sont pas toujours en sûreté devant lui. Les petits naissent en hiver, et la durée de la vie de ces animaux est au moins de qua- rante à cinquante ans. Dans le jeune âge , leur chair est bonne à manger, et leurs pattes sont toujours estimées. On parvient facilement à dresser ces animaux à certains exercices, et on en promène souvent dans nos villes, pour exciter la curiosité publique. L’ours jongleur, espèce propre à l’Inde et plus petite que la nôtre , est employée aux mêmes usages par les bateleurs de ce pays : il est remarquable par sa difformité. L’ours noir d’ Amerique , très commun dans la partie septen- trionale du Nouveau-Monde et dans quelques points du Kams- chatka, se nourrit presque exclusivement de fruits et de légumes, et fait souvent de grands dégâts. On assure qu’il aime le poisson et l’attrape avec beaucoup d’adresse. Il paraïirait que, dans les montagnes Rocheuses et les parties les plus élevées du Missouri, il existe une autre espèce beaucoup plus grande et plus forte : on l'appelle l'ours terrible, et on estime beaucoup sa fourrure, qui est grisâtre. L’ours maritime Où ours blanc de La mer Glaciale diffère beau- coup des espèces précédentes par sa forme et par ses mœurs. Il est entièrement blanc et plus allongé que les ours ordinaires : 20. Ours brun. Ours jon- gleur. Ours noir. Ours blanc. 304 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. sa taille est aussi plus considérable ; car on en voit dont la lon- gueur est de six à sept pieds , etles voyageursassurent en avoir rencontré de plus grands encore. Il habite les terres qui avoi- sinent le cercle polaire et la mer Glaciale , et il vient quelque- fois, porté sur des glaçons flottans, jusque sur les côtes de l'Islande et de la Norwège. Des récits exagérés de sa voracité l'ont rendu fort célèbre ; mais c’est principalement aux circon- stances où il se trouvait qu’on doit attribuer son régime exclu- sivement animal; en effet, dans les régions glacées qu’il habite, il ne trouve ni fruits ni bourgeons et ne peut vivre que de chasse; mais, lorsqu'on le tient en captivité , on le voit s’habi- tuer facilement à une nourriture végétale semblable à celle des autres ours. Il nage et plonge avec une étonnante facilité et poursuit les poissons, les phoques et les jeunes cétacés. Au lieu d’être solitaire comme les autres espèces de ce genre , les ours blancs se réunissent quelquefois en troupes nombreuses. Ratons. Les RATONS (Procyon) ressemblent beaucoup aux ours par leur structure intérieure et même par leurs formes extérieures, si ce n’est qu’ils ont une longue queue : ce sont des animaux de moyenne taille, qui habitent l'Amérique: ils ont à-peu-près le même régime et les mêmes habitudes que les ours ; mais ils grimpent avec plus d’agilité. Leur fourrure, douce et épaisse, ressemble assez à célle du renard. Le raton laveur, dont le dos est d’un gris brun, et la queue annelée de brun et de noir, a le singulier instinct de ne rien manger sans l'avoir plongé dans l’eau. Pandas et LES PANDAS(AZ2urus) et les ICTIDES sont des animaux plus car- ictides, nassiers que les précédens : ils sont propres à l'Inde et n’offrent rien de très intéressant. Les COATIS (Nasua) ressemblent davantage aux ratons , mais Coatis. ont les pieds à demi palmés et les ongles fouisseurs. Ils habitent les parties chaudes de l'Amérique, et se nourrissent à-peu-près comme nos martres. Kiukajous. Les KINKAJOUS (Cercoleptes)se trouvent dans les mêmes con- trées et sont remarquables par leur queue longue et prenante comme celle des sapajous. Blaireaux. Les BLAIREAUX (Meles) sont, comme tous les précédens , des animaux à vie nocturne et à marche rampante : leurs jambes sont irès courtes et leurs poils si longs, que leur ventre paraît toucher à terre ; leurs ongles de devant sont allongés et propres à fouir la TRIBU DES CARNIVORES PLANTIGRADES. 305 terre ; leur queue est courte, et au-dessous de sa base se trouve une poche d’eù suinte une humeur grasse et fétide. Ces ani- maux vivent principalement de proie; ils mangent des lapins, des mulots, des sauterelles , des œufs, etc. , et leurs dents pré- sentent des caractères en rapport avec ce régime. Le Blaireau d'Europe, qui est de la taille d’un chien de mé- diocre grandeur, présente dans son pelage une particularité remarquable. Presque toujours la face dorsale du corps des mammifères est d’une couleur plus foncée que la face ventrale. Le blaireau au contraire est grisâtre en dessus et noir en dessous : c’est un animal solitaire qui passe la plus grande partie de sa vie au fond d’un terrier oblique, tortueux et à une seule ouver- ture, qu’il se creuse facilement à l’aide de ses ongles très forts, et qu'il a soin d'entretenir dans un état de propreté extrème. Il habite les parties tempérées de l’Europe et de l'Asie; mais il est devenu très rare en France à cause de la chasse active qu’on lui a faite. Pour s’en emparer, on lui tend des pièges , ou bien on le fait poursuivre par un basset , qui pénètre dans son gite, l’accule et donne ainsi le moyen de le prendre avec des pinces, en ou- vrant le terrier par-dessus, Pour se défendre , il se couche sur le dos et se sert avec avantage de ses ongles aussi bien que de ses dents. La fourrure des blaireaux est épaisse , rude et peu brillante. Les rouliers s’en servent pour couvrir le collier de leurs chevaux , et les poils de la queue de cet animal sont très recherchés pour la fabrication des pinceaux et des brosses à barbe. Les GLOUTONS {Gulo) semblent établir, en quelque sorte, le passage entre les blaireaux et les martres: ils ressemblent beau- coup aux premiers par leur port, par leurs ongles fouisseurs et par l’existence d’un pli placé au-dessous de leur courte queue et tenant lieu de la poche odorifère des blaireaux ; mais ils tiennent aussi aux martres par leur système dentaire, et par leur régime essentiellement carnivore. Leur nom leur a été donné à cause de Pidée exagérée qu’on s'était faite de la voracité de l’une des es- pèces de ce genre, le glouton du nord qui se trouve dans les parties les plus froides des deux continens. Ce carnassier passe en effet pour être très cruel, et pour se rendre maitre des plus grands animaux, en sautant sur eux de dessus un arbre. Sa four- rure, épaisse et d’une couleur marron-foncé , avec un disque plus brun sur le dos , est assez estimée. On donne encore le nom de RATTELS à des plantigrades du cap de Bonne-Espérance, qui ont beaucoup de rapports avec les précédens, Gloutons. Rattels. 306 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. TRIBU DES CARNIVORES DIGITIGRADES. Les animaux de cette tribu se distinguent par la conforma- tion de leurs pattes. Au lieu de poser la plante entière de leurs pieds sur la terre et d’avoir par conséquent toute cette partie dénuée de poils, ils ne marchent que sur le bout des doigts , en relevant le tarse , et il en résulte que leurs allures sont plus légères et leur course plus rapide. Ils sont en même temps plus exclusivement carnassiers que les plantigrades, et leur goùt pour la chair, joint à leur légèreté , en fait des animaux essentielle- ment chasseurs : aussi leurs pattes sont-elles presque toujours armées d'ongles puissans , leurs mâchoires robustes et leurs dents molaires presque entièrement tranchantes. Le nombre des petites dents tuberculeuses , qu’on leur trouve au fond de la bouche varie (1), et comme ces différences coïncident avec des dispositions plus où moins sanguinaires , on les prend avec raison pour base de la classification des digitigrades. On les divise ainsi en trois petits groupes , savoir : qui ont, en arrière de la carnassière d’en haut, et d'en bas une seule dent tuberculeuse. qui ont deux dents tuberculeuses plates der- rière la carnassière supérieure, qui elle-même a un talon assez large. .Les CHATS et les {qui n’ont point de dents derrière la carnas- HYÈNES, sière d’en bas. Les VERMIFORMES, Les CHIENS et les CIVETTES , %&, Division des digitigrades à une seule dent tuberculeuse partout , ou digitigrades vermiformes. {Fig. 88, LOUTRE COMMUNE.) Ces animaux établissent ; en quelque sorte, le passage entre les derniers genres de la tribu des plantigrades et les autres (1) Voy. fig. go, as. 310 , et fig QI, pag. 312, etc: Y- A£- 90, pag » LYS OT; PAS TRIBU DES CARNIVORES DIGITIGRADES. 307 digitigrades : ils ont en effet beaucoup d’analogie avec les g'outons. : Le nom de vermiformes leur vient de la longueur de leur corps et de la brièveté de leurs pattes, qui donnent à leur allure quelque chose de celle d’un serpent ou d’un ver, et qui leur permettent de passer par les plus petites ouvertures. Ils ont tous cinq doigts , réunis plus ou moins complètement par des membranes et en général armés d’ongles arqués et pointus comme des griffes. Tous répandent aussi une odeur plus ou moins forte, occasionée par une liqueur fétide, que sécrètent deux petites glandes , situées près de lanus. Ils ne s’engourdis- sent pas en hiver comme la plupart des carnassiers , dont l’étude nous a déjà occupé , et , quoique petits et faibles , ils sont au nombre des plus sanguinaires de tous les animaux qui se nour- rissent d’une proie vivante. On divise les vermiformes en quatre genres principaux : {es putois , les martres, les mouffettes et les loutres. Les MOUFFETTES ( Mephites ), plus que tous les autres vermifor- mes , se rapprochent des blaireaux et des gloutons : elles sont demi plantigrades, et elles ont , comme les blaireaux, les ongles de devant longs, arqués et propres à fouir.Leur système dentaire ne diffère guère de celui des putois que par l’existence de deux tubercules au côté interne de la carnassière d’en bas. Leur pe- lage est ordinairement rayé de blanc sur un fond noir, et leur queue, qui est assez courte, mais garnie de longs poils , est habituellement relevée sur le dos comme un panache. Comme leur nom lindique , les mouffeittes sont remar- quables par leur excessive puanteur.On pourra s’en faire une idée par lanecdote suivante , que rapporte un naturaliste voyageur, digne de toute confiance. « En 1749 , dit cet auteur, il vint un de ces animaux près de la ferme que j’'habitais : c'était en hiver et pendant la nuit. Les chiens étaient éveillés et le poursuivaient ; il se répandit alors une odeur si fétide, qu'étant dans mon lit, je pensai être suffoqué. Sur la fin de la même année, il s’en glissa un autre dans ma cave; une femme, qui laperçut la nuit à ses yeux étincelans , le tua ; et, dans ce moment, il remplit la cave d’une telle odeur, que non-seulement cette femme en fut malade pendant quelques jours , mais que le pain ; la viande et les autres provisions , que l’on conservait dans cet endroit furent tellement infectés, qu’on ne put en rien garder et qu’il fallut tout jeter ». Ces ammaux se trouvent pour la plupart ea Amérique : ils vivent dans des terriers el se nourrissent de pe- its quadrupèdes , d'œufs , etc. Mouffettes. Genre pu- to1s Putois com- mul. Furet. 308 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. Les PUTOIS (Putorius) ont, de même que les mouffettes, deux Fig. 89. fausses molaires en haut et trois en bas fig. 89); mais leur dent carnassière infé- rieure n’a point de tubercule en-dedans. La souplesse de leur corps est extrême, _et leurs mouvemens sont d’une rapidité qui étonne; leur forme mince et allongée leur permet de s’iniro- duire, pour ainsi dire , partout, et les ongles acérés , dont leurs pattes sont armées, leur donnent la faculté de grimper aux arbres. Leur vie est solitaire et nocturne. Après les chats, ce sont les plus cruels de tous les carnassiers , et c’est même le sang plutôt que la chair qu’ils recherchent pour leur nourriture: aussi font- ils parmi les petits animaux un grand carnage. Leur fourrure, douce et épaisse, surtout chez ceux qui habitent le nord , est en général très recherchée ; mais quelquefois on ne peut s’en servir que difficilement à cause de l’odeur fétide qu’elle retient. Ces animaux sont répartis dans presque toutes les parties du monde. On en connaît un assez grand nombre d'espèces , dont les plus intéressantes sont : 1° Le putois commun, qui se trouve dans toute l'Europe, et qui atteint une taille plus grande que toutes les autres espèces du même genre. Son corps est long d'environ un pied, et sa queue de six pouces. On le distingue à son pelage brun en des- sus, fauve sur les côtés et jaunâtre sous le ventre, et à son museau blanc. Il vit près de nos habitations , et il est la terreur des poulaillers et des garennes. Lorsqu'il se glisse dans une basse- cour, il met tout à mort , et, après avoir apaisé sa faim, em- porte peu-à-peu ce qu’il a tué: il poursuit les lapins dans leur terrier et grimpe sur les arbres, pour chasser les oiseaux et dévorer leurs œufs : aussi est-il à la campagne un voisin très inquiétant , et cherche-t-on toujours à le détruire ;'mais sa défiance le fait aisément échapper aux pièges qu’on lui tend. En hiver, ces animaux s’établissent sous les toits et dans les parties les plus reculées des granges ; en été, ils se retirent dans des terriers de lapins, des fentes de roche ou des troncs d'arbres creux, d’où ils ne sortent guère que la nuit. Les petits naissent dans cette saison et quittent leur mère vers l'automne. L’odeur qu’ils répandent est irès infecte : c’est même de là que vient leur nom ; mais néanmoins on emploie leur fourrure , qui est douce etchaude. Nos marchands de pelleteries en tirent des Pyrénées, des Vosges , de l'Auvergne , etc. , et en exportent même pour l'Angleterre et l'Allemagne. 2° Le furet , qui ressemble extrêmement au putois et qui est considéré par quelques naturalistes comme n’en étant qu’une variété. Nous ne le connaissons guère qu’à l’état de domesticité : TRIBU DES CARNIVORES DIGITIGRADES. 309 il est originaire d’Afrique, d’où il a été apporté en Espagne : c'est de là , en effet , qu’il nous vient. Ainsi que nous l’avons dit, les nuances de son pelage varient beaucoup et sa taille est un peu moindre que celle du putois. Son instinct en fait l’ennemi mortel des lapins. Dès qu’il aper- coit un de ces animaux , il s’élance sur lui , le saisit à la gorge ou au nez, et lui suce le sang : aussi, comme chacun le sait, est-il fréquemment employé pour la chasse de ces animaux. ILest assez facile à apprivoiser, et peut être nourri avec du pain, du lait, des œufs, auxquels on joint de temps en temps de la viande. Il ne s’éveille guère que pour manger, et cette tendance au sommeil force les chasseurs à museler cet animal avant que de le lâcher dans les trous des lapins; en effet, si le furet avait sa complète liberté, il se jetterait aussitôt sur sa proie, et, après en avoir sucé le sang, il sendormirait au fond du terrier. Pour le faire sortir, on enfumerait le terrier; mais ce moyen ne réus- sissant pas toujours , on risquerait de le perdre. Etant muselé, il ne peut tuer le lapin dans sa retraite souterraine ; il l’oblige seulement à en sortir et à se jeter dans les filets tendus à cet effet. 3° La BELETTE , dont le corps d’un roux uniforme , n’est long que d’environ six pouces. Cette petite espèce de putois est commune dans les parties tempérées de l’ancien monde. Ses mœurs sont à-peu-près les mêmes que celles du putois com- mun , et, quoique plus faible , elle est tout autant à craindre; car elle s’introduit plus facilement dans les basses-cours : elle n’attaque , 11 est vrai que rarement les coqs, qui la repoussent à coups de bec ; mais elle y détruit tous les poussins et les jeunes poules. 4° L’hermine , qui est un peu plus grande que la belette et qui se trouve dans les parties tempérées des deux continens, mais n’est abondante que dans les pays froids. En été, elle est rousse et est connue alors sous le nom de roselet ; mais son pelage dhiver est d’un blanc d'autant plus pur que le climat est plus rigoureux. Le bout de sa queue reste toujours noir. Ses mœurs sont à-peu-près les mêmes que celles de la belette , si ce n'est qu’elle fuit le voisinage des habitations et recherche les contrées rocailleuses. Sa fourrure d'hiver est l’objet d’un com- merce très important. Dans les pays tempérés , elle est peu re- cherchée , parce qu’elle conserve toujours une teinte jaunâtre ; mais , dans le nord et dans la Sibérie surtout, on lui fait une chasse active. 5° Le wison est une espèce de putois qui vit en Amérique, près du bord des rivières, et qui fournit aussi une fourrure assez belle. Le mink des Américains el la martre de Sibérie , dont la Belette. Hermine. Vison. Mink, etc. Zoriles. Genre marte. Fouine. Zibeline. 310 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. fourrure est également recherchée , paraissent appartenir au même genre. Quelques naturalistes distinguent, sous le nom de ZORILES, une espèce de putois , qui habite les environs du cap de Bonne- Espérance , le Sénégal, etc. , et qui a des ongles fouisseurs. Les MARTRES (Mustela)ont le museau plus allongé que les putois, F'4. 90. et on leur trouve à chaque mâchoire une fausse molaire de plus; leur dent carnassière inférieure présente aussi en dedans un tubercule , caractère qui dénoie une nature moins san- guinaire. Du reste , elles ont avec ces animaux la plus grande ressemblan- ce d'organisation et de mœurs. On les trouve en Europe , dans l'Asie septentrionale et dans le Nouveau-Monde. Les espèces eurvpéennes sont la surtre commune ei la fourne. La martre commune, longue d'environ dix-huit pouces (la queue non comprise), est généralement d’un brun lustré avec une tache d’un jaune clair sous la gorge : elle habite les forêts et fuit le voisinage des lieux habités. Sa nourriture consiste principalement en petits oiseaux et en œufs , qu’elle va déni- cher jusque sur les branches les plus élevées des arbres. La fouine, un peu moins grande que la martre commune et avec le dessus du cou blanc plutôt que jaune , en diffère surtout par ses mœurs. Elle se tient à la portée des habitations , où elle pénètre souvent et où elle fait de grands ravages ; car elle a les habitudes sanguinaires des putois. Elle est assez commune dans presque toutes les parties de l'Europe et se trouve aussi dans quelques contrées de l'Asie. Sa fourrure est moins douce et moins brillante que celle de la martre commune. La zibeline , célèbre pour sa magnifique fourrure , appartient également au genre martre , et ressemble même beaucoup à la martre commune. Son pelage est généralement d’un brun lustré, noirâtre en hiver et moins foncé en été , avec quelques taches grises à la tête. Un caractère qui distingue cette espèce des précédentes et qui est en rapport avec ses habitudes , c’est d’avoir du poil jusque sous les doigts. En effet, la zibeline habite les parties les plus froides de PAsie ei abonde surtout dans les montagnes de ce pays glacé , que le froid rend mhabi- table. C’est en hiver que sa fourrure est la plus belle : aussi (1) Fig. 89, dents molaires d’en haut des martres :—/m fausses molaires ; -- c carnassière ; — { tuberculeuse. TRIBU DES CARNIVORES DIGITIGRADES. 311 la chasse s’en fait-elle dans cette saison et est-elle une des plus pénibles et des plus périlleuses. Les LOUTRES(Lutra) se distinguent de tous les autres digitigra- des vermiformes par leurs pieds palmés et par leur queue apla- tie horizontalement , deux caractères qui en font des animaux aquatiques. Il est également à noter que le nombre de leurs fausses molaires est de trois en bas comme en haut; leur tête est comprimée , et leur corps est encore plus allongé que celui des putois et des martres. Toutes ont le pelage d’un brun plus ou moins foncé en dessus et plus clair en dessous, surtout à la gorge , qui est même quelquefois blanchâtre. Elles se tiennent sur le bord des eaux et vivent principalement de poisson; mais elles peuvent s’accoutumer à manger des substances végétales : aussi la dent tuberculeuse de leur mâchoire supérieure est-elle très large. Ces animaux nagent et plongent avec une facilité extrème : la plupart fréquentent les eaux douces ; mais il en est aussi qui habitent le rivage de la mer. C’est pendant la nuit qu’ils chas- sent ; le jour, ils restent cachés dans des réduits qu'ils se pra- tiquent entre les rochers ou sous quelque racine. Le pelage des loutres est très épais et assez doux; les poils soyeux, qui en garnissent la superficie, sont longs , doux, luisans et plus épais vers la pointe qu’à la base. Le duvet , placé au-dessous de ceux- ci, est épais et d’une extrème douceur : aussi ces fourrures sont- elles très estimées ; mais on ne les emploie qu'après les avoir dépouillées de leur jar. On connaît un grand nombre d’espèces de loutres, qui ne diffèrent que peu entre elles , surtout quant à leur pelage. La loutre d'Europe, dont le corps est long de plus de deux pieds , et la queue d’environ un pied , vit au bord des étangs et des fleuves (voy. fig. 88, pag. 306). Sa fourrure est d’un grand usage pour la fabrication des casquettes et autres coiffures. Il existe en Amérique plusieurs espèces de loutres d’eau douce, qui sont également recherchées pour les mêmes usages. Aux Indes on emploie ces animaux pour la pêche, comme nous nous servons des chiens pour la chasse. La loutre de mer, plus de deux fois aussi grande que la nôtre , habite le Kamschatka, les iles Aleutiennes et la côte nord-ouest de l'Amérique. Elle a le pelage noirâtre , éclatant et des plus riches que l’on connaisse : il est composé presque en entier de poils laineux de la plus grande douceur Les Chinois en font un très grand cas, et chaque année les Russes , les Anglais et les Américains en font, à la Chine et au Japon, l’objet d’un com- merce très lucratif. Genre lou- tre. Loutre d’'Eu- rope. Loutre de mer. GCeare chien 312 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. Division des digitigrades à deux tuberculeuses superieures. Une seconde subdivision de la tribu des digitigrades , carac- Fig. 91. térisée par l’existence de deux tuberculeuses (2j) plates derrière la carnas- sière supérieure (k), se compose des chiens et de quelques autres carnas- siers,dont le caractère est | bien moins sanguinaire de fg À € ÿj queceluides putoisetdes niartres. En général, ces animaux ne montrent que peu de cou- rage à proportion de leurs forces et vivent surtout de charogne Le genre des CHIENS(Canis) se compose non-seulement des chiens proprement dits, mais aussi des loups et des renards. Il est caractérisé par l’existence de trois fausses molaires en haut (Âg. 91,e,f,g), quatre fausses molaires en bas et deux iubercu- leuses (7, j) derrière l’une et l’autre carnassières (4). Chacun con- naïitla forme générale de ces animaux ; leurs pieds de devant ont cinq doigts, dont les deux du milieu, égaux entre eux, sont les plus longs , etdont l’interne , qui est le plus petit, ne descend pas jus - qu’à terre; leurs pieds de derrière n’ont ordinairement que quatre doigts avec un rudiment d’un cinquième et du métacarpe; mais quelquefois ce doigt rudimentaire se développe d’une manière plus ou moins complète; leurs ongles sont propres à fouir etne se redressent pas pendant la marche , de façon que la pointe s’en émousse promptement. Leur langue est douce , et ils boivent tou- jours en lapant. Ainsi qu’on pouvait le prévoir, d’après la dispo- sition de leur système dentaire , ils sont loin d’être aussi carnas- siers que les vermiformes ou les chats, et paraissent avoir besoin de mêler des matières végétales à leur nourriture; ce sont des ani- maux qui habitent les bois et qui peuvent , à raison de la grande finesse de leur odorat, suivre leur proie à la piste. Enfin ces ani- maux , au nombre de trois à six par portée, naissent les yeux fermés , et n'arrivent à leur entier développement qu'après la deuxième année. La durée de leur vie est de quinze à vingt ans. I! existe dans le genre des chiens deux groupes bien distincts, qui diffèrent par leurs mœurs anssi bien que par leurs carac- tères physiques, Les uns sont des animaux diurnes : leurs pupilles, en se ré- TRIBU DES CARNIVORES DIGITIGRADES. 313 trécissant , conserve la forme circulaire , leurs incisives supé- rieures sont fortement échancrées , et ils présentent d’autres particularités propres à les faire reconnaitre : ce sont les chiens proprement dits ou nos chiens domestiques et les loups. Les autres sont nocturnes et se distinguent par leurs pupilles, qui de jour sont en forme de fente verticale; par leurs incisives supérieures moins échancrées que chez les premiers; par leur queue longue et touffue; par leur museau plus pointu , et par leurs mœurs : ce sont les renards. De toutes les espèces appartenant au premier de ces groupes, la plus intéressante est le chien domestique , qui se distingue par sa queue recourbée, mais varie d’ailleurs presque à l'infini pour la taille , la forme , la couleur et la qualité du poil. C’est la conquête la plus complète que l’homme ait faite sur la nature; nous ne connaissons même plus le chien dans son état primitif ; Sa race entière a subi la domination de l’homme ; et dans les contrées où il vit aujourd’hui à l’état sauvage , il descend d’in- dividus qui ont recouvré leur indépendance , après l’avoir per- due pendant bien des générations ; mais ce n’est pas seulement sous ce rapport que la puissance de l’homme s’est fait sentir sur ces animaux; Car le chien est l'exemple le plus remarquable de l'influence de la domesticité sur les formes physiques et sur les qualités de ces êtres. En effet, les différences qui caractérisent les diverses races de nos chiens domestiques (comme chacun le sait) sont im- menses, et cependant tout porte à penser que c’est notre in- fluence qui les a déterminées, et que ces variétés proviennent d’une souche commune, qui ne serait ni le loup ni le chacal, mais un chien peu différent de notre chien-loup ou de notre chien-berger. Mais, par quelle puissance pouvons-nous subjuguer ainsi des animaux, ei comment par la domesticité pouvons-nous en modifier les formes et les qualités ? L'instinct de ces êtres les porte à fuir tout ce qui leur inspire de la défiance: ce n’est donc point par la violence que nous pourrions disposer un animal sauvage à l’obéissance. N’étant pas de son espèce, il ne serait pas naturellement porté à se rapprocher de nous, et ,au premier sentiment de crainte que nous lui ferions éprouver, il nous fuirait s’il était libre , ou nous prendrait en aversion s’il était captif. Ce n’est qu’en lui inspirant de la confiance, que nous pouvons l’attirer et le rendre familier, et ce n’est que par les bienfaits que nous pouvons faire naître cette confiance. Chien do- mestique. Domesticité. 314 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. Satisfaire les besoins naturels des animaux est l’un des pre- miers moyens à employer pour amener leursoumission. L’habi- tude de recevoir leur nourriture de notre main , en les familia- risant avec nous, nous les attache ; et, comme l’étendue d’un bienfait esttoujours en proportion des besoins qu’on en éprouve, leur reconnaissance est d'autant plus vive et plus profonde, que la nourriture que nous leur donnons leur est devenue plus nécessaire : aussi la faim est-elle entre nos mains un levier puis- sant pour ployer à la captivité tous les animaux; car, en même temps qu’elle fait naitre des sentimens affectueux , elle produit un affaiblissement physique , qui, en agissant sur la volonté, Vaffaiblit à son tour. Si l’on ajoute à l’influence de la faim celle d’une nourriture choisie et surtout, si, par des alimens que la nature ne leur fournissait pas, on parvient à flatter beaucoup le goût des animaux, on excite en eux une reconnaissance bien plus grande encore, et on développe d’une manière artificielle des besoins nouveaux que l’homme seul peut satisfaire (1); enfin à ces moyens de captation on peut joindre aussi les caresses, dont l'influence sur certains animaux est extrême. Une fois que, par l'habitude et les bons traitemens, la fami- liarité est établie , et la confiance obtenue , l'homme peut faire sentir son autorité et appliquer des châtimens , afin de trans- former les sentimens dont il veut réprimer la manifestation en celui de la crainte. Par l’assaciation d'idées qui résulte de cette pratique , le premier de ces sentimens s’affaiblit peu-à-peu et quelquefois même finit par se détruire jusque dans son germe ; mais l’emploi de la force ne doit jamais être sans limites ; car les châtimens excessifs révoltent souvent , et d’autres fois la crainte, portée très loin, trouble toutes les facultés. La veille for- cée est aussi un puissant moyen d’affaiblir la volonté d’un animal et de le disposer à l’obéissance; car il ne sait pas rapporter la fatigue et le malaise qu’il en éprouve à celui qui en est réelle- ment la cause , et, dans cet état , les sentimens affectueux oc- casionés par les bienfaits éprouvent moins de résistance et s’enracinent plus profondément , tandis que , d’un autre côté, la crainte agit avec plus de promptitude et de force. C’est, comme on le voit, par les besoins sur lesquels nous pouvons exercer quelque influence , et en réprimant la mani- festation de certains sentimens par celle de quelques autres, que nous parvenons à apprivoiser les animaux ; mais tous les mammifères ne sont pas également sensibles aux bienfaits et (x) C’est principalement au moyen de sucre et d’autres friandises , que l’on parvient à dresser les chevaux, les cerfs, etc. , aux exercices extraordinaires , dont nos cirques nous rendent quelquefois les témoins. TRIBU DES CARNIVORES DIGITIGRADES. 315 par conséquent ne se laissent subjuguer ni avec la même facilité ni d’une manigre aussi complète. Souvent leurs passions sont trop violentes*pour que l'animal parvienne jamais à les mai- triser et à devenir docile pour son maitre. Souvent aussi leur défiance naturelle est si grande et la mobilité de leurs idées si excessive, qu'on ne saurait leur imposer aucune règle de conduite, et d’autres fois encore l'intelligence de ces êtres paraît trop bornée pour que le souvenir du bien-être persiste après que sa cause a cessé , et pour qu'ils associent dans leur mémoire le bienfait et le bienfaiteur. Par ces moyens on parvient à dompter plus ou moins complè- tement un assez grand nombre d'animaux ; mais de cet état d’as- servissement individuel à la docilité complète ethéréditaire, que la domesticité demande, il y a encore une grande différence. Pour obtenir ce résultat , il faut que les animaux soient en quelque sorte prédisposés à la domesticité par l'instinct de la sociabilité. En effet le sentiment qui les porte à vivre isolés et même à se fuir entre eux, ou qui les réunit en société et les dispose à se laisser guider par un chef ,le plus fort ou le plus expéri- menté de la troupe , exerce l'influence la plus grande sur leur aptitude à la domesticité. > Aucun mammifère solitaire , quelque facile qu’il soit à appri- voiser, n’est devenu domestique (si ce n’est le chat); tandis que presque tous les animaux dont la race est soumise à l'empire de l’homme vivent naturellement en troupes plus ou moins noin- breuses. La sociabilité est une condition de la domesticité , et c’est en développant à notre profit et en dirigeant vers nous par nos bienfaits le penchant qui portait ces animaux à se réunir entre eux que l’homme est parvenu à lier leur existence à la sienne et à prendre sur eux l’autorité qu’aurait eue le chefde la troupe dont ils auraient fait partie. Comme l’a très bien démontré un habile zoologiste, M. Frédéric Cuvier, la disposition à la domesticité peut être considérée comme le déveleppement extrême de Pinstinct de la sociabilité et la domesticité elle-même comme un état dans lequel les ani- maux sociables reconnaissent l’homme comme membre et comme chef de leur troupe. Nous comprenons maintenant comment l’homme peut sou- mettre à son empire des races entières d'animaux. Voyons comment il peut ensuite influer sur les formes et les qualités qu’ils apportent avec eux en naissant , et créer, pour ainsi dire, à son gré des variétés nouvelles. Une loi physiologique, généralement reconnue, est cette ten- dance qu'ont les animaux à ressembler à leurs parens non-seu- 316 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. lement d’une manière générale, mais aussi par les particularités qui peuvent distinguer ces derniers. Dans l’espèce humaine, par exemple, les influences héréditaires se manifestent dans une foule de circonstances ; conformation, facultés, caractères , infirmités même, se lèguent de générations en générations, et pour les ani- maux chez lesquels moins de circonstances étrangères viennent agir sur les individus et oecasioner des perturbations dans cette répétition des mêmes formes et des mêmes qualités, la tendance des petits à ressembler aux auteurs de leurs jours est encore plus évidente. Or, tous les individus d’une même espèce ne possèdent pas au même degré les qualités physiques , morales et intellectuelles , dont chacun d’eux est doué, et par l’exercice ou par l'influence des conditions physiques, nous pouvons, en lexerçant , développer telle ou telle faculté , et augmenter par conséquent ces différences. Il s’ensuit que l’homme peut, dans certaines limites, modifier à volonté les races ; car il esi maïtre de choisir ou même de produire des différences individuelles transmissibles par hérédité, etde régler la succession des géné- rations , de facon à en écarter tout ce qui tendrait à éloigner la race du iype qu’il veut produire et à agir sur les qualités héré- ditaires des petits, comme il la fait sur celles de leurs parens. Il en résulte qu’à chaque génération nouvelle, il fait un pas de plus vers le but qu’il s’était proposé; car il agit sur des indivi- dus déjà modifiés par suite des modifications imprimées à leurs parens. (1) En s’attachant à développer, de générations en générations, telle qualité ou telle particularité physique , nous pouvons donc la porter bien plus loin qu’il ne nous aurait été possible de le faire dans le principe , et nous pouvons créer des races artifi- (r) Les limiers , qui ont été transportés en Amérique par les Espagnols, et qui n'étaient employés autrefois qu’à chasser le cerf ou l’homme , fournissent une preuve bien remarquable de l'influence de l'éducation individuelle sur les qualités héréditaires. Dans diverses parties de l’Amérique, sur le plateau de Santa-Fé, par exemple, ces chiens ont conservé les habitudes et les dispositions instinctives qui les rendaient jadis célèbres ; mais, chez les pauvres habitazs des bords de la Madeleine, ils se sont ahâtardis, en partie par le mélange , en par- tie par le défaut d’une nourriture suffisante , et, chez cette race dégénérée, un nouvel instinct semble devenir héréditaire. La chasse, à laquelle on emploie depuis long-temps presque exclusivement ces animaux est celle du pecari à mächoire blanche. L'adresse du chien consiste à modérer son ardeur, à ne s'attacher à aucun animal en particulier, mais à tenir toute la troupe en échec : or, parmi ces chiens, on en voit maintenant qui , la première fois qu’on les mène au bois, savent déjà comment attaquer, tandis qu’un chien d’une autre espèce se lance tout d’abord , est environné , et, quelle que soit sa force, est dévoré dans un instant. TRIBU DES CARNIVORES DIGITIGRADES. 317 cielles, dont les caractères ne s’effaceront que lorsque des cir- constances opposées à celles qui ont déterminé ces particula- rités viennent en détruire l'effet. C’est aussi ce que nous faisons lorsqu'un intérêt puissant donne de la persévérance à nos efforts. De nos jours on a pro- duit ainsi des races de moutons, de bœufs et de chevaux, carac- térisées par des particularités des plus remarquables , et c’est probablement par des moyens analogues qu'on a obtenu les races variées de chiens, dont les formes et les qualités sont si différentes , qu'au premier abord on a peine à croire qu'ils ap- partiennent à une même espèce. Le chien paraït être de tous les animaux le plus disposé à la do- mesticité et celui que l'homme a le premier soumis à sa puissance. En effet , si nous jugeons de l’état primitif des chiens par les mœurs de ceux qui , abandonnés à la nature, sont redevenus sauvages , nous voyons qu'ils possèdent les qualités que nous avons déjà signalées comme étant les plus propres à faire con- tracter aux animaux cette espèce d’association avec l’homme. Ces chiens, qu’on appelle chiens marrons, et qu’on rencontre dans presque toutes les parties de l'Amérique , où ils habitent de vastes terriers, vivent en familles très nombreuses (quelque- fois de deux cents individus) ne souffrent point le mélange des individus d’une famille étrangère, se réunissent pour chasser en commun , s'entr'aident pour se défendre contre leurs ennemis, et rentrent sans résistance dans l’état de domesticité. D'un autre côté, nous voyons aussi les peuples les moins civi- hsés et les plus misérables posséder déjà le chien pour compa- gnon et pour auxiliaire. Les habitans de la Nouvelle-Hollande , par exemple, se l’étaient déjà associé , lorsque, vivant exclusive- ment de chasse, ils savaient à peine se vétir ou allumer du feu, et lorsque presque toute leur industrie consistait à se faire un abri peu différent des tannières des ours ou des huttes que se con- struisent les Orangs. Il est probable que , dans l’ancien monde, la domesticité du chien remonte à un état tout aussi reculé de la société , et date par conséquent de la plus haute antiquité. Une plus longue possession a donc permis à l'homme d’exercer sur le chien une influence plus forte que sur les autres ani- maux , et une circonstance, qui a dù rendre son action encore plus grande , c’est la rapidité avec laquelle les générations se succèdent dans cette espèce. Pour juger de l'influence de l'empire exercé par l’homme sur nos chiens domestiques , il faudrait savoir ce qu’ils étaient pri- mitivement ; or, nous l'ignorons et nous ne savons même que peu de choses sur les formes et les mœurs de ceux qui sont rede- venus sauvages. Il paraïirait qu’ils ont des traits communs; leur 21 Différcates. races de chiens. 218 __ ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. | museau , de longueur médiocre et assez semblable à celui d’un mâtin, leur procure un odorat d’une grande finesse ; leurs oreilles, toujours droites et dont l’ouverture est dirigée en avant , rendent leur ouïe très délicate ; leur vue est perçante ; leur couleur varie encore d’un individu à un autre ; enfin la recherche des alimens et le repos qui succède immédiatement aux fatigues , oceupe tous leurs momens. À défaut du chien primitif, on peut prendre pour objet de comparaison ceux de ces animaux qui, possédés par les peuples les moins civilisés , sont nécessairement le plus près de l’état de nature. Le chien de la Nouvelle-Hollande est dans ce cas. Cet animal, que l’on connait d’après un individu rapporté en France par le capitaine Baudin, ressemble exactement à notre chien de ber- ger, si ce n’est que sa tête se rapproche davantage de celle du mâtin ; son poil, fauve sur le dos et blanchâtre en dessous, est bien fourni et recouvre un duvet grisâtre. Son agilité et ses forces sont considérables, et son courage tient souvent de la témérité. Les différences que l’on rencontre parmi nos chiens domes- tiques sont presque innombrables et se lient entre elles par une foule de nuances. La taille de ces animaux varie beaucoup. Depuis le grand chien danois , le mâtin et le dogue de forte race, jusqu’à l’épagneul , au roquet et au bichon , on trouve tous les degrés intermédiaires. Les uns sont un peu plus grands que les chiens qui se rapprochent le plus de l’état primitif, et l’on comprend facilement comment ce résultat a pu être obtenu , en ayant soin de placer, pendant plusieurs générations successives, les jeunes individus dans les circonstances les plus favorables à leur développement, et en empêchant le mélange de la lignée, ainsi obtenue , avec des animaux de moyenne ou de petite taille. Cest aussi ce que les agriculteurs font tous les jours, dans la vue d'obtenir des chevaux de grande taille. D’un autre côté, il est encore plus aisé d'obtenir par des procédés ana- logues le résultat inverse et de créer, pour ainsi dire , une race de nains. Lorsque les caprices de la mode rendaient cette spéculation lucrative, on était parvenu ainsi à avoir un grand nombre de chiens assez petits pour que les dames puissent les porter commodément dans leurs manchons ; mais , lorsque les races , si éloignées du type naturel de l’espèce , sont abandon- nées à elles-mêmes, et que les circonstances qui ont déterminé leur formation cessent d’agir sur les nouvelles générations , elles ne lardent pas à perdre leur caractère distinctif. Un des premiers effets de la domesticité est toujours de pro- duire des variations dans le pelage des animaux : aussi ne de- TRIBU DES CARNIVORES DIGITIGRADES. 219 vons-nous pas nous étonner de voir les chiens présenter sous ce rapport des différences multiphiées. Les unes paraissent tenir au climat ou à la manière plus ou moins complète dont nous protégeons ces animaux contre lintempériedes saisons ; d’autres au soin que l’on a de n’admettre dans une même lignée que des individus de même couleur. Par ce dernier moyen , les modi- fications accidentelles deviennent héréditaires, et on imprime à la race un cachet particulier. C’est ainsi que la couleur fauve est devenue presque générale chez les chiens de la race des dogues, de celle des grands danois, etc.; que les chiens de berger sont noirs , les chiens loups blancs, les chiens courans, les braques, les bassets et les épagneuls blancs avec des taches noires , etc. La forme du pied varie aussi chez les chiens ; mais les différences les plus remarquables qui se rencontrent parmi ces animaux consistent dans la forme de leur tête et le développe- ment de certaines tendances instinctives. C’est principalement d’après ces derniers caractères que lon distingue nos diverses races de chiens domestiques. Ces races sont très nombreuses et peuvent, par le croisement et par l'influence d’autres circonstances se multiplier extrême- ment. Les plus importantes, les plus communes et les mieux ca- ractérisées sont les seules dont nous puissions nous occuper ici. On peut les diviser en trois familles principales. La première se reconnait à la forme de la tête, dont les os pariétaux en s’élevant au-dessus des temporaux, tendent à se rapprocher, mais d’une manière presque insensible , et dont les condyles de la mâchoire inférieure sont placés sur la même ligne que les dents molaires: elle se compose du mâtin, du danois, du lévrier, etc. Ces chiens se rapprochent plus que tous les autres de ce que nous avons lieu de croire le type primitif de l’espèce. Leur intelligence west pas très développée, et leur odorat n’est pas d’une finesse remarquable ; mais on peut les dresser pour la chasse. Les mâtins sont des chiens remarquables par leur force et leur grande taille: ils ont le corps allongé, le crâne médiocrement développé , le front aplati et par conséquent les sinus frontaux peu développés, le museau allongé, les oreilles petites , à demi redressées et pointues au bout , les jambes longues et fortes ; la queue recourbée en haut et en avant , et le poil assez court, On peut les dresser pour la chasse , surtout pour celle qui deman- de plus de force et de courage que d'intelligence et d'adresse, et ils sontsusceptibles d’un grand attachement pour leur maitre. Les chiens danois se rapprochent beaucoup du mâtin par la forme de leur tête; mais ils ont toutes les parties de leur 21. 320 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. corps plus grosses : ils ont aussi à-peu-près les mêmes instincts. Les Zevriers se distinguent des espèces précédentes par des formes plus sveltes et par une disposition remarquable à la maigreur. Leur intelligence est fort bornée , et leur attachement pour leur maitre presque nul ; mais leur course est des plus rapides, et on les emploie pour chasser les lièvres en plaine. Un second groupe se compose des races où la hoîïîte cérébrale prend le plus de développement, et les sinus frontaux acquiè- rent le plus d'extension. Les os pariétaux , au heu de tendre à se rapprocher, dès leur naissance , au-dessus des temporaux, s’écartent et se renflent en s’élevant vers le sommet du crâne. Ce mode de conformation coïncide avec l’existence d’un cer- veau plus volumineux : et l’intelligence est ici plus grande que chez tous les autres chiens ; l'étendue des sinus frontaux rend en même temps leur odorat plus exquis. On remarque parmi les chiens appartenant à cette famille l’épagneul , le barbet, le chien courant , le chien de berger, le chien loup, les bassets et les braques. Le chien de berger est une des races les plus précieuses et aussi une de celles qui paraissent avoir été le moins modifiées par l'influence de la domesticité. Il se rapproche un peu du mâtin par sa taille et par sa forme générale; mais il est plus faible. Son museau est plus allongé , son front plus bombé , ses oreilles droites ; sa queue en général horizontale ou pendante, et ses poils très longs partout, excepté sur le museau. Il est peu sociable, mais s'attache à son maïtre, et montre dans la garde des troupeaux autant d'intelligence que d'activité et de courage. Le chien loup , de mème taille que le précédent , a la tête , les oreilles et les pieds dégarnis de poils , les formes plus ramas- sées , et la queue très relevée et très touffue ; 1l est d’un caractère sauvage, et ne s'attache que faiblement à son maitre , mais peut. être employé comme chien de garde. L’épagneul a de l’anaïogie avec le chien berger; mais il est de plus petite taille. Son corps est couvert de poils longs et soyeux ; sa tête est plus arrondie; ses oreilles sont longues et pendantes, et ses jambes peu élevées. Son attachement pour son maître est médiocre ; mais il est encore remarquable par ses qualités pour la chasse. Le chien courant a le museau aussi long et plus gros que celui du mâtin , la tête grosse et ronde , les oreilles longues et pen- dantes , les jambes longues ei charnues, le corps gros et allon- gé, le poil très court, la queue grèle , relevée et recourbée un peu en avant. Sa couleur est ordinairement blanche, avec des taches noires ou fauves. C’est le chasseur par excellence. Le braque a le museau moins long et moins large, les oreilles TRIBU DES CARNIVORES DIGITIGRADES. 321 plus courtes et à demi pendantes, les jambes plus longues, le corps plus épais et la queue plus charnue et plus courte. Les basse se rapprochent des deux précédens , mais se re- connaissent au premier abord par le raccourcissement excessif de leurs jambes , qui sont tantôt droites , tantôt torses. Enfin le harbet se distingue par les poils longs , fins et frisés, qui couvrent tout son corps. Son museau est court et épais, ses oreilles larges et pendantes , et son corps court et gros. Il est de tous les chiens celui dont l'intelligence est le plus susceptible de développement , et il le doit probablement en partie à ce qu’il fait plus particulièrement que les autres races de son espèce la société de homme. La troisième famille formée par nos chiens domestiques est caractérisée par le raccourcissement du museau, le rappétisse- ment du crâne et l'étendue des sinus frontaux. Tous ces ani- maux ont aussi les formes pesantes et l'intelligence très bornée, mais sont en général d’une fidélité remarquable. Ceux de grande taille se dressent assez facilement au combat et deviennent alors d’une férocité extrême. Les principales variétés de ce groupe sont le dogue de forte race, le dogue ordinaire et le doguin. Le dogue de forte race se reconnait au premier coup-d’æil, à la grandeur de sa tête, à son épaisse corpulence , à ses oreilles petites et à demi pendantes, et à ses lèvres épaisses , qui re- tombent de chaque côté de sa gueule. Les dogues en diffèrent par leur taille plus petite ; enfin les doguins , qu’on appelle aussi carlins , sont à leur tour plus petits que les dogues et n’ont pas les lèvres aussi développées. - #13 85; Il existe une multitude d’autres races, dont il serait trop long de donner ici la description : comme les précédentes, elles ont non-seulement des caractères physiques distincetifs, mais aussi les qualités différentes , qui , développées peu-à-peu par lédu- cation , sont à-la-fin devenues héréditaires. Chacune d’elles est le résultat de l'influence des circonstances où ces animaux ont vécu , ou a été créée par l’homme dans quelque vue d'utilité ou d'agrément, et on peut juger, par le nombre de ces races , com- bien ces animaux nous rendent de services variés. Les qualités les plus remarquables du chien sont la rapidité de sa course, sa force musculaire, la finesse extrême de son odorat , son intelligence et son attachement pour son maitre, et c’est à elles que nous demandons la plupart des services qu'il nous rend. Chez les peuples qui vivent uniquement de chasse, comme chez ceux pour lesquels cet exercice est devenu le dé- lassement privilégié du riche , lun des principaux emplois du chien est d'aider l’homme, soit dans la découverte du gibier, soit dans sa poursuite et sa capture , et comme les services 329 | ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. qu’on en réclame varient suivant la nature de ce gibier, et que les qualités particulières qu’ils nécessitent se développent par l'éducation et deviennent à la longue héréditaires , il s’est formé autant de races différentes de chiens qu’il y a de différentes espèces de chasses. Un autre emploi, que les progrès de la civilisation ont fait tomber en désuétude, mais auquel on dressait jadis les chiens, est la chasse de l’homme lui-même. Autrefois on se servait de limiers pour traquer les malfaiteurs ; et, dans quelques co- lonies des Antilles , on avait recours ,il y a peu d’années encore, à ce moyen barbare, pour atteindre les nègres, qui, fuyant l’es- clavage , se réfugiaient dans les bois. Ces chiens de forte race, dont on avait soin de développer l'appétit sanguinaire , par une éducation particulière, suivie de génération en génération, ont été aussi dans les combats les auxiliaires de leurs maitres. Strabon nous apprend que les limiers de la Grande-Bretagne furent employés dans les guerres des Gaules ; et, à une époque plus récente , lors de la conquête de l'Amérique par les Espa- gnols ,on voit ces animaux jouer encore un rôle important dans les combats que ces aventuriers hardis livraient aux Indiens. Un reste de férocité a fait conserver chez quelques peuples le goùt des spectacles sanglans, dans lesquels les anciens Ro- mains déployaient une si grande magnificence; mais, faibles imitateurs de ce peuple gigantesque , au lieu de faire combattre des armées entières d'animaux féroces , nous nous contentons en général de voir un taureau furieux assailli par des hommes et des chiens. Les dogues , que lon dresse à ces combats , y dé- ploient une force et un courage extrêmes. Ces qualités , jointes à d’autres plus précieuses, la vigilance et attachement pour son maitre , rendent les chiens des gardiens précieux pour les habitations isolées. Ceux que l’on emploie à cet usage et que l’on appelle communément des chiens de basse-cour,sonten général le mâtin, le chien du berger, le dogue et quelquefois le barbet. Ils doivent être choisis forts et vi- goureux, d’un caractère actif et courageux, mais non méchant; car cette dernière qualité occasione souvent des accidens dé- plorables , et n’est jamais nécessaire. Le Chien est également utile au cultivateur pour la garde et la conduite de ses troupeaux; mais, comme ces fonctions exigent plus d'intelligence que celles d’une simple sentinelle ; on ne peut y employer indistinctement tous les chiens de basse-cour. Celui qui possède au plus haut degré les qualités nécessaires est celui nommé pour cette raison chien de berger. Instruit des intentions de son maitre, il veille sans relâche autour du troupeau , le ras- semble, le dirige, lempéche de dévaster les récoltes et le défend TRIBU DES CARNIVORES DIGITIGRADES. 323 contre ses ennemis. Sa surveillance est si active et si intelli- gente, qu'on ne peut se lasser de l’admirer ; mais, dans les pays infestés ca, loups, il est trop faible pour résister avec succès contre ces animaux , et l’on est obligé de lui substituer des mA- tins de forte race, qui, s’ils sont moins propres à garder le trou- peau , peuvent au moins le mieux défendre. Chez nous et surtout en Hollande, on fait quelquefois servir aussi les chiens de forte race comme bêtes de trait ; mais, au Kamstchatka et au Groënland , c’est leur principal emploi. On les attelle, au nombre de cinq à dix (quelquefois davantage, suivant les difficultés et la longueur de la route), à de petits itraineaux légers, construits en osier, et on les fait courir avec tant de rapidité que, dans un seul jour, ils font quelquefois sur la glace un trajet de vingt-cinq lieues. Enfin ces animaux sont encore utiles après leur mort : on les recherche comme aliment dans les iles de la mer du Sud, et leur peau est employée à divers usages dans l'industrie. Les chiens préfèrent la viande à toute autre nourriture ; mais, pour les entretenir en bonne santé et pour adoucirleurcaractère, aussi bien que par économie, on ne leur donne ordinairement que du pain mêlé à des restes de cuisine ou à du suif ,et il est à noter que ce n’est pas un préjugé que de croire le pain de munition plus propre à ce genre d'alimentation que le pain blanc. En général on en doune une livre et demie par jour aux chiens de moyenne taille ; mais, s’ils prennent beaucoup d’exer- cice , cette ration ne leur suffit pas. Le loup commun est une espèce extrêmement voisiae du chien. Son organisation est la même , et il peut produire avec Fig. 92, LOUP COMMUN. lui des métis fé- conds ; maisil en diffère sous un rapport très im-— portant. Au lieu d'être un animal éminemment so- ciable comme le chien, il vit ha- bituellement so- litaire et ne se réunit à d’autres loups que lors- que la faim le presse. lIla la tail- le de nos plus grands chiens et la physionomie d’un matin, Loup com- mun. Loup noir. Chacal. 324 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. dont les oreilles seraient droites, le pelage fauve et la queue droite. On le trouve depuis l'Egypte jusqu’en Laponie , et il pa- rait même être passé en Amérique. C’est l'animal carnassier le plus nuisible de nos contrées. Sa force est très grande : il em- porte facilement un mouton en s’enfuyant ,et attaque tous nos animaux ; Mais son Courage n’est pas proportionné à sa grande vigueur, et il connaît peu la ruse; souvent il se repaît de cha- rognes. Il existe en Europe et même en France une autre espèce de loup , qu’on dit plus féroce que la précédente : c’est le Zoup noër, eton donne le nom de Zoup dore ou de chacal à une troisième espèce du genre chien, moins grande que les précédentes, et qui a plus danalogie avec nos chiens domestiques. Cette der- nière est répandue dans les parties chaudes de PAsie et de VAfrique , où elle vit en troupes nombreuses, dont les membres chassent en commun et se défendent mutuellement. Plusieurs naturalistes sont disposés à croire que notre chien domestique est une race de chacal , soumise à l’homme et modifiée par une longue servitude. La seconde division du genre des chiens , comprenant les espèces essentiellement nocturnes , dont la pupille contractée ressemble à une fente , se compose des RENARDS. Ces animaux ont tous la même physionomie et se distinguent par les carac- tères précédemment indiqués (voyez page 312). Le renard commun , dont la longueur est d’un pied et demi environ , et dont le pelage est plus ou moins roux, est répan- du principalement dans les parties septenirionales des deux hémisphères, mais se rencontre jusqu’en Egypte. Pour donner une idée vraie du naturel de cet animal, nous ne pouvons mieux faire que de reproduire ici le tableau que le célèbre Buffon a tracé de ses mœurs. « Le renard, dit-il, est fameux par ses ruses et mérite en partie sa réputation. Ce que le loup ne fait que par la force, il le fait par adresse , et réussit plus souvent; sans chercher à combattre les chiens ni les bergers, sans attaquer les troupeaux, sans ‘trainer les cadavres, il est plus sûr de vivre. Il emploie plus d’esprit que de mouvement. Ses ressources semblént être en lui-même: ce sont, comme l’on sait, celles qui manquent le moins. Fin autant que circonspect, ingénieux et prudent, même jusqu’à la patience, il varie sa conduite ; il a des moyens de réserve qu’il sait n’employer qu’à propos; il veille de près à sa conservation. Quoique aussi infa- tigable et même plus léger que le loup , il ne se fie pas entière- ment à la vitesse de sa course. Il sait se mettre en sûreté , en se TRIBU DES CARNIVORES DIGITIGRADES. 325 pratiquant un asile, où il se retire dans les dangers pressans , où il s’établits, où il élève ses petits ; il n’est point animal vaga- bond , mais animal domicilié. Cette différence, qui se fait sentir même parmi les hommes, a de bien plus grands effets et sup- pose de bien plus grandes causes parmi les animaux. L'idée seule du domicile présuppose une attention singulière sur soi- mème ; ensuite le choix du lieu, Part de faire son manoir, de le rendre commode, d’en dérober l’entrée , sont autant d’in- dices d’un sentiment supérieur. Le renard en est doué, et tourne tout à son profit : il se loge au bord des bois , à portée des hameaux ; il écoute le chant des coqs et le cri des volailles; il les savoure de loin; il prend habilement son temps, cache son dessein et sa marche, se glisse, se traine, arrive et fait rarement des tentatives inutiles. S’il peut franchir les clôtures ou passer par-dessous , il ne perd pas un instant, il ravage la basse-cour, il y met tout à mort, se retire ensuite lestement, en emportant sa proie, qu’il cache sous la mousse où porte à son terrier. Il revient quelques momens après en chercher une autre, qu’il emporte et cache de même, mais dans un autre endroit ; ensuite une troisième, une quatrième, etc., jusqu’à ce que le jour ou le mouvement dans la maison l’avertisse qu’il faut se retirer et ne plus revenir. Il fait la même manœuvre dans les pipées et dans les boquetaux, cù lon prend les grives et les bécasses au lacet : il devance le pipeur, va de très grand matin, et souvent plus d’une fois par jour, visiter les lacets , les gluaux, emporte successivement les oiseaux qui se sont empêtrés , les dépose tous en différens endroits, surtout au bord des che- mins , dans les ornières , sous la mousse, sous un genièvre, les y laisse quelquefois deux ou trois jours, et sait parfatiement les retrouver au besoin. Il chasse les jeunes levrauts en plaine, saisit quelquefois les lièvres au gite , ne les manque jamais lors- qu’ils sont blessés, déterre les lapereaux dans les garennes, dé- couvre les nids de perdrix , de cailles, prend la mère sur ses œufs , et détruit une quantité prodigieuse de gibier. Le re- nard est aussi vorace que carnassier: il mange de tout avec une égale avidité: des œufs, du lait, du fromage, des fruits et surtout des raisins. Lorsque les levrauts et les perdrix lui manquent , il se rabat sur les rats, les mulots , les serpens, les lézards, les crapeaux , etc. : il en détruit un grand nombre. C’est là le seui bien qu’il procure. Il est très avide de miel; il attaque les abeilles sauvages , les guêpes , les frelons, qui d’abord tâchent de le mettre en fuite, en le perçant de mille coups daiguillons ; il se retire en effet, mais en se roulant, pour les écraser, et il revient si souvent à la charge, qu'il les oblige à abandonner le guëpier ; alors il le déterre , et en mange 320 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. | et le miel et la cire. Il prend aussi les hérissons, les roule avec ses pieds et les force à s’étendre, enfin il mange du pois- son, des écrevisses, des hannetons, des sauterelles, etc. Il produit en moindre nombre et une seule fois par an. Les por- iées sont ordinairement de quatre ou cinq, rarement de six, et jamais moins de trois. Lorsque la femelle est pleine, elle se recèle , sort rarement de son terrier, dans lequel elle prépare un lit à ses petits. Elle devient en chaleur en hiver, et l’on trouve déjà de petits renards au mois d'avril. Lorsqu’elle s’aper- çoit que sa retraite est découverte , et qu’en son absence ses petits ont été inquiétés, elle les transporte tous, les uns après les autres, et va chercher un autre domicile. Ils naissent les yeux fermés. Ils sont, comme les chiens, dix-huit mois ou deux ans à croître, et vivent de même treize ou quatorze ans. Le renard glapit, aboie et pousse un son iriste, semblable au cri du paon: il a des tons différens , selon les sentimens diffé- rens dont il est affecté ; il a la voix de la chasse, l’accent du desir, le son du murmure, le ton plaintif de la tristesse, le cri de la douleur, qw’il ne fait jamais entendre qu'au moment où il reçoit un coup de feu, qui lui casse quelque membre; €ar il ne crie point pour toute autre blessure , et il se laisse tuer à coups de bâton , comme le loup, sans se plaindre, mais toujours en se défendant avec courage. Ilmord dangereusement , opiniâtré- ment , et l’on est obligé de se servir d’un ferrement ou d’un bâton, pour le faire démordre. Son glapissement est une espèce d’aboiement qui se fait par des sons semblables et précipités : c’est ordinairement à la fin du glapissement , qu’il donne un coup de voix plus fort, plus élevé et semblable au cri du paon. En hiver surtout, pendant la neige et la gelée , il ne cesse de donner de la voix, et il est au contraire presque muet en été. Cest dans cette saison que son poil tombe et se renouvelle. L'on fait peu de cas de la peau des jeunes renards, ou des reuards pris en été. La chair du renard est moins mauvaise que celle du loup. Les chiens et même les hommes en mangent en automne, surtout lorsqu'il s’est nourri et engraissé de raisins, et sa peau d'hiver fait de bonnes fourrures. Il a le sommeil pro- fond : on l’approche aisément sans l’éveiller. Lorsqu’il dort, il se met en rond comme les chiens ; mais, lorsqu'il ne fait que reposer, il étend les jambes de derrière et demeure étendu sur le ventre. C’est dans cette posture qu’il épie les oiseaux le long des haies: ils ont pour lui une si grande antipathie que, dès qu'ils l’aperçoivent, ils font un petit cri d'avertissement. Les geais, les merles surtout le conduisent du haut des arbres, répètent souvent le petit cri d'avis, et le suivent quelquefois à plus de deux ou irois cents pas. » TRIBU DES CARNIVORES DIGITIGRADES. 327 On donne le nom d’isatis ou de renard bleu à une espèce un peu plus petite que la précédente, et qui se trouve dans les parties les plus septentrionales des deux continens , Mais sur tout en Sibérie, et qui fournit une fourrure des plus pré- cieuses. Son pelage est d’un gris cendré, et ses pattes , au lieu d’être nues dans les points qui appuient sur le sol comme chez la plupart des autres animaux , sont garnis de poils en dessous comme en dessus. On trouve dans les mêmes conirées le renard argente Ou re- nard noir, dont le pelage est d’un noir de suie légèrement glacé de blanc, parce que l'extrémité des poils est blanche. Sa four- rure est une des plus belles et des plus chères ; sa finesse et sa légèreté, jointes à sa beauté, la font beaucoup rechercher par les Orientaux. On distingue sous le nom de corsac ou de petit renard jaune une quatrième espèce, qui est très commune dans les vastes landes de Asie centrale. Sa fourrure, quoique commune, fait pour les peuples nomades de ces contrées un objet assez consi- dérable de commerce. D’autres espèces de renards se trouvent aussi en Afrique et en Amérique. Une seconde division du groupe des digitigrades à deux dents tuberculeuses supérieures se compose des civettes , des genettes, des mangoustes , etc., que M. Cuvier réunit sous le nom com- mun de CiVETTES. Ces animaux établissent à quelques égards le passage entre le genre des chiens et eelui des chats; car, de même que chez ces derniers, leur langue est hérissée de pa- pilles aiguës et rudes, et leurs ongles se redressent plus ou moins dans la marche; leurs dents fausses molaires sont en même nombre que chez les chiens ; mais ils ont une tubereuleuse de moins à la mâchoire inférieure. Un autre caractère, commun à ces animaux, est d’avoir près de l’anus une poche plus ou moins profonde , où s’amasse une matière onctueuse et souvent odorante , sécrétée par une glande particulière. Les CIVETTES PROPREMENT DITES (Viverra) ont cetie poche si- tuée au dessous de l’anus, profonde, divisée en deux sacs et rem- plie d’une espèce de pommade d’une odeur musquée très forte, qui est sécrétée par des glandes situées autour de la poche, et qui était autrefois un article important dans le commerce de la parfumerie. La civette , animal qui a donné son nom à ce genre, habite les parties les plus chaudes de l'Afrique. Son corps, long de deux pieds trois ou quatre pouces , est d’un gris brun , rayé Isatis. Renard noir. Corsac. Civettes. Civettes pro- prement dites. Geucttes. Mangoustes. 328 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. de noir, et est surmonté d’une espèce de crinière , dont les poils peuvent se redresser. En Abyssinie , on élève beaucoup de civettes en esclavage, afin de recueillir leur parfum , soit en le ramassant, lorsqu'il tombe , soit en le prenant dans la poche au moyen d’une espèce de cuiller, ou en introduisant dans ce réservoir des substances grasses , qui se pénètrent de la matière odorante et qu’on retire ensuite. Les GENETTES (Genetta) ressemblent beaucoup aux civettes ; mais leur pupille , au lieu de demeurer ronde pendant le jour, prend , en se rétrécissant , la forme d’une fente verticale ; leurs ongles se retirent entièrement entre les doigts comme dans les chats, et ieur poche se réduit à un enfoncement léger, dans lequel lexcrétion , quoique répandant une odeur bien manifeste, est très faible. La genette commune , qui a à-peu-près la grandeur et la figure de la fouine , mais qui a le museau plus effilé , la queue plus longue et le pelage gris, taché de brun ou de noir, se. trouve depuis la France méridionale jusqu’au cap de Bonne-Espé- rance : c’est un animal nocturne qui se tient le long des ruis- seaux , et qui est recherché pour sa fourrure. On donne le nom de MANGOUSTES (Herpestes) à des espèces de civettes, dont la poche est volumineuse , simple, et présente l’ou- verture anale percée dans sa profondeur, et dont les doigts sont à demi palmés. Une espèce de ce genre, la mangouste d'Egypte, était célèbre chez les anciens sous le nom d’ichkneumon. Cet animal , qui est d’un naturel doux et timide , rend des services réels au pays qu’il habite, en détruisant les souris , les petits reptiles et surtout les œufs des crocodiles, et il était jadis l’objet d’un culte religieux; mais ce qu’en ont dit les anciens , qu’il se jette dans le corps des crocodiles , pour le mettre à mort , est entièrement fabuleux. Il est de la taille de nos chats, effilé comme les martres , de couleur grise ou marron, et à queue longue et terminée par une toufle de longs poils noirs étalés en éventail. Les Européens du Caire le nomment rat de Pharaon. Division des digitigrades sans dent tuberculeuse en has. La troisième et dernière subdivision de la tribu des digiti- grades , celle qui est caractérisée par l’absence de dents der- TRIBU DES CARNIVORES DIGITIGRADES. 329 rière la grosse molaire d’en-bas , contient les animaux les plus eruels etges plus carnassiers de la classe: les hyènes et les chats. Les HYÈNES({yæna)ressemblent un peu aux chiens, mais s’en distinguent au premier coup-d'æil par la position oblique de leur corps et leur allure bizarre , dépendant de ce que leur train de derrière est beaucoup plus bas que celui de devant (1). De même que tous les autres genres de cet ordre, elles présentent, dans la Fig. 93. (2) disposition de leur sys- tème dentaire, des par- ticularités caractéristi- ques. Le nombre de leurs fausses molaires est de trois à chaque mâchoire et de chaque côté , et ces dents sont remarquables par leur grosseur et leur forme conique. La carnassière est presque entièrement tranchante, et derrière celle d’en haut on trouve une petite dent tuber- culeuse, à laquelle rien ne répond à la mâchoiré inférieure. Les muscles qui mettent en jeu cette armature puissante et ceux qui fixent la tête sur le cou sont si vigoureux qu'il est presque im- possible d’arracher aux hyènes ce qu’elles ont une fois saisi, et qu’elles peuvent emporter dans leur gueule des proies énormes, sans les laisser toucher le sol. Les efforts violens qu’elles font ainsi déterminent quelquefois l’ankylose (c’est-à-dire la soudure) de leurs vertèbres cervicales, et la force de leurs dents leur per- met de briser les os les plus durs ; cependant les hyènes sont loin d'être aussi sanguinaires qu’on le croit vulgairement. Elles sont extrêmement voraces et féroces , mais en même temps lâches et préférant à tout autre aliment des charognes déjà ramollies par la putréfaction. Lorsque la faim les presse, elles attaquent quel- quefois d’autres animaux ,même l’homme, ou bien se nourris- sent de matières végétales. Elles sont nocturnes et habitent des cavernes. La nuit , elles vont à la recherche des cadavres et des débris infects laissés sur le sol ou enfouis dans la terre , pénè- (1) Cette disposition ne vient pas de ce que les membres postérieurs sont réellement plus courts que les antérieurs , mais de ce que l’animal les tient tou- Jours dans un état de flexion. (2) Dents molaires de la hyène. nn b Hyènes. 4 330 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. trent dans les cimetières pour déterrer les morts, et rôdent dans les rues , pour dévorer les immondices qui s’y trouvent. Ces animaux rendent ainsi des services aux habitans des pays chauds où ils vivent; car ils débarrassent les villes des cha- rognes que l’on ne se donne pas la peine d'enlever, et qui, en se putréfiant, répandraient à l’entour des miasmes infects et pernicieux. Ilest peu d'animaux dont l’histoire ait été char- gée de plus de fables et de traditions superstitieuses. Le vul- gaire les croit hermaphrodites : et cetle erreur, consacrée par les écrits de Pline, a pris probablement naissance à cause d’une poche profonde et glanduleuse que les hyènes portent au-dessous de Panus. Leur organisation présente quelques particularités qu’il faut ajouter aux traits caractéristiques que nous avons déjà indiqués. Leur langue est rude comme celle des civettes et des chats. Tous leurs pieds ont quatre doigts, armés d'ongles courts et propres à fouir ; leur queue est courte et pendante ; enfin leur pupille a la forme d’une pyramide à base arrondie. Ces animaux habitent toutes les parties chaudes de l’ancien continent. L'espèce la plus anciennement connue est la Ayene rayee , qui se trouve en Perse, en Arabie , eu Egypte et dans PAbyssinie : elle a environ trois pieds et demi de long, et pré- sente des bandes irrégulières de brun ou de noir sur un fond gris- jauntre ; elle porte tout le iong de la nuque et du dos une cri- nière, qu’elle relève dans les momens &e colère. La zyène brune setrouve dans le midi de l'Afrique , et est connue des colons du cap de Bonne-Espérance sous le nom de Zoup de rivage ; la hyene tachetee , appelée vulgairement Zoup-tigre , habite les mêmes contrées. Jadis il existait aussi des hyènes en France , en Allemagne et en Angleterre; car on y a trouvé dans des cavernes les osse- mens d’une espèce perdue de ce genre. Le genre des CHATS (felës) se compose d’un grand nombre Fig. 94. d'espèces si semblables, qu'on ne peut guère les distinguer entre elles que par leur taille, leur couleur, la longueur de leur poil et les dimensions de leur queue. Ces animaux sont de tous les carnassiers les plus féroces , les plus sanguinaires et les plus fortement armés. Leurs mâchoires courtes et ro- Tr U# “tu Him æ jo” ÿ 19 IIILèS - nie U En — TRIBU DES CARNIVORES DIGITIGRADES. 331 bustes (9. 95) portent en haut comme en bas seulement‘ deux fausses molaires, comprimées et tranchantes (fq.94), suivies d’une Fig. 95. grande dent carnassière, dont les talus sont pointus et tranchans. La tuberculeuse qui suit lacar- nassière d'en haut est très petite; enfin leurs canines sont énor- mes ; et, lorsque les mâchoi- res se rapprochent, les angles tranchans de toutes ces dents s’engrènent et glissent l’un sur l'autre comme des ciseauxdont chaque branche serait une scie bien affilée. Les muscles qui meuvent ces organes sont aussi plus puissans que chez tous Fig. 96. les autres carnivores :ils donnent à la tête de ces animaux une lar- geur remarquable ( fig. 96), et leur permetteni de briser et de déchirer toute espèce de proie avec une facilité extrême. Mais ce ne sont pas là les seules armes doni la nature a pourvu ces ani- maux , si bien organisés pour le carnage. Aussitôt que le pied, par un mouvement particulier, pose sur le sol, leurs ongles crochus et courbés se relèvent et se ca- chent entre les doigts , de facon à conserver toujours leur tranchant et leur pointe acérée (fig. 97). La phalange unguéale Fig. 91. donne attache par sa face dorsale à un ligament élastique qui tend à la maintenir relevée; aussi pour l’abaisser et pour faire sail- lir la griffe , faut-il que les mus- cles fléchisseurs des doigts se contractent et surmontent l’é- lasticité de ce lien ; lorsque le pied pose sur le sol, le poids du corps tend au contraire à étendre les doigts et aide par consé- quent à relever la phalange unguéale. La force musculaire de ces animaux est immense, et partout où les muscles se fixent sur les os, ceux-ci présentent des crêtes ou des tubérosités disposées de manière à favoriser l’action de la puissance motrice. Toutes les parties de leur corps sont en même temps dune flexibilité remarquable: aussi peuvent-ils faire des bonds énormes ou bien ramper et grimper avec une 332 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. agilité extrême; mais cette souplesse si grande leur rend la course presque impossible , et leur aurait réellement nui, s’ils n'avaient su employer la patience, la ruse et le silence aussi bien que la force pour s'emparer de leur proie. Marchant sans bruit sur les tubercules épais etélastiques dont le dessous de leurs pattes est garni , ils semblent glisser vers de lieu où l’espoir de trouver une victime les attire, et: tapis dans le silence, sans qu'aucun mouve- ment les décèle , ils attendent l'instant propice avec une patience que rien n ’altère : ; puis, s’élançani tout-à-coup sur leur proie , ils tombent sur elle, la déchirent de leurs ongles et assouvissent pour quelques heures leur appétit sanguinaire. Rassasiés, ils se retirent au centre du domaine qu’ils ont choisi pour leur em- pire et y attendent dans un profond sommeil que quelque-nou- veau besoin les presse encore d’en sortir. Le sens du goût est chez eux peu développé: ils dévorent plutôt qu’ils ne man- gent, et ils ont la langue toute couverte de pointes cornées, à l’aide desquelies ils râpent, en quelque sorte, les pariies molles de leur proie. Leur vue ne parait pas avoir une portée très longue , mais est d’une sensibilité extrême : ils voient égale- ment bien le jour et la nuit. Les uns ont la pupille ronde : les autres, plus essentiellement nocturnes , ont cette ouverture rétrécie et allongée verticalement. Leur odorat est loin d’être aussi développé que celui des chiens ; mais l’ouïe est chez eux d’une finesse extrême ; le son le plus imperceptible pour nous les frappe, et c’est au bruit des pas de leur proie qu’ils se dirigent à sa poursuite. Leur cerveau est petit proportionnellement à leur taille et ne présente sur chaque hémisphère que deux sillons longitudinaux. A l’état sauvage, leur intelligence est assez bor- née , et la défiance parait être le trait le plus marqué de leur caractère; mais, lorsque la contrainte les force à recevoir des soins et leur nourriture d’une main étrangère , l'habitude finit par les rendre confians; et bientôt leur confiance se change en une véritable affection: elle va même jusqu’à faire de quelques- uns d’entre eux des animaux domestiques, et toutes les espèces de ce genre se ressembient tellement , qu’il est assez probable que toutes pourraient être apprivoisées de la même manière.Les femelles ont pour leurs petits une grande tendresse; mais il en est tout autrement des mâles , qui souvent détruisent leur propre progéniture. Ils vivent toujours solitaires , et cette anti- pathie pour la société se comprend facilement chez des animaux qui ne se nourrissent que de proie vivante, ont besoin d’exploi- ter un grand domaine où tout voisin serait un rival et par con- séquent un ennemi. Le pelage des chats est en général doux et composé de deux sortes de poils. Le duvet est ordinairement gris , et les poils TRIBU DES CARNIVORES DIGITIGRADES. 333 longs , diversement colorés , forment quelquefois à ces ani- maux une robe très riche. Leur fourrure constitue un objet de commerce assez considérable. Ainsi que nous l’avons déjà dit, tous ces animaux ont entre eux la plus grande similitude. Quiconque a vu un chat domes- tique peut se faire une idée de la physionomie, de la forme, des allures et du caractère de toutes les espèces . même genre. On en connait un grand nombre. Les chats sont répartis sur presque toute la surface du globe ; mais aucune des espèces de l’ancien monde n’est en même temps originaire de l'Amérique. On ne conuaît aujourd’hui en Europe que deux espèces de ce genre, savoir : le chat ordinaire et le lynx. Le tigre, le guépard , le mélas, etc.appartiennenti exclusivement à l’Asie; d’autres espèces sont communes à ceite contrée et à l’Afrique : le lion , la pan- thère, le léopard, le caracal, sont dans ce cas. L’Afrique en possède aussi qui ne se rencontrent pas ailleurs , le chat du Cap, par exemple; enfin on trouve exclusivement en Amérique le jaguar , le couguar , l’ocelot, le serval, etc. Le Zion se place naturellement à la tête de ce genre, comme étant le plus fort et le plus courageux des animaux de proie, et comme étant aussi le plus célèbre. La longueur de son corps est de cinq à six pieds , et on le distingue de tous les autres chats par sa couleur fauve uniforme, par le flocon de poils qui termine sa queue , et par la crinière qui revêt la tête, le cou et les épaules du mâle, mais qui manque chez la femelle. Les chats tiennent or- dinairement la tête basse , et ont dans les yeux et dans l'allure quelque chose qui semble indiquer la perfidie ; le lion au con- traire tient la tête haute, et est remarquable par la majesté de son regard et la noblesse de sa démarche: aussi a-t-il une répu- tation de générosité et d’élévation bien différente de celle des autres animaux du même genre; cependant son caractère et ses mœurs sont essentiellement les mêmes. À moins qu’une faim violente ne le pousse, ce n’est pas à force ouverte, mais par surprise , qu’il attaque sa proie. En général il se met en embuscade sur les bords des ruisseaux , où les antilopes et autres animaux viennent boire , s’y cache parmi les roseaux ou les longues herbes de la rive , et, saisissant le moment favo- rable , s’élance comme la foudre sur sa victime ; il peut franchir d’un seul saui une dizaine de mètres (environ 30 pieds) et con- tinuer pendant quelques instans à s’élancer ainsi par bonds, de manière à surpasser envitesse le meilleur cheval ; mais il ne pourrait soutenir long-temps de tels efforts, et il arrive rare- ment qu’il le tente : s’il ne parvient pas à saisir sa proie après un petit nombre de sauts, il renonce ordinairement à sa poursuite. Quant à l’homme , le lion ne l’attaque que rarement , à moins 22 Lion. 334 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. qu’il ne soit provoqué par lui, ou qu’il ne remarque dans sa contenance quelque signe de frayeur ; mais, s’ilest affamé ou s’il a déjà goùté de la chair humaine, il en est autrement ; dans le pays des Bosjemans, par exemple, où les malheureuxindigènes n’ont, pour se défendre , que des flèches de roseaux, ilregardel homme comme un adversaire peu dangereux, et, lorsqu'il a réussi à en- lever quelque habitant d’un kraal , il ne manque pas de revenir toutes les nuits, pour se procurer quelque autre victime humaine. Ces visites nocturnes finissent quelquefois par devenir tellement à charge aux Bosjemans , qu’on les a vus abandonner leurs habi- tations, pour aller s’établir ailleurs, heureux encore si, pendant leur retraite, ce terrible ennemi ne se met pas à leur poursuite et ne parvient pas à les dévorer fes uns après les autres. Pourécarter ces animaux pendant la nuit, les voyageurs allument un feu vif; mais ce n’est pas toujours un moyen sür de les éloigner. Les bœufs et les chevaux les sentent de fort loin, et témoignent aussitôt leur frayeur extrême, en se serrant les uns contre les autres et en poussant des cris lamentables. Les chiens éprouvent aussi de leur présence le plus grand effroi ; mais ils gardent le silence. Le rugissement du lion est un cri prolongé et retentis- sant, qui se fait entendre à une distance considérable , mais qui n’est pas chez lui un signe de colère. Ces animaux rugissent en général après avoir mangé, ou quand le temps est à Porage, et lorsqu'un d’entre eux s’est mis à rugir, il est imité par tous ceux qui l’entendent , par les femelles comme par les mâles. La force du lion est prodigieuse : il traine sans peine à une grande distance les plus gros bœufs , et des personnes dignes de foi assurent avoir poursuivi à cheval , pendant dix lieues , la trace d’un lion, qui emportait à la hâte une génisse de deux ans, et qui ne paraissait avoir laissé toucher à terre le corps de la victime qu’à deux ou trois endroits. La durée de la vie de ces animaux paraît être d’environ qua- rante ans : ils naissent les yeux ouverts, au nombre de deux ou trois par portée. Les mâles et les femelles se ressemblent d’abord extrêmement ,et ce n’est qu’à la troisième année, que la cri- nière commence à pousser aux premiers : ils ne paraissent ar- river à l’état adulte qu’à l’âge de quatre ou cinq ans. Ainsi que la chatte, la lionne a le plus grand soin de ses petits et aime à les cacher à tous les regards. Pendant lallaitementet pendant toute la durée de l’espèce d'éducation qu’elle donne à ses lionceaux, elle est bien plus farouche et plus redoutable que dans toute autre circonstance. Le moment du repas est aussi un de ceux où tous ces carnassiers deviennent le plus féroces. Ces animaux si terribles peuvent cependant être soumis à l'empire de Phomme et se plaire dans la société de quelque autre animal de prédilec- TRIBU DES CARNIVORES DIGITIGRADES. 335 tion ; ceux que l’on retienten captivité s’attachent à leur gardien, et on en a vus d’une docilité extrême. L’art de les apprivoiser et de les dompter a été porté très loin chezles anciens. Dans lan- née 46 avant Jésus-Christ, Marc-Antoine se montra aux Romains sur un char trainé par des lions , et on nous raconte que, long-temps auparavant, le Carthaginois Hannon, le premier qui en eùt apprivoisé, fut pour cette cause exilé de sa patrie : ses concitoyens prétendaient que celui qui s'était attaché ainsi à dompter des lions devait avoir le projet d’asservir les hommes. La chasse de ces animaux est toujours très dangereuse. Pour les attaquer, on se réunit en grand nombre; mais le plus sou- vent on leurtend des pièges. Autrefois ils étaient bien plus répandus qu’ils ne le sont au- jourd’hui. Du temps d’Hérodote et d’Aristote , on en trouvait dans la Thrace et dans la Macédoine , où il n’en existe plus de nos jours; ils étaient communs dans l’Asie-Mineure, et, à en juger par le nombre de ceux que les Romains montraient dans leurs cirques , il fallait qu'en Afrique , d’où ce peuple les tirait, leur multitude fùt immense. Quintus Scævola fit le premier combattre les lions devant le peuple de Rome , et ileut bientôt de nombreuximitateurs. Sylla , pendantsa préture , donna en spectacle le combat de cent lions mâles. Lors de la dédicace du théâtre de Marcellus , on fit tuer deux cent soixante-huit lions ; aux fêtes données par César dans l’année 46 avant Jésus-Christ, quatre cents de ces animaux périrent , et , quelque temps auparavant, Pompée en avait ras- semblé six cents pour les eux destinés à célébrer l'inauguration de son théâtre. La même abondance de lions dans les spectacles de Rome subsista jusqu’au temps de Marc-Aurèle , et, au milieu du troisième siècle, Probus en fit encore paraitre au cirque deux cents au milieu d’une infinité d’autres animaux; mais ce grand carnage commença alors à faire sentir ses effets, et dans la crainte que le cirque ne vint à manquer de combat- tans , la chasse du lion fut défendue aux particuliers. L’abroga- tion de cette loi sous Honorius, accéléra la destruction des lions, qui depuis , par l’usage des armes à feu, a été presque consommée sur tout le littoral de la Méditerranée. Aujourd’hui ces animaux sont confinés dans les déserts de l’Afrique et y sont même devenus assez rares. Le tigre royal ou tigre d'Orient est un animal plus redoutable encore que le lion, qu’il égale en taille et en force, mais qu’il dépasse en férocité. Son poil est ras, fauve en dessus, blanc en dessous , et rayé irrégulièrement en travers de noir. Il habite les Indes, et on ne saurait peindre en couleurs trop fortes, les ravages qu’il occasionne et l’effroi qu’il inspire. Il éventre 22. Tigre. Jaguar. Panthere. Léopard. Couguar. Chat ordi- naire. 336 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. un bœufd’un coup de griffe, et l'emporte dans sa gueule presque en fuyant; excepté l’éléphant, aucun animal ne peut lui résis- ter, et souvent il s’attaque à l’homme. Le tigre d’ Amerique Où jaguar, que les fourreurs appellent la grande panthère , est presque aussi grand que le tigre d’Orient et presque aussi dangereux. On l’a vu emporter un cheval et traverser à la nage avec cette proie une rivière large et pro- fonde; il attaque les hommes et n’est pas effrayé par le feu. ’est un animal plutôt nocturne que diurne ; il habite les grandes forêts , se cache dans les cavernes et se montre d’une défiance extrême. On le distingue à son pelage d’un fauve vif en dessus, marqué le long des flancs de quatre rangées de iaches noires en forme d’yeux (1), et blanc en dessous, rayé de bandes noires. La panthere est moins grande que les espèces précédentes et plus commune. Elle est répandue dans toute l'Afrique et dans les parties chaudes de Asie , ainsi que dans larchipel Indien. Elle est remarquable par son beau pelage , fauve en dessus, blanc en dessous , et orné sur chaque flanc de six ou sept ran- gées de taches noires en forme de roses , c’est-à-dire formées de l'assemblage de cinq à six petites taches simples. Ses mœurs se rapprochent beaucoup de celles des chats; en effet la pan- thère attaque les petits quadrupèdes et grimpe sur les arbres, pour y poursuivre sa proie ou pour y fuir le danger. Le Leopard ressemble beaucoup à la panthère: mais les taches dont ses flancs sont ornés sont plus petites, et on en compte dix rangées au lieu decinq à six. Il habite l’Afrique et peut-être aussi l'Asie. Jusqu’en ces derniers temps, on le confondait avec l’es- pèce précédente , et dans l’état actuel de la science , il n’est pas possible de décider si c’est le léopard ou la panthère qui, d’après Xénophon, se trouve en Thrace ou de désigner celui des deux auquel doit se rapporter ce qu’on raconte des panthères qui, aux Indes , servent encore de nos jours à la chasse. Une autre espèce , également remarquable par sa grande taille , mais qui n’attaque guère que les petits animaux , est le couguar, appelé par quelques auteurs le lion d’Amérique. Son pelage est d’un fauve roux presque uniforme. Les espèces inférieures par leur taille sont très nombreuses : les unes ressemblent plus ou moins à notre chat domestique ; les autres se distinguent par un pinceau de poils dont leurs oreilles sont ornées : on désigne ces derniers sous le nom delynx. Le chat ordinaire se trouve à l’état sauvage dans les forêts de (x) C’est-a-dire d’anneaux plus ou moins complets avec un point noir au milieu. TRIBU DES CARNIVORES DIGITIGRADES. 537 l'Europe : il a le pelage d’un gris brun avec des ondes trans- versales plus foncées en dessus, d’un gris blanc en dessous, ies pattes fauves en dedans et la queue d’abord annelée, puis noi- râtre. Il est d’un tiers plus grand que nos chats domestiques. Ceux-ci varient beaucoup par la couleur, la longueur et la finesse de leur poil. Leurs mœurs sont trop généralement connus pour qu’il soit nécessaire de nous y arrêter ici. Nous noterons seule- ment que les petits naissent au nombre de cinq à six , les yeux fermés et ne les ouvrent que le neuvième jour, qu'à dix-huit mois ils ont acquis leur entier développement, et que la durée de leur vie n’est que de douze à quinze ans. La domesticité de ces animaux remonte à des temps très reculés. Les Grecs ne les connaissaient que peu; mais ils étaient communs chez les anciens Egyptiens. Aujourd’hui ils sont répandus dans l’Amé- rique et dans l’Inde , aussi bien que dans l’Europe et l'Afrique. On trouve dans les deux continens beaucoup d'espèces plus ou moins voisines du chat ordinaire, mais qui ne présentent pas assez d'intérêt pour nous y arrêter. Le Zynx ou loup cervier se trouve dans toutes les parties sep- tentrionales de l’ancien monde : du temps des Romains, il était assez commun en France , et on le rencontre encore dans les Pyrénées ; il est surtout commun dans le nord, où sa fourrure est un objet de commerce. Sa taille est presque le double de celle du chat sauvage. Son pelage est tacheté de roux brun et ses oreilles sont terminées par un pinceau de poils noirs. C’est un animal très destructeur : il a assez de force pour attaquer les cerfs , etc., et assez d’agilité pour suivre les petits animaux Jusque sur les arbres. Le caracal , qui habite la Perse et la Turquie, et parait être le lynx des anciens , est d’un roux vineux presque uniforme , mais du reste ne diffère que peu du lynx ordinaire. On distingue en- core plusieurs autres espèces de loups cerviers, qui se trouvent en Asie , dans le nord de l’Europe , en Afrique ou en Amérique. Enfin on range aussi dans le genre des chats un animal qui a beaucoup de ressemblance avec les tigres et les léopards , mais qui diffère de toutes les autres espèces du même groupe par ses ongles peu rétractiles : c’est le guepard ou tigre chasseur des Indes. Il est de la taille du léopard , mais plus haut sur jambes, plus élancé: sa tête est plus ronde, et son pelage fauve est semé de petites taches noires uniformes. Il s’apprivoise très facile- ment et se laisse dresser pour la chasse. Lynx. Caracal. Guépard. Genre phoques, des 338 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. TRIBU DES CARNIVORES AMPHIBIES. Cette troisième tribu de la famille des carnivores se compose d'animaux essentiellement aquatiques, qui passent la plus grande partie de leur vie dans la mer, qui ne viennent sur la plage que pour se reposer au soleil ou allaiter leurs petits , et qui sont , par conséquent , organisés pour la nage plutôt que pour la marche. Leurs pieds sont si courts et tellement enveloppés dans la peau, qu’ils ne peuvent, sur la terre, servir qu’à ramper; mais ils sont larges , aplatis , palmés et constituent d’excellentes rames. Leur forme générale se rapproche même un peu de celle des pois- sons ; leur corps est très allongé et flexible , leur bassin étroit, leur queue courte et en partie cachée entre les pattes posté- rieures , qui sont dirigées en arrière dans le sens de l’axe du tronc; enfin leur poil est ras et serré contre la peau. Les carnivores amphibies se divisent en phoques et en morses. Fig. 98, PHOQUE (CALOCÉPHALE MARBRÉ). Les PHOQUES ont la tête ronde et assez semblable à celle d’un chien. Leurs yeux sont grands ; leur regard est intelligent et doux ; leurs oreilles, peu ou point saillantes; leur langue, douce et échancrée au bout; leurs pieds de devant, en- veloppés dans la peau du corps jusqu'au poignet , portent cinq doigts, réunis par une membrane, et armés d’ongles crochus. Les postérieurs ne deviennent libres que près du talon, et se terminent par des doigts en même nombre qu’en avant, mais dont le premier et le dernier (ou le pouce et le petit doigt), au lieu d’être plus courts que les intermédiaires, les dépassent. Leur queue, comme nous lavons déjà dit , est très courte , et toutes leurs formes sont arrondies par la graisse dont leur corps est toujours chargé. Ce qui les distingue principale- — TRIBU DES CARNIVORES AMPHIBIES. 339 ment des morses est la disposition de leur système dentaire : on leur compteçquatre ou six incisives en haut , quatre en bas. Leurs canines sont pointues, et leurs dents mâchelières , au nombre de vingt, vingt-deux ou vingt-quatre, sont toutes tran- chantes ou coniques, sans aucune partie tuberculeuse , et ne peuvent être distinguées en fausses et vraies molaires , comme celles des autres carnassiers. Tantôt ces mâchelières, plus ou moins minces et dentelées , présentent, comme d'ordinaire, des racines multiples ; mais d’autres fois elles deviennent ço- niques et ne paraissent avoir alors qu’une racine , disposition qui étabhit le passage entre la première, et celle que nous étudierons par la suite chez certains cétacés. Les phoques vivent en troupes , souvent très nombreuses , et se nourrissent de poissons et de mollusques : ils mangent tou- jours dans l’eau , et nagent avec une grande facilité : ils plongent aussi très bien et peuvent rester assez long-temps dans l’eau sans respirer. On a cru qu’ils devaient cette fa- culté à lexistence d’une communication entre les deux oreil- lettes du cœur, qui se voit chez le fœtus des mammifères, et qui permet an sang de parcourir le cercle circulatoire sans tra- verser les poumons; mais il n’en est rien , et la seule particu- larité que présente leur appareil vasculaire est un grand sinus veineux , logé dans le foie et servant de réservoir pour le sang, lorsque l'interruption de la respiration entrave le mouvement de ce liquide. Une autre disposition organique , qui est en rap- port avec la manière de vivre de ces animaux est celle de leurs narines , qui sont garnies d’une espèce de valvule servant à les fermer et à empêcher l’eau d’y pénétrer. A terre , les phoques ne se meuvent que très difficilement et deviennent aisément la proie des chasseurs, qui les recherchent, pour leur graisse et leur peau. Ce sont des animaux doux et intelligens, qui s’apprivoi- sent facilement et s’attachent bientôt à ceux qui les nourrissent. On les rencontre dans toutes les mers; mais c’est dans les régions glacées du nord et du sud qu’ils sont le plus abondans. Les an- ciens connaissaient ces amphibies et les mélaient à leurs fables ; les troupeaux de Neptune que conduisait Protée étaient des phoques, et ce sont aussi ces animaux que la mythologie poé- tique des Grecs transforma en tritons et en sirènes, pour escor- ter le dieu de la mer. Les uns ayant les incisives pointues, point d'oreille externe et tous les doigts plus ou moins mobiles et terminés par des ongles pointus, placés sur le bord de la membrane palmaire , sont ap- pelés PHOQUES PROPREMENT pirs, et forment les genres Culore- Phale , Stenorhinque , Pelage , Stemmatope ei Macrorhine. Les autres, ayant les incisives mitoyennes supérieures à Division des phoques. Calocépha- les. Pelages. Stemmatos pes. 340 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. double tranchant (forme qu’on n’a encore remarquée dans aucun autre animal), des oreilles externes , les doigts de la nageoïire antérieure presque immobiles et ceux des pattes postérieures dépassés par des prolongemens de la membrane palmaire ont reçu le nom d’ofartes. Les CALOCÉPHALES, Caractérisés par l’existence de six inci- sives en haut et quatre en bas, habitent nos mers , et sont re- marquables par le volume de leur cerveau et le développement de leur intelligence. On en connaït plusieurs espèces ; la plus commune est connue sous le nom vulgaire de veau marin ; ce phoque, long de trois à cinq pieds, est d’un gris jaunâtre plus ou moins nuancé ou tacheté de brun (fy. 98). Son poil est luisant et continuellement lubréfié d’une matière grasse , qui le rend imperméable à l’eau. On le voit assez souvent sur nos côtes, où il vient se reposer en grandes troupes; et il se rencontre assez loin dans le nord, où l’on trouve également en grande abon- dance quelques autres espèces de phoques, appartenant au même genre. Dans quelques parages, ces animaux sont assez communs pour être l’objet d’une pêche ou plutôt d’une chasse importante. Dans les glaces qui environnent en hiver les côtes de Terre-Neuve et de Labrador, par exemple , on voit, pendant les mois de février, mars et avril, trois à quatre cents goëlettes , montées chacune de vingt hommes, poursuivant ces animaux timides et méfians. Pour s’en emparer, les pêcheurs tendent sur le rivage, avec de grands filets , des espèces de pièges, dans les- quels on cherche à emprisonner tout un troupeau de phoques. Le produit annuel de cette chasse , exportée de l’ile de Terre- Neuve pour l'Angleterre , s'élève à environ cent vingt mille peaux ettreize et quatorze cents tonneaux d'huile, obtenus en faisant fondre la graisse de ces animaux. Les PELAGES ont seulement quatre incisives en haut comme en bas , et ont les mâchelières en cône obtus avec un talon peu marqué en avant et en arrière : c’est à ce genre que se rapporte le phoque à ventre blanc Ou moine qui se tient particulièrement entre les iles de l’Adriatique et de la Grèce, et qui est probable- ment l’espèce qui a été le plus connue des anciens. Sa longueur est de dix à douze pieds. Le phoque à capuchon , qui habite la mer Glaciale et qui porte sur la tête une peau lâche , susceptible de se gonfler et de former une sorte de capuchon, dont lanimal recouvre ses yeux, quand EE une Cle Des D nt. É.. ÉD TRIBU DES CARNIVORES AMPHIBIES. 341 il se croit menacé , appartient à la division des STEMMATOPES, qui diffèrent des pelages par leurs màchelières légèrement com- primées. Les MACRORHINES sont remarquables par leur museau en forme de trompe courte et mobile. On n’en connait qu’une espèce , le phoque à trompe, qui est très commun dans les pa- rages méridionaux de la mer Pacifique , et qui est désigné par les voyageurs sous le nom d’éléphant marin, de lion marin (Anson), de loup marin, etc.: c’est le plus grand des phoques connus : sa longueur est de vingt à trente pieds, et sa circon- férence de quinze à dix-huit. Ces animaux vivent en troupes de cent cinquante à deux cents individus , et fournissent une quantité très considérable d'huile : aussi sont-ils l’objet de pêches importantes. Les OTARIES Ou phoques a oreilles externes diffèrent des espèces précédentes par les caractères déjà indiqués, ainsi que par plusieurs autres particularités d'organisation. Les espèces les plus remarquables de ce genre sont le phoque a criniere , ou lion marin de divers auteurs, et le phoque ourson, appelé vulgaire- ment ours marin. Le premier, long de quinze à vingt pieds et même davantage, habite toute la mer Pacifique, depuis le détroit de Baring jusqu’à celui de Magellan. Une crinière épaisse entoure le cou du mâle. Le second, long de huit pieds et sans cri- nière , se trouve dans le nord du même océan. Les MORSES (7richechus) ressemblent aux phoques par la forme Fig. 99. générale de leur corps et par la dispo- sition de leurs membres , mais en dif- fèrent beaucoup par la tête et par les dents. Leur mâchoire supérieure, re- levée en avant et formant un gros mufle renflé, porte deux énormes Ca- nines , qui se dirigent en bas et attei- gnent souvent jusqu’à deux pieds de long. Entre ces défenses sont placées deux incisives semblabies aux molai- res, qui, au nombre de quatre de chaque côté, en haut et en bas, ont toutes la forme de cylindres courts et tronqués. La mâchoire inférieure manque d’incisives et de canines. On ne connaît d’une manière bien certaine qu’une seule espèce de morse , qui habite Macrorhi- pe:. Otarics. Morses. 342 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. toutes les parties de la mer Glaciale et qui atteint jusqu’à vingt pieds de longueur. Les voyageurs le désignent souvent par les noms de vache marine , de cheval marin , de bête à la grande dent: c’est le æwatrus des Anglais. Il paraît que cet animal se nourrit de plantes marines aussi bien que de substances animales. Ses mœurs sont à-peu-près les mêmes que celles des phoques : il vit sur les côtes du Spitzberg et des autres con- irées du nord, en troupes nombreuses et vient fréquemment à terre , cù il devient d’une capture facile , tandis que, dans la mer, la rapidité de sa nage et sa grande force le rendent difficile à alteindre et dangereux à attaquer ; car alors toute la troupe se réunit pour défendre celui qui est blessé , entoure le bateau et essaie quelquefois de le submerger, en perçant ses flancs avec leurs longues dents. On le recherche pour son huile, pour ses défenses , dont l’ivoire, quoique grenu, peut s’employer dans les arts et pour sa peau , dont on fait d’excellentes soupentes de carrosse. Un seul individu fournit souvent une demi-tonne d'huile. ORDRE DES RONGEURS. L'ordre des rongeurs se compose des mammifères onguicu- lés , dont les organes de la génération sont constitués de la ma- nière normale (et non comme ceux des marsupiaux), et dont le système dentaire consiste seu- Fig. 100. laires ,les canines n’existant pas, et laissant de chaque côté de la bouche un grand espace vide (fig. 100). Le nom de ces animaux leur vient de la manière dont ils coupent leurs alimens par un travail continu, comme s'ils les limaient: ils peuvent ainsironger les matières les plus dures , et en effet on en voit qui se nour- rissent de bois ou d’écorce, et la plupart sont complètement inhabiles à saisir une proie vivante ou à déchirer de la chair. La gueule de ces animaux est assez peu ouverte, quoique la lèvre supérieure soit toujours fendue en long dans son milieu (disposition qui a fait donner le.nom de bec-de-liévre à une con- formation analogue qu’on observe chez quelques hommes), et lement en dents incisives et mo- ORDRE DES RONGEURS. 343 c'est à l’aide des dents incisives seulement que les rongeurs altaquent lesçcorps dont ils veulent se nourrir. Ces dents sont séparées des molaires par un espace vide (occupé chez les autres mammifères par les canines) , et elles sont remarquables par Fig. 101. leur force, leur lon- gueur, leur forme ar- quée et la manière pro- fonde dont elles sont enfoncées dans leurs alvéoles (fig. 101); en- fin leur extrémité est taillée en un biseau tranchant, et elles n’ont pas de racines, mais continuent toujours à croître. Il en résulte qu’elles tendent à s’allonger sans cesse; mais, dans les circonstances ordi- naires, elles conservent cependant les mêmes dimensions ; car, à mesure qu’elles poussent, elles s’usent en se froitant contre celles de la mâchoire opposée. Lorsqu'une des dents vient à manquer, il en est autrement: l’incisive qui lui est opposée ne trouvant plus à s’user par son sommet, s’allonge indéfiniment , en suivant la courbe, qui lui est naturelle, et quelquefois on voit ainsi se développer des denis mon- strueuses, qui de la mâchoire inférieure remontent au-dessus de la tête , et finissent par s’enfoncer dans le sommet du crâne. Au premier abord, on pourrait croire que la détrition, à laquelle ces dents sont continuellement exposées , devrait détruire bien- tôt le bord tranchant qui les termine et qui est si nécessaire pour ronger ; mais la nature a obvié à cet inconvénient par une disposition très simple ; l'émail épais qui garnit la face antérieure de ces incisives est beaucoup plus dur que le corps de la dent, et par conséquent s’use moins vite, de sorte que ces instrumens s’aiguisent d’eux-mêmes par cela seul qu’ils fonctionnent. Leur nombre est presque toujours de deux seulement à chaque mà- choire , et leur face antérieure est ordinairement teinte en jaune plus ou moins foncé. Les dents molaires des rongeurs ont une couronne large et plate ; en général , elles sont d’abord plus ou moins tubercu- leuses ; mais, comme elles s’usent à la manière des incisives, leur surface ne tarde pas à devenir tout-à-fait plane. Ordinaire- ment l’émail qui en revêt l'extérieur forme aussi, de chaque côté de la dent, des replis plus ou moins profonds et nombreux dans la substance de livoire, et, comme il s’use moins facilement que celui-ci, il en résulte que la surface de ces organes présente des stries transversales plus élevées que les parties intermé- 344 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. diaires , disposition singulièrement favorable au broiement des matières dures dont ces animaux se nourrissent ; car elle rend la surface des molaires semblable à celle d’une meule. Chez la plu- part des rongeurs, ces denis ne se composent que de deux substances , l’ivoire et l'émail; mais quelquefois on voit aussi une substance corticale placée en dehors de l'émail , ainsi que cela a lieu chez l'éléphant et d’autres herbivores. Chez les rongeurs qui vivent uniquement de végétaux , les molaires s’usent rapidement et continuent toujours à croître (voy. fig. 101) : aussi n’ont-elles point de racines ou n’en prennent- elles qu'à un âge avancé, tandis que, chez les rongeurs omni- vores , ces denis qui ne s’usent pas de même, prennent des ra- cines , et cessent de croitre de très bonne heure. Ces différences dans le régime coïncident aussi avec d’autres modifications de l'appareil digestif. Les rongeurs qui n’ont pas de racines aux mo- laires et qui ne se nourrissent naturellement que de substances végétales plus ou moins dures, ont, en général, les intestins plus gros , et sont pourvus d’un grand cœcum , tandis que , chez les omnivores, cet appendice n’est que rudimentaire, et les in- testins sont moins développés. Les rongeurs présentent une autre particularité de structure en rapport avec leur mode de mastication ; leur mâchoire infé- rieure , au lieu de s’articuler avec le crâne par un condyle transversal , ainsi que cela se voit chez les carnassiers , y est uni par un condyle longitudinal, qui ne permet de mouvemens que davant en arrière , comme il convient pour laction de ronger. On remarque aussi que leurs mächoires sont faibles , et que les arcades zygomatiques sont minces et courbées en bas, au lieu de s’écarter du crâne comme chez les carnassiers , doni les muscles masticateurs acquièrentun grand développement : aussi ces animaux ont-ils en général la tête comprimée latéralement. Presque tous sont de petite taille : on n’en connaït pas qui soient plus grands que nos cochons domestiques , et la plupart ne dépassent guère en volume les rats et les -écureuils. Leur corps est étroit vers les épaules et ordinairement renflé en arrière; mais ce qu'ils présentent extérieurement de plus re- marquable , c’est la disproportion qui se voit ordinairement entre les membres thoraciques et abdominaux. Ces derniers sont en général beaucoup plus longs que le train de devant , de façon que ces animaux sautent plutôt qu’ils ne marchent. Le lièvre nous offre un exemple de cette disproportion qui, chez quelques autres rongeurs (la gerboise) est portée si loin, que l'animal ne se sert plus que des pattes de derrière pour se poser et pour sauter sur le sol. Les membres antérieurs présentent en général moins de mo- SECTION DES RONGEURS CLAVICULÉS. 345 bilité que chez les mammifères plus élevés. L’avant-bras ne peut presque plus t@urner, et les deux os qui le forment sont souvent complètement réunis. Chez plusieurs rongturs , la clavicule manque ou n’est plus assez longue pour s’éter dre du sternum à l’épaule ; mais, chez d’autres, cet os est complet, et conserve ses rapports ordinaires ; chez ces dermiers , les membres antérieurs servent quelquefois à grimper et même à porter les alimens à la bouche. Du reste, sous beaucoup d’autres rapports , ces ani- maux sont bien moins favorisés de la nature que les quadrumanes ou les carnassiers en général. Leur intelligence est fort bornée, et on remarque aussi que leur cerveau est peu développé et pré- sente à peine quelques circonvolutions : néanmoins, c’est parmi les rongeurs qu’on trouve lesmammifères dont les facultés in- stinctives sont les plus admirables , ainsi que nous le verrons, en parlant des castors et même des écureuils. L'ordre des rongeurs ne se prète que difficilement à de grandes divisions naturelles : il se compose d’un nombre assez considérable de petits groupes, fondés sur des différences dans la disposition des dents, dans la conformation des membres, dans les mœurs , ete. ; mais ces tribus ne sont pas liées entre elles par des caractères assez importans pour autoriser leur dis- iribution en familles. Afin de faciliter l’étude de ces animaux, nous les répartirons, néanmoins, en deux sections principales, suivant qu’ils sont pourvus d’une clavicule bien développée , et servant, comme d'ordinaire, à maintenir l’épaule dans des rap- ports déterminés avec le sternum, ou bien que cetos, devenu trop court pour s’articuler avec le thorax et l’'omoplate, ne remplit qu’imparfaitement ses fonctions, ou manque complètement: les premiers ont été appelés RONGEURS CLAVICULÉS , les seconds RONGEURS A CLAVICULES IMPARFAITES. SECTION DES RONGEURS CLAVICULÉS. Cette division de l’ordre des rongeurs se compose principale- ment de huit tribus assez naturelles , ayant pour types les écu- reuils , les rats, les gerboiïses, les campagnols, les hélamys, les chirchilla , les rats-taupes et les castors, groupes que l’on peut distinguer à l’aide des caractères suivans : Classifica- tion 346 Dents molai- res pourvues de racines et ces- sant par consé- quent decroître aussitôtqu’elles sont complète- ment formées. RONGEURS CLAVICULÉS. Dents molaires dépourvues de racines et continuant par consé- quent de croître pendant toute la vie. ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. / Incisives de longueur ordinai- I { re, les inférieures très compri- ! SCIDRIENS. mées ; queue large et garnie de à poils. à Dents mo- Incisives de longueur ordinai- 4] . FA . £ laires simples, , les inférieures. pointues ; > MUSÉIDXS, c’est-à-direcom-\ LE grêle et ordinairement | RATS-TAUPES, posées seule - } peu ou point garuie de poils ment d’émail et Incisives extrêmement longues d'ivoire. et toujours à découvert , les lè- vres etant trop courtes pour les cacher ; queue très courte ou ‘ nalle. Pattes postérieures palmées de cinq doigts partout. | Dents molai- res composées ; c’est-à-dire for- CASTORIENS. mées de matière Pattes postérieures non pal- corticale, anssi | mées; doigts en nombre va- GERBOISIERS. bien que d’émai] | riable. FL vor Trois mâchelières partout | anvicourens. , , pattes de derrière | disproportionnel- lement longues et armés d'ongles } HÉLswYS. Quatre mâ-| larges et presque chelieres par-/ semblables à des tout. sabots. doigts de derriè- re, de longueur ordinaire ; ongles petits. | CHINCHILLIENS, TRIBU DES SCIURIENS. ! L’écureuil de nos bois peut être pris comme type d’un groupe naturel de rongeurs claviculés formé d’un assez grand nombre Fig. 102. de petits animaux frugivores, qui nichent sur les arbres , et qui sont en général remarquables par leur légèreté et par la vivacité de leurs mou- vemens. On les reconnaît à leurs incisives in- férieures très comprimées , et, à leur queue longue et garnie de poils. Leur tête est large, leurs yeux saillans , leurs mâchelières simples et tuberculeuses , au nombre de quatre de cha- que côté à la mâchoire inférieure , et de cinq, dont une très petite, située au-devant des autres, à la mâchoire supérieure (#g. 102) ; enfin leurs pattes sont munies de cinq doigts derrière et de TRIBU DES SCIURIENS. 347 quatre devant; quelquefois le pouce de devant se marque par un tubereule Cette division comprend les ÉCUREUILS , les TAMIA , les GUER- LENGUETS et les PATATOUCHES ; On y rapporte aussi les CHEIROMYS. Les ÉCUREUILS (Sciurus) se distinguent au premier abord par la disposition des poils de la queue , qui sont dirigés de côté , et représentent une sorte de large plume : ils vivent sur les arbres, y grimpent avec une agilité extrême, et s’y construisent une sorte de bouge, pour s’y reposer et pour y loger leurs petits. Leurs mouvemens sont gracieux, et ils se familiarisent assez promptement avec l’homme, mais sans montrer d’attachement pour les personnes qui les soignent. L’écureuil commun est le plus joli petit quadrupède de nos bois : il est répandu dans les parties froides et tempérées de l'ancien monde. Son pelage varie suivant les climats: en France, en Allemagne, etc., il est toujours d’un roux plus ou moins vif en dessus et blanc en dessous; mais , dans le nord, il de- vient en hiver d’un beau gris bleuâtre , et donne alors la four- rure connue sous le nom de petit-gris, quand on ne prend que le dos, et de zair, quand on y laisse le blanc du ventre. Sa taille ordinaire est de sept à huit pouces : chacun connaît ses formes. T1 se distingue de la plupart des autres espèces par l’existence d’un bouquet de poils à l'extrémité des oreilles. Ses mœurs sont assez curieuses. Pendant une partie de la journée, il reste caché dans un nid sphérique, qu’il construit avec beaucoup d'art dans les parties les plus élevées des plus grands arbres, et qu’il recouvre d’une espèce de toit conique, destiné à em- pêcher la pluie d'y pénétrer. Cette bauge, faite de mousse et de brins de bois flexibles, est tenue avec une propreté remarqua- ble ; jamais l’écureuil n’y fait d’ordure. Vers le soir, ces animaux sortent de leurs retraites , et prennent leurs ébats. On les voit alors sauter de branches en branches avec une grâce et une agi!ité extrêmes , et en étalant leur queue sur leur corps, en manière de parachute. À l’aide de leurs ongles , ils grimpent aussi avec une grande facilité: ils sont très timides, et, lors- qu’un objet les inquiète, ils mettent toujours entre eux et lui l'épaisseur de la branche à laquelle ils sont accrochés, ce qui fait qu’on a de la peine à les voir, si on en est aperçu. La grandeur de leur train de derrière en fait des animaux essentiellement grim- peurs , et, lorsqu'ils sont à terre, ils ne vont que par sauts. Ils ne s’engourdissent pas en hiver, etont l'instinct d’amasser, pendant l'été, les provisions nécessaires à leur subsistance pendant la saison froide. Ils se nourrissent de noisettes, de glands, LA Ecureuils. Tamia. Guerlin- guets. l'oiatouches. Ave-aye. 348 ZOULOGIE DESCRIPTIVE. d'amandes , etc. , et ont une grande propension à cacher en iout temps les alimens qui leur restent. Le tronc d’un arbre creux devient ordinairement leur magasin : ils font plusieurs réserves dans des cachettes différentes , et ils savent très bien les re- connaître , même sous la neige , qu’ils écartent avec leurs pattes. On assure avoir vu ces petits animaux traverser des rivières, embarqués par troupes sur des morceaux d’écorce , qui leur servaient de radeaux, les gouverner , en opposant au vent, comme une voile, leur large et belle queue. C’est dans la Sibérie et la Laponie , que ces écureuils donnent les plus belles fourrures. On assure que chaque année , on exporte de la Russie plus de deux millions de peaux de petits-gris. L’ecureuil gris de Caroline , dont la fourrure est également un objet de commerce important, est un peu plus grand que le nôtre, et manque de pinceau aux oreilles. Les TAMIA sont des écureuils qui ont des abajoues , comme les hamsters et les macaques , et qui passent leur vie dans des trous souterrains : on les'rencontre en Amérique et en Asie. Cest à ce genre , que se rapporte l’ecureuil suisse ; qui habite la Sibérie et l'Amérique septentrionale, depuis le détroit de Behring jus- qu’à la Caroline. Les GUERLINGUETS diffèrent des écureuils et des tamias par leur queue , qui est presque ronde. On en trouve dans les deux continens. La Les POLATOUCHES (Ptéormys) se distinguent de tous les précé- dens par la disposition de la peau des flancs , qui s'étend entre les jambes antérieures et postérieures , de manière à former de chaque côté du corps une sorte de parachute ; à l’aide duquel l'animal peut se soutenir quelques instans en l'air et faire de très grands sauts. L’espèce la plus commune se trouve en Pologne, en Russie et en Sibérie , et vit solitaire dans les forêts ; d’autres habitent le nord de l'Amérique , Archipel indien , etc. Les CHEIROMYS Ou AYE-AYE sont des animaux très singuliers, qui, pendant long-temps , ont été confondus avec les écureuils, mais qui en diffèrent réellement beaucoup , et qui tiennent presque autant des quadrumanes que des rongeurs. Ils ressem- blent assez aux écureuils par leur port et par leur queue , qui est longue et épaisse ; mais leurs doigts , au nombre de cinq TRIBU DES MUSÉIDES. 349 partout , sont longs et grèles, et le pouce de derrière est oppo- sable , de sorte que ce sont réellement des espèces de pedimanes. Leurs dents incisives inférieures sont beaucoup plus compri- mées et surtout plus étendues d’avant en arrière, même que celles des écureuils, et ressemblent à des socs de charrue ; il est aussi à noter qu'ils ont partout une molaire de moins que les véritables sciuriens. On ne connaît qu'une seule espèce ap- partenant à ce genre bizarre : elle habite l'ile de Madagascar : c'est un animal nocturne et qui vit dans des terriers. Son doigt médian de devant, encore plus long que les autres, lui sert pour porterses alimens à sa bouche. Sa démarche est pénible et lente. TRIBU DES MUSÉIDES. De toutes les divisions de l’ordre des rongeurs celle qui a pour type les rats et que l’on pourrait appeler la TRIBU DES MUSÉIDES, se rapproche le plus des carnassiers tant par l’organisation que Fig.103. ._ parles mœurs. Les espèces , dont elle se compose ont en général les dents incisi- ves inférieures pointues(voy. fig. 103), tandis que, chez la plupart des autres rongeurs, elles sont ordinairement lar- ges et tranchantes. Or, cette disposition est indicative de goùts plus sanguinaiï- res, et en effet plusieurs muséides man- gent de la chair aussi bien que des sub- stances végétales ; quelques-uns même , le rat domestique et le surmulot, par exemple, se montrent avides de matiè- res animales de préférence à toutes au- tres, et, lorsqu'ils sont pressés par la faim, ils se dévorent entre eux. Ces animaux sont tous de petite ou de moyenne taille. Leurs pattes de de- vant sont en général terminées par quatre doigts bien développés et par un tubercule qui re- présente un pouce rudimentaire. Aux pailes postérieures , il existe au contraire cinq doigis. Leur queue est ordinairement grèle , cylindrique et peu garnie de poils: ils ont une clavicule bien développée ; enfin leurs dents molaires sont en général au nombre de trois ou de quatre à chaque mâchoire; elles sont 23 Maärmottes. 350 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. simples quant à leur composition et sont pourvues de racines, mais elles varient quant à leur forme. Les principaux genres dont ce groupe se compose sont les genres marmotte, loir , rat, hamster et gerbille. Les MARMOTTES établissent , sous le rapport de la disposition du système dentaire , le passage entre les loirs et les écureuils ; car elles ont des mächelières tout hérissées de pointes, au Fig. 104,(1) nombre de cinq en haut, ct de quatre en bas ; . mais leur forme générale et leurs mœurs les éloi- gnent beaucoup de ces derniers; ce sont des ani- maux à Jambes courtes , à tête large et aplatie, et à queue velue, mais médiocre ou courte : elles sont tout-à-fait plantigrades; leur démarche est lourde et embarrassée , et elles courent mal: elles peuvent s’aplatir de manière à passer par des fentes étroites , et creusent avec facilité des re- traites souterraines très profondes, dans les- quelles eiles passent l’hiver en léthargie. Une espèce de ce genre , la marmotte des Alpes, est connue de tout le monde ; car les petits Sa- voyards , qui viennent dans nos villes mendier leur existence, en promènent souvent dans nos rues. Cet animal est à-peu-près de la taille d’un lapin , et son pelage est d’un gris roussâtre avec des teintes cendrées vers la tête. Il habite les Alpes à une hauteur très considérable ; son terrier se trouve en général immédiatement au-dessous des neiges perpétueiles, et c’est là que les montagnards vont le chercher pendant l'hiver, lorsqu'il est endormi et roulé dans son lit de foin. En général on trouve plusieurs marmottes dans le même terrier qu’elles ont soin de bien garnir de foin ,et dont elles bouchent l'entrée avec de la terre à l'approche de la saison froide ; eiles vivent en société et ne s’éloignent jamais beaucoup de leur retraite : on assure que, lorsque la troupe est dehors, elles placent toujours au sommet d’un rocher voisin une sen- ünelle qui, par un sifflement aigu, avertit ses compagnes de l’approche de quelque danger. Leur peau est employée comme fourrure de bas prix , et les montagnards n'angent leur chair. Une autre espèce de marmottes se trouve en Pologne, et ilen xiste plusieurs en Amérique. ( Les animaux appelés vulgairement écureuils de terre et dési- 4 {1) Dents molaires de la mâchoire supérieure d’une marmotte. > L| TRIBU DES MUSÉIDES. 351 gnés par les zoologistes sous le nom de SPERMOPHILES , sont des les formes plus élégantes. Le souslik de l’orient de l'Europe ap- partent à ce genre. Les RATS se reconnaissent à leurs dents molaires ; au nombre de trois partout , dont la couronne est divisée en tubercules mousses, qui, en s’usant lui donnent la forme d’un disque Fig. 105. (1) échancré ; à leur queue très longue, ronde , écail- leuse et presque entièrement dépourvue de poils, et à leurs pieds médiocrement longs, non natatoi- res et terminés par des doigts minces et libres, au nombre de cinq en arrière et de quatre, avec un rudiment de pouce, en avant. Ces animaux sont en général d'assez petite taille : leur pelage est or- dinairement dur, leur museau obtus et leurs oreil- les très grandes et peu garnies de poils. Plusieurs se sont attachés à l’homme et transportés partout où il s’est établi; du reste, leur instinct n'offre rien de remarquable. Peu d’entre eux font des provisions pour la saison froide, comme beaucoup d’auires rongeurs , et quel- ques-uns se creusent tout au plus des terriers fort simples, peu étendus et sans profondeur. Parmi les rats qui aujourd’hui hantent en si grand nombre nos demeures , il n’en est qu’un qui paraisse être originaire de l'Europe , et qui était connu des anciens : c’est la sourts. Ce petit animal se trouve quelquefois dans les bois ; mais en général il vit dans une sorte d'intimité avec l’homme, dont il partage les habitations : il a même suivi les Européens partout où ils se sont établis. C’est principalement dans les vieilles maisons que les souris fixent leur domicile ; elles se cachent dans des galeries longues et plus ou moins compliquées , qu’elles creusent dans les planchers et les vieilles murailles, dont le plâtre se désagrège facilement, et elles causent souvent de grands dom- mages , en rongeant le linge , les livres et tout ce qu'elles peuvent atteindre. Elles se nourrissent de substances végétales aussi: bien que de matières animales ; mais ce sont les corps gras , tels que le suif, le lard et le savon, qu’elles dévorent avec le plus d’ardeur. Elles pullulent beaucoup ; les femelles font chaque année plusieurs portées composées chacune de six à huit petits. C’est dans les pays chauds qu’elles se multiplient le plus. Il paraît que nulle part elles ne sont aussi incommodes (x) Dents molaïres de la mâchoire supérieure d’un rat. 29, Genre rats. Souris. 2 k Spermophi- espèces de marmottes qui sont pourvues d’abajoues et qui ont les. des Rat domes- tique. Surmulot. 352 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. qu’en Egypte; mais on les rencontre jusqu’en Islande et en Sibérie. Elles supportent très bien les hivers les plus rigoureux et ne s’engourdissent pas comme les loirs et les marmottes. Le rat domestique Ou rat noir n’était pas connu des anciens, et parait n'avoir pénétré en Europe que dans le moyen àge. Quelques naturalistes célèbres pensent qu’il est originaire de l'Amérique ; mais on ne sait rien de positif à cet égard. La lon- gueur de son corps est d'environ sept pouces et celle de sa queue d’un peu plus. Son pelage est ordinairement d’un cen- dré noirâtre. Jadis il était très commun dans nos villes; mais une autre espèce de rat plus grand et plus fort, que le com- merce maritime des Anglais nous a apporté des grandes Indes, est venu le détruire en grande partie, et le reléguer dans les granges et les habitations rurales, où il devient un véritable fléau par les dommages qu’il occasionne , en ron- geant le linge, le cuir des harnais, le lard, le grain, en un mot, tout ce qui tombe sous sa dent. Du reste il se mulii- plie bien moins que la souris; car la femelle ne fait , chaque année , qu’une seule portée , composée de cinq à six petits. L'espèce exotique, qui a dépossédé ainsi le rat noir de ses anciens domaines, est le surmulot, dont le corps a ordinairement neuf pouces de long , et dont la queue est proportionnellement plus courte que celle du rat noir. Son pelage est en général d’un brun roussâtre , et les anneaux écailleux , dont sa queue est garnie , sont au nombre d'environ deux cenis , tandis que, dans l’espèce précédente , on n’en compte qu'environ cent cin- quante. Ce grand rat , aujourd’hui très multiplié en Europe, a été d’abord transporté de l'Inde et de la Perse en Angleterre, vers l’année 1730; son existence n’a été signalée en France qu’en 1750; en 1766, il n’était pas encore parvenu en Russie et en Sibérie; mais, peu de temps après , on l’a vu arriver de l'occident sur les bords du Volga, et, à une époque encore plus récente , il a été transporté en Amérique et dans les autres co- _lonies européennes où il a prodigieusement pullulé. Mulot. Les surmulots sont très carnassiers; ceux , en petit nombre, aui habitent la campagne, attaquent les jeunes animaux , et ceux qui infestent les villes se nourrissent principalement de charognes. À Paris, ils sont très communs dans les égouts situés près des marchés et des abattoirs, les lairines publiques, les boyauderies , et surtout dans la voierie de Montfaucon , où, vers le soir, on les voit recouvrir en entier les cadavres des chevaux abattus dans la journée. Le mulot, qui ressemble au surmulot par ses couleurs, mais dont la taille est inférieure à celle du rat commun , ne fréquente pas les habitations de l’homme , comme les trois espèces pré- TRIBU DES MUSÉIDES. 353 cédentes , mais établit sa demeure dans les forèts.Il se multiplie beaucoup : les portées sont chacune de neuf à dix petits, et se renouvellent plusieurs fois par an; ces animaux pullulent quelquefois à tel point , qu'ils deviennent pour les cultivateurs un véritable fléau; car tantôt ils coupent les tiges du blé pour en dévorer quelques grains et gaspiller le reste, et d’autres fois ils retirent de la terre, pour le manger, le gland ou la faine qu'on a semé, ou bien ruinent le jeune plant, en rongeant son écorce. Ils font aussi des provisions de glands, de châtaignes ,etc., dans des trous creusés à un pied sous terre. Il existe aussi en Europe quelques autres espèces de rats qui ne présentent rien de très particulier. Aux Indes il s’en trouve une qui est remarquable par sa grande taille: on l'appelle le rat géant. Son corps est long de près d’un pied. Le rat musque Où pilori des Antilles est encore plus grand et plus nuisible. Les HAMSTERS se rapprochent aussi des rats par le nombre et Fig. 106.(1) la forme de leurs dents; mais ils s’en distinguent facilement à leur- queue courte et velue , etils sont remarquables par les sacs ou abajoues, creusés de cha- que côté de leur bouche, disposition que nous avons déjà rencontrée chez beau- coup de singes de l’ancien continent. Le hamster commun , que l’on désigne quelquefois sous le nom de marmotte d'Allemagne , est très commun depuis le Rhin jus- qu’en Sibérie , et se rencontre quelquefois dans l’Alsace. Il est plus grand que le rat commun. Son corps est long denviron huit pouces, et son pelage, gris-roussà- tre en dessus, est noir en dessous, avec des taches blan- té, sur la gorge. Il vit solitaire et se nourrit de racines et de toutes les graines céréales et farineuses quelhomme cultive : il peut manger aussi de la chair, et, lorsque la faim le presse , il n’épargne même pas sa propre espèce. C’est un des mammifères les plus nuisibles à l’agriculture, à cause de la quantité de grains qu’il amasse dans (1) Dents molaires de la mâchoire supérieure d’un hamster , déja usées. Genre des bamsters. Hamster commun. ches de chaque cô- Genre des loirs. 354 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. son terrier. Celui-ci a toujours une double issue , l’une oblique sert à rejeter au-dehors les déblais de la terre; l'autre perpendi- culaire est la voie par laquelle l'animal entre et sort. Ces gale- ries conduisent à un certain nombre d’excavations circulaires qui communiquent ensemble par des conduits horizontaux. L'une de ces cellules, garnie d’un lit d’herbes sèches , est la demeure :du hamster; les autres sont destinées à lui servir de magasin pour les provisions qu’il amasse et qu’il transporte dans ses abajoues. Ces poches , qui se prolongent depuis l’angle des lèvres jusqu’au-devant des épaules , peuvent contenir cha- cune une once et demie de blé, et on trouve quelquefois dans le terrier d’un hamster plusieurs boisseaux de provisions amas- sées pendant la saison chaude pour servir aux besoins de l’ani- mal pendant l'hiver. Dans cette dernière saison, les hamsters restent dans leurs retraites, dont ils bouchent l'ouverture , et on assure qu'ils s’y engourdissent. Ils se multiplient beaucoup. La femelle met bas , trois ou quatre fois par an , de dix à douze petits. Les Lorrs différent de tous les muséides, dont nous nous sommes occupés jusqu'ici par le nombre de leurs dents molaires. On en trouve quatre à l’une et l’autre mâchoires , et la couronne (Fig. 108.) de ces dents est divisée par des lignes transversales et rentrantes d’émail , sans que l'émail qui les entoure fasse aucun re- pli dans leur intérieur (fg.108).Il est aussi à noter que ce sont les seuls rongeurs qui manquent de cæcum. A la première vue, ces animaux rappellent quelque chose le poil doux et épais, la queue velue et même touffue, le museau court et fin, la tête large et le regard vif. Tous leurs doigts, à l’exception du pouce de devant, qui est rudimentaire, sont armés d’on- gles aigus et comprimés, et ils grimpent sur les arbres comme les écureuils ; mais ils sont plus bas sur jambes : leurs formes sont plus lourdes, et ils n’ont pas lagilité de ces animaux. Tous les loirs sontnocturnes et passent la saison froide dans un sommeil léthargique très profond, roulés en boule au fond de leur terrier etenfouis dans unlit de mousse. Ils se nour- rissent principalement de fruits de toutes espèces ; mais quel- quefois ils mangent aussi les œufs et les jeunes oiseaux, dont ils rencontrent le nid. Pendant la belle saison, ils ont l’instinct de la physionomie des écureuils : ils ont TRIBU DES MUSEIDES. 395 d’amasser des provisions de noisettes , de châtaignes , etc., dont ils vivent pendant l'hiver, dans des intervalles de veille, et après que leur engôurdissement a cessé. Il existe en Europe trois petits rongeurs qui appartiennent au genre des loirs, savoir : le Zoir commun, le lerot et le mus- cardin. Le Loir commun est un peu moins grand que le rat, d'un gris cendré en dessus et d’un blanc roussâtre en dessous. Sa queue , bien fournie dans toute sa longueur, ressemble assez à celle d’un écureuil , et ses oreilles sont courtes , presque rondes et un peu plus larges à leur extrémité qu’à leur base. Ce petit animal habite les forêts de l'Europe méridionale et niche dans les creux des arbres ou les fentes des rochers. Sa chair a le zoùt de celui du cochon d'Inde, et elle était si estimée des Ro- mains, qu'ils élevaieni des loirs , et les engraissaient pour leur table, comme nous le faisons des lapins. En Italie , on est encore dans l’habitude de les manger. Ils sont rares en France. Le Zerotest un peu moins grand que l’espèce précédente , et sa queue n’est touffue que vers le bout. Son pelage est gris blanc en dessus , blanc en dessous. Il est très commun dans les parties tempérées de l’Europe et occasionne de grands dégâts dans nos vergers ; Car il a l’habitude de courir sur les espaliers , et d’enta- mer les meilleurs fruits au moment où ils commencent à mûrir: il attaque les pêches de préférence, et un seul lérot suffit pour perdre toute une récolte. Les cultivateurs le désignent en général sous le nom impropre de loir, et cherchent avec raison à s’en défaire par tous les moyens possibles. Le muscardin est un joli petit animal, de la taille d’une petite souris , roux-cannelle en dessus, blanc en dessous , qui habite les forêts de toute l'Europe. Il se tient de préférence sur la lisière des bois, et fait avec de l'herbe et de la mousse, sur les branches basses, un nid , où il élève ses petits. Pendant l'hiver, il se tient dans les trous des arbres. Les GERBILLES ressemblent aux rats par la disposition de leur système dentaire ; mais elles ont les pieds de derrière plus longs à proportion , et la queue est longue et velue : elles habitent les contrées chaudes et sablonneuses de l’ancien continent. Loir €om- mun. Ler ot. Muscardin L Gerbi!les, Mérions. Gerboises. 3956 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. TRIBU DES GERBOISIENS. Le petit groupe formé par les gerboises, les mérions et quelques autres rongeurs , a la plus grande analogie avec celui des muséides ; de même que chez ces derniers, les incisives inférieures sont pointues, et les molaires sont pourvues de racines; mais ces dents ont une structure différente : elles se composent de lames garnies d’émail et liées entre elles par de la matière corticale, disposition qui est caractéristique d’un ré- gime herbivore. Les MÉRIONS , qui se trouvent en Amérique, ressemblent aux rats et aux gerbilles , mais ont les pattes postérieures encore plus longues que ces dernières et une petite dent molaire de plus à la mâchoire supérieure. (Fig. 109 , GERBOISE COMMUNE.) Les GERBOISES Ont à-peu-près les mêmes dents que les pré- cédens ; mais leur queue est longue et touffue au bout ; et leurs pattes postérieures d’une longueur démesurée , en comparaison de celles de devant, présentent, dans leur ostéologie, des par- ticularités remarquables. On y trouve trois grands doigts, auxquels s'ajoutent, dans quelques espèces , deux petits doigts latéraux ; et, chose singulière , ces doigts si développés ne sont soutenus que par un seul os métatarsien , disposition qui est analogue à ce que nous verrons bientôt chez les oiseaux. Cette disproportion dans les membres donne aux allures des ger- TRIBU DES ARVICOLIENS. - 357 boises un caractère particulier. En effet, ces animaux se dres- sent ordinairement sur leur train de derrière, en s'appuyant sur leur queue , et ne vont guère qu’en sautant: c’est ce qui les a fait nommer par les anciens des rats à deux pieds. Ils se creusent des terriers comme les lapins, et se nourrissent de ra- cines et de grains. Leur vie est complètement nocturne, et ils s’engourdissent en hiver. L'espèce la plus commune est le gerboa, qui est de la taille d’un rat et qui est pourvu seulement de trois doigts aux pattes de derrière : il se trouve depuis la Barbarie jusqu’à la mer Cas- pienne. TRIBU DES ARVICOLIENS. La tribu des arvicoliens , composée des CAMPAGNOLS , des LEM- MINGS et des ONDdATRAS, est extrêmement voisine de celle des muséides , à laquelle M. Cuvier et beaucoup d’autres zoologistes la réunissent ; mais elle est caractérisée par un mode d’organisa- tion différent du système dentaire, et elle établit le passage vers les rongeursessentieHement herbivores.Lesdivers rongeurs dont nous nous sommes occupés jusqu'ici sont tous omnivores et ont Fig. 110. des dents molaires pourvues de racines bien dis- tinctes de la couronne. Chez les arvicoliens, ces or- ganes sont privés de racines proprement dites , ou n’en prennent qu'à un âge assez avancé , et ne se composent que d’une couronne, dont la base conti- nue de croître à mesure que son extrémité s’use. La forme de leurs dents molaires est également ca- ractéristique ( fig. 110): elles sont composées cha- cune de plusieurs prismes triangulaires, placées alternativement sur deux lignes et confondus par leur base; enfin on n’y trouve pas, comme chez les rongeurs essentiellement herbivores , une sub- stance corticale remplissant les échancrures for- mées par les replis de l'émail. On compte trois de ces molaires de chaque côté et à chaque mâchoire. La forme générale du corps et la disposition des membres sont les mêmes que chez les muséides, Les CAMPAGNOLS (arvicola) se reconnaissent par leur grosse tête, leurs proportions épaisses , leur queue velue et à-peu-près Campaguols. Campagnol ordinaire. ee . ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. de la longueur du corps, et leurs doigts armés d’ongles longs, crochus et propres à fouir, sans palmures et en même nombre que chez les rats, c’est-à-dire quatre devant et cinq derrière. Leur pelage est long, épais et moelleux. On en connaît un assez grand nombre d'espèces répandues dans les deux hémisphères. La plus commune est le campagnol ordinaire Ou petit rat des champs (fig. 111), que, dans quelques provinces , on nomme Fig. 111. aussi, mais im- proprement , zn7u- Lot.Ilestde la taille d’une souris, jau- ne-brun en des- sus , blanc sale en dessous. Cet ani- mal, trop bien con- nu dans les campa- gnes par les nom- breuxravagesqu’il y cause, habite toutes les parties de l'Europe, et choisit de préférence les jardins et les champs, où il peut trouver facile- ment des grains : il n’entre pas dans les maisons ni même dans les granges , mais se creuse une demeure souterraine peu pro- fonde , composée de plusieurs cellules en communication entre elles, et ayant diverses issues. En hiver, il se retire dans les bois. Les femelles mettent bas , au printemps ou en automne, de six à dix petits par portée , et, lorsque les circonstances sont favorables à la multiplication de ces animaux , ils pullulent au point de devenir un véritable fléau. Lorsque les campagnols s’établissent dans un canton, ils y apportent la famine avec eux. Ces animaux, qu’on voit quelquefois couvrir par légions innombrables de vastes étendues de terrain , sont d’une voracité extrême : ils détruisent la semence que l’on met en terre et celle qui vient de mürir. Aussitôt que le blé est près d’être re- cueilli, ils le coupent par la racine, vident l’épi, mangent une partie du grain, emportent le reste et continuent ainsi jus- qu'à ce qu'ils aient tout moissonné. Quand ils envahissent un champ de céréales, ils en deviennent les maitres : on n’a aucun moyen de s’opposer à leurs ravages, et on ne peut tra- vailler utilement à leur destruction qu’à l’époque des labours et des semis. C’est lorsque l’été est sec, qu’ils sont le plus à craindre, heureusement qu’ils ont des ennemis redoutables, et que les pluies de l'automne et surtout la fonte des neiges les dé- truisent en nombre très considérable. Les oiseaux de proie en font une chasse active, et les renards, les chats, les fouines et les beleites leur font une guerre perpéluelle. On peut aussi D tt RS TRIBU DES ARVICOLIENS. 359 dresser des chiens à en faire la chasse , et les cultivateurs soi- gneux font swvre la charrue , au second labour d'automne , par des enfans qui , avec un faisceau de baguettes, tuent tous ceux que le soc amène au jour ; mais ces causes de destruction ne suffisent pas toujours, et, pour se débarrasser de’ces animaux voraces , on empoisonne quelquefois tout le champ qu’on veut préserver, en faisant tremper les grains de blé dans une décoc- tion de noix vomique, d’euphorbe , etc. Le rat d’eau appartient aussi au genre campagnol: il est d’an gris brun foncé et un peu plus grand que le rat commun, auquel il ressemble beaucoup: il habite le bord des eaux et creuse des trous peu profonds , parallèles au sol et à plusieurs ouvertu- res. Sa nourriture consiste principalement en racines de plantes aquatiques. Quand il est surpris, il court se jeter à l’eau; mais il nage et plonge mal. Le schermaus Ou rat fouisseur des Alsaciens est une espèce de campagnol qui ne diffère que très peu du rat d’eau, auquel il ressemble aussi par ses mœurs. On ne l’a encore rencontré qu'aux environs de Strasbourg. Le campagnol économe ou campagnol des prés , qui habite toute la Sibérie, et qui paraît se trouver aussi dans la Suisse et le midi de la France , dans les champs où l’on récolte des pommes de terre , est remarquable par l’art avec lequel il con- struit sa demevre souterraine et par les émigrations éloignées qu'il fait en troupes nombreuses dans diverses parties du nord de l’Asie. Au Kamtchatka, on voit chaque printemps ces animaux se rassembler de toutes parts, se réunir en légions et se diriger vers le couchant. Rien ne les arrête dans leur course , ni lacs, ni rivières, ni bras de mer. Beaucoup se noient ; d’autres devien- nent la proie des plongeons et des poissons.Vers le milieu de juil- let , ils arrivent sur les bords de l'Ochotsk et du Joudoma , après une route de plus de vingt-cinq degrés en longitude , et sont encore en si grand nombre, que chaque colonne met souvent plus de deux heures à défiler. Au mois d'octobre , ils reviennent au Kamtchatka , et leur retour est une fête pour le pays; car l'escorte de carnassiers à fourrures qui les suit fournit aux ha- bitans de ces contrées arides une chasse abondante, et leur ab- sence prolongé est un présage de pluies et de tempêtes. Les LEMMINGS (georychus) diffèrent des campagnols par la Rat d'eau. Rat fouis- seur, Campagnol économe. Genre des brièveté de leurs oreilles et de leur queue et par la disposition lemmings. de leurs doigts de devant , qui sont particulièrement propres à fouir. Le Zemming ordinaire, qui habite les bords de la mer Glaciale, est de même que le campagnol économe, remar- Gevre des endatras. Hélamys. 360 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. quable par les migrations, qu'il fait de temps en temps sans époques fixes et en troupes innombrables. Des bandes de iem- mings descendent quelquefois des montagnes qui les recèlent, marchent en ligne droite par colonnes serrées et dévastent tout sur leur passage : ils ne se bornent pas à dépouiller la surface de la terre , mais la creusent encore pour manger les racines et les grains. Ces animaux sont de la taille d’un rat , et leur pelage est varié de jaune et de noir. Les ONDATRAS sont des campagnols à pieds semi-palmés et à queue comprimée et écailleuse, qui établissent en quelque sorte le passage entre les muséides et les deux genres précédens ; car leurs dents molaires prennent des racines et cessent de croître à un certain âge. On n’en connaît bien qu'une es- pèce , qui habite le nord de l'Amérique, et qui est connue sous le nom de rat musque du Canada. Cest un animal de la taille d'un lapin , dont le pelage est d’un gris roussàtre; par ses habi- tudes, il ressemble un peu au castor; en effet, les ondatras construisent, sur les bords des lacs et des rivières, avec de la terre et du jonc , des huttes voùtées , dans lesquelles ils habitent plusieurs ensemble. TRIBU LES HÉLAMYS. Les HÉLAMYS, appelés vulgairement des Zievres sauteurs, ressemblent beaucoup aux gerboises par la forme et les propor- tions de leur corps ; mais ils constituent un petit groupe disiinct des précédens par la structure de leurs dents. Leurs incisives inférieures sont tronquées , et non pointues comme chez les ger- boises, les rats, etc.: ils ont partout quatre mâchelières, dé- pourvues de racines et composées chacune de deux parties el- liptiques , réunies par une de leurs extrémités et séparées dans le reste de leur étendue par une échancrure remplie de matière corticale ; enfin ils ont cinq doigts aux pieds de devant , et seu- lement quatre aux pieds de derrière, disposition qui est préci- sément l'inverse de ce qui existe le plus ordinairement chez les muséides. On ne connaît qu’une espèce d’hélamys , qui est grand comme un lapin , et habite le cap de Bonne-Espérance. | TRIBU DES CHINCHILLIENS. 361 TRIBU DES CHINCHILLIENS. Les animaux qui forment le type de ce petit groupe four- nissent au commerce des pelleteries une des fourrures les plus élégantes et les plus recherchées ; cependant, jusqu’en ces der- niers temps , ils étaient restés presque inconnus des natura- listes. Ils ont des rapports assez intimes avec les muséides, les arvicoliens , les hélamys et les lièvres, mais ne peuvent étre rangés dans aucune de ces tribus. Leurs clavicules sont com- plètes , et leurs dents molaires , au nombre de quatre partout, sont dépourvues de racines et présentent dans leur composition de la matière corticale aussi bien que de livoire et de l'émail. La forme de ces dents est également caractéristique : elles sont composées de deux ou trois lames d'ivoire semblables à un ru- ban, placées parallèlement , garnies chacune par de l'émail et unies par de la substance corticale seulement; enfin ces ani- maux n’ont point d’incisives accessoires comme les lièvres. Où range dans cette division les ckënchillas proprement dits , les viscaches , etc. Tous sont propres à l'Amérique méridionale. Les CHINCHILLAS (chinchilla) se distinguent par la forme par- ticulière de leurs dents et par le nombre de leurs doigts (quatre en arrière et cinq en avant) , leur queue médiocre, etc. On n’en connait bien qu’une espèce , appelée le chinchilla lanigére, qui habite les montagnes du Pérou et du Chili. C’est un animal un peu plus petit que notre lapin de garenne. Sa tête, garnie de longues moustaches , ressemble assez à celle d’un écureuil. Ses oreilles sont grandes ; ses paites sont minces et peu diffé- rentes en longueur ; son pelage d’un beau gris, ondulé de blanc en dessus , et d’un gris très clair en dessous , se compose de poils d’une finesse et d’une douceur extrêmes ; enfin sa queue est noirâtre , surtout vers l’extrémité. Il vit dans des terriers et se nourrit principalement de racines de plantes bulbeuses. On en fait la chasse avec des chiens dressés à les prendre , sans déchi- rer leur robe et en les relançant dans leur terrier. On les trouve surtout aux environs de Coquimbo et de Copiapo, et on envoie leur fourrure à Santiago et à Valparaiso, d’où on les exporte pour l'Europe; mais on en a fait une chasse si active, que, depuis quelque temps, an en voit à peine, et que leur pour- suite est momentanément prohibée , afin d'empêcher la destruc- ton totale de leur race. Chinehillas Viscaches. Rats-taupes. Oryctéres. 362 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. Les vISCACHES, dont on a formé le genre LOGOSTOME (Zogosto- mus) , n’ont que quatre doigts devant et trois derrière , et ne vivent que dans les plaines: on les rencontre dans presque toutes les parties de l'Amérique méridionale, situées entre le vingt-neuvième et le trente-neuvième degré de latitude aus- trale: mais c’est surtout dans les provinces de Buénos-Ayres, qu elles sont communes : elles vivent dans des terriers profonds , à une seule ouverture , et se rassemblent par familles dans le voisinage les unes des autres. Leur peau n’est pas employée comme fourrure. On a donné le nom de LAGOTIS à un troisième genre de chin- chilliens , où les doigts sont au nombre de quatre partout. TRIBU DES RONGEURS TALPIFORMES. Ce petit groupe se compose des rongeurs essentiellement fouisseurs , qui vivent sous terre , et qui, par leur forme géné- rale , se rapprochent un peu des taupes. La structure de leurs dents est la même que chez les muséides ; mais ils sont remar- quables par la grandeur démesurée de leurs incisives infé- rieures. Les RATS-TAUPES (sphalax), que l’on peut prendre pour type de cette tribu , sont remarquables par leur corps cylindrique , leur grosse tête , où l’on n’aperçoit d’abord ni traces d’yeux ni d'oreilles , par la brièveté de leurs jambes et de leur queue , et par leurs denis incisives , qui sont trop longues, pour être re- couvertes par les lèvres. Iis vivent sous terre, comme les taupes ; mais ils n’ont pas, comme elles , des instrumens puissans pour la diviser; leurs pattes très courtes et divisés en cinq doigts, armés d'ongles fouisseurs, ne sont guère plus robustes que celles des rats, et ces animaux ne se nourrissent que de ra- cines. Le zemni Où rat-taupe aveugle, qui est un peu plus gros que notre rat , habite l’Asie-Mineure et la Russie méridionale. Les ORYCTÈRES (bathiergus), qui ont à-peu-près la même forme générale que les rats-taupes, en diffèrent parleurs dents molaires, qui sont au nombre de quatre partout , tandis que , dans le genre précédent, on n’en compte que trois. Une espèce , appelée par Buffon taupe des Dunes , est presque de la taille d’un lapin. TRIBU DES CASTORIENS. 363 TRIBU DES CASTORIENS. Les rongeurs qui forment cette petite tribu sont plus robustes que ceux dont l’histoire nous a occupés jusqu'ici. De même que tous les précédens, ils ont des clavicules complètes ; mais ils s’en Fig. 112.(1) distinguent par leur mode de vie, essentielle- ment aquatique, et par la structure de leurs pieds , qui sont tous pourvus de cinq doigts , et dont les postérieurs sont palmés. Leurs inci- sives , très vigoureuses sont teintes en jaune, et leurs dents molaires, au nombre de quatre à cha- que mâchoire et de chaque côté , et pourvues de racines qui, en arrêtent l’accroissement aussi- tôt leur entière formation , sont composées de substance corticale aussi bien que d'ivoire et d’émail , et ont l’air d’être faites d’un ruban os- seux, replié sur lui-même. Les animaux qui com- posent cette tribu sont les CASTORS et les COurA. Les caAsTORS se distinguent des couia et même de tous les autres rongeurs par leur queue aplatie horizontalement , de forme presque ovale et couverte d’écailles imbriquées comme celles des poissons. Ce sont des animaux d’assez forte taille et bas sur jambes , dont les formes sont lourdes et ramassées. Leur museau est entouré de poils longs etraides , qui paraissent servir de même que les moustaches des phoques, et de quelques autres animaux, comme d’instrumens de toucher; leurs yeux sont petits ; leurs oreilles courtes sont disposées de façon à s’abais- ser contre la tête et à fermer le conduit auditif, lorsque l'animal plonge dans l’eau; leurs narines sont très mobiles et peuvent également se fermer pour empêcher l’entrée de l’eau dans les fosses nasales; leurs doigts de devant, courts à proportion de ceux de derrière , sont garnis d’ongles en gouttière et propres à fouir ; les postérieurs , comme nous lavons déjà dit , sont pal- més; enfin on trouve, sous la queue de ces animaux, deux grosses glandes , dont les canaux excréteurs aboutissent dans des replis cutanés nommés prépuces , et y versent une sorte de pommade , d’une odeur très forte, qui est employée en méde- cine , sous le nom de castoreum. {1) Dents molaires de la mâchoire supérieure du castor. Castors. 364 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE, Il existe des castors en Europe , en France même, aussi bien qu’en Amérique , et on ne leur trouve aucun caractère physique qui doive les faire considérer comme appartenant à des espèces distinctes. Leurs mœurs , il est vrai, sont loin d’être les mêmes; mais on peutattribuer ces différences à l'influence de la solitude ou du voisinage de l’homme. | Le castor du Canada est un animal, dont l'intelligence parait être assez obtuse; mais il est sans contredit de tous les mammi- fères le plus remarquable par son industrie instinctive. Pendant l'été, il vitsolitaire dans des terriers, qu’il secreuse sur le bord des lacs et des fleuves ; mais, lorsque la saison des neiges approche, il quitte cette retraite et se réunit à ses semblables , pour con- struire en commun avec eux sa demeure d’hiver. C’est dans les lieux les plus solitaires de PAmérique septentrionale, que les castors, souvent au nombre de deux ou trois cents par troupe , déploient tout leur instinct architectural. Pour construire leurs nouvelles demeures , ils choisissent un lac ou une rivière assez profonde pour ne jamiais geler jusqu'au fond, et préfèrent en général des eaux courantes , afin de s’en servir pour le transport des matériaux nécessaires à leurs constructions. Pour soutenir l’eau à une égale hauteur, ils commencent alors par former une digue en talus :ils lui donnent toujours une forme courbe, dont la convexité est dirigée contre le courant et la construisent de branches entrelacées les unes dans les autres, dont les inter- valles sont remplis de pierres et de limon , et la crépissent exté- rieurement d’un enduit épais et solide. Cette digue, qui a pour l'ordinaire onze à douze pieds de large à sa base , et qui est ren- forcée tous les ans par de nouveaux travaux,se Couvre souvent d’une végétation vigoureuse , et finit par se transformer en une sorte de haie. Lorsque la digue est achevée , ou lorsque l'eau étant stagnante, cette barrière n’est pas nécessaire, les castors se séparent en un certain nombre de familles, et s’oc- cupent à construire les huttes qu’ils doivent habiter ou à répa- rer celles qui leur ontdéjà servi l’année précédente. Ces cabanes sont élevées contre la digue ou sur le bord de l’eau , et sont de forme à-peu-près ovalaire ; leur diamètre interne est de six à sept pieds, et leurs parois, construites, comme la digue, avec des branches d’arbres , sont recouvertes des deux côtés d’un induit limoneux. On y trouve deux étages : le supérieur, à sec, est destiné à l’habitation des castors ; l’inférieur, sous l’eau, sert de magasin pour les provisions d’écorce ; enfin elles necom- muniquent au-dehors que par une ouverture placée sous l’eau. On a pensé que la queue ovalaire des castors leur servait comme une truelle, pour bâtir ces demeures; mais il parait qu'ils, w’emploient à cet usage que leurs dents et leurs pattes de TRIBU DES CASTORIENS. 365 devant. Avec leurs fortes incisives , ils coupent les branches et même les troncs d'arbres dont ils ont besoin, et c’est dans leur bouche ou avec leurs pattes antérieures , qu’ils trainent ces matériaux. Lorsqu'ils s’établissent sur les bords d’une eau cou- rante ils coupent le bois au-dessus du point où ils veulent con- struire leur demeure , le mettent à flot,et, profitant du cou- rant, le dirigent là où il faut qu'il aborde : c’est également avec leurs pattes qu’ils creusent sur le rivage ou au fond de l’eau la terre qu'ils emploient. Du reste, ces travaux, qui s’exécutent avec une extrême rapidité, ne se font que pendant ia nuit. La nourriture principale des castors consiste en écorces d’ar- bres , tels que le bouleau , le saule, etc. , et en racines de cer- taines plantes aquatiques. Les femelles mettent bas à la fm de l'hiver deux à quatre petits, qui , en deux ans, prennent leur entier accroissement. La durée de leur vie paraît être d'environ quinze ans. Ces animaux habitent tout le nord de l'Amérique, depuis le trentième degré jusqu’au-delà du soixantième de latitude nord. On les rencontre aussi en Sibérie , en Norwège, en Allemagne et même en France (sur les bords du Rhône , du Gardon , etc. ); mais ces derniers, que l’on appelle souvent des hievres , sont toujours solitaires , ét ne construisent pas de huttes. On pense généralement que c’est le voisinage de l’homme, qui les em- pêche de suivre leur instinct naturel. Les castors, dont le pelage est ordinairement dun brun roussâtre uniforme, mais quelquefois d’un beau noir et d’au- tres fois blanc, sont pourvus en très grande abondance d’un duvet grisätre, moelleux et d’une finesse extrême, qui est caché sous des poils longs et soyeux, et qui, ne se mouillant pas, les protège contre le froid et l'humidité ; mais cette fourrure, qui leur est si utile , devient souvent la cause de leur destruc- tion ; car elle est d’un grand usage dans l’industrie des hommes, et, pour se la procurer, on fait à ces animaux une chasse des plus actives. Les peaux de castors sont en effet l’objet d’un commerce im- portant ; on les emploie comme fourrure et pour la fabrication des chapeaux de feutre ; les plus belles sont celles des animaux tués en hiver et dans les parties les plus froides de l'Amérique septentrionale. Une peau fournit environ une livre et un tiers de duvet, qui vaut actuellement en France environ 200 francs la livre. L’importation de ces peaux , en Europe, s’est élevée quel- quefois à environ cent cinquante mille en une seule année. Le castoréum, denrée qui est également fournie par ces ani- maux , est une substance solide, fragile et d’une odeur forte et nauséabonde. On la vend en général renfermée dans la poche, 24 366 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. où elle se trouve naturellement. Un castor -en fournit environ deux onces. Les femmes de quelques peuplades sauvages s’en servent pour graisser leurs cheveux, et, en Europe, on l’emploie comme médicament. Chaque année , on en importe en France environ douze cents kilogrammes. On a donné le nom de COuIA où de MYOPOTAME à d’autres rongeurs aquatiques , qui ressemblent beaucoup aux castors, si ce n’est que leur queue est ronde et allongée. Ces animaux, qui vivent dans des terriers , au bord des rivières , dans une grande partie de l'Amérique méridionale , fournissent un duvet qui s'emploie en chapellerie comme celui du castor, et leur peau estaussi un objet important de commerce. SECTION DES RONGEURS A CLAVICULES IMPARFAITES. Les rongeurs qui manquent de clavicules , ou chez lesquels ces os sont trop courts pour s'étendre du sternum à l’épaule, et servir aux usages ordinaires , forment quatre petites tribus na- turelles , que l'on peut distinguer par les caractères suivans : 1- les dents molaires [1e 05 armé de p Re —ÉPICS. ourvues de racines, ee P point de piquans. PACCAS. | deux petitesincisives | su pplémentaires der- rière les deux gran- des incisives ordinai. ÉPUSIENS. les dents molaires dé-/res de la mâchoire | pourvues de racines, \supérieure. point de petites inci- sives supplémentai- | res ; deux incisives à \ \ chaque mâchoire. FAITES , ayant CAVIENS RONGEURS A CLAVICULES IMPAR- TRIBU DES PORC-ÉPICS. On désigne sous le nom de porc-épies des rongeurs faciles à distinguer de tous les autres animaux de cet ordre par les pi- quans raides et pointus dont ils sont armés. Ils ont la tête forte, le museau gros et renflé , la langue hérissée d’écailles épineuses , E— TRIBU DES PORC-ÉPICS. 567 les incisives très fortes, et leurs molaires , au nombre de quatre partout , cylindriques et à couronne plate, marquée de plusieurs enfoncemens# sont composées, comme celles des castors , de lames d’émail , réunies par de la matière corticale. Leurs pieds sont courts et armés d'ongles robustes ; les antérieurs ont quatre doigts ; et les postérieurs ordinairement cinq, enfin leur clavi- cule est trop courte pour s'appuyer sur lomoplate , et se trouve suspendue dans les chairs. Ces animaux vivent dans des terriers, et ont beaucoup des habitudes des lapins. On en trouve dans presque toutes les parties du monde ; eton les subdivise en porc- epics proprement dits, atherures , coendous , etc. Les PORC-ÉPICS PROPREMENT DITS (Yystrix) ont la tête bombée, la queue rudimentaire et tout le dessus du corps armé de longues épines, que l'animal à la faculté de redresser par l'action de ses muscles sous-cutanés. Le porc-epic d'Europe se trouve dans le midi de Ptalie et de l'Espagne, ainsi qu’en Barbarie.Il est long d'environ deux pieds ; sa démarche est lourde , et les piquans qui couvrent la partie supérieure de son corps sont gros, très acérés, et fort longs. Sur le dos, on en voit qui ont plus d’un pied de long, et ils sont pour la plupart annelés de blanc et de noir. Une crête de longues soies occupe sa tête et sa nuque , et sa courte queue est garnie de poils d’une structure des plus singulières : ce sont des tuyaux creux , à parois minces , longs d'environ deux pouces , tronqués à leur extrémité et suspendus à un pédicule flexible , de façon que , lorsque l’animal les secoue, ils résonnent en se choquant entre eux. Lorsque le porc-épic est irrité ou effrayé , il redresse tous ses piquans à la manière des hérissons ; ei ses épines se détachent facilement ; mais c’est à tort qu’on lui a attribué la faculté de les lancer contre ses ennemis. C’est un animal nocturne et solitaire qui, pendant tout le jour, reste ca- ché au fond de son terrier, et qui , pendant l'hiver, tombe dans un état d’assoupissement léthargique. On trouve dans les Indes et en Afrique d’autres espèces peu différentes de la précédente. Les ATHÉRURES sont des porc-épics , dont le museau n’est pas renflé , et dont la queue est longue. Les URSONS (£retisons) différent de tous les précédens par leurs piquans courts et à demi cachés dans le poil. Enfin les COENDOUS (Synetheres) se distinguent par leur longue queue, qui est nue au bout et préhen- sile comme celle des sapajous : ils grimpent sur les arbres et se trouvent en Amérique. 24. Porc -épics proprement dits, Athérures. Ursons. Coendous. Agoutis. Paccas. 368 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. TRIBU DES PACCAS. Les paccas et les agoutis, qui, pendant long-temps, ont été confondus avec les caviens, ressemblent beaucoup aux porc- épics par la structure de leurs dents molaires, qui sont à cou- ronne plate et irrégulièrement sillonnée, à racines , et dans la composition desquelles il entre de la matière corticale:on en compte quätre de chaque côté et à chaque mâchoire. Tous ces animaux sont propres à l'Amérique. Les AGOUTIS(CAloromys) ont quatre doigts devant et trois der- rière ; leur tête est petite , et la partie postérieure de leur corps privée de queue, est beaucoup plus élevée et plus forte que l'antérieure ; ils ressemblent un peu aux lièvres , mais sont plus élevés sur jambes et n’ont que des poils gros et longs. On les trouve aux Antilles et dans les parties chaudes de l'Amérique du sud. Les PpACCAS ( Cælogenys) ressemblent aux agoutis par leurs denis ; mais ils ont cinq doigts partout et sont remarquables par la grande largeur de leur face et par les cavités creusées dans l'intérieur de leurs joues, et dont on ignore les usages.On trouve ces animaux dans les mêmes contrées que les précédens , et leur chair est très estimée. TRIBU DES CAVIENS. Cette petite division de l’ordre des rongeurs se compose de quelques animaux propres au nouveau continent , qui ressem— Fig. 113. blent beaucoup aux agoutis par l’en- semble de leur organisation et par leurs mœurs , mais qui ont les dents molaires dépourvues de racines et composées d’une espèce de ruban d’émail , dont les replis sont unis par de la matière corticale{#g.110):ils n’ont aussi que quatre doigts devant, et trois derrière. On y range les cabiais, et les cobayes. Les CABTAIS (Xydrochœrus) ont les doigls armés d'ongles larges et réunis par des membranes ; mais ce qui les caractérise sur- tout, C’est la disposition de leurs dents. De chaque côté et à YRIBU DES LÉPUSIENS. 369 chaque màchoire , on leur trouve quatre mâchelières sans ra- cines , très longues et composées de nombreuses lames verti- cales , parallèles et transversales , soudées ensemble par beau- coupd e substance corticale. On n’en connait qu’une espèce, qui habite en troupes les bords des rivières de la Guyane et des Amazones. Les COBAYES(Cavia Où Ænœma), appelés vulgairement Co- CHONS D'INDE, ressemblent beaucoup aux cabiais : mais ont les doigts libres. L'espèce la plus commune se trouve dans les bois du Brésil et du Paraguay, et s’est beaucoup multiplhiée en Eu- rope , où on l’élève dans les maisons, parce qu’on croit que son odeur chasse les rats. TRIBU DES LÉPUSIENS. Les lièvres et les autres rongeurs qui forment avec eux le petit groupe dont nous faisons ici l’histoire , ont , dans la dis- Fig. 114. position de leur système dentaire, un caractère fort remarquable. Leurs incisives, au lieu d’être au nombre de deux , comme d’ordinaire chez les rongeurs, sont au nombre de quatre (1),et ces quatre dents, au lieu d’être rangées sur une même ligne transversale , sont placées sur deux files : derrière chaque incisive ordimaire , il s’en trouve une autre plus petite (fig. 114). Leurs incisives inférieures ne présentent rien de remarquable. Leurs molaires (fg. 115) sont sans racines Fig. 115. et armées chacune de deux lames verticales sou- dées ensemble par dela matière corticale. On en compte cinq à la mâchoire inférieure ; mais , à la mächoire supérieure , on en trouve une sixième , qui est très petite. Une autre particularité de leur organisation est d’avoir l’intérieur de la bouche et le dessous des pieds garnis de poils comme le reste du corps. Ils ont cinq doigts devant et quatre derrière ,les membres antérieurs plus grè- les et plus courts que les postérieurs, la queue courte , la lèvre supérieure entièrement fendue sur la ligne médiane, et les yeux grands et la- téraux ; enfin leur canal alimentaire est très déve- (1) Dans le jeune âge, les incisives sont même triples. Cochons d'Inde. Genres des lèvres. Lievre com- mun. 370 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. loppé, et leur cœcum surtout dont l’intérieur est divisé par un repli valvulaire , disposé en spirale , est cinq à six fois aussi grand que leur estomac. Ce groupe se compose de deux genres : les LIÈVRES et les LAGOMYS. a Le genre des LIÈVRES (/epus) est caractérisé par des oreilles longues , une queue courte , les pieds de derrière beaucoup plus longs que ceux de devant , et des clavicules très imparfaites. Toutes les espèces dont il se compose se ressemblent extrême- ment : leur pelage est très fourni et toujours d’un gris roussâtre tiqueté , la queue , et en général tout le corps , à l'exception de la gorge, blancs en dessous, et les oreilles noires à leur extré- mité. Ces animaux sont nocturnes ou äu moins crépusculaires. Tout le monde connaît leur grande agilité, leur timidité et leur extrême fécondité. Leur marche consiste en une suite de sauts. Ils se nourrissent d’herbes et d’autres substances végé- tales , et la nature de leurs alimens influe beaucoup sur le goùt de leur chair ; du reste , leur manière de vivre varie suivant les espèces.On en trouve dans les deux hémisphères. Le Zièvre commun , qui est ordinairement d’un gris jaunâtre, se distingue par ses oreilles plus longues que la tête d’un dixième , et par sa queue, qui est de la longueur de la cuisse, et blanche , avec une ligne noire en dessus. Il se trouve dans presque toutes les parties de l’Europe, et vit solitaire , tandis que le lapin vit toujours en société avec ses semblables , et c’est peut-être à ce défaut de sociabilité , que le lièvre doit la liberté qu’il conserve partout , tandis que ce dernier est réduit depuis long-temps à l’état de domesticité. Une autre différence assez grande dans les mœurs de ces animaux, c’est que le lièvre ne creuse point de terrier, mais se contente d’un gite, dont il change la position suivant les saisons. Le poil de cet animal esi très utile, et sa chair, qui est noirâtre , est fort estimée. La poursuite du lièvre est en même temps un objet d’amusement et un exercice salutaire pour les habitans oisifs des campagnes : aussi en fait-on de tous côtés une chasse active , et, si on ne connaissait sa grande fécondité, on s’étonnerait de ne pas voir l’espèce disparaitre de nos forêts. Lorsqu'un lièvre est lancé et poursuivi par les chiens , il fuit d’aborden ligne droite, mais ensuite tourne et retourne sur ses pas. En général , il ne s'éloigne pas beaucoup de son gite , ei quelquefois il a recours à différentes ruses pour se soustraire à ses ennemis. TRIBU DES LÉPUSIENS. 371 On donne le nom de Zievre variable à une espèce un peu plus grande que lg nôtre, qui s’en distingue par ses oreilles et sa queue un peu plus courte , et qui se trouve dans le nord et dans les hautes montagnes du midi de l'Europe. Le Lapin commun est au contraire un peu moins grand que notre lièvre ; mais ce qui le distingue surtout, ce sont ses oreilles plus courtes que sa tête , et sa queue moins longue que sa cuisse. À l’état sauvage, son pelage est ordinairement d’un gris jaunâtre en dessus et blanc en dessous ; mais, dans l’état de domesticité, ses couleurs varient beaucoup. On le croit origi- naire d'Espagne ; cependant il est répandu en abondance dans iouies les parties de l'Europe. Sa chair est blanche et très diffé- rente de celle des lièvres , dontil s'éloigne aussi beaucoup par ses mœurs. Sa fécondité est encore plus grande et s’accroit par l'état de domesticité. Lorsque des lapins s’établissent dans un pays qui leur convient, et qu'ils ne sont pas trop inquiétés par les furets, par les chiens et par l’homme, ils pullulent si prodigieuse- ment, que la terre peut à peine suffire à leur subsistance. Ils vivent par paires dans des terriers profonds, qui les mettent à Pabri de la plupart de leurs ennemis. A l’âge de cinq à six mois, ils sont déjà aptes à reproduire ; la gestation dure trente jours, et chaque portée se compose de cinq, six, sept, on même un plus grand nombre de petits. Quelques jours avant de mettre bas, la femelle se creuse un nouveau terrier en zigzag , au fond duquel elle pratique une excavation , où elle dresse, avec du duvet arraché de dessous son ventre , une espèce de lit pour ses petits. Ceux-ci sont allaités par leur mère pendant environ deux mois , et ne sortent de leur demeure souterraine que lorsqu'ils sont assez forts et tout-à-fait en état de se suffire à eux-mêmes: ils se creusent alors , dans le voisinage du lieu de leur naissance, un terrier et s'y établissent. La durée de leur vie parait être de huit à neuf ans. Les pays étrangers fournissent plusieurs autres espèces du genre lièvre , qui se rapprochent beaucoup de notre lapin. La fourrure de ces divers animaux estemployée comme pelle- teries ; mais c’est surtout dans la fabrication des chapeaux de feutre qu’on fait un grand usage de leurs poils. Le duvet, qui se irouye en grande abondance sous les poils longs et soyeux dont tout leur corps est recouvert, a , de même que le duvet du castor et de beaucoup d’autres mammifères , la propriété de se méler et de se pelotonner si solidement, lorsqu'on le foule que par ce moyen, on en forme de véritahles tissus, ayant une consistance très grande , et pouvant s'adapter à divers usages. Le poil de lapin ne sert que pour le feutre le plus commun ; celui du lièvre donne des produits beaucoup plus beaux, surtout Liévre va- riable. Lapin. 372 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. quand il provient d’un animal habitant les pays froids. Nos cha- peliers tirent les peaux de lièvres nécessaires à leur industrie des différentes parties de la France (surtout la Bourgogne , lAu- vergne et la Bretagne), de l'Allemagne et de la Russie.Cent peaux de lièvres du pays donnent en général environ huit livres de du- vet tandis que le même nombre de peaux de Russie en fournit de quatorze à seize livres , et ce dernier poil vaut jusqu’à 34 fr. la livre , tandis que celui des lièvres du pays (première qualité) ne se vend que 28 francs. Le jar qu’on arrache des peaux , avant que de couper le duvet , qui seul s'emploie en chapellerie , n’a presque aucune valeur: on s’en sert quelquefois comme de bourre ; enfin les peaux , dépouillées de tous leurs poils, s’uti- lisent pour la fabrication de la colle-fortie (1). La quantité de duvet nécessaire pour la confection d’un chapeau de feutre or- dinaire est d'environ quatre onces. (2) (r) La substance de la peau est naturellement insoluble dans l’eau ; mais , si on la fait bouillir long-temps avec ce liquide, elle se ramollit,se dissout et se trans- forme en un produit particulier , appelé gélatine , laquelle possède la propriété de se prendre par le refroidissement, en une gelée plus ou moins solide. Il en est de même des tendons et de divers autres tissus de l’économie animale , et la gélatine , ainsi obtenue, constitue la colle-forte. C’est principalement avec les peaux de lapin que l’on fabrique la colle blanchâtre et de consistance gélati- neuse, dont on se sert pour la peinture à la détrempe. (2) La fabrication des chapeaux de feutre est assez simple et se compose de trois séries d'opérations, savoir : le coupage et la préparation du poil, le foulage et le dressage. Des femmes sont en général employées à la première partie de ce travail: elles arrachent d’abordle jar qui recouvre le duvet et passent les peaux ainsi préparées à un ouvrier chargé d’induire le duvet d’un liquide, appelé secret, et composé de mercure (ou vif argent) dissous dans de l’acide nitrique affaibli. Cette opération a pour objet d'augmenter la propriété feutrante des poils. Lors- qu’elle est terminée , on sèche les peaux dans une étuve chaude , et on les rend aux coupeuses de poils, qui, munies d’un instrument tranchant d’une forme par- ticulière, détachent le duvet du dos et des flancs de la peau. Les poils, ainsi préparés sont livrés au chapelier, qui procède au feutrage. Pour cela , il place sur une table la quantité de duvet convenable pour la fabrication d’un chapeau, et commence son travail par lopération dite de l’arconage : il se munit d’une espèce d’archet extrêmement grand , qui est suspendu au plafond , en passe la corde au milieu du tas de poils et la fait vibrer. Par ce moyen, il projette en l’air tous les filamens déliés qui constituent le duvet , les sépare etles méle dans tous les sens. La masse légère, ainsi obtenue, est ensuite étalée sur une toile ou un cuir et pressée en divers sens. Par ce travail, appelé bastinage , les poils se mélent de plus en plus et commencent à se feutrer. Lorsqu'il est ter- miné, on obtient une espèce de grande galette peu consistante, nommée capade, que l’on foule ensuite , en ayant soin de la plonger de temps en temps dans un bain chaud, aiguisé par de l'acide sulfurique. Ce foulage se fait sur une table inclinée, placée au bord de la cuve, et s'effectue à l’aide de la main, d’une rou- lette de bois ou d’une brosse. A mesure que le poil se feutre , la capade se res- TRIBU DES LÉPUSIENS. 373 Les LAGOuYSs forment un genre très voisin des lièvres, mais qui Genre des s’en distingue par les oreilles beaucoup plus petites , les jambes Henns peu différentes entre elles , Pabsence d’une queue et l'existence de clavicules presque parfaites. On n’en a encore trouvé qu’en Sibérie. Le pika où Lagomys alpin , qui est de la taille de nos cochons d'Inde, vit dans des terriers ou dans des fentes de rochers , au milieu des montagnes les plus élevées, et rend quelquefois , quoique d’une manière indirecte, d'assez grands services aux chasseurs de zibelines. En effet, vers l’automne, les lagomys font sécher avec beaucoup de soin , pour leurs provisions d'hiver, de l'herbe et des feuilles, qu’ils entassent ensuite dans des rochers ou dans des troncs d'arbres. Les tas qu’ils font ainsi ont souvent quatre ou cinq pieds de haut sur plus de huit pieds de large , et , lorsque les chasseurs les découvrent , ils en profitent pour la nourriture de leurs chevaux. Les animaux dont la dépouille est employée comme FOURRURE Pelleteries. appartiennent presque exclusivement aux deux ordres que nous venons d'étudier : aussi , avant que de passer à l’histoire des autres mammifères, croyons-nous devoir ajouter quelques lignes sur le commerce des pelleteries. Ce que l’on recherche le plus dans les fourrures , c’est la fi- serre de ples en plus, et, en foulant dans un certain sens plus que dans les autres, on lui fait perdre sa forme discoïde, pour lui donner celle d’une cloche. En général, on prépare d’abord, avec des poils très communs, le fond du chapeau (ou galette)et ensuite on le dore, c’est-a-dire qu’on y incorpore, par sa surface, une couche de poils plus fins , que l’on foule beaucoup moins , de facon qu'ils restent en partie libres, et constituent une couche de duvet velue ; appelée par les chapeliers Za plume. Pour la dorure, on emploie communément environ une once de beau poil de lièvre de Russie non sécrété. La moitié de cette quantité de poils de castor couvre autant et donne de bien plus beaux produits ; mais, à raison de son prix élevé , on ne s'en sert guère que mêié au poil de lièvre. Enfin, pour terminer la fabrication du chapeau , on ramollit le feutre à la vapeur, et on le dresse sur des formes en bois ; puis on le teint et on encolle sa surface intérieure, pour lui donner plus de consistance. Cette industrie s'exerce sur presque tous les points de la France; mais c’est surtout à Paris et a Lyon, qu’elle a une grande importance. On comptait, il y a quelques années , en France, environ onze cents fabriques de chapelleries, dans lesquelles à-peu-près dix-sept mille ouvriers trouvaient de l’occupation, et l’on évaluait à plus de 19 millions leur produit annuel ; mais , depuis quelques années , cette branche d'in- dustrie a perdu une grande partie de son importance par suite de l'usage général des chapeaux de soie. Pelleteries d'Amérique. 374 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. nesse, l'abondance, le moelleux et le brillant du poil; or, d’après ce que nous avons dit ailleurs de l'influence des saisons et du climat sur l’enveloppe tégumentaire des mammifères , on peut prévoir que ce doit être dans les pays les plus glacés, dans les montagnes et surtout pendant l'hiver, que l’on doit trouver les plus belles pelleteries , et en effet c’est du nord que nous les tirons presque toutes. La France et les pays voisins fournissent bien quelques fourrures , connues dans le commerce sous le nom de sauvagines ; mais C’est principalement dans la Sibérie et dans la partie la plus septentrionale de l'Amérique, que le commerce des pelleteries devient réellement important. Les forêts qui s'étendent dans le nord-est de l'Amérique, depuis les grands lacs du Canada jusqu’à la baie d'Hudson et au détroit de Baring, sont peuplées par un nombre immense d’ani- maux à pelleteries précieuses , dont la chasse est la principale, sinon l'unique ressource des Indiens, à moitié sauvages, qui errent dans ces vastes solitudes , et ces pays, que la civilisation n’a pas encore envahi, fournissent ainsi au commerce des Eu- ropéens de grandes richesses ; car c’est en échange de nos pro- duits manufacturés que les négocians obtiennent des indigènes les dépouilles , qu’ils revendent ensuite à grand prix sur nos marchés. La baie de Hudson et le Canada sont les deux entrepôts des pelleteries de PAmérique du nord , et c’est par cette dernière voie que l’Europe en recoit la plus grande quantité. Chaque année, vers le mois de mai, les agens d’une compa- gnie établie à Montréal se rendent dans les pays des Indiens chasseurs, emportant avec eux des objets grossiers d’habille- ment, des armes, des munitions, des ouüls, du tabac, des liqueurs spiritueuses , et d’autres denrées propres à leur tra- fic : ils s'embarquent, pour ce long et pénible voyage, sur des canots à fond plat d’une légèreté extrême , remontent la rivière Ottawa , gagnent le lac Nipissing, et par la rivière Française , entrent dans le lac Huron, passent les chutes de Sainte-Marie et traversant le lac Supérieur, arrivent à l’établis- sement appelé Grand-Portage. Pendant cette longue route, ils ont souvent été obligés de décharger leur canot et de porter les marchandises disposées, à cet effet, en paquets du poids d'environ quaire-vingis livres , jusqu’à ce que la pro- fondeur de leau redevienne suffisante pour leur navigation ; d’autres fois ils sont même forcés de transporter par terre et à dos d'homme, le canot, aussi bien que le chargement, mais, comme nous le verrons bientôt , des obstacles plus grands encore s’op- posent au voyage du lac Supérieur vers le nord-ouest. Au Grand- Portage , les négocians rencontrent les agens appelés coureurs des bois, qui passent toute l’année dans ces contrées et qui PELLETERIES. 375 parcourent le pays , pour trafiquer avec les Indiens : ils reçoivent d'eux les fourrures , objets de leur expédition , et, après avoir réglé les affaires de la compagnie , ceux qui ne doivent pas sé- journer dans le pays, retournent vers Montréal , où ils arrivent en septembre. Pour pénétrer plus avant dans l’intérieur, les aventuriers demeurés sur les bords du lac Supérieur, con- struisent de nouveaux canots , de moitié plus petits que les pré- cédens et devant être montés par quatre ou six hommes. On charge chaque canot d’environ trente-trois paquets de mar- chandises et de deux paquets de provisions , et on confie à un seul pilote la direction de quatre de ces embarcations. L’expé- dition part de la rivière Autort, sur le côté nord du Grand-Por- tage , traverse une série de petits lacs et de rivières , dont la na- vigation est interrompue par des portages (1), et arrive dans les eaux profondes du grand lac Winnipeg , qui communique avec la baie d'Hudson par les fleuves de Barens ou Severn et de Bourbon ou Nelson , et conduit vers le nord et l’ouest par les rivières du Dauphin , du Daim Rouge et Saskashavan , sur les bords desquels on a construit plusieurs petits forts, destinés à protéger le commerce des pelleteries. En remontant le Saskasha- van , la flottille traverse un pays riche en castors et en d’autres animaux à fourrures recherchées , et elle gagne par une rivière affluente le lac de l’'Esturgeon : elle continue ensuite sa route à travers divers lacs et portages jusqu’à la rivière de Churchill , qui la conduit au lac de Ours, d’où elle passe par une nouvelle série de lacs et par la rivière de l’Elan jusqu’au lac des Mon- tagnes ou Atapeskow, où elle trouve un nouveau lieu de repos, le fort Chipaways. De là des détachemens remontent la rivière de la Paix, pour aller trafiquer avec les Indiens des montagnes Rocheuses ; d’autres se rendent au lac Esclavon par la rivière du même nom , tandis que d’autres encore restent au fort, pour y rencontrer les Indiens Chipaways, qui viennent y apporter les produits de leur chasse. Les agens voyageurs et les coureurs des bois de la compagnie de Montréal pénètrent quelquefois jus- qu’à l’Océan Pacifique , et on leur doit même une grande partie de ce que lon sait sur la géographie des vastes solitudes qu'its ont ainsi explorées. La principale rivière qui traverse le pays des Esquimaux, pour se jeter dans l'Océan Arctique, bien au- delà du cercle polaire , porte même le nom d’un de ces négocians Makenzie, qui, pour étendre la sphère des relations commerciales de la compagnie, fit, dans les parties les plus reculées du nord- ouest de l'Amérique , deux voyages d'exploration , riches en dé- couvertes géographiques. (1) On appelle portages les endroits où la navigation est interrompue. 376 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. Les pelleteries forment une des branches les plus importantes du commerce du Canada; elles ne le cèdent qu'aux grains et au bois. Pour fixer les idées à ce sujet, nous dirons qu’en 1805, la dernière année pour laquelle nous possédions des documens au- ihentiques , la valeur des fourrures exportées pour l'Angleterre était estimée à plus de six millions et demi, et que des quantités très considérables s’en expédient aussi, chaque année , pour les Etats-Unis. En 1808 on importia en Angleterre, du Canada , 95,000 peaux de castors , 123,000 peaux de ratons, 10,000 de martes , 7,000 de louires , 9,000 de minks, 5,700 de chats, 3,900 de glouton vol- verenne , etc. Le commerce des pelleteries , qui se fait par la voie de la baie d'Hudson , est exploité par une compagnie anglaise, qui en a eu le privilège dès l’année 1670, et qui a établi, sur cette côte glacée, plusieurs comptoirs décorés du nom de forts. Jadis les Indiens apportaient, chaque été, à ces entrepôts , le fruit de leur chasse, que, pour cette raison, ils interrompaient pendant cette saison. Mais la concurrence des négocians du Canada a forcé ceux de la baie d'Hudson à baitre le pays comme ces derniers, et il en est résulté que les Indiens, n'ayant plus à se déplacer pour vendre leurs fourrures , chassent maintenant en été aussi bien qu’en hiver, et détruisent ainsi une quantité siimmense d'animaux, précisément dans la saison de la repro- duction , que plusieurs de ceux-ci deviennent de plus en plus rares, et que le commerce des pelleteries tend à perdre de son importance. Ainsi,en 1794, le nombre &es peaux de castors, expédiées de ces parages pour l'Angleterre, s’éleva à plus de 56,000 , tandis qu’en 1808, il n’était plus que de 34,000. A cette dernière époque , on recevait annuellement , par la même voie, plus de 5,000 peaux de raton , et aujourd’hui ce nombre m’atieint pas 200 ; néanmoins la quantité de pelleteries que la compagnie de la baie d'Hudson verse dans le commerce , ne laisse pas que d’être encore très considérable. Pendant les cinq années qui vien- nent de s’écouler, elle a vendu, terme moyen, chaque année, plus de 134,000 peaux, dont environ 77,000 de martre, 14,000 de mink, 16,000 de putois de rivière, 7,500 de loutre, 600 de glouton vol- verenne , 2,500 d'ours, 4,500 de renards d'espèces diverses, 20,000 de chat et 2,709 de lapin , auxquelles il faut ajouter quelques peaux d’écureuil, d’hermine , de castor, etc. Les négocians des Etats-Unis se livrent aussi au commerce des pelleteries ; depuis quelques années, ils ont établi, à cet effet, un comptoir à l'embouchure de la rivière Colombia, et ils font, pour la Chine, des envois considérables de fourrures de castor, de loutre de mer, de loutre de rivière, etc. PELLETERIES. 277 Enfin, nous ajouterons aussi quelques fourrures, que l’on exporte de lAmérique du sud , telles que le chinchilla et le couia. L'ancien mônde , qui fournit à la consommation des pellete- Pelleteries ries , depuis bien plus long-temps que l'Amérique , et qui ren de la Sibérie. ferme moins de ces immenses forêts , refuge des animaux que le chasseur poursuit, n’abonde pas autant en rongeurs et en petits carnassiers recherchés pour leur fourrures; mais cependant la branche de commerce dont nous nous occupons ici ne laisse pas d’être encore très considérable dans la portion asiatique de l'empire russe. Au Kamischatka etdans diverses par- ties de la Sibérie, la chasse de ces animaux, est, pour ainsi dire, l'unique moyen d’existence de presque toute la population , dont les impôts même se paient avec des fourrures. Dans les terrains marécageux qui bordent le Volga , on trouve déjà beaucoup de blaireaux, d’hermines, de loutres, etc. Le pays des Kirghiz fournit aussi des renards, des loups ,et, dans les montagnes , on trouve des zibelines , des gloutons , etc.; mais c’est à mesure que l’on s’avance davantage vers l’ouest que l’on rencontre les plus belles fourrures ; ainsi les zibelines les moins estimées, sont celles que l’on prend le long de la rivière Oby , celles qui se trouvent auprès de l’Ienissei sont d’une qualité un peu meil- leure , mais les plus belles sont celles qui se trouvent dans les monts Altaï, qui avoisinent le lac Baiïkal , et dans la vaste éten- due de pays qu’arrose le Léna. Le long de ce fleuve , les bois sont remplis d’écureuils, et dans le Kamischatka, mais surtout sur les iles Aleutiennes,on trouve, non-seulement des renards, des zibelines , des hermines , etc. , mais aussi des loutres de mer, que les Russes appellent quelquelois des castors de mer. Une partie des pelleteries exportées par les Russes est dirigée sur la Chine, principalement les peaux de loutre de mer, que les marchands vont chercher jusque sur la côte nord-ouest de l'Amérique ; les cargaisons sont débarquées à Okholok , et trans- portées jusqu’à Krakhta , situé sur la frontière chinoise, près du lac Baïkal. Les entrepôts des pelleteries destinées à la con- sommation de l’intérieur de la Russie , et au commerce de l'En- rope , sont à Orembourg et à Archangel ; on y vend principale- ment des peaux d'ours, de petit-gris , de zibelines , de renard- noir , argenté et bleu. C’est à Londres, pour les pelleteries d'Amérique, à Leipsig et à Francfort pour celles de Russie, que nos marchands vont chaque année s’approvisionner. Ces foires se tiennent à Pâques et à la Saint-Michel (fin de septembre). Pour fixer davantage les idées sur l’importance du commerce des pelleteries , nous au- rions voulu donner le chiffre annuel des ventes effectuées sur Pelleteries du pays. Préparation des pellete- ries, 378 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. ces grands marchés ; mais nous n’avons pu nous le procurer que pour la première de ces villes, qui, du reste, est celle où cette branche de commercea pris le plus d’extension. Dans les quatre années qui viennent de s’écouler (1828 à 1832), on a vendu à Londres , terme moyen, près de 500,000 pelleteries , dont en- viron : | Martre.. . . . . . 140,000. Renards de diverses Mink:.0 AUSNERNENC 2082 000. espèces. + + + . 30,000 . Putois de rivière - . 6,000. Loups. . . . : . . 2,500. Hernrines . 22 1: 2 6,000: Chats". IHM 5095 000. LOutres US 0 15100000. 7) Ecureuil ST MAO PE S/000! Ratom A benetL Te 35 1013,000 4 Chiichiflars 2 COLONEL 000. Glouton volverenne. 600. Lapins et lièvres.. . 18,000. CPS AAENL CAL 215071: 4/00 Nous recevons aussi quelques fourrures de la partie du sud de lempire russe, par la voie de Marseille ; et celles qui proviennent de l'Amérique méridionale nous arrivent principalement par le Havre et Bordeaux. On estime à quatre ou einq millions la va- leur des pelleteries importées annuellement en France. Enfin, les pelleteries du pays , ou sauvagins, consistent en peaux de renard commun, de fouine , de putois, de loutre de rivière , de chats et de lapins. On les tire surtout des Pyrénées, des Vosges , de l'Auvergne et de la Lorraine. La Normandie fait un commerce assez grand de peaux de lapins. L’exportation des peaux non apprêtées est prohibée par nos lois de douane, mais se fait beaucoup par contrebande; c’est ainsi qu’on envoie, en Angleterre et en Allemagne, des quantités considérables de peaux de lapins destinées à la chapellerie. Les peaux de chats, après avoir été confectionnées , s’expédient principalement pour l'Amérique ; les autres fourrures exportées se vendent à la foire de Leipsig. Les préparations que l’on fait subir aux fourrures, pour les approprier à nos besoins, sont peu compliquées. Pour les peaux auxquelles on conserve leur couleur naturelle, on exécute deux séries d'opérations ; la première , appelée le travail des peaux, consiste surtout à les bien écharner , à les enduire de graisse du côté de la chair, à les fouler ensuite avec les pieds dans un ton- neau défoncé , puis à les étendre , à les écharner de nouveau, et à les assouplir en les frottant avec force , du côté de la chair , sur une tige de fer ou sur une corde tendue ; la seconde série d’opé- rations se compose du dégraïssage, qui s’effectue sur les peaux préalablement travaillées avec du plâtre en poudre, ou du sable chaud , ou de la sciure debois, en les faisant tourner dans un tonneau placé sur un axe, et hérissé de chevilles à son intérieur ; enfin on les bat , et , si c’est nécessaire , on les assouplit de nou- ORDRE DES ÉDENTÉS. 379 veau , en les frottant, comme dans le premier travail, sur un fer implanté dans le mur, ou sur une corde tendue. Souvent on#donne aussi aux pelleteries des couleurs artifi- cielles, soit pour les rendre plus uniformes et plus belles, soit pour imiter des fourrures plus précieuses. Cette espèce de tein- ture est connue , dans l’industrie, sous le nom de lustrage , et se fait , en général par l'application successive de diverses couches de matière tinctoriale , à l’aide d’une brosse plutôt que par im- mersion , Car Ce procédé permet d’imiter mieux la nature, en donnant des teintes différentes à la portion basilaire du poil et à sa pointe. C’est surtout à Paris et à Lyon que le lustrage des pelleteries est porté à un haut degré de perfection. ORDRE DES ÉDENTÉS Les mammifères qui composent cet ordre ,ont pour caractère principal, l'absence de dents sur le devant de la bouche (#g.116); ils ont des ongles très gros, qui embrassent l’extrémité des Fig. 116. doigts , et qui se rappro- chent un peu de la nature des sabots ; en général ils ont aussi, dans ieurs mou- vemens, une certaine len- teur occasionée par des dispositions de leurs mem- bres, faciles à apercevoir; mais ce groupe est bien moins naturel que les précédens , car on y range , à côté de quel- que mammifère ayant le mode d'organisation ordinaire , d'autres espèces qui présentent des anomalies remarquables et qui de- vraient plutôt former , avec les marsupiaux , une série parallèle à celle des édentés ordinaires, des rongeurs et des carnassiers. Plusieurs naturalistes, M. de Blainville entre autres, ont adopté, dans la classification des mammifères , cette dernière marche ; mais la méthode de M. Cuvier étant la plus généralement em- ployée, nous avons cru devoir la suivre ici, tout en indiquant les imperfections que nous croyons y apercevoir. Le groupe artificiel des édentés se divise en trois familles na- turelles et faciles à distinguer ; ce sont : 1° Les TARDIGRADES , qui ont le mode d'organisation ordinaire des mammifères, et qui ont la face très courte ; 2° Les ÉDENTÉS ORDINAIRES, qui ont aussi la conformation normale, mais dont le museau est long et pointu; Paresseux. 380 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. 3° Les MONOTHRÈMES, qui, de même que les oiseaux et les reptiles, n’ont qu’une seule ouverture extérieure pour la se- mence , l'urine et les autres excrémens, et dont la structure présente encore d’autres anomalies extraordinaires. FAMILLE DES TARDIGRADES. Les tardigrades , qui doivent leur nom à la lenteur de leurs mouvemens , ne forme qu’un seul genre, appelé , pour la même raison , Celui des paresseux. (Fig. 117, L’AÏ). Ces animaux ressemblent un peu à des singes difformes et engourdis , et ils ont dans tout leur être quelque chose de si dis- proportionné et de si bizarre, qu’au premier abord on les pren- drait pour le produit de quelque jeu fantastique de la nature ; mais lorsqu'on étudie mieux ces anomalies , on voit qu’elles ont leur utilité, et qu’elles tendent toutes, quelque grotesques qu’elles paraissent , à adapter les organes de l'animal aux usages auxquels son genre de vie les destine. Lorsqu'ils sont à terre, rien en effet n’est plus gauche, plus disgracieux et plus impuissant que les paresseux. Leur corps court et ramassé, est porté sur des membres de longueurs si inégales, que, pour marcher, ces animaux sont obligés de se trainer sur leurs coudes ; leur bassin est si large, et leurs cuisses tellement dirigées en dehors , qu'ils ne peuvent rapprocher les genoux ; leurs pieds de derièrre sont en même temps articulés si obliquement sur la jambe, qu’ils ne touchent le sol que par leur bord externe; enfin, les doigts, réunis ensemble par la FAMILLE DES TARDIGRADES. 381 peau , ne se marquent en dehors que par d'énormes ongles cro- chus et fléchis dans le repos, et sont si peu mobiles, qu’à un certain âge lês premières phalanges se soudent aux os du méta- carpe et du métatarse. La position assise et verticale leur est moins incommode, mais leur tête étant dirigée dans le sens de l'axe du corps, leur bouche regarde alors en haut, et il leur serait bien difficile de païtre à terre; ajoutez aussi que leurs muscles fléchisseurs sont bien plus puissans que les extenseurs, tandis que dans la marche ce sont ces derniers qui doivent sup- porter tous le poids du corps , et que les mouvemens sont d’une extrême lenteur : on pourra se former alors une idée de toute la gène que le mode de conformation de ces animaux doit leur im- poser , quand ils sont dans les conditions où la plupart des qua- drupèdes vivent et se meuvent commodément. Mais ce serait à tort que l’on croirait que la nature ait voulu en faire des êtres imparfaits et grotesques ; il en est tout autrement; elle les a destinés à vivre accrochés aux branches des arbres, et dans cette position, qui pour la plupart des mammifères ordinaires serait promptement fatigante, les anomalies de structure que nous venons de signaler , deviennent autant de dispositions heureuses qui permettent à ces édentés de grimper et de se cramponner, en déployant le moins de force musculaire possible, et qui leur faci- lite la préhension des alimens suspendus au-dessus de leur tête. Les paresseux, en effet, vivent toujours sur les arbres, et se nourrissent de feuilles ; ils affectionnent surtout la cécropie peltée, que les colons des Antilles connaissent sous le nom de bois trompette , et ces animaux ne quittent une branche qu'après l'avoir entièrement dépouillée; quelques auteurs assurent que, lorsqw’ils ne trouvent plus de feuilles , ils se laissent tomber de leur branche pour s’éviter la peine d’en descendre; tous les mouvemens leur sont pénibles , mais l’opinion qu’on s’est gé- néralement formée de leur excessive ienteur et de leur paresse obligée , parait exagérée ; car deux voyageurs, à qui la zoologie doit de nombreuses découvertes, MM. Guoi et Gaimard ont conservé, pendant quelques jours, un de ces animaux vivans à bord de leur navire, et l’ont vu grimper aux mâts et en descen- dre sans difficulté. Ces animaux présentent aussi, dans la disposition de leur sys- ième dentaire , des particularités distinctives ; leurs canines sont aiguës et assez longues, et leurs molaires ont la forme de cylindres. Leur estomac est divisé en quatre poches assez ana- logues aux quatre estomacs des ruminans , mais ne présente , à l'intérieur, ni feuillets ni replis; leur canal intestinal est court et sans cæœcum. Enfin ils ont sur la poitrine deux mamelles, et ne font qu'un petit qu’ils portent sur leur dos. 25 Uoau. Tatous. 382 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. Les paresseux habitent les forêts de l’intérieur de l'Amérique méridionale; on en connaît plusieurs espèces. La plus remarqua- ble est l'ai ou paresseux à trois doigts ; c’est le seul mammifère qui ait plus de sept vertèbres cervicales : on lui en compte neuf. Sa taille est celle d’un chat, ses bras ont le double de la longueur de ses jambes, et le poil qui recouvre tout le dessus de son corps est gros, long , sans ressort, et ressemble à de l’herbe fanée. Son nom lui vient de son cri. L’unau, ou paresseux didactyle , est de moitié plus grand, eta les membres moins disproportionnés. FAMILLE DES ÉDENTÉS ORDINAIRES. Les édentés de cette famille , qui se reconnaissent à leur mu- seau pointu, méritent encore mieux leur nom que ceux du genre des paresseux , car non-seulement ils manquent de dents incisives, mais sont aussi privés de canines; plusieurs manquent aussi de molaires. (Fig. 116 , page 379.) Cette division se compose des tatous , des oryctéropes, des fourmilliers et des pangolins. Les TATOUS ( Dasypus) sont des animaux de petite ou de moyenne taille, à corps épais et bas sur jambes, qui sont très re- marquables parmi tous les mammifères, par le test écailleux, , dur, et composé de petits compartimens comme une mosaique, dont leur tête , leur corps et souvent leur Re LTD queuesontrecouverts. | r Cetie substance , que | JUAN lon peut considérer MN comme des poils agglu- (Fig. 118, LE TATOU CABASSOU). tinés , forme un bou- clier sur le front, un second , très grand , qui couvre les épaules, et qui est suivi de plusieurs bandes parallèles et mobiles , les- quelles se joignent à leur tour à un troisième bouclier placé sur la croupe ; la queue est tantôt garnie d’anneaux, tantôt de tuber- cules seulement , comme les jambes ; enfin quelques poils épars se montrent entre les écailles, ou sur la partie de la peau qui FAMILLE DES ÉDENTÉS ORDINAIRES. 383 est dépourvue de ces plaques.Ces animaux ont les pattes armées d'ongles trèçgrands et propres à fouir la terre, aussi se creusent- ils des terriers ; le nombre de ces organes est de cinq derrière, et de quatre ou cinq devant. Leurs dents molaires sont cylindriques, sans émail dans l’intérieur et séparées entre elles ({g. 116); on en compte huit partout ; chez quelques tatous , une partie de ces denis s’implantent dans l'os intermaxillaire, et peuvent , par conséquent , être considérées comme des incisives ; mais cette anomalie ne change en rien la structure de l’appareil de la mastication , considéré sous le rapport physiologique ; car tou- jours ces animaux manquent de dents sur tout le devant de la bouche. Ils vivent en partie de végétaux et en partie d'insectes et de cadavres.Tous sont originaires des parties chaudes ou tem- pérées de FAmérique. D’après le nombre de leurs dents et de leurs doigts , on les divise en cachicames , apars , encouberts, cabassous , Etc. On a donné le nom de Megatheriun à un édenté de très grande taille, dont la tête ressemble un peu à celle des paresseux, mais dont l’ensemble de l’organisation se rapproche davantage de celle des tatous, et dont les ossemens ont été découverts, à l'état fossile, en Amérique; cet animal, antédiluvien, avait douze pieds de long sur six ou sept de haut. Les CHLAMYPHORES sont des espèces de tatous dont le dos est re- Chlamypho- couvert d’une suite de rangées transversales de pièces écailleuses 7 sans aucun test solide ni devant ni derrière, et formant une sorte de cuirasse qui n’est attachée au corps que le long de l’é- pine dorsale. Ils sont originaires du Chili. Les FOURMILLIERS ( Myrmecophaga) habitent les mêmes Fourmilliers. contrées que les tatous , mais s’en distinguent facilement, car leur corps est velu comme celui de la plupart des mammifères Fig. 119. (1) et leur museau effilé en un long tube cylindrique est ter- miné par une petite bouche entièrement dépourvue de dents (fig. 119). Leurs mà- choires , très longues, s’é- cartent à peine ,et ne peu- vent servir à ces animaux pour saisir ou comprimer leur nourriture; mais ils sont pourvus d’une langue filiforme | d’une longueur extrême, qu’ils peuvent projeter au loin, hors (1) Tète du tamanoir. 12 Qt Oryctéropes. Pangolins,. 384 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. de leur bouche , et qui, étant toujours enduite d’une humeur gluante, leur sert pour s’emparer des fourmis etdes autres insec- tes dont ils vivent. A laide de leurs ongles forts, tranchans et en nombre variable , suivant les espèces, les fourmilliers déchirent les nids des termites , et au moment où ces petits insectes sortent en foule de leur retraite, pour former un rempart et se défen- dre , ils lancent sur eux leur langue visqueuse, et, la retirant subitement, les entrainent dans leur bouche. Dans l’état de repos, ces ongles, qui servent aussi comme des armes de dé- fense, restent toujours à demi reployés en dedans, contre une callosité du poignet, et l’animal ne pose le pied que sur le côté , aussi ses allures sont-elles très lentes. Les fourmilliers ne font qu'un petit à-la-fois , qu’ils ont l'habitude de porter sur le dos; quelques espèces , telles que le tamandua, ont la queue préhensile , et s’en servent pour se suspendre aux branches des arbres sur lesquels ces animaux grimpent; l'espèce la plus grande , appelée tamanoër, n’a point cette faculté; elle a plus de quatre pieds de long et habite les lieux bas et humides. Les ORYCTÉROPES ressemblent beaucoup aux fourmilliers , par leurs formes et leurs mœurs ; mais ils ont la bouche armée de dents mächelières, et les ongles plats. On n’en connaït qu’une espèce qui habite le cap de Bonne-Espérance , et qui y est dési- gnée sous le nom de cochon de terre. Enfinles PANGOLINS(Manis) manquent de dents comme les four- milliers, mais leur système tégumentaire les rapproche un peu des latous , car ils ont tout le dessus du corps, ainsi que les membres et la queue revêtus de grosses é- cailles cor- nées , tran- chantes,im- briquées en quinconce , qui parais- sent formés de poils sou- dés entre eux. Ils sont bas sur jambes; leurs pieds sont tous pourvus de cinq doigts armés d’ongles robustes et crochus ; leurs mouvemens sont lents, et, pour se défendre contre leurs ennemis, ils se roulent en boule et relèvent leurs écailles. Du reste leurs mœurs sont très analogues à celles des fourmilliers; de même que ces derniers, ils vivent de termites ou fourmis blanches qu’ils font sortir de leur habitation, en déchirant la FAMILLE DES MONOTHRÈMES. 385 terre avec leurs ongles , et qu'ils prennent en les colant à leur langue visqueuse et extensible. Les pangolins sont propres à l’ancien continent ; 6n en trouve en Afrique et aux Indes orientales. FAMILLE DES MONOTHREMES. Les monothrèmes présentent, dans leur organisation, des particularités si remarquables, qu’il serait plus naturel d’en former un ordre distinct, que de les regarder comme consti- tuant une simple subdivision de l’ordre des édentés. Les anoma- lies de leur structure sont mème telles, que plusieurs de nos zoologistes les plus habiles , afin de mettre la classification mieux en harmonie avec la nature, divisent la classe des mammifères en deux sous-classes, dont lune comprend tous les mammi- fères ordinaires , et l’autre les monothrèmes et les marsupiaux ; d’autres naturalistes vont encore plus loin, car ils pensent que les animaux dont nous nous occupons ici, ne sont pas de véri- tables mammifères , et devraient former une classe distincte. Leur nom leur vient de la disposition particulière des organes, Fig. 121(1) génito-urinaires ; leur intestin se ter- mine , comme chez les oiseaux, par un cloaque commun, où viennent aboutir les uretères et les conduits f'efférens de l'appareil de la repro- : duction ; il n’y a, par conséquent, qu’une seule ouverture externe pour le passage de l'urine , des autres excrémens , eic. Les uretères s’ou- vrent, dans l’urètre , au-delà de l’ou- verture de la vessie ;les canaux dé- férens y aboutissent également ; l’uté- rus ne se compose que de deux ca- naux (irompes ou cornes) qui s’ou- vrent séparément , et chacun par un double orifice , dans Furètre, qui est très large, et donne dans le cloaque ; enfin il existe , entre les muscles de labdo- men , deux os appelés marsupiaux (#4. 121), qui s’appuient sur (x) Bassin de l’échidné :—c colonne vertébrale ;—i l'os ihaque ;—" 0s marsu- Plaux ;—/f cavité cotyloïde s’articulant avec le fémur. 386 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. la partie antérieure du bassin , et qui nese rencontrent pas chez d’autres mammifères , excepté les marsupiaux , où ils servent à soutenir la poche abdominale , destinée à loger les petits ; chez les monothrèmes, cependant, il n’existe aucun organe de cette nature. Ces animaux ont des mamelles , mais cependant les habi- tans du pays où ils vivent, assurent qu’ils pondent des œufs, fait qu’il serait bien intéressantde soumettre à une investigation scientifique. Le squelette des monothrèmes présente aussi des singularités trés grandes. La disposition des os de l’épaule(fg. 122)ressemble Fig. 122. (1) beaucoup plus à ce qui existe a co d chez les lézards et les oiseaux qu’à ce que l’on voit chez les mammifères : un os en forme d’'Y s’appuie sur l'extrémité an- térieure du sternum , et envoie ses deux branches aux deux omo- plates, de la même manière que la fourchette des oiseaux (4) ; deux pièces, situées au-dessous de cette clavicule furculaire, re- présentent l’os coracoïdien des oiseaux et des lézards (co); enfin l’omoplate elle-même (0), au lieu dese terminer par la fossette des- tinée à loger la tête de l’humérus, se prolonge au-delà ,et vient s’unir directement au sternum (s). Quelques particularités de la tête rappellent aussi un peu ce qui existe chez les oiseaux : les monothrèmes n’ont point de conque auditive ; les uns manquent complètement de dents, et chez ceux qui en sont pourvus, ces organes ont une structure très diffé- rente de celle des dents ordinaires : elles ne sont pas enchâssées dans les mâchoires, mais plutôt appliquées à la surface, et ressemblent à de la corne qui serait encroùtée d’une très petite quantité de phosphate calcaire. Enfin , outre les cinq doigts qui existent à tous les pieds des monothrèmes, les mâles portent à ceux de derrière un ergot , qui est percé d’un canal, lequel communique avec une glande particulière,et paraît servir à transmettre au-dehors une humeur vénéneuse. Ces animaux singuliers, et encore imparfaitement connus, ne (1) Os de l’épaule et sternum de l’ornithorynque : — s sternum ;—e cartilages costaux ; — d clavicule ; — co os coracoïdien; — o omoplate ; — a portion aeromiale de l’omoplate ; — h cavité glénoïdale recevant la tête de l’humérus. FAMILLE DES MONOTHRÈMES. 