“a A EH À a At 1 «its MANUEL COMPLET JARDINIER. TOME PREMIER. MANUEL COMPLET DU MARAICHER, PÉPINIÉRISTE, BOTANISTE, FLEURISTE ET PAYSAGISTE ; PAR M. LOUIS NOISETTE, MEMBRE DES SOCIÉTÉS LINNÉENNE DE PARIS, HORTICULTURALES DE PARIS, DE LONDRES ET DE BERLIN, D'AGRICULTURE ET DE BOTANIQUE DE GAND, ETC., ETC, SECONDE ÉDITION. MS —— TOME PREMIER. PARIS. ROUSSELON, LIBRAIRE-ÉDITEUR, RUE D’ANJOU-DAUPHINE, N° 8. 2 À ON LotoletdiSt6 0 o000bi:S 060006000606 100606 lS té Si t 00 Se. vistoiSiéeiaoe louvrages sur 1 existe un très- grand nombre « l'horticulture ; et cependant, en formant le projet de publier ce Manuel, j'ai cru être utile aux ama- teurs des jardins. Si un praticien versé dans la théorie de son art, et possédant les connaissances nécessaires en his- toire naturelle, en physiologie végétale et en phy- sique, eût, avant moi, écrit un Traité complet sur cette matière, trente ans de travaux et d'observa— tions suivies ne m'eussent peut-être pas paru des titres suflisans pour entreprendre cet ouvrage. Mais Olivier de Serres, La Quintinie et les autres anciens auteurs sont trop en arrière des connaissances du jour; le Dictionnaire de Müller, Duhamel, et le Potaniste cultivateur de Dumont de Courcet sont jugés , et la foule des petits écrits publiés depuis, et: qui, pour Îa plupart, n’en sont que des extraits, ne mérite pas de l'être ; en en exceptant néanmoins deux ou trois ouvrages qui auraient véritablement de l'intérêt, s'ils étaient composés sur un cadre plus grand. Le nombre des amateurs du jardinage s’est accru 3. a v) en proportion des richesses végétales que cette sciehce aimable a conquises sur les diverses parties du monde ; elle en compte dans chaque pays et dans tous les rangs de la société. Si ce goût est autant ré- pandu aujourd'hui, c'est parce que des ambitions décues et des événemens extraordinaires nous ont ramenés à des occupations plus conformes aux in- spirations de la nature. Désabusés des illusions de la fortune , les hommes ont voulu se créer des jouis- sances nouvelles et plus vraies, en dirigeant eux- mêmes les travaux par lesquels ils devaient obtenir les fruits délicieux qui font l'ornement de nos tables, et les fleurs éclatantes destinées à la décoration des parterres. Ils se sont bientôt aperçus que la nature est avare de ses faveurs, et ne les prodigue qu'aux cul- tivateurs zélés qui, pendant de longues années, ont consacré leurs veilles laborieuses à lui dérober ses secrets. Manquant d'expérience, ils ont senti le besoin de profiter de celle des autres ; mais il leur fallait un bon livre, et je me suis cru capable de le faire. Né au milieu des jardins particuliers du roi, en- traîné par état et par goût vers la pratique d'un art auquel j'ai dû mes plus vifs plaisirs, et qui pour moi est devenu un besoin aussi durable que ma vie, dès ma plus tendre enfance, j'en ai fait mon étude vi) la plus chère. J'ai visité plusieurs fois les jardins les plus célèbres de l'Europe ; mes correspondances s’é- tendent dans toutes les parties du monde; depuis plusieurs années mon frère exploite les plantes des deux Amériques, et m'envoie les produits de ses re- cherches ; je recois annuellement, de ja Chine et des Indes, des végétaux, des graines et des dessins qui me mettent à même de juger les cultures en usage chez ces anciens peuples ; je recueille enfin de partout des notes et des renseignemens précieux sur l’art de cultiver. Ce n’est pas tout : je mets jour- nellement en pratique, et avec des frais énormes qui sont loin d’être compensés par les résultats de mon commerce , les instructions que j'acquiers de toutes parts ; trois établissemens sous différentes latitudes de la France, et dix-huit cents pieds de longueur en serres chauffées à toutes les températures, sont con- sacrés à cet usage; je possède une école complète de tous les végétaux ligneux qui peuvent croîtresous le climat de la France : j'ai réuni et classé métho- diquement, dans mes établissemens, plus de mille espèces et variétés d'arbres fruitiers. Tels sont les titres qui me donnent la hardiesse de publier un ouvrage dont, mieux que beaucoup d’autres, je con- nais les dificultés. Désirant embrasser l’art du jardinage dans toutes vii} ses ramifications, je me suis attaché à présenter son état et ses progrès jusqu'en 1826. | Les découvertes et les acquisitions que fera la science seront publiées dans des Supplémens, aux époques que leur importance déterminera. J'ai déposé dans cet ouvrage toute la somme des connaissances que Jai acquises pendant la carrière que jai parcourue; j'ai écrit sans réserve tout ce. que mon expérience m'a dicté d'utile, et je le hivre avec confiance au public. Louis NOISETTE, AA BABA DA IARIAS 144142143533 403 DUT LU] RAA AA AAA AAA AAA AA " TABLE GÉNÉRALE DES MATIÈRES. TOME PREMIER. PRINCIPES GÉNÉRAUX. PREMIÈRE PARTIE CHAPITRE PREMIER. Des jardins. ib Origine et histoire des jardins. Division des jardins. 20 Des jardins d'utilité. 38 Des jardins mixtes. 44 Des jardins d'agrément. 46 DE L'ORNEMENT DES JARDINS. 59 Des sites. 6o Des eaux. 9! Des constructions d'agrément. 103 Des fabriques. 107 Des effets d'optique. 130 CHAPITRE II. Formation des jardins. 137 Cuoïx ET PRÉPARATION DES TERRES. ib, De l'exposition. ib. Du sol. 142 Ænalyse des terres. 143 Terres composées ou composts. 162 Des enGrais. 166 Des engrais minéraux. 167 Des engrais végétaux. 169 Des engrais animaux. 171 Des engrais mixtes. 172 Préparation et emploi des engrais , Ou amendement des terres. 195 TRAVAUX PRÉPARATOIRES. 181 Des clôtures. ib. Manière de tracer un jardin. 184 Des ovuriss. ; 186 Outils propres aux labours et défoncages. tb. Outils propres à entretenir la propreté d’un jardin. 189 Outils propres aux transports et aux chargemens. 101 1. « x TABLE GÉNÉRALE Pages Outils propres à la plantation et à la transplantation. 193 Instrumens servant aux arrosemens. 194 Instrumens propres à la taille des arbres, et à entretenir leur pro- preté. 196 Instrumens divers. 197 CuLTURE DES TERRES. 199 CHAPITRE LI. Des constructions utiles, et des abris, 206 Des coucues. 207 Couches chaudes. 1b. Couches tièdes. 216 Couches froides. 217 Des cloches et verrines. 219 Des paillassons et des cages. 222 Des cuassis. 226 Des serres, 240 - De la serre aquatique. 244 Du jardin d'hiver. 247 De La serre chinoise. 250 De l’orangerie. 251 De la serre à géranium. 259 De la bâche. 261 De la galerie d'hiver. 262 De la serre tempérée. 264 De La serre chaude. 269 De La serre à boutures. 271 De la serre voütée. 273 De la serre à vapeur. 279 De la resserre. 277 PRINCIPES GÉNÉRAUX. DEUXIÈME PARTIE. 28 PHYSIQUE VÉGÉTALE. ib. CHAPITRE PREMIER. ib. ExpPLiCATION DES TERMES DE BOTANIQUE. tb. VocABULAIRE DES TERMES DE BOTANIQUE. 292 CHAPITRE II. Physiologie. 327 Des végétaux. ib. Parties élémentaires des végétaux. 330 De la germination. 335 Des racines. 338 De la tige. 340 Des boutons et des rameaux. 344 Des bulbes ou tubercules. 345 Des feuilles. ib, Des organes accessoires. 346 De la fleur. 347 De l'enveloppe florale. ; 349 DES MATIÈRES. Des organes de la fructification. De la vie des végétaux. De la nutrition. De la sève et de la circulation. De la transpiration. De l'expiration. Des déjections. De la propagation. De la fécondation. De la mort des végétaux. CHAPITRE III. Maladies des plantes. Maladies occasionées par les plantes parasites. Maladies organiques , dont les causes varient et sont quelquefois inconnues. Maladies occasionées par des insectes parasites. Lésions occasionées par des animaux nuisibles. CHAPITRE IV. Multiplication des plantes. Multiplication par graines. Choix des graines. Conservation des graines. Préparation des graines. Stratification. Du semis. Multiplication par gemmes. Multiplication par racines. Multiplication par tiges, rameaux et feuilles. Des boutures. Des boutures à l’air libre, Boutures des plantes de serre. Des marcottes. CHAPITRE V. Conservation des plantes. De la dégénérescence. Des variétés. Culture générale. De la transplantation. Des arrosemens. CHAPITRE VI. De l'emballage et du transport des plantes. CHAPITRE VII. De l'aménagement des jardins , ou travaux dont le jardinier doit s’occuper en chaque saison. Du jardin potager. Du verger. Du jardin fleuriste. xij TABLE GÉNÉRALE TOME DEUXIÈME. PRINCIPES GÉNÉRAUX. TROISIÈME PARTIE. CHAPITRE PREMIER. De la greffe. GREFFES DES ARBRES FRUITIERS EN GÉNÉRAL. GRErFES PROPRES À DE CERTAINS ARBRES FRUITIERS. . GREFFE DES ARBRES FORESTIERS. GREFFES POUR LÉS ARBRES ET ARPRISSEAUX D'ORNEMENT. GREFFES HERPBACÉES DES PLANTES VIVACES OU ANNUELLES. GREFFES D'EXPÉRIENCE. CLASSIFICATION MÉTHODIQUE DES GREFFES. CHAPITRE II. De la taille. PRINCIPES GÉNÉRAUX. Des instrumens propres à tailler, et de la coupe du bois. Époque de la taille. PRÉCEPTES GÉNÉRAUX DE LA TAILLE. Ds QUELQUES GPÉRATIONS RELATIVES À LA TAILLE. De l’ébourgeonnement. Du palissage. Du cassement. De l’incision annulaire. De l'incision longitudinale. De l’arcure. De l'ébranchement. De l'élagage. De la tonte. Du pincement. Dr LA FORME DES ARBRES FRUITIERS. DE LA FORMATION ET DE LA TAILLE DES ARBRES À FRUITS À NOYAUX, De l'espalier à la Montreuil. Du remplacement. De l’espalier à la française. De l’espalier à châssis. De la palmette à branches droites. De la quenouille. Du contre-espalier. Du plein-vent et du mi-vent. Formation à la Sieulle. Formation et taille de l'abricotier. Formation et taille de l’amandier. Formation et taille du prunier. Formation et taille du cerisier. De la palmette chinoise. TaiLLE DES ARBRES À FRUITS À PEPINS, Taille et formation du poirier. DES MATIÈRES. De l'espaler. Du contre-espalier. De l’espalier oblique. Du gobelet. k De la quenouille. De la pyramide. De la girandole. Des plein-vent et mi-vent. Formation et taille du pommier. De l’espalier. De l'espalier horizontal. Du vase. Du buisson. Taille et formation du cognassier. Taille et formation du néflier. Taille du sorbier. Taille et formation de l’oranger. Taille et Jormation du grenadier, Tarzre ET FORMATION DES, ARBRES À FRUITS EN BAIE, Taille de La vigne, De la treille. Du berceau et du cordon. Taille de l'olivier et du figuier. Taille du mürier, du groseillier, du framboisier. Taille du vinettier. Taille des arbres à fruits à enveloppe. DU JARDIN POTAGER. CLASSIFICATION DES PLANTES POTAGÈRES. TABLEAU DES ANALOGIES DE CULTURE. TABLEAU MENSUEL DES PLANTATIONS ET SEMIS. Plantes potagères, par ordre alphabétique. DU JARDIN FRUITIER. TABLEAU DES ARBRES FRUITIERS. ARBRES FRUITIERS. TOME TROISIÈME. 281 284 et suiv. 449 tb. 4x et suiv. PLANTES CULTIVÉES DANS LES JARDINS. TOME QUATRIÈME. SUITE DES PLANTES CULTIVÉES DANS LES JARDINS. f FIN DE LA TABLE DES MATIÉRES. XIV 3 AR LABS AVE VUS SABRE VUIBLS VUE BULLE VER GAULLE TABLE DES PLANTES POTAGÈRES RAA AAA UE TABLE ALPHABÉTIQUE DES PLANTES POTAGÈRES ET DES ARBRES FRUITIERS. Nora. Le chiffre romain indique le volume, le chiffre arabe indique la page. Abricotier. II. 488. Abécédaire. Voyez Cresson de Para. Absinthe. IT. 284. Ache doux. 7. Céleri. Æsculus. IX. 458. Agaricus. IL. 333. Ail. IL. 284. Alisier. IL. 558. Alleluia. XI. 286. Allium. 1. 284, 358, 360, 368, 4ra, 434. Aluine. #7, Absinthe. Amande de terre. 77, Souchet. Amandier. IE. 470. Ambroisie. II. 286. Amysgdalus. I. 470 : Or nr > 174 Anchusa. \. 3253. Anethum. XI. 350. Angelica. XI. 302, Angélique. IT. 302. Anis. Il. 303. Api. 7. Céleri. Apium. AI. 320, 42r. Appétit. #7. Ciboulette. Arachys. 1. 303. Arachide. IT. 303. Arbousier. II. 563. Arbutus. II. 562. Artemisia. 1. 284, 370. Artichaut. IE. 305. Arroche. II. 304. Asparagus. IX. 310. Asperge. IL. 310. Atriplex. II. 304. Aubergine. #7. Melongène. Azerolier. IF, 558. Bacile. 7, Perce-Pierre. Balotte. 77, Chêne. Bannette. 77, Dolic. Baselle. II. 319. Basella. IX. 319. Basilic, II. 320. Batate. 7. Patate. Baume. /7, Menthe. Belle-Dame. 7. Arroche. Berberis. II. 578. Beta. 11. 320, 423. Bette. 7, Poirée. Betterave. IL. 320. Bibacier. II. 555. Blanchette, 77. Mâche. Blé d'Inde. 77. Maïs. — de Turquie. 77. Mais. — d'Espagne. 77. Mais. Blète. 77. Poirée. — Sainte-Lucie. Ÿ7. Maha- eb. Bonne Dame. 7. Arroche. Borrago. II. 322. Boucage. #7. Anis. Bourrache. IT. 322. Boursette. 7/7. Miche. Brassica. WU. 347, 410, 441. Brimbelle. 7. Myrtille. Bromelia. II. 286. Broussonetia. IL. 561. Broussonetier. IL. 567. Buglosse. IL. 323. Campanula. XL. 437, 438. Campanule gantelée, [I. 438. Campanule miroir de Vénus. II. 438. Capucine. IL 323. Cardamine. IX. 366. Cardamine des prés. #7, Cresson des prés. ET DES ARBRES FRUITIERS. Carde. II. 323. Car don. IL. 323. Carotte. IL. 326. Caroubier. IE. 455. Capsicum. IL. 422. Castanea. XL. 455. Céleri. IL. 329. Celtis. II. 510. Cendrée. 7. Moutarde noire. Ceratonia. IE. 451. Cerfeuil. II, 332. Cerisier. II. 502. Champignons. IL. 333. Châtaigne d’eau. 77. Macre. Châtaignier. IL. 455. Chêne. IL. 46r. Chenilles. IL. 343. Chenillettes. 7. Chenilles. Chénopode. . Ambroisie. Chenopodium. IL. 286. Chervis. II. 343. Chicorée. 1L. 345 Chicorée sauvage. IL. 343. Chéruis ou Chérouis. 7. Chervis. Chou. II. 347. Chou d'amour. 7. Arroche. Chou marin. II. 357. Ciboule. IL. 358. Ciboulette. II. 360. Cicer. IT. 437. Cichorium. 11. 343, 345. Citronnelle, 7. Mélisse. Citrouille. II. 363. Citrouille Pastèque. 7. Melon d’eau. Citrus. II. 585. Cive. 7. Ciboulette. Civette. 77. Ciboulette. Cochlearia. II, 360, 361, 437. Cognassier. IL. 512. Concombre. II 36r. Convolvulus. IT. 419. Corail des jardins, 7. Piment. Coriandre. II. 363. Coriandrum. XI. 363. Cormier. 7. Sorbier. Corne de Cerf. II. 363. Cornichon. 77, Concombre. Cornier. 7. Cornouiller. Cornouiller. LE. 5rr. Cornue, cornuelle. 77, Macre. Cornus. II. 51r. Corylus. II. 464, Coudricr. 7, Noisetier Courge. II. 363. Crambe. XX. 355. XV Crambé maritime. #7, Chou ma- rin. Cran. 7. Cochléaria. Cranson. 7, Cochléaria. Cranson rustique. Ÿ”. Cochléaria. Cratægus. IL. 558. Cresson Alénois. II. 366. Cresson de fontaine. 11. 365. Cresson des Indes. 7. Capucine. Cresson de Para. IT. 367. Cresson des prés. II. 366. Cresson de terre. II. 366. Cresson vivace. #. Cresson de terre. Crête marine. 7. Perce-Pierre. Criste marine. 77. Perce-Pierre. Jrithmum. IX. 421. Cucumis. II. 361, 397. Cucurbita. IX. 363, 408. Cydonia. II. 514. Cynara. IL. 305, 323. Cyperus. IL. 444. Daucus. II, 326. Dent-de-lion. II, 363. Dolic. II, 368. Dolichos. II. 368. Diospyros. II. 565. Doucette. 7. Mâche. Dragonne. 7. Estragon. Echalotte. II. 368. Endive. /. Chicorée. Epicerie. 7. Toute-épice. Epinard. II. 369. Epinard du Malabar. #. Baselle. Epine d’Espagne. Ÿ. Azerolier. Epine-vinette. IL. 578. Ervum. IL. 4. Erysimum. IL. 366. Estragon. IL. 370. Eugenia. IE. 599. Eugenia. 7. Jambosier. Faba. II. 350. Fagus. II. 454. Fau. 7. Hétre. Fayard. 7. Hêtre. Fenouil. IT. 350. Fenouil marin. /, Perce-Pierre. Fève de marais. IL. 370. Ficus. II. 5g1. Figuier. IT. 5or. Follette. 77. Arroche. Fougère musquée. 77. Cerfeuil. Fouteau. 7. Hêtre. Fragaria. XL: 372. Fraisier. IL. 372. Framboisier. 11. 565. Gesse. IL. 357. XV) TABLE DES PLANTES POTAGÈRES Girolles, 77, Chervis. Gombo. IT. 353. Goyavier. IE. 583. Grenadier. II. 590. Groseillier. II. 555. Gros millet. #7, Maïs. Gros-raziné, #7. Orpin. Haricot. IL. 358. Helianthus. 1T, 447. Herbe à la cuiller. 77. Cochléaria. Herbe de citron. 7. Mélisse. Hêtre. IL. 454. Hibiscus. II. 378. Houblon. IT. 384. {umulus. IX. 384. Hyssope. IL. 385. Hyssopus. IT. 385. Irible. 7. Arroche. Jambose, 77, Jambosier. Jambosier. IL. 500. Jamrose. 77, Jambosier. Juglans. II. 466. Jujubier. II. 583. Ketmie comestible. 77. Gombo. Lactuca. II. 385. Laitue. IL. 385. Lathyrus. IT, 357. Lavande. 11. 393. Lavendula. II. 393. Lentille. IT. 394: Lentille du Canada. 7. Vesce. Lentille d'Espagne. 7. Gesse. Lepidium. II. 366. Lycoperdon. IX. 342. Mâche. IT, 395. Macre. IT. 395. Mahaleb. IE. 510. Mais. II. 396. Malus. IT. 547. Marjolaine, V. Origan. Mayenne. Ÿ. Melougène. Melissa. IT. 397. Mélisse. IT. 397. Melon. II. 307. Melon d’eau. ÎT. 408. Melongène. II. 408. Mentha. IL. 409. Menthe. II. 400. Menthe-coq. 7. Tanaisie-baume. Mérangène. 7. Melongène. Merisier. 77, Cerisier. Meslier, 77, Néflier. Mespilus. II. 556, 559, 558. Mesplier. #7, Néflier. Micocoulier. II. 510. Mongette. 77. Dolic. Moret. #7, Myrtille. Morus. IT. 559. Mouretier. 7. Myrtille. Mousserons. Ÿ7. Champignons. Moutarde noire. IL. 409. Mûrier. II. 550. Myrtille. IT. 559. Nasitor. 77. Cresson alénois. Navet. Il. 410. Néflier. I, 556. Nigelle. 7. Toute-épice. DMigella. IT. 447. Noisctier. IL. 464. Noyer. II. 466. Ocymum. I. 320. Ognon. IL. 412. Ognonette. 7, Ciboule. Olea. IT. 560. Olivier. IL. 580. Oranger. IL. 584. Orchys. IT. 415. Orchys mâle. IE, 415. Origan. IL. 416. Origanum. LE. 416. Orpin. IL. 419. Oseille, IT. 417. Oxalide. 7. Alleluia. Oxalis. IT. 286. Pain de coucou. 7, Alleluia. Panais. IL. 418. Parmentière. Ÿ, Pomme-de-terre. Passe-Pierre. 77. Perce-Pierre. Passerage cultivé. 7. Cresson alé- nois. . Pastèque. 7. Melon d’eau. Pastinaca. IT. 418. Pastonade ou Pastenade. 7. Ca- rotte. Patate. II. 4ro. Pavier. 11. 458. Pécher. IE. 474. Pépon. #. Courge. Perce-Pierre. IT. 421. Persil. II. 42r. Petite pimprenelle. IT. 423. Petite rave. 77. Rave. Phaseolus. IT. 378: Picridie. IL. 422. Picridium. II. 422. Piment. II. 422. Pimpinella. AI. 303. Pin. IL. 452. Pinus. IL. 452. Pissenlit. 7. Dent-de-lion. Pistacia. 11. 459. Pistache de terre. 77, Arachide. Pistachier. IL. 459. Pisum. IX. 454. ET DES ARBRES FRUITIERS. Plantago. IT. 363. Plantain. 7. Corne-de-cerf. : Plaqueminier. II. 565. Poire de terre. #7, Topinambour. Poirée, IT, 423. Poirier. ET. 514. Pois. IT. 424. Pois chiche. IT. 437. Pomme d'amour. 7”. Tomate. Pomme-de-terre. II. 435. Pomme rose./”, Jambosier. Pommier. IL. 514. Porreau. II. 434. Portulaca. IX. 436. Poterium. II. 423. Potiron. #7. Courge. Poivre d'Inde. 7. Piment. Poivre long. 77. Piment. Poivron. Ÿ7. Piment. Pourpier. IL. 436. Prismatocarpus. II. 438. Prunier. IL. 403. Prunus. IL. 458, 393. Prunus cerasus. I. 5o2. Prunus mahaleb. IX, 510. Psidium. 11. 583. Punica. II. 590. Pyrus. IT. 512. Quercus. II. 46r. Radis. 7. Rave. Raifort. II. 437. Raifort sauvage. 77. Cochléaria. Raiponce. IL. 435. Raphanus. 11. 438. Rave. IL. 438. Rheum. XI. 440. Rhubarbe. IL. 440. Ribes. IL. 595. Rocambole. II. 285. Romarin. II. 440. Roquette. IL. 44r. Rubus. II. 565. Rumezx. 11. 417. Salade des blés. 77, Mâche. Salat. #7. Orchys mâle. Salep. F7. Orchys mâle. Salsifis. IT. 441. S'alvia. I. 442. Sarriette. IL. 442. Satyrion. /. Orchys mâle. S'atureia. IL. 442. x Xvi} Sauge. II. 4/42. Savourés ou savorés, 7’. Sarrictte. S'eandix. Il. 332. S'corpiurus. IL. 343. Scorsonère. 11. 443. Scorzonera. IX, 443. Sedum. II. ALE . Senevé. 7/7. Moutarde noire, Serpentine. 7, Estragon. Sinapis. IL. 409. S'isymbrium. 11. 365. Sium. II. 343. Solanum. Il. 408 , 446, 437. Sorbier. II. 5e 46 4 S'orbus. IL. 555. Souchet. IT. 444. Spilanthus. IL. 367, 444. Spilanthe, IL. 444. Spinacia. IL. 369. Surelle. Z7. Alleluia. Tanacetum. II. 445. Tanaisie-baume, IT. 445. T'araxacun. II. 367. Tartoufle. 7. Topinambour. Tétragone. II. 445. Tetragonia. II. 445. Terre à touffe. 7. Topinambour. Terre crépie. 7, Picridie, Thym. IE. 446. Thymus. IL. 416. Tomate. II. 446. Topinambour. II. 447. Toute-épice. IL. 447. Tragopogon. II. 441. Trapa. 11. 395. Trique ou tripe-madame. F. Or- pin. Tropæolum. IL. 323. Truffe d’eau. 7. Macre. Truffe. II. 342. V'accinium. 11. 539. V’alerianella. XL. 395. Vélarbarbaré. 7. Cressonde terre. Vesce. IL. 448. Vicia. Il. 448. Viédaze. 7, Melongène. Vigne. IL. 566. Vinetier. Ÿ. Epine-vinette. üis. IL. 566. Zea. IX. 306. Ziziphus. 11. 583. FIN DE LA TABLE DES PLANTES POTAGÈRES ET DES ARBRES FRUITIERS. XVii} TABLE AAA AL LL AE VU EEE VE LA AU LULU ADULTE LULULLELE SUBAMUULE LU TABLE ALPHABÉTIQUE DES GENRES. Nora. Le chiffre romain indique le volume, le chiffre arabe indique la page. Abies. IV. 717. Abricotier. IV. 541. Abrome , abroma. IV. 343. Abrus. IV. 606. Acacie. IV. 546. Acajou. IV. 627. Acalypha. IV. 669. Acdatha III. 403. AcanTuÉes. JIL. 4o1. ÆAcanthus. III. 403. Acer. AV. 245. ACÉRINÉES, LV. 245. Ache. IV. 165. Achillée, achillea. IV. 92. Achit. IV. 204. Achras. XI. 545. Achyranthes. HT. 361. Aconit, aconitum. IV. 206. Acore, acorus. III. 28. Acrostic. HIT. 5. Acrostichum. IIT. 5. Actée, actea. IV. 212. Adansonia. IV.346. Adélie, adelia. IV. 665. Adenanthera. IN. 572. ÆAdiantum. XIT. 10. Adonide. IV. 193. ÆAdonis. IV. 193. Adoxa. IN. 425. Ægiphila. IL. 424. Ægopodium. IV. 164. Æsculus. IV.245. Æthusa. IV. 16 7. Agapanthe, agapanthus. NT. 181. Agaty. IV. 624. Agavé. III. 183. Agérate, ageratum. IV. 48. Aginéi. IV. 663. Agnanthe. III. 426. ÆAgrimonia. IN. 529. Agripaume. III. 4br. Agriphylle, agriphyllum.{V. 119. Agrostemma. XV. 407. Agrostis. LIT. 39. Agyneya.{V.663. Ahouai. III. 54r. Aigremoine. IV. 529. Ail. III. 173. Aira. I. 48. Airelle. #”, Myrtille. Aitone. IV. 292. ÆAizoon. IV. 438. Ajonc. IV. 583. ÆAjuga. III. 440. Albuca. III. 162. Alcée. IV. 333. Alchemilla. XV. 530. Alchimille. IV. 530. Alcine, alcina. IV. 98. Alétris. III. 134. Aleurit, aleurites. IV. 667. Aliboufier. IIT. 55r. Alisier. IV. 484. Alisma. III. 105. Arsmacées. III. 104. Allamanda. HI. 54. ÂAllionie, allionia. ÀV. 126. Allium. YEL 173. Allophylle, allophyllus. IV. 243. Alnus. IV. 701. Aloës, aloe. III. 135. ÆAlopecurus. WI. 35. Alpinie, alpinia. IL. 268. Alsine. LV. 393. Alstræmeria. IE. 185. Althæa. IV. 333. Alysse, alyssum. IV. 228. Amandier. IV. 54r. Amaranthe. IIL. 360. AmaArANTHES. III. 359. Amaranthine. III. 362. DES GENRES. Amaranthus. IT. 360. Amary llis. HE. 193. Ambrosie, ambrosia. XV. 6or. A mbrosinie, ambrosinia. IL. 20. Amélanchier. IV. 460. Amelle, amellus. LV. 117. AmEnTACÉES. IV. Got. Améthyste, amethystea. HX. 435. Amirole, amirola. IV. 243. Ammi. IV. 174. Amome, amomum. II. 262. Amorphe, amorpha. IV. 606. Amourette. III. 59. Amygdalus. IV. 54x. Amyris. IV. 632. Anacycle, anacyclus. IV. 51. Anagallis. XII. 577. Anagyre, anagyris. IV. 578. Anaménie, anamenia. IV. 194. Ananas. LIL, 212. Anarrhine, anarrhinum. TITI. 468. Anastatica. IV. 233. Ancistre, ancistrum. IV. 528. Ancolie. IV. 202. Anchusa. XII. 504. Andrachné, andrachne. IV. 663. Andrewsie, andrewwsia. LIT. 552. Andromède, andromeda. IT. 592. Andropogon. IIL. 45. Androsace. II. 38r. Andryale, andryala. IV, 11. Anémone. IV. 188. Anethum. IV. 165. Angélique, angelica. IV. 170. Anguine. IV. 674. Anigozanthe, anigozanthos. IT. 192. Annona. IV. 359. Annoxées. IV. 350. Ansérine. III. 355. Anthemis. LV. 91. Anthéric, anthericum. III. 143. Antholyse, antholysa. II. 250. Anthosperme, anthospermum. LV. 132. Anthoxanthum. I. 34. Anthyllide, anthyllis. IV. 595. FRE , antidesma. IV. 721. Antirrhinum. WI. 468. Apalanchine. IV. 6/5. Apargie, apargia. IV. 7. Apeiba. IV.3977. Aphyllanthes. VX. 97. Apium. IV. 165. Apocin. III. 536. Arocynées. III. 527. Apocynum. JL. 556. xiX Aquilegia. IV. 202. Arabette, arabis. IV. 220. Arachide, arachis. IV, 595. Aralie, aralia. IV. 1Gr. Arazies. IV. 161. Arbousier. LIT. 595. Arbutus. IX. 505. Arctium. LV. 16. Arctotide, arctotis. LV. 120. Ardisie, ardisia. AI. 546. Arduine, arduina. III, 542. ÂArec, areca. III. 69. Arenaria. AV. 395. Arétie, aretia. IL. 380. Aréthuse, arethusa. VII, 285. Argalou. IV. 648. Argémone, IV. 214. Argousier. IIL. 308. Arguze. IT. 497. Aristée, aristea. II. 240. Aristidie, aristidia. IL. 41. Aristoloche. IIT. 301. ArisrorocHÉEs. LIL. 5or. Aristolochia. HI, 301. Aristotélie, aristotelia. IV. 727. Armarinte. IV. 172. Armeniaca. IV. 541. Armoise. IV. 29. Arnique, arnica. IV. 65. Anoïpées, HIT. 19. Aronia. IV. 490. Arroche. III. 356. Arrocues. IL. 349- Artédie, artedia. AV. 176. Artemisia. IV. 29. Artichaut. IV. 17. Artocarpus. IV. 655. Arum. III. 20. Arundo. XII. G:. Asaret, asarum. TI. 306. Asclépiade, asclepias. HI. 537. Ascyre, ascyrum. LV. 255. AsparAGiNÉES. II. 8r. Asparagus. HI. 84. Asperge. IIL. 84. Aspérule, asperula. AV. 130. Asphodèle, asphodelus. KIT. 148. Aspidier, aspidium. IL. 7. Asplenium. MX. 8. Asprelle, asprella. NII. 52. Assiminier, [V. 360. Astère, aster. IV. 69. Astragale, astragalus. IV. G\2. Astrance, astrantia. IV. 178. Athamante, athamanta. AV. 173. Athanasie, athanasia. IV. 50. Atractylis. XV. 15. XX TABLE Atragène. IV. 184. Atraphaxe, atraphaxis. NII. 344. Atriplex. III. 356 ÆAtropa. III. 482. Aucuba. IV. 655. Aune, IV. 01. Aunée. IV. 67. Avena. III. 59. Averrhoa. IV. 638. Avoine. IIL. 50. Avoira. III. 72. Axiride, axiris. III. 353. Ayène, ayenia. IV. 3/9. Aÿlanthe, aylanthus. LV. 635. Æytonia. IV. 292. Azalée, azalea. III. 557. Azédarach, IV. 293. Asier. IV. 145. Azime, azima. IV. 720. Bacille. IV. 173. Bacchante. IV. 38. Baccharise IV. 38. Bactris. III, 0. Badamier. TH. 312. Badiame, IV, 357. Baguenaudier. IV. Gro. Balanite, balanites. IV. 262. Balanoptère , balanopteris. AV. "22. Balbisie, balbisia . IN. 117. Balisier. IL. 259 Barisiers. III. 259. Balotte, ballota. LI. 450. Balsamier. IV. 632. Balsamine. IV, 323. Balsamite, balsamita. XV. 27. Baltimore, baltimora. IV. 97. Bambos. III. 62. Bambou. IIL. 62. Bananier. LI. 255. Bawaniers. ILE. 254. Banisierie, banisteria. IV. 250. Banksie, banksia. IL. 333. Baobab. IV. 346. Baquois. IV. 724. Barbon. #. Andropogon. Barbouquine. IV. 10. Bardane. 1V. 16. Barkhausie, barkhausia. IV. 5. Barleria. IE. 4or. Barrelière. IL. 4or. Barringtonie, barringtonia. IN. 473. Bartsie, Bartsia. I. 400. Baselle, basella. LL, 354. Basile. 77. Eucomis. Basilic. HIT, 459. Bauhine, Bauhinia. Beckée, Beckea. IV. 474. Beckmannie, beckmannia. 0836: Bégonie , begonia. IV. 522, Béjarie, bejaria. III. 561. Béjuco. IV. 240. Belemcande, Belemcanda. III. 238, Belladone. IIT. 482. Belle-de-nuit. JIL, 366. Bellis. IV. b2. Bellium. IV. 6x. Ben. IV. 57r. Benoite. IV. 533. Bérardie, Berardia. IV, 14. Bergérinées. IV. 363. Berberis. IV. 363. Berce. IV. 171. Berle. IV. 170. Bermudienne. ILE. 216. Beslère , besleria. XIL, 473. Bétoine. II. 449. Betonica. IT. 449. Betula. IV. 700. Bident, bidens. IV. 118. Bignone. III. 518. Brexowss. III. 515. Bignonia. AIT. 518. Bihai. IL. 256. Billardière, billardiera. ML. 492. Biscutella. IV. 227. Biserrula. IV. 615. Bistropogon. III: 446. Bixa. IV. 373. Blakea. IV. 475. Blanc de Hollande. 7. Peuplier. Blechnon , blechnum. AL. 0. Blète. IIT. 358. PBlitum. XII. 358. Boccone , bocconia. IV. 216. Bocbère , boebera. IV. 64. Boerhavie , boerhaavia. EL. 368. Bois-Guitare. 7. Citharexylon. Poltone, boltonia. IV. 69. Bombax. IV. 345. Bonduc. IV. 554. Bonplande, bonplandia. XIE. 514. Bontia. IT. 492. Borassus. III. 58. Borbonia. IV. 585. Boronie, boronia. IV. 352. Borracinées. III. 494. Borrago. IL. 504. Bosée, bosea. III. 3517. Botryche, botrychium. XIE. 4. Bautre. Bauera. IV. 475. IV. 575. III. DES GENRES. XX) Boucage. IV. 164. Bouleau. IV, 700. Boulette, LV, 24. Bourbone, IV. 585. Bourrache. III. 504. Bragalou, LIL. 97. Brassica. IV. 220. Brésillet. IV. 553. Briza. IL. 59. Brize. 7. Amourette. Brome. IIT. 53. Bromelia. XIL. 212. Bromus. HI. 53. Broualle. III. 455. Broussonnettier, broussonelia. IV. 687. Browallia. HI. 475. Brucée , brucea. IV. 635. Brunelle. III. 46r. Brunia. XV. 654. Brunichie, brunichia. HI. 344. Brunie., IV. 654. 4 Brunsfelse, brunsfelsia. XL. 493., Bruyère. III. 5635. ne IL. 562. ie ryone, bryonia. LV. 653. R DPNIN 064. 7 Buchnère, buchnera. IIL. 390. Bucida. XII. 372. Budlèje, budleia. II. 463. Bufouie, bufonia. LV. 392. Bugle. III. 440. Buglosse. I[1. 504. Bugrane. IV. 594. Buis. IV. 663. Bulbocode, HE Bulliarde, bulliarda. IV. 412. Bunias. IV. 234. Bunium. IV. 194. Buphtalme., buphthalmum. IV. (Q péplèvre; buplevrum. IV. 156. Bursera. IV. 633. Butome, butomus. IT. 104. Buttnère. IV. 348. Buxus. IV. 663. Bystropogon. IL. 446. A tner2EN is Cabrillet, IIL. 496. Cacalie, cacalia. IV. 4o. Cachrys. IV. 172. Cactier, cactus, IV. 428. Cadélari. IIL. 361. : Cañleyer. IV. 142. Caillelait. 77. Gaillet. Caïmitier. IL, 545. : Calothamne, bulbocodium. III. Cakile. IV. 934. Calaba. IV. 260. Calabure. IV. 377. Caladion , caladium. VIT, 23. Calamus, XI. G7. Calcéolaire, calceolaria. YIT. 472. Calebassier. IIL. 403. Calée, calea. LV. 49. Calendula. AV. 58. Calle, calla. LIL. 25. Callicarpe, callicarpa. IT, 425. Callicome, callicoma. IV. 426. Calligon, calligonum. XII. 348. Callise , callisia. ILE. 107. Callistachys. IV. 583. Callitriche. IIL. 00. Calophyllum. IV . 260. calothamnus. IV. 4G2. altha. IV. 208. Calycanthe, calycanthus. IV, 543. Calyptranthe, calyptrantha. 1V. 477. Ctymee calyxhymentia. YIT. 367. ous II. 429. Camarine. ILE. 6o4. Camelée. IV. 631. Caméline. IV. 233. Camellia. IV. 287. Camérier , cameraria. XII, 530. Camomille. IV. or. Campanula. LI. Go. Camranuracées. III. 606. Campanule. III. 6o7. Camphrée. II. 352. Camphorosma. NII. 352. Canamelie. 7. Canne à sucre. Canang. IV. 367. Canarine, canarina. III, Gr1. Canche. III. 48. Canna. WU. 259, Cannabine. IV. 689. Cannabis. IV. 688. Canne à sucre. IT. 4r. Canthium. IV. 143. Canti. IV. 143. Cantu, cantua. AXE. 514. Capillaire, LIT. 10. CappariDÉes. IV: 235. Capparis. IV. 236. Capraire, capraria. III. 464. Caprier. IV. 236. Capsicum. XII. 489. Capucine. IV. 322. Caquillier. IV. 234. Caragana, IV. Go8. XXi] Caragate. 77. Tillandsie. Carambolier. 1V. 638. Cardamine. IV. 225. Cardamome. 7. Amome. Cardèére. IV. 124. Cardiospermum. IV. 240. Carduus. XV. 13. Carex. III. 30. Carica. 1V. 680. Carline, carlina. IV. 14. Carludovicie, carludovica. MI. 50. Carmantine. IT, 405. Caroline, carolinea. IV. 345. Carotte. IV. 155. Caroubier. IV, 566. Carpésier, carpesium. IV. 28. Carpinus. IV. 702. Carthame, carthamus. IV. 15. Carum. IV. 165. Carvi. IV. 165. CaryoPHyLLÉéEs. IV. 390. Caryophyllus. IV. 473. eo pois Ets 68. Casse, cassia. IV, 568. Cassiné. IV. 643. Castanea. IV. 703. Cassuvium. IV. G2r. Casuarina. IV. 509. Catabrose, catabrosa. III. 48. Cataire. III. 443. Catananche. IV. 15. Cathartocarpe, IV. 570. Caucalide, caucalis. IV. 155. Céanothe, ceanothus. IV. 65. Cecropia. IV. 685. Célastre, celastrus. IV. G4r. Celosie, celosia. III. 360. Celsie, celsia. III. 476. Celis. IV. 694. Cenchrus. III. 47. Centaurée, centaurea. IV. 19. Centenille. IIL. 376. Centunculus. III. 376. Céphalanthe, cephalanthus. IV. 147. Céphalis. IV. 143. Cephalophore, cephalophora. IV. ed IV. 394. Cerastium. IV. 394. Cerasus. IV. 538. Ceratonia. IV. 566. Ceratophyllum. WI. 16. Cerbera. TIL. 541. Cercis. IV. 577. €Cercodée, cercodea. IV. 449. cathartocarpus. TABLE Cedrèle, cedrela. IV. 294. Cérésie, ceresia. II. 37. Cerfeuil. IV. 167. + Cerinthe. TT. 499. Cerisier. IV. 538. Ceroxylon. III. 74. Cestreau, cestrum. III. 490. Cétérach. IIT. 5. Chalef. III. 309. Cuazers. III. 307. Chamagrostis. IÏT. 40. Chamédore, chamædorea. UI. 73. Chamérope, chæmærops. IL. 75. Chanvre. IV. 688. Charagne, chara. IL, 16. Chardon. IV, :3. Charme. IV. sv2. Charmille. 7. Charme. Châtaignier. IV. 703. Cheïlanthe , cheilanthes. III. 10. Cheiranthus. IV. 222. Chélidoine , chelidonium. IV. 215. Chelone. III. 516. Chêne. IV. 703. Chenillette. LV. 62r. Chenopodium. IL. 355. Cherlérie, cherleria. IV. 395. Chévrefeuille. IV. 15r. CuèvrereuiLres. IV. 148. Chicot. IV. 566. Chiendent. III. 35. Chiococca. IV. 147. Chionanthe, chionanthus. II. 414. Chirone, chironia. III. 525. Chloris. IL. 46. Chærophy llum, IV, 166. Choin. III. 30. Chondrilla, IV, 3. Chondrose, chondrosum. TIIL, 46. Chorysème, chorysema. IV. 580. Chou. IV. 220. Choucalle. 7. Calle. Chrysanthème, chrysanthemum. IV. 54. Chrysobalanus. IV. 542. Chrysocome, chrysocoma. IV, 42. Chrysoplenium. LV. 424. Chrysophy llum. I. 545. Cicapxes. III. 11. Cicer. IV. G27. Cicerole. /. Garvanche. Cicuta. IV. 167. Cicutaire. IV. 167. Cierces. 1V. 42r. Ciguë. IV. 174. Cinchona. IV. 135. Cinéraire, cineraria. IV. 83. DES GENRES. Cinna. II. 34. Ciocoque. IV. 14r. Circée, circæa. 1V. 450. Cissampelos. IV. 361. Cissus. IV. 294. Ciste, IV. 374. Cisrées. IV. 374. Cistus. IV. 374. Citharexylon, citharexylum. III. 426. Citrus. IV. 263. Clavalier. IV. 656. Claytonie, claytonia. IV. 436. Clématite, clematis. LV. 182. Cleome, IV, 236. Cléonie, cleonia. III. 467. Clerodendrum. NI. 422. Clethra. LIL. 506. Cliforte, cliffortia. IV. 529. Clinopode, clinopodium. ILE, 454. Clitorie, clitoria. IV. 6o4,. Clusie, clusia. IV. 250. Clutelle. IV. 662. EAN 662. DR Clypéole, clypeola. IV. 227. y IV 63. Cnicus. IV. 12. Cobée, cobæa. IIT. 515. Coccoloba. III. 342. Cochléaria. IV. 230. Cocos. III. 71. Cocotier. III. 7r. ‘Cocrète. IIL. 399. Caæsalpinia. IV. 553. Coffea. IV. 142. Coignassier. IV. 484. Coix. IL. 65. Cookia. IV. 262. Colasseau. /7. Barrelière. Corcicacées. III. 107. Colchique, colchicum. XII, 112. Collinsonne, collinsonnia. III. 440. Colomnée. III. 472. Columnea. III. 472. Colutea. IV. 610. Collétier, colletiæ. IV. 650. Comaret, comarum. IV. 533, Comméline, commelina. IL. o9. Coumézinees. III. 08. Comoclade, comocladia. IV. 631. Comptone, comptonia. IV. 707. Concombre. IV. 674. Condori. IV. 572. Condrille. IV. 3. CowrrÈres. IV.708. Conium., IV, 174. Conocarpe, conocarpus. JII, 311. xxiij Consoude. III. 503. Convallaria. XIL, 87. Convorvuracres, LIL. 506. Convolvulus. IX. 507. Conyze, conyza. IV. 38. Copahu. IV, 6:26. Copaifera. IV, 626. Coquelourde. IV. 407. Coqueluchiole, IIL. 35. Coquemollier, ILE. 542. Coqueret. LIL. 483. Corchorus. IV. 368. Cordia. III. 495. Coréope, coreopsis. IV. 110, Corète. IV. 368. Coriandre, coriandrum. IV. 167. Coride. IIL. 370. Corinde. IV. 240. Coris. LIL. 379. Corisperme, corispermum. INI.350. Cornaret. III, 520. Cornifle. II. 16. Cornouiller. IV. 158. Cornucopiæ. III. 35. Cornus. IV. 158. Cornutia. IIL. 426. Coronille, coronilla. IV. 622. Coronope, coronopus. IV, 230. Corossol. IV, 359. Corrée, correa. 1V. 382. Corrigiole, corrigiola. IV. 435. Cortuse, cortusa. ILE. 385. Corydale, corydalis. IV. 217. Cory lus. IV. 706. Coryphe, corypha. IL. 56. Cossinie , cossinia. IV. 244. Cosmos, IV. 1rr, Costus. IIL. 264. Cotelet. 77. Citharexylon. Cotonnier. IV. 34r. Cotule, cotula. IN. 52. Cotyledon. IV, 415. Cotylet. IV. 415. Coulequin. IV. 685. Courbaril. IV. 555. Coutarée , coutarea. IV. 141. Crambé. IV. 535. Cräpaudine. IT. 445. Crassule, crassula. IV. 412. Cratægus. IV. 484. Cratéva, cratæva. IV. 236. Crépide, crepis. IV. 5. Crescentia. III. 493. Cretelle. 77. Cynosure. Crinole, crinum. III. 190. Crithmum. IV. 173. Crocus. HI, 250, XXIV Croisette. IV. 13r. Crotalaire, crotglaria. IV. 5o7. Croton. IV. 668. Crowée, crowea. IV. 383. Crucianelle, crucianella. IV, 131. CrucirÈres. IV. 210. Crustolle. 7. Ruellie. Crypside, crypsis. II. 34. Cucubale, cucubalus. IV. 405. Cucumis. IV. 654. Cucursiracées. IV. 672. Cumin, cuminum. IV. 168. Cunile, cunila. 1. 435. Cunonie, cunonia. IV. 426. Cupanie, cupania. IV. 244. Cuphea. IV. 480. Cupidone. IV. 11. Cupressus. IV. 512. Curcuma. LIT. 266, Cussonie, cussonia. IV. 161. Cyanelle, cyanella. LL. 161. Cycas. IIT. 13. Cyclame, cyclamen. TITI. 387. Cydonia. 1V. 484. Cymbidier, cymbidium. TIL. 285. Cynanque, cynanchum. III. 536. Cynara.1V. 17. Cynodon. II. 37: Cynoglosse, cynoglossum. IT. 505. Cynosure, cynosurus, II. 50. Cyperus. LIT. 37e Cyprès. IV. 513. Cypripède, cypripedium. TI. 201. Cyrille, cyrilla. LIT. 592. Cyrtanthe, cyrtanthus. ILE. 192. Cytise, cytisus. IV. 589. Dactyle, dactylis. LIL. 49. Dahlia. IV. 98. Dais. IIL. 327. Dalbergie, dalbergia. IV. 625. Daléa. 1V. 506. Daléchampie, dalechampia. XV. G7r. De , damasonium. III. 104. Danae. IIT. or. Danaiïde. IV. 143. Danthonie, danthonia. XII. 58. Daphné. II. 314. Daphnot. IIL. 492. Datisca. IV. 689. Dattier. III. 65. Datura. WI. 480. Daucus. IV. 195. Dauphinelle. IV. 203. Davallie, Davallia. HI. 11. Daviésie, daviesia. IV. 581. TABLE Décumaire, decumaria. IV. 471. Delphinium. IV. 203. Dendrobe, dendrobium. IT. 200. Dentaire, dentaria. IV. 296. Dentelaire. IIL. 370. Dentelle, dentella. IV. 137. Dianelle, dianella. XII. 83. Dianthus. IV. 395. Diapensie, diapensia. III. 38r. Diasie, diasia. III. 2/42. Dichondre, dichondra. XIE. 499. Dictamnus. IV. 384. Dierville, diervilla. IV, 150. Digitaire, digitaria. TIL. 37. Digitale, digitalis. III. 469. Dillenia. IV. 357. Dinèbe, dineba. IE. 50. Dionée, dionæœa. IV. 426. Dioscorea. III. 94. Diosma. IV. 385. Diospyros. IT. 5/0. Diobe. IV. 5o. DupsacÉes. IV. 1923. Dipsacus. IV. 124. Dirca. ILL. 314. Disandre, disandra. XII. 397. Diuris. III. 286. Dodarte, dodartia. IL 466. Dodecatheon. III. 386. Dodonée, dodonæa. IV.637. Dolique, dolichos. IV. Go2. Dombeya. IV. 348. Doradille. III. 8. Dorianthés. IIE. 183. Dorine. IV. 424. Doronic, doronicum. IV. G4. Dorstène, dorstenia. IV. 685. Draba. IV. 229. Dracocéphale , dracocephalum. IIL. 456. Dracæna. III. 8r. Draconte, dracuntium. XII. 25. Dragonier. III, 81. Drave. [V. 229. Drépanie, drepania. IV. 6. Driade. IV. 534. Drimmie, drimmia. III. 1:57. Drosera. IV. 230. Dryas. IV. 534. Drypis. 1V. 408. Duahamélie, duhamelia. IV. 146. Durante, duranta. III. 428. Duroia. IV. 140. Dysode, dysodium. IV. 98. Ebène, ebenus. IV. 505. Echéandie , echeandia. II, 145. Echinaria. HT. 47. DES GENRES. Echinope. [V. 25. Echinophore; echinophora. IV. 157. hope, IV. 25. Echioïde , echioides, IT. 502. Echium. HI. 5oo. Eclipte, eclipta. IV. 07. Egilope. LIT. 47. Egyphile. IIL. 424. ÆEhretia. III. 406. Ehrharte, ehrharta. III. 63. Elais. IL. 2. E late. III. 70. Elatiné. IV. 393. Eleagnus. TL. 309. Eléocarpe. IV. 261. Eléodendron, elæodendrum. IV. 650. Eléphantope, elephantopus. IV. 2 Eleusine, eleusina. XII. 51. Elichryse, elichrysum. IV. 32. Elléborine. 7. Sérapias. Ellise, £llisia. LI. 498. Elæocarpus. IV. 261. Elyme. III. 52. Elymus. LIT. 52. Elytraire , elytraria. III. 409. Embothrion , 336. ÆEmpetrum. NII. 604. Emplèvre, emplevrum. IV. 389. Encélie, encelia. IV. :07. Enoplie. IV. 645. Epacride, epacris. III. 602. Epervière. LV. 4. Ephedra. IV. 708. Ephémérine. IIL. 101. Epière. III. 440. Epi d’eau. 7. Potamogéton. Epidendre , epidendrum. III. 293. Epigée, epigæa. III. 508. be es IV. 453. Epimède , epünedium. IV. 365. Epipactide , epipactis. III. 285 Equisétacées. LIL. 14. Equisetum. NT. 15. Erable. IV. 24. Erianthe , erianthus. III. 42. Erica. XII. 563. Erigeron. IV. 68. Eriné, erinus. III. 398. Eriocépale, eriocephalus. IV. 61. ÆEriophorum. IIL. 31. Eriosperme. III. 164. Eriospermum. WII. 164. Le embothrium. IL. XXV Erithrone, erithronium. Xi. 107, Erodier, erodium. LV. 317. Erucago. 1V.234. Ervum. IV, G2r. Lryngium. AV. 170. RE eddu x pas Se EE III, 548. Erysimum. IV, 224. Erythale, erythalis. IV. 144. Erytrine , erytrina. IV. 603. Erythroxylon, erythroxilum. IV. 254. Ethulie, ethulia. IV. 27. Ethuse. IV. 167. Eucalypte, eucalyptus. IV. 465. Euclée, euclea. 1V. 720, Eucomis. III. 149. Eufraise. IIT. 399. Eugenia. IV. 469. Eupatoire , eupatorium, IV. 44. Euphorbe, euphorbia, IV. 657. Evprnorgracées. IV. 656. Euphoria. IV. 243. ÆEuphrasia. NL. 390. Euridice. IIT. 238. Eutaxie, Zutaxia. IV. 582. ÆEvolyulus. III, 510. Evonymus. IV. 6/o. Faba. IV. G2r. Fabagelle. IV. 380. Fabricie, fabricia. IV. 4Gr. Fagarier, fagara. IV. 636. Fagone, fagonia. IV, 380. Fagus. IV. 703. Falkie, falkia. TI. 506. Fenouil. IV. 165. Fer-à-cheval. IV. 622. Ferraire, ferraria. EL. 210. Férule, ferula. IV. 172. Festuca. III. 57. Fétuque. III. 53. Fève. IV. G2r. Févier. IV. 564. Ficaire, fee IV. 198. Ficoïde. [V. 430. Ficoines. IV. 435. Ficus. IV. 682. Figuier. IV. 682. Filago. IV. 32. Filao. IV. 709. Filaria. IL 415. Fissilie, fissilia. IV. 262. Flacurtia. IV. 369. Flagellaire, flagellaria. HI. 84. Flavérie, flaveria, IV. 27. Fléau. III. 35. Fléchière. III. 105. Froscureuses. IV. 12. b XAW] Flouve. III. 34. Flûteau. #7. Alisma. Læœdia. XV. 128. Fontanésie, fontanesia. IT. 414. Forskalée, forskalea. IV. 687. Fothergilla. IV. 692. Fothergille. IV. 692. Fougère. IIL, 9. Foucères. III. 3. Fragaria. IV. 533. Fragon. IIL 90. Fraisier, IV. 533. Frangipanier. III. 530. Frankenia. IV. 408. Franquène. IV. 408. Fraxiuelle, IV. 384. Frazxinus. VI. 417. Frêne. III. 411. Fritillaire, fritillaria. YIL. 124. Fromager. IV. 345. Froment. III. 53. Fuchsie, fuchsia. IV. 455. Fumaria. IV. 218. Fumeterre. IV. 218. Furcrée, furcræa. III. 184. Fusain. IV. 640. Gaillet. IV. 130. Gainier, IV. 555. Galane. III. 51. Galanga. 77. Marante. Galanthus. TIL. 209. Galantine. ILE. 200. Galardienne, galardia. XV. 115. Galax. IE. 508. Galaxie, galaxia, 1LE. 241. Galé. IV. 699. Galega. IV. 616. Galénie, galenia. TI. 353. PE III. 448. Galéopsis. IL. 448. Galinsoga. AV. 116. Galium. IV. 130. Gandasuli, HT. 265. Garance. IV. 131. Garcinia. IV. 360. Gardénie, gardenia. IV. 135. Garidelle, garidella. IV. 202. Garou. 77. Daphné. Garvanche. IV. G21. Gastridier, Gastridium. UT. 30. Gattilier. IH. 425. Garriniers. IL. 422. Gaulthérie, gaulheria. IT. Soo. Gaura. IV. 453. Gayac. IV. 381. Genét. IV. 585. Genevrier. LV. 9rr. TABLE Genipa. IV. 138. Génipayer. IV. 138. Genista. IV. 585. Geoftræa. IV. 625. Gentiane, gentiana. III. 522. GenTianées. III. 592. Géonome, geonoma. IE. 55. GÉraniers. IV. 296. Géranier, geranium. IV. 319. Germaine. IIL. 458. Germandrée. IIL. 441. Geropogon. IV. 10. Gesnérie, gesneria. IIL. 611. Gesse. IV. 618. Gethyllide, gethyllis. I. 217. Geum. IV. 533. Gingembre. Ÿ#. Amome. Ginkgo. IV. 725. Ginseng, IV. 163. Giroflée. IV. 222. Giroflier. IV. 473. Gisèque, gisekia. IV. 436. Githago. IV. 407. Gladiolus. II. 242. Glauce. IV. 48r. Glaucienne, glaucium. IV. 216. Glaux. IV. 481. Glayeul. IT. 2432. Glécome. III. 447. Glechoma. WI. 447. Gledütschia. IV. 564. Glinole, glinus. IV. 439. Globbée, globba. XIT. 261. Globulaire, globularia. HI. 388. Gluttier. IV. 670. Glyciné. IV. 60. Glycirrhiza. IV. 615. Gnidienne , gnidia. IE. 327. Gnaphalium. IV. 34. Gnavelle. IV. 435. Gomart. IV. 633. Gomphrena. III. 362. Goodenia. III. 616. Goodie , goodia. IV. 592. Gordonie, gordonia. IV. 34. Gorthérie, gortheria. IV. 65. Gossypium. VI. 341. Gouanie, gouania. IV. 654. Goyavier. IV. 467. Graminées. II. 33. Grand Baumier. #. Peuplier. Grangée, grangea. IV. 29. Grassette. ILE, 390. Gratgal. IV. 13/4. Gratiole, gratiola. TIT. 473. Grémil. IL. 5or. Gremillet: F7. Scorpione. DES GENRES. Grenadier. LV. 471. Grenadille. LV. 675. ‘ Greuvier , grewia. IV. 369. Grignon. Aix. 312. Grindélie, grindelia. IV. 66. Gronovie, gronovia. IV. G72. Groseillier. LV 427: Cet guétarda. IV. 144. Gui, IV. 15 Guaiacum. LV. 381: Guazume, guadzuma. LV. 37. Cillandinn: IV.674. Gustavie, Re LV. 474. Guttiers. 7 Gymnocladus. 4. 566. Gymnoëÿlé gymnostyles.: IV. 28. Gypsophile, Gypsophila. IV. 306. Gyrocarpe | gÿrocarpus. IV. 2b1. Gyroselle. IIL. 386. Hakea. NI. 334. . Halésie, Æalesia. XII. 552. Hallérie : Halleria. XII. 465. Hamamélis. IV. 365. Haricot. IV. 602. Harmale. IV. 384. Hebenstrète , 433. Hedera. XV. 160. Hedychium. IH. 263. Hedysarum. IV. 633. Hélénie , helenium. IV. G2. Hélian thème, Helianthemum. 1N. 376. Helianthus. LV. 113. Heliconia. III. 256. Hélictère, helicteres. IV. 34 Héliocarpe, heliocarpus. IV. 369. Héliophile, he/iophila. IV. 227. Héliotrope, keliotropiun:: WI. 500. Hellébore, helleborus. IN. 200. Hellénie, hellenia. VS. 269. Helmen tie , helmentia. IV. 8. Hélonie, helonias IT. 108. Hématoxylon, pete ep IV, ai ÉCLOUINE FAST ANTON IE. 180. où Hémitome, henlitomus. HE: 457. Henné. IV. 49. Heracleum. IV. #91. Hérissonnière. EE. 45. Hermannie, hermannia. IN. 366. Hernandie , Lernandia. WE. 340. Herniaria. TI. 363. Herniole. HT, 363. Herse. IV. 370. Re héRE Iretils, III. XXI} Hesperis. IV. 201. Hêtre. IV. 703 Heuchère, heuchera. IV. 4x. Hibiscus. IN. 337. Hieracium. IV. 4. Hillie, Acllia. LV. 141. Hippie , hippia. IV. 27: Hippocratea. AN, 2/0. Hippophaë. VIE: 308. Hippuris. IL. 76. pentes Hæmanthus. nil. 188. offmanSeggic ;: hof{manseggia. IV: bar. ÿ ‘se Holcus. ir. 44. . Holoste, holosteum. IV. 39r. Hopée, “hopea. III: 553. ordeum. XII, 53. Horminelle , horminum. II. 458. Hornemanne , hornemannia. VI. 469. Hortensia. 1V. 425. Hottonie, hottonia. XII. 379- Houblon. IV. ET Houque. III. 4 Houstonie, AA LS IV. 432 Houx. IV. 644. Hudsone, hudsonia. VII. Go6. Humée, humea. IV. 27. Humulus. IV. 688. Hurao1V.650. Hyacinthus. TL. 152. Hydrangée, kydrangea. IN. Hyorocnarinées. IL. 206. Hydrocharis. TL. 298. Hydroglosse, hydroglossum. HL. 7 Hydr aphylle, ‘hydr ro um. TL. 8. Si PA EV ; 180. Hymenæa.XV. 575. . Hyosciamus, IE, 70. Byoséride, hyosenis. IV.6 Hypécoon, hyppecouuin. IV. 219. Hyréricées. IV.254. Hypericum. IV: 471 Hyphène, RER II. 80. Hypochæris. IViap..lii Hypoxide, hyporis. IL. 209. Hyptis. IL. 445 Hyssope, hÿssopus. Hi. 443 Ibéride, iLeris. IV, 23. . Icaquier. IV.\540, If. IV. 10! Togname: ‘ri. 94. lies IV. 644; Illecchre, illecebr um EX: an Illicium. EV. nr L. 4: Immortellé: IV, XXII} Impatiens. IV. 323. Imperata. II. 42. Impératie. IIL. 42. Impératoire , 166. Impériale. II. 125. Indel. IIL. ro. Indigofera. IV. G16. Indigotier. IV. 616. Iuocarpe, inocarpus. TITI. 548. Inule, inula. IV. 67. Ionidier, ionidium. IV. 376. Ipomea. IL. 509. Îresine. XII. 361. lriartée, iriartea. IL. 74. Trnées. IL. 216. Iris. IIL. 220. pre isnardia. IV. 480. sopyron, isopyrum. IV. 201. Fr A SGA Iva. IV. 690. Ivraie. II. 51. Tria. III. 235. Ixore. ixora. IV. 130. Jacinthe. IL. 152. Jacquinier, jacquinia. WI. 547. Jambosier. IV. 469. Jaquier. IV. 685. Jasione. III. 617. Jasmin, jasminum. TI. 419. Jasminées. IL. 410. Jatropha. IV. 665. Jérose. IV. 233. Jonc. III. 98. Joxcs. III. 97. Joséphine, Josephinia. WE. 517. Joubarbe. IV. 419. Jousarses. IV. 411. Juglans. 638. Jujubier. IV. 647. beta IAARCUTE Juncus. III. 08. Juniperus. IV. II. Jusquiame. III. 470. Jussie, jussiæa, IV. 450. Justicia. III. 405. Kalanchoe. IV. 416. Kalmie, ka/mia. XII. 554. Kennedie, kennedia. IV. 605. Ketmie. IV. 337. Kiggellaire, kiggellaria. IV. 662. Killingie, killingia. XII. 32. Kirganéle, kirganelia. IV. 661. Kitaibèle, kitaibelia. IV. 330. Knautia. IV. 126. Knépier. IV. 244. Koelerie, koelerta. ILE. 51. imperatoria. IV. TARLE Kæœmpférie, kæmpferia. XII. 267. Kœnige, Aœnigia. III. 340. Kolreutérie, ko/reuteria. IV. 242. Kuhnie, Auhnia. IV. 48. Lames. IIL. 434. Lachenalie, /achenalia. HE. 159. Lachnée, lachnæa. I. 3520. Lactuca. IV.53. Lagascée, lagascea. IV. 25. Lagécie. IV. 187. Laget, Lagetta. XII. 313. Lagerstrome, lagerstræmia. IV. 478. Ééart IV: Tôr: Lagunée, lagunea. IV. 341. Lagurier, lagurus. IIL. 43. Laitron. IV. 4. Laitue. IV. 3. Lamarckie, lamarckia. II. 50. Lambertie, lambertia. III. 332. Lamier, lamium. IL. 445. Lampourde. IV. 6or. Lampsane , lampsana. LV. 1. Lanquas. #7. Marante. Lanquette. IV. 438. Lantana. WI. 429. Lappulier. IV. 369. Larix. IV. 519. Larochée, Larochea. IV. 415. Larmille. III. 65. Larrée, larrea. IV. 381. Laser, laserpitium. AV. 197. Lasiopétale, lasiopetalum. IV .654. Latania. NII. 78. Latanier. III. 78. Lathyrus. IV. 618. Laurelle. 7. Laurose. Lauréole. 7. Daphné. Laurier. III. 338. Laurier rose. #7. Nérion. Laurinees. III. 337. Laurose. 7. Nérion. Laurus. TITI. 338. Lavanèse. IV. 616. Lavande, lavandula. II. 444. Lavatère, lavatera. IV. 352. Lawsonia. IV. 479. Lédon, ledum. III. 560. Lée, leea. III, 548. Léersie, leersia. XL. 35. Leflinge. IV. 390. Lecumineuses. IV. 546. Lentille. IV. 62r. Leonurus. III. 451. Lepidium. IV. 232. Leptosperme, leptospermum. LV. 459. DES GENRES. Lessertie, Lessertia. IV. Gro. Leucoium. III. 208. Leuzée, leuzea. AV, 14. Liatris. IV. 43. Liciet. IL. 489. Licuala. III. 80. Lierre. IV. 160. Ligusticum. IV. 190. Ligustrum. LIL 421. 2 de LIL, 4ro. Laracées. ÎIL. 114. Lilium. INT. 126. Liméole. IV. 436. Limeum. IV. 436. Limodore, limodorum. II. 286. Limonellier, limonia. IV. 285. Limoselle, limosella. XII. 380. Lin. IV. 409. Linaigrette. LIL. 31. Linaire , linaria. III. 466. Linderne, lindernia. XII. 475. Linnée, linnœæa. IV. 149. Linum. IV, 400. Liquidambar. 1V. 507. Liriodendron. IV. 356. Lis. III. 126. Liserolle. III, 510. Liseron. III. 5or. Litchi. IV. 243. Lithospermum. WI. 5o1. Lithrum. IV. 470. Littorelle, Zittorella. IN. 365. Livèche. IV. 190. Lobélie, lobelia. XII. 613. Lodoïcée, lodoïcea. III. 95. Lœflingia. IV. 390. Lolium. XII. 51. Lomandre, /omandra. WI. 97. Lonicera. IV. 155. Lopézie, lopezia. IV. 49. Lotier, lotus, IV. Go1. Loureire, louriera. IV. 667. Lubine, lubinia. II. 379. Ludier, ludia. IV. 545. Ludolphie, Zudolphia. II. 38. Luduige. IV. 450. Ludwigia. IN. 450. Lunaire, lunaria. IN. 226. Lunetière. IV. 225. Lupin, lupinus. IV. 503. Luzule, luzula. III. 98. Luzerne. IV. 599. Lycium. III. 480. Lychnide, Zychnis. IV. 406. Lycope. II. 434. Lycopersicum. HI. 488. Lycopside, lycopsis. LIL 503. XXIX Lycopus. TI. 434. Bit II. 63. Lysimachie, /ysimachia. II. 357. Lysimacmes. III. 376. Maceron. IV. 165. Macre. IV. 449. Macrocnemon, MÉREE Madie , madia. IV. 59. Macnoziacées. IV. 351. Magnolier , magnolia. IV, 352. Mahernie, mahernia. IV. 363. Mahogon, IV, 293. Mais. III, G3. Malachre, malachra. IV. 3344 Malacodendron. #7. Stuartie. Malaxide, malazxis. III. 284. Malope. IV. 330. Marpiemiacées. IV. 250. Malpighier, malpighia. IV. 252. Malus, IV. 482. Malyva. IV. 330. Marvacérs. IV. 329. Malvaviscus. IV. 340. Mammée, mammea. IV. 260. Manguier. IV. 628. Mangifera. IV. 638. Mangoustan, IV. 260. Manicaire, manicaria. NII. 80. Manihot. 7. Médicinier. Manioc. 77. Médicinier. Manulée, manula. I. 398. Marante, maranta. II. 265. Marguerite. #7. Paquerette. 7. Crysanthemum. Marice, marica. HI. 253. Marmolier. IV. 140. Marronnier d'inde. IV. 245. Marrube, marrubium. YIL. 451. Martinézie, martinezia. II. 73. Martynia. XL. 520. Massette. LIL. 28. Massonie , massonia. UI. 150. Massue. IV. 234. Matricaire, matricaria. IV. 53. Mauricie, mauritia. I. 80. Mauve. IV. 330. Mauvisque. IV. 340. Mayanthème, mayanthemun. HN]. muacrocnCMmun.. 89. Médéole , medeola. IT. 85. Medicago. IV. 599. Médicinier. IV.665. Mélaleuque, melaleuca. AV. 457. Melampode, melampodium. XV. 107. Mélooy re, melampyrum.IL. 400. SSI XXX Mélanthe , melanthium. IE. 100. Mélastome, melastoma. IV. 456. Mécasrours. IV. 475: Mélèze. IV: 519 Melia. IV. 203. Mériacées. IV. 29. Mélianthe, melianthus. IN:.385: Melica. UI. 49. Melicocca. IV. he Mélier. IV. 455 Mélilot, meli otus. IV. Mélinet. III. 499. Mélique. III. Mélisse , melissa. II. 456. Mélite, melittis. JET. 458. Mélochie , melochia. AV. 343. Mélothrie , melothria. IV. 673. Ménisrenmérs. IV. 367. Ménisperme, 362. Menthe , mentha. III. 446. Mentzélie, mentzelia. LV. 456. Menyanthes. III. 390. Menzièzie, menziezia. WI. 561. Mercuriale, mercurialis. Mérendère , merendera. TI. 113. Méringie. IV. 303: Mesembryanthemum. XV. 439. Mespilus. IV. 489 Messerschmidia. IIL. 497 508. Méthonique, mEonE JIL. 190. Metrosideros. IV . 462. Michauxie, michauxia. WE. Gor. Micocoulier. IV. 694. Micrope, micropus. IV. 31. Millérie, milleria. IV. 61. Millepertuis. EV...255. Mrrcepertuis. IV. 254. Mimosa. XV. 546. Mimule, mimulus. LI. 471. Mimusope, mimusops. LE: 545. Minuartie, minuurtia. IV. 395. Mirabilis. TL. 366. Mirbélie, mirbelia: LV. 582. Mirsine. IL. 546. Mitchelle, niteholles IV. 147. Mitelle , mitella. IV. 424. Mochringia. IV. 393. Mogori, an LIT. 418. Molène. IL. 4 Molinie, na. IX. Mollavi. SENS Mollé, IV. 632 Mollugine. IV. 397. Mollugo. IV. 301. Molucelle, molucella. III. 453. Mombin. IV. 63 4. menispermum. JV. IV.656. L TABLE Momordique, momordica. LV .674. Monarde, monarda. XII. 455. Nonsone , monsonia. IV. 322. Montie, montia. IN. 433. Montin. IV. 457 Montinia.1V. 454. Morée. III. 231. Morelle. IIE. 484, Moréène. IL. 298. Morenie, morenia. II. 54. Morgeline. IV.393. Morinde, M Est IV: 148. Morine, morinà. IV. 123. Moringa. IV. 571. Moræœa. II. 231. Morus. IV.6536. Mosambeé. IV. 236. Moscatelline. IV. 425. Mouron. IIT, 337. Moutarde. [V. 220. Muflier. IL. 468. Muguet. IIX, 85. Muntingia. IV. 37+. Murier. IV. 686. Murraie, murraya. IV. 263. Murucuya, murucuja. IV. Musa. I. 255, Muscadier. IE. 341. Muscari. II. 155. Mussinie, mussinia. IV. G6. Myagrum. IV:9233, Myopore , myoporum. II. 427: Myosotis. II. 503. Poe LV. 199. ns IV. Goo. M br Ram LV. 448. Myristica. LEE. 347. Myrrhis. IV. 166. Myrsine. LI. 546. Myrte, myrûus. IV: 468. Mxnres, LV: 456! T . Myrtille. IL. 599: Naïade, HI. 15. Naranes. IL. 15. Naias. II, 45. Nandine, nandina. IV. 364. Napée, napæa. IV.:336; Nansenes LIT. 180. Narcisse, narcissus. III. 204. Nard, tañdus) IH. 63. Nartees HI. ror. IVarthecium. IL, 107. Nauenburgie, ranenburgia, LV . 25. Néflier. IV. 480. Nélombo, nelumbo. II. 300 Némésie, nemesia. HI. 469. 680. DES GENRES. Nénufar. ILL, 208. / Néottie, neottia. IL. 283. IVepeta. HI. 443. Nérion, nerium. IN. 531. Nerprun.1V.646. NerPruns. IV.639. Nicandre , nicandra. IL. 483. Nicotiane , nicotiana. NT. 459. Nigelle , nigella. IV. 201. Nigrine. IV. 720. DMipa. III. 72. Niruri. IV. 66o. Nitraire, nitraria: IV. 438. Nivéole, II. 208. Noisetier. IV. 766: Nolane, nolana. HI. 506. IVonatelia. IV. 145. Notélée, notelæa. IL. 416. Noyer. IV. 638. Nunnezie, nunnezia. II. 80. Nyctage. F7. Belle-de-nuit. Nycracnées. IIL. 366. Nymphæa. M. 208. yssa. HI, 310. Ochné, ochna. IV. 358. Ochrome, ochroma. IV. 346. Ocymum. WI. 459. Ofdera. AV. 25. OEgilops. XIL. 47. OEillet. LV. 397. OEnanthe. IV. 168. OEnoplia. IV. 647. OEnothera. LV. 457. OEschynomene. AV. 624. Olea. HE. 415. Olivetier. 1V. 643. Olivier. IL. 415. Omrezzrrères. IV. 164. Onagre. IV. 451. Ovacres. IV. 448. Oncide , oncidium. IX. 293. Onoclée, onoclea. XL. 8. Ononis. IV. 594. Onoporde, onopordon. LV. 15. Onosma. HI. 502. Operculaire, opercularia. IV. 147. Ophioglosse, ophioglossum. IT. 4. Ophiose. IT. 54o. Ophioxy lon. HA, 540. Ophrys. NL. 279. Oranger. IV. 265. Onawcers. IV. 261. Orcanette. III. 502. Orcuinées. III. 270. Orchis. IL. 271. Orélie. LL. 540. Orge. II. 53. XXX) Origan. IL. 454. Origanum. HL. 454. Orme, 1V.692. Orne. IL. 414. Ornithogale , ornithogalum. HI. 167. Ornithopus. IV. 621. Ornus. LIL. 414. Orobe, orobus. IV. Gao. Oronte, orontiunr. AI. 25. * Orpin. IV. 417. Ortégie, ortegia. XV. 390. Ortie. IV. 689. Oryza. IL. 62. Osier jaune. Ÿ. Saule. Osier france. 7. Saule. Osier rouge. F7. Saule. Osier vert. 77. Saule. Osmonde , osmunda. IX 4. Osteospermum. IV. 6o. Osyris. III. 308. Othonne, othonna. IV. go. Oxalide, oxalis. IV. 324. Oxycoccos, orieoccus. LIT. Go. Oxilobié, oxilobium. IV. 582. Oxytrope, oxytropis. IV.Grr. Pachysandre, pachysandra. AV. 664. Palavie, palavia. IV. 320. Paliurus. IV. 648. Pallasie, pallasia. HI. 348. Pazurers. IE. 66. Panax.1V.163. Pancrais. IIL. 200. Pancratium. II. 200. Pandang. IV. 724. Pandanus. IV. 724. Panicaut. IV. 190. Panicum. XI. 37. Panis ou panic. II. 37. Papaver. IV. 214. PaPAvÉRACÉES. LV. 215. Papayer. IV. 680. Paquerette. IV. 52. Paquerole. IV. 61. Pareire. IV. 36r. Parictaire, parietaria. IV: 657. Paris. IL. 87. Parisette. ILE. 87. Parisiole. IL. 86. Parkinsonia. IV. 567. Parnassie, parnassti. LV. 239. Paronique , paronychia. I. 365. Parthène, parthenium. IV. 05. Paschalie, paschalia. LV. 116. Paspale, paspalum. WI. 36. Passerage. IV. 232. XAXi] Passerinc, passerina. ILE, 317. Passe-velours. 77. Célosie. Passiflora. IV. 675. Passirzores. IV. 675. Pastel. IV. 235. Patience. III. 346. Paturin. UI. 58. Paullinie, paullinia. LV. 241. Pavonie, pavonia. IV. 335. Pavot. IV. 214. Pectis. IV. Ga. Pêcher. IV. 54a. Pénicuraires. III. 3g1 Pédiculaire po aris. IL. 400. Peganum. 1V. 384. Pelargonier, RER ei 185. Pélégrine. III. Peltaire, peltaria. IV. 227. Pénée, penœæa. IT. 6o5. Penicillaire, penicillaria. NI. 43. ‘ Pentapètes, pentapetes. IV. 347. Penthore, penthorum. IV. 420. Pentstemon. XII. 516. Péplide. IV. 48r. Peplis. IV. 481. Péragu. III. 422. Periploca. IL. 535. Péronie, peronia. III. 266. Persica. IV. 542. Persoonie, persoonia. III. 337. Pesse. III. 16. Pétivère, petivera. IL. 352. Pétrée, petræa. III. 428. Pervenche. IEL. 528. Peucedan, peucedanum. IV. 172 Peuplier. IV. Go. Phaca. IV. 611. Phalangère. III. 145. Phalangium. XII. 145. Phalaris. MX. 36. Phaque. IV. 611. Pharnace , pharnaceum. LV. 393. Phaseolus. IV. 602. Phellandre, phellandrium.AV . 168. Philadelphus. IN. 472. Philydre, philydrum. MX. 269. Phillyrea. NL. 417. Phleum. II. 35. Phlomide, phlomis. IT. 452. Phlox. JE. 5rr. Phæœnix. II. 65. Phormion, phormium. LIL. 156. Phylique, phylica. IV. 652. Phyllanthus. IV. GGo. Phyllis. XV. 133. Physalis. UT. 453. Phytelephas. NL. 75. TABLE Phyteuma. 1. 612. Phytolacca. III. 350. Picride. IV. 8. Picridion. IV. 9. Picridium. IV. 9. Picris. IV.8. Pied d’alouette. 7. Dauphinelle. Pied d’oiseau. IV. 627. Pigamon. IV. 186. Pimélée, pimelea. IIL. 320. Piment. 1. 489. Pimprenelle. IV. 528. Pimpinella. XV. 164. Pin, pinus. IV. 915. Pinckneya. IV. 134. Pinguicula. III. 390. Piper. IV. 689. Piquérie, piqueria. IV. 48. Piscidie, piscidia. IV. 606. Pisonie, pisonia. III. 360. Pissenlit. LV. 7. Pistacia. IV. 632. Pistachier. IV. 632. Pisum. IV. 619. Pitcairne , pitcairnia. III. 136. Pittone, LIT. 497. Pittospore, pittosporum. IV. 619. Pivoine. IV. 209. Planère , planera. IV. 694. Plantain. III. 365. PLaAnrAGiNÉES. III. 364. Plantago. XII. 365. Praqueminiers. III. 540. Plaqueminier. II. 540. Platane, platanus. AV. 507. Platylobier, platylobium. V. 584 Plectranthus. II. 458. Plinie, plinia. IV. 543. Plocamier , plocama. IV . 145. Prumpaainees. IIL. 370. Plumbago. HI. 370. Plumeria. II. 530. Poa. III. 58. Podagraire. IV. 164. Podalyre, podalyria. IV. 559. Podocarpe , podocarpus. IV. 710. Podophylle, podophyllum.IV .213. Pæderia. XV. 143. Pæonia. IV. 209. Pogonia. IV. 722. Poinciana. IN. 573. Poincillade. IV. 573. Poirétie, poiretia. III. 598. Poirier. I. 453. Pois. IV. G19. Pois chiche. 7. Garvanche. Pormaderis. IV. 650. DES GENRES. Poivrier. IV. 689. PoLÉMONTACÉES. TL. Mrs Polémoine, polemonium. TITI. 513. Pollichie , pollichia. XII. 358. Polyanthes. TL. 179. Polycarpe. IV. 397. Polycarpée, polycarpea. IV. 392. Polycarpon. IV. 391. Polycnème , polycnemum. II. 352. Polygala. III. 397. Polygonatum. il. 88. Porxcoxées. III. 342. Polygonum. NI. 345. Polymnie , polymnia. IV. 107. Polypode, polypodium. NI. 6. Polypogon. XII. 4o. Pommier. IV. 482. Pontederia. XII. 252. Pontédérie. III. 252. Populage. IV. 208. Populus. IV. 697. Porcelia. IV. 360. Porcelle. IV. 10. Porlière, porliera. IV. 38r. Porte-collier. IV. 60. Portesia. IV. 292. Portésie. IV. 292. Portlande, portlandia. IV. 138. Portulaca. 1V. 433. Portulacaire, portulacaria. IV. 436. PorruLacÉEs. IV. 432. Potamogeton. III. 18. Potamot. #7. Potamogeton, Potentille , potentilla. IV. 531. Poterium. IV. 528. Pothos. III. 26. Pourpier. IV. 433. Pourrétie, pourretia. III. 103. Prasion, prasium. III. 462. Prêle. LIL. 15. Prenanthe, prenanthes. IV. 2. Primevère. III. 389. Primula. 1IL. 382. Prinos. IV. 645. Priva II. 437. Prockie, prockia. 543. Proserpinaca. IV. 448. Protée , protea. III. 323. Proréacezs. III. 323. Prunier. IV. 541. Prunella. II. 461. Prunus. IV. 541. Psoralier, psoralea. IV. 597. Psycotre, pese IV. 142. Psydium. IV. 467. Psyllium. XII. 564. XXXII) Ptéléa. IV. 637. Ptérocarpe, pterocarpus. IV. 626. Pteranthe , pteranthus. II. 353. Pteris. IIL. 9. Puüilium. UI. 125. Pulicaire. III. 364. Pulmonaire, pulmonaria. III. Bor. Pultenée, pultenæa. IV. 580. Punica. IV. 451. Pyrole, pyrola. II. 597. Pyrus. IV. 483. Pyxidantère, pyzidantera. III. 6oÿ. Juamoclit. III. 5og. uassia. IV. 358. uenouillette, IV. 15. FRE LV: 505: Querie, queria. IV. 392. Quinquina. IV. 137. Racle. III. 47. Rapnr£es. IV. 52. Rafnie, rafnia. LV. 593. Raïane. IIL. 94. Raïfort. IV. 220. Raisinier, III. 342. Rajana. XII. 94. Ramonde, ramonda. I. 478. Ramontchi. IV. 360. Randia. IV. 134. Ranunculus. IV. 194. Raphanus. XV. 220. Raponcule. III. 612. Rateau. IV. 615. Ratoncule. IV. 199. Rauvolfe, rauvolfia. XII. 540. Ravenal, ravenala. II. 257. Réaumurie, reaumuria. IV. 437. Redoutée. IV. 342. Redutea. IV. 342. Réglisse. IV. 615. Rénéalmie, renealmia. IIL. 269. Renoncuracées. IV. 181. Renoncule. IV. 194. Renouée. III. 345. Reseda. IV. 938. Rhagadiole, rhagadiolus. IV, 2. Rhamnus. IV. 646. Rhapis. TL. 5. Rheum. XII. 346. Rhexie, rhexia. IV. 477. Rhinanthus. III. 3990. Rhodiole, rhodiola. IV. 419. Rhododendron. II. 555. Rhodore, rhodora. III. 560. Rhubarbe. III. 346. Rhus. IV. 628. XXxiV Ribes, IV. 427. Ricinelle. 1V 66 ; Ricin, ricinus. IV. 665. Ricotie , ricotia. iV. 226. Rindera. XI. 505. Rivine, rivina. III. 351. Riz. III. Ga. Robinier, robinia. IV. 607. Rocou, IV. 353. Roellie, roellia. LI. 612. Romarin. IL, 433. Ronce. IV. 535. Rondeletia. IV. 134. Rondelier. IV. 134. Rondier. III. 98. Rosa. IV. 491. Rosacées. 1V. 481. Rosage. III. 555. Rosaces. III. 553. Roseau. IIL. Gr. Rosier, IV. 497, Rosmarinus. III. 437. Rossolis. IV. 239. Rotang. IIL. G7. Rottboellie, rotthoellia. II. 48. Rouvet. IIT. 308. Royène, royena. II. 550. Rubanier. III. + Rubentia. IV. 643. Rubia. IV. 137. Runracées. IV, 199. Rubus. IV, 535. Rudbèque, rudbeckia. IV. 112. Rue. IV. 383. Ruellie, ruellia. TIL. 404. Ruizie, ruizia. IV. 343. Rumezx, II. 346. Ruppie, ruppia. II. 18. Ruscus. III. 90. Ruta. IV. 3583. Ruracées. IV. 359. S'abal. III. 76. Sablier. IV: 670. Sabline. IV. 395. Sabot. 7. Cypripède. S'accharum. II. 41. Safran. III. 250. Sagine, sagina. IV. 392. S'agittaria. III. 105. Sagou , sagus. II. 73. Sainfoin. IV. 633. Salicaire. IV. 450. SazicaiRes. IV. F8. Salicorne, salicornia. XI. 358. Salix. IV. 695. *Saliquier. IV. 480. Salsepareille. HT. or. TABLE Salsifix. IV. 9. Salsimagre. IV. 10. Salsola. LIL. 354. S'alvia. III. 437. S'ambucus. IV. 155. Samole, samolus. fur. 389. Samyde, samyda. IV .1724. Sanguinaire, sanguinaria. IV. 213. Sanguisorbe, sanguisorba. IV .528. Sanicle , sanicula. LV, 178. Sanseviére, sansevieræ. Ti. 133. Santoline, santolina. IV. 5o. Sapin. IV. 719. S'apindus. IV. 242. S'apium. IV. 650. Saponaire. IV. 396. S'aponaria. IV. 306. Sapotillier. IT. 545. Saroriziers. LIL. 545. S'aracha. III. 488. Saraquier. II. 488. Sarcocollier. 77. Pénée. Sarracénie, sarracenia. LV. 721. Sarrète, IV. 18. Sarriette. LIT. 443. S'atureia. III. 443. Satyrion , satyrium. IIL. 280. Sauge. II. 457. Sauie. IV. 695. Saurure, saururus. IL. :7. Savonier. IV. 242. Savoniers. IV. 240. Saxifrage, saxifraga. IV. 421 SAXIFRAGES. LV. 421, Scabieuse, scabiosa. IV. 124. Scabioselle. IV. 126. S'candix. IV. 165. Sceau-de-Salomon. ILE. 88. S'cecurinega. IV.664. S'eutellaria. XIT. 460. Scheuchzérie, scheuchzeria. XI. 106. S'chinus. IV. 632. Schisandre, schisandra. IV, 363. Schkurie, schkuria. IV. 62. Schloranthus. IV. 720. S'chænus. II. 30. Schotie, schotia. IV. 567. Scille, scilla. UI. 164. Scirpe , scirpus. IL. 31. Scleranthus. IV. 435. Sclerocarpe, sclerocarpus. IV. 108. Scolopendre, solopendrism., I. 5. Scolyme , scolymus. IV. 17. Scopaire , scoparia. III. 464. DES GENRES, Scorpione. IL. 505. Scorpiurus. LV, G2r. Scorzoncre, scorzonera. LV#S. Scrophulaire, scrophularia. AT. 465. Scrorauraines. JL. 462. Sébestier. IT. 495: S'ecale. XII. 56. Securidaca. IV. 626. Sedum. IV. 417. Seigle. ILE. 56. Sélagine. LIT. 433. Selugo. IT. 433. Sélin , selinum. LV, 173. SemrLoscuLeuses. IV. 17€. S'empervivum. IV. 419: Senebière , senebiera. IV. 230. Senecio. IV. 89. Senecon. IV. 69. S'eptas. IV. 420. S'erapias. HI. 282. Seringat. IV. 453. Seriole, seriola. IV. 10. Sérisse , serissa. IV. 141. Serjanie, serjania. IV. 241. S'erratula. LV. 18: Sésame, sesamum. III. 517. S'eseli. IV. 166. Seslerie , sesleria. III. 50. Sésuve, sesuvium. LV. 438. Shérardie , sherardia. IV. 129. Sibbalde, sibbaldia. IV. 5315. Sibthorpie, sibthorpia. III. 397. Siciote. IV. G72. Sicyos. IV. 672. Sida. IV. 336. Sideritis. LIT. 445. Sidéroxylon.JIL. 544. Sigaline. EV. 567. Sigeshbèque, sigesbeckia. IV. 97. Sialite. IV. 357. Silene. IV. 404. Silphie, silphium. IV. 108. Simarouba. IV. 358. Sinapis. IV. 220. Wison. IV. 169. Sisymbrium. IV : 295. Sisyrinchium. III. 216. Sium. {V. 150. Smilacine , smilacina. NI. 80. Smilax. HI. o7. Smyrnium. 1Ÿ. 165. Solandre, solandra. II. 482. Sorantes. LIL. 456. S'olanum. III. 484. Soldanelle, soldanella. NIK. 386. Soleil. LV. 113. XXXV Solidago. IV. 83. Sonchus. IV .4. Sophora. IV. 578: Sorbier, sorbus. 1V. 48). Sorgho, sorghum. HI. 45. Souchet. II. 3r. Soucuers III. 29. Souci. IV. 58. - Soude. ILE. 354. Sowerbée , sowerbea. IT. 126. Spandoncé, IV. 571. Sparganium. HE. 20. Spargoutte. IV. 394. Sparmanne, sparmannia. IV 350. Sparte. HI. 63. Spartier, spartium. IV. 585. Spartina. QE. 49. Spartine. IIL. 49. Spergula. IV. 394. Spermacoce. IV. 133. Spielmannia. HE. 430. Spigéle, spigelia. IIL. 527. SU authe, Spilanthus. IV.119 Spilmane. Lif. 430. - Spirée , spiræa. LV. 536. Spondias. IV. 634. Sphéæranthus. AV. 21. Sphærolobié, sphærolobium. IV. 582. Spændoncea. EV. 571. Stachytarpheta. IL. 437. re IT. 4/0. Stapélie , stapelia. IEL. 532. Staphylier, staphylea. AV. 639. Statice. III. 3771. Stellaire , stellaria. IV. 395. Stéhéline. IV: 17. Stellera. III. 318. Stellérine. IIE. 318. Sterculier, terculia. IV. 350. Stévie, stevia. IV. 47. Stipe, stipa. IL: /o. Stæhelina. IV. 19. Stramoine. IIT. 480: Stratiote. III. 297. Stratiotes. IT. 597. Strelitzie, strelitzia. MI. 258. Streptope, streptopus. HI. 123. Struthiole, struthiola. IE. 319. Strychnos. IL. 543. Stuartie, stuartia. IV. 344. Stylidier, stylidium. XL. 604. Styphelie, styphelia. EU. 605. Styrax. III. 551. 7 Subulaire, subularia. LV. 529. Sumac. IV.628. Sureau. IV. 155. XXXY] Swertie, siwertia. III. 524. S'wietenia. IV. 293. Syderoxylum. ILE. 544. Symphoricarpos. IV. 150. Symphorine. IV. 150. Symphytum. XII. 503. Syringa. XIE. 410. Sysimbre. IV. 326. Taberne , tabernæmontana. XII. 29. Tahoe F. Thlaspi. Tagetes. IV. 63. Talin, talinum. IV. 433. Jamarinier, tamarindus. IV. 567. Tamarise, tamarix. IV. 434. Taminier. IIL. 96. Famne. 77. Taminier. Tamnus. II. 06. Tanacetum. IV. 928. Tanaisie. IV. 28. Tarconanthe, tarconanthus. IV, res IV. 5. Taxus. IV. 710. Tectone, tectona. III. 426. Tek. 7. Tectone. Télèphe, telephium. IV. 434. Téligonier. IV. 688. TEéRÉBINTHACÉES. IV. Ga. Terminalia. XI. 312. Ternstrome, ternstromia. IV. 286. Terrenoix. IV. 194. J'étragonie, tetragonia. IV. 443. Teucrium. IL. 441. Thalie, Thalia. III. 268. Thalictrum. IV. 186. Thapsie, thapsia. IV. 166. The, thea. IV. 287. Theligonum. IV. 688. Theophrasta. XII. 542. Thésion , thesium. III. 308. Thlaspi. IV.9232. Thrinax. IL 90. Thunbergie, thunbergia. IL. 403. Thuya. IV. 714. Thymn , thymus. IL. 455. Thymbra. IT. 455. Tiarelle, tiarella. IV. 421. Tigridie , tigridia. IE, 219. PiliaAN 3x Tillandsie , tillandsia. TITI, 254. Tillée, tillæœa. IV. 4x1. Tilleul. LV. 371. Tolu. IV.634. Toluifera. IV. 634. Tomate. III. 488. Toque. IT. 460. TABLE Tordylier, tordylium. IV. 175. Tormentille, tormentilla. IV. 531 Tournefortia. LIL. 497. Tourrette, IV. 220. Trachélier, trachelium. XII. Grr. Tragie, tragia. IV. 670. Tragopogon. IV. 9. Tragus. II. 45. Trapa. IV. 449. Trefle. IV. 599. Trianthème, trianthema. IV. 435. Trichilie, trichilia. IV. 292. Trichodier, trichodium. 1IL. 39. Trientales, trientalis. IL. 380. Trifolium. IV. 599. Triglochine, triglochin. III. 106. Trigonelle, trigonella. IV. 600. Triguère, triguera. III. 482. Triopteris. IV. 251. Trioste , triosteum. IV. 149. Triphasie, triphasia. IV. 286. Triplaride, triplaris. LIL. 347. Tripsaque, tripsacum. II. 46. Tritoma. III. 135. Triumfetta. IV. 369. Trixide. IV. 448. Troène. III. 427. Trolle, trollius. IV. 199. Tropæolum. IV. 322. Troscart. #. Triglochine. Tubéreuse.'IIL, 179. Tulbagia. NL. 212. Tolipe, tulipa. XII. 116. Tulipier. IV. 356. Tupelo. III. 310. Turnère , turnera. IV. 433. Turritis. IV. 220. Tussilage , tussilago. IV. 39. Ulez. IV. 583. Ulmus. IV, Go2. Umari. IV. 625. Uniole, Uniola. III. 59. Urène, Urena. IV. 335. Urrospermum. IV. 10. Urtica. IV. 685. Unricées. IV. 685. Ustérie, usteria. XII. 471. Utriculaire, utricularia. II. 389- Uvaria. IV. 361. Uvette. IV. 508. Uvulaire, uvularia. XII. 123. Vaciet. V. Muscari. Vaccinium. III. 599. V’alantia. IV. 131. Valériane, valeriana. IV. 1237. Valérianelle. IV. 128. VaALÉRIANÉES. IV. 127. DES GENRES, Vallisnérie, vallisneria. III. 206. Vampi. IV. 262. Vanguier, vanguiera. IV. 144. Vanille, vanilla. II. 205. Varaire. III. 109. Varrone, varronia. LIT, 406. Vaubier. III. 334. Velar. IV. 224. Vella. IV. 235. Vélézie, velezia. IV. 408. Veltheimie, veltheimia. I. 134. Vératre. 77. Varaire. Veratrum. III. 109. Ferbascum. XII. 458. Verbena. III. 432. Verbésine, verbesina. IN. 118. Verge d’or. IV. 83. Vergerette. IV. 68. Vergerolle. 7. Vergerette. Vernonie, vernonia. IV, 43. Véronique, veronica. III. 394. Verveine. III. 432. Vesce. IV. 627. V'iburnum. 1V. 154. Vicia. IV. 621. Vieusseuxie, vieussexia. III. 230. Vigne vierge. 7. Achit. Vigne. IV. 296. Vicwes. IV. 294. Vigoline. IV. 116. Villarsie , villarsia. TIT. 525. Viminaire, viminaria. IV. 581. Vinca. III. 528. Vinettier. IV. 363. Vinule. III. 97. Viola. IV. 377. Violette. IV. 377. Viorne. IV. ss : Vioulte. 7. Érithrone. Vipérine. IIL. 5oo. Virgilie, virgilia. IV. 570. V'iscum. IV. 154. XXX Vi} Visnée, visnea. III. 551. Vitex. III, 425. V'itis. IV. 206. Vomique. III. 543. Volant-d'eau. IV. 448. Volkamier, volkameria. WI. 423. Vulpin. III. 35. Wachendorfie , ET N059. Waldsteinie, wa/dsteinia. IV .529. Walthérie, waltheria. IV. 365. Westéringie, westeringia. AL. 436. Wintérane, winterania. IV. 291. Witsénie, wwitsenia. III, 218. Woodwardie,woodwardia. TI. 9. Wurmbée, wurmbea. III. 112. Xanthium. IV, 601. Xeranthème, xeranthemum. IV. SP Ximénésie, ximenesia. IV. 108. su IV. ar TAN ophylle, xylo a. IV. 667. OA Dons ler. Pucca. III. 131. Zacinthe, zacintha. IV. 7. Zamie, zamia. II. 17. Zanichelle, zanichellia. III. 18. Zanonie, zanonia. IE, 107. Zanthorize, zanthoriza. IV. 212. Zanthoxilum. IV. 636. Zapane, zapania. IL. 430. Zarolle. IT. 616. Zea. II. 63. Zedoaire. 7. Kæmpférie. Zinnia. AV. 117. Ziziphore , ziziphora. III. 435. Zizyphus, IV. 647. Zœgée , zœgea. IV. 18. Zuccangnia. I. 155. Zygophy llum. IV. 380. wachendorfia. FIN DE LA TABLE DES GENRES, XXX VII) EXPLICATION AAA LUE LS BALISE ED LULAL VILLA EUS LUEUR EUR L11143::15:11113)::h:71321 LL] SARRAR ARS. EXPLICATION DES ABRÉVIATIONS. AL. ANDREW. ARDUIN. Bazeis. Bzauv. B£LLanDi. Bizr.. BouerLanp. Bosc. Bor. Macaz. BRroOTERA. Browx. Cav. Conre£a. CRranTz. Curris. CyrizLo. Dzcann. Dezie. Desr. Desvaux. Duuax. Duxaz. Excycz. FL. pan. FL. PEruv. Forsx. GÆRTN. Goon. Gouax. Allioni. Flora pedemontana. Auctuarium. Andrews. Repository. Arduini. Specimen. Balbis. Miscellanea et additamentum ad floram pede- montananz., Beauvois, Agrostographie. Appendix ad florum pedemontanam. La Billardière. Vovæ-Hollandiæ plant. Specimen. Plantes rares de Navarre et de Ja Malmaison. — Plantes équinoxiales. Dictionnaire d'agriculture. — Actes de la Société d’his- toire naturelle de Paris. Botanical Magaziv. Flora lusitanica. — Phytographia lusitaniæ selectior. Prodromus floræ V.-Hollandiæ Cavanilles. Zcones. — Dissertationes. Transactions of the Linneam society. Stirpium Austriacarum fasciculi. Flora londinensis. Plant. Rariorum regni neapolitani fasciculi. Decandolle. Annales du Muséum d'histoire naturelle, — Astragalogia. — Decandolle. Catalogus ‘plant. horti botanici monspeliensis. —Klore fraucaise. Delile. Floræ ægyptiacæ illustratio. — Description de l'Égypte. Desfontaines. Flora atlantica. — Annales du Muséum d'histoire naturelle. — Mémoires de l’Académie des sciences de Paris. Journal de botanique. Duhamel. Traité des arbres et arbustes. — Nouvelle édi- tion. Histoire de Solanum. Encyclopédie méthodique. — Supplément. ( Poiret.) Flora danica. Flora peruviana. Forskahl. Ælora ægyptiaco-arabica. Gærtuer. De fructibus, etc. Goodnow. Transactions of the Linnean society. Gouan, {llustrationes. Guzes. Haw. Honr.K. Honr. Par. Hosr. Jaco. Juss. Kozcer. Lanperr. Lau. Lapeyre. Larocue. Lzers. L'Hérir. L'Hénir, L. ou Lis. DES ABRÉVIATIONS. XXXIX Guersant. Bulletin de la Société philomatique. Haworth. Observations on the genus mesembryantemum. Hortus Kewensis. Edition deuxième. Hortus parisiensis. Icones et descriptiones graminum , etc. Jacquin. Selectarum stirpium americanarum historia.— ‘Flora austriaca. — Collectanea. — Fragmenta bota- nica. — Hortus Schœnbrunensis. — Hortus V'indobo- nensis. — Icones plantarum. — Miscellanea. — Ob- servationes botanicæ. — Oxalis. De Jussieu. Annales du Muséum d’histoire naturelle. Descriptio graminum. À description of the genus pinus. Lamarck. Illustration des genres. — Journal d'histoire vaturelle. Lapeyrouse. Histoire des plantes des Pyrénées. Eryngiorum historia. Flora herbornensis. L’Héritier. Cornus. — Geranologia. L’Héritier. Sertum anglicum. — Stirpes novæ. Linnœus. Species plantarum.— Mantissa.— Filius , sup- plementum. Lois.Descoxc. Loiseleur Deslongchamps. Flora gallica. — Herbier de Mansceu. Mass. Muicu. Murray. Nesrer. OrTEGA. PazLas. Pers. Porr. Pozzicu. Pourer. Ramar. Ramoxp. Rep. Rerz. SALISB. Scux. Scuouse. SCHRAD< SCHREB. l'amateur. Marschall. Flora taurico-caucasica. Masson. Stapeliæ novæ. Michaux fils. Histoire des arbres forestiers de l'Amérique septentrionale. — Commentaria soc. Goettingensis. S'ystema vegetabilium. Potentillæ genus (manuscrit). Decades. Species astragalarum, etc. — Voyages. — Nova acta petropolitana. — Flora rossica. Persoon. Synopsis plantarum. Poiret. Encyclopédie (Supplément). Historia plant. in Palatinatu sponte nascentium. Mémoires de l’Académie de Toulouse. Ramatuelle. Journal d'histoire naturelle. Bulletin de la Société philomatique. Redouté. Liliacées. Les roses. Retzius. Observationes botanice. Salisbury. Prodomus. Schkubr. Histoire des Carex (traduction). Schousbæ. [agttagelser over vextriget i Marokko. Schrader. Flora germanica. Schreber. gramina. — Spicilegium.— Plantarum verti- cillatarum unilabiatarum genera et species. xl Scor. SMITH. Son. SWARTZ. Tours. Tuuizrer. Vauz. Vaur. Wan. Wexpz. Venr. Wzin. Vivranr. EXPLICATION DES ABRÉVIATIONS. Scopoli flora Carniolica. — Deliciæ floræ et faunæ in- subriccæ. Flora Britanica. — À specimen of the botany of New- Holland.. — Zcones pictæ. — Transactions of the Lin- nean society. — Spicilegium botanicum. Sounerat. Voyage aux Indes orientales, etc. Observationes botanicæ. — Orchides. — Prodromus. Aunales du Muséum d'histoire naturelle. Flore des environs de Paris. Enumeratio plantarum. Symbolæ botanicæ. Waldstein et Kittaibel. Descriptiones et Icones plant. rariorum hungariæ. Wendland. $ertum Hannoverianum. Ventenat. Choix de plantes. — Jardin de Cels. — Mé- moires de l’Institut. — Jardin de la Malmaison. Willdenow. Ænumeratio plantarum horti regü beroli- nensis. — Supplementum. — Hortus berolinensis. — Species plantarum. Floræ italicæ fragmenta. FIN DE L’'EXPLICATION DES ABRÉVIATIONS. MANUEL COMPLET DU JARDINIER. FC Re Of Gb QG De De D D 6 D EL SE oh Do QG Le C6 D AE 26 6 PE D De 6 À LE 6 D D Le GX D PRINCIPES GÉNÉRAUX. PREMIÈRE PARTIE. CHAPITRE PREMIER. DES JARDINS. SECTION PREMIÈRE. ORIGINE ET HISTOIRE. Aussrrôr que les hommes se sont réunis en société, l’art des jardins a dû prendre naissance. À supposer que les premiers habitars de la terre aient commencé à se nourrir de racines, de fruits sauvages et de gibier, comme on nous le raconte, Ces ressources précaires ont dû leur manquer dès qu’ils ont été en assez grand nom- bre pour peupler une certaine étendue de pays. Alors il a fallu réunir et élever dans des parcs les animaux sus- ceptibles de se plier au joug de la domesticité, et culti- ver autour des habitations les plantes destinées à la nourriture de l'homme. Mais les bêtes fauves, profitant des ombres de la nuit, venaient ravager en quelques heures des plantations qui avaient coûté des années d’un travail d'autant plus pénible, que l’agriculture était dans I. 1 a} DES JARDINS. | son enfance, que le cultivateur, n'ayant pas pour lui l'ex- périence de ses pères, était réduit à un tätonnement continuel, et qu'enfin il devait plus compter, pour réussir dans ses entreprises agricoles, sur des hasards heureux que sur son talent et ses observations. L'impé- rieuse loi de la nécessité le forca donc à clore la petite portion de terrain où ses mains laborieuses avaient su rassembler et multiplier les plantes destinées à nourrir sa famille ; il renferma dans le même espace quelques pieds des arbres des forêts dont les fruits lui plaisaient par leur saveur; de là sont venus les jardins et les pares: du moins c’est à peu près ainsi qu'Homère le raconte. Bientôt la population s’accrut; les hommes, forcés de donner plus de développement à leur industrie , se rap- prochèrent les uns des autres, afin de se communiquer leurs découvertes , et d'en tirer le parti le plus avanta- geux au bien général; de là naquirent la civilisation , les arts, et toutes leurs conséquences. Il y eut alors des villes, au sein desquelles des hommes furent retenus par leurs occupations. Mais, au milieu des richesses, des agitations d’une vie tumultueuse, et même jusque dans la carrière dangereuse de l'ambition, ils ne purent oublier les douceurs de la vie champêtre ; des lambris dorés, des coussins voluptueux, des mets recherchés, leur laissèrent encore de vifs regrets lorsqu'un souvenir les ramenait sous l’ombrage des forêts, sur un simple banc de gazon, où la nature leur présentait les fleurs charmantes du printemps et les fruits délicieux de l’au- tomne. Les plus riches ne se contentèrent plus d’un jardin potager ; ne pouvant aller chercher la nature, ils la for- cèrent, pour ainsi dire, à venir lestrouver , et les jardins d'agrément furent inventés. Là, ils tâchèrent de réunir dans un petit espace tous les objets qui leur plaisaient dispersés dans la campagne. Les chaleurs excessives de l'Asie ont peut-être occasioné les premières plantations de ces allées couvertes, de ces quinconces majestueux DES JARDINS. 3 qui décorent aujourd'hui toutes nos promenades pu- bliques : comme le goût de la chasse a pu seul détermi- ner à entreprendre les immenses travaux nécessaires à la clôture des parcs , où les souverains et les seigneurs renfermaient les animaux sauvages qu'ils n'avaient pas le temps d'aller poursuivre dans les forêts. On peut conclure de ceci que la date de l'invention des jardins est la même que celle de la civilisation pour tous les pays: Mais quoique les hommes se soient toujours proposé dans leurs plantations l’utile ou l'a- gréable, et plus ordinairement les deux réunis, il ne paraît pas que tous les peuples aient employé les mêmes moyens pour arriver à ce but. Si nous nous en rapportons à quelques poésies nouvel- lement traduites du Sanscrit, les anciens habitans des bords de l’Indus et du Gange , dès la plus haute anti- quité, ont cultivé des fleurs dans leurs jardins : ce que n’ont pas fait d'abord tous les peuples. Chez eux la reli- gion avait consacré plusieurs plantes dans lesquelles ils pensaient que résidaient quelques divinités tutélaires. Ils les cultivaient dans des jardins sacrés, où de jeunes vierges , élevées dans le sacerdoce, avaient pour toutes fonctions la charge de les soigner et de les arroser. Les fleurs, qui n'avaient rien de commun avec le dogme , étaient cultivées dans de vastes parterres, et servaient à faire des guirlandes et des couronnes (1). Nous ignorons si, dans la haute antiquité, les Ghinois établissaient des jardins paysagers à la manière de Cham- bers, dont nous parlons plus loin; mais ce qu'il ya de certain, c’est quede tout temps ils onteu pour les jardins une passion excessive , et que leur amour pour les fleurs perce jusque sur leurs étofles, leurs papiers , et même RE 0 2 RE D ge re (1) Voyez Recherches sur les plantes d'ornement, par lestimable M. Deleuze; et le drame sanserit, intitulé $acontala traduit par M. Bruguière. 4 DES JARDINS. sur les meubles dont ils ofnent leurs appartemens. Si jamais ils ont été atteints de cette manie des fabriques bizarres, ce n’est que depuis leur empereur Kiè. Ce monarque apporta dans ses immenses jardins autant de luxe que de mauvais goût. Il s’y fit construire un vaste palais dont les appartemens étincelaient d’or et de pier- reries; on y voyait des lacs couverts d’embarcations élégantes, et il poussa même l’extravagance jusqu'à y donner des fêtes, dans l’une desquelles il fit remplir un étang de vin pour désaltérer trois mille hommes couverts de peaux d'animaux sauvages, tandis qu'il se promenait dans une gondole avec une de ses femmes. Les Égyptiens paraissent avoir eu la passion des jar- dins depuis l'antiquité la plus reculée ; et les fleurs en firent toujours le premier ornement. [ls les aimaient jusqu’à l'excès, et, comme les Grecs après eux , ils en faisaient des couronnes dont ils se paraient dans les jours de fête. Athénée cite, d’après Hellanicus, une anecdote qui, lors même qu’elle ne serait pas vraie, n'en prouverait pas moins le goût de cette antique na- tion (1). Un simple particulier, nommé Amasis, offrit au roi Partamis une couronne composée de si belles fleurs, que le monarque lui donna en échange son ami- tié et le commandement des armées égyptiennes. Amasis profita de ce bienfait pour s'emparer du trône. Il est malheureux pour Athénée que ce Partamis ne soit pas connu dans l’histoire, qui raconte cependant que cinq cent quatre-vingt-dix-neuf ans avant l'ère chrétienne, un Amasis, favori et général des armées d’Apriès, usurpa le trône de son maître. Quoi qu'il en soit, un des monu- mens les plus anciens que nous ayons des Égyptiens , la pierre de Palestrine (2), peut nous donner une idée de (1) then. deipn., lib. 15, (2) Voyez les planches du Dictionnaire encyclopédique, édition en 37 vol. in-fol. DES JARDINS. 5 la manière dont ce peuple établissait un jardin, car il est évident que cette mosaïque ne représente rien autre chose, comme on peut en juger par les fabriques qu'on y voit, et surtout par le berceau en treillage recouvert de pampres, qui se trouve sur le premier plan. Mais c’est surtout dans la Perse que les fleurs furent cultivées avec autant de soin que de sagesse, el que les jardins réunirent ce genre d'agrément au but d'utilité pour lequel ils furent d’abord créés. Les hommes les plus riches, les princes même , ne dédaignaient pas de s’occuper de leur culture. Le jeune Cyrus (1) s'amusait à planter de ses propres mains les arbres dont il ornait ses jardins de Sardes. Les Grecs eurent pendant fort long-temps des jardins dont les Phéniciens et les Égyptiens leur donnèrent le goût lorsqu'ils leur apportèrent la civilisation. Mais ces. Jardins ne furent d’abord consacrés qu'à l'ulile, c'est-à-dire qu'ils n’y cultivaient que les légumes et les fruits propres à la nourriture de l’homme. Les choses allèrent ainsi jusqu’à ce que, ayant pénétré en Asie , ils en rapportèrent, avec les riches dépouilles des Perses , la mode des jardins d'agrément. Par une singu- larité inconcevable , ils en exelurent les fleurs, qu'ils aimaient cependant beaucoup, et les reléguèrent dans les champs où l’on consacra des portions de terrain à leur culture en grand. I paraît que leurs jardins n'étaient que ce que nous.appelons aujourd’hui paysagers , c'est- à-dire, des retraites ombragées, décorées de monumens consacrés à de grands souvenirs ou à la volupté. Épicure fut le premier qui en eut un dans l'enceinte même de la ville d'Athènes (2), environ trois cents ans avant Jésus-Christ. Presque tous les écrits des poëtes et des philosophes grecs prouvent que ces peuples, comme (1) Xénophon, Économique. (2) Pline, Liv. 19, chap. 4. 6 DES JARDINS. les autres orientaux, faisaient un usage journalier des fleurs. « Non-seulement , dit M. Deleuze, elles étaient comme aujourd'hui la parure de la beauté; non-seule- ment on en ornait les autels des dieux, mais les jeunes gens s'en couronnaient dans les fêtes, les prêtres dans les cérémonies religieuses, les convives dans les festins. Des faisceaux de fleurs couvraient les tables ; des guir- landes de fleurs étaient suspendues aux portes dans les circonstances heureuses ; et, ce qui est plus remarqua- ble et plus étranger à nos mœurs, les philosophes eux- mêmes portaient des couronnes de fleurs, et les guerriers en paraient leur front dans les jours de triomphe. » Malgré cela, les Grecs ne connurent jamais l’art d’aug- menter la beauté des plantes par une culture éclairée, et surtout celui, si répandu aujourd’hui, de faire doubler leurs brillantes corolles. Il semblerait que cette culture était abandonnée aux mains ignorantes des habitans de la campagne , qui les récoltaient, et venaient les vendre dans les villes par l'entremise de bouquetières dont quelques-unes ont été célèbres par leur beauté. Si nous nous en rapportons à Théophraste (r), ils ne cultivaient qu'un très-petit nombre d'espèces; les roses, les vio- lettes, les giroflées, les narcisses, les iris et les grena- diers étaient les seules qu'ils aient un peu perfectionnées par des soins raisonnés; les trois premières et la der- nière étaient les seules aussi qu'ils soient parvenus à doubler. C’est particulièrement dans les contrées méridionales, sous Îles influences d’un climat favorable à la végétation, que l’art des jardins a dû se perfectionner le plus tôt. Aussi lisons-nous avec étonnement les descriptions que les Grecs nous ont laissées des jardins des Hespérides dans la Mauritanie, de ceux d’Alcinoüs dans l'ile de Corcyre et de ceux de Sémiramis à Babylone. Ces derniers (1) Theophr. hist. Plant. lib. 6. DES JARDINS. 5. surtout étaient extrêmement vantés dans l'antiquité. Rollin nous en a donné une idée admirable. Ils for- maient, dit-il, un carré long, dont chaque côté avait quatre cents pieds. Ils étaient élevés et composés de plu- sieurs terrasses en amphithéâtre, dont la plus élevée égalait la hauteur des murs de Babylone, qui était de cinquante toises. On montait d’une terrasse à l’autre par un escalier large de dix pieds; la masse entière était sou- tenue par de grandes voûtes, bâties lune sur l’autre, qui formaient des salles magnifiques. Le tout était for- tifié d’une muraille de vingt-deux pieds d'épaisseur. Les plate-formes établies sur ces voûtes étaient cou- vertes d’une épaisseur de terre assez considérable pour y faire végéter les arbres de première grandeur. On ar- rosait les jardins au moyen de pompes qui puisaient l’eau dans l’Euphrate. Lorsqu’'Alexandre le Grand s’em- para de Babylone, seize siècles après la construction de ces monumens de la splendeur de Sémiramis, ces jardins existaient encore, et l’on y voyait des arbres de plus de cinquante pieds de hauteur , dont le tronc avait douze pieds de circonférence. Les Romains, d’abord entièrement absorbés par l'es- prit de conquête, sur lequel ils fondaient les bases de leur grandeur future, s’occupèrent très-peu des arts d'agrément, et négligèrent, ou plutôt ne connurent point la culture des fleurs pendant les premiers siècles. Leurs jardins ne copsistaient qu’en quelques plantations de légumes, dont les soins étaient confiés à la mère de fa- mille. On sait qu’alors un consul , un dictateur même, ne craignait pas de quitter l’épée avec laquelleil venait de subjuguer une partie du monde, pour prendre la bèche ou conduire la charrue. Cette simplicité de mœurs dura presque autant que la république; cependant ils avaient déjà, sous les derniers consuls, un goût pro- noncé pour les fleurs , et ils ne tardèrent pas à le por- ter à l'extrême. Cicéron, dans sa troisième harangue 5 DES JARDINS. contre Verrès , lui reproche d’avoir parcouru la Sicile dans une litière où il était mollement étendu sur des feuilles de rose, ayant une couronne de fleurs sur la tête et une autre autour du cou. Lors de la défaite de Mithridate, roi de Pont, Lucul- lus apporta de ce royaume divers végétaux utiles par leurs fruits (le cerisier est de ce nombre). Séduit par la magnificence des jardins de l'Asie, il résolut de porter dans sa patrie ce nouveau genre de luxe, et il fit cons- truire ces fameux jardins dont Pline nous a conservé la description. Cet exemple fut bientôt imité, et ce fut surtout pendant le règne des douze césars que ce goût fut porté jusqu'à l’extravagance. Il n’est personne qui n'ait lu avec surprise jusqu'à quelle folie Néron fut en- trainé pour la construction de ses jardins, dans lesquels il avait fait renfermer des lacs, des montagnes, des forêts et des villages. Bientôt les Romains, nés pour tout porter à l'extrême, ne se contentèrent plus d'em- ployer les fleurs en couronnes ou en guirlandes, comme les Grecs; ils voulurent les entasser autour d'eux et s’é- nivrer de leur parfum. Ils les effeuillaient dans leurs lits, dans leurs appartemens, et jusque sous les porti- ques de leurs palais (1). Cependant ils ne songèrent pas uon plus à s'en servir pour la décoration des parterres, et l’on se borna à les cultiver dans les champs. D'après ce que dit Pline (2), il paraît qu'ils en avaient encore moins d'espèces que les Grecs, et qu'ils ne possédaient presque que des roses et des violettes. Du moins ces fleurs étaient les plus répandues et les plus estimées. Mais les Romains, asservis par les empereurs, perdi- (1) On croit que l'usage où l’on est encore aujourd’hui d’effeuiller, de jeter des fleurs devant les processions, est un reste d’habitude des Ro- mains qui en agissaient ainsi devant les statues de leurs dieux. (2) Paucissima nostrigenera coronamentorum inter hortensia novere, ac penè violas rosasque tantum. Pline, lib, a1, cap. 3. DES JARDINS. 9 rent peu à peu le goût des arts, et le temps renversa ces obélisques , ces statues, eL tous les édifices dont ils avaient orné leurs parcs avec autant de magnificence que de goût. Lorsque les Germains se précipitèrent du Nord pour inonder l'Italie, dont ils firent la conquête, les anciens maîtres du monde ne pensèrent plus à embellir une patrie qu'ils n'avaient pas su défendre, et il ne fut plus question de fleurs ni de jardins. Les Grecs furent alors le seul peuple de l'Europe qui conserva le goût des jardins d'agrément, sans doute parce que les grands, effrayés des factions qui sans cesse déchiraient l'empire , ou lassés des intrigues du palais, avaient contracté l'habitude de passer une grande parte de leur vie dans leurs maisons de campagne , où la cul- ture des fleurs amusait leurs loisirs. Au huitième siècle, les Arabes, sous la conduite des califes, s'emparèrent de l'Espagne, et y rallumèrent le flambeau des sciences. Ils ornèrent la ville de Grenade de palais magnifiques et de jardins superbes, dans les- quels cependant ils ne cultivèrent pas un bien grand nombre de fleurs. Ebn-Alwan, un de leurs auteurs, nous à laissé cette liste fort curieuse des plantes d’a- grément qu'on y soignait; mais quelques-unes ne sont plus connues aujourd’hui : des roses de plusieurs es- pèces ; des gtroflées, lis, violettes; le nymphæa blanc; les narcisses blanc, jaune, et de macédoine; la ca- momille ; la matricaire; sept espèces de basilic; la la- vande; l’acacia à fleurs blanches et odorantes; l’althæa; l'hibiscus ; le Javatère en arbre ; le nisrin, le ward, etle Zuani, Lorsque les Arabes se retirèrent de l'Espagne, le goût des jardins allait se perdre en Europe, si les Grecs, chassés de Constantinople par les Turcs , n’eussent ap- porté en Italie leur amour pour les arts. Leurs vain- queurs, lorsqu'ils eurent donné de la stabilité à lem- pire , occupèrent leurs loisirs à la culture des fleurs dont 10 DES JARDINS. ils ornaient les jardins de leurs sérails. Un gouvernement despotique ayant proscrit chez eux les arts et les scien- ces , ils surent se créer une occupation agréable dans l’in- térieur de leurs palais, et cette occupation consistait àras- sembler à grandsfraisles plantesles plus belies et les plus rares. Les femmes, qu'ils tenaient captives dansde tristes harems, partagèrent leurs goûts, d’abord par désœuvre- ment, puis ensuite pour favoriser les entreprises d’un amour dangereux. Une fleur cessa bientôt, pour elles, de n'être qu'une brillante parure du printemps, elle de- vint la messagère mystérieuse et discrète chargée de faire connaître au dehors les feux secrets qui les consu- maient dans leur étroite prison. C’est ainsi qu’en faisant parvenir à un jeune homme une tulipe en fleur , la plante muette pour les indiscrets, parlait le langage de l'amour et des désirs à celui qui la recevait : «Je brûle d’une flamme aussi ardente que celle que tu vois sur ces pé- tales ; et , si mes feux ne sont partagés, mon cœur sera bientôt consumé comme le fond noirei du calice de cette fleur. » Les Gaulois, sans cesse occupés à défendre leur ré- publique fédérative, ou à subjuguer les nations voisines, conservèrent pendant fort long-temps des mœurs dures et sauvages, et négligèrent entièrement les arts d'agrément ; aussi ne s’occupèrent-ils des jardins et des fleurs que long-temps après les autres peuples. Peut-être aussi doit- on attribuer cette négligence à la rigueur du climat de Jeur pays, alors couvert de forêts et de marais. Ce ne fut que sous le règne de Charlemagne que la civilisation commenca à faire des progrès ; aussi ce n’est qu'à cette époque remarquable que les Français cultivèrent des plantes et tracèrent des jardins ; mais il parait que leurs fleurs étaient en très-petit nombre et toutes indigènes. Ce prince, dans son capitulaire de 7’illis, indique à ses jardiniers toutes les plantes qu’ils doivent cultiver , -et le nombre n'en monte pas au-delà de soixante, parmi DES JARDINS, 11 lesquelles on ne peut même regarder comme d'agrément que les lis et les roses. Les choses en restèrent là jusqu’au treizième siècle, époque où les fleurs commencèrent à devenir de mode, grâce aux croisés qui en rapportèrent quelques-unes de l l'Égy pte et de la Syrie. Les moines surtout charmèrent les ennuis du cloître par la cul- ture de leurs parterres ; mais le peu de richesses végé- tales qu’ils possédaient resta enfoui dans les jardins de leurs couvens. Tout à coup un homme riche et ami des arts parut en Italie ; le cardinal d'Est, possesseur du terrain où jadis on avait admiré les magnifiques jardins d’Adrien, eut la pensée de reproduire ces ombrages délicieux et ces fabriques élégantes dont l’antique Rome avait été dé- corée. En fouillant dans la terre pour obéir à sa volonté, on découvrit une quantité de morceaux de sculpture, chefs-d’œuvre des anciens artistes grecs et italiens. Le cardinal les employa à la décoration de ses jardins, et bientôt il put se vanter d’avoir plus de luxe et de richesses en ce genre, qu'aucun souverain de lEu- rope. Les princes italiens suivirent d’abord l'exemple du cardinal d'Est, et le goût des jardins se communiquant de proche en proche pénétra bientôt en France. Ce fut François [* qui commenca à adopter le genre italien à Villers-Coterets, au bois de Boulogne , à mel à Fontainebleau, ete) Mais Louis XIV, grâce au talent de Lénôtre , surpassa ses modèles et fut le créateur de ce qu'on appelle le genre français, dont Versailles est de- venu le type inimitable. Pendant que Lenôtre s’immortalisait en France en entassant chefs-d’œuvre sur chefs-d’œuvre , monu- mens sur monumens ; pendant que la règle, le com- pas et l’équerre lui servaient à tracer d’une main har- die et savante ces parterres superbes et symétriques, ces co'onnades de verdure, par lesquels il a prouvé 12 DES JARDINS. que l’art n’est pas, comme on le croit, l'ennemi de la nature, les Anglais transportaient en Europe le goût des jardins chinois, et Kent renchérissait encore sur les peuples de l'Orient en ne cherchant, dans les compo- sitions dont il couvrit la Grande-Bretagne, que l’imita- tion presque servile de ce qu'il appelait la nature; il poussa même cette affectation jusqu'a planter des arbres morts dans les jardins de Kinsington. Depuis ces dernières époques les fleurs furent étudiées et devinrent partie intégrante des jardins, dontellesfirent un des premiers ornemens. Jusqu'au seizième siècle, la botanique n'avait été envisagée que sous le rapport de la médecine , et personne ne s'était avisé de voir autre chose que l'envie de se procurer des remèdes plus ou moins salutaires, dans les collections de plantes ras- semblées avec soin par quelques pharmaciens. Le pre- mier exemple de ces jardins de plantes médicinales fut donné par Antoine Castor, le plus célèbre médeein de Rome, du temps de Pline. On attribuait alors aux plantes les vertus les plus merveilleuses, et la crédulité du peuple servit long-temps le charlatanisme des empiriques. Il faut convenir cependant que, si autrefois on leur accor- dait trop de propriétés, aujourd'hui on leur en accorde peut-être trop peu. Ce ne fut guère qu'au seizième siècle que l'amour de la botanique pure s’empara de quelques personnes, et que l’on commença à réunir dans un même lieu toutes les plantes intéressantes pour les comparer entre elles, et les étudier dans un autre but que celui de leur chercher des propriétés médicales. La découverte d'un passage aux grandes Indes par Vasco de Gama, celle de l'Amérique, et les relations commerciales qui s’établirent entre ces eontrées lointaines et l’Europe firent connaitre et apporter beaucoup de végétaux inté- ressans par la beauté de leurs fleurs ou la qualité de leurs fruits. Mais la plus grande partie, trop sensible DES JARDINS. 13 aux rigueurs de nos hivers, se montrait un printemps pour ne laisser ensuite que des regrets sur leur perte. Cependant on connaissait déjà, même du temps des em- pereurs romains, une méthode de les abriter par le moyen des verres à vitres. En 1591, Ferdinand I", fils de Côme de Médicis, fit construire à Pise une serre tempérée, la première qui réunit toutes les conditions nécessaires pour la culture des plantes de la zône tor- ride et autres pays plus chauds que Ptalie. Dés-lors l’horticulture fit de rapides progrès. Quelques particuliers furent les premiers qui fondè- rent des jardins entièrement consacrés à la botanique, et ce fut en 1525 qu'Euricius Cordus, à Erfort, Nor- decius à Cassel, et Gaspard de Gabriel, à Padoue, don- nèrent cet exemple , qui fut bientôt suivi dans presque toute l’Europe. Conrad Gesner rassembla dans son jardin de Zurich toutes les plantes qu'il put se procurer dans ses voyages et ses correspondances avec les pays étran- gers. À peu près à la même époque , les Flamands fai- saient venir du Levant et des deux Indes les végétaux les plus intéressans ; et leurs jardins, renfermant un grand nombre de plantes curieuses et rares, cultivées avec un soin jusqu'alors inconnu, devinrent les plus riches qu'il y eût. Ils parvinrent à augmenter la beauté de certaines fleurs, au point de les faire beaucoup re- chercher par les amateurs des autres pays ; et, dès ce mo- ment, les produits de leurs cultures devinrent pour eux une branche considérable de commerce. C'est ainsi qu'ils obtinrent et perfectionnèrent les nombreuses va- riétés de la jacinthe venue d'Orient, de l’œillet, de l'oreille d’ours originaire des montagnes de la Suisse, des tulipes, etc., etc. À peu près vers cette époque, Rome possédait un jardin botanique confié, par les ré- collets auxquels il appartenait, aux soins de Palca et de Della Villa. On admirait, à Naples, celui de Jean Vincent Pinelli ; à Venise, celui du sénateur Jérôme Cor- 14 DES JARDINS. ner ; à Milan, celui de Scipion Simonetta; à Lucques, celui de Vincent de Monte-Cattino ; à Augsbourg, celui de Fugger; enfin, en France, celui de René du Bellay, évêque du Mans. Ce fut aussi dans ce temps-là que des princes fondè- rent les premiers jardins publics, entièrement consacrés à l’enseignement de la science. Côme de Médicis établit celui de Pise, en 1543, ainsi qu'une chaire d'histoire naturelle, qu'il fit remplir par Luce de Ghini , professeur de botanique à Bologne. Celui-ci envoya des voyageurs dans toutes les provinces de l'Italie pour se procurer les doubles des végétaux cultivés chez les amateurs. Le cé- lèbre André Césalpinluisuccédaen 1555, etfut le premier quicréaune méthode philosophique de classement pour le règne végétal ; 1l la fonda principalement sur la considé- ration du fruit, etnon sur la grandeur etles proprictés de la plante comme avaient fait tous ses devanciers. En 1587, Ferdinand I‘, dont nous avons parlé plus haut, envoya le naturaliste Joseph Benincasa, en Crète et dans d’autres parties du Levant, pour y recueillir des graines. Ce voyageur en rapporta une quantité de très-belles fleurs, qui ne tardèrent pas à se répandre en ltalie et ensuite dans toute l'Europe. En 1523 on établit une chaire de botanique à Padoue ; et en 1545, un jardin botanique dont Prosper Alpin fut le démonstrateur en 1593. La ville de Bologne en eut un en 1568 sous la direction d’Aldrovande. Déjà on professait depuis long -temps un cours de botanique à Florence, mais l'établissement de son jardin public n’a pas une date bien certaine. Tout ce que l’on sait de po- silif à cet égard, c'est qu'il fut entièrement négligé pendant fort long-temps , et que ce ne fut qu'en 1718 que, par un diplôme du grand-duc, sa direction fut accordée à la société de botanique de cette ville, qui bientôt en fit un établissement considérable, et Jui donna tout le lustre qu'il à encore aujourd'hui. Enfin DES JARDINS. 15 celui du Vatican fut établi environ dans le même temps que celui de Bologne (1). Les Hollandais suivirent bientôt l'exemple des Ttaliens, et l’université de Leyde eut un jardin botanique en 1573. Vingt-deux ans après on y construisit une serre tempé- rée. Les voyageurs les plus célébres s’'empressèrent à l'envie d'enrichir ce magnifique établissement; et les Benting, les Rheed, les Hermann y apportèrent les végétaux les plus intéressans des quatre parties du monde. Le catalogue de ce jardin, publié par Boerhaave, porte à six mille le nombre des plantes que l’on y cul- tuvait. L'Allemagne imita la Hollande et l'Italie. Leipsick eut un jardin botanique en 1580. En 1605, le célèbre botaniste Jungermann en obtint un pour l’université de Gressen, et en 1625 un autre pour celle d’Altorf, On construisit dix ans après une serre dans ce dernier, et il devint bientôt après le plus beau de l'Allemagne. En 1621, les villes de Rintlen, de Ratisbonne et d'Ulm eurent chacune le leur. Enfin l’université de Léna fonda le sien en 1629. Lorsque Henri IV eut pacifié la France, ce prince, extraordinaire autant par son goût et ses connaissances dans les sciences et la littérature que par sa bravoure et sa bonté, résolut de ne pas rester en arrière des autres peuples due les progrès que l’on faisait faire à la bota- nique. En 1597 il fonda le jardin de Montpellier, et celui de l'École de Médecine à Paris. Le premier devint célèbre parce que c’est là que se formèrent les Gessner, L'Écluse, Dalechamp, Lobel, les frères (1) Voyez pour ces dates contestées par quelques auteurs, 1° fasti gimn. patav. Patavii, 1757. — 2° Commentarium inserviturum historiæ Pisanivireti botanici academici. Pisis, 1577.—3° Storia della letter. ita- liana, du savant Tiraboschi.— 4° De hortis botanico-med. Germaniæ, et de origine et fatis horti acad. de Baïer. Enfin l'excellent ouvrage, déjà cité, de M. Deleuze. 16 DES JARDINS. Bauhin, etc. Mais, en 1626, Louis XIIT, en créant le Jardin botanique du Roi, appelé vulgairement , sans que nous sachions pourquoi , le Jardin des Plantes, à Paris, éclipsa tous les autres jardins de l’Europe. Nous ne donnerons pas ici l'historique de ce magni- fique établissement, illustré par les hommes célèbres qui l'ont dirigé et par les premiers savans de l’Europe qui l’habitent aujourd’hui.Seulementnousremarquerons que jamais ce jardin n’a été entièrement consacré à la bota- nique, même sous le rapport des végétaux. De tous temps il a été une très-bonne école d'agriculture et de naturalisation, et on lui doit une grande partie des plantes d'ornement qui sont dans les collections des amateurs et dans le commerce. Jusqu'en 1700, et peut- être même plus tard, il n'existait pas de jardiniers fleuris- tes qui fissent le commerce des plantes étrangères; aussi les directeurs de ces établissemens publics attachaient- ils beaucoup d'importance, non-seulement à se procurer une grande quantité d'espèces, mais encore à en mul- tiplier les variétés, même les plus légères. C’est ainsi qu'on y voyait de vastes espaces de terrain destinés à réunir des collections d'oreilles-d’ours, de tulipes, d'œillets, de renoncules, etc. Ce ne fut que lorsque les particuliers commencèrent à aimer et à pratiquer géné- ralement l’horticulture , que les jardins de botanique leur abandonnèrent ces brillantes monstruosités, pour s’en tenir au type dont on les avait obtenues à force d’art et de patience. Les autres nations de l'Europe n’eurent que plus tard de semblables établissemens, et encore en petit nombre. Les principaux sont ceux : de Messine , fondés en 1638 ; de Copenhague, en 1639; d’'Upsal, en 1657. Ce der- nier est surtout remarquable, parce que c’est là que l'immortel Linnée professa et réforma la botanique. Enfin on peut encore citer ceux : d'Amsterdam, établis en 1684; de Groningue, en 1641 ; de Chelsea, en 1722; DES JARDINS. 17 d'Oxford, en 1640; de Madrid, en 1953; de Coïmhre, en 1773. C'est dans celui d'Amsterdam que l’on a eultivé le premier pied de café apporté en Europe. Nicolas Witsen, fondateur et directeur de ce jardin, écrivit à Horn, directeur de la compagnie des Indes et résidant à Batavia, pour le prier de faire venir des graines d’Ara- bie, de les semer, et de lui envoyer les jeunes sujets ; ce que celui-ci s’empressa de faire. Ces précieux arbris- seaux se multiphièrent dans les serres chaudes d’Amster- dam, et bientôt M. Paneras, bourgmestre de la ville, put en envoyer un à Paris, en 1714. I fleurit et porta graine la même année, ce qui donna la facilité de le mulüplier. Dix ans après, M. Desclieux se chargea d’en transporter deux pieds dans nos colonies. Pendant la traversée l’eau vint à manquer, de manière que non- seulement on en refusa pour arroser les arbustes, mais encore on diminua beaucoup les rations de chaque pas- sager. Cet homme généreux, enflammé par l’idée du bien qu'il pouvait faire à son pays en lui conservant cette source, alors si faible, des immenses richesses que lAmé- rique en a tirées depuis, eut le courage de se priver de sa part d’eau pour en fournir à ces cafés. C’est de ces deux arbres que sont provenus tous ceux cultivés dans nos colonies. | Nous citerions un très-grand nombre de plantes utiles que l’on doit aux jardins botaniques dont nous avons parlé, si l’on pouvait mettre en problème les imménses services que ces établissemens ont rendus aux nations ; mais nous croyons que la chose est trop bien établie aujourd'hui, pour entrer dans de semblables détails, et nous nous bornerons à citer la pomme de terre, seule capable de remplacer la récolte des blés dans une année de disette : les mûriers, dont la feuille sert à nour- rir les vers à soie : le pêcher, l’abricoter, et une grande quantité de plantes céréales. à 2 18 DES JARDINS. Mais, pour utiliser autant quepossible ces institutions, il ne suflisait pas de charger des négocians et des marins de recueillir des végétaux dans les pays étrangers pour les apporter en Europe. Malgré toute la bonne volonté qu'ils pouvaient y mettre, leurs envois devaient être tou- jours insuflisans pour que l’on püt atteindre le but que l'on se proposait. N'ayant point ou peu de connaissances en histoire naturelle, ils ne pouvaient remarquer et re- cueillir que les plantes usuelles les plus communes dans chaque pays; et, à supposer même qu'ils eussent bien voulu dérober untemps précieux à leurs propres affaires, leurs recherches, dirigées au hasard, eussent été infruc- tueuses. On envoya donc sur tous les points de la terre des hommes instruits, pleins ‘de zèle pour la science et de dévouement pour la prospérité de leur patrie. Ils ne se contentèrent pas d'herboriser dans les jardins des Indes et de l'Afrique, comme devaient nécessairement le fure les premiers. Bravant avec courage les dangers de toutes espèces qui naïssaient sans cesse sous leurs pas, ils pénétrèrent dans les déserts les plus sauvages; ils surmontèrent les influences terribles des climats enflam- més, et trouvèrent des richesses végétales dans les lieux mêmes où les naturels ne Les avaient jamais soupconnées. Cependant une autre difficulté existait encore. Beau- coup de graines perdent leurs qualités germinatives si elles ne sont pas semées aussitôt leur maturité ; d’autres les perdent en moins de temps qu'il n’en faut pour faire la traversée de leur pays dans le nôtre; d’autres enfin dès qu’elles ont passé les tropiques. De Ïà il résultait qu'après de longs et périlleux voyages on avait le cha- erin d’en voir les produits réduits à très-peu de chose. En 1950, J. G. Loten, gouverneur de l’ile de Ceylan, fonda un jardin dans lequel il fit semer toutes les graines qu'il put se procurer dans l'Inde; et, lorsque les plans avaient atteint une certaine force, il les envoyait dans sa patrie. Par ce moyen on évila ce grave inconvément, DES JARDINS. 19 et l’on put se promettre de réunir un jour dans un seul jardin des échantillons de toutes les plantes connues sur la terre. La compagnie hollandaise en forma un au cap de Bonne-Espérance, à peu près vers la même époque, et pour le même but. 11 rendit d’abord de grands ser- vices; mais depuis il a été très-négligé, et aujourd’hui il est à peu près réduit à rien. On sentit les avantages nombreux résultant de ces établissemens ; aussi vers la fin du dernier siècle et au commencement de celui-ci , on s’empressa de les imiter dans la plus grande par Lie des colonies appartenant aux Européens. C’est ainsi que l'on vit en tres-peu de temps des jardins de botanique, ou plutôt d’entrepôt, se former : 1° à Ténériffe, par les ordres du roi d'Espagne ; 2° à Calcuta ; 3° à la Jamaïque ; 4° à Cayenne; 5° à New-Yorck et à Charles-Town; Ge à Mexico , etc. , etc. Il est résulté de tout ceci, que le goût de la botanique est venu se mêler à celui que l'on avait simplement pour les fleurs, et que l’agriculture a considérablement gagné à ce mélange. On veut aujourd'hui posséder des flé UrS agréables par la beauté de leurs corolles, des plantes recommandables par leur utilité dans l’économie do- mestique ou dans les arts, et enfin des collections purement de botanique. Aussi l’horticulture est - elle devenue un art d'autant plus difficile qu'il embrasse le règne végétal tout entier. Outre cela, on veut que ces collections offrent encore un autre agrément tout-à-fait indépendantde la science, celui d’être présentées comme un objet d'ornement et de luxe. Il ne suflit pas d’avoir dans son parc les arbres et les arbustes les plus rares de l'Amérique, dans son jardin les plus belles fleurs des Indes et de l’Afrique, dans son potager les végétaux servant à la nourriture de l’homme dans toutes qe par- ties de la terre ; il faut encore qu'ils se montrent aux yeux dans la place quileurest la plus avantageuse pour produire de l'effet. Enfin l’on veut avoir de riches co!- 20 DES JARDINS. lections et des jardins agréables. On a parfaitement réussi quant au premier point ; mais, Si On Compare nos jardins, sous le rapport de l'agrément , aux brillantes descriptions que les auteurs nous ont laissées sur ceux des anciens peuples, je crois que, loin de l'emporter sur eux, nous leur devenons de jour en jour inférieurs ; grâce à la manie des petites fabriques, des jardins paysa- gers et anglais, et au mauvais goût qu’ils entrainent le plus souvent avec eux. Ce qu'il y a de fortsingulier à présent, c’est qu'à force de chercher pour trouver la perfection de l'art dans la formation des jardins, nous en sommes à ne plus nous entendre, même sur la simple signification de ce mot. Un jardin n'est plus aujourd’hui un enclos d’une éten- due déterminée, consacré entièrement à la petite cul- ture; mais bien une portion ‘de domaine où même un domaine tout entier, si l'on a cherché à y réunir l’a- gréable à lutile dans les mêmes proportions. Un clos renfermant des terres en culture et un potager peut n'être pas un jardin , tandis qu'une immense propriété, renfermant des bois, des prés, des terres et des vignes, est considérée comme tel, si l’art s’est employé à em- bellir les sites et les points de vue. Nous avons cru devoir donner cette explication à nos lecteurs, pour les mettre dans le cas de nous comprendre parfaitement dans l'analyse des différens systèmes des auteurs, s'ils ne leur sont déjà familiers. SECTION II. DIVISION DES JARDINS. Personne ne peut mettre en doute les progrès 1m- menses que l’horticulture et même l'agriculture en gé- néral ont fait depuis un siècle, et à plus forte raison depuis l'antiquité ; mais , si l’on envisage seulement lart DES JARDINS. 21 de créer des jardins agréables, ces progrès deviendront peut-être plus sujets à discussion , comme nous croyons l'avoir établi précédemment. Quoi qu'il en soit, si les anciens possédaient des jardins plus riches, plus magni- fiques que les nôtres, en récompense nousavons de plus qu'eux des théories brillantes , et notre amour-propre se console aisément en réfléchissant que, si les Romains, par exemple, avaient sur nous une supériorité maté- rielle , ils la devaient à des richesses immenses qui leur permettaient de mettre en pratique ce qui, pour nous, est resté en spéculation. Parmi le grand nombre d'auteurs qui ont traité de: l'art des jardins, quelques-uns seulement ont établi des règles et des divisions praticables : c’est de ceux-là que nous nous occuperons plus spécialement. Lesautres s’a- bandonnant aux agréables prestiges d’une imagination toute poétique, nous ont donné des images charman- tes, des descriptions séduisantes, mais qui s'évaporent comme de brillantes illusions dès que la froide raison, la règle et le compas à la main, s’avance pour les mettre en pratique (r). (1) Nous n'avons pas cru devoirnousoccuper ici des anciens auteurs, parce qu’ils ont plutôt donné des descriptions de jardins que des règles pour en établir. Cependant on pourrait en excepter Pierre de CrescEnr, sénateur bolonaïs, qui, en 1300, publia un ouvrage sur l’agriculture, où un livresetrouve consacré à la culture des jardins d'agrément. Ilen- seigne lesmoyensde les construire et de les orner, et les partage en trois classes : 1° ceux des personnes peu riches; 2°ceux des riches; 3° ceux des princes et des rois. Ces derniers, dit-il, doivent renfermer une ména- gerie d'animaux paisibles, des volières d’oiseaux dont lechant mélodieux fasse retentir les berceaux d’arbres et de vigne ; ils doivent ètre décores de gazons, d’herbes aromatiques et de fleurs. Mais Crescent, dans la liste de ses fleurs, ne mentionne que la rue, la sauge, le basilic, la marjolaine , la menthe, la violette, le lis, la rose, et l'iris. Si le lecteur était curieux d'approfondir la science des jardins de l'antiquité et du moyen Âge , voici Les auteurs qu'il pourrait consulter : 3° Pranx. Il a consacré trois livres de son'histoire naturelle aux jardins et aux fleurs; 2° le Poëme des jardins de Cozuwezce; 3° celui du père 22 DES JARDINS. Tous ont divisé et sous-divisé les jardins en sections, classes et genres, auxquels ils assignent des caractères qu'ils croient exclusifs. Avant de donner notre opinion propre sur cette matière, nous allons rapidement, ana- Jyser leurs différens systèmes, en les placant dans l'ordre de l'importance qué nous leur accordons. En 1820, M. Gagrier Tuouix publia ses Plans rai- sonnés de toutes les espèces de jardins. Il les divise en us sections principales , en raison de leurs divers usages. 1° Les économiques où légumiers (marais et be ; 2° le fruitier ou verger ; 3° les jardins de botanique ; 4° les jardins © agrément ou de plaisance. Les jardins composant ces quatre sections sont eux- mêmes sous-divisés en trois séries, savoir : 1° « Les jardins symétriques, à la composition desquels procè- dent la règle et le compas, et que l'on exécute au moyen de la toise, des jalons et du cordeau ; 2° les jardins chi- nois, sets ou de genre irrégulier, qui n’ont pour prin- cipes que le caprice ou la fantaisie de leurs constructeurs et les facultés de leurs propriétaires ; 3° les jardins des paysages , paysagistes, paysagers ou de la nature (noms que l’on donne dans les divers ouvrages qui en traitent spécialement ). » « Les jardins symétriques, dit-il, n’admettent dans leur composition que des formes régulières et des sur- faces plus ou moins planes dans leurs parties où même Ram, et particuliérement l'excellente dissertation qu’il y a jointe: De universd culturæ hortensis Disciplind, dgnslaquelle il compare les jardins des Grecs et des Romains aux jardins modernes; Vaxièrr, Præ- dium rusticum ; 4° Car. Srrrxanvs, De lie hortensi ; 5° GEsxer , Horti Germanie ; 6° LoBEz DE L’ÉCLusE , Histoire des plantes et de neglect& plantarum Culturé ; 7° Hazrer, Bibl. bot.; 8° Brron, Remontrances d'agriculture; g° Cawerarius, Hortus medicus et philosophicus ; 10° Ror- rixc, De V'egetabilibus; 11° Bauer, De Hortis botanico-med. Germaniæ, et Fa Origine et Fatis hortiacad. ; 12° Bocacr, Decamerone; 13° Dopozns, forum et coronarium arborum Historiaz et enfin les auteurs cités dans le chapitre précédent et dans la suite dé celui-ci. DES JARDINS. 23 dans leur ensemble. Tels sont les jardins du Palais- Royal, du Luxembourg, des Tuileries, de Versailles. L'architecte Lenôtre, au commencement du siècle der- nier, a fourni les plus beaux modèles en ce genre. » « Les jardins de la deuxième série offrent, dans un espace très-rétréci , toutes sortes de formes fantasti- ques, en même temps que les diverses productions des arts et les fabriques de toute espèce, amoncelées sans nécessité comme sans rapport entre elles. Tels étaient les jardins de Mouceaux et de Chavilles ; tels sont encore une grande partie de ceux qui ont été exécutés, à Paris, dans les temps modernes. » « Enfin le caractère de la troisième et dernière série des jardins d'agrément, est d'imiter les plus belles scènes de la nature, en faisant disparaître l’art qui à servi à les établir. Ceux d'Ermenonville, de Guiscard, de Méréville, de Trianon, de Jambevile, de Moulin Joli, construits par Watelet, Girardin, Morel, ete., offraient ou présentent encore de beaux exemples de cette série de jardins chantés avec tant de grâces par Delille. » M. Thouin ajoute que ceux-ci ne doivent pas être confondus avec les jardins qu’on nomme communément anglais ou chinois, puisque c’est la nature qui a fourni leurs modèles , et que les principes d’après lesquels ils sont établis ont été posés en France, dès le commen- cement du siècle dernier, par Dufreny. Jusque-là la distribution de M. Thouin est méthodi- que et parfaitement raisonnée ; mais voyons si cet esti- mable auteur n’a pas voulu trop sacrifier aux préjugés établis par ses devanciers, lorsqu'il traite des genres que présente le jardin paysager. « Cette série des jardins paysagistes de la nature , dit-il, offre cinq sections différentes, qui comprennent les jardins campêtres, sylvestres, pastoraux, ro- mantiques , et les pares ou carrières. Ces noms leur 21 DES JARDINS. ont été donnés en raison des caractères qui les distin- guent dans leur ensemble, et dont nous tracerons ici une légère esquisse. » « Un sol plane ou peu tourmenté, des prairies , des terres labourables, des cultures économiques, des ver- gers agrestes, des bouquets de bois, des masses fleu- ries, une culture soignée, des eaux vives, des fabriques agricoles et des vues ménagées sur tout le pays environ nant avec lequel ils paraissent se confondre, constituent les jardins du style champôütre. » « On donne le nom de sylvestres à ceux dont le sol âpre et tourmenté présente des rochers, deschutes d’eau, des forêts d'arbres estivaux et résineux, des clairières tapissées de gazon et émaillées de fleurs des diverses sai- sons ; des fabriques appropriées au site, des chaumières agrestes de bücherons et decharbonniers augmentent les caractères distinctifs des jardins de cette section. » « Ceux de la troisième, ou du style pastoral , exi- gent des terrains unis ou un peu concaves, traversés par des eaux vives, formant des ruisseaux , de petites riviè- res, des lacs bordés de pelouses, de prairies, d’oseraies , de saules, de bouquets d'arbres aquatiques variés par leur port et leur hauteur, des ponts, des moulins, des bestiaux de plusieurs espèces, des cabanes rustiques propres aux animaux qui animent la scène, et aux Bommes qui les gouvernent. » « On appelle jardins romantiques ceux dont le sol, très-varié dans son plan, ainsi que dans ses élévations et ses contours, présente des pièces de gazon, des tapis de fleurs, des masses d’arbustes, des bouquets d'arbres d'agrément de toutes les saisons, des bois dans leurs différens âges, des futaies , des eaux dans les divers états dans lesquels on les rencontre dans la nature. Ces jardins admettent pour ornement , des vases, des sta- tues, des colonnes , de grottes, des ruines, des tom- beaux et des temples. » DES JARDINS. 25 Dans l’énumération des caractères qui constituent les jardins paysagers, M. Thouin s'étend beaucoup : nous n'en donnerons que l'analyse. Ce genre nécessite les plus grandes dimensions dans son ensemble ; il comprend souvent un pays entier. Il admet tout ce qui distingue les quatre précédens, tous les genres de culture et de bâtimens , les eaux sous toutes les formes, toutes Îles usines, fabriques, les animaux domestiques et sau- vages, toutes les serres propres à la conservation des végétaux exotiques. Mais il faut que chaque scène, encadrée dans ses limites, n'oflre ni contradiction, ni contrastes choquans ; il faut qu’elle soit liée aux autres par des transitions ménagées avec art, de manière à inspirer et soutenir l'intérêt. Ces compositions doivent rassembler les sites les plus gracieux et les plus surpre- nans, et emprunter aux arts mécaniques, à l’architec- ture, la peinture, la sculpture, ce qu'ils offrent de plus approprié aux différentes scènes et de plus séduisant. Quoique nous ne soyons pas toujours du même avis que M. Thouin, surtout quand il s’agit de ses dernières divisions, la justice nous oblige à dire que les deux pages dont nous venons de faire l'analyse donnent plus de préceptes vrais, clairs et faciles à mettre en prati- que, que tous les autres ouvrages qui sont tombés entre nos mains. Nous croyons faire plaisir à nos lecteurs en mettant sous leurs yeux le tableau résumé de ses genres, sections et sortes de jardins. | IL DIVISE LES JARDINS EN: De légumes rusti- ques. A couches, clo- ches ou châssis. MARAIS. Privés ou ordinai ÉCONOMIQUES OU LÉGUMIERS. res. Des grands jar- POTAGERS. . : dins, avec serres à primeurs, bâ ches à ananas, orangeries. 26 DES JARDINS. AGRESTES. Ea lignes. : { En quinconce. En quenouiltes. En vases ou buis- SOUMIS À LA TAILLE+ { SOnS. En éventails ou espaliers. FRUITIERS OU VERGERS. MEDICINAUX. « « » nue contenant BOTANIQUE. « . . une série de D'INSTRUCTION. + AdrTSA Pour la naturali- sation. = Pharmaceutiques. De ville. Public. De palais. Chinois. Anglais. Fantastiques. Champètres. Sylvestres. DE LA NATURE. . . 4 Pa:oraux. Romantiques. Parcs ou carrières. SYMÉTRIQUES. : DE GENRE. «… . PLAISANCE. OU D'AGRÉMENT. . En 1824, M. Parcy, dans un bon ouvrage sur le jardinage (1), a donné des conseils assez judicieux sur la manière de tirer parti avantageusement des différens sites qui donnent aux jardins d'agrément les caractères propres à chaque genre. Mais après avoir divisé en Jar- -dins utiles, renfermant le potager et le fruitier, et jar- dins d'agrément, il entre, à propos de ceux-ci, dans dés sous- ue tout aussi arbitraires que celles de ses devanciers, et beaucoup moins méthodiques. « Nous divisons, dit-il, les jardins d'agrément d’après l'étendue qu'ils comportent, en jardins fleuristes et en jardins paysagers. » « Le jardin fleuriste ou d'agrément proprement dit, est celui dans lequel la rareté et la beauté des végétaux qu'on y cultive, la variété et la recherche dans la dis- (1) Manuel théorique et pratique du jardinier. DES JARDINS. 27 position de ces végétaux, suppléent au peu d’étendue que ce Jardin comporte. » ï M. Bailly intitule ensuite un chapitre Il, du jar- din paysager et naturel, puis, sans en donner nulle raison , il place en tête de ce chapitre. 1° Le jardin sy- métrique où français , « qui se distingue , dit-il, par son ordonnance régulière et jamais conforme à la nature : c’est l’art seul qui en fait les frais, et il se montre de tous côtés à découvert. De vastes allées droites, coupant des carrés on des massifs, formant des quinconces ou des étoiles, des bosquets, des palissades, des arbres taillés régulièrement sous diverses formes, des terras- ses, des statues , des bassins toujours de forme régulière, le plus souvent entourés de marbre et ornés de jets d’eau , telles sont les parties dont se composent ces jar- dins. » 2° Le jardin italien, dont le caractère le plus distinc- tif, «est la prodigieuse quantité de monumens et de bâtimens de toute espèce qui y sont disséminés. Gra- dins, théâtres, cirques , amphithéâtres, bains, temples, monumens, statues antiques , y sont accumulés souvent avec profusion. » 3° Le jardin chinois , que-cet auteur regarde « comme le type des jardins naturels et en même temps comme le plus haut degré de perfection auquel ils puissent at- teindre. » Îl en fait une assez longue description extraite de Chambers, et que nous donnerons aussi plus loin, lorsque nous parlerons de cet architecte anglais. 4° Enfin les jardins naturels ou paysagers, dits an- glais, d'ornement, de plaisance, modernes , pitto- resques , qui, selon lui, ne sont que des jardins chi- nois, mais qui ne sont pas arrivés à leur plus haut point de perfection, et se bornent à profiter habilement de la disposition du sol, desaceidens du terrain, ainsi que des scènes que peuvent faire naître les plantations et les ac- cessoires d’un jardin. 28 DES JARDINS. En 1806, Morer publia une seconde édition de sa Théorie des Jardins, qu'il avait donnée au public en 1776. Dans cet ouvrage, plus poëtique qu'élémen- taire, plus plein de phrases que de principes, l’auteur ne s'occupe que des jardins de la zature ou paysagers et les divise en quatre genres. 1° Le parc; °° le jardin proprement dit; 3° le pays ; 4° la ferme. Le parc à pour caractères la noblesse et la grandeur. Il lui faut un loeal étendu, divers tableaux et plusieurs scènes ; il admet de vastes pelouses, de grandes masses de bois, des eaux en grands volumes, ses tableaux veu- lent être largement dessinés ; les eflets en doivent être grands et nobles. Le jardin proprement dit demande de la grâce et de l'élégance. « Plus ressérré dans ses limites et plus ré- servé dans ses effets, il se distingue par l'élégance, la fraicheur et la propreté ; il se prête aux détails; il se contente d’un petit nombre de scènes, mais il les veut voluptueuses et riantes. IL fuit les grands contrastes , les perspectives négligées, âpres ou sauvages, etc. » « Le pays s'approprie le pittoresque et la variété. I admet toutes les scènes de la nature, quel qu’en soit le caractère ; 1l ne connait de limites que celles que pose la nature elle-même; il s'empare de tout ce que l'œil peut embrasser ; il n’a pas de point principal qui soit le centre de la composition et auquel elle se rapporte. Le manoir même du propriétaire n’est qu'un accident dans l'ensemble. Les aspects riants, les tableaux sombres, le cultivé, le sauvage, les scènes les plus vastes, les eflets les plus hardis, les perspectives les plus pittoresques, sont de son ressort, etc. ». « La ferme, dont le principal objet est l'économie et l'utilité, s’annoncera par son air champêtre et négligé. Sans prétention, sans art apparent, sans orneinens af- fectés, la ferme , ainsi que la naïve bergère quu lha- bite, tire son plus grand charme de sa simplicité. Ge DES JARDINS. 29 genre de jardin admet plusieurs espèces; il recoit son caractère de celui de ses cultures et du site sur lequel il est assis ; ses scènes , animées par le travail et le mouvement, enrichies par la variété des productions, peuvent êlre quelquefois rustiques mais jamais sau- vages, elc. » Dans son dernier chapitre, Morel semblerait recon- naître que le jardin paysager pourrait encore avoir d’au- tres caractères que les quatre qu'il lui assigne; et qu’on diviserait en poëtique, romanesque , pastoral et imi- tatif. « Dans le jardin poëtique, dit-il, on se propose de mettre en action quelques événemens des temps hé- roïques, quelques mystères du paganisme ; c’est dans la mythologie, dans les fables anciennes qu'on va chercher les sujets; mais pour réaliser ces fictions qui n’ont point de modèles dans la réalité, pour leur don- ner de l'existence, l'artiste s’en fait, d’après son imagi- nation, un tableau à son gré; en conséquence il se fi- gure des sites analogues aux scènes qu'il prétend repré- senter; 1l transporte le spectateur au loin et dans les siècles reculés; il envoie en Éoypte, en Grèce, dans l’ancienne Rome ; pour produire cette illusion, 1l élève des temples, des gymnases ; il plante des bois sacrés ; il les peuple de divinités. » « Le romanesque est une autre espèce de jardin qui a pour objet de réaliser tout ce qu'il est possible à l’ima- gination d'enfanter.… Dans Pimmensité de sujets qu'il a le pouvoir d’embrasser, il comprend non-seulement les événemens les plus extraordinaires, mais les enchante- mens, les rêves de la féerie, les prodiges dela magie. I faudra pour de tels jardins trouver des sites singuliers, dont le caractère se prête à la scène, des déserts, des antres, des cavernes souterraines, de vieux donjons asiles des follets; de brillans palais, séjour des fées ; enfin il faudra des sites qu'on ne voit nulle part, et qu'on ne rencontre Jamais. » 30 DES JARDINS. « Le jardin pastoral paraît au premier coup d'œil tenir de plus près que les autres à celui de la nature, puis- qu'il ne suppose que des scènes champêtres ; il a pour objet de rappeler ces temps où les hommes, ne connais - sant d'occupation que celle de la garde de leurs trou- peaux, n'ayant d'asile que les champs, vivaient dis- persés dans les campagnes sous d’heureux climats. Quoique la scène soit un site champêtre , elle ne saurait peindre le genre pastoral si elle n’est peupléede bergers, de bergères et de troupeaux; ce sont eux qui la carac- iérisent : sans eux le site Le plus champêtre, d’après les idées qu’on s’est formées de ce genre, n'aurait rien de pas- toral. Il faut donc avoir recours aux statues et faire in- tervenir des acteurs. » , (Le genre ämitatif est restreint aux imitations des sites étrangers aux nôtres. Quelques artistes et quelques amateurs ont imaginé de transporter sur leur terrain les accidens et les bâtimens des pays éloignés. Veulent-ils supposer le spectateur en Égypte, en Turquie, ils élè- vent des pyramides; s'ils font un lac, c’est le lac Moœris ; s'ils ont une rivière, elle sera, comme le Nil, séparée en trois branches, et formera le Delta : ils la voudraient peupler de crocodiles, d'hippopotames. Veulentls trans- porter le promeneur à la Chine, ils construisent des tours de porcelaines, des kiosques, des pagodes; les ponts, les barques, les barrières sont soumis aux formes chinoises. » Rendons justice à Morel; s'il cite ces quatre derniers genres, c’est plutôt pour en faire la critique que pour les recommander. S'il se fût moins livré à la métaphy- sique de son art; si, au lieu d'écrire en poëte, il eût serré son style et se fût particulièrement appliqué à donner cles règles claires, faciles dans l’application, son livre , moins volumineux, serait le meilleur que l’on eût fait sur cette matière. WareLer, assez bon peintre , membre de l’Académie ' DES JARDINS. 31 francaise, auteur d’un dictionnaire de peinture très- estimé, a publié une petite brochure sous le titre d'Essai sur les Jardins. Il divise les jardins d'agrément en ferme ornée, dont il fait un tableau riant et gracieux, mais dans lequel il oublie complètement ce qui constitue par-dessus tout le genre, c'est-à-dire, les cultures. Il assigne à la ferme ornée deux caractères différens, le champétre et le . pastoral. Viennent ensuite le parc ancien et le parc moderne. Le premier est formé des jardins symétriques, tels que les Kent et les Lenôtre les ont dessinés; le second n’est rien autre chose que ce que l’on appelle jardin anglais. À ce dernier s’appliquent les trois caractères qu’il nomme poétique , romanesque et pittoresque; puis il subdivise le pittoresque en noble, rustique, agréable, sérieux, triste, magnifique, terrible, voluptueux. Il décrit ensuite ce qu'il appelle les jardins de plai- sance, puis les jardins chinois. Watelet, en écrivant cet ouvrage charmant , s'est montré peintre, poëte, et plus encore philosophe, mais pas du tout jardinier. Il manque à ses tableaux de genres, pleinsde fraicheur et de coloris , d'observations fines et piquantes sur le cœur humain, surles douceurs de la vie champêtre; il leur man- que un point essentiel : c’est d'être définis d’une manière assez rigoureuse pour être compris, et, dans le cas en- core où ils le seraient, de pouvoir être mis en pratique. Les Anglais comptent comme nous plusieurs auteurs qui ont écrit sur l’art des jardins et sur leur distribution en genres et en espèces. Warpore, dans son Essai sur l'art des Jardins modernes (1), après avoir épanché sa bile sur les jardins symétriques qu'il déteste, divise le jardin paysager en jardin-parc, ferme ornée, et forét ou jardin agreste. I ne définit pas les trois genres, (1) An Essay on the Art of modern gardens. 33 DES JARDINS. mais il cite leurs inventeurs, et donne un exemple de chacun. Kent, dit-il, est l'inventeur du premier, dont il cite les jardins de Kinsington pour exemple; Philip Southcote a créé le second à Woburn, et le troisième sur la côte de Pains hill. Du reste l'ouvrage de cet Anglais est fort intéressant, parce qu'il est écrit par un homme qui connaissait par- faitement l'antiquité, et qui tire parti de ses connais- sances, si ce n'est en jardinier, au moins en historien agréable et piquant. Warezy a publié à Londres un des meilleurs ouvrages que l’on ait écrit sur cette malière (1), quoique ses sous- divisions soient établies sur des caractères peut-être en- core plus fugitifs qu'aucuns de ceux dont nous avons déjà parlé. I divise les jardins en quatre genres, qui sont : la ferme, le jardin, le parc, la carrière, aux- quels il assigne à peu près les mêmes caractères que Morel, à cette diflérence près que sa carrière, dont Morel ne fait qu'une dépendance du parc, est, chez l'Anglais, ce que le premier appelle le pays. Les pre- miers agrémens de la carrière sont, comme on peut facilement le deviner, les rochers ; mais il leur assigne des caractères assez difliciles à comprendre ; ils doivent être majestueux , terribles où merveilleux. Quant au parc, les eaux en augmenteront beaucoup le mérite, qu'elles aient le caractère tranquille, murmurant , mugissant, etc. Le jardin ne peut être réellement agréable qu’autant qu'il aura un de ces trois caractères : emblématique, imitatif où original. Cuamsers , architecte anglais, plus homme de lettres que jardinier, a donné au publie une dissertation sur les jardins de l'Orient (2), dans laquelle il prescrit des règles fort amusantes, mais qui certes ne sont pas des (1) The Art of modern gardens. . Le, (a) Dissertation on the orient's gardening. DES JARDINS. 33 règles de bon goût. En lisant son ouvrage original, on ne sait si l’on doit plus s'étonner du dérèglement d'ima- gination de l’auteur, que de la hardiesse avec laquelle il donne pour des réalités un roman évidemment de son invention. Il ne connait que trois espèces de jardins: r° Le symé- trique, qu'il ne peut supporter ; 2° le jardin anglais, qu'il trouve trop simple « par la raison, dit-il, qu'il est abandonné aux jardiniers- potagers, fort experts sans doute dans la culture des salades, mais trop peu versés dans les principes du jardinage de décoration ; » 3° Le jardin chinois, devant lequel il s’extasie, sans doute « parce que les jardiniers de ce pays sont non-seulement botanistes, mais encore peintres et philosophes; ils ont une connaissance profonde du cœur humain et des arts par lesquels on excite ses plus vives sensations. » 11 décrit trois genres de jardins chinois, l’agréable , le terrible, et le surprenant , tous plus ridicules les uns que les autres. Nous sommes assurés d’amuser le lec- teur en Jui donnant un échantillon de son genre terrible, extrait du 7'raité de la composition et de l’ornement des jardins, par M. Boitard. «Ii se compose, dit Chambers, de sombres forêts, « de vallées profondes, inaccessibles aux rayons du so- « leil; de rochers arides prêts à s’écrouler; de noires « cavernes, et de cataractes impétueuses qui se précipi- « tent de toutes les parties des montagnes. Les arbres « ont une forme hideuse; on les a forcés de quitter leur « direction naturelle, et ils paraissent déchirés par l'effort « des tempêtes; les uns sont renversés : ils arrêtent le « cours des torrens; vous voyez que les autres ont été « noircis et fracassés par la foudre. Les bâtimens sont en «ruines, où à demi consumés par le feu, ou emportés « par la fureur des eaux. Rien d’entier ne subsiste, sinon « quelques chétives cabanes dispersées dans les mont2- « gnes, qui ne vous apprennent l'existence des habitans, 1. 3 O2 4 DES JARDINS. « que pour vous montrer leur misère. Les chauve-souris, «les vautours , et tous les oiseaux de rapine, voltigent « dans les halliers. Les loups, lestigres, les jackals hur- « lent dans les forêts ; des animaux affamés sont errans « dans Les plaines; du milieu des routes on voit des gibets, « des croix, des roues, et tout l'appareil de la torture : «et dans les plus affreux enfoncemens des bois , où les « chemins sont raboteux et couverts d'herbes nuisibles, « où chaque objet porte les marques de la dépopulation , « vous trouverez des temples dédiés à la vengeance et à « la mort ; des cavernes profondes dans les rochers ; des « descentes qui, à travers les broussailles et les ronces , « conduisent à des habitations souterraines. Près de là « sont placés des piliers de pierre, avec les tristes des- « criptions d’événemens tragiques , et l'horrible récit des « cruautés sans nombre commises dans ces lieux mêmes « par les proscrits et les brigands des anciens temps ; et, « pour ajouter à la sublime horreur de ces tableaux, des « cavités pratiquées au sommet des plus hautes monta- « gnes, recèlent quelquefois des fonderies, des fours à « chaux, et des verreries , d’où s’élancent d'immenses « tourbillons de flammes et des flots continuels d'une « épaisse fumée , qui donnent à ces montagnes l'appa- «rence de volcans. » Mais ce qu'il y a de plus singulier dans tout cela, c’est que Bailly , dont nous avons parlé plus haut, cite Cham- bers avec éloge, et donne ses descriptions comme des modèles à imiter. Nous allons à présent chercher la raison qui fait que sur tant d'auteurs il n’en existe pas deux qui aient été d'accord, surtout lorsqu'il s'agissait des jardins d’agré- ment, et particulièrement des jardins paysagers. Peut- être cette recherche nous conduira-t-elle à découvrir la vérité dans les principes de Part. | La nature a créé des sites de différens caractères, qui produisent sur nous des sensations différentes, mais DES JARDINS. 35 toutes agréables. Chaque point Ge vue, chaque scène font naître dans lé cœur une émotion; mais, comme ces scènes sont infiniment variées, les émotionsle sont aussi. Outre cela, les hommes ne sentent pas de la même ma- nière , parce que les sensations sont loujours soumises À une organisation particulière , à éducation et à l'habi- tude. Par exemple, un Parisien, peu accoutumé aux beautés sauvages de la nature, trouvera très-pittoresques cinq ou six arbres maigres et chétifs , couvrant à peine de leur ombre un berceau de lilas et de syringas ; 1} n’en faudra pas plus pour faire éclore dans son âme les mêmes sensations que le campagnard éprouve à la vue d’une côte agreste couverte d'arbres majestueux et de retraites charmantes, impénétrables aux rayons du soleil ; voilà lhabitude. Qu'un homme instruit et bien élevé se pro- mène avec son voisin sans Connaissances n1 éducation : la vue d’un peuplier , d’un chêne où d’an laurier, rappel- lera au premier les travaux d’Hercule, la couronne civique d'un citoyen de l’antique Rome , ou les malheurs de Daphné ; l’enthousiasme s’emparera de son esprit, et le paysage s’'embellira à ses yeux de ces nobles et grands souvenirs. Le voisin, au contraire, calculera le nombre de planches que lui fournira le tronc du peuplier, la quan- tité d'écorce que le tanneur retirera du chêne, et peut- être dérobera-t-11 quelques feuilles du laurier pour les porter à sa cuisinière; voilà l'éducation. Deux jeunes gens, l’un fort, robuste, vigoureusement organisé, l'autre faible, cacochyme , d’une complexion débile , partent ensemble pour visiter la Suisse. Les voilà arrivés près des glaciers aussi anciens que le monde ; là il faut abandonner et voiture et chevaux, il faut gravir à pieds les montagnes rudes et escarpées. À la vue de ces rocs taillés à pic et s’élevant jusque dans les nues ; en enten- dant le plaintif murmure des vents agitant la cime des noires forêts de sapins ; en traversant , sur un frêle pont de corde et de fagots , les profonds abimes au fond des- 36 DES JARDINS. quels se précipitent en mugissant les ondes écumantes d’un torrent, le premier sera saisi d’admiration , son es- prit s'échauffera d’un sublime enthousiasme ; et, devenu poëte ou peintre par inspiration , il retracera sur la toile ou le papier les scènes terribles ou majestueuses qui rem- plissent son âme; le second, effrayé, fatigué, découragé, abandonnera son compagnon et reviendra en poste ad- mirer , beaucoup plus commodément , les grands acci- dens de la nature sur les décorations de l'Opéra : voilà les résultats de l’organisation. Les mêmes objets peuvent donc faire naître dans les hommes des sentimens tout-à-fait différens. Ceci reconnu, il nous est on ne peut plus facile d'expliquer la grande dissidence d'opinion qui existe chez les auteurs qui ont voulu caractériser exclusivement chaque genre de jar- dins. Tous ont pris leurs sensations particulières pour des sensations générales et communes à tous Les hommes ; ils ont étudié le nombre de ces sensations, les causes qui les ont produites; et, partant de ce faux principe, ils ont déterminé selon leur calcul le nombre des genres , et, selon les causes de sensations, ils ont établi des prin- cipes pour les reproduire. En un mot leurs erreurs vien- nent de ce qu'ils ont pris des émotions pour des règles : de là sont nés leurs genres fantastique, merveilleux, romanesque , Sylvestre, emblématique , etc., etc. Il résulte de tout ce que nous venons de dire que nous rejetons, comme impraticables, une grande partie des genres établis par nos devanciers; et nous rejetons sur- tout ce prétendu principe par lequel ils font aux artistes une obligation de renfermer les cadres de leurs jardins dans la même unité d'action et de caractère qui enchaîne un poëte dramatique, où un auteur romancier. Nous croyons que tout l’art des jardins consiste dans l’art de plaire , et que l'on aura aileint son but quand on aura produit des scènes agréables à tous, et intéressantes pour le plus grand nombre. DES JARDINS. 37 Nous avons visité, et en homme intéressé à tout voir et à bien voir, les jardins les plus fameux de la France , de l'Angleterre, de l'Écosse et de l'Allemagne ; nous pouvons assurer que nous y avons vu toujours des choses agréables et souvent même admirables, quoique nous n'ayons jamais pu exclusivement assigner à aucun les ca- ractères qui constituent la ferme, la carrière, le parc, Fe pays, ni même le pastoral , le romantique, etc. Nous croyons fermement que l’on peut faire un jardin enchanteur en réunissant dans une enceinte convenable toutes les scènes dont les auteurs ont fait leurs genres exclusifs, pourvu néanmoins que les transitions , pour passer de l’une à l’autre , ne soient pas trop brusques, et qu'elles aient été ménagées avec art ; pourvu que le goût ait présidé à leurs compositions et que l'artiste ait scru- puleusement observé toutes les convenances locales. Nous allons donner le tableau de nos divisions ; puis nous enseignerons à notre tour les principes qui doivent guider le jardinier ou l’architecte dans la formation de chacun de nos jardins. LES JARDINS SE DIVISENT EN: Marais. * *UDe primeur. Avec verger. Sans verger. POTAGERSe « » . POTAGERS-FRUITIERS, { JARDINS D’UTILITÉ.{ FRUITIERS. . . . pt erger. PHARMACEUTIQUES D'étude. A .. u D’usage. D’ctude. RER {De naturalisation. (Ro te MALRES-(; e je)» 001 lampe Potager-orné. | Public. SYMETRIQUES, . . « Privés Area De palais. , z De ville. D AGREMENT. . . . Naturel. PAYSAGERS, © + « + Orné 38 DES JARDINS. Nos divisions , comme on voit, n’ont aucune préten- tion à l'innovation; nous les avons établies, non pas comme des théories lumineuses , enfans caressés d'une féconde imagination, mais comme le résultat de ce qui. a été pratiqué jusqu’à ce jour. On ne verra pas figurer dans notre tableau les jardins fantastique, énigmati- que, merveilleux des auteurs; mais on pourra facile- ment y rapporter tous les genres de jardins qui existent sur le terrain. $ I. Des Jardins d'utilité. Nous donnons cette épithète à tous les jardins consa- crés uniquement à la culture des végétaux alimentaires, ou employés dans les arts et dans la médecine, ou enfin à ceux destinés à réunir des collections propres à fa- ciliter l'étude de la botanique, ou à tenter la naturalisa- tion des plantes exotiques. Les jardins d'utilité convien- nent particulièrement aux environs des grandes villes qui favorisent leur exploitation. 1°. Le jardin potager est celui dans lequel on cultive exclusivement les plantes herbacées dont les racines , jes tiges, feuilles, fleurs, ou graines, sont d'usage pour la nourriture de l’homme. Sa formation, quant à sa dis- tribution , est la plus simple de toutes. Perdre le moins de terrain possible; consacrer à chaque végétal la por- tion du jardin la plus favorable à sa végétation , c'est-à- dire, les expositions chaudes ou sèches à celui qui aime la chaleur ou craint l'humidité, les places regardant le nord ou celles humides à celui qui aime la fraîcheur ou l'eau : tout se borne là. Mais s'il est facile d'établir ce jardin , qui ne demande pour toute condition qu'un bon terrain plus ou moins léger, mais substantiel, et une ex- position favorable , il n’en est pas de même pour sa eul- ture , si on attache de l'intérêt à la qualité et à la quan- uté de ses produits. | DES JARDINS. 39 Les hommes ont le malheur de se blaser prompte- ment sur les jouissances faciles. [ls dédaignent les dons de la nature au moment où elle les leur présente pleins de qualités et de saveur, et ils payent au poids-de l'or des productions étiolées , sans parfum et presque sans goût, mais qui ont à leurs yeux le précieux avantage d’être un résultat que l'art a dérobé à la nature pour satisfaire à la fois la gourmandise et l'ostentation. Les jardiniers ont profité de cette faiblesse des gens riches pour tirer uu parti plus lucratif de leurs jardins. De Ià s’est formé l'art de forcer les plantes, c’est-à-dire, de leur faire produire leursrésultats alimentaires dans une autre saison que celle marquée par la nature. Les couches chaudes, sourdes, les cloches, les châssis, les serres vitrées et chauffées se sont emparées du potager, et lon a eu des jardins de primeur, où se sont bientôt montrés les fruits que leur organisation semblait condamner à ne jamais müûrir que sous les influences brûlantes du ciel du midi. Les légumes indigènes et rustiques, auxquels tout ect appareil de luxe est inutile, se sont trouvés relégués dans le marais destiné à fournir la table de l’homme sobre et celle du pauvre ; mais aussi ils ont conservé leur saveur et leurs qualités sanitaires. >. Le potager- fruitier appartient moins au com- merce que le précédent. Îl accompagne assez ordinai- rement l'habitation rurale du riche , etse trouve relégué dans un coin de terrain d’où sa vue ne puisse pas dé- truire l’effet pittoresque d’un jardin anglais ou chinois : du moins c’est toujours ainsi que nous l'avons vu placé dans le domaine des gens qui, dans leurs parcs, pays ou carrière, courent après le romantique ei Vallégo- rique. W est certain qu'un carré de choux n’a rien de romantique, et que, si on y cherche quelques allégories, on ne pourra trouver que des choses peu agréables; car, en nous rappelant les peines et les sucurs qu'il en coûte pour procurer à notre faible humanité un des moins 4o DES JARDINS. importans de ses alimens, nous ferons sur nous-mêmes un retour qui ne sera rien moins que gracieux. Le pota- ger-fruitier réunit à la culture des plantes du potager celle des arbres dont les fruits parfumés et pleins d’une agréable saveur sont une des plus précieuses con- quêtes que l’art ait faites sur la nature sauvage des forêts, qui nous les ont d’abord offerts avec toute leur amer- tume et leur âpreté originaires. Ces arbres sont quelquefois réunis dans une partie du jardin entièrement consacrée à leur culture ; alors le potager-fruitier estavec verger ; mais, si on les a dissé- minés dans les plates-bandes des carrés où l’on cultive des légumes, ou quand même ils seraient placés en quinconces de quenouilles, de pyramides ou de buissons dans quelques-uns de ces carrés, ils ne formeraient pas verger, et le jardin conserverait simplement son nom de potager-fruitier. Ces sortes de culture exigent un terrain aussi substantiel que les précédentes, mais plus fort et surtout plus profond. Le choix, les plantations et la conduite des arbres, surtout dans leurs premières années, demandent aussi, dans celui qui entreprend de former ce genre de jardin, des connaissances plus va- rites et plus approfondies en horticulture. 3. Le jardin fruitier peut être considéré sous le rap- port de la science et sous celui du produit. Cultivé sous ce premier rapport, il prend le nom d'école; sous le second, il prend celui de verger. Une école du jardin fruiier peut se proposer deux buts : 1° de réunir dans un petit espace toutes les espèces et variétés, afin de juger par comparaison des qualités de chacune d'elles, des différences qui les ca- ractérisent , et de fixer une synonymie par le moyen de laquelle les espèces et variétés les meilleures puissent être connues et se répandre; 2° de réunir dans un espace plus grand toutes les espèces et variétés , afin d'étudier l’organisation, Ja physiologie, où même, si DES JARDINS. 41 | j'osais me servir de cette expression, le tempérament de chacune d'elles, les différences qui existent entre elles, et décider, au moyen de cette étude appro- fondie , le genre de culture qui leur convient le mieux ; c'est-à-dire, le sol, la température, la greffe, la taille et la forme les plus appropriés à leur nature, sous le triple rapport de la vigueur, du produit et de la longévité. L'école du jardin fruitier exige un sol riche et varié, offrant dans un espace donné toutes les expositions possibles. Les plantations doivent se faire dans un ordre déterminé qui rapprochera, méthodiquement et par sé- ries (autant que la nature du terrain le permettra), les classes, les ordres, les familles, les genres, les espèces, les variétés et sous-variétés , selon qu’elles auront entre elles plus ou moins d’affinités. Dans notre jardin fruitier, formant la dernière partie de notre second volume , nous avons classé les arbres à fruits dans le même ordre mé- thodique que nous avons adopté pour notre école, comme étant celui qui nous a paru le plus naturel. Le verger, n'étant formé que pour le produit, veut un bon terrain, mais moins varié dans sa qualité et son exposilion que pour l’école, parce qu'ici on a le choix des espèces, et qu’on peut les approprier au sol ; au lieu que dans l’autre c’est Le sol qui doit être approprié aux espèces, puisqu'on n’a pas la faculté de les choisir. Nous aurions bien pu, comme M. Thouin, diviser notre ver- ger, en prenant en considération les différentes formes de tailles, en quenouilles, vases ou buissons, éven- Lails ou espaliers: mais l'expérience nous a trop appris que , pour adopter exclusivement un de ces genres, il faudrait renoncer à cultiver, ou au moins à voir pro- duire , une grande quantité d'arbres fruitiers, dont quel- ques-uns même non-seulement se refusent à la taille en quenouille, comme par exemple tous les arbres à fruits à noyaux, mais encore à toute espèce de taille. Tous ceux dont les fleurs naissent au sommet des ra- 42 DES JARDINS. meaux sont dans ce cas. Ce serait, à notre avis, une triste chose qu'un verger qui ne renfermerait que deux ou trois espèces de fruits. 4°. Le jardin pharmaceutique se divise naturelle- ment en Jardin d’éfude et jardin d'usage. Le premier doit renfermer non-seulement les plantes dont les qua- lités salutaires sont reconnues, mais encore tous les végétaux formant la branche la plus considérable de la matière médicale. On doit même y trouver les plantes vénéneuses qui n’entrent dans la composition d'aucun mé- dicament, parceque l'étude des effets pernicieux qu’elles produisent est du ressort de la médecine légale. C’est là que les jeunes élèves iront acquérir les connaissances nécessaires pour empécher les funestes quiproquo qui peuvent sortir de la boutique d’un herboriste ignorant. Ils étudieront le facies des plantes, afin de les recon- naître lors même que la dessiceation leur aura enlevé leurs caractères botaniques. Hs les étudieront sous les rapports de leurs formes, afin de les reconnaître dans tous les lieux où ils pourraient en avoir besoin , et sous celui de leur analyse chimique pour en faire toujours une heureuse application. Le jardin pharmaceutique d'étude n’exige pas un très-grand espace de terrain , parce que le nombre des plantes médicinales, quoique assez considérable, est cependant limité. Il est néces- saire qu'il y ait une pièce d'eau , afin d'y faire croître les nénuphar, ménianthe , iris, faux-acore, cresson et autres plantes aquatiques; tandis que la renouée bistorte, les menthes et les cardamines fleuriront sur ses bords marécageux. La nature et les expositions du sol doivent être extrêmement variées , quoiqu'il n’y ait pas nécessité que la terre y soit de première qualité. Les végétaux y seront classés méthodiquement, dans un ordre botanique ou dans celui de leurs propriétés. Le jardin pharmaceutique d'usage appartient plutôt à Pherboriste qu'à l'homme qui aime et cultivela science. DES JARDINS. 43 Son but est de multiplier le plus possible les plantes médicinales usuelles, afin de tirer parti de leur récolte. Aussi ne cultive-t-1l guère que celles dont l'usage est le plus répandu. Généralement, dans ces sortes de jardins, les plantes sont placées sans ordre dans les parties du terrain les plus favorables à leur végétation. L'art n'entre presque pour rien dans les jardins pharmaceutiques qui ne sont guère en convenance qu'avec les écoles de mé- decine et les hôpitaux. 5°. Le jardin botanique est entièrement consacré à la science. Nous le divisons en jardin d'étude botanique, et en jardin de naturalisation. Tous deux exigent un espace immense, toutes les natures de terrain, les ex- positions les plus variées, et la culture la plus savante comme la plus soignée. Quant à leur formation, elle peut être envisagée sous deux rapports , celui de la méthode, dans lequel les plantes seront placées selon la série de leurs aflinités physiologiques, et celui de l'agrément, dans lequel on les groupe de manière à produire un eflet agréable, sans cependant les confondre au point que les individus soient tout-à-fait isolés de la famille à laquelle ils appartiennent. Comme le jardin botaniqne renferme des végétaux de serre-chaude, d’orangerie, de pléine- terre ; des plantes qui se plaisent sur les rochers les plus secs ct les plus arides, d’autres qui ne croissent que dans le sein des ondes : comme la même famille renferme assez ordinairement des individus auxquels il faut appliquer tous les genres de cultures qu'exigent leurs diverses ha- bitudes, l'or.lre méthodique par séries entières est aussi difficile que peu usité. Du reste, tous les principes d’hor- ticulture que nous donnons dans cet ouvrage doivent être familiers au chef des travaux d’un semblable établis- semenL. 44 DES JARDINS. $ IL. Des Jardins mixtes. Nous renfermons dans cette division les jardins qui ont été formés avec l'intention de réunir l’utile à l’a- gréable dans un espace borné. Tels sont, pour la plu- part, les jardins qui accompagnent les maisons bour- geoises des heureux habitans de la campagne. Quelque- fois les carrés destinés à la culture des légumes utiles sont renfermés dans de larges plates-bandes où l’œillet , la primevère , les juliennes, les giroflées et mille autres plantes toutes plus jolies les unes que les autres , recoi- vent les soins de l’amateur ; la sensitive, les gardénias , peut-être même le cafeyer et la canne à sucre , auront une place réservée dans la bâche des ananas; quelques bruyères, des amaryllis et des ixias disputeront un ou deux châssis aux melons et aux primeurs , tandis que la tulipe éclatante, la jacinthe à la douce odeur et les narcisses élégans, obtiendront une place dans la plate- bande exposée au midi, où le jardinier fait les semis de plantes moins séduisantes, mais plus utiles. Là tout est mélangé : le rosier croît entre le groseillier et l'épi- ne-vinette ; le jasmin tapisse les murailles entre le pêcher et l’abricotier , tandis que la bignone grimpante entre- lace ses rameaux fleuris autour des pampres de la vigne. Tels sont les jardins que nous nommons potagers-fleu- ristes : la régularité les caractérise. Mais, si un homme de goût veut tirer d’un espace borné toute la somme d'agrément qu'il peut produire, la partie potagère de son jardin deviendra la moins essentielle , et son étendue sera restreinte et calculée juste sur les besoins de sa famille. Le reste du petit clos se dessinera avec grâce en parterres réguliers, ou se divisera en massifs, en bosquets, en tapis de gazon émaillés de fleurs se succédant sans interraplion toute l’année. L'ordre, l'élégance, et surtout une extrème propreté DES SARDINS. 45 sont ici de rigueur. Les côtés et le fond , s'ils sont fermés par des murs, seront masqués par des palissades d'arbres verts ou par des arbustes grimpans; si l’étendue de votre terrain vous permet quelques bosquets, que la hauteur desarbrisseaux soit calculée sur cette étendue ; évitez de planter des arbres que vous serez contraint d’arracher avant qu'ils aient pris la moitié de leur accroissement , sous peine de les voir écraser de leur ombre votre jardin tout entier, qui, d'autre part, en paraîtrait beaucoup plus petit. Que vos fleurs soient mélangées avec art, selon leurs différentes nuances, dans la plate-bande de terre de bruyère, dans la corbeille ou le massif ; surtout que les plus basses soient sur le premier rang , les moyennes sur le second , les hautes sur le troisième, et ainsi de suite, de manière à ce qu’elles ne se masquent pas les unes et les autres. Que les premiers plans du jardin soient ornés par les arbrisseaux et les plantes rares cul- tivés en caisses et en pots; que l’orangerie ou la serre tempérée, destinée à les abriter des rigueurs de l'hiver, soient les seules fabriques qui osent s'y montrer. Cepen- dant ce jardin est très-propre à recevoir des ornemens, mais ils doivent être choisis avec goût et conserver les convenances avec le local, et principalement avec l’ar- chitecture plus ou moins élégante de la partie de lhabi- tation faisant face au jardin. Les bancs de gazon, les salles de verdure, les berceaux de treillages artistement entrelacés, conviennent dans tous les cas; mais encore faut-il que leurs places soient choisies avec discerne- ment. Ces sortes de repos ne sont bien placés que dans les endroits qui offrent un point de vue intéressant , soit sur le jardin ou au dehors, ou dans un lieu solitaire et reuré, consacré à la lecture et à la méditation. L'eau, agréable partout, peut ici produire un effet charmant si elle ne s’y montre pas avec des prétentions ambitieuses. Point de lac, de rivière, de torrent ni de cascade, mais simplement un bassin régulier, orné sur ses bords de ‘ 46 DES JARDINS. quelques saules pleureurs, et, dans le milieu, d’un vase, d’une coquille, ou d’une figure jetant de Peau. Tels sont les caractères que nous assignons au pota- ger-orné, le plus commun, et peut -être le plus sage des jardins privés. S IT. Des Jardins d'agrément. Comme les auteurs qui ont écrit avant nous sur ce sujet, nous comprenons sous ce titre tous les jardins qui n'offrent aucun but d'utilité réelle, au moins sous les rapports des produits alimentaires et de l'étude des sciences naturelles ; car les jardins publics contribuent à entretenir la salubrité de l'air dans les grandes vil- les (x) , et fournissent en outre , aux habitans , des lieux de promenades aussi agréables que nécessaires à la santé. Nous les avons distingués en symétriques el paysagers ; il nous reste à établir leurs subdivisions , et à esquisser les caractères essentiels qui constituent chaque genre. 1°. Les jardins symétriques ou français ont com- mencé à orner les palais pendant le siècle de Louis XIV. Lenôtre fut le fondateur de ce genre, dont Leblond, son élève, nous a laissé une savante théorie. Bientôt les simples châteaux ont voulu avoir aussi leur jardin fran- cais; puis On a cherché à en tirer parti pour la décoration (1) Les arbres surtout contribuent beaucoup à entretenir la pureté de lair, ou, pour parler avec plus de justesse, à le rendre plus propre à la respiration. L’air respirable, destiné à entretenirla viechez l’homme et les animaux, a pour base principale Poxigène. Fair que les végétaux aspirent pour entretenir leur végétation est le carbone. Tout animal , plongé dans de l’air privé d’oxigène, mourra subitement asphixié; tout végétal, plongé dans une atmosphère privée de carbone, languira d’a- bord et finira par périr. L’homme renvoie après chaque aspiration une assez grande quantité de carbone dont les poumons se débarrassent et que les arbres s’approprient; ceux-ci exhalent, pendant la nuit , une quantité considérable d’oxigène qui, se mêlant à la masse de l'air, la rend plus propre à la respiration. DES JARDINS. 47 des habitations dé la ville, et enfin les promenades pu- bliques se sont métamorphosées en jardins symétriques. Il est résulté de là deux genres différens que nous avons nommés jardins symétriques publics, et jardins symé- tiques privés. Le jardin public est ordinairement sans clôtures; il est ouvert tous les jours, à toute heure , à tout le monde; enfin ce n’est rien autre chose qu'une promenade pu- blique, qui , au lieu de consister simplement en quel- ques rangées d'arbres, a été embellie par des quinconces, des gazons, des statues, ou des monumens. Plusieurs villes nous en offrent des beaux molèles ; mais les Champs-Élysées à Paris sont peut-être ce qui existé de mieux dans ce genre. Le jardin symétrique privé prend quelquefois le nom de jardin public, quoiqu'il ne le soit que par to- lérance ; ceux des Tuileries et du Luxembourg en sont des modèles superbes. «Lorsque vous aurez à former des jardins pour l’embellissement d’un palais ou d’un chà- teau pour lequel un architecte aura déjà employé toute la richesse , toute l'élégance de son art , c’est alors que vous dite les bestitéé pittor esques mais simples du paysage, pour vous élever à des conceptions moins gracieuses peut-être, mais pleines de grandeur et de noblesse. C’est alors que vous déploierez toutes les ressources de votre génie pour élever ces terrasses majestueuses où les orangers, les myrtes, les grena- diers s’étonnent de fleurir et de prospérer loin de leur pays natal; d'immenses parterres réguliers brilleront de tout l'éclat dont la nature a paré les fleurs les plus belles, apportées à grands frais des quatre parties du monde ; ils orneront le devant des serres chaudes où l'art est venu à bout de renfermer et de multiplier les plantes rares et curieuses.que leur organisation semblait condamner à n’épanouir leurs brillantes corolles , à ne müûrir leurs fruits délicieux que sous les rayons enflam- 48 1. DES JARDINS. més du soleil de la zone torride. C’est dans ces lieux que tous les prestiges d’un art magique doivent se déployer. Les ondes ne rouleront plus en murmurant sur le sable argenté de la prairie ; prisonnières dans des tuyaux d’ai- rain , elles s’en échapperont en mugissant, s’élanceront jusque près de la nue en colonnes éblouissantes, ou jail- liront de la gueule des dauphins , de la conque du tri- ton, pour retomber en jets, en nappes argentées, en gerbes de mille formes différentes, dans des bassins de marbre ou de granit. Ces bassins, de forme élégante et géométrique , que le génie du sculpteur ornera de naïades et de néréides, ne seront p:s peuplés par la truite rougeâtre et l’écrevisse à Ja marche insidieuse : le poisson doré et argenté de la Chine montrera ses écailles brillantes à travers le cristal des eaux ; le ca- nard, la sarcelle et la poule d’eau n’en rideront pas la surface, mais le cygne majestueux, au plumage blanc comme de la neige, y nagera avec grâce. Là des avenues de tilleuls , de platanes ou de marronniers d'Inde , s’é- tendront à perte de vue, des quinconces magnifiques, des voûtes de verdure, des allées couvertes, protége- . ront de leur ombre les chefs-d'œuvre des Phidias anciens et modernes. Si quelques fabriques trouvent place dans ces lieux, où tout doit respirer la richesse et la magni- ficence , ce ne seront plus les châlets rustiques ou les ermitages pittoresques. Des temples de marbre, des pa- villons d'une architecture légère et savante, voilà les seules fabriques qui puissent convenir à ce genre, dontle luxe dans les monumens fait un des principaux carac- tères. Tels sont les jardins propres à la décoration des palais ou des grands châteaux. » Mais il est encore un genre de jardins symétriques des- tinés plus particulièrement à orner les hôtels habités par les gens riches que leurs occupations ou leurs habitudes retiennent continuellement #la ville. Ceux-là, bornés à une petite étendue, ne peuvent afficher le même luxe DES JARDINS. 49 que ceux que nous venons de décrire; vous chercle-ez dans leur distribution plus de grâce que de majesté, plus d'élégance que de noblesse ; enfin dans leurs ornemens vous vous attacherez plus au bon goût qu’à la richesse : une grande propreté, un entrelien soigné, des allées bien ‘sablées, des palissades de verdure régulièrement tail- Jées et masquant les murailles , quelques pelouses, peu de bosquets , quelques vases, peu de statues et sculptées dans des proportions moindres que la nature ; pas le plus léger vestige de montagnes, de rochers, de rivières, ni de fabriques, mais des parterres bien dessinés et en- richis des fleurs les plus brillantes dans toutes les sai- sons, tels sont les caractères qui nous paraissent devoir constituer ce genre de jardin. Un emplacement d'un demi-arpent, où même beaucoup plus grand, entouré de quatre murailles resserrées elles-mêmes par les mai- sons de quatre rues, ne doit jamais être dessiné qu'en jardin symétrique. Si vous avez la prétention, malheu- reusement trop commune, de vouloir y transplanter une seule scène de paysage dont le fond pittoresque, formant perspective, sera quelque vieille muraille bien noire, bien enfumée, des toits et des cheminées, malgré tout l'art que vous pourrez y mettre, vous n'aurez fait qu’un objet ridicule inspirant le rire Ge la pitié. 2°. Le jardin paysager, ou paysagiste, est sans con- tredit le plus agréable de tous quand un goût pur l'a tracé, et surtout quand les convenances locales et autres ont été scrupuleusement observées. Ici une grande que- relle s’est élevée entreles auteurs qui tous en leur particu- lier ont exclusivement ce qu'ils appellent le bon goût. Les ups ont dit : Un jardin paysager ne sera vraiment agrc: - ble et de bon goût que lorsque la nature seule aura fait _tous les frais de ses ornemens; nous ne voulons, disent- ils, que des bois, des forêts, des montagnes, des ro- chers, des rivières, des fleuves, des torrens, des grottes eldes cavernes, parce que c’est notre goût, qui certaine- À À 5o DES JARDINS. ment est le bon goût. Enthousiastes de ce qu'ils appellent la belle nature, ils ont rejeté de leurs jardins tout ce qui en faisait autrefois le charme et la richesse; ils ne par- donnent pas à Delille d'aimer les statues, les vases, les bronzes, le marbre; d’avoir vanté en vers pompeux les jets d’eau, les cascades artificielles, qu’ils appellent de fastidieux efforts de l’art. « Comment, disent-ils, le « chantre des jardins va-t-il prodiguer son encens au « genre fastidieux des jardins de Fart, leur plus grand « ennémi (des charmes de Ja nature), usurpateur in- « signe qui, après avoir chassé la nature de son do- « maine, a eu l'audace de se mettre à sa place? » Ils lui reprochent surtout d'admettre les urnes, les tombeaux , les temples, les églises ; de proposer des ruines, un fort , une abbaye antique ; de conseiller une cabane de pêcheur, et même une serre chaude , qui, assurent-ils, n'a jamais prétendu à l'honneur de faire fabrique. Les autres, au contraire , veulent entasser fabriques sur fa- briques, et renfermer dans un espace de deux cents pas des salles de danses et des tombeaux, des ruines et destemples, deschaumièreset des glacières, etc., ele. Mais tous s'entendent assez bien relativement à la haine qu'i's portent à la symétrie. [ls ne peuvent souffrir une avenue, un quinconce , un parterre tracé géométrique ment, enfin tout ce qui sent l’ordre et l’arrangement. Aussi ne trouvent-ils rien que de monotone et d'insigni- fiant dans nos jardins publics tels que ceux des Tuile- ries et du Luxembourg, et ils ne font pas plus de grâce à ceux de Versailles. | Nous ne pensons pas plus comme eux, sur cette ma- üère, que quand il-s’agit de leurs genres exclusifs; mais seulement nous adoptons deux divisions de jardins pay- sagers. Le premier sera le jardin paysager naturel, qui répondra au parc , à la carrière, et au pays de Morel et de Wately ; le second, sous le nom de jardin paysa- giste orné, offrira les jardins anglais, chinois, ou la DES JARDINS. Ba ferme ornée des auteurs, selon qu'on y placera plus où moins de fabriques, dont le but sera seulement l’orne- ment, ou l'ornement et l’utile. Le jardin paysager naturel appartient tout entier à la nature, et l’art, qui doit ne jamais y paraitre, ne sera employé qu'a en faire ressortir davantage les accidens pit- toresques. Il exige un emplacement extrémement grand, offrant les sites et les points de vue les plus agréables et les plus variés ; il admet touslesgenres de scènes naturel- les, tels que les sombres forêts, les coteaux rians et cou- verts de vignobles, les rochers sauvages , les montagnes, les profondes vallées, les eaux sous toutes leurs formes, ruisseaux, rivières, Lorrens, cascades, cataractes, étangs, lacs , etc. ; maisil doit toujours les présenter sousle point de vue le plus p'quant et le plus original, et c’est là le travail de lartiste. Ménager ses plans, ses perspectives, de manière à renforcer le caractère de chaque scène ; embellir la nature sans la changer; profiter de toutes les circonstances locales ; en créer d’accidentelles pour produire des effets agréables et variés, telles sont les rè- gles qui doivent diriger dans la formation du jardin naturel. Le jardin paysagiste-orné exige moins d’étendue, mais plus encore de variété dans le site, si l’on doit y placer des fabriques de diflérens caractères. Du reste , il demande les mêmes conditions que le précédent, et de plus une stricte convenance morale dans les scènes qui se présentent sous le même point de vue. L’art de créer un Jardin paysagiste- orné , agréable, git tout dans l’ar- rangement et la composition des tableaux dont il est composé, dans les contrastes doux et bien amenés de chaque scène, et surtout dans la manière énergique dont elles seront caractérisées. Les jardins paysagers, naturels ou ornés, se compo- sent, comme on le voit, de différentes scènes ou tableaux dont chacun à son caractère saillant et particulier. Les 53 DES JARDINS. auteurs, voulant un seul genre, dans leur cadre, c’est-i- dire, un seul caractère, une unité d'action, sont partis de ce point pour établirleurs divisions de jardins de genres, en majestueux, terrible, pittoresque, rustique, cham- pétre , tranquiile, riant, mélancolique, etc. En reje- tant toutes ces divisions quant-aux genres, nous les adoptons, et mille autres encore dont ils n’ont pas parlé résultant de différens mélanges de celles-ci, mais seu- lement comme caractères de scènes partielles, qui toutes peuvent également trouver place dans le même jardin. Nous allons déerire les principales, et ce sera, je crois, la meilleure méthode de faire concevoir parfaitement les principes que l’on doit suivre dans la formation des jar- dins paysagers. Scènes majestueuses. La nature seule les compose. Tout ce qui est noble et grand, ce qui nous inspire un sentiment élevé d’admiration et d'enthousiasme , voilà ce qui constitue le majestueux. Une silencieuse forêt dans laquelle des arbres aussi vieux que le monde balanceront leur tête élevée jusque près de la nue, et formeront des voûtes épaisses d'une verdure impénétrable aux rayons du soleil; des lacs d’une étendue considérable, reflétant sur le cristal de leurs eaux la voûte azurée des cieux, et l'image renversée des futaies couronnant les coteaux qui forment le fond du tableau ; une rivière large et tranquille promenant ses eaux profondes au milieu d’une vaste prairie, ou se précipitant en cataracte sur toute sa largeur ; un point de vue géographique, si je puis me servir de cette expression, nous montrant, au bout d'un immense horizon, une des principales chaînes de monta- gnes qui partagent les provinces, limitent des royaumes, ou égarant notre œil sur l’immensité des mers, voilà des tableaux majestueux. Aucune fabrique ne peut figurer que d’une manière mesquine dans de semblables ta- bleaux. Scènes terribles. Comme pour le majestueux , la na- DES JARDINS. 53 ture en fait tous les frais. Les scènes en sont grandes et quelquefois sublimes. C’est surtout dans les montagnes de la Suisse, de la Savoie et du Puy-de-Dôme que lar- üste ira les ctudier. Là ce sont des montagnes escarpées dont les flancs déchirés sont quelquefois entr'ouverts en larges précipices , dont on n'ose sonder la profondeur sans frémir ; leur cime est hérissée de rochers taillés à pic et formant une barrière insurmontable du haut de Ja- quelle le vautour affamé brave la balle meurtrière du chasseur. Les vents mugissent à travers le feuillage noi- râtre des sapius qui ombragent leur base, et marquent l'entrée d’une profonde caverne (1). « Le curieux, assez « hardi pour pénétrer dans les entrailles de la terre, « confiera son existence à la bonne foi d'un guide qui « Jui est inconnu ; et celui-ci, muni d’une torche rési- « neuse dont la lumière sinistre se reflète sur les angles « satllans des rochers, conduira ses pas mal assurés à « travers le labyrinthe des voûtes sombres et humides « que la nature s'est plu à décorer de brillantes sta- « Jactites, affectant lesformesles plusbizarres.» Plus loin, un torrent impétueux roulera , en-mugissant, ses ondes noirâtres de précipice en précipice, un frêle pont sus- pendu par des cordes offrira le seul moyen de franchir ces dangereux abîmes, où l’eau s’engouffre en formant d’épouvantables tourbillons. Il serait inutile de pousser plus loin la description de ces tableaux; seulemeni nous recommanderons à l'artiste auquel une heureuse localité permettrait de s’en servir, de ne pas faire comme Chambers. Point de loups effrayans, point de plantes vénéneuses, encore moins de spectacles dégoütans tels que ses potences et ses roues; que la femme la plus ti- mide puisse parcourir le paysage sans éprouver la moin- (1) Extrait du Traité sur: La composition et l’ornement des jardins, par M. Boitard, comme tous les morceaux de ce chapitre resserrés entre deux guillemets, 54 | DES JARDINS. dre crainte. De la surprise et de admiration, voilà ce que doivent inspirer ces scènes, que du reste on ne doit pas beaucoup multiplier si on veut qu'elles ne devien- nent pas fatigantes. Scènes pittoresques. À la rigueur, le pittoresque peut appartenir à toutes les scènes ; mais comme les auteurs n'ont pas donné à ce mot sa signification tout-à-fait vraie, pour nous conformer à leur pensée , nous en don- nerons les caractères tels qu'ils les ont conçus. Ce qui pour eux constitue le pittoresque, est l'originalité du site, du point de vue, d’une fabrique, ou simplement d’un accident. « Quelquefois un arbre isolé, jeté par le « hasard au milieu d’une clairière, produira un effet pit- « Loresque , sans que l’on puisse en assigner précisément « Ja cause. Un pont rustique, un kiosque, une rocaille, «le feuillage blanchâtre d’un peuplier se dessinant sur « le flanc rembruni d’un rocher, une simple guirlande « de herre tapissant le tronc d’un vieux chêne ou pen- « dant avec grâce de ses branches, un buisson, un câ- « prier Ctendant ses rameaux et développant ses fleurs € d’un blanc de neige au sommet d’une ruine couverte « de mousse et de lichens ; tous ces objets peuvent être « Lrès-pittoresques, surtout quand l’art ne peut y être « soupconné. » Un écueil qu'il faut éviter lorsque l’on veut produire le pittoresque, c’est de tomber dans le bizarre en cherchant l'original. Ce n’est qu'après avoir observé beaucoup la nature, après l'avoir long-temps méditée, que l’on peut se promettre de reproduire avec succès dans nos jardins les scènes de ce genre dont elle est d'ailleurs si peu avare. Scènes rustiques. Celles-ci sont principalement ca- ractérisées par les fabriques. Avant que les hommes aient perfectionné les arts, lorsque manquant d'expérience et d'instrumens ils construisaient grossièrement leurs habi- tations , et employaient pour cela les matériaux bruts, tels que la nature les leur pr'sentait, ils ne 5ouvaient ni DES JARDINS. 55 exécuter ni même concevoir le beau; la solidité seule était l’objet de leur sollicitude. Les fabriques rustiques doivent avoir les mêmes caractères que nous supposons à ces premiers essais de Pindustrie humaine, Cependant, en cherchant comme eux le solide , il faut prendre garde À saire lourd ; car ce genre peut avoir une élégance de forme d’autant plus agréable qu’elle est plus rare et sup- pose des combinaisons plus difficiles. « Le rustique ne « se compose pas seulement de fabriques, il faut que le « style ait avec elles ses convenances ; peu d’accidens « dans le terrain, point d’ambition dans les plantations ; « que tout ait l'air d’être là pour lutile. Ce ne sera plus « le ginkgo exotique, dont le feuillage ombragera le « toit de chaume; la bignone ne grimpera pas autour « des piliers de la construction, mais le poirier croîtra « devant sa porte, et le pampre de la vigne entourera « ses fenêtres , et tapissera les murailles de sa riante ver- « dure. Il faut encore animer le tableau pour donner « à ce genre toutes ses convenances. On aime à voir la « chèvre agile grimper avec adresse l'escalier raide et « tournant qui la conduit jusqu'au dernier étage d’un « pavillon dont elle habite le sommet, tandis que la « poule ou le faisan occupent le premier, et que la « douce brebis allaite ses agneaux au rez-de-chaussée. « Les scènes rustiques sont d'autant plus faciles à animer, « qu'on peut, sans manquer aux convenances , les iso- « ler, pour ainsi dire, par le moyen de palissades, de « barrières, ou de treillages artistement entrelacés, et « en former ainsi de petits parcs, très-propres au loge- « ment des animaux domestiques. » Le Jardin du Roi, à Paris, oflre de charmans modèles des différentes cons- tructions de ce genre , et de la manière dont on peut les utiliser. Scenes champêtres. Elles veulent du mouvement. Il faut que les vastes cultures, les gras pâturages et les prai- ries qui les composent , soient animés par la présence des 56 DES JARDINS. hommes et des animaux ; il faut entendre le chant joyeux du pâtre conduisant son troupeau, les bélemens de la brebis, et les mugissemens du taureau. I] faut que l'ad- miration se partage entre la beauté du point de vue-et la belle culture du vignoble riant qui s'élève à mi-côte, et se confond dans la perspective avec Îles bois et les bo- cages formant le cadre du tableau. « Éloignez de ces « scènes tout ce qui sent le luxe et l'affectation; point « de temples, d'obélisques ; point d’ermitage, de rochers « ni de grottes; la première et même la seule fabrique « que le goût vous permette, c’est la ferme ornée; en- « core faut-il que ces ornemens appartiennent au carac- «tère de la composition. N’allez pas, comme ont fait « quelques Anglais , masquer votre bâtiment rural « par la voûte gothique d’une église tombée en ruine ; « que vos poules ne soient pas logces dans une chapelle, « vos pigeons dans un clocher, et vos bœufs dans nne « sacristie. Ces contrastes puérils annoncent un absolu « manque de goût et une imagination déréglée. Les « habitations des hommes et des animaux doivent être « d’une architecture simple, villageoise, si on peut se « servir de cette expression, mais élégante, et, pardessus «tout, commode. Chaque bâtiment doit être rigoureu- « semenñt approprié à l'usage auquel on le destine; et, « dans les plantations, on ne doit jamais perdre de « vue que l’utile doit toujours marcher de front avec « l’agréable. » Scènes tranquilles. Des bocages frais et rians, un ruisseau qui serpente avec un doux murmure au fond d’un vallon solitaire; l’aune, le saule au feuillage ar- genté, ombrageant les tranquilles réduits de verdure qui parent ses rives fleuries, où le chant de la fauvette trouble seul le silence de la solitude ; des pentes adou- cies, des sentiers faciles, et enfin toute la variété que des groupes de fleurs, des massifs d’arbrisseaux, des gazons d’une brillante verdure, pourront jeter dans une DES JARDINS. 57 composition pleine de grâce; voilà ce qui constitue le caractère tranquille. Quelques fabriques placées et choi- sies avec goûl viendront augmenter le charme de ce sé- Jour de la paix et du repos. « Éloi. anez tout ce qui peut « rappeler des idées de tristesse ; surtout point de tom- « beaux, d’urnes, ni de funèbres cyprès, car ces lieux « sont principalement consacrés à la méditation de Ja « vieillesse, et rien ne doit lui rappeler qu'il faudra « bientôt voir se briser les derniers liens qui l’attachent «encore aux objets de ses affections. Quels que soient les « orages qui aient traversé la vie d’un vieillard , rappelez « dans son cœur des souvenirs, mais ne déchirez Jamais « d’une main barbare le voile, prêt à tomber, qui lui « cache l'avenir. » Près du berceau où chaque jour il viendra s'asseoir, « vous entasserez,. pour ainsi dire, « les souvenirs agréables ou glorieux. Une simple guir- « Jande ou une inscription lui rappellera le jour où sa « destinée fut unie à celle d’une épouse chérie qui lui «consacre encore les derniers momens de sa vie. Un « monument, un canot ou une cabane de bouleau, le « reporteront à l’époque où, dévoré par l'envie d’ac- « quérir des connaissances, il parcourait des climats « lointains, et bravait les glaces et les frimas du Canada. « Si par hasard son œil découvre à quelque distance « un sphinx de pierre dont la figure devient encore plus « singulière en se dessinant sous le feuillage d’un pal- «mier, son cœur palpitera de plaisir, son sang rajeuni « circulera dans ses veines avec une nouvelle vitesse, «et fera revivre dans son cœur cet enthousiasme pour «Ja patrie, cet amour de la gloire, qui lui firent jadis « combattre les Arabes dans les déserts brûülans de « l'Égypte. » Scènes riantes. Elles ont une grande analogie avec les scènes tranquilles, mais cependant elles se caracte- risent par des différences assez tranchantes. Jamais elles ne se présentent que dans des sites découverts, offrant + 58 DES JARDINS. en perspective des vues pittoresques et gaies. Elles doi- vent être animces par le mouvement des eaux. Un ruis- seau limpide se précipitant en cascade peu élevée, puis côtoyant des sentiers fleuris; des massifs d’arbrisseaux choisis parmi ceux dont les fleurs ont le plus d'éclat ; des fabriques élégantes décorées avec goût et fraicheur; quelques marbres, des statues, mais en petit nombre et. toujours dans une position bien motivée ; un parterre soigné, enfin beaucoup de grâce et de brillant dans tous les objets que l’on fait entrer dans la composition , telles sont les nuances qu’elles présentent. Les scènes riantes plaisent particulièrement à la jeunesse ; aussi doit-on y conserver une place pour la consacrer aux exercices gymnastiques, et aux jeux qui demandent de l'adresse et de Fagilité. Scènes mélancoliques. Le cœur humain est extré- mement bizarre. On éprouve un plaisir inexplicable, mais vrai, à se rappeler les événemens malheureux qui ont aflligé de certaines époques de notre vie, quand même ce souvenir nous coûte encore des larmes. Les scènes mélancoliques sont destinces à faire naître dans le cœur ces émotions profondes ; mais il faut pour cela qu’elles soient parfaitement dans les convenances locales, et qu’elles aient été dessinées avec cette ex- pression de sensibilité et de tristessse qui leur sont par- üiculières. Loin du bruit importun et de lagitation d'un monde indifférent, au fond d’une vallée solitaire dont l'horizon est bornée, on se plaît à aller rêver, sous l'om- brage sombre des ifs et des cyprès, aux amis que l'on a perdus. Là le romarin et la verveine croissent le long des chemins silencieux ; les immortelles, le souci et la pensée parlent à nos yeux un langage mélancolique. fc, sous un massif de peupliers, un obélisque de granit nous rappelle les héros morts pour la patrie; plus loin, une urne funéraire paraît au milieu du feuillage d’un chène vert : c’est Ie modeste monument que la reconnais- DES JARDINS. 59 sance a élevé à la mémoire d’un homme obscur, mais ‘vertueux. « Est-il sur la terre un seul homme qui, « même avant d’avoir parcouru le quart de sa carrière, « n'ait versé des larmes sur Ja perte d’un être qui lui fut « cher? en est-il un seul auquel la vue de la dernière « demeure de l’homme ne soit un objet de pieuses mé- « ditations ou d’attendrissans souvenirs ?» Aussi lorsque, parvenu dans une île romantique, un tombeau de marbre blanc se présentera tout à coup à nous sous les rameaux pendans du saule-pleureur, un sentiment incompréhen- sible de douleur, d’attendrissement et de plaisir s’em- parera de notre cœur. « Mais souvenez-vous que l'esprit « tue le sentiment, que le cœur et la sensibilité seuls « doivent vous inspirer une épitaphe simple, courte, et «sans nulle prétention littéraire. Point de latin, point « de grec; ces langues, peu familières au commun des « hommes, exigent encore, chez ceux qui les connais- « sent le mieux, un moment d'étude pour être parfai- « tement comprises, et ce moment suflit pour détruire « l'illusion et empêcher l'émotion. » Les scènes mélan- coliques ne doivent pas se multiplier, quoi qu’en disent les amateurs de genres exclusifs; car on courrait la chance de faire un cimetière au lieu d’un jardin d’agré- ment. C'en est assez sur le caractère des scènes pour guider l’homme de goût dans tous les genres qu'il désirera créer. Nous donnerions mille fois plus de détails sur cette matière , que ce serait toujours trop peu pour celui au- quel la nature a refusé le sentiment du beau et du vrai. _ SECTION III. DE-L'ORNEMENT DES JARDINS. La nature a mis à la disposition de l’homme quatre sortes d'objets généraux, qu'il peut à son gré employer à lembellissement d’un jardin. 1° Les sites; 2° les vésé- Go DES JARDINS. taux; 3° les eaux; {° les constructions. Du choix et de la combinaison de ces matériaux l’homme de goût obtiendra tous les effets agréables, capables de produire dans notre cœur et dans notre esprit ce vif sentiment de plaisir inspiré par le beau. Nous allons traiter chacun de ces articles dans ses détails les plus nécessaires à con- naître , et enseigner les moyens que nous croyons les plus propres à en tirer parti. $ I. Des Sites. Ils se composent de plaines, de coteaux, et de mon- tagnes, ayant leurs caractères particuliers que l'on ne peut changer, mais que l’art embellit. La plaine est un terrain plat, d’une plus ou moins vaste étendue. Si elle se trouve couronnerune montagne, ou au sommet d’une côte, elle prend le nom de plateau. Dans ce cas, elle a l'avantage d'offrir un point de vue très-Cloigné ; mais souvent elle manque d’eau , et cet inconvénient est un des plus graves. Lorsque la plaine se trouve assise au pied d'une colline, ou resserrée en- tre deux montagnes, il est rare qu’elle n'ait pas une ri- vière ou un ruisseau qui la traverse ; assez ordinæire- ment elle est même marécageuse. L'on peut tirer un parti assez avantageux de ces deux sites. Mais si la plaine offre un horizon sans limites, si son immense éten- due ne comprend aucune chaîne de montagnes , aucun coup d’œil pittoresque qui en rompe la monotonie, c’est de toutes les positions la plus triste et la moins propre à former un jardin d'agrément, surtout si l’on a la préten- tion de le faire paysagiste. | Cependant, si l’on n’a pas le choix dans l’emplace- ment, on pourra encore dessiner un jardin agréable. L'artiste ne cherchera que l'élégance dans les contours, de lacommodité dansles promenades, de la fraicheur dans les omhrages , et de la variété dans la forme et dans les- DES JARDINS. Gt pèce de ses plantations. Il peut donner un peu de mou- vement au terrain , mais seulement en créant quelques pentes douces pour Jeter de la diversité dans les prome- nades. Surtout qu'il ne cherche pas à dessiner, dans la plaine, des scènes dont le caractère appartient au site montagneux; il ferait une dépense énorme pour en- tasser les uns sur les autres des milliers de tombereaux de terre , et ne produirait cependant que des inégalités ridicules , qu'il décorerait en vain des pompeuses épi- thètes de montagnes et de vallées. C’est dans la plaine particulièrement que des rochers ne doivent jamais éle- ver leur tête hétérogène au milieu des vertes pelouses qui font le principal ornement de ce genre de site ; loin de produire un effet agréable , ils ne feraient que dénoncer d’une manière bizarre le mauvais goût de celui qui les y aurait apportés. On doit encore en éloigner les fabriques d’un caractère trop pittoresque ; et, si l’on s’y permettait un ermitage, une chaumière ou un chalet, ce ne serait que dans le cas où le jardin serait d’une immense étendue , et où l’on pourrait masquer ou ca- cher ces compositions dans l’épaisseur d’un bois, ou dans une clairière isolée; enfin les seules scènes qui puis- sent convenir sont celles que nous avons appelées rus- tiques. Si la plaine est peu avantageuse au jardin paysager , en récompense elle convient assez bien aux jardins symé- triques , et mieux encore à ceux d'utilité, dont la créa- tion est entièrement soumise aux eflets de l’art. Une col- lection d'arbres fruitiers s’y déploiera en longues allées tirées au cordeau et offrant d’un seul coup d'œil le spec- tacle intéressant et entier de toutes les espèces de fruits , de tous les genres de tailles et de formes. Le potager en deviendra d'autant plus productif qu'il sera plus facile à cultiver, et enfin une collection botanique sera très- bien placée dans le jardin de plaine, parce qu'on aura plus de facilité à y ranger les végétaux de manière à 62 DES JARDINS. figurer sur le terrain ordre méthodique du système que l’on aura choisi. Le coteau n’est pas assez élevé , ni d’une pente assez raide , pour être confondu avec la montagne. C’est une simple éminence , plus où moins prolongée, mais trop éloignée d’une autre pour former vallon entre deux , ce qui Jui donne le précieux avantage du point de vue. Il peut offrir un site varié dans ses accidens de terrain ; si, joint à cela, on peut y amener des eaux , on en fera un jardin paysager charmant : la gaîté en sera le principal caractère , et les objets placés à son sommet auront plus de dignité. On évitera autant que possible les formes raides et anguleuses , ainsi que les pentes régulières. Les lignes y seront ondoyantes, convexes à mesure qu'elles approcheront du sommet, et concaves vers la base, où elles se perdront insensiblement sur le niveau. Le cotean convient parfaitement à la formation des jardins réguliers et de luxe, que nous avons appelés symétriques privés. La facilité d'y élever des terrasses majestueuses, d'y former des jets d'eau d'une grande hauteur, afin d'y former des scènes pleines de grâce et de noblesse, semble avoir marqué le coteau pour les jardins de luxe dont on accompagne les châteaux habités par les riches. Les montagnes diffèrent des coteaux en ce qu’elles sont plus élevées, rapprochées les unes des autres de manière à former les bassins des vallées ou le cours des vallons ; ce sont elles qui, par la variété des sites qu'elles présentent, offrent le plus de ressources au développe- ment de l’art des jardins, parce que ordinairement elles sont susceptibles de se prêter aux scènes de tous les caractères. C'est au fond des vallées, entre les pentes des montagnes que serpentent et coulent les ruisseaux €t les rivières, premier ornement d'un paysage quand on sait en rer parti ; c’est sur leur sommet que l’on ren- contre ces crêtes de rochers dont la perspective s’enri- DES JARDINS. 63 chit, tandis que leurs flancs recèlent ces grottes pro- fondes , ces accidens variés que l’art peut embellir, mais qu'il chercherait vainement à imiter si la nature n’en avait fait d’abord les premiers frais. C’est là qu’elle semble avoir fait tous ses efforts pour produire les effets pittoresques les plus saillans. L'artiste qui saura profiter de mille hasards heureux que de telles positions présen- tent à chaque pas, qui saura prononcer les accidens sans essayer d'en changer le caractère, enfin qui sera susceptible d’un sentiment vrai du beau naturel, devra nécessairement y créer un exemple du zec plus ultra de l'art. Les fabriques de tous genres pourront avantageu- sement figurer dans sa composition , pourvu que le goût et la raison en aient combiné la place , arrangement et la forme. Nos lecteurs concevront aisément qu'en décrivant d’une manière aussi rapide la plaine, le coteau et la mon- tagne , notre intention n’a pas cté de parler de tous les sites que l’on peut y rencontrer, mais seulement de gé- ncraliser. Il serait d’ailleurs impossible de rien écrire de complet sur cette matière , car la nature a tellement varié ses points de vue, elle a tant de diversité dans la manière dont elle se présente à nos yeux, qu'il n’est pas dans le monde deux sites qui se ressemblent. S II. Des Fégétaux. La végétation est à la terre ce que la vie est aux êtres or- ganisés. Sans elle l’espace , quels que soient d’ailleurs les mouvemens du terrain , ne présentera que la triste image de lamonotonie et dela mort. Maisil est peu deterrains, du moins en Europe, qui soient assez arides pour être en- tièrement dépouillés de verdure, et l’on ne sera jamais tenté d'établir un jardin dans ces landes que la nature a frappées du fléau de la stérilité. C’est par le choix et l’arrangement des plantes que lartiste donne à sa com- 64 DES JARDINS. position toute la fraicheur, toute la grâce et le coloris dont les puissans attraits frappent et émeuvent l’homme le plus insensible aux beautés simples et touchantes de Ja campagne. Les végétaux se présentent à nous sous deux formes différentes. Lorsqu'ils atteignent une certaine hauteur , que leurs tiges sont dures, ligneuses, fortes et suscep- tibles de braver les rigueurs de plusieurs hivers , on les nomme arbres, arbrisseaux et arbustes : lorsqu'au contraire elles sont faibles, peu élevées, d’une sub- stance plus où moins succulente, ne paraissant que Pes- pace de temps nécessaire pour fleurir, et mürir une seule fois leurs graines, puis mourant ensuite avec ou sans leurs racines, on nomme les végétaux plantes herbacées. Ainsi toute la végttation se borne done à nous offrir deux genres de mattriaux : 1° Les végétaux ligneux ; 2° ceux herbacés, auxquels on donne vulgai- rement le nom de fleurs. Avec les premiers on forme différentes scènes qui toutes peuvent se rapporter à ces principales divisions : 1° L'arbre isolé; »° les groupes; 3° les bosquets ; 4° les bocages ; 5° les massifs; 6° les bois; 7° les forêts; 8° les palissades ; 9° les haies; 10° l’allée couverte; r1° l'ave- nue; 12° le quinconce; 13° le berceau ; 14° le rideau. Les plantes herbacées nous offriront : 1° Les pelou- ses, prairies et gazons ; 2° les plates-bandes, corbeilles , massifs et planches ; 3° les fleurs en vases; 4° les bor- dures. Ces objets, par leur assemblage ou leur opposi- tion, par leur diversité et le nombre infini de leurs combinaisons, fournissent à toutes les compositions que l'imagination la plus fertile peut enfanter. Mais, pour en tirer un parti aussi avantageux que possible, il faut que l'artiste connaisse parfaitement la dendrologie, afin de placer dans chaque ‘plantation les espèces qui lui con- viennent par leurs dimensions, leur forme, la couleur des feuilles, celle des fleurs et l'époque à laquelle elles DES JARDINS. 65 épanouissent ; il faut encore qu'il sache les placer à l'ex- position et dans le sol qui leur convient. Quant à la den- drologie, nous en offrirons une table complète à la fin de cet ouvrage, afin de donner aux amateurs la facilité d'exécuter eux-mêmes leurs conceptions. Pour l’ex- position et la qualité du terrain, on les trouvera, ainsi que la culture particulière, aux articles de chaque plante. Un arbre isolé peut produire un effet très-agréable, selon la place qu'il occupe et son port particulier. S'il présente en lui-même quelque chose de singulier ou de pittoresque, soit par ses feuilles ou par ses fleurs, il faudra l’isoler davantage que si on le placçait seulement pour interrompre des lignes droites, ou pour conduire l'œil vers un point de vue ou une fabrique intéressante. Un saule pleureur , un sophora à rameaux pendans, par exemple, feront toujours un effèt charmant lorsqu'ils seront isolés, tandis qu'ils seront entièrement perdus pour l'agrément s'ils se trouvent confondus dans un bos- quet ou un massif. On emploie assez ordinairement un arbre isolé pour donner un peu d’ombre sur l’avant-scène d’une pelouse, et dans ce cas il forme un ornement dont le naturel et la simplicité manquent rarement de pro- duire un effet charmant ; d’autres fois il sert à masquer un point de vue inconvenant. Enfin on l’emploie pour in- diquer, à une certaine distance, la place d’une fabri- que. C’est ainsi que l’on ombragera avec le feuillage d’un chêne , ou même d’un arbre fruitier, le banc de pierre placé à la porte d’une humble chaumière ; un cyprès couvrira de son feuillage mélancolique l’urne funé- raire ou la pierre sépulcrale ; un saule croîtra près d’une fontaine rustique ; le tilleul servira de but à la carrière ouverte pour les exercices gymnastiques, et le peuplier d'Italie annoncera de loin, au voyageur qui cher- che les consolations de la piété, l'asile solitaire où un saint ermite est venu se refugier. 1: 5 66 DES JARDINS. Un arbrisseau, et même un simple arbuste, peuvent encore être employés isolés s'ils ont quelque chose de remarquable soit dans leur forme ou dans leur cou- leur. Mais, pour les uns comme pour les autres, il ne faut pas que la fleur entre pour beaucoup dans le choix que l’on fait de l'individu, ou de la place qu'on lui destine, parce que, durant fort peu de temps, la scène manquera de caractère pendant la plus grande partie de l'année. Les effets de longue durée doivent toujours obtenir la préférence, quoique peut-être moins brillans. Il faut une grande finesse de goût pour placer conve- nablement l'arbre isolé dans d’autres circonstances que celles que nous venons d’énumérer. Par exemple, on s'en est servi quelquefois très-heureusement pour établir une liaison entre des parties séparées, et, en en placant quelques - uns sur le devant d’une clairière quis’enfonce dans l'épaisseur d’un bois, pour en éloigner la pers- pective. Les groupes ne peuvent se composer qu'avec des ar- bres à tiges, dont les têtes, réunissant leur feuillage , formeront des masses de verdure soutenues dans les airs par les troncs nus ou seulement entourés de plantes grimpantes, pour leur donner l'apparence de colonnes pittoresques isolées les unes des autres. On concoit aï- sément que les groupes ne souflrent pas le mélange du taillis, des arbrisseaux , et enfin d'aucune chose qui puisse leur donner un air de pesanteur en les rem- plissant dans le bas; il faut que l’on puisse librement circuler à travers les arbres, et qu'ils s'élèvent sans bran- ches, jusqu'à une certaine hauteur, au-dessus d’un ga- zon où d’une prairie. On peut rendre beaucoup plus pi- quans les effets d’un groupe, en choisissant la couleur des feuilles qui doit dominer dans sa masse, selon la place qu'il occupe et les contrastes agréables qui peuvent en résulter. Par exemple, devant le rideau noirâtre que forme le sombre feuillage d’une forêt de sapins, un DES JARDINS. 67 groupe de peupliers blancs et de peupliers trembles se détachera d'autant plus agréablement que l'agitation continuelle de leurs feuilles contrastera d’une manière plus frappante avec la masse rembrunie et immobile des arbres résineux. On emploie le plus ordinairement les groupes isolés sur la cime ou le penchant des collines, sur le bord des eaux dont ils servent quelquefois à masquer l'étendue trop bornée, et quelquefois encore au milieu d’une prairie, d’une pelouse ou d’un gazon pour motiver une fabrique. Une des règles caractéristiques que les auteurs ont indiquée dans ce genre de plantation, c’est que les- pace de terrain qu’un groupe couvrira soit égale en diamètre à la hauteur des arbres qui le composent. Les bosquets doivent offrir beaucoup de variété, dans leurs masses, c’est-à-dire qu'on y fera entrer tous les arbres et arbustes à fleurs et à feuillages remarquables, et qu'on les y entremélera de la manière la plus avänta- geuse pour les faire réciproquement valoir. Un bosquet n'estrien autre chose qu’une réunion de massifs, de buis- sons, et d’arbresisolés, heureusement combinée, enfin un agréable mélange de tous les genres de plantations. On les emploie assez souvent à masquer les murs de clôture d’un jardin, et dans ce cas il faut beaucoup d’art pour cacher les irrégularités du terrain et sa limite. 1] faut surtout qu'ils soient dessinés de manière à lier les ob- jets extérieurs à la composition, et à les faire paraître appartenir au jardin dont l'œil ne devra pas soupconner le terme. Un bosquet, dont l'emplacement n’est pas in- diqué par la nécessité, doit se planter dans la position la plusriante du local et près de l'habitation, pour le mettre a portée d'offrir une promenade facile autant qu'agréa- ble. Les clairières y seront ornées d’un ou de plusieurs arbres isolés, mais toujours remarquabies par quelque caractère particulier et trés-saillant ; les allées, ou plu- tôt les sentiers en seront très-soignés et décorés par des 68 DES JARDINS. arbustes à fleurs apparentes ou odorantes ; les plantes herbacées, les gazons même peuvent figurer avanta- geusement dans ce genre de composition, dont le plus grand mérite est la grâce, la fraîcheur, et la variété du coup d'œil. Le bocage se forme d’un certain nombre de groupes, tantôt espacés avec goût , d’autres fois assez rapprochés les uns des autres pour former ensemble de grands grou- pes composés. « Quoiqu'un bocage soit beau en tant qu'objet de perspective, dit Whately, il est encore déli- cieux comme lieu de promenade ou de repos; le choix et la disposition des arbres pour les effets intérieurs doivent donc entrer en considération. Les arbres seront rassem- blés en groupes ou plantés sur des lignes variées et irré- gulières, quidécriront diverses figures; leurs intervalles seront contrastés tant dans les formes que dans les di- mensions ; 1] y aura dans quelques endroits de grands espaces entièrement découverts; dans d’autres les ar- bres seront si rapprochés qu’à peine laïisseront-ils un pas- sage entre eux, et dans d’autres encore ils seront aussi éloignés qu'ils peuvent l'être en formant un même groupe. C’est dans les formes et la variété de ces grou- pes, de ces lignes et de ces espaces vides que consiste principalement la beauté d’un bocage. » S'il esthien plan- té, il en résultera de larges clairières, danstoutesles for- mes et toutesles directions , produisant cette multiplicité d'effets qui en font tout le charme. Un arbre seul ne peut étre admis que très-rarement dans l’ensemble d’un bocage, et seulement pour rapprocher des parties trop éloignées, ou pour remplir un trop grand vide. Ce genre de composition peut être plus clair ou plus épais selon l'exigence des situations ; mais danstous les cas ses con- tours seront gracieux etarrondis. Les arbres formant les diflérens groupes dont on la composera doivent être d’un caractère à peu près semblable sous les rapports de leurs formes, de leurs dimensions, de la direction de DES JARDINS. 6) leurs branches, et de la nuance de leur verdure, afin de former toujours un ensemble harmonieux. Le massif est un groupe touffu, garni dans toutes ses parties de taillis, d’arbrisseaux et d’arbustes à fleurs. II exige de belles masses d’une verdure bien variée. On le forme d'arbres, d’arbustes, et même de plantes de di- verses élévations, groupés et réunis avec goût et intelli- gence. Les végétaux les plus bas doivent toujours occuper la lisière, ceux plus hauts le second rang, et ainsi de suite, mais cependant sans former gradin, n1 présenter l’image d’un arrangement combiné. Les massifs sont très- employés aujourd'hui, parce qu'ils peuvent avoir beau- coup d'agrément , quoique d’une étendue très-bornée. Répandus çà et là sur un vaste espace et autour d’une place découverte, entremélés de quelques groupes, ils formeront un ensemble de plantations qui souvent peut remplacer, d’une manière assez avantageuse , le bocage et le bois. Ils ont encore le mérite de présenter de grandes ouvertures qui , si elles sont ménagées avec art, permettront à l'œil de parcourir toutes les perspectives agréables qu’on aura dans les environs. Le bois est un terrain planté, sans dessein apparent, en mélange de taillis et de futaies, ne laissant pénétrer la vue qu’à une très-petite distance. Par cette raison il peut être employé à masquer un petit espace, ce que ne peuvent faire aussi bien les autres plantations. Le bois peut se former d’arbres d’une certaine hauteur, pourvu qu'ils soient assez rapprochés pour ne laisser aucun es- pace vide entre les branches ; c’est alors qu'il prend le nom de futaie. Si les arbres se trouvaient trop éloignés, on les réunirait par le moyen du taillis; celui-ci n’est autre chose que l'assemblage d’un grand nombre d’arbres sans têtes élevées, d’arbrisseaux et d’arbustes. Dans toutes les plantations, de quelque genre qu’elles soient, on doit s'appliquer beaucoup à donner à la ligne extérieure tout l'agrément, toute la grâce dont elle est 7o DES JARDINS. susceptible, et c’est là que l’on reconnaît particulière- ment le bon goût de l'artiste. « Lorsqu'un bois est situé sur une colline, dit le jardiniste moderne, il doit s’é- tendre jusque sur le sommet ; car, s’il laissait apercevoir un espace vide au-dessus de lui, il paraîtrait petit et per- drait le caractère principal qui lui convient ; mais il peut très-bien rester suspendu sur le penchant, cette situation ayant beaucoup de grâce quand quelques parties, des- cendant plus et d’autres moins, forment, par ce moyen, plusieurs enfoncemens qui, se présentant dans diverses directions, produisent un mélange de lumière et d’ombre répandues sur les contours extérieurs du bois ; effet qui est bien préférable à l'aspect d’une ligne uniforme égale- ment éclairée. Les intervalles qui se trouvent entre les parties saillantes et le point le plus reculé de ces en- foncemens , lorsqu'on observe les bois en face ; ou entre les différentes saillies, lorsqu'on les aperçoit de côté, donnent aussi beaucoup d'agrément à la ligne horizon- tale que la cime des plantations dessine sur le ciel, cha- que partie fuyant l’une derrière l’autre à mesure qu’elles s’éloignent de l'œil, et présentant des masses distinctes qui prolongent et varient les perspectives. » Le dedans d’un bois est susceptible de recevoir tous les genres d’embellissemens. On peut y placer des scènes de diffé- rens Caractères, des boulingrins, des quinconces, etc. Quelquefois il est particulièrement destiné à fournir des promenades ombragées; dans ce cas les allées prinei- pales ne doivent pas y rester renfermées pendant un long trajet, parce que l’épaisseur du bois y jetterait une mo- notonie bientôt ennuyeuse. Elles doivent au contraire traverser des clairières bien ménagées, conduire à des élévations d’où l'œil puisse jouir d’un horizon agréable et varié, enfin aboutir à des fabriques pittoresques ou à des lieux de repos. On se plait quelquefois à y tracer des chemins insidieux qui, se croisant et sé mélant les uns avec les autres , laissent le promeneur dans le doute DES JARDINS. 