387 se trouvent qu'à la Nouvelle-Hollande. On en a découvert deux genres , les échidnés et les ornithorynques. Les ÉCHIDNÉS (Echidna) sont moins anomaux que les ornitho- rynques. À l'extérieur ils ressemblent un peu aux hérissons, car tout le dessus de leur corps est couvert d’épines, el lorsqu'ils sont inquiétés ils se ramassent sur eux-mêmes, et cachent leur tête entre leurs jambes , mais sans pouvoir se rouler aussi com- plètement en boule ; du reste ils s’éloignent beaucoup de ces ani- maux , et se rapprochent davantage des fourmilliers ; leur mu- seau allongé , grèle et terminé par une fort petite bouche, con- tient une langue très extensible , dont l'extrémité est garnie de papilles molles , dirigées en arrière ; il n’ont pas de dents, mais leur palais est garni de plusieurs rangées de petites épines diri- gées en arrière; enfin leurs pieds sont courts et armés chacun de cinq ongles très longs, très robustes et propres à creu- ser la terre. Ce sont des animaux timides , stupides et dont les mouvemens sont en général lents, mais qui fouissent avec une rapidité extrême. Le froid les engourdit promp- tement. Les ORNITHORYNQUES (Ornythorynchus ) sont des animaux bien plus singuliers que les échidnés , car leur museau se prolonge en uneespèce de bec corné , très large , aplati, irrégulièrement quadrilatère qui est garni sur les bords de petites lamelles trans- | versales , et qui (Fig. 123 , ORNITHORYNQUE.) a la plus gran- de ressemblan- ce avec le bec d’un canard. Leur corps est allongé, très déprimé et couvert de poils ordinaires; leur queue est aplatie, leurs membres sont extrêmement courts , et leurs doigts palmés ; aux pattes postérieures la membrane qui unit les doigts ne s’étend que jusqu'aux ongles, mais aux pattes antérieures elle les dépassent de beaucoup. À chaque mâchoire, on voit, sur les côtés et en avant, une espèce de plaque cornée, jaunâtre, longue et étroite; plus en arrière se trouve une seconde dent analogue, par sa position, aux molaires, de forme ovalaire, à couronne plate, sans racines, et Échidnés Oruithoryn- ques. 388 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. composée de petits tubes verticaux. La langue ne remplit que la moitié postérieure de la cavité buccale, et se compose de deux portions : une, l’antérieure, étroite, terminée par une pointe obtuse et hérissée de papilles cornées, dirigées en avant; une postérieure plus large, garnie de villosités molles, et portant en avant deux petites pointes charnues. Les ornithorynques , comme on pouvait le prévoir , d’après ce que nous avons dit de la conformation de leurs pattes et de leur queue, sont des animaux aquatiques ; ils habitent les rivières et les marais de l’intérieur de la Nouvelle-Hollande , près du port Jackson. ORDRE DES MARSUPIAUX. Les mammifères onguiculés semblent former deux séries, dans chacune desquelles ces êtres se dégradent en quelque sorte de plus en plus , et conduisent , par des modifications successives et légères du mode d'organisation le plus propre à l'exercice des fonctions de relation , à une structure incompatible avec le dé- veloppement des facultés intellectuelles. L’une de ces séries , en tête de laquelle se place l’homme, se compose, comme nous Vavons vu, des quadrumanes , des carnassiers des rongeurs et des édentés ordinaires; l’autre série vient aussi se terminer dans l’ordre des édentés, par la famille des monothrèmes, mais ne présente ni autant de variété , ni autant de perfection que la première , et se compose des marsupiaux. Ces animaux ressemblent aux monothrèmes par une particu- larité bien importante de leur organisation: c’est la duplicité des ouvertures utérines. Le canal urétro-sexuel, très développé et analogue à celui des oiseaux , communique avec deux tubes la- téraux , en forme d’anse de panier , qui se rendent à l’utérus, et représentent le canal qui , chez les mammifères ordinaires, est simple et débouche au dehors. Cette disposition entraine des anomalies extrême dans le mode de reproduction des marsupiaux ; les petits ne se dévelop- pent pas , comme d'ordinaire , dans la poche utérine , mais sont promptement expulsés au dehors, et naissent dans un état d’imperfection telle qu’on ne peut les comparer qu’à des em- bryons à peine ébauchés. Ce sont de petits corps gélatineux, informes et incapables de mouvement, dont les divers organes ne sont pas encore distincts , et dont l’existence serait impossi- ORDRE DES MARSUPIAUX. 389 ble , si la nature n’avait assuré leur conservation par des moyens particuliers Au lieu de jouir, aussitôt leur sortie du sein de la mère , d’une vie indépendante, ces petits êtres sont déposés sur ses mamelles, et se greffent en quelque sorte à la tétine ; pendant assez long-temps ils y restent suspendus comme des grains de raisin , et afin de les protéger pendant cette période de leur dé- veloppement, leur mère est en général pourvue d’une espèce de poche profonde, qui est formée par un prolongement de la peau du ventre, au-devant des mamelles, et qui leur sert de demeure. C’est de lexistence de cette poche que les marsupiaux, appelés aussi animaux à bourse, tirent leur nom. Les jeunes marsupiaux achèvent leur développement dans l’intérieur de cette poche, suspendus chacun à une tétine qui pénètre fort avant dans leur bouche , et qui verse , dans leur go- sier , le lait dont l’expulsion est déterminée par la contraction des muscles entre lesquels se trouvent les glandes mammaires. Arrivés à un certain âge, ils se détachent, mais ils continuent encore à téter, et même, lorsqu'ils sont sortis de la poche qui, jusqu'alors, leur avait servi de demeure, ils y cherchent encore, pendant long-temps, un refuge contre le froid ou les dangers dont ils sont menacés. Chez quelques marsupiaux , cette poche , si utile aux jeunes, n'existe pas, et n’est représentée que par un simple repli de la peau; les petits restent alors suspendus sous le ventre jusqu’à ce qu'ils puissent marcher, et pendant quelque temps la mère les porte sur son dos. Mais chez les marsupiaux qui méritent le moins ce nom, comme chez ceux où la poche ventrale est la mieux formée , et chezles mâles aussi bien que chez les femelles, ilexiste toujours , entre les muscles de l'abdomen, deux tiges os- seuses qui naissent de l’arcade du pubis, et qui servent à sou- tenir toute la région mammaire (voy. la fig. 121, p. 385 ); ces os ont reçu, pour cette raison, le nom d’os marsupiaux ; nous avons déjà signalé leur existence chez les monothrèmes, et ils sont caractéristiques de toute la série de mammifères didelphiens. Les marsupiaux diffèrent beaucoup entre eux sous le rapport des mœurs et de la structure des dents et des pieds. Les uns ayant le pouce plus ou moins complètement opposable aux autres doigts, et étant pourvus de dents incisives, de canines et de molaires tu- berculeuses plutôt qu'hérissées de pointes (fig. 125 et 126), repré- sentent en quelque sorte , dans la série des didelphiens, la divi- sion des quadrumanes parmi les monodelphes; d’autres , par leur système dentaire, ressemblent aux insectivores à longues canines, et il en est qui , par le défaut de dents canines, par leurs longues incisives et leurs molaires à colines transversales (4g. 127), correspondent aux rongeurs; enfin nous avons vu que les mono- 390 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. thrèmes , qui ont, avec les animaux dont nous nous occupons ici, des liens étroits, appartiennent, par la disposition de leur système dentaire, à l’ondre des édentés. Il en résulte que , parmi les didelphiens , il existe une série de groupes comparables à ceux dont se compose la division des mammifères onguicu- lés monodelphiens, et que ces animaux semblent, comme nous l’avons déjà dit, former deux séries en quelque sorte parallèles. En prenant pour base de la classification de ces animaux , les modifications de leur système dentaire et de leurs pattes, on les a: divisés en six petites tribus, reconnaissables aux caractères suivans : Mansupraux INSECTIVORES , ayant à chaque mâchoire de longues ca. mansorraux Pie » plusieurs petites incisives er des molaires hérissées de pointes. ie | Six petites incisives en haut; un pouce bien dis Érmuuanee. Des cani-| tinct à tous les pieds. nes ou des Deux fausses mo-| grandes in-| Pattes pos- laires , à |cisives en| térieures et } PoroRoos. la mâchoire( haut, sui- | queue très moins à la mâchoi- | dentsincisi- de à arte : . ( supérieure, | vies dequel- } longues. re inférieure; deux } ves à la mâ-{ À 4 entre lesin-f ques peti- a a ee aa] eroimde| vont de) clinées en avant , à la mâchoire infe- rieure, et les molai- res plus ou moins tuberculeuses. Mansurraux FRu- GIVORES , ayant les canines rudimen- taires où nulles au Plusieurs molaires. pouce aux | queue ; pat- pattes pos- | tes courtes. terieures. Point de canines ni de fausses \ molaires, mais un grand espace vide entre les incisives et les mächelières. Deux dents incisives longues et inclinées à chaque màchoire. KANÇGUROO3. PHASCOLOMES. TRIBU DES MARSUPIAUX INSECTIVORES. Les marsupiaux qui composent ce groupe correspondent , en quelque sorte, aux carnassiers insectivores , surtout à ceux qui ont, comme les taupes et les tenrecs , de longues canines ; leurs incisives sont très petites et au nombre de huit ou dix en haut et de six ou de huiten bas; leurs canines sont fortes et leurs molaires nombreuses (douze ou quatorze à chaque mâchoire). Comme leur nom l'indique , ils se nourrissent principalement d'insectes. Les principaux genres qui appartiennent à cette tribu sont les sariques , les péramiles et les dasyures. TRIBU DES MARSUPIAUX INSECTIVORES. 391 Les SARIGUES (Didelphis) sont caractérisées par l'existence de dix incisives en haut , de huit en bas , et de quatorze molaires à chaque mâchoi- re , Ce qui, avec les quatre cani- nes , fait en tout cinquante dents, nombre qui est plus considéra- ble que chez au- cun autre mam- mifère quadru- pède.Leurs pieds de derrière sont pourvus d’un pouce parfaite- ment opposable aux autres doigts et constituent une main pos- térieure sembla- ble à celle des siges , disposi- tion qui leur à fait donner le (Fig. 124, LA SARIGUE A OREILLES BICOLORES.) NOM de pedima- nes. Ce pouce manque d’ongle, mais ceux de tous les autres doigts étant crochus , ces animaux s’en servent pour fouir et pour grimper aux arbres; leur queue prenante et en partie nue , est également propre à ce dernier usage : aussi les sarigues vivent-elles princi- palement sur les arbres , où elles nichent , et poursuivent les in- sectes et les oiseaux, dont elles font leur principale nourrilure, bien qu’elles mangent aussi des fruits. La physionomie de ces animaux est tout-à-fait particulière : leur bouche fendue jusqu’au-delà des yeux , leurs oreilles nues et violacées , leur queue écailleuse, leur poil terne, et la peau d’un rose livide , qui se montre autour de la bouche , des yeux et aux pieds , leur donnent un aspect des plus désagréables , et il faut ajouter encore qu’ils exhalent une odeur extrémement fétide. Ils sont nocturnes, et, lorsqu'ils sont à terre, leur démarche est très lente ; pendant le jour, ils dorment dans des trous , roulés sureux-mêmes comme des chiens. Les sarigues sont propres à l'Amérique : aussi ont-elles été connues bien avant les autres marsupiaux, et leur singulier Sarigues. Thylacines. Dasyures. Pérameles. 399 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. mode de reproduction les a rendus célèbres. On les rencontre depuis la Plata jusqu’à la Virginie, et on en connait plusieurs espèces. Les unes ont une poche profonde , où sont placées leurs mamelles, et où elles peuvent renfermer leurs petits. De ce nombre est la sarigue à oreiiles bicolores ou oppussum äes Anglo- Américains (fig. 121), qui estde la taille de nos chats, et qui habite toute l'Amérique. Ses pelits , quelquefois au nombre de seize , ne pèsent ,en naissant , qu'environ un grain , et adhèrent, pen- dant cinquante jours, à la tétine : ils prennent alors la taille d’une souris ; mais ils continuent à faire leur résidence dans la poche abdominale de leur mère jusqu’à ce qu’ils aient à-peu-près la taille d’un rat. Le crabier Ou grande sarique de Cayenne, qui vit sur les bords de la mer et se nourrit principalement de crabes, appartient aussi à cette subdivision. D’autres sarigues n’ont pas de poche, mais seulement , de chaque côté du ventre, un repli de la peau, qui en est le ves- tige. Leurs mamelles sont à nu, et le développement des petits se fait plus rapidement que chez les précédentes. Lorsque les jeunes sont assez forts pour se détacher de la tétine, la mère les porte sur son dos avec leur queue , enroulée autour de la sienne. Le cayopollin, le grison, la marmose , etc. , présen- tent ce mode d'organisation. Les THYLACINES sont des animaux très voisins des sarigues, mais qui habitent la Nouvelle-Hollande , et qui ont les pieds de derrière sans pouce , la queue velue et non prenante, et deux incisives de moins à chaque mâchoire. Les DASYURES ressemblent aux précédens par la disposition de leur queue et par l’état rudimentaire de leurs pouces posté- rieurs : ils n’ont aussi que huit incisives en haut et six en bas; mais le nombre de leurs dents molaires n’est que de douze à chaque mâchoire, au lieu de quatorze. Ils vivent , à la Nouvelle- Hollande , se nourrissent d'insectes et de cadavres, etne grim- peni point sur les arbres. Les PÉRAMÈLES ont seulement deux incisives inférieures de moins que les sarigues. Le pouce de toutes les pattes est rudi- mentaire , et la queue de ces animaux est non prenante. De même que les précédens , ils habitent l’Australasie. TRIBU DES PHALANGERS. TRIBU DES PHALANGERS. Le système dentaire des phalangers rappelle un peu celui des musaraignes. De même que tous les marsupiaux , dont il nous Fig. 125. reste à parler, ils ont à la mâchoire inférieure deux incisives très lon- gues et très inclinées (#g. 125). A la mâchoire supérieure, six petites in cisives répondent aux deux d'en bas et sont en général suivies de canines longues et pointues, tandis qu’en bas, ces dernières, lorsqu'elles existent, sont si petites, que sou vent la geneive les cache ; enfin les molaires sont très nombreuses Fig. 126. et garnies en dessus de pointes triangulaires ou de tubercules (#g. 126), dont la disposition a de ee) l’analogie avec ce que l’on voit chez les guenons et les sajous. La conformation des membres est également caractéristique chez ces animaux : ils ont le pouce grand, opposable et tellement séparé des autres doigts, qu’il a l'air d’être dirigé en arrière , et les deux doigts qui le suivent aux pieds de derrière sont réunis par la peau jusqu’à la dernière phalange. Ce sont des animaux qui, par leur forme générale , ressemblent un peu aux écureuils et qui vivent aussi sur les arbres. Leur régime consiste principale- ment en fruits; mais ils mangent aussi des insectes. Leur poche abdominale est très développée. Tous les phalängers habitent les îles de l'Asie et de PAustra- lasie ; on les distingue en pAalangers proprement dits, et phalan- gers volans. Les PHALANGERS PROPREMENT DITS (Balantia) n’ont point de prolongement cutané entre les pattes et ont la queue toujours prenante. Les PHALANGERS VOLANS (Petaurus) ont la peau des flancs plus ou moins étendue entre les membres de façon à former une es- pèce de parachute comme chez les polatouches. TRIBU DES POTOROOS. Dans la petite division des POTOROOS (X{ypsiprymnus), le sys- tème dentaire se rapproche beaucoup de celui des phalangers : Phalangers proprement dits. Phalangers volans. 394 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. les canines manquent à la mâchoire inférieure, et les deux pre- miers doigts de derrière sont réunis comme chez ces animaux, dont les potoroosse distinguent surtout par la disposition de leurs pattes postérieures qui sont beaucoup plus grandes, à proportion que celles de devant, et par leur longue et forte queue, dont ils se servent pour se soutenir, lorsqu'ils marchent, comme le font les gerboises et les kanguroos, sur leur train de derrière. Ils sont fru- givores. On n’en connait qu’une espèce appelée, par la plupart des auteurs, le kanguroo-rat, qui habite la Nouvelle-Hollande. TRIBU DES KANGUROOS. Les KANGUROOS (Halmaturus) présentent les mêmes caractères que les potoroos, si ce n’est que leurs canines supérieures man- quent , et que leurs incisives moyennes ne dépassent pas les au- tres. L’inégalité de leurs jambes est encore plus grande, en sorte qu’ils ne marchent à quatre pattes qu'avec peine , maisilsse tien- nent ordinairement sur leur train de derrière et sur leur queue comme sur un trépied, et sautent ainsi avec beaucoup de vi- gueur. Les dents molaires de ces animaux présentent des collines transversales qui leur donnent quelque ressemblance avec celles des ruminans, et , en effet , les kanguroos se nourrissent d’her- bes comme ces derniers. La disposition de l’ongle du doigt mé- dian des pattes postérieures , les rapproche aussi un peu des mammifères ongulés , car il est très gros et presque en forme de sabot. Les kanguroos habitent la Nouvelle-Hollande et les îles voi- sines. Une espèce, appelée le £anguroo-geant , a jusqu’à six pieds de haut. TRIBU DES KOALA. Ces marsupiaux se rapprochent des potoroos , par la disposi- tion de leurs dents, mais diffèrent de tous les précédens par leur corps trapu , leurs jambes courtes, et par l'absence com- plète de queue ; leurs doigts de devant , au nombre de cinq, se partagent en deux groupes pour saisir; ceux de derrière sont disposés à-peu-près comme dans les deux groupes précédens. On ne connait qu’une espèce de koala , qui ressemble un peu à un petit ours et qui se trouve à la Nouvelle-Hollande. = +7 ORDRE DES PACHYDERMES. 395 » TRIBU DES PHASCOLOMES. Les PHASCOLOMES (PAascolomys) ressemblent en tout aux ron- Fig. 127. geurs, si ce n’est par les organes de la reproduction, qui sont parfaite- ment semblables à ceux des autres marsupiaux. Ce sont des animaux lourds, à tête grosse et plate, à jam- bes courtes , et sans queue , dont les mouvemens sont d’une excessive lenteur ; ils se nourrissent d'herbes, et vivent dans des terriers , à l’ile de King, au sud de la Nouvelle-Hollande. On n’en connait qu'une espèce. ORDRE DES PACHYDERMES. Chez les mammifères , dont nous nous sommes occupés jus- qu’ici,nous avons presque toujours vu les membres antérieurs conformés de manière à constituer des organes plus ou moins Fig.128.(1) parfaits de préhension et de toucher, lors même qu'ils sont aussi des instrumens indispensables de locomotion; en effet, les doigts peuvent se ployer plus ou moins complètement autour des objets pour les saisir et les palper d'autant mieux que l’ongle, dont ils sont armés, laisse à mdécouvertleur extrémité , dans une étendue plus considérable. Chez les animaux dont nous allons maintenant faire lhistoire , il en est tout autre- ment. Les doigts ne peuvent plus se fléchir pour saisir les objets, et leurextrémité estentièrement enveloppée dans un grand ongle ou sabot, qui y émousse complètement le tact. On donne le nom de MAMMIFÈRES ONGULÉS à ces derniers, par opposition à la dénomination d’onguiculés , imposée aux premiers , pOur rap peler le peu de développement de leurs ongles. (1) Pied d’un cheval , — # première rangée des os du tarse ; — Pdeuxième rangée de ces os ;—m métatarse ou canon ;—s stylet ou doigt latéral rudimen- taire;—pr phalange ou paturon ;—p? phalangine ou couronne ; — p° phalangette enveloppée dans le sabot. 396 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. Cette disposition des membres , caractéristique des mam- mifères ongulés, influe , non-seulement sur l'adresse de ces ani- maux , et sur la délicatesse de leur toucher, mais aussi sur leur régime ; elle ne leur permet point de saisir une proie vivante , et les rend nécessairement herbivores; aussi tous les animaux à sabots ont-ils les dents mâchelières, à surface large, irrégulière , et propre à broyer les alimens , et le canal alimentaire d’une longueur et d’une capacité considérables. Les membres antérieurs ne servent que de soutien à ces ani- maux et ne devant se mouvoir que dans la direction de la lon- gueur du corps, il n’y a jamais de clavicule , os dont les usages sont, comme nous l’avons vu, de servir d’arc-boutant à l'épaule lorsque le brasse porte en dedans, vers la poitrine. La division de l’extrémité des membres en doigts longs et nombreux, qui est si utile lorsque ces organes jouissent d’assez de flexibilité pour saisir les corps, perd ici toute son importance; car les pieds des ongulés n’en sont pas moins des supports soli- des, qu’ils se terminent par un seul doigt ou par cinq. Or, nous avons déjà posé en principe , que la conformation d’un organe était toujours d'autant plus constante , que le rôle qu’il rem- plissait était plus important, tandis que, devenu inutile, sa forme varie beaucoup avant qu’il ne disparaisse complètement. Il en résulte que, chez ces animaux nous ne devons pas nous attendre à trouver la même fixité dans le nombre et la disposi- tion des doigts que chez ceux où l’organe du toucher est plus parfait, et, effectivement, nous rencontrons, à cet égard, les différences les plus grandes entre des genres , du reste très voisins. Les mammifères à sabots , ainsi que nous l’avons déjà vu, for- ment deux classes naturelles, les pachydermes et les ruminans. Les PACHYDERMES sont caractérisés par la manière dont ils se nourrissent ; ils mâchent leurs alimens avant que de les avaler, et ne ruminent pas. La plupart de ces animaux sont remarquables par l'épaisseur et la dureté de leur peau, et c’est de là qu’ils tirent leur nom (1). Ils vivent réunis en troupe ou en famille, et lorsqu'ils sont menacés de quelque danger, ils peuvent courir avec velo- cité; mais si l’on en excepte les chevaux, ce ne sont pas des coureurs. Tous fournissent une chair très nourrissante , et des peaux applicables aux besoins de l’industrie , et c’est dans cette classe que nous trouvons les animaux les plus utiles, comme bêtes de somme et de trait. Du reste ils diffèrent beaucoup entre eux, par leur structure ainsi que par leurs mœurs, et ils forment (1) De rays, épais , et d'eoua , peau. FAMILLE DES PROBOSCIDIENS. 393 trois familles naturelles , bien distinctes , qu’on peut reconnaï- tre aux caractères suivans. Lu - ‘ . Uñe trompe prébhensile et des défenses. } - d = “ ] . d PACHYDERMES PROBOSCIDIEXS. Cinq doigts à tous les pieds. { Doigts au nombre de CLASSE quatre, de trois ou de ; PaCHYDERMES ORDINAIRES, DES Point de trompe } deux. | 2CHxDERMES | préhensile jamais.Cinq Un seul doigt appa- doigts aux pieds. rent , ou du moins un seul sabot à chaque pied. PACHYDERMES SOLIPEDRS, FAMILLE DES PROBOSCIDIENS. Fig. 129, ÉLÉPHANT DES INDES. Le trait le plus remarquable de l’organisation de ces animaux, est la conformation singulière de leur nez, qui s’allonge en forme de tube , et constitue une trompe cylindrique dont ils se servent, comme organe de préhension, avec presque autant d'adresse que la main peut en donner aux singes ; C’est un dou- ble tuyau qui se continue avec les fosses nasales, et qui est revêtu intérieurement d’une membrane fibro-tendineuse , au- tour de laquelle se fixent des milliers de petits muscles diverse- ment entrelacés , et disposés de facon à allonger la trompe , à la raccourcir , et à la courber dans tous les sens; à son extrémité supérieure il existe une valvule cartilagineuse et élastique, qui, à moins d’être relevée parla contraction volontaire deses muscles, tercepte la communication entre les fosses nasales etle dehors; 26 398 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. enfin , à son extrémité libre, se trouve un appendice en forme de doigt , également mobile. Cette longue trompe sert à l’animaï pour saisir tout ce qu’il veut porter à sa bouche, pour cueillir l’herbe et les feuilles dont il se nourrit, et pour pomper la bois- son qu’il lance ensuite dans son gosier : sans elle, la confor- mation générale de son corps rendrait son existence presque impossible. En effet, pour qu’un animal puisse chercher com- modément à terre sa nourriture, il faut , lorsqu'il n’a pas d’or- ganes spéciaux de préhension, que la longueur de son cou soit proportionnée à celle de ses jambes , de telle sorte qu’en abaissant la tête, il puisse, sans les fléchir, toucher le sol avec ses lèvres ; s’il est haut sur pattes, il lui faut donc un long cou , et cette disposition est à son tour incompatible avec une tête très grosse et très lourde, dont le poids devient d’autant plus difficile à soutenir, qu’il est placé à l'extrémité d’un cou plus long : aussi observe-t-on que, chez tous les animaux dont les pattes sont allongées et dont la bouche sert à la préhension des alimens, le cou est long et la tête petite , tandis que, chez ceux dont la tête est forte et lourde, ou destinée à exécuter des mouvemens très énergiques , le cou est plus ou moins court. Or, les proboscidiens sont de très grands animaux, dont la tête est fort éloignée du sol et d’un volume en rapport avec les énormes défenses dont la mâchoire supérieure est armée; son poids est par conséquent très considérable, et le cou qui le supporte très court: s’ils étaient dépourvus d’une trompe, il aurait fallu donner par conséquent au reste de leur organisation un tout autre plan. Le volume du corps de ces animaux nécessite aussi une grande solidité dans la structure de leurs membres: aussi leurs doigts, au nombre de cinq partout, sont-ils très courts , et la peau calleuse qui entoure le pied les encroûte tellement, qu'ils n’ap- paraissent au dehors que par les ongles attachés au bord de l'espèce de sabot ainsi formé. La tête de ces animaux est pourvue, comme nous l'avons déjà dit, de puissantes défenses: ce sont les incisives de la mâchoire supérieure , qui prennent un accroissement extrême , et se recourbent en bas et en avant; les canines manquent, et à la mâchoire inférieure , il n’y a que des molaires. On ne connait dans la nature vivante qu’un seul genre de proboscidiens , celui des é/ephans ; mais on trouve enfouis dans la terre les débris de quelques autres animaux, qui, depuis long-temps , ont disparu de la surface du globe, et qui, avec des différences dans la structure des denis mâchelières , pré- sentaient le même mode général d'organisation , et qui, par conséquent, doivent prendre place dans la famille dont nous faisons ici l’histoire: ce sont les mastodontes. FAMILLE DES PROBOSCIDIENS. 399 Le principal caractère zoologique des ÉLÉPHANS consiste dans leurs dents molaires, dont le corps se compose d’un certain nombre de lames de substance osseuse, enveloppées d’émail, et liées ensemble par de la substance corticale , ainsi que nous l'avons déjà vu chez les cabiens, et plusieurs autres rongeurs ; mais ce n’est pas leur structure seulement qui rend ces dents remarquables, la manière dont elles se succèdent est égale- ment digne d'attention. Chez lhomme et chez la plupart des mammifères, ©’est verticalement que les dents de rempla- cement succèdent aux dents de lait; mais , chez l'éléphant, c’est d’arrière en avant, de façon qu’à mesure qu’une mâche- lière s’use, elle est en même temps poussée en avant par celle qui vient après. Il en résulte que le même animal à tantôt une, tantôt deux mächelières de chaque côté, selon les époques, et on assure que ce changement s’opère jusqu’à huit fois. Les défenses ne se renouvellent qu’une fois. Ces animaux sont les plus grands des mammifères terrestres : leurs proportions sont lourdes, leur corps épais et leur dé- marche pesante; mais leur physionomie est imposante , et la saillie considérable de leur front , due au développement des si- nus frontaux, donne à leur tête un cachet d'intelligence, qui a fait beaucoup exagérer l'étendue de leurs facultés. Leur trompe leur donne beaucoup d’adresse; le trait caractéristique de leur esprit est la prudence , et ils se laissent facilement apprivoiser ; mais ils ne font réellement pas des combinaisons intellectuelles plus élevées que le chien ou peut-être même le cheval, et si on peut leur apprendre à faire des exercices plus variés, c’est que le mé- canisme de leurs organes y est plus favorable. Leur naturel est en général très doux: ils vivent en troupes sous la conduite des vieux mâles et ne se nourrissent que de végétaux.On a prétendu qu’ils ne se couchaient pas ; mais c’est une erreur : ils dorment sur le côté comme la plupart des autres quadrupèdes. On connaït actuellement deux espèces d’éléphans, qui ha- bitent l’une et lautre la zone torride de l’ancien continent , et qui ont la peau rude et presque entièrement dépourvue de poils. L’une est propre à l'Afrique , l’autre aux Indes. L’elephant des Indes (fig. 129), qui habite depuis l’Indus jusqu’à la mer Orientale, ainsi que dans les grandes îles du midi de l'Asie, se reconnait à sa tête oblongue, à son front concave, à ses oreilles médiocres, à ses mâchelières marquées de lignes trans- versales ondoyantes et à ses pieds de derrière pourvus de quatre ongle . Sa taille , mesurée au garot , est communément de dix pieds et en atteint quelquefois quinze. Sa couleur est ordinaire- ment d’un gris noirâtre ; mais il paraît que cette teinte dépend principalement de la terre dont ces animaux se couvrent, et qui 26. Genre éléphans. des Éléphans d'Afrique 400 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. s'attache à leur peau; car, lorsqu'ils sont restés quelque temps dars l’eau, et que leur peau a été débarrassée des matières qui la salissaient , elle est couleur de chair avec des taches rondes et noirâtres. La force prodigieuse de l'éléphant , sa marche qui, quoique lourde, est assez rapide pour n'être que difficilement dépassée par le cheval , et sa docilité, en font un animal très utile à l'homme , et, depuis les temps historiques les plus re- culés , nous le voyons réduit à l’état de domesticité , mais d’une manière moins complète que le cheval, le chien , le bœuf, etc. ; car ce n’est pas la race entière qui a été soumise à notre empire, mais seulement des individus. En effet les éléphans ne se repro- duisent que rarement en captivité , el c’est en apprivoisant des individus sauvages, nés dans les forêts, que lon se procure tous ceux dont on a besoin. Tantôt c’est en attirant dans des pièges, à l’aide d’éléphans femelles, dressés à cet usage, un éléphant solitaire ; d’autres fois, en entourant toute une troupe et en la poussant , à force de bruit, dans une enceinte fermée de fossés et de fortes pallissades, que les Indiens capturent ces animaux. On se sert aussi d’éléphans déjà apprivoisés,pour dresser les éléphans sauvages , et on estime que six mois suffisent d’ordi- naire pour l’éducation d’un de ces animaux. La durée de la gestation est de vingt mois; le petit, en naïis- sant , a environ trois pieds de haut : il tète avec sa bouche et non avec sa trompe, comme on l’a dit ; il grandit lentement et ne parait arriver au terme de sa croissance qu’à l’âge de dix-huit à vingi-quatre ans. La durée de la vie de ces animaux est très longue : elle paraît être de près de deux siècles. Les éléphans domestiques font sans peine de vingt à vingt-cinq lieues par jour, et les plus forts portent jusqu’à deux milliers. Chaque animal adulte consomme par jour environ cent livres d’herbe ou de foin et la valeur de douze à quinze seaux d’eau. L’elephant d Afrique, facile à distinguer de celui des Indes par sa tête ronde , son front convexe , les grandes oreilles qui lui re- couvrent toute l’épaule, et les losanges tracées sur la couronne de ses mächelières, est répandu depuis le Sénégal et le Niger jus- qu’au cap de Bonne-Espérance:autrefoisils’étendait plusau nord, dans les plaines voisines de l'Atlas , ‘et il paraît que les anciens Carthaginois le domptaient et l’'employaient à la guerre, comme le font encore de nos jours les Hindous pour l'espèce asiatique. L’ivoire , dont on fait un si granä usage en tabletterie, n’est autre chose que les défenses de l’éléphant : c’est une matière osseuse remarquable par sa dureté, la finesse de son grain , sa blancheur et le degré de poli dont elle est susceptible. Une par- ticularité de structure la rend facile à reconnaitre. Les défenses d’éléphans, mais non celles des autres animaux, présentent FAMILLE DES PROBOSCIDIENS. 401 sur leur coupe transversale , des stries allant en arc de cercle du centre vers la circonférence et formant par leur croisement des losanges qui ên occupent toute la surface. L’éléphant des Indes n'en porle que d'assez courtes ; mais l’espèce africaine en donne qui ont quelquefois plus de huit pieds de long : aussi est- ce principalement d'Afrique , que lon tire l’ivoire employé dans l'industrie. La France en importe ordinairement de cinquante à soixante mille kilogrammes par an. Les deux espèces d’éléphans, dont nous venons de parler, sont comme on a pu le voir, d'après la nature de leurs tégumens, des animaux destinés à vivre dans les climats chauds; mais jadis il existait une troisième espèce, qui habitait les pays les plus froids. On trouve dans tout le nord de l'Asie une quantité immense d’ossemens d’un animal inconnu aujourd’hui : ses dé- fenses sont si communes et si bien conservées , [que , dans quel- ques localités, on les emploie aux mêmes usages que livoire frais,etqu’elles font un article de commerce assez important pour que les czars aient voulu autrefois s’en réserver le monopole.Pour expliquer l'abondance de ces grands débris, les habitans de la Si- bérie les disent appartenir à un grand animal souterrain ,qui ne peut voir impunément la lumière, et qu’ils nomment Mammouth, du mot 7amma , qui, dans quelque idiome tartare , signifie la terre ; mais l'étude de ces ossemens montre qu’ils ont dû ap- partenir à une espèce d’éléphant , détruite avant les temps historiques , et une découverte bien singulière a complété l’his- toire de cetanimal antédiluvien, et a montré qu’il avait été pro- bablement destiné par la nature à vivre dans ces climais glacés. En 1799, un pêcheur tongouse remarqua , sur les bords de la mer Glaciale , près de l'embouchure de la Lena , au milieu des glacons , un bloc informe qu’il ne put reconnaitre. L'année d’après, il s’apercut que cette masse était un peu plus dégagée ; mais il ne put encore en deviner la nature. Vers la fin de l’été suivant , il y vit à nu une des défenses et tout le flanc d’un mon- strueux animal; enfin la cinquième année, les glaces ayant fondu plus vite que de coutume , cette masse énorme vint échouer. Le pêcheur en enleva les défenses et les vendit pour une valeur de 50 roubles ; on fit en même temps un dessin grossier de l'animal, et les Iakoutes du voisinage en dépécèrent les chairs, pour nourrir leurs chiens, Des bêtes féroces vinrent aussi s’en repaitre; mais, deux ans après , lorsqu'un natura- liste , M. Adams , se rendit sur les lieux , l'animal, quoique fort mutilé , conservait encore des débris de chair et de peau, cou- verte de crins noirs, ayant jusqu'à quinze pouces de long et d’une espèce de laine rougeàtre, si abondante que ce qui en res- lait ne put être transporté que difficilement par dix hommes. Mammouth. 402 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. On connaît encore d’autres exemples de mammouths, conser- vés si bien dans les glaces, que leurs chairs n'étaient pas corrom- pues et que les poils adhéraient à la peau. Cette espèce d’élé- phant a cependant disparu de la surface de la terre depuis les dernières révolutions qui en ont bouleversé la surface. Les ossemens de l'éléphant fossile , qui diffèrent très notable- ment de ceux des éléphans vivans , se rencontrent enfouis dans la terre, non-seulement dans la Sibérie et tout le nord de l’ancien monde , mais rique septentrionale , aussi en France , en Italie et dans lAmé- depuis le Mexique jusque par delà le cercle polaire : il paraîtrait même qu’on en a découvert dans des cavernes de ia Nouvelle-Hollande , pays dont les animaux actuels diffèrent tant de ceux des autres parties du monde. Des débris fossiles d’un autre animal gigantesque, que l’on trouve dans les deux hémisphères, mais surtouten Amérique, et qui ont été d’abord confondus avec ceux du mammouth ou élé- phanit fossile, appartiennent à un genre voisin des éléphans, et qui Genre mas- à été entièrement détruit. M. Cuvier, à qui l’on doit de si beaux none travaux sur la zoologie antédiluvienne , a donné à ces animaux perdus le nom de MASTODONTES , à cause des grosses pointes co- niques , dont la couronne de leurs dents molaires est hérissée. FAMILLE DES PACHYDERMES ORDINAIRES. Les pachydermes de cette division se reconnaissent au nombre des doigts, qui est de quatre, de trois ou de deux : ils se rappro- Fig. 130. (1) b us | : a EF ER À | d e [ -——V (1) Os du pied du cochon : mctacarpe ;—e doigt interne chent à plusieurs égards des ruminans. Ceux chez lesquels les doigts sont en nom- bre pair ont le pied en quelque sorte four- chu. Leur estomac présente une certaine complication , qu'on ne rencontre pas chez les proboscidiens et les solipèdes, et leur squelette offre des particularités, qui se rencontrent aussi dans l’ordre des ru- minans. Les principaux genres dont ce groupe se compose sont les kippopotames , les cochons , les rhinoceros , les damans et les tapirs. Les deux premiers se distin- guent des derniers par leurs doigts en nombre pair, et leur pied, en quelque: a cubitus ; — à radius ; — c os du tarse; — d os du ; — f doigt externe; —g, k doigts médians. FAMILLE DES PACHIDERMES ORDINAIRES. 403 sorte fourehu , tandis que , chez les rhinocéros, les damans et les tapirs, les sabots des doigts médians ne se touchent pas par une surface aplatie, et ne ressemblent pas à ceux des animaux à pieds fourchus. Les HIPPOPOTAMES (/g. 131) ont pour caractères zoologiques quatre doigts presque égaux et bornés par de petits sabots à tous Fig.131. les pieds et un appareil dentaire composé de quatre incisives à chaque les'inférieures 16n- gues et couchées en avant, de ca- nines très gros- ses, qui s'usent lune contre l’au- ire et dont l’infé- rieure est recourbée en haut, enfin de six mâchelières partout, lesquelles sont précédées en haut d’une petite fausse molaire rudimentaire et isolée. Ce sont des animaux remarquables par leur grandeur, leur corps massif, leur tête énorme et terminée par un large museau renflé , leurs jambes très courtes et très grosses , leur ventre trai- nant jusqu’à terre , et leur peau nue et si épaisse , que les balles ordinaires s’aplatissent en la frappant. Leurs mœurs sont du reste en accord avec leurs formes disgracieuses, car ils sont stupides et féroces; ils vivent continuellement dans la fange, se nourrissent de jones, de racines, de riz etautres substances végétales, et leur estomac est divisé en plusieurs poches : ils vivent en troupes sur Îles bords des rivières de lintérieur de l'Afrique. Au moindre bruit ces animaux plongent dans l’eau, et ils savent marcher sur le fond avec plus de vitesse qu'ils ne le feraient sur un terrain sec ; car ils sont très gros , et l’eau sou- tient un peu le poids énorme de leur corps: ils nagent aussi très bien. Leur nom de chevaux de rivière paraît venir des lieux qu’ils habitent, et de leur voix, qui, dit-on, ressemble au hen- nissement du cheval. On ne connaît qu’une espèce vivante d’hippopotame; mais on trouve, dans les terrains meubles des diverses parties de l’Europe, les débris fossiles de deux ou trois autres , dont une ressemble beaucoup à celle d'Afrique. Hippopota- mes. mâchoire , dont : Cochons. Cochons pro- prement dits. 404 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. Les COCHONS forment le type d’un groupe qui se compose des cochons proprement dits , des phacochæres et des pécaris, et Fig. 132. qui se distingue par lexistence de pieds four- chus, dont les deux doigts mitoyens seulement, gar- nis de forts sabots, tou- chent à terre et servent à la locomotion (voyez fig. 131), et par le boutoir fort et mobile , qui ter- mine leur museau et qui leur sert à fouiller la terre , pour y chercher leur nourriture (fig. 132). Cet organe consiste en un prolongement mobile du museau, soutenu par un os particulier, qui s’appuie inférieurement sur le devant de la mâchoire supérieure (sur les os intermaxillaires), et qui est mis en mouvement par deux gros muscles situés de chaque côté de la face (/ig. 132). Un tissu fibro-cartilagineux re- couvre cet os et se termine en avant par une surface circulaire et inclinée en bas, qui est recouverte d’une peau épaisse et nue. Au bord supérieur &e cette extrémité tronquée du museau, on remarque un bourrelet épais et calleux, à l’aide duquel Panimal ouvre la terre, tandis que le dessus du museau jusqu’au nez lui sert comme le ferait un soc de charrue, pour la diviser. Le genre des COCHONS PROPREMENT DITS se reconnaît facile- ment à la disposition des dents. Les canines sortent de la Fig. 133. bouche et se recourbent lune et l’autre vers le haut, de facon à constituer des défen- ses plus ou moins puissantes. Les incisives sont au nombre de quatre ou de six à la mâ- choire supérieure et de six à inférieure, oùelles sont cou- chées en avant; enfin les mäâchelières, au nombre de vingt-quatre ou de vingt- huit , sont à couronne tuberculeuse au fond de la bouche ; mais en avant elles sont plus ou moins comprimées et tranchantes, disposition qui rend ces animaux moins essentiellement herbi- vores que les autres pachydermes. Ils ont la tête grosse, pyra- midale , allongée et tronquée obliquement à son extrémité , les SR FAMILLE DES PACHYDERMES ORDINAIRES. 405 yeux petits, la peau dure, épaisse et couverte de longs poils raides et grassiers, connus sous le nom de sotes, la queue courte et grèle, les jambes basses et minces; enfin ils ont à chaque pied quatre doigts, dont les deux latéraux trop courts pour servir à la locomotion. Ces pachydermes ont tous les allures lourdes et disgracieuses que chacun connait à notre cochon domestique. Leur intelligence est fort bornée , et ils sont peu susceptibles d'éducation ; néanmoins ils s’apprivoisent-facile- ment et s’attachent même aux personnes qui les soignent. Ils se nourrissent presque indistinctement de substances végétales et animales, mais vivent principalement de racines et de graines, pour la recherche desquelles , guidés par leur odorat qui est très fin , ils fouissent continuellement la terre. Les lieux soli- taires , humides et marécageux , leur plaisent , et ils parais- sent même se vautrer avec délices dans la fange ; ils vivent en troupes quelquefois assez nombreuses , et on en trouve par- tout , excepté dans le nord des deux continens et dans lAus- tralasie. Le sanglier, qui est la souche de nos cochons domestiques, et qui est répandu dans les régions tempérées de l’Europe et de l'Asie , ainsi que dans les parties septentrionales de l'Afrique , a les défenses prismatiques et recourbées en dehors et un peu en haut , et dépourvues de racines : aussi croissent-elles pendant toute la vie. Tout son corps est d’un noir brunätre, et les soies sont hérissées et remarquables par leur dureté, surtout le long de l’échine du dos. Dans le jeune âge, ces animaux portent une livrée formée de bandes longitudinales , mais irrégulières, d’un brun plus ou moins foncé sur un fond blanc , mêlé defauve. On les connaît alors sous le nom de marcassins ; mais, à la seconde année , ils prennent la teinte uniforme propre aux adultes. Dès la seconde année , ils commencent à reproduire ; mais cepen- dant ils n’achèvent leur croissance qu’au bout de cinq à six ans, et la durée de leur vie est d’une trentaine d'années. Les vieux sangliers vivent ordinairement seuls ; au contraire, les femelles, avec leurs petits , se réunissent en troupes , et se défendent mutuellement avec courage. Les plus forts font face au danger, en se pressant les uns contre les autres, se forment en cercle et placent les plus petits derrière eux. La portée se compose de quatre à dix marcassins : ils naissent en mai ou juin, et sont nourris et guidés par leur mère pendant plusieurs mois: quelquefois ils la suivent pendant deux ou trois ans; mais en général les troupes se dispersent vers le milieu de l'hiver. C’est le soir que ces animaux vont chercher leur nourriture : ils vivent dans les forêts , et souvent ils font dans les champs voisins les plus grands dégäts , en fouillant la terre, pour y cher- Sanglier. 406 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. cher les racines. Lorsque la faim les presse, ils deviennent car- nivores et attaquent même les animaux vivans. Leur grande force et leurs puissantes défenses les rendent redoutables aux chasseurs et aux chiens. Lorsqu'un sanglier est attaqué, il ne sort qu’à la dernière extrémité de sa bauge , fourré épais où il a établi sa retraite; il fuit d’abord, mais lentement et en se retournant sur les chiens qui le serrent de trop près , et, lors- qu’il est blessé, il s'arrête, et renverse tout pour arriver au chasseur qw’il croit l'avoir frappé. eee do- Nos cochons domestiques varient beaucoup pour la taille , la ” couleur, etc.; mais c’est à l’état de domesticité qu’on doit attri buer ces modifications; car, lorsqu'ils sont abandonnés à eux- mêmes et qu’ils redeviennent sauvages, comme cela est arrivé pour un grand nombre de ceux que les Européens ont trans- portés en Amérique, ils reprennent peu-à-peu tous les caractères propres aux sangliers. Ces animaux sont d’une grande utilité à l’homme , à cause du goût agréable de leur chair et de la facilité avec laquelle on la conserve à l’aide du sel; de leur grande fécondité, qui dépasse de beaucoup celle de tous les autres animaux de la même taille et du peu de frais qu’entraine leur nourriture. En France ,il n'est guère de ménage de paysan qui n’en élève un ou deux chaque année pour les besoins de la famille, et, dans nos villes, la consommation du porc est encore plus considérable. A Pa- ris , par exemple, on mange plus de quatre-vingt mille co- chons par an. La plupart de ces animaux sont tirés des départe- mens du Nord et de l'Aisne, ou de la Normandie. Plusieurs dé- partemens du centre et de l’ouest de la France, tels que la Creuse , le Cher et la Haute-Vienne , en fournissent aussi à la capitale, et, vers les Pyrénées, ils sont l’objet d’un commerce considérable; mais , malgré le grand nombre qui s’en élève dans nos provinces , la production ne suffit pas à la consommation, et chaque année, on en tire beaucoup de la Belgique et de PAllemagne. L’importation s’élève à plus de cent cinquante mille têtes par an. Les soies du sanglier et ‘du cochon sont également utiles à notre industrie : on les emploie à la fabrication des balais, des brosses, etc. Un cochon de moyenne taille en fournit à-peu- près une livre : on les estime à raison de leur force, et celles qui nous arrivent de la Russie sont d’une meilleure qualité que celles des animaux du pays. On en importe plus de 400,000 liv. par an au prix de 1 à 4 fr. la livre, suivant la qualité. Les cochons domestiques sont plus féconds que les sangliers. Une truie donne quelquefois douze à quinze petits d’une seule portée, et, lorsqu'elle en donne moins de dix à douze , les agri- FAMILLE DES PACHYDERMES ORDINAIRES. 407 culteurs la regardent comme stérile et ne la conservent pas. Ces animaux, peuvent donner trois portées dans lespace de quatorze mois ; mais , pour que leurs petits puissent téter suffi- samment sans épuiser leur mère, il faut se contenter de deux portées par an. Les jeunes, que l'on appelle des cochons de lait, sont un aliment très recherché: c’est à l’âge de trois se- maines qu’on doit les livrer à la boucherie. Ceux qui sont desti- nés à être élevés doivent téter pendant environ deux mois; mais, dès l’âge de quinze jours, on commence à leur donner d'autre nourriture, aussi bien que le lait de leur mère , et, pendant plusieurs mois , il convient de leur fournir en abon- dance des alimens plus choisis que ceux qu’on emploie pour les adultes. Ceux-ci peuvent se nourrir, pour ainsi dire, de tout. Les fruits sauvages , abattus par le vent, les glands , la pomme de terre , les débris de toute espèce leur conviennent également ; mais , jusqu'au moment où ils doivent être engraissés pour la boucherie , il faut bien se garder de les nourrir trop abondam- ment; car cela les rendrait sujets à des maladies et les empé- cherait de prendre par la suite autant de graisse qu’ils en sont susceptibles. L’âge auquel on tue les cochons varie suivant les circonstances. Lorsqu'on a principalement en vue la préparation du petit salé ,on peut se servir des animaux de huit à dix mois; mais , pour donner du lard en abondance, il faut qu’ils aient au moins dix-huit mois ou deux ans.Le vérat devient si intraïtable et si méchant , lorsqu'il veillit, qu’en général on l’engraisse et on le tue à l’âge de deux ans. Quant à la truie , on s’en défait or- dinairement avant qu’elle n’ait atteint sa sixième année, non pas qu’elle ne puisse conserver pendant long-temps encore toute sa fécondité, mais parce qu’à cet Âge, ellene s’engraisse que dif- ficilement et par conséquent ne donne plus les mêmes profits. Lorsqu'on veut engraisser un cochon , on commence par le faire jeuner un peu , afin d'augmenter son appétit ; puis on lui fournit en abondance une nourriture succulente. Dans le midi, on emploie principalement le maïs , et, dans le nord , l'orge, ies pois , les fèves et le résidu des fabriques de sucre de bette- raves , des brasseries , etc. L’expérience montre que la diver- sité des alimens est une circonstance favorable à la réussite de lengrais , et que toutes les substances nutritives conviennent bien mieux à ces animaux, lorsqu’elles ont été cuites, et qu’elles sont réduites à une consistance plus ou moins pulpeuse. Le repos est également indispensable à l’engrais des cochons , et, dans quelques pays , on méle à leurs alimens des semences nar- cetiques (1), pour les porter au sommeil ; la propreté est aussi f o 3nc : . r - r (1) De jusquiame ou de stramoine, appelée vulgairement pomme epineuse. 408 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. utile à ces animaux , et la saison qui parait être la plus favo- rable pour les engraisser, est l'automne. Le choix du cochon influe encore d’une manière très remar- quable sur les profits que ces animaux peuvent donner lors- qu’on les engraisse ; les agriculteurs instruits savent que cer- taines formes coïncident toujours avec la disposition à prendre de la graisse , et que ceux qui sont d’une grande taille donnent des bénéfices plus considérables que les petits ; car le poids de la chair, comparé à celui des viscères, du sang, de la tête, etc. ,est proportionnellement d’autant plus considérable que Panimalest plus grand. En général, le lard et les quartiers du porc, tels qu’on les livre au boucher, constituent environ les trois quarts du poids total de l’animal , lequel varie suivant les races. Les cochons du Poitou pèsent souvent cinq cents livres ; ceux de la Normandie pèsent jusqu’à six cents , et il n’est pas rare de voir ceux de la grande race d’Angieterre et de Flandre atteindre le poids de mille à douze cents livres. La rapidité avec laquelle ilss’engraissent est réellement surprenante. Souventils doublent de poids en quelques semaines , et, lorsqu'ils cessent d'aug- menter rapidement de poids, il faut se hâter de les envoyer à la boucherie ; car non-seulement les frais d’une nourriture ulté- pen seraie nt perdus ; mais aussi ils ne tarderaient pas à périr de la maladie connue sous le nom de la cacherie graisseuse. Parmi les espèces exotiques du genre cochon proprement dit, nous Citerons le babiroussa , qui habite quelques iles de Parchi- pel Indien , et qui , au lieu d’avoir, comme le sanglier, six mo- laires de chaque côté et a chaque mâchoire , n’en a que cinq. Ses défenses sont très longues. Phacochæ- Les PHACOCHOERES ressemblent beaucoup aux cochons pro- res. prement dits, mais s’en distinguent par la structure de leurs dents molaires , qui sont composées de cylindres unis par de la y matière corticale , et qui se poussent d'avant en arrière d’une 47. manière analogue à ce qui a lieu chez les éléphans. Les dé- fenses de ces animaux sont extrêmement grandes; leur tête est très large, et il leur pend de chaque côté des joues une espèce de loupe charnue, qui leur donne une figure hideuse : ils habitent l'Afrique. Pecaris. Les PECARIS (Décotylis) sont des animaux de l'Amérique méri- dionale , qui ont également la forme générale et les dents de nos cochons , mais dont les canines re sortent pas de la bouche, et dont les pieds de derrière manquent de doigt externe. Ils tes FAMILLE DES PACHYDERMES ORDINAIRES. 469 n'ont pas de queue et présentent sur les lombes une ouvérture glanduleuse d’où suinte une humeur fétide. Les pachydermes ordinaires , dont le pied n’est pas fourchu, se ressemblent par la disposition de leurs dents molaires , qui, au nombre de sept en haut et de six ou de sept en bas, de chaque côté , ont la surface de leur couronne hérissée de lames saillantes, affectant en bas la forme d’un double croissant. Ils forment , comme nous l’avons déjà dit, les genres tapir, daman et rhënoceros. Les rapirs ont, de même que les précédens, de l’analogie avec les cochons par la forme générale de leur corps ; mais on les Fig. 134. distingue au premier abord par la petite trompe charnue qui est formée par le prolongement de leur nez (fig. 134), et qui est sus- ceptible de s’allonger et de se raccourcir, mais qui n’esi pas un organe de préhension , comme celle de l’éléphant. Leurs doigts sont en même nombre que chez les pécaris ; mais leurs pieds n’ont pas l’apparence fourchue , et ils ont, à chaque mâchoire, six incisives et deux canines, séparées par un intervalle vide des molaires , qui sont au nombre de quatorze en haut et de douze en bas. Le tapir d'Amérique, qui est assez commun dans les lieux humides des contrées chaudes de l'Amérique méridionale , est de la taille d’un petit âne , et sa peau , presque nue, est brune. On mange sa chair. Une seconde espèce , qui habite les régions les plus élevées de la Cordillière des Andes , et qui a le poil long et noir, paraît avoir donné lieu , parmi les Indiens , à beau- coup de récits fabuleux. Enfin une troisième espèce se trouve dans les forêts de l'ile de Sumatra et de la presqu’ile de Malac- ca. Le griffon des anciens , que l’on regarde généralement comme un animal entièrement fabuleux, pourrait bien être ce dernier, un peu défiguré parles voyageurs et auquel les artistes auraient ajouté des ailes et une queue de style architectural. Les RHINOCÉROS sont de grands animaux à formes lourdes, massives et trapues , dont les os du nez très épais et réunis en une espèce de voûte, portent sur la ligne médiane une corne solide , qui adhère à la peau , et qui est composée de substance fibreuse et cornée , comme si elle était formée de poils aggluti- Pachyder- mes à pieds. non fourchus Tapirs. Rhinocéros. Damans. Pachyder- mes fossiles. 410 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. nés. Dans quelques espèces , il existe une seconde corne de même nature que la précédente et placée également sur la ligne médiane. Les pieds de ces animaux sont tous divisés en trois doigts, garnis de sabots très grands ; leur queue est courte et ru- dimentaire , et leur peau sèche, rugueuse et presque dépourvue de poils , est si épaisse et si dure, qu’elle semble constituer une espèce de cuirasse. Quelquefois elle forme en travers des épaules et des cuisses , des plis profonds. Enfin ils ont, à chaque mà- choire et de chaque côté, sept mâchelières et une canine; mais le nombre de leurs incisives varie, et, dans une espèce (celle d'Afrique), ces dernières dents manquent complètement. Les rhinocéros se nourrissent d'herbes et de jeunes branches d'arbres : ils habitent les lieux ombragés et humides, et, de même que la plupart des mammifères dont la peau est presque nue et se dessèche facilement, ils aiment à se vautrer dans la fange. Leur naturel est grossier et féroce, et leur force extraordi- naire. Les habitans des pays où ils se trouvent estiment la chair et font avec la peau de ces animaux un cuir extrêmement dur, qu’ils emploient à divers usages, pour faire des soupentes de voi- tures , par exemple ; mais leur chasse est difficile et dangereuse. On trouve aux Indes trois espèces de rhinocéros, dont une bicorne et deux ayant une corne unique. Près de l'embouchure du Gange on a trouvé un rhinocéros sans cornes , mais on ignore encore si c’est une espèce distincte ou une simple variété indi- viduelle; enfin en Afrique , il existe aussi un rhinocéros bicorne, et on trouve en France et dans diverses parties de l’ancien con- tinent des ossemens fossiles provenant d’espèces détruites. Sur les bords du Vilhoui, en Sibérie , on a trouvé le cadavre presque entier d’une de ces espèces de rhinocéros antédiluviennes. Les DAMANS (Hyrax) sont de très petits animaux qui, pendant long-temps, ont été confondus avec les rongeurs, mais qui res- semblent beaucoup aux rhinocéros par la disposition de leursys- tème dentaire , et qui sont de véritables pachydermes : ils ont le museau et les oreilles courts, quatre doigts en avant , trois en arrière, le corps couvert de poils, un tubercule au lieu de queue , et l'estomac divisé en deux poches. On n’en connait qu’une espèce , qui est de la taille d’un lapin, et qui est assez commune dans les rochers de diverses parties de l'Afrique. On doit ranger aussi dans la famille des pachydermes ordi- naires plusieurs quadrupèdes perdus, dont les ossemens se retrouvent à l’état fossile dans les carrières à plaire des envi- rons de Paris et dans diverses autres localités. De ce nombre sont les PALÆOTHERIUM , qui, à en juger par la structure de FAMILLE DES SOLIPÈDES. 411 leur tête osseuse, devaient avoir une courte trompe charnue comme les tapirs, mais qui s’en distinguent par les dents et par le nombre desdoigts , qui est de trois partout. Il ne peut y avoir ancun doute sur leur régime herbivore , et il est probable que ces animaux antédiluviens habitaient les bords des lacs et des marais; Car les pierres qui renferment leurs ossemens con- tiennent aussi des coquilles d’eau douce. On en connait une douzaine d’espèces, dont une , presque de la taille du rhinocé- ros , a été découverte près d'Orléans. M. Cuvier, à qui l’on doit la connaissance de ces habitans an- tiques de notre globe, a donné aussi le nom d’ANOPLOTHERIUM à un genre fossile de pachydermes ordinaires, qui se trouve dans les mêmes localités et qui se rattache , à quelques égards, à l'ordre des ruminans ; car leurs pieds sont divisés en deux doigts seulement. FAMILLE DES SOLIPEDES. La troisième famille de l’ordre des pachydermes, caractérisée par un seul doigt apparent et un seul sabot à chaque pied, ne se compose que d’un seul genre , celui des CHEVAUX (Equus). Chacun connait les formes de ces animaux, dont la tête est fine et un peu comprimée latéralement , le cou et le corps bien proportionnés, et les jambes minces, mais bien musclés. Ils Fig. 135. (1) portent , à chaque p A TE: ms mâchoire, six incisi- ves(i),suivies, de cha- que côté, d’une ca- nine (c), qui manque souvent, chez les fe- melles, à la mâchoire inférieure surtout, et d’une série de six mo- laires (m) à couronne carrée , marquée de quatre croissans for- més par les lames d’émail qui s’y enfoncent ; entre les canines et les molaires se trouve un grand espace vide, nommé barres, qui correspond à l’angle des lèvres, et c’est là que l’on place le mors, (1) Tête osseuse du cheval : — o os occipital; —p pariétal ; — f frontal ; — or orbite; — » os du nez; — ms maxillaire supérieur; — im intermaxillaire ; — mi maxillaire inférieure ; — 1: dents incisives ; — c canines ; — 7» molaires. Genre che- val. 412 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. au moyen duquel l’homme est parvenu à dompter ces fiers et vigoureux quadrupèdes. Les chevaux sont essentiellement her- bivores; leur estomac est cependant petit et simple; mais ils ontun énorme cœcum, dans lequel la digestion de leurs alimens Fig. 136.(1) parait s'achever. Leurs pieds, comme nous la- vons déjà dit, ne montrent au-dehors qu’un seul doigtqu’enveloppe un grand sabot ({g. 136); mais on trouve caché sous la peau les rudimens d’un doigt latéral (s), et on pourrait peut-être avec rai- son considérer leur doigt médian comme résul- tant de la soudure de deux doigts , semblables à ceux des ruminans. Tous les sens paraissent être très délicats chez ces animaux : leurs oreilles sont allongées et très mobiles, et leur œil, saillant et grand , a la pupille horizontale, dis- position qui est très commune parmi les herbi- vores, tandis que, chez les carnassiers , cette ouverture , lorsqu'elle ne conserve pas, en se contractant, la forme circulaire devient, en général verticale. Leurs narines sont grandes, mobiles et sans mufle ; leur langue est très douce ; enfin leur larynx offre quelques particu- larités de structure qui paraissent en rapport avec le son de leur voix. Il n’y a point de ligament supérieur de la glotte ni de ventricules proprement dits ; mais de chaque côté, au dessus des cordes vocales, on trouve une grande cavité oblon- gue, et en avant un trou s’ouvrant dans un troisième sinus pra tiqué sous la voûte que forme le rebord antérieur du cartilage thyroïde. Dans le cheval, cette dernière cavité est peu profonde, et son ouverture est très large ; mais, chez l’âne, c’est une grande cellule arrondie , dont l'entrée est étroite , et qui rappelle, par sa forme, la poche laryngienne des alouattes. Les mœurs des solipèdes sont à-peu-près les mêmes: tous viventen troupes plus ou moins nombreuses , ayant pour chef un mâle; et, lorsqu'un danger les menace, ils se réunissent en groupes serrés, et se défendent en ruant avec force. Il est presque inutile de rappeler combien ils sont rapides à la course. Ces animaux sont lous originaires des parties chaudes ou tempérées de lPancien monde. On en connait six espèces vi- vantes : savoir : le cheval proprement dit, l'âne, le dzigquetai , le zebre , le couagga et lonagga. (r) c os de l’avant-bras ;—c1 première rangée des os du carpe ;—c2 deuxième 2 L S € 3 rangée de ces os ;— s stylet ; — mc os du métacarpe ou canon ; — pi, p?, p les trois phalanges. FAMILLE NES SOLIPÈDES. 413 Le cheval , le plus utile , le plus beau et le mieux soigné de nos animaux domestiques, se distingue des autres espèces de ce genre par la couleur uniforme de sa robe et par sa queue, garnie de crins dès sa racine. Il paraït originaire des grandes plaines de l'Asie centrale et peut-être aussi de quelques con- trées de l'Europe. Primitivement 1l ne se trouvait ni en Afrique, ni en Amérique, ni à la Nouvelle-Hollande ; mais , devenu le compagnon de l’homme à la guerre , dans les voyages et dans les travaux de l’agriculture , du commerce et des arts, il a été transporté dans tous les pays où la civilisation a pénétré et l’es- pèce entière a subi l’influence de la domesticité. Dans les vastes steppes de la Tartarie , berceau de leur race, on trouve encore des chevaux sauvages , que l’on appelle des trapans ; mais ces animaux n’ont pas conservé leurs caractères primitifs; car, ils se mêlent continuellement à des individus échappés à la domesticité, et la plupart des zoologistes (peut-être sans preuves suffisantes) les regardent même comme descendans de che- vaux domestiques redevenus libres. Quelques auteurs vont jusqu’à leur assigner pour origine ceux que leurs maîtres ont abandonnés, faute de fourrage, iors du siège d’Azoph, en 1658. Au premier abord , cette opinion parait bien hasardée ; mais elle devient plus plausible , lorsqu'on voit ce qui s’est passé en Amérique. Lors de la découverte du Nouveau-Monde, il n’y existait au- cun animal du genre des chevaux. Le cheval domestique a été importé dans ces contrées à une époque qui ne remonte guère au-delà de trois siècles , et cependant on y trouve aujourd’hui des troupes immenses de chevaux sauvages. Ces animaux y ont repris des mœurs analogues à celles des trapans de PAsie , et leur nombre est bien plus considérable. Les chevaux sauvages présentent bien moins de variations dans leurs couleurs que nos chevaux domestiques; mais cepen- dant n’offrent pas l’uniformité qu’on rencontre chez les ani- maux restés complètement étrangers à l'influence de la domes- ticité. Ceux de l'Asie sont pour la plupart isabelle ou gris de sou- ris, et ceux de PAmérique bai-châtain. Partout les individus noirs sont très rares, et on n’en voit pas de couleur pie. C’est toujours dans les pays de plaines que ces animaux habitent , et ils se réunissent constamment en familles composées d’un étalon et d’un nombre variable de jumens et de poulains. En Asie, ces troupes d’une vingtaine d'individus restent isolées : il en est de même dans quelques parties de l'Amérique (la Colombie , par exemple), où les cantons qu'ils habitent sont resserrés et visités fréquemment par les hommes; mais , dans les vastes pampas du Paraguay, ces familles se réunissent à leur tour et forment 27 Cheval pro- prement dit. 414 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. des troupes dont le nombre s'élève quelquefois , assure-t-on , à plus de dix mille individus. Toutes ces troupes sont conduites par des chefs, qui sont toujours à leur tête dans les voyages comme dans les combats , et qui doivent l'autorité dont ils sont revêtus à la supériorité de leur force et de leur courage. Chaque troupe habite un canton particulier, qu’elle défend comme sa propriété contre toute invasion étrangère , et qu’elle n’abandonne que lorsqu'elle y est forcée par le manque de pâtu- rages ou par quelque ennemi puissant. Ces troupes marchent en colonnes serrées , précédées de quelques éclaireurs , et lors- qu'un objet les inquiète , elles s’en approchent, les chefs en tête , et décrivent autour un ou plusieurs cercles , comme pour Pexaminer. Si leurs guides reconnaissent quelque danger et donnent l’exemple de la fuite, tous ces chevaux sauvages les suivent sans hésitation, et , lorsqu'ils ont à résister à l’atiaque de quelques grands carnassiers , les seuls animaux qu’ils doivent craindre , ils se réunissent en groupes compactes et se défendent courageusement par des morsures et des ruades. A la vuedes che- vaux en esclavage, ils poussent des hennissemens longs et graves, et semblent les inviter à les suivre dans leur vie vagabonde. Sou- vent ils y réussissent; car, si ces derniers ne sont pas bien gardés, l'instinct de la sociabilité et l'amour de la liberté se réveillent alors en eux , et ils se joignent à la horde sauvage, pour ne plus s’en séparer. N Ces chevaux, libres depuis plusieurs générations, sont ce- pendant eux-mêmes faciles à dompter. Dans beaucoup de pro- vinces de l'Amérique du Sud, on n’en emploie pas d’autres. Pour les prendre ,on chasse souvent iout une troupe de manière à la pousser dans un coral ou enclos circulaire , construit avec des pieux plantés solidement en terre; puis le capitan ou chef de la tribu indienne , monté sur un cheval vigoureux et bien dressé, entre dans l’enceinte , ayant à la main un /asso ou longue cour- roie de cuir iressé, fixée par une extrémité à la selle de son cheval , et terminée à l’autre extrémité par un nœud coulant.Le cavalier lance ce nœud autour du cou du premier jeune cheval sauvage qui se présente à lui, ei l’entraine au dehors.Au moyen de cordes lancées autour des jambes de l'animal, onle iette parterre, on lui met dans la bouche une forte courroie de cuir en guise de bride, et on le selle. Un Indien , armé d’éperons très aigus, le monte et le laisse alors courir. Le cheval fait d’abord des efforts incroyables pour se débarrasser de son cavalier; mais léperon le met bientôt au galop, et, après avoir couru perdant un temps plus ou moins long , il se laisse ramener au fatal enclos où il a perdu sa liberté. Il est alors dompté: on lui ôte sa bride et sa selle et on le laisse aller avec les autres chevaux, Car, ÿ ra FAMILLE DES SOLIPÈEDES. 415 dès ce moment , il ne cherche plus à fuir ni à désobéir à son maitre. : Dans la Tartarie , on a recours à des moyens analogues pour prendre et dompter les chevaux sauvages; mais il paraït que les vieux sont plus difficiles à maîtriser. La domesticité du cheval remonte aux temps les plus reculés. D’après quelques passages de la Genese , il est à présumer que ces animaux commençaient à être employés en Egypte et dans les parties voisines de PAsie vers l’époque où Joseph adminis- trait la première de ces contrées , c’est-à-dire il y a environ trois mille six cents ans, et, d’après les sculptures antiques trouvées dans les ruines de Persopolis, et même d’après les poésies d’Homère, on a lieu de croire que, dans les premiers temps de leur domesticité , on ne les montait pas, mais qu’on s’en servaitseulement comme de bêtes de trait. L'influence de l'homme et les circonstances variées dans les- quelles les chevaux ont été placés par suite de leur esclavage, a déterminé, parmi ces animaux des différences considérables, qui se propageant de génération en génération, ont produit une multitude de races diverses. Nous ne pouvons entrer ici dans la description de toutes ces variétés; mais , pour faire sentir combien sont grandes les dif- férences qui existent entre deux races, il nous suffira de nom- mer , à côté l’un de autre, le cheval arabe , si gracieux, si bien proportionné, si léger et si ardent, et le cheval flamand, dont la lourde masse ne manque pas d’une certaine beauté, mais ressemble si peu au premier. La durée de la vie du cheval est d'environ trente ans, et celle de sa gestation de onze mois. Le poulain naït les yeux ouverts et peut presque de suite courir après sa mère, qui lallaite pen- dant six ou sept mois. L'époque de la puberté arrive à deux ans ou deux ans et demi pour les étalons et un peu plus tôt pour les jumens ; mais ils ne donnent de beaux produits qu'à l’âge de quatre ou cinq ans. Les jumens ne cessent d’être fécondes que dans la vieillesse : on en a vu donner des poulains régulièrement, chaque année, jusqu’à l’âge de vingt-quatre ans. Quant aux éta- lors , on les réforme en général à quinze ou seize ans. L’âge auquel on peut commencer à faire travailler les chevaux varie suivant les races.Pour les chevaux communs, c’est ordi- nairement vers trois ou quatre ans ; mais, pour les chevaux fins, on est obligé d'attendre une année ou deux de plus. Ceux que lon emploie aux travaux les plus rudes , au halage des bateaux , par exemple, ne résistent à ces fatigues que cinq ou six ans; en général, le service des postes les use lout aussi promptement , et on compte que, terme moyen, un cheval de labour peut supporter | 20: 416 ZCOLOGIE DESCRIPTIVE. une douzaine d’années de travail, après quoi il n’a presque au- cune valeur. D’après ce que nous venons de dire, on voit que, même dans les circonstances ordinaires , un cheval augmente de va- leur, à mesure qu’il s'approche de l’âge auquel il pourra rendre des services , et en perd à mesure qu’il vieillit : il importe donc beaucoup de pouvoir reconnaitre avec certitude lâge de ces animaux , et, jusqu’à huit ou dix ans, on y parvient assez bien à laide des changemens qui s’opèrent dans leurs dents. Fig. 138. Fig. 139. Fig. 140. (1) Mm P m ?P Le poulain , en naissant, est en général encore privé de dents sur le devant de la bouche , et n’a que deux molaires de chaque côté età chaque mâchoire ; mais, au bout de quelques jours, les deux incisives du milieu (appelées pènces) se montrent à chaque mâchoire. Dans le cours du premier mois, une troi- sième molaire parait également. Vers trois mois et demi ou quatre mois, les deux incisives mitoyennes sortent aussi , et entre six mois et demi et huit mois, les incisives latérales, appelées coins , ainsi qu’une quatrième molaire apparaissent. A cette époque , la première dentition est complète, et les chan- gemens qui y surviennent avant l’âge de trois ans ne dépendent que de lPusure de plus en plus profonde des incisives , dont les (1) Dents incisives et canines de la mâchoire inférieure du cheval: — p pince; — m incisives mitoyennes ; — € COINS ; — CA Canines. Fig. 138, dents d’un cheval d’environ quatre ans. Fis. 139, dents d’un cheval d’envirou cinq ans. Fig. 140, dents d’un cheval d'environ sept ans. FAMILLE DES SOLIPÈDES. 417 fossettes, colorées en noir par les alimens (1) disparaissent peu- à-peu. De treize à seize mois , les pinces rasent , c’est-à-dire que la cavité de leur surface terminale s’efface: de seize à vingt mois , les incisives mitoyennes présentent le même degré d'usure, et de vingt à vingt-quatre mois , les coins rasent à leur tour. A deux ans et demi ou trois ans, le travail de la seconde den- tition commence. Les dents de lait se reconnaissent en ce awelles sont plus courtes , en général plus blanches et rétrécies à leur base , près de la gencive; les dents de remplacement sont beaucoup plus larges et ne présentent pas le rétrécissement que nous venons de signaler et que l’on appelle collet. Ce sont les pinces qui tombent et sont remplacées les pre- mières. De trois ans et demi à quatre ans, les incisives mitoyennes éprouvent le même changement , et les canines inférieures ou crochets commencent à se montrer (/#g.138). De quatre ans et demi à cinq ans, les coins se renouvellent aussi, les canines supé- rieures , lorsqu'elles existent , percent la gencive , et à la même époque , la cinquième molaire commence à paraitre. Ces incisives de remplacement présentent, comme celles de lait, une dépression en forme de fossette à la surface de leur couronne et s’usent de la même manière. De cinq à six ans, les pinces de la mâchoire inférieure perdent leur cavité; l’année suivante , les incisives mitoyennes rasent à leur tour, et de sept à huit ans , la marque des coins s’efface. La détrition des inci- sives supérieures se fait dans le même ordre, mais est plus lente. La différence paraït être d’environ une année. Lorsque ces divers changemens se sont opérés, les dents ne fournissent plus de signe certain indicatifde l’âge du cheval, qui, alors, en style de maquignon , est Lors d’äge. La couleur et la longueur des canines , qui se déchaussent de plus en plus, les rides du palais et quelques autres signes ne peuvent donner plus tard que des notions approximatives à cet égard. La production et l'éducation des chevaux est une branche importante de l’industrie agricole. On donne le nom de Aaras aux lieux où l’on rassemble des chevaux , pour en multiplier la race , et on les distingue en haras sauvages , haras parqués et haras domestiques. Les Aaras sauvages sont ceux où les chevaux , abandonnés complètement à eux-mêmes dans un endroit circonscrit, se nourrissent du produit du sol et restent étrangers à l’homme jusqu'au moment où il s'en empare pour les dompter. Cette (1) Cette tache est appelée par les maquignons germe de féve. 418 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. manière d'élever les chevaux n’est praticable que dans les pays où la population est rare et où l’on peut abandonner à ces ani- maux une très grande étendue de terrain inculte, qu’il serait difficile d'utiliser d’une autre manière; car le revenu qu’elle donne est faible et précaire. Les chevaux, élevés dans ces haras , sont sobres et durs à la fatigue ; mais ils sont rétifs , et conservent toujours quelque chose de leur nature sauvage : ils s’accoutument aussi difficilement à la vie d’écurie, et, pendant le jeune âge, ils souffrent des privations qu’ils éprouvent; car, lorsque l'herbe est abondante , ils dévastent les pâturages et ne trouvent ensuite qu’une nourriture insuffisante. C’est en Amé- rique , dans les îles de Cuba et de Taïti, en Asie et dans quelques parties de la Russie, que l’on rencontre des haras de cette es- pèce ; mais, dans les pays bien cultivés , où la terre a de la valeur , ils sont impossibles. Il existe cependant, dans certains points de la France quelque chose d’analogue. Dans les landes de Bordeaux et dans les marais de la Camargue , on voit des chevaux, qui, pendant presque toute l’année, sont abandonnés à eux-mémes et mènent la vie sauvage ; mais, à certaines époques de l’année, on les fait travailler ; car on les emploie au dépiquage des grains. Les Aaras parques sont de grandes exploitations agricoles consacrées entièrement à la production des chevaux , qui réu- nissent les avantages des haras sauvages sans en avoir tous les inconvéniens. Les chevaux s’y accoutument aux intempéries de Pair et y trouvent l’espace nécessaire au déploiement de leurs forces , mais n’y éprouvent point de privations ; car le parc est divisé en plusieurs pâturages, qu’on leur livre successivement pendant l’été , en prairies de récolte et en portions de terre. consacrées à la culture des grains et des racines destinées à leur nourriture d'hiver. Dans la Russie, la Hongrie et l'Allemagne, et même dans l'Italie et l'Espagne, on rencontre de ces grands haras ; mais, en France et en Angleterre , la production des céréales exige une proportion trop forte du sol , pour que l’on puisse consacrer à celle des chevaux des terrains aussi éten- dus , et on n’établit que des karas domestiques, exploitations beaucoup moins vastes où ces animaux sont presque toujours renfermés dans les habitations, y reçoivent leur nourriture , et sont le plus ordinairement employés à des travaux agricoles. Les chevaux que lon élève dans tous ces établissemens doi- vent en partie leur taille leurs formes et leurs qualités à la race dont ils descendent; maisles circonstances où ils sont placés pen- dant le jeune âge exercent sureux, à la longue, une influence non moins grande. On remarque qu'en général le poulain tient de sa mère plus que de son père pour la taille et le volume, tandis me FAMILLE DES SOLIPÈDES. 419 que, pour la forme de la tête, les pieds, le courage , la lé- gèreté, etes il ressemble davantage au dernier. Du reste, les défauts , comme les qualités , se transmettent de génération en génération , et, pour maintenir une race dans sa pureté ou pour l’améliorer, il faut avoir soin d’en écarter tous les indivi- dus qui ne possèdent pas les qualités que l’on desire obtenir. Pour faire disparaitre un défaut, on croise pendant plusieurs générations , des individus qui le présentent avec d’autres ayant une disposition opposée , et en appareillant avec persévérance les chevaux qui possèdent telle on telle perfection on crée une race où elle devient héréditaire et générale. C’est en grande partie à des soins de cette nature, que les chevaux arabes doivent leur célébrité si bien méritée. Les Arabes attachent une telle importance à la pureté de la race de leurs chevaux nobles , appelés kochlani, que leur filiation est toujoursconstatée par des actes authentiques : ils font remonter à près de deux mille ans, la généalogie connuede plusieurs de ces beaux animaux , et 1l en est dont la lignée peut être démontrée par des preuves écrites pendant une série de quatre siècles. D’un autre côté, l'influence des croisemens de race est égale- ment bien démontré par les chevaux de course anglais; car c’est au mélange des jumens indigènes avec des étalons appor- tés de l’orient, qu’on doit la création de cette race, si re- marquable par la finesse, de ses formes et son étonnante ra- pidité. L’abondance plus ou moins grande et la qualité de la nourri- ture , la sécheresse ou l'humidité du pays, les soins journaliers et même une foule de circonstances en apparence peu impor- tantes, exercent aussi une influence puissante sur la taille , les formes et les qualités des chevaux. Pour en donner la preuve, nous pourrions montrer avec quelle rapidité dégénèrent les plus beaux chevaux anglais dans certaines localités, telles que le haras de Kopschan , sur les bords de la Morave; mais, sans aller si loin, nous trouverons des exemples encore plus frap- pans de la puissance modificatrice des circonstances extérieures. Si de deux poulains nés de la même race, en Lorraine, par exemple , l’un esttransporté dans la Flandre , et l’autre dans les herbages de la Normandie , au lieu de conserver les mêmes ca- ractères, ils seront , à l’âge de cinq ans, presque aussi différens entre eux, que s’ils provenaient de deux races distinctes : lun deviendra un cheval de carrosse léger et élégant, l’autre un animal énorme presque incapable d’aller au trot, mais constitué pour trainer lentement les plus lourdes charges. Là où la nourriture est abondante et où , par la prévoyance de l’homme, elle ne manque en aucune saison , les chevaux 420 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. sont ordinairement grands et étoffés, tandis que, dans les contrées où elle est peu abondante , même pendant une partie de l’année, ces animaux n’acquièrent qu’une taille petite ou médiocre. Nous avons déjà vu quelque chose de semblable , en étudiant les lois de la croissance de l’homme , et, pour nous convaincre de la vérité de cette observation , relativement aux chevaux , il suffit de comparer ceux qui, dans un même pays, appartiennent à de pauvres cultivateurs ou à de riches proprié- taires. Le pâturage , dans les prairies grasses et humides, celles qui conviennent le mieux pour l’engrais des bestiaux, tend à don- ner aux chevaux des formes lourdes et empâtées , à rendre leur peau épaisse et leur poil grossier, et à diminuer la vivacité de leur caractère. La nourriture fournie par les prairies sèches, n’occasionne rien de semblable , et, lorsqu'on la rend encore plus substantielle par l'addition d’une proportion considérable de graines céréales , elle devient éminemment propre à conser- ver et même à produire l’élégance des formes et l’énergie mus- culaire caractéristiques d’une race noble. Lorsqu'une température un peu basse vient ajouter son in- fluence à celle de lhumidité et d’une nourriture abondante et aqueuse , les chevaux acquièrent la taille la plus forte, mais deviennent en même temps les moins ‘énergiques et les plus lymphatiques. Dans les pays très chauds ou très froids, au con- itraire , la croissance s’arrête plus tôt, et les grandes races ne tardent pas à perdre leur haute stature. Enfin les soins journaliers que on prodigue à certains che- vaux, et qui manquent complètement à d’autres, ont aussi leur influence sur la beauté de ces animaux : aussi le bou- chonnement fréquent, l’usage des couvertures, la précaution de nettoyer ei de sécher les extrémités , et même de les en- tourer de bandes de flanelle, sont des circonstances qui ne laissent pas que de contribuer puissamment à donner aux che- vaux anglais la netteté que l’on remarque dans la partie in- férieure de leurs jambes et à rendre leur peau et leurs poils d’une si grande finesse. La quantité de nourriture nécessaire au cheval varie suivant sa taille, le travail qu’on en exige et le climat du pays qu’il habite. Cet animal est difficile dans le choix de ses alimens et rejette beaucoup de plantes, dont le bœuf se contente. L’herbe verte suffit au cheval qui n’est pas condamné à des travaux pé- nibles ; mais celui qui y est obligé a besoin d’une nourriture plus substantielle , de grain, par exemple. Le fumier du cheval est un engrais précieux: il active la végétation plus que celui des autres animaux domestiques, et FAMILLE LES SOLIPÈDES. 421 c’est presque le seul dont on fasse usage pour la culture des jardins et lf*composition des couches. Les dépouilles de cet animal sont également utiles. Sa peau tannée est employée pour faire des tiges de bottes et des empeignes de souliers. Les crins servent à la fabrication des tamis ,etc., et on commence même à tirer parti de sa chair, que l’on dessèche, pour la transformer en engrais , et de ses os, qui servent à la préparation de l’espèce de charbon , appelée noër animal, qui est si utile pour le raffinage des sucres. A Paris, il existe de grands chantiers d’équarrissage , où l’on dépouille, chaque année , environ douze mille chevaux , qui meurent dans cette ville ou que l’on y condamne à être abattus comme ne pou- vant plus travailler. L'espace nous manque pour énumérer ici tous les soins que nécessitent la production et l'éducation des chevaux, ou pour discuter les chances de profit ou de perte qu'offre ce genre d'industrie rurale ; mais nous ne pouvons omettre d'indiquer les résultats au’elle fournit. La production de ces animaux est presque nulle dans tout le midi de la France : elle devient un peu moins insignifiante dans le centre du royaume et augmente vers le nord; mais elle est presque entièrement concentrée dans l'Alsace, la Lorraine , la Flandre , la Normandie et la Bretagne. Cette dernière province tient le premier rang, et la Normandie le second. Le nombre de poulains qui naissent sur une même étendue de territoire , estenviron trente-sept fois plus considérable dans les départe- mens du Finistère, du Morbihan et des Côtes-du-Nord, que dans ceux du Var,des Bouches-du-Rhône, de FAveyron, etc. Ce n’est pas toujours dans les pays de production que l'on élève les jeunes chevaux : ainsi une grande partie des poulains nés dans la Bre- tagne sont amenés dans le Perche et dans la Normandie, pour y être élevés. La Basse-Normandie en recoit un grand nombre de la Picardie. La carte ci-jointe donnera une idée de limpor- tance relative de cette branche d'industrie dans les différentes parties de la France. (1) (x) Pour rendre plus facile à saïsir la part que les diverses parties de la France prennent dans la production des chevaux , nous avons donné à cette carte des teintes d'autant plus foncées, que sur une égale superficie de terrain, on élève un nombre plus considérable de poulains. La France y est divisée, comme dans l'administration des haras,en arrondissemens, composés chacun de plusieurs départemens, et désignés par des numéros correspondans à ceux de la liste ci- Jointe. Dans la figure placée au-dessous, le nombre de poulains qni naissent dans chacune de ces divisions territoriales , sur une étendue de dix mille hec- ir ie est indiqué par la hauteur à laquelle la ligne bleue coupe les diverses lignes verticales qui représentent les arrondissemens dont ils portent les numéros. 429 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. Il existe en France plusieurs races de chevaux bien distinctes. Dans presque toutes les campagnes, on trouve un grand nombre de ces animaux abâtardis et chétifs , qui n’ont ni beauté, ni vélocité, ni force, et qui sont employés à tous les travaux de la petite culture. Les autres peuvent être rangés en trois classes : 1° les chevaux grands, forts, mais lourds, qui sont propres à tirer lentement de grosses charges ; les chevaux de brasseur Cette ligne transversale s’élève d'autant plus que ce nombre est plus considé- rable, et pour connaitre la valeur de celui-ci, dans un arrondissement quel- conque, il suffit de comparer la longueur de la ligne verticale , dont il porte le numéro ou la distance comprise entre la base de la figure et le point d’inter- section de la ligne en question, avec les degrés de l’échelle placée de chaque côté. La ligne transversale jaune indique de la même manière le nombre de poulains de quatre ans que l’on trouve sur une même étendue de terrain dans chaque arrondissement, et la ligne rouge celle des chevaux de tout âge que l’on y compte par mille hectares de superficie. Les chiffres qui ont servi à ces calculs sont extraits des tableaux publiés, il a quelques années, par le savant Chaptal, ancien ministre de l’intérieur. KHÉGIONS. s°° DES DÉPARTEMENS CORRESPONDANS. ARRONDIS. : 1. Nord. 2. Ardennes. 3. Meuse, Meurthe , Moselle. 1° Du nord-est, comprenant la Flandre, £.. Haut RE 2e 4 A la Picardie, l'Ile-de-France , la Lor- F | Pas-tlé-Coe | Sonine @é Oise ; à : : raine et l'Alsace, G. Seine-et-Cise, Seine, Seine-et-Marne | et Aisne. . Marne , Haute-Marne et Vosges. si . Seine-Inférieureet Eure. ,; Calvados et Manche. | 20 Du nord-ouest, comprenant la Nor- 10. Mayenne et Ille-et-Villaine. | mandie , la Bretagne, le Maine, etc. | 11. Côtes-du-Nord, Finistere et Mor- biban. . Orne , Sarthe et Eure-et-Loir. © © œ 4. Vendée, Deux-Sèvres et Vienne. 5. Indre, Indre-et-Loire et Loir-et- Cher. | 3° De l’ouest septentrional , comprenant le Poitou, l’Anjou et la Touraine. 6. dr Yonne et Aube. . Nièvre , Allier et Cher. 8. Ain , Côte-d'Or, Saône-et-Loire. 9. Haute-Saône , Doubs, Jura. ASS = De l’est septentrional , comprenant la Champagne, la Bourgogne , la Franche-Comté , etc. & De l'est méridional, comprenant le (20.kRhône et Loire. Lyonnais, le Dauphiné et l’'Au-32r. Isère, Drôme et Ardèche. vergne. 22. Cantal , Haute-Loire, Puy-de-Dôme. 6° De l’ouest méridional , comprenant la ( 23. Corrèze, Creuse et Haute-Vienne. Marche, PAngoumois , la Sain-9 24. Charente , Charente-Inférieure et tonge, etc. Dordogne. 7 3. POTESSS et Loire-Inférieure. pe au 17 ON T UT OT Mélanie é éd Carte figurative de la production tes Chevaux en France. R-422. Le Le + Ocean FAMILLE DES SOLIPÈDES. 423 et ceux qu'on emploie au service du roulage, par exemple ; 2° les chevaux gros ei vigoureux, qui galopent avec facilité et qui , sans avoir les formes élégantes , conviennent pour le service de la poste ; 3° les chevaux de luxe employés, soit comme mon- ture , soit comme chevaux de voiture. La race boulonnaise, qui se rencontre dans la Picardie et la Haute-Normandie , appartient à la première de ces catégories, et se fait remarquer par sa haute taille , le développement de ses muscles, ses formes empâtées et l’abondance de ses crins. La croissance de ces chevaux est hâtive , et , dès l’âge de deux ans , ils peuvent déjà travailler de manière à payer les frais de leur nourriture : aussi ne les vend-on que de 300 à 400 francs. La race franc-comtoise diffère peu de la précédente , mais est moins étoffée , moins musculeuse et plus longue de corps. Enfin la race poitevine est également très forte et est propre aux mêmes usages que les deux précédentes. La race bretonne , qui se trouve non-seulement dans la Bre- tagne , mais aussi dans le Perche, le Maine , etc., est celle qui fournit nos meilleurs chevaux de poste et de diligence. Enfin, parmi les chevaux, dits de race noble , on remarque les chevaux normands qui peuvent devenir de beaux chevaux de carrosse ou de bons chevaux de selle , suivant la manière dont ils ont été nourris pendant leur jeunesse. Le Limousin, l'Auvergne et la Lorraine, produisent aussi des chevaux de selle très esti- més , mais qui sont en général lents à croître et sont par con- séquent d’un prix élevé. D’après les renseignemens recueillis , il y a quelques années, par administration , il paraït que le nombre des chevaux exis- tans en France pouvait être évalué à environ un million six cent mille, dont à-peu-près les quatre-vingt-cinq centièmes étaient employés aux divers travaux de l’agriculture. Leur distribution , dans les diverses parties du royaume , est non moins inégale que celle de la production, comme on pourra s’en convaincre par les courbes ci-jointes. Depuis l’époque dont nous venons de parler, ce nombre a dù augmenter consi- dérablement , et la production des chevaux a repris de limpor- 25. Gironde, Lot, Lot-et-Garonne. 7° Du sud-ouest, comprenant la Guyenne } 26. Landes , Gers, Basses-Pyrénées. et la Gascogne. 27. Hautes-Pyrénées, Haute-Garonne et Ariège. 28. Tarn-et-Garonne , Tarn et Lozère. 29. Pyrénées - Orientales , Hérault et Aude. . Gard, Bouches-du-Rhône, Vaucluse, Var, Hautes et Basses-Alpes. 8° Du sud-est, comprenant le Langue- doc et la Provence. a nee [en © Ane: 424 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. iance en Normandie , ainsi que dans d’autres provinces du nord et du centre ; mais elle est loin de répondre aux besoins du pays, et nous sommes obligés, chaque année, d’en acheter un nombre considérable à l'étranger. Depuis 1824 jusqu’en 1829, on en a importé plus de cent six mille, ce qui, à raison de 500 fr. par cheval , prix moyen , représente une valeur d’environ 53 millions, ou plus de 8,800,000 fr. par an. C’est de Allemagne , de la Belgique et de la Suisse, que nous tirons presque tous ces chevaux. La France , par la densité de sa population , lactivité de son industrie et l’aisance générale qui y règne , est un des pays de l'Europe où le besoin des chevaux se fait le plus sentir; mais, si lon excepte l'Espagne et l'Italie , c’est l’un de ceux où il y en a le moins , comparativement au nombre des habitans. Dans la Grande-Bretagne , on estime que le nombre des chevaux est à celui des habitans , comme 1 est à 10, tandis qu’en France, ce rapport est d’environ 1 à 19. De toutes les parties civilisées de l'Europe , c’est le Brunswick, le Hanovre et POldembourg, où la production des chevaux , comparée à la population , et par conséquent jusqu’à un certain point aux besoins du pays, est la plus considérable. Sous ce rapport , la Suède , les Pays-Bas, l'Autriche, le grand-duché de Bade et quelques autres parties de l'Allemagne ne le cèdent que peu à l'Angleterre , tandis qu'en Espagne, il est à proportion sept à huit fois moindre. En Angleterre, le nombre de ces ‘animaux, si utiles à l’industrie et au bien-être des hommes , est environ trois fois plus considérable qu’en France pour une même éten- due de terrain. D’après ces divers faits, on voit combien cette branche im- portanie de notre industrie rurale est restée en arrière des be- soins toujours eroissans de notre civilisation. L'état de notre agriculture parait en être la principale cause ; mais, depuis quelques années , des combinaisons d’assolement, plus heu- reuses que celles qui avaient été usitées jusqu'alors , commen- cent à s’introduire, et il y a lieu d'espérer que leurs bons effets ne tarderont pas à se faire sentir sur la multiplication de nos ani- maux domestiques. L’âne se distingue essentiellement du cheval par ses longues oreilles , la houppe de poils dont l’extrémité de sa queue est garnie , et la croix noire ou brune formée par une ligne dorsale et une ou deux lignes transversales , situées sur les épaules. La patrie de ces deux animaux parait être la même, et aujourd’hui encore on trouve l’âne à l’état sauvage dans les grands déserts du centre de PAsie. | D à — _— FAMILLE DES SOLIPÈDES. 425 Dans l’état de nature, cet animal est de la grandeur d’un cheval de moyenne taille ; sa tête est lourde , ses oreilles moins longues que cêlles de nos ânes domestiques, ses jambes plus longues et plus fines, son corps plus comprimé et sa robe grise ou d’un jaune brunâtre. Les ânes sauvages vivent en troupes in- nombrables et changent de climats suivant les saisons. En hiver, ils descendent dans les parties chaudes de la Perse et de l'Inde, et, en été, se portent vers le nord et vont jusqu'aux monts Ourals, pour trouver des pâturages frais et abondans. On assure que ces iroupes;en traversant ainsi les landes, y laissent des traces ayant quelquefois une werste (ou environ un quart de lieue)de largeur. La vitesse de ces animaux est extrême , ils peuvent soutenirleur course rapide pendant plus long-temps que le meilleur cheval persan , et, pour se défendre, ils ont recours aux mêmes ma- nèges que les chevaux. La voix rauque et sonore de l’âne (appe- lée braire)parait tenir aux cavités laryngiennes dont il a été question plus baut‘et dans l’intérieur desquelles Pair résonne. D’après les témoignages historiques , il paraïtrait que l’âne a été réduit à l’état de domesticité, même avant le cheval; mais moins beau que lui et supportant moins bien le froid , il n’a pas reçu les mêmes soins , et, dans presque tous les pays, sa race a dégénéré. Dans la Perse et dans quelques autres contrées de l’orient, où l’on s’en sert plus que du cheval, on le choie et le climat est favorable à son développement: aussi n’y res- semblent-ils pas aux ânes chétifs et dégradés de nos cam- ‘pagnes. Sa taille est élevée , et la vitesse de ceux qu’on emploie à la monture est d’environ sept milles par heure. Dans le nord, il vient mal : on le méprise et on l’accable de mauvais traitemens ; cependant il ne laisse pas que d’y rendre à l’agriculture des services importans. Sa sobriété et son tempérament robuste sont de précieuses qualités pour les cultivateurs peu riches, et, si on iui reproche sa lenteur, il rachète ce défaut par sa patience et par sa force. La durée naturelle de la vie de ces animaux parait être à-peu- près la même que celle du cheval ; mais chez nous, le climat et les mauvais traitemens l’abrègent beaucoup. La gestation, comme celle du cheval dure onze mois, et il est rare que la mère mette bas plus d’un petit. Vers l’âge de trois ans, on le fait travailler, et c’est à l’âge de dix ou douze ans , que nos ânes commencent en général à perdre de leurs forces. C’est dans les départemens des Deux-Sèvres et de la Vienne, que l’on élève le plus de ces animaux, et qu’on possède les plus belles races. L’âne et le cheval produisent facilement des métis , qui participent des formes et des qualités des deux espèces dis- Mulets. Dzigguetai. 426 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. iinctes dont ils proviennent ; mais ils ne constituent pas une espèce intermédiaire: car ils sont toujours stériles , et par con- séquent leur race ne peut se perpétuer. Ces animaux bâtards sont appelés mulets; quelquefois on distingue sous le nom de bardeau ceux dont la mère est une ânesse. Ils supportent mieux la faim et la fatigue que le cheval, sont moins délicats sur la qualité des alimens , moins maladifs , peuvent porter des poids plus considérables, et ont le pied plus sûr: aussi, dans beaucoup de pays où les fourrages ne sont pas toujours abon- dans , en emploie-t-on un grand nombre ; en Espagne et er Ita- lie, par exemple. Dans le midi de la France, on s’en sert pour le labourage et les charrois , et c’est dans l'Auvergne et la partie voisine de la Guienne, qu’on en élève le plus. Jadis Pexportation de ces animaux pour l'Espagne était une branche lucrative du commerce de ses provinees ; mais , depuis quelque temps, elle a beaucoup perdu de son importance. Le lait d’ânesse est souvent ordonné comme aliment aux personnes maladives: il contient plus de sucre de lait et beau- coup moins de matières caseuses que le lait de vache. Il existe aussi, dans les déserts de l'Asie centrale , une troi- sième espèce du genre cheval, le dzigguetai , qui paraît être le hemionus ou mulet sauvage des anciens. Cet animal tient le milieu , pour les proportions , entre le cheval et l’âne, mais a les formes encore plus élégantes que le premier. Sa couleur est isabelle avec la ligne dorsale et la crinière noires , et sa queue, nue dans sa moitié supérieure, est terminée par une houppe de crins noirs. En hiver, son pelage devient épais, frisé et molleux comme celui du chameau. Il vit en troupes composées d’une vingtaine de jumens, de poulains et d’un mâle, qui en est le chef. Sa vélocité est si grande, qu’elle est devenue proverbiale chez les Mongols , et que c’est monté sur un dzigguetai, que la mythologie thibétaine représente le dieu du feu. On chasse cet animal pour sa chair et son cuir; mais, à moins d’être étourdi par le ventet la pluie, il ne se laisse que difficilement approcher, et en général on le prend dans des pièges ou bien on le tue, en se mettant à l'affût derrière quelque mammelon de terre voisin des prairies salées qu’il fréquente ; jusqu'ici on ne Pa pas réduit à l’état de domesticité. L'Afrique possède aussi trois espèces du genre cheval, le scbre , le couagga et le daurw. ” ORDRE DES RUMINANS. 427 Le zebre (fig. 141) a presque la forme d’un âne, dont il se dis- Fig. 141. tingue parles bandes transversales, d’un brunnoirâtre surun fondjaune,donttout son corps est Cou- vert. Il s’apprivoise avec quelques soins, mais n’a pas été ré- duiten domesticité, et se rencontre de puis lP'Abyssinie jus- qu’au cap de Bon- ne-Espérance: c’est lhippotigre dont il est question dans quelques passages des écrits des anciens. Le couagga ressemble davantage au cheval et ne présente de bandes transversales que sur les épaules et le dos. Son nom lui vient de son cri , qui ressemble à l’aboiement du chien. Il parait que les colons du voisinage du cap de Bonne-Espérance en ont habitué au trait, et qu'on en élève avec le bétail ordinaire, qu’ils défendent, dit-on , contre les hyènes et les autres ani- maux féroces de même taille. Le dau , qu'on appelle aussi onagga ou cheval de montagne, et qui n’est connu des naturalistes que depuis très peu de temps, est plus petit que l’âne et porte sur la tête, le cou et le tronc, des raies noires alternativement plus larges et plus étroites sur un fond isabelle. Ses jambes et sa queue sont blanches. ORDRE DES RUMINANS. Ces animaux, qui diffèrent des autres mammifères par un caractère physiologique des plus importans, se ressemblent tant entre eux , qu’ils ont l’air d’être presque tous construits sur un même modèle et qu’ils forment un des groupes les plus naturels et les mieux déterminés de la classe dont nous faisons ici l’histoire. Leur nom leur vient de la faculté singulière qu’ils ont de ramener dans la bouche, pour les mächer de nouveau, les ali- mens déjà avalés une première fois , faculté qui tient à la struc- ture de leur estomac. En effet , l’œsophage n’aboutit pas à une cavité stomacale unique comme chez les animaux ordinaires , Zébre. Couagga. Onagga. 428 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. mais communique directement avec plusiéurs poches dispo- sées de telle sorte que, lorsque les alimens avalés sont gros- siers, ils s’arrêtent dans un premier estomac, d'où ils remontent plus tard dans la bouche par une espèce de régurgitation, tandis que , lorsqu'ils sont réduits en une pâte molle, ils pénètrent plus loin, dans une cavité différente, où leur digestion s’achève. Les estomacs des ruminans sont au nombre de quatre: le premier, qui est le plus vaste de tous se nomme panse, ou her- Fig. 142. (1) bier (fig. 142 p). Sa surface in- terne est garnie de papilles , et re- vêtue d’une cou- che épidermique (Ag. 143 p) ; il oc- eupe une grande partie de l’abdo- men, particuliè- rement du côté gauche ; le se- cond estomac, appelé le bonnet (b), est petit et se ? trouve à droite de l’œsophage , et en avant de la panse, dont il ne semble, au pre- mier coup-d’œil , être qu’un appendice. A l’intérieur , la miem- Fig. 143. (2) brane muqueuse qui le tapisse for- e MEL... N 2808 AN q me une multitu- re de de replis dis- J posés ide facon à constituer des prete: mailles ou cel- lules polygones, semblables à des Core À rayons d’abeil- les ; le troisième = estomac, qui est moins petit que : le bonnet , est Py b pP placé à droite de (1) Estomacs du mouton :—e æsophage ;—p panse ;—& bonnet ;—f feuillet ; — g la gouttière qui conduit dans le feuillet ;—c caillette;—pypylore ;—d duodénum, (2) Estomacs d’un mouton, dont la moitié a été enlevée , pour en montrer l’in- térieur : les lettres indiquent les mêmes parties que dans la figure précédente. ORDRE DES RUMINANS. 429 la panse et a reçu le nom de feuillet, à cause des larges replis longitudinaux , qui en garnissent l’intérieur , et qui ressemblent aux feuillets d’un livre (/g. 142 f); enfin le quatrième estomac, qui est intermédiaire pour le volume, entre la panse et le feuil- let, se trouve à droite de cette dernière poche. Sa surface in- terne , irrégulièrement plissée , est continuellement humectée par un liquide acide , qui est le suc gastrique; et c’est à cause de la propriété que possède cette humeur de faire cailler le lait, qu’on donne à lorgane qui le renferme le nom de cazllette. Les trois premiers estomacs communiquent directement avec l’æsophage. Ce conduit s'ouvre d’abord presque également dans la panse et le bonnet, ei se continue ensuite sous la forme d’une gouttière ou demi-canal (#9. 143 g), qui longe la partie su- périeure du bonnet, et aboutit au feuillet, lequel, à son tour, com- munique avec la caillette. Cest dans la panse que les alimens, grossièrement divisés par une première mastication , s’accumulent , et ce n’est qu'après avoir été reportés dans la bouche etmächés une seconde fois, au en d’autres mots ruminés, qu’ils pénètrent dans le troi- sième et de là dans le quatrième estomac, siège de la véritable digestion. Au premier abord, on s'étonne de voir les alimens pénétrer tantôt dans la panse, tantôt dans le feuillet, suivant que la déglu- tition se fait pour la première fois ou que ces substances ont été déjà ruminées, et on est tenté d'attribuer ce phénomène à une es- pèce de tact presque intelligent , dont les ouvertures de ces di- verses poches seraient douées; mais les expériences récentes de M. Flourens montrent que ce phénomène curieux est une con- séquence nécessaire de la disposition anatomique des parties, et en donnent une explication aussi simple que satisfaisante. Lorsque l'animal avale des alimens grossiers et d’un certain volume , comme ceux dont il se nourrit habituellement, ces substances, arrivées au point où l’æsophage se continue sous la forme d’une gouttière (voy. fig. 143 g), écartent mécaniquement les bords de ce demi-canal , transformé ordinairement en un tube par la contraction de ses parois , et tombent dans les deux premiers estomacs placés au dessous ; mais, lorsque l’animal avale des boissons ou des alimens atténués et demi fluides, leur présence dans ce demi-canal ne détermine pas l’écartement de ses bords. Cette portion terminale de l'æœsophage conserve par conséquent la forme d’un iube et conduit les alimens en totalité ou en majeure partie dans le feuillet où elle se ter- mine. C’est par conséquent l’état d'ouverture ou d’occlusion de cette portion de l’æsophage , qui détermine lPentrée des alimens dans les deux premiers estomacs ou leur passage dans la troi- 28 430 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. sième cavité digestive, et c’est l’aliment lui-même qui décide de cet état, selon qu’il est assez volumineux ou non, pour dilater l’æœsophage, naturellement affaissé, ou pour couler dans la rigole toujours ouverte, par laquelle ce conduit mène vers le féuillet. Or, les alimens, lors de leur première déglutition, nesontqu’imparfaitement divisés et consistent en fragmens gros- siers et assez volumineux , tandis qu'après avoir été ruminés, ils sont transformés en une pâte molle et demi fluide , et cette circonstance suffit par conséquent pour déterminer leur chute dans la panse ou leur passage dans le feuillet. Quant à l’espèce de régurgitation régulière par laquelle les alimens contenus dans la panse et le bonnet remontent dans la bouche pour être ruminés , elle est généralement attribuée à l’action du bonnet lui-même , qui, dit-on, saisit une portion de la masse alimentaire , la comprime de manière à en former une sorte de pelotte arrondie et la pousse dans l’æœsophage, dont les contractions vermiculaires de bas en haut achèvent le phénomène ; mais, d’après les nouvelles expériences du physiologiste que nous venons de citer, il paraïtrait que la panse et le bonnet, en se contractant, poussent la masse ali-. mentaire qu’ils contiennent entre les bords du demi-canal œsophagien , lequel ,en se contractant à son tour, en saisit une portion , la détache et en font une pelotte destinée à remonter le long de l’æœsophage. La panse, avons-nous dit, est extrêmement grande; mais elle ne présente pas toujours les mêmes dimensions, et les changemens qu’on y observe montrent combien les organes des animaux peuvent être modifiés par les circonstances où ils sont placés. En effet, pendant que les ruminans tettent et ne vivent que de lait, la panse est moins grande que la caillette, et elle ne prend son énorme volume qu’à mesure qu’elle recoit dans son intérieur de lherbe, substance peu nourrissante et dont l'animal est par conséquent obligé de manger des masses con- sidérables. Tous les ruminans se nourrissent essentiellement d'herbes ou de feuilles : aussi ont-ils le canal intestinal extrêmement dé- veloppé. Sa longueur n’est jamais moins de onze fois celle du corps, etatteint, chez quelques-uns de ces animaux, vingt-deux ou même vingt-huit fois cette mesure. Leur cœcum et leurs gros intestins sont peu boursouflés. Le système dentaire présente, dans cette famille , la plus grande uniformité. Il n’existe jamais d’incisives à la partie antérieure de la mâchoire supérieure, où elles sont remplacées par un bourrelet calleux , et les incisives inférieures sont presque toujours au nombre de huit(quelquefois on n’en trouve que six). ORDRE DES RUMINANS. Fig. 144. . 431 Entreles incisivesetles molai- res est un espace vide (fg. 144) oùse trouvent, dans quelques genres seulement , deux ca- nines ; enfin les molaires, presque toujours au nombre de six partout , ont leur cou- ronne large et marquée de deux doubles croissans , dont la convexité est tournée en dedans dans les supérieures et en dehors dans les inférieures. Il -est aussi à noter que , lors de la mastication , le mouvement des mâchoires se fait presque circulairement. Sous le rapport des organes du mouvement > On remarque Fig. 145. (1) Fig. 146. également la plus grande simili- tude parmi les divers ruminans. Chez tous ces animaux, les pieds (/g. 145) sont terminés par deux doigts dont les deux os métatar- siens et métacarpiens sont réunis en un seul os, nommé canon {e): quelquefois il existe en outre, à la partie postérieure du pied , deux petits ergots, vestiges de doigts la- téraux (/g. 146). Chez tous les ru- minans , excepté les chameaux et les lamas , les sabots qui envelop- pentenentier la dernière phalange des deux doigts de chaque pied sont grands etse regardent par une face aplatie, en sorte qu’ils ont l'air d’un sabot unique , qui au- rait été fendu. C’est de là que vient le nom de pieds fourchus, qu’on a donné à ces animaux ; enfin leurs jambes sont fines, sèches et longues; mais le fémur et l’humérus sont courts. Leurs mamelles sont situées entre leurs cuisses. Les yeux des ruminans sont en général grands, et la pupille a la forme d’un carré long, transversal ou oblique ; les oreilles sont ordinairement longues , en forme de cornet » et très mo- biles ; leur cerveau est peu volumineux, comparativement à la (1) Fig. 145, pied d’un cerf: — à jambe ; — 2 os du carpe; — c métacarpe ou canon ; — d phalanges ; — e phalangines; — f phalangettes. Fig. 146, pied de cerf su de profil. 28. 432 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. masse du corps, et laisse le cervelei presque entièrement à découvert, mais présente des sillons nombreux. Leur intelli- gence est très bornée. Ceux qui ont la force en partage sont en général d’un naturel farouche , tandis que les plus faibles , et c’est le grand nombre, sont craintifs et presque uniquement oc- cupés à paitre ou à se soustraire aux poursuites de leurs nom- breux ennemis. È Les services que les ruminans rendent à l’homme sont im- menses: il peut manger de tous ces animaux, et c’est d’eux qu’il tire presque toute la chair dont il se nourrit. Leur lait nous fournit des alimens excellens; leur graisse, qui, par le refroidissement ,se durcit plus que celle des autres quadru- pèdes , et qui porte le nom de swif, a de nombreux usages dans l’économie domestique et dans l’industrie. Leur peau, rendue imputréfable par le tannage, constitue presque tout le cuir dont on fait une consommation si énorme. Enfin leurs cornes, leurs os et jusqu’à leurs intestins, nous sont utiles, et, pendant leur vie, plusieurs de ces animaux, employés comme bêtes de somme, sont également précieux pour le commerce et pour lagri- culture. - Cet ordre peut être divisé en deux sections, faciles à distin- guer par l’existence ou l’absence de cornes chez le mâle, sinon dans les deux sexes. SECTION DES RUMINANS SANS CORNES. Ces animaux diffèrent des ruminans ordinaires , non-seulc- ment par l’absence de cornes, mais aussi par la disposition äu système dentaire : ils forment deux groupes, qui diffèrent entire eux, à plusieurs égards, mais pour la distinction des- quels il suffit de tenir compte du nombre des incisives. Bans l’une de ces subdivisions , comprenant les CHAMEAUX , etc., on n’en compte que six à la mâchoire inférieure , tandis que, dans la seconde, formée par les CHEVROTAINS, il en existe huit comme chez les ruminans à cornes. TRIBU DES CHAMEAUX. Les chameaux et les lamas sont de tous les ruminans ceux qui se rapprochent le plus des pachydermes , et qui offrent dans leur structure le plus d'anomalies. Nous avons déjà vu que le TRIBU DES CHAMEAUX. 433 nombre de leurs incisives inférieures est de six, tandis que, chez tous les autres ruminans, il en existe huit: ils ont aussi deux incisives en haut et des canines à chaque mâchoire , et seulement vingt ou vingt-deux molaires , au lieu de vingi- quatre. La conformation de leurs membres est également carac- téristique ; car ils n’ont que des sabots très petits et symétriques, comme ceux de beaucoup de pachydermes, et leurs pieds, qui par conséquent ne sont pas fourchus , posent à terre , dans toute la longueur des doigts. On reconnaît aussi ces animaux à la forme générale de leur corps ; leur cou est très long , leur croupe faible ; leurs jambes sont mal proportionnées , leurs or- bites saillans et leur lèvre renflée et fendue. Leur sobriété est remarquable : ils supportent la faim et la soif pendant un temps très considérable , et on attribue cette dernière faculté à lexis- tence de poches s’ouvrant dans la panse, et contenant de grandes cellules , qui paraissent servir de réservoir pour une partie de l’eau, que l'animal boit, et qui pourraient bien aussi en exhaler. Les autres ruminans ne présentent rien de semblable. Les CHAMEAUX PROPREMENT DITS Ont le dos chargé de loupes de graisse , disposition qui n'existe pas chez les lamas : ils dif- fèrent ausside ces derniers par l’exisience d’une peau calleuse et comme cornée , qui réunit en-dessous leurs doigts et consti- tue une sorte de semelle très dure. Il est peu de mammifères, dont l'aspect soit plus disgracieux; leur corps est épais et dif- forme ; leurs jambes, les postérieures surtout, paraissent trop faibles pour le poids qu’elles ont à soutenir ; leur cou est long et leur tête petite, mais lourde dans ses proportions ; leur allure est pesante et gênée , et souvent leur peau est, pen- dant une grande partie de l’année, presque nue et couverte d’une espèce d’efflorescence dartreuse. Mais leurs membres sont loin d’être réellement aussi faibles qu’ils le paraissent; et la lenteur de ces animaux n’est qu'apparente : ils sont très ro- bustes ; leurs sens sont très délicats, l’odorat surtout: ils ont beaucoup de mémoire et sont sans contredit les plus intelligens des ruminans. Ils se prétent facilement à l'éducation et sont disposés à la confiance ; mais la violence les révolte, et ils ne tardent jamais long-temps à se venger des mauvais trailemens. Presque tous sont passés sous l'empire de l’homme. Leur crois- sance dure environ sept ans, et le terme de leur vie parait être de quarante ou cinquante ans. Les chameaux appartiennent aux parties chaudes ou tempé- rées de l'Asie et de FPAfrique. On en connait deux espèces : le chameau à deux bosses , qui est originaire du centre de lPAsie, et le cÆameau à une bosse, qui s’est répandu dans le nord de l'Afrique et les contrées de l'Asie voisines de l’Arabie, et qui Chameaux proprement dits. Chaimeau à deux bosses. Chameau à uue bosse. 434 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. est ordinairement appelé dromadaire, bien que ce nom nw’ap- partienne réellement qu'à une variété particulièrement légère et propre à la course. Le chameau à deux bosses est plus grand que l’autre : sa taille ordinaire est d'environ sept pieds au garrot. Son poil, de cou- leur marron, est épais et généralement court, mais forme autour des jambes de devant et au cou d’épaisses manchettes et un large fanon. On en voit quelques individus à lPétat sau- vage dans le désert de Shamo, vers les frontières de la Chine. On l’emploie comme bête de somme dans toute lPAsie cen- trale : il marche assez bien dans les terrains humides, et peut supporter un froid intense. On assure que les plus forts peuvent porter jusqu’à douze et même quinze cents livres; mais leur charge ordinaire n’est que d'environ trois cents livres. Le chameau à une bosse parait être originaire de l'Arabie: il a des formes moins massives que l’espèce précédente, et on en connait plusieurs variétés : une, presque aussi grande que le chameau à deux bosses, est employée à porter des fardeaux et peut faire une dizaine de lieues par jour, chargé de mille à douze cents pesant ; une autre, plus petite et propre surtout à la course, fait jusqu’à trente lieues par jour. La sobriété de ces- animaux est presque incroyable: ils soutiennent ces longues marches pendant huit ou dix jours de suite , sans autre aliment que les herbes du désert qu’ils broutent en passant, et si le voyage se prolonge davantage , il suffit, pour les nourrir, de leur donner quelques dattes ou un peu de fleur de farine, réduite en pâte. Le chameau à deux bosses ne supporte pas aussi bien Pabstinence; mais il peut , de même que celui-ci , se contenter d’une nourriture des plus chétives , et il paraïîtrait que tous ces animaux doivent en partie cette faculté précieuse aux bosses , qui déforment leur dos ; car ces protubérances sont des amas de graisse, qui est absorbée peu-à-peu, lors d’une longue abstinence, et qui doit servir à l’entretien du travail nutritif, de la même ma- nière que la graisse, dont le corps des ours et autres animaux hibernans est chargé lorsqu'ils se retirent dans leurs tanières, pour dormir pendant toute la saison froide ; en effet, lorsque les chameaux sont bien nourris , leurs bosses sont fermes et rebendies ; mais, lorsqu'ils arrivent d’un long et pénible voyage, ces protubérances sont flasques et retombent de côté, comme si elles étaient à moitié vides. Ce n’est pas seulement comme bête de somme et de trait que les chameaux sont utiles aux peuples qui les possèdent. Leur chair et leur lait sont employés comme alimens, et leurs poils servent à fabriquer des vêtemens. = TRIBU DES CHAMEAUX. | 455 Les LAMAS(Anchenia) sont les chameaux du Nouveau-Monde ; mais , s'ils n’ont pas la laideur de ceux de l'Asie, ils n’ont aussi . Fig. 147. ni leur taille, ni leur force. Leurs propor- tions sont plus légères:ils n’ont pas de bosses, et leurs doigts ne sont pas réu- nis et conser- vent de la mo- bilité, ce qui leur donne la faculté de gra- vir les rochers avec la même agilité que les chèvres. On en connait deux es- pèces : le guana- co et la Vigogne. Le quanaco se rencontre dans les hautes montagnes de l'Amé- rique du Sud : il est de la taille d’un cerf, et son pelage est gros- sier et châtain. Une variété de cette espèce, réduite depuis long-temps à l’état de domesticité , est connue sous le nom de Lama ou Llama (fig. 147). A l’époque de la conquête du Pérou par les Espagnols, c'était la bête de somme de ce pays , et de nos jours, on l’emploie encore aux mêmes usages: il porte jusqu’à cent cinquante livres, mais ne fait que de très petites journées. Une autre variété de guanaco domestique est l’a/paca Où paco, dont la ioison est composée de poils laineux très longs qui, pour la finesse et l’élasticité , ne le cèdent guère qu’à la plus belle jaine des chèvres du Thibet. La vigogne , qui est grande comme une brebis, est également remarquable par sa laine fauve , d’une douceur et d’une finesse admirables. Elle habite l’étage des neiges perpétuelles de la longue chaine des Andes , au Pérou et au Chili; on lui fait une chasse active; car sa laine est employée à la fabrication «étoffes précieuses. Genre des Lu 1arias. Guanaco, 7; one Vigogne. 436 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. TRIBU DES CHEVROTAINS. Genre che- Ce petit groupe ne se compose que d’un seul genre , et diffère vrotain. bien moins que le précédent, des ruminansordinaires. Les chevro- tains ont en effet le pied fourchu et les dents incisives et mo- Fig. 148. laires en même nombre que ces derniers , dont ils diffèrent par l’absence de cornes, par lexisten- ce de deux longues canines à la mà- choire supérieure, qui, chezle mà- le , sortent de la bouche(fg. 148), et par la présence d’un péroné grèle , mais distinct, tandis que, chez ious les autres animaux de cet ordre, cet 05 manque complètement ou est réduit à l’état d’un simple stylet formant la malléole externe. Par la forme générale de leur corps, ils res- semblent assez aux biches de nos bois et sont remarquables par leur élégance et leur légèreté. Ils habitent les montagnes du midi de l'Asie et les îles voisines. | Clevrotain Une espèce de chevrotains mérite surtout de fixer notre at- Aie tention; car c’est elle qui fournit le musc : c’est un animal de la taille d'un petit chevreuil de six mois , presque sans queue et couvert de poils si gros et si cassans, qu’on pourrait presque leur donner le nom d’épines. Il est solitaire, nocturne , et habite les montagnes rocheuses de PAsie centrale , d’où descendent tous les plus grands fleuves de ce vaste continent, et il égale, pour sa timidité , sa légèreté et la sûreté de son pied , le cha- mois et le bouquetin. Au-dessous du bassin , il existe chez le mâle une poche remplie de muse, substance solide, granuleuse, d’une couleur brune-jaunâtre , d’une nature grasse et d’une odeur souvent très forte , qui est employée comme médicament et comme parfum. Les chevrotains qui habitent vers le nord, dans les monts Altaï, par exemple , ne fournissent qu’un musc peu odorant : le plus estimé vient de Tunquin. Les autres chevrotains n’ont pas de poches moschifères. L’une de ces espèces a reçu le nom de pygmee, à cause de sa petite taille. L) __ RE OO “ SECTION DES RUMINANS A CORNES. 437 . SECTION DES RUMINANS A CORNES. Les ruminans dont se compose cette division, qui est par- faitement naturelle, ont tous huit incisives en bas et six mo- Fig. 149. laires de chaque côté et à chaque mâchoire (fig. 149 ): quelques-uns (certains cerfs) ont à la mâchoire supérieure des canines analogues à celles des chevrotains; mais ce n’est guère que chez le mâle , et tantôt on les trouve, tantôt elles manquent dans les es- pèces les plus voisines d’un même genre , de sorte que ce caractère n’a ici aucune importance. Ce qui distingue au premier coup-d’œil tous ces animaux des autres ruminans , et même des mammifères des autres ordres, ce sont les &eux cornes, qui, chez le mâle au moins, sur- montent le front , et qui consistent chacune en un prolonge- ment plus ou moins long de los frontal(fg. 149). La structure de ces appendices varie. Tantôt la cheville os- seuse qui en constitue l’axe est recouverte par la peau, qui, dans ce point , ne diffère pas de celle du reste de la tête, et qui ne se détruit pas ; tantôt la portion osseuse des cornes , d’abord revêtue d’une peau velue, s’en dépouille, et, après être restée à nu pendant un certain temps, tombe elle-même , pour faire place à une nouvelle corne, destinée à éprouver à son tour les mêmes changemens : ces cornes caduques se nomment bois ; enfin d’autres fois l’axe osseux croit pendant toute la vie, ne tombe jamais et est revétu d’une espèce de gaine, composée d’une substance élastique , appelée corne, qui est analogue à celle des ongles , et qui croit par couches. On donne le nom de cornes creuses à ces cornes revétues ainsi d’un étui, qui semble formé de poils agglutinés. Les différences que nous venons de signaler dans la structure des cornes servent de base à la division de cette famille en trois tribus naturelles, savoir: les ruminans à cornes caduques où bois , IS ruminans à cornes persistantes ct velues et les rumi- nans à cornes creuses. 438 ZOULOGIE DESCRIPTIVE. TRIBU DES RUMINANS A CORNES CADUQUES OU BOIS. Genre cerf. Ce groupe ne se compose que d’un seul genre, celui des CERFS (Cervus). Ces animaux sont en général remarquables par la lé- Fig. 150. gèreté et l’élé- gance de leurs formes , la grâce de leurs mouve- mens , et la rapi- dité de leur cour- se. Leur corps est svelte et ar- rondi ; leurs jam- bes minces et élevées sans être faibles , et leur pelage propre et luisant. Le plus ordinaire- ment ils n’ont que des poils secs et cassans qui présentent à leur base un rétrécissement parti- culier ; enfin les bois , dont la tête du mâle est ornée, n’existent chez la femelle que dans une seule espèce (le renne). Le mode de formation et de renouvellement de ces espèces de cornes est très simple. À un certain âge, il se développe de chaque côté de los frontal un prolongement , dont la formation peut être comparée à celle des tubercules , connus en médecine sous le nom dexostoses , ou à celle du caZ osseux , qui se dépose autour des extrémités des os ordinaires dans les cas de fracture, et qui en détermine la consolidation. Ces protubérances , dont le tissu est très compacte , croissent rapidement et soulèvent la peau qui les recouvre. Celle-ci, dans un état voisin de celui de inflammation , reçoit une grande quantité de sang à l’aide de vaisseaux nombreux qui sillonnent la surface du bois; mais bientôt il se forme à la base du prolongement osseux un cercle de tubercules, qui, en grossissant, comprime ces vaisseaux nourriciers el les oblitère , et l'enveloppe cutanée de la corne, ne recevant plus de sang, meurt, puis se dessèche et tombe. Le bois est alors à nu et ne tarde pas à éprouver le sort de tout os, qui est dépouillé des parties molles environnantes , et TRIBU DES RUMINANS A CORNES CADUQUES. 439 reste exposé à l'air ; ce qui a lieu dans bien des cas de blessure chez l’homme a lieu ici par suite des phénomènes que nous venons de décrire, L’os est frappé de necrose, meurt et finit par se détacher du crâne et par tomber. L'animal reste alors sans armes ; mais , peu de temps après (ordinairement vingt- quatre heures), une pellicule mince recouvre la plaie formée par la chute du bois, et bientôt un nouveau prolongement osseux s’élève à la place de ancien. En général le nouveau bois ac- quiert des dimensions plus considérables que celui auquel il succède ; ordinairement le nombre des branches est aussi plus considérable ; mais sa durée n’est pas plus longue ; etil passe par les mêmes phases que le premier. C’est en général au printemps que ce phénomène curieux a lieu , et presque toujours le renouvellement du bois se fait régulièrement chaque année. Du reste il semble exister un rap- port évident entre l’époque à laquelle il s’effectue , et l’activité périodique des fonctions de reproduction ; car, chez les cerfs, où le rut n’est pas un état de crise violent et limité, les cornes persistent plus d’une année. Les cerfs habitent pour la plupart les forêts de haute futaie, et en général ne s'élèvent pas très haut sur les pentes des mon- tagnes. Les uns vivent isolés, les autres en troupes nom- breuses. Les premiers sont susceptibles de s’apprivoiser jusqu'à un certain point (les femelles surtout); mais ils restent en gé- néral défians , tandis que les autres sont plus disposés à se sou- mettre à l'homme, et peuvent même devenir domestiques. Ces animaux sont répandus dans des contrées très diverses. L’élan et le renne sont communs au nord des deux continens ; le cerf commun , le daim et le chevreuil, sont propres à l'Europe et à l'Asie ; enfin d’autres espèces habitent exclusivement le sud de l'Asie ou l'Amérique. La forme de leur bois fournit des carac- tères pour les distinguer. Le cerf commun (fig. 150) a les bois ronds et le pelage d’un gris brun uniforme en hiver, brun-fauve, avec une ligne noirâtre, et de chaque côté une rangée de petites taches fauves, päles le long Cerf com- mu. de l’épine du dos en été. Dans le premier âge, il est fauve ta- . cheté de blanc, et est alors appelé fon. À six mois environ, deux bosses , premiers vestiges du bois , commencent à se montrer sur l'os du front, et le jeune animal prend alors le nom de ere; mais ce n’est que pendant la seconde année , que les bois se développent réellement : ils constituent alors une tige simple, et se nomment dague ; l’année suivante, les branches ou andouillers se forment sur la face antérieure de la tige principale ou merrain , enfin , à la quatrième année, les bois se couronnent d’une sorte d’empaumure garnie de pointes, Cerf du Ca- nada. Daim. €Chevreuil, 440 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. dont le nombre augmente avec les années. C’est au printemps que la chute de ces cornes arrive, et c’est pendant l’été qu’elles repoussent. Les vieux cerfs mettent bas leurs boisles premiers, vers le mois de février, et les plus jeunes en mars ,avril et même mai. Tousse cachent alors dans les taillis, d’où ilsne sortent que lorsqu'ils ont déjà la tête ornée d’un bois nouveau, qui n’est en- tièrement développé et durci que vers le mois d’août : alors com- mence la saison du rut, qui dure environ trois semaines , et qui est pour ces animaux un temps d’excitation et de fureur presque incroyable. Le cerf, d'ordinaire si paisible et si timide, devient alors dangereux, même pour les hommes , il ne dort plus, mange à peine et court en tous sens dans les forêts, qu’il fait retentir de sa voix forte et âpre. Après l’époque du rut, les cerfs sont d’une faiblesse extrême, et se retirent dans les lieux abon- dans , pour se refaire; pendant lhiver, les mâles et les femelles se réunissent en grandes troupes. La biche porte huit mois, et met bas en mai ou juin : son faon la suit pendant tout l’été, et si des chiens le poursuivent, elle se présente et se fait chasser elle- même, pour le préserver du danger. Les anciens atiribuaient à ces animaux une vie d’une longueur prodigieuse ; mais, dans le fait, ils ne dépassent guère vingt ans. } Le cerf habite les forêts de toute l’Europe et de l'Asie tempé- rée. Sa chasse a été de tous les temps lexercice favori des grands. Pour se soustraire à la poursuite des chiens, l'animal a recours à des ruses variées; tantôt il passe et repasse sur la voie, pour leur faire perdre la piste, d’autres fois, pour leur donner le change, il sefait accompagner d’autres bêtes, ou bien fait un grand saut de côté, se couche sur le ventre, et laisse passer devant lui ses ennemis. Sa dernière ressource est en général dese plonger dans l'eau. Le cerf est alors aux abois, et, quand les chiens l’atteignent, il ne cherche plus qu’à se dé- fendre avec ses cornes ,armes dangereuses pour ses adversaires, mais qui ne lui suffisent pas pour préserver sa vie de leurs at- taques acharnées. Le cerf du Canada ressemble beaucoup au nôtre, mais il est plus grand, et ses cornes ne prennent jamais d’empaumure. Le daim, qui parait être originaire de la Barbarie, mais qui est devenu commun dans tous les pays de l'Europe, se distingue facilement des précédens par la forme des bois , qui, à leur base, sontronds et armés d’un andouiller pointu , mais sont aplatis et dentelés en dehors dans le reste de leur étendue. Ses mœurs sont analogues à celles du cerf commun. Sa taille est moindre, et son pelage, brun-noirâire en hiver, est fauve, tacheté de blanc en été. Le chcvreuil est le plus petit des cerfs d'Europe. Ses bois, ns. TRIEU DES RUMINANS A CORNES CADUQUES. 441 veu développés et ronds s'élèvent perpendiculairement au-des- sus de sa tête , et ne présentent que deux andouillers. Son pelage varie , mais est ordinairement d’un brun roux. Il se plait dans les lieux élevés et vit par couples dans les forêts. Son bois tombe en automne et il entre en rut en novembre. La gestation est de cinq mois et demi, ei la chevrette met bas au mois d'avril deux petits, l’un mâle , l’autre femelle, qui restent avec leurs parens jusqu’à ce qu’ils aient eux-mêmes une famille. La durée de la vie de ces animaux est de douze à quinze ans, ei leur chair est très estimée. Plusieurs espèces très voisines de notre chevreuil se trouvent en Amérique et en Asie. L’élan estle plus grand des animaux de ce genre : sa taille dé-- passe quelquefois celle d’un cheval. Ses bois, qui s’écartent hori- Fig. 151. zontalement de la tête , forment deux grandes lames aplaties et profondément dentelées au bord antérieur (f#g. 151): leur poids s'élève quelquefois à cinquante livres, et, pour le supporter, cet animal a reçu de la nature un cou plus court et plus robuste que celui des autres cerfs : il est cependant plus haut sur jambes que la plupart d’entre eux, ce à terre , de se mettre à genoux ou d'écarter les jambes ; mais il se nourrit principalement de feuilles et de graminées élevées. Il se plait dans les forêts basses et marécageuses , et habite le nord de l’Europe, de PAsie et de l'Amérique. Cest un animal lourd, qui est loin d’avoir la grâce et la beauté de la plupart des cerfs: il est très farouche très paisible , à moins d’être irrité par des blessures ou d’être en rut ; sa grande force le rend alors redoutable, et on Pa vu souvent tuer un chien ou un loup d’un seul coup du pied de devant. Pour se soustraire à la piqûre des insectes, il se plonge quelquefois dans l’eau et y reste pendant tout le Jour, ayant seulement ies narines au-dessus de la surface du liquide. Sa peau est précieuse pour les ouvrages de chamoiserie et est employée par les Indiens du nord de PAmérique comme vête- ment. qui le force, lorsqu'il veut paitre- Elan. 442 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. Renne. Le renne diffère des autres cerfs , en ce qw’il existe des bois chez la iemeile(#g. 152) aussi bien que chez le mâle. Ces appendices, divisés en plusieurs Fig. 152. branches, sont d’a- bord grèles et poin- tus , mais finissent , avec l’âge , par se terminer ‘en pal- mes élargies et den- telées. Sa taille est à-peu-près celle de notrecerfcommun; mais il est plus tra- pu. Ses jambes sont plus grosses et plus courtes, et son poil, en partie laineux et brun en été, de- vientpresque blanc en hiver. Il habite les contrées glacées des deux continens. et rend aux peuples hyperboréens les services les plus grands ; en effet, le renne est de- venu pour eux un animal domestique, qui leur sert comme bête de trait et de somme , qui leur fournit par son lait et sa chair une nourriture précieuse, et dont la peau est pour eux un vêtement chaud et solide. La nourriture de ces animaux consiste princi- palement en une espèce de lichen (appelé Zichen rangiferinus), qui est presque la seule production végétale qui se développe pen- dant le long hiver des régions polaires , et c’est principalement cette circonstance qui les rend si utiles , car elle permet aux Lapons et aux Samoïèdes d’en élever des troupeaux nombreux. Le froid est en quelque sorte leur élément. Le climat de Saint- Pétersbourg leur est déjà insupportable par sa chaleur, et, en Laponie même , on est obligé de les conduire dans les mon- tagnes pendant l'été. Chaque renne donne par jour une livre de lait, qui sent un peu le suif, mais dont on fait du fromage, qui est le principal aliment des Lapons pendant leurs voyages. La chair d’un de ces animaux suffit à la nourriture de quatre personnes pendant une semaine. La peau de leur front, comme étant la plus solide, est employée pour faire des souliers, et celle des autres parties du corps pour des habits. Leurs tendons tien- nent lieu de fil, et leur vessie de bouteilles ; enfin les Samoïèdes fontencore avec leur peau des voiles pour leurs bateaux. Employé TRIBU DES RUMINANS A CORNES VELUES. 443 comme hète de trait, le renne est d’une rapidité prodigieuse : Il fait de six à sept milles de Suède sans se reposer ; mais il n’est pas toujours docile , et lance quelquefois à son maitre des coups de pieds violens. TRIBU DES RUMINANS A CORNES VELUES ET PERSIS- TANTES. Cette division ne se compose, comme la précédente, que d’un seul genre , celui des GIRAFES ; mais , au lieu de renfermer une vingtaine d'espèces , elle n’en contient qu’une seule (#g. 153). Les cornes des girafes sont de petits prolongemens osseux, de forme conique , qui, dans le jeune âge , sont simplement Fig. 153. articulés avec le fron- tal , mais qui, par la suite , s'y soudeni complètement , et qui ne se dépouillent jamais de la peau velue dont elles sont recouvertes. AU Mmi- lieu du chanfrein est un tubercule ou troi- sième corne , de mé- me nature que les précédentes , mais plus large et beau- coup plus courte. Ces animaux sont suriout remarqua- bles par la longueur de leur cou et la hau- teur de leurs jambes de devant ; leur tête, qui est très petite ,se trouve à environ dix- huit pieds du sol : mais leur train de derrière est plus court que celui de devant, et leur corps est par conséquent très oblique, ce qui rend leur long cou plus facile à porter. Leur robe est bien lisse et d’une couleur grise, parsemée de taches anguleuses fauves. Ils sont d’un caractère doux et timide , vivent en petites troupes de cinq ou six individus et courent avec une grande vitesse, et si la fuite leur est impossible , se défendent par des ruades si vigoureuses, Girafe. Genre anti- lope. Gazelle. 444 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. que souvent ils triomphent même des attaques du lion. Les feuilles des arbres constituent leur principale nourriture. Ils habitent le midi de PAfrique. TRIBU DES RUMINANS A CORNES CREUSES. Les ruminans dont les cornes sont enveloppées d’une gaine élastique semblable à des poils agglutinés, ne se laissent diviser que d’après des caractères peu importans. La différence la plus grande que l’on remarque dans leur organisation dépend de la substance du noyau osseux de ces prolongemens frontaux. Chez les uns, elle ressemble à celle du bois des cerfs, et ne présente dans son intérieur ni pores , ni cellules, tandis que, chez les autres, eile est creusée de cellules qui communiquent avec les sinus frontaux. La première de ces dispositions est propre aux antilopes ; la seconde se rencontre chez les chèvres, les moutons et les bœufs. Les ANTILOPES ( Antilope) sont des animaux, dont la taille est en général élancée et légère ,et dont les cornes sont presque toujours rondes et marquées d’anneaux saillans ou d’arêtes en spirale : ils ressemblent aussi, pour la plupart, aux cerfs par la vitesse de leur course et par l’existence de fossettes creusées au-dessous de l'angle interne de l'œil, et nommées Zarmiers. La plupart des antilopes ont aussi , à l’articulation du poignet , une forte touffe de poils raides et saillans, que l’on appelle rosse. On connaît un grand nombre de ces animaux, que l’on dis- üngue principalement d’après la forme de leurs cornes. En général,1ils sont doux et vivent en troupes nombreuses ; on en trouve dans les deux hémisphères. Parmi ceux dont les cornes , annelées et à double ou triple courbure, se terminent par une pointe dirigée en avant, en de- dans ou en haut , on remarque surtout la gazelle, dont la grâce Fig. 154. et la beauté sont devenues prover- biales chez les orientaux. Elle est de la taille d’un chevreuil ; son pelage est fauve-clair en dessus, blanc en des- sous ; ses cornes , grosses et rondes, sont moins fortes chez les femelles que chez les mâles; enfin son regard est d’une douceur extrême , et sa légèreté est des plus grandes : elle est répan- äue depuis l'Arabie jusqu'au Sénégal, et vit en troupes innombrables, qui servent Ge pâture ordinaire aux lions et aux panthères. TRIBU DES RUMINANS A CORNES CREUSES. 445 La corinne , le kevel, qui habitent aussi l'Afrique, le dseren des Mongols, la gazelle à bourse, qui remplit de ses troupes le midi de l'Afrique, et le saïga , qui habite les landes du midi de la Pologne et de la Russie, ainsi qu’une partie de l'Asie , et qui se réunit quelquefois en troupes de plus de dix mille individus , sont des antilopes , qui ne diffèrent que peu de la gazelle. Chez d’autres , tels que l’antilope des Indes , les cornes sont annelées comme chez les précédens , mais présentent une triple courbure. Chez le ubaz de la Barbarie et le caama du Cap , leur double courbure est en sens inverse de celle des précédentes : et leur pointe est dirigée en arrière. Il en est aussi dont les cornes sont droites et moins longues que la tête , lantilope lai- neuse du Cap et le sauteur des rochers , par exemple, d’autres dont les cornes sont une arête spirale, etc. , et on en connait même dont les cornes sont au nombre de quatre. Le chamois est aussi une espèce d’antilope , mais ses cornes sont lisses et recourbées brusquement en arrière près de leur pointe : il est de la taille d’une grande chèvre , et a le pelage brun-foncé. Son habitation est dans les parties les plus impra- ticables des grandes montagnes boisées de l'Europe :il y vit par troupes de quinze à vingt, ou même davantage ,et ne se montre guère que le matin et le soir. Sa timidité est extrême , et son agilité encore plus grande : il bondit de rocher en rocher avec une force et une adresse admirables, et fuit l’homme, dès qu’il l’aperçoit ; mais, lorsqu'il se trouve cerné par les chasseurs, il se Jette sur eux et les renverse souvent dans les précipices , aux bords desquels ils sont obligés de le suivre. Sa peau ferme et souple était jadis très employée pour les vêtemens ; mais aujour- d’hui qu’il est devenu rare, on la remplace par celle du mouton, du daim , etc. p Le gnou est un animal très singulier, que l’on range égale- ment parmi les antilopes, mais qui ressemble à un petit cheval par la forme de son corps, la disposition de sa queue et sa crinière , et qui porte sur la tête des cornes assez semblables à celles du buffle du Cap. Il habite les montagnes du midi de l'Afrique. Les ruminans à cornes creuses, qui ont le noyau osseux de ces prolongemens occupé en grande partie par des cellules communiquant avec les sinus frontaux, sont divisés par les zoologistes en trois genres : les chèvres, les moutons et les œufs. Ces derniers se distinguent nettement des précédens ; mais les chèvres et les moutons ont entre eux une ressemblance si 29 Corinne, ete. Bubal , etc. Chamois. Gnou. Genre des chèvres. Æygagre. Bonquetin. 446 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. étroite que c’est peut-être sans des motifs suffisans qu’on les à séparés. Les CHEVRES (Capra) ont pour caractère d’avoir les cornes dirigées en haut et en arrière, tandis que celles des moutons, dirigées d’abord en arrière, reviennent ensuite plus ou moins Fig. 155. en avant en spirale. Le chanfrein est presque tou- jours concave chez les pre- miers, et convexe chez les seconds. Enfin le menton des chèvres est générale- ment garni d’une longue barbe, qui manque chezles moutons.Dans l’état de do- mesticité , leurs formes et leurs allures sont aussi très différentes ; mais, à létat sauvage,leuraspectetleurs mœurs sont à-peu-près les mêmes. Il est aussi à noter qu'ils peu- vent produire ensemble des métis féconds , et que plusieurs des races domestiques de ces animaux tiennent si également des uns et des autres, qu’on est embarrassé pour savoir à quel genre les rapporter. Du reste , les chèvres, comme les moutons, diffèrent des bœufs par leur taille médiocre, l'absence d’un mufle, la forme grèle de leurs jambes et le nombre de leurs mamelles, qui est de deux. On connait plusieurs espèces de chèvres sauvages: ce sont des animaux qui vivent en petites familles sur les monta- gnes escarpées., où elles déploient une agilité bien plus grande encore que le chamois. On les voit fuir avec la rapidité de Péclair sur les pointes aiguës des rochers, suspendus, pour ainsi dire ,au-dessus des précipices , et franchissant d’un seul bond des distances qui étonnent , pour tomber d’aplomb sur une crête saillante dont la surface est quelquefois à peine assez large pour qu’ils puissent y poser leurs pieds. Leurs formes sont assez sveltes , et leur aititude fière et gracieuse. Ils sont extrêmement farouches, et comme leur vue et leur odorat sont très fins, ils se laissent rarement approcher par le chasseur. Une espèce , qui se distingue par ses cornes tranchantes en avant , habite les montagnes depuis le Caucase jusqu’à l’'Hima- laya , et est connue des naturalistes sous le nom d’ægagre. Le bouguctin est une seconde espèce, distincte de la précé- denie par des cornes grandes, plates en avant et marquées en cs TRIBU DES RUMINANS A CORNES CREUSES. 447 travers de nœuds saillans (#g. 155): il se trouve sur les sommets les plus élevés des hautes chaînes de montagnes de l'Europe et de l'Asie. Sa couleur est ordinairement d’un gris fauve en dessus et d’un blanc sale en dessous, et sa taille d'environ deux pieds et demi. Enfin , dans les montagnes du Caucase , on rencontre une troisième espèce de chèvres sauvages , à cornes triangulaires , et il en existe aussi en Afrique. Il y a tout lieu de croire, que c’est de l’ægagre dont la race se sera mêlée à celle du bouquetin, que descendent nos chevres do- mestiques, parmi lesquelles on rencontre des variations extrêé- mes pour la taille , le poil et la grandeur, ainsi que le nombre des cornes. La domesticité a peu changé le naturel de ces ani- maux : ils aiment toujours les lieux escarpés et exposés au soleil ; ils ne prospèrent pas dans les pays de plaines , et recherchent les pâturages secs ; le froid et l'humidité leur sont surtout nui- sibles. Ils sont assez difficiles sur leur nourriture , mais sont précieux dans les pays arides et montagneux , où d’autre bétail ne trouverait pas une pâture suffisante. La durée de leur vie est d'environ douze ou quinze ans : ils portent cinq mois. Notre chèvre commune diffère peu de l’ægagre, si ce n’est par ses couleurs , qui sont ordinairement le noir et le blanc. Dans quelques canions montagneux de la France , au Mont-d'Or, par exemple , on en élève beaucoup pour le lait qu’elles fournissent. On les trait deux ou trois fois par jour et pendant quatre ou Cinq mois on en obtient du lait en abondance , quel- quefois jusqu’à quatre pintes par jour, mais ordinairement trois seulement. Ce liquide a un goùt particulier et ne donne que peu de beurre , dont la qualité du reste est très médiocre ; mais on l’emploie avec avantage à la fabrication de fromages. Dans le midi, on mange la chair des chevreaux, et le suif de ces animaux a les mêmes usages que celui du mouton. Avec la peau de la chèvre , on fait du maroquin , du parchemin , etc. ; enfin ses poils servent à la fabrication de quelques étoffes, telles que le camelot. Certaines races exotiques fournissent aussi un duvet des plus précieux. Les chèvres du Thibet, dites de Cachemire , sont les plus remarquables sous ce rapport : c’est avec leur laine que se fabriquent au Cachemire ces beaux châles de l'Orient, dont les Turcs font un si grand usage, et dont limitation est devenue depuis quelques années une branche importante de l’industrie française. Les chèvres d’Angora, dont on élève un grand nombre dans lAsie-Mineure , ont aussi une toison extrêmement fine, et celles du plateau des Kirgis peuvent presque rivaliser avec les chèvres du Thibet. A diverses époques , on a tenté d’intro- duire en France ces animaux précieux. Il y a quelques années 29. Chévres do- mestiques. 448 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. surtout, un de nos industriels les plus éclairés , M. Ternaux , en a fait amener un certain nombre; mais jusqu'ici ils se sont peu répandus et n’ont pas exercé sur nos races indigènes l’in- fluence qu’on pouvait en espérer. Genre des Les MOUTONS, comme nous l'avons déjà dit , ont les cornes none ridées , annelées , et dirigées en arrière , puis, revenant plus ou moins en avant en spirale, le chanfrein , généralement convexe , et point de barbe; du reste , ils ne diffèrent pas no- tablement des chèvres. Mouflon. Il en existe une espèce sauvage dans les montagnes de la Corse , de la Sardaigne , de la Crète et de quelques parties de Fig.156. l'Espagne: c’est le mouflon com- mun(fig. 156). Sa taille est un peu plus grande que celle de nos mou- ions domesii- ques , et sa toi- son, laineuse et grisâtre, est Ca- chée sous des poils longs et soyeux , fauves ounoirs.Ses COr- nes sont triangu- laires à leur base etaplaties versla pointe. Chez les mâles , elles sont grandes; mais , chez la femelle, elles manquent en général complètement. Le mouflon vit en troupes assez nom breuses , et ne paraît avoir l'intelligence guère plus développée que nos moutons domestiques. Argali. L’argali,ou mouton sauvage des montagnes de l'Asie, est de la taille d'un daim. Ses cornes sont assez semblables à celles de nos beliers, mais plus grandes et plus élevées. En hiver, son pelage est épais, dur et d’un gris roussätre avec du blanc plus ou moins pur au museau, à la gorge et sous le ventre; en été au coniraire , son poil est ras et gris fauve. C’est un animal remar- quable par son agilité , et qui, par ses allures et ses mœurs ;, res- semble plus aux bouquetins qu'aux moutons domestiques. Le mouflon d’ Amerique ressemble beaucoup à Pargali, mais a les formes plus sveltes ; enfin on trouve en Afrique d’autres Mouflon d’A- mérique , etc. TRIBU DES RUMINANS A CORNES CREUSES. 449 moutons également sauvages , mais remarquables par la crinière pendante sous leur cou, et les espèces de manchettes formées de longs poils , qu'ils portent autour du poignet. C’est du mouflon commun ou de largali que paraissent des- cendre les innombrables variétés de moutons que l’homme élève en domesticité. Leur aspect est cependant bien différent. Nos moutons, au lieu &’avoir les formes sveltes et gracieuses, ainsi que la légèreté des premiers , sont lourds et d’une lenteur qui semble indiquer l’indolence la plus grande; enfin les poils longs et soyeux des espèces sauvages ont presque entièrement disparu chez ceux-ci, tandis que le duvet, prenant un dévelop- pement extrême, constitue, chez ces animaux ; une loison épaisse de laine plus ou moins longue. Leur stupidité est extrême : ils sont incapables d’aucun attachement, ne savent éviter aucun danger, et n’ont pas assez d'intelligence pour cher- cher un abri contre les intempéries de l'atmosphère: c’est tout au plus s’ils savent trouver eux-mêmes leur nourriture. Enfin leur constitution est en même temps très faible: le froid , Phu- midité et la fatigue déterminent chez eux de nombreuses mala- dies , et, s’ils étaient abandonnés de l’homme , il est probable que leur race ne tarderait pas à s’éteindre. Dans nos pays, les brebis ne font en général qu’un petit par portée et ne produisent qu’une fois par an; mais, dans les pays plus chauds , ils en font souvent deux , et quelques races don- nent deux agneaux à-la-fois. La durée de la gestation est de cinq mois, et les brebis conservent leur lait pendant sept ou huit mois après la naissance de leurs petits; mais on ne laisse ceux-ci téter que deux ou trois mois. À un an, les brebis peuvent déjà reproduire , et elles continuent à être fécondes jusqu’à l’âge de dix ou douze ans. Pendant la première année, les huit dents inci- sives paraissent, et les jeunes moutons portent le nom d’gneaux. Durant la deuxième année, on les appelle antennots , et on les reconnait à ce que les deux incisives du milieu tombent et sont remplacées par d’autres dents plus larges. Les deux dents sui- vantes se renouvellent la troisième année, de sorte qu’il en existe alors quatre incisives larges etquatre pointues. F/année suivante, ilen est de même pour les troisièmesincisives; enfin les latérales tombent et sont remplacées la cinquième année ; quelquefois le travail de la dentition se fait plus rapidement , et, lorsqu'il est achevé ; on ne trouve aucun signe positif pour reconnaitre l’âge de ces animaux. Il existe des différences très grandes entre les diverses variétés des moutons. La race la plus remarquable par la singularité de ses formes , est celle des moutons à large queue, chez lesquels cet appendice est tellement gonflé par de la graisse, qu'il à Moutons do- mestiques. 450 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. souvent la forme d’une grosse loupe à un ou même à deux lobes : il en existe dans les parties tempérées de l'Asie , le midi de la Russie , dans la Haute-Egypte, etc. Des voyageurs dignes de foi assurent que , dans certaines contrées de l'Afrique orien- tale, il n’est pas rare de rencontrer de ces moutons attelés à une sorte de brouette , destinée uniquement à supporter le poids de leur queue, tant son volume devient énorme. Le mouton de Valachie se distingue par ses cornes en spirale, et dirigées en haut ,comme celles de certaines antilopes , et chez le mouton d'Islande , qui est répandu depuis la Norwège jusqu’au Groën- land, le nombre de ces prolongemens frontaux varie singulière- ment. Tantôt il n’est que de deux, mais d’autres fois il existe trois , quaire et quelquefois jusqu’à huit cornes. Le mouton merinos , que l’on croit originaire de la Barbarie, mais qui est commun en Espagne , d’où il s’est répandu dans les autres parties de la France , ne présente aucune de ces anoma- lies de structure, mais mérite cependant davantage de fixer notre attention , à raison de la beauté de sa toison. On le recon- nait à ses cornes très grosses et irès fortes, qui forment une spirale régulière sur les côtés de sa tête, et à sa laine d’une finesse et d’un moelleux extrêmes , qui est contournée en tire- bouchon. | Le mouton ordinaire présente aussi des variations très grandes dans sa taille , ses proportions et les qualités de sa laine. Ces animaux constituent une des principales sources des ri- chesses agricoles et fournissent à l’industrie manufacturière des produits précieux. Les meilleures terres perdent bientôt leur fertilité, si elles ne reçoivent continuellement une propor- tion convenable d'engrais, et là où les pâturages ne sont pas assez abondans pour entretenir un grand nombre de bœufs ou de chevaux , les troupeaux de moutons trouvent encore une nourriture suffisante et améliorent le sol par le fumier qu’ils y déposent. Le paccage de ces animaux, dans un champ destiné à la culture du blé, fait sentirses bons effets pendant trois années consécutives. Sous ce rapport, ils rendent donc à l’agriculture des services considérables , et en même temps ils paient ample- ment les soins qu’on leur donne , et les fourrages qu’ils con- somment par la laine qu'ils produisent , et par la viande, le suif et la peau qu’ils fournissent après leur mort. La tonte des moutons se fait vers le mois de juin ou de juillet. Si on laissait leur laine croître pendant plus d’une année , cela nuirait à la santé de ces animaux et occasionnerait souvent des maladies de peau , et, d’un autre côté, si on les tondait deux fois par an (ce qui contribuerait peut-être à augmenter le finesse de la laine), ils se trouveraient privés de leur chaude toison à des TRIBU DES RUMINANS A CORNES CREUSES. 451 époques où dans nos climats, elle leur est nécessaire pour les pré- server des intempéries de l'atmosphère. La quantité de laine fournie par @n mouton varie beaucoup , suivant les races, et ces différences ne dépendent pas seulement de la taille : elles tiennent encore davantage à la nature particulière de l'animal. Le poids des toisons des moutons communs de la plupart de nos provinces est seulement de un à deux kilogrammes et demi (deux à cinq livres), tandis que celui de nos moutons , dont la race à été améliorée par leur croisement avec les mérinos, est de trois à quatre kilogrammes , et que celui des mérinos eux-mêmes est communément de quatre à cinq kilogrammes, et s’élève quel- quefois au double. Sous le rapport de la qualité des toisons , il est une distinction importante à établir entre les moutons qui fournissent une laine longue et droite, et ceux qui donnent une laine courte, fine et frisée. La manière de travailler ces deux espèces de laine n’est pas la même, on les emploie à des fabrications différentes, et les circonstances agricoles favorables aux races qui produisent l’une , sont souvent nuisibles à celles qui donnent l’autre. Parmi les moutons à laine courte et fine , les mérinos se présentent en première ligne , et, parmi les races à laine longue, on re- marque surtout celles de Saxe et de quelques contrées de PAn- gleterre. La laine qui est sur le dos de l’animal est enduite d’une ma- tière grasse , appelée suint, et en général très sale. Dans quel- ques cantons on la lave d’une manière imparfaite avec la tonte; mais en général on ne pratique cette opération qu'après. Le lavage et le dégraissage font perdre à la toison la moitié ou les deux tiers de son poids. L'âge auquel on engraisse les moutons, pour les livrer à la boucherie, varie : c’est à deux ou trois ans , que leur chair est le plus tendre et le plus savoureuse ; à quatre ans, ils sont plus disposés à prendre de la graisse ; mais, lorsqu'on les destine d’abord à la production de la laine, on attend jusqu’à l'âge de huit ou même dix ans, avant que de les livrer au boucher. On les engraisse , soit en les faisant paitre dans de bons herbages , soit en pouture , C'est-à-dire à la bergerie , et, au moyen de fourrages secs et de grains. Le temps nécessaire pour les amener au point de graisse convenable est en général d’environ trois mois, et afin d’exciter leur appétit, et de les maintenir en bonne santé, on leur donne une certaine quantité de sel , substance qui leur est en tout temps très utile; c’est ce qui explique la supériorité des prés salés sur les herbages ordinaires. La quantité de nourriture né- cessaire à ces animaux est à-peu-près en raison du poids de leur corps, qui varie considérablement ; car, dans beaucoup de nos 452 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. provinces, les moutons ordinaires ne pèsent que dix ou douze kilo- grammes, tandis que ceux de la Flandre pèsent de trente à qua- rante kilogrammes , et qu’en Angleterre , on en élève qui attei- gnent le poids énorme de quatre-vingts ou cent kilogrammes, et même davantage; mais une différence plus importante, qui existe entre ces animaux, est celle de la proportion des parties charnues de leur corps, comparée au poids des os, des viscères, etc. On a re- marqué que les moutons qui présentent certaines particularités de conformation, s’engraissent beaucoup plus facilement que d’autres , et un des hommes qui ont rendu le plus de services à l’agriculture anglaise , Bakewell, en ayant soin de croiser des moutons chez lesquels ces caractères extérieurs se voyaient à un haut degré, est parvenu à créer une race des plus précieuses sous ce rapport. Le poids des quatre quartiers de la car- casse des grands moutons de la race wurtembergeoise, que l’on élève dans quelques-unes de nos provinces, comme étant par- ticulièrement propres à fournir la viande de boucherie , est de cinquante-deux à cinquante-cinq pour cent du poids total de Vanimal , tandis que, dans les moutons anglais de la race de Dishley ou New Leicester, cette proportion s'élève à soixante-dix où même à soixante-quinze. Il est par conséquent évident que le choix de ces animaux doit exercer la plus grande influence sur les profits que l’on retire de leur engrais. La viande de mouton est un des alimens les plus sains et les plus employés, à raison de ses qualités agréables et de son prix inodique. À Paris, par exemple, on consomme chaque année environ trois cent quarante mille de ces animaux. La graisse du mouton ou suif est également un produit im- portant de ces animaux. Les moutons ordinaires de nos cam- pagnes en fournissent, lorsqu'ils sont de moyenne taille, deux kilogrammes et demi à trois kilogrammes et demi, et nos grandes races en donnent jusqu’à six ou huit kilogrammes ; mais ce sont les moutons de Dishley qui sont les plus disposés à se charger de graisse: on leur en trouve souvent une couche épaisse de plus de quatre pouces tout le long des côtes et autour des reins , quelquefois même épaisse de sept à huit pouces. Ii n'est pas rare de retirer douze kilogrammes de suif d’un seul de ces moutons, et cependant on a soin de les engraisser avant l’époque où ils sont le plus disposés à en produire , afin d’obte- nir une viande plus délicate. Leur peau, dépouillée de sa laine , a aussi d’importans usages : c’est avec elle que l’on fabrique la plupart des peaux minces, employées pour la confection de nos souliers, de nos gants, etc. , et préparée par d’autres procédés, elle prend dans le com- TRIBU DES RUMINANS À CORNES CREUSES. 453 merce le nom de chamois, de parchemin, de velin, etc.{1) Après les récoltes des céréales et des vins , celle des laines est la plus importante pour l'agriculture française ; cependant, jus- (1) C'est presque exclusivement avec des peaux de moutons, d’agneaux ou de chevreaux, que l’on prépare les peaux blanches employées pour la fabrication ,des gants, la doublure des souliers , etc., etc. ; quelquefois on y emploie aussi des peaux de chèvres, de veaux ou méme de chiens, et on donne le nom de mné- gisserie à ect art, qui repose principaiement sur la propriété que possèdent certains sels terreux de se combiner avec la substance du derme, et de la rendre incorruptible. Les peaux destinées à être mégies sont d’abord lavées, puis enduites de chaux délayée dans de l’eau. On les laisse dans une fosse jas- qu’a ce que le poil se détache facilement ; alors on les lave et on les pele sur un chevalet de bois, en les frottant avec une espèce de couteau mousse , et cette opération terminée, on les soumet de nouveau à l’action de la chaux , qui les dégraisse et les fait gonfler. Pour faire gonfler les peaux davantage et faciliter l’action des substances salines , qu’il est nécessaire d’y combiner , on les met en- suite en confit, c’est-à-dire on les enduit de son ou de farine délayée dans de l’eau, afin qu’elles s’imbibent de l’acide acétique (ou vinaigre), développé par la fermen- tation de cette matière. Les peaux, gonflées de la sorte, sont plongées dans une dissolution d’alun et de sel marin, qui, en se décomposant mutuellement, donnent naissance à du chlorure d'aluminium, lequel se combine avec le tissu du derme, le blanchit et le rend inaltérable à l'air. Enfin on fait sécher les peaux et on les assouplit, en les frottant sur une lame de fer arrondie et nommée pesson. Les peaux de mouton, sur lesquelles on conserve la laine, sont préparées a-peu-près de la même manière, si ce n’est qu’on ne les met pas ou du moins qu’on ne les laisse que peu de temps dans la chaux et les confits. Les peaux connues dans le commerce sous le nom de chamoës sont aussi en majeure partie des peaux de mouton: les plus fortes et les plus souples sont celles de daim. Le chamais est un animal trop rare pour en fournir beaucoup : quelquefois on chamoise des peaux de chèvre et de buffle. Les premières opé- rations qu’on leur fait subir sont les mêmes que pour les peaux mégies. Après les avoir soumises à l’action de la chaux, on les enduit d'huile de morue ou de baleine, et on les fait battre sous le marteau d’un moulin à foulon. On renouvelle cette opération jusqu’à ce qu’elles soient convenablement ramollies; puis on les met en pile, et on les laisse fermenter un peu et se gonfler; enfin, après quelques opérations mécaniques peu importantes, on les dégraisse à l’aide d’une lessive alcaline, et on les travaille sur le pesson, comme nous l’avons déja vu pour les peaux mégies. Le plus beau parchemin se fait avec des peaux d'agneau ; mais on emploie également à cet usage des peaux de mouton, de chèvre, de porc, et même de petits veaux. Voici comment on les prépare. Les peaux , après avoir été bien trempées et lavées sont enduites d’une bouillie faite avec dela chaux délayée dans de l’eau, puis lavées, dépelées et immergées pendant quelques jours dans un bain d’eau de chaux. Cette opération terminée , on les lave, on les tend sur des chässis de bois et on les écharne; ensuite on les saupoudre avec de la chaux, et on les fait sécher, après quoi on les détache du cadre (ou herse) où elles étaient fixées et, avec un instrument tranchant , on enlève la superficie des deux côtés de la peau , on les rend aussi unies que possible, et si c’est nécessaire, on les poht encore davantage , en les frottant avec une pierre-ponce. 454 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. qu’à une époque très rapprochée de nous , nos moutons étaient tous petits, chétifs, mal soignés et en petit nombre; mais, depuis un certain nombre d'années , nos agriculteurs commen- cent à sentir combien il y aurait d'intérêt pour le pays et de profits pour eux à améliorer nos races indigènes ou à leur en substituer de plus précieuses. Colbert, lun des premiers, eut l'idée heureuse de tirer de l'Espagne et de l'Angleterre des mou- tons plus parfaits que les nôtres , pour améliorer les races fran- çaises ; mais , de même qu'ilen est de presque toutes les inno- vations mêmes les plus utiles, ses vues trouvèrent des contradic- teurs qui s’opposèrent à leur exécution, et les premiers essais ne furent tentés que long-temps après. Ce fut en 1776 seu- lement, que l’on importa en France les premiers mérinos, et les noms des hommes qui ont rendu à leur patrie ce service important méritent d’être signalés à la reconnaissance pu- blique : ce fut Daniel Trudaine, intendant des finances, qui mit en exécution le projet de Colbert, et il confia à Daubenton, le savant et laborieux collaborateur de Buffon , le soin de diri- ger cette utile entreprise. Depuis lors , de nouveaux troupeaux de mérinos nous ont été amenés d’Espagne. Ces animaux ont prospéré dans nos bergeries , et , par leur croisement avec nos moutons indigènes , on a obtenu les résultats les plus heureux. La France produit aujourd’hui des laines fines presque aussi belles que celles d'Espagne , et, quoiqu'il reste encore bien des améliorations à faire , il est à espérer que , dans peu d'années, elle s’affranchira des iributs énormes , que le manque de ces matières la forcait à payer chaque année à l'étranger. D’après les calculs d’un de nos grands manufacturiers , Ter- naux , il paraitrait qu’il existe en France environ 30,000,000 de bêtes à laine , dont environ 164,000 mérinos de race pure, 340,000 de mérinos réputés purs , mais n’étant réellement que des métis de cinq ou six croisemens, 1,400,000 moutons métis mérinos de trois ou quatre croisemens , 2,200,000 de deuxième et iroisième croisemens. Plus de24,000,000 denos bètes à laines sont encore de race indigène pure, et sur ce nombre on re compte pas plus de huit millions de beaux animaux. Plus de dix mil- lions de nos moutons, c’est-à-dire plus du tiers du nombre total possédé par la France, sont des animaux petits , chétifs et en mauvais état, dont la toison ne pèse , terme moyen, qu'un kilogramme et demi, et ne vaut qu'environ 2 fr. 50 C., tandis que les mérinos ou les beaux métis donnent des toisons du poids de trois à quatre kilogrammes , et valant de 7 à 11 francs , ou même davantage. Depuis quelques années, on s’occupe aussi à acclimater en France les belles races anglaises de moutons à laine longue, et TRIBU DES RUMINANS A CORNES CREUSES. 455 il serait d'autant plus desirable de voir ces tentatives couron- nées de succès, que ces animaux peuvent prospérer dans un grand nombre de localités trop humides pour les mérinos. Tous nos départemens possèdent des bêtes à laine; mais, dans les uns, elles ne sont considérés que comme un faible ac- cessoire des exploitations rurales , tandis que, dans &autres, elles font la base des spéculations agricoles, et qu'ailleurs on les trouve associées au gros bétail et partageant avec lui les soins du cultivateur. Dans la région qui avoisine la Méditerranée, et qui s'étend du littoral vers le nord jusqu’à {l'Isère , aux monts GCoiron , dans l'Ardèche , à la Corrèze et au Cantal, et latérale- ment des Alpes à la Garonne, les moutons constituent la prin- pale richesse des agriculteurs. Dans une seconde région, plus centrale, qui comprend le département du Cher, les deux rives de la Loire , les départemens de l'Indre , du Loiret et d'Eure-et- Loir, on leur donne une importance presque égale; enfin, dans une troisième région, qui se lie à la précédente, et qui s’étend des bords de la Seine vers le nord, en embrassant les dépariemens de Seine-et-Oise , de Seine-et-Marne, de l'Oise, de l'Aisne , du Pas-de-Calais et du Nord, ces animaux se trouveni aussi en grand nombre , mais cependant dans une proportion moins forte que les bœufs et les vaches. La carte ci-jointe servira , par ses teintes variées , à donner une idée de la part que prennent nos différens départemens dans la production des laines.{1) Là où les pâturages suffisent pour le gros bétail, celui-ci for- me la partie principale du cheptel , et les moutons sont exclus ou n’occupent qu’une place secondaire. L’élève du cheval dans les herbages de la Bretagne, de la Normandie, de lAnjou et du Maine, et celle des mulets dans le Poitou les excluent presque entièrement de ces provinces ; mais partout où l’engrais des bœufs ou la nourriture des vaches n’a pas lieu constam- ment au pâturage, mais en partie à l’étable , ce n’est pas le che- val, mais le mouton, que l’on associe aux bêtes à cornes; car ils mangent les herbages peu élevés , les chaumes et les débris de la nourriture sèche des bœufs , genre d’alimens que les chevaux neconsommeraient pas avec le même avantage. Dans les lieux humides où l'herbe croit avec le plus d’abondance , et où les bœufs s’engraissent le plus rapidement , les moutons à laine (x) Ici, comme dans lacarte figurative de la répartition des chevaux, les teintes sont d'autant plus foncées que cette branche de nos richesses agricoles augmente, Les numéros des départemens indiquent l’ordre dans lequel ils se rangent par rapport à la production des laines dans une même étendue de terrain. La diffé- rence entre les deux extrémités de l'échelle est à-peu-près comme 1 est à 110. 456 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. fine sont aussi, pour ainsi dire, exclus à cause de linfluence funeste du climat sur leur constitution , et on ne peut s’adonner - avec succès qu’à la production des moutons à laine longue. On évalue à environ vingt millions de kilogrammes le poids, el à 114,000,000 de francs le prix des laines que produit chaque année la France ; mais cette quantité est loin de suffire aux be- soins de notre industrie, et on en tire annuellement de l'étranger de sept à huit millions de kilogrammes.C’est principalement l’Al- lemagne qui nous les fournit. Ce pays possède en effet des trou- peaux presque innombrables et des races des plus belles. La laine dite électorale de la Saxe surpasse en finesse celle d’Espagne. L’Angleterre est aussi très riche en bêtes à laines; mais ce pays manufacturier met en œuvre une quantité si immense de laine, que , pour alimenter ses fabriques , il en importe chaque année de l'Allemagne environ dix millions de kilogrammes. Genre bœuf. Le genre BOEUF se distingue facilement des autres groupes de la division des ruminans à cornes creuses : il se compose d’ani- Fig. 157. maux gros et lourds , dont les cornes, 1 dirigées de côté , reviennent ensuite en haut et en avant en forme de croissans, doni la tête se termine par un large mu- fle, dont les jambes sont robustes et dont la peau du cou, lâche et pendante, forme inférieurement un grand repli, appelé fanon. De même que les précédens, ces animaux vivent d'herbes; mais ils n’ont point leur agilité, et en général ils habitent les plaines de préférence aux montagnes. On en connaït huit espèces bien distinctes, savoir : le bœuf ordinaire et l’aurochs, originaires l’un et l'autre de l'Europe et de quelques parties de PAsie, le buffle, le gyall et le yack, qui sont propres à l’Asie ; le buffle du Cap, qui ne se rencontre que dans l’Afrique méridionale ; i enfin le bison et le bœuf musqué , qui appartiennent à lAmé- rique septentrionale. Bœuf com- Le bœuf ordinaire est considéré par Buffon et quelques autres ne naturalistes, comme descendant de l’aurochs , qui aujourd’hui se trouve encore à l’état sauvage, dans les forêts de la Lithuanie et du Caucase; mais c’est à tort: il en diffère par un grand nombre de caractères, et paraît provenir d’une espèce sauvage, Vurus des anciens, dont on trouve les crânes à l’état fossile dans les tourbières de la France , de l’Allemagne et de PAngle- terre. Ses caractères spécifiques sont d’avoir le front plat, plus long que large, des cornes rondes , placées aux deux extré- RÉ Éd SSL cé TRIBU DES RUMINANS A CORNES CREUSES. 457 mités d’une ligne saillante, qui sépare le front de l’occiput, treize pairessgde côtes , et les quatre mamelles, placées par paires. Il paraïitrait qu'au seizième siècle , il existait encore de ces animaux à l’état sauvage dans les forêts de la Pologne et même de l'Angleterre; mais, depuis l'antiquité la plus recu- lée ,cette espèce était en majeure partie réduite en domesti- cité, et depuis lors elle a passé tout entière sous l'empire de l’homme. Nos bœufs domestiques se sont propagés en abondance dans les quatre parties du monde. On les trouve non-seulement dans toute l'Europe, mais aussi dans la plus grande partie de l'Asie et de l'Afrique, et ils se sont prodigieusement multiphiés en Amérique, où ils ont été importés par les Espagnols et où ils sont même retournés à la vie sauvage. Ceux de l'Inde, de la Perse , de l'Arabie et de toute l'Afrique , au sud de l'Atlas , diffè- rent beaucoup de ceux d'Europe :ils sont connus sous le nom de zebus, et forment une variété très remarquable par la loupe graisseuse qu'ils portent sur le dos, et par la variation de leur taille. Les uns sont grands et ont une bosse, dont le poids s’élève quelquefois à cinquante livres ; d’autres surpassent à peine nos cochons ordinaires. À Surate, on en voit qui ont deux bosses, et tantôt ces animaux ont des cornes très grandes, tantôten sont complètement dépourvus , enfin d’autres fois encore ils ont de petites cornes adhérentes seulement à la peau et mobiles, parce que leur axe osseux ne s’est point développé. Les bœufs de nos climats diffèrent moins entre eux, mais cependant offrent en- core des variations très grandes sous le rapport de la taille , de la direction et la longueur des cornes, des proportions du corps et de la couleur du poil. Chacun connait les allures de ces animaux: ils sont en géné- ral lents dans leurs mouvemens , mais peuvent cependant cou- rir assez vite. Leur force est très considérable , et ils n’ont be- soin que de peu de sommeil : ils mangent vite et prennent en peu de temps toute la nourriture qu'il leur faut, après quoi ils se couchent ordinairement sur le côté gauche , pour ruminer à loisir. Leurs alimens peuvent être plus grossiers que ceux des chevaux et des moutons ; mais l'herbe qu'ils broutent doit toujours être plus longue ; car l'absence de dents incisives à la mâchoire supérieure et l'épaisseur de leurs lèvres les empèchert de pincer et de couper les brins courts et fins. Pour les déta- cher du so! , ils les saisissent avec leur langue longue, rude et mobile, les ramènent contre les dents de la mâchoire inférieure, et les cassent en les tordant. Il en résulte que, pour tirer tout le parti nécessaire des pâturages, où l’on nourrit des bœufs, il faut leur adjoindre des chevaux ou des moutons , suivant la nature 458 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. des localités. En général on compte que, pour dix bœufs, il faut un cheval. Lorsque ces animaux sontabandonnés à eux-mêmes, ils sont très farouches et dangereux. La colère les rend furieux, et leurs cornes sont des armes puissantes, à l’aide desqueiles ils déchirent leur adversaire, et, s’il n’est pas de trop grande taille , le lancent en Fair, après lavoir percé.Si un loup vient à roder autour d’un troupeau de bœufs, ceux-ci se réunissent pour former une enceinte , au milieu de laquelle se tiennent les veaux et les jeunes bœufs , dont la tête n’est pas encore armée. La bête de proie n’ose approcher de ce rempart hérissé de cornes, etsi elle ne s'éloigne pas, on voit souvent un taureau sortir des rangs et lui donner la chasse. Les vaches domestiques, quoique d’un naturel grossier, sont susceptibles d’une sorte d’atiachement : elles reconnaissent très bien les personnes qui en prennent soin, ainsi que l'habitation où on les nourrit ; en gé- néral, elles sont d’un caracière doux et paisible. Le taureau , au contraire , conserve toujours son caractère fier et irascible. La durée de la vie de ces animaux peut dépasser vingt ans; maisilest rare qu’on les conserve aussi long-temps avant que de les livrer à la boucherie. Jusqu’à trois ans, on reconnait l’âge des bœufs aux changemens qui surviennent successivement dans leurs dents incisives, qui tombent et sont remplacées par d’autres moins blanches et plus larges. Le renouvellement des deux dents médianes a lieu à dix mois ; celui des suivantes à seize mois , et celui des troisièmes un peu plus tard. A trois ans, les dernières incisives de lait sont également remplacées , et à me- sure que l'animal vieillit, tous ces organes s’usent , noircissent et deviennent inégaux. Les cornes présentent aussi des chan- gemens avec l’âge: elles croissent toujours par Paddition an- nuelle d’une nouvelle lame, qui se dépose à l’intérieur de l'espèce d’étui formé par la matière cornée , et la pousse de- vant elle, en développant à sa base un bourrelet circulaire. Ce phénomène commence à trois ans , et, chaque année , un nouvel anneau s'ajoute au-dessous des précédens. Les bœufs sont des animaux précieux par leur travail aussi bien que par les produits qu’ils nous fournissent. La force de leur tête et de leurs épaules en fait de puissans animaux de trait. Pour le labour, ils sont souvent préférables au cheval. Leur marche est, à la vérité, plus lente, et ils font environ un cinquième de travail de moins par jour; mais leur entretien est moins coùteux, et, lorsqu'ils ont servi pendant quelques années, on peut les vendre sans perte, pour être engraissés et livrés au boucher. Les taureaux sont plus vigoureux ; mais leur indocilité rend leur usage dangereux, à moins qu’on n’ait le soin EN ne - D É TRIBU DES RUMINANS À CORNES CREUSES. 459 de leur passer un anneau de fer dans les narines, ce qui permet de les dompier. Pour rendre ces animaux plus doux et pour les disposer aussi à prendre plus facilement de la graisse, on est dans l'usage de les couper à l’âge de dix-huit mois ou deux ans: c’est après cette opération qu’on leur donne plus spécialement le nom de bœufs. A trois ans , on commence à les faire travailler ; mais l’époque de leur plus grande vigueur est de cinq à neuf ans ; ordinairement on les emploie pendant sept ans; mais , dans les pays où l’engrais du bétail donne des profits considérables , on ne les fait travaiiler que pendant quatre ans. Quelquefois on emploie les vaches aux mêmes usages ; mais en général on les consacre exclusivement à la production du lait et à la multiplication de l’espèce. Dans le jeune âge , on les connait sous le nom de genisse. Leur croissance est de deux ans, et la durée de la gestation de neuf mois. La portée ordinaire n’est que d’un veau, et dans l’état demi sauvage où ces ani- maux se trouvent dans quelques pays , en Colombie, par exem- ple , le lait se tarit aussitôt que le petit cesse de téter ; mais, par effet de la domesticité , il en est tout autrement , et nos vaches continuent toujours à en fournir jusqu’au moment où elles sont prêtes à vêler de nouveau. La quantité qu’elles donnent varie suivant une foule de circonstances: c’est à l’âge de cinq ou six ans , et dans les premiers mois qui suivent le vèlement, qu’elles sont les meilleures laitières. L’abondance plus ou moins grande de la nourriture , sa nature , le climat et les différences de races exercent la plus grande influence sur Factivité de cette sécré- tion. On assure qu’à Surinam, les meilleures vaches ne donnent qu’un demi-litre ou un litre de lait par jour ; celles des côtes barbaresques en fournissent tout au plus trois ou quatre litres par jour, tandis que les vaches ordinaires de nos campagnes en donnent près de six litres , et que les belles vaches suisses en donnent de dix à onze litres ; enfin celles de la Frise en donnent jusqu’à treize litres ou environ vingt-et-un kilogrammes. Dans le voisinage des grandes villes, c’est la consommation du lait en nature qui donne à ce liquide sa plus grande valeur 2 mais ailleurs on l’emploie principalement à la préparation du beurre et du fromage. Ainsi que nous l'avons déjà dit ailleurs (p.243), le lait se compose de sérwm ou petit-lait , qui est de l’eau tenant en dissolution du sucre de lait, une certaine quantité de matière caséeuse , un acide particulier, quelques sels, etc., et de parücules solides de forme globulaire et d’une petitesse extrême, qui nagent dans ce liquide et sont formés de matière caséeuse et de beurre. La proportion des parties solides (supposées sèches) est en général de dix à douze pour cent. Par le repos, les parties grasses du lait, plus légères que le sérum, s'élèvent peu-à-peu 460 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. vers la surface et y forment une couche plus ou moins épaisse , qui est connue sous le nom de créme , et qui se compose de glo- bules de beurre qui ont entrainé avec eux une partie de la matière caséeuse et ont retenu une certaine quantité de sérum. En bat- tant pendant quelque temps la crème , on détermine la réunion des globules graisseux , qui forment alors de petits grumeaux, tandis que la matière caséeuse reste en suspension ou en dissolu- tion dans le liquide, que l’on appelle alors Lait de beurre : c’est ainsi que l’on obtient le beurre. On le lave ensuite en le pres- sant, pour séparer autant que possible le lait de beurre, dont la masse est imprégnée; mais en général il en conserve environ le sixième de son poids, ei c’est pour préserver ces substances étrangères de toute altération, qu’on le sale. Par la fusion, elles se séparent complètement , et alors le sel n’est plus nécessaire pour la conservation de ce produit. La quantité de beurre fournie par le lait varie suivant une foule de circonstances. Dans les envi- rons de Paris , on l’évalue à environ un sixième. Par l'addition d’un acide , le lait se dépouille presque entière- ment des matières caséeuses et grasses qu’il renferme. Celles-ci forment alors un caillot, dont le petit lait se sépare peu-à- peu , et c’est en agissant ainsi, que l’on prépare le fromage. On mêle au lait ,avant que la crême ne soit montée , après qu’on l’a déjà écrêmé ou, au contraire , après y avoir ajouté de la crême, suivant la qualité que l’on veut donner au produit , une petite quantité de pressure délayée dans de l’eau. Tantôt on laisse le tout en repos pendant vingt-quatre heures ; d’autres fois on accélère la coagulation par la chaleur ; et, lorsqu'elle s’est effec- tuée , on fait égoutter la masse composée de matière caséeuse et de beurre, on le sale et on le met en forme ; souvent on emploie le fromage dans cet état; mais d’autres fois on le place dans un lieu frais et humide , où il ne tarde pas à subir des altérations particulières qui en changent complètement la nature : par une espèce de putréfaction , une portion du caséum se décom- pose et donne naissance à des sels ammoniacaux, qui produisent lodeur et la saveur âcre et particulière que chacun lui connait. Les veaux que l’on destine à être élevés sont en général sevrés au bout desix semaines , et on les accoutume peu-à-peu à se nourrir de fourrages; les autres sont livrés à la boucherie à l’âge de six semaines ou de deux mois, quelquefois plus tard. Dans les environs de Pontoise, où les cultivateurs se livrent d'une manière spéciale à l’engrais des veaux, on sèvre ces ani- maux dès leur naissance , eton leur fait boire du lait, auquel on ajoute quelquefois des œufs. Pendant les premiers quinze jours, ils en consomment environ cing litres et demi (six pintes) par jour; pendant la seconde quinzaine , on augmente leur ration + ac ebe Les. id ELE . des, or der +4 A wc : EN l + LATE Tr 4 dat Hs à, ME Y ‘ e « ef Mt, sun “ « PI | + A s b ‘. ” LA | rie Uf à Sn di Ai AS es À NE 4 AR * (LORS Deus de à : - D je ; Carte, figurative de la distribution des béles & cornes {bœufr, vacher, ete m et Le dans les différentes partier de la France”. La à À N È Ÿ ù À J'uxrse $S CS D > Æspagne Carte figurative de la distribution Le des Letes à laine . a. CÈ Dans ces deux (artes. Les Lerntes sont d'autant plus foncees, que Le nom - bre d'animaux est plus consuterable pour ure méme étendue de ler- Tai : a L1 TRIBU DES RUMINANS A CORNES CREUSES. 461 d'environ deux litres, et ensuite on la porte jusqu’à neuf ou dix litres par jour, À six semaines , un veau engraissé , de moyenne grosseur, pèse environ quarante à quarante-cinq kilogrammes et à trois mois soixante à soixante-cinq kilogrammes. Paris en consomme annuellement environ quatre vingt mille. C’est vers l’âge de sept ans que les bœufs sont dans les circon- stances les plus favorables à l’engrais ; mais en général on les fait travailler jusqu’à l’âge de dix ans. Dans les pays où il existe de beaux herbages(comme dans le Coteniin et la vallée d’Auge, en Normandie), on engraisse ces animaux par le pâturage seule- ment. Les prairies artificielles de ruy-grass ou ivraie vivace sont particulièrement propres à cet usage. Ailleurs (dans le Limousin, par exemple), on les place en général à l'écurie ,eton les nourrit avec du foin , de la farine de seigle délayée dans de l’eau, des tourteaux de lin, etc. Les turneps (espèces de raves), les pommes de terre , les topinambourgs , sont également propres à l’engrais du bétail. Souvent on fait cuire les racines et le grain qu’on leur donne, et, dans les derniers temps de lengraissement, cette méthode a surtout de l'avantage. On évalue la consomma- tion journalière d’un gros bœuf engraissé à l’étable à quinze kilogrammes de fourrage, dix kilogrammes de racines cuites et autant de farine de divers grains mêlés à du son gras. Les dispositions individuelles du bœuf influent beaucoup sur la rapidité avec laquelle ces animaux s’engraissent et sur le degré d’embonpoint auquel ils parviennent. On remarque que ceux dont la tête est grosse , le muffle court et arrondi, le ventre rond , large et abattu en dessous, l’échine large et unie, la peau fine et lusirée, etc., profitent le mieux de la nourri- ture qu'on leur donne; et si l’on s’appliquait avec persé- vérance à améliorer nos races de gros bétail, il n’est pas dou- teux que l’on rendrait ces caractères héréditaires , et qu’on les développerait à un haut degré. En Angieterre, on y est arrivé et même on est parvenu à avoir des bœufs dont la graisse se dé- pose dans certaines parties du corps en plus grande proportion que dans d’autres. Le repos est une condition de la réussite de l’engrais des bœufs comme de celui de tout autre animal. Il faut aussi pro- portionner la richesse des alimers au degré plus ou moins avancé de l’embenpoint, et l’usage du sel est toujours d’une grande utilité. ; Le poids des bœufs engraissés varie beaucoup. En France, il n’est souvent que de deux cent cinquanie kilogrammes ; mais on en voit qui pèsent jusqu'à quinze cents kilogrammes , et on assure qu'en Angleterre , en Irlande , en Allemagne et en Suisse, ils atteignent quelquefois un poids beaucoup plus considérable 30 462 ZGOLOGIE DESCRIPTIVE. encore. Le poids moyen de ceux consommés à Paris est de deux cent quatre-vingt-dix kiiogrammes ; et on évalue à onze trente- cinquièmes le poids brut des abats et issues , et à vingt-quatre trente-cinquièmes celui de la viande. La proportion du suif est le plus ordinairement égale à un dixième du poids de la viande ; mais à cet égard on rencontre des variations extrèmes. (1) Les parties de la France où les agriculteurs élèvent le plus de bœufs est (comme on peut le voir par la carte ci-jointe) la région nord-ouest, comprenant la Bretagne, le Maine et la Basse-Normandie , et une partie du Poitou. Une seconde région, moins étendue et moins riche en bêtes à cornes, mais qui cependant ne laisse pas que d’en produire un grand nombre , longe la frontière de la Suisse et de lPAllemagne, depuis l'Eure jusqu’à la Moselle. Une troisième région , très productive sous le même rapport, occupe le centre de la France et comprend l’Auvergne, la Marche et le Nivernais , etc. ; enfin une quatrième région , remarquable par le nombre des bœufs est la Flandre et l’Artois. Dans tout le midi de ia France, au- dessous du 45° degré de latitude, on n’en trouve presque pas: l’'Orléanais , le Berri, la Bourgogne et la Champagne n’en pro- duisent aussi qu’une faible proportion. Cette branche de notre industrie agricole laisse beaucoup à desirer. L’Angleterre , la Belgique , tout le nord de l'Allemagne et la Suède , etc. , sont bien plus riches en bêtes à cornes que la France. On calcule que, chez nous , le nombre des bœufs est à-peu-près dans la proportion d’un pour cinq habitans , tan- dis que , dans les Pays-Bas, la Prusse, etc., celte proportion est à celui des habitans comme 1 est à 3, et que , dans l'Angleterre, le Hanovre, le Wurtemberg, la Suède, etc. , il est égal à la moitié du chiffre total de la population. Le nombre total des bêtes à cornes est évalué en France à environ six millions sept cent mille têtes, et chaque année nous en importons de trente à quarante mille de la Belgique , de l'Allemagne et de la Suisse. Pour fournir à la consommation de la ville de Paris (qui est d’en- viron cent cinquante mille bœufs , vaches ou veaux par an), il (x) Voici les proportions des divers produits, terme moyen , pour un bœuf pesant trois cent vingt-cinq kilogrammes, calculés d’après ceux des abattoirs de Paris: Cuir. . 0 H . Gé » 20 k. Le) Abat}S&£é.) . 1 C AS EEE RE : et issues. } Tête , pieds et fressure. 22 5 pui ordi Sang et immondices. .27 5 Viande. . . . . . . . . . . .222 5=—°#,ou 0,6857 de poids total. La valeur des abats est comptée pour un cinquième de la valeur totale de l'animal. TRIBU DES RUMINANS 4 CORNES CREUSES. 463 ne suffit pas de ceux que nos bouchers tirent de la Normandie, du Poitou, de la Marche , etc. : on en fait venir aussi de la Bel- gique et de l'Allemagne. Du reste la consommation de la viande fournie par ces ani- maux est bien plus faible en France que chez nos voisins du Nord. A Paris , elle est annuellement , terme moyen, d'environ soixante livres par habitant , tandis qu’à Londres, on l’évalue à pres de cent cinquante livres par habitant. Ce n’est pas seulement par leur travail et les alimens qu’ils nous fournissent , que ces animaux sont précieux ; l’industrie tire partie de leur peau , de leurs os , de leurs cornes , de leur sang et mème de leurs intestins. C’est avec la peau du bœuf ou de la vache que l’on prépare tous les cuirs forts employés à la confection de nos chaussures et à une multitude d’autres usages (1). Celles de la vache et du veau (1) La peau des animaux, comme nous l’avons déjà dit , est en majeure partie formée d’une substance qui , par l’ébullition , se transforme en gélatine ou colle- forte : elle absorbe facilement l’eau, et , dans cet état , ne tarde pas à se putréfer. Pour la rendre incorruptible et propre aux besoins de l’industrie, on a recours a divers procédés, dont le plus important est le fznnage. L’écorce de chêne, et la plupart des écorces , dont la saveur est très astringente, renferme une quantité considérable de tannin , matière qui se dissout dans l’eau, et qui a la propriété de se combiner avec la gélatine, pour donner naissance à un produit insoluble dans l’eau et incorruptible : c’est sur cette réaction que repose la fabr - cation des cuirs par le tannage. Les cuirs tannés se divisent en trois classes principales , les cuirs forts, les cuirs corroyés et les cuirs maroquinés. Ces derniers se tannent avec l’écorce de sumac, les premiers avec l'écorce de chéne. Les cuirs non tannés sont mégis, chamoisés , hongroyés et parcheminés par les procédés déja indiqués (pag. 453). Les cuirs forts sont fabriqués avec des peaux de bœufs, de vache, et sim- plement tannés sans préparation ultérieure. On ramollit d’abord ces peaux dans une eau courante , puis en les râclant avec un couteau d’une forme particulière , on les dépouille du tissu cellulaire et de tout ce qui adhérait à leur surface in- terne. Cette opération préalable terminée , on procède au gonflement et au dé- pelage des peaux, qui peuvent s'effectuer d’après trois procédés : par l’action de la chaux’, de bains contenant de la farine d’orge ou autres substances suscep- tibles d’une prompte fermentation acide , ou bien par l’immersion dans de l’eau, mélée à du tan, qui a déja servi et qui y donne une faibie proportion de tannin et un certain degré d’acidité. Cette dernière manière de préparer les euirs dits à la jusée , est la meilleure. Du reste , quel que soit le procédé employé, _on détermine ainsi le gonflement des peaux , et on détruit l’adhérence des poils;on place alors les peaux sur un chevalet, et , avec un couteau mousse, on en fait tomber les poils; puis , si elles ne sont pas suffisamment gonflées ,on les met dans une nouvelle dissolution faible de tannin aiguisée par de l’acide sul- furique; enfin on les place dans des fosses , en les séparant par des couches de tan en poudre , et on humecte le tout avec de l’eau ,qui se charge peu-à-peu du tannin contenu dans l'écorce de chéne, et en imbibe les peaux. Après un 30. * 464 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. servent à la fabrication des cuirs souples ou œuvrés. À Paris seu- lement, on tanne, chaque année, environ cinquante mille peaux de bœufs ou de vaches et soixante mille peaux de veaux , et cependant cette production ne suffit qu’à la moitié de la con- sommation en cuirs forts et à un neuvième de celle des cuirs de veaux. On évalue à plus de 36,000,000 de francs la valeur des peaux employées annuellement en France par les tanneurs, et on estime que les préparations que ces industriels leur fontsubir en doublent le prix. Outre les peaux fournies par les bêtes à cornes livrées à la boucherie dans toute l’étendue de la France, nos tanneries en importent beaucoup du Brésil, de Buénos-Ayres, de la Russie , etc. C’est également avec les peaux de bœufs, que l’on fabrique les cuirs hongroyés dont on se sert pour faire les soupentes de voitures , etc. Les poils dont on dépouille ces peaux sont employés à divers usages. Après les avoir filés , on en fait des tissus grossiers et presque imperméables à l’eau, dont nos rouliers se servent comme de manteaux , et que l’on nomme tibaudes. La corne de ces animaux est employée aux ouvrages de tablet- terie : par les préparations qu’on lui fait subir on parvient à lui donner l'aspect de l’écaille (1). La membrane musculaire deleurs séjour d'environ trois mois dans cette première fosse , on les place dans une seconde avec une nouvelle quantité de poudre de tan, et on renouvelle encore cette opération une , deux ou même trois fois. À Paris, la durée de la fabrication est en général d'environ dix-huit mois , et on évalue à cent vingt-cinq kilogram- mes la quantité de poudre de tan nécessaire pour la préparation d’un cuir fort du poids de soixante-dix kilogrammes. La réussite de l’opération dépend principale- ment dela manière dont on ménage l’action du tannin, afin de ne pas endurcir la surface du cuir avant que d’avoir laissé la matière tannante pénétrer suffisam- ment dans son intérieur. On admet qu’un bon cuir fort contient quatre dixièmes de son poids de tannin. Les cuirs ouvragés , après avoir été tannés comme les ‘cuirs forts, sont livrés à des ouvriers qui les assouplissent par des moyens mécaniques. Tantôt on laisse les cuirs corroyés sans autre préparation; d’autres fois on les imbibe de suif ou d'huile; on en lisse la surface et on les teint, le plus souvent, en noir au moyen du sulfate de fer, appelé;vulgairement couperose verte, qui, en se combinant avec le tannin, produit cette couleur. Les cuirs corroyés, après avoir été trempés et dépouillés de leurs poils, sont préparés, comme les cuirs mégis, par l’immersion dans une dissolution d’alun et de sel commun, ce qui les rend inaltérables à l’air (oy. page453); ensuite on les imprègne de suif fondu. (x) La corne est une substance élastique, insoluble dans l’eau , mais qui, par une ébullition prolongée , se ramollit et devient alors susceptible de se souder et de prendre la forme des objets sur lesquels: on l’applique avec force. Pour lui donner l'apparence de l’écaille, on la teint avec des sels d’argent et d’or qui produisent des taches noirâtres ou d’un brun rouge. TRIBU DES RUMINANS À CORNES CREUSES. 465 petits intestins sert aux boyaudiers , pour en faire des cordes pour les instrumens de musique , etc. , et la membrane séreuse, qui fixe ces Membranes aux parois de l’abdomen ,convenable- ment préparée, devient de la baudruche. Le sang du bœuf desséché commence à être employé comme un engrais puissant ; et la partie séreuse de ce liquide sert , comme le ferait du blanc d'œuf délayé dans de Peau, pour clarifier le vin, le sirop, etc. (1) Enfin les os, traités par la vapeur d’eau à une haute température ou par des acides, donnent de la gélatine , que l’on emploie comme un aliment économique et comme colle-forte; simple- ment broyés, ils fournissent à l’agriculture un excellent engrais, et, chauffés à l'abri de l’action de l'air, ils se transforment en un charbon précieux, connu sous le nom de xoir animal, doni les raf- fineries de sucre fontun grand usage pour décolorer leurs sirops. Notre bœuf commun n’est pas la seule espèce de ce genre qui ait été réduite depuis loug-temps en domesticité. On emploie aux mêmes usages le buffle, le gyall et le yack. Le buffle parait être originaire des parties chaudes et humides de l’Inde et des iles voisines, d’où il s’est répandu dans la Perse, l'Arabie , toute la partie orientale de Fig.158. l'Afrique , la Grèce et l'Italie. On le re- connaît à son front bombé et plus long que large, et à ses cornes dirigées de côté et marquées en avant d’une arête longi- tudinale saillante ({g. 158). Sa tête est très grosse ; sa peau , très épaisse, est noire et presque nue, excepté à la gorge et aux joues ;il n’a qu’un très petit fanon; enfin ses côtes sont en même nombre que chez (1) L'usage du sang et du blanc d'œaf pour clarifier les sirops, le vin, ete., repose sur la propriété que possède l’albumine , dissoute dans ces liquides, de se coagu- ler par l'action de la chaleur ou par sa combinaison avec le tannin et autres sub- EX RE astringentes ; car, en se solidifiant ainsi , elle entraine avec elle les par- ticules qui nageaient dans la liqueur que l’on veut clarifier, et qui en troublaient la transparence, Pour employer le sang à cet usage , on commence par le battre, afin dele dépouiller de sa fibrine , et d’empécher la formation du caillot, et, lorsqu'on ne veut pas s’en servir immédiatement, on le fait dessécher à une tem- PE qui n’est pas assez élevée pour coaguler. La poudre, ainsi obtenue, est ensuite délayée dans de l’eau et mélée à la liqueur à clarifier. Si celle-ci renferme des matières astringentes (comme c’est le cas pour le vin), l'opération se fait à froid , sinon on fait bouillir le tout et on eulève l’écume qui se forme. à Le sang, desséché et mêlé à de la terre,est un excellent engrais pour la vigne, ER LS bois Loan a sucre, etc. Outre la consommation qui s’en fait en envoient une grande quantité aux Antilles. Buffle. Gyall. Yack, Aurochs. 466 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. le bœuf commun ; mais ses mamelles sont sur -une même ligne transversale. Cet animal aime à se vautrer dans l’eau et dans la fange ; ilrecherche les terrains marécageux, et, comme il est en même temps peu difficile sur sa nourriture, on peut le tenir dans des lieux où le bœuf ordinaire ne vivrait pas; mais il con- serve presque toujours de la férocité, etne réussit pas bien dans les pays froids. La durée de la vie du buffle est de vingt et quel- ques années ; mais ordinairement on l’engraisse et on le tue à l’âge de douze ans. Sa chair est très médiocre; son lait est agréable. Dans quelques pays, on l’emploie pour labourer la terre et trainer des chariots. Sa peau est excellente pour faire des vêtemens à l’épreuve des armes tranchantes, mais est peu propre à faire des semelles , à cause de la facilité avec laquelle elle s’imbibe d’eau. L'introduction du buffle en Grèce et en Italie date du moyen âge : on dit qu’il a été importé dans ce dernier pays, vers le septième siècle, sous le règne d’Agi- lulfe , roi des Lombards; mais il paraît avoir été connu des an- ciens ; Car Aristote en parle sous le nom de bœuf sauvage d'Ara- chosie. Dans l'Inde, il en existe une race appelée arni, dont les cornes ont jusqu’à dix pieds d’envergure. Le gyall ou bœuf des jongles ressemble beaucoup au nôtre ; mais ses cornes sont aplaties d'avant en arrière, ne présentent pas d’arêtes anguleuses et sont dirigées en dehors eten haut, mais non pas en arrière. On élève ces bœufs en domesticité dans les contrées montagneuses du nord-est de l'Inde. Le yack se distingue par sa queue , entièrement garnie de longs poils lustrés et soyeux comme celle d’un cheval, parti- cularité qui lui a valu le nom vulgaire de buffle à queue de cheval: il porte aussi une épaisse crinière sur le dos et a les flancs et le dessous du corps garnis de poils touffus, qui tombent jusqu’à mi-jambes ; il a quatorze paires de côtes comme Pau- rochs , et quatre mamelies sur une même ligne comme le buffle. Sa voix est un grognement grave et monotone comme celui du cochon. Cet animal est originaire des montagnes du Thibet; mais les Tartares nomades en élèvent un grand nombre, et il a été introduit aussi en Chine. Il n’est pas propre au la- bour, mais est une excellente bête de somme. On fait des tentes avec le poil des yacks ,et ce sont leurs queues dont les Turcs se servent comme d’étendards, pour distinguer les officiers su- périeurs. On a pensé pendant long-temps que l’aurochs était la souche de nos bœufs domestiques ; mais les observations de M. Cuvier ont démontré le contraire : il en diffère essentiellement par la forme de son front, bombé et plus large que haut ; par la position de ses cornes, implantées au dessous de la crête occipitale ; par TRIBU DES RUMINANS À CORNES CREUSES. 467 l'existence de quatorze paires de côtes au lieu de treize; par la hauteur de ses jambes, par la laine crépue qui couvre la tête et lecou du mâle, et par sa voix grognante. C’est , après l’éléphant, le rhinocéros et la girafe, le plus grand des quadrupèdes : il a jusqu’à six pieds de haut, mesuré au garrot. Jadis il vivait dans toutes les forêts marécageuses de l'Europe tempérée. Du temps de César, il se trouvait encore en Allemagne; mais, à mesure que les hommes se sont multipliés , il est devenu de plus en plus rare, et aujourd’hui on ne le rencontre plus que dans les forêts les plus profondes de la Lithuanie , des monts Krapachs et du Caucase. C’est le bison ou urus des anciens. Il existe en Ecosse une race particulière de bœufs qui pour- raient bien être des aurochs réduits en domesticité ; mais, pour s’en assurer, il faudrait les étudier mieux qu’on ne l’a encore fait. Le buffle du Cap se distingue de toutes les autres espèces propres à l’ancien monde par ses grosses cornes, dont les bases aplaties couvrent, comme un casque, tout le sommet de la tête et ne laissent entre elles qu’un espace triangulaire. Il vit en grandes troupes dans les forêts de l'Afrique méridionale, et se pratique dans les fourrés les plus épais des sentiers étroits dont il ne s’écarte jamais. C’est un animal terrible par sa féro- cité : il renverse avec fureur tout ce qui se rencontre sur son passage , et court presque aussi bien qu'un cheval. Sa chair est passable et son cuir excellent. Dans les parties les plus septentrionales de l'Amérique , sous le cercle polaire, se trouve une autre espèce de bœufs, dont les Fig. 159: cornes présentent à-peu-près la même disposition : c’est le bœuf mus- que (fig. 159), qui doit son nom à l'odeur forte de muse , qu’il répand, et dont sa chair est imprégnée. Il est moins grand que notre bœuf com- mun et très bas sur jambes. Sa queue est très courte, et reste cachée dans le poil, qui est très abondant et pend jusqu’à terre. Ces animaux se dis- tinguent de tous les autres bœuîs par le museau entièrement garni de poils : ils vivent par troupes d’une centaine d'individus et grimpent sur les rochers presque aussi bien que les chèvres. | Le bison (fig 160) babite aussi l'Amérique septentrionale, mais Buffle du Cap. Bœuf mus- que. Bison. Organisa- tion, 468 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. à une latitude moins élevée. On le rencontre depuis la Louisiane jusqu’au cercle polaire. Il vit en grandes troupes péle-mêle avec Fig. 160. les daims et les cerfs,dans les vastes sa- vanes décou- vertes, et a- bonde sur- tout dans le voisinage des sources du Mississipi. Il est plus pe- tit que lau- rochs, mais plus grand que nos plus forts taureaux domestiques. Ses jambes et sa queue sont cour- tes; sa croupe est plus faible ; la saillie de son garrot est très forte ; sa tête grosse; ses cornes rondes, courtes , presque droites et écartées à leur base ; enfin une laine crépue et épaisse et d'un brun noir, qui, en hiver, devient très longue, lui couvre la tête , le cou et les épaules , tandis que le reste de son corps est garni d’un poil ras et noir. Sa peau est très épaisse et spongieuse comme celle du buffle. Quelque lourd qu’il pa- raisse , il ne laisse pas que d’être très rapide à la course : il est très sauvage ; mais, pris jeune, il peut être apprivoisé, et il paraît que, dans quelques fermes du Kentuky et de l'Ohio, on l'élève en domesticité : il donne avec la vache des métis féconds. ORDRE DES CÉTACES. Les baleines , les dauphins , les marsouins et les autres ani- maux d’une structure analogue , désignés par les naturalistes sous le nom de cetaces, ressemblent si exactement à des poissons par leurs formes extérieures aussi bien que par leur manière de vivre que le vulgaire les regarde toujours comme appartenant à cette classe; mais, lorsqu'on ne se borne pas à un examen aussi superficiel de ces êtres singuliers, et qu’on étudie leur organisa- tion et le mécanisme de leurs fonctions, on ne tarde pas à se con- vaincre que, sous tous les rapports les plus importans, ils s’éloi- gnent des poissons, pour se rapprocher des mammifères ordi- ORDRE DES CÉYACÉS. 469 naires. Ils ont bien, comme les premiers, le tronc en apparence confondu avec la tête, etse continuant sans interruplon avec une queue épaisse que termine une large nageoire, et les membres antérieurs transformés en nageoires (voy. fig. 161); 1ls manquent de membres postérieurs, et leur peau n’est point gar- nie de poils, comme celle des mammifères ordinaires; mais , quoiqu’ils se tiennent constamment dans les eaux, ils n’ont pas de branchies et respirent par des poumons; ce qui les oblige à venir souvent à la surface y prendre air nécessaire à l'entretien de leur vie. Leur sang est chaud ; leur cœur présente deux ven- tricules et deux oreillettes ; enfin leurs petits naissent vivans, ei ils sont pourvus d’un appareil mammaire , pour les allaiter. Fig. 161. Les cétacés sont par conséquent de véritables mammifères ; mais , au lieu d’être organisés, pour vivre sur la terre comme les quadrupèdes de cette classe , ils présentent dans leur struc- ture des modifications profondes qui en font des animaux es- sentiellement aquatiques , et la densité de l’élément qu’ils ha- bitent leur permet à son tour d’acquérir les dimensions qui auraient été incompatibles avec la manière de vivre et de se mouvoir des autres mammifères : aussi esi-ce dans ce groupe que se rencontrent les géants de la création. Les plus gros qua- drupèdes sont petits comparativement à beaucoup de cétacés, et cependant ces êtres, si démesurément grands, nagent avec une rapidité extrême. L'air renfermé dans leur poitrine et l'énorme quantité de graisse dont leur corps est chargé aident à les soutenir dans l’eau qui les baigne , et leur forme générale est parfaitement appropriée au genre de mouvement qu’ils sont appelés à exécuter. Leur queue longue et épaisse est une rame aussi puissante que celles dont la nature a doué les poissons les plus vigoureux et les plus agiles , et la nageoïre qui la termine, au lieu d’être verticale, comme chez ces derniers , est placée horizontalement , disposition qui leur est singulièrement favo- rable pour s'élever à la surface de l’eau, lorsque le besoin de res- pirer les y appelle. 