71 sur la route qu'il doit suivre pour arriver au but qu'il se propose ; on donne à cette composition le nom de labyrinthe. Mais, pour qu’elle soit marquée au coin du bon goût, il lui faut une condition essentielle : c'est que l’on soit embarrassé pour y trouver une fabrique que l’on y cherche, mais jamais pour en sortir. Quand on est dans l'attente d’un objet agréable, le désir em- pêche l'ennui ; mais, quand les yeux et l'esprit sont satisfaits, la satiété amène l’indifférence ; on cherche la variété; et si, dans ce cas, onse trouvait retenu dans le labyrinthe, on éprouverait une contrariété qui détruirait tout le plaisir de la promenade. Le moyen d'éviter cet écueil, c’est de ménager de distance en distance des échappées de vue qui permettront au promeneur de toujours s'orienter sur les objets extérieurs. L'entrée d’un bois demande aussi à être ménagée avec beaucoup d'art. Par exemple, un enfoncement entre deux petites collines serait l'endroit le plus favorable pour la placer. « Des lignes d'arbres, dit M. Viart (1), peuvent dès le‘ commencement suivre quelque temps les sinuosités de cette route, en se developpant avec elle sur le milieu d’une pelouse, limitée de chaque côté par des bois touffus, et dont les bords se formeront au moyen de grands massifs séparés par des intervalles toujours moins étendus que la elairière où se dirige le chemin, afin de ne point distraire du but principal. A mesure qu'on avance, les bois venant à se rapprocher, la ligne d'arbres qui faisait la bordure ira se perdre et se fondre dans celle du bois qui servira pendant quel- que temps de cadre à l'avenue. L'espace s’élargira insen- siblement , et donnera naissance à plusieurs clairières , qui s'enfonceront de côté et d’autre dans le fourré, dont (1) Propriétaire et créateur des charmans jardins de Brunehaut , au- teur du Jardiniste moderne. 72 DES JARDINS. les entrées seront divisées tantôt par de petits massifs, d’autres fois par des arbres jetés en avant, mais toujours disposés de manière à ne point interrompre Ja marche de la route, surtout si elle est destinée à former avenue, mais plutôt à la déterminer. Si l'emplacement vient à s'élargir davantage, des groupes d’arbres d’un côté, un arbre isolé de l’autre, que quelque singularité fasse remarquer, ressortiront avec grâce sur la pelouse, et serviront à indiquer la continuité du chemin. Plus loin un buisson aidera à fondre la ligne de ces groupes dans celle que formeront quelques arbres qui se trouveront détachés du bois, quoiqu'ils en suivent les contours. La route , qui jusque-là a parcouru les sinuosités du petit vallon dans lequel elle s'était engagée et a monté peu à peu, arrive à un plateau où la clairière pourra s’élar- gir de différens côtés, par la réunion de plusieurs che- mins qui viendront se Joindre à la route principale ou à l'avenue. » Nous ajouterons, pour terminer, que l’on ne doit jamais planter un bois entièrement en taillis, afin d'éviter une monotonie qui deviendrait insupportable malgré les scènes et les fabriques que l’on emploierait pour jeter un peu de variété. Les forêts n'appartiennent qu'aux grandes composi- tions, et rarement on a à les planter. L'artiste doit s’ap- pliquer à en tirer le meilleur parti possible , soit comme aspect, soit comme site, si un heureux hasard le met dans le cas d’en avoir une, ou seulement une portion , dans le terrain abandonné à sa disposition. Une forêt se compose de grands arbres d’une végétation vigoureuse ; pour qu'elle ait toute la majesté de son caractère il faut leur conserver cet air antique que leur donne la mousse, les lichens et les plantes grimpantes dont leur énorme tronc est couvert. C’est par l'épaisseur de leur feutilage, par la fraicheur qui règne sous leur ombre silencieuse, qu'ils nous inspirent ces sentimens de plaisir DES JARDINS. 73 et d’admiration que nous éprouvons en parcourant Ja solitude mystérieuse où la hache du bûcheron ne s’est pas fait entendre depuis de longues années. Nul arbuste, nulle plante exotique à fleurs remarquables , ne doivent se montrer dans la sombre épaisseur d’une forêt, parce que, rappelant à l’homme ses travaux et ses conquêtes dans les pays lointains, ce souvenir étouflérait dans son cœur le germe des sublimes méditations que doit faire naître la vue d’une nature vierge et sauvage. La ligne extérieure ne veut pas être enjolivée comme dans les autres genres de plantations, mais elle doit offrir des contours grands et majestueux , des arbres élevés four- nissant une ombre épaisse. Si l’on avait l'intention de placer quelques fabriques, soit sur la lisière, soit à Fin- térieur, on les choisirait d’un caractère noble et grand, de manière à être en harmonie avec la majesté du lieu. Une ruine peut aussi y figurer avec avantage, mais il faut qu’elle rappelle à notre esprit des époques mémo- rables de notre histoire. Un reste de couvent gothique, un château féodal, ou même les antiques ruines d’un temple de Teutatès n’y seront jamais déplacés. Une forêt, s'étendant au nord d’une habitation , donne toujours au tableau un caractère grave et imposant ; mais c’est sur- tout par les promenades étendues et variées qu’elle de- vient du plus grand intérêt. Souvent, pour la facilité de la chasse , on la perce par des allées droites et d’é- gale largeur, et cependant cet exercice offrirait le même charme si l’on y formait des routes légèrement sinueuses, d’une largeur plus considérable dans des endroits oùelles formeraient clairière, et où de vastes pelouses pourraient être décorées par des groupes et des arbres isolés. Les chasseurs au tir en trouveraient leur exercice plus fa- cile, la monotonie des allées droites serait détruite, et l’on y gagnerait quelques points de vue intéressans. Ce dernier objet surtout devrait entrer dans le plan pour quelque considération, parce qu'il préviendrait l'mquié- 74 DES JARDINS. tude que l'on éprouve naturellement en parcourant une grande étendue de bois. Les Palissades vertes sont des lignes d’arbres qui se prêtent facilement à une taille régulière. On leur donne différentes figures ; celle d’un mur, d’une rampe , d’arca- des , etc. ; on les emploie ordinairement pour masquer les murailles , les maisons, et tous les objets extérieurs dont la vue n’a rien de pittoresque. On peut pratiquer dans leur épaisseur des jours de différentes formes aux- quels on donne le nom de ka-ha ; ils servent à procurer aux promeneurs la faculté de voir les passans sans en être vus. Les palissades appartiennent exclusivement aux Jardins réguliers ; aussi ne sont - elles plus guère de mode. Autrefois on les employait beaucoup, et on ne se servait guère pour les planter que de charmilles et d’ifs. Les haies sont à présent beaucoup plus employées que les murs pour clore les jardins, surtout ceux paysagers. On leur a donné la préférence, parce qu’elles se confon- dent facilement avec les autres plantations, et par ce moyen ne fixent aucune borne apparente à une compo- sition. On peut quelquefois les employer à clore une fa- brique rustique dans laquelle on tient des animaux ren- fermés , et alors on les soigne davantage, paree qu'elles deviennent plus spécialement un objet d'ornement L’allée couverte appartient plus particulièrement aux jardins publies, et à ceux du genre régulier. Elle con- siste en deux ou quatre rangs d'arbres à feuillage épais et brillant. On tond ces arbres de manière à ne laisser joindre que leur sommet, et à dessiner une voûte de verdure sur la tête des promeneurs. Quelquefois leurs troncs sont dépouillés de branches jusqu'à une certaine hauteur ; d’autres fois on tâche de leur conserver de la verdure , assez pour faire palissade , et l'on forme alors des berceaux. L'avenue diffère de l'allée couverte en ce que sa lar- geur est beaucoup plus considérable, les arbres qui La DES JARDINS. 75 forment plus élevés , et son style plus grand , plus mayes- tueux, La longueur d’une avenue en fait la principale beauté. Plus les arbres dont on la plantera seront sus- ceptibles de grandes dimensions, plus l'effet qu'ils produi- ront par la suite sera imposant. Rarement on les soumet à la tonte, et jamais on ne doit y faire que les élagages indispensables au maintien de leur vigueur et de leur santé. L’avenue ne s'emploie guère que pour encadrer , pour ainsi dire, la perspective d’une façade d’une ar- chitecture remarquable ; elle doit conduire à l'entrée de l'habitation principale , sans quoi elle est de nul effet et hors des convenances. Les arbres qui servaient le plus fréquemment autrefois à ce genre de plantation étaient le tilleul, le marronnier d'Inde, le hêtre, le platane et l’orme. Aujourd'hui on emploie avec plus d'avantages un grand nombre d'espèces exotiques qui ont le mérite précieux de joindre la beauté des fleurs à celle du feuillage. Le quinconce est une plantation d'arbres le plus or- dinairement élevés, toujours à haute tige, et placés en échiquier comme les cases d’un damier. On ne peut l'employer avantageusement que sur un grand espace de terrain ; aussi n'est-il guère d'usage que pour l’orne- ment des places publiques et des jardins de palais. On le plante avec les mêmes espèces que l'avenue. Le berceau, comme nous l'avons dit plus haut, est une espèce d’allée couverte dont les côtés, au lieu d’être à jour, sont garnis d'une verdure aussi épaisse que la voûte. Il y a cette différence que l’allée couverte est toujours faite avec des arbres, au lieu que celui-ci con- siste quelquefois en une charpente légère de menuiserie, de treillage ou de fer, sur laquelle on dispose de la ma- nière la plus avantageuse les branches sarmenteuses des arbrisseaux grimpans. On peut donner à un berceau toutes les dimensions que l’on désire; mais cependant sa longueur ne doit guère dépasser cent ou cent cin- 76 DES JARDINS. quante pas, parce que sa destination est de fournir un espace suffisant seulement pour prendre l'exercice de la promenade sans cependant se promener, c’est-à-dire que c’est plutôt un lieu d’attente que l’on parcourt par des allées et des venues, sans intention de porter ses pas dans un autre lieu. Le berceau a cet avantage sur l'allée couverte, qu'offrant la même fraicheur dans ses om- brages, les yeux et l’odorat y sont encore flattés par le brillant coloris des fleurs et par leur doux parfum. Les tonnelles , cabinets, salles couvertes , ete. , se com- posent de la même manière, et peuvent, quant au carac- ière, se rapporter à ce genre de plantation applicable à toutes les espèces de jardins. Nous devons faire ici une observation essentielle , c’est que toutes les fois que l’on pourra se procurer de l’ombrage dans une salle de verdure sans la couvrir, on fera bien de prendre ce parti à cause du nombre prodigieux d'insectes que la fraicheur y attire, ce qui en rend le séjour désagréable. Si un groupe d'arbres voisins étend son ombre sur cette plantation , ne fut-ce que pendant une partie du jour, on fera très-bien d’en élever les eôtés en palissade, et d’é- laguer le dessus : ceci est surtout nécessaire lorsqu'une salle est formée avec des arbres tels que charmille’, etc. Enfin, les végétaux se prêtent encore à une décoration charmante à laquelle nous donnons le nom de rideau. Souvent la vue d’une muraille triste et enfumée, mais qu'il n’est pas en notre pouvoir d’abattre , vient détruire l'illusion enchanteresse qui, même au sein d’une grande ville, nous transportait au milieu d’un paysage char? mant et nous faisait jéuir, dans un jardin au milieu du tumulle , de douces émotions que la campagne manque rarement de développer dans notre cœur. C’est surtout alors qu’un rideau de verdure est d’une nécessité absolue. Par le moyen du lierre grimpant, de Ha bignone aux fleurs écarlates, et de cent autres arbustes tous plus agréables les uns que les autres, on parvient non-seule- DES JARDINS. 77 ment à se sauver de ce grave inconvénient , mais on fait même un objet charmant de ce qui, sans cela, nous eût inspiré de l'ennui et du dégoût. Si les végétaux ligneux offrent, comme on vient de le voir par cette rapide esquisse, les plus grandes ressources aux décorateurs des jardins, les plantes herbacées n’en sont pas moins un des premiers ornemens, quand elles sont distribuées avec intelligence. Ce sont elles qui don- nent les fleurs les plus belles et les plus attrayantes par leur vif éclat et leur enivrante odeur. Ce sont elles en- core qui fournissent ces prairies émaillées sur lesquelles l'œil aime tant à se reposer , enfin elles forment le fond du tableau dont toutes les autres productions ne sont pour ainsi dire que les épisodes. Nous allons présenter à nos lecteurs les principaux modes de les employer avec le plus d'avantage. Les prairies. Nous comprenons sous ce titre les prai- ries naturelles, les pelouses, les gazons, les tapis, et nous entrerons dans quelques détaiis sur les plantes dont on doit les former , sur la manière de les semer, et sur les moyens de les entretenir. Nous placons ici ces ren- seignemens, parce que tout leur eflet , toute leur beauté dépendent de leur culture, et parce que nous n’aurons plus occasion de revenir sur ce sujet. Les prairies naturelles sont aussi nécessaires dans une grande composition de jardin paysager , que les massifs et les gazons le sont dans un espace plus borné. Elles se sèment et cultivent comme les prés ordinaires; ainsi nous n’entrerons pas ici dans des détaiis qui appartiennent plus spécialement à la grande culture ; seulement nous nous bornerons à quelques observations sur ce sujet, et nous nous étendrons un peu plus sur la manière de l’encadrer agréablement dans un tableau. On doit se proposer, en créant une prairie, de réunir l’agréable à lutile ; ainsi, lorsqu'on fera le choix des semences, on aura égard au plus ou moins de produit qu'elles pourront donner , et 78 DES JARDINS. à la qualité des alimens qu’elles fourniront aux animaux domestiques. Chaque espèce devra aussi être placée dans le terrain qui lui convient davantage : nous allons tâcher de donner un tableau exact qui puisse diriger le culti- vateur. ; 1°. Terrain bon et médiocrement humide. Fro- mental (avena elatior); avoine pubescente (avena pu- bescens); fétuque élevée (festuca elatior); flouve odorante (anthoxanthum odoratum); dactyle pelo- tonné (dactylis glomerata); houque laineuse (Aolcus lanatus); paturin des prés (poa pratensis); paturin à feuilles ovales (poa angustifolia) ; ivraie vivace (Lo- lium perenne); crételle cynosure (cynosurus crista- tus ); brise tremblante (briza media); agrostis chevelu (agrostis capillaris); foin rouge (agrostis rubra); brome gigantesque (bromus giganteus ). 2°. Terrain marécageux.Fétuqueflottante (festuca fluitans); vulpin des prés (alopecurus pratensis); vulpin genouillé (alopecurus geniculatus); fléole des prés (phleum pratense); mélique blanc (melica cæ- rulea); paturin aquatique (poa aquatica); paturin des marais (poa palustris); agrostis genouillé (agrostis geniculata); orge des prés (kordeum secalinum ) ; canche aquatique (aira aquatica); houque odorante ( holcus odoratus). 3°. Terrain sec et sablonneux. Avoine des prés (avena pratensis ); fétuque des brebis (festuca ovina); fétuque couchée (festuca decumbens ); fétuque durète (festuca duriuscula); fétuque rougeñtre (festuca rubra); vulpin des champs ( alopecurus agrestis ) ; houque soyeuse (Lolcus mollis); mélique ciliée (melica ciliata) ; paturin commun (poa trivialis ; paturin bul- beux (poa bulbosa); canche flexueuse (aira flexuosa); canche blanchâtre (aira canescens); agrostis traçant (agrostis stolonifera). 4°. Terrain de toutes sortes. Fiouve odorante (an- DES JARDINS. 79 thoxanthum odoratum) ; dactyle pelotonné (dactylis glomerata); houque laineuse (Aolcus lanatus) ; mé- lique penchée (melica nutans); paturin des prés (poa pratensis); paturim annuel (poa annua); agrostis des chiens ( agrostis canina ). Nous ne prétendons pas avoir cité dans cette liste toutes les plantes graminées qui peuvent entrer dans Ja formation d’un fond de prairie; seulement nous avons indiqué celles qui passent généralement pour fournir le foin le meilleur et pour en donner le plus abondam- ment. Lorsque l’on sèmera une prairie naturelle, la surface du sol sera préalablement nivelée et aplanie autant que possible , épierrée, afin de ne point gêner le fauchage. Les graines fines ne seront jamais semées que sur un hersage, et très-peu recouvertes de terre; pour cela on se sert d’une herse à dents courtes ou d’un rouleau. Dans le cas où l’on aurait des graines fines et des grosses, on sèmerait les grosses les premières, on herserait ; on sémerait ensuite les fines, puis on passerait le rou- leau. On peut mêler aux semences d’une prairie naturelle des graines de plantes légumineuses vivaces et d’autres familles, telles, par exemple, que des mélilots, trèfles, lotiers, luzernes, sainfoins, spergules, pimprenelles, scabieuses , boucages, etc. , etc. Outre qu’elles l’orneront par leurs fleurs , elles en augmenteront encore le produit et la qualité. Quelques liliacées rustiques y feront aussi un charmant effet par l’éclat et la vivacité de leurs gran- des corolles; enfin les orchis, les néotties et les par- nassies, qu'on y rapportera avec la motte, y figureront d'une manière d'autant plus agréable, qu’on n'a guère d’autres moyens de les cultiver. Loin de détruire, dans une vaste prairie, les plantes qui y croissent spontané- ment, on doit au contraire aider à leur multiplication, en tant qu'elle ne nuirait pas à la qualité de la récolte ; 80 DES JARDINS. les irrégularités produites par ces végétaux sont trop peu importantes pour modifier l'effet du plan général , et néanmoins ils jettent mille agrémens dans l’ensemble et les détails par la multitude de teintes dont ils parent, selon les saisons, les tapis de verdure. Les prairies doivent occuper les terrains un peu hu- mides placés au fond des vallons, le long des rivières ou ruisseaux , entre les bois, etc. On peut détruire leur uniformité par quelques arbres isolés ou groupés, par des massifs ou des bosquets ; mais jamais les fabriques ne doivent figurer dans le milieu, ou même près de la lisière, à moins qu’elles ne soient tout-à-fait appropriées aux convenances locales. Leur ligne extérieure doit être dessinée avec grâce dans les contours; mais plus ordi- nairement c’est la lisière voisine qui la détermine , celle d’un bois, par exemple, parce que rarement la prairie est considérée comme sujet principal. Nous avons dit qu’elle sera en terrain humide, par la raison qu'il n'est pas possible de l’arroser artificiellement, comme on peut le faire pour un gazon ou un tapis. Du reste, tout son entretien se borne à quelques coupes tous les ans, à réparer par des semis les places dégarnies, et à donner des fumures quand elles sont nécessaires. Les pelouses tiennent de la nature des gazons et de celle des prairies. Elles ne différent des premiers que parce que ceux-ci exigent des soins, tandis que les troupeaux et la nature font tous les frais de l'entretien des pelouses. Comme les prairies , elles peuvent être se- mées de toutes les espèces de plantes graminées et au- tres appartenant à la section des fourrages ; mais, pour être belles et bien garnies, elles ne doivent être fau- chées que par la dent des animaux. Les pelouses peuvent occuper les terrains secs et élevés, et présenter dans ces positions les mêmes avantages que la prairie dans les lieux bas et marécageux. Comme les plantes qui les composent n'arrivent jamais à tout leur développement, DES JARDINS, 81 il est assez inutile d’y mêler des fleurs qui ne parvien- draient pas à leur épanouissement. Les gazons s'emploient ordinairement dans tous les jardins d’une petite étendue, où on les destine à ména- ger des points de vue, ou à figurer une vallée ou une petite prairie. Le plus souvent ils occupent la partie centrale de la composition, et le devant de l'habitation qu'ils découvrent de manière à permettre à l'œil de saisir d’un des appartemens l’ensemble du jardin et ses prin- cipaux détails. Le premier mérite d’un gazon est de présenter une verdure brillante et uniforme ; pour cela il faut l’entretenir avec grand soin, le tailler souvent, et le purger minutieusement des mauvaises herbes. Ses contours irréguliers peuvent être accompagnés de mas- sifs d’arbustes à fleurs brillantes, et entourés cà et là de plates - bandes que le bon goût et les localités déter- minent. C’est du choix des plantes dont on le forme, et surtout de leur analogie de culture avec la qualité du terrain où l’on doit les semer, que dépendent tous les agrémens d'un gazon. On doit donc, avant de se déterminer sur le choix, examiner les plantes graminées qui conviendront le mieux à la nature du sol. Les plus ordinairement employces sont : l’ivraie vivace (lolium perenne), vul- gairement connue sous le nom de ray-grass, et de gazon anglais ; la fétuque ovine ou coquiole (festuca ovina) ; la fétuque glauque (festuca glauca), et la fétuque rouge (festuca rubra). On est dans l'usage de méler à leurs semences un peu de graines de lotier corniculé, de trèfles blanc, rouge, et fraise, et d’autres plantes très- basses et à fleurs apparentes. On y ajoute, depuis quel- que temps, des colchiques, safrans ou crocus, orchis, et autres végétaux analogues. Les gazons se font de deux manières, par semis et par placage. l Le semis ne doit se faire que sur un terrain parfaite- ment préparé par des labours et des fumures, exacte- ke 6 82 DES JARDINS. ment purgé de toutes pierres et racines, et nivelé au râteau autant que possible. Les graines , très - bien nettoyées et épluchées, afin de les rendre nettes de toutes mauvaises herbes, sont semées à la volée, dans la proportion de cent livres de ray-grass par demi-hectare, de cinquante livres de fétuque ovine, et de soixante et dix livres de fétuques rouge et glauque. On choisit pour faire ce semis un jour pluvieux du printemps. Lorsque les semences sont jetées sur le sol, on les recouvre légè- rement à la herse ou au râteau , et l’on passe le rouleau. Cette dernière opération se répétera le plus souvent pos- sible, afin de faire beaucoup taller les plantes, et d'obtenir par ce moyen une verdure épaisse et uniforme. Les soins qui restent à prendre consistent à le peigner et nettoyer souvent, à le tondre au moins quatre fois par an tou- jours avant l’époque de la fructification , et enfin à l'arroser pendant les sécheresses. La mousse vient sou- vent s’en emparer et le détruire en peu de temps, si on ne prend le plus grand soin de l’en extraire dès qu'elle se montre, ou au moins à l’automne ; on passe à plu- sieurs reprises un râteau dont les dents serrées retiennent et arrachent la mousse sans nuire aux autres plantes. Le meilleur moyen serait d'empêcher qu’elle y crût, et l’on y parviendrait en répandant chaque année une certaine quantité de terreau consommé, ou de plâtre, de chaux, ou de cendres noires ; on y trouverait encore cet avantage, qu’en préservant le gazon des plantes pa- rasites, ces engrais augmenteraient la vigueur et la beauté de sa végétation. Enfin, quand malgré toutes ces précautions la mousse, favorisée par quelques circons- tances particulières, s’est trop multipliée , il ne reste plus qu’un moyen; c’est de retourner le gazon par un bon labour, de laisser reposer quelque temps le terrain, et de semer de nouveau. On gazonne en placage lorsque l’on veut former des talus, des bancs, des bordures, ou enfin lorsque l’on DES JARDINS. 83 veut couvrir de verdure un plan incliné quelconque, sur lequel les graines glisseraient ou seraient entrainées par la pluie. On enlève dans une prairie, ou sur le bord des chemins, des plaques de gazon de deux pouces d'épaisseur; on rapporte ces morceaux les uns auprès des autres comme des dalles, on les réunit le mieux possible, et lon bouche les interstices qui peuvent exister entre eux avec de la terre, sur laquelle on jette un peu de graine. Pour les ajuster et les mettre bien de niveau, on glisse plus ou moins de terre dessous, selon Je besoin ; et enfin, si la pente est très-rapide , on les fixe par le moyen de chevilles en bois que l’on enfonce au marteau. Ces opérations faites, on aplanit le tout au rouleau ou à la batte; on arrose copieusement, et l’on donne ensuite les mêmes soins que pour les autres gazons. On emploie quelquefois le procédé du placage, dans un petit espace, pour se procurer un gazon dont on veut jouir de suite. Il est encore un autre moye de semer un talus, si l’on n'avait pas la facilité de se procurer des plaques de gazon. On prend de la terre un peu argileuse, mais cependant d’une bonne qualité végétale, on la délaie dans un baquet ou un tonneau avec une sufli- sante quantité d’eau pour la mettre en une espèce de mortier épais et liant; on y ajoute des graines de ray- grass ou de fétuque, et on mélange bien le tout. Après avoir préparé le talus que l’on veut semer, en donnant de la solidité à sa surface par le moyen d’une batte , on le couvre, avec la truelle, où même les mains, d’une couche d’un pouce ou deux de mortier de terre. On a soin d’arroser peu et doucement, seulement pour main- tenir le terrain dans une humidité suflisante à la végéta- tion , et pour ne pas entrainer le semis, qu’il faut même garantir des grandes pluies jusqu'à .ce que les plantes aient acquis assez de développement pour maintenir le tout au moyen de leurs racines. 54 DES SARDINS. Il arrive parfois qu'un gazon, de quelque manière qu’il ait été fait , se dégarnit dans quelques places ombragées, ou même sans causes apparentes. Dans le premier cas on se contente de remuer légèrement la terre où sont les taches, de semer et recouvrir ; dans le second on agit de même, mais avec la précaution d'enlever une cer- taine épaisseur de la surface du sol et de remplacer avec de la nouvelle terre, ou d'y mélanger une bonne quantité de terreau à moitié ou aux deux tiers consommé, parce que ces taches ne peuvent être occasionées que par la mauvaise qualité ou la médiocrité du terrain. Les tapis se composent de toutes les espèces de plan- tes, vivaces , annuelles , rampantes ou érigées , offrant de l'intérêt dans leurs fleurs ou leur feuillage. Is servent à parer le sol sur lequel s'élèvent les groupes, les. bos- quets et massifs. Ils ont cela de particulier qu'ils peu- vent offrirun coup d'œil pittoresque dans leurs détails comme dans leur ensemble. L'artiste, qui voudra les re- produire dans les jardins paysagers avec tout leur agré- ment, doit aller étudier dans les champs et dans des sites analogues à ceux qu'il veut décorer, les espèces qu'il choisira ; s'il y admet des plantes exotiques , il aura le soin de ne pas y mettre celles dont les fleurs trop bril- lantes fixeraient l'attention aux dépens de l'effet général : celle-ci sont destinées à composer des groupes ou des massifs dans des places réservées. Le tapis, étant formé de différentes fleurs , dont chacune doit avoir sa place particulière marquée par le goût, ne peut être semé comme les gazons ; il se cultivera donc et se sèmera ou plantera commele parterre; mais, autant qu'onle pourra, on cachera les traces de culture au moyen de plantes très-basses et rampantes qui couvriront la surface de la terre, et déroberont aux yeux les marques récentes de Ja main qui les a plantées. Les végétaux herbacés, que l’on appelle vulgairement fleurs, offrent encore un bien plus grand avantage que DES JARDINS. 85 ceux dont nous venons de nous occuper, parce qu'ils servent également à Ja décoration des grandes composi- tions, et qu'ils sont à la fois le principal ornement des petits dit Les fleurs ont tant de charmes, tant d’em- pire sur nos sens, qu elles sont toujours bien placées dans quelque lieu qu’on les mette ; elles appartiennent à tous les caractères de scènes , à tous les genres de com- positions , ne blessent les convenances nulle part, et plaisent partout. Mais cependant il est des moyens d'augmenter beaucoup le plaisir qu’elles nous donnent, et ces moyens consistent à les placer, isolément ou groupées, dans les circonstances les plus favorables pour se faire remarquer ou se faire valoir les unes et les autres. La nature a divisé les plantes en annuelles et vivaces; ce sont ces dernières surtout que l’on destine à l’ornement des plates-bandes et des massifs très-grands , placés dans l’intérieur du jardin. Le milieu de ces plan- tations est ordinairement garmi par de petits arbrisseaux à fleurs brillantes , entremélés entre eux et avec les plan- tes vivaces les plus hautes. [ls forment ensemble Ja ligne intérieure principale, qui doit toujours suivre les mêmes courbes, les mêmes sinuosités que la ligne extérieure. À mesure que l’on rapproche les lignes du milieu à la circonférence, les végétaux dont elles sont compo- sées doivent diminuer de hauteur, et finir , de dégra- dation en dégradation, par n'être guère plus élevés que ceux formant la bordure dont on entoure ordinaire- ment ces petites compositions. Soit que l’on plante les fleurs dans un ordre régulier ( en rang , en échiquier ou en losange) , soit qu’on les y place dans un ordre irrégu- lier et comme au hasard, on doit laisser entre elles un espace assez grand, jamais moindre d’un pied, afin d’avoir de Îa place pour y intercaller, lorsque leurs fleurs seront passées , des plantes en pots, ou annuelles des ognons, des griffes, etc. , dont les brillantes corolles feront un effet charmant au travers du feuillage des vé- 86 DES JARDINS. gétaux vivaces. Par cette méthode on se ménage des jouissances pour toutes les saisons. Les plates - bandes sont très en usage dans les jar- dins fleuristes proprement dits : ce sont des espèces de rubans, autrefois en ligne droite, aujourd’hui inflé- chis, serpentant dans tous les sens et suivant toutes les sinuosités des lignes des allées, bosquets, massifs et autres dessins. Leur longueur n’a pas de dimersion dé- terminée, mais leur largeur est calculée sur la facilité que le jardinier doit avoir pour arroser, biner et soigner les plantes que l’on y cultive, sans être obligé d’y entrer. Cette largeur , par conséquent , ne peut jamais excéder six pieds, et n'être jamais moindre de quatre, sous peine de produire un effet mesquin : elle doit aussi être la même dans toute la longueur, car c’est là le caractère qui détermine la plate - bande. Les plantes n’ont pas ri- goureusement besoin d'y être placées dans l’ordre de leur élévation, parce que souvent on y plante des col- lections (tulipes, jacinthes, renoncules, etc.), dont les tiges sont toutes à peu près de la même grandeur ; mais la plate-bande sera élevée de deux ou trois pouces au-dessus du niveau des allées, et le centre s’exhaussera en dos d’âne de six ou huit pouces. La corbeille ne se place que dans un lieu remarqua- ble ; c’est le luxe d’un parterre. Elle forme le plus ordi- nairement un cercle parfait, quelquefois un polygone, et très-rarement une étoile, ou une autre figure, mais affectant toujours la forme circulaire. Le centre sera en- core plus élevé que dans la plate-bande, et marqué par un arbuste des plus remarquables par ses fleurs, ou par une belle plante d’un choix recherché. L'espace du mi- lieu à la circonférence sera garni de plusieurs rangs de plantes de collection, ou d’autres, mais alors se fai- sant distinguer parmi toutes celles du jardin par leur éclat et leur rareté. La corbeille, pour produire toutson effet d’apparat, doit être entourée d’une bordure élé- DES JARDINS. 87 gante, d’un beau vert, et assez solide pour soutenir les terres ; le buis est le seul végétal qui remplisse parfaite- ment toutes ces conditions. Le massif n’affecte aucune forme particulière, et n’a pas de place déterminée. On le jette çà et là , selon que le goût indique l'endroit où il produira un eflet agréa- ble. On doit le composer de plantes vivaces , les plus élevées dans le milieu et les plus basses sur les bords. Comme :il est essentiel qu'il conserve une belle verdure pendant une grande partie de l’année, on est assez dans l'usage d'y planter quelques arbrisseaux des plus petits, mais dont le feuillage et les fleurs offrent de l'intérêt. Les planches, formant un carré long régulier, étaient autrefois très - employées ; mais aujourd’hui elles sont entièrement passées de mode. Si on en fait quelquefois dans un jardin , ce n’est guère que dans une place écartée, et seulement pour y semer les plantes annuelles que l’on doit repiquer en place dans les plates-bandes, corbeilles et massifs : on s’en sert encore comme pépinière, ou comme lieu de dépôt. Les fleurs en vase ou en pots produisent toujours un effet charmant dans les jardins mixtes ou réguliers ; mais on peut les envisager de deux manières sous le rap- port de l’ornement : 1° sous celui de leur beauté propre ; 2° sous celui de l'élégance et de la richesse des vases qui les contiennent. C’est sous le premier point de vue que nous devons les considérer ici. Le plus souvent onne cul- tiveen pots que les plantes deserre et celles de collection, telles qu’auricules , œillets, etc.; celles-ci doivent être placées sur un gradin en amphithéâtre , près de l’habi- tation, On mélange leur couleur de deux manières qui produisent chacune également de l'effet : 1° par dégra- dation de couleur, c’est-à-dire, que l’on réunit toutes les corolles de la même nuance, sur le même rang, en commencant par la teinte la plus foncée, puis celle qui l'est moins , et ainsi de suite de dégradation en dégra- 88 DES JARDINS. dation jusqu’à la nuance la plus pâle et la plus fugitive : ces rangs peuvent se faire dans le sens de la longueur du gradin, mais ordinairement ils plaisent davantage dans le sens de sa largeur ; 2° par opposition : dans ce cas on place l’une à côté de l’autre les couleurs les plus oppo- sées, les plus tranchantes, celles qui sont le plus sus- ceptibles de se faire réciproquement valoir. On tire encore parti des fleurs en pots pour l’ornement des murs de ter- rasse : mais alors, comme nous l'avons déjà dit, c’est plu- tôt pour la beauté des vases que pour celle des plantes, car on se contente d'y placer quelques géraniers rus- tiques , des aloës , et autres végétaux peu précieux. Les bordures nous ofiriront un article d’autant plus intéressant qu'il a étéoublié , ou au moins fort négligé var les auteurs qui ont traité de l’art des jardins. Cependant rien n’est utile comme une bordure bien faite et soignée, car c’est elle qui seule peut arrêter les contours d’une composition, les dessiner avec netteté, et leur donner toute leur grâce, outre qu’elle contribue à maintenir la propreté des allées et à donner à un jardin ce coup d'œil d'élégance recherchée qui plaît à tout le monde. Nous diviserons les bordures en annuelles et vivaces, par la raison que non seulement elles ne se composent pas des mêmes végétaux, mais encore qu’elles ne sont pas destinées tout-àa-fait aux mêmes usages. Les bordures annuelles ou lignes ne s'emploient que très - rarement pour dessiner la ligne extérieure d’une composition quel- conque, mais le plus souvent en ce qu’on appelle contre- bordure, ou second rang , espacé de la véritable bor- dure par une plate-bande plus ou moins large. On les plante encore quelquefois pour accompagner des lignes intérieures tracées dans des massifs ou des gazons. La ligne doit se composer de plantes à tiges droites, très-garnies de fleurs dans diverses nuances. Le pied d’alouette nain est très -avantageux pour ce genre de décoralion ; on le sème en place , ou on le repique. La DES JARDINS. 89 bordure vivace peut réunir l’utile à l’agréable , c’est-à- dire qu’on peut faire choix de plantes dont les fleurs auront du mérite , soit par leur beauté, soit par leur odeur, en même temps que leurs tiges auront assez de fermeté pour former des touffes capables de soutenir les terres. Le premier mérite d’une bordure vivace, c’est d’être d’une belle verdure, taillée parfaitement net des deux côtés , de manière à former une ligne de quelques pouces d'épaisseur , ayant en hauteur le double de sa largeur, et n’offrant aucun rameau qui la dépasse. Plus ses côtés seront droits et unis, plus la composition qu’elle entourera sera pure dans'ses contours. Le buis nain pa- rait le végétal le plus approprié à prendre cette netteté de forme ; aussi, malgré toutes les tentatives que le goût de la nouveauté a fait faire, on a toujours été obligé d’y revenir, faute d’avoir pu trouver une plante pour le remplacer plus utilement. Lorsqu'une bordure est bien entretenue, souvent taillée , son agrément et son utilité marchent de pair ; mais, pour peu qu'on la néglige, l'agrément disparait et les inconvéniens naissent : la bordure s'étale , se dégar- nit , perd sa régularité ; elle forme des touftes épaisses, qui se peuplent bientôt d'insectes pernicieux et de co- limacons extrêmement nuisibles aux jeunes plantes. Il résulte de tout ce que nous venons de dire que l'on a deux précautions essentielles à prendre lorsque l’on veut faire de jolies bordures : 1° d’en avoir le plus grand soin en les nettoyant de toutes les mauvaises her- bes qui croïssent au travers, et en les taillant trois ou quatre fois par an; 2° de faire un bon choix de plantes lorsqu'on les forme. Nous allons nous arrêter un peu sur ce dernier point. Les bordures annuelles, oulignes, appartiennent à de grandes ou à de petites compositions; et, pour con- server leurs convenances, il faut qu'elles soient hautes pour les premières, basses pour les secondes. Le pied go DES JARDINS. d’alouette peut convenir à ces deux lignes à cause de sa variété élevée et de sa variété naine; la balsamine forme des bordures moyennes; la reine - marguerite offre deux variétés, l’une haute et l’autre basse ; les gi- roflées sont dans le même cas, et ces quatre espèces ont sur toutes les autres plantes l'avantage d'offrir des fleurs très-apparentes, d’un bel effet, ayant un grand nombre de nuances toutes très-vives ; aussi doivent-ellés être employées de préférence. Les plus intéressantes qui se présentent ensuite sont : l’athanasie à fleurs jaunes, les juliennes , et le mélilot à fleurs bleues ou trèfle musqué. Il est un autre genre de bordures annuelles que lon fait avec des plantes bulbeuses, telles que tulipes, nar- cisses, bulbocodes, colchiques, galanths, iris, jacin- thes, safrans, etc. Elles sont fort agréables sous le rap- port des innombrables et brillantes couleurs dont leurs corolles sont ornées ; mais elles ne durent que quelques jours , et leur feuillage est à peu près de nul effet. Les bordures vivaces sont celles qui offrent pour le choix le plus grand nombre de plantes, les unes in- téressantes par leur feuillage seulement, les autres par leurs fleurs, et d’autres enfin par leur odeur aromatique ou par leurs fruits; la fraise est dans ce dernier cas. Parmi les plus basses nous citerons l’'anémone hépati- que, dont les fleurs , affectant trois ou quatre nuances, tranchent d’une manière charmante sur le vert brillant de ses épaisses touffes de feuillage; la marguerite vi- vace et ses nombreuses variétés ; les primevères et les oreilles d'ours dont on peut avoir d'immenses collec- tions ; les staticés ou gazons d’olympe, d’une verdure très-agréable et très-fournie , mais ayant le défaut de loger beaucoup d'insectes; l’anthémis odorante ; l’alysse saxatile ou corbeille dorée, dont les charmans corym- bes d’un jaune éclatant couvrent entièrement la plante peudant fort long-lemps, mais qui, plus encore que la sialicé , a le défaut de s’élargir beaucoup ; plusieurs DES JARDINS. LOL espèces de saxifrages bleus, blancs, ou violets; le draco- céphale d'Autriche, dontles largestoufles se couvrent d'é- pis d’un très-joli pourpre bleuâtre; la linaire à feuilles d’orchis ; les œillets mignardise , de poëte, de la Chine, et de mai; enfin la violette et ses espèces et variétés, de toutes les saisons, blanche, tricolore, odorante, etc. Les bordures vivaces plus élevées se feront avec des végétaux dont les fleurs ne sont pas toujours très - remarquables , mais qui répandent une odeur aromatique de toutes les parties de la plante ; tels sont : les absinthes ; l’hysope ; la sauge, dont le feuillage glauque, presque argenté, fait un effet pittoresque en se détachant sur les masses vertes des groupes d’arbrisseaux ; la camomille romaine ; Ja lavande; la mélisse ; la matricaire; l'origan ; le ro- marin , le thym, etc. S IL. Des Eaux. Après les végétaux , les eaux sont ce qu'il y a de plus agréable pour la décoration des jardins , quel que soit leur genre. Elles figurent avec avantage dans toutes les scènes , et jettent sur les tableaux une vie , un mouve- ment, qui agissent sur notre imagination comme la fraicheur de leurs bords agit sur nos sens. Nous divi- sons les eaux en naturelles et artificielles , et ces deux divisions se subdivisent encore en non - fluentes , c’est- à-dire , n'ayant par elles - mêmes aucun mouvement sen- sible, en courantes et jaillissantes. Les eaux naturelles nous offriront les sources, fontaines, lacs, étangs , ruisseaux , rivières, marais, marres, torrens, Ca- taractes et cascades. Les eaux artüficielles nous don- neront le bassin , le jet d’eau, et la rivière an- glaise. La source n’a pas de bassin, c’est le commencement d’un ruisseau qui prend sa marche et fuit à travers le paysage dès l'endroit même où il sort de terre. Une 92 1 DES JARDINS. source pent être jaillissante , mais cette circonstance est si rare que lartiste doit la regarder comme une faveur extraordinaire que lui fait le hasard. Dans de certains terrains il est possible , par le moyen d’un tuyau de bois enfoncé dans la terre jusque sur un courant souterrain, d'interrompre son cours, et de le forcer ià s’élancer au dehors en gerbe ou même en jet. Mais, abstraction faite de ces heureuses circonstances , si une source se pré- sentait dans une partie élevée du terrain, on pourrait facilement , en la masquant aux yeux pendant un certain espace , la faire reparaître dans des rochers ou des rocail- les, la faire tomber de quelques pieds d’élévation , et li donner ane expression pittoresque pleine de grâce et de vérité. Mais il faut pour cela conserver les convenances, et que le rocher ne paraisse pas plus avoir été apporté là pour la source, que la source amenée pour le rocher. La nature seule peut fournir des modèles de ce genre de composition , et tout artiste qui prétendra suppléer à l'observation par les combinaisons de l’art ou de l’ima- ginalion , sera certain de manquer son objet, qui est la représentation parfaite de cette nature qu'il n'aura pas étudiée. La fontaine a de grands rapports avec a source; mais ce qui la caractérise, c’est le bassin dans lequel séjourne ses ondes limpides, soit que teur surabondance alimente un ruisseau à sa naissance, soit qu'elle s’infiltre et dis- paraisse dans la terre. Dans le jardin paysagiste, si la fontaine se trouve dans une partie découverte et fréquen- tée, on doit l’orner parune fabrique élégante ; mais si, plus heureusement située, elle se trouve ombragée par les arbres d’une forêt, par ceux d’un bois ou d’un bosquet, si son lit est placé dans Le fond d’un vallon solitaire, les embellissemens qu'elle exige doivent sembler être en- tièrement l'ouvrage de la nature : un saule pleureur dont l'extrémité des rameaux tombera en longues guirlandes , un gazon, un bocage et quelques fleurs DES SARDINS. 93 des champs, voilà ce qui plaira davantage lorsqu'on ira se reposer sur ses bords. Le lac est un bassin naturel dans lequel des eaux tranquilles séjournent, sans que l’on puisse leur trou- ver d'issue en cas que l'on voulût les en faire échapper. S'il n’a une immense étendue, si la nature n’en a fait tous les frais , il n’est plus qu'un objet mesquin et ridicule , qu'une marre insignifiante, quoique décorée d’un nom pompeux. Ordinairement un lac est formé par un cou- rant d'eau qui, rencontrant un bassin plus profond que son lit et sans ouverture par où 1l puisse continuer sa course, le remplit et s’y élève jusqu’à ce que les eaux couvrent un espace assez grand pour que l'infiltration et l'évaporation puissent absorber la même quantité d’eau que le courant y amène. II résulte de ceci que les îles formées dans un lac, n’étant que des monticules que les ondes n'ont pu atteindre, ne doivent pas avoir de figure déterminée comme celles des rivières, mais bien affecter des formes irrégulières, peu allongées, n'ayant point de rapport dans leurs contours avec ceux des bords du lac. Les rives de ces pièces d’eau, ayant les mêmes causes de formation que les îles, doivent aussi présenter une suc- cession de baies et de caps extrêmement variés dans leur ligne, et produisant une multiplicité d'effets dans leur étendue. L'artiste mettra son talent à prononcer davantage le caractère de ces sinuosités , mais en suivant la même marche que la nature, c’est-à-dire qu'il pourra avancer davantage les caps pour les rendre plus pit- ioresques , enfoncer davantage les baies, et couvrir leurs rives de frais ombrages et de quelques fabriques. Il est encore une chose sur laquelle il doit porter son atten- tion : c’est l’ouverture par laquelle entrent Les eaux, et celle par laquelle elles sortent, si toutefois une rivière ou un ruisseau traversent le lac. L'ouverture par où elles s échappent n'est ordinairement qu'un eflet de leurs efforts, effet qui produit le plus souvent des chutes et 94 DES JARDINS. des cascades que l’art peut imiter d’une manière très- vraie. L'entrée doit avoir un caractère tout différent : la rivière et le ruisseau, en versant leurs eaux dans le lac, les dirigent toujours au centre, et, loin d’altérer les rives, les fortifient en y déposant sans cesse les limons et les terres qu'ils charrient avec eux; d'où il résulte qu’on peut sans pécher contre la vérité, y former quelques avancemens en forme de jetée plate, imitant des allu- vions naturelles. L'étang est formé, comme le lac, par un courant ar- rêté dans sa course ; il n’y a que cette seule différence , c'est que l'étang a une digue bâtie par la main des hommes, et sur laquelle on peut très-avantageusement placer des usines utiles et faisant fabrique. Ordinaire- ment d’une assez médiocre étendue, il est difhicile d'y créer des îles , et de lui donner l'apparence d’un lac. Ce- pendant ou y réussit quelquefois en masquant sa chaus- sée , et en déguisant toutes les formes qui lui sont ordi- naires. Pour cela, on élargit la partie qui fournit entrée au ruisseau, on donne à ses rives des développemens arrondis et naturels, on détourne le courant formé par la surabondance des eaux; et, au lieu de le laisser s'échapper par une vanne de la chaussée, comme c'est l'usage, on creuse vers le milieu d’un des côtés de l'étang un lit artificiel dans lequel on le fait passer en formant un ruisseau qui, après avoir serpenté un instant, se précipitera en cascade à une distance assez éloignée de la pièce d’eau pour donner le change à l'esprit de l'ob- servateur. Du reste, les rives de l'étang sont susceptibles de recevoir les mêmes embellissemens que celles du lac ; les saules pleureurs, argentés, le peuplier, l’aune , le tupelo et le cyprès chauve , foarniront sur le bord de ses eaux transparentes un ombrage pittoresque et déli- cieux. Le ruisseau est l'âme d'un paysage ; de toutes Îles eaux ce sont celles qui se présentent avec le moins de DES JARDINS. 95 prétentions, et cependant qui produisent l'effet le plus séduisant. On aime à suivre son cours sinueux au milieu de la prairie émaillée où ses ondes, transparentes comme du cristal, roulent paisiblement sur un sable pur; on le suit à travers les bocages où sa marche, tantôt arrêtée, tantôt précipitée par les accidens du terrain , s'annonce par un murmure qui porte l’âme à une douce rêverie ; mais c’est surtout lorsque , surmontant un obstacle, il s’élance en bouillonnant à travers les rochers , et se pré- cipite en cascade dans le bassin que ses ondes écumeuses se sont creusé dans les fissures de la roche; c’est alors qu'il déploie tous les charmes mystérieux que la nature lui a donnés pour émouvoir le cœur, pour plaire et séduire les hommes les plus indifférens. L'artiste s’em- parera de son cours pour le diriger avec goût et le faire serpenter dans tous les lieux de la composi- tion où 1l se trouvera en convenance; mais il ne faut pas pour cela croire pouvoir conduire sa marche ar- bitrairement. Pour atteindre le naturel, dans un jardin paysager, il ne faut pas violer les lois de la nature : les eaux tendent toujours à s'échapper dans une pente par le chemin le plus droit et le moins long : il ne fant donc pas leur faire louvoyer une colline sous le vain prétexte d’allonger leur cours. Si on veut leur faire parcourir un grand espace , il faut que ce soit sur un terrain en pente insensible , afin que l’œil ne puisse s’apercevoir de cette contravention envers les lois de la gravité. Les bords d'un ruisseau ne doivent pas se montrer toujours faciles : il faut quelquefois qu'un accident de terrain ou de plantation oblige le promeneur à s'éloigner de son lit pour le retrouver plus loin avec un nouveau plaisir. C’est dans cet espace dérobé aux yeux indiscrets par des mas- ses épaisses de verdure, par des buissons impénétrables à celui qui n’en connaît pas les détours, que l’on peut placer ces berceaux mystérieux, favorables aux doux épanchemens du cœur et aux tendres confidences. Le 96 DES JARDINS. ruisseau sera embelli, sur ses rives, de fleurs d’un co- loris brillant, de plantes grimpantes dont les tiges sar- menteuses embrasseront le tronc brunâtre des arbres voisins. L’aune étendra ses racines jusqu'au milieu des ondes , tandis que la fleur argentée de la circée se penchera pour se mirer à leur surface. La rivière , moins agréable peut-être que le ruisseau, est plus majestueuse , plus noble, et produit plus d'effet dans une grande composition. Ses bords, le plus sou- vent parallèles, ne doivent pas cependant l'être assez pour lui donner de la ressemblance avec un canal. Mille accidens, un tronc d’arbre renversé, un rocher et même un banc de terre plus compacte, suflisent pour détruire cette uniformité, parce que le courant, rencontrant un obstacle, attaque et creuse les rives dans ces endroits- la. C'est ce que l'artiste imitera avec la plus grande facilité. Lorsqu'une rivière parcourt le fond d’une col- line, elle rencontre des parties plates et d’autres pro- fondément creusées : dans les premières, elle s’élargit considérablement ; dans les autres, elle se resserre en raison de la profondeur de son lit ; c’est une indication dont on ne s’éloignera jamais, si l’on veut faire un ou- vrage imitant parfaitement la nature. Les fles font une charmante décoration au milieu d'une rivière. Elles plaisent d’abord par elles-mêmes, puis par les fabriques qui les décorent, et surtout par les ponts pittoresques ou rustiques qui les attachent au con- tinent. Nous avons vu que dans un lac elles doivent aflecter des formes irrégulières; il n’en est point de même ici : formées par l’accumulation lente et succes- sive des sables charriés par les courans , elles s'élèvent peu, et prennent une figure aliongée dans le sens du courant. On sent que des rochers, qui peuvent être bien placés dans l’île d’un lac, seraient inconvenans et ridi- cules dans celle d’une rivière. Une chanmière de pé- cheur, un obélisque sépulcral ou une autre fabrique du DES JARDINS. 97 même genre y figureront d’une manière très-pittores- que, pourvu que l'étendue des terres d’alluvion soit suflisante pour les motiver. Une île fort petite, sans monumens, ne présentant aucun objet d'utilité qui puisse déterminer à aller la visiter souvent, ne doit point avoir de pont pour communiquer , sous peine d’invrai- semblance. On réservera son abordage pour la pro- menade en bateau. Du reste, le bord des rivières, commeles îles qu’on y voit, sera riches en végétation. Les arbres, les arbustes et les plantes aquatiques fleuriront sur leurs rives, et les couvriront d'un épais ombrage , de dessous lequel le pêchéur, abrité des rayons brülans du soleil, tendra ses hamecons perfides, ou lancera sur le brochet et la carpe, attirés par un appât trompeur, le filet dans lequel son adresse cherche à les enlacer. Les marais ne se rencontrent que trop fréquemment dans les pays cultivés, où ils annoncent que l’agriculture est loin encore d’avoir atteint le degré de perfection dont elle est susceptible. Presque toujours il serait facile de les dessécher pour en faire des terres labourables, ou au moins d’excellens pâturages ; mais c’est dans un jardin qu'il est aisé d’en tirer un charmant parti en les conver- üssant en une espèce de petit archipel. Il ne faut pour cela que donner plus de profondeur aux parties entière- ment submergces, et jeter la vase et la terre qu’on en tire sur les endroits les plus élevés. On forme ainsi une quantité d’ilots fort agréables, lorsqu'ils sont couverts de plantations. La marre est un réservoir naturel où l’eau des pluies et celle filtrée par un terrain plus ou moins humide se conservent dans un état perpétuel de stagnation. On peut, si elle est considérable , en faire une pièce d’eau intéressante en Jui donnant la forme d’un petit lac, et à ses bords des inflexions gracieuses et variées. Une marre est toujours parfaitement placée dans une scène LI. 7 98 DES JARDINS. champêtre , auprès d’une ferme, où elle sert à désalté- rer Jes troupeaux ; on la rencontre encore avec ses con- venances sur la lisière d’un bois, et dans les pâturages. Le grand inconvénient des marres est que l’eau, ne s’y renouvelant jamais, se trouble, se corrompt, et non- seulement perd tous ses agrémens, mais encore COn- tracte une odeur désagréable : les miasmes qui s’en exhalent sont très-dangereux pour la santé des hommes et des animaux. Il est une manière fort simple de main- tenir sa limpidité ; elle consiste à y planter des végé- taux aquatiques et à la peupler de poissons. Les plantes, en s'emparant du carbone surabondant, empêchent en grande partie la décomposition; agitées par le vent, elles communiquent à l’eau un mouvement qui, augmenté par les poissons, remuant sans cesse la vase du fond, produit l’effet d’un léger courant suffisant pour la main- tenir dans son état de limpidité. Il est inutile de re- commander à l'artiste d'y placer les végétaux dont les tiges s'élèvent au-dessus de la surface des ondes; il comprendra parfaitement que les vents auront plus de prise sur ceux-ci, et que; par conséquent, ils rempliront mieux ses intentions. Les roseaux, massetie, jonc, iris faux-acore , etc., mériteront la préférence sous ce rap- port. Cependant celan’empêchera pas d’ornerla marre de quelques nénufars où autres plantes à feuilles larges et, flottanteset à fleurs apparentes; seulementon en éloignera la macre, parce que, multipliant beaucoup, elle se serait bientôt emparée de toute la pièce , et couvrirait entière- ment sa surface de verdure, ce qui en détruirait l'effet. Le torrent diffère du ruisseau et de la rivière par limpétuosité avec laquelle ses ondes précipitent leur cours toujours resserré entre deux bords élevés formant ravin. Dans une agitation continuelle , toujours bouil- lonnantes, ses eaux roulent avec bruit à travers les ro- chers qui forment leur lit : loreille doit en être frap- pée long-temps avant que l’on arrive sur ses bords. DES JARDINS. 99 Aussi cet accident de la nature, d'autant plus à désirer qu'il est plus rare-et d’un eftet plus majestueux et plus terrible, ne figure-t-il avec toutes ses convenances que dans les scènes sauvages et pittoresques, éloignées de l'habitation pour ne pas en troubler Je tranquille si- lence. Un pont d'une architecture hardie et légère, une digue pour retenir les eaux et former une chute, quel- ques arbres penchés sur le ravin, voilà tous les ornemens qui conviennent au torrent, qui, du reste, ne peut jamais étre un objet d'imitation. Cataractes et cascades. Les obstacles qu'un cou- rant d'eau rencontre dans sa marche forment les cata- ractes et les cascades. Les premières tombent d’un seul jet en une seule nappe, du haut en bas : les secondes jaillissent d'obstacles en obstacles, se divisent en plu- sieurs nappes ou gerbes, et n'atteignent le fond du bassin qu'après plusieurs chutes. Le caractère de ces accidens est sublime lorsque la chute appartient à une rivière d'une certaine largeur; il peut devenir terrible si les eaux se précipitent avec fracas d’une hauteur considé- rable, mais il est toujours pittoresque , la chute ne fût- elle que de quelques pieds, ou celle d’un simple ruis- seau. L’art peutimiter la nature pour produire ces effets, mais l'artiste doit dans ces occasions développer tout son génie pour ne pas outrepasser les règles strictes de la vraisemblance, [!n’entassera pas rochers sur rochers pour établir sa digue : quelquefois une simple pierre en tra- vers duruisseau paraîtra plus naturelle que tout l'appareil compliqué d’une composition la mieux combinée. Si la chute est considérable, on peut lui donner la forme de cascade en lui présentant plusieurs obstacles. On peut encore avec de l’art la faire paraître beaucoup plus large qu'elle n’est réellement ; il ne s’agit que de la diviser par une roche placée avec vraisemblance. Il faut employer, dans ces constructions, des rochersirréguliers, de grandes dimensions, paraissant opposer à la force des eaux un 100 DES JARDINS. obstacle inébranlable sur lequel elles viendront se briser avec fracas, en lançant au loin d'éclatans bouillons d’écume. L'endroit d’où elles se précipitent simulera une montagne qu'elles auront creusée en ravin pour se frayer une issue. Telles sont les différentes formes sous lesquelles se présentent les eaux naturelles; leur abondance, leur limpidité, sont des caractères qui les distinguent tou- jours, et d’une manière extrêmement avantageuse, des eaux artificielles. Celles-ci, obtenues par le moyen de pompes, conduits et autres machines hydrauliques, seront d'autant plus ménagces qu’on se les procurera avec plus de dépenses et de diflicultés. Cependant nous ne conseillerons jamais de les tenir prisonnières dans des bassins de‘plomb, comme on en voit dans de certains jardins : l'aspect de ce métal détruit toute illusion, ne nous fait plus adnurer que les efets de l’art et de Fopu- lence; et si ces eflets ne sont pas assez grands pour pro- duire l’étonnement et l'enthousiasme, 1ls cessent de plaire, et tombent même dans le mesquin. Si le terrain où l’on creusera des pièces d'eaux arüficielles est trop poreux pour les retenir, on emploiera les procédés en usage pour la maçonnerie, tels que les couches d'argile, le ciment, le pavé même, mais on aura le pius grand soin de masquer ces travaux dans la rivière anglaise et autres compositions où l’on cherchera limitation des eaux naturelles. Le bassin accompagne les jardins réguliers les plus élégans. Sa forme est ordinairement circulaire ou en pely- gone, rarement carrée. Le granit, le marbre ou la pierre de taille dessinent ses bords ornés de moulures et de tout le luxe de l'architecture. Nous n’entrerons dans aucun détail relativement à sa construction, à sa place et à ses dimensions, parce que ces combinaisons appartiennent à l’architecte qui a tracé le plan de lhabitation, avec laquelle ces sortes de décorations doivent être en par- DES JARDINS. 10H faite harmonie. Seulement nous dirons que nous y avons toujours vu nager le cygne dont Ja tournure noble et majestuense est très-bien en convenance avec le gran- diose des châteaux et des palais. li n’en est pas de même de la rivière anglaise, ou à eau dormante , qui convient très-bien aux jardins paysa- gers d’une petite étendue. Quoiqu’elleait beaucoup d’a- nalogie avec l'étang, que ses rives se prêtent aux mêmes décorations , 11 y a cependant cette différence essentielle que le faible filet d'eau qui lalimente doit être déguisé avec le plus grand soin, tandis qu’au contraire le ruis- seau qui se jette dans l'étang se montre orné de tous les agrémens dont il est susceptible. La forme de la rivière anglaise doit être allongée, et ses rives parallèles comme celles de la rivière naturelle. Le grand art consiste à masquer de Ja manière Ja plus vraisemblable possible , l'endroit où elle commence et celui où elle finit. I est pour cela trois moyens, dont le moins bon nous a tou- jours paru le plus employé, sans que nous puissions en expliquer la cause. Celui - ci consiste à placer un pont rustique construit sur des rochers, et caché d’un côté par une épaisse plantation, ou une autre fabrique, telle qu'une ruine, un moulin, etc. Un autre moyen préfé- rable est de faire décrire à Ja rivière beaucoup de si- nuosités, et de faire perdre ses deux extrémités dans un bosquet impénétrable, où l'œil même ne pourra la suivre. Enfin on peut encore, si le terrain est vaste, la faire serpenter par un grand nombre de contours, arranger les plantations de ses rives de manière à empécher le promeneur de pouvoir les suivre sans interruption et à lui faire perdre la trace de son cours de temps à autre ; puis on réunira les deux extrémités, ce qui formera une île dans je milieu, mais assez irrégulière pour qu'on n’en puisse pas saisir Je caractère. Du reste, la stagnation des eaux est presque insensible dans Ja rivière artificielle, parce que le moindre vent, ridant leur surface , pousse 102 DES JARDINS. toujours les ondulations du même côté, ce qui prête singulièrement à l'illusion, et figure un courant. Dans les fortes chaleurs elles seraient sujettes à se putréfier comme celles dela marre, si on n’employait les mêmes moyens pour les en préserver. Le jet d'eau, comme les morceaux de sculpture lan- cant de l’eau, appartient aux jardins réguliers et de luxe. Il est d'autant mieux placé qu'il fait point de vue et termine un tableau en se dessinant sur un fond de verdure. On ne doit se le permettre que lorsqu'on a une chute considérable, qui donne la facilité de le faire s'élancer au moins à quinze ou vingt pieds; moins élevé, il a peu d'effet ; de trois à six pieds, il est mesquin et ridicule. Si on ne peut lui donner une plus grande hauteur, il vaut beaucoup mieux s’en passer, ou le métamorphoser en fontaine que lon fera tomber d’un vase, d'une coupe , d’un animal, ou même d'un groupe sortant des mains d’un habile sculpteur. En voilà assez sur le chapitre intéressant des eaux ; c’est à l'artiste à savoir profiter sur le terrain de toutes les circonstances imprévues qui peuvent augmenter leur effet agréable. Nous ne donnerons pas ici les moyens de les diriger pour les amener dans la composition, soit qu'on les fasse venir d’un lieu éloigné par le moyen de Luyaux de conduite, de siphons, etc. , soit qu’on les force à monter à la surface de Ja terre par des pompes ou des machines hydrauliques. Cette science, toute physique, s'éloigne trop de notre sujet, outre que, pour l’exposer d’une manière utile, elle demanderait à elle seule un volume. D'ailleurs nous n’engagerons jamais un amateur de jardins à employer des machines extré- mement dispendieuses, dont le résultat est souvent incertain, et toujours peu satisfaisant. Dans le cas où l'on serait obligé d’avoir recours à des eaux de puits, nous conseillons très-fort de s’en tenir à l’eau nécessaire aux arrosemens, et à renoncer à l'espérance d’en tirer DES JARDINS. 103 parti sous le rapport de l'agrément ; rien n’est puérile comme ces rivières que l’on remplit à seau , et ces cas- cades que l’on fait jouer avec une pompe. $ IV. Des Constructions d'agrément. Nous n'entendons parler ici que de celles qui ont pour but la décoration, et non de celles utiles à la conserva- tion des végétaux. Nous traiterons de ces dernières dans la deuxième partie de ce volume. Sous ce titre de cons- tructions nous renfermons les fabriques de tous genres et les rochers. Ceux-ci sembleraient appartenir plutôt à l'article des sites qu’à celui-ci, du moins si l’on s’en rapportait entièrement aux auteurs qui recommandent sans cesse de n’en jamais construire, et de s’en passer s’il ne s’en trouve pas sur le sol que l’on métamorphose en jardin. Nous sommes assez de cet avis; mais cependant, comme nous avons vu quelquefois des rochers factices produire un effet pittoresque, comme aussi on peut creuser dans leurs flancs des grottes et des cavernes, nous croyons devoir en traiter ici. Les rochers peuvent avoir plusieurs caractères : ils sont imposans par leur masse ; majestueux par leur élé- valion ; terribles par leur assise, leurs profondes fis- sures et leur âpreté; enfin pittoresques par leur tran- chante opposition avec tous les autres objets entrant dans la composition d’un paysage. Ceux de ce dernier caractère sont les seuls que les hommes puissent tenter de créer; mais avant de commencer une entreprise aussi diflicile et d’une dépense énorme il faudra calculer long- temps ses facultés pécuniaires et ses moyens de réussite. Qu'on ne croie pas qu'il ne s’agit ici que de maconner les unes sur les autres des pierres brutes et irrégulitre- ment posées ; il faut apporter des roches naturelles, étudier leur position et leur connexité sur leur véritable sol, pour les leur rendre dans la composition. Mais si 104 DES JARDINS. un terrain se trouve en posséder de naturelles, c’est alors que l'artiste montrera son goût en les rendant propres au caractère de la scène qu'il se propose de faire. Tantôt il les mettra à découvert en les décombrant des terres végctales que le temps amoncèle à leur base: tantôt il rendra leurs pentes plus escarpées, plus raides, en employant la poudre à canon pour les éclater, et par ce moyen il rompra l’uniformité de leur figure si elle était peu pittoresque ; d’autres fois, il en couvrira de certaines parties, pour isoler des groupes, par des plan- tations qui demandent beaucoup de goût et de connais- sances en dendrologie. Il animera ses tableaux : des mousses , des lichens, des plantes grimpantes en tapis- seront quelques portions, tandis qu'un arbre gêné dans son accroissement, altéré dans sa forme , se penchera ou se courbera d’une manière singulière, comme si ses ra- cines , étroitement serrées dans une fissure de la roche, avaient à peine la force de le soutenir. Quelquefois les rochers sont trop isolés, c'est encore par des plantations intercalées dans les espaces vides que lon fait croire que les masses les plus remarquables tiennent à d’autres non-aperçues. Les sentiers offrent encore un moyen de rendre ces ta- bleaux très-piquans. Tantôt ils serpenteront sur le pen- chant d’une côte escarpée , et rendront accessibles , en louvoyant , les crêtes les plus hautes et paraissant les plus inabordables. De distance en distance ils offriront, en s'élargissant, un plateau d’où la vue se promènera sur un vaste horizon; un simple banc taillé dans la roche et recouvert par une guirlande de lierre, rendra ces lieux de repos extrêmement agréables. D’autres fois ils se re- tréciront et longeront de profonds précipices , mais dont le danger ne sera qu'apparent. Nous ne pouvons donner ici de meilleurs conseils pour la convenance existant entre les rochers et la composi- tion générale, que ceux de Morel. I dit : « Que, si ce- DES JARDINS. 105 pendant, après de mûres réflexions, de faciles ressour- ces, des moyens possibles déterminaient un artiste à jeter des rochers dans quelques scènes de ses jardins pour en fortifier le caractère et lui donner plus d'expression, en- treprise toujours coûteuse et d’un succès presque toujours incertain , il n'oubliera pas du moins que le‘terrain doit avoir du mouvement , que les productions qui le cou- vrent ne doivent être que du genre de celles qui erois- sent sur un sol sec et aride, qu'il faut enfin que le site soit tel qu’on doute, en is voyant , si l'absence des ro- chers n’est pas un oubli de la nature. Il pourvoira encore à ce que cette scène factice soit amenée par des inter- médiaires qui la préparent et l’annoncent naturellement. Une transition subite, des entours d’un genre disparate, ne présenteraient, dans ce cas, qu'un contraste fait à la main, et détruiraient lillusion qui dans ce genre ne nn. être trop complète. Bret, à force d'art, il retrou- vera la nature. » Les cavernes, les antres et les grottes appartiennent aux rochers dont ils ne sont que des accessoires; cepen- dant ils peuvent former des scènes tout-à-fait indépen- dantes par leur caractère. Par exemple , la grotte sera toujours pittoresque , mais elle peut avoir la physiono- mie sauvage ou rustique. Dans le premier cas on n'y verra aucun des meubles ordinaires à l'usage de l’homme, et cependant l'artiste trouvera le moyen d'y placer, comme si la nature et le hasard s’en étaient seuls mêlés, quelques bancs de pierre irréguliers , mais commodes, imitant des fragmens de rochers renversés ou détachés de la voûte par le temps, un bloc qui , au besoin, pourra servir de table, et un coin enfoncé d’où la fumée s’é- chappera par une fente ou un trou ménagé avec adresse, afin de donner la possibilité d’y avoir du feu lorsque, par partie de plaisir, on aura choisi cet endroit pour y prendre un repas champêtre ou quelques heures de repos et de méditation. Piusicurs provinces de la 105 DES JARDINS. France, et particulièrement celles que la Loire arrose dans son cours, sont peuplées par de véritables Troglo- dytes, c’est-à-dire, par des hommes habitant les trous qu'ils ont trouvés ou creusés sur le penchant des mon- tagnes. Si l’on voulait donner à une grotte la physiono- mie de ces singulières habitations , elle prendrait alors le caractère rustique. Sur un petit plateau, formé devant l'entrée par les déblaiemens qu'on y aurait jetés et ni- velés en la creusant, on tracerait un petit jardin légu- mier , Où au moins on planterait un arbre pour ombrager un banc ; une treille tapisserait le devant de la grotte, où l’on aurait grossièrement maconné une espèce de mu- raille percée par une porte étroite et par une fenêtre plus étroite encore. L'intérieur serait garni d’une table et de quelques meubles rustiques à la convenance des ha- bitans de la campagne, mais d’une propreté égale à leur simplicité. On donnera aux antres et aux cavernes un caractère tout-à-fait différent; toujours cachés dans l'épaisseur d’une sombre forêt, au fond d’une sauvage solitude , ils doivent inspirer la frayeur au même degré que la curiosité. L'entrée en sera basse et étroite , les détours nombreux et hérissés de rochers, les ténèbres les plus profondes règneront sous leurs voûtes humides et silen- cieuses, et la chauve-souris seule fera entendre le bruis- sement de ses ailes lorsque, troublée dans sa sinistre de- meure , elle voltigera autour de la torche du curieux. Presque toujours la nature fait les premiers frais de cette scène ; on peut creuser une grotte, mais si le ha- sard ne présentait une caverne , ce serait en vain qu'on voudrait en avoir une, puisque ce qui la constitue plus particulièrement c’est son immense étendue. Cependant, sil arrivait que lon posstdàät une vieille carrière cou- verte, avec peu de dépense et beaucoup d'art on pour- rait en tirer le même parti que si elle était l'ouvrage de la nature ; si l’on voulait même lui donner un caractère DES JARDINS, 107 terrible et romantique, il ne serait pas nécessaire de masquer les travaux des hommes, il suftirait d'y placer une fabrique annonçant que jadis il s’est passé, dans ce lieu sinistre, un de ces événemens mystérieux et funestes où l'innocence a succombé sous le poignard du crime. Des Fabriques. On donne ce nom à toutes les constructions bâties pour la décoration d'un jardin, en tant cependant qu’elles sont ou figurent un monument, quel qu’en soit l'usage vrai ou supposé. Par exemple, un pont, quand même il serait composé seulement d’un tronc d'arbre renversé , ou même d’une seule planche, est regardé comme fa- brique, parce que, s iln’est pe un monument, au moins il en tient la place et le remplace sous le rapport de l’u- ülité ; un treillage artistement entrelacé , une palissade, ne feront pas fabrique parce qu'ils ne forment ou ne sont censés former que clôture, et qu'il n’est jamais venu à l'esprit de personne de regarder les murs d’un pare ou d’un Jardin comme des monumens. Cependant nous ne donnons pas cette définition comme rigou- reuse ; il nous suflit de nous faire comprendre à nos lecteurs. Comme nous l’avons déjà dit, les fabriques ont pris naissance en Chine, si l’on s’en rapporte aux auteurs ; de là elles ont passé en Angleterre, puis sur le conti- nent. Ce qu'il y a de certain, c’est que le goût s’en est si prodigieusement répandu, qu'il n'existe peut-être pas un village en France où l’on ne trouve un ou plusieurs jardins avec ce genre d'ornement bien où mal placé. II en est résulté que, devenu trop commun, les gens ri- ches s’en sont dégoûtés : les artistes, n'ayant plus guère la prétention de faire du neuf dans ce genre, ont voulu le réformer, et les auteurs, plus faciles peut-être qu'ils ne le pensent à se laisser impressionner, se sont mis, 108 DES JARDINS. pour la plupart, à déelamer contre des décorations dont ils ont jugé sans doute par les plus mauvaises, c’est- à-dire , par le plus grand nombre, Mais les hommes pour: vus d’un goût délicat, uni à un jugement solide, n’en ont pas Jugé de même, par la raison que , n'étant jamais portés aux extrêmes comme les personnes engouées de l'esprit de système, ils ont tout vu , tout raisonné , se sont avoué avec bonne foi le plaisir qu'ils ont éprouvé , ne se sont pas dissimulé le ridicule et le mesquin toutes les fois qu'il s’est présenté sous leurs yeux, d’où ils ont fini par conclure qu'il ne faut pas exclusivement adopter le genre chinois, comme l'ont fait Chambers et ses com- patriotes, ni le rejeter entièrement, comme Morel et d'autres artistes. | En effet, rien de fastidieux, de ridicule même, comme un jardin dans lequel les fabriques sont entassées les unes sur les autres sans choix ni discernement , et mal- heureusement ces exemples ne sont que trop Commups ; mais aussi, en ne copiant que la nature , comment pro- duire des eflèts remarquables et piquans dans un pays où celte nature n’est elle-même qu'une suite de tableaux les plus pittoresques et les plus variés ? Par exemple, dans les environs de Lyon, sur les bords de la Loire, dans les Alpes, les Pyrénées, etc. , ete., si l'on veut ercer des scènes d’un caractère différent de celles que l’on rencontre à chaque pas, il faudra de toute né- ccssité y placer des fabriques , ou la composition , quel qu'en soit d’ailleurs le mérite , ne sera ni remarquable ni remarquée. Qu'on place, dans un des pays que je viens de nommer, un artiste avee le livre de Morel à Ja main, qu'on y place Morel lui-même pour y tracer un jardin, qu'aura-t-il à faire ? à clore un espace plus ou moins grand, et tout sera fini s’il s’en tient aux règles qu'il a tracées, à moins qu'il ne fasse arracher les arbres et ar- brisseaux indigènes, les chênes, tilleuls, saules, peu- pliers, les chamecerisiers , chèvre-feuilles, cytises , ba- DES JARDINS. 109 guenaudiers , etc., pour les remplacer par des espèces exotiques, plus rares sans doute , mais le plus souvent moins agréables. Nous eroyons que des fabriques bien motivées, par- faitement en convenance avec le site, ne peuvent pro- duire qu'un charmant effet lorsqu'elles ne sont pas trop prodiguées. En règle générale, elles doivent être placées de manière à n'être apercues que lune après Pautre, afin de piquer continuellement la curiosité du promeneur et d’exciter sans cesse son étonhement. Îl est cependant des cas où, pour caractériser davantage une scène, on peut en rapprocher deux ou trois du même genre; par exemple, une chapelle et un tombeau. Enfin toutes les fois que l’on ‘pourra utiliser une fabrique en fui donnant la destination indiquée par sa forme, on aura atteint le but le plus favorable pour qu'elle plaise, parce qu'elle aura nécessairement Loutes ses convenances. L'Aabitation ne semblerait pas au premier coup d'œil devoir figurer dans le nombre des monumens destinés à l'embellissement d’un jardin , puisque le plus ordinaire- ment celui-ci n’est qu'une dépendance de la première , destinée à-en rendre le séjour plus attrayant. Cependant il est des circonstances dans lesquelles lartiste se trouve forcé de caractériser Les bâtimens d'habitation de manière à les mettre en harmonie avec le site, et dans ce cas on peut les regarder comme de véritables fabriques. Il faut alors les placer dans les situations les plus favorables pour faire valoir le jardin, c’est-à-dire que l'on doit découvrir, des appartemens, les scènes les plus pittores- ques et les plus propres à donner l'envie de la prome- nade en faisant naître la curiosité. Or, l'habitation de- vant aussi être en vue, si elle ne se trouve pas en rapport avec les scènes principales du paysage , le con- traste devient choquant, le tout cesse de plaire , et le but est manqué. l1 résulte de là que, si les bâtimens existent avant le jardin, il faut, en tracant ce dernier, se con- 110 DES JARDINS. former à leur caractère , et même sacrifier pour cela tous les heureux accidens que lesite offrirait ; mais, si on avait à construire l’un et l’autre , ce serait au contraire le style des bâtimens qu'il faudrait accommoderaux convenances locales. C’est de cette dernière supposition que nous allons partir pour tracer quelques règles générales. Si le paysage est d’une immense étendue, s’il offre de toutes parts des tableaux intéressans , l'habitation s’élè- vera au milieu de la composition, sur un plateau s'il s’en trouve, ou au moins dans un lieu découvert d’où la vue pourra s'étendre sans obstacle sur tous les points. Dans le cas où l'artiste n’aurait à sa disposition qu'une étendue de terrain assez bornée, 1l la placera au contraire sur une des lignes extérieures , mais toujours sur une éléva- tion un peu prononcée. Autant qu'on le pourra la facade sera tournée au levant, où au midi, ou au couchant , et jamais au nord. Toutes les constructions seront appro- priées au but d'utilité qu'on se proposera en les élevant, etonne cherchera point à déguiser leur emploi. Dans un jardin symétrique, d’une grande étendue , on bâtira un château d’une architecture nobleet élégante; dans un Jar- din paysagiste, une maison prendra le caractère cham- pêtre d’une ferme, si tel est le caractère principal de la composition ; les écuries , les basses - cours , les pigeon- niers, ete. , l’entoureront en partie, ou au moins seront adjacens ; si c’est le caractère rustique qui domine, l'architecture en sera plus simple encore. La véritable place d’une maison bourgeoise est dans le jardin mixte. Enfin, dans un paysage dont les sites seraient durs et austères, les accidens majestueux ou terribles, rien n’empécherait de nous rappeler l’image d’un de ces ma- noirs féodaux , à créneaux, à donjons et à pont-levis , dont les tours du nord et de l’ouest sont encore en pos- session d'échauffer le cerveau de nos auteurs romanti- ques. Dans tous les cas, quel que soit le caractère que l'on veuille donner à l'habitation, on doit respecter DES JARDINS. LIL scrupuleusement les lois sévères de l'architecture , ne point faire d’anachronisme, et rejeter, sans autre exa- men, tout projet dans lequel on aurait voulu allier deux genres diflérens , par exemple , les architectures grec- que et gothique. Nous ne nous étendrons pas davan- tage sur une matière qui se trouve, pour tout le reste , dans les attributions de l'architecture. Les pavillons conviennent parfaitement aux scènes gracieuses et riantes d’une petite étendue. [ls peuvent se prêter à tous les caractères et à toutes les formes, mais seulement dans le genre gai. Tantôt placés sur une élé- vation, ils oflriront aux promeneurs un charmant lieu de repos, d'où l'œil errera avec complaisance sur un lointain pittoresque. Alors on pourra développer dans leur architecture toute lélégance et toute la légèreté dont cet art enchanteur est susceptible. Dans le jar- din régulier , deux pavillons peuvent orner les deux ex- itrémités d’une terrasse, l'entrée d’une grille, ou même le commencement d’une avenue conduisant à l’habita- tion principale ; et dans ce cas leur architecture sera ri- goureusement dans le même style que la maison, par Ja raison qu'ils n'en sont qu'une dépendance, D'autres fois le pavillon remplace la maison d'habitation; alors il doit être en harmonie avec la composition générale plutôt qu'avec une scène parüelle, et il prendra le ca- ractère champêtre, où rustique, où pittoresque, etc. ; on lui donnera de l'étendue, et l’on distribuera son inté- rieur en appartemens commodes. Nous n'avons pas be- soin de répéter que c’est toujours de la fenêtre du salon ou de la pièce qui le remplace, que l'on doit jouir du plus beau coup d'œil. On utilise assez ordinairement les pavillons en y établissant des bains, ou une salle de bil- lard ou de danse. Le £iosque et le belvédère ne se distinguent du pavil- lon que par une structure plus légère, et par leurs jours qui tiennent presque entièrement la place des murs. Ils 112 DES JARDINS. appartiennent plus particulièrement au caractère pitto- resque , et ne se placent jamais que sur le point le plus élevé du paysage. Il faut que le promeneur, parvenu dans cette construction , puisse, du milieu, découvrir un im- mense horizon de tous Les côtés où il jettera la vue. On les orne ordinairement de colonnes légères, de bal- cons, etc. Mais la grande utilité qu’on en peut retirer, c’est d’en faire un préservatif contre les effets terribles de la foudre. Dominant toute la campagne des environs et surtout l'habitation , un paratonnerre s’y trouve par- faitement placé ; près de la nue il agit sur le fluide élec- trique avec plus d'énergie, l'attire , l’absorbe en grande parte , et prévient non-seulement le danger, mais même les détonations si eflrayantes pour de certaines per- sonnes. Les rotondes sont des espèces de larges tours, tron- quées à une petite hauteur, servant à la fois à l’orne- ment et à l’utile. On peut donner cette forme au loge- ment d’un jardinier, où à une écurie, en l’entourant symétriquement d’autres constructions plus petites pour loger les différentes espèces d'animaux domestiques. La rotonde ne convient guère qu'aux scènes champêtres et rustiques. Le jardin du roi, à Paris , en offre un très-joli modèle. On donne encore le nom de rotonde à plusieurs es- pèces de constructions d’un genre indéterminé ; il suflit pour cela qu’elles soient basses et affectent une forme ronde. Un cirque, un manége, peuvent se placer avec d'autant plus d'avantage dans une rotonde, que ce bà- timent ne se trouve jamais à une grande distance de l’ha- bitation principale. > Le chalet est une maison, ou plutôt une chaumière, placée dans un bois ou au moins à sa proximité , car elle est censce habitée par des bücherons ou des charbon- niers. Son Loit de chaume, ses parois en torchis ou en bois, lui donnent un air de pauvreté qui n’en exclut pas DES JARDINS. 113 la propreté. Elle ne peut convenir qu'aux scènes rus- tiques. L'intérieur doit être meublé simplement, et n’of- fir que les objets de première nécessité. La chaumière a beaucoup de rapports avec le chalet, mais elle peut figurer dans des scènes de différens ca- ractères. On la rencontre avec plaisir dans tous les lieux où le symétrique et le luxe sont prohibés, sur le bord d'une fontaine, adossée contre un rocher, sur la lisière d'un bois, d'une prairie, ou au milieu d’une plantation pittoresque. La maçonnerie en pierre n’entrera jamais pour rien dans sa construction ; et, comme pour le cha- let, la paille sera employée pour la couvrir : on peut la bâur avec du bois revêtu de son écorce, avec de la terre ou du torchis ; mais on en exclura, au moins à l’exté- rieur, ces couches de mousses insignifiantes dont le mau- vais goût l’a quelquefois revêtue. La cabane est un diminutif de la chaumitre , comme celle-ci en est un du chalet. Quelques claies recouvertes d'un peu de paille , une perche soutenant le toit, et un côté entièrement ouvert, voilà ce qui Ja constitue. N’é- tant jamais destinée à être habitée, tout autre meuble qu'un banc y serait superflu. Devant servir à garantir un berger des intempéries de l'air, on conçoit que, pour être dans ses convenances , il faut qu’elle soit éloignée de toute autre construction où il serait censé pouvoir trou- ver un abri plus commode pendant l'orage ; il faut en- core qu'on la rencontre à proximité des lieux où les troupeaux viennent paître. Ceci indique assez qu’elle ne convient qu'aux scènes champêtres et agrestes. Elevée près d’une garenne, à côté d’un champ cultivé, elle peut servir à cacher le chasseur qui , le soir, va se mettre en embuscade pour attendre à l'affût le timide lapin ou le lièvre plus timide encore. La maison de pécheur se bâtit sur le bord des eaux. Sa position se trouvera très-pittoresque, si, assise sur une digue ou un rocher, elle domine la surface d’un étang L. 6 114 DES JARDINS. ou d’une rivière, à la hauteur de quelques pieds seule- ment. Partout où l’on aura des eaux naturelles d’une cer- taine étendue , la pécherie sera dans ses convenances , et elle y sera d'autant mieux qu’en y déposant les filets et autres ustensiles servant à la pêche, on lutilisera comme elle doit l'être. Du reste, son architecture est à peu près semblable à celle du chalet , mais sa construc- tion en diflère en ce qu’on peut sans inconvénient élever ses murs en maçonnerie et la couvrir en tuiles plates. Comme le pêcheur exerce’une industrie qui peut devenir lucrative, une petite salle à manger, meublée sans luxe mais avec une élégante simplicité, n’y sera pas du tout déplacée. Si une des croisées donne sur l'eau , et que de là on puisse jeter des lignes pour prendre du poisson, la fabrique en deviendra d'autant plus agréable. Le moulin ne s'établira sur une rivière, ou sur un étang , qu'autant qu’on pourra lui donner sa véritable utilité. Tous les bâtimens nécessaires à son exploitation y seront disposés de la manière la plus commode et la plus pittoresque ; leur architecture rustique sera en har- monie avec celle de l'usine principale, mais on ieur donnera des formes gracieuses et variées. Le moulin s’é- lèvera et se fera remarquer au milieu de ces accessoires. Les vannes, les roues, et l’eau jaillissante qui les fait tourner, formeront un tableau dont toutes les combinai- sons produiront le plus charmant effet, de quelque côté qu’elles frappent la vue. Rien ne détruit Ia monotonie d’un paysage comme cette fabrique animée par la pré- sence de l’homme, des animaux, par le bruit des ma- chines et par le mouvement des eaux ; aussi ne négli- gera-t-on jamais de l’établir, toutes les fois que les cir- constances le permettront. L'ermitage est une des fabriques le plus employées, et c'est cependant une de celles qui sont le plus difli- ciles à placer dans leurs véritables convenances. Un homme trompé par la société, parce qu'il en attendait DES JARDINS. 115 trop, blessé dans son amour-propre, dans ses affections, trahi par la fortune , prend le monde en horreur, de- vient misanthrope, et rompt ses chaînes faute d’avoir le courage de les porter. Il croit plaire à Dieu en lui re- portant cette part d'affection que le créateur avait placé dans son âme au profit de sa famille, de ses frères ; exalté par le malheur et une religion mal entendue, il fuit la société de ses semblables et va cacher son déses- poir et sa piété dans un désert inaccessible et sauvage. Là il cherche dans la solitude un antre de rocher, une grotte sèche et peu profonde qui lui offre un‘abri natu- rel ; bientôt il l’agrandit , il la ferme aux injures de l’air avec les matériaux bruts que lui offre la nature ; un banc de rocher recouvert de fougères et de feuilles sèches lui sert de lit; un tabouret en bois, une petite table, un coffre et un prie-dieu composent tout son ameublement ; et là, dans la pénitence et la contemplation, il attend que la misère et les privations viennent terminer son suicide. On conçoit aisément que son ermitage ne peut être bien placé que dans un lieu sauvage, retiré, et surtout éloigné autant que possible de l'habitation princi- pale et des autres fabriques annonçant une utilité pré- sente et journalière comme celles que nous avons énu- mérées jusqu'ici. Cependant il est arrivé, quoique plus rarement , que des hommes pieux, mais d’un esprit bor- né, enflammés par un zele peu éclairé, ont adopté ce sin- oulier genre de vie sans pour cela entièrement fuir la so- cicté des humains, auxquels, au contraire, ils consacraient une partie de leur existence en leur portant les secours consolans de la religion. Leur ermitage, moins retiré que le précédent, offrait aussi plus de commodités : son architecture très-simple avait cependant une sorte d’élé- gance ; on ÿ entrait par une porte étroite dont le fron- tispice portait souvent une inscription courte, mais édi= fiante , et le jour pénétrait dans l’intérieur par une petite fenêtre garnie de vitraux de couleur , enchâssés dans de 116 DES JARDINS: minces lames de plomb. Au dessus de l'édifice s'élevait une espèce de petite tour, d’où une cloche, agitée par le voyageur, annoncait à l’ermite en promenade qu'un malheureux avait besoin de son secours. Devant la mo- deste demeure était un jardin où l’on voyait quelques fleurs briller parmi les légumes et les fruits que le saint homme. cultivait pour sa nourriture. Souvent un banc de bois , ombragé par un arbre touflu , permettait de se re- poser en attendant l’arrivée du solitaire. Une semblable fabrique produira toujours son effet pittoresque si on la place dans un lieu riant, d’un facile accès, et assez boisé pour ne se montrer aux yeux que lorsque les fa- briques d’un autre caractère auront disparu derrière les arbres. La chapelle plaira toujours par son architecture lé- ore et gothique. Elle se trouve très-bien placée à la proximité d’un ermitage du second caractère, et celui-ci peut même paraître n'en être qu'une dépendance. Sa construction est extrêmement diflicile , et nous pouvons même avancer que c’est le tour de force de l'architecte ; aussi ne hasarderons-nous là-dessus aucun conseil. Seulement il faudra , lorsqu'elle sera terminée , lui don- ner une couleur d’un gris brunâtre assez foncé pour qu'elle ait de suite l'apparence d’un antique monument bien conservé. Une église dans un jardin paysager serait une chose ridicule, parce que non-seulement elle n'aurait aucune apparence d'utilité actuelle ; mais on ne pourrait même la motiver pour les temps passés, parce que les églises accompagnaient toujours un couvent, un hos- pice, ou un village , dont on chercherait vainement les traces. À supposer même qu’elle s’élevât à côté des ruines annonçant que les objets dont nous venons de parler existaient jadis dans ces lieux , on se demanderait en- core pourquoi le temps les a détruits, tandis qu'il Pa res- pectée. On conçoit que des ruines d'église isolées offri- raient la même inconvenance, et pour la même raison. DES JARDINS. 117 Dans un paysage , une chapelle sera donc toujours dans de petites dimensions ; mais, lorsqu'elle accompagnera un château et qu'elle devra servir à son véritable usage , rien n'empêche que l'architecte ne se livre à tout le grandiose , à toute la noblesse de ses conceptions. L'ex-voto est, comme la chapelle, un monyment élevé par la piété ; mais, n'étant jamais destiné à aucun exercice du culte autre que celui de la prière , sa forme et son caractère deviennent tout-à-fait différens. Quel- quefois c’est une simple croix en bois ou en pierre, plan- iée sur le lieu même où l’on a été sauvé d’un grand dan- ger par une assistance miraculeuse de la Providence; une croisée de chemin , à l’entrée ou dans l'épaisseur d’une forêt, est un endroit où un être timide ne passe jamais, pendant le crépuscule, sans éprouver un sentiment de frayeur : aussi est-ce là que l’ex-voto sera le mieux placé. Mais quelquefois un voyageur, sur le point d’être assas- siné ou de faire naufrage, s’est recommandé à quelque saint, et a vu dans linstant même fuir les brigands, ou les flots se calmer. La reconnaissance élève un petit monu- ment gothique dans lequel une niche, pratiquée avec goût , sert à loger l’image du saint tutélaire. Ce genre de fabrique, moins sévère que la première, peut se placer partout et produire un effet très-piquant sur une roche, ou sous l’ombrage d’un arbre touftu. Les temples ont plusieurs caractères qu'il est essentiel de déterminer. Un temple peut être un asile consacré à rappeler des-événemens ou des temps mémorables de l'antiquité. Sous ce rapport il est impossible de le mettre en convenance avec la localité, car on ne cherchera certes jamais un monument égyptien, ou turc, ou chi- nois, dans les environs de Paris. Or, comme dans le jar- din paysagiste, chaque scène doitemporter avec elle sa vraisemblance, ces sortes de fabriques s’en trouvent na- turellement exclues. Mais, dans le jardin symétrique, ou dans les compositions mixtes, toutes les fois que l’on 118 DES JARDINS. cherchera la majesté et la noblesse dans un tableau, on y placera cette décoration. L'architecte, qui se chargera d’en faire le dessin, s’attachera scrupuleusement à rendre sa composition absolument semblable à ce qu’elle aurait été, si elle eût été bâtie dans le temps et dans le pays dont on veut rappeler la mémoire. Il étudiera les mœurs, les arts et l’histoire naturelle des lieux et de l’époque, afin dene commettre ni erreurs, ni anachronismes ridicules. Mais les temples offrent encore un caractère extrême- ment gracieux, quand ils sont consacrés à un sentiment ou à une vertu personnifiée par l’ingénieuse mythologie des Grecs et des Romains , outre que leur architecture, pleine d’élégance et de noblesse, prête davantage pour faire naître dans l’âme cette émotion, cette admiration, résultant du vrai beau. Un dôme arrondi, soutenu par des colonnes corinthiennes ou doriques, couvrant une statue de l’Amour , de Vénus ou de l’Amitié , fera éclore dans le cœur plus de sensations agréables, plus de doux souvenirs, que tous les sphinx, les dieux à tête de chien, les croissans, les parasols et les lanternes des premiers. Avant de se déterminer à élever un semblable monu- ment, il faut se décider à faire toutes les dépenses qu'il exigera, car la moindre économie faite , ne fût-ce qu'aux dépens de quelques détails d'ornement, fera tomber la composition dans le mesquin , et lui ôtera tout son mérite. Le marbre, le granit et le fer doré, voilà les seuls matériaux qui doivent y paraître , et les statues qui l’orneront appartiendront au ciseau d’un grand mai- ire, où au moins, seront d'excellentes copies de ses meilleurs ouvrages. La tente turque est une fort jolie fabrique que l’on peut employer dans un pare ou dans les parties boisées d’un paysage, pour annoncer un rendez-vous de chasse. On l'élève en charpente légère ; on l'entoure d’une balus- trade en fer, et on la couvre, non pas en toile, mais avec des planches légères, ou mieux, du métal laminé, du DES JARDINS. 119 plomb, de la tôle, ou même du fer-blanc, recouvert de trois ou quatre couches épaisses de couleur à l'huile , et peint, par dessus le tout, en manière de draperie. Les croissans , les trophées, et enfin tous les ornemens bril- lans conviennent parfaitement à ce genre de décora- tion. La tour et le phare se bâtiront dans un lieu où la hau- teur ordinaire d’une autre construction ne permettrait pas à la vue de surmonter un obstacle quelconque pour aller au delà jouir d’un spectacle d’une beauté remar- quable , tel que celui de la mer, d’une grande ville, d’une chaîne de montagnes fameuses par leur éléva- tion , etc., etc.; la hardiesse de ces monumens en fait le principal mérite, et quelquefois aussi l'architecte se plait à y développer tout son génie pour y créer un es- calier digne d’admiration. La pyramide et l'obélisque se placent le plus souvent dans un carrefour où viennent aboutir plusieurs che- mins. Toute leur beauté consiste dans la légèreté et l’élé- gance de leur architecture. Cependant on peut souvent les décorer de bas-reliefs, d'inscriptions et de trophées. La blancheur de leur marbre se dessine d’une manière charmante sur le feuillage d’une forêt, et permet de les apercevoir de fort loin ; aussi les emploie-t-on comme des espèces de jalons qui servent à s'orienter et à se re- trouver à la chasse : ils conviennent particulièrement au parc et au Jardin régulier. Les tombeaux ont des formes extrêmement variées et qui ne sont point indifférentes aux caractères généraux d’une composition. On les placera toujours, dans un lieu isolé, loin du bruit et de l'agitation du bâtiment habité. Le fond d’un vallon solitaire et écarté , caché par lé- paisseur des bocages ou des bois ; une île couverte de saules et de cyprès , voilà les endroits qui leur convien- nent. La terre recèle à jamais l’insensible dépouille d’un enfant que vous avez perdu au berceau, d’un enfant chéri, 120 DES JARDINS. l'espoir et la consolation d’une vieillesse qui s'approche; ne mettez aucun faste dans le monument que vous lui élèverez : la véritable douleur est sans ostentation. Une colonne tronquée sur laquelle vous poserez une urne funéraire, une simple pierre tumulaire, voilà tout ce qu'il faut pour faire passer dans l’âme du voyageur une partie des sentimens qui affectent la vôtre. Avez - vous à verser des larmes sur la perte d’un père, d’une épouse adorée, vous devez à leur mémoire un monument plus remarquable. Le marbre et la sculpture l’orneront de tout leur éclat. Mais si un homme marquant dans la so- - ciété par son rang , ses richesses ou ses grandes actions, doit dans ces lieux laisser ses restes mortels, c’est alors que , déployant toutes les ressources de l’art, son sarco- phage devra surprendre par sa richesse et'sa beauté, et méler dans notre âme l'admiration aux regrets. Nous ne répéterons pas 101 ce que nous avons déja dit de l’inscrip- tion qui doit être simple et touchante dans le plus grand nombre de cas ; cependant, dans le dernier , il est peut- être permis de rappeler , en style élevé, les grandes ac- tions et les qualités qui ont distingué le héros des autres hommes. Les scènes de tristesse, lorsqu'elles sont bien amenées, produisent de profondes sensations ; mais il ne faut pas trop les répéter, parce que rien ne s'émousse plus vite que la sensibilité ; et, si le prome- neur en vient à ne plus éprouver qu’une simple curio- sité , tout le charme est détruit, lartiste a manqué son but pour l'avoir outrepassé. Les ruines sont un genre de monument fort employé aujourd'hui, parce que, naturellement très-pittoresques, elles ajoutent beaucoup de charmes à une scène soli- taire. On aime à trouver sur une roche escarpée les restes de cette forteresse féodale, d’où un chevalier chà- telain , dans les temps reculés et romantiques, oppri- mait ou, plus rarement, protégeait les paisibles habi- tans de la plaine. On voit avec plaisir s'élever , malgré DES JARDINS. 121 les ravages du temps , cette tour à créneaux d’où le cor d’un homme d'armes répondait à celui d’un chevalier demandant l'entrée du château pour y recevoir l’hospi- talité pendant une nuit sombre et pluvieuse, ou pour proposer à un châtelain discourtois le combat en champ clos. L’imagination supplée à ce que le temps a entière- ment détruit; dans un fragment de murailles elle voit un rempart tout entier; elle agrandit, anoblit tout , et jouit de sa propre création comme d’une réalité. Mais, pour la mettre dans le cas de se tromper elle-même , il faut que l’artiste ait combiné sa composition avec beau- coup de talent, et qu'il ait surtout masqué avec une grande sévérité jusqu'au plus petit détail qui pourrait faire soupconner une vieille ruine faite d'hier, comme disent les auteurs. La scène que nous venons de décrire convient parfaitement aux sites remplis de mouvemens, d’un aspect âpre et sévère, aux genres que l’on a nommés romantique, terrible, sauvage, majestueux, etc. Mais il est d’autres espèces de ruines qui , d’un genre moins noble peut-être, ne sont pas moins très-pittores- ques et peuvent figurer dans tous les tableaux d’un jar- din paysager; ce sont celles dont les formes gothiques nous rappellent quelques constructions de nos pères. Les restes d'un vieux couvent, d’une tour, d’un ancien pont ou d’une chapelle, se rencontrent quelquefois dans nos campagnes ; la faux du temps les eût-elle presque entièrement renversés, l’art restaurant adroitement le peu qu'il en reste, pourra faire revivre l'édifice à lima- gination qui souvent même ira au delà de la réalité. Les ruines de monumens religieux font particulièrement une vive impression , soit qu’elles nous rappellent la vie mys- tique et singulière de leurs premiers habitans, soit qu’elles élèvent notre pensée jusqu’au créateur de toutes choses, le seul être dont la grandeur et la toute-puissance sont impérissables. On peut tolérer dans un jardin un monument chinois, 122 DES JARDINS. turc, égypüen ou grec ; mais l’artiste qui placerait en France une ruine dans un genre d'architecture étrangère aurait fait une chose souverainement ridicule, par la raison qu'elle n'aurait pas la moindre vraisemblance, et qu'il n'est pas une seule ligne de l’histoire qui puisse lui en donner. On voit, dans un grand nombre de jar- dins des ruines solidement bâties, bien crépies , aux- quelles on pourrait rendre en une heure l'apparence d’un bâtiment tout neuf ; 1l ne s’agirait que de gratter la mince couche de couleur à l'huile, avec laquelle un peintre a barbouillé des mousses, des briques, de vieilles pièces de bois, des fentes de mur, et autres mi- sères semblables. Nous nous abstiendrons de juger de semblables conceptions, mais nous recommanderons de les écarter de toute composition où l’on tient un peu aux règles du bon goût. Aucune fabrique , de quel genre que ce soit, ne doit emprunter des ornemens extérieurs à Ja peinture. Les fontaines sont ou fluentes ou jaillissantes. Les premières appartiennent aux jardins de la nature ; il ne leur faut que rarement des constructions pour augmenter leur effet pittoresque , et même, dans ce cas, il ne s’agit que de creuser et nettoyer leur bassin , en couvrir une partie par une petite voûte gothique, dans laquelle, si on le veut, on pouñra former une niche et loger la statue d’une madone ou d’un saint. Cette fabrique sera d'autant plus vraisemblable, qu’autrefois presque toutes les sources étaient mises sous la protection d’un saint, et qu'on attribuait des vertus merveilleuses aux eaux d’un assez grand nombre. La fontaine jaillissante est tout entière un effet de l’art; aussi n’est -elle par- failement en convenance que dans les grands jardins réguliers où le luxe et la richesse sont une des nécessités de chaque objet. Tantôt l’eau tombe en nappe d’une coquille soutenue par des Nymphes, des Grâces ou des Tritons , tantôt elle s’'élance et jaillit de la gueule d’un DES JARDINS. 123 lion , d’un poisson, ou d’un autre animal. Il est mille manières toutes plus agréables les unes que les autres de décorer ce genre de monument dont on doit confier la direction à un architecte habile ; Tui seul saura Ja mettre en harmonie de style et de caractère avec le senre d'architecture de l'habitation principale, et lui donner par conséquent ses véritables convenances. Une wolière se trouve quelquefois placée d’une ma- nière pittoresque dans un jardin ; mais pour cela on mas- quera la triste monotonie de ses grillages, en Jui faisant prendre la forme d’une petite tour, d’une rotonde, d’un temple, ou autre chose semblable. Ellesera à proximité de la maison , afin de pouvoir veiller plus facilement sur les petits prisonniers qu'elle renferme, et leur donner des soins journaliers. Nous avons remarqué que la forme carrée est celle qui convient le moins à cette fabrique. Les statues et les vases font la richesse des jardins réguliers et de luxe, mais seulement par la beauté du travail, parleur prix, etnon pas par leur nombre. Le bronze, le marbre et Le granit sont les seules matières dignes de rendre, dans le fourneau ou sous le ciseau , les belles conceptions d’un artiste distingué. Si la mé- diocrité de sa fortune ne permet pas à amateur de pla- cer de bons ouvrages dans ses jardins , il fera très - bien de se passer tout-à-fait de ce genre de décoration. Il n’est rien de plus mesquin que ces plâtres à moitié rongés par la pluie, malgré les enduits dont on les couvre tous les ans; rien de mauvais goût et de plus misérable que ces ridicules babouins grossièrement ébauchés par un tailleur de pierre qui vousles vend pour des Pomones, des Cérès , des Flores , etc. ; dans tous les cas, il faut être extrémement sobre de ces riches décorations qui ne conviennent parfaitement qu’en face d’un château de l'architecture la plus élégante, ou du palais d’un prince. La glacière n’est pas uné fabrique par elle - même; 124 DES JARDINS. mais, comme elle est extrêmement utile dans une maison de campagne, ne fût-ce que pour conserver pendant les chaleurs de l'été des provisions que l’on est quelque- fois obligé de faire venir de loin; comme aussi on est dans l’usage de la bâtir hors de l'enceinte de l'habitation, elle se trouvera très-bien placée dans le jardin où elle Joindra à son utilité le mérite de faire ornement. On peut recouvrir sa voûte de deux ou trois pieds de terre; pratiquer un sentier tournant pour gagner lesommet, où l'on construit un petit temple ou un kiosque. On le des arbres et des arbustes sur cette butte, et par ce moyen on acquiert une fraicheur utile à Le conserva- üon de la glace’, et un ombrage agréable. Il est vrai qu'en masquant ainsi une nice on pêche un peu contre le bon goût qui défend expressément ces monta- gnes élevées à la pelle et à la pioche ; mais l'artiste peut aisément trouver le moyen de motiver ce monceau de terre en le faisant servir de base, comme nous l’avons dit, à une fabrique , eten motivant la fabrique elle-même, c'est-à-dire , en la plaçant près d’un mur, d’une palis- sade par dessus laquelle il fallait l'élever pourse procurer une échappée de vue intéressante. On peut encore don- ner à la glacière la forme d’une rotonde ou de tout au- tre monument , auquel on imprimera le caractère de la scène dans laquelle il figurera. Les ponts sont une des constructions les plus multi- pliées et les plus variées, que l’on rencontre dans tous les jardins et Les parcs ; mais malheureusement on les y voit souvent placés sans aucune nécessité; et, dans ce cas, malgré l’effet pittoresque qu'ils peuvent produire, ils n’en sont pas moins des objets ridicules. Si un pay- sage semblait demander des ponts pour être davantage caractérisé, quoiqu'ils n’y fussent pas d’un usage indis- pensable , l'artiste combinerait son dessin de manière à les faire paraître un effet du besoin. Pour cela, il don- nerait à ses pièces d'eau la forme de rivière anglaise, DES JARDINS. 12) dont il dissimulerait les extrémités avec un soin extréme; mais , si l’exéculion rigoureuse de ce moyen était impos- sible, il renoncerait à ce genre de décoration. Les ponts ont cela de particulier, que la multiplicité de leurs formes, la différence des matériaux avec les- quels ils sont bâtis , leur donnent des caractères tranchés et tellement variés qu'ils sont propres à augmenter l’ef- fet des scènes de tous les genres et de s'offrir dans toutes les positions. Un pont en corde avec quelques planches en travers pourra augmenter l'émotion que fait naître une scène terrible, lorsqu'il sera jeté sur un précipice pour la communication de deux pics de rochers élevés. Deux chênes non équarris , dont les branches forment les garde-fous, jetés sur un torrent impétueux dont les ondes écumantes font retentir les bocages en se préci- pitant en cascades, renforceront considérablement le caractère pittoresque ou champêtre d’une scène. Lors- qu'une rivière large et profonde promènera avec majesté ses eaux calmes au milieu des pelouses, des prairies et des bosquets, un pont en pierres de taille entremêlées de brillans matériaux, et surmonté d’une élégante ba- lustrade , servira de facile communication d’une rive à l’autre , et sera parfaitement dans les convenances. Près d'un bocage du caractère tranquille , un pont gothique trouverait convenablement sa place. Un autre, de plu- sieurs arches en plein cintre ou peu surbaissées, parai- trait avantageusement dans une campagne ouverte , où une belle rivière serait traversée par un chemin fré- quenté. Dans un paysage d’un aspect sauvage, on élè- vera un pont en pierre brute , et enfin une scène rustique sera plus caractérisée si on y rencontre un pont en bois non équarri, couvert de son écorce, et employé tel à peu près qu’on l’a coupé dans la forêt. Les intérieurs de jardins et les points de vue rappro- chés exigent plus spécialement des ponts en bois, parce que la diversité de leurs formes, la combinaison de leurs 126 DES JARDINS. assemblages, la disposition de leurs culées, et le ton de leur couleur, s'associent très-facilement aux eflets oppo- sés et variés des petites scènes. Nous recommanderons surtout de rejeter d’une composition de bon goût ces formes étrangères et bizarres, ces ponts chinois, in- diens, etc., qui eurent tant de vogue lors de la naissance de Part des jardins paysagers ; nous le répétons, lartiste doit se faire une loi inviolable de suivre strictement les convenances. Îl faut donc que toutes ses constructions soient motivées; or nous ne voyons pas trop, ainsi que nous l'avons déjà dit, comment on pourrait renconirer avec quelque vraisemblance une construction chinoise ou indienne dans les environs de Paris. Cette règle n’est pas aussi rigoureuse dans la composition du jardin symé- tique où l’art se montre sans cesse à côté de la nature, comme pour lui disputer son empire sur nos sens. Comme il arrive assez fréquemment qu'un amateur n'appelle pas un architecte lorsqu'il veut élever une de ces fabriques dans un jardin, nous allons donner les principales règles de construction dont il ne doit pas s'é- carter, sous peine de créer des monumens de mauvais goût, sans intérêt comme sans eflet. Pour qu'un pont soit agréable, il faut que sa longueur soit au moins double de sa largeur, et quelquefois beaucoup plus. S'il arrivait que la largeur d’un ruisseau où d’une petite rivière ne {ût pas assez considérable pour permettre de faire un pont dans les proportions convenables , on remédierait à cet inconvénient en l’étendant, des deux côtés, au dela des rives du courant, jusqu’à ce qu'il ait acquis des dimensions suflisantes. Cette méthode est parfaite- ment motivée par les inondations qui souvent ont lieu l'hiver ou pendant la saison des pluies. La hauteur des arches est assez arbitraire ; cependant elle sera toujours calculée sur la masse de la construction, et sur l’espace qu'elles auront à franchir. I ne faut pas les multiplier, parce qu’alors elles perdent ces belles dimensions qui DES JARDINS. 127 donnent au pont de la grâce et de la légèreté, et la cons- truction devient lourde et massive. Souvent on calcule la hauteur d’une arche sur la commodité de la naviga- tion ; il faut alors qu’elle soit suflisante pour que les personnes de la plus grande taille puissent facile- ment passer dessous debout dans l’embarcation pour pouvoir la manœuvrer. On doit encore prendre en considération la pente de la culée d’un pont , afin de rendre son arrivée aisée, ce que l’on fait en l’adoucis- sant en montée insensible. Les garde - fous et parapets seront proportionnés à sa largeur, et plutôt plus bas que trop hauts, afin de ne gêner la vue en aucune ma- nière. L'aspect sous lequel un pont se présente dans une - composition est une chose essentielle ; nous ne pouvons, sur ce sujet, donner de meilleurs conseils que M. de Viart. « Les ponts, dit-il, pour produire tout l'effet dont ils sont susceptibles, devront, autant qu'il sera possible , être posés de manière à marcher avec la pers- pective , étant observés des principaux points de vue, particulièrement de celui de lhabitation; c’est-à-dire que leur entrée , ou partiela plus rapprochée, doit s'appuyer à la vue sur un des côtés du tableau, et l’autre extré- mité, se diriger vers le fond de la composition. Cette situation fera mieux juger de leur forme, en laissant voir une de leurs faces, et permettra à l'œil de pénétrer sous leur voûte, de jouir des coups de lumière et des ombres que les différentes heures du jour leur procurent, et aussi de distinguer les deux côtés de leurs parapets au point où le chemin entre dessus ; ce qui les fera alors re- marquer comme des corps solides : impression beaucoup plus favorable à l'effet pittoresque, que s'ils étaient vus exactement en face, ou dans la direction d’un passage. » Quelquefois un pont en pierre peut paraître un peu lourd pour être parfaitement en harmonie avec certaines parties de paysage ; et cependant le caractère principal 128 DES JARDINS. de la scène, ou même une utilité forcée, contraint à le construire ainsi. On parvient à le faire paraître plus léger en employant des matériaux de couleurs différen- tes, disposés en compartimens , qui en diminuent le vo- lume et contribuent à sa décoration. Ces ponts seront placés de préférence dans des expositions où le soleil puisse les éclairer long-temps, car dans l'ombre ils pa- raissent encore plus massifs que lorsqu'ils sont frappés par ses rayons, outre que cette vive lumière leur donne un aspect beaucoup plus pittoresque. Les ponts en bois peuvent être très-avantageux dans une position con- traire. Les embarcations, barques, bateaux, gondoles, que l’on place sur les pièces d’eau pour se procurer le Gouble plaisir d’une promenade délicieuse et d’un exer- cice amusant, seront, comme toutes les autres choses, ap- propriés au caractère principal des scènes formant ta- bleau et se liant à celui des eaux. Un bateau modeste et simple sera attaché devant la maison du pêcheur ; une barque légère , plus ou moins enjolivée , se promènera sur la rivière qui serpente et se déploie devant une ha- bitation d’une architecture élégante; et la riche gondole, dont la proue se prolonge en statue dorée , dont le mât est paré de banderoles de soie, voguera avec grâce sur le lac majestueux dont les ondes viennent expirer au bas de l'escalier d’un palais ou d’un château habité par un homme puissant. Dans tous les cas, on sacrifiera la légèreté, et même, s'il était nécessaire, l'élégance d’une embareation à sa solidité. Sur une pièce d’eau , même la moins profonde, on ne doit jamais avoir la moindre crainte d’un accident, ne püt-il être que désagréable, ou le plaisir que l’on peut retirer d’une promenade sur l'eau se métamorphose en un véritable supplice. Les barrières et palissades, quoique paraissant au premier coup d'œil offrir peu d'intérêt, sont cependant susceptibles de donner à une composition des eflets pit- DES JARDINS. 129 toresques aussi agréables que des édifices beaucoup plus importans. Entrevues à travers des groupes , entre des massifs de verdure , entourant une toufle de bois qu’on semble avoir voulu préserver de la dent du bétail, au milieu d’une pelouse ou d’une prairie , leur bon eflet est immanquable. Dans les jardins réguliers on peut établir ces constructions en bois descié ou de charpente; mais dans le paysage, elles tirent presque tout leur agrément de leur apparente simplicité , et on les fait alors en bois couvert de son écorce, et en baguettes de châtaignier agréablement entrelacées. On peut voir de très-jolis modèles de ce genre de treillis dans l'ouvrage de M. Ga- briel Thouin , et dans le traité sur la composition et l’or- nement des jardins. Les bancs, destinés à offrir aux promeneurs des lieux de repos , ne doivent pas être jetés au hasard, et peut- être ont plus d'importance dans une composition qu'on ne leur en soupconne généralement. Les bancs de gazon, par exemple, ne se rencontreront que dans les lieux écartés où l’on ne sera pas à portée de s’en servir sou- vent, et cela par deux raisons : la première et la plus essentielle est qu'ils sont très malsains à cause de leur humidité ; la seconde, est que l’usage les dégrade facilement et leur fait perdre tout leur charme. Mais les bancs en bois et les siéges rustiques n’ont jamais de dé- sagrémens. Leur choix, leur forme et leur construction doivent, de mêmeque pour lesfabriques, être déterminés par le caractère des sites. Les plus grossiers, les plus rustiques et les plus simples sont souvent les plus agréa- bles. C’est dans l'endroit que l'artiste aura marqué pour fixer l'attention du spectateur sur les tableaux nombreux et variés qu'offrira sa composition, qu'il doit placer un banc d’où l'œil saisira sans efforts tous les détails. Il n'est rien de tel que des jeux de diverses sortes, pour augmenter la somme de plaisir que l’on peut at- tendre d’un jardin d'agrément. C’est surtout à la jeu- I. O 130 DES JARDINS. nesse que conviennent ces exercices d'autant plus agréa- bles, qu'ils entretiennent chez elle cette aimable gaîté, compagne inséparable de l’innocence et d’un bon cœur. C’est dans les bosquets rians qu'on les place avec avan- tage. Les plus usités sont : les balancçoires, jeux de bague, de paume, de boule, de quilles , ete. Les tirs d'arc, de fusil et de pistolet peuvent aussi y figurer ; mais il faut éloigner les deux derniers de l'habitation, parce que le bruit des armes à feu est désagréable pour beaucoup de personnes. Il faut aussi prendre les précau- tons les plus scrupuleuses pour que les balles ne puis- sent se détourner du but et causer des accidens. Ici nous terminerons l’histoire des fabriques, sur les- quelles nous croyons que plus de détails seraient ab- solument inutiles. C’est à l'homme de goût à juger sur les lieux de toutes les circonstances que nous n'avons pu prévoir, et à tirer parti de tous les accidens que peuvent lui offrir le site et la nature du sol. $ V. Des effets d'optique. Sous ce titre nous entendons traiter de la perspective, et des artifices de plantations par lesquels on vient à bout de faire paraitre aux yeux des accidens de terrain qui n'existent pas en réalité, d’allonger la perspective, de créer pour ainsi dire des distances, enfin de faire pa- raitre une composition ou une scène d’une étendue beaucoup plus vaste qu’elle n’est en effet. Toute la perspective gît dans l’opposition qui existe entre les ombres et la lumière , entre les teintes claires ou foncées, et la dégradation, en grosseur, en forme et en couleur, des objets à mesure qu'ils s’éloignent de nous. Nous allons, par un exemple, développer ce prin- cipe, qui renferme tout ce qu'il est nécessaire de savoir au dessinateur de jardin, pour produire avec une DES JARDINS. 131 grande facilité les choses les plus surprenantes dans ce genre. Supposons une avenue de peupliers de deux mille toises de longueur, et voyons si nous ne pourrons pas rendre le même effet sur une longueur de mille toises seulement. En nous plaçant au milien de l'avenue , entre les deux premiers arbres, nous estimons de suite que l'allée où nous sommes a quarante pieds de large, et que les arbres sont éloignés de quarante pieds les uns des autres en tous sens. Nous apprécions fort bien cette dis- tance du premier au second arbre, mais du second au troisième elle nous paraît un peu moindre, du troisième au quatrième elle nous parait encore plus peute, et ainsi de suite, toujours en diminuant, jusqu’à ce qu’en- fin, à un grand éloignement , les arbres paraissent se toucher les uns et les autres. La largeur de la route nous paraît aussi diminuer dans les mêmes proportions, et n’a- voir, à son extrémité que deux ou trois pieds, plus ou moins selon la distance. Les arbres suivent la même progression relativement à leur hauteur, à leur largeur, et généralement à toutes leurs proportions. Mais notre manière de percevoir les objets produit encore un phé- nomène dont il faut se rendre un compte exact ; le pre- mier arbre nous présente des détails de feuillage que nous n'apercevons plus que comme des masses légèrement esquissées à un certain éloignement; plus loin encore ces masses se fondent les unes dans les autres pour en former de plus grandes, qui disparaissent à leur tour et ne laissent plus distinguer dans l'arbre entier qu’une seule masse peu arrêtée dans ses contours ; et même si l'éloignement est considérable, les arbres eux-mêmes se ou les uns dans les autres pour ne plus montrer à notre œil trompé qu'un seul tapis ou rideau d’une verdure fugitive. Les couleurs suivent Ja même loi de dégradation ; à mesure que les objets s’éloignent de nous , ils perdent celte teinte foncée qu'ils ont sur le 132 DES JARDINS. premier plan du tableau, teinte d’autant plus dure qu'elle est plus rapprochée de nos yeux, et ceci est à re- marquer. À une certaine distance nous voyons les objets à travers une masse de vapeur atmosphérique, assez grande pour leur communiquer une teinte de bleu qui jui est propre. Plus la distance est grande, plus la teinte bleuâtre devient intense; et enfin à un éloignement con- sidérable les montagnes même nous paraissent à peu près de la même couleur azurée que le ciel. Ces phénomènes bien connus par lartiste , il pourra aisément en tirer parti pour éloigner ou rapprocher la perspective à sa volonté. Revenons à notre allée de peu- pliers que nous devons planter sur mille toises, et à la- quelle nous voulons faire prendre l'apparence d’une lon- gueur de deux mille. Nous lui donnerons quarante pieds de largeur à son‘entrée, et nous rétrécirons peu à peu cette largeur de manière à la réduire de moitié, plus ou moins, à son extrémité ; l'éloignement fera le reste de la réduction. Sur le premier plan nous placerons les ar- bres qui croissent avec le plus de vigueur , et qui s’élè- vent à une grande hauteur, pourvu qu'ils joignent à ces qualités un feuillage d’un vert très-foncé pour faire re- poussoir ; plus loin nous planterons des arbres moins hauts, à feuillage moins étoffé et d’une teinte moins foncée. À mesure que nous nous éloignerons du point de vue, nous placerons, par dégradation insensible, des ar- bres moins haut, à feuillage plus petit et plus pâle ; enfin les nains de l’espèce , choisis parmi ceux dont les feuilles d'un vert glauque imitent un peu la couleur bleuâtre de l'horizon , seront placés à l'extrémité; il est entendu que le second arbre sera à quarante pieds du premier, le troisième à trente -neuf du second, le quatrième à trente-huit du troisième, et ainsi de suite, en suivant pour les rapprocher les uns des autres, la même progression que suit la route dans son rétrécis- tement. DES JARDINS. 133 Mais, pour produire une illusion complète , il faut que la même loi de perspective ait été observée dans la plan- tation ou la construction des objets extérieurs , et c’est à quoi l'artiste s’astreindra rigoureusement. On conCoit que cette règle de perspective peut s'appliquer dans tou- tes les circonstances et à toutes les choses qui entrent dans [a composition et l’ornement des jardins. Cependant il ne faut pas chercher à trop exagérer l'éloignement, surtout dans un espace médiocre ; car, si l'œil s'aperçoit d’abord d’un des moyens d’ bfibes la pensée lui fera bientôt découvrir tous les autres , et l'illusion détruite, on ne verra plus que l’impuissance de l’art. Souvent un gazon, une pelouse ou une prairie, nous offriraient une perspective charmante, si elle était moins rapprochée. Comme on ne peut guère calculer sur le vo- lume des plantes qui les composent, et pas du tout sur leur espacement , ce sera la couleur qui se chargera de la plus grande partie de lartifice. Sur le devant, ou pre- mier plan, on sèmera le /olium perenne ou ray - grass, avec les crocus, safrans, etc.; les touiles épaisses et d'un vert prononcé du premier, et les fleurs très-appa- rentes des autres feront parfaitement repoussoir. Vers le milieu de la longueur du gazon on sèmera la fétuque ovine mêlée au lotier corniculé et au trèfle blanc ; ceux-et ayant les feuilles beaucoup plus menues, d’un vert plus pâle, et les fleurs moins grandes, fuiront davantage aux yeux. Enfin, vers le dernier quart de la longueur et jus- qu'à l'extrémité, on sèmera la fétuque glauque et les trèfles incarnat et fraise ; la couleur bleuâtre de cette fétuque et le peu d'apparence des deux trèfles , les met- tront parfaitement en harmonie avec le fond plus éloi- gné du paysage, et feront paraitre la pièce de verdure d’une étendue beaucoup plus considérable. On concoit qu'en semant il faut mélanger ses graines de manière à ne pas passer trop brusquement d’une espèce à une au- tre, ce qui formerait des zônes tranchées qui produi- 134 DES JARDINS. raient un effet contraire à celui que l’on en attendrait. S'il arrivait, dans un jardin paysager, que l'habitation fût placée dans un lieu de même niveau que celui où l’on voudrait élablir une pièce d’eau , il en résulterait que, quoique très-étendue, elle serait à peine apercue des ap- parlemens , si l’artiste ne suivait un principe d’optique indispensable; dans ce cas , il tracera le cours d’une ri- vière dans une direction qui permette à l'œil de le sui- vre, observé du salon de la maison. Par ce moyen , la vue ne trouvant plus d’obstacle depuis l'instant où elle commence à se fixer sur les eaux, jusqu’à ce qu’elle ar- rive à l'endroit où la rivière se perd à une des extrémités les plus reculées de la grande pièce d’eau, le specta- teur éprouvera uneseule impression, complexe à la vé- rité , mais dont il ne se rendra pas compte ; et cette dis- position des eaux agrandira beaucoup en apparence la principale pièce qu’elle semblera rapprocher de ses yeux. « Les ponts qu’on serait dans le cas d’établirsur ces rivières , ainsi rapprochées de l'habitation, dit M. de Viart , devront toujours être d’une construction légère, pour ne point obstruer le cours des eaux, qui sont dans cette circonstance le point capital. On cherchera aussi , pour cette raison , à les placer sur la portion de rivière qui se trouve le plus sur un des côtés du tableau. En suivant toutes ces dispositions ou d’autres à peu près semblables, que le local pourrait inspirer à une imagi- nation réglée, on tirera le parti le plus avantageux dont soit susceptible une grande masse d’eau située dans la position supposée. » IL arrive fort souvent qu'il est impossible de propor- tionner une pièce d’eau à la majesté ou au caractère de la scène dans laquelle elle se trouve placée. Veut-on en diminuer l'étendue en apparence, on y parvient en rap- prochant artificiellement de l'œil la partie trop éloignée de son rivage. Pour cela on exhausse les bords autant que possible , puis on les rehausse encore en y plaçant DES JARDINS. 135 des objets dont la grandeur des masses permet à la vue d’en saisir les détails; par exemple, un grand monu- ment, ou des groupes d'arbres très - élevés, dont le feuillage très-ample et d’une couleur sombre fait repous- soir pour les objets placés plus loin. Par des moyens contraires on fait paraître une pièce d’eau plus étendue qu'elle ne l’est réellement ; on abaisse jusqu’au niveau des eaux les rives trop exhaussées , on détruit les objets trop saillans et on les remplace avec ceux dont les for- mes plus confuses et les teintes plus claires se confondent plus facilement avec l'horizon. On peut encore, par des îles artistement placées, masquer les rives d’une rivière ou d’un lac, et laisser, par ce moyen fort simple, l’imagination leur créer une étendue analogue au earac- tère du paysage. Nous avons dit, à l’article de la rivière anglaise , comment on déguisait ses extrémités. Sur un terrain plat, on peut, par un artifice de plan- tation, simuler un vallon, rétrécir une vallée, etc, , il ne s’agit, pour le premier cas, que de fortifier en appa- rence l'élévation des coteaux, au moyen d'arbres touffus et élevés, plantés par gradation. De chaque côté on éta- blitses one en plaçant en première ligne des ar- brisseaux ou des arbres de la plus petite rafddur( ceux de moyenne grandeur sur la seconde ligne , et les plus élevés sur le derrière. Si l’on a donné au terrain une lé- gère inflexion qui le relève, ne fût-ce que d’un pied ou même six pouces à droite et à gauche du sentier; si des deux côtés le taillis et les arbres sont tellement touffus qu'ils ne laissent apercevoir aucune partie du sol qu'ils ombragent, on supposera le terrain s’élevant dans lamême proportion que le sommet des arbres, et l’on se croira dans un véritable vallon. Mais une condition essentielle , c’est de choisir, pour faire cette plantation , des arbres dont les branches et le feuillage aient une grande analogie de forme et de couleur; il faudra encore qu'ils n'aient rien de remarquable qui puisse au premier coup d'œil faire 136 DES JARDINS. trop facilement reconnaitre leur espèce, et par consé- quent leurs dimensions ordinaires. On conçoit aisément que si, loin de vouloir faire paraître une vallée, on vou- lait au contraire en déguiser une pendant une certaine étendue, il faudrait planter dans le sens absolument con- traire. Les grands arbres seraient, sur le devant , entre- mélés à d'épais buissons qui masqueraient le terrain ; sur les lignes suivantes seraient d’autres arbres dont les di- mensions diminueraient à mesure que le sol monterait , et le sommet du coteau serait couvert d’arbustes dontles plus hautes guirlandes se trouveraient au même niveau que le sommet des arbres de première ligne , comme à celui des arbres des lignes intermédiaires. Il résulterait que le promeneur, loin de se croire dans une gorge étroite, penserait se promener dans un chemin couvert tracé au milieu d’une forêt. Quelquefois on désire faire paraître plus épais qu'il ne l'est réellement un massif bordant une clairière; on en vient aisément à bout en donnant du mouvement à sa ligne extérieure par le moyen de saillies et de renfonce- mens tracés avec goût : l'œil, trompé par ses sinuosités, accordera au masssif une profondeur qu'il n’a pas. Ces renfoncemens eux-mêmes, quoique créés comme parties accessoires , peuvent avoir un caractère agréable lors- qu'ils interrompent la ligne extérieure d'une épaisse plantation; si l’on veut en augmenter en apparence la profondeur , on place en avant des arbres isolés qui font comme une espèce d'échelle servant à mesurer, et, à la fois , à tromper sur la distance. DES JARDINS. 137 CHAPITRE IL. FORMATION DES JARDINS. Si nous eussions suivi un ordre rigoureusement analy- tique, nous aurions nécessairement placé ce chapitre avant le précédent. Cependant, comme l’art d’orner les jardins appartient plus particulièrement aux jardins de genre, qu'il les caractérise avec plus de précision, nous avons cru devoir l’enseigner à la suite de nos divi- sions et de celles des auteurs, ne fût-ce que pour les faire mieux comprendre. Nous allons supposer, dans ce chapitre, que l’on a le choix du terrain où l’on veut établir un jardin; car, s’il en était autrement, 1l faudrait bien se soumettre aux cir- constances , et se contenter de tirer tout Le parti possible de ce que l’on posséderait, en faisant une application vai- sonnée des principes que nous allons enseigner. SECTION PREMIÈRE. CHOIX ET PRÉPARATION DES TERRES. On doit se déterminer sur deux considérations princi- pales : 1° sur l'exposition ; 2° sur la qualité du sol. $ L. De l'exposition. On nomme exposition, en jardinage, l’inclinaison plus ou moins grande de la surface du sol vers un des quatre points cardinaux , ou la position de cette surface relativement à un abri. Si le terrain est en pente directement tournée au sud, on dit que lexposition est au midi; sil est en pente 138 DES JARDINS. vers l’est, l’exposition est au levant; s'il est incliné vers l’ouest , elle est au couchant; enfin, si l’inclinai- son regarde le nord , l'exposition est au z0rd. On con- sidère encore si ces expositions sont rigoureuses ; si elles ne le sont pas, on dit qu’un terrain est exposé au $ud- est ou au nord-est, au sud-ouest ou au nord-ouest, selon qu'il est plus ou moins tourné vers ces côtés de l'horizon. Lorsque le sol est plat, de niveau , sans abris, comme par exemple le milieu d’une grande plaine, l'exposition est libre. Il ne faut pas confondre l’exposition libre avec l’ex- position aérée : cette dernière peut être inclinée plus ou moins. Pour être à exposition aérée , il suflit qu'un végétal ne se trouve pas dans une place où l’air ne peut circuler librement , soit qu'il en soit empêché par des rochers, des constructions, des palissades même, ou par d’autres causes. Ainsi, l'exposition découverte ou aérée, diffère donc de l'exposition libre en ce qu'elle s'applique plus particulièrement au végétal qu’au ter- rain. Un quinconce de pommiers, par exemple. peut se planter à exposition libre ; mais chaque pommier, étant ombragé par son voisin, ne sera pas à exposition dé- couverte. L'exposition abritée résulte d’un abri naturel ou ar- üficiel. Une montagne , un rocher, sont des abris na- turels ; des murs, des palissades de verdure, sont des abris artificiels. Les expositions abritées peuvent être en terrain plat ou incliné ; elles sont au midi, quand l'abri est au nord ; au nord, quand l'abri est au midi, etc. On a encore des expositions ombragées , à mi-soleil, au soleil. Les premières résultent d’un abri qui inter- cepte les rayons du soleil pendant la plus grande partie du jour. Si cet abri consiste en lombrage d’un arbre ou d'une palissade de verdure, l'exposition peut être frat- che; s'il consiste en un mur, un rocher, une montagne DES JARDINS. 139 ou toute autre chose qui intercepte la circulation de l'air et présente au vent du nord une résistance qui le force à réagir, l'exposition est froide. L'exposition à mi-soleil résulte d’un abri qui intercepte les rayons de cet astre pendant la moitié du jour, depuis neuf ou dix heures jusqu’à deux ou trois, ou, bien depuis le lever - du soleil jusqu'à midi, ou enfin depuis midi jusqu’à son coucher. Ces deux dernières expositions répondent à celles que nous avons nommées du couchant et du le- vant. Enfin , il existe des expositions étouffées. Ce sont celles qui sont abritées de tous côtés par des bâtimens très - hauts ou par des escarpemens de terrain, de ma- nière à former des enfoncemens ou des gorges dans les- quelles Les rayons du soleil se concentrent pendant une partie du jour. Comme la théorie des expositions est une branche très-importante de l’art du jardinier , nous allons en pré- senter un tableau méthodique. Il servira à jeter sur lhis- toire de nos cultures une clarté indispensable. NOUS CONSIDÉRONS LES EXPOSITIONS SOUS LES RAPPORTS : EXPOSITIONS. Faible RITES ALAIN Froide ou du nord. Du nord-est. Du nord-ouest. ? *) Du sud-est. Du sud-ouest. ÉO RE NES MAT AAT Ten Chaude ou du midi. D'UNE CHALEUR.{ Modérée., . . . . . . . Circulant librement autour de plusieurs végétaux SROMDES A NU den Libre. Ares Circulant librement autour f d'unseulre Min sr Découverte ou aérée. Concentré dans un petit es- pace et ne circulant pas , librement... 0" Ftouffee. Faible Re RENNES + Ombragée. D'UNE voi [dé D EDEN A ait 1 .. À mi-soleil. ÉOQTE AE NE en Au soleil. 140 DES JARDINS. Autant qu'on le pourra, on choisira, pour tracer un jardin, une partie de terrain qui offrira le plus grand nombre possible de ces expositions. Si la nature du pays n'était pas assez montagneuse pour cela , ou que l’on ne dût renfermer qu’un petit espace qui ne permit pas de les réunir dans la même enceinte, on se déterminerait sur le genre de culture que l’on voudrait adopter de préférence. Nous en avons assez dit sur le jardin d'agrément pour diriger l’amateur dans son choix : aussi n’indiquerons- nous ici les expositions les plus favorables que pour les jardins d'utilité, et pour ceux que nous avons appelés mixtes. Quand on veut établir un marais, on donne la préfé- rence à une exposition libre si on habite le midi de la France, ou à une exposition au midi si c’est dans le nord. Les primeurs réussissent très-bien dans les expositions étouflées où la chaleur devient d'autant plus forte qu’elle est plus concentrée ; à défaut, on Les place à l'exposition du midi. Le potager-fruitier exige dans le midi l'exposition du levant. Au nord il lui faut celle du midi. Le fruitier, si on veut y cultiver toutes les espèces de fruits, demande l'exposition libre ; si on le consacre à la culture spéciale de quelques espèces, il faudra lui donner celle qui est le plus favorable à chacune. Par exemple, le levant pour la vigne , le levant ou le couchant pour la pêche et l’abricot , le midi pour l’oranger et le gre- nadier, etc. Le jardin pharmaceutique exigerait un grand nombre d'expositions ; mais, en en prenant une libre pour terme moyen, on force toutes les plantes à y prospérer au moyen des abris. Le jardin botanique est dans le même cas que le pré- cédent. Enfin, les expositions générales qui présentent le plus DES JARDINS. 141 d'avantages sous le climat de Paris, et par conséquent dans toutes les parties tempérées de l’Europe, sont celles du levant, du midi et du couchant. Mais il ne suflit pas qu'un jardin ait une bonne expo- sition générale, il faut encore en créer d’artificielles. Pour cela on se sert de murs, de paillassons et de palis- sades vertes, comme nous l'avons dit, et l’on obtient par l’art ce que la nature a refusé. Non seulement les végétaux ne réussissent bien que dans une exposition favorable , mais il en est même qui refusent de croître dans toute autre que celle voulue par leur nature. C’est ainsi que les bruyères périront si elles ne sont ombragées pendant une partie du jour, que les rosages n'élaleront leurs charmantes corolles que dans un lieu frais et dérobé à la grande clarté du jour, tandis que les figuiers ne müriront leurs fruits, et les plantes grasses ne montreront leurs fleurs , qu'à la plus forte ar- deur du soleil. La chaleur et la lumière sont indispensa- bles à toutes Les plantes, mais il ne leur en faut que la quantité nécessaire à chacune. Si elles en ont trop, elles se dessèchent et meurent; si elles n’en ont pas assez, elles s’étiolent, languissent quelque temps, et finissent par périr. Il n’en est pas de même de l'air; car la plupart ne peut jamais en avoir trop , au moins quand elles sont en santé. S'il était possible de donner en même temps aux plantes de l'air et de la chaleur, un grand problème d'horticulture serait résolu, et nous pourrions, au moyen des serres, voir figurer communément sur nos tables Les fruits de toutes les parties de la terre , avec le même parfum et la même saveur qu'ils ont dans leur pays natal. Une chose essentielle, c’est d'établir le jardin dans un lieu où l'air est pur; car, s’il charrie avec lui des miasmes odorans , les fruits pourront s’en imprégner et contrac- ier un mauvais goût. Les terrains bas, marécageux, à 142 DES JARDINS. proximité des marais croupissans ou des voiries, offrent souvent cet inconvénient , outre qu'ils sont sujets à des brouillards froids qui font couler les fleurs , et aux gelées de printemps plus dangereuses encore : le seul avantage qu'ils présentent, c’est qu'ils sont moins exposés à la sécheresse. Les endroits élevés, tels que les plateaux qui couron- sent les montagnes, n’ont pas cesinconvéniens, mais la température y est ordinairement trop froide , et la vio- lence des vents tourmente les végétaux, les déracine , ou au moins arrête la vigueur de leur végétation. C’est au pied des collines, dans les vallons secs, sur le penchant.des coteaux, dans la partie la plus élevée des plaines abritées, que l'exposition est la plus favora- ble pour le plus grand nombre des végétaux , et par con- séquent pour l'établissement d’un jardin. Si les terres sont fortes et absorbent difficilement les eaux de pluie, on Jui donnera une légère pente; dans le cas contraire, il offrira plus de facilité dans sa culture en le tracant sur un terrain plat ou à peu près. Avant de se déterminer , on prendra en considération la proximité des eaux pour les arrosemens, la facilité des abords et la qualité du terrain. $ IL. Du Sol. Le choix d’une bonne exposition est indispensable , mas celui du sol l’est encore davantage si on peut le dire. La première qualité qu'il lui faut est d’être profond , afin que les arbres que l’on y plantera puissent y étendre facilement leurs racines verticales. Il faut encore qu'il ne soit ni trop sec ni trop humide ; enfin que la terre en soit d’une bonne qualité. Mais, pour faire comprendre parfaitement ce qui cons- {itue la bonne qualité d'une terre, nous sommes forcés «l'entrer dans des détails chimiques que nous tâcherons DES JARDINS. 143 de rendre avec toute la précision et la clarté qui nous seront possibles. Il. Znalyse des Terres. Toutes les terres végétales que l’on rencontre dans la nature se divisent en deux classes : les 2umus mi- néraux , et les Awmnus résultant de la décomposition des corps organisés. Les humus minéraux résultent de la décomposition des rochers qui forment le noyau et la base de notre globe, et cette décomposition est opérée par de nouvelles combinaisons et par le frottement. On sait que toutes les molécules élémentaires de ma- tière sont soumises à une loi particulière d’attraction qui les contraint sans cesse à se rapprocher les unes des autres et à se combiner. Cette tendance à former de nouvelles combinaisons se nomme affinité. Par exem- ple, si l’on expose un morceau de fer dans un lieu hu- mide, sa surface s emparera de l’oxigène de Pair, parce que les molécules de fer ont beaucoup d’aflinité avec l’oxigène , et n’en ont pas ou beaucoup moins avec les autres gaz , tels que l'hydrogène, l'azote, qui compo- sent l’air. Cette surface offrira une nouvelle combi- naison pulvérulente et rouge, nommée rouille ou oxide de fer. Les molécules élémentaires , comme on voit par cet exemple , n’ont pas toutes la même affinité. Chacune a les siennes particulières : d’où il résulte qu’elles refusent constamment de se combiner avec de certains corps, et qu’elles se combinentintimement avec les autres. C’est par la connaissance des aflinités que la chimie vient à bout de décomposer tous les corps et d’en recomposer quelques-uns. Ce principe connu, on concevra aisément que la surface des rochers se trouvant sans cesse en contact 144 DES JARDINS. précis avec les météores atmosphériques, tels que l'air, la pluie, les frimas , etc. , doit combiner quelques -unes de ses parties, peut - être toutes, avec les gaz charriés par ces météores, et qui ont de l’aflinité avec chacune d'elles. Il en résulte des efflorescences et des terres qui sont entraînées par les eaux jusque dans le fond des vallées. Voilà l’humus minéral formé par ce que nous avons appelé de nouvelles combinaisons. L'eau, l'air, et les autres météores atmosphériques, en décomposant les parties de rochers avec lesquelles ilsont le plus d’aflinité, mettent les autres à nu, les minent, les détachent de la masse en détruisant les corps dans les- quels elles étaient agrégées ; ces parties, obéissant aux lois de la pondération, roulent, sont entraînées par les pluies, par les torrens ; elles éprouvent continuelle- ment des chocs qui les brisent en fractions plus ou moins volumineuses. Le frottement les use, émousse leurs angles, et en forme d’abord le galet, qui, entraîné à son tour, devient sable, etenfin, usé davantage et tout- à-fait décomposé , se trouve être une véritable terre ou lhumus minéral, résultant, comme nous l'avons dit, du frottement. Lorsque l’on connaîtra bien la nature des rochers sur lesquels un pays est assis, on connaîtra donc la nature des terres qui sont accumulées dans ses vallées. Cepen- dant il faudra encore avoir égard à leur plus ou moins de distance des rochers d’où elles auront été charriées par les eaux; car, leurs principes décomposés n'étant pas tous de même nature , leur pesanteur spécifique et leur aflinité avec l’eau sont aussi diflérentes : d’où il résulte qu’à égalité de ténuité les uns sont déposés les premiers, et les autres sont entraînés beaucoup plus loin. Les couches les plus près du point de départ seront donc les oxides de fer, la silice, et successivement la chaux , l’alumine et la magnésie. Nous allons d’abord faire connaître la nature des DES JARDINS. 145 rochers dont les masses sont assez considérables pour fournir des couches de terre À l'agriculture ; puis nous analyserons ensuite les résidus des décompositions , où plutôt des combinaisons dont nous venons de parler, La presque totalité des rochers de notre globe est composée de feld-spath , de quartz, de mica, de chaux Carbonatée ou pierre calcaire, et de schiste. Les autres substances qu'on y trouve y sont en trop petite quantité pour qu'on puisse les compter pour quelque chose dans la composition des terres arables. Le feld-spath est un mélange naturel de silice, d’a- Jumine et de chaux. Il fait la base des granits ; mais les roches granitiques renferment ordinairement du mica et du quartz mélangés plus où moins intimement avec lui par petits fragmens. Le feld-spath est mis, par les chi- misies, dans la classe des pierres dures ; on le trouve sous une forme lamelleuse , ou cristallisé en parallélipi- pède obliquangle, dont deux côtés sont toujours ternes et les autres brillans (voy. pl. 1°, fig. r ). Le quartz a pour caractères d’être extrémement dur e au point de rayer lacier , et de se cristalliser en prisme à six pans, terminé en pyramide à six faces (voy. pl. 1°°, Jig. 2), souvent adossées base à base (voy. pl. 1°, Jig- 3). H contient beaucoup de silice, un peu d’alu- mine , et souvent des oxides métalliques qui le colorent. Comme il est une des substances les plus dures, qu'il a peu d’aflinité avec les corps entrant dans la composi- tion de l’eau et de l'air, il est plus difficile à se décom- poser par le frottement et par de nouvelles combinai- sons; aussi fournit-1l presque exclusivement la base des terrains sablonneux. Lorsque ses particules de sable sontréunies, par un gluten, en masses plus ou moins dures, il forme le grès ; lorsqu'il est aggloméré en fragmens plus gros et différemment colorés , comme, par exem- ple, dans la pierre meulière, on lui donnait autrefois le nom de silex, La pierre à fusil est un quartz. 1. 19 146 DES JARDINS. Le mica est une pierre tendre , que l’on peut diviser en feuillets très-larges et très-minces , et surtout élas- tiques, ce qui est un trés - bon caractère spécifique. Quand il est mêlé avec le quartz, il prend une couleur métallique jaune ou blanche, imitant parfaitement l'or ou l'argent ; il est composé d’alumine et de magnésie. La chaux carbonatée ou pierre calcaire est ce que les chimistes appellent un sel terreux. Elle est composée de chaux combinée avec l'acide carbonique. Quand on la rencontre cristallisée, elle a la forme d’un rhomboïde à sommet obtus( voy. pl. 1°, fig. 4), mais plus souvent on la trouve en masses informes. Les marbre, craie, blanc d'Espagne, stalactite, tuf, pierre à bâtir, etc., ne sont rien autre chose que de la chaux carbonatée. Nous devons parler ici des différentes combinaisons de la chaux avec des acides , parce qu'on la trouve quel- quefois en grandes masses pierreuses qui fournissent Ja base de quelques sols cultivés. La chaux phosphatée est combinée avec l'acide phosphorique; ellese cristallise en prisme hexaèdre régulier (voy. pl. 1°, fig. 5), ne fait pas d’eflervescence avec les acides, et ses fragmens deviennent lumineux lorsqu'ils sont chauflés ou forte- ment frottés. La chaux est unie à l'acide fluorique dans la pierre autrefois nommée spath fluor , et aujourd'hui chaux fluatée ; alors elle se cristallise en un octaèdre régulier ou en py ramides quadrangulaires adossées base à base (pl. 1°, J18- 7); quelquefois fort agréablement co- lorées en violet , en bleu ou en vert. La chaux sulfatée est combinée avec une petite quantité d'acide sulfurique. Le gypse, la sélénite et la pierre à plâtre ne sont rien autre chose. Lorsqu'elle est pure, elle se cristallise en prisme à quatre pans , dont la base est un carré allongé etobliquangle (voy. pl. 1", fig. 6), mais plus ordinai- rement on la rencontre en masses terreuses , combinée avec la chaux carbonatée. Le schiste est une combinaison d’alumine , de silice DES JARDINS. 147 et d'un oxide métallique. Il se présente sous la forme d’une pierre plus ou moins tendre, insoluble dans l'eau s divisée en lames ou grands feuillets fragiles et parallèles entre eux : tels sont les ardoises, le crayon noir, les pierres à rasoirs , etc. Nous trouvons donc que les principes qui constituent les roches sont : 1° l'alumine, 2° la silice 33°.la chaux, 4° la magnésie; plus des acides et des oxides mé- talliques : nous allons à leur tour analyser ces quatre terres. L'alumine pure est une poudre blanche, onctueuse au toucher, happant à la langue, faisant pâte avec l’eau , ayant une odeur particulière, et donnant une apparence lamelleuse aux substances dans lesquelles on la trouve mêlée. Elle se serre et se durcit au feu ; elle est com- posée de 46, 70 d’oxigène, et de 53, 30 d'aluminium : on la retire de l’alun et de l'argile. La silice est une substance sèche , aride, blanche, rude au toucher, très - dure, usant les métaux , et in- soluble dans l’eau. Elle est composée de 50 d’oxigène, et de 50 de silicium'; elle n’est soluble que dans l’a- cide fluorique , et, unie aux alcalis, elle se fond en verre. On la retire du sable, du cristal , du quartz et des cailloux , où elle est presque pure. La chaux pure est composée de 28, 09 d’oxigène, etde 71, 91 de calcium ; elle est âcre, brûlante sur la langue, grisâtre , et absorbe l’eau avec avidité , siflement et dé veloppement de chaleur, La magnésie pure est une poudre blanche, très-légère, semblable à de l'amidon, d’une saveur fade. Elle change du bleu au vert quelques couleurs végétales liquides. On l'extrait de différens sels dans lesquels elle est com- binée avec des acides : elle est peu utile à Ja végéta- ton. On voit que ces quatre terres sont blanchâtres lors- qu'elles sont pures, Elles doivent le plus ordinairement 148 DES JARDINS. les couleurs qu’elles possèdent dans leurs différens états de combinaison, aux oxides métalliques qu’elles contien- nent. Le mélange de ces quatre substances a formé des corps composés qui ont recu des noms particuliers ; deux sont répandus en grandes masses dans la nature : ce sont l'argile et la marne. L’argile est une terre formée par un mélange naturel de silice, d’alumine et d’oxide de fer qui lui donne sa couleur grise. Les proportions de ces matières varient beaucoup, ce qui fait aussi varier sa couleur. Elle a les mêmes qualités que l’alumine , et sert particulièrement pour la poterie. La glaise, la terre de pipe, la terre à foulon, Vocre jaune, la sanguine, la terre si- gillée, ete. , sont des argiles. La marne est un composé, sous forme terreuse ou pierreuse, d’alumine , desilice , et de chaux carbonatée. On la distingue en marne crayeuse quand la chaux carbonatée domine dans le mélange , et en marne ar- gileuse lorsque c’est l’alumine qui fait la plus grande partie de sa base. Ici se borne la nomenclature des humus minéraux. Chacun d’eux, s’il pouvait se trouver seul, fournirait un sol infertile ; mais il n’en est pas ainsi quand ils sont mélangés dans de certaines proportions. Aussi a-t-on fait des recherches pour s'assurer avec exactitude du nombre des parties de chacune de ces terres entrant dans la composition des meilleurs sols connus; et c’est en comparant les résultats obtenus par plusieurs chi- mistes célèbres, que nous viendrons à bout d'établir notre jugement d’une manière certaine. M. Bergmann a analysé un des sols les plus fertiles de la Suède ; M. Gio- bert à fait la même opération dans les environs de Turin; M. Davy , dans le voisinage de Drayton en Middlesex ; M. Tillet, à Paris; M. Chaptal, sur les bords de la Loire et en Touraine. Nous avons pris le terme moyen de ces DES JARDINS. 149 six analyses, et nous avons trouvé que la meilleure terre ‘arable serait ainsi composée : MIE tS Je cUevs +30) DD. Alamine NS 10, 55. Carbonate de chaux. 24, Go. Silex grossier... . . . 17, 65. Sable siliceux. . .. 5, 65. Sable calcaire, . . . a, »». 100, »»,. On concoit que le silex et les sables, qui sont à peu près pour un quart, ne sont utiles que pour rendre la terre plus poreuse. Si nous cherchons à pénétrer les causes qui rendent la silice , l’alumine et la chaux carbonatée aussi utiles à la végétation qu'elles le paraissent , nous les trouverons dans l'analyse des végétaux composant la presque tota- lité des grandes cultures. On retire, selon les analyses de Bergmann et de Ruckert, des cendres mélangées de blé, d'avoine, d'orge, de seigle, de pommes de terre et de trèfle rouge, terme moyen : Silice. . . 48, 25. Alumine. 18, 50. Chaux. . 33, 25. 100, »». Telles sont les matières terreuses que renferment la plupart des plantes ; elles doivent les autres subs- tances qui entrent dans leur composition , à l’humus fourni par le détritus des corps organisés , à l'air et à l'eau. Les terres dont nous venons de donner les analyses , mélangées les unes avec les autres , deviennent plus ou moins fertiles , et prennent différens noms selon qu’une d’elle domine dans le mélange. Lorsqu'un sol renferme la silice, l’alumine et la chaux carbonatée dans les proportions que nousavons indiquées 150 DES JARDINS. plus haut, on dit que la terre est franche. Elle est ordi- nairement assez compacte, et a besoin d’être divisée:au moyen du sable, surtout pour être appropriée à la petite culture. S'il s’y trouve une grande quantité de silex grossier , ou autres débris de roche en assez grosfragmens , on dit qu'elle est pierreuse , rocailleuse ; si c'est le sable qui domine, on la dit sablonneuse ; mais ces dernières qua- lités peuvent appartenir à tous les mélanges. Les terres pierreuses peuvent convenir à la grande culture, les terres sablonneuses valent mieux pour les jardins. La terre franche est ordinairement le détritus des monta- gnes dont la base est le feld-spath, à moins que des pentes opposées aient amené dans le même bassin les décompositions de plusieurs roches qui, réunies, oflrent les mêmes principes élémentaires. Lorsque le mica et le quartz se trouvent mélangés en assez grande quantité avec le feld-spath, le premier fournit de la magnésie à la terre, le second y ajoute de la silice. D'où il résulte que le sol devient plus léger , graveleux et un peu moins fertile : c’est alors un sol granitlique. Les terrains qui contiennent beaucoup de silice , peu d’alumine et une grande quantité de sable, doivent leur origine au quartz; aussi nomme-t-on ces terres quart- zeuses et sablonneuses. Elles sont assez fertiles quand elles reposent sur un fond compact qui retient long- temps l'humidité, ou dans les climats pluvieux ; car leur défaut essentiel est de craindre la sécheresse. Les terres composées d’alumine et de magnésie peu- vent appartenir aux roches de mica; mais cette combi- naison se présente rarement en France, si ce n’est dans les montagnes qui séparent la Loire de la Saône, sous : le 44° degré de latitude. Ces terres micacées sont for- tes, compactes, retiennent l'humidité, et sont peu fer- tiles. On les reconnait aisément , parce que les ruisseaux DES JARDINS. 151 qui les traversent roulent des fragmens de roche res- semblant à des paillettes d’or et d'argent. Lesterres calcaires, qui doivent leur origine à la chaux, sont ordinairement stériles quand elles sont pures ; par exemple, la craie et le tuf, la sélénite, le plâtre, etc. ; mais, mélangées avec la silice et l’alumine, elles for- ment les meilleurs sols, comme nous l’avons dit. Quel- quefois elles se présentent sous la forme d’un sable cal- caire mêlé à une petite quantité de earbonate de chaux ; alors elles sont poreuses , légères, propres à la culture dans les climats pluvieux où elles ont peu à craindre la sécheresse, ou quand elles reposent sur un fond com- pact. Les terres composées de silice, d’alumine et d’un oxide métallique, sont fournies par le schiste; ce qui leur a fait donner le nom de schisteuses. Seules, elles sont peu fertiles. L Lorsque l’alumine forme la base d’une terre, elle est argileuse et forte. Mélangée avec la silice , elle devient moins compacte , elle retient moins l'humidité, et ac- quiert un certain degré de fertilité. Selon ses combinai- sons, elle porte les noms de terre glaise, d’ocre, ou de terre sigillée. Le mélange de l’alumine, de la chaux carbonatée, et d’une très-petite quantité de silice, forme la marne. Celle-ciest crayeuse ou argileuse, comme nous l’avons dit. Dans le premier cas elle est encore nommée marne calcaire où maigre , et dans le second, marne grasse. Seule, elle est stérile : mais, combinée avec d’autres terres, elle en augmente beaucoup la fertilité ; aussi s'en sert-on comme engrais. Les terres “br. c'est-à-dire, dont la silice forme la base, sont pulvérulentes, très-divisibles, légères, et eu beaucoup la sécheresse. On les range, en agri- ire: dans la classe des terres légères. Les "e dans lesquels dominent la magnésie et l’oxide 152 DES JARDINS. de fer sont absolument stériles et confondus par les cul- tivateurs avec les tufs sous le nom de cran. Toutes ces terres retiennent plus ou moins l'humidité, per Ja raison qu’elles sont plus ou moins compactes ; aussi leurs qualités, dans la même espèce, varient-elles selon que la culture se fait dans un pays sec ou humide, sous un climat sain ou pluvieux, selon que les couches de terres sont posées sur des lits perméables ou imper- méables à l’eau. Les terres à bases alumineuses sont celles qui retiennent le plus long-temps l'humidité : elles seront donc fertiles dans les climats secs ; et, pour l'être dans ceux humides , il faudra qu’elles reposent sur un lit de sable qui permette aux eaux un libre écoulement. Ce sera positivement le contraire pour les terres dont la base sera fournie par la silice et la chaux carbonate. Il résulte de ces différens accidens combinés avec une exposition plus ou moins favorable, qu’on a dû diviser les terres en froides et chaudes. Les terres froïdes le sont par une ou plusieurs de ces causes : 1° lorsqu'elles sont exposées au nord ; 2° lorsque, composées d’alumine en trop grande proportion, elles sont fortes et compactes, de manière à retenir lhumi- dité; 3° quand elles reposent sur un lit d'argile qui ne permet pas l’infiltration des eaux; 4° quand la couche de terre se trouve trop près de la couche des eaux ; 5° quand des sources multipliées, ou plusieurs courans d’eau les tiennent constamment dans un état de délaye- ment, par exemple, les sols marécageux ; 6° quand leurs élémens sont en trop petit nombre pour former sans cesse de nouvelles combinaisons et dégager du calorique par la fermentation ; 7° enfin, quand des oxides métal- liques y sont en trop grande quantité, comme par exemple dans la tourbe. Ces deux dernières terres froides sont assez généralement confondues par les cultivateurs avec les terres maigres. Les terres chaudes sont celles qui ont les qualités DES JARDINS. 106 opposées à celles que nous venons d’énumérer : ainsi, 1° lorsqu'un terrain sera tourné au midi et abrité des vents du nord ; 2° lorsqu'il sera assez léger et poreux pour laisser facilement évaporer l'humidité et pénétrer la cha- leur à une certaine profondeur ; 3° quand le lit sur le- quel reposera la couche végétale sera sain et facilement perméable ; 4° quand la couche sera assez éloignée de celle des eaux pour n’en recevoir aucune influence ; 5e quand le terrain ne sera abreuvé que par la petite quantité d’eau nécessaire à l'entretien de la fermentation; G° quand cette fermentation sera continuellement ali- mentée par un grand nombre de principes élémentaires ; enfin, quand ces élémens seront tous de nature à se combiner aisément, un terrain, disons-nous, sera néces- sairement très-chaud. | Nous n'avons pas besoin de dire que les terres sont plus ou moins chaudes ou froides, selon qu'elles ont plus ou moins de ces qualités. Quelques personnes font encore entrer la couleur dans les causes qui augmentent ou diminuent la chaleur du sol ; mais des expériences nous ont prouvé que leurs ob- servations sont absolument fausses, et que les terres blanches et noires ne retiennent la chaleur qu’en pro- portion du nombre de leurs principes élémentaires. D’ail- leurs, le célèbre physicien Herschell a établi d’une ma- nière assez plausible que les rayons solaires sont com- posés de faisceaux distincts de chaleur et de lumière, et je serai assez tenté de croire, toujours raisonnant d’a- près le résultat de mes expériences , que , si le noir ab- sorbe la lumière et Le blanc la réfracte, il peut bien en étre autrement de la chaleur. D'ailleurs les expériences de Wollaston et Ritter semblent assez confirmer les miennes, DES JARDINS. 154 "24179709 9$N9UU0]QD *2SN97J10N() “2SNaUU0]qDQ *28N9]20D4r) “onbinuvar) *25n99171( *21SIDJ{ “252 AD") *241D0]D/) "oUADJÿ *2SN9NU979 “osnosd Ar) *“OYOUDL,T EDUE OI EN "2SSDAr) ÉULEIENT "2UADIU ‘uDd?) PLrA ‘a1D47) 2419707) C7/LON *2490) ‘asin]r) NY LENT 22909174] s SAUVAL * “ourunpe,p nod an ‘zjaenb ap ajqes op 9e sotpis op dnoonvog AŒ ASVE Y S SATILUTI ZASSV MN ES «23: Me Ge rage Ar REX ae ne fe SOUL op nod un ‘oageuoqaeo xnego ‘outunpe ‘oops 2p dnoontog tetes: *xneo 9p aJeuoquvo 2p nod un Jo opt *STANVHD LNTNAUIVNIAUO SXHD —AS LA SAUHOAT SIUUTL 11 A4 ASVA ST mt Ve ne MO UTUUTITE D nod un 99 29J2u0q{189 XNEU") Y SL SATIUALS L L L L L Cet | L L . L LL . . 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En voici les causes : les plantes ne peu- vent se nourrir par leurs racines que des substances so- lubles dans l’eau ; or, la plus grande partie de celles qui composent les terres dont nous avons parlé, ne le sont pas, ou du moins le sont très-diflicilement. La silice pure, par exemple , ne se dissout que dans l'acide fluo- rique et un peu dans les alcalis. Elle forme la base du quartz et du cristal ; supposons que nous remplissions un vase de quartz ou de cristal pulvérisé , il est clair qu’en y plantant un végétal il n’en tirera aucune nourriture, puisque l’eau dont on l’arrosera ne dissoudra aucune molécule terreuse. Si je mélange à ce sable du spath- fluor , du soufre et un alcali, il se fera, quoique lente- ment, un dégagement de gaz acide fluorique, la silice se décomposera, se combinera d’une autre manière, et deviendra soluble dans l’eau. La plante alors pourra s’en emparer. C’est ainsi que chaque substance, obéissant à la loi des affinités, se combinera avec d’autres subs- tances qu'elle rendra solubles dans l’eau, en le devenant elle-même. Or, plus il y aura de substances différentes, plus il y aura d’aflinités, de combinaisons et de matières rendues solubles. Mais il ne nous suffit pas d'enseigner la composition des terres susceptibles de culture, il faut aussi donner Ja manière de les décomposer , afin de pouvoir Les recon- naître sous toutes les formes et s'assurer de leur nature. Nous allons décrire le moyen le plus simple, le seul qui soit exécutable partout et sans instrumens exprès. C'est celui de M. Chaptal, avec quelques modifications. (1) On prend une petite quantité de la terre que l’on veut analyser ; et, après l'avoir exactement mêlée avec les (1) Chimie appliquée à l'agriculture. 156 DES JARDINS. mains, On la pèse, si l’on veut savoir combien elle con- tient d’eau; on la met ensuite dans un vase de grès ca- pable de résister au feu, et on la fait chauffer Jusqu'à ce qu'elle soit parfaitement sèche. IL faut ménager son feu de manière à ne pas la brûler ; et, pour en juger, on met au fond du vase un morceau de paille ; on retire le tout quand il commence à brunir. On pèse et l’on connaît, par la différence du poids, la quantité d’eau qu’elle conte- nait, non pas en combinaison, mais simplement par imbibition. On pulvérise la terre et on la délaye dans de l’eau très- pure ; on laisse reposer un instant , et les parties les plus lourdes se précipitent au fond ; on verse dans un autre vase les plus légères et celles qui sont en dissolution avec l'eau. On agite de nouveau le fond , en y mélant de la nouvelle eau, puis on passe à travers un tamis de crins très-serré. Les sables et autres parties grossières restent dans le tamis ; on les ramasse, on les fait sécher, on les pèse, et c’est par elles que l’on commence l’ana- lyse. On les met dans un vase de verre , et on verse dessus de l'acide muriatique étendu dans trois parties d’eau. S'il y a effervescence, c’est qu’elles contiennent de la chaux carbonatée , et celle-ci se dissout entièrement. On lave de nouveau ce qui reste, on le pèse et l’on connaît combien il contenait de chaux. On remet dans un vase de verre, on y mêle de l’eau très-pure, et l’on agite le tout. La silice se précipite, et l’alumine nage quelque temps; on l’enlève en écoulant doucement l’eau qui la contient, et on lave le résidu de la même manière , jus- qu'à ce que l’eau ensorte pure et limpide. On fait sécher, et l’on verse dessus une très-grande quantité d’acide ni- trique pur. Quelques heures après, celui-ci s’est emparé de toute l’alumine qui pouvait encore étre restée; on lave, on fait sécher, et on juge par le poids de la quan- tité d’alumine qui manque. On remet ce qui reste dans DÉS JARDINS. 157 un vase de métal; et, si l’acide fluorique décompose le tout, on peut conclure qu'il n'y avait plus que de la silice. Il reste à s'occuper de la partie pulvérulente contenue dans l’eau. On fait bouillir le tout pendant un quart- d'heure, avec la précaution de remuer ; puis, lorsque la partie la plus pesante s’est précipitée, on verse l’eau sur un filtre de papier gris. On a, par ce moyen, trois nouvelles parties à analyser, le précipité, le dépôt sur le filtre , et l’eau filtrée. Le précipité se traite comme nous l'avons déjà dit, et on en obtient les mêmes principes. Le dépôt, après avoir été séché, s’analyse avec de l’a- cide muriatique étendu dans quatre parties d’eau. On le verse dessus jusqu'a ce qu'il n'y ait plus d’efferves- cence , et il dissout le carbonate de chaux, celui de ma- gnésie et l’oxide de fer : on filtre la dissolution et l’on a sur le filtre tout ce qui n’est pas soluble dans cet acide, ordinairement de l’alumine, de la silice et quelques détritus de corps organiques. On lave avec de l’eau, jus- qu'a ce qu'elle en sorte insipide, on sèche le résidu et on le pèse. On le met ensuite sur un fer rouge que l’ontient au même degré de chaleur jusqu’à ce que ce résidu de- vienne blanc; s'il s'en dégage une fumée approchant de l'odeur de corne brülée, c’est qu'il contenait des ma- tières animales; si la fumée n’a pas d’odeur, ce sont des matières végétales. Quand le résidu est devenu blane , on le pèse de nouveau, et le poids qui y manque fait connaître la quantité de détritus organiques qu'il con- tenait. On sépare l’alumine et la silice, comme nous avons dit. Il s’agit ensuite de reconnaître les substances en dis- solution dans l'acide muriatique. On y plonge d’abord un morceau d'écorce de chêne : si la liqueur brunit ou noircit, elle contient du fer ; alors on y verse du prussiate de poiasse jusqu'a ce qu'il ne se fasse plus de préci- 1 58 DES JARDINS. \ pité bleu qu’on recueille lorsqu'il est déposé , et que l'on fait chaufler jusqu’au rouge ; c’est alors de l’oxide de fer. Ane reste plus dans la dissolution qu’un peu de car- bonate de chaux que l'on précipite en y versant une dissolution de carbonate de soude jusqu'à ce qu'il ne se fasse plus de précipité. Si ce dépôt est coloré, on peut y soupconner des matières animales ou végétales que l’on fait brûler sur un fer rouge comme nous l'avons dit. Il faut aussi savoir trouver dans la terre qu’on analyse les sels qu’elle contient , surtout quand elle est mélangée à un humus végétal. Et alors l'opération se recommence sur une autre partie de terre prise dans le même lieu. On la fait tremper dans une bonne quantité d’eau, dans laquelle on la délaye parfaitement ; puis on fait bouillir pendant quelque temps, et ensuite on laisse déposer jusqu’à ce que la terre soit précipitée et que l’eau soit devenue limpide ; on verse cette eau dans un vase, et on Ja fait évaporer sur un feu très-doux, ou plutôt sur des cendres chaudes , jusqu'à ce qu'on obtienne des cristaux bien formés. On juge alors, par leur figure et par lcurs autres qualités, de l'espèce de sel qu’on a obtenu. Le nitre ou potasse nitratée a une saveur piquante, et la propriété de faire brûler, avec un très-grand éclat et beaucoup de chaleur, les corps combustibles forte- ment échauffés sur lesquels on le place. Il brûle sur les charbons ardens. Lorsqu'il est pur, il se cristallise en oc- taèdre à base rectangle (voy. pl. 1 fig. 8). Le sel marin, de cuisine où soude muriatée , se re- connaît aisément à son goût; il décrépite et se divise en éclats sur le feu ; il se cristallise en cube (voy. pl. 1", Ji8: 9). La soude carbonatée ou natron, a une saveur désa- gréable; elle verditle sirop de violette, et blanchit à l'air. Ses cristaux sont des octaëdres à base rhomboïdale (voy. pl 1®, Jig. 10 ). Elle abonde principalement dans les détritus de végétaux marins. DES JARDINS. 159 La soude sulfatée ou sel de glauber, se boursoufle par la chaleur, donne une fumée aqueuse, et laisse un résidu secet blanc. Elle se cristallise en prismes exagones terminés par dés pyramides dièdres, ou en octaèdres pris- matiques terminés par deux pyramides tronquées. La magnésie sulfatée ou sedlitz, sel d'Epsom, est d'une saveur très-amère; elle se fond sur le feu en lais- sant échapper son eau de cristallisation, etse réduit à l’état de sulfure. Quand ce sel est cristallisé, il représente des prismes à quatre pans portés sur des bases carrées (voy. pl. 1°, Jig. 12); on en retire la magnésie en unissant sa dissolution à celle d’un alcali. Quelques sels sont peu ou point solubles dans l’eau, tels que par exemple le sulfate et le phosphate de chaux ; et cependant ils ont une grande influence sur la végétation. Pour s'assurer si un sol contient le pre- mier, on prend une petite quantité de terre que l’on mêle avec le tiers de son poids de charbon en pou- dre, et que l’on met dans un creuset; on chauffe rouge pendant une demi-heure. On fait ensuite bouillir le mélange pendant un quart d'heure dans une demi- pinte d’eau ; on filtre et on expose la liqueur pendant quelques jours dans un vase ouvert. Le sulfate de chaux se précipite en une poussière blanche. Lorsqu'il s’agit d'extraire le phosphate , on fait digérer la terre dans une grande quantité d'acide muriatique ; on met la dissolu- tion dans un vase sur le feu, et on fait évaporer jusqu’à ce que le résidu reste sec ; alors on le lave dans plusieurs eaux, et le phosphate reste à nu. . Mais il est rare que les humus minéraux se rencontrent purs dans une étendue de terrain même assez bornée ; ils sont presque toujours mélangés à une partie d’humus végétal, et quelquefois à une autre d’humus animal. Expliquons d’abord ce que nous entendons par humus végétal, et comment ils’en forme des couches naturelles jusque sur les roches Les plus nus. Dans le principe nous i6o DES JARDINS. avons dit que l'air et les autres météores atmosphériques décomposaient journellement la surface des rochers. Aussitôt que cette surface est en efllorescence , elle ac- quiert la faculté de retenir un peu d'humidité, et les li- chens s’en emparent. Ils y multiplient rapidement, et, à mesure qu'il en meurt, ils se décomposent et forment un terreau favorable à la végétation des mousses; les détritus de celles-ci fournissent au bout d’un certain laps de temps, par leur décomposition, une couche d'humus végétal assez épaisse pour que de petits arbrisseaux puissent y étendre leurs racines ; et, après un certain nombre d'années, un vieillard pourra rencontrer des ar- bres élevés là où , dans sa jeunesse, pouvaient à peine croître quelques plantes rachitiques. Voilà donc la formation des terreaux naturels; et les terres de bruyères , aujourd’hui tant et peut-être trop employées dans lhorticulture, n’ont pas d’autre origine. Les humus végétaux agissent sur la végétation de la même manière que les humus minéraux, c’est-à-dire qu'ils fournissent aux plantes des principes de nutri- tion solubles dans l’eau. Mais, outre la silice, l’alu- mine et le carbonate de chaux que l’on trouve en petite quantité dans leur analyse, ils abondent en sels particuliers; et leur fermentation presque continuelle dégage une assez grande quantité de gaz acide carboni- que , toutes choses augmentant beaucoup leur fertilité. (Voy. au chapitre de la physiologie végétale, article nutrition des végétaux.) L'hamus végétal, ou plutôt les débris de végétaux se décomposent très-lentement, d’où il suit qu'il y a long- temps fermentation, long-temps dégagement de gaz, et par conséquent nourriture abondante pendant tout le temps que dure la décomposition; et cela parce que tant qu’elle n’est pas complète, c'est-à-dire, tant qu'il reste quelques principes organiques qui ne sont pas re- tournés à leur élément primitif, ou, si l’on aime mieux, DES JARDINS. 161 qui ne sont pas complétement retournés à leur état ter- reux , il y a de nouvelles combinaisons avec les gaz at- mosphériques, avec les élémens qui composent le sol, el augmentation de molécules solubles dans l’eau. Il résulte de ceci que les terreaux sont très-fertiles tant qu'ils nesont pas entièrement décomposés, mais que, lorsqu'ils le sont en totalité , ils perdent cette grande fer- tilité; et que, si on ne les ranime pas au moyen des en= grais, ils finissent même par être tout-à-fait stériles. C’est ordinairement ce qui arrive aux terres de jardins. Les humus végétaux obtenus artificiellement , tels que Je terreau de feuilles, de paille, etc. , offrent les mêmes principes élémentaires, et agissent de la même manière sur la végétation. Si quelques matières animales s’y trou vent mélangées, telles que l’urine ou les déjections des animaux , les cornes, ies poils, etc., ils offrent de plus à la nutrition des plantes leurs sels particuliers, et ont aussi plus d'énergie, parce qu'ils augmentent la fermen- tation, hâtent la décomposition, et dégagent plus de gaz acide carbonique ; mais aussi les mêmes raisons font qu'ils conservent moins long-temps leur fertilité. Les humus végétaux et animaux, lorsqu'ils sont arri- vés à un état de décomposition qui les rend mixtes entre les terres pures ét les engrais, portent spécialement le nom de éerreaux; et, pour indiquer leur nature précise, on ajoute à la suite de ce mot le nom de l’engrais qui les a fournis, ou celui de lanimal qui a fourni l’engrais. C'est ainsi que l’on dit, £erreau de feuilles, de cheval, de vache , de porc , ete. Hs peuvent fournir seuls , sans mélange, à la végétation, puisqu'ils renferment à la fois les élémens des humus minéraux et des engrais ; mais comme leurs molécules ont fort peu d’adhérence entre elles , ils forment une terre extrêmement légère , poreuse , qui lasse facilement évaporer l'humidité , et qui ne permet pas aux racines ligneuses des plantes ro- bustes de s’y implanter solidement. Aussi est-on dans 10 II 162 DES JARDINS. l'usage, pour remédier à ces inconvéniens , de les mé- langer avec un humus minéral , le plus ordinairement avec de la terre franche. Cependant, comme toutes les plantes ne sont pas de même nature, les cultivateurs ont dû varier ces mélanges de manière à donner à chaque végétal la terre qui lui est le plus appropriée. Le raisonnement et l'observation n’ont pas toujours présidé à ces combinaisons , et celte branche importante de l’horticulture n’a pas fait les mêmes progrès que les autres parties de la science. Néanmoins, pour être juste, nous devons dire que les cultivateurs ne doivent pas porter à eux seuls tous les torts, mais que l’on pourrait aussi reprocher aux voyageurs d’avoir trop souvent négligé une chose es- sentielle ; qui est de prendre note de la nature des terres et de l'exposition dans lesquelles ils ont trouvé les dif- férentes espèces de végétaux qu’ils nous ont apportés. Quoi qu'il en soit , nous allons donner la composition des différentes terres employées à des usages généraux, nous réservant d'apprendre au lecteur, à chaque article de nos cultures particulières, les modifications qu'exige chaque espèce de végétal. SIV. Terres composées ou composts. 1. Terre franche. Nous avons dit de quoi elle est composée. On la choisit ordinairement dans les prés en bon fond , et on la fait entrer dans le mélange des com- posts. Mais il peut'arriver qu'on n’en ait pas à sa portée, ou qu’elle ne soit pas naturellement composée comme nous l'avons dit ; alors c’est à l’art à la rendre propre à la culture. Si une terre est trop forte, on y mélange du sable pour l’alléger ; si, au contraire, elle est trop lé- gère , on y ajoute la quantité nécessaire d'argile pour lui donner de la consistance. Autant qu’on le pourra, on approchera des proportions que nous avons indiquées , DES JARDINS. 163 page 154. Si elle manquait de principes calcaires, la marne y suppléerait ; seulement on aurait la précaution de choisir une marne argileuse pour les terres franches légères , et une marne crayeuse pour celles qui seraient fortes et compactes. Quand il s'agirait de se procurer une terre franche pour les poteries, c’est-à-dire, pour les plantes cultivées en pots et en caisses, on prendrait trois parties de terre forte que l’on mélangerait à une qua- trième de terreau de couche; on mettrait le tout en tas à l'automne, on remuerait plusieurs fois pendant l'hiver, et l’on pourrait s’en servir au printemps. Cette terre con- vient parfaitement à tous les végétaux vigoureux, dont les racines fortes et ligneuses aiment à s'étendre dans les terres compactes. >, La terre franche-légère est celle dans laquelle do- mine le sable siliceux ou calcaire, uni à une certaine quantité d’humus végétal , ce qui lui donne une assez grande porosité. Quand il s’agit de la composer, on mêle moitié de terre franche, un quart de terreau, et un quart de terre de bruyère, ou, à défaut, du terreau de feuilles et de la terre légère de jardin. On conçoit que les quan- tités que nous désignons ici pour le mélange sont subor- données au plus où moins de corps de la terre franche. On met en tas comme la précédente, et on remue souvent. Elle n’acquiert toutes ses qualités qu'après un an de fer- mentation. Elle convient à la plus grande partie des plantes, c’est-à-dire, à toutes celles qui ne sont ni très- robustes, ni trop délicates. 3. Terre légère. Celle-ci, composée pour des plantes d’une végétation plus faible, doit être plus poreuse, afin de laisser pénétrer facilement les influences atmosphéri- ques jusque sur leurs racines. On pourra la composer d’un quart de terre franche, un quart terre de bruyère, un quart terreau de vieilles couches, et un quart terreau de feuilles, ou bien encore un tiers terre franche-légère, un tiers terreau de couches, etun üers terreau de feuilles. 164 DES JARDINS. 4. Terre de bruyère. Elle est le résultat de la décom- position des bruyères, et on la trouve en couche plus ou moins épaisse dans les forêts, sur les lisières des bois, où ces plantes croissent en grande abondance ; elle a pour base une partie de la terre sur laquelle la couche s’est formée, et une autre d’humus végétal. Celle que nous employons dans les environs de Paris vient, pour la plus grande partie, des forêts de Chantilly, de Meudon et de Fontainebleau. Elle est plus ou moins chargée de terreau de feuilles, selon l’endroit où on l’a prise ; mais elle offre pour terme moyen ces deux analyses. TERRE DE BRUYÈRE; NOIRE OU SUBSTANTIELLE. Sable siliceux. . . . 39, 35. Humus végétal. . . 47, 55. Alumine. + +... ., 9» 10. Chaux carbonatée. 6, »». 100, D». TERRE DE BRUYÈRE», GRISE OU MAIGRE. Sable siliceux. .. . 5o, 55. Humus végétal. . . 36, 20. AIME. (00. 447.) MD AU Chaux carbonatée. 4, 25. 100, »». On y trouve aussi de l’oxide de fer, mais en si petite quantité qu'à peine est - il appréciable. Comme la terre de bruyère ne se rencontre pas dans tous les pays, nous avons cru devoir en donner l’analyse afin de mettre les cultivateurs dans le cas de la composer artificiellement. Il ne s'agirait pour cela que de faire un mélange dans le- quel le terreau de feuilles entrerait comme humus végé- tal ; du sable de rivièretrès-fin et très-pur, quelle quesoit sa nature, tiendrait lieu de sable siliceux , et une bonne terre franche fournirait l’alumine et la chaux carbonatée. La terre de bruyère est la plus légère de toutes , celle DES JARDINS. 165: dans laquelle les plantes à racines fibreuses et délicates réussissent le mieux, mais dans leur jeunesse seulement; car, si on en excepte quelques genres des Alpes, du Cap, de la Nouvelle -Hollande et de l'Amérique septentrio- nale, qui aiment une fraicheur et une humidité soute- nues , les autres y prospèrent pendant leur premier âge, passé lequel temps ils ne trouvent plus une nourriture assez substantielle, et ils restent rachitiques si on s’obs- tine à les y tenir toujours. IL en est de la terre de bruyère comme de toutes les bonnes choses : on en abuse. 5. Terre sablonneuse. On la prépare pour cultiver les plantes qui se plaisent dans les sables, et particuliè- rement sur les plages des bords de la mer. On la com- pose moitié de sable fin, et moitié de terreau de feuilles. 6. Terre des plantes bulbeuses. C’est particulière- ment pour la culture des plantes à ognons qu'il est in- dispensable de la préparer, à moins que le sol d’un jardin en ait les qualités. Dans toute autre terre les jacinthes dégénèrent rapidement. On la compose ainsi : moitié terre de bruyère, un quart sable pur et fin, un quart terreau de vache très-consommé et sans litière. Nous observerons qu’on doit en éloigner tous les engrais frais, c’est-à-dire, susceptibles de fermentation putride , sous peine de voir pourrir les ognons. 7. Terre à orangers. Elle doit étre forte, afin que les racines puissent s’y implanter solidement , et cependant assez poreuse pour que l’eau des arrosemens puisse la pénétrer. Outre cela, il faut qu'elle soit très - subs- tantielle, et continuellement dans un léger degré de fermentation. Voici comment on lui donne toutes les qualités nécessaires pour résoudre ce problème : terre franche naturelle, moitié; terreau de vache peu con- sommé, moitié; on mêle et on laisse en tas pendant un an avec la précaution de le remuer deux ou trois fois. L'année suivante, on y ajoute une quantité égale de fumier de cheval que l’on y mélange parfaitement ; 166 DES JARDINS. on le laisse se consommer ainsi pendant un an; puis, un an avant de s’en servir, on y mêle encore un dou- zième de crottin de mouton, un vingtième de colom- bine , et un quarantième de poudrette. Si on trouvait cette terre trop difficile ou trop longue à préparer , on pourrait employer celle-ci, quoique avec moins d’a- vantages : moitié terre franche , un sixième fumier de cheval , autant de fumier de mouton et autant de fumier de vache, que l’on peut remplacer avec du mare de rai- sin quand on habite un pays vignoble. On mélange bien le tout et on le remue plusieurs fois jusqu'à ce qu'on s'en serve, ce qui arrive au bout de deux ans. Ces deux compositions sont utiles, non seulement aux orangers, mais à la plus grande partie des arbres et arbrisseaux de serre. 8. Terre à ananas. Comme celle-ci ne convient ri- soureusement qu'à la culture de l'ananas, nous ren- voyons le lecteur à l’article du potager qui traite de cette plante. ( F’oyez le second volume, page 186.) Autant qu’on le pourra, ces mélanges seront faits sous un hangard ou autre endroit abrité de la pluie, mais exposé aux autres influences atmosphériques. On aura la précaution de passer parfaitement les terres à Iæ claie , afin d'en extraire les pierres, racines, et autres corps étrangers. Les tas ne doivent jamais être absolu- ment secs : à l’aide d’arrosemens modérés , on y entre- tiendra une humidité légère mais soutenue, favorable à la fermentation. SECTION II. DES ENGRAIS. Avant de passer à la culture des terres , nous allons traiter de la manière de leur rendre leurs principes nu- tritifs quand elles les ont perdus, ou de les augmen- ter si elles n'en ont pas assez. Nous parlerons d'abord de DES JARDINS. 167 tous les engrais en particulier ; puis nous traiterons de leur application en général. De même que nous avons trouvé des terres dans les trois règnes de la nature , nous trouverons aussi des en- grais minéraux , Végétaux et animaux ; Mais une qua- trième classe nous fournira des engrais mixtes, c’est-à- dire, composés de matières appartenant à plusieurs régnes. Nous allons en donner le tableau. L2 pren crayeuse. rnest s Me ; À Ma 04 Marne argileuse. Terres TRE ENGRAIS MINÉRAUX : Re Te ST Mahler. Chaux. SRISL MENT ESES T NE À Plâtre. Sel marin. Cendres. Tourbe. Suie. Plantes et feuilles. Marcs. T'année. AN Or ENGRAIS VÉGÉTAUX , En fermentation. . . Colombine. Os. Chair. Corne, poils, plumes. — Laine, cuir, etc. Poissons. ENGRAIS ANIMAUX ;: Résidns CIN UE Urine. Sécrétions. -: : . . . À Poudreue. Animaux et végétaux. Fumier. ENGRAIS MIXTES; MÉLANGE Végétaux et minéraux. Vases. Ne Jarimaux et minéraux. ÜUrate. Animaux, végétaux et minéraux. .« . . . «+ Doues de rue. $ I. Des engrais minéraux. Ils agissent de deux manières sur la végétation : 1° en divisant la terre ou la rendant plus compacte; 2° en fournissant aux plantes des sels nutritifs. 1. La marne se présente la première ; nous avons in- diqué ses principes constituans; voyez pag. 151, et com- ment on l’emploie avantageusement à donner du corps ou 168 DES JARDINS. de la porosité aux terres franches. Elle convient particu- Hèrement aux sols froids, légers ou sablonneux , qu’elle détermine à la fermentation ; de plus elle fournit de l'a- cide carbonique et de la chaux à la nourriture des plan- tes, Comme elle est peu employée en horticulture, nous nous en occuperons peu, et il en sera de même pour tous les engrais plus spécialement consacrés à la grande culture. 2. L’argile est excellente pour donner du corps aux terres trop légères, mais on ne l’emploie jamais pure dans les jardins. On est dans l'usage de la mélanger avec des terreaux, et alors elle devient une véritable terre franche. 3. Le sable ne sert guère qu’a donner à la terre la légèreté et la porosité qui lui manquent. Toutes les fois qu’on peut le remplacer par une terre de bruyère sablon- neuse , les effets qu'on en attend n'en sont que plus marqués. 4. La chaux, comme la marne, fournit de l’acide car- bonique, à la nourriture des plantes; mais il paraît qu’elle agit plus en décomposant dans la terre les parties végé- tales et animales que par ses propres principes. De cette manière, elle rend solubles dans l’eau , et propres à être absorbces par les végétaux, des matières qui ne leussent été qu'après plusieurs années de fermentation. Aussi convient-elle parfaitement dans les terrains humides et froids où la fermentation a peu d'activité. 5. Le plätre offre à peu près les mêmes principes que la chaux ; il contient, en outre, une légère quantité d’a- cide sulfurique. Dans la grande culture on l’emploie , cuit ou cru , en poussière que l'on sème à la surface du, sol. Il paraît particulièrement convenir aux plantes de la famille des légumineuses, surtout dans les terrains froids. 6. Le sel marin, employé en petite quantité, soit qu'on le sème sur le terrain ou qu'on le mêle à l'éau DES JARDINS. 109 des arrosemens, agit sur les végétaux en leur fournissant de l'acide muriatique, et sur la terre en la disposant à a fermentation ; car cette substance a la singulière pro- priété de hâter la décomposition des matières qui en contiennent en petite partie , et de l'arrêter lorsqu'elles en sont saturées. En horticulture , on n’emploie guère le sel que dans l’eau des arrosemens. SIL. Des engrais végétaux. 7. Les cendres de bois fournissent plusieurs principes favorables à la nutrition des plantes ; les principaux sont le sulfate et le muriate de potasse , le sulfate et le phos- phate de chaux, tous sels utiles à la végétation. Elles ont encore l'avantage de diviser les terres et par consé- quent de les rendre plus légères. Quand elles sont lessi- vées, elles ont perdu une partie de leurs substances nutritives, mais elles forment encore un bon engrais. 8. La tourbe est ce terreau noir ou brun, formé dans le fond des marais par les détritus des plantes aquati- ques, que l’on exploite dans de certains pays pour four- nir au peuple un combustible à bon marché. Elle con- tient ordinairement une grande quantité d’oxide de fer, ce qui la rend froide et stérile. Dans les terres fortes et chaudes, si on la combine avec la chaux, elle peut fournir un assez bon engrais ; mais il vaut beaucoup mieux la brüler pour n’employer que ses cendres. Elles ont assez d’analogie, au moins dans leurs eflets , avec les cendres de bois lessivées. 9. La suie contient une assez grande quantité de car- bone , quelques sels volatils des matières qui l’ont fournie, et des alcalis. Elle convient parfaitement dans les terres humides où il s’agit de détruire les mousses , mais elle agit avec plus d'énergie, relativement à la vé- gétation, dans tous les terrains autres que-ceux humides et argileux. 170 DES JARDINS. 10. Les feuilles, les chaumes, et généralement tous les débris de la végétation, entassés et en fermenta- tion, forment des engrais d'autant meilleurs qu'ils ont le triple avantage de fournir à la végétation des sels so- lubles dans l’eau, des gaz, tels que de l'hydrogène et de l'acide carbonique ; et de diviser la terre suffisamment pour laisser pénétrer dans son sein les influences atmos- phériques. Il est vrai qu'ils agissent moins brusquement que les autres, mais aussi leurs effets se font sentir bien plus long-temps. Ils conviennent très-bien à la culture des jardins, et produisent les meilleurs effets dans toutes les espèces de terrain; ils sont excellens, par- ticulièrement pour les plantes qui craignent le pourri. 11. Les marcs sont de plusieurs natures, selon la matière qui les a fournis. [ls agissent sur la végétation de la même manière que l’engrais précédent , et fournissent à peu près les mêmes principes; mais généralement ils fermentent davantage et plus vite, ce qui les approprie mieux aux terres froides. Les mares des matières qui ont fermenté avant d'être pressées, par exemple, celui de raisin, sont excellens : mais ceux des matières dont on a tiré de l’huile valent mieux , parce qu'ils dégagent, par la putridité, une plus grande quantité de carbone et d'hydrogène. 12. La année deviendrait embarrassante dans les jardins, si on ne trouvait le moyen de l’employer comme engrais. Dans la plupart des établissemens du genre du nôtre, on attend qu'elle soit absolument devenue ter- reuse pour la mélanger avec les autres terreaux ; et alors elle ne forme plus qu'un humus végétal privé de fermentation, par conséquent plus nuisible qu'utile dans les terres légères. Si, au contraire, on la met en décomposition avec de Ja chaux, le principe tannin qu'elle contient et qui nuit à la végétation se combine et se perd ; et, si elle ne devient pas un excellent engrais, du moins elle cesse d’être nuisible. En Angleterre on DES JARDINS. 171 l'emploie beaucoup pour la grande culture dans le comté de Warwick. $ Il. Des engrais animaux. 13. L'urine de tous les animaux, principalement celle de mouton, fournit un excellent engrais par les sels qu’elle contient. Cette dernière épanchée fraîche sur le terrain est très-fertilisante pour la grande culture , mais il n’en serait pas de même si on en arrosait des plantes délicates ; elle les brûlerait sur-le-champ. Il faudrait donc la laisser fermenter avant de s’en servir ; et encore la mélangerait-on avec de l'eau et du terreau pour ne l'employer qu'en arrosement, Du reste, on n’en fait pas ordinairement usage. 14. La poudrette, ou excrémens humains desséchés et pulvérisés, est peut-être l'engrais le plus actif que l'on connaisse; mais il faut l'employer à très-petite dose, sans quoi il brûle les racines des plantes. J agit sur la végétation en fournissant des sels, du carbone, et en augmentant la fermentation de la terre ; du reste tous les engrais animaux agissent à peu près de la même manière. Celui-ci convient à toutes les terres, mais plus particulièrement à celles qui sont alumineuses et froides. 15. La colombine, ou fiente de pigeon, s'emploie à petite dose comme la poudrette, parce qu'ayant la même énergie elle a aussi les mêmes inconvéniens ; elle pré- sente à l'analyse une plus grande partie d’alcali. La fiente des autres oiseaux de basse- cour produit les mêmes eflets , mais à plus grande dose. Ces engrais sont excellens dans les terres froides et humides. 16. Les os présentent, à l’analyse dela chaux, d’autres sels , et des substances purement animales , de manière qu'ils fournissent à la végétation les principes réunis des matières animales , végétales et minérales; mais leur 172 DES JARDINS. décomposition est très-longue ; d’où il résulte que, sileur eflet se fait sentir très-long-temps (quelquefois plus de trente ans), 1l est aussimoins marquant. Cette sorte d’en- grais est excellente dans les argiles pures et compactes, parce qu’elle fournit à ces espèces de terres la chaux qui leur manque, et qu’elle les divise pour donner passage à l'humidité. On en fait peu usage en horticulture. 17. Les chairs ou cadavres d'animaux fournissent un excellent engrais à cause de la grande quantité d’a- cide carbonique qu’elles dégagent pendant leur dé- composition. Pour éviter l’odeur infecte qu'elles exha- lent , on est dans l’usage de les enterrer à six pouces au moins de profondeur. 18. Les cornes, poils, plumes , rognures de cuir, chiffons de laine, ete., sont d’excellens engrais qui agissent comme les deux précédens, mais dont l’eflet dure moins que celui des os et a plus d'activité, par la raison que la décomposition en est moins lente. C’est particulièrement aux terres légères, sablonneuses et maigres qu'ils communiquent une grande fertilité. 19. Les poissons, sur les côtes de la mer, peuvent former la base d’un très-bon engrais ; nous en avons pour preuve l'usage qu'on en fait sur les côtes de Cornwall , dans le comté de Dorset, de Cambridge, de Lincoln et de Norfolk, en Angleterre. On les enterre de la même manière que les autres cadavres d'animaux. Toutes les substances animales agissent sur la végéta- üon en Jui fournissant à peu près les mêmes primeipes, dont les plus abondans sont l'hydrogène, l'oxygène, l'azote , le carbone , le phosphore et le soufre. (Voy. nutrilion des végétaux. ) $ IV. Des Engrais nuixtes. 0. Les fumiers résultant d’un mélange des excré- tions des animaux, de la paille dont on fait leurs litiè- DES JARDINS. 1731 res et des plantes dont on les nourrit, sont les plus em- ployés en horticulture , et c’est aussi de ceux-là que nous nous occuperons davantage. On les divise en fumiers chauds et fumiers froids : on emploie les premiers dans les terres froides, et les seconds dans celles qui sont trop chaudes. Nous n’agiterons point ici la grande question de savoir si on doit s’en servir sortant de l'écurie, ou lorsqu'on les a laissés fermenter en tas pendant quelque temps : ceci regarde plus particulièrement la grande cul- ture ; car, dans les jardins où les terres sans cesse tra- vaillées ne sont jamais très-froides, les fumiers neufs ne peuvent être que préjudiciables , surtout quand on les met en contact avec les racines des plantes qu'ils brûlent et font infailliblement périr. On ne doit donc s’en servir que lorsqu'ils sont au quart, au tiers, ou à moilié consommés. Le fumier de mouton est le plus chaud de tous ; aussi ne s’emploie-t-il qu'avec précaution, en petite dose, et à moitié consommé. Îl ne peut convenir qu'aux terres froides et humides. Le fumier d'âne et de mulet est le plus chaud après celui de mouton. Il s'emploie de la même manière dans les terres froides et humides. Le fumier de cheval a moins de chaleur que les pré- cédens, mais cependant il en a encore beaucoup. On s'en sert, avant sa décomposition et pendant que la litière qu'il contient a encore de la consistance , pour donner de la porosité aux terres compactes, et pour échauffer celles qui sont un peu froides. Dans les jardins, il est la base de la plupart des cultures, soit qu’on l’emploie neuf à la construction des couches, à demi consommé pour rendre la terre plus substantielle , ou à l’état de terreau pour faire les semis de plantes délicates. Ce qui le rend trés-précieux , c'est qu'il convient également aux terres froides et chaudes, légères ou fortes , substantielles ou maigres, selon la manière dont on le prépare pour en 174 DES JARDINS. faire usage, de manière qu'il peut remplacer tous les autres engrais. Le fumier de vache est plus gras, plus onctueux et beaucoup moins chaud que le précédent ; aussi est-il excellent pour les terres chaudes et légères, auxquelles il donne du corps. Le fumier de cochon est tout-à-fait froid et ne peut, par conséquent, produire un bon effet que dans lesterres très-chaudes. Il est à remarquer que jamais on ne doit l'employer pour les terres dans lesquelles on cultive des plantes bulbeuses, à moins qu'il ne soit entièrement consommé , car il est mortel pour la plus grande partie des ognons à fleurs. 21, Les vases que l’on extrait du fond des étangs, des mares, des fossés, etc., sont un composé de détritus végétaux et de la terre sur laquelle elles reposent. Si on les emploie de suite, elles sont froides et ne peuvent convenir qu'aux terrains très-chauds ; mais, si on les laisse fermenter pendant un an , exposées aux météores at- mosphériques, elles se mürissent, pour nous servir de l'expression consacrée en culture, se combinent avec dif- férens gaz, et deviennent très-propres à fertiliser toutes les terres, surtout celles qui sont légères, Elles four- nissent à la végétation des sels terreux et alcalins, selon la nature des végétaux qu’elles tiennent en décomposi- ton, et celle des terres qui en forment la base. 22. L’urate, engrais si vanté depuis quelques années, est un mélange de plâtre et d’urine ; ses principes sont, par conséquent, ceux d’une terre calcaire unie à des sels, des alcalis et de l’urée élément de lurine. Cet engrais iermente rapidement et n’est pas d’un eflet de longue durée , mais il fertilise les terres froides et alumineuses au moins pendant deux ou trois ans. Il convient encore dans les terres siliceuses; mais dans celles calcaires il ne peut que nuire quand son premier eflet est passé, DES JARDINS. 179 parce qu'il y apporte une surabondance de carbonate de chaux. 23. Les boues de rue sont un mélange de toutes les matières que nous avons mentionnées, el agissent selon qu'une d'elles y domine. Elles fournissent un excellent engrais, mais qui n’acquiert toutes ses qualités que lors- qu'il a fermenté en tas pendant six mois au moins; employées de suite, elles sont très-chaudes. $ V. Préparation et emploi des engrais, ou amen- dement des terres. La marne sé trouve en couches plus ou moins épaisses el enfoncées dans la terre. On l'en tire au moyen des fouilles, et on la laisse en tas pendant sept à huit mois, ou on l’étend de suite sur le terrain à fertiliser ; mais alors elle doit y rester exposée à l’air pendant le même espace de temps avant d’être enterrée par des labours. Comme tous les engrais minéraux , elle a de la propen- sion à s’enfoncer : aussi ne doit-on l’enterrer que le moins possible. La meilleure saison pour marner est l'été pour les terrains humides et gras; dans les autres on peut marner l'hiver ou dans toute autre saison. Nous n'indiquerons pas la quantité d'engrais qu'il faut à chaque sol, parce que ceci est le résultat de leurs dif- férentes natures, et que l'expérience seule peut guider le cultivateur. L'argile et le sable ne demandent aucune préparation ; il ne s’agit que de Les étendre sur le terrain et de les in corporer avec lui le mieux possible, au moyen de plu- sieurs labours. - La chaux s'emploie cuite et en efllorescence ; pour la faire arriver à ce dernier état, on la laisse pendant plus ou moins de temps exposée, en petits tas, à l'influence de l'air et des météores. Elle s'étend ensuite sur la sur- face du sol, et on l’enterre peu en labourant. 176 DES JARDINS. Le plâtre se jette à la main sur les semis, lorsque les plantes ont atteint un certain développement ; on laisse ordinairement à la pluie le soin de l’enterrer , et très- rarement on le répand avant de labourer; il convient donc de plâtrer dans un temps pluvieux, Le sel se répand comme le plâtre, et ne s’enterre pas non plus. Celui obtenu par l’évaporation des eaux de mer est préférable à celui des mines ou des fontaines salées. Les cendres s'étendent de la même manière que le plâtre, et ne s’enterrent que très-légèrement, surtout quand elles n’ont pas été lessivées. La tourbe ne s'emploie jamais pure ; ou on la brüle pour ne se servir que de ses cendres , ou on la combine avec la chaux. Voici comment on agit dans le dernier cas : on étend d’abord sur un terrain sec un lit de tourbe de trois ou quatre pouces d'épaisseur , et on jette dessus une couche de poussière de chaux épaisse de trois lignes au moins ; on fait un second lit de tourbe et une seconde couche de chaux, et ainsi de suite, jusqu’à ce que le tas ait au moins quatre pieds d'épaisseur, En cet état on l’abandonne à la fermentation pendant six mois au moins. On étend sur le terrain cet engrais ainsi préparé, et on l’enterre de suite par un labour. Si on avait à l’em- ployer sur le sol même où on l'aurait enlevé, on pour- rait le réduire en cendre par le moyen de l'écobuage. Les végétaux, ou fragmens de végétaux, doivent être préparés convenablement. Pour cela, on fait un trou dans un endroit sec et à l'abri des rayons du soleil, et on y entasse des feuilles, de la fougère , les mauvaises herbes arrachées dans le jardin, les gazons, les raclures d’al- lées, ete., et même les petits rameaux ligneux résultant de la taille et de la tonte des arbres. On peut hâter leur décomposition au moyen de quelques arrosemens, et plus encore en les mettant par lits avec un peu de pous- sière de chaux vive entre chacun. Il faut les employer un peu avant qu'ils soient réduits en terreau, sans quoi DES JARDINS. 177 ils perdent une grande partie de leur action. Dans la grande culture, on a une méthode d’écobuer les gazons, les bruyères etautres plantes, pour les réduireen cendres et brûler la terre dans laquelle ils végètent. On les en- lève en espèce de galettes, avec un pouce et demi à deux pouces de terre; on les retourne, les racines en l'air, et on les laisse ainsi sécher pendant quelques jours. On les réunit ensuite en petits tas, auxquels on donne la forme de dômes ou de cônes, avec un espace vide dans le milieu et un très-petit soupirail dans le haut; on place quelques brins de bois sec dans le vide intérieur, et on y met le feu. Lorsque le dôme est assez échauffé pour qu’on soit sûr que les racines brüleront, on bouche le soupirail, et on laisse aller le feu jusqu’à ce qu'il s’é- teigne naturellement, ce qui n'arrive guère qu'au bout de deux à trois jours. On étend la terre brûlée et les cendres sur le terrain, et on les enterre par un léger labour. Les marcs s’emploient sans autre préparation que de les briser et de les réduire en très-petits fragmens, en poussière s'il est possible. Ceux formant le résidu des matières fermentées font un très-bon effet quand ils sont légèrement enterrés par un labour. Si on s’en rapporte à des expériences faites en Angleterre, il paraît que ceux provenant de matières oléagineuses produisent plus d'effet quand , réduits en poussière, on les sème sur le terrain en même temps que les semences. La tannée employée seule est mortelle pour les plantes. Quand on l’enlève des couches, on la met dans un trou, et par lit, avec de la poussière de chaux vive, et on ne J'en sort que lorsqu'elle est presque entièrement dé- composée. On l’étend sur le terrain, et on l’enterre par un labour, ou on la mélange avec du terreau de fumier pour recevoir les semis. On ne se sert guère de l’urine que comme nous l'avons dit à son article, et pour composer l’urate. Te 12 178 DES JARDINS. La poudrette ne peut servir seule, à moins que ce ne soit pour répandre, mais en très-petite quantité et par un temps humide et pluvieux, surun semis pour hâter sa végétation. Le plus ordinairement elle ne s'emploie qu'en mélange dans les composts. La colombine et les autres excrémens purs sont dans le même cas. Les os se jettent sur le terrain tels qu’on se les est pro- curés, ets’enterrent par le moyen des labours. Sion pou- vait les concasser, leur effet n’en serait que meilleur, Ceux qui ont fourni du noir de fumée par la calcination sont dépouillés d’une grande partie de leurs principes fertilisans , et n’agissent plus sur la végétation quecomme la chaux et autres sels terreux. Quant aux chairs et autres débris d'animaux , on les emploie tels qu'on les a, et on les enterre de suite assez profondément pour que les gaz délétères qu'ils exhalent ne se mêlent pas à l’air atmosphérique, ce qui produi- rait une odeur désagréable et peut-être dangereuse pour les hommes et les animaux domestiques. Quelquefois on entasse les os, la corne, les vieux cuirs, et autres résidus, en les placant par couches, alternativement avec un lit de terre, et on les laisse fermenter ainsi pendant siX MOIS. | Les fumiers demandent surtout à être bien préparés et employés à propos, pour produire tous les excellens effets qu’on en attend. À mesure qu'on les sort de l’écu- rie, on doit mettre à part chaque espèce, si on veut ürer partie des qualités qui sont propres à chacune. Si on n'avait pas la facilité de s’en procurer de toutes les espèces pour les placer dans les natures de terres où chacune serait le plus convenable, on pourrait, avec celles que l’on a, remplacer les autres en les employant pendant qu’elles ont un certain degré de chaleur. Par exemple, le fumier de mouton, lorsqu'il a fermenté quel- ques jours , perd une grande partie de sa chaleur, et de- vient semblable au fumier de cheval ; celui de cochon, DES JARDINS. 