470 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. Fig. 162. (1) 7 4) PRE RRER Ge EDS EE et à RE RTE Ce QE 2 Le 44 VAI TE ALL A RIVE NENe ESS fe FT LT" 0 S : =) & \® SE v Leurs membres antérieurs , avons-nous dit , sont aussi trans- formés en nageoires : ces organes offrent cependant au fond la même structure que le bras de l’homme, la patte d’un chien ou l'aile d’une chauve-souris. On ytrouve les mémesos(voy. fig. 162), seulement l’humérus et les os de Pavant-bras sont raccourcis , et ceux de la main sont aplatis et enveloppés dans une membrane tendineuse, qui ne permet en général des mouvemens que dans l'articulation de l'épaule. Quelquefois les phalanges sont en plus grand nombre que chez les autres mammifères; mais du reste ces rames ne servent guère qu’à mainienir l'animal en équi- libre et à lui faire changer de direction ; car c’est sa queue qui est son véritable moteur. Les membres postérieurs manquent com- plètement; mais on trouve à la partie postérieure de l'abdomen deux ou trois osselets rudimentaires, qui sont suspendus dans les chairs, et qui sont les vestiges d’un bassin(2). Au-dessous des vertèbres caudales, on remarque des os en forme de V, quiser- vent à donner insertion aux muscles fléchisseurs dela queue ,et à augmenter leur force : il est aussi à noter que les vertèbres cer- vicales , quoiqu’au nombre de sept, sont très courtes et en général presque toutes soudées ensemble. Enfin le rocher, por- tion du crâne qui renferme l'oreille interne, au lieu d’être confondu avec les autres pièces du temporal , est séparé du reste de la tête et n’y adhère que par des ligamens. Les sens paraissent généralement obtus chez ces animaux. Ils n’ont jamais d'oreille externe : ils manquent souvent de nerfs olfactifs; leur langue est presque immobile , et leur peau est en général revêtue d’une couche épidermique des plus épaisses. Ils ne montrent que peu d'intelligence. Leur cerveau est néanmoins grand , et ses hémisphères bien développés. (r) Squelette d’un cétacé (le dugong): — b bassin ; — + os en V suspendu aux vertébres caudales. FAMILLE DES CÉTACÉS HERBIVORES. 471 L'appareil de la respiration présente , chez les cétacés, des particularités de structure , dont l'utilité est évidente. Les na- rines s'ouvrent en général au-dehors à la partie la plus éle- vée de la tête, ce qui donne à l’animal la facilité d’aspirer l'air sans élever son museau hors de l’eau, et le larynx s’avance jusque dans les arrière-narines, de facon à établir, indépen- damment du pharynx, une communication entre les fosses nasales et les poumons, et à lui permettre de remplir sa bouche d’eau et d’avaler des alimens sans interrompre la respiration. Enfin l'estomac des cétacés offre en général dans sa structure une complication aussi grande , ou même plus grande que celle des ruminans.On ne distingue point de gros intestin, et leurs dents, lorsqu'il en existe, sont en général toutes semblables entre elles. Cet ordre se compose de deux familles , qui se distinguent par leur régime , leurs dents et plusieurs autres particularités d'organisation , et qu’on peut reconnaitre par la position de leurs narines , ce sont: 1° Les CÉTACÉS HERBIVORES, dont les narines s'ouvrent au dehors à l'extrémité du museau ; 2° Les CETACÉS ORDINAIRES OU SOUFFLEURS, dont les narines sont percées à la face postérieure de la tête. FAMILLE DES CÉTACÉS HERBIVORES. Le régime de ces animaux, qui est herbivore , a nécessité l'existence de dents molaires à couronne plate et la faculté de ramper sur la terre , pour venir paitre sur le rivage de la mer: aussi ont-ils les membres antérieurs plus flexibles que les autres cétacés , et ne vont-ils pas dans la haute mer. C’est parce qu’ils paissent l'herbe comme les ruminans, et qu’ils sont grands et massifs , que les voyageurs les ont souvent désignés sous le nom de 2œuf, de vache où de veau marin. Quelquefois on les a ap- pelés des femmes de mer, et c’est probablement d’eux qu’il a été question , lorsque des navigateurs modernes ont dit avoir ren- contré des sirènes ou des tritons ; car ils ont l'habitude d'élever souvent la partie antérieure de leur corps hors de l’eau et leurs mamelles placées sur la poitrine, les poils qui entourent leurs muffles et qui de loin peuvent ressembler à une sorte de cheve- lure ; enfin l'adresse avec laquelle ils se servent quelquefois de leurs nageoires pour porter leurs petits, leur donnent alors quel- ques points de ressemblance éloignés avec l’espèce humaine. Leur estomac est divisé en quatre poches , dont deux latérales , et ils ont un grand cæœcum. Classi£ ca- tiou, Lamentins. Dagongs. \ 472 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. Les principaux genres de cette petite famille sont les Zamen- tins etles dugongs. Les LAMENTINS ont le corps oblong et terminé par une na- geoire ovale allongée. Leurs patles présentent des vestiges d'ongles, et ont avec des mains une ressemblance grossière, qui paraît avoir valu à ces animaux le nom de manates , dont on a fait, par corruption, Zamentin. Leur tête est terminée par un mur- seau Charnu et garni de poils. Dans le jeune âge, on leur trouve deux petites dents implantées dans les os intermaxillaires ; mais , à l’âge adulte , ils n’ont ni incisives ni canines, et leurs molaires , à couronne carrée , sont au nombre de huit partout. Ces animaux habitent les parties les plus chaudes des deux versans de l’Océan Atlantique dans le voisinage des côtes ; on le voit principalement près de l'embouchure des rivières, qu'ils remontent quelquefois assez loin: ils vivent en troupes, viennent souvent à terre, se laissent facilement approcher, et montrent le plus grand attachement pour leurs compagnons. Leur chair se mange. Les DUGONGS , qui habitent la mer des Indes, se distinguent des lamentins par leur corps allongé , leurs nageoires caudales en forme de croissant, et les défenses pointues qui sortent de leur mâchoire supérieure(voy. fig. 162). FAMILLE DES CÉTACÉS ORDINAIRES OU SOUFFLEURS. Les cétacés de ce groupe diffèrent des précédens par leurs mamelles , situées près de l’anus, au lieu d’être placées sur leur poitrine , par l’armature de leur bouche, dont les dents , lorsqu'elles existent , sont pointues ; par leur régime carnassier ; par la position de leurs narines , etc.; mais, ce qui les distingue surtout ; c’est l'appareil singulier qui leur a valu le nom de souffleurs. Les grandes masses d’eau que ces animaux engloutissent avec leur proie dans leur vaste gueule , sont rejetées en dehors à travers les fosses nasales , et forment ainsi des jets qui s’élè- vent dans l'air, et s’apercoivent de fort loin. Pour cela les souf- fleurs meuvent leur langue et leurs mâchoires, comme s'ils voulaient avaler ce liquide pendant que le commencement de l’æsophage, resserré avec force , l'empêche de descendre vers l'estomac et le retient dans le pharynx. Le voile du palais , en s’abaissant, intercepte ensuite la communication entre la bouche ) 44 FAMILLE DES CÉTACÉS ORDINAIRES. 473 et l’arrière-beuche , et les muscles puissans qui entourent cette dernière cavité, venant à se contracter, en expulsent l’eau, qui ne trouvent d’issue que par les arrière-narines , traverse les fosses nasales et s’amasse dans deux grandes poches membra- neuses , situées entre l’extrémité de la portion osseuse du canal nasal et la peau. Une valvule charnue , disposée de facon à se lever lorsque l’eau la pousse de bas en haut et à intercepter toute communication entre ces cavités et les fosses nasales, lorsqu'elle est pressée en sens contraire , empêche l’eau poussée dans les réservoirs que nous venons de décrire, de redescendre dans les fosses nasales ; enfin des fibres charnues, qui viennent, en rayonnant de tout le pourtour du crâne , se fixer sur ces deux bourses , en se contractant, les compriment violemment; et en expulsent l’eau , qui s'échappe au-dehors par louverture étroite des narines (ou event), et forme un jet, dont la hauteur est quelquefois de près de quarante pieds. Ces animaux ne mâchent point leurs alimens, mais lesavalenti rapidement. Leur estomac présente de cinq à sept poches dis- tinctes , et, au lieu d’une seule rate, ils en ont plusieurs qui sont petites , globuleuses et accolées au premier estomac. Plu- sieurs ont sur le dos une nageoire verticale, formée par une sub- siance tendineuse, mais qui n’est pas soutenue par des os ; enfin leur peau est lisse , et en général ne présente plus aucun vestige de poils. Cette famille peut être divisée en deux tribus faciles à distin- guer par la grandeur relative de la tête, savoir :les DELPHINIENS, où elle est en proportion ordinaire avec le corps, et les CÉTACÉS A GROSSE TÈTE , chez lesquels la tête fait à elle seule le tiers ou la moitié de la longueur totale. TRIBU DES DELPHINIENS. Les cétacés ordinaires à petite tête ont tantôt les deux m4- choires garnies de dents simples et presque toujours coniques , tantôt dépourvues de dents ordinaires et.armées seulement de longues défenses droites , implantées dans l’os intermaxillaire, et dirigées en avant dans le sens de l’axe du corps.Les premiers ont reçu la dénomination générale de dauphins ; les seconds sont appelés narvals. Classifica- tion. 45 4 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. Fig. 161. Dauphins. * : s P Les pAUPœHINSs sont les plus carnassiers , et proportion gardée 2 P P le) , avec leur taille, les plus cruels des cétacés. Leur peau, lisse et bien tendue , est ordinairement d’un noir bleuâtre en dessus et blanc ou blanchâtre en dessous. L’évent, dirigé verticalement, est tantôt en forme de croissant, tantôt en ligne droite et se trouve souvent en arrière du niveau des yeux. Chez la plupart, le dos est pourvu d’une nageoire triangulaire ; enfin leur cerveau esten général remarquable par son volume et la profondeur de ses circonvolutions. Ces animaux nagent avec une rapidité extrême et vivent en troupes. On les divise , d’après la forme de la tête et l’existence ou l’absence de la nageoire dorsale, en dauphins proprement dits , marsouins , delphinapteres et kyperoodons. Dauphins Les DAUPHINS PROPREMENT DITS (Delphinus) Se reconnaissent à Se Si l'espèce de bec que forme leur museau , plus mince que le reste de la tête et séparé brusquement de leur front bombé: ils ont une nageoire dorsale et des dents coniques et en nombre très considérable , fixées tout le long des deux mâchoires ; on en compte en tout de cent soixante-huit à cent quatre-vingt-dix , suivant les espèces. Ces animaux sont célèbres par leur vélocité , par les fables dont les anciens ont chargé leur histoire, et par espèce de culte religieux dont ils étaient l’objet chez les Grecs. Ils vivent en grandes troupes , qui semblent être conduites par les plus forts, etils montrent un grand attachement pour leurs petits: sou- vent ils se pressent autour des navires, pour s'emparer des poissons que les débris jetés äu bord y attirent , et on les voit quelquefois suivre un vaisseau pendant une longue traversée, en se jouant sous la proue, pendant qu’elle fend Peau avec toute la vitesse que le vent et les voiles peuvent imprimer. Ce soni ces particularités de mœurs, jointes à une intelligence bien supé- rieure à celle des poissons, avec lesquels le vulgaire est toujours porté à comparer ces animaux , qui leur ont valu leur antique réputation de sociabilité, d’attachement pour Phomme, et on pourrait presque dire de vertu; l'imagination poétique des TRIBU DES DELPHINIENS. 475 Grecs avait créé pour le dauphin un assemblage de perfections morales et physiques, dont l’espèce humaine est loin de pouvoir se vanter. Ils placèrent son image dans leurs temples, sur leurs monnaies , surles médailles , en firent lattribut ou le symbole du dieu de la mer; se servirent de son image pour retracer le souvenir d’une foule d’évènemens réels ou fabuleux , et pour exprimer des préceptes de morale : c'était l'emblème de l'activité, de la prudence ; enfin ils l’associaient à un grand nombrede leurs divinités , et, chose singulière, les anciens ne le représentent jamais avec l’exactitude qu’ils mettaient habituellement dans l’imitation de la nature ,comme s'ils avaient voulu lidéaliser. L'espèce de cétacés qui a reçu tant d’honneurs paraît être le dauphin ordinaire. Cet animal, qui est long de huit à dix pieds, noir en dessus , blanc en dessous, et qui a le bec déprimé et armé de chaque côté de quarante-deux à quarante-sept dents grèles et pointues , est répandu dans toutes les mers et se voit quelquefois sur nos côtes. Une autre espèce , beaucoup plus grande et appelée pour cette raison le dauphin geant , Se trouve assez communément dans la Manche et remonte quelquefois la Seine jusqu’à Rouen. Les Normands l’appellent le souffleur. Les MARSOUINS (Phocæna)diffèrent des précédens par leur mu- seau court , uniformément bombé, et n’ayant pas la forme d’un bec. Leur nom, qui signifie en allemand cochon de mer, leur vient probablement de la quantité considérable de graisse qu’on trouve sous leur peau. Lemarsouin commun (fig.161) estle plus petit de tous les cétacés et aussi celui qui abonde le plus sur nos côtes : il n’atteint que quatre à cinq pieds de longueur, et vit en troupes nombreuses. On le voit souvent bondissant sur la surface de l’eau, et sa vé- locité est extrême : il remonte fréquemment les rivières , et il parait que des individus sont arrivés ainsi jusqu’à la hauteur de Paris. On n’en fait la pêche que pour l'huile qu’on retire de sa graisse. Une seconde espèce de marsouins, connue sous le nom d’épaulard ou de dauphin gladiateur est au contraire le plus grand des animaux de cette tribu; sa longueur est souvent de vingt à vingt-cinq pieds ; quelquefois on le voit sur nos côtes ; mais c’est dans les mers du nord que ce grand marsouin est le plus commun. Il est célèbre par les combats qu’il livre à la baleine. Réunis en troupes nombreuses, ces animaux attaquent cet immense cétacé et le harcèlent jusqu’à ce qu’il ait ouvert sa gueule , et alors ils lui dévorent la langue. Marsouins. Delphinap- tères. Hyperoo- dons. Narvals. 476 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. Les DELPHINAPIÈRES ne diffèrent des marsouins que par labsence de la nageoire dorsale. L’epaulard blanc de la mer glaciale appartient à cette division. Enfin les HYPEROODONS ressemblent assez aux dauphins pro- prement dits, mais sont remarquables par les tubercules denti- formes dont leur palais est hérissé. On n’en connaît qu’une espèce, qui atteint vingt à vingt-cinq pieds de longueur, et qui s’est rencontrée dans la Manche aussi bien que dans la mer du Nord. Les NARVALS , comme nous l’avons déjà dit, s’éloignent des. dauphins par leur système dentaire; par la forme générale de leur corps, ils diffèrent peu des marsouins ; mais on les distingue au premier coup-d’œil de tous les autres cétacés par leur longue défense, qui est implantée dans la mâchoire supérieure, et qui ressemble à une grande corne plutôt qu'à une dent.Il existe deux de ces denis incisives ; mais presque toujours l’une avorte en quelque sorte, et reste cachée dans l’alvéole , tandis que l’autre (ordinairement celle du côté gauche) s’avance en ligne droite , et constitue un énorme stylet arrondi, pointu et en général sillonnée en spirale, qui parait impair et qui at- teint le tiers ou la moitié de la longueur du corps. On en voit qui ont dix pieds de long, et ses denis ont été pendant long- temps prises pour des cornes d’un quadrupède fabuleux , la li- corne. On ne connaît qu’une espèce de narval , qui habite les mers du nord , principalement entre le Groënland et l'Islande. Sa peau est marbrée de brun et de blanchätre , et sa longueur de quinze à seize pieds. Son évent est sur le haut de la tête, et il n’a pas de nageoire dorsale. Il nage avec ure grande vitesse, et est pour la baleine un ennemi redoutable; car, réuni en troupes nombreuses , il attaque souvent cet immense cétacé, et lui fait avec sa défense des blessures profondes. Les pêcheurs le prennent assez facilement et le recherchent pour l’excellente huile fournie par sa graisse. Un seul narval en donne deux ou trois tonnes. La défense de cet animal est également employée comme de l’ivoire. TRIBU DES CÉTACÉS A GROSSE TÈTE. 47 =] TRIBU DES CÉTACÉS A GROSSE TÈTE. Fig. 163. LA BALEINE FRANCHE. Les cétacés de cette tribu doivent l'énorme développement de leur tête non pas au cerveau et au crâne, qui conservent leurs proportions ordinaires , mais aux os de la face seulement - qui acquièrent des dimensions gigantesques. Ce sont les plus grands des mammifères , et leur pêche est pour les nations maritimes une branche importante d’industrie. On les divise en cachalots et baleines. Les CACHALOTS se distinguent principalement par l’existence d’une rangée de dents cylindriques ou coniques de chaque côté de la mâchoire inférieure, qui est étroite, allongée et répond à un sillon de la mâchoire supérieure. Celle-ci manque de dents ou n’en présente que de très petites , ne porte point de fanons comme chez les baleines ; et offre une série de cavités , destinées à recevoir les dents de la mâchoire opposée, lorsque la bouche se ferme. La tête de ces animaux est énorme et excessivement Fig. 164. (1) renflée en avant. Sa struc- ture est des plus singuliè- res ; tout le dessus de la face et du crâne (#g. 164)a la for- me d’un vaste bassin ova- laire, dont les bords s’élè- vent en arrière à six pieds au dessus du crâne , et s’a- baissent graduellement en (r) Tête osseuse d’un cachalot vu en dessus, pour montrer le bassin qui loge 31 Cachalots. 478 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. avant; les parois de cette grande cavité sont formées principa- lement par un prolongement des'os maxillaires,'qui va rejoindre une crête verticale de loccipital , et elles donnent insertion , par leurs bords, à une espèce de tente fibro-cartilagineuse , qui transforme le bassin que nous venons de décrire en une longue cavité cylinärique, divisée en deux étages par une cloison mem- braneuse également tendue d’un bord des maxillaires à l’autre. Ces deux chambres sont remplies d’adipocire , espèce d’huile, qui se fige par le refroidissement et qui est connue dans le commerce sous le nom bizarre de sperma-ceti ou de blanc de ba- Leine : elles communiquent avec des canaux, qui se distribuent dans différentes parties du corps, s’entrelacent dans le tissu graisseux sous-Cutané , et contiennent également de l’adipocire : aussi, à mesure qu'on vide le grand réservoir supérieur, le voit-on se remplir d’une nouvelle quantité de cette matière grasse. Le canal de l’évent traverse obliquement cette masse d’adi- pocire et s’ouvre un peu à gauche, près du bord supérieur du muffle , qui termine en avant la tête du cachalot. Les jets d’eau qui en sortent sont dirigés obliquement en avant, et ressemblent à une gerbe de pluie: ils sont plus élevés et plus fréquens que chez la baleine et sont accompagnés d’un bruit qui s’entend de très loin. La couche de lard , étendue sous la peau , est moins épaisse et fournit moins d'huile que chez la baleine ; enfin la substance odorante, si connue sous le nom d’ambre gris, et que l’on rencontre quelquefois flottant à la surface de la mer, paraït être une concrétion morbide qui se forme dans lintestint de ces animaux. Les cachalots habitent de préférence la partie équatoriale du grand Océan et de l'Atlantique. On les rencontre par bandes assez nombreuses , composées de femelles et conduites par deux ou trois mâles, qui sont beaucoup plus grands que les pre- mières. Ils paraissent se nourrir principalement de grands mol- lusques ; mais on assure qu’ils n’épargnent pas les plus gros poissons , et sont pour ious les habitans de la mer un objet d’effroi. Cachalot Les diverses’ espèces de ce genre sont mal déterminées. La macrocéphale. mieux connue est le cachalot macrocéphale, qui n’a qu’une éminence calleuse , au lieu de nageoire dorsale, et porte de chaque côté de sa mâchoire inférieure vingt à vingt-trois dents coniques. Son museau, presque cubique, est comme tronqué en avant, et son évent est unique, tandis que celui de la plupart des l’adipocire: — a condyles de l’occipital; — Z extrémité de la mächoire supé- rieure. . e. “OR ar D mm TRIBU DES CÉTACÉS A GROSSE TÈTE. 479 autres cétacés est double. Sa longueur est d'environ soixante- dix pieds , et la nageoire bilobée qui termine sa queue a plus de huit pieds deMlarge. Comme nous le verrons bientôt, on lui fait une chasse active pour son huile et surtout pour son adipo- cire. Les BALEINES ont la tête aussi grande que les cachalots, quoique moins renflée en avant; mais leurs mâchoires sont Fig. 166. (1) dépourvues de dents , et la su- périeure , en forme de carène, est garnie de /anons.On donne ce nom à de grandes lames cornées , de texture fibreuse, très élastiques et effilées à leurs bords (/g. 166), quisont placées transversalement comme des mi dents de peigne, fortement ser- rées les unes contre les autres, et fixées par leur base à la mà- choire, de facon à s'étendre de chaque côté du palais (fig. 165)et à Fig. 166. former une sorte de vaste tamis, à travers lequel Peau, engloutie dans l'immense gueule de animal, s'échappe en partie, sans pouvoir entrainer avec elle les petits animaux quis’y trouvent. Lorsque la bouche est fermée, le bord inférieur des fanons se loge entre la mâchoire inférieure , dont les bran- ches sont arquées en dehors , et la langue, qui est graisseuseetimmobile.Cette disposition ne permet aucune espèce de mastication, et cblige les baleines à se nourrir d'animaux petits et mous ,et,si on ne connaissait l'abondance extrème de certains crus- tacés , mollusques et zoophytes, ayant seulement quelques lignes de longueur, dont elles font leur pàture,on s’étonnerait de voir des êtres si énor- mes vivre ordinairement d’une proie si minime; mais, à l’aide de leurs fanons, elles peuvent, à chaque bouchée, en prendre des légions ; et on remarque que la chevelure de ces lames est d'autant plus fine et plus abondante, que la proie ha- bituelle de la baleine est de plus petite taille. Souvent ces ani- maux poursuivent des légions de harengs , de maquereaux, de sardines, etont l'instinct de les pousser dans les anses étroites, pour s’en emparer plus facilement; d’autres fois ils se nourris- sent d'animalcules presque microscopiques. (x) Tête osseuse d’une baleine:—s mâchoire supérieure à laquelle sont fixés les fanons ; — mi mâchoire inférieure ; — cr crâne. 31. Paleines. Baleine fran- che, 480 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. On distingue parmi ces animaux les baleines proprement dites, qui n’ont pas de nageoire sur le dos, et les halenopteres, qui sont pourvues de cet organe et se subdivisent en halenopteres à ventre lisse et halenopteres à ventre plisse ou rorquals. L'espèce la plus célèbre est la baleine franche , qui appar- tient au premier de ces groupes , et dont une variété est ordi- nairement désignée par les naturalistes sous le nom de 7ord- caper. Pendant long-temps, elle passait pour le plus grand des animaux ; mais elle n’a d'ordinaire que cinquante à soixante pieds de long , et ne paraït guère excéder soixante-dix pieds, mesure que le rorqual dépasse de beaucoup : elle est néan- moins plus grosse , et la masse de son corps est énorme. On calcule que le poids d’une baleine, longue de soixante pieds seulement, est d'environ soixante-dix tonnes , et équivaut pres- qu’à celui de trois cents bœufs gras. Sa tête forme à-peu-près le tiers de sa longueur. Ses mâchoires ont de seize à vingt pieds de long , et sa queue a près de vingt pieds de large. Sa peau noire et spongieuse , est souvent envahie par un grand nombre de parasites. Les uns s’y attachent comme sur un rocher, et les autres pénètrent dans son épaisseur, et se nourrissent à ses dé- pens. La couche de lard qui revêt tout le corps de cet animal est souvent épaisse de plusieurs pieds et donne une quantité immense d'huile; enfin ses fanons ont de trois à quinze pieds de long, suivant la partie de la bouche qu’ils occupent, On ne sait rien sur la durée de la vie de ces animaux : celle de la gestation paraît être de neuf à dix mois. Les petits naissent en février ou mars et ont environ quatorze pieds de long. La baleine n’a ordinairement qu’un seul baleineau à-la-fois et lui porie la plus vive affection. Souvent on la voit le soutenir sur ses nageoires, et, lorsqu'il est attaqué par les pêcheurs , elle le défend avec fureur et, plutôt que de l’abandonner, se laisse tuer sans chercher à fuir. La force de ces animaux est im- mense : d’un seul coup de queue , ils peuvent lancer en Pair une chaloupe chargée d'hommes , et, lorsqu'ils sont percés par le harpon , ils plongent avec tant de violence , que , si la corde fixée à cet instrument s'accroche au bateau du pêcheur, ils l’entrainent avec eux au fond de la mer. Souvent on trouve un grand nombre de ces animaux dans les mêmes parages ; mais ils ne vivent pas en troupes comme les cachalots et sont en géné- ral solitaires. Jadis la baleine franche descendait jusque dans nos mers : elle était commune dans le golfe de Gascogne ; mais la chasse active dont elle a été l’objet , l'en a fait disparaitre , et peu-à- peu elle s’est retirée devant le pêcheur dans les mers glacées du nord. TRIBU DES CÉTACÉS A GROSSE TÊTE. 481 Le balenopière à ventre lisse OU gibhbar, qui est aussi long, mais plus grèle que la baleine franche , se rencontre fréquem- ment dans lé mêmes parages, mais n’est pas recherché comme elle ; car il ne donne que peu de lard, et sa capture est difficile et dangereuse. Les rorquals ou balenoptères à ventre plisse sont remarquables par les rides profondes qui sillonnent leur poitrine , et qui per- mettent une grande dilatation de cette partie, mais dont on ignore les usages. Il s’en trouve deux espèces dans les mers d'Europe , le rorqual de la Mediterranee ; ainsi nommé, parce qu'il pénètre dans la Méditerranée ,et le ;wharte des basques , qui surpasse en longueur la baleine franche. La pêche des cétacés à grosse tête, que les naturalistes dis- tüinguent en cachalots et en baleines , mais que les marins con- fondent souvent sous ce dernier nom, est une des industries maritimes les plus importantes par les produits qu’elle donne et par l’influence qu’elle exerce sur éducation nautique des matelots. Elle remonte à une antiquité fort reculée. Les sagas norwégiens et le compte qu'Othon rendit de ses voyages à Alfred-le-Grand , roi d'Angleterre , montrent que , dès le neu- vième siècle , les Normands se livraient avec activité à la pêche des baleines qui s’approchaient de leurs côtes, et il paraïtrait qu'avec la peau de ces cétacés , on faisait des cordages employés dans la marine grossière de ces peuples. A l’époque de linva- sion des Normands en France, les baleines se montraient en- core en grand nombre dans la Manche , et y étaient atta- quées par les pêcheurs. Enfin de temps immémorial les Basques faisaient aussi la pêche de ces animaux dans le voisinage des terres , et peu-à-peu, les baleines devenant rares dans le golfe de Biscaye, ils les poursuivirent en pleine mer: c’est même à ces hardis marins qu'appartint l'honneur d’avoir les premiers fait au loin une pêche régulière de la baleine. Ils pour- suivaient leur proie le long des côtes d’Espagne jusqu’au cap Finistère, et on voit encore sur ces rivages les vigies établies par les pêcheurs basques pour découvrir les baleines, et les dé- bris des fours construits pour la fonte de leur lard. Il paraît que , vers la fin du dixième siècle , ils avaient déjà occupé la ville d’Oporto à titre de conquête et fondé des colonies dans son voi- sinage. Cette pêche, d’abord côtière, se fit ensuite dans le grand Océan. La boussole étant découverte , les Basques se ha- sardent à aller dans le nord-est au-devant des baleines, et on assure que, dès 1372, ils arrivèrent ainsi au grand banc de Terre- Neuve, d'où ils poursuivirent leurs excursions jusqu’au golfe de Saint-Laurent et aux côtes de Labrador. Au quatorzième siècle, des armateurs de Bordeaux équipèrent pour la mer Glaciale des Gibbar. Forquals. Péche de la baleine et du cachalot. 482 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. navires pêcheurs, qui s’élevèrent jusqu’au Groënland et même au Spitzhberg. A cette époque, la pêche de la baleine était dans létatle plus florissant sur toute la côte du Béarn et de lAunis, et les choses continuèrent sur le même pied jusqu’au commen- cement du dix-septième siècle; mais alors les Basques, ne trouvant aucune protection dans le pavillon national , furent inquiétés par des rivaux jaloux, qui les exclurent des parages les plus favorables à la pêche , et leur imposèrent des contributions onéreuses. Cette branche d'industrie commença dès-lors à dé- cliner , et elle fut perdue pour la France , lorsque, en 1636 , les Espagnols, ayant pris et saccagé Soccoa, Cibourn et Saint-Jean- de-Luz, s'emparèrent de quatorze grands navires , arrivant des mers du Groënland, richement chargés de lard et de fanons de baleines. Les pauvres pêcheurs basques furent alors réduits à servir de guides à leurs rivaux plus puissans : ils enseignèrent l’art de harponner la baleine aux Hollandais et même aux Anglais, qui s’'adonnaient déjà avec ardeur aux spéculations maritimes et avaient compris tout l'intérêt qu’aurait pour eux cette pêche lointaine. La pêche des Hollandais, commencée en 1612 et entravée d’abord par la rivalité des Anglais , prit rapidement une grande extension. De riches compagnies se formèrent pour l’exploita- tion de cette industrie nouvelle qui fut une source de prospérité pour tout le pays jusqu'au commencement du dix-neuvième siècle; mais la guerre maritime y mit alors un obstacle insur- montable , et, depuis la paix , la Hollande n’a fait que de vains efforts pour relever la prospérité de la pêche de la baleine , qui est sans contredit l’école la plus propre à former des matelots hardis et expérimentés. Pendant que la pêche de la baleine était si productive entre les mains des Hollandais , elle ne prospérait pas en Angleterre; mais le gouvernement éclairé de ce pays commerçant , appréciant son utilité, fit de grands efforts pour en assurer le succès. En 1732, il accorda des primes élevées à tous les bâtimens armés pour cette pêche, et ces encouragemens , ne produisant pas encore l'effet desiré, furent, en 1749, doublés et rendus à-peu-près égaux au dixième de la dépense des armemens. Dès-lors , cette branche d'industrie maritime prit un accroissement rapide, et aujourd’hui elle appartient presque exclusivement à lAngle- terre et à ses anciennes colonies d'Amérique, les Etats-Unis, de- venus ses rivaux. Nous avons déjà vu le siège de cette pêche s'éloigner de plus en plus vers le nord, à mesure queles baleines étaient détruites ou qu’elles apprenaient à fuir les dangers dont elles étaient TRIBU DES CÉTACÉS A GROSSE TÊTE. 483 menacées. Jusque vers le quatorzième ou le quinzième siècle, elle se faisait dans nos mers ; mais, dans le seizième, les pè- cheurs ne ren@ontraient plus de baleines que dans les mers du Groënland et du Spitzherg. Ces animaux étaient alors si nom- breux près des côtes et même dans les petites anses de cette dernière ile que les bâtimens baleiniers complétaient prompte- ment leur chargement , en restant près de terre , et afin de fa- ciliter leurs opérations, les Hollandais établirent même sur la petite ile d'Amsterdam , un village, nommé Smerremberg , où ils amenaient ies baleines capturées et en faisaient fondre la graisse, pour la transporter ensuite en Europe; mais bientôt ces animaux s’éloignèrent des côtes du Spitzherg et des îles voisines, pour chercher un refuge près du grand banc de glace, qui limite vers le nord-ouest la mer du Groënland. Les pêcheurs les y suivirent et dès-lors abandonnèrent les eaux du Spiizherg. Depuis le milieu du dix-septième siècle, c’est principalement dans ces parages vers le 78° ou 81° degré de latitude nord, ou dans le détroit de Davis, vers l’ile Disco, que la pêche de la baleine a été la plus active ; mais ces eaux se sont à la longue dépeuplées à leur tour,et depuis trois ou quatre ans, les balei- niers anglais ont presque entièrement abandonné ces parages, pour s’avancer au milieu des glaces , dans la baie de Baffin jus- qu’au sound de Lancaster et à la baie de Melville. Du reste, ce n’est pas seulement vers les mers du nord que les baleiniers font leurs excursions. Au commencement du dix- huitième siècle, les pêcheurs américains de Massachussett com- mencèrent à se diriger vers le sud, et se rendirent dans les eaux du cap Vert, sur les côtes du sud-ouest de PAfrique et le long de celles du Brésil et du Paraguay, jusqu'aux iles Falkland. Depuis lors , les Anglais font aussi une pêche du sud, et au- jourd’hui les navires baleiniers de ces deux nations sillonnent non-seulement les parties australes de l'Océan Aïtlantique, mais toute l’étendue du grand Océan: ils croisent pendant la belle saison, dans les eaux du Japon, puis redescendent vers les archipels des îles Sandwich , des Marquises et des Gallapagos , et, si leur chargement est complet, touchent sur les côtes du Chili ou du Pérou , et effectuent leur retour par le cap Horn ; mais, s’ils veulent continuer leurs opérations, ils croisent, pendant l’étéde l'hémisphère austral dans les para- ges de la Nouvelle-Zélande , pour remonter ensuite vers le nord et se rendre dans les mers du Japon ou sur la côte de Califor- nie. Quelquefois ils tiennent ainsi la mer sans relâcher pendant huit mois de suite et sont exposés aux plus grandes fatigues et à des privations de toute espèce; mais les dangers sont en général moins grands dans ce vaste Océan que dans les mers 484 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. polaires , où les plus forts vaisseaux se brisent souvent con- tre la glace, et où les naufrages sont malheureusement très fréquens. Dans la pêche du nord, c’est la baleine franche que l’on pour- suit. Dans celle du Sud, c’est principalement le cachalot ma- crocéphale que lon rencontre. La manière d'attaquer ces immenses cétacés est la même. Aussitôt que le matelot , placé en vigie au haut du mât, signale la découverte d’une baleine , les pêcheurs se jettent dans leurs barques , et font en silence force de rames pour s’en approcher. L’un deux, debout à la proue, tient à la main un harpon, espèce de Javelot , dont le fer, profondément bardé, est attaché à une forte corde de cent vingt brasses de long (environ six cents pieds). Le harponneur de la première chaloupe , qui arrive à portée de la baleine , lance son dard de façon à le faire pénétrer profondément et à le bien fixer dans le corps de l'animal qui , se sentant blessé , se tord quelquefois avec violence et agite sa puissante queue avec tant de force que , si elle rencontre l’em- barcation , elle la brise ou la lance en l'air. En général cepen- dant la baleine plonge immédiatement, entrainant après elle la corde fixée au fer implanté dans ses chairs. Ce moment est critique pour les pêcheurs. Si la ligne ne se déroulait pas assez vite et venait à s’accrocher, la baleine submergerait la chaloupe et toui son équipage , et on a vu quelquefois des matelots dont le corps se trouvait pris dans une anse de cette corde, presque coupés en deux, et lancés dans la mer, pour ne jamais reparaitre à sa surface. La rapidité avec laquelle Panimal fuit est telle que ja corde , en frottant sur le bord de la chaloupe , produit une fu- mée épaisse, et prendrait feu, si on n'avait soin de larroser * Sans cesse. Lorsque la première ligne est presque déroulée, les pêcheurs y attachent une seconde, puis une troisième et ainsi de suite, jusqu’à ce qu’ils aient employé tout ce qu’ils avaient à bord et tout ce que les autres chaloupes ont pu leur en fournir. La longueur de la ligne qu’ils mettent ainsi dehors dépasse quelquefois dix mille pieds; cependant elle ne suffit pas tou- jours ,et il arrive qu’ils sont obligés de la lâcher et d'abandonner toute cette masse de cordages ainsi que leur harpon, tant la baleine prolonge sa fuite sans remonter à la surface. Quelquefois Panimal reste sous l’eau pendant plus dune demi-heure ; mais le besoin de respirer le force alors de revenir à la sur- face , et les pêcheurs, qui se sont dispersés pour être plus à portée dele frapper, cherchent alors à implanter dans son corps un second harpon ou à le percer avec des lances. Lorsque la baleine remonte ainsi, elle est ordinairement dans un état d’épuisement extrême, et, à mesure que son sang s'écoule, elle TRIBU DES CÉTACÉS A GROSSE TÊTE, 485 s’affaiblit davantage ; souvent lorsque la morts’approche, elle fait cependant un dernier et terrible effort, élève sa queue au dessus de l’eau , et l’fgite d’un mouvement convulsif, qui se fait en- tendre à une distance de plusieurs milles. Enfin, succombant iout-à-fait, elle se couche sur le flanc et expire. Les pêcheurs se hâtent alors de percer sa queue et d'y attacher des cordes , à l’aide desquelles ils fixent au flanc de leur navire cette im- mense carcasse ; puis , armés d'énormes couteaux et d’un instru- ment qui ressemble à une grande bèche , ils descendent dessus et enlèvent par tranches le lard , que l’on dépose dans des ba- rils pour être fondu lors du retour. Une seule baleine donne quelquefois jusqu’à vingt-cinq eu trente tonnes (1) d'huile (environ vingt-quatre ou trente hecto- litres) , mais, comme on en pêche un plus grand nombre de pe- tites que de très grosses, on est loin de retirer de toutes une quantité aussi considérable. Scoresby, un des capitaines balei- niers à qui l’on doit les connaissances les plus précises sur tout ce qui concerne cette pêche , nous apprend que 498 baleines, harponnées par ses matelois en vingt-huit voyages successifs dans les mers du Groënland , fournirent 4,246 tonnes d’huile, ce qui correspond , terme moyen, à un peu moins de neuf tonnes ou huit hectolitres et demi par baleine. Les cachalots , comme nous lavons déjà dit, fournissent beau- coup moins d'huile , et ceux que l’on pèche dans les mers tropi- cales sont beaucoup plus maigres que ceux des mers froides. Un cachalot mâle , de soixante-dix pieds de long, donne jusqu’à quatorze tonneaux (plus de douze hectolitres) d'huile et de sper- ma-ceti , tandis que six femelles n’en donnent qu’à peine autant. La pêche de la baleine dans le nord occupe souvent plus de cent cinquante navires anglais, et celle du Sud cinquante ou soixante. En 1831 ,on expédia pour le détroit de Davis et la baie Baffin soixante-quinze navires, qui firent la capture de 330 ba- leines , et revinrent chargés de 4,100 tonnes d'huile et 4,000 quintaux de fanons. Les Anglais armèrent en même temps, pour les mers du Groënland douze baleiniers, qui prirent 86 baleines et 4,100 phoques, et effectuèrent leur retour, chargés de 700 tonnes d'huile et de 600 quintaux de fanons. L’année précédente, les produits de la pêche, dans le sud aussi bien que le nord, furent évalués à un total de 114,416 liv. st., ou environ 2,900,000 fr. La pèche faite par les Américains est également très productive. Depuis une douzaine d’années, on expédie aussi (1) La tonne d'huile (mesure anglaise) contient 209 1/2 gallons anglais, ce qui fait environ 949 litres. 486 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. quelques baleiniers de nos poris. Jusqu'en ces derniers temps , leurnombre ne s’est élevé qu’à six ou huit ; mais, depuis 1830, on en compte seize, qui vont presque tous dans le sud. La quantité de fanons que nous importons s’est élevée, en 1832, à 477,000 ki- logrammes, dont environ 323,000 provenaient des Etats-Unis d'Amérique. CLASSE DES OISEAUX. 487 . CLASSE DES OISEAUX. La classe des oiseaux, qui comprend tous les animaux à squelette intérieur les mieux organisés pour le vol, est une des subdivisions du règne animal les plus distinctes et les plus net- tement caractérisées, soit que l’on considère seulement la con- figuration extérieure de ces êtres, soit que l’on s'attache exclu- sivement aux particularités de leur structure intérieure , ou à la manière dont leurs fonctions s’exécutent. Pour définir ce groupe , il suffirait de dire que les oiseaux sont des animaux vertebres ovipares , dont La circulation est double et complete; mais, pour donner une idée exacte de ses principaux caractères, il faut ajouter que la respiration des oiseaux est aerienne et double , c’est-à-dire qu’au lieu de s'effectuer dans les poumons seulement comme celle des mammifères et des reptiles, elle s’opère en même temps dans ces organes et dans la profondeur de toutes les parties du corps ; que leur sang est chaud comme celui des mammifères; enfin que leurs membres antérieurs ont La forme d’ailes et que leur peau est garnie de plumes. La conformation de ces animaux ne varie que peu et est en rapport avec le mode de locomotion auquel ils sont essentielle- ment destinés. Ils n’atteignent presque jamais une grande taille et la présence d’une quantité considérable d'air dans l’intérieur de leur corps les rend très légers. Le squelette, qui détermine leur forme générale et qui est en même temps l’une des parties les plus importantes de l’appareil du mouvement, se compose à- peu-près des mêmes élémens que chez les mammifères , mais la forme et la disposition des divers os sont quelquefois très diffé- rentes. La tête des oiseaux est en général petite; dans le très jeune âge, le crâne se compose de deux os frontaux , de deux parié- taux , de deux temporaux, d’un occipital et d’un sphénoïde ; mais toutes ces parties se soudent de fort bonne heure et cessent alors d’être reconnaissables. Intérieurement la boite cérébrale est divisée en deux fosses principales , dont l’antérieure loge le cerveau et la postérieure, les lobesoptiques, le cervelet et la moelle allongée. La face est formée , en majeure partie, par les mà- choires. La mandibule supérieure (formée par les analogues des os maxillaires, intermaxillaires, nasaux et palatins des mammifères) s’unit supérieurement à l'extrémité antérieure du frontal, tantôt par une articulation mobile , tantôt en s’y sou- dant toul-à-fait, mais de manière cependant à conserver quel- 32 Caracteres généraux. Squelette. Tête. 488 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. que mobilité ; à sa face inférieure ou palatine , elle se partage en quatre branches, dont les externes correspondent aux arcades Fig. 167. (1) zygomatiques et vont s’articuler en arrière sur un os particu- lier nommé os carre , lequel à son tour s’appuie sur le temporal ; et dont les intermédiaires, analogues aux apophyses ptéry- goïdes de l’homme et des mammifères , se fixent sur une lame verticale qui sépare les orbites entre elles et s’unit au crâne. Il résulte de cette disposition que la mâchoire supérieure con- serve plus ou moins de mobilité, et que les orbites n’ont pas en dessous de plancher osseux. L’os carré, dont nous venons de parler, est une portion de l’os temporal qui. chez les mammi- fères se soude au rocher , mais qui, chez les vertébrés ovipares, (x) Squelette du goeland à manteau gris : — wc vertèbres cervicales ; — c clavi- cule furculaire; — st sternum; — o omoplate; — à les deux os de l’avant-bras, derriere lesquels on voit uue partie de l’humérus ; — d doigt; — s sacrum ; — cx copyx; — { tibia ; — fatarse ; — p pouce. mes. CLASSE DES OISEAUX. 489 en reste distinct et sert à soutenir la mâchoire inférieure. Chez les mammifèrés, celle-ci s'articule directement au crâne par un condyle saillant , ici au contraire elle est creusée d’une fossette articulaire qui roule sur l’extrémité saillante de los carré; son extrémité se prolonge en arrière plus loin que la mâchoire su- périeure et chacune de ses branches, au lieu d’être composée d’un seul os , ainsi que cela a lieu chez les mammifères, est formée de deux pièces plus ou moins intimement unies entre elles. L’articulation de la tête avec la colonne vertébrale permet des mouvemens plus étendus que chez les mammifères, car elle se fait par un seul condyle , ou tubercule demi sphérique, situé au bas du grand trou occipital et reçu dans une fossette corres- pondante de l'atlas. Le cou des oiseaux est en général beaucoup plus long et plus mobile que celui de la plupart des mammifères ; comme le bec est presque toujours l’unique organe de préhension, à laide duquel ils ramassent à terre leurs alimens, la portion cervicale de la colonne vertébrale devient d’autant plus longue que ces animaux sont plus élevés sur leurs pattes; et , lorsqu'ils sont es- sentiellement nageurs et doivent plonger la téte dans l’eau pour s'emparer de leur proie , dans bien des cas la longueur de leur cou dépasse notablement la hauteur de leur tronc. Le nombre de vertèbres qu’on y compte varie beaucoup suivant les espèces ; ordinairement 1l y en a de douze à quinze, mais quelquefois on n’en trouve pas autant , et d’autres fois il en existe plus de vingt (1); elles sont très mobiles les unes sur les autres, et par la nature de leurs facettes articulaires, le cou se ploie en S, de facon à pouvoir se raccourcir ou s’allonger suivant que ses courbures augmentent ou s’effacent. Chez les oiseaux qui volent (et à un très petit nombre d’excep- lions près, tous sont dans ce cas)les vertèbres du dos sont au contraire tout-à-fait immobiles , et on comprend facilement la nécessité de cette disposition , car cette portion de la colonne épinière , servant à soutenir les côtes et fournissant par consé- quent un point d'appui aux ailes , doit avoir une grande soli- dité. En général ces vertèbres sont même soudées entre elles ; (x) Les vertébres cervicales sont au nombre de neuf dans le moineau, de dix dans le bouvreuil, etc.; de onze dans l’hirondelle, la mésarge, l’épervier, etc.; de douze dans le milan , le geai, le martin-pécheur , etc.; de treize dans l’aigle, 1e vautour, la corneille , le pigeon, etc. ; de quatorze dans le paon, le canard com- mun , etc. ; de quinze dans l’oie, le dindon, le casoar, etc.; de seize dans le pélican ; de dix-sept dans la spatule , de dix-huit dans l’autruche, le flamant, le héron, etc.; de dix-neuf dans la cigogne et la grue; de viugt-trois dans le cigae. 32. Colonne ver- tébrale. 490 ZOOLOGIE BESCRIPTIVE. mais chez les oiseaux qui ne volent pas comme l’autruche et le casoar, elles conservent de la mobilité; leur nombre est en géné- ral de sept ou de huit (1). Les vertèbres lombaires et sacrées, dont le nombre varie de sept à vingt, se réunissent toutes en un seul os , ayant les mêmes usages que le sacrum de l’homme. En- fin les vertèbres coccygiennes sont petites et mobiles ; en géné- ral on en compte sept ou huit, et la dernière , qui supporte les grandes plumes de la queue, est ordinairement plus grande que ies autres et relevée d’une crète saillante.(er, fig. 167.) Côtes. Les côtes des oiseaux présentent aussi quelques particularités de structure qui tendent encore à donner de la solidité au tho- rax. Le cartilage, qui chez les mammifères les fixe au sterrum, est remplacé ici par un os, et chacune d’elles porte à sa partie moyenne une apophyse aplatie qui se dirige obliquement en ar- rière au-dessus de la côte qui suit, de facon que tous ces os prennent des points d'appui les uns sur les autres. Mais la partie la plus remarquable de la charpente osseuse du thorax est le sternum (s), qui, servant à donner insertion aux muscles du vol, prend chez les oiseaux un développement ex- trème ei constitue un grand bouclier convexe el ordinaire- ment carré qui recouvre le tho- rax et une grande partie de l’ab- domen. Les différentes pièces qui se réunissent pour le former ne sont pas placées bout à bout comme chez les mammifères , et en se joignant elles laissent souveni entre elles, vers la par- lie postérieure de cet os, des échancrures ou des trous plus € S Co (s ou moins grands. Chez le ca- saor et l’autruche, qui ne peuvent pas s’élever dans les airs, le sternum ne présente point de crête à sa face externe, mais chez les autres oiseaux on y remarque une espèce de carène saillante et longitudinale nommée le 2rechet (b), qui sert à don- ner plus de force aux museles abaïsseurs de lPaile. Os de lé Les os de l’épaule sont également disposés de la manière la paule. plus favorable à la puissance des ailes. L’omoplate (0) est étroit, (1) Le bouvreuil n’en a que six, tandis que l’oie en a dix et le castor cnze. (2) Appareil sternal: —s sternum ; — e échancrure du sternum ; — co origine des côtes sternales ; — b bréchet ; — f fourchette ou clavicules furculaires ; — c os corocoïdien, — o omoplate.—m membrane fibreuse, qui s'étend de la fourchette au sternum. CLASSE DES OISEAUX. 491 mais très allongé dans le sens qui est parallèle à l’'épine,ets’appuie sur le sternunnon-seulement par l'intermédiaire de la elavicule ou fourchette(7), mais aussi à l’aide d’un autre os qui remplit les fonctions d’une seconde clavicule et qui est appelé os coracoï- dien (c), parce qu’il parait étre analogue de l'apophyse coracoïde de l’omoplate humaine. Les clavicules des deux côtes se soudent par leur extrémité antérieure en forme de V, dont la pointe est dirigée en bas et unie au bréchet; et les os coracoïdiens con- stituent des arcs-boutans qui , avec la fourchette, maintiennent les épaules écartées et offrent à l’humérus un point d'appui d'autant plus solide que l'animal est meilleur voilier. Les membres antérieurs des oiseaux ne servent jamais ni à la marche , ni à la préhension, ni au toucher, mais forment des espèces de rames très étendues, nommées wzles. En faisant l'histoire des chauve-souris , nous avons déjà vu un exemple de la transformation des membres thoraciques en un organe de locomotion aérienne; chez ces animaux c’est un repli de la peau qui sert à frapper Pair, et pour la soutenir les doigts prennent une longueur extrême; mais chez les oiseaux ces larges rames sont d’une autre nature: elles sont formées de plumes raides qui n’ont besoin d’être fixées que par leur base , ei la main, par conséquent , ne présente pius les divisions qui nuiraient à sa solidité et ne seraient d'aucune utilité ; elle a la forme d’une es- pèce de moignon aplati et presque immobile. La conformation des bras et de l’avant-bras ne diffère que peu de celle de l’homme ; Fhumérus ne présente rien de particulier ; le radius et le cubitus ne peuvent tourner l’un sur lautre, et sont en général d'autant plus longs que le vol est plus puissant. Le carpe se compose de deux petits os placés sur le même rang et suivi du métacarpe qui présente deux branches soudées par leurs extrémités; au côté radial de Ia base de cette dernière partie de la main s’insère un pouce rudimentaire ; enfin à son extrémité se trouve un doigt médian (4, /ig. 167) composé de deux phalanges et un petit stylet représentant un doigt externe. Lorsque Foiseau pose, ce sont ses membres postérieurs qui seuls lui servent de soutien ; c’est donc un animal réellement bipède , et comme tel il doit avoir le bassin large et fixé solide- ment à la colonne vertébrale. Les os des hanches, en effet, sont extrêmement développés chez les oiseaux, et ils ne forment, avec ies vertèbres sacrées et lombaires, qu’une seule pièce (s, /fg. 167). En général cette ceinture osseuse est incomplèle en avant ;les pu- bis ne se réunissent pas entre eux , et la portion ischiatique , au lieu d’être séparée du sacrum par une large échancrure, se soude à cet os par sa partie postérieure, et transforme lPéchancrure en un trou. Los @e la cuisse est court et droit, et la jambe se com- Membres zn- térieurs Membres postérieurs, Plumes. 492 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. pose, comme chez la plupart des mammifères , d’un tibia , d’un péroné et d’une rotule , seulement le péroné se soude au pre- mier avant que d'arriver à sa partie inférieure. Un seul os qui fait suite à la jambe représente le tarse et le métatarse, et porte à son extrémité inférieure les doigts qui sont ordinairement au nombre de quatre; il n’en existe jamais davantage, mais quel- quefois le doigt externe ou l’interne que l’on désigne sous le nom de pouce, ou même tous les deux disparaissent de manière qu’iln’en existe plus que trois ou seulement deux. Le nombre des phalanges va presque toujours en augmentant régulièrement de deux à cinq du pouce au doigt externe qui en a toujours le plus. Enfin de ces quatre doigts, trois seulement sont ordinairement dirigés en avant, tandis que le pouce est dirigé en arrière; quel- quefois le doigt externe se porte aussi en arrière. Les plumes , qui couvrent tout le corps des oiseaux , sont des productions très analogues aux poils des mammifères, mais d’une structure plus compliquée. On peut en général y distin- guer un tube corné qui en occupe la partie inférieure et qui est percé à son extrémité, une tige qui surmonte ce tube, enfin des barbes qui naissent de chaque côté de la tige , et sont elles- mêmes ganies de barbules qui à leur tour paraissent quelque- fois frangées sur le bord. L’organe sécréteur destiné à former la plume, se nomme capsule, et acquiert souvent une longueur considérable. D’après des observations de M.F.Cuvier, il paraîtraït que la capsule croit pendant toute la durée du développement de la plume et qu’à me- sure que sa base s’allonge son extrémité meurt et se dessèche dès qu’elle a formé la portion correspondante de cet appendice. Cha- cun de ces petits appareils se compose d’une gaine cylindrique, revêtue à l’intérieur de deux tuniques unies par des cloisons obiiques et d’un bulbe central. La substance de la plume se dé- pose à la surface du bulbe et pour former les barbes se moule en quelque sorte dans les espaces que les petites cloisons, dont nous venons de parler, laissent entre elles ; dans la portion cor- respondante à la tige, le bulbe est en rapport avec la surface interne de celle-ci, et après y avoir déposé une substance spongieuse se dessèche et meurt; mais là où le tronc de la plume est tubulaire, la lame de matière cornée que cet organe sécré- teur dépose , se contourne autour de lui et l'enveloppe complè- iement; cependant le bulbe, lorsqu'il a rempli ses fonctions, ne s’en dessèche pas moins et il forme en se flétrissant une série de cônes membraneux, emboîtés les uns dans les autres, qui rem- plissent l’intérieur du tube et sont appelés l’äme de La plume. La plume nouvelle est d'abord renfermée dans la gaîne de sa CLASSE DES OISEAUX. 493 capsule qui est souvent saillante de plusieurs pouces hors de la peau et se détruit peu-à-peu ; la plume se montre alors à nu et ses barbes , roulées dans le principe , s’étalent latéralement; l’extré- mité de son tuyau reste implantée dans le derme, mais en géné- ral s’en détache facilement et à une certaine époque tombe pour faire place à une nouvelle plume. Ce renouvellement des plumes, qui est appelé mue, s’effectue en général chaque année après la saison de la ponte, et a quelquefois lieu deux fois dans l’année, en automne et au printemps; il arrive plus tôt pour les vieux que pour les jeunes , et c’est pour l'oiseau une époque de ma- laise pendant laquelle il perd sa voix. La forme de ces appendices tégumentaires varie beaucoup, on en connait qui manquent de barbes et qui ressemblent à des piquans de porc-épics, d’autres dont les barbes sont raides et gar- nies de barbules qui s’accrochent entre elles , de façon à former une grande lame que l'air ne traverse pas; d’autres encore, dont les barbes et les barbules sont longues, flexibles et ne s’ac- crochent pas, ce qui leur donne une légèreté et une mollesse extrême, enfin il en est qui ressemblent à un simple duvet. Leurs couleurs sont variées à l'infini et souvent surpassent en beauté et en éclat celles des plus belles fleurs ou des pierres les plus brillantes. En général les femelles ont un plumage moins riche que le mâle, et il est rare que le jeune oiseau présente les couleurs qu’il conservera toute sa vie; souvent elles changent deux ou trois ans de suite , et quelquefois l'adulte a un plumage d’été tout-à-fait différent de celui de l'hiver. Les ornithologistes donnent des noms différens aux plumes des diverses parties du corps. Les grandes plumes des ailes et de la queue portent la dénomination commune de pennes , mais on les distingue en rectrices (g, fig. 167) et en remages (rp, rs); les premières ordinairement, au nombre de douze, appartiennent à la queue, et les secondes se subdivisent en remiges primaires, qui, toujours au nombre de dix, sont fixées sur la main; en re- miges secondaires qui naissent de lavant-bras et en remiges bä- tardes qui se fixent au pouce ; celles qui sont insérées sur le bras et qui diffèrent peu des plumes du reste du corps sont appelées scapulaires (s), enfin les plumes qui recouvrent la base des pennes se nomment couvertures Ou tectrices. Nomencla- ture des plu- mes, 494 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. Fig. 167. (1) LS 4 PLAT PF. 7 ENT D , L E > 4 LT AVR 1 # s C’est de la longueur des rémiges plus encore que celle des os du bras, de l’avant-bras ou de la main que dépend létendue des ailes et la puissance du vol. Chaque fois que l’oiseau veut frapper l’air, il élève l’humérus et avec lui laile encore ployée , puis il la déploie en étendant lavant-bras et la main et l’abaisse subitement; l’air qui résiste à ce mouvement lui fournit alors un point d'appui, sur lequel il se soulève: il se lance ainsi comme un projectile, et une fois Pimpulsion donnée à son corps, il reploie l'aile pour diminuer autant que possible la résistance nouvelle que le fluide ambiant oppose à sa course. Cette résistance et l’attraction terrestre, qui tend à faire tomber tous les corps vers le centre de la terre, di- minuent graduellement la vitesse que l'oiseau a acquise par cette percussion de l'air, et s’il ne fait pas de nouveaux mouvemens, il ne tardera pas à descendre, mais si , avant que la vitesse ac- quise par le premier coup d’aile soit anéantie, il en donne un (x) Cette figure est destinée à faire connaître les noms des plumes des diverses parties du corps : — o occiput ; — g gorge ; — d dos; — 5 plumes scapulaires ; — t'tectrices ou couvertures des ailes ; — rs rémiges secondaires ou pennes fixées à l’avant-bras ; — rp rémiges primaires ou pennes de la main ; — ph rémiges bà- tardes , formant dans le pli de l’aile un petit appendice fixé au pouce;--v ventre; — cg couvertures de la queue ou tectrices caudales ; — r rectrices ou pennes de la queue. CLASSE DES OISEAUX. 495 second , il ajoutera une vitesse nouvelle à celle qu'il avait encore, et se déplaceræpar un mouvement accéléré. Tel est , en effet, le mécanisme du vol. Pendant que l'oiseau est ainsi suspendu dans Pair, ce sont ses ailes qui supportent tout le poids de son corps, et pour qu’il puisse conserver dans cette position son équilibre , il faut que son centre de gravité soit placé à-peu-près sous les épaules et aussi bas que possible ; c’est pour cela que, pendant le vol, il porte en général sa tête en avant en tendant le cou, et que son tronc, au lieu d’être allongé comme celui des mammi- fères, est toujours ramassé et ovalaire. Nous trouvons aussi dans la nécessité d’abaisser autant que possible le centre de gravité, la raison d’une particularité de structure qui, au pre- mier abord , paraït singulière; les principaux museles releveurs des ailes au lieu d’être placés comme d'ordinaire sur le dos se trouvent à la poitrine avec les abaisseurs, et s’ils produisent un effet opposé à ceux-ci, c’est que leur tendon passe sur une espèce de poulie avant que de se rendre à lhumérus ; cette dispo- sition est nuisible à leur action, mais elle a avantage d’accumu- ler à la partie la plus inférieure du thorax tous les organes les plus pesans du corps, et par conséquent d’abaisser d’autant le centre de gravité. Il est évident que la résistance de l’air est d’autant plus grande que la masse de ce fluide frappée à-la-fois par les ailes est plus considérable , et par conséquent que, plus les ailes seront éten- dues, plus aussi, toutes choses égales d’ailleurs, la vitesse acquise par l’abaissement de ces rames sera grande; il en résulte que non-seulement les oiseaux à longues ailes pourront voler plus vite que ceux à ailes courtes, mais aussi pourront se soutenir plus long-temps dans Pair, car ils ne seront pas obligés de répéter aussi souvent les mouvemens de ces organes, et par conséquent aussi se fatigueront moins vite. Et, en effet, tous les oiseaux remarquables par leur vol rapide et soutenu ont de grandes ailes , tandis que ceux dont les ailes sont courtes ou médiocres, comparativement au volume du corps, volent avec bien moins de vitesse et sont condamnés à des repos plus fréquens. Pour s'élever verticalement, il faut que les ailes de l’oiseau soient entièrement horizontales , mais ce n’est pas ordinaire- ment le cas ; en général, elles sont inclinées d'avant en arrière de facon à imprimer à l'animal un mouvement ascensionnel oblique ; quelquefois même cette inclinaison est telle que pour monter à-peu-près verticalement dans Patmosphère l'oi- seau est obligé de voler contre le vent. La longueur relative des rémiges influe sur la facilité avec laquelle il peut s’élever dans un air Calme; les oiseaux dont les rémiges antérieures sont les Station. 496 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. plus longues et les plus résistantes à leur extrémité , ont le vol plus oblique que ceux dont l’aile est tronquée au bout. Les pennes de la queue servent aussi aux oiseaux pour se di- riger dans leur vol ; ils les étalent et les relèvent ou les abais- sent Comme un gouvernail pour augmenter ou diminuer lobli- quité de leur course , et en les inclinant s’en aident aussi lors- qu'ils veulent changer leur direction horizontale. Lorsque l'oiseau veut s'élever de terre, il prend son premier élan en sautant sur ses pieds et en étendant ses ailes de façon à pouvoir frapper l'air avant que de retomber sur le sol; ceux qui ont les ailes très longues ont besoin de plus d’espace pour les abaisser , et il en résulte que si leurs pieds sont en même iemps trop courts pour leur permettre de sauter très haut, ils ne peuvent que difficilement prendre leur essort. Les martinets sont dans ce cas. Nous avons vu que pendant le vol le centre de gravité de l’oi- seau doit se trouver sous les épaules ; pour qu’il reste en équilibre sur ses pattes, qui sont situées à l’arrière du trone, il faut que ces organes puissent se ployer assez enavant, el que les doigts soient assez longs pour avancer au-delà du point où tomberait une ligne verticale , passant par le cenire de gra- vilé, ou bien que ce cenire lui-même se porte en arrière, de façon à se trouver au-dessus de la base de sustentation. Cela explique Putilité de la grande flexion de la cuisse et de lobli- quité du tarse sur la jambe ; lorsque le pied est grand et que le cou peut se reployer de facon à porter la tête en arrière, l’équi- libre s'établit ainsi, sans que le corps s’éloigne beaucoup de la position horizontale; mais lorsque le cou est court, la tête grosse et les doigts de longueur médiocre, l'animal est obligé de prendre, pendant la station ou la marche, une position presque verticale. C’est pour conserver plus facilement l’équi- libre que les oiseaux placent en général leur tête sous leur aile pendantqu’ils dorment perchés sur une seule patte. Chez plu- sieurs de ces animaux cetie position est rendue singulièrement commode par une particularité dans la structure delarticulation du genou; chez l’homme et la plupart des animaux les membres fléchissent sous le poids du corps dès que leurs muscles exté- rieurs cessent de se contracter, et c’est la contraction perma- nente de ces organes qui rend la station si fatiganie; mais chez la cigogne et les autres oiseaux à longues paties, il en est tout autrement , Pexirémité inférieure du fémur présente un creux où s’emboite, pendant l'extension du membre, une saillie du Libia, laquelle ne peut en sortir que par un effort museulaire ; la CLASSE DES OISEAUX. 497 patte une fois redressée reste par conséquent étendue sans que l’animal ait besoin de contracter ses muscles etsans qu’il en ré- sulie aucune fatigue. Il est toujours plus difficile à un oiseau de prendre son vol lorsqu'il est à terre que lorsqu'il peut se lancer d’un point élevé : nous en avons déjà vu la raison, et chacun sait que la plupart de ces animaux perchent bien plus souvent qu'ils ne se posent à terre. Pour se maintenir en équilibre sur une branche, il faut qu’ils Pembrassent avec leurs doigts et la serrent fortement; s’il leur avait fallu déployer pour cela une force musculaire considérable, une telie position aurait été prompte- ment fatigante; mais ici encore un mécanisme très simple rend tout effort presque inutile et permet aux oiseaux de serrer la branche qui les soutient, même quand ils dorment ; les muscles fléchisseurs des doigts passent sur les articulations du genou et du talon, de façon que lorsque celles-ci se fléchis- sent , elles tirent nécessairement sur les tendons de ces muscles, et font fléchir les doigts; le poids du corps, en affaissant les cuisses et les jambes, détermine donc ce mouvement, et il en résulte que l’animal serre ,sans exercer aucun effort, la branche sur laquelle il est perché, et s’y maintient fixé. La grande quantité d’air répandu dans la substance de leurs organes donne au corps des oiseaux une pesanteur spécifique beaucoup moindre que celle de Peau , et les fait par conséquent flotter à sa surface ; il en résulte que la natation leur est plus fa- cile qu'aux autres animaux terrestres, et lorsqu'ils sont destinés à une vie aquatique leurs pattes sont transformées en nageoires par l'addition d’une membrane qui s’étend entre les doigts sans les empêcher de s’écarter. En poursuivani l’étude des oiseaux , nous verrons que leurs membres présentent encore d’autres modifications moins im- portantes , il est vrai, mais qui influent néanmoins sur le genre de vie de ces animaux. Le système nerveux des oiseaux est moins développé que celui des mammifères, et leur encéphale présente dans sa structure des particularités remarquables. Les hémisphères cérébraux (Zg. 170, c) sont encore les parties les plus volumineuses de cet Natation. Systeme ner veux. Toucher. Goût. Odorat. 498 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. appareil, mais ils w’offrent pas de circonvolutions, et ils ne sont pas réunis par la grande commissure que nous avons signalée chez les mammifè- res sous le nom de corps calleux. Les lobes op- tiques (c), qui chez ces derniers sont petits et restent cachés entre le cerveau et le cervelet, prennent au contraire, ici, un grand déve- loppement et se montrent toujours à décou- vert en arrière el en dehors des lobes céré- braux; enfin au lieu d’être solides ils sont creux , comme les lobes cérébraux. Le cer- velet {cv) est sillonné par des rainures paral- lèles et convergentes ; il est formé presque en entier par le lobe médian, qui chez les mammifères est petit comparativement aux lobes latéraux ou hémisphères ; et ceux-ci restent dans un état plus ou mois rudimentaire , surtout chez les oiseaux mauvais voiliers; quant à la protubérance annulaire qui, dans la classe précédente, réunit entre elles les hémisphères du cervelet, en passant autour de la moelle allongée , elle man- que ici de même que chez les reptiles et les poissons. Enfin la moelle épinière des oiseaux est, en général , très longue et pré- sente deux renflemens correspondans à l’origine des nerfs des ailes et des pattes; chez ceux qui volent le mieux le renflement supérieur est plus développé que linférieur, et ceux qui se ser- vent de leurs pattes plus que de leurs ailes présentent une dis- position inverse. Fig. 170. (1) La sensibilité tactile est peu développée chez les oiseaux ; les plumes, qui revêtent toute la surface de leur corps, opposent de grands obstacles à l'exercice de cette faculté, et le mode de confor- mation des organes de préhension y est également défavorable. Le goût est plus ou moins obtus chez ces animaux ; leur langue (fig. 171, pag. 500)est,en général, cartilagineuse et dépourvue de papilles nerveuses, ei ils paraissent presque toujours avaler leurs alimens sans les déguster. L'appareil de l’odorat est plus par- fait, sans offrir cependant tout le développement qu’on y trouve dans la classe des mammifères. Les narines sont distantes entre elles et séparées par les os intermaxillaires qui remontent jusqu’au frontal, en écartant les os nasaux ; souvent elles sent en partie recouvertes par une lame eartilagineuse , et elles ne sont jamais contractiles. Les fosses nasales sont creusées à ia base de- la mandibule supérieure et ne communiquent pas avec des sinus ; leur surface est tapissée par une membrane pituitaire (1) Encéphale de l’autruche vu en-dessus : — c cerveau; — o lobes optiques ; — cv cervelet ; — e moelle épinière. CLASSE DES OISEAUX. 459 très vasculaire et est augmentée par des lames carlilagimeuses contournées swr elles-mêmes et appliquées contre leur paroi; on compte trois de ces corneis qui sont séparés par des sillons ou méats plus ou moins profonds. Enfin les arrière-narines se réunissent vers le milieu de la voûte palatine , de manière à y former une fente longitudinale. Les oiseaux carnassiers, sur- tout ceux qui vivent de charogne, ont l'appareil de l’odorat plus développé que chez les oiseaux granivores ou insectivores; el la plupart des auteurs assurent que chez les premiers la finesse de ce sens est telle qu’elle suffit pour les guider vers leur poie , lorsqu'ils en sont à des distances irès considérables ; mais les expériences de quelques savans et surtout d’un ornithologiste de l'Amérique, M. Audubon , tendent à prouver que , chez tous ces animaux , l'odorat est presque nul. L'appareil de louïe est moins compliqué que chez les mammi- fères; le pavillon de l'oreille manque chez les oiseaux, etleconduit auriculaire ne consiste guère qu’en un tube membraneux placé entre l'os carré etune partie saillante de l’occipital.La caisse, très évasée en dehors et formée par les deux os dont nous venons de parler, communique avec un grand nombre de cellules creu- sées dans presque tous les os du crâne; les trompes d’Eustache sont osseuses et se réunissent avant que de déboucher dans l’ar- rière-bouche. Enfin le limaçon est peu développé, et les autres parles de l'oreille interne sont logées au milieu des cellules dont les os temporaux et occipilaux sont creusés. L'appareil de la vue parait être au contraire plus parfait que chez les mammifères : les yeux des oiseaux sont plus grands comparativement au volume de la tête , et on y trouve des par- ties nouvelles. La rétine est très épaisse et il en part une mem- ‘brane noire, plissée en éventail ou à la manière d’une bourse, qui s’avance vers le cristallin ; les physiologistes ne sont pas d'accord sur la nature de cet appendice nommé peigne ; suivant les uns, ce serait une dépendance de la choroïde, et suivant d’autres, un prolongement nerveux destiné à augmenter l’éten- due de la surface visuelle. La pupille est toujours ronde; l'iris très contractile , la cornée transparente , grande et très convexe, et la sclérotique fortifiée en avant par un cercle d’écailles os- seuses , logées dans son épaisseur. L'appareil palpébral se com- pose de deux paupières horizontales, doni l’inférieure est la plus grande et la plus mobile , et d’une troisième paupière verticale et semi-transparente qui oceupe l'angle interne de l'œil, et peut recouvrir toute la surface de cet organe. Enfin il existe toujours des glandes lacrymales. Chez quelques oiseaux la portée de la vue est extrêmement longue ; on en voit qui, élevés dans l'air à des hauteurs telles Ouie. Vue. 500 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. que, malgré leur volume, nous ne les aperceyons qu’à peine, dis- tinguent nettement les petits animaux dontils se nourrissent et fondent sur cette proie éloignée sans la moindre indécision . Chez eux le cristallin est beaucoup moins bombé que chez les oiseaux qui ne s’éloignent que peu de la surface de la terre. Appareil di- gestif. Le régime des oiseaux est très varié: les uns se nourrissent exclusivement de graines, d’autres d'insectes , d’autres de pois- sons, d’autres encore de la chair des mammifères ou des oi- seaux encore vivans ; enfin il en est qui ne se repaissent que de charognes corrompues. Leurs pattes servent quelquefois à la préhension des alimens, mais le bec est toujours le principal or- gane employé à cet usage; sa forme varie suivant la nature des alimens et suivant le caractère plus ou moins carnassier de ces animaux; aussi fournit-il au zoologiste d’excellens caractères pour la classification. Une corne solide et plus ou moins dure, le revêt extérieurement et rend ses bords tranchans; mais il n’est jamais armé de véritabies dents, aussi la mastication est-elle très incomplète et en général entièrement nulle. Langue. La langue sert quelquefois à la préhension des alimens, aussi bien qu’à la déglutition , et présente des particularités de struc- ture remarquables. L’os hyoïde (2), sur lequel elle est portée, se Fig. 171. (1) prolonge en arrière sous la forme de deux longues cornes qui remontent derrière la tête et qui donnent attache par leur extrémité à des muscles (#7) fixées antérieurement à la mâchoire inférieure; lorsque ces muscles se contractent, ils ramènent en bas et en avant ces cornes, et poussent par conséquent la lan- gue hors de la bouche. Ce mécanisme estsur- tout curieux chez les pies et chez quelques autres oiseaux qui dardent leur langue avec une vitesse extrême, et à des distances consi- dérables sur les insectes dont ils se nourris- sent. Cet organe présente aussi dans sa forme des différences importantes à noter. Chez les perroquets, qui mâchent jusqu’à un certain point leur nourriture, la langue est épaisse et charnue; chez les oiseaux de proie, elle est encore large et assez molle, chez la plupart des granivores elle est sèche, triangulaire et hérissée , vers la base , de petites pointes cartilagineuses, enfin (1) Langue, glotte, etc. — / langue; — k hyoïde; — » muscles de l’hyoïde;— p pbarynx ; — g glotte; — # trachée ; — e œsophage. CLASSE DES OISEAUX. 501 chez certains insectivores son extrémité est armée de crochets ou de dentelures. Les glandes salivaires sont placées sous la langue et consis- tent en des amas de petites follicules arrondies. La salive est or- dinairement épaisse; quelquefois elle est tout-à-fait gluante. L’arrière-bouche ou pharynx n’est pas séparée de la bouche par un voile mobile comme chez les mammifères, et ne pré- sente rien de remarquable. L’æœsophage(e), parvenu vers la partie Fig. 172. (1) inférieure du cou, communique avec une première poche digestive , nommée jabot(j), dont les pa- rois sont membra- neuses. Les alimens séjournent pendant un certain temps dans ce premier esto- mac, dont la forme et la grandeur varie. C’est chez les grani- vores quelejabot est leplus développé; on le trouve aussi chez les oiseaux de proie ; mais il manque chez lauiruche et chez la plupart des piscivo- res. Au-dessous de cetie partie , l’æœso- phage se resserre de nouveau et présente à quelque distance une seconde dilata- tion, appelée ventri- cule succenturie (vs), dont la surface inter- neest criblée par une infinité de petits po- res communiquant avec des follicules , destinés à sécréter le (x) Appareil digestif de la poule: — e œsophage; — 7 jabot; — ws ventricule succenturié, — g gésier ; — f foie; — »f vésicule du fiel; — c canaux biliaires ; — Glandes sa- hvaires. Tube diges- tif, Pancréas. Rate. 502 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. suc gastrique; en général le volume de ce second estomac est peu considérable, mais chez les oiseaux qui manquent de jabot, ilest beaucoup plus grand que de coutume et paraît en tenir lieu. Enfin, le ventricule succenturié s'ouvre inférieurement dans un troisième estomac nommé gester(g), où la chymification s’achève ; sa capacité varie beaucoup , mais c’est surtout dans sa structure qu'il présente des différences importantes. Chez les oiseaux qui se nourrissent uniquement de chair, les parois du gésier sont minces et membraneuses ; mais chez ceux qui avalent des ali- mens plus durs et plus difficiles à digérer, il est garni de mus- cles puissans, destinés à comprimer ces matières et à les broyer- Cest chez les granivores que cet organe est le plus musculaire ; l'épaisseur de ses parois charnues est très considérable, et sa surface interne est revêtue d’une espèce d’épiderme presque cartilagineuse ; sa force est immense : on a vu les corps les plus aurs être broyés par ses contractions, et il tient évidemment lieu d’un appareil masticateur. L’intestin, qui fait suite à cette série d’estomacs, est beaucoup moins long que chez la plupart des mammifères, mais se compose aussi de deux portions : l’iniestin grèle et le gros in- testin. Le premier, après avoir formé une première anse, se con- tourne diversement; le second n’en diffère que peu et n’est pas boursouflé , mais en général s’en distingue facilement par existence dans leur point de jonction de deux appendices tubi- formes, et terminés en cul-de-sac que l’on appelle des cœcums (fig. 172, ce). Ces appendices manquent ou du moins sont irès pe- tits chez la plupart des oiseaux de proie , mais sont généralement longs et assez gros chez les oiseaux granivores et omnivores. Le pancréas (p)est logé dans la première anse de l'intestin grèle ; il est généralement long , étroit et plus ou moins divisé. Le suc qu’il sécrète est versé dans la partie voisine du canal alimen- taire, tantôt par un seul canal, tantôt par deux ou trois. Le foie est très volumineux et remplit une grande partie du thorax, aussi bien que de la portion supérieure du venire, car ces deux cavités ne sont pas séparées, le muscle diaphragme étant réduit à l’état rudimentaire. Cette glande est divisée en deux lobes àä-peu- près égaux, et donne en général naissance à d ux canaux hépa- tiques qui après s’être réunis, débouchent dans l'intestin. Enfin il existe presque toujours une vésicule du fiel qui ne reçoit qu’une portion de la bile et la verse dans l'intestin par un canal particulier. La rate, organe dont les usages ne sont pas bien connus, est d duodénum ; -—p pancréas ; — z suite de l’intestin grèle ; — ce cœcum ; — gi gros intestin ; — c{ cloaque ; — u uretère; — o oviducte. CLASSE DES OISEAUX. 203 pelite. Les reins, qui sécrètent l'urine, sont au contraire très volumineux eÿ de forme irrégulière ; ils sont logés derrière le péritoine dans plusieurs fossettes, creusées le long de la partie supérieure du bassin , et ne présentent pas , comme chez les mammifères, une substance corticale distincte. Les uretères aboutissent, de même que les oviducties, près de l’anus, dans une partie dilatée de lintestin rectum nommé cloaque (fig. 172, el) ; il n'existe point de vessie, et l'urine est évacuée avec les excré- mens. Ainsi que nous l'avons déjà dit, elle se compose presque entièrement d'acide urique qui est très peu soluble, et qui en se desséchant forme une masse blanchätre. (1) Les produits nuiritifs de la digestion passent de l'intestin dans le torrent de la circulation par des vaisseaux lymphatiques qui, en se réunissant, forment deux canaux thoraciques ; ces conduits s'ouvrent dans les veines jugulaires de chaque côté de la base du cou. Le sang des oiseaux est plus riche en globules que celui des mammifères, et ces corpuscules, au lieu d’être circulaires sont elliptiques. La manière dont ce liquide circule ne présente rien de particulier. Le cœur a la même forme, la même struc- ture , la même position et les mêmes enveloppes que chez les mammifères ; les parois du ventricule gauche sont extrêmement épaisses , et le ventricule droit enveloppe le premier à droite et en dessous sans se prolonger jusqu’à la pointe de cet organe; les oreillettes n’ont pas d’appendice bien distinct à l'extérieur ; enfin l'aorte, dès sa naissance , se divise en trois grosses bran- ches , dont les deux premières portent le sang à la tête et aux ailes, et la troisième , située plus à gauche,se recourbe en bas et constitue l’aorte descendante. La route suivie par le sang est la même que chez les mammifères. (Voyez pag. 29.) L'appareil de la respiration offre des différences plus impor- tantes. Les poumons, comme nous l’avons déjà dit, communi- quent avec de grandes cellules creusées dans le tissu cellulaire, et transmettent ainsi l'air dans toutes les parties du corps, de façon que la respiration est en quelque sorte double, le sang veineux se trouvant er contact avec l’oxigène, lors de son pas- (x) Cette matièreest employée quelquefois comme engrais. Dans l'ile de Chin- che , près de Pisco et dans quelques autres ilots de la mer du Sud, les excré- mens de divers oiseaux sont accumulés en si grande quantité qu’ils forment une couche de cinquante à soixante pieds d'épaisseur composée principalement d'acide urique combiné avec de l’ammoniaque et de la chaux, et exploitée par les cultivateurs du continent voisin. Cette matière est connue sons le nom de guano , corruption du mot indien huanu , qui signifie excrément. J9 Reins. Vaisseaux chyliferes. Sang. Appareil de la respiration. 504 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. sage à travers les vaisseaux capillaires de tous les organes , aussi bien que lorsqu'il traverse les capillaires pulmonaires. Dans les mammifères la longueur de la trachée-artère est proportionnée à celle du cou; chez quelques oiseaux , tels que certaines cigognes, le cygne chanteur, le hocco , etc., ce conduit est beaucoup plus long et se replie sous le sternum ou dans une cavité de cet os; cette disposition singulière n’a ordinaire- ment lieu que dans les mâles. Les cerceaux cartilagineux de la trachée sont généralement complets , et ceux des bronches in- complets , tandis que chez l’homme et chez la plupart des mam- mifères le contraire se remarque. Enfin à l’endroit de sa bifar- cation ce tube présente une modification particulière dans sa structure, et constitue un larynx inférieur dont nous aurons bientôt à parler. Les poumons ne sont pas divisés en lobes comme ceux des mammifères et sont loin de remplir le thorax; ils sont accolés aux côtes et présentent à leur surface inférieure plu- sieurs ouvertures appartenant à des bronches qui les traversent de part en part et servent à porter l’air dans les cellules aérifères placées entre les divers organes de lanimal. Ces cavités sont formées par des lames de tissu cellulaire et communiquent les unes avec les autres ; on en voit dans le tronc qui présentent des dimensions très considérables, et d’autres qui se prolongent ver la tête et entre des muscles des membres; l’air se répand ainsi jusque dans l’épaisseur des os , dans les plumes ,en un mot dans toutes les parties du corps. L'examen des cellules aériennes chez différens oiseaux, montre que la quantité d'air distribuée ainsi aux diverses parties du corps est , toutes choses égales d’ailleurs, en rapport avec l'énergie et la continuité des mouvemens de Panimal ; ainsi chez les aigles, les éperviers et d’autres oiseaux grands voiliers ce fluide pénètre dans tous les os , et chez ceux qui n’ont pas la faculté de voler, comme les pingoins, etc., l’humérus en est privé; en général Pair se trouve en plus grande abondance dans les os des membres les plus employés dans la locomotion; dans l’autruche, par exemple, les cellules aériennes présentent dans le fémur un développement remarquable. Les oiseaux sont de tous les animaux ceux dont la respiration est la plus active; il consomment proportionnellement plus d’oxigène que les mammifères , et ils résistent moins long-temps à l’asphyxie. Ce sont aussi les animaux qui produisent le plus de chaleur ; la température de leur corps s’élève à 41°, 42°, 43°et même 44 centigrades, et les plumes dont leur corps est recouvert leur sont très utiles pour empêcher leur refroidissement lors- qu'ils s’élèvent dans l’atmosphère à des hauteurs considérables. De même que chez les mammifères l’organe de la voix est une CLASSE DES OISEAUX. 265 dépendance de l’appareil de la respiration. Le larynx supérieur est d’une structure très simpleet ne sert que peu ou point à la pro- Fig. 173. (1) duction des sons.Son ouverture à la forme d’une fente (g, fg.170, p.500) dont les bords ne peuvent ni S ‘étendre, ni se relächer, et il ne s’y trouve ni ventricules, ni cordes vocales, ni épigloite. Mais à l'extrémité in- férieure de la trachée , il existe un second larynx dont le jeu est très remarquable, et dont la structure est d'autant plus com- pliquée que loiseau module mieux son chant. Chez les oiseaux chanteurs ce petit appareil se compose d’une espèce de tam- bour osseux(/ig. 173, L), dont l’intérieur est divisé inférieurement par unetraverse 0s— seuse que surmonte une membrane fort mince de forme sémi-lunaire(e, £g. 174) .Ce tambour communique inférieurement avec deux glottes formées par la terminaison des bronches et pourvues chacune de deux lèvres ou cordes vocales ; enfin des muscles, dont le nombre varie suivant les espèces , s'étendent entre les divers Fig. 174.(2) anneaux dont se composent ces parties, et les meuvent de manière à tendre plus ou moins fortement les membranes qu’elles soutiennent. Chez les oiseaux qui sont privés de la faculté de t - moduler les sons d’une manière compliquée la cloison membraneuse dont nous avons parlé ci- dessus manque , et chez ceux qui ne chantent 6 — me PAS, il n’existe pas de muscles propres du la- rynx inférieur , et l’état de la glotie ne peut être modifié que par ceux qui élèvent ou abaïissent la trachée. Les oiseaux sont ovipares et n’ont pas, comme les animaux (1) Larynx inférieur de la corneille : — # trachée-artère; — ? tambour formé par l'extrémité inférieure de ia trachée ;—Z osselet moyen de la trachée ; —L° premier arceau des bronches, séparé du troisième osselet du larynx par un espace membraneux ;—b bronches ;—" muscles propres du larynx : ces muscles ont été enlevés du côté opposé ; — #7” muscle abaisseur de la trachée. (2) Coupe verticale du larynx: — # portion inférieure de la trachée, fendue par moitié; — c membrane semi-lunaire, située au-dessus du point de réunion des deux glottes et fixée à une traverse osseuse ; —a bourrelet que forme la lèvre interne de la glotte droite ;—me face interne de la bronche droite, formée par une membrane tympaniforme ;—b portion de la cavité de la bronche droite , mise à nu par la section d’une partie de cette membrane. 33. CEufs. ds. Ponte. 506 ZGOLOGIE DESCRIPTIVE. de la classe précédente, des mamelles pour allaiter leurs petits. Dans la première partie de ces leçons , nous avons dit quelques mots sur la manière dont leur corps se forme et se dévelop- pe; nous nous abstiendrons, par conséquent, d’en parler ici (1). La durée de l’incubation (ou du temps que le jeune oi- seau met à se développer dans l’intérieur de l'œuf) varie dans les différentes espèces , mais elle est constante pour chacune des celles-ci; pour l’oiseau-mouche, le plus petit des animaux de cette classe, elle est de douze jours seulement; pour les serins que nous élevons en domesticité, elle est de quinze à dix-huit jours , de vingt-et-un jours pour les poules , de vingt-cinq jours pour les canards et quarante à quarante-cinq jours pour les ci- gnes. Un certain degré de chaleur est nécessaire à ce phéno- mène ; celle du soleil suffit pour faire éclore les œufs de quelques oiseaux des régions interitropicales; mais , en général , il en est tout autrement, etpour maintenir les œufs à la température con- venable la mère les recouvre de son corps et les dépese dans un nid propre à les abriter. Quelques oiseaux se contentent, pour cela , de creuser dans la terre ou dans le sable une cavité arrondie; mais la plupart dé- ploient dans la construction de cette espèce de berceau une adresse et un art remarquables ; et une chose non moins sur- prenante, c’est la régularité avec laquelle toutes les générations successives exécutent les mêmes travaux et bâtissent des nids exactement semblables , lors même que les circonstances où ces animaux ont été placés ne leur ont jamais permis d’en voir et de prendre des leçons de leurs parens; un instinct admirable les guide et les porte à prendre une foule de précautions dontils ne connaissent pas d'avance toute lPutilité. Presque tous garnissent l'intérieur de leur nid avec des substances molles qu’ils ramas- sent avec soin, ou même avec un duvet précieux qu’ils arrachent de leur poitrine; les parois en sontordinairement bâties avec de petites tiges flexibles et quelquefois mastiquées avec de la terre délayée dans la salive gluante de l'animal ; du reste, leur forme et leur disposition varient beaucoup, comme nous le verrons par la suite. La ponte a lieu en général un fois par an, quelquefois deux; et, dans l’état de domesticité , la fécondité devient encore plus grande. Le nombre des œufs est plus considérable chez les pe- tites espèces que chez les grandes; les aigles n’en pondent qu’un ou deux, la mésange et le roitelet quinze à vingt. La constance avec laquelle les oiseaux couvent leurs œufs est admirable ; quelquefois les deux parens se partagent ce (x) Voyez page 213. CLASSE DES OISEAUX. 50% soin ; d’autres fois le mâle se borne à veiller aux besoins de la fe- melle pendantsque celle-ci reste accroupie sur ses œufs , et dans d’autres espèces, c’est la mère qui s'occupe seule de lincubation. En général ce n’est qu'à regret et poussée par la faim qu’elle quitte pour quelques instans sa progéniture, el lorsque ses pe- tits sont éclos son instinct maternel la porte à leur prodiguer les soins les plus tendres; elle les recouvre de ses ailes pour les préserver du froid , et leur apporte une nourriture choisie, que souvent elle dégorge dans leur gosier après lavoir à moitié di- gérée pour la rendre plus appropriée à leur estomac délicat; on la voit aussi guider leurs premiers pas, leur apprendre à se servir de leurs aïles , et lorsqu'un danger les menace déployer pour les sauver autant de courage que de dévoùment et on pour- rait presque dire d'intelligence. Sous ce rapport les mœurs des oiseaux sont bien intéressantes à étudier ; mais un instinct plus singulier et par conséquent plus remarquable encore, est celui qui porte certaines espèces à chan- ger de climat suivant les saisons , et à faire, à des époques déter- minées de l’année, des voyages plus ou moins longs. Quelques es- pèces émigrent ainsi pour fuir le froid ou pour chercher une tem- pérature moins élevée, et vont dans le midi ou dans le nord pour pondre ou pour y passer le temps de la mue; d’autres changent de pays pour se procurer plus facilement des moyens de subsi- stance, la plupart des insectivores sont dans ce cas; mais il est des oiseaux qui exécutent des voyages réguliers sans y être solli- cités par aucune cause appréciable et sans que leur déplacement paraisse porter aucun changement bien notable dans les condi- üons où 1ls se trouvent. Du reste, quelle que soit la circonstance qui rende la migration périodique des oiseaux utile à eux- mêmes où à leur progéniture, il est bien évident que ce n’est pas elle qui en est ordinairement la cause déterminante ; les oi- seaux voyageurs éprouvent, à certaines époques de l’année, le besoin de changer de place , comme ils éprouvent dans d’autres momens le desir de construire leur nid sans y être portés par un calcul intellectuel ou par la prévision des avantages qu'ils en recueilleront. C’est un instinct aveugle qui , en général , les pousse, et qui se développe quelquefois indépendamment de tout ce qui peut influer dans le moment sur le bien-être de Panimal. Ainsi dans des expériences faites sur quelques oiseaux voyageurs de nos pays, on a vu ce besoin se manifester avec force à l’époque ordinaire , bien qu’on eût eu le soin de maintenir autour de ces animaux une température constante , de leur donner une nour- riture convenable, et qu’on eût eu la précaution de choisir de jeunes individus qui n'avaient pas encore pu contracter lPhabi- tude des migrations. Lorsqu'ils changent de climat ils n’atten- Voyages; LA y 08 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. dent pas pour partir que le froid leur soit devenu insupporta ble et ils ne sont pas repoussés peu-à-peu vers le midi par les em- piétemens de l'hiver, mais ils les précèdent et se transportent de suite et presque tout d’un trait dans les régions tropicales ; sou- vent on les voit revenir au printemps, lorsque la température est encore au-dessous de ce qu’elle était au moment de leur départ, et pour certaines espèces, nous le répétons, les migra- lions ne coïncident avec aucune circonstance extérieure appré- ciable. Ce phénomène est , par conséquent, inexplicable; mais en cela, il ne diffère pas de tous ceux que détermine l’intinct, et à mesure que nous avancerons dans l’étude des animaux, nous aurons l’occasion d’en voir un grand nombre, aui ne sont ni moins intéressans , ni moins incompréhensibles. Mais de ce que les migrations dépendent d’une impulsion instinctive et aveugle , il ne faut pas en conclure que les cir- constances extérieures soient sans influence sur le développe- ment du besoin que les oiseaux voyageurs éprouvent de changer d'habitation; on remarque , au contraire , que ce phénomène coïncide , en général , avec des variations atmosphériques, et que le moment de l’arrivée et du départ estsouventavancé ou retardé suivant que la saison froide se prolonge plus ou moins. L'époque à laquelle les oiseaux voyageurs arrivent dans nos pays ou le quitient varie suivant les espèces; ceux qui sont ori- ginaires des régions les plus septentrionales de l'Europe nous viennent à la fin de l’automne ou au commencement de l'hiver, et, dès les premiers beaux jours, fuyant la chaleur comme ils avaient fui l’excès du froid, retournent vers le nord pour y faire leur ponte; d’autres oiseaux qui naissent toujours dans nos contrées etqui doivent par conséquent être considérés comme étant essen- tiellement indigènes, nous quittent en automme et après avoir passé l’hiver dans les climats chauds reparaissent parmi nous au printemps , ou bien , évitant au contraire la chaleur modé- rée de notre été, émigrent alors, vers les régions arctiques; il en est d’autres encore qui, natifs des pays méridion- naux , s'élèvent vers le nord pour échapper à lardeur du soleil d'été, et nous arrivent au milieu de la belle saison. Enfin on en voit aussi qui ne séjournent Jamais dans nos con- tirées, et qui, dans leurs migrations annuelles, ne font qu'y passer. L’époque de l’arrivée et du départ de ces voyageurs est, en général , déterminée d’une manière très précise pour chaque espèce et l’expérience a appris que, dans certaines localités , les chasseurs pouvaient compter sur l’arrivée de tels ou ielsoiseaux, comme sur une rente dont les termes écherraient à jour fixe. L'äge y apporte cependant quelque différence: on voit ordinai- rement les jeunes ne se mettre en route que quelque temps après nt RÉ LT er F7 CLASSE DES OISEAUX. 509 les adultes , et cela parait dépendre de ce que la mue ayant lieu plus tard chezteux que chez ces derniers , ils ne sont pas encore rétablis de l'espèce de maladie qui accompagne ce phénomène au moment où ceux-ci sont déjà en état de supporter les fatigues du voyage. Quelques oiseaux effectuent leurs migrations isolément ou réunis seulement par paires ; mais dans l'immense majorité des cas , ils se rassemblent en troupes plus où moins nombreuses et voyagent de concert. On les voit alors prendre tous leur essor au même instant et se suivre dans uniordre déterminé ; souvent ils paraissent se laisser guider par des chefs et les espaces qu'ils par- courent ainsi sont très considérables. Chaque année des légions innombrables traversent la Méditerranée pour passer d'Europe en Afrique ou pour suivre la route inverse; nos hirondelles, par exemple, hivernent au Sénégal et se répandent pendant l'été dans la Hollande et le nord de l'Europe. Certaines espèces sont ioujours errantes et changent de pays sans que leur marche pa- raisse guidée par aucune règle. Mais la plupart des oiseaux voyageurs suivent toujours une route déterminée. Des expé- riences , dont nous aurons l’occasion de parler plus en détail en traitant des hirondelles, prouvent même que souvent, sinon tou- jours , les mêmes individus viennent chaque année dans les mêmes localités ; mais il paraïtrait que les adultes ont seuls ce pri- vilège et que les jeûnes ne reviennent que rarement dans le lieu qui les a vus naïtre; ceux-cise réunissententre eux et ne poussent pas leurs voyages aussi loin, de facon que dans certains cantons où les adultes abondent et déposent leurs œufs, il arrive de ne jamais rencontrer des individus d’un ou de deux ans, lesquels sont faciles à distinguer par leur plumage. L'instinct social des oiseaux se développe aussi dans d’autres circonstances ; il en est qui vivent toujours en troupes nombreu- ses, et qui non-seulement paraissent obéir à des chefs, mais qui, pour mieux assurer leur sûreté, ont le soin, dit-on, de s’entourer de sentinelles chargées d’avertir leurs compagnons de l'ap- proche du moindre danger. Enfin on en connait qui ont assez d'intelligence pour s’épargner les fatigues de la chasse en forçant d’autres oiseaux plus faibles ou plus lâches à leur abandonner la proie dont ceux-ci se sont à grand'peine emparés , et, dans quelques cas , ils se prêtent des secours mutuels pour repousser leurs ennemis. En faisant l’histoire particulière de ces animaux , aus aurons l’occasion de faire connaître ces habitudes singu- ières. Le nombre d’espèces d'oiseaux connues des naturalistes est Classifica- d'environ cinq mille, et comme l'organisation de ces animaux tion. 510 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. présente une grande uniformité, leur classification offre des dif- ficultés considérables ; les caractères dont on se sert pour les divi- ser en ordres,en familles et genres, sont fournies principalement par la conformation du bec et des pattes, organes dont la struc- ture est en rapport avec le régime de ces animaux. M. Cuvier, dont nous suivons ici la méthode, les partage ainsi en six ordres, Savoir : 1° Les RAPACES , OU OISEAUX DE PROIE , dont le bec et les serres sont acérés, recourbés, très forts et propres à déchirer la chair des animaux dont ils se nourrissent. 2° Les PASSEREAUX , dont le bec est faible ou droit et dont les pattes conformées de la manière ordinaire ne sont ni palmées, ni armées d'ongles crochus et puissans. 3° Les GRIMPEURS , caractérisés par la direction de leur doigt externe qui est tourné en arrière comme le pouce, disposition qui leur permet de grimper avec plus de facilité. 40 Les GALLINACÉS , dont le bec est médiocre, renflé en des- sus et propre seulement à un régime granivore, dont les ailes sont courtes, le corps lourd et les doigts de devant réunis en général à leur base par de courtes membranes. 5° Les ÉCHASSIERS OU OISEAUX DE RIVAGE, qui Ont les tarses élevés, les jambes dénuées de plumes vers le bas, la taille élancée et les doigts ordinairement réunis par quelques petites palmures. 6° Les PALMIPÈDES, OU OISEAUX NAGEURS, dont les pattes, de longueur médiocre , sont terminées par une large nageoire, formée des doigts antérieurs réunis par une membrane com mune. Les limites de ces divers groupes ne sont pas toujours bien tranchées, et on peut reprocher à quelques-uns de n’être pas bien naturels ; l’ordre des passereaux , par exemple , se lie d’une ma- nière très intime à celui des grimpeurs et se compose de Passemblage un peu hétérogène de tous les oiseaux qui man- quent des caractères saillans , propres aux rapaces , aux échas- siers, aux palmipèdes, etc.; dans l’ordre des échassiers on a réuni aussi des oiseaux qui diffèrent extrêmement entre eux ; mais cependant cette classification est la meilleure qu’on ait en- core proposée , et pour la corriger entièrement, il faudrait peut être multiplier les divisions au point de perdre un des princi- paux avantages de la méthode: le secours qu’elle prête à la mé- moire. Nous nous bornerons donc à signaler ces défauis et à avertir que les divisions primaires de cette classe n’ont pas la même valeur que chez les mammifères et devraient être consi- dérées comme des familles, plutôt que comme des ordres. ORDRE DES OISEAUX DE PROIE. 511 ORDRE DES RAPACES OU OISEAUX DE PROIE. Ce groupe, l'un des plus naturels de la classe dont l’étude nous occupe en ce moment, se compose de tous les oiseaux les plus carnassiers , et se reconnait aux armes puissantes dont ces ani- maux sont pourvus. Tout dans leur organisation indique la force; leur bec est court et la mandibule supérieure, plus longue que l'inférieure , est courbée vers son extrémité et terminée par une pointe aiguë ( fg 157, p. 513 ); leurs cuisses et leurs jambes sont grosses et robustes ; leurs pieds sont forts ei en général courts; leurs doigts, au nombre de quatre, sont rudes en dessous, et ter- minés par des ongles puissans , acérés, rétractiles et arqués; ceux du pouce et du doigt interne sont les plus forts; enfin leurs ailes sont le plus ordinairement grandes, et le sternum , qui donne insertion aux principaux muscles du vol, est très déve- loppé, et sans échancrure latérale. Il est aussi à noter que leurs narines sont ouvertes et percées dans une membrane qui recouvre tout la base du bec , et qui a recu le nom de cire. Ces oiseaux acquièrent souvent une taille très considérable; les femelles sont toujours plus grandes que les mâles. La plu- part vivent de chasse et se nourrissent de petits mammifères et d'oiseaux qu’ils prennent vivans; d’autres se repaissent de cha- rognes , et 1l en est qui se contentent de poissons ou de reptiles et d'insectes. Quand l’occasion s’en présente ils se gorgent d’une quantité très considérable d’alimens , et ils supportent le jeûne pendant plusieurs jours. Ce sont de tous les oiseaux ceux qui s’élèvent le plus haut dans l'atmosphère, et leur vol est très ra- pide ; errans et vagabonds ils vivent en général solitaires ou seu- lement par couples , et nichent sur des rochers inaccessibles ou sur de très hauts arbres; leur nid , appelé aire, est souvent très vaste et construit avec une solidité qui étonne ; il ne renferme Ja- mais plus de quatre œufs ; enfin ces oiseaux naissent en général nus , les yeux fermés et dans un état de faiblesse qui rend les soins de leurs parens nécessaires à leur existence. L'ordre des rapaces se compose de deux familles les DIURNES et les NOCTURNES, reconnaissables aux caractères suivans : DIURNES. | NOCTURNES. Feux dirigés de côté. | Feux dirigés en avant. Téte et cou bien proportionnés. | Téte très grosse et cou court. Doigt externe dirige en avant et pres- | Doigt externe libre et pouvant se di- que toujours réuni par sa base au doist | | viger a volonté en avant ou en arrière. médian par une petite membrane. Caractères généraux. Mœurs. Classifica- tion. d12 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. FAMILLE DES OISEAUX DE PROIE DIURNES. Caractères, CS Oiseaux, comme l’indique leur nom , chassent le jour et ne craignent pas comme les nocturnes l'éclat du soleil; leur vue est extrêmement percante et leur permet d’apercevoir leur proie lorsqu'ils en sont assez éloignés pour échapper à ses regards. Leur plumage les distingue également des nocturnes, il est terne et les pennes de leurs ailes sont fortes et résistantes ; leur ster- num , afin d'offrir à l'insertion des muscles pectoraux une sur- face plus étendue , est large et complètement ossifié ; leur four- chette est demi circulaire , très écartée et très forte pour mieux résister aux efforts violens de ces muscles lors de l’abaissement de l'aile; enfin la structure de leur tube digestif est en rapport avec leur régime essentiellement carnassier : leurs intestins sont peu étendus, leurs cæœcums très courts, et leur gésier presque entiè- rement membraneux. Classifica- On peut diviser les oiseaux de proie diurnes en quatre tribus, tion. dont voici les principaux caractères : VAUTOURS. | GYPAETES. FAUCONS. MESSAGERS. Téte,et en géné-| Tête et cou em-| Téte et cou em-| Tête et cou em- ral cou nus, ou cou-|plumés. plumés. plumés. vert seulement d’un duvet irès court. Pattes de lon-| Pattes de lon-| Pattes de lon-| Pattes extrème- gueur médiocre. |gueur médiocre. |gueur médiocre. | ment longues et très grèles. Ongles peu cro-| Ongles peu cro-| Ongles très cro-| Ongles peu cro- chus. chus. chus. chus. Bec allongé et| Bectrèsfort,droit| Bec fort, crochu Bee court et cour- recourbé seulement|à sa base, crochu et|et en général cour-| bé près de sa base. au bout. exbaussé au bout. |bé dés son origine. Feux à fleur del Feux à fleur del Yeux surmontés Yeux entourés tête. tête. d’un sourcil saillant | d’un espace nu. qui les fait paraître enfoncés. TRIBU DES VAUTOURS. Les vaulours se reconnaissent au premier coup-d’œil par la nudité de leur petite tête et en général de leur long cou, dont la TRIBU DES VAUTOURS. 513 base est presque toujours entourée d’une espèce de collier for- mé par du duvet ou par de longues plumes. Ils n’ont pas dans le port la noblesse des autres oiseaux de proie ; à terre leur dé- marche est embarras- sée et leurs ailes sont si longues qu’en mar- chant ils sont obligés de les tenir à demi étendues. Leur vol est lent , mais ils s'élèvent à des hauteurs prodi- gieuses, et c’est en tournoyant qu’ils mon- Fig. 175. LE VAUTOUR FAUVE. tent et qu'ils descen- dent dans lair. Ils sont de grande taille et très forts, mais leurs serres ne sont pas assez robustes pour qu’ils puissent s’en ser- vir pour attaquer leur proie ou pour l'emporter avec eux. Ils sont aussi d’un naturel lâche, n’attaquent que rarement des animaux vivans, et, à moins d’être réunis en grand nombre, se laissent mettre en fuite par le plus faible adversaire. Leur nourriture consiste en cadavres seulement, et leur odorat parait être assez fin pour qu'ils puissent sentir lesexhalaisons des cha- rognes à des distances considérables: ils arrivent alors de toutes parts se repaitre de ces chairs infeetes et mangent avec tant de voracité que, souvent après leur repas, ils ne peuvent s'envoler qu'avec la plus grande difficulté et restent dans un état de stupeur jusqu’à ce que leur digestion soit terminée. Leur aspect fait tou- jours naïître de la répugnance, mais c’est lorsqu'ils sont dans cet état qu’ils inspirent le plus de dégoût ; leur jabot se gonfle alors au point de faire à la base du cou une espèce de grosse vessiechar- nue, et il coule de leurs narines une humeur fétide. Au lieu d’être solitaires , comme les oiseaux de proie chasseurs, les vautours vivent en grandes troupes ; en général ils établissent leur demeure sur quelque rocher inaccessible près de la mer ou sur le bord d’un torrent, et y construisent une aire vaste,garnie intérieure- ment de paille ou de foin, et entourée &’un talus de büchettes, liées par un mastic ; ils ne pondent, en général , que deux œufs. Les petits naissent couverts d’un duvet, et leurs parens les nour- rissent en dégorgeant devant eux les charognes qu'ils ont amas- sées dans leur jabot et en les invitant par un cri particulier à s’en rassasier. Le plumage des jeunes est varié de nombreuses taches. Organisa- tion et mœurs. de o1+ ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. celui des vieux coloré par grandes masses; la mue wa lieu qu'une fois dans l’année, et à l’âge adulte les deux sexes ont la même livrée. Les vaulours se montrent dans toutes les contrées, mais ha- bitent principalement les régions équatoriales et tempérées ; ils se plaisent surtout dans les montagnes et dans les lieux les plus sauvages; mais il en est qui pénètrent jusque dans les villes pour y chercher les débris dont ils se nourrissent. Classifieae Ondistingue parmi les vautours quatre genres: les vautours pro- tion. prement dits, les sarcoramphes, les cathartes et les percnoptères. Vautours Les VAUTOURS PROPREMENT DITS (&#llur) appartiennent exclusi- Er. vement à l’ancien continent, et se reconnaissent à leur tête et à leur cou sans plumes et sans caroncules, à leur collier, et à leurs narines percées en travers à la base du bec. Il existe une grande confusion dans la nomenclature et dans la distinction des oiseaux du genre vautour; une des es- pèces les mieux caractérisées est le vautour/fauve (fig. 175), dont le corps dépasse en grosseur celui du cygne, et dont les ailes éten- dues mesurent plus de huit pieds ; il est d’un gris fauve avec les pennes des ailes et de la queue brunes , le collier et le ventre blancs. C’est l’espèce la plus commune dans les Alpes, les Pyré- nées et les autres hautes montagnes de l’Europe et de l'Afrique. Buffon lui a appliqué à tort le nom de percnoptère. Le vantour brun Où noir est encore plus grand que le précé- dent et habite les mêmes montagnes. Vautour fauve. Sarcoram- phes. Condor. Les SARCORAMPHES ressemblent beaucoup aux précédens , mais 1ls s’en distinguent par leurs narines ovales et longitudi- Fig. 176. nales et par les caroncules charnues qui surmontent la base de leur bec. L'espèce la plus remarquable de ce genre est le condor Ou grandvautour des Andes (fig.176), rendu célèbre par l’exagération avec laquelle on a parlé de sa taille et de sa force, c’est probablement le roc si fameux dans les contes arabes. Mais , ainsi que l’observe un savant voyageur (M. de Humboldt), il en est de cet oiseau comme des Pata- gons et de tant d’autres objets d'histoire naturelle: plus on les a examinés, plus ils se sont rapetissés. La longueur du condor r’excède guère quatre pieds etson envergure douze à treize. Son vol est très bruyant et des plus puissans ; il s'élève plus haut qu'aucun oiseau ; on le voit TRIBU DES VAUTOURS. 515 au bord de la mer et plauant au-dessns du Chimborazo à un ni- veau de près defsept mille toises au-dessus du premier point. Sa demeure habituelle est sur la crête des rochers de la Cordillière des Andes, immédiatement au-dessous de la limite des neiges per- pétuelles à un niveau de trois mille trois cents à quatre mille huit cents mètres au-dessus du niveau de la mer; c’est de ces pitons escarpés qu’il descend dans les vallons et dans la plaine pour chercher sa nourriture, qui consiste pr incipalement en Ca— davres de grands mammifères ; on prétend que, réunis plusieurs ensemble, ils peuvent tuer facilement des bœuñs , et qu’ils sont assez puissans pour enlever dans leurs serres des moutons et des lamas , et les transporter ainsi jusqu’à la cime du Chimborazo et des autres montagnes les plus élevées de la chaine des Andes ; mais ces récits ont besoin de confirmation. Le condor appartient à l'Amérique méridionale, et c’est à tort que Buffon le confond avec le vautour des agneaux ou lem- mer-geyer de l’ancien continent. Une autre espèce du même genre qui habite aussi l'Amérique du sud , mais qui se tient dans les plaines est, le roi des vautours Où lirubt (V. Papa); cet oiseau est de la taille d’une oie ; son nom lui vient de l’espèce de diadème formé par les caroncules vivement colorées qui surmon- tent sa tête, et de la manière dont il tyrannise les urubus qui lui cèdent toujours la place lorsqu'il se jette sur un cadavre dont ces derniers ont commencé à se repaitre. Les CATHARTES sont aussi des vautours du Nouveau-Monde qui diffèrent des précédens par l'absence de crêtes charnues sur la tête. Enfin les PERCNOPTÈRES se distinguent de tous les autres vautours par leur bec grèle et par leur cou emplumé. Ce sont des oiseaux de taille médiocre, qui n’approchent point pour la force des autres vautours et qui se nourrissent de toutes sortes d’im- mondices. Ils vivent en grandes troupes et se plaisent dans le voisinage des lieux habités. L’un de ces oiseaux, qui se trouve dans toute l'Europe, mais qui abonde surtout en Grèce, en Egypte et en Arabie, est le PERCNOPTÈRE DES ANCIENS, ainsi nommé par les Grecs à cause de la couleur noire des premières rémiges des ailes du mâle, tandis que tout le reste de son plu- mage est blanc. Il est de la grosseur d’un dindon de moyenne taille, et les Européens établis en Orient le connaissent sous le nom de poule de Pharaon. Les anciens Égyptiens le respectaient à cause des services qu’il rend au pays, en dévorant les charo- gnes et les autres immondices qui, en se corrompant, rendraient l'air insaluble ; de nos jours on ne lui fait aucun mal et on le voit parcourir sans crainte les rues des villes les plus peuplées de l'Egypte ; on assure même que quelquefois des musul- [rubi. Cathartes. Percnopte- res. Urubu. Vautours des agneaux. 16 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. mans dévots lèguent de quoi en entretenir un certain nombre. Une autre espèce du même genre et ayant des mœurs analo- gues est très commune dans les parties chaudes et tempérées de l'Amérique ; au Pérou, à la Guyane, au Brésil les toits des maisons en sont quelquefois couverts, et on voit ces pelits percnoptères à l’entour des habitations se disputant avec les animaux domes- tiques les débris de poissons et les autres alimens qu’ils y trou- vent. On leur donne généralement le nom d’urwbu. (Vult. jota.) TRIBU DES GYPAETES. Les gypaëtes ou griffons sont intermédiaires entre les vautours et les faucons , comme on a pu le voir par les caractères que nous leur avons déjà assignés. On ne connait bien qu’une seule espèce appartenant à cette division , c’est le autour des agneaux ou /emmer geyer des Allemands qui habite l’ancien continent, et qui dépasse par sa taille tous nos oiseaux de proie; il est pres- que aussi grand que le condor; son plumage est d’un brun fauve tirant sur le noir; ses narines sont couvertes en dessus de soies raides , et il porte sous le bec un pinceau de longs poils pareils. Ses tarses ne sont pas réticulés comme ceux des vautours, mais emplumés jusqu'aux doigts, et ses ailes sont trop longues pour être complètement reployées dans le repos. Il a plus de sou- plesse et de grâce dans les mouvemens que les vautours, et se rapproche par son port des oiseaux de proie chasseurs. En effet, il leur ressemble aussi davantage par ses mœurs; car il attaque les animaux vivans et dédaigne ordinairement les cadavres. Les agneaux, les chèvres , les chamoiïis et méme les veaux devier- nent souvent sa proie, et pour s’en rendre maitre le gypaëte épie le moment où l’un de ces animaux se trouve sur les bords d’un rocher escarpé pour fondre dessus du haut des airs ei l’en précipiter ; lorsque sa victime s’est brisée dans sa chute, il la- chève, sur place, et se repait sans rien emporter dans ses serres qui ne sont pas propres à saisir. La force de ces oiseaux est extrême , mais cependant ils se jettent de préférence sur des animaux jeunes ou malades, et on ne doit pas ajouter une entière confiance aux récits de leurs attaques contre des hommes. Il paraîtrait que c’est aussi à tort qu'on leur a attri- bué l’habitude d’enlever dans leurs serres, et de porter dans leurs nids des agneaux et d’autres animaux de grande taille. Ils vivent le plus ordinairement par paires, et établissent leur demeure dans l’anfractuosité la plus inaccessible de quelque rocher ; leur aire a une étendue très considérable et se compose de bùchettes entrelacées et pour ainsi dire cimentées par des TRIBU DES FAUCONS. 17 débris infectés de matières animales. Ils pondent deux œufs et s'occupent pendant assez long-temps des soins, de la nourriture et de l'éducation de leurs jeunes. Cet oiseau est le phéne des Grecs et l’ossifraga des Latins ; les ornithologistes l’ont désigné aussi sous les noms de vultur barbarus et de falco barbatus. TRIBU DES FAUCONS. Cette division de la famille des oiseaux de proie diurnes est la plus nombreuse én espèces; elle se compose d'oiseaux essen- üiellement chasseurs et qui, pour la plupart, sont remarquables par leur courage , par leur force ct par la puissance de leurs armes , aussi bien que p&* la noblesse de leur main- tien , la hardiesse et la vivacité de leurs mouve- mens ; leur vol est élevé, rapide et soutenu ; jeur vue est plus percante que celle d'aucun autre oi- seau ; presque toujours ils se nourrissent d'animaux vivans ; mais lorsque la faim les presse, ils ne dé- daignent pas les cada- vres , ainsi qu’on le pré- tend généralement, et au lieu de se repaitre sur place comme les vautours, ils saisissent leur proie avec leurs serres et lemportent souvent jusque dans leur aire; les plus grandes espèces attaquent les mammifères et les oiseaux, d’autres vivent de poissons, quelques-unes se nourrissent de reptiles, et il en est qui sont insectivores seulement. La femelle est générale ment d’un tiers plus grande que le mâle , que pour cette raison on désigne souvent sous le nom de #ercelet. La mue n’a lieu qu’une fois dans l’année, et l’âge apporte de si grandes différences dans le plumage de ces oiseaux que les naturalistes ont souvent pris pour des espèces distinctes des variétés dépendantes seule- ment de cette cause ; les jeunes sont en général bigarrés de taches et de raies longitudinales , tandis que les vieux ont les couleurs plus uniformes et sont plutôt rayés transversalement ; ils ne se Fig. 1797. L’AUTOUR. Caractères. >18 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. revêtent de leur dernière livrée qu’à leur troisième, quatrième ou même sixième année , et alors les couleurs du plumage diffèrent encore suivant les sexes. Classifica- Cette tribu se divise en deux sections: la première comprend tion. les oiseaux de proie nobles, ainsi appelés parce qu’ils se lais- saient dresser à la chasse et servaient de la sorte au plaisir des nobles, et les oiseaux de proie ignobles, dont le caractère s’ac- corde en général assez mal avec leur nom, car la plupart sont trop fiers et trop indomptables pour se plier à ce genre d’escla- vage ; mais quelques-uns d’entre eux sont en effet lâches et faciles à dompter. Oiseaux de LES OISEAUX DE PROIE NOBLES sont les mieux armés, et les plus proie nobles. COurageux, proportion gardée avec leur taille ; leur mandibule Fig. 178. supérieure est courbée dès sa base, et pré- sente ordinairement près de sa pointe une ou deux fortes denis qui correspondent à des échancrures de la mandibule inférieure (fig- 178), etajoutent beaucoup à la puissance de leur bec. Leurs ailes ({g. 179) sont en gé- néralaussi longues que la queue ou mémela dépassent ; enfin la première rémige est tou- | jours presque aussi longue que la seconde | qui est la plus longue de toutes , et il en résulte que ces organes sont pointus, disposition qui influe, comme nous l’avons déjà dit Fig. 179. (1) ailleurs (pag. 495), sur la ma- nière dont ces oiseaux vo- lent ; on peut en effet les re- connaitre à ce seul caractère , car lorsque lair est tran- quille, ils volent très obli- quement ei ne peuvent s’éle- ver qu’en zigzag , Comme un vaisseau qui court des bor- dées , ou bien en volant contre le vent, tandis que les oiseaux de proie, dits ignobles, dont les ailes sont tronquées au bout, peuvent s'élever verticalement. Cette division comprend le genre des faucons, proprement dits, et celui des gerfaulis. (1) Aile d'un faucon :—a première penne ;—E seconde penne ;—c dixième penne où dernière rémige primaire ;—d rémiges secondaires ; —e peunes bâtardes. TRIBU DES FAUCONS. 519 Les FAUCONS PROPREMENT DITS (/4/co) ont le bec armé de dents; Fauconspro. le faucon ordimaire, le lanier, le hobereau, l’émérillon et les cres- prement dits. serelles appartiennent à ce genre. Le premier de ces oiseaux (fal- co communs) est à-peu-près de la grosseur d’une poule; ses ailes atteignent à l'extrémité de la queue, et le doigt du milieu est aussi long que le tarse ; on le reconnait aussi à une grande moustache triangulaire et noire qu’il porte sur la joue; mais du reste ses couleurs varient suivant l’âge: les jeunes ont le dessus brun, avec les plumes bordées de raies jaunes, le dessous blanchâtre ,; avec des taches longitudinales brunes; à mesure que l'oiseau vieil- litle plumage du dos devient d’un brun plus uniforme, rayé en travers de cendré noirâtre; les taches du ventre et de; cuisses tendent aussi à devenir des lignes transversales noires, enfin le blanc augmente à la gorge et au bas du cou. Le faucon pelerin des auteurs ne parait être autre chose que le faucon commun, dans sa livrée du jeune âge et un peu plus noire que de coutume ; c’est encore le même oiseau que les fauconniers appellent quel- quefois faucon sors , faucon niaïs , faucon gentil, etc. Cet oiseau est assez commun dans presque toutes les parties tempérées et chaudes de l'Europe, et recherche partout les rochers et les montagnes dont il ne descend que pour chasser la proie qui lui manque sur les hauteurs. On le voit rarement dans les pays de plaines et jamais dans les contrées marécageuses. Il niche dans les fentes des rochers les plus escarpés, et pond trois ou quatre œufs d’un jaune rougeâtre tacheté de brun. La durée de sa vie est très grande; on raconte qu’en 1793, une personne prit, au cap de Bonne-Espérance, un faucon portant un eol- lier-d’or , sur lequel était gravé : qu’en 1610, cet oiseau appar- tint au roi d'Angleterre , Jacques 1°. Il avait, par conséquent, plus de cent quatre-vingts ans, et cependant il conservait en- core beaucoup de vigueur. Le vol du faucon est extrêmement rapide , il se nourrit ordinairement de gros oiseaux, tels que des tétras , des faisans , des pigeons , des canards, des oïes, et pour s’en emparer il s'élève au-dessus de sa proie et fond perpendicu- lairement sur elle ; son courage est remarquable, et souvent on le voit attaquer le milan , soit pour le harceler seulement, soit pour lui enlever sa proie. Cette qualité et la facilité avec la- quelle le faucon commun se laisse dresser, le faisait beaucoup estimer, lorsque les grands se plaisaient à chasser avec des oi- seaux comme de nos jours encore, on fait poursuivre le gibier par des chiens; c’est lui qui a donné son nom à l’art d'élever et de se servir d'oiseaux de proie pour cet usage. On y parvenait en privant ces animaux de lumière, épuisant leurs forces par la fatigue et le jeûne , puis en leur présentant des appâits et en les accoutumant peu-à-peu à poursuivre telle ou telle espèce de 34 Lanmer Hobereau. Emeérillon. Cresserelle. Petite cres- serelle. 520 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. gibier. Les oiseaux les plus employés en fauconnerie étaient le faucon commun , le gerfault, l’'émérillon , le hobereau , l'autour et l’épervier. L'espèce de faucon appelée Zanier, ou sacer, a les ailes beau- coup moins longues que la queue, et est un peu plus grande que le faucon commun au jeune âge duquel elle ressemble assez par ses couleurs ; on ne la rencontre guère que dans les parties orientales et septentrionales de l'Europe. Le hobereau à au contraire les ailes plus longues que la queue ; il est presque de moitié plus petit que le faucon com- mun et a le plumage brun dessus, blanchâtre, tacheté en long de brun dessous, avec les cuisses et le bas du ventre roux. Il est assez commun en France ,et se irouve jusqu’en Sibérie. Sa demeure ordinaire est dans les bois voisins des champs, et il niche sur les arbres élevés ; les alouettes forment sa principale nourriture, mais il chasse beaucoup d’autres petits oiseaux, et mange aussi de grands insectes. Il est indocile, et les fauconniers n’en tiraient que difficilement part pour la chasse. L’émerillon est le plus petit de nos oiseaux de proie; il n’est guère plus grand qu’une grosse grive , mais il a les formes et le port des autres faucons; ses ailes, comme celles du lanier, n’atteignent qu'aux deux tiers de la queue, le fond de son plu- mage est d’un cendré bleuâtre en dessus , blanc à la gorge et d’un jaune roussâtre en dessous, avec des taches longitudinales noirâtres sur le dos, et d’autres taches en forme de larmes en des- sous ; dans le jeune âge sa livrée est plus brunâtre. Il niche dans les rochers, et pond cinq ou six œufs; il habite surtout les montagnes boisées , et montre le même courage que les espèces précédentes. C’est le plus docile et le plus familier des oiseaux employés en fauconnerie ; on les dressait à chasser les allouettes, les cailles , les perdreaux , ete. Les cresserelles ont les doigts moins longs que dans les es- pèces précédentes, et ne volent pas aussi vite; leurs ailes abou- tissent aux trois quarts de la queue et leur plumage est roux, tacheté de noir en dessus, blanc, tacheté de brun pâle en des- sous ; enfin ils sont un peu plus grands que le hobereau et sont très communs dans presque toute l'Europe; en France on les connait sous le nom vulgaire d’éemouchets. Ces faucons habitent les bois et se cachent souvent dans les masures et les clochers ; leur nourriture consiste principalement en souris , mulots , gre- nouilles , lézards et petits oiseaux qu’ils prennent perchés, ils mangent aussi des insectes. Leur nom vient du cri aigu qu'ils répètent fréquemment , lorsqu'ils planent dans l'air. Une autre espèce, très voisine de la précédente et appelée petite cresserelle , habite le midi de l’Europe ei se distingue de la TRIBU DES FAUCONS. o21 précédente par ses ailes plus longues et par ses ongles blancs ; tandis que chez les cresserelles , ils sont toujours noirs. Enfin une troisième espèce de cresserelle, la grise, encore plus petite, et à ongles jaunes, se montre aussi en France. Les GERFAULTS ressemblent aux faucons par la forme de leurs ailes, mais se rapprochent des oiseaux de proie ignobles par leur bec qui présente au lieu de dents un simple feston de chaque côté. Leurs ailes sont très longues, mais cependant n’atteignent pas l’extrémité de la queue, et leurs tarses sont garnis de plumes dans leur tiers supérieur. On ne connait qu’une seule espèce de ce genre qui est d’un quart plus grande que notre faucon et qui habite l'Islande et les parties septen- trionales de l'Europe ; son courage et son ardeur pour la chasse sont encore plus grandes que celles du faucon ; il s’élance sur sa proie avec une rapidité étonnante et attaque de très grands oi- seaux, tels que le héron et la cigogne , aussi bien que des lièvres et autres mammifères ; le plus ordinairementil fond presque per-- pendiculairement sur sa victime, et souvent après en avoir dé- chiré un lambeau , il labandonne pour en poursuivre une autre. De même que le faucon, il est susceptible d’une certaine édu- cation, et il était même le plus estimé de tous les oiseaux qu’on élevait pour la fauconnerie. La deuxième section de la tribu des faucons, celle des or- SEAUX DE PROIE IGNOBLES, COmprend un bien plus grand nombre } de genres, et se dis- Fig. 180. (1) tingue de la précéden- te par la forme des ai- les qui sont tronquées au bout, la première penne étant très cour- teet la troisième ou la quatrième la plus lon- gue (fig. 180); le bec de ces oiseaux est aussi moins bien armé, car la mandibule supé- rieure est dépourvue e b de denis latérales, il ne présente de chaque côté qu’un léger feston (/#g. 177, 181). On (1) Aile d’un épervier :—a troisième penne ;— neuvième rémige primaire ; — c rémiges secondaires. 34. Gerfaults. Oiseaux de proie ISUNQ = les. Aigles pro- prement dits. 522 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. range dans cette division les aigles, les autours, les milans, les bondrées, les buses, etc. Le genre des AIGLES se compose de tous les oiseaux de proie ignobles, dont le bec très fort, est droit à sa base, et courhé seulement vers sa pointe(fig. 181); mais ce groupe doit être encore subdivisé en aigles proprement dits, aigles pêcheurs, balbusards, circaètes ; harpies , aigles autours , etc. Les AIGLES PROPREMENT DITS (aguila) se reconnaissent à leurs tarses forts et emplumés jusqu’à la racine des doigts; leur tête est aplatie en dessuset leur sourcil très sail- lant ; leurs ailes sont à-peu-près de la lon- gueur de la queue ; leur vol est élevé et ra- pide ; leurs serres sont unies; leur force mus- culaire est très grande et leur courage sur- passe celui de tous les autres oiseaux. Ces qualités jointes à l’as- pect fier et imposant de ces oiseaux les fai- saient prendre par les anciens comme sym- bole de la puissance, et leur valurent une ré- putation de noblesse et de générosité qu’ils Fig. 181 , AIGLE ROYAL. sont loin de mériter. On a dit et répété pen- dant bien long-temps que l'aigle , quelque affamé qu’il soit , ne se jette jamais sur les cadavres et qu’il dédaigne même une proie trop faible, mais dans la réalité il en est autrement; pressé par la faim il se repait de charognes, et s’il n’attaque pas d’ordi- naire les petits oiseaux, c’est qu’ils lui échappent facilement au milieu des buissons et n’offrent pas à sa voracitéun assez riche butin. Ces oiseaux sont sombres et farouches, ils vivent par paire au milieu des rochers et ne souffrent le voisinage d’aucun autre oiseau de proie; pendant l'été ils ne quittent guère les montagnes, mais l’hiver les fait souvent descendre dans les plai- nes. Leur proie varie suivant les espèces ; leur vue perçante jeur permet de l’apercevoir à de grandes distances, et c’est avec TRIBU DES FAUCONS. 523 lPimpétuosité d’un trait qu’ils fondent sur elle, pour la déchi- rer, s’'abreuvYer de son sang, puis l'emporter dans leurs serres, afin d’en dépecer à loisir les lambeaux dans leur retraite ordi- naire. Leur nid , construit en général sur l’entablement de quel- que rocher escarpé est large et plat ; ils n’en changent pas, et ses murs, construits avec de gros bâtons entrecroisés, s'élèvent continuellement par l'accumulation des ossemens et des autres débris que ces oiseaux y abandonnent après leur repas. Le nombre des œufs est de deux ou trois par ponte ; mais souvent un ou deux avortent ; la durée de l'incubation est de trente jours, et lorsque les jeunes sont nés, leurs parens leur portent en abon- dancede la chair encore palpitante ou même des animauxenuers. L'espèce la plus commune en Europe est l'aigle royal ou l'aigle brun (fig. 181) ; elle se distingue par sa queue plus longue que les ailes et très arrondie; ses narines elliptiques ,et son plu- mage d’un brun obscur qui devient plus ou moins noiràtre avec l’âge. Cet oiseau , dont la taille chez la femelle est de trois pieds et demi, abonde dans les grandes forêts du nord de l'Europe et se montre assez fréquemment dans les Pyrénées, les montagnes de l'Auvergne et même la forêt de Fontainebleau. Il se nourrit de gros oiseaux , de lièvres, d’agneaux et même de jeunes cerfs. Pendant la durée de l’incubation , le mâle chasse seul et pour- voit aux besoins de sa compagne ; mais pendant le reste de Fannée il chasse de concert avec la femelle, et les habitans des montagnes assurent que l’un d’eux bat les buissons, tandis que l’autre se tient sur quelque endroit élevé pour saisir le gi- bier au passage ; dans l'extrême disetie ils se rabattent sur les cadavres. L’aigle impérial est un peu moins grand que l’espèce précé- dente dont il se distingue par les ailes au moins aussi longues que la queue , par da forme carrée de celle-ci et par quelques autres caractères organiques, ainsi que par la nuance de son plumage. Son cri est sonore, tandis que celui de l'aigle commun est un son rauque et faible; il a le corps plus trapu, et il paraït être aussi plus redoutable. Il se nourrit non-seulement de gros oi- seaux , de renards et d’autres mammifères de moyenne taille, mais aussi de chevreuils et de daïms. Il habite les hautes mon- tagnes du midi de l'Europe, l'Egypte , etc. ; et c'est à lui que se rapportent les récits exagérés que les anciens faisaient de la force , du courage et de la magnanimité de leur aigle doré, Une troisième espèce d’un tiers plus petite que les précédentes est commune dans les Apennins et les autres montagnes du midi de Europe; c’est le petit aigle , appelé aussi aigle tachete et aigle criard ; ce dernier nom lui vient des cris plaintifs qu’il pousse continuellement. Sa nourriture consiste principalement Aigle royal. Aigle impé- rial, Aigle criard. Ailes pé- cheurs. Palbusards Circaëtes. 224 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. en lièvres , lapins, mulots, chauve-souris, canards et gros in- sectes. Il niche sur de grands arbres, et peut être dressé à la chasse; mais on assure que loin d’avoir le courage des autres aigles , il se laisse poursuivre et vaincre par l’épervier. Les AIGLES PÊCHEURS(kaliœtus)ressemblent aux aigles propre- ment dits par les proportions de leurs ailes , mais en diffèrent par leurs tarses quisont emplumés dans la moitié supérieure seule- ment et garnie de demi-écussons dans la moitié inférieure ; ils s’en distinguentaussi par leurs mœurs, car ils se tiennentau bord des rivières ou de la mer, et se nourrissent principalement de pois- sons. L’un de ces oiseaux connu sous lesnoms de pygargue et d’or- fraie, suivant qu’il a la livrée du jeune âge ou celle de l'adulte, se trouve dans tout le nord du globe, et habite de préférence les forêts qui avoisinent la mer ou les grands lacs ; pendant l’hiver il est très commun sur les côtes de l’Angleterre et de la France. Son vol est moins élevé et moins rapide que celui des aigles proprement dits, et il chasse de nuit aussi bien que de jour; il saisit les poissons en fondant dessus, lorsqu'ils sont à fleur d’eau ou même en plongeant, et se nourrit aussi de jeunes pho- ques , d'oiseaux de mer et de mammifères terrestres ou même de cadavres. On donne le nom de BALBUSARDS (pandion) à des aigles qui se distinguent des précédens par leurs ongles ronds en dessous, tandis que chez les autres oiseaux de proie ils sont creusés en gouttière, par leurs tarses réticulés et par leurs aïles plus longues que la queue et dont la seconde penne est la plus longue. On n’en connaît qu’une espèce, le balhusard appelé vulgairement dans quelques parties de la France l'aigle nonette ou le craupé- cherot; elle est répandue dans presque toutes les parties du globe et habite le bord des eaux douces ; elle est assez commune en Bourgogne , dans les Vosges, la Suisse, etc., et émigre pen- dant l'hiver. Sa longueur est d’environ deux pieds, et son plu- mage est blanc avec un manteau brun et quelques taches de même couleur sur la tête et la poitrine. C’est un oiseau essen- tiellement pêcheur , et lorsqu'il se trouve dans les mêmes loca- lités que le pygargue , celui-ci le poursuit et le force à lui aban- donner le poisson dont il s’était emparé. Les CIRCAËTES (circaetus) ont les tarses réticulés comme les balbusards , et les ailes comme les aigles proprement dits; par leur allure ils ressemblent davantage aux buses. Le jean Le blanc appartient à cette division: c’est un oiseau d'environ deux pieds TRIBU DES FAUCONS. 525 de long , qui habite les grandes forèts de sapins des parties orientales du nord de l'Europe, mais qui se montre aussi en France. Il se nourrit principalement de lézards et de serpens: Les HARPIES (Æarpyia) sont des aigles pêcheurs dont les ailes sont plus courtes que la queue; ils habitent l'Amérique ; la grande espèce dépasse l'aigle commun par sa taille et se fait re- marquer par la puissance de son bec et de ses serres: on le dit si fort que d’un coup de bec il peut fendre le crâne d’un homme. On donne le nom d’AIGLES-AUTOURS (morphnus) à des aigles qui ont les ailes courtes comme les harpies, mais qui diffèrent de tous les précédens par leurs doigts faibles et par leurs tarses élevés et grèles ; ils établissent en quelque sorte le passage entre cette grande division et la suivante. On les trouve en Amérique. Le genre des AUTOURS (astur) se compose des oiseaux de proie ignobles , dont le bec se courbe dès sa base, dont les ailes sont plus courtes que la queue, dont les tarses sont longs et les ongles très courbés et très acérés (v0y. fig. 177, pag. 517). Leur vol est rapide, mais peu élevé, ils fondent obliquement sur leur proie, el quelquefois la poursuivent à tire-d’aile ; mais en général ils la guettent perchés sur un arbre,et lorsqu'elle est à portée, s’élan- cent sur elle avec une vitesse extrême en combinant les mouve- inens du saut et du vol. Dans le temps des amours ils dessinent des cercles en volant. Ils sont rusés et assez dociles pour être employés en fauconnerie. On range dans ce genre les autours proprement dits et les eperviers qui différent principalement des premiers par des tarses plus allongés. L’autour ordinaire esi commun France et se trouve jusqu’en Sibérie et en Afrique. La femelle a environ deux pieds de long, le mâle un tiers de moins. Le plumage de cet oiseau est brun en dessus, blanc en dessous avec des raies brunes transversales chez l'adulte et des mouchetures longitudinales dansle premier àge.Il fréquente les montagnes basses et boisées , et niche sur les ar- bres les plus élevés. Le nombre de ses œufs s'élève à quatre ou cinq. La proie ordinaire de l’autour est les jeunes pigeons, les petits oiseaux , les écureuils, les levrauts et les souris. Jadis on dressait cet oiseau à chasser le canard, le lapin etles perdrix; il se laisse apprivoiser avec plus de facilité qu'aucun autre oiseau de proie. Les autres espèces d’autours sont exotiques. Les ÉPERVIERS ne diffèrent que très peu des autours propre- ment dits. L’épervier commun a les mêmes couleurs que Pautour ordinaire , mais est beaucoup plus petit; il se nourrit de souris, de petits oiseaux , de lézards et même de limaçons; il se ren- Harpies. Aigles-au- tours. Autours. Autour or- dinaire. Eperviers, 5206 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. contre dans presque toutes les parties du monde ; beaucoup de ces oiseaux restent constamment en Europe, mais d’autres traversent chaque année les mers pour passer l’hiver dans des pays plus chauds. On s’en servait en fauconnerie pour faire la chasse des grives , des cailles et des perdrix. Milans. Les MILANS (mivis) forment un troisième genre de la division des oiseaux de proie ignobles ; ils se distinguent par leurs ailes excessivement longues, leur queue fourchue, et leur bec bien moins crochu et moins fort que chez tous les autres oiseaux de la même tribu ; enfin leurs tarses sont courts et emplumés un peu au-dessous du genou, et leurs serres faibles proportionnément à leur taille. Fig. 182. MILAN DE LA CAROLINE. Ces oiseaux volent avec une rapidité et une élégance extrêmes en décrivant des cercles , et semblent nager dans Pair; cepen- dant ils ne saisissent pas leur proie à tire-d’aile, mais se ra- battent dessus lorsqu’elle est posée à terre ou sur quelque élé- vation; du reste ils ne chassent que les plus petits mammi- fères , le menu gibier ou même les insectes seulement , et la faiblesse de leurs armes les rend singulièrement lâches. Milan com- Le milan commun , fauve, avec les pennes des ailes noires, œmun. est répandu en Europe et en Asie; c’est de tous nos oiseaux ce- lui qui se soutient en l’air le plus long-temps et le plus tran- quillement. Sa nourriture ordinaire consiste en mulots, taupes, rats, et divers reptiles , ainsi qu’en gros insectes, et à leur défaut il se jette même sur les poissons morts qui flottent sur l'eau ; TRIBU DES FAUCONS. 527 quelquefois il attaque les petits poulets, mais si leur mère l'aper- coit ,ses cris êt sa résistance suffisent pour le mettre en fuite; il se laisse battre et chasser par tous les oiseaux de proie, même par les corbeaux , et sa lächeté est devenue proverbiale. Lorsque la fauconnerie était en vogue, on se plaisait à le faire poursuivre et vaincre par un épervier, et souvent on se servait pour lattirer d’un grand-duc , auquel on attachait une queue de renard; le milan voyant celui-ci voler à fleur de terre s’en approchaïit aussitôt, non pour le combattre , mais pour l’examiner et don- nait ainsi le temps au chasseur de le tirer ou de lâcher à sa pour- suite quelque oiseau de proie. Les BONDRÉES , les buses et les busards ont le bec petit et se courbant subitement dès sa base; les premiers se distinguent du reste de la tribu des faucons par les plumes serrées et cou- pées en écailles, dont est couvert l'intervalle entre l’œil et le bec, espace qui est d'ordinaire nu ou garni seulement de quelques poils. Les bondrées ont aussi les ailes assez longues et la queue égale. Il ne s’en trouve chez nous qu’une seule espèce qui a en- viron deux pieds de long et se nourrit d’insectes, principalement de guëpes et d’abeilles. Les BUSES sont caractérisées par la forme de leur bec, dont il a déjà été question, par leurs ailes de moyenne longueur, par l’espace nu s’étendant de la base du bec à l’œil et par la brièveté de leurs tarses. Elles n’ont pas dans leurs serres cette force dont sont doués les aigles, ni le port fier et élancé de ces oiseaux; leur tête est grosse ; leur corps massif et leur vol lourd. Elles ne poursuivent pas leur proie à tire-d’aile, mais la guettent d'or- dinaire, placées en embuscade sur un arbre. Leur aspect triste et stupide leur ont valu une certaine célébrité. La buse commune est l'oiseau de proie le plus abondant et le plus nuisible de nos contrées; elle demeure toute l’année dans nos forêts, et se nourrit de jeunes lièvres, de lapins, de volailles, de petits quadrupèdes et de reptiles, elle dévaste aussi les nids et détruit beaucoup de gibier. Sa taille est à-peu-près celle de la bondrée; son plumage est brun plus ou moins ondé de blanc en dessous, enfin ses tarses sont nus et écussonnés. Les BusARDS diffèrent des buses par leurs tarses très longs et très minces, leur corps svelte et leur queue longue et arrondie, ils ont aussi, le plus ordinairement, une espèce de collier formé de chaque côté du cou par les bouts des plumes qui couvrent leurs oreilles. Ces oiseaux sont plus agiles et plus rusés que les Fondreées. Buses. Busards. 528 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. buses, mais moins audacieux que les faucons proprement dits, et ils saisissent leur proie à terre.On les rencontreen généraldansles jones et les marais; nous en possédons en France trois espèces que de simples variations de plumage ont fait singulièrement multi- plier par les auteurs. L'une d'elles la sou use se trouve en Afrique et en Amérique, aussi bien qu’en Europe, et se distingue par ses ailes qui aboutissent aux trois quarts de la longueur de la queue et par les raies transversales placées sur la surface interne des ailes et sur les pennes de la queue ; sa couleur générale est brune ou cendrée en dessus, blanche en dessous. Le mâle, dans sa se- conde année, a les pennes des ailes noires, et a été pris pour une espèce distincte qu'on a désignée sous le nom d’oiseau de Saint-Martin. Ce busard niche à terre dans les bois maréca- geux ; il se nourrit principalement de grenouilles , de lézards, de très petits mammifères, de jeunes oiseaux aquatiques, et chasse le soir. Le busard cendre, qui se trouve également dans diverses parties de l’Europe , se reconnait à ses ailes aussi longues que la queue. Enfin la karpaye ou busard de marais , est répandue dans toutes les contrées marécageuses, et diffère de la soubuse par lab- sence des raies transversales sous les aïles et sur la queue. Ces deux espèces ont des mœurs analogues à celles de la précédente. TRIBU DES MESSAGERS. Cetle division de la famille des oiseaux de proie diurnes ne se compose que d’une seule espèce, mais elle diffère tant des pré- cédentes que plusieurs naturalistes l’ont rangée parmi les échas- siers ; ses tarses sont en effet d’une longueur extrême et font paraitre l’oiseau comme s’il était monté sur des échasses ; mais ses jambes entièrement couvertes de plumes ,son bec crochu , et bien fendu , enfin toutes les autres particularités de son organisation le rapprochent des rapaces. Les uns ont appelé cet oiseau secre- taire à cause des longues plumes qu’il porte derrière la tête, d’au- tres lui ont donnéle nom demessager, parce qu’il a l’habitude de marcher à grands pas à la poursuite des reptiles dont il faitsa principale nourriture; ses ongles sont usées par la marcheet ilne s’en sert pas pour saisir sa proie, mais ses ailes sont munies d’un éperon et il paraît que c’est en frappant à coups redoublés avec cet arme qu’il étourdit ses victimes avant que de les déchirer avec son bec; il détruit beaucoup de serpens, même des plus venimeux. On le trouve dans les lieux arides et découverts des environs du cap de Bonne-Espérance, et on a essayé de le naturaliser aux An- FAMILLE DES OISEAUX DE PROIE NOCTURNES. 529 tilles, où il pourrait rendre de grands services en dévorant les vipères qui infestent ces iles. Pris jeune il s’apprivoise facilement. FAMILLE DES OISEAUX DE PROIE NOCTURNES. Ces oiseaux que l’on désigne souvent sous le nom commun de hiboux ou de chouettes (strix) , Se reconnaissent au premier Coup- d'œil à leur grosse tête et à leurs grands yeux dirigés en avant et entourés d’un cercle de plumes effilées, dont les antérieures recouvrent la cire du bec et les postérieures l’ouverture de l'oreille. Ils ont aussi le cou très court, le corps trapu.et les plumes à barbes douces au toucher, veloutés et fine- ment duvetées ; le bec compri- mé et courbé dès sa racine; les pieds amplement couverts de plumes , souvent jusqu'aux ongles, enfin le doigt externe libre et pouvant se diriger en avantaussi bien qu’en arrière. La plupart de ces oiseaux ont la pupille si grande que, pen- Fig. 183. SCOPS VULGAIRE. dant le jour, cette ouverture laisse pénétrer dans leur œil une quantité si considérable de lumière qu’ils en sontéblouis; ils ne peuvent bien voir que pendant le crépuscule ou lorsque la lune répand une faible clarté : aussi pendant le jour se tiennent- ils ordinairement immobiles et se cachent-ils dans quelque ré- duit sombre telle qu’une masure ou le creux d’un vieux arbre, dontils nesortentquele soir. L'appareil du vol n’a pas une grande force ; la fourchette est peu résistante, et les plumes de leurs ailes flexibles , disposition qui diminue la puissance de ces organes, mais qui est cependant utile aux chouettes en leur permettant de voler sans bruit et de s’approcher ainsi de leur proie sans en être entendues. La nourriture de ces oiseaux de nuit consiste princi- palement en souris, en petits oiseaux et en insectes ; ils fondent à limproviste sur ces animaux , les saisissent avec leurs serres et en général les avalent tout entier ; ils ne se repaissentde cadavres qu’à la dernière extrémité, et lorsque leur digestion est achevée ils rejettent , sous la forme de pelottes arrondies, les poils, les plumes et les os qu’ils avaient avalés. Leur jabot est très grand, Caractères. Classifica- tion. Hiboux pro- prement dits. 930 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. leur gésier assez musculeux, et leurs intestins pourvus de cœæcums longs et élargis. Après le coucher du soleil ils sont la terreur des petits oiseaux, qui fuient au bruit de leurs cris; mais pendant le jour ils se laissent en général insulter impuné- ment par ces faibles ennemis , qui ont pour eux une haine in- stinctive ; souvent on voit les pinsons, les mésanges ;les rouge- gorges et d’autres petits oiseaux se réunir en grand nombre autour d’une chouette blotie sur quelque branche, et la har- celer avec acharnement; en général l'oiseau de nuit se borne à prendre alors des postures bizarres et ridicules, quelquefois cependant il s'enfuit. Quelques chouettes, celles dont la tête lisse et la queue courte, arrondie , est dépassée par les ailes, voient au contraire assez bien en plein Jour pour guetter alors leur proie dans l’épaisseur des forêts ou la poursuivre à tire- d’aile. Le cri de tous ces oiseaux est lugubre, et cette circonstance jointe à l’heure où il se fait d'ordinaire entendre y a fait atta- cher par le vulgaire des idées superstitieuses; dans nos cam- pagnes les chouettes sont généralement un sujet d’effroi, et ce- pendant loin d’être nuisibles ils rendent réellement des services à l’agriculture par la destruction qu’elles font des mulots et des souris. C’est probablement la grosseur de leur tête et leur tran- quillité habituelle qui leur a valu la réputation de sagesse dont elles jouissaient chez les anciens. | Tous les oiseaux de proie nocturnes se ressemblent extrè- mement entre eux, et les différences qu’on remarque passent de l’une à l’autre par des nuances intermédiaires si insensibles, qu'il est difficile d'établir dans cette famille, de bonnes divi- sions génériques. Un certain nombre de chouettes ont la tête ornée d’aigrettes ; l'étendue du cercle de plumes quientoure leurs yeux, et la grandeur de leur conque auditive varient aussi , et d’après ces caractères de peu d'importance, M. Cuvier établit parmi ces oiseaux huit sections, auxquelles il donne les noms de hiboux, de chouettes, d’effraies, de chais-huanits, de ducs, de chouettes à aigrettes, de cheveches et scops. Les HIBOUX PROPREMENT DITS (otus) ont le disque de plumes ef- filées qui entoure leurs yeux , bien complet et bordé lui-même d’un cercle de plumes écailleuses, des aigrettes mobiles, la conque auditive très grande et munie en avant d’un opercule membra- neux, enfin les pieds garnis de plumes jusqu'aux ongles. Le hihou commun appelé aussi moyen duc, est assez répandu en France ; sa longueur depuis le sommet de la tête, jusqu’au bout de la queue, est de treize à quatorze pouces et son plumage est jaune avec des taches brunes.Il habite ordinairement les forêts etétablit sa retraite dans les cavernes ou les maisons en ruines , où il fait entendre pendant la nuit, un gémissement plaintif et grave ; FAMILLE DES OISEAUX DE PROIE NOCTURNES. 531 souvent il s'empare des nids abandonnés par les corbeaux , les pies , les canagds , etc. Les CHOUETTES PROPREMENT DITES / #lula) ne diffèrent des précédens , que par l’absence des aigrettes. Les EFFRAIES (strir) ressemblent aux hiboux par la disposition de leurs oreilles, mais se distinguent par leur bec allongé et coudé vers le bout seulement, tandis que dans les autres nocturnes il est arqué dès sa base. Elles n’ont pas d’aigrettes, et n’ont que des poils à leurs doigts. L'espèce commune en France et connue sous le nom d’effraie , est de toutes les choueites , celle que le peuple regarde plus particulièrement comme un oiseau de mau- vais augure; son plumage est jaune nuancé de cendré ou de brunen dessus, et joliment piqueté de points blancs et noirs. Elle niche dans les trous des clochers , etc. On la trouve en Asie eten Amérique aussi bien qu'en Europe. Les CHATS-AUANTS { syrnium) diffèrent des effraies par leur conque auditive réduite à une cavité ovale qui n’occupe pas la moitié de la hauteur du crâne; leurs pieds sont emplumés jusqu'aux ongles. La Aulotte que l’on apelle aussi chat-huant et chouette des bois appartient à cette division : elle est plus grande que le hibou commun , auquel elle ressemble par ses mœurs. Les DUCS (hubo) ont des aigrettes comme les hiboux communs, et la conque auditive petite comme les chats-huants, mais ils ont le disque de plumes qui entoure les yeux moins marqué que les précédens. Le grand-duc a environ deux pieds de long ; c’est le plus grand de tous les nocturnes; ilest assez commun dans les grandes forêts des parties orientales de l'Europe, et se trouve aussi en France. Sa nourriture ordinaire consiste en taupes et en petits mammifères rongeurs, mais on assure qu’il attaque même les jeunes chevreuils , et il lui arrive souvent de se battre avec les buses , et de leur enlever leur proie. Les CHEVECHES (/noctua) et les SCOPs ont l’ouverture de l'oreille plus grande que les oiseaux ordinaires , et le disque de plumes, dont les yeux sont entourés , moins grand et moins complet que tous les précédens. Ces caractères coïncident avec des particularités dans leurs mœurs , qui les rapprochent aussi des oiseaux de proie diurnes. En effet, plusieurs de ces chouettes voient assez bien en plein jour, pour distinguer leur proie et pour se livrer à la chasse. Les scops (fig. 183, page 529) ont la tête garnie d’aigrettes. Il s’en trouve , en France , une espèce de la taille d’un merle, dont le plumage est cendré avec des taches noires. Chouettes Chats huants. Dues. Chevèches et scops. Caractères. Classifica- tion. Cr Co LE] ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. ORDRE DES PASSEREAUX. L'ordre des passereaux se compose d’un très grand nombre d'oiseaux de petite ou de moyenne taille qui diffèrent considéra- blement entre eux par le régime et par la forme de leur bec, mais qui se ressemblent par leur aspect général, par la confor- mation de leurs pattes et par Pabsence des caractères qui distin- guent les rapaces , les palmipèdes , les échassiers, les gallinacées et les grimpeurs. Ils ont beaucoup d’analogie avec ces derniers, dont il ne faudrait peut-être pas les séparer, et ces deux ordres comprennent tous les oiseaux insectivores, omnivores et grani- vores, qui nesont pas comme les gallinacées terrestres, plutôt que voiliers.Ils onten généralles formes élancéesetlégères ; leurs ailes sont le plussouvent demoyenne longueur, mais varient beaucoup, ainsi que la puissance de leur vol. Le sternum des passereaux ne présente d’ordinaire à son bord postérieur qu’une seule échan- crure de chaque côté, mais chez les meilleurs voiliers , les mar- nets, et les colibris, il en manque tout-à-fait et chez d’autres o1- seaux de cet ordre, les martin-pêécheurs, les guépiers, etc.,on en trouve deux. Leurs jambes sont courtes ou de longueur moyenne; leurs doigts sont presque toujours faibles et au nombre de quatre, dont un seul dirigé en arrière et dont les deux extérieurs sont unis à leur base; enfin leurs ongles sont grèles et peu courbés, et ne constituent jamais des griffes puis- santes comme celles des rapaces. Leur bec est en général droit ou simplement arqué; le plus ordinairement la mandibule su- périeure n’est pas recourbée à sa pointe et n’est jamais crochueet acérée comme celle des oiseaux de proie. Ceux chez lesquels le bec est fort et un peu crochu ou dentelé près de la pointe sont sou- vent carnassiers ; ceux qui ont cet organe gros et court sont gra- nivores et ceux chez lesquels il est faible et grèle ou très élargi se nourrissent d'insectes. Leur gésier est musculeux et leur in- testin est en général pourvu de deux cœcums très petits. C’est dans cette classe que se trouvent les oiseaux chanteurs ei la plupart de ceux qui exécutent des voyages périodiques. Il existe des gradations si insensibles dans les différences, du reste légères , offertes par les divers oiseaux de cette classe qu’il est presque impossible d'établir parmi eux des divisions bien tranchées. Les caractères, d’après lesquels on les sépare en tribus , manquent souvent dans des espèces qui d’ailleurs diffè- rent à peine et qui ne peuvent être éloignées d’autres espèces ayant au plus haut degré ces particularités de structure ; enfin " ORDRE DES PASSEREAUX. 533 les types des divers genres que les naturalistes ont cru devoir for- mer dans cette classe sont en général assez distincts entre eux ; mais sont réunis par des nuances intermédiaires si graduelles , que la limite de séparation devient souvent tout-à-fait arbi- traire et les déterminations très difficiles. Une division importante à établir entre les passereaux, esl'celle qui se fonde sur la disposition de leurs deux doigts externes qui tantôt sont inégaux et réunis par une ou deux phalanges seule- ment , tantôt presque de même longueur et réunis jusqu’à la- vant-dernière articulation. Ces derniers , appelés syndactyles , établissent le passage des passereaux ordinaires aux grimpeurs. Le premier de ces groupes se compose de presque tous les passereaux, et a été subdivisé d’après la forme du bec en denti- rostres , conirostres, fissirostres et ténuirostres. La FAMILLE DES DENTIROSTRES comprend les passereaux dont les deux doigts externes ne sont pas unis jusqu’à l’avant- dernière articulation , et dont le bec est plus ou moins échancré de chaque côté près de la pointe. La forme de ce dernier organe varie un peu , et ces différences servent pour la distinction des genres dont les principaux sont les pies-grièches, les merles, les gobe-mouches , les tangaras et les becs-fins. Le genre des PIES-GRIÈCHES (lanius )est caractérisé par un bec conique ou comprimé et plus ou moins crochu au bout ( Voyez fig. 184). Les PIES-GRIÈCHES PROPREMENT DITES, quoique d'assez petite taille, ont le courage et les goûts carnassiers des oi- Fig. 184. seaux de proie les plus sanguinaires; leur nourriture , qu’elles saisissent el emportent avec le bec, consiste ordi- nairement en insectes , mais elles aiment la chair de préférence, et les petits oi- seaux deviennent souvent leurs victimes ; elles savent aussi se défendre contre les pies, les corneilles, les cresserelles et autres oiseaux bien plus gros qu'elles, et lorsque ceux-ci s’approchent de leur nid, elles poussent de grands cris et se jettent sur eux avec tant de force qu'en général elles les mettent en fuite. Ces oiseaux vivent en fa- mille et prennent beaucoup de soin de leurs petits, ils vo- lent d’une manière inégale et précipitée en jetant des cris aigus ; ils ont aussi l'habitude d’imiter sur-le-champ quelques parlies du ramage des oiseaux qui vivent dans leur voisinage ; Pics - grie- ches. Gobe-mou- ches. Tyrans. 234 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. enfin ils demeurent d’ordinaire dans les plaines boisées et nichent dans les arbres ou les buissons. La pie-grièche commune(fig. 184) est de la taille d’une grive, cen- dréeen dessus,blancheen dessous,avec les ailes et la queuenoires; elle habite dans presque toute l'Europe. Nous possédons plu- sieurs autres espèces qui sont plus petites; l’une d’elles a reçue le nom d’ecorcheur à cause de la manière dont elle dépèce sa proie après l’avoir accrochée aux épines des buissons; elle détruitune grande quantité d'insectes, et s’empare aussi de petits oiseaux, de jeunes grenouilles, etc.; cette petite pie-grièche arrive chez nous au printemps et nous quitte en automne. Parmi les espèces étrangères, il en est dont le bec s’affaiblit et se rapetisse telle- ment qu’il est difficile de les distinguer des merles. Les pies-grièches - hirondelles , les cassicans , les vangas et plu- sieures autres genres se groupent autour du précédent et ont des mœurs analogues. Les GOBE-MOUCHES { muscicapa) Ont également le bec plus ou moins crochu à sa pointe et échancré, mais déprimé horizonta- lement et garni de poil à sa base (fig. 185 ); par leurs mœurs ils ressemblent aussi aux pies-grèches, et suivant leur taille vivent Fig. 185. de petits oiseaux ou d’insectes qu’ils attrapent au vol. Ceux qui habitent l'Europe appartien- - nent à la subdivision des GOBE-MOUCHES PRO- À PREMENT DITS;ils nous arrivent assez tard Pre. dans la belle saison, et nous quittent de bonne T7 heure , en automne; ils vivent solitaires dans les forêts , et perchent sur le sommet des ar- bres. Le gobe-mouche à collier, qui est long d’environ cinq pouces, et se montre le plus communément dans les parties centrales de l'Europe, est très remarquable par les changemens de plumage du mâle; celui-ci mue deux fois par an; son plumage d’hiver est gris , avec une bande blanche sur Paile ; il est alors semblable à la femelle; mais en été, il prend une livrée d’un noir intense en dessus , avec le dessous du corps, le front, le collier et une partie des ailes blancs. Le gobe-mouche gris, espèce un peu plus grande que la précédente, se montre aussi en France. On donne le nom de TYRANS ({yrannus) à des gobe-mouches d'Amérique dont le bec est très fort; d’autres oiseaux de cette division ont au contraire le bec si grèle qu'ils se rapprochent, des Figuiers. ORDRE DES PASSEREAUX. 539 Les COTINGAS appartiennent aussi à ce groupe par leur bec déprimé etsarqué; plusieurs de ces oiseaux, propres à l’A- mérique , se font remarquer par l'éclat du pourpre et de l’azur qui orne, dans la saison des amours , le plumage du mâle. Les JASEURS ({ hombycilla), dont une espèce de la taille d’un moineau , arrive quelquefois par troupes dans nos contrées, prennent ‘également place à côté des gobe-mouches. Enfin plusieurs autres genres exotiques ne diffèrent aussi des gobe-mouches que par de très légères différences dans la forme . du bec; tels sont les ÉCHENILLEURS d’Afrique , les DRONGOs des Indes, etc. Le genre des TANGARAS se compose de petits passereaux qui ressemblent à nos moineaux par leurs habitudes, mais qui ont le bec gros, conique et échancré vers le bout, les ailes courtes et le plumage en général remarquable par la vivacité de ses cou- leurs. Ils habitent les parties chaudes de l'Amérique. Les MERLES ({uräus) diffèrent de tous les précédens par leur bec comprimé et arqué, mais sans être crochu et sans être armé de dentelures (fig. 186), aussi fortes , ainsi que par leur régime Fig. 186. qui est plus frugivore; ils mangent des insectes, mais aiment beaucoup les baies. En général, on réserve le nom de merle aux espèces dont les couleurs sont uniformes ou distribuées par grandes masses , et on donne celui de grives aux espèces dont le plumage est grivelé, c’est-à-dire marqué de petites taches noires et brunes. Le merle commun est trop généralement connu parmi nous pour qu’il soit nécessaire d’en décrire le plumage. Il reste dans nos contrées toute l’année et se retire pendant l'hiver dans les forêts d’arbres verts , surtout de genévriers. Vers le commence- ment de mars, ces oiseaux construisent avec de la mousse, de petites racines et de la terre détrempée, leur nid placé au milieu des buissons ou sur un arbre de moyenne hauteur ; le mâle et la femelle y travaillent également avecactivité, mais en général c’est la femelle qui se charge du soin de l’incubation ; elle fait chaque année deux ou trois pontes de quatre à six œufs chacune. Les merles sont défians et passent pour être rusés ; mais ils donnent dans divers pièges et s’apprivoisent facilement; leur chant est un sifflement éclatant qu'ils font entendre principalement le soir et le matin pendant la belle saison. Il est à noter que ces oiseaux , dont le plumage est naturellement si noir, deviennent quelquefois blancs en totalité ou en partie. 39 Cotingas. Jaseurs. Tangaras. Merles, Fourmuliers. Cincles. 530 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. Dans les contrées boisées et montagneuses, telles que la Suède et l’'Ecosse on trouve une autre espèce, le merle à plastion blanc, qui se montre aussi dans les Vosges, mais qui n’est que de passage chez nous. La grève commune est de la grosseur du merle; son plumage est brun sur le dos, tacheté sur la poitrine et jaune sous les ailes. Cet oiseau voyage en grandes troupes; 1l arrive dans nos. climats vers la fin de septembre, el n’y séjourne que peu après les vendanges, mais repasse en avril pour disparaitre presque entièrement en mai; quelques individus restent ce- pendant parmi nous et nichent sur les pommiers ou dans les buissons. Le chant de cette grive est agréable , et elle le répète pendant long-temps perchée au sommet des arbres les plus élevés; on en estime aussi la chair surtout en automne. La drenne est une espèce de grive qui diffère de la précédente par sa taille un peu plus grande et par le dessous de ses ailes blanc. Ces oiseaux , quoique voyageurs , restent en assez grand nombre en France pendant toute l’année. Ils recherchent de préférence les fruits du gui et comme ils en rendent les graines sans altéraration , ils contribuent à semer au loin cette plante parasite. La litourne et le mauvis sont aussi des espèces de grives que nous possédons en France. Les espèces exotiques de ce genre sont très nombreuses ; il en est une qui habite l'Amérique septen- trionale et qui est célèbre par l’étonnante facilité avec laquelle elle imitele chant des autres oiseaux et même toutes les voix qu’elle entend ; ce merleest connu sous le nom de mogueur. Les FOURMILIERS (myothera) diffèrent des merles par leurs longues jambes et leur courte queue ; ils vivent principalement de fourmis ; on en trouve en Amérique , en Afrique et en Asie. On a séparé aussi des merles, à cause d’une légère différence dans la forme du bec , les CINCLES , connus sous le nom vulgaire de merles d’eau. Ces oiseaux fréquentent d'ordinaire le bord des ruisseaux clairs et rapides pour y chercher les insectes aquati- ques dont ils se nourrissent. L’espèce que nous possédons en Eu- rope, le cèncle plongeur, a la singulière habitude de les chercher sur le bord desruisseaux et de continuer à en suivre la pentesans nager, même lorsque la profondeur de l’eau le force à se sub- merger ; il marche ainsi sous le liquide en conservant les mêmes allures que s’il était à l'air et s’y promène librement en tous sens. Les MANIATES , les MARTINS et lies CHOCARDS (pyrrhocorax ) sont aussi les voisins des merles ; un de ces derniers, le ckocard des Alpes niche dans les fentes de rochers sur nos plus hautes mon- ORDRE DES PASSEREAUX. 537 tagnes , dont il descend en grandes troupes rangées par lignes ; il est tout hoir et de la taille de notre petite corneille des clochers. Les LORIOTS (oriolus) différent aussi très peu des merles ; leur bec est seulement un peu plus fort, leurs ailes un peu plus lon- gues , et leurs pieds plus courts. Les femelles etles jeunes ont en général le plumage verdâtre , tandis que chez les mâles la cou- leur dominante est presque toujours le jaune. Ces oiseaux vivent dans les bois par paires , et se réunissent en famille pour leur voyage d’automne. Nous en possédons une espèce dont le mâle est d’un jaune doré avec les ailes et la queue noires ; c’est le Loriot d'Europe appelé vulgairement mere dore. Cet oiseau est timide et ne demeure pas long-temps en France; il se nourrit de cerises , de baies de différentes espèces, d'insectes , etc. , et construit avec beaucoup d’art un nid suspendu à la cime des arbres. Enfin c’est encore à côté des merles qu’il faut ranger un grand oiseau de la Nouvelle-Hollande remarquable par sa ma- gnifique queue en forme de LYRE, instrument dont il porte le nom. Une tribu plus nombreuse que les divisions précédentes est celle des BECS-FINS ({ motacilla) caractérisés par leur bec droit, menu et semblable à un poincon (fig. 187 , 188 et 189); l’'échan- crure de la mandibule supérieure est en général faible et quel- quefois nulle. Ce groupe comprend presque tous les petits oi- seaux chanteurs de nos bois; on y range les traquets, les ru- biettes , les fauvettes, les roitelets, les troglodytes, les hoche- queues , les bergeronnettes et les farlouses ; de légères différences dans la forme du bec servent à les distinguer, mais l’espace nous manque pour faire connaître ces caractères. Les TRAQUETS {saricola) ont le bec légèrement déprimé et un Fig. 187. peu plus large que haut à sa base (fg.187); ils ont le corps ramassé, et sont assez hauts sur jambes. Ces oiseaux vivent dans lan- EE QE a cien continent et fréquentent les lieux dé- \ | couverts et pierreux ; ils sont très vifs , mé- | fians , en général silencieux , et se nourris- \ sent d'insectes qu’ils attrapent en courant. Nous en possédons plusieurs espèces qui, en automne, émigrent vers les pays chauds, pour revenir au printemps. 35. Loriots. Lyre. Becs-fins. Traquets. Fubiettes. 538 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. Le traguet commun est un petit oiseau brun, à poitrine rousse, à gorge noire, avec du blanc sur les côtés du cou, sur l'aile et au croupion; son nom parait lui venir d’un petit cri semblable au tictac d’un moulin; il veltige sans cesse sur jes buissons et les haies; son nid, construit extérieurement avec des herbes sèches, et garni en dedans d’un peu de laine, est soigneusement caché au fond d’un buisson, sous lPavance de quelque racine ou de quelque pierre; la femelle y pond cinq ou six œufs. Dans les premiers jours de l’automne, lorsque les insectes, dont il fait sa principale nourriture, com- mencent à devenir rares, il émigre vers le sud ; il est alors fort gras et sa chair est très estimée. Le furier est une autre espèce de ce genre, un peu plus grande que la précédente, à la- quelle ïl ressemble beaucoup par son plumage et par ses mœurs ; 1l est très commun dans la Lorraine où on le connait sous le nom vulgaire de toc-toc. Une troisième espèce de tra- quet, le notteur ou le cul-blanc , doit le premier de ces noms à l'habitude qu’il a de se poser sur les mottes les plus élevées dans les champs nouvellement labourés; le second, aux plumes blanches qui couvrent le croupion et forment une partie de la queue, tandis que le dessus du corps est cendré ou brun et le dessous blanc roussâtre. Il se plait dans les sillons nouvel- lement tracés où il cherche des vers , et il se fait remarquer par les mouvemens brusques de sa queue. Les RUBIETTES { sylvia) ont le bec seulement un plus étroit à sa base que les précédens; ce sont aussi des oiseaux solitaires qui vivent d'insectes, de vers et de baies, et qui pour la plupart nous quitient en hiver. On en trouve en France quatre espèces: le rouge-gorge, le gorge-bleu, le rossignot de muraille et le rouge-queuc. Le premier, gris-brun en dessus, blanc en dessous avec la gorge et la poitrine rousses , abonde dans presque toutes nos grandes forêts et n’émigre que très tard dans l’année; souvent il reste même dans nos campagnes pendant tout l’hiver et se rappro- che alors des habitations ; c’est un des oiseaux les plus familiers et des plus faciles à apprivoiser. Pendant les grands froids il se réfugie souvent dans les maisons, voltige dans les appartemens sans s’effaroucher et paraît souffrir à peine de la captivité. Il niche dans les bois, près de terre, et pendant iouie la durée de l’incubation, 1e mâle se tient à quelque distance de la femelle, l’égayant de son ramage doux et modulé. Le gorge - bleu a les mœurs semblables, mais il est assez rare en France. Le rossignol de muraille, brun, avec la gorge noire, nous arrive également au printemps, et alors, le mâle, toujours seul, se pose sur les édi- ORDRE DES PASSEREAUX. 89 fices les plus élevés , d’où il fait entendre, dès l'aube du jour un chant douxtet mélodieux; plus tard ces petits oiseaux se reti- vent par paires dans les montagnes pour y établir leur nid. Les FAUVETTES { curruca) ont le bec droit, grèle partout, un peu comprimé en avant et à bord supérieur un peu courbé vers la pointe. Presque tous ces petits oiseaux volent continuelle- ment, et avec légèreté à la poursuite des insectes et font entendre un ramage agréable. Le plus célèbre pour son chant est le ros- signot. Chaque année, vers la fin de mars, il arrive dans nos contrées et au commencement de mai s'enfonce dans les tail- lis les plus épais des bois pour y construire son nid. Pendant tout ce temps, il chante la nuit aussi bien que le jour et les sons de sa voix sont aussi variés que mélodieux ; lorsque la femelle est occupée des soins de lincubation, le rossignol s’anime en- core davantage , mais dès que les petits sont éclos, 1l ne se fait plus entendre, sa voix se perd, et dès les premiers jours de juin, il ne lui reste plus qu’un cri rauque et désagréable. La femelle fait jusqu'à trois pontes par année, et on assure que dans chaque couvée le nombre des mâles est toujours double de celui des fe- melles ; le père et la mère s’occupent également des soins d’éle- ver leurs petits et leur dégorgent la nourriture qu’ils leur ap- portent. Vers la fin de septembre ces oiseaux se dirigent vers le sud ; ils sont un peu plus gros que le rouge-gorge, et leur plu- mage est brun-roussâtre en dessus et gris-blanchäâtre en dessous. Le nombre des fauvettes et très considérable; les unes se plaisent dans les terrains secs, d’autres fréquentent de préfé- rence les lieux humides et se nourrissent principalement d’in- sectes aquatiques. Parmi les premiers on doit ranger la fau- vette proprement dite, qui est à-peu-près de la taille du rossignol et qui arrive aussi dans nos campagnes au printemps, C’est un oiseau timide, mais très gai ; à la vue du moindre danger il se cache en silence dans l’épaisseur du feuillage, mais l'instant d’après il reprend son chant et voltige de nouveau pour aller agacer ses compagnons ou poursuivre quelque insecte. Il niche dans les arbustes ou sur les ramées, dont les cultivateurs se servent pour soutenir les pois; la femelle couve avec constance, mais abandonne ses œufs lorsqu'on les a touchés ; pendant l’in- cubationle mâle pourvoit à la nourriturede la couveuse et chante auprès de son nid ; les jeunes restent avecleurs parens pendant la première année. La nourriture ordinaire de ces oiseaux con- siste en insectes mous et en vermissaux ; mais lorsque , au com- mencement de l'automne , ceux-ci deviennent rares, ils mangent aussi des baies, et c’est alors queles oiseleurs leur font la guerre Faurvettes. Roitelets. Troglody- tes. Hochequeues. 240 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE, la plus active , car, dans cette saison, ils deviennent très gras et leur chair est très délicate. En automne la fauvette nous quitte ; il en est de mème pour Fig. 188. toutes les autres espèces de ce genre à l’ex- ception de la fauvette d'hiver Où traîne- buisson qui, dans le mois de novembre , ar- ll / | rive en France par petites bandes, et au f / printemps retourne dans le nord. La rous- serolle Ou rossignol de riviere qui niche parmi les jones, et se rapproche du merle par sa taille et par la forme de son bec (/g. 188) , appartient aussi à ce genre. Les ROITELETS OU FIGUIERS (regulus) diffèrent des fauvetties par leur bec très aigu et parfaitement conique (fig. 189). Le roitelet commun est le plus petit des oiseaux d'Europe; il n’a que trois pouces et demi de la pointe du bec à l'extrémité de la queue; Fi son plumage est olivâtre en dessus, blanc- ig. 189. PA jaunâtre en dessous; le mâle porte sur le RE sommet de la tête une huppe jaune, bor- dée de noir. Il est très abondant dans les bois de sapins qui avoisinent les Vosges; on le voit voltiger en troupes nombreuses et avec une agilité extrême au milieu de ces arbres et s’y suspendre en tous sens pour y chercher les insectes dont il se nourrit. Son nid , formé de mousse et de toiles d’arai- gnées , est construit avec un art admirable, et a la forme d’une boule avec l’ouverture sur le côté; la femelle y pond six ou sept œufs de la grosseur d’un pois. Ces petits oiseaux sont très fami - liers , et pendant l’hiver ils se rapprochent de nos habitations. On donne le nom de pouillot à une espèce de roitelet un peu plus grande que la précédente, mais sans huppe, qui a des mœurs analogues, si ce n’est qu’elle nous quitte en hiver. Dans quelques cantons ou donne à tort le nom deroitelet à un autre oiseau qui chante agréablement jusque dans le plus fort de l’hiver , qui a le bec plus grèle et légèrement aigu , et la queue courte; c’est le {roglodyte d'Europe, la seule espèce que nous ayons du genre TROGLODYTE. Les HOCHEQUEUES (motacilla), ainsi nommés à cause de la ma- nière dontils élèvent et abaissent sans cesse leur longue queue, sont aussi très voisins des fauvettes, mais ont le bec encore plus grèle. Les uns appelés par les naturalistes HOCHEQUEUES PROPRE- MENT DITS OU LAVANDIÈRES Ont l’ongle du pouce courbé comme ORDRE DES PASSEREAUX. o41 les précédens , et vivent au bord des eaux; celui de notre pays a des formes élégantes et des mouvemens légers et gracieux ; C’est un des premiers oiseaux voyageurs qui nous arrivent au prin- temps ; il construit, près des eaux et dans quelque trou, son nid composé d'herbes sèches et de mousse, et le mâle, aussi bien que la femelle, montrent pour leurs jeunes la plus tendre af- fection. Les BERGERONNETTES (hadytes) ne diffèrent des lavandières que par l’ongle du pouce qui est allongé et un peu arqué {/ig.190,. Ce sont des oiseaux extrémement familiers, quise tiennent dans les pâturages et poursuivent les Fig. 190. insectes au milieu des trou- peaux. La plus commune a été / nommée bergeronnelie du prin- { temps, parce qu’elle est la pre- PES mière de son genre qui repa- "NX raisse dans nos campagnes à la fin de l'hiver. Enfin, les FARLOUSES ({anthus) prennent aussi place dans la tribu des becs-fins à cause de leur bec grèle et échancré; mais l’ongle de leur pouce est si long qu'on les a long-temps réunis aux alouettes. Celles dont l’ongle est encore assez arqué se per- chent volontiers : le pipi par exemple ; mais celles qui ont cet ongle droit se tiennent le plus souvent à terre; la /arlouse pro- prement dite ou alouette de pre est du nombre de ces derniers. Cet oiseau se trouve dans les bruyères humides et les lieux ma- récageux, et paraît émigrer en Afrique pendant lhiver ; il se nourrit ordinairement de petits insectes, mais en automne il mange beaucoup de raisin et devient ainsi extrêémementgras ; on le recherche alors pour la table, et, dans plusieurs de nos pro- vinces, on le désigne sous le nom de vinette ou de bec-figue. (1) Pour terminer ce que nous avions à dire de la familie des dentirostres , il ne nous reste plus qu'à mentionner quelques oiseaux étrangers qui se distinguent de tous les précédens, el se rapprochent des syndactyles par leurs deux doigts externes réunis dans près du tiers de leur longueur.Les COQS-DE-ROCHE, qui habitent le Pérou et qui sont remarquables par la beauté de leur plumage , présentent ce caracière. (x) Le nom de bec-figue est employé aussi dans le midi et en Italie, pour désigner plusieurs espèces de fauvettes, dont la chair est également estimée ; certaius gobe-mouches portent également ce nom, ct l'oiseau appelé ainsi par Buffon est une espèce imaginaire furméc en réuu:ssant les attributs de ces divers animaux, PBergeron- uet!es. cl Far louses. Coqs-de-re- 16. 42 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. Famille des La seconde famille de l’ordre des passereaux, celle des FISSI- fissirostres. ROSTRES est peu nombreuse et se distingue facilement de toutes les autres par la conformation du bec ; cet organe est court, large, aplati horizontalement sans échancrure, légèrement Fig. 191. (1) crochu et fendu très profondément ; de facon à donner à l’ouverture de la bou- che beaucoup de largeur, disposition qui permet à ces oiseaux d’engloutir facilement les insectes qu’ils poursui- vent au vol. Ainsi que nous l'avons déjà dit , les fissirostres ont beaucoup d’ana- logie avec les gobe-mouches. De même que tous les autres oiseaux essentiellement insectivores, ceux- ci voyagent et nous quittent en hiver. On les divise en deux tri- bus : les diurnes et les nocturnes. _Fissirostres Les FISSIROSTRES DIURNES se reconnaissent à leur plumageserré EE et sont remarquables par la longueur extrême de leurs ailes et la Fig. 192. rapidité de leur vol. On les désigne quelque- fois sous le nom commun d’HIRONDELLES ; mais on les distingue en hirondelles propre- ment dites et en martinets; ces derniers ontun caractère remarquable dans la conformation de leurs pattes (fig. 192) : le pouceest dirigéen avant presque comme les autres doigts qui sont tous séparés et n’ont chacun que trois phalanges ; tandis que chez les hirondelles proprement dites le pouce s’insère en arrière du tarse et conserve lamème direction que chez les autres passereaux (fig. 193) ; le Fig. 193. doigt externe est uni au doigt médian jusqu’à la première articulation et lenombre des pha- langes n'offre rien d’anormal. Les HIRONDELLES PROPREMENT DITES lhirun- do) ont le bec triangulaire , déprimé et large à sa base, un peu recourbé à sa pointe, les nari- nes oblongues , les pattes courtes, les ailes très longues et la queue ordinairement fourchue. Nous en avons quatre espèces qui se trou- vent également dans tout le sud-ouest de l'Europe ; ce sont: l’Airondelle de fenétre, dont les pieds sont revêtus de plumes jus- L qu'aux ongles et le plumage noir en dessus, blanc en FAT etau croupion ; l’Airondelle de cheminee, dont fe Hirondelles, (r) Tète d’engoulevent. ORDRE DES PASSEREAUX. 543 doigts sont nus, la queue à fourche très longue, et le plumage noir en dessus, roux au front et à la gorge, blanc à la poitrine et au ventre ; l’Airondelle de rivage qui est plus petite que les autres et qui se distingue de la précédente par sa couleur brune en dessus et à la poitrine , tandis que sa gorge et le dessous de son corps sont blancs ; enfin, l’Aërondelle des montagnes qui diffère de lhirondelle de cheminée par sa queue un peu fourchue etpar son plumage brun clair en dessus. C’est vers l’époque de léquinoxe du printemps que ces oiseaux commencent à se montrer dans nos contrées ; dans la Grèce et les autres pays plus chauds que le nôtre on les voit plus tôt, dans les derniers jours de février ou au commencement de mars; en général leur retour coïncide avec celui des beaux jours et semble les annoncer ; mais les va- riations météorologiques n’influent réellement que peu sur ce phénomène; car si l'hiver se prolonge plus que de coutume les hi- rondelles n’en arrivent pas moins à-peu-près à l’époqueordinaire; quelquefois on en voit voler à travers les flocons d’une neige épaisse, et d’un autre côté lorsque, dès le mois de février, la tem- pérature s'élève assez pour faire fleurir nos arbres , ces oiseaux manquent à ce printemps prématuré, etn’arrivent comme de coutume que vers le commencement d'avril. L’hirondelle de cheminée esi celle que nous voyons la première; l’hirondelle de fenétre et l’hirondelle de rivage n’apparaissent guère chez nous que huit ou dix jours plus tard , c’est-à-dire vers le 15 avril. Chacun connait le vol léger, élégant et soutenu de ces oiseaux, et a pu remarquer combien ils aiment à planer au-dessus de l’eau et à sillonner lair dans toutes les directions en y poursuivant les insectes dont ils se nourrissentet dont ils détruisent un nombre immense. Les hirondelles nous délivrent , en effet, de nuées de cousins , de charançons et d’autres insectes destructeurs ou in- commodes et les services qu’elles nous rendent ainsi devraient leur assurer notre reconnaissanceet notre protection. Elles nous arrivent d’abord par bandes peu nombreuses, mais bientôt les masses, dont celles-ci étaient les devancières, se répandent dans les villes et dans les campagnes; l’hirondelle de cheminée et celle de fenêtre se rapprochent de nos habitations ; lhirondelle de rivage ne hante que les bords des rivières où le voisinage de l’homme ne la trouble pas. Presque-aussitôt après leur arrivée on les voit s’occuper activement de la construction d’un nid ou de la réparation de l’un de ceux abandonnés l’année précédente. Ce nid estune véritable bâtisse, artistement façonnée ; 1l est con- struit avec des débris de matières végétales ou animales et une espèce d’un ciment formée de terre gàchée que l'oiseau étend . avecson bec comme avec une truelle ; à l'intérieur il est garni de duvet, et louverture servant d'entrée est pratiquée à sa partie su- 544 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. périeure. L'endroit où ces oiseaux le placent varie suivant les espèces, mais est toujours choisi de manière à les mettre autant que possible à l’abri des aitaques de leurs ennemis. L’hirondelle de cheminée établit en général son domicile dans la partie la plus élevée des tuyaux de cheminée, et doit à cette particularité le nom qui la distingue; l’hirondelle de fenêtre attache son nid sous les encoignures des fenêtres ou aux poutres des granges et des écuries ; enfin l’hirondelle de rivage niche dans des trous qu’elle creuse avec son bec dans la berge des rivières ou s’établit dans les fentes des rochers. La ponte consiste en quatre ou six œufs, et lincubation dure quatorze jours ; pendant ce temps la femelle ne quitte pas son nid; le mâle voltige sans cesse autour et ap- porte à la couveuse la plus grande partie de sa chasse; la nuit il se tapit en sentinelle sur l’ouverture du nid , et en rend la sur- prise impossible. Lorsque les jeunes sont nés , leurs parens leur prodiguent encore les soins les plus constans et semblent se plaire à leur donner une espèce d'éducation; on les voit exci- tant leurs petits à faire usage de leurs ailes en leur présentant d’un peu loin la nourriture qu’ils aiment et en s’écartant à me- sure que ceux-ci les suivent; pendant quelques jours encore ils les guident dans leurs excursions ; mais aussitôt que les jeunes peuvent se passer de leur secours , ils s'occupent d’une nou- velle couvée , et la ponte se répète jusqu’à trois fois dans la sai- son. Toute la jeune génération abandonnée à elle-même vit alors en troupes nombreuses , dans lesquelles l’hirondelle de che- minée estmême confondue avec l’hirondelle de fenêtre. Les mœurs de ces oiseaux sont douces; et ils donnent même des signes remarquables de sociabilité ; lorsque leurs petits sont menacés par l'approche de quelque ennemi le père et la mère poussent des cris de désespérés , et on voit alors toutes les hirondelles du voisinage venir à leur secours et harceler de concert l’animal dont ils redoutent l'attaque; 1l parait qu’ils se prêtent aussi des secours mutuels pour la construction de leur nid, et on assure que si un moineau s'empare de la de- meure de l’un d’entre eux, comme cela arrive souvent, toutes les autres hirondelles se rassemblent autour pour chercher à l’en expulser ou pour Fy renfermer en bouchant avec de la terre le trou qui y sert de sortie. Vers l’équinoxe d'automne les hirondelles se rassemblent en troupes nombreuses et ne tardent pas à disparaître. Quelques naturalistes ont pensé qu’elles se retiraient alors dans des ca- vernes ou se cachaient au milieu des roseaux pour y rester dans un état d’engourdissement léthargique jusqu’au retour du prin- lemps ; on a été même jusqu’à admettre qu’elles demeuraient pendant tout ce temps submergées dans les marais; des hommes, dat : ORDRE DES PASSEREAUX. 245 dont la véracité ne peut être mise en question, assurent effective- ment en avoîr retiré de l’eau dans un état de mort apparente à uneépoque où toute la race avait disparu du pays, et les avoir rap- pelées à la vie en les réchauffant lentement. Dans la vue d’éclair- cir ce point intéressant , un physiologiste habile, Spallanzani, a fait diverses expériences et a constaté que lefroid peut tuer,mais n’engourdit pas de la sorte Fhirondelle de cheminée ni lhi- rondelle de fenêtre; ce ne pourrait donc être que l’hirondelle de rivière qui serait susceptible de tomber dans un sommeil lé- thargique, et on ne peut guère se refuser à admettre que quelque- fois ces oiseaux passent ainsi une partie de l’hiver ; mais il est bien difficile de croire qu'ils restent alors sous l’eau , car même les animaux hybernans, dont le sommeil est le plus profond, ont besoin d’une certaine quantité d’air pour entretenir leur vie affaiblie. Quoi qu’il en soit, il est aujourd’hui bien certain que la plupart des hirondelles , sinon toutes, ne présentent rien de semblable , mais émigrent en automne vers les pays chauds. On les voit alors se rendre par bandes nombreuses sur les bords de la Méditerranée , et s’y rassembler, sur quelque point élevé, en légions innombrables qui, après avoir attendu quelques jours un moment favorable, partent de concert et traversent la mer; on les y rencontre quelquefois et on les voit s’abattre sur les cordages des navires lorsque les vents contraires s'opposent à leur voyage; enfin on assure que dans le mois d'octobre nos hirondelles commencent à se montrer au Sénégal, où elles pas- sent l'hiver et changent de plumes. Ces petits oiseaux font, comme on le voit, de bien longs voyages , et cependant, par un instinct que nous ne pouvons comprendre, ils savent au printemps suivant retrouver les lieux où ils ont déjà niché et y reviennent toujours. On s’est assuré de ce fait curieux en attachant à la patte de plusieurs hirondelles de petits cordons de soie pour constater leur iden- üté.Elles construisent leur premier nid dans le voisinage de celui où elles sont nés ; l’hirondelle de cheminée bâtit chaque année le sien au-dessus de celui de l’année précédente, et l’hirondelle de fenêtre s'établit dans celui qu’elle avait quitté à l'automne ; Spallanzani a vu, pendant dix-huit années consécutives, les mêmes couples revenir à leurs anciens nids sans presque s’oc- cuper de les réparer. Les hirondelles montrent aussi dans d’au- tres occasions la singulière faculté de se diriger vers un lieu déterminé, âont elles sont éloignées d’une distance considérable; si On transporte au loin une couveuse renfermée dans une cage et qu'on lui donne sa liberté, elle s’élève d’abord très haut comme pour examiner le pays, puis se dirige en ligne droite vers l’endroit où elle a laissé sa couvée. Spallanzani a répété Alartinets. Fissirostres nocturnes. 546 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. % avec succès cette expérience à diverses reprises et a vu un couple d’hirondelles de rivière qu'il avait transporté à Milan se rendre en treize minutes auprès de ses petits laissés à Pavie. On connaît un grand nombre d’hirondelles étrangères ; Fune d'elles , la salangane, qui habite l’Archipel indien, est célèbre par ses nids de substance gélatineuse que les Chinois estiment beaucoup comme aliment; on les trouve principalement parmi: les rochers, sur les côtes de Java, et on en fait un commerce considérable. Les MARTINETS (cypselus) ont les ailes encore plus longues etles pattes plus courtes que les hirondelies, dont ils se distinguent également par la disposition des doigts et par le nombre de pennes de la queue qui est de dix seulement. Lorsqu'ils sont à terre ces oiseaux ont la plus grande peine à prendre leur élan, aussi ne s’y posent-ils jamais, et quant on les voit perchés, ce qui est rare, c’est toujours sur quelque point élevé; mais ils volent sans efforts et passent, pour ainsi dire, leur vie dans Pair; réunis en troupes nombreuses , ils y poursuivent à grands cris les insectes. On n’en trouve en Europe que deux espèces : le martinet commun, qui est noir, à gorge blanche, et qui niche dans les vieux murs et dans les rochers; et le grand martinet Ou martinet à ventre blanc qui fréquente les Alpes, et niche dans les fentes des ro- chers. Ces oiseaux nous arrivent en même temps que les hiron- delles et nous quittent aussi en automne. . Les FISSIROSTRES NOCTURNES ressemblent aux chouettes par leur plumage léger, mou et nuancé de gris et de brun. Ces oi- seaux vivent solitaires et ne voleni que pendant le crépuscule ou les belles nuits d'été , à la poursuite des phalènes et autres insectes nocturnes, qu'ils engloutissent facilement dans leur bec encore plus fendu que celui des hirondelles et garni de fortes moustaches ; ils le tiennent grandement ouvert , et l'air qui s’y engouffre y produit un bourdonnement particulier: de là le nom d’ENGOULEVENS par lequel on les désigne. Leurs ailes sont très longues , et leur vol silencieux. La disposition de leurs doigts se rapproche de celle des martinets , si ce n’est qu'une courte membrane les réunit en général à leur base; leurs yeux sont grands et la lumière du jour les éblouit. On a prétendu que les engoulevens avaient l’habitude de téter les chèvres, et on leur a même donné en conséquence le nom vulgaire tete-chèvre (caprimulqus), mais cette opinion n’est pas fondée et vient pro- bablement de ce que ces oiseaux se mêlent souvent aux trou- ORDRE DES PASSEREAUX. 247 peaux pour y chercher les insectes que ceux-ci attirent en grand nombre. Quelquefois on les appelle aussi crapauds-volans , probablement à cause de Faplatissement de leur tête et de leur laideur. Pendant la belle saison on en voit une espèce dans les parties tempérées de l’Europe ; elle est un peu plus grosse que le merle commun et se tient de préférence dans les forêts. On donne le nom générique de podagres à des engoulevens étrangers qui ont le bec plus fort et les doigts libres. La troisième grande division de l’ordre des passereaux est celle des CONIROSTRES , ainsi nommés à cause de leur bec plus ou Fig. 194. (1) moins conique etsans échancrure(/g.194); ces oiseaux sont bien plus essentiellement granivores que tous les précédens et ont la plus grande analogie avec les dentiros- tres. On range dans cette famille les alouettes, les mésanges, les bruans, la tribu des moineaux, les corbeaux, les oiseaux de paradis, etc. Les ALOUETTES (a /auda)se rapprochent des bergeronnettes par l’onglede leur pouce qui est droit, fort et bien plus long que ce- lui des autres doigts ; mais leur bec ordinairement droit, et en forme de cône allongé, n’est pas échancré; leur tête esi petite, ar- rondie, et garnie en dessus de plumes plus ou moins érectiles ; leur queue est de longueur moyenne et presque toujours four- chue. La conformation de leurs ongles ne permet pas à la plu- part de ces oiseaux de percher sur les arbres , mais elle leur est utile lorsqu'ils courent sur la terre nouvellement retournée ; ils vivent, en général, dans les champs et se nourrissent de grai- nes , d'herbes tendres, d'insectes et de larves. L’alouette com- mune, dont chacun connait la forme et la couleur, est répan- due dans une grande partie de l’ancien continent. Pendant l'été, ces oiseaux fréquentent de préférence les terres élevées et sèches , et se plaisent à s’élever perpendiculairement dans Pair à de grandes hauteurs en chantant d’une voix forte et mélo- dieuse. En hiver, ils se réunissent en grandes troupes dans les plaines basses, et restent presque toujours à terre cherchant leur nourriture; quand le froid est intense , ils se réfugient sous des rochers et le long des fontaines qui ne gèlent pas, et lors- qu'ils sont poussés par la disette, on les voit s'approcher ide nos habitations. Dans nos climats ces alouettes font en général deux pontes par an, en mai et en juillet; en automne elles sont (r) Tête de gros bec. Conirostres. Alouettes, Mésanges. 548 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. très grasses et leur chair est très estimée; on en prend un nombre immense pour Pusage de la table, et sur nos marchés on les désigne communément sous le nom de mauviettes. Le coche- vis est une espèce d’alouette qui ressemble beaucoup à la pré- cédente » Mais qui a la tête ornée d’une huppe éreciile bien dis- uncte; son chant est plus doux que celui de l’alouette com- mune , et on la trouve aussi, quoique moins abondamment, dans la plupart des contrées de l’Europe ; on la voit souvent sur le bord des chemins cherchant dans le crotin de cheval des graines non digérées. Une troisième espèce, l’alouette Lulu, dont la tète estégalement ornée d’une huppe, mais qui est de moindre taille , fréquente les bruyères dans l’intérieur des bois. Notre plus grande espèce est la calandre, dont le bec est presque aussi gros que celui d’un moineau ; elle fréquente le midi de la France. Les MÉSANGES (parus), reconnaissables à leur bec petit , conique et garni de poils à sa base (Ag. 195), à leurs narines cachées sous les plumes et à leurs ailes, dont la quatrième et cinquième pennes sont les plus longues, ont les ongles effilés et propres à secram- Fig. 195. pounner aux arbres; cesont de petits oiseaux me actifs, pétulans et courageux, qui voltigent EE et grimpent sans cesse sur les branches ou A TIENIOE TH TT ZX sur les jones, s’y suspendent dans tous les sens, déchirant les graines dont ils font leur principale nourriture, mangeant À aussi beaucoup d’insectes et n’épargnant | pas même les petits oiseaux quand ils les trouvent malades , et peuvent les achever ; ils leur percent alors le crâne à coups de bec pour se repaitre de leur cervelle; au printemps ils causent souvent des dégâts con- sidérables dans les jardins et détruisent beaucoup d’abeilles. Les uns vivent dans les bois ou dans les buissons et nichent dans les trous des arbres: de ce nombre est la charbonntere, lune des espèces les plus communes dans nos campagnes ; elle est oli- vâtre en dessus et jaune en dessous, avec la tête noire et une bande longitudinale de même couleur sur la poitrine. Elle reste en France toute l’année, mais celles du nord se retirent vers le midi en automne ; en été elle fréquente de préférence les mon- tagnes boisées; en hiver les plaines; sa ponte se renouvelle deux ou trois fois par an et se compose chaque fois de huit à vingt œufs. La petite charbonniere, dont le plumage est cendré en dessus, blanc en dessous, a des mœurs analogues. Il en est de même de la nonnette qui diffère de la précédente par sa calotte noire ef de la mesange à téte bleue, joli petit oiseau assez com-— ORDRE DES PASSEREAUX. 549 mun dans nos laillis. La mesange huppee, caractérisée par une petite huppe mêlée de noir et de blanc, se plait dans les lieux solitaires et fuit la compagnie des autres oiseaux; on la voit dans le nord de la France. Enfin on trouve aussi dans nos bois la mesange à Longue queue qui n’est guère plus grande que le roitelet, et qui en hiver se montre par pelites troupes dans les jar- dins et les vergers. D’autres mésanges vivent au bord des eaux dans les roseaux et les joncs, où elles pratiquent des nids artistement construits ; nous n’en avons en Europe qu’une espèce, la moustache, qui est fauve , à tête cendrée , et qui diffère des mésanges ordinaires par la forme de sa mandibule supérieure, dont le bout se re- courbe un peu sur l’inférieure. Enfin nous avons aussi, dans le midi de la France, une espèce de mésange dont le bec est plus droit et plus pointu que chez toutes les précédentes, et dont quelques naturalistes forment un genre distinct; c’est la remiz , OU mesange du Languedoc, petit oiseau remarquable par son Joli nid en forme de bourse, artistement tissu de duvet de saule ou de peuplier, garni intérieurement de plumes et sus- pendu aux rameaux flexibles des plantes aquatiques. Les BRUANS(emberiza) sont caractérisés par leur bec conique , court, un peu comprimé et par le tubercule saillant et dur dont leur palais est garni (fg. 196).Ils sont de petite taille et se nourris- sent principalement de graines ; ceux dont l’ongle postérieur est Fig. 196. court et courbé vivent dans les bois et les jardins , et nichent dans les broussailles ; —. ceux qui au contraire ont cet ongle longet 4 TL 2 faiblement arqué et qui se rapprochent ; de davantage des alouettes vivent toujours à 4 terre dans les lieux découverts. Ce sont des oiseaux de peu de prévoyance qui donnent dans tous les pièges qu’on leur tend et qui sont recher- chés comme petit gibier. Le bruant commun , fauve , tacheté de noir en dessus , jaune en dessous , est répandu dans toute l'Eu- rope, et se tient pendant la belle saison le long des haies et sur la lisière des bois ; mais en hiver lorsque la neige couvre la terre il se rapproche , en troupes innombrables avec les pincons et les moineaux, des habitations où il trouve plus facilement à se nour- rir.Le bruant fou, qui se trouve dans les contrées montagneuses, a le dessus du corps gris-roussâtre ; le sruant des haies se dis- tingue par sa gorge noire. On donne le nom de bruant de roseaux à Une troisième espèce, à calotte noire, qui niche le long des eaux. Le proyer, qui nous arrive au printemps , qui niche Pruants. Moineaux. Tisserins. Moineaux yroprement dits. 590 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. dans le blé, et qui est gris-brun , tacheté partout de brun foncé, appartient aussi à ce genre. Il en estencore de même de Portolan , célèbre pour la délicatesse de sa chair; ce petit oiseau, dont le dos est brun-olivâtre, et la gorge jaune , est répandu dans presque toute l’Europe , mais n’est commun que dans le midi. Vers le mois de mai, les ortolans arrivent dans les parties centrales de l’Europe, et en septembre ils retournent dans les contrées méri- dionales ; ils sont alors chargés de graisse et fort recherchés, tan- dis qu’au printemps ils sont maigres et insipides. Ils ne nichent guère que dans la Lorraine , la Bourgogne et l’Allemagne et dans les pays vignobles ; c’est ordinairement sur les ceps de vignes qu’ils placent ieur nid. Le hruant de neige diffère de tous les pré- cédens par son ongle pointu, long et presque droit; il habite les régions arctiques , et en hiver se montre dans le nord de la France. Les mMorxEAUx forment une tribu très nombreuse qui se dis- tingue des autres conirosires par un bec conique plus ou moins gros à sa base, mais point angu- leux à sa commissure. Ce sont pour la plupart de petits oiseaux voraces et nuisibles qui vivent principalement de grains. On les divise en tisserins, moi- neaux proprement dits, pinçons, linot- tes, chardonnerets, gros-becs, bou- vreils, etc. Les TISSERINS ({ploceus) doivent leur nom à la manière habile dontils construisent leur nid, en entrelaçant des brins d'herbes ; quelques-uns les rapprochent en grand nombre de manière à en former une seule masse à plusieurs compartimens : tels sont le républicain qui se trouve au cap de Bonne -Espérance, et le mangeur de riz qui dévasie en troupes innombrables les champs de plusieurs des parties chaudes de l'Amérique, et qui a été dé- signé tour-à-tour sous les noms de petit choucos de Surinam , de cassique noir, de loriot noir, etc. Les MOINEAUX PROPREMENT DITS ({pyrgita) ont le bec moins grand que les tisserins , conique et un peu bombé vers la pointe. Le type de ce genre est notre soineau domestique, ainsi nommé à cause de sa résidence habituelle dans le voisinage de nos habitations; il est remarquable par son audace et par sa vora- cité. Ces petits oiseaux consomment une quantité considérable de ORDRE DES PASSEREAUX. 551 blé, détruisent beaucoup de jeunes fruits et occasionnent ainsi des dommagesttrès grands. Ils sont répandus dans tout notrecon- tinent , mais ils abondent surtout dans les contrées où l’on cul- tive des céréales. On connaît sous le nom de friquet une autre es- pèce de moineau un peu moins grande que la précédente et qui se trouve également dans toutes les parties de l'Europe, mais qui ne se rapproche pas des endroits habités. Les PINCONS (/ringilla) ont le bec un peu moins arqué que les moineaux. Le pincon ordinaire est un des oiseaux les plus com- muns de nos campagnes ; ses mœurs sont à-peu-près les mêmes que celles du moineau commun, mais il est plus vif, plus gai et chante d’une manière plus variée. A l’âge adulte ces oiseaux ne s’accoutument que très difficilement à la captivité, mais quand on les prend jeunes ils s’apprivoisent fort bien ; on a remarqué qu’ils ne chantaient jamais mieux que lorsqu'ils avaient perdu la vue ,et c’est pour cette raison que, dans plusieurs contrées ,on a l'habitude barbare de priver de la vue, en passant sur les paupières un fil de fer rougi au feu , les pinçons qu’on élève en cage. Les CHARDONNERETS, les LINOTTES et les SERINS /carduelis) ont le bec plus court et sans être bombé; chez les premiers, cet organe est un peu plus long et plus aigu que chez les der- niers qui ne se distinguent entre eux que par leur plumage brun avec des teintes rouges chez les linottes, plus ou moins verdâtres chez les serins. Le chardonneret ordinaire est l’un des oiseaux d'Europe les plus jolis, les plus dociles et les plus habiles chanteurs; son plumage est brun dessus, et blanchätre dessous , avec le masque d’un beau rouge et une belle tâche jaune sur l'aile; il tire son nom de la graine de chardon, qu’il recherche de préférence; il se plaît surtout dans les vergers , et niche en général dans les vignes , les pruniers ou les noyers; son vol est bas et filé, et en hiver ces oiseaux se réunissent en troupes nombreuses; ils vi- vivent de seize à vingt ans ou méme davantage. La Zinotte commune Se trouve aussi dans presque toutes les parties de l'Europe, où elle habite les vignobles, les plaines et la lisière des bois. La femelle, dont le plumage est d’un cen- dré jaunâtre mêlé de brun et de roux, ne chante pas ; le mâle a au contraire un ramage très agréable, et à l’âge adulte on le remarque aussi à cause de la couleur rouge des plumes de la tête et de la poitrine. Le cabaret ou siserin est une espèce de 38 Pinçons. Chardonne- rets. 552 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. linotte plus petite que la précédente qui habite le nord, et vient passer l’hiver dans les parties tempérées de l'Europe. Serin Le serin des Canaries chante si agréablement et se multiplie si facilement en esclavage qu’on l’a transporté partout et qu’il est devenu très commun parmi nous; l’état de domesticité de ce petit oiseau et la faculié qu’il a de se mêler avec la plupart des autres espèces de ce genre et de produire avecelles des métis féconds , ont fait varier sa couleur au point qw’il est difficile de Jui en assigner une primitive. La plupart des naturalistes s’ac- cordent à le regarder comme originaire des îles Canaries, où on le trouve un grand nombre et à l’état sauvage; mais quelques voyageurs pensent qu'il est venu primitivement de PAsie. C’est aussi à cette division de la tribu des moineaux qu’il faut rapporter en grand nombre de petits oiseaux chanteurs des pays chauds connus sous les noms de hengalis et de senegalis ; plusieurs sont remarquables par la beauté de leur plumage. Grocbecs. Les GROS-BECS (cocccthraustes) se distinguent des autres moi- neaux par lexcessive grosseur de leur bec , exactement conique Fig. 198. (fig. 198). Celui dans lequel ce caractère est le plus marqué est le gros bec commun, NT qui vit dans les montagnes boisées , et LACS N mange toutes sortes de fruits et d’aman- re 4 des. Le verdier, très commun aux envi- -_ rons de Paris, appartient aussi à ce genre ; mais il a le bec moins gros que le précédent. Bouvreuils. Enfin les BOUVREUILS (pirrhula) ont le bec arrondi et bombé en tous sens et assez fort pour leur permettre de briser les semences les plus dures : ils habitent principalement les climats froids et tempérés. Nous en avons un, le bouvreuil ordinaire, qui s’appri- voise aisément et apprend à chanter agréablement et même à parler : il est cendré dessus, rouge ou roussâtre dessous et à une calotte noire. Becs-croisés. LS BECS-CROISÉS (/oxia) ressemblent beaucoup aux bouvreuils, mais présentent un caractère très remarquable dans leur bec Fig. 199. (fig-199), dont les deux mandibulessont tellement courbes, que leurs pointes se DR. croisent tantôt d’un côté, tantôt de l’au- vd © a tre , suivant les individus. Le bec croise 4 FT commun habite l’Europe et se tient dans les forêts d’arbres verts. C’est pendant l'hiver qu'il niche etse reproduit dans nos chimats ; en été, it émigre vers le nord.Il se nourrit de fruits ORDRE DES PASSEREAUX. 