179 au contraire, acquiert de la chaleur par la fermentation, et peut, après avoir reposé cinq ou six mois en tas, rem- placer le fumier de cheval consommé. Mais le point essentiel est d’élever les tas de fumier de manière à leur laisser perdre le moins possible de leur substance. Un creux en terrain sec, muré sur les côtés et pavé au fond, peut assez bien remplir ce but. On place sur le pavé une couche de six pouces de terre, et on y entasse le fumier à mesure qu'il sort de l’écu- rie. Quand il est consommé convenablement pour la cul: ture à laquelle on se propose de l’employer, on l’enlève, et la couche de terre, saturée de tous les liquides nutri- tifs qu'il y a déposés, devient un engrais aussi fertilisant que le fumier , et même plus facile à ameublir dans une plate-bande que l’on veut tenir propre. Il serait un autre moyen de tirer un parti plus avan- tageux encore des urines et autres liquides qui décou- lent des fumiers, surtout en hiver , saison pendant la- quelle ils sont exposés aux pluies qui les délayent. Ce serait de donner au pavé de la fosse une pente qui se terminât à une fosse plus petite, bien cimentée, de manière à ne point laisser échapper les liquides qui s’y rendraient de toutes parts. Toutes les fois que cette fosse serait pleine , on la viderait pour arroser du plâtre avec son eau, et en former une espèce d’urate plus substan- telle que celle préparée avec de l’urine pure. Quoi qu'il en soit , il faut éviter de mettre les fumiers en tas sous un égout, ou dans unlieu oùles eaux peuvent se ramasser. Il serait bon, si on le destinait à faire des couches, de le tenir à l'abri de la pluie jusqu’au mo- ment de l’employer. Si on devait le conserver long-temps avant de s’en servir, etque l’on craignit qu'il fermentât trop vite, on pourrait l’en empêcher en le plaçant par couches, entre lesquelles on interposerait une certaine quantité de terre. Les fumiers s'emploient soit sur la terre pour l’empé- 180 À DES JARDINS. cher de se plomber ou de se battre par les pluies, soit en mélange avec elle; et alors on se sert des plus chauds et des moins consommés pour les terres fortes et froides, et vice versä. On les convertit aussi en {erreaux que l’on emploie purs, ou en mélange pour former des composts. Les fumiers au quart ou au tiers consommés pourraient être utiles dans les terres légères et même chaudes, si l’on prenaitla précaution de les émietter en les coupant avec la béche. Les vases que l’on voudrait employer de suite cesse- raient d’être froides si on les mélangeait à une certaine quantité de chaux vive ou de poussière de plâtre, et dans ce cas leurs qualités fertilisantes en acquerraient plus d'énergie. L’urate a, comme on a pu le voir à son article, le défaut de ne convenir parfaitement qu'aux terres argi- leuses et froides. Si on combine cet engrais avec un tiers ou moitié de marne argileuse, il produit un très-bon effet dans les terres légères et calcaires, et devient excel- lent dans celles dont la silice fait la plus grande partie. Du reste, on le jette sur le sol, et on l’enterre aussitôt, mais à une petite profondeur. Enfin les boues de rue, les balayures de maison, et tous lesimmondices, se déposent dans des trous en terre, d’où on ne les sort pour les employer que lorsqu'ils sont presque entièrement décomposés. On les enterre aussitôt qu’on les a transportés sur le terrain, car sans cela l'air les dessèche , leur enlève une partie de leur gaz et presque toutes leurs qualités. Si, faute d'espace ou par d’autres raisons, on ne séparait pas chaque espèce d'engrais, et qu'on voulût en faire des composts, on devrait toujours les diviser en trois parties. Les engrais animaux et les immondices seraient jetés dans une fosse à mesure qu’on se les pro- curerait ; et, pour éviter les exhalaisons fétides, chaque fois que la couche aurait une certaine épaisseur , on éten- DES JARDINS. YVaBT drait dessus deux ou trois doigts de poussière de chaux vive, et on recouvrirait avec un lit de terre de quelques pouces. Ainsi préparé, cet engrais produirait un très-bon effet dans toutes les espèces de terrain, et plus particuliè- rement dans les sols froids. Dans une seconde fosse on déposerait les excrémens purs, les colombines, les balayures de maison et les marcs. On n’y mélange pas de chaux, mais on les couvre de terre pour la même raison que le précédent. Ce mé- lange, quand il est à moitié ou aux trois quarts consommé, forme un engrais chaud et très-fertilisant, qui convient à toutes les terres meubles et aux plantes les plus dé- licates. Dans une troisième fosse on entassera les fumiers et on les manipulera comme nous l'avons dit. Nous avons traité dans ce chapitre des composts et des engrais, parce que, ne pouvant guère s’employer de suite, on fera très-bien de commencer à les préparer aussitôt que l’on sera déterminé sur l'emplacement d’un jardin, SECTION Ill. TRAVAUX PRÉPARATOIRES, Nous supposons que le choix d’un emplacement est fait, et qu'il ne reste plus qu’à clore le jardin , à le tracer et à préparer la terre à recevoir les plantations. Ces trois choses vont nous occuper dans la suite de ce chapitre. SI. Des clôtures. On à plusieurs méthodes pour clore les jardins, et tou- tes ont leurs avantages comme leurs inconvéniens. La première consiste à les entourer de murs, la seconde de haies, la troisième de palissades. Les murs font certainement la meilleure clôture 182 DES JARDINS. pour défendre une enceinte contre les entreprises des hommes et des animaux, surtout lorsque l’on a hé- rissé leur chaperon avec des morceaux de verre de bou- teilles ; ils ont encore cet avantage de servir d’abris aux espaliers que l’on palisse contre, mais aussi ils masquent entièrement la vue ; et, si le jardin n'est pas très-grand, on y est comme emprisonné. | La hauteur la plus convenable à leur donner est celle de dix pieds ; plus haut , les espaliers n’en seraient que mieux, mais ils masqueraient davantage et occasione- raient une augmentation de dépense qui peut-être ne pourrait pas être compensée par le produit des cordons de vignes ou autres arbres fruitiers que l’on y établirait. Si on donnait beaucoup d'importance aux espaliers , on orienterait le jardin de manière à pouvoir en placer sur toutes les surfaces des murailles. Pour cela, en suppo- sant qu'il soit de forme carrée, un de ses angles regar- derait le midi, tandis que l’autre correspondant re- garderait le nord. Il en résulterait qu’une ligne , allant directement du nord au midi, le couperait en deux parties égales , formant chacune un triangle semblable à l’autre. Par ce moyen on n'aurait ni l’exposition du nord , ni celle du midi , mais celles du nord-est, du nord-ouest , du sud-est, et du sud-ouest, toutes quatre favo- rables. Le mur doit être solidement bâti, bien crépi pour empêcher les rats et les insectes de se loger dans l’inté- rieur , et recouvert d’un chaperon qui débordera de cinq à huit pouces , selon que les espaliers devront être palissés à la loque ou contre un treillage. Ce chaperon servira à les abriter et à empêcher le mur d’être gâté par l'humidité. C'est une grande question , agitée aujourd’hui par nos théoriciens , que de savoir si le mur doit avoir une cou- leur blanche ou noire , pour favoriser la végétation. Le blanc, disent les uns, reflète la chaleur, mais ne s’en DES JARDINS. 103 imprègne pas ; d’où il résulte qu'aussitôt que les rayons du soleil ont abandonné une muraille blanche, elle est refroidie et ne renvoie plus de calorique. [ls ajoutent : Je noir absorbe la chaleur pendant le jour et la reflète pendant la nuit; donc il faut peindre les murailles en noir ! Ce raisonnement nous paraissait assez singulier ; mais , pour nous conformer à notre habitude, nous avons voulu nous éclairer par l'expérience avant de rien déci- der. En conséquence , nous avons mis un thermomètre contre un mur blanc, dans une niche fermée par une légère couche de plâtre ; nous en avons placé de la même manière un second contre un mur crépi en noir; et, quoique nous ayons renouvelé l'expérience plusieurs fois, les deux instrumens ne nous ont guère donné que la même température. Nous en avons conclu que les murs de notre établis- sement ne seront pas peints en noir, et qu’ils resteront tels qu’ils sont. En effet, il est bien prouvé que le blane n’absorbe point ou peu de lumière, mais il ne l’est pas qu'il n’absorbe point de chaleur. Ensuite , quand même les choses seraient comme ils le disent , les observations que nous avons faites sans discontinuer depuis notre en- fance, nous portant à croire que la circulation de la sève dans les végétaux n’est due qu’à la transition jour- nalière du chaud au froid, comme nous le prouverons dans notre article de physiologie végétale , nous laisse- rions encore ces murs blancs, afin d’avoir cette transition naturelle , que nous n’obtenons qu'artificiellement dans nos serres ; Car il n’est pas un jardinier qui ne sache très- bien, sans pouvoir peut-être en déduire les raisons, que, si l’on chauffait une serre au même degré Le jour et la nuit, les végétaux languiraient d’abord, s’épuiseraient et finiraient par périr. Les haies , lorsqu'elles sont bien plantées et bien en- tretenues, font de très-bonnes clôtures, mais qui deman- dent des soins assidus pour les empêcher de se dégarnir, 184 DES JARDINS. surtout dans le bas. Les arbrisseaux les plus propres à les rendre impénétrables sont : le zoux dans les sols granitiques et montagneux où il peut réussir , le prunel- lier, et le néflier aubépine. Ge dernier a l'avantage de se très-bien garnir et de réussir à peu près dans tous les terrains : aussi mérite-t-il la préférence. On en fait des haies simples ou doubles, c’est-à-dire, plantées sur un ou deux rangs. Pendant les deux ou trois premières an- nées on leur donne deux bons labours par an, une fu- mure si le terrain est médiocre, et on les taille très-bas pour les forcer à se garnir. On peut ensuite les aban- donner à la nature, avec la précaution cependant de les tondre régulièrement, et de remplacer les pieds morts. La haie convient beaucoup mieux que les murailles pour les jardins d'agrément, parce qu’elle ne gêne pas le coup d'œil , et qu’elle est beaucoup plus pitto- resque. | La palissade ne peut remplacer la haie que lorsque le jardin est renfermé dans un clos; elle n’est utile dans ce cas-là que pour marquer les limites de la grande et de la petite culture. Elle se plante sur un ou deux rangs comme la haie , s'élève de même, mais demande un entretien beaucoup plus soigné, parce que toute sa beauté dépend de la régularité et de la propreté de sa tonte. ( F’oyez page 74 de ce volume, et page 173 du second volume ). S IE Manière de tracer un Jardin. Le jardin une fois fermé , il s'agira de le tracer , et nous ne donnerons pas d’autres préceptes, pour le genre de la composition, que ceux compris dans les chapitres deux et trois de cette première partie. Seulement nous recommanderons de ne rien exécuter sur le terrain avant que d'en avoir parfaitement arrêté le plan sur le papier ; DES JARDINS. 185 car c’est le seul moyen dene pas faire de l'ouvrage inutile, que peut-être on serait obligé de recommencer. On fait d’abord une esquisse générale, ou plutôt la carte topo- graphique du terrain, sans y oublier le moindre accident, un arbre, un buisson , un fragment de rocher , etc. ; ce plan doit être géométrique, et les distances seront ob- servées à la rigueur. Si on ne l’a pas levé soi-même , il faut se familiariser avec lui en s’attachant à reconnaitre au premier coup d'œil sur Le terrain tous les détails qu'il indique, et à en saisir facilement l’ensemble. Alors seulement, on commence à fixer sur le papier, au moyen du pinceau et des couleurs, les conceptions inspirées par le goût et les convenances. Si on a un peu l'habi- tude du dessin, on fera très-bien de figurer en éléva- tion les fabriques , et généralement toutes les construc- tions ; ce sera le vrai moyen de se rendre compte des effets généraux aussi bien qu'il est possible sur le pa- pier. Avant de déterminer le genre d’une fabrique, il serait bien de chercher à se former une idée juste de l’eflet qu'elle produira sur le terrain. Pour y parvenir, on pourra employer l’ingénieux moyen que voici, inventé par M. de Viard, auteur du Jardiniste moderne. Dans len- droit même que doit occuper la fabrique, on plante deux jalons éloignés l’un de l’autre dans la même pro- portion que celle que le monument doit avoir en largeur. On dessine celui-ci sur une feuille de carton, on le co- lore des teintes qu’il doit avoir, puis on le découpe avec précaution et exactitude. Cela fait, on le fixe au bout d’un jalon que l’on va planter en terre devant et à quel- que distance des deux premiers. Alors on s'éloigne à reculons jusqu'à ce que la base des deux côtés du des- sin paraisse toucher aux deux jalons; et, en prêtant un peu à lPillusion, on obtient un eflet semblable à celui que produira la fabrique lorsqu'elle sera bâtie. Une fois assuré de son effet, il sera moins nécessaire 186 DES JARDINS. de la dessiner en élévation sur le plan. Nous ne don- nerons point de principes sur l’art de lever la carte du jardin, parce que tout ce que nous pourrions dire serait insuflisant pour les personnes qui ne savent pas des- siner, et inutile pour les autres. Nous nous bornerons à dire qu’on lave Les constructions avec du rouge de car- min; les terres cultivées en jaune et en bistre, une raie de l’un et une de l’autre pour imiter des sillons ; les prairies en vert de vessie ; les arbres en vert foncé du côté ombré et en vert jaunâtre du côté du jour; les terres en friches en bistre, et les eaux en vert de cuivre ou vert d’eau. Les allées et les chemins restent en blanc. Lorsqu'un plan est définitivement arrêté, au moyen d’un compas, d’une échelle de proportion , d’une toise où d’une chaîne de géomètre , on le reporte sur le ter- rain, et on en marque toutes les sinuosités avec des ja- lons plantés de distance en distance, et des petits piquets très-rapprochés. SECTION IV. DES OUTILS. Avant d'enseigner la manière de rendre fe terrain propre à recevoir les plantations, nous allons parler de quelques outils qu’il faut d’abord se procurer pour le défrichement, les labours et binages ; puis, pour ne pas revenir sur cette matière, nous ÿ ajouterons tous ceux nécessaires à la culture du jardin. SL. Outils propres aux labours et défoncages. 1. Le presson ou levier. C’est une barre de fer plus ou moins forte et longue , de forme cylindrique, garnie d'acier à une de ses extrémités qui est aiguisée en biseau. DES JARDINS. 167 Il sert à détacher les rochers de dessus leur lit, à soule- ver les pierres, etc. 2. Le pic. C’est un outil qui tient du levier et de Ja houe. Il consiste en une barre de fer carrée, finissant en pointe à une de ses extrémités, courbée en arc comme la lame d’une houe, et emmanchée de même à son autre extrémité. On s’en sert pour arracher les pierres enter- rées, pour ouvrir les sols rocailleux , et pour remplacer le levier. 3. La hachette de Forsith. C’est une houe à lame forte et étroite, propre au défrichement, ayant, du côté opposé à la lame, une petite hache très-commode pour couper les racines d'arbres qui embarrassent le ter- rain. 4. La pioche, C’est une houe, mais dont la lame très- longue, très-forte et très-étroite , décrit avec le manche, qui n’a pas plus de dix-huit pouces de longueur , un angle très-resserré. Cet instrument , très-pénible , est particulièrement employé dans les terrains pierreux et forts. 5. La pioche à deux taillans. C’est une espèce de houe ayant deux lames, dont l’une est ovale finissant en pointe , l’autre comme dans une houe ordinaire , mais un peu plus étroite. La première sert dans les terres rocailleuses, l’autre dans celles qui sont fortes et com- pactes. 6. La houe à lame carrée est l'instrument le plus généralement employé dans tous les jardins. Sa lame doit former avec le manche un angle de 45 degrés. 7. La houe triangulaire ne diffère de la précédente que parce que sa lame triangulaire finit en pointe. Elle convient dans les terres compactes. 8. La Aoue fourchue a sa lame formée de deux dents longues, plates, d’un pouce environ de largeur. On l’emploie dans les terrains pierreux, et pour la- 198 DES JARDINS. bourer au pied des arbres dont on craint de couper les racines. 9. Le Loyau difitre de la pioche en ce que sa lame, ordinairement longue de quinze pouces sur quatre de largeur, forme presqu'un angle droit avec le manche, qui est long. On s’en sert dans les terrains légers et pro- ‘fonds. 10. La binette est une petite houe dont la lame , un peu moins courbée , n’a guère que six ou sept pouces de longueur sur quatre à cinq de largeur. 11. La serfouette, ou sarcloir, ou béchélon, est une très-petite binette dont la lame double offre un taillant d'un côté, et deux longues dents de l’autre. Elle sert à ouvrir les pores de la terre entre les plantes assez serrées pour A ne puisse pas se servir de la binette. 12. La béche, connue de tout le monde, a diffé- rentes formes, io l'usage des différens pays. Dans les terres He sa lame est totalement en fer ; dans les terrains très-légers et sablonneux , comme par PE dans la Bresse, elle peut être en bois et n’avoir en fer que le taillant et les côtés. La bêche est le meilleur de tous les outils pour ameublir la terre en lui donnant de profonds labours. 13. La béche à dents est à la bêche ordinaire ce que la houe fourchue est à la houe à lame carrée. On s’en sert de même pour labourer au pied des arbres et pour arracher les récoltes consistant en racines, en bulbes ou en ognons que l’on craint de couper. Il est encore beaucoup d’outils qui peuvent appartenir à cette section; chaque pays en possède que le besoin et l'expérience ont appropriés à la nature du sol, et aux- quels nous conseillerons de donner la préférence quand on ne leur reconnaitra pas de défauts essentiels ; l’ou- vrier, accoutumé à s’en servir dès son enfance , en tra- vaillera mieux et plus proprement. Tous doivent être corroyés avec de l'acier. Nous n'avons point indiqué DES JARDINS. 189 de proportion, parce que leur poids et leur grandeur doivent être mesurés sur la force de celui qui les em- ploie ; et cette force peut différer de moitié, selon l'âge ou le sexe. $ Il. Outils propres à entretenir la propreté d'un jardin. 14. Le rdteau doit être armé de dents en bois ou en fer, plus ou moins longues, plus ou moins espacées entre elles, selon l’usage auquel on l’emploiera. Il faudra donc en avoir de plusieurs dimensions. Ceux à longues dents en bois serviront à réunir en bottes les fanes des plantes que l’on aura laissées sécher sur la terre pour en recueillir les graines ; ceux à longues dents en fer se- ront très-commodes pour rapprocher en tas les mauvaises herbes que l’on aura coupées avec la ratissoire ; et on emploiera celui à dents courtes et en fer, pour unir la surface d’un carré nouvellement labouré, ou pour re- couvrir légèrement les graines d’un semis. 10. La ratissoire à cheval. Elle est faite sur les mé- mes principes de mécanique que la charrue à roue. Au lieu d’avoir un soc long et pointu, elle n’a qu'une lame de fer haute de sept ou huit pouces, et large de irois ou quatre pieds, selon l’écartement des roues qui doit être calculé sur la largeur des allées. On y attèle un cheval qu'un enfant conduit par la bride, tandis qu'un homme , au moyen d’une queue , fait mordre plus ou moins la lame sur la surface du sol , afin de la râcler parfaitement, et de couper un peu au-dessous du coliet toutes les herbes que l’on veut enlever d’une allée, Cette machine n'est d’une véritable utilité que dans les très- grands jardins. 16. La ratissoire en brouette consiste en une roue de quinze à dix-huit pouces de diamètre, placée au bout d’un cadre en bois, comme la charpente d’une brouette 190 DES JARDINS. plate. À l'extrémité opposée et au-dessous du cadre est une lame de fer de vingt pouces de largeur sur cinq ou six de hauteur, ajustée au moyen de bras en fer, de maniere à présenter obliquement son tranchant à la sur- face du sol. Vers le tiers postérieur du cadre se trouvent emmanchés deux bras inclinés comme la queue d’une charrue , terminés par des manettes. Pour se servir de l'outil, on saisit les deux manettes et on pousse devant soi en appuyant plus ou moins la lame sur la terre. 17. La ratissoire en houe. Elle consiste en une lame de deux à trois pouces de hauteur, sur dix à douze de largeur , ajustée au bout d’un manche, de manière à dé- crire avec lui le même angle que la houe. Quand on s’en sert, on ratisse les allées en marchant à reculons. 18. La ratissoire en béche. La lame , faite comme la précédente, est presque parallèle à la ligne du manche, de manière à être obligé de pousser devant soi quand on veut s’en servir. C’est Ja moins commode de toutes, et cependant la plus employée dans le midi. L'esherboir (pl. 2. fig. 4) est une espèce de très-grande tenaille en bois dont les deux mords sont plats, larges de trois à quatre pouces. On saisit avec, le collet d’une plante dont la racine très - longue et pivotante ne peut être arrachée à la main, par exemple, le chardon, la bardane ; on appuie le manche sur un billot ou une pierre , et en le baissant vers la terre comme un levier, on arrache aisément, et sans la casser , une racine longue de plusieurs pieds. S'il arrive qu’elle se rompe , c'est toujours assez profondément pour que la partie qui reste en terre ne puisse plus repousser. On conçoit qu'on ne peut se servir avantageusement de cet instrument que lorsque la terre est bien imbibée d’eau. L'arrachoir ou pied de chèvre est un instrument qui sert au même usage que le précédent, mais pour arra- cher les racines ligneuses des arbrisseaux et arbustes que Fon ne pourrait extraire qu'en minant, si l’on ne possé- DES JARDINS, 191 dait pas cette machine. Sa confection est assez simple * pour que nous n’ayons pas besoin de l'expliquer autre- ment que par notre gravure (pl. 2, fig. 5). a est la ra- cine saisie par la corde b, au moyen d’un nœud cou- lant ; cette corde, en se roulant autour du cylindre €, que l'on fait tourner au moyen des leviers d d, se rac- courcit et entraîne la racine hors de terre. On emploie beaucoup ce pied de chèvre dans le midi pour arracher les vignes, les oliviers et les buissons. Son avantage est d'être très-expéditif. 21. Le rouleau est un très-gros cylindre en fonte, muni à chaque extrémité d’une oreillette arrondie , tour- nant comme un essieu dans une boucle en fer. Les deux boucles tiennent à un harnais de manière que, lorsqu'un cheval qui y est attelé marche, le cylindre roule sur le terrain , le nivelle et le rend plus compacte. S UL. Outils propres aux transports et aux char- gemens. 22. La pelle en bois est nécessaire pour ramasser les immondices, et les jeter sur la charrette ou la brouette qui doit les transporter. La pelle est dans des propor- tions un peu plus grandes qu'une bêche ordinaire , sur- tout en largeur ; le manche a ordinairement trois pieds de longueur. 23. Le roché ou féchou, généralement employé dans les environs de Lyon, n’est rien autre chose qu’une lame de houe, mince, presqu'aussi large que longue, mais emmanché comme une bêche. Le manche doit être long de quatre pieds et demi, légèrément arqué, et d’un bois léger tel que le saule ; la lame n’est pas tout-à-fait parallèle au manche, mais elle forme avec lui un angle extrêmement ouvert. Cet outil est très-commode pour curer les marres, fossés, enlever les terres, les boues , et les charger sur un tombereau. 192 DES JARDINS. 24. La fourche à manche très-long, emmanché comme celui du roché et un peu arqué, sert au chargement des fumiers. 25. Le trident est une fourche à trois dents, à manche court comme celui d’une bêche, ou guère plus long. Il sert à remuer les fumiers pour ralentir leur fermenta- üon , à les sortir de l'écurie, etc. 26. Les panniers et les mannes sont très-commodes pour enlever les pierres que l’on ôte à la main, pour transporter les plantes dans l’endroit où on veut les re- piquer , etc. 27. La hotte est indispensable pour le transport des terres , des terreaux , des fumiers, partout où le tombe- reau ou la brouette ne peuvent pas passer. 28. La brouette. Son usage est connu de tout le monde. 29. Le tombereau. I] doit étre léger pour moins fa- tiguer le cheval, et bas sur roues, afin qu'on puisse le charger aisément: il en est de même de la charrette. 30. Le chariot d'orangerie. Celui-ci sert à transpor- ter les caisses d’orangers ou d’autres plantes, quand elles sont trop lourdes pour être portées à bras. On en fait de plusieurs sortes, mais nous allons indiquer seu- lement le plus simple (Voyezpl. 2,fig. 1.). a, a, a, a, est un cadre en bois composé de deux fortes pièces de bois, &, &, 4, Le et d’une traverse également forte, b. Il est supporté à sa partie postérieure par deux roues, e,e, au moyen d’un essieu en fer, f, ajusté dans une en- taille semblable à celles g, g, que l’on voit sur le devant du cadre. À chaque extrémité des pièces de bois est un montant k, k,h,h, soutenu par des bras de force é, ë, ë, t. Toutes ces pièces sont ajustées solidement à tenons et mortaises. Dans deux trous #,k, percés au bout des mon- tans, est un rouleau en bois autour duquel deux cordes L, L, sont roulées. Lorsqu'on veut se servir du chariot, on le place de- DES JARDINS: 193 vant une caisse d’orangers, on soulève les deux extrémi- tés antérieures du cadre, et on fait avancer le chariot de manivre à ce que la caisse se trouve placée entre les deux pièces de bois &, a, a, a, et à peu près au milieu de la machine , comme nous l'avons figurée par des points ; alors on fait approcher l’avant-train du chariot, fig. », et on ajuste les entailles g, g, sur l’essieu en fer m. On prend ensuite le rouleau 7, on l’ajuste dans les deux bras antérieurs au moyen de l’entaille o. On passe sous la caisse les deux bouts de corde p, p, et on vient les ajus- ter au rouleau comme ils le sont à l’autre. Alors avec des leviers passés dans les trous des rouleaux, comme r,r, on tend les cordes et on soulève la caisse. Quand elle est à la hauteur du cadre, on fait glisser un fond mobile fig. 3, sur les rainures s, s; on détend les cordes, et la caisse se trouve chargée; il ne reste plus qu’à la conduire où l’on veut. Au moyen de cette mécanique, que le plus simple ouvrier peut exécuter, surtout si on y met des roues pleines, un homme seul peut aisément charger et transporter une caisse d’un millier pesant, et même davantage. Sÿ: Outils propres à la Plantation et a la Trans- plantation. 31. Le transplantoir à tubes, décrit par Dumont de Courset , nous a paru le plus commode de tous quand il s’agit de transplanter, avec précaution et pendant sa floraison, une plante délicate, et surtout un ognon à fleur. Il consiste en deux tubes de tôle cylindriques, entrant l’un dans l’autre. Le premier est tranchant à son pourtour inférieur ; on fait passer dedans la tige et le feuillage de la plante, puis on l’appuie sur la terre, et on l’enfonce de manière à lui faire cerner les racines sans les endommager. Quand il est à une profondeur conve- nable , on lui donne deux petites secousses en l’inclinant 1. 13 194 DES JARDINS. à droite et à gauche, afin de détacher la base de la motte ; puis on le lève avec la plante et la terre, ce qui est fa- cile en l’inclinant. On fait un creux dans l'endroit où on veut repiquer la plante, on y place le transplantoir, puis on fait entrer dedans le second tube qui, au lieu d’être tranchant sur son pourtour inférieur, est au contraire muni d’un petit rebord intérieur qui appuie sur la motte de la plante, et la force à rester en place à mesure qu’on retire le premier tube. 32. Le transplantoir à pince est composé de deux lames de houlette auxquelles on a ajouté des tiges croi- sées en forme de longue pince. On ouvre le transplantoir, on enfonce les deux lames de chaque côté de la plante, on serre la motte, et on l’enlève. 33. La houlette consiste en une lame longue de six à sept pouces, large de trois ou quatre, repliée cylindri- quement sur ses côtés de manière à représenter la moitié d’un tube. Son extrémité doit être plus étroite , afin de pouvoir plus aisément être enfoncée dans la terre. 34. Le plantoir ou fichet est un piquet long de quel- ques pouces, pointu à une de ses extrémités , recourbé à l’autre en forme de manette pour être aisément saisi. C’est un mauvais outil dont on ne doit faire usage que dans le jardin maraicher, pour avancer l'ouvrage quand on a une irès-grande quantité de repiquages à faire dans un espace de temps borné. $ V. Znstrumens servant aux Arrosemens. 35. Les arrosoirs sont ordinairement en cuivre, ou en fer-blanc ; mais alors on a la précaution de les peindre à l'huile pour empêcher la rouille de les percer. L’es- sentiel est qu'ils aient chacun plusieurs têtes et plusieurs becsderechange.Les têtes serontau nombre detrois : une grande percée de trous moyens pour arroser dans les pépinières ; une seconde plus petite et criblée de très- DES SARDINS. 1095 petits trous pour arroser en forme de pluie fine sur les semis et sur le feuillage des plantes; enfin une troisième semblable, mais beaucoup plus petite pour arroser le feuillage d’une plante de serre, sans mouiller les plantes voisines. On aura deux becs : un ayant dix-huit pouces de longueur pour mouiller la terre des premier et se- cond rangs de pots ; un autre beaucoup plus long , afin d'atteindre et de porter l’eau jusque sur les derniers rangs, sans crainte d'en épancher sur les premiers. 36. La seringue est indispensable dans une serre pour porter l’eau sur la terre des pots placés hors de atteinte des arrosoirs. Quand on l’emploie à cet usage , on ajuste au bout un long tuyau dont l'extrémité touche à la terre du pot que l’on veut mouiller. On s’en sert aussi pour ar- roser les feuilles de quelques plantes; mais alors onajuste, au lieu de tuyau, une tête percée de petits trous comme celle d’un arrosoir. La seringue doit être longue de deux pieds et demi à trois pieds, sur deux pouces à deux pouces et demi de diamètre. 37. La pompe a main. Elle doit être assez forte pour lancer l’eau à vingt pieds de hauteur, afin de pouvoir servir à l’arrosement du feuillage des arbres fruitiers ou de serre les plus hauts. Afin que l’eau ne s’élance pas en colonne , on ajuste, au bout du tuyau par où le jet s’é- chappe, une petite lame de cuivre qui divise l’eau et la fait retomber sur les arbres en forme de pluie. On possède plusieurs espèces de pompes à main, c'est-à-dire , qui peuvent aisément se transporter. Les unes sont fixées à leur vase monté sur de petites roues , et, au moyen de longs boyaux en cuir au bout desquels on ajuste une pomme d’arrosoir, elles servent à arro- ser les gazons. Nous n’entrerons dans aucun détail sur ces différentes machines, parce qu’on en trouve de très- bien faites pour tous les usages, chez les marchands de Paris. 196 DES JARDINS. $ VI. Znstrumens propres à la Taille des Arbres et a entretenir leur propreté. Dans le chapitre de la taille des arbres, volume se, page 124, nous traitons des instrumens propres à cette opération ; à la page 20 du même volume, nous décri- vons ceux que l’on emploie pour greffer ; ainsi nous n’en parlerons pas ici. Mais il nous reste à décrire les émoussoirs de notre invention , instrumens indispen- sables, si l’on ne veut voir les arbres fruitiers rapide- ment dévorés par les mousses et les lichens. | 1° Lesémoussoirs(voy.pl.2,/fig.6,7,8 eto).On doit enavoiren crochet pour nettoyer les branches d’espaliers du côté où elles touchent au mur; d’autres en pointes plus ou moins allongées pour atteindre dans toutes les bifur- cations ; d’autres enfin montés comme un couteau à deux manches, pour racler les fortes tiges et les troncs. Un des côtés de chaque lame sera uni et un peu tranchant pour enlever les lichens sur les écorces lisses; l’autre sera finement denté, et servira sur les écorces dont l’épiderme desséché rend la surface raboteuse. Nous n'avons pas besoin de dire qu'on possédera plusieurs de ces instru- mens dans différentes dimensions, afin de pouvoir tou- jours proportionner leur grosseur à celle des arbres sur lesquels on les emploiera. 2° Les échenilloirs sontencore des instrumens dont on ne peut se passer dans toute bonne culture. On en fait de plusieurs sortes; mais les meilleurs sont ceux qui, em- manehés au bout d’une longue perche et jouant au moyen d’une corde ou d’une ficelle, saisissent, après l'avoir coupé net, le rameau attaqué par les chenilles , et don- nent la facilité de le déposer sans secousse, de manière à ce que ces insectes malfaisans ne s’en échappent pas en tombant. DES JARDINS. 197 S VIT. Znstrumens divers. Nous ne grossirons pas cette liste de beaucoup d’us- tensiles qui servent continuellement dans un jardin, mais qui sont employés également à d’autres usages en économie rurale; tels sont par exemple, les échelles simples et doubles, les scies, cordeaux, couteaux à scie, hachetteset haches, piéges pour prendre les animaux nui- sibles, serpes, vans pour nettoyer les graines, etc. , etc.; mais nous croyons devoir entrer dans quelques détails relativement aux claies et cribles donton fait usage pour passer et préparer les terres , ainsi que sur les marques dont on se sert pour étiqueter les plantes et les retrou- ver sur le catalogue du jardin. La claie consiste en un cadre solide en bois, ayant ordinairement de cinq à six pieds de haut sur une lar- geur indéterminée , mais qui ne peut guère être moindre de quatre pieds. Il est garni, dans le sens de la hauteur, de tringles en fer , distantes les unes des autres de six, sept ou huit lignes. Ces tringles sont soutenues par une traverse en croix dans toute la hauteur et la largeur du châssis. Pour se servir de cet instrument, on l’appuie sur deux bons piquets , non pas verticalement, mais un peu incliné , et, avec la bêche ou la pelle, on jette la terre contre les tringles. Celle qui est la plus meuble passe au travers, et s’entasse derrière la claie ; la plus grossière, les pierres , les mottes roulent dessus, et tombent sur le devant. Si l’on veut faire un mélange parfait, rien n’est meilleur que d'employer la claie , et de jeter alternative- ment une pelle d’une espèce de terre, et une pelle de l'autre. Le crible est une espèce de claie, et s'emploie de la même manière; mais, au lieu d’être fait avec des trin- gles en fer , il est garni de mailles en fil de fer plus ou 108 DES JARDINS. moins larges , selon que l’on veut plus ou moins ameu- blir Ja terre qu'on y passe. Les marques ou étiquettes sont un objet essentiel dans un jardin bien tenu, où l’on cultive un grand nom- bre d'espèces. Celles que l’on emploie pour les plantes en pots consistent en une lanière de plomb laminé, pointue par le bout que l’on enfonce en terre , arrondie au sommet, et marquée d’un numéro d'ordre qu'on y à gravé au moyen d’un poinçon d'acier. Si on veut mettre une certaine élégance dans ces étiquettes, on les fait faire en porcelaine ou en faïence, sur laquelle l’ouvrier écrit avec de l'émail le nom ou le numéro du végétal ; les plaques sont percées d’un trou, dans lequel on passe l'anneau d’un gros fil de fer qui leur sert de pied. Pour les arbres et arbustes, on est quelquefois dans Pusage de leur donner une étiquette en plomb laminé, que l’on attache à une des branches avec une lanière de plomb. Quelques personnes remplacent cette lanière par un fil de fer; mais cette méthode a un inconvénient, celui de faire un bourrelet à la branche, si on oublie de desserrer à mesure qu'elle grossit. Il vaut beaucoup mieux placer Pétiquette au pied de l'arbre, en l’enfon- çant dans le terrain. Nous avons long-temps employé à ce dernier usage, dans notre établissement, des ardoises gravées(pl. x'°, Jig. 12) ; des lattes de douze à dix-huit pouces de lon- gueur, dont le sommet uni et peint portait un numéro noir ; des planchettes aussi peintes à l'huile ; des plaques de fer-blanc peintes demême( fig. 13); du plomb laminé (Jig. 14), etc. ; mais aucune de ces méthodes ne nous satisfaisait entièrement, parce que chacune offrait plus ou moins d’inconvéniens qu'il serait inutile de détailler ici. Enfin nous nous sommes imaginé d’en faire faire en terre cuite (Jig. 15 ), dont le sommet, assez large et carré, porte un très-grand numéro imprimé, et dont l'autre extrémité, finissant en pointe longue de dix pouces, DES JARDINS. 199 s'implante dans le sol au pied de l'arbre. Il est vrai que ces étiquettes sont un peu massives, et qu'elles ont peut- être moins de grâce que d’autres; mais, par compensa- tion , elles durent beaucoup plus long-temps, se dé- rangent moins, et leur apparente fragilité fait que les ouvriers y font plus d'attention , les changent moins de place, et, par conséquent , occasionent moins d’er- reurs. On pourrait aussi employer très - avantageuse- ment , dans les grands établissemens, des morceaux de sue de tonneau taillés comme la fig. 13, et dont le sommet porterait les numéros imprimés au moyen d'un fer rouge. SECTION V. CULTURE DES TERRES. Nous appelons ainsi la méthode de préparer les terres, seulement par le travail, à recevoir les plantations et les semis de la manière Là plus avantageuse à la végé- tation. La première chose dont on s'occupera , lorsque l'on établira un jardin dans un terrain qui n’aura jamais été consacré à cet usage, ce sera de züveler la surface du sol. Mais un nivellement ne doit pas s’entreprendre à la légère, car ce qui souvent paraissait peu de chose à exécuter devient , lorsqu'on est à l’œuvre , un objet de dépenses considérables. C’est en vain que l’on aura cal- culé, avec la plus grande précision, le nombre de pieds cubes de terre à enlever, les moyens de transport, la distance des charrois; on pourra s'être trompé de la moitié et même des trois quarts dans la somme totale des frais , eten voici une raison entre plusieurs. Lorsque la terre est long-temps sans être remuée , elle seresserre, se tasse , et ses molécules se rapprochent considérable- ment ; selon sa nature elle devient plus ou moins com- pacte, et remplit un plus ou moins grand espace. Qu’arri- 200 DES JARDINS. ve-Llde là? Qu'en la minant et piochant pourla transpor- ier, on détruit l'ouvrage du temps, de sa pesanteur et des pluies : elle se desserre, se gonfle, si on peut se ser- vir de cette expression, el une quantité qui n’oecupait qu'un pied cube d'espace, avant d’être remuée, peut, sur les brouettes et les tombereaux, en occuper un et demi, deux , et même trois : de manière que, si l’on a calculé sur les frais de transport deux mille voitures de terre, il est très-possible qu’on ait à en payer trois, quatre ou même six mille voitures. Quelle que soit l'habitude que lon ait de juger ces espèces de travaux, il faut toujours s'en défier, parce que, comme nous l'avons dit, le tas- sement des terres peut être plus ou moins grand, et ap- partenir à des causes dont nous ne pouvons apprécier la puissance. Si l’on s'était déterminé à faire un nivellement, et que la couche de terre végétale ne fût pas très-profonde ,.on ferait bien de l’enlever sur les hauteurs à abaisser et dans Îles enfoncemens à combler. On mettrait la terre en tas, et on l’étendrait ensuite où il en manquerait quand le ni- vellement serait fait. Il reste ensuite à miner, c'est-à-dire, à ameublir la terre à une certaine profondeur , afin que les racines des plantes puissent aisément la pénétrer pour y aller cher- cher leur nourriture. Les sels les plus utiles à la végéta- tion sont aussi ceux quise dissolvent le plus facilement dans l’eau , d’où il résulte que , si une terre n’a pas été retournée depuis long-temps, les pluies les ont entraînés à une assez grande profondeur. H faut donc aller cher- cher à dix-huit pouces au moins, quelquefois à deux ou trois pieds, la terre qui en est imprégnée, et la ramener à la surface. Ceci est un des principaux objets du minage ; mais il en est encore d’autres : par exemple, si le sol contient une quantité de roches, de pierres, si ony a nouvellement défriché un bois et qu’il y soit resté des racines , enfin s’il renferme des corps étrangers nuisibles DES JARDINS. 201 ou inutiles à la végétation , c’est en minant qu’on les en extrait. C’est encore en faisant cette opération indispen- sable qu’on corrige la nature du sol en y mélangeant, dans des proportions judicieusement calculées , de l’ar- gile s'il faut le rendre plus compacte, ou du sable si on doit lui donner de la légèreté. Le minage ou défoncçage se fait en toutes saisons, mais plus avantageusement en automne, parce que la terre se fait, se mürit pendant l'hiver, et se trouve plus appro- priée aux différens genres de semis quand vient le prin- temps. Si la couche végétale n'avait que quelques pou- ces de profondeur , il ne faudrait pas défoncer plus bas dans la crainte d'y mêler ou d'amener à la surface une couche de terre stérile ; cependant, si la couche au des- sous était susceptible d’être fertilisée au moyen des mé- langes ou des engrais, on ferait très-bien de l’attaquer, de manière à former un fond végétal de dix-huit pou- ces au moins, C’est la moindre profondeur dans laquelle on puisse cultiver des arbres fruitiers et des arbustes d'agrément. Néanmoins ceci ne dispenserait pas, toutes les fois que l’on planterait un arbre, de lui creuser une fosse profonde que l’on remplirait de bonne terre, comme nous le dirons à l’article de la plantation. Si, au contraire, la couche végétale a trois ou quatre pieds, il ne faudra pas craindre de la défoncer à cette profondeur, si on a intention de cultiver des arbres. Le sol absorbera plus facilement les météores atmosphé- riques, et les racines trouveront un supplément de nour- riture qui augmentera beaucoup leur vigueur. Si l’on craignait une trop grande dépense, qui cependant se trouverait bien compensée par la beauté et le produit des arbres fruitiers, on pourrait se borner à ouvrir des tranchées de quatre ou cinq pieds de largeur et trois ou quatre de profondeur , sur les lignes de plantation. On 202 DES JARDINS. comblerait ces tranchées avec une bonne terre prépa- rée , passée à la claie, et convenablement amendée. Un jardin, ou la partie d’un jardin, spécialement destiné à la culture des plantes annuelles, dont les racines pivotent peu, n’a pas besoin d’être aussi profon- dément défoncé ; et dix-huit pouces sont suflisans. Enfin, quand on fera cette opération , on prendra en considération le genre de végétal que l’on devra placer dans chaque partie du jardin, et l’on calculera la pro- fondeur du minage sur la nature des racines ou pi- votantes ou tracantes. Voici comment on s’y prend or- dinairement pour miner. On ouvre une tranchée plus ou moins large sur toute la longueur du terrain à défoncer ; et, après en avoir passé les terres, on les dépose en tas dans un lieu d’entrepôt. A côté de celle-ci on en ouvre une seconde , on passe les terres à la claie et on les jette dans la première tranchée ; on en ouvre une troisième dont les terres servent à combler la seconde, et ainsi de suite jusqu’à ce qu’on soit arrivé à la dernière , que l’on comble avec les terres de la première. Le labour se fait avec la bêche ; il a pour objet de retourner les terres et de les ameublir, afin de laisser à l'air et aux autres météores la facilité de les pénétrer. Plus il est profond, meilleur il est ; mais ce n’est qu’au- tant qu'on n’attaque que la couche végétale. On ne la- boure guère, cependant, qu’à la profondeur d'un fer de bêche. Nous n’indiquerons pas la manière de bêcher, elle est connue par tous les ouvriers ; mais nous dirons à quoi on pourra reconnaître quand un labour a été bien fait. En béchant, l’ouvrier doit scrupuleusement en- lever les pierres et extirper les racines, surtout celles des plantes qui pivotent ou repoussent facilement , celles de chiendent, de chardon , par exemple ; il doit aussi s'attacher à détruire les insectes nuisibles, tels que vers blancs (larves de hanneton), courtillières, et vers de terre (lombries) ; mais, pour ce dernier, il ne doit pas DES JARDINS. 203 se contenter de le couper en deux avec le tranchant de la bêche, comme font quelques personnes ; car, au lieu de l'avoir détruit, il aurait multiplié son être, ces ani- maux ayant, comme les polypes, la faculté singulière de se reproduire entiers d’une de leurs parties. Il doit briser les mottes à mesure qu’elles se montrent, anir et niveler son ouvrage; enfin, si en enfoncant un bâton dans différens endroits on rencontrait de la résistance , qu'en donnant quelques coups de bêche après l’ou- vrier et ramenant à la superficie la terre qu'il a mise dessous, on trouvât des pierres, des racines ou des mottes , on serait forcé de conclure qu'il n’a pas soigné convenablement son travail. Quelquefois on cultive dans des terrains tellement rocailleux, que le labour ne peut pas se faire à la bêche, au moins pendant les premières années, c’est-à-dire , jusqu’à ce que le sol soit déblayé ; alors on se sert de la houe et de la pioche pour entamer le terrain , et de la brouette ou du panier pour enlever les pierres ; le travail n’en demande pas moins les mêmes soins ét la même profondeur que celui fait à la bêche. Un bon la- bour se fait en automne et au printemps. Le binage est un labour qui se répète plusieurs fois par an, afin d'ouvrir les pores de la terre, de l’ameu- blir à une certaine profondeur , de la rendre plus propre à s'emparer des influences atmosphériques , et de dé- truire les herbes parasites qui s'emparent de ses sucs nourriciers au détriment des plantes cultivées. Le binage, se faisant pendant que le terrain est occupé, demande des précautions afin de ne pas froisser n1 dé- couvrir les racines des plantes ou blesser leur collet, leur feuillage ou leurs tiges. Le temps auquel on doit biner est aussi d’une grande importance; si dans les grandes sécheresses on ouvrait les pores de la terre, ce serait le moyen de faire évaporer un reste d'humidité indis- pensable à la végétation , et cette opération serait alors 204 DES JARDINS. préjudiciable. Si, au contraire, on binait pendant des vents froids, des givres, des neiges ou des gelées , on refroidirait le sein de la terre , la fermentation s’arrête- rait , et les plantes en souflriraient considérablement. Il ne faut donc faire cette opération que lorsque les in- fluences atmosphériques sont favorables à la végéta- üon. Quant à la profondeur d’un binage, elle doit se eal- culer sur la nature des plantes cultivées. Celles dont les racines pivotent verticalement sans jeter beaucoup de chevelu sur les côtés , peuvent être binées plus profon- dément que celles dont les racines tracent ou s’écartent beaucoup. On se sert ordinairement de la binette, d’une petite pioche ou d’une petite houe pour exécuter ce tra- vail ; la seule chose à observer, c’est que la largeur de la lame soit en harmonie avec la distance existant entre chaque plante, afin de ne pas être exposé à en couper si l'instrument était trop large, ou à perdre du temps, ce qui arriverait s’il était trop petit. C'est en faisant les labours et les binages que l’on amende les terres, c’est-à-dire, qu'on y incorpore les engrais qui conviennent à chacune; comme nous l'avons dit, page 155, on étend les fumiers à lasurface, et on les enterre à la bêche ou à la binette. Le serfouissage se fait encore plus souvent que le binage, puisqu'il a pour but d'empêcher la germination et la croissance des mauvaises herbes, d'enlever celles qui ont poussé depuis le dernier binage , d'empêcher Ja terre de se plomber ou se battre par les pluies, ou de briser la croûte dure qui s’est formée à la surface du sol. Du reste, cette opération se fait dans les mêmes princi- pes que la précédente, et ne saurait être trop souvent répétée. Le rätelage a pour but de donner un coup d'œil de propreté à la terre, en unissant sa surface. Le râtelage se fait principalement après avoir labouré, avant ou après DES JARDINS. 205 avoir semé, où après un binage. Dans les terres très- légères ou sablonneuses on peut encore se servir avan- tageusement d’un râteau à dents de fer pour arracher les herbes , et faire une espèce de léger serfouissage. C'est en préparant les terres à la culture que l’on s'occupe des allées d’un jardin. Si l’on est riche en terre végétale , il faut bien se donner de garde de les dé- foncer, parce que ce serait le moyen d’ôter au sol sa solidité , et de le rendre gras et boueux. On se contente de les niveler, s'il est nécessaire, de couper avec les ra- üssoirs le collet de toutes les herbes qui s’y trouvent, et de les recouvrir de deux ou trois pouces de gravier ou de gros sable pur ; ceux de rivière auront toujours la pré- férence quand on sera à portée de s’en procurer. Mais, si l’on manquait de terre végétale , l'opération deviendrait tout-à-fait différente. On enlèverait toute la couche des allées pour la transporter où il serait né- cessaire , et on la remplacerait par les pierres , les tufs ou les sables que l’on extrairait des endroits mêmes où on aurait porté ja bonne terre. Si ces tufs étaient sus- ceptibles d’être détrempés par les eaux de pluie , on leur donnerait de la solidité en battant les allées avec des masses de paveurs, puis on étendrait ensuite la couche de sable ou de gravier. Il ne reste plus, pour les entre- tenir très-propres, que d’y passer la ratissoire et le râteau toutes les fois que des herbes s’y montrent. Quelquefois, dans un vaste jardin ou dans un jardin paysager, on donne aux allées une très-grande largeur ; et, au lieu de les couvrir en sable , on y sème des gazons. Comme cette dernière opération demande quelques soins , nous renvoyons le lecteur à ce que nous ayons dit page 81 de ce volume. 206 DES JARDINS. 720 Po Em ne 2e En 0 De 2e} 0 En Xe De (ee ee ec ee ee EL EL ET EL ou cer ve ce cet oo CHAPITRE IIT. DES CONSTRUCTIONS UTILES ET DES ABRIS. Novs entendons parler des châssis, bâches , serres, et autres constructions consacrées : 1° à la conservation des plantes qui demandent plus de chaleur que n’en a le climat où se trouve placé le jardin; 2° à faire donner à différens végétaux leurs fleurs, leurs fruits, ou leurs autres produits comestibles, dans une saison autre que celle marquée par la nature. Ici, nous serons obligés d'abandonner l’ordre que nous imposerait une rigoureuse analyse, et de parler de différens objets que le lecteur est encore censé ignorer; mais, si nous laissons quelques instans la marche régulière et logique qui doit con- duire du connu à l’inconnu, c'est parce que nous y trouvons l'immense avantage de ne pas faire , dans les cultures particulières de chaque plante, des répétitions qui, outre qu'elles deviennent fastidieuses , emportent encore avec elles une perte d'espace et de temps. Nous supposerons doncici qu'on a déjà quelques connaissances de l’organisation et de la physiologie des végétaux, quoi- que nous ne devions en parler que dans le chapitre sui- vant, et nous enseignerons quelques détails de culture qui ne devraient point appartenir au chapitre des cons- tructions. C’est ainsi que nous allons débuter par les couches. DES JARDINS, 207 PREMIÈRE SECTION. DES COUCHES. Elles ont pour objet de suppléer, par une chaleur ar- üficielle , à la chaleur naturelle qui manque dans un climat ou dans une saison. 1] serait impossible d'entendre parfaitement la construction d’une serre chaude ou tem- pérée, d’une bâche, ou même d’un simple châssis, si l’on ne savait pas parfaitement comment s'établit une couche. On en distingue plusieurs espèces : 1° les couches chaudes, 2° les couches tièdes , 3° les couches froides. $ I. Couches chaudes. Celles-ci s’établissent à l’air libre ou dans la serre, et ces deux méthodes demandent deux modes différens dans la manière de les élever. Les couches chaudes à l'air libre ne doivent, autant qu'on le peut, s'établir qu'à une exposition chaude et abritée. Si l’on ne pouvait disposer d’un emplacement au pied d’un mur au midi, on y suppléerait en élevant au nord , au nord-ouest et au nord-est de la couche des paillassons formant un abri de cinq à six pieds de hau- teur. Cependant on fait très-souvent des couches à expo- sition libre, mais elles ont l'inconvénient de conserver beaucoup moins long-temps leur chaleur. Une attention que l’on doit encore avoir, c’est d’asseoir la couche sur un terrain très-sec, qui ne puisse lui renvoyer aucune humidité. Si le sol est sablonneux, et qu'il absorbe rapi- dement les eaux de pluie , il n’a besoin d'aucune prépa- ration ; mais , s'il est compacte, argileux ou humide , il faut le préparer ainsi qu'il suit. On fouille et on enlève un pied de terre environ sur toute la surface du sol que la couche doit couvrir , et on le remplace par des gravois ou de la pierraille que l’on ferait irès-bien de recouvrir d'un lit de gros sable. On donne à cette espèce de plan- 208 DES JARDINS. cher une pente suflisante pour permettre un libre écoulement aux eaux; et, si le terrain n’était pas as- sez incliné pour les faire écouler à une certaine distance , on pratiquerait , dans l’endroit le plus bas, un puisard pour des faire perdre. Si l’on ne prend. pas scrupuleusement toutes ces précautions, les fumiers se pourrissent sans s’échaufler, l'humidité et le froid gagnent les plantes , qui périssent promptement malgré les réchauds que l’on tenterait d'y mettre. On pratique deux sortes de couches à l'air libre. 1° Les couches sourdes, ou encaissées ; 2° les couches bor- dées. Toutes deux se préparent avec du fumier d’âne, qu'on regarde comme le plus chaud , de mulet, ou, plus généralement , de cheval. On doit l’employer sortant de l'écurie , et avant qu'il ait séjourné et comnifencé à fer- menter en tas. La litière imbibée d'urine est excellente pour cet usage. Quant à la grandeur que doit avoir cha- que couche, elle varie selon l’usage auquel on la des- tine; mais elle doit toujours être suffisante pour que son volume permette la fermentation du fumier. De décembre en février on ne leur donnera que deux pieds et demi à trois pieds de largeur, afin de pouvoir plus aisément leur communiquer une nouvelle chaleur , au moyen de réchauds , quand elles commenceront à la perdre. À cette époque leur hauteur doit être de trois pieds de fumier au moins. Celles que l’on fait dans les autres mois de l’année ont moins besoin de réchauds , parce que les rayons du soleil ont déjà pris de la force ; aussi pourra-t-on leur donner de quatre à quatre pieds et demi de largeur, et une épaisseur de deux pieds sera suffisante. Dans tous les cas elles devront avoir plus d'épaisseur, quand elles seront posées sur un terrain humide, que quand elles le seront sur une terre sèche et poreuse. | Rarement on fait une seule couche; plus ordinaire- ment on est dans l'habitude d’en dresser trois , quatre, DES JARDINS. 209 ou davantage, placées par rangs parallèlement les unes aux autres. L'intervalle que l’on doit laisser entre cha- cune n’est point indifférent , parce qu'il sert à placer de temps à autre le fumier neuf pour réchauffer les couches. Cette distance sera donc d’un pied pendant la belle sai- sen, ét de dix-huit pouces en hiver, On observera que , si on élevait une couche seule, il faudrait qu'il y eût un espace de deux pieds libre tout autour, afin de pou- voir placer un réchaud de cette largeur. On nomme réchauds des cordons de fumier dont on entoure les couches, afin de leur communiquer la cha- leur qui résulte d’une nouvelle fermentation. Ils doi- vent avoir la largeur que nous venons d'indiquer , mais Jeur hauteur doit dépasser celle de la couche, parce qu'ils baissent beaucoup et qu’on est même obligé de les re- charger peu de jours après. Lorsqu'ils sont achevés et bien piétinés, si on veut hâter la fermentation, on jette quelques arrosoirs d’eau dessus, et cela a encore l’avan- tage d'empêcher le fumier de se brüler, Si l’on étend dessus deux ou trois pouces de crottin, ils se réchauf- fent plutôt, et conservent leur chaleur plus long-temps. L'essentiel est de ne pas attendre, pour les placer, que les couches soient tout-à-fait refroidies; ear, pendant qu'ils acquerraient leur chaleur pour la communiquer, les plantes souffriraient et périraient peut-être ; l’expé- rience et une surveillance exacte peuvent seules instruire le jardinier du moment auquel il doit travailler à cette épération. Si on fait les réchauds avec du fumier sor- tant de l'écurie , ils ont plus de chaleur, et elle dure da- vantage; mais il lui faut plus long-temps pour se dévelop- per, ce qui est quelquefois un désagrément. Les fumiers qui ont été entassés pendant quelque temps, quoi- que ayant moins de chaleur, sont cependant préférables, parce que leur action est plus prompte : on en est quitte pour les renouveler plus souvent. Si on ne désire pas un très-haut degré de température , on peut faire les nou- Je 14 210 DES JARDINS. veaux réchauds avec moitié de fumier neuf mélangé à moitié de l’ancien. Enfin, il suflira de les remanier en- üièrement , si l’on ne veut avoir que huit ou dix jours d’une chaleur modérée. Des couches sourdes, ou encaissées. On creuse une. fosse de deux pieds de profondeurenviron, dans un terrain léger et très-sec, et on en garnit le fond avec des plâtras, des gravois, ou mêmeavec du bois de fagotage. La largeur et la longueur de la fosse sont indifférentes, parce qu'on n'y place jamais de réchauds, mais cependant la largeur ne peut être moindre de deux pieds et demi. Si l'on crai- gnait l'humidité, on couvrirait les parois du trou avec des planches, en laissant entre celles - ci et la terre un espace vide d’un pouce à peu près. Ensuite on étend au fond un lit de cinq ou six pouces de fumier chaud, que l’on tasse le mieux possible en le piétinant; sur celui- ci on en met un second que l’on traite de même ; sur ce second un troisième, puis un quatrième qui doit élever la couche au-dessus du niveau du sol. Si l'on avait du marc de raisin ou des feuilles sèches , on ferait très-bien d'en mélanger avec le fumier dans la proportion d’un quart, ou d'en composer le troisième lit tout entier; ce serait le véritable moyen de maintenir long-temps la chaleur. On égalise parfaitement le dessus de la couche, et on y étend un lit de terreau ou de terre préparée, d’une épaisseur calculée sur la nature des plantes que l'on doit y cultiver, et dépassant de beaucoup la surface du sol, parce que, lorsque la couche se sera baissce, elle se trouvera de niveau et souvent même enfoncée, car il n’est pas rare de voir le fumier s’affaisser de la moitié de son épaisseur. Pour hâter la fermentation , on peut, si le fumier de la couche estsec, jeter dessus quelques arrosoirs d’eau avant d'y placer le terreau. Quelquefois, dans les terrains très-humides, au lieu de creuser les couches sourdes dans la terre , on les éta- blit dans un encaissement en maconnerie , formé par des DES JARDINS. SAIS murs en pierres ou en briques, ayant deux pieds de hau- teur, sur un d'épaisseur. Quelquefois encore on creuse dans la terre, mais on élève ce mur contre les parois du trou ; Ou enfin, on se contente d’un simple encaissement en planches. Les avantages des couches sourdes sont de demander moins de temps et de soins pour les faire , et de fournir plutôt du terreau , parce qu’on a la facilité d'y laisser le fumier s'y consommer un temps convenable pendant le- quel on cultive dessus des plantes qui demandent peu ou point de chaleur. Mais aussi elles ont l'inconvénient de se refroidir plus vite que les autres. Des couches bordées. Après avoir marqué; avec des piquets et un cordeau , la place qu’une couche doit oc- cuper, on y étend un premier lit de fumier chaud , COM- posé de grande litière. Avec une fourche on retrousse là paille sur les côtés, de manière à ce que tous les bouts se trouvent en dedans, et que le surplus fasse une espèce de dos en dehors sur les côtés ; On refait un second lit que l’on range de même, puis on unit, on bat avec la fourche, et on piétine en reportant un peu de fumier dans les endroits où il en manquerait pour que l'épaisseur fût parfaitement égale, La couche doit étre également garnie partout ; car, s’il en était autrement , quand elle s'affaisserait, elle le ferait plusdans les endroits faibles, et le terreau de dessus formerait des trous ou s'entasserait dans ces places. On continue à ranger des lits les uns sur les autres jusqu’à ce qu'elle ait la hauteur suffisante. IL est essentiel de charger davantage le milieu ; car, sans cela, ils formeraient des creux à cause de la grande épais- seur que la paille ployée donne aux côtés. Après qu’elle a été bien marchée et Piétinée, on l’arrose s’il est néces- saise , et on la charge aussitôt de terreau , que l’on ne dresse et unit qu’au moment de semer, c'est-à-dire, quand la plus forte chaleur est passée. On se sert pour cela d'une planche large de dix pouces ou un peu plus, que 212 DES JARDINS. l'on place sur les côtés, à deux pouces environ du bord: on la maintient ferme avec la main gauche et le corps, et, avec la main droite, on tasse le terreau contre, afin de lui donner assez de solidité pour se soutenir seul ; et, pour plus grande sûreté, on forme ce bord de terreau un peu en talus. Quand il est ainsi dressé, on enlève la »lanche pour la reporter plus loin et opérer de même, et ainsi de suite jusqu'à ce qu'on ait fait le tour de la cou- che. I] faut, lorsque tout est fini, que le terreau ait en tous sens un demi-pied de moins en surface que Ia base de la couche, et il doit être parfaitement uni. Si l’on trouvait trop de difficultés à retourner le bout du fumier en forme de dos, soit parce que la litière serait trop courte , soit parce qu'on y aurait mêlé d’autres fu- miers sans paille, tels que poudrette, marc de raisins, colombine, etc., on emploierait la méthode hollan- daise ; c’est-à-dire, qu’on formerait simplement les lits sur les côtés comme à l'intérieur ; puis, quand la couche serait élevée , on les unirait en coupant avec des cisailles tous les brins qui déborderaient. Lorsqu'une couche est établie, il faut, avant de semer dessus, que la chaleur soit tombée à un degré convena- ble, ce qui arrive ordinairement après six à douze jours, selon la température de l'atmosphère et la qualité du fumier. Pour s’en assurer, on enfonce de ier:ps en temps la main dans le terreau ; et, lorsqu'on en peut aisément soutenir la chaleur, on sème sans inconvénient; plus tôt, les graines brüleraient et ne germeraient pas ; plus tard , elles risqueraient de pourrir. Si l’on doit faire un semis de plantes délicates qui demandent un degré déterminé de chaleur , on y enfonce un thermomètre. Quatre ou cinq jours après le semis, si on veut écono- miser les réchauds pendant quelque temps, on place des accots, c'est-à-dire, qu'on adosse tout autour un peu de fumier long pour soutenir la chaleur ; et par ce moyen, au lieu de mettre les réchauds dix à douze DES JARDINS. 213 jours après le semis, on peut en attendre quinze ou vingt, Par fois il arrive qu'une couche, après avoir été plan- ie ou semée , se remet de nouveau à fermenter et déve- loppe une chaleur considérable , nuisible aux jeunes plants , et que l’on doit attribuer à l’eau des arrosemens. Dans ce cas, il faut la larder, c’est-à-dire, y ouvrir des ventouses avec un bâton pointu ; puis, quand son grand feu est évaporé, on les rebouche exactement. Mais d’au- tres fois, au contraire, on a pu la laisser surprendre par le froid , faute d’y avoir placé les réchauds en temps opportun. En attendant que ceux-ci puissent commu niquer de la chaleur à la couche, on tire par le côté une poignée de fumier à deux ou ‘trois pouces en dessous du terreau sur lequel est placée chaque plante qui pourrait en souffrir ; cela forme comme une espèce de fourneau où la première chaleur des réchauds dégorge et se con- centre plus promptement qu'ailleurs, et se communique aisément au plant qui est dessus. Si, pour former des couches, on n'avait pas du fu- mier également chaud , que tout ne sortit pas immédia- tement de l'écurie, il faudrait le mélanger très-exacte- ment ; car, s’il s’en trouvait plus d’un côté de la couche de celui qui serait resté quelque temps en tas, ce côté s'échaufferait plus vite, mais aurait moins de chaleur etla conserverait moins long-temps; d’où il résulterait que, la température de la couche n'étant pas égale, des plantes pourraient fondre par le froid , tandis que d’autres se- raient brülées. Les couches chaudes pour serres, bâches ou chäs- sis, se font toutes à peu près de la même manière. Comme ellesse trouvent nécessairement encaissées, on se contente d'y jeter le fumier par lit que l’on piétine au- tant que possible. Mais il n’est pas indifférent d'employer tel ou tel fumier; car, étant destinées à la culture de plantes délicates , on en exige un degré de chaleur plus 214 DES JARDINS. rigoureusement déterminé, et qui se soutienne long- temps. Si l’on veut une chaleur considérable, on em- ploie ceux de mouton, d'âne, ou plus ordinairement de cheval sortant de l’écurie ; et, pour qu’elle se conserve long-temps , on y mélange des feuilles sèches, du mare de raisin, ou autres matières végétales susceptibles de fermentation. La couche élevée, on la couvre d’une _bonne épaisseur de tan (1), calculée sur la profondeur des pots qui doivent y être enfoncés de manière à ce que leur fond ne porte pas sur le fumier, comme nous Pavons figuré pl. 12 du second volume, Jig. 3, a, &, a. Le tan a l'avantage de donner une chaleur douce, égale, sans une trop grande humidité, et de Ja maintenir pendant un espace de temps considérable. Dans tous les cas, les couches chaudes doivent être maintenues autant que possible de vingt à trente degrés, selon la pature du végétal qu’on y cultive, et selon la saison. Quand une couche se refroidit, on la défait de fond en comble; on remanie entièrement le fumier , et on y en ajoute du neuf, par tiers ou par moitié, selon que le vieux est plus où moins consommé. On remanie de même le lit de tan, en y en mêlant du nouveau dans les mêmes proportions; on peut même se contenter de lui donner un bon labour dans toute son épaisseur, de bien l'émietter et le mélanger pour le réchauffer am moins pour trois mois. La chaleur des couches s’élève et se conserve en rai- son des matières qu'on emploie ; et, comme on s’est assuré par l’expérience que chaque espèce de végétal en demande plus ou moins, il est nécessaire de connaître et le degré et la durée de chaleur que peuvent fournir (1) Écorce de chêne que l’on va chercher dans les tanneries où elle a déjà servi à la préparation des cuirs. On lemploie, pour les couclies , après l'avoir fait sécher en l’étendant à l’air et au soleil. DES JARDINS. 215 les différentes matières dont on fait le plus ordinaire- ment usage. Les fumiers de moutons peuvent faire monter le ther- momètre de 6o à 75 degrés de chaleur, mais ils ne la conservent que trois ou quatre mois. Les fumiers d’ânes, de chevaux et de mulets, donnent de 55 à Go degrés, et la conservent environ six mois. Les tannées donnent de 35 à 4o degrés, et la conser- vent aussi pendant six mois. Les fumiers mélangés par moitié avec des feuilles sèches donnent de 4o à 50 degrés, et la conservent de sept à neuf mois. Les feuilles sèches, mélangées à un tiers de fumier, donnent de 30 à 4o degrés, et la conservent de neuf à onze mois. | Les feuilles sèches, seules donnent de 35 à 40 degrés, et la conservent un an. La poudrette, dont on commence à faire usage dans les jardins fleuristes destinés à forcer , donne de 50 à 60 degrés , et la conserve un an. Les marcs d’œillettes, de pommes, d'olives et de noix , donnent de 25 à 30 degrés et la conservent pen- dant dix-huit mois. Enfin le marc de raisin donne de 4o à 5o degrés de chaleur, et la conserve quelquefois pendant plus de vingt mois. Au moyen des mélanges de ces différentes matières, on peut arriver à obtenir d’une manière assez durable les différens degrés de chaleur que l’on désirera ; mais en observant que, pour l'avoir constamment égale, il faudra remanier souvent, afin de renouveler la fermen- tation. Sans cela les couches perdraient peu à peu ; et, vers la fin des époques déterminées , la température se- rait presque baissée au degré de Fair atmosphérique. On conçoit aussi que les degrés que nous avons déter- minés peuvent beaucoup varier en raison des climats, des 216 DES JARDINS. saisons , des localités, et du plus ou moins d'humidité répandue dans l'atmosphère. L'état des matières elles- mêmes peut encore être une cause du plus ou moins d’élévation du thermomètre. Le jardinier intelligent étu- diera toutes ces causes, et apprendra, au moyen de l’ex- périence, à en combiner les effets d’une manière avan- tageuse. Dans notre Jardin potager, tome second, page 298, à l’article ananas, nous entrons , relative- ment aux couches chaudes , dans des détails que nous croyons suffisans pour compléter cet article. $ II. Des Couches tièdes. Celles-ci diffèrent des couches chaudes par l'usage auquel on les emploie. Elles ne sont pas dressées pour forcer les plantes, ni pour cultiver les végétaux exoti- ques qui demandent beaucoup de chaleur ; on ne les destine pas à faire obtenir, pendant les rigueurs de lhi- ver, les produits que la nature ne donne qu’au printemps, mais seulement à en hâter un peu la récolie, et plus particulièrement à favoriser la germination des graines délicates, et la reprise de la plupart des boutures. Comme les couches chaudes , on les fait à J’air libre ou dans des serres, et on les distingue en bordées et en encaissées. Quant à la manière de les établir , elle est absolument la même, à cette différence près que l’on emploie des fumiers moins chauds, ou des matières d’une fermentation moins active. Du reste, on peut les recou- vrir de terreau ou de tannée , selon l’usage qu’on en veut faire. Le degré de chaleur qu’elles doivent avoir est de 15 à 20 degrés du thermomètre de Réaumur. Les fumiers d’une couche chaude que l’on détruit , mélangés à une Rs partie de fumier neuf, sont excellens pour les établir. DES JARDINS. 21,7 $ I. Des Couches froides. Elles se font à l’air libre , sous châssis, dans les bà- ches, et d'une manière particulière pour les champi- enons; mais nous ne traiterons pas de cette dernière ici, parce que, ne servant qu'a une culture particulière , nous avons trouvé plus convenable d'entrer dans les détails de sa confection à l’article champignon du Jar- din potager; voyez le second volume, page 332. Les couches froides, ou plutôt sans chaleur artificielle, servent à faire les semis de plantes délicates et à graines très-fines, à cultiver les végétaux qui, sans aimer la chaleur, craignent cependant beaucoup la gelée, comme par exemple la plupart des ixias et autres liliacées ve- nant du Cap, les bruyères, etc., etc., et ceux dont les racines faibles ne peuvent s’accommoder de la pleine terre. Lorsque la couche froide est en plein air, elle prend assez ordinairement le nom de plate-bande. On lui donne de quatre à six pieds de largeur sur une longueur indéterminée. Dans l’endroit le plus sain du jardin, à une exposition convenable, le plus ordinairement à demi ombragée , on creuse une fosse de deux pieds à deux pieds et demi de profondeur. Si l’on craint l’humi- dité ,on étend , dans le fond, six pouces de pierrailles, de gravois ou de gros sable, et l’on jette par dessus les debris de racines et de branchage que l’on extrait de la terre de bruyère , en la passant à la claie; on piétine le tout, et l'on achève de remplir la fosse avec une de ces différentes matières : 1° de la terre de bruyère pure et très-fine ; 2° de la terre de bruyère mélangée avec un tiers ou moitié de terre franche ou légère ; 3° de la terre de bruyère mélangée avec un tiers ou moitié de terreau de couche ou de feuilles très- consommé ; 4° avec du terreau pur de couche ou de feuilles ; 5° enfin , avec du 216 DES JARDINS. terreau consommé , mêlé à un tiers ou moitié de terre franche ou légère. C'est le genre de culture que l’on veut faire qui doit déterminer sur le choix. Il arrive assez souvent que l’on plante à demeure et en pleine terre, dans la plate-bande de terre de bruyère, des arbrisseaux qui craignent le froid. Alors on prépare la couche de manière à pouvoir l’abriter avec des châssis pendant l'hiver ; et pour cela on a deux moyens. Le premier consiste à établir quatre murailles, d’un pied d'épaisseur , contre les parois de la fosse , et à les élever hors de terre suffisamment pour y placer une char- pente qui supportera des panneaux vitrés, que l’on y ajus- tera dès les premiers froids pour les enlever le printemps suivant. Nous avons figuré (pl. 3, fig. 1 et 2) la plate- bande dans laquelle nous cultivons des rosiers délicats. À est le mur de devant élevéde trois pieds et couvert de dalles, D, sur lesquelles sont posées les traverses € ; ces traverses sont unies et très - plates en dessus pour recevoir les panneaux vitrés qui doivent s'y ajuster parfaitement pour ne laisser aucun joint , aucun pelit trou , par lesquels l'air et le froid puissent s’introduire. Fest le mur de derrière, auquel nous avons fait don- ner six pieds d’élévation, afin de procurer aux châssis une pente de trente degrés, regardant le levant. G est la couche de terre de bruyère ayant deux pieds et demt d'épaisseur ; elle est posée sur un lit de gravois , de six pouces d'épaisseur. Le niveau du terrain que l'on voit en £, t, montre que la couche est enfoncée un peu au des- sous de la surface du sol. En K , nous avons figuré un panneau placé comme ils le sont l'hiver. Si les froids de- viennent rigoureux , pour empêcher la gelée de péné- trer sur les plantes, on établit tout le tour des panneaux un accot épais de litière ou de feuillessèches; on en jette sur les vitres cinq ou six pouces que l’on garantit des pluies au moyen de paillassons , ou que l'on change lors- qu'elle est mouillée. L'essentiel, lorsque l’on prive aiusi DES JARDINS. 21) les plantes d'air, c’est que la terre de la couche n'ait que très-peu d'humidité , seulement celle nécessaire âux racines pour ne pas se dessécher. Toutes les fois que la température se radoucit, il faut avoir le soin d’enlever ou au moins de soulever les panneaux, afin de donner aux plantes de Pair et de la lumière. Le second moyen d’abriter les couches froides consiste à les encaisser , non pas dans des murailles, mais sim- plement avec des planches épaisses et solides, parfaite- ment jointes, et formant un châssis à demeure. Cette petite construction se fait absolument comme un châssis (voyez cet article), et sa culture se dirige de la même manière. La couche froide, que l’on établit dans une bâche, consiste tout simplement en de la terre de bruyère que l'on jette dans des encaissemens préparés pour la rece- voir dans une serre construite en conséquence ; VOyez l'article bâche. S IV. Des Cloches et Verrines. La cloche de verre (pl. 3, fig. 4, 5) est le plus simple de tous les abris, l’un des plus anciens, et peut-être encore aujourd on un des plus généralement employés. Il parait que le châssis, qui le remplace si avantageu- sement sous le double rapport de l'économie et des résultats qu'on en obtient, n’a commencé à s'intro- duire dans nos cultures qu'à l’époque où de Combles a publié son École du Jardin potager, c’est-à-dire , en 1749 ; jusque-là , 1l fallait ee entre les cloches et les serres. La cloche est une pièce de verre soufflée , ayant à peu près la forme évasée d’une cloche de métal, d’où son nom. On en fabrique quelques-unes à Paris, mais la plus grande partie sort des verreries de la Champagne et de Ja Lorraine. On en a de plusieurs grandeurs et de 220 DES JARDINS. différentes formes, que l’on adapte à diverses cultures. Toutes les fois qu'il s’agit d’étouffer une bouture ou une plante nouvellement repiquée , on peut se servir de celles dont les dimensions sont petites : mais, quand il s’agit d'élever un végétal, et de le cultiver dessous pendant toute sa durée, on ne saurait les choisir trop grandes. Cependant celles dans la grandeur moyenne de quatorze à quinze pouces peuvent , en cas de besoin , ser- yir à tous les usages. Si l’on avait à s’en procurer , il faudrait choisir celles dont le verre d’un blanc plus ou moins transparent ne tire jamais sur le bleuâtre, car l’expérience a démontré qu'elles concentrent moins la chaleur que les autres, L’épaisseur du verre doit aussi entrer en considération : elle doit être assez forte pour donner de la solidité sans trop nuire a la transparence. Les cloches sont surmontées d’un bouton en verre, qui sert à les saisir pour les trans- porter : il faut donner la préférence à celles qui l'ont gros et solide. On prendra garde à ce qu’elles ne soient pas fêlées, ce dont on s’apercevra très - facilement en les sonnant avec le doigt. Elles sont assez sujettes à se plomber et se ternir au bout de quelques années, eflet que l’on attribue à l’hu- midité et à la poussière qui , en s’incrustant dans le verre , le dépolissent et lui ôtent sa transparence ; une cloche dans cet état a perdu sa qualité de réfléchir les rayons du soleil, et de concentrer la chaleur de cet astre. Il faut donc , au moyen de quelques soins, empêcher ou au moins retarder cet inconvénient. Il suflit, pour y parvenir, de ne jamais les recouvrir qu'avec de la litière sèche et propre, de les garantir des pluies continues de l'hiver ; et, lorsqu'on ne s’en sert pas, de les tenir dans un lieu sec et abrité de la poussière. On doit aussi avoir la précaution de les laver de temps en temps, et de les essuyer tous les matins avec un morceau d’étoffe ou une éponge, après qu’on a enlevé les couvertures. S'il s’en DES JARDINS. 221 trouvait quelques-unes de cassées dans les cultures , et que les morceaux fussent assez grands pour être rajustés, on pourrait encore en tirer parti en les recollant avec du blanc de plomb délayé dans du blanc d'œuf, eten ob- servant qu'il n’y ait point d'humidité sur le verre lors- qu'on en rassemble les fragmens. Les cloches se placent sur les semences, les plantes, boutures , etc., qui demandent de la chaleur : aussi ne les emploie-t-on guère que sur les couches chaudes. Lorsque la gelée est rigoureuse, et qu’elle menace de pénétrer dessous le verre, on les entoure avec de la litière sèche, dont on remplit exactement les intervalles qui se trouvent entre les cloches : et, sile froidaugmente, on les en recouvre entièrement jusqu’à un pied ou deux d'épaisseur. Lorsque le temps se radoucit, on enlèvela litière pour donner de la lumière et empêcher aux plantes de s’étioler. Lorsqu'il est nécessaire de leur pro- curer de l'air, on soulève la cloche du côté opposé au vent, ou du côté du soleil si le ciel est calme, et on la soutient élevée au point convenable par le moyen d’une crémaillère. La crémaillere (pl. 3, fig. 6) est un morceau de planchette ou de latte, long de huit à dix pouces, taillé d’un côté en crans profonds 4, a, sur l’un desquels on appuie le bord de la cloche. Si on veut que celle-ci soit entièrement suspendue, on place trois crémaillères pour la supporter. Les verrines( pl. 3, fig. 7) sont des espèces de clo- ches faites de plusieurs pièces de verre ou vitres assem- blées avec du plomb. On leur donne ordinairement une forme octogone. Elles concentrent moins de chaleur que les cloches, maison a l'avantage de les avoir aussi grandes qu’on le veut ; et elles ne sont pas sujettes à se ternir. Du reste, on les emploie aux mêmes usages , et on les traite de la même manière. 222 DES JARDINS. $ V. Des Paillassons et des Cages. Pour être assuré d’un plein succès dans Ja culture que l'on fait sur couches chaudes ou tièdes , il ne suflit pas d'employer seulement les cloches, les verrines, ni même les châssis portatifs. La litière , il est vrai, peut garantir les plantes du froid ; mais elle ne peut empêcher la pluie de pénétrer sur la couche, ce qui arrête sa fermentation, détruit par conséquent sa chaleur , et expose les plantes à la pourriture. Les paillassons ont seuls la précieuse qua- lité de maintenir la chaleur en écartant les eaux; aussi ne peut-on pas s’en passer dans une culture un peu soignée. De Combles, que nous avons cité plus haut, a très-bien traité cette partie essentielle de la culture , et nous ne saurions mieux faire que de rapporter ce qu'il en dit : « On fait des paillassons de deux manières. Beaucoup de jardiniers, pour avoir plus tôt fait, les font en treillage avec des échalas en travers, liés par des osiers : rien n'est plus meurtrier pour les cloches , rien de plus em- barrassant en même temps ; il vaudrait mieux n’en avoir pas du tout. La seule bonne façon de les faire est avec de la ficelle. Je dirai d’abord qu'il faut les disposer pour servir aux couches, non pas étendus en longueur, comme font encore plusieurs jardiniers malentendus , mais pour embrasser la couche en travers, de manière que les deux bouts portent sur les sentiers, ce qui la dé- fend bien mieux de tous les mauvais vents, et ce qui procure en même temps l'écoulement des eaux dans les sentiers. Pour rendre cet écoulement encore plus certain, il y a une précaution de plus à prendre , c’est de mettre une latte courante de bout en bout de la couche dans le inilieu entre les deux cloches , qui soit soutenue et lice à de petits piquets échancrés qu'on enfonce dedans , de distance en distance : cette latte doit être élevée de six pouces plus que les cloches, pour former une pente à DES JARDINS. 223 droite et à gauche aux paillassons qui portent dessus, et on peut l’élever plus haut , lorsque la rigueur du temps demande une grande charge de litière sur les cloches. Quant aux châssis , on est dispensé de cette précaution : leur disposition favorise l'écoulement des eaux, on ne fait qu'étendre les païllassons dessus : revenons à la fa- con des paillassons. « I faut régler leur longueur sur la largeur des cou- ches , et leur donner deux pieds de longueur de plus que leur largeur, pour qu'ils retombent d’un pied de chaque côté sur les sentiers ; et, pour la largeur, elle est bonne à quatre pieds. « Pour les faire justes dans les mesures qu'on veut, on marque ses longueurs et largeurs sur terre, dans quelque serre ou écurie qui ne soit pas pavée, et on divise ensuite les traits de ficelles proportionnément à la lar- geur : il en faut cinq, savoir , un dans le milieu , deux à six pouces des bords , et les deux autres dans le milieu des intervalles , de sorte qu'ils se trouvent à neuf pouces de distance. On enfonce ensuite des chevilles de bois ou de fer aux cinq places marquées aux deux bouts de la longueur , et on y attache cinq morceaux de la même ficelle bien tendus d’une cheville à l'autre. On coupe après cela cinq autres morceaux de la même ficelle , qui aient deux fois la même longueur, qu’on tourne chacun séparément autour d’un morceau de bois que les jardi- niers appellent des navettes; ces morceaux de bois ont quatre pouces de longueur, évidés à mi-bois à un demi- pouce près des deux bouts, de manière que ces deux bouts forment deux boutons qui empêchent la ficelle de glisser ; on approche en même temps la paille qui doit être de seigle bien secouée, et la plus longue qu'on puisse trouver. « Lorsque tout est ainsi préparé , un ou deux hommes se mettent à deux genoux à un bout, et une femme ou un enfant fait les poignées de paille , qu’il leur étend 224 DES JARDINS. devant eux sur les ficelles tendues ; ils les prennent l’une après l’autre et les lient à ces ficelles avéc celles de leurs navettes, en faisant une espèce de nœud coulant qui les arrête et les serre en même temps les unes contre les autres. À mesure que l’ouvragé avance, ils avancent de même, et se trouvent à genoux dessus dès qu'ils en ont fait quinze à dix-huit pouces. Arrivés au bout de leur longueur , ils nouent les deux ficelles ensemble, et détachent le paillasson qui se trouve fait. Avec des ciseaux à tondre ils égalisent ensuite les bords, en cou- pant de même dans toute l'étendue les épis et les bouts de paille qui se trouvent volant cà et la. « La difficulté de cet ouvrage est de serrer également les cinq nœuds coulans qu’on fait pour chaque poignée de paille, en sorte qu’on soit juste des deux côtés quand on arrive au bout. « Une autre attention importaute , c’est de faire les poignées de paille bien égales , et médiocrement fortes : douze à quinze brins sont suflisans ; ils deviennent trop lourds à manier, surtout quand ils sont mouillés, si on en met davantage. Ce nombre de brins se partage par la moitié, et se croise de manière que les épis se trouvent ious en dedans, et le pied aux deux extrémités : ce qui fait que l'épaisseur est à peu près égale partout. « Il y a encore plusieurs précautions à prendre pour la conservation de ces paillassons. 1° 11 faut que la ficelle soit à trois bouts pour résister aux injures du temps; c'est elle qui est l’âme de l’ouvrage qui ne périt jamais que par là. 2° Après que les paillassons sont faits, il faut frotter tous les traits de ficelle des deux côtés avec du goudron préparé , tel qu’on l'emploie pour les cordages de la marine, et on se sert d’un pinceau pour l’étendre ; cela empêche que l’eau ne la pénètre et ne la pourrisse. 3° Autant de fois qu'on les ôte de dessus les couches , il faut les étendre debout le long des murs ou d’une es- pèce de treillage grossier qu'on fait exprès avec des DES JARDINS. 2925 perches pour les adosser ; ils sèchent dans cette situa- tion : mais si on les jette sur terre, ou qu’on les roule les uns sur les autres, ils sont bientôt ruinés. 4° Il faut les mettre à couvert dès qu’on n’en a plus besoin, et les fermer bien secs ; mais on doit prendre garde qu'il n’y ait ni rats ni souris dans la serre où on les met ; ces animaux les coupent et les ruinent. Si on ne peut pas s'en défendre, il faut en ce cas tendre des cordes très- élevées de bout en bout de la serre et les mettre à che- val dessus, de manière que ces animaux ne puissent pas y atteindre. Faits et soignés, comme Je viens de dire, ils peuvent durer trois ou quatre années : négligés, ils ne vont pas à la seconde. » Nous avons figuré (pl. 4, fig. 2) la manière dont on les fait, et en a, a, a, le nœud dont on serre la paille. Les cages sont desustensiles dont on fait usage comme des cloches , quand il s’agit d’abriter des végétaux d’une certaine hauteur, que ces dernières ne pourraient pas couvrir. On les fait, comme les verrines, en verres de vitre montés sur du plomb, et on leur donne une lar- geur et une hauteur calculées sur les dimensions de la plante. On est dans l'usage de laisser un des côtés mobile en forme de porte, afin de pouvoir soigner le végétal sans avoir l'embarras d'enlever la cage chaque fois qu’on veut y toucher. Quelquefois on peut avoir besoin d'isoler une plante, soit pour la défendre de l'attaque des animaux, soit pour empêcher les oiseaux de dévorer ses graines ; ou enfin, si elle est vénéneuse, pour la mettre hors de l'atteinte des enfans. On se sert alors d’une cage en osier, faite sur le modèle de celle que nous avons figurée, pZ. hi. 4. 226 DES JARDINS. SECTION Il. DES CHASSIS. Îls tiennent le milieu entre les cloches et les serres, et peuvent, à la rigueur, remplacer , pour les plantes bas- ses, les unes et Les autres. On s’en sert très-avantageuse- ment pour faire des primeurs sur couches, pour cultiver les plantes qui demandent beaucoup de chaleur , et pour abriter, pendant l'hiver, celles qui sont délicates et craignent la gelée sans aimer la chaleur. Les châssis, dont on s’est servi la première fois en Hollande, se font de deux manières différentes. Ceux le plus généralement employés pour le jardin potager sont portatifs, et les plus utiles pour le jardin fleuriste sont fixes : nous allons traiter de ces deux sortes. Le chässis portatif (pl. 5, fig. 2) se compose, comme l'autre , de deux parties : la caisse et les pan- neaux (pl. 9,/ig.1). La caisse varie dans sa longueur et sa largeur, mais on lui donne toujours les mêmes dimensions que celles des couches sur lesquelles doivent se placer les châssis. Par conséquent , elle n'aura que de trois à quatre pieds de largeur si l’on doits’en servir pour les couches d'hiver, et de quatre à cinq pour les couches d'été. On pourrait, dans la belle saison, lui donner une plus grande dimen- sion ; mais alors elle deviendrait embarrassante à trans- porter quand on voudrait la changer de place. Quant à sa longueur , elle est tout-à-fait indifférente ; elle peut varier depuis quatre pieds jusqu’à huit. La hauteur à donner à la caisse d’un châssis demandé à être plus mürement examinée, par la raison qu'il faut, autant que possible, que les vitres des panneaux soient rapprochées du feuillage des plantes , si l'on veut que celles-ci profitent de toutes les influencés des rayons du soleil. Comme le châssis doit porter positivement sur le DES JARDINS. 227 fumier de la couche et non pas sur le terreau , on prendra d'abord en considération l'épaisseur de ce dernier , puis la hauteur ordinaire des plantes que l’on cultivera. Par exemple, quelques-unes, telles que la rave, demandent huit à neuf pouces de terreau; les concombres et les laitues en ont assez de six; les semences se contentent de quatre , et les melons n’en veulent que deux ou trois ; toutes les plantes peuvent se rapporter à ces quatre es- pèces sous ce rapport. Voilà donc de huit à deux pouces déterminés, auxquels on ajouterala hauteur du feuillage, plus deux pouces pour qu'il ne touche pas le verre. Mais comme les panneaux doivent être inclinés au midi, si l’on donnait sur le derrière du châssis la hauteur calculée, il en résulterait que le devant se trouverait trop bas : pour éviter cetinconvénient, on prendra le termemoyen, c’est-à-dire que l'on donnera la hauteur convenue vers le milieu ; il ne restera plus qu’à repiquer les plants les plus vigoureux sur le derrière et les moins avancés sur le devant. Tous ces calculs faits et arrêtés , on se procurera des planches de chêne , bien sèches et épaisses d’un pouce, pour établir les caisses en les faisant assembler à la ma- nière ordinaire par un menuisier ou un charpentier. Mais ici se présente une difficulté : quel degré d’in- clinaison donnera-t-on aux bords supérieurs de la caisse, et comment le mesurera-t-on? Un ouvrier ordinaire sait rarement se servir du quart de cercle et du rappor- teur: sil n’a un châssis pour modèle , il tâtonnera et inclinera ses panneaux au hasard, d’où il résuitera que l’on aura plus de chaleur qu’il n’en faut pour de certaines plantes, et pas assez pour d’autres ; car plus les verres pré- sentent perpendiculairement leur surface aux rayons du soleil, plus le calorique se concentre sous le chässis ; et, par la raison inverse, il y a moins de chaleur lorsque les rayons solaires frappent les verres obliquement. Ceci s'ap- plique plys particulièrement aux serres qu'aux châssis. 228 DES JARDINS. Pour mettre tout le monde dans le cas de donner aux panneaux d’une serre, d’une bâche ou d’un châssis, l'inclinaison nécessaire sans être obligé de se servir d’instrumens, nous avons dressé une table (pl. 5, Jig. 1), dans laquelle nous avons indiqué toutes les proportions. Nous allons citer deux exemples pour faire parfaitement concevoir la manière de s’en servir. Supposons que l’on veuille établir quatre châssis , le premier de trois pieds de largeur avec dix degrés d’in- clinaison ; le second, de quatre pieds avec quinze degrés ._d’inclinaison ; letroisième, de cinq pieds, incliné de vingt degrés; et le quatrième, de six pieds, incliné de vingt- cinq degrés. 1° Pour le premier , on commence à établir le devant (Jig. 2, a, a, a, a), auquel on donne la hauteur déter- minée, comme nous l'avons dit , par l'épaisseur du ter- reau et la hauteur du feuillage des plantes que l’on doit cultiver. On établit ensuite les côtés comme celui &, b, a,c, auxquels on donne, ainsi qu'au dernière, la même hauteur que celle de devant. On a une caisse de trois pieds de largeur , dont les quatre côtés, tous de la même hauteur, vont servir de base pour calculer lin- clinaison. La ligne a, b, nous servant de base , repré- sente la ligne À B de notre table. Comme dans notre première supposition notre châssis doit avoir trois pieds de largeur , nous cherchons à la base de la table le chifire 3, en d, qui nous donne trois pieds ; nous cherchons aussi le rayon qui marque dix degrés, puisque c’est l'inclinaison déterminée , et nous le trouvons d’A en H. Alors, en cherchant le point où la perpendiculaire d, d, coupe le rayon À, H, nous trouvons le chiffre 7, qui nous indique que la hauteur de la perpendiculaire de- puis sa base jusqu’au rayon est de sept pouces : or, comme cette hauteur représente celle du derrière du châssis, nous savons que nous devons lui donner (de b ent, fig. 2), sept pouces de hauteur si nous voulons DES JARDINS. 229 obtenir ( de £ en &, fig. 2 ) une inclinaison de dix de- grés. 2° Pour le second châssis de quatre pieds de largeur et de quinze degrés d’inclinaison , on agit de la même manière ; et, quand la caisse a, a, b, c, est faite, il s'a- git de recourir à la table pour savoir de combien on élèvera le derrière. On trouve, à la ligne formant la base de la table, la largeur de quatre pieds en 4 e ; le point où le rayon de quinze degrés À , K , coupe la perpendi- culaire e , L, indique 13 pouces; donc il faudra élever de treize pouces le derrière de la caisse D, à , fig. 2, pour obtenir, d’& en z, une inclinaison de quinze degrés. 3° Le troisième châssis ayant cinq pieds de largeur et vingt degrés d’inclinaison, on trouvera les cinq pieds à la table en 5 f, et le rayon de vingt degrés d'A en M. Le point de section de la perpendiculaire f, 7, indiquant vingt-deux pouces, on élèvera d'autant le derrière du châssis b, 1, fig. 2. 4° On cherchera de la même manière les proportions du quatrième châssis, en observant que depuis la per- pendiculaire 9, o, jusqu’à la dernièrep, g , notre ta- ble n'indique plus des pouces seulement , mais des pieds et des pouces séparés par un trait d'union. Ainsi, sion nous a bien compris, on trouvera , pour les six pieds de largeur et les vingt-cinq degrés d’inclinaison, deux pieds dix pouces d'élévation , ainsi marqués 2-10, qui seront la hauteur du derrière b,2, du châssis. Pour le second exemple, nous supposerons qu'il n’est plus question d’un châssis, mais d’une serre. Le pro- blème à résoudre sera celui-ci : construire une serre de dix pieds de largeur , dont les panneaux seront portés , sur le devant, par un mur de trois pieds de haut, et déterminer la hauteur du mur du fond pour procurer aux panneaux une inclinaison de 45 degrés ? On com- mence par tracer sur le terrain Les dimensions de la serre, 230 DES JARDINS. ï pais on fait élever le mur de devant, fig. 3, À, et celui du fond B, jusqu’à la hauteur de l'horizontale c, d, c’est-à-dire , à trois pieds. Alors on a recours à la table où l’on prend la perpendiculaire 10, e, et le rayon A, N; le point de section donne neuf pieds onze pouces, qui, ajoutés aux trois pieds du mur déjà bâti, donneront un total de douze pieds onze pouces depuis E jusqu'à F, et le panneau €, F; par ce moyen se trouvera incliné de maniere à former un angle de 45 degrés. Mais il arrive quelquefois que l’on veut donner une grande profondeur à une serre, douze ou quinze pieds par exemple, comme il lui faudrait une élévation consi- dérable pour que les panneaux, inclinés supposons à 55 degrés, pussent porter sur le mur de devant et celui de derrière , et qu’outre cela il ne serait pas possible de les faire solides à cause de leur grande longueur , on est daus l’usage de placer un toit sur le derrière , comme nous l'avons figuré par des points en g, k, fig. 3. Pour obtenir l'inclinaison des panneaux à 45 degrés , il ne s’'a- git plus de savoir la hauteur que l'on donnera au mur du fond, mais bien celle qu’aura le toit au pointé, c’est- à-dire, au sommet des panneaux. Pour y arriver, on com- mencera par déterminer avec justesse Ja largeur de la serre qui en sera couverte ; supposons que celle (fig. 3) ait quinze pieds de profondeur, et que l’on veuille don- ner cinq pieds au toit g , , il restera à couvrir avec des panneaux la largeur de dix pieds d'A en K, qui, cherchés à la table, donneront quatorze pieds deux pouces d'élé- vation de K en £. On peut calculer de la même manière l'inclinaison du toits, À, afin de lui faire former un an- gle plus ou moins ouvert avec les panneaux. Il en sera de même pour une serre chinoise, ou un jardin d'hiver vitré des deux côtés, c'est-à-dire, couvert par deux panneaux appuyés l’un sur l’autre comme €, ë, L. Après avoir élevé les deux murs 4, ec, 1, m,on prendra le milicu K, et par le moyen de la table on déterminera DES JARDINS. 231 la hauteur du faîte £, de la serre, selon le degré d’incli- naison que devront avoir les deux panneaux. Dans notre table des inclinaisons nous avons négligé de marquer les hauteurs que donneraient des fractions de pieds; mais il est un moyen très-facile de remédier à cet inconvénient. Nous allons supposer qu'on veuille établir une serre de dix pieds et demi avec des panneaux inclinés à l'angle de 55 degrés. La table donne pour hau- teur , à dix pieds, quatorze pieds deux pouces, et à onze, quinze pieds six pouces : or, il est clair qu'en prenant le terme moyen entre ces deux nombres, c’est-à-dire , quatorze pieds dix pouces , le rayon À g, se trouvera coupé enr, par la perpendiculairer, s, s’élevant sur dix pieds six pouces : le calcul sera le même pour les fractions plus petites. On s’apercevra que notre table n’a pas une parfaite justesse mathématique ; en voici la raison : dans ce genre de construction une précision à six lignes près, surtout en élévation, est tout-à-fait inutile ; partant de là, nous avons omis les fractions du pouce comme ne pouvant être d'aucune utilité à l’ouvrier, et pouvant em- barrasser notre table de chiffres qui l’eussent rendue plus difficile dans l'usage. Toutes les fois que la fraction est de plus de six lignes, nous avons ajouté le pouce tout en- ter ; quand elles est de moins de six lignes, nous avons retranché un pouce. Mais ces omissions n’ont été faites que sur la figure de notre tableau ; car, pour arriver à dé- terminer avec exactitude ces termes moyens , NOUS avons été obligés de mettre la plus grande précision dans notre calcul. | Revenons à présent à la construction des châssis. Lors- que la caisse sera faite , et que ses bords auront une incli- naison convenable , il s'agira de faire les panneaux. Comme ceux des serres, des bâches et des châssis se construisent dans les mêmes principes, nous n’en fe- rons qu'un seul article. 232 DES JARDINS. Un panneau (pl. 6, fig. 1), pour avoir toutes les con- ditions requises, doit : 1° être fait sur des dimensions exactes, afin de s'adapter parfaitement sur des traverses ou sur les bords d’un châssis, de manière à ne laisser aucun jour , aucune fente, par où l’air et le froid puis- sent s’insinuer ; 2° le bois dont on le fait doit être très- sec, afin de n'être pas sujet à travailler, eton lui don- nera l'épaisseur convenable pour qu'il ait une grande solidité. Cette épaisseur peut varier depuis un pouce jusqu'à deux selon la longueur et la largeur du panneau; c’est à l'ouvrier intelligent et qui connait la force du bois qu’il emploie, à déterminer les proportions voulues pour donner à son ouvrage la force et la légèreté néces- saires ; 3° les montans doivent être espacés de manière à augmenter la solidité du panneau , et en même temps à laisser,un libre passage aux rayons du soleil. C’est de ce troisième point que nous allons particulièrement nous occuper. Autrefois, lorsqu'un cadre de panneau était fait, on y ajustait des montans en fer sur lesquels on mastiquait les carreaux de verre; on s’était déterminé à cela pour avoir plus de soleil, mais cet avantage ne pouvait être mis en balance avec le peu de solidité qu’offrait cette méthode. On remplaca les verges de fer par un assemblage en me- nuiserie, fait sur le même modèle que celui d'une fe- nêtre , d’où 1l résultait que l'eau des pluies, ne pouvant trouver un écoulement, s’amassait devant les traverses qu'elle pourrissait bientôt , pénétrait davs l'intérieur, où elle noyait les plantes et refroidissait les couches. De Combles , en 1750, perfectionna les châssis, et depuis lui ils n’ont point éprouvé de changement dans la plu- part des jardins. Aussi allons - nous extraire textuclie- ment de son ouvrage tout ce qui se rapporte à cette matière. « Lorsque les châssis, dit-il, ont plusde dix-huit pieds, qui est la longueur des plus grandes planches de chêne, DES JARDINS. 233 on emboîte les planches les unes sur les autres, pour ne former qu’un seul corps; ce qui se peut faire de plusieurs manières : mais la plus simple est d’eniailler les deux bouts à mi-bois, et de les assembler l’un sur l’autre avec deux ou trois forts clous à vis, qui aient des écrous au bout pour les retenir. On continue la même opération de planche tant qu'il y en a; car, quoique j'aie dit ci- dessus que la longueur était indifférente, il est entendu que le châssis doit être de la même grandeur que la cou- che ; et, quand il aurait quinze toises , il doit être d’une seule pièce, sans quoi les séparations qui se trouveraient dans le dedans, si on voulait en accoler plusieurs ensem- ble, nuiraient infiniment aux plants par leur ombrage ; et ce n’est pas le seul inconvénient qui en résulterait. « La partie supérieure est liée comme au-dessous par des traverses semblables de deux pouces , assemblées de méme, quiservent tout à la fois à retenir les planches et à porter les panneaux de verre; mais ces traverses (pl. 6, Jig. 2, A), doivent être cannelées ; ou, pour m'expli- quer autrement, creusées d’un demi - pouce dans le milieu, tant en largeur qu’en profondeur , en forme de gouttière b, b, pour recevoir l’eau des pluies, qui passe entre les deux panneaux qui s’assemblent dessus (comme nous l’avonsfiguré par des points en €, c,e,c); et au bout de ces traverses, sur le devant, on met une petite gouttière de fer-blane qui passe dans la tringle qui arrête les châssis et qui jette les eaux dehors; il suffit qu’elle ait une saillie d’un demi-pouce hors de la tringle. « Ces traverses (pl. 6, fig. 3, À , et pour le détail Jig. 2, A), doivent être posées à quatre pieds l’une de l'autre, les épaisseurs comprises ; et les panneaux , par conséquent , se trouvent de la même largeur de quatre pieds ; plus grands, ils deviennent trop difficiles à ma- nier ; et, plus étroits, ils occupent trop de place en bois, qui diminue beaucoup l'action du soleil sur les plants. 234 DES JARDINS» « Le cadre de ces panneaux doit être de deux pouces de largeur sur un pouce et demi d'épaisseur , assemblé solidement par les coins , et fortifié par des équerres de fer entaillées dans le bois(fig.r,a,a,a,a). « [ls sont portés par les côtés, comme Jje viens de le dire, sur les traverses, et ils reposent par les deux bouts sur les deux planches de la caisse; mais comme ils glis- seraient s'ils n'étaient retenus , attendu la pente, on pose dans le bas une tringle qui excède d’un pouce et demi la superficie de la planche, et qui se trouve par consé- quent de niveau avec le châssis : les eaux qui coulent dessus , et qui passent entre cette tringle et le cadre da châssis, tombent dans une petite gouttière qu'on creuse sur l'épaisseur de la planche, semblable à celle des traverses, et se perdent en dehors par les mêmes issues. « Ces panneaux ont , conséquemment à ce que je viens de régler, trente - deux pouces dans œuvre à remplir, sur quarante-quatre environ, déduction faite des deux pouces de bois que prennent les cadres tout autour. IL faut diviser d’abord ces trente-deux pouces de largeur en trois , et placer de dix pouces en dix pouces un petit montant d’un pouce de largeur sur un pouce et demi d'épaisseur, pour qu'ils ne fléchissent pas, avec une feuillure des deux côtés peur recevoir ies carreaux. « On divise ensuite la hauteur, qui est de quarante- quatre pouces, en quatre, pour former quatre carreaux seulement qui remplissent toute la longueur ; et il faut y donner un pouce de plus pour qu'ils chevauchent les uns sur les autres, de manière que l’eau des pluies coule de l'un sur l’autre comme sur les tuiles d’un toit, et se perde dans le bas. Sur ce chevauchement des deux car- reaux, où, pour mieux dire, entre les deux verres, on peut introduire légèrement un peu de mastie, pour qu'il n’y passe aucun air ni neige subtilisée, lorsqu'elle est fouettée par le vent; mais, quand les deux verres DES JARDINS. 235 s’approchent bien, on pêut n'y rien mettre, d'autant plus que ce mastic ôte toujours du soleil. J’ai omis de dire ‘que, sur la partie antérieure du cadre, il doit y avoir une feuillure en dedans, de trois lignes au moins, pour y recevoir les carreaux qu'on y mastique de la même manière que sur les montans ; et, par cette dis- position , le verre se trouve presque de niveau avec le cadre. « Le mastic est une composition de blanc de céruse, de litarge et d'huile de lin, assez connue partout; mais il est bon que je dise que, pour le faire durer plus long- temps , il faut y passer, aussitôt employé , une couche de couleur. « Pour la facilité de placer et déplacer ces panneaux , on attache aux deux extrémités et dans le milieu deux anneaux de fer, de force et grandeur suffisantes pour y passer deux doigts; deux hommes les prennent cha- cun par un bout, et les portent sans peine ni risque. Ils servent également à tirer à soi quand on veut donner de l'air aux plants, ou quand on les veut travailler ; on pousse le bout du panneau dans le sentier opposé à celui où on est ; ce côté fait, on passe de l’autre, et on y fait la même opération. Pour empêcher, dans les grandes tempêtes, que le vent ne les enlève, quoique baissés , il faut arrêter chaque panneau par un crochet que l’on attache sur la caisse, et qui s'accroche à un piton à vis qu'on perce dans l'épaisseur du cadre sur le derrière. Pour les élever, lorsqu'on veut donner de l'air aux plantes sur le derrière , on a, pour en donner plus ou moins à sa volonté, des morceaux de bois entaillés comme une crémaillère , qui s’enfoncent dans le sentier et sur lesquels on repose le panneau lorsqu'il convient de donner de l'air de ce côté ; car ce sont les vents et les saisons qui doivent régler à cet égard ; s’il con- vient de le donner du côté du midi, onn'a qu'a re- pousser les châssis du côté du nord, plus ou moins, 236 DES JARDINS. suivant que le besoin l'exige. La règle générale est de le donner du côté opposé au vent , quel qu'il soit, lors- qu'il est froid ou qu’il souflle avec violence. Cependant, dans les grandes chaleurs , quand il ne fait aucun vent, il est plus avantageux aux plants de ürer l’air du côté du nord, qui tempère mieux l’ardeur du soleil , et ce mé- lange d’air avec le soleil leur est très-favorable. » Long-temps nous avons fait construire nos châssis, comme le dit De Combles; mais l'expérience nous y a fait fre ensuite quelques changemens que nous croyons avantageux. Îl conseille de maintenir les panneaux au moyen de tringles ; nous avons trouvé plus commode et plus simple de les maintenir en bas par le moyen de petits morceaux de bois solidement cloués, comme on le voit dans la fig. 3 de la pl. 6. Ils ne s'ouvrent plus en glissant sur les traverses , mais en se soulevant par der- rière ou par devant, et ils se maintiennent ouverts par de petites crémaillères , comme en D, fig. 3. Il résulte de cette méthode que, lorsqu'on donne de l'air, il pénètre autour des trois côtés du panneau, et se renouvelle en- üèrement dans le châssis en formant un léger courant qui emporte avec lui l'humidité, ce qui n’arrivait pas lorsqu'on se contentait de découvrir une partie en fai- sant glisser le panneau. De Combles recommande de placer les montans des panneaux à dix pouces les uns des autres, ce qui exige des carreaux de verre de cette largeur , et par consé- quent une grande dépense pour peu qu’un établissement soit considérable. Nous avons trouvé beaucoup plus d'avantages, sous plusieurs rapports, de faire rappro- cher les montans de cinq à neuf pouces, selon que les plantes exigent plus ou moins de lumière. Les verres en acquièrent une solidité capable de les faire résister à une grêle légère ; ils sont beaucoup plus économiques, parce que les petits fragmens que les vitriers amassent peu- vent servir, pourvu qu'ils aient de cinq à neuf pouces DES JARDINS. 237 de longueur , leur largeur ne füût-elle que de trois ou quatre pouces. Quoi qu'en dise De Combles , la chaleur qu'ils concentrent dans l'intérieur du châssis est tout autant considérable, les plantes craignent moins les coups de soleil, et le panneau est beaucoup plus solide. Cependant , quand il s’agit de cinq à sept pouces de lar- geur, nous n’entendons parler que des panneaux de châssis, et seulement pendant l’été ou pour les plantes qui ne demandent pas une très-grande lumière. Une condition essentielle pour assurer la conservalion des verres, c’est d’avoir toujours à portée, soit pour châssis, bâches, ou pour serres, des paillassons dont on les couvre à la première apparence d’un orage. Si on se trouvait surpris, et que l’on n’eüt pas de paillassons prêts, onse hâterait de jeter dessus de la litière, du fu- mier , des feuilles , de la paille, ou autre chose capable de les garantir , et qui se trouverait sous la main. Leur entretien demande aussi quelques soins ; on les nettoie avec un chiffon et de l’eau chaque ne qu'un peu de crasse se montre à leur surface supérieure et inférieure ; on essuie , au besoin , les vapeurs humides qui s’y Sant attachées pendant la nuit ; et ceci est de rigueur , non- seulement pour conserver la transparence des verres, mais encore pour garantir les plantes de la pourriture. Si un accident brise un carreau, il faut le remplacer sur- le-champ ; on en taille un autre avec un diamant de vi- trier , on l’ajuste entre les feuillures des deux montans ; on le maintient de chaque côté avec deux petits clous à pointe sans tête , et on lui donne de la solidité avec le mastic ; chaque carreau doit déborder de trois ou quatre lignes au moins sur celui qui se trouve après lui, et même de sept ou huit si le panneau n’a que très - peu de pente , mais il n’est jamais nécessaire de les mastiquer l’un sur l’autre, comme le dit De Combles. Quant au bois , si on tient à conserver long-temps un châssis ou toute autre construction de ce genre , il fau- 4 238 DES JARDINS. dra d’abord lui donner trois bonnes couches de couleur à l'huile, et tous les ans on en appliquera une nou- velle. Le châssis fixe( pl. 6, fig. 3) diffère peu du châssis portatif; cependant on a pour le construire plusieurs manières qui vont nous fournir quelques détails. Après avoir déterminé sa largeur et sa longueur en raison de la culture à laquelle on le destine, on creuse, en terrain sec et à exposition favorable, une fosse dans les mêmes dimensions , à laquelle on donne la profondeur déter- minée par l'épaisseur de la couche que l’on doit y faire. On enfonce aux quatre coins un pieu équarri propre- ment , d'une hauteur déterminée sur celle que doit avoir Ja caisse, tant sur le devant que sur le derrière. Depuis le fond de la fosse jusqu’au sommet du pieu on as- semble des planches que l’on cloue solidement de ma- nière à former une caisse de châssis à moitié ou aux trois quarts enterrée, d’où il résulte que la couche se trouve eucaissée. Par un autre moyen on atteint le même but , mais d’une manière plus satisfaisante, parce queles bois, ne se trouvant pas enterrés, ne sont pas sujets à se pour- rir. On creuse la fosse de la même manière, mais on élève contre ses paroiïs un petit mur de briques sur lequel re- pose la caisse du châssis à fleur de terre. Enfin une troisième méthode consiste à remplacer toute la caisse par cette construction en briques, que l’on élève hors de terre en conséquence. On ajuste dessus un cadre en charpente pour porter les traverses et les panneaux. Du reste, tout s'achève comme s'il s'agissait de faire un châs- sis portatif. L'usage des châssis est presque universel, parce qu'é- tant peu dispendieux ils peuvent néanmoins remplacer les serres jusqu'à uu certain point, comme nous l'avons déjà dit. On peut cultiver dessous non-seulement les plantes d’orangerie et de serre tempérée , mais encore la plupart de celles de serre chaude. Il est vrai que ce DES JARDINS. 239 que l’on gagne en économie, on le perd bien par les soins continuels qu’elles exigent. On prépare sous châs- sis des couches sans chaleur , des couches tièdes , chau- des et des taunées ; mais, dans les unes comme dans les autres, les plantes sont beaucoup plus sujettes que dansles serres à être attaquées par lhumidité , la moisissure et le pourri, outre les coups d'air, les coups de soleil et l’étiolement. Nous allons exposer les précautions géné- rales qu'il faut prendre afin d'éviter ces inconvéniens. Pour éviter l'humidité, 1l faudra d’abord prendre les moyens que nous avons indiqués à Particle couche, c'est-à-dire, avant de faire celle-ci, placer au fond des plâtras, de la pierraille ou du sable , et assurer à l’eau un écoulement facile. Toutes les fois que l’on verra des gouttes d’eau amassées contre les parois intérieures des panneaux , on les essuiera avec un linge ou une éponge; eu arrosant, on ne donnera jamais aux plantes que la quantité d’eau nécessaire, et l’on aura grand soin de ne pas en laisser tomber sur la couche , ou de la faire dé- border par-dessus les pots. On enlèvera scrupuleusement toutes les ordures qui auront pu s’amasser sur le feil- lage des plantes et aux bifurcations des branches et des tiges, ainsi que les feuilles et tiges moisies ou pourries. On espacera les plantes de manière à ce que Pair puisse facilement circuler autour de chacune. Toutes les fois que le thermomètre ne marquera que » ou 3 de- grés au-dessus de glace, on tiendra les châssis exacte- ment fermés; et, si le froid prend de l'intensité, on couvrira les panneaux avec des paillassons et de la li- tière sèche ; on entassera une bonne quantité de celle- ci contre les côtés de la caisse, et enfin on prendra toutes les précautions nécessaires pour empêcher la gelée de pénétrer dans l’intérieur. Mais , si les plantes restaient ainsi privées d’air et de lumière pendant un certain espace de temps, elles s’é- tioleraient et périraient infailliblement. II faudra donc 240 DES JARDINS. profiter de tous les momens de soleil pour les faire jouir de ses rayons en découvrant les panneaux, et profiter avec plus d’empressement encore des instans où le thermomètre montera à 5 ou 6 degrés au-dessus de glace pour soulever les panneaux et donner de l'air. Mais , lorsque les plantes auront été long-temps étouflées, il ne faudra les mettre en contact avec l'air extérieur que peu à peu, afin de ne pas les exposer à périr subite- ment par un coup d'air. On ouvrira donc peu le pan- neau le premier jour, un peu plus le second, et ainsi de suite pendant une huitaine de jours, c'est-à-dire, jusqu'à ce qu’elles y soient accoutumées , et que le danger soit passé, et avec la précaution de jeter devant l'ouverture un peu de litière, ou d'y placer des paillassons. Dès le mois de mars les rayons du soleil prennent une force qui devient funeste aux plantes de châssis et de serre, si l’on n’y prend garde. Aussi, dans cette saison et pendant tout l’été, on couvrira les verres des panneaux avec des toiles ou des paillassons pendant la partie du jour la plus chaude, c’est-à-dire, depuis onze heures du matin jusqu'à deux pendant le printemps, et depuis neuf heures jusqu'à cinq pendant l'été. Enfin, l'expérience enseignera encore beaucoup d’autres précautions dont aucune n’est à négliger, quelque minutieuse qu'elle paraisse. SECTION III. DES SERRES: Lorsque l’on veut posséder des végétaux appartenant aux différentes parties du monde, il faut avoir des serres de plusieurs sortes, afin de donner à chaque planie les soins et la température qui lui conviennent. De même que notre globe se divise en zones glaciale , tempérée et torride, on a aussi construit des serres froides, c’est-à- dire, sans chaleur artificielle , tempérées et chaudes. Au premier coup d'œil quelques personnes ne regar- DES JARDINS. 2/1 deront pas ce rapprochement comme très-juste : com- ment , diront-elles, comparer la température de la zone glaciale à celle d’une orangerie ? Des végétaux qui crois- sent à la baie d'Hudson, dans le Groënland , en Sibérie, peuvent-ils craindre le froid sous le climat de Paris ? Oui; la preuve, c’est que la plupart des plantes qu’on nous apporte de ces contrées périssent l'hiver dans nos jardins si on les met en pleine terre ; et la raison en est fort simple. Dans le nord les approches de l'hiver s’an- noncent par des neiges considérables qui s'amoncèlent à six, dix et même quinze pieds d'épaisseur sur la terre ; les végétaux qui ne dépassent pas cette hauteur se trou- vent ensevelis et par conséquent abrités du froid. On sait combien une semblable couverture est favorable à la végétation ; ses effets sont encore plus remarquables dans ces contrées glaciales que chez nous, puisque, lorsque le printemps fait fondre les neiges, il n’est pas rare de voir sortir de dessous des violettes, des ané- mones et des primevères en fleurs. Cependant il doit y avoir encore d’autres raisons qui font que telle plante résistera mieux au froid dans certain pays que dans un autre ; par exemple , nous avons vu en Angleterre des arbres, et entre autres des camellia, des magnolia, des araucaria imbricata, ete. , qui passaient très-bien l'hiver en pleine terre, quoiqu'il n’y eût que peu de neige , tandis que sous le climat de Paris ils exigent rigoureusement l’orangerie. Peut-être un jour les physio- logistes feront-1ls des recherches à ce sujet, et découvri- ront-ils la cause cachée qui produit de si singuliers effets. On a aussi construit des serres aquatiques pour les plantes qui ne peuvent croître que dans l’eau, mais ce genre de construction n’a guère été perfectionné qu’en Angleterre. Nous en avons figuré une dans la p£. 4, fig. 1. Les serres sans chaleur artificielle comprennent les jardins d'hiver, pl. 7, fig. 1 ; les serres chinoises, pl. Le 16 242 L DES JARDINS. 8, Jig. 1 ; l'orangerie, pl. 7, Jig.2 ; les bâches, pl. , Jig. 1; la serre à géraniums, pl. 9, Jig. 2. Les serres tempérées renferment la serre tempérée ordinaire, pl. 10, fig. 1 ; et la serre tempérée pour plantes grasses. Les serres chaudes comprennent la serre à boutures, pl. 11, fig. 2; la serre des jeunes plantes, p£. 10, fig. 1; et Ja serre des plantes faites ou de la zone torride, pl. ig. 2; etpl. 11, fig. x. Ces diverses serres diffèrent par leurs formes, mais principalement par la température qu'on y entretient continuellement au moyen des fourneaux et des tan- nées. Les fourneaux ou poëles doivent être en maçonnerie de briques et de terre. Leur grandeur et leur nombre se- ront calculés sur la grandeur des serres où on les pla- cera, ainsi que sur le degré de chaleur qu'ils devront leur communiquer. Dans tous les cas, il sera essentiel de les construire de manière à ce qu'il ne puisse pénétrer aucune fumée dans la serre; et pour cela leur ouverture doit être dehors, ou, ce qui vaut beaucoup mieux, dans un petit cabinet vitré joignant la serre, et que l’on peut utiliser en y plaçant des rayons sur lesquels on dépose des plantes grasses d’orangerie. Si l’on devait bâtir deux corps de serre, on construi- rait ce cabinet entre les deux, de manière à y placer l'ouverture des deux fourneaux, l’une à droite, l’autre à gauche. L’utilité d’un cabinet ne se borne pas à mettre à couvert des intempéries de l'air l’homme chargé d’en- tretenir le feu des fourneaux , il sert encore à empêcher les vents froids de pénétrer dans la serre lorsqu'on en ouvre la porte pour y entrer, ce qui évite aux plantes le danger des coups d’air, qui assez souvent les tuent subitement. Aussi conseillons-nous cés petites construc- tions dans tous les cas, mais surtout pour les serres chaudes et tempérées , où les plantes, étant continuelle- DES JARDINS. 243 ment en état de transpiration, sont beaucoup plus sensi- bles à la transition subite du chaud au froid. Long-temps on a distribué les tuyaux des poëles le long des murs de la serre et à une certaine hauteur; mais celte méthode est vicieuse en ce que la chaleur, tendant plutôt à monter qu’à descendre, abandonne les couches ou au moins ne les pénètre pas. Il vaut donc beaucoup mieux les faire passer sous les sentiers pratiqués entre les couches, comme nous l'avons indiqué en A dans la coupe, fig. 1, pl. 11. Ces tuyaux doivent être en terre cuite et épaisse, afin qu'ils conservent plus long-temps leur chaleur et qu’ils la répandent plus également. Ceux en tôle ou en fer ne valent absolument rien pour cela, outre qu'ils sont dangereux sous le rapport du feu. S'il arrivait que la fumée refusât de prendre son cours dans le tuyau d’un fourneau , et qu’elle refluât par la porte, on ferait chauffer le tuyau à dix-huit pouces ou deux pieds de son embouchure dans le fourneau ; et par ce moyen, en raréfiant l'air, on le forcerait à former un courant qui donnerait cours à la fumée. Si cet inconvé- nient se renouvelait, on ferait bien d'établir un réchaud à demeure , avec des briques; et, toutes les fois qu’on voudrait allumer le poële, on commencerait par y faire brûler un peu de charbon pour chauffer le tuyau. Le bois est le seul combustible dont on doivese servir pour chauffer une serre , à moins que ce ne soit dans un pays où son excessive cherté en défend l'usage. Dans ce cas on donnerait toujours la préférence aux matières qui ont le moins d’odeur en brûlant, et l’on n’emploierait la houille que dansle cas où l’on ne pourraitfaire autrement. À la rigueur on peut se dispenser de maconner des fourneaux dans les jardins d'hiver et dans les orangeries; mais cependant on est obligé d'y avoir du feu quand les gelées sont très-fortes, non pas pour y entretenir de la chaleur, niais seulement pour empêcher le thermomè- tre de Réaumur de descendre au-dessous de zéro. Quel- 2/4 DES JARDINS. ques personnes se contentent d'y allumer des terrines qu'elles y déposent pendant la nuit, mais les vapeurs du charbon sont très-nuisibles aux plantes ; comme l'acide carbonique y domine, il agit sur elles en stimulant la végétation dans une saison où toute l'industrie du culti- vateur doit s'employer à l'empêcher. On remplacera ces terrines par des poëles en faïence, sans tuyaux, dans lesquels on renfermera de la braise recouverte de cendres chaudes, prises dans un foyer ou dans les fourneaux des serres chaudes. Les poëles roulans dont on se servait autrefois pour chauffer les salles à manger pendant le repas, sont excellens pour cet usage. Si l’on n'avait pas de braise à sa disposition, et qu'il fallût absolument se servir de charbon, on aurait au moins la précaution de l’allumer en plein air, et de ne l’apporter dans la serre que lorsqu'il serait assez consumé pour ne pas exhaler de vapeurs suflocantes. SL. De la Serre aquatique. Les Indes, l'Égypte, l'Amérique méridionale et beau- coup d’autres pays chauds, possèdent un grand nombre de plantes superbes qui ne croissent que dans l’eau, et qui pour cette raison sont restées rares en Europe ; tels sont un grand nombre de souchets, de nénufars et autres végétaux. Les Anglais seuls, jusqu’à ce jour, ont établi des serres entièrement consacrées à la culture de ces plantes, et celle que nousavons figurée, pl. 4, fig. 1, a son modèle dans les environs de Londres. Sa largeur est de douze pieds, et sa longueur de cin- quante ; un bassin en plomb, de huit pieds de longueur sur trois de profondeur, règne sur toute sa largeur ; à côté de la porte se trouve un fourneau sur lequel une très-grande chaudière est fixée à demeure au moyen d’une maconnerie en terre et en briques; un robinet en cuivre est soudé dans le fond, et en verse l’eau dans un DES JARDINS. 245 tuyau de plomb qui la conduit dans le bassin ; tout le reste est construit sur le plan d’une serre chaude ordinaire. Les plantes croissent en pleine eau ou dans des pots et des baquets qui y sont plongés. Pour les premières , on étend au fond du bassin une couche de terre de six ou huit pouces, dans laquelle s’implantent leurs racines toujours tracantes. On concoit qu'aucun engrais ne doit y être mêlé pour ne pas troubler et corrompre l’eau. Les secon- des se plantent dans des baquets en chêne remplis de terre tourbeuse, ou, à défaut, de terre de bruyère mé- langée par moitié avec de la terre franche. Une chose essentielle , c’est de tenir toujours l’eau limpide autant que possible, ce à quoi on parvient en la renouvelant quand il est nécessaire et par parties. Pendant l'été on peut remplacer celle que l’on enlève par de l'eau de ri- vière, ou de marre si elle est claire ; faute de celle-ci, on se sert d’eau de puits et de fontaine; mais, avant de la jeter dans le bassin, il faut I laisser pendant trois ou quatre jours dans destonneaux, pour qu’elle se réchauffe et se mette en équilibre avec la température de Fatmos- phère. L'hiver onen remplit la chaudière et on la Fâche dans le bassin lorsqu'elle est un peu plus que tiède : en se mélangeant avec celle dont il est rempli, elle perd la chaleur qu’elle avait de trop et la communique à l'autre. On aura deux thermomètres , dont lun sera constam- ment plongé dans l’eau du bassin, et Pautre attaché con- tre le mur à l'extrémité de la serre opposée au poële. Le thermomètre plongé dans l’eau marquera coustam- ment 10 degrés, et l’on maintiendra à 15 ou 20 celui qui sera contre la muraille. Il est de rigueur que la tem- pérature de l’air soit toujours à quelques degrés au-des- sus de celle de l’eau; car sans cela il s’élèverait de cette dernière des vapeurs qui s’attacheraient pariout et pour- riraient les bois des panneaux et des traverses. Quoique l’eau de la chaudière répande peu de va- peurs à cause du peu de degrés auxquels on fait monter 246 DES JARDINS. sa chaleur, néanmoins il faudra toujours la tenir cou- verte au moyen d’un rondeau en planche qui la mas- quera. On conçoit aisément qu'elle n’occasionera au- cune dépense, puisque ce sera le feu que l'on est obligé d’entretenir dans le fourneau qui la chauffera. La chau- dière sera en fer et non en cuivre, parce que, se trouvant souvent chauffée à vide, ce dernier métal serait bientôt brülé. Il faut bien se pénétrer d’une chose , c’est que l'on ne jette pas de l’eau chaude dans le bassin pour en réchaufler l'eau, mais seulement pour ne pas la laisser refroidir. Ain- si, tant qu’elle se maintiendra limpide et qu'il n’y aura pas besoin de la changer, on se donnera bien de garde d'en augmenter la chaleur autrement qu'en augmentant celle de Pair. L'équilibre nécessaire qui doit exister entre sa température et celle de la serre s'établit naturellement, et toujours de la manière la plus avantageuse auxplantes. Il est un moyen fort simple de s'assurer quand l’eau se décomposera et cessera d’être favorable à la végéta- üion : il ne s’agit que d’y mettre des poissons rouges, ou d'autre espèce ; tant qu'ils seront vifs et bien portans, l'eau aura toutes les qualités désirables; mais, dès qu’on s'apercevra qu'ils viendront chercher l'air à la surface, que leurs mouvemens deviendront lourds, ou qu'ils na- geront un peu sur le côté, ce sera une preuve que l’eau aura perdu de ses principes, et qu’eile sera sur le point de se corrompre. C’est alors qu’on se hâtera de la re- nouveler. Quant aux soins à donner aux plantes, ils se bornent à enlever scrupuleusement les feuilles pourries, avec l'extrême précaution de n'occasioner aucune déchi- rure, surtout aux parties submergées. Lorsqu'on sera obligé d'y porter la serpette, il faudra avoir soin de couper toujours au-dessus de la surface de l’eau, pour ne pas donner à celle-ci un passage qui puisse la laisser pénétrer dans le tissu cellulaire de la plante. DES JARDINS. 247 Les végétaux aquatiques ne peuvent guère se multi- plier que par graines, par drageons et par l'éclat des toufles. Pour le premier cas on fera très-bien de semer les plantes précieuses dans des pots, que l’on tiendra submergés dans des baquets ou des terrines. N’étant couvertes que d’un ou deux pouces d’eau, ïl sera beau- coup plus facile de suivre les progrès de la germination , et de donner aux jeunes sujets les soins que les circons- tances exigeront. À mesure que la plante croîtra et pren- dra de la force, on la submergera davantage ; et, lors- qu’elle sera parvenue à une certaine grandeur, on la mettra dans le bassin pour être abandonnée à sa propre vigueur. S'il s'agissait de l’ôter de son pot pour la mettre en plein bassin, on la tiendrait pendant quelques heures hors de l’eau , afin de donner à la terre du pot le temps de se raflermir; puis on dépoterait à la manière ordi- naire ,-et un homme entrerait dans l’eau du bassin pour enfoncer la motte, sans la briser, dans la vase du fond. Lorsqu'on multiplie une plante aquatique, en éclatant une touffe ou en séparant les drageons, il faut que cette opération se fasse par déchirement, sans employer d’ins- trument tranchant, à moins que ce nesoit indispensable. $ IL. Du Jardin d'hiver. Nous avons figuré , pl. 7, fig. 1, celui de notre éta- blissement. Deux murs de quatre pieds d’élévation por- tent un premier rang de panneaux légèrement inclinés, afin de laisser à l'intérieur plus de place pour le déve- loppement des arbres, Sur ceux-ci sont posés d’autres panneaux formant le faite de la construction, et incli- nés à l'angle de 4o degrés. Le sens de la longueur est de l’orient à l'occident, de manière que les panneaux sont tournés au nord et au midi : dans une localité plus convenable, il sera mieux de la mettre du nord au midi, afin que les deux côtés jouissent des rayons du soleil, 248 DES JARDINS. lun le matin, et l’autre l'après-midi. La charpente se compose des traverses destinées à soutenir les panneaux, qui s’enlèvent et se placent à volonté. L'intérieur de la serre est divisé en deux larges plate- bandes de terre de bruyère, séparées par une allée sa- blée et sinueuse. Nous avons planté, en pleine terre, dans tout l’espace de la serre, des arbrisseaux et plan- tes fleurissant depuis le commencement de novembre jusqu'en avril, de manière à jouir de toute la beauté du jardin d'hiver à une époque où la terre, dépouillée de verdure, est couverte de tristes frimas. Cependant nous avons plus spécialement destiné cette serre à la culture des camellia, des pivoines et des magnolia de la Chine, qui y acquièrent toute leur beauté, et y produisent un effet charmant. Les plantes cultivées dans le jardin d’hiver n’exigent pas d’autres soins que celles cultivées en pleine terre à l'air libre ; seulement on a la précaution de ne laisser aucunes feuilles pourries, et de couper scrupuleusement le bois mort et les parties où se montre de la moisissure. Lors- que les froids deviennent rigoureux, on couvre les deux rangs de panneaux exposés au nord, avec une bonne épaisseur de litière ou de feuilles sèches bien compri- mées sur les verres, et l’on jette par-dessus un double rang de paillassons pour en détourner les eaux de pluies, qui pourriraient la litière, et la rendraient moins propre à conserver la chaleur. Ces deux rangs de panneaux res- tent ainsi couverts pendant tout le temps que les gelées sont rigoureuses. Mais il n’en est pas de même de ceux regardant le midi; on se contente le plus souvent d'y étendre un peu de litière et des paillassons, que l’on en- lève toutes les fois que le soleil paraît sur l'horizon, pour ne les replacer que la nuit. Lorsqu'il cesse de ge- ler, ne fût-ce que pendant quelques heures, on se hâte de profiter de ces heureux momens pour donner de l'air en soulevant quelques panneaux, Néanmoins ceci ne DES JARDINS. 2/49 doit se faire que par un temps sec, sans vent et sans brouillard. Dans un jardin de luxe cette serre permet à un archi- tecte de déployer toute l'élégance, toute la richesse de son art. Sa hauteur, sa largeur et sa longueur sont ab- solument arbitraires, de manière qu'on peut lenrichir de statues, de bassins et de jets d’eau, de colonnes, etc. Quoique les plantes qu'on y cultive n’exigent pas de chaleur, cependant elles craignent le froid, et jamais le thermomètre ne doit y descendre au-dessous de 2 ou 3 degrés au-dessus de zéro. Lorsque la serre est enter- rée de trois ou quatre pieds, on peut à la rigueur se passer de fourneau , et se contenter, lors des fortes ge- lées, d'y déposer pendant la nuit des poëles roulans remplis de braise. Si on y construit un fourneau, il faut que le tuyau de chaleur passe dans la muraille et non pas dans le sen- ter, parce que celui-ci se trouve sur la pleine terre et non recouvert de planches. On ménage donc, dans un des murs, un canal carré, voyez pl. 9, fig. 3, quire- coit le tuyau, et laisse échapper la chaleur dans la serre par des ventouses hautes de six pouces et larges de six à dix lignes, comme nous les avons figurées, pl. 9, fig. 4. On a soin de ne pas trop pousser le feu, afin que la chaleur ne fasse jamais monter le thermomie- tre au-dessus de cinq ou six degrés. Si l’on chauffait davantage, les plantes, au lieu de fleurir, pousseraient des bourgeons minces et étiolés , qui épuiseraient les tiges et les exposeraient à périr. Dans un coin de cette serre, comme dans toutes les autres, on placera un tonneau masqué par le feuillage de quelques arbustes ; on y déposera trois ou quatre jours d’avance l’eau destinée aux arrosemens, afin de lui donner le temps de s’échaufler au même degré que la température où les plantes se trouvent. La terre des plate - bandes se cultive avec la bêche, la binette et la 250 DES JARDINS. serfouette de la même manière qu'a l'air libre, mais avec la précaution de ne jamais la remuer en hiver, c'est-à-dire, tant que les couvertures des panneaux in- terceptent l'air et la lumicre. $ IE. De a Serre chinoise. Nous avons figuré la nôtre, pl. 8, fig. 1. Elle con- siste en deux murs de quatre RS d'élévation, sup- portant des panneaux formant le faite et inclinés à l'angle de 4o degrés. Son exposition est la même que celle du jardin d'hiver, c’est-à-dire qu'une des lignes des panneaux regarde de nord , et l’autre le midi. Celle du nord se couvre de la éme: manière pendant l’hiver. La serre chinoise est destinée à l'éducation des plantes délicates d’orangerie. On les y place dès leur première Jeunesse, et on les y laisse (pendant le temps où les plantes sont rentrées ) jusqu’à ce qu’elles aient pris assez de force, que leurs tiges soient devenues assez ligneuses pour pouvoir sans inconvénient se passer d’une grande somme de Jumière; car cette serre n’a pas d'autre but que de Îles faire jouir de son influence au plus haut degré. De chaque côté, contre des murs, sont des encaisse- mens en planches pour contenir des couches sans cha- Jeur, consistant en fumier à demi consommé, recouvert de sept ou huit pouces de terre de bruyère. Ces couches s'élèvent à deux pieds et demi, ce qui laisse dix-huit pouces de mur entre elles et le point le plus bas des pannezux , distance suflisante pour le développement du duillage des jeunes plantes. On peut, si on le veut, y enterrer les pots, ce qui maintient une humidité favo- rable autour des racines des végétaux qu'ils contiennent ; ou bien, ce qui vaut mieux, quand on met beaucoup de soins dans les arrosemens, on étend sur la couche un lit d’un demi-pouce de gros sable , et on place les pots DES JARDINS. 251 dessus sans les y enfoncer. Ce sable empêche la terre de se mastiquer au trou du fond du pot et de le bou- cher ; accident qui arrive souvent quand on n'a pas cette précaution, et alors l’eau des arrosemens, ne trou- vant plus d’issue, s’amasse au fond , s’y croupit, et noie ou pourrit les racines des plantes. On ne s’en aperçoit qu'au moment où le feuillage jaunit et tombe, et déjà il n’est plus temps d'y porter remède: la plante périt, malgré toutes les tardives précautions que l’on peut prendre. La serre chinoise n’exige pas plus de chaleur que le jardin d'hiver et moins encore , car on ne cherche pas à faire fleurir les plantes , et tous les soins consistent au contraire à empêcher la végétation pendant l'hiver. On se bornera donc à maintenir le thermomètre à deux ou trois degrés au-dessus de zéro. Si la serre est enterrée, on peut s'abstenir d’y cons- iruire un fourneau ; dans ce cas on oppose des poëles roulans aux efforts de la gelée. Mais, s’il en est autre- ment, on y en établit un , dont on fait passer le tuyau sous le sentier , et avec l'extrême précaution ( ce qui se doit dans toutes les circonstances ) de l’isoler des plan- ches et des fumiers des couches, au moyen de briques qui le maintiennent dans une disposition solide ; sans cela on courrait la chance de mettre le feu. Du reste les plantes se soignent de la même manière que celles d'orangerie. $ IV. De lOrangerie. C'est assez ordinairement dans la construction de ce genre de serre que la richesse du propriétaire d’un jar- din aime à se montrer. La raison en est qu’une orangerie se prête avec facilité à toutes les formes qu’on veut lui donner , et permet à l'architecte d'employer les règles sévères de proportion que son art exige. Aussi cette 252 DES JARDINS. construction appartient-elle, pour ainsi dire, plus à l'architecture qu’au jardinage , et c’est pour cette raison que nous ne traiterons ici que des conditions essentielles pour l'entretien et la santé des plantes , laissant à l’ar- chitecte le soin de lui donner l'élégance et le genre de beauté qui appartiennent à l’art. Une orangerie (pl. 7, fig. 2 ) doit être assez spacieuse pour que tous les végétaux qu’elle renferme aient de l'air et de la lumière, pour qu'on ne soit pas obligé de les y entasser les uns sur les autres de facon à les étouffer. Sa hauteur doit être calculée de manière à ce que les plus grands végétaux destinés à y passer l'hiver n’en at- teignent pas le plafond ; entre celui-ci et le sommet des plus hautes branches, il faut qu'il y ait au moins trois ou quatre pieds d'intervalle, et que l’air puisse cireuler librement. Une des qualités essentielles, qu’elle doit avoir est d'être parfaitement sèche. Aussi la construira-1-0on sur un terrain très-sain ; et, pour plus grande précaution , on fera très-bien de l’exhausser de quelques pouces au dessus du niveau du sol. Mais alors on arrangera son en- trée en pente douce pour éviter d'y mettre une marche d'escalier , ce qui nuirait beaucoup à la facilité du trans- port des grosses caisses d’orangers. Pour peu que le ter- rain fût humide, on y construirait plusieurs petits ca- naux que l’on remplirait de pierrailles, et que l’on ferait. aboutir, par une pente assez raide , à des puisards , ou dans un endroit où les eaux trouveraient un facile écou- lement. Nous n'avons pas besoin de dire que sous aucun prétexte elle ne doit être enterrée comme beaucoup d'autres serres. Il faut qu’elle soit close de manière à ce que jamais le froid ne puisse y pénétrer ; et cette raison fait que sou- vent on la voûte en maconnerie, ce qui est excellent sans être indispensable. On peut se contenter d'un pla- fond en planche , sur lequel on jette une bonne épais- DES JARDINS. 283 seur de feuilles sèches, et l’on s’en dispense même si l’on fait un toit épais et en chaume ; dans ce cas quelques lattes et un peu de plâtre sont suflisans pour établir le plafond. Il est nécessaire que les fenêtres soient extrêmement grandes, de toute la hauteur de la serre s’il est possible. Plus elles auront de jour, plus elles seront adaptées à une bonne culture. L'architecte, en déterminant leurs proportions, se pénétrera de l’idée que, s’il pouvait vi- irer la plus grande partie de la facade , l’orangerie n’en serait que meilleure. Cette façade sera tournée au midi ; néanmoins l'exposition du levant et même à la rigueur celle du couchant peuvent suflire. Dans les contrées placées au-dessus du cinquantième degré de latitude, un fourneau est indispensable dans une orangerie ; alors on fait passer le tuyau dans les murs, de la même manière que nous l'avons dit pour le jardin d'hiver et que nous Pavons figuré (pl. 9, fig. 3 et A); mais nous ne conseillerons pas de faire d’un poële un objet d'ornement, comme on n’en voit que trop dans la plupart des serres. Les végétaux doivent toujours jouer le premier rôle dans une scène semblable : si vous y pla- cez des objets capables d’en détourner l'attention , votre maladresse détruit tout le piquant d’une scène dont le sujet principal est éclipsé. Notre avis est au contraire qu'on doit masquer le moyen artificiel par lequel on maintient, dans toute sa beauté , une verdure d’autant plus agréable que sa gaîté contraste davantage avec la tistesse de la saison. Dans les climats où l’on peut se passer de fourneau, on doit, en cas de froids extraor- dinaires, employer les poëles roulans. Plus encore pour l’orangerie que pour les serres pré- cédentes, on se donnera de garde d’élever la chaleur. S'il était possible de toujours maintenir le thermomètre à 2 degrés au - dessus de zéro , les arbres ne s’en porte- raiént que mieux; mais , dans tous les cas, on veillera 254 DES JARDINS. scrupuleusement à ce qu'il ne monte jamais au-dessus de 4 à 5 degrés, surtout quand les arbres auront encore quelque temps à rester renfermés. Nous persons qu’une négligence qui laisserait le froid pénétrer dans l’orangerie au point de faire baisser le thermomètre à » ou 3 degrés au-dessous de glace, serait moins préjudiciable aux plan- tes qu'un excès de précaution qui le maintiendrait pen dant quelques jours seulement à 6 ou 8 degrés au-dessus; car alors la végétation se développerait infailliblement les gemmes s’allongeraient en bourgeons languissans qui énerveraient le végétal , se dessécheraient rapidement à l'air , et affaibliraient l’arbre pour plusieurs années. Un point rigoureux pour assurer la conservation des plantes dans l’orangerie , c’est de choisir avec discerne- ment le moment de les rentrer. Quelques auteurs ont fixé cette époque au 15 octobre, qui , en eflet , est assez ordinairement le moment favorable à la température de Paris, mais qui ne peut convenir tous les ans ni partout, Aussinousrecommanderonsau jardinier intelligent de ne point prendre pour guide tel quantième de tel mois , mais l’état de l'atmosphère et de la saison , deux choses qui varient constamment selon les lieux et les années. Si l’on attendait les premières gelées, il serait trop tard, pour deux raisons : la première , c’est que l’on courrait risque de se laisser surprendre et de voir les arbres at- teints avant qu'on ait pu les soustraire à leurs pernicieux effets ; la seconde , et peut-être la plus grave , c’est que l'on serait obligé de fermer la serre dès que les arbres y seraient placés :n’ayant point été accoutumés peu à peu, comme cela doit être , à la privation d'air, ils éprouve- raient une espèce de suflocation qui les fatiguerait con- sidérablement , les rendrait plus susceptibles de morsis: sure , et pourrait peut-être les exposer à périr. Le véritable moment de rentrer les arbres d’orangerie est indiqué par la cessation totale de la végétation dans ces mêmes arbres , et par la première chute des feuilles DES JARDINS. 259 des arbres de pleine terre , particulièrement des arbres fruitiers ; d’où 1l résulte que la rentrée aura lieu plus tôt où plus tard , selon que la saison aura été plus ou moins tardive. Cette règle recoit aussi son application dans tous les climats. Pour rentrer les plantes, on choisira un jour serein, sans brouillard ni aucune humidité , afin que les feuilles soient parfaitement sèches. Quant à la terre des caisses ou des pots, on aura pris quelques jours d'avance la pré- caution de modérer les arrosemens, pour qu’elle ne porte pas dans l'orangerie une humidité beaucoup plus perni- cieuse que le froid. Avant de rentrer les plantes, on les épluchera exactement , c'est-à-dire qu'on enlévera les branches mortes, les feuilles et les bourgeons malades ou moisis , les ordures qui pourront s'être amassées aux bifurcations des branches, etc. ; mais il faudra le moius possible couper sur le vif, parce que cette saison n'est favorable ni au dessèchement de Ja plaie, ni à sa eï- catrisation ; ajnsi on renverra au printemps toute opc- ration de taille. On binera la terre des pots avant de les rentrer, et même trois ou quatre fois pendant leur sé- jour dans la serre , pour favoriser l’évaporation de l’eau. L’arrangement des plantes dans la serre est encore une chose qui demande à être raisonnée, afin de mettre chacune d’elles à la place qui lui est le plus favorable. Les arbres qui se défeuillent ont moins besoin de lumière ; aussi les place-t-on dans le fond. Ceux à feuilles persis- tantes sont de plusieurs natures, que l’on peut réduire à trois classes. La première renfermera les arbres dont les feuilles sont d’une substance sèche et coriace et le bois dur et peu moelleux ; le myrte et l'oranger, par exemple : ils supporteront l'obscurité moins que les grenadiers et autres arbres nus, mais beaucoup mieux que les suivans ; aussi formeront-ils le second rang. La seconde classe renferme les arbres à feuilles molles, d’une substance aqueuse , et dont le bois est tendre et 256 DES JARDINS. moelleux : par exemple, le datura arborea. On placera ceux-ci sur le troisième rang , et devant eux on ména- gera un sentier pour favoriser la promenade des curieux, la circulation des jardiniers, et un courant d’air. La troisième classe comprend toutes les plantes dont les feuilles sont d’une nature très-délicate ou d’une sub- slance charnue, et dont les tiges sont herbacées et succu- lentes ; par exemple, la capucine à fleur double, quel- ques mesembrianthemum, les ficoïdes, etc. Celles-ci se placent au quatrième rang, c'est-à-dire, le plus près des verres qu'il est possible. Mais il ne suffit pas que chaque classe soit à son rang, il faut encore les mettre dans un certain ordre , ménagé pour que celles de devant n'interceptent ni l'air ni la lumière à celles qui sont derrière. Par conséquent , en comptant les rangs à commencer devant , les plantes les plus basses seront les premières , celles un peu plus hautes viendront après , les moyennes seront sur un troisième rang, les grandes sur un quatrième , les très- grandes sur un cinquième ; viendront ensuite les arbus- tes et les arbrisseaux aussi par rangs de taille , et enfin les arbres rangés selon le même principe. Si la hauteur des plantes ne se trouvait pas en har- monie avec les rangs des classes, on y remédierait en élevant sur des gradins celles qui se trouveraient trop basses. Enfin, lorsque toutes sont en place, elles doi- -vent ne laisser apercevoir qu'un amphithéâtre de ver- dure parfaitement aligné, et dont la surface régulière s'élève uniformément et en pente également inclinée sur toute la longueur, formant avec l'horizon un angle plus ou moins aigu depuis le devant de la serre jusqu'au fond. Par ce moyen la tête d’un premier arbre cache le tronc du second, celle du second la tige du troisième , et ainsi de suite ; de manière que toutes les têtes Jouis- sent, par-dessus les unes des autres, des influences de l'air et de la lumière. DES JARDINS. 207 Ce n’est que peu à peu que l’on prive les plantes d’air, pour les raisons mentionnées plus haut. On laisse d’a- bord l’orangerie entièrement ouverte le jour et la nuit, jusqu'à ce que lon ait à redouter les gelées. Alors on commence à la fermer pendant la nuit, puis enfin pen- dant le jour, lorsqu'il gèle. Mais, toutes les fois que le thermomètre exposé à l'air libre marque un ou deux degrés au - dessus de glace, on s’'empresse d'ouvrir, ex- cepté cependant quand l'atmosphère est chargée d’hu- midité, ou quand les vents sont trop violens. Il est de principe de diminuer de beaucoup les ar- rosemens l'hiver dans toutes les serres; mais c’est sur- tout dans celles qu’on appelle froides, c’est-à-dire, dans celles où l’on ne fait pas monter le thermomètre à plus de 3 ou 4 degrés, que cette règle doit s’observer à Ja ri- gueur. Dans l’orangerie, ainsi que dans la serre chinoise, les bâches, etc., on ne doit arroser la terre que pour empécher les plantes de se dessécher, et rien de plus. C’est ici que cette routine malheureuse, qui fait arroser à des époques périodiques et régulières, peut devenir funeste à beaucoup de végétaux. Il n’est pas un jardinier qui ne sache parfaitement que toutes les plantes n’ai- ment pas également l’eau, que toutes les terres, soit à cause de leur composition, soit à cause de Ja grandeur des vases, ne se dessèchent pas dans le même espace de temps ; et cependant beaucoup ont cette fatale habitude de tout arroser dans de certains jours déterminés à l’a- vance pour tout un hiver, et de donner la même quan- tité d’eau à toutes les plantes. Nous ne saurions trop insister sur ce point : on n’ar- rosera chaque plante que lorsqu'elle en aura besoin, et on ne lui donnera que la quantité d’eau absolument nécessaire à son entretien. On se servira pour cela d’un arrosoir à très-long goulot, afin de porter l’eau jusque sur la terre du pot le plus éloigné derrière les rangs, sans courir la chance de mouiller, ni ses feuilles, ni celles 1. 17 258 DES JARDINS. des plantes voisines. On prendra garde à ne pas faire épancher l’eau par-dessus les bords du vase, afin de maintenir toujours le plancher très-sec ; enfin l’eau que l'on emploiera pour les arrosemens d'hiver ne sera Jja- mais mélangée, et aura séjourné pendant quelques jours dans un tonneau placé dans un coin de Ja serre. Tous les jours on visitera les plantes, et on épluchera les parties moisies ou pourries. Si l’on s’apercevait qu'une plante dépérit sans que la cause en fütapparente, on l’enlèverait, on la sortirait de son pot, et l'on trou- verait certainement le principe du mal en visitant ses racines. Alors on la transporterait dans une bâche ou sous un châssis, et on la traiterait en raison de sa ma- ladie, comme nous le dirons à l’article Maladie des plantes. Si le moment pour rentrer les plantes dans la serre est difficile à choisir, celui de les en sortir ne l’est pas moins. Îl faut attendre que la végétation commence à montrer de la vigueur dans les arbres à Pair libre, et que leurs jeunes bourgeons développent les premières feuilles, ce qui répond au commencement du mois de mai pour la température de Paris. Il vaut beaucoup mieux cependant garder les plantes en orangerie quel- ques jours de plus, que de les exposer à être saisies par une gelée tardive du printemps. C’est en sortant de la serre que les plantes sont ex- trêmement sensibles aux influences atmosphériques ; aussi faut-il user de tous les moyens pour les y accoutu- mer peu à peu. Pour cela, on commence à leur donner long-temps d'avance dans l’orangerie le plus d'air qu'il est possible, puis on attend un jour sombre et pluvieux pour les y exposer tout-à-fait en les sortant. Dans cette circonstance , si elles sont frappées par les rayons du s0- leil, il est rare qu’elles aient la force de leur résister, et elles sont brülées dans un instant au point d’en périr. S'il arrivait donc que le ciel se découvrit, et que , loin DES JARDINS. 259 d’avoir du brouillard ou de la pluie, on eût à craindre le soleil, il faudrait nécessairement les en garantir, soit en les déposant dans un lieu ombragé, soit en les couvrant avec des toiles. Après quelques jours de plein air elles sont ordinairement hors de danger , à moins que le soleil n'ait une chaleur très-vive. $ V. De la Serre à géraniums. Un assez grand nombre de plantes , quoique n'aimant pas la chaleur, sont cependant trop délicates pour passer facilement l'hiver dans une orangerie, surtout quand celle-ci est peu sèche et peu éclairée. Beaucoup de géra- niums sont particulièrement dans ce cas. Nous avons fait faire pour ces végétaux une serre appropriée à leur na- ture, et nous l'avons figurée p/. 9, fig. 2. Le mur du fond, élevé de sept pieds, recoit un gra- din sur lequel sont placés sept rangs de pots. Le devant est formé par un mur de trois pieds, garni d’un seul rayon en planche et sable, sur lequel on dépose les jeu- nes plantes qui demandent à être plus rapprochées des verres. Les panneaux sont inclinés à l’angle de 35 de- grés, afin d’être le plus possible rapprochés du feuillage des plantes. Nous tenons cette serre à la même tempé- rature que la serre chinoise, et nous mettons autant de . précautions à la garantir de l humidité que de la gelée. Quelques amateurs s’élonneront peut-être quand ils verront qu’ une serre, entièrement consacrée à la culture desgéraniums, est sans couches chaudes et sans fourneau, car la nôtre n’en a pas. Pour peu qu'ils aient visité les établissemens des marchands qui portent les produits de jeur industrie au marché aux fleurs, ils nous demande- ront compte de ce qu'ils regarderont d’abord comme une singularité dans nos cultures. Voici ce que nous leur répondrons : la chaleur agit sur quelques végétaux , et particulièrement sur les géraniums, d’une manière toute 260 DES JARDINS. particulière ; au lieu de développer également la végé- tation dans toutes les parties de la plante, elle dirige les efforts de la nature sur les organes de la génération, et cela par la raison que la plante est, si ce n'est dans un état de souffrance, au moins dans celui de contrainte ; d’où il suit qu’elle fait un eflort pour fractifier. Nous donnons les développemens de ce principe dans notre second volume, page 16. Or les cultivateurs qui veu- lent obtenir des corolles dans des dimensions fort grandes, pour satisfaire les amateurs de bouquets, font irès-bien de cultiver ces plantes en serre chaude, et de sacrifier au goût de ces amateurs et la santé de leurs plantes eL leurs caractères botaniques : d’aitleurs cela donne lieu à de nouvelles sous-variétés, éphémères à la vérité, mais qui n'en ont pas moins le mérite d’être fort belles tant qu’on les cultive dans la serre chaude, quot- qu’elles disparaissent aussitôt que l’on rend à la plante sa véritable culture , c’est-à-dire , celle de l’orangerie. Comme nous l'avons dit, nous n'avons pas de fourneau dans notre serre à géraniums, et lorsque les gelées sont très-rigoureuses, nous nous contentons de couvrir les panneaux avec une bonne couche de litière et de feuilles sèches, sur laquelle nous jetons quelques paillassons ; au moyen d’un poële roulant nous empêchons le froid d'y pénétrer. Du reste, les plantes que l’on y met n’exigent aucun autre soin que ceux de l’orangerie. On les rentre et on les met dehors À la même époque que les autres. Les ar- rosemens se font avec l’arrosoir à long goulot pour les trois premiers rangs de pots qui sont à la portée de l'homme qui arrose ; pour les quatre rangs plus hauts, on se sert de la seringue, au bout de laquelle est ajusté un tuyau assez long pour porter l’eau jusque sur le pot le plus élevé. DES SARBDINS, 261 $ VI. De la Bäche. Cette espèce de serre , que nous avons figurée, pl. 9, Jig. 1, est indispensable si l’on veut cultiver les bruyè- res, les ixias, un grand nombre de liliacées délicates, et éénépAlément toutes les plantes qui craignent égales rs chaleur et le froid. La bâche est une espèce de châssis, avec cette diflé- rence qu'on y a pratiqué un sentier, et qu'on y pénètre par une porte comme dans ane serre. La culture en bâche se fait de deux manières, en pleine terre de bruyère ou en pot; mais dans l’un et l’autre cas sur couche froide, c’est-à-dire, faite avec de la terre de bruyère pure, ou seulement mélangée avec très-peu de terre franche, ou de terreau très-consommé. Cette couche se fait dans un encaissement , soutenu par unléger mur debriques, ou simplement par desplanches. Le mur de derrière de la bâche et celui de devant doi- vent être élevés de manière à ce que le panneau vitré, incliné de dix à quinze degrés, soit le plus près possi- ble du feuillage des plantes, afin de conserver à la lu- mière toutes ses influences. Les bâches ne se chauflent jamais ; aussi, pour empé- cher la gelée d'y pénétrer, on est dans l’usage de les enterrer jusqu à la hauteur des panneaux. On profite au- tant que les circonstances le permettent d’une pente de terrain , pour que le mur de derrière se trouve enterré comme celui de devant, c’est-à-dire, jusqu'aux pan- neaux , Comme nous l'avons figuré, pl. 9, fig. 1, en A et B. Les serres enterrées ont cet avantage sur les autres, que la température en est beaucoup moins variable ; mais par compensation, si elles ne sont pas dans un ter- rain sablonneux et très-sain, 1l est fort difhcile d'en écarter lhumidité. 262 DES JARDINS. La longueur d'une bâche est tout-à-fait indifférente, mais il n’en est pas de même de sa largeur. Comme la couche est assez élevée pour qu'un homme puisse aisé- ment passer dans le sentier sans heurter avec la tête les traverses des panneaux , il en résulte qu’il ne pent guère cultiver qu’à la distance de quatre ou cinq pieds, et qu’une couche plus large deviendrait incommode. Qu'on ajoute deux pieds pour le chemin, et l’on trouvera que la plus grande largeur d’une bâche bien construite ne doit pas excéder sept pieds. Pendant les gelées, pour défendre les plantes de la rigueur du froid, on couvre les panneaux d’un pied d’é- paisseur de litière ou de feuilles sèches, et même de dix-huit pouces si on le juge nécessaire. On étend des- sus des paillassons, afin d'empêcher les eaux de pluie de pénétrer cette couverture. Sans autres précautions le thermomètre se maintient assez régulièrement à 2 ou 3 degrés au-dessus de zéro. Quelquefois on destine une bâche à la multiplication par marcottes des plantes d’orangerie , telles que les ca- mellia, pivoine , etc. : dans ce cas on est forcé d'élever davantage les deux murs , ou de faire la couche moins épaisse, afin que les vieilles plantes que lon y dispose pour être marcottées y trouvent une place suflisante. (Voyez pl. 9, fig. 1.) On peut alors donner un peu moins d’inclinaison aux panneaux, et leur faire former avec l'horizon un angle de 30 degrés. $ VIE. De la Galerie d'hiver. Ce genre de serre fait le passage entre la bâche et fa serre tempérée. Comme elle est destinée à recevoir les jeunes élèves des plus grands végétaux d’orangerie, et qu'on les y laisse pendant un certain nombre d'années, elle doit être construite dans de plus grandes dimen- sions. Nous avons figuré, p{.8, fig. 2, une de celles de DES JARDINS. 263 notre établissement, et nous allons en donner les pro- portions. Le mur de derrière a six pieds d'élévation ; il supporte un toit incliné au nord, formé, par une légère charpente, recouverte par un toit épais en chaume ; Ja parie intérieure de cette charpente est plafonnée en lattes et en plâtre. Ce toit est soutenu devant par les traverses des panneaux et par de petites colonnes en bois, de quatre pouces de diamètre, qui viennent s’ap- puyer à l'intérieur sur le bord interne de la couche de terre de bruyère ; elles ont six pieds dix pouces de hauteur, ce qui, ajouté à lépaisseur de la couche, donne à la serre neuf pieds dix pouces dans sa plus grande hauteur. Le mur de devant est élevé de quatre pieds et demi, et les panneaux forment avec l'horizon un angle de 50 degrés. Le long du fond de la serre règne un gradin, ou plu- tôt un banc en terre sablonneuse, de dix-huit pouces de hauteur sur quatre pieds huit pouces de largeur. La terre dont il est formé est soutenu par un petit mur en brique comme la couche de devant ; on a répandu des- sus un demi -pouce de gros sable pour faciliter par les trous des pots l'écoulement des eaux d’arrosement. Les plantes s’y arrangent dans le même ordre que nous l'avons dit pour l'orangerie, c’est-à-dire, les plus délicates et les plus basses sur le devant, celles qui le sont moins sur un second rang , et ainsi de suite. Si les plantes n'avaient pas des dimensions favorables, et qu’on ne puisse les étager de manière à les faire jouir toutes des influences de la lumière, on les placerait sur un gradin en planches élevé en conséquence. Sur le devant de la serre est une couche de terre de bruyère, large de quatre pieds et demi, et haute de trois, dans laquelle on plante à demeure les végétaux que l’on veut marcotter ou grefler par approche. Les plantes destinées à cette serre étant un peu plus délicates que celles d'orangerie, on est obligé d'y éta- 264 DES JARDINS. blir un fourneau, dans lequel on ne fait du feu que pendant les grands froids. La chaleur peut s'y élever jusqu’à 5 ou 6 degrés, mais jamais davantage. $ VIII. De La Serre tempérée. Nous avons fait figurer une des nôtres , pl. 10, fig. 1. Ce genre de serre ne diflère des autres serres chaudes que par la température qu’on y entretient constamment au moyen des fourneaux, des couches et des traverses. En hiver le thermomètre doit y marquerÿ degrés pen- dant la nuit, et 10 pendant le jour. Un homme, chaque nuit, veille à_ce que la chaleur se maintienne toujours réglée ainsi; pour peu qu’elle baisse, il la fait monter en mettant du bois dans le fourneau : si, au contraire, elle monte plus haut que nous avons dit, il se hâte de re- tirer le bois, et d’étoufler la braise en fermant la petite porte du fourneau. Lorsqu'une serre tempérée est con- fiée à un homme vigilant, il y a peu de dangers à redouter; mais il doit bien se pénétrer que si, par une*négligence impardonnable, il n'avait pas soin de son feu pendant une partie de la nuit seulement, il pourrait le lendemain matin avoir perdu la plus grande partie de ses plantes. Dans nos établissemens, où nous sommes obligés d'employerun grand nombre d'ouvriers, chacun d'eux veille une nuit à tour de rôle; et les soins de nosserres, se trouvant ainsi partagés entre une quinzaine de jardi- niers, sont beaucoup moins pénibles. Nous concevons parfaitement qu'il n’en est pas de même dans un jardin bourgeois qui n'occupe que deux ou trois personnes : aussi nous ne donnerons pas le conseil impraticable de faire passer toutes les nuits à deux hommes, pendant trois ou quatre mois que peuvent durer les gelées ; mais nous regardons comme indispensable de les faire lever au moins deux fois pendant la nuit pour aller visiter les fourneaux : ils les verront en se couchant, à minuit, DES JARDINS. 265 et à quatre heures du matin. Avec un peu d'habitude, ils viendront facilement à bout de gouverner leur feu de manière à maintenir la chaleur au degré déterminé sans y toucher pendant trois ou quatre heures. Tout individu qui répugnerait à s'imposer rigoureusement cette tâche, doit renoncer à gouverner une serre tem- pérée ou chaude. Comme les plantes de ces sortes de serres sont tou- jours en végétation, la lumière leur est indispensable en tout temps; aussi ne couvre-t-on jamais les panneaux avec de la litière, mais seulement avec des paillassons que l’on déroule pendant la nuit et qu’on roule pendant le jour, pour donner de la [lumière quand le froid n’est pas excessif. Mais, avant d'entrer dans des détails relatifs à la manière de gouverner les plantes, nous allons don- ner les dimensions que l'expérience nous a montrées les plus favorables dans la construction d’une serre tempérée. On donne au mur de derrière onze pieds d’élévation, et trois à celui de devant; la serre ayant huit pieds et demi de largeur, cela donne aux panneaux 45 degrés d’inclinaison. Si l’on augmentait la largeur de la serre, il faudrait aussi augmenter l'élévation du mur de der- rière, afin de retrouver la même inclinaison qui nous à paru la meilleure. On pratique sur le devant, comme sur le dernière, un encaissement en planches, de trois pieds de hauteur et autant de largeur, ce qui laisse entre deux un sentier suflisamment large pour pouvoir aisément culti- ver. Tousles ans, dans le commencement d'octobre, on établit dans les encaissemens une couche chaude de bon fumier de cheval mélangé à un tiers de feuilles sèches, et on la recouvre de huit pouces à un pied de tan neuf, et davantage s'il est nécessaire, dans lequel on enfonce les pots lorsque la plus grande chaleur du fumier est passée, et avec la précaution de toujours meltre la couche de tan assez épaisse pour que le 266 DES JARDINS. fond des pots ne touche pas au fumier. Si la couche se refroidit pendant l'hiver, il ne s’agit que de la remuer entièrement pour Jui faire acquérir une nouvelle cha- leur, et de Ja traiter comme nous l'avons dit à l’article des Couches chaudes, voyez page 207. Au mois de mars on la refait entièrement avec du fumier neuf et du nouveau tan mêlé moitié par moitié avec l’ancien. Les plantes s’arrangent sur ces couches de la même manière que nous l’avons dit pour l’orangerie, les plus basses et les plus délicates devant, et ainsi de suite, et l'on enfonce leurs pots dans la tannée jusqu’à un demi pouce au plus de leur bord. L'eau des arrosemens doit avoir séjourné au moins cinq ou six jours dans la serre avant d’être employée ; et, en la donnant aux plantes, on aura le plus grand soin de n’en point épancher sur la couche, de crainte de la refroidir ; pour cela on seservira de l’arrosoir à long goulot et de la seringue. L'hiver on ne donnera de l'air que lorsque le soleil brillera de tout son éclat, et lorsque le thermomètre montera au-dessus de glace à l'air hbre. Enfin on éplu- chera soigneusement les plantes pour ne leur laisser au- cunes parties moisies où pourries, car sans cela le mal s'étendrait rapidement, et même deviendrait contagieux pour les plantes qui se trouveraient en contact avec celles infectées. Les plantes de serres tempérées et chaudes étant dans un état de végétation et de transpirations continuelles, sont très - susceptibles de coups d’air et de coups de soleil. On évite les premiers en refermant la porte du cabinet qui précède la serre, aussitôt qu'on est entré et avant d'ouvrir la seconde porte. Cette précaution est surtout indispensable quand il règne des vents secs et froids. Quant aux coups de soleil, ils ne commencent guère à être dangereux , au moins sous le climat de Pa- ris, que dans le mois de mars ; depuis la fin d'avril jus- qu'au commencement de juillet, ils le sont peu ; mais, DES JARDINS. 267 lorsque les chaleurs sont très-grandes pendant ce mois et celui d'août, ils le redeviennent. Quand une plante à recu un Coup de soleil, ses feuilles rougissent d'abord ; puis elles sèchent, ainsi que les jeunes tiges, et dit le végétal périt en deux ou trois jours. On évite cet ac- cident en étendant des toiles ou des paillassons sur les vitraux, toutes les fois que les rayons du soleil devien- nent trop piquans. Ce n’est que lorsque la température à Pair libre se tient assez constamment à 14 ou 15 degrés du thermo- mètre, que l’on peut sans danger donner beaucoup d'air aux plantes, en soulevant entièrement les panneaux, mais avec la précaution de ne jamais les enlever ; car il est toujours prudent de les baisser le soir pour abriter les végétaux des pluies et des brouillards qui peuvent survenir pendant Ja nuit. Les plantes, ne sortant jamais de la serre , se trou- vent privées des influences atmosphériques si utiles à la végétation : il faut employer l’artifice pour les en faire jouir. On profite d’un tempssec et chaud , pendant lequel les panneaux sont ouverts, pour arroser leur feuillage au moyen d’une pluie artificielle. Pour cela on se sert de la seringue, au bout de laquelle on ajuste une pomme d’arrosoir criblée de très-petits trous. Cette opération se répète plusieurs fois pendant les grandes chaleurs, mais avec l'extrême précaution de ne jamais onglet les plantes grasses et celles dont les feuilles en faisceau ter- minal pourraient retenir l’eau dans le milieu de la roseite qu'elles forment. Les végétaux couverts d’une pous- sière glauque , et ceux revêtus d’une épaisse fourrure laineuse ou soyeuse , doivent aussi être ménagés. En gé- néral les plantes auxquelles ces sortes de bains sont le plus salutaires, sont celles dont le feuillage est d’un vert gai, lisse et brillant. Dans tous les cas on choisira son moment pour faire cette opération , de manière à ce que les feuilles soient parfaitement essuyées, le soir, lorsque 268 DES SARDINS. l'on baissera les panneaux. Quand l'air est sec, chaud et tendu, dans une serre chaude, il faut non-seulement arroser le feuillage des plantes, mais encore répandre de l'eau dans les chemins intérieurs, et même sur le terrain devant la serre , pour rendre à l'atmosphère l'humidité nécessaire à la respiration et à l'entretien des végétaux. Il est encore une précaution à prendre, qui est indis- pensable pour les plantes de serres chaude et tempé- rée, et fort utile à celles des orangerie, bâche, etc. Elle consiste à profiter d'un jour sec et chaud pour les sortir de la serre, et laver leur feuillage. On emploie pour cela &e l’eau tiédie au soleil, des chiffons, une éponge et une brosse très-douce. On visite toutes les feuilles les unes après les autres : on écrase avec un pe- ut morceau de bois aplati les insectes qui y sont aita- chés, puis avec le chiflon ou l'éponge, selon qu'on a plus de facilité, on lave les deux surfaces de la feuille, et on enlève toute la poussière et la crasse qui s’y sont amassées. Avec la brosse mouillée on frotte légèrement les tiges dont l'écorce est peu unie, et on les nettoie par- faitement. IL faut observer que tous les végétaux dont les feuilles sont munies à leurs surfaces de pores, sous forme de poils ou autres aspérités, ne doivent éprouver aucun frottement, car la moindre lésion, une simple compression même sur ces organes délicats, altère le feuillage à l'instant , et nuit àla végétation. Lorsqu'une plante a été ainsi lavée, on la met sécher à l'ombre pendant quelques heures ; puis, lorsqu'elle n’a plus au- cune humidité, on la reporte dans la serre. Les autres soins à donner aux végétaux appartenant aux cultures particulières, nous n’en traiterons pas ici. Quand on veut donner à la serre tempérée une largeur qui excéderait Ja longueur ordinaire d’un panneau, on est obligé d’en mettre deux rangs l’un au-dessus de l’au- tre, comme nous l'avons figuré, pl. 10, Jig. 1 , en À et B, On les fait porter par la même traverse entallée, en DES JARDINS. 269 ce, de manière à ce que le panneau À rec ouvre de fus ou trois pouces le panneau B. Mais de là résulte la difficulté de l'ouvrir, parce qu’on ne peut l’atteindre. On ajusie alors une bascule contre la traverse, et on l'y fixe au moyen d’une vis comme en e; la tête de la bas- cule appuie sur le cadre du panneau; et, lorsqu'on tire ja corde J; l'extrémité de la bascule baisse, et sa tête en se levant soulève le panneau , comme nous l'avons figuré par des points. Ce moyen, aussi simple que d’une exécution facile, s'emploie dans toutes les circonstances pareilles. Ce panneau supérieur sert de ventilateur pour renouveler l'air toutes les fois qu'il en est besoin ; aussi fera-t-on bien d'en établir dans toutes les serres chaudes et tempérées, quand même ils devraient être fort étroits et n'avoir pas d'autre utilité. La dalle plate qui couronne les murs de derrière de [a plupart des serres que nous avons figurces, sert à fournir un sentier sur toute la longueur du mur, pour donner la facilité de couvrir les vitraux avec les paillassons. Du reste, on peut encore donner à la serre tempérée les mêmes for- mes et proportions que celles ci nous avons figurées, pluosis. 25 et plans fige $ IX. De la Serre chaude. On l'établit de différentes manières. Quelquefois on la construit absolument comme la serre tempérée, pl. 10, Jig. 1; mais on élève davantage le mur de derrière, afin de donner aux panneaux une inclinaison de 55 degrés ; telle est la serre dans laquelle nous cultivons les végé- taux de la zone torride. Mais plus souvent, afin de ga- gner de la largeur sans être obligé de beaucoup élever le mur du fond et de poser plusieurs rangs de panneaux, on les construit sur les modèles que nous en donnons, pan tes, ein reset Dans la Rene un mur de sept pieds et demi sup- 270 DES JARDINS. porte une toiture plafonnée à l’intérieur en lattes et en plâtre. L'autre extrémité de ce toit incliné n’est portée que par les traverses des panneaux ; mais néanmoins cette construction est solide, parce qu’on a donné aux traverses une épaisseur suflisante, et qu'elles ne sont inclinées qu’à l'angle de 60 degrés. Nous remarquerons ici que l'ouverture de cet angle est la plus grande que l’on puisse donner utilement aux vitraux d’une serre ; passé ce nombre de degrés, il devient indifférent de mettre les panneaux dans une position inclinée, ou tout- à-fait perpendiculaire. Sur lé devant de la serre, dont le mur est élevé de quatre pieds, est un rayon large de près de trois pieds, couvert d'un demi-pouce de gros sable, sur lequel on dépose les plantes basses , et qui ont besoin d’être près des jours. Le long du fond de la serre est un encaissement de trois pieds de hauteur, dans lequel est une couche chaude avec tannée, pour recevoir les plantes. Si l’on possédait des individus d’une très-grande taille, on ferait construire une serre de la même manière, mais que l’on exhausserait beaucoup au moyen d’un rang; ou même, s’il était nécessaire , de deux rangs de panneaux perpendiculaires. (pl. 11, fig. 1.) La seule différence qui existe entre la serre tempérée et la serre chaude, c’est que cette dernière exige beau- coup plus de chaleur. Le thermomètre doit constam- ment être à ro degrés au-dessus de glace pendant la nuit, et à 15 pendant le jour. Qu'un jardinier mal adroit n'aille pas Eau qu’en tenant les serres tempérée et chaude au même degré de température la nuit et le jour , il n'aura plus de dangers à redouter. Ce passage alternatif et journalier de 5 à ro degrés ou de ro à 15, ce changement périodique de température est aussi né- cessaire à l’entretien de la vie des plantes, que l'eau et l'air sont nécessaires à leur nourriture, et la lumière à leur coloration. Si une plante était constamment chauf- DES JARDINS. 271 fée au même degré, elle végéterait d'abord avec une vigueurextraordinaire ; mais bientôt ses fibres perdraient leur élasticité, ses vaisseaux s'engorgeraient, et elle ne tarderait pas à mourir. Nous développerons davantage ce principe de physiologie, dont la connaissance est 1- dispensable à tout cultivateur, dans la seconde partie de ce volume. Quant à la conduite de la serre chaude et aux soins à donnet aux végétaux qu'on y cultive, ils sont absolu- ment les mêmes que ceux que nous avons détaillés pour la serre tempérée. $ X. De la Serre à boutures. Celle-ci, figurée pl. 11, fig. 2, n'est utile qu'à la multiplication des plantes de serre chaude, ou à faire réussir des expériences de cultures, telles que la repro- duction des végétaux par leurs feuilles, leurs écailles, par greffes en rameaux sans yeux, elc., elc. ; toutes choses dont nous traiterons dans les plus grands détails et d’une manière absolument neuve, du moins nous le pensons , à l’article de la Multiplication des plantes , nous nous bornerons ici à faire la description de la serre et des appareils qu’elle doit renfermer. Dans un terrain léger et très-sec, on creusera une fosse de neuf pieds de largeur, sur quatre et demi de profondeur. On soutiendra ses parois par un mur solide, d’an pied d'épaisseur. Le mur de devant ne s'élèvera qu'à cinq ou six pouces de la surface du sol; il aura par conséquent quatre pieds et demi; celui de derrière s’é- 1èvera à deux pieds huit pouces au-dessus du niveau du sol , c’est-à-dire qu’il aura sept pieds deux pouces. Il ré- sultera de là que le panneau se trouvera incliné à l’an- ole de r8 degrés. Cette serre doit nécessairement être enterrée pour avoir un degré d'humidité nécessaire. Le long du mur de devant on établit un encaissement 272 DES JARDINS. de trois pieds de hauteur, de manière à ce qu'il n'y ait que deux pieds et demi, au plus, d'intervalle entre les verres et la superficie de la couche, dans l'endroit où clle s'en trouve le plus éloignée. On donne à cet en- caissement deux pieds et demi de largeur, et on y éta- biit une couche faite avec le fumier le plus chaud que l'on puisse se procurer, et recouverte de huit ou dix pouces de tan neuf. Contre le mur de derrière on fait un autre encaisse- ment de Ja même largeur, mais on lui donne trois pieds et demi de hauteur, afin de rapprocher davantage des vitraux la surface de la couche qu’on y établit de la même manière que l’autre. On creuse un escalier sou- terrain à une des extrémités de la serre, pour y péné- trer par une porte double et fermant hermétiquement. Si la serre est creusée dans un terrain humide, il.est nécessaire d'y construire un fourneau ; mais, dans le cas contraire, on peut s'en dispenser. Il ne s'agit plus ici de faire varier les degrés de chaleur le jour et la nuit, il faut au contraire la soutenir le plus également possible, et elle ne doit jamais être moindre de 20 degrés. Jamais on ne soulève les panneaux, car on a pour but d’étouffer les plantes. Tout doit être calculé : le degré de lumitre, celui de la chaleur , de humidité, la den- sité de l'air, de sa pesanteur ; aussi se pourvoira-t-on de toiles pour donner à volonté plus où moins d'obscurité , selon le besoin , en les étendant sur les vilraux ; on aura plusieurs thermomètres , des hygromètres , et un excel- lent baromètre pour s’en servir comme nous le dirons à l'arücle Boutures. On se munira de bocaux, de cloches dans les deux formes figurées, pl. 3, fig. 4 et 5 ,et d’en- tonnoirs ; on aura ces différens objets dans toutes les di- mensions ; les uns seront en verre très - blane et très- transparent, les autres en verre dépoli et par conséquent trouble. Comme les plantes de cette serre n’y sont déposées DES JARDINS. 273 que fort peu de temps, c’est-à-dire, jusqu’à la parfaite reprise des boutures et des grefles, ou jusqu’à ce que certaines graines soient développées, les soins à leur donner appartiennent entièrement à notre chapitre de la multiplication des plantes. Néanmoins nous ne fini- rons pas cet article sans recommander de ne jamais ex- poser à l’air un végétal sortant de cette serre. Non seu- lement il ne peut résister à l'air libre du dehors , mais pas même à celui de la serre chaude. Si c’est une plante de pleine terre, on la portera d’abord dans la serre tem- pérée, et on la recouvrira d’une cloche pendant quel- ques jours; en soulevant peu à peu celle-ci, on l’ac- coutumera lentement et insensiblement à l'air; puis, quelque temps après , on la transportera dans la serre chinoise, ou tout autre ayant beaucoup de lumière et une chaleur de 5 à 6 degrés , si c’est en hiver. On ne la ris- quera en pleine terre qu'au printemps suivant. Si c’est une plante de serre chaude ou tempérée, on l'y trans- portera de suite, mais avec la précaution de la placer pen- dant quelque temps dans un endroit peu éclairé, et‘de l'accoutumer peu à peu à Pair, au moyen d’un enton- noir ou d’une cloche, et comme nous l'avons dit. $ XI. De La Serre voñtée. Dans quelques pays le froid a une telle intensité, que les couches et les tannées ne conservent que très-peu de temps leurchaleur, quand elle n’est pas soutenue par des fourneaux; et les châssis, dans lesquels on ne peut en consiriure, deviennent à peu près inutiles pendant une parte de l'hiver, faute de pouvoir renouveler les cou- ches. On obvie à ce grave inconvénient par le moyen de la serre que nous avons figurée, pl. 12, fig. 1. Nous allons la décrire en en indiquant l'usage. Le mur de devans est élevé de six pieds , et celui de derrière de neuf; ce qui, sur six pieds de largeur que T, 18 bar £ 274 DES JARDINS. l’on donne à la serre, fournit aux panneaux une incli- naison de 20 degrés. On construit une voûte en briques, de quatre pieds et demi dans sa plus grande élévation, et on la cintre le moins possible, sans cependant nuire à sa solidité. Dans le dessus de la voûte on laisse des trous carrés, de quatre ou cinq pouces de diamètre, sur trois rangs, et à un pied de distance dans le sens de la longueur de la voûte ; ils servent de soupiraux pour laisser passer la chaleur, et doivent être garnis, à la partie supérieure de leur ouverture, d’un petit grillage en fer. La serre ainsi construite, on pénètre sous la voûte par deux petites portes laissées à ses deux extrémités, et on la remplit de fumier chaud , que l'on y tasse le plus qu'on peut. On étend sur la voûte un lit de trois ou quatre pouces de litière longue, servant à retenir une tannée de huit pouces d'épaisseur, et à distribuer éga- lement sous toute cette tannée la chaleur que la couche inférieure du fumier envoie par les soupiraux de la voûte. Toutes les fois qu'un thermomètre plongé dans la tannée indique que la chaleur commence à tomber, on pénètre sous la voûte pour en changer ou remanier le fumier, selon les principes que nous avons enseignés à l’article des couches chaudes, et lon n’a pas besoin de sortir les plantes de la tannée, n1 de la serre; ce qui dans aucun cas n’est possible lorsqu'il gèle. Les végétaux de cette serre se gouvernent du reste conime ceux des autres serres chaudes. Les personnes qui ne craindraient pas de faire la dépense d’une sembla- ble construction , seraient certaines d’une parfaite réus- site dans la culture de l’ananas, par la raison que, n'étant pas obligé de déranger les plantes pour refaire les cou- ches, il est beaucoup plus facile d'entretenir d’une ma- nière égale le haut degré de chaleur nécessaire à la cul- ture de ces végétaux. | DES JARDINS. 275 $ XII. De la Serre à vapeur. Nous avons figuré, pl. 1a, fig. 2, cette serre d'un usage habituel en Russie, et qui peut devenir fort utile dans les pays très-froids, où , comme nous l'avons dit pour la serre précédente, les couches de châssis ne con- servent pas leur chaleur pendant l'hiver. On la construit dans les mêmes dimensions que l’au- tre , et l’on donne aux panneaux le même degré d’incli- naison. On établit, dans le fond et sur toute la longueur, un bassin en plomb laminé , soutenu par une maconne- rie en briques ; il doit avoir de vingt à vingt-et-un pou- ces de profondeur, sur trois pieds ou un peu plus de largeur. Sur le derrière de la serre, en dehors, on bâtit de petites constructions souterraines, assez spacieuses pour contenir un fourneau sur lequel une chaudière est à de- meure. [1 faut qu'il y ait la place d’une provision de bois pour vingt-quatre heures au moins, et celle de l'homme chargé d'entretenir le feu. Si la serre était fort longue , il faudrait plusieurs fourneaux, et par consé- quent autant de ces constructions. Les chaudières doi- vent se trouver absolument sur le même niveau que le bassin de plomb, et de la même profondeur , afin que par des tuyaux en cuivre l’eau , par la simple loi de l'équilibre des fluides, puisse passer de l’un dans l'autre. Dans la serre, à cinq ou six pouces au-dessus du bas- sin, on établit une forte grille en fer, capable de sup- porter le poids d’une couche, et des pots qui y seront enfoncés. On recouvre cette grille avec une bonne épaisseur de litière ou mieux avec des planches irès- minces et criblées de petits trous, et l’on fait la couche chaude par-dessus à la manière ordinaire. Les tuyaux qui partent de la chaudière pour se rendre dans le bassin doivent être très-courts , c’est-à-dire qu’en pratiquant une niche dans le mur on rapproche la 276 ù DES JARDINS. chaudière le plus possible du bassin. Les tuyaux ne se termineront pas à leur entrée dans le bassin, mais ils se diviseront chacun en trois branches qui s’y promène- ront, comme nous l'avons figuré, l’espace de quelques pieds, et auront leurs trois ouvertures distancées non- seulement dans le sens de la largeur du bassin, mais aussi dans celui de sa longueur. On les soutiendra au moyen de verges de fer, comme nous l'avons figuré en a, a, a. Cet arrangement est indispensable pour répan- dre également partout la chaleur qu’ils sont chargés de communiquer à toute l’eau de la serre. On tient l’eau des chaudières dans un état continuel d'ébullition ; et, pour faciliter son mélange avec celle du bassin, de temps à autre on en tire une certaine quantité de celui-ci au moyen d’un robinet, et, en la versant dans la chaudière , on force celle qui y est bouillante à passer dans le bassin pour la remplacer. La chaudière étant couverte, la chaleur comprime la surface de l'eau et la force à passer dans la serre pour se renouveler par d’au- tre moins chaude qui prend sa place. Enfin il faut con- tinuellement entretenir le feu, pour que toute l’eau de la serre soit constamment au degré de température le plus près de l’eau bouillante. L'espace vide entre la grille en fer et le bassin se remplit d’une vapeur épaisse et très-chaude ; elle pénè- tre dans la couche, et la maintient toujours à un haut pôint de chaleur. I faut avoir le plus grand soin de ne. jamais laisser refroidir. le fumier, car l'humidité dont il estimprégné ne lui permettrait de se réchaufler qu'après un laps de temps considérable , suflisant pour que la gelée pénètre jusque sur les plantes. Le grand inconvé- nient de cette serre est l'humidité ; aussi doit-on lui donner de l'air toutes les fois que le temps le permet, et cesser de la chauffer à la vapeur quand une couche or- dinaire peut suffire. On concoit que dans ce cas il faut entièrement refaire les couches avec du fumier neuf. Du DES JARDINS. 297 reste, tout Ce que nous venons de rapporter sur cette serre nous a été transmis par un horticulteur de St.-Pé- tersbourg, et nous n’en avons pas fait l'expérience ; aussi ignorons-nous les avantages que l’on pourrait en retirer sous le climat de la France. S XIII. De la Resserre. On donne ce nom à une construction destinée à ser- rer les légumes pendant l'hiver , à conserver les fruits, et à mettre à l’abri des intempéries de l’airles graines, bulbes et ognons , et les instrumens tratoires toutes les fois qu’on ne s’en sert pas. Rarement on fait construire une resserre ; on emploie ordinairement à cet usage des bâtimens auxquels on fait les réparations nécessaires pour les rendre propres à cela. Dans le cas même où l’on en bâtirait une , sa dis- tribution entre dans les attributions de l'architecture ; aussi n’en donnerons-nous aucun plan, et nous nous bornerons à énumérer les conditions qu’elle doit avoir pour étre appropriée à ses divers usages. Si la maison du jardinier ne fait pas partie du corps de bâtiment formant la resserre , elle doit au moins en être le plus près possible , afin qu'il puisse employer les journées que le mauvais temps lui laisse libres pendant l'hiver , à mettre de l’ordre dans ses outils et ustensiles, à raccommoder ses cloches, à confectionner des paillas- sons , etc., sans être obligé à un grand dérangement. La resserre se compose : 1° d’une cave dans laquelle on conserve les plantes potagères craignant le froid et destinées à la consommation d'hiver, ou à être replan- tées au printemps. Elle doit être voûtée , sèche, et à l'abri de toute gelée, sans être trop chaude. 2° Une seconde cave, destinée aux couches à cham- pignons. Ÿ’oyez pour cet article le Jardin potager, tome 2, pag. 339. 278 DES JARDINS. 3° Un hangard pour déposer les instrumens de trans- ports, tels que civière, charriot d’orangerie, etc. , les claies, cribles, et enfin tous les objets qui ne risquent pas de se détériorer au grand air. C’est aussi là que lon fait le mélange des terres , les rempotages, etc. 4° Une pièce au rez-de-chaussée, dans laquelle on serre les outils qui ont des dangers à redouter , ou qui se détériorent à l'air ; les cloches, verrines, panneaux de châssis ; les arrosoirs, les outils en fer , bêche, bi- nette, etc. Il est bon d’avoir dans cette pièce quelques outils de menuisier, marteau , rabot, banc, scie, râpe à bois, limes , tenailles, etc., objets dont on a conti- nuellement besoin, soit pour raccommoder les caisses d’orangers, soit pour faire les caisses d'emballage, etc. 5° Dans une seconde pièce, au rez-de-chaussée, seront déposés les étiquettes , le plomb Jaminé pour en faire, tes marques, poinçons, lettres et numéros en acier ser- vant à imprimer sur le plomb, et les vignettes en cuivre pour écrire les adresses sur le bois, la toile ou le papier. C'est aussi [à que l’on déposera les vitres de réserve pour réparer les accidens qui peuvent arriver aux pan- neaux des châssis et des bâches, les mastics , cire à gref- fer, et généralement tous les petits objets qui peuvent facilément s’égarer , ou dont la conservation exige quel- ques soins. Le premier étage se composera de trois pièces : 1° une consacrée à la conservation des graines. Elle sera rayon- née en planches, de manière à former un très - grand nombre de cases. Les graines , renfermées dans des sacs de papier ayant chacun une étiquette annonçant l'espèce, et l’année dans laquelle elle a été recueillie, seront placées dans ces cases avec le plus grand ordre , afin de ue laisser aucune équivoque , aucun sujet d'erreur. Cette pièce doit être très-sèche , hermétiquement fermée , et à l'abri de toute gelée ; 2° une autre pièce sera consa- / 4 crée à la conservation des ognons de tulipes , jacinthes DES JARDINS, 279 et autres plantes bulbeuses qui se plantent à l'automne. On les y déposera sur des rayons disposés à cet eflet. Cette pièce doit être sèche et acrée. Elle doit avoir plu- sieurs fenêtres, afin de pouvoir y établir un courant d’air à volonté ; 3° une pièce servant à conserver les fruits, et ceci demande un peu plus de développement. Les fruits se conservent plus ou moins bien, selon diverses circonstances. Quand ils ont müri pendant une saison sèche, leur pulpe étant moins aqueuse renferme peu de principes de fermentation, et ils se conservent bien; mais il faut qu'ils aient été cueillis un peu avant leur parfaite maturité, et avec précaution, pour qu'ils n'aient éprouvé ni chocs, ni blessures ; 1l faut encore qu'ils soient parfaitement sains et non attaqués des vers. L'air est le principe qui hâte le plus la fermentation des fruits et leur décomposition ; par conséquent la frui- terie sera parfaitement close. Cependant elle aura des ouvertures, afin que l’on puisse changer l’air quelque- fois, parce que , lorsque les fruits l'ont respiré pendant quelque temps et se sont emparés d’un de ses élémens, les autres ont plus de tendance à former de nouvelles combinaisons, ce qui hâte la putréfaction. Il résulte de ceci qu'il faut donner le moins d'air possible, en le renouvelant néanmoins de temps à autre, mais alors on ouvre toutes les croisées et pendant fort peu de temps. On choisit pour cela un moment durant lequel l'air est sec et le ciel serein. La chaleur est encore un des grands agens de la pu- tréfaction, parce que , tenant les molécules de matière dans un mouvement continuel, elle favorise les nou- velles combinaisons. Aussi la meiïileure fruiterie sera celle où le thermomètre se maintiendra le plus constam- ment à 2 ou 3 degrés au-dessus de zéro. Pour arriver aussi près que possible à établir cette température , les fenêtres doivent être tournées au levant. La plus petite geléene doit jamais pénétrer jusque sur les fruits ; mais, 280 DES JARDINS. si cela arrivait, il se pourrait que quelques espèces, dans les pommes surtout, ne fussent pas perdues, en ayant la précaution de les laisser lentement dégeler, sans les toucher en aucune manière. Les fruits s’arrangent sur les rayons en planches qui garnissent la fruiterie, de manière à être placés très- près les uns des autres, mais sans se toucher. Quelques personnes les posent sur un lit de paille, d'autres se contentent de les meitre à nu sur les planches. Dans tous les cas on ne doit les rentrer que lorsqu'ils sont très-secs, et pour cela on les cueiïlle pendant le moment le plus chaud de la journée. En les transportant, il ne faut jamais les entasser, et on prend toutes les précau- tions, même les plus minutieuses, pour ne pas les blesser. Nous finirons le chapitre des constructions utiles, en conseillant aux cultivateurs qui mettent de l'intelligence dans le jardinage, d'élever au-dessus de la resserre un observatoire d’horticulture. On lui donnera la forme d’une petite tour ronde et vitrée, afin d’avoir toutes les expositions. Quatre thermomètres seront placés en dehors aux quatre points cardinaux : leur élévation au- dessus du sol les mettra hors de l’atmosphère formé par la chaleur réflétée, et l’on sera sûr d’avoir toujours le véritable degré de chaleur de Pair libre. Dans l’intérieur seront placés un hygromètre pour juger de l'humidité de l’atmosphère, et un baromètre pour connaître sa pe- santeur. On en tire des conséquences utiles, selon les principes que nous enseignerons à l'article des influences atmosphériques. Enfin , une girouette placée au sommet indiquera de quel côté de l'horizon viendra le vent, chose dont on tire dans tous les pays des pronostics presque certains pour la pluie ou le beau temps, le froid ou la chaleur. 281 V6 9 25 0h Ve So 1e Ve D Pr AG AO Ho 1 PP D A6 D Vo D LL PE EG A 2 6 D do LG VO D LL PRINCIPES GÉNÉRAUX. DEUXIÈME PARTIE. PHYSIQUE VÉGÉTALE. CHAPITRE PREMIER. EXPLICATION DES TERMES DE BOTANIQUE. La botanique, ou phytologie, est l'étude des végétaux. Elle renferme plusieurs divisions dont nous ne nous oc- cuperons point ici, parce qu'elles sont en dehors de notre cadre, telles par exemple que la phytotechnie, ou l’art de décrire et de classer les plantes ; la phytog- raphie qui enseigne l’art de choisir les épithètes conve- nables pour faire une bonne description , etc. Nous nous borneronsà décrire succinctement les parties extérieures des plantes , afin de faire connaître à nos lecteurs les noms que l’on a donnés à chacune de ces par- ües, et les adjectifs que l'on emploie pour désigner leurs formes, leur substance , leur position, et autres caractères, C’est ce que les botanistes appellent glosso- logie ou terminologie. Nous donnerons à cette branche de la botanique la forme de dictionnaire, afin de rendre la lecture de nos derniers volumes plus facile. Mais la physique végétale, ou botanique organique, étant le véritable guide du cultivateur , nous nous éten- 15e 10) -282 PHYSIQUE VÉGÉTALE. drons beaucoup sur cette partie intéressante qu'ilfautcon- naître à fond si l’on ne veut pas se trainer dans uneroutine aveugle en agriculture. Cette branche importante de la science se divise en organographie ou anatomie végé- tale , étude de la structure des organes ; en physiologie végétale, ou étude des principes de Féconomie végé- tale, ainsi que du jeu des diflérens organes ; d’où, étude des phénomènes que présentent les végétaux dans leur développement, étude des phénomènes qu'ils présentent dans les fonctions de la reproduction. La physique vé- gétale se divise encore en phytothérosie , qui a pour objet la connaissance des altérations des végétaux où leurs maladies , et en géographie botanique ou exa- men des causes physiques qui , modifiées par la nature particulière des êtres , déterminent chacun d'eux à vivre dans un lieu déterminé. On voit assez que toute la théorie de la culture appartient à la physique végétale. Nous allons rapidement esquisser toutes les parties d’une plante, pour nous faire plus facilement compren- dre par les personnes qui n’ont encore aucune idée de botanique. La craie est un œuf végétal renfermant l'embryon ou premier rudiment d’une plante. Si l’on met germer un haricot, on voit paraître deux premières feuilles n’ayantaucun rapport de forme avec celles qui viendront après elles; ce sont les cotylédons (pl. 13°, fig. +, a, a); entre ceux-ci se trouve placées la radicule (pl. id., fig. 1 , b) ou premier rudiment de la racine, et la plumule, ou premier rudiment de la tige (pl. id. fig: me La mice s’allonge à mesure que la plante se déve- loppe, et elle affecte différentes formes. Tantôt elle est droite, ligneuse, grosse, et prend le nom de éronc (pl. 13°, Jig.», a) ou de säipe (pl. id., fig.3, a) (voyez ces mots dans le vocabulaire) ; tantôt elle est TERMINOLOGIE, 263 grêle , rampante ou grimpante, quelquefois herbacte, et, dans ce dernier cas, si elle ne porte pas de feuilles et qu'elle serve immédiatement de Support à la fleur, elle se nomme hampe (pl. 13°, Jig. À, a); si, por- tant des feuilles engainantes , elle est articulée de dis- tance en distance, on la nomme chaume (plr3r3 Jig. 5). Quand la tige est ligneuse » Souvent elle porte des boutons ou gemmes, qui renferment des fleurs, des feuilles, ou des branches non encore développées. Plus tard la tige se ramifie en émettant des branches, celles-ci des rameaux , et ces derniers des ramilles. La tige et toutes ses ramifications sont, comme les racines , recouvertes d’une enveloppe nommée écorce Ê et composées ainsi qu'il suit : 1° d’un épiderme ou cu- dicule, premitre enveloppe mince, sèche, transparente ; 2° du tissu cellulaire ou Parenchyme, substance ten- dre, spongieuse, pulpeuse , remplissant une espèce de réseau à mailles plus ou moins serrées, affectant di- verses formes ; 3° des couches corticales ; faisceaux de lames fibreuses appliquées les unes sur les autres, les- quelles, vues au microscope, paraissent entièrement criblées de cellules remplies d’une matitre gélatineuse : ces lames forment la plus grande épaisseur de l'écorce ; 4 du Liber ou livret, portion comprise entre les cou- ches corticales et l’aubier, composée d’un réseau vascu- laire, dont les arcoles allongées sont remplies par du tissu cellulaire : il se renouvelle chaque année, Sous l'écorce se trouve le corps ligneux, composé, 1° de l'aubier ou faux-bois, première couche qui n’est rien autre chose que le liber endurci ; 2° du boïs pro- prement dit, qui n’est à son tour que de l’aubier ayant acquis de la dureté; 3 de l'évui médullaire, cavité dans laquelle la moëlle est contenue. La RACINE est la partie qui se développe ordinaire ment la première quand la graine germe. On en distin- 284 PHYSIQUE VÉGÉTALE. gue trois espèces principales, qui sont : la racine ft- breuse, la racine tubéreuse , et la racine bulbeuse. La racine fibreuse (pl. 13°, fig. 6 ) est composée de ramifications fibreuses et arrondies , de grosseurs très- différentes. Les plus grosses gardent le nom de racines; celles qui consistent en filets capillaires très-fins, très- nombreux, portés par les premières et les terminant, sont nommées chevelues. La racine tubéreuse (pl. 13°, fig. 7) consiste en un corps renflé, solide, ou, mais rarement, creux, charnu. On nomme tubercules les parties distinctes dont elle est quelquefois composée. La racine bulbeuse {pl. 13°, fig. 4, b) à proprement parler, n’est point une racine, mais un véritable bour- geon radical ; mais ce n'est point ici le lieu d'entrer dans cette discussion. Elle consiste donc en un corps charnu, succulent , composé de tuniques qui se recou- vrent, et porlant la véritable racine à sa partie infé- rieure et sur un seul point, ce qui la distingue très-bien du tubercule. On la nomme vulgairement ogron. Une racine , considérée sous le rapport de sa durée, se dit annuelle, bisannuelle , ou vivace ; sous celui de sa substance , elle peut être ligneuse ou charnue ; de sa direction , pivotante , oblique , progressive, ram- pante, flexueuse, etc. ; sous celui de sa forme, sim- ple, rameuse, fasciculée, capillaire, jiliforme, Jfi- breuse , tubéreuse , orchidacée, palmée , rapacée , napacée, fusiforme, articulée, noueuse, monili- forme, géniculée, tronquée , mordue, ete.; sous le rapport de ses appendices, elle peut être dentée, écailleuse , vagineuse , utriculeuse , turionifere , bulbifère , ete. (Voyez tous ces mots dans le vocabu- laire. ) Les FEUILLES se composent souvent de deux parties ; du limbe (pl.'13°, fig. 8, a), expansion ordinairement plane, constituant proprement la feuille, et du pétiole TERMINOLOGIE. 285 (pl. id., fig. 8,b), ou petite queue qui sert de support au Jlimbe. Le limbe d’une feuille pent être canaliculé, créné , plissé, sillonné , strié , ridé, onduleux , cré- pus , glabre , pubescent , poilu , velu , soyeux , lai- neux, cotonneux , hispide, pulvérulent, nervé, veiné , ele. Mais c’est surtout sous le rapport de sa cir- conscriplion qu'il fournit d'excellens caractères spéci- fiques , et qu'il mérite d’être étudié ; ainsi le Himbe peut être orbiculaire , arrondi, ovale, ové, oblong , cu- néiforme , spatulé, lancéolé, linéaire , subulé, ca- pillaire , filiforme, sétacé, falqué, inéquilatére. Si sa base est échancrée , on le dit cordiforme , réniforme , sagitté, hasté. Quant à son sommet, ilse dit aigu, piquant, accumine , claviculé, appendiculé, obtus, tronqué , échancré, rétus , obcordé, bifide, bilobé, biparti. Sous les rapports de son angulation, il est deltoide , rhomboïdal, trapéziforme , angulé, renflé, cylindrique, ligulé, comprimé , ensiforme , dolabri- Jorme. Considéré relativement à ses bords , on le dit indenté, denté, érodé, sinuolé, créné, denté en scie, denticulé, épineux , aiguillonneux , frangé, cilié, calleux , marginé. On remarque ses incisions , et on le dit bifide, trifide, lobé, bilobé , trilobé, etc., biparti, triparti, lacinié, palmé, auriculé, panduré, sinué, pinnatifide, bioutripinnatifide, lyré, ronciné, interrompu. Dans son expansion, le limbe peut être plan, convexe , concave, gladié, convoluté , plissé en éventail, plcatile, ondulé. On distingue plusieurs espèces de feuilles; les sémi- nales (pl. 13°: fig. r , a, a), qui ne sont que les coty- lédons développés ; les primordiales (pl. id. , fig. »., d, d), qui succèdent aux séminales et n’ont pas toujours la même forme que les autres feuilles ; les héféroides , qui diffèrent entre elles sur la même plante ; les carac- téristiques , les plus ordinaires de la plante, celles dont les formes sont le moins variables, et qui fournissent 280 PHYSIQUE VÉGÉTALE. par conséquent les meilleurs caractères ; les bractées et les stipules. Les feuilles caractéristiques sont simples (pL. 13°, Jig. 8) où composées (pl. 13°, fig 9). Elles sont sim- ples, quand elles n’ont qu'un seul limbe qui s'étend sans interruption au-dessus du pétiole. Pour les décrire on emploie les mêmes termes que pour le limbe. La feuille caractéristique composée est celle dont le pétiole se ramifie, ou dont le limbe est interrompu par des sinus creusés jusqu’à la côte principale. Les petites feuilles qui la composent portent le nom de folioles , et peuvent affecter différentes formes que l’on décrit avec les mêmes termes que pour la feuille simple ou le limbe. Elle est polytome , quand son pétiole est sans ramifications articulées, et alors on la dit tridactyle, à trois folioles, pentadaciy le, heptadactyle, etc. Quand les folioles sont placées sur des nervures secondaires opposées, on dit la feuille pinnatiforme, bipinnati- forme, etc. La feuille composée est articulée quand son pétiole est ramifié. Elle peut-être bifoliolée , trifo- liolée, etc., quinquéradiée, septiradiée, etc., pinnée, bipinnee, tripinnée etc, ou bijouguée, trijouguée, etc. ; ailée, ter. géminée, ee triternee, biconjou- guee , BEC. S'eic: Les sracrTÉESs sont des petites feuilles qui naissent dans le voisinage des fleurs. On les dit solitaires, géminées , articulées, axillaires, caduques, persistantes, ci- liées , tomenteuses , colorées, dentées, entières, ser- rées, multifides, latérales , pétiolées , amplexicaules, et enfin, leurs caractères étant les mêmes que ceux de la feuille simple, on emploie les mêmes expressions pour les décrire. Les srrpures sont des appendices foliacés que l’on trouve à la base des véritables feuilles. Elles peuvent être caulinaires, pétiolaires, foliolaires, persistantes ou caduques. TERMINOLOGIE. 287 Le périoLe fournit aussi des caractères spécifiques que l’on étudie. ILest simple (pl. 13°, Jig.8, b) ou rameux, outerminé en vrille. S'il sert desupport à d’autres feuilles on dit qu'il est commun (pl. 13°, fig. 9 , a); il est au contraire partiel (pl. 13°, fig. 9, b) lorsqu'il porte une foliole et qu'il est inséré sur un autre pétiole. Un pétiole peut être articulé , inarticulé; bordé par des poils, des épines, des appendices quelconques ; canaliculé, téret, térétiuscule, clavé, obclavé, en- Jlé, ailé, foléiforme, cirrhé, glanduleux, embras- sant, vaginant, dichotome , die He A FLEUR est el complet ou ni edraplet des or- ganes de la génération; elle se compose des organes de la tion , de is enveloppes, et Tin d’au- tres parties accessoires dont on connaît peu ou point les fonctions. Les organes de la fécondation sont les é£amines et les pistils. Prenons un lis, par exemple : nous voyons au centre de la fleur une espèce de petite colonne (pl.13°, Jig. 10, a) s'élevant perpendiculairement, c’est Le pis- til ou organe femelle. La base de ce pistil estsouvent ren- flée : on appelle ce renflement ovaire ou germe (pl. 13°, Jig. ro, b), et il renferme les radimens des graines qui se développeront quand la fécondation sera opérée. Le sommet du pistil est terminé par une partie renflée, un peu triangulaire dans le lis, c’est le stigmate (pl. 13°, Jig. 10, c ); enfin, le filament allongé et formant la longueur de la colonne entre le stigmate et l'ovaire, porte le nom de style (pl. 13°, fig. 10, a ). Autour du pisul nous voyons six filets(pl. 13°, fig.ro, d, d, etc.), terminés chacun par une petite tête jaun4- tre; ce sont les éfarmines ou organes mâles. Les petites têtes oblongues sont les anthères (pl. 13°, fig. 10,e,e, etc.), espèce de sacs membraneux qui s'ouvrent à l’épo- que de la fécondation, pour laisser échapper la liqueur prolifique et jaune que l’on nomme pollen. Qc 200 PHYSIQUE VÉGÉTALE. Les organes de la fécondation sont ordinairement en- tourés par des enveloppes qui, prises ensemble, sont le périanthe (pl. 13°, fig. 10, g,g, g, etc.). Examinons une rose : nous trouverons d’abord une première enve- loppe formée par des espèces de feuilles arrondies, dé- licates, colorées du rose le plus agréable; ce sont les pétales, si on les considère chacune en particulier : pri- ses toutes ensemble, leur réunion forme ce que l’on ap- pelle la corolle. Quand la corolle est composée, comme dansla rose, de plusieurs pétales, on dit qu'elle est poly- pétale; si, au contraire, elle n’est formée que d’un seul, comme dans le liseron et la campanule , elle est mono- pétale. Au-dessous de cette première enveloppe on en trouve une seconde aussi composée de petites feuilles, mais vertes et de la même substance que les autres feuil- les de la plante. Cette enveloppe est le calice, et les petites feuilles, les folioles. Une fleur peut avoir une enveloppe seule, comme le lis; dans ce cas, si elle est d’une autre couleur que le reste de la plante, on l'appelle corolle, et si elle est verte comme les feuilles, on la nomme calice. Cepen- dant les botanistes ne se sont jamais bien entendus là- dessus. Plusieurs la nomment calice, qu’elle soit colorée où non; d'autres la nomment calice dans une plante, corolle dans une autre, quoique verte ou colorée, et cela sans être fondés en raison. M. Decandolle, pour éviter toute équivoque, l’appellent périgone ; d'autres botanistes, qui nomment périanthe les enveloppes de la fécondation, proposent de nommer une enveloppe uni- que périanthe simple, et le calice et la corolle pris en- semble périanthe double. Toutes les fleurs n’ont pas des enveloppes semblables à celles dont nous venons de parler. Par exemple, celles de l’arum ou gouet sont entourées d’une feuille , tantôt verte, tantôt colorée , roulée autour comme un cornet de papier, et portant le nom de spathe. TERUINOLOGIT. 289 D’autres fois un grand nombre de petites fleurs sont posées sur un réceptacle commun, nommé disque où phoranthe, par plusieurs botanistes; ces fleurs s’appel- lent fleurons lorsqu'elles ont Ja forme d’un entonnotr; quand elles s’allongent d’un côté en forme de pétale, on les nomme demi-fleurons. L'enveloppe générale, composée de petites feuilles vertes, souvent appliquées les unes sur les autres, entourant le disque, est le ca- lice commun ou involucre. Quand une fleur à étamines et pistls dans le même périanthe, on la dit kermaphrodite où monocline; si elle n’a que des étamines, elle est mâle; si elle n’a que des pistils, elle est femelle. Souvent on voit sur le même végétal des fleurs mâles et des fleurs femelles, comme, par exemple, dans le melon; la plante, dans ce cas est monoïique où androgyne. Si, comme dans le chanvre, un individu ne porte que des fleurs mâleset un autre seu- lement des fleurs femelles, la plante est dioïque. Enfin , quand an même individu porte des fleurs hermaphro- dites et des fleurs unisexuelles, on la dit polygame. On ne trouve pas des fleurs sur tous les végétaux ; par exemple, le champignon. On a donné à ceux qui en manquent le nom d'agame. Ceux chez lesquels on reconnait aisément les organes de la fructificauon, mais dont les sexes sont douteux ou difficiles à distin- guer, se nomment crytogames. Enfin, ceux qui, com- me le lis, la rose et la campanule, ont des sexes bien évidens , sont dits phénogames ou phanérogames. Lorsque la fécondation est opérée, l'ovaire se gonfle, prend en peu de temps son développement, et devient le fruit. Quand les semences sont nues, elles constituent le fruit à elles seules; mais quand elles sont enveloprées dans une partie quelconque, c’est l'appareil entier de la fructification qui retient le nom de fruit, et les se- mences prennent alors celui de graine. On voit quelquefois dans les fleurs une partie qu'on ne 290 PHYSIQUE VÉGÉTALE. peut rapporter à aucune de celles que nous venons de nommer ; tantôt c’est une glande, une écaille , des poils ou des filamens, affectant des formes plus ou moins sin- gulières. On leur donne, assez improprement, le nom de nectaire. Les fleurs et les fruits sont ordinairement portés sur un petit pied nommé pédoncule, quand il part direc- tement de la tige, et pédicelle lorsqu'il n’est qu'une ramification d’un principal pédonenle. Dans plusieurs plantes, et particulièrement dans celles nommées om- bellifères, les pédoncules partent assez ordinairement d’une enveloppe foliacée, nommé involucre et mieux collerette. Quand la collerette se trouve placée à la base des pédoncules, on la dit zniverselle ; si elle est à‘la base des pédicelles, elle est dite partielle. Les Fruits ont été beaucoup étudiés par les botanistes et divisés en plusieurs espèces, à la vérité assez arbitrai- rement caractérisées. Nous allons indiquer les princi- pales. La noix (pl.13°, fig. 11) consiste en une graine ie 44 Ne est die osseuse et d’une seule pièce. La baie (pl. 13°, fig. 12) est un fruit à péricarpe mou, dont les graines sont sans noyaux et répandues dans l’intérieur, Une baie peut avoir plusieurs loges. La pomme (pl. 13°, fig. 13) a un péricarpe charnu; ses graines, nommées pepins, sont renfermées dans une capsule coriace ordinairement carthacée. Le drupe (pl. 13°, fig. 14) a de même un péricarpe charnu, mais ses graines sont renfermées dans un noyau dur et osseux. Le cône ou strobile (pl. 13°, fig. 15) consiste en un péricarpe sec, formé de plusieurs écailles imbri- quées, plus ou moins coriaces et serrées les unes sur les autres, et dont l'assemblage sur un axe commun est de forme conoïde. La silique (pl. 13°, fig. 16) a un péricarpe sec, à TERMINOLOGIE, 291 valves, dont les deux graines sont attachées immédia- tement de côté et d'autre à la suture et séparées par une cloison mitoyenne. La silique est toujours au moins deux fois plus longues que large. La silicule (pl. 13°, Jig. 17) ne diffère de la silique que parce qu'elle est presque aussi large que longue, ou même plus large que longue. La gousse ou légume(pl. 13°, fig. 17)a un péricarpe sec à deux valves, sans cloison mitoyenne, et ses gra1- nes sont attachées le long d’une des sutures. Le follicule (pl. 13°, fig. 18) a un péricarpe sec, oblong, souvent membraneux, quise fend dans toute sa longueur et d’un seul côté. La capsule (pl. 13°, fig. 19.) est un fruit à péricarpe sec, plus ou moins ovoide ou arrondi, renfermant Îes graines, et s’ouvrant par des valves, par des pores, par des trous, etc. Il existe dans les plantes des parties accessoires qui doivent être étudiées. Felles sont les vrilles ou cirrhes, filets simples ou rameux qui se roulent autour des corps étrangers pour soutenir les tiges qui en sont munies; les aiguillons , piquans qui ne tiennent qu'à l'écorce du végétal ; les épines qui sont acérées, ligneuses, et sont un prolongement de la partie ligneuse du végétal ; les glandes , organes particuliers des sécrétions ; enfin, les poils. Nous nous bornerons à cette courte énumération des- criptive des parties extérieures des plantes, en engageant nos lecteurs à recourir au vocabulaire chaque fois qu'ils se trouveront embarrassés dans la signification d’un mot. D'ailleurs, quand nous traiterons de la physiologie, nous serons obligés de revenir sur cette matière. 