553 et de bourgeons, et il paraît que son bec extraordinaire lui sert pour arrach&r les semences de dessous les écailles des pommes de pin. On donne le nom de DURS-BECS (corythus) à d’autres conirostres, très voisins des précédens , mais dont le bec, bombé de toutes parts , est un peu crochu à sa pointe. L'espèce la plus commune habite le nord des deux continens. Les PIQUE-BOEUFS (buphaga) , qui se servent de leur bec, renflé vers le bout, pour comprimer la peau des bœufs, afin d’en faire sortir les larves d’œstres qui s’y trouvent , et de les manger, doivent aussi prendre place ici. On n’en connait qu’une es- pèce qui habite l'Afrique. Les ÉTOURNEAUX (sturnus), qui ont le bec droit, déprimé, sur tout vers la pointe, ets’avançant sur le front, suivent aussi le bé- tail et se nourrissent principalement d'insectes. On en trouve dans toutes les parties du globe. L’etourneau commun est ré- pandu dans tout l’ancien continent : il se tient sur les arbres si- tués près des prairies et vole en troupes nombreuses et serrées. Son plumage est noir avec des reflets volets et verts , tacheté partout de blanc ou de fauve ; on peut facilement l’apprivoiser et lui apprendre à chanter. Les CORBEAUX {corvus) se distinguent de tous les conirostres dont nous avons parlé jusqu'ici par leur taille plus grande et par Fig. 200. leur bec fort, plus ou moins aplati sur les côtés et garni à sa base de plumes rai- EE) des dirigées en avant, au-dessus des na- == rines (fig. 200). Ils sont, pour la plupart, / ji omnivores : ils fontdes provisions pour / D iaré-ctison et ont la singulière ha- bitude de prendre et de cacher même les choses qui leur sont inutiles; ils sont rusés, et, quand on les tient en captivité, ils apprennent facilement à contrefaire des voix étrangères et même à obéir à celle de leur maitre. Les espèces qui ont le bec le plus fort, proportionnellement à leur taille, dont l’a- rête de la mandibule supérieure est la plus marquée, et dont la queue est ronde , sont nommées CORNEILLES OU CORBEAUX PRO- PREMENT DITS; celles qui, avec un bec à-peu-près de la même forme, ont la queue longue et étagée , sont appelées PTES (pica ). enfin , lorsque les deux mandibules sont peu allongées et finis- 36. Durs-becs. Pique-bœufs. Etourneaux. Corbeaux. 554 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. sent par une courbure subite et que la queue est médiocre et égale ou peu étagée, on donne à ces oiseaux le nom de GEAIsS (garrulus ). Le corbeau commun , le plus grand des passereaux de l'Europe , appartient à la première de ces divisions et se reconnait à son plumage entièrement noir et à sa queue arrondie. La corneille ordinaire est d’un quart plus petite et a la queue plus carrée; le freux est encore plus petit et a le bec plus droit et plus pointu, son plumage est également d’un beau noir, mais excepté dans la première jeunesse , il a la base du bec, le devant de la tête et la gorge dépouillée de plumes. La corneillemantelee est cendrée, avec la tête, les ailes et la queue noires ; enfin la petite corneille des clochers Ou ehoucas est plus petite encore d’un quart que les précédentes : son plumage est noir, mais un peu moins foncé que chez le corbeau , et son bec est plus court. Tous ces oiseaux abondent en Europe. Le corbeau commun vit plus retiré que les autres et se tient presque toujours dans les montagnes cou- vertes de bois ; la corneille et le freux fréquentent , au con- iraire, les plaines et vivent réunis en grandes troupes ; la cor- neille mantelée ne se voit guère que sur les bords de la mer ou des marais,et le choucas s'établit d’ordinaire , par grandes troupes, dans les clochers et les vieilles tours. Le corbeau a le vol élevé et facile , et il sait s’'accommoder de tous les climats. Sa démarche est grave et posée et son courage remarquable. On le voit quelquefois poursuivre le milan , pour le combattre ,et, lorsqu'on le tient en captivité, il ne redoute ni les chiens, ni les chais,ni même l’homme. Sa nourriture favorite consiste en cha- rognes , qu’il sent de très loin ; mais, à défaut de cadavres, 1l vit de graines ou d'insectes , et quelquefois il attaque des animaux vivans , tels que des rats, des perdrix et des grenouilles; enfin ilnicheisolémentsur les arbres élevés ou sur des rochers escar- pés, et ne fait que deux couvées par an. La corneille se nourrit à- peu-près de même; mais elle est plus insectivore et mange plus de graines.On lavoitsouvent pendant le jour, réunie en troupes nom- breuses avec les freux , chercher dans les terres nouvellement labourées des vers et des larves de bannetons ; le soir ils vont percher ensemble sur quelques grands arbres. Les freux et les choucas,qui souvent volent aussiavec les corneilles,nese jettent sur les charognes que lorsqu'ils y sont poussés par la faim , et ils portent la sociabilité encore plus loin que ces derniers ; car, au lieu de s’isoler pour nicher, comme les oiseaux le font d’or- dinaire , ils se rassemblent en familles. Tous ces corbeaux n’é- migrent pas: en hiver, ils restent dans les cantons les moins froids. Les corneilles mantelées changent , au contraire , de de- meures deux fois l’an: en automne, elles nous arrivent par nn. don nt one. Sd ORDRE DES PASSEREAUX. 155 grandes troupes , qui se mêlent aux freux et aux corneilles , et, au printemps, suivant une direction contraire, on les voit se diriger par petites bandes vers le nord. Nous avons aussi en Europe une espèce de pie, qui est très commune et qui se reconnait à son plumage d’un beau noir chatoyant partout , excepté au ventre et sur une partie de l'aile, où cette couleur est remplacée par du blanc pur. Cet oiseau se plaît dans les lieux habités , et , comme la corneille , se nourrit de tout : il est très vorace , et attaque même les petits oiseaux de basse-cour. Tout le monde connaît la facilité avec laquelle il apprend à prononcer quelques mots , et sa loquacité , devenue proverbiale. Les geais sont également remarquables par le pen - chant qu’ils ont à imiter toute espèce de sons. Le geai d'Europe est un bel oiseau d’un gris vineux, dont l’aile est ornée d’une grande tache bleu-vif, rayée de bleu foncé :il vit par paires ou par petites troupes dans les boïs , et se nourrit principale- ment de glands et de noisettes. On connait un grand nombre d’autres espèces de corbeaux. Ce genre est répandu dans tous les pays, et souvent la même espèce se retrouve en Amérique aussi bien qu'en Europe , en Asie et en Afrique : C’est le cas de notre grand corbeau, par exemple. Les CASSE-NOIX (caryocatactes) ressemblent extrêmement aux corbeaux, mais ont les deux mandibuies également pointues, droites et sans courbures. Par leurs habitudes, ils se rappro- chent des pics ; car ils grimpent sur les arbres , en frappant du bec contre l'écorce, pour en faire sortir les larves d'insectes dé- posées dans son épaisseur : ils se nourrissent aussi de fruits, d'insectes et de petits oiseaux. Ils habitent l’Europe et vivent en grandes bandes. Les ROLLIERS {coracias) sont aussi des oiseaux de l’ancien con- nent qui doivent prendre place à côté des geais : ils ont le bec comprimé vers le bout et un peu crochu, les narines à découvert et les pieds couris et forts. Les couleurs de leur plumage sont or- dinairement vives , mais peu harmonieuses. Le rollier commun , vert d’aigue-marine, avec le dos fauve et du bleu à l’extrémité de l'aile, est à-peu-près de la taille du geai, et se tient de préférence dans les grandes forêts de chênes et de bouleau du nord de l'Eu- rope : il est farouche et criard. Enfin les OISEAUX DE PARADIS ({paradisæa) ressemblent égale- Casse-no1ix. Roliiers. Oiseaux de paradis. 556 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. mentaux corbeaux par la forme générale de leur bec, qui est mé- diocre et droit: ils ont aussi les narines cachées sous les plumes du front; mais celles-ci, au lieu d’être raides et grèles, sont ve- loutéset brillantes.Cesoiseaux, originaires de la Nouvelle-Gui- née et des îles voisines, sont re- marquables par le luxe de leur plumage.La plupart ont les plu- mes des flancs effilées et allon- gées en panaches bien plus lon- gues que lecorps; chez d’autres, les plumes scapulaires forment une espèce de mantelet, qui peut HE recouvrir les ailes. Souventdeux SAN des plumes du croupion pren- : nent aussi la forme de longs FNQS Br be filets ébarbés , et presque tou- | 4 Ÿ jours les couleurs les plus har- L monieuses se mêlent aux reflets Fig. 201, OISEAU DE PARADIS. je plus riches et les plus bril- lans. Pendant long-temps, ces oiseaux magnifiques m’étaient connus que par les individus desséchés et mutilés , pour servir de panaches , qui se trouvent dans le commerce ,et on a débité sur leur histoire les contes les plus absurdes. On a dit gravement qu'ils n'avaient pas de pieds, et vivaient toujours dans Pair, soutenus par leurs longues plumes : mais, dès qu’on a pu se pro- curer des individus complets, on a vu qu’ils ne présentaient aucune anomalie semblable. L'espèce la plus anciennement célèbre est l’oiseau de paradis émeraude , dont le mâle porte ces longs et élégans faisceaux de plumes jaunâtres employées par les dames , pour orner leur coiffure. ca La famille des TÉNUIROSTRES comprend, ainsi que nous l'avons déjà dit, les passereaux non syndactyles , dont le bec est grèle, Fig. 202. allongé et sans échancrure (fig. 202). Les insectes sont leur principale nour- riture. Cette division comprend les sitelles , les grimpereaux, les colibris et les huppes. Les SITELLES (sifta) ont le bec mé- diocre , droit, pointu et comprimé vers le bout ; la langue courte, aplatie et peu protractile. Ils grimpent sans Sitelles. - ORDRE DES PASSEREAUX. 297 cesse el dans tous les sens aux arbres, en entamant Pécorce à coups de be&, pour y chercher des insectes et des larves. Sous ce rapport , ils ressemblent aux grimpereaux et aux pics; mais ils ne se servent pas de leur queue, pour se soutenir , comme le font ceux-ci , et les plumes qui la forment ne sont pas usées au bout. On en trouve en France et dans d’autres parties de l’Eu-- rope , une espèce qui a reçu les noms de forchepot et de pic- macon , à Cause de la manière dont elle travaille à la con- struction de son nid , qu’elle établit dans un trou d’arbre : Si l'ouverture est trop grande , elle la rétrécit avec de la terre grasse. Ce petit oiseau, brunâtre en dessus, roussàätre en dessous, et de la taille d’un rouge-gorge , vit solitaire dans les bois pen- dant l'été, et vient , en hiver, dans les vergers et les jardins ; il se nourrit de graines aussi bien que d’insectes. La petite tribu des GRIMPEREAUX se COmpose d'oiseaux dont les mœurs sont semblables à celles des sitelles , mais dont le bec est arqué (fig. 202). On y range les grimpereaux proprement dits , les échelettes et quelques autres genres exotiques. Les GRIMPEREAUX PROPREMENT DITS {certhia) se reconnaissent Griinpe- aux pennes de la queue usées et finissent en pointe raide/{fig.203), reaux. Fig. 203. comme celles des pics, disposition qui dépend de l'usage continuel qu’ils en font coïnme d’un arc-bou- Gi tant, pour se soutenir lorsqu'ils grimpent sur les ar- bres.Leur langue est cartilagineuse, aiguë et propre ul à percer les insectes, qu’ils trouvent dans les fentes ll de Pécorce des arbres ou sous la mousse. Le grim- \ \ pereau commun se voit dans différentes parties de {A lEurope ainsi que dans le nord de l'Asie et de fi) \ l'Amérique: c’est un pelit oiseau dont le plumage o4 est blanchätre , tacheté de brun en dessus , rous- | sätre au croupion et sur la queue. Les ECHELETTES ({ichodroma) grimpent de même à la poursuite des insectes , mais sur les murs et les rochers plutôt que sur les Fig. 204. arbres, ets’y cramponnent seulement à laide de leurs ongles, qui sont très foris, surtout celui du pouce : ils ne s’appuient pas sur leur queue , qui est très faible et arrondie (fig. 104), et qui , par conséquent , n’est pas usée comme chez les grimpereaux proprement dits. Ces oiseaux sont appelés aussi grèmpereaux de muraille. On n’en connaît qu’une espèce, qui vit dans le midi de l’Europe et niche dans les fentes des rochers Jes plus escarpés. Echellettes. 598 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. Colibris. Les COLIBRIS (frochilus) sont de petits oiseaux remarquables par la beauté de leur plumage et qui ont des mœurs très diffé- rentes des précédens : ils vivent sur les fleurs et se nourrissent, à ce que l’on assu- re,du nectar qu’ils ytrouventetqu’ils sucent avec leur langue allongée , très protractile , tubulaire et for- mée de deux filets. Leur bec est long et grèle , tantôt droit, tantôt cour- bé ; leurs pattes sont très courtes , leurs ailes très é longues et étroi- 3 tes, et leur ster- Fig. 205, COLIBRI. num est grand et sans échancrure , comme celui des martinets. Les plumes qui leur recouvrent la tête et la gorge ont une structure particulière : elles ressemblent | à des écailles , et brillent d’un éclat métallique , que rien ne peut surpasser. D’autres parties du corps présentent aussi les teintes les plus riches, et la beauté de ces oiseaux, jointe à la petitesse extrême de la plupart d’entre eux, les a rendus cé- lèbres. Ils habitent les parties chaudes de l’Amérique et se tiennent d'ordinaire dans le voisinage des jardins, où on les voit voltigeant de fleur en fleur avec une incroyable rapidité. Ils sont peu défians et montrent un courage bien au-dessus de ce que l’on pourrait attendre de leur faiblesse. Lorsqu'il s’agit de défendre leur couvée, ces petits oiseaux résistent à des ennemis bien supérieurs en taille et en force , et parvien- nent souvent à les mettre en fuite. Ils se battent aussi avec acharnement entre eux. Leur nid consiste en une espèce de feutre délicat de soie et de coton , revêtu en dehors de lichens et de brins de bois gommé : il a la forme d’une capsule et se trouve suspendu à une branche ou à un des brins de chaume dont les colons recouvrent leurs habitations. Il paraît que la couvée se répète jusqu’à quatre fois par an. On donne plus particulièrementle nom de co/ihris aux espèces dont le bec est arqué, et celui d'oiseaux mouches aux espèces dont le bec est droit (#g. 205). L’un de ces derniers, appelé, à raison de Sa taille de naïn, le plus petit des oiseaux-mouches, n’est guère plus ORDRE DES PASSEREAUX. 559 gros qu’une abeille. Sa longueur est de seize'lignes, et l’oëseau- mouche geant, le plus grand de ce genre, n’égale pas notre marti- net. On connait un grand nombre de ces magnifiques oiseaux, et on pourra juger des richesses de leur plumage par les noms qu’on leur a donnés et qu’ils méritent pleimement.Nous citerons comme exemple le colibri grenat , le colibri topaze ,V'oiseau-mouche ecla- tant ,le rubis-topaze , le rubis , le rubis emeraude , le saphir, etc. Les sOui-MANGAS (einnyris) sont, pour ainsi dire, les représen- Soui-mane tans des colibris dans l’ancien monde: ils se trouvent en Afrique gas. et dans l'archipel Indien , et ont des mœurs analogues; leur langue et leur bec présentent à-peu-près la même structure, et le plumage du mâle, dans sa livrée d'été, brille des couleurs les plus belles. Les HUPPES (#pupa) diffèrent de tous les précédens par leurs mœurs ; Car C’est à terre qu’elles cherchent les insectes dont elles senourrissent.Leur bec est très long,grèle, triangulaire et un peu arqué ; la langue très courte, molle et collée au fond du gosier, les ailes médiocres et la tête surmontée d’une double rangée longitudinale de longues plumes érectiles. La Awppe commune est d’un roux vineux , avec la queue noire et les ailes noires rayées de blanc ; elle arrive dans nos contrées au printemps, pour retourner vers le sud en automne et elle se tient dans les plaines humides. Les PROMEROPS et les ÉPIMAQUES sont très voisins des huppes et habitent les pays chauds.On peut aussi en rapprocher les CRAVES (fregilus), qui ont cependant beaucoup d’analogie avec les cor- beaux tant par leurs formes que par leurs mœurs. Leur bec est un peu plus loug que la tête , et leurs narines sont recouvertes par des plumes dirigées en avant. Le crave d'Europe habite les rochers les plus élevés des Pyrénées et des Alpes, dont il ne des- cend qu’à l'approche de la neige et des mauvais temps: il est de la taille d’une corneille , et son plumage est noir. Dans la dernière grande division de l'immense série des passe- reaux , le doigt externe et le doigt du milieu , comme nous Fig. 206. Pavons déjà dit, sont presque de même longueur, et unis entre eux jusqu’à l’a- vant-dernière articulation (fig. 206), dis- position qui a valu à cette famille le nom de SYNDACTYLES. On peut les diviser en six genres : les guepters , les motmots, les martins-pécheurs, les ceyx , les todiers et les calaos. Huppes. Epimaques, craves , etc. Famille des syndactyles. Guépiers. Martins-pé- cheurs. Ceyx, Calaos. 560 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. Les GUÈPIERS (merops )sont des oiseaux à longues ailes, qui volent presqu’à la manière des hirondelles et qui poursuivent en Fig. 207. grandes troupes les insectes , surtout les abeilles , les guépes et les frelons, Dr et, chose remarquable, ils n’en sont triangulaire à sa base, légèrement arqué et pointu (#g. 207); leurs pieds sont très courts et le doigt interne est soudé au médian jusqu’à la pre- mière articulation. Ils appartiennent aux parties chaudes de l’ancien continent; une espèce, remarquable par ses couleurs, est assez commune dans le midi de l'Europe. en Les MARTINS-PÉCHEURS (acedo) ont les pieds encore plus courts, et le bec plus long, droit anguleux et pointu (fig. 208). Leur sternum a deux échancrures comme celui des guëêpiers, mais ils volent avec rapidité. Ils sont défians et farouches ; leur : nourriture consiste principa- Fig. 208. lement en petits poissons et en insectes aquatiques, qu’ils prennent en se précipitant dans l’eau du haut de quel- que branche où ils se tenaient perchés pour guetter avec patience leur proie; la diges- tion terminée, ils vomissentL par petites pelottes les parties dures des animaux qu’ils ont ainsi dévorés. Ils nichent , comme les guépiers, dans des trous en terre, le long des bords escarpés des fleuves. On en trouve dans les deux continens ; espèce d'Europe est de la taille d’un moineau , et verdâätre ondé de noir en dessus, roussätre en des- sous, avec une large bande bleue aigue-marine le long du dos; elle est plus commune dans le midi que dans le nord. Quelques oiseaux de l’Inde, très voisins des martins-pêcheurs, et connus sous le nom générique de CEYx présentent une ano- malie remarquable : ils manquent de doigt interne. Les CALAOS (buceros) sont de grands oiseaux de l'Afrique et des Indes qui ressemblent aux martins-pêcheurs par la conforma- ORDRE DES OISEAUX GRIMPEURS. 561 tion de leurs pieds, et qui ont de l’analogie avec les corbeaux par leur port et par leurs habitudes , mais qui se font en général re- marquer par leur énorme bec , dentelé sur les bords et surmonté d’une proé- minence qui en double quelquefois le volume , et qui varie de forme suivant l’âge. Ils se nourrissent de fruits tendres , de petits animaux qu'ils avalent eu- tiers , et de charognes ; presque loujours ils se tiennent perchés sur de grands arbres, et ne pa- 4 gl raissent marcher à terre CE qu'avec difficulté. Fig. 209. CALAO A CASQUE EN CROISSANT. ORDRE DES GRIMPEURS OÙ DES ZYGODACTYLES. Ce groupe se compose de tous les oiseaux qui, avec le régime et l’organisation ordinaire des passereaux, ont les doigts diri- gés deux en avant et deux en arrière (voyez fig. 167, pag. 494). ou même qui ont le doigt externe réversible, disposition qui est de nature à leur fournir un appui plus solide et à leur per- mettre de se mieux cramponner au tronc et aux branches des arbres. La plupart profitent de cette conformation particulière pour grimper dans toutes les directions , et quelquefois ils se servent même de leur bec pour escalader en quelque sorte les branches. De là le nom de grimpeurs par lequel on les désigne le plus ordinairement, mais qui ne leur convient pas à tous ; quelques-uns (les coucous, par exemple) ne grimpent pas, et, d’un autre côté, nous avons déjà vu que parmi les passereaux de la famille des syndactyles il s’en trouve plusieurs qui, par leurs habitudes , mériteraient à tous égards cette dénomination ; c’est un exemple des inconvéniens qui résultent si souvent de emploi de noms trop significatifs en histoire naturelle ; il arrive presque toujours un moment où , par les progrès de la science, ils donnent des idées fausses, plutôt que d’utiles indications. Toucans. Perroquets. 562 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. Quoi qu’il en soit nous continuerons à désigner de la sorte ces oiseaux , Car le nom de zygodactyles , qui serait peut-être préfé- rable, n’est pas généralement adopté. Les grimpeurs se lient étroitement à la famille des syndactyles et nous pensons que c’est avec raison qu’on a proposé dernière- ment de les réunir dans un même ordre, et de ne laisser dans celui des passereaux que les oiseaux dont les doigts présen- tent la disposition normale. Le régime des grimpeurs est le même que celui des passereaux ; les uns se nourrissent d’in- sectes qu’ils prennent d'ordinaire dans les fentes des écorces ; les autres mangent des fruits plus ou moins durs suivant la force de leur bec. La plupart nichent dans les trous des arbres. La disposition du sternum varie. Chez les uns le bec est plus ou moins arqué, et le doigt externe de derrière est quelquefois ré- versible : ce sont les coucous , les toucans , les perroquets , etc. ; chez lesautresle becest long, droit, conique et tranchant, etil ya toujours seulement deux doigts devant : ce sont les pics , les tor- cols et les jacamars. Les TOUCANS (ramphastos) ont de l'analogie avec le dernier genre des syndactyles dont nous avons parlé ci-dessus, les calaos, car ils ont aussi un énorme bec presque aussi gros et Fig. 210. aussi long que leur corps. On les trouve dans les par- ties chaudes de l’'Améri- que. Ils vivent par petites troupes sur les branches les plus élevées, mais ne grimpent jamais le long des ironcs des arbres; leur nourriture consiste principalement en fruits (surtout des bananes) et en bourgeons, mais ils mangent aussi des insectes et même de jeunes oiseaux; la disposition de leur bec les oblige à avaler leurs alimens sans les mâcher, et pour les faire arriver jusque dans leur gosier ils les jettent en Pair et les reçoivent dans leur énorme bouche pendant leur chute vers la terre. Les PERROQUETS (psittacus) se reconnaissent à leur bec gros, dur, arrondi de toute part, et garni à sa base d’une cire où sont percées les narines (fig. 211). Ce sont des oiseaux essentiellement grimpeurs , et on les voit aller de branche en branche en s’y ac- ORDRE DES OISEAUX GRIMPEURS. 563 crochant avec leur bec aussi bien qu'avec les pattes qui cepen- dant sont robuStes et armées d’ongles forts etassezcrochus. Leurs Fig, 211. ailes sont généralement courtes et leur corps gros, aussi ont-ils de la peine à A prendre leur essor ; mais la plupart peu- ao LPS \ vent cependant , lorsque les circonslan- A+ ‘\ ceslexigent, volerassezhaut. Ilsse nour- f ÉCC \| ) | rissent de fruitsde touteespèce, mais pré- ET « fèrent les amandes qu’ils épluchent avec El CA \ 72164) soin. Lorsqu'ils mangent , ils se servent d’une de leurs pattes pour porter leurs alimens à leur bouche pendant qu'ils res- tent perchés surl’autre pied. Hors le temps de la ponte les perro- quets vivent en troupes plus ou moins nombreuses. Ils setiennent sur le bord des ruisseaux et prennent plaisir à se baigner plusieurs fois le jour. Ces oiseaux sont monogames , et nichent dans des trous d'arbres; la ponte se compose ordinairement de trois ou quatre œufs et se renouvelle plusieurs fois l’année. Les pelits naissent nus et avec une tête démésurément grosse; ils ne se couvrent complètement de plumes qu’au bout de deux ou trois mois , et restent avec leurs parens jusqu’après leur première mue. Chacun connait la facilité avec laquelle ils imitent la voix humaine et apprennent à articuler quelques mots ; cette faculté parait tenir à la structure assez compliquée de leur larynx infé- rieur et à la conformation particulière de leur langue qui est épaisse, charnue et arrondie. Par l’éducation on parvient aussi à leur faire faire des exercices au commandement, et ils s’attachent aux personnes qui en ont soin, de même qu'ils prennent en aversion celles dont ils ont reçu de mauvais irai- temens. Le plumage des perroquets offre des couleurs très variées, mais presque toujours pures et brillantes; le vert domine, puis le rouge, ensuite le bleu , et le jaune parait remplacer le blanc qui se voit chez la plupart des autres oiseaux ; souvent les plumes qui repoussent , après avoir été arrachées , sont jaunes ou rouges , et on donne quelquefois le nom de tapirefes aux in- dividus ainsi maculés. Ces oiseaux habitent, pour la plupart, sous la zone torride, et c’est même dans les parallèles les plus approchés de l’équateur qu’on trouve le plus grand nombre d’es- pèces ; mais il en est qui sont répandus jusqu’au 52° degré de latitude sud, et qui vivent dans des pays très froids; chaque hémisphère en possède un grand nombre, et non-seulement les espèces ne sont pas les mêmes dans le nouveau et l’ancien monde, mais chaque grande ile a ses espèces particulières, et dans les continens chacune d’elles n’occupe souvent qu’une ré- 564 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. gion assez CirConsCrite ; on en connaît cependant qui émigrent. Ces oiseaux forment une tribu très nombreuse et se divisent en aras , perruches , cacatoës, perroquets proprement dits , etc. Les ARAS ont la queue longue et étagée, et les joues dénuées de plumes (#g. 211) ; la plupart sont de grande taille, et offrent les couleurs les plus brillantes. Ils appartiennent aux parties chaudes de l'Amérique méridionale et aux Antilles. Les perroquets à longue queue et à joues emplumées sont Perrucbes. connus sous le nom de PERRUCHES.Les uns ont la queueen flèche, c’est-à-dire avec les deux pennes du milieu dépassant de beau- coup les autres ; telle est l’espèce la plus anciennement connue en Europe, qui habite les Indes-Orientales, et qui a été apportée en Grèce par Alexandre de Macédoine; ce service n’est pas le seul que ce conquérantait rendu à l’histoire naturelle, et pour le commémorer les ornithologistes ont donné à cet oiseau le nom de perruche d Alexandre ; son plumage est d’un beau vert, avec une tache noire sous la gorge et un collier rouge sur la nuque. D’autres perruches ont la queue élargie vers le bout ou étagée à-peu-près également. On donne le nom de CACAYOES à des perroquets à queue courte et égale , dont la tête est ornée d’une huppe de longues plumes érectiles. Leur plumage est , en général, blanc ; ils ha- bitent les Molluques , la Nouvelle - Guinée, la Nouvelle - Hol- lande, eic., et se tiennent ordinairement dans les endroits marécageux. Perroquets L@S PERROQUETS PROPREMENT DITS Ont la queue de même proprement forme, mais sont dépourvus de huppe. Le perroquet gris ou De jacoestle plus recherché à cause de sa docilité et de la facilité avec laquelle il apprend à parler ; il habite la côte occidentale d’A- frique, mais n’arrive ordinairement en Europe qu'après avoir été porté en Amérique par les bâtimens négriers. On appelle Loris les espèces dont le fond du plumage est rouge et la queue un peu en coin ; on n’en trouve qu'aux Indes-Orientales. Perroquets Enfin, ilest aussides perroquets qui diffèrent de tous les précé- à trompe. dens parleur langue cylindrique, protractile ,et fendue au bout, disposition qui leur a valu le nom de PERROQUETS A TROMPE ; ils habitent les Indes-Orientales. Aras. conne Les coucous se distinguent facilement des autres grimpeurs par leur bec médiocre comprimé et légèrement arqué (v. fig. 167, pag. 494). Les GOUCOUS PROPREMENT D1TS (euculus) ont le bec de la longueur de la tête et sans échancrure, les tarses couris et la queue longue et composée de dix pennes seulement. Ces oiseaux sont célèbres par une particularité singulière de leurs mœurs ; ORDRE DES OISEAUX GRIMPEURS. 565 non-seulement ils ne construisent pas eux-mêmes de nids pour leurs petits, mais ils font couver leurs œufs par d’autres oiseaux. Ils les déposent un à un dans les nids étrangers , et ont l'instinct de choisir celui d’un oiseau ayant l'habitude de nourrir ses petits avec des alimens qui conviennent aussi aux jeunes Coucous ; en Europe , c’est ordinairement dans les nids de la fauvette, de la lavandière , du rouge-gorge, du rossignol, du bruant, de la grive , du merle ou de quelques autres petits oiseaux insecli- vores qu’ils les placent ; et, chose remarquable, la couveuse qui s’y trouve devient pour ces intrus une mère tendre et infati- gable, quoiqu’ils la privent de sa propre progéniture. Suivant quelques naturalistes les vieux coucous ont le soin de détruire les œufs qu'ils trouvent dans le nid auquel ils confient le leur, mais d’autres observateurs assurent que c’est le jeune coucou lui- même qui se charge de les rejeter de sa demeure, ou d’en expulser aussitôt après leur naissance les petits dont il usurpe la place. L’illustre Jenner, médecin anglais, à qui on doit la découverte de la vaccine, nous dit avoir vu bien des fois le manège au moyen duquel ce petit intrus se débarrasse de ses faibles compagnons; le jeune coucou se glisse sous l’un des petits oiseaux dont il partage le berceau et parvient bientôt à le placer sur son dos où il le retient à laide de ses ailes; ensuite se trainant à reculons jusqu’au bord du nid, il le jette par-dessus ; puis il recommence les mêmes mouvemens pour un second et ainsi de suite jusqu’à ce qu’il reste maître de sa demeure.On ne connait pas bien la cause qui détermine les coucous à abandonner ainsi à d’autres oiseaux le soin de l’incubation (1;. Ils restent souvent par paires dans le voisinage de l’endroit où les œufs ont été déposés ; et leurs petits, quand ils sontassez forts pour voler, quittent leurs premiers pour- voyeurs et rejoignent leurs parens naturels qui se chargent de compléter leur éducation. Les coucous vivent d'ordinaire soli- taires etse nourrissent de chenilles , d'insectes et de vers qu’ils écrasentavant de les avaler ; ils volent bien, et de même que les autres insectivores émigrent en hiver vers les pays chauds. L’es- pèce d'Europe, appelée aussi le coucou commun, estàä-peu-près de la taille d’un pigeon biset et a le plumage d’un gris cendré en des- sus , le ventre blanc, rayé en travers de noir et la queue tachetée de blanc sur les côtés. Cet oiseau nous arrive vers le mois d'avril, et fréquente les buissons plutôt que les arbres; il se laisse diffici- lement approcher, mais lorsqu'il s’envole c’est pour se poser de (r) Une espèce de Carouge (genre des passereaux conirostres, voisin des moineaux) qui habite l’Amérique, a également l'habitude de déposer ses œufs un à un dans des nids étrangers où ils sont couvés par d’autres petits oiseaux insectivores. Indicateurs. Pics. 566 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. nouveau à peu de distance. Son chant, qui rappelle son nom, n'appartient qu'aux mâles déjà parvenus à leur seconde année; il cesse au mois de juillet , époque à laquelle commence ia mue, et vers le mois de septembre les coucous émigrent vers le midi et paraissent passer en Afrique. Quelques espèces de coucous exotiques ressemblent au nôtre par leurs mœurs ; mais il en est d’autres qui se consiruisent un nid , et couvent eux-mêmes leurs œufs. D’autres grimpeurs, très voisins des précédens, mais qui ont le bec presque de même force que celui du moineau et la queue composée de douze pennes , sont connus sous le nom d’INDICA- TEURS à cause de la manière dont ils servent de guides aux ha- bitans de diverses parties de l’Afrique pour découvrir les nids - d’abeilles sauvages ; ces oiseaux aiment beaucoup le miel et le cherchent en criant; la dureté de leur peau les garantit assez bien des coups d’aiguillon , mais cependant les abeilles, pour défendre leur demeure, les harcèlent avec persévérance, les attaquent aux yeux et parviennent quelquefois à les tuer. Les pics (pieus) sont faciles à reconnaitre par leur bec long, droit, anguleux et propre à fendre l'écorce des arbres (fig. 212)par leur langue longue, grèle, armée à sa pointe d’épines recourbées en arrière et extrêmement protractile ; enfin par leur queue, com- Fiy. 212. posée de dix grandes pennes raides, dont ils se servent, comme d’arc-bou- tant, lorsqu'ils grimpentlelong des ar- bres. Ils montent perpendiculairement et en décrivant une spirale le long du tronc et des grosses branches des ar- bres ,et méritent à tous égards le nom degrimpeurs. Leur nourriture consiste principalement en larves, qu'ils prennent en frappant avec leur bec sur l'écorce ou en introduisant dans les fentes de celle- ci leur langue constamment imbibée d’une salive gluante. Leur estomac est presque membraneux, et leur intestin manque de cæœcum, cependant ils mangent des fruits aussi bien que des insectes. Leurs ailes sont médiocres et leur vol lourd et saccadé. Ils sont craintifs, rusés , et vivent solitaires dans les forêts; la nuit, ils se retirent dans des trous d'arbres que souvent ils creusent eux-mêmes. Ces oiseaux sont répandus sur presque tout le globe, mais c’est dans les forêts humides de l'Amérique qu’on en voit le plus grand nombre. Nous en avons six espèces en Europe, les plus communes sont: le pre ORDRE DES GALLINACÉS. 567 vert, oiseau de la taille d’une tourterelle, vert dessus , blan- châtre dessous, avec une calotte rouge et le croupion jaune; le grand épeiche , qui est de la taille d’une grive, noir en dessus, blanc en dessous , avec une tache rouge à l’occiput et à l’anus ; le moyen epeiche et le petit epeiche, qui sont de la taille d’un moineau. Enfin les TORCOLS ont la langue longue et extensible comme celle des pics , mais sans être armée d’épines; ils se distinguent aussi à leur bec droit, pointu et à-peu-près rond, et à leur queue dont les pennes ont la forme ordinaire. Ils n’ont pas comme les pics l'habitude de grimper le long du tronc des arbres, maisils s’y cramponnent seulement pour saisir, entre les fentes de l’é- corce , les fourmis et autres insectes dont ils se nourrissent; le plus souvent on les voit à terre grimpant sur les nids des fourmis. Il paraît que leur nom leur vient de la singulière habitude qu’à notre forcol d'Europe , de tordre sa tête et son cou en différens sens quand on le surprend; c’est un oiseau de la taille d’une alouette , brun, tacheté longitudinalement de noir et de jaune en dessus , blanchätre rayé en travers, et noirâtre en dessous. ORDRE DES GALLINACÉS. L'ordre des gallinacés à pour type notre coq domestique, et se compose des oiseaux qui ont, comme lui, le bec court ou mé- diocre et voùté en dessus , les narines percées dans un espace membraneux et recouvert d’une écaille cartila- gineuse ; les ai- les , en général , courtes , le ster- numaffaibli par quatre échan- crures larges et très profondes ; le port lourd, le régime essen- tiellement gra- nivore , et le gé- Fig. 213. TRAGOPAN NEPAUL. sier très muscu- 37 Torcols. Caractères. Caractères. 568 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. leux. Cette division renferme presque tous nos oiseaux de basse- cour et se compose de deux familles naturelles , celle des galli- nacés proprement dits, et celle des pigeons, qui diffèrent par leurs mœurs , aussi bien que par leur structure. Les premiers sont polygames , volent mal , cherchent leur nourriture à terre, et ne nichent presque jamais sur les arbres; leurs doigts anté- rieurs sont réunis à leur base par une courte membrane et dente- lés sur les bords; enfin leur queue a, en général, quatorze ou même un plus grand nombre de pennes. Les pigeons , au con- traire , sont constamment monogames, volent bien et nichent sur les arbres; leurs doigts sont entièrement divisés, et leur queue n’a presque toujours que douze pennes. FAMILLE DES PIGEONS. Les pigeons établissent à quelques égards le passage entre les passereaux et les gallinacés proprement dits. On les reconnait aux caractères que nous venons d'indiquer et à leur bec compri- mé, plus ou moins courbé à sa pointe, et recouvert à la base de la mandibule supérieure d’une peau nue, molle et verru- queuse dans laquelle sont percées les narines que recouvre Fig. 214. une écaille cartilagineuse et renflée(fig. 214). Leursmæurs sont douces et familières; ils vivent par paires, etles deux époux montrent l’un pour l’autre une tendresse et une constance remarquables; le mäle concourt à la consiruc- | tion du nid, et couve comme ) Î la femelle; la ponte ne se | compose d'ordinaire que de deux œufs, mais se renou- velle plusieurs fois; les petits naissent nus, aveugles et très faibles , et pour les nourrir leurs parens leur dégorgent dans le bec des alimens à moitié digérés ; la couvée se compose, en général, d’un mâle et d’une femelle qui, élevés ensemble , ne se quittent jamais. La nourriture de ces oiseaux consiste en grai- nes ,en baies et en fruits pulpeux; quelquefois ils mangent aussi des insectes ou des limacçons, et lorsqu’ils boivent, c’est tout d’un trait, en plongeant le bec dans l’eau ; tandis que les autres gallinacés relèvent la tête à chaque gorgée. Ils se tiennent de préférence sur la lisière des forêts, dans le voisinage des eaux, FAMILLE DES PIGEONS. 569 et ne vont guère en troupes que dans leurs émigrations; leur vol est lourd et bruyant, mais peut être soutenu long-temps. Cette petite famille peut être divisée en trois genres : les colombes qui ont le bec grèle et flexible et les pieds courts; les colombi-gallines qui diffèrent des précédens par leurs tarses élevés et par leurs habitudes qui les rapprochent des gallinacés proprement dits, et les colombars, dont le bec est gros et solide. C’est au genre des COLOMBES qu’appariiennent nos pigeons in- digènes; nous en possédons à l’état sauvage quatre espèces; sa- voir : le ramier, le colombin ou petit ramier, le biset et la tour- terelle. Le ramier est le plus grand des quatre ; son plumage est d’un cendré bleuâtre, avec la poitrine d’un roux vineux et des taches blanches à l'œil et sur le côté du cou. Il habite la plus grande partie de l’ancien continent et émigre en hiver; il nous arrive au commencement de mars; fait deux pontes pendant l'été, et en général se porte vers le sud au mois de novembre ; les vallées des Pyrénées sont alors traversées par des troupes si nombreuses de ces oiseaux qu’ils y sont l’objet d’une chasse active. Le petit ramier a des mœurs analogues , et des couleurs sem- blables, si ce n’est que les côtés du cou sont d’un vert changeant. Le biset ou pigeon de roche est encore plus petit,et se reconnait à son croupion blanc, au vert changeant qui entoure son cou, et à une double bande noire sur aile. Le ramier, même lorsqu'on le prend jeune, ne s’apprivoise qu'imparfaitement et ne se reproduit pas en captivité ; le biset, au contraire , s’habitue très bien à la domesticité, et quelquefois on le voit même quitter volontairement son état d'indépendance pour vivre dans nos colombiers ; aussi paraïit-il être la souche principale de nos pigeons domestiques , dont les variétés de race se sont multipliées jusqu’à l’infini, mais se reproduisent entre ellessans difficulté, et donnent ainsi naissance à une progéniture féconde. Ces oiseaux nichent de préférence dans les rochers, les vieilles tours et les masures, et ce n’est qu’à défaut de ces habi- iations qu’ils contruisent leur nid dans des trous d’arbres; jamais ils ne l’établissent sur les branches comme le font les ramiers et les colombins , et cet instinct est peut-être une des causes qui les rendent si faciles à retenir dans nos colombiers. Ils vivent en troupes , et quelques auteurs assurent qu’ils pous- sent la sociabilité au point de veiller tour-à-tour en senti- nelle autour de leurs compagnons pendant que ceux-ci sont oc- 37. Colombes. 270 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. cupés à chercher leur nourriture; mais cette opinion n’est peut- être pas étayée de preuves suffisantes. Les bisets sauvages sont très abondans dans le nord de l’Afrique et dans les grandes iles montagneuses de la Méditerranée; mais ils ne passent que l’été chez nous, et la plupart de ces oiseaux, élevés dans une sorte de captivité volontaire, s’accommodent des gites que l’homme leur prépare. On distingue, en général, nos pigeons domestiques en pi- geons de colombier et pigeons de volière; les premiers sont à demi libres, car chaque jour ils quitient leur demeure et se répandent dans la campagne; les pigeons de volière sont tenus toujours renfermés dans de petits colombiers. L’une des variétés qu’on élève suivant la première de ces méthodes et qu’on ap- pelle biset de colombier a conservé à peu de chose près son plu- mage et ses mœurs primilives. Ces pigeons aiment à vivre en société et recherchent les lieux paisibles élevés et bien exposés aux rayons du soleil; ils produisent souvent trois fois dans l'année, et pondent à deux jours de distance deux œufs , quel- quefois trois ; mais ils n’élèvent presque jamais plus de deux petits; beaucoup de jeunes ne pondent qu’une fois, et c’est au printemps que le nombre de pigeonneaux est le plus considé- rable. Quelquefois ils retournent à la vie indépendante. On donne le nom de mondain à une race peu différente de celle du biset, mais qui s’en distingue par formes plus allongées et plus élégantes , ainsi que par des différences de couleur. Une variété de cette race atteint la taille d’une petite poule, c’est le gros mondain; une autre remarquable par sa fécondité, mais sur- tout par son vol léger et élevé, ainsi que par la singulière faculté qu’elle possède de retrouver à des distances immenses le colom- bier où elle est née ou dans lequel elle a laissé sa progéniture, est le messager. On en a vu, qui transportés dans des cages bien fermées à une distance de plus de cent lieues de leur demeure, y retournaient en quelques heures et au moment de leur départ ne montraient aucune incertitude sur la route qu’ils avaient à sui- vre. Dureste, ce pigeon n’est pas le seul qui jouisse de cette faculté que les curieux se plaisent à mettre à l'épreuve. Le pigeon grosse gorge, qui à l’habitude d’enfler beaucoup la gorge en remplis- sant d’air son jabot , est aussi une variélé du mondain. Il en est de même du pigeon culhutant et du pigeon tournant qui sont re- marquables par leur manière de voler; le premier s'élève très haut et souvent tourne deux à trois fois sur lui-même la tête en arrièr& le second, décrit des cercles à la manière des oiseaux de proie en battant des ailes; mais ces habitudes paraissent tenir à la captivité dans laquelle on élèveces oiseaux, car on assure que , par l'effet seul de la liberté , elles ne tardent pas à se perdre. FAMILLE DES PIGEONS. 571 Le pigeon nonnain peut être considéré comme le type d’une autre race ; ilise reconnait à l’espèce de capuchon qui lui des- cend sur les épaules ; il n’a pas le vol rapide, mais se familia- rise facilement et est très fécond. Le pigeon à cravate estune va- riété voisine de la précédente, mais de très petite taille; le vol de ces oiseaux est un peu lourd, mais bien soutenu, et ils finissent toujours par revenir à leur colombier quelle que soit la distance qui les en sépare; ils ne s’unissent pas volontiers avec les autres pigeons domestiques ; enfin ilsélèvent difficilement leurs petits à cause de la brièveté de leur bec. Cette conformation vicieuse est portée encore plus loin chez le pigeon polonais ; au point que ses petits meurent souvent de faim, et que pour les conserver il est quelquefois nécessaire de les faire nourrir par des pigeons à bec long. Enfin nous citerons encore ici le pigeon romain recon- naissable au cercle de peau nu, rouge et ridée, situé autour des yeux; son corps est gris, son vol est lourd, sa marche embarras- sée , et sa fécondité médiocre. La quatrième et dernière espèce de colombes sauvages, qui se voit en France, est la tourterelle qui vit dans les bois comme le ramier, et se distingue par son manteau fauve, ta- cheté de brun, et son cou bleuâtre avec une tache de chaque côté, mélée de noir et de blanc; elle s’étend depuis l'Afrique jusqu’en Chine , et nous quitte vers la fin de l’été pour aller pas- ser l'hiver dans le midi ; elle vit par paires réunies en petites troupes, et fait retentir les bois de ses roucoulemens plaintifs. La tourterelle, que nous élevons souvent en volière, est d’une espèce distincte de la précédente; elle paraît originaire de l'Afrique et a reçu le nom de tourterelle à collier à cause du collier noir qu’elle porte sur la nuque; elle s’unit à la tourte- relle Europe , mais ne donne ainsi que des métis inféconds. Les COLOMBARS , dont nous avons déjà fait connaitre des prin- cipaux Caractères, habitent la zone torride de l’ancien con- tinenti. Enfin les COLOMBI-GALLINES semblent établir le passage entre les autres pigeons, et les gallinacés ordinaires; il cherchent leur nourriture à terre comme nos coqs, et ne perchent pas; chez quelques espèces les petits peuvent aller à la recherche de leur nourriture dès leur sortie de l'œuf, et chez d’autres on re- marque sur la tête des caroncules ou des huppes de plumes. Ils habitent les pays chauds des deux hémisphères, el on en élève quelquefois dans les basses-cours , mais c’est vainement qu'on a cherché jusqu'ici à les acclimater en Europe. Colombars Colombi-ga! lines. Caractères et mœurs. Alectors. 572 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE, FAMILLE DES GALLINACÉS PROPREMENT DITS. Les gallinacés proprement dits ont des mœurs bien diffé- rentes de celles de la plupart des pigeons ; ils se nourrissent principalement de graines auxquels quelques-uns ajoutent des baïes , des bourgeons, des insectes et des vers, mais c’est tou- jours à terre qu’ils cherchent leur nourriture; ils grattent sans cesse le sol et aiment à se vautrer dans la poussière , aussi quel- ques auteurs leur ont-ils donné le nom d’oiseaux pulvérateurs. Ils ne se perchent que peu, et au lieu de vivre monogames, comme les pigeons, ils sont presque tous polygames. Le mâle ne se mêle pas de la construction du nid , et ne s’occupe ni de l’in- cubation des œufs , ni de l'éducation des petits ; la femelle seule se charge de ces soins; son nid est presque toujours construit à terre sous quelque buisson avec des brins de paille ou d’herbe grossièrement étalés. Les pontes sont nombreuses et se renou- vellent souvent ; enfin les petits, dès leur sortie de l'œuf, peuvent ordinairement voir, courir et manger seuls, mais la mère les conduit et les abrite pendant quelque temps, et ils continuent à vivre en famille jusqu’au retour de la saison de la ponte. Ainsi que nous l’avons déjà dit, les gallinacés proprement diis ont le corps lourd et charnu , les ailes courtes, la queue en général, composée de quatorze pennes ou même davantage, les tarses larges, les doigts antérieurs en général réunis à leur base par une courte membrane, et le pouce lorsqu'il existe, ar- üculé plus haut que les autres doigts, et souventtrop court pour toucher à terre ou ne s’y appuyant que par son extré- mité. On range dans cette division les alectors , les dindons, les pintades, les paons, les faisans, tétras, etc. ; la plupart sont d’ori- gine étrangère, mais plusieurs ont été naturalisés en Europe et font la principale richesse de nos basses-cours. La petite tribu des ALECTORS se compose de quelques grands gallinacés d'Amérique qui diffèrent de la plupart des autres oiseaux de la même famille par l'habitude de se percher et de nicher sur les arbres ; leur queue est large , arrondie et com- posée de douze grandes pennes raides et leurs ailes sont courtes avec les quatre premières pennes étagées et la cinquième ou FAMILLE DES GALLINACÉS PROPREMENT DITS. 573 sixième la plus longue. Ils vivent de bourgeons et de fruits, sont très sociäbles et sont même disposés à la domesticité. Les plus intéressans sont les HOGCOS (crax) qui ont le bec médiocre , mais fort et entouré à sa base d'une membrane où sont percées les na- rines , la tête ornée d’une huppe érectile et les tarses élevés ; leur trachée fait un repli avant d’entrer dans la poitrine. Ils ont la taille du din- don et sont élevés en domesticité dans nos colonies ; au Brésil, on les connaît sous le le nom de nitou-po- Fig. 215. LE HOCCO COMMUN. renga. L'oiseau à pierre , remarquable par le gros tubercule ovale, d’une dureté pierreuse et d’une couleur bleu-elair, située sur la base du bec, appartient à un genre voisin du précédent : celui des PAUXxI. Les DINDONS (meleagris)formentun genre facile à distinguer par la peau nue et mamelonnée qui revêt leur tête et le haut de leur cou , par les appendices charnues qu’ils portent sous la gorge et sur le front, et par leur queue composée de dix-huit pennes raides qui se relèvent et s’étalent, ainsi que les couvertures supérieures , de manière à faire la roue. Chacun de nous a pu re- marquer combien ces oiseaux sont irascibles, surtoutlorsqu'ils voient du rouge, et comment le mâle dans les momens de pas- sion se rengorge et enfle les caroncules charnues de son front. Ils sont originaires de l'Amérique ; mais à cause de leur gros- seur, de leur fécondité et de la bonté de leur chair,on les a natu- ralisés en Europe; les premiers furent apportés en Espagne par les missionnaires au seizième siècle, en 1552, ils furent intro- duits en Angleterre, et on assure qu'il n’en a paru en France qu’en 1570, aux noces de Charles IX; mais aujourd'hui ils y sont devenus l’un de nos oiseaux de basse-cour les plus communs. On connaît deux espèces de dindons; le dièndon ocelle , nou- vellement découvert près de la baie de Honduras, et l’un des Hoccos. Pauxi. Dindons. 574 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. oiseaux les plus remarquables par l’éclat et la beauté de ses couleurs, et le dindon commun, qui se trouve à l’état sauvage dans diverses parties de l’intérieur del’ Amérique septentrionale. Ce dernier abonde surtout autour de Ohio, du Mississipi et du Missouri,dans l'immense étendue de pays que la culture n’a pas encore envahie; son plumage, ordinairement noir chez nos dindons domestiques , est dans l’état de nature d’un brun ver- dâtre glacé de teintes cuivrées. Ces dindons sauvages se nourrissent des baïes et des fruits des arbres forestiers , et ils émigrent d’une contrée à une autre, suivant qu'ils y trouvent ces alimens en plus grande abondance. Vers le commencement d'octobre, lorsque les fruits et les graines sont tombés, ils s’assemblent en troupes et se diri- gent peu-à-peu vers les riches plaines de lOhio et du Missis- sipi; les mâles se réunissent eu petites bandes, composées de dix à cent individus, et cherchent leur nourriture séparés des femelles ; celles-ci s’avancent seules avec leur jeune famille ou réunies à d’autres et évitent avec soin les mâles qui attaquent les petits et souvent les tuent; tous suivent cependant la même di- rection et font leur voyage à pied. Lorsqu'une rivière les arrête on les voit se porter sur les points les plus élevés de ses bords et y rester un jour ou deux comme s’ils étaient en délibération ; enfin, lorsque tout est calme autour d’eux, ils montent sur le sommet des arbres et à un signal donné par celui qui parait être le chef de la troupe, tous prennent leur vol vers la rive opposée; les vieux y parviennent facilement, même lorsque la rivière à un mille de large, mais les jeunes tombent sou- vent dans l’eau et achèvent leur traversée à la nage. Arrivé dans un canton où les fruits des arbres forestiers abondent, ils se divisent en petites troupes sans distinction de sexe ni d’äge ,et dévorent tout ce qu’ils rencontrent. Ils passent ainsi l'automne et une partie de lhiver; mais vers le milieu de février, les fe- melles se séparent du reste de la troupe et sont suivies par les mâles qui souvent se livrent alors des combats acharnés ; ils s’apparient bientôt, et les deux époux perchent dans le voisinage l’un de l’autre jusqu’à ce que la femelle commence à pondre, car alors elle se sépare du mâle pour lui dérober ses œufs que sans cela il ne tarderait pas à casser. C’est vers le milieu d'avril qu’elle dépose ainsi dans un nid, construit à terre avec quelques feuilles desséchées, dix à quinze œufs; il paraït que quelquefois plusieurs femelles se réunissent pour placer leurs œufs dans un mème nid et élever leurs petits en commun ; l’une des mères est alors toujours en sentinelle près de la couvée pour en défendre l'approche contre les corbeaux , et même les chats sauvages. | FAMILLE DES GALLINACÉS PROPREMENT DITS. 279 Il n’est pas rare de voir des dindons sauvages se mêler à ceux que l’on élève en domesticité dans les fermes ; quelque- fois c’est pour les attaquer et les chasser de leurs alimens, d’autres fois pour rechercher une femelle et la race mixte résultant de ce mélange est très estimée des fermiers amé- ricains, car les petits sont plus robustes et plus faciles à élever. Nos dindons domestiques sont moins gros que les dindons sauvages, et leur chair est moins savoureuse ; cependant elle est très estimée et nos agriculteurs élèvent un très grand nombre de ces oiseaux ; surtout dans le Périgord , l’Angoumois , la Guyenne, etc. En général , on ne laisse qu’un mâle pour huit à dix femelles , et on les tue ordinairement au bout de trois ans, car en avançant en âge , ils deviennent méchans et coriaces. Les femelles donnent des œufs dès leur première année, et c’est à l’âge de deux ou trois ans qu’elles sont les plus fécondes, la ponte , qui se compose de quinze à vingt œufs, commence bien- tôt après la fin des gelées et se continue de deux jours l’un ; elle a lieu le matin, et se fait le plus souvent loin de la ferme dans les haies ou les buissons , à moins qu’on ait le soin de tenir les pon- deuses enfermées ou de leur préparer , dans un endroit écarté, un nid qui leur plaise et qui soit à l'abri des atteintes du mâle; car, s’il y trouvait une de ses femelles il la maltraïterait et casse- rait ses œufs , qui sont gros , allongés et tachetées de jaune; on peut les conserver un mois sans leur faire perdre leur faculté reproductive, mais il arrive souvent qu’ils sont clairs, c’est-à- dire non fécondés. L’incubation dure trente jours, et la mère couve avec tant de constance que si quelques jours avant la naissance des petits on change ses œufs sans qu’elle le voie, elle recommence sa tâche avec la même assiduité; on peut ainsi la faire rester sur son nid pendant tout l'été, et couver non-seule- ment des œufs d’autres dindes , mais aussi des œufs de poule, de canard et d’oie; cette vie sédentaire lui est cependant très nui- sible, et à la fin de la saison elle devient toujours étique. Les petits dindonneaux sont très sensibles au froid ; l'humidité leur nuit aussi beaucoup, et dans nos climats ils ne prospèrent qu'avec des soins assidus ; les cantons élevés et abrités des vents du nord ei de l’ouest sont ceux qui leur conviennent le mieux, et dans les premiers temps on les nourrit ordinairement avec des orties ou du persil finement hachés et mélés avec de la farine et des jaunes d'œufs cuits. Vers l’âge de deux mois les caroncules rouges commencent à leur pousser et ce moment est pour eux une Crise dans laquelle beaucoup succombent; mais, lorsqu'ils l'ont traversé, ils deviennent robustes et ne craignent plus les intempéries de l'air ; on les réunit alors en troupes pour les ES 570 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. conduire au pâturage, et quand le froid arrive on les engraisse pour la table. Piutades. Les PINTADES (nzumida) ont aussi ordinairement la tête nue, et des barbillons charnus au bas des joues, mais leur queue est courte et pendante ,et leur tarse n’esi pas armé d’un éperon. Les plumes fournies de leur croupion donnent à leur corps une forme bombé, et leur crâne est en général surmonté d’une crète calleuse. Ces oiseaux sont originaires de l'Afrique et y vivent en grandes troupes. L'espèce commune, appelée pintade meleagride, a le plumage ardoisé et couvert de taches rondes et blanches. C’est elle que nous élevons quelquefois en domesticité dans nos basses-cours. Du temps d’Aristote elle était déjà acclimatée en Europe, et les Romains faisaient grand cas de sa chair, mais pen- dant le moyen àge la race s’en est perdue, et nous a été apportée de nouveau par les Portugais à l’époque de leurs premières na- vigations sur les côtes d'Afrique; depuis lors , on a même trans- porté ces oiseaux aux Antilles et au Mexique. Ils sont cependant criards, vifs, turbulens et querelleurs; ils tyrannissent tellement les autres oiseaux de basse-cour qu’on renonce souvent à en éle- ver, bien queleur chair soit excellente et leur fécondité extrême. Paon. Les PAONS (pavo), ainsi nommés d’après leur cri aigu et désa- gréable , ont pour caractères principaux, une aigrette ou une huppe sur la tète,etles couvertures de la queue du mäle extrême- ment longues et pouvant se relever ainsi que les rectrices (dont le nombre est de dix-huit) pour faire la roue. Chacun connait la ma- gnifique espèce que nous élevons pour l’ornement de nos parcs et de nos ménageries ; en décrire ici les formes ou les couleurs serait superflu, mais ce qu’il importe de dire , c’est que, malgré le luxe et la beauté de son plumage, cet oiseau n’a pas tout l'éclat quiluiestnaturel ; à l’état sauvage sa queueest encore mieux four- nie , et le bleu , dont son cou est orné, se prolonge sur le dos et sur les ailes au milieu de mailles d’un vert doré. Il est originaire de l'Inde et a -été apporté en Europe par Alexandre. Dans leurs forêts natales les paons se tiennent dans les fourrées les plus épaisses et les plus élevées , et dépose les œufs à terre dans un irou soigneusement caché ; à l’état de demesticité ils con- servent les mêmes goûts et aiment à se percher sur de grands arbres. La femelle , comme on le sait , n’a pas la brillante pa- rure du mâle ; chez nous elle ne fait chaque année qu’une seule ponte composée de huit à douze œufs, mais il parait que les FAMILLE DES GALLINACÉS PROPREMENT DITS. 577 paons sauvages sont plus féconds. La durée de lincubation est de vingt-Sept à trenie jours, et afin de la mieux assurer ou pour faire produire à la paonne un plus grand nombre d'œufs , on prend souvent le parti de les faire couver par une dinde ou par une poule. Les petits naissent couverts d’un duvet jaunàtre ; dans les premiers temps la mère les mène chaque soir dans un endroit nouveau et jusqu’à ce qu’ils soient assez forts, elle les prend sur son dos et les porte l’un après l’autre sur la branche où ils doivent passer la nuit; le matin elle saute à terre et les provoque à l’imiter. Ces jeunes oiseaux ont besoin d’une nourriture délicate et ce n’est qu'à l’âge de six ou sept mois qu'ils peuvent vivre comme les grands; l’aigrette commence à leur pousser à l’âge dun mois, mais ce n’est qu'à la troisième année que la queue acquiert toute sa longueur, et chaque année, vers la fin de juillet, les plumes, dont elle se compose , tombent en tout ou en partie pour repousser au printemps. On a pré- tendu que le paon pouvait vivre cent ans, mais la durée ordi- naire de sa vie n’est réellement que d'environ vingt-cinq ans. Il existe au Japon une autre espèce de paon , nommé spicifere, dont la queue est presque aussi belle que celle du paon ordi- paire , et c’est aussi à côté de ce genre qu’on doit ranger l’epron- nier et le monaule Où lophophore , magnifique oiseau des mon- tagnes de lIndostan. La TRIBU DES FAISANS comprend les gallinacés proprement dits , dont les joues sont en partie dénudées de plumes et gar- nies d’une peau rouge, et dont les pennes de la queue sont diver- sement disposées , de manière à former un double plan incliné. Chez presque tous , on remarque aussi un fort éperon au tarse du mâle. Ce groupe se compose des coqs , des faisans propre- ment dits et quelques autres autres oiseaux exotiques. Le genre des Coos (gallus) se distingue à la crête charnue et verticale qui surmonte la tête , aux barbillons également char- nus , situés de chaque côté de la mandibule inférieure , et à la queue, composée de quatorze pennes plates , disposées sur deux plans verticaux adossés l’un à l’autre, et garnies en dessus chez le mâle de longues plumes recourbées en arc. Notre cog domestique, dont la femelle a reçu le nom de poule, est l'espèce la plus généralement répandue et la plus anciennement soumise à l'empire de l'homme. On ignore même son origine : il descend probablement de l’une des espèces qui, de nos jours , Faisans. Cogqs. 578 ZOOLOGIE BESCRIPTIVE. se trouvent encore à l’etat sauvage dans les montagnes de l'Indostan , et dans l’ile de Java; mais il est dificfile de dé- cider si c’est du cog de Sonnerat, découvert par le voyageur dont il porte le nom, ou du cog Bankiva. I ressemble , en effet , beaucoup à l’une et à l’autre de ces deux espèces , mais il varie presque à l'infini pour ses couleurs. Chacun connaît les différences individuelles si fréquentes dans la race commune de nos coqs; dans une autre variété , nommée cog de Bentham, le larse, au lieu d’être nu , comme d’ordinaire, est garni de longues plumes , qui ressemblent à des manchettes ; dans une troisième race (le coq huppé), la crète est rudimentaire ou même nulle et est remplacée par une touffe de plumes redressées ; une autre variété encore est remarquable par la couleur noire de sa crète, de ses barbillons et du périoste de tout son squelette (c’est le rog negre); enfin il est des races qui sont modifiées au point de pré- senter, pendant plusieurs générations successives, cinq ou même six doigts, tandis que le nombre normal ne dépasse pas quatre ni chez le coq , ni même chez aucun autre oiseau. On ne sait presque rien sur les mœurs des coqs sauvages. A létat de domesticité , ces oiseaux s’accommodent de toute espèce de nourriture. On les voit , pendant toute la journée , occupés sans cesse à gratter la terre et le fumier, pour y chercher des alimens; les graines, les larves et les insectes qu’ils trouvent ainsi suffisent presque à leur entretien , et, dans nos fermes, ils n’ont guère besoin d’un supplément de nourriture qu’en hiver et au prin- temps ; on leur jette alors matin et soir des graines farineuses , des racines cuites, les débris de la table, du son mêlé à des eaux de vaisselle ou tout autre aliment, suivant les res- sources qu'offre la localité , et afin de leur procurer en abon- dance des vers et des larves, dont ils sont 1rès friands , on établit souvent dans les basses-cours des fosses appelées vermi- nieres , Où lon mêle à de la paille le sang , les intestins et les autres débris d'animaux ; car les mouches viennent en grand nombre déposer leurs œufs dans ces matières en putréfaction , et en peu de jours convertissent , pour ainsi dire, le tout en un monceau d’asticots.La fécondité des poules est extrême, mais ne dure guère que quatre ans ; à l’exception du temps de la mue et du mois qui la suit, c’esi-à-dire depuis la fin d'octobre jus- qu’au milieu de janvier, celles qui ne sont pas occupées à couver pondent presque tous les jours ; en les préservant du froid eten les nourrissant avec des alimens substantiels etexcitans on peut mème les faire produire aussi en hiver. On a calculé que, terme moyen , chacune de nos poules communes donne plus de cin- quante œufs par an. Un seul coq peut suffire à vingt-cinq poules, el lorsque les œufs sont destinés à la consommation, son con- FAMILLE DES GALLINACÉS PROPREMENT DITS. 579 cours n’est même pas nécessaire, Car la poule abandonnée com- plètement à elle-même peut encore pondre comme dans les cir- constances ordinaires , seulement ses œufs sont alors clairs, c'est-à-dire stériles. Après avoir donné un certain nombre d'œufs la poule éprouve le desir de couver et le manifeste par un Cri particulier; d'ordinaire on lui laisse alors douze à quinze œufs, et on a soin de lui ménager, dans un endroit tran- quille, un nid garni de paille brisée. L’incubation dure vingt- et-un jours , lorsque le petit poulet est prèt à naître, il brise sa coquille à laide d’une protubérance osseuse et caduque dont son bec est garni. La mère prodigue à ses poussins les soins les plus assidus : les abrite sous ses ailes, les conduit à la re- cherche de leur nourriture , les défend avec courage et semble être fière de sa jeune famille ; l'instinct de la maternité est même poussé si loin chez ces oiseaux qu’ils adoptent, pour ainsi dire, tous les jeunes qu'on confie à leurs soins, et comme une seule poule suffit pour conduire vingt-cinq à trente poussins , on ré- unit, en général, les poussins de deux couvées, et on remet l’une des mères à pondre ou à couver. Le coq, ainsi que nous l'avons déjà dit, ne s’occupe ni de lincubation , ni de l’éduca- tion des petits; on a vu cependant quelques exemples du con- traire , dans des cas où la poule avait été tuée ou avait abandon- né sa couvée, et on parvient facilement à dresser des chapons à couver et à conduire une nombreuse poussinée. Quelquefois on a recours aussi à d’autres moyens pour faire éclore les œufs : c’est en les maintenant à une température voisine de celle de son corps que la couveuse y détermine le développement du poulet , et pour produire le même phénomène il suffit de les placer dans des circonstances semblables, dans des fours conve- nablement chauflés par exemple. C’est ce que l’on fait habituel- lement en Egypte; cette industrie y est exercée principalement par les habitans de Bermé, village du Delta, et se pratique à l'aide d’un appareil appelé mamal. On a fait en France diverses tentatives pour arriver au même résultat; et on y a parfaitement bien réussi, mais ces procédés d’incubation artificielle n’ont pas donné tous les profits qu’on en attendait. C’est dans la Normandie , la Bretagne, le Mans et les parties centrales de la France que nos fermiers élèvent le plus grand nombre de poulets. Pour rendre ces oiseaux plus délicats et plus faciles à engraisser , on enlève souvent aux poules les ovaires et aux jeunes coqs les glandes correspondantes ; après cette opéra- tion ils prennent les noms de poulardes et de chapons. Non-seu- lement nous en consommons un nombre immense, mais chaque année on expédie pour l'Angleterre, où ces oiseaux sont plus chers à élever, des cargaisons considérables d'œufs. 580 ZOCLOGIE DESCRIPTIVE. Faisans pro- Les FAISANSPROPREMENT DITS (phasianus)se distinguent par leur prement dits. tueue longue, étagée et composée de dix-huit pennes ployées cha- cune en deux plans longitudinaux et se recouvrant comme des toits. De même que les précédens ils appartiennent à l'Asie, mais se sont répandus depuis long-temps en Europe et même dans les autres parties de l’ancien continent. L'espèce la plus ancienne- ment connue et la plus commune se trouve en abondance à lé- tat sauvage dans le Caucase et dans les plaines couvertes de joncs qui avoisinent la mer Caspienne. On croit généralement que son introduction en Grèce date de expédition des Argo- nautes aux bords du Phase. Aujourd’hui. on lélève dans les parties tempérées de l'Europe, mais elle exige beaucoupde soins. Le mâle est un bel oiseau dont la tête et le cou sont d’un vert doré, le reste du corps d’un marron tirant sur le pourpre et très brillant , et la queue grisätre, mélée de brun et de marron. La femelle est plus petite et la couleur générale de son plumage n’est qu'un mélange de brun, de gris, de roussätre et de noir. Ces animaux se nourrissent de grains , de baies et d'insectes , se plaisent dans les plaines boisées et humides, passent la nuit per- chés au haut des arbres et nichent dans les buissons ou au pied des arbres; leurs œufs sont moins gros que ceux de la poule , à coquille très mince et d’une couleur gris-verdâtre avec de pe- tites taches brunes. La durée de lincubation est de vingt-trois à vingt-quatre jours , et il parait que ces oiseaux vivent d’ordi- naire six à sept ans. Nous possédons aussi trois autres espèces qui sont originaires de la Chine: le faisan à collier qui ne diffère du faisan commun que par une tache blanche de chaque côté du cou; le faisan argentée qui est blanc en dessus avec des lignes noires , très fines sur chaque plume, noir en dessous , et qui s’apprivoise plus facilement que les précédens ; enfin, le /aisan dore si re- marquable par la magnificence de son plumage; sa tête est ornée d’une huppe pendante d’un jaune d’or, son cou est revêtu d’une collerette crangée , maillée de noir; son ventre est rouge de feu; le haut de son dos est vert; les ailes rousses ; le crou- pion jaune, et sa longue queue est brune, tachetée de gris. Cuvier pense que la description du phénix, donnée par Pline le naturaliste, a été faite d’après ce bel oiseau. L’aARGUS, l’un des plus singuliers oiseaux par le grand déve- loppement des pennes secondaires des ailes et par les taches en forme d’yeux qui couvrent ces plumes , ainsi que celles de sa longue queue , doit prendre place à côté des faisans proprement dits. Il habite les montagnes de Sumatra et de quelques autres contrées du sud-est de PAsie. Tragopans. On range aussi dans cette tribu les TRAGOPANS Ou népauls Se FAMILLE DES GALLINACÉS PROPREMENT DITS. 581 qui sont originaires de l'Himalaya, et qui se remarquent à cause de leurs tête presque nue et bizarrement ornée chez le mâle de deux petites cornes grèles , d’où leur est venu le nom de faisans cornus(voy. fig. 213, pag. 567); leur plumage est d’un rouge éclatant semé de petites larmes blanches. Enfin on donne le nom de GRYPTONYx à d’autres gallinacés également voisins des faisans , qui manquent d’éperons et d'ongles au pouce. La tribu la plus nombreuse de la famille de gallinacés or- dinaires est celle des TÉTRAS , qui a pour principal caractère une bande nue et le plus souvent rouge qui occupe la place du sourcil; elle se com- pose de deux groupes ; lun , comprenant les coqs de bruyère, les la- gopèdes et les gangas, qui ont tous le tarse garni de plumes; l’au- tre , formée des tétras à tarses nus, savoir : les perdrix, les cail- les , etc. ER . Fig. 216. LAGO = PÈDE ORDINAIRE. Les COQS DE BRUYÈRE (fetrao) se reconnaissent à leurs jambes couvertes de plumes et dépourvues d’éperon, leurs doigts nus et leur queue ronde ou fourchue. Nous en avons trois espèces, dont l’une appelée le grand coq de bruycre, est le plus grand de nos gallinacés; il dépasse pour la taille nos dindons; le mâle a environ trois pieds de longueur et a le plumage ardoisé, fine- ment rayé en travers de noir sur les côtés; la femelle, d’un tiers plus petite, est rayée et tachetée de roux, de noir et de blanc. Cet oiseau est rare en France, mais se trouve en grand nombre dans les forêts des hautes montagnes, depuis lAlle- magne jusque dans le nord de l'Asie, et niche à terre dans les bruyères ou les nouveaux taillis. Les mâles ont la voix forte et leur trachée présente une disposition remarquable: parvenue à la partie inférieure du cou elle décrit deux courbures avant que de pénétrer dans la poitrine. Leur chair est excellente, mais On n’a pu réussir à les réduire en domesticité. Le petit cog de bruyere qu’on appelle aussi cog de bouleau , faisan noir ou cog de bruyère à queue fourchue , se distingue de l'espèce précé- Tétras. Cogqs de bruyére. Lagopedes. Gangas, Franeolins, 582 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. dente par la forme de la queue qui, chez celui-ci , est ronde et par l’absence de longues plumes sous la gorge; sa taille est celle de notre coq domestique, et son plumage est plus ou moins noir. Il est plus répandu dans les parties centrales de l'Europe, et vit dans les bois qui avoisinent les bruyères et les champs ; sa nourriture consiste principalement en bourgeons de hêtre , de bouleau , de sapin et en graines, mais il mange aussi des in- sectes. Notre troisième espèce de coq de bruyère est la gelinotte ou poules du coudrier qui n’est guère plus grosse que la perdrix ; son plumage est agréablement varié de brun, de blanc, de gris et de roux, et sa tête est un peu huppée , quelquefois on en voit qui sont d’un blanc pur. Elle fréquente les montagnes couvertes de pins , de sapins, de bouleaux et de coudriers; on en trouve dans les Vosges. On donne le nom de LAGOPÈDES, Ou perdrir de neige, à des tétras qui ne diffèrent guère des précédens que par leurs doigts garnis de plumes comme la jambe , et par leur queue carrée ou ronde. Le Zagopède ordinaire (fig. 216, pag. 581), qu’on appelle quelquefois aussi perdrix des Pyrénées, habite les hautes mon- tagnes du centre et du nord de l’Europe ; ilest très commun en Suisse , et se trouve aussi en Amérique. Il se nourrit de toutes sortes de baïes et de feuilles de plantes alpestires ; vole par troupes, et niche dans les lieux ouverts. Il parait que pendant l'hiver ilse tient dans des trous qu'il se creuse sous la neige. Son plumage varie suivant les saisons ; en hiver, il est d’un blanc pur avec une bande noire sur les côtés de la face; en été, il est d’un cendré roux , rayé de noir en dessus et à la poitrine , blanc en dessous. On sépare sous le nom générique de GANGA (pterocles) les tétras, qui ne se distinguent des précédens que par leur queue pointue, leurs doigts nus et leur pouce très petit. La ganga ordinaire ou gélinotte des Pyrenees , qui se trouve dans les landes stériles du midi de la France, appartient à cette division. Les tétras, dont les tarses sont nus comme les doigts, sont dési- gnés par quelques naturalistes sous le nom collectif de PERDRIx, mais on les subdivise ensuite en francolins, perdrix proprement dites , cailles et colins. | Les FRANCOLINS ont le tarse armé, chez le mâle, d’un et quelquefois de deux éperons , le bec un peu plus long et plus FAMILLE DES GALLINACÉS PROPREMENT DITS. 583 fort que les perdrix ordinaires, et la queue plus développée: ils vivent dans leslieux humides , se perchent sur les arbres et se nourrissent comme nos perdrix. Il s’en trouve une espèce dans les parties les plus méridionales de l'Europe , en Barbarie , etc. : c’est le francolin à collier roux. Les PERDRIX PROPREMENT DITES (perdir) n’ont que des éperons Perdrix pro- très courts ou de simples tubercules aux tarses; elles se tiennent prementdites. dans les champs et ne se perchent pas sur les arbres. L'espèce la plus commune est la perdrix grise, qui a le bec et les pieds cen- drés, la tête et la gorge fauves , une tache marron sur la poitrine du mâle, et le reste du plumage gris, mêlé de roux et de noir. Elle vit dans les parties tempérées de l’Europe , et se plait dans les pays de plaines où elle peut trouver de grandes prairies ou des champs semés de blés. Jusqu'au mois d’avril, elles s’ytiennenten troupes ; mais alors ces oiseaux se retirent par paires, et contrai- rement à ce qui se voit chez la plupart des gallinacés ordinai- res , passent l’été en monogamie. La femelle pond quinze à vingt œufs, dans quelque trou garni d’un peu d’herbe et couve pendant trois semaines. Le mâle ne l’aide pas dans ce travail , mais reste auprès de son nid et semble s’y tenir en sentinelle : c’est vers la fin de juin que les petits éclosent. Ils courent dès leur naissance et vivent avec leurs parens jusqu’au printemps suivant. Le mâle se joint à la femelle , pour conduire et protéger la couvée. Si un danger meriace les jeunes, ils déploient tous deux de l'adresse aussi bien que du courage, pour en éloigner leurs ennemis. Dans leur première Jeunesse , les perdrix se nourrissent d’insectes ; mais plus tard elles vivent principalement de graines et surtout de blé , qu’elles retirent très bien de terre , même lorsque le sol est couvert de neige. Ce gibier, comme chacun le sait, est très es- timé, ce qui le rend l’objet d’une chasse active. La perdrix rouge , un peu plus grosse que la précédente , s’en distingue facile- ment par la couleur rouge de ses pieds et de son bec: elle se tient de préférence sur les collines et les endroits élevés , et est assez répandue dans le midi de la France, mais rare dans le nord. La bartavelle Ou perdrir grecque ressemble beaucoup à la rouge et se trouve dans les montagnes du midi de l'Europe : il parait que c’est à cette espèce que doit se rapporter tout ce que les anciens ont dit de la perdrix. Les CAILLES (coturnir) différent des perdrix ordinaires par leur Cailles. queue courte, penchée vers la terre et cachée par les plumes du croupion , par leur bec en général plus mince, par l’absence de sourcils rouges et par leurs tarses dépourvus d’éperons. 38 Colins. Turnix, ete. Caractèreset mœurs. 584 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. La caille commune est célèbre par ses migrations : c’est un oiseau lourd et qui paraît mal conformé pour voler ; cependant, chaque année , 1l nous quitte pour traverser la Méditerranée et passer l’hiver en Afrique. Les cailles se réunissent alors en troupes nombreuses et volent de concert, le plus souvent au clair de la lune ou pendant le crépuscule. Quand elles rencon- tirent sur leur route une île ou quelques rochers , elles en pro- fitent pour s’y reposer , et, en automne, elles s’abattent en si grand nombre dans LE TEE poinis dé l'archipel du levant, que le produit de leur chasse est d’un revenu considérable. Excepté aux époques du voyage, elles vivent isolées. Le mâle est polygame et ne prend aucun soin de sa couvée ; les pe- tits se séparent de leur mère aussitôt qu’ils peuvent se suffire à eux-mêmes. C’est à terre et le plus souvent dans les blés, que celle-ci dépose ses œufs, dont le nombre varie de huit à qua- torze. Ces oiseaux se HE dans les champs , jamais dans les bois et se nourrissent de graines et d'insectes. Les coLixs se trouvent en Amérique et ne diffèrent que peu des précédens. On range encore auprès des tétras les TURNIX, qui ont le port des cailles , mais qui manquent de pouce, et les TINAMOUS, dont la queue est presque nulle. ORDRE DES ÉCHASSIERS. Les oiseaux dont nous nous sommes occupés jusqu'ici sont essentiellement terrestres; les uns poursuivent leur proie au vol ; les autres trouvent leur nourriture sur les arbres ou à terre. La plupart de ceux dont il nous reste à parler sont , au contraire , aquatiques: ils vivent ordinairement de poissons et des autres animaux dont les eaux fourmillent , et par consé- quent habitent eux-mêmes sur cetélément ou dans son voisinage; mais tous n’y cherchent pas leur nourriture de la même ma- nière. Les uns sont nageurs, les autres conformés pour marcher à gué dans les eaux peu profondes. Ces derniers , que l’on désigne souvent sous le nom d'oiseaux de rivage, se font remarquer par un mode d'organisation en rapport avec leurs mœurs : leurs pattes sont si longues, que ces ORDRE DES ÉCHASSIERS. 585 animaux paraissent comme s'ils étaient montés sur des échasses; le bas de leursambes est dépourvu de plumes , comme le tarse ; leur taille est élancée, et la lon- gueur de leur cou ou de leur bec est telle que, tout haut montés qu’ils sont sur leurs pattes, ils peuvent, sans se baisser, ramasser à terre leurs alimens. Natura non facit saltum , a dit un philosophe , pour peindre l’enchainement qui semble exi- ster dans toute la création et pour exprimer que, chez les ani- maux comme chez les végétaux , les grandes différences d’organi- sation ne se montrent pas tout- à-coup à l’observateur, mais sont en quelque sorte amenées par une foule de degrés intermédiaires à l’aide desquels tel ou tel genre de conformation se trouve transfor- mé en un mode de structure tout : différent. Ces passages plus ou Fig. 217. CIGOGNE A SAC. moins graduels d’un type à un autre , Si intéressans à étudier pour l’anatomiste et lephysiologiste, sont souvent pour les clas- sificateurs la source de grandes difficultés et sont la cause prin- cipale des changemens que les auteurs proposent sans cesse dans certaines parties de nos méthodes; car elles nousobligent souvent de fixer un peu arbitrairement les limites des groupes naturels formés par les animaux, et ici, comme en toutes choses, ce qui est arbitraire est instable. L'ordre, dont l’histoire nous oc- cupe en ce moment, nous offre des exemples de ces modifica- tions successives et par degrés presque insensibles ; aussi les zoologistes sont-ils loin de s’accorder sur les limites qu’il con- vient d'y assigner. Les uns en séparent les oiseaux qui, à raison de leur structure ou de leurs habitudes, n’offrent pas tous les caractères propres aux oiseaux de rivage, tandis que d’autres ras- semblent autour d’eux ceux qui ont avec eux le plus d’analogie, comme dans l’organisation sociale de quelques peuples de l’an- tiquité , on groupait autour de chaque famille puissante les ci- toyens moins marquans qui, sans en faire naturellement partie, y tenaient par des liens quelconques. M. Cuvier, dont nous avons cru devoir prendre la méthode pour guide dans ces le- çons , a adopté cette dernière marche, et afin de ne pas trop 38. Classif£cae t:08. 586 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. multiplier les divisions, il réunit aux oiseaux de rivage, d’au- tres oiseaux qui vivent loin des eaux, et qui par leurs mœurs ressemblent davantage aux gallinacés , mais qui cependant par l’ensemble de leur structure aussi bien que par la longueur de leurs paties ne diffèrent que peu des premiers. C’est le groupe ainsi formé que l’on désigne sous le nom d’ÉCHASSIERS pour rappeler le trait le plus saillant de leur conformation ordinaire ; mais cette dénomination ne leur est pas également applicable à tous, car le motif qui a fait réunir aux oiseaux de rivage des échassiers non aquatiques, a fait ranger aussi dans cet ordre quelques espèces dont les pattes n’ont pas cette longueur déme- surée. Il en résulte que, pour caractériserid’une manière absolue cette division, on ne peut se servir de l’ensemble des particula- rités d'organisation déjà indiquées, comme étant propres à la plu- part de ces oiseaux et qu’on ne peut guère indiquer comme très commune à tous, que la nudité de la partie inférieure de la jambe. Les échassiers ne perchent que peu ou point; le pouce leur est, par conséquent, moins utile qu’à la plupart des oiseaux : aussi est-il souvent très court ou tout-à-fait nul ; tantôt les au- tres doigts sont tout-à-fait séparés , d’autres fois tous les trois ou seulement les deux externes sont unis à leur base par une petite palmure. Leur régime varie beaucoup; ceux qui vivent éloignés des eaux se nourrissent principalement de matières végétales, les autres de poissons ou de reptiles quand leur bec est robuste, d'insectes et de vers quand il est faible. La longueur de leur tarse et la nudité de la partie inférieure de leurs jambes leur permetient d’entrer dans l’eau jusqu’à une certaine pro- fondeur sans se mouiller les plumes, et la longueur de leur cou et de leur bec, proportionnée à celle des paties , leur per- met aussi d’y pêcher commodément. La plupart de ces oiseaux ont les ailes longues et sont bons voiliers; mais il en est qui sont complètement privés de ce mode de locomotion; ces der- niers courent avec une grande célérité, tandis que les pre- miers ont souvent la démarche lente et compassée. Quand ils volent, au lieu de reployer leurs pattes sous le ventre comme le font les autres oiseaux, ils les étendent en arrière comme pour faire équilibre à leur long cou; la plupart font périodiquement de longs voyages, et se réunissent alors en troupes nom- breuses. Enfin il en est qui nagent très bien, mais c’est le plus petit nombre. Cetordre se compose de cinq familles principales et de quelques genres qui ne peuvent se rapporter à aucune de ces divisions et qui doivent former autant de petits groupes distincts; les pre- miers ont été nommés d’après leurs caractères les plus saillans : brévipennes, pressirostres, cultrirostres, longirostres et ma- FAMILLE DES ÉCHASSIERS BRÉVIPENNES. 587 crodactiles ; les derniers sont les flamans , les giaroles et les vaginales. : Les BRÉVIPENNES sont caractérisés par la brièveté extrême de leurs ailes qui leur ôte entièrement la faculté de voler. Les PRESSIROSTRES Ont souvent les ailes courtes, mais tous peuvent voler ; ils ont le bec médiocre, mais fort ; les jambes hautes et sans pouce ou munie d’un pouce trop court pour tou- cher à terre. Les CULTRIROSTRES se reconnaissent à leur bec gros, long, fort et le plus souvent tranchant et pointu; leur pouce est, en général , assez long pour s’appuyer sur le sol. Les TÉNUIROSTRES doivent leur nom à leur bec longs , grèleet, en général , faible ; leur pouce est ordinairement court et quel- quefois manque complètement. Les MACRODACTYLES ont les doigts extrêmement long et quel- quefois élargis latéralement par des bordures , mais toujours libres. Les vAGINALES diffèrent des autres échassiers par leurs jambes courtes, presque comme dans les gallinacés. On n’en connaît qu’une espèce qui habite la Nouvelle-Hollande. Les GIAROLES ont les jambes de hauteur médiocre et le bec court, arqué et ressemblant à celui des gallinacés. Enfin les FLAMANS se distinguent par leur bec coudé et par plusieurs autres caractères que nous indiquerons plus tard. FAMILLE DES BRÉVIPENNES. La famille des échassiers brévipennes se compose des autruches et des casoars, oiseaux singuliers qui , au lieu d’être organisés pour le vol ,sont spécialement conformés pour la course. Leurs ailes sont trop courtes pour pouvoir les soutenir dans Pair, et ces organes ne servant plus aux usages ordinaires, les muscles de la poitrine, le sternum et les os de l’épaule ne présentent plus les particularités de structure que nous avons vues chez les autres oiseaux et quenous avons ditêtre en rapport avec la production des mouvemens puissans nécessaires pour le vol. Ces muscles , en effet, sont faibles et minces; le sternum est réduit à un simple bouclier, sans arête longitudinale et les deux branches de la fourchette ne se réunissent pas comme d'ordinaire. Mais d’un autre côté leur longues pattes sont très robustes et les muscles de leurs cuisses et surtout de leurs jambes ont une épaisseur énorme. Aussi courent-ils avec une célérité extrême. Tous sont dépourvus de pouce. Aütruches. 588 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE Les brévipennes n’ont pas les mœurs des oiseaux de rivage ; ils vivent dans les lieux secs et déserts, et se nourrissent princi- palement d’herbes et de graines ; leur bec est médiocre et obtus. Les AUTRUCHES (struthio) ont les ailes revêtues de grandes plumes molles et flexibles , et dont les barbules ne s’accrochent pas ensemble comme chez la plupart des oiseaux. Leur bec est déprimé et mousse au bout; leur langue courte, et arrondie parait insensible aux sa- veurs; leur jabot est énor- me ,et leurs intestins vo- lumineux , et pourvus de longs cœcums. Elles sont herbivores ; dans le midi de l’Afrique on les voitsouvent paître, mais leur voracitéest si exces- sive, qu’elles engloutis- sent sans choix tout ce qu’elles rencontrent, mé- me les substances les plus dures et les moins pro- pres à servir d’alimens, telles que des pierres, des pièces de monnaie, des morceaux de fer, de mn TS verre, etc. La portion Fig. 218. AUTRUCHE D'AFRIQUE. terminale de leur canal intestinal présente une particularité remarquable : elle consti- tue un vaste réceptacle où l’urine s’accumule comme dans une vessie; cette disposition ne se rencontre pas ailleurs : aussi ces oiseaux sont-ils les seuls qui urinent. Les autruches courent avec une rapidité si grande qu’elles dépassent les meilleurs chevaux, etont tant de vigueur dans les jambes que d’un coup elles peu- vent lancer loin d’eux une pierre assez lourde; elles étendent leurs ailes en courant, et lorsque le vent les favorise s’aident ainsi dans leur course. Du reste, ce sont des oiseaux stupides et qui n’offrent rien de bien remarquable dans leur instinct, si ce n’est peut-être la manière dont ils déposent de leurs œufs. On connaît deux espèces d’autruche; l’une propre à l’ancien continent, et caractérisée principalement par l'existence de deux doigts, dont un, l’externe, est court et dépourvu d’ongle ; l’autre a trois doigis gros , habite l'Amérique, et forme pour beaucoup de naturalistes un genre distinct. FAMILLE DES ÉCHASSIERS BRÉVIPENNES. 589 L'autruche d Afrique est le plus grand de tous les oiseaux ; elle atteint septet même huit pieds de haut ; lemäâle estordinairement d’un beau noir mêlé de blanc et avec de grandes plumes blanches aux ailes et à la queue ; chez la femelle le noir est remplacé par du gris uniforme. Elle vit en troupes dans les déserts sablonneux de l'Arabie et de toute l'Afrique. Ses œufs sont très gros et pèsent près de trois livres ; la femelle en pond cependant un nombre très considérable ; elle ne construit pas de nid, mais les dépose à terre dans un trou et on assure que, dans la zone torride, au lieu de les couver, elle en abandonne lincubation à la chaleur des rayons solaires; dans des pays moins chauds elle les couve, il parait même que souvent plusieurs réunissent leurs œufs dans un même trou, et s’y accroupissent alternativement; en général on trouve autour de cette espèce de nid un certain nombre d'œufs non fécondés , et on prétend que l’autruche les met en réserve pour servir d’alimens aux petits qui doiventéclore. Les mâles cou- vent aussi bien que les femelles, et paraissent vivre tantôten mo- nogamie , tantôt en polygamie. C’est cette espèce qui fournit les belles plumes larges et ondoyantes dont les dames se servent pour leur parure. Le nandou ou l’autruche d’ Amerique diffère tant de lespèce précédente que beaucoup d’ornithologistes en font un genre distinct ; sa taille est moitié moindre , et son plumage grisâtre ; mais le caractère principal, par lequel il se distingue, est le nombre de ses doigts et l’existence d’ongles à tous ces appen- dices. Il habite l'Amérique méridionale , et se tient, par paires ou en petites troupes , dans les plaines découvertes; sa rapi- dité à la course est extrême, et il est bon nageur. Par leurs mœurs les nandous ressemblent beaucoup à l’autruche d’Afri- que; mais leurs plumes sont loin d’avoir la même valeur et ne servent guère qu’à faire des houssoirs. Les CASOARS ( casuarius) sont en quelque sorte les représen- tans des autruches dans l'Archipel indien et la Nouvelle-Hol- lande ; de même que celles-ci ils acquièrent une taille très éle- vée, courent avec une grande vitesse, et ne peuvent se servir de leurs ailes pour voler ; mais ils s’en distinguent au premier coup-d’œil par leurs plumes dont les barbes sont si peu garnies de barbules que de loin elles ressemblent à des crins tombans ; leurs ailes sont encore plus courtes que celles des autruches et sont même totalement inutiles pour la course , leurs pieds ont trois doigts, tous garnis d'ongles ; leurs intestins sont courts et leur cloaque n’est pas plus grand que dans les autres oiseaux. On en connaît deux espèces : l’emeu Ou casoar à easque qui ha- Casoar:i. Ontardss. 590 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE.. bite les iles de l’Archipel indien, et le casoar de la Nouvelle- Hollande. Le premier est, après l’autruche d’Afrique, le plus grand des oiseaux; ses plumes sont pour la plupart doubles, chaque tuyau donne naissance à deux tiges ; ses ailes sont ar- mées de cinq pennes faibles et dénuées de barbes qui ressem- blent à des piquans; sa tête est ornée d’une proéminence os- seuse en forme de casque et garnie , ainsi que le haut du cou, d’une peau nue, teinte en bleu céleste et en couleur de feu. Il ne mange pas de graines ei se nourrit de fruits, d'œufs , etc. ; par ses mœurs il ressemble beaucoup à lautruche. Le casoar de la Nouvelle-Hollande n’a pas de casque , ni d’éperons à Paile. FAMILLE DES PRESSIROSTRES. Les caractères de ce groupe sont : des jambes élevées, sans pouce , ou dont le pouce est trop court pour toucher à terre; des ailes tantôt grandes , tantôt médiocres , mais pouvant tou- jours servir au vol; un bec médiocre et assez fort pour percer la terre et y chercher des vers. On y range les outardes , les plu- viers , les vanneaux , les huîtriers , etc. Les OUTARDES (otés) sont des oiseaux lourds , qui volent mal et qui ressemblent aux gallinacés par leur port massif, leur mandi- bule supérieure médiocre et légèrement voûtée, et leurs doigts réunis par de très petites palmures ; mais ils tiennent encore da- vantage aux échassiers par la forme deleurs pattes et par presque tous les points de leur anatomie.'Tls n’ont que trois doigts; le tarse réticulé et les ailes courtes ; lorsqu'ils courent ils s’aident de leurs ailes et rasent ainsi la terre avec rapidité; leur nour- riture consiste en graines , en herbes , en vers et en insectes; ils se plaisent dans les plaines rocailleuses et sablonneuses, ne perchent pas, et déposent leurs œufs à terre dans un trou au milieu des blés ou de l'herbe. La grande outarde esi le plus gros des oiseaux d'Europe; le mâle a, en général, environ trois pieds de long, et pèse une vingtaine de livres ; la femelle est d’un tiers moins forte. Leur plumage est jaune, traversé par des traits noirs sur le dos, gri- sâtres sur la tête , le cou et la poitrine. Cette outarde vit d’or- dinaire dans les grandes plaines découvertes ; elle se trouve en Allemagne , en Italie, dans quelques parties de la France, etc. ; pendant l’hiver on la voit assez communément dans la Champa- gne, le Poitou , etc.; elle est très farouche et ne se laisse que difficilement approcher ; sa chair est très estimée. La cannepeticre estune petite espèce d’outarde qui n’est guère FAMILLE DES ÉCHASSIERS PRESSIROSTRES. 591 plus grande qu’un faisan, et qui est beaucoup plus rare que l'espèce précédente; elle nous arrive au printemps; se plait dans les champs d’avoine et d’orge, ainsi que dans les prairies arti- ficielles , et nous quitte vers la fin de septembre. Les PLUVIERS (charadrius) manquent aussi de pouce, et ont le bec médiocre , mais d’une forme différente de celle des outardes, car ilest comprimé et renflé au bout. On les divise en ædicnè- mes , dont le bec est renflé en dessous comme en dessus , et percé par les narines dans la moitié de la longueur ; eten pluviers pro- prement dits , dont le bec est renflé en dessus seulement ; et oc- cupé dans les deux tiers de sa longueur par les fosses nasales, ce qui le rend plus faible. Les OEDICNÈMES ont des rapports avec les petites espèces d’outardes , et vivent de préférence loin des eaux dans les lieux pierreux et incultes; il s’en trouve en Europe une espèce l’œdicnème ordinaire , appelée vulgairement courlis de terre , qui est de la taille d’une bécasse, et de couleur grisätre avec une flamme brune sur le milieu de chaque plume; cet oiseau se nourrit principalement de petits quadrupèdes, de limaçons, de vers et d'insectes ; à terre il est solitaire , très timide, et fuit en courant avec rapidité ou en rasant la terre ; pen- dant le jour il se tient tranquille et blotti contre le sol; mais au coucher du soleil il se met en marche et ne fait que crier pendant une grande partie de la nuit. Pendant tout lété on trouve ces oiseaux en assez grand nombre dans différentes parties de la France; mais au mois de novembre ils se réunis- sent en troupes de trois ou quatre cents et se dirigent vers le midi. Les PLUVIERS PROPREMENT DITS vivent Ordinairement en troupes nombreuses et fréquentent les bords de la mer, les ma- rais et les embouchures des fleuves; leur nom leur vient de ce que chez nous ils ne sont que de passage ; on les voit surtout à l’époque des pluies de lPautomne et du printemps. Nous en possédons plusieurs espèces , dont la plus commune est le plu- vier doré , qui est répandu sur presque tout le globe, et qui a le plumage noirâtre, pointillé de jaune, avec la gorge et le ventre blancs ; en hiver il abonde sur nos côtes, et on le voit sur la plage suivre constamment la ligne des eaux, en poussant un petit cri et en frappant le sable humide de ses pieds pour mettre en mouvement les vers et les autres petits animaux marins dont il se nourrit. Il niche dans le nord. Les VANNEAUX (trénga) ressemblent beaucoup aux pluviers, mais s’en distinguent par l’existence d’un pouce qui, à la vérité, est si court qu’il ne peut toucher à terre ; leurs mœurs sont ana- Pluviers. OEdicuèemes. Pluviers pro- prement dits. Vanveaux, Iluîftriers, £ourvite. 592 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. logues à celles à celles des pluviers. Le vanneau gris Où vanneau Fig. 219. pluvier va de compagnie avec ces oiseaux, et leur ressem- ble le plus à raison de l’état rudimentaire de son pouce. Les vanneauxr proprement dits ont le tarse écussonné au ; ù lieu d’être réticulé, et le } TXL pouce plus long; l’espèce d'Europe, qu’on désigne d’or- dinaire sous le nom de van- neau huppe(fig. 229), arriveen France par grandes troupes vers le commencement de mars; son vol est puissant et élevé, et à la manière dont il varie ses positions pendant qu’il voltige au-dessus des champs et des marais, on dirait qu’il se plait à folâtrer avec grâce et à déployer sa légèreté. Il est très farouche, et en s’élevant de terre, il pousse un petit cri sec, dont les mots dix-huit rendent assez bien le son ; sa nourriture consiste prin- cipalement en vers qu’il sait tirer de terre avec une grande adresse. La ponte a lieu en avril, et vers la fin d'octobre les fa- milles de vanneaux, dispersées jusqu'alors dans les champs marécageux , se rassemblent en bandes de cinq à six cents indi- vidus et émigrent vers le sud. Les HUITRIERS ( Aæmatopus ) se distinguent facilement des précédens par leur bec fort, droit, pointu et comprimé; leurs jambes sont de hauteur médiocre ,et leurs pieds pourvus de trois doigts seuiement. Ils vivent toujours sur les bords de la mer et suivent les mouvemens de la lame ; ils courent et volent très vite, ethien que leurs pieds ne paraissent pas conformés pour la nata- tion , on les voit quelquefois nager avec facilité ; leur nourriture consiste principalement en vers et en mollusques et à l’aide de leur bec ils parviennent à ouvrir les coquilles d’huitres et d’au- tres bivalves pour en extraire les animaux. Pendant la saison de la reproduction ils vivent solitaires, mais ils se rassemblent en troupes pour entreprendre leurs voyages périodiques. L’espèce d'Europe a été nommée aussi pie de mer à cause de son plu- mage noir et blanc; c’est un oiseau de la taille du canard, qui niche au milieu des herbes dans les prairies marécageuses. Enfin on place aussi près des huiïtriers et des outardes des oi- seaux à ailes courtes , à jambes hautes et à bec grèle et conique, qui se montrent quelquefois en France , et qu’on appelle COURE- VITE ( cursorius ), à raison de la rapidité de leur course. none. EEE de nn FAMILLE DES ÉCHASSIERS CULTRIROSTRES. 593 BAMILLE DES CULTRIROSTRES. Les échassiers de la famille des cultrirostres se reconnaissent à leur bec gros , long, fort, et le plus souvent même tranchant et pointu. Chez plusieurs d’entre eux , la trachée du male se replie de diverses manières sur elle-même ; leurs cæcums sont courts ; leurs pattes longues , et leurs doigts au nombre de quatre. On peut les diviser, d’après la conformation du bec en trois tribus, ayant pour types les GRUES , les HÉRONS et les CIGOGNES. Dans la TRIBU DES GRUES , le bec est droit , peu fendu et oc- cupé, dans près de la moilié de sa longueur, par les fosses mem- braneuses des narines ; les jambes sont écussonnées, les doigts médiocres , le pouce touchant à peine à terre, le gésier musculeux et le régime plus herbivore quechezlesautres cultrirostres. Cegroupese compose des AGAMIS(psophia), oiseaux exotiques à bec court (#g. 220) ,et les GRUES PROPREMENT DITES (grus), qui ont le bec aussi long ou plus long que la tête. Parmi les premiers , on doit noter l’oi- seau trompette, qui habite l'Amérique mé- ridionale et qui doit son nom aux sons sourds et profonds qu’il fait entendre , et qui semblent d’abord venir de l'anus. La L, grue couronnee Ou oiseau royal(fig. 220), qui ( vient de la côte occidentale d'Afrique, et se fait remarquer par sa taille svelte Fig. 220. et élevée et par la gerbe de plumes effi- lées, dont sa tête est surmontée , se rapproche des précédens. Il en est de méme de la demoiselle de Numidrie, ainsi nommée à cause de son port élégant et de ses gestes affectés. Une espèce de grue proprement dite habite l'Europe: c’est la grue commune. Ellea plus de quatre pieds de haut; lesommetdesa tête est nu et rouge , sa gorge noire, le reste de son plumage cen- dré, et la croupe ornée de longues plumes redressées , crèpues et en partie noires. Ces oiseaux sont célèbres par leurs voyages périodiques. Originaires du nord , ils viennent en automne s’a- battre dans nos plaines marécageuses et nos terres ensemencées; puis, continuent leur route vers le sud , d’où ils reviennent au printemps , pour s'élever de nouveau dans les parties les plus septentrionales de l’Europe ; ils voyagent de la sorte en troupes nombreuses et en formant un triangle dont le sommet est oc- Caractères. Tribu des grues. Agamis. Grues pro- prement dites. Tribu des hérons. Hérons pro- prement dits. 594 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. cupé par celui qui semble être le chef de la bande, et qui de temps en temps fait entendre , comme pour appeler ses com- pagnons , un cri de réclame, auquel ceux-ci répondent aussi- it. Leur voix est forte et éclatante, et les inflexions diffé- rentes de leurs cris , ainsi que la manière dont ils volent, ont été regardés comme des présages de variations dans l’état de laimosphère. Leur passage a souvent lieu la nuit, et leur vol est puissant et fort élevé, mais ils ont de la peine à prendre leur essor. En général , ils se rassemblent pour dormir la tête sous Paile , et on assure qu’alors l’une d’elles veille toujours la tête haute , pour avertir ses compagnes, par un cri d'alarme , lors- qu’un danger les menace. Elles nichent dans les terres basses et marécageuses des contrées septentrionales et montrent pour leurs petits un attachement extrême. Dans la tribu des HÉRONS (ardea) , le bec est plus fort et fendu jusque sous les yeux, quisontentourés d’une peau nue, s'étendant jusqu’au bec ; les jambes sont écus- sonnées ; les doigts sont assez longs et l’ongle de celui du milieu tran- chant et dentelé sur le bord interne; enfin leur estomac est peu mus- culeux, et l'intestin n’est pourvu que d’un seul cœcum très petit. Ces oiseaux vivent sur le bord des riviè- res et des lacs ou dans les marais : ils se nourrissent principalement de poissons, de grenouilles, de mol- lusques et d'insectes. Souvent on les voitimmobiles sur le bord des eaux, le corps droit , le cou replié et la tête presque cachée entre les épaules , et leur aspect semble indiquer un mélange de tristesse et de stu- pidité. Pendant le jour, ils restent isolés ; mais ils se réunissent en grandes troupes pour nicher et pour émigrer. Lorsqu'ils volent, ils tiennent leur cou replié et leur tête appuyée sur le haut du dos. Les uns ont le bec plus long que la tête et au moins aussi large que haut à sa base, et le cou grèle et garni vers la partie inférieure de longues plumes pendantes (fig. 221): ce sont les HÉRONS PROPREMENT DITs. De ce nombre est le Aeron com- mun, grand oiseau, gris -bleuâtre avec le devant du cou blanc , parsemé de larmes noires et l’occiput orné d’une huppe noire. Son corps est grèle , ses ailes très grandes et fort con- caves , et son vol si puissant , que souvent la hauteur à la- quelle il s’élève le rend invisible à nos yeux. Pendant le jour, il FAMILLE DES ÉCHASSIERS CEULTRIROSTRES. 595 se tient isolé et à découvert sur le bord des eaux, dans l'attente de sa proie. La nuit, il se retire dans les bois de haute futaie du voisinage et en revient ayant le jour. Il place en général son nid sur le sommet des arbres les plus élevés et pond trois ou quatre œufs d’un beau vert de mer. Pendant l’incubation , le mâle porte à sa compagne le fruit de sa pèche. Lorsque le héron est attaqué par quelque oiseau de proie , il cherche à échapper à son ennemi, en s’élevant le plus possible dans l'air et en ga- gnant ainsi le dessus. Jadis les chasseurs prenaient un grand plaisir à le faire poursuivre de la sorte par le faucon, mais seu- lement pour jouir du spectable de cette lutte ; car sa chair n’est pas un mets agréable. On le trouve dans presque toute l’'Eu- rope et même dans beaucoup d’autres parties du monde; mais, dans les pays habités, il n’est jamais commun. Dans cer- taines localités , il est stationnaire; dans d’autres , il émigre. On donne le nom d’aigrettes à des espèces de hérons , dont les plumes du bas du dos deviennent à certaines époques longues et effilées.Il s’en trouve en Europe deux espèces toutes blanches, dont les plumes sont employées pour la parure des dames. La grande aïgrette est commune en Asie, dans la partie orientale de l'Europe , le nord de l'Afrique et dans l'Amérique septentrio- nale et il passe quelquefois en Allemagne. La petite aigrette , qui est moitié moindre que notre héron,est de passage dans le midi de la France et habite principalement les confins de l'Asie. Dans une seconde subdivision du genre héron, le bec est plus haut que large et très comprimé. Le Blongios , petite espèce de héron voisine des précédentes, appartient à ce groupe. Sa taille ne dépasse guère celle d’un râle , et son plumage est fauve et noir:il n’est pas rare dans la Suisse et les parties monta- gneuses de la France ; il n’y arrive qu’à l’époque où les herbes des prairies sont assez hautes pour lui fournir un abri , et il se tient d'ordinaire près des étangs. On range aussi dans cette division les butors, qui ont les plumes du cou làches et écartées et les hiAoreaux , dont l’occi- put est garni de deux ou trois longues plumes droites et ro- bustes. Le butor d'Europe a le plumage fauve doré, tacheté de noirâtre : il se tient habituellement caché au milieu des roseaux, immobile et le bec levé vers le ciel. Lorsqu'il est attaqué , il se défend avec courage et en portant à ses ennemis de violens coups de bec. Sa voix est si forte, que ses cris lui ont valu le nom de bos taurus, dont on parait avoir fait, par corruption, le mot hutor. Cet oiseau n’est pas rare en France. Le 2ihoreau d'Europe se trouve depuis la Chine jusqu’en Amérique et fréquente les rivages de la mer aussi bien que les bords des fleuves, des lacs et des marais. Pendant la nuit , il fait entendre une espèce de croassement lu- Savacous. Tribu des cigognes. Cigognes. 596 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. gubre , et ilse nourrit d'insectes et de limaces aussi bien que de grenouilles et de petits poissons. Les vieux sont blancs , à ca- lotte et dos noir ; les jeunes gris à manteau brun. Les SAVACOUS (cancroma) , oiseaux de l'Amérique, remar- quables par leur bec large et écrasé , prennent place à côté des hérons dans cette grande tribu de la famille des cultrirostres. Dans la troisième et dernière tribu , composée des cigognes , des spatules , etc. , le bec est encore plus gros que dans la deuxième précédente et plus lisse: il existe aussi des palmures presque égales et assez fortes entre la base des doigts. Les CIGOGNES (cicontia) sont caractérisées par leur bec long, fort , droit, arrondi , pointu et sans sillons (fig. 217, pag. 585). Leurs yeux sont entourés d’un espace nu; leurs pieds sont longs et leurs doigts antérieurs réunis par une membrane jusqu’à la première articulation ; leurs ongles courts et sans dentelures ; leurs ailes médiocres ; enfin leur gésier peu musculaire et leur cœæœcum rudimentaire. Le larynx inférieur de ces oiseaux n’a pas de muscles propres , et le claquement résultant du choc de leurs mandibules larges et légères est presque le seul bruit qu’ils pro- duisent. Ils vivent dans les marais et se nourrissent principale- ment de reptiles. Leurs mouvemens sont lents et mesurés, et une disposition particulière de larticulation du genou leur permet de dormir commodément sur une seule patte, en tenant l’autre fléchie ou même suspendue à angle droit; leur vol est puis- sant , et ils se réunissent en grandes bandes à l’époque de leur émigration. L'espèce la plus commune est la cigogne blanche, grand oiseau à plumage d’un blanc pur partout , excepté aux ailes , qui sont noires. Pendant l'hiver, elle se retire en Afrique ; mais, au prin- temps , elle revient en France , et se répand dans les autres parties de l’Europe : c’est au milieu des villes, dans les tours et les clochers élevés , qu’elle établit d'ordinaire son nid ,et,comme elle détruit une grande quantité d’animaux nuisibles , elle est partout respectée. Suivant un préjugé populaire , ces oiseaux portent même le bonheur dans les maisons où ils nichent, et de nos jours encore , en Hollande, on établit souvent , pour l’at- tirer, des aires élevés sur les points culminans des édifices. Quelques peuples de lantiquité ne se bornaient pas à lui rendre un culte religieux, comme le faisaient les Egyptiens : ils allaient jusqu’à punir de mort la destruction d’un de ces animaux privilégiés. L’attachement extrême que les cigognes portent à leurs petits, leurs émigrations périodiques et plusieurs autres parlieularités de leurs mœurs, ont contribué aussi à FAMILLE DES ÉCHASSIERS CULTRIROSTRES. 597 rendre ces oiseaux célèbres et par cette tendance qui porte tou- jours l’hommé à exagérer ce qui excite son intérêt et sa sur- prise, on leur a supposé des qualités qu’ils sont certes bien loin de posséder: on leur a prêté nos idées et nos penchans , et on a chargé leur histoire de fables nombreuses. Une seconde espèce, la cigogne notre , se trouve aussi en Europe , et fréquente les marécages écartés. Parmi les espèces étrangères on remarque surtout les eëgognes a sac , ainsi nommées à cause de l’appendice charnu, qui est suspendu sous le milieu du cou, et qui ressemble à un gros saucisson ; leur bec est encore plus gros que celui des autres cigognes , et ce sont des oiseaux d’une laideur extrême (#g. 217, pag. 585) : ils nous fournissent cependant ces beaux panaches si légers que l’on appelle marabous. Ces plumes précieuses se trou- vent sous l’aile. On connaît deux espèces de ces cigognes : l’une vit en troupes à l'embouchure de plusieurs fleuves de l'Inde ; l’autre habite le Sénégal. On donne les noms de JABIRUS , d'OMBETTES , de BECS OUVERTS et de TANTALES , à des échassiers voisins des cigognes et qui s’en distinguent par de légères différences dans le bec. Les SPATULES (platalea)appartiennent aussi à la même tribu, mais diffèrent de tous les précédens par la forme singulière de leur bec qui, très long et tout-à-fait plat, s’élargit au bout en un disque arrondi comme celui de l'instrument dontils portent le nom : on en con- naît une espèce, qui est propre à l'Amérique , et une autre, qui est répandue dans tout l’ancien continent. FAMILLE DES LONGIROSTRES. Les échassiers dont se compose ce groupe sont d'ordinaire faciles à reconnaïtre par leur bec long , grèle et si faible , qu’ils Fig. 222. ne peuvent guère s’en servir que pour fouiller dans la vase et y cher- cher les vers et les petits insectes ; tous ont à-peu-près les mêmes for- . mes , les mêmes habitudes et sou- \ vent presque les mêmes distribu- \ tons de couleurs. Les zb?s , les cour- | lis, les becasses , les barges, les mau- | beckes , les alouettes de mer, les com- battans , les tourne-pierres et plu- sieurs autres genres appartiennent à cette famille nombreuse. S Cigognes a ac. Jabirus, etc. Spatules. Caractères. Ibis. Courlis. 598 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. J Les 1BIS, Caractérisés par leur bec presque carré à sa base ; arqué et sans échancrure à sa pointe, méritent de fixer un instant notre attention, à cause de l’antique célébrité de l’un d’entre eux, l’ibis sacre. Les anciens Egyptiens rendaient à cet oiseau un culte religieux , l’éle- vaient dans l’enceinte de leurs temples, lelaissaient errer librement dans leurs villes , et en embaumaient le cadavre avec autant de soin qu’ils pouvaient en prodiguer aux dépouilles mortelles de leurs plus chers parens: ils lui sup- posaient un attachement inviolable à leur pays, dont il était l'emblème , et croyaient qu’il arrêtait sur les frontières des légions de serpens, qui, sans lui , auraient porté la destruction dans leurs champs: ils attribuaient du pouvoir même à ses plumes , et ils assuraient que, lorsque Mercure voulut parcourir la terre et enseigner aux hommes les sciences et les arts , il en avait pris la figure ; enfin ils portèrent ces idées superslitieuses au point de punir de mort le meurtre, même involontaire d’un de ces oiseaux sacrés qu’on voil sculptés sur presque tous leurs monumens.Jus- qu’en ces dernières années , les naturalistes s’étaient mépris sur l'espèce d’échassier qui jadis recevait tant d’honneurs. Les uns ont cru que c'était un petit héron, d’autres un tantale; mais, par les recherches de Cuvier et des naturalistes qui ont suivi Napoléon en Egypte , on sait aujourd’hui que c’est l’abou hannes des Arabes , oiseau de la taille d’une poule, ayant le plumage blanc , avec du noir sur les bouts de l'aile et du croupion, les pattes et le bec de la même couleur, enfin la tête ainsi que le cou nus et également noirs. Fig. 223. IBIS SACRÉ. Les COURLIS (nuwmenius)ressemblent beaucoup aux ibis. Leur bec est arqué de même , mais plus grèle et rond dans toute sa longueur. Ils setiennent sur les bords de la mer, des marais, etc., s’avancent souvent dans l'intérieur des terres , se nourrissent de vers, de petits mollusques, ete., et vivent isolés pendant le temps de la reproduction, mais s’assemblent en grandes troupes à l’époque de leur émigration. Le courtis d'Europe a le plumage | , t , L PS FAMILLE DES ÉCHASSIERS LONGIROSTRES. 599 brun avec le bord des plumes blanchâtre , le croupion blanc et la queue rayée de blanc et de brun. Il est assez commun sur les bords de la Loire et niche d'ordinaire dans les herbes, qui croissent au milieu des bruyères et des dunes. Une seconde espèce , plus petite et appelée courline, passe aussi régulière- ment , chaque printemps, en troupes nombreuses le long de nos côtes. Les BÉCASSES (scolopar) ont le bec droit, un peu renflé et mou vers le bout, et creusé dans presque toute sa longueur par les sillons des narines (#g. 222) : elles n’ont pas, comme les pré- cédens ,des palmures aux pieds; leur tête est comprimée, leurs yeux gros et placés fort en arrière ; enfin leur aspect dénote la stupidité. La Leeasse commune , à-peu-près de la grosseur de nos perdrix et à plumage varié de brun, de gris et de noir, est répan- due dans presque tout l’ancien continent ; elle se trouve aussi en Amérique et même dans presque tous les pays. Elle émigre alter- nativement de la plaine aux montagnes et des montagnes à la plaine. En Europe, ces oiseaux habitent, pendant l'été, les Alpes, les Pyrénées, etc. , eten automne ils descendent dans les bois mieux abrités; ils sont alors très gras et recherchés par les chasseurs. Leur naturel est solitaire et sauvage, et ils voient mal pendant le jour: aussi choisissent-ils la nuit pour chercher leur nourriture. Ils marchent avec difficulté, ne prennent leur essor que d’une manière lourde et bruyante, et,aprèsavoir volé avec ra- pidité pendant quelque temps, ils s’abaissentavec tant de promp- titude, qu’ils semblent tomber comme une masse.Au printemps, presque tous regagnent les montagnes où ils nichent. La becas- sine , espèce plus petite et à bec plus long que la précédente , ne fréquente pas les bois, mais se tient dans les endroits bas et marécageux. Les bécassines nous arrivent en automne et , pour la plupart quittent la France au printemps , pour aller __ nicher en Allemagne ou en Suisse. Une troisième espèce de bé- | casse , encore plus petite et qui se trouve également dans nos marais , où elle reste pendant presque toute Pannée, est la sourde Ou petite becassine. Les BARGES (Zimosa) ont le bec droit, comme les bécassines , mais encore plus long et quelquefois légèrement arqué vers le haut : leur taille est plus élevée, leurs jambes plus longues et leurs pattes garnies d’une palmure entre les doigts externes. Elles vi- vent sur les bords de la mer ou dans les marais salés et habitent 39 Bécasses. Barges. 600 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE.- de préférence les régions froides des deux hémisphères. Vers le mois de septembre, on en voit souvent sur nos côtes et même dans l’intérieur des terres. Leur plumage d’hiver diffère souvent beaucoup de celui d’été. Maubèches. Les MAUBÈCHES (calidris) sont aussi des échassiers très voisins des bécasses ; mais leur bec n’est pas notablement plus long que la tête, et leur s doigts sont légèrement bordés. L’espèce commune est à-peu-près de la taiile d’une bécassine et a le plumage d’hiver cendré dessus , blanc dessous et tacheté de noirâtre à la gorge et à la poitrine, tandis qu’en été elle a le dessus tacheté de fauve et de noirâtre, et le dessous roux. Elle habite les régions arctiques et passe deux fois l’année sur nos côtes. Sauderling. On donne le nom de SANDERLINGS (arenaria) à des oiseaux qui ressemblent itout-à-fait aux maubèches , si ce n’est qu’ils man- quent entièrement de pouce. En automne et au printemps, ils se montrent sur nos côtes ; mais, de même queles précédens, ne nichent que dans le nord. Alouettes de mer. Les ALOUETTES DE MER (pe/idna)ont aussi , avec les maubèches, la plus grande ressemblance. Leur bec est seulement un peu plus long que la tête et la bordure de leurs pieds insensible. L'espèce commune est connue aussi sous le nom de petite mau- beche. Son plumage varie beaucoup: c’est aussi un oiseau de passage. Combattans. Un autre petit genre, qui encore ne diffère qu’à peine des mau- bèches, est celui des COMBATTANS {machetes) , ainsi nommés à cause des combats furieux que les mâles se livrent au printemps. Ces oiseaux ontles doigts externes réunis à leur base par une pal- mure, et sont communs dans tout le nord de l’Europe:ils abondent en Hollande , et au printemps viennent aussi sur nos côtes. . Tourne- Les TOURNE-PIERRES (strepsilas) ont le bec un peu plus fort Era que les précédens , conique, court et pointu; leur manière de vivre est à-peu-près la même que celle des sanderlings et des pluviers, et ils doivent leur nom à l’habitude qu’ils ont de re- FAMILLE DES ÉCHASSIERS LONGIROSTRES. 601 tourner avec le bec chaque pierre qu'ils rencontrent, afin de s'emparer de$ petits animaux cachés dessous. Les CHEVALIERS (fotanus) diffèrent des bécasses , des mau- bèches , etc., par leur bec dur et solide , dont la pointe est assez résistante pour leur permettre de saisir leur proie à la surface d’un terrain dur. Leur taille est légère, leurs jambes élevées, leur pouce touche à peine à terre , et leur palmure externe est bien marquée. On en possède en Europe plusieurs espèces, par exemple , le becasseau Ou cul blanc de riviere , qui est assez com- mun au bord de nos ruisseaux ; le bécasseau des bois , qui ne se voit que dans les marais boisés ; la guignette , qui est plus petite que les autres et a les mêmes habitudes que le bécasseau ; le chevalier aux pieds verts , la plus grande des espèces d'Europe; la gambette ou chevalier aux pieds rouges , etc. Les ÉCHASSES (Aïmantopus) se distinguent par l’excessive lon- gueur de leurs jambes grèles et si faibles, que la marcheen devient pénible. Une espèce de ce genre, l’eéchasse à manteau noir, est assez commune dans les parties orientales de l’Europe, et se trouve aussi en Asie, en Afrique et en Amérique : elle n’est que de passage chez nous. Enfin, on range aussi dans cette famille les AVOCETES (recur- virostra), genre très remarquable par la forme du bec, qui est Fig. 224. long , grèle, pointu, élastique et forte- ment recourbé vers le haut (#g. 224). La longueur et la disposition de leurs jambes ne permettent pas de les éloi- gner des échassiers ; mais cependant leurs pieds sont palmés presque aussi complètement que ceux des oiseaux essentiellement nageurs. Il ne s’en trouve en Europe qu’uneseule espèce, Vavocete à nuque notre : elle habite les bords de la mer et est assez commune en Hollande. 39. Chevalier. Echasses. Avocètes. Kamichi. Rales. 602 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. FAMILLE DES MACRODACTYLES. Les échassiers de cette famille semblent être spécialement organisés pour marcher sur les herbes des marais ou même pour nager, car chez les uns les doigts sont d’une longueur dé- Fig. 225. mesurée; et chez d’autres ces organes, quoique tou- jours parfaitement libres, sont élargies par de grandes bordures. Leur pouce est assez long, leur corps singu- lièrement comprimé, leurs ailes médiocres ou courtes, leur vol faible et leur bec assez fort et de longueur variable. Les uns se distinguent par les éperons dont leurs ailes sont armées et par la longueur de leurs doigts; cesont les JACANAS (parra)et les KAMI- cui. Les premiers ont les ongles, surtout celui du pouce, très longs et très pointus ,et c’est de là que leur vient le nom de cAr- rurgien, Sous lequel on les désigne vulgairement. On en trouve en Amérique et en Asie. Les KAMICHI (palamedea) sont de grands oiseaux qui vivent par paires dans les cantons inondés de lAmé- rique méridionale. Les macrodactyles, dont les ailes ne sont pas armées d’épe- rons , forment les genres rale et fouique. Les RALES (rallus) se reconnaissent en ce que la base de leur bec ne se prolonge pas sur le front en manière d’écusson comme chez les foulques ; ils se tiennent dans le voisinage des eaux, et courentau milieu des herbes avec une grande vitesse; tous ne sont pas également aquatiques. Le rale des genets vit et niche dans les champs et dans les taillis; son nom, latin crex, rappelle le son de son cri, et dans nos campagnes on lappelle quelque- fois le rot des cailles , parce qu’on le voit arriver et parlir avec ces oiseaux, qu’ilest un peu plus gros et qu’il vit solitaire dans les mêmes lieux, ce qui a fait croire qu’il les conduisait. Il se nourrit FAMILLE DES ÉCHASSIERS MACRODACTYLES. 603 d'insectes , de vers et de grains, et c’est pendant la nuit qu'il cherche sa n@urriture. Son nid n’est autre chose qu’un enfonce- ment creusé en terre et grossièrement garni demousseet d'herbes. Son plumage est brun fauve, tacheté de noirâtre en dessus, gri- sâtre en dessous, avec les aïles rousses et des raies blanches sur les flancs. Le rale d’eau d'Europe a le bec plus long et les flancs rayés de noir et de blanc. Il est très commun en France, et se tient ordinairement caché dans les grandes herbes et les joncs sur le bord de nos ruisseaux et de nos étangs; il nage assez bien et court avec légèreté sur les feuilles du nénuphar, du trèfle d’eau et des autres plantes aquatiques; sa nourriture consiste en petites crevettes, en insectes , etc., et sa chair sent la marée. La marouette ou petit rale tachete que l’on connait aussi sous les noms vulgaires de grisette, de girandine, etc., vit tout-à- fait solitaire et ne quitte guère nos étangs que dans le fort de l'hiver. Le nid de ces oiseaux est remarquable, car, construit avec du jonc et en forme de gondole, il est attaché par un des bouts à une tige de roseau, et constitue ainsi un berceau flottant qui peut s’élever et s’abaisser avec les eaux sans risquer d’être emporté. En automne la marouette est très grasse et fort estimée ; elle nage et plonge très bien. Les FOULQUES, caractérisés, comme nous l'avons déjà dit, par l'armaturede leur front (fig. 226), se subdivisent en poules d’eau, Fig. 226. poules sultanes et foulques proprement dites. Les POULES D'EAU (gallinula) oni les doigts ENS fort longs et garnis d’une bordure très Ü SN étroite. On les voit souvent à terre, mais } a à F ti re VER à elles vivent en général sur les eaux dor- mantes. Elles nagent et plongent très bien; pendant le jour elles restent cachées au milieu des roseaux et ne se hasardent à la chasse que le soir et la nuit; leur vol n’est niélevé, nirapide,nisoutenu ; enfin leur nid est composé de jones grossièrement entrelacés, et lorsque la mère est obligé de quitter ses œufs pour chercher sa nourri- ture , elle les recouvre avec des brins d’herbes; les petits cou- rent dès qu’ils sont éclos. Notre poule d’eau commune est répan- due dans presque toute l’Europe et ne paraît pas différer spéci- fiquement de celle qu’on trouve en Afrique,en Amérique, etc. ; elle est brun foncé dessus, gris d’ardoise dessous, avec du blanc aux cuisses, au ventre et au bord de laile. En automne elle Foules d’eau, Poules sul- tanes. Foulques proprement dits. Giaroles, etc 604 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. quitte les pays froids et montueux pour descendre dans les plaines basses. Les POULES SULTANES OU TALÈVES (porphyrio) ont les doigts très longs et presque sans bordure sensible ; leur bec est plus élevé et leur plaque frontale très grande; elles courent avec vitesse sur la terre et ont à-peu-près les mêmes mœurs que les précédentes, seulement leur nourriture consiste principale- ment en grains, et elles ont l'habitude de porter leurs alimens à la bouche avec une de leurs pattes, tandis qu’elles se tiennent sur l’autre. L’espèce commune est originaire de l’Afrique , mais se trouve aujourd’hui dans le midi de l’Europe; c’est un bel oiseau un peu moins fort que nos poules ordinaires, dont le plumage est d’un bleu lustré à reflets brillans; on le trouve principalement dans les marais et les rivières. Enfin les FOULQUES PROPREMENT DITES OU MORELLES (/#u/ica)ont les doigts fort élargis par une bordure festonnée ; aussi sont-elles d’excellens nageurs et passent-elles toute leur vie sur les ma- rais et les étangs ; leur plumage lustré et imperméable à l’eau les rapproche également des oiseaux essentiellement aquatiques, dont se compose l’ordre des palmipèdes. On n’en possède en Europe qu’une seule espèce, de couleur d’ardoise foncée; en été elle vii dispersée en petites bandes , mais en hiver elle se réunit en troupes très nombreuses sur les grands lacs, dont les eaux ne gèlent que rarement; on ne les voit presque jamais à terre ; c’est le soir seulement qu’elles font la traversée d’un étang à un autre, et lorsque pendant le jour on les force à prendre le vol , elles se bornent à se diriger vers un autre point de la même pièce d’eau, aussi les chasseurs en font-ils une grande destruction. Les GIAROLES, les VAGINALES et les FLAMANS, comme nous l’avons déjà dit, ne peuvent se rapporter à aucune des familles précédentes. Les premiers portent aussi le nom de perdrix de mer ; leur bec en effet ressemble assez à celui d’un gallinacé, et leurs jambes sont de hauteur médiocre; mais leurs ailes exces- sivement longues et pointues, leur queue souvent fourchue , et leur vol rappellent l’hirondelle. Elles vivent en troupes sur le bord des eaux; l’espèce d'Europe se trouve dans toui le nord de l’ancien-monde. FAMILLE DES ÉCHASSIERS MAGRODACTYLES. 605 _Les FLAMANS (phœnicopterus) sont des oiseaux extrêmement singuliers ; leurs corps est petit; leurs jambes d’une hauteur excessive ; leurs trois doigts de devant palmés jusqu’au haut; leur Fig. 227. cou très grèleet aussi long que leurs jambes ; leur tête petite et leur bec grand, etgarni sur f se les bords de petites lamelles tranversales à- / LS peu-près comme celui des canards ; enfin la mandibule supérieure est oblongue, plate, ployée en travers dans son milieu, et ap- {| pliquée exactement contre l’inférieure qui \| est au contraire ployée longitudinalement \\ en un canal demi cylindrique (fig. 227). Les \\ mœurs des flamans sont aussi remarqua- \\ bles que leur mode de conformation ; ils \ vivent en troupes , et soit qu’ils se re- posent , qu’ils pêchent ou qu’ils volent, ? } on les voit toujours allignés comme des — à soldats; on assure que lorsqu'ils sont à ns terre , l’un d’eux remplit les fonctions de e sentinelle et veille pour ses compagnons ; si queique danger l’effraie, il pousse un cri bruyant qui ressemble au son de la trompette, et à ce signal de départ tous prennent leur vol. Ils se plaisent sur les plages humides et les bords des maraïs, et se nourrissent de mol- lusques , de vers, d'insectes et d’œufs de poissons qu’ils pêchent au moyen de leur long cou et en retournant la tête pour em- ployer avec avantage le crochet de leur mandibule supérieure. Ils volent très bien , et dans leurs voyages se rangent par bandes triangulaires, à la manière des grues. Enfin ils construisent leur nid avec de la terre et lui donnent la forme d’un cône élevé et tronqué par le haut, sur lequel ils se mettent à cheval pour couver leurs œufs. Ces grands oiseaux habitent les deux hémi- sphères ; l'espèce commune se trouve en Afrique eten Asie, et ar- rive en troupes nombreuses sur nos côtes méridionales; quelque- fois elle remonte jusqu’au Rhin; sa hauteur est de trois à quatre pieds , et son plumage est d’un beau rose, avec les ailes et le dos d’un rouge vif et les rémiges noires; à l’âge de deux ans le corps est au contraire blanchâtre , tandis que les ailes sont rouges, et c’est alors que ces échassiers méritent le plus le nom de phenicop- tres ou oiseaux à ailes de feu , que leur avaient donné les Grecs ; c’est aussi de la couleur de leur plumage que leur vient le nom de flamant. Les anciens Romains regardaient la langue char- nue et grasse de ces oiseaux comme un mets des plus délicats, et on rapporte que l’empereur Héliogabale entretenait constam- ment des troupes chargées d’en pourvoir sa table. Flamans, Classihica- tion. 606 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. . ORDRE DES PALMIPEDES. Les oiseaux , dont il nous reste à parler, sont conformés de la manière la plus favorable à la natation. Leurs pattes sont courtes et implantées à larrière du corps; leurs tarses courts et compri- més , et leurs doigts antérieurs entièrement réunis par des pal- mures ou du moins élargis par des membranes découpées (1); leur plumage est serré etimprégné d’un suc huileux qui le rend presque imperméable à Peau, et près de la peau se trouve un du- vet épais propre à la protéger; enfin leur cou dépasse la lon- gueur de leurs jambes , disposition qui aurait été inutile à des oiseaux terrestres , mais qui devient très utile à ceux destinés à vivre à la surface de l’eau ei à chercher leur nourriture dans sa pro- fondeur. Le sternum des palmipèdes est très long et ne présente de chaque côté qu’une échancrure ou un trou ovale, de manière à fournir aux muscles abaisseurs de l'aile une surface d'insertion très étendue ; leur gésier est, en général , musculeux, et leurs intestins garnis de deux longs cæœcums. Presque tous les palmi- pèdes habitent la mer; les uns sont privés de la faculté de voler, d’autres surpassent , pour la puissance du vol, tous les oiseaux terrestres. On peut les diviser en quatre familles de la manière suivante : 1° Les BRACHYPTÈRES OU PLONGEURS , doni les ailes sont très courtes et dont les pattes sont implantées si loin en arrière que, pour se tenir en équilibre à terre, ils sont obligés de garder une position verticale. 2° Les LONGIPENNES, dont les ailes sont extrêmement longues, le vol puissant, le pouce libre ou nul et le bec corné. 3° Les TOTIPALMES , douni le pouce est réuni aux autres doigts dans une palmure commune , les ailes longues et le bec corné comme d'ordinaire. 4° Les LAMELLIROSTRES , dont le bec, épais ei revêtu d’une peau molle, plutôt que d’une véritable corne , est garni sur les bords de lames transversales ou de petites denis. (1) Cette disposition n’est même qu'un cas exceptionnel offert par les grébes et un petit nombre d’autres palmipèdes. FAMILLE DES PALMIPÈDES BRACHYPTÈRES. 607 , | FAMILLE DES BRACHYPTÈRES OU PLONGEURS. SE — L'organisation des oiseaux de cette famille en fait des ani- Caractères. maux essentiellement aquatiques ; la plupart sont presque ex- clusivement attachés à la surface des eaux, car ils ne volent que peu ou même point et ne peuvent marcher que d’une manière pénible et incertaine. Leurs ailes, en effet, sont toujours extrè- mement courtes et en géné- ral tout-à-fait impropres au vol, et leurs pieds sont couris et placés à l'extrémité postérieure du corps, ce qui les oblige à se tenir dans L } | ! " : = une position verticale et leur | ARE rend la marche difficile; du Fig. 228. MANCHOT. reste toutes ces dispositions leur deviennent utiles quand ils sont sur l’eau , et non-seulement ils y nagent avec rapidité, mais plongent aussi très bien en se servant de leurs ailes comme de nageoires ; leur plumage est aussi remarquablement serré el lisse. Les brachyptères se divisent en trois groupes : les plongeons, les pingouins et les manchots. La TRIBU DES PLONGEONS est caractérisée par le bec lisse, Tribu des droit, comprimé, pointu , et les narines latérales; elle se com plongeons. pose des grèbes, des plongeons proprement dits, des guille- mots , eic. Les GRÈBES (podiceps) se rapprochent des poules d’eau par la Gzibes conformation de leurs pattes, car leurs doigts antérieurs, au lieu d’être réunis par des palmures complètes comme chez les autres palmipèdes, sont seulement élargis par des bordures découpées, el ne présentent de véritable palmure qu'à leur base. {ls ont la iète petite; le bec comprimé latéralement et en général droit : Plongeons proprement dits. 608 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. les narines percées à jour; le corps aplati, les jambes entière- ment engagées dans l’abdomen ; le tibia prolongé en arrière, au- delà de l’articulation du genou , pour donner plus de force aux muscles extérieurs qui s’y fixent ; le tarse comprimé; les ailestrès étroites et cachées dans le repos sous les plumes des parties voi- sines ; la queue composée d’un petit faisceau de plumes légères ; enfin le plumage court , épais et d’un brillant métallique qui la fait souvent employer comme fourrure. A terre les grèbes sont obligées de se tenir dans une position verticale; ils ne marchent qu'avec peine et volent difficilement, mais ils sont d’excellens nageurs et fendent l’eau avec une facilité extrême, soit à sa surface , soit à une profondeur plus ou moins considérable ; c’est même en plongeant qu’ils cherchent d’ordinaire à échap- per au danger. Les uns vivent sur les eaux douces, d’autres sur les bords de la mer ; ils se nourrissent de petits poissons, de crustacés, d'insectes, etc., et nichent au milieu des jones ou dans le creux de quelque rocher escarpé. Quatre espèces de ce genre habitent l'Europe; savoir: le grebe huppé, grand comme un canard, brun noir dessus , blanc argenté dessus, avec une bande blanche sur aile et portant à l’âge adulte une sorte de huppe érectile sur la tête et une colle- retie rousse bordée de noir au haut du cou; le grele cornu plus petit que le précédent et à collerette noire ; le guebe à joues grises intermédiaire aux deux précédens par sa taille et le petit grebe OU castagneux, qui est de la grosseur d’une caille et n’a ni crète, ni collerette. Les PLONGEONS PROPREMENT DITS (colymbus)ressemblent beau- coup aux grèbes , mais ont les pattes palmées comme les autres oiseaux de cet ordre; ils habitent le nord , et arrivent quel- quefois sur nos côtes pendant l'hiver. Ils vivent continuelle- ment sur les eaux ; d'ordinaire ils s’y tiennent entièrement plon- gés, ne sortant que de : temps en temps la tête pour respirer ; ils volent très bien, mais rarement, et émigrent sur les eaux; lorsqu'ils sont à terre leur démarche est si l'embarrassée qu ils ne peuvent se maintenir en équilibre qu’en se soutenant sur leurs ailes, et tombent facilement à plat ventre; aussi ne quit- -tent-ils presque jamais les eaux, si ce n’est à l’époque de la ponte. Ils nichent sur les îlots au milieu des rochers. Le grand plongeon est long de deux pieds et demi; il habite les mers arctiques des deux mondes et il est très commun aux iles Hébrides et sur les côtes de la Norwège. Une autre es- pèce , nommée /umme , est un peu moins forte el abonde sur les lacs de la Sibérie , de l'Islande , etc. Les Lapons font des bonnets d'hiver avec leur peau. FAMILLE DES PALMIPÈDES BRACHYPTÈRES. 609 | Les GUILLEMOTS (wria) diffèrent des précédens par lenombre de Guillemots. - leurs doigts : fls manquent de pouce ; du reste , leurs pattes sont - _palmées comme chez les plongeons , et leur bec est à-peu-près l de même forme ; mais leurs ailes sont encore plus courtes, et ils - peuvent à peine voler. On en trouve dans le nord , au milieu . des rochers escarpés et dans les hivers rigoureux, on en voit -_ qui descendent sur nos côtes. La petite TRIBU DES PINGOUINS à pour caractères un bec très Tribu des comprimé , élevé verticalement, tranchant par le dos et ordi- Pirgoums: | nairement sillonné en travers ; point de pouce, et les doigts antérieurs complètement palmés. Ces oiseaux appartiennent exclusivement aux mers du nord : on les distingue en macareux et en péngouins proprement dits. is D 2 | Les MACAREUX (/ratercula) ont le bec plus court que la têteet Macareux. au moins aussi élevé à sa base, qu’il est long. Leurs mœurs sont à-peu-près les mêmes que celles des précédens ; mais ils volent encore plus mal ; leurs petites ailes ne peuvent les soutenir en | l'air que pendant quelques instans. Ils ne viennent presque jamais à terre et ne se voient qu'accidentellement sur les eaux douces ; ils vivent sur la mer comme les guillemots et nichent - aussi sur les rochers. Le nacareux commun Ou moine est de pas- | sage sur nos côtes, périodiquement en hiver et au printemps. Les PINGOUINS PROPREMENT DITS (alca) ont le bec plus allongé, Pingouins en forme de lame de couteau ; leurs mœurs sont semblables à proprement celles des précédens , et on les trouve dans les mêmes parages. ‘5 Ils nichent par grandes bandes dans les trous des rochers qui bordent la mer et ne pondent qu’un seul œuf , qui est oblong et très grand. Le pingouin commun est à-peu-près de la taille du canard ; il se montre quelquefois sur nos côtes en hiver et peut voler assez rapidement , mais en général sans s'élever beaucoup et en effleurant la surface des eaux. Le grand pingouin , qui habite la mer Glaciale , a , au contraire, les ailes entièrement dépourvues de pennes et impropres au vol. La TRIBU DES MANCHOTS (aptenodytes) se compose d'oiseauxen- De core moins volatiles que les pingouins. Leurs petites ailes ne sont manchots. garnies que de vestiges de plumes, qui , au premier abord , res- semblent à des écailles : aussi sont-ils complètement privés de la Caracteres. Pétzels. 610 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. faculté de voler. Leurs pieds sont en même temps implantés si loin en arrière qu’ils ne peuvent se soutenir à terre , même dans une position verticale, qu’en s'appuyant sur le tarse , qui du reste est élargi comme la plante du pied d’un quadrupède: aussi ne viennent-ils à terre que pour nicher, et ce n’est qu’en se trai- nant péniblement sur le ventre qu’ils s’y meuvent. Ils sont tous propres aux mers antarctiques. Le grand manchot habite en très grandes troupes les environs du détroit de Magellan et les îles de l'Océanie. FAMILLE DES LONGIPENNES. La famille des Longipennes ou Grands voiliers se compose d'oiseaux remarquables par la longueur de leurs ailes et la puis- sance de leur vol. Leurs pieds manquent souvent de pouce , et, lorsque cet appendice existe , il n’est jamais réuni aux autres doigts par une palmure commune; le bec n’est pas armé de lamelles ou de dentelures et varie par sa forme ; enfin le gésier est musculeux et les cœcums très courts. Tous fréquentent la mer, et les navigateurs les rencontrent souvent à des distances immenses de terre : ils vivent de poissons ou autres animaux ma- rins , et sont répandus dans tous les parages. On les divise en petrels , albatros , mouettes , sternes , etc. Les PÉTRELS (procellaria) ont le bec crochu au bout et les na- rines réunies en un tube couché sur le dos de la mandibule su- périeure(/g. 229). Leurs ailes sont longues et leurs pieds n’ont, au lieu de pouce qu’un ongle pointu 1m Fig. 229. planté dans le talon. Ce sont des oiseaux de haute mer: ils ne cherchent que rare- ssh ment leur nourriture le long des côtes , 1 ANS) à et se plaisent dans les parages où les = | cétacés abondent et où lagitation des \ flots ramène souvent à la surface les ani- \ maux dont ils font leur proie. Ils vivent Ë principalement de la chair de morues et \ de baleines mortes , de mollusques nus et des insectes ou des vers qui flotlent à la surface de la mer. Ils ne plongent pas et ne nagent que rarement; mais, dans leur vol rapide , ils ef- fleurent les vagues et courent même sur l’eau , en piétinant el en tenant les ailes élevées. Il parail que c’est même à celle par- FAMILLE DES PALMIPÈDES LONGIPENNES. 611 ucularité de leurs mœurs qu’ils doivent le nom de petret ou de petit Pierme ; car elle les a fait comparer par les marins à saint Pierre , le patron des pêcheurs. La puissance de leurs ailes est extr ème : ils volent en planant , avec ces organes en apparence immobiles , et ne se laissent pas arrêter dns leur course rapide par le vent le plus violent ; quelquefois cepen- dant la tempête les force à chercher un ‘refuge sur les ver- gues ou sur les mâts des navires. Souvent on les voit suivre le sillage des vaisseaux pour y trouver un abri ou pour profiter des débris qui sont jetés du bord , et c’est surtout pendant les nuitsclaires ou le crépuscule qu’ils pourvoient à leur nourriture. Ils nichent dans les trous des rochers les plus escarpés , et, quand on essaie de les surprendre sur leurs œufs , ils lancent contre l’assaillant une liqueur huileuse, dont leur estomac parait être toujours rempli. Leur plumage ne varie que peu avec l’âge et ne diffère pas avec le sexe. La plupart de ces oiseaux habitent les mers antarctiques ; maïs il s’en trouve aussi dans les régions arctiques , et on en voit quelquefois sur nos côtes. La plus grande espèce , le petrel geant , dont le plumage est noi- râtre , est plus gros que l’oie , et se rencontre depuis le cap Horn jusqu’au cap de Bonne-Espérance, mais y est moins Commune que le petrel damier, dont la taille est plus petite. Le fwZmar ou petrel gris blanc habite au contraire le nord et se montre quel- quefois sur nos côtes : il enest de même d’une petite espèce , qui n’est guère plus grande qu’une alouette, et qui est souvent désignée sous le nom d’oiseau de tempéte. Les PUFFINS, qui se distinguent des autres pétrels par quelques différences dans la forme du bec , se trouvent dans presque toutes les mers. Les ALBATROS (diomedea) sont les plus grands et les plus mas- sifs de tous les oiseaux pélasgiques , et ils méritent mieux que tout autre cette dénomination; car ils se tiennent presque toujours en haute mer, et sont également bien organisés pour le vol et pour la nage. On les rencontre principalement dans les mers australes , et souvent on les voit suivre en troupes pendant plusieurs jours un vaisseau voguant de ioute sa vitesse. De même que les pétrels, ils se plaisent au milieu des tempêtes, et les voyageurs ne parlent pas sans étonnement de la manière dont ils se balancent à la surface des vagues en fureur et af- frontent en face les ouragans les plus impétueux ; du reste , si la fatigue les arrête , c’est à la surface de l’eau , qu’ils se repo- sentet qu’ils dorment. Ils paraissent se nourrir indifféremment d'animaux vivans ou de chair corrompue , et sont d’une glou- tonnerie extrême. On en a rencontré en troupes immenses sur Albatros. 612 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. des cadavres flotitans de baleines ou de cachalots , et souvent les matelots les surprennent sur des rochers, gorgés d’alimens au point de ne pouvoir ni s'enfuir, ni s’envoler avant que d’avoir allégé par le vomissement leur estomac surchargé. Leur force est extrême ; mais ils manquent de courage et se laissent battre par de faibles mouettes. Leur bec est cependant très robuste et tranchant; la mandibule supérieure se termine par un croc qui semble y être surajouté ; leurs narines ovales et ouvertes sont en forme de petits rouleaux courts et couchés sur les côtés du bec ; leurs ailes sont longues et très pointues ; enfin leurs pattes, bien palmées, manquent de pouce, et ne présentent pas même l’ongle, qui, chez les pétrels , en est un dernier vestige. Les diverses espèces d’albatros sont assez mal connues ; la plus commune a été nommée par quelques voyageurs mouton du Cap , à cause de sa grandeur, de son plumage blanc , excepté sur les aïles , et parce qu’elle abonde surtout dans le voisinage des deux caps qui terminent l’Afrique et l'Amérique. Les navigateurs anglais l’appellent aussi le vaisseau de ligne (man of Genis ; comme étant le plus grand des oiseaux de mer. Mouettes. Les MOUETTES (/arus) se distinguent facilement des deux genres précédens par leur bec allongé et pointu, et simplement arqué vers le bout; leurs narines, placées vers le milieu dela mandibule Fig. 230. supérieure , étroites , longues et percées Re à jour, et par leur pouce court, mais bien distinct. On les rencontre en pleine mer ; mais elles fourmillent surtout près des côtes, et, lorsque le temps est mauvais, elles s’avancent quelquefois dans les ter- | res. Elles nagent et volent très bien , fon- dent sur leur proie avec une violence F extrême et se jettent sur les cadavres aussi bien que sur les poissons vivans. Du reste, ce sont des oiseaux lâches et criards, dont les mœurs n offrent que peu d'intérêt. En général, on donne le nom de goelands aux grandes espèces et celui de mouettes ou de mauves aux plus petites. Plusieurs habitent les mers du nord et sont de passage sur nos côtes: l’une des plus grandes est le goeland à manteau noir. Stercoraires. On donne le nom de STERCORAIRES OU LABBES (Zestris) à des longipennes très voisins des mouettes, mais qui en diffè- rent par leur queue pointue et par la disposition de leurs na- rines. Ils ont cela de remarquable qu’ils poursuivent avec achar- FAMILLE DES PALMIPÈDES LONGIPENNES. 613 nement les petites mouettes, pour leur enlever leurs alimens et même, à cé que l’on prétend , pour dévorer leur fiente. Les STERXNES (sterna) ressemblent aux hirondelles par leurs ailes pointues et excessivement longues , leur queue fourchue et leurs pieds courts : aussi leur donne-t-on le nom d’Airon- . Sternes. delles de mer. Ces oiseaux se tiennent principalement sur mer, mais s’avancent aussi dans l’intérieur des terres , sur les lacs et les rivières. On ne les voit pas nager; mais ils volent presque continuellement avec une rapidité extrême , en jetant de grands cris et en enlevant avec dextérité , de la surface des eaux, les petits poissons et les mollusques , dont ils se nourrissent. Ils ont l'habitude de nicher par bandes très nombreuses dans un même lieu, et leurs nids sont souvent si rapprochés, que les couveuses se touchent. Leur bec est pointu, droit et sans courbure ni saillie , et leurs narines oblongues et percées de part en part. L'espèce la plus commune sur nos côtes et sur nos eaux douces est le Pierre-garin. Les xoppis ne diffèrent guère des hirondelles de mer que parce que leur queue n’est pas fourchue et que leur bec est un peu renflé en dessous. Ils se trouvent dans les mers des pays chauds et sont célèbres parmi les navigateurs pour l’étourderie avec laquelle ils se jettent sur les vaisseaux. Enfin on range encore dans la famille des longipennes les COUPEURS D'EAU OU BECS EN CISEAUX (rkynchops), qui ressemblent assez aux Siernes par leur forme générale , mais qui se font re- Fig. .231 marquer parmi tous les oiseaux par la formeextraordinaire deleur bec,dont les deux mandibules, aplaties comme des lames, se joignent sans s’emboi- ter l’une dans l’autre (9.231). Leur mandibule supérieure est en même temps beaucoup plus courte que lin- férieure : aussi ne peuvent-ils se nour- rir que de ce qu’ils relèvent avec celle-ci, en volant près de la surface de l’eau. On n’en connaît qu’une espèce , qui habite les mers des Antilles. FAMILLE DES TOTIPALMES. Les oiseaux dont se compose cette famille méritent mieux que toute autre le nom de palmipèdes ; car non-seulement leurs trois Noddis. Becs en ci- seaux : Caractères. 614 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. doigts antérieurs sont réunis par de larges palmures comme dans le reste de l’ordre auquel ils appartiennent ; mais ces mem branes s’étendent aussi du doigt interne au pouce , ce qui aug- mente considérablement la largeur des rames que constituent ces organes. Les pattes des totipalmes sont en même temps courtes et ces oiseaux sont de bons nageurs , mais cependant ils se perchent sur les arbres, habitude qu’on ne retrouve chez presque aucun autre palmipède. Tous ont aussi les ailes longues et sont de bons voiliers. Les pélicans, les cormorans , les anhinga et les phaétons appartiennent à cette division. Tribu des Plusieurs auteurs ont réuni sous le nom de PÉLICANS tous les pélicaus. totipalmes chez lesquels il existe à la base du bec quelque espace dénué de plumes. Ces oiseaux ont aussi d’autres caractères com- muns ; leurs narines ont la forme de fentes à peine sensibles ; leur langue est petite ; la peau de leur gorge est plus ou moins exten- sible ; leur gésier est mince et forme avec le veniricule succen- turié un grand sac , et leurs cæœcums sont médiocres ou petits; mais ils offrent en même temps des différences plus grandes encore, et, pour que la classification de ces animaux soit un tableau fidèle des modifications de leur structure , on a été obligé de les séparer en plusieurs genres , savoir : les pelicans proprement dits , les cormorans , les fregates et les fous. Pélicans. Les PÉLICANS PROPREMENT DITS se distinguent de tous les oiseaux par l’organisation singulière de leur bec; la mandibule supérieure , très longue , droite , large , aplatie et terminée par Fig. 232. un crochet, ne présente rien de très remarquable ; mais les bran- ches de la mandibule inférieure sont flexibles et soutiennent une espèce de poche formée d’une membrane nue et dilatable. Ce sont de grands oiseaux , dont les ailes sont médiocres , la queue ronde , le tour des yeux ainsi que la gorge nus , le bas des jambes et les tarses également dénués de plumes , et les ongles sans dentelures. Ils vivent indistinc- tement sur les bords de la mer, les lacs et les fleuves, nagent très bien et se nourrissent de FAMILLE DES PALMIPÈDES TOTIPALMES. 615 poissons , dont ils remplissent leur poche, pour les avaler ensuite à mesure que la digestion s’achève. Le pelican ordinaire , que l’on a nommé aussi onocrotale, parce que sa voix a été comparée au braiement de âne , a cinq ou six pieds de long et jusqu’à douze pieds d’envergure ; son bec seul a près d’un pied et demi de long , et sa poche peut contenir plus de vingt pintes d’eau ; enfin son plumage est d’un blanc plus ou moins pur, suivant l’âge, et les rémiges sont noires. Il vole irès bien et s’élève quelquefois fort haut ; mais en général il rase la surface de l’eau ou se balance à une hauteur médiocre, pour se précipiter plus facilement sur sa proie ; quelquefois on le voit battre l’eau de ses ailes comme pour la troubler et effrayer le poisson , et on assure que , lorsque les pélicans sont réunis en roupes , ils péchent de concert ,en formant un grand cercle, qu'ils resserrent peu-à-peu pour y emprisonner les poissons , jusqu’à ce que, sur un signal donné, ils frappent l’eau tous en même temps , et , à la faveur de ce désordre , plongent et se sai- sissent de leurs victimes. La pèche terminée, ils vont s’accroupir sur quelque pointe de rocher et y digérer en repos. Ils peuvent percher sur les arbres, mais ils n’y nichent pas, et font leur nid à terre , dans un enfoncement qu’ils garnissent d’herbes. La femelle pond de deux à quatre œufs et nourrit ses petits en dégorgeant devant eux des poissons qu’elle leur apporte dans sa poche. On dit qu’elle leur apporte aussi de l’eau de la même manière, et c’est peut-être le mouvement qu’elle fait pour vider sa poche , en la pressant contre sa poitrine , qui a donné lieu à la fable débitée par quelques écrivains sur la prétendue habi- tude qu’auraient ces oiseaux &e s’ouvrir le sein pour nourrir de leur sang leur jeune famille. Cette espèce de pélican est com- mune dans les parties orientales de l'Europe , mais abonde sur- tout en Afrique : elle se trouve aussi en Asie et en Amérique. Les CORMORANS (phalacrocorar) ont le bec allongé, comprimé, à mandibule supérieure crochue au bout, la peau de la gorge peu dilatable , l'ongle du doigt du milieu denté en scie et la queue ronde et composée de quatorze pennes. Ce sont d’excellens plongeurs : ils nagent ordinairement avec la iète seulement hors de l’eau et poursuivent, avec une vitesse étonnante, entre deux eaux , les poissons dont ils se nourrissent. Leur vol est rapide et soutenu ; mais à terre ils marchent mal et se tiennent dans une position presque verticale, en s’appuyani sur leur queue. Le cormoran commun est de la taille de l’oie et a le plumage d’un noir verdâtre : il habite les conirées septenirionales des deux mondes et n’est pas rare en France: il niche tantôt dans les 40 Cormorans. Frégates. Fous. 616 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. fentes des rochers , tantôt sur les arbres ou dans les jones, et se nourrit principalement d’anguilles. Les FRÉGATES (tachypetes) diffèrent des cormorans par leur queue fourchue , leurs ailes excessivement longues , leur bec, dont les deux mandibules sont courbées au bout, et leurs pieds , dont les palmures sont profondément échancrées. Fig. 233. LA FRÉGATE. Ces oiseaux n’habitent que les régions tropicales , et leur vol est si puissant, qu’ils s’éloignent de terre, à des distances immenses. On en a rencontré à plus de quatre cents lieues en mer, et ils font une guerre active aux poissons volans, qui, pour échapper à la poursuite d’autres poissons , s’élancent hors de Peau. Les frégates donnent aussi la chasse aux fous, et, en les frappant de l'aile et du bec , les forcent à dégorger le produit de leur pêche, dont ils se saisissent avec dextérité avant qu’il ne soit retombé dans l’eau. On n’en connaït bien qu’une espèce, dont le plumage est noir, avec du blanc sous la gorge et le cou. Les FOUS Où BOUBIES (sua), qui se font ainsi battre par les frégates , doivent leur nom à la stupidité avec laquelle ils se laissent attaquer par l’homme et les animaux. Ils ont le bec droit, pointu et dentelé en scie sur les bords , et les ongles dis- posés comme dans les deux genres précédens. L’espèce la plus commune est le fou de Bassan , ainsi appelé du nom d’une petite île du golfe d'Edimbourg, où elle multiplie beaucoup ; elle se D MA RR R . « D RE FAMILLE DES PALMIPÈDES LAMELLIROSTRES. 617 montre assez souvent sur nos côtes et niche dans le nord, par grandes bañdes , sur les rochers baignés par la mer. Sa taille est presque égale à celle de l’oie, et son plumage est blanc avec les premières pennes des ailes noires. Les ANHINGA (plotus) ressemblent assez aux cormorans par la forme*de leur corps et de leurs pieds , mais se distinguent par la longueur de leur cou , leur petite tête et leur bec droit, grèle, pointu et dentelé sur les bords. Ils habitent les pays chauds des deux hémisphères et ont à-peu-près les mêmes mœurs que les précédens. Enfin les PHAËTONS OU PAILLE-EN-QUEUE diffèrent des autres totipalmes par leur tête entièrement emplumée et par les deux pennes étroites et très longues qu'ils portent à la queue, et qui de loin ressemblent à des pailles. Ils ne vont guère à terre que pour nicher et ne quittent que rarement la zone torride. Leur apparilion fait reconnaitre aux navigateurs le voisinage de cette région et leur a valu le nom d'oiseaux du tropique. FAMILLE DES LAMELLIROSTRES. Les lamellirosires diffèrent des autres palmipèdes par leur bec épais , revêtu d’une peau molle, au lieu de corne, et garni sur les bords de lames parallèles ou de petites dents. Leur langue , large et charnue , est également dentelée sur les bords; leur gésier est grand et très musculeux; leur cœcum long et leur trachée-artère, en général , renflée près de la bifur- cation ; chez le mâle leurs ailes sont médiocres. La plupart vivent sur les eaux douces plus que sur la mer : ils nagent avec grâce et facilité , et en général plongent très bien , mais ne marchent que d’une manière vacillante et embarrassée. On les divise en deux groupes : les canards et les harles. Les canards proprement dits, les oies et les cygnes forment un groupe très nombreux, qui se distingue des harles par les lamelles dont leur bec est garni, mais qu'il est très difficile de diviser d’une manière nette et naturelle. Les ornithologistes leur donnent le nom commun de CAXARDS (anas). Le bec de ces oiseaux est médiocre , mais fort, déprimé , convexe en dessus, 40. Anhinga. Phaëtons. Caractères. Tribu des canards. vo ; Cygnes. 618 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. plane en dessous, arrondi au bout et terminé par une écaille lisse, en forme €” ongle. Les bords de chaque mandibule sont armés d'une rangée de petites lames saillantes , minces et placées trans- versalement , qui paraissent destinées à laisser écouler l’eau que Panimal a saisi avec sa proïe. Leur nourriture consisle en pois- sons, mollusques , insectes , graines , etc. Pour se la procurer, les uns se submergent tout entiers ; les autres restent à la surface de Peau et n’y “plongent que la tête ; on les voit peu à terre. En général ils changent de plumage deux fois dans l’année, en juinet en novembre ; les femelles ne changent pas de couleur ; mais les mâles revêtent, lors de la mue d’été, une partie des couleurs pro- pres aux femelles , tandis qu’en hiver ils en diffèrent beaucoup. La chair de la plupart de ces oiseaux est un aliment agréable, et en général ils se laissent facilement élever en domesticité. Les caractères qui distinguent entre eux les canards propre- ment dits, les cygnes et les oies, sont de peu importance et n’établissent pas de ligne de démarcation bien tranchée: ils sont fournis principalement par la forme du bec. Chez les cygnes, le bec est aussi large en avant qu’en arrière, plus haut que large à sa base , et percé vers le milieu par les narines ; enfin le cou est fort long. Chez les oies , le bec, plus court que la tête, est plus étroit en avant qu’en arrière , et plus haut que large à sa base; le cou est de moyenne longueur. Enfin, chez les canards pro- prement dits, le bec est au moins aussi large à son extrémité qu'à sa base, où il est moins haut que large ; les narines sont rapprochées de son dos et de sa base, et le cou est plus court que les précédens. Les cxGxes sont les plus grands oiseaux de ce genre. Chacun connait leurs formes élégantes et la manière gracieuse dont ils glissent à la surface des eaux: ils vivent principalement de graines el des racines de plantes aquatiques: aussi ont-ils les intestins et surtout les cœcums très longs. Ils sont monogames et nichent à terre , sur le bord des eaux ; enfin les petits nagent et mangent seuls dès leur naissance. Nous en avons, en Eu- rope , deux espèces : le cygne à bec rouge et le cygne à bec notr. Le cygne à bec rouge Où cygne à bec tuberculeux (anas olor) est celui que lon élève en domesticité sur nos bassins et nos canaux. À l’état sauvage , il habite les grandes mers de linté- rieur, surtout vers les contrées orieniales de l’Europe. Gn le reconnait à son bec rouge , bordé de noir et surmonté à sa base d’une protubérance arrondie. La douceur de ses mouvemens , Pélégance de ses formes et la blancheur éclatante de son plumage l'ont rendu emblème de la beauté et de l’innocence. Ce magni- FAMILLE DES PALMIPÈDES LAMELLIROSTRES. 619 fique oiseau vole très bien et a tant de force dans l'aile, qu’il s’en sert commeñd’une arme puissante pour se défendre contre ses ennemis. Il nage aussi avec une rapidité extrême, et vit égale- ment de poissons et de végétaux. Les mœurs de nos cygnes sont en général douces et paisibles , et on les voit se prodiguer les ca- resses les plus tendres ; quelquefois cependant, excités par la ja- lousie, ils se livrent des combats longs et meurtriers. La saison de la ponte arrive au mois de février. Le nombre de leurs œufs s'élève à sept ou huit, et l’incubation, dont la mère seule s’occupe, dure six semaines. Le cygne à bec noir ressemble beaucoup à l'espèce précédente par sa forme extérieure. On remarque seulement que son bec est noir et couvert à sa base d’une cire jaune ; mais, à l’intérieur, il en diffère beaucoup dans les deux sexes ; car la trachée- artère, au lieu de se rendre en ligne droite dans les poumons, se recourbe et pénètre dans une cavité de la quille du sternum. Ces oiseaux habitent les régions septentrionales des deux con- tinens, et, dans les hivers rigoureux , descendent par bandes dans des pays tempérés et se montrent alors sur nos côtes. On connait aussi une espèce de cygne, dont le plumage est noir : elle se trouve à la Nouvelle-Guinée. Les o1rs se distinguent, comme nous l'avons déjà dit, par la forme de leur bec: ils ont aussi les jambes plus élevées que les canards et moins écartées , ce qui leur rend la marche plus facile. En général elles ne nagent que peu et ne plongent pas ; la plupart vivent d'herbes et de graines, et se tiennent pendant le jour dans les prairies ou les marais, d’où elles se rendent, après le coucher du soleil , sur les étangs et les rivières. Elles vivent en troupes , et, pendant qu’elles mangent ou qu'elles dorment, il y en a toujours une qui, le cou tendu et l'œil au guet, veille sur ses compagnes et les avertit du danger. Le vol de ces oiseaux est élevé , et ils émigrent par troupes, en se plaçant sur une seule ligne, lorsqu'ils sont en petit nombre, ou sur deux lignes divergentes lorsque leur nombre est consi- dérable. Lorsque celui qui est à la tête du triangle est faligué, il cède sa place à celui qui le suit , et va se placer au dernier rang. Pendant l'hiver, ils restent dans les pays tempérés, si les rivières ne gèlent pas ; mais si le froid est vif, 11s s'avancent plus au midi, d’où ils reviennent vers la fin de mars, pour retourner dans le nord , y passer l'été. On distingue des oies proprement dites les bernaches, dont le bec est plus court et ne laisse pas paraitre au dehors les extré- milés des lamelles qui en garnissent les bords , tandis que, Oies. Oigs propre ment dites. 520 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE chez les premières , le bout de ces lamelles se voit au dehors et ressemble à des dents pointues. L’oie ordinaire (anas anser), qui appartient à la première de ces divisions et qui s’est multipliée dans nos basses-cours , est originaire des contrées orientales de l'Europe, d’où elle ce ré— pand pendant l’hiver dans les parties centrales et méridionales de ce continent : elle s’avance rarement au-delà du cinquante- troisième parallèle nord, etsetient sur les bords de la mer ou dans les marais. A l’état sauvage, son plumage est d’un gris cendré, à manteau brunâtre, ondé de gris ; mais , dans la domesticité j elle prend toutes les couleurs : on peut cependant la reconnaitre à son bec gros et d’une seule couleur (jaune-orangé) et à ses ailes qui , étant pliées , n’atteignent pas l’extrémité de la queue. Elle niche dans les bruyères ou les marais , sur de petits tertres de jones coupés et d’herbes sèches , et pond ordinairement de cinq à huit œufs verdâtres. Cette espèce est la souche de nos oies domestiques , qui, avant l’importation du dindon , étaient extrèémement com- munes dans toutes les parties de l'Europe, et qui aujourd’hui encore sont loin d’être négligées des agriculteurs , bien qu’on leur préfère en général ce gallinacé , dont le volume est aussi considérable et dont la chair est plus délicate. Mais l’oie n’est pas seulement utile comme aliment: elle nous donne aussi des plumes dont on fait un grand usage , soit pour lécriture , soit pour en remplir les coussins et les lits. Dans la Normandie, le Maine, la Bretagne, ainsi que dans le Languedoc et la Guyenne, on en élève un très grand nombre. Un seul mâle (qu'on appelle jar) suffit pour plusieurs femelles. Pendant le jour, on les fait paître dans les champs où la récolte est déjà faite , dans les pâturages ou sur les bords des étangs ; mais, le soir, on les fait rentrer dans la ferme, et, dans les grandes exploi- tations , on leur consacre une habitation spéciale qu’il importe toujours de tenir avec une grande propreté. La ponte ne com- mence guère qu’en mars et se continue en général de deux jours l’un. La même femelle fait quelquefois jusqu’à quarante ou cinquante œufs de suite ; mais, dans la plupart des cas, la ponte est interrompue par la couvaison. On peut mettre sous chaque couveuse quatorze à quinze œufs , selon son volume, et il faut avoir le soin de mettre à sa portée des alimens conve- nables , tels que de l'orge détrempé et un grand vase d’eau , où elle puisse se laver et boire. L’incubation dure trente jours , et, pendant ce temps , le mâle ne s'éloigne pas beaucoup du nid. Les jeunes oisons sont plus faciles à élever que les dindon- neaux ; mais , pendant les premiers temps , il est nécessaire de les abriter de la pluie et de l’ardeur du soleil, de leur donner Se RE. 2 . dr mmEtt FAMILLE DES PALMIPÈDES LAMELLIROSTRES. 621 une nourrilure choisie et de ne pas les mêler avec le reste du troupeau oMls seraient exposés à des attaques dont ils ne sau- raient se défendre. Pour engraisser les jeunes oies , il suffit d’une quinzaine de jours ; pour les adultes, il faut un mois; en général, on commence à s’en occuper vers le mois de no- vembre , et, pour hâter cette opération, il faut avoir le soin de les renfermer dans un lieu obscur, tranquille et peu spacieux ; souvent on les gave plusieurs fois le jour. Dans quelques can- tons , en Alsace, par exemple, on les renferme dans de petites loges assez étroites pour qu’elles ne puissent s’y retourner, et, après les avoir nourries abondamment avec du maïs pendant trois semaines, on mêle à leurs alimens quelques cuillerées d'huile de pavot, qui agit comme stupéfiant. Par ces moyens, elles deviennent en peu de temps tellementsurchargées de graisse, qu’elles ne peuvent plus respirer, et le foie , devenu malade, ac- quiert un grand volume et un goût particulier, qui le fait re- chercher des gourmets sous le nom de foie gras. Ce n’est pas seulement après leur mort qu’on arrache les plumes des oies. Pour avoir les rémiges , dont on se sert pour l'écriture, on attend que l'oiseau soit entré en mue; mais, pour les petites plumes , on les arrache du ventre, du dos et du croupion , à deux ou trois reprises chaque été. Une autre espèce d’oie, très voisine de la précédente, mais qui a les ailes plus longues et le bec coloré de noir et d’orangé, a été souvent confondue avec l’oie commune : c’est l’oie sauvage de Buffon ( 4. segetinus ), Voie des moissons, de quelques au- teurs. Elle habite les contrées arctiques et émigre périodique- ment vers le midi. Lors de ces deux passages, elle est assez com- mune en France. Nous avons assez souvent en hiver l’oie rieuse, qui est grise , à ventre noir et à front blanc , et qui a reçu ce nom à cause de son cri. La BERNACHE ( À. leucopsis) , qui habite les parties les plus froides et les plus sauvages du Groenland , de la Laponie et de la Sibérie , arrive aussi jusqu’en France pendant l'hiver, et a été pendant long-temps célèbre par les fables qu’on débitait sur sa propagation.On prétendaitqu'ilnaissaitsur des arbres comme un fruit , et on croyait que les mollusques pédonculés qui se voient souvent fixés sur des morceaux de bois flottans dans la mer, sur la carène des navires , etc. , étaient de jeunes bernaches : aussi désigne-t-on encore aujourd’hui ces animaux sous le nom d’anatifes. Les anciens Egyptiens vénéraient une autre espèce de Ber- Fernacke. Canards pro- prement dits. Macreuses, Garrots, Eiders. 622 ZOCLOGIE DESCRIPTIVE. nache , à cause de son attachement pour ses petits: c’estle chenalopex Où renard, appelé par les ornithologisies modernes bernackhe orne. Les CANARDS PROPREMENT Dis Ont les jambes plus courtes et implantées plus en arrière que les oïes, et le cou moins long: ils marchent plus difficilement et sont plus aquatiques. Chez les oies , la trachée ne présente à sa base ni renflement ni replis , tandis que, chez les canards proprement dits , ce tube se renfle à sa bifurcation en forme de capsules cartilagineuses. Les uns ont le pouce bordé d’une membrane, les doigts plus longs , les palmes plus entières , le tarse plus comprimé, la tête plus grosse et les ailes plus courtes que les autres, ils se nour- rissent plus exclusivement de poissons et d'insectes aquatiques, plongent très bien et vivent sur les grandes mers: ce sont les macreuses , les garrots , les eiders et les millouins. Les autres, dont le pouce n’est pas bordé d’une membrane , ont les pattes moins reculées et marchent moins mal:ils ont aussi la tête plus mince , le cou plus court ; enfin ils ne plongent que rarement et se nourrissent de plantes et de graines aquatiques autant que de poissons : ce sont les souchets, les tadornes, les canards com- muns ei les sarcelles. Les macreuses ont le bec large et renflé. Les macreuses com- munes , dont le plumage est noir, violacé , et le bec garni d’une protubérance sur sa base, arrivent en grandes troupes sur nos côtes lorsqu'elles descendent au midi, pour y passer l'hiver, et lorsque au printemps elles regagnent les régions arctiques. Ces oiseaux marchent très mal, mais nagent avec une grande agilité et courent sur les vagues comme les pétrels : ils se nour- rissent principalement de moules. On donne le nom de double macreuse à une espèce voisine, qui est un peu plus grosse et qui a une tache blanche sur l'aile: elle habite les mêmes pays, mais elle est moins commune. Les garrots ont le bec court et plus étroit en avant : les uns ont la queue pointue, les autres la queue ronde ou carrée. Parmi ces derniers , nous citerons le garrot commun, qui est blanc, avec la tête, le dos et la queue noirs, et qui, en hiver, vient par troupes du nord et niche quelquefois sur nos étangs. Les eiders ont aussi le bec étroit en avant, mais plus long et FAMILLE DES PALMIPÈDES LAMELLIROSTRES. 623 remontant plus haut sur le front où il est échancré par un angle de plumes. L’eider com- mun est célèbre par ΀ duvet précieux qu'il nous fournit , ei que lon nomme edredon. Cet oiseau est blanchà- tre , avec la calotte ; le ventre et la queue noirs. La femelle est grise, maiilée de brun. Sa taille approche de celle de l’oie. II habite les mers glaciales du 5 in pôle et abonde surtout g. 234. L’EIDER. en Islande, en Lapo- nie,au Groenland et au Spitzherg ; on le trouve encore assez communément aux Orcades et aux Hébrides,et même en Suède : il est aussi de passage dans les parties moins septentrionales de l'Europe , et lon a remarqué que les jeunes seulement se mon- trent sur les côtes de l'Océan. Les eiders nichent au milieu des rochers baignés par la mer. Dans les mers du nord, c’est une propriété qui se garde soigneusement et se transmet par héri- tage , que celle d’un point de la côte où ces oiseaux viennent d'habitude s'établir à l’époque de la ponte; car c’est là que l’on récolte l’édredon. La femelle , en effet, en garnit son nid , et, après qu’on lui a dérobé cette précieuse dépouille , si utile pour maintenir une douce chaleur autour de ses œufs , elle arrache de son ventre une nouvelle provision de duvet. En dépouillant les nids, on s’en procure ainsi une quantité assez considérable , et lédredon provenant de l’oiseau vivant est beaucoup plus es- timé que celui arraché après la mort. Les millouins ont le bec long , plat et sans aucune particula- rité notable. Nous en possédons ‘plusieurs , tels que le m2llouin commun , dont le plumage est cendré finement , strié de noi- râtre, varié de noir sur le dos, la poitrine et le croupion, la tête et le cou bruns. En automne, il est assez commun sur nos lacs et nos rivières. Le morillon , noir avec une huppe à Pocci- put et le ventre blanc , est une autre espèce de ce groupe qui nous vient aussi du nord en hiver. Parmi les canards proprement dits de la seconde division , on remarque d’abord les souchets , à cause de leur long bec, dont la mandibule supérieure est élargie au bout et ployée parfaite- Millouins. Souchets, Tadornes. Canard com- un. 624 ZGOLOGIE DESCRIPTIVE. inent en demi-cylindre , et dont les lamelles marginales sont si longues et si minces , qu’elles ressemblent à des cils , disposition en rapport avec le régime de ces oiseaux, qui vivent principa- iement des vermisseaux cachés dans la vase au bord des ruis- seaux. Le souchet commun est un très beau canard, dont le plumage est d’un vert clair sur la tête et le cou, blanc sur la poitrine , brun-noirâtre sur le dos , roux au ventre, avec les ailes variées de bleu clair, de vert, de blanc et de noir. Il nous arrive du nord vers le mois de février et se répand dans les marais. Sa chair est excellente. Les tadornes ont le bec très aplati vers le bout et relevé en bosse saillante à sa base. Le tadorne commun est de tous nos canards celui dont les couleurs sont les plus vives : il est blanc, avec la tête d’un vert foncé, une ceinture rousse autour de la poitrine , et l’aile variée de noir, de blanc, de roux et de vert pourpré. Il est très commun sur les bords de la mer, dans les parties septentrionales et occidentales de l'Europe , et, au prin- temps il se montre aussi en assez grand nombre sur nos côtes. Parmi les canards ordinaires , nous signalerons en première lignele canard commun (À. boschas), qui est reconnaissabie à ses pieds aurores, à son bec jaune , au beau vert changeant qui orne la tête et le croupion du mâle, et aux quatre plumes du milieu de la queue, qui , chez celui-ci , sont recourbés en demi- cercle. La femelle , comme dans tous les autres oiseaux de ce genre , est plus petite et privée des belles couleurs dont le mâle est orné. Cette espèce, qui est la souche de la plupart des diffé- rentes races de canards que nous élevons en domesticité!, habite le nord des deux continens et passe dans presque toutes les contrées de l’Europe. Vers la mi-octobre , elle commence à se montrer par petites bandes dans nos campagnes. Quelques se- maines plus tard, ces canards sauvages deviennent plus abon- dans , et on les reconnait à leur vol élevé et aux lignes inclinées et aux triangles réguliers qu’ils forment dans l'air: c’est princi- palement le soir qu’ils voyagent , et le sifflement de leur vol dé- cèle leur passage; ils se tiennent sur les étangs et les rivières , et y vivent de petits poissons , de grenouilles , de graines , etc. Si les glaces les priveni de cette nourriture , ils se retirent vers la li- sière des bois, pour ramasser au gland ou paitre le blé vert, et si le froid devient plus intense , ils se dirigent vers le midi, pour revenir en février, et aller ensuite passer l’été dans le nord; quelques-uns cependant restent dans nos contrées toute l’an- née. Au printemps, ils se séparent par paires et nichent d’or- dinaire dans les marais, sur une touffe de joncs; quelque- fois ils établissent leur nid au milieu des bruyères et on en à vu pondre dans le nid des pies et des corneilles sur des | | | FAMILLE DES PALMIPÈDES LAMELLIROSTRES. 625 arbres élevés. La ponte est en général de dix à quinze œufs , et l’'incubation ure trente Jours. Chaque fois que la femelie est obligée de quitter ses œufs , elle les recouvre du duvet qu'elle s’est arraché de la poitrine pour garnir son nid , et , lorsqu'elle revient , elle a la précaution de s’abatire à quelque distance et n'arrive à sa demeure qu’en se frayant une route tortueuse au milieu des joncs ; le mâle Paccompagne dans ses courses, se tient à quelque distance de son nid et le défend contre les autres canards qui voudraient en approcher. Les petits , conduits par leurs pa- rens , vont à l’eau dès le premier Jour de leur naissance, mais ne peuvent voler que vers l’âge de trois mois, car c’estalors seulement que les pennes de leurs ailes poussent. Les canards sauvages sont des oiseaux très méfians , et qu’il est dificile de surprendre. Ceux que l’on élève en domesticité et qui proviennent d'œufs d'individus sauvages , trouvés au milieu des roseaux et qu'on a fait couver dans nos basses-cours , sont aussi très farouches et paraissent agités sans cesse du desir de vivre en liberté ; mais, lorsque cette captivité s’est étendue sur plusieurs générations , cet instinct se perd, et les canards domestiques deviennent doux et familiers , et changent de robe aussi bien que de mœurs. Au lieu d’être constamment monogames ; ils vivent alors en polyga- mie , et un mâle suffit à huit ou dix femelles. Leur couleur varie beaucoup: on en voit dont le plumage est plus ou moins brun ou noir ; d’autres ont la tête ornée d’une huppe. On en élève un grand nombre; car aucun animal domestique n’est plus facile à nourrir. Pourvu qu’il ait de l’eau à sa disposition et une retraite pour la nuit,il ne demande plus rien à son maitre ; il ne coùte par conséquent presque rien, et il donne un bénéfice assuré ; car sa chair est un aliment agréable , et ses plu- mes sont un objet de commerce. En général on plume ces o1- seaux au mois de mai et de septembre , eton se contente d’arra- cher les plumes du ventre et du cou, qui sont les meilleures, sans valoir celles de Voie. Lorsqu'on ne consacre pas les canards à la multiplication de leur race , on les engraisse en général vers âge de six à huit mois pour la table. On élève aussi, dans nos campagnes , une autre espèce de canards , le canard musque, que l’on y désigne mal-à-pro- pos sous le nom de canard de Barherie; Car, au lieu de venir d'Afrique , il est originaire d'Amérique. On le distingue aux caroncules rouges dont sa tête est couverte. Ce canard est deux fois plus gros que le précédent , mais il est plus difücile à nourrir, et il répand une odeur de musc, provenant des glandes placées sous le croupion et qui se communique à sa chair. Ces deux espèces se mélent facilement et donnent naïis- sance à des hybrides appelés mulards, qui ont presque la gros- Sarceiles. Barles. 626 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. seur du canard musqué , sans en avoir l’odeur, mais qui sont en général stériles. Gn donne le nom de sercelles à plusieurs petites espèces de canards , qui ne diffèrent guère du canard commun que par la taille. Notre sarcelle ordinaire est maillée de noir sur un fond gris et présente une bande blanche sur les côtés de la tête et un miroir vert cendré sur les ailes: eile est commune sur nos étangs , en automne et au printemps, et se porte dans le nord pour couver. La petite sarcelle, qui est beaucoup plus commune et qui faitsa ponte dans nos contrées, ale corps finement rayé de noirâtre , la tête rousse avec une bande verte de chaque côte , la poitrine d’un blanc roussâtre , varié de taches rondes , et, sur les ailes , un miroir vert et noir. Elle se trouve aussi dans l’Amé- rique septentrionale. Les HARLES /merqus) diffèrent dela grande famille des canards par leur bec grèle , presque cylindrique et armé sur les bords de pointes dirigées en arrière et ressemblant à des dents de scie ; du reste , ils leur ressemblent extrêmement tant par leur port et leur plumage que par leurs mœurs. Leur demeure habituelle est dans les climats froids: c’est là qu’ils se reproduisent ; mais, en hiver, ils se répandent dans les pays tempérés. Leur vol est rapide et soutenu , et ils nagent extrêmement bien ; en général, ils se tiennent le corps snbmergé et la tête seulement hors de l’eau ; en plongeant , ils s’aident de leurs ailes , pour accélérer leur course, et font de la sorte une pêche active. Leur plumage varie beaucoup avec l’âge. Pendant l'hiver, il nous arrive iroisde ces oiseaux : le karle vulgaire qui est de la taille d'un canard ; le harle huppe , qui est plus petit , et le karle piette, qui est encore de moindre taille. CLASSE DES REPTILES. 627 . CLASSE DES REPTILES. La classe des reptiles comprend tous les animaux vertébres à sang froid , dont La respiration (à l'etat parfait, sinon dans Le jeune âge) est aerienne et incompliete. Is ont des poumons comme les mammifères et les oiseaux ; mais leur appareil circulatoire est toujours disposé de manière à ce qu'une partie du sang veineux se mêle au sang artériel , sans avoir traversé l'organe respira- toire , et en général ce mélange s'opère dans le cœur, qui ne présente qu’un seul ventricule , dans lequel s'ouvrent les deux oreillettes. Par leur forme générale , les reptiles se rapprochent des mammifères plus que des oiseaux ; mais , du reste , ils offrent à cet égard beaucoup de variations. Leur tête est presque toujours petite, et leur corps très allongé; quelquefois ils manqueni complètement de membres ou n’en ont que des vestiges ; mais la plupart de ces animaux ont quatre pattes conformées pour servir à la marche ou à la nage. Du reste , ces membres sont d'ordinaire trop courts pour empècher le tronc de trainer à terre ,et , au lieu d’être dirigés parallèlement à l'axe du corps et de se mouvoir dans ce sens , ils se portent en général de côté et se meuvent de dehors en dedans perpendiculairement à l'axe du corps , disposition très défavorable à la locomotion : aussi la piupart des reptiles ont-ils l'air de ramper sur le so! plutôt que de marcher , et c’est de là que leur vient leur nom. Leur squelette présente dans sa structure des variations bien plus grandes que celui des animaux vertébrés à sang chaud ; toutes les parties dont il se compose peuvent tour-à-tour man- quer, si ce n’est la tête et la colonne vertébrale ; mais les os qui s’y trouvent conservent toujours une grande ressemblance avec ceux des mammifères ei des oiseaux, et se reconnaissent facile- ment pour en être les analogues. En faisant l’histoire des diffé- rens ordres doni la classe des reptiles se compose , nous décri- rons les principales modifications de la charpente osseuse de ces animaux , et, pour éviter les répétitions , nous nous borne- rons à ajouter ici que le crâne est petit et la face allongée. La mâchoire inférieure est toujours composée de plusieurs pièces, comme chez les oiseaux, et s’articule avec le crâne par l’intermé- diaire d’un os distinci du temporal (los carré ou iympanique) ; la tête est en général peu mobile et s'articule avec la colonne Caracteres généraux. Ferme. Squeleite. Mouvement. Systeme ner- veux. 628 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. vertébrale au moyen d’un seul condyle à plusieurs facettes ; la colonne épinière est ordinairement très longue et les côtes nombreuses ; enfin les os de l'épaule ont de l’analogie avec ceux des oiseaux , sans être cependant aussi développés , et presque toujours le membre postérieur ressemble en tout au membre antérieur. Les mouvemens des reptiles sont en général moins vifs et moins soutenus que ceux des animaux à sang chaud, comme, du reste ,on pouvait le prévoir d’après l’étendue plus bornée de leur respiration ; car il existe toujours , ainsi que nous l’avons déjà vu, un rapport intime entre l’énergie de ces deux fonctions. Leurs muscles reçoivent moins desang et présentent une teinte blanchätre ; enfin il est également à remarquer que ces organes conservent plus long-temps leur irritabilité , après qu’on les a sousiraits à l'influence du système nerveux. Chez les animaux à sang chaud, la destruction du cerveau et de la moelle épi- nière ou la section d’un nerf détermine immédiatement une paralysie complète, soit générale, soit locale , et , peu de temps après que ce phénomène s’est déclaré, il devient impossible d’exciter des contractions musculaires , en piquant ou en sti- mulant autrement les parties affectées. Chez les reptiles, au contraire , la faculté d'exécuter des mouvemens sous l’influence de ces stimulans, se conserve dans des circonstances analo- gues pendant fort long-temps ; ainsi la queue d’un lézard, détachée du corps, continue à se mouvoir pendant plusieurs heures , et il arrive souvent de voir une tortue morte depuis plusieurs jours , agiter ses membres lorsqu'on stimule les muscles , en les piquant. On peut en conclure que, chez ces animaux , la division du travail physielogique et la localisation des diverses fonctions du système nerveux sont portées moins loin que chez les mammifères et les oiseaux , d’où résulte une dépendance moins intime des différentes parties de l’économie les unes des autres. L’encéphale des rentiles est peu développé; la surface du cerveau est lisse et sans circonvolutions. Les deux hémisphères sont ovalaires, plus ou moins allongés et creusés intérieurement d’un ventricule ; de même que , chez les oiseaux, il n’y a point de corps strié; enfin , à leur partie antérieure, on remarque sou vent des lobules olfactifs assez gros , situés à lorigine des nerfs de la première paire. Les lobes optiques sont en général assez grands et placés en arrière des hémisphères, sur le même niveau. Le cervelet est au contraire très petit , et, de même que, chez les autres animaux vertébrés ovipares, il n’envoie pas sous la moelle allongée un prolongement transversal , de manière à y former une sorte d’anneau comme chez les mammifères. La moelle épi- CLASSE DES REPTILES. 629 nière, comparée au Cerveau , est très développée ,et on remarque aussi que lesnerfs sont plus gros proportionnellement au volume des parties centrales du système nerveux que chez les animaux supérieurs. La plupart des reptiles n’ont pas d’organe spécial pour le toucher et en général la sensibilité tactile ne peut être très déve- loppée à raison de la nature de leurs tégumens. Quelques-uns ont ,ilest vrai, la peau complètement nue et l’épiderme à peine distinct ; mais , chez la plupart, elle est recouverte par une couche épidermique épaisse et formée par des lames plus ou moins dures de matière cornée ou même osseuse. Chez les reptiles à peau nue, lépiderme de consistance moyenne, se détache et se renouvelle très souvent , et, chez les animaux de cette elasse où il offre plus de consistance , il se détache aussi à différentes époques de l’année, pour faire place à un épiderme nouveau ; tantôt celte espèce de mue est partielle , OU du moins l’épiderme ne tombe que par lambeaux; mais d’autres fois il se détache en entier et conserve la forme de l'animal dont il provient. Les serpens se dépouillent ainsi plusieurs fois par an. Les yeux des reptiles ne présentent rien de bien remarquable : leur disposition est en général à-peu-près la même que chez les oiseaux ; mais on n’y trouve que rarement quelque prolon- gement ayant de analogie avec le peigne. Les paupières sont ordinairement au nombre de trois , mais quelquefois manquent complètement , comme nous le verrons chez les serpens. L'appareil auditif est bien moins complet que chez les mam- mifères ou même les oiseaux. L’oreille externe manque presque toujours complètement: il n’y a jamais de conque auditive , et le iympan est à fleur de tête et à nu, ou caché sous la peau ; quelquefois même il n’en existe aucune trace ; la caisse n’est d'ordinaire que très imparfaitement cloisonnée par les os du crâne et communique par une large fente avec l'arrière -bouche, dont elle semble quelquefois n’être qu’une dépendance ; les osselets de louie manquent pour la plupart ; enfin le limaçon est souvent rudimentaire. Les fosses nasales sont peu développés et présentent dans leur disposition quelques particularités dont nous aurons loc- casion de parler par la suite. La plupart des reptiles avalent leurs alimens sans les mâcher; et le sens du goùt parait être très obtus chez tous ces animaux. La langue est quelquefois épaisse et charnue ; mais, en général, elle est mince, sèche, très protractile et souvent bifide ; quel- quefois elle devient un organe de préhension dont le jeu est très remarquable. Organes des sens. Nutrition. Appareil di- gestif. Sang. 630 : ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. Il est peu de reptiles qui vivent uniquement de matières végé- tales. Presque ious sont carnivores, et, à quelques exceptions près, ne recherchent qu’une proie vivante, qu’ils avaient, en général, sans la diviser : aussi le choix des animaux dont ils se nourrissent est-il, pour ainsi dire , réglé par le calibre de leur bouche. La plupart ne boivent que peu et peuvent , sans incon- vénient , supporter des jeùnes très prolongés. La bouche est largement fendue ei en général armée de dents ; quelquefois cn en trouve au palais aussi bien qu'aux mâchoires: elles ont presque toujours une forme conique, et, en général, au lieu d’êire logées dans des alvéoles , elles sont soudées par leur base sur los qui les porte. Chez quelques reptiles dépour- vus de dents, les mâchoires sont recouvertes d’une lame cornée, dont les bords sont iranchans comme le bec des oiseaux ; mais il n’y a jamais de lèvres charnues et mobiles comme chez les mammifères. Des organes glandulaires en assez grand nombre entourent d'ordinaire la bouche des reptiles et y versent soit une humeur gluanie, soit de la salive; quelquefois des glandes, ayant la plus grande analogie avec les glandes salivaires , sécrètent aussi un poison violent. En faisant l’histoire des serpens , nous aurons l’occasion de revenir sur ce sujet. Les alimens ne devant pas séjourner dans la bouche, pour y être broyés, le voile du palais aurait été en général inutile, et, en effet , il n’existe presque jamais. Chez la plupart de ces ani- maux , le pharynx n’est pas distinct de la bouche, et souvent il n’y a même aucune ligne de démarcation bien tranchée entre l’œsophage et lestomac, qui est simple et de forme variée. Les intestins sont courts et dépourvus d’appendice cœcal ; le gros in- testin diffère peu de l'intestin grèle et se termine dans un cloaque où viennent aboutir aussi les canaux urinaires et les organes de la reproduction. Le joie est en général volumineux ; le nombre de ses lobes varie de un à trois ; la bile est de couleur verte ou brune, et arrive dans l'intestin par deux canaux souvent complètement séparés, et dont l’un provient directement du foie , l’autre de la vésicule du fiel; quelquefois ce réservoir est tout-à-fait séparé du foie. Le pancréas se trouve à sa place ordinaire, et il existe aussi une rate , dont la forme et la position varient. Les reptiles ont, de même que Îles animaux supérieurs, des vaisseaux lymphatiques destinés à pomper les produits de la digestion et à les verser dans le torrent de la circulation. Le sang de ces animaux esi rouge et à globules elliptiques. Le volume de ces corpuscules est beaucoup plus considérable que chez les mammifères et les oiseaux , el leur nombre moins ttes CLASSE DES REPTILES. 631 considérable. La disposition de l’appareil circulatoire varie ; mais, aing que nous l’avons déjà dit , il y a toujours une com- munication directe entre le système vasculaire à sang rouge et le système vascuiaire à sang noir, de sorte que ces deux liquides se mêlent et que les organes ne reçoivent qu’un sang imparfaite- ment artérialisé par le travail de la respiration. Presque tou- jours le cœur se compose de deux oreillettes (04, og) , s’ouvrant Fig. 235. (1) dans un seul ventricule (s). Il en ag ac ad résulte que le sang artériel venant des poumons et reçu dans l’oreil- » ap lette gauche, et le sang veineux ar- «#privant des diverses parties du corps dans l'oreillette opposée se mélent : 5 #.. 09 dans ce ventricule commun. Une DE td “ # portion dece mélangeretourne par Qu À l'artère aorte dans les divers orga- nes qu’il est destiné à nourrir , une autre se rend aux poumons par des vaisseaux (ap) qui naissent immé- TNT avdiatement du veñtricule commun ou même de l’artère aorte. Il parai- trait que , dans les crocodiles ,le cœur est conformé de la même manière que chez les oiseaux et les mammifères , et présente une cloison qui sépare le ventricule droit du ventricule gauche: il en résulte que le sang artériel ne s’y mêle pas au sang veineux ; mais , Comme nous le verrons bientôt , une disposition particu- lière des artères opère ce mélange à quelque distance de cet or- gane , et les vaisseaux de toute la moitié postérieure du corps ne reçoivent que du sang imparfaitement artérialisé. Jusqu’en ces derniers temps , on croyait que, chez d’autres animaux de cette classe (les batraciens) , il n’existait au contraire qu’un seul veniricule ; mais on a démontré qu’il en était autrement. La respiration est peu active chez les reptiles; la plupart de ces animaux ne consomment que peu d’oxigène, et peuvent en être long-temps privés sans tomber en asphyxie. Du reste, la (1) Cœur et principaux vaisseaux d’une tortue : — ventricule , — od oreillette droite , qui recoit le sang par le gros tronc veineux (wc) et le verse dans le ven- tricule (+) ; — og oreillette gauche, qui recoit le sang artériel venant des poumons par les veines pulmonaires (vp) et le verse également dans le ventricule ; — ag et ad les deux artères aortes qui naissent du ventricule unique, et qui , après s’être portés en arrière, s'unissent pour former lartère aorte verticale (av); — ac branche de l'aorte droite, qui fournit les artères carotides , brachiales, etc.; — ap, ap, les deux artères pulmomaires , dont le tronc commun naît da ventricule a côté des artères aortes. 41 Respiration. Poumoss. Temjréra- ture. 622 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. température à la plus grande influence sur ce phénomène , et, dans la saison chaude, le besoin de respirer se fait sentir bien plus vivement qu’en hiver. Une grenouille, par exemple , que l’on prive d'air, périt en moins de deux heures en été, tandis qu’en hiver elle peut continuer à vivre pendant plusieurs jours. Chez quelques reptiles , il existe , dans les premiers temps de la vie, des branchies ; maïs bientôt les poumons se développent , et d’ordinaire les branchies se flétrissent alors et disparaissent, de telle sorte que le même animal à une respiration d’abord aquatique , puis aérienne : il en est même qui conservent ces organes pendant toute la vie , et qui , ayant en même temps des poumons , sont complètement amphibies ; mais la plupart des reptiles n’ont jamais que des poumons. Il ne faut pas en conclure cependant que leur respiration soit toujours exclusivement aé- rienne ; Car, chez plusieurs de ces animaux, la peau est aussi un organe respiraloire , et peut agir sur l'air dissous dans Peau aussi bien que sur l’oxigène gazeux. Chez quelques reptiles la respiration cutanée est même si active que, dans certaines circonstances, elle suffit à l’entretien de la vie. Les poumons sont organisés d’une manière peu favorable à une grande activité de la fonction dont ils sont le siège ; car leurs cellules sont très grandes, et par conséquent la surface vasculaire destinée à recevoir le contact de lair peu étendue. Ils ne sont pas logés dans une cavité particulière, le thorax n’étant pas séparé de labdomen par un muscle diaphragme, et V’airne se renouvelle dans leur intérieur qu'avec moins de facilité et de régularité que chez les animaux supérieurs. Les reptiles sont tous des animaux à sang froid , c’est-à-dire qui ne produisent pas assez de chaleur pour avoir une tempéra- ture sensiblement au-dessus de celle de Patmosphère. Tout leur corps s’échauffe ou se refroidit en même temps que le milieu ambiant, et ies changemens de température qu’ils éprouvent ainsi influent puissamment sur toutes leurs fonctions. Une cha- leur d'environ quarante à cinquante degrés est promptement funeste à la plupart de ces animaux , et le froid tend à ralentir chez eux tous les phénomènes vitaux. En hiver, la plupari d’entre eux ne peuvent plus digérer les matières ingérées dans leur estomac et ne prennent pas d’alimens. Leur respiration se ralentit aussi de la manière la plus remarquable. Une gre- nouille, par exemple, qui, en été, périt asphyxiée en moins de deux heures par la privation complète d’air ou même par la strangulation , peut , dans la saison froide , résister à Pasphyxie pendant plusieurs jours et vivre pendant plusieurs mois sans CLASSE DES REPTILES. 633 faire entr er d’air dans ses poumons, mais, à l aide de la respi- ration cutahée seulement. Enfin l'abaissement de la tempéra- ture détermine souvent chez ces animaux un engourdissement léthargique analogue à celui des animaux hibernaux. Les sécrétions ne présentent dans cette classe rien de bien remarquable, si ce n’est la production du venin chez certains serpens. L'appareil urinaire se compose de deux reins, dont les canaux excréteurs se rendent en général directement dans le cloaque ; quelquefois cependant il y a une vessie urinaire. Quant à la composition chimique de l'urine, elle varie. De même que les oiseaux , les reptiles n’ont pas de mamelles pour allaiter leurs petits , et se reproduisent par des œufs ; seu- lement ceux-ci éclosent quelquefois avant la ponte, et on donne le nom d’ovovivipares aux animaux chez lesquels ce phéno- mène s’observe. La classe des reptiles présente quatre types principaux et se divise par conséquent en quatre ordres : les Cheloniens ou tor- tues , les Sauriens , les Ophidiens où Serpens et les Batraciens , dont voici les caractères les plus importans. / recouvertparune carapace. ( Mä- SERRE choires dépour- vues de dents et sde Respiration garnies d’une en- ; : Corps pourvu toujours pulmo- veloppe cornée.) S : de membres , et paire. (Point de n'ayant pas de ca- | casse | métamorphoses ; rapace. Robes ORDRE TR peaupresque tou- res armées j écai À u- | SAURIENS reprises, | Jours écailleuse.) dents et sans e MA veloppe cornée. Corps dépourvu de membres ; des ORDRE dents. {En général point de pauypiè- DES res mobiles. ) OPHIDIENS. Respiration d’abord branchiale, puis pulmonaire TRE (quelquefois en même temps branchiale et pulmonaire ; LEeS s en général des métamorphoses; peau nue, en généraldes | ic ns, membres ; point d'ongles.) 41, Sécrétions. OEufs. Classifica- tion. Caractères. Squelette. 634 ZGOLOGIE DESCRIPTIVE. ORDRE DES CHÉLONIENS OU TORTUES. Fig. 236. TORTUE GRECQUE. Les tortues se reconnaissent au premier coup-d’œil par la singulière armure défensive dont la nature les a pourvues. Un double bouclier enveloppe de toutes parts leur corps et ne laisse passer que la tête, le cou , les quatre pattes et la queue, qui, en général, peuvent aussi se cacher dans cette espèce de boïtesolide. En étudiant les mammifères , nous avons déjà vu des animaux dont le corps est protégé par une espèce de test. Le tatou nous en a fourni un exemple ; mais cette armure , formée seulement par des poils agglutinés ou par une modification particulière des couches épidermiques de la peau , ne ressemble en rien au double bouclier des tortues ; car celui-ci est composé d’os élargis et intimement unis entre eux ; la carapace ou bouclier supérieur résulte de la réunion des côtes et des vertèbres dorsales ; le plastron ou bouclier inférieur est le sternum. Ces organes sont par conséquent une portion du squelette qui, au lieu d’être logée dans la profondeur des parties molles , est devenue super- ficielle et n’est recouverte que par une peau sèche et mince. La charpente osseuse des tortues , pour présenter cette dispo- sition insolite, a dû être, comme on le pense bien , profondément modifiée : on y retrouve cependant les mêmes pièces consti- ORDRE DES CHÉLONIENS OU TORTUES. 635 tuantes que chez les animaux vertébrés normaux ; seulement plusieurs de ces pièces ont changé de forme et de volume. Fig. 237. (1) ne em we mm meme = AR en nn en vC “ax fn D ps NE 2712 Lorsqu'on examine la carapace d’une tortue par sa face supé- rieure , on voit qu’elle est formée par un assez grand nombre de plaques osseuses , unies entre elles par des sutures, et dont huit occupent la ligne médiane , seize constituent de chaque côté de celles-ci une rangée longitudinale, et25 ou 26 entourent le tout comme un cadre ovalaire. Il est alors difficile de recon- naître la nature de ces os; mais , si on examine la carapace par sa face inférieure (fig. 237), on voit aussitôt que les pièces mé- dianes dont nous venons de parler ne sont autre chose que des (r) Squelette d’une tortue de terre, dont on a enlevé le plastron :—»c vertèbres cervicales , — vd vertèbres dorsales, — c côtes, — cs côtes sternales ou pièces marginales de la carapace, — o omoplate, — cl clavicule, — co os carocoïdien , — b bassin, — f'fémur, —+ tibia, — p péroné. 636 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. dépendances des vertèbres dorsales (vd). En dessous se trouve ef- fectivement le corps de chacun de ces os avec sa forme ordinaire, ainsi que le canal vertébral servant à loger la moelle épinière ; mais la portion supérieure des parois de l’anneau, qui constitue ce canal , au lieu d’avoir, comme de coutume, la forme d’une bande osseuse transversale, séparée par un espace de ses con- Sénères , et d’être surmontée d’une apophyse épineuse, est ici élargie en manière de disque, et se continue sans interruption avec les plaques analogues appartenant à la vertèbre qui pré- cède et à celle qui suit. Ces vertèbres dorsales , devenues ainsi immobiles , portent chacune une paire de côtes comme chez l’hommeet la plupartdes autres animauxvertébrés; mais ces côtes s’'élargissent au point de se toucher dans toute ou presque toute leur longueur etde s’articuler entreelles par des sutures (ec) ;enfin les pièces marginales(es)quis’articulent avec l'extrémité des côtes et qui bordent en quelque sorte la carapace , représentent évi- demment la portion sternale de ces os , qui , chez les mammi- fères , restent à l’état cartilagineux ; mais qui, chez les oiseaux, sont complètement ossifiées. Dans quelques tortues, elles restent même cartilagineuses , et , chez presque tous ces animaux, plu- sieurs d’entre elles s’appuient latéralement sur les bords du plasiron sternal. Le siernum des tortues présente un développement extraordi- naire :ils’étend depuis la base du cou jusqu’à l’origine de la queue et recouvre toute la face inférieure du corps(#g. 236). Les pièces qui entrent dans sa composition sont au nombre de neuf, et, au lieu d’être placées toutes à la file les unes des autres comme chez les mammifères, elles sont , à l’exception d’une seule , rangées par paires et soudées ou articulées entre elles , de facon à former une grande plaque ovalaire. Tantôt ce bouclier est entier et solide dans toute son étendue; tantôt il est divisé en trois porlions , dont l’antérieure et la postérieure , sont un peu mobiles, et d’autres fois encore il est évidé au centre en ma- nière de cadre; enfin , de chaque côté, il est fixé à la carapace, soit par un large prolongement osseux , soit par des cartilages, et c’est par l’espèce de fente située entre ces deux boucliers , en avant eten arrière de cette articulation, que passent les membres, la tête et la queue. La carapace et le plastron , ainsi que nous l'avons déjà dit, ne sont recouverts que par la peau ordinairement écailleuse de l’animal. Aucun muscle ne s’insère à leur surface , et c’est par conséquent dans l’intérieur du tronc , que vont se fixer ceux du cou et des membres. L’épaule, au lieu de s’appuyer sur la face externe des parois du thorax, se loge dans l’intérieur de cette cavité , et le bassin est , pour ainsi dire, rentré dans Fin- ORDRE DES CHÉLONIENS OU TORTUES. 637 térieur de l'abdomen ; enfin les pièces marginales de la cara- pace s’avartent au-dessus de la base du cou et de la queue , de façon que ces parties semblent aussi sortir de la mème cavité. Les vertèbres cervicales(zc), loin d’être immobiles comme celles du dos, sont articulées entre elles de manière à permettre en général des mouvemens très étendus et assez semblables à ceux du cou des oiseaux. Leur nombre est ordinairement de huit , et leurs surfaces articulaires sont alternativement convexes et concaves au lieu d’être planes comme chez les mammifères. Chez quelques tortues le cou n’est pas rétractile ; chez d’autres, il peut se reployer complètement sous la carapace, en se courbant sur lui-même en dessous ou de côté. La tête des tortues est petite comparativement au corps , et le crâne petit, même comparativement à la tête. En général elle est aplatie et fort élargie postérieurement par de grandes fosses temporales , cachées œ ordinaire sous une voûte osseuse. La mâchoire supérieure est solidement fixée au crâne et tout-à-fait immobile. L’os tympanique, qui supporte la mâchoire infé- rieure , est articulé de la même manière aux os voisins et forme la majeure partie du pourtour du cadre du tympan ; enfin la mâchoire inférieure se compose d’un grand nombre de pièces osseuses : on en compte six de chaque côté. Les os de l'épaule (0 , e£ , co) s’articulent avec la colonne verté- brale , d’une part, et avec le sternum , de l’autre, de façon à for- mer une sorte d’anneau entre la carapace et le plasiron. On y distingue trois branches , qui souvent se soudent ensemble de bonne heure et qui convergent vers la cavité articulaire de l’humérus , qu’elles forment en se réunissant. L’un de ces os (0), suspendu à la colonne vertébrale, est évidemment l’omoplate ; le second, qui se dirige en arrière (co), est Panalogue de los cora- coïdien des Oiseaux, ét la irorsième(c2), qui drscead se joindr e au plasiron , est le représentant de la clavicule ou du moins de l'apophyse acromion de l’omoplate , avec laquelle cet os s’arti- cule d'ordinaire. Le bassin (b} ressemble beaucoup à la ceinture formée “ei les os de l'épaule. Il se compose de trois paires de pièces &is- tinctes: un os iliaque , qui s’attache aux apophyses iransverses des vertèbres postérieures de la carapace, un pubis et un is- chion, qui lun et l’autre se dirigent vers le plastron et se réu- nissent à leur congénères. Les membres ne présentent rien de bien remarquable dans la disposition de leur charpente osseuse. Ces organes sont toujours courts ; tantôt ils sont comme ironqués au bout, d’auires fois aplatis et allongés en rame ; enfin , chez tous, les doigts sont peu mobiles , et, en général , ils sont à peine distincis à Textérieur. Peau. Sens. Appareil di- gestif. Cœur. 6338 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. Pour terminer cette description succincte du squelette des tortues , nous ajouterons que la colonne vertébrale se pro- longe au-delà de la carapace , en formant une queue plus ou moins longue. Le nombre des vertèbres caudales varie suivant les espèces. La peau qui recouvre tout le corps de ces animaux conserve quelquefois de la mollesse et n’est pas recouverte d’écailles ; mais , chez presque tous, elle est garnie d’une couche cor- née , d’une consistance très grande. Sur le plastron et sur ;la carapace ces écailles forment de larges lames, dont la dispo- sition et l’aspect varient suivant les espèces ; celles qui recou- vrent la carapace d’une espèce particulière de tortue de mer sont d’une beauté remarquable et s’emploient dans l’industrie sous lenom d’ecaille. Les yeux des tortues sont protégées par trois paupières comme ceux des oiseaux. Leur tympan est grand, mais d’ordinaire caché sous la peau , et les narines sont percées à l'extrémité du museau. Ainsi que nous lavons déjà dit, ces animaux sont dépourvus de dents, et leurs mâchoires sont en général revètues d’une enveloppe cornée, à bords tranchans , comme celle des oi- seaux. Les uns vivent de plantes marines, d’autres de petits animaux aussi bien que de végétaux. Du reste, il ne leur faut que peu de nourriture , et on en a vu qui avaient passé des mois et même des années sans manger. Les muscles élévateurs de la mâchoire sont extrêmement forts , et , lorsqu'une tortue saisit quelque chose avec sa bouche, il est presque impossible de lui faire lâcher prise. La langue est d’une structure plus compliquée que celle de la plupart des reptiles: elle est courte, épaisse et hérissée de papilles fili- formes. L’estomac ne paraît différer des parties voisines du tube digestif que par un peu plus &@e largeur; lintestin est de iongueur médiocre et n’a point de cœcum ; le foie est volumi- neux. Il exisie une grande vessie urinaire , des poches qui com- muniquent avec le cloaque et qui paraissent être le siège de quelque excrétion , enfin des canaux qui mènent du cloaque dans la cavité du péritoine. L'appareil de la circulation ne présente rien de particulier, si ce n’est que le ventricule du cœur est imparfaitement divisé en deux chambres qui communiquent ensemble , d’où il résulte un mélange plus ou moins complet du sang veineux et du sang artériel dans l’intérieur de cet organe. (Voyez fig. 235, pag. 631.) FAMILLE DES TORTUES TERRESTRES. 