202 PHYSIQUE VÉGÉTALE, Be Edo 7x 290223 En Eee ne ne 22 De 2 ne ec co een EE ec ec ve ed eut VOCABULAIRE. À. Asontir, ve; se dit d’un fruit, AIGuILLOx ; épine qui n’adhère d’une graine, ou d’une partie avor- tée ou incomplète. Asnurrez; se dit d’une feuille pinnée à laquelle manque la foliole impaire terminale, ACAULE; qui manque de tige. ÂCERBE; qui a un goût âpre. ACÉRÉ, E; terminé en pointe raide, menue et piquante, Acnène; fruit sec, d’une seule graine, dont l'enveloppeextérieure adhère plus ou moins avec l’inté- rieure. Par exemple, la graine des composces. ACICULAIRE ; à pointe longue, menue, piquante, comme une épingle. Accrescenr (carrier); lorsqu'il Persiste et prend de l’accroisse- ment après Ja floraison. AciNacrroRME; en forme desabre. AcoryLépoxes ; plantes qui nais- sent sans cotylédons, ACuMINÉ ; qui se prolonge en pointe aiguë. ACUTANGULE ; ayant des angles aigus. AbuÉrEent ; soudé ou attaché à autre chose quand cela devrait être libre naturellement. ADxE ; immédiatement attaché, etfaisant où paraissant faire corps. AGauE ; qui n’a pas de sexe. AGGLONÉRÉES (rzzuns ); réunies eu forme detête, mais sans invo- lucre commun. AGGRÉGÉES ( FLEURS ); réunies sur un même réceptacle et munies d’un involucre commun. AIGRETTE ; touffe de poils ou d’écailles, surmontant certaines graines. Aicrerrée (GRAINE) ; surmontée d’une aigrette, AiGu; tout ce qui se termine en angle aigu. qu’à l'écorce ou seulement à Pépi- derme, AIGUILLONNÉ ; muni d’aiguillons. AILE; expansion souvent mem- braneuse des tiges, des graines. AiLé, E; muni d’une ou plu - sieurs ailes. AiLes ; pétaleslatéraux des fleurs papillonacees. Ausserre ; angle formé par une feuille où un rameau , avec la tige, à leur insertion. ALève (Ex); synonyme de su- bulé. Voyez ce mot. Azvunex ; substance qni accom- pagne ou enveloppe, en tout ou en partie, l'embryon, mais qui en est distincte ainsi que du tégument propre de la graine. ArLsuminé ou ALBUMINEUX ; qui est muni d’un albumen. Avrixes (PLANTES) ; quand elles croissent, non pas seulement sur les Alpes, mais sur toutes les hau- tes montagnes du monde. ALrennes ; toutes parties dispo- sées sur une autre à des distances à peu près égales , alternativement d’un côté et de l’autre. On dit encore que les pétales Sont ALTERNES avec Îles divisions du calice, que les étamines sont 41= TERNES avec les pétales ou les di- visions de la corolle, quand leur point d'insertion répond aux in- tervalles qui existent entre les di- visions du calice, entre les péta - les ou entre les divisions de la co- rolle. ALVÉOLÉ , E ; creusé de trous an- guleux, plus ou moins réguliers, à parois minces et mitoyennes, à peu près comme les rayons des abeilles, AwanDe; graine renfermée dans le noyau des fruits nommés drupes. VOCABULAIRE. AMENTACE, E; qui est disposé en chaton. AMFMIBIES Grasens qui peu- vent également vivre dans Peau ou hors d'elle. AuPLEexICAULE ; se dit des feuilles et des pétioles dont la base em- brasse la tige et les rameaux. Axprie; mot dérivé du grec et qui veut dire époux ou organe mâle. Il ne s’emploie que composé : movandrie , diandrie, polyandrie, à une étamive, deux étamines, plu- sieurs étamines. On dit aussi : fleur monandrique, polyandrique, etc. AxpRoGyxE (rLeur) ; celle dans laquelle les fleurs mâles et les fleurs femelles sont entremélées sur le même réceptacle ou sur le même épi. AxGiosperMe; se dit d’un fruit dout le péricarpe est distinct. ANGULAIRE ; qui appartient aux angles, qui naît sur les angles. AxcuL£eux ; qui a plusieurs an- gles. ANGULE ; qui a un nombre d’an- gles déterminé : triangulaire, qua- drangulaire. Anneau. Voyez Collet. ANXELE; qui a un ou plusieurs anneaux. ANNUELLE (PLANTE); celle qui germe , fructifie et meurt dans l’es- pace d’un an au plus. AxomaLEs ( FLEURS ); fleurs dont la forme ne peut se rapporter à au- cune forme ordinaire. AxomaLie; bizarrerie de la na- ture qui semble s’écarter de ses lois ordinaires. Axruëre; petit sac plein de pol- len , queles étamines portent à leur sommet. AnTuëse; on appelle ainsi le mo- ment où la fleur a acquis tout son développement. ANTHOLOGIE ; discours sur les fleurs. AouTE; mot employé pour in- diquer que le bois de la pousse d'août à mûri suffisamment pour résister aux froids de l'hiver, ou que les semences sont mûres, co- lorées, etque leur amande est bien formée. APÉTALE (FLEUR); Qui manque 293 de corolle, et'par conséqueut de pétales. AvnnonitTE, par opposition d’her- maphrodite. On donne ce nom aux plantes qui se reproduisent par jets, caïeux. soboles, etc. AruyzLe; sans feuilles. Aroruyse; renflement que l’on trouve à la buse de l’urne des mousses ou au sommet de leurs soies, Apeexnice; tout prolongement qui paraît ajouté à une partie quel- conque. APPENDICULE; qui a un ou plu- sieurs appendices. APPLIQUE, E; partie qui en tou- che une autre et lui est appliquée dans toute sa longueur sans Jui étre unie. Arre; synonyme de rude. AQUATELE (PLANTE) ; entièrement submergée, ou flottante. AQUATIQUE ( PLANTE ); qui croît dans les eaux. ARBOREE ( TIGE OU PLANTE ); en arbre, formant arbre; c’est-à-dire, ligneuse, grosse, ferme, et nue du bas. ARBORESCERT ; presque de la na- ture d’un arbre, soit que l’on con- sidère la forme , la graudeur ou la substance. Arsne ; plante ligneuse, plus ou moivs solide, vivant long-temps, portant des bourgeons , et s’élevant à plus de douze pieds de hauteur. AnBRISSEAU ; plante ne diflérant de l'arbre que parce qu’elle ne s’é- lève jamais au-dessus de dix à douze pieds. Ansusre ; plante ne différant de Varbrisseau que parce qu’elle ne s'élève pas au-dessus de quatre à cinq pieds. Les caractères sur les- quels on établit ces trois distinc- tions sont très-arbitraires. ArèrTr; filet grêle , sec, plus ou moins raide, qui part de la base, du dos ou du sommet des écailles florales des graminées. Dans d’au- tres plantes , on donne ce nom aux parties qui ont de l’analogie avec l’'arête que nous venons de définir. ARILLE; partie charnue, dis- tincte de la paroi interne du péri- carpe, et que l’on trouve dans 294 PHYSIQUE quelques fruits. Elle enveloppe la graine en tout où en partie, sans contracter avec son tégument pro- pre d'autre adhésion que par le style. L'arille paraît n'être qu’une expausion du cordon ombilical. ÂARILLE, E; qui à une arille. AisTk, E; qui porte une ou plusieurs arêtes. Ares ; nom que l’on donne quel- quefois aux aiguillons et aux épi- nes. ARTICULÉ; qui a des nœuds ou des étranglemens de distance en distance, comme, par exemple, le chaume des graminées. ARTICULATION ; point d'union de deux parties mises bout à bout. ARvIEN ; qui croit dans les champs. ASEXE, ASSEXUEL; Qui manque de sexe ; synonyme d’agame. AssurGEnr, synonyme de re- dressé. oyez ce mot. Aunier; couche de nouveau bois , qui recouvre l’ancien, et qui n’a point encore acquis sa dureté et sa couleur. AURIGULÉE (FEUILLE) ; munie à sa base de deux petits lobes en forme d’oreillettes. AUTONNALE; qui croît, ou pro- duit, ou fleurit en automne. AVorTEMENT ; accident par le- quel une partie quelconque d’un végétal n’acquiert pas son entier développement. L’avortement peut être accidentel ou constant. Une fleur, un fruit , une feuille peuvent être avortés. Axe; on donne ce nom à toute partie grêle et allongée sur laquelle ou autour de laquelle sont fixées d’autres parties. AXILE (GRAINE); c'est-à-dire, attachée vers l’axe rationel, ou à la columelle, AXILLAIRE ; qui naît à l’aisselle, qui y est placé, qui en part. B. Baccirère ; qui porte une baie. BaccrronuE; ayant la forme d’une baïe. Baie; fruit charnu, succulent, pe s’ouvrant pas naturellement, et VÉGÉTALE. renfermant une ou plusieurs grai- nes éparses. Bars ; synonyme de bacciforme. Bazzr ou raLe; enveloppe exté- rieure des fleurs glumacées, re- présentant le calice. Quelquefois on donne le nom de bale à l’enve- loppe intérieure représentant la corolle. Barre; synonyme d’arête, dans les fleurs des graminées. Bareu, E; synonyme d'aristé, dans les fleurs des graminées. Barbu, E; partie remarquable par un amas de poils. Base; ce mot signifie ordinaire- ment l'extrémité inférieure d’une chose; quelquefois le point d’une partie sur lequel est ajusté ou sur lequel est posé une autre partie. Basicaire; qui appartient à la base, qui y naît, y est placé. Barrans; synonyme de valves. Voyez ce mot. Bicarsuzaine (rruir); formé par Ja réunion de deux capsules. Bicrave ; en forme de deux mas- sues ajoutées l’une sur l’autre. BiconsucEz (FEUILLE ); quand le pétiole commun est divisé en deux parties portant chacune deux folioles. Bicusringe (rEuicze); dont le sommet est divisé en deux pointes. Ce mot s'emploie aussi pour dési- gner toutes les parties qui se ter- minent ainsi. Bivenré, £; dont le bord ou le limbe a deux dents. Brrive; divisé, environ jusqu’à moitié, en deux parties séparées par un angle aigu. Brecore; se dit d’un pédoncule qui porte deux fleurs. Biruncarion; point où une par- tie se divise en deux et forme la fourche. Brveures (roLiores); au nombre de quatre en deux paires sur un pétiole commun. Briimsé ( cazice ) ; lorsque son limbe est étranglé par le milieu et en fait paraître comme deux. Bicose ; qui a deux lobes. Birocuraire; quia deux loges. Bixges (reuizres) ; quand le pé- tiole porte deux foliolesau sommet. VOCABULAIRE. Brrarri,E; fendu en deux par- ties jusqu’à la base, où plus bas au moins que le milieu de la lon- gueur. Bivanri Lors ; lorsque la scis- sure est obtuse. Biranrisze ; susceptible de di- vision ou partition spontanée en deux parties. Brrinnarieine (reuiLce); lors- qu'elle est pinnatifide et que ses divisions sont elles-mêmes pinna- tilides. BiriNNÉE Où BIPENNÉE (FEUILLE) ; deux fois pinnée. BisaNNuELLE (PLANTE) ; qui naît et meurt dans l’espace de deux ans à peu prés. BisexE , RISEXÉE 3 synonyme d’'hermaphrodite,. Birernezs (reurcres) ; quand le péliole commun se divise en trois parties portant chacune trois fo - lioles. BivaLve, qui a deux valves. Bono ; c’est la partie qui forme la lisière des diflérentes parties d’une plante. Boraxique où pnyrozoGte ; bran- che de lhistoire naturelle qui a pour objet létude des végétaux. Bossu (cazice) ; lorsqu'il a une petite bosse qui le retient ouvert par le retirement d’un de ses bords. BouLox ; grouppes de fleurettes amassées en tête. Bouquer (Een); disposition des fleurs en grappes droites, pyrami- dales et formaut bouquet : par exemple, le lilas BourGrow; feuilles et tiges dans les premiers degrés de leur déve- loppement. Bourse ou vorva; enveloppe membraneuse qui entoure les jeu- nes champignons en partie ou en totalité. Bouross; petits corps arrondis ou allongés, qui naissent sur les tiges, les branches et les rameaux, et qui renferment les rudimensdes feuilles , rameaux, etc. BRAGT£ES Où FEUILLES FLORALES ; petites feuilles qui naissent avec les fleurs et qui toujours diflérent des autres feuilles par leur forme, souvent aussi par leur couleur, 299 BRACTÉE, BRACTÉIFÈRE, BRACTÉTÉ ; qui porte ou qui est accompagné de bractées. Brancuegs; grosses divisions du tronc où de la tige d’un végétal. Elles se divisent elles-mêmes en rameaux, et ceux-ci en r'amilles. Braxcuv ; synonyme de rameux ; qui a beaucoup de branches. Brixnize ; branche trés-petite, très-courte , disposée à donner du fruit. Buisson ; arbrisseau touffu , dont les branches partent de la racine comme de la tige. Buzge ou o6xon ; racine d’une plante, composée d’un corps char- nu plus ou moios arrondi, d’une substance tendre et succulente, recouverte d’une ou plusieurs tu- niques, et ayant à son extrémité inférieure une espèce de couronne charnue portant seule des racines. Quelques bulbes écailleuses, par exemple, celles du lis, de la ja- cinthe, ne sont pas autre chose que des gemmes. Buzseuse (PLANTE); qui a une bulbe pour racine. Bouzsirère ; qui produit des bul- billes. BuzstroRueE ; qui a la forme d’une bulbe. Burrieres ; petites bulbes qui naissent aux aisselles des feuilles ou à la place des graines de cer- taines plantes, et qui servent de méme à les multiplier. Burives ou BULLEUSES (FEUIr- LES); dont une surface est cou- verte de petites élévations obtuses , formant creux à la surface oppo- sée. Quand ces élévations sont fortes, la feuille est boursoufllée. C. Cavuc, que; partie ayant peu de durée, et tombant promptement comparativement à une autre. Carice; première enveloppe des organes de la fécondation, ordinai- rement verte et foliacée. Caricé (FRuiT) ; environné d’un calice persistant. . CaztcixaL; qui tient ou appar- tient au calice. 290 Caricuzz; nom donné à une ou plusieurs petites bractées environ - nant immédiatement la base ex- terne du calice, CALICULÉ ; qui a un calice. Cazreux; d’une substance dure et sèche. Cawmiun; liqueur organisatrice qui circule entre l'écorce et le bois des végétaux. Campaxuze, ou CAMPANIFORME ; qui a la forme d’une cloche. CanaLIcoLE; qui est creusé lon - gitudinalement en canal ou en gout- ticre, Carirraimz; grêle, allongé, me- nu, comme un cheveux. Carre ou CAPITULE ; ramassé en tête ou capitule. Cariuse; assemblage plus ou moins globuleux de parties quel- conques, serréesles unes contre les autres, et sans supports particu- liers manifestes. CaPSULAIRE ( PLANTE ); dont le fruit consiste en une capsule. Carsure; fruit sec, contenant une ou plusieurs graines dans une cavité intérieure, ne s’ouvrant pas ou s’ouvrant d’une manière déter- minée. CaPUCHONNÉ ; creux, voûté, ou- vert antérieurement, allant en se rétrécissant en arrière, comme un capuchon. CaRaGTÈREs; on nomme ainsi les rapports généraux ou particu- liers que les plantesont entre elles, et on étudie ces rapports pour groupper les végétaux selon leur plus où moins grand nombre d’a- nalogies, de manicre à établir des méthodes ou des systèmes de clas- sification. Canëxe; saillie longitudinale du milieu du dos d’une partie creusée ou pliée en gouttière, et formant un angle manifeste. Canëne ; on donne encore cenom à une partie de la corolle des fleurs papillonacées. . Carëné; ayant une saillie en ca- rêne. CarioPniriées (rLeurs); ayant de la ressemblance avec un œillet. Caniorss; fruit sec à une scule graine, et dont le péricarpe adhère PHYSIQUE VÉGÉTALE. ct se confond avec son enveloppe propre. Par exemple le blé, CaRTILAGINEUX; d’une consis- tance dure, séchc et un peu flexi- ble. Casque ; lévre supérieure des co- rolles labices. Casrrario ; opération qni rend une fleur inféconde et qui consiste à lui enlever ses anthères avant qu’elles aient épanché leur pollen. CauvÉE (GRAINE ); se terminant par un filet grêle, long, velu et flexible, provenant du style per- siStant et qui a pris de l’accroisse- ment. Caunex; synonyme de stipe. Voyez ce mot. Caurxscexr; formant ou ayant une tige. On le dit par opposition d’acaule ou sans tige. Caurinaire ; qui est attaché, qui appartient à Ja tige. Caxeux ; petites bulbes qui nais- sent à côté d’une bulbe principale, etqui servent à multiplier la plante. Ceriureux (rruir); dont l’in- térieur est divisé en plusieurs cel lules ou petites cavités inégales, dans lesquelles les graines sont ni- chées, mais non séparées par de véritables cloisons. Cenrrai ; qui occupe ou traverse le centre, Cuaixs ; formé de parties comme attachées bout à bout. Cuir ; substance plus où moins ferme ou molle, plas ou moins succulente , Spongieuse , subé- reuse , elc., composant en tout ou en partie certaines plantes. Cuancissure; petits filamens blanchâtres, semblables à une moi- sissure, attaquant les végétaux et annoncant qu’ils sont dans un état d’épuisement et de maladie. CuanxGeanTE (rreur); qui change de couleur à de certaines périodes de sa durée. Par exemple l’horten- sia. Cnapgau; partie supérieure et ordinairement arrondie et conique d’un champignon. Cuarsu, 8; fruit, plante, feuil- le, etc., de substance plusou moins épaisse , succulente et un peu ferme, VOCABULAIRE. Cusron; assemblage de petites fleurs ordinairement disposées le long d’un axe commun, une ou plusieurs ensemble dans Vaisselle d’une écaille florale ou d’une petite bractée. Par exemple les fleurs mâles du noyer, du noisetier, etc. Cuaroxnée (FLEUR); qui est en chaton. Cnauue; tige articulée des gra- minées. Cusvaucnanres (reurLres); celles qui, étant pliées comme en gout- tière aiguë, ou angulées sur le dos, sont appliquées les unes sur les autres. CusveLu; petites racines capil- ‘laires, filiformes, déliées, fibreuses, naissant sur les autres racines et les terminant. | Cu, & ; dont le bord est garni d’un ou plusieurs rangs de poils implantés parallélement. Ciss; poils qui se distinguent des autres par leur longueur, leur place et leur arrangement en série régulière, Crue ; disposition de fleurs telle que les pédoncules communs par- tent du même point, comme dans l’ombelle, et les pédoncules par- tiels de points différens, quoique les fleurs de chaque groupe se trouvent à peu près sur le même plan. Exemple, le sureau. Ciueux; disposé en cime ou en portant une. Cinconscisse (carsuze); s’ou- vrant transversalement en deux parties, comme une boîte à savon- nette. ; CircoxscriPrion; se dit de ce quidétermine la forme d’une feuille en général. Dans une feuille simple et indivisée, la circonscription est réellement formée par le bord même. Circuraire ; qui a la forme d’un cercle. Cinnue; synonyme de vrille. Voyez ce mot. Cine ; qui a la forme ou rem- plit les fonctions de cirrhe. Cinrugux; terminé en véritable cirrhe. . Cirrureëre; portant un ou plu- sieurs cirrhes. 1. 297 Crasses; on appelle ainsi les grandes divisions établies dans les trois régnesde la nature, Les classes se divisent ordinairement eu or- dres, ceux-ci en familles ou en gen- res, ces derniers en espèces. CLassirication; méthode artifi- cielle ou naturelle par laquelle on groupe les êtres, de maniére à ar- river facilement à trouver celui que l’on cherche, en passant au milieu de tous les autres par la route la plus courte. C’est le fil du labyrinthe, CLAVE, CLAVIFORME; qui a la forme d’une massue. CravicuLé ; qui a la forme d’une petite massue. Crer; on donne ce nom au ta- bleau exact et méthodique d’une classification. Crocue (ex); synonyme de cam- panulé. l’oyez ce mot. CLoisox; lame qui partage un fruit en plusieurs loges ou cavités intérieures, CoLLERETTE ; synonyme d’invo- lucre. F’oyez ce mot. Correr; on donne ce nom à la partie d’un végétalformantle point de rencontre entre la tige et les ra- cines. Cocoré, E; quand ce mot est employé sans désignation de cou- leur, 1l indique seulement que la partie est d’une autre couleur que celle qui est générale à la planté. -CoLumezLe; axe vertical de quel- ques fruits, qui persiste après la chute de leurs autres parties, aux- quelles il servait de point de réu- nion. ; CoLumeLLE ; pourvu d’une colu- melle. Coumux (carice). Foyez Invo- lucre. Cowrzer, Te; se dit d’une fleur ou d’un fruit auxquels il ne man- que aucune des parties ordinai- res. Ce mot n’a pas un sens ab- solu. CowprosE, £; on emploie ce mot pour désigner toute partie d’une plante composée de plusieurs par- ties ou partagée en plusieurs divi- sions. Ainsi une feuille formée par la réunion de plusieurs folioles, est 29 295 composée; une fleur formée par la réunion de plusieurs fleurettes dans un calice commun, est com- posée; un fruit formé par la réu- nion de plusieurs baïes, est com- posé, etc. Coupriné; ce qui est aplati; une chose dont la largeur des côtés excède l’épaisseur. Coxcave ; se dit de toutes les par- ties creusées ou marquées d’un enfoncement remarquable. Coxcerracze ; nom que lon donne à l'enveloppe des graines très-fines des plantes agames. Par exemple, des fougères. Côxe ; fruit formé par la réunion d’écailles ligneuses, fixées par leur base à un axe commun, serrées ou imbriquées, et portant à leur base une ou plusieurs graines. Le cône ne diffère guère du chaton que par la consistance de ses écailles. Coxcénène; qui est du même genre. À < Cowcroré; qui estréunien boule. Coxsucué , E; lié ensemble deux à deux. Conirère ; dont la fleur ou le fruit sont en cône. Consoinres (rrEuns); réunies plusieurs ensemble dans une enve- loppe commune. Ÿ Coxxecrtr; partie de l’anthère, souvent en forme de petit pédon- eule, par lequel elle est attachée au filament de l’étamine. Il est très-développé dans la sauge. Coxxérs (FEUILLES); opposées et sessiles, réunies par la base de mavière à ne former qu’une seule feuille traversée par la tige. Les anthères connées sont réunies de manière à former un tube dans le- quel passe le pistil. | CoxxivexT; quand les parties sont très-rapprochées les unes des autres, sans cependant être adhé- rentes , on dit que l’objet est con- nivent. Calice connivent, à divi- sions rapprochées; anthères conni- ventes, etc. Coxsore; petites saillies que l’on voit sur les tiges et les rameaux à la naissance des feuilles et des bou- tons. Connu, 5; on applique ce mot PHYSIQUE VÉGÉTALE. à deux choses qui se touchent ou se tiennent, mais qui peuvent se séparer sans déchirement sensible. ConrinuiTé; on dit deux parties continues quand on ne peut les séparer sans les rompre. Coxvexe; dont la surface exté- rieure est bombe ; c’est l'opposé de concave. CoxvoLur£e (rEuizze); rouléeen dedans par un côté, sur lequel l’autre s'applique en s’'incourbant, ou même en l’enveloppant. Coque; capsule formée par la réunion de plusieurs loges arron- dies, attachées à un axe central, s’ouvrant avec élasticité en deux valves par une suture interne qui correspond à l’axe, et contenant chacune une ou deux graines. CorpiroRmE ; qui a la forme d’un cœur tel qu'il est représenté sur les cartes à jouer. Corvox omeiLicaz; saillie formée par le réceptacle d’une graine sur laquelle celle-ci se trouve portée. Corrace; qui approche de la nature du cuir par sa dureté, sa flexibilité et sa ténacité. Conxe; d’une substance dure, plus ou moins transparente, ne se réduisant pas en poudre, se cou- pant sans fracture, enfin analogue à de la corne. Conxer; sorte de nectaire infun- dibuliforme. Coroize; enveloppe immédiate et colorée des organes de la fecon- dation, ayant toujours une origine cemmune avec les étamines. CoroLLirÈRE; qui a ou porte une corolle. Coroxaire , de coronarius; les botanistes emploiert ce mot pour désigner une fleur propre à entrer dans la composition d’un bouquet, Corricaz ; qui appartient à l’é- corce. Conriqueux; dur et coriace, ap- prochant dela nature d’une écorce. Corvuse; disposition de fleurs ou de fruits portés sur des pédon- cules naissant sur des points diflé- rens et s’élevant à peu près à la même hanteur. Conymseux; disposé en corymbe. VOCABULAIRE. Convmmirine; qui porte des fleurs en corymbe, Cosse; valve des fruits légumi- neux. Cossox; nouveau sarment qui croit sur la vigne après qu’elle est tuillée. Côrs; on donne vulgairement ce nom à la nervure moyenne d’une feuille simple, ou au pétiole com- mun d’une feuille composée. Côreux ; longitudinalement re- levé de côtes. Corowxeux, se; recouvert d’un poil fin ou d’un duvet ressemblant à du coton. Corxzépons; on nomme ainsi les deux premières feuilles qui se dé- veloppent les premières, aussitôt la germination. La plus grande partie des graines renferment un ou deux cotylédons. Coucuk, E; quand une plante est étenduesur la terre dès sa base, et sans jeter de racines par ses tiges ou rameaux. Coucans; jets rampaus et sus- ceptibles de s’enraciner , qui nais- sent au pied de certaines plantes. Par exemple, du fraisier. Counrsé ; qui était d’abord droit et qui s’est courbé,. Couroxxé (rRuir); quand ilcon- serve au sommet une partie ou la totalité du calice persistant. On dit encore qu’une corolle est cou- ronnée lorsqu'elle, renferme un ou plusieurs appendices formant la couronne; qu'un épi de fleur est couronné lorsqu'il est surmonté d’un faisceau de feuilles ou de bractées. Créé ,e; dont le bord est muni de dents très - larges et arrondies, sans nulle apparence de pointe. Crexeze ; lorsque les dents sont moins larges, plus nombreuses, mais néaumoins arrondies et sans pointe. CréNuLe; synonyme de crénelé, Crépu; à bords très-onduleux et chargés de petites rides ou plis- sures très-rapprochées. Crévassé; parsemé de fentes et de crevasses. Crocuers;. on appelle ainsi des poils durs, raides, dont la pointe 299 est recourbée comme un hamecon, Cnrocuv ; recourbé en crochet. Croisée; dont les parties, au nombre de quatre, sont opposées par paires et forment une croix. Cnucirëre; ayant une corolle de quatre pétales opposés par paires , et dont les limbes sont étalés en croix. Cnucrronue (conozLe); composée de quatre pétales opposés en croix, Cnusrace; d’une substance mince, fragile, ne se ramollissant pas dans l’eau. Cryptrocame; dont les noces sont cachées; c’est-à-dire dont on ne connaît pas les organes de la fécon- dation. Curuirère; dont la tige consiste en un chaume. Cuxéironue; rétrécei insensible- ment de haut en bas en angle aigu, ayant la forme d’un coin. Curvuze ; fructification de quel- ques plantes cryptogames, ayant la forme d’une petite coupe. Godet dans lequel est porté un gland. CuruLE ou ouPuLIFORME ; qui a la forme d’une coupe. Cusrie ; terminé par une pointe dure et un peu raide. Cxzinpracé; qui approche de la forme cylindrique. Cxzixprique ; d’une forme al- longée, à peu prés de même gros- seur dans toute la longueur, sans angles. CxuieR, CYME; synonyme de ci- me. Voyez ce mot. Cxruscrs; petites concavités que Von trouve à la surface inférieure de certains lichens. D. Désice ; se dit d’une tige trop, faible pour se soutenir naturelle- ment dans une position verticale, Déca; veut dire dix en grec, let s'emploie dans les mots composés. Décandrie, dix étamines ; décagy- nie, dix pisuls; décafide, déca- lobé, décaphylle, etc. Décurquets ; synonyme de Jaci- nié. Voyez ce mot. Décnins; se dit des parties dont les bords sont partagés en divisions 300 PHYSIQUE de grandeurs différentes et irrégu- lières. Déciou, E; qui tombe avant d’autres parties. Calice décidu, qui tombe après la fécondation; feuilles décidues, qui tombent avant une nouvelle feuillaison. Ce mot s'emploie par opposition à per- sistant. Décuixé; qui retombe en for- mant l'arc. Découré; divisé en plusieurs segmens , mais non pas jusqu’à la base. Décourure; ce mot s'emploie pour indiquer que des segmens de corolle où de calice ne s'étendent pas dans toute la longueur de ces parhes. DécourANTES OÙ DECURRENTES (reuizves); dont les bords se pro- longent en descendant sur la tige plus bas que linsertion. Décunsie (srxLE) ; quand , inséré à la base de Fovaire, il longe un des côtés et paraît placé au som- met, Déreuiczaison; chute ou temps de la chute des feuilles décidues. Déuiscence; manière dont un fruit s'ouvre pour disséminer ses graines. Un fruit est nEéuiscenr quand il s'ouvre naturellement, INDÉHISCENT quand il ne s'ouvre pas Dezroïve (reuiLce); en rhom- boïde dont l'angle inférieur est très-court, à peu près comme le delta grec. | DenI-AMPLEXICAULE OU SEMI-AN- PLEXICAULE (FEUILLE ); quand elle est sessile et que sa base embrasse distinctement une partie de la tige. On dit aussi un pétiole amplexi- caule, dans les mêmes circons- tances. Demi-cycixorique; ayant la fi- gure d’un cylindre dont on aurait enlevé la moitié dans le sens de la longueur, c'est-à-dire bombé d’un côté et aplati de l’autre. Deur-rLeurox; fleurette d’une fleur composée, ayant un côté de sa corolle prolongé en languette. Dexi-FLEURONNE; ayant des demi- fleurons. Dewi-FLOSCULEUSE Où SEMI -FLOS- YÉGÉTALE. CULEUSE; fleurs composées ne por- tant que des demi-fleurons. Dexi-pérazofve (cazice) ; dont les divisions alternes ressemblent à des pétales par leur coloration et leur nature. Dexproive ; qui ressemble à un arbre. Dexprorocte; étude ou histoire naturelle des arbres. Dexre; dont les bords offrent des dents; et on dit : inégalement denté, lorsque les dents sont de grandeur inégale; Doublement denté, quand cha- que dent est elle-même dentée ; Denté en scie, quand les dents sont disposées comme les dents d’une scie , toutes les pointes tour- nées du même côté ; Denticulé, quand les dents sont trés-petites. Derrine ; aplati, dé manière à ce qu'il y ait moins de hauteur que de largeur, ou au moins que la hauteur paraisse diminuée par la dépression. Dsssicarron; action par laquelle on prive une plante de toute son humidité, et on la rend propre à être conservée dans un herhier. Dérermine (EN NOMBRE) , expres- siou par laquelle ou indique que les parties doivent être comptées, et que leur nombre est caractéris- tique. On dit encore dans le même sens en nombre défini. Dranecpues (ÉTAMINES) ; réunies en deux corps par leursfilets. Diaveceuie; classe de plantes { daus le système de Linnée) dont les élamines sont réunies en deux faisceaux. Dianezvuiques ( rLEurs ); dont. les étamines sont diadelphes. Dranxpre où DraxbriQuE; qui a deux étamines. Draxprie ; classe de plantes (dans le systéme de Linnée) dontlesfleurs ont deux étamines. DicnoromaL ( PÉDONCULE ) ; naïs- sant dans l’angle formé par deux rameaux de la tige dichotome. Dicuoroue ; se dit des tiges des branches, des rameaux, des pédou- cules lorsqu'ils se divisent et sub- divisent par bifurcation. Ducrines ( rLeurs ); celles qui VOCABULAIRE. n’ont qu’un sexe dans la même en- veloppe florale. Dicoque ; fruit composé de deux coques. Dicorycévoxe ; plante qui a deux cotylédons; dont l’embryon a deux lobes. Dinyur ; composé de deux par- ties plus ou moins ovales ou sphéri- ques, très-rapprochées , et ayant une insertion commune. Divvynamie ; classe de plantes ( dans le systéme de Linnée) qui ont quatre étamines, dont deux plas longues opposées à deux plus courtes. Dinynamique où DinynaME ; qui a quatre étamines dont une paire plus longue que l’autre. Dirrus ; étalé et saus ordre. Ducrrges ( reuicres); celles qui ont cinq à neuf folioles attachées au sommet et au méme point du pétiole. | Dicyxe (FLEUR) ; qui a deux pis- tils. Dicyare ; ordre de plantes (dans le système de Linnée) dont la fleur a deux pistils. Diogcie; classe de plantes(dans le système de Linnée) qui portent sur le même individu des fleurs mâles et des fleurs femelles. : Diroïque (»LaANTE) ; qui porte sur le même pied des fleurs mâles et des fleurs femelles. DirgrianTué; qui est muni de deux envelopypes florales , le calice et la corolle. Dirérazs ; qui a deux pétales. Drruyizr; quin’a que deux feuil- les, ou qui est composé de deux pièces dislinctes. Dirrères; qui a deux ailes. Dissoixtes (FLEURS) ; qui ne sont pas renfermées dans un involure commun. Disrsnue ; à deux semences. Disour ; surface des feuilles; plus employé pour indiquer la partie centrale, charnue, élevée, d’une fleur, portant les pétales et autres organes , et étant enveloppée par Ja base du calice. Disrixer, £ ; sans réunion, adhé- rence ou superposition. Disrique; on emploie ce mot 3o1 pour indiquer que des parties sont fixées sur deux rangs opposés l’un à l’autre. Diunxe; qui fleurit le jour ou ne dure qu’un jour. DivariQué, #; quand les divi- sions divergent ou s’écartent d’une manière remarquable depuis leur base. DivercenTs, F5; parties qui, naissant d’un même point, s’en écartent en rayonvant. Duivise, &; d’une seule pièce, mais. partagé en plusieurs segmens. Division ; synonyme de segment; corolle à deux, trois segmens ou divisions. Dopeca ; veut dire douze, en grec, et s'emploie dans les mots composés : dodécagyne , qui a douze pistils; dodécagynie, nom d’un ordre de plantes ( dans le sys- tème de Linnée) ayant douze pis- ils. Dodécandrie , nom d’une classe de plante (dans le même sys- tème ) ayant douze étamines , do- décafide, dodécaparti , dodécapé- lule , elc. Dorasrirorue; en forme de do- loire. Donsaz , E; qui appartient au dos, ou naît dessus le dos d’une partie. Donsirëre; qui porte la fructi- fication sur le dos des feuilles; quelques fougères par exemple. Dousre (rLEur) ; quand la moi- tié des étamines , environ , s’est changée en pétales; s’il n’y en a que quelques - unes de métarmorpho- sées , la fleur est semi - double ; si toutes le sont , la fleur est pleine et stérile, DraAGEon, REJET, STOLOR; rejetons qui poussent au pied des plantes, qui peuvent en être détachés avec des racines, et qui servent par conséquent à la multiplication. Draré, E; couvert d’un duvet court et serré comme on le voit sur le drap. Daessé, #; qui s'élève perpen- diculairement au plan de sa base, ou quelquefois verticalement. Droit, £; n'ayant vi courbure ni inflexion. Daure , quelquefois Daovrs ; 302 fruit charnu, renfermant un seul noyau. I , Ecarrre; on donne ce nom à toute expension plate, laminée, petite, raccourcie, d’une substance plus où moins sèche , ayant sou- vent une tendance à s'appliquer sur la partie qui la porte ou l’ac- compagne , et dont l’organisation est semblable à celle d’une feuille, mais dans un état d’avortement. Telles sont les écailles qui entou- rent les bourgeons, qui forment les enveloppes florales des grami- nées , des chatons, etc. Ecarrreux, se ; qui a desécailles, qui en est couvert ou qui en est formé. Ecwaxcré , Er; employé seul ce mot indique que le sommet a un petit sinus ou angle rentrant, S'il est question d’une autre partie que le sommet, on la nommeet l’on dit échancré par la base, sur les bords, etc. Ecuaxcrure; sinus ou angle ren- trant , paraissant interrompre la circonscription d’une manière in- attendue, Ecorcer ; première enveloppe gé- nérale des tiges, des rameaux, et des racines , composée de l’épider- me , de tissu cellulaire, etc. Ecussor ; fructification des li- chens. Evovuzz; qui est bon à manger. Erxiré; grêle, long, souple. Ecarz , #; quand toutes les par- ties sont en égales proportions. Errrprique; dontla circonscrip- tion est en cercle déprimé sur ses côtés, ou, si l’on veut, en ovale dont les deux extrémités seraient de même largeur. Ce mot n’est applicable qu'aux corps plans. EuprassanT, x; SYnonyme d’am: plexicaule pour lesfeuilles , stipu- les , bractées, etc. Exenvox ; premier rudiment d’une plante renfermé dans la graine. EMouSsE ; qui se termine par un angle très-obtus. Euwras; mesure égale à la lon- gucur de Ja main étendue. PHYSIQUE VÉGÉTALE, Expécaxpre ; qui a onze éta- mines. Exervé; sans nervure. Exrzé, z; lorsqu'une cavité se manifeste au dehors par des parties trés-saillantes. Le fruit du bague- naudier, par exemple. | ExGarnanr , £; enveloppant par sa base la partie qui donne attache. Les feuilles de Ja plupart des gra- minées, par exemple. Excuse, enveloppé par une gaine. ExNEANDRE ; qui a neuf étami- nes. Exoné ou Exoué ; sans nœuds; par opposition de noueux. NSIFORME ; qui à la forme d’une lame d’épée à deux tranchans. Exrier; sans division; n’iyant ni angles ni sinus sur les bords. EpPus, se ; d’une substance fer - me et solide. EpPanouissemenr ; état d’une fleur dont toutes les parties sont dans leur entier développement. Épars, £; disposé sans ordre. ÉrErox; prolongement de forme variable, de la corolle ou du ca- lice. ErERoNNÉ ; qui a un ou plusieurs éperons. ÉPnEMÈRE (FLEUR); qui ne dure qu’un jour ou quelquefois beau- coup moins. . Err; fleurs réunies et attachées le long d’un axe commun non ma- nifestement ramifié. L’epi est com- posé lorsqu’il y a ramification ; di- gité, lorsque ces ramifications vaissent à peu près du même point. Épinerme; première enveloppe, souvent mince et transparente, de l'écorce. Ermermoipe (Tissu); qui appar- tient ou ressemble à l’épiderme. Erik, E; disposé en épi. Éricyne; inséré sur le sommet de l'ovaire. ÉPIGYNIQUE; id. EÉrirrer; petit épi partiel de Pépi composé. Erixe ; production dure et poin- tue faisant corps avec la tige et ne pouvant en être séparée sans frac- ture, ce qui la différencie de l’ai- guillon. VOCABULAIRE, CPINEUX , 88; qui a des épines. Evipunacme; membrane qui unit les dents du péristome des mous- ses, ÉquinoxiaLe (FLEUR); qui, pen- - dant plusieurs jours, s'ouvrent et se ferment à des heures détermi- nées, Encor; production en forme de corne plus ou moins allongée. ERiGE ; qui est dressé, qui s'élève perpendiculairement à l'horizon. Enons; dont le bord est fine- ment et irrégulièrement denticulé, comme rongé par une chenille. Esrèce; 11 faut distinguer les- pèce Jardinière de l'espèce botani- que. La première n’est souvent qu’une variété, la seconde se défi- mit : série d'individus qui se res- semblent tellement par toutes leurs parties, que s’il existe entre elles quelques différences , elles ne sont qu'accidentelles et disparaissent par la reproduction des graines. On trouve jusqu’à présent beau- coup de vagueet d'incertitude dans les définitions de l'espèce. Esrivaz, E ; qui naît ou produit en été. Érazk, £; ouvert, ou s'étendant dans une position horizontale. Érammes; organe mâle de la fleur, que l’ou reconnaît à l’anthère qui Je termine ou le forme. Érenparp; pétale supérieur d’une fleur papillonacée. Êrioré, £; on donne ce nom à un végétal ou à la partie d’un vé- gétal qui s’allonge outre mesure et qui n’a pas sa couleur naturelle. L’étiolement est le résultat d’une privation de lumière et d’air. Éroc; on appelle ainsi une sou- che morte. îroizé; disposition rayonnante des parties qui les fait ressembler à une étoile. ÉrranGLEMeNT ; on désigne, par ce mot, la place où une partie de- vient plus étroite, comme étran- glée. Évazve; qui n’a pas de valves; quine s'ouvre pas. Excrérion; matière résultante de la transpiration des plantes. Excroissance ; production de for- 303 me et grosseur variable, naissant sur toutes les parties des végétaux, étqui sont généralement Le résultat de piqûres d’insectes, Exenr, 8; saillant hors de la par- tie contenante, ou dépassant en longueur les parties environnantes. Exrozrarion ; on appelle ainsiune maladie qui fait détacher et tomber les parties en forme de petites la- mes ou feuillets desséchés. Exosrose, excroissance de forme et grosseur variables, qui survient aux tiges et racines des arbres, et qui , pour l'ordinaire, est le résul- tat d’un choc ou d’une déchirure. | Exorique; qui est étranger ; ril s'emploie par opposition d’indi- gène. Exraxsiox; considération de la superficie des feuilles quant à leur disque et à leurs bords. Exsripuze , 25 sans stipules. ExTravasarion; épanchement de la sève occasioné par une plaie. ExrraxiLLaAIRE ; qui naît hors de Vaisselle des feuilles. Exsnonsr; lorsque l’anthère s’ou- vre du côté opposé au pistil. F. Facs; elle est externe, interne, ou latérale : la face interne d’une fleur regarde le pistil, celle d’une feuille regarde son aisselle. Face À Face; quand deux surfa- cessontappliquées l’une surPautre. Faciës ouracie, du latin fucies ; exprime le port particulier, la phy- sionomie d’une plante, Far; qui plie facilement. Faisceau (ex); rapproché dans le sens de Ja longueur. Farqué; courbé ea forme de la- me de faux. Fane, assemblage des feuilles d’en bas de la plante. FANÉROGAMES (PLANTES) ; Qui ont une fleur apparente et ornée; par opposition à eryptogames. Farixace; delanaturedela farine. FarinNeux; qui contient de la fa- rine , qui peut être converti en fa- rine, où qui est couvert d’une poussière blanche semblable à de la farine. PHYSIQUE ; groupé en forme 304 Fascicuré , r de faisceau, Fasriciée (r16E ) ; terminée par des rameaux égaux en hauteur et ParVenant au même niveau. Fécoxparion; acte par lequel le pollen des étamines est porté sur les pistils et rend les ovaires fruc- tueux. F£connrré; phénomène de Ja multiplication par les graines. On a compté 360,000 graines sur un pied de nicotiane. Femeire (rreur); qui manque d’étamines et a un pistil. FEeNDiLLé , E; qui a beaucoup de petites fentes ou crevasses. Fexou, £; ayant une fissure plus ou moins profonde. b Fenesrre,r; percé de trous à jour. Fenré ; qui s'ouvre par une fente. Fenrire; susceptible de pouvoir perpétuer l'espèce ; qui porte des fruits. FeurrraGe; ensemble des feuilles d’une plante. FeuiLLaison ; époque à laquelle une plante se couvre de feuilles. FeuiLe; expansion de écorce, ordinairement plate ct nervée, composée de quelques fibres et de beaucoup de parenchyme. La feuil- le est simple quand son disque est uniqueet continu; composée, quand elle est formée de plusieurs petites feuilles ou folioles, attachées à un même pétiole commun. FeuiLré; qui a des feuilles. FeuicLeré ; composé de lames ou feuillets. Feuizrers ; on donne ce nom aux James qui garnissent le dessous du chapeau de beaucoup de champi- goons etsurtout des agarics, FeutLru, £; qui est très-chargé de feuilles. Fisres; filamens de diverses na- tures qui s'étendent dans la subs- tance des végétaux et la parcourent en diflérens sens. Fisreux; qui est pourvu de fibres. Firament; filet d’une étamine, portant l’anthère, Fixer; synouyme defilament. Firirorne ; délic ,Cylindracé, de même grosseur partout » Comme un fil. VÉGÉTALE. FixPenDute; qui pend comme par un fil. Il s'emploie particulie- rement pour désigner une racine composée de tubercules charnus attachés entre eux ou au bas de Ja tige par des fils. Fisrureux; qui est allongé et creux dans l’intérieur. Freur; assemblage complet ou incomplet des organes de Ja fécon- dation ou de la génération, avec ou sans enveloppe florale. Freuraisox; temps auquel une plante fleurit. Freurerre; petite fleur munie d’un calice propre, entrant dans la composition d’une fleur aggrégée. Frzuros ; petite fleur régulière, Sans caïñce , entrant dans la com- position d’une fleur composée. Elle se distingue du demi-fleuron par sa régularité. FLEURONNÉ ou FLOsCULEUx ; des fleurons, Frexueux; qui forme plusieurs courbures ou flexions, sur un même plan. Froraz, E; qui tient à la fleur ou l'accompagne. FLore; on donne ce nom à un ou- vrage qui renferme l’énumération et la description de toutes les plan- tes d’un pays. Froripare (rourGrox ); quine produit que des fleurs. Frorranr, £; flexible et prenant la direction d’an courant d’eau dans lequel est l’objet. Fruviarise (PLANTE) ; qui croît dans les eaux des fleuves et des ri- vières. : Forracé, E; qui approche de la nature où dela forme d’une feuille. ForratRE ; appartenant ou tenant à la feuille. Fornuronme, ressemblant à une feuille. ForrrPare : des feuilles. Fortores ; petite feuille partielle d’une feuille composée. On donne aussi ce nom aux petites feuilles dont un calice est composé. ForLiGure ; fruit ordinairement géminé , à péricarpesec, univalve s’ouvrant Jougitudinalement, Les qui a qui ne produit que VOCABULAIRE. 7 309 apocynées seulés ont un fruit véri- nement des plantes vivaces et li- tablement en follicule. Fourceuv, £; synonyme de bifur- qué, qui a la figure d’une fourche. Fnraxc; arbre qui n’a pas été gref- fé. FRancé, E; à découpures très- fines, comme faites à coup de ci- seaux et sans perte de substance. Frisé, E; synonyme de crépu. Voyez ce mot. Fronpe ; expansions foliacées des cryplogames,. Fnucrirëre ; qui porte des fruits, Frucriricarion ; temps ou action de porter des fruits. Frucrirorue ; qui a la forme d’un fruit. j Fnurr ; dernier résultat de la fé- condation par lequel l'ovaire ac- quiert son entier développement, et ses graines leur maturité. Fruvescenr, E; se dit d’une plante à tige ascendante, vivace, ligneuse, mais privée de bour- geons. Fruricuceux, se; se dit d’une plante petite et ligneuse, formant arbuste. FnruriQueux, se; se dit d’une plante ligneuse, formant arbris- seau, Fusirorme ; qui a la forme d’un fuseau; c’est-à-dire, allongé, cy- lindrique, renflé dans le milieu de la longueur. G. Gaixe; espèce de fourreau for- mé par l'expansion d’une partie qui en embrasse une autre. Gazonxeux ou GazonnanT; qui forme gazon par ses tiges nom- breuses et courtes, et ses feuilles iouflues. Gérarineux, se; de la consis- tance d’une gelée , ou gélatine. GEMINE , E ; naissant deux à deux du même point. Grmixeess (rLEurs); quandelles sont au nombre de quatre, deux à deux, sur un pédoncule commun. Il s'emploie aussi pour les feuil- les, etc. Gemmariox; on donne ce nom à tout ce qui concerne le bourgeon- gneuses. Gewue; bouton au bourgeon non encore développé. Gemmipare ; qui produit des bourgeons. Les plantes annuelles ne sont Jamais gemmipares. GENERATION (ORGANES DE LA) ; il ne faut pas les confondre avec les organes de la fécondation : ce sont les ovaires seulement. GanicuLé, £; synonyme de ge- nouillé. GexouiLé, # ; articulé, noueux, coudé à chaque nœud, ou quel- quefois seulement coudé brusque- ment. Gzenue; on appelle ainsi lem- bryon avant sa fécondation. GERMEE ( GRAINE ), quand sa ra-- dicule commence à se montrer. GErminarTion; premier moment de la végétation d’une graine. Gisseux ; synonyme de bossu. Gzasre; sans poils ni duvet. GLarréitTÉ; état d’une chose glabre. GragriuscuLe ; presque glabre. Gzranié, E; en forme de glaive; synonyme d’ensiforme. Graxv; sorte de fruit sec, mo- nosperme, ne s’ouvrant pas, tel que les fruits du chêne, du hêtre, du noisetier. Gzaxpes; petits corps vésicu- leux, distillant souvent une li- queur particulière, et se trouvant sur différentes parties des végé- taux. Gzanpureux; qui a des glandes ou qui en est composé. Grauque ; qui est couvert d’une poussitre extrémement fine, blan- che; ce qui donne à la partie une couleur de vert de mer, ou de vert bleuâtre. Groseux; arrondi en forme de globe. Grorureux; arrondi, presque globeux. Gzuuant; couvert d’une liqueur visqueuse qui s'attache aux doigts. Gzuue ; enveloppeintérieure des fleurs graminées, remplaçant la corolle. Quelques auteurs appel- lent glume l'enveloppe extérieure, et bale l'enveloppe intérieure. 306 Gover (Ex) ; se dit d’un calice ou d’une corolle à base enflée et sommet rétréci: Gouxe; excrétion de quelques végétaux, et particulièrement des arbres à fruits à noyau. Gorcz; orifice de la partie tu- bulée d’un calice ou d’une corolle. Gounwann; Jet gros, droit, vi- goureux, attirant souvent une trop grande quantité de sève, dans les ‘arbres fruitiers , ce qui la détourne des fruits. Gousse ; fruit bivalve , ordinai- rement allongé, membraneux, à sutures bordées, et l’une portant les graines alternativement rangées sur ses deux bords, Gnae; œuf végétal contenant l'embryon fécondé d’une nouvelle plante semblable à celle qui l’a pro- duite. Graminée ( FeuiLze ); longue, étroite, à nervures toutes longitu- dinales, ressemblant enfin aux feuilles du chiendent, et autres plantes graminées. Gnaminee ( PLANTE ); celle dont la tige consiste en un chaume ar- ticulé, et dont les fleurs ont une glume et une bale, remplacant la corolle et le calice. Grarre ; assemblage de fleurs ou de fruits disposés en divers petits groupes, ou fascicules plus ou moins ramilés et attachés sur un pétiole commun, de forme oblon- gue et plus large à la base qu’au sommet, Grèce; menu; dont la longueur est considérable relativement à la grosseur. Grimeanr, &; dont la tige, trop faible pour se soutenir elle-même, grimpe sur les corps voisins et s’y entortille, ou s’y attache au moyen de vrilles, de sucoirs, de racines. GxuxosPeRME; à semences nues. GxunosrenmiE; veut dire, en grec, graines nues. C'est le nom d’un ordre dans la classification de Lainnée. Grant; classe du système de Linnée, dont le caractère est dans la connexion des organes des deux sexes, PHYSIQUE VÉGÉTALE. Gyaie ; mot grec signifiant épou- se, et que l’on emploie dans les mots composés, pour indiquer le nombre des organes femelles d’une fleur. Monogynie, un pistil ; digy- nie , deux pistils ; polygynie, plu- sieurs pistils. Gueuze ( rLeur En ). Voyez Labiée, Personnée. H. Hawecoxxé; aigu et recourbé au sommet comme un hamecon. Hawrs ; tige herbacée, sans feuil- les, partant immédiatement de Ja racine : par exemple la tulipe, le pissenlit. Hasré, £; ayant la forme d’un fer de pique, c’est-à-dire en trian- gle allongé, subitement élargi à la base, et divisé en deux lobes di- vergens. Hepracyste; qui a sept pistils. HepTaNDRIE; qui a sept étami- nes. HepTAPÉTALE ; qui a sept pétales. Hensacé; qui est de la nature de Vherbe; se dit par opposition de ligneux. Hense; on appelle ainsi les plan- tes annuelles et celles qui perdent leurs tiges tous les hivers. Ces der- nicres, considérées sous le rapport de la durée de leurs racines, peu- vent être bisannuelles, trisannuel- les et vivaces. Hersier; collection de plantes desséchées et préparées de manière à pouvoir être conservées pour l’é- tude. Hersorrser ; aller à la recherche des plantes qui croissent spontané- ment dans la campagne. Hensorisre; il ne faut pas le confondre avec le botaniste. Le premier cherche des plantes offici- nales pour les vendre; le second herborise pour s’instruire et enri- chir la science. Hénissé, E; recouvert de poils rudes et très-apparens, quelque- fois de petites épines, d’aiguil- lons, etc. Heénissonxé, E; recouvert d’é- pines ou d’aiguillons raides, longs, flexibles, xombreux et rapprochés. VOCABULAIRE. Henwarnnonire (FLEUR ) ; qui a dans là même enveloppe florale, des organes mâles et des organes femelles, étamines et pistil. Héréronoxes ( aurEurs ); ceux qui ont établi des systèmes ou des classifications sur d’autres organes que ceux de la fructification. HérérornyLze; qui porte des feuilles caractéristiquement dis- semblables entre elles. Hérerorome; qui est irrégulier. Hexacynie; à six pistils. HexanDrie ; à six étamines, HexaPeraLe; à six pétales. Hexaruyzre; à six feuilles ou folioles. ; HexaprÈrRE ; qui a six ailes. Hire; ombilic: d’une graine; point superficiel, et souvent mar- qué d’une cicatrice, par où une graineétait attachée. Hirsure; synonyme de velu, couvert de poils rudes et assez Jongs. Hisrine; garni de poils longs, raides et alvéolés ou tuberculés à la base. Hivervaz, E; qui naît ou pro- duit en hiver. Hounomarze; dont les: parties composantes sont tournées du mé- me côte. HorrzonTAL, E; qui coupe à an- gle droit une ligne verticale. Hourre; assemblage de poils naissant au mêmé point d'insertion et s’'écartant au sommet. Huwrruse ( rrce ); couchée sur la terre, mais sans y prendre ra- cine. Hysrine (PLANTE) ; celle qui naît d’une graine fécondée par deux espèces différentes. Hyvo ; signifie en grec dessous. On s’en sert dans les mots compo- sés , et l’on dit : HyrocoroLztie, la partie placée sous la corolle, etc. HxrocrATÉRIFORNE ; en forme de soucoupe. Hyrocxxes, les étamines ou la corolle placées sous l’ovaire, I. “Ecosanprie; veut dire, en grec, 307 qui a vingt maris. Linnée appelle ainsi une classe de plantes qui ont une vingtaine d’étamines insérées sur le calice. IcosaxDRIQUE ; appartenant à li- cosandrie, Iusense; dépourvu de barbe; sans poils. Iuvniqué, #; se dit des parties appliquées en recouvrement! les uuées sur les autres, comme les tui- les d’un toit. Iupaie ( rorroe) ; celle qui est terminale, solitaire, terminant une feuille pinnée. On dit, pinnée avec impaire, quand cette foliole terminale existe; pinnée sans im- paire, quand elle n'existe pas, et que la feuille se termine par une paire de folioles opposées. Iuparrair,£; ce qui n’est pas ar- rivé à son degré ordinaire de per- fection. InaLBUMINE ; qui manque d’albu- men. IxaxGuré, £; sans angle. Incazicée (FLEUR) ; qui n’a pas de calice. Ixcaxe; blanchâtre par pubes- cence. Ixcisé, #3; dont les bords sont découpés par des incisions étroites et aiguës. Incrus , #; qui ne fait point sail- lie hors de la partie contenant. IxcomBANTE ( ANTHÈRE ); quand elle est attachée au filet par le mi- lieu du dos ou par un point plus élevé, et que sa partie inférieure touche au filet On dit encore que les divisions d’un calice ou d’une corolle sont ircombantes, quand elles se recouvrent latéralement. Ixcouprer, E; se dit particuliè- rement des fleurs auxquelles il manque une des parties ordinai- res : étamines ou pistil, corolle ou calice. On emploie ce mot par op- position de complet. Ixcoursk, E; qui est courbé en dedans. InnemisçenT, E; qui ne s’ouvre pas. Invenré, E; sans dents. Ixnicëxz; qui est naturel à un pays. Opposé d’exotique. 308 Inécar, £; dont les parties n’ont pas les mêmes proportions. INÉQUILATÉRAL OU INEQUILATÈRE; dont les côtés sont inégaux. InéqQuivaLve ; à valves inégales. Ixenue; privé de poils, d’aiguil- ons et d’épines. Ivrère (ovaime); quand il cest placé au dessous du calice, ou pa- raît avoir cette disposition. INFÉROVARIE, E; à ovaire infère. Inxreuizce, synonyme d’aphyl- le, sans feuilles. Ixrzecui; fléchi en dedans. Ixrronescexce; disposition des fleurs. La tête ou capitule, le cha- ton , le corymbe, la cyme, Pépi, la grappe, l’ombelle, la panicule, le spadice, le thyrse, le verticille, sont autant de sortes d’inflores- cences. l’oyez ces mots. INFUNDIBULIFORME, CU INFUNDI- BULÉ; qui a la forme d’un enton- noir. Innarariox; faculté qu'ont les plantes de se pénétrer des fluides dans lesquels on les plonge. InonDéEs ( PLANTES ); qui nais- sent au fond de l’eau et ne vien- nent jamais flotter à la surface. {nserriox; lieu où naît une par- te, où elle prend son point d’at- tache. Ixsexeé, E; qui n’a pas de sexe. InsriPuLé, E; Qui n’a pas de sti- pules. IxreRMÉDIAIRE ; Ce qui est situé entre deux autres parties. Ixrerromeu, £; dont les parties sont interrompues par des vides ou des parties plus petites. On dit une feuille pinnée - mterrompue quandde petites folioles sont inter- posées entre des plus grandes, InTrERVALVAIRE (CLOISON) ; quand les valves sont soudées sur ses bords, de manière à ce que, lors- qu’elles s'ouvrent, la cloison reste libre. Comme par exemple dans la silique à deux loges. Inricé , E; synonyme d’acaule, sans tige. Exronsiox ; contorsion ou flexion autre que celle que la partie de- vrait naturellement avoir. Inrronse ( anrnère ); lorsqu’elle s'ouvre du côté du pistil. PHYSIQUE VÉGÉTALE. Ixrus - suscerrion ; on appelle ainsi la faculté qu'ont les êtres or- ganisés vivans d’absorber par tou- tes leurs parties de certains prin- cipes susceptibles d’être assimilés à leur propre nature. IxvozvesLee; petitinvolucre par- tiel. Exvorucre; assemblage de feuil- les, ou folioles, placé à la base com- mune de plusieurs pédoncules , et formant comme une espèce de col- lerette. On donne encore ce nom au calice commun des fleurs com- posées et des fleurs agrégées. : Invozucré; munid’uninvolucre. Invozurée (FEUILLE ) ; cellequi, avant son développement, est re- phée de manière à ce que ses bords soient roulés en dedans sur eux- mêmes. IRRéGULIER, E; qui manque de symétrie. InRitaBiiTe ; faculté d’être irri- té. Les causes immédiates de l'ir- ritabilité sont inconnues. Inrirazze; doué de la faculté d'exécuter de certains mouvemens déterminés par un agent quelcon- que. Isosrémones ( ÉramiNEs ); lors- qu’elles sont en même nombre que les parties de la corolle. On les dit DUPLOSTEMONES quand elles sont en nombre double, J: Jasré , E; quand la partie colo- rée a des panaches courts, étroits et très-multipliés. Jer; on appelle ainsi le jeune rameau résultant du-développe- ment d’un bourgeon. Juze ; synonyme de chaton. Voyez ce mot. L. Lapré ,#,-se dit d’un calice ou d’une corolle d’une seule pièce, partagée transversalement en deux découpures nommées lèvres , dont lune supérieure et l’autre infé- rieure. Quelquefois une des lèvres manque, et on dit alors que le calice ou la corolle sont urilabiés. VOCABULAIRE. Lacne; quand les parties com- posantes s’étalent et s'écartent les unes des autres. Lacnié, # ; découpé en lanières inégales et irrégulières, c Lacré ; qui ressemble à du lait. LacrescENTES (PLANTES); Quiiais- sent échapper une liqueur laiteuse des blessures qu’on leur fait. Lacusrnaz, #3; qui naît dans les eaux des lacs et des grands étangs, ou sur leurs bords. Lacénironme; qui a la forme d’une fiole ou d’une bouteille. Laixeux, se; couvert d’un du- vet dépressible, composé de poils moux, assez longs, diffus et entre- lacés. j Larreux, se; synonyme de lac- tescent. Laws; partie supérieure, ordi- nairement élargie et étalée d’un pétale. Lanezré,E;quia la forme d’une pelite lame. LaueLLeux, SE ; qui est composé de petites lames. Lancrore, £; ressemblant à un fer de lance, c’est-à-dire oblong, élargi au milieu, et finissant en pointe à la base et au sommet. Lancuerre, prolongement long, étroit et latéral d’un demi-fleuron. Laréraz, E; qui a son insertion sur un côté. LaxirLore ; dont les parties sont écartées les unes des autres par la distance, la divergence; la longueur et la faiblesse des pétioles ou des pédoncules. Lecume; synonyme de gousse. oyez ce mot. Lécummeux, se; dont le fruit est une gousse. Lécumimironme; qui a la forme d’une gousse. LENTICULÉ OÙ LENTICULAIRE ; qui a la forme d’une lentille. Livre. /’oy. Labié, Personnée. Laver; dernière couche de l’é- corce, composée de plusieurs pel- licules appliquées les unes sur les autres comme les feuillets d’un li - vre,et formant l’aubier en se déta- chant de l'écorce. Lire (oyaire); qui ne fait pas corps avec le tube du calice. Les 309 étarnines sont libres quand elles ne sont pas soudées entre elles, soit par les anthères, soit par les filets. Lréceux où suréreux ; qui est à peu près de la nature du liège ou lui ressemble. Licxé où LINE ; qui est marqué de lignes fines et colorées, Laicneux, se; qui est de même nature et consistance que le bois. Lacure ; qui est en languette ou en porte une. Lairiace , &; qui ressemble à un lis. Lime; est la partie plane et éta- lée d’une corolle où d’uu calice, se prolongeant au-dessus du tube ou dés onglets. Lingaire ; aplati, étroit, allongé, ayant les deux bords parallèles. Lincurronue ; en forme de lan- ue. lasse ; glabre et uni. Livrer ; synonyme de liber. Voyez ce mot. Lose; partie saillante et ob- tuse formée par des échancrures d’une certaine profondeur. Lore ; qui est composé d’un ou plusieurs lobes, bilobé, trilobé, etc. Loses sémINaux ; synonyme de cotylédons. #’oyez ce mot. LocuzaiRE ; pour indiquer qu’un fruit a une ou plusieurs loges; et l'on dit : uniloculaire, à une loge ; biioculaire , à deux loges, etc. Loces; on appelle ainsi les ca- vités qui se trouvent dans un fruit. Louvre; excroissance ligueuse ou charnue qui se trouve sur les tiges et les branches des végétaux. Luisanr, E; comme vernissé. Lunuze,s; en forme de croissant. Lyrée (reurrce) ; oblongue, à disque élargi et entier à sa partie supérieure , divisée inférieurement en plusieurs lobes latéraux qui vont toujours en diminuant de gran- deur à mesure qu'ils se rappro- chent de la base. M. Macuse; tache irrégulière , plus ou moins large, d’une couleur dif- férente du fond. Macure, &; qui a des macules, 3510 Marcrer; quelques auteurs don- nent ce nom à une bouture munie d’un talon de vieux bois. Mains ; synonyme de vrille. Voyez ce mot. Mazes (rceurs); celles qui man- quent d'organes femelles , e’est- à-dire, qui w’ont que des étamines. MameLonNe, € ; dont la surface porte des petites protubérances charnues plus ou moins coniques et arrondies au sommet. Mareré, 8; panaché irrégulié- rement, comme les veines du marbre. MancescExT , £; qui persiste, se dessèche et meurt sans tomber. Mancinxé , synonyme de bordé ; dont le bord est d’une autre cou- leur et d’une autre substance. Marine (PLANTE) ;-qui croît daus la mer. Manimime; quicroitsur les bords de la mer. Masque (FLEUR EN); synonyme de personnée. Voyez ce mot. MévratnEs; quioccupele milieu. MensranEeux; trèés-mince, pres- que dénué de substance intérieure, ayant la consistance d’une mem - brane. Une partie se dit encore membraneuse lorsqu’elle est com- posée de plusieurs membranes ap- pliquées les unes sur les autres. Mer£orique et quelquefois Mé- TÉOROLOGIQUE ( FLEUR ) ; quis’ouvre ou se ferme à la fin ou au commen- cement d’un orage. Méruons; classification artifi- cielle des plantes. Le système en est la classification naturelle. Nous allons présenter ici le tableau de la méthode sexuelle de Linnée, que les amateurs pourront compléter en y rapportant tous les genres décrits dans cet ouvrage. 1° FLEURS VISIBLES. À. HERMAPHRODITES. * Liamines libres, égales. Une étamine. Classe rre. MONANDRIE. Une étamine et un pistil. Ordre 1e", Monandrie -monogynie. PHYSIQUE VÉGÉTALE. Une étamine et deux pistils. Ord. 2°. Monandrie-digynie. Deux étamines. Classe 2°. DIANDRIE. Deux étamines et un pistil. Or- dre 3°. Diandrie-monogynie. Deux étamines et deux pistils. Ord. 4°. Diandrie-digynie. Deux étamines et trois pistils. Ord. 5°. Diandrie-trigynie. Trois étamines. Classe 3°. TRIANDRIE. Trois élamines et un pistil. Ord. 6°. Triaudrie-monogynie. Trois étamines et deux pistils. Ord. 7°. Triandrie-digynic. Trois étamines et trois pistils. Ord. 8. Triandrie-trigynie. Quatre étamines. Classe 4°. TÉTRANDRIE, ne élamines et un pistil. Ord. 9°. Tétrandrie-monogynie. Quatre étamines et deux pistils. Ord. 10°. Tétrandrie-digynie. Se élamines et trois pistils. Ord. 11°. Tétrandrie-trigynie. Quatre étamines et quatre pis- tils. Ord. 12°. Tétrandrie - tétra- gynie. Cinq étamines. Classe 5e, PENTANDRIE. Cinq étamines et un pistil. Or” dre 13°. Pentandrie-monogynie. Cinq étamines et deux pistils. Ord. 14°. Pentandrie-digynie. Cing étamines et trois pistils. Ord. 15°. Pentandrie-trigynie. « « D . 0 Cinq étamines et quatre pistils. Ord. 16°. Pentandrie-tétragynie. y: n n . D. . . Cinq elamines et cinq pistils. Ord. 17°. Pentandrie-pentagynie: . . “ (ol « Cinq étamines et dix pistils. q £ ES Ord. 18°. Pentandrie-décagynie. ER L Ru Cinq étamines , et pisils en nombre indéterminée. Ordre 19°. Pentandrie-polygynie. Six étamines. Classe 6e. HEXANDRIE. Six étamines et un pistil. Or- VOCABULAIRE. dre 20°. Hexandrie- monogynic. Six étamines et deux pistils. Ord. o1°. Hexandrie-digynie. Six élamines et trois pistils Ord. 22°. Hexandrie-trigynie. Six étamines et six pistils, Or- dre 23°. Hexandrie-hexagynie. Six étamines, et pistils en nom- bre indéterminé. Ord.24°. Hexan- drie-polygynie. Sept étamines. Classe 7°, HEPTANDRIE. Sept étamines et un pistil. Or- dre 25°. Heptandrie-monogynie. Sept étamines et deux pistils. Ord. 26°. Heptandrie-digynie. Sept étamines et quatre pistils. Ord. 27°. Heptandrie-tétragynie. Sept étamines et sept pistils. Ord. 28°. Heptandrie-heptagynie. Huit étamines. Classe 8°. OCTANDRIE. Huit étamines et un pistil. Or- dre 29°. Octandrie-monogynic. {luit étamines et deux pistils. Ord. 30°. Octandrie-digynie, fluit étamines et trois pistils. Ord. 31°. Octandrie-trigynie. Îluit étamines et quatre pistils. Ord. 32°. Octandrie-tétragynie. Huit étamines , et pistils en nont- bre indéterminé. Ord. 33°. Octan- drie-polygynie. Neuf étamines, Glasse 9°. ENNÉANDRIE. Neuf étamines et un pistil, Or- dre 34°. Ennéandrie-monogynie. Neuf étamines et trois pistils. Ord. 35°. Ennéandrie-trigynie. Neuf étamines et six pistils. Ord. 36°. Ennéandrie-hexagynie. Dix étamines. Classe 10°. DÉCANDRIE. Dix étamines et un pistil. Or- dre 37°. Décandrie-monogynie. Dix étamines et deux pistils. Ord. 38°. Décandrie-digynie. Dix étamines et trois pistils. Ord. 39°. Décandrie-trigynie. Dix étamines et cinq pistils. Or- 311 dre 40°. Décandrie - pentagynic. Dix étamines et dix pistils, Or- dre 41°. Décandrie-décagynie. Douze à dix-neuf étamines. Classe 11°. DODÉCANDRIE: Douze 4 dix-neuf étamines et un pistil. Ord, 42°. Dodécandrie- monogynie, Douze à dix-neuf étamines et deux pistils. Ord. 43°. Dodécan- drie-digynie. Douze à dix-neuf étamines et trois pistuls. Ord. 44°. Dodécandrie- tétragynie. Douze à dix - neuf. éltamines et quatre pistils. Ord. 45°. Dodécan- drie-tétragynie, Douze à dix-neuf élamines et cinq pistils. Ord. 46°. Docécandrie- pentagynie. Douze à dix-neuf étamines et six pistils. Ord. 45°. Dodécandrie- hexagyuie. Douze à dix-neuf étamines et douze pistils. Ord. 48°. Dodécan- drie-décagynie. Vinet étamines ou plus, insérées le] À , sur le calice. Classe 12°. Ico- SANDRIE. Vingt étamines au moins sur le calice, un pistil. Ord. 49°. Icosan- drie-monogynie. Vingt élamines au moins sur le calice , déux pistils, Ord. 50°. Ico- sandrie-trigynie: Vingt étamines au moins sur le calice , trois pistils. Ord. 51° Ico- sandrie-trigynie. Vingt étamines au moins sur le calice, cinq pistils. Ord. 52° Ico- sandrie-pentagynie. 1 Vingt étamines au moins sur le calice, pistils en nombre indéter- miné. Ord. 53°. Icosandrie -poly- gynie. Plus de vingt étamines , jusqu’à cent, n’adhérant pasau calice. Classe 13°. POLYANDRIE. Vingt étamines au moins sur le réceptacle, un pistil. Ord. 54°. Polyandric-monogynie. 312 Vingt étamines au moins sur le réceptacle, deux pistils. Ord. 55°. LUE MES | Polyandrie digynie. Vingt étamines au moins sur le , © “ . . réceptacle , trois pistils. Ord. 56°. Polyandrie-trigynie. Vingt étamines au moins sur le réceptacle, quatre pistils. Ord. 57°. Polyandrie-tétragynie. W’ingt étamines au moins sur le réceptacle, cinq pistils. Ord. 58°. Polyändrie-pentagynie. Vingt étamines au moins sur le réceplacle, pistils en nombre in- déterminé. Ord. 59°. Polyandrie- polygynie. ** Elamines inégales, deux toujours plus courtes. PHYSIQUE Quatre étamines, dont deux lon- gues et deux courtes. Classe 14°. DIDYNAMIE. Quatre graines nues au Jond d'un calice persistant. Ord. Go. Didynamie-gy mnospermie. Plusieurs graines rerifermées dans une capsule. Ord. 7°. Didy- namie-angiospermie. Six étamines, dont quatre lon- gues et deux courtes. Classe 15€. TÉTRADYNAMIE. Graines renfermées dans une silicule. Ord. 62°. Tétradynamie- siliculeuse. Graines renfermées dans une silique. Ord. 63°. Tétradynamie- siliqueuse. *** Llamines réunies par quel- ques-unes de leurs parties, ou avec le pistil. + Ltamines réunies par leurs filets. En un seul corps. Classe 16°, MONADELPHIE. Trois étamines. Ord. 64°. Mo- nadelphie-triandrie. YÉGÉTALE. Cinq étamines. Ord. 65°. Mo- nadelphie-pentandrie. W'ept étamines. Ord. nadelphie-heptandrie. Huit etamines. Ord. nadelphie octandrie. Dix étamines. Ord. 68°. Mona - delphie-décandrie. Onze étamines. Ord. Go°. Mo- nadelphie-endécandrie. Douze étamines. Ord. 50°. Mo- nadelphie-dodécandrie. Ætamines en nombre indéter- miné. Ord. 71°. Monaldelphie-po- lyandrie. 6G:. Mo- 7°. Mo- Etamines réunies en deux corps par leurs filets. Classe 17°. DiADELPHIE. Cinq étamines. Ord. 72°. Dia- delphie-pentandrie. Six étamines. Oxd. 73°. Diadel- phie-hexandrie. Huit étamines. Ord. 54°. Dia- delphie-octandrie. Dix étamines. Ord. 55°. Diadel- phie-décandrie. Etamines réunies en plusieurs corps par leurs filets. Classe 18°. POLYADELPAHIE (1). Dix étamines. Ord. 76°. Po- lyadelphie -décandrie. Douze étamines. Ord. 77°. Po- lyadelphie-dodécandrie. V'ingtétamines et plus. Ord. 78e. Polyadelphie-icosandrie. n très-grand nombre d'éta- mines. Ordre 59°. Polyadelphie- polyandrie. ++ Z'tamines réunies par leurs anthères. EÉtamines réuniesentre elles par leurs anthères. Classe 19°. SYNGÉNÉSIE. Fleurs composées ; tous les fleu- rons hermaphrodites. Ordre 80°. Syngénésie-polygamie-égale. (1) Quelques botanistes ne regardant pas comme un caractère assez constant d'avoir les étâmines réunies par leurs filamens en plus de deux faisceaux, ont cru devoir supprimer cette classe, et transporter les genres qu’elle renfermait dans la treizième classe , celle de la polyandrie, YOCABULAIRE. Fleurs composées; fleurons du centre hermaphrodites : ceux de la circonférence femelles. Ord. 81°. Syngénésie-polygamie-superflue. Fleurs composées ; fleurons her- maphrodites au centre et stériles & la circonférence. Ord. 82°. Syn- génésie-polygamie-frustranée. Fleurs composées ; fleurons md- les au centre et femelles à la cir- conférence. Ord. 83°. Syngénésie- polygamie-nécessaire. fleurs agrégées ; tous les fleu- rons séparés dans autant de petits calices particuliers. Ordre 84°. Syngénésie-polygamie-séparée (1). Étamines réunies au pistil par leurs anthères. Classe 20°. GYNANDRIE. Une étamine sur le pistil. Or- dre 85°, Gynandrie-monandrie. Deux étamines sur le pistil. Or- dre 86°. Gynandrie-digynie. * Trois étamines sur le pistil, Ord. 87°. Gynandrie-triandrie. Six étamines sur le pistil. Or- dre 88°. Gynandrie-hexandrie. B, FLEURS UNISEXUELLES. Mâles et femelles sur le même pied. Classe 21°. MONOECIE. Une étamine. Ord. 89°. Monæ- cie-monandrie. Deux étamines. Ord. 90°. Mo- nœcie-diandrie. Trois étamines. Ord. g1°. Mo- nœæcie-triandrie. Quatre étamines. Ordre 92°. Monœcie-tétrandrie. Cinq étamines. Ord. 93°. Mo- nœcie-pentandrie. Six étamines. Ord,94. Monæcie- hexandrie, Flamines en nombre indéter- miné, Ord. 95°. Monæcie-polyan- drie. 313 Étamines réunies en un seulcorps par leurs filets. Ord. 96°. Monæ- cie-monadelphie. she ÆLtamines insérées sur le pistil. Ord. 97°. Monœcic-gynandrie. Mâles sur un individu, femel- les sur un autre. Classe 22e, DIOECIE. Une étamine. Ord. 98°. Diœcie- monandrie. Deux étamines. Ord. 99°. Diæ- cie-diandrie. Trois étamines. Ord. 100°. Diæ- cie-triandrie. Quatre étamines. Ord. 1o1°. Diœcie-tétrandrie. Cinq étamines. Ord. 102°, Diæ- cie-pentandrie. Six étamines. Ord. 103°. Diæ- cie-hexandrie. Huit étamines. Ord. 104°. Diæ- cie-octandrie, Neuf étamines. Ord. 105°. Diæ- cie-ennéandrie. Dix étamines. Ord. 106°. Diæ- cie-décandrie. Douze étamines. Ordre Diœcie-dodécandrie, Vingt étamines et plus sur le calice. Ord. 108. Diœcie-icosan- drie. Æiamines en nombre indéter- miné. Ord. 109°. Diæœcie-polyan- drie. Ltamines réunies en un seul corps par leurs filets. Ord. 110°. Diœcie-monadelphie. tamines insérées sur un pistil avorté. Ord. 111°. Diœcie-gynan- drie. *107°. Mûles et femelles sur des indivi- dus différens , ou sur le même avec des fleurs hermaphrodi- tes. Classe 25°. PoLYGAMIE (2). Fleurs mâles et fleurs femelles sur un méme indiwidu, avec des (1) Sous le nom de Syngénésie-monogamie, Linnée avait établi un sixième ordre renfermant les plantes à fleurs solitaires, ayant cinq étamines soudées par leurs an= thères, et un calice particulier. Les botanistes qui sont venus après lui ont confondu cet ordre dans la cinquième classe de la pentaadrie. (2) Quelques autenrs, pensant que les fleurs unisexuelles des plantes de cette classe n'étaient dues qu'à un gyortement, l'ont supprimée; ne prenant en considé- 1. 21 314 fous hermaphrodites. Ord. 112°. olygamie-monæcie. Mäles sur un individu, femelles sur un autre, mélées à des her- maphrodiles. Ord. 113°. Polyga- mie-diæcie. 2° FLEURS PEU OÙ POINT VISIBLES. Fleurs inconnues. Classe 24°, CRYPTOGAMIE. Fructification en épis distincts, ou disposée sur le dos des feuilles, eu radicale. Ord 114°. Fougères. Fructification logée dans des urnes pédicellées , rarement sessi- les, le plus souvent recouverte d’une coiffe ou d’un opercule. Ord. 115°. Mousses. Fructification en forme de glo- bules, de cônes, de cornes ou de tubes, s’ouvrant en quatre ou en un plus grand nombre de valves, et contenant des pousstéres atta- chées à des filamens élastiques dans La plupart. Oxd. 116°. Algues. Plantes dépourvues de feuilles, d'une consistance spongieuse, su- béreuse , et chargée d'une pous- sière logée dans des sillons, dans des lames , des plis , des pores, etc. Ord. r17°. Champignons. Telle est la méthode de Linnée, d'autant plus admirable que non- seulement toutes les plantes con- nues jusqu’à ce jour s’y rangent naturellement, mais encore que celles que l’on découvrira par la suite s'y rangeront de même. MoniLEe OU VAGILLANTE; se dit d'une anthère qui se balance, et est placée comme en équilibre sur son filet, Mozzze ; substance plus ou moins vasculeuse , occupant ordi- nairement le centre du corps li- gneux des végétaux. Moxanezruie; en grec veut dire un frère. Classe de plantes (selon le système de Linnée), dont les étamines sont réunies en un seul faisceau. PHYSIQUE VÉGÉTALE. Monannnin; en grec veut dire un mari. Classe de-plantes (selon Linnée) dont le caractère est de n'avoir qu'une étamine, On dit fleur monandre ou monandrique , de celle qui n’a qu’une étamine. Moxo; en grec veut dire un et s'emploie dans les mots composés : monopétale, quin’a qu’un pétale ; monogyne, qui n’a qu'un pistil ; monophylle, qui n’a qu’une feuille ou qu’une foliole ; monosperme, qui n’a qu’une graine ; #0n0cotylé- don, qui n’a qu’un cotylédon ; etc. Moxocine; en grec un seul lit; synonyme d’hermaphrodite. Moxocamie; en grec une seule noce ; dont les étamines sont réu- nies par leurs anthères, sans que la fleur soit composée. Moxoïque (PLANTE); qui a, sur le même individu, des fleurs mâles et des fleurs femelles séparées. MoxsTRE, MONSTRUOSITÉ; On in- dique par ces mots une plante ow une partie de plante qui, par un accident (quelquefois produit par l'art du jardinier), a acquis un changement de forme contre na- ture. Une fleur double est une monstruosité; le calice des roses mousseuses est une moristruosité. Moxraix, E ; qui croît spontané- ment sur les montagnes. Morpue (FEUILLE); quand son sommet est tronqué et terminé par des entailles inégales. Se dit aussi d’une racine qui se termine tout : d’un coup, comme si elle eût été rongée. Mucrowé ; terminé brusquement par une pointe étroite et aiguë. Murze; synonyme de masque. Voyez Fleurs personnées. MuzrricarsuLaiRe (FRuIT ); qui est composé de plusieurs capsules. Muzricaure (pLante); dont le collet de la racine produit plu- sieurs tiges. Muznirie; qui est divisé à peu près jusqu’à moitié ou un peu moins, par plusieurs incisions ai- guës. PEL nnnnnd ration que les‘fleurs hermaphrodites , ils ont transporté les végétaux qui la compo- saient dans les classes où ils vont naturellement se ranger par leurs autres carac- tères. VOCABULAIRE. Muzriwrore ; qui a plusieurs fleurs. Murrirosé ; qui a plusieurs lo- bes. MurrizocuLaIRE ; qui a plusieurs loges. Muzripre ( FLEUR ); synonyme de double. Ou ce qui contient plu- sieurs fois une chose simple, ou ce qui est formé de plusieurs choses similairés, comme ovaires, styles, fruits. MurrivaLve ; qui a plusieurs val- ves; qui s’ouvre en plusieurs val- ves. Muraz, 8; qui croît sur les murs. Murique, E ; couvert de pointes grosses et courtes. . Muriqus ; s'emploie par opposi- tion de mucroné; quin’est pas ter- miné par une pointe. N. Nacranr, Er; étendu à la surface de l’eau, Se dit des feuilles. Nain (arene ); qui est beaucoup au-dessous de la taille ordinaire. Naracée où NapirorME (RACINE); qui ressemble à un navet. Narurazisée ( PLANTE ); se dit d’une plante étrangère qui, rap- portée dans un pays, y croît spon- tanément. Il ne faut pas confondre ceterme avec acclimaté. Une plan- te se naturalise : nous ne croyons pas qu’elle puisse s’acelimater, du moins nous n’en connaissons aucun exemple. Narunez , re; tout cequiest dans l'ordre de Ja nature sans que l’art y ait part.» 1 Navicunams; creusé en forme de nacelle. Necraire; toute partie acces- soire d’une fleur, du moins pris dans le sens linnéiste, Nervé, £; qui a des nervures saillantes. Nervurss ; petites côtes fibreu- ses, plus ou moins saillautes, qui parcourent le limbe d’une feuille ou d’un pétale. Neurre, qui n’a pas de sexe. Noun ; renflement formé sur les tiges et les partageant en plusieurs espaces nommés entre-nœuds. 319 Norx; fruit formé par une enve- loppe ligneuse où osseuse, Conte- nant une ou plusicurs'graînés re- vêtues en outre de leur tégument propre. Nourcx ,se; qui a desnæads,ou des renflemens remarquables. Novau ; péricarpe osseux renfer- mant une amande. Nu, £; qui n’est recouvert où accompagné d’aucuneautre partie. Nucuzaie; fruit renfermant plu- sieurs noix en nombre déterminé, disposées sur un seul rang autour de l'axe vertical du péricarpe: Nurariox ; on appelle ainsi l'ac- tion par laquelle quelques parties des plantes se tournent du côté du soleil par un changement de direc- tion. Nurrrriow; l’action par laquelle les végétaux absorbent leur nour- riture. 0, On»; premiére partie d’un mot composé pourindiquer que la chose est renversée. Obconique, en cône renversé; obcordiforme, en cœur renversé; obclavé , en massue ren- versée; oboval, en ovale renversé ; obové, ayant la’ forme d’un œuf dont le gros bout est en haut, étc. Orzique; qui dévie de la direc- tion verticale. Osroxe ; plus long que large. Onrus; dont l'extrémité n’est pas aiguë. Osrusaxeuzé; dont les angles sont obtus on émoussés, | Osvozuré, £; dont les parties sont roulées les unés sur les autres. Ocranprie ; qui a huit étaminés. Nom d’une classe du systéme de Linnée. Ocrocevxte; qui a huit pistils. Nom d’un ordre du système ‘de Linnée. aol Ocror£raLé, x; qui a huit pé- tales. ; Ocroruvir£e; qui a huit feuilles ou folioles. ii dar té Œur; on donne quelquefois ce nom au gemme ou bouton ayant son développemeht. Quelques per- sonnes appellent encore ainsi une 316 petite cavité que l'on trouve au sommet de certains fruits. Par exemple, de la poire, dela pomme. CErzzeTow; petits rejets. qui sor- tent de la racine de certaines plan- tes, au moyen desquels on les mul- tiplie. Orricxaz, E; qui se‘vend dans ïes boutiques (autrefois officines ) pour être employé en médecine. Ocxox; synonyme de bulbe. Foycz.ce mot. OzéracE,E ; synonyme d’alimen- taire. Ozicorux£is; quiu’a que peu de feuilles. Oricosrerme; qui a peu de grai- nes. Orivarre ; en forme d'olive. Ouvecre (FLEURS Ex) ; quand les pédoncules , partant tous du même point, sont Lerminés par un amas de fleurs ou pédicelles uniflores paissant également du même point. OnuseLiairène ; qui porte une om- belle, Ouserrurx; petite ombelle en- trant dans la composition d’une ombelle composée. Oumixic; .enfoncement remar- quable au sommet d’un corps so- hide; on donne aussi ce nom à la- réole..terminant. un fruit infère,. Ouniniquée (reuirre.); peltée et ayant son disque plus ou, moins enfoncé au centre. Oxpé, r; ayant sur ses bords des plis gros et arrondis. OxourE, oxpureux; plus fine- ment ondé. Oxeze; petite tache fortement colorée qui se trouve sur le bout de l'onglet des pétales dans cer- taines plantes. Oxezer; partie inférieure d’un pétale, par laquelle il est immédia- tement attaché au réceptacle. L’onglet.est remplacé par le, tube dans Ja corolle monopétale. ONGLETTE, ONGUIGULÉ; qui a un onglet. Orencure; petit couvercle qui ferme une cavité quelconque et qui peut être soulevé sans déchirement à l’époque de la, maturité. . OrErcuLE; quia un opercule. Orrosé , 83 quand deux parties PHYSIQUE VÉGÉTALE. naissent sur les deux points oppo- sés d’un plan transversal. : Onmicuze, &; aplati et à circons- cription circulaire, approchant de Ja figure d’un cercle. OreiLLÉ, =; remarquable par deux petits appendices de la base qui sont comme séparés du reste par une contraction. OnGanes ; parties ‘essentielles destinées à des usages particuliers. Onrricz ; l'entrée d’un tube, d’une cavité, Ossezers; petits noyaux renfer- més en plus ou moins grand nom- bre dans un fruit charnu. Oursixxé; hérissé d’aiguillons très-grêles et très-rapprochés. Ouvert, £; synouyme d’étalé. Voyez ce mot. Ovaire ; partie inférieure du pistil, renfermant les embryons des graines, et devenant le fruit après la fécondation. Ov£, ovoine; ayant à peu près la figure d’un œuf. Ovuzes; rudimens de la graine reufermés dans l’ovaire. P. Pace; surface d’uve feuille ou d’un pétale, On dit page supérieure où inférieure pour les feuilles ; page intérieure ou extérieure pour les pétales. Parrrerres; petites lames mem- braneuses interposées entre Îles’ fleurons ou demi-fleurons de beau- coup de fleurs composées. Pazais; renflement que l’on voit près de orifice du tube sur la lè- vre inférieure de quelques fleurs personnées. Pargacé, E; garni de paillettes, ou de même nature que la glume des graminées. Parwe; mesure usitée en bota- nique pour indiquer la longueur de quatre travers de doigts ou d'à peu prés trois pouces. Paré, E; profondément divisé en plusieurs lanières allongées et naissant sur le même point, dema- nière à ressembler un peu à une Main ouverte; VOCABULAIRE Panxacné, #; mélangé de diverses couleurs. Panpunironms ou PanDuRé; qui alla forme d’un violon ; c’est-à- dire, oblong avec ‘deux échancrures la- térales et opposées. Paxiouzs; assemblage de fleurs disposées en une espèce de grappe dont les pédicules s’écartent lesuns, desautres etseramifient beaucoup. Panicuze, ; qui est disposé en panicule. Parirres; petites élévations glan- duleusesque-l’on:trouve sur la sur- face de quelques parties végétales. PariLLeux, SE; qui a des papilles ou en est couvert. PAPILLONACÉE (COROLLE) jirrégu- lière , à oinq pétales dont un supé- rieur et plus grand, nommé éten- dard ; deux latéraux, nommés ai- des; deux inférieurs réunis ou rap- prochés par leur bord inférieur et formant ensemblecomme une petite nacellenommée carène. Par exem- ple, la fleur du pois, du haricot. ParvtAcÉ, E; mince, Sec, mem- braneux, approchant de la consis- tance du papier. Parasrre ; qui croît sur un autre: corps et se nourrit à ses dépens. Leguiest une plante véritablement parasite, parce qu *elle se nourrit de la substance même de l’arbrequi la porte: Les mousses, les lichens ne sont que de fausses - parasites. parce qu’elles se nourrissent seule- ment del’humiditéqu’elles rencon- trent et qu ’elles , maintiennent sur les corps où elles croissent. Panencuymareux ; qui abonde en parenchyme; qui appartient au pa- renchyme. Parexcnywur; tissu cellulaire mou, spongieu*, pulpeux, qui rempht dansles feuilles, lestiges herbacces, les fruits, ete, les intérbtiées exis - tant entre le tissu vasculaire. Paniéraz, E; attaché à la paroi interne dela loge d’un fruit. Parti; profondément divisé par: des incisions aiguës. On dit biparti, triparti, multiparti, etc., selon le nombre des incisions. PanTiBLE OU PARTIBILE ; SUSCEP- tble de divisions spontanées. On dit aussi bipartible, tripartible, etc. 3r* Panriuris { CHUBÉEE ); $y or me d’ombellule, #oyeice mot. Paucrtone; qui a peu de fleurs. Paveriavré, 85. qui à peu de rayons, Paviuror ; synôny med’étendard. Voyez Papillonace €. PénrceLie ; petit pédoncule pro- pre de ehaque fleur. Pénicurr ; petit pied servant de support aux aigrettes, aux nec- taires et autres parties accessoires d'une plante, et qu’il ne-faut pas confondre avec un pédoncule. Pénicuré , 8j qui est porté sur un pédicule, | PépoxcuLe ; support cômmuün de plusieurs fleurs, ou support d’une fleur solitaire. Pépoxcuzé, 3 porté sur um pé- doncule : par opposition : ‘de sessilé. Pezré , x; en forme de bôucliér, ayantson support attaché à à la sur- face inférieure. RE Pexcré, E; incliné ou presque’ renversé par ‘une courbure du pé- doncule. Pespanr, £; dirigé comnte par débilité vers la terre. à Pexicizzé, #; qui ‘a Ja’ forme d’un pinceau ou d’uñt goupillén, PEnné. Voyez Pinaée: 41017 . PENTAGOoNE ; qui a cinq côtés for mant cinq angles. 1] PExTAGYNIE ; qui a cinq pistils. © PENTANDRIE ; qui a cinq étami- nes. Nom d’une classe du système de Linnée. F6 S PenraréraLé ; qui a cinq pétales: PenraPHyLLE; qui a Fa feuillés ou cinq folioles. PenraprÈère; qui a cinq ailes PEenTASPERNE;; à Cinq g grafnéssri Pris; graine recouverté! das tunique propre, épaisse ët coriaée comme dans la poire, la pomme La graine de raisin n’est pas ün pepin: Perrourée (reuiLre) ; dontla base entoure la.tige etsemble percée par elle A PÉRANTRE : enveloppe floralé quelquefois le calice. Péricarpe; enveloppeextérieure d'un fruit, tantôt sèche et mem- braneuse, tantôtépaissect charnue. Périconr.; selon Décandole, c’est l'enveloppe florale quand il »’y en 318 a qu'une. Quelques auteurs l'ap- pellent calice, d’autres, corolle,, dans la tulipe par exemple. Péricvyxe (éramine) ; lorsqu'elle prend naissance autour de l'ovaire, . PERISPERME; Corps qui, accom- pagne souvent l'embryon ;: n’offre aucune communication vasculaire avec lui, et se trouve placé sous les mêmes enveloppes. PerPENDICULAIRE ; qui ne penche ui d’un côté ni de l’autre. - PERRUQUE ; on donne ce nom aux racines garnies d’un chevelu touffu de fibrilles entrelacces. Pensisraxr; ce qui dure au-delà du temps ordinaire, Pensonxke (rLEur); quand la corolle imite un masque ou un mu- fle à,deux lèvres, ou qu’elle a la forme d’un capuchon. : Penruse (FEUILLE) ; parsemée de petits points transparens qui la font paraître comme criblée de petits trous... Pérare; nom desparties d’une co- rolle composée de plusieurs pièces. Prraxé; qui a une corolle. Pr£raLoive ; semblable à une co- rolle,ou un pétale. Péraroipz; synonyme de pétalé. PerioLainsy qui tient ou appar- tient au pétiole. PEriore; partie qui sert de sup- portaux feuilles; vulgairement la queue d’une feuille. ; ÉPIOLÉE, (æstuxe); qui à un pétiole; se dit par opposition de sessile. PiaxeroGane. f’oy. Fanérogame. Paxnarimine (reuizze); dont les côtés sünt divisés en plusieurs la- nières. où lobes, par des sinus profonds,:mais cependant n’at- teignant, pas la côte de la feuille. Gn dit Ja feuille bipinnatifide , tri- pinnatifide, quand ceslanières sont elles-mêmes une ou deux fois divi- sées de Jla:même manière. PINN&E Où AILÉE (FEUILLE) ; COM- posée de plusieurs folioles ran- gées opposilivemént ou alternative- ient:le long d’un pétiole commun. Quand les folioles sontopposéeson exprime le nombie des paires par ces ‘expressions bijouguées , trijou- guées, etc. multijouguées , à deux, PHYSIQUE. YÉGÉTABE. trois, etc. , plusieurs paires de fo- lioles. Pisriz; organe femelle d’une fleur. Il se compose de l'ovaire, du style, petit filet qui le surmonte, et du stigmate qui le couronne ou le termine. Quelquefois le style manque et alors on dit que le stig- mate est sessile. .Pivor; racine souvent unique, ou étant toujours la plus grosse, tendant à s’enfoncer perpendicu- lairement. Prvoraxts (RACINE) ; synonyme de pivot. Pracenra; partie interne du pé- ricarpe à laquelle la graine est at- tachée. Pranruze; nom de l'embryon quand il commence à se dévelop- r. Preis (rreur); celle dont tous les organes de la fécondation se sont métamorphosés en pétales. Pzicarize; susceptible de plisse- ment. ' Puissee (reuire) : celle dans la- quelle le disqueestalternativement élevé et abaissé en sillons'par des uervures longitudinales. Prumevux ; barbu comme une plu- me ; garni de poils disposés longi- tudinalement sur deux rangs op- posés. Prumurs; c’est dans l'embryon le premier développement de la tige, croissant verticalement eten sens opposé à la radicule: PiurisocuraArRE ; qui a plusieurs loges. Poriv; garnidepoilslongs, mous et distincts. PoixtiLzé, x; marqué de très- petits points. PozLex; poussière fécondante, souvent jaune , renfermée dans les anthères jusqu’au moment de la fé- condation. Porx; mot grec signifiant plu- sieurs et que l’on emploie dans les mots composés , pour indiquer que les parties sont nombreuses et en nombre indéterminé. Polyandrie , plusieurs étaminés; poly gynie, plu- sieurs pistils ; polypétale, à plu- sieurs pétales ; po/ysperme, à plu- VOCABULAIRE. 319 sieurs graines ; calice où PRY Ba Puzrs; substance médullaire et composé de plusieurs folioles. charnue des fruits, Porxangzrues (ÉTAMINES) ; réu- nies par leurs filamens en plusieurs faisceaux. Porxcame (PLANTE); qui porte sur le même individu des fleurs hermaphrodites, des fleurs mâles et des fleurs femelles. Porxcoxe; qui a plusieurs cô- tés. Powws; sorte de fruit succulent où charnu, bi ou pluriloculaire , dont les loges, revêtues intérieure- ment d’une membrane carthacée ou osseuse, sont situées près de l’axe du fruit , de manière à êtreou cohérentes entre elles, ou séparées Pune de l'autre. Du reste , tous les botanistes sont bien loin d’être d’ac- cord sur la définition de ce mot. Poxcruk, x; marqué de points assez gros. Pores; petites ouvertures im= perceptibles, par lesquelles les végé- taux respirent, absorbent et sécrè- tent. Porr ; synonymede facies. Voy. ce mot. Poracères (PLanTes); celles que Von cultive pour l’usage de la cui- sine. Poussière crauous. ’oy. Glau- que. À PoussièrE SÉMINALE ; Synonyme de pollen. f’oyez ce mot. Praz, £ ; qui croit dans les prairies. PRréFrLEuRAïsoN; on se sert de ce mot pour indiquer les différentes nianières d’être des parties d’une fleur , avant son épanouissement. PRiNTANIER ; qui a lieu, naît, ou produit au printemps. PrOcOMBANTE ( TIGE); qui, par débilité, tombe sur la terre , mais de manière à ne la toucher que par son extrémité. Prortrère (rcEur); lorsque de son disque naissent une ou plu- sieurs autres feuilles. Lorsque la prolification ne produit qu’un pé- doncule ou un rameau feuillu, on dit que la fleur prolifére est fron- dipare. Pussscenr ; garni de poils courts, mous , fins et distincts. Purreux, se ; composé d’une pulpe plus ou moins succulente. PuzveénuLenr; couvert d’uu du- vet trés-fin , très-court, peu adhé- rent , ressemblant à de la pous- sière. Pyramimaz, 8; qui a la forme d’une pyramide, Pyrironue ; ayant la forme d’une poire. 0; Quanrancuré ou QuannanGuLAI- RE ; qui à quatre angles. QUADRICAPSULAIRE; qui est com- posé de quatre capsules. QuanribeNTE ; qui a quatre dents. Quapririne ; à quatre divisions, dont les sinus sont à peu près égaux à la demi-longueur. Quanrircore; qui porte quatre fleurs, ou dont les fleurs sont rangées quatre à quatre. QuADRIUGUÉE (FEUILLE) ; com- posée de quatre paires de folioles opposées. Quaprirogé ; à quatre lobes. QuaDrivaLve ; qui s’ouvre en quatre valves. F Quarern£es ; parties rappro- chées quatre à quatre sur un même point. Queur ; appendice long, flexi- ble, souvent velu, qui termine certaines graines. Quies ; parties disposées cinq par cinq sur un même point. R. Rasoteux ; chargé d’aspérités et rude au toucher. Raccourcr, # ; plus large que long. Racnée ; assemblage de petites pousses qui se développent autour d’un tronc coupé rez terre, que l’on butte pour leur faire prendre racine et servir à la multiplication. Racns ; partieinférieure et sou- terraine d’un végétal, servant à le fixer au sol et à lui transmettre une partie de sa nourriture. Ranicaz , 8 ; qui naît de la racine ou lui appartient, 320 Rapicanr, 8; qui Jette des ra- cines distinctes de la racine prin- cipale. Ranicuze ; premier rudiment de la racine qui se développe dans l'embryon en sens inverse de la plumule. Ranie,E; parties qui rayonnent ou divergent autour d’an centre commun. On appelle fleurs ra- diées , celles composées qui ont des fleurons au centre et des demi-fleu- rons à la circonférence. Rae ; que l’on ploie dificile- ment, quoique allongé. Rauegau ; division de la branche. Faweux ; qui a un ou plusieurs rameaux. Ramizzs ; division du rameau. Rampanre (T1GE ) ; étendue sur la terre et s’enracinant cà et là. Raracée (RAGINE ) ; ayant la forme et à peu près Ja nature de la rave. RaRIFEUILLÉ ; qui a peu de feuil- les , éparses , éloignées les unes des autres. RarirLore ; ayant peu de fleurs, et dispersées. Raxow; partie rayonnante ; fleu- rons en languette de la fleur radiée. Récerracze ; fond du calice où est inséré l'ovaire. Dans les fleurs composées, c’est la partie élargie du pédoncule portant les fleurons et les demi-fleurons. Rscué ; droit et brusquement réfléchi au sommet. Recowposée ( FEuILLE ); deux fois composée, c’est-à-dire, ayant un pétiole commun, de seconds pé- tioles immédiats, et de troisièmes pétioles propres. Quand une feuille est plus de deux fois composée, on la dit surcomposée. Recourse ; courbé en dehors, RscriuscuLe ; presque droit. Repressé, E ; courbé ou arqué à la base, et se rapprochant de la ligne verticale au sommet. Rérrécur; courbé ou renversé en dehors. Récixe ; ensemble des grappes de fleurs de certains végétaux. Récuzrer, &; dont les lobes ou les parties sont semblables et dans les mêmes proportions. PHYSIQUE VÉGÉTALE. Renarms ; plat, ct dont la cir- conscription ressemble à celle d’un rein. Ressronxs ou rrJErs ; nouvelles pousses produites par le pied d’un arbre. Rénronme ; solide et ayant la forme d’un rein. Rexvensé, E; dirigé en sens contraire du corps portant ou con- tenant. ) Revre ( rÉRICARPE ); dont les valves sont réunies par autant de filets, qui en deviennent distinets par la déhiscence , après laquelle ils persistent. . RePropucrion ; par ce mot on entend tous les moyens que l’art et Ja nature emploient pour perpétuer et multiplier une espèce. Réseau (En); entrelacé lâche- ment comme les mailles d’un filet. Résine ; excrétion épaisse, vis- queuse, inflammable, ne fondant pas dans l’eau , suintant de diflé- rentes parties des végétaux, Resserre, £ ; dont les ramifica- tions ou parties se rapprochent de la tige ou d’un axe commun. Rericuze , E; marqué de ner- vures nombreuses et entrelacées comme les mailles d’un filet. Rérirorme ; en réseau. ’oyez ce mot. Rérnéct, £; diminuant de lar- geur. Rérus , #; trés-obtus , avec une dépression sensible. ReévoLutE, E ; roulé en dehors. RuompoïnaL, 5; quiaquatre an- gles, dont deux opposés plus aigus. RioE , & ; sillonné par des lignes enfoncées, formant comme des es- pèces de rides. RixGenr ; du verbe latin ringor, faire la grimace. Ce mot s'applique à quelques corolles labiées, qu’on a cru représenter grossièrement la figure d’un homme ou d’un animal. Riveraix , E; qui croît sponta- nément sur les rivages. Rosacée (rLEur) ; dont les pé- tales sont disposées à peu prés comme ceux d’une rose. Rosé ; qui a la couleur de rose. RoszLé ; disposé en forme de ro- _sette. VOCABULAIRE. Roszrrs (rLEur Ex) ; synonyme de fleur rosacée. Rosuze; fleur rosacée ou en ro- sette. Roracé ; sans tube et élalé en rond sur le même plan. Roues (rLEuRr Ex) ; synonyme de fleur rosacée , dont les divisions sont disposées à peu près comme les mollettes d’un éperon. RouiLLé , E ; couleur de rouille. Roure,E; ayant une ou plu- sieurs circonvolutions, Rusaxé , £ ; ayant des bandes longitudinales, à peu près paral- lèles, et de couleur différente. Rupe ;: qui présente des aspérités rudes au toucher. Rupérar ,E; qui croît sponta- nément autour des ruines et des masures, RuncixÉE ou RONGINÉE (FEUILLE); oblongue , latéralement divisée en Janières aiguës , inclinées ou cour- bées par en bas. La feuille du pis- senlit, par exemple. RurssrRaL , £; qui croît sur les rochers. Ruprire ; qui s'ouvre par rup- ture ou déchirure spontanée , et von par une suture. S. SAFRANÉ , E; d’un jaune de sa- fran. SAGITTÉ , E ; qui a la forme d’un fer de flèche , en triangle allongé, dont la base est profondément di- visée en deux lobes aigus. SAARE ; capsule coriace -mem- braneuse , comprimée , uni ou biloculaire , ne s’ouvrant jamais spontanément , aplatie, et comme foliacée par ses côtés au sommet. Par exemple, la capsule de l’orme. SARMENTEUX, SE; à tige fruti- queuse et grimpante. Sauvaceox; arbre qui n’a pas été reflé, et qui est né spontanément Las les bois ou les champs. SAXATILE ; qui croît à nu sur les pierres ou les rochers. ScaRIEUX, SE; membraneux, sec, sonore , souvent transparent. Sconrrormes ( GRAïNES ) ; qui, 321 au premier coup d'œil, ressem- blent à de la sciure de bois. ‘ ScroricuLeux; parsemé de petits trous concaves , creusés dans la substance même du corps. x SÉGÉTAL , £; qui croît parmi les moissons. SRMENCE ; synonyme de graine. SEMI-FLOSCULEUSE Gr 5 qui est toute composée de demi-fleu- rons. SÉMINAL , E ; quiappartient ou a rapport à la graine. SémNaTION; dispersion des grai- nes. SErTICIDE ( PÉRICARPE ), qui s'ouvre par des sutures correspon- dantes aux cloisons. SepTiFÈRE ; portant une ou plu- sieurs cloisons. SErr£; ce qui est trés-rapproché ou se touche. : SEerreTÉ , £; denté en scie. Si les dents sont elles-mêmes dentées, on se sert du mot biserreté. SERRULÉ , £; finement dentée en scie. Serrure ; assemblage de plu- sieurs pédicelles uniflores naissant tous du même point. Par exem- ple, l’inflorescence des primevères. SESSILE ; sans support; immé- diatement fixé sur la partie don- nant naissance ; fleur sessile , sans pédoncule ; feuille sessile, sans pétiole ; stigmate sessile , sans style, etc. SEracé ,E ; menu, se terminant insensiblement en pointe, comme une soie de cochon. SÉTEUx, se ; garni de soies ou parties sétacées. SEëve ; liqueur ordinairement limpide, qui circule dans les vé- gétaux et concourt à leur nutri- tion. Il ne faut pas confondre la sève avec les sucs propres. SExE ; comme les animaux, les végétaux ont des sexes, dont les organes sont les étamines pour les mâles, les pistils pour les femelles. Les sexes sont combinés de diverses manieres, auxquelles les botanistes ont donné des noms et ont appli- qué des signes abréviatifs. : Lorsqu'une fleur réunit dans la même enveloppe des étamines et 322 des pistils, on la dit hermaphro- dite, ce qui s’indique parce signe #. Lorsqu’elle n’a que des étamines, on la dit mâle à. Si elle n’a que des pistils , elle est femelle ® . On appelle monoïque ou andro- gyne une plante qui porte sur le même pied des fleurs mâles et des fleurs femelles ; dioique , celle qui porte des fleurs mâles sur un indi- vidu et des fleurs femelles sur un autre ; polygame, si le même in- dividu a des fleurs femelles. Quelques fleurs stériles n’ont ni organes mâles, ni organes femelles : on les dit neutres, et leur signe abréviatifse marque ainsi £. Siricure , ce n’est autre chose qu'une silique raccourcie, dont la largeur est presque égale à la lon- gueur, SILIQUE ; fruit sec, allongé, sim- ple , solitaire , équilatère , marqué de deux sutures longitudinales op- posées. Elle diffère de la silicule en ce qu’elle est toujours au moins deux fois plus longue que large. SILLONNÉ , E; qui a des lignes longitudinales creusées en gout- tières ou en sillons. SIMPLE ; qui ne se divise pas, ne se ramilie pas. SiNuE , #; dont les bords sont remarquables par des sinuosités ou des échancrures arrondies. SINUEUX ; Synonyme de sinué. SINUOLÉ ; à bords légèrement flexucux. Sote ; filament quelconque, res- semblant à une soie de cochon. SOLAIRES ( FLEURS ); qui n’é- panouissent eur corolle qu'aux rayons du soleil, et la referment lorsque cet astre n’est plus sur l'horizon. Soin ; qui a de l’épaisseur et n’est pas creux en dedans. SOLITAIRE ; qui est inséré seul. Sozuse ; composé de plusieurs pièces articulées bout à bout, et susceptibles de se détacher sponta- nement. Sowxeir ; état d’une plante dont quelques parties se ferment en changeant de position pendant la auit. - PHYSIQUE VÉGÉTALE. Sowugr; on donné quelquefois ce nom aux anthères. Il se prend toujours pour l’extrémnité supé- rieure. Sous , en latin sub ; préposition que l’on emploie comme diminutif dans les mots composés, et qui équivaut à presque ou à un peu ; subpetiolatus , sous-pétiolé, c’est-à- dire un peu pétiolé; subcordifor- mis, Sous -cordiforme, qui est presque en forme de cœur. Sous - ARBRISSEAU ; Synonyme d’arbuste. Voyez ce mot. Sous-AxILLAIRE; qui prend nais- sance sous l’aisselle. SOuTERRE , E ; qui tend à se ca- cher sous la terre. Par exemple, les fruits de l’arachide. Soyeux ,sE; couvert de poils mous , couchés , nombreux et lui- sans. SPADIX OÙ SPADICE ; rameau flo- ral dans la famille des palmiers. On donne encore ce nom à une petite colonne florifère qui s'élève d’une enveloppe particulière nom- mée spathe. Par exemple dans les arums. SPATHACÉ , E ; qui a une spathe ou qui est de la nature d’une spa- the et en remplit les fonctions. Srarue ; enveloppe foliacée ou membraneuse, quelquefois coriace ou même ligueuse, d’une ou plu- sieurs fleurs qui y sont d’abord renfermées et ne paraissent au de - hors que par son déroulement’, sa: rupture ou sa scission. 5 Sraruizce ; petite spathe pro- pre, enveloppant chaque fleur et renfermée dans la spathe commune. Sraruzé ,E 3; étroit et allongé à la base, large et arrondi au som- met, plat; ayant la forme d’une spatule de pharmacien. SrÊciFiQuE ; qui appartient ou qui est relatif à l’espèce. Sruérique ; arrondi en globe. SprnescenT ; qui se termine en pointe grêle , raide et piquante. SriraLé, £; tordu en spirale. SronGiEux , SE ; d’un tissu com- pressible et lâche, à peu près com- me une éponge. SroxTANÉ, E ; qui croît naturel- VOCABULAIRE. lement én un lieu, sans le concours de Part, SQUAMIFLORE ve ); dont les enveloppes florales sont écailleuses, SQuAMIFORME ; qui à la forme d’une écaille. SQUARREUX , 8E ; garni de parties rapprochées ou recourbées avec raideur, STAMINAL , E ; qui appartient ou est relatif à l’étamine. Sramneux, sk ; dont lesétamines sont très-longues. Sramuirère ; qui porte des éta- mines. STÉRILE ; qui ne fructifie pas, SriGmaTE; organe femelle cou- ronnant le pistil. STIMULEUX ; qui a des poils rai- des , à piqûre douloureuse et brû- lante. Sir ; espèce de tige des mono- cotylédones, souvent plus mince à sa base qu’au sommet ; celle des palmiers , des fougères, etc. Sririré , E; subitement rétréci à la base en une’sorte de support plus où moins allongé. STIPULATION ; tout ce qui con- cerne les stipules. STreuLE ; appendice membra- neux ou foliacé, accompagnant de chaque côté la base du pétiole d’une feuille, et faisaut souvent corps avec lui. STIPULE , E; Qui a des stipules, STIPULEUX, SE; ayant de très- grandes stipules. STOLONIFÈRE ; qui pousse par le pied des stolons ou rejetons ram- pans , susceptibles de s’enraciner de distance en distance. STRIE, £; marqué de lignes pa- rallèles peu élevées, ou seulement d’une couleur différente du fond. SrrosiLe ; synonyme de cône. Voyez ce mot. Sryze ; filet placé sur l'ovaire et portant le stigmate. Sryzé ( rRuir); qui conserve le pisül persistant. SuSEREUx ; Qui est à peu près de la nature du liége, qui lui ressem- ble. SUBMERGÉ , E ; quiestentiérement plongé dans l’eau sans jamais pa- raître à la surface, hors quelque- 323 fois au moment de la fécondation. SUBMERSIBLE ( FRUCTIFICATION ); quand les pédoncules ramènent le fruit sous l’eau après la féconda- tion. SueuLé, #; en alêne; insensible- ment terminé en pointe, SucouLenr ; rempli de suc. Sucoirs ; espèces de mamelons qui servent à de certaines plantes grimpantes à s’accrocher aux au- tres végétaux et à en tirer leur nourriture. Par exemple, la cus- cute, SucS NOURRICIERS; nom que l’on donne quelquefois à la sève. SUPÈRE OU SUPÉRIEUR (OVAIRE ) ; libre au fond de la fleur et distinct de toutes ses autres parties. . Surcomrosé, £; qui est plus de deux fois divisé. SurRPOSÉ Ou SUPERPOSÉ ,E ; parties posées l’une sur l’autre en série lon- gitudinale. SururaL, £; qui naît ou dépend d’une suture. Suture; impression longitudi- pale indiquant la soudure de deux valves ou autres parties. SvLvarique; qui croît dans les bois. SxLvESTRE; qui croît sans cul- ture. SYMPÉTALIQUES (ETAMINES); Qui réunissent les pétales de mamière à faire paraître la corolle monopé- tale. SYNANTÉREE (FLEUR) ; à étamines synantériques. SYNANTÉRIQUES (ÉTAMINES) ; réu- nies par leurs anthères. Sxncaree ; fruit composé de plu- sieurs petits fruits comme soudés et provenant d’une seule fleur à plu- sieurs pistils. FT: Tasrrer; pétale inferieur d’une fleur orchidée. T'acue ; marque arrondie ou oblongue d’une autre couleur que le fond. acné, E; marqué detaches ; sy- nonyme de tacheté. Taror; oreillette que Pon trouve à la base des feuilles d’orangers. 324 Técuwesr; ce qui enveloppe ou recouvre un organe. TEnzr; solide, sans angles soit rentrans, soit saillans, c’est-à-dire cylindrique. TéreTIuscuLE ; presque cylindri- due. TERGEMINEE (FEUILLE) ; dont le pétiole commun se divise en deux autres , portant chacun trois folio- les, dont deux au sommet , et l’au- tre à la base. rp . Terminaz, 2; qui forme le som- met. Terxé, E ; fixé trois à trois sur le même point. Feuille ternée, qui porte trois folioles. TEsr; cette partie osseuse ou pierreuse qui enveloppe la graine dans les fruits qu’on appelle vul- gairement à noyau. Tère (FLEURS EN TÊTE), synonyme de fleursen capitule. ’oy. ce mot. TérrADyYNAME (FLEUR); qui a six étamines, dont quatre longues et deux courtes. TErrAGoNE; qui a quatre côtés égaux. san £ te ge TérRAGyNIE; à quatre pistils. Nom d’un ordre du système de Lin- née. TérranDRiE ; à quatre étamines. Nom d’une classe du système de Linnée. TETRAPÉTALE; qui a quatre pé- tales. TéTrAPHYLLE; quia quatre feuil- les ou quatre folioles. TETRAPTÈRE ; qui a quatre ailes. TéTRASPERME ; qui a quatre grai- nes. Tuvyrse; épi rameux, cylindri- que et contourné. ice; partie ascendante d’une plante portant toutes les autres par- tes. TomsanT (cazice); par opposi- tion de persistant ; lorsque ses fo- lioles tombent à la fin de la florai- son. TomExTEUx, Se; synonyme de cotonneux. Toque; corolle cylindrique imi- tant un chapeau avec une partie du Himbe retroussée. Tors (»£rioLr) ; contourné sur lui-même. PHYSIQUE VÉGÉTALE. Tonrize; susceptible de torsion spontanée. Tonrueux, se; courbé inégale- ment en divers sens. Tonureux, se; oblong, solide, alternativement renflé et contracté sans articulations. TraçanrTe (RACINE); qui se pro- mène horizontalement entre deux terres et pousse des rejetons de tous côtés. Tracuées; vaisseaux formés par une lame plate et mince, roulée en spirale comme l’élastique d’unebre- telle, formant, par des étrangle- mens, de petites cellules. Traiasse; long filet qui traîne àterreouentre deux terres et prend racine à chaque articulation. Traxsversaz, E; qui est placé dans le sens de l’épaisseur d’une partie allongée, ou dans le sens de la largeur, si la partie est plane. TRAPÉZIFORME; qui a quatre côtés dissemblables, ou dont deux seu- lement sont parallèles. TRÉéFLé, E; composé de trois fo- lioles disposées comme celles du trèfle. TrrandRie; qui a trois étamines. Nom d’une des classes du système de Linnée. TRrANGULÉ , 8; qui a trois angles. TricarsuLAIRE ; qui a trois cap- sules. Tricoque ; formé de trois coques. TripenTé; à trois dents. Trier; fendu entrois, au plus, jusqu’à moitié de la longueur. Tricoxe; ayant trois faces ou côtés. Triévyxte; à trois pistils. Nom d’un ordre du système de Linnée. Truvcurk,E£. Voyez Pinnée. Trirosé, 8; à trois lobes. TrirocuratRe; qui a trois loges. TRineRvE, E; à trois nervures longitudinales. Triarrisze. Voyez Partible. Tripuyzre; à trois feuilles ou trois folioles. TRIPLINERVÉ , E; ayant cinq ner- vures principales longitudinales, deux naissant à la base de la côte, et les deux autres au-dessus, à une distance plus ou moins grande des premières. VOCABULAIRE. Triprène ; à trois ailes. Triquèrre; À trois faces planes et à trois angles aigus; synonyme de prismatique. Trisannugz, LE; qui dure trois ans. LA A . . Trispenme; à trois graines. Trirernée (FEUILLE) ; composée, dont le pétiole commun se divise et se subdivise trois fois. Trivazve ,£; à trois valves. Trocuer; bouquet de fleurs ou de fruits partant du même point. Tronc; corps principal d’une tige arborée; partant immédiate- ment de la racine et se divisant en branches. TronqQuE, £; terminé brusque- ment; comme si on avait coupé uet et transversalement. TrornosPerme; synonymede pla- centa. Voyez ce mot. Tusg ; partie laminée, cylindri- que et creuse. Tusercure; petites parties ar- rondies, solides, que l’on trouve sur les feuilles, les tiges et les ra- cines. On nomme encore tubercules toutes les parties distinctes d’une racine tubéreuse. TusercuLEux, SE; garni ou for- mé de tubercules. Tuséreuse (RACINE ); épaisse, charnue, solide, de forme variée. Tueuré, £; en tube ou en por- tant un. Tusureux, se; qui a un tube al- longé ou qui est fait en tube. Tuize, E; synonyme d’imbriqué. Voyez ce mot. Tunique ; enveloppe membra- neuserecouvrantdiflérentes parties des plantes, sans adhérer avec elles. Tunique, E; qui est entouré de tuniques. Turn, r;en forme de toupie ou de cône court et renversé. Turion; bourgeon radical des plantes vivaces. U. Uricinaire; qui croît dans les marais. Uricineux, se; synonyme du précédent. 325 Uni, # ; synonyme de lisse, Foy. ce mot. Urircore; qui ne porte qu’une fleur. Unirorme; dont les parties sont semblables entre elles. Uxiranté , &; dont le tube ne se prolonge qu’en une seule lèvre. UÜxiraréraz , £; tourné d’un même côté ou placé sur un seul côté. UnrocuraïRe ; à une seule loge, UnrpétaLEe, E; qui n’a qu'un pétale. UnisExEé, E; qui n’a qu’un sexe, mâle ou femelle. Uxivazvé, E; s’ouvrant d’un seul côté par une suture unique. Urcéoté, # ; renflé en forme de petite outre dont l'ouverture est rétrécie. Ürnricuzes ; petits vaisseaux per- cés par les deux bouts, appliqués Jun sur l’autre et remplis de sève, Ve VacirranT. Voyez Mobile. Vazve; pièce d’un péricarpe déhiscent. On désigne encore par ce mot une partie de la glume et de la bâle. Vécérar; on le définit « être or- « ganisé, vivant, dépourvu de sen- « timent et de mouvement volon- « taire.» Pour peu que l’on soit versé en histoire naturelle on sent la faiblesse de cette définition, mais on sent aussi l’extrême difi- culté de la remplacer par une meil- leure. Vécérarior ; developpement suc- cessif des parties qui concourent à la perfection d’un végétal. Vixe , &; se dit des parties sur lesquelles on voitun grand nombre de lignes non élevées ramifiées et anastomosées. Veru, #; garni de poils mous, longs, très-rapproches et serrés. Venrru, £; se dit d’une partie tubuleuse qui a un renflement très- marqué dans une partie de sa lon- gueur. VErsaTiLE (ANTUÈRE); fixée au sommet du filet par le milieu du 326 dos et susceptible de balancement. Verricice (En) ; inséré autour d’un axe commun et à la même hauteur. Verricirre; assemblage de par- ties placées en verticille, Vésicurains ; qui a la forme d’une petite vessie. Visqueux, se; enduit d’une li- queur gluante. Vivace (pLawre); dont les tiges meurent tous les ans, mais dont les PHYSIQUE VÉGÉTALE,. racines se conservent vivantes et repoussent chaque année. Vivipare (PLANTE) ; qui au lieu de fleurs produit des petits reje- tons feuillés ou des bulbilles. VozusiLe (rice) ; qui s’entor- tille en tournant autour des corps étrangers. Vnizee; filament simple ou ra- meux, nu, diversement recour- bé, roulé, etc. , servant aux plan - tes à s'attacher aux corps élran- gers. PHYSIOLOGIE. 327 CHAPITRE IL. PHYSIOLOGIE. Des végétaux. Qu'Esr-ce qu'un végétal ? Cette question paraît fort simple au premier abord , et cependant pour peu qu’on y réfléchisse, on se trouve fort embarrassé pour y ré- pondre. Les plantes sont des êtres organisés et vivans : Les voilà séparées net des minéraux; mais si nous vou- lons chercher des caractères qui les séparent avec la même netteté des animaux, nous ne tarderons pas à nous apercevoir que toutes les définitions employées jusqu’à ce jour, pour tracer une limite entre les deux règnes , sont fausses ou insuflisantes. Linnée a dit: Lapides crescunt ; vegetabilia cres- cunt et vivunt ; animalia crescunt, vivunt et sen- tiunt. Decandolle définit ainsi un végétal : « Étre or- ganisé et vivant , dépourvu de sentiment et de mouve- ment volontaire. » Duméril donne une définition un peu plus rigoureuse: « On appelle végétal ou plante, un être vivant, sans organe des sens et sans mouvement volontaire , qui se nourrit et se développe par une suc- cion ou absorbtion exercée à l’extérieur, et qui n’a ja- mais de cavité digestive. » Pour faire concevoir à nos lecteurs combien ces dé- finitions , quoique les meilleures de celles données par les auteurs, sont peu satisfaisantes, nous allons, dans une esquisse rapide, comparer les plantes aux animaux. Les animaux, comme les plantes, ont des organes qui, dans leurs dispositions particulières, remplissent chacun un emploi spécial, et dont l’ensemble agissant 328 PHYSIQUE VÉGÉTALE. ; donne pour résultat l'existence du tout. Dans les uns comme dans les autres la force vitale paraît résulter de l'irritabilité des parties. L’azote, le carbone, l’hydro- gène, l’oxigène, des sels alcalins et des oxides métal- liques forment la base des substances animales et végé- tales; seulement dans ces dernières, c’est le carbone qui domine au lieu de l'azote. Pendant la vie, ces substances obéissent à une loi particulière que l’on nomme force vitale, et qui n'a nulle analogie avec les lois chimiques des corps ; mais après la mort leurs fonctions cessent, elles se décom- posent et se combinent selon leurs aflinités chimiques. Les animaux opposent une puissance vitale qui résiste aux forces extérieures tendant à les détruire ; ils réparent leurs parties lésées par une blessure. Par la nutrition et les déjections ils s’'approprient les substan- ces qu'ils peuvent assimiler à leur nature, et ils rejettent celles qui leur seraient inutiles ou nuisibles. Les plantes sont absolument dans le même cas ; elles régénèrent fa- cilement les parties qu'on leur a retranchées; leurs blessures se cicatrisent; leurs tiges, principalement leurs racines, se détournent par un mouvement qui pa- raît presque volontaire, les premières pour abandonner les ténèbres et aller chercher la Jlumière, les secondes pour abandonner un sol sec et stérile et aller chercher une terre humide et plus nutritive. Les plantes absor- bent les fluides qui leur conviennent et rejettent au de- hors les sécrétions inutiles ou nuisibles. Tous les animaux ne sont pas doués de la faculté lo- comotive; les huîtres, une grande quantité de zoophites sont condamnés à passer leur vie entière sur le rocher et à la place qui les a vus naître. Quelques plantes voyagent pendant toute là durée de leur vie : un champignon dans les airs, quelques mousses et algues dans les flots. Comme les animaux, les plantes ont des sexes. Dans les deux régnes on trouve des individus hermaphrodi- PHYSIÔLOGIE. 329 tes ( la plupart des plantes, la plus grande partie des mollusques ); des individus monoïques (les concom- bres, melons, etc; les escargots et la plupart des ani- maux qui habitent des coquilles univalves); des individus dioïques (le chanvre, le müûrier, etc. ; tous les mam- mifères , les oiseaux, etc. ). Dans beaucoup de plantes le vent porte la liqueur séminale des mâles sur les ovai- res de la femelle, comme l’eau entraine la liqueur sémi- nale des poissons sur les œufs que les femelles ont dé- posés. Dans beaucoup d'animaux la fécondation a lieu par un accouplement pendant lequel il y a rapproche- ment et contact ; à l’époque de la fécondation de quel- ques conferves, deux tubes, qui sont les organes sexuels de la plante, se rapprochent et s’accouplent par emboïi- tement l’un dans l’autre ; la matière prolifique du mâle qui est une liqueur épaisse et verte, passe dans le tube femelle, s’y coagule, et forme un globule qui, au bout d’un temps déterminé, sort en déchirant le sein de sa mère pour former une nouvelle plante. Beaucoup d'animaux sont vivipares, c’est-à-dire qu'ils font leurs petits vivans ; quelques graminées, des lis, des ails, au lieu de produire des graines, produisent de petites plantes toutes formées. Une graine n’est rien autre chose qu'un œuf végétal ; il faut , pour qu’elle produise un individu semblable à ses parens, les mêmes cir- constances que pour un œuf ; qu’elle ait été fécondée, et qu'elle se trouve placée à un degré de chaleur et d'humidité convenable. Plusieurs animaux, et entre autres les polypes, se multiplient de boutures et de gem- mes comme les plantes; d’autres réparent par une nouvelle production les membres et même la tête qu'on leur à coupée : les écrevisses , les cabres, les sa- lamandres sont dans le premier cas, les hélices et beau- coup d’intestinaux sont dans le second. Si on objecte que quelques végétaux, par exemple l’épinard, peuvent produire des graines fécondes sans le concours des deux 1. 22 330 PHYSIQUE VÉGÉTALE. sexes, on répondra qu’une seule fécondation suflit à huit ou di générations de pucerons. Les végétaux n’ont pas de cavité digestive; ils se nour- rissent HT par absorption, mais la AA des zoophites manquent aussi d’intestins, et ne se nourris- sent que par une absorption qui a lieu par tous les points de leur surface. Si l’on coupe une tige d’euphorbe, si l’on touche les étamines de l’épine-vinette et de l’opuntia , les feuilles de la sensitive, si l’on examine les folioles de l’edysa- rum gyrans , et beaucoup d’autres phénomènes ana- logues , certes il sera difficile de prouver que les plantes ne sentent pas, en les comparant à une éponge, par exemple, chez laquelle on n’a pas pu découvrir encore un signe bien évident d'irritabilité seulement. Mais nous ne pousserons pas plus loin une compa- raison que l’on pourrait étendre davantage ; nous croyons en avoir assez dit pour faire comprendre à nos lecteurs l'importance qu'ont les plantes dans la chaîne des êtres, et la place qu’elles doivent y occuper entre les animaux et les minéraux. Nous devons nous occuper plus spé- cialement de leur organisation, des fonctions que rem- plissent leurs organes , et du parti que l’on peut tirer en agriculture de "1 Cobhaitétibe de ces phénomènes. Parties élémentaires des végétaux. On nomme parties élémentaires d'un corps quelcon- que , des parties excessivement petites , toujours sembla- bles à elles-mêmes , quel que soit l’organe que l’on sou- mette à l'analyse. Ces molécules organiques forment, par leur agrégation, des petites lames transparentes, et par leur arrangement, un 4issu membraneux com- posant toute la substance des animaux et des plantes. Le tissu membraneux est criblé de petits trous, de fentes ou de pores, destinés à transfuser les fluides PHYSIOLOGIE. 331 d’une partie d’un végétal dans un autre ; ces trous sont aussi les organes de la transpiration insensible. Le tissu se présente à l'œil de lobservateur sous deux modifica- tions différentes, auxquelles on a donné les noms de tissu cellulaire et de tissu vasculaire. Le tissu cellulaire où aréolaire est composé d’un grand nombre de cellules ou de vides, fermés de toutes parts, souvent hexagones, mais prenant aussi une forme déterminée par les parties environnantes. La moëlle du sureau, des jones, elc., oftre le tissu cellulaire dans presque toute sa simplicité. Les cellules qui le compo- sent n'étant criblées que de pores excessivement fins, il en résulte que les fluides ne peuvent.les pénétrer que très-lentement. Le tissu cellulaire se trouve dans pres- que toutes les parties des végétaux, mais en plus grande abondance dans les parties pulpeuses et charnues. La moëlle et l'écorce en sont presque entièrement formées. Dans les parties ligneuses, les cellules se sont beaucoup allongées et y paraissent comme des petits tubes paral- lèles les uns aux autres, et portant le nom de fibres ligneuses. Leur cavité s'obstrue et leurs parois de- viennent épaisses et opaques à mesure que les couches de bois vieillissent. * Le tissu cellulaire régulier que l’on trouve formant la moëlle des végétaux , surtout des monocotylédons, a peu. de consistance, se déchire facilement, et offre de grands vides, que l’on nomme /acunes. C’est surtout dans les plantes aquatiques que ces lacunes sont remar- quables. Elles sont remplies d’air et servent sans doute à empêcher que ces végétaux ne s’altèrent par l’imbi- bition de leau qui détruirait leurs tissus en peu de temps. Elles servent aussi à rendre les tiges plus légères que le liquide dans lequel elles sont plongées, à leur donner la facilité de s'élever verticalement à la surface des ondes, et à les soutenir contre les courans qui, sans cela , Les coucheraient dans la vase du fond , d’où il 332 PHYSIQUE VÉGÉTALE. résulterait que les plantes périraient faute de se trouver en contact avec l'air et la Iumière. Le tissu vasculaire ou tubulaire est formé par le tissu membraneux, dont les lames sont roulées sur elles-mêmes, de manière à former des tubes où vais- seaux cylindriques, ovales ou anguleux, qui parcourent les .différens organes des plantes, et s’anastomosent entre eux de manière à former une espèce de réseau à mailles plus ou moins régulières. Les vaisseaux ont des parois fermes, peu transparentes, assez épaisses, et percées d’un grand nombre de pores servant à répandre dans les parties latérales l'air et les fluides nécessures à la végétation. Nous croyons, contre le sentiment de beaucoup de botanistes , que ces vaisseaux sont irritables et susceptibles de contraction; car, sans cela, il serait impossible d'expliquer le phénomène de la cireulation dans les plantes. On a divisé les vaisseaux du tissu vasculaire en six espèces. Les premiers, nommés vaisseaux €72 chapelet ou mnoniliformes, sont formés de cellules ovoïdes, po- reuses , placées bout à bout en séries, et séparés par des diaphragmes percés de trous nombreux à Ja manière des cribles. Ils se trouvent ordinairement à la naissance des feuilles, des branches, et dans les racines. Ils servent de canaux intermédiaires pour faire circuler la sève des gros vaisseaux des tiges à ceux des branches. Les seconds, appelés vaisseaux poreux ou ponctués , sont formés par des tubes non continus, marqués de séries transversales de pores à orifice glanduleux. On les ren- contre dans presque toutes les parties des végétaux où ils se joignent , se séparent, se joignent de nouveau et se séparent encore, {s’oblitèrent totalement dans un point pour reparaître dans l’autre, et se terminent toujours en üssu cellulaire. Ils paraissent être destinés à promener et élaborer les sucs aqueux fournis par la sève. Les troi- sièmes, auxquels on a donné le nomde fausses trachées PHYSIOLOGIE. 333 ou vaisseaux rayés, se composent de tubes dont les parois sont marquées de fentes transversales à bords glanduleux. Elles s’observent particulièrement dans les bois d’un tissu lâche et mou. Ce sont les principaux canaux de la sève. Elles la portent d’une extrémité à l’autre du végétal, et la répandent dus ‘les par- ties latérales au moyen de leurs pores. Lestrachées ou vaisseaux spiraux, vaisseaux aériens, sont des tubes formés par une membrane étroite, argentée, or- dinairement élastique, roulée sur elle-même en spirale, et souvent bordée de petits bourrelets calleux. Comme le plus souvent elles ne renferment que de:Pair, nous croyons, avec Hedwig , Grew et Malpighi,:que ce sont les organes de la respiration des plantes. Elles sont comme passées à travers le tissu qui leur sert de gaîne, et n’y adhèrent que par leurs extrémités. Dans les mo- nocotylédones, elles sont ordinairement placées au centre des filets ligneux, et dans les cotylédones autour de la moëlle. À la longue, elles s'abstruent par l'effet de la nutrition. Les vaisseaux mixtes de Mirbel sont des tubes qui, à diverses parties de leur longueur , sout percés de pores comme les vaisseaux poreux, fendus transversalement comme les fausses trachées, et décou- pés en tirebourre comme les trachées. [ls paraissent remplir les mêmes fonctions que ces dernières. Les sixièmes, Où vaisseaux propres, sont des espèces de cavités jetées çà et là dans le tissu cellulaire, fermés de toute part, et n'ayant ni fentes ni pores sur leurs parois. On en trouve de différentes formes et sur diverses par- tes. Ceux que l’on a nommés réservoirs vésiculaires ou glandes vésiculaires sont de petites vésicules sphé- riques, ordinairement remplies d'huile volatile et pla- cées dans le parenchyme des feuilles et des écorces ; ceux nommés réservoirs en Ccœcum, sont des tubes courts, pleins d'huile volatile, que l’on trouve dans les fruits des ombellifères. D’autres ont été nommés réser- 334 PHYSIQUE VÉGÉTALE. | voirs tubuleux ou vaisseaux propres solitaires ; ce sont des tubes solitaires au milieu d’un amas de tissu cellulaire. Les réservoirs fasciculaires où vaisseaux propres fasciculaires, sont des faisceaux de petites cellules tubulées et parallèles, distribuées avec plus ou moins de symétrie dans le tissu cellulaire de l'écorce et pleines de-sugs propres. Les réservoirs accidentels sont des cavités qui se forment accidentellement et se rem- plissent par infiltration des sucs propres sécrétés ailleurs. Jusqu'à ce jour on ignore de quelle utilité peuvent être pour les plantes leurs sucs propres; on sait que toutes n'en ont. pas, Telles sont les modifications des parties élémentaires des végétaux. Beaucoup offrent dans leur organisation des exemples de toutes ; quelques-uns n’en -ont qu'une partie. Par exemple, les nostochs, les conferves n’ont pas de vaisseaux ; dans la plupart des monocotylédones les vaisseaux sont tous dans une direction longitudinale ; tandis que, dans la plupart des dicotylédones, les uns sont longitudinaux et les autres rayonnent transversake- ment du centre à la circonférence. De la germination. On appelle ainsi le premier phénomène de la végéta- tion, celui par lequel Fembryon renfermé dans une graine, se gonfle, brise ses enveloppes, et parvient à üirer sa nourriture du dehors. Un embryon non fécondé est mort, et par conséquent incapable de se développer. Lorsqu'il y a eu fécondation, il est dans, un état de sommeil où d’engourdissement dans lequel il. attend qu'une circonstance favorable vienne le réveiller. IL peut rester plus ou moins long-temps dans cet état de léthargie , selon les espèces et selon la position dans la- quelle il se trouve placé. La graine de fraxinelle, d’an- gélique, par exemple , ne conserve sa vertu germinative PHYSIOLOGIE. 335 que pendant un ou deux ans, tandis que lon a vu quel- ques graines de haricots, de mimosa, etc., germer et végéter vigoureusement après être restées pendant cent ans dans l’herbier de Tournefort. Les circonstances favorables au développement des graines sont un cerlain degré de chaleur et d'humidité, et une certaine quantité d’air. Les quantités de chacun varient selon les espèces. Voici comment agissent ces agens extérieurs de la végétation. L'humidité seule commence la première évolution ; elle pénètre dans l’intérieur par l'ombilic, gonfle la plan- tule, délaye le périsperme et rend plus facile la rupture des enveloppes de l'embryon en les amollissant. La cha- Jeur agit sur Ja jeune plante comme sur les animaux, c’est-à-dire, comme stimulant. Mais, si aucun autre agent ne se mélait au phénomène dans cette entrefaite, l’eau, aecumulée dans la graine , pourrirait le périsperme et par suite l'embryon; l’oxigène de l'air, qui s’introduit avéc l'humidité, arrête les progrès de la fermentation putride et la métamorphose en fermentation spiritueuse. Expliquons ce phénomène. Le périsperme farineux d’une plante est élémentairement composé de quantité déterminée d’oxigène, d'hydrogène et de carbone, et toutes les fécules contiennent les mêmes principes; en cet état elles sont insolubles dans l’eau. L’oxigène de l'air s'empare du carbone, l'équilibre se trouve détruit, la quantité d’oxigène contenue dans la fécule domine, se combine de nouveau, et le périsperme cesse d’être farineux pour passer à l’état de sucre soluble dans l’eau. Ici la nature agit comme le chimiste qui oxide une fé- cale pour en faire du sucre. Cette liqueur sucrée, ren- fermée dans les cotylédons, sen échappe par des vaisseaux qui la portent au rudiment de la plante, le pénètre , le stimule, et le réveille de sa léthargie. C'est dans cet état que l'embryon prend le nom de plantule. Il est composé de deux parties , le rudiment de Ja plu- 336 PHYSIQUE VÉGÉTALE. mule et celui de la radicule. Mais par quelle loi Ja plumule tend-elle constamment à sortir de terre et la radicule à s’y enfoncer ? La lecture de tous les ouvrages écrits sur cette matière, trente ans de méditations et d'expériences ne nous ont rien appris sur ce mystère étonnant de la vitalité. Jusque-là l'obscurité est favorable à la germination ; car, pour germer, l'embryon a besoin d’être dans un état de mollesse, et il ne peut acquérir cet état qu’en se dépouillant de son carbone, dont l’oxigène s'empare pour former de l'acide carbonique qui s’'évapore. Or, un des eflets de la lumière est de décomposer l’acide carbonique, d’expulser l’oxigène, et de fixer le car- bone , d’où résulte l’endurcissement des parties ; ce qui rendrait la germination impossible. Les cotylédons fournissent toute la nourriture néces- saire à la plantule pendant son premier développement. Mais bientôt la radicule pousse des petites ramifications munies de sucoirs, et devient capable de tirer de l’humi- dité de la terre les sucs alimentaires qui s’assimileront à Ja substance de la plante et lui feront changer de na- ture ; car, de mucilagineuse qu'elle était, elle deviendra ligneuse ou herbacée, mais solide. Alors les cotylédons, épuisés et devenus inutiles, se dessècheront et tom- beront. Ce ne seront pas seulement les nouveaux sucs alimen- taires qui opèreront ce changement, la lumière y aura Ja plus grande part. La plumule se trouvant hors de terre en contact avec elle, la fermentation spiritueuse s'arrête, parce que le gaz acide et l’eau se décomposent et ne fournissent plus de matière sucrée ; le carbone, jusque-là rejeté, se combine avec les élémens de l’eau et avec ceux contenus dans l’eau et circulant avec elle dans le tissu vasculaire, d’où résulte la formation des substances ligneuses, résineuses, etc. , et de tous les sucs propres. Dès cet instant commence le phénomène de la | PHYSIOLOGIE. 3379 végétation, On ignore par quelle loi chimique la lumière a la faculté de fixer le carbone dans les plantes et de l'identifier à leur propre substance ; mais on sait parfai- tement que c’est à elle que les végétaux doivent la soli- dité de leurs tissus, la solidité de leurs parties, et leurs sues propres. Toute plante développée dans l'obscurité est ctiolée. On doit conclure de la connaissance de ces phéno- mènes, que , pour la multiplication des végétaux, le choix de l’agriculteur doit se porter sur de bonnes graines, c'est-à-dire, ayant été fécondées, ayant atteint le point parfait de leur maturité, et ayant toutes leurs parties. Que pour leur conservation elles doivent être à l'abri de toute humidité et à une température peu élevée. Que celles dont le périsperme est de substance cornée demanderont, pour germer, des arrosemens plus abondans que celles qui l'ont farineux. Dans ces dernières, comme ilest plus facile à délayer, la ger- mination sera plus prompte, quoique les graines soient vieilles ; dans les autres elle sera très-lente, et les graines germeront d'autant mieux qu’elles seront mises en terre avant leur dessèchement complet, où même aussitôt la maturité. Il en résulte encore que les semences ne doivent jamais être trop enterrées, afin qu'elles puis- sent jouir de l'influence de l’air, mais qu’elles doivent cependant l'être assez pour être privées de la lumière. Le cultivateur intelligent saura pourquoi ses semis de graines très-fines, qu’on ne peut enterrer à cause de la délicatesse de leur embryon, réussissent mieux quand il les a recouverts de mousse hachée capable d’en- tretenir l'humidité et de les soustraire aux rayons lu- mineux, etc., etc. Nous nous bornerons là dans les conséquences à tirer des connaissances physiologiques, et même nous nen avons cité quelques-unes à propos de la germination, que pour mettre le lecteur sur la voie, 336 HHYSIQUE VÉGÉTALE. et l’engager dans les réflexions qui doivent l’arracher à toutes routines vicieuses. Des racines. On donne ce nom à toute par tie d’un végétal qui croît toujours dans un sens opposé à la tige, qui cherche constamment l’humidité et nn Le racines ne sont pas d'une substance tellement homogène qu’elles ne puissent changer de placeet de nature. On les trouve au sommet des feuilles de quelques plantes, sur toute la lon- gueur des tiges de plusieurs végétaux, aux articulations des graminées, sous l’aisselle ou dans l’aisselle des feuil- les de certaines espèces, etc. Telle partie aérienne d’un végétal peut se changer en racines, si les circonstances le nécessitent. Dans une renoncule, assez commune dans nos ruisseaux, les pétioles des feuilles portent un limbe avec son parénchyroe lorsque le hasard les fait se déve- lopper hors de l’eau; si, àu contraire, ils croissent dans son sein, le En roue disparait et Les nervures de la feuille se changent en véritables racines. L'art des boutures repose tout entier sur cette faculté qu'ont les végétaux d'émettre des racines partout où ils peuvent émettre des bourgeons, et vice versd, etils . peuvent émettre des bourgeons partout où il y a de la liqueur organisatrice, per du cambium. Les racines peuvent aussi, dans des circonstances, se métamorphoser en, rameaux. On a vu dans un jeune saule, planté sens dessus dessous, les branches se chan- ger en racine, et celles-ci émettre des bourgeons et des feuilles. La durée des racines n’est pas toujours la même que celle des plantes auxquelles elles appartiennent, et cette particularité; qui pourrait fournir de très-bons carac- tères botaniques, n’a jamais été bien observée. Par exemple, on appelle plantes vivaces celles dont les tiges PHYSIOLOGIE. 339 meurent tous les ans, et dont les racines vivent plu- sieurs années, et l’on donne le même nom aux lilia- cées bulbeuses, dont les racines meurent tous les ans, tandis que le bourgeon seul, représentant la tige des autres végétaux, vit plusieurs années. Toutes les racines ne croissent pas dans la terre; les unes flottent dans Jes eanx, d’autres serpentent sur la surface des troncs d'arbres et des rochers; 1l en est qui pénètrent dans la substance des écorces vivantes pour détourner à leur profit la sève qu’elles y trouvent. Telles sont celles des plantes véritablement prie tel que le gui. Quant à leurs fonctions, 1l paraît que les racines sont autant destinées à fixer le végétal sur le sol qui la vu naître, qu'à lui transmettre de la nourriture. Ceci est remarquable dans les plantes grasses qui végètent avec vigueur sur des murs, des rochers, et dans les terrains les plus graveleux et les plus secs. Elles recoivent pres- que toute leur nourriture de l'air, et Pabsorbent par leurs feuilles et leurs tigés. Aussi leurs racines sont grêles, fibreuses, coriaces , et paraissent peu propres à la trans- mission des ilhäes: Dans les végétaux dont le tissu est mince et sec, elles ont, au contraire, la nutrition pour fonction principale. Elles n sont pas les fluides nourriciers par toute leur surface, comme les autres parties des plantes, mais seulement par de petites bou- ches aspirantes, ayant la forme de pores, et placées à l'extrémité de chaque fibre capillaire. Aussi plus une racine a de chevelu, plus elle transmet de nourriture à la tige, et cette partie ne saurait être trop ménagée à la transplantation. Quant à l'organisation des tissus, elle est la même que celle de la üge dont nous allons nous occuper. 340 PHYSIQUE VÉGÉTALE. De la tige. La tige est cette partie aérienne d’un végétal qui croît en sens opposé à la racine, et qui-tend ordinairement à prendre une position plus ou moins verticale; elle cherche l'air et la lumière. Le point de rencontre ou de jonction de la tige avec la racine porte le nom de collet ou nœud vital. Quelques plantes manquent de tige, et dans le plus grand nombre de celles-ci , elle est remplacée par une sorte de pédoncule nommé hampe. Dans les dicotylédones la tige se compose de trois parties distinctes : Fécorce ou enveloppe extérieure , le corps ligneux, et le centre ou la médullaire. L'écorce est formée par l’épiderme, par l'enveloppe herbacée , par les couches corticales et par le liber. L’épiderme est cette première enveloppe membra- neuse, mince, sèche, transparente, nullement élastique, formée par la réunion des parois les plus antérieures du tissu cellulaire auquel elle adhère fortement. Dans les plantes parfaites il est enduit d’une matière analogue à la cire, destinée à défendre l'écorce de la pluie et du contact immédiat de l'air. En vieillissant , il s’épaissit par de nouvelles couches intérieures, se détache et tombe comme celui des animaux. L'enveloppe herbacée est une couche de tissu cellu- laire placé en dehors des couches corticales. Son tissu est plus ou moins régulier, et ses cellules sont remplies d’une matière verte, succulente, qui, dans les feuilles, remplit les intervalles des nervures, et porte plus par- ticulièrement le nom de parenchyme. L'enveloppe her- bacée est destinée à séparer des autres fluides la matière de Ja transpiration, et c’est dans son tissu que la lumière opère la décomposition de l’acide carbonique. Les couches corticales sont placées sous l'enveloppe herbacée, et composées de plusieurs réseaux de cellules PHYSIOLOGIE:. 341 allongées, superposés les uns sur les autres; elles sont formées par les couches les plus extérieures du liber, et elles ne paraissent destinées qu’à donner de la solidité à l'écorce. On appelle liber ou livret, cette couche immédiate- ment placée entre le bois et l'écorce, consistant en un réseau vasculaire dont les aréoles allongées sont rem- plies par du tissu cellulaire. [l'est composé de plusieurs couches appliquées les unes sur les autres comme les feuillets d’un livre, d’où lui est venu son nom. C’est la partie la plus importante du végétal; car c’est elle qui, par son développement , produit les nouvelles ra- cines , les nouvelles branches, les fleurs et les fruits; la couche intérieure, en vieillissant, s’endurcit et forme le bois ; la couche extérieure forme une nouvelle couche corticale. C'est encore le liber qui fournit le cambium, prin- cipe organique de tout le végétal. Si, pendant la vé- gétation, on enlève une partie d’écorce à un arbre, on voit bientôt suinter sur les bords de la plaie une liqueur épaisse et gélatineuse qui se durcit, s'organise , devient verte, et forme une couche de nouvelle écorce; cette liqueur est le cambium. Il s'étend entre l'écorce et le bois et forme de nouvelles couches de liber ; mais, si on l’arrête ou l’entrave dans sa circulation, il forme un bourrelet, soulève l’écorce, s'organise en gemmes ou boutons qui bientôt percent au dehors et se déve- loppent en bourgeons, s'ils sont en contact avec la lu- mière, ou en racines s'ils se trouvent exposés à l’obscu- rité. C'est sur la connaissance de ce principe qu'est basé l’art des marcottes. Comme nous l'avons dit, toute parte qui contient du cambium peut reproduire un in- dividu complet de son espèce, et cela par le moyen de la greffe ou simplement de la bouture. Nous sommes parvenus à faire développer des gemmes sur le pétiole 3/2 PHYSIQUE VÉGÉTALE. des feuilles et même sur leurs nervures, et à multiplier ainsi la plus grande partie des vb Lau se: Dans les tiges herbacées le cambium se porte en tota- lité au dévelop de la végétation et des organes de la fructification, aussi s’épuise-t-1l très-vite ; et comme il n’y a pas de liber pour en reproduire de nou- veau, dès qu’elle a donné fruit, la plante se dessèche et meurt. Le corps ligneux d’une tige dicotylédone se compose de l’aubier et du bois. L'aubier n'étant qu'une couche de liber endurgi, est organisé de la même manière que lui, à cette différence cependant que les mailles de son tissu sont plus raides et plus allongées. Peu à peu il se lignifie, et au bout d’un laps de temps plus ou moins long, il devient bois. Celui-ci occupe toute la partie de la tige entre l’aubier et la médullaire, et ses couches concentriques sont d'autant plus dures qu’elles sont plus près du centre et par conséquent plus anciennes. La sève circule dans le bois au moyen des vaisseaux poreux ; mais, avec l’âge, ces canaux s’obs- truent par l’épaississement de leurs parois et la diminu- tion de leur cavité ; ils finissent par disparaître : le cours des liquides est à jamais interrompu, et tout le bois qui se trouve dans ce cas peut être regardé comme une partie morte. La moëlle est cette substance légère, sèche, entière- ment composée de tissu cellulaire, à mailles très-régu- lières, communiquant toutes les unes avec les autres, et remplissant l’étui médullaire. Elle a, dans quelques parties de son épaisseur, des vaisseaux qui la parcourent longitudinalement. Elle communique avec l'écorce par des prolongemens transversaux nommés rayons ou in- sertions médullaires. On ignore de quelle uülité elle peut être à la végétation. Quoiqu'en aient dit les anciens, il ne paraît pas que ses fonctions soient bien importantes, puisqu'un arbre vit encore et produit pendant de longues PHYSIOLOGIE. 343 années, quoiqu'il en soit entièrement privé. Le tronc des vieux saules nous en offre presque toujours l'exemple. La moëlle manque dans quelques tiges de dicotylé- dones, et quelques espèces de cette classe n’offrent pas de différence sensible entre le bois et l’aubier. Si nous examinons les tiges des monocotylédones, nous ne leur trouverons pas de liber, et par conséquent ni couches concentriques ligneuses, ni couches corti- cales; quelques-unes seulement sont recouvertes d’une légère pellicule qui est intimement réunie à la substance de la tige.. L’étui médullaire est très- large; il s'étend presque jusqu'a la circonférence. Le bois est composé de longs faisceaux de fibres dispersés dans la moëlle, la parcourant dans toute sa longueur, et s’anastomosant les unes avec les autres à de longs intervalles, de ma- nière à former un réseau à mailles très-lâches ; du moins telle est l’organisation du tronc d’un palmier. Dans les dicotylédones le bois augmente d'épaisseur du centre à la circonférence ; dans les monocotylédones, au contraire, 1l augmente de la circonférence au centre, en remplissant de plus en plus le canal médullaire. Aussi, le bois ancien étant toujours le plus dur, il en résulte que, dans les premières, le centre de la tige est toujours la partie la plus dure, an lieu que dans les se- condes c’est la circonférence. Les filets ligneux sont accompagnés de fausses trachées, de trachées et de vais- seaux poreux servant de canaux à la sève. Du reste, le mode de végétation des monocotylédones est très-varia- ble ; car on en trouve qui l'ont double, et dont le bois, recouvert d’une véritable écorce, croît également du centre à la circonférence, et de la circonférence au centre. Ceux-ci peuvent plus facilement repousser des gemmes quand on leur a coupé le bourgeon ter minal, ou qu'il a péri par un accident. 344 PHYSIQUE VÉGÉTALE. * Des boutons et des rameaux. Les boutons ou gemmes sont le berceau renfermant les rudimens des fleurs, des feuilles et des branches; ils n’attendent pour se développer que le retour du cam- bium qui les a formés l’année précédente , soit sponta- nément avec le développement des bourgeons, soit en percant l'enveloppe corticale. Ils naissent aux aisselles des feuilles , sur un rayon médullaire , à moins que par accident le cambium se soit fait jour sur un autre point. Dans les pays où l'hiver a quelque rigueur, les gemmes sont entourés d’écailles sèches et scarieuses , d’une seconde enveloppe laineuse, ou d’un enduit glutineux capable de les défendre contre l’intempérie des saisons. Ces enveloppes manquent à la plus grande partie des végétaux qui croissent dans les pays chauds. Lorsque le germe se développe il devient ce qu’on appelle un bour- geon tant qu'il est de substance herbacée , et branche ou rameau quand il est devenu ligneux. Sa contexture est absolument la même que celle des tiges. Les bourgeons des végétaux, comme leurs jeunes tiges, ont une tendance remarquable à se porter du côté de la lumière, et quelques botanistes ont cité ce . phénomène pour prouver une espèce de sentiment dans les plantes. Mais on explique aisément cette singularité par les lois les plus simples de la physique. Nous avons dit que la lumière agit sur les plantes en décomposant l'acide carbonique et en fixant le carbone, ce qui donne aux parties de la solidité ; si par conséquent le côté de la plante tourné vers les rayons de lumière se durcit par la fixation du carbone, sa croissance sera plus lente, ell’autre côté, en s'allongeant davantage, le fera néces- sairement courber. | PHYSIOLOGIE. 345 Des bulbes et tubercules. Pendant fort long-temps les cultivateurs, et même les botanistes , ont confondu les bulbes ou ognons, ainsi que les tubercules, avec les racines. Comme nous l'avons dit, ce sont de véritables bourgeons. La bulbe consiste en un plateau large et plat, assez mince, horizontal , meltant les racines à sa partie inférieure, et portant au milieu de sa partie supérieure desrudimensdesfeuilles, de la hampe et des fleurs ; le tout est enveloppé de Plu- sieurs rangs d’écailles ie larges ou circulaires, ou étroites et Fe iquées, formées par des feuilles avor Le Les bulbilles ou soboles n’en diffèrent que parce qu’elles naissent sur différentes parties aériennes de la plante. Les tubercules sont des réceptacles charnus, des espèces de collets très-développés , qui émettent des bourgeons sur plusieurs points de leur surface, ainsi que des racines. Des feuilles. Avant leur développement elles sont renfermées dans le bouton où elles sont pliées d’une manière déterminée par l'espèce de plante , el toujours invariable. La face supérieure d’une feuille est ordinairement plus lisse, plus verte, couverte d’un épiderme plus adhérent et moins criblé de pores. La face inférieure , souvent cou- verte de duvet ou de poils, est percée d’un grand nombre de très-petits trous qui sont les orifices des vaisseaux intérieurs du végétal, par où il absorbe les fluides répandus dans l'air et la nourriture qu'ils cha- rient avec eux. Ces deux surfaces constituent le limbe , réseau formé par les ramifications du pétiole anastomo- sées , et dont les mailles sont remplies par du tissu cel- lulaire ou parenchyme. C'est dans ce parenchyme que s'opère principalement Ja décomposition de l'acide car- 1. 23 346 PHYSIQUE VÉGÉTALE. bonique répandu dans l'atmosphère ; l'air s’introduit avec les gaz qu’il contient dans les pores de la surface inférieure ; le contact de la lumière le décompose, fixe le carbone et dégage l’oxigène. Pendant l'obscurité le phénomène doit nécessairement changer : aussi les feuilles, au lieu de retenir l'acide carbonique, le déga- gent et s'emparent de l’oxigène. L’épiderme des feuilles est extrêmement mince , et beaucoup plus poreux que celui des autres parties de la plante. Le pétiole n’est rien autre chose qu’un prolongement de fibres caulinaires qui s’étend hors de la tige avant de s'épanouir. Sa composition , ainsi que celle des parties fibreuses du limbe , offre des trachées, des fausses tra- chées et des vaisseaux poreux , entourés par une couche de substance herbacée qui se prolonge sur eux au mo- ment où ils sortent de la tige. C'est particulièrement par les phénomènes qu'offrent les feuilles de plusieurs espèces de végétaux que l’on prouve l'irritabilité des plantes. Les unes s'ouvrent le matin et se ferment le soir comme pour se livrer au som- meil. D’autres, telles que celles de ’hedysarum gyrans, sont dans un mouvement continuel, et d'autant plus re- marquable qu'il s'exécute spontanément , sans l’inter- vention d’une cause extérieure apparente. Des organes accessoires. On appelle ainsi toutes les parties des plantes qui ne remplissent pas des fonctions essentielles à la végétation. Tels sont les stipules , les vrilles, les épines , les aiguil- lons, les glandes et les poils. Les stipules, petits appendices foliacés ou écailleux que l’on trouve à la base des feuilles , sont organisées de la même manière et ne sont peut-être que des feuilles avortées. Leur utilité ne nous est pas connue. Les vrilles, servant aux tiges grimpantes à s’accrocher PHYSIOLOGIE£. 347 aux Corps étrangers, sont de diverses formes appro- priées à la manière dont chacune remplit ses fonctions ; les unes consistent en de longs filamens qui s’entortil- lent autour des corps étrangers ; les autres y implantent leurs racines nommées griffes, H y en a dont l'extrémité est munie de trois à quatre petits doigts coriaces , très- forts, crochus, qui se cramponnent sur les plus petites inégalités d'une surface plane, et s'y attachent si forte- ment qu'on les brise plutôt que de les en arracher, D'au- tres sont terminées par un petit mamelon charnu , espèce de bouche qui s'attache à la manière des sangsues contre les corps les plus unis. Les épines ne sont que des prolongemens du corps ligneux, comme les aiguillons en sont de l'écorce. Cesont des espèces d'armes défensives que la nature a données à de certains végétaux pour repousser l'attaque des ani- maux nuisibles, On à pensé, dans ces dernières années , que les plantes étaient munies de ces sortes de pointes afin d’absorber le fluide électrique dans l'atmosphère. Cette opinion hasardée est loin d’être prouvée. Les glandes sont des petites masses de tissu cellulaire très-fin , dans lesquelles un grand nombre de vaisseaux se ramifient. Leurs fonctions consistent à extraire de Ja masse générale des fluides une liqueur particulière et de Ja transsuder au dehors. Les poils sont des organes servant à l'absorption et à l'exhalation, et assez ordinairement ce sont les canaux excréteurs des glandes, comme cela est bien prouvé dans l’ortie. De la fleur. Dans les plantes, comme dans les animaux, la nature a créé des organes particuliers qui, par leur influence réciproque , concourent à l'acte de Ja génération. Dans les uns comme dans les autres , il faut le concours de deux organes pour opérer la fécondation , et ces organes 348 PHYSIQUE VÉGÉTALE. constituent les sexes. La fleur , le plus ordinairement, renferme les deux sexes et jouit d’un hermaphrodisme très-rare dans les animaux ; cependant la nature ne s’est pas fait une loi invariable de ce rapprochementdes sexes, car il existe beaucoup de plantes dioïques, dont un individu porte des étamines seulement, et un autre des pistils. En botanique, on définit rigoureusement la fleur en disant que c’est l'appareil des organes de la féconda- ton, Ainsi, toutes les fois que les organes seront appa- rens, quand même nous ne pourrions pas nous rendre un compte exact du jeu de leurs fonctions , la plante qui les portera aura des fleurs, par exemple les fou- geres. Dans les champignons on ne peut distinguer les organes de la fructification, du moins à la vue simple ; aussi les a-t-on placés dans la classe des agames ou crip- togames. Considérons d’abord dans la fleur les organes des sexes , le pistil et les étamines , car toutes les autres par- ties sont accessoires. Comme nous l'avons vu, le pistil est composé d’un stigmate , souvent d’un style, et d’un ovaire. On y trouve des trachées , des fausses trachées , des vaisseaux poreux et des tissus cellulaires allongés. Les vaisseaux de la plante-mère pénètrent dans toutes ces parties et y portent les sues nutritifs ; lorsqu'ils les y transmettent avec trop d’abondance, le pistil se mé- tamorphose en lame pétaloïde et devient stérile, ce qui arrive aux fleurs pleines. Le stigmate est l’orifice de l'organe femelle ; il peut affecter différentes formes, mais il est toujours marqué d’une petite cicatrice souvent entourée de papilles ou de petits mamelons sans doute destinés à retenir la pous- sière fécondante. Il est toujours couvert d'humidité , afin de faire éclater les vésicules du pollen , comme on le verra à l’article de l’anthère. Le style, quand il existe, est une espèce de conduit percé dans le centre par un ou plusieurs canaux très- PHYSIOLOGIE. 349 déliés , chargés de transmettre à l'ovaire Ja liqueur sc- minale versée par le pollen et recue par le stigmate. L'ovaire renferme les ovules, rudimens des graines, qui y sont attachées par un cordon ombilical ; après la fécondation il remplit le même oflice que la matrice dans les animaux. La paroi de sa cavité intérieure éla- bore les sucs nutritifs destinés à développer les em- bryons , et les leur transmet par le cordon ombilical. L'étamine est l'organe mâle d’une fleur; elle est com- posée du filet et de l’anthère. Le filet est de même subs- tance que la corolle ; quelquefois il est fistuleux, d'autrefois le centre est rempli par un faisceau de trachées. L'änthère est une espèce de sachet dans lequel est renfermé le pollen ; jusqu’ au moment de Ja fécondation , époque à laquelle il s'ouvre naturellement pour le laisser échapper. Le pollen se compose d’une petite membrane formant une espèce de vessie remplie par la liqueur spermatique. Ces vessies sont fort petites, ce qui donne au pollen l'apparence d'une poussière souvent jaunâtre. Si l’on met en contactavecde l’eauunde ces corpuscules, il s’enfle, se dilate , crève et laisse échapper un jet de matière liquide qui paraît avoir de l’analogie avec l'huile, puisqu'elle surnage ; ce qui se confirmerait encore par la nature de la cire, qui n’est , comme on sait, que du pollen ramassé sur les fleurs par Les abeïlles ; une autre preuve dont on pourrait appuyer celte opinion, Cest que le pollen de certaines plantes est très-inflammable et brûle avec la rapidité et l'éclat de la poudre de poix résine ; on s’en sert à l'Opéra pour imiter les éclairs et les re infernaux. » De l'enveloppe florale: Elle peut être simple ou double, c'est-à-dire quil peut y avoir un calice et une corolle, où simplement un 350 PHYSIQUE VÉGÉTALE. calice auquel on donne quelquefois le nom de corolle. Le calice est un prolongement de l'écorce; il en a ordinairement la couleur et la fermeté ; le plus ordinai- rement il contient comme elle des trachées. Son épi- derme est couvert de glandes miliaires comme celui des feuilles. Son usage consiste à protéger les autres organes de la fleur, pendant la perfloraison, contre les intem- péries de l'air. La corolle est un prolongement du tissu ligneux situé sous l’écorce ; elle est composée de tissu cellulaire et de quelques trachées, et rarement son épiderme offre des glandes miliaires. Il y a cette différence entre la corolie et le calice, que celle-ci, à la lumière comme à l’obscu- rité, exhale du gaz acide carbonique et jamais d’oxigène, tandis que le calice, exposé à la lumière directe du soleil , s'empare du gaz acide carbonique, le décompose, en retire le carbone, rejette l’oxigène, et, à l'ombre expire l'acide carbonique. La corolle protége immédia- tement les organes de la fécondation. Quand l'enveloppe est unique, elle participe quel- quefois du calice et de la corolle, c'est-à-dire que ce n’est rien autre chose que ces deux enveloppes intime- ment réunies par leurs deux surfaces. Si elle est d’une couleur verte et herbacée , c’est le plus souvent un pro- Jongement de l'écorce et un véritable calice ; lorsqu'elle est colorée on la trouve organisée comme la corolle. L'enveloppe simple remplit les mêmes fonctions que les précédentes. Des organes de la fructification. Le fruit est l'ovaire fécondé et ayant acquis son der- nier degré de ‘développement. Il se compose du péri- carpe et de la semence. Le péricarpe est l'enveloppe des graines formée par les parois de l'ovaire. Il existe toujours, quoi qu’en aient dit les anciens botanistes ; seulement , dans les graines PHYSIOLOGIE. 351 qu'ils appellent nues, il est si mince, qu'à peine peut-on le distinguer. Dans tous les fruits il est composé, 1° de l'épicarpe, membrane mince formant l'enveloppe la plus extérieure du fruit ; 2° de l’endocarpe, membrane inté- rieure qui revêt la cavité séminifère ; 3° du sarcocarpe , partie parenchymateuse qui se trouve interposce entre l’endocarpe et l'épicarpe. Le sarcocarpe renferme tous les vaisseaux chargés de porter la nourriture au fruit , et s’il paraît manquer dans quelques espèces, c'est qu'il s’est desséché. Les cloisons des fruits-à plusieurs loges consistent en un prolonge- ment de l’endocarpe en deux lames adossées l’une à l'autre et réunies par un autre prolongement plus ou moins mince du sarcocarpe. Le péricarpe communique avec la graine par l’ombilic (encore nommé hile ou ci- catricule ) ; et si entre lui et l’ombilique il y à un corps charnu intermédiaire, ce corps se nomme placenta s'il est court, funicule ou cordon ombilical s'il est allongé. L’arille est une enveloppe accessoire formée par un pro- Jongement du funicule qui entoure la graine, mais n'a aucune adhérence avec elle. La graine est cette partie du fruit contenant immé- diatement l'embryon et renfermée dans le péricarpe. Elle est composée de deux parties principales , l’épis- perme et l’'amande. L’épisperme est l'enveloppe immédiate de la graine ; il n’a ni valve ni suture, et se compose quelquefois , mais rarement, de deux membranes appliquées l’une sur l’autre ; dans ce cas la membrane extérieure , sou- vent coriace ou crustacée , prend le nom de lorique, et l'intérieur celui de tegmen. C’est sur l’épisperme que le hile est toujours placé ; ce dernier est percé, vers sa parte centrale, d’une ouverture fort petite , nommée micropyle, livrant passage aux vaisseaux du funicule qui doivent nourrir la graine. Les vaisseaux se prolon- gent quelquefois dans l'épaisseur des tuniques avant de 352 PHYSIQUE VÉGÉTAME. se ramifier ; ils forment une ligne saillante à laquelle on donne le nom de prostype funiculaire ou vasiducte. Dans ce prostype on distingue la raphe , partie qui part immédiatement du hile , et a souvent l'apparence d'un ou de plusieurs filets en relief; la chalaze, extrémité plus où moins épaissie et dilatée de la raphe. Quelques graines ont encore un embryotége ou oper- cule ; c’est un renflement en forme de calotte, situé à la surface, à une distance quelconque du hile, qui se dé- tache et livre passage à l'embryon lors de la germination. L’amande est toute la partie de la graine contenue dans l’épisperme. Quelquefois elle se compose de l’em- bryon seul , quelquefois de l'embryon et du périsperme. Le périsperme est une partie accessoire placée à côté de l'embryon et n'ayant avec lui aucune continuité de vais- seaux ou de tissu; il est composé de tissu cellulaire dont les mailles sont remplies d'une fécule amylacée où d’un mucilage épais, insoluble dans l’eau avant la ger- mination, mais qui le devient dans cette circonstance , et paraît servir de nourriture à l'embryon lors de son premier développement. L'embryon, composé comme nous l'avons dit de la plumule , du collet, de la radicule et des cotylédons, constitue seul la graine. Toutes les parties que nous avons énumérées plus haut manqueraient, qu'il n'y en aurait pas moins graine; mais toutes ces parlies exis- teraient, que, si l'embryon manquait, il n'y aurait pas graine. | De la vie des végétaux. On peut définir la vie, dans les végétaux comme dans les animaux , une force particulière et dont les principes sont inconnus, qui les fait résister pendant plus ou moins long-temps aux lois des affinités chimiques et de Ja pondération. Les phénomènes généraux de la vie, sont : 1° lirritabilité, 2° la nutrition, 3° la propagation. PHYSIOLOGIE. 353 1° L'irritabilité. Elle est la cause de la contraction et du mouvement. La contraction est prouvée par une foule d'expériences; nous n’en citerons qu'une. Que l'on coupe la tige d’une plante laiteuse, on verra les plaies de chaque morceau se couvrir aussitôt de suc propre. Si l'écoulement n'avait lieu que sur la partie de la tige qui tient à la racine, on pourrait croire que c’est l'effet d'une circulation ascendante qui continue, mais le morceau enlevé se couvre de même de sucs propres, qui se rendent à la plaie par une marche contraire à ceux de la tige ; donc il y a contraction dans les vais- seaux. On ne peut pas alléguer que les sucs se rendent sur la plaie par la loi de la pesanteur , puisqu’en ren- versant de suite la partie de la tige coupée et tournant la blessure vers le ciel , les sues n’en continueront pas moins à couler contre toutes les lois physiques de la gravité. La contraction que l’on remarque dans les vais- seaux des végétaux paraît absolument semblable à celle de la fibre animale , car les mêmes stimulans agissent de la même manière sur les uns que sur les autres, et l’on arrête une hémorrhagie dans les uns et dans les autres avec les mêmes astringens. L'irritabilité et Ja contraction sont les causes des mou- vemens que l’on remarque dans les plantes, soit que ce mouvement résulte d’une cause accidentelle, comme dans la sensitive, la dionce, l’opuntia, l’épine -vi- nette , etc., soit qu'il résulte d’une cause intérieure et inconnue , comme dans l’hedysarum gyrans. Il est une sorte de mouvement fort singulier dans les végétaux, auquel Linnée a donné le nom de sommeil des plantes. Quand la nuit approche, les folioles de beau- coup de végétaux, surtout dans la famille des légumi- neuses , se ferment en s'appliquant les unes contre:les autres, ou s’abaissent vers la terre, ou enfin prennent une position différente ; lorsque le soleil reparaît sur l'horizon elles reprennent leur attitude ordinaire. Long- 354 PHYSIQUE VÉGÉTALE. Lemps on a cru que cette espèce de sommeil devait être attribuée à la lumière agissant mécaniquement sur les organes des végétaux , mais une expérience bien simple est venue renverser toutes les hypothèses que lon avait faites à ce sujet. Si l’on tient constamment plusieurs plantes dans un lieu obscur où nulle lumière du jour ne puisse pénétrer, et qu'on les éclaire fortement au moyen de flambeau , quelques-unes se trompent sur les heures du jour, ouvrent leurs folioles pendant la nuit et les ferment pendant que le soleil est sur l'horizon ; d’autres , au contraire, persistent dans leurs habitudes, veillent et sommeillent à leurs heures accoutumées. Les fleurs offrent aussi des exemples fort singuliers de ce genre de mouvement. Quelques-unes sont hygromé- triques et ferment leur corolle à l'approche de la pluie. D'autres s'ouvrent à une heure déterminée du jour et se referment à une autre heure pareillement déterminée. C'est avec ces dernières que Linnée a composé son Lor- loge de Flore. Tous ces phénomènes n’ont pas encore été expliqués d'une manière satisfaisante. De la nutrition. On appelle ainsi cette faculté qu'ont les végétaux de s'emparer de certaine substance extérieure et de les trans- former en leur propre substance. Les plantes, analysées par le feu, donnent pour dernier résultat du carbone, de l’oxigène, de l'hydrogène et de l'azote; pour pre- mier résultat, du soufre , de la silice, de l’alumine , des oxides de fer et de manganèse , de l’hydriotate de po- tasse, des sous-phosphates de chaux, de potasse et de magnésie, des sulfates de potasse, de soude , de ma- gnésie, de chaux et d’ammoniaque ; quelques sous-car- bonates produits par la combinaison d’acides végétaux unis à la chaux, la potasse , etc. Tous ces matériaux leur sont fournis par la terre, l'air et l’eau. Cd PIYSIOLOGIE. 355 L'eau tient en dissolution une certaine quantité de terres, de sels, de matières animales et végétales, qui sont absorbés par les racines et charriés par la sève dans le tissu organique qui s’en assimile une partie : une autre s'échappe par la transpiration. La terre ne fournit de la nourriture aux plantes qu’en état de dissolution dans l’eau. L'air leur fournit de l'hydrogène et de l'azote en petite quantité, mais une grande abondance de gaz acide car- bonique. L’oxigène de l'air s’unit au carbone de la plante et produit aussi du gaz acide carbonique , lequel est décomposé et fixé par la lumière, comme nous l'avons dit. Les plantes se nourrissent par succion, c’est-à-dire en absorbant les sucs nourriciers. Cette absorption se fait par toutes leurs parties , mais avec beaucoup plus de force par les feuilles et par les racines. Les fluides ab- sorbés par ces parties sont charriés dans tout le végétal par les gros vaisseaux du bois, et principalement par ceux qui sont le plus près de Pétui médulaire; par les pores de ces vaisseaux ils se répandent du centre à la circonférence. De la sève et de la circulation. Lorsque la végétation commence, la sève s'accumule dans les parties les plus jeunes du bois ou des tiges, s’y élabore, et forme les sucs propres et le cambium. Long- temps on a cru que la sève avait deux mouvemens, un ascendant au printemps et un descendant en automne ; mais cette opinion, que rien ne prouve et qui n’explique- rait rien si elle était prouvée, est aujourd’hui abandon- née par les physiologistes. Quelques botanistes ont pensé que pendant le jour la sève circulait des racines aux feuilles et pendant la nuit des feuilles aux racines, mais cette théorie n’est pas appuyée sur des hypothèses 356 PHYSIQUE VÉGÉTALE. plus spécieuses. Il parait que la sève tend toujours à monter et à se répandre partout où elle manque, et qu'il n'y à pas d’autres principes de circulation que ceux que l’on peut déduire de ces deux causes. Mais quelles sont les lois qui forcent la sève à s'élever contre les lois physiques de la pesanteur ? Voilà ce qui a embarrassé tous les naturalistes. Quelques-uns ont pensé que Ja succion des végétaux n’était qu’une simple imbibition, et que l’ascension des fluides dans les tiges était le résultat de l’attraction capillaire des tubes; que cette ascension devait être continue tant qu'il y avait assez de chaleur dans l'atmosphère pour entretenir la transpiration des feuilles au moyen de la vaporisation des fluides. On a observé ensuite qu'il n’y a ni suceion, ni mouvement des fluides dans un végétal mort, quoique ses formes organiques soient absolument les mêmes, et cette hypothèse fut renversée. Voyons si nos botanistes modernes expliquent mieux ce phénomène , ‘en appelant à leur secours ce qu'ils ont appelé la force vitale. « La succion, la transpiration et « la marche des fluides, dit Mirbel, dépendent de la « force vitale; mais parce que nous voyons que cette « force vitale n’agit pas toujours avec une égale inten- « sité, et que même ses effets sont modifiés par des « causes extérieures, il nous reste à connaitre ces causes, « el lPinfluence que chacune d’elles exerce sur les phé- « nomènes de la végétation. Le calorique est celle dont « l’action est le moins équivoque. Indépendamment de « ce qu'il détermine lévaporation, il agit encore comme « stimulant de lirritabilité, puisqu'il faut différens de- « grés de chaleur pour faire entrer en sève les différen- « tes espèces, et que chacune est douée d’une force par- « ticulière, au moyen de laquelle elle supporte, sans « risque de la vie, un abaissement de température plus « ou moins considérable. L'action de la lumière oc- « casione la décomposition du gaz acide carbonique + = « PHYSIOLOGIE. 357 et le dégagement de l’oxigène : c’est un fait que prouve l’expérience , quoique les théories chimiques n’en puissent rendre raison. Le fluide électrique a sans doute quelque influence sur la vie végétale, mais jusqu’à ce jour on ne sait rien de positif sur ce sujet. La raréfaction et la condensation de l'air con- tenu dans les vaisseaux , contribuent au mouvement des fluides. La plante, au moyen de l'air, agit comme une pompe foulante ou aspirante; mais cet effet a pour cause les variations de l’atmosphère, et air n'est ici qu'un véhicule que la température met en jeu. Quant à l'attraction capillaire, elle tend sans cesse à intro- duire et à retenir dans le tissu végétal une quantité considérable d'humidité , et, par cette raison, il n’y a pas de doute qu’elle n’aide à la nutrition ; mais le tissu végétal, privé de vie, ne cesse pas d’être hygromé- trique, parce que cette propriété résulte de formes que la mort ne détruit point; ainsi on ne saurait ex- pliquer certains mouvemens de la sève qui ne se ma- nifestent que dans le végétal vivant, par les seules lois de l'attraction des tubes capillaires. » De la transpiration. Les plantes transpirent beaucoup plus que les ani- maux, etil paraîtrait, par les expériences de Musschen- broek , Halles, Desfontaines et Mirbel, qu'une plante de soleil ( kelianthus annèus), à masse égale et à temps égaux, transpire dix-sept fois plus qu'un homme. Si l’on décompose le fluide exhalé, on le trouve formé par une certaine quantité d’eau réduite en vapeur, mêlée une très-petite quantité des principes immédiats sus- ceptibles de se dissoudre dans l’eau, et de se vaporiser par la chaleur. 353 FIYSIQUE VÉGÉTALE. De l'expiration. Plusieurs auteurs ont donné à ce phénomène le nom de respiration, en y comprenant l'absorption. L'expira- tion est, comme nous j’avons dit, un résultat de l’action de la lumière; elle se compose de gaz acide carbonique et d’oxigène. Des déjections. Elles consistent en des sues plus ou moins épais, des résines, des huiles, de la manne, du sucre, de Ja cire, etc., etc., rejetés au dehors par la force de la végétation. On donne encore ce nom à toutes les li- queurs qui cireulent naturellement , c’est-à-dire sans lésion ou maladies des organes , par les poils, les glan- des, les pores, etc. De la propagation. Les végétaux se multiplient et se perpétuent de di- verses manières. Par graines , par boutures et marcottes, par bulbilles, etc. (Foyez pour la greffe, la page r°° du volume 2°); quant aux autres modes de multiplication, nous en traiterons dans le chapitre suivant. De la fécondation. Nulle graine ne peut germer si elle n'a été fécondée, soit actuellement, soit au moins dans une des géné- rations précédentes. (L’épinard et la courge paraissent être les seules plantes chez lesquelles une seule féconda- tion peut servir à plusieurs générations. Da reste, des expériences rigoureuses ne peuvent être faites là-dessus, parce qu'aucune plante ne-peut prendre tout son déve- loppement sans air, et l’on peut supposer que partout où l'air s’'introduit le pollen peut aussi s’introduire.) La fécondation est l'acte par lequel une plante trans- PHYSIOLOGIE. 359 met la force vitale à l'embryon renfermé dans ses en- veloppes. Cette transmission s'opère par l'émission de la liqueur prolifique du pollen sur les ovaires, et voilà tout ce que l’on en sait. À une certaine époque les an- thères s'ouvrent et le pollen s’en échappe. Il tombe sur lestigmate , ou le vent l’y porte si la plante est dioïque; la vésicule, rencontrant de l’humidité, crève, et la liqueur spermatique s’insinue jusque sur les ovaires par les canaux plus ou moins déliés du style. L'art est venu à bout de tromper, jusqu'à un certain point, la nature dans l'acte de Ja fécondation. Si on coupe les anthères d'une fleur avant qu'elles aient épan- ché leur pollen, et que l’on rapporte sur le stigmate de la poussière d’une fleur d'espèce différente (mais ayant cependant avec elle un certain nombre d’analogies qui n’a pas encore été calculé), la fécondation a lieu, et les plantes qui en naissent ont plus ou moins de ressem- blance avec le père et la mère, sans ressembler exacte- ment ni à l’un ni à l’autre. Ces sortes d'individus sont quelquefois mulets, c’est-à-dire, privés de la faculté de se reproduire par graines. Ils ont recu le nom d’ky- brides. De la mort des végétaux. . Tout être organisé est mort, lorsque la force vitale cessant, la matière rentre sous la puissance des lois connues de la chimie et de la physique. Les plantes herbacées meurent quand le cambium est épuisé; ce qui arrive dans l’espace de temps d’une seule végétation, puisqu'il ne se renouvelle pas. Mais cette espace de temps, qui se compte depuis la germination jusqu'a la maturité des graines, peut être plus ou moins long selon les circonstances accidentelles et selon les espèces. Îl n'est que de cinq à six mois dans le blé’et dans la plupart des plantes annuelles ; il est de deux ans dans le bananier, de trente et davantage dans les pan- 360 PHYSIQUE VÉGÉTALE. danus, les sagoutiers, etc. À mesure que le cambinm s'épuise les vaisseaux nourriciers s'engorgent et perdent leur souplesse ; l’irritabilité cesse ainsi que l'absorption ; de là plus de nutrition et Ja mort. La mort de vieillesse est extrêmement diflicile à expliquer dans les végétaux ligneux; aussi plusieurs naturalistes célèbres la nient-ils. Sans rien décider là- dessus, nous allons simplement émettre leur opinion. « La seule partie, disent-ils, qui entretienne la vie dans les arbres, est la couche annuelle et berbacée fournie par le cambium ; or, cette couche étant toujours jeune, elle doit jouir toujours de sa force vitale; il ne peut y avoir ni engorgement de vaisseaux, ni endurcisse- ment de fibres; 1ls conservent toute leur irritabilité ; et, par suite, les fonctions de la vitalité ne peuvent être interrompues que par des causes accidentelles. » Dans tous les végétaux c’est la force vitale qui entre- tient la vie. Sans connaître les causes, ni la nature de cette puissance occulte, il n’en est pas moins vrai que par le fait seul qu’elle existe elle doit avoir des limites, une fin comme nous lui voyons un commencement. À force d'agir, de s'étendre dans la production continuelle de nouveaux organes, elle doit s’épuiser et finir par s'anéantir. Un gland, par exemple, recevra par la fé- condation une impulsion de force vitale dont l'énergie devra augmenter pendant cent cinquante ans, puis di- minuer pendant autant d'années, puis enfin se perdre tout-à-fait, et alors l'arbre mourra ; il mourra, parce que le cambium diminuera chaque année en raison égale de la force vitale, et finira par ne plus se régé- nérer lorsque l’irritabilité des parties sera réduite à rien ; il mourra, parce que, chose sur laquelle les botanistes se sont trompés, ce n’est pas le renouvellement du cam- bium qui fait la force vitale, mais bien la force vitale qui fait le renouvellement du cambium. Selon notre hypothèse tout s'explique naturellement, , h PHYSIOLOGIE. 361 et nous ne nous trouvons plus forcés d'admettre qu’un être a commencé pour n'avoir plus de fin, ce qui est absurde en raisonnement. Selon l'hypothèse des natu- ralistes, qui nient la mort de vieillesse dans les végétaux ligneux, comment expliquer la courte durée de quel- ques arbrisseaux qui ne vivent pas plus de quatre ou cinq-ans ? Comment expliquer les bornes précises que la nature a fixées dans la grosseur et l'élévation de chaque espèce en particulier ? Pourquoi le thym n’ac- querrait-il pas, avec les siècles, la taille du baobab ou du cèdre du Liban ? Du reste, nous convenons que les accidens journa- liers, résultant du terrain, de la température, des mé- téores, et trop souvent d’une mauvaise culture, font considérablement varier l’époque de la caducité dans les végétaux ligneux ; toutes choses qui rendent comme impossible de savoir avec quelque justesse le nombre d'années que la nature a dévolu à chacun. 362 PHYSIQUE VÉGÉTALE. CHAPITRE III. DES MALADIES DES PLANTES. Les auteurs ont donné le nom de phytothérosie à cette branche de.la physique végétale qui a pour objet la connaissance des altérations des végétaux. Is Pont divi- . sée en pathologie végétale, ou examen des maladies des plantes, et en nosologie végétale ou classification et nomenclature des edit + plantés. N'ayant envisagé la science que sous un point de vue philosophique, leurs travaux sont à peu près restés étrangers à la botanique appliquée, et inutiles au progrès de Pagriculture. Aussi n'essaierons-nous pas de les suivre dans leur classifica- tion toute scientifique. Nous nous bornerons à décrire les maladies générales qui attaquent les végétaux, et à enseigner les moyens à employer pour arrêter, autant que possible, les progrès du mal. Les maladies des plantes peuvent être divisées en affections générales et affections locales. Une maladie est générale quand elle affecte à la fois tout le système organique, et dans ce cas elle peut être constitution- nt c'est-à-dire produite par une cause qui agit dès la formation de l’embryon ou au moins depuis son pre- mier développement; accidentelle, quand la cause du mal n’existe que lorsque la végétation a commencé. Une maladie est locale quand elle n’affecte qu'une partie de la plante, et elle peut encore être accidentelle ou cons- titutionnelle. Toute maladie constilutionneile peut se transmettre par la génération, au moins dans un grand nombre de plantes, et c’est pour celte raison que l’on obüent des fleurs doubles par la voie du semis. Toute maladie acci- 2 _ MALADIES DES PLANTES. 363 dentelle ne peut se transmettre par la génération, et c’est pour cette raison que les granies d’un très-bon fruit ne donnent souvent qu'un très-mauvais sauvageon. On dit les maladies endémiques quand elles sont par- ticulières à certaines races ou certaines familles ; spo- radiques, quand elles attaquent indifféremment telle espèce ou telle autre; contagieuses, lorsqu'elles se communiquent d'individu à autre, soit par un contact immédiat, soit par des molécules morbifiques portées par le vent d’une plante. sur une autre ; épidémiques , lorsqu'elles attaquent tout d’un coup un grand nombre d'individus dans une même contrée. Les maladies ont plusieurs causes connues qui peu- vent toutes se rapporter à cellés-ei. 1° La qualité du sol; dans les terres maigres les plantés ne trouvent pas une nourriture suffisante , elles se développent mal et atter- gnent rapidement cette première période de désorgani- sation annonçant la vieillesse ; leur écorce se couvre de mousse , de lichens, de chancres; la sève charrie peu de carbone, mais elle se charge d’une quantité sura- bondante de matières alcalines et terreuses, qui obs- truent les vaisseaux conducteurs et occasionent le des- séchement des branches. Dans les solsirop gras contenant unetrès-grande quantité de detritus animaux, les plantes à bulbes pourrissent , les autres fournissent une végé- tation très-vigoureuse, mais au détriment de la fructifi- cation. Quelquefois la sève se porte toute aux rameaux et aux feuilles et abandonne les fleurs qui avortent faute denourriture. D’autres fois ellese porte avec trop d’abon- dance aux organes de la fécondation et change les pistils et les étamines en pétales, d’où résulte nécessairement l’avertement des ovaires. 2° L'eau est encore une cause générale de l’altération des végétaux. Quand les pluies sont trop abondantes, l’eau remplit les vaisseaux séveux sans s’y élaborer , les sucs propres ne se forment pas, le végétal s’étiole, languit, les feuilles jaunissent et tom- 364 PHYSIQUE VÉGÉTALE. bent, les fruits n’ont aucune saveur, les graines ne müû- rissent pas, les racines pourrissent et entraînent la perte de l'individu avec la leur. La stérilité des graines est encore le résultat de l’eau des pluies qui fait manquer la fécondation en obligeant les vésicules de pollen à éclater et à laisser échapper la liqueur spermatique avant d’avoir été portée sur le stigmate. Outre cela , une humidité stagnante sur une partie d’un végétal y produit des chancres, des ulcères et des écoulemens. À ces deux causes générales viennent encore s’en joindre de secondaires, qui peuvent cependant agir seules dans de certaines circonstances, tels sont par exemple, le froid ou une chaleur excessive, les odeurs méphytiques, le défaut d’air ou sa stagnation, l'obscurité ou une lumière trop vive , les chocs des corps étrangers, et enfin les blessures. Nous allons traiter en particulier de toutes les maladies dont les remèdes sont connus. SECTION PREMIÈRE. Maladies occasionées par les plantes parasites. Il y en a plusieurs espèces, résultant pour l'ordinaire d’une humidité stagnante sur lécorce. 1. La mousse. Lorsqu'un jeune arbre est de mauvaise nature, c'est-à-dire lorsqu'il est rabougri, soit que son altération soit constitutionnelle ou qu’elle résulte sim- plement de la maigreur du terrain, son écorce devient rude , écailleuse, gercée, propre à retenir l'humidité. Les graines imperceptibles de mousses, de lichens et même de quelques champignons, y sont apportées par les vents, y germent , se développent , et bientôt ces plantes parasites augmentent l'humidité, attirent les in- sectes auxquels elles servent de refuge, bouchent les pores de l'écorce et favorisent les chancres et Les ulcé- rations. Les vieux arbres sont particulièrement sujets à cette maladie. MALADIES DES PLANTES. 365 Lorsqu'on en a étudié la cause il est assez facile d'y porter un remède efficace. Si elle vient du terrain, on, enlève sa superficie jusqu'à la profondeur des premières grosses racines et on rapporte à la place une terre pré- parée plus fertile. Si le terrain est humide, on fait des tranchées et:on emploie les moyens d'usage pour l’assai- nir. Quelquefois le feuillage épais d’un arbre intercepte la circulation de Pair et favorise par cette raison la stagnation de l'humidité et la naisqance des mousses ; il s’agit alors de combiner sa taille de manière à favoriser des courans d’air autour de la tige et des branches. Dans tous les cas il faut entretenir avec soin ja propreté du végétal et enlever les plantes parasites à mesure qu'elles paraissent. Pour cela nous avons inventé des émoussoirs de formes variées dont on se sert avec avan- tage et facilité. Is consistent en des lames plus ou moins grandes , oblongues avec deux pointes, ou ellipsoïdes, ou triangulaires, en croissant, et ayant un côté tran- chant et un autre finement denticulé ; elles'sont placées transversalement sur un petit manche auquel elles tien- nent par le milieu de leur surface inférieure , à la ma- nière des feuilles peltées. On en racle les écorces , et, au moyen de leurs différentes formes, on parvient dans tous les angles et l’on embrasse toutes les surfaces, On indique encore comme remède contre la mousse des arrosemens faits sur les parties affectées avec de l'eau de chaux: ou d'étendre dessus une couche de chaux vive détrempée dans de l’eau et à demi - éteinte; mais, outre que ces moyens sont désagréables à l'œil; ce sont des palliatifs qui ne peuvent agir que pour un laps de temps très - court. 11 faut attaquer le mal dans sa source. Si un jeune arbre pousse mal et se couvre de mousse, quoique planté dans un bon terrain, il vaut beaucoup mieux le remplacer par un autre que de ten- ter des remèdes qui seraient toujours infructueux. 2. Le aux est une plante véritablement parasite, qui, 366 PHYSIQUE VÉGÉTALE." en s'emparant de la sève des arbres fruitiers , les épuise où au moins les fatigue. Il ne se trouve ia que dans Jes grands vergers fréquentés par les merles et les grives qui y apportent sa graine. Îl ne s'agit que de inque. avec la racine en lé coupant au rez de l'écorce. : “On débarrassera de même les arbres du lierre , des clématites , et aûtres arbrisseaux grimpans qui s'y atta- chent, à moins qu'on ne’soit intéressé à les conserver pour augmenter l'effet pittoresque d’une scène. 3. Le pranc, MEUNIER ou LÈPRE. On apercoit par fois une espèce de’poussière blanchâtre où de moisissure au sommet d’un jeune rameau , surtout sur de pêcher ; cette moisissure gagne bientôt la base des rameaux , attaque même les petites branches et les fruits. Toutes les par- tiés qui en sont infectées se dessèchent et meurent promp- tément, et emportent quelquefois l'arbre entier dans leur pérte. Cette maladie, contagieuse par attouchement, est océasionée par un St Empletion dont l’humidité a LE me “sé Ie développement. Aussitôt qu'elle’ paraît; 1l faut couper les parties sur lesquelles on l'apercoit, lesenlever et les brûler: Mais si: lon se borne à ces précautions, le principe du mal existant toujours sur les autres parties du végétal, le'‘blane s'y montrera de nouveau aussitôt que le circonstancesle favoriseront. [ faudra donc aérer le‘ végétal, si Ja choseest possible, et surtout l'abriter des pluics continues avecdes ‘paillassons. Toutmoyen EUR tendra à maintenir son feuillage dans un Ctat constant de séeh eresse , aura de Écfiéacité. °Ebs arbres en terrain’sée ét à bonne exposition,sont peu ‘où point exposés au blanc ;::ceux-placésau nordiet a T'ouest en sont beatcoup plüs infectés, etune fois qu'ils en sont attaqués ilest très-difficile de les guérir. S'ils sont en espaliers palissés à laïloque} on les détachera de la muraille et on les en éloïgnera de deux’ou trois pouces au moyen d'un treillage , afin de favoriser larciroulation . de Pair attour des rameaux. MALADIES DES PLANTES. 367 4. La morsissure est un autre champignon qui attaque de même les jeunes pousses des végétaux , surtout de ceux que l’on tient l'hiver dans une serre peu éclairée , peu acrée, humide, et maintenue à une température trop élevée. En donnant de la lumière et surtout de l'air, on arrête aisément les progrès de la moisissure. On attend pour amputer les parties attaquées, que le sujet soit dehors, à moins que le mal ne fasse des progrès me- naçans, auquel cas on les coupe de suite , avec la précau- tion de rapprocher la plante des jours. 5. La roUILzLE est encore l’eflet d’un champignon, qui paraît sur les feuilles et les jeunes rameaux, en forme de taches rousses et un peu proéminentes. Son effet est de faire tomber les feuilles, de détruire les gemmes, et quelquefois de stimuler je organes de la plante de ma- nière à leur faire ein a des rameaux à contre- temps. Elle est contagieuse et aussi difficile à guérir que le blane , avec lequel elle a beaucoup d’analogie. On la traite de même , et l’on doit aussi avoir la précaution de brüler les parties infectées que l’on a amputées. 6. Le craron n’attaque guère que les graines de quel- ques graminées, et entre autres celles du maïs, C'est un champignon qui se développe dans l’intérieur même du grain , dévore sa substance et la remplace par une pous- sière noire et fétide. Il esi favorisé par l'humidité de Pat- mosphère. Une fois que les graines en sont attaquées, il n'y a aucun moyen d’en arrêter les progrès, mais on peut les en préserver jusqu'à un certain point en les chaulant avant de les semer. 7. L’ERGor est une maladie fort singulière , qui alta- que le blé. Le grain s’allonge en forme d’ergot de coq, noircit plus ou moins à l'extérieur, se remplit d’une poussière blanchâtre et inodore que l’on attribue à un champignon. On en préserve les récoltes par le même moyen que pour le précédent, c’est-à-dire par le chau- lage. L’ergot est un poison np qui agit en gangré- 368 PHYSIQUE VÉGÉTALE. nant les extrémités. En 1817, beaucoup de personnes , en Bourgogne , ont perdu les pieds ou les mains pour avoir mangé du pain dans lequel il s'en trouvait. 8. Le rouGE est une affection propre au pêcher et au rosier. Îl s'annonce sur le jeune bois par une teinte rou- geâtre qui augmente de plus en plus en intensilé, et qui ordinairement fait périr l'arbre affecté en trois ou quatre ans. On l’attribue au développement d’un champignon du genre uredo. On guérit quelquefois le rouge en trans- portant l'arbre à une exposition chaude et abritée, en terrain substantiel et sain, mais il faut qu'il soit assez jeune pour supporter la transplantation. 9- CONTAGION RADICALE. On nomme ainsi une maladie qui attaque les racines des plantes, particulièrement celles de quelques arbres fruitiers et les ognons de sa- fran. Elle consiste en un champignon blanc, de forme pulvérulente, qui s'attache d’abord au chevelu des ar- bres, gagne les grosses racines, les fait périr et entraîne l'arbre dans leur perte. Quand on voit un arbre languir, jaunir et se défeuiller sans causes apparentes , On peut soupçonner une contagion radicale, et alors on visite ses racines. Si on s'aperçoit qu'il y ait du blanc, on le déplante, on coupe toutes les parties malades, on lave et brosse avec soin les autres racines. Si on veut replan- ter l'arbre à la même place, il fant scrupuleusement changer la terre, sans quoi la maladie reparaîtra de suite; surtout il faudra bien se donner de garde de transporter cette terre infectée au pied d’autres arbres. Quant aux ognons de safran, on les visite les uns après les autres ; on Jeite ceux que l’on soupconne aflectés, et l’on re- plante les autres dans un autre terrain. Cette maladie est très-Contagieuse, MALADIES DES PLANTES. 369 SECTION II. Maladies organiques, dont les causes varient et sont quelquefois inconnues. 10. La cLoQUE attaque principalement les pêchers. Les feuilles se boursouflent, deviennent épaisses, cris- pées, d’un vert terne et jaunâtre; les bourgeons se tuméfient, cessent de croître, se roulent ou se chif- fonnent ; les fourmis et les pucerons sont attirés par des pertes de substances ; l'arbre devient stérile, languit quelque temps et finit par périr. Nous pensons que cette maladie est le plus souvent occasionée par une mauvaise exposition et par un terrain maigre et hu- mide. Les racines ne renvoient qu'une sève crue, mal élaborée, trop aqueuse, d’où résultent des désordres dans les fonctions organiques. Assainir le sol, l’appro- prier à la végétation au moyen de bons engrais bien combinés avec la nature de l'arbre et du terrain, ra- battre de suite les bourgeons attaqués (si ceux qui pous- seront peuvent encore avoir le temps de mürir), ou at- tendre pour cela le moment de la taille, tels sont les moyens les plus sûrs pour remédier au mal. 11. La comme est une maladie propre aux arbres portant des fruits à noyau. C’est une extravasation des sucs propres qui s’amassent dans de certaines partes, forment des dépôts entre l'écorce et le bois, s'y coa- oulent, interceptent la marche du cambium, et occa- sionent par conséquent une désorganisation des par- ües, surtout si l'écorce est assez épaisse pour empêcher que la gomme ne s'ouvre un passage au dehors. Cette affection peut avoir plusieurs causes : la faiblesse du su- jet et la mauvaise qualité du terrain sont les plus géné- rales et les plus difliciles à parer. Quelquefois elle est accidentelle et alors on y porte remède en ouvrant les 370 PHYSIQUE VÉGÉTALE. dépôts, ou mieux en coupant les branches attaquées à quelques pouces au-dessous du mal. 12. Le cnancre est une ulcération quelquefois sèche, le plus souvent avec écoulement et perte de substance. Il ronge, creuse et exfolie les parties, de manière à entrai- ner la perte entière de l'arbre si on n’y porte un prompt remède. Lorsqu'il est accidentel, c’est-à-dire qu'il résulte d'une blessure , on le guérit aisément en prenant le mal dès son principe. On enlève toutes les parties infectées avec un instrument tranchant et en coupant jusqu’au vif; on unit la plaie, et on la garantit du contact de l'air avec de la cire à greffèr où de l'englument de forsith, ainsi composé : argile, cendre , poussière de charbon, plâtre pulvérisé , le tout amalgamé, passé au tamis, et formant une espèce de pâte au moyen de l’eau qu’on y ajoute. Toute autre matière susceptible de retenir l'humidité, comme par exemple ce que les jardiniers appellent on- guent de Saint-Fiacre, doit être rejetée. Si le mal résulte d’un apauvrissement de la sève occasioné par un sol de mauvaise qualité , il faut changer la nature de la terre. 13. Le rAcuITISME est une maladie ordinairement cons- titutionnelle. Le sujet qui en est atteint languit, se couvre de mousseset de lichens, ne fait que de très-faibles pousses. Sa tige est chancreuse, noueuse, basse , dif- forme ; les écorces sont grossières , écailleuses, noires, comme charbonnées; l'arbre , quoique jeune , annonce toute la décrépitude de la vieillesse; il est stérile , et ce- pendant il vit assez long-temps. Le mal résulte, ou de la mauvaise nature du sujet sur lequel ona greffé, où d’une affection constitutionnelle du sujet qui a fourni la greffe, ou enfin de Ja nature du terrain qui ne convient pas à l'espèce de l'arbre, ou qui, peut-être, manque de sucs nutritifs, ou enfin d’une mauvaise localité. Quand la maladie vient du sujet, il n’est pas d'autre moyen que de l'arracher et le remplacer par un autre plus robuste ; si MALADIES DES PLANTES. 371 le mal vient du terrain , en l’amendant, l’assainissant, et taillant l'arbre court pendant deux ou trois ans, on peut le ramener. Les jardiniers , quand un sujet est atta- qué du rachitisme , disent qu'il est rabougri. 14. Des roupes. On donne ce nom à des excroissances souvent verruqueuses , qui se montrent sur le tronc des arbres et sur leurs grosses branches , et qui finissent tou- jours par s’ulcérer et devenir chancreuses. Elles sont occasionées par une déviation du cambium résultant de la déchirure d’un des tissus cortiqueux. Les loupes s'enlèvent comme les chancres et se traitent de la même manière. 15. Les crevasses ou cÉrIvUuREs peuvent avoir plusieurs causes, mais les plus ordinaires sont le froid, la pléthore et l'humidité. Dans le premier cas la gelée en saisissant l'écorce et augmentant considérablement la densité de ses tissus, laretire et la forceàse déchirer. Danslesecond, le cambium se porte plus particulièrement à la formation du liber qui, devenant trop épais, force de même l'écorce qui lui sert de fourreau, à se fendre. Cette maladie est peu de chose quand on a la précaution de recouvrir aussitôt la plaie avec la cire à grefler, pour empêcher la partie du bois mise à nu de se dessécher au contact de Pair. Dans le dernier cas surtout , le cambium a bientôt formé une seconde écorce. 16. La ranquEur, que Plenck nomme assez impropre- ment phthisie, s'annonce par la stérilité, le défaut de vé- gétation , la décoloration du feuillage et sa chute ayant le terme marqué par la nature. Ceite maladie peut ré- sulter d’un climat contraire, et alors le mal est sans remède. Mais le plus souvent elle tient à la stérilité ou à ‘a mauvaise nature du sol, et alors on la guérit en amen- dant la terre. Quelquefois elle provient d’une maladie des racines, ce que lon doit eroire quand on ne peut en découvrir aucune autre cause. Dans ce cas on pro- fite de Ja saison favorable à la transplantation, on dé- y 372 PHYSIQUE VÉGÉTALE. plante le sujet et on visite scrupuleusement ses racines. On enlève en coupant jusqu’au vif toutes les parties attaquées de pourriture ou de moisissure, on les lave et les nettoie parfaitement, et on replante dans une nou- velle terre préparée convenablement. Si on plantait à la même place et sans changer la terre , on courrait la chance de voir le mal revenir. La langueur peut encore venir d’une trop grande sécheresse du sol , et on y re- médie par des arrosemens ; où du manque d'air, et dans ce cas il ne s’agit que d’élaguer les corps qui obs- truaient son passage. 17. De L’ÉrioemEnT. Cette maladie s'annonce par l'allongement outre mesure des tiges et des rameaux, par leur faiblesse , par leur mollesse, et par leur manque de coloration. Les plantes dans cet état sont stériles et périssent promptement : cette affection provient d’un défaut d’air et de lumière. Ce n’est qu'avec beancoup de précautions qu'on peut ramener une plante étiolée à son état naturel. Si on l’exposait tout à coup au grand air et aux rayons du soleil , ilne faudrait qu'une heure pour la tuer sans ressource. Il faut donc la rapprocher peu à peu des ouvertures de la serre , l’accoutumer in- sensiblement aux influences atmosphériques, et ne l’ex- poser dehors que lorsque ses parties , par la fixation du carbone , auront pris de la fermeté et une couleur verte très-prononcée. Si elle est sous châssis, on lève les pan- neaux peu à peu et on les laisse couverts de paillassons, jusqu'à ce qu'on puisse sans danger l’exposer à Pair libre. Il est prudent , alors, de rabattre toutes les par- tes qui se sentiraient encore de l’étiolement. 18. Des écouremens. Il arrive parfois qu'à la suite d'une piqûre d’insecte ou d’une blessure, il se déclare une hémorragie. Les sucs qui s’'échappent de la plaie en corrodent les bords, les ulcèrent, et bientôt un chancre dangereux se déclare. On prévient ces suites fâcheuses en rafraichissant les bords de la plaie avec un MALADIES DES PLANTES. 373 instrument très-tranchant, el en arrêtant l’écoulement des sucs au moyen d’une épaisse application de cire à grefler. 19. De la DérocraTIoN ou PnyYLLoPtosre. Cette maladie s'annonce d’abord par la langueur, ensuite par une ces- sation subite de toute végétation. Les feuilles pâlissent, puis elles jaunissent et tombent , de manière qu’en peu de temps le végétal s’en trouve entièrement dépouillé quoique dans une saison favorable à la végétation ; si la cause du mal continue, il meurt dans le courant de l’hi- ver. On doit attribuer cette affection à une maladie des racines , et la traiter comme la langueur, n° 15. 20. De la canGRÈNEe ou PourRITURE. Cette maladie n’attaque guère que les plantes , ou les parties de plantes, d’une substance charnue et plus ou moins succulente ; par exemple les feuilles et les tiges des plantes grasses, les bulbes et les tubercules. Elle commence par un en- gorgement des vaisseaux ou par une ulcération causée par une blessure ou par le séjour d’une humidité stag- nante ; si le défaut d’air vient se joindre à ces causes, le mal augmente rapidement. La pourriture est con- tagieuse ; ellese communique non-seulement aux parties saines de la plante malade , mais encore aux parties des plantes voisines qui se trouvent en contact avec elle. : Quand elle n’a pas fait de trop grands progrès, onla guérit aisément en faisant l’amputation, jusqu'au vif, des par- ties désorganisées , et en exposant la plaie à l’air et à la lumière pour la cicatriser, ou plutôt la dessécher promp- tement. 21. Dela pirrorwrré. Elle résulte ordinairement d’une marche irrégulière de la sève, occasionée par un climat ou un sol peu favorables, par des insectes, le vent, une blessure, etc.; on la répare au moyen de la taille, des tuteurs, et par l’amendement du terrain. 22. La cARPOMANIE est une maladie par laquelle toute la sève de l'arbre, au lieu de se porter aux branches, d 374 PHYSIQUE VÉGÉTALE. aux rameaux et aux feuilles, se concentre sur les orga- nes de la fructification. L'arbre produit une quantité de fruits petits et médiocres, s'épuise en deux ou trois ré- coltes , et finit par périr où au moins par rester stérile pendant plusieurs années. Une taille courte et parfaite- ment raisonnée, avec quelques engrais, peuvent seuls prévenir cette maladie qui attaque principalement les vieux arbres. 23. La poLyaNTHAcARPIE est une maladie contraire à la précédente. Toute la sève, se portant aux branches, aux rameaux et aux feuilles, abandonne le fruit qui avorte. Elle est occasionée par un excès de vigueur que l’on dompte au moyen de l’areure, de l'incision annu- laire, par des incisions longitudinales dans l'écorce , et mieux, en retranchant quelques parties des racines les plus vigoureuses. 24. De la sRruLURE. On donne le nom de brûlure ou de coup de soleil , à une maladie accidentelle qui peut tuer un végétal délicat en peu d'heures. Lorsqu'une plante a été pendant quelque temps privée d’air ou de lumière, si on l’expose sans ménagement aux rayons d’un soleil trop ardent , ils agissent sur ses tissus comme sur la peau d’un homme qui a recu ce qu’on appelle un coup de soleil. L'écorce se dessèche et se détache du bois, les feuilles rougissent , se dessèchent et tombent , et, si la brûlure est entière, le végétal périt. On ne peut pas guérir Ja brûlure , maïs on la prévient en abritant les plantes au moyen de toiles et de paillassons pendant la plus grande ardeur du jour. Nous avons remarqué que la réflexion des rayons du,soleil par l'eau produit assez souvent la brülure. 25. De la cetée. Lorsqu'un végétal a été entièrement gelé, rien ne peut le rappeler à la vie ; il est entière- ment désorganisé. Mais si des gelées tardives de prin- tempssaisissent les jeunes pousses des plantes, les fleurs des pêchers, abricotiers, ete., le mal n’est pas toujours MALADIES DES PLANTES. 375 sans remède si l'on s'en apercoit avant que le soleil ait achevé la désorganisation des parties. On commencera par les garantir de ses rayons au moyen de toiles ou paillassons , et on fera dégeler lentement. Pour cela on prendra un arrosoir à pomme criblée de trous extrême- ment fins, et on arrosera à plusieurs reprises sur les bour- geons gelés, avéc l’eau la plus froide que l’on pourra se procurer, car 1l ne s’agit que d'éviter une transition trop subite. Pour les fleurs ce remède serait pire que le mal, car l’eau ferait éclater et disséminer le pollen , et les fruits avorteraient nécessairement ; aussi on agira par un autre procédé, On fera de distance en distance des petits tas de paille ou de foin humide, on y mettra le feu , et, en profitant de la direction du vent, on en di- rigera la fumée sur les fleurs gelées. Si on ne parvient pas à les sauver toutes, au moins on s’assurera la conser- vation d’une quantité suffisante pour espérer une récolte plus ou moins bonne. Si le mal n’est pas grand, on peut se contenter de tenir les plantes à l'ombre et de les laisser ainsi dégeler lentement. Mais si le soleil voit les parties avant qu’ellessoient entièrement remises, en dix minutes elles noircissent, elles se dessèchent entièrement dans la journée , et tout espoir de récolte est perdu. 26. De la rérHaARGtE. On appelle ainsi une suspension de végétation, pendant plus ou moinslong-temps , sans que la mort s’ensuive. Cette maladie est surtout remarquable dans de certaines plantes tuberculeuses, par exemple, les dahlies, dont les racines restent quelquefois un an ou deux en terre sans donner le moindre signe de végé- tation. Si on les place ensuite dans une circonstance fa- vorable, elles poussent avecla même vigueur que si elles n’eussent pas été malades. La léthargie est assez ordi- nairement le résultat d’un défaut de chaleur ou d’hu- midité. 27. De l’aspnyxie. Tout végétal privé d'air meurt asphyxié. L’asphyxie n'est jamais subite dans les jardins 376 PHYSIQUE VÉGÉTALE. | comme sous la machine pneumatique ; aucun végétal ne périt pour manquer totalement d’air, parce que cette circonstance ne peut jamais se rencontrer en culture. Mais une plante, qui se trouve placée dans des circons- tances telles que l’air ne peut circuler librement autour de toutes ses parties, que sans en manquer elle n’en a pas une quantité suflisante, languit d’abord, et à la longue périt asphyxiée. Le cultivateur doit donc mettre tous ses soins à placer ses plantes, soit dans la serre, soit en pleine terre, de manière à ce que l'air puisse constamment circuler autour de toutes ses parties. SECTION III. Maladies occasionées par des insectes parasites. 28. Des cocneniLres, encore nommées gallinsectes, kermès, etc. Ge sont des insectes de la classe des hé- miptères, à corps ovale ou arrondi, en forme de bou- clier ou d'écaille, s'appliquant contre l'écorce des Jeunes rameaux, la percant au moyen de leur trompe, et occasionant ainsi une grande perte de substance qui, si ces animaux sont trop multipliés , peut beaucoup fa- üiguer un arbre. Ils s’attachent particulièrement aux pêchers, aux orangers, lauriers, etc. Aussitôt qu’un vé- gétal en est atteint, il faut le visiter dans toutes ses parties , les écraser avec un morceau de bois, puis laver les rameaux avec une éponge, ou avec une brosse, s'ils sont assez forts pour supporter un léger frottement sans écorchure. Avec de la propreté les cochenilles sont peu redoutables. 29. Des pucerons. Ce sont encore des insectes appar- tenant à la classe des hémiptères et à un genre voisin des précédens. Ils sont très-petits et vivent en sociétés nombreuses sur les arbres et sur les plantes qu'ils sucent avec leur trompe, qu'ils salissent et épuisent. Les piqûres qu’ils font aux feuilles et aux jeunes tiges font MALADIES DES PLANTES. 377 prendre à ces parties diflérentes formes irrégulières, ou produisent des espèces de vessies ou d’excroissances ren- fermant dans leur intérieur des familles de pucerons. Outre cela, ils couvrent les feuilles d’une liqueur miel- Jeuse qui, en attirant les fourmis, augmente encore le mal. On détruit diflicilement ces insectes. Cependant on y parvient en les arrosant à plusieurs reprises avec des décoctions de plantes âcres, telles que celles de tabac, de feuilles de noyer, etc., ou en poudrant les parties attaquées du végétal avec de la cendre, de la suie, ou de ja fleur de soufre. Un moyen plus certain, c'est de les asphyxier avec de la fumée de tabac que l’on dirige sur eux au moyen d'un soufllet au bout duquel on adapte une boîte de fer blanc contenant le tabac al- lumé et se terminant par un tuyau. 30. Des PsyL1res ou faux-pucerons, genre d'insectes hémiptères voisins des précédens, dont ils diffèrent ce- pendant par la faculté qu’ils ont de sauter, et parce que les deux sexes ont des ailes. [ls vivent sur les arbres et sur les plantes, les piquent pour en sucer le suc, et occasionent dans quelques - unes de leurs parties , par- ticulièrement dans les feuilles et les boutons, des mons- truosités ou des apparences de galles. On les détruit par les mêmes procédés que les pucerons. . 31. Des cynrps. Ces insectes appartiennent à la famille des hyménoptères. Ce sont des espèces de mouches Jongues, bossues , souvent ornées de couleurs agréa- bles ; les femelles portent une tarrière avec laquelle elles piquent les végétaux. Les sucs s’'épanchent à l'endroit qui a été piqué, et y forment une excroissance ou une tu- meur qu'on nomme galle. Telle est la noix de galle , ou galle du Levant, qui sert à teindre en noir. Ces excrois- sances prennent différentes formes, celles d’un artichaut, d’un champignon, d’un mamelon, d’une pomme, d’une groseille, d’une nèfle, etc. Une des plus remarquables est ceile qui ressemble à un paquet de mousse qui se Le 25 ‘378 PHYSIQUE VÉGÉTALE. développe sur le rosier, et à laquelle on a donné le nom de Bédéguar. Les œufs, renfermés dans ces excroissances , éclosent et produisent des vers ou larves qui se nourrissent des sucs nutritifs du végétal. Pour les détruire, il ne s’agit que d'enlever ces productions et de les écraser. Ce sont des insectes de ce genre que les an- ciens Grecs employaient pour opérer la caprification, ou fécondation artificielle d'un figuier dioique. SECTION IV. Lésions occasionées par des animaux nuisibles. 32. Les Fourmis, en établissant leur demeure au pied des arbres, fatiguent les racines et font beaucoup de mal au sujet. Outre cela elles montent dans les rameaux qu'elles salissent , elles attaquent les fruits et même les feuilles. On parvient difficilement à les détruire. En entourant la tige d'un arbre avec un flocon de laine bien cardée-on les empêche d’y monter. Si la fourmi- lière se trouve à quelque distance des racines d’un arbre, on y verse de l’eau bouillante. Dans d’autres circons- tances, on la bouleverse chaque jour, on l’arrose avec de l’eau dans laquelle on a étendu un peu d'huile; par ce moyen on fait périr beaucoup de fourmis et on force les autres à l’abandonner. On vient-encore à bout d'en diminuer considérablement le nombre en suspendant aux branches des arbres qui en sont infectés des petites bouteilles d’eau miellée où elles vienneut se noyer. Quand elles se sont établies dans un pot ou une caisse, il est assez facile de les en chasser en plaçant le fond dans un vase d’eau, de manière à ce que la terre soit constamment mouillée pendant quelques jours. On les empêche de pénétrer dans les caisses en plaçant sous chaque pied un petit vase que l’on entretient constam- ment plein d’eau. | MALADIES DES PLANTES, 379 33. Les courriLuièRes, vulgairement nommées cour- teroles ou taupes-grillons, font un grand dégât dans tous les jardins où elles sont multipliées. Elles voyagent entre deux terres et coupent les racines qui se ren- contrent sur leur passage. C’est surtout aux Jeunes se- mis qu’elles portentie plus de dommage. Dans les terres fortes on peut en détruire beauconp en versant dans leur trou de l’eau sur laquelle on a jeté un peu d'huile. On enterre de distance en distance des pots ou des cloches, de manière à ce que leurs bords soient enfoncés à un demi- pouce au-dèssous de [a surface du sol, et on y verse quelques pouces d’ean ; en se promenant la nuit elles y tombent, ne peuvent en sortir et s’y noient. De cette manière on détruit une grande quantité d’autres insectes nuisibles. En automne, avant les mauvais temps, on fait dans chaque carré un trou de deux pieds de profon- deur sur autant de largeur , et on À remplit de fumier chaud. Lorsque les gelées se font sentir, les courtillières s'y retirent pour y passer l’hiver. Pendant le froid on vide ces trous, on cherche parmi le fumier et on tue les insectes qu'on y trouve. Si on aperçoit des trous dans la terre du fond, on y &irige pareïllement ses recherches. Ce moyen est d'autant Melo que lon détruit ainsi les mères et leur postérité future. On peut , dans le courant de l'été, déposer dans la terre une caisse sans couvercle, de plusieurs pieds de longueur sur dix-huit pouces de largeur, de manière à ce que ses bords soient à huit pouces au-dessous de la surface du terrain. On la rem- plit de fumier et on recouvre de terre. Tous les huit jours on la lève et ont ue toutes les courtillières qui s’y sont réfugices. 34. Les verspLaAncs ,taons, larves de hanneton, mans, ou tures, causent de très-grands dommages dans de certaines années, en détruisant les racines des végé- taux, et malheureusement on ne s'aperçoit du mal que lorsqu'il n’est plus possible de le réparer. Leur 860 PHYSIQUE VÉGÉTALE. destruction est fort diflicile, mais peut-être réussirait- on à en avoir beaucoup moins si, dans la saison des hannetons, on allait à leur recherche le soir et le matin. On les fait aisément tomber des arbres en se- couant ceux-ci, et on les écrase à mesure. Par ce moyen, les femelles ne déposant point d'œufs dans la terre, on aura d'autant moins de vers blancs qu'on aura détruit davantage de hannetons. Si l’on soupconne une plantation d’être attaquée par le ver blanc, on y plante aussitôt des fraisiers et on y sème de la laitue. Ces in- sectes