639 Les poumons sont très grands , également développés et placés sous la carapace au-dessus du péritoine. Le mécanisme à laide duquel l'air y pénètre est tout-à-fait différent de ce que nous avons vu chez l’homme et les autres animaux dont le thorax est dilatable. Les parois de cette cavité étant immobiles chez la plupart des tortues , c’est par le jeu de la bouche , qu’elles poussent l’air dans ces organes. Les mâchoires étant fermées, l'animal abaisse l’os hyoïde , ce qui agrandit la cavité de la bouche , et lair y étant entré par les narines , il ferme avec sa langue les arrière-narines, et élevant l’hyoïde comme pour ava- ler , il force l'air , ainsi emprisonné, à descendre dans la trachée. C’est comme on le voit par une espèce de déglutition qu’il respire. Les tortues pondent des œufs revètus d’une coque dure, qu’elles déposent dans le sable ou dans la terre, dans un endroit exposé au soleil , afin de les faire éclore. Les mâles sont en géné- ral plus petits que les femelles et se reconnaissent d'ordinaire à leur plastron , légèrement concave. La durée de la vie de ces animaux est très longue : on connait des exemples bien authen- tiques de tortues terrestres qui ont vécu plus de cent vingt ans, même deux cents ans , et on en cite qui sont parvenues à une vieillesse encore plus grande. Les mœurs de ces animaux varient , et ces différences , qui coïncident avec des modifications dans leur structure , les ont fait diviser en quatre familles principales , savoir : les tortues terrestres , les tortues paludines , ies tortues fluviatiles ei les tortues marines. FAMILLE DES TORTUES TERRESTRES. Les tortues terrestres, que quelques auteurs désignent aussi sous lenom de CHERSIES, se reconnaissent à leurs pattes, en forme de moignons arrondis (fig. 238). Ces organes sont gros, courts, Fig. 238. et leurs doigts , presque égaux et immobiles ;, sont réunis, par une peau épaisse, en une masse arron- die, et ne se montrent au dehors que par des ongles courts , gros et coniques, ressemblant à de petits sabots. Le nombrede ces ongles est presque toujours de cinq en avant et de quatre en arrière. La cara- paceest très bombée et quelquefois plus haute que large, formant une voûte très solide et presque tou- jours complètement immobile, sous laquelle la tête, OEufs. Durée de la vie. Classifica= tion. Tortues pro- prement tes di- 640 ZOGLOGIE DESCRIPTIVE. les membres ei la queue peuvent se retirer entièrement (/g. 236. Ce bouclier est recouvert de grandes plaques cornées , non im- briquées , dont le nombre varie à peine. On en compte toujours treize sur l’espèce de disque qui correspond aux vertèbres et aux côtes , et vingt-trois à vingi-cinq formant une bordure autour des premières. | , Ces tortues vivent dans les bois ou dans les lieux bien fournis d'herbes : elles ne vont jamais à l’eau , mais habitent souvent dans son voisinage. La plupart se nourrissent principalement de végétaux et de mollusques terrestres. Elles se creusent des espèces de terriers, et, dans les climats tempérés , y passent l'hiver dans un état d’engourdissement. Leurs œufs sont en général sphériques et garnies d’une coque dure; la mère les dépose dans un trou et ne parait s'occuper en rien des petits qui en proviennent. Les erpétologistes réservent le nom de TORTUES PROPREMENT DITES (éestudo) à une des principales divisions de cette famille , caractérisée par l’existence de cinq doigts , d’une carapace im- mobile et d’un plastron également immobile dans sa partie antérieure. En général ce dernier bouclier est tout d’une pièce ; mais quelquefois sa portion postérieure est un peu mobile. Chez d’autres tortues terrestres , dont on a formé le genre PYxXIDE, la portion antérieure du plastron est aussi mobile, et peut , lorsque la tête et les pattes sont rentrées , s'appliquer contre les bords de la carapace, comme une porte sur son chambranle. Il en est aussi dont la carapace est flexible et peut s’abaisser en arrière contre le plastron : ce sont les GrNIxYs; enfin, chez d’autres encore , il existe à toutes les pattes seulement quatre doigts, ious onguiculés , disposition qui leur a valu le nom générique de HOMOPODE. Nous ne possédons en Europe que trois espèces de tortues terrestres , qui appartiennent toutes au genre des Tortues pro- prement dites. La plus commune est la tortue grecque, jaune, tachetée de noir et d'environ dix pouces de long (fig. 236) : elle habite la Grèce , l'Italie et les grandes iles de la Méditerranée ; aujourd’hui elle se trouve aussi dans le midi de la France, où on Pa apportée d'Italie. Elle recherche de préférence les lieux sa- bionneux et boisés, aime à se réchauffer aux rayons du seleil et pond vers le milieu de l'été. À l’approche de lhiver, elle se retire dans des trous qu’elle creuse en terre , et y reste dans un sommeil léthargique des plus profonds jusqu’au printemps. En Italie et en Sicile , on mange ces tortues. Une autre espèce (La tortue mauresque), très voisine de la précédente, avec laquelle FAMILLE DES TORTUES PALUDINES. 641 on l’a souvent confondue , se trouve en assez grande abondance aux environs d'Alger, d’où on en expédie pour nos marchés. FAMILLE DES TORTUES PALUDINES. Cette famille , beaucoup plus nombreuse que la précédente, établit en quelque sorte le passage entre les tortues terrestres et les tortues essentiellement aquatiques ; car elle se compose Fig. 239. de chéloniens qui vivent d'ordinaire dans les marais et qui peuvent nager, mais qui, par leur organisation , ne diffèrent que peu des précédens. C’est principalement par la confor- mation de leurs pattes qu’on les en distingue. Les doigts, au nombre de cinq, sont distincts, mobiles, garnis d'ongles crochus et réunis à leur base par une palmure plus ou moins étendue (/g. 239) ; mais ces caractères ne sont pas toujours également prononcés. De mème que, chez les tortues terrestres , la carapace est en général entièrement solide et de forme ovalaire ; mais , au lieu d’être très élevée , elle est d'ordinaire plus ou moins déprimée. Le cou de ces reptiles est presque toujours plus long que chez les précédens et présente dans sa conformation des variations remarquables. Chez les uns , il est cylindrique et entouré d’une peau lâche, qui permet à cette partie de se retirer en entier sous le milieu de la carapace , tandis que , chez d’autres, il est un peu aplati et revêtu d’une gaine cutanée, étroite et adhérente aux muscles et il ne peut se reployer que latéralement sur le côté du corps. Presque toutes ces tortues peuvent cacher leurs pattes entre leur double bouclier,et ont, comme les précédentes, seule- ment quatre ongles aux pieds de derrière. Elles n’ont pas , dans leurs mouvemens , la lenteur des tortues terrestres et nagent avec assez de facilité. Leur nourriture consiste principalement en mollusques fluviatiles ,en batraciens et en annélides : on les rencontre sur les bords des lacs, des marais et des petites rivières dont le cours n’est pas rapide. L'espace nous manquerait pour décrire ici tous les genres dont se compose la famille des tortues paludines. L’un des plus intéressans pour nous est le genre CISTUDE ; Car il a pour type la tortue bourbeuse, si commune dans les eaux douces de toutes les parties méridionales de l'Europe. C:studes. Tortues à boites. Matamata. Caractères. 642 ZOCLOGIE DESCRIPTIVE. Les cistudes appartiennent à la division des tortues palu- dines à cou rétractile , et se distinguent par leur sternum , garni de douze plaques et "divi isé tr ansyemalement en deux parties à-peu-près égales, l’une et l’autre mobiles , par leur queue courte et par leur menton dépourvu de barbillons. La cistude d Europe ou tortue bourbeuse a la carapace déprimée ,assez lisse, noirâtre avec des poinis jaunes et d'environ six pouces de long. Elle ha- bite de préférence les eaux stagnantes , au fond desquelles elle aime à se tenir enfoncée dans la vase. A l’approche de la saison froide, elle se retire dans des trous, pour hiberner. On la trouve dans le midi de la France ; mais c est surtout en Grèce et en Italie qu’elle est commune. On en mange la chair. On désigne quelquefois sous le nom de tortues à boîtes des chéloniens voisins des cistudes chez lesquels la mobilité du sternum est encore plus grande. On peui séparer des tortues paludines une espèce très singu- lière , qui habite la Guyane et qui est appelée le matamata. Son double bouclier est beaucoup trop petit pour recouvrir sa tête et ses pieds; ses narines se prolongent en trompe ; sa tête est aplatie ; sa bouche est largement fendue et à peine cornée sur les bords ; son menton et son gros cou sont garnis de barbillons et de franges , et la carapace est très déprimée. Les naturalistes don- nent à ces tortues le nom de CHÉLIDES ou de TORTUES A GUEULE. FAMILLE DES TORTUES FLUVIATILES. Les tortues dont se compose ce groupe diffèrent de toutes les précédens par la conformation de leurs pattes (fig. 240), qui sont disposées pour servir de rames natatoires , mais sont tout-à-fait Fig. 240. impropres à la marche. Les pattes sont, en effet, fort déprimées, et les doigts , quoique bien dis- tincts et plus ou moins mobiles , sont réunis jus- qu'aux ongles par de larges membranes flexibles. Leur carapace est très élargie et presque plate, dépourvue d’écailles , couverte seulement d’une peau molle et complètement cartilagineuse dans iout son pourtour, disposition qui leur a valu le nom de tortues molles ; leur cou est généralement allongé et protractile; leurs narines sont prolongées en une espèce de petite trompe ; leurs mâchoires tranchantes et garnies FAMILLE DES TORTUES MARINES. 643 \! d’un repli de la peau, qui simulent des lèvres ; leurs membres courts, trapus et armés seulement de trois ongles. A ces ea- ractères extérieurs s'ajoutent d’autres particularités anatomi- ques. Ainsi la carapace manque des pièces marginales, et le sternum n’est pas ossifié au milieu. Ces animaux sont essentiellement aquatiques et habitent les ri- vières et les lacs des régionsles plus chaudes du globe: ils nagent avec une facilité extrême et ne viennent se reposer à terre que pendant la nuit: ils sont très voraces et vivent principalement de reptiles et de poissons. Le Nil nourrit une de ces tortues , qui est utile à l'Egypte, en dévorant un grand nombre de petits crocodiles au moment où ces reptiles éclosent: c’est le tyrse ou trionyx égyptien des zoolo- gistes. Une autre espèce , qui habite les fleuves de l'Amérique septentrionale , est remarquable par sa férocité et par la délica- tesse de sa chair. FAMILLE DES TORTUES MARINES. Les tortues qui vivent dans la mer diffèrent de toutes les autres par leur conformation aussi bien que par leurs mœurs. Leurs pattes déprimées et changées en palettes , ne sont propres qu’à la nage, et leurs doigts, étroitement serrés et enve- loppés dans la même mem- brane , sont entièrement im- mobiles. Il n’existe d’ongles qu'aux deux premiers doigts de chaque pied, etencoretom- bent-ils souvent avec l’âge ; enfin les pattes antérieures, au lieu d’être à-peu-près de même longueur que les posté- rieures, sont plus longues du double. La carapace est sur- baissée et cordiforme ; les côtes ne sont pas élargies et es soudées entre elles , près du Fig. 241. LE CARET. bord de ce bouclier, et, de même que dans la famille précédente, le sternum a la forme d’un cadre évidé au centre. Leurs narines ne se prolongent pas en t'ompe , mais sont surmontées d’une masse charnue , qui fait l'office d’une soupape, pour fermer ces ouvertures, lorsque Trionyx. Caractères. Mœurs. Ciassifica- Uücn. 644 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. Panimal plonge sa tête sous l’eau. Enfin leur bec est fort tran- chant sur les bords , et la mandibule supérieure est crochue. Ces tortues se nourrissent principalement de plantes marines et ne sortent guère de l’eau qu’à l’époque de la ponte : elles nagent avec une grande facilité , et on les rencontre quelque- fois , à plusieurs centaines de lieues de toute terre, flottant à la surface de ia mer ; elles paraissent pouvoir dormir ainsi, et elles plongent aussi irès bien. À l’époque de la ponte, ces animaux quittent les parages qu’ils fréquentent d'habitude , et se rendent sur le rivage de quelques iles désertes , pour y dé- poser leurs œufs, préalablement fécondés , dans des trous qu’ils creusent sur la plage. C’est pendant la nuit que les fe- melles sortent de leau pour pondre: elles se trainent sur la plage au-delà de la ligne des hautes eaux et creusent avec leurs nageoires antérieures un trou d'environ deux pieds de profon- deur, puis y déposent leurs œufs par rangées régulières et les recouvrent de sable , qu’elles nivellent si bien ,qu’on n’aperçoit aucune trace de leur travail, L'opération terminée , elles retour- nent immédiatement à la mer. Le nombre de ces œufs est très considérable : ii s'élève souvent à deux cents , et la ponte se renouvelle deux ou trois fois dans l’année. Après être restés ainsi exposés à la chaleur du soleil pendant quinze à vingt jours, ils éclosent , et les petits, qui sont encore privés d’écaille , se dirigent aussitôt vers la mer. En général, ils éprouvent d’abord quelque difficulté à s’y enfoncer, et, avant que d’y par- venir, deviennent souvent la proie des oiseaux carnassiers , qui semblent épier le moment de leur naissance pour s’en repaitre. Ils ont aussi à redouter les poissons voraces et les crocodiles , qui affluent dans le même but dans ces parages; ceux qui échappent à ces ennemis nombreux acquièrent, pour la plupart, des dimensions très considérables : on en a vus dont la carapace avait plus de quinze pieds de circonférence, et dont le corps pesait jusqu'à quinze ou seize cents livres. Les tortues marines se trouvent dans toutes les mers des pays chauds : elles abondent autour des Antilles , et, en été, elles arrivent en grandes troupes sur plusieurs ilots de ces parages, notamment dans un petit archipel situé près de la terre ferme et connu sous le nom de Tortugas : elles sont également communes aux iles du Cap-Vert , de l’Ascension , à l’ile-de-France , à Ma- dagascar, aux iles Séchelles , Sandwich, Galapagos , etc. ; enfin on en rencontre dans le grand océan Atlantique et dans la Méditerranée , mais en petit nombre. On distingue, parmi ces tortues , les GHÉLONÉES, dont la nt D FAMILLE DES TORTUES MARINES. 645 carapace est recouverte de lames cornées ou d’écailles, et les SPHARGIS, Qui n’ont qu'une peau Coriace. Les espèces les plus remarquables du premier de ces genres sont la fortue franche, le raret et la caouane. On ne connait qu’une espèce de sphargis, le Zuth. La tortue franche ou tortue verte se reconnait aux plaques non imbriquées qui , au nombre de treize , recouvrent le disque de la carapace, dont la couleur est fauve, avec un grand nombre de taches marron, glacé de vert. Elle se trouve dans l’océan Atlantique et se nourrit principalement de la plante connue des botanistes sous le nom de zostera marina : elle pond deux fois dans l’année , vers le mois de mai et de juin , et le nombre total de ses œufs est d’environ deux cent cinquante. Sa longueur est quelquefois de six à sept pieds, et son poids de sept à huit cents livres. Cette espèce ne diffère qu’à peine de quelques autres tortues marines , qui fréquentent les mêmes para- ges et se trouvent aussi sur les côtes d'Afrique et dans les mers d'Asie. La chair de tous ces chéloniens est très estimée. En Angleterre surtout on la recherche beaucoup , comme un mets de luxe , et, pour en alimenter le marché de Londres, on expédie des vaisseaux jusque dans les mers des Indes, et on a même établi sur certaines côtes des parcs destinés à la con- servation des tortues de mer. La graisse de ces animaux, quoique d’une teinte verdâtre , qui peut déplaire au premier abord , a le goût le plus délicat , et leurs œufs sont également un mets estimé. La caouane a , comme les tortues franches , la carapace re- couverte de plaques simplement juxta-posées ; mais le nombre de ces écailles sur le disque est de quinze , au lieu de treize. Sa tète est aussi plus grosse , et sa couleur est brune ou marron- foncé. Elle habite la Méditerranée aussi bien que l'océan Atlan- tique ,et watteint pas des dimensions aussi grandes que l’espèce précédente. Sa longueur est d’environ quatre pieds, et son poids s'élève à trois ou quatre cents livres. Elle est très vorace ; sa nourriture consiste principalement en mollusques, et sa chair est mauvaise. On se sert de sa graisse comme d'huile à brûler. Le caretou chelonee imbriquee (fig. 241 , pag. 643) est l'espèce la plus intéressante de ce genre ; car c’est eile qui fournit l’écaille. On la distingue facilement à la disposition des plaques cornées de Sa Carapace, qui, au lieu d’être simplement juxta-posées, se pro- longent en arrière au dessus les unes des autres et se recouvrent comme les tuiles d’un toit ; on en compte quinze sur le disque, et Sa Couleur est jaunâtre marbré ou jaspé de brun foncé. Les mà- choires sont fortes , allongées et recourbées vers leur extrémité, mais sans dentelures sur les bords ; enfin les nageoires , comme Tortue fran- che. Couane. Caret. Sphargis. Caractères. 646 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. celles de la caouane , sont pourvues de deux ongles , tandis que , chez la tortue franche , on n’en trouve qu’un. Sa taille ne dépasse guère le tiers de celle de ces dernières chélonées : elle se nourrit principalement de plantes marines , mais mange aussi des crustacés, des mollusques et de petits poissons. On la ren- contre dans l’océan Indien aussi bien que dans les mers d’Amé- rique , et, à l’époque de la ponte, elle se rend dans les mêmes localités que les espèces précédentes. Aux tortugas , par exem- ple , elle arrive en juin et fait une seconde ponte en août. Le nombre total de ses œufs est d'environ deux cents : ils sont réputés un mets excellent ; mais la chair de cette tortue est mauvaise , et c’est pour les écailles qu’on la recherche. L’ecaille qui recouvre la carapace du caret est une substance qui a la plus grande analogie avec la corne , mais qui n’est pas fibreuse ou lamelleuse comme elle : elle est aussi plus transpa- rente ; sa dureté est plus considérable , et elle peut recevoir et conserver le plus beau poli: aussi est-elle fort estimée pour les ouvrages de tabletterie. Chacune de ces tortues fournit , terme moyen , trois à quatre livres de ces grandes plaques, et , pour les détacher , 1l suffit de présenter la carapace devant un brasier ar- dent. C’est sans autre préparation qu’on les verse dans le com- merce , sous le nom d’ecarlle brute , matière que l’on travaille ensuite de la même manière que la corne (1). En la ramollissant par l’action de l’eau chaude et en la comprimantensuite, on peut en effet l’étendre, la souder et y donner toutes les formes desi- rées. Ce que l’on nomme l’ecaille fondue s’obtient en agglutinant par des procédés analogues , la rapure et la poudre , que l’on dé- tache des lames d’écaille ordinaire , pour les égaliser ou leur donner les dimensoins voulues. Les tortues marines , désignées sous le nom de SPHARGIS, n’ont pas le corps recouvert de lames cornées , mais seulement d’une peau coriace, semblable à du cuir. On n’en connaît qu'une espèce , le luth, qui se trouve dans ia Méditerranée et l'Océan , et atteint sepi ou huit pieds de long. ORDRE DES SAURIENS. L'ordre des sauriens se compose de tous les reptiles qui , par leur conformation générale , se rapprochent des lézards. Ces animaux ont toujours le corps allongé, terminé par une queue (1) Voyez page 464. ORDRE DES SAURIENS. 647 plus ou moins longue et pourvue de membres dont le nombre, à quelques #xceptions près, est de quatre. La plupart d’entre eux ressemblent assez à des serpens auxquels on aurait ajouté des pattes. Ces membres sont courts et disposés d’une manière peu favo- rable à la rapidité des mouvemens.En général, ils sont très éloi- gnés les uns des autres et dirigés en dehors, à angle droit avec le corps , de manière à ne pouvoir soutenir le poids du tronc : aussi la plupart de ces reptiles traïinent-ils le ventre et la queue sur le sol. Leurs doigts, bien distincts et ordinairement au nom- bre de cinq, se terminent par des ongles pointus et recourbés: tantôt ils sont très longs et très grèles, d'autrefois élargis et garnis en dessous de replis diversement disposés, et d’autres fois encore réunis par des palmures, modifications qui sont en rap- port avec la manière de vivre de l’animal. Le squelette des sauriens ne présente aucune particularité importante à noter. Le nombre des vertèbres est très variable , surtout dans la région caudale: il existe toujours des côtes mobiles , qui souvent protègent l'abdomen aussi bien que le thorax. Le sternum aussi ne manque jamais. L’épaule est ordi- nairement formée de trois os (une omoplate,une clavicule et un os coracoïdien), réunis en ceinture, de manière à envelopper la Partie antérieure de la poitrine et à concourir tous à la forma- tion de la cavité destinée à loger la tête de l’humérus. Le bassin se compose également de trois pièces et se joint au sacrum, formé par deux vertèbres. La peau de ces animaux est toujours recouverte d’une couche épidermique assez épaisse et inégale, qui forme des espèces d’écailles ou de plaques plus ou moins grandes. La bouche, largement fendue, n’est pas munie de lèvres charnues, mais est armée de dents, en général de forme co- nique , qui servent à saisir et à retenir la proie, mais rarement à broyer les alimens. Souvent on en trouve au palais aussi bien qu'aux deux mâchoires. La nourriture des sauriens consiste essentiellement en substances animales : aussi leur canal diges- tif est-il d'ordinaire assez court ; en général l’estomac est peu distinct de lœsophage ; mais quelquefois il a la forme d’une poche plus ou moins globuleuse. La disposition du système circulatoire varie chez ces animaux: en général le cœur n’est qu'imparfaitement divisé dans sa por- tion ventriculaire , de manière que le sang veineux et le sang artériel se mêlent dans son intérieur ; mais, chez les crocodiles, comme nous le verrons bientôt, la séparation entre les deux moitiés de cet organe est complète , et le mélange des deux sangs n’a lieu que dans l'aorte descendante. 42 Class'fica- tion. Structure. 648 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. Les poumons sont, en général, grands , el pénètrent presque toujours plus où moins loin dans l’abdomen. L’air s’y renou- velle par le même mécanisme que chez les mammifères et les oiseaux , c’est-à-dire par la dilatation et la contraction alterna- tives de la cavité thoracique, dues aux mouvemens des côtes. L'ordre des sauriens peut être divisé en six familles , savoir: les crocodiliens , les lacertiens , les iguaniens , les geckosiens , les cameleoniens et les scincoïdiens. FAMILLE DES CROCODILIENS. Les crocodiles diffèrent à tant d’égards des autres sauriens , que plusieurs auteurs ont cru devoir en former un ordre dis- tinct. Par leur organisation intérieure , ils semblent même établir le passage entre les reptiles et les vertébrés supérieurs. On les recon- nait facilement à leur queue comprimée la- téralement , et à leurs doigts, au nombre de + cinq devant et Fig. 241. CROCODILE DU NIL. de quatre der- rière , tous plus ou moins réunis par des membranes, Caractère qui indiquent des habitudes aquatiques. La particularité la plus remarquable de la structure de £es animaux est la disposition de leur système circulatoire : elle est telle que toute la portion postérieure du corps reçoit seulement un mélange de sang artériel et de sang veineux, tandis que la tête reçoit du sang artériel pur. Le cœur présente quatre cavités, deux oreillettes et deux ventricules distincts comme chez les mammifères etles oiseaux. Le sang artériel, venant des poumons, passe de l’oreillette gauche dans le ventricule du même côté, qui, à son tour, l’envoie dans l'artère aorte(/ig. 242). Le sang veineux, reçu dans le ventricule droit, ne trouve aucune communication LELOIR SC e ORDRE DES SAURIENS. 649 pour pénétrer dans le ventricule gauche, comme cela a lieu chez les autres reptiles; mais il ne va pas en entier aux poumons, Fig. 242. (1) comme chez les vertébrés à sang chaud ; ao ce a car, à côté de l’ouverture des artères “ET Pet LI pulmonaires (ap); se trouve un autre MF vaisseau (a), qui naît également du AP — leg PT ap Yentricule droit , et qui, après s'être vp NM W77/__., recourbé derrière le cœur, va aboutir 2 NT dans l'aorte descendante (ao). Il en JA) résulte que, à chaque contraction du oki; 22 A-— 09 Cœur, une portion du sang veineux est Qu ® où envoyée aux poumons et une autre por tr —} LÆÆ 7 tion vase mêler au sang artériel ; mais S — ce mélange ne se fait dans l’intérieur # de l'artère aorte qu’au dessous de lori- gine des branches (ce) que ce vaisseau en- voie à la tête et à la partie antérieure du tronc, de manière que ces parties reçoivent du sang artériel pur, tandis que toutes celles dont les artères naissent , en arrière du point de jonc- tion de l'aorte avec le vaisseau venant du ventricule droit , ne reçoivent qu’un mélange de sang rouge et de sang noir. Les poumons des crocodiles re s’enfoncent pas dans l’abdo- men comme ceux des autres reptiles et sont séparés des viscères par une espèce de diaphragme incomplet. Il est aussi à noter que le canal par lequel l’air pénètre dans ces organes , peut être complètement séparé de la bouche par l’abaissement d’un repli analogue au voile du palais des mammifères , disposition qui leur permet de rester sous leau , la bouche béante, pour at- tendre leur proie, sans interrompre leur respiration. Enfin leurs narines , ouvertes au bout du museau, sont fermées par des valvules. Leur bouche est fendue jusque derrière les oreilles , et la mà- choire inférieure se prolonge derrière le crâne, ce qui fait pa- raitre la supérieure mobile ; mais elle ne se meut qu’avecle crâne. Ilexiste à chaque mâchoire, une seule rangée de dents pointues, très fortes et implantées dans des alvéoles distinctes. La langue (1) Cœur et gros vaisseaux du crocodile: —#, » veines qui rapportent le sang des diverses parties du corps à l'oreillette droite du cœur (od),— 1 les deux ven- tricules qui intérieurement sont séparées par uue cloison , — a4p les deux artères pulmonaires qui se rendent du ventricule droit aux poumons, — « vaisseau qui part du même ventricule et se réunit à l’artère aorte descendante ,— æp veines pulmonaires qui portent le sang artériel des pouxons à l'oreillette gauche (og), d’où il descend dans le ventricule gauche, et pénètre ensuite dans l'artère aorte (ao) , et les deux artères (cc) qui se distribuent à la tête, ete. 42, 650 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. est charnue , plate, attachée à la mâchoire inférieure jusque très près de ses bords et peu distincte, ce qui a fait croire aux anciens qu’elle manquait. L’estomac a la forme d’une poche arrondie, et l'ouverture de anus est longitudinale. Leur squelette présente aussi plusieurs particularités. Leur caisse et leurs apophyses ptérygoïdes sont fixées au crâne comme chez les tortues; leurs vertèbres cervicales s’appuient les unes sur les autres par de petites fausses côtes , qui rendent le mou- vement latéral difficile. Outre les côtes ordinaires , on trouve entre les muscles de labdomen des os analogues ; qui protègent les viscères , sans remonter Jusqu'à l’épine dorsale; enfin ces reptiles sont les seuls sauriens qui manquent de clavicules proprement dites. Les crocodiles sont des animaux de grande taille; leur dos est couvert de grandes écailles carrées , très fortes et carenées au milieu. La queue en présente de semblables et est garnie en dessus d’une crète de fortes dentelures , double à sa base; enfin le ventre est recouvert par des écailles carrées , minces, lisses et disposées par bandes transversales. Ces grands et puissans reptiles habitent les parties les plus chaudes des deux continens et se tiennent d'ordinaire dans les fleuves et les lacs d’eau douce. Leur démarche est en général grave; cependant ils peuvent nager avec une rapidité extrême et courir très vile en ligne droite, mais ils ne chan- gent que difficilement de direction, à cause de la disposi- tion des vertèbres de leur cou: aussi peut-on aisément les éviter en tournoyant. Ils sont très carnassiers et à redouter, même pour l’homme. Ils ne peuvent pas avaler dans l’eau; mais, en général, ils y entrainent leur proie, pour la noyer, et l’y laissent, dit-on, dans quelque creux pour la faire pourir avant que de la manger. Ces animaux , si redoutables et si bien cuirassés , ont cepen- dant des ennemis à craindre, et ces ennemis sont de faibles insectes , des espèces de fourmis qui s’introduisent dans leur bouche en nombre immense aussitôt qu’ils vont à terre , et les tourmentent par leurs morsures ; mais, chose singulière, de petits oiseaux viennent souvent les délivrer de ce fléau et entrent sans crainte dans leur gueule, pour y chercher ces insectes. Ce fait, observé par Hérodote et ensuite traité de fable, a été confirmé de nos jours par M. Geoffroy Saint-Hilaire, qui accompagna l'empereur en Egypte. C’est une espèce de pluvier qui rend au crocodile du Nil ce service intéressé, et aux Antilles le todier a des habitudes analogues. La famille des crocodiliens se compose de trois genres, savoir : les crocodiles proprement dits , les caïmans et les gavials. ORDRE DES SAURIENS. 651 Les CROCODILES PROPREMENT Dits ont le museau oblong et déprimé , le$dents inégales et la mâchoire supérieure échancrée de chaque côté, pour recevoir la quatrième dent d’en bas, lorsque la bouche est fermée. L'espèce la plus anciennement connue et la plus célèbre est le crocodile du Nil, animal dont la longueur dépasse quelquefois vingt-cinq et même trente pieds : il est vert bronzé . piqueté et marbré de brun en dessus, vert jaunâtre en dessous , et il se distingue par les plaques carrées, de grandeur à-peu-près égale , qui forment six rangées tout le long du dos. On trouve , depuis le Sénégal jusqu’au Gange et même au-delà, des crocodiles très semblables à celui du Nil, et qui paraissent n'être que des variétés de cette espèce. Jadis ce reptile descen- dait le Nil jusqu’au Delta, et, d’après le récit de Pline, il y passait les quatre mois d'hiver en léthargie dans des cavernes ; mais, de nos jours, il ne quitte pas la Haute-Egypte, où il ne s’en- gourdit pas. Les anciens Egyptiens , surtout les habitans de Thèbes et des environs du lac Mæris , rendaient de grands hon- neurs à ces reptiles: ils en faisaient même l’objet d’un culte religieux et en embaumaient les cadavres. A Arsinoé, les prêtres élevaient dans un temple un de ces animaux, qu’ils nourris- saient avec grand soin et qu’ils ornaient de bijoux. M. Geoffroy Saint-Hilaire pense que le crocodile sacré était d’une espèce particulière , d’un naturel plus doux que le crocodile vulgaire ; mais cette opinion ne parait pas appuyée sur des preuves suffi- santes. Il existe aussi des crocodiles proprement dits en Amérique: le caïiman des colons de Saint-Domingue et des autres Antilles appartient à ce genre et a reçu le nom de crocodile à museau effile , a cause de la forme de sa tête : on lui compte quatre ran- gées de plaques sur le dos, et sa longueur dépasse quelquefois seize pieds. C’est un animal très féroce et dangereux , mème pour l’homme. Les mâles se livrent des combats acharnés, et les femelles déposent aux mois de mars , avril et mai , leurs œufs dans des trous creusés dans la terre. Au bout d’un mois, les petits éclosent et la mère vient alors gratter la terre , pour les faire sortir du trou où ils sont enfouis , et, pendant l’espace de trois mois , les nourrit et les défend. Au moment de la naissance , ils n’ont que neuf à dix pouces de long, et leur croissance dure plus de vingt ans. Les Caïmans ou ALLIGATORS se distinguent facilement des crocodiles proprement dits par la disposition de leur quatrième dent d’en bas qui , la bouche étant fermée , est logée dans un trou et non dans une échancrure de la mächoire supérieure. Crocodiles proprement dits. Caïmans, Gavials. 652 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. Leurs pieds de derrière, au lieu d’être dentelés au bord externeet palmés jusqu’au bout des doigts , sont dépourvus de dentelures et à demi palmés seulement. On en connaît plusieurs espèces ; mais toutes paraissent être propres à l'Amérique. L’une d'elles , le caïman à museau de brochet, habite le midi de l'Amérique septentrionale , et , lors des glaces , s'enfonce dans la vase et y reste engourdie jusqu’au retour d’une température plus douce. À la Guyane et au Brésil , il s’en trouve un autre, appelé caïman à lunettes, à raison d’une arête transversale , qui réunit en avant les bords saillans de ses orbites. Comme les autres crocodiles , ce dernier pond ses œufs dans le sable ; mais il les recouvre de pailles ou de feuilles, et, au lieu de les abandonner, il les défend avec courage : il a douze ou quinze pieds de long, et n’attaque presque jamais l’homme. Enfin les GAvIALs diffèrent des deux genres précédens par leur museau grèle et très allongé, ainsi que par leurs dents, à-peu-près égales. Jusqu'ici on n’en a rencontré que dans l’an- cien continent. Le plus commun est le gavial du Gange, qui atteint, dit-on, jusqu’à trente pieds de long, mais qui n’est pas dangereux pour l’homme ou les grands animaux et ne se nourrit que de poissons. FAMILLE DES LACERTIENS. Caractères. Fig. 243. LÉZARD VERT PIQUETÉ. Les lacertiens ont, aux pattes postérieures comme aux pieds de devant, cinq doigts séparés et armés d’ongles ; leur langue est mince , extensible et terminée par deux filets ; leurs écailles sont disposées par bandes transversales et parallèles autour de la queue et sous le ventre; enfin l’anus est une fente iransver- sale. Chez les uns, il n’existe de dents qu'aux deux mâchoires ; chez d’autres , on en trouve aussi sur le palais. Les premiers forment la tribu des monitors , les seconds celle des Zezards. ORDRE DES SAURIENS. 653 Les MONITORS , que l’on nomme aussi SAUVEGARDES , el que, par une erréur singulière de quelques auteurs , on a appelé en- core des tupinambis (1), ont en général la queue comprimée la- téralement comme les crocodiles. Les MONITORS PROPREMENT DITS se reconnaissent aux petites écailles qui recouvrent la tête, les membres et tout le corps. On en trouve deux espèces en Egypte: l’une (le monitor du Nil) a cinq ou six pieds de long et se voit gravé sur les monumens des anciens Egyptiens ; l’autre, appelée monitor terrestre d'Egypte, à raison de ses habitudes terrestres, est commune dans les déserts qui avoisinent ce pays. D’autres monitors ont la tête garnie en dessus de plaques angulaires, et le ventre ainsi que la queue recouverts de grandes écailles rectangulaires : ce sont les DRAGONNES , dont on trouve une espèce longue de cinq àsix pieds dans les marécages de la Guyane , les SAUVEGARDES et les AMEIVA. Une espèce de sauve- gardes, de la taille des reptiles dont il vient d’être question , habite les mêmes pays et se tient sur les bords des eaux, y plonge, mais n’y nage point. On en mange la chair et les œufs. Les Ameivas sont aussi des animaux du Nouveau-Monde: ils ressemblent beaucoup à nos lézards. La TRIBU DES LÉZARDS se compose des lézards proprement dits et de quelques genres voisins, dont le palaisestarmé de deux ran- gées de dents, etdont la queue est cylindrique. La plupart se dis- tinguent aussi par une espèce de collier, placé sous le cou et formé par une rangée transversale de larges écailles , séparées de celles de la poitrine par un espace couvert de granulations seulement. En général, on leur voit aussi, sous chaque cuisse, une série longitudinale de pores saillans , et tout le dessus de leur tête est muni d’un bouclier osseux , que recouvrent de grandes plaques cornées. Les LEZARDS PROPREMENT DITS (/g. 243) ont le dessus du corps couvert de petites écailles semblables à des granulations, tandis que , sous le ventre, on leur voit de larges plaques transversales. Ce sont des animaux agiles , sveltes et de formes élégantes : ils se nourrissent principalement d'insectes et veulent une proie vi- vante. En été, ils en mangent beaucoup ; mais ils peuvent sup- (x) Nom d’un peuple confondu par Seba avec celui d'un espèce de reptile de cette famille. Monitors. Sauvegar- des, etc. Lézards. Caractères. Stellions. Agames, 654 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. porter facilement un jeûne de plusieurs semaines dans l'été et de quatre à cinq mois dans l'hiver, et , lorsqu'on les retient en captivité , ils refusent en général de prendre des alimens; ce- pendant ils mordent tout ce qu’on leur présente, et serrent les mâchoires avec une force très grande. Dans nos climats, ils passent l'hiver engourdis dans des trous ,et ont des mouvemens d'autant plus vifs , que la température est plus élevée : ils aiment à se réchauffer au soleil, même au milieu de l'été, et on les voit souvent s'étendre sur une pierre frappée de ses rayons. On a débité beaucoup de fables sur ces animaux: les uns ont pré- tendu, sans aucune raison, qu'ils sont venimeux ; d’autres, sans plus de fondement , qu’ils ont pour l’homme un véritable atta- chement et l’avertissent lorsqu'un serpent cherche à le mordre. On en connaïîtun grand nombre d’espèces , dont plusieurs se tiennent en France. La plus commune est le Zezard grès ou lézard des murailles , qui habite les ruines , les vieux murs et les rochers. Dans nos forêts , on rencontre aussi un lézard beau- coup plus grand , dont la couleur générale est vert brillant, mais dont le dos est piqueté de points noirs et vert jaunätre; c’estle Zezardvertou lézard piquete des naturalistes (#g.243), enfin, dans le midi de la France et en Italie, on en trouve unautre (le lézard ocelle) plus grand encore et plus beau parles anneaux et les lignes d’un beau noir, qui forment une espèce de broderie sur le fond vert brillant de son dos. FAMILLE DES IGUANIENS. Les sauriens dont cette famille se compose ont à-peu-près la même forme générale que les lacertiens : ils ont aussi une longue queue, des doigts libres et inégaux , etc.; mais leur langue est charnue , épaisse, non extensible et seulement échancrée au bout. L’armature de la bouche présente les mêmes modifications que dans la famille précédente : tantôt il existe des dents au palais aussi bien qu'aux deux mâchoires ; tantôt il n’y a en haut que deux rangées de ces corps fixées aux mâchoires. Parmi les premiers, on range les STELLIONS , dont la queue est entourée d’anneaux composés de grandes écailles, souvent épineuses ; les AGAMES , dont les écailles de la queue sont imbri- quées et non verticillées; les DRAGONS , etc. Ces derniers se dis- ORDRE DES SAURIENS. 655 tinguent de tous les autres reptiles par des espèces d’ailes que Dragons. forme de chaque côté du corps un grand repli de la peau. Ces RS re SE à ES LIS RS > g RARE, A ne Fig. 245. DRAGON. appendices ressemblent assez aux ailes des chauve-souris ; mais, au lieu d’être soutenus et mis en mouvement par les membres , ils en sont tout-à-fait indépendans et sont soutenus par les six premières fausses côtes qui n’entourent pas l’abdo- men, mais s'étendent horizontalement en ligne droite. L’animal s’en sert comme d’un parachute pour se soutenir en l'air, lors- qu’il saute de branche en branche ; mais il ne peut les mouvoir avec assez de force pour voler comme une chauve-souris ou un oiseau. Ces singuliers reptiles, qui habitent l’Inde, réalisent donc jusqu’à un certain point la fable des espèces de lézards ou serpens volans , dont quelques écrivains de l’antiquité ont parlé; mais les dragons des zoologistes , au lieu d’être des animaux redou- tables , comme ceux des poètes , sont de très petite taille et n’at- taquent que les insectes. Nous c terons , comme exemples des iguaniens à dents pala- fguanes. tines , les IGUANES PROPREMENT DITS, les BASILICS et les ANOLIS. Les premiers sont couverts de petites écailles imbriquées et ont tout le long du dos une crête formée de larges écailles pointues. Sous leur gorge, on remarque aussi un fanon comprimé et pendant. On en connaît plusieurs espèces , qui habitent l'Amé- rique : l’une, longue de quatre à cinq pieds , est commune dans toute la partie chaude du Nouveau-Monde: elle vit en grande partie sur les arbres , et se nourrit de fruits, de feuilles , etc. Sa chair passe pour être délicate, mais malsaine. Les BASILICS ont en dessus du dos et de la queue une crête Basilies. continue et élevée , que soutiennent les apophyses épineuses Auolis. Caractères, Aœurs. 656 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. des vertèbres : ils se nourrissent de graines et habitent la Guyane. Enfin les ANOLIS, qui sont également propres à l'Amérique, se distinguent par la conformation de leurs doigts, dont l’anté- pénultième article est garni, en dessous, d’un disque ovalaire et strié, à l’aide duquel ces reptiles s’attachent à la surface sur laquelle ils grimpent. Plusieurs ont la faculté de varier la cou- leur de leur peau. FAMILLE DES GECKOTIENS. Fig. 246. GECKO DES MURAILLES. Les sauriens désignés par le nom collectif de geckos sont des animaux nocturnes , dont laspect est triste et lourd, dont la marche est rampante et dont la forme trapue et aplatie contraste avec celle de la plupart des reptiles dont nous avons parlé jus- qu’ici. Leur tête est large et déprimée ; leurs yeux sont très grands et très sailläns ; leurs màchoires sont armées tout autour d’une seule rangée de petites dents; mais il n’y en a pas au palais. Leur langue est charnue et non extensible; leur corps est comme chagriné en dessus et recouvert en dessous d’écailles plates et imbriquées ; leurs pattes sont médiocres; enfin leurs cinq doigts, presque égaux , sont ordinairement élargis sur tout ou sur une partie de leur longueur, armés d’ongles rétractiles et garnis en dessous de replis de la peau, à laide desquels ils adhèrent aux corps sur lesquels ils marchent. Cette conformation des doigts leur permet de grimper avec facilité contre les murs les ORDRE DES SAURIENS. 657 plus unis, et même de marcher sur des plafonds. Pendant le jour, ils s®cachent dans les lieux obscurs, et c’est principa- lement le soir qu’ils poursuivent les araignées et les autres animaux dont ils se nourrissent. La laideur de ces reptiles est extrême , et on assure que souvent le contact de leurs doigts sur notre peau y occasionne une sorte d’inflammation: aussi sont-ils partout un objet d’aversion et les accuse-t-on d’être venimeux, mais sans que cette opinion soit basée sur aucune preuve réelle. Un de ces sauriens, appelé parles naturalistes le gecko des mu- railles , habite le midi de la France et les autres pays voisins de la Méditerranée. Dans la Provence, on le connaït sous le nom de tarente. Il est long de quatre à cinq pouces et de couleur grisâtre. Sa tête est rude et tout le dessus de son corps est parsemé de tubercules formés chacun de trois ou quatre gra- nules ; enfin ses doigts , élargis dans toute leur longueur et garnis en dessous de stries transversales , ne sont pas tous armés d'ongles : il n’en existe qu'aux troisième et quatrième doigts. Cet animal hideux se plait dans les lieux secs et chauds: il se cache dans les trous des murailles, dans les tas de fumier et sous les toits des masures : il est assez agile et ne parait pas s’engourdir en hiver. Un autre reptile du même genre , le gecko des maisons, est commun dans les villes de l'Orient, où il se tient dans les parties humides et sombres des maisons. Au Caire, on prétend qu’il donne la lèpre en empoisonnant avec ses pieds les alimens et surtout les salaisons dont il est très friand: de là son nom arabe: abou burs (père de la lèpre). Ses doigts sont élargis en disque au bout seulementetgarnis de stries disposées en éventail. On connaît encore un assez grand nombre d’espèces de geckos qui diffèrent entre eux par la conformation de leurs doigts et qui se trouvent , soit en Amérique, soit dans diverses parties de ancien monde. Un de ces animaux, qui habite la Nouvelle- Hollande, a la queue aplatie horizontalement en forme de feuille : on en a formé le genre PHYLLURE. FAMILLE DES CAMÉLÉONS. Les caméléons se distinguent de tous les autres sauriens par leurs doigts, au nombre de cinq partout , mais divisés en deux 658 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. paquets opposables, disposition qui en fait desanimauxessentiel- lement grim- peurs , desti- nés à vivre sur les bran- ches des ar- bres.Une fou- le de particu- larités d’or- ganisation les éloignent é- galement de tous les repti- Fig. 247. CAMÉLÉON COMMUN. les dont nous nous sommes occupés jusqu'ici. Leur queue , ronde et pre- nante leur sert comme d’un cinquième membre , pour s’accro- cher aux branches et les aider dans leurs mouvemens lents et gauches. Leurs yeux, très grands et extrêmement saillans, sont presque entièrement recouverts par la peau; la lumière n’y pénètre que par un petit trou situé vis-à-vis la pupille, et ces organes se meuvent d’une manière tout-à-fait indépendante l’un de l’autre. Leur bouche est armée de petites denis trilobées , et leur langue, charnue et cylindrique, est extrêmement exten- sible: ils peuvent la darder hors de la bouche , à une distance qui dépasse quelquefois la longueur de leur corps , et ils s’en servent pour prendre les insectes vivans dont ils se nourrissent. Leur corps est comprimé, leur dos comme tranchant et leur peau couverte de petites granulations écailleuses. Enfin ces sin- guliers animaux sont célèbres par la faculté de changer de cou- leur presque subitement; et, si l’on en croyait d'anciens écri- vains , ils auraient même le pouvoir de prendre successivement la teinte de tous les objets dont ils se trouvent environnés, afin de mieux se dérober à la vue de leurs ennemis. Les observations des naturalistes ont déjà dépouillé l’histoire du caméléon des fables dont on l’avait chargée; mais, tout en lui refusant la pro- priété de varier de la sorte ses couleurs, on a constaté qu'il peut réellement éprouver des changemens des plus remar- quables et être tantôt presque blanc , tantôt jaunâtre, d’autres fois vert, rougeâtre et même presque noir, soit partout, soit dans quelques parties du corps seulement. Ces changemens se voient surtout lorsque l’animal est excité par la colère ou par la chaleur. Lorsqu'il est resté long-temps dans un endroit obscur et froid, il est presque blanc, et,en le réchauffant ou en le stimulant , on lui fait prendre une teinte vert bouteille ou rouge vineux , qui souvent devient si intense , qu’elle parait presque ORDRE DES SAURIENS. 659 noire. Pendant long-temps on attribuait ces changemens à la distension “plus ou moins grande des vastes poumons de cet animal et à des modifications correspondantes dans la quantitéde sang envoyé à la peau ; mais on s’est assuré qu’il n’existe aucune relation nécessaire entre ces phénomènes, et la dissection de la peau nous a appris qu’il fallait chercher la cause de ces varia- tions de teinte dans le mode particulier de structure de cetie membrane. On y trouve, en effet, diverses matières colorantes, dont les unes peuvent tantôtse montrer à sa surface et masquer en quelque sorte les autres , d’autres fois se retirer en dessous et se cacher sous le pigment superficiel. On ne connaït qu’un seul genre de sauriens organisés comme nous venons de le dire; mais on a constaté l’existence de plu- sieurs espèces de caméléons. L’une d'elles , très commune aux environs d'Alger, est répandue depuis l'Espagne jusque dans les Indes. FAMILLE DES SCINCOIDIENS. Les sauriens dont il nous reste à parler se reconnaissent à leurs pieds courts , à leur langue peu ou point extensible et aux écailles égales et ordinairement imbriquées , qui leur couvrent le corps en dessous comme en dessus. Les uns ont la forme d’un fuseau ; d’autres, cylindriques et très allongés, ressemblent à des serpens. Chez plusieurs, les pieds sont trop courts pour servir à la locomotion , et il en est même chez lesquels l’une des paires de membres, soit l’antérieure, soit la postérieure, manque complètement: aussi les scincoïdiens établissent-ils évidem- ment le passage entre les sauriens et les ophidiens. On y range les SCINQUES, les sEPs , les BIPÈDES , les CHALCIDES et les BIMANES. Dans les deux premiers genres, il existe quatre pattes , et, chez les seps , le corps est plus allongé et plus vermi- forme que chez les scinques. Les bipèdes et les chaléides man- quent de membres antérieurs, et les bimanes n’ont que les pieds de devant. Pour terminer cette esquisse de l’histoire des sauriens , nous devons ajouter qu’à des époques bien antérieures à celle con- temporaine de l’homme, il existait sur la surface du globe un grand nombre de ces reptiles d’une taille gigantesque, dont on retrouve les ossemens à l’état fossile. Parmi ces sauriens , dont la race est éteinte , se trouvaient des lacertiens voisins des Caracteres. Scinques, ete. Sauriens fos= siles. 660 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. monitors, dont la longueur devait être de trente à quarante pieds ; mais c’estsurtout par l’anomalie de leur structure, que plusieurs de ces animaux perdus sont le plus remarquables. En Angleterre , près de Honfleur et dans d’autres localités, on a irouvé , dans des terrains très anciens , les débris de plusieurs espèces de deux genres de sauriens , dont les pattes larges et en forme de palettes , indiquent quecesanimauxétaiententièrement aquatiques. On les désigne sous le nom de PLÉSIOSAURUS et d’1C- THYOSAURUS. Enfin un autre reptile (#g. 248), plus extraordinaire Ptérodactyie. encore , a été découvert dans les anciennes couches de la forma- ee ee ne LS .. A ar A Fig. 248. PTÉRODACTYLE. (1) tion jurassique. D’après la structure de sa charpente osseuse , on voit que, de même que nos chauve-souris, il devait pouvoir marcher sur la terre et voler ; car ses pattes postérieures et tous les doigts deses pattes de devant, un seul excepté, sont con- formés de la manière ordinaire ; mais le second doigt des mem- bres antérieurs, est plus de deux fois aussi long que le tronc, et servait probablement à soutenir un repli de la peau propre à remplir les fonctions d'ailes. Pour rappeler cette conformation singulière , on a donné à ces sauriens fossiles le nom générique de PTÉRODACTYLE. ORDRE DES OPHIDIENS OU SERPENS. Caractères. On réunit d'ordinaire dans le groupe des serpens ou ophi- diens tous les reptiles , dont le corps, cylindrique et allongé, (x) La ligne ponctuée indique le contour présumé de la peau. ORDRE DES OPHIDIENS OU SERPENS. 661 n’est pas pourvu de membres ; mais, pour que la classification de ces animaux soit la représentation des modifications intro- duites par la nature dans leur mode d'organisation et indique le degré d'importance physiologique de ces différences, il devient nécessaire de séparer des serpens quelques reptiles apodes dont la respiration est d’abord branchiale , puis pulmonaire comme chez les batraciens ordinaires. D’un autre côté, le passage entre les sauriens et les ophidiens se fait d’une manière si graduelle, que la limite entre ces deux ordres est un peu arbitraire. Quel- ques naturalistes pensent même qu'il ne faudrait pas les sépa- rer, et, suivant d’autres , il conviendrait de ranger dans la division des sauriens les serpens qui, par leur organisation intérieure, s’éloignent du type ordinaire des ophidiens et se rapprochent des scincoïdiens. Les reptiles apodes, qui sont de la sorte intermédiaires aux sauriens et aux serpens proprementdits, sont connus sous le nom d’ORVETS ou d’ANGUIS. On les distingue facilement par les écailles imbriquées dont tout leur corps est recouvert comme chez la plupart des scincoïdiens ; ils se rapprochent aussi de ces sauriens par l’existence detrois paupières, organes que nousne trouverons pas chez les vrais serpens. Leur langue est également charnue et peu extensible, et leur tête osseuse présente la même conforma- ion que chez les scinques ; enfin on trouve sous la peau de la plu- part de ces animaux des vestiges d’un bassin et des os de l'épaule. D’unautre côté, ils ressemblent aux serpens vrais par la forme gé- nérale de leur corps et par la petitesse de l’un de leurs poumons. Ce sont des animaux très doux et qui ne cherchent pas même à mordre , lorsqu’on les saisit. Leur bouche est petite et armée de dents semblables à celles des scincoïdiens : ils vivent d’in- sectes divers et de mollusques terrestres , se cachent entière- ment dans des trous et s’y engourdissent en hiver. Leur queue, comme celle des lézards , se casse avec la plus grande facilité, et quelques orvets se raidissent tellement quand on les prend, que leur corps se rompt , circonstance singulière qui leur a valu le nom de serpent de verre. L’orvet commun, appelé aussi l’anguis fragile ,se trouve dans presque toutes les parties de l’Europe : il a environ un pied de long , et sa queue , qui est obtuse et res- semble au reste de son corps, est de la même longueur que celui-ci. Ses écailles sont lisses et luisantes; en dessous il est noirâtre ; en dessus d’une teinte jaunâtre plombé, avec trois filets noirs qui , par les progrès de l’âge, se changent en séries de points et finissent par disparaître ; enfin on ne lui voit pas de tympan extérieur. Ilse creuse des galeries souterraines etfait Orvets. Serpens YraAIS. 662 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. ses petits vivans commeles vipères, dont les œufs éclosent avant la ponte. Les auteurs qui laissent les orvets dans la classe des ophi- diens , en forment une famille distincte, et désignent sous le nom de SERPENS VRAIS les autres reptiles apodes dont la respi- ration est toujours pulmonaire. Pour quelques naturalistes , ces derniers forment à eux seuls l’ordre des ophidiens. Ces animaux ne présentent plus de traces intérieures des membres antérieurs : ils n’ont aucun vestige de siernum ou d'épaule; mais plusieurs ont encore sous la peau des rudimens de membres postérieurs qui même se montrent quelquefois au dehors sous la forme d’un petit crochet. Leur peau est garnie d’écailles, qui, en général, sont petites et imbriquées , en dessus , et ont en dessous la forme de larges plaques quadran- gulaires : ils n’ont pas de tympan, et leurs yeux paraissent manquer complètement de paupières ; car ils ne sont recouverts que par une sorte de voile unique et immobile , qui est enchàssé comine un verre de montre au devant de l'orbite et qui laisse traverser la lumière. | Les vertèbres et les côtes forment à elles seules presque tout le squelette des serpens. Leurnombre est très considérable ; dans la vipère, on compte cent quatre-vingt-dix-huit vertèbres ; dans le boa, trois cent quatre, et, dans la couleuvre à collier , trois cent seize. La forme de ces os està-peu-près la même dans toute la longueur de la colonne , et leur mode d’articulation est très remarquable : la partie antérieure du corps de chaque vertèbre présente un tubercule arrondi , demi sphérique, qui s’emboite dans une cavité correspondante de la face postérieure du corps de la vertèbre voisine.Ce mode d’articulation en genou explique très bien les mouvemens du corps de ces animaux, qui, en général, s’exécutent latéralement et non de haut en bas, comme le représentent les peintres ; en effet les apophyses épinières qui règnent le long du dos sont d’ordinaire disposées de manière à empècher la colonne de se courber fortemeni dans ce sens. Les côtes entourent une grande partie de la circonférence du tronc et ne manquent qu'aux vertèbres caudales. Les premières paires sont plus petites que les autres ; mais elles existent à partir de la tête , en sorte que ces animaux n’ont pas de cou. On en compte jusqu’à deux cent cinquante paires. Quant à la struc- ture de la tête , elle varie comme nous le verrons bientôt. Les serpens sont essentiellement carnassiers : ils peuvent supporter pendant long-temps l’abstinence ; mais , en général, jorsque l’occasion se présente , ils engloutissent dans leur esto- GRDRE DES OPHIDIENS OU SERPENS. 663 mac une si grande masse d’alimens , que , pendant leur diges- tion , ils restent dans un état d’engourdissement plus ou moins profond : ils ne màchent pas leurs alimens ; mais leur gueule est armée de dents crochues , propres à y retenir la proie. Leur langue est très extensible et se termine par deux longs filets semi-cartilagineux et très mobiles. Leur canal digestif est très court et leur estomac a seulement la forme d’un boyau un peu plus large que le reste de ce tube. L’anus est une fente iransver- sale placée sous l’origine de la queue. Le foie, long et cylin- drique , n’a qu’un lobe et est tout-à-fait séparé de la vésicule du fiel. Les reins sont très allongés et divisés en un grand nombre de lobes, complètement séparés ; enfin les uretères, avant que de déboucher dans le cloaque se dilatent en une petite vésicule, et il n’y a point de vessie urinaire. La circulation se fait de la même manière que chez les tortues et les sauriens, les crocodiles exceptés. Le cœur se compose de deux oreillettes et d’un seul ventricule, incomplètement di- visé en deux loges , de chacune desquelles part une artère aorte, qui, en arrière de cet organe, se joint à son congé- nère. Les poumons sont très inégaux en grandeur, et en géné- ral Pun d’eux est tout-à-fait atrophié, tandis que l’autre est très grand , et se prolonge dans l’abdomen au dessus et bien au delà de l'estomac et du foie: il a la forme d’un grand sac membraneux dans l’intérieur duquel se trouvent de vastes cellules polygonales. L'air s’y renouvelle par les mouvemens des côtes et des muscles abdominaux , à-peu-près comme chez les sauriens et chez les oiseaux. C’est probablement en partie à cause de la position de leur poumon , que les serpens s’engour- dissent après un repas copieux ; car, toutes les fois qu’ils avalent une proie d’un certain volume , cet organe doit être comprimé, et la circulation pulmonaire gênée. Ainsi que l’avons déjà dit, la structure de la tête varie chez ces animaux. Quelquefois la mâchoire inférieure, dont les deux branches sont soudées en avant, est portée par un os tympa- niqué, qui lui-même est immédiatement articulé au crâne comme chez les sauriens et chez les chéloniens ; mais , en général les os tympaniques sont mobiles. Les serpens vrais à os tympanique immobile ont aussi la m4- choire supérieure fixée au crâne et la bouche peu dilatable : ils forment la petite famille des DOUBLES MARCHEURS, ainsi nom- més de la faculté qu’ils possèdent de marcher également bien en avant et en arrière. Les uns , formant le genre AMPHISBÈNE, ont toui le corps entouré de rangées circulaires de petites écailles 43 Doubles marcheurs. 664 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. quadrangulaires comme certains scinoïdiens ; les autres, ap- pelés TYPHLOPrS , ont de petites écailles imbriquées comme les orvets , et ressemblent pour le coup-d’œil à des vers de terre. Ces ophidiens habitent les pays chauds des deux continens : quelques-uns d’entre eux sont aveugles. Rouleaux. Les Serpens vrais ayant l’os tympanique mobile forment une famille bien plus nombreuse. Les uns ressemblent encore beau- coup aux précédens par la forme cylindrique de leur tête et de leur corps , et par la petitesse de leurs écailles. Leur gueule est aussi moins dilatable que chez les autres ophidiens de la même division : car los tympanique s'articule directement au crâne, tandis que , chez ces derniers , il est suspendu à un os mastoi- dien , qui lui-même est mobile. Les ROULEAUX (fortrèx) présen- tent ce mode d'organisation. Chez tous les SERPENS ORDINAIRES , Ceux dont il nous reste en- Serpens or- dinaires. core à parler, la bouche est conformée de manière à pouvoirse di- later au point de permettre à l’animal d’avaler des corps plus gros Fig. 249 (à). que lui. Les deux branches n + ie de la mâchoire inférieure ne sont pas unies, et l’es- pèce de pédoncule qui les soutient ( l’os tympanique fig. 249 t) estnon-seulement mobile lui-même , mais est comme suspendu à une au- tre portion du temporal, me appelée os mastoïdien (ma), pipe mi qui est également séparée du crâne et attachée à cette boite osseuse par des ligamens et des muscles seulement; les branches de la mâchoire supérieure ne sont fixées à l’os intermaxillaire que par des ligamens qui leur permettent de s’écarter plus ou moins ; ei les arcades palatines participent aussi à cette mobilité. Un autre caractère, propre à ce groupe , est l’existence de dents aiguës et recourbées en ar- (x) Tête osseuse d’un serpent à sonnette ; — € le crâne ; — ma l'os mastoïdien qui s'articule avec le cräne et porte à son extrémité opposée los tympanique (4)? —mi mâchoire inférieure suspendue à l’os tympanique ;—7 vomer;etos nasaux ; — m os maxillaire supérieur mobile ; — pet pe os ptérygoïdiens (portions du sphé- noïde) dont l’interne se continue en avant avec les arcades palatines. ORDRE DES OPHIDIENS OU SERPENS. 665 rière ,implamtées sur ces arcades aussi bien que sur les os maxil- laires supérieur et inférieur. Du reste , la disposition de l’armature de la bouche varie, et ces différences sont d’une grande importance ; car elles coïn- cident avec l’existence ou l'absence d’un appareil sécréteur d’un venin actif , dont l’arimal se sert pour frapper de mort la proie qu’il mord. Les serpens ordinaires se divisent effectivement en serpens venimeux et en serpens non venimeux. Chez les SERPENS NON VENIMEUX , les branches de la mächoire Serpens non supérieure sont armées tout du long , ainsi que celles de la mâ- Ytnimeux. choire inférieure et les branches palatines , de dents fixes et non percées. On réunit sous 12: nom de Boas ceux dont le dessous du corps et de la queue est garni de bandes écailleuses transversales d’une seule pièce ; et on donne le nom collectif de Couleuvres à ceux dont le dessous de la queue est recouvert de plaques paires divisées sur la ligne médiane. La division des B04S se compose des boas proprement dits , des Tribu des érix , etc. boas. Les BOAS PROPREMENT DITS On! le corps comprimé, la queue Boas propre- prenante, un crochet de chaque côté de l’anus et de petites écailles ment dits. au moins sur la partie postérieure de la tête. Les plus grands serpens connus appartiennent à ce genre; certaines espèces atteignent trente et même quarante pieds de longueur, et par- viennent à avaler des cerfs, et même , à ce que l’on assure , des bœufs. Ils sont dépourvus de venin, mais n’en sont pas moins redoutables à cause de leur agilité et de leur force prodigieuse. Tapi sous l’herbe ou suspendu par la queue aux branches des arbres dans un lieu de passage ou sur le bord d’un ruisseau , le boa attend , à l'affût , l’occasion de saisir sa proie, qu’il entoure de ses plis , et serre si fortement, que l’animal est bientôt étouffé et ses os broyés. Quand le serpent a , pour ainsi dire, pétri sa victime , il l’enduit de sa bave , et, dilatant énormément ses mâchoires , Pavale lentement. On assure qu’il lui faut quelque- fois plusieurs jours pour avaler en entier l’animal dont il se repait ainsi , et qu'une portion de celui-ci est déjà digérée avant que le tout soit entré dans la gueule du reptile. Après un repas semblable , les boas demeurent immobiles dans quelque endroit écarté , et exhalent une odeur fétide. Il est alors facile de les tuer, et il paraît que leur chair n’est pas un aliment désagréable; car certaines peuplades indiennes s’en nourrissent. Pendan: long-temps , la plus grande confusion a régné dans l’histoire de ces grands serpens , que l’on confondait avec les pythons. On a 43. Tribu des couleuvres. Pythons. Couleuvres proprement dites. 666 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. cru qu'ils se trouvaient en Afrique et en Asie aussi bien qu’en Amérique ; mais il parait bien certain qu'ils sont propres au nouveau continent. L’espèce la plus célèbre doit même son nom à une erreur de ce genre. On l’appelle le boa divin , parce qu’on lui attribuait ce qui est dit de certaines grandes couleuvres, dont les nègres du Mozambique font l’objet d’un culte religieux. Du reste, il paraîtrait que les Brésiliens et même les anciens Mexicains lui rendaient des honneurs semblables. Cet énorme reptile, qu'on appelle aussi le boa constrictor, habite les parties chaudes et humides de l'Amérique : sa tête est couverte de petites écailles jusqu’au bout du museau, et on le reconnaît facilement à l'espèce de larges chaines qui forment , tout le long de son dos , des taches noirâtres hexagonales, et d’autres de couleur jaunâtre. Deux autres espèces , qui habitent les mêmes con- trées , atteignent presque la même taille : le boa anacondo et le boa aboma. La division des COULEUVRES renferme les pythons , les cou- leuvres proprement dites et plusieurs autres genres qui n’offrent pas assez d'intérêt pour nous arréter ici. Les PyYTHONS sont, pour ainsi dire , les représentans des boas dans l’ancien monde : ils arrivent à une taille aussi gigantesque et sont munis comme ceux-ci de crochets près de Panus: ils ont également les plaques ventrales étroites ; mais celles du dessous de la queue sont doubles au lieu d’être simples. Il est cependant à noterque quelques-uns de ces serpens ont les premières , d’autres les dernières plaques de la queue simples, ce qui parait établir un passage graduel entre ces deux genres, dont la dis- tinction, du reste, est fondée sur un caractère de bien peu d’im- portance. Quoi qu’il en soit, C’est aux pythons qu’il faut rap- porter tout ce qui a été dit des boas de l'Afrique et de PAsie. L’Ular sawa ou grande couleuvre des îles de la Sonde ,qui parvient à plus de trente pieds de long, appartient à ce groupe : son nom indien signifie en langue malaise, serpent de rivière. Les COULEUVRES PROPREMENT DITES (co/uber) ont la tête cou- verte de grandes plaques (/g. 250) et ne présentent ni fossettes ORDRE DES OPHIDIENS OU SERPENS. 667 sur les côtés du museau , ni crochets près de l'anus, ni aucune Fig. 250. des particularités de structure, qui ontservi aux erpétologistes pour l’établissement de plusieurs petits genres dont il serait inutile de parler ici. Le nombre de ces serpens est immense: 1l en existe plusieurs en France. La plus commune est la couleuvre a collier (fig. 250): elle est cendrée avec des taches noires le long des flancs et trois taches blan- châtres formant un collier sur la nuque. Sa longueur est d'environ irois pieds: on la trouve dans les prés voisins d’eaux dorman- tes. Elle nage avec facilité et vit principale- ment d'insectes , de mollusques et de gre- nouilles ; elle ne cherche à mordre que lorqu’elle est très irritée , et sa morsure n’est nullement dange- reuse. On la mange dans plusieurs de nos provinces, La couleuvre viperine, ainsi nommée à cause de sa ressemblance avec la vipère, est commune dans le midi de l'Europe et se rencontre aussi, comme la précédente, dans les environs de Paris. Les SERPENS VENIMEUX sont pourvus d’une glande particulière, Serpens ve- située de chaque côté de la tête, qui verse au dehors le venin rimeux. qu’elle sécrète par un conduit excréteur aboutissant à l’une des Fig. 251. (1) dents maxillaires de la n v m mâchoire supérieure,dont la conformation est mo- difiée, pour être en rap- port avec les usages aux- quels elle est destinée. Ceite glande (fig. 251 , >) est placée sous les muscles temporaux , de manière à être comprimée par leur contraction, et cette dent, d plus grande queles autres, est tantôt percée d’un canal , et tantôt creusée d’un sillon seule- (1) Appareil verimeux d’un serpent à sonnettes ; — glande venimeuse dont le conduit excréteur aboutit à la grosse dent mobile (c);—"# muscles élévateurs de la mâchoire qui recouvrent en partie la glande et peuvent la comprimer ; — s glandes salivaires qui garnissent le bord des mächoires ;—# narine au-dessous de laquelle se voit la fossette qui distingue ces serpens et les trigonocéphales des vipéres. 668 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. ment; mais , dans l’un et l’autre cas , le conduit qu’elle présente est en communication avec le canal excréteur de la glande veni- meuse et sert à verser le venin au fond de la plaie faite par la dent elle-même. Ce venin est un poison des plus violens. Il nest ni âcre , ni brûlant, ne produit sur la langue qu’une sensation ana- logue à celle occasionée par une matière grasse et peut être avalé impunément; mais, introduit en quantité suffisante dans une plaie , il donne la mort avec une rapidité effrayante. Son énergie varie suivant les espèces et suivant les circon- stances dans lesquelles le serpent se trouve. La même espèce arait être plus dangereuse dans les pays chauds que dans les pays froids ou tempérés, et les accidens déterminés par sa morsure sont d'autant plus graves que le poison coule plus abondamment dans la plaie : aussi ces animaux sont-ils bien plus redoutables lorsqu'ils ont jeûné pendant quelque temps, et que leur venin s’est amassé en quantité considérable dans les glandes où il est sécrété que lorsqu'ils viennent de mordre à plusieurs reprises , et qu’il ne leur reste plus qu’une petite quantité de ce liquide. On a remarqué aussi que leur morsure n’agit pas de la même manière sur tous les animaux. Il paraïtrait que , pour les sangsues, les limaces, l’aspic , la couleuvre et lorvet , le venin de la vipère , par exemple, n’est pas un poi- son, tandis qu’il peut tuer avec une grande rapidité ious les animaux à sang chaud , les lézards et la vipère elle-même. En général , la quantité de venin nécessaire pour donner la mort, est, toutes choses égales d’ailleurs, d'autant plus grande que Vanimal blessé est plus grand : ainsi, lorsqu'un centième de grain de venin de la vipère suffit pour tuer un moineau , il en faudra six fois davantage pour tuer un pigeon. Ce poison , pour agir sur l’économie animale, doit être ab- sorbé et porté dans le torrent de la circulation : aussi , dans des cas de morsure de serpens venimeux , faut-il se hâter d’em- ployer les moyens les plus propres à à ralentir celte absorption ; afin davoir le temps de faire sortir ou de détruire le venin déposé au fond de la piqûre. La compression, exercée sur les veines au dessus du point piqué, et l’application d’une ventouse sur la plaie elle-même sont les moyens les plus propres à raien- tir Pabsorption du poison; mais , pour délivrer complètement le malade du danger qui le menace, il faut en général élargir la plaie et en cautériser le fond, soit avec le fer rouge , soit avec des caustiques énergiques.On a vanté aussi plusieurs remèdes in- ternes , tels que lammoniaque, l’arsenic,etc.; mais ces moyens, s'ils sont quelquefois utiles, ne peuvent inspirer une grande confiance. Les Indiens de l'Amérique du Sud attribuent des x verlus encore plus grandes à une plante de ce pays, connue ORDRE DES OPHIDIENS OU SERPENS. 669 sous le non de guaco ou de Micania quaco:1s assurent que non- seulement l’application des feuilles de guaeo sur la morsure des serpens les plus dangereux prévient tout effet délétère, mais que l’inoculation du sue de cette plante empêche ces animaux de mordre la personne ainsi préparée. On cite à l’appui de cette opinion les observations d’un auteur espagnol, nommé Vergas, et celles de Mutis ; enfin le célèbre et savant voyageur, M. de Hum- boldt, pense, d’après quelques expériences , que le guaco peut donner à la peau une odeur qui répugne au serpent, et lem- pêche de mordre. Quant aux symptômes qui accompagnent l’action du venin, ils diffèrent suivant les espèces et suivant les circonstances. En général , la circulation s’affaiblit extrêmement, le sang perd la faculté de se coaguler, et la gangrène envahit la partie blessée. La disposition de l’appareil venimeux varie chez ces reptiles. Tantôt la dent qui termine le canal excréteur du venin est un ‘crochet mobile, tantôt une dent immobile, simplement sil- lonnée. Les SERPENS A CROCHETS VENIMEUX MOBILES sontles plus redou- tables. Ces crochets (e, fg. 251), situés sur le devant de la bouche, sont isolés, très aigus et percés d’un petit canal, qui aboutit près de leur extrémité : ils sont fixés sur des os maxillaires très petits ({g. 249), et ces os, portés sur un long pédicule, sont très mobiles, de sorte que, lorsque l'animal ne veut pas se servir de ses cro- chets, il les reploie en arrière , et les cache dans un repli de sa gencive , tandis que , dans le cas contraire, il les redresse. On voit une de ces longues denis de chaque côté, etil y a derrière chacune d'elles, plusieurs germes destinés à la remplacer, si elle se casse dans une plaie ; mais les os maxillaires ne portent pas d’autres dents , et, par conséquent , on ne voit dans le haut de la bouche que les deux rangées de dents palatines ; au lieu de quatre rangées , comme chez les couleuvres. Ces serpens ont en général la tête pius large en arrière et Paspect plus féroce que les précédens. Tous ceux dont on connait bien la reproduction sont ovo-vivipares, c’est-à-dire font des petits vivans, parce que leurs œufs éclosent avant d’avoir été pondus. De là le nom de vipères , contraction de vivipares, donné à la plupart d’entre eux. Les genres les plus remarquables de celte division des serpens venimeux sont les crotales, les trigonocephales , les viperes et les LATE Serpens à crochets mo- biles. 670 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. Crotales. Les CROTALES OU SERPENS À SONNETES doivent leur nom à un singulier appareil qui termine la queue et qui les distingue de tous les autres ophidiens. C’est une suite de cornets écailleux , lâchement emboi- tés les uns dans les autres, qui se meuvent , vibrent et résonnent quand l’animal re- mue la queue. Le nombre de ces grelots augmente avec l’âge : il parait qu’il en reste un de plus après chaque mue,et qu'ils sont formés par l’épiderme du serpent, re- tourné sur lui-même comme un doigt de gant et retenu à lextrémité postérieure de la queue, Cet instrument vibre avec une rapidité extrême et produit ainsi un bruit assez fort pour être entendu à une Fig. 252. CROTALE. distance de plusieurs toises. Les serpens à sonnettes atteignent une longueur de cinq à six pieds ou même davantage : ils habitent l’Amérique et sont célèbres pour la violence de leur venin. On a vu des chiens périr en quinze secondes de la morsure d’un de ces reptiles ; on assure que les chevaux etles bœufs y succombent aussi presque instantanément. et on a eu malheureusement l’occasion de constater dans plus dune circonstance l’action terrible de ce poison sur l’homme. En général cependant , ces serpens n’attaquent pas les animaux trop gros pour pouvoir leur servir de proie , etils ne mordent l’homme que lorsqu'ils sont provoqués. Leurs mouvemens sont lents, et ils ne grimpent pas aux arbres ; mais néanmoins ils font leur principale nourriture des animaux que l’on croirait devoir leur échapper le plus facilement, tels que les oiseaux et les écu- reuils. On a cru pendant long-temps que le crotale possédait dans son regard une espèce de charme, qui ferçaitses victimes à se pré- cipiter dans sa gueule; car on a souvent observé qu’il lui suffisait de se coucher immobile au pied d’un arbre, et de tenir ses yeux fixés sur la proie qu’il convoite, pour que celle-ci, agitée de mouve- mens presque couvulsifs, finisse par tomber à.terre , près de son puissant ennemi; mais celte prétendue fascination n’est réelle- ment que l'effet de la frayeur excessive que ce serpent inspire. Rarement un animal , surpris par un crolale, cherche à s’échap- per; tantôt il reste comme pétrifié de terreur à son aspect, tantôt ORDRE DES OPHIDIENS OU SERPENS. 871 il se livre à des mouvemens désordonnés, qui, au lieu de le sauver, rendent sa capture plus facile. Ces serpens se tiennent ordi- nairement contournés en spirale près d’un abreuvoir , fré- quenté par les petits mammifères. Là ils attendent tranquille- ment que quelque victime se présente , et, dès qu’elle est à leur portée , ils s’élancent sur elle avec la rapidité d’un trait. Dans les parties de l'Amérique septentrionale où l'hiver est rigoureux, ils s'engourdissent pendant l’hiver, et on assure que, pendant la saison froide , leur morsure est peu dangereuse. À Cayenne et dans les autres contrées chaudes, ils ne s’engourdissent pas. Les nègres mangent leur chair. On connait plusieurs espèces de serpens à sonnettes : la plu- part ont la tête couverte d’écailles semblables à celles du dos; celle qui est la plus commune aux Etats-Unis est brune, avec des bandes transversales, irrégulières , noiràtres ; celle de la Guyane a des taches en losange, bordées de noir (#g. 252). Toutes deux parviennent à six pieds de longueur. Une autre espèce, dont la tête est garnie de grandes plaques , le crotale millet , n’a guère plus d’un pied de long , mais passe aux Etats-Unis pour être ‘aussi dangereux que les précédens. Les TRIGONOCÉPHALES se distinguent des précédens par l’ab- sence de grelots au bout de la queue ,mais ont, comme eux, des fossettes derrière les narines. Les uns ont les plaques subcaudales simples , comme les boas et les crotales ; les autres ont la queue garnie en dessous de plaques doubles, comme les couleuvres et la plupart des vipères. Ils égalent les serpens à sonnettes pour la violence de leur venin et habitent aussi , pour la plupart , le nouveau continent. Une espèce, le {rigonocephale à losanges dont la tête est recouverte de petites écailles , les plaques subcaudales presque toutes doubles et la queue termi- née par une sorte d’aiguillon , atteint six à sept pieds de long. L'espèce la plus célèbre est le trigonocéphale jaune , appelé aussi serpent jaune des Antilles etvipere fer-de-lance. Ce reptile est très commun à la Martinique et dans plusieurs autres iles voisines. Dans ces colonies on ne moissonne pas un champ de cannes à sucre , sans en trouver un grand nombre; on le rencontre dans presque toutes les localités , et il pénètre fréquemment dans les maisons. Sa longueur est de six à sept pieds , et son agilité extrême : il grimpe sur les arbres les plus élevés, à la poursuite de sa proie, et se lance , comme un trait , non-seule- ment sur les rats , les oiseaux et autres animaux de petite taille, dont il fait sa nourriture ordinaire ; mais encore sur les grands animaux et même sur l’homme. La tuméfaction de la partie Vipères. 672 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. blessée, qui devient bientôt froide , livide et gangréneuse, des nausées , des convulsions et une somnolence invincible sont les symptômes les plus ordinaires de l’action de son venin, qui , en général , donne promptement la mort. Les vIPÈRES diffèrent des serpens venimeux , dont nous avons déjà parlé, par l’absence de fossettes derrière les narines. La plupart ont été souvent confondues avec les couleuvres ,à cause Fig. 253. de leurs plaques subcaudales doubles , et quelques-unes ont la tête garnie de grandes plaques comme ces dernières; maïs, chez presque toutes les vipères, la tête est recou- verte de petites écailles imbriquées ou granu- lées. La vèpere commune , qui est répandue dans toutes les parties chaudes et tempérées de l’Europe, présente ce dernier caractère. (fig. 253). Sa taille dépasse rarement deux pieds, et elle est en général brune , avec une double rangée de taches transversales noires sur le. dos et une autre rangée sur chaque flanc ; mais souvent ces taches s’unissent pour for- mer des bandes ployéesenzig-zag,eton trouve des individus presqueentièrement noirs. C’est une de ces vipères, que l’on nomme quelquefois dans nos environs lPaspie ; mais il ne faut pas la confondre avec le véritable aspic des anciens, dont nous parlerors en traitant des Naja. La vipère commune habite les cantons boisés, montueux etpierreux. On la rencontre prin- cipalement sur la lisière des taillis secs , et elle était devenue, il y à quelques années, très commune dans la forêt de Fontaine- bleau. Elle se nourrit de souris , de taupes , de jeunes oiseaux , de reptiles et même d’insectes et de vers. Pendant la saison froide , ces reptiles restent engourdis dans des trous où on les trouve “souvent entrelacés plusieurs ensemble. C’est dans les pre- miers beaux jours du printemps qu’on les voit le plus souvent se réchauffant au soleil ; maïs , lors des grandes chaleurs, on n’en rencontre que rarement. À chaque portée, ils produisent douze à Sn petits , qui n’acquièrent leur entier développement qu’à Page de six à sept ans. De tous les reptiles venimeux de l'Europe, la vipère commune est la plus dangereuse : même dans notre climat froid , sa morsure peut occasioner en quel- ques heures la mort d’an homme et fait périr en quelques minutes les petits animaux. En général cependant, la quantité de venin qu’elle verse dans la plaie est insuffisante pour ètre mortelle à lhomimne. ORDRE DES OPHIDIENS OU SERPENS. 673 La petite wpère (V. chersæa) , qui est assez commune dans le nord de l'Europe , et qui se trouve aussi dans les Pyrénées, a , au milieu du dessus de la tête, trois plaques un peu plus grandes que les écailles qui les entourent. Elle n’a en général guère plus de six pouces de long ; mais son venin est très violent. La vipère & museau eornu Où ammodyte habite le midi de l'Europe et se distingue de la vipère commune par une petite corne molle et couverte d’écailles qu’elle porte sur le bout du museau ; enfin le Ceraste ou vipere cornue , dont les anciens ont souvent parlé, se reconnait à la petite corne placée sur chaque sourcil. On la trouve dans les sables brülans de l'Egypte et de la Syrie. Les xaJa ressemblent aux vipères , si ce n’est que leur tête est toujours garnie de plaques , et que les côtes antérieures peuvent se redresser et se porter en avant, de manière à dilater cette partie du tronc en une sorte de disque plus ou moins large (fig. 254). Deux es- pèces de ce genre sont célèbres sous les noms de serpent à lunette et d’espie d Egypte. Le serpent à tunettes(ou cobra capelio des Portu- gais de l’Inde) doit son nom à un trait noir en forme de lunette , dessi- né sur la partie extensi- ble de son cou. Sa lon- gueur est d'environ qua- Fig. 254. L'ASPIC. tre pieds; sa morsure est extrêmement dangereu- se, ei 11 est très féroce ; néanmoins les jongieurs indiens par- viennent à le dresser à exécuter, au son de la fiète, certains mouvemens en cadence , et s’en servent pour étonner le pu- blic ; pour faciliter le débit de leurs prétendus spécifiques contre le venin de ce reptile, ils se laissent même mordre par leur serpent, en quelque sorte apprivoisé ; mais ils ont la précaution de lui arracher préalablement ses crochets à venin. Le naja hoje Gu aspie, qui habite l’Egypie, et qui a environ Naja. Aspic: Elaps, etc. Serpens ve- nimeux sans crochets mo- biles. 674 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. deux pieds de long , est employé aussi par les bateleurs de ce pays , pour amuser le public. En lui pressant la nuque avec le doigt , ils le font tomber dans une espèce de catalepsie , qui le rend raide et immobile , comme s’ils le changeaient en un bâton ou verge. Son venin est très actif, et Galien rapporte qu’à Alexandrie on se servait de la morsure de ce serpent pour abré- ger le supplice des criminels condamnés à mort. C’est incontes- tablement l’aspic de Cleopätre. Les anciens Egyptiens l'avaient pris pour l'emblème de la divinité protectrice du monde, et l'ont sculpté sur leurs monumens, des deux côtés d’un globe. L’habitude qu’il a de se redresser quand on en approche leur avait fait croire qu’il gardait les champs où il se trouvait. D’autres serpens venimeux à crochets isolés , nommés ÉLAPS, ont la bouche à peine dilatable ; et il en est dont la queue est comprimée en forme de rame et dont les habitudes sont aqua- tiques : ce sont les PLATURES. Parmi les SERPENS VENIMEUX SANS CROCHETS ISOLÉS , il en est qui se distinguent à peine des couleuvres et qui ont la bouche garnie en dessus de quatre rangées de dents comme les serpens non venimeux, sans qu'on leur voie , à la place qu’occupent d'ordinaire les crochets, rien de nature à indiquer lexistence d’un appareil venimeux. Chez eux, en effet, le canal excréteur de la glande du venin vient aboutir à une des dernières dents maxillaires , un peu plus grosse que les autres, et creusée d’un simple sillon. Quelques serpens de l'Amérique et de l'Afrique présentent ce mode d'organisation : tels sont les prpsas et les CERBÈRES. Enfin il en est d’autres qui, avec une armature de la bouche à-peu-près semblable à ces derniers , ont la première dent maxillaire plus grande que les autres et percée, pour conduire le venin, comme les crochets mobiles dont il a été question plus haut. Les uns, connus aux Indes sous le nom de serpens de roche, ont des plaques simples sous le ventre et la queue, et constituent le genre BONGARE. Les autres, appelés HYDRES, ont la partie pos- térieure du corps et la queue très comprimées et très élevées, ce qui leur donne de la facilité pour nager : ils sontcommuns dans certains parages de la mer des Indes. si Cr ORDRE DES BATRACIENS. 6 ORDRE DES BATRACIENS. Cette quatrième et dernière division de la classe des reptiles nous conduit évidemment vers les poissons ; car elle se compose d'animaux qui , pendant les premiers temps de la vie, respirent par des branchies et ressemblent à des poissons par leurs mœurs et par leur forme, aussi bien que par leur mode d’orga- nisation , mais qui , par les progrès de l’âge, subissent de véri- tables métamorphoses et acquièrent les caractères communs aux autres reptiles. Lorsqu'ils sont dans cet état transitoire , on leur donne le nom de tetards. Les branchies des jeunes batraciens sont placées sur les côtés du cou et soutenues par des prolongemens latéraux du carti- lage qui représente l’hyoïde. Tantôt elles ont toujours la forme de Fig. 255. panaches extérieurs qui flottent dans l’eau ambiante (#g.255, b); d’autres fois elles consistent en filamens fixes le long des branches hyoïdiennes dont nous venons de parler, et recouverts par les tégumens. A mesure que les poumons se développent , on voit en général les branchies se flétrir et finir par disparaitre complètement ; mais il n’en est pas toujours ainsi, et, chez quelques reptiles, elles persistent pen- dant toute la vie et existent conjoin- tement avec des poumons. L'appareil de la circulation subit des changemens correspondans à ceux qu'éprouvent les organes de la respi- ration. Le cœur des batraciens se com- pose , comme celui de la plupart des reptiles , de deux oreilleties et d’un seul ventricule, d’où naït une grosse artère, qui, à sa base, est renflée en un bulbe contractile et qui bientôt se bifurque. Lorsque l’animal respire par des branchies seulement, le sang, chassé du ventricule , se distribue à ces organes et de là se rend en majeure partie dans une artère dorsale , dont les branches se ramifient dans les di- 6876 À ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. "A vb 3 @ ap av ce ab2 vb Fig. 251. 1 Lt, O1 (1) Fig. 256. Principaux vaisseaux sanguins du tétard de la salamandre: — a artère qui part du ventricule unique du cœur, et se divise en six branches, qui se rendent aux trois paires de branchies et s’y ramifient (on les appelle artères branchiales , ab); — br les branchies dans lesqueiles on voit se distribuer les artères branchiales et naître les veines branchiales (vb), qui recoivent le sang après son passage à travers les lamelles des branchies; celles des deux dernières paires de branches se réunissent pour fournir de chaque côté un vaisseau (c), qui, en se réunissant à son tour avec celui du côté opposé, forme l’artère aorte ventrale ou artère dorsale(av), laquelle se dirige en arrière et distribue le sang à la plus grande partie du corps; la veine branchiale de la première paire de branchies se recourbe en avant et porte le sang vers la tête (4 #) ;—1 petite branche anastomo- tique extrêmement fine, qui unit l’artère et la veine branchiales entre elles, à la base de la première branchie, et qui, en s’élargissant plus tard, permettra au sang de passer du premier de ces vaisseaux dans le second, sans traverser la branchie ; — 2 petite branche arastomotique qui établit le passage de la même manière entre l’artère et la veine des branchies de la seconde paire ; —3 vaisseau qui, en se réunissant avec un filet situé plus en dedans, joint également l'artère et la veine des branchies postérieures ; — o artère orbitaire ; — ap artères pulmonaires rudi- mentaires. Fig. 257. Les mêmes parties chez un tétard dont les branchies commencent à ORDRE DES BATRACIENS. 677 vers organes. Nous verrons bientôt que , chez les poissons , ce liquide suite même trajet. Mais, lorsque les poumons se Fig. 258. développent , la disposi- tion de lappareil circu- latoire change : il s’éta- blit une communication directe entre les vais- seaux qui portent le sang aux branchies et ceux qui le recoivent de ces organes , de sorte que ce liquide n’est plus obli- gé de traverser cet appa- reil respiratoire, pour ar- riwer dans l'artère dor- sale , et de là dansles di- verses parties du corps. L’artère (a) qui nait du ap Av ap ventricule et que lon pourrait comparer d’abord à une artère branchiale, devient alors l’origine du vaisseau dorsal ei constitue avec lui une vé- ritable artère aorte, dont certaines branches, qui se rendent aux poumons , se développent en mème temps et établissent la circu- lation pulmonaire. Enfin les vaisseaux branchiaux s’oblitèrent, et alors la circulation se fait à-peu-près de même que chez les autres reptiles. Le sang veineux , revenant de toutes les parties du corps est versé dans le ventricule par l’une des oreillettes et s’y mêle avec le sang artériel venant des poumons et poussé dans le méme ventricule par l’autre oreillette. Ce mélange pénètre daus l'aorte et se rend en petite partie aux poumons et en ma- jeure partie aux divers organes de l’animal. perdre de leur importance dans Ja respiration, et dont une partie du sang va du cœur aux diverses parties du corps sans traverser Ces organes ; les mêmes lettres indiquent les mêmes vaisseaux que dans la figure précédente, et on remarquera que les branches anastomotiques (1,2, 3) lesquelles, dans le tétard précédent, étaient capillaires et ne pouvaient pas laisser passer une quantité notable de sang, sont ici assez gros, et que c’est avec eux , plutôt qu’avecles vaisseaux branchiaux , que les artères venant du cœur semblent se continuer. Les artères pulhuonaires se sont'aussi beaucoup développées. Fig.258. Les mêmes parties chez lanimal parfait, indiquées par les mêmes lettres. Ici les vaisseaux des branchies sont devenus rudimentaires et les artères pulmonaires beaucoup développées; les vaisseaux qui portaient le sang aux branchies moyennes se continuent sans interruption avec ceux (c) qui recevaient ce liquide après son passage à travers ces organes et forment ainsi, de chaque côté du cœur, une crosse aortique. 678 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. ‘Le squelette des batraciens présente aussi des particularités remarquables ; en général les côtes manquent ou sont réduites à l’état rudimentaire , d'où il résulte que la respiration pulmo- naire ne peut se faire par le méca- nisme ordinaire; en effet, c’est par une espèce de dé- glutition que Pani- mal introduit Pair dans ses poumons. Il est aussi à noter Fig. 259. SQUELETTE DE GRENOUILLE. que la peau de ces reptiles n’est pas revêtue d’écailles comme celle des sauriens , des ophidiens et de la plupart des chéloniens , mais est nue. Presque tous les ba- traciens manquent aussi d'ongles. Enfin leurs œufs n’ont pour enveloppe qu’une masse gélatineuse qui s’enfle beaucoup dans l’eau et ils ne sont en général fécondés qu'après la ponte. _Classifica- Cet ordre se compose de quatre familles , savoir : 1° les BA- SE TRACIENS ANOURES , qui , à l’état parfait , n’ont pas de queue, ne conservent pas leurs branchies et sont pourvus de quatre membres ; 2° Les BATRACIENS URODÈLES, qui perdent également leurs branchies et acquièrent des membres, mais conservent leur queue ; 3° Les CÉCILIES, qui perdent aussi leurs branchies , mais qui n’ont jamais de membres et qui ont été jusqu’en ces derniers temps , classés parmi les ophidiens sous le nom de serpens nus. 4° Enfin les BATRACIENS BRANCHIFÈRES, Qui COnservent tou- jours leurs branchies et qui ressemblent à des batraciens uro- dèles dont le développement se serait arrêté lorsqu'ils étaient encore à l’état de tétard. Faunile des La famille des BATRACIENS ANOURES se compose des gre- batraciens a- nouilles , des crapauds et de quelques autres reptiles ayant Fat de à-peu-près la même forme. Ce sont de tous les animaux de cet ordre ceux dont les métamorphoses sont les plus complètes. Au moment où le jeune tétard sort de l’œuf, il ressemble assez à un petit poisson et ne peut vivre que dans l’eau. Sa tête est très grosse , son ventre renflé , et son corps, dépourvu de membres, se lermine par une queue comprimée , qui, dans les jours sui- vans, s’allonge et s’élève beaucoup ; sa bouche n’est encore ORDRE DES BATRACIENS. 679 qu'un pelit trou ,à peine perceptible, et ses branchies ne con- sistent qu’en un tubercule placé de chaque côté à la partie posté- rieure de la tête. Bientôt ces appendices s’allongent etse divisent en lanières ; les yeux se dessinent à travers la peau , et une fente transversale se montre sous le cou, de manière à y former une espèce d’opercule membraneux. Un peu plus tard (fig. 258, pag. 677), les branchies se ramifient et les lèvres se recouvrent d’une sorte de bec corné, à l’aide duquel l'animal se fixe aux végétaux , dont il fait sa principale nourriture ; mais cet état ne dure que peu. Au bout de quelques jours, les franges branchiales, Fig. 260. qui flotiaient de chaque côté du cou, disparaissent , et la respiration se fait à l’aide de petites houppes vasculai- res , fixées le long de quatre arcs carti- Vs lagineux, situés sous la gorge et appar- tenant à l’hyoïde. Une tunique mem- braneuse, recouverte par la peau, enveloppe ces branchies in- ternes , auxquelles l’eau arrive par la bouche , en passant par les intervalles des arceaux de l’hyoïde; enfin , après avoir baigné ces organes , ce liquide sort par une ou deux fentes extérieures, dont la position varie un peu, suivant les espèces. L’appa- Fig. 261. reil respiratoire pré- sente alors, comme on le voit, la plus exacte ressemblance avec ce- lui des poissons. Quel- que temps après, les pattes postérieures du tétard se montrent et e développ ent petit-à- petit (#g. 261); leur lon- gueur est déjà assez grande qu’on ne voit pas encore les pattes anté- rieures. Celles-ci se développent sous la peau , qu’elles percent plus tard (#g. 262). Vers la même époque, le bec corné tombe et laisse à nu les mâchoires; la queue commence à s’atrophier _ Fig. 263. Fig. 264. (fig. 263) , les poumons se dé- veloppent, et, à mesure que ces organes deviennent plus _# exclusivement le siège de la 29 respiration, les branchies se = flétrissent et disparaissent ; les arceaux cartilagineux qui les portaient sont aussi 44 Maæurs. Grenouilles. 680 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. en partie absorbés ; enfin la queue disparait complètement. Le petit animal prend la forme qw’il doit toujours conserver et change complètement de régime (fig. 264). Herbivore d’abord, il devient peu-à-peu exclusivement carnivore , et, à mesure que sa métamorphose s'achève , son canal intestinal , de long , mince et contourné en spirale qu’il était, devient court, presque droit et renflé, pour former l'estomac et le colon. L’époque de ces changemens varie suivant les espèces , et on a constaté que diverses circonstances peuvent hâter ou retarder considérablement la métamorphose complète du jeune ani- mal. Le défaut de chaleur et de lumière prolonge extrêmement la durée de l’état de tétard. Parvenus à l’état parfait , les batraciens anoures cessent d’être des animaux aquatiques ; mais la plupart cependant continuent à vivre dans le voisinage des eaux et s’y plongent souvent. Pen- dant la saison chaude , ils ne peuvent y rester continuellement, même en venant librement respirer l’air à la surface; car la respiration pulmonaire ne leur suffit pas alors , et ils ont besoin de l’action de l'air sur la peau ; mais , en hiver, non seulement cette respiration cutanée peut suffire à l’entretien de la vie, ils peuvent même rester plusieurs mois dans l’eau sans venir à l'air. | Tous ces reptiles ont le corps ramassé, la tête plate ,le museau plus ou moins arrondi, la gueule très fendue, les pieds de devant courts et terminés par quatre doigts, enfin ceux de derrière plus longs et montrant quelquefois le rudiment d’un sixième doigt. Leurs yeux sont ordinairement garnis de trois paupières etsont très saillans, mais s’enfoncent dans la tête sous la plus légère pres- sion; Car les orbites ne sont séparés de la bouche que par des membranes. Une plaque cartilagineuse tient lieu de tympan et fait reconnaitre l'oreille en dehors. La langue est en général molle, et, à l’opposé de ce qui se voit chez la plupart des mammifères, n’est fixée que par son extrémité antérieure au bord de la mä- choire , de façon à pouvoir se reployer en arrière ou se renverser en dehors de la bouche. Enfin le squelette de ces reptiles (#g. 259) est entièrement dépourvu de côtes, et l’inspiration de l'air ne peut se faire que par un mouvement analogue à celui de la dégluti- tion , dans lequel l’animal dilate sa gorge, pour la remplir d’air, puis , fermani les arrière-narines avec sa langue, contracte les muscles de l’arrière-bouche et oblige ce fluide à pénétrer dans les poumons : aussi, pour asphyxier un de ces batraciens , suffit-il de lui tenir la bouche ouverte pendant un certain temps. Les GRENOUILLES (rana) ont le corps plus effilé que les autres ORDRE DES BATRACIENS. 681 batraciens anoures et les pieds de derrière très longs, très forts et plus ou moins bien palmés, ce qui leur donne la faculté de nager et de sauter très bien. Leur peau est lisse, et les mâles ont, de chaque côté du cou, sous l’oreille , une membrane mince, qui se gonfle d’air, quand ils coassent. Ils se distinguent aussi des crapauds par l’existence d’une rangée de petites dents très fines tout autour de la mâchoire supérieure. Ces reptiles se tiennent d'ordinaire sur le bord des mares et des ruisseaux et se précipilent dans l’eau au moindre danger: ils ne se nour- rissent que de proie vivante et se repaissent de larves d’insectes aquatiques, de vers, de petits mollusques et de mouches. En hiver, ils ne mangent pas et s’enfoncent d'ordinaire dans la vase ou dans des trous. L'espèce la plus commune dans nos étangs est la grenouille verte; une autre espèce, la grenouille rousse , presque aussi répandue dans nos environs, vit plus à terre et coasse beaucoup moins. On donne le nom de RAINETTES (.yle) à des batraciens, qui ne diffèrent guère des grenouilles que parce que lextrémité de chacun de leurs doigts est élargie et arrondie en une espèce de pelotie visqueuse , qui leur permet de se fixer aux Corps sur lesquels ils grimpent, et de mon- ter aux arbres. Douées d’une souplesse et d’une agilité extrême , les rai- nettes cheminent avec lé- gèreté sur les branches les plus flexibles. Pen- dant tout l'été, elles vi- vent ainsi sur les arbres, y poursuivant les insec- tes; mais , en hiver, elles Fig. 265. LA RAINETTE COMMUNE. se retirent au fond de l’eau , comme les grenouilles, et ne reviennent dans les bois humides qu’au printemps , après avoir pondu leurs œufs. Nous en avons une espèce , qui est commune dans les parties méridio- nales del’Europe, etqui se trouve aussi quelquefois aux environs de Paris : c’est la ratnette verte,que l’on désigne aussi sous le nom de grenouille d'arbre, de graisset et de raënette de Saint-Martin Elle est verte dessus, pâle dessous , avec une ligne jaune et noire le long de chaque côté du corps. 44. Raivettes Crapauds. 682 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE,. Les CRAPAUDS (bufo) ont le corps venliru et couvert de verrues ou de papilles , d’où suinte une humeur visqueuse ; on remarque aussi de chaque côté du cou une grosse glande saillante et comme criblée de pores, qui sécrète une humeur âcre et qui est désignée sous le nom de parotide Leurs pattes postérieures ne sont pas aussi allongées que celles des grenouilles, et ils sautent mal; en général ils rampent plutôt qu'ils ne marchent, et, quand ils sont surpris, au lieu de fuir, ils s'arrêtent subitement, enflent leur corps de manière à le rendre dur et élastique , font suinter de leur peau une humeur blanche , et lancent au loin leur urine fétide ; quelquefois ils cherchent même à se défendre en mordant leur ennemi ; mais leur bouche est complètement dépourvue de dents et leurs morsures ne sent pas venimeuses, comme on le dit souvent dans nos campagnes. Ces reptiles hideux et dégoùtans se cachent d'ordinaire dans les lieux sombres et humides, dont ils ne sortent que pendant la nuit ou immédiatement après les pluies chaudes et abondantes de l'été. Ils se nourrissent, comme les grenouilles, de petits mollus- ques , de vers et d’insectes vivans , mais ils sont plus terrestres : c’est au printemps seulement qu’ils se rendent dans les étangs -et ies mares, où les femelles vont déposer leurs œufs. Dans les pays où l'hiver est froid , ils passent cette saison engourdis dans des trous. Leur respiration devient alors extrêmement bornée, et le contact d’une très petite quantité d’air sur la peau suffit à l'entretien de leur existence. Lorsque les circonstances où 1ls se trouvent diminuent les pertes qu’ils éprouvent d'ordinaire par lévaporation , ils peuvent même vivre ainsi pendant très long- temps. C’est ce qui explique comment , après avoir enseveli des crapauds dans du plâtre ou les avoir renfermés dans des trous creusés dans des pierres , on les a souvent trouvés vivans après plusieurs mois de réclusion. Ces expériences curieuses ont été faites dans la vue d’éclaircir un fait qui jusqu'alors avait été souvent observé, mais en général traité de fable par les naturalistes : Pexistence de cra- pauds vivans dans des trous de mur, dans des arbres creux ou même dans l’intérieur de pierres , où ils étaient restés proba- blement des années entières et d’où ils ne pouvaient sortir. Les ouvriers qui travaillent dans les carrières ont fait souvent des rencontres pareilles , en cassant des blocs de pierres , et ils prétendent que le crapaud se trouve enfermé de toutes parts dans la pierre comme dans un moule solide , ce qui supposerait que celle-ci s’est formée autour de son corps et que la réclusion du reptile date d’une antiquité très reculée ; mais cette opinion est inadmissible et tout porte à croire que, dans ces cas, la re- iraile du crapaud communique avec le dehors par quelque ORDRE DES BATRACIENS. 683 trou , qui se sera bouché accidentellement ou qui aura échappé à observation. Le crapaud commun, gris, plus ou moins olivâtre et hérissé de tubercules gros comme des lentilles, a les pieds de devant demi-palmés. Ses œufs sont très nombreux et réunis par une gelée transparente en deux cordons extrêmement longs. Le tétard est noirâtre et ne grossit que peu avant d’achever sa métamorphose et de quitter l’eau. Le crapaud des jones ou crapaud calamite se trouve aussi aux environs de Paris et dans les autres parties tempérées de l’Europe: il se tient d'ordinaire dans les lieux secs, les fentes des murs, etc. Son dosest olivâtre et ses pattes postérieures manquent entièrement de palmures. Une troisième espèce , également commune dans nos envi- rons , est le crapuud brun , dont les pieds de derrière sont au contraire complètement palmés : il se tient de préférence près des eaux. Enfin nous mentionnerons encore le crapaud accou- cheur, à cause d’une particularité remarquable de ses mœurs. La femelle ne dépose pas ses œufs dans l’eau comme les autres crapauds ; mais le mâle se les attache en paquets sur les deux cuisses et les porte ainsi jusqu’à ce que les petits soient prêts à éclore ; alors il cherche quelque eau dormante et s’y plonge ; les œufs se fendent aussitôt et le jeune tétard en sort. Ce singulier reptile est commun dans les lieux pierreux des environs de Paris; il est plus petit que les précédens, gris , ponctué de noir et sans palmures. Les prpAs sont des reptiles encore plus laids que les crapauds : leur corps est plus aplati, leur tête triangulaire , leurs yeux très petits , leurs pattes postérieures courtes et leurs doigts de devant fendus au bout en trois ou quatre petites pointes ; ils manquent Fig. 266 PIPA. Pipas. Batraciens urodèles. Tnitons. 684 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. complètement de langue. L'espèce la mieux connue, qui vit dans les parties chaudes et humides de l'Amérique méridionale, est célèbre par la manière dont ses petits se développent. Le mâle place les œufs sur le dos de la femelle , qui se rend ensuite à l’eau , où sa peau, irritée par le contact de ces corps, se gonfle et forme des cellules dans lesquelles les petits éclosent et de- meurent jusqu’à ce qu’ils aient achevé leurs métamorphoses : c’est alors seulement que la mère revient à terre. Dans la famille des BATRACIENS URODÈLES, les métamorphoses sont moins complètes ; car, à l’état parfait , ces reptiles con- servent encore la longue queue qui, dans la famille précédente , n'existe que chez le tétard. A la sortie de l’œuf, ils sont apodes et respirent par des branchies en forme de houppes, qui, au nombre de trois, sont fixées de chaque côté du cou et flottent au dehors. Leurs membres apparaissent successivement comme chez les batraciens anoures; mais ici ce sont les pattes de devant qui se montrent avant celles de derrière ; enfin , pour compléter la transformation du tétard , les poumons se développent et les branchies disparaissent. A l’état adulte, ces animaux ont à-peu- près la même forme que les lézards ; mais leur tête est aplatie et on ne voit pas de tympan extérieur. Leurs deux mâchoires et leur palais sont armés de petites dents ; leur langue est disposée comme celle des grenouilles ; leur squelette offre des rudimens de côtes ; et leurs doigts sont au nombre de quatre devant et presque toujours cinq derrière. Quelques auteurs désignent ces animaux sous le nom commun de salamandres. Les TRITONS OU SALAMANDRES AQUATIQUES sont les batraciens urodèles les plus communs : ils conservent toujours une queue comprimée latéralement et passent presque toute leur vie dans l’eau. Ce que ces reptiles offrent de plus remarquable est la facilité étonnante avec laquelle ils réparent les mutilatiors qu’on leur fait subir. Non-seulement leur queue repousse après avoir été coupée, comme cela se voitchez les lézards; mais leurs pattes se reproduisent de la même manière. On a vu le même membre, après avoir été coupé, repousser en entier avec ses Os, ses muscles , ses vaisseaux et ses nerfs plusieurs fois de suite, eton assure même que, dans une expérience, l'œil , après avoir été extirpé , s’est reproduit dans l’espace d’une année. On en trouve plusieurs espèces aux environs de Paris. Quel- quefois les tétards grandissent beaucoup avant que de perdre ORDRE DES BATRACIENS,. 685 leurs branchies. Un fossile, trouvé dans les schistes d'OEningen et appartenänt à une grande espèce de salamandres, a excité beaucoup d'intérèt ; car, par une singulière erreur, on l’a con- eee ; pendant long-temps , comme un squelette d’homme ossile. Les SALAMANDRES PROPREMENT DITES OU SALAMANDRES TER- RESTRES Ont, à l’état parfait, la queue ronde et ne se tiennent dans l’eau que lorsqu'elles sont à l’état de tétard ou qu’elles veulent mettre bas. Leurs œufs éclosent avant la ponte, et les petits ont d’abord la queue comprimée comme les tétards ordinaires ; ils perdent leurs branchies et achèvent leur méta- morphose très promptement. À l'état parfait , elles habitent les lieux humides et ombragés : on les trouve d'ordinaire cachées sous des pierres ou dans des trous souterrains. On a cru pen- dant long-temps que la salamandre avait le pouvoir de résister à l’action du feu ; mais cette fable ne repose sur rien , si ce n’est peut-être que lorsqu'on irrite ce reptile , il suinte de sa peau une humeur laiteuse. Cette humeur parait être un poison pour des animaux très faibles; mais c’est encore sans raison que, dans les campagnes ,on redoute la salamandre comme un animal malfaisant. L'espèce commune, noire avec de grandes taches d’un jaune vif, est connue sous le nom vulgaire de mouron et de sourd. On a découvert en Amérique un grand batracien qui a tout- à-fait la forme de la salamandre , et qui porte de chaque côté du cou un orifice , mais qui passe ‘pour n'avoir jamais de bran- chies. Il est probable que, dans les premiers temps de la vie, ces organes existent, mais qu’ils disparaissent de très bonne heure , comme cela a lieu pour notre salamandre terrestre. Ces reptiles, dont on a formé le genre mExopomA , habitent les grands lacs et les rivières de l’intérieur de l'Amérique septen- trionale. Les AMPHIUMA , qui habitent le même continent, ont le même mode d'organisation ; mais leur corps est excessive- ment allongé et leurs pattes très peu développées. Le nombre de leurs doigts varie de deux à trois, suivant les espèces. Les batraciens qui conservent toujours leurs branchies res- semblent à des tétards batraciens urodèles et ont été regardés Salamandres terrestres. Menopomes. Amphiuma. Batraciens branchifères. 686 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. pendant long-temps comme étant en effet les jeunes de quel- que grande espèce de salamandre; mais au- jourd’hui on ne peut guère douter que ce ne soient des animaux parfaits, et ils ont cela de remarquable que, ayant des branchies bien développées, ils possèdent aussi des poumons et sont par conséquent complète- ment amphibies. Ces branchies fixées à la place ordinaire, ont la forme de houppes plus ou moins ramifées et flottent à l’exté- rieur dans l’eau ambiante. Les poumons sont quelquefois pour- vus d’un lacis vasculaire aussi bien développé que chez aucun reptile , tandis que, chez d’autres , leur structure est très simple. Le corps de ces animaux se termine par une longue queue verticale; enfin leurs mêmbres sont peu développés et souvent manquent en partie. On en connaït quatre genres, les axolotis , lesmenobranches , les protees et les sirènes. Fig. 267. AXOLOTL. Axolotls. Les AXOLOTLS ressemblent en tout point à des tétards de sala- mandres ayant déjà leurs quatre pattes. On n’en a encore dé- couvert qu’une seule espèce ({g. 267), qui habite le lac au milieu duquel s'élève la ville de Mexico. Meucbran- Les MENOBRANCHES ont également quatre pieds; mais , au lieu LE d’avoir quatre doigis devant et cinq derrière, ils n’en ont que quatre partout. Protées. Les PROTÉES n’ont que trois doigts devant et deux derrière. La seule espèce connue, longue de plus d’un pied et seulement de la grosseur du doigt, ne se trouve que dans les eaux souter- raines de quelques cavernes de la Carniole. Sa peau est lisse et. blanchätre, son museau allongé et déprimé, et ses yeux exces- sivement petits et cachés sous les tégumens. Tee Enfin les SIRÈNES n’ontque des pieds de devant et ressemblent presque à des anguilles par la forme allongée de leur corps. On en connait trois espèces , dont l’une atteint jusqu’à trois pieds de longueur et habite les marais de la Caroline. Batracieus Les GÉCILIES, comme nous l’avons déjà dit, manquent com- potes plètement de membres et ont été, jusqu’en ces derniers temps ORDRE DES BATRACIENS. 687 regardés comme des serpens ; mais on a constaté que, dans le jeune âge, ils ont des branchies qui se montrent au dehors par un trou situé de chaque côté du cou. Chez l’animal adulte , on trouve même les arceaux de l’os hyoïde , qui ont servi à soute- nir ces organes. Le corps des cécilies est à-peu-près cylin- drique et l'anus en occupe presque l’extrémité postérieure. La peau est lisse , visqueuse et sillonnée en travers de rides annu- laires. Au premier abord, elle paraît tout-à-fait nue; mais, par la dissection , on trouve dans son épaisseur des rangées de petites écailles excessivement minces , situées entre ces rides. Les yeux, fort petits , sont cachés sous les tégumens communs, et quelquefois manquent complètement. Enfin ces animaux sont tout-à-fait apodes , et leur squelette présente, comme chez les serpens, deux longues rangées de côtes ; mais ces os sont beaucoup trop courts pour entourer le tronc, et, d’un autre côté , on remarque dans le mode d’articulation des vertèbres et dans la disposition des mâchoires plusieurs caractères qui les rapprochent des derniers batraciens. Ces reptiles, qui établissent, comme on le voit, le passage entre les batraciens et les ophidiens , habitent les lieux sombres et humides , se creusent des trous en terre et paraissent se nour- rir de matières végétales aussi bien que de vers et de petits in- sectes. On les trouve dans l'Amérique du sud. Caractères. Forme uéra!e. FE à 5e 688 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. CLASSE DES POISSONS. La quatrième et dernière classe de lembranchement des animaux vertébrés comprend les poissons. Ces animaux , ainsi que chacun le sait, sont destinés à vivre sous l’eau, et celte circonstance a imprimé à toute leur organi- sation un cachet particulier ; mais les différences les plus importantes qu’ils présentent, lorsqu'on les compare aux autres vertébrés , consistent dans la conformation des appareils de la respiration et de la circulation. Ils n’ont jamais de poumons et respirent toujours par des branchies seulement. Leur cœur ne renferme que deux cavités et ne reçoit que du sang veineux, et ce liquide, après avoir subi le contact de l’oxigène, passe dans un vaisseau dorsal, où aucune nouvelle force motrice n’accélère sa course vers les diverses parties du corps.Leur cir- culation ne peut donc être aussi active que chez les animaux supérieurs et leur sang est froid comme celui des reptiles. Leur peau est nue et couverte d’écailles seulement ; ils n’ont pas de mamelles comme les mammifères et ils se reproduisentau moyen d'œufs ; enfin leurs membres ont la forme de nageoires. La forme extérieure des poissons varie; mais leur corps est en général tout d’une venue. Leur tête, aussi grosse que le tronc, n’en est pas séparée par un rétrécissement semblable au cou des vertébrés supérieurs, et leur queue , par sa grosseur à sa base , ne se distingue pas du reste du corps. Quelques-uns de ces animaux manquent tout-à-fait de nagevires; mais, chez presque tous, on voit un nombre considérable de ces organes placés les uns sur la ligne médiane du dos ou du ventre, et par conséquent impaires, les autres sur le côté et disposés par paires. Ces derniers représentent les quatre membres des autresanimaux vertébrés ; les membres antérieurs, qui correspondent au bras de l’homme et à l'aile de l’oiseau, sont fixés, de chaque côté du CLASSE DES POISSONS. 689 tronc, immédiatement derrière la tête, et sont appelés nageoires N Fig. 268. (1, pectorales. Les mem- d d' bres abdominaux(?), moins éloignés les uns des autres , OC- cupent en général la face inférieure du corps et peuvent être placés plus ou moins enavantouenarrière c a p vo b depuisledessousdela gorge jusqu’à l’origine de la queue: on les nomme nageoires ventrales.Les nageoires impaires occupent, comme nous l'avons déjà dit, la ligne médiane du corps et se distinguent en nageoires dorsales (d) , nageoires anales (a), nageoires caudales (c), suivant qu’elles sont placées sur le dos , sous la queue ou à son extré- mité. Du reste, les unes et les autres ont à-peu-près la même structure , et consistent presque toujours en un repli de la peau , soutenu par des rayons osseux ou cartilagineux, à-peu- près de la même manière que les ailes des chauve-souris et des dragons sont soutenues par les doigts ou par les côtes de ces animaux. On remarque aussi à la surface extérieure du corps &e grandes fentes placées , de chaque côté , immédiatement derrière la tête et servant à la sortie de l’eau qui a baigné les branchies (0): ce sont les ouvertures des ouïes. En général il ne s’en trouve qu’une de chaque côté, et leur bord antérieur est mobile et ressemble à un battant de volet. Enfin il règne , dans toute la longueur du corps , de chaque côté, une série de pores qui forment ce que les ichtyologistes nomment Z4 ligne latérale. La peau est quelquefois à-peu-près nue, mais presque toujours elle est couverte d’écailles. Quelquefois ces écailles ont la forme de grains rudes ; d’autres fois ce sont des tubercules très gros ou des plaques d’une épaisseur considérable ; mais, en général, elles prennent l’aspect de lamelles fort minces , se recouvrant comme des tuiles et enchâssées dans des replis du derme. On peut les comparer à nos ongles ; mais elles renferment beaucoup plus de sels calcaires. Quant aux couleurs dont ces animaux sont ornés , elles étonnent par leur variété et par leur éclat. Tantôt elles ne peuvent être comparées qu’à de l’or ou à lar- (x) Le rouget (mullus barbatus) pour montrer les diverses nageoires , ete. : — p nageoire pectorale,—vnageoire ventrale ,—d! première dorsale, —d? deuxième dorsale, — c caudale , — x anale , — o ouverture des ouies, — 2 barbillons de la mächoire inférieure. Tégumeus. Squelette. 690 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. gent le plus brillant ; tantôt ce sont les teintes les plus riches du vert, du bleu , du rouge ou du noir. La matière argentée , qui leur donne souvent un éclat métallique si beau , est sécré- tée par le derme et se compose d’une multitude de petites lames polies. Le squelette des poissons est ordinairement osseux; mais, chez plusieurs de ces animaux , il reste constamment à l’état fibro-cartilagineux ou cartilagineux , et il en est même où cette charpente offre encore moins de solidité et demeure absolument membraneuse. Sous ce rapport , ils établissent donc le passage entre les vertébrés et les invertébrés. Les os ne présentent jamais de canal médullaire , et le cartilage qui en fait la base n’est pas semblable à celui des mammifères et des oiseaux; car, lorsqu'on le fait bouillir dans l’eau , il ne donne pas de gélatine. Le squelette se compose de la tête , à laquelle est joint un appareil hyoïdien très développé et servant à la respiration ; du tronc et des membres. La structure de la tête est très compliquée: on y remarque d’abord une portion médiane, composée d’un grand nombre d’os articulés entre eux par des sutures et formant une espèce Fig. 269. (1) im t pro de carène immobile , à laquelle sont suspendus les os des mà- choires, des joues , etc. Cette portion médiane, dont la forme ordinaire est à-peu-près celle d’une pyramide à trois faces, (1) Tête osseuse du brochet: —c crâne ; — or orbite ; — n fosses nasales ; — im os intermaxillaire; — » os maxillaire supérieur; — £ espèce de cloison laté- rale, qui sépare la joue de la bouche et qui s’articule en avant, au vomer, par l’in- termédiaire des arcades palatines, dont on apercoit une portion au dessus de los maxillaire ; en arrière avec le crâne (c), en bas avec la mâchoire inférieure et en arrière avec le préopercule (p),qui, à son tour, porte l’opercule (6) ; — 10 l'es intermaxillaire, suivi d’un sous-operculaire. CLASSE DES POISSONS, 691 ayant son sommet dirigé en avant, présente en arrière la boîte cranienne (4}, où se loge l’appareil de louïe aussi bien que l’en- céphale. Sa partie moyenne est évidée pour former les cavités crhitaires (or), et en avant on y remarque des fossettes apparte- nant à l'appareil olfactif(») , et une espèce de gros bouton formé par l'os vomer et servant à porter la mächoire supérieure (fg.270, r). On y distingue les analogues de l’occipital, des temporaux, des sphénoïdes, des pariétaux, du frontal , d’un ethmoïde et d’un vo- mer ; mais la plupart de ces parties sont composées de plusieurs pièces , qui ne se soudent Jamais , comme cela arrive de bonne heure pour les mammifères et ies oiseaux. A l’extrémité antérieure de cette portion cranienne de la tête se trouve la mâchoire supérieure , qui y est quelquefois fixée d’une manière immobile , mais qui , en général , conserve une grande mobilité : on y distingue , de chaque côté, un os intermaxil- laire (im), placé près de la ligne médiane, et un os maxillaire (#), qui s’étend latéralement et qui est mobile sur le premier. Une chaine de petites pièces osseuses s’élend , de chaque côté de l'angle antérieur de la fosse orbitaire, à son angle posté- rieur, et complète ainsi le cercle orbitaire. Plus en dedans, on voit aussi de chaque côté une sorte de cloison verticale, qui est suspendue au crâne et qui sépare les orbites et les joues de la bouche. Elle est formée par les analogues des os palatins , ptéry- goïdiens , tympanique , etc., et s’articule avec le crâne par deux points (sur le vomer et sur les tempes). À sa partie inférieure elle donne attache à la mâchoire inférieure, et en arrière elle se prolonge de manière à constituer une sorte de couvercle mo- bile que protège l’appareil respiratoire et qui est appelé opercule. Trois pièces de chaque côté forment la màchoire inférieure , qui s'articule par une surface concaveavec l'appareil jugal, dont nous venons de parler. Enfin en dedans de ces cloisons latérales etau fond de la bouche se trouve une charpente très comyliquée dans sa structure, qui sert à l’insertion des branchies ou à les proté- ger, et qui parait formée par l’aualogue de l’hyoïde parvenu à un développement extrême (fg. 270). L’os de la langue se continue en arrière avec une série de pièces médianes, et s’articule de chaque côté, avec une branche latérale très longue et très grosse (b), qui, par son extrémité opposée , est comme suspendue à la face interne de la cloison latérale de la tête, dont il a déjà été ques- tion. Ces branches latérales , formées de plusieurs os, portent à leur bord inférieur une série de rayons aplatis et recourbés(r), qui concourent avec les epercules à compléter les parois des cavités branchiales et sont connus sous le nom de rayons bran- chiostèges. En arrière de ces branches, il part de la portion médianede l'appareil hyoïdien quatre paires d’arcs osseux (v), qui 692 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. se dirigent en dehors , puis se recourbent en haut et en dedans ; et vont se fixer à la base du cràne par l'intermédiaire de quelques petits os nommés pharyngiens superieurs(ph). Ces arceaux por- Fig. 270. (1) phars or Tv co ca ab À Tr. D L tent les branchies et sont appelés pour cette raison ares bran- chiaux. Enfin , en arrière de ceux de la dernière paire à l'entrée de l’æœsophage , se voient deux os pharyngiens inférieurs , dispo- sés ordinairement de manière à pouvoir s'appliquer contre les os pharyngiens supérieurs dont il vient d’être question. Telleest en général la structure compliquée de la tète osseuse des poissons. Quant à à la comparaison des diverses pièces dont elle se compose , avec les os de la tête des mammufères , nous ne [1) Fig. 250. Tête osseuse de la perche, dont on a enlevé, d’un côté, les mâchoires, la cloison jugale et l’opereule, pour montrer l’intérieur de la bouche, et l'appareil hyoïdien:—c crâne; —or orbite; — + vomer (armé de dents),— im mâchoire supérieure ,—dp dents implantées sur l’arcade palatine ; —7ni mächoire inférieure ,—Z os lingual ,—b branches latérales de l'appareil hyoïdien ,—s stylet servant à suspendre ces branches à la face interne des cloisons jugales, —rrayons branchiostèges , — a arceaux branchiaux, — ph os pharyngiens supérieurs, — ar surface articulaire de la cloison déjà mentionnée , — o à k ceinture osseuse supportant la nageoire pectorale (p) ,—0 et o? omoplate divisée en deux pièces ,— k humérus, — ab os de l’avant-bras , — ca os du carpe. — co os coracoïdien. CLASSE DES POISSONS. 693 nous y arrêterons pas; Car il règne encore à cet égard beaucoup d'incertitude. | La colonne vertébrale , qui fait suite à la tête, ne présente que deux portions distinctes , l'une dorsale , l’autre caudale ; car ici il n’y à ni cou, ni sacrum. Le corps des vertèbres a une forme particulière: il est creusé en avant et en arrière d’une cavité conique ; ces deux espaces vides se joignent quelquefois de manière à les transformer en un trou, et la double cavité co- nique résultant de la juxta-position des deux vertèbres voisines est remplie par une substance molle. L’anneau destiné au pas- sage de la moelle épinière est surmonté d’une apophyse épi- neuse , et de chaque côté on voit en général une apophyse transverse plus ou moins distincte , qui, au-dessus de la cavité abdominale, se porte en dehors, et s’articule d'ordinaire avec la côte correspondante, mais qui, dans la portion caudale de la colonne , se dirige en bas et forme souvent , avec celle du côté opposé un anneau , de la partie inférieure duquel nait une longue apophyse épineuse, semblable à celle qui est située à la face dorsale de la vertèbre. Les côtes manquent quelquefois ; d’autres fois ellesenceignent tout l’abdomen, et, chez un petit nombre de poissons, elles vien- nent se fixer à une série d'os impairs , que l’on doit considérer comme un sternum. Souvent elles portent un ou deux stylets , qui se dirigent en dehors et pénètrent dans les chairs. Il y a quel- quefois aussi des stylets semblables qui partent du corps des ver- tèbres, et c’est ainsi que, dans quelques genres , tel que celui des harengs , les arêtes des poissons deviennent très nombreuses. Enfin on trouve encore ,sur la ligne médiane du corps, un cer- tain nombre d'os, appelés interepineux (fig. 271, i),qui,en général, s'appuient contre le bout des apophyses épineuses des vertèbres, Fig. 271. etauis’articulent par Tr leur extrémité oppo- sée avec les rayons des nageoires média- nes (r). Ces rayons sont tantôt des os pointus, nommés at- guillons Ou epines, tantôt des tiges ossi- fiées à leur base seu- : lement , formées en- suite d’une multitude de petites articulations et souvent rami- fiées vers le bout. Ces derniers appendices sont appelés rayons mous ow articulés : ils forment toujours la nageoire caudale, et quelquefois il n’en existe pas d’autres. 694 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. Les nageoires latérales, qui représentent les membres, sont terminées par des rayons semblables à ceux des nageoires verti- cales et analogues aux doigts. A la nageoire pectorale on trouve, à la base de ces appendices , une série transversale de quatre à cinq petits os plats (ca), comparables aux os du carpe, qui , à leur tour, sont fixés à deux os plats (ab), qui semblent être le radius et le cubitus élargis. Cet appareil est porté sur une espèce de ceinture osseuse , située immédiatement derrière les ouïes et sur laquelle lopercule vient s'appliquer comme sur un cham- branle : il se compose d’une série de trois os, s'étendant depuis le crâne jusqu’à l’appareil hyoïdien , et porte en arrière un long stylet. La pièce principale qui entre dans sa composition est celle qui porte l’avant-bras et qu’on peut par conséquent comparer à l’humérus (4): elle se réunit inférieurement avec celle du côté opposé et avec un prolongement médian de l'appareil hyoïdien et tient au crâne par l’intermédiaire de deux os , que M. Cuvier considère comme les analogues de l’omoplate (0°); enfin le stylet, qui en part et se prolonge en arrière sur les côtés du corps, est d'ordinaire formé de deux pièces et peut étre comparé à un os coracoïdien (co). Le membre postérieur est moins compliqué ; les rayons de la nageoire ventrale ne sont portés que par un seul os , en général triangulaire , qui souvent vient s'attacher en avant à la sym- physe médiane de la ceinture osseuse du membre pectoral, et qui d’autres fois reste suspendu dans les chairs. Dans les poissons cartilagineux la disposition du squelette diffère de ce que nous venons de décrire. La tête surtout a une structure beaucoup plus simple, comme nous le verrons, en faisant l’histoire de ces animaux. Apparail Ce sont ies muscles destinés à fléchir latéralement la colonne musculaire. vertébrale et à mouvoir ainsi la queue, qui forment la ma- jeure partie de la masse du corps des poissons ; ce qui est en rapport avec leur mode de locomotion. Effectivement c’est en frappant latéralement l’eau par ces flexions alternatives du tronc et de la queue, que ces animaux impriment à leur corps presque toute la vitesse dont ils sont animés pendant la natation. Leurs nageoires verticales servent à augmenter l'étendue de cette espèce de rame , et en général les nageoires pectorales et ven- irales ont pour usage principal d’influer sur la direction de leur course et surtout de maintenir Panimal en équilibre. Vessienan. Une particularité de leur organisation, qui leur est d’un toire. grand secours dans la natation , est l’existence d’une espèce de poche remplie d’air et disposée de manière à pouvoir être com primée à volonté. Celte sessie natatoire, placée dans Pabdomen, sous l’épine dorsale , communique d'ordinaire avec læos- CLASSE DES POISSONS. 695 phage ou avec l'estomac par un canal à travers lequel Pair contenu dahs son intérieur peut s'échapper ; mais ce fluide ne parait pas y pénétrer par cette voie:il est le produit d’une sécrétion dont une portion des parois du réservoir lui-même , qui à une siructure glandulaire, est le siège. Par les mouve- mens des côtes, cette vessie est plus ou moins comprimée, et, suivant le volume qu’elle occupe, elle donne au corps du pois- son une pesanteur spécifique égale, supérieure ou inférieure à celle de l'eau , et le fait ainsi rester en équilibre , descendre ou monter dans ce liquide. On a remarqué qu’elle manque sou- vent et que généralement elle est très petite dans les espèces des- tinées à nager au fond des eaux ou même à s’enfouir dans la vase. Chez un petit nombre de poissons, les nageoires pectorales prennent un développement extrême et permettent à l'animal de se soutenir pendant quelques instans dans Pair, lorsqu'il s’élance hors de l’eau. Il en est aussi quelques-uns qui , en rampant ou par des sauts répétés , parviennent à avancer sur la terre. On en cite même qui grimpent sur les arbres ; mais ces exemples sont bien rares. La vie d’un poisson se passe presque entièrement à pourvoir à sa subsistance et à fuir ses ennemis; ses sens extérieurs ne paraissent lui donner que des impressions obtuses et ses facul- tés sont des plus bornées : on ne lui connaît aucune industrie, aucun instinct remarquable : aussi son cerveau est-il peu développé, et ses organes des sens bien imparfaits. La cavité du crâne est petite relativement à la masse du corps, et l’encéphale ne la remplit pas à beaucoup près. Entre ses parois et le cerveau , on trouve une masse spongieuse et grasse, d’un volume considérable , surtout chez les individus adultes. Les lobes qui composent l’encéphale sont placés à la file les uns des autres et représentent souvent une espèce de double chape- let. On y distingue un cervelet , des hémisphères cérébraux, des lobes optiques , des lobes olfactifs et , en arrière de toutes ces parties , des lobes appartenant à la moelle allongée. La nature des téçumens des poissons doit leur rendre le tact bien imparfait ; et, dénués, comme ils le sont, de membres pro- longés et surtout de doigts flexibles et propres à envelopper les objets , ce n’est qu’au moyen de leurs lèvres , que ces animaux peuvent exercer le sens du toucher. Les barbillons qu’on leur voit autour de la bouche paraissent servir à les avertir du contact des corps. Le goût est aussi à-peu-près nul; car leur langue , à peine mobile , n’est pas charnue, et ne reçoit que peu de nerfs , et les alimens ne séjournent jamais dans la bouche. L'appareil de lodorat est de structure plus compliquée, mais n’est pas disposé de facon à être traversé par Pair eu par 45 Ses, etc. Appareil de la digestion: 696 ZOOLOGEIE DESCRIPTIVE. l'eau servant à la respiration. Les losses nasales ne consistent qu’en deux cavités terminées en cul-de-sac, s’ouvrant en géné- ral au dehors , chacune par deux narines , et tapissées par une membrane pituitaire , plissée d’une manière très remarquable. L’oreille est presque toujours logée tout entière dans la cavité du crâne, sur les côtés du cerveau, et ne consiste guère qu’en un ves- tibule, surmonté de trois canaux semi-circulaires, auxquels les ondes sonores n'arrivent qu'après avoir mis en vibration les té- gumens communs et les os du crâne. En général on ne voit rien qui puisse être comparé à l'oreille externe , au tympan ou à la caisse. Enfin les yeux sont très grands et peu mobiles : ils n’ont pas de véritable paupières ni d'appareil lacrymal. La peau passe au devant de l’œil et se laisse traverser par la lumière. La cor- née est presque plane, la pupille irès large et peu ou point contractile ; enfin le cristallin est sphérique. Les poissons sont très voraces : 1l n’en est qu’un très petit nombre qui vivent principalement de matières végétales, et, en général, ils avalent sans choix tous les petits animaux qui sont à leur portée. Quelques espèces sont dépourvues dé dents ; mais, chez la plupart, il en existe , et on en trouve non- seulement aux deux mâchoires, mais au palais , implantées sur le vomer ou sur les os palatins,, à la langue, sur le bordintérieur des arcs branchiaux et enfin jusque dans larrière-bouche , sur les os pharyngiens qui entourent l’entrée de l’œsophage. En général elles ont la forme de cônes ou de crochets : elles n’ont jamais de racines , mais se soudent avec los qui les porte : elles tombent néanmoins, probablement par un mécanisme analogue à celui de la chute du bois des cerfs et sont remplacées par de nouvelles dents, qui naissent tantôt dessous, tantôt à côté des anciennes. Les dents dont les mâchoires sont armées ne servent en général qu’à retenir ou à briser la proie ; celles situées au fond de la bouche sont rarement disposées de manière à la broyer. La bouche n’est entourée d’aucune glande salivaire. L’æœso- phage est court; l’estomac et les intestins varient pour la forme etles dimensions. Le foie (/) estgénéralement grand et d’un tissu mou ; la position et la grandeur de la vésicule du fiel (vf)varient ; presque toujours le pancréas est remplacé par des cæcums d’un tissu particulier, placés autour du pylore ; enfin la position de l'anus (a)varie beaucoup; quelquelois ilse trouve sous la gorge ; d’autres fois à la base de la queue. Les reins (r) sont extrêmement volumineux et s'étendent des deux côtés de la colonne verté- brale dans toute la longueur de Pabdomen. Leurs conduits excré- teurs aboutissent à une espèce de vessie, dont l’ouvertiure (x) externe est placée immédiatement derrière l'anus et lorifice des organes reproducteurs. re 697 LASSE DES * 1 { La (1) Viscères du brochet : — / largue,— n narines,— cv cerveau, e estomac, —i intestin grèle , — l'intestin, — ra rate, — 0 ovaires remplis d'œnfs,— va vessie aérienne S S E ms) ln. Ce ne F nn mm mm mm mm — qe em RE - | ‘3 me ” [ 0 ni ch dl pa = AL 9 è “ À a 7 — b branchies, —e cœur, — ap artère pulmonaire, — d diaphragme, — gt gros intestin,— « anus, —f foie, — wf vésicule du fiel ;— cb conduit extérieur de la bile s’ouvrant dans ou natatoire, — rreins ,—# vessie ,— 4 urètre. LE Sang. Appareil de la circuiation. Respiration. 698 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. La digestion parait se faire très rapidement , et le chyle est absorbé par denombreux vaisseaux lymphatiques, qui aboutis- sent par plusieurs troncs dans le système veineux, près du cœur. Le sang des poissons, comme nous l'avons déjà dit, est rouge , et les globules ont une forme elliptique et des dimen- sions considérables. Le cœur (c) est placé sous la gorge, dans une cavité séparée de l'abdomen par une espèce de diaphragme (4) et protégée par les os pharyngiens en dessus , les ares branchiaux sur les côtés et en général par la ceinture humérale en arrière. Il se compose d’une oreillette , qui reçoit le sang veineux rassemblé dans un vasie sinus situé auprès , et d’un ventricule placé en dessous et donnant naissance , par son extrémité antérieure , à une artère pulmonaire (ap) , dont la base est renflée et constitue un bulbe contractile. Ce vaisseau se divise bientôten brancheslatérales, qui se distribuent aux branchies , et le sang , après avoir traversé ces organes , remonte vers la tête par un autre vaisseau qui longe également le bord des arcs branchiaux. Là ces canaux envoient quelques branches aux parties voisines et se réunissent pour former une grande artère dorsale , laquelle se dirige en arrière, au dessous de la colonne vertébrale et donne des rameaux à toutes les autres parties du corps. Enfin tout le sang veineux ne se rend pas directement dans le sinus que nous avons déjà men- tionné; celui des intestins , et de quelques autres parties , avant que de retourner au cœur, se répand par la veine-porte dans le foie. On voit donc que le sang, en parcourant le cercle circula- toire, traverse en entier l’appareil de la respiration comme chez les mammifères et les oiseaux , mais ne passe qu’une seule fois dans le cœur, ce qui doit rendre sa marche plus lente. Le cœur lui-même correspond par ses fonctions à la moitié droite du même organe chez les vertébrés supérieurs. La respiration se fait au moyen de l'air dissous dans l’eau et a lieu à la surface d’une multitude de lamelles saillantes et très vasculaires, fixées au bord externe des arcs branchiaux, dont nous avons déjà indiqué la position. En général on compie, de chaque côté, quatre branchies , composées chacune de deux rangées de lamelles allongées. Dans la plupart des poissons car- tilagineux , il y en a cinq ,et, dans la lamproiïe on en trouve sept. Chez presque tous les poissons osseux , ces lamelles sont simples et fixées par la base seulement ; chez un petit nombre, elles sont au contraire ramifiées et en forme de panaches ; enfin, chez la plupart des poissons cartilagineux , elles sont fixées à la peau par leur bord externe aussi bien qu'aux ares branchiaux par leur bord intérieur. CLASSE DES POISSONS. 699 L'eau nécessaire à la respiration entre dans la bouche , et, par un mouvement de déglutition, passe par les fentes que les arcs branchiaux laissent entre eux, etarrive de la sorteaux branchies, dont elle baigne la surface, puis elle s'échappe au dehors par les ouvertures des ouies. On voit, en effet, l'animal ouvrir la bouche et soulever son opercule alternativement. Chez les poissons dont les branchies sont libres à leur bord extérieur, il suffit d’une seule de ces ouvertures de chaque côté; mais, lorsque les branchies sont fixes , il faut, pour la sortie de l’eau, autant d'ouvertures qu’il y a d'espaces interbranchiaux. On peut par conséquent connaître la disposition de l’appareiïi respiratoire par la seule inspection de ses ouvertures extérieures. Les poissons ne consomment qu’une quantité assez faible d’oxi- gène, quelques-uns cependant ne se contentent pas de celle qui est dissoute dans l’eau, et viennent de temps en temps à la surface respirer l'air. Il en est méme qui en avalent et qui convertissent l’oxigène en acide carbonique , en le faisant passer au travers de leur intestin. Lorsque les poissons demeurent hors de l'eau , ils périssent en général promptement par asphyxie, non pas que l’oxigène leur manque , mais parce que , les lamelles branchiales n'étant plus soutenues par l’eau , s’affaissent et ne se laissent pas traverser aussi facilement par le sang, et parce que ces organes, en se desséchant , deviennent impropres à remplir leurs fonc- tions : aussi les poissons , qui périssent le plus promptement par exposition à l’air ont-ils les ouies très fendues , ce qui facilite l’évaporation à la surface des branchies, tandis que ceux qui résistent le mieux ont ces ouvertures très étroites ou possèdent même quelque réceptacle , où ils peuveni conserver de l’eau pour humecter ces organes. Ainsi que nous l’avons déjà dit, les poissons ne produisent presque pas de chaleur ; mais quelques-uns d’entre eux ont la singulière faculté de produire de l'électricité et de donner ainsi des commotions très fortes aux animaux qui les touchent. La torpille , le silure et une espèce de gymnote sont dans ce cas , et, chose remarquable, l'organe électrique présente une conforma- tion toute différente chez chacun d’eux. Nous la ferons connaître en traitani de ces espèces. Les ovaires sont en général très grands et d’une structure fort simple : ce sont des sacs membraneux, dont les parois con- tiennent les œufs dans leur épaisseur jusqu’au moment où ceux- C1 s’échappent en déchirant leur enveloppe ; ces sacs se réunis- sent d'ordinaire dans un canal commun ayant son ouver- ture entre Panus et l’orifice urinaire. La disposition des parties correspondantes chez le mâle est à-peu-près la même. Le nombre des œufs est quelquefois immense : il peut s’élever, E'cctricité animale. Reproduc-. tion. labitude. 700 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. pour une seule ponte , à des centaines de mille. En général, ils n’ont qu'une enveloppe mucilagineuse et sont fécondés après la ponte. Quelques poissons sont au contraire ovo-vivipares ; mais, quelle que soit la manière dont les jeunes poissons sont amenés à la vie, ils sont, du moment de leur naissance, abandonnés complètement à eux-mêmes, et, dans le premier âge, il en périt beaucoup. ’est au développement simultané d’un nombre incalculable d'œufs déposés dans un même lieu et à instinct qui pousse divers poissons à se suivre entre eux , que l’on doit attribuer la réunion de certaines espèces en légions immenses et serrées, appelées par les pêcheurs des bancs de poissons. En effet, on ne peut guère appeler ces réunions des sociétés ; les individus dont elles se composent ne s’aident pas entre eux ; les mêmes besoins à satisfaire les retiennent dans la même localité ou les en éloi- gnent, et, si on les voit quelquefois suivre l’un d’entre eux comme un guide , c’est probablement par suite d’une tendance à l’imi- tation qui accompagne toujours les premières lueurs du rai- sonnement. (1) Quoi qu’il en soit, ces animaux , ainsi réunis en troupes, font souvent de longs voyages , tantôt pour gagner la mer, tantôt pour remonter les rivières ou pour changer de parages.Certains poissons mènent une vie presque sédentaire et restent toujours dans la localité qui les a vus naïtre; d’autres sont toujours errans , et un grand nombre de ces animaux font périodique- (t) On s’étonnera peut-être de nous entendre parler du raisonnement chez un poisson, animal dont la stupidité est devenue proverbiale; mais, si l’on étudie les mœurs de ces êtres dans les bassins de nos pares , on verra que, lorsqu'ils nagent tranquillement sans but bien déterminé, ils passent les uns a côté des autres, sans qu’ils paraissent faire attention aux mouvemeus de leurs compagnons ; mais , si l’un d’eux , apercevant tout-à-coup quelque appät, hâte sa course et nage avec vitesse dans une direction déterminée, on voit souvent que les autres poissons, méme ceux qui sont placés de manière à ne pas aperce- voir l'objet qui l’attire , se mettent aussitôt à le suivre en foule pour profiter de sa découverte. Or, cet instinct d’imitation ressemble bien à un raisonnement simple , il est vrai, mais suivi. Ne peut-on pas supposer que ces ADiMAUX attribuent la course rapide de leur compagnon à quelque circonstance de na- ture à les intéresser aussi, à la découverte de quelque danger qu'il veut fuir, ou de quelque appât qu’il court dévorer, et que c’est pour cela, qu'ils se pré- cipitent aussitôt à sa suite? Du reste n’en est-il pas ainsi partout, même parmi les hommes, et l’instinct d'imitation, qui produit tant de bonnes et de mauvaises actions , n'est-il pas une suite de cette tendance à profiter des résultats des observations ou du jugement d'autrui, et à attribuer aux actions de ceux qui Paraissent mus par une impulsion puissante , un but que l’on serait également desireux d’atteindre ? CLASSE DES POISSONS. 701 ment des voyages plus ou moins longs. A l’époque du froid, ils se rapprochent ordinairement des côtes ou entrent dans les rivières et font quelquefois de la sorte un trajet extrêmement long. Chaque année , vers la même époque, des bancs de pois- sons voyageurs arrivent dns les mêmes parages , et l’on croit généralement que plusieurs de ces espèces émigrent réguliè- rement du nord vers le sud et du sud vers le nord, en sui- vant une route déterminée ; mais peut-être serait-il plus exact de croire que, lorsqu'ils disparaissent du littoral, ils se re- tirent seulement dans les grandes profondeurs de la mer. En faisant l’histoire de la morue, du hareng , du maquereau , du saumon , etc., nous aurons l’occasion de revenir sur ces voyages périodiques. Les poissons se divisent, d’après leur habitation , en marins et en fluviatiles : il en est aussi qui fréquentent alternativement les eaux douces et salées, et la nature de ce liquide parait exercer sur eux moins d'influence qu’on ne le croit généralement ; car on est parvenu à élever dans des réservoirs d’eau douce quelques poissons essentiellement marins. Le nombre de ces animaux est immense, et, comme ils four- nissent à l’homme un aliment agréable et sain , leur pêche est une branche d'industrie importante chez les peuples les plus sauvages comme chez les nations les plus civilisées. Les Romains, qui, après la perte de leur liberté, déployèrent pour leur table un luxe si effréné , ne se bornaient pas à expédier dans les mers voisines des bâtimens de pêche et à recevoir des Ioniens , inventeurs des barques à réservoir, des poissons vi- vans ; afin de mieux assurer leur approvisionnement , les plus riches citoyens firent creuser d'immenses viviers, remplis d’eau de mer, dans lesquels on déposait les poissons les plus délicats des mers de la Sicile et même des côtes de la Grèce et de l'Egypte. Le premier qui construisit un de ces immenses dépôts fut Lucrus Murena , ainsi nommé , à cause du soin qu’il prenait des murènes ou anguilles: il eut de nombreux imitateurs et fut même surpassé dans ses folies par Lucullus, qui fit percer une montagne près de Naples, pour introduire l’eau de la mer dans ses bassins et creusa , dans les rochers qui les bordent , des ca- vernes destinées à fournir à ses poissons, pendant les chaleurs de l'été, une fraicheur délicieuse. D’autres grands personnages de l’ancienne capitale du monde, mettaient leur gloire à posséder des poissons assez privés pour se laisser toucher ; on assure que Crassus se montra plus affligé de la perte d’une de ses anguilles, qu’il ne l'avait été de la mort deses trois enfans, et pour donner une idée du goùt désordonné de ces Romains dégénérés pour les poissons de toute espèce , nous citerons un souper donné à Péche. Classifica= tion 202 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. l’empereur Othon par son frère , repas dans lequel on avait réuni deux mille plats äe poissons rares. Les temps modernes m'ont pas été témoins de folies sem- blables; mais la pêche n’en a pas moins été, pour plusieurs peuples maritimes , une source de grandes richesses. À une époque, qui n’est pas bien éloignée de la nôtre, cette branche d'industrie occupait un cinquième de la population totale de la Hollande , et, pour la pêche du hareng seulement , ce pays couvrait de ses bâtimens les mers du nord. En Angleterre, elle fait subsister aussi un nombre considérable de bons et hardis matelots, et même en France , où elle a moins d'importance, on compte de trente à quarante mille pêcheurs, dont près du üers s’aventurent jusque sur les côtes de l’Islande et de Terre- Neuve. La classe immense des poissons se divise naturellement en deux séries , les poissons osseux et les poissons cartilagineux, qui diffèrent entre eux non-seulement par la nature de leur squelette, mais par un grand nombre d’autres caractères. Des modifications dans la structure des branchies, dans la disposi- tion de la bouche et dans la nature des rayons qui soutiennent la nageoire dorsale , ainsi que dans la position des nageoires ventrales , fournissent aux naturalistes les bases de la division de l’un et l’autre de ces groupes en ordres , comme on peut le voir par le tableau suivant. co © LL sé NS, CLASSE DES POISSO g: k ‘aprqoutmf “(sax “saneped SINOLSOIIA) 00109 un n0 S09pU0S SATOHOYIN sonpouviq Ÿ suorSKiodoapuoy ) ‘sa | S0I aed spoujdemou sum | / ‘ LA . \ Q Î / ; AU BATLEN soan)i9AnNO sanoisnd ‘spioq -odns 91109 ÇUI vI 2P s0 *SNHIOVIAG "HTIQOUL DANOHPJUT 911049Y IN xnop sanot ad saJuoxH {pe SO UE -xnoui8vjuavo 0oy91onbg ‘SNHIOZXVALIOUGNOHI NO XAHNIOVIILUVO SNOSSIO = “STUNT cu À ropnoodo > SN OX MI LIOUANOM : i s RTS d donanloTUnLs onbeyo anod oopuo qnos un ‘ou191X2 PA0 anot ad s94qi] 5910 UE ŒIVYS .c a æ es ‘SHUHLVNOOLONT , ‘ouya) nv ooug18u9 aanorodns 9110 EN “a39çdmoo a oamonodns À = 2HOUO VIN = *FTHONVUAOHAO"T -sopuna soddnor u9 629504 s1p sa1qouEIg «xnoss0 À © opoponbs S _ *SHGOÏV- TOOV'IVIN *S0]PATU9A sonoeguu 9Pp JUI04 *XNAS -$0 SNOSS1O4 (su018 \ "2prqout | “NTITONVUTNS “opnedo,r op poied + -Aiprdoonprni ) ‘SI oanonodns |'HIUAS o1! | SNTIOAUALIOIV'IVIN -dey v sonpuodens -L10,904 no $sojes OHOUOYIN 1 CR) LRU LLEU -10p S011099E0 $0p soxtoofuu 60( aormoad of sroyonb ‘souñrod *XNAVNINOGHV | ‘aomopqr] -jonb o1dooxo “nom |9pouroy no SNHIOXUALIOD V'IVIN Lop oaquae uo sogmrs guofui 659[ SNOI, SOTO Ua . *2[F1109 A oxooseu onbero v — ATIOAMALIONELNVOY | UN AUOUOAPUTPAIO 79 “OTUUE ono9en er e xmosso snoÛet sonb 3 [BUTP I ! 1 -joub ‘ounoroque 9[es40p oat00BUU U[ E XN9880 suoÂUE S0( / _ , ‘SAYGaUO 704 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE,. PREMIÈRE SÉRIE. — POISSONS OSSEUX. 1° ORDRE DES ACANTHOPTÉRYGIENS. L'ordre des acanthoptérygiens se distingue facilement par la disposition normale des branchies et de la mâchoire supérieure et par les nageoires épineuses. Les trois quarts des poissons coanus se rapportent à ce groupe ; mais ces animaux présentent entre eux des rapports si multipliés, que , malgré les différences nombreuses qu’on leur remarque , on ne peut les séparer autre- Fig. 273. ment qu’en plusieurs familles naturelles , et qu'on est obligé de les réunir tous dans un même ordre. Les premiersrayons du dos sont toujour; osseux et spiniformes ( fig. 275). Lorsqu'il existe deux nageoires dorsales , ces rayons épineux soutiennent seuls la première; et, lorsqu'il n’y a qu’un seul de ces organes, ils en souliennent au moins la portion antérieure; enfin on en trouve quelquefois d’entièrement libres. En général il y a aussi un rayon osseux à chaque nageoire ventrale , et souvent l’anale a aussi quelques épines pour premiers rayons. On range dans cette grande division des poissons ordinaires seize familles naturelles, désignées sous le nom de Percoïdes, Mulles, Joues cuirassees , Scienoïdes, Sparoïdes, Menides , Squam-— mipennes , Scomberoïdss, Tæœntioïdes , Theutyes, Pharyngiens laby- rinthiformes , Mugiloïdes , Gobioïdes , Lophioïdes Où peclorales pediculees, Labroïdes et Bouches en flute. Famille des LA FAMILLE DES PERCOÏDES, qui à pour iype la perche com- percoïdes. mune,se compose de poissons dont le corps est oblong, plus ou ORDRE DES POISSONS ACANTHOPTÉRYGIENS. 705 moins comprimé et couvert d’écailles , généralement dures ; F?g. 274. dont la bouche est grande et armée de dents sur le vomeret presquetoujours sur les os pala- tins ainsi que sur les mâchoi- res, et, au devant du gosier, sur les arcs branchiaux et sur les os pharyngiens ; dont les opercules sont dentelés ou épineux sur le bord d’un ou de plusieurs des os qui entrent dans leur composi- tion (#g. 274);enfin dont les na- geoires sont toujours au nom bre de sept ou de huit. Ils n’ont pas de barbillons au menton ; en général , ils sont ornés de belles couleurs, et leur chair est d’un goût agréable. La plupart des percoïdes ont les nageoires ventrales attachées sous les pectorales : elles forment la tribu des PERCOÏDES THORA- CIQUES , qui se subdivise en deux groupes caractérisés par le nombre des rayons mous de la nageoire ventrale , qui est de cinq chez les uns et sept chez les autres. Parmi les premiers, on distingue d’abord celles qui ont sept rayons branchiostèges , deux nageoires dorsales et toutes les dents en velours : ce sont les perckhes, les bars , etc. | Les PERCHES (perca) se distinguent par leur langue lisse et par les épines , et dentelures de leurs opercules : elles habitent les eaux douces. La perche commune, Yerdâtre, avec des bandes ver- ticales, noirâtres , et les nageoires ventrales et anales rouges, est répandue dans toute l'Europe ainsi que dans une grande partie de lAsie , et vit dans les lacs , les rivières et les ruisseaux d’eau vive : elle- évite l’eau salée ou même saumätre et ne se tient d'ordinaire qu’à une profondeur de deux ou irois pieds. Ces poissons ne nagent pas en grandes. troupes et se nourrissent de vers , d’insectes et de petits poissons : ils fraient au mois d'avril , et leurs œufs sont réunis par uue matière visqueuse en longs cordons qu’entrelacent les roseaux. On ne sait rien sur la durée de la croissance ou de la vie des perches. En général elles ne dépassent guère quinze à dix-huit pouces de long et attei- gnent rarement deux pieds. Les BARS (Labrar) sont des poissons de mer qui ont la langue Percoïdes thoraciques. Perches. Pars. 706 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. couverte d’aspérités et les opercules conformés d’unemanière un peu différente (/g. 274) , mais qui, du reste, ressemblent beau- coup aux perches. Le bars commun abonde sur nos côtes et porte le nom vulgaire de Loup et de Loubine : C’est un grand et excellent poisson, de couleur argentée. Lorsquw’il est jeune, il est ordinai- rement tacheté de brun. Aprons, etc. Les APRONS (aspro), dont une espèce habite le Rhône, et les SANDRES (/wcio-perca), appelés vulgairement hrochets-perches, appartiennent aussi à cette division. D’autres percoïdes thoraciques, voisines des précédentes, n’ont qu'une seule nageoïire dorsale, telles sont les Serrans ou perches de mer, les Merous, les Germilles Ou perches goujonnieres , etc. Les Percoïdes thoraciques, ayant, comme les précédentes, cinq rayons mous aux nageoires ventrales , mais ayant moins de sept rayons branchiostèges , forment plusieurs genres , qui ne pré- sentent pas assez d'intérêt pour nous arrêter ici. Il en est de même de celles qui ont un plus grand nombre, soit de rayons ventraux , soit de rayons branchiostèges. p ‘de =: . Percoïdes Les PERCOÏDES JUGULAIRES, Cest-à-dire celles dont les na- jugulaires. É L 1e geoires pectorales sont placées en avant des pectorales sous la gorge , sont moins nombreuses. Vives. Les Vives (trachinus) appartiennent à cette tribu et se distin- guent par ieur tête comprimée et par laiguillon de leur opercule. Ce sont des poissons allongés , à museau court, qui ont lhabi- tude de s’enfoncer dans le sable et qui sont redoutés des pê- cheurs à cause des piqüres profondes, qu’ils font avec les épines fortes et aiguës de leur première nageoire dorsale. Plusieurs es- pèces habitent nos côtes. x Uranosco- Les URANOSCOPES , ainsi nommés à cause de la position de ne leurs yeux , qui sont dirigés vers le ciel, sont voisins des précé- dens : on en trouve dans la Méditerranée. Percoïdes 116$ PERCOÏDES ABDOMINALES, dont les nageoires ventrales sont abdominales. placées plus en arrière que les pectorales , s’éloignent davan- tage des perches , qui forment le type de cette famille ; mais elles n’offrent rien de bien intéressant. ORDRE DES POISSONS ACANTHOPTÉRYGIENS. 707 La petite RAMILLE DES MULLES est voisine de la précédente , ne des dont elle se distingue facilement par les deux longs barbillons *” di suspendus sous la symphise de la mâchoire inférieure (voyez fig. 268 , page 689):elle se compose de poissons, dont la tête, aussi bien que le corps , est garnie d’écailles grandes et peu adhérentes , dont les deux nageoires dorsales sont très séparées, et dont la couleur est presque toujours d’un rouge plus ou moins vif. : Les MULLES PROPREMENT DITS (#ullus) sont propres aux mers Mules pro- d'Europe et sont appelés vulgairement rougets-barbets. Ils n’ont prementdits. que trois rayons branchiostèges ; leur opercule est dépourvu d’épines , et ils manquent de vessie natatoire. Leur chair est dé- licieuse et. ce sont des poissons célèbres par le plaisir puéril que les Romains prenaient à voir les changemens de couleur qu’ils présentent en mourant. Pour mieux jouir de ce spectacle, et pour être bien certains d’avoir ces poissons le plus frais possible , ils les faisaient venir dans de petites rigoles jusque sous les tables où l’on mangeait , et les faisaient mourir dans des vases de verre , que les convives se passaient de main en main. Cette passion pour les mulles fut portée au point de faire payer, à des prix exorbitans , ceux qui dépassaient la taille ordinaire. Sé- nèque raconte l’histoire d’un mulle, pesant quatre livres et de- mie , qui fut présenté à Tibère , et que ce prince, ridiculement économe, fit vendre au marché ; Apicius et Octavius se le dispu- tèrent , et ce dernier l’emporta au prix de 5,000 sesterces , qui, dans ces temps-là, faisaient 974 fr. Pline parle d’un de ces pois- sons , qui , du temps de Caligula, fut acheté par Asinus Celer, pour 8,000 sesterces (1,558 fr.) , et Suétone nous apprend que, sous Tibère , trois mulles d’une grande taille furent payés 30,000 sesterces (5,844 fr.) Nous possédons dans nos mers deux espèces de ces mulles:la plus estimée est le rouget proprement dit (fig. 263 , pag. 689), quiest d’un rouge vif; il habite en grand nombre la Méditerranée et se montre, mais rarement , jusque dans la Manche. Le surmulet est moins délicatet de plus grande taille. On le distingue aussi du pré- cédent par le jaune , qui forme de chaque côté des raies longitu- dinales, et par son profil moins vertical: il est également plus commun dans l'Océan et se voit quelquefois sur les marchés de Paris. La FAMILLE DES JOUES CUIRASSÉES est remarquable par la Famille des manière singulière dont leur tête est hérissée et cuirassée. Les os joues cuiras- sous-orbitaires , au lieu d’encadrer seulement les yeux en des- Trigies. Dactylog- tères, 708 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. sous, s'étendent sur la joue et vont s’articuler en arrière avec le premier os de lopercule. C’est chez les TRIGLES (érigla) et quelques genres voisins que ce caractère est le plus marqué. La tête de ces poissons est cuirassée par des os très durs et a une forme presque cubique. Plusieurs font entendre, quand on les prend , des sons qui leur ont valu le nom vulgaire de grondins. De même que la plupart des Joues- cuirassées , ils n’ont pas de rayons épineux libres en avant de la nageoire dorsale , mais ils en présentent trois sous la pectorale ; leur dos porte deux nageoires dorsales ; leur corps est écailleux etleur bouche garnie de dents en velours sur les mächoires et au devant du vomer. Une espèce de trigle , le grondin rouge, est très commun sur nes côtes et se vend à bas prix sur le marché de Paris , où on le connait sous le nom de rouget. Le perlon esi une autre espèce du même genre , qui a une plus grande taille et qui est également très commune. Les DACTYLOPTÈRES , célèbres sous les noms de poissons vo- Lans, À'hirondelles de mer , etc., ressemblent beaucoup aux trigles, mais s’en distinguent par leurs grandes nageoires Fig. 275. DACTYLOPTÈRE DE LA MÉDITERRANÉE. pectorales dont ils se servent comme d’ailes pour se soutenir dans l'air, lorsqu'ils s’élancent hors de l’eau, dans l'espoir d'échapper à leurs ennemis. Les navigateurs les rencontrent dans la Méditerranée , mais surtout dans les mers tropicales : ils nagent par légions nombreuses , que poursuivent avec acharne- ment les bonites, les daurades et d’autres poissons voraces , et lorsque , pour échapper à ce danger, ils s'élèvent dans les airs, un autre, non moins grand , les y attend ; car une foule d’oi- seaux de haute mer, tels que des frégates et des phaétons, les poursuivent aussi et saisissent ce moment pour s'en emparer. Du resle, ces poissons ne peuvent faire de la sorte un bien long tra- ORDRE DES POISSONS ACANTHOPTÉRYGIENS. 709 jet; car le dessèchement de la membrane qui unit les rayons de leurs nageoïres pectorales, les force bientôt à retomber dans la mer. Les CHABOTS (cottus) sont voisins des trigles , mais ont la tête déprimée et diversement armée d’épines ou de tubercules. L’es- pèce la plus commune est le ckabot de rivière ; d’autres habitent la mer. Les SCORPÈNES ont a contraire la tête comprimée latéra- lement etne portent sur le des qu’une seule nageoire. Leur peau est en général molle et spongieuse , leur tête grosse et épineuse, et les lambeaux cutanés qui pendent de diverses parties de leur corps , leur donnent un air hideux et dégoûtant; les piqüres de leurs épines sont en même temps redoutables ; aussi les pê- cheurs leur prodiguent-ils des noms odieux: sur nos côtes, on les appelle des diables de mer, des crapauds de mer, des scor- pions de mer. La Méditerranée en nourrit deux espèces. 3 Enfin nous citerons encore, parmi les joues cuirassées , les ÉPINOCHES (gas{erosteus), qui n’ont la tête ni tuberculeuse, ni épi- neuse comme les précédens et se distinguent aussi par les épines libres, qui leur tienneni lieu de première na- geoire dorsale. Ce sont les plus petits de nos poissons d’eau douce et à-peu- ) près les plus Fig. 276. ÉPINOCHE. communs. Il n’est pas de ruisseau, pas de mare où l'on n’en voie, ou qui même n’en fourmillent à certaines époques; et dans diverses parties de PAngleterre et du nord, ils paraissent quelquefois en nombre si prodigieux , qu’on les y emploie à nourrir les cochons et à fumer les terres. Une espèce de ce genre, le gastre, est marine et se trouve sur nos côtes. La FAMILLE DES SCIÉNOÏDES a de grands rapports avec celle des Chabots. Scorpènes. Epiroches, Famille des. percoïdes, mais elles’endistingue par l'absence de denis au vomer sciénoïdes, 510 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. et aux palatins. En général les os du crâne et de la face sont caverneux et rendent le museau plus ou moins bombé. Presque tous les poissons de ce groupe sont bons à manger, et plusieurs sont même d’un goùt exquis. C’est à cette famille qu'appartient : une espèce de SCIÈNE ou maigre, qui habite la Méditerranée et l'Océan et qui était autrefois très estimé; l’OMBRINE, qui se trouve dans les mêmes parages , et qui est également un bon et grand poisson ; enfin les PAGONIAS OU TAMBOURS , qui habitent les mers d'Amérique et qui sont remarquables par le bruit qu’ils font entendre et que l’on compare à celui de grosses cloches ou de plusieurs tambours. Famille des La FAMILLE DES SPAROÏDES n’a pas le museau bombé comme la sparcides. précédente ni l’opercule épineux (/#g. 277) ; mais le palais’est en- core dénué de denis et le corps couvert d’écailles plus ou moins grandes ; enfin la bouche n’est pas protractile. Dans une pre- mière tribu de cette famille (les spares), On remar- que , de chaque côté des mâchoi- res, des dents mo- laires, rondes, en forme de pavés fig. 278); quel- Sargues. quefois il existe aussi en avant des mächoires des incisives tran- chantes, presque semblables à'celles de homme (c’est le cas pour les SARGUES (fig. 277 et 278) , dont quelques espèces vivent près Fig. 278. des côtes de la Méditerranée); d’autres fois | Daurades. on trouve en avant seulement quelques | dents coniques ou émoussées. Les DAURADES (chrysophris) se reconnaissent à ce dernier | caractère et à l'existence d’au moins trois rangées de molaires à la mâchoire supérieu- re. La daurade vulgaire est 1rès commune sur les côtes de la Bretagne ainsi que dans la Méditerranée. Son corps est ovalaire et sa bouche est garnie de quatre rangées de molaires en haut et de cinq en bas. Son nom lui vient de sa couleur dorée. Fig. 277. SARGUE ORDINAIRE. Pagres. Les paGres et les PAGELS, dont on trouve quelques espèces ORDRE DES POISSONS ACANTHOPTÉRYGIENS. 711 dans la Méditerranée , sont voisins des daurades ; mais les pa- gels ont un museau beaucoup plus allongé, ce qui leur donne une physionomie différente. Dans une seconde tribu, qui a pour type les DENTÉS de la Dentés. Méditerranée , il existe, sur les côtés des mâchoires , des dents coniques , dont quelques-unes des antérieures s’allongent en grands crochets. Une troisième tribu de cette famille est caractérisée par des Canthères. dents en velours ou en cardes serrées tout autour des mà- choires. On y range les cANTHÈRES , dont une espèce fort commune dans la Méditerranée , est nommée cantena par les Marseillais et dont une autre , qui se trouve dans la Manche, a été appelée breme de mer. Enfin une quatrième tribu diffère des précédentes par lPexis- Bogues,etc. tence d’une rangée extérieure de dents tranchantes et comprend les BOGUES et les OBLADES , genres dont on trouve des espèces dans la Méditerranée. La petite FAMILLE DES MÉNIDES se compose de poissons qui Famille des Fig. 279. (1) Fig. 280. ressemblent beaucoup ménides. aux spares , mais qui sen distinguent par leur bouche , qui est très protractile , et se transforme à la volonté de animal en une sorte de tube: ce sont les MEx- DOLES(mæœna), les pICA- RELS (smarts),etc., dont plusieurs espèces habi- tent la Méditerranée. La FAMILLE DES SQUAMMIPENXES se reconnait à ce que la partie Famille des molle et souvent aussi la partie épineuse de leurs nageoires dor- Squammipen- DES, (1). Fig. 279. Tête d’une mandole, la bouche étant dans une p’sition ordinaire, Fig. 280. La même , la mâchoire supérieure étant ayancée. 46 712 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. sale et anale sont recouvertes par des écailles et difficiles à dis- tinguer de la masse du corps, qui est comprimé et également écailleux. Quelques sciénoïdes ont aussi les nageoires comme encroùtées d’écailles: mais ils n’ont jamais les dents en forme de soies flexibles comme chez la plupart des squammipennes , et leur museau renflé fournit souvent aussi un caractère pour les faire distinguer. Chætodons, Les squammipennes , dont les mächoires sont garnies de plu- sieurs rangées de dents semblables , par leur conformation et leur disposition , aux poils d’une brosse , ont éié réunis sous le nom de CHÆTODO»NS. Leur bouche est très petite et leurs na- geoires dorsale et anale tellement garnies d’écailles , qu’il est difficile de les distinguer du corps: ils sont très nombreux dans les mers des pays chauds et fort remarquables par la beauté et la variété de leurs couleurs. Castagnoles, Les CASTAGNOLES (brama), les ARCHERS ({oxotes), etc. , différent archers, €t@ es chætodons par plusieurs caracières , entre autres, par l’exis- tence de dents au vomer et sur les palatins. Les premiers ont le museau très court, le front vertical et un très petit nombre de rayons épineux Ca- chés dans le bord an- térieur de leur na- geoire dorsale : ils habitent la Méditer- ‘ ; . ranée. Les Archers 3 ÿ : d É Fig. 281. CASTAGNOLE DE LA MÉDITERRANÉE. nt je front très obli- que et la nageoire dorsale très reculée et armée d’épines fortes et non cachées par les écailles. L'espèce commune habite le Gange et la mer des Indes, et est célèbre par la manière dont elle projette des gouttes d’eau sur les insectes qui se tiennent sur les herbes aquatiques, afin de les faire tomber et de s’en repaitre. Elle les lance quelquefois à trois ou quatre pieds de haut et manque rarement son but. Ce singulier instinct lui est, du reste, commun avec une espèce de chætodons , qui habite les mêmes parages. de, Hrmile Les ACANTHOPTÉRYGIENS A PHARYNGIENS LABYRINTHIFORMES ryn- : “ jiens PERE Le forment une petite famille, remarquable par Pexistence de cel- thiformes. ORDRE DES POISSONS ACANTHOPTÉRYGIENS. 713 luies très compliquées, situées au dessus des branchies. Ces cellules (#g. 282), ren- Fig. 282 (1) fermées sous loper- cule et formées par des lamelles des os pha- ryngiens , servent à retenir une certaine quantité d’eau, la- quelle maintient les branchies humides , lorsque l'animal est à Pair , et lui permet d'y vivre assez long- temps : aussi Ces pOis- sons ont-ils l’habitude de sortir des rivières el des étangs , qui sont leur séjour ordinaire, et de se porter à d’assez grandes distances , en rampant dans l’herbe ou sur la terre. Ceux qui présentent cet appareil labyrinthiforme , porté au plus haut degré de complication , et qui ont reçu le nom d’ANABAS, non-seulement restent très long-temps hors Peau, mais encore , à ce que l’on assure, grimpent sur les arbres. La plupart des poissons de cette famille habitent les Indes, la Chine et les Mollusques. Une espèce , le gourami, qui est origi- naire de la Chine et qui est très estimé pour sa chair savou- reuse , a été acclimaté dans les étangs de l'Ile-de-France et de Cayenne. La FAMILLE DES SCOMBÉROÏDES est la plus importante de cet ordre: elle comprend plusieurs poissons d’un volume considé- rable, dont le goût est excellent et dont la fécondité est si inépui- sable que, malgré la destruction continuelle qu’on en fait, ils reviennent chaque année par légions immenses dans les mêmes localités et s’offrent, comme une proie assurée , à l’activité des pécheurs et à l’industrie de ceux qui exercent l’art de les préparer et de les conserver. Les thons, ies bonites et les ma- quereaux , qui sont si utiles à l’homme et qui forment le type de ceite famille, sont faciles à distinguer des autres acanthoptéry- giens ; mais plusieurs des espèces qui se groupent naturellement autour d’eux ne présentent aucun des caractères les plus propres - (1) Tète d’un anabas, dont on a eulevé l’opercule, pour montrer les bran- chies et les cellules situées au dessus. 46. Famille des scomberoiïdes. Maquereaux. 714 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. à les faire reconnaître et établissent des liaisons si étroites avec d’autres familles, que les limites de celle-ci sont difficiles à définir. En général, les scombéroïdes ont les écailles très pe- tites et une grande partie de la peau lisse : ils n’ont ni épines ni dentelures sur les pièces operculaires; leurs nageoires verticales ne sont pas écailleuses ; leur queue et surtout leur nageoire caudale sont ordinairement grandes et très vigoureuses. La plupart ont les côtés de la queue carénés ou armés d’écailles en forme de boucliers; enfin , chez plusieurs , les rayons posté- rieurs de la seconde nageoire dorsale et de l’anale sont séparés et forment autant de fausses nageoires ou fausses pennules. Ceux qui présentent ces deux derniers caractères et qui ont une premiere nageoire dorsale continue , forment la TRIBU DES SCOMBRES. Leur corps est en forme de fuseau , leur queue fort rétrécie et plus ou moins carénée latéralement, mais non ar- mée de boucliers , et leur nageoire caudale très grande : aussi sont-ils d’excellens nageurs. Ils parcourent les mers en troupes nombreuses et donnent lieu à de très grandes pêches: ce sont les maquereaux , les thons , les germons , etc. Les MAQUEREAUX (scomber) se distinguent par leur corps, cou- vert d’écailles uniformément petites et lisses, par leur queue, garnie latéralement de deux petites crêtes cutanées, et par l’es- pace vide qui sépare leurs deux nageoires dorsales. Le maquereau vulgaire, dont le dos est blanc, marqué de raies noires , et dont les fausses nageoires sont au nombre de cinq en haut aussi bien qu’en bas , est, comme chacun le sait, un poisson de passage, qui, en été, arrive en abondance sur nos côtes et donne lieu à des pêches et à des salaisons presque aussi productives que celles du hareng. On a prétendu que ces pois- sons passaient l’hiver dans les mers du nord et descendent au printemps le long des côtes de l’Islande, de l'Irlande et de l'Ecosse , pour gagner l’Atlantique , où ils sed iviseraient en deux colonnes, dont l’une continuerait ce long voyage vers la Méditerranée , tandis que l’autre entrerait dans la Manche , et, après s'être répandue jusque dans la Baltique, retournerait vers le nord, en côtoyant la Norwège; mais cette opinion ne repose pas sur des preuves suffisantes , et il est probable que les migra- tions des maquereaux sont bien moins lointaines : il y a même lieu de croire que, pendant l'hiver, ils se retirent seulement dans les grandes profondeurs de la mer, et que le besoin de pourvoir à leur nourriture et de chercher des lieux convenables pour y déposer leur frai, les en chasse au printemps et les fait longer les côtes voisines. En effet , si ces légions de poissons ORDRE DES POISSONS ACANTHOPTÉRYGIENS. 715 descendaient toutes des mers polaires, elles devraient se montrer aux Orcade$%avant que d’apparaitre dans la Manche , et n’entrer dans la Méditerranée que beaucoup plus tard. Or, la pêche du maquereau commence dans la Méditerranée en même temps ou même plus tôt que dans la Manche , et on assure qu’elle n’est abondante aux Orcades qu’à une époque beaucoup plus avancée de la saison. Enfin il paraïitrait que ce sont même des variétés différentes qui hantent les divers parages où ces poissons abon- dent. Ainsi, dans la Baltique , ils ne dépassent pas un pied de long , et on dit que, sur les côtes de l'Islande , ils ne valent pas la peine d’être péchés, tandis que, dans la Manche , ils four- vissent une nourriture aussi agréable qu'abondante. C’est à l’entrée de cette dernière mer, entre les Sorlingues et l'ile de Bas , que se prennent les plus gros maquereaux: il y en a de près de deux pieds de longueur ; mais ils sont moins esti- nés que ceux d’une plus petite taille. Les bancs de ces poissons ne paraissent pas entrer dans le golfe de Gascogne ; mais ils abondent depuis l'extrémité de la Bretagne jusqu’à la mer du Nord. C’est en général vers le mois d'avril qu’on commence à en rencontrer ; mais ils sont encore petits et non laités. Pen- dant le mois de juin et une partie de juillet , ils sont le plus estimés et le plus communs : il y en a même assez avant en août ; mais alors ils ont déjà frayé ; enfin, vers la fin de septembre et en octobre , on en pêche de petits, qui paraissent avoir pris naissance dans l’année , et il n’est pas rare d’en avoir aussi dans les mois de novembre et même de décembre ; du reste tout cela est fort irrégulier et les pêcheurs attribuent aux tempêtes l’ap- parition de ces poissons à ces époques insolites. La pêche du maquereau se fait tantôt à la ligne , tantôt avec des filets semblables à ceux qu’on emploie pour la pêche du hareng , mais à mailles plus grandes. Le maquereau vulgaire fréquente , comme nous l'avons déjà dit , la Méditerranée aussi bien que l'Océan. 1l existe également dans cette mer intérieure une autre espèce qui mérite d’être signalée , parce que, extérieurement , elle diffère à peine de la précédente ; mais cependant elle est pourvue d’une vessie nata- toire , tandis que le maquereau vulgaire n’en a pas. Le genre des THONS ({kynnus) est très voisin de celui des ma- quereaux , dont il se distingue par l'existence d’une sorte de cor- selet formé par des écailles plus grandes et moins lisses que celles du reste du corps (/ig. 283). Ces poissons ont aussi de chaque côté une carène cartilagineuse entre les petites crêtes latérales de la queue. Leur première nageoire dorsale se pro- Thons. 716 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. longe jusque très près de la seconde et leurs fausses nageoires sont plus nombreuses. Le thon commun ressemble assez au maquereau par la forme générale de son corps, mais il est plus rond et atteint une très grande taille ; en général sa longueur est de trois ou quatre pieds ; mais il paraît que quelquefois il en a plus de quinze. On assure que, sur les côtes de la Sardaigne, il n'est pas rare d'en prendre dont le poids s’élève à plus de mille livres ; ceux de cent à trois cents livres n’y sont appelés que des demi thons ; enfin un auteur, à qui l’on doit une histoire naturelle de cette ile, assure qu’on en a vus de dix-huit cents livres. La partie supérieure du corps est d’un noir bleuâtre , et le ventre gri- sâtre avec des taches argentées. Ce poisson se montre quel- quefois dans l'Océan ; mais c’est dans la Méditerranée qu’il se multiplie et qu’il abonde. A certaines époques de lannée , il longe les côtes en légions innombrables et y donne lieu à des pêches d’une grande importance. On a pendant long-temps pensé que les thons ne sont que de passage dans ceite mer inté- rieure , et que , chaque année , ils y entrent par le détroit de Gibraltar, pour s’avancer au delà du Bosphore et revenir ensuite vers l’ouest; mais il paraïtrait qu’ils ne font pas de si longs voyages ; et que , nés dans ces parages, ils passent une parlie de l’année dans les eaux profondes , tandis qu’à d’autres saisons is se rapprochent de la terre et la côtoient souvent. Dans beau- coup de localités , les bancs de thons se montrent au printemps et se dirigent tous vers l’orient , tandis qu’à la fin de l'été ou en automne , on les voit suivre une direction opposée. Ainsi , à la Ciotat , sur les côtes de la Provence , on fait une pèche d’arrivée depuis le mois de mars jusqu’en juillet , et une seconde péche, dite de retour, depuis le milieu de juillet jusqu’à la fin d’oc- tobre ; mais, sur d’autres points , on voit les thons arriver en même temps en suivant des directions très différentes ,et ailleurs encore c’est en hiver seulement qu’on en trouve. À Cassis, par exemple , cette pêche commence en novembre et se continue jusqu’à la fin de décembre. La pêche du thon se pratique dans la Méditerranée de- puis la plus haute antiquité. Jadis elle était pour Byzance et pour les côtes d’Espagne une source de grandes richesses , et de nos jours elle se poursuit avec activité sur les côtes de la Provence, de la Sardaigne , de la Sicile , etc. Cette pêche se fait principalement de deux manières, à la thonaïire et à la ma- Fig. 283. THON COMMUN. ORDRE DES POISSONS ACANTHOPTÉRYGIENS. 717 drague. Pour la pêche à la thonaire : lorsque la sentinelle postée sur un liemélevé a signalé l'approche d’une légion de thons et a indiqué la direction qu'ils suivent, des bateaux nombreux partent sous le commandement d’un chef, se rangent sur une ligne courbe , jettent leurs filets et les réunissent de manière à former une vaste enceinte autour de la troupe de ces poissons timides , qui , effrayés par le bruit, se rapprochent du rivage. Avec de nouveaux filets placés en dedans des premiers , on rétrécit de plus en plus lenceinte et on ramène les thons vers le rivage ; enfin , lorsqu'il n’y a plus que quelques brasses d’eau, on tend un grand et dernier filet , qui se termine en cul-de- sac , on le tire vers la terre et on amène ainsi les poissons cap- tifs , que l’on tue avec des crocs ou que l’on saisit à bras. Cette pêche , pratiquée sur les côtes du Languedoc , donne quelque- fois en un seul coup deux ou trois mille quintaux de thons. La madrague est un engin beaucoup plus compliqué et consiste en une sorte de grand labyrinthe, construit avec des filets placés à demeure dans la mer et disposés de façon à consti- tuer une suite d’enceintes ouvertes, du côté de la terre, par une espèce de porte et réunis au rivage par un autre filet, qui barre le passage et arrête les thons, lorsque, dans leurs courses périodiques , ils suivent la côte dans une direction déterminée. Ces poissons passent d’abord entre la madrague et la terre ; mais , arrêtés par le filet dont nous venons de parler, ils se détournent vers le large et pénètrent dans l’enceinte, qui esi subdivisée par d’autres filets transversaux en une suite de chambres, dans iesquelles ils s’égarent. On les contraint en- suite, par différens moyens, à passer jusque dans le dernier compartiment de la madrague, nommé Corpou ou chambre de mort où des matelots, arrivant en grand nombre dens des barques , soulèvent un fiiet horizontal disposé comme une sorte de plancher et les amènent de cette manière jusqu’auprès de la surface de l’eau ; alors on leur livre de toutes paris un combat acharné , en les frappant avec des crocs ou avec d’autres armes semblables , et on charge les bateaux d’un riche butin. Les troupes de thons sont ordinairement précédées par des sar- dines , et il arrive souvent que des dauphins les poursuivent et les forcent en quelque sorte à entrer dans les filets tendus pour les prendre. Les pêcheurs se figurent que c’est par amitié pour eux ; mais ils ne font pas de semblables contes sur l’espadon, qui quelquefois accompagne aussi les colonnes de thons ; car ces poissons leur causent de grands dommages, en déchirant les madragues et se frayant une issue par laquelle tous les autre capiifs ne tardent pas à s'échapper. La chair du thon est très estimée: elle ressemble un peu à celle du bœuf et se conserve, 718 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. soit à l’aide du sel, soit par la cuisson et l’immersion dans de l'huile. On donne le nom de fonnine à une espèce de thon très sem- blable à la précédente , qui se pêche aussi dans la Méditerra- née, et qui atteint environ trois pieds de long : son dos, d’un bleu brillant , est orné de lignes noires déliées , et son ventre ainsi que ses flancs sont argentés avec quelques taches noires. La bonite des tropiques , célèbre par la chasse qu’elle donne en grandes troupes aux poissons volans , est encore une espèce de thon reconnaissable aux raies longitudinales brunes, dont son ventre est marqué. Germons Le GERMON (orcynus) ne diffère guère des précédens que par des nageoires pectorales beaucoup plus longues qui atteignent au delà de l’anus. C’est un grand et bon poisson , qui, vers le mois de juin, arrive en troupes nombreuses dans le golfe de Gascogne, à la suite des sardines, des anchoiïs, etc.; mais il se tient éloigné des côteset disparait vers le mois d'octobre. Les Basques et les habitans de l’ile d’Yeu en font une pêche active. Pélamides. Les PÉLAMIDES OU SARDES, dont une espèce est abondante dans la Méditerranée, sont aussi très voisins des thons: ils n’en diffèrent guère que par leurs dents pointues et assez fortes. Espadons. La TRIBU DES ESPADONS a encore la plus grande analogie avec les thons, mais ces poissons se reconnaissent du premier coup- d’œil à leur mâchoire supérieure, prolongée en forme de bec, de broche ou d'épée , dont ils se servent comme d’une arme puissante pour attaquer les plus grands animaux ma- Z rins. Ils présentent aussi un Fig. 284. ESPADON COMMUNX. Caractère remarquable dans la disposition de leurs branchies , qui ne sont pas divisées en dents de peigne , mais formées chacune de deux grandes lames parallèles, dont la surface est réticulée. Espadons LeS ESPADONS PROPREMENT DITS (xiphias) manquent de na- proprement geoires ventrales et ont le prolongement du museau aplati hori- us zontalement, et tranchant comme une large lame d'épée. On n’en connaît qu’une seule espèce , qui a souvent plus de quinze pieds de long et même davantage: elle est plus commune dans ORDRE DES POISSONS ACANTHOPTÉRYGIENS. 719 la Méditerranée que dans l'Océan. Sa chair, blanche et com- pacte, est très délicate, et on le pêche souvent au harpon à-peu- près comme la baleine. Les VOILIERS { 2stiophorus) appartiennent aussi à la tribu des espadons et sont remarquabies par leur énorme nageoire dorsale dont ils se servent pour prendre le vent lorsqu’ ils nagent à la surface de la mer. Ils habitent les mers tropicales. Une troisième tribu, celle des CENTRONOTES , est caractérisée par Pabsence d’une membrane pour réunir les épines de la première nageoire dorsale ;, qui restent par conséquent libres. On y range , entre autres poissons , les PILOTES /naucrates), ainsi nommés de lhabitude qu ils ont de suivre les navires, pour s'emparer de tout ce qui en tombe, et de celle qu’on leur prête de conduire le requin, qui, attiré par le même instinct, accom- pagne aussi très fréquemment nos bâtimens avec une persévé- rance extrême. Ils ont le corps fusiforme , des écailles très pe- ttes , à-peu-près comme les maquereaux, et des carènes cartila- gineuses sur les côtés de la queue comme les thons. L'espèce commune a environ un pied de long. Les LICHES , dont on péche plusieurs espèces dans la Médi- terranée, appartenant aussi à cette tribu: elles n’ont pas de carènes latérales à la base de la queue. Les caARAxx se distinguent de tous les précédens par une ligne latérale cuirassée de pièces carénées et souvent épineuses. Nos mers d'Europe en nourrissent plusieurs qui sont semblables au maquereau pour la forme et pour le goût, et qui sont con- fondus sous les noms de saurels , maguereaux bâturds , etc. On réunit sous le nom commun de vomER d’autres scombé- roïdes , qui ont le corps comprimé et élevé, et la peau en gé- néral sans écailles apparentes. De ce nombre sont les DORÉES, dont la bouche est très protractile et les épines de la nageoire dorsale, accompagnées de longs lambeaux membraneux. Une espèce, qui habite nos deux mers, est connue sous le nom vulgaire de poisson de saint-Pierre. Enfin nous mentionnerons encore , dans cette nombreuse famille , les CORYPHÈNES , appelés aussi dorades par les pêcheurs. Ces poissons ont le corps com- Voiliers. Centronotes. Pilotes Liches. Caranx. Vomer. Famille des tœnioiïdes. Famille des theutyes. 720 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. primé, allongé et couvert de petites écailles, la tête élevée , iranchante à sa partie supérieure , et une nageoire dorsale qui règne sur toute ja longueur du dos et se compose de rayons presque également flexibles. !Iis sont célèbres parmi les navi- gateurs pour la rapidité de leur natation et la guerre qu’ils font aux poissons volans. La co.yphéne de La Méditerranée est un beau poisson d’un bleu argenté, avec des taches bleues, foncées en dessus , Jjaune-citron tacheté de bleu-clair en dessous. D’autres acanthoptérygiens , qui tiennent de près aux scom- béroïdes et qui ont aussi les écailles fort petites , s’en distin- guent par leur corps très allongé et très aplati sur les côtés, forme qui leur a valu le nom de POISSONS EN RUBANS OU TOE- NIOÏDES. Les uns , appelés vulgairement jerretières , ont le mu- seau allongé, la bouche fendue et armée de fortes dents , et les nageoires venirales réduites à deux petites pièces écailleuses : ils constituent le genre LÉPIbOPE des ichthyologistes. On en trouve quelquefois dans nos mers une espèce qui a jusqu’à cinq pieds de long. D’autres tœænioïdes ont la bouche petite et peu ‘endue : tels sont les GYMNÈTRES , qui manquent entière- ment de nageoire anale, mais ont les ventrales fort longues , et le corps très mou, plat comme les précédentes et très allongé. Une espèce de ce genre , qui habite la Méditerranée et qui atteint trois ou quatre pieds de long , est remarquable par le brillant argenté de tout son corps; une autre, appelée en Norwège le rot des harengs , parce qu’elle se trouve souvent au milieu des bancs de harengs a jusqu’à dix-huit pieds de long. Enfin il en est d’autres encore qui diffèrent des précédens par leur museau court et leur bouche fendue obliquement. L’un des genres qui offrent ces caractères a reçu le nom de RUBAN, et se rencontre dans la Méditerranée. La FAMILLE DES THEUTYES a aussi des rapports avec les scom- béroïdes , mais, par d’autres particularités de son organisa- lion. Elle se compose d’un petit nombre de poissons , dont le corps est comprimé et oblong, dont la bouche petite et peu ou point protractile est armée, à chaque mâchoire , d’une seule rangée de dents tranchantes et dont le palais et la langue sont sans denis et dont le dos ne porte qu’une seule nagecire. Les theutyes sont herbivores et sont tous étrangers. Les ACAN- THURES , appelés vulgairement chirurgiens , à cause de la grosse épine mobile et tranchante comme une lancette , qu’ils portent ORDRE DES POISSONS ACANTHOPTÉRYGIENS. 721 de chaque côté de la queue et avec laquelle ils font à ceux qui les preunëént imprudemment de grandes blessures , appar- tiennent à cette famille. Les MUGILOÏDEs forment une petite famille bien distincte de tous les précédentes et caractérisée par un corps presque cylin- drique et couvert de grandes écailles, une tête un peu déprimée et à museau court, une bouche transversale et armée de dents d’une petitesse extrême , deux nageoires dorsales séparées , des ventrales attachées un peu en arrière des pectorales, etc. Ils constituent un seul genre, celui des MUGESs, et sont en géné- ral très estimés. Les mers d'Europe en nourrissent plusieurs espèces , que l’on confond souvent sous le nom de céphale ou de mulet de mer, et que l’on voit , au commencement de Pété, remonter lembouchure des fleuves en troupes si nombreuses et si serrées qu’elles donnent à l’eau une teinte bleue. Le poisson appelé corbeau sur nos côtes de la Méditerranée et tetragonurus Cuvierii par les naturalistes , ainsi que les ATHÉ- RINESs établissent le passage entre les mugiloïdes et les gobioïdes sans se laisser complètement associer ni à l’un ni à l’autre de ces groupes. La FAMILLE DES GOBIOÏDES se reconnait à ses épines dorsales grèles et flexibles : on y range les Hennies, les gobous , les anar- rhiques les callionymes , eic. Les BLENNIES OU BAVEUSES , ainsi nommées à cause de la mucosité dont leur peau est enduite, ont le corps allongé, comprimé , les nageoires ventrales placées en avant des pec- iorales et composées seulement de deux rayons, une seule nageoire dorsale et point de vessie nataioire. Elles vivent en petites troupes parmi les rochers du rivage, et plusieurs d’entre elles sont vivipares: nous en avons quelques espèces sur nos côtes. Les ANARRHIQUES ressemblent beaucoup aux blennies , mais manquent de nageoires ventrales : ce sont des poissons féroces et dangereux , dont l'espèce la plus commune, appelée vulgaire- ment {oup marin Où chat marin, habite les mers du nord et arrive quelquefois sur nos côtes : elle atteint six ou sept pieds de long et est d’une grande ressource pour les Islandais , qui la Famille des mugiloïdes. Famille des gobioïdes. Blennics, Anarrhiques. Gobous. 722 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. mangent sèche et salée , emploient sa peau comme ds et se servent de son fiel comme de savon. Les GOBOUS gobèus), appelés aussi Joulereaux Où gougeons de mer,sereconnaissent à leurs nageoires ventrales placées en avant des pectorales et réunies entre elles en un seul disque creux, for- mant plus ou moins l’entonnoir. Ce sont des poissons petits ou médiocres qui se tiennent entre les rochers du rivage et qui Calitonymes. Famille des pectorales pé- diculées. Baudroies. peuvent, comme les blennies, vivre quelque temps hors de l’eau. Plusieurs passent l’hiver dans des canaux qu’ils creusent dans la vase et construisent au printemps une espèce de nid, dans lequel le mâle attend les femelles et veille à la garde des œufs qu’elles y déposent. Les CALLIONYMES, jolis petits poissons dont une espèce (le savary Ou doucet) habite la Manche, sont remarquables par la grandeur de leurs nageoires ventrales et par leurs ouïes ouvertes seulement par uu trou de chaque côté de la nuque. Les poissons dont se compose la famille suivante ont un caractère très remarquable dans la disposition de leurs na- geoires pectorales qui sont portées sur des espèces de bras, formés par l'allongement des os du carpe : delà leur nom de PECTORALES PÉDICULÉES. Les plus communs sont les BAUDROIES (/ophius) , appelés vul- gairement raies pécheuses, à cause d’une certaine ressemblance avec les raies ordinaires et de la manière dont elles s'emparent de leur proie. Elles ont la tête excessivement grande, large et déprimée , la gueule très fendue et armée de dents pointues , la peau sans écailles , deux nageoires dorsales et un certain nombre de rayons détachés en avant, libres et mobiles sur la tète , la membrane des ouïes formant de chaque côté un grand sac ouvert dans laisselle , les branchies au nombre de trois paires, enfin le squelette à demi cartilagineux. Ge sont des poissons très laids, qui se tiennent dans la vase et on assure qu’ils s’y cachent et font jouer les rayons de leur tête, pour attirer les petits poissons , lesquels, prenant l’extrémité charnue de ces tiges pour des vers, viennent y mordre. On dit - aussi que les baudroies peuvent saisir leur proie et la retenir dans le sac de leurs ouïes. La haudrote commune, qui habite nos ORDRE DES POISSONS ACANTHOPTÉRYGIENS. 723 mers, atieint quaire à cinq pieds de long et a acquis une certaine célébrité pâr sa figure hideuse. Les CHIRONECTES (antennarius) sont des poissons voisins des Chironertes. baudroies , qui , en distendant leur énorme estomac , peuvent se gonfler comme un ballon ; et qui, lorsqu'ils sont à terre, s’aident de leurs nageoires pectorales et ventrales pour ramper ; ils habitent les mers des pays chauds et ils peuvent rester hors de Peau pendant deux ou trois jours. Les BATRACOÏDES sont d’autres poissons à pectorales pédoncu- Batracoïdes. lées, qui se rapprochent aussi des baudroies par leur forme gé- nérale ; car ils ont aussi la tête plus large que le corps et aplatie horizontalement , la gueule bien fendue et les nageoires ven- trales (qui ne présentent que trois rayons) altachées sous la gorge. Ils sont très voraces et se tiennent cachés dans le sable, pour tendre des embèches aux poissons dont ils se nourrissent ; les blessures faites par leurs piquans passent pour être dan- gereuses. On en trouve dans les deux océans. La FAMILLE DES LABROÏDES se COmpose d’un grand nombre, Famille des de poissons , dont le corps est oblong et écailleux , le dos sur- "des. monté d’une seule nageoire , soutenue en avant par des épines garnies le plus souvent chacune d’un lambeau membraneux, les mâchoires couvertes par des lèvres charnues , et le pharynx armé de trois os garnis de fortes denis. Les LABRES (/abrus) Ou vieilles de mer se reconnaissent à leurs r:pres. doubles lèvres , dont l’une tient immédiatement aux màchoires , Pautre aux os sous-orbitaires ; à leurs dents maxillaires co- niques , à leurs dents pharyngiennes cylindriques, mousses et disposées en forme de poire; à leurs opercules à cinq rayons, sans épines ni dentelures , et couverts, comme les joues, par des écailles , et à leur ligne latérale droite. Nos mers en possèdent quelques espèces remarquables par la variété et la beauté de leurs couleurs. Les GIRELLES (Julis), dont une espèce de la Méditerranée est remarquable par sa couleur violette, relevée de chaque côté par une bande orangée , ne diffèrent guère des labres que par l’ab- sence d’écailles sur la tête et par la courbure de la ligne latérale. Girelles, Filous. Rasons. Chromis. Scares. Famille des bouches en flûte. 724 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. C’est aussi à côté des labres que prend place un poisson de la mer des Indes , appelé le FILOU (epihulus) , qui mérite d’être signalé à cause de la manière singulière dont il peut avancer tout-à-coup sa bouche et la transformer en un long tube, pour saisir au passage les petits animaux. Les RASONS /ririchthys) sont semblables aux labres par la forme générale ; mais ils sont très comprimés et leur front descend su- bitement vers la bouche par une ligne tranchante et presque verticale. Leur corps est couvert de grandes écailles; mais la plu- part ont la tête nue. Le rason ou rasoir de la Méditerranée, äont la chair est estimée , présente ce caractère. Les caromis ont le port et la plupart des caractères des labres , mais ont des dents en carde au pharynx et aux mâ- choires derrière une rangée de dents coniques. Le petit casta- gneau , qui se pêche par milliers dans la Méditerranée , appar- tient à ce genre. Les sCARES sont aussi des labroïdes remarquables par Farma- ture de leur bouche ; leurs mâchoires sont arrondies et garnies de dents disposées comme des écailles. Une espèce , qui parait être le scarus, si célèbre chez les anciens , se trouve dans PArchipel. Les Romains le comptaient au nombre des.mets les plus délicieux , et, pour en enrichir les côtes d'Italie , lempe- reur Claude chargea le commandant de lune de ses flottes, laffranchi Elipertius Optatus , d’en chercher un grand nombre dans la mer de Grèce et de les répandre le long des rivages d’Ostie. Enfin la seizième et dernière famille de l’ordre des acantho- piérygiens se compose des BOUCHES EN FLUTE , ainsi nommés du long tube formé en avant du crâne par les os de la face et ter- miné par la bou- che. Les uns, appelés FISTU - LAIRES , Ont le corps cylindri-- que, long et mince. On en trouve dans les mers chaudes Fig. 285. CENTRISQUE COMMUNX. des deux hémi- ORDRE DES MALACOPTÉRYGIENS ABDOMINAUX. 725 sphères. Lesautres ont au contraire le corps ovale ou oblong, comprimé latéralement et tranchant en dessous. On les nomme vulgairement Lecasses de mer, et ils forment le genre CENTRISQUE des ichthyologistes. Une espèce , longue de quelques pouces et de couleur argentée , est très commune dans la Méditerranée. MALACOPTÉRYGIENS. Les poissons osseux , qui ressemblent aux acanthoptérygiens par la structure de leurs branchies et par le mode d’articula- tion de leur mâchoire supérieure , mais qui ont tous les rayons mous et articulés fig. 286), Fig. 286. excepté quelquefois le pre- mier de la nageoire dorsale ou des nageoires pectiorales , constituent un second grou- pe très nombreux , qui se subdivise en trois ordres, ca- ractérisés d’après la position des nageoires ventrales ou leur absence. Tantôt ces or- ganes sont suspendus sous l’abdomen ; tantôt ils sont attachés sous les pectorales , et d’autres fois ils manquent complètement. ORDRE DES MALACOPTÉRYGIENS ABDOMINAUX. Ces malacopiérygiens ont les nageoires ventrales situées sous l'abdomen , en arrière des nageoires pectorales ,et non attachées aux os de lépaule. Ils forment cinq familles , savoir : les cypri- noïdes, les esoces , les siluroïdes , les salmones et les clupes. La FAMILLE DES CYPRINOÏDES , qui a pour type la carpe, se reconnait à une bouche peu fendue , à des mâchoires faibles le plus souvent sans denis, et dont le bord est formé par les os intermaxillaires , à des os pharyngiens foriement dentés et à des rayons branchiostèges peu nombreux. Le corps de ces poissons est écailleux , et ils n’ont pas , comme deux des familles sui- vantes , une nageoire dorsale adipeuse, c’est-à-dire formée par un repli de la peau , rempli de tissu graisseux et dépourvu de Famille des cyprinoides. Cyprins Carpes. 726 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. rayons Leur canal digestif présente aussi quelques particu- larités de structure; enfin ce sont les moins carnassiers des poissons. Une première tribu se compose des GYPRINS et a pour carac- tère des mâchoires dépourvues de dents, et des ouïes soutenues seulement par trois rayons plats. Ils n’ont qu’une seule nageoire dorsale, et leurs écailles sont , en général , grandes. Leur langue est lisse et leur palais est revêtu d’une substance molle et épaisse, que l’on connait sous le nom de Langue de carpe; enfin leur pha- rynx est garni de dents très larges. Ce sont des poissons d’eau douce peu carnassiers, qui vivent en grande partie de graines, d'herbes et même de limon. On les divise en carpes proprement dites, barbeaux ; goijons, tanches , brèmes , «bles , etc. Les CARPES (cyprinus) se distinguent par leur nageoire dorsale longue , ainsi que l’anale , et par l'existence d’une épine plus ou moins forte pour deuxième rayon. Les uns, tels que la carpe vulgaire, ont des barbillons aux angles des mâchoires; d’autres, en manquènt, par exemple , la gihele, espèce assez commune aux environs de Paris ,et la dorade de La Chine (appelée vulgai- rement poisson dore), que la beauté de ses couleurs fait élever en grand nombre pour l’ornement de nos bassins. Le carpe vulgaire, dont tout le monde connaît la forme , est originaire des parties tempérées et méridionales de l'Europe; mais , par les soins de l’homme , elle s’est répandue aussi dans le nord. On assure que son introduction en Angleterre ne remonte qu'à 1514, et qu'on ne l’acclimata dans le Danemark qu'un demi-siècle plus tard. C’est dans les eaux tranquilles que ces poissons se plaisent le plus. Pendant l'hiver, ils s’en- foncent dans la vase et passent ainsi plusieurs mois sans prendre d’alimens. Dans la saison chaude , au contraire, ils mangent avec tant de gloutonnerie, qu’ils se donnent quelquefois des indigestions mortelles. Leur fécondité est extrême. Dès leur troisième année, ils sont enr état de se reproduire , et le nombre de leurs œufs parait augmenter avec l’âge. On a irouvé dans le corps d’une carpe, du poids de dix livres, jusqu’à sept cent mille œufs ; mais une grande partie de ces œufs et des petits qui en naissent deviennent la proie d’autres poissons. La croissance des jeunes carpes est assez rapide : en général ils pèsent environ trois livres à l’âge de six ans, et à dix, terme moyen , six à huit livres. Leur longévité est cependant extrême : Buffon en a vu, dans les fossés de Pontchartrain, une qui avait cent cinquante ans. ORDRE DES MALACOPTÉRYGIENS ABDOMINAUX. 727 Ils s'élèvent facilement dans les viviers et dans les élangs, et atteignent Souvent jusqu’à quatre pieds de long. Pallas, na- turaliste célèbre de la Russie, assure que, dans le Wolga , on en trouve de cinq pieds , et on cite, dans les annales de la science , une Carpe gigantesque, qui fut prise, en 1711, à Bis- chofshaun , près de Francfort-sur-l'Oder, et qui avait neuf pieds de long : son poids était de soixante-dix livres. On voit assez souvent des individus monstrueux , à front bombé et à museau très court; enfin on élève une race à grandes écail- les, dont certains individus ont la peau nue par places ou même entièrement , et sont appelés carpes à cuir, reines des carpes , etc. Les BARBEAUX (barbus) ressemblent à la carpe vulgaire par leurs épines et leurs barbillons, mais s’en distinguent par la brièveté de leurs nageoires dorsale et anale. Le harheau commun a la tête oblongue : il habite les eaux claires et vives , et atteint quelquefois plus de dix pieds de long. Les GOUJONS (gobio) ont aussi ies nageoires dorsale et anale courtes , mais ils manquent d’épines à l’une et à l’autre: ils ont également des barbillons. Nous en avons un qui ne dépasse guère huit pouces de long, et qui vit en troupes dans nos eaux douces ; il passe de préférence l'hiver dans les lacs, et au printemps remonte les rivières pour frayer. Sa nourriture consiste ordi- nairement en vers , en insectes aquatiques et en frai d’autres poissons ; mais il est aussi très avide de charogne. Les TANCHES ({inca) joignent aux Caractères des goujons celui de n’avoir que de très petites écailles et des barbillons fortcouris. La tanche vulgaire est courte, grosse et d’une couleur brune- jaunâtre ou même dorée : elle habite de préférence les eaux stagnantes , et n’est bonne que dans certaines localités. Les BRÈMES (abramis) n’ont ni rayons épineux ni barbillons ; leur nageoire dorsale est courte et placée en arrière des ventrales; enfin leur ventrale est longue. Nos eaux douces en nourrissent deux espèces : la bréme commune , assez bon poisson qui se multiplie aisément , et la bordelière ou petite hréme , qui est peu estimée. Enfin les ABLES (Zeuciscus) , appelés vulgairement poissons 47 Barbeaux. Goujons. Tanches. Brèmes. Ables. Loches. Famille des ésoces. Brocuet:. 528 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. blanes , ont la dorsale et Panale courtes et manquent d’épines et de barbillons. On en connait un grand nombre d’espèces, qui sont presque toutes de petite taille. L’ablelte ou able ordinaire ac- quiert sept ou huit pouces de long et se fait remarquer par ses écailles brillantes , qui se détachent aisément et qui sont ar- gentées sur les côtés et le dessous du corps. La substance nacrée qui leur donne cet état métallique, est employée dans les arts pour la fabrication des perles fausses. Ce poisson est commun dans presque toutes les rivières de l’Europe. Son corps est étroit; son front est droit et ses nageoires pâles ; enfin la nageoïre dor- sale répond au dessus de l'intervalle compris entre les ventrales et l’anale. Une autre espèce de ce genre , le veron, est le plus petit de tous nos poissons. Il n’a guère que trois pouces de long; et on le confond souvent avec les jeunes goujons. La position de sa nageoire dorsale est la même que chez Pablette ; mais son corps est tacheté de noir, et les écailies sont si petites qu’elles échap- pent presqu'’à la vue: il est très commun dans nos eaux douces. Le meünier, le gardon, la rosse , la raudoise et plusieurs autres espèces , appartiennent aussi à ce genre et se distinguent par la position de leur nageoire dorsale et par leurs couleurs. Les LOCHES OU DORMILLES(cobitis) ont, comme les cyprins, la bouche dépourvue de dents ; mais elle est entourée de lèvres propres à sucer. Leur tête est pelite; leur corps est allongé, revêtu de petites écailles et enduit de mucosité; enfin leurs nageoires ventrales sont fort en arrière, et au dessus d’elles se trouve une seule petite dorsale. Nous en avons trois espèces dans nos eaux douces, savoir : la Loche franche, qui est commune dans les ruisseaux ; la Zorhe d’etang , qui a la singulière habitude d’ava- ler de l'air et de le rendre ensuite par l'anus, après en avoir changé oxygène en acide carbonique ; enfin la Zoche de riviere , qui est la plus petite des trois. La FAMILLE DES ÉSOCES manque aussi de nageoire adipeuse, el se distingue de la précédente par la conformation de la bouche. Le bord de la mâchoire supérieure est formé presque en entier par l’os intermaxiliaire , qui seul porte les dents (voyez fig. 272, page 690). Les BROCHETS (esor) forment le type de ce groupe de poissons voraces : ils se reconnaissent à leur museau oblong, obtus , long et déprimé , et à armature de leur bouche, qui se compose de ORDRE DES MALACOPTÉRYGIENS ABDOMINAUX. 229 plusieurs gentaines de dents. Les os intermaxillaires , qui forment les deux tiers de la mâchoire supérieure , sont garnis de petites dents pointues , tandis que les maxillaires, qui en occu- pent les côtés , n’ont pas de dents. Le palais , la langue, les arcs branchiaux et les os pharyngiens sont hérissés de dents en carde ; enfin , sur les côtés de la mâchoire inférieure règne une série de longues dents pointues, dont les unes sont fixes et les autres mobiles (#g. 272 et 274). Ils ont le corps allongé et com- primé , une seule nageoire dorsale placée vis-à-vis de l’anale ; point de barbillons et les écailles dures et cornées. Nous en pos- sédons une espèce en Europe, le hrochet commun : c’est l'un des poissons les plus voraces et les plus destructeurs ; il dévore des animaux presque aussi gros que lui . et ne redoute aucun pois- son de rivière , si ce n’est la perche et l’épinoche, dont les épines lui blessent la bouche. Il n’est pas rare de trouver dans le nord de l'Europe des brochets de quatre à cinq pieds de long, et ils peuvent même atteindre une taille beaucoup plus considérable : leur croissance est rapide. Dès la première année, ils ont sou- vent environ un pied de long; à la troisième dix-huit à vingt pouces. Leur longévité parait être très grande. On donne lenom d’ORPHIES (belone) à un autre genre de cette tribu , remarquable par l’allongement du corps et surtout du museau. Une espèce , longue de deux pieds, habite près de nos côtes et mérite d’être signalée à cause de la couleur verte de ses arêtes. Les pêcheurs l’appellent aiguille de mer, broche, etc. Les ExOCETS se distinguent facilement de tous les autres poissons de cette famille par l’excessive grandeur de leurs na- geoires pectorales , qui leur servent pour se soutenir quelques instans dans l'air, comme nous l’avons déjà vu pour les dacty- loptères. On les connait aussi sous le nom de poissons volans. Une espèce est assez commune dans la Méditerranée ,etles mers d'Amérique en nourrissent d’autres. La FAMILLE DES SILUROÏDES difière de tout le reste de l’ordre des malacoptérygiens abdominaux par labsence de véritables écailles (fig. 287). La peau est nue ou bien garnie de grandes plaques osseuses. Presque toujours les nageoires dorsale et pec- torale ont pour premiers rayons une forte épine articulée , et il y a très souvent en arrière une nageoire aüipeuse comme dans la 47. Orphies. Exocets. Famille des siluroides. Tribu des silires. A Silures pro- prement dites. Malaptéru- res. Famille des saimornes. 730 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. famille suivante ; enfin la bouche présente aussi des particula- rités de structure. La plupart de ces poissons composent la TRIBU DES SILURES, reconnaissables à la nudité de la peau , à la bouche fendue au bout du museau et en général à une forte épine , qui constitue le premier rayon de la nageoire pectorale , et qui est articulée avec l’épaule , de facon que le poisson peut à volonté le rappro- cher de son corps ou l’en écarter pour le fixer perpendiculaire- ment et s’en servir comme d’une arme dangereuse. Les SILURES PROPREMENT DITES ont sur le devant du dos une petite nageoire, soutenue par des rayons. Une espèce de ce genre, la seule de toute la tribu que nous possédions , est le plus grand poisson d’eau douce de l’Europe. Sa longueur dépasse ordinairement six pieds et son poids s'élève, dit-on, à trois cents livres. On la trouve dans les rivières de l’Allemagne, de la Hongrie , etc. ; les Suisses la connaissent sous le nom de saluth. La plupart des silures habitent les rivières des pays chauds. Les MALAPTÉRURES ne diffèrent que peu des vraies silures, dont elles se distinguent par l'absence d’une nageoire rayonnée sur le dos et par quelques autres caractères. Le fameux sèZure Fig. 287. MALAPTÉRURE ÉLECTRIQUE. electrique du Nil (fig. 287) est la seule espèce appartenant à cette division : il possède, comme la torpilleet la gymnote, le pouvoir de donner de fortes commotions électriques , et il paraît que le siège de cette faculté est un tissu particulier, situé entre la peau et les museles et ayant l’apparence d’un tissu cellulaire grais- seux. Ce poisson , qui habite le Sénégal aussi bien que le Nil , a dix-huit ou vingt pouces de long. Les Arabes lui donnent le nom de raasck, qui signifie tonnerre. La FAMILLE DES SALMONES, Gont les saumons forment le type, a pour caractère un corps écailleux et une première dorsale à ORDRE DES MALACOPTÉRYGIENS ABUOMINAUX. 751 rayons mous, suivie d’une seconde petite et adipeuse, c’est-à-dire formée d'u repli de la peau contenant de la graisse et dépourvu de rayons : elle se compose de poissons d’un naturel vorace , qui presque tous remontent dans les rivières et ont la chair agréable au goùt. On la divise en un grand nombre de genres, parmi lesquels nous citerons les truites, les eperlans , les ombres. Les TRUITES OU SAUMONS PROPREMENT DITS { salmo) sont de tous les poissons ceux dont la bouche est le plus compiète- ment armée ; car elles ont une rangée de dents pointues aux os maxillaires , intermaxillaires, palatins et mandibulaires , et deux rangées au vomer, sur la langue et sur les os pha- ryngiens. Leur corps est plus ou moins fusiforme , écailleux et presque toujours tacheté; leur ventre est arrondi ; leurs nageoires ventrales répondent au milieu de leur première dorsale , et ladipeuse à Panale ; enfin leurs rayons branchios- tèges sont au nombre d’environ dix. Elles nagent avec une grande facilité et luttent avec avantage contre les courans les plus rapides : elles remontent les rivières pour frayer et ne se laissent pas arrêter par les cataractes qu’elles franchissent en bondissant. C’est dans les eaux les plus pures et les plus vives qu’elles se plaisent, et on en trouve jusque dans les ruisseaux et les petits lacs des plus hautes montagnes. Leur chair est géné- ralement très bonne. La plus grande espèce de ce genre est le saumon , qui atteint quatre ét même six pieds de long. Il a le dos noir, les flancs bleuâtres ou verdätres et le ventre argenté sur les côtés , rouge- jaunâtre sur le côté. Souvent des taches irrégulières brunes se 4oient aussi sur la tête et le dos, mais s’effacent promptement par l'effet du séjour dans l’eau douce ; enfin sa nageoire cau- dale est fourchue et sa chair rouge. Ce grand et excellent poisson habite toutes les mers arctiques , d’où , chaque printemps, il entre en grandes troupes dans les rivières. Dans ces émigra- tions , les saumons suivent un ordre régulier; en formant deux longues files, réunies en avant et conduites par la plus grosse femelle , qui ouvre la marche, tandis que les plus petits mâles sont à l’arrière-garde. Ces troupes nagent en général avec grand bruit, au milieu des fleuves et près de la surface de l’eau , si la température est douce; plus près du fond, si la chaleur est forte. D’ordinaire les saumons avancent lentement et en se jouant ; mais, si quelque danger parait les menacer, la rapi- dité de leur natation devient telle que l’œil a peine à les suivre: dans les eaux tranquilles des lacs , on assure en avoir vu franchir environ vingt-quatre pieds par seconde et parcourir Truites saum0ns. ou 739 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. en une heure un espace de huit à dix lieues. Si une digue ou une cascade s’oppose à leur marche, ils font les plus grands efforts pour la franchir. En s'appuyant sur quelque rocher et en redressant tout-à-coup avec violence leur corps courbé en arc , ils s’élancent hors de l’eau et sautent quelquefois de la sorte à une hauteur de douze à quinze pieds dans l'atmosphère, pour aller tomber au delà de l’obstacle qui les arrétait. Les saumons remontent ainsi les fleuves jusque vers leur source et vont chercher dans les petits ruisseaux et les endroits tran- quilles un fond de sable et de gravier propre à y déposer leurs œufs ; puis, maigres et affaiblis par tant de fatigues , ils redes- cendent en automne vers l'embouchure des fleuves et voni passer l’hiver dans la mer. Les œufs sont déposés dans un en- foncement que la femelle creuse dans le sable. Le mâle vient ensuite les féconder. Les jeunes saumons grandissent très promptement, ei, lorsqu'ils ont atteint la longueur d'environ un pied , ils abandonnent le haut des rivières , pour gagner la mer, qu'ils quittent à leur tour, pour rentrer dans les fleuves, lorsqu'ils sont longs de dix-huit pouces, c’est-à-dire vers le milieu de l’été qui a suivi leur naissance. Nous avons déjà vu que les hirondelles , qui, à l'approche de la saison froide , émi- grent vers le sud, reviennent chaque année dans les mêmes Lieux. Il parait que les saumons ont le même instinct. Pour s’en assurer, un naturaliste, nommé Deslandes , mit un anneau de cuivre à la queue de douze de ces poissons et leur rendit la liberté dans la rivière d’Auzou , en Bretagne. L'année suivante, on reprit dans le même lieu cinq de ces saumons; la seconde année , trois ; et l’année d’après, trois encore. La chair du saumon est très estimée , et dans certaines loca- lités , dans les rivières du nord de l’Europe surtout, la pêche de ce poisson est une branche d'industrie des plus productives et des plus importantes. Il est quelquefois si abondant que d’un seul coup de filet, on en prend plus de trois cents. Dans quelques pays, on se sert du harpon ou du trident pour s'en emparer ; ailleurs, on les pêche avec des lignes ou avec des filets de diverses formes ; mais souvent aussi on établit, en travers des rivières fréquentées par les bans de Saumons, des barrages permanens disposés de manière à les arrêter. Le Becard est une espèce très voisine du saumon , qui se pêche aussi à embouchure de nos rivières ; mais sa chair est plus maigre et moins estimée. Il est tacheté de rouge et de noir sur un fond blanchätre, et a le bout de la mâchoire inférieure bien plus recourbé. ORDRE DES MALACOPTÉRYGIENS ABDOMINAUX. 733 La trœite de mer, àe moindre taille que le saumon et à dents plus gréle$et plus longues , se distingue aussi des espèces pré- cédentes par de pelites taches en forme de croissant, semées sur un fond argenté , et par la couleur jaune de sa chair. Elle est très estimée , et en été on nous en apporte beaucoup. La truite saumonee a la chair rougeâtre et la nageoire caudaie en croissant , comme le saumon ; mais elle a sur tout ie dessus du corps un grand nombre de taches noires, ocellées ou en forme d’X ; elle parvient à une grande taille et pèse quelquefois huit à dix livres. Elle quitte la mer vers le milieu du printemps et remonte les rivières jusque dans les plus hautes montagnes ; les ruisseaux d’eau claire qui se jettent immédiatement dans la mer sont les eaux où l’on pêche les meilleures. La truite commune a la nageoire caudale peu échancrée et la chair blanche : on la distingue aussi aux taches brunes, sur le dos, et rouges , entourées d’un cercle clair sur les flancs , qui se détachent sur un fond dont la nuance varie depuis le blanc et le jaune doré jusqu’au brun foncé. Ce poisson , plus petit que les précédens , n’arrive d'ordinaire qu'à douze ou quinze pouces de longueur, et ne pèse pas une livre; mais queiquefois on en trouve de plus grands. Il est fort rare äans la Seine, mais assez commun dans la plupart des ruisseaux dont l’eau est claire et vive. On connait plusieurs autres truites de rivière qui habitent principalement les lacs et les ruisseaux des montagnes , ei qui varient pour les couleurs et pour la taille dans chaque localité ; quelques naturalistes pensent que ce sont autant d'espèces diffé- rentes; d’autres , que ce sont &e simples variétés résuliant de Pâge, de la nourriture et de la qualité des eaux dans lesquelles ces poissons séjourneni. Les ÉPERLANS (osmerus) ressemblent beaucoup aux iruites, mais n’ont que huit rayons branchiostèges et “eux rangées de dents écartées à chaque palatin. Leur corps est aussi sans taches , et leurs nageoires ventrales sont placées plus en avant. On les prend dans la mer, à lembouchure des grands fleuves , et leur chair est excellente. Les OMBRES ({4ymallus) ont la même structure de mâchoires que les truites ; mais leur bouche est très peu fendue , et leurs dents sont très fines. Elles ont, du reste, à-peu-près les mêmes ha- bitudes , et sont également estimées. L’ombre commune a le corps rayé en long de noirâtre : elle parvient à la taille de dix-huit Énerlans. Ombres. Farmiile des clupes. Tribu des ha- rengs. Harengs pro- prement dits. Hareng com muu. 734 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. pouces, etremonte,au printemps, dans plusieurs des rivières de la France et de Italie. On la rencontre surtout dans les eaux pures et limpides des montagnes de l'Amérique et de la Suisse. L’om- bre chevalier w’appartient pas à ce genre, comme on pourrait le croire d’après son nom , mais à celui des truites. Celles que l’on pêche dans le lac de Genève sont célèbres pour le goût exquis de leur chair. La famille des salmones comprend encore un grand nombre d’autres genres ; mais ces poissons n’offrent pas assez d’intérèt pour nous arrêter ici. La cinquième et dernière famille des malacoptérygiens abdo- minaux , celle des CLUPES , se reconnait en ce que, n’ayant pas de nageoire adipeuse , comme les précédens , sa mâchoire supé- rieure est formée, comme dans les truites , au milieu , par des intermaxillaires sans pédicules , et, sur les côtés , par les maxil- laires. Le corps de ces poissons est toujours très écailleux , et la plupart ne remontent pas dans les rivières. La principale tribu de cette famille est celle des HARENGS, caractérisée par des intermaxillaires étroits et courts et par le bord inférieur du corps , comprimé, et garni d’écaiiles , dispo- sées comme les dents d’une scie. Ces poissons sont remar- quables aussi par la finesse et le grand nombre de leurs arètes , ainsi que par quelques particularités dans la structure de leur appareil branchial. On y range les hurengs proprement dits, les aloses , eic. Les HARENGS PROPREMENT DITS (c/vpea) Ont la lèvre supérieure non échancrée et l’ouverture de la bouche médiocre. Chacun connait le hareng commun , poisson devenu célèbre par limpor- tance des pêches dont il est l’objet. Il habite les mers du nord et arrive chaque année en légions innombrables sur diverses par- ties des côtes de l’Europe, de lAsieet de l'Amérique, mais ne des- cend guère au dessous du quarante-cinquième degré de latitude nord.Quelquesnaturalistes pensentque tous ces bancs de harengs se retirent périodiquement sous les glaces des mers polaires , et partent de cette retraite commune en une immense colonne, qui, en se subdivisant , se répand sur presque toutes les côtes siluées au dessus du parallèle que nous venons d'indiquer. On a ORDRE DES MALACOPTÉRYGIENS ABDOMINAUX. 735 été même jusqu'à tracer sur la carte l'itinéraire de ces poissons ; mais cette longue émigration et ce rendez-vous commun dans les régions arctiques sont loin d’être démontrés, et il y a lieu de croire que les choses ne se passent pas de la sorte. C’est près de nos côtes que les harengs déposent leurs œufs, et il est pro- bable que les jeunes se retirent bientôt dans les grandes profon- deurs de la mer et s’y dirigent vers le nord, où ils doivent ren- contrer en plus grande abondance les petits crustacés et les autres animalcules propres à leur servir d’alimens. Au prin- temps, d’autres besoins les rapprochent du rivage et leur font rechercher des eaux moins profondes et plus chaudes: ils se montrent alors en légions innombrables et descendent vers le sud ; mais , après être arrivés dans la Baltique , sur les côtes de la Hollande et jusque dans la Manche , on ne les voit pas re- prendre la route du nord pour passer lhiver sous les glaces du pôle, et recommencer au printemps suivant leur prétendu voyage périodique. Quoi qu’il en soit, aux mois d’avril et de mai, les harengs commencent à se montrer dans les eaux des iles Schetland, et, vers la fin de juin ou en juillet , ils y arrivent en nombre incal- culable et en formant de vastes bancs serrés, qui couvrent quel- quefois la surface de la mer, dans une étendue de plusieurs lieues et ont plusieurs centaines de pieds d’épaisseur. Peu après, ces poissons se répandent sur les côtes de l’Ecosse et de l'Angleterre. Pendant les mois de septembre et d'octobre, ils y donnent lieu à de grandes pêches; et, depuis la mi-octobre jusque vers la fin de l'année , ils abondent dans la Manche , principalement depuis le détroit jusqu’à l'embouchure dela Seine. En général, ces poissons arrivent chaque année dans les mêmes parages avec une grande régularité : pour ainsi dire à jour nommé ; maïs quelquefois ils abandonnent tout-à-coup certaines eaux et n’y reviennent qu'après une absence de plusieurs années. En juillet et août, ils restent d'ordinaire en pleine mer ; mais ensuite ils entrent dans les eaux peu profondes, et cherchent un endroit convenable pour y déposer leurs œufs , où ils séjournent jusque vers le mois de février. Les harengs les plus vieux fraient les premiers et les jeunes plus tard ; mais la température et d’autres circonstances paraissent influer aussi sur ce phénomène ; car, dans certaines localités , on en trouve d’œuvés pendant presque toute l’année. Après la ponte, ils sont maigres et peu estimés ; les pêcheurs les appellent alors des Larengs gais. Leur multiplication est pro- digieuse : on a trouvé plus de soixante mille œufs dans le ventre d’une seule femelle de moyenne grandeur. On assure que leur frai recouvre quelquefois la surface de la mer dans une grande étendue, et ressemble de loin à de la sciure de bois, qui y serait Sardine, 736 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. répandue. Du reste, on ne sait que fort peu de choses sur le jeune âge de ces poissons. La pêche du hareng est une des plus importantes : elle oceupe chaque année des flottes entières , et jadis elle était poursuivie avec encore plus d'activité. Vers le milieu du dix-septième siècle , les Hollandais n’y employaient pas moins de deux mille bâtimens , et on a évalué à huit cent mille le nombre de per- sonnes que cette branche d'industrie faisait vivre seulement dans les deux provinces de la Hollande et de la Frise occiden- tale. Les Norwégiens , les Américains, les Ecossais , les Anglais et même nos pêcheurs, s’y adonnent aussi en grand nombre , et aujourd’hui encore, bien que son importance soit bien moindre, elle est encore une grande source de richesses pour tout le lit- ioral des mers du nord. Dans nos divers ports , situés entre Dunkerque et embouchure de la Seine, on compte chaque année trois à quatre cents bâtimens montés par environ cinq mille marins , qui s'occupent de la pêche du hareng, et on éva- lue à près de 4 mitlions les produits qu’ils en obtiennent. Cette pêche se fait d'ordinaire avec des filets de cinq à six cents ioises de long, dont le bord inférieur est allourdi par des pierres , tandis que le bord supérieur est maintenu à flot au moyen de barils vides et dont les mailles sont juste assez grandes pour permettre au hareng d'y enfoncer la tête jusqu’au- delà des ouïes , mais ne laissent pas passer les nageoires pecto- rale. Le poisson , en cherchant à vaincre lobstaeie que cette grande cloison verticale oppose à son passage , s'emmaille ainsi et, ne pouvant plus , à cause de ses nageoires et de ses ouïes, ni avancer ni reculer, il reste prisonnier jusqu’à ce que les pécheurs retirent leur filet à bord. Le nombre des harengs qui se prennent de la sorte est quelquefgis si considérable qu’en quelques instans , tout le filet s’en trouve garni et rompt sous leur poids. En général, cette pêche se fait loin du port, ei, pour conserver le poisson , on le sale à bord. Une autre espèce du genre des harengs donne également lieu à des pêches importantes : c’est la sardine, petit poisson, célèbre par l’extrême délicatesse de sa chair. Elle habite POcéan Atlan- tique, la mer Baltique et la Méditerranée. Pendant Fhiver, elle se tient dans les profondeurs de la mer; maïs , vers le mois de juin, elle se rapproche des côtes, réunie en légions immenses. On a vu des bateaux prendre jusqu’à quarante ou même cin- quante mille de ces poissons d’un seul coup de filet. La pêche de la sardine se fait à-peu-près de la même manière que celle du hareng , mais avec des fileis à mailles plus petites , et les pé- ORDRE DES MALACOPTÉRYGIENS ABDOMINAUX. 737 cheurs , afin d'y attirer le poisson, ont l'habitude de jeter de temps en femps à la mer un appät particulier, qu’ils nomment rogue, et qui consiste en œufs de morue conservés à l’aide du sel. Depuis l'embouchure de la Loire jusqu’à l'extrémité de la Bretagne , ce poisson abonde chaque été et donne lieu à des pèches très productives : aussi existe-t-il sur cette côte un grand nombre d’établissemens appelés presses , dans lesquels on s’oc- cupe de la salaison de la sardine. On connaît plusieurs autres espèces de harengs, parmi les- quelles nous citerons le pirhard ou celan, qui ne diffère guère de la sardine que par sa plus grande taille; le Aarenguet, ou esprot dont on fait également des salaisons, et la /anquette, très petit poisson , de la plus belle couleur d'argent, avec une pelite tache noire sur le bout du museau. Les ALOSES se distinguent des harengs proprement dits par une écharcrure au milieu de la mâchoire supérieure. L’alose commune , qui atteint jusqu’à trois pieds de long et n’a pas &e dents visibles, habite aussi nos mers, et remonte, au printemps, les grands fleuves en troupes nombreuses. À cette époque de l'année , sa chair est très bonne; mais , quand on prend ce poisson à la mer, il est sec et de mauvais goût. Les ANCHOIS (engraulis) diffèrent de la tribu des harengs par leur bouche fendue jusque loin derrière les yeux, par le nombre de leurs rayons branchiostèges , qui est de douze ou davantage, et par quelques autres caractères. En général, ils n’ont pas le ventre tranchant. L’anchois vulgaire , long de trois à huit pouces , avec le dos brun-bleuäire, les flancs et le ventre argen- tés , et les écailles tendres et caduques , se pêche en quantités innombrables dans la Méditerranée , et fréquente aussi diver points du littoral occidental de l'Europe depuis lEspagne jusque dans la Baltique. Depuis avril jusqu’en juillet, ce poisson abonde sur nos côtes méridionales , et la pêche s’en fait d’une manière assez singulière. En général on la pratique pendant la nuit, et même on choisit de préférence les nuits les plus ob- scures. Plusieurs bateaux pêcheurs se réunissent ; les uns sont pourvus de grands filets appelés réssoles , qui ont environ deux cents pieds de long sur vingt-cinq à trente de large; d’autres portent une espèce de réchaud en fer, dans lequel on entretient un feu vif et flambant. Ces derniers vont se poster dans les en- droits où ils espèrent rencontrer les anchoïis qui, attirés par la lumière , arrivent en grand nombre et se pressent tout autour A'oses. Ancho:is. Familie des gadoïdes, Morues. 738 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. du bateau ainsi éclairé; à un signal donné par les pêcheurs, les autres bateaux viennent tendre leurs filets tout autour de ce dernier, de manière à le renfermer au milieu d’une grande enceinte circulaire; puis , ces préparatifs terminés , on éteint toui-à-coup le feu , et on bat l’eau pour effrayer davantage les anchoiïs, qui fuient aussitôt , et , interceplés dans leur passage par l’enceinte de filets , s’y emmaillent et deviennent une cap- iure facile. On emploie un très grand nombre de ces poissons comme assaisonnement ; pour les préparer, on leur ôte la tête et les intestins ; puis on les sale. La famille des clupes renferme un grand nombre d’autres genres, dont plusieurs présentent des particularités remar- quables , mais dont nous ne pourrions parler ici sans sortir des limites que nous nous sommes tracées. ORDRE DES MALACOPTÉRYGIENS SUBRANCHIENS. Cette division du groupe des malacoptérygiens a pour ca- ractères des nageoires ventrales attachées sous les pectorales et immédiatement suspendues aux os de l’épaule. Elle se compose des gadoïdes , des pleuronectes , des discoboles et des echeneis. La FAMILLE DES GADOÏDES , qui a pour type la morue et le mer- lan , comprend tous les malacoptérygiens subranchiens dont la forme est régulière et dont la structure extérieure ne présente rien d’anormal. Presque tous ces poissons sont reconnaissables à leurs nageoires ventrales attachées sous la gorge et aiguiséès en pointe. Leur corps est médiocrement allongé et peu com- primé, leur tête bien proportionnée , leurs nageoires toutes molles , leurs écailles peu volumineuses et molles, leur mà- choire et leur vomer armés de plusieurs rangs de dents co- niques et inégales , et leurs ouiïes grandes et garnies de sept rayons. La plupart de ces poissons vivent dans les mers froides ou tempérées , et fournissent en abondance un aliment sain et agréable. Les MORUES se distinguent par l'existence de trois nageoires dorsales et de deux anales ,et d’un barbillon au bout du museau. La morue proprement dite ou cabeliuu a le dos gris, tacheté de ORDRE DES MALACOPTÉRYGIENS SUBRANCHIENS. 739 jaunâtre et le ventre blanc. Sa longueur, à l’âge adulte, est d'environ trois pieds , et son corps, médiocrement allongé com- parativement à sa grosseur, est recouvert d’écailles molles et très petites. On rencontre quelques morues dans nos mers ; mais c’est l'Océan boréal qui est, pour ainsi dire, la patrie de ces poissons , et c’est entre le quarantième et le soixantième degré de latitude nord, qu’ils se trouvent en plus grande abondance. Sur les côtes de la Norwège, dans le voisinage de l'Islande et surtout dans les eaux de Terre-Neuve, on en trouve en nombre incalculable. Pendant lhiver, ils se retirent dans les profon- deurs de la mer ; mais , pendant la saison chaude , le besoin de jeter leur frai et de pourvoir à leur subsistance les rapproche des côtes et des bas-fonds. La manière dont on en fait quelque- fois la pêche peut donner une idée de leur nombre. Sur cer- taines parties des côtes de Terre-Neuve, les pêcheurs , en atten- dant l’arrivée des capelans, dont ils se servent d'ordinaire comme d’appât , se bornent à jeter leurs lignes sans amorce et à les retirer brusquement, de manière à accrocher avec leurs hamecons les morues qui se trouvent à leur portée, et cette manœuvre suffit pour leur procurer une pêche abondante.Dans quelques localités , on fait la pêche de la morue au moyen de seines de quatre à cinq cents pieds de long ; mais, en général, on n’emploie que la ligne et on amorce les hamecons , soit avec des capelans, soit avec du hareng, des encornets, etc. Un pêcheur habile peut prendre ainsi jusqu’à quatre cents morues par jour. Pour conserver le poisson , on le prépare de diverses manières. Tantôt on se borne à le saler, et on l’appelle alors dans le com- merce morue verte ; d'autres fois on le fait sécher sans l'avoir salé , et il porte alors le nom de stockfish ; enfin , d’autres fois encore, on le sale et on le fait ensuite sécher au soleil, pour être livré au commerce sous la dénomination de morue sèche. La pèche et la préparation de la morue sont une des branches d'industrie maritime les plus importantes. Chaque année elle emploie environ douze mille de nos marins, et, en Angleterre de même qu'en Amérique, elle a pris un développement bien plus grand. Une partie de nos bâtimens pêcheurs se rendent sur le Dogger-Bank et sur les côtes de l'Islande; mais plus des deux tiers de nos armemens , ainsi que tous ceux des Américains, et presque tous ceux de l'Angleterre , sont destinés à la côte de Terre-Neuve ou au grand banc du même nom. Une seconde espèce de morue , qui abonde également dans le nord, mais qui est d’un goùt moins agréable, est l’égrefin : on le distingue à son dos brun , à la ligne latérale noire et à la tache Merlans. Merluches. Lottes. 520 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. de même couleur, située derrière la nageoiïre pectorale. Quand ce poisson est salé, on le nomme Yadow, d’après son nom anglais kadok. Le dorsch ou petite morue, que l’on appelle à Paris faux merlan ; est tachetée comme la morue proprement dite, mais est en général plus petite, et a la mâchoire supérieure plus longue que inférieure : on la pêche aussi dans nos mers, et sa chair est estimée. Les merLAxs ont le même nombre de nageoires que les mo- rues, mais manquent de barbilions. Le merlan commun , long d’environ un pied , argenté en-dessous , gris-roussâtre ou oli- vâtre en-dessus , est reconnaissable à sa mâchoire supérieure , plus longue que l’inférieure : il habite les mers d'Europe et se fait rechercher par la légèreté de ‘sa chair blanche et dé- licate. On le trouve pendant toute l’année; mais il se rencontre taniôt en mer, tantôt près des côtes, où il se montre quelquefois en troupes extrêmement grandes. Le rnerlan noir, qui est plus connu sur nos côtes sous les noms de colin, de grelin, de charbon- nier, etc. , devient du double plus grand que l'espèce précédente et en diffère aussi par sa mâchoire supérieure , plus courte que l'inférieure , et par sa couleur brune-foncée. Il est très commun sur les côtes de l'Océan , et, lorsque la guerre maritime em- pêche nos marins de se rendre dans les parages fréquentés par la morue , il devient l'objet d’une pêche active. Dans divers ports de la Bretagne, on le fait saler et on le sèche comme la morue. Le lieu ou merlan jaune, qui vit aussi en grandes troupes dans l'Océan Atlantique et qui appartient au même genre, se conserve de la même manière et est plus estimé : il est presque de la taille du merlan noir et a les flancs tachetés. Les MERLUCHES manquent de barbillons comme les merlans, mais en diffèrent , ainsi que des morues , par le nombre de leurs nageoires ; car ils n’en ont que deux sur le dos et une seule der- rière l'anus. L'espèce commune , appelée merlus, se pêche en égale abondance dans l'Océan et dans la Méditerranée, où les Pro- vençaux lui donnent le nom de merlsn : elle a un ou deux pieds de long , et queiquefois davaniage. Le genre des LOTTES (/ot«) à pour caractère des nageoires en même nombre que les merlueches et des barbillons. On y range la lingue, appelée quelquefois morue longue, qui dans les mers du Nord, est presque aussi abondante que la morue proprement dite ,et qui se prépare de la même manière : sa longueur est de trois à quatre pieds ou même davantage. La lotte commune difière des autres gadoïdes par la forme presque cylindrique de pu ORDRE DES MALACOPTÉRYGIENS SUBRANCHIENS. 741 son Corps , par sa tête déprimée el par ses mœurs : c’est le seul poisson degette famille qui remonte avant dans les eaux douces. Sa chair est fort estimée. La deuxième famille des malacoptérygiens subranchiens se compose des PLEURONECTES , appelés vulgairement Poissons PLATS, et ainsi nommés à cause de la manière dont ils nagent sur le côté et de leur forme singulière. Ces poissons ont en effet le corps très comprimé latéralement et très clevé; mais ce qu'ils offrent de plus remarqua- ble est le défaut de symé- Fig. 288. LA SOLE. irie de leur tête , caractère qu'aucun autre animal veriébré ne partage avec eux. Leurs deux yeux sont placés du même côté, lequel reste supérieur quand Vanimal nage, et est fortement coloré, tandis que le côté opposé , où les yeux manquent, est toujours blanchâtre. Les deux côtés de leur bouche sont inégaux , et il est rare que les deux nageoires pectorales soient exactement semblables; mais , du reste, leur corps est disposé à-peu-près comme d’or- dinaire. Leur nageoire dorsale règne tout le long du dos, et l'anale occupe presque tout le bord inférieur du corps. Ils se tiennent en général au fond des eaux comme appliqués contre le sable ou la vase, et s’y glissent , pour ainsi dire , à plat : aussi, pour les prendre , se sert-on principalement de filets trainans. Cette famille se compose des plies , des turbots, des soles et de quelques autres genres moins importans. Les PLIES (pZatessa) ont une forme rhomboïdale: leur nageoire dorsale ne s’avance que jusqu’au-dessus de læi supérieur et laisse , aussi bien que lanale , un intervallenu entre elle et la caudale. Leurs mächoires sont armées d’une rangée de denis tranchantes et ob- tuses ; leurs os pharyn- giens sont en général garnis de denis en pavés: enfin leurs yeux sont Fig. 189. LA PLIE COMMUNE. presque toujour s situés à droite. Famille des pleuronectes. Dies. Fletars. Turbots. 742 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. La plie commune Où plie franche est reconnaissable à six ou sept tubercules , formant une ligne sur le côté droit de la tête, entre les yeux, et aux taches aurores , qui relèvent le brun de ce côté du corps: elle est trois fois aussi longue que haute , et ses écailles sont minces et molles. Sa chair est fert tendre et très estimée : son poids s'élève quelquefois jusqu’à seize livres. Elle est commune sur nos côtes, mais abonde en nombre encore plus considérable sur celles de la Hollande. Les jeunes plies sont appelées vulgairement carrelets. Le flet , appelé aussi picaud ou flonder, ressemble assez à la plie franche, mais n’a que des petits grains entre les yeux , et porte tout le long de ses nageoires dorsale et anale un petit bouton àpre sur la base de chaque rayon. Il habite nos mers et remonte fort loin dans les rivières. Dans beaucoup d'individus, les yeux sont tournés à gauche, au lieu d'occuper le côté droit de la tête. Une autre espèce de plie, la Zimandz, a le corps plus haut comparativement à sa longueur et une ligne saillante entre les yeux. Ses écailles sont plus âpres qu’aux espèces précédentes , ce qui lui a valu son nom (1); ses dents sont plus étroites ; enfin le côté des yeux est brun-clair, avec quelques taches effacées, brunes ei blanchâtres. Cette espèce est commune sur nos côtes, et, quoique petite , on l’estime à Paris plus que la plie franche, parce qu’elle supporte mieux le transport. C’est vers la fin de l'hiver ou au commencement du printemps que sa chair est le plus agréable; car, à l’époque du frai, qui a lieu plus tard, elle a moins de saveur et de fermeté. On donne le nom de FLETANS (Aëppoglossus) à des pleuronectes très voisins des précédens , mais qui ont les mächoires et le pharynx armés de dents fortes et aiguës. Les mers du nord en nourrissent une espèce qui atteint six à sept pieds de long, et pèse jusqu’à trois ou quatre cents livres. Lés TURBOTS (rhombus) se distinguent par la disposition de leur nageoire dorsale , qui s’avance jusque vers le bord de la (1) De Lima, lime, ORDRE DES MALACOPTÉRYGIENS SUBRANCHIENS. 743 mâchoire supérieure, et règne, ainsi que l’anale, jusque tout près . de la caudale; la plupart ont les yeux à gauche ;en- fin ils ont des dents en carde ou en velours aux mäâchoires et au pharynx. Le turbot proprement dit a les yeux rapprochés, le corps rhomboïdal , pres- que aussi haut que long et hérissé , du côté brun , de Fig. 290. LE TURBOT. petilstubercules : ilatteint d'assez grandes dimensions, et se pèche sur toutes nos côtes. Il est extrêmement vorace et aime à se cacher dans la vase , pour s'emparer plus facilement de sa proie: aussi fréquente-t-il sou- vent l'embouchure des fleuves ou Fentrée des étangs qui com- muniquent avec la mer. C’est de tous les poissons plats le plus estimé. Pour se le procurer, les pêcheurs se servent en géné- ral de lignes de fond , qui sont d’une longueur extrême , et portent quelquefois plus de deux mille hamecons , amorcés avec des morceaux de harengs et des petits poissons encore vivans. La barbue appartient au même genre et se distingue facile- ment à la forme plus ovalaire de son corps , qui est dépourvu de tubercules , et aux premiers rayons de la nageoire dorsale, qui sont à moitié libres et ont leur extrémité divisée en plu- sieurs lanières. Le côté gauche de son corps est marbré de jaunâtreet de rougeâtre sur un fond brun. Elle pèse souvent près d’une vingtaine de livres et est très commune sur nos côtes. Sa chair, comme chacun le sait, est très estimée. Les SOLES/solea)sont de forme oblongue (fig. 288, pag. 741) : leur museau est rond et saillant ; leur nageoire dorsale s’étend depuis la bouche jusqu’à la caudale , la ventrale rejoint aussi cette dernière; mais le caractère le plus remarquable de ces poissons consiste dans la conformation de leur bouche , qui, du côté opposé aux yeux , est contournée et comme mons- trueuse , et qui présente de ce côté des dents fines en velours serré , tandis que , du côté opposé, il n’en existe pas de traces. La sole commune est brun-olivàètre du côté droit , grisätre à gauche. Sa nageoire caudale est arrondie et son corps est couvert décailles tenaces. Elle est lrès répandue et se trouve assez abondamment sur nos côtes , principalement à lembou- 48 Soles. Achires. Famille des discoboles. Ech:neis. 744 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. chure des fleuves : on la pêche souvent au harpon dans les eaux peu profondes. C’est un de nos meilleurs poissons. On donne le nom d’ACHIRES à des pleuronectes assez sem- blables aux soles , mais qui diffèrent de tous les précédens par l'absence de nageoires pectorales. La FAMILLE DES DISCOBOLES se compose d’un petit nombre de malacoptérygiens subranchiens , qui ont les nageoires ven- trales réunies en forme de disque.On y range les PORTE-ÉCUELLES, petits poissons dontles nageoires pectorales s’unissent entreelles sous la gorge au moyen d’une membrane et constituent une sorte de disque concave au-devant de celui formé par les nageoires ventrales. Nos mers en possèdent plusieurs espèces. Les CYCLOP- TÈRES , qui se rangent dans la même division ,ontles rayons de leurs nageoires ventrales suspendus tout autour du bassin et réu- nis par une seule membrane formant un disque ovale et concave, dont le poisson se sert comme d’une ventouse, pour se fixer aux rochers. Le /umph, appelé vulgairement grus mollet, appartieni à ce dernier genre. Enfin la petite FAMILLE DES ÉCHENEIS, formée d’un seul genre, est remarquable entre tous les poissons par un disque aplati, qui recouvre la tête (fig. 292)et qui se compose d’un certain nombre de James cartilagineuses iransversales , dirigées obliquement en arrière, et mobiles , à l’aide des- quelles l'animal peut se Fig. 291. LE REMORA. fixer aux différens corps sur lesquels il applique ce singulier instrument. Souvent il s'attache ainsi aux rochers , aux vaisseaux et à d’autres pois- sons , surtout au requin. Une espèce , qui vit dans la Méditer- Fig. 292. ranée et l'Océan, est depuis long-temps célèbre sous le nom de remora, et son his- toire a été chargée de fables. On a prétendu que ce petit poisson se nourrissait par l’es- pèce de succion qu’il exerce avec le disque dont nous venons de parler, et on lui a attri- buéle pouvoir d'arrêter subitementla course du vaisseau le plus rapide. Une espèce, voi- sine de la précédente, est très commune dans les eaux de l'Ile-de-France, et il parait que, sur les côtes ORDRE DES MALACOPTERYGIENS--APODES. 745 de la Cafrerie , on l’emploie à la pêche , en le lächant à la pour- suite des poissons et en le ramenant à l’aide d’une ligne attachée à sa queue , aussitôt qu’il s’est fixé sur sa proie. ORDRE DES MALACOPTÉR Y GIENS-APODES. Les malacoptérygiens-apodes ont ious une forme allongée et une peau épaisse , molle et peu écailleuse ; mais leur caractère principal est le défaut de nageoires ventrales. Ils ne forment qu'une seule famille naturelle, celle des ANGUILLIFORMES , qui se compose de la tribu des anguilliens, des gymnotes , des don- zelles , des equilles , etc. La TRIBU DES ANGUILLIENS à le corps long et grèle , les écailles Auguilliens. comme encroûtées dans une peau grasse et épaisse ; enfin l’oper- cule petit, entouré circulairement par les rayons branchios- tèges, qui sont enveloppés dans la peau, et ne s’ouvrent que fort en arrière par un trou ou une espèce de tuyau, disposition qui , abritant mieux les branchies , permet à ces poissons de de- meurer quelque temps hors de l’eau sans périr. On subdivise ce groupe en anguilles, murènes, etc. Les ANGUILLES (muræna) Ont pour caractère d’avoir des na- Anguilles. geoires pectorales et de présenter les ouvertures des ouïes sous ces nageoires. Celles qui ont les nageoires dorsale et caudale prolongées autour du bout de la queue, de manière à former par leur réunion une nageoire caudale pointue , sont désignées sous le nom d’ANGUILLES PROPREMENT DITES , et se subdivisent encore en ANGUILLES ORDINAIRES et en CONGRES, suivant que leur nageoire dorsale commence loin en arrière des pectorales ou près de ces organes. Nos anguilles communes appartiennent à la première de ces Angailles subdivisions. Chacun connaît la forme générale de ces poissons. ‘rues. Leur couleur varie suivant l’âge , et, à ce qu'il parait, suivant la qualité des eaux où ils vivent. Ceux qui habitent les eaux limpides ont le dos verdätre , rayé de brun et le ventre argenté, tandis que ceux que lon pêche dans la vase sont d'ordinaire brun-noirâtre en dessus et jaunäâtre en dessous. La forme de leur museau varie aussi , et les pêcheurs assurent que ces différences caractérisent quatre espèces distinctes, qu’ils désignent sous les 48. Murènes pro- prement dites. 746 ZOGLOGIE DESCRIPTIVE. noms d’anguille verniaux , d'ançguille long-bec , d'anguille plat- bec et d’anguille pinperneaux , mais les naturalistes les confon- dent encore sous la dénomination d’anguille vulgaire. On en trouve dans presque tous les pays. Elles sont très voraces et dune agilité extrême ; elles nagent également bien en arrière et en avant , et leur peau est si glissanie, qu’on ne peut que difficilement les saisir. Pendant une grande partie de leur vie, elles habitent les eaux douces et fréquentent les étangs et les mares aussi bien que les rivières. Le jour, elles se tiennent presque toujours enfoncées dans la vase ou cachées dans des trousqu’elles se creusent près du rivage. Ces trous sontquelquefois très vastes et logent un grand nombre d’anguilles ; mais, en général, leur diamètre est petit, et ils s'ouvrent au dehors par leurs deux extré- mités, ce qui permet à l’animal qui l’habite de s'échapper plus facilement lorsque quelque danger lPy menace. Quand la saison est très chaude et que Peau siagnante des étangs commence à se corrompre , les anguiiles quittent le fond et se cachent sous les herbes du rivage, ou mèmese metient en voyage pour aller , aira- vers les terres, chercherune localité plus favorable: elles peuvent en effet ramper sur le sol à la manière des serpens et rester long- temps à Pair sans périr. C’est ordinairement pendant la nuit qw’elles font ces voyages singuliers, et quand la sécheresse est extrême , elles s’enfoncent dans la vase, pour y rester enfouies jusqu’à ce que l’eau soit revenue. Le temps qu’elles peuvent y demeurer sans périr est tout-à-fait surprenant. On a vu de ces poissons rester des mois et même des années cachés dans la vase des étangs desséchés ou dans des trous privés d’eau, et cependant se montrer agiles, dès qu’ils retrouvaient leur élé- ment naturel. Du reste, cette circonsiance n’est pas la seule dans laquelle ces poissons montrent une force de vitalité bien remarquable. On peut les dépouiller de leur peau et de leurs viscères , et les couper en morceaux , sans que le tronçon de leur corps cesse pendant long-iemps encore de se mouvoir. C’est au printemps que les jeunes anguilles quittent d'ordinaire la mer pour vivre dans les eaux douces , et elles n’y retournent qu’à l’âge adulte; on donne souvent le nom de montee aux pe- tites anguilles qui entrent ainsi par myriades dans lembou- chure de certaines rivières. Les MURÈNES PROPREMENT DITES manquent tout-à-fait de nageoires peciorales , et leurs branchies s'ouvrent, de chaque côté , par uu petit trou. L'espèce la pius célèbre est la #urène commune, qui atteint plus de trois pieds de long, et est toute marbrée de brun et de jaunâtre : elle est très répandue dans la ORDRE DES MALACOPTÉRYGIENS-APODES. 747 Méditerranée et était fort estimée des anciens. Les Romains en élevaient fn grand nombre dans leurs magnifiques viviers, et se plaisaient à orner ces poissons de nijoux précieux et à les accoutumer à accourir à la voix de leur maître. Hirrius fut le premier qui consacra des viviers uniquement aux murènes , et, dans un repas qu’il donna à César, qui venait d’être nommé dictateur, il fit servir six mille de ces poissons. D’autres anguilliens , voisins des précédens, sont privés de nageoires verticales aussi bien que de nageoires latérales , et par conséquent manquent complètement de ces organes : on leur a donné le nom d’APTÉRICHTES. On a long-temps rangé dans la même tribu les GYMNOTES, qui ont les ouies en partie fermées par une membrane, mais s’ouvrant au-dexant des nageoires pectorales. Les GYMNOTES PROPREMENT DITES (gymnoles) ont, comme les autres poissons de cette division, une ventrale, qui règne sous la plus grande partie du corps, mais elles manquent de nageoires au bout de la queue, et leur peau est sans écailles sensibles. Elles habitent les rivières de l'Amérique méridionale, et l’une d’elles, la gymnoteclectrique, appelée vulgai- rement l’anguille electrique, est célèbre par les violentes commo- tions électriques qu’elle a la faculté de donner à volonté et dans la direction qu’elle choisit. Ce poisson atteint cinq ou six pieds de long ; son corps est allongé et tout d’une venue, et sa peau est enduite d’une matière gluante: il est très commun dans les petits ruisseaux et les mares que l’on rencontre çà et là dans les plaines immenses situées entre la Cordilière , POrénoque et la Bande-orientale , et on le trouve aussi dans le Méta, l'Apure, lOrénoque, etc. Les commotions électriques qu’il donne suf- fisent pour abattre les hommes et les chevaux, et la gymnote a recours à ce moyen pour se défendre contre ses ennemis, et pour tuer dc loin les poissons dont elle veut se repaitre ; car l’eau, ainsi que les métaux, transmet le choc engourdis- sant de ce singulier animal de la même manière que les para- ionnerres conduisent, de l'atmosphère dans la terre, l'électricité des nuages. Ses premières décharges sont en général faibles ; mais , quand il est irrité et agité , elles deviennent de plus en plus vives et sont alors terribles. Lorsqu'il a frappé ainsi à coups redeublés , il s’épuise eta besoin d’un repos plus ou moins prolongé avant que de pouvoir donner de nouveaux chocs. On dirait qu’il emploie ce temps à charger ses organes électriques , et les Américains profitent de cette circonstance pour le prendre Aptérichtes Gywnotes. Equilles. Syngnathes. 748 ZOCLOGIE DESCRIPTIVE. sans danger. Pour faire la pêche des gymnotes, ils font entrer de force , dans les étangs habités par ces poissons, des chevaux sauvages, qui, recevant les premiers chocs, sont bientôt étour- dis et abattus ou même tués ; ensuite ils s'emparent des gym- notes épuisées avec des filets ou avec le harpon. L'appareil à l’aide duquel la gymnote produit ces commo- tions électriques règne lout le long du dos et de la queue, et consiste en quaire faisceaux longitudinaux , composés d’un grand nombre de lames membraneuses parallèles et très rap- prochées entre elles, qui sont à-peu-près horizoniales et unies par une infinilé d’autres lamelles plus petites , placées verticalement en travers ; les petites cellules prismatiques et transversales , formées par la réunion de ces lames , sont rem- plies d’une matière gélatineuse ; enfin tout l'appareil reçoit des nerfs très gros. Les EQUILLES ont, outre les nageoires dorsale et anale, une caudale fourchue et séparée des précédentes par un espace lisse. Leur museau est aigu et leur corps allongé comme les précé- dens. Nos côtes en produisent deux espèces , l’eguille et le Zan- con , qui se tiennent dans le sable, d’où on va les enlever quand la mer se retire. ORDRE DES LOPHOBRANCHES. Les lophobranches ont les mächoires complètes et libres, comme tous les poissons dont il a déjà été question ; mais leurs branchies , au lieu d’avoir, comme d'ordinaire , la forme de dents de peigne, se divisent en petites houppes rondes , dispo- sées par paires le long des arcs branchiaux. L’appareil opercu- laire qui recouvre ces organes présente aussi une structure particulière : il esi attaché de toutes parts par une membrane qui ne laisse qu’un petit trou pour la sortie de l’eau, et on n’y trouve que des vestiges de rayons branchiostèges. Enfin ces poissons se reconnaissent , en outre, à leur corps, presque sans chair et cuirassé d’une extrémité à l’autre par des écussons qui le rendent presque toujours anguleux. Cet ordre ne renferme que les syngnathes et les pegases. Les SsYNGNATHES ont le museau tubuleux et formé à-peu-près ste ORDRE DES PLECTOGNATHES. 349 comme celui des Bouches-en-fiûte ; le trou de la respiration est vers la nuque et ils manquent de nageoires ventrales. Ces pois- sons sont remarquables par lespèce de poche formée par une boursouflure de la peau du ventre ou du dessous de la queue, et servant à loger les œufs pendant toute la durée de leur déve- loppement ; lorsque les petits sont nés , cette peau se fend pour les laisser sortir. (1) Les SYNGNATHES PROPREMENT DI1S sont appelés vulgairement aiguilles de mer à cause de la forme allongée et mince de leur corps : on en trouve plusieurs espèces sur nos côles. Les HiPpoCAMPES sont des syngnathes dont le tronc est com- primé latéralement et notablement plus élevé que la queue. En se courbant après la mort, ce corps et la tête prennent quelque ressemblance avec l’encolure d’un cheval en miniature , ce qui a valu à ces petits poissons le nom vulgaire de chevaux marins. Enfin les PÉGASES habitent la mer des Indes et se distinguent des précédens par leur corps large et déprimé, la position de la bouche , etc. ORDRE DES PLECTOGNATHES. Les poissons dont se compose ce groupe établissent le passage entre les poissons ordinaires et les poissons cartilagineux , tant par la conformation de leurs mächoires que par le durcissement tardif de leur squelette. Leur principal caractère distinctif tient à ce que l’os maxillaire est soudé ou attaché fixement sur le côté de l’intermaxillaire, qui forme seul la mâchoire , et à ce que l’arcade palatine s'articule avec le crâne , de manière à ne conserver aucune mobilité. Leurs opercules et les rayons bran- chiostèges sont , en outre , cachés sous une peau épaisse, qui ne laisse à l'extérieur qu’une petite fente branchiale; ils n’ont pas de vraies nageoires ventrales ; enfin ils n’ont que des ves- tiges de côtes. Cet ordre comprend deux familles reconnais- sables à l’ouverture de leur bouche, savoir : les gymnodontes et les sclérodermes. (x) D'après quelques observations récentes, il paraîtrait que c’est le mâle et noa la femelle qui est pourvu de cette poche ovifère. Syngnatkes proprement dits. Hip pocam- pes. Pégases. 750 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. Famille des Dans là FAMILLE DES GYMNODONTES il n’y a pas de dents appa- BPPOOERE: rentes ; mais les mâchoires sont garnies d’une espèce de bec d'ivoire , divisé intérieurement en lames , qui représentent les dents. On y range les diodons , les tétrodons , les môles, etc. Diodons. Les DIODONS ont reçu ce nom, parce que leurs mâchoires, imdivises, ne présentent chacune qu’une seule pièce, tandis que, chez les TÉTRODONS , elles sont divisées dans leur milieu par une suture , de manière à présenter l'apparence de quatre dents: deux en dessus et deux en dessous. Ces deux genres de poissons ont la faculté de se gonfler comme des ballons, en avalant de l'air et en distendant ainsi un premier estomac très extensible, qui occupe toute la longueur de labdomen. Cette particularité leur à valu les noms vulgaires de bowrsouflus et d’orbes et leur fournit un moyen de défense ; car, lorsque leur peau est disten- due , les épines dont elle est garnie se relèvent de toutes parts et hérissent toute la surface de leur corps; enfin , quand ils sont ainsi gonflés , ils culbutent : leur ventre prend le dessus , et ils flottent à la surface de la mer sans pouvoir se diriger. C’est chez les diodons ou orbes épineux que celte armature cutanée est le plus développée. La peau est toute recouverte de gros aiguillons pointus , de façon que lorsqu'ils sont enflés , ils ressemblent au fruit du marronnier. On les trouve en assez grand nombre dans les mers des pays chauds. Môles. Les MÔLES (carthagoriseus) appelés vulgairement poissons-lunes, ressemblent aux diodons par la disposition de leurs mâchoires: mais leur corps, comprimé et d’une forme bizarre, n’a pas d’épines et n’est pas susceptible de s’enfler; enfin leur queue est si Courte et si haute verticalement, qu’ils ont l’air de pois- sons , dont on aurait coupé la partie postérieure. Une espèce, qui atteint quelquefois plus de quatre pieds de long et qui pèse au-delà de trois cents livres , habite nos mers. Famille des La FAMILLE DES SCLÉRODERMES se distingue aisément par le sclérodermes. museau conique ou pyramidal , prolongé depuis les yeux et terminé par une petite bouche , armée d’un petit nombre de dents distinctes. Leur peau est généralement âpre'ou revêtue d’écailles dures. Balistes. Les uns , nommés BALISTES , ont le corps comprimé et cou- L: CHONDROPTERYGIENS OU POISSONS CARTILAGINXEUX. 251 vert d’une peau écailleuse ou grenue , mais non osseuse: ils ont huit dents, ên général tranchantes, disposées en une seule rangée à chaque mâchoire , et deux nageoires dorsales. Ils se trouvent en grand nombre dans la zone torride. Les autres , appelés COFFRES (ostracion), ont , au lieu d’écailles , des compartimens osseux et réguliers, soudés entre eux de facon à former une sorte de cuirasse inflexible , qui leur revêt la tête et le corps , et ne laisse de mobile que la queue, les nageoires et la bouche. SECONDE SÉRIE. — CHONDROPTÉRYGIENS, ou POISSONS CARTILAGINEUX. Les poissons dont il nous reste à parler diffèrent, à plusieurs égards, de tous ceux dont nous venons de traiter, et présentent dans leur structure moins d’uniformité. Les uns ont des organes même plus compliqués que ces derniers et se rapprochent davantage des reptiles , tandis que d’autres établissent en quelque sorte le passage entre les animaux vertébrés et les animaux des classes inférieures. Leur squelette est essentiellement cartilagineux: il ne s’y forme pas de fibres osseuses, et la matière caleaire qui en durcit la surface , ne s’y dépose que par petits grains. Quelquefois même cesquelette est simplement membraneux, et il présente toujours, dans sa conformation , plus de simplicité que chez les poissons osseux. On y remarque aussi une ressemblance très grande avec le squelette encore cartilagineux des tétards. Le crâne n’est pas divisé par des sutures et ne se compose que d’une seule pièce, mo- delée d’ailleurs et percée à-peu-près comme le crâue d’un poisson ordinaire. La mâchoire supérieure est formée par des pièces analogues aux os palatins ou au vomer ; les maxillaires et les intermaxillaires n’existent pas ou ne se trouvent qu’à l’état de vestiges , cachés sous la peau. La mâchoire inférieure n’a éga- lement qu’une pièce de chaque côté , et l'appareil operculaire manque en général complètement. La colonne vertébrale est quelquefois formée en grande partie d’un seul tube , percé de chaque côté pour le passage des nerfs , mais point divisé en vertèbres distinctes ; souvent aussi le corps des vertèbres est percé de part en part, de façon que la substance gélatineuse Coffres. Esturgeous. 752 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. qui remplit les intervalles de ces os forme un cordon continu. Quant à la disposition des os de l’épaule, du bassin et des nageoires , elle varie. L'appareil hyoïdien qui supporte les branchies est en général conformé à-peu-près de même que chez les poissons ordinaires ; mais , dans les derniers degrés de cette série, les arcs branchiaux manquent et les branchies ne sont fixées, du côté interne , qu'aux parois d’un canal mem- braneux. Le mode d’organisation de ces organes présente , du reste, des modifications remarquables. Tantôt les branchies sont libres à leur bord externe, comme chez les poissons osseux ; tantôt, au contraire , elles sont attachées par ce bord aussi bien que par leur bord interne , et cette différence sert de base à la division des poissons cartilagineux en deux groupes. savoir : les chondropterygiens à branchies libres , qui constituent un seul ordre , et les chondropterygiens à branchies fixes , qui en forment deux , les seZaciens et les cyclostomes. ORDRE DES CHONDROPTERYGIENS A BRANCHIES LIBRES OU STURIONIENS. Les sturioniens , qui ont pour iype l’esturgeon , ressemblent aux poissons ordinaires par la disposition de leurs ouïes aussi bien que par leurs branchies libres : ils ont, de chaque côté, une seule ouverture branchiale , qui est garnie d’un opercule, mais qui manque de rayons. Les ESTURGEONS (acipenser) ont aussi la forme générale des poissons osseux, et, par la conformation de leur squelette, ils éta- blissent le passage entre ceux-ci et les Chondroptérygiens; car Fig. 293. LE GRAND ESTURGEON. plusieurs des os de leur têteet tous ceux de Pépaule sont complè- tement durcis et comme pierreux à la surface. Leur mâchoire supérieure se compose des palatins soudés aux maxiliaires,eton ORDRE DES CHONDROPTÉRYGIENS A BRANCHIES LIBRES. 753 trouve dans d'épaisseur des lèvres des vestiges des intermaxil- laires. Leur Corps est plus ou moins garni d’écussons implantés sur la peau en rangées longitudinales ; leur bouche est petite et dépourvue de dents; leur nageoiïire dorsale est située en arrière des ventrales et au-dessus de lPanale; enfin la caudale entoure l'extrémité de la queue et a en dessous un lobe saillant. Ces pois- sons sont en général de grande taille et sont doués d’une force musculaire très considérable : ils remontent facilement les courans les plus rapides et peuvent donner avec leur queue des coups violens ; mais ils ont d'ordinaire des habitudes pai- sibles et ne sont guère redoutables que pour les poissons petits ou mal armés: ils se nourrissent de harengs , de maquereaux , quelquefois de saumons , et on les voit quelquefois fouir avec leur museau dans la vase, pour y chercher des vers et des mollusques. Au printemps ils remontent en abondance de la mer dans certaines rivières, souvent par troupes nombreuses, et y déposent leurs œufs. Leur fécondité est très grande : on assure avoir trouvé près de quinze cent mille œufs dans une femelle du poids de deux cent soixante-dix-huit livres, et que, dans une autre, pesant deux mille huit cents livres , les œufs à eux seuls en pesaient huit cents. Les jeunes paraissent Rene promptement la mer et y rester Jusqu'à l’âge adulte. La chair de la plupart de ces poissons est agréable, et on prépare avec leurs œufs un aliment très recherché dans le nord et connu sous le nom de caviar ; enfin c’est principalement avec leur vessie nata- toire que se fait l’échthyocolle ou colle de poisson. On connait plusieurs espèces d’esturgeons : il s’en trouve dans l'Europe occidentale et dans le nord de l'Amérique ; mais c’est surtout dans les grandes rivières de la partie orientale de l'Eu- rope et du nord de l’Asie qu’ils abondent et qu’ils donnent lieu à des pêches importantes. L’esturgeon ordinaire , long de six à sept pieds , à museau pointu et à cinq rangées d’écussons forts et épineux, entre dans nos grands fleuves vers le mois d’avril et remonte en troupes nombreuses le Danube , le Don et plu- sieurs affluens de la mer Caspienne. Le hausen Où grand estur- geon , qui atteint douze à quinze pieds de long et pèse souvent plus de douze cenis livres , quelquefois même près de trois milliers, se voit quelquefois dans le Pô; mais ne fréquente d'ordinaire que le Danube, le Don, le Volga et les autres fleuves qui débouchent dans les ee tags Il y entre en grandes iroupes dès la fin de l'hiver, et, aussitôt après le frai, étude à la mer, où ses petits le SAR bientôt. Sa chair est moins estimée que celle de lesturgeon ordinaire ; mais c’est principa- lement avec ses œufs et avec sa vessie natatoire que l’on prépare le caviar et l’ichthyocolle. On le distingue de ce dernier par ses Polyedous, Clhimcéres, 754 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. boucliers plus émoussés , son museau plus court et sa peau plus lisse. Le sterlet où petit esturgeon , qui ne passe guère deux pieds de long , et qui a ses boucliers osseux disposés par rangées plus nombreuses que les espèces précédentes , habite aussi les fieuves affluens des mers Noire et Caspienne , et passe pour être un mets des plus délicats : c’est probablement lélops et l’acèpen- ser, Si Célèbre chez les Romains. On donne le nom de POLYODONS (spatwlaria) à des poissons du Mississipi, qui ont de l’analogie avec les esturgeons et qui sont remarquables par un énorme prolongement du museau , auquel les bords élargis donnent la figure d’une feuille d’arbre, Enfin les CHIMÈRES établissent le passage entre tous les précé- dens et les squales , auxquels elles ressemblent par la forme générale de leur corps. CHONDROPTÉRYGIENS A BRANCHIES FIXES. Les poissons cartilagineux dont il nous reste à parler et doni se composent les deux ordres des Sélaciens et des Cyclos- tomes , présentent un caractère commun très remarquable dans H disposition de l'appareil respiraioire. Au lieu d’avoir les branchies libres par leur bord externe et suspendues dans une cavité commune , d’où l’eau s'échappe au dehors par une seule ouverture , ils les ont, au contraire, adhérentes aux tégumens , de sorte que, pour la sorte de Peau qui les a baignées , il faut autant d'ouvertures qu’il y a d’intervalles entre elles; ces ouvertures sont presque toujours extérieures ; quelquefois cependant elles débouchent dans un canal com- mun, servant à transmettre l’eau au-dehors; enfin des ares cartilagineux , souvent suspendus dans les chairs, sont pla- cés vis-à-vis des bords extérieurs des branchies. Du reste, ces poissons diffèrent beaucoup enire eux et se divisent en deux ordres , suivant que leur bouche est pourvue de mâ- choires mobiles et de forme ordinaire, ou bien que ces organes sont soudés en un anneau immobile, propre seulement à la succion. Les premiers sont les selaciens , les seconds les cyclos- tomes. ORDRE DES SÉLACIENS. =] or Qt ORDRE DES SÉLACIENS. L'ordre des sélaciens comprend le plus grand nombre de poissons cartilagineux , les raies et les squales , par exemple. Leur forme extérieure varie; ils ont des nageoires pectorales ; des nageoires ventrales situées en avant de labdomer , près de l'anus ; cinq ouvertures branchiales en forme de fentes, de chaque côté du cou ou à sa face inférieure ; les mâchoires ar- mées de dents et conformées comme nous l’avons déjà dit ; l'intestin court. Chez un grand nombre de ces poissons , il existe à la face supérieure de la tête deux ouvertures , appelées évens, qui conduisent aux branchies et qui servent à y porter l’eau nécessaire à la respiration , lorsque la gueule de l'animal est remplie par une proie irop volumineuse. Les uns sont ovo-vivi- pares. Les autres font des œufs revêtus d’une coque dure et cornée ; aussi la fécondation a-t-elle lieu avant la ponte. On les divise en squales , marteaux , anges , scies et rates. Les SQUALES constituent une grande tribu, reconnaissable par leur forme générale, peu différente de celle des poissons ordi- naires (voy. fig. 294, p. 756). Leur corps est allongé, leur queue grosse et charnue , leurs nageoires pectorales de grandeur mé- diocre. Leurs yeux sont situés, comme d’ordinaire, sur les côtés de la tête; leur museau ne présente rien de remarquable, et les ouvertures de leurs branchies se trouvent sur les côtés du cou ; leurs os de l'épaule sont suspendus dans les chairs, sans s’articuler ni au crâne ni à la colonne vertébrale; enfin leur peau est en général rugueuse et leur chair coriace. La plupart atteignent une grande taille et sont très voraces. —# On distingue sous le nom de ROUSSETTES (seyllium) les squales dont le museau est court et obtus , et les narines percées près de la bouche et contournées en un sillon qui règne jusqu’au bord de la lèvre. Ces poissons sont tous pourvus d’évens et d’une na- geoire anale ; leurs dorsales sont en arrièreet leur caudale est allongée , non fourchue et tronquée au bout; enfin leurs ouver- tures branchiales sont situées en partie sous les pectorales. Nos mers en nourrissent deux grandes espèces , la grande roussette , appelée vulgairement chien de mer, qui atteint trois ou quatre pieds de long , et le rochier. La peau de ces poissons, qui est hérissée d’une multitude de petits tubercules pierreux , devient irès rude par la dessiccalion , et est alors très employée dans Pindustrie pour polir les corps durs , tels que livoire. Squales. Roussettes, " 756 ZOCLOGIE DESCRIPTIVE. Squales pro- Les SQUALES PROPREMENT DITS Ont les narines sans sillon et prement dits. situées au-dessous du museau, qui est proéminent (fig. 295). Leur nageoire caudale est plus ou moins fourchue. Les uns ont des évens, les autres en manquent. On les divise en requins, lamies , milandres , aiquillats, humantins, leiches, etc. tequins Les REQUINS (carcharias) manquent d’évens et sont pourvus d’une nageoire anale ; leur museau est déprimé , et leur bouche est fortement armée de dents tranchantes pointues, et en géné- ral dentelées sur les bords. Fig. 294. LE REQUIN. Lerequin proprement dit, quiatteint jusqu’à vingt-cinqoutrente pieds de long, est célèbre par sa férocité. Sa vaste gueule (fig. 295) est garnie de dents iriangulaires et mobiles , dont le nombre Fig. 295. augmente avec l’âge. Chez les jeunes, on n’en voitqu’uneseulerangée; mais, chez l'adulte, on en compte six. La force de ce poisson est extrême et ses mouvemens des plus rapides ; enfin sa voracité n’a presque pas de bornes : aussi est-ce un des animaux les plus dangereux. On a vu bien des fois des hommes devenir la proie des requins , et on a irouvé quelque- fois jusqu'à huit ou dix thons dans leur ventre. Les phoques , les thons et les morues sont leur nourriture ordinaire ; mais ils se jettent aussi sur les cadavres et ils se dévorent même entre eux. Il parait qu’on les rencontre dans toutes les mers; mais les voyageurs ont souvent confondu sous le nom de requin d’autres es- pèces de squales à dents tranchantes. EE ND hs TEL os cm 0 0 ORDRE DES SELACIENS. 757 Une seconde espèce de ce genre, appelée faux ou renard demer, est longue @e sept à huit pieds, quelquefois de quinze, et se montre souvent sur nos côtes. Il en est de même du bleu, ainsi nommé à cause de la couleur bleue ardoisée du dessus de son Corps. Les LAMIES (/amna) ne diffèrent guère des requins que par leur museau pyramidal. On n’en connait qu’une espèce dans nos mers, le nez, que sa grandeur a fait souvent confondre avec le requin. Les MILANDRES (galeus) ont à-peu-près la forme des requins, mais sont pourvus d’évens : ils habitent nos mers. On donne lenom dePÉLERINS (se/ache)à d’autres squales qui, à ces caractères, joignent des ouvertures branchiales assezgrandes pour entourer presque tout le cou , et des dents petites et co- niques. La seule espèce connue dépasse le requin pour la grandeur : elle atteint plus de trente pieds de long , mais n’a rien de la férocité de ce poisson destructeur. Elle habite les mers du Nord et a été quelquefois jetée sur nos côtes par les vents. Les AIGUILLATS (spinax) manquent de nageoires anales ; Pun des squales les plus communs sur nos marchés appartient à ce genre. Les HUMANTINS (centrina) , qui diffèrent des aiguillats par la position de leur'seconde nageoire dorsale au-dessus des ven- trales et par leur queue plus courte , abondent aussi sur nos côtes. Enfin les LEICHES (seymnus), dont une espèce habite également nos mers, ont tous les caractères des humantins, si ce n’est qu’elles manquent de la grosse épine qu’on voit en avant de chaque nageoire dorsale chez ces poissons et chez les aiguillats. Les MARTEAUX (zygæna) joignent aux caractères des requins une forme de tête dont le règne animal n'offre pas d’autre exemple : aplatie horizontalement et ironquée en avant, ses côtés se prolongent transversalement en branches qui la font Lamies. Milaudres. Pélerins. Aiguillats. Humantins: Leiches. Marteaux. Anges. Scies, Rates, Rhinobates. 758 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. ressembler à la tête d’un marteau.Les yeux sont aux extrémités de ces prolongemens et les narines à leur bord antérieur. L’es- pèce la plus commune dans nos mers a quelquefois douze pieds de long.” Les ANGES (squatina) diffèrent des squales par leur tête ronde, leur bouche fendue au bout du museau et non en dessous , par leurs yeux occupant la face dorsale et non les côtés de la tête, par leurs pectorales grandes et se portant en avant, et par plusieurs autres caractères ; ils sont pourvus d’évens , mais manquent de nageoire anale; enfin ils se rapprochent un peu des raies par leur forme élargie , mais ont les ouvertures branchiales latérales et placées entre la tête et les nageoires pectorales. Nous en avons un dans nos mers , qui devient assez grand. Les sCIESs (pristis) oni la forme allongée des squales ; mais leur corps est aplati en avant ; leurs branchies sont ouvertes en des- sous comme chez les raies, et leur museau se prolonge en une espèce de long bec déprimé en forme de lame d'épée et armé, de chaque côté, d’une série de grandes épines osseuses , pointues , tranchantes et implantées comme des dents. L’espèce commune a douze ou quinze pieds de long. Les RAIES forment une grande tribu facile à reconnaitre. Leur corps est aplati et en général semblable à un disque, disposition dépendant de l'union du tronc et de la tête avec des nageoires pectorales extrêmement amples, horizontales etcharnues, qui, en avant se joignent au museau ou même l'entourent pour se réunir entre elles, et en arrière , s'étendent des deux côtés de l’abdo- men , jusque vers la base des nageoires ventrales. Les yeux et les évens occupent la face dorsale de la tête, les narines, la bouche et les ouvertures branchiales la face ventrale ; enfin les nageoires dorsales sont petites et presque toujours placées sur la queue. Ce groupe naturel se subdivise en rhënobates ; torpilles , raies proprement dites , pastenaques , mourines , elc. Les RHINOBATES établissent le passage entre les squales et les raies ordinaires , par leur queue grosse , charnue et garnie de deux nageoires dorsales et d’une caudale bien distincte ; par le peu de largeur des pectorales et par l'allongement du museau. On en trouve une espèce dans la Méditerranée. à sé er DS — ORDRE DES SÉLACIENS. 759 Les TORPILLES OU razes electriques (torpedo)ont la queue courte, mais encore assez charnue. Leur corps est lisse et représente un disque à-peu-près circulaire, dont le bord antérieur est formé par deux prolongemens du museau , qui , de chaque côté, vont rejoindre les na- geoires pectorales et laissent entre ces or- ganes , la tête et les branchies , un espace ovalaire ;, servant à loger l'appareil électri- que de ces poissons. Cet appareil se compose d’une multitude de tubes membraneux ver- ticaux, serrés les uns contre les autres ; comme des rayons d’abeilles , subdivisés par des cloisons horizontales en petites cel- lules remplies de mucosités et animées par plusieurs branches très grosses des nerfs pneumogastriques. C’est dans ces singuliers Fig. 296. TORPILLE organes que se produit l'électricité à l’aide COM MUNE. de laquelle les torpilles peuvent donner, à ceux qui les touchent , des commotions violentes , faculté que nous avons déjà rencontrée chez les malaptérures et les gym- notes , mais qui, chez ceux-ci, réside dans un appareil d’une structure différente. Ces poissons sont moins puissans que les gymnotes , mais peuvent néanmoins frapper d’engourdissenient le bras de celui qui les touche, et ils se servent probablement de ce moyen pour s'emparer de leur proie. Nous en avons dans nos mers plusieurs espèces qui fréquentent les côtes de la Vendée et de la Provence. Les RAIES PROPREMENT DITES Ont le disque de forme rhomboiï- Torpilles, Raies pro- dale, la queue mince et garnie en dessus de deux petites nageoires Premeut dites, dorsales , enfin les dents minces et serrées en quinconce sur les mâchoires. Nos mers en fournissent plusieurs espèces, dont l’une des plus estimées et des plus communes est la raie bouclee, ainsi nommée à cause des gros tubercules, garnis chacun d’un aiguillon recourbé, qui hérissent irrégulièrement les deux surfaces de son corps. Sa chair, naturellement dure, s’attendrit et s'améliore par la conservation et le transport. La race blanche ou cendree, qui ne porte d’aiguillons que sur la queue, atteint des dimen- sions beaucoup plus considérables : on en voit qui pèsent plus de deux cents livres. Elle est vivipare et fréquente nos côtes pen- dant le printemps et l’été. Les PASTENAGUES ont la tête enveloppée par les nageoires pectorales comme les raies ordinaires et oni la forme d’un 49 Pastenegues. Mourines. 760 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. disque en général très obtus ; mais elles se distinguent de ce dernier genre par leur queue armée d’un aiguillon dentelé en scie des deux côtés. Nos mers en fournissent, et l’on connait aussi des espèces d’eau douce qui vivent dans quelques rivières de l'Amérique méridionale. Enfin les MOURINES (Myliobatis) ont la tête saillante hors des nageoires pectorales , et celles-ci plus larges transversalement que dans les autres raies, ce qui leur donne quelque ressem- blance avec un oiseau de proie dont les ailes seraient étendues, et leur a valu le nom vulgaire d’aigle de mer. Leurs dents, larges et plates , sont disposées comme des pavés, et leur queue, extrêmement grêle , est armée d’un aiguillon comme celle des pasténagues, ou même de plusieurs de ces dards. L'espèce commune se trouve dans la Méditerranée et dans l’Océan , et devient très grande. ORDRE DES CHONDROPTÉR Y GIENS SUCEURS ou CYCLOS- TOMES. Ce dernier ordre des poissons cartilagineux est caractérisé , comme nous l'avons déjà dit, par la conformation singulière de la bouche , et se compose des plus imparfaits de tous les ani- maux vertébrés. Fig. 297. LA GRANDE LAMPROIE. Leur corps, allongé, nu et visqueux, est dépourvu de membres thoraciques et abdominaux; car les nageoires pecto- rales manquent aussi bien que les ventrales. Antérieurement ils Fig. 298. se terminent par une lèvre charnue, circulaire (fig. 298) ou demi-circu- jaire, soutenue par un anneau carti- lagineux, formé par la soudure des pa- latins et de la mâchoireinférieure. Les vertèbres sont réduites à desimples an- neaux cartilagineux , à peine distincts les uns des autres, traversés par un cordon tendineux et surmoniés d’un second anneau plus solide , qui en- ORDRE DES CHONDROPTÉRYGIENS SUCEURS. 761 toure la moelle épinière. Il n'existe pas de véritables côtes , ni d’arcs branchiaux ; mais les petits arceaux que nous avons déjà vus , dans l’ordre précédent , garnir le bord externe des bran- chies , sont ici fort développés et unis entre eux pour former une espèce de cage thoracique. Quelquefois ce squelette impar- fait n’est même pas cartilagineux et reste toujours membra- neux. Les organes des sens présentent aussi une structure moins compliquée que chez les poissons ordinaires. Le canal intes- tinal est droit et mince; enfin les branchies , au lieu de former des peignes , présentent l'apparence de bourses, et ces poissons manquent de vessie natatoire. On les divise en deux groupes: les lamproies et les myrines. Les LAMPROIES (petromyzon) se reconnaissent aux sept ouver- tures branchiales qui se voient de chaque côté du cou et à leur anneau labial circulaire, et armé de plusieurs rangées de fortes dents et de tubercules cornés (#g. 298); leur langue est aussi garnie de dents et se porte en avant et en arrière, comme un piston, ce qui permet à l’animal d'opérer une forte succion et de se servir deson disque buccal , non-seulement pour pomper les sucs dont il se nourrit, mais pour se fixer sur les corps so- lides. La peau de ces poissons se relève en dessus et en dessous de la queue en une crête longitudinale, qui tient lieu de nageoire et qui n’est soutenue que par des vestiges de rayons. Enfin l’eau nécessaire à la respiration arrive de la bouche aux branchies par un canal situé au dessous de l’æsophage et percé de trous latéraux. La grande lamproie (fig. 297) , longue de deux ou trois pieds et marbrée de brun sur un fond jaunâtre , habite nos mers, et au printemps entre dans les fleuves, pour y déposer ses œufs Elle fait sa proie ordinaire de vers marins et de petits poissons ou de lambeaux de cadavres ; mais elle s'attache à de grands pois- sons et parvient à percer leur peau et à les dévorer. Sa chair est très estimée. La pricka Ou Lamproie de riviere est une espèce plus petite, qui n’a guère plus de quinze à dix-huit pouces, et qui passe une grande partie de l’année dans les lacs d’eau douce , qu’elle abandonne au printemps, pour remonter dans les rivières. Elle est noirâtre en dessus , argentée en dessous : on en trouve beau- coup dans la Seine. Enfin une troisième espèce , encore plus pe- tite et connue sous le nom vulgaire de sucet, habite aussi les eaux douces et se distingue de la précédente par ses nageoires dorsales, qui sont contiguës ou réunies, au lieu d’être bien distinctes. Lamproics. Myxiues. 762 ZOCLOGIE DESCRIPTIVE. Lés MYXINES ont l’anneau maxillaire tout-à-fait membraneux et armé en dessus d'une seule dent ou même en manquent com- plètement , tandis que la langue est garnie de fortes dentelures latérales, en sorte qu’au premier abord on pourrait croire que ces poissons ont des mâchoires latérales comme les animaux arti- culés, avec lesquels quelques auteurs les ont en effet rangés ; mais tout le reste de leur organisation est analogue à celle des lamproies. Leur corps est cylindrique et garni en arrière d’une nageoire qui contourne la queue; leur bouche est circulaire, éntourée de huit barbillons et percée à son bord supérieur d’un évent , qui communique avec son intérieur. On ne leur voit pas d’yeux et leur peau est lubréfiée par une grande quantité de mucosité. Ces poissons se servent de leur disque bucca lcomme d’une ventouse et attaquent des poissons de la même mäñière que le font les lamproies. Les uns, appelés HEPTATRÈMES, ont aussi sept trous branchiaux de chaque côté du cou ; d’autres, les GASTROBRANCHES , ont de chaque côté un canal qui reçoit, par des trous particuliers, Peau venant des branchies, et aboutit au dehors à un trou situé vers le tiers de la longueur du corps; enfin, chez d’autres encore , les ouvertures branchiales sont disposées comme chez les lamproies et les heptatrèmes ; mais la lèvre charnue , qui est dépourvue de dents, n’est que demi- circulaire et ne recouvre que le dessus de la bouche , ce qui les empèche de s’en servir pour se fixer. Ces dernières myxines, auxquelles on a donné le nom d’AMMOCèTEs , ont aussi cela de remarquable , que leur squelette est tout-à-fait mou et mem- braneux ; elles se tiennent dans la vase des ruisseaux et ont beaucoup deshabitudes des vers, auxquelselles ressemblent aussi par la forme. Nous en avons une , longue de six à huit pouces et grosse comme un fort tuyau de plume , que l’on appelle amprit- lon, chatouille, etc. Les pêcheurs s’en servent pour amorcer leurs hamecçons. LES MOLLUSQUES. .. 763 : SECOND EMBRANCHEMENT DU RÉGNE ANIMAL. LES MOLLUSQUES. La longue série d'animaux dont nous venons de terminer l’histoire ne forme qu’une faible partie du règne animal, et si les êtres que nous allons maintenant étudier nous offraient autant d'intérêt que les vertébrés , nous nous verrions obligé de dépasser de beaucoup les limites assignées à ces leçons ; mais Ces animaux nous sont bien moins utiles: ils attirent moins l'attention , et la plupart d’entre eux passent même inaperçus de tous ceux qui ne s'appliquent pas à les connaitre; leurs facultés sont plus bornées, et leur structure est moins compliquée et moins parfaite. Par conséquent , il nous suffira d’en présenter un tableau plus abrégé. Tous ces animaux inférieurs manquent , ainsi que nous l'avons déjà vu , d’une moelle épinière et d’un véritable sque- lette intérieur ; ce dernier caractère leur a valu le nom col- lectif d'animaux invertebres ; mais, dans une classification naturelle, on ne peut les réunir dans un même groupe; car ils sont évidemment conformés d’après trois types différens, et ils doivent , d’après cela , être divisés en trois embranchemens distincts , savoir ,.les mollusques , les articules et les rayonnes ou zoophytes. L’embranchement des zoophytes se compose essentiellement des animaux les plus imparfaits, et comprend dans la classi- fication de Cuvier, dont nous nous servons ici, un certain nombre d'êtres qui semblent , en quelque sorte , offrir les premières ébauches des modes d'organisation propres aux mollusques et aux articulés : aussi sa place est-eile mar- quée dans les degrés les plus inférieurs de la série animale, et passe-t-on par des nuances graduelles du type rayonné à celui des deux grands rameaux qui s’en élèvent. Ces der- niers embranchemens présentent , lun et l'autre, une com- plication d’organisation toujours croissante et forment deux séries pour ainsi dire parallèles. C’est la série des animaux articulés qui paraît être la plus élevée; mais les mollusques, quoique d’une structure généralement moins parfaite, sem- blent s'éloigner moins du mode de structure propre aux ani- maux vertébrés , et ceite raison nous détermine à nous en occuper en premier lieu. 50 Mollusques en genéral. Systeme ner- Yeux, 764 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. Les MOLLUSQUES les plus élevés sont, en effet, de tous les animaux invertébrés ceux qui ressemblent le plus à certains animaux vertébrés ; mais il existe entre ces deux embranche- mens un Azatus immense , et le mode de structure du poisson le plus imparfait diffère encore essentiellement du plan d’or- ganisation offert par le mollusque le plus parfait. Le système nerveux, cet appareil si important , dont le jeu règle tous les phénomènes de la vie animale, et dont les fonc- tions doivent nécessairement être en harmonie avec son mode de conformation , présente, en effet, chez les mollusques, une disposition générale tout-à-fait différente de ce que nous avons vu chez les vertébrés. IL existe bien un centre nerveux qui peut jusqu’à un certain point être comparé au cerveau des animaux supérieurs; mais cette masse ganglionnaire ne se coniinue pas avec un organe analogue à la moelle épinière ; les autres parties centrales du système nerveux se trouvent du côté opposé du tube digestif, et il en résulte que ce canal est toujours embrassé par une espèce de collier médullaire , d’où partent les divers nerfs du corps. Du reste , cet appareil varie beaucoup tant par sa disposition que par le nombre des parties dont il se compose. Fig. 299. (1) © & Chez un grand nombre des mollusques les moins parfaits, tels que le Solen manche de couteau et la plupart des autres (r) Systèmenerveux d’un mollusque acéphale (le Solen manche de couteau): — a la paire de ganglions qui est située au devant de l’æsophage et qui repré- sente la portion du système nerveux de ces animaux, généralement appelée le cerveau; ici, ces deux ganglions sont très éloigrés l’un de l’autre, et sont réunis par une bride transversale ; — c nerfs qui cn partent antérieurement pour se distribuer aux tentacules, au manteau, etc.; — paire ventrale de ganglions, qui sont réunis en une seule masse, placée sous l'intestin et liée aux ganglions añ- térieurs par deux cordons nerveux très longs ; — d nerfs qui partent des gan- glions postérieurs, pour se distribuer au manteau, etc. LES MOLLUSQUES. 765 acéphales qui habitent une coquille à deux valves , le système nerveux ne se compose guère que de deux paires de ganglions Fig. 300. (1) réunies par deux longs cordons intergan- glionnaires et donnant naissance à diverses branches (#g. 299) ; les ganglions de la paire | antérieure (a) sonttantôt assez éloignés entre eux et réunis seuiement par un cordon in- a / termédiaire, tantôt accolés l’un à l’autre ou OZ même confondus en une seule masse : ils b sont situés au-dessus de l’æsophage et fort ) / éloignés des ganglions postérieurs (2), placés au-dessous de l’intestin vers la partie posté- À rieure du corps. Dans quelques mollusques, \ le système nerveux est encore plus simple dans sa composition ; mais, en général , les ganglions tendent à se rapprocher de plus en plus de l’œso- phage (fig. 300),et chez la plupart de ces animaux, on trouve un plus grand nombre de ces petites masses médullaires , dont les uns forment une espèce de centre nerveux, et les autres sont disséminés dans diverses parties du corps. Ainsi , dans les Fig 301. (2) limaces et la plupart des mollus- ques construits sur le même plan, et nommés gastéropodes, à cause de la manière dont ils rampent sur la face ventrale du corps, il existe au-dessus eten avant de l’æœsophage unemassemédullaire(e, fg.301),qui est le représentant de la paire an- iérieure de ganglions doni il vient d’être question, et qui est regar- dée par la plupart des anatomistes comme étantle cerveau de ces ani- maux : elle fournit desnerfsaux or- ganes des sens ainsi qu'aux parties voisines (0),et se continue posté- rieurement avec deux cordons in- (x) Système nerveux d'une janthine, mollusque gastéropode, chez lequel les ganglions postérieurs (b) sont écartés entre eux , aussi bien que les ganglions antérieurs ; (a) mais sont beaucoup rapprochés de ceux-ci, de manière que les cordons interganglionraires sont très courts et forment une espèce de collier assez serréauntour de l’œsophage, (2) Portion centrale du système nerveux du colimacon; — c ganglions situés au Cevant de l’œsophage et constituant, par leur réunion, la masse appelée le dE 00, 766 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. terganglionnaires, qui embrassent l’œsophage, et qui, après un court trajet, se réunissent à une seconde masse nerveuse(g), située sous le tube digestif et comparable à la paire postérieure de ganglions dont nous Fig. 302. (1) avons parlé chez les mol- lusques acéphales ; enfin deux petits nerfs , sortis du cerveau, se réunis- sent pour former un troi- sième ganglion (#g.302, t)au-dessous de l’origi- ne de l’œsophage. Dans d’autres gastéropodes , les aplysiesou lièvres de mer , par exemple, à ces ganglions s’en ajou- te un autre (fig. 302, ), situé au milieu des viscè- res, uni par deux filets de communication au Ccol- lier médullaire ,qut en- toure l’æsophage et don- nant naissance aux nerfs des intestins, du foie, des branchies , des ovai- res , etc. On irouve aussi chez ces mollusques un cinquième ganglion très petit appartenant à ces derniers organes. Enfin, chezles poulpes etlessei- ches (fig. 303), où ce sys- tème acquiert son plus haut degré de dévelop- / pement , les parties gan- glionnaires , groupées cerveau des mollusques ; — 0. nerfs de la partie antérieure du corps , des yeux, ete. ;— g la masse nerveuse formée par la réunion des ganglions de la paire pos- térieure; dans le collier qui lunit au cerveau, passait l’æsophage ; —p nerfs du pied;— n. nerfs qui se rendent à la cavité pulmonaire , etc. ; — a nerf qui ac- compagne la principale artère ; — d nerf qui se rend au diaphragme, etc. (r) Système nerveux de l’aplysie , autre mollusque gastéropode:— c cerveau ; — o collier qui entoure l’œsophage; — g ganglions thoraciques ou postæsopha- gien; — » ganglion viscéral; — { ganglion buccal. LES MOLLUSQUES. 767 autour de l’œsophage, présentent un volume beaucoup plus considérable et plus de complication ; car les ganglions cépha- liques et poslæsophagien , unis en un gros collier œæsophagien, Fig. 303. (4) présentent laiéra- s lementunetroisiè- me paire de renfle- mensganglionnai- res, d’où naissent les nerfsdes pieds, et sont logés dans une çcavilé cra- nienne cCartilagi- neuse(/g. 303). Enrésumé,nous voyons que , dans cette classe d’ani- maux, le système nerveux se Com- pose essentielle- ment d’un collier médullaire , em- brassant le tube alimentaire et for- mé par les cor- dons de commu- nication de deux paires de gan- glions , qui, très éloignés l’une de Pautre dans les mollusques acé- phales ,se rappro- chent de plus en plus à mesure que 3 l’on s'élève dans la (r) Système nerveux de la seiche : — a le collier nerveux qui embrasse l’æso- phage , dont le trajet est indiqué par une soie (s); — c la masse nerveuse, située au-devant de l’æsophage et nominée communément le cerveau : sa surface supé- rieure est surmontée d’un tubercule cordiforme très gros, et il part de sa partie antérieure deux nerfs qui bientôt se terminent dans un ganglion circulaire, qui, à son tour, donne naissance à une autre paire de nerfs, lesquels descendent sous la bouche, de manière à embrasser de nouveau Pœsophage, et y forment un petit ganglion antérieur, d’où naissent les nerfs labiaux ;—2 ganglions tentaculaires, d’où naissent les nerfs du bras ;—o nerfs optiques qui naissent des parties latérales Forme uérale. Peau. ’ Tl. 5 7168 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. série formée par ces êtres, par les gastéropodes et par les cépha- lopodes; enfin les nerfs qui partent de l’un et de l’autre de ces ganglions , pour se distribuer aux divers organes , sont d’abord simples , mais ne tardent pas à présenter dans différentes parties du corps des renflemens ganglionnaires ; du reste ces ganglions, quelque nombreux qu’ils soient , ne forment jamais une chaine iongitudinale régulière ,étendue le long de la ligne médiane de la face abüominale du corps , comme que nous le verrons chez les animaux articulés. Ainsi que nous l'avons déjà dit,il n'existe dans ce grand embranchement du règne animal ni squelette articulé inté- rieur, analogue à la charpente solide des animaux vertébrés, ni squelette extérieur , semblable à la gaine tégumentaire qui, chez les animaux articulés ,enveloppe tout le corps dans une série d’anneaux et remplit les mèmes usages que le squeletle proprement dit chez les animaux supérieurs. La forme géné- rale des mollusques est extrêmement variable. Leur corps est toujours mou , et ce n’est même que chez un très petit nombre d’entre eux qu'il existe à l’intérieur quelques pièces solides non articulées et servant à protéger les viscères plutôt qu’à fournir à l'appareil locomoteur des leviers et des points d’ap- pui. Les muscles se fixent directement aux tégumens et magissent guère que sur le point même où ils s’insèrent ; aussi les mouvemens ne sont-ils que lents et en général mal déter- minés. Chez un petit nombre de ces êtres, il existe des appen- dices flexibles et allongés , destinés à la locomotion ( fig. 305, pag. 733): mais , dans la plupart des cas , l'animal ne peut se déplacer que par les contractions successives des divers poinis de la surface inférieure de son corps, et, lors même qu’il existe des membres, ces organes sont réunis en groupe à l’une des extrémités du £orps,et jamais disposés en séries symé- iriques comme chez les animaux vertébrés et articulés. La peau des mollusques , toujours molle et visqueuse , forme souvent des replis qui enveloppent plus ou moins complète- ment le corps,et cette disposition a fait donner le nom de du cerveau, et bientôt se renflent en un gros ganglion; — #petits tubercules nerveux, situés sur l’origine des nerfs optiques ; — g ganglion sous-æsophagien ou ventral. — + grand nerf des viscères , dont l’une des branches présente un ganglion allongé (r),et pénètre dans la branchie ;—71 nerfs qui naissent également des ganglions postæsophagiens et qui présentent sur leur trajet un gros ganglion étoilé (é) dont les branches se distribuent au manteau. LES MOLLUSQUES. 709 manteau à la portion des tégumens qui fournit d'ordinaire ces expansions Souvent ce manteau esi presque entièrement libre et constitue deux grands voiles qui cachent tout le reste de l'animal, ou bien ces deux lames se réunissent de manière à former un tube; mais d’autres fois il ne consiste qu’en une espèce de disque dorsal dont les bords seuis sont libres ou entourent plus exactement le corps sous la forme d’un sac. En général cetie peau molle est protégée par une espèce de cuirasse pierreuse , nommée coguille. C’est une sécrétion, ayant quelque analogie avec celle de l’épiderme , qui produit cetle enveloppe. Les follicules , logés d'ordinaire dans les bords du manteau , déposent à sa surface une matière semi-cornée, mêlée à une proportion plus ou moins forte de carbonate cal- caire qui se moule sur les parlies sous-jacentes, et se solidifie. La lame , ainsi formée , s’épaissit et s’accroit par le dépôt successif de matières nouvelles. Sa superficie n’est pas pier- reuse , mais ressemble à une espèce d’épiderme , et porie le nom de drap marin. Quelquelois elle conserve une consistance cornée dans toute son épaisseur. En général cependant la proportion de carbonate de chaux qu’elle renferme augmente rapidement et lui donne une dureté pierreuse. Souvent sa sur- face interne est même plus dense que le reste, et présente une structure particulière qui la rend vitreuse ou chatoyante et nacrée. Quelquefois la coquille reste toujours renfermée dans Pépaisseur de la peau des mollusques; mais , en général , elle est extérieure et dépasse même les bords du manieau, de façon à fournir à l'animal un abri parfait. On donne commu nément le nom de mollusques nus à ceux qui sont dépourvus de coquilles ou qui n’ont qu’une coquille intérieure, et le nom de conchiftres à ceux dont la coquille est visible au dehors. La manière dont la coquille s’accroit est facile à comprendre. Si on examine une coquille d’huitre, par exemple , on voit qu’elle se compose d’une multitude de lames superposées dont on peut même déterminer la séparation à laide de la chaleur. Ces lames ont été formées successivement par le manteau de l'animal, qu’elles recouvrent, et, par conséquent , c’est la plus extérieure qui doit être la plus ancienne; c’est elle aussi qui est la plus petite , et chaque nouvelle lame qui vient s’y ajouter Gé- passe la lame située au dessus , de facon que la coquille, en mème temps qu’elle augmente d'épaisseur s’élargit rapidement. En général , la distinction des iames composantes est moins marquée , et souvent les matières nouvelles se déposent de ma- nière à ce que leurs molécules correspondent exactement aux mollécules de la partie déjà consolidée et äonnent ainsi au tout une structure fibreuse. Manteau. Coquille. Appareil di- gestif. Sang et cir- culation. 770 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. Les couleurs les plus variées et les plus agréablement dis- posées ornent les coquilles , et varient souvent avec l’âge. Presque toujours elles sont tout-à-fait superficielles et semblent dépendre d’une sorte de teinture opérée par la peau de l’ani- mal, qui est peint d’une manière correspondante à celle de son enveloppe. La matière colorante parait être déposée sur la coquille au moment de sa formation: aussi est-elle d’autant plus vive que cette dernière est plus jeune. C’est le bord du manteau qui la produit. En effet, si une coquille vient à être cassée et que l’animal parvienne à réparer cet accident, la partie nouvellement formée est toujours blanche , lorsqu'elle w’a pas été en contact avec le bord du manteau, et si elle correspond à ce bord , on la voit prendre la couleur que celui- ci présente dans le point qu’elle touche. Ainsi , lorsque ce bord est tacheté , il en résulte, sur le bord de la coquille, des taches correspondantes , et, à mesure que celui-ci s’allonge, ces taches se confondent avec celles précédemment formées et produisent des lignes perpendiculaires aux stries d’accroisse- ment , Ou bien ne se joignent pas à celles-ci et restent isolées, suivant que le manteau demeure immobile , et conserve avec le pourtour de la coquille les mêmes rapports, ou bien que par les mouvemens de l’animal, il change souvent de position. Quel- quefois la sécrétion de la matière colorante varie aussi avec l’âge, et des circonstances accidentelles peuvent également la modi- lier. La lumière , par exemp'e, exerce sur ce phénomène une influence très remarquable , et non-seulement les coquilles les plus exposées à l’action de cet agent physique sont d'ordinaire les plus vivement coloriées ; mais, lorsqu'un mollusque vit fixé sur un rocher ou en partie caché sous une éponge ou quelque autre corps opaque , La portion de la coquilie, ainsi placée dans l'obscurité, est toujours plus pâle et plus terne que celle expo- sée au contact des rayons solaires. Les mollusques ont tous un tube digestif plus ou moins contourné sur lui-même et ouvert par ses deux bouts, soit aux deux extrémités du corps , soit dans des poinis plus ou moins voisins lun de l’autre. Il existe toujours un foie volu- mineux , et souvent on irouve aussi des glandes salivaires el des organes de mastication; mais les intestins ne sont jamais retenus à l’aide d’un mésentère. Le sang de ces animaux est incolore ou légèrement bleuâtre LES MOLLUSQUES. 771 el circule dans un appareil vasculaire très compliqué , composé Fig. 304. (1) d’artères et de veines. Un cœur , formé d’un ven- tricule(+)et d’une ou deux oreillettes (0), se trouve sur le trajet du sang arté- riel, et envoie ce liquide dans toutes les parties du corps , d’où il revient à h lorgane de la respira- üon. Quelquefois on ren- contre aussi à la base des vaisseaux qui pénè- trent dans ce dernier ap- pareil ,des réservoirs vei- neux, nommés cœurs pul- monaïires , Mais à tort; car, n'ayant rien de mus- ° € culaire dans leur struc- ture , ils ne peuvent ser- vir à mettre le sang en mouvement ,et par con- - 4 Séquent ne méritent pas ce nom. (Voyez fig. 307, ch ,page 775.) Quant à la disposition des organes de la respiration, elle varie trop pour que nous puissions en parler ici. Nous dirons seu- lement que tantôt ils ont la forme de poumons, d’autres fois celle de branchies. Nous ne pouvons dire non plus rien de général sur la siruc- ture des organes des sens , qui, du reste, sont toujours moins complets que chez les animaux vertébrés. Certains mollusques ne paraissent doués que du sens du toucher et du sens du goût ; mais , chez un grand nombre, on trouve des yeux dont la structure varie , et, chez quelques-uns de ces animaux, il (1) Cœur d’un moilusque acéphale : — o le ventricale qui , chez ces animaux, est traversé par l’intestin rectum (r) et donne naissance à deux artères (a); — c l’une des ouvertures auriculo-ventriculaires ; — o les deux orerlettes recevant le sang des veines branchiales (2). Respiratios. Orgares des sens. OEufs. Cilassitica- tion. 772 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. existe même un appareil de l’ouiïe ; mais on n’en connait pas qui soit pourvu d’un organe particulier pour lodorat. Les mollusques naissent d'œufs ; mais tantôt ceux-ci éclosent au dehors , tantôt dans l’intérieur du corps de leur mère , et alors les petits naissent vivans. Dans tous les cas, ces animaux viennent au jour,ayant déjà à-peu-près la forme qu’ils doivent conserver et n’éprouvent pas de métamorphoses. Nous avons déjà vu que les mollusques présentent de grandes différences dans la forme générale de leur corps, et, comme ces modifications extérieures sont accompagnées de différences correspondantes dans le degré de complication de leur organi- sation intérieure , elles peuent servir pour la division de ces animaux en groupes naturels. Le tableau suivant donnera une idée de cette classification : esten forme de sac ouvert par de- vant ,et d’où sort une tête entourée de tentacules. CÉPHALOPODES. , des nageoires ! membraneuses en formed’ailes surles | | côtés du cou. ] n’est pas en forme de sac ourert en a- vantet dont la tête ù PTÉROPODES. ayant une téte distincte et dont n’est pas entourée de tentacules. ayant pour orga- e . - nes principaux du mouvement le corps mo MOLLUSQUES manteau et presque charnu. [ n'ayant pas de/n’ayant pas roue | tête apparente , | charnu et presque jamais de bran- | chies distinctes du | manteau. \fois de nageoires. ; a ayant quatre branchies distinctes du occupant ja face ventrale du corps et en forme de disque ou quelque- un pied ire} GASTÉROPODES. toujours un pied & ACÉPHALES. bras ciliés, qui en { BRACHIOPODES. tiennent lieu. dépourvus de bras | et d’organes parti- culiers du mouve- pourvus de d'en | TUNICIERS. s ment. Cuvier et plusieurs autres zoologistes rangent aussi dans l'embranchement des moilusques les eirrhopodes; mais il est aujourd’hui bien démontré que c’est plutôt au type des animaux articulés que ces petits êtres doivent être rapportés : aussi n’en parlerons-nous qu’en faisant l’histoire de la troisième grande division du règne animal. «1 =) (US MOLLUSQUES CÉPHALOPODES. CLASSE DES CÉPHALOPODES. Cette classe se compose de mollusques , dont la forme est Forme gé- très bizarre; car leur tète est placée entre le tronc et les nérale pieds ou tentacules servant à la locomotion , et , lorsqu'ils marchent , c’est le corps en haut et la tête en bas, qu'ils se trainent sur le sol. En effet, c’est sur la tête, autour de la bouche , que s’insèrent leurs pieds, et c’est de là que leur vient leur nom de cephalopodes. Fig. 305. LE POULPE CCMMUN. Le tronc de ces animaux est recouvert par le manteau , qui a la forme d’un sac, tantôt presque sphérique, tantôt plus ou moins allongé, qui renferme tous les viscères et qui est ouvert en avant seulement (£g.306 , 0). La tête sort de cette ouverture : elle est ronde et pourvue en général de deux gros yeux d’une structure très analogue à celle des yeux des animaux vertébrés. La bouche en occupe le milieu : elle est armée de deux mâächoires; enfin autour de cetie ouverture se trouve une couronne d’appendices flexibles et charnus , qui sont désignés indifféremment sous les noms de pieds ou de bras, et qui méritent également bien ces dénominations ; car ils servent en même temps d'organes de préhension et de locomotion. 774 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. Respiration. Les céphalopodes sont des animaux essentiellement aqua- tiques, el, par conséquent, c’est à l’aide de branchies qu’ils respirent. Ces organes sont toujours parfaitement symétriques Fig. 306. et se trouvent cachés sous le manteau, dans une Cavité particuliè- re (/g. 306), dont les parois se contractent et se dilatent alter- nativement , et dont l'intérieur commu- nique avec le dehors par deux ouvertures, l'une (o) en façon de fente, servant à l’en- trée de l’eau: Pautre prolongée en tube ou en entonnoir (f), et servant à la sortie de Peau et des excré- mens. Chaque bran- chie (b) a la forme d’une pyramide al- longée, dont le sommet est dirigé en avant et se compose d’un grand nombre de lamelles membraneuses, placées itransversale- ment et fixées des deux côtés d’une tige médiane. Chacune de ces feuilles se divise en lamelles , qui, à leur tour, se subdivisent encore, et c’est dans leur épaisseur que se trouvent les vais- seaux Capillaires dans lesquels le sang veineux se change en sang artériel. Le nombre des branchies varie , et cette diffé- rence est caractéristique des deux grandes divisions naturelles dont cette classe se compose. Chez les uns, il n’en existe qu’une seule paire, tandis que, chez les autres, on en trouve deux paires. Les premiers ont reçu pour cette raison le nom de cephalopodes dibranchiaux ; et les derniers le nom de cephalo- podes tetrabranchiaux. Circulation. Le cœur est situé entre les branchies sur li ligne médiane du corps , et n’est formé que par un seul ventricule (e, fig. 307) ; le (1) Corps d’un poulpe vu par la face inférieure (le manteau est fendu sur la ligne médiane , et , d’un côté , rejeté en dehors pour montrer l’intérieur de la ca- vité respiratoire) :—a base de la tête ;—-1 le tube par lequel l’eau sort de la cavité respiratoire ; —o l’une des deux ouvertures latérales par lesquelles l’eau pénètre dans cette cavité ; — à l’une des branchies. MOLLUSQUES CÉPHALOPODES. 775 sang y arrive des branchies par des veines branchiales (+3) dont les ouvertures sont garnies de valvules , et pénètre ensuite dans les artères qui naissent de cet organe. Ces derniers vaisseaux sont au nombre de deux ou de trois ; mais l’un d’eux est toujours beau- coup plus gros que les autres ,et l’un d’eux présente aussi à sa base un renflement ou bulbe plus ou moins musculaire analogue à celui que nous avons déjà vu à l’origine de l’aorte des batraciens. Fig. 307. (1) vh CS ve as b . ab La grande artère, à laquelle on donne en général le nom d’aorte, se porte en avant et va distribuer ses branches à une partie des viscères , à la tête et aux pieds. Les autres artères serendent aux (r) Organes de la circulation et de la respiration de la seiche; — c le cœur aortique , dont l’extrémité supérieure se continue avec l’aorte supérieure , qui distribue le sang à la tête, etc. — à des branches de ce vaisseau; — à l’aorte inférieure qui présente un bulbe à son origine , et se divise bientôt en deux branches (vw); — ve veine cave, dont les parois sont recouvertes par des corps spongieux (cs) ;—aw veines des viscères allant déboucher dans les deux branches de la veine cave ; — ch sinus veineux ou cœurs branchiaux ; — s renflement de la base des artères branchiales ; — br branchies ; — ab artère branchiale ; — + veine branchiale, — 2x bulbe des veines branchiales, situé près de la terminaison de ces vaisseaux dans le cœur. 776 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. viscères , et le sang, après avoir traversé ainsi tous les organes, revient par les veines dans une grosse veine-cave , située près du cœur. Les artères branchiales naissent de l’extrémité infé- rieure de ce dernier vaisseau et présentent , chez les céphalo- vodes dibranchiaux une disposition très remarquable ; car, avant que de pénétrer dans les branchies , chacune d’elles se dilate de manière à former un grand sinus veineux (/g. 307,cb), que la plupart des auteurs considèrent comme un cœur bran- chial , mais dont les parois ne paraissent pas être réellement musculaires. On voit , par conséquent , que la cireulation se fait ici d’une manière inverse de ce qui a lieu chez les poissons; car c’est sur le trajet parcouru par le sang artériel que se trouve le cœur, tandis que , chez les poissons, cet organe est traversé par du sang veineux ; mais, du reste, il existe une grande ressemblance dans la disposition générale de Pappareil circu- Jlatoire dans ces deux classes d'animaux; car, chez les uns et les autres ,le sang ne traverse qu’une seule fois le cœur et passe en entier par l'appareil respiratoire avant que de retour - ner aux organes. On remarque sur la veine-cave et ses principales branches une multitude de corps spongieux très singuliers (/g. 307, cs)qui laissent suinter de la mucosilé lorsqu'on les presse, et qui sont fixés sur les parois de ces vaisseaux; ces appendices sont ren- fermés dans deux poches membraneuses, qui remplissent en même temps les fonctions de péricarde , et qui communiquent par des ouvertures particulières avec la cavité branchiale. L’eau vient ainsi du dehors les baigner, et leur intérieur, qui est creux, communique par d’autres trous avec l’intérieur des veines, de facon que le sang doit y pénétrer. On ne sait rien de positif sur leurs usages ; mais il est probable qu’ils sont le siège de quelque sécrétion , et qu’ils servent aussi de réservoir pour contenir le trop-plein des veines , lorsque la circulation est gênée dans ces vaisseaux , de la même manière que cela paraît avoir lieu pour la rate chez les animaux supérieurs. Organes de L'appareil de la digestion est très compliqué. La bouche est la digestion. entourée d’une lèvre circulaire et armée de deux mandibules verticales, qui ressemblent beaucoup à un bec de perroquet et qui sont mis en mouvement par des muscles puissans. Une langue charnue, garnie de papilles et de plusieurs pièces cornées , occupe l’intérieur de cette cavité et se fixe à un cartilage particulier. Enfin des glandes salivaires, dont le MOLLUSQUES CÉPHALOPODES. 733 nombre et la disposition varient un peu, entourent le pharynx et l'æsophag , et versent dans le tube alimentaire le produit de leur sécrétion. L’æœsophage se contracte en général et pré- Fig. 308. (1) sente ,avant sa terminaison dans l’estomac, une grande dilata- tion ou jabot (j) ; mais quelquefois cetie première poche digestive manque. L’estomac a d'ordinaire la forme d’un sac allongé ; ses parois sont musculaires , et sa structure rappelle celle du gésier des oïseaux. Une troisième cavité (s) fait suite à cet organe et présente , chez les céphalopodes dibranchiaux la forme d’un cæcum contourné en spirale , tandis que, chez les iétrabran- chiaux , elle affecte celle d’un sac sphérique lamelleux intérieu- (x) Viscères du poulpe: — 7 le jabotsitué au-dessous du cartilage céphalique: —gs glandes salivaires inférieures ; —f masse formée par le foie et le sac de l'encre; — e canal excréteur de l'encre allant déboucher dans l'eatonnoir ; — t ce tube ; — m» manteau ouvert; — s cœcum contourné en spirale ; — à portion de l'intestin, dont le reste est enlevé pour montrer les organes sitaés au-äessous ; — o oviductes ; — cle cœur ; —a l'aorte inférieure ; — as l'aorte supérieure; — vb les vemes branchiales ; — Er les branchies ; — cZcloison par laquelle ces organes adhéraïent aux parois de la cavité respiratoire ;—4b artères branchiales ; — cb sinus ou cœurs branchiaux; — o veines caves ; — fm faisceaux musculaires. Cartilage ce- phalique. Organes de la locomotion. 7178 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. rement : c’est dans sa cavité que la bile est versée par deux canaux. Le foie est un viscère très volumineux , tantôt simple, tantôt divisé en deux ou en plusieurs lobes; sa couleur est jaune-rougeâtre et sa texture très molle. L’intestin, qui nait très près de l’orifice cardiaque est simple et communique à peu de distance du pylore avec une poche glandulaire, qui paraît être analogue au pancréas; enfin , après avoir décrit quelques courbures , ce tube va déboucher dans la cavité bran- chiale à la base de l’entonnoir par lequel l'eau qui a servi à la respiralion s'échappe au dehors. Chez les céphalopodes dibranchiaux , il existe, dans le voi- sinage du foie, un autre organe sécréteur très remarquable, qui produit en abondance une liqueur noirâtre , à laquelle on a donné le nom d’encre ; le conduit excréteur de cette glande (e, fig. 308)débouche dans l’intestin , près de son extrémité , et, lorsque l’animal est en danger, il lance au dehors , par l’enton- noir, ce liquide en quantité assez grande pour teindre l’eau qui l’entoure et pour se cacher ainsi à la vue de ses ennemis. C’est l'encre d’un de ces céphalopodes , la seiche , qui est employée en peinture sous le nom de sepia , et plusieurs auteurs pensent que l’encre de Chine est une substance analogue (1). Les cé- phalopodes tétrabranchiaux ne présentent rien de semblable. Nous avons dit plus haut que les mollusques ne présentent pas dans l’intérieur de leur corps une charpente solide articu- lée et comparable au squelette des animaux vertébrés. Chez les céphalopodes , cependant, on retrouve encore des vestiges de quelque chose d’analogue; car il existe dans la tête un carti- lage qui non-seulement protège le cerveau , mais aussi s’élargit dans diverses directions , pour fournir des points d'insertion aux principaux muscles de animal. La disposition des organes de la locomotion et de la préhen- sion , fixés autour de la bouche, varie chez ces animaux. Chez les céphalopodes dibranchiaux, il existe une couronne de huit ou de dix gros tentacules charnus , dont la surface interne est garnie de sucoirs ou ventouses, à l’aide desquels ils se fixent avec beaucoup de force aux corps qu’ils embrassent ( voyez fig. 305, page 773). Chez les céphalopodes tétrabranchiaux , ces (1) Il paraïtrait cependant que la matière ordinairement employée pour la fabrication de l'encre de Chine, n’est autre chose que du charbon très divisé. MOLLUSQUES CÉPHALOPODES. 779 appendices sont, au contraire , grèles et dépourvus de sugoirs, mais extrêmement nombreux. C’est aussi chez les céphalopodes dibranchiaux que les organes des sens sont les plus parfaits. Chez ces mollusques, il existe deux yeux très gros et de forme sphéroïdale , logés dans les parties latérales de la tête. Ces organes se composent d’une cornée iransparente , enchâssée dans la peau, et quel- quefois protégée par un repli semblable à une paupière , d’un cristallin , d’un corps vitré , d’une rétine , d’un choroïde, d’une sclérotique , etc., à-peu-près comme chez les animaux verté- brés. Chez les céphalopodestétrabranchiaux, les yeux sont portés sur des pédoncules saillans , et ne consistent qu’en une ca- vité, dont l’intérieur, peint en noir, renferme une rétine et reçoit les rayons lumineux par une ouverture circulaire. On n’a encore découvert d'appareil auditif que dans la première de ces deux familles. Là on trouve dans le cartilage céphalique, deux petites cavités fermées de toutes parts , excepté dans le point par lequel pénètre le nerf; elles logent une vésicule mem- braneuse , et sont remplies d’un liquide particulier, contenant une petite pierre. C’est ,comme on le voit, une disposition encore plus simple que chez les poissons ; car tout l’appareil est réduit à un vestibule et à un nerf seulement. Le système nerveux des céphalopodes est plus compliqué que celui des autres mollusques, et les divers ganglions , groupés autour de l’æsophage , tendent davantage à se confonüre en une seule masse. Le collier méduilaire , ainsi formé , se compose de trois paires de ganglions, savoir : les ganglions cépha- liques (e, fig. 309) , les ganglions tentaculaires(#) et les ganglions thoraciques (9) ; les deux premières paires sont placées au dessus de l’æsophage et, en se réunissant à la première , forment un double collier autour de ce tube; quelquefois ils sont bien dis- tincts; d’autres fois presque entièrement confondus. Les gan- glions céphaliques donnent naissance latéralement à deux gros cordons nerveux, qui, dèsleur origine, s’élargissent en ganglions, et fournissent ensuite les nerfs optiques; il part aussi de cette espèce de cerveau des nerfs, qui se rendent à la bouche, et qui forment quelquefois autour de cette ouverture un nouveau col- lier garni de deux paires de petits ganglions (voyez fig. 303, page 767). Les ganglions tentaculaires donnent naissance aux nerfs des pieds, ou tentacules , qui, avant de se ramifier dans ces organes , présentent aussi divers renflemens ganglionnaires. Enfin les ganglions thoraciques , tantôt bien distincts des pré- cédens , d’autres fois confondus avec eux (voyez fig. 304), four- 51 Organes de: ‘ens. Système ncr- veux. ZOOLOGTIE DESCRIPTIVE. nissent plusieurs nerfs, dont les plus importans sont : 1° les deux nerfs des viscères (+) , qui présentent sur leur trajet une paire de ganglions et distribuent leurs rameaux aux bran- chies, au cœur, à l’esto- mac, etc; 2° les nerfs du manteau , qui, chez ies cé- phalopodes dibranchiaux, se terminent aussi par des ganglions , d’où naissent un grand nombre de filamens. Chez les céphalopodes té- trabranchiaux , le collier æsophagien est simplement protégé par le cartilage cé- phalique ; mais, dans les céphalopodes dibranchiaux chez lesquels le système nerveux acquiert son plus haut degré de développe- ment, cette masse médul- laire est logée dans une ca- vité spéciale creusée dans ce cartilage quetraverse l’æso- phage. C Ovaires. Les céphalopodes ne sont jamais hermaphrodites , comme le sont la plupart des autres mollusques. L’ovaire est toujours simple et logé au fond du sac formé par le corps de l’animal ; tantôt il n’y a qu’un seul oviducte ; tantôt on trouve deux deces conduits qui s'ouvrent à la base de l’entonnoir ; enfin tous ces animaux sont ovipares. (x) Système nerveux du nautile :—c cerveau ;—0 nerfs optiques; —g ganglions sous-æsophagiens ou thoraciques;—t ganglions tentacalaires ; —p nerfs des ten- tacules ; — e nerfs de l’entonnoir ; — a ganglion d’où partent d’autres nerfs ten- taculaires (b); — d second ganglion semblable, donnant également naissance a des nerfs tentaculaires ({);—m nerfs du manteau, etc.—" grands nerfs viscéraux, qui donnent chacun naissance à un ganglion (gv), d’où partent les principaux nerfs des viscères. MOLLUSQUES CÉPHALOPODES. 781 Ces mollusques sont tous marins : ils sont très voraces et se nourrissent principalement de crustacés et de poissons , dont ils s'emparent à l’aide de leurs bras souples et vigoureux , et dont ils dévorent facilement la chair au moyen de leurs man- dibules acérées. Cette classe se divise , comme nous l’avons déjà dit, en deux famille . La famille des CÉPHALOPODES DIBRANCHIAUX ou AcÉTA- BULIFÈRES , C’esi-à-dire portant des ventouses , est très nom- breuse. On y range les poulpes ; les seiches, les calmars , les argonautes , etc. La plupart de ces mollusques n’ont pas de co- quille extérieure , et leur peau nue renferme un grand nombre de vésicules contractiles et remplies de liquides diversement colorés , qui, en se dilatant ou en se resserrant alternative- ment, produisent des taches souvent très brillantes et les font disparaître tour-à-tour; mais on trouve dans leur intérieur une coquille plus ou moins développée, située sur le dos. C’est chez les seiches que cette coquille interne est la plus grande : elle est ovalaire et composée en majeure partie d’un grand nombre de lames calcaires transversales : elle est très commune sur les bords de la mer, et on la connait généralement sous le nom d'os de seiche. Chez les calmars , elle est de consistance cornée et ressemble assez par sa forme à une plume ou à une lamelle ; enfin, chez les poulpes , elle n’est représentée que par deux petits stylets cornés , logés dans l’épaisseur du manteau. Les tentacules de ces céphalopodes forment autour de la bouche une couronne simple et portent à leur face interne des ventouses circulaires ; leur nombre varie de huit à dix. Dans la famille suivante, nous trouverons une disposition toute diffé- rente. Les POULPES ( fig. 305, page 773) se reconnaissent facilement à leur corps nu , en forme de sac ovalaire, dépourvu de nageoires et à leurs huit pieds très grands, à-peu-près égaux. Ils se servent de ces derniers organes pour saisir leur proie aussi bien que pour nager et pour ramper sur le sol, et sont redoutables même pour les nageurs , à cause de la force avec laquelle ils serrent ainsi les corps qu’ils enlacent. Ce sont des animaux essentielle- ment Ccarnassiers. Leur taille est souventtrès grande :il en existe une espèce dans l’Océan Pacifique, qui atteint environ six pieds 51. Mœurs, Famille des céphalopodes dibranchiaux. 782 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. de long , et ces mollusques sont un objet de terreur pour les in- digènes des îles de la Polynésie, qui plongent pour chercher des coquilles au fond de la mer ; mais on a singulièrement exagéré leur taille et leur force. Pline parle d’un poulpe dont les bras avaient trente pieds de long , et un auteur moderne raconte gravement l’histoire d’un de ces mollusques gigantesques , qui, en se jetant sur un vaisseau , manqua de le faire sombrer. Le poulpe commun est long environ deux pieds: il habite nos côtes et se tient d'ordinaire au milieu des rochers: il détruit une grande quantité de homards et d’autres crustacés. Fiy. 310. ARGONAUTE. MOLLUSQUES CÉPHALOPODES. 783 Les ARGONAUTES sont des céphalopodes très voisins des poulpes , Mais dont la paire de pieds la plus voisine du dos se dilate à son extrémité en une large membrane , et dont le corps est toujours logé dans une grande coquille d’une délicatesse et d’une élégance extrême. Du reste, on ne sait pas avec certitude si cette coquille appartient réellement à l'animal qui l’habite, ou provient de quelque autre mollusque. Quoi qu’il en soit, le céphalopode n’y adhère pas, et s’en sert comme d’un bateau pour flotier à la surface de l’eau quand la mer est calme. Six de ses tentacules sont alors reployés en bas et agissent comme des rames , et on prétend que les deux autres , dont l’extrémité est élargie , sont relevés el étendus comme des voiles; mais, d’après leur structure , ces tentacules ne paraissent pas propres à remplir ces dernières fonctions. L’espèce commune se trouve dans la Méditerranée , l'Océan Indien , etc. : elle était connue des anciens sous les noms de nautilus et de pompilius. Les CALMARS (Zoligo) diffèrent des précédens Fig. 311. CALMAR COMMUN. par leur sac allongé et pourvu de deux nageoires terminales , par la lame cornée , logée dans le dos et tenant lieu de coquille, et par leurs tentacu- les , dont le nombre est de dix , et dont la conforma- tion n’est pas partout la même. Huit de ces pieds sont médiocres et sont chargés de veniouses dans iouieleur longueur, tandis que les deux autres sont très allongés et ne présen- tent de ventouses que vers les extrémités. Nos mers en nourrissent trois es- pèces. Les CALMARETS (/oligop- sis) sont remarquables par la longueur démesurée de deux de leurs bras, qui ; sont filiformes et élargis Fig. 312. CALMARET. seulement an bout; du Argonautes. Calmars. Calmarets. Onychoteu- Les: Seiches. Céphalopo- des tétrabran- chiaux. iles. Nau- 784 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. reste , ils ne diffèrent que peu des calmars : on les trouve dans la Méditerranée. On donne le nom d’oNycHoTEuTEs à des céphalopodes, qui ressemblent aussi beaucoup aux calmars, mais dont les longs bras sont armés de crochets, Les SEICHES ont les appendices tenlaculaires disposés comme les calmars ; mais leur corps ovalaire, déprimé, est garni de na- geoires charnues latérales, occupant toute la longueur du sac, et leur dos est soutenu par une grande coquille intérieure, dont nous avons déjà fait connaitre la structure. Une espèce très commune dans nos mers atteint environ un pied de long : on en mange la chair. La famille des CEPHALOPODES TETRABRANCHIAUX a pour type les NAUTILES, mollusques très remarquables, dont le corpsest renfermé dans la dernière loge d’une grande coquille contournée Fig. 313. (1) en spirale et divisée par des cloi- sons transversales en plusieurs cavités. Chacune de ces cloisons est percée d’un trou , et le con- duit, ainsi formé et appelé sy- phon, s'étend jusqu’à l’extrémité postérieure de la coquille, et est traversé par un tube membra- neux contractile postérieur au corps de l’animal.Cette structure parait être destinée à faciliter les mouvemens de descente ou d’ascension de l’animal dans l’eau, en déterminant une augmentation ou une diminution dans la pesanteur spécifique de la coquille ; car le syphon communique avec un réservoir extérieur et peut s’y vider ou être distendu par le liquide qui s’y trouve; or, les chambres qu’il traverse sont remplies par de Pair, et, lorsque ce tube vient à se gonfler, (1) Conpe verticale de la coquille du nautile : — « dernière chambre, servant a loger Panimal ; — Z l’une des cloisons qui séparent entre eiles les chambres (c); — s siphon. MOLLUSQUES CÉPHALOPODES. 785 il doit comprimer ce fluide élastique et en augmenter la den- sité , ce qui augmente en même temps la pesanteur spécifique de l’ensemble de la coquille , et doit tendre à la faire descendre vers le fond de l’eau , dans laquelle elle flotte. S Fig. 314. NAUTILE. f1) Lu Ainsi que nous l’avons déjà vu, la conformation de l’animal diffère également beaucoup de celle des poulpes , des calmars et des autres céphalopodes dibranchiaux. La tête du nautile supporte un grand disque charnu , qui a quelque analogie avec le pied des gastéropodes , et qui sert probablement à l’animal, pour ramper. Les teniacules qui s’insèrent près de la bouche ne sont pas garnis de ventouses comme dans la famille précé- dente : ils sont rétractiles et en nombre très considérable. Les yeux sont pédonculés: il n’y a point d’organe de l’ouiïe , ni de poche , ni de nageoires ; enfin les branchies sont au nombre de quatre. On trouve à l’état fossile un grand nombre de coquilles qui (1) Dans cette figure on a représenté la coquille ouverte : — 1 les tentacules ; — € l’entonnoiz ; — p le pied ;—/# portion du manteau ; —0 l'œil; —s le siphon. Ammonites. Bélemnites. Foramini- feéres, 786 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. présentent une structure très analogue à celle des nautiles et qui appartenaient probablement à des céphalopodes conformés à-peu-près de même: ce sont les AMMONITES , appelés vulgaire- ment cornes d Ammon, à cause de la ressemblance de leurs volutes avec celles de la corne d’un be- lier. Ces animaux étaient au nom- bre des plus anciens habitans de la terre ,et ils vivaient jadis dans toutes les mers. Leurs dépouilles fourmillent dans les terrains se- condaires et se rencontrent dans toutes les parties du monde; mais depuis long-temps , ils ont dis- paru de la surface de la nn re ,et, dans les couches qui sur- montent la craie , on n’en trouve plus de trace. Leur destruc- lion remonte par conséquent à une époque antérieure à la créa- tion de presque tous les mammifères: ils varient beaucoup pour la forme et encore davantage pour la grandeur ; car les uns ne sont guère plus gros qu’une lentille , et d’autres ont plus de quatre pieds de diamètre. On en connait plus de trois cents es- pèces , et on les divise en plusieurs genres , d’après la manière dont la coquille s’enroule, la position du syphon, la forme des cloisons, etc. Fig.515.AMMONITE. On donne le nom de BÉLEMNITES à d’autres fossiles qui paraissent avoir appartenu aussi à des céphalopodes , mais qui, au lieu d’être une coquille extérieure , devaient être logés dans l’intérieur du corps de l’animal , comme los de la seiche. Ils ont une forme conique et se composent principa- lement d’une série de cornets emboiîtés les uns dans les autres, traversés par un syphon et terminés antérieurement par une lame cornée , qui forme une espèce de chambre, dans l’intérieur de laquelle on trouve quelquefois les restes d’un réservoir de l'encre semblable au sac, qui, chez les céphalopodes nus, remplit les mêmes usages. Les bélemnites ne se montrent pas dens des terrains aussi anciens que les ammonites ; mais elles abondent de même dans les couches moyennes et supérieures de la formation secondaire et cessent d’exister dans les terrains supérieurs à la craie. Jusqu'en ces derniers temps on rapportait aussi à l’ordre des MOLLUSQUES GASTÉROPODES. 787 céphalopodes une foule de coquilles microscopiques de forme lenticulairebet sans ouverture apparente , désignées par les auteurs sous les noms de NUMMULITES , de CAMÉRINES , de FORAMI- NIFÈRES, eic.; ces petits corps abondent tellement à l’état fossile que , dans certains terrains, ils forment presque à eux seuls des chaines de collines et des bancs immenses de pierres à bâtir ; mais on les trouve aussi dans nos mers, et , en les observant à l'état vivant , on s’est convaincu que les animaux auxquels ils appartiennent ne ressemblent en rien à des céphalopodes ni même à des mollusques : ce sont des êtres d’une structure très singulière, qui paraissent se rapprocher davantage des polypes. CLASSE DES GASTÉROPODES. Les mollusques qui sont pourvus d’une tête et qui rampent Conforma- sur le ventre ou nagent à l’aide d’une nageoire formée par tion générale. cette partie du corps constituent une classe très nombreuse , ayant pour type la limace et le colimacon. Leur corps est allongé et terminé antérieurement par une tête plus ou moins développée qui porte d'ordinaire des tentacules insérés au dessus de la bouche ; leur dos est garni d’un manteau qui s'étend plus ou moins , et leur ventre est recouvert par une masse charnue, qui affecte en général la forme d’un large disque ( fig. 316), et sert à Fig. 316. LYMNÉE DES ÉTANGS. animal pour ramper sur le sol, mais qui est quelquefois très comprimée et constitue alors une nageoire verticale (fg. 354). Plusieurs de ces animaux sont absolument nus; d’autres ont une coquille intérieure cachée dans l'épaisseur de leur manteau ; 788 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. mais la plupart ont une coquille extérieure, et presque toujours cette enveloppe calcaire est assez grande pour les contenir tout entiers et leur fournir un abri assuré. La disposition de ces coquilles varie beaucoup: tantôtellessont composées de plusieurs pièces , d’autres fois d’une seule ; tantôt elles sont symétriques , d’autres fois encore non symétriques , et Fig. 317.(1) dans ce dernier cas, à mesure qu’elles s’ailongent, elles s’enroulent en général sur elles-mêmes et constituent un cône contourné en spirale. Cette dernière forme , qui nous est offerte par la co- quille du colimaçon, est la plus com- mune chez les gastéropodes , et pré- sente de nombreuses variations.Tantôt la partie qui croit le moins vite etsur laquelle le cône s’enroule est pleine (fig. 317) ,tantôt elle est vide : on la nom- me columelle , et, lorsqu'elle est vide, on donne le nom d’ombilie à son ouverture (fig. 318). Siles tours de la coquille res- tentà-peu-près dans le même plan la spire est plate ou concave, et la forme générale de la coquille est discoïde (fig. 322); quelquefois le haut de chaque tour enveloppe complètement les circonvolu- Fig. 318. tions précédentes, de manière que la spire est cachée; mais, dans la plu- part des cas, les tours sont inclinées vers le bord de la columelle , et il en résulte une spire oblique , d'autant plus aiguë que le cône s’élargit moins rapi- dement ( fig. 317 ). On appelle coquilles turbinees celles dont les premiers tours s’élèventainsi au-dessus des suivans , en formant une spire saillanie, et on re- marque que presque toujours c’est du côté droit que celle-ci se dirige. Quel- quefois cependant la spire de ces co- quilles turbinées se tourne du côté gauche de Fanimal(#g. 323), el, dans ce cas, on les nomme perverses. (1) Une coquille turbinée ouverte pour montrer comment elle s’enroule en À : : x 2 spirale: — } bouche ou ouverture de la coquille ; — c columelle ; — c’ portion de la columelle renfermée dans le dernier tour de spire;—s avant-dernier tour de spire ; — p pointe ou sommet de la coquille. MOLLUSQUES GASTÉROPODES . 789 La masse des viscères occupe la partie supérieure du cône formé par cés coquilles et y reste toujours renfermée ; mais la tête et le pied saillent au-dehors quand lanimal se déploie Fig. 316. (1) pour marcher, et Ce © app? r rentrent dans le dernier tour de spire , lorsqu'il se contracte : aussi la grosseur de cet- te dernière partie de la coquilleet la forme de son ou- ? ar verture sont-elles en rapport avec la grosseur du 4 pied. Chez la plu- part des mollus- ques gastéropo- | des aquatiques, * d de dont la coquille est spirale , il existe un disque corné ou calcaire, nommé oper- cule (fig. 325, o), qui est fixé à la partie postérieure du pied , et qui ferme l’entrée de sa coquille , lorsque l’animal s’y retire. Les organes de la respiration sont conformés tantôt pour la respiration aérienne, tantôt pour la vie aquatique; mais, chez les mollusques à coquille contournée, ils sont toujourslogés dans le dernier tour de spire , et recoivent l'élément ambiant par dessous son bord, soit par un trou percé dans le manteau, soit entre le corps et le bord libre de ce repli cutané, qui sou- vent aussi se prolonge en un canal, à laide duquel lanimal peut aller chercher le fluide nécessaire à sa respiration, sans faire sortir de sa coquille ni sa tête , ni son pied. Dans ce der- nier cas , la coquille présente aussi dans son bord une échan- crure ou un canal destiné à loger ce tube respiratoire et situé près du bout de la columelle opposé à celui vers lequel la spire se dirige. Ce canal est par conséquent à gauche dans les espèces ordinaires , et à droite , dans celles dont la coquille est perverse. (1) Anatomie du colimacon : — pi pied ; — + tentacules à moitié contractés;— d espèce de diaphragme qui sépare la cavité respiratoire des autres viscères; — e portion de l'estomac; — f foie; —o ovaire; — à intestius ; — r rectum; — a anus ;—c cœur (le péricarde étant ouvert) ;—ap artère pulmonaire, se ramifiant sur les paroïs de la cavité pulmonaire (p);—v glande sécréteur de la viscosité; — cv son canal excréteur, allant s'ouvrir près de l’anus. Classifica- tion. 790 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. Le cœur (e, fig- 318) est toujours aortique: il est composé en général d’une oreillette et d’un ventricule, et sa position , comme ceile du tube respiratoire , est en rapportavec la direction de la spire de la coquille. Cet organe est situé du même côté que le tube, c’est-à-dire du côté opposé à celui vers lequel la coquille se contourne , et les organes reproducteurs /dont la conformation varie du reste beaucoup) sont toujours placés de ce dernier côté, et, par conséquent , du côté opposé au cœur. La bouche est entourée de lèvres contractiles et quelquefois armée de dents cornées qui occupent le palais. Chez plusieurs autres animaux de cette classe, la partie antérieure de l’æso- phage est très charnue et a la faculté de se porter au dehors , de manière à constituer une trompe. Quelquefois l’estomac est aussi garni de pièces cartilagineuses ou osseuses, propres à diviser les alimens ; l'intestin est contourné sur lui-même et logé entre les lobes du foie et l'ovaire ; enfin l’anus (a, fig. 319) est presque toujours situé du côté droit du corps. Dans cette classe , les organes de la sensibilité sont moins développés que les céphalopodes ; les tentacules , que la plupart des gastéropodes portent sur le front et dont le nombre varie de deux à six, ne servent guère qu’au tact et peut-être à l'odorat. On ne leur connaît pas d’organe auditif, et leurs yeux, qui manquent quelquefois, sont très petits et d’une structure très simple : ils ressemblent à ceux des nautiles et sont tantôt adhérens à la tête, tantôt portés sur la base, le côté ou la pointe des tentacules. On divise les gastéropodes en huit ordres, dont les princi- paux caractères sont tirés de la disposition de Pappareil bran- chial, comme on pourra le voir dans le tableau suivant: [ayant des poumons. | dans une cavité dor- sale, ouver- te au-dessus de Ja tête ! Coquiile apla'iet pres- que toujours propre à la marche. / | cachées | GASTÉROPODES ayant des : 7 Branchies bran- ss L ” sous les re nues 1e PE bords du fixees \ manteau: | \ \ sur le dos. Point de \ quille. | Puzmoxés. presque tou- jours turbi- née. Tubiforime. Très ouverte ordinairement : en forme de | S"TIPRANCHES. bouctier. \ , sous une lame dn manteau, qui contient presque toujours | une coquille ,ou bien sons un \ rebord redressé du pied. TECTIBRANCHES, f une coquille non turbinéc d’une ou de plusieurs p'è- | ces. CYCLOBRANCHES. co- } | xuorerancues. | comprimé verticalement et propre à la nage seulement. | #étTÉROroDsS. PECTINIBRANCHES, | TUBULIBRANCHES. { INFÉROPBRANCHES, MOLLUSQUES GASTÉROPODES PULMONÉS. 791 . æ ORDRE DES GASTÉROPODES PULMONÉS. Les gastéropodes conformés pour la respiration aérienne Organisa- n'ont pas de branchies , mais portent sur le dos une cavité , sur 1°: les parois de laquelle les vaisseaux pulmonaires forment un réseau compliqué (voy. fig. 316, page 789), et le poumon reçoit l'air du dehors par un trou ouvert dans le rebord du manteau au dessus de la nuque du côté droit et susceptible de se fermer ou de s'ouvrir au gré de l’anämal. Tous les gastéropodes pulmo- nés ne sont cependant pas dés mollusques terrestres. Plusieurs vivent dans l’eau ; mais alors'ils sont obligés de venir de temps en temps à la surface de ce liquide #pour “chercher l’air néces- saire à leur respiralion. Ces, animaux se nourrissent tous de substances végétales. On les divise en deux familles : les puëmones terrestres etles Classifca- pulmones aquatiques. tion. f Les PULMONÉS TERRESTRES se laissent en général facile- Famille des ment reconnaitre à leurs quatre tentacules. Ces appendices soni Pulmonés ter- rétractiles et ceux de la paire supérieure qui sont le plus longs “°°” portent les yeux à leur extrémité. La bouche est armée d’une dent palatine , d’une petite langue hérissée de dents microsco- piques; enfin leur corps est de forme variable , et les uns sont nus ou pourvus seulement d’une coquille interne, tandis que les autres ont une coquille extérieure contournée en spirale , à sommet mousse et à ouverture non échancrée. La petite tribu formée par les premiers se divise en Zimaces ,vaginules , parma- celles, etc. La tribu des pulmonés terrestres à coquille appa- rente comprend les genres escargot, vitrine , bulime, maillot, grenaille , nonpareille , ambrette et agathine. 2? ee ” + Les LIMACESs forment le type des pulmonés terrestres sans Limaccs. coquille apparente. Leur corps, comme chacun le sait, est allongé , et ils ont pour manteau un disque charnu , qui est à péine séparé du reste de la peau, et qui occupe seulement le Arions. Limaces pro- prement dites. Vaginules 792 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. devant du dos, où il recouvre la cavité pulmonaire, et qui renferme souvent, dans son épaisseur, une petite coquille plate. A droite de cette espèce de bouclier est une échancrure au fond de laquelle se voit une ouverture contractile, qui conduit dans la cavité pulmonaire ; l’anus est situé sur le bord antérieur de cet orifice respiratoire , et une troisième ou- verlure , appartenant à l'appareil reproducteur, est située au côlé extérieur de la base du tentacule droit supérieur. Les quatre tentacules sont cylindriques , plus ou moins renflés au bout et creux ; ils rentrent et sortent, en se déroulant comme des doigts de gants , à l’aide de fibres musculaires logées dans leur intérieur; les yeux, portés à l’extrémité des tentacules supérieurs, sont noirs; la bouche est armée d’une espèce de dent palatine, en forme de croissant et d’une langue lisse. Le cœur est logé dans une cavité particulière sous le manteau et se compose d’une oreillette ovale, qui reçoit une grosse veine pulmonaire , et d’un ventricule pyriforme d’où part l'aorte. Enfin il existe près du cœur un appareil sécréteur qui verse au dehors par un canal excréteur débouchant près de l’orifice respirateur, une matière visqueuse. Ces animaux sont herbivores : ils se nourrissent principale- ment de jeunes plantes, de fruits, de champignons, et c’est le soir qu’ils se montrent le plus voraces. Pendant la chaleur du jour, ils restent cachés dans des trous , sous des pierres ou quelque amas de feuilles à demi pourries , ou même dans la ierre, et ils ne sortent guère que le matin et le soir, lorsque Vair est humide : c’est surtout après la pluie qu’ils se montrent en grand nombre. Pendant la saison froide, ils s’enfoncent dans la terre et s’y engourdissent. Les uns, nommés ARIONS , ont l’orifice pulmonaire silué vers la partie antérieure du bouclier dorsal, telle est la limace rouge, si commune dans les campagnes et dans les potagers ; les autres , appelés LIMACES PROPREMENT DITES OU LIMACES DOMES-— TIQUES , ont cet orifice situé plus en arrière et ont souvent une coquille intérieure assez bien formée : la grande limace grise, qui habite les caves et les forêts sombres , appartient à cette dernière division , ainsi que la petite limace grise Où limace agreste , qui est extrêmement abondante dans les campagnes, et nuit beaucoup à l’agriculture. On donne les noms de VAGINULES, de TESTACELLE et des PARMACELLES , à d’autres gastéropodes nus, très voisins des MOLLUSQUES GASTÉROPODES PULMONES. 793 limaces, mais qui en diffèrent par la position de l'anus, léten- due du manteau, etc. Les ESCARGOTS (Aelir) forment la tribu la plus importante des pulmonés terrestres à coquille complète et apparente. Leur organisation diffère fort peu de celle des limaces ; seulement le manteau , au lieu d’être en forme de bouclier convexe, constitue un grand cône contourné sur lui-même, qui est recouvert par la coquille et qui renferme les viscères (fg. 319 , page 789). On les distingue par leur coquille , dont l’ouverture , ordinairement relevée en bourrelet chez l'adulte, est un peu contournée par la saillie de l’avant-dernier tour de spire , et prend ainsi une cir- conscriplion en forme de croissant. Chez les ESCARGOTS PROPRE- MENT DITS OU COLIMACONS, Cette ouverlure est au moins aussi large que haute , et la coquille est tantôt globuleuse , tantôt dépri- mée. Les mœurs de ces mollusques sont à-peu-près les mêmes que celles des limaces.En été, ils sont très voraces ; mais, en au- tomne , ils ne mangent que peu, et, à l'approche de lhiver, ils se retirent dans quelques trous, se contractent dans leur coquille, en bouchantFouverture avec une matière calcaire , sécrétée par le bord du manteau , et restent engourdis jusqu’au printemps. Des expériences très curieuses et souvent répétées ont fait voir que non-seulement les plaies faites à ces animaux se cicatrisent facilement , mais que des parties considérables de leur corps, après avoir été enlevées , peuvent repousser. On a vu des coli- macons chez lesquels les yeux , les tentacules et même la tête tout entière avaient repoussé de la sorte. On connait un très grand nombre d'espèces de colimacons: on en trouve dans toutes les parties du monde. Les deux plus communes dans nos campagnes et nos jardins sont : l’escargot vigneron , qui est fort gros et d’un gris jaunâtre , et l’escargot nemoral , appelé vulgai- rement la Zivree , à cause de sa coquille diversement coloriée et ordinairement ornée de bandes brunes sur un fond jaune. On donne le nom de VITRINES à des escargots dont la coquille très mince, aplatie et dépourvue de bourrelet, est trop petite pour renfermer le corps tout entier; on en trouve quelques petites espèces en Europe. Les BULIMES ont la coquille allongée, l’ouverture plus haute que large , garnie d’un bourrelet et sans dentelures. Une petite espèce , qui se trouve en France, est remarquable par l’habitude singulière de casser successive- ment les tours du sommet de sa coquille. D’autres mollusques Escargots. Vitrines. Bulimes. 794 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. Maillots. de la même tribu, appelés MAILLOTS ou BARILLETS (pupa) ont la coquille ellipsoïde ou même presque cylindrique, à ouverture plus haute que large, garnie d’un bourrelet échancré et en général dentelée (/ig. 320 ): ils sont de petite taille et vivent dans les lieux humides , parmi les mousses , etc. Les GRENAILLES (chondrus) on également le bourrelet échancré et dentelé; mais leur forme est plus ovoiïde. Enfin 1es NONPAREILLES OU CLAUSILIES sont de petits mollusques qui vivent dans les mousses , au pied des arbres , et ont une co- quille assez semblable à celle des maillots, Fig. 320. MAILLOT. mais beaucoup plus grèle et plus pointue. Les AMBRETTES diffèrent de tous les précédens par l’absence d’un bourrelet autour de l’ouverture de la coquille, qui est ovale et trop petite pour loger l’animal en entier (fig. 321):ils vivent sur les . plantes qui bordent les ruisseaux. Ambrette:. Les AGATINES sont de grands escar- gots, qui, dans les pays chauds, dévo- rent les arbustes et qui ont une coquille oblongue, à ouverture plus large que haute , sans bourrelet , et itronqué à l'extrémité de la columelle, disposition un peu analogue à celle de la coquilie de Fig. 321. AMBRETTE. la plupart des gasiéropodes marins. Famille des Les PULMONÉS AQUATIQUES n’ont que deux tentacules pulmonés a- {fq, 316 , page 787); leur mode de respiration les oblige à venir TaULS. fréquemment à la surface de l’eau : aussi ne peuvent-its se tenir dans des endroits profonds, et vivent-ils d'ordinaire dans les eaux douces ou fort près des côtes. _ De même que dans la famille précédente , nous trouvons ici Onchidies. des mollusques privés de coquille, et d’autres qui en sont pourvus: les premiers forment le.genre ONCHIDIE; les seconds se subdivisent en PLANORBES , LYMNÉES , AURICULES, elc. MOLLUSQUES GASTÉROPODES PULMONÉS. 795 Les PLANORBES Ont une coquille mince , enroulée sur le même plan (par conséquent discoïde), et dont les tours n’augmentent de grosseur que fort gra- Fu duellement ( fig. 322). | | Leurs tentacules sont y) longs et filiformes , et \ un 1 (©) portent les yeux à la 1 Mes | | partie interne de leur base. Ces gastéropodes \| *e se nourrissent de sub- ] stances végétales et ha- Ki bitent nos eaux dor- mantes ; en h'ver, elles Fig. 322. PLANORBE. s’enfoncent dans la vase et s’y engourdissent. Les LYMNÉES (fig. 316 , page 787) ont les mêmes mœurs et se trouvent presque toujours dans les mêmes localités que les pla- norbes , dont elles se distinguent facilement par la forme de leur coquille , dont la spire est oblongue ; leurs tentacules sont larges et triangulaires. Dans la saison de la ponte , on les trouve sou- vent réunies en grand nombre, de manière à former un leng chapelet. Elles nagent renversées , le disque ventral étendu à la surface de l’eau, et, pendant l’hiver, s’en- gourdissent comme les planorbes. On donne le nom de PHYsEs à de petits mollusques Fig. 323. de nos fontaines , dont la coquille (g. 323) est assez PHYSE. semblable à celle des lymnéés , mais très mince, sans rebord et sans pli à la columelle. L’animal , quand il rampe ou nage , recouvre sa coquille de deux lobes dentelés de son manteau. Du resie il res- semble beaucoup aux lymnées. Les AURICULES diffèrent des précédens par les grosses cannelures obliques , dont la columelle de leur coquille, ovale ou oblongue , est marquée (fig. 323). Plu- sieurs de ces gastéropodes sont d’assez grande taille. On en trouve une espèce sur les bords de la Méditerranée. Fig. 324. AURICULE. Lur | 12 Planorbes. Lymnces, Physes, Auricules, Organisa- tion, 7296 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. ORDRE DES PECTINIBRANCHES. Cette division de la classe des gastéropodes est la plus nom- breuse en genres et en espèces : elle comprend presque tous les mollusques , dont la coquille univalve est contournée en spi- rale , et plusieurs de ceux dont la coquille est simplement conique. Le trait le plus remarquable de l’organisation de presque tous ces animaux est la disposition de leur appareil branchial ; mais ce caractère n’est pas constant ; car, dans deux Fig. 325. (1) (1) Fig. 325, anatomie d’un gastéropode pectinibranche (le turbo pica), pour montrer la disposition de la cavité respiratoire : — p le pied de l’animal ; — o l'opercule;— + la trompe; — ta les tentacules; — y les yeux; — "2 le manteau fendu longitudinalement , de manière à ouvrir la cavité respiratoire; —/f bord antérieur du manteau, qui, dans la position naturelle, recouvre le dos de l'animal et y laisse une ouverture ou grande fente, par laquelle l’eau arrive à la branchie ; — b la branchie; — #b la veine branchiale, qui se rend au cœur (c'; - ab Vartère branchiale; — & l’anus ; — à l'intestin ; — e l’estomae et le foie; — o l’oviducte. — Au-dessus de la nuque , on voit le ganglion nerveux cépha- lique et les glandes salivaires. — 4 membrane frangée qui borde en-dessous le côté gauche de l’ouverture dela cavité respiratoire. MOLLUSQUES GASTÉROPODES PECTINIBRANCHES. 797 genres (les,cyclositomes et les hélicines) , qui sont, du reste, trop semblables aux pectinibranches ordinaires , pour qu’on puisse les en séparer, il n'existe pas de branchies , et la respi- ration , aérienne , comme celle des pulmonaires, se fait à l’aide d’un réseau vasculaire , qui tapisse le plafond de la cavité respi- ratoire. Cette cavité occupele dernier tour de la coquille et s’ouvre au-dehors par une grande fente, située entre le corps et le bord du manteau : elle loge dans le plus grand nombre de cas des branchies (b, fig. 325) qui sont composées de feuillets ou de laniè- res rangées parallèlement et attachées à sa paroi supérieure sur une, deux ou troislignes, suivant les genres. Tous ces mollusques ont deux tentacules (fa) et deux yeux portés quelquefois sur des pédoncules particuliers ; leur bouche est en forme de trompe(#), et renferme une langue armée de petits crochets; enfin les individus mâles portent , au côté droit du cou , un appendice quelquefois très gros , qui, en général , ne peut pas rentrer dans le corps de l’animal , mais se reploie dans la cavité branchiale ; le rectum (r) et l’oviducte (oz) se trouvent aussi du côté droit de cette cavité , et auprès d’eux on trouve un organe particu- lier, renfermant une humeur très visqueuse, destinée à former autour des œufs une enveloppe commune. On a divisé cet ordre en trois familles. Dans les deux pre- mières (celle des trochoïdes et des cupuloïdes), il n'existe point de siphon à l’aide duquel l’animal puisse respirer sans sortir de sa coquille (£g. 326), tandis que , dans la troisième (celle des buccinoïdes) , il existe un tube respiratoire , qui est formé par un prolongement du bord de la cavité pulmonaire du côté gauche, et qui passe par un canal ou une échancrure correspondante de la coquille (fig. 327). Fig. 326. TURRITELLE. (1) Fig. 327. CASQUE. (1) Fig. 326 : — rm» manteau; — p le pied ; — + tentacules. 52. Classifica - tion. 583 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. Famille des Les TROCHOIDES se distinguent des autres pectinibranches trochoïdes. la charnière présente , à chaque Re, à: \ valve, deux dents qui entrent if 0 SP dans des fossettes de la valve op- Fig. 360. MARTEAU. EUR Gas7t JA posée ; RU 0 V Enfin c’est aussi dans cette 1! SN tribu que prennent place les PERNES, dont la charnière se compose de plusieurs Hgamens insérés dans des fosseties par— ticulières ; et un assez grand nombre d’autres coquilles, soit récentes , soit fossiles. Fig. 361. PERKNE. Parmi les ostracés pourvus de deux muscles distincts et dont la coquille présente, par conséquent, à la face interne de cha- que valve , deux surfaces inégales correspondantes à l'insertion de ces organes, nous cilerons les efAeries, les arondes , les jam- bonneauzx , les arches et les trègonies. Les ÉrHÉRiES ont beaucoup d’analogie avec les huîtres: leur Limes, etc. Marteaux. Anomies. Spondyles. Pernes, Ostracés à deux muscles. Ethéries. Arondes, 822 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. coquille est grande, inéquivalve, très inégale , sans dents à la charnière , et pourvue d’un ligament , qui est en partie exté- rieur et en partie intérieur. Il en existe dans le Haut-Nil. Les ARONDES se reconnaissent à leur coquille équivalve , à charnière rectiligne, munie d’un ligament étroit, et souvent allongée en ailes par ses deux extrémités (/g.362). Le corps de ces mollusques est très petit et se prolonge en un pied conique vermi- ‘orme et garni d’un byssus pour le passage duquel il existe une échancruresur le bord de la coquille. Le muscle adducteur anté- rieur est excessivement petit, et les palpes labiaux très grands. On a divisé ces mollusques , mais peut-être sans raison suffi- Pintadine-. sante, en deux genres: les AVICULES et les PINTADINES, suivant Perles. que leur coquille présente ou non de grands prolongemens en forme d’ailes et que sa char- nière est armée d’une dent ou dépourvuedetouteprotubérance semblable. C’est au dernier de ces groupes qu’appartient l’aron- de aux perles, Connue aussi sous les noms d’huître perliere , de pintadine mécre-perle,etc. , et cé- lèbre parlanacredont l'intérieur de sa coquille est revêlu , et par les perles fines qu’on y trouve. Fig. 362. ARONDE PERLIÈRE. . Celte coquille est à-peu-près demi circulaire , écaiileuse et brune-verdâtre en dehors : elle devient très grande et se trouve sur les côtes de Ceylan , dans le golfe Persique, le golfe du Mexique et plusieurs autres loca- lités, où elle vit en bancs considérables, attachée par son bys- sus aux rochers sous-marins et où elle est l’objet d’une pêche active. Les perles sont des corps de même nature que la nacre bril- lante dont l’intérieur de ces coquilles est revèlu : elles se com- posent de couches concentriques de nacre très serrées , et elles ie produisent lorsque cette matière, au lieu de s'étendre en couches plates sur celles déjà déposées, constitue de petits amas isolés comme des gouttelettes, ou adhérens à la coquille par un pédicule seulement. Leur formation dépend d’une espèce de maladie ou , du moins , d’une activité anomale dans le travail sécrétoiré qui donne naissance à la nacre : aussi toutes les cir- constances qui peuvent stimuler celte sécrétion , telles que ia MOLLUSQUES ACÉPHALES. s23 présenee d’un grain de sable ou de quelque autre eorps étranger entre la coquille et le manteau de l’animal , iendent-elles à en déterminer la formation. Du reste , les arondes perlières ne sont pas les seuls mollusques qui produisent des perles. Toutes les coquilles dont l’intérieur est nacré peuvent en contenir. Les patelles, les halliotides et nos moules communes en renferment quelquefois , et il n’est pas rare d'en trouver dans une grosse espèce de mulète , qui habite les grandes rivières du nord de l'Europe ; mais c’est la pintadine mère-perle qui fournit le plus et qui en donne les plus belles. C’est principalement dans le golfe de Manaar, sur les côtes de Ceylan , dans le golfe Persique , dans le golfe de Panama et sur la côte est de la Californie, que se pratique la pêche des perles ; mais il existe des bancs de pintadines mères-perles dans plusieurs autres localités , telles que les côtes du Japon, de Cumana, etc. Pour se procurer ces mollusques précieux, des hommes , habitués à cet exercice , plongent au fond de la mer et vont les ramasser ainsi à des profondeurs de vingt à cinquante pieds. Afin d'accélérer sa descente, le plongeur saisit avec ses orteils une grosse pierre, munie d’une corde, et,quand le besoin de respirer ou la crainte des requins lui fait desirer de remonter, il se débarrasse de ce poids et donne le signal pour que les matelots resiés sur le bateau le tirent à eux. La pierre est ensuite ramenée à bord , et sert à un nouveau plon- geur. Le temps pendant lequel les plongeurs resient sous l’eau est ordinairement d’une minute, quelquefois d’une minute et demie ou même deux minutes: on cite même un individu qui pouvait y rester six minutes. Chacun d’eux est muni d’un sac ou filet destiné à recevoir les coquilles qu'il ramasse, et il n’est pas rare de les voir remonter chargés d’une centaine de ces mollusques: ils plongent quarante ou cinquante fois dans une journée , et la pêche d’un bateau , monté par dix plongeurs et dix hommes employés à les haler à bord, s’élève quelquefois à trente-trois mille pintadines par jour. Pour que les bancs ne soient pas dévastés , on en règle l’exploitation, et on pense qu’il fautsept ans pour que ces animaux acquièrent toute leur matu- rité. A Ceylan, la saison de la pêche dure depuis le milieu de février jusque vers la fin de mars. Les coquilles sont déposées sur la plage, dans des enclos particuliers , et, lorsque les ani- maux sont moriset à demi pourris, on examine attentivement chaque coquille, pour en retirer les perles ; on choisit aussi les plus belles coquilles , propres à fournir la nacre; puis on fait le triage des perles; on les nettoie ; on détache et on polit avec de la poudre de perles celles qui sont adhérentes; on les per- fore , et, après les avoir réunies en chapelet, on les livre au 824 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. commerce. Les produits de cette industrie sont assez considé- rables. En 1798, la pêche de Ceylan a été évaluée à 4,800,000 fr. ; mais, les bancs ayant été trop épuisés , dennèrent beaucoup moins les années suivantes, et le revenu qu’on en tire aujour- d’hui est moins elevé. Les JAMPONNEAUX Ou PINNES ont deux valves égales en forme d’évantail à demi ouvert, bäillantes et réunies par un ligament le long d’un de leurs côtés. On en trouve dans la Méditerranée une très grande espèce qui vit à demi enfoncée dans le sable et ancrée à l’aide de son byssus, dont les filämens très fins, brit- lans comme de la soie et d’une grande force, sont employés par les habitans de quelques parties de la Calabre et de la Si- Jambon- neaux. cile pour tisser des étoffes précieuses. Arches. Le st NAN a VW NS NN NN Fig. 363. ARCHE. quille est plus allongée dans le sens parallèle à cette jonction; chez les autres nommés PÉTONCLES {fig. 364), la charnière est Fig. 364. PÉTONCEE. Les ARCHES se distinguent de tous les précédens par leur co- quille équivalve, et dont la charnière, situéesur le long côté des valves, est garnie d’un grand nom- bre de petites dents qui s’engrènent dans les in- tervalles les unes des au- tres ; chez les unes, les ARCHES PROPREMENT DI- TES (/g. 363), la charnière est rectiligne et la co- courbe et la coquille de forme len- ticulaire. Les premières se tien- nent près du rivage dans les en- droits rocailleux , et sont ordirai- rement recouvertes d’un épiderme velu ; les derniers vivent dans Ja vase. Les unes et les autres se trouvent sur nos côtes. Enfin les TRiGOnIEs , dont la plupart des espèces sont fossiles, sont remarquables par leur char- nière munie de deux lames en che- vron crénelées à chaque face, et pé- MOLLUSQUES ACÉPHALFS. 82: nétrant entre quatre lames de la valve opposée, crénelées de même sur léur face interne. | Dans la FAMILLE DES MYTILACÉS, le manteau est large- ment ouvert en avant comme chez les osiracés, maisil présente une ouverture particulière pour la sortie des excrémens; cet orifice , du reste, ne se prolonge pas en tube , comme dans les familles qui voni suivre, et il n’existe pas d’ouverture spéciale pour le passage de l’eau servant à la respiration. Il existe tou- jours un pied distinet , et les valves sont rapprochées par l’ac- tion de deux muscles adducteurs. Les mytilacés se ressemblent assez pour être connues du vuigaire sous un seul nom , celui de moules, mais ils doivent néanmoins être divisés en plusieurs genres, dont les plus im- portans sont les moules proprement dites , les anodontes et les mulètes. Les MOULES PROPREMENT DITES abondent sur les rochers de nos côtes où elles vivent fixées par leur byssus et en généra! serrés les unes contre les autres. Leur coquille est close et ses valves, de forme triangulaire, sont égales, bombhées et réunies par un jigament éiroit sur le côté de leur angle aigu. La bouche de l'animal est située près du sommet de la co- quille dont extrémité opposée laisse passer le byssus ; Panus est placé aussi près de la charnière; et vis-à-vis de cet ori- fice, il existe une ouverture particulière ou un petit tube formé par le manteau; vers l’angle arrondi de la coquille, là où passe l’eau nécessaire à la respiration , le bord du manteau est frangé ; enfin, le pied est grèle, cylindrique, et garni postérieurement d’un byssus soyeux. Les moules sont généralement employées comme aliment, mais elles déterminent quelquefois une espèce d’empoisonne- ment accompagné de symptômes très alarmans et suivis quel- quefois de la mort. Le vulgaire attribue à tort ces accidens à la présence d’un petit crabe nommé Pinnothère , qui se trouve fréquemment dans l’intérieur de la coquille de ces mollusques ; car ce crustacé n’est nullement vénéneux ; quelques auteurs pen- sent que la qualité malfaisante des moules dépend au contraire de ce qu’elles se sont nourries du frai des étoiles de mer, qui, assure-t-0n, est lui-même un poison; enfin d’auires la consi- dèrent comme résultant d’une maladie de ces mollusques. Mais toutes ces opinions ne paraissent pas suffisamment étayées, et, Famille des mytiluces. Moules. Modioles. Anoduntes, Rluletes. 826 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. du reste, ne suffisent point pour expliquer les faits observés ; ear on sait que certaines personnes ne peuvent jamais manger de moules sans en être plus ou moins incommodées , tandis que, pour d’autres personnes, elles ne sont jamais nuisibles; ilsemble- rait donc plus rationnel d’attribuer les accidens qu’elles produi- sent à l’état particulier de celui qui s’en nourrit, plutôt qu’à l'existence d’un véritable poison , et en effet, la médecine nous apprend que, par suite de dispositions particulières de l’esto- mac (appelées par les hommes de l’art Zdiosyncrasie), certains alimens qui, pour les personnes ordinaires , sont de facile di- gestion , peuvent devenir pour d’autres individus une espèce de poison, et déterminer tous les accidens produits par les moules ; on cite des exemples de personnes qui, jouissant d’ailleurs d’une bonne santé, ne pouvaient jamais manger des fraises sans avoir une indigestion violente, d’autres qui éprouvaient les mêmes symptômes pour peu qu’elles mangeassent des goujons, du merlan, eic., enfin on saitégalement que des substances qui, pour tous les hommes sont de violens poisons , n’ont aucune in- fluence nuisible sur certains animaux ; aussi sommes-nous por- tés à croire que l’empoisonnement produit par les mouies ne dépend pas tant des qualités particulières d’un certain nom- ore de ces animaux, que de l’état de l’estomac des personnes qui ne peuvent les digérer. On distingue sous le nom de mMop1oLEs les moules dont la char- nière est placée plus bas, et on donne le nom de LITHODERMES à d’autres espèces qui ont la coquille presque également arrondie aux deux bouts, et qui se creusent des trous dans les pierres auxquelles elles sont d’abord simplement suspendues. Les ANODONTES, appelées vulgairement moules d'etang , vivent dans les eaux douces et se reconnaissent à leur coquille mince, médiocrement bombée, ovalaire , close et sans dents à la char- nière ; elles manquent de byssus et sont pourvues d’un pied très grand, comprimé et de forme presque quadrangulaire, à laide duquel elles rampent sur le sable ou sur la vase. Nous en possédons une grande espèce dans nos eaux douces à fond va- seux. Les MULÈTES ou moules des peintres (unio), ressemblent beau- Coup aux anodontes, mais ont une charnière plus compliquée, la MOLLUSQUES ACÉPHALES. 827 valve droite ayant une fossette dans laquelle pénètre une dent de la valve gauche, et offrant en arrière une longue lame qui, à son tour, est reçue entre deux lames du côté opposé. Ces mollusques habitent aussi les eaux douces , mais se tiennent de préférence dans celles qui sont courantes. L'espèce commune est ovalaire et de couleur brun-verdâtre ; elle est très répandue en France. On trouve aussi dans le Rhin, la Loire et quelques autres rivières, une mulète beaucoup plus grande et remarquable par la beauté de la nacre dont l’intérieur de la coquille est garni; on en re- tire même des perles assez belles. Enfin, on range aussi dans ce groupe quelques mollusques marins qui ressemblent aux mulètes par leur organisation et par la disposition générale de leur charnière, mais dont la coquille a les sommets plus bombés et des côtes saillantes qui rayonnent de ces points vers la circonférence ; telles son! les GARDITES , dont la forme est plus ou moins oblongue ou en cœur, les CYPRICARDES , dont la dent située sous le sommet de la coquille, est divisée en deux ou en trois ; les CORALLIOPHAGES, dont la coquille est mince et la lame latérale très effacée, etc. Dans la FAMILLE DES CAMACÉES , le manteau est fermé et percé seulement de trois ouvertures , dont l’antérieure sert à la sortie du pied (p. fg. 365), la suivante (r) au passage de l’eau néces- saire à la respiration, et la troisième (e) à l’expulsion des excrémens.Ainsi que nous l’avons déjà dit, ces deux dernières ouvertu- res ne se prolongent pas entubes, comme dans les deux familles suivantes. Enfin la charnière a beau- coup d’analogie avec celle des mulètes ; car la valve PR gauche présente, près du . e sommet, une dent, et, rt) plus en arrière , une lame Saillante, qui entre dans des fosses de la valve opposée. Lin, Men PAM à xbt ni LT ERA ren A SET ay Ve DS »”) 4 \C à n:A PA KE \ \ f + F & À ?P (1) Une came dépoillée de sa coquille, pour montrer la disposition de son manteau ; —— p le pied ; — r l'ouverture de la respiration. 54 Familie des camäcees. Tridaæcves. Came: isucardes, Famille des Capriacées, s2s ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. On üivise les camacéest en tridacnes , cames, isocardes , etc. Les TRIDACNES ont la coquille équivalve, allongée et bâillante en avant , où ses bords sont dentelés (#4. 366). Leur organisa- tion intérieure présente plusieurs particularités remarquables. Ils n’ont qu’un seul muscle adducteur des valves. Leur manteau est largement ouvert en avant, pour livrer passage au byssus, et présente , un peu au-dessous de l’angle antérieur, une autre ouverture, qui introduit Peau vers les branchies ; enfin la trei- sième ouverture, qui répond à l’anus, est située vers le milieu du bord inférieur. C’est à ce genre qu’appartient l'énorme coquille de la mer des Indes , connue sous le nom vulgaire de benitier : elle se trouve suspendue aux rochers par des byssus si gros et si forts, que, pour les trancher, il faut employer la hache, et son poids s'élève quelquefois à plus de trois cents livres. Fig. 366. TRIDACNE. Les cAMESs ont la coquille équivalve, irrégulière, et le plus souvent lamelleuse et hérissée : elles vivent fixées aux rochers, comme les huitres et ont un petit pied coudé comme celui de l’homme (fig. 365). On en trouve quelques espèces dans la Médi- terrance. Les ISOCARDES ont , au contraire, la coquille libre , régulière et bombée. La Méditerranée en produit une espèce assez grande. La FAMILLE DES CARDIACÉES a pour caractère d’avoir Île MOLLUSQUES ACÉPHALES. 829 manteau ouvert par devant et prolongé postérieurement en deux tubes qui tantôt sont distincts , tantôt sont unis en une seule masse , et qui ser- vent , lune pour la res- piration (r, fig.367), l'au- tre pour le passage des excrémens (e). Ce mode de conformation se re- Fig. 367. TELLINE. connait sur la coquil- le par la disposition de l'impression d'attache des bords du manteau, qui, avant de se réunir à l'impression musculaire postérieure , décrit une cour- bure rentrante plus ou moins pro- fonde (#g. 368). Chez tous ces mol- lusques , il existe un muscle trans- versal à chaque extrémité du corps et un pied(p, fig. 367), qui, en géné- ral, sert à ramper. Les espèces qui ontide longs tubes vivent d'ordinaire enfoncées dans le sable ou dans ia vase. Fig. 368. VÉNÉRUPE. On range dans cette famille les bucardes, les donaces , les cyclades , les corbeilles , les tellines , les lucines, les vénus, les pétricoles , les mactires , etc., genres qui , pour la plupart, sont très nombreux en espèces , mais n’offrent que peu d’in- térèt. Les BUCARDES ( cardium) Ont pour caractère principal une charnière , garnie de part et d’autre de deux petites dents, situées au milieu et d’une lame saillante ou d’ure dent , placée à quelque distance en avant et en arrière. Leur coquille est équi- valve , bombée , garnie de côtes rayonnantes du sommet vers la circonférence. Enfin sa forme générale, lorsaqu’on la regarde de côté , rappelle celle d’un cœur, à cause de la manière dont les sommets des valves s’élèvent et se recourbent en dedans. Ces mollusques sont irès communs sur nos côtes. Une espèce, que l’on mange et que on désigne ordinairement sous le nom de coque ou soudon , abonde sur les plages sablonneuses. Les DONACES (donax) ont la charnière conformée ä-peu-près D4, Bucardes. Donasces, Cyclades. Corbeilles. Tellines. Venus. 830 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. comme chez les bucardes ; mais leur coquille est aplate , a-peu-près triangulaire, inéquilatérale et à sommets presque verticaux. On en trouve sur nos côtes plusieurs petites espèces, dont la coquille est très jolie. Les CxCLADES ont la même charnière et se distinguent des précédens par la forme arrondie de leur coquille, qui est équilatérale (c’est-à-dire dont les deux moitiés de la valve, situées de chaque côté d’une ligne verticale passant par son sommet, sont semblables), et striée en travers. Une espèce est fort commune dans nos mers. Les CORBEILLES (corbis) sont des coquilles de mer oblongues transversalement , qui ressemblent aux précédentes par leur charnière et dont la surface extérieure est garnie de côtes trans- verses , croisées par des rayons divergeant avec une grande régularité. Les TELLINES ressemblent beaucoup aux donaces ; mais elles ont le milieu de la charnière armé d’une dent à gauche et de deux à droite. Leur coquille est légèrement bâillante. De même que les donaces , elles ont deux longs tubes (fig. 367 ), qui peuvent rentrer en entier dans la coquille, quand Panimal se contracte. Les unes et les autres vivent enfoncées dans le sable et abondent sur nos côtes. Les vÉNus sont reconnaissables à leur charnière, dont les lames antérieure et postérieure , au lieu d’être écartées des dents médianes , comme chez les bucardes, elc., sont rappro- chées en un seul groupe sous le sommet. Leur coquille est en général épaisse , médiocrement bombée et un peu allongée.On en connaît un très grand nombre. Les PÉTRICOLES et les VÉNÉ- RUPES ressemblent beaucoup aux vénus, et ont été ainsi nommées, parce qu'elles vi- vent dans Pintérieur des pier- res qu’elles perforent. Enfin les MACTREs diffè- rent des autres cardiacées Fig. 369. MACTRE. par Pexistence d’un ligament MOLLUSQUES ACÉPHALES. 831 intérieur logé dans deux fossetles de la charnière correspon- dant l’une À l'autre (fig. 869). Il en existe quelques grandes es- pèces sur nos côtes. La cinquième et dernière famille d’acéphales testacés , ou les ENFERMÉS , se compose des mollusques dont le manteau n'est ouvert que par son exirémité antérieure ou vers son milieu pour le passage du pied, et se prolonge postérieurement en un double tube ; partout ailleurs il est complètement fermé (fig. 370). Leur coquille est toujours bâillantie par ses extrémités, Fig. 350. SOLEN. (1) et la plupart de ces animaux vivent enfoncés dans le sable ou dans la vase ; quelquefois ils se creusent même des trous dans les pierres ou dans les bois. On les divise en myes , luiraires, anatines, glycymères, solémyes , byssomies , hyatelles , solens, psammobies , pholades , tarets , fistulanes, etc. Les LUTRAIRES ressemblent beaucoup aux mactres ; mais leur charnière est dépourvue de lames latérales , et leurs valves sont très bâillantes, surtout en arrière , par où sort le gros cylindre charnu , formé par leur double tube. On en trouve une grande espèce dans le sable de l'embouchure de plusieurs de nos fleuves. (x) e La coquille ; — a l'extrémité antérieure du manteau ; — p le pied ; —# les talons. Famille des cufermes, Luiraires. Myes, etc. B\ssomies. Hrateiles. Solenus, Sanguino- iaires. Phoiades. 832 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. Chez les MYxEs, 1l existe à une des valves une lame saillante, et ,à l’autre, une fossette , réunies par le ligament ; les ANATINES présentent à chaque valve une petite lame , donnant attache au ligament; enfin les SOLÉMYES et les GLYCYMÈRES diffèrent des myes par leur ligament extérieur. Les RyssOMIES , au lieu de vivre dans le sable, comme les précédens , pénètrent dans les pierres et les coraux, et s’y fixent à l’aide &’un byssus. Leur coquille est oblongue , sans dent marquée et hâillante vers le milieu de son bord inférieur pour le passage du pied. Les HYATELLES ont à-peu-près la même forme générale ; mais ja dent de leur charnière est plus marquée. Les SOLENS, appelés vulgairement manches de couteau (fig. 370), à cause dela formecylinärique et allongée de leur coquille, ont la charnière garnie d’un ligament extérieur et armée, de chaque côté, de deux ou trois dents saillantes et bien prononcées. Leur pied est conique et sort par l'extrémité antérieure de la coquille. Ils vivent dans le sable et s’y enfoncent avec beaucoup de rapidité à FPaide des mouvemens qu'ils exécutent avec leur pied. Les SANGUINOLAIRES, Les PSAMMOBIES et les PSAMMOTHÉES sont des mollusques très voisins des solens, mais dont la coquille est plus large , et dont l’armature de la charnière est un peu différente. Les PHOLADES se distinguent de tous les précédens par l’exis- tence d’une ou plusieurs pièces calcaires, situées entre les deux valves de leur coquille, près de la charnière. Les valves, Jarges et bombées antérieurement, s’allongent du côté opposé et laissent entre elles , à chaque bout , une grande ouverture obli- que; leur charnière ressemble assez à celles des myes ; enfin leur äouble tube n'est point rétractile et peut s’allonger extrême- menti. Ces animaux habitent des tubes, qu’ils se creusent, soit dans la vase , soit dans des pierres ou dans des bois. Nous en possédons une grande espèce sur nos côtes. MOLLUSQUES ACÉPHALES. 835 Les rareps sont célèbres par les dégâts qu'ils font en perfo- rant la quille des navires , les pilotis des digues, les écluses , etc. Ce sont des mollusques, dont le corps très allongé et presque C7 PR sn ARTS 6 ATEN TE cru FR Pronos Emi EPANETE Ai ea RE LNH ge 0 20m CE ARE is or SSSR w ZA “à D Ltée Ee 2 + : TA j 27 L4 TS. RE CR CEA M ENT TES P * CE rent Ad vermiforme, est enveloppé dans un manteau tubuleux, ouvert à la partie antérieure et infé- rieure pour livrer passage au pied , est pourvue en arrière de deux tubes distincts, très courts, et dont la base est garnie de chaque côté d’une palette pierreuse et mobile; leur coquille est composée de deux valves rhomboïdales , mais elle est très petite , et ne recouvre qu’une faible portion du manteau. Il paraïtrait que c’est en faisant agir l'extrémité de sa coquille à la manière d’une tarière , que l’animal creuse dans le bois submergé le irou qui lui sert de demeure ,et, à mesure qu’il s'enfonce, il tapisse cette excavation d’une matière calcaire , de facon que bientôt il se trouve logé dans un tube pierreux qu'au premier abord on pourrait prendre pour une seconde coquille. IL com- mence à attaquer le bois lorsquw’il est très jeune; aussi l’ouverture extérieure de sa galerie est-elle très petite, mais il s’y enfonce jusqu’à ce qu’il ait terminé sa croissance et augmente progres- sivement la largeur de sa demeure; les deux tubes qui occupent l’extrémité postérieure de son manteau restent cependant dans le voisi- nage de l’ouverture de la galerie, et c’est par l’un d’eux qu’il fait entrer l’eau nécessaire à sa respiration et à sa nutrition, car il reste tou- jours dans son trou la bouche en bas et l’anus en haut. Le tarret commun, dont la longueur est d'environ six pouces, a été apporté, dit-on, de la zone torride, mais s’est malheureusement beaucoup répandu dans nos mers, et a telle- ment infesté les digues de la Hollande, que plus d’une fois ses ravages inaperçus ont manqué d’occasioner de terribles inondations. On a vu Fig.371.TARET.aussi des vaisseaux couler à la suite de voies d’eau déterminées par ces animaux destructeurs. Les FISTULAXES vivent aussi enfoncées dans le bois submergé Tarets. Fistulancs. 834 ZOOLOGIE DESCRIPTIYE. ou dans quelque autre corps analogue, et tapissent également leur trou d’un mortier calcaire qui constitue un tube complè- tement fermé par le gros bout, et ressemblant plus ou moins à une bouteille. De même que les tarets, elles ont en outre une petite coquille bivalve et deux palettes qui peuvent être consi- dérées comme les analogues des pièces operculaires des gastéro- podes. Elles habitent la mer des Indes. Gastrochè- Les GASTROGCHÈNES ne diffèrent que peu des précédentes ; leur ne coquille , dépourvue de dents , est très brillante en avant , et leur double tube qui peut y rentrer entièrement, est susceptible de beaucoup d’allongement; ils se creusent des trous dans la pierre calcaire ou dans des masses madréporiques , et revêtent souvent ces excavations de matière calcaire qui, en se solidifiant , con- stitue un tube analogue à celui des tarets et des fistulanes. Clavagelles Enfin, on range encore dans cette division les CLAVAGELLES ctarrosois. et les ARROSOIRS qui se construisent également un tube calcaire ; chez les premiers, l’une des valves est saisie par ce tube, tandis que l’autre reste libre dans son intérieur , et, chez les derniers, Je tube présente à son extrémité fermée, un disque percé d'un grand nombre de petits trous tubuleux , disposition qui leur a valu le nom d’arrosoirs. CLASSE DES MOLLUSQUES BRACHIOPODES. Caractères. Ces mollusques ont beaucoup d’analogie avec les acéphales ordinaires; ils sont également pourvus d’un manteau à deux lobes et d’une coquille bivalve, mais ils n’ont pas de pied , et présentent à la place de cet organe deux bras charnus garnis de filamens et susceptibles de se déployer au- dehors ou @e rentrer dans la coquille, en s’enroulant en spirale (a, fig. 372;; leurs branchies cessent d’être distinctes du man- teau , etla masse formée par leurs viscères esttrès petite. Ils sont dépourvus d'organes de locomotion, et vivent fixés aux corps a sous-marins. Fig. 372. TÉRÉBRATULE. MOLLUSQUES BRACHIOPODES. 835 Les genres principaux dont ce groupe se compose sont les lingules , les térébratules ei les orbicules. Les LINGULES sont pourvues d’un long pédoncule charnu, dont l’une des extrémités est en général fixée aux rochers sur lesquels ces animaux habitent d'ordinaire , et l’autre extrémité porte deux valves oblongues et aplaties. Leurs bras, insérés sur les côtés de la bouche, sont très longs; enfin, les vais- seaux branchiaux rampent à la face intérieure du manteau, et y forment de chaque côté une série de petits replis parallèles. Elles se trouvent dans les mers d’Asie. Les TÉRÉBRATULES Ont deux valves inégales jointes parunechar- nière , et c’est à travers un trou percé au sommet de l’une d’elles que passe le pédoncule charnu à l’aide duquel l’animal se fixe. Leurs branchies sontmoins dis- üunctes que chez les lingules , et ne consistent qu’en un réseau vasculaire disséminé à la face interne du manteau; mais leur système musculaire est plus dé- veloppé, et il existe dans linté- rieur de la coquille une petite Fig. 373. TÉRÉBRATULE. charpente solide (#g. 374), dont la structure est quelquefois très compliquée, et dont les princi- paux usages sont de fournir des points d'attache aux muscles et d'aider à produire l’écartement des valves. On trouve des tére- Fig. 374. bratules vivantes dans les mers du Sud ; mais c’est surtout à l’é- tat fossile qu’elles abondent, et elles se monirent dans les cou- ches fossilifères les plus ancien- nes de l'écorce du globe. Les ORBICULES ont une valve ronde et conique comme la co- quille des patelles, tandis que l'autre est plate et perforée pour le passage d’un pédoncule très petit; la conformation de leurs bras et la disposition des vaisseaux branchiaux, se rapprochent beaucoup de ce que nous avons vu chez les térébratules. bu Liugu'es. Térébratu- es, Orbicules. Fiphores. s36 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. CLASSE DES MOLLUSQUES TUNICIERS OU ACÉPHALES SANS COQUILLES. Les mollusques acéphales sans coquiile, qui ont reçu aussi le nom de tuniciers , diffèrent beaucoup de tous les précédens par leur forme générale aussi bien que par plusieurs particularités importantes de leur organisation. Leur manteau constitue tantôt un tube ouvert à ses deux bouts, tantôt un sac; leurs bran- chies présentent des formes diverses, mais sont toujours peu développées et ne sont jamais divisées en quatre feuillets comme chez les acéphales ordinaires ou testacés lamellibranches aux- quels plusieurs auteurs les réunissent; ils n’ont ni pied ni bras, et établissent évidemment le passage entre les mollusques dont nous venons de terminer l’histoire, et certains animaux infé- rieurs que l’on range parmi les polypes dans l’embranchement des zoophytes. Les BIPHORES ({sælpa) sont, de tous les tuniciers, ceux dont l’organisation est la plus compliquée. Leur manteau est tubi- forme, garni de bandes musculeuses transversales , et ren- 4 an fermé dans u- ne enveloppe cartilagineu- se, transpa- rente; l’uneel l’autre sont ouvertes aux deux bouts, et leur orifice de postérieur (p) Fig. 375. BIPHOHE. (1) est muni d’u- ne valvule, disposée de manière à permettre l’entrée de l’eau, mais non sa sortie ; la bouche est placée dans lintérieur du tube formé par le manteau vers sa partie antérieure; et le cœur, le foie et les autres viscères sont réunis en une petite masse près de cette ouverture; l’anus est situé assez loin en arrière , et une (1) a Ouverture antérieure du manteau; — b bouche; — f foie , ete. ; — an anns; — br branchie; — p ouverture postérieure du manteau. MOLLUSQUES TUNICIERS. 837 branchie umique composée d’une membrane plissée en travers, s'étend obliquement de la paroi supérieure à la paroi inférieure de la cavité palléale; l’eau qui traverse ce tube baigne par con- séquent l’appareil respiratoire, et c’est en l’expulsant avec force du côté de la bouche que l'animal se déplace : aussi est-ce en arrière qu’il nage. A l’âge adulte, ces mollusques sont libres; mais au moment de la naissance, ils sont souvent réunis entre eux en une longue chaine , et nagent ainsi pendant long- temps ; il paraitrait du reste que les individus ainsi agrégés, après être devenus libres, produisent des jeunes qui ne sont pas réunis en chapelets et qui ont ane forme différente de la leur, et que les petits provenant de ces derniers sont agrégés et sem- blables aux premiers ; de manière qu’il y aurait chez ces singu- liers animaux une alternance des plus remarquables, les mêé- mes formes et le même mode d'existence, ne se transmettani pas d’une génération à l’autre , mais revenant toujours à la se- conde génération. Les biphores se trouvent dans la Méditerranée et dans les par- lies chaudes de lOcéan; souvent ils émettent une lumière phosphorique. Les ASCIDIES SIMPLES ne peuvent se déplacer comme les bi- phores et vivent fixées aux rochers ; leur manteau a la forme d’un sac pourvu de deux orifices, et l’intérieur de cette cavité est ta- pissé par le réseau des vaisseaux branchiaux ; la bouche et le noyau renfermant les viscères , sont fixés au fond du grand sac branchiai, et l’anus se trouve près de l’une de ses ouvertures. D’autres tuniciers, très voisins des précédens par leur orga- nisation , vivent réunis en une masse commune, et sont dési- gnés pour cetie raison sous le nom d’ASCIDIES COMPOSÉES. Un tissu de consistance gélatineuse ou cartilagineuse , renfermeun grand nombre de ces petits êtres, et présente à sa surface une multitude de petites étoiles à six branches formées par leur ou- verture; ieur propagation parait se faire de deux manières : tantôt la masse s’accroit par le développement de bourgeons re- producteurs dans ce tissu commun, tanlôt des jeunes formés dans unovaire, sont expulsés au-dehors et nagent librement pen- dant quelque temps, jusqu’à ce qu’ils se soient fixés sur quelque corps sous-marin où ils vont établir une nouvelle colonie. On donne le nom de BOTRYLLES à de petits tuniciers agrégés, Ascidie* sim- pies. Acidies com- posées. Dotryiles, Pyrosomes. 838 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. de forme ovalaire , qui diffèrent un peu des précédens, en ce que leur sac branchial est ouvert à ses deux extrémités, et que l’orifice anale aboutit à une cavité centrale autour de laquelle dix à douze de ces mollusques sont groupés comme les rayons d’une étoile. Enfin , les PYROSOMES sont des mollusques agrégés assez sem- blables aux botrylles par leur organisation individuelle, mais qui sont réunis en très grand nombre, de manière à former un grand cylindre creux, ouvert par un bout seulement, contrac- tile et nageant dans la mer. RS VE LES ANIMAUX ARTICULES. 839 * FROISIÈME EMBRANCHEMENT DU REGNE ANIMAL. LES ANIMAUX ARTICULÉS. Les animaux qui composent celte grande division présentent non-seulement une structure intérieure essentiellement diffé- rente de celle quiest propre aux trois autres embranchemens du règne animal, mais aussi des caractères extérieurs si tranchés et si évidens, qu'il est presque toujours facile de les reconnaitre au premier coup-d’æœil. Tout leur corps, en eïfet, est divisé en tronçons et semble composé d’une suite d’anneaux placées à la file les uns des autres. Chez les uns, cette disposition annulaire résulte seulement de l’existence d’un certain nombre de plis transversaux , qui sillonnent la peau et ceignent le corps; mais, chez la plupart, l’animal est renfermé dans une sorte d’armure solide , composée d’une série d’anneaux soudés entre eux ou réunis de manière à permettre des mouvemens. Cette armure a des usages analogues à ceux de la charpente intérieure des animaux vertébrés; car elle détermine la forme générale du corps ; elle protège les parties molles; elle donne des points d'attache aux muscles , et elle leur fournit des leviers propres à assurer la précision et la rapidité des mouvemens : aussi l’ap- pelle-t-on souvent un squelette extérieur ; Mais ce serait à tort que l’on voudrait y voir le représentant ou l’analogue de notre squelette ; car, dans la réalité, elle n’est autre chose que la peau devenue dure et rigide, ou même encroùütée par une sorte d’épiderme calcaire de consistance pierreuse. Pour donner une idée vraie de ses usages aussi bien que de sa nature , il serait par conséquent préférable de le nommer un squelette tequ- mentaire. Les divers anneaux ou troncons du corps d’un animal arti- Organisa - tion, Squelette tc- culé ont toujours beaucoup de ressemblance entre eux; quel- 8g'mentaire. quefois ils sont presque tous la répétition exacte les uns des autres, et toujours ils montrent une tendance remarquable vers celte uniformité de structure. Chaque anneau peut porter deux paires d’appendices ou demembres, l’une appartenant à son arceau dorsal ({g. 376), l’autre à son arceau ventral, et, lorsque ces appendices sont peu développés, et que la division du travail physiologique est peu avancée , tous les anneaux en sont effec- tivement pourvus : aussi le nombre de ces organes est-il quel- quefois extrémement considérable; mais, en général, les ap- Système ner- veux. 840 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. pendices de certains anneaux acquièrent un grand développe- ment, el, par une sorte de compensation ou de balancement organique, les autres restent rudimentaires ou ne se montrent même pas. Presque toujours les appendices de l’arceau infé- Fig. 3176. (1) rieur sont les seuls qui se développent ,etils prennent des formes d'autant plus variées , que lPanimal est plus élevé dans la série des êtres. Ce sont eux qui, diversement modifiés, constituent les filamens semblables à des cornes qui ornent la tête des insectes et des crustacés , et qu’on nomme antennes, les divers organes de mastication , les pattes , les nageoires, etc. Quelquefois'les ap- pendices de l’arceau supérieur existent partout et remplissent , comme ceux de l’arceau inférieur, les fonctions de pattes (2); mais d'ordinaire ils n’existent tout au plus que sur deux des anneaux situés vers la pariie moyenne du corps et constituent des ailes ou des organes analogues (3). Les pattes sont ordinairement au nombre de trois , quatre, cinq ou sept paires ; quelquefois on en compte plusieurs centaines, et d’autres fois elles manquent com- plètement ; mais alors elles sont presque toujours représentées , pour ainsi dire, par des faisceaux de soies raides , comme dans le ver de terre, par exemple. La tendance que montrent les anneaux du corps à se répéter les uns les autres , est remarquable dans la disposition des (1) Coupe verticale d’un anneau du corps d’une annélide du genre amphinome, — d arceau dorsal; — * arceau ventral; — re membre (ou rame) de l’arceau ventral ; — rd membre (ou rame) de l’arceau dorsal ; —s soïes dont ces organes sont armés ; — c appendice nommé cirrhe. (2) Voyez les annélides. (3) Voyez les insectes. LES ANIMAUX ARTICULÉS. S41 museles et même du système nerveux , aussi bien que dans la conformatiom du squelette tégumentaire. Fig. 3717. (1) 2) L q gro (1) Fig. 377, 378 et 3759, anatomie d’un insecte (le sphynx du troë de chenille (fig. 378), à l’état de chrysalide (f7. 377) Chaque anneau, dans Son état complet , pos- sède une paire de gan- glions nerveux, et tous ces ganglions, réunis entre eux par des cor- dons de communica- tion , constituent une double chaîne, qui oc- cupe la ligne médiane du corps près de sa face ventrale(fg. 377), Chez les animaux articulés les plus inférieurs dans la série, comme chez ceux plus élevés, mais dont le développement n’est pas terminé , ces ganglions sont tous à- peu-près égaux et for- ment avec leurs cor- ne) à l’état et à l’état parfait (re. 370) 842 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. dons de communication deux chaines semblables à des cordons garnis de nœuds étendus d’un bout du corps à l’autre ; mais, à mesure que l’on s'élève à des êtres plus parfaits , on voit ces mêmes ganglions se rapprocher entre eux, soit de manière à se confondre sur la ligne médiane en une seule série, soit dans le sens longitudinal, de facon à déterminer la réunion de plu- sieurs paires en une seule masse (fig. 378 et 379). Cette centrali- sation est quelquefois portée si loin , qu’il n’existe pour tous les anneaux du corps que deux masses nerveuses, l’une située dans la tête, l’autre dansle thorax (1); mais il est impossible qu’elle aille au-delà ; car les cordons qui réunissent entre eux ces deux centres nerveux , passent de chaque côté de l’æso- phage et les ganglions céphaliques sont placés au-devant ou au-dessus de ce tube, tandis que les ganglions du reste du corps sont situés en arrière de l’æsophage , au-dessous du çanal digestif. De même que chez les mollusques, les ganglions cépha- liques etles ganglions du thorax et de l'abdomen, unis par deux cordons de communication, forment en effet une espèce de collier autour du tube digestif; mais, chez les mollusques , la portion post-æsophagienne ou ventrale du système ganglionnaire ne se compose que d’une seule paire de ganglions situés sur la ligne médiane du corps , tandis que, chez les animaux articulés , on trouve d'ordinaire une longue suite de ganglions ventraux , et, lorsqu'il n'existe dans une partie du corps qu’une seule masse nerveuse , on reconnait facilement qu’elle résulte du rappro- chement de plusieurs paires de ganglions. Les animaux articulés ayant un système nerveux plus déve- loppé que les mollusques, des membres pour la locomotion , ei une espèce de squelette tégumentaire, doivent nécessairement pour montrer la manière dont les ganglions des divers anneaux du corps , d’abord éloignés entre eux, se rapprochent quelquefois au point de se confondre — a Ganglions céphaliques ou cerveau , situés au-devant de l’æsopkage et don- nant naissance aux nerfs des yeux , etc.; — b cordons qui unissent ces ganglions à ceux de la seconde paire, en passant de chaque côté de l’œsophage , et for- mant ainsi un collier auteur de ce canal; — c première paire de ganglions post-æsophagiens, situés derrière la bouche ; — d ganglions du premier anneau du thorax ; — e masse nerveuse formée par les ganglions du deuxième et du troisième anneaux thoraciques ; — fsixième paire de ganglions abdominaux ; — hla bouche ; —5ÿla trompe;-7 æœsophage; — À estomac; — / intestin et vaisseaux biliaires ; —» gros intestin; — #7 anus; —o pattes de la première paire; — p pattes de la seconde paire; — g pattes de la troisième paire ; — r première paire de pattes membraneuses de la chenille ; — s vaisseau dorsal ; — t premier anneau du thorax ; — w corne qui surmonte l'extrémité de l’abdomen de la chenille. (1) Voyez les crustacés brachyures. LES ANIMAUX ARTICULES. 843 leur être supérieurs dans tout ce qui caractérise essentiellement lanimalité# c’est-à-dire dans les fonctions de relation ; mais, sous le rapport des fonctions de la vie végétative, ils sont moins bien partagés ; car leur appareil circulatoire est moins complet et manque quelquefois complètement. En général, ils ont le sang blanc ; mais tous ne sont pas dans ce cas. Du reste cette différence ne parait pas avoir chez eux une grande importance. Leur mode de respiration varie. Leur tube di- gestif s’étend d’un bout du corps à l’autre; la bouche est placée à la tête, et l’anus à extrémité opposée. Enfin il existe presque loujours des mâchoires ou du moins des instrumens particuliers pour la préhension des alimens, et ces organes sont toujours disposés latéralement par paires , au lieu d’être placés l’un au-devant de lautre , comme chez les animaux vertébrés. L’embranchement des animaux articulés se divise en quatre classes principales: les 2nsectes, les arachnides , les crustacés et les annelides. Dans la plupart des ouvrages , même les plus modernes , on n’y range pas les cirrhopodes , que Cuvier pla- çait parmi les mollusques; mais des recherches récentes ont fait voir que ces animaux singuliers présentent tous les carac- tères les plus importans du type des articulés ; par conséquent, il faut aujourd’hui les comprendre dans ce groupe et porter à cinq le nombre des classes dont il se compose. Le tabieau suivant résume les traits distinctifs les plus saillans de ces divisions : distincte du | 4 en général des ailes | a 2 d INSECTES. poumons ou tra- et trois paires de pat- | ñ # chées pour respi-) tes. =) rer dans l'air, La \ confondue avec le oO pourvus de mem- tête thorax. Jamais d’ailes. AZACHNIDES = bres articulés, de Quatre paires de pit- { 4 < { sang blanc et de tes. L A En général cinq ou | RS n branchies pour | sept paires de pattes. S respirer dans { Point d'organes de ) == l’eau. iocomotion ( ST PE er < fixés ). dépourvus de membres articulés; ayant du sang rouge et} ne e ANNÉLIDES. ordinairement des branchies. j Fontions nu- tritives. R44 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. CLASSE DES INSECTES. Cnracteres On réunit dans la classe des insectes tous les animaux généraux. articulés dépourvus d’un système circulatoire proprement dit, respirant par des trachées , subissant en général des métamor- phoses dans le jeune âge et ayant des pattes articulées au nombre tantôt de trois paires, tantôt de vingt-quatre paires ou davan- tage , en général des ailes et toujours la tête distincte du thorax et garnie d'antennes. Squelertete Le squelette tégumentaire des insectes, c’est-à-dire la peau gumentaire. endurcie de ces animaux , conserve quelquefois une certaine flexibilité, mais présente en général une consistance analogue Fig. 380. b «& e d : t h LA \ . *; k ab l m (4) Anatomie du squelette tégumentaire d'un insecte : — « tête séparée dn thorax ; —e antennes ; — b yeux; — thorax; — d premier anneau du thorax, LES INSECTES. 815 à celle de la corne. Il ne faut pas croire cependant que son tissu soit réellement de mème nature. La chimie nous apprend qu’il est composé de matières très différentes et qu’une substance particulière, norimée chitine , en forme la base. On y voit un grand nombre de pièces, qui sont tantôt soudées entre elles , d'autres fois réunies par des portions molles de la peau et jouis- sent ainsi d’une mobilité plus ou moins grande. Le corps de l’insecte, comme nous l'avons déjà dit , se divise en un certain nombre d’anneaux , placés bout à bout, et, dans cette série de segmens , On distingue d'ordinaire trois portions , auxquelles on a donné les noms de féte, de thorax et d’ubdomen. La téte, formée d’une seule pièce , porte les yeux, les antennes et la bouche. Le thorax est quelquefois confondu avec l'abdomen : mais , en général (chez tous les insectes ailés, par exemple) il en est complètement séparé et se compose alors de trois anneaux, appelés prothorax , mesothorax et metathorazx , qui portent cha- cun une paire de paites , et sont soudés entre eux (#g. 380, d, fi). Lorsqu'il existe des ailes , c’est sur l’areeau dorsal des deux der- niers anneaux thoraciques qu’elles s’insèrent. Enfin l'abdomen est d’ordinaire formé d’un nombre beaucoup plus considérable de segmens plus ou moins mobiles les uns sur les autres, et pri- vés d’appendices; quelquefois cependant (comme cela se voit chez les myriapodes), chacun de ces anneaux est semblable en tout aux anneaux thoraciques , et porte également des paltes. Les membres ou appendices qui naissent de ces diversanneaux ont une structure analogue à celle du tronc de l’animal : iis se composent en effet de tubes solides ou de lames creuses, pla- eées bout à bout et renfermant dans leur intérieur les muscles et les nerfs destinés à les faire mouvoir. Ceux dela première paire , insérés sur la partie antérieure ou supérieure de la tête constituent les antennes(c, fig. 380), organes dont la forme varie beaucoup et dont les usages ne sont pas bien connus , mais pa- raissent se rapporter aux sens du toucher et de l’ouïe. Les diffé- rences qu'on remarque dans leur conformation fournissent de bons caractères pour la distinction des genres et des espèces , et sont désignées par des noms particuliers , qu’il serait trop long d’énumérer ici. Les trois paires d’appendices suivans entourent la bouche et constituent les organes de mastication et de suc- cion, dont nous exposerons bientôt la disposition. A la suite de ces appendices viennent les pattes, dont la première paire s’in- portant les pattes de la premiere paire (e); — f second anneau du thorax, sup- portant les ailes de la première paire (9) et les pattes de la seconde paire (A) ; — : troisième auueau du thorax , supportant les ailes de la seconde paire(}), et les pattes de la troisième paire (4 cuisses ;/ jambes; m tarse) ,— ai abdomen. 55 346 ZOGLOGIE DESCRIPTIVE. sère au premier anneau du thorax(e, fig. 380). On distingue dans ces membres une hanche composée de deux articles, une cuisse, une jambe et une espèce de doigt , nommé tarse, divisé en plusieurs articles , dont le nombre varie de deux à cinq, et terminé par des ongles. Chez tous les insectes aiïlés, 11 n’existe quetrois paires de pattes qui correspondent aux trois segmens du thorax; mais , chez la plupart des insectes privés d’ailes, tous les anneaux du corps en portent, et quelquefois même chaque segment donne naissance à deux paires de membres, disposi- tion qui parait dépendre de l’union intime de deux anneaux en un seul tronçon. Du reste, la conformation des pattes est en rapport avec les mœurs de ces animaux. Ceux qui en possèdent un très grand nombre ne peuvent que ramper à la manière des vers , et ceux chez lesquels les pattes postérieures présentent une grande longueur sautent , en général , plutôt qu'ils ne marchent; chez les insectes nageurs, les tarses sont ordi- nairement aplatis, ciliés et disposés comme des rames, et chez ceux qui peuvent marcher suspendus à des surfaces , on irouve , sous le dernier article de ces organes une espèce de pelotte ou de ventouse propre à les faire adhérer aux corps qu'ils touchent. Les ailes des insectes sont des appendices lamelleux, composés d’une double membrane, soutenue à l’intérieur par des nervures plus solides. Lorsqu’elles soni encore à peine développées , elies sont molles et flexibles, mais bientôt elles se dessèchent et demeurent raides et élastiques. En général, il en existe deux paires; on n’en voit jamais un plus grand nombre, mais quel- quefois l’une ou l’antre de ces paires manquent; c’est toujours sur les deux derniers anneaux du thorax qu’elles naissent; le prothorax n’en porte jamais. Leur forme varie; lorsqu'elles servent réellement au vol, elles sont minces et transparentes , à moins d’être recouvertes par une sorte de pous- sière colorée formée par des écailles d’une petites- se microscopique; mais souvent celles de la pre- mière deviennent épais- ses, dures et opaques, et constituent des espèces de boucliers ou d’étuis nommés élytres , qui > dans le repos, recouvrent les ailes membraneuses LES INSECTES. 847 et servent à les protéger (voyez fig. 390, pag. 858); d’autres fois ces mêmeslailes encore membraneuses vers leur extrémité, de- viennent dures et opaques vers leur base, et sont alors dési- gnées sous le nom de demi-étuis ou hémélytres. Enfin , lorsque les ailes postérieures manquent , elles sont d’ordinaire rempla- cées par deux petits filets mobiles terminées en massue que lon nomme balanciers. (Voyez fig. 381.) Le système nerveux des insectes présente la disposition gé- nérale et la plupart des modificatisws que nous avons déjà si- gnalées en traitant de l’embrancnement auquel ces animaux appartiennent. Il se compose principalement d’une double série Fig. 382. de ganglions qui sont réunis entreeux par des cordons longitudinaux(#g. 382); leur nombre correspond à celui des anneaux, et tantôt ils sont à-peu-près également espacés et s’éten- dent d’un bout du corps à l’autre , tandis que d’autres fois plusieurs d’entre eux sont rapprochés de manière à constituer une masse unique. Les ganglions céphaliques présentent un développement assez grand et donnent naissance aux nerfs des antennes, des yeux, etc. La première paire de ganglions post-æsophagiens fournit les nerfs de la bouche , et les cordons qui unissent ces noyaux médullaires aux ganglions cépha- liques et qui embrassent l’œsophage, don- nent de chaque côté un nerf qui remonte sur l'estomac, et qui, en s’unissant avec celui du côté opposé, constitue un nerf médian situé au-dessus du canal digestif ,et présentant sur son trajet deux ganglions. Les trois paires de ganglions situés à la suite de ceux placés im- médiatement derrière l’œsophage appartien- nent aux trois anneaux du thorax, et sont ie point de départ des nerfs des pattes et des ailes ; en général , elles sont très rapprochées entre elles et beaucoup plus grosses que les paires suivantes qui appartiennent à l'abdomen. La structure des yeux est très difiérente de ce que nous avons vu chez les animaux supérieurs et chez les mollusques. En géné- ral, l'organe qui , au premier abord, parait être un œil unique, est dans la réalité formé par l’agglomération d’une multitude de petits yeux , ayant chacun une cornée , un corps vitré de forme conique , un enduit de matière colorante et nn filament nerveux particuliers. Chez le hanneton, par exempie, on en compte près de neuf mille , et on connaït des insectes qui en ont plus Système 2er- veux. Yeux. Quiïe etodo- rat. Régime. 543 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. de vingt-cinq mille. Toutes ces petites cornées sont hexago- nales ei sont soudées entre elles, de facon à constituer une espèce de cornée commune, dont la surface présente une mul- titude de divisions semblables aux mailles dun filet , visibles seulement à l’aide d’une loupe , et c’est à raison de cette dispo- sition , que l’on donne souvent à ces yeux composées le nom d’yeux à reseau Où d’yeux à facettes. Du reste , chacun des petits appareils constituans de ces organes multiples est parfaitement distinct de ceux qui l’entourent et forme avec eux un faisceau de tubes terminés chacun par un filet nerveux provenant du renflement terminal d’un même nerf optique. Presque tous les insectes sont pourvus de deux de ces yeux composés , situés d'ordinaire sur les côtés de la tête; mais quelquefois ils sont remplacés par des yeux simples ; et d’autres fois ces deux sortes d'organes existent en même temps. Quant à la structure des yeux simples , que l’on désigne aussi sous les noms de stem- mates où d’ocelles , elle a la plus grande analogie avec celle de chacun des élémens des yeux composés. En général , les yeux simples sont réunis en groupe, au nombre de trois, vers le sommet de la tête. On ne sait rien de précis sur la manière dont ces appareils agissent sur la lumière qui les frappe ni sur le mécanisme de la vision ehez les insectes. Une multitude de faits bien constatés prouve l’existence de fouie et de l’odorat chez ces animaux ; mais on ne connaît pas encore bien les instrumens à l’aide desquels ces sens s’exercent. Les antennes et la bouche paraissent être les principaux organes du toucher. La manière dont les insectes se nourrissent varie beaucoup : les uns ne vivent que du suc des plantes ou des animaux , les autres se repaissent d’alimens solides et sont ou carnivores ou phytophages, et à ces différences correspondent des modifi- a cations remarquables dans la confor- mation de la bouche. Chez les insectes broyeurs , cette ouverture est garnie en avant d’une pièce médiane, nommée levre superieure Ou labre(a, fig. 383), et présente de chaque côté une espèce de grosse dent, mobile et très dure, appelée mandibule (b , fig. 383), qui sert à diviser les alimens. Immédiatement en arrière des mandibules se trouve une seconde paire d’appendices, dont la structure est plus compliquée : ce sont les méchoi- FT #0 res (re, fig. 383). Chacun de ces derniers Pannes organes offre au dedans une lame ou un LES INSECTES. 849 cylindre plus ou moins dur etordinairement armé dedentelures ou de poils , et porte du côté externe une ou deux petites tiges composées de plusieurs articles et appelées palpes maxillaires. Enfin , derrière les mâchoires se trouve une seconde paire d’appendices , dont la base est supportée par une pièce cornée médiane , nommée nenton (d). Ces appendices constituent la languette. ls sont appliqués contre les mâchoires , comme ces organes sont eux-mêmes appliqués contre les mandibules, et on leur distingue aussi une paire de filamens articulés et mobiles, appelés palpes labiaux, parce qu’on donne ordinairement le nom de Zevre inférieure au menton réuni à la languette. Quant à la forme de ces diverses parties , elle varie suivant la nature et la consistance des alimens. Les palpes servent principalement à saisir les alimens et à les maintenir entre les mandibules pen- dant que celles-ci les divisent. Chez les insectes suceurs , les mächoires ou le labre sallon- sent de manière à constituer une espèce de trompe tubulaire, dans l'intérieur de laquelle on trouve souvent des filamens b a déliés, remplissant les fonc- tions de petites lancettes et formés par les mandibules et les mâchoires modifiées au point d’être à peine re- connaissables. En faisant l'histoire des divers groupes dont se compose cette gran- de division des insectes, | nous décrirons les divers » e modes de conformation que | Fig. 385.(2) présentent ces organes. Le canalalimentaire pré- Fig. 384. (1) sente en général une struc- lure assez compliquée ; quelquefois il est droit et présente à-peu-près le même diamètre dans toute sa longueur; mais d'ordinaire il est plus ou moins flexueux et offre plusieurs ren- flemens et rétrécissemens successifs. On y distingue alors un pharynx , un æsophage, un premier estomac, ou jabot , un se- cond estomac ou gésier, dont les parois sont musculaires etsou- ventarmées de pièces cornées, propres à triturer les alimens ; un troisième estomac, nommé ventricule chylifique , dont la texture (1) Fig. 384 , bec d’un insecte hémiptère. (2) Fig. 385, trompe d’un papillon :— a tète ; — à base des antennes ; — € œil ; — d'trompe, — € palpes. Canal di- gestif. 860 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. est molle et délicate, un intestin grèle, un cœcum et un recium. Le même que chez ies animaux supérieurs , en remarque un (2 b (] d . Fig. 586. (1) tricule chilifique (e, ffy. 386). Ces vaisseaux biliaires tienhent aussi lieu de glandes urinaires ; car il s’y forme de Pacide urique. Par un de leurs bouts ils débouchent toujours dans le ventricule rapportentre la nature des alimens et le développe- ment qu’acquiert ce ca- nal ; chez les insectes car- nassiers , il est en général très court, tandis que, chez les insectes qui se nourrissent de substances végétales, il est ordinaire- ment fort long. Les ali- mens qui y arrivent sont d’abord imbibés de salive ; l'appareil qui sécrète ce liquide consiste en un cer- tain nombre de tubes flot- tans, terminés quelquefois par des espèces d’utricules et communiquant avec le pharynx par des canaux excréteurs. Unemultitude de villosités , dont le ven- tricule chylifique est or- dinairemeni garni, parais- sent servir à la sécrétion d’un suc gastrique , et c’est également dans cette ca- vité qu'est versée la bite. Ii n'existe pas de foie pro- prement dit chez les in- sectes ; mais cet organe est remplacé par des tubes longs et déliés, qui flottent dans l’intérieur delabdo- men et débouchent supé- rieurement dans le ven- (x) Appareil digestif d’un insecte carnassier : — 4 tête portant les antennes, les mandibules, etc. ; — à jabot et gésier, suivi du ventricule chilifique ; —c vais- seaux biliaires ; — intestins; — e organes sécréteurs : — f'anus. _ LES INSECTES. 851 chylifique, et l’autre extrémité est tantôt libre, tantôt fixée à l'intestiné soit auprès de la première ouverture , soit dans le voisinage du rectum. Enfin on trouve encore, vers l’extré- mité postérieure du canal intestinal , d’autres organes sé- créteurs , qui servent à élaborer des liquides particuliers (tels que le venin de labeille), que plusieurs insectes font sortir de lextrémité de leur abdomen lorsqu'on les inquiète. Il paraitrait que c’est par une simple imbibition que le chyle traverse les parois du tube digestif et se mêle au sang. Ce der- nier liquide est aqueux et incolore ; il n’est pas renfermé dans des vaisseaux, et se trouve répandu dans les interstices, que les organes laissent entre eux ou présentent dans la substance de leur tissu. Les insectes manquent aussi d’une circulation régu - lière. On distingue bien , dans certaines parties du corps, des courans même assez rapides ; mais le liquide nourricier ne par- court pas un cercle de manière à revenir constamment vers son point de départ.Il n'existe effectivement chez ces animaux quedes vestiges d’un appareil circulatoire. On voit près de la surface dorsale du corpsun tube longitudinal ({g.379, page 841), qui exé- cute des mouvemens alternatifs de contraction et de dilatation analogues à ceux du cœur chez les animaux supérieurs ; mais ce vaisseau dorsal ne paraît fournir aucune branche. Le liquide nourriCier y pénètre par des ouvertures latérales, garnies de valvules pour empêcher le reflux, et on y ignore comment il s’en échappe. Du reste, le mouvement du sang ne dépend pas unique- ment de cet organe; car on a découvert récemment dans plu- sieurs insectes des valvules mobiles, dont les battemens déter- minent dans ce liquide des courans rapides, et, chose singulière, c’est dans les pattes que cet appareil est logé. Le sang, devenu veineux par son action sur les divers tissus de l’économie , ne peut donc venir, dans un point déterminé du corps , se mettre en contact avec l’oxigène et reprendre ainsi ses qualités vivifiantes. Si la respiration s'était faite de la manière ordinaire à l’aide des poumons ou de la surface extérieure du corps , elle aurait été par conséquent extrêmement incomplète ; mais le désavantage qui paraïtrait devoir résulter de cette grande imperfection dans la fonction si importante de la circulation n’existe réellement pas. La nature a suppléé au transport du sang , en conduisant l’air lui-même dans toutes les parties du corps, à laide d’une multitude de canaux qui communiquent avec l’extérieur et se ramifient à l'infini dans la substance des organes(/#g. 387). Ces tubes aérifères, désignés sous le nom de frachees , présentent une structure admirable : on y distingue d'ordinaire trois tuniques , dont la moyenne est composée dun filament cartilagineux , enroulé en spirale, SAUT Daug. Respiration, 852 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. comme un élastique de bretelles. Tantôt ils sont simples ; mais d’autres fois ils présentent un certain nombre de grands ren- flemens en forme de vésicules molles, qui remplissent les fonc- Fig. 387. b d 4) lions de réservoirs à air (x, fig. 387). Les ouvertures par lesquelles l'air pénètre dans les trachées sont nommées stigmates : elles res- semblent en général à une petite boutonnière , mais présentent (1) Appareil respiratoire d’un insecie (la nèpe): — a tête ; — 2 pattes ante- rieures , — c ailes de la première paire ; — e pattes de la seconde paire ; — f stigmate : — # tranchées; — À vésicules aériennes. LES INSECTES. 853 quelquelois deux valves qui s’ouvrent et se ferment comme les battans d’une porte. On en voit d'ordinaire une paire sur les parties latérales et supérieures de chaque anneau; mais elles manquent souvent aux deux derniers segmens du thorax. Quant au mécanisme par lequel lair se renouvelle dans linté- rieur de cet appareil respiratoire , il ne paraît consister en général que dans les mouvemens de contraction et de dilatation de l'abdomen. Ainsi que nous l’avons déjà dit ailleurs , la res- piration est très active chez ces animaux : ils consomment une quantité considérable d’air comparativement à leur volume, et s’'asphyxient promptement lorsqu'on les prive d’oxigène ; mais, quand ils sont dans cet état de mort apparente, ils peuvent y rester très long-temps sans perdre la faculté de revenir à la vie. Les sexes sont distincts chez ces animaux, et souvent il existe des différences très grandes entre le mâle et la femelle. Presque tous les insectes pondent des œufs ; quelques-uns cependant sont vivipares. Souvent il existe à l’extrémité de l'abdomen de la femelle un dard , une tarière ou quelque autre organe destiné à pratiquer des trous propres à recevoir les œufs; et par un instinct admirable , la mère les dépose toujours dans un en- droit où les jeunes trouveront à proximité les alimens dont ils auront besoin , bien que, dans la plupart des cas , ces alimens ne soient pas de la nature de ceux qu’elle recherche elle- même. Dans le jeune âge , les insectes changent plusieurs fois de peau et présentent presque toujours un phénomène des plus singuliers , dont , au reste, nous avons déjà vu un exemple chez les batraciens. La plupart d’entre eux, en sortant de l'œuf , ne ressemblent ni à leurs parens, ni à ce qu'ils devien- dront plus tard, et subissent, avant que d'arriver à l’élat parfait , des changemens si considérables, qu’on ne peut m'eux les désigner que sous le nom de metamorphoses. Ces changemens ne sont pas toujours également grands. Tan- tôt ils rendent l’animal tout-à-fait méconnaissable ; d’autres fois ils ne consistent que dans le développement de quelques organes, dont il était jusqu'alors privé, et on désigne ces divers degrés de transformation sous les noms de métamor- phose complète , de demi-métamorphose et de métamorphose ébauchée. Les insectes à métamorphose complete sont d’abord plus ou moins vermiformes et portent dans cette première période de leur vie le nom de Zarves. Leur corps, allongé , presque entière- ment mou et divisé en anneaux mobiles , presque toujours au nombre de douze , est tantôt complètement privé de pattes, OEufs. Métamor- phoses. 854 ZOOCLOGIE DESCRIPTIVE. d’autres fois pourvu d’un nombre variable de ces organes, mais dont la conformation ne rappelle en rien celle des mêmes parties chez l'animal adulte, Presque toujours ils n’ont que des yeux simples ; et en sort quelquefois complètement privés , enfin leur bouche est presque toujours ar- mée de mandibules et de mâchoires , quelle que soit Fig. 388. la conformation qu’elle doit prendre par la suite, el on voit souvent les premiers de ces organes servir à la locomotion aussi bien qu’à la préhension des alimens. Ces larves varient du reste dans leur forme , et sont connus tantôt sous le nom de chenilles, tantôt sous celui de vers. Après être restés dans cet état pendant un temps plus ou moins long , ils prennent une forme nouvelle et se changent en nympkhes. Pendant toute la durée de cette seconde période de leur existence, Ces singuliers animaux cessent de prendre de la nour- ritureet restent immobiles. Tantôt la peau dont ils viennent dese dépouiller se dessèche et constitue une espèce de coque oviforme dans l’intérieur de laquelle ils demeurent renfermés ; tantôt ils ne sont recouverts que par une pellicule mince , qui , appliquée sur les organes extérieurs, en suit tous les contours, et ressemble à des langes danslesquels insecte serait emmaillotté. Cette der- nière disposition, qui se voit chez ies nym- phes des papillons ou cArysalides ( fig. 389), leur a fait donner aussi les noms de pupe et de maillot. Avant @éprouver cette métamorphose , la larve se prépare souvent un abri,eise ren- ferme dans une coque , qu’elle fabrique avec de la soie sécrétée par les glandes salivai- res et préparée à l’aide de filières creusées dans les lèvres. D’autres fois elle se suspend au moyeu de filamens ( fg. 389 ) ou se cache dans quelque trou. Cest pendant que lin- secte est dans cet état de repos apparent, qu'il se fait dans l’intérieur de son corps un travail actif, dont le résultat est le développement complet de toute son organisalion. Toutes ses parties intérieures se ramollissent et prennent peu-à-peu la forme qu’elles doivent conserver ; les divers organes dont l'animal adulte doit être pourvu se développent sous l'enveloppe qui les cache, et, quand cette évolution est achevée , il se débarrasse de celte espèce de Fig. 389. LES INSECTES. 855 masque ,eten sort à l’état d’insecte parfait. Les papillons nous offrent ur exemple remarquable de toute celte série de méta- morphoses ; mais ce ne sont pas les seuls insectes qui Îles pré- sentent : les coléoptères , les hyménoptères , les diptères et quelques autres les subissent également. Les insectes à demi-metamorphoses passent aussi par l’état de larve et de nymphe, avant que d'arriver à l’état parfait ; mais ici la larve ne diffère guère de l’insecte parfait que par l’absence d’ailes , et l’état de nymphe n’est caractérisé que par la crois- sance des ailes, qui d’abord reployées et cachées sous la peau, sont alors libres , mais n’acquièrent tout leur développement qu’à l’époque de la dernière mue. Les hémiptères et un petit nombre d’autres insectes sont les seuls qui éprouvent ces méta- morphoses incomplètes. D’autres insectes, destinés à rester toujours privés d'ailes, naissent aussi avec la forme générale qu’ils doivent toujours conserver, mais n’acquièrent pas , comme les précédens , des organes différens de ceux qu’ils possédaient déjà ; seulement, à une certaine époque de la vie, le nombre d’anneaux dont leur corps se compose augmente , ei il se développe en même temps des paites en nombre correspondant à celui des segmens nou- vellement formés. Ces changemens, qui s’observent chez les myriapodes , sont par conséquent bien moins importans que ceux dont nous venons de parler, et constituent ce qu’on appelle une metamorphose ebauchee. Enfin il est un petit nombre d’insectes qui naissent avec les formes qu’ils doivent conserver ; mais ils ressemblent plutôt à un insecte ordinaire, dont la demi-métamorphose ne se serait achevée qu’à un de ces animaux parvenus à l’état par- fait; car ils sont toujours privés d’ailes. Les parasites et les thysanoures sont dans ce cas. Les insectes , si remarquables par leur organisation, le sont encore davantage par leurs mœurs et par l’instinct admirable dont la nature a doué un grand nombre d’entre eux. Les ruses qu’ils emploient pour se procurer leur nourriture ou pour se soustraire à leurs ennemis , et l’industrie qu’ils déploient dans leurs travaux , étonnent tous ceux qui en sont témoins, et, lors- qu’on les voit se réunir en sociétés nombreuses pour suppléer à leur faiblesse individuelle , s’aider entre eux , se partager les travaux nécessaires à la prospérité de la communauté, pourvoir à leurs besoins futurs et souvent même régler leurs actions d’après les circonstances accidenielles où ils se trouvent , on reste confondu de trouver chez des êtres si petits et en appa- rence si imparfaits, des instincts si variés et si puissans , et des combinaisons intellectuelles qui ressemblent tant à du raison- Demi-méta- morphoses. Métamor- phoses éban- ch ées, Mœurs des insectes. Classifica- tion, 856 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. nement. Le sujet ne tarirait pas, si nous voulions rapporter ici des exemples de ces phénomènes curieux; mais les limites étroites de ces leçons ne nous permettent pas d’y consacrer en ce moment plus de temps, et, du reste , en traitant de l’histoire particulière de ces animaux , nous pourrons enccre mieux faire ressortir les singularités de leurs habitudes. Il n’est aucune classe d'animaux qui soit aussi nombreuse en espèces que celle des insectes : on en connaît plus de soixante mille, et chaque jour les entomologistes en découvrent des espèces inaperçues jusqu'alors : aussi la vie d'un homme suifit- elle à peine pour en faire l’étude approfondie, et tout ce que nous pouvons chercher ici est de montrer les principales modifications qui se rencontrent dans la structure de ces ani- maux, et d’esquisser l’histoire de ceux d’entre eux qui nous offrent le plus d'intérêt. La division des insectes en ordres repose principalement sur la considération de leur appareil buccal, de leurs organes locomoteurs et de leurs métamorphoses. Le tableau suivant donnera une idée nette des principaux caractères employés dans cette classification. = pe *SIUOAYINAN | “(sopte,p qutod) o$wjueaup no soyed op soned onenb-18uta quefe jaus ne saidoid soorpuod -dep no sanrd sossnez op rues uUOpAY | *SHUNDONVSAHL l ‘(saym,p sutod) sosogdiomeour op sed qaussiqus ou | *SALISVUVA | *soorpuodde p nainodop | \ *SYNADNS | ‘sa[pnu | ‘SAUALAIA | ‘sooseryd qu10d 10e) ‘Xn9p 9p 91quOou ne *SHUA LATIN o ù -U949 09 S09s81[d *2pno00 | Q no J101pP onbruoo 29 un J90W1P el *"SAUALIINAH ar AT 1 P = Ù joqgonog ‘souffo-tmop op ou} U u9 JUOWOLCUIPAIO SOINOUIJUE 69] S9ITY ‘uoroons ou 19 (sap 2 ojeatds uo odmox oun pinowonos SEAT -odoxay ) sai mi *SHVALAOQIANI à OQUIE 9U9NOY ‘2910109 a191s8n0d mi, -Jed op soxred ” : « 9p 91quOu ne ep anod ogumoquog | 77" °D SOS n 9p 99105 9UNP #9112AN09 $9Jn0] Lé Ù 7009 rou quefr = oyonog ‘sos0qd1om | | *s91901S1p s0]Nq -LJOUI S0p JUeSss1qns -IpULUI 9p 99UIE 9onog : “SHULLIONNAH À TP La 1280: "EUINT ù | “109 SoputiS 09 S0981A1p Jo soquou / S { | -vdsueay ‘sosnouviquour s2n0] | “soinoti91sod so7 our *SAUALAOUAAN 3 ù ‘| 0109 599[N91191 19 sosnonviquour . “juomonos Buo] saint "SAUYALAOHILUO u9 no SU95 Xn9P outed -o1ue xn9p sol quop € oxenb op so] suep so91d \9PU0998 e[ op | 51quou ne sojry “uonvonsem 9/00 * souJÂ] | *SIJAUIT U9 -9P 2107 u) “SAUHLAOAIOD dr (iuomonos soouyd / SALIASNI Structure 8358 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. ORDRE DES COLÉOPTERES. L'ordre des coléoptères comprend tous les insectes pourvus d’élytres et subissant des métamorphoses complètes. Leur bouche est conformée pour la mastication et présente un labre, deux mandibules ordinairement de consistance cornée , deux mâchoires portant cha- cune un ou deux palpes et une lèvre inférieure également garnie de pal- pes(1).Leur tête offredeux antennes composées pres- que toujours de onze ar- ticles et deux yeux réticu- lés. On ne leur voit pres- que jamais d’ocelles. Leur thorax, distinct de l’abdo- men, est composé de trois anneaux, portant chacun une paire de pattes. Le premier de ces segmens, Fig. 390. beaucoup plus grand que les autres , ne donne pas insertion à des ailes, et est à découvert ; on le désigne ordinai- rement sous le nom de corselet ou de prothorax. Le second anneau thoracique ou mésothorax porte les aïles supérieures ou élytres, qui sont dures, épaisses, horizontales, et se joignent sur la ligne médiane par une ligne droite(a, fg.391).Lesailes inférieures ou de la seconde paire (b) s’insèrent au troisième segment thoracique ou métathorax ; mais, dans plusieurs es- pèces , elles manquent. Elles sont Fig. 391. fines , transparentes et trop longues pour se cacher sous les élytres ; sans se reployer en travers (fg.391). L’abdomen est sessile , c’est-à- dire uni au thorax par sa plus grande largeur et se compose de six ou sept anneaux, plus ou moins membraneux en dessus, mais durs en dessous. Du reste , la forme de ces insectes varie beau- coup. Quant à leur organisation intérieure , On remarque aussi des différences très grandes. Tantôt le tube digestif est presque (r) Voyez fig. 383 , page 848. INSECTES COLÉOPTÈRES. 859 - droit , et d’autres fois il est très long et flexueux ; les glandes salivaires*sont très simples ; les vaisseaux biliaires sont fort longs et au nombre de deux ou trois paires. La larve des coléoptères ressemble à un ver, dont la tête est cor- née, tandis que le reste du corpsest presque toujours mou (/ig.392): sa bouche est conformée de même que cellede l’insecte parfait ; et il n’y a pas toujours d’ocelles ; les trois anneaux qui suivent la tête sont presque toujours pourvus chacun d’une paire de pattes ordinairement très courtes; enfin il existe chez un grand nombre de ces animaux une paire de fausses pattes, attachée au ceruier segment de l'abdomen. La nymphe est inactive et ne prend pas de nourriture ; elle est recouverte d’une peau membraneuse , qui s'applique exactement aux parties situées au-dessous et les laisse apercevoir. Fig. 392. Les habitudes des coléoptères varient trop pour que nous puissions en rien dire de général. La plupart se font remarquer par la dureté de leurs tégumens et le brillant de leurs couleurs. Leur nombre est immense : on en connaît plus de trente mille espèces : aussi leur étude est-elle devenue très difficile. On les divise en quatre sections, d’après le nombre de leurs tarses ; mais ces groupes ne sont pas aussi naturels qu’on pourrait le desirer. Voici , du reste , le résumé de cette classification : ! cinq articles à tous les ‘arses. | PENTAMÈRES. cinq articles aux tarses des quatre pattes COLÉOPTÈRES | autérieures et quatre seulement aux D lon rete ayant de derriere. quatre articles aux tarses de tous les pieds. | TÉrR:mMÈRES. | trois articles aux tarses ou un moindrenombre. | rRIMÈRES, La section des COLÉOPTERES PENTAMERES est la plus nombreuse et se compose de six familles, savoir : les carnassiers, les brachélytres, les serricornes , les clavicornes, les palpi- cornes et les lamellicornes. 56 Métamor- phoses. Ciassifica- tion. 860 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. Famille des Les CARNASSIERS se distinguent de tous les autres penta- carnassiers. mères par le nombre des palpes dont leur bouche est garnie : ils en ont six , savoir : deux palpes labiaux ‘comme d’ordinaire) et quatre palpes maxillaires. Leur mâchoire se termine par une griffe ou un crochet, et leurs antennes sont presque toujours plus ou moins filiformes. Plusieurs n’ont pas d’ailes sous leurs élytres. Ils font la chasse aux autres insectes et sont très carnas- siers à l’état de larve aussi bien qu’à l’état parfait. Les uns sont terrestres , les autres aquatiques. Carnassiers LS CARNASSIERS TERRESTRES Ont les pieds uniquement propres terrestres. à ]a course, et dont les quatre postérieurs sont insérés à égale distance. Leur corps est en général allongé et leurs yeux sont Fig. 394 saillans ; enfin leurs mandibules sont enlièrement à découvert. On les subdivise en deux tribus : les CICINDELÈTES , qui ont au bout des ongles un onglet choires se terminent en pointe ou en crochet, G mobile (fig. 394), et les CARABIQUES, dont les mâ- sans offrir d’articulation à leur extrémité (fig. 394; page 484). Tribu des Les CICINDELÈTES ont en général la tête forte, des yeux gros, cacindelètes. le corps oblong, métallique et brillant : on les rencontre pour la plupart dans les lieux secs et exposés au soleil. Nous citerons comme exemple de cette tribu les cIcINDÈLES, dont une espèce (Le cicindele champêtre) , vert pur avec cinq points blancs sur chaque élytre , est très commune au printemps. Tribus des Les GARABIQUES Ont ordinairement la tête plus étroite que carabiques. Je corselet : ils se cachent dans la terre, sous les pierres , etc., Fig. 595, CARABE. el sont pour la plupart très agi- les ; souvent ils répandent une odeur fétideet lancent par l’anus une liqueur âcre et caustique. Le carabe dore , que l’on nomme vulgairement Le jardinier, et qui est d’un vert doré en dessus, noir en dessous ,est dans ce cas ; mais c’est chez les APTINES et les BRACHINES, que ce phénomène est le plus remarquable. Ces insectes , qui , en général, vivent en sociétés nombreuses, lancent INSECTES COLÉOPTÈRES. 861 celte liqueur avec assez de force pour produire une petite explo- sion , accompagnée d’une apparence de fumée blanchâtre : on en trouve quelques espèces dans le midi de l'Europe; mais c’est à Cayenne et aux Antilles qu’on rencontre les espèces les plus remarquables. Les carabiques sont si nombreux, que, pour les classer, on a été obligé d'établir dans ce groupe sept divisions , compre- nant chacune plusieurs genres , Savoir : 1° Les TRONCATIPENNES , Caractérisés par leurs élytires tron- quées à leur extrémité postérieure , une échancrure profonde sur le côté interne des jambes anté- rieures (fig. 397) et quelques autres particularités d'organisation. On y range les BRACHINES et les APTINES, dont nous venons de parler, ainsi que les LÉBIES , dont une espèce bleue , à corselet rouge , est très commune en Europe ; et plus de vingt autres Fig. 396. LÉBIE. genres appartiennent à celle divi- sion. 2° Les BIPARTIS, qui se distingueni des précédens par leurs élytres entières et leur abdomen, en général pédiculé ; leur couleur est presque toujours d’un noir uniforme, et ils sont pour la plupart fouisseurs et nocturnes. Tels sont les SCARITES, dont on trouve quelques espèces dans le midi de la France, et un grand nombre d’in- sectes exotiques, qui n’offrent rien de très remarquable. 3°Les QUADRIMANES OU HARPALIENS, qui ressemblent aux précédens par leurs élyires , terminées en pointe, et par l’écuancrure de leurs jambes antérieures , mais se reconnaissent à la dilatation des quatre tarses antérieures chez le mâleet aux papilles ou poils en forme de brosse , qui garnissent en dessous ces organes:ils ont la tête engoncée , le corcelet plus large que long, ei le corps aïlé. Ces insectes se plaisent dans les jieux sabionneux, exposés au soleil et sont moins nombreux que les précédens. Le genre HARPALE est le type de ce groupe. Nous en possédons plusieurs espèces , dont une, le Aurnale bronze, qui est très commune dans toule l’Europe. 4° Les SIMPLICIMANES , qui se rapprochent beaucoup des précédens , mais n’ont que les deux tarses antérieurs dilatés 56. Fig. 397. SCARITE. Troncati- pennes, Bipartis. Quad:ima - nes, Simplicima- nes. Patellima- nes. Grandipal- pes. Subulipal- pes. Tribu des carpassiers a- quatiques. 862 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. chez le mâle. Ils se divisent en un assez grand nombre de genres , dont le pricipal porte le nom de FÉRONIES. 5° Les PATELLIMANES, qui ne se distinguent de la section précé- dente que par la manière dont les tarses antérieurs du mâle sont dilatés , les derniers articles, au lieu d’être terminés par des angles aigus, étant toujours arrondis à leur extrémité et formant une palette orbicu- laire ou carrée, dont le dessous est ordinai- rement garni de brosses. Leurs pieds sont en général grèles et allongés, et leur, corselet plus étroit que l'abdomen. La plupart fréquen- tent les lieux aquatiques. Ce groupe se com- pose d’une vingtaine de genres, dont les dif- Fig. 398. férences caractéristiques sont peu impor- tantes. Un de ces insectes , appelé souvent le carabe savonnier et appartenant au genre CHLOENIE , est employé, dit-on, en guise de savon par les nègres de la côte du Sénégal. 6° Les GRANDIPALPES, qui diffèrent de tous les précédens par l’absence ou la petitesse de l’échancrure, qui, chez ceux-ci, se remarque au côté interne des jambes antérieures. Leurs mandibules sont robustes, leurs yeux saillans, leur abdomen volumineux et leurs élytres entières ( fg. 395, page 860). La plu- part sont de grande taiile et ornés de couleurs métalliques bril- lantes. Les CARABES, dont nous avons déjà dit quelques mots , les CALCOSOMES et plusieurs autres genres appartiennent à cette di- vision, Une espèce de calosome , nommée calosome sycophante, longue de huit à dix lignes et d’un noir violet ,avec les élytres d’un vert doré, est d’une voracité extrême, lorsqu'elle est à l’état de larve; elle vit alors dans le nid des chenilles processionnaires, dont ellese nourrit, et , lorsque, à force de s’être repue, elle a perdu son activité, elle est souvent attaquée et dévorée à son tour par d’autres larves de son espèce, encore petites et agiles. 7° Les SUBULIPALPES, dont les palpes extérieurs sont fusiformes au bout ou terminés enalène , mode de conformation qui n'existe dans aucune des divisions précédentes. Leurs jambes antérieures sont échancrées; mais , du reste, ces insectes res- semblent beaucoup aux grandipalpes tant par les formes que par les mœurs. On y range les BEMBIDIONS , dont une espèce est très commune aux environs de Paris. Les CARNASSIERS AQUATIQUES forment une tribu bien moins nombreuse que les carnassiers terrestres , et sont caractérisés par leurs pieds conformés pour la natation. Ceux des quatre INSECTES COLÉOPTÈRES. 863 lernières paires sont, en effet, comprimés et ciliés ou en forme de rame. Le corps de ces insectes est toujcurs ovalaire: leurs mandibules sont presque entièrement couvertes et leurs yeux peu saillans. A l’état de larve , ils ont le corps long et étroit , la tête forte et armée de deux mandibules puissantes , deux petites antennes , six yeux simples et six pieds souvent frangés de poils. Ils vivent alors dans l’eau et respirent soit par l’anus, soit par des espèces de branchies. A l’époque de leurs méta- morphoses en nymphes, ils sortent de l’eau, mais y retour- nent lorsqu'ils sont arrivés à l’état parfait. On les trouve dans les eaux douces et tranquilles , et, lorsqu'ils éprouvent le besoin de respirer, on les voit remonter à la surface , élever leur abdomen hors de l’eau et en écarter un peu les élytres, afin que l'air puisse arriver aux stygmates situés au-dessous de ces étuis- Ils nagent très bien et sont extrèmement voraces ; quand on les retire de l’eau , ils répandent une odeur nau- séabonde. Vers le soir, ils viennent à terre , et la lumière les attire quelquefois dans l’intérieur des maisons. On les divise en deux genres principaux : les BYTISQUES , qui ont les antennes filiformes et plus Jongues que la tête, deux yeux et les pieds antérieurs plus courts que les suivans , et les GyrINs, dont les antennes sont en massue et plus courtes que la tête , les yeux au nombre de quatre et les deux premiers pieds longs et avancés en forme de bras. Les DYTISQUES atteignent souvent une assez grande taille: ils ont cinq articles très distincts à tous les tarses , dont les anté- rieurs se terminent souvent, chez le mâle, par une sorte de palette circulaire ou ovalaire, tandis que les autres, particulièrement les postérieures , se terminent en pointe et sont garnis d’une bordure de longs poils , qui en font d’excellentes rames. Ils sont très carnassiers et s’élancent sur leur proie avec beaucoup de vitesse. La larve se suspend à la surface de l’eau , à l’aide de deux appendices latéraux, fixés au bout de sa queue et se sert aussi de ces organes pour respirer ; car ils ont la forme de petits tubes et conduisent aux trachées. L'espèce la plus com- mune en France est le dytisque de Ræsel, qui est ovalaire. très déprimée et noirâtre , avec une bordure jaune. Les GyrINs sont en général de petite taille leur corps esi ovalaire et très luisant; leurs élytres tronquées au bout; leurs palles antérieures grèles , repliées en deux, presque à angle Dytisques. Gyrius. Famille des brachélytres. Famille des SerriCOrDes. 864 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. droit , avec le corps et les pieds des deux dernières paires larges, minces, presque membraneux et terminés par un tarse comme feuilleté. On les voit pendant toute la belle saison réunis en troupes nombreuses à la surface des eaux dor- mantes et même sur celle de la mer:ils y nagent ou courent avec une agilité extrême et en dé- crivant mille détours circulaires ou obliques, habitude qui leur a valu les noms vulgaires de tourniquet et de puce aquatique: ce sont les quatre pieds de derrière , qui leur servent d’avi- rons : ils ne font usage de ceux de devant que Fig. 399. pour saisir leur proie. Le gyrin nageur, espèce GYRIN. très commune en Europe, est long de trois lignes et d’un noir bronzé: sa larve sort de l’eau au commen- cement de l’automne, pour passer à létat de nymphe et se renferme dans une pelite coque, qu’elle fixe à des feuilles de roseau , et qu’elle forme avec une matière ayant l’apparence de papier gris. Les BRACHÉLYTRES, qui forment la seconde famille de la grande division des coléoptères pentamères, n’ont , comme tous les suivans , que quatre palpes, et se distinguent de ces derniers par leurs étuis beaucoup plus _ — courts que le corps et leurs antennes, 4 ordinairement filiformes et composés d'articles granulaires. Ils ont en général es la tête grande et armée de fortes man- \ € N dibules , et le corps étroit et allongé; deux vésicules , situées près de lPanus, et que l’animal peut faire sortir à volon- ié, sécrètent une liqueur très volatile, s dont l’odeur ressemble souvent à celle de PPT EE PER Ee plupart de ces insectes vivent dans la terre , le fumier, les champignons ou sous les pierres : ils sont très voraces, marchent avec une grande vitesse , et, lorsqu'on les touche , courent en relevani et en remuant fe bout de leur abdomen. Leurs larves ressemblent beaucoup à l’insecte parfait et se nourrissent des mêmes matières. Le principal genre de cetle pelite famille est celui des STAPHYLINS. Dans la FAMILLE DES SERRICORNES il n'existe aussi qu'un INSECTES COLÉOPTÈRES. 865 palpe à chaque mâchoire ; mais les élytres recouvrent l’abdo- men. Leurs antenne sontde la même grosseur partout (fg.401,a) ou même plus grèles vers le bout, et dentées soit en scie (b , fig. 401), soit en peigne ou même en évan- tail (fig. 401,0). On divise cette famille en trois sections : les sternoxes , les ma- lacodermes et les limebois. Les STERNOXES se reconnais- sent à leur corps ferme, solide et ordinairement ovalaire; à leur tête , engagée verticalement dans le corselet jusqu'aux yeux, et à l'espèce de mentonnière formée par une dilatation du pre- slernum Où partie médiane et inférieure du premier anneau thoracique , qui s’avance jusque sous la bouche et à la pointe formée par un prolongement du bord postérieur de cetie même pièce sternale et reçue dans un enfoncement du second anneau thoracique ( /ig. 402). Ils se subdivisent en deux tribus: les buprestides et les élatérides. Fig. 401. Les BUPRESTIDES , que l’on a nommés aussi richards , à Cause de la richesse des couleurs métalliques dont ils brillent , ont la pointe postérieure du présternum peu développéeetsimplement reçue dans une échancrure de l'anneau suivant : aussi ne peu- vent-ils sauter comme le font les élatérides. Ils volent très bien , mais marchent lentement et se laissent tomber à terré, en faisant le mort, lorsqu'on veut les saisir. A l’état de larve, ils vivent dans le bois sec , et, à l’état parfait, se tiennent sur les fleurs et les feuilles. Chez les BUPRESTES PROPREMENT DITS, les antennes sont de la même grosseur partout , et en scie depuis le troisième ou quatrième article. Une espèce de Cayenne, nommée le bupreste geant, est longue de deux pouces. On en trouve de petites espèces en France. F La TRIBU DES ÉLATÉRIDES est caractérisée par une disposition singulière du sternum , qui donne à ces insectes la faculté de sauter lorsqu’iis sont placés sur le dos,et de reprendre ainsi Sternoxes. Buprestides. Élatérides. 866 ZOOLOGIE DESCRIPTIVYE. leur position naturelle ; le présternum (a, fig. 402) présente en arrière un Stylet terminé en une pointe comprimée latérale- ment, qui, à la volonté de l'animal, s'enfonce dans une partie de l’anneau suivant (b) et lui fournit un point d'appui, à l’aide duquel il raïdit brusquement son corps, et frappant tout- à-coup le plan sur lequel il repose avec la tête, les pointes latérales de son cor- selet et le dessus de ses élytres, s’élance perpendiculairement en l'air avec assez de force. Les TAUPINS, qui forment le type de ce groupe , ont le corps étroit et allongé, les angles latéraux du corselet prolongés en pointe, et le présternum creusé de chaque côté d’une rainure où se logent les antennes , qui sont dentelées en scie. Ils vivent sur les fleurs et les feuilles, ou même à terre , et, lorsqu'on veut les saisir, ils appliquent leurs pieds sous le corps , et se laissent tomber, en faisant le mort. En sautant , ils font entendre un petit coup sec ,et , lorsqu'on les prend entre les doigts , ils rejettent quel- quefois par la bouche un liquide verdätre, ce qui a valu à quelques espèces le nom vulgaire de eracheurs. On les appelle aussi scarabees à ressort , toque-maillets, eic. Les espèces indi- gènes sont assez nombreuses. Le taupin cucujo de l'Amérique méridionale présente , de chaque côté du corselet, une tache jaunâtre, qui répand pendant la nuit une lumière très vive ; lorsqu'on en réunit plusieurs, ils reluisent assez pour rendre facile la lecture de Pécriture la plus fine, et ïes Indiens en attachent à leur chaussure , pour s’éclairer dans leurs voyages nocturnes. Nos colons appellent cet insecte singulier mouche lumineuse. Sa longueur est d'environ un pouce. Fig. 402. Malacoder. L€S SERRICORNES MALACODERMES Ont la tête engagée dans mes. le corselet , comme les précédens; mais le présternum ne présente pas de dilatalion antérieure en forme de mentonnière et n’est presque jamais pourvue d’une pointe dirigée en arrière et reçue dans la cavité de l'anneau suivant. Enfin leur corps est ordinairement en tout ou en partie de consistance molle on flexibles. On les subdivise en cinq tribus : les cébrionites , les lampyrides , les mélyrides , les clairones et les ptiniores. Cébrionites. Les CÉBRIGNITES se reconnaissent à leurs mandibules teim:- INSECTES COLÉOPTÈRES. 867 nées par une pointe simple ou entière , et à leurs palpes, qui ne s’élargissent pas vers le bout. Plusieurs de ces insectes se rapprochent des élatérides par la forme de leur corselet, dont les angles postérieurs se prolongent en pointe , et par lexis- tence d’une pointe du présternum, qui est reçue dans un en- foncement du mésosternum. Les CÉBRIONS PROPREMENT DITS sont de ce nombre, et diffèrent Cébrions. des genres dont la conformation est analogue par les articles de leurs tarses, qui sont entiers et sans pelottes, et par leurs cuisses postérieures, qui ne sont guère plus grosses que les autres. On en voit un grand nombre après les pluies d'orage, et la femelle de l'espèce la plus commune diffère tellement du mâle que les entomologistes l’ont considérée pendant quelque temps comme appartenant à un autre genre. D’autres insectes de cette tribu ont les cuisses des pattes postérieures très grosses et la jambe terminée par des éperons disposés de manière à donner à l’animal la faculté de sauter ; les SCYRTHES sont dans ce cas. La TRIBU DES LAMPYRIDES se distingue de la précédente Tribu des par le renflement qui termine leurs palpes. Le corps de ces PR insectes esi toujours mou, étroit et peu ou point convexe; leur tèle est en partie recouverte par le corselet et le pénultième article des tarses est bilobé. De même que les taupins, ils contractent les pattes et font le mort lorsqu'on les saisit. Les femelles de quelques espèces sont. privées d'ailes ou pourvues seulement délytres très courtes (4.888). Les LAMPYRES, qui donnent leur nom à cette iribu,ontles E*mpyres antennes très rapprochées à leur base , la tête presque entière- ment occupée par les yeux et ne se prolongeant pas en forme de museau et presque ên- tièrement recouverte par le corselet, les palpes ter- minés en pointe et le corps très mou ; mais ce qui les rend surtout re- marquables, c’est Ia pro- priété que possèdent les femeiles ou même les deux sexes de répandre une lumière phosphores- Fig. 403. LAMPYRES. (1) (x) Lampyre spleydidule : — à le mâle; — » la femelle. / Drilles, Telcphores. Tribu mélyrides, des 868 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE,. cente plus ou moins vive. Ce sont des taches situées sur le dessus des deux ou trois derniers anneaux de l’abdomen, qui émettent cette lueur dont l’animal peut à volonté faire varier l'intensité et qui persiste pendant quelque temps après qu’on a séparé l’abdomen du reste du corps ou qu’on a placé l’insecte dans le vide, dans la plupart des gaz non respirables ou dans de l’eau tiède, mais qui s’éteint dans l’eau froide. Une espèce, appelée le Zampyre splendidule, est très commun en Europe. La femelle est privée d'ailes et répand une lumière vive , tandis que le mâle, qui est pourvu d’élytres noirâtres et d’ailes , n’est pes phosphorique. C’est la première qui se voit si commu- nément sur les buissons pendant les nuits chaudes de Pété, et qui est connue sous le nom vulgaire de ver luisant. De mème que les autres espèces du genre, celle-ci est nocturne et reste, pendant le jour, cachée sous l’herbe. En Italie et surtout dans les pays chauds , on trouve un grand nombre de lampyres dont les deux sexes sont ailés; et ces insectes , en voltigeani pendant l’obscurité , produisent une sorte d’'illumi- nation naturelle. Les DRILLES sont très voisins des lampyres, mais s’en distin- guent par leurs antennes écartées à la base , et leurs yeux, de grandeur médiocre. La femelle, beaucoup plus grande que le mâle , est aplatie et ressemble beaucoup à la larve qui se loge dans la coquille du limaçon némoral , en dévore l’animal et y subit ses métamorvhoses. * Cest aussi à côté des lampyres que prennent place quelques insectes , nommés TÉLÉPHORES , qui sont très communs sur les plantes, et diffèrent des précédens par leurs palpes terminés en forme de hache , et leur corselet sans échancrure latérale. La TRIBU DES MÉLYRIDES est caractérisée par des palpes or- dinairement filiformes et courts, des mandibules échancrées à la pointe , un corps étroit et allongé , et quelques autres par- ticularités d'organisation. On y range les MALACHIES , qui ont les palpes filiformes , et qui présentent , de chaque côté de la base de l'abdomen , une vésicule rétractile et susceptible de se dilater quand l’animal est eïffrayé. Les DAsyTES , dont une espèce bleuâtre est très commune aux environs de Paris sur ies fleurs , diffèrent des précédens par l'absence de ces vési- cules et par la forme allongée de leur corps. Les MÉLYRES sc INSECTES COLÉOPTÈRES. 869 distinguent par leurs antennes , qui sont plus courtes que la tête et le corselet et qui grossissent insensiblement vers le bout. Les serricornes de la TRIBU DES CLAIRONES ont les man- dibules dentées , les palpes terminés en massue, le corps ordi- nairement presque cylindrique , les yeux échancrés , le pénul- tième article des iarses bilobé , etc. La plupart vivent sur les fleurs ou sur les troncs des vieux arbres. Plusieurs de ces insectes paraissent n’avoir que quatre articles au tarse, lors- qu’on les regarde en dessus , le premier de ces articles étant caché sous le second. Les CLAIRONS proprement dits sont dans ce cas et ont les antennes terminées en massue et les palpes maxillaires terminés par un article en forme de triangle ren- versé. Leurs larves dévorent souvent celles de certains hymé- noptères , et l’une d’elles la larve du clairon des rûches), dont le corps est bleu , avec les élytres rouges , marquées de bandes bleues) , nuit beaucoup aux ruches , en détruisant les larves de nos abeilles domestiques. Les NÉCROBIES , dont la massue terminale des antennes est allongée et à articles [àches, diffèrent aussi des précédens par la forme de quelques pièces de la bouche. La necrobie violette est très commune au printemps dans les maisons et se trouve aussi dans les charognes. Enfin la TRIBU DES PTINIORES se compose d’un assez grand nombre d’insectes , tous de petite taille, à tête globuleuse et encapuchonnée , à mandibules courtes et dentelées sous la pointe, à palpes très courts, à corps de consistance assez solide et à jambes non dentelées. En général ils sont de couleur obscure , et leurs mouvemens sont lents. Si on les touche, ils contrefont le mort , et les individus ailés prennent rarement le vol pour s éChipper: Leurs larves sont blanchätres , avec la tête et les pieds bruns et écailleux , et les ro irès fortes. Les uns ont la moitié antérieure du corps plus étroit que l’abdomen , les antennes simples ou très peu en scie ei insérées sous les yeux. Ce sont les PTINES proprement dites , qui se tiennent pour la plupart dans les greniers et les parties peu habitées des maisons , etqui , à l’état de larve, nous sont très nuisibles en rongeant les herbiers et les dépouilles d’ani- maux conservés dans les cabinets d'histoire naturelle. Les GIBBIES , qui font aussi de grands ravages dans nos collections, diffèrent des ptines par l'insertion de leurs antennes au-devant des yeux. Dans d’autres genres , le corselet est aussi large que l'abdomen, dans les VRILLETTES, par exemple. Ces Gerniers Tribu des clairones Tribu des ptiuiores. Vroiulettes. Limcbois. Famille des clavicornes. 870 ZOGLOGIE DESCRIPTIVE. insectes hantent l’intérieur de nos maisons, et, à l’état de larve , plusieurs d’entre eux rongent les planches , les meubles, les livres , etc., qu’ils percent de petits trous ronds semblables à ceux que lon ferait avec une vrille très fine. Ce sont leurs excrémens qui forment les petits tas de bois vermoulu qu’on voit souvent sur le plancher, dans les vieilles maisons. A l’état parfait ils produisent , en frappant vivement plusieurs fois de suite avec leurs mandibules sur les boiseries où ils sont placés, un petit bruit semblable aux battemens d’une montre et pa- raissent se servir de ce moyen pour s'appeler Fig.404. entre eux. Les larves de quelques autres es- VRILLETTE. pèces de vrillettes attaquent les farines, les collections d’oiseaux , d’insectes , etc. La troisième et dernière section de la famille des serricornes comprend les LIMEBOIS , qui se distinguent par leur tête entièrement dégagée ,et qui doivent leur nom à la manière dent leurs larves perforent en tous sens le bois dans lequel elles vivent. Les LYMEXYLONS constituent le type de cette famille et se distinguent à leurs antennes presque moniliformes , à leur corselel presque cylindrique et à leurs élytres aussi longues que l’abdomen. L’espèce la plus commune, appelée Zymexylon naval, à cause des grands dégâts qu’elle fait dans les chantiers de la marine, est très répandue dans les forêts de chène du nord de l’Europe : elle est de couleur fauve , avec la tête et le bord extérieur des élytres noirs. La FAMILLE DES CLAVICORNES ressemble à celle des serri- cornes par la disposition des palpes et des élytres, et n’en diffère guère que par les anten- nes (fig. 405), presque toujours plus grosses vers leur extrémité, souvent terminées en massue et plusionguesqueles palpes maxil- laircs. Les pieds ne sont jamais propres à Ja natation, et ces insectes se nourrissent , dans leur premier état au moins, de matière animale. On peut les a diviser en deux sections. INSECTES COLÉOPTÈRES. 871 Le premier de ces groupes est caractérisé par des antennes de onze articles , plus longues que la tête , et ne formant pas depuis leur troisième article une massue fusiforme ou cylin- drique. On y a établi plusieurs petites tribus sous les noms de palpeurs , d’histéroïdes , de silphales , de scaphidites, de nitidulaires , d’engidites, de dermestins et de byrrhiens. Dans la TRIBU DES PALPEURS , les antennes , au moins aussi longues que la tète et le corselet , ne grossissent que peu vers le bout; les palpes maxillaires sont longs , avancés et uni- formes ; la tête est ovoïde et séparée du thorax par un élran- glement ; enfin l'abdomen est grand, ovalaire et enchässé laté- ralement par les élytres. Les insectes de cette division se tiennent pour la plupart sous des pierres et forment le genre MASTIGE. Les HISTÉROÏDES se distinguent des autres clavicornes par la position de leurs pattes , dont les quatre postérieures sont plus écartées entre elles , à leur base , que les deux antérieures : ils présentent aussi plusieurs autres caractères communs , tels que l’existence de dents et d’épines sur le côté externe des jambes, des antennes coudées et terminées en une massue solide ou à articles très serrés, la tête enfoncée dans le corselet , et la forme carrée et la courbure de leur corps. Ces insectes se nour- rissenti ordinairement de cadavres , de fumier, de vieux cham- pignons ou d'autres matières corrompues; quelquelois cepen- dant ils vivent sous l’écorce des arbres ; leur démarche est lente, et , lorsqu’on les touche , ils contrefont le mort , en collant les pattes et les antennes contre le corps , et en demeurant complè- tement imwmobiles. Ils sont en général d’une couleur noire très brillante ou bronzée. Leurs larves, de forme presque linéaire, pourvues de six pattes courtes et terminées postérieurement par deux appendices articulés et un prolongement anal, se nourrissent des mêmes substances que les insectes parfaits. Le genre ESCARBOT forme le type de ce petit groupe. Dans la TRIBU DES SILPHALES, la tête esi ordinairement enfon- cée dans le corselet , comme chez les histéroïdes et la plupart des clavicornes suivans ; mais ils ont les pieds insérés à égale distance les uns des auires; leurs antennes se terminent en Tribu des palpeurs. Trihu des histéroi des. Escarbots. Tribu des silphales. - 872 ZOCLOGIE DESCRIPTIVE. massue , le plus souvent perfoliées et de quatre à cinq articles ; leurs élylres présenient en général au-dehors un rebord saillant , et les cinq articles de leurs tarses sont partout bien distincts : ils constituent les genres BOUCLIER PRO- PREMENT DIT, NÉCROPHORE , etc. Les premiers tirent leur om de la forme de leur corps ovalaire et vivent pour la plupart dans les charognes. Les NÉCROPHORES ont des mœurs analo- gues , mais recherchent surtout les cadavres de taupes et de souris, qu’ils enfouissent pour y déposer leurs œufs et placer ainsi leur progéniture au milieu de matières propres à leur servir de nourriture. Ils se distin- guent par la forme de leur corps, par leurs antennes, plus longues que la tête et terminées brusquement par une petite massue presque globuleuse et par quelquesautres particularités d'organisation. F19.406. NÉCROPHORE FOS- SOYEUR. Tribu des Les SCAPHIDITES diffèrent de la tribu précédente par leurs scaphdites mandibules fendues ou bidentées à leur extrémité. Leur corps est ovalaire et convexe ; leurs pieds allongés et grèles , et leurs antennes longues et terminées par une inassue allongée. Les SCAPHIDIES , qui forment le iype de cette petite division , viveni dans les champignons et habitent pour la plupart le nord de l'Europe. Tibn de Les clavicornes de la TRIBU DES NITIDULAIRES se rapprochent nitidulaires. des silphales par leur corps en forme de bouclier rebordé , et des scaphidites par leurs mandibules bidentées ou échancrées au bout, mais diffèrent des unset des autres par la conformation de leurs tarses, dont quatre articles seulement sont visibles en dessus. Leurs mœurs varient. Les NITIDULES PROPREMENT DITS habitent sur les fleurs. Tribu des La sixième tribu, celle des ENGIPITES , offre des mandibules engidites. échancrées comme chez les précédens, mais qui ne débordent que peu ou point. Quelques espèces très petites vivent dans l’intérieur des maisons; mais ces insectes ne présentent du INSECTES COLÉOPTÈRES. 873 reste que peu d'intérêt : on en a formé les genres DANIE et CRYPTOPHAGE. Dans les quatre dernières tribus, les pattes ne sont pas con- tractiies, et le présternum n’est jamais dilaté antérieurement en forme de mentonnière. Dans la tribu des DERMESTINS ie contraire se remarque ; les pieds sont incomplètement contrac- tiles , le tarse seul restant libre; la tête est enfoncée dans le corselet jusqu'aux yeux ; il existe en général une mentonnière ; les antennes et les mandibules sont courtes ; enfin le corps est ovoïde et épais. Les larves de ces insectes sont velues et se nourrissent, pour Ja plupart , des dépouilles où de cada- vres d'animaux. Les DERMESTES PRO- PREMENT DITS Ont les antennes com- posées de onze articles distinctset ter- minées brusquement en une massue perfoliée, formée par les trois derniers articles. Quelques espèces font de grands ravages dans les pelleteries et les collections d’hisioire naturelle. Leurs larves se nourrissent aussi de graisse , de fromage et de toutes sortes de matières animales : elles aiment les lieux tranquiiles et obseurs, et , lors- qu’elles sont prêtes à se métamorphoser, leur nymphe se déve- loppe dans la peau de la larve, qui lui sert comme de cocon. Les ANTHRÈNES , dont les antennes se terminent par une massue solide et se logent dans des cavités pratiquées sous les angles antérieurs du corselet , rongent aussi , lorsqu'ils sont à l’état de larve , les matières animales sèches, et s’attaquent particu- lièrement aux collections eniomologiques ; elles sont très petites et vivent à l’état parfait sur les fleurs. Fig. 407. DERMESTE DU LARD. Eufin la huitième et dernière tribu de la première section de la famille des clavicornes se reconnait à ses pieds parfaitement by contractiles, les jambes pouvant se replier sur les cuisses, et les tarses sur les jambes, de sorte que l'animal , dans cet état d« contraction , parait privé de pattes et reste complètement im- mobile. Les insectes qui forment ces groupes portent le nom commun de BYRRHIENS : ils ont le corps court et bomhé . et se tiennent généralement à terre dans les lieux sablonneux. Tribu Tribu rrhiens. des dermestins. des 874 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. Tribu des La seconde section de la famille des clavicornes est beaucoup acanthopodes Hoins nombreuse que la première, et se compose d’insectes de se forme ovoïde , qu’on trouve dans l’eau , sous les pierres, près r du rivage, ou même enfoncés dans la boue. Chez les uns, les antennes sont composées de dix ou de onze articles comme chez les précédens , mais terminées par une massue presque cylin- drique , et , chez les autres, elles ne se composent que de neuf articles ; chez la plupart, les tarses sont terminés par un grand article avec deux forts crochets au bout ; chez quelques-uns on n’y compte que quatre articles ; enfin leur tête est enfoncée jusqu'aux yeux dans un corselet trapézoïde ; leur présternum est dilaté antérieurement , et leurs pieds sont imparfaitement contractiles. On les divise en deux tribus , savoir: les ACANTHO- PODES , remarquables par leurs jambes aplaties ; assez larges et armées extérieurement d’épines , leurs antennes , de onze articles , et leur corps déprimé ; et les MACRODACTYLES “dont les jambes sont étroites, à tarses très longs, le corps épais et convexe. La première de ces divisions se compose du genre HÉTÉROCÈRE. La conformation de la jambe de ces insectes leur permet de fouiller la terre et de s’y cacher. On les trouve dans des trous creusés dans le sable ou dans la boue, près du bord des ruis- seaux et les mares. Parmi les macrodactyles nous citerons les DRxoPs, dont les antennes, composées de dix à onze articles , terminées en massue cylindrique , et plus courtes que la tête, sont reçues dans une cavité située sous les yeux; les ELMIS, dont les an- iennes sont presque filiformes, et les GÉRISSES, dont les an- tennes, terminées en massue ronde, m’offrent que neuf ar- ticles , et dont les tarses ne paraissent composés que de quatre articles. Famille des ‘LA FAMILLE DES PALPICORNES nous offre, comme la palpicornes. précédente , des antennes terminées en massue et ordinaire- ment perfoliées , mais composées de neuf articles au plus, insérées sur les côtés de la tête , à peine plus longues qu’elle et les palpes maxillaires , ou même plus courtes que ces derniers organes. Le corps est généralement ovoïde ou hémisphérique D INSECTES COLÉOPTÈRES. 875 et bombé. La conformation des pieds varie; chez les uns , ces organes#ont propres à la natation et ne présentent que quatre articles bien distincts aux tarses ; chez les autres, ils sont propres à la marche seulement et ont cinq articles bien dis- tincis aux tarses. Les premiers forment la tribu des HYDROPHI- LIENS ; les seconds, celle des SPHÆRIDIOTES. Les HYDROPHILES PROPREMENT DITS COnstituent le type du premier de £es groupes, et se reconnaissent à leurs antennes, composées de neuf articles et terminées par une massue ova- laire , à leur sternum relevé en carène et prolongé postérieure- ment en une longue pointe , à leurs palpes maxillaires plus longs que leurs antennes et à leurs tarses, comprimés, ciliés en dedans, terminés par deux crochets et ayant , chez le mâle, le dernier article en forme de palette triangulaire aux pattes antérieures. On trouve assez communément en Fran£e l’Aydro- phile brun : C’est un de nos plus gros coléoptères. Son corps est ovalaire et long d’un pouce et demi : il marche mal, mais vole et nage très bien. La femelle porte , de chaque côté de anus , une filière dont elle se sert pour fabriquer une coque ovoïde , dans laquelle elle dépose ses œufs. Cette espèce de berceau est rempli d’air et flotte sur l’eau. Les œufs y sont maintenus par une sorte de duvet et éclosent au bout de douze à quinze jours. Les larves ressemblent à des vers mous , allon- gés , déprimés et noirâtres , pourvus àäe six pieds et d’une tête écailleuse , armée de mandibules fortes et crochues ; elles res- pirent par la partie postérieure du corps, et présentent au- dessous de l’anus deux appendices charnus destinés à les maintenir à la surface de l’eau, la tête en bas, lorsqu'elles viennent y chercher l'air dont elles ont besoin: elles nagent très bien et ont la faculté de se renverser en arrière , ce qui leur donne le moyen de saisir les petits mollusques qui flottent à la surface de l’eau , et d’en casser la coquille sur leur dos comme sur une table , pour dévorer ensuite l’animal qu’elle renferme. Elles sont très agiles ; mais , lorsqu’on les saisit, elles se laissent allonger et tirailler dans tous les sens , sans donner aucun signe de vie. Lorsque leur croissance est terminée , elles sortent de l’eau et se creusent une sorte de terrier dans lequel elles se métamorphosent en nymphe, et restent pendant quelques jours , même après être parvenues à l’état parfait. Les larves de tous les hydrophiles sont carnassières, tandis que l’insecte parfait ne se nourrit guère que de matières végétales décom- posées : aussi le canal intestinal de ces animaux éprouve-i-il de grands changemens pendant leur métamorphose , et devient-i! 57 Hydrophiles. Tribu des sphæridiotes. i Familie des lamellicornes. 876 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. beaucoup plus long chez linsecte parfait. D’autres espèces d'hydrophiles ne présentent pas les particularités de mœurs que nous venons de signaler. La femelle nage difficilement , et porte ses œufs sous l’abdomen, dans un tissu soyeux; en- fin la larve, dépourvue d’appendices sur les côtés de anus, ne se suspend pas , comme les précédentes, et ne nage pas, Les ÉLOPHORES et quelques autres hydrophiliens de petite taille ont les jambes grèles et ne nagent que peu où mal ,et s’éloignent quelquefois des eaux , pour se cacher dans la terre. Enfin on donne le nom de GLOBAIRES à quelques insectes de cette tribu , qui ont la faculté de se mettre en boule. La TRIBU DES SPHÆRIDIOTES se compose de palpicornes ter- restres de petite taille, dont le corps est presque hémisphé- rique, les jambes épineuses el les antennes composées de neuf articles: ils habitent pour la plupart les matières excrémenti- uelles et appartiennent presque tous au genre SPHÆRIDIE. Les LAMELLICORNES, qui constituent la cinquième et der- nière famille de la longue série des coléoptères pentamères, sont caractérisés par leurs antennes , insérées dans une fossette profonde, sous les bords laté- raux de la tête , courtes, com- posées ordinairement de neuf à dix articles, et terminées par une massue formée en général des trois derniers articles , qui sont lamelleux et disposés, soit en éven- tail ou comme les feuillets d’un livre, soit en peigne ou bien em- boités les uns dans les autres. Ces à insectes sont remarquables par RE leur grande taille, et par les for- mes bizarres que présentent souvent la tête et le corselet. Leur corps est généralement ovoiïde et épais ; le côté extérieur des jambes antérieures est denté , et les articles des tarses sont entiers et sans brosses ni pelotes en dessous; les mandibules de plusieurs sont membraneuses , caractère qu’on n’observe dans aucun autre coléoptère; enfin ils sont tous pourvus d'ailes et ont une démarche lourde. Les larves ont le corps long, demi cylindrique, courbé en dessous, mais blanchätre, divisé en douze anneaux el pourvu de six pieds écailleux ( fig. 392 , page 859 ): INSECTES COLÉOPTÈRES. 877 elles vivent dans la terre, se nourrissent de fumier, de racines, de végétaux, etc. , et se construisent avec les débris des matières qu’elles rongent une sorte de coque. Quelques - unes ne se changent en nymphes qu'au bout de irois à quatre ans, et occasionnent de grands ravages dans nos potagers. A Pétat parfait, la plupart de ces insectes se nourrissent aussi de matières végétales en décomposition ou de fumier. Cette famille se partage en deux tribus: les Scarabéides, dont les antennes sont terminées en massue, soit feuilletée , soit globulense ou composée d’articles emboités (#g. 411), et les Lucanides , dont la massue des antennes est conformée en ma- nière de peigne (fg. 412). La TRIBU DES SCARABÉES Ou plutôt des SCARABÉIDES est très nombreuse et se divise en six petites sections, désignées sous les noms de Coprophages, Arénicoles , Xylophiles , Phyllo- phages , Anthobies et Mélitophiles. Les SCARABÉIDES COPROPHAGES se distinguent par leurs an- tennes , composées de neuf ou de huit articles par leur labre et leurs mandibules membraneuses et cachées, et par l’état égale- ment membraneux du lobe terminal de leurs mâchoires. Cette conformation de l'appareil buccal ne leur permet de se nourrir que de matières molles , et la disposition de leur tube alimen- taire indique aussi que leur régime doit être peu substantiel ; car sa longueur, toujours très considérable, égale quelquefois dix à douze fois celle du corps. Parmi les genres nombreux dont cette tribu se compose les Ateuchus et les Bousiers méritent surtout de fixer notre attention. Les ATEUCHUS sont célèbres à cause de l’espèce de culte dont ilsétaient l’objet chez les anciens Egyptiens. On les reconnait à leur corps arrondi et dépourvu de cornes (fig. 409 ), à leurs pattes postérieures non dilatées , à la forme de leurs élytres et à quelques autres caractères. Ils ont l'habitude de vivre dans des boules de fiente ou même d’excrémens humains, semblables à de grosses pilules , qu’ils font rouler avec leurs pieds de der- rière jusqu’à ce qu'ils aient trouvé un lieu propre à les enfouir. Souvent 1ls se réunissent plusieurs pour opérer ce transport, et c’est en marchant à reculons et en saisissant la boule avec leurs paites de devant , qu’ils la tirent après eux. Deux 57. Tribu des scarabéides. Scarabéices. coprophages. Ateuchus. Bousiers. Scarabéides arénicoles. 878 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. espèces de ces scarabés , l’ateuchus sacré et l'ateuchus des Égyp- tiens, dont l’une se trouve dans le midi de l’Europe aussi bien qu’en Egypte , et dont l’autre habite le Sennaar, étaient em- ployées par les anciens Egyp- tiens comme une sorte d’amu- lette et comme un signe hyé- roglyphique , aussi bien que comme un objet de culte re- ligieux. Ce peuple singulier renfermait quelquefois ces scarabés dans ses cercueils et plus souventencore plaçait auprès de ses morts l'effigie de ces insectes ; enfin il n’est aucun de ses monumens qui ne les représente sculptés ou FFig. 409. ATEUCHUS DES peints dans diverses positions EGYPTIENS. et souvent avec des dimen- sions gigantesques. \ À Les BOUSIERS (f. 408) habitent les bouses de vache et les fu- miers , etdiffèrent des précédens par leurs quatre jambes posté- rieures fortement dilatées et par quelquesautres caractères. Une espèce de couleur noire, le bousier lunaire , est très commun aux environs de Paris , principalement dans les lieux sablon- veux : elle porte de chaque côté du corselet une corne élevée, qui est plus longue chez le mâle : mais ce sont certaines espèces des pays chauds qui sont surtout remarquables par le grand développement de ces protubérances. Les scarabéides de la section des ARÉNICOLES diffèrent des Co- prophages par leurs mandibules cornées et par quelques autres caractères ; leurs élytres , au lieu de se Joindre par leur base, comme chez la plupart de ces derniers , sont séparés -€e par un écusson (e, fig. 410). Ils vivent aussi de fiente , creusent des trous dans la terre et ne volent guère qu'après le coucher du soleil. On range dans ce groupe les GEOTRUPES , dont la massue des antennes est feuilletée et ovalaire, et le labre carré , et dont le mâle a souvent le corselet armé de cornes. Le Fig. 410. GÉOTRUPE. INSECTES COLÉOPTÈRES. 879 geotrupe stcrcoraire , d'un noir luisant en dessus et d’un violet ou vert doré en dessous, porte un tubercule sur le haut de la tête et setrouve trèscommunément dans nos environs. Dans la section des SCABARÉIDES XYLOPHILES , les élytres sont aussi séparés par un écusson bien distinct, mais ne recouvrent pas l'extrémité postérieure de labdomen, comme chezles précé- dens. Les antennes ont toujours dix articles, dont les trois derniers forment une massue feuilletée , et les mandibules, ainsi que les mâchoires , sont cornées. Nous citerons comme exemples de ce groupe le genre ORYCTE , dont une espèce , irès commune dans les couches de tan, est remarquable par la corne dont sa tête est armée, et le genre SCARABÉE PROPREMENT pir, dont une espèce de l'Amérique méridionale est longue de cinq pouces, et présente , chez le mâle, une grande corne recourbée en avant, sur la tête , et une autre sur le corselet. La section des SCARABÉIDES PHYLLOPHAGES à les mandibules cachées en dessus par le chaperon et en dessous parles mâchoi- res, tandis que, dans la tribu précé- dente ,elles débordent latéralement 2 la tête; leurs antennes ont de huit à dix articles. Dr Fig. 411. nt Les HANNETONS appartiennent à cette division. La larve de Fespèce commune , nommée vulgairement ver blanc, est extrèémement nui- sible à lagriculteur : elle vit trois ou quatre ans sans subir de métamorphoses, et reste pendant tout ce temps enfoncée plus ou moins profondément sous terre. En hiver, elle tombe dans une espèce de léthargie et ne prend aucune nourriture ; mais, en été, elle est très vorace et ronge les racines des plantes. L’insecte achève ses métamorphoses vers le mois de février; mais il est alors très mou et il ne gagne la surface de la terre que vers le mois de mars ou d'avril , pour en sortir tout-à-fait vers le commencement de mai. A l’état parfait les hannetons se nourrissent de feuilles , et leur nombre est quelquefois si con- sidérable, qu’ils dépouillent en peu de temps tout un bois. Pendant le jour, ils sont en général immobiles ; mais , à l’ap- proche de la nuit, ils s’élancent dans Pair. Leur vol est lourd et bruyant, et ils ont tant de peine à se diriger, qu’on les voit se heurter contre tout ce qu’ils rencontrent. Searabeides xylophiles. Scarabéide: phyllophages. Haanncetouns 880 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. Scarabéides Enfin , dans le sixième groupe de la tribu des scarabéides , m-htophiles. Celui des MELITOPHILES , le corps est déprimé et le plus souvent ovalaire et de couleur brillante , le labre et les mandibules sont cachéseten forme de lames aplaties, presque entièrement mem- braneuses ; l'anus est à découvert, etc. Les larves de ces insectes vivent dans le bois pourri, et, à l’état parfait, ils se tiennent ordinairement sur les fleurs. On y range les cETOINEs , dont une espèce , vert-doré , est commune surtout sur les fleurs du rosier et du sureau ; les TRICHIES, etc. Tribu des Les LUCANIDES, qui forment la seconde tribu de la famille des lucanides. lamellicornes, se reconnaissent à leurs antennes («, fig. 412), dont la massue est dentelée comme un peigne. Leurs mandi- bules sont toujours cornées et en général saillantes et très grandes. Cette \ disposition est très remarquable chez } un des plus grands coléoptères de notre pays, le /ucane cerf-volant, dont les mandibules ressemblent à des cornes dentées (m). Cet insecte se montre le soir vers le mois de septembre et reste pendant plusieurs années à l’étal de larve dans l'intérieur des chênes. Coléoptères La division des COLÉOPTÈRES HÉTÉROMÈRES , carac- hétéromères. lérisée, comme nous l’avons déjà dit , par l’existence de quatre articles aux deux pieds postérieurs et de cinq aux quatre pieds antérieurs, se compose entièrement d'insectes qui se nourrissent de substances végétales. On la subdivise en quatre familles, savoir ; les Mélasomes, les Taxicornes, les Sténélytres et les Trachélytres. Famille ds La FAMILLE DES MELASOMES se compose d'insectes de mélasomes. Couieur noire ou cendrée, dont les élytres , généralement fermes et dures, sont souventsoudées entre elles ; la plupart sont ap'ères ; les crochets de leurs tarses sont presque toujours simples , et leur tête, plus ou moins ovoïde , ne présente pas à sa base un rétrécissement brusque en forme de col ; enfin leurs mandibules sont bifñides ou échancrées au bout; leurs mà- choires sont armées au côté interne d’une dent ou d’un cro- INSECTES COLÉOPTÈRES. s8&1 chet, et leurs antennes sont grenues en totalité ou en partie et peu o@ point renflées vers le bout. Presque tous ces coléop- tères sont nocturnes et vivent à terre, soit dans le sable ou sous les pierres , soit dans les caves ou d’autres parties basses et sombres de nos maisons. Les uns, toujours aptères et ayant en général les élyires Tribx des soudées et les palpes presque filiformes , composent une tribu pimétaires. nombreuse, désignée sous le nom de PIMÉLIAIRES. La plupart de ces insectes habitent les pays chauds et surtout les terrains _sablonneux et salés. D’autres mélasomes, également privés d'ailes, diffèrent des ‘ribu des précédens par la conformation de leurs palpes maxillaires ; blapsides. dont ie dernier article est dilaté en manière de hache ou de triangle : ils constituent la tribu des BLAPSIDES. Les BLAPS PRO- PREMENT DITS on! le corps oblong et le corselet presque carré et l'abdomen embrass£ latéralement par les élyires, qui le plus souvent se prolongent au-delà en une pointe semblable à une sorte de queue. Leur marche est extrêmement lente, et ils paraissent êlre d’une stupidité remarquable. Lorsqu'on les saisit , ils exhalent une odeur particulière , produite par un liquide âcre et irritant que sécrètent deux glandes situées près de l'anus. Le h/aps porte-matheur, long d'environ dix lignes et d’un noir luisant , est très commun dans les lieux sombres ei malpropres. Eiaps Enfin les mélasomes munis d'ailes forment une troisième Tiibu de. tribu sous le nom de TÉNÉBRIONITES. Chez les uns , tels que les mélasomes. OPATRES , le corps est ovale , et le corselet arqué latéralement ; chez d’autres , les TÉNÉBRIONS PROPREMENT DITS , par exemple , le corps est étroit et allongé, et le corselet presque carré. Un de ces derniers , le ténébrion de La farine ,se voit fréquemment le soir dans les boulangeries, les moulins à farine , etc. : il esi brun-noirâtre en dessus , marron en dessous. Sa larve, cylin- drique et d’un jaune d’ocre , vit dans le son et la farine. Les hétéromères de la FAMILLE BES TAXJCORNES se dis- Famille des tinguent des précédens par l'absence de l’onglet qu’on voit au taxicornes. Farnil'e des sténélytres. Tribu des hélopiens,. Tribu des cistelides. Tribu des serropalpi- des. Tribu des æd°mérites. 882 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. côté interne des mâchoires de ceux -ci. Tous sont ailés et leur corps est ordinairement presque carré. La tête de ces in- sectes est en partie cachée par le corselet et présente souvent des cornes chez le mâle. La plupart vivent sous les écorces des arbres ou dans les champignons dont celles-ci sont recou- verles ; mais on en trouve aussi sous les pierres. Nous citerons, comme exemple de ce groupe, le genre DIAPÈRE. La FAMILLE DES STÉNÉLYTRES diffère de la précédente par les antennes , qui ne sont ni grenues , ni perfoliées. Ces insectes sont beaucoup plus agiles que les mélasomes et les taxicornes , et se rencontrent, pour la plupart , sur les feuilles ousur les fleurs ; mais onen trouve aussi sous les vieilles écorces des arbres ou dans les champignons. On les divise en cinq tribus, dont les quatre premières ont les antennes rapprochées des yeux et la tête point prolongée en manière de trompe. Les HÉLOPIENS , qui forment le premier de ces groupes , ont les antennes recouvertes à leur base par les bords de la tête. Leurs pieds ne sont pas propres au saut, et leur corps, de consistance solide , est en général arqué en dessus. Le genre HÉLOPS est le type de celie division. La TRIBU DES CISTÉLIDES est très voisine de la précédente, mais s’en distingue en ce que l’insertion des antennes n’est pas recouverte. Il est à noter que les tarses de ces coléoptères sont dentelés inférieurement en manière de peigne; mais, du reste, ils ne présentent rien de bien remarquable. La troisième tribu des siénélytres est caractérisée par les palpes maxillaires, qui sont souvent dentés en scie, fort grands et inclinés, mode de conformation qui lui a valu le nom de SERROPALPIDES. Le Corps est presque cylindrique dans les uns, ovalaire dans les autres, avec la tête inclinée, les pieds posté- rieurs au moins sont longs et propres au saut ; enfin les cuisses ne sont pas renflées. Ce petit groupe a pour type le genre DIRCÉE. La TRIBU DES OSDÉMÉRITES ressemble aux précédentes par INSECTES COLÉOPTÈRES. 883 plusieurs caractères , mais se distinguent par le corps étroit et allongé , le corselet un peu plus étroit que labdomen, les élyires linéaires ou rétrécies postérieurement en manière d’alène et souvent flexibles, la tête plus ou moins prolongée en forme de petit museau , et plusieurs autres particularités de structure. Ces insectes se trouvent sur les fleurs et sur les arbres , ei se divisent en OEDÉMÈRES et quelques autres petits genres. La dernière tribu de la famille des sténélytres, celle des RHYNCHOSTOMES , se reconnait au prolongement , en forme de museau avancé ou de trompe aplatie, à la base duquel s’insèrent les antennes. On y range les MYCTÈRES, etc. La FAMILLE DES TRACHÉLIDES diffère de tous lés autres coléoptères hétéromères par la conformation de la tête , qui est triangulaire ou en cœur, et portée sur une espèce de coi. Le corps de ces insectes est en général mou avec les élytres flexibles, sans stries et quelquefois très courtes; leurs mà- choires ne sont jamais onguiculées ; enfin la plupart vivent sur les végétaux , dont ils dévorent les feuilles ou sucent le miel contenu dans les fleurs. On les partage en six tribus, savoir:les LAGRIAIRES , dont les crochets des iarses sont simples, le corps allongé et le corselet cylindracé ou carré ; les PYROCHROÏDES , qui diffèrent des précédens par leur corps aplati et leur corse- let orbiculaire ou trapézoïde ; les MORMODELLES , dont le corps est élevé et arqué, la tête basse et les élytres très courtes ou finissant en pointe , ainsi que l'abdomen ; les ANTHICIDES, dont le corselet esten général cordiforme ou divisé en deux nœuds et le corps oblong; les HoRIAïES, dont tous les crochets des tarses sont dentelés et accompagnés chacun d’un appendice en forme de scie; et les CANTHARIDIES, dont les crochets des tarses(fg.413) Fig. 418. sont profondément divisés et paraissent doubles. Ce groupe mérite surtout de fixer notre attention à raison des propriétés médicinales de la plupart des insectes dont il se compose , et surtout des CANTHARIDES. Ces petits animaux con- tiennent une matière irrilante de nature particulière , qui agit comme un poison lorsqu'on lavale, et qui a la propriété de produire Ge grandes cloches lorsqu'on l’applique sur la peau : Tribu des rhynchosto- nes, Famille des trachélides. Cautharides. 884 ZOOLOGGIE DESCRIPTIVE. aussi s’en serl-on en médecine pour faire des vésicatoires. L’es- pèce la plus employée est la cantharide vesicante , appelée vul- gairement mouche d'Espagne. Son corps est long de six à huit lignes ; ses élytres sont longues , flexibles et d’un vert doré très brillant, et ses antennes sont simples, noires et composées de onze articies. Elle est très commune en Espagne, en Italie et même en France, et vit en familles nombreuses sur le frène et le lilas, dont elle dévore les feuilles. Sa larve vit dans la terre et ronge les racines des plantes. LesMÉLOËS,qui appartiennent aussi à cette tribu et qui possèdent éga- lement des propriétés vésicantes , sont privés d'ailes et se trainent à terre ou sur les plantes peu élevées. Fig. 414. CANTHARIDE VÉSICANTE (grossie). Coléoptères La section des COLÉOPTÈRES TÉTRAMERES se compose, tétramères. comme la précédente , d'insectes conformés pour se nourrir de substances végétales seulement : aussi se tiennent-ils sur les fleurs ou sur les feuilles des plantes. Les larves ont ordinairement les pieds courts, et Souvent ces organes manquent et sont rem- placés par des mamelons. On divise ce groupe en sept familles : les Rhynchophores, les Xylophages, les Ptatysomes , les Longi- cornes, les Eupodes , les Cycliques et les Clavipalpes. Famille de Les RYNCHOPHORES ou PORTE-BEC se distinguent à l’espèce ryuchopho- de museau ou de trompe formée par un prolongement de la Fe partie antérieure de leur tête (fig. 415, c” l/ 416, 417). La plupart de ces insectes Y ont l’abdomen gros, les antennes coudées et en massue , et le pénultième article du tarse bilobé. Les larves ont le corps oblong , mou et blanchätre : ils ressemblent à de petits vers et n’ont à la place des pieds que de petits ma- f 4 __ melons. Enfin ils rongent les matières *% végétales , et plusieurs vivent uni- Ü quement dans lintérieur de certains Fig. 415. BRENTE. fruits ou graines. INSECTES €OLÉOPTÈRES. 885 On donne le nom de BRUCHES aux rhynchophores pourvus d’un labre apparent et dont la tête, courte, large et déprimée , a la forme d’un museau. Plusieurs de ces insectes déposent leurs œufs un à un dans les germes encore tendres de certaines plantes légumineuses ou céréales, des palmiers, etc. Lalarve s’y nourrit , et, lorsque l’animal est arrivé à l’état parfait ,il détache une portion circulaire d’épiderme , pour sortir de sa retraite: c'est ce qui produit les trous arrondis qu'on voit souvent aux graines des lentilles , des pois , des dattes , etc. Les PRENTES , qui Sont prôpres aux pays chauds, ont les antennes filiformes et terminées par une massue d’un seul article. La plupart sont remarquables par la forme allongée de leur corps. Les ATTELABES ( /g. 416) n’ont pas de labre apparent ; le prolongement antérieur de leur tête représente un bec ou une trompe, sur laquelle s’insèrent les antennes quisont droites, etse composent de neuf à douze articies , dont les trois cu quatre derniers sont réunis en une massue. Ils rongent les feuilles ou les parties les plus tendres des végétaux, etles femelles déposent pour & à. la plupart leurs œufs dans des feuilles, qu’elles rouient Fig. 416. ATTELABE. en forme de tuyau ou de cornet. La larve d’un de ces insectes vit dans les feuilles roulées de la vigne et en dévore quelquefois une quantité immense, On les connait, dans diverses parties de la France, sous les noms de Zisette où de béche. Les CHARANCONS diffèrent des précédens par leurs antennes coudées et composées de onze ou douze articles (fig. 417). On en connait un nombre immense et on les divise en plusieurs genres. Ils vivent en sociétés nombreuses et nuisent beaucoup aux plantes dont ils se nourrissent. Enfin les CALANDRES ont les antennes également coudées, mais composées de neuf articles au plus, et insérées à la base de la trompe. Plusieurs sont Brucles. PBreuntes, Attelabes. Charancons. Famille des xylophages. 886 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE aptères, et, à l’état de larve , ils se nourrissent de graines ou de substances ligneuses. Une des espèces de ce dernier genre, la calandre du ble, que l’on désigne vulgairement sous le nom de charancon aussi bien que de calandre, fait de grands ravages dans les magasins à blé. Son corps est étroit et de couleur brune, avec le corselet ponctué, et aussi long que les élytres, qui sont striés profondément. Sa démarche est lente, et elle paraît se nourrir en rongeant les Fig. 417. grains de blé ; mais c’est surtout à l’état de larve, qu’elle fait de grands dégâts. Les femelles dé- posent leurs œufs dans autant de grains de ce céréale et bouchent ensuite le trou oblique qu’elles ont pratiqué à cet effet. Ces œufs ne tardent pas à éclore , et il en naït une petite larve vermiforme , dont la tête est cornée et armée de fortes mandibules , au moyen desquelles elle ronge l’intérieur de la graine, qui lui sert en même temps de nourriture et de de- meure. Elle n’en sort qu'après avoir achevé ses métamorphoses, et arrive à l’état parfait environ six semaines après la ponte de l’œuf dont eile provient. La rapidité avec laquelle ces insectes destructeurs se multiplient est extrême. On a calculé qu’un seul couple de calandres pouvait , dans l’espace d’une année, être la souche d’une famille composée de vingt-trois mille six cents individus , et, comme chaque larve dévore un grain de blé , on comprend facilement comment leur présence peut être en peu de temps la cause de grands dégâts. Une autre espèce, qui ressemble à la précédente , mais qui a deux taches jaunes sur chaque élytre , attaque le riz ; et une troisième , longue d’un pouce et demi et de couleur noire, vit de la moelle des palmiers de l'Amérique. Sa larve, nommée ver palmiste, est considérée dans ce pays comme un mets délicat. Dans la FAMILLE DES XYLOPHAGES, la tête est confor- mée de la manière ordinaire , et les antennes, composées de moins de onze articles et toujours courtes , sont plus grosses vers leur extrémité et perfoliées dès leur base. Ces insectes vivent pour le plupart dans le bois, que leurs larves perforent dans tous les sens. Lorsqu'ils sont très abondans dans les forêts, celles de pins et de sapin particulièrement, ils font périr un grand nombre d’arbres et les mettent hors d'état d’être employés dans les arts. Tels sont les BOSTRICHES, dont INSECTES COLÉOPTÈRES. 887 une espèce , le Lostriche capricieux, long de cinq lignes, avec les élytres et l'abdomen rouges , et les antennes composées de dix articles , dont les trois derniers forment une massue per- foliée, est assez commune sur les vieux bois. La FAMILLE DES PLATYSOMES est caractérisée par des antennes de la même grosseur ou plus grèles vers le bout, des tarses à articles entiers, des mandibules saillantes et le corps déprimé et allongé. Ces insectes se tiennent sous les écorces des arbres et constituent le genre CUCUIE. La FAMILLE DES LONGICORNES diffère des précédentes par Famille des platysomes. Famile des la conformation des tarses , dont les trois premiers articles sont longicornes. garnis en dessous de brosses , et les deuxième, troisième et quatrième articles sont cordiformes ou bilobés. Les antennes sont fili- formes et très longues, en général plus longues que le corps , et tantôt elles sont simples dans les deux sexes, tantôt pectinés ou en éventail chez le mâle. Les larves de ces insectes sont pri- vées de pieds ou n’en ont que de très petits et vivent presque toutes dans l’in- Fig. 418. CAPRICORNE DES ALPES. térieur des arbres ou sous les écorces. Plusieurs nuisent beaucoup aux végélaux, en les criblant de trous ; d’autres rongent les racines des plantes. A l'état parfait , ils font entendre un petit son aigu , produit par le frottement des pédoncules de la base de leur abdomen contre le thorax. Les Longicornes se divisent en quatre petites tribus. Dans le premier de ces groupes les yeux sont fortement échancrés ou allongés et étroits, et la tête, presque toujours avancée ou simplement penchée, s'enfonce jusqu’à ces organes sous le corselet. Chez les uns, les PRIONIENS , le labre est peu ou point distinet; les mandibules sont fortes ou même très grandes, 888 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. et les yeux n’entourent pas la base des antennes; chez les autres, nommés CÉRAMBYCIENS , le labre est très apparent; les mandipules sont de grandeur ordinaire; les yeux entourent, au moins en partie la base des antennes, etc. Cette dernière tribu est très nombreuse et renferme les genres CAPRICORNE, CALLICHROME , CALLIDIE, etc. Plusieurs de ces insectes sont remarquables par leur couleur et par l’odeur agréable qu’ils répandent : tel est le callichrôme musque, dont le corps est déprimé, le corselet tuberculeux sur les côtés, les antennes simples et les cuisses postérieures très comprimées. Il est long d'environ un pouce et d’un beau vert ou bleu foncé. On le trouve souvent sur les saules, et il répand une forte odeur de roses. Tribu des Les LAMIAIRES , qui forment la troisième tribu de cette “umiaires. famille , se distinguent par leur tête verticale, leurs palpes filiformes et terminés par un article ovoïde, et plusieurs autres caractères. Quelques espèces sont privées d’ailes ; la plupart habitent l'Amérique méridionale ; mais nous en avons plusieurs dans nos environs, par exemple , la Zamie charpentier, qui est brune , avec un duvet grisâtre , quatre points jaunes sur le corselet , et deux bandes noires sur les élytres , et qui a les antennes quatre fois aussi longues que le corps ; la Zamie cendree, qui est très commune dans les terrains calcaires, etc. Tribu des Enfin , dans la TRIBU DES LEPTURÈTES , les yeux sont arrondis lepturètes. Gu à peine échancrés ; la tête est penchée et souvent rétrécie postérieurement en manière de cou; le corselet est rétréci en avant , et les élytres vont en se rétrécissant graduellement. La cinquième famille de la section des tétramères est celle des EUPODES. Ici le corps est plus ou moins oblong , avec la tête et le corselet plus étroit que l'abdomen, qui est grand. Tous les articles des iarses , à l’exception du dernier, sont garnis en dessous de pelotes , et les cuisses postérieures sont souvent très renflées ; les antennes sont filiformes ou vont en grossissant, et il existe toujours des ailes. Ces insectes vivent sur les tiges et les feuilles de divers arbustes, tels que le lilas, et les larves de plusieurs se renferment dans une sorte de four- reau ,qu'ils se construisent avec leurs excrémens. Nous cite- rons comme exemple de ceite famille les CRIOCÈRES , dont une Famille des eupodes. LES INSECTES COLÉOPTÈRES. S89 espèce , ayant le corselet et les élytres d’un beau rouge, est très commune sur le lis blanc. Dans la FAMILLE DES CYCLIQUES , les tarses et les an- tennes sont conformés à-peu-près de même que chez les précédens ; mais le corps est presque toujours arrondi, et la division extérieure des mâchoires , au lieu d’avoir la forme d’un lobe plus ou moins membraneux a l’apparence d’un palpe. Ces insectes sont généralement de petite taille et sont souvent ornés de couleurs métalliques très brillantes ; ils sont pour la plupart lents et timides. À l’état de larve, ils ont le corps mou, coloré , sont pourvus de six pieds et se nourrissent de feuilles. On divise cette famille en trois tribus: les Cassidaires, les Chrysomélines et les Galeruques. x Les CASSIDAIRES ont les antennes insérées à la partie supé- rieure de la tête, rapprochées , courtes et presque filiformes. La bouche est située tont-à-fait en dessous ; les pieds sont courts , contractiles et à iarses aplatis ; enfin la tête est cachée sous le corselet ou même dans son échancrure antérieure , et cette dernière partie, ainsi que les élytres , débordent le corps iout autour. Les larves, dont on connait les mœurs, se re- couvrent de leurs excrémens. Les HISPES et les CASSIDES Com - posent ce groupe. Dans la TRIBU DES CHRYSOMÉLINES , les antennes sont insérées au devant des yeux et écartées. On y range les GR1IBOURIS, les EUMOLPES , les CHRYSOMÈLES , elC. = Les GALERUQUES se distinguent par leurs antennes , au moins aussi longues que la moitié du corps ; plusieurs ont les cuisses postérieures très grosses, ce qui leur donne la faculté de sauter. On peut prendre , comme exemple de cette petite tribu , les GALÉRUQUES PROPREMENT DITS , dont une espèce , longue de trois lignes , jaunâtre ou verdâtre en dessus, avec des taches noires, vit sur l’orme et en dévore quelquefois toutes les feuilles. Enfin la septième et dernière famille des tétramères, les Famille des cycliques. Tribu des eassidaires. Tribu des chrysoméli- nes. Tribu des galeruques. Familie des clavipaipes. Section des trimères. Tribu des fungicoles. Tribu des aphidiphages. Tribu des psélaphiens. 890 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. CLAVIPALPES , se distingue de toutes celles ayant égale- ment le dessous des trois premiers articles garni de brosses et l’avant-dernier bifide, par les antennes terminées en une massue perfoliée et très distincte, par les mâchoires armées en dedans d’une dent cornée, et par quelquesautres caractères. Ce sont des insectes rongeurs , dont le corps est ordinairement arrondi et souvent même hémisphérique. Ils forment les genres ÉROTYLE , TRIPLAX , etc. Les COLÉOPTERES TRIMÈRES , caractérisés par l’existence de trois articles plus ou moins distincts à tous les iarses, composent trois pelites familles : les Fungiceles , les Aphidi- phages et les Psélaphiens. Les FUNGICOLES ont le corps ovale, les antennes composées de onze articles , terminées en massue et plus longues que la tête et le corselet ; leurs élytres recouvrent entièrement labdo- men , et le pénultième article des tarses est profondément bilobé. Ils forment les genres EUMORPHE , ENDOMYQUE, etc. Les APHIDIPHAGES ont pour la plupart le corps hémisphé- rique et se distinguent aussi des précédens par la brièveté de leurs antennes. Les COCCINELLES, connues sous le nom vulgaire de hétes à Dieu, forment le type de ce groupe. Ces petits insectes sont très répandus dans nos jardins et. sont des premiers à y paraitre au printemps. Lorsqu'on les saisit , ils replient leurs pieds contre le corps et font sortir par les jointures de la cuisse avec la jambe une humeur jaunâtre d’une odeur désagréable. Ils se nourrissent principalement de pucerons. Enfin les PSÉLAPHIENS diffèrent des deux petites familles précédentes par leurs élytres tronquées et trop courtes pour recouvrir tout l’abdomen, par leurs antennes , composées sou- vent de six articles seulement , et par leurs tarses , dont tous les articles sont entiers et dont le premier est en général si difficile à apercevoir, que, pendant long-temps , il avait échappé à l'observation des entomologistes. Leur corps est long et ar- INSECTES ORTHOPTÈRES. 891 rondi postérieurement. On les trouve à terre sous les débris des végétaux. Ils forment les genres PSÉLAPHE , CLAVIGÈRE, etc. ORDRE DES ORTHOPTÈRES. L'ordre des orthoptères comprend tous les insectes ayant : 1° la bouche armée de mandibules et de mâchoires disposées pour la mastication ; 2° quatre ailes dont les deux antérieures constituent des élytres , et les deux postérieures sont membra- neuses et plissées longitudinalement pendant le repos. Le corps des orthoptères est en général moins consistant que celui des coléoptères et d’une forme allongée. Dans la plupart , la tête est grosse et verticale; les antennes sont composées d'un nombre consi- dérable d’arti- cles, tantôt fili- formes , tantôt en massue, ensi- formes ou per- foliés. Les yeux composés sont très grands et accompagnés @e Fig. 419. deux ou trois pe- tits ocelles. La conformation générale de la bouche est la même que chez les coléoptères ; les mandibules (Bb, fig. 420 ) sont courtes, épaisses , très fortes et armées de dents, dont la dis- position paraît être en rapport avec la manière dont l’animal se nourrit ; les mâ- choires portent cha- cune un seul palpe, composé de cinq articles et présen- tent en dedans une pièce cornéeet den- telée , recouverte par une lame voù- Fig. 420. (1) tée, nommée galette (1) Organes de la mastication chez un‘ orthoptère (le criquet): — ælabre où lèvre supérieure; — } mandibules; — ce mâchoires; — d galette ; — e palpes maxilaires; — f lèvre inférieure. 58 Caracteres. a92 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. (4, fig. 420), analogue à la portion de ces 6; juu.s, qui, Chez les coléoptères carnassiers , constitue le palpe maxillaire in- terne. La languette est divisée en deux ou en quatre lanières, et porte des palpes de trois articles. Le prothorax de ces insectes est assez grand et présente quelquefois des formes très bizarres. Les élytres sont coriaces ou demi membraneuses , chargées de nervures et ordinairement un peu croisées l’une sur l'autre. Leur position varie; mais , dans un grand nombre de cas, elles sont placées obliquement ou en toit. Il en est de même des ailes qui sont larges et plissées en éventail; quelquefois elles se replient aussi transversalement. Tantôt les pattes sont toutes de la même forme ; tantôt celles de la première ou de la dernière paire sont modifiées pour devenir propres à fouir la terre (fig. 422), à saisir la proie (fig. 421) ou à sauter (fig. 419 ). L’abdomen , dont la forme est en général allongée , présente, chez un grand nombre de femelles , des appendices qui en oc- cupent l'extrémité postérieure et constituent une tarière ou un ovidncte à l’aide duquel l'animal loge ses œufs dans un endroit qui leur convient. Tous les orthoptères sont terrestres, même à l’état de larve. Quelques-uns sont carnivores ; mais la plupart se nourrissent de plantes vivantes et sont d’une voracité extrème. La plupart sont pourvus d’un gésier musculeux , dont l’intérieur est armé de dents ou d’écailles cornées. Ces insectes ne font dans nos climats , qu’une seule ponte par année, et ils ne subissent que des demi-métamorphoses. La larve et la nymphe ressemblent à l’insecte parfait, tant par la forme que par les mœurs: seule- ment elles sont dépourvues d'ailes. Ces organes ne commencent à se montrer que dans la nymphe. 2 Cet ordre se compose de deux familles très distinctes: les au ORTHOPTÈRES COUREURS, dont les pieds postérieurs , ainsi que | les précédens, sont uniquement propres à la course , et les ORTHOPTÈRES SAUTEURS, dont les pattes postérieures , très lon- gues, avec une cuisse très forte, sont organisées pour le saut. Famillede Dans la FAMILLE DES ORTHOPTÈRES COUREURS , les orthoptères élytres et les ailes sont presque toujours couchées horizontale- coureurs. ment sur le corps, et la femelle ne porte jamais de tarière cornée. On les divise en forficules , blattes, mantes et spectres. Forficules. Les FORFICULES Ou perce-orcilles ont le Corps presque linéaire, INSECTES ORTHOPTÈRES. 893 la têtedépourvue d’yeux lisses, les élytres très courts , et qui se Joignetft par une suture droite , comme chez les coléoptères ; tantôt les ailes manquent; d’autres fois elles dépassent les élytres et se replient en travers aussi bien que longitudinale- ment. Les pattes sont grèles et terminées par des tarses de trois articles seulement , tandis que, chez les autres orthoptères de la même famille , il en existe toujours cinq; enfin l’abdomen est long et terminé par deux appendices cornés et mobiles, qui représentent une sorte de tenaille. Ces caractères, ainsi que plusieurs particularités de leur organisation intérieure, éloi- gnent beaucoup les forficules des autres orthoptères et les rapprochent des coléoptères ; mais la conformation de leurs ailes ne permet cependant pas de les réunir à ces derniers, et plusieurs entoñologistes pensent qu’il faudrait en former un ordre particulier qui serait intermédiaire entre les coléoptères et les orthoptères. On. a proposé le nom de Dermanpteres ou de Lahidoures pour ce groupe nouveau. Ces insectes sont très communs dans les lieux frais et humides : ils se rassemblent souvent en troupes nombreuses et font beaucoup de dégâts dans les jardins fruitiers. On a cru qu'ils s’insinuaient dans les oreilles, et c’est de là que leur vient leur nom vulgaire; mais cette opinion est inexacte. La pince qui termine leur abdomen leur sert pour se défendre. La femelle pond ses œufs par tas dans les lieux bas et humides, et se tient constamment dessus comme une poule qui couve. Les BLATTES ont le corps ovalaire ou orbicuiaire , la tête cachée sous le corselet, les ailes pliées seulement dans leur longueur, et les tarses composés de cinq articles à tous les pieds. Elles sont nocturnes, fort agiles et extrêmement vo- races. Plusieurs vivent dans l’intérieur des maisons, particu- lièrement dans les cuisines et les boulangeries, et attaquent les étoffes de laine et de soie aussi bien que les comestibles. Les espèces propres à nos colonies y sont connues sous le nom de kakerlacs , ei Se trouvent souvent à bord des vaisseaux qui viennent des Antilles. Les MANTES ont également cinq articies aux tarses et des ailes simplement pliées dans leur longueur ; mais leur corps est étroit et allongé; leur tète est découverte et leurs paties anté- rieures , beaucoup plus grandes que les autres, constituent des organes de préhension ; car les jambes , terminées par un fort 8. Dlaties. Mantes. 894 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. crochet, se reploient contre la cuisse, qui est comprimée et armée d’épines en dessous. C’est avec ces griffes que les mantes Fig. 4291. MANTE RELIGIEUSE. saisissent leur proie: elles se nourrissent d’insectes , qu’elles dévorent vivans, et on les trouve fréquemment dans le midi. Les sPECTRES ne diffèrent guère des mantes que par leurs pieds tous semblables entre eux. Ces insectes ont des formes très singulières. Les uns , appelés PHYLLIES ont le corps aplati et membraneux, ainsi que les pieds et les élytres, qui res- semblent à des feuilles ; d’autres, désignés sous le nom de PHASMES, Ont le corps filiforme et semblable à un bâton. Plusieurs manquent d'ailes : ils se nourrissent de végétaux, et on remarque que , en général , ils ont la même couleur que les plantes sur lesquelles ils vivent. Spectres. Famille des La FAMILLE DES ORTHOPTERES SAUTEURS est caracté- orthoptères risée , Comme nous l’avons déjà dit, par la conformation des sauteurs. pattes postérieures, qui sont propres au saut (voyez fig. 419, page 891). Beaucoup de femelles ont une tarière, à l’aide de laquelle elles enfouissent leurs œufs dans la terre. Les mâles font entendre un son bruyant, appelé vulgairement le chant de ces animaux, et occasioné par le frottement de diverses parties de leur corps les unes contre les autres. Tantôt c’est en frottant les cuisses postérieures contre les élytres et les ailes comme un archet sur un violon , que ces sons monotones se INSECTES ORTHOPTÈRES. 895 produisent; d’autres fois €’est en faisant vibrer l’une contre l’autre la portion membraneuse des élytres nommée miroir, ou bien à l’aide d’un organe particulier, semblable à un tambour placé à la base de l'abdomen. Cetie famille se compose des genres Courtillière , Grillon, Sauterelle, Criquet , etc. Les GRILLONS et les COURTILLIÈRES ont les élytres et les ailes horizontales , les tarses composés de trois articles : ils se cachent dans des trous et se nourrissent ordinairement d’in- sectes. Les femelles ont en général une tarière très saillante, en forme de stylet ou de sabre. Les COURTILLIÈRES se recon- naissent à leurs pieds antérieurs , qui , élargis , plats et dentés, Fig. 422. COURTILLIÈRE. ressemblent à des mains et sont propres à fouir. La courtilliere commune , longue d’un pouce et demi et de couleur brune, se creuse des terriers comme les taupes, et en coupant les racines des plantes qui se trouvent sur son passage , occasionne souvent de grands dégâts ; mais elle ne mange pas de végétaux, et se nourrit d'insectes et de vers. Le chant du mâle, qui ne se fait entendre que le soir ou ras la nuit, est produit par le miroir des élytres. Les GRILLONS n’ont pas de pieds propres à fouir. Nous en avons deux espèces : l’une noire , avec la base des élytres jaune, se creuse des terriers assez profonds dans les ravins secs et bien exposés au soleil, et s’y tient à l’affüt des insectes : on le nomme le grillon des champs ; V'autre , appelée grillon domes- tique , est jaunâtre , mêlée de brun , et fréquente l’intérieur de nos maisons, principalement les forges , les cheminées , etc. Courtillières. Grillons. 896 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. Le mâle produit un son aigu et désagréable, qui a valu à cet insecte le nom vulgaire de eri-cri. Sautereiles Les SAUTERELLES et les CRIQUETS ont les ailes et les élytres etcriquets. placés obliquement en forme de toit (/ig. 419, page 891 ); les premiers ont quatre articles aux tarses, les seconds trois seule- ment. C’est au genre des Criquets qu’appartiennent ces insectes appelés par les voyageurs sauterelles de passage , qui se réunissent quelquefois par bandes innombrables, et parcourent ainsi le pays , en détruisant sur leur passage tout vestige de végétation. On a vu, dans l’espace de peu de jours, des provinces entières converties en déserts par le passage de ces nuées d’insectes. C’est en Afrique surtout que leurs ravages sont à craindre ; mais quelquefois ils se montrent aussi dans le midi de l'Eu- rope. Dans quelques parties de l'Afrique, les habitans con- servent le corps de ces insectes dans de la saumure ou les font sécher, et les emploient comme comestibles. On trouve en France plusieurs petites espèces de Criquets et plusieurs grandes Sauterelles, dont une toute verte. RE On donne le nom de TRUXALES à des orthoptères très voisins des criquets , mais dont la tête s’élève en forme de pyramide. ORDRE DES NÉVROPTÈRES. Caracteres. LeS névroptères ressemblent aux coléoptères et aux orthop- tères par la conformation de l'appareil! de la mastication, Fiy. 423. mais en diffèrent par leurs ailes supérieu- res, qui, de même que ies inférieures , sont membraneuses, transparentes et fi- nement réticulées. Le corps de ces in- sectes est ordinaire- ment allongéet mou, et leurs antennes sé- tacées. Ils ont deux ou trois yeux lissesaussi bien que des yeux é = = . « » a sa ) composés : ils n’ont jamais d’aiguillon à lPextrémité de lPab- INSECTES NÉVROPTÈRES. 897 domen , et rarement une tarière ; enfin ils varient par leurs mœæurstet par la nature de leurs métamorphoses. Cet ordre se compose de trois familles : les Subulicornes , les Planipennes et les Plicipennes. Dans la FAMILLE DES SUBULICORNES, les antennes sonten forme d’aiène , guère plus longues que la tête, et composées de sept articles au plus(/g. 423) ;les mandibules et les mâchoires sontenlièrement couvertes parle labre et la lèvre, ou par la par- lie antérieure de la tête ; les yeux sont gros et les ailes écartées. A l’état de larve , ils se tiennent dans l’eau et se nourrissent de proie vivante , mais en sortent pour subir leur dernière mé- tamorphose On les subdivise en Libelluliens et Ephémères, re- connaissables au nombre des articles du tarse, qui, chez les premiers , est de trois , et, chez les derniers, de quatre. Les LIBELLULIENS Ou demoiselles se font remarquer par leur forme svelte, leurs couleurs brillantes , leurs grandes ailes, semblables à une gaze éclatante, et la rapidité de vol avec laquelle ils poursuivent les mouches ou les autres insectes dont ils font leur nourriture. Ils déposent leurs œufs sur les plantes aquatiques , et les larves qui en naissent vivent dans l’eau. Dans ce premier état et à l’état de nymphe, ils sont assez semblables à l’insecte parfait, si ce n’est qu'ils manquent d'ailes et que leur tête , encore dépourvue d’yeux lisses, présente en avant une espèce de masque, qui recouvre les mandibules, et qui est garnie de pinces mobiles , en forme de tenailles, à laide desquelles l'animal saisit sa proie. On remarque aussi à l’extré- mité postérieure de l’abdomen des appendices lamelleux , que la larve épanouit à chaque instant en même temps qu’elle dilate son rectum, pour y faire entrer de l’eau ; puis on la voitexpul- ser avec force cette eau, mêlée à de grosses bulles d'air, et se servir de ce moyen pour se déplacer aussi bien que pour respirer. À l’époque de leur dernière métamorphose , les nymphes sortent de l’eau, grimpent sur les tiges de plantes aquatiques , et s’y dépouillent de leur ancienne peau; mais, en quittant cette enveloppe, leurs ailes sont encore molles et hu- mides, et ce n’est que lorsque ces organes se sont séchés , que lanimal peut prendre son vol. Cette tribu se divise en LIBEL- LULES PROPREMENT DITES , qui ont les ailes étendues horizonta- lement dans le repos ,et la lète globuleuse surmontée d’une élévation vésiculeuse , ayant de chaque côté un œil lisse; en Ciassifica- uon, Famille des névroptéres subulicornes. Libelluliens, Lihelluies. Ephémères, 898 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. ÆSHNES , qui se dislinguent des libellules par la position des yeux lisses postérieurs sur une simpie élévation transversale en forme de carène; et en AGRIONS, dont les ailes sont verti- cales dans le repos , et la tête transversale (#g. 423). Les larves el lesnymphesde ces derniers ont l’abdomen terminépar trois lames en nageoire, tandis que celles des æshnes et des libellules présentent cinq appendices réunis en une queue pointue. L’agrion vierge (fig. 423 ), d’un vert doré ou d’un bleu verdätre : avec les ailes supérieures plus ou moins bleues, est très com- munedans nos environs. Les ÉPHÉMÈRES doivent leur nom à la courte durée de leur vie à l’état parfait : ils paraissent ordinairement, dans le voisinage des eaux, vers le coucher du soleil , dans les beaux jours d’été ou Fig. 424. ÉPHÉMÈRE. d'automne , et, quelques heures après, on les voit tomber à terre et mourir. Pendant ce temps, ils ne prennent même pas de nourriture, et, réunis en troupes nombreuses, ils voltigent et se balancent dans les airs , puis se réunissent par couples sur quelques plantes ; bientôt après, la femelle dépose dans l’eau ses œufs , réunis en un petit paquet, et ces insectes légers ne tardent pas alors à tomber à terre et à périr. Leur nombre est quelquefois si considérable , que le sol est tout couvert de leurs cadavres, et on assure que , dans certains cantons, on les ramasse par charretées pour fumer les terres. Mais, si on con- sidère ces animaux pendant toute la durée de leur vie, on voit que leur existence est loin d’être si brève; car, loin de naître pour mourir aussitôt , ils vivent par le fait deux ou trois ans; seulement ils restent pendant tout ce temps à l’état de larve ou de nymphe , et demeurent dans l’eau. La larve des Ephémères ressemble assez à l’insecte parfait ; cependant la bouche offre INSECTES NÉVROPTÈRES. 899 deux saillies en forme de cornes, et l’abdomen a de chaque côté une rangée de lames ou de feuillets , servant à la respiration et à la natation (fig. 425). La nymphe ne diffère de la larve que par la présence des fourreaux renfermant les ailes. Au moment où ces organes doivent se développer, l'insecte sort de l’eau ; mais, par une exception remarquable , après avoir subi cette métamorphose , il change encore une fois de peau avant que d’être parfaitement adulte. Dans ce dernier état , les Ephémères ont le corps mou , long , effilé et terminé par deux ou trois longues soies (fig. 424); les an- tennes sont très petites, les pieds fort grèles, et les ailesélevées perpendiculairement ou un peu inclinées en arrière comme chez les agrions. L’espèce la plus commune , nommée l'Ephemere de Swammerdam, en l'honneur Fig. 435. d’un anatomiste qui a puissamment contri- bué aux progrès de l’entomologie , a le corps jaune-roussâtre, terminé par deux filets très longs. On connaît une autre espèce d’éphémère, qui fait exception à ce que nous avons dit des carac- tères de l’ordre des névroptères , car elle n’a que deux ailes. La FAMILLE DES PLANIPENNES comprend les névroptères dont les antennes sont notablement plus longues que la tête , et composées d’un grand nombre d’articles sans avoir la forme d’une alène ou d’un stylet , dont les mandibules sont très dis- tinctes et les ailes inférieures presque égales aux supérieures. On les partage en Panorpates ,Fourmilions , Hémérobins, Ter- mitines et Perlides. Les PANORPATES ont cinq articles aux tarses , et l’extrémité antérieure de la tête verticale et prolongée en forme de bec. Les PANORPES , qui constituent le type de cette petite tribu, ont les quatre ailes grandes, égales et horizontales, et l’abdomen du mâle terminé par une queue articulée et armée au bout d’une pince. Le panorpe commun se voit sur les haies et dans les bois. Les FouRMILIONS ont aussi cinq articles aux tarses ; mais la têle ne se prolonge pas en forme de bec ou de trompe; les Famille des pévroptères planipennes. Panorpates. Fourmilions. Tribu des hémeérobins. Tribu des termitines. Fermites. 900 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. antennes vont en grossissant vers le bout ou se terminent en bouton, et la bouche est garnie de six palpes. Ce sont les mœurs de l'espèce commune qui leur ont valu leur nom. Lors- qu’elle est à l’état de larve , elle se nourrit d'insectes et parti- culièrement de fourmis, dent elle fait une grande destruction. Quoique pourvue de six pattes, elle marche trop mal pour saisir Sa proie à la course et lui tend un piège en forme d’en- tonnoir, qu’elle creuse dans le sable le plus fin ; cachée au fond de cette retraite, elle attend patiemment qu’un insecte tombe dans le petit précipice qu’elle a ainsi formé, et, s’il cherche à s'échapper ou s’il est trop loin pour qu’elle puisse s’en saisir, elle l’étourdit et le fait rouler au fond du trou, en lui jetant avec la tête et les mandibules une grande quantité de sable ; elle l’entraine ensuite et le suce , puis rejette loin d’elle son cadavre. La matière nutritive qu’elle se procure ainsi se digère tout entière sans laisser de résidu , et cette larve singulière ne présente point, en effet, d'ouverture analogue à l’anus. Lorsqu'elle doit passer à l’état de nymphe, elle file un cocon soyeux , d’où l’insecte parfait sort au bout de quinze à vingt jours. Il est alors long d’environ un pouce, noirâtre , tacheté de jaune, avec les ailes égales, disposées en toit, transpa- rentes , à nervures noires et tachetées vers le bord antérieur. Dans la TRIBU PES HÉMÉROBINS, la tête et les pieds sont con- formés comme chez les précédens; mais les antennes sont fi- liformes , et la bouche n’est garnie que de quatre palpes. Les HÉMÉROBES PROPREMENT DITS, qu’On nomme aussi demoiselles terrestres , Voient lourdement et répandent pour la plupart une forte odeur d’excrémens, dont les doigts demeurent long- temps imprégnés lorsqu'on les touche. A l’état de larve, ils se nourrissent principalement de pucerons, qu’ils saisissent avec leurs mandibules en forme de cornes. La TRIBU DES TERMITINES Ont presque ious quatre articles aux tarses ; leurs mandibules sont cornées et fortes, et, dans tous leurs états , ils sont terrestres et carnassiers ou rongeurs. Les TERMITES Où fourmis blanches ont le corps déprimé, la tête arrondie , les ailes très grandes , horizontales et colorées, et les pieds courts (/£g. 426, A); ils sont propres aux pays chauds et y occasionnent, à l’état de larve, de grands dégâts. Les insectes singuliers vivent réunis en troupes innombrables, INSECTES NÉVROPTÈRES. 901 composées de mâles, de femelles , de larves, de nymphes, d’in- dividus adultes, mais incomplets, qu’on nomme soldats (/g. B). Ils se tiennent toujours cachés dans l’intérieur de la terre, des A arbres ou des 50- lives, et s’y con- struisent un nid commun , entouré d’une multitude de galeries couvertes. B Les habitations de quelques-uns de ces termites sont faites avec de la terre gâchée et s’é- lèvent au-dessus du sol , à une hau- teur de six ou huit pieds ; tantôt elles ont la forme d’un pain de sucre, Fig. 426. TERMITE FATAL. d’auires fois celle d’un dôme , et, dans quelques parties de la côte d'Afrique , le nombre de ces monticules est si considérable que , de loin, on croirait voir un village. Elles se couvrent ordinairement de gazon , et leur solidité est également très grande; non-seulement elles résistent aux intempéries des saisons , mais elles peuvent supporter un poids considérable , sans se briser. Des voyageurs assurent que souvent on voit des taureaux sauvages monter sur ces monticules de moyenne grandeur, pour y rester en senti nelle pendant que le reste du troupeau pait à l’entour. Ce sont les larves qui élèvent ces édifices remarquabies : aussi les désigne-i-on' ordinairement sous le nom d'ouvriers. Les sol- dats , reconnaissables à leur grosse tête et à leurs longves man- dibules , sont moins nombreux et ne participent pas à ces travaux; mais , ainsi que leur nom l'indique, ils veillent à la défense de la communauté, et, dès qu’une brèche est faite à leur habitation , ils se présentent en foule et pincent avec force leurs ennemis. Devenus insectes parfaits, les termites quittent leur retraite , et s’envolent vers le soir; mais , le lendemain , dès le lever du soieil, leurs ailes se dessèchent et tombent. La plupart deviennent alors la proie des oiseaux ou des reptiles insectivores ; mais on assure que, lorsque Îles larves ou les soldats rencontrent un couple de ces insectes , ils les recueillent dans leur habitation , les emprisonnent dans une cellule particulière, les nourrissent avec soin et transportent 902 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE, dans des chambres voisines les œuis à mesure que la femelle les pond. Psoques. D’autres Termitines, nommés PSOQUES , n’ont que deux articles aux tarses: ce sont de petits insectes dont le corps est court et souvent comme bossu, et les ailes en toit : ils vivent dans le bois, le vieux chaume , etc. Tribu des Enfin, dans la TRIBU DES PERLIDES, il existe trois articles periides. aux tarses. Les mandibules sont presque toujours en partie membraneuses ; les ailes inférieures sont plus larges que les supérieures et doublées sur elles-mêmes au côté interne , enfin l'abdomen est terminé par des soies. La Perle à longue queue est commune au printemps sur le bord des rivières. Famille des Dans la troisième et dernière famille des névroptères , celle plicipennes. des PLICIPENNES , les mandibules manquent et les ailes infé- rieures sont ordinairement plus larges que les supérieures et plissées dans leur longueur. Leur corps forme avec leurs ailes , comme chez beaucoup de lépidoptères nocturnes , un triangle allongé , et ces insectes ressemblent un peu à de petites pha- lènes. Ils volent principalement la nuit et se trouvent souvent réunis en troupes au dessus des eaux. Leurs larves vivent dans des fourreaux recouverts de différentes matières , qu’ils trou- vent dans l’eau , telles que des graines , des petites coquilles ,etc., etqu’elles lient ensemble avec des fils soyeux ; elles ne quittent jamais cette habitation , mais la traînent avec elles quand elles marchent , et alors se bornent à en faire sortir l’extrémité antérieure de leur corps. Lorsqu’elles doivent se transformer en nympbhes, elles fixent leur tube contre quelque corps solide, et en ferment les deux bouts avec une sorte de porte grillée, qu’elles percent plus tard lorsque cette première métamorphose est achevée. Elles sont alors très agiles. Les grandes espèces sortent tout-à-fait de l’eau pour se transformer en insectes parfaits ; les petits se rendent seulement à sa surface , et linsecte ailé se repose sur son ancienne dépouille comme sur un bateau jusqu’à ce que ses ailes soient devenues assez fermes pour lui permettre de prendre son vol. Legenre principal de ces névroptères a reçu le nom de FRIGANE. INSECTES HYMÉNOPTÈRES. 903 ORDRE DES HYMÉNOPTÈRES. Les Hyménoptères établissent en quelque sorte le passage entre les insectes broyeurs et suceurs. Leur appareil buccal se compose effectivement de mandibules , de mâchoires et de deux lèvres très analogues à celles des insectes précédemment étudiés : la lèvre , et les mandibules ne pré- sentent même rien de très particu- __a lier; mais les mâchoires et la lan- guette se sont excessivement allon- gées, et les premières prennent une forme tubulaire et engainent lon- gitudinalement les côtes de la lan- &\ guette , de façon que ces organes, \/}— h réunis en faisceaux, constituent / * une trompe, qui sert de conduit aux alimens, toujours mous ou liqui- des , dont ces insectes se nour- F F rissent. Cette trompe est mobile à Fig. 427.(1) sa base et flexible dans le reste de son étendue, mais ne s’enroule ja- mais comme chez les Lépidoptères. Quant aux mandibules, elles servent uniquement à découper.les matières’dont les Hy- ménoptères font leur nid , ou bien à saisir et à mettre à mort la proie dont ces insectes sucent les humeurs. On remarque aussi qu’il existe dans l’intérieur de la cavité buccale d’autres pièces solides , qui manquent chez les insectes broyeurs, et qui con- stituent des valvules destinées à fermer le pharynx toutes les fois que le mouvement de la déglutition ne s’effectue pas. Tous les hyménoptères ont, outre les yeux composés, trois petits yeux lisses ; les antennes varient dans leur forme. Les ailes, au nombre de quatre, sont membraneuses, nues et veinées seulement ; les supérieures sont toujours les plus grandes, et, pendant le repos, ces organes sont croisés hori- zontalement sur le corps. Les pattes sont {pourvues de cinq articles aux tarses; enfin l’abdomen des femelles est terminé (1) Appendices de la bouche d’an bourdon : — a labre ; — à mandibules; — c mâchoire ; — d languette. Organtsa- tion, 904 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. par une tarière ou un aiguillon , composé ordinairement de trois appendices longs et grèles. Il est aussi à noter que les trachées des hyménoptères sont plus compliquées que dans les autres ordres. Ces insectes subissent une métamorphose complète. La larve, tantôt privée de pattes, ressemble à un ver; d’autres fois pourvue de six'pieds à cro- chets et souvent aussi de douze à seize pieds membraneux , ressemble davantage à des che- Fig. 428. ABEILLE. nilles. Dans l’un et l’autre cas, - elle a une tête écailleuse avec des mandibules , des mâchoires et une lèvre, à l’extrémité de laquelle est une filière pour le passage de la matière soyeuse dont sa coque doit être construite. Le régime de ces larves varie beaucoup. Plusieurs ne peuvent se passer de secours étrangers et sont élevées en commun par des individus stériles, réunis en société. La nymphe reste sans nourriture et dans un repos compiet. Enfin, dans leur état parfait , les hyménopières vivent presque tous sur les fleurs et meurent au bout de la première année de leur existence. On a divisé cet ordre en deux grandes sections, celle des Térébrans et celle des Porte-aiguillons. La section des HYMÉNOPTÈRES TÉRÉBRANS est caractéri- sée par l’existence d’une tarière à Pextrémité de l'abdomen de la femelle. Get organe est composé de trois pièces , dont deux servent de fourreau à la troisième. Deux familles, les Porte-scies et les Pupivores composent ce groupe. Famille des Dans la FAMILLE DES PORTE-SCIES, l'abdomen est sessile, portescits. Cest-à-dire n'ayant pas à sa base un rétrécissement en forme de pédicule , et paraissant être une continuation du thorax. La tarière de la femelle est ordinairement en forme de scie et sert à préparer un logement pour les œufs , aussi bien qu'à les y déposer. Les larves sont toujours pourvues de pieds. Ce groupe se compose de deux tribus : les Tenthrédines et les Urocères. INSECTES HYMEÉNOPTÈRES. 905 Les TENTHRÉDINES, appelées vulgairement mouches à scie, ont la tarière @omposée de deux lames dentelées en scie, pointues, réunies et logées dans une coulisse sous l’anus. Leurs mandi- bules sont allongées, fortes et dentées; leurs mâchoires , presque membraneuses au bout , portent un palpe de six articles, la lan- guette est droite et divisée en trois ; les palpes labiaux sont courts et formés de quatre articles ; les ailes sont divisées en cellules nombreuses ; enfin l'abdomen est cylindrique et arrondi posté- rieurement. À l’aide de sa double tarière, la femelle fait aux branches et aux autres parties des végétaux de petits irous, dans chacun desquels elle dépose un œuf et une liqueur mous- seuse, dont l'usage parait être d'empêcher louverture de se fermer. Les plaies faites ainsi deviennent convexes par laug- mentation de volume de lœuf logé dans leur intérieur et prennent souvent la forme d’une galle, dans l’intérieur de la- quelle la larve se développe et subit ses métamorphoses , et dont l’insecte parfait s'échappe en pratiquant à ses parois une ouver- ture circulaire. En général cependant les larves se tiennent à découvertsur les feuilles dont elles se nourrissent. Elles ressem- blent beaucoup à des chenillestant par la forme générale de leur corps que par leur couleur et le nombre considérable âe leurs paies. Pour se transformer en nymphe, elles filent une coque et y restent souvent pendant plusieurs mois. Les TENTHRÈDES COn- stituent le type de cette tribu. Leurs larves ont de dix-huit à vingt-deux pattes. Nous en avons plusieurs espèces , dont une noirâtre et assez semblable à une guëpe , se nourrit des feuilles de la scrophuiaire ; une autre, de couleur verte , avec des taches noires , vit sur le bouleau. Dans la TRIBU DES UROCÈRES , les mandibules sont courtes , la languette entière et la tarière , tantôt composée de trois filets et irès saillante, tantôt capillaire et roulée en spirale dans l'intérieur de labdemen. Ces insectes forment le genre SIREx. Dans la FAMILLE DES PUPIVORES , l'abdomen est rétréci ‘fribu des teuilrédiues. Tribu ces urocères. Famille des ou même pédiculé près de sa base et très mobile , et les larves pupivores. sont apodes. Six tribus composent ce groupe , les Evaniales, les Ichneumonides , les Gallicoles, les Chalcidites , les Chrysides et les Oxyures. Les ÉVANIALES se reconnaissent à leurs ailes veinées, à leurs Tnba äes évanizles. Tribu des ichneumoni des. Tribu des gallicoles. 906 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. antennes , formées de treize à quatorze articles , et à leur abdo- men , implanté sur le thorax. Elles ont ordinairement une tarière saillante composée de trois filets. Les ICHNEUMONIDES ont également les ailes veinées ; mais leur abdomen prend naissance entre les deux paites postérieures, et leurs antennes sont composées d’au moins seize articles. Le principal genre de cette tribu a recu le même nom qu’un mammifère dont nous avons parlé précédemment , celui d’ICHNEUMON. Quelques auteurs appellent aussi ces insectes des mouches vibrantes , à Cause des mouvemens vibratiles qui agitent leurs antennes , ou bien mouches triples, à raison des trois soies dont leur tarière se compose. Leur corps est ordi- nairement linéaire et leurs antennes contournées. Les femelles déposent leurs œufs dans le corps des chenilles , des pucerons et même des araignées , et montrent un instinct remarquable dans la recherche de leur victime. Celles dont la tarière est courte s’attaquent à des chenilles ou à des nymphes, qui se montrent au dehors; mais celles pourvues d’une longue tarière vont chercher ces animaux sous les écorces des arbres ei jusque dans les galles où ils sont cachés. Les larves des ichneumonides n’ont pas de pattes ; mais elles vivent dans le corps des che- nilles où elles sontécloses , et s’y nourrissent des parties grasses qui s’y trouvent jusqu’à ce qu’elles en percent la peau, pour en sortir soit à l’état parfait, soit au moment de subir leurs métamorphoses; alors elles se mettent aussitôt à filer une coque soyeuse, qu’elles attachent aux tiges des plantes ou qu’elles suspendent aux feuilles. Dans la TRIBU DES GALLICOLES , les ailes inférieures n’offrent plus qu’une seule nervure et les supérieures ne sont que peu veinées ; les antennes ne forment pas de massue , et la tarière est filiforme et roulée en spirale dans l’intérieur du ventre. Son extrémité est armée de dents , comme celle d’un fer de flèche , à l’aide desquelles l’insecte élargit les entailles qu’il fait aux différentes parties des végétaux, pour y loger ses œufs. Les sucs de la plante s’épanchent sur les bords de cette ouverture, et il en résulte bientôt une excroissance nommée galle , dont la forme varie. Les larves vivent tantôt solitaires, tantôt en société dans l’intérieur de ces petites tumeurs , dont elles rongent la substance , et y restent plusieurs mois. Les unes y subissent leurs métamorphoses ; les autres la quittent pour s’enfoncer dans la terre , où elles demeurent jusqu’à leur der- INSECTES HYMÉNOPTÈRES. 907 nière transformation. Des trous ronds , qui se voient à la surface des gallesi, annoncent que l’animal en est sorti. Un de ces insectes , appelé Cénips de la galle à teinture, dépose ses œufs sur une espèce de chène du levant et délermine ainsi la formation des noix de galie, dont on fait un si grand usage pour la teinture en noir et pour la fabrication de l'encre. Les Pupivores de la TRIBU DES CHALCIS ne diffèrent guère des précédens que par leurs antennes en massue et coudées. Ce sont de très petits insectes ornés de couleurs métalliques très bril- lantes et ayant pour la plupart la faculté de sauter. Quelques- uns sont assez petits pour pouvoir se nourrir de l’intérieur d'œufs d’insectes presque imperceplibles. Leur tarière est semblable à celle des ichneumons. Les oxYUREs ressembient aux précédens par labsence de nervures aux ailes inférieures, mais labdomen de la femelle est terminé par une tarière tubulaire : ce sont les BÉTHYLES. Enfin les curysis manquent de nervures aux ailes inférieures et ont une tarière tubulaire susceptible de s’allonger et de se raccourcir comme une lunette d’approche et armée d’un petit aiguillon. La richesse de leurs couleurs les a fait appeler des guépes dorees. On les trouve sur les fleurs et sur les murs, exposés aux rayons du soleil. Dans la SECTION DES PORTE-AIGUILLON, il n’existe pas de tarrière; mais un aiguillon rétractile la remplace ordinaire- ment. Chez la femelle il existe toujours un petit appareil sécré- teur, situé près de l’anus et destiné à produire un liquide vénéneux , que l’animal emploie pour sa défense. Quelquefois Pinsecite se borne à lancer ce venin au-dehors; mais, en général , la petite poche dans laquelle il s’'amasse communique avec umaiguillon destiné à le verser au fond de la plaie faite par cet instrument. On distingue dans l’aiguillon une portion basilaire composée de plusieurs pièces , une tige cornée , creu- sée en gouitière et nommée etui, et un dard , composé de deux stylets aigus , logés dans l’étui et présentant chacun en dedans un sillon par lequel le venin s’écoule. Dans l’état de repos, 59 Tribu des chalcis. Tribu de OXYUTES, n Tribu des chrysis. Section des hyménoptères porte - aiguil- on. Famille des hétérogines. Tribu fourmis. des 908 ZOOLOGIE DESCRIPTiVE. toutes ces pièces sont retirées dans l'intérieur du corps de P’animal; mais, quand linsecte veut s’en servir, il fait sortir l'étui , et l’enfonce , ainsi que son dard , dans la peau de son ennemi. Quelquefois il lui est même impossible de je retirer ; l’aiguillon tout entier se sépare alors de son corps et reste implanté dans la plaie. La déchirure qui en résulte détermine promptement la mort de l’insecte. Le mâle est toujours privé de cette arme: aussi peul-on le saisir sans danger; mais les femelles et souvent les individus stériles , appelés ouvriers , en sont pourvus , et sa piqüre délermine une inflammation irès douloureuse. Les hyménopières de cette section ont les antennes simples et composées de treize articles chez le mâle et de douze chez la femelle. Les palpes sont ordinairement filiformes ; les quatre ailes sont toujours veinées , et l’abdomen est pédiculé. Les larves sont privées de pieds et vivent des alimens que les fe- inelles ou les ouvriers leur fournissent. On divise les porte- aiguillon en quatre familles : les Hétérogynes, les Fouisseurs , les Diploptères et les Mellifères. Dans la FAMILLE DES HÉTÉROGYNES les ailes manquent, chez les femeiles ou chez les individus appelés ouvriers; les antennes sont coudées ei la languette est petite et arrondie ou en cuiller. Ces insectes forment deux tribus : celle des Four- mis et celie des Mutiiles. La TRIBU DES FOURMIS nous offre un second exemple d’in- sectes vivant en sociétés nombreuses , composées de mäles , de femelles et surtout d'individus imparfaits et stériles, que l’on désigne sous les noms d’ouvrieres où de neutres. Les mœurs de ces petits animaux sont des plus singulières, et, si elles n’avaient été étudiées par des observateurs dignes de toute notre con- fiance, on serait tenté de traiter de fables les récits qu’on nous en fait. Les fourmis ouvrières sont dépourvues d'ailes et d’yeux lisses et se font remarquer aussi par la grosseur de leur tête, la force de leurs mandibules et quelques particularités de forme : elles constituent, comme nous lavons déjà dit, la portion la plus nombreuse des colonies dont elles font partie, et sont seules chargées des travaux nécessaires à la prospérité générale. Les unes bâtissent leur demeure commune en terre, les autres en bois. Les premières creusent dans le sol une mul- INSECTES HYMÉNOPTÈRES. 509 titude de saleries , de chambres disposées par étages, et rejetant les aéblaïs au-dehors, élèvent souvent au dessus de leur nid un monticule , dans l’intérieur duquel ces travailleuses infatigables creusent de nouveaux étages, semblables à ceux situés au- dessous ; quelquefois on les voit aussi construire avec cette terre des galeries qui montent le long des tiges des arbustes où ces insectes vont chercher leur nourriture , et qui les abri- tent dans leurs courses journalières. Les fourmis qui con- struisent leurs fourmilières en bois , s’établissent dans des arbres déjà attaqués par des larves d’autres insectes el ramollis par la pourriture. Avec leurs mandibules , elles détachent des particules de bois , et creusent dans l’intérieur de l’arbre plusieurs étages séparés par des planchers et soutenus par des piliers , formés de bois non rongé ou de sciure détachée des parties voisines et pétrie avec de la salive. Si quelque accident vient détruire une partie de leur édifice , on voit aussitôt toutes les ouvrières qui ont échappé à ce désastre, déployer une activité extrême , retirer des décombres celles qui y ont été ensevelies , transporter en lieu de sûreté leurs compagnes bles- sées et ajouter de nouvelles bâtisses à celles encore debout. Les mâles et les femelles ne participent pas à ces travaux. Les premiers ne restent dans la fourmilière que fort peu de temps et'périssent presque aussitôt qu’ils en sont sortis ; les femelles quittent aussi la demeure commune avec les mâles ; mais , après s'être séparées de ceux-ci et s'être dépouillées de leurs ailes,elles sont ramenées dans la fourmilière par les ouvrières et placées dans les chambres les plus retirées, où elles restent prisonnières, et sont nourries par leurs garäiennes. Dès qu’elles pondent un œuf, une fourmi ouvrière s’en empare et le transporte avec soin dans une chambre particulière. Les œufs destinés à pro- duire des femelles ne sont pas logés dans les mêmes cellules que ceux d’où naîtront les ouvrières. Les larves recoivent aussi de la part des ouvrières des soins assidus ; chacune d’elles est appâtelée par celles-ci avec des sues qui lui conviènnent, et, lorsque ie temps est beau, on voit ces nourrices aclives trans- porter leurs élèves hors de la fourmilière pour les exposer aux rayons du soleil, les défendre contre leurs ennemis, les rap- porter dans leur nid à l’approche du soir, et les entretenir dans un élat de propreté extrême. Les fourmis ne font de provisions ni pour elles-mèmes ni pour leurs nourrissons, mais vontchaque jour chercher les alimens dont elles ont besoin. Pendant que certaines ouvrières s’occupent de l'entretien des bâtisses et des nouvelles constructions nécessaires à leurs colonies croissantes, d’autres vont chercher sur Îes fleurs des liquides sucrés et surtout y récolter un suc particulier, qui suinte du corps des »9. Tribu des mubilles. Famille des fomsseurs, 910 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE,. pucerons et de quelques autres petits hémiptères. Certaines fourmis ne se contentent pas de prendre la gouttelelte su- crée que le puceron leur abandonne lorsqu'il se sent caressé par leurs antennes. Souvent elles portent ces insectes dans leurs demeures et les y élèvent comme des fermiers le font pour leurs vaches laitières. On a vu les habitans de deux fourmilières voisines se disputer leurs pucerons et les vainqueurs emporter leurs prisonniers avec le même soin qu’elles le font pour leurs larves. Mais cette singulière habitude de prévoyance n’est pas encore le trait le plus extraordinaire de lenrs mœurs. Il est des fourmis qui, après avoir vaqué pendant une partie de leur vie à leurs travaux ordinaires , semblent comprendre le plaisir de loisiveté et vont faire la guerre à des espèces plus faibles , pour en enlever les larves et les nymphes , transporter celles-ci dans leur propre demeure et charger les esclaves qu’elles se sont amsi procurés de lous les travaux de la communauté. Les fourmis se reconnaissent aisémentà la disposition de leur abdomen, dont le pédicule est en forme d’ocelle ou de nœud, soit simple , soit double. Leurs antennes sont coudées , el leurs mandibules ordinairement très fortes. Les mâles sont beaucoup plus pelits que les femelles. Les unes , appelées par les entomo- logistes les FOURMIS PROPREMENT DITES, manquent d'aiguillon et portent les antennes sur le front; d’autres (les POLYERGUES) manquent aussi d’aiguillon , mais ontles antennes fixées près de la bouche ; enfin, chez d’autres, les PONÈRES, par exemple, il existe un aiguillon chez les ouvrières aussi bien que chez les femelles. La fonrmi mineuse ei la fourmi noire cendree, qui appartiennent lune et l’autre à la première de ces divisions, sont souvent enlevées , comme nous l’avons dit plus haut , par une troisième fourmi du même groupe (la fourmi sanguine) et par la polyergue roussâtre, pour vivre dans les fourmilières de celles-ci et les remplacer dans éducation des petits de leur race. Les hyiménoptères de la TRIBU DES MUTILLES vivent solitaires. Les mâles sont ailés; mais les femelles sont privées de ces organes. Ils habitent pour la plupart les pays chauds. La FAMILLE DES FOUISSEURS comprend les hyménoptères porte-aiguillon dont tous les individus sont ailés , dont les pieds posiérieurs ne sont pas propres à ramasser le pollen des fleurs et dont les ailes sont toujours étendues. Ces insectes sont très INSECTES HYMÉNOPTÈRES, 911 agiles et vivent pour la plupart sur les fleurs ; mais leurs larves sont cärnassières,et, par une prévoyance instinctive bien re- marquable , la femelle pourvoit ordinairement à leur nourri- ture, en plaçant à côté de ses œufs , dans le nid préparé pour ses pelits , le corps de quelque larve ou de quelque araignée qu’elle a préalablement percée de son aiguillon.On connaît un très grand nombre de ces insectes , et on les divise en SCOLIÈTES, dont le premier segment du thorax n’est pas linéaire, dont les pieds sont courts et épineux, et dont les antennes sont, chez la femelle, sensiblement plus courtes que la tête et le tho- rax ; SAPYGITES, qui diffèrent des précédens par leurs pieds grèles et point épineux, leurs antennes plus longues, etc. ; SPHÉGIDES , qui ressemblent aux précédens , mais ont les pattes postérieures une fois au moins aussi longues que le corps ; les BEMBICIDES , dont le premier anneau du thorax est linéaire, le labre entièrement à nu ou très saillant , etc. ; LABRATES , qui diffèrent des précédens par leur labre caché , et qui ont les mandibules profondément échancrées en bas , près de leur base; NYSSONIENS , dont le labre est également caché, mais dont les mandibules ne sont pas échancrées de la sorte et dont l'abdomen est triangulaire ou conique ; et les CRABRONITES , qui diffèrent des précédens par la forme de l'abdomen et par quelques autres caractères. La FAMILLE DES DIPLOPTÈRES est la seule de celte section dans laquelle on trouve les ailes supérieures doublées longitu- dinalement , et même ici ce mode de conformation n’existe pas toujours. Les antennes sont ordinairement coudées et en mas- sue , les yeux échancrés , le corps glabre , noir ei plus ou moins tacheté de jaune. Beaucoup deces insectes vivent en sociétés tem- poraires , composées d'ouvriers aussi bien que de mâles et de fe- melles. Ces dernières commencent l'habitation de la communauté et d’abord soignent seules les petits qu’elles mettent au jour jus- qu’à ce qu’il soit né des ouvrières qui les aident dans leurs tra- vaux. On divise ce groupe en deux tribus : les Masarides et les Guépiaires. Les MASARIDES n’ont que huit articles bien distincts aux antennes : ils ne présentent rien d’intéressant. Dans la TRIBU DES GUÊËPIAIRES les antennes offrent toujours bien distincitemeni treize articles chez le mâle et douze chez la guépiaires. Fanulle des diploptères. Ma-arides. Tribu des Eumènes. Guépes. Famille des me!lifères. 912 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. femelle. Les unes, ayant les mandibules beaucoup plus longues que larges , et Le chaperon cordiforme , vivent toutes solitaires , et leurs larves se nourrissent de cadavres de chenilles ou d’autres insectes , que la femelle place avec ses œufs dans un nid construit en terre ou dans quelque trou de mur ; tels sont les EUMÈNES, etc. D’autres ont les mandibules courtes et tronquées et le chaperon presque carré : elles constituent le genre GUÊPE PROPREMENT DIT, et diffèrent beaucoup des précé- dentes par leurs mœurs; car elles vivent en sociétés nom- breuses , composées de trois sortes d'individus comme celles des fourmis. Les femelles et les ouvrières font avec des par- celles de vieux bois , qu’elles détachent à l’aide de leurs mandi- bules , et qu’elles convertissent en une pâte semblable à du carton, des gâteaux ou rayons garnis en dessous de cellules hexagonales et suspendus en dessus par des pédicules ; tantôt ces agrégations d’alvéoles sont à nu; d’autres fois les rayons sont renfermés dans une enveloppe commune , dont la forme varieet dont l’ouverture externe est en général située en des- sous. Les femelles commencent seules la construction de ce nid , qu’elles placent tantôt en plein air, tantôt dans le creux d’un vieux arbre ou en terre. Les premiers œufs qu’elles y pondent produisent des individus stériles ou ouvriers , qui aident à agrandir le guêpier et à élever les petits. En automne, il nait des femelles et des mâles, et un peu plus tard toutes les larves et les nymphes qui ne peuvent achever leurs métamor- phoses avant le mois de novembre, sont arrachées de leurs cellules et tuées par les ozvrières, qui elles-mêmes périssent avec les mâies au retour de la saison froide. Quelques femelles seules passent l’hiver et deviennent au printemps les fonda- irices de nouvelles colonies. La guépe commune Construit son nid en terre , avec une matière semblable à du papier fin et y place un grand nombre de rayons renfermés dans une enve- loppe composée de plusieurs couches, disposées par bandes. La guépe frelon place son nid dans les trous des murs oules vieux arbres et ne lui donne ni autant de solidité ni un aussi grand nombre de rayons. Ceite espèce détruit les autres insectes et particulièrement les abeilles, dont elle vole aussi le miel. Une troisième espèce, la guépe cartonnière , propre à l’Amérique méridionale , est célèbre par l’architecture de son nid, de forme conique, qui est suspendu aux arbres, et qui est com- posé d’un carton très fin. La FAMILLE DES MELLIFÈRES se distingue des autres hyménoptères porte-aiguillon par l2 conformation des paties INSECTES HYMÉNOPTÈRES. 913 postérieures qui ont le premier article du tarse très grand , en forme de palette carrée ou de losange renversé (#g. 429) , ei qui sont propres à ramasser le pollen des fieurs. Les mâchoires et les lèvres de ces insectes sont en général très longues et con- slituent une sorte de trompe. À l’état parfait ils vivent du miel des fleurs , et, à l’état de larve , ils se nourrissent de la même substance et de pollen. On les divise £n deux sections: les Andrenètes , qui vivent solitaires, et les Apiaires , qui , pour la plupart, vivent en société. Les ANDRENÈTES se distinguent par la disposition de la languette , qui est plus courte que sa gaine et en forme de cœur ou de fer de lance. Ils n’offrent que deux sortes d’indi- vidus , des mâles et des femelles. Ces dernières ramassent ordinairement avec leurs pieds postérieurs un peu de pollen, et, en le mêlant avec du miel, composent une pâiée, qu’elles renferment avec leurs œufs dans un trou creusé dans la terre, el qu’elles destinent à nourrir leur progéniture. L’andrenéte des murs, bleu -noirâtre , avec des poils blancs sur la tète le corselet et le bord de l’abdomen , est commune dans nos environs. Dans la PRIBU DES APIAIRES , la division moyenne de la lan- guelte est filiforme et au moins aussi longue que sa gaine tubulaire. Les uns sont solitaires ; les autres vivent en société. Les APIAIRES SOLITAIRES n’offrent toujours que deux sortes d'individus , des mâles et des femelles. Il n’y a pas d’ouvrières comme dans le groupe suivant, et chaque femelie pourvoit isolément à la conservation de sa postérité. Ces insectes se distinguent aussi par la conformation de leurs pattes posté- rieures , qui, chez la femelle , ne présentent ni la corbeille, ni la brosse tarsienne, que nous y verrons chez les apiaires sociales ; mais le côté interne de leurs jambes postérieures et du premier articie du tarse correspondant est le plus souvent garni de poils nombreux et serrés, à laide desquels ils ré- coitent le pollen des fleurs. Plusieurs de ces hyménopières ont aussi , chez la femelle , le ventre garni de poils soyeux, qui constituent une sorte de brosse servant au même usage. Leurs mœurs varient. Les XYLOCOPES, par exemple , ont l’habitude de creuser dans le vieux bois des canaux divisés par des cloisons et servant à loger leurs œufs, ainsi que la pâture destinée aux Tribu des: andrepetes. Tribu des apiaires. Apiaires s0- litaires. Xylocopes. Mégachiles. Tribu des apiaires SO ciales. Abeilles. 914 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. larves: aussi leur a-t-on donné les noms de menuisieres, abeilles percebois , eic. Une grande espèce de ce genre , longue de près d’un pouce, avec le corps noir et les ailes violacées, est très commune dans nos environs. D’autres Apiaires soli- taires, dont les naturalistes ont formé le genre MEGACHILE, construisent contre les murs un nid avec une espèce de mor- tier terreux ou bien creusent en terre, pour y loger leurs œufs, des trous cylindriques, qu’ils ferment avec un cou- vercle, et qu’ils garnissent de petits morceaux de feuilles dé- coupées à l’aide de leurs mâchoires. D’autres encore ne pré- parent pas de demeure pour leur progéniture, mais déposent leurs œufs dans les nids de quelque autre insecte de la même tribu. Les APIAIRES SOCIALES vivent , comme les fourmis , en sociétés nombreuses, composées d’ouvrières aussi bien que de mâles et de femelles ,et sont caractérisées par la conformation des pattes postérieures, qui, chez les ouvrières , présentent à la face in- terne de la jambe (ou palette) un en- foncement lisse, appelé corheïlle, dans lequel ces insectes placent la pelotte de pollen qu’ils ont recueil- lie sur les fleurs à laide du duvet soyeux (ou brosse) , dont la face interne du tarse de ces mêmes pat- tes est garnie (/g. 429). Les Abeilles et les Bourdons proprement dits Fig. 499. appartiennent à ce groupe. Les ABEILLES se reconnaissent à l’absence d’épines au bout des jambes postérieures et à la forme des premiers articles de leur tarse postérieur, qui, chez les ouvrières est en carré long. L’abeille domestique Où mouche à miel est un des insectes dont l’histoire offre le plus d’intérêt tant à raison de l’instinet admi- rable dont ce petit animal est doué qu’à cause des produits de son industrie. Elle est originaire de l’ancien contineni , proba- blement de la Grèce, mais a été transportée dans toute l’'Eu- rope, ainsi que dans le nord de lAfrique ét de l'Amérique septentrionale. Ces insectes établissent leurs demeures dans quelque cavité, telle que les trous des vieux arbres ou les espèces de huttes que les agriculteurs leur préparent et qu'on INSECTES HYMÉNOPTÈRES. 915 nomme des ruches. Chaque colenie se compose d’un nombre très considérable d’ourrières où mulets (quinze ou vingt mille, quelquefois jusqu’à trente mille), de six à huit cents mâles ou frelons, appelés à tort Lourdons par les cultivateurs, et communément d’une seule femelle, qui paraît y régner en souveraine et qui a recu le nom de reine. Ces trois sortes d’in- dividus diffèrent entre eux par leur forme aussi bien que par les fonctions qu’ils sont destinés à remplir dans ces communautés. Les ouvrières (/g. 430), qui sont des femelles stériles, sont les plus petiteset se distinguent des mâles par leurs antennes, composées de douze articles , leur abdomen court et formé de six anneaux, leurs mandibules en forme de cuiller et sans dentelures, et leurs pattes postérieures pourvues d’une corbeille et d’une brosse pour la récolte du pollen (fg. 429). Les abeilles femelles ou reines (fig. 428, p. 904) ont l’abdomen plus long et les mandibules échan- crées ; enfin les mâles (fig. 431) ont treize arti- cles aux antennes et man- quent d’aiguillon. Ce sont les abeilles ou- vrières quiexécutent tous les travaux nécessaires à Fig. 431. FRELON. l'existence et à la prospé- rité de la société et ces animaux se les partagent entre eux. Les unes , nommées ciriéres, sont chargées de la récolte des vivres et des matériaux de construction ainsi que des bâtisses à élever ; les autres , appelées , à raison de leurs fonctions s les nourrices, s'occupent presque exclusivement du soin in- térieur du ménage et de l'éducation des petits. Pour faire sa récolte, l'abeille cirière entre dans une fleur bien épanouie, dont les étamines sont chargées de la poussière appelée pollen par les botanistes. Cette poussière s'attache aux poils branchus , dont son corps est couvert , et en se frottant avec les brosses qui garnissent ses tarses, l’insecte la rassemble en pelottes , qu’elle empile dans les corbeilles ou palettes creu- sées à la face interne de ses jambes postérieures. A laide de leurs mandibules , les ouvrières détachent aussi de la surface Fig. 430. ABEILLE OUVRIÈRE. 916 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. des plantes une matière résineuse, appelée propolis, et en rem- vlissent leurs corbeilles. Ainsi chargées, ces abeilles retournent à leur demeure commune, et, anssitôt arrivés, se débarrassent de leur fardeau, pour retourner à la recherche de nouvelles provi- sions Ou pour employer celles déjà recueillies. Les travaux de lin- iérieur sont plus compliqués : les abeilles commencent par bou- cher avec du propolis toutes les fentes de leur habitation et n’y laissent qu’uneseule ouverture, dont les dimensions sont peu con- sidérables ; elles s'occupent ensuite de la construction des rayons Ou gâteaux, destinés à servir de nid pour les petits et de maga- sins pour les provisions de la communauté. Ces gâteaux sont faits avec de la vire , matière qui se trouve sur diverses plantes, et qui est sécrétée aussi par les abeilles dans des organes parti- culiers , situés sous les anneaux de leur abdomen. Ils sont composés de deux plans de cellules (ou alveoles) hexagones, à base pyramidale , adossés l’un à l’autre , et sont suspendus, perpendiculairement par une de leurs tranches. En général, c’est à la voùte de la ruehe qw’ils sont fixés , et ils sont toujours rangés paralièlement , de manière à laissér entre eux des espaces vides, dans lesquels les abeilles peuvent circuler. Les cellules, comme on le voit, sont par conséquent disposées horizontalement et ouvertes parun de leurs bouts. C’est avec leurs mandibules que les ouvrières les façonnent : elles en iaiilent les pans pièce à pièce , et elles portent dans leur con- struction une précision étonnante. La plupart de ces loges ont exactement les mêmes dimensions et servent à loger les larves ordinaires ou deviennent des magasins ; mais quelques-unes, des- linées à conienir des larves de femelles et appelées pour cétte raison des cellules royales , sont beaucoup plus grandes et de forme presque cylindrique.Quand les abeilles ont fait une récolte abondante de pollen ou de miel , elles déposent leur superflu dans quelques-unes des cellules ordinaires , pour subvenir soit à leur consommation journalière, soit à leurs besoins futurs. Elles ont aussi la précaution de boucher, avec un couvercle en cire, les cellules contenant leur réserve de miel , et, si queique accident vient menacer de miner leurs constructions , eiles savent aussi élever des colonnes et des arcs-boutans, pour empêcher la chute de leurs gâteaux. Les mèles , comme nous l'avons déjà dit ,ne participent pas à ces travaux , et lorsqu'ils ne sont plus d'aucune utilité à la communauté, les ouvrières les mettent à mort, en les perçant de leurs aiguillons. C’est du mois de juin à celui d'août que ce carnage a lieu, et il s'étend même sur les larves et les nymphes de frelons. La femelle reste également étrangère à la vie active menée par les ouvrières; mais , comme C’esi de sa fécondité que INSECTES HYMENOPYTEÈRES. 917 dépend la prospérité de l’essaim , elle est toujours choyée par celles-e1. Nés qu’elle commence à pondre des œufs , eile devient pour toute la colonie un objet de respect , et elle ne souffre dans sa demeure aucune rivale; si elle en rencontre , un com- bat à mort s'engage aussitôt , et une seule reine se voit toujours dans chaque essaim , quelle que soit la multitude d'individus dont celui-ci se compose. Tant qu’elles sont restées renfermées dans intérieur de leur habitation , la jeune reine ne pond pas d'œufs; mais, si le temps est beau , elle en sort peu de jours après sa naissance, et s'élève avec les frelons à perte de vue dans Fair ; cependant elle ne tarde pas à rentrer, et , quarante-six heures après , elle commence à pondre des œufs, qu’elle dépose un à un dans les cellules préparées à cet usage. Pendant le premier été, cette ponte n’est pas Lrès nombreuse et ne se compose que des œufs d’ouvrières; pendant lhiver, elle s'arrête ; mais, dès que le retour du printemps se fait sentir, la fécondité de la mère- abeille devient extrème : dans l’espace d’environ trois semaines eile pond en général plus de douze mille œufs. C’est seulement vers le onzième mois de son existence qu’elle commence à aonner des œufs de frelons en mème temps que des œufs d’ouvrières , et ceux d’où naïtront des femelles ne viennent qu'un peu plus tard. Trois ou quaire jours après la ponte, les œufs éclosent , et il en sort une petite larve de couleur blanchâtre, qui, étant privée de patles, ne peut sortir de son nid et chercher sa nourriture; mais les ouvrières pour- voient abondamment à ses besoins, en lui présentant une sorte de bouillie, dont les qualités varient suivant l’âge et le sexe de l'individu à qui elle est destinée , et , lorsque le moment de sa transformation en nymphe approche, elies la renferment dans sa loge , en adaptant à celle-ci un couvercle en cire. Cinq jours après la naissance d’une larve d’ouvrière , ses nourrices ferment ainsi sa cellule. Elle file alors autour de son corps une coque de soie , et, au bout de trois jours , se change en nymphe; enfin , après être restée sous cette forme pendant sept jours et demi , elle subit sa dernière métamorphose. Les mâles n’arrivent à l’état parfait que le vingt-et-unième jour de la naissance &e la larve , tandis que les femelles subissent leur dernière trans- formation le treizième jour. L'influence qu'exerce sur le développement des abeilles la : nalure des alimens dont les ouvrières nourrissent les larves est des plus remarquables ; car, en variant la bouillie qu’elles donnent à leurs élèves, ces singulières nourrices produisent à volonté des ouvrières, ou des reines. Cela se voit d’une ma- mère évidente lorsqu'un essaim a perdu sa reine, et qu’il 918 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. n'existe pas dans les rayons de la ruche de cellule royale con- tenant une larve de femelle; alors les abeilles se hâtent de démolir plusieurs cellules d’ouvrières, pour y donner la forme d’une cellule royale, et fournissent en abondance à la larve qu’elles y laissent, la päture dont elles alimentent les fe- melles ; or, par ce seul fait, la larve, au lieu de devenir une abeille ouvrière, comme cela serait arrivé si elle avait con- tinué à être élevée de la manière ordinaire, devient une abeille-reine. Quand une jeune reine a achevé ses métamorphoses et rongé les bords du couvercle de sa cellule, pour sortir de son nid, on voit se manifester dans toute la colonie une grande agi- tation. D’un côté, les ouvrières bouchent avec de nouvelles quantités de cire les ouvertures qu’elle pratique, et la re- tiennent prisonnière dans sa loge; d’un autre côté, la vieille reine cherche à s’en approcher, pour la percer de son aiguillon et se défaire ainsi d’une rivale dangereuse ; mais des phalanges d’ouvrières s’interposent, pour l’en empêcher. Au milieu du tumulte qui résulte de tout ce manège, la vieille reine sort de la ruche avec toute l’apparence de la colère, et suivie dune grande partie de la société d’ouvrières et de mâles, dont elle était le chef unique. Les jeunes abeilles , trop faibles pour émigrer de la sorte , restent dans la ruche , et bientôt leur nombre augmente par la sortie de celles qui étaient encore à l’état de larve ou de nymphe ; les jeunes reines se dégagent aussi de leurs cellules pendant ce tumulte. S'il y en a plusieurs, elles se battent entre elles, et celle qui, après le combat, se trouve seule, devient la souveraine de la nouvelle société. L’essaim qui a abandonné de la sorte sa demeure avec la vieille reine ne se dis: perse pas , mais va à quelque distance se suspendre en groupe et fonder une nouvelle colonie qui recommence tous les travaux dont nous venons de parler, et qui à son tour, fournit au bout d’un certain temps un second essaim dont la sortie est déter- minée par les mêmes causes que nous ayons vu OCCasioner lémigration du premier. Une ruche donne quelquefois trois ou quatre essaims par saison; mais les derniers sont toujours faibles. La mort de l’abeille-reine, la faiblesse d’une colonie et les attaques de ses ennemis déterminent quelquefois les abeilles à se disperser ; les fugitives vont alors chercher asile dans une ruche plus fortunée ; mais elles en sont impitoyablement re- poussées à coup d’aiguillon par les propriétaires de la demeure qu’elles voudraient partager ; car aucune abeille étrangère, même isolée, n’est reçue dans une ruche où elle n’est pas née. Quelquefois aussi toute une colonie en altaque une autre INSECTES LÉPIDOPTÈRES. 919 pour en piller les magasins, et , si les agresseurs ont le dessus, ils détruisént complètement la population vaincue et enlè- vent tout le miel de leurs victimes , pour le déposer dans leur ruche. Les abeilles ont aussi à redouter plusieurs insectes qui leur nuisent beaucoup, soit en dévorant leur miel ou la cire de leurs rayons , soit en les attaquant directement. Les entomologistes donnent le nom de BOURDON à un genre voisin de celui des abeilles , mais qui s’en distingue par plu- sieurs caractères , tels que l'existence de deux épines à l’extré- mité des jambes postérieures. Ces insectes ont aussi le corps plus gros et plus arrondi ; ils vivent réunis en société d’une cin- quantaine d'individus ou davantage , dans des habitations souterraines , revêtues de cire et garnies de mousse bien car- dée ; mais ces sociétés ne sont que temporaires et se dispersent en automne. Les ouvrières , les mâles et les vieilles femelles ne tardent pas à périr par l’action du froid ; mais les jeunes fe- melles qui sont déjà destinées à donner des œufs le printemps prochain se cachent dans quelque trou de mur ou même dans la terre et y passent l’hiver dans un état de sommeil léthargique. ORDRE DES LÉPIDOPTÉÈRES. Fig. 432. VANESSE PAON DE JOUR. L'ordre &es lépidoptières se compose d’un grand nombre d'insectes dont les ailes, couvertes d’une espèce de poussière Bourdons. Caractères. g2ù ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. colorée , semblent être peintes de la manière la plus brillante et la plus variée. On y range tous les papillons. Ces animaux , comme nous l'avons déjà dit, sont conformés pour se nourrir exclusivement de matières liquides, qu’ils pompent au fond des fleurs. Leur bouche est armée d’une a t longue trompe (b), roulée en spirale et com- posée de deux filets creusés en gouttière à leur partie interne , qui ne sont autre chose que les mächoires excessivement allongées et modifiées dans leur forme. A la base de cette trompe , on distingue en avant une petite pièce membraneuse, qui est le repré- sentant du labre , et, de chaque côté, un petit tubercule, dernier vestige des man- dibules. On y aperçoit aussi des rudimens de palpes maxillaires , et en arrièrese trouve = ee une petite lèvre triangulaire portant deux ëg- 483. (1) balpes labiaux très grands, composés de irois articies et presque toujours velus ou garnis d’écailles (p). Le thorax des lépidoptères est moins distinctement divisé que chez la plupart des insectes , et la première paire de pattes est souvent pelile , relevée contre le corps et cachée sous les poils. On compie toujours cinq articles aux tarses et on trouve souvent à l’extrémité du dernier un petit appareil assez com- pliqué , qui remplit les fonctions d’une ventouse et sert à Pani- mal pour se fixer aux corps sur lesquels il se pose. Les ailes sont au nombre de quatre et sont simplement veinées. L'espèce de poussière farineuse qui les couvre se compose d’une multitude d’écailles d’une petitesse extrême, fixées par un pédicule et présentant des formes très variées suivant les espèces et aussi suivant Îes parties où on les observe. À la base de chacune des ailes supérieures, on voit une petite pièce qui ressemble à une épaulette. Enfin l'abdomen se compose de six ou sept anneaux et ne présente ni tarière ni aiguillon ; mais, chez le mâle, il se termine par une sorte de pince aplatie. Les lépidopières subissent des métamorphoses complèles. (x; Tète d'un papillon. — #, tête; — 0, œil; —4a, base de l'antenne ; — &, bouche en forme de trompe; — p, palpe. INSECTES LÉPIDOPTÈRES. 921 C'est ordinairement sur des feuilles ou sur quelque autre partie des végétaux propre à servir &’aliment aux jeunes, que la femelle dépose ses œufs. Les larves sont connues sous le nom de chenilles (fig.434). Leur corps est en général al- longé, presque cylindrique, mou , diversement coloré et Fig. 434. CHENILLE divisé en treize segmens. On y distingue de chaque côté neuf stigmaies , et tantôt il est ras, tantôt hérissé de poils, de tubercules ou d’épines. Les trois premiers anneaux qui suivent la tête portent chacun ure paire de pieds écailleux ou à crochets, et plus en arrière on compte de quatre à dix pieds membraneux , dont les derniers s’insèrent à l'extrémité pos- térieure du corps près de l’anus. A l'extrémité de ces pieds membraneux il exisie souvent une couronse de petits cro- chets, et, pour que cette armature ne gêne pas l’animal pendant sa marche, le bout du membre se contracte alors de manière que les crochets se trouvent à plat avec la pointe en dedans. La tête de ces larves est revètue d’une peau plus ou moins cornée, et présente de chaque côté six petits yeux lisses. On y distingue aussi des antennes très courtes et coniques. Enfin leur bouche est conformée pour la mastication et armée de fortes mandibules , de deux mâchoires, d’une lèvre infé- rieure et de quatre palpes. La plupart des chenilles vivent sur les végétaux , doni elles dévorent les feuilles. Quelques-unes rongent les fleurs, les grains, les racines, même la partie ligneuse la plus dure des arbres, et il en est d’autres encore qui attaquent les matières animales, telles que la laine , les peile- ieries , le cuir, le lard , etc. Plusieurs vivent d’alimens plus ou moins divers ; mais il en est qui ne veulent que d’une seule espèce de nourriture et ne se voient que sur une seule plante. Leurs mœurs sont très variées. Guelques-unes de ces larves se logent dans l'épaisseur des feuilles où elles se creusent des gale- ries; d’autres se fabriquent des fourreauxsoitfixes, soit portatifs, et il en est qui se réunissent en société sous une tente de soie qu'elles filent en commun, pour leur servir d’abri. La plupart recherchent la lumière ; mais il en est aussi qui ne sortent de leur retraite que la nuit. Ordinairement elles changent de peau quatre fois avant de passer à l’état de nymphe, et, lorsqu'elles se préparent à subir cetie métamorphose, la plupart filent une coque et s’y renferment. La matière soyeuse qu’elles emploient à cet usage se forme dans des organes particuliers assez apa- logues aux glandes salivaires , dont le conduit excréteur aboutit Famille des lépidoptères diurues. 922 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. à un mamelon conique, situé au bout de la lèvre. D’autres chenilles se contentent de lier avec quelques fils de soie des feuilles ou des fragmens d’autres substances solides et de s’en former une enveloppe grossière ; enfin il en est aussi un grand nombre qui restent à nu et se suspendent par leur extrémité posté- rieure ou par un fil de soie passé autour de leur corps. Les nymphes ou chrysalides sont toujours emmaillotees ou en forme de momie, c’est-à-dire que tout leur corps est enve- loppé d’une membrane assez dure sous la- quelle les parties extérieures de l’insecte futur se distinguent néanmoins. Leurs mé- tamorphoses s’achèvent en général assez promptement , et celles qui sont renfermées dans une coque soyeuse évacuent pour la plupart, au moment d’arriver à l’état par- fait, un liquide particulier propre à ramollir le tissu de leur enveloppe et à faciliter leur sortie. Fig. 433. L'ordre des lépidoptères se divise en trois familles , également distinctes par les mœurs et par la conformation , savoir : les DIURNES , reconnaissables à leurs ailes élevées perpendiculaire- ment dans le repos ; les CRÉPUSCULAIRES , dont les ailes sont horizontales pendant le repos et les antennes en massue allon- gée ; et les NOGTURNES , dont les ailes sont également horizon- tales ou penchées , et dont les antennes sont sétacées ou di- minuent de grosseur de la base à la pointe. Les LEPIDOPTERES DIURNES sont les plus remarquables par la vivacité des couleurs dont leurs ailes sont peintes en dessous comme en dessus : ils n’ont pas, comme presque tous les lépidoptères de deux familles suivantes, une sorte de frein fixé au bord extérieur des ailes de la seconde paire et servant à retenir celles de la première paire dans une position verticale pendant le repos: aussi ces organes s’élèvent-ils alors perpen- diculairement , et en général les inférieures prennent la même position. Il est également à noter qu’en général les antennes des papillons de jour se terminent par un bouton ou une pelite massue , ou sont d’égale grosseur partout. Quelquefois ces appendices sont au contraire plus grèles vers le bout , et se INSECTES LÉPIDOPTÈRES. 923 terminent en une pointe crochue. Leurs chenilles ont toujours seize pattes, et leurs chrysalides sont presque toujours de forme angulaire , et, au lieu de se ren- fermer dans une coque , restent en génerai, à nu , et fixés, par lextrémité posté- rieure du corps. Ainsi que leur nom lindique , les lépidoptères diurnes ne vo- lent que pendant le jour. Fig. 436. On peut diviser cette famille en trois sections, d’après la manière dont les jeunes subissent leurs métamorphoses. Chez les uns, la chrysalide est attachée par la queue et par un lien transversal en forme de ceinture ; chez d’autres , elle est sus- pendue par la queue seulement ; et, chez d’autres encore , elle est renfermée dans une coque. Les lépidoptères diurnes, qui, à l’état de chrysalide, sont fixés par une ceinture aussi bien que par la queue, ont été désignés sous le nom commun de sUCCEINTS , et subdivisés en plusieurs tribus, parmi lesquelles nous citerons les Papillo- nides et les Piérides. Les PAPILLONIDES ont six pattes semblables dans les deux sexes, les ailes larges , à nervures saillantes , le bord inférieur de celles de la seconde paire concave ou replié , la tête assez grosse et l'abdomen libre (#g. 436); enfin leurs chenilles sont allongées , cylindriques et munies d’un ou deux tubercules rétractiles, placés sur le premier anneau du tronc. On range dans ce groupe les Papillons proprement dits, les Thais, les Parnassiens , etc. Les PAPILLONS PROPREMENT DITS ont les ailes larges ; celles de la seconde paire se prolongent souvent en une espèce de queue ; la massue des antennes est arquée de bas en haut; les palpes 60 Diurnes suc- ceints Tribu des papillons. Papiilons propremert dits. Thais. Parnassicns. HE ZOGLOGIE DESCRIPTIVE. sont très courts et ne dépassent pas les yeux. Leurs chenilles ont la peau nue, et, dans les momens d'inquiétude, font sortir de la partie supérieure @u cou une corne molle et fourchue , en général ces larves vivent solitaires, et elles répandentsouvent une odeur pénétrante et désagréable. Ce genre est extrémement nombreux en espèces, qui, pour !la plupart, sont remar- quabies par leur taille et la variété de leur coloris : celles qui ont des taches rouges à la poitrine ont été désignées par quelques naturalistes sous le nom de chevaliers troyens , et celles qui n’en offrent pas ont été appelées auelquefois chevaliers grecs ; mais ces distinctions sont sans importance. L'espèce la plus connue en France est le papéllon machaon Où à queue de fenouil, dont les ailes sont jaunes, avec des taches et des raies noires; celles de la seconde paire se prolongent en queue, et présentent près du bord posiérieur une série de taches bleues et à l’angle interne une tache rouge en forme d'œil, surmontée d’un } 1e. FER des Tipules, compo- EE _ _—, —, sent cette famille et se MS distinguententre elles x par la forme de la Æ \ trompe. mi ET bi . Les cousins, dont gs 4 le corps et les pieds sont allongés et les | antennes garnies de / \ longs poils, ont une \ trompe longue, fili- à forme, cornée et ren- \ fermant un sucoir pi- } k quant, composé de cinq soies. Ces insec— tes fuient la lumière vive du soleil et se plaisent surtout dans les lieux aquatiques ; le soir ils voltigent en troupes nombreuses et s’annoncent par un bourdonnement aigu. Chacun sait combien ils sont avides de notre sang. Pour s’en repaître, ils nous percent la peau avec les soies fines et dentelées de leur suçoir, et ils laissent dans la piqüre, ainsi produite , une liqueur vénéneuse , qui y détermine une irrita- tion vive et une enflure souvent considérable.On a observé que ce sont les femelles seules qui nous tourmentent de la sorte, et c’est dans les pays chauds surtout que leurs attaques sont à redouter. On les y désigne sous le nom de moustiques. Du reste, ces insectes ne vivent pas seulement de sang : ils aiment aussi le suc des fleurs. La femelle dépose ses œufs sur l’eau et les réunitentre eux de manière à former une espèce de petit radeau qui flotte à la surface du liquide. Les larves (fig. 461) sont aqua- tiques et fourmillent dans les eaux stagnantes au printemps et en été. Leur abdomen est allongé et terminé par des soies et des appendices disposés en rayons. Son pénultième segment Fig. 450. COUSIN (grossi). Cousins. 952 ZOOLGGIE DESCRIPTIVE. porte sur le dos un tube assez long (#), à laide duquet l'animal puise dans l’atmosphère Pair dont il a besoin. Pour respirer ainsi , il se pend en quelque sorte à ia surface de l’eau la tête en bas, et on le voit à de courts intervalles renouveler ce manège. La nymphe continue Na à vivre dans l’eau et à s’y mouvoir; mais, au AE lieu de respirer commela larve, ellepuisePair PÂTE dont elle a besoin au moyen de deux tuyaux 0 placés sur le thorax. Elle flotte à la surface AE du liquide, et , après avoir achevé sa méta- ALT morphose, l’insecte parfait se sert de sa dé- 2 pouille de nymphe comme d’un bateau , jus- FR _ qu’à ce que ses jambes et ses ailes aient acquis TASS assez de solidité pour lui permettre de mar- Fat cher sur la surface de Peau ou de s’envoler ; 4 car si son Corps venait à être submergé, Fig. 451. comme cela arrive souvent quand le vent renverse ces frèles embarcations, ilse noierait infailliblement. Toutes ces métamorphoses se font dans l’espace de trois à quatre semaines : aussi les générations se renouvellent- elles plusieurs fois dans la même année. Une espèce du genre des COUSINS PROPREMENT DITS, de couleur cendrée, avec lab- domen annelé de brun et les ailes sans taches , est très com- mune dans toute l'Europe. Triba des Dans la TRIBU DES TIPULES , la trompe est tantôt très courte tipules. et terminée par deux grandes lèvres , tantôt en forme de bec, mais alors perpendiculaire ou courbée sur la poitrine. Plusieurs de ces insectes , lorsqu'ils sont à l’état de larve et de nymphe, vivent dans l’eau comme les cousins ; d’autres habitent dans les galles végétales , et il en est aussi qui se tiennent dans les végétaux pourris , dans le terreau ou dans les bouses. On con- nait un très grand nombre de ces insectes et on les a divisés en une multitude de genres; mais les limites de ces leçons ne nous permettent pas d’en faire l'histoire détaillée, et nous nous bornerons à ajouter que certaines tipules présentent une anomalie remarquable ; car elles manquent d'ailes. Famille des Dans les familles suivantes , les antennes sont très courtes fanystomes. et présentent souvent, soit sur le côté , soit à leur extrémité, une soie plus ou moins grosse et divisée à sa base en plusieurs petits articles. Dans la division des TANYSTOMES, le dernier article de INSECTES DIPTÈRES. 953 ces appendices (en ne comptant pas la soie stylitorme, dont 1 vient d’être question) n’esi pas annelé transversalement, et le suçoir est composé de / quatre pièces. La plu- part de ces insectes vi- veni de rapine; d’autres se nourrissent du suc des fleurs. A l’état de larve , ils ressemblent à des versallongéset pre - que cylindriques, à tête écailleuse , et vivent pour la plupart dans la terre. Pour subir leur se- conde transformation , ils changent de peau, et la nymphe, qui est nue, offre plusieurs des parties extérieures de l’insecte par- fait. On range dans cette famille Les Asiles, les Empis, les Bom- byles, les Anthrax, les Leptis et plusieurs autres groupes qui, à leur tour, se subdivisent en genres assez nombreux. Fig. 452. BOMBYLE PEINT. Les ASsIiLEs ont la trompe saillante, dirigée en avant et de consistance presque cornée, lecorps allongé et les ailes couchées. Ils volent en bourdonnant et sonttrès carnassiers ; suivant leur taille , ils s'emparent des mouches, des tipules, des bourdons ou des coléoptères , dont ils sucent les humeurs. L’ASILE FRÉ- LON, long d’environ un pouce et de couleur jaune avec les trois premiers anneaux de l'abdomen noir, et les ailes roussâtres, est commun vers la fin de l’été dans les lieux sablonneux. Les EMpIS ressemblent beaucoup aux précédens, mais leur trompe est perpendiculaire ou dirigée en arrière ( fig. 449 ) ; ils sont de petite taille, et vivent de proie ou du suc des fleurs. Les BOMBYLES (fig. 452) ont la trompe dirigée en avant comme les asiles , mais leurs ailes sont étendues horizontalement de chaque côté du corps, leur thorax est comme bossu , et leur ab- domen est triangulaire ou conique. Ces diptères volent avec une grande rapidité en planant au-dessus des fleurs dontils pompent le miel sans s’y poser, et font entendre un bourdonnement aigu. On en connait dont la trompe est plus longue que le corps. Ailes, Empis. Bombyles. Lejtis. Dolichops. Famille des tabaniens, Taons 954 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. Les ANTHRAx diffèrent peu des bombyles , mais leur corps est déprimé et leur trompe est généralement courte ; la plupart de ces insectes sont velus , et on les voit se poser souvent à terre ou sur les murs exposés au soleil ; du reste leurs habitudes sont très analogues à celles des précédens. Les LEPTIs ont les ailes écartées et la trompe membraneuse, à tige ordinairement très courte , et terminée par deux lèvres bien distinctes. La larve d’un de ces diptères creuse dans le sa- ble un entonnoir , au fond duquel elle se cache jusqu’à ce qu’un petit insecte y tombe: alors elle s’en saisit , le perce avec les crochets dont sa bouche est armée, le suce et rejette au-de- hors le cadavre en courbant son corps et en le redressant en- suite brusquement comme un ressort. Cette espèce appartient au genre des Leptis proprement dites, et a recu le nom de ver- lion. Enfin les poLicHoPps ressemblent aux précédens par leur trompe , mais leurs ailes sont couchées sur le corps, la tête est triangulaire et l'abdomen courbe en dessous ; plusieurs sont re- marquables par leurs couleurs vertes ou cuivreuses ; les uns se tiennent sur les murs ou les feuilles, d’autres courent avec célérité sur la surface des eaux. On range dans cette tribu les SCÉNOPTINES qui n’ont pas de soie au dernier article des anten- nes et dont une espèce ayant la tête et le thorax d’un brun ob- scur , Pabdomen noir, strié transversalement et les pieds fer- més , est très commune sur les vitres de nos fenêtres. La FAMILLE DES TABANIENS a pour caractères une trompe saillante terminée ordinairement par deux lèvres pourvues de palpes avancés ét armés d’un sucoir composé de six pièces ; le dernier article des antennes annelé, etc. Elle se compose d’un certain nombre de diptères qui ressemblent à de grosses mou- ches et qui ont en général le corps velu, les ailes étendues ho- rizontalement de chaque côté du corps et l’abdomen triangu- laire. Ces insectes commencent à paraitre vers la fin du prin- temps et tourmentent extrêmement les chevaux et les bœufs, dont ils percent la peau pour sucer le sang; ils poursuivent aussi l’homme et sont très communs dans les bois et les pâtura- ges. On les désigne souvent sous le nom collectif de Taows, INSECTES DIPTÈRES. 955 mais les no réservent ce nom à un des petits genres dont la famille se compose. L’espèce appelée taon des bœufs est très commune dans nos environs ; son corps est brun avec des lignes jaunes sur lPabdomen et ses yeux verts; sa larve vit dans la terre. Une autre appelée ckrysops aveuylant, dont le corps est jaunâtre, rayé ou tacheté de noir, l'abdomen jaunâtre et les yeux dorés, tourmente beaucoup nos chevaux. La FAMILLE DES NOTACANTHES ressemble à la précédente par la conformation des antennes ; maïs ici le suçoir n’est formé que de quatre pièces, et la trompe , dont la tige est en général très courte, est presque entièrement retirée dans la cavité buccale.On partage ce groupe en trois seclions, savoir : les Mydas, les Xylophages, et les Stratiomes. Les mypaAs ont le corps oblong avec l’abdomen conique, les ailes écartées, et les antennes divisées en cinq pièces, dont tantôt les deux dernières forment une massue , tantôt les trois dernières sont réunies en un grand article presque cylindri- que. Les xYLOPHAGES ont lesantennes composées de irois pièces dont la dernière en forme de massue, de gland , ou de cône , est divisée en huit anneaux; leurs ailes sont ordinairement cou- chées sur le corps et leurs larves vivent dans les parties cariées ou humides des arbres. Les STRATIOMES ont presque ioujours une soie ou un stylet aux antennes dont le troisième article est terminal et divisé en cinq à six anneaux; enfin les ailes sont presque ioujours couchées l’une sur l’autre. Les larves de plusieurs de ces insectes vivent dans l’eau et ont des habitudes analogues à celles des larves de cousins. Celles de quelques autres (de la sargue cuivreuse, par exemple) vivent dans les bouses de vaches. La FAMILLE DES ATHÉRICERES , beaucoup plus nombreuse que les précédentes, comprend tous les diptères dont la trempe, ordinairement membraneuse , longue et coudée est entière- ment renfermée dans la cavité orale , ou bien est saillante et ne renferme que deux pièces composant le sucoir et dont les antennes composées seulement de deux ou de trois articles, dont le dernier n'offre jamais de divisions annulaires et porte toujours une soie ou un stylet{a, fig. 453). Le sucoir ne présente 62 Famille des notacanthes. Mydas. X slophages. Stratiomes. Famille des athéricères. Tribu des syphrides, Volucelles. Syrphies. 056 ZOCLOGIE DESCRIPTIVE. jamais plus de quatre soies ; et la trompe se termine ocrdinaire- ment par deux lèvres. Peu de ces insectes sont carnassiers à l’état parfait; la plupart se tiennent sur les fieurs , sur les feuilles ou sur les excrémens, mais souvent ils piquent ULPŸ t la peau des animaux pour y déposer leurs 1% œufs. Leurs larves ont le corps mou, con- tr T tractile ,annelé, et plus ou moins fusiforme ; elles ne muent pas et leur peau, en se soli- Fig. 453. (1) difiant, constitue pour la nymphe une sorte de coque ovoïde , ou sphérique; le corps de l'insecite se détache peu-à-peu de cette enveloppe et prend la forme d’une boule allongée et molle qui passe bientôt à l’état de nymphe; parvenu à l’état parfait, l'animal sort en faisant sauter avec sa tête la partie antérieure de sa coque en forme de calotte. Les athéricères , dont le suçoir est formé de quatre pièces, constituent la TRIBU DES SYPHRIDES ; leur trompe est toujours longue et coudée près de sa base; leur tête est hémisphérique et occupée en grande partie par les yeux ; et, par leur forme gé- nérale , plusieurs de ces insectes ressemblent beaucoup à des bourdons ou à des guëpes. Cette ressemblance avec les bour- dons est surtout remarquable chez les VOLUCELLES et quelques autres genres voisins , et semble leur avoir été donnée pour leur faciliter l’entrée dans les nids de ces hyménoptères,où ils doivent en effet pénéirer pour déposer leurs œufs, car c’est dans ces habitations qu'ils vivent lors- qu'ils sont à l’état de larve. D’au- Fig. 454. VOLUCELLE. tres syphrides , dont on a formé le genre HÉLOPHILE , méritent aussi de nous arrêter un instant à cause de la forme singulière des larves de plusieurs d’entre eux. Dans ce premier état, ils vivent dans deseaux ou dans des matières à demi fluides , et leur corps se termine par une longue queue dont lextrémité perforée arrive à la surface du liquide quand ils ont besoin de respirer ; ces larves sont connues sous le nom vulgaire de vers à queue de rat, et se voient dans les lairines , les égouts et les eaux bourbeuses. Les SYRPHES PROPREMENT purs vivent sur les plantes ; leurs larves se nourrissent uni- (1) Tête d’un syrphe : — 4 antennes; — /tète; — /r trompe. INSECTES DIPTÈRES. 957 quement de pucerons, et se fixent aux feuilles ou à quelque autre corps pour se transformer en nymphe. Les autres Athéricères , dont le suçoir ne se compose que de deux soies, se divisent en trois tribus, les OEstres, les Conops et les Mouches. Les OESTRES ressemblent à de grosses mouches très velues et OE:tres. sont Caractérisés par la conformation de la bouche qui n’offre que trois tubercules, ou seulement de faibles vestiges de la trompe et des palpes; leurs ailes sont ordinairement écartées et leurs antennes très > courtes et terminées F par une palette arron- die munie d’une soie. Ces insectes sont pour le bœuf, le cheval, l4- ne, le mouton, le cha- meau,lerenneet quel- ques autres mammife- resdesennemisredou- tables, car ils déposent leurs œufs dans le corps de ces animaux et leur occasionent ainsi des tourmens très grands. Chaque es- pèce d’æstre s'attache à un animal particulier, et loge sa progéni- ture dans unepartie déterminée du corps. Les uns percent la peau de leurs victimes à l’aiäe d’une tarière écailleuse , et introdui- sent au fond de la plaie leurs œufs , dont la présence détermine la formation de tumeurs plus ou moins grosses, remplies d’hu- meurs purulentes , qui servent d’aliment à la jarve, à laquelle les habitans de la campagne donnent le nom de taons : dauires déposent simplement leurs œufs dans le voisinage de lune des ouvertures naturelles du corps, et les larves quien naissent pé- nètrent par cette voie , soit dans les fosses nasales ou les sinus du nez, soit dass l’intérieur de Pestomac. Le corps de ces larves parasites est en zénéral conique et composé de onze anneaux garnis de tubercules ou de petites épines ; elles mont pas de pattes, et leur bouche est tantôt garnie de mamelons , tantôt armée de deux foris crochets ; quand eiles ont terminé leur croissance elles sortent de leur demeure; celles qui ont vécu dans l’estomac , descendent dans l'intestin avec les matiè- res excrémenticielies et s’échappent par l'anus; elles se laissent alors tomber à terre et se transforment en nymphe sous leur 62. Fig. 455. OESTRE. Tribu des conops. Tribu des mouches. 958 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. peau conune les autres diptères de cette famille. L’æstre du mou- ton qui est long de cinq lignes, avec le thorax grisätre et labdo- men jaunâtre tacheté de noir ou de brun , place ses œufs sur le bord interne des narines de ce quadrupède qui cherche à l’en empêcher en s’agitant et en se cachant le museau en terre; les larves remontent jusque dans les sinus du front où elles se fixent à l’aide des crochets dont leur bouche est armée, et y res- tent depuis le mois de mai ou de juillet, jusqu’au mois d’avril de l’année suivante ; ces parasites sont très communs surtout dans les pays montagneux et boisés, et lorsqu’il s’en trouve plu- sieurs dans les sinus d’un mouton, leur présence occasionne sou- vent des vertiges. Les larves de l’æstre du cheval, de l’œstre hémor- rhoïdalet de Væstre veterinaire vivent dans l'estomac des chevaux. L’æstre des bœufs, qui a le thorax jaune avec une bande noireet VPabäomen blanc à la base, fauve à son extrémité, dépose au contraire ses œufs un à un sous la peau des bœufs, des che- vaux et de plusieurs autres quadrupèdes. Il existe en Amérique une autre espèce qui s’attaque dela même manière aux Indiens, dont on voit quelquefois le ventre couvert de petites tumeurs produites par les larves de cet insecte. Les athéricères de la TRIBU DES conops sont les seuls de cette famille dont la trompe soit toujours saillante et en forme de syphon, soit cylindrique ou conique , soit sétacé. La plupart de ces insectes se tien- nent sur les fleurs. Le stomoxe piquant qui ap- partient à cette division et qui est souvent con- fondu avec la mouche commune, est un des insectes les plus incom- modes par les piqüres qu’il nous fait; c’est sur- tout en automne qu'il nous tourmente ainsi, Fig. 456. CONOPS. et il s’atiaque de préfé- rence à nos jambes, mais n’épargne pas non plus les chevaux et les bœufs. Dans la rrigu pes MoucHeEs la trompe est très apparente , INSECTES DIPTÈRES. 959 membraneuse, presque toujours garnie de deux palpes , com- plètemént rétractile et armée d’un suçoir formé de deux pièces, et les antennes sont en palette avec une soie latérale. Ce groupe a été subdivisé par les entomologistes en neuf sections com- posées chacune de plusieurs genres. Dans toutes ces divisions à l’exception de la dernière, les antennes s’insèrent près du front, les palpes sont portés sur la trompe et se retirent avec elle dans la cavité buccale, et les ailes présentent des nervures trans- versales. La première section, celle des CRÉOPHILES , est carac- térisée par la grandeur des cuillerons , qui recouvrent presque entièrement les balanciers; les ailes de ces diptères sont presque toujours écartées; chez quelques - uns elles sont vibratiles ; tantôt la soie des antennes est simple, par exemple, chez les ÉCHINOMYES , dont une grosse espèce noire, hérissée de poils, se voit souvent dans les boiïs , bourdonnant au-dessus des fleurs ou des bouses de vaches dans lesquelles sa larve habite; tantôt au contraire , la soie des antennes est plumeuse ; les MOUCHES PROPREMENT DITES présentent Ce caractère et se reconnaissent à leurs yeux contigus et à leur abdomen triangulaire. C’est à ce dernier genre qu'appartiennent la plupart des mouches dont les larves se nourrissent de viande ou de charognes pourries. Les femelles ont l'extrémité de l’abdomen retiré et prolongé en forme de tuyau ou de tarière pour enfoncer leurs œufs dans ces matières où les jeunes achèvent en peu de jours leurs métamorphoses. La mouche à viande (musca vomitoria) dont le thorax est noir, l'abdomen d’un bleu luisant avec des raies noires et le front fauve , dépose aussi ses œufs dans la viande dont elle accélère la putréfaction. La mouche dore, qui est de couleur vert-doré avec les pieds noirs, pond dans les cha- rognes et c’est principalement de sa larve que les pècheurs se servent sous le nom d’usticots pour amorcer leurs lignes ; on les emploie aussi pour nourrir les jeunes faisans et les jeunes din- dons. La mouche domestique vit à l’état de larve dans le fumier; elle a le thorax d’un gris cendré avec quatre raies noires, et Pabdomen d’ur brun noirâtre tacheté de noir. Les SARCOPHAGES, qui diffèrent des mouches proprement dites par les yeux nota- blement écartés l’un de l’autre, présentent quelquefois une particularité physiologique remarquable: chez quelques-uns de ces insectes, les œufs éclosent avant la ponte, de facon que les femelles sont ovo-vivipares. La mouche carnassière , qui a le corps céndré, des raies sur le thorax et des taches carrées noi- res sur l’abdomen et les yeux rouges, dépose ses larves sur la viande, sur les cadavres et quelquefois même sur des plaies du corps de Phomme qui sont exposées à l'air. Section de: créophiles. Echinomyes. Mouches propreirent dites. Sarcopha- Ses. Section des anthomÿzi- des. Section des hydromygoi- des. Section des scatomyzides, Section des dolichocères. Section des leptopodites. Section des carpomyzes. 960 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. La seconde division des mouches se compose des ANTHOMYZ1- DEs qui ontle port des mouches ordinaires , mais qui ont, ainsi que les diptères de toutes les sections suivantes , les cuillerons petits ; leurs ailes sont en général couchées, leur tête est hémi- sphérique et leurs pieds sont de grandeur ordinaire; nous cite- rons comme exemple de ce groupe , lanthomyzie des pluies qui est très Commune dans notre pays et qui est cendrée avec des taches noires sur le thorax et neuf taches triangulaires de même couleur sur lPabdomen. Les HYDROMYGIDES, qui Constiluent un troisième groupe, dif- fèrent des précédens par leur tête presque triangulaire et le museau voûté , les ailes couchées l’une sur Pautre et les pattes fortes avec les cuisses souvent renflées. La plupart vivent dans les lieux aquatiques. La mouche des celliers qui dépose ses œufs dans les vaisseaux renfermant des liqueurs vineuses , prend place dans cette division. Dans la quatrième section, à laquelle on donne le nom de sca- TOMYZIDE , le corps est oblong , les ailes couchées, la tête pres- que sphérique, les antennes insérées au haut du front et pres- que toujours plus courtes que la tête. Tantôt les pattes posté- rieures sont grandes avec les cuisses grosses ou comprimées ; d’autres fois elles re diffèrent que peu ou point des pattes précé- dentes. On peut prendre pour type de ce groupe le scatophage commun (scatophaga stercoraria), mouche très velue, d’un jaune grisâtre avec un point brun sur les ailes, qui est très commune sur les excrémens, à la surface desquels la femelle dépose ses œufs. La section des BOLICHOCÈRES est très voisine de la précédente dent on la distingue par la longueur du second article des an- tennes par quelques autres caractères peu importans. On désigne sous le nom de LEPTOPODITES, une cinquième sec- tion remarquable par la longueur et la ténuité des pattes, sur- iout des postérieures. Les mouches qu’on y range se tiennent sur les plantes; plusieurs fréquentent les lieux aquatiques. La septième section de la grande tribu des mouches a recu INSECTES DIPTPRES. 961 le noin de GARPOMYZES , parce que les larves de plusieurs es- pèces semourrissent de fruits ou de graines dans le germe des- quels les mères avaient déposé leurs œufs. Le port de ces insectes est en général semblable à celui des mouches ordinaires ; mais leurs ailes sont vibratiles , caractère qui n’existe pas dans les groupes précédens; plusieurs ont le corps très allongé et les pattes filiformes telles sontles propsis , appelées aussi mouches a lunettes , parce que leurs yeux sont portés à l'extrémité de deux prolongemens cylindriques dirigés en dehors. Une huitième section, celle des GYMNOMYZIDES , se compose de plusieurs petites mouches, dont le corps est court, ramassé, arqué, d’un noir luisant , la tête comprimée transversalement, les ailes couchées sur le corps et le dépassant postérieurement , et l'abdomen déprimé et souvent terminé par une petite poin- te. Le mosille arque , qui appartient à ce groupe, se trouve souvent en grand nombre sur les vieux murs. Enfin, la neuvième et dernière division, celle des HYPOCÈRES, Section des gymnomyzi- des. Section des diffère de tout le reste de la tribu des mouches par un grand b;pocéres. nombre de caractères : les palpes sont toujours extérieurs , les antennes sont insérées près de la bouche, et les ailes présentent une nervure oblique , de laquelie partent trois autres nervures longitudinales presque parallèles. Le corps de ces insectes est arqué , et leurs pattes fortes et épineuses ; ils forment le genre PHORE. La FAMILLE DES PUPIPARES se compose d'un petit Famille des nombre d'insectes aussi singuliers par leur organisation que pupipares. par leurs mœurs. Ils vivent en parasites sur les corps des mam- mifères et des oiseaux, en s’y cramponnant a moyen des ongles robustes et dentelées dont leurs tarses sont armés. Leur bouche n’est pas conformée comme celle des autres dip- tères ; la trompe qui d'ordinaire sert de gaine au sucoir, wexiste plus ici, mais est remplacée par deux lames coriaces et velues et le sucçoir ne se compose que de deux soies. Leur tête parait divisée en deux parties, dont la postérieure porte les yeux , et l’antérieure la bouche et les antennes qui ont ian- tôt la forme d’un tubercule garni de trois soies , tar {ôt celle d’une petite lame veiue. Leur corps est large et aplati ; leurs alies sont écartées et , dans quelques genres , manquent tout-à- 962 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. fait; enfin l’abdomen , au lieu d’être recouvert d’arceaux écail- leux comme dans les insectes ordinaires, est revêtu d’une peau très extensible. Mais le point le plus curieux de l’histoire de ces animaux , est la manière dont ils naissent ; les œufs au lieu d’é- tre pondus directement, restent dans une poche membraneuse et y éclosent ; les larves elles-mêmes demeurent aussi renfer- mées dans le ventre de la mère, s’y nourrissent et n’en sortent qu'après leur transformation en nymphe ; elles ressemblent alors à des œufs mous et bleus qui seraient presque aussi gros que J’abdomen de leur mère et qui se durcissent, deviennent noirs Hippobos- ques. Nyctéribie. Caractères, et n’offrent pas de stries transversales comme la coque des autres dipières ; à l’une des extrémités de cette enveloppe se trouve une sorle de couvercle qui se détache lorsque linsecte a terminé sa métamorphose et lui permet desortir de sa loge. Les uns ont la tête bien disiincte et articulée avec l’extrémité antérieure du thorax ; ils forment la TRIBU DES HIPPOBOSQUES. Une espèce à antennes “tuber culeuses , à ailes grandes et à corps brun nué de jaunâtre, se tient sur les chevaux et les bœufs, ordinairement sous la queue. D’autres diptères de cette tribu, qui sont également ailés, vivent sur les oiseaux , et on en con- nait qui sont privés d’ailes et se tiennent cachés sous la laine des moutons. Enfin d’autres pupipares ont la tête presque confondue avec y le thorax, et manquent d’ailes et de balanciers ; ils ressemblent beaucoup à des araignées et vi- vent sur les chauve-souris. Ils constituent le genre NYCTÉRIBIE. Fig. 457. NYCTÉRIBIE. ORDRE DES PARASITES. Les derniers diptères paraissent établir le passage entre les insectes ordinaires et un petit groupe composé d’insectes ano- maux, les parasites, qui sont toujours privés d’ailes ; qui n’ont que des yeux lisses et qui ne subissent point de métamorphoses. Ainsi que leur nom l'indique, ils vivent sur le corps d’autres animaux dont ils sucent le sang; leur bouche est conformée INSECTES PARASITES. 963 pour ce genre de régime, et présente une sorte de mu- seau ou, de mamelon avancé , armé d’un suçoir rétractile , ou bien deëx lèvres membraneuses recouvrant une paire de cro- chets. Leur corps est aplati, presque transparent et divisé en onze ou douze segmens, dont trois appartiennent au thorax et portent chacun une paire de pattes courtes etarmées de cro- chets à l’aide desquels cette vermine se fixe sur les poils ou les plumes de leur hôte. C’est aussi à ces appendices cutanés qu’ils allachent leurs œufs : ils se multiplient très rapidement et ne se montrent chacun quesur des espèces particulières d'animaux. On les désigne généralement sous le nom commun de poux, mais les entomologistes les distinguent en Poux proprement dits, et en Ricins. Les POUx PROPREMENT DITS , Ont la bouche tubulaire , située à l’extrémité antérieure de la tête et renfermant un suçoir ; leurs tarses soni composés d’un gros article qui se replie contre la jambe et remplit ainsi les fonctions d’une pince ; il parait que chez le mâle, l'extrémité de l'abdomen est armée d’une espèce d’aiguillon. Les œufs connus sous le nom de Zentes, éclosent au bout de cinq à six jours; les jeunes changent plusieurs fois de peau, mais leur croissance est très rapide : dans l’espace d’envi- ron dix jours, ils arrivent à l’âge adulte. Ils pondent un nom- bre considérable d’œufs , et on a constaté que dans l’espace de deux mois, deux individus suffiraient pour produire dix-huit mille de ces parasites. Trois espèces de ce genre sont propres à l’homme. La plus commune est le pou de La téte qui a le thorax bien distinct de l'abdomen , et a des taches latéralement bru- nes ou noirâtres sur un fond cendré. Le pou du corps humain à la même forme , mais est d’un bianc sale sans taches; dans quel- ques maladies il pullule d’une manière effrayante. La troisième espèce a le corps arrondi et le thorax presque confondu avec l'abdomen; sa piqüre est très forte. Plusieurs autres mammi- fères ont aussi des espèces de poux qui leur sont particu- lières. Les RICINS ont la bouche inférieure et composée à l'extérieur de deux lèvres et de deux crochets; ils diffèrent aussi des poux proprement dits , par leurs tarses articulés etterminés par deux crochets égaux. Il en est une espèce qui vit sur le chien; les autres se trouvent exclusivement sur les oiseaux. Poux. Ricius. Caractéres. Lépismenes. Podurelles. 964 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. ORDRE DES THYSANOURES. Les thysanoures sont des insectes aptères qui , de même que tous les précédens, ne sont pourvus que de trois paires de pieds , mais qui se distinguent par les appendices dont leur abdomen est garni et qui ne subissent point de méiamor- phoses. Ils forment deux familles : les Lépismènes et les Podurelles. Les LÉPISMÈNES ont l’abdomen muni de chaque côté, en dessous , d’une rangée d’appendices mobiles, et terminé par plusieurs soies articulées. Leur corps est allongé et couvert de petites écailles luisantes , qui paraissent souvent comme argen- tées. Leurs antennes sont sétacées et très longues , leur bouche est armée de mandibules et de mâchoires avec des palpes ; enfin leurs pieds sont fort courts. Ces insectes courent très vite. La plupart se cachent dans les endroits obscurs, tels que les armoires et les fentes des cloisons construites en planches. Quelques-uns vivent sous les pierres. On les divise en MACHILES et en LÉPISMES PROPREMENT DITS. Les premiers sautent très bien à l’aide des filets terminaux de leur abdomen et fréquentent les lieux pierreux et couverts ; les derniers ne sautent pas et vivent pour la plupart dans l’intérieur des maisons. Les PODURELLES ont l’abdomen terminé par une espèce de queue fourchue, qui, dans le repos, est appliquée sous le ventre et qui, en se redressant brusquement, sert à lanimal pour sauter. Leurs antennes sont très courtes ; leur tête est ovale , et leur corps est mou et allongé. Quand ils sau- tent, ils retombent en gé- néral sur le dos , la queue étendue en arrière ,el, pour pouvoir s’élancer de nou- veau , ils ont besoin de se remettre sur le ventre et de recourber en dessous cet appendice. Les uns vivent sur les Fiy: 458. PODURELLE. INSECTES MYRIAPODES. 965 arbres ou se cachent sous les pierres; d’autres se tiennent à la surface des eaux dormantes, et on trouve quelquefois des réunions nombreuses de ces petits insectes dans la neige ou sur le sable. ORDRE DES MYRIAPODES. Les myriapodes diffèrent tellement des insectes ordinaires, Caraetères. que plusieurs naturalistes les regardent comme devant en être séparés , et en forment une classe distincte intermédiaire entre les insectes proprement dits et les + d arachnides.Non-seulement ces ani- | maux n’ont jamais d'ailes; mais leur corps, très allongé et divisé en un grand nombre d’anneaux , porte sur chacun de ces segmens au moins une paire de pattes; aussi le nombre de ces organes s’élève-t-il toujours à vingt- quatre ou davantage, ei n’existe-t-il aucune ligne de démar- cation entre le thorax et Fabdomen. Ils ressemblent un peu à des serpens ou à des vers qui seraient munis de pieds; mais leur organisation inté- rieure les rapproche des insectes ordinaires. La iète des myriapodes est garnie »* de deux petites antennes et de deux ; yeux formés ordinairement d’une réuniou d’yeux lisses. Leur bouche ù est conformée pour la mastication à et présente une paire de mandibu- N° les bi-articulées suivie d’une espèce N ! de lèvre à quatredivisions , et deux 73 paires d’appendices semblables à de j petits pieds. Le nombre des an- v neaux de leur corps varie , et quel- \ quefois ces segmens paraissent réu- . Ÿ nis deux à deux , de telle sorte que chaque tronçon mobile porte deux Fig. 459. SCOLOPENDRE. paires de pattes. Ces derniers or-- ganes ne se lerminent que par un seul crochet. Enfin il existe CE TT * Sepi ts Eu A mu Ré br Un, >” Classifica- ticn Famille des chilograthes. Iules. 966 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. de chaque côté du corps une série de stigmates en communica- tion avec des trachées conformées de A même manière que chez les insectes ordinaires. Les myriapodes éprouvent dans le jeune âge des métamorphoses ; mais ces changemens ne sont pas analogues à ceux que nous avons vus chez les autres in- sectes , et consistent seulement dans la formation de nouveaux anneaux et dans une augmentation correspondante du nombre des pattes. Deux familles naturelles, faciles à distinguer par la forme des antennes, composent cet ordre, savoir: les CHILOGNATHES ou Iules et les CHILOPODES ou Scolopendres. Les myriapodes de la FAMILLE DES CHILOGNATHES ont en général le corps cylindrique et revêtu de tégumens très durs , les antennes , au moins aussi grosses vers le bout que vers la base et formées de sept articles ; les pattes courtes et pour la plupart insérées par doubles paires à des sesmens com- posés de deux anneaux confondus en un seul tronçon. Les pre- miers anneaux qui suivent la tête ne présentent pas cette dis- position, et les deux ou trois derniers segmens sont apodes. La nourriture de ces animaux consiste en matières animales ou végétales plus ou moins décomposées , et leur bouche est armée de mandibules dépourvues de palpes et garnies de dents imbriquées , d’une espèce de lèvre inférieure et de deux paires de pieds semblables aux suivans , mais plus rapprochés à leur base. Leur respiration se fait à l’aide de stigmates placés sur la pièce sternale de chaque double anneau et communiquant in- térieurement avec une double série de poches aérifères , dispo- sées en chapelet et isolées, desquelles partent les trachées- Enfin on voit aussi de chaque côté du corps une série de pores qui livrent passage à un liquide acide d’une odeur désagréable. La marche des chilognathes est très lente: ils semblent glisser plutôt que marcher et se roulent en spiraleou en boule. Ils pondent leurs œufs dans la terre, et les petits, an moment de la naissance , ne ressemblent pas à leurs parens. Plusieurs d’entre eux, sinon tous, ont alors le corps parfaitement uni et sont complètement apodes; mais, dans le jeune âge, ils changent plusieurs fois de peau , et à chacune de ces mues , le nombre de leurs pattes augmente. Cette famille se divise en Jules, Polydèmes, Gloméris, etc. Les TULES PROPREMENT pits ont le corps cylindrique, fort INSECTES MYRIAPODES. 967 long et grustacé; leurs antennes sont renflées vers le bout, cet ils n’ont pas d’appendices à l’extrémité postérieure de leur corps. La plupart des espèces vivent à terre, dans les bois et les lieux sablonneux; mais on en trouve aussi quelques-unes de petite taille sous les écorces des arbres et dans la mousse. Ils s’enroulent en spirale et répandent en général une odeur dés- agréable. Lors de la naissance, leur corps est réniforme et dé- pourvu d’appendices; mais, au bout de huit jours, ils subissen: une première mue et prennent la forme qu’ils doivent conserver à cette différence près qu’ils n’ont pas encore tous leurs an- neaux. Dans l'espèce sur laquelle ces métamorphoses ont été ob- servées , on ne leur trouva alors que vingt-deux segmens, et le nombre total deleurs pattes était de vingt-six paires; à la seconde mue, l'animal acquittreize paires de nouvelles pattes, et, après la troisième, on lui en vit quarante-trois paires. Son corps se composait alors de trente segmens ; enfin, à l’état adulte, le mâle en présentait trente-neuf et la femelle soixante-quatre ; mais ce nombre varie suivant les espèces. ; L’iule des sables, long d’environ seize lignes et d’un brun noiràtre , est assez commun en Europe, de même que leivle terrestre qui est d’un quart plus petit et d’une couleur cendrée. Les POLYDESMES diffèrent des Iules par la forme des anneaux de leur corps qui sont anguleux ; on les trouve sous les pier- res dans les lieux humides , etc. Les GLOMÉRIS ressemblent beaucoup par la forme générale de leur corps à des cloportes ; il est ovalaire, convexe en des- sus, concave en dessous et composé, la tête comprise , de treize segmens ; le nombredes pattes est de trente-deux dans les mâles et de trente-quatre dans les femelles. Ces myriapodes vi- vent sous les pierres dans les terrains montueux et se roulent en boule. Dans la FAMILLE DES CHILOPODES ou des SCOLOPENDRES (fig.459),le corps est déprimé et membraneux, les antenness’amin- cissent vers le boutet se composent de quatorze articles ou davan- tage; chaque anneau, recouvert d’une plaque coriace ou cartilagi- neuse , ne porte en général qu’une paire de pieds dont la dernière est ordinairement rejetéeen arrièreetallongéeen forme de queue; la bouche est armée de deux mâchoires munies de palpes , d’une Polydesmes. Gloméris, Famille des chilopodes. Scolopen- ères. Lithobies. Seutigeres, 968 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. espèce de lèvre quadrifide, de deux petits pieds onguiculés et réunis à leur base et d’une paire de pieds-mâchoires , fixés au premier segment du tronc au-devant d’une paire de pieds ambulatoires, réunis à leur base, de manière à représenter une espèce de lèvre inférieure, et terminés par un fort crochet, dont l'extrémité est perforée. L'ouverture située au bout de ces or- ganes , communique avec une glande particulière et livre pas- sage à une liqueur vénéneuse qui, chez les grandes espèces des pays chauds, parait être très active; aussi y redoute-t-on beau- coup ces animaux. Les scolopendres recherchent l’obscurité et se cachent ordi- nairement sous les pierres ou les écorces des arbres, dans le fumier ou dans la terre; elles courent très vite et sont carnas- sières. Les SCOLOPEKDRES PROPREMENT DITES ont le corps divisé de lamême manière en dessuset en dessouset sont pourvues tantôt de vingt-et-une paires de pattes, tantôt de quarante-deux paires ou d’un nombre même beaucoup plus considérable. Dans quel- ques espèces on en compte Jusqu'à soixante-quatorze paires. Elles vivent de vers de terre , d'insectes , elc., et 1l paraît ‘que quelques-unes répandent pendant la nuit unelumière phospho- rique. On en trouve dans le midi de la France, mais c’est sur- tout dans les pays chauds qu’elles sont nombreuses. On äonne ce nom de E1THOBIES à des scolopendres dont les plaques dorsales sont alternativement plus longues et plus courtes et dont les pieds sont au nombre de quinze paires. Enfin les sCUTIGÈRES diffèrent des précédens par la conforma- lion de leur corps, dont la face inférieure est divisée en quinze segmens, et la face supérieure est recouverte seulement de huit plaques en forme d’écusson ; leurs antennes et leurs pattes sont irès longues, et lorsqu’on les saisit, ils perdent facilement une partie de ces appendices. On en trouve chez nous une espèce qui se cache dans Ia charpente des maisons. LES ARACHNIDES. 969 CLASSE DES ARACHNIDES. La classe des arachnides se compose d'animaux articulés qui ont beaucoup d’analogie avec les insectes , et qui sont éga- lement organisés pour vivre dans l'air ; Mais qui s’en distin- guent , au premier coup-d'œil , par la forme générale du corps et par le nombre des pattes, et qui différent aussi de cesanimaux par plusieurs particularités importantes dans leur structure intérieure. En effet, les arachnides ont toutes la tête confondue avec le thorax et dépourvue d'antennes ; elles ont quatre paires de patles et jamais d’ailes; enfin elles respirent en général à l’aide de cavités pulmonaires et ont presque toutes un appareil circulatoire complet. Le squelette iégumentaire de ces animaux est en général moins solide que celui des insectes, et leur corps se compose de deux parües principales , presque toujours distinctes , l’une appelée céphalothoraz , parce qu’elle est formée par la tête et le thorax confondus en un seul tronçon; l’autre nommée ahbdomen et composée tantôt d'une suite d’anneaux distincts (comme cela se voit chez les scorpions( £g. 468 )), tantôt d’une masse molle , globuleuse et sans divisions (chez les araignées , par exemple ( fig. 464). Les organes de la locomotion sont tous fixés au céphalotho- rax , et consistent en huit pattes irès semblables à ceiles des insectes et presque toujours terminées par deux crochets; en général leur longueur est considérable, et elles se cassent facile- ment; mais de même que chez les crustacés, le moignon après s'être cicatrisé, reproduit une nouvelle patte qui croit peu-à- peu, et finit par être semblable à celle dont l'animal avait été privé. Jamais les arachnides ne présentent aucun vestige d'ailes et leur abdomen est ioujours complètement dépourvu d’appendices locomoteurs. C’est sur la partie antérieure du céphalothorax quese trouvent la bouche et les yeux. Ces derniers organes sont ioujours sim- ples et en nombre assez considérable ; on en compte ordinai- rement huit ,et on distingue dans chacun d’eux une cornée transparente, derrière laquelle se trouve un cristallin, et une Rumeur vitrée, puis une rétine formée par la lerminaison d’un nerf optique et une enveloppe de matière colorante. On ne sait rien relativement aux instrumens à l’aide desquels s’exerce l'audition chez les arachnides; mais on a des preuves mullipliées Caractères, Organisa- t'On4 970 ZOCLOGIE DESCRIPTIVE. de l'existence de ce sens chez ces animaux, et il paraîtrait même que certains d’entre eux sont sensibles au charme de la musique. Le toucher s’exerce principalement par l'extrémité des pattes et par les appendices dont la bouche est garnie. Le système nerveux des arachnides présente des différences assez grandes; tantôt (chez les scorpions, par exemple) il se compose d’une série de huit masses ganglionnaires réunies entre elles par de doubles cordons de communication et formant une chaine étendue, d’un bout du corps à l’autre, d’une ma- nière presque uniforme; d’autres fois (chez les araignées , etc.) on trouve tous les ganglions du thorax réunis en une seule ct e ct no y 7 b IST ER: Fig. 460. (1) masse (#, fig. 460 et fig. 462), d’où partent en arrière deux Cor- dons (e, qui vont aboutir à un ganglion abominal unique (a, fig. 462). Du reste la disposition générale de ces parties est tou jours la même: les ganglions antérieurs(c), situés au devant ou au dessus de l’æsophage et considérés plus ordinairement comme représentant le cerveau de ces animaux , donnent nais- sance aux nerfs optiques en avant et se continuent en arrière avec le collier œæsophagien ; les autres ganglions sont silués au- (r) Section du céphalothorax d’une mygale, montrant la disposition a système nerveux :—ct céphalothorax ; —» mandibule ;—g griffe ou crochet mo- bile, qui la termine ;— à bouche ; — æ œsophage ; —e estomac; — ab origine de l'abdomen; —c cerveau ou ganglion céphalique ; —t masse ganglionnaire du thorax ;— ca cordons qui l’unissent aux ganglions abdominaux ; — no nerfs optiqnes ; — y yeux. LES ARACHNIDES. 971 dessous du tube alimentaire, et envoient des nerfs, aux pattes, aux appênaices de l’abdomen , etc. Les arachnides sont douées d'instineis variés qui sont quel- quefois non moins remarquables que ceux des insectes , et on serait même porté à leur accorder des facultés plus dévelop- pées; car on a vu des animaux de cette classe se prêter à une espèce d'éducation et donner des signes d’une sorte d’intelli- gence.Plusieursemploient des ruses particulières pour s'emparer de leur proie , et d’autres déploient dans la construction de leur demeure une industrie singulière ; mais nous ne trouvons dans cette classe aucun animal comparable sous ce rapport à la fourmi ou à abeille. Les arachnides sont carnassières , mais se bornent en géné- ral à sucer les humeurs contenues dans le cadavre de leur vic- time, et afin de leur rendre plus facile la capture d’animaux dont ils pourraient redouter la force, la nature a pourvu un grand nom- d bre d’entre eux d’un appareil veni- 4 meux. La plupart se nourrissent m d'insectes qu’ils saisissent vivans ; ur quelques - uns cependant vivent L en parasites. Chez les premiers, s la boucheest garnie d’une paire de mandibules armées de crochets Fig. 461. (1) mobiles ou conformées en manière de pinces, d’une paire de màächoires lamelleuses, portant chacune un grand palpe plus ou moins pédiforme , et d’une lèvre inférieure ; chez les arachnides para- sites, la bouche a la forme d'une petite trompe d’où sort une espèce de lancette formée par les mâchoires. Le crochet mobile des mandibules présente près de son ex- trémité une petite ouverture qui est l’orifice du canal excréteur de la glande venimeuse dont nous avons déjà parlé, et la liqueur qu’elle verse au fond des plaies détermine presque aussitôt l’en- gourdissement des insectes auxquels ces animaux font la chasse, mais est trop faible pour nuire à l’homme, et c’est sans aucune raison que le vulgaire attribue souvent à la morsure des arai- gnées les boutons et les rougeurs qui se développent quelque- fois sur notre peau. (4) Appareil buccal d’une araignée : — s sternum; — / lèvre; — m4 màchoi- res; —p palpes des mächoires ; — »7 mandibu:es; — g crochet ou griffe des mandibules. 63 972 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. Le canal intestinal est en général assez simple, mais offre quelquefois des appendices cœcaux qui pénètrent jusque dans l’intérieur des pattes. En général des tubes analogues aux vais- seaux biliaires des insectes, s'ouvrent dans l'intestin près de l'anus ; mais chez quelques arachnides, tels que les scorpions, il existe un foie composé de quatre grappes glanduleuses. C’est aussi autour de l'ouverture anale que se trouvent les glandes sécrétoires de la matière soyeuse, et les filières à laide desquelles plusieurs arachnides se construisent des toiles sou- vent très élendues et d’une délicatesse extrême (7, fig. 462). La respiration des arachnides est aérienne comme celle des insectes , et se faii quelquefois au moyen de trachées ; mais m chez la plupart de ces animaux, elle est con- centrée dans des poches, logées dans l'abdomen et appelés poumons. Ces der - niers organes présentent dans leur intérieur une multitude de lameiles membraneuses (2) dispo- sées comme les feuillets d’un livre: aussi res- semblent-ils bien plus à des branchies intérieures qu'à de véritables pou- mons. Chaque poumon reçoit l’air par une ou- verture située à la face in- férieure de l’abdomen (s) et on en compte tantôt deux , tantôt quatre ou même huit. Certaines a- rachnides possèdent en Pre se mème temps, des pou- Fig. 462. (1) mons et des trachées; et d’autres ne sont pourvues que de ces tubes dont la structure est essentiellement la même que chez les insectes. (4) Anatomie d’une Mygale. — ct céphalothorax ouvert en dessous et donnant attache aux pattes , dont la base est en place; — pa patte de la première paire ; — p palpe ; — » mandibules ; — ab abdomen ; — + masse ganglionnaire thora- cique ; — a ganglions abdominaux ; —po poches pulmonaires; — s stigmates ; — / lamelles respiratoires d’une de ces cavités ouverte; — 09 ovaires ; — or orifice des oviductes ; — 4 muscles de l’abdomen; — an anus ; — filières. LES ARACHNIDES,. 973 Le sang est blanc chez tous les animaux de cette classe. Les arachnides pulmonaires sont pourvues d’un appareil cir- culatoire complet. Leur cœur si- tué sur ledos, a la forme d’un vais- Re | seauallongéet donne naissance à di- verses artères ; le sang , après avoir traversé les organes , se rend aux poumons et de là arrive au cœur , en suivant une marche semblable Bis à celle que nous avons déjà vue chez les mollusques. Chez les arachni- des dont la respiration s’effectue S \ GE) uniquement à l’aide de irachées, \ l'appareil de la circulation est ru- ANS dimentaire. Il ne paraît y avoir qu’un simple vaisseau dorsal sans artères ni veines. Fig. 463. Les arachnides pondent des œufs comme les insectes, et le mâle diffère , en général, de la femelle par la forme des palpes maxillaires , dont les usages paraissent être irès impor- tans ; un grand nombre de ces animaux enveloppent leurs œufs dans un cocon de soie, et quelquéfois la mère demeure avec sa jeune famille pour la protéger, et porte même les petits sur son dos lorsqu'ils sont encore trop faibles pour mar- cher. Tous ces animaux subissent plusieurs mues avant que d'arriver à l’âge adulte , et quelques-uns éprouvent une sorte de métamorphose , car il en est dont les pattes ne sont d’abord qu’au nombre de trois paires et qui en acquièrent une qua- trième à un âge plus ou moins avancé. On divise la classe des arachnides en deux ordres caractérisés par le mode de respiration et de circulation, qui est tantôt semblable à ce que nous avons vu chez les insectes , tantôt toui différent. Le tableau suivant donne les caractères de ces deux groupes. { fayant des sacs pulmonaires et un appareil circulatoire complet (yeux au nombre de six à huit ; stigmates au nombre de deux, de PULMONAIRES, quatre ou de huit). ARACHNIDES . L À ayant seulement des trachées pour la respira- : ; 3 | ” RACE mES. LOUE CE des vestiges d'organes circulatoires (yeux au nombre de quatre au plus; stigmates très nombreux )s (1) Cœur d’un aranéide: — 4 contour de l’abdomen ; — c cœur ; — ar grande 63. Classifica- tion. Famille des aranéides. 974 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. Cette classification n’est pas parfaitement naturelle ; car elle sépare certaines arachnides très analogues entre elles , et l’exis- tence des trachées n’est pas une circonstance aussi importante qu’on serait porté à le croire au premier abord, puisqu'on voit ces organes se montrer dans certaines arachnides pulmonaires, qui, du reste , diffèrent à peine de quelques autres espèces dé- pourvues de ces vaisseaux respiratoires ; mais jusqu'ici les na- turalistes n’ont proposé aucune autre classification qui soit préférable. ORDRE DES ARACHNIDES PULMONAIRES. Les arachnides dont la structure est la plus compliquée, respirent par des poches pulmonaires , qui existent en général seules, maïs qui sont quelquefois accompagnées de trachées ; les stigmates par lesquels Pair y entre ont la forme de petites fentes situées sous l’ahbdomen et sont au nombre de 2, de 4 ,ou même de huit; tandis que chez les arachnides trachéennes ces orifices ne sont qu’au nombre de deux. On divise cet ordre en deux familles , les ARANÉIDES dont les palpes sont petits, pédiformes, et ne se terminent pas en pince (fig. 464) ; et les PÉDIPALPES dont les palpes sont très grands et terminés en pince ou en griffe (/ig. 468). Les ARANÉIDES ou arachnides pulmonaires fileuses, ont le céphalothorax composé d’un seul ironçon et recouvert par une sorte de bouclier corné, ordinairement de forme ovalaire; leur abdomen y est appendu par un pédoncule très court et consiste en une masse renflée et ordinairement molle. Les yeux sont presque toujours au nombre de huit , mais quel- quefois on n’en compte que six. Les mandibules sont insérées sous le front et se terminent par un crochet mobile très acéré et percé près de son extrémité d’une petite fente, servent au passage du venin sécrété par une glande logée dans Particle précédent. Les mâchoires sont au nombre de deux et la lan- guette située entre ces organes se compose d’une seule pièce ; les palpes maxillaires s’avancent de chaque côté des mandibu- artére qui part de son extémité antérieure ; — ® vaisseaux qui paraissent venir des poumons. ARACHNIDES PULMONAIRES. 975 lesetressemblent à de petits pieds; chez la femelle ils se ter- minent#par une griffe et chez le mâle ils sont renflés vers le bout et présentent dans ce pointunesiructure très compliquée. Les pattes sont insérées presque circulairement autour du cé- phalothorax. Elles sont toutes de même forme et se composent de sept articles dont le dernier est armé de deux crochets ordi- nairement dentés en peigne ; souvent on remarque près de ceux- ci, une multitude de poils aplatis, et il paraît que c’est à l’aide de ces appendices qu’elles se fixent sur les corps les plus polis. Dans cetie famille les cavités pulmonaires sont au nombre de deux ou d’une seulement, et sont placées près de la base du ventre ; une tache jaunâtre ou blanchâtre indique à Pextérieur, la position de chacun de ces organes , et c’est tout auprès à la face inférieure de l'abdomen que se voient les stigmates. La soie avec iaquelle les aranéides se construisent des demeu- res , tendent des pièges à leur proie et forment des cocons pour leurs œufs, est sécrétée comme nous l’avons déjà dit par un appareil logé dans la partie postérieure de l’abdomen. Cet ap- pareil consiste en plusieurs paquets de vaisseaux coniournés sur eux-mêmes et aboutissant à des pores percés au sommet de quatre ou de six mamelons coniques ou cylindriques , appelés filières, et situés au-dessous de l’anus. La matière gluante ex- pulsée à travers ces pores, prend de la consistance par le contact de l'air, et constitue des fils d’une ténuité extrême et d’une longueur non moins grande; à l’aide de ses pattes, l’animal réunit en une seule corde une multitude de ces fils, et chaque fois qu’en se balancçant, les filières viennent à toucher le corps sur lequel il pose, il y attache le bout d’un de ces fils, dont l'extrémité opposée est encore renfermée dans l’appareil sé- créteur, et dont il peut par conséquent, augmenter à volonié la longueur. La couleur et le diamètre des fils varient beaucoup; une araignée du Mexique se construit une toile composée de fils rouges , jaunes et noirs , entrelacés avec un art qui étonne ; et on a calculé que dix mille fils sortant des pores d’une des filières de quelques-unes de nos araignées communes, n’éga- lent pas en grosseur un de nos cheveux, tandis que d’autres espèces propres aux pays chauds, forment des trames si fortes, qu’elles suffisent pour arrêter de petits oiseaux, et que l’homme, même , a besoin de faire un effort pour les rompre. La manière dont les aranéides mettent leur soie en œuvre ne varie pas moins ; les unes se bornent à tendre des fils irréguliers, d’autres tissent une toile dont les mailles sont d’une régularité ex- trême. Cette famille se divise en deux sections , savoir : les MYGALES Classifica- tion. Mygales. 976 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. où ARANÉIDES TÉTRAPNEUMONES , Ou qui Ont quatre stigmates s’ouvrant dans autant de cavités respiratoires ; et les ARANÉIDES DIPNEUMONES OU ARAIGNÉES , qui n’ont que deux stigmates et par conséquent, seulement deux poches pulmonaires. Les MYGALES sont remarquables par la force de leurs pattes et de leurs mandibules; leurs yeux sont situés à l’extrémité antérieure du cé- phalothorax , et la plupart n’ont que quatre filiè- res. Les MYGALES PROPREMENT DI- rEs, ont les cro- chets des mandi- bules repliés en dessous (/g. 462), huit yeux , et les palpes insérés à l'extrémité des mâchoires, de fa- çon à paraitre composés de six articles dont la mâchoire serait le premier. C’est à ce genre qu’ap- partiennent les plus grandes ara- néides ; dans PA- mérique méridio- nale, on en trou- ve qui occupent, lorsque leurs pat- tessont étendues, un espace circulaire de huit à neuf pouces de diamètre , eton assure que ces énormes araignées sont assez fortes pour s'emparer des colibris, et des oiseaux-mouches ; nos colons les connaissent sous le nom d’araignees-crabes. Leur corps est en- tièrement velu et leur couleur plus ou moins noirâtre ; ils éta- blissent leur domicile dans les gercures de l'écorce des arbres, ou entre des pierres, et se construisent un tube dont le tissu ln et serré ressemble à de la mousseline. On en distingue plusieurs espèces dont quelques-unes passent pour être veni- Fig. 464. MYGALE. ARACHNIDES PULMONAIRES,. 977 meuses. D’autres mygales, beaucoup plus petites, vivent pour la plupart dans nos climats, et se creusent, dans les lieux secs el montueux , des galeries souterraines en forme de boyau, dont elles tapissent l’intérieur d’un tissu soyeux et dont elles ferment l'entrée à l’aide d’un couvercle garni d’une charnière et formé de plusieurs couches de fils mélés de terre gachée ; la disposition de cette porte est telle que son poids suffit pour la fermer , mais lorsque la mygale craint de voir sa demeure en- vahie par quelque ennemi , elle s’accroche à des trous prati- qués à la face inférieure de ce couvercle, du côté opposé à la charnière et empèche de l'ouvrir. On donne le nom d’ATY£ESs à des aranéides qui se distinguent des mygales par l'insertion de leurs palpes, sur le côté externe des mächoires , et qui ont les yeux très rapprochés et groupés sur un tubercule. Une espèce de ce genre habite les environs de Paris, et se creuse une habitation souterraine à-peu-près comme les mygales dont nous venons de parler. D’autres aranéides de cette tribu ont la griffe des mandibu- les repliée sur la surface internede ces organes etsix filières; les unes pourvues seulementde six yeux disposés en fer-à-cheval, et de mandibules très fortes, forment le genre DYSDÈRE; d’autres ayant huit yeux groupés sur une petite élévation , et des man- dibules petites ont reçu le nom de FILISTATES. La section des ARACHNIDES DIPNEUMONES Caractérisée par l'existence d’une seule paire de poches pulmonaires et presque toujours d’une seule paire de stigmates , se compose d’un grand nombre d’aranéides dont les palpes sont toujours ais- posés comme dans les deux genres dont il vient d’être ques- tion , et dont les filières sont toujours au nombre de six. On a subdivisé ce groupe en deux tribus, savoir : les ARAI- GNÉES SÉDENTAIRES , qui Consiruisent des toiles ou tendent au moins des fils pour surprendre leur proie, et se tiennent habituellement dans ces pièges ou dans leur voisinage ; et les ARAIGNÉES VAGABONDES, qui ne font pas de toiles, mais gueitent leur proie et la saisissent à la course ou en sautant sur elle. Les ARAIGNÉES SÉDENTAIRES se reconnaissent à leurs yeux Atypes, Dipteres fi - listates. Aranéisies dipacumoncs Araignees sédeniaires. Eatérigrades. Araignées tapissières, Tégéunaires. 978 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. au nombre de huit ou de six, disposés sur la largeur du front et placés quatre ou deux au milieu , et deux ou trois de chaque cèté (fig. 465 et 466).Les unes nommées REC-— TIGRADES, parce que dans leur marche, elles s : & se portent toujours en avant, ont ces or- | ganes situés de manière à ne pas représenter un segment de cercle ou un croissant, et Fig. 465. tiennent leurs pieds élevés dans le repos; elles ourdissent des toiles et sont toujours stationnaires. Les autres appelées LATÉRIGRADES, peuvent marcher de côté et enar- rière aussi bien qu’en avant, ont les yeux au nombre de huit et disposés de façon à représenter par leur réunion, un segment de cercle ou un croissant; elles diffèrent aussi des précédentes par leurs mœurs : car au lieu de construire une toile, elles se bornent à tendre quelques fils solitaires pour arrêter leur proie et elles se tiennent tranquillessur les végétaux, les pieds étendus. E Le On subdivise encore les araignées sédentaires rectigrades en TUBITÈLES OU TAPISSIÈRES , qui ont les filières cylindriques rap- prochées en un faisceau dirigé en arrière et les pieds robustes, et qui se construisent des tubes ou des cellules pour leur ser- vir de demeure ; INÉQUITÈLES OU ARAIGNÉES FILANDIÈRES , qui ont les filières presque coniques , peu saillantes et disposées en roselte ; les pieds très grèles et les mâchoires inclinées, et qui se construisent en général des toiles à réseau irrégulier , dont les fils se croisent dans tous les sens et sur plusieurs plans; et ORBITÈLES OU ARAIGNÉES TENDEUSES , qui ressemblent aux précédentes par la disposition de leurs filières et par ia forme de leurs pieds, mais qui ont les mâchoires droites et élargies vers le bout et qui font des toiles en réseau régulier, composé de cercles concentriques croisés par des rayons droits , se ren- dent du centre à la circonférence. On range dansla division dos Tubitèles, les Araignées propre- ment dites ou Tégénaires , les Ségestries , les Drasses, les Clu- biones, les Argyronètes , etc. Les TÉGÉNAIRES Ou araignees proprement dites ont huit yeux, dont les quatre antérieurs disposés en une ligne courbe ( /g. 466) et les mâchoires droites et plus ou moins dilatées vers le bout (fig. 461). Ces arachnides construisent dans l’intérieur de nos mai- sons, sur les haies ou sous les pierres, une grande toile à-peu-près ARACHNIDES PULMONAIRES. 979 horizontale, à la partie supérieure de laquelle est un tube où elles se tiennefit sans faire de mouvement ; elles y placent aussi leurs œufs renfermés dans une double enveloppe soyeuse, qui adhère au reste de la toile. Notre araignee domestique appartient à ce genre. Fig. 466. Les SÉGESTRIES n’ont que six yeux et sont remarquables par l’existence de trachées aussi bien que de poumons. Elles se tien- nent dans les fentes des vieux murs où elles se construisent de longs tubes soyeux, dont ouverture extérieure est bordée de fils divergens , qui constituent une petite toile propre à ar- rêter les insectes. Une espèce appelée seégestrie perfide, de cou- leur noire, avec les mandibules vertes, est assez commune en France. Les DRASSEs ont huit yeux comme les araignées , mais dispo- sés autrement, et se distinguent aussi par la forme de leurs mâ- choires qui représentent un ceintre autour de la languette ; leur mandibules sont robustes et ils se construisent sous les pierres, dans les fentes des murs , ou entre les feuilles des cellules d’une soie très blanche. Le drasse reluisant se trouve assez communément aux environs de Paris; il est petit , presque cy- lindrique avec le thorax fauve et l'abdomen peint de bleu , de rouge , de vert et de jaune à reflets métalliques. Enfin, les ARGYRONÈTES au lieu d’être terrestres comme toutes les précédentes, sont des arachnides aquatiques ; elles se re- connaissent à la forme de leurs mâchoires et à leurs yeux dont les quatre médians représentent un quadrilatère, et les deux situés de chaque côté sont rapprochés l’un de l’autre et portés sur une éminence spéciale. L’argyronète aquatique, qui est d’une couleur brune-noirâtre , vit dans nos eaux dormantes; elle nage , l'abdomen entouré de bulles d'air, et se construit pour demeure une coque ovale remplie d’air, et atiachée aux plar- tes des environs par une multitude de fils. Retirée dans cette loge, elle guette sa proie et garde assidèment le cocon dans lequel elle renferme ses œufs. Le groupe des SÉDENTAIRES INÉQUITÈLES Comprend les genres Théridion , Pholque , etc. Ségestries. Drasses, Argyronetes. Inéquiteles. Théridions, Pholques. Orbiteles 980 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. Les THÉRIDIONS ont les pieds de la deuxième et de la troisième paires plus courts que les autres ; le céphalothorax est presque triangulaire , et les yeux disposés en trois groupes , dont celui du milieu, formé par quatre de ces organes , représente un carré, et les deux latéraux, composés chacun de deux yeux. Ces arachnides jettent entre les feuilles de grandes traînées de fils , et, lorsqu'un insecte s’y est embarrassé, ils emmaillottent en quelque sorte leur proie avec de la soie, de manière à l’em- pècher de faire aucun mouvement, et le percent ensuite de leur crochet venimeux pour l’engourdir avant que de s’en repaitre. La malmignatle , qui se trouve dans le midi de l’Europe et que l’on regarde généralement comme étant très venimeuse , appar- tient à ce genre. Les PHOLQUES, dont les yeux sont disposés trois de chaque côté et deux au milieu , et dont les pieds de la deuxième paire sont plus longs que les postérieurs , ont des mœurs analogues aux Théridions. Le pholque phalangiste, dont le corps est long et étroit, la couleur jaunäâtre, et les pattes très longues, est commun dans nos maisons, où il file aux angles des murs une toile composée de fils lâches. La femelle ne construit pas de cocon pour ses œufs, mais les agglutine en une petite masse arrondie, qu’elle porte toujours avec elle entre les mandi- bules. Le groupe des SÉDENTAIRES ORBITÈLES se compose d’arach- nides , qui, pour la plupart, se rapprochent des précédens par la grandeur et la mollesse de leur abdomen , et qui ont les yeux disposés quatre au milieu , formant un carré , et deux de chaque côté (9. 465). Tantôt leur toile est horizontale , tantôt perpendiculaire , et ce sont les fils qui la soutiennent, dont les astronomes se servent pour construire les micromètres que ces observateurs placent dans l’intérieur des télescopes. Le genre principal de cette division de la grande section des araignées sédentaires rectigrades est celui des ÉPÉIRES , Caracté- risés par les yeux latéraux presque confondus ( fig. 465), et ses mâchoires dilatées à leur base. Presque toutes ces arachnides se tissent une toile verticale ou inclinée; les uns se placent au centre de cette trame, le corps renversé; les autres se cachent dans une retraite qu’ils se pratiquent tout auprès ,etqui a tantôt la forme d’un tube soyeux , tantôt celle d'une coupe. Leur cocon ARACHNIDES PULMONAIRES. 981L est en général globuleux ou ovoïde , et offre quelquefois une structuretrès remarquable. Nous possédons en France plusieurs espèces d’'Epéires. Dans la division des ARAIGNÉES SÉDENTAIRES LATÉRIGRADES, les Latérigrades. yeux sont toujours au nombre de huit et disposés en segmens de cercle ; les mandibules sont en général petites , et le corps est d'ordinaire aplati avec l'abdomen grand, arrondi ou irian- gulaire. On y range les MICROMMATES, les PHILODROMES , les THOMISES , elc., dont on trouve diverses espèces dans nos environs. La TRIBU DES ARAIGNÉES VAGABONDES est caractérisée par la disposition de leurs yeux , qui s'étendent au moins autant d’avant en arrière que transversalement à (fig. 467). Ces arachnides ont le céphalo- ele thorax grand et les pieds robustes. Ainsi sg ” que nous Pavons déjà dit, elles sont chas- seurs et ne font pas de toile. Fig. 467. Les mé , appelées CITIGRADES Ou araignees-loups ont en général les pieds propres à la course seulement ; leur céphalo- thorax est ovoide , rétréci en avant et plus large que le côté antérieur du groupe formé par leurs yeux. La plupart des femelles se tiennent sur le cocon renfermant leurs œufs, ou l’'emportent même avec elles , et ne l’abandonnent qu’à la der- nière extrémité : encore les voit-on retourner le chercher aussitôt que le danger est passé , et elles veillent aussi quelque temps à la conservation de leurs petits. Ce groupe comprend les DOLOMÈDES , les LYCOSES OU TARENTULES, etc. Ces dernières se tiennent presque toujours à terre, courent très vite et se logent dans des trous ou dans les fentes des vieux murs: elles sont très voraces et défendent courageusement leur demeure. Lorsque la femelle va en course , elle emporte son cocon atta- ché à son abdomen, et, quand les petits sont éclos, ils se tiennent cramponnés sur le corps de leur mère jusqu’à ce qu’ils soient assez forts pour chercher eux-mêmes leur nourri- ture. Une des espèces de Lycoses , appelée la farentule, parce qu’elle est commune aux environs de la ville de Tarente, est devenue célèbre par les fables dont son histoire a été chargée. On a prétendu, et cette opinion est encore adoptée du vulgaire, que la morsure de cet animal produisait des accidens très Araignees vagabondes:. Citigrades. 982 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. graves , même la mort, mais qu’au son de la musique le malade dansait malgré lui ,et que cet exercice , suffisamment prolongé, le guérissait de tous les maux. La Lycose narbonnaise , qui se trouve dans le midi de la France , diffère peu de la taréntule. Saltigrades. D’autres araignées vagabondes , formant la division des saL- TIGRADES , Ont les cuisses antérieures remarquables par leur grosseur et les pieds conformés pour le saut aussi bien que pour la course : aussi marchent-elles par saccades , et, lors- qu’elles sont à portée de leur proie, les voit-on bondir dessus comme le ferait un chat. Tels sont les SALTIQUES et les ÉRÈBES. ORDRE DES PÉDIPALPES. Les arachnides pédipalpes n’ont pas de filières comme les aranéides , et se reconnaissent facilement à leurs grands palpes en forme de bras, terminés en pince ou en griffe. Leur gaine tégumentaire est assez solide , et leur abdomen est com- posé de plusieurs segmens distincts (fig. 468). Tarentules. Quelques-unes de ces arachnides ont l’abdomen plus ou moins pédiculé, dépourvu d’aiguillon à son extrémité et por- tant seulement quatre stigmates recouverts d’une plaque cor- née ; huit yeux, dont deux situés près de la ligne médiane et trois de chaque côté, près des angles antérieurs du céphalo- thorax ; enfin les mandibules armées d’une griffe ou simplement d’un crochet mobile, et les palpes épineux. Elles habitent les parties les plus chaudes de PAsie et de l'Amérique , et sont désignées par quelques auteurs sous le nom commun de TAREN- TULES ; mais il ne faut pas les confondre avec les tarentules dont il a déjà été question et dont on a formé le genre Lycose. Ces pédipalpes se divisent en deux genres: les PHRYNESet les THÉLYPHONES. Caractères. Scorpions. . Les autres arachnides de cette famille forment le genre des scorRrIOoNs. Leur corps est très long, et leur abdomen est uni au thorax dans toute sa largeur, mais bientôt se rétrécit brusquement de manière à consiituer une sorte de queue grèle el composée de six anneaux, dont le dernier se termine par un crochet aigu ou un dard. Leurs stigmates sont au nombre de ARACHNIDES PÉDIPALPES. 983 quatre paires : ils se voient à découvert près de la base de l’ab- domen et'donnent chacun dans une poche pulmonaire, de cou- leur blanche. Leurs palpes (p) sont très grands et terminés par Fig. 468. SCORPION. une pince didactyle. Leurfront porte de chaquecôté deux outrois yeux disposés en ligne courbe, et, vers le milieu du dos, on voit deux autres yeux très rapprochés lun de l’autre. Les scorpions habitent les pays chauds des deux hémisphères et vivent à terre dans les lieux sombreset humides ; on en trouve dans le midi de la France, maisils n’atteignent une grande taille qu’en Afrique et dans l’Inde. Ils courent très vite, en tenant leur queue relevée au-dessus du dos, et se servent de laiguillon qui la termine pour se défendre et pour attaquer les animaux dont ils se nourrissent ; ce dard présente au-dessous de la pointe plusieurs ouvertures qui communiquent avec une glande venimeuse , et la piqüre de ces arachnides est souvent mortelle pour les animaux même assez gros, tels que les chiens; les grands scorpions des pays chauds sont aussi très redouta- bles pour l’homme, mais la piqüre des espèces qui habitent l’Europe, ne parait pas être jamais mortelle; il en résulte or . dinairement une inflammation locale plus ou moins vive, accompagnée de fièvre et d’engourdissement, et quelquefois de vomissemens, de douleurs dans tout le corps et de tremble- ment; pour combattre ces accidens, les médecins conseillent l'usage de lammoniaque (ou alcali volatil) administré à l’in- térieur aussi bien qu’à l'extérieur, et l’application de substan- ces émollientes sur la plaie. Ces animaux vivent principale- ment d'insectes qu’ils saisissent avec leurs serres ; ils sont ovo- 984 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. vivipares , et la femelle porte pendant quelque temps ses petits sur son dos et veille avec soin à leur conservation. Le scorpion d'Europe est de couleur brune et n’est pourvu que de six yeux ; ses bras sont anguleux , sa queue plus courte que le corps, et sa taille d'environ un pouce ; il commence à se montrer vers le quarante-quatrième degré de latitude, et de- vient très commun en Italie et en Espagne. On trouve égale- ment dans le midi de l’Europe et dans la Barbarie, le scorpion roussätre , qui est plus grand, se reconnait à ses yeux au nom- bre de huit , et à sa queue plus longue que le corps ; sa piqüre est plus dangereuse que celle du scorpion d'Europe. ORDRE DES ARACHNIDES TRACHÉENNES. Caractères. Les arachnides qui sont dépourvues de poches pulmonaires, et qui respirent à l’aide de trachées , forment dans la classifica- tion généralement adoptée, le second ordre de la classe des arachnides. L’air pénètre dans ces canaux par deux stigmates très petits, situés à la partie inférieure de l'abdomen. Toutes les arachnides trachéennes paraissent manquer d’un appareil circulatoire ; enfin il en est qui sont dépourvues d’yeux, et chez celles qui en possèdent, on n’en compte jamais que deux ou quatre. La plupart des auteurs placent dans cette division, quelques animaux marins dépourvus de trachées , et connus sous le nom de PYCNOGONIDES , mais il parait plus naturel de les ranger parmi les crustacés ; en adoptant cette marche, l’ordre des arachni- des trachéennes se compose des trois familles , des Faux Scor- pions , des Phalangiens et des Acariens. Faux score Les FAUX SCORPIONS ont l’abdomen bien distinct du thorax pions. et annelé, des palpes très grands et en forme de pieds ou de serres comme chez les scorpions , les mandibules apparentes et terminées par deux doigts et le corps ovalaire ou oblong. Ils sont tous terrestres et très agiles. Les uns nommés GALÉODES, ont les mandibules extrêmement grandes, les palpes pédifor- mes , le thorax divisé en deux segmens et l’abdomen ovalaire et mou; ils habitent les pays chauds et sablonneux et sont ré- Pinces. pulés venimeux. Les autres appelés PINCES Ou CHÉLIFÈRES, res- semblent à de petits scorpions privés de queue , leur corps est Galéodes. ARACHNIDES TRACHÉENNES. 685 aplati, leur thorax presque carré et leurs palpes très longs et terminés par une main didactyle. Les PHALANGIENS et les acariens sont réunis par la plupart des auteurs dans une même famille sous le nom de HOLÈTRES ; mais ils méritent d’être distingués. De mème que les acariens, les phalangiens ont le thorax et l'abdomen réunis en une seule masse; mais cetie dernière partie du corps présente des divi- sions annulaires qu’on ne voit pas chez les acariens. Le corps de ces arachnides est ovale ou arrondi ; leurs pieds sont fort longs ; leurs mandibules sont très saillantes et terminées en pince di- dactyle ; les màchoires portent des palpes filiformes ; enfin, leurs yeux sont au nombre de deux. Les FAUCHEURS /phalangium), constituent le principal genre de cetie famille. Ils sont remar- quables par la longueur de leurs pattes, et se distinguent des autres phalangiens par leurs mandibules beaucoup plus courtes que leur corps, et leurs yeux portés sur un pédonceule commun. Ce sont des animaux très agiles qui vivent les uns à terre , les autres sur les arbres, et sont très communs dans nos campagnes. Les ACARIENS ou mites, n’ont l’abdomen ni annelé, ni pédiculé , et leur bouche est conformée en manière de suçoir; les organes de la mastication ne sont pas libres comme chez les autres arachnides , mais plus ou moins enveloppés dans une gaine ou une sorte de cuiiler formée par la lèvre inférieure ; les palpes maxillaires seuls, sont en général libres, et leur extré- mité est ordinairement armée d’un crochet ou d’une petite pince ; les uns ont quatre ou deux yeux, d’autres un seul , et plusieurs sont tout-à-fait privés de ces organes. Ils sont pres- que tous de très petite taille, et pullulent excessivement ; plu- sieurs ne naissent qu'avec six pattes et n’acquièrent une qua- trième paire qu'après leur première mue. Leurs mœurs varient beaucoup ; les uns se tiennent à terre sous les pierres ou sur les plantes, d’autres sont aquatiques ; d’auires encore ne se rencontrent que dans les substances organiques plus ou moins altéré®s , telles que le vieux fromage, eic. ;enfin, il en est aussi qui vivent en parasites sur la peau ou dans la chair de divers animaux. La plupart des acariens parasites sont connus sous les noms de TIQUES ou ricins , et de SARCOPTES. Une espèce, le ricin proprement dit, ou 2rode brun ,se fixe sur les chiens , les Phalangieus. Faucheurs, Acariens, 986 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. bœufs, etc.; et enfonce tellement son suçoir dans la chair de ces animaux, qu’on ne peut l’en détacher qu'en enlevant la portion de peau qui y adhère ; on assure que la multiplication de ces parasites est quelquefois si considérable, qu’ils font périr d’épuisement les bœufs et les chevaux sur lesquels ils se sont fixés. Une autre espèce de mite appelée le Lepte automnal ou rouget, est très commune en automne dans nos champs, et s’insinue sous la peau de nos jambes, où sa présence occasionne des démangeai- sons insupportables. Enfin, c’est un petit animal de cette famille qui, en se multipliant dans des cla- piers sinueux sous la peau, occasionne une de nos ma- ladies les plus dégoùtantes, la gale. Le sarcopte de La gale est à peine visible à À l'œil nu, mais quand on | \ lexamine au microscope, | | on voit que son corps est oblong , que sa bouche a la forme d’une papille coni- que armée de plusieurs soies , et que ses pieds , au nombre de huit, diffèrent beaucoup entre eux, les quatre pieds postérieurs élant terminés par des soies seulement , tan- dis que les quatre pieds antérieurs sont garnis à leur extrémité de petites ventouses à l’aide desquelles ils peuvent adhérer aux corps ies plus polis. Fig. 469. SARCOPTE DE LA GALE- CLASSE DES CRUSTACÉS. La classe des crustacés comprend tous les animaux arti- culés à pattes articulées, qui sont pourvus d’un cœur et de branchies , pour respirer dans l’eau. Les crabes et lesécre- visses forment le type de ce groupe ; mais on y range aussi un grand nombre d'animaux dont la structure est beau- coup moins compliquée , et dont la forme extérieure est dif- férente; car, à mesure que l’on descend dans la série naturelle CRUSTACÉS. 987 formée par ces êtres, on voit le même plan général d'organisa- tion se modifier successivement et se simplifier de plus en plus. Les derniers crustacés sont même si imparfaits qu’ils ne peuvent vivre que fixés en parasites sur d’autres animaux, et que la plu- part des naturalistes les ont rangés parmi les vers intestinaux. Le corps des crustacés se com pose d’une série d’anneaux plus ou moins distincts. Tantôt la plupart de ces segmens sontsimple- mentarticulés entre eux et jouissent d’une mobilité assez grande (fig. 470); tantôt ils sont presque tous soudés en- semble et ne se distinguent que par des sillons situés à leur point de jonction ; en- fin d’autres fois leur union est encore plus intime, et c’est par analogie seule- ment qu'on est conduit à considérer le troncon ré- Fig. 470. TALITRE (grossi). comme composé de plu- sieurs anneaux plutôt que d’un seul. Il en résulte, comme on le pense bien, des différences très grandes dans la forme gé- nérale de ces animaux, et, si l’on compare entre eux un cloporte (fg. 471) ou un talitre et un crabe(f. 478), par exemple, on sera porté au premier abord à les croire conformés d’après des types entièrement dissemblables ; mais une étude plus approfondie de leur structure fait voir que la compositionde leur squelette tégu- mentaireest essentiellement la même, et que les différences tien- nent presque entièrement à ce que la plupart des anneaux , com- plètement distincts et mobiles chez les cloportes , sont soudés entre eux, chez les crabes, et à ce que certaines parties analogues ne présentent pas chez ces deux animaux les mêmes proportions. Ainsi, chezle cloporte ou chez le ialitre(fg. 471) , on trouvera une tête distincte (#) suivie d’un tho- rax, composé de sept anneaux semblables entre eux (pat, dat) et portantchacun une paire de pat- tes (p , pp); enfin, à la partie pos- térieure du corps , on verra un abdomen (4h) formé également de sept segmens, dont la gran- 64 Fig. 471. CLOPORTE. sultant de leur fusion, Organisa- tion. 988 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. deur diminue rapide ment, mais dont la forme est à-peu-près la méme que dans le thorax. Chez un crabe , au contraire (/ig. 478, pag. 998), la tête n’est pas séparée du thorax et ne forme, avec toute cette partie moyenne du corps , qu’un seul tronçon recou- vert par un grand bouclier solide , nommé carapace; enfin lab- domen échappe &abord à læil; car 1l est reployé en dessous du thorax et n'offre que peu de volume ; cependant il est facile de démontrer que , chez le crabe comme chez le cloporte, il existe en arrière de la tête sept anneaux thoraciques bien reconnais- sables , et que la carapace n’est pas un organe nouveau créé pour les premiers ; mais seulement la portion dorsale de lun des an- neaux de la tête, qui a pris un développement extrême et a che- vauché sur tous les anneaux voisins. Cette étude comparative du squelette tégumentaire des crustacés offre un grand intérêt pour l'anatomie philosophique, dont une des branches les plus im - portantes a trait aux modifications que la nature fait subir aux mêmes élémens organiques,pour les adapter à des usages variés et pour créer avec des matériaux analogues des animaux dissem blables ; mais les limites que nous avonsassignées à ces leçons ne nous permettent pas de nous arrêter plus long-temps sur cesujet. Le squelette tégumentaire des crustacés offre en général une consistance très considérable. Presque toujours il a une dureté pierreuse, et renferme en effet une proportion très considérable de carbonate de chaux. On peut considérer cette enveloppe solide comme étant une espèce d’épiderme; car, au-dessous d'elle, on trouve une membrane qui ressemble au derme des animaux supérieurs, et, à certaines époques , elle se détache et tombe , comme nous avons déjà vu l’épiderme des reptiles se séparer de leur corps, et comme nous avons vu aussi la membrane téscumentaire des larves des insectes se renouveler à plusieurs reprises. On comprend facilement la nécessité de ces mues chez des animaux dont tout le corps est renfermé dans une gaine solide, qui, ne pouvant croître comme les parties intérieures , opposerait à leur développement des obstacles invincibles , si elle ne tombait pas du moment qu’elle est deve- nue trop pelite pour les loger commodément : aussi les crusta- cés changent-ils de peau pendant tout le temps que dure leur croissance , et il paraïîtrait que la plupart de ces animaux grandissent pendant presque toute leur vie. La manière dont ils se dépouillent de leur ancienne enveloppe est très singu- lière. En général ils parviennent à en sortir sans y occasioner la moindre déformation , et, lorsqu'ils la quittent , toute la surface de leur corps est déjà revêtue de sa nouvelle gaine ; mais celle-ci est encore entièrement molle et m’acquiert la solidité qu’elle doit avoir qu’au bout de quelques jours. CRUSTACES. 939 La tête des crustacés paraît résulter de Funion intime de plusieurs anneaux confondus en un seul tronçon. Tantôt elle est mobile et distincte du thorax ( fg. 470), tantôt réunie à plu- sieurs Ou à tous les anneaux de cette portion du corps ( fg. 478). Du reste elle por- ie les yeux, deux paires d’antennes, et la bouche, dont les bords sont ar- més d’appendices nombreux. Quel- quefois ce sont de véritables pattes, qui entourent la bouche et quirem- | plissent à-la-fois les fonctions de | mâchoires et de pattes (7ig. 472 ); | mais , en général, | plusieurs de ces membres sont ex- clusivement ap- propriés à la pré- hension des ali- mens (/g. 474, page 991), et on remarque que , à mesure qu’on s'élève dans la série des crustacés , le nombre des appendices buccaux augmente , et le nombre des pattes diminue pro- portionnellement. Ces derniers organes sont fixés aux an- neaux thoraciques. En général leur nombre est de cinq ou de sept paires , et leur forme varie suivant qu'ils doivent servir à la nage , à la marche ou même à la préhension ; dans le premier cas, ils sont larges et plus ou moins membra- neux ; dans le second ils sont grèles et allongés , et, lorsqu'ils doivent servir à l’animal pour saisir les corps dont il veut s’em- parer , ils se terminent par une pince plus ou moins complète. (fig. 479). Enfin, à la suite des pattes proprement dites, on trouve presque toujours une double rangée d’appendices, qui sont fixés Fig. 472. LIMULE. (1) (x) Limule vu en dessous :—c carapace ; —g queue ; — à bouche ; —pm pattes qui entourent la bouche ; — ph fausses pattes branchiales. 04. 500 ZOCLOGIE DESCRIPTIVE. à l'abdomen et qu’on nomme fwusses pattes ; 1is aident à la na- tation et servent à porter les œufs. Le système nerveux se compose d’une double série de gan- glions situés sur la face ventrale du corps, près de la ligne médiane. En général leur nombre correspond à celui des segmens distincts dont le corps se compose, et toujours ceux e na de la première pai- re sont logés dans la tête , au-devant de lœsophage, où ils constituent une espèce de cerveau us (e,; mais la dis- position des gan- glions du thorax etdel’abdomen va- 2 rie beaucoup. Tan- tôt ils sont égale- mentespacésentre eux ,et forment a- vec leurs cordons decommunicalion une chaine éten- due d’un bout du corps à l'autre ; tantôt ils sont plus ou moins rappro- chés entre eux,et quelquefois ils sont tous réunis en une seule masse, située vers le milieu du thorax. Il est à noter que , dans cette classe de même que chez les mollusques , cette centralisation du système nerveux, devient de plus en plus complète à mesure qe Panimal pequiért une organisation plus élevée. Du reste ils n’ont tous que des facultés très bornées, et aucun d’entre eux ne présente beaucoup d'intérêt. Les yeux sont conformés à-peu-près de même que chez les in- sectes. Quelquefois ils sont simples; mais en général ils sont composés , et, chez'tous les crustacés les plus parfaits , ces or- ganes sont portés sur des pédoncules mobiles , disposition qui Fig. 473. (1) (1) Système nerveux d’un erabe (le maja) :—ca carapace ouverte; —aantennes extérieures ; — y yeux; — e estomac; — c cerveau; — no nerfs optiques ; — na nerfs des antennes; — co collier æsophagien ; — ns nerfs stomatogastriques ; — gt masse ganglionnaire thoracique; — np nerfs des pattes ; — na nerf abdo- minal. LES CRUSTACES. 981 ne se voil dans aucune des autres divisions de l’embranchement des animaux articulés. Chez un grand nombre de crustacés il existe aussi un appareil de l’ouïe, qui est silué à la base des antennes externes et qui se compose d’une petite membrane semblable à un tympan , au-dessus de laquelle se trouve une espèce de vestibule rempli de liquide et renfermant la termi- naison d’un nerf particulier. On ne sait rien de positif touchant l’odorat et le goût chez ces animaux. La plupart des crustacés vivent de substances animales ; mais ils présentent de grandes différences dans leur régime. Les uns ne se nourrissent que de matières liquides ; les autres se repaissent d’alimens soli- des, et on remarque dans ne la conformation de leur bouche des différences cor- F respondantes.Chezles crus- ‘ tacés broyeurs ,1l exisie au 7 h devant de cetie ouverture Rx: une lèvre courte et trans- versale, suivie d’une paire de mandibules, d'une lèvre hs 2: inférieure, d’une ou deux A paires de mächoires pro- prement dites , et en général d’une ou de trois paires de mâ- choires auxiliaires ou pattes-mächoires, qui servent prineipa- lement à la préhension des alimens.Chez les crustacés suceurs, au contraire , la bouche se prolonge en une espèce de bec ou de trompe , semblable à ce que nous avons déjà vu chez les insectes , dont les mœurs sont analogues. Dans l’intérieur de ce tube se trouvent des appendices grèles et pointus , qui font l'office de petites lancettes , et , de chaque côté , on voit d’ordi- naire des organes analogues aux mâchoires auxiliaires des crustacés broyeurs, mais qui sont conformés pour servir à fixer l'animal sur sa proie. Le canal digestif s’étend de la tète à l'extrémité postérieure de l’abdomen , ei se compose d’un æœsophage très court, d’un es- tomac grand (e , fig. 475) et en général armé intérieurement de dents puissantes, d’un intestin grèle et d’un rectum. Chez quelques crustacés , la bile est sécrétée par des vaisseaux (r) Portion antérieure de ia face inférieure du corps d’un erabe (le maja) - — ai antennes internes ; — « antennes externes; — y yeux; — o organe auditif; m pattes mâchoires ; — 2 bouche; —p base des pattes antérieures ; — 7 ouverture afférente de la cavité respiratoire : — s sternuim. 992 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. biliaires assez semblables à ceux des insectes ; mais, en géné- ral, ilexiste un foie très volumineux ( fo, fig. 475), divisé en Fig. 475. (1) plusieurs lobes et composé d'une multitude de petits tubes ter- minés en cul de sac et groupés autour d’un canal excréteur ramifié , dont l’extrémité débouche de chaque côté dans l’in- testin , près du pylore. On ne sait rien sur la manière dont le chyle passe de Pintes- Un dans l'appareil circulatoire. Le sang est incolore ou légère- ment teint en bleu ou en lilas, et se coagule facilement. Ce liquide est mis en mouvement par un cœur situé sur la ligne médiane du dos (ce, fig. 475) et composé d’une seule cavité. Sa (r) Anatomie du crabe tourteau : — p portion de la membrane cutanée qui tapisse la carapace; — c cœur ; — ao artère ophthalmique ; — «& artère abdo- minale ; — 2 branchies dans leur position naturelle ; — &’ branchies renversées eu dehors, pour montrer leurs vaisseaux efférens;—f7 voûte des flancs ;—fappen- dice flabelliforme ( ou fouet ) des pattes mâchoires;—e estomac,—m muscles de Pestomac ; — fo foie. LES CRUSTACÉS. 993 forme varie , comme nous le verrons par la suite, Ses contrac- lions chassent le sang dans les artères , qui le distribuent à toutes les parties du corps. Les veines sont très incom- plètes et sont formés princi- palement par les lacunes que les divers organes laissent entre eux et que tapisse une couche mince de tissu cellu- laire : elies aboutissent à de vasies sinus, situés près de la s base des pattes (s, /ig. 476 el Fig. 476.(1) fig. 477)et de ces cavités le sang se rend aux organes respiratoires, puisrevient au Cœur par des canaux bien distincts, nommés branchio-cardiaques (+, fig. 471). Les crustacés sont presque tous des animaux essentiellement aquatiques : aussi leur respiration se fait-elle presque toujours b ve ce f vb à l’aide de branchies, et, lorsque ces or- ganes manquent,c’esi la peau de certai- h nes parties du corps (le plus souvent des pattes) qui en tient lieu. Il existe un très - # petit nombre de ces animaux qui viveni s ce à l'air ; mais ils font Fig. 477. (2) excepiion à ce que nous avons dit relativement aux différences de structure de l'appareil respiratoire chez les animaux aquatiques et terres- tres , Car au lieu d’être pourvus de poumons ou de trachées, ils respirent par des branchies; comme les premiers ; seule- (1) Thorax d’un crabe (le maja) ouvert et va de côté : — p base des pattes ; — { voûte des flancs ; — 2 branchies ; — s, s sinus veineux; — c cellules des flaucs dans lesquelles ces sinus sont logés. (2) Coupe verticale du thorax d’un crustacé montrant la marche suivie par le Sang:— c Cœur ; —s sinus veineux ; — & branchies; — va vaisseau qui porte le sang veineux aux branchies ; —ve vaisseau qui recoit le sang après son passage a travers le réseau capillaire des branchies ;—à vaisseaux branchio-cardiaques ; — f voûte des flancs; — st sternum; — ce céllules des flancs; — # base des pattes. Classifica- tiou. 994 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. ment ces organes sont disposés de manière à se maintenir dans un état d'humidité nécessaire à l’exercice de leurs fonc- tions. Du reste la disposition des branchies varie beaucoup dans les divers crustacés : tantôt ce sont des portions mem- braneuses des membres abdominaux ou thoraciques qui les coustituent ; tantôt ce sont des organes d’une structure beau- coup plus compliquée , formés d’une multitude de lamelles ou de petits cylindres ( , fig. 475). Les crustacés sont tous ovipares; la femelle se distingue en général du mâle, par la forme plus élargie de son abdomen, et , après avoir pondu ses œufs, elle les porte pendant un certain temps suspendus sous cette partie du corps ou même renfermés dans une espèce de poche formée par des appendices apparte- nant aux pattes; quelquefois les petits naissent dans cette poche et y restent jusqu'à ce qu'ils aient subi leur première mue. En général les jeunes n’éprouvent pas de véritables métamor- phoses; quelquefois cependant ils acquièrent par les progrès de l’âge, un plus grand nombre de pattes , et il en est qui chan- gent complètement de forme pendant les premiers temps de la vie. La classe des crustacés se divise en trois groupes naturels d’après la conformation de la bouche, savoir : 1° Les CRUSTACÉS BROYEURS dont la bouche est armée de mâ- choires et de mandibules propres à la mastication. 2° Les CRUSTACÉS SUCEURS dont la bouche est composée d’un bec tubulaire armé de sucçoirs. 3° Les CRUSTACÉS xYrHOSURES dont la bouche ne présente pas d’appendices qui lui appartiennent en propre, mais est en- tourée de pattes dont la base fait office de mâchoires. DIVISION DES CRUSTACÉS BROYEURS. Cette division de la classe des crustacés comprend le plus grand nombre de ces animaux et se compose de tous ceux dont lor- ganisation est la plus compliquée et la plus parfaite. Ces crus- tacés ne vivent presque jamais en parasites comme le font tous les suceurs et se nourrissent habituellement d’alimens solides. Ils varient beaucoup par leur forme extérieure et par la struc-— ture de leur appareil respiratoire ; on les a divisés en neuf or- dres d’après les caractères suivans : CRUSTACÉS DÉCAPODES. 995 | les branchies renfermées dans des cavités parti- culières, situées de chaque côté du thorax. Pres- DÉCAPODSS. [ay ant les yeux pédon- | | que toujours cinq paires de pattes. ben et mobiles , et presque toujours des ( | branchies proprement £ à se 5 les branchies extérieures. Pattes en nombre va- ) | dites.( Podophthalmes.) \ : OMAPODES. ( P / \ riable STOMAPODES ! [ . | | / Appendi- Abdomen | ce flabelli-| très déve- ; AuPuironss. forme des | loppé. | - | pattes tho-« n Pattes raciques Abd = thoraciques ae: d SAUT, <- x k. ambulatoi- / "van . ja | rudimentai- | LEIPODSS. = È sp = es me is es | Edrio-\ ** piration. | re. = TEMPIACEES | Lhthalmes. ) : & | par certaines Appendices flabellifor ä portions mem- mes des fausses pattes ab- | NT e z : . $ ES Z \ ayant les yeux | braneuses des dominales, servant à la 2 | presque lou- |} battes ou des respiration. Fe | Jours sessiles. | fausses pattes. LME { =. Point de bran. £ S à Corps nu ou garni d’ une 1 | eLs nu = RRE nm N nes i S SRE. = à chies propre- aciques "4° Ÿ carapace siinpie - ment dites. melleuses et na s. z tatoire Corps renfermé entre | | { Branchio- PHYLLOFODES deux valves. \podes } 1 hie Corps renfermé dans na € e “4 Jranc #3 D pr æ nt dix bouclier composé de Ç COLEPODES. ite i organ ar Pre S PaTHCU- À eux valves latérales. liers, ohne de mauière Ê ara ntenir | L = \ D à - + = Fe Ra A Corps sans carapace ni) l i 1, D À à neue 100" T'enveloppes , en forme de | osrorouss. race ee . dE coquilie bivalve. | CBDRE DES CRUSTACÉS DÉCAPODES. L'ordre des décapodes comprend les crabes, les écrevisses , et tous les autres crustacés dont les branchies sont intérieures et dont les pattes sont au nombre de einq paires. La tète et le tho- rax de ces animaux sont confondus en une seule masse que re- couvre une grande carapace (fig. 478, 479 et 480) ; ce bouclier dorsal s’avance en général plus où moins loin au devant du front, descend de chaque côté jusqu’à la base des pattes, et s’étend en arrière jusqu’à l’origine de l'abdomen. Ilen résulte qu’en dessus on ne peut distinguer dans toute cette partie du corps aucune trace de division anfuläire: mais en dessous la plupart des an- neaux , quoique soudés entre eux, sont encore reconnaissables et laissent dans leurs points de jonction, des lignes de suture plus ou moins distinctes. C’est au thorax que ces divisions se voient le mieux et si on enlève la carapace on trouve que, dans cette portion du corps, les anneaux sont méme bien plus com- plets qu’on neserait porté à le croire au premier abord ; car non- seulement, l’arceau inférieur ou sternal de ces segmens est très | Orgamisa- Uon. 936 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. développé, etconstitue une sorte de plastron plus ou moins large, mais chacun de ces segmens est en outre pourvu des pièces laté- rales de son arceau dorsal ; tes dernières pièces sont situées au- dessus des pattes el par leur réunion forment de chaque côté une grande cloison ou une espèce de voùle qui remonte sous la cara- pace(f, fig. 476; fi, fig. 475); d’autres cloisons naissent de la face in- terne de cette portion latérale du squelette tégumentaire nom- mée voûte des flancs, et, se réunissant à des lames semblables qui s'élèvent du plastron sternal , constituent au-dessus de la base des pattes, une donble rangée de cellules destinées à loger les principaux muscles de ces organes (r,fig. 477). Dans la portion abdominale du corps , les divers anneaux sont presque toujours mobiles les uns sur les autres et ne consistent qu’en un anneau pius ou moins comprimé, sans lames ni cellules intérieures. Quant à la forme générale et aux proportions de ces diverses parties , elles varient dans les différens groupes dont cet ordre se compose. C’est chez les décapodes que lesystème nerveux est le plus dé- veloppé(/g. 473)et queles organes des sens sont les plus parfaits. Les yeux sont toujours portés à l’extrémité d’une paire d’appen- dices mobiles qui naissent du premier segment de la tête (y, lig. 473); quelquefois la longueur de leur pédoneule est très consi- dérable eten général ils peuvent se reployer dans les cavités qui remplissent les fonctions d’orbites, et qui sont formés par le bord antérieur de la carapace. Les antennes, qui paraissent être aussi des organes desensation, sont toujours au nombre de quatre etont la forme de petites tiges articulées, plus ou moins longues, insérées entre les yeux etla bouche(uë, a, fig.474); leur longueur varie beaucoup, mais presque toujours ce sont celles de la seconde paire qui sont les plus grandes. On trouve dans l’article basilaire des antennes antérieures (ou internes) , une petite cavité qui, suivant quelques naturalistes, pourrait biea être un organe de l’odorat , et à la base des antennes exlernes (ou de la seconde paire), est situé l'appareil de l’ouiïe dont nous avons déjà fait connaitre la structure (o , fig. 477). Les organes de la locomotion sont également très déve- loppés chez ces crustacés; plusieurs courent avet une rapi- dité extrême et d’autres nagent avec encore plus de vitesse. Leurs pattes, comme nous l'avons déjà dit, sont au nombre de cinq paires ,et sont fixées aux cinq derniers anneaux du thorax, mais en général celles des quatre dernières paires seules servent à la FRERE et celles de la première paire, terminées par une pince plus ou moins parfaite , deviennent des organes de préhension (fig. 479). Chez les décapodes les mieux “conformes pour la nage, le corps est allongé et l'abdomen CRUSTACÉS DÉCAPODES. 997 se termine par une large nageoire transversale (fig. 480), tandis que chez @ux qui sont conformés pour courir, l'abdomen est très court, ne présente pas de nagecire terminale ,et se recourbe sous le thorax. L'appareil de la mastication est très compliqué; la bouche est armée de deux fortes mandibules et de cinq paires de mà- choires ou de pattes-mächoires, qui se recouvrent les unes les autres. L’estomac , situé immédiatement au-dessus de la bouche , est vaste et armé de plusieurs pièces solides semblables à des dents qui broient les alimens avant leur entrée dans le pylore ; enfin le foie est très volumineux et divisé en plusieurs lobes (fig. 475); sa couleur est jaune , et c’est ce viscère que l’on désigne vulgairement sous le nom de farce chez les crabes et les écrevisses. Le cœur des décapodes est situé vers le milieu du thorax entre les deux rangées latérales de cellules contenant les muscles des pattes , et au-dessus de l'intestin; sa forme est à-peu-près carrée etilen naïîtsix artères dont les branches portent le sang dans toutes les parties du corps. Les branchies consis- tent en un nombre considérable de pyramides composées cha- cune d’une multitude de petits cylindres disposés comme les poils d’une brosse ou de petites lamelles empilées les unes sur les autres comme les feuillets d'un livre ; ces organes sont fixés par leur extrémité au bord inférieur de la voùte des: flancs (fig. 475) , et sont renfermés dans deux grandes cavités situées sur les côtés du thorax et comprises entre la carapace et la voûte dont nous venons de parler , disposition qui ne se retrouve dans aucun autre animal de cette classe. La cavité respiratoire com- munique au dehors par deux ouvertures ; lune servant à l’entrée de l’eau , est presque toujours située entre la base des pattes et le bord de la carapace (r, fig. 474); l’autre, destinée à la sortie de ce liquide, est placée sur les côtés de la bouche. Enfin le renou- vellement de l’eau à la surface des branchies , est déterminé par les mouvemens d’une grande valvule située près de cette dernière ouverture et formée par un appendice lamelleux des mâchoires de la seconde paire. Les crustacés décapodes forment trois groupes naturels qu’on a désignés sous les noms de brachyures , d’anomoures ;, et de macroures , et qu’on peut distinguer d’après la conformation de l’abdomen et la position des ouvertures destinées au passage des œufs. Classifica- tion. 998 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. Décapodes La section des DÉCAPODES BRACHYURES secomposedescrus- bruchyures. tacés quisont conuus vulgairement sous le nom commun de cra- bes. Ils sont confor- més pour la course plutôt que pour la nage , et sont re- marquables par Pé- tait presque rudi- mentaire de leur abdomen qui ne constitue qu’une espèce de tablier recourbé sous le thorax. La carapace est très large et semble, au pre- mier abord, recou- vrir tout leur corps, car l’abdomen ne se voit que lorsqu'on renverse l'animal sur le dos. Le plastron sternal est également très large, et c’est dans ce bouclier inférieur, près de lorigine des pattes de la troi- sième paire, que sont percées les deux ouvertures deslinées au passage des œufs. Les antennes sont courtes; les pattes-mä- choires extérieures recouvrent tout l’appareil buccal comme des opercules {m, fig. 474); les pattes de la première paire se ter- minent par une espèce de main armée d’une pince dont le doigt inférieur est immobile; les pattes des quatre paires suivantes sont terminées par un tarse styliforme ou lamelleux, et Pabdomen ne porte que des appendices rudimentaires fixés sur deux ou quatre des segmens qui suivent le premier : l’avant-dernier anneau en est toujours dépourvu, et il n’existe jamais de nageoire à extrémité postérieure du corps. Il est aussi à noter que dans cette grande division de l’ordre des décapodes , tous les ganglions nerveux du thorax sont réunis en une seule masse, et qu’il n’existe pas de ganglions dans l’abdomen, de sorte que le système nerveux ne présente que deux centres médullaires, l’un placé dans la tête au-devant de l’œsophage , l’autre dans le thorax en arrière de l’estomac et au-dessous de l'intestin ( {g. 473). Enfin les branchies sont tou- jours lamelleuses, et leur nombre est presque toujours de neut paires de chaque côté du corps, mais celles des deux premières paires sont toujours rudimentaires. Les brachyures forment quatre familles naturelles , qui se composent chacune de plusieurs tribus subdivisées à leur tour en un grand nombre de genres. F'q. 478. TELPHUSE. CRUSTACÉS DÉCAPODES. 999 L'une de ces familles a recu le nom d'OXYRHINQUE à cause de la forme plus ou moins triangulaire de la carapace, dont l'extrémité antérieure se prolonge presque toujours de ma- nière à former une espèce de bec (ou rostre) très aigu. Plu- sieurs des crabes appartenant à ce groupe, sont remarqua- bles par la longueur de leurs pattes et sont appelés par les pé- cheurs araignées de mer ; tels sont les INACHUS , les MAIA, etc. La seconde famille , celle des CYCLOMÉTOPES, se reconnait à la forme arquée de la partie antérieure de la carapace et à quelques autres caractères qu’il serait trop long d’énumérer ici. On y range la plupart des crabes les plus connus de nos côles ; ceux dont le dernier article des pattes postérieures est styliforme vivent près des bords de la mer , et marchent plus qu’ils ne nagent, tandis que ceux dont les pattes postérieures se terminent par un article lamelleux et cilié sur les bords, sont nageurs et habitent souvent la haute mer. Cest à la première de ces subdivisions dela famille des cy- clométopes qu’appartlient le tourteau Où crabe poupart (cancer pagurus) quise trouve en grand nombre sur nos côtes et qui se fait remarquer par sa grande taille et le goût délicat de sa chair. Ilest de forme ovalaire , et de couleur brun-rouge en dessus ; on en prend souvent dont la carapace a près d’un pied de large. Le crabe commun de nos côtes, que les naturalistes désignent sous le nom de carcin menade, se reconnait à sa carapace or- dinairement verdätre et armée de chaque côté de cinq dents situées en dehors des orbites , et a ses pattes postérieures dont le dernier article est un peu élargi sans avoir cependant la forme d’une rame natatoire. Ce crustacé se tient ordinairement sur la plage et court avec une grande vitesse ; il peut vivre long-temps à l’air pourvu qu’il y trouve assez d'humidité pour empé- cher le dessèchement de ses branchies , et il a l'habitude lorsque la mer se retire, de s’enfoncer dans le sable. On en mange un grand nombre ; mais il est moins estimé que le tourteau et n’a guère plus de trois pouces de large. Il existe aussi près de nos côtes plusieurs petites espèces de crabes nageurs, qui pour la plupart appartiennent au genre PORTUNE. Dans la FAMILLE DES CATOMÉTOPES, la carapace est en Famille des oxyrlhinques, Maia. Famille des cyclométopes. Tourtear. Careins. Portunes. Famille des catométopes, Thelphuses. Gécarcei- HIieLSe 1000 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. général à-peu-près carrée ou ovalaire, le front rabattu et le bord postérieur du plastron sternal , beaucoup plus large que Pab- domen. Plusieurs des crustacés qu’on y range, sont remarqua- bles par leurs mœurs ; tels sont les Ocypodes, les Thelphuses et les Gécarciniens. On donne le nom de THELPHUSES ( /ig. 478) à des crustacés qui ressemblent beaucoup aux crabes proprement dits, mais qui,au lieu d’habiter la mer, vivent au loin dans l’intérieur des terres, au bord des ruisseaux ou dans les bois humides où ilsse cachent sous les pierres. Un de ces animaux est répandu en Italie, dans la Grèce et en Egypte. Les GÉCARCINIENS ont la carapace plus ovalaire que les pré- cédens, et se distinguent surtout par la forme particulière de leurs paites-mà- choires externes. On en trouve en Asie, et en Amérique, mais c’est principale- ment dans quel- ques parties de ce dernier conti- nent qu’ils abon- dent; aux Antil- Fig. 419. GÉCARCIN. les on les connaît sous les noms de tourlouroux , de crabes de terre , etc. Au lieu de vivre dans Veau comme les crustacés ordinaires , ils sont terrestres , et , quoi- qu’ils soient pourvus de branchies,quelques-uns d’entre eux s’as- phyxient promptement par la submersion; leur a ci est en effet trop active pour que la petite quantité d’oxigène dis- soute dans l’eau, puisse suffire à leurs besoins, tandis que dans l'air ils trouvent ce gaz en abondance, et une disposition ana- logue à celle que nous avons déjà rencontrée chez quelques pois- sons , leur permet de rester hors de l’eau sans que leurs bran- chies se dessèchentau point de devenir impropres à remplir leurs fonctions ; tantôt il existe au fond de la cavité respiratoire, une espèce d’auge destinée à servir de réservoir pour l’eau néces - saire au maintien de l'humidité autour des branchies ; d’au- tres fois on trouve à la voûte de cette cavité une membrane spon- CRUSTACÉS DÉCAPODES. 1001 gieuse qui parait servir aux mêmes usages. La plupart de ces crabes déterre se tiennent d'ordinaire dans les bois humides, et s’y cachent dans des trous qu'ils creusent dans le sol ; mais les localités qu'ils préfèrent , varient suivant les espèces : les unes vivent dans les terrains bas et marécag:ux qui avoisi- nent la mer , d’autres sur les collines boisées loin du littoral , et à certaines époques, ces dernières quittent leur demeure habituelle pour gagner la mer. On rapporte qu’alors ces crus- tacés se réunissent en troupes nombreuses et font ainsi des voyages très longs sans se laisser arrêter par aucuu obstacle, et en dévastant tout sur leur passage. Ils se nourrissent principalement de substances végétales et sont nocturnes ou crépusculaires; c’est surtout lors des pluies qu'ils quittent leurs terriers et ils courent avec une grande rapidité. On en a formé plusieurs genres sous les noms de GÉCARCIN, UuCA, etc. Les ocYPpODESs ont la carapace carrée et très élevée , et sont remarquables par la grandeur &e leurs pédoncules oculaires et par la rapidité avec laquelle ils courent sur le sable des bords de la mer. On en trouve plusieurs espèces en Egypte , en Asie et en Amérique. Les GÉLASIMES sont très voisins des ocypodes, mais méritent d’être cités à cause de la conformation singulière de leurs pat- tes; chez le mâle l'espèce de main qui termine l’une de celles de la première paire, acquiert des dimensions énorines : elle est quelquefois beaucoup plus grande que tout le reste du corps et l'animal parait s’en servir pour fermer l’entrée du ter- rier dans lequel il vit. La plupart de ces crustacés habitent l'Amérique et les iles de l'Océan Indien. C’estaussi à celte famille qu’appartiennent les GRAPSES, qui ont la carapace quadrilatère et en général très déprimée ,et qui vi- vent au milieu des rochers des bords de la mer. Une espèce de ce genre est assez commune sur nos côtes. On donne le nom de NAUTILOGRAPSES a de petits crustacés qui ressemblent beau- coup aux grapses et qui se rencontrent fréquemment en haute mer , flotiant sur de grandes plantes marines. Il est probabie que le crabe apercu par Christophe-Colomb , quelques jours avant la découverte du Nouveau-Monde , et considéré par ce célèbre navigateur comme un signe du voisinage des terres, élait un de ces crustacés. Ocypodes, Gélasimes. Grapses. Famille des oxvystomes, Leucosiens. Calappes. Matutes. Section des 1ï)omoures. Dromies. Homoles. Hippes. Porcellares 1002 7ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. Enfin, on classe encore dans cette famille les PINNOTHÈRES, petits crustacés, presque sphériques et assez mous, qui se lo- gent dans l’intérieur de la coquille des moules et de quelques autres mollusques bivalves. La cinquième et dernière famille de la section des brachyures est celle des OXYSTOMES caractérisés par la forme triangulaire de la bouche et par quelques autres particularités de structure. Chez plusieurs de ces crustacés , donton a formé la tribu des LEU- COSIENS, il n'existe pas comme d'ordinaire au-devant de la base des pattes antérieures une ouverture servant à l'entrée de l’eau nécessaire à la respiration, et ce liquide n’arrive dans la ca- vité branchiale que par un canal qui s’ouvre au devant de la bouche. D’autres oxystomes sont remarquables par la forme de leurs pattes antérieures qui s’élèvent en crêtes, et s’ap- pliquent contre la bouche ; tels sont les CALAPPES dont la cara- pace se prolonge de chaque côté au-dessus des pattes comme une espèce de bouclier, et les MATUTES dont les pattes sont ter minées par un article aplati en forme de rame natatoire. Les décapodes de la SECTION DES ANOMOURES présentent dans leur organisation des différences assez grandes; leur abdo- men n’est pas un organe puissant de natation comme cela a lieu chez les macroures , mais n’est pas non plus’en général réduit à un état aussi rudimentaire que chez les brachyures ; et presque toujours il existe une paire d’appendices fixés à son avant-der- nier anneau; chez la femelle il n'existe pas d’ouverture sur le plastron sternal , mais on remarque un petit trou à l’article basilaire des pattes de la troisième paire ; enfin les branchies sont presque toujours beaucoup plus nombreuses que dans la section précédente, et disposées par faisceaux sur plusieurs rangées. Cette division comprend les DROMIES qui se reconnaissent à leur forme globuleuse et à leurs quatre pattes postérieures re- ployées sur le dos; les HOMOLES dont une espèce qui habite la Méditerranée , mesure trois pieds lorsque ses pattes sont éten- dues ; les HIPPES etles RÉMIPÈDES qui ont les pattes très courtes et conformées pour fouir dans le sable ; les PORCELLANES, etc. ; mais CRUSTACÉS DÉCAPODES. 1003 les seuls anomoures surlhistoire desquels nous nous arrêterons un instant, sont les PAGURES, animaux singuliers dontl’abdomen Pagures. gros et contourné sur lui-même , est tout-à-fait membraneux, tandis que les tégumens du reste de leurs corps sont crustacés comme d'ordinaire ; ce mode de conformation rend leur ab- domen d’une délicatesse extrême , et pour le protéger, ces ani- maux se logent dans des coquilles de diverses mollusques gastéropodes ; ils s’y cramponnent à l’aide de leurs pattes pos- térieures qui sont courtes, et trainent partout avec eux cette demeure dans laquelle ils peuvent à volonté se retirer en entier. On en trouve plusieurs espèces sur nos côtes , et on les désigne généralement sous les noms de Bernards-l'hermite, de soldats, etc. Les BIRGUS sont de grands crustacés de la mer des Indes, Pirgus. qui, sans avoir l'abdomen entièrement membraneux, comme les pagures , en diffèrent très peu, et paraissent pouvoir vivre très long-temps hors de l’eau à la manière des crabes de terre. Les DÉCAPODES MACROURES se reconnaissent du premier Section des abord par le grand développement de leur abdomen, qui se macroures. termine toujours par une grande nageoire (n, fig. 480) composée as r "+ pm D. ph D Fig. 480. PALEMON. (1) (t) as Antennes de la premiére paire ; — ai antennes de la seconde paire ou antennes inférieures ; —/ appendice lamelleux qui en recouvre la base ;—r rostre ; — ÿ yeux, — pm patte mâchoire externe; — p’ patte thoracique de la première 65 1904 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. de cinq lames disposées en éventail. Ce sont des crustacés es- sentiellement nageurs , qui ne viennent pas à terre et qui ne marchent que peu au fond de l’eau ; 1ls nagent presque toujours, et en frappant l’eau avec leur puissante queue, ils se lancent en arrière avec une vitesseextrème.Leur corps est allongéet presque toujours comprimé latéralement ; ils ont des antennes très lon- gues et le dessous de leur abdomen est garni de fausses pattes natatoires. (fp) Cette section de l’ordre des décapodes se compose de quatre familles : les Macroures cuirassés , les Thalassiniens, les Asta- ciens et les Salicoques. l'amilledes L€S MACROURES CUIRASSÉS sont remarquables par l’épaisseur macroures €t la dureté de leur squelette tégumentaire et par la largeur de cuirassés. Jeur plastron sternal. On range dans cette famille les Lan- goustes , les Scyllares , les Galathées , etc. Langoustes. L€S LANGOUSTES sOnt des crustacés de grande taille dont les antennes sont cylindriques et très longues, dont toutes les pattes sont monodactyles , dont le front est armé de deux gros- ses cornes recourbées, et dont la carapace est en général héris- sée d’une multitude d’épines. La chair de ces animaux est très estimée ; ils fréquentent pour la plupart les côtes rocailleuses , et il s’en trouve dans nos mers une espèce qui est très com- Scyllares, Mune. Les SCYLLARES et quelques macroures qui s’en rappro- chent extréèmement, ont comme les langoustes toutes les pattes monodactyles , disposition qui est assez rare dans cette section, mais ils sont caractérisés par la forme singulière des antennes externes qui sont irès.larges et lamelleuses. La Méditerranée en Galathées. possède deux espèces. Enfin les GALATHÉES dont on trouve aussi plusieurs espèces sur nos côtes , ont les pattes de la première paire terminées par une grande main didactyle et les pattes de la cinquième paire , grèles, impropres à la locomotion , et re- ployées au-dessus des autres. Famille des Dans la FAMILLE DES THALASSINIENS , les tégumens sont thalassiniens. peu Consistans, le sternum est iinéaire, et 1l n'existe pas comme paire; —p’ patte thoracique de la seconde paire; —/p fausses pattes patatoires de l'abdomen, —- nr nageoire caudale. CRUSTACÉS DÉCAPODES. 1005 dans les familles suivantes une écaiile mobile au-dessus de la base des'antennes externes. La plupart des crustacés de cette di- vision vivent enfontés dans le sable à quelque distance du ri- vage; on en trouve sur nos côtes deux genres, les AxIESs et les CALLIANASSES. Dans la FAMILLE DES ASTACIENS, lesternum est également linéaire , de facon que les pattes se touchent presque par leur base; mais il existe au-dessus de la base des antennes externes un appendice lamelleux et mobile. Il est aussi à noter que les branchies sont conformées en manière de brosses. Ce petit groupe ne présente d’intéressant que le genre des ECREVISSES (astacus) composé de plusieurs macroures , dont les uns vi- vent dans les fleuves ou les ruisseanx , les autres dans la mer ; leur squelette tégumentaire est très solide et leur carapace se iermine antérieurement par une espèce de corne médiane , nommée rostre ; leurs pattes antérieures sont très grosses, et ar- mées de pinces didactyles extrêmement fortes ; celles des deux paires suivantes quoique grèles sont également didactyles, tandis que celles de la quatrième et de la cinquième paires sont monodactyles.La chair de ces crustacés est très estimée et on en fait une pêche active. L’ecrevisse commune Ou ecrevisse fluviatile, de couleur brun- verdâtre , à rostre armé d’une petite dent de chaque côté et à pinces chagrinées , habite les eaux douces de l’Europe et du nord de l'Asie , et se tient ordinairement dans des trous ou sous des pierres. Chaque année vers la fin du printemps, elle change d’enveloppe ; sa croissance paraît durer pendant toute sa vie qui dépasse vingtans; sa taille est cependant toujours médiocre. Elle est très vorace et se nourrit de mollusques , de petits poissons , etc. Le homard ou écrevisse de mer est beaucoup plus grand et a le rostre armé de chaque côté de trois petites dents ; ses pinces sont inégales et très grosses. IL habite le voisinage des côtes et se tient au milieu des rochers ; on en trouve beaucoup sur les côtes de la Bretagne. La FAMILLE DES SALICOQUES comprend un grand nombre de macroures , qui , pour la plupart, sont de petite taille et se font reconnaitre par la grande lame qui recouvre toute la base de leurs antennes inférieures (fig. 480 , Z) ; leurs branchies sont 65. Famille des astaciens. Ecrevisses. Homards. Famille des salicoques. l'énées. Palémoncs, Crangons,. Organisa- tion, 1006 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. lamelleuses et leur corps en général comprimé. Nous citerons parmi ces crustacés les Pénées , les Palémons et les Crangons, qui sont tous comestibles. Les PÉNÉES ont, comme les écrevisses, les pattes des trois premières paires didactyles ; mais ces organes sont grèles , et les antérieures sont encore plus courtes que les suivantes ; il est aussi à noter que leurs tégumens sont peu solides, et que leurs antennes internes sont très courtes. Une espèce de ce genre ap- pelée vulgairementcaramote, esttrès commune dans la Méditer- ranée ; sa longueur est d’environ neuf pouces et sa chair est très délicate. Les PALÉMONS , qui sont connus Sur nos côtes sous les noms de crevettes, chevretles , salicoques et bouquets, Sont également recherchées pour lusage de la table ; on les reconnaît au long rostre denté en scie , dont leur front est armé (fig. 480), à la conformation de leurs pattes dont les deux premières paires sont grèles et didactyles , et à leurs antennes internes terminées par trois filamens. On les trouve en assez grande abondance sur nos côtes, à peu de distance du rivage, mais toutes les es- pèces de nos mers sont d’assez petite taille. Enfin les CRANGONS qui ressemblent aux précédentes par la forme générale , mais sont plus aplatis , manquent de rostre et ont les pattes antérieures terminées par un seul doigt qui se reploie en manière de griffe contre la main. Leur chair estun peu moins estimée que celle des palémons et leurs tégumens de couleur grisâtre , ne deviennent pasrouges par la cuisson comme cela a lieu chez la plupart des crustacés. Ils sont très communs sur nos côtes. ORDRE DES CRUSTACÉS STOMAPODES. Cette division comprend les crustacés doni les yeux sont por- tés sur des pédoncules mobiles, dont le thorax est recouvert en totalité ou en partie par une carapace , et dont les pattes sont cylindriques comme chez les décapodes , mais dont les branchies ne sont pas renfermées dans une cavité située de CRUSTACÉS AMPHIPODES. 1007 chaque côté du thorax au-dessous de la carapace ; 2n général ces dernièrs organes ont la forme de houppes et sont fixés aux fausses pattes de l'abdomen , mais quelquefois on les trouve appendus aux pattes thoraciques, et d’autres fois ils sont rudi- mentaires où manquent même complètement ; dans ce dernier cas , les tégumens sont simplement membraneux, et la respira- tion parait se faire par la surface générale du corps. Quelques-uns de ces animaux ressemblent extrêmement aux décapodes macroures , les THYSANOPODES par exemple ; mais la plupart ont des formes plus ou moins bizarres. Ainsi chez les SQUILLES qui se trouvent dans la Méditerranée et dans plusieurs autres mers, la carapace est petite et ne recouvre que la moi- tié antérieure du thorax, dont la partie postérieure est compo- sée d’anneaux semblables à ceux de l'abdomen ; les membres qui par leur position correspondent aux pattes-mâchoires ex- terres des décapodes sont extrêmement longs , et se terminent par une grande griffe dentée et préhensile ; les trois paires de membres suivans sont au contraire appliqués contre la bouche et les pattes fixées aux trois derniers anneaux du thorax, sont grèles et natatoires ; enfin l'abdomen se termine par une large nageoire, et porte au-dessous une double série de fausses paties lamelleuses auxquelles sont fixées les branches. Les PHYLLO- SOMES qui appartiennent aussi à cet oràre et qui habitent pour la plupart les mers voisines des tropiques, ont une forme encore plus singulière; leur corps est aplaiti comme une feuille, presque entièrement transparent et composé d’une première lame ovalaire qui représente la têle, d’une seconde lame en partie recouverte par la précédente et donnant insertion aux pattes thoraciques et d’un abdomen souvent rudimentaire ; enfin les pattes de ces animaux sont grèles , bifides et propres à la nage seulement. ORDRE DES AMPHIPODES. Les crustacés amphipodes, isopodes et læmipodes forment un groupe naturel , caractérisé par la forme générale du corps et par plusieurs autres particularités de structure. Chez ces animaux , que ion désigne sous le nom commun & Edrioph- thalmes , les yeux ne sont jamais portés sur des pédoncules mobiles comme chez les décapodes et les stomapodes : il n’existe jamais de carapace. La tête est distincte du thorax, et cette dernière portion du corps se compose toujours d’une série d’anneaux mobiles, dont le nombre est ordinairement de sept Squilles. Phyllosomes Edriophthal- mes. Amphipo- des. Crevettines. Crevettes. Talitres. H vpérines, 1008 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. (fig. 471, page 987, et fig. 481). Presque toujours on compte “aussi sept paires de pattes, et lappareil de la mastication ne se compose , outre les mandibules et les deux paires de mâchoires , que d’une seule paire de pattes- mâchoires. Chez les AMPHIPODES , la respiralion s’effectue à Pai- de de grandes vésicules À À | membraneuses , fixées à la re éd base des pattes et formées par des appendices analo- Fig. 481. TALITRE. gues aux fouets des pattes , chez les crustacés supérieurs; ces organes pendent sous le thorax et sont baignés par l’eau ambiante, dont le renouvelle- ment est assuré au moyen des mouvemens continuels qu’exé- cutent les trois premières paires de fausses pattes abdominales. L’abdomen de ces crustacés est très développé et se compose de sept segmens, dont le dernier est rudimentaire et dont les trois précédens portent chacun une paire d’appendices , qui se réu-- nissent en faisceaux , pour constituer une espèce de queue propre au saut, ou une sorte d’éventail servant de nageoire. Enfin tous les amphipodes sont de petite taille , et leurs pattes assez longues, soni dirigées , les unes en avant, les autres en sens contraire. Cet ordre se compose de deux grandes familles : les Crevet- tines et les Hypérines. Les CREVETTINES soni pour la plupart de petits crustacés, dont le corps est très comprimé latéralement ( y. 481) et dont l'abdomen est conlormé de manière à agir comme un ressort et à scrvir au saut. Elles nagent sur le flanc et ne sont jamais pa. rasites, comme les hypérins. On en connaît un grand nombre, parmilesqueiles nous citerons les CREVETTES PROPREMENT DITES, dont une espèce , appelée vulgairement puce d’eau , est très com- mune dans les ruisseaux , et les TALITRES , qui abondent sur le sable des bords de la mer et sautent avec une agilité extrême. Les HYPÉRINES ont le corps élargi et Pabdomen propre à la CRUSTACES ISOPODES. 1089 nage seulement ; ils vivent presque toujours en parasites sur des poissons et se distinguent des précédens par la conforma- uon de leurs patites-macboires, etc. ORDRE DES LÆMIRODES. Les læmipodes ressemblent aux amphipodes par la confor- mation de leurs organes respiratoires, mais se distinguent des autres Edriophthalmes par l’état rudimentaire de leur abdomen. Les uns, tels que les CHEYROLLES Chevrolles. dont le corps est linéaire et les pattes très grèles, mènent une vie errante; d’autres, dont le corpsest irès élargi et les pattes courtes, vivent fixés sur d’autres ani- maux ; tels sont les CYAMES qui Cyames. habitent en parasites sur le corps de la baleineet qui ont reçu pour cette raison le nom vulgaire de poux de baleine. Fig. 482. CYAME. ORDRE DES ISOPOBDES. Les isopodes ressemblent beaucoup aux amphipodes par Organisation. leur conformation générale, si ce n’est que leur corps est dé- primé et élargi , et que leur abdomen ne se termine jamais par des appendices propres au saut ni par une nageoire caudale composée d’appendices des trois dernières paires comme cela a lieu dans le premier ordre des Edriophthalmes. Ainsi que nous lavons déjà dit , les yeux sont sessiles , le thorax se compose presque toujours de sept anneaux distincts et porte sept paires de pattes ambulatoires (fig. 471, page 987); l'abdomen n’est jamais rudimentaire comme chez les Iæmipodes, et ce sont les lames terminales des fausses pattes abdominales qui rem- .plissent les fonctions de branchies; en général ces organes, dont la forme est ovalaire et la texture membraneuse , sont suspendus librement sous Pabdomen, mais quelquefois ils sont Idotées. Cymothoés. luportes. Trilobites. 1010 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. recouverts par deux appendices en forme de volets qui se re- ploient au-dessous. Enfin on remarque ordinairement chez la femelle de grandes lames fixées à la base des pattes thoraciques et disposées de façon à constituer sous le thorax une sorte de poche destinée à loger les œufs , et les petits pendant les pre- miers temps de la vie. Ceux-ci au moment de la naissance ont souvent une forme un peu différente de celle qu’ils auront par la suite, et manquent d’une paire de pattes qui se développe lors de la première mue. Lés genres principaux de l’ordre des isopodes sont les 1Do- TÉES , dont le corps est étroit et allongé, et les fausses pattes branchiales recouvertes par des lames operculaires; les CYMo- THOÉS dont le corps est élargi et dont les habitudes sont para- sites ; les BOPYRES qui vivent également en parasites (sous la ca- rapace des palémons)et dont les fausses pattes abdominales sont garnies d’appendices branchiaux rameux à-peu-près comme chez les squilles ; et les CLOPORTES ( fig. 471 ), qui au lieu d'etre aquatiques comme tous les précédens , vivent à terre et sont très communs dans nos caves, sous les pierres et autres lieux sombres et humides. C’est aux isopodes que ressemblent davantage les animaux fossiles connus sous le nom de TRILOBITES, mais il parait probable qu’ils en différaient par l’existence de paltes mem- braneuses et simplement natatoires, analogues à celles quenous verrons chez les phyllopodes. C’est seulement dans les couches fossilifères les plus anciennes de l’écorce du globe qu’on ren- contre des trilobites et ils paraissent avoir tous cessé d’exister antérieurement à la création des mammifères. ORDRE DES COPÉPODES. Les copépodes , qui appartiennent à la division des ENTro- MOSTRACÉS , ressemblent assez aux édriophthalmes par la forme générale de leur corps ; ils n’ont pas de carapace et leurs yeux ne sont pas pédonculés , mais en général ces organes, au lieu d'occuper les côtés de la tête sont situés au milieu du front et confondus en une seule masse , de manière que ces pe- Uts animaux ne paraissent avoir qu’un seul œil médian. CRUSTACÉS ENTOMOSTRACÉS. 1011 Les cYCLOPES qui forment le principal genre de ce groupe, sont desscrustacés presque microscopiques, qui se trouvent en grand nombre dans les eaux douces aussi bien que dans la mer. Leur corps est plus ou moins pyriforme et leurs pattes natatoires, mais non membraneuses. Les femelles portent leurs œufs suspendus sous leur abdomen dans un ou deux sacs ova- laires , et les petits subissent des métamorphoses considérables, car en naissant, ils n’ont que quatre pattes, leur corps est arrondi et ils manquent de queue ; mais par la suite ils ac- quièrent une paire de pattes de plus et leur abdomen se déve- loppe de manière à former une longue queue. ORDRE DES OSTRAPODES. Ces Entomostracés sont également de très petite taille et sont pourvus de paites natatoires, non membraneuses et d’un œil unique ; mais ce qu’ils offrent de plus remar- quabie , est l’espèce de double bouclier sem- blable à une coquille bivalve qui recouvre tout leur corps. Les cypris qui forment le type de cette division fourmillent dans nos eaux dou- P ces, mais échappent facilement à la vue à cause Fig. 483. (1) de leur petitesse. ORDRE DES CLADOCÈRES. On range dans cette section de la division des BRANCHIOPODES quelques petits crustacés qui ont également le corps renfermé dans un grand bouclier bivalve , et qui pour la plupart n’ont aussi qu’un seul œil , mais qui sont pourvus de pattes natatoires membraneuses , paraissant remplir les fonctions de branchies. La plupart de ces animaux presque microscopiques , appartien- nent au genre DAPpHNIEet habitent les eaux douces et stagnantes. ORDRE DES PHYLLOPODES. Les phyllopodes, qui appartiennent, comme les précédens, à la division des brachiopodes, sont remarquables par le grand nom- bre de leurs pattes branchiales ; les uns , tels que les BRANCHIPPES, (1) o OEil ; — p pattes. Cyclopes. Caractères. Cypris, Däphnies. Caracteres. Lernées. Limules. 1012 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. ont le corps divisé en une longue série d'anneaux distinets et n’ont pas de carapace; d’autres ont la tète et le thorax cachés sous un grand bouclier horizontal; les Apus par exemple. Presque tous ces crustacés habitent les eaux douces DIVISION DES CRUSTACÉS SUCEURS. Les crustacés suceurs vivent en parasites avec d’autres ani- maux, et ont la bouche en forme de bec ou de trompe cylin- drique renfermant des appendices styliformes propres à per- cer les tégumens des animaux dont ils sucent les humeurs. La structure de ces animaux varie beaucoup et la plupart éprou- vrent dans le jeune âge des métamorphoses considérables ; quelques-uns peuvent toujours marcher ou nager , mais d’au- tres après s’être fixés sur leur proie, prennent un accroisse- ment monstrueux qui les prive de la faculté de se mouvoir ; leurs membres deviennent rudimentaires, tandis que leur corps grossit beaucoup et prend souvent les formes les plus bizarres. Ils viventen général sur des poissons. Dans la classification naturelle des crustacés, les suceurs doivent être répartis en trois ordres distincts , mais ces petits êtres n’offrent pas assez d'intérêt pour que nous nous y arré- tions davantage , et nous nous bornerons à ajouter que la plu- part de ceux qui vivent immobiles et sont dépourvus d'organes locomoteurs rentrent dans la famille des LERNÉES, tandis que le genre principal formé par les suceurs pourvus de pattes naîiatoires est celui des CALIGUES. DIVISION DES CRUSTACÉS XYPHOSURES. Cette division ne se compose que d’un seul genre, celui des LIMULES dont la structure est des plus anomales. Ce sont de grands crustacés dont le corps est divisé en deux parties, la première recouverte par un grand bouclier demi cireulaire , porte les yeux , les antennes et six paires de pieds qui entourent la bouche et qui servent en même temps à la marche et à la mas- tication (voyez fig. 472 , page. 989); la seconde portion du corps recouverte par un autre bouclier presque triangulaire , porte en dessous cinq paires de paites natatoires, dont la paire poslé- rieure est garnie de branchies, et elle se termine par une longue DES CIRRHOPODES. 1013 queue styliforme. Ces singuliers animaux habitent POcéan In- dien et lés côtes d'Amérique; on les connait sous le nom vul- gaire de crabe des Moluques. CLASSE DES CIRRHOPODES. Les cirrhopodes sont des animaux qui ont en même temps de grands rapports avec les mollusques et avec les crustacés, mais qui se rapprochent davantage de ces derniers, el qui ap- partiennentà lembranchement des animaux articulés. Dans les premiers temps de la vie , ces petits êtres qui sont tous marins, nagent librement et ressemblent extrêmement à certains crusta- cés inférieurs , tels que les jeunes cyclops ou les cypris; mais bientôt après ils se fixent pour toujours sur quelque corps sous- marin, et changent complètement de forme. C’est parle dos qu’ils aäbèrent ainsi, et leur corps plus ou moins pyriforme et recourbé sur lui-même est renfermé en totalité ou en majeure pariie dans une es- pèce de coquiile composée de plu- sieurs pièces. Ilsn’ont point d’yeux, et leur bouche est garnie de mandi- bules et de mächoires ayant la plus grande ressemblance avec celle de certains crustacés ; la face abdomi- nale de leur corps est occupée par deux rangées de lobes charnus, por- tant chacun deux longs appendices cornés , garnis de cils et composés d’un grand nombre d’articies; ces espèces de bras ou cirrhes dont le nombre est de douze paires, sont recourbéessur elles-mêmes, et l’animal les fait constamment sortir et rentrer par louverture de sa gaine. À l'extrémité de cette série d’organes se trouve une espèce de queue ayant la forme d’un long tentacule charnu, à la base de laquelle se trouve Panus. Leur système nerveux se compose d’une double chaine de ganglions disposés exacte- Fig. 484. ANATIFE. (1) (1) Une anatife dont les tégumens ont été enlevés, d’un côte, pour montrerles parties du corps renfermées sous le manteau (#1); —ple pied ; — d les appen- dices tentaculiformes. Organisa- tion, Classifica- tion. Anatifes. Balanes. Organisa- tion. 1014 ZOOLOCIE DESCRIPTIVE,. ment comme chez les autres animaux articulés. Ils ont un cœur logé dans la partie dorsale de leur corps, et ils respirent par des branchies dont la forme varie. Les cirrhopodes se divisent en deux familles naturelles : les ANATIFES qui sont fixées par un long pédoncule cylindrique, et les BALANES qui n’ont point de pédoncule semblable. Les ANATIFES sont renfermées dans une espèce de manteau comprimé, ouvert d’un côté et suspendu à un tube charnu : tan- tôt ce manteau est presque entièrement cartilagineux, et n’est garni que de deux valves très petites (les oTIoNs présentent ce mode de conformation), d’autres fois, comme chez les ANATIFES PROPREMENT DITES ,ilest recouvert par cinq lames testacées dont les deux principales ressemblent assez à celles d’une moule. Les branchies qui ont la forme des petites pyramides sont fixés à la base des cirrhes ; enfin c’est dans le pédoncule que se trouve l'ovaire. L’anatife commune habite dans nos mers, et se trouve fréquemment attachée aux rochers , à la quille des navires ou à des morceaux de bois flottans. Elle a été le sujet de fables les plus absurdes ; quelque ressemblance grossière de sa coquille avec un oiseau , a fait dire qu’elle donnait naissance à l’espèce d’oie qu’on nomme bernache. Les BALANES Ou GLANDS DE MER abondent sur nos rochers et sont contenus en entier dans une espèce de coquille ordinaire- ment conique et très courte, qui est fixée par la base et qui se compose de plusieurs pans articulés entre eux ; louverture de ce tube est occupée par deux ou quatre valves mobiles entre lesquelles se trouve une fente destinée à livrer passage aux cir- rhes. Les branchies ont la forme de lames membraneuses fo- liacées et frangées , et elles adhèrent à la face interne de l'espèce de manteau qui tapisse la coquille. CLASSE DES ANNÉLIDES. La classe des ANNÉLIDES ou des vers à sang rouge Se COMPOse de tous les animaux articulés, dépourvus de membres articulés LES ANNÉLIDES. 1015 et dont le sang est coloré en rouge. Guidés par cette dernière circonstance , plusieurs naturalistes ont placé ces êtres à la tête de la série des animaux articulés; mais par leur organisation ils sont évidemment inférieurs aux insectes , aux arachnides et aux crustacés , et ils ressemblent extrêmement à certains ani- maux d’une structure fort simple, les vers intestinaux , placés par ces mêmes auteurs dans l’embranchement des zocphytes. Le corps des annélides est toujours très allongé , mou et divisé par des plis circulaires en un grand nombre d’anneaux : tantôt ils ont une tête distincte, d'autres fois ils en manquent, et d'ordinaire on leur voit de chaque côté du corps une longue série de fais- ceaux de soies portés sur des tubercules charnus et tenant lieu de pieds. Souvent il existe deux de ces organes placés Pun au-dessus de l’autre de chaque côté des divers anneaux du corps (voyez fig. 376, page 840); d’autres fois ces deux tuber- S& cules sétifères sont réunis, et presque toujours il existe à Ja base cha- : cun un long appendice moe cylin- Fee) drique ,nommé cérrhe (ce, fig. 885) ; quel- quefois la place des pieds est indiquée seulement par quelques poils raides , et d’autres fois il n'existe sur tout le corps aucune trace de membres. Ces soies servent aux annélides pour ramper, et leur fournissent aussi des armes pour leur défense , car en général ils sont très acérés et conformés de manière à s’im- planter avec force dans les corps mous, contre lesquels ils frappent. Chez les annélides dépourvus de soies , il existe aux extrémités du corps des ventouses (/ig. 490) qui sont également des instrumens de locomotion. Le système nerveux de ces animaux est peu développé et consisteen une chaine simpleou double, de très petits ganglions étendus d’un bout du corps à l’autre. La plupart sont pourvus d’un certain nombre de petites taches qui paraissent être des yeux , et d'ordinaire leur tête est garnie de plusieurs filamens Fig. 486. (2) (x) Patte d’un annélide du genre Eunice : — 4 tubercule sétifère; —c cirrhe dorsal ; — ci cirrhe inféricur ou ventral; — branchie. (2) Tête et trompe d’un annélide du genre Giycère: — c portion antérieure du corps; — ! tête ; — trompe; — b ouverture buccale ; — m mächoires. Cia-sificanon. 1016 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. analogues aux cirrhes des pieds et appelés antennes et cirrhes tentaculaires {/ig.487), qui paraissent être des organes de tact. La bouche occupe la face inférieure de la tête , ou lextrémité antérieure du corps lorsqu'il n’y a pas de tête distincte ; elle est souvent armée d’une trompe protractile (y. 886) et de mâchoi- res ayant la forme de crochets cornés. L’intestin est droit, tantôt simple, tantôt garni d’un nombre plus ou moins consi- dérable de cæœcums situés de chaque côté. Enfin, lPanus oc- cupe l’extrémité postérieure du corps. Le sang est presque ioujours rouge; quelquefois cependant il est à peine coloré. Ce liquide circule dans un système très compliqué de vaisseaux , dont les uns sont contractiles et tien- nent lieu de cœurs , et d’autres remplissent les fonctions d’ar- ières et de veines. Du reste , la disposition de cet appareil cir- culatoire n’est pas encore parfaitement connue et parait varier d’un annélide à un autre. La respiration de ces animaux est quelquefois aérienne , mais en général aquatique , et dans ce dernier cas elle s’opère ordinairement au moyen de branchiesextérieures dont la forme ei ladisposition varient beaucoup. (9) qise les annélides en quatre ordres, savoir : Les ANNÉLIDES ERRANTES OU DORSIBRANCHES , dont les organes de la respiration sont fixés sur la partie moyenne du corps ou dans toute sa longueur et dont le corps, pourvu de pieds séti- gères pour la locomotion, se termine par une tête presque toujours très distincte. Les ANNÉLIDES TUBICOLES qui n’ont d’organes respiratoires qu’à Pextrémité antérieure du corps et n’ont point de tête distincte, mais sont également pourvus de pieds sétigères. Les ANNÉLIDES TERRICOLES qui sont dépourvus de branchies saillantes, de pieds , et n’ont pas de tête disiinete, mais ont à la place des pieds des soies raides qui en remplissent les fonctions. Enfin les ANNÉLIDES SUCEURS qui sont également privés de pieds et même de soies, mais ont à chaque extrémité du corps une ventouse préhensile qui sert à la locomotion. LES ANNÉLIDES. 1017 . ORDRE DES ANNÉLIDES ERRANS OU DORSIBRANCHES. Les annélides errans ou dorsibranches ont leur organi- sation plus compliquée que les autres animaux de cette classe et sont doués de facultés plus variées. Leur tête est presque toujours parfaitement distincte du tronc et \ pourvue d’un certain nombre d’antennes; on ‘ y remarque aussi une ou deux paires d’yeux qui se montrent sous la forme de taches noi- res où diversement colorées (fig. 487). Leur bouche est garnie d’une trompe protractile , dont la longueur est quelquefois très consi- dérable , et à son extrémité on trouve sou- vent deux ou plusieurs paires de mâchoires cornées (/g. 486). En général il existe de Fig. 487.(1) chaque côté de la nuque un certain nombre de cirrhes tentaculaires, appendices analogues aux antennes, et chaque anneau du corps porte une paire de pieds dont la struc- ture varie beaucoup : souvent ces membres sont composés cha- cun de deux tubercules placés Pun sur larceau dorsal , l’autre sur l’arceau ventral et garnis à leur sommet d’un faisceau de soies (fig. 376); chacun de ces tubercules , qu’on distingue sous les noms de rame dorsale et de rame ventrale, porte ordinairement un appendice charnu plus ou moins filiforme , appelé cirrhe , et c’est presque toujours à la base de l’un d’eux que se trouvent les branchies. D’autres fois ces deux rames sont confondues en un seul organe, qui est alors presque toujours pourvu de deux cirrhes (#g. 485). Les soies qui garnissent le sommet des pieds sont en général raides et rétractiles ; elles servent alors à la lo- comotion et à la défense de l'animal ; mais d’autres fois elles sont très longues et flexibles et ne peuvent pas rentrer dans l'intérieur du corps qu’elles recouvrent comme d’un pelage. La conforma- tion des branchies varie beaucoup : tantôt ces organes ont la forme de simples tubercuies , d’autres fois ils ressemblent à de larges panaches (#9. 485) ou à des arbrisseaux toulfus (y. 488). Ces annélides marchent et nagent très bien, mais vivent cependant le plus ordinairement sous des pierres, parmi les coquilles ou enfoncées dans le sable; une espèce de mucus qui suinle de leur corps constitue souvent autour d’eux une gaine (1) ‘Fete et portion antérieure du corps d’une Néréide. Structure- Moœurs. Aphrodites, 1018 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. tubulaire dans laquelle ils habitent ; mais ce fourreau n’offre jamais la solidité que l’on remarque dans celui de la plupart des tubicoles et l’animal peut toujours le quitter et aller au loin chercher la proie dont il se nourrit. Tous les annélides errans sont marines; on en connait un assez grand nombre, mais leur histoire n'offre pas assez d’intérêt pour que nous nous y arrêtions et nous nous bornerons à citer quelques genres des plus remarquables. De ce nombre sont les APHRoODITES, dont le corps est ovalaire et bordé de longues soies qui brillent des teintes métalliques les plus riches ; leur dos est garni de larges lames membra- neuses disposées comme des élytres et cachées sous une voùte de feutre, formée par une multitude de poils appartenant , comme les soies dont nous avons déjà parlé , aux pieds de l’animal. Les poLY- NOÉS, qui diffèrent peu des aphrodites par leur mode d'organisation , n’ont ni bor- dure, ni manteau de feutre. Les NÉRÉIDES (/ig. 487) sont extrême- ment communes sur nos côtes et ont le corps grèle , très allongé , les pieds garnis à leur sommet de tubercules branchiaux, et la trompe armée de deux mâchoires très fortes. Les EUNICES ressemblent aux néréides par leur forme générale , mais ont les pieds garnis en dessus de longs filamens branchiaux, réunis sur une tige comme des dents de peigne (b, fig. 485). On donne le nom d’AMPHINOMES à d’autres an- nélides de cetordredont les branchies ont la forme d’arbuscules et sont répandues dans toute la longueur du corps. Enfin on range aussi dans cette grande division les ARÉNICOLES (#g. 488) qui vivent dans le sable comme leur nom l'indique, et qui n’ont de branchies que sur la partie = moyenne du corps; leur organisation est Fig. 488. ARÉNICOLE. plus simple que celle de la plupart des ANNÉLIDES. 1019 annélides errans ; leur tête n’est pas distincte et ils n’ont ni antenne, ni yeux, ni Cirrhes, ni mâchoires., Les pêcheurs en font un grand usage pour amorcer leurs lignes, etlorsqu’on les saisit ils font sortir de leur corps un liquide jaune qui teint fortement les doigts. On les trouve dans le sable à un ou deux pieds de profondeur, et leur retraite se reconnait aux petits cordons de sable qw’ils rejettent au-dehors. ORDRE DES ANNÉLIDES TUBICOLES. Les annélides dont cette division se compose n’ont ni tête distincte, ni màchoires, ni yeux, ni antennes, mais l’extrémité antérieure de leur corps est garnie d’un grand nombre d’ap- pendices dont les uns constituent des branchies et d’autres servent à la préhension des alimens ou même: la locomotion. Les pieds de ces ani- maux sont peu saillans et ne leur servent guère que pour s'élever ou pour descendre dans le tube qu’ils habitent ; la plupart ne peuvent ni nager , ni marcher, et ceux qui peu- vent se trainer sur le solse déplacent à l’aide des longs tentacules dont leur bouche est entourée, à-peu-près de la même manière que marchent les mollusques céphalopodes. On range dans cet ordre les sER- PULES , qui vivent dans des tubes calcaires, contournées sur elles- mêmes et qui ont l’extrémité anté- rieure du corps ornée d’une cou- Fig. 489. SERPULES. ronne d’appendices semblables à de superbes panaches disposés en entonnoir; les TÉRÉBELLES qui vivent dans des tuyaux minces, enfoncés dans le sable ou ca- chés sous des pierres et qui ont la bouche entourée de longs ten- tacules simples derrière lesquels se trouvent deux outrois paires de branchies rameuses ; enfin les AMPHITRITES , qui sont faciles à reconnaître aux grosses soies dorées qu’on voit rangées comme les dents d’un peigne à leur extrémité antérieure. 686 Serpules. Térébelles. Amyphitrites, Caractercs. 10290 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. ORDRE DES ANNÉLIDES TERRICOLES OÙ DES ABRANCHES SÉTIGERES. Le Ces annélides ont le corps cylindrique, aminci aux extré- mités et garni seulement de plusieurs rangées de soies qui leur tiennent lieu de pieds; leur tête n’est pas bien distincte et elles n’ont ni yeux , ni antennes , ni mandibules, ni cirrhes , ni branchies extérieures. Elles vivent dans la terre ou dans la . Vase. Lombrice, Les LOMBRICS ou vers de terre forment le type de ce groupe. Ces animaux sont les seuls annélides qui ne soient pas aqua- tiques ; ils vivent dans la terre humide et paraissent respirer par la surface générale du corps et par un certain nombre de petites poches situées à la partie antérieure de leur corps et communiquant au dehors par des pores. Ils pondent leurs œufs au printemps, et chacun de ces petits corps ovalaires ren- ferme plusieurs jeunes vers. Un des points les plus remarqua- bles de l’histoire de ces animaux est la faculté qu’ils possèdent de se multiplier par la simple division de leur corps (voyez page 10). Les naïs sont des annélides très voisins des lombries qui vi- vent dans la vase des étangs et des ruisseaux; leur corps est plus allongé et moins distinctement annelé. ORDRE DES ANNÉLIDES SUCEURS. Cette division comprend tous les annélides dont le corps est dépourvu de soies. Quelquefois leur dos est garni d’appen- dices membraneux qui paraissent remplir les fonctions de branchies (chez les Branchellions), mais en général est complè- tement dépourvu d’appendices quelconques. Ainsi que nous l’avons déjà dit, il existe à chaque extrémité de leur corps une cavité dilatable et préhensile qui agit à la manière d’une ANNÉLIDES. 1021 ventouse et permet à l’animal d’adhérer fortement aux objets sur lesqels il applique ces organes. La bouche est placée au Fig. 490.SANGSUE. fond de la ventouse antérieure(a), et est armée de petites màchoires; lanus est situé à la base de la ventouse pos- térieure (p) et on distingue sur lextré- mité antérieure de la face dorsale du corps un certain nombre de petites ta- ches qui paraissent être des yeux rudi- mentaires. Tous ces annélides, désignés ordi- nairement sous le nom de sangsues , se uourrissent aux dépens d’autres ani- maux qu'ils sucent ou qu’ils avalent en entier. Tantôt ils s’attachent aux poissons où aux batraciens, tantôt ils dévorent les mollusques , les annélides ou les larves dinsectes ; certaines es- pèces s’atiachent aux chevaux , aux bes- üaux et même aux hommes qui vont boire dans les mares ou les fontaines, et ils se nichent quelquefois sous la langue , dans les fosses nasales ou même jusque dans l’æsophage. On donne le nom de HIRUDINÉES à ioutes les sangsues dont le corps est dépourvu d'appendices membraneux. Quelques-uns de ces animaux (dont on a formé le genre ALBIONE) habitent la mer, mais la plupart se tiennent dans les eaux douces. Les SANGSUES PROPREMENT Di- TES (fig. 388) sont au nombre de ces der- niers ; on les reconnait à leur ventouse ovale , oblique, à leurs yeux au nombre de dix disposés sur une courbe, à leurs mächoires fortes , très comprimées et foriement dentelées ( /g. 491), et à leur corps allongé et déprimé. L’armature de leur bouche leur permet de percer la veau de l’homme pour en sucer le sang, et à raison de cette faculté on les em- (1) À ventouse buccale d’uue sangsue médicinale; — m ses trois mâchoires, 66. Saugsues. Hirudinées. Hæmopis. 1022 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. ploie en médecine pour pratiquer des saignées locales. Depuis quelques années l’usage des sangsues est devenu si général, que ces animaux sont aujourd’hui l’objet d’un commerce im- portant ; qu'après en avoir presque entièrement dépeuplé les étangs et les ruisseaux des diverses parties de la France et de l'Espagne , où on les trouvait jadis en abondance , on est obligé de les aller chercher jusque dans la Hongrie et la Tur- quie. On peut en effet les conserver en vie pendant très long- temps en les plaçant dans la terre humide ; en hiver on les voit s’enfoncer dans la vase et y rester dans un état d’engour- dissement pendant toute la saison froide. Les Hæmopis diffèrent principalement des sangsues pro- prement dites par leurs mâchoires ovales, non comprimées et peu dentelées. Une grande espèce de ce genre, connu sous le nom de sangsue de cheval , est très commune dans les eaux douces d'Europe; elle est quelquefois confondue avec les sangsues médicinales , mais c’est à tort qu’on lui attribue les accidens inflammatoires qui se développent quelquefois à la suite de l’application de ces animaux, car elle se refuse con- stamment à se fixer sur la peau de l’homme et ne l’entame ja- mais. —B l’une de ces mâchoires isolée et grossie ; — C bord dentelé de ces mâchoires grossi davantage. LES ZOOPHYTES, 1023 QUATRIÈME EMBRANCHEMENT DU RÈGNE ANIMAL. LES ZOOPHYTES OU ANIMAUX RAYONNÉS. Les animaux qu’on range dans cette quatrième et dernière grande division du règne animal, ont une organisation bien moins compliquée et par conséquent moins parfaite que celle des êtres dont nous nous sommes occupés jusqu’ici. Dans les animaux plus élevés , le corps présente toujours deux moitiés semblables ; tous les organes extérieurs se ré- pètent symétriquement de chaque côté de la ligne médiane, tandis que les faces supérieure et inférieure du corps diffè- rent beaucoup entre elles. Dans les zoophytes, au contraire, cette symétrie ne se montre presque jamais: en général , les divers organes sont placés tout autour de l’axe du corps, de manière à donner à celui-ci une forme rayonnée. Quelquelois cette disposition est portée si loin , que l'animal ressemble à une étoile ,et , chez un grand nombre de ces êtres, elle donne à leur corps l'aspect d’une fleur épanouie. Beaucoup d’entre eux vivent fixés au fond de l’eau et unis entre eux de manière à simuler des arbrisseaux rameux , et cette analogie extérieure avec certains végétaux est si grande, que, pendant long- temps, on a confondu plusieurs de ces animaux avec les plantes marines dont ils ont le port, et que même aujourd’hui que nous savons combien leur structure et leurs fonctions sont diffé- rentes de celles des végétaux, on ne peut leur donner un nom plus juste que celui de zoophytes , ou animaux-plantes. Dans cetembranchement , le système nerveux n’existe plus ou ne se montre tout au plus que dans un état rudimentaire. En général on ne trouve pas d’organes spéciaux pour les sens, et les fonctions de relation se réduisent presque entièrement à un tact plus ou moins obtus et à la faculté d'exécuter des mou- vemens généraux Ou partiels. Quelques-uns de ces êtres pa- Organisa tion. Classifica- tiou. 1024 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. raissent sensibles à Paction de la lumière , et , chez d’autres on voit des points colorés , qu’un habile naturaliste considère comme étant des yeux; mais jusqwiei on n’a observé aucun fait propre à démontrer l'existence de la vision chez les z00- phytes mème les plus élevés. La Gisposition de leur appareil digestif varie irop pour que nous puissions en rien dire de général. On leur trouve souvent des canaux plus ou moins compliqués , destinés à répartir dans les diverses parties du corps le liquide nourricier; maïs ils n’ont jamais ni un cœur, ni une Circulation proprement dite. Enfin leur respiration se fait tantôt par toute la surface du corps , tantôt par des cils vibratiles ou par des organes intérieurs qui ressemblent un peu à des trachées, mais qui reçoivent de l’eau au lieu de porter dans tous les organes de l’air atmosphérique. Il est difficile d’assigner.à cette grande division du règne ani- mal des caractères positifs bien tranchés. Tous les êtres qu’on y range se ressemblent, il est vrai, par Pabsence d’organes impor- tans, qui se rencontrent toujours daus les autres embranche- mens ; mais Ces animaux , pour ainsi dire , incomplets diffèrent beaucoup entre eux, et plusieurs semblent ètre les premières ébauches des divers types d'organisation adoptés par la nature dans la création des animaux plus élevés. La plupart des zoophytes ne ressemblent presque en rien aux animaux dont nous nous sommes occupés jusqu'ici, et forment une série nalurelle parfaitement distincte de celles des mollusques ou des animaux articulés ; mais d’autres , tout en ayant plus ou moins de ressemblance avec les premiers , semblent être des mollusques,, des annélides ou des crustacés , dont l’organisation aurait été simplifiée et les facultés abaissées. Plusieurs natu- ralistes pensent qu’il serait mieux de séparer des animaux es- sentiellement rayonnés tous ces êtres qui établissent le passage vers les animaux articulés ou vers les mollusques, et de placer à la suite de chacun de ces embranchemens les êtres inférieurs qui paraissent construits d’après le mème plan, plus ou moins simplifié ; mais cette marche n’est pas sans inconvénient et n’est pas encore assez généralement adoptée pour que nous puissions la suivre dans un ouvrage aussi élémentaire que celui-ci, et par conséquent nous continuerons à ranger sous le nom de zoophytes tous les animaux dépourvus d’un sysième nerveux ganglionnaire bien distinet. Dans la classification du règne animal par Cuvier, méthode que nous avons suivie d’une manière générale dans ces leçons, ZOOPHYTES. 1025 lembranchement des zoophytes se divise en cinq classes : les Echinodèrmes, les Vers intestinaux , les Acalèphes , les Polypes et les Infusoires ; mais aujourd’hui que lorganisation d’un grand nombre de ces ètres est mieux connue qu’à l’époque où écrivait ce grand zooiogiste, on reconnait de graves défauts dans un pareil mode de distribution , et on voit que, si l’on voulait conserver ces groupes sans modifications , il serait impossible d’y assigner des caractères distinctifs exacts. Nous avons cru, par conséquent , ne pas devoir nous y asireindre ici, et nous avons cherché, tout en nous rapprochant autant que possible de la méthode de Cuvier, à faire de la classification des zoophytes un tableau fidèle de leur mode général d’organi- sation. Dans cette vue, nous séparerons d’abord de tous ces animaux les Eponges et autres corps analogues qui, pendant long-temps, ont été confondus avec les polypes , ei qui cepen- dant en diffèrent tellement , que plusieurs naturalistes les considèrentcomme pouvant à peine prendre place dans le règne animal. Les autres zoophytes, dont l’animalité est bien évi- dente , forment deux séries , dans chacune desquelles l’organi- sation , d’abord extrémement simple , se complique de plus en plus , à mesure qu’on s'élève davantage. L'une de ces séries se compose d'animaux , qui, pour la plupart, ont une grande analogie avec les annélides ; l’autre offre plus de ressemblance avec le type propre à l’embranchement des mollusques. Cha- cune de ces divisions se subdivise en trois classes , comme on peut le voir dans le tableau suivant: 1026 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. Canal intestinal droit, termine CLASSE DES INFU-| par deux orifices distincts ; bou- SOIRES ROTA- / che en général armée de mächoi- TEURS. res et garnie de cils rotateurs; pouvant nager et naissant d'œufs. Canal intestinal, tantôt droit et a deux orifices, tantôt ramifié et a une seule ouverture. Bouche dépourvue de mâchoires et de cils rotateurs. Vivent en général en jours vermiforme et parasites sur d’autres animaux symétrique. En géné- et naissent d’ovules. ral un canal digestif à | Canal intestinal, en général Sous=embranchement des ZOOPHYTES VER- | MIFORMES. ( Point de | disposition rayonnée. Corps presque tou- CLASSE DES EN- TOZOAIRES, deux ouvertures dis- nul et paraissant être remplacé tinctes , situées aux par un certain nombre de petites deux extrémités du cavités intérieures. Pouvant na- corps. ) ger et se multipliant par la divi- sion spontanée de leur corps. Animaux d’une structure assez compliquée , conformés pour ramper et pourvus à cet effet d’une multitude de tentacules faisant l'office de ventouses. Peau épaisse et en général très dure. Animaux gélatineux , confor- més pour nager seulement et dont la structure est très simple, Point de suçoirs faisant l’office de pieds ni de tentacules ré- CLASSE DES INFU- SOIRES POLY- \ GASTRIQUES. \ CLASSE DES ÉCHI- Sous-embranchement NODERNES. des RAYONNÉS PRO- PREMENT DITs.(Aui- maux dont le corps n'est presque jamais vermiforme ni symé- | CLASSE DES ACA- trique , mais offre une LÈPHES. disposition plus ou EMBRANCHEMENT DES ZOOPHYTES. moins rayonnée. En tractiles. général une cavité di- Animaux vivant presque tous gestive à une seule fixés au fond de l’eau et réunis ouverture ou à deux entre eux en nombre considé- orifices, rapprochés] cLasse Des pro-)rable. Bouche entourée d'une l’un de l’autre. ) LYPES, couronne de tentacules rétrac- tiles. Se muitipliant par bour- \ geous aussi bien que par des \ ovules. Sous-embranchement | | des SPONGIAIRES(Mas- ses sans forme déter-} Une seule classe, ayant pour type l'éponge com- minée , Ccreusées de | muue. canaux , Sans MOouve- ment et insensibles.) DIVISION DES ZOOPHYTES VERMIFORMES. Ce n’est pas pour donner à ces animaux un rang plus élevé qu'aux rayonnés proprement dits, que nous nous en occupons en premier lieu, mais pour les rapprocher autant que possible de l’embranchement des animaux articulés , dont nous venons de terminer l’histoire. Leur structure, en elfet, n’est ni plus ZOOPHYTES VERMIFORMES. 1027 compliquée ni plus perfectionnée que celle de plusieurs ani- maux de la division suivante , et ce serait à tort qu’on les pren- drait pour type des zoophytes en général ; car ils n’offrent presque aucun des caractères les plus remarquables des animaux rayonnés , et ils ne semblent appartenir au même type qu’à raison de la simplicité de leur organisation ou plutôt de l'absence d’un système nerveux ganglionnaire bien développé. Ainsi que nous l’avons déjà dit, trois classes bien distinctes apparliennent à cette série: les Vers intestinaux et les deux groupes confondus jusqu’en ces derniers temps sous le nom d’Animalcules infusoires. - CLASSE DES INFUSOIRES ROTATEURS. Ces êtres sont d’une petitesse telle, qu'avant la découverte du microscope, leur existence n’était même pas soupçonnée, et néanmoins leur structure parait être, pour le moins, aussi compliquée que celle d'aucun autre animal du même embran- chement. Tant que les instru- mens à l’aide desquels on les ob- servait ne les faisaient paraitre que deux ou trois cents fois plus gros qu'ils nele sont réellement, on n’a pu apercevoir dans leur iniérieur aucun organe distinct, et pendant fort long-temps on les a cités comme des exem- hk ples d’êtres composés seulement d’une sorte de gelée animée et se nourrissant par imbibition. Maisles recherches de quelques naturalistes modernes et sur- tout d’un professeur de Berlin, M. Ehrenberg, ont fait voir combien on s'était trompé à l'égard de ces animalcules, et Fig. 492. HYDATINE. (1) aujourd’hui ce n’est pasleursim- (1) Anatomie de l’hydatine , animalcule microscopique , voisin du rotifère : — a cils vibratiles ; — ? masse charnue qui entoure la bouche et met en mou- vement les mêchoires;—c estomac :—-d cloaque ; —e anus; —/ glandes salivaires; —g ovaires ; — A vaisseau, Orgauisation. Rotifères. 1028 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. plicité de structure qui nous étonne , mais bien la complication de leur organisation ioute microscopique. Ces animalcules se rencontrent dans les eaux stagnantes , et même dans l’eau où on a fait tremper diverses matières orga- niques.Leur corps est semi-transparent et présente souvent des traces assez distinctes de divisions annulaires. La bouche en oc- cupe l’extrémité antérieure, et, de chaque côté ou même tout autour de cetorifice, se voientdes cils vibratiles, dont les mouve- mens rotateurs sont très remarquables. Presque toujours l’ar- rière-bouche est garnie de muscles puissans et armée de mà- choires latérales. Le canal digestuf est droit,ils’étend d’un bout au corps à l’autre et présente d'ordinaire vers le milieu un ren- flement qui constitue l’estomac de ces petits êtres ; souvent on voit de chaque côté de ce tube des corps d'apparence glandu- laire et à son extrémité postérieure une sorte de cloaque dans laquelle viennent déboucher les oviductes. M. Ehrenberg a découvert aussi dans ces animaleules des vaisseaux assez com- pliqués, un grand nombre de muscles et des organes qui pa- raissent être des vestiges d’un système nerveux. Les ROTIFÈRES , dont une espèce est devenue célèbre par les expériences de Spallanzani sur la suspension de la vie qu’en- traine le dessèchement (1), peuvent être pris pour type de cette a classe. Leur corps est allongé et se ter- mine antérieurement par deux petites couronnes de cils qui au gré de Panimal rentrent dans Pintérieur ou se déploient en dehors ,et qui par leurs vibrations produisent l’image de deux pelites roues tournant avec rapidité sur leur axe. Une queue bifurquée et articulée les ter- nine en arrière et leur sert pour se fixer aux corps sur lesquels ils veulent repo- ser; enfin on leur remarque encore deux petits points rouges (a) qui sont consi- dérés par quelques naturalistes comme étant des yeux. Ces animalcules nagen! avec une vivacité extrême et pondent des œufs ovalaires. b Fee * Fig. 493. ROTIFÈRE. (2) (1) Voyez page 16. : (2) a Tête ;—b cils rotateurs ; —c bouche et mächoires ; —d'intestin ;—e œuis ; -—fquene. ZOOPHYTES VÉRMIFORMES. 1029 D'autres infusoires auxquels on a donné le nom de BRA- Brachions. CHIONS ressemblent aux rotifères par le mode général de leur organisation, mais méritent d’être signalés à raison de l’es- pèce de carapace dont leur corps est couvert. Chez plusieurs de ces animalcules le test est mème bivalve et rappelle tout-à- fait celui de certains petits crustacés, tels que les cypris et les daphnies. CLASSE DES ENTOZOAIRES. Cette division comprend les vers intestinaux et les autres ani- Organisa- maux inférieurs d’une organisation analogue. La plupart de tion. ces êtres singuliers ne peuvent vivre que dans l’intérieur d’au- ires animaux, et se logent dans la substance du foie, dans les yeux, dans le tissu cellulaire, dans les muscles et même dans le cerveau aussi bien que dans le canal digestif; on sait qu’ils se multiplient au moyen d'œufs ou même qu’ils donnent quel- quefois naissance à des pelits vivans, mais on ne comprend pas bien comment ils peuvent se transmettre d’un animal à un autre , ni Comment ils peuvent pénétrer dans la profondeur des organes, dans l’intérieur desquels ils se développent. Pres- que tous ont une grande analogie avec les annélides, dont ils se distinguent du reste par l'absence d’une chaine de ganglions nerveux ; leur sang n’est pas rouge et ils n’ont pas de membres sétifères comme la plupart des premiers. En général leur corps est très allongé et cylindrique ou déprimé, et présente des traces plus ou moins distinctes de divisions annuilaires ; on ne leur voitrien qui ressemble aux couronnes de cils vibratiles dont sont pourvus les animalcules que nous venons de décrire ; mais leur bouche est souvent garnie de crochets où conformée en manière de ventouse. Plusieurs présentent des vaisseaux bien distincts, et chez quelques-uns on trouve des vestiges d’un système nerveux ; mais il n’en est pas qui paraissentpour- vus d'organes spéciaux pour la respiration. Cuvier divise cette classe en deux ordres : les cavitaires dont Classifica- ie tube intestinal est renfermé dans une cavité abdominale dis- tion. tincte,et les parenchymateux , dont la cavité digestive n’est pas libre et semble être creusée dans la substance même du corps. Les ENTOZOAÏRES CAVITAITRES, auxquels ona donné aussi Ordre le nom de rematoïdes , ont beautoup d’analogie avec les anné- cavitaires. des 1030 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE, lides de l’ordre des terricoles ; leur tube alimentaire est simple, ouvert à ses deux extrémités et étendu en général en ligne droite, d’une extrémité du corps à l’autre ; leurs tégumens sont assez épais , tapissés de fibres musculaires et presque toujours siriés transversalement ; enfin on trouve dans leur intérieur des ovaires et plusieurs autres organes d’une structure assez compliquée. On les divise en Filaires, Trichocéphales , Asca- rides , Strongles , Linguatules , etc. Filaires. Les rILAIRES ont le corps grèle et filiforme ; on en connait plusieurs espèces quivivent dans la substance des organes d’un assez grand nombre d'animaux. De ce nombre est le ver de Me- dine ou de Guinee, qui est très commun dans les pays chauds et qui se loge sous la peau de l’homme ; il est de ja grosseur d’un tuyau de plume de pigeon , et atteint quelquefois plus de dix pieds de long. Ascarides. Les ASCARIDES ressemblent beaucoup aux précédens ; leur corps est rond et aminci aux deux bouts , mais leur bouche est garnie de trois papilles charnues entre lesquelles s’a- Fig. 494. ASCARIDE. (1) vance de temps en temps une petite trompe. Les femelles sont plus com- munes que les mâles, dont on les dis- tingue facilement. L'espèce la plus commune est l’ascaride lombhricoïde appelée vulgairement lombric des in- testins, ver de couleur blanchâtre qui atteint quelquefois plus de quinze pouces de long et qui se multiplie quelquefois à l'excès dans l’intestin de l’homme , du cheval, du bœuf et de quelques autres animaux. L’ascaride vermiculatre, qui pullule souvent dans les gros intestins des enfans et qui occasionne des démangeaisons insup- portables à l’anus, n’a guère plus de cinq lignes de long, et diffère de l'espèce précédente par l’existence d’une petite membrane de chaque côté de la tête. (4) Ascaride lombricoïde : —} son extrémité antérieure; — e extrémité posté- rieure du corps chez le male. ZOOPHYTES VERMIFORMES. 1031 Les STRONGLES se distinguent des ascarides par la conforma- tion de l’extrémité postérieure du cerps qui, chez le mâle, porte autour de l’anus une sorte de bourse diversement con- figurée. Le strongle geant est le plus gros des vers intestinaux ; il est quelquefois de la grosseur du petit doigt et atteint au- delà de trois pieds de long ; en général il se développe dans quelque organe intérieur , tels que les reins dont il détruit la subsiance.On le trouve chez le chat, la marte et chez l'homme, et on en a vu de très petits individus expulsés avec les urines. Une autre espèce du même genre est très commune chez le cheval. Les TRICHOCÉPHALES, dont une espèce est très commune dans le gros intestin de l’homme , ont le corps gros et arrondi en ar- rière , mais mince et filiforme en avant. Enfin, les LINGATULES ont le corps déprimé, fortement an- nelé, el atténué postérieurement; on en rencontre dans les sinus frontaux du chien et du cheval. Les ENTOZOAIRES PARENCHYMATEUX ont une structure beaucoup plus simple que les précédens ; leur cavité digestive semble être simplement creusée dans la substance de leur corps et ne présente en général qu’une seule ouverture. On peut les diviser en cinq familles : les Trémaiodes, ies Planaires , les Acanthocéphales , les Tœnioïdes et les Cestoïdes. Les TRÉMATODES ont beaucoup de rapports avec les anné- lides de la famille des Hirudinées, et se reconnaissent aux ven- touses dont ils sont munis pour se fixer aux viscères des ani- maux , sur lesquels ils vivent en parasites. Les uns n’ont qu’une seule ventouse située à la partie antérieure du corps (ce sont les FESTUCAIRES OU MONOSTOMES); d’autres appelés STRIGÉES OU AMPHISTOMES , en Ont une à chaque extrémité du corps, et d’autres encore , les DOUVES , portent un suçoir antérieur et un second placé sous le ventre ; enfin on en connait dont toule la face inférieure du corps est couverte de ventouses ; disposition qui leur a valu le nom d’HÉCATOCOLYTES. Une petite espèce de douve est très commune dans le foie du cheval , de divers animaux et même de l’homme ; mais se mul- tiplie surtout chez les moutons qui paissent dans des terrains humides; ce parasite a le corps aplati, presque ovalaire an- térieurement et rétréci en arrière , sa bouche occupe le milieu Strongles, Triclioce- phales. Lingatules. Ordre des parenchyma- teux. Famille des trématodes. Monostomes,. Strigées. Doures, 1082 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. de la ventouse antérieure et donne dans un petit œsophage d’où parient des canaux qui se ramifient dans tout le corps. Famille des es PLANAIRES ont beaucoup danalogie avec les douves, plaoaires. mais n’ont pas de ventouses et ne vivent pas dans l’intérieur d’autres animaux. On les trouve dans les eaux stagnantes aussi bien que dans la mer ; ils rampent commedes limaces et sont très voraces ; On leur voit des points noirs qui sont probablement des yeux , souvent des tentacules , un système vasculaire très com- pliqué et une cavité digestive ramifée, qui tantôt s’ouvre aux deux extrémités du corps, d’autres fois ne présente qu’une seute ouverture située sous le ventre. Famiile des La FAMILLE DES ACANTHOCÉPHALES ne se compose que des acanthocé- ÉCHINORYNQUES , dont le corps, cylindrique ou en forme de sac, phales. se termine antérieurement par une petile proéminence , armée d’épines recourbées , à l’aide desquelles ils se fixent aux parois des intestins des animaux qu’ils infestent. Famille des Dans la FAMILLE DES ENTOZOAIRES TÆNIOIDES, le corps tenioides. se termine antérieurement par une petite tête creusée de deux ou de quatre fossettes , et présentant souvent un ou plusieurs appendices proboscidiformes; mais la bouche est nulle ou peu distincte , et en général l'appareil digestif est réduit à un double vaisseau longitudinal. Le corps est ordinairement plat, très allongé et divisé en un grand nombre d’articulations plus ou moins distince- tes (/ïg. 496). Chaque anneau présente un ou deux pores qui communiquent avec les vaisseaux longitudimaux dont il vient d’être question , et renferme un ovaire distinct (/g. 495). Le genre a leplus important de cette famille est celui des TÆNIA , qu’On désigne sou- vent sous le nom de vers solitaires. 137 Le corps de ces parasites ressemble Ur | assez à un long ruban, plissé en tra- LULU | vers ; on en trouve dont la longueur Fag. 495. (1) dépassait trente pieds. Leur tête est presque carrée : elle offre à chacun 2/72) ( L dy SE \w!) | es Tænia, Ur AR TE SNS” | \ (NS | t) NÉ f 1} one L Di 12 (e (1) à Un anneau du tœnia, montrant les ovaires, les deux vaisseaux lougi- ZOOPHYTES VERMIFORMES. 1033 des quatre angles une petite fessette ou suçoir, et présente au milieubun tubercule qui ressemble souvent à une trompe, et est en général armé d’un cercle de crochets , à l’aide des- quels Panimal se fixe aux parois de l'intestin , où il demeure. 2 Fit DO one TE TON nan a MAI CON us dus DT | { Fig. 496. cule, et armée de petites pointes, disposition qui n’exisie pas dans le {ænta Large , autre espèce qui attaque aussl l’homme et qui est très difficile à expulser. A cette petite tête (a, fig. 496) succède un cou filiforme , qui s’é- largit peu - à - peu et se continue avec le corps, dont le tissu estblanchâtre et pres- que gélatineux. Tou- tes les classes d’ani- maux vertébrés sont sujettes. à être infes- tées de ces vers qui se logent d'ordinaire dans l'intestin grèle et qui paraissent se nourrir en absorbant par leurs pores les sucs dont ils sont bai- gnés. Leur présence dans le canal digestif détermine en général de Paffaiblissement , de l’amaigrissement, et un trouble de léco- nomie souvent très grave. On en con- nait un grand nom- bre d'espèces propres à différens animaux. Celle qui est la plus commune chez l’hom- me estle (ænia à longs anneaux, dont la tête est garnie d’un tuber- tudinaux et le pore latéral ; —b un anneau, dont on a enlevé l’ovaire presque en entier. 1334 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. Cysticerques. D’autres vers intestinaux , dont la tête est conformée comme celle des tænia ont le corps terminé en arrière par une vessie remplie d’eau. Les uns , nommés CYSTICERQUES Ou Aydatides , ne sont pas agrégés entre eux , et chaque vessie ne porte qu’un seul corps et une seule tête ; mais les COENURES sont réu- nis entre eux, de telle sorte que la même vessie porte plusieurs corps et autant de têtes distinctes. Les cysticerques se dévelop- pent dans les membranes et dans le tissu cellulaire de divers animaux. Il en est une petite espèce qui se multiplie excessive- ment chez le cochon et détermine la maladie connue sous le nom de Zadrertie. Une espèce de cænure est également célèbre à cause de la maladie appelée le fournis, qu’elle occasionne chezles moutons ; elle se développe dans le cerveau de ces animaux et détermine des mouvemens convulsifs, qui les font tourner involontaire- ment sur eux-mêmes ; sa vessie commune a quelquefois la grosseur d’un œuf, mais les petits vers répandus à sa surface ont à peine une demi-ligne. Famille des Enfin , les CESTOIDES ne présentent ni suçoirs, ni autres or- cestoides. ganes extérieurs, et ressemblent à un long ruban finement strié en travers, dans la substance duquel on trouve seule- ment des œufs. On n’en connaît qu’un genre (les LIGULES), qui se rencontre dans l’abdomen des oiseaux et des poissons. CLASSE DES INFUSOIRES POLYGASTRIQUES. Fig. 497.(1) {x) Divers infusoires polygastriques , vus au microscope : — 1 Monades ; — —— 11 Trachelie anas ; — 111 Enchelide représenté dans le moment où il rejette ZOOPHYTES VERMIFORMES. 1033 Les vers intestinaux d’une structure extrêmement simple , dont mous venons de parler, semblent en quelque sorte con- duire vers un groupe fert nombreux de petits êtres, dont l’or- ganisation parait être réduite au moindre degré de complica- tion compatible avec l’animalité. Ces animalcules qui ne s’ap- perçoivent qu’au moyen du microscope, et qui se développent en abondance dans l’eau contenant des débris de corps orga- nisés, ont été jusqu’en tes derniers temps confondus avec les infusoires rotateurs, dont la structure est très différente. Leur corps , tantôt arrondi, tantôt allongé et aplati, est souvent couvert de petits cils, et offre dans son intérieur un nombre ordinairement très considérable de petites cavités qui parais- sent remplir les fonctions d’autant d’estomacs; chez quelques- uns ces sortes d’ampoules semblent être groupées autour d’un canal quis’ouvre au-dehors par ses deux extrémités (fig. 497,111) ; mais d’autres fois elles paraissent être tout-à-fait isolées , et les personnes qui ont fait de ces petits êtres l’objet d’une étude spé- ciale ne s'accordent pas sur l’existence d’une communication directe entre leur cavité et le dehors. La manière dont ces in- fasoires se propagent a été l’objet de beaucoup de recherches, et un grand nombre de naturalistes pensent qu’ils peuvent se former directement par la désagrégation des matières dont les feuilles, la chair musculaire et autres corps organisés se composent; mais cette génération spontanée est loin d’être suffisamment démontrée, et l’on sait que, dans certains cas au moins , ils naissent les uns des autres. Du reste leur mode de propagation est bien d'accord avec la simplicité de leur struc- ture : c’est par la division spontanée de leur corps en deux ou plusieurs fragmens, dont chacun continue de vivre et devient bientôt un nouvel individu semblable au premier, que ces êtres singuliers se multiplient. Leurs formes sont très variées et on les a divisés en plusieurs genres, parmi lesquels nous citerons les ENCHÉLIDES (NI, /ig.497), dont le corps est oblong; les vozvoces qui sont globuleux et tournent continuellement sur eux-mêmes; et les MONADES (£, fig. 497) qui ressemblent à des petits points tourbillonnant dans l’eau où elles nagent. par l’anus des matières excrémentitielles; — 1v Paramecie; — v Kolpode ; — vc Trachélie fasciolaire marchant sur des végétaux microscopiques. 1035 ZLOOLOGIE DESCRIPTIVE. DIVISION DES RAYONNÉS PROPREMENT DITS. — - SET à ZI ÈPEe EASxT - A Æ —= %: \ d0/ éd FR, * Li SK (NU Fig. 498. ASTÉRIE. Les animaux que nous réunissons dans cette grande division de l’'embranchement des zoophytes, méritent bien mieux que les précédens non-seulement le titre de rayonnés, mais aussi le nom de zoophytes; car c’est parmi eux qu’on trouve au plus haut degré toutes les particularités de structure les plus carac- téristiques de ce quatrième type organique du règne animal. Ici le corps n’est jamais bien symétrique, ni subarticulé comme chez la plupart des zoophytes vermiformes, et tous les organes sont disposés en cercle autour d’un axe commun. Presque toujours la cavité digestive ne présente qu’un seul orifice, et cette ou- verture est ordinairement entourée d’un cercle de tentacules. Plusieurs de €es animaux ont une structure très compliquée , el doivent occuper dans la série des êtres un rang au moins aussi élevé que les infusoires rotateurs; mais la plupart ont une ZOOPHYTES RAYONNÉS. 1037 organisation moins parfaite, et chez ces derniers on ne voit, pour tôut organe intérieur, qu’une simple cavité digestive. Tous ces zoophytes sont aquatiques , et la plupart habitent la mer. On les divise comme nous l'avons déjà dit, en trois clas- ses , les Echinodermes , les Acalèphes et les Polypes. CLASSE DES ÉCHINODERMES. Les échinodermes sont des animaux rayonnés , dont la peau est épaisse et souvent soutenue par une sorte de squelette solide , et dont la structure intérieure est très compliquée. Ils sont conformés pour ramper au fond de l’eau et sont en géné- ral pourvus à cet effet, d’une multitude de petits tentacules rétractiles, qui passent à travers des pores dont leurs tégumens sont percés , el agissent par leur extrémité à la manière de ventouses, Trois genres principaux, les Holothuries, les Oursins el les Astéries composent ce groupe. Les HOLOTHURIES sont des animaux dont le corps est allongé, arrondi et coriace; leur bouche en occupe l'extrémité anté- rieure et est entourée d’une couronne de tentacules branchus et rétractiles, portées sur un cercle de pièces osseuses. L’in- tesin est fort long ; il est attaché dans la cavité abdominale par une sorte de mésentère , et se termine par un cloaque dont l'ouverture extérieure se voit à l'extrémité postérieure du corps. Un organe respiratoire semblable à un arbre creux, dont les rameaux sont extrémement nombreux , aboutit également dans le cloaque, et se remplit d’eau au gré de l’animal. Il existe aussi, chez les holothuries, un système vasculaire très compliqué, des organes sécréteurs assez nombreux et des muscles puis- sans ; enfin , On a cru leur reconnaitre un vestige de système nerveux. La disposition de leurs tentacules ambulatoires varie : tantôt ces appendices sont distribués en cinq séries longitudi- nales comme des côtes de melon, tantôt ils n’occupent que la face inférieure du corps, ou même sont rassemblés sur une espèce de disque ventral. Les holoihuries sont à peine rayonnés et semblent établir le passage entre les oursins et les entozoaires les plus élevés. Quelques auteurs en rapprochent, sous le nom d’Echinodermes sans pieds , les sIPONCLES et plusieurs autres animaux marins à corps Cylindrique, qui ont en effet de l’analogie avec ces z00- phytes, mais qui sont dépourvus de tentacules ambulatoires , el 67. Structure. Holuthuries. Oursins. Astcrics, 1038 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. qui ressemblent davantage aux entozoaires avec lesquels ils pa - raissent devoir être rangés. Les oursINs ont le corps plus ou moins globuleux et revêtu d’un test calcaire composé de plusieurs rangées de pièces angu- leuses , exactement réunies entre elles. La surface de cette co- que est armée d’épines plus ou moins longues, portées sur des tubercules arrondis et mobiles au gré de l'animal qui s’en sert pour ramper ; ses tentacules ambulatoires concourent au même usage et traversent une multitude de petits trous disposés avec une grande régularité par rangées verticales. La bouche occupe le centre de la face inférieure du corps et est armée de cinq dents puissantes enchâssées dans une charpente calcaire très compliquée ; l'intestin est contourné sur lui-même, et l’a- nus se trouve tantôt au milieu de la face dorsale , tantôt au bord postérieur du corps ou en dessous entre ce bord et la bouche. Ils ont de même que les holothuries , un système vas- culaire très compliqué et à la face interne de leur test on trouve cinq ovaires qui se déchargent par des orifices particuliers. Plusieurs de ces animaux sont comestibles, mais ce ne sont que leurs ovaires que lon mange. Les uns vivent dans Île sable , les autres sur les rochers; leurs mouvemens sont très lents et il se nourrissent de petits mollusques. Les ASTÉRIES Ou etoiles de mer doivent leur nom à la forme singulière de leur corps qui est divisé en rayons, dont le nombre est ordinairement de cinq. La plupart ont une char- pente solide d’une structure très compliquée ; leur bouche est située au milieu de la face inférieure de leur corps , et donne dans un grand estomac qui, en général, envoie dans chacun des rayons des appendices ramifiés , mais qui ne présente pas d’ou- verture anale, comme dans les genres précédens. Leur système vasculaire est disposé à-peu-près de la même manière que chez les oursins, et les ovaires sont répartis tout autour de leur corps. Chez les ASTÉRIES PROPREMENT DITES (fig. 498), chaque rayon présente en dessous un sillon longitudinal aux côtés duquel se trouvent les pieds ou tentacules ambulatoires ; une multitude d’épines hérissent le reste du dessous de leur corps et toute sa surface est en outre percée de pores qui laissent passer des tentacules beaucoup plus grèles que ceux dont il vient d'être question. Chez les oPRIURES les rayons ne présentent ni sillons, n! lentacules , el e’est par les mouvemensondulaires de ces bran- ZOOPHYTES RAYONNÉS. 1039 ches que Panimal se meut plutôt que par le jeu de ses tentacu- les ambulatoires dont le nombre est peu considérable. On a donné le nom d’EURYALES à des ophiures dont les rayons sont branchus, et celui de COMATULES à d’autres étoiles de mer, dont ces mêmes rayons divisés soit en deux ou trois tiges , portent deux rangées d’appendices articulés. Les ENCRINES sont des zoophytes qui ressemblent beaucoup à des comatules , mais qui sont fixées au sol par une longue tige ; on en trouve de vivantes dans les mers actuelles, mais c’est principalement à l’état fossile qu’elles abondent. CLASSE DES ACALEPHES. Les acalèphes sont des animaux mous , d’une consistance : : gélatineuse, qui flot- tent ioujours dans la merei sont essen- tiellement organisés pour ja nage. Ils n’ont pas comme les échinodermes une peau bien distincte des parties sous- jacentes et une cavité intérieure logeantles viscères; leur orga- nisation est très sim- ple, et leurs organes intérieurs se réduisent presque à un estomac d’où partent des vaisseaux qui se ramifent dans les diverses parties du corps. On les divise en deux ordres : les Acalèphes simples et les Acalèphes hydrostatiques. F E Fig. 499. RHIZOSTOME. Les ACALÈPHES SIMPLES flottent et nagent dans la mer par l'effet des contractions et des dilatations alternatives de leurs corps sans être aidés par une vessie aérienne. Les MÉDUSES for- ment le groupe le plus nombreux de cette division. On donne Euryales, Coatules. Eucrines. Acalephes simples. Méduses. Fhyzosto- ICS. Cestes Béroc: . 1040 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE, ce nom à des animaux gélatineux dont le corps élargi et plus ou moins convexe , ressemble à un disque ou à une tête de champignon (fa. 499). L’estomac est creusé au milieu de cette espèce d’ombrelle, au-dessous de laquelle pend d'ordinaire un pédicule ou des appendices tentaculaires de formes variées. Chez la plupart des méduses, l’estomac est percé au milieu de sa face inférieure d’une bouche bien distincte du pourtour de la- quelle naissent des canaux qui se ramifient dans lombrelle et y forment un lacis vasculaire très compliqué ; mais chez d’autres, auxquels on a donné le nom de RHIZOSTOMES, il n'existe pas de bouche proprement dite, et l'estomac ne communique avec lextérieur que par l'intermédiaire de ses parois membraneuses et de äivers vaisseaux qui vont se ramifier dans les tentacules et s'ouvrir par des pores à l’extrémité de ces appendices. Des organes particuliers, dont le nombre est ordinairement de quatre, sont groupés autour de lestomac de presque toutes les méduses , et sont considérés comme étant des ovaires ; sou- vent ils sont logés au fond d’autant de,cavités distinctes , ou- vertes sous l’ombrelle. Enfin, on trouve chez plusieurs de ces animaux des organes qui paraissent être des instrumens de sécrétion, et à la face interne de leur ombrelle on distingue ordinairement des stries qui paraissent être des fibres muscu- laires. Il est aussi à noter que chez un grand nombre de ces animaux les bords de l’ombrelle sont garnis de longs tentacules qui leur servent probablement pour s'emparer des petits mol- lusques ou zoophytes, qu’ils veulent amener à leur bouche pour les y engloutir. C’est en contractant lentement les bords de leur ombrelle, et en expulsant ainsi l’eau contenue dans sa concavité, que les méduses nagent ; on ne les voit guère près de la surface que lorsque le temps est très calme , et plusieurs de ces animaux contribuent au phénomène de la phosphorescence de la mer , en répandant une lumière blanchätre. Les CESTES sont voisins des méduses par leur organisation intérieure , mais en diffèrent beaucoup par la forme de leur corps , Car ils ressemblent à un long ruban gélatineux. On donne le nom de BÉROËS à des acalèphes qui se rapprochent également beaucoup des méduses , mais qui ont le corps globu- leux ou ovoide , et garni de plusieurs rangées verticales de cils vibratiles. ZOOPHYTES RAYONNES. 1041 Enfin , on range aussi dans cette division les PORPITES et les VÊLELLES , doni le corps , en forme de disque , est soutenu à l’intérieur par une lame cartilagineuse , et garni en dessous de nombreux tentacules. Les ACALEPHES HYDROSTATIQUES se reconnaissent à une ou plusieurs vessies ordinairement remplies d’air, qui contri- buent à les faire floiter dans l’eau et qui surmontent une mul- titude de tentacules et d’appendices de formes variées. La structure de ces singuliers animaux et les usages de diverses parties de leur corps sont encore trop peu connus pour que nous nous y arrêtions ici. On les divise en PHYSALIES , PHYSSO- PHORES , DIPHYES, @lC. CLASSE DES POLYPES. On réunit sous le nom de polypes, un grand nombre d’ani- maux dont le corps est cylin- drique ou ovalaire, et n’offre d'ouverture qu'à une de ses exirémités laqueile est en- tourée d’une couronne de longs tentacules. Chez la plupart de ces zoophyies la bouche occu- pe l’axe du corps, et sert en même temps d’anus, mais chez quelques-uns la cavité digestive présente la forme d’un tube recourbé sur lui- Fig. 500. même, et ouveri par ses deux extrémités ; il existe alors un anus bien distinct, mais cette seconde ouverture est toujours située très près de la première. La structure des polypes est très simple et leurs facultés très bornées. Presque tous ces animaux vivent fixés à des corps étrangers par leur extrémité postérieure et n’exécutent d’autres mouyemens qne ceux nécessaires pour étendre leurs tentacu- les ou les contracter et faire rentrer la portion antérieure de ieur corps en elle-même. Ils ne se multiplient que de deux manières : tantôt ils produisent des œuis qui se détachent et Porphyes Vélelles Acalephes hy- drostatiques. Organisa! 1042 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. sont expulsés au dehors pour aller au loin se fixer et se développer; d’autres fois il nait sur un point quelconque de la surface de leur corps , des espèces de bourgeons qui ne s’en séparent ja- mais,et qui devien- nentautantde nou- veaux polypes sem- blables à leur mè - re ; 1l en résulte alors des masses de formes variées, dans lesquelles tou- te une suite de gé- néralions se trouve agrégée , et sem- ble vivre d’une vie commune , COMM si elle était réelle- ment un être com- posé, pourvu d’un seul corps, avec mille bouches et autant d’estomacs (fig. 501). En gé- néral les cavités digestives de tous Fig. 501. SERTULAIRE. ces animaux agré- gés, vivant ainsi en communauté , ne s'ouvrent pas direclement les unes dans les autres, mais il existe d’ordinaire des communications vascu- laires entre les divers individus réunis en une seule masse , et les matières alimentaires digérées par les uns peuvent de la sorte profiter à tous leurs voisins. | Souvent le corps de ces petits animaux esi composé en entier d’un tissu semi-transparent d’une délicatesse extrême; mais chez la plupart la portion inférieure de leur gaine tégumentaire se durcit beaucoup et même s’ossifie de façon à acquérir la dureté et l'aspect de la pierre. Cette enveloppe solide présente des formes variées et constitue tantôt des tubes , tantôt des espèces de cellules; pendant long-temps on la considérait comme étant seulement la demeure des polypes qui la forment , et c’est elle qu’on désigne sous le nom de polypier. Quelquefois ZOCPHYTES RAYONNÉS. 1043 chaque polype possède un polypier distinct , mais d'ordinaire c'est la portion commune d’une masse de polypes agrégés qui présente les caractères propres à ces corps , et il se forme ainsi des polypiers agrégés , dont le volume peut devenir extrême- ment considérable, quoique chacune de ses parties consti- tuantes n’ait que des dimensions fort petites. C’est de la sorte que des polypes dont le corps n’a que quel- ques pouces de long, élèvent dans les mers voisines des tropi- ques, des récifs et des iles; lorsqu'ils sont placés dans des circonstances favorables à leur développement , certains ani- maux de cette classe pullulent au point de recouvrir des chai- nes de rochers , ou d'immenses bancs sous-marins, et de for- mer avec les masses pierreuses de leurs polypiers amoncelés les uns au-dessus des autres , des amas dont l’étendue s’accroit sans cesse par la naissance de nouveaux individus au-dessus de ceux déjà existans. La dépouille solide de chaque colonie de polypes reste intacte après que ces frèles architectes ont péri , et sert de base pour le développement d’autres polypiers, jusqu’à ce que ces récifs vivans atteignent la surface de l’eau , car alors ces animaux ne peuvent plus y vivre’, et le sol formé par leurs débris cesse de s’élever ; mais bientôt la surface de ces amas de polypiers , exposée à l’action de l'atmosphère, devient le siège d’une nouvelle série de phénomènes; des graines déposées par les vents ou apportées par les vagues, y germent et la couvrent d’une riche végélation jusqu’à ce qu’enfin ces vastes charniers de zoophytes presque microscopiques, devien- nent des iles habitables. Dans l’Océan pacifique on rencontre une foule de récifs et d’iles qui n’ont pas d’autre origine; en général ils semblent avoir pour base quelque cratère de volcan éteint, car presque toujours ils ont une forme circulaire et présentent au centre une lagune communiquant au-dehors par un seul chenal; on en connait qui ont plus de dix lieues de diamètre. Presque tous les polypes habitent la mer; on en trouve ce- pendant dans les eaux douces. Ceux dont le polypier est sim- piement charnu ou corné sont répandus dans toutes les lati- tudes, mais ce n’est guère que dans les mers des climats chauds qu’on trouve en abondance des polypes à polypier pierreux. Cuvier a divisé cette classe de zoephytes en trois ordres : les polypes charnus, les polypes gélatineux et les poiypes à poly- pier; mais cette classification n’est pas naturelle et aujourd’hui que la structure intérieure de ces animaux est mieux connue, on a senti la nécessité de les distribuer autrement; les poiypes présentent en effet quatre types d'organisation et doivent par conséquent étre divisés en autant de groupes naturels. Le ta- 1044 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. bleau suivant donnera une idée de cette classification nouvelle, basée sur anatomie. POLYPES } BAYOZOAIRES, | ayant une pe | | che et un anus distincts. Tentacules sim- ples et très nom- l ZOANTAAIRES. Le 15 k à eux. cs Cavité digesri- nos ) = { ayant une seule : — |ouverture, ser ve garnie de la- Tentacules pi Z ES rat POLYPES melles verticales. | _; Ee & Avant en même } nes et au nombre de six ou de huit temps de bouche seulement- ALCYONIEXS. et d’anus. | | ANTHOZOAIRES. Cavité digestive sans lamelles ni } { SERTULARIENS, } / cloisons interieures. Ordre des Les polypes de l'ORDRE DES BRYOZOAIRES sont les plus brjozoaires. compliqués et semblent établir le passage entre les zoophytes in- férieurs et les derniers mollusques. Leur corps a la forme d’un sac ovoide ou allongé, qui serait fermé par le bas, et qui par son extrémité opposée, pourrait rentrer plus ou moins pro- fondément en lui-même , comme on le ferait faire à un doigt de gant que l’on chercherait à retourner ; la portion inférieure de ce sac tégumentaire offre presque toujours une consistance assez considérable , et constitue d’ordinaire une cellule ou un tube s’ouvrant seulement par lehaut ; la portion rétractile de l'animal est au contraire d’une délicatesse extrême , et se !ermine anté- rieurement par un cercle de longs tentaeules au milieu duquel se trouve la bouche. Ces tentacules sont bordés de chaque côté par une série de cils vibratiles, et peuvent à volonté s’épanouir au-dehors en forme de cloche ou rentrer dans la cellule for- mée par la portion inférieure du corps. Dans Pintérieur du sac tégumentaire se trouve l’appareil digestif et les muscles des- tinés à faire saillir ou rentrer les tentacules ; la cavité alimen- taire a la forme d’un tube recourbé en une anse, et offre des dilatations et des rétrécissemens alternatifs ; sa première por- tion est très évasée , el parait servir à la respiration aussi bien qu'à la déglutition ; plus bas on distingue un estomac et un intestin, enfin l'anus se voit du côté du dos de l’animal , tout près de la bouche. Il existe aussi aulour de cet appareil des canaux qui paraissent être destinés à opérer des sécrélions et une masse molle qu'on regarde comme un ovaire. Enfin un grand nombre de ces petits êtres sont encore pourvus d’un oper- cule qui est mis en mouvement par des muscles particuliers, ZOOPHYTES RAYONNES. 1045 et qui est disposé de façon à fermer l'entrée de la ceïlule tégu- mentaire quand l'animal y a retiré ses tentacules et la portion molle qui termine antérieurement son corps. La plupart de ces polypes sont microscopiques, mais ils vi- vent presque tous agrégés , et forment souvent par leur réunion des masses assez considérables. Les plus communs sont les ESCHARES et les FLUSTRES , dont le polypier pierreux, chez les premiers , corné chez les seconds, a la forme d’une petite cellule ovoïde et dont les divers membres d’une même communauté se réunissent de façon à constituer de grandes lames à mailles régulières, qui tantôt s'étendent comme une fine dentelle sur des coquilles ou des pierres sous-marines, el d'autres fois s’élèvent en branches ou en touffes foliacées. D’autres polypes d’une structure analogue, mais entièrement mous, habitent les eaux douces et sont connus sous les roms de Cristatelles , d’Alcyonelles , etc. Les POLYPES ANTHOZOAIRES n’ont jamais les tentacules garnis de cils vibratiles comme les précédens , ni d’anus dis- tinct. Leur cavité digestive se termine toujours en cul-de-sac, et ne communique au-dehors que par la bouche située à son extrémité supérieure. Chez les ZOANTHAIRES , ainsi nommés à cause de leur res- semblance avec certaines fleurs , la peau est épaisse et opaque, et le corps a ordinairement la forme d’un cylindre tronqué à ses deux extrémités, dont l’une adhère au sol etlautre est garnie d’un grand nombre de tentacules cylindriques et plus ou moins effilés vers le bout ({g. 453). Au milieu de la couronne formée par ces appendices, se trouve la bouche qui, par l'intermédiaire d'un court œsophage, conduit dans ure grande cavité stomacale; les parois de celle-ci ne sont pas distinctes de l'enveloppe générale du corps, mais présentent un grand nombre de lames membra- neuses verticales, qui paraissent remplir les fonctions d’ovaires, et renferment dans leur épaisseur des vaisseaux sécréteurs. Parmi les zoanthaires , il en est un certain nombre dont les tégumens conservent icujours de la moilesse et n’offrent par- tout qu'une consistance charnue. Tels sont les ACTINIES ou aneémones de mer { fig. 500, pag. 1041), qui vivent isolées sur les Division des anthozoaires . Ordre des zoanthaires. Act'inics. Zoantlies. Caryophil- lies. Astrées. Méandrines Ordre des alcyouivns. 1046 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. rochers et qui sont ornées des couleurs les plus belles ; ces zoo- phytes peuvent se détacher des corps auxquels ils adhèrent etne se multiplient pas au moyen de bourgeons extérieurs comme la plupart des polypes ; aussi ne se réunissent-ils pas en masses comme ces derniers; leurs petits, en se détachant des ovaires, tombent dans l'estomac et sont vomis par la bouche. Quelques zoanthaires charnus forment au contraire des agré- gations nombreuses , et quand ils sont épanouis dans leau ressemblent à des bouquets de fleurs; les ZoANTHES sont dans ces Cas. Les autres polypes de cet ordre sécrètent en abondance du carbonate de chaux , qui se dépose dans les tégumens et dans les replisintérieurs de la portion inférieure du corps, demanière à constituer un polypier pierreux, dont la forme extérieure est en général cylindrique et dont l’intérieur est occupé par des lames verticales, disposées comme les rayons d’une roue. Quel- ques-uns de ces animaux vivent isolés comme les actinies ; mais la plupart sont agrégés, et leurs polypiers sont alors réunis plus ou moins intimement en une seule masse , dont la surface offre une multitude de petites cavités ou cellules circulaires , à fond étoilé. Les uns , tels que les CARYOPHYLLIES , forment de la sorte des espèces d'arbres pierreux , dont chaque branche se termine par une cellule servant à abriter la portion molle et rétractile d’un de ces polypes. D’autres , comme les ASTRÉES, se réunissent en masses arrondies , mais sans que leurs limites respectives cessent d’être distinctes , tandis que , chez d’autres encore , tels que les MÉANDRINES , l’union des divers individus d’une même agrégation est si intime , qu’ils semblent former un seul ruban contourné sur lui-même. Ce sont principale- ment ces zoanthaires à polypes pierreux qui concourent à la formation des £Les de corail , dont nous avons parlé il y a quel- ques instans. Dans l'ORDRE DES ALCYONIENS, le corps de chaque polype est en général beaucoup plus allongé, et les tentacules qui le terminent sont larges , foliacés , garnis , sur les bords , de petits prolongemens cylindriques et au nombre de six ou de huit seulement (fig. 502). La bouche est placée de la même ma- nière que chez les zoanthaires, et au-dessous de cetle ouver- ZOOPHYTES RAYONNES. 1047 ture se trouve un canal alimentaire membraneux et droit, qui esthsuspendu à la partie supérieure de la grande cavité stomacale , dans laquelle il dé- bouche par son extrémité in- férieure. Des cloisons verticales entourent ce tube, le fixent aux tégumens et se continuent inférieurement le long des pa- rois de la grande cavité, située au-dessous. C’est dans leur épaisseur que se forment les ovules , et, à leur partie supé- rieure, près de l’ouverture in- férieure du canal æsophagien, dont nous venonsde parler, on remarque des vaisseaux intes- tiniformes qui paraissent être des organes de sécrétion. Presque tous ces polypes sont agrégés, et la portion commune formée par leur réunion esttraversée par une multitude de petits canaux qui constituent un lacis très compliqué, et établissent des communications entre les divers individus ainsi associés. Certains alcyoniens forment par l’ossification de la portion inférieure de leurs corps des polypes pierreux , très analogues à ceux des zoanthaires , mais qui ont la forme de simples tubes sans lamelles intérieures , le txbipore musique est dans ce cas ; les tubes calcaires qu’il construit forment des masses très con- sidérables , et sont rangées verticalement les unes à côté des autres comme des tuyaux d'orgue. D’autres alcyoniens en plus grand nombre ont leur partie charnue , comme farcie d’une multitude de petites aiguilles calcaires et forment par leur réunion des rameaux dont l'intérieur est d’abord creux, et se remplit peu-à-peu d’une matière cornée ou pierreuse , de facon à donner naissance à un axe solide qui soutient toute la masse, et qui ressemble à un arbrisseau. La substance dont on fait de si jolis ornemens de parure , et qu’on appelle corazl, se forme ainsi et n’est autre chose que l’axe pierreux de certains polypes de l’ordre des al- cyoniens qui vivent fixés aux rochers, à des profondeurs assez considérables dans la mer. Lorsqu'on retire le corail &e Fig. 502. (1) (1) Un des po'vpes du corail, fortement grossi: — c portion corticale com- IIUUC. Tubipores. Corail. Coruones, 1Ü48 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. l’eau, on voit, en effet, que chaque branche pierreuse est recou- verte d’une espèce d’écorce charnue , renfermant une multitude de petits polypes blanchâtres , à huit tentacules à bords frangés, qui ressem- blent à des fleurs plutôt qu’à des ani- maux (fig. 503); la substance ra- meuse qui les unit est remplie de pe- tites aiguilles cré- tacées et est sillon- née par une mul- titude de vaisseaux en communication avec la cavité di- gestive de ces ani- maux; sa face in- terne sécrèle en a- bondance du car- bonate de chaux, mélé à une matière coloranterouge,qui se dépose par cou- che soit sur des corps sous-marins, sur lesquels ces polypes se sont fixés , soit dans le milieu de la masse résultante de leur réunion, et constitue ainsi une tige dont la grosseur augmente par addition de nouvelles couches tant que les polypes dont elle est recouverte continuent à vivre, ei dont la longueur s’accroit par le développement de nouveaux individus à l’extrémité de l'agrégation déjà existante. Quelque- fois ,par l’effet d’une espèce de maladie, le corail au lieu d’être d’un beau rouge, est seulement rosé ou même tout-à - fait blanc ; on le trouve dans diverses parties de ia Méditerranée, mais €’est suriout près de la côte d’Alger qu’on en fait une pèche active. Fig. 503. CORAIL. * On donne le nom de GORGONES à des polypes très voisins de ceux du corail, mais dont lPaxe commun est seulement corné. ZOOPHYTES RAYONNES. 1049 Les PENNATULES sont des polypes agrégés qui ressemblent ex- trèmemeént aux précédens par leur organisation , mais qui ne vivent pas fixés au fond de la mer comme eux. Elles oni une partie commune charnue, soutenue à l’intérieur par une tige calcaire et susceptible de se contracter et de se dilater; ces polypes sont disposés avec une grande régularité de chaque côté de la portion supérieure de cet axe charnu , et sont en général disposés de manière à donner à l’ensemble de la masse la forme d’une plume d'oiseau. La plupart des pennatules flot- tent dans la mer et répandent une lumière phosphorique. Enfin , on range encore dans cet ordre des polypes agrégés qui n’ont point d’axe solide, et dont la poriion commune, simplement farcie d’aiguilles calcaires microscopiques, con- serve toujours une consistance Charnue ; les ALGYoxSs offrent ce mode “organisation. Les polypes de ORDRE DES SERTULARIENS sont beauccup plus simples que les précédens, et ne semblent être formés que par un tube fermé à son extrémité inférieure , mais ouvert à son extrémité opposée, et portant autour de celle ouverture une couronne de tentacuies filiformes. Les HYDRES OU POLYPES A BRAS, qui habitent les eaux douces et qui nous ont déjà offert des phénomènes physiologiques si remarquables , peuvent être considérés comme le type le plus simple de ce groupe. Leur corps tubiforme est gélatineux et ne laisse apercevoir dans son intérieur aucun organe particulier, néanmoins ils nagent et rampent avec agilité, agitent leurs longs tentacules pour saisir les petits animaux qui se trouvent à leur portée, et qu’ils dévorent avec avidité ; ils paraissent aussi être sensibles à la lumière. On est parvenu à retourner quelques-uns de ces polypes , de façon à rendre la surface de leur estomac extérieure, eton a vu que la cavité formée par la surface de leur peau devenue intérieure , a rempli tout aussi bien que l'estomac naturel, les fonctions d’un organe digestif, mais ce qu’ils offrent de plus singulier, c’est l’étonnante force de vitalité , qui les fait continuer à vivre lorsqu'on les divise en morceaux , et qui permet à chaque fragment de devenir un in- Pennatuies. Aleyous. Ordre des sertulairiens. B vdres. Structure. 1050 ZOOLOGIE DESCRIPTIVE. dividu complet (1). De mêmeque nous l'avons déjà vu pour ies polypes agrégés, ces animaux se multiplient par le développe- ment de jeunes indivi- dus sur divers points de la surface extérieure de leur corps; mais ici les petits, qui ressemblent h d’abord à des branches + du corps de leur mère , / cessent bientôt d'y ad- hérer et deviennent li- bres. ed La plupart des sertula- \/ riens n’ont pas le corps entièrement gélatineux comme les hydres, mais sont revêtus d’une gaine cornée tubiforme , qui est fixée aux corps sous- Fig. 504. HYDRES. (1) marins par lune de ses extrémités , et qui, à lextrémité opposée, s’évase presque toujours en forme de cloche pour loger les tentacules lorsque ces polypes se multi- plient par des bourgeons qui restent adhérens; il en résulte des polypiers rameux ayant l’aspect d’un petit arbuscule, dont chaque branche serait terminée par une fleur délicate et élé- gante. Les SERTULAIRES (fig. 501)et les PLUMULAIRES nous offrent ce mode d'organisation. DIVISION DES SPONGIAIRES. Les éponges et les autres corps d’une structure analogue, ressemblent beaucoup à la portion commune de certains po- lypes agrégés, tels que les alcyons , mais s’en distinguent es- seniiellement en ce qu’ils ne renferment rien d’analogue à la portion individuelle de ces animaux. Guidés par cette ressem- blance plutôt que par l'observation , plusieurs auteurs ont (1) Voyez page 9. . Se ' , . . (2) a Lentilles d’eau au dessous desqueiles on trouve d ordinaire les hydres ; — ë un de ces polypes; —c un autre sur lequel se sont développés deux jeunes individus. ZOOPHYTES SPONGIAIRES. 1051 admis que les petits trous qui se voient à la surface des éponges étaient des cellules renfermant des polypes, mais il n’en est rien , el aujourd’hui ilest hors de doute que ces corps singu- liers ne renferment point de polypes. Ce sont des masses qui vivent dans la mer fixées aux rochers, et qui n’offrent aucun signe, ni de sensibilité, ni de contractilité; on peut les pi- quer , les déchirer, les brûler , sans qu’ils exécutent le moindre mouvement, et on sait seulement qu’ils vivent, parce qu’ils absorbent continuellement une quantité considérabie d’eau par les pores répandus sur toute leur surface , et que ce li- quide est ensuite expulsé par d’autres ouvertures plus grandes dont il s’écoule en formant un courant rapide. Une espèce de charpente solide composée tantôt d’aiguilles ou spicules cal- caires ou siliceuses, tantôt de filamens cornés , soutient ces masses et est revêtue d’une espèce de tissu mou dont l’intérieur présente une multitude de lacunes communiquant entre elles de façon à constituer un système compliqué de canaux rami- fiés. À certaines époques, de petits corps ovoïdes ou sphériques se développent dans ce parenchyme , tombent dans les canaux dont il est percé et sont expuisés au-dehors avec l’eau qui les traverse; ces corpuscules sont les germes reproducteurs de l’é- ponge ; ils sont doués de la faculié de se mouvoir, et après avoir nagé pendant quelque temps, se fixent et se transforment en une petite éponge semblable à celle dont ils proviennent. On connaît un grand nombre de spongiaires ; la plupart sont propres aux mers des régions chaudes, mais plusieurs habiteni les rochers de nos côtes. Celles dont on fait un si grand usage dans l’économie domestique se distinguent par la naiure pu- rement cornée et par l’élasticité des filamens dont leur char- pente solide se compose ; l’une de ces espèces, l'éponge com- mune, se trouve en grande abondance dans la Méditerranée, l'autre appelée éponge usuelle, est propre aux mers d’Amé- rique. Ces corps sont l’objet d’un commerce important , et pour les préparer aux usages auxquels on les destine , il suffit de les bien laver pour détacher de leur squelette corné, la matière animale dont il est naturellement recouvert. Il existe aussi dans les eaux douces des corps appelés spox- GILLES , qui ont beaucoup d’analogie avec les éponges , mais sur la nature animale desquels on a pius de doutes ; plusieurs naturalistes les regardent comme appartenant au règne vé- gétal. FIN. 6s Spongilles. US I ee Ÿ ] 1 | f"? \ ar PARLE , dei . N} dr à Let : nt | : ‘ 12 FR) y FES (E- à DELLE d * on Li. ‘ . \ Fe | 1, | COTE AT E ES \ IL Fa LE LPS v Lu: ‘ PARLER HUE CE ‘ S 2 D Es sie FA a? t d 14 62354 “ibn . “Dos us JU aghif L nur! LEE M f dei le 7 de Ur * AT OS pe : sit k 3 : CP à we sx AY LEE | Dites NE Je, ai, à PE dE, : . SPRl 4 3% PAPE rue \ Fées ni | | At © + 83e ma, Vis OR | SET , Pi et, ; 4 EL.) wir - r#ÿ 26 ASE dire Fes CHARTE ét Dr HAN FHENE CIC À a Eat à TABLE DES MATIÈRES. ABDOMENS. . - . . ARMES SZ. - 5 MIE ON : = MISE" ENS :S = > APTRIRESE ee as ES ABSORPTIONe + + » ACALEPHES... | .::. Acanthocéphales . Acanthopodes.. . . ACANTHOPTÉRYGIENS. Acanthures. . . . PATES UT EX » à AcÉPaaLeslamellibran- CRT 26 À" SI MS 2 2 : ACÉTABULIFÈRES. . . Aebires UNE, : Achromatisme de l’œil. ACIDE CARBONIQUE. . ÆABCREEE + - —… : AEBIES St | MEET ds: à: . Asipotire. + : s » Héaigre." - . . APR ON AN à EEE ADGIRESS | + © . DER + Rs M. À Agrions. Se DRE A à & Dee Aigles-autours. . . Aigles-pêcheurs. . . Aigrettes, . . . Misnillats: re … . Aiguille de mer. . . DE. . 201 ; 491 EE + ..:: AtTR atmosphérique : sa composition . — Modification qu'il éprouve par l'effet dela respiration des animaux et des plantes. . . . Alauda. LORS E: Albatros UNSS EN se Albnmine. 728 : 846 949 55 RON. (MER #2 AE AOS os Me 5 à Alcyonelles. . . . Alcyoniens. . . . Alerons Alactorss 4 2, LOUE ADEMENSST UN EN e Aliurus. ere Aloses. . . 2e Alanaties: :.': ‘Me Alouettes. . . Alouette des Alpaca. . . ABMÉOEES SU LUS Ambregris. . . Ambrettes. . . . ANEIYAS= à + Ie Ammonites. . . . Amphinomes. . . . AMPHIPODES, . . . Amphistomes.. , . Amphitrites, . . . Amphiuma. .. . . Ampullaires. . . . Anabas. . . Anarrhiques. PARASE Te E D L Te ANASTOMOSES + . . Anatifes. PRAARESS 4e ee 794 653 786 1018 1007 1031 1019 685 Sor 715 722 617 34 1014 832 ANaTOMtE (définition del) 2 "" RENE sui Andouïllers. . . . Andrenètes, - ._. - Dee nn 2\ - Anémones de mer. . LITE SCENE ANGLE facial. . Anguilles. Er Anguilles électriques. Anguilliens. . . . Anguis. Se Angyostomes. . . . Anhinga. . . - ANIMAUX (caractères généraux des). . ANIMAUX ARTICULÉS. ANIMAUX HIBERNANS. ANIMAUX A SANG EMAURE "EE 0) ANIMAUX 4 SANG PROEDS EE. le Ve Pre? | 459 913 424 1045 755 163 745 747 545 G61t 803 6x7 6 S39 70 ANIMAUX VERTÉBRÉS ARNÉTINES + 0 abranches, errans. . . suceurs ,. terricoles . tubicoles. . Anodontes. . . . LEFT TT ERP RS AHOMIESSS, Anomoures. . . . . Anoplotherium. , . Antennarius. . . . ANTENNES, . . . . Anthicides. :,. , . Anthomyzides. . . ANTHOZOAIRES. . . DER Us 5" Aathreness.. : ‘= | Pallus 0 LT: BanlOEs es TE TC ARR DRE SEE Aphidiens 50, Aphidiphages . , . Apbrodiies. ‘. . . RARES Re =. = PRIS, lee e/ - ArOPHYSsE olécrane. . —— — — — =— mastoide. DpASHRes D 5 APPAREIT, définition de cembE). . . AREA ee Apterichtes. . . . Aptenodytes. . . . PRES S.à |: RS RS 2 à ARACHNIDES. « « . pulmonaires. trachéennes. AFACENOÏIDE. © à Arannees "2". Araignées crabes. loups sédentaires. vagabondes. LT UE NN Aras. Se LL Arcade du pubis. Arckers. : = Arches. Ardea. 2259 1014 1020 1017 1020 1020 1019 826 655 82t 1002 4Ix 28 845 883 960 1043 953 2e 241 444 383 943 8ga 1018 913 Ôdr2 IQ 197 93 De 1054 Arénarid, + Arénicoles. Argalis . . Argonautes. +. . « Argyronètes. ÂArions. . À Arondes MEL 7 Le Arpenteuses. Arrosoirs. « ARTÉRES.. à - o 28, 32 — aorte . — axillaires. — brachiales, . — carotides. — cœliaques. — mésentériques. pulmonaires. — rénales. . — sous-clavières. ARTICULATIONS. Arvicoliens. . « Ascarides. + + + » ASCIdieSs ele ie Le Asiles, . . ASpie.! re. ee Vebile Astaciens. ASÉACUSSS Se ie ASIETIES 0e ea Astragale. . + Astrées. . ASIUT ste Aeles, 217-100 Ateuchus. Athéricères. : Atherines. . .""". Athérure. ATLAS. Attelabes. Atypes Auchenia. AUDITION. Auricules. Aurochs. Autours. Autruches. Avicules. . . Avocettes. » Axies. AXIS. Axolots. Aye-aye. 5 AZOTE (son rôle darts Ja respiration ). B. Babiroussa. Babouin. 1: DAAyies "4.3 0e BAILLEMENT. Balanciers. . . 847-949 Balanes . Balantids sue: Balbusards. . . Baleimes te ent: Balénoptère. . . Balistes. z Barbeaux. TABLE DES MATIÈRES. Barbue . Barges. . . Barillets. Bars - co d Bartavelle. . . . Base de sustentation. Pasilics. - PASSIN) 20/5 ae droite Bathiergus . BATRACIENS Batraciens anoures. . Batraciens urodéles. . Batracoïdes. +, +. . Baudroies, « . Baveuses. +. . Bécard: 2 Bécasseau . . bécasses 1 Becassine. -/s/400 Becfigue. Bécke. Becs-croisés. Becs-en-ciseaux. . Becs-finss . . . Becs-ouverts. Bélemnites. = Belette. 130" Belone. Beugalis. Benitier. Bergeronnettes. Bernaches. » Bernard Phéoité: 3 Beroes:1tée 2-12 Béthyles. . . . . Bihoreaux. : Acae BITES. BIMANES. . Bimanes (reptiiellé . Bipartis, se Bipèdes. Biphores. Biset. Bison. Blaireaux. + BLanc de hhe. Blaps. Blattes. . Blennies. Biens + 5 cie lee Blongios . He Boas. Bœufs,. : Bœuf à queue de che- val. — des ongles. — musqué. MAP es Bogues. . . Bombrycilla. . Bombycites. . . Bombyles. + . Bombyx . . . — (faux). Bondrées. . . . Bongares. . . . : Donite. re Mettie lle Bonnet, . Bostriches. . . Botrylles. . Botys . Boubies ,. 71% Boucae. . Bouches en ‘flûte. Boucliers. , . Boulereaux . . Pouquetin., . . . Bouquets. Bourdons. . Bourdons. Boursouflus. . . Boniernss: 0. . Bouvreuils, . Brachélytres. Brachines. . , Brachions. # . . BRACHIOPODES. . Brachyptères. . Brachyures . PROC TE 0 Branchellions . BRANCHIES . 2 Brechet (des oiseaux). Brêmes, . . SR Prentes. . Brevipennes. Broche!» .? - Brochets, . BRonNcHrEs. . Bruans. . Bruches . BRYOZOAIRES. Baron Bucardes. Buccinoïides. Buccins, . Buceros . . Bute, *. — du Cap . Rs SAUT Bulimes . "- EE ne MS Bulles. Buphaga . Buprestes. . . Busards . Buses. . Babrs. ns Byrrhiens. . Byssomies. . . Esbaret". 7. Cabassons. . . Cabeliau. . Cabiais. . Cobochons . Cacatoes. . . Cachalots. . . Cachicames. . . Gidrans. "7". Cælogenys « . . : Cailles, +". ve Caillette . China: 27 57 77 # Caisses. « .. - . 135-139 Calandre. 548 Calandres. . 885 Calaos. re 560 Calappes.@ +: - + 1vo2 CaLCANEUM . . 109 CazcuLs urinaires. 105 Cakdris. . . 600 CaLLEUXx (corps). . 115 Callianasses. . . . 100 Callichrome. . . . 838 à: 8 Callimorphes. 935 Callionymes. 722 Calmarets. . . . 753 Calmars . | 733 Calocéphales. . 340 Calosomes. . . 862 Calsptrées. . 807 Camacées. . . . B27 Caméléons.. . 657 Camérines. ., . . 787 Cames. = 823 Campagnols. 357 Caxaz cholédoque. 95 — cystique. 93 — hépatique . . 95 — nasal. . 60 — thoracique. 45-100 Canaux semi - cireu- laires . . 136 nn 7 Gr; Cancroma. . à A Cawines (dents). . . 83 Cannepetière, . . . 590 Canon (os du). . 395 Cantharides, 833 Cantharidies. . 883 roue. : . 645 Chen - « 4:36 Capricornes. . . 855 Caprimulgus. . 546 Capuloïdes . . 807 tanhés,. 0e. - 862 Carabiques . . . 860 Caracal. . ne 336 Caramote. 1006 Carapace. . 634 Carcharias. . 756 €arcin. . : 990 Cardiacées . , 120 CaRDIAQUE ( ouver- sure): >: Yo ns le <8°5 Cardium., . . . . 829 ÉRee, … … = +. JE EE - - 2 645 ES. - - -., Où Carwassiers ( ordre des mammifères ). 283 — insectivores. 293 PO. - : . . . 19 Carnivoresamphibies. 335 Carnivores ( mammi- es). - - 299 Carpes. . - 726 Carpomyzes. . 961 CaRONÇGULE lacrymale 160 TABLE DES MATIÈRES. Carouge . Carrelet . Carrelets. Carthagoriscus . CARTILAGES. —= cricoïde, — ihyroiïde. Caryocatactes. up . Casoars . Casques . . Casse-noix. . Cassicans. Cassidaires . Castagnols . Castors . . Casuarius. Cathartes. . Catometopes. . Caviens…. . . CAVITAIRES. Cavire glenoïde. Cayopollin. . . Cébrionites. Cécilies . Célan. Centenes. , Centhéres , CENTRE de gravité. k Centrina. = Centrisques . . . Centronotes. CÉPHALOPODES. . . . CEPHALOTHORAX. . « Cérambyciens. Ceraste. Cerbères. Cercoleptes \, Cercopithecus. Cerfs. Cérites. . ae Gerthinies Jen): Cérumen. . CERVEAU. — (ses Fonctions) - CERVELET, . Cestes. Cestoides CETACÉS . Cétoines. Ceyx . . Chabots . Chacal. Chalcides. Chaleis . CHALEUR ANIMALE. . Chameaux. . . Chamois. . CHANT. . . Charadrius . Charancons. Charbonnier. Charbonnieére, . Chardonnerets. . . . Chassie, Chats. — ee — (ses fonctions). 565 295 1055. Chats-huants. . 531 Chatouille. . 762 Chauve-souris. . . 287 Chéiromys. . 348 Chéiroptère. . 286 Chélicères . . 954 Chélonées, . . … 1622 CHÉLONIENS. à. 668 Chenilles. , . . 854 — processionnaires. 934 — mineuses. . + + 936 Chersies 659 Cheval. . Du "4: Chevaliers. . .« + . 6o1 Chevaliers . . 924 Chevèches, . Me Chèvres . - 446 Chevrettes. . : 1006 Chevreuil. . ‘ 440 Chevrolles . . 1009 Chevrotains. té +838 Chien de mer, . . 55 Gens le, -'e 313 Chilognathes. . . 966 Chilopodes . . 967 Chimères. . 954 Chimpansé . 270 Chinchillas, 361 Chique. . 948 Chironectes. ‘ :723 Chirurgiens. *. ‘20 Chlamyphores. 383 Chlænies. 862 Chloromys.… . 365 Chocards. 536 Chætodons.. 712 Chondrus. . ES 70 CHONDROPTERYGIENS. 791 — à branchies fixes. 554 EE — libres. 722 CHOROIDE. . + . 143, 147 Choucas. + -. 554 Chouettes. . . 529 Chromis. . 724 Chrysalides. . 554 Chrysis. Go7 Chrvsochlores. 208 Chrysomèles. 859 Chrysops. 7 099 CayLe. 96, 100 Cave. . 92 Cicadaires. 942 CicATRICULE. 215 Cicindéles. 860 Cicindelètes. . 860 Cigales,. . . x 2 Cigognes. . . 596 Cincles. . 536 Cinips. . 907 Cinixys . , . . 640 Circaetes. . . 524 CIRCULATION du sang 24 Cire du bec. . 511 Cirrhopode, 1013 Cistélides. . 882 Cistudes Gt Citigrades. g8z 1056 Civette, 327 Cladobates. 294 Cladoceres, 1011 Clairones. 869 Clairons. 869 CLASSES . 224 CLass[FICATIONS. 221 Clausilies. . ; 794 Clavagelles. . - 834 Clavicornes. 870 CLAVICULE. 190 Clavigère. 891 Clavipalpes. 890 Cléodores. . 816 €lios. “ce RE 816 Cloportes . 1010 Clopes. : ?. "TETE CONS. TUE 304 Cobayes. © 1 ER ER Cobitis. SAIS Coccinelles , 890 Coccothraustes . . 1553 Cochenille :.. *. *. .' 10949 Cocheyis: 2,4 548 Cochons . : à 404 — de terre. . 384 CoEcuM . .… . . : 96 Coéndons. *. ‘. 2127006" Cœur. . 24, 29, etc. Coffres.” . + Re COLEOPTÈRES … * 858 Coléoptères carnas- MTS en te le . 860 — pentamères. 859 — hétéromères. 880 — tétramères. 884 — - triméres. - 890 Coliades . 025 Colibris 20: #2: 555 Colimacons . … . . 593 Coflasrhs "5 583 CR ES see ; P "40 CorzE de poisson. 733 Colombars . is: «TE Colombi-gallines . . 571 Colombin. 569 Colon. re Au 97 Coroxxe vertébrale. 182 Coluber. . + . 666 Colymbus. . . 608 Comatules. 1039 Combattans. . . . Conchifères. . . . 769 Condor. 514 Coxpyres de l’occi- pital. . 137 Condylures . + 298 CES NE OCR RES. UE 749 CONJONCTIVE. . 159 Conirostres . 547 Conops. . 955 CONTRACTILITÉ . . 109 Copepodes . . . 1010 Coprophages. SON Cogs de roche. . . 541 — de bouleau. 981 Cogqs . ÿnT TABLE DES MATIÈRES. Cogqs de Poe 58: Coque. . EE … - Coquiiles. 769, 78 Coracias . . 559 Cora, 0 Se Me : : : Coralliophages : 827 COPDeR TE, FES Corbeilles. . 830 CTIPIS Eee TL PE 830 CoRDESs vocales. 202 Cabane": 1.7. 445 Cormorans . a | CoRxNÉE transparente. 142 Corneille. *. ”. OP CORKNES. . = 437 — - d'Ammon ; 786 Cornets du nez. 188 Cornets . , | Corps striés (leurs fonctions). 173 Corsac. 327 COrtuS.. 22 TENTE Coryphènes. . . . "19 Corythus. . er CORESS 2: FETE 159 Cotingas . PA 13 1: Cottus. "NICE CoTmR . te 583 Coüagga.”, . . * 427 Ceteous . "TT CD. "COURSES Couguat . .‘."-"- "530 Couleuvres . 666 Coupeur d’eau. +. 613 Coure-vite. + 302 Courline. . , +. + 599 Courlis. . . 598 Courlis deterre. . 5gt Couruüllièress « + 895 Cousins « - oô1 Crabier. . + . -+ 392 Crabronites. . . + 11 CRANE. . 186 Crangons. . 1006 Crapauds. . . + * 682 Crapaud-volant. . + 547 Craupecherot . . 524 Craves. 559 DE =, = Vous 572 Créophiles. . 959 Crépidules . 807 Crépusculaires. 926 Cresserelles. . . 520 Crevettes 1000! 1008 Crevettines. 1008 Crez. 602 Cri 206 Criocères. 588 Criquets. . . 806 CRISTALLIN. .« + 143-147 Crstatelles. .". "7 ""Vr0 Crocodiles. : :°. + ‘O9 Crocodiliens. . . 648 CRGIssANcE de l ae me. 252 Crotales 650 CRUSTACÉS» . 986 — décapodes: 99 Crustacés suceurs. Cryptes. . - Cryptonyx . . . Cryptophages. . . CORBESE re Cucullus . 2 Cuillerons. . . Cm la nie CUISSE. Culblanc. Clriontete, Curruca. . Cursorius. CES. . . : Cyclades. . . . Cycliques. . Cyclobranches. Cyclométopes . Cyclopes. Cyeloptères. . , Cxcrosromes (ordr bent: 1672 Cyclostome. , Cygues. s Cymbulies. . Cymothoés . Cynocéphales . . Cypricardes. . Cyprinoïdes. Cyprins . Cypris. . Cysticerques. D. Dauphins. . . Dauphinules. . Daurades.' .' .‘ : Dactyloptères . Dague. .« , : Daim . Re Damans . 4 : Dames, . «Tamer Daphnies. Ad. Dasypus. : 7 - * Dasytes .' ." fs. Dasyures. . + + : DÉGLUTITION . è Delphinaptères. . Delphiniens. +. . Deltoides." .” «+ + Demoiselles. . = — de Numidie. s Penn Nate Dentirostres. . + Mes." "net TS — carnassières. + — tuberculeuses . Dermaptères. à DERME. .« . . Dermestes. .« « . Dermestins . 4 DEsmarts..t ..) © Diaphragme ( (muscle). Diastole mer is ET Dibranchiaux . . . Dicotylis. . 2 Dicranoures. . Didelphis. . DiGEsTioN . Digitigrades. Dindons. . . Diodons . Diomedea. # Diphyes . . . Diphyllidies. Diploptères . . Dipsas. . . . DarTÈRES. . . Dircée. +. . D Diurnes . . . Dolabelles. . , Dolichocères. . Dokichops. . Dolomèdes . . Donaces. . . Dorade de la C Pose US, - Dormilles. . Dorsibranches . Deseet..….. ". Douroucouli. . Douves. . Dragonnes . Dragons. . . Drasses . Drenne. . Drilles. Dromadaire. Dromies, . Drongos,. . . Byops :, .!: Pas at. Dugong . . DuovExuüu . DuRE-MÈRE. Durs-becs. . . Dytiques. , Dzigguetai . EcaiLre . . Eeailles . Echasses , . Ecaassrers . Echelettes. , Echeneis. , . Echenilleurs. . Echidnés. . . ECHINODERMES, Echinomyes. . Echinorinques . Ecorcheur . . Ecrevisses. , . Ecureuils. . . EpExTÉs. . . Edredon, . . EU EDRIOPHTHALMES . Bibne, -: .. .. Egrefin. . . Eiders. ,. à nn re Elaps. . Elatérides. Eléphans. . Elmis, . TABLE DES MATIÈRES. Elophores, . : 8-6 Pc: 2.0" 754 BÉErRES.. ;- : -"; 846 UT Ve RSR TT MON - $2 Emarginules. . . 809 Emberiza. - ......#449 EMBRANCHEMENS . . 924 EmRRyON. . . ._ .# 212 Emerillon. . 520 Emeu. . . 589 Emouchets . 220 Empis. . . 952 ENCÉPHALE . 111,113 Enchélides . 1036 EncLumE. . ; 136 Encoubert. . . . +. 3583 Enerines. . . 1039 Endomyque. 890 ENDOSMOSE . . 4x Enfermés. | 831 Engidites. . . . 872 Engoulevens. . . . 546 Engrauls. ... ...., 737 Raielles :. 2; . 20e ENTOZOAIRES. . . . 1029 Babies. L _ .. : . - NON Epanchemens san- TRS ER PE” 48 Epoulard. _. ... 040 EPAULE . . . .…. + EQR Epeiche . . . 367 Epéire. . . 950 Eperlaus. . 533 Epéronnier . .. . , 977 Eperviers. + . . 525 Ephémères . . . . 898 Epibulus + + . . « 724 EPIDERME. . . . 126 Epiglotte. . . . 88,203 Epimaques . . . . 559 EpP1xE du dos . . . 182 Epinoches, . . . . 709 Epiploon. . . . . 80 Eponges. . + . + 1090 Equilles . ._ . . : 748 MÉSES. Le. se, = 982 Brébisons.. .… .… -. ::. 307 Erinaceus. +. .. .: + 293 Éryenes., ., .: - . 929 nn à 0 Van ea Esearbots. :. .. …. 2 2 OM Escargots. . 793 Eschares. 1045 RACE en ee, à 728 Espadons. . . . 718 ESPÈCES … .. . 224 pme. .: ., . - 737 EsTomac. . . . 90 Esturgeons . à GR Hihéries … .. . Ut EÉTrRMOIDE. . . .. 12190 Etoiles de mer. . . 1038 Etourneaux. . * . 5953 ÊTRES VIVANS ( carac- tères généraux des). 2 FREE. à, à © 136 Eumènes. 912 Eumelpes. . . 6 Eumorphe. . . .… , St nndes - . >. 4. -, -e Evaniales. EvEnT. . . US ExXHALATION. . . . EXPIRATION. . : EXPRESSION. . . . Frein le. FE: FABR:E. «LEP x FacuLtTÉs ( instincti- 5 PPT AE — intellectuelles . Faim .-. _. FaiSans. 1 | PAREREES, Lo ile Le Fanons. . . Faon . ATEN > Farlouses. . ,. . Faucheurs. . . . . Faucons. . . 517 Fauvettes. US PETER He 3. + : PR © Se FanÈTRE ovale . , Fenêtre ronde. . , Festucaires . . . Feuillet . . Feutre. . . FRRINE fe. ©." e Figuiers . , Filaires. . . Filandières . . . . Filistates. . . . . Filous. . Firoles. . Fissipennes Fissirostres Fissurelles. Fistulaires, . PC RENE E Eletins. . . -2 Flustres . «+ . : LT CSRRGENRE Foilicules :. + +. « FonNcTioNs DES ANI- Maux ( définition et classification des). FONCTIONS DE NUTRI- MON es Les Les Ein FONCTIONS DE RELA- MAI 24 d eut lan COLE Foxcrioxs de repro- ducuons. SE 24 Foraminifères . . Forficules. .« . + + Fosses nasales. . . ÉRaine ue. =. Fomisseurs. . . . : Foulques. +. Fourmiliers. . . Fourmiliers . Fourmilions. RnnnS :. ‘1e et 580 1058 Fourmis blanches. . ROUSSEL te) à de, Francolins +. . . . Fratercula. + . . Fregattes, . . . ERElONS EE, Met - Ut s Friganes. . . . Frigilus + +... Fringilla . . . . : Friquet. . - Fromage. HRONTAT. .- :.--0e Heu. de + Dore Fulgores. . 7, Huilmar: : 00e Fungicoles . . . Kuseaux : 9 20e Heret- 1-0. G. Gadoïides. : «7 .:uate Gagon Le Galathées. + . . + Galéopithèques. . . Galette... Le 0 Galeruques . … . . Caleus ee Nes Galleries. 5; 4.10 Galles,» 00 Gakicoles. . mr. GALLINACÉS. . . . Gallinsectes. , . . Gallnula:) 41. ; 12 Call Es HU rdsele Gangas. . . . . GANGLIONS nerveux, Casdoni .: 5:24." E100 GCOErOIN 4. CCE GASTÉROFODES. . , Gastéropodes pulmo- MES + aù Le mt re — aquatiques. — terrestres . Gasterosteus. .: ÉrAStreE.s OV ee CR Gastrobranches. Gastrochènes. . . ÉAVIAIS. RER Gazelles s .. + 0 Geais.. 12%. Ne Gécarciniens. . . . Gécarcins. . . . Geckos.: ,? 2 wo us Geckotiens . .._ … 4 Gelasimes. , , . Célinottes.’ 1:21.) GÉNÉRATION ovipare. — par bouture. . — spontanée . ÉoVivipare.. . Genettess .r2210È0e RES ele de :. à CRRRRES 2 0 SUR Géocorises …. .… .:-% Géomètres. . Georychus. . Géotrupes. , Detbilies Sr 1hid, 1001 582 211 216 210 211I 328 459 224 940 935 359 878 355 TABLE DES Gerboa:-- -2 Geérboises Ur Gerboisiens. . . . Gerfaults . . GENIESES . : - RS Germilles. 4.570500 Éérmon... RS Ma GESLERS ste Giaroles - . .. Gibbies . Éibbons 4502598 Crbele.s 25e RaN. Giafe Le oRRE Giraudine. . Cirelles 5.1. 9550 De GLANDES. , ‘ Glande Lerymale, . Glande de Meibomius. Glands de mer. . . Giicusi. LL, ë Grogures du sang. F Gloméris. ».:4: 4810 Ginife. 4 «2 1e COS Glontons. «. } ,.146000 Glycymères. . . RE À Gobe-mouches, . , Gobio; : 44 1250 GoMioidess - ...,,4 COhous, % 1.408 Goclands.. , : L, 40 Gorge-bleu. . . . Gorgones. . . . Goujons gt 51 tr Goujons demer. . , GOUT 2e MR TRS Graisse . 03. Grandipalpes. , , , Grapses... .,,..4 Gras-mollet, ,. . . GRAVIER urinaire. . Grébes. 4 ce «+ 01 Grélin., .: 2,9 0 Grenailles. .: .. 48 Grenouilles .. , ..: Gribouris.. .1. © Griffons . . , Grillons . . Grimpereaux. . . . GRIMPEURS. . ÉCRIS: 1 Pau : Grisette =: + .7 1e Gnsons.s,,.1"., 0 Grives . . à Grondins.. 4 1,006 Gros-hecs.,..72, 2 CIHES- + sue ce 0 Gryphéess "© 19 Gmanaco .. LOS Gaino 4 5106 Gvuenons.. ..: . ue Guepard. . EMEDES:: a ol ei Guepiaires ANSE Guepiers. . 3 Gucriinguets. .… … . Guillemots. . Gulo. MATIÈRES. 356 ibid. ibid. 521 Gyall, . … Gymnètres . . Gymnodontes, Gymnomyzides. Gymnotes. , Gypaëtes. . Gyrins. 'én H. Hæmopsis. . Hæmatopus … . Haliætus. +. . Haliotides. . . Halmaturus. . Hamsters. Hancux. 9 Hannetons . L : Harengs. -. . Harenguet , , Harles., ., + Harpale. , . Harpaliens . . Harpaye. , . DO. , ,: Harpies . Hausen. . . , Hectocotyles. . Helamys, . , (' 2 SRE HRIONE., 4 à Hémérobes. , Hemionus. , , HEMIPTÈRES. . Hemorhagie (effets de l'). Hepiales. ..., Hepialites. . . Heptatrèmes, Herissons. . , Hermine, , . Hérons. 47 Herpestess. . Hésiones. . . Hespéries. . . Hespérisphynges Hétérocères.: Hétérogynes. Hétéropodes. Hétéropteres. . Hhbonx 5-2 Himantopus Hippes. . … . Hippobosques . Hippocampes . Hippoglossus. Hipponyces. +. Hippopotames . Hirondelles. . dpi de mer Hirudinées. . Hwandc .: : le Hispes. . . . Histeroïdes . Hobereaux . . Hecenss 7 le Hochequeues . Holctres, Holothuries. . 1037 Homard. . 1005 ce mel 5. 002 Homoptères . . 942 mile ” sites Houlettes. . - . + 827 ie sn 818 Hors. - - «+ - 592 ne 2 55t Humwmantins. . . 797 Humeur aqueuse de Fons, 2, 0 à 147 Humeur vitrée . . 143 HumEeRus « + «+ + 191 Happes. .”. . + 559 Herdenes. 0. - à de 0 Halo... NE Hyatelles . : «AE Hydatides. . . . + 1033 Hydres. . st à + 674 Hydres (Polypes d" eau douce). + 9» 1049 Hydrochærus +. 171308 Hydrocorises . . + 941 Hydromètres. + . + QAI Hydromygides. . 960 Hydrophiles. . + . 875 Hydropisies. . . . 56 Eêness - nn... + :: 329 D 5... . 68r HyMENOPTÈRES . 903 HyxoiDE . . , , + 89 Hypsiprymnus. . . . Hypercodops, . , . 476 Hyperines.. . 1008 Hypocères. . . . 961 HER 4 à - Ne 410 Hystrix. : 367 KE. DER 12,7. 598 Ichneumons. . . . 06 Ichthyocolle. . . . 753 Icthyosaures. . . , 660 Tdotéee rem, roro Iguanes.. . .:. 653 IguanienSs . . . . (654 Mr iT-. .. 5. 94 IMBIBITION. . . . 40 us: 220 L =. 0099 Incisives (dents). . . 83 Indicateurs. . . . 266 Indris . . 282 Inequiteles. . . . 979 Inferobranches. . . 811 IxFusorres polygas- triques. . . . 1033 — rotateurs. . 1027 INSALIVATION . . . 86 Emsrcress à .2.0: 1 844 INSPIRATION. . . 66 INSTINCT . . . 109, 163 INTELLIGENCE. TI10 INTESTINS. , , . . 93 —gréle. : . . 94 — gros intestins, 94 ne nu: 28e . L L L L2 27 TABLE DES MATIÈRES. ER ES, de 142 rod.» .…. it LORMIQUErS LaGsse + 10 Isocardes, . . « 828 Isopodes. ,. . . +. 1009 Tstiophorus. + . . 719 if, 5 1 RACE ETES 52 LA (CORTE ECS 985 +. Jbires +. . 597 PAROLE: 0.0.0 LMP EE Jabanas Len ste SG Jen: rs: de UINÉÉE JaBuñrs. 1." 9... 386 Jamse .! . . .. 12404194 Jambonneaux. . . . 824 Janthines. . . 8ot Jaseurs . AI. 535 Jean-le-blanc. . . 524 Jevonung .. . *» 94 Joues-cuirassées. , . "07 Sakartes :5 0: 0er Jueaux (05). . . . 188 Jules, Le, His real oe LE PEN" 723 K. Käkerlacs :. . . 3040 Kamiehs . . .,. 1.0 Kanguroos. . . . 394 MEMMES +, +: 170967 Bévéless Misc OS Kinkajous. . .. , 304 Koalas. , . . 394 Le bbess ti 2% 612 Labidoures. . . ,. 893 Labrates. . . OIT BAPDTAL NS tre que 70 TABRE- 25 +. &. libres 9 0: Root nos Habroïdes : + … 1% 00993 Parertiens:-97: :.:0. 0692 Læmipodes . , . L009 Pibémys: : 2/07 998 lésopedes : .-. . . 11982 Lagotis. . . _. . 362 Lagriaires, - -. 105683 FF 5 EE CESSE 459 Famantin - 0000 EE AE OP RER EL | Lameilicornes . . . 876 Lameilirostres , Gr7 Lamiaires. . . . . 988 EME 1... 0: = 10 Eamprillon. . .. + 762 Lamproiïe.. . . + - Lampyrides. . . . 867 Lampyres. . . . . il, Eançcon . . ... . 748 Langoustes. . . . 1004 EAKGUz x. . 130 Lanier. . 520 Tanus te. 533 Lapin. . . 371 Larmes. , 160 L LT NTI SORTIES DARVES,. . PRRENRS … .: .c074 Laterigrades : . . Lavandières. . . . DRE …- HORRRES Us: 28 Lemmer-geyer. . . Lemmings . . . Lémuriens.. . Léopard. . . Lépidope. . . LEPIDOrTÈRES. — diurnes. . — crépusculaires . — nocturnes. «. . Lepismènes. ,. . . Eepismes. 44128, Bépten.. .. Leptis. . . . Leptopodites, . . Lepturètes. , Lepusiens. . . . LERNÉES « : Derot: Mr DEStris es is Leuciscus., . . Leucosies. . . Éézardss.. ‘. Eibellules. . : . . Mrehess tetes ,. 12 Lieu, ns PRES LR Lievres, Sn sr trs Lièvre marin . .… , Lièvres sauteurs. . . Ligamens dela glotte, PIGAMENS 20 5, #1 23 Pmaces:. … * ; Limacçon de l'or cite : Émande C7: 2ts Pipreboïs- : 2405 mes LE SEE. DARCOS Loris EYE Limule. Linguatules. . . . Einines ur. 50. Lingules , +... . + Hinottés. ". Lion. Shine: de Liquipes contenus dans le corps des AIDAUXS.T- UE Lithobies. . a Lithodermes. Eftfourne:s., 2:80 Eittorines 25 :LST UE Lisette. Sd. ESA Loges optiques. . . Loches.:s 1: "5041 LOcOmMOTLON., 2%": À LE Ce fe Ne mo AE Loligo.- -. .. Loligopsis. RES Lombric intestinal, Lombrie terrestre. — expériences sur leur division. Longicornes. 10960 Longipennes. . . Longirostres. ; Lophius, SEUL ARR Lophobranches. . . Lophophore. LOMODES ELLE -& à Loriot noir. Hors Em er ans Los 2 Lottes. . Loups. . + + + Loup-cervier. + + Hontres..: + HUE LOL. «. : RE Fücanes. 00 LuUETTE. : 5 LUMIÈRE (marche de la ) dans l’æil. TEamnme.e 0-0; Lumph. « … . . Tiutraires. :.",..16 Lycoses . Lymexylons. Lymnées, . . LYMPHATIQU ES ( glani des) . « cu . — ValsseaAUX. LYMPHE. . Lynx . Lyre . M. Macaques. Macarenx. RS. MacueLiÈRes (dents). Machètess ee à de MÉreuIes. le te Macreuses. +: . . Macrodactyles . . Macrodactyles . Macrorhines. . . . Macroures . … . Magires RS 0e MENT. dy: NO Magiles . Magnans. +. . . . Magots. . . . . . MAS EVER EEE Masgres 00 Mrerde 4 Maillots . MAIN. Makiss … :. Malachies. e Mliecdermes: : MArLACOPTERYGIENS Apodes tte MALACOPTÉR YGIENS abdominaux. , MaALACOPTÉRYGIENS subrachiens . Malaptérures. . Malmignatte. . MAMMIFÈRES. . Mammouth . . , Manches de couteau. Manchots. . . MANDIBULES. TABLE DES MATIÈRES. Mandrills. . : Mangeur de riz. . . Mangoustes . Maniates. ; Mél LOL 2481 Manteaux =... 087 ManTEAu des mollus- ES ne ei colauthes Méales:.) Lt an Maquereaux. . . . Masabons: .- = Marcassin: ,. 42:20 MaRcne.. .: ee Marmoses: 17.204008 Marmottess.28 72004 Marouette...… … .. Marsouins. . MaARSUPIAUX. . ©. . Magtean Ti ‘+ Marteaux... 184006 Marteaux._ . .. Æ Mrtes. 2 VON Maritimes: >. Martins. —. : Martins- -pécheurs s MassaRIDESs. MasTicATION. . Mastodontes. Matamata. . é NManies.. ss... 51 Maubecles . Mauvesi se Mais. cum" MAXILLAIRRES: + six Méandrines. . . MÉCANISME des mou- Vemens.. ‘20e Médusés . =. Mégachiles . . . Mégatliérium. Mégisserie. . : Mélanies. . / Mélasomes . . . . Méleagris. . … . MELES + : JR Mélitophiles. . . . Mellifères. > Méloës.s SA Melyres . Qu Mébyrides.. . . . « MEMBRANE pituitaire. Membranes séreuses. Membranes synoviales MemBres inférieurs. — supérieurs + + + MEMOIRE... -4 ce Méndoles.; !,.,. 4 Ménides .… ::) 4080 Ménobranches ,. . . Ménopome . +: . +. MéEpPhEES., =, = "#8 MMÉrEUS x e0:r is sue Mérmos .-: -: «Cet Merions:.. 14. #8 Mérlans .: ‘V6 Mérless #1) 0028 Merles d’eau, . Merle doré. , 274 549 328 536 334 820 893 Merluches. . . Mens tes Mérops:. + : 4: 0 Mévens, .5 5500 Merran s:. - OR Mésanges, . . . MÉSENTÈRE. : .. . 20 Mésothorax. , 5. +. Messagers.. .. . . . METACARPE. . MÉTAMORPHOSES . . MÉTATARSE:. |‘ e. «+ + MEÉTATHORAX. « « Métiers ete Micrommates . . . Milandress:. .. .. Mans 20 . |. Mini. 6.205 4 12 DES. si ne a ME 52 11 SNS Mitou-porenga .« . . Maires ee 5 el US DRE EL: à, 7 DR. © Modioles, . . MOELLE ALLONGÉE. . (Ses fonctions). . MOELLE ÉPINIÈRE. Moineaux... «+ + . Mozarres (dents). , DER tousse MOLLUSQUES. . . : OISE LL, lei tes Le Monades. . +. . Monaule... . . . Momo os certe Monodontes. . . , Monothrèmes. . . . Monostomes, . . , Moqueur. . «+ + . MOmIEs.. 0. ,< lon. 42) 1: Mormodelles. . . . Morpñnus. «+ + + + Morses. . . ' Mortalité de ue Mébrües: =" « Je Mhtacilla::.. :: 5 Motteux &: 5e, Mouches. . . Mouettes. . . Mouffettes. . « + . Mouflons. . Moules, . Mou!es d’étang. « . — des peintres. +. . Mouriness. #4 . ei 1 Mouront 2e .: ut Moustiques . . : Moutons . : : _ ste MOUYVEMENS. + + e Mouvemens involon- toires pet R os 1 Mugiloïdes . . . Mulètes + 4“. Muletsi :, … . sie Malo Ne. ete) rt tés Mess tous Murènes. ds Musaraignes. . D ee Muscardin&æ. . . Muscicapa. . . . + PRESS. Ur de Museles de l'œil. . Museles de l'épaule. . Musaidet .. . « . MECS = er à F7" PORTANT Maties..:. 1 cotes MREES.. Lun = Myetères. ,… … ee À RE Mygales . ne € DT. hu de re ve Myliobatis. . . 3 Myopie. . 3 Myopotame. . . . Myothéra . . . . MYRIAPODES. . . Myrmécophaga. . Mytilacés. : Myxmes. . . N. Nageoires. NS, ee. : Naissances humaines. DE RS ee LITE PR ir Mal." . … s Nasua. . : NATATION. . MEME tt Te Naucores. . . . Naacrates. . . . Maetilese is... “à Nautilograpses. Nautilius, . Néeérebies".”". 2757 Nécropsores. Nematoides. . . Nemoceres -. - . : . bals :* .4R) à MERS... + 50 Né“ides nr + 3 NERES- » . “.r 1578 Nerf acoustique. . . Nerfs ciliaires. . Nerf grand syapathi- [ _ OPRREL" Nerf lingual. . . + . Nerf olfactif. : . . Nerf optique. . . Nerfs des mouvemens volontaires. . . Némiesr . .: 24288 Néritines. . . . NÉVROPTÈRES .« . . Nitidulaires. , . Nitidules. . Nocthores. , . Noctilions. . MNoEluas + .1%. TABLE DES Noctule.. Noetuélites . . . . Noddis:.. :: -..08 Nonnette, Nonpareilies, . . Notacanthes, . . Notonectes , . . NüUDIBRANCHES. .. +. Nantnius. JS STE Namide.:s..s. 51018 Numulites. . NUTRITION (définition de la jé Preuves de — du mouvement nu- auf... . … 0 — (Résumé des some tions de). Nyctéribies . Nictipithèques . Nyssoniens . O. Oblades . Occrr1:TaL . DREURS: … ,. OboRAT . OEcophores . , HE OEdémérites. . OEdicnèmes. Oes 1: OËstres. . = OEuf (son développe- ment). .. .- 2e LL RES Oiseaux . Oiseau a pierre. Oiseaux-mouches . . Oiseaux de paradis. OisEAUx DE PROIE. — diurnes «+ . . — ignobles . . . — nobles: . : 4 — nocCturces, Oiseaux de rivage. . Oiseau de St-Martin. Oiseau du tropique. . Oiseau royal. . . Oiseau trompette . . Olives. _…"#h - : Cabhres tirs #04 Ombrettes. + . + OMDPLATE.,S : 4 13 Daxppas. . 5e ru. c2 MR UEAS se seu DEEE... «22 Onperotale ..... 4% Onychoteutes. . , Opatres . . . ë OPERCUzE des ms ques - .. . 2. — des poissons. OPALDIEENS + NS Ophiures. Oppossum. . . . . Orangs. «+ … ‘… . Orang-outang . : Orbes. MATIÈRES. 2092 935 1061 Qrhicules, . -. . 1101935 QRBErE. . - . . . 1958-7188 .. ./ .: 0 980 Oreyaus . . .:.1.100728 Oreillards . . . 292 OREILLE. . 139 Orfraie. . VS MÉ a arox : ; défi- nition de ce mot. 5 ORGANES ; définition de ce mot. . . ns Onbluss 2 Creme, 537 Otaners . -. Nr seu. 666 Ornithorynques. . . 387 Orplies . -. .. "= 728 Orteils. + «+ + + + 195 ORTHOPTERES . . .+ 891 Orvets. 667 Oryctères. . 362 Orfctéropes. . . . 384 GEpties.. -. 7: 50010509 ME LS - à EU — iliaque. . . . 193 -—— du carpe. . .' . “192 — lacrymaux . 158 — péroné, «+ . » 194 Oscabrions . . _.*. 810 Oimerus. "ARS Ossifraga. . . « . 517 Ostraces . 8. = 1618 Gércceni. : NUIATEE Ostrapodes . . . . ïIo1r Obariess . 74 : - 34: Otions. 85. =. Nbr OS . 6..." OBS... SAS Quel 5. 5. 134 Oasis … 50. 1 « : ANR Oäfirdes + :: 110996 Ours . . 3o1 Caransd..- 22: 1038 RES 5 ns 70 rie Ox1GÈNE (son action sur les animaux). . 55 Oxyrhinques. . . . 099 Oxystomes. . . . 1002 Oxyures. . . 907 P. Paccas. . : 368 Pachydermes. . 395 Pants Ut -. : 435 Pagels. . . 710 Pagres. . . . . ibid. Pagures . . . . 100 Paille-en-queue. . . 617 Palæotherium. . . . 410 Palamedea ... 002 Palémons. .:. . r006 PAr.MIPÈDES.. 6ofñ Palpeurs. . . 871 PAIE 0 © = 849 Palpicornese + : 874 Paludine+ + : 500 PAnce=4S - + - 95 Pan‘éatique (suc). b. padas. . 304 Pandion . 52% 1062 Pangolins. . 384 Panorpates . « . 899 Panorpes, . + + +. 899 PANSE. , DRE ET Pantheres lee à Le n- +. 330 eo VERT à Papillonides. . 923 Papillons. . . . bi. Papions #5. - + 14274 Paradisæa « + + : Parasrres (insectes ). Parchemin . . + + 453 Paresseux. . + MAIrS80 PABréTaUz ‘ut. NT 6 Parmacelles. . +. + 792 Parnassiens. + + + O24 ParoTipes ( glandes. 86 Pañra 48e. LOS LE IEEE Pazus … 22 5 07 OO PASSEREAUX. , +. 0800 Pastenagues. . 759 Patelles te... 810 Patellimanes. 862 PAUPIÈRES « « + 159 Pauxis gs) re 573 Pas A Le Lt Pecaris , 408 PECTINIBRANCHES. + 7906 Pectorales pédiculées. 722 Pédimanes . +. . 391 Pédipalpes « . : 982 Pégases .« « : + + 746 Peigne. . = P£eiGne (de l'œil). Peligeëhée SU. 20 940 Pélamides. . 718 Pélerines. 820 Pélerinsi. .. _: : =. «0999 Pélicansé .:: +1. 1N08L PELLETERIES. 393 Penées. « 1006 Pennatules . 1049 Pennes. . 493 Pentamères . 859 Pentatomes . 940 Peramèles. . 302 Perca . = 50ù Perce-oreilles 892 PERCEPTION. 102 Perches . 70 Percnoptères. « + + 91 5 Percoïdes.… . . -:* 2.104904 Perdrix : — ‘de“mer: - 24m608 — de neige . 582 Meniess xs "PR 822 Perles, "ii 0 Perles . RE PÉRICARDE . . 29 Péristaltiques ee mens ) ; 92 PÉRITOINE « sé ve n Perlon. + 708 Pernes. . 821 Perroquets . 562 Perruches. : 564 Petaurus. « + :.: HA Petit-gris. mn 947 TABLE DES MATIÈRES. Pétoncles. 824 Pétrels 6ro Pétricoles, +. 830 Pétromyzon, . J6r Phacochæres. . . 408 Phaëétons, 617 Phalacrocorax . 61 Phelangers « + + : 393 Phalangers volans. . 305 PHALANGES . . “11-292 Phalangiens. . . . 955 Phalangium fan ibid, Pbaryngiens labyrin- thiformes. . . PHARYNXs ue 0e + 87 Phascolomes, . . + 395 Phasianelles, . . 8ot Phusianus. … + ‘0. 880 Phasmes. + . + # 804 Phene.. vs de 517 Philodromes. . O81 Phœæniccpterus . . . 6oÿ Pholade,. 10 Pholques. . . ... So Phoques . . RE" 338 PHRÉNOLOGIE « + 104 Phrynes, 2 » Le 982 Poissons volans. + 708 Phyllidies. . , 811 Phyllies .… :. »+ 894 Phyllophages . . . 879 Phyllopodes. ,. +. . ïIO11 Phyllosomes. . 1007 Phyllostomes . + + 291 Phyllures. . . + + 697 Physalies. , . Of Physis. 795 PHYSIOLOGIE Céfni- tion de la). sde 3 Physophores. 1041 Picarels « . . LS RGRE Pics . + 366 Pic-maçon . . : 557 PERD ee + URR 194 PIE-MÈRE. « + + + 112 Pie: + a Ars tte LUN Pie de mer. -: t >-580 Pies-grieches. . 535 Pies- grièches=hiron- delles : : 2P4:, : - Piérides . « . + “929 Pierre-garin. : RE Pigeons . + + + : 568 Pilchard. .. . . Pileopsis . + + + + 107 Bilori. .., °: LT Pilotes... . 4°: Hu Piméliaires « + + + 881 Pinces. . +; TR Pincons .« «+ + + + 551 Pingouins. + + + + 609 Pinnes. . Ta 824 Pinnotheres . . 1002 Pintades . Ni 2e 576 Pintadines. . «+ 822 Ep ique suit 541 Pipistrelle 202 Pique-bœufs. . . : 995 Pipos S.2s 685 Planaires. 1032 Planipennes. . . 899 Planorbes, ‘ « +799 Plantigrades. . «+ 300 Plastron. +: + + + 034 Platalea, » + »« +: +. 597 Platypterix . . s-2 939 Platysomes . . + + 337 PLECTOGNATHES. + + 749 Plésiosaurus. . . + 660 Pleurobranches. . . S11 Pleuronectes. . +. + 741 PLÈVRE « « : 63 Plicipennes. . . . go2 BDs à :. 741 Ploceuss.. . « 549 Plongeons. . 6058 Plongeurs . . . 607-608 bis EN eva VO PLUMES . ue :e ÉOE Plumulaires. . . + 1030 Pluviers « + + + + 991 Podarges. . . 547 Podiceps « = . 608 Podurelles , . . + 964 Poilss 24 = 1 1 127 Pornrs lacrymaux. 100 Poissons. +. « 688 — blancs. . 727 — cartilagineux. 751 — de St-Pierre. 719 — dorés . 726 — en rubans. 729 UE St, De — plats. .« 741 — vols : ls . 74 Polatouches. s CUS Polydesmes. . . . 967 Polynoés. . . . 1018 Polyodons . . . 754 POLYPES+ 1041 Polypes d’eau ‘douce (expériences sur la division des). . : (4) POLYPIERS . ; 1043 Pomme d'Adam. . 202 Pompilius. 785 Ponéres .« . . 910 Pont. de Niro. 116 Porcelaines . 805 Porcellanes. . 1002 Pores-épics. + + : 366 Pores de la peau. + 127 Porphyrio. « + . 604 Porpites . - + + + JO4I Porte-aiguillons. + + 907 Por le eu x 080 OR Porte-écuelle . 744 Porte-scie. . 904 Portune . «+ « + 099 Potoroos. «+ + + + 393 Pouillot .« . 540 Ponlèrs -1te 79 —" d'eau. . 605 — du coudrier. . 282 — de Pharaon. 51à Poule sultane . Poulpes . Pouzs. . PoumMoxs. . . Poupart . Pourpres. , * PORE: > :- Poux de la haléué. Presbytisme . Pressirostres. Pricka. Prioniens, Pristis. Proboscidiens . Procellaria …« . Procès ciliaires. Procyon . . Promerops . PRONONCIATION. . PYOTECES 4. 1e Prothorax. . Proyer. . . Psammothées. . - Psammobies. Psélaphe. . Psélaphiens . Psittacus. . . Poylles … …. Ptérocères. . Pterocles … . Pterodactyle. . Pteromys. Ptéropodes , Ptérophores. Ptiniores. Ptines. , Puces, , Puce d’eau . Pucerons. Puffins, . Punaises, . — des EM — d’eau. — terrestres, Pupa % .: . PHPILEE.S TS Pupipares . Pupivores, . . Eminis. ,: - . Putocrius . Pygargue. Pryrgita . : PYLORE . - Pole : |: Pyrochroides. . Pyrosomes . , Pyrrhocorax. , Pyrrhulas"s :| Ephons.. 2, Pyxide, . Q. Quadrumanes ,. R. RaDrus . Races humaines, Raies . CR PSS LCA CS ME TE ef rt DA TABLE DES MATIÈRES. Raies électriques . Rainettes. Rales . Ramier. . Ramphastos . Rana . » . . . . Ranatres. Rapaces . RASURSA 2: 2 € Ratons. Rat (petit) des champs: Rats, - ; À Rat fouisseur. . Rat musqué du Ca- Radac- ‘à Rat musqué de Russie. Rats-taupes. . Rattels. . : Roussettes. . . RAYONNÉS. . Rayows Panchioste DES © Reins, TE Recurvirostra, + . Rectigrades. F Rectrices (plumes). . ReGrüum ve Reduves. :. . Real + \. 00e REGURGITATION. . Remiges . . . Remipèdes, . Remiz, . . ‘ Remora . Renards , Renne, Reptiles , Républicain. Requins , RESPIRATION. . , RÉTINE. . : Rhinobates . Rhinocéros ; , . Ehombuss “ :e Rhipiptères. . . Rhizostomes, Rhynchophores, Rhynchostomes. Rhyncops , . Biehardse CU Ricins, : TRE. - ROCHER". . Hochers »-@ Let Rochier . ,. . Rogue. , « + « Roi des cailles . . Roitelets, : Mallers 4147. RONGEURS. ; 4 . : Rorquals. HOSS Os 7 2 Rossignol, NE Rossignol de nn ROTATEURS . Rotifères. ; — (Expériences sur la dessiceation des). LI L . L2 L L L2 799 68t 602 569 562 686 g4t 511 724 304 358 351 Rotule. Mers PS Rouge-gorge, . . . Rouget. . : Rougets-barbets. Rouleaux. Roussettes ( chauve- souris ),. " — (poissons). . RD "6 Rubiettes. RUMINANS. « . RuMINATION 7 Sabots. Saeer à +: 0e Sacrum, . Sagouins. Saïmiris . Sajous. . Sakis . Salamandres ques. . Salamandres térrestes Salicoques. . Salive. Salmo. Sälmones, : … Satpa ses JE. 2400 Saltigrades . . . . Saltiques. + . . Sanderling . SAAUTES SE. -… Ve SAME: Ce. à ae — artériel . — Veineux .« « » Sanglier , SANGLOT, Sangsues, . . + Sanguinolaires. . Sapajous. . . + en Sapygites. Sarcelles. . Sarcophages. Sarcoptes. . Sarcoramphes . DARTESS Perte: se SAFTINES à: + : Sargues on . Sargues (insectes ). Sarigues . Saturnie . Satyres. . Saumons. Saurels. . Sauriens . RE Lu lu da à Sauterelles . . . Sauve-gardes, . . Savacous. Savary. . SAVEURS. . : Sazxicola Scalairés Scalspes. . Saphidites. . Scarabées. Scarabéides. 1064 SCATESe se Scarites. Scatomyzides. , Scatophages: . Schermaus . Sciène. Sciénoïdes, Scies, Scincoïdiens. Scinques, Sciuriens. Sciurus . £ Sclérotique. . Sclerodermes. Scoliètes. + Scolopax. + Scolopendres . Scomber. Te Scombéroides. , . Scops. Scorpènes. Scorpions. Scutibranches, Scutigères + . Scyllium . Scymnus. Scyrthes, Scyllares. . . Secrétaire. » SÉCRÉTIONS. «+ « Sécrétion urinaire. Ségestries. + . » Seiches. AR DT Selackhe. TMS Selacienss:. "370804 Semnopitsèques. . - Sénégalis . . ‘+ - Sensibilité .« . + SES. - As Séricaires % Us 0 Serinss 5e 7. Fe Serotine. SERPENS. . . —doubles cho — à lunette . — à sonnettes. — venimeux . Vrais ne Serpules. Serrans. . Serricornes. Serropalpides . - Sertulaires. Sertulariens. Sérum. Siamangs . Sigarets. NE Siliquaires. ME à. Suüphaïes. À Sluress 40 + Siluroïdes. Simplicimanes. Singes, «+ + + + Singes araignées. Singes de nuit. Singe paresseux, Sos du nez. Siphonaires. . . TABLE DES MATIÈRES. Siponcles Sirènes, Siserin. . Sitelles, . Sittas Smnaris. Smérinthes. . . Solemyes. Solens. . Sales ue Solipèdes. . Sox. Sorex Souchets. Soudon. Souffleurs Souis-mangas . Soxprrer. SOURGILS. Sourd. Souris. Souslik. Spalax. . Sparoïdes. . Spatularia, . Spatules. Spectres. Sperma-ceti Sphæridies. Sphargis. SPHÉNOÏDE. Sphyngides. Sphynx. Spicifere Spinazx. Spondyles. SPONGIAIRES. + Spougilles. Squales. . Squammipennes. Squatina… . . SQUELETTE. +. Squilles. Staphylins. . Stellions: : . 120 Stemmatopes. . Sténélytres. Stercoraires. Sterlet Sternes. D Sternoxes. . Steraum STOMAPODES. Stomoxe. . Stratiomes. . . Strepsilas. . . . Strésiptères. . Strigées. . . Strix. k Dune Strombes, . . Strongles. . Struthio. .« . Sturioniens. Sturnus. = as Subulicornes. . . Subulipalpes. . SuCÊt, 10 “do Suceurs (insectes). 1038 686 551 556 556 TENDON d'Achille, Sue gastrique. — a Sueur. : Sula. Surmulot. Synetheres, SHPIAT À à Syndactyles. Syngnathes. Synovie . Syrnium. Syrphes. . Syrphides. . . SYSTÈME GANGLION- HAIRE. Le :- SYSTÈME NERVEUX. Systole. . x Tabanensus -.! FAGT. Tachypetes. Taidornesss 24 ox LED SAR nioides, ! 2 + Tænioïides. Talèves. NE Talitre. . Tamandua. Tamanoir. . . - RAM se Manches «' - “Lu Tangaras. . - . . Mantales . 3 Tanystomes. D = - - MADES AR - - Tapissières. + + . Tardigrades. . . . Tarentule. . . Tarentvules. PE n Marets. . "Or. Hürier. 5 0x TARSE. Tarsiers. LOUE at Taupe des danps, Taupe | « s« Taupins. . Taxicornes. TECTIBRANCHES. . TEcTR1CES (plumes). Tégénaires . . . . Teignes . .… . Téléphores . . . Tellines . . È TEmMrOoRAUx. : Æenébeions. - . Tenrecs . Tenthrèdes , Tenthrédines Tenuirostres, Terebelles . Térébrans . Térébratules. Termites. Termitines . TRACHÉE artère, Testacelles . 792 Testudo . 640 Tètards . . . 675 Tête-chèvre . 546 Taies. . 1: - A Tetrabranghiaux ur 1784 Tetragonurus. 721 Tetras. Sa SX Thaïs. . «… 924 Thalassines. « 1004 Thelphuses . + 1000 Taélyphones. . 982 Théridions . 980 Theutyes. +. ,. . + 720 Thons. one IXE THORAx . 29» 63, 189 Thylacines . : M 302 Thymallus. . 733 Thymus 53 Thynnus . 714 THYROÏDE (corps ou glande) . 53 Thysanopodes . 1007 Thysanoures. 964 Trsra. 194 Tichodroma . 557 Tiercelet, 51° Tigre a + 334 Tivamous, 583 Tinca . « 727 Tinéites . 936-037 Tipules . 951 5 - 985 isserius . 549 Tissus, . . 12 — érectile. 48 — fibreux . 13 — muqueux . tb. — musculaire. 12 — nerveux. tb. | _— osseux . 13 EEE > - 538 Tonnine. . . . ‘78 Toque-maillet . 866 Torchepot. . 557 Torcols. . 565 Tordeuses. . 935 Torpilles. 759 ToRTUES. : 654 — à boite . Gzr — fluviatiles . 642 — marines . :bid. — molles, . tbid. — paludines. . 641 — terrestres. . 639 Tortrix. . 664 Totanus. . 6or Totipalmes . 613 Toucans . 0. DER ToucHER. . . Re Toupies . . . 798 Tourlouroux 1000 Tournepierre. . 600 Tourniquet . 864 Tourteau. - 999 Tourterelle. . . 571 Toxotes . . 712 TABLB DES MATIÈRES. TRACREES. Trachélides. Trachinus. Tragopans. . Traine-Buisson. TRANSFUSION, . TRANSPIRATION INSEN- SIBLE . TRANSPIRATION PUL- MONAIRE . Trapans . Traquets. Trematodes. Trichechus . . Trichies . . Trichocéphales. Tridacness Trigles. . Trigonies. Trigonocéphales . Trilobites. Tringa. Trionyx . Tritonies. Tritons. . Trochilus . Trochoïdes . Trogiodytes. Troncatipennes. . Troques. . . : Trous de conjugaison. HTUIÉCS: —, > -< — saumonées. Troxales. Tubipore. , Tubulibranches. Tunicrers . Turbots . Muirduss 00 Turnix Turritelles. . Upupa. . Uranoscopes. URETÈRE. UÜria URINE. Urocères. Ursons. . Urubu. Urus . cet w. Vaches . . —, marines. Vaginales. . Vaginules VAISSEAUX capillaires. — chylferes. — Jactés . = lymphatiques Valvées . 63-S5x 883 706 580 540 2x 1065 VaLvuLE mitrale . 35 — tricuspide. 38 — semi-lunaire . 8 Vampire . 202 Vanesses. 025 Vangas. . 534 Vanneaux, 5gr Vaudoise. 728 Vautours. 1 GES VEINES . . 25-37 — cave. 3r — porte . ib. —, pulmonaires . 32 Velelles . 1041 Vélin . 453 Vénérupes, . 830 VENTRICGULE chlife que. 849 Ventricules FE cœur. 20 Ventricule succentu= Trié. Sud RE Vénus. S +100 Verdier . 552 Vermets . . : 808 VERS à sang rouge. 1014 — à sang blanc. 102% — de terre. + 10,1020 — de Médine . 1030 — solitaire . 1032 — asoie. s 930 VERTÈBRES . RE VERTÉBRÉS (animaux) 228 Vésicure du fiel, 93 Vespertilions. . 292 Vessie. 102 Vestibule. SRE € Vibrions du blé (ex- périence sur la des- siccation des }. . 15 Vigneau . 800 Vigogne . . 435 Vieilles de mer. 723 Villosités intestinales. 94 Vinette. 54x Vipères. . 672 Vis 803 Viscaches. 362 Vison. 309 Vitrines . 793 Viverra. . 327 Vives . 706 Vivipare. . Soc Voile du palais. S8 Voiliers. . 719 VO - 201 Voz. . 200 VoroxTé. 109 Volutes . S05 Volvoces. 1036 Vomers. . 719 VOMISSEMENT . 91 Vrilleites. s6g CT SN TRE: 141 W. V'airus. . 342 1066 X. Xiphias, . Xirichthys. . Xylocopes. . Xylophages. Xylophages . Xylophiles . Xyphosures. . L] Li . e. FIN TABLE DES MATIÈRES. Yack. Zèbre. Zébus. . 7zemni DE LA TABLE DES be Zibeline . Zoanthaires . 466 Zoanthes. ZOOPHYTES . Z: Zygœna . Zygènes . . ° + + 427 ELygénides. . 457 Zygodactyles. . 362 MATIÈRES. 310 1045 1046 1022 797 928 923 561 on. -… dit ERRATA. Page 3, ligne 27. Le mouvement continuel de composition qui constitue le travail nutritif, /ésez : le mouvement continuel de composi- tion et de décomposition qui constitue le travail nutritif. Page Go,p."7et2r. Jatres cubes, lisez : litres, ou décimètres cubes Page 167, ligue 3. Au-dessus et en avant de l'oreille, lisez : au-dessus et en arrière de l’oreil!'e. 7 ee | 2 0 : ci a, "2 21 > ’ Lg AA : « - - - À a N/A 4 ur 438" à Se . SRI » | OM. A : & Ji sûtituer ‘op CTPICEOUE aus sil quon 3 trade. prsccmaroe Vaccton liés gl ad veu 1 eus arab ut VU 0 to audbbsairs cuit . ifisrnft éfié _ 0 2 = ME, 7 M 1) KNS Ne 2 f . : Ê . » \ ù L , . 4 — La. s R D k } " N à L Lee ° rionié ARC - = - ". 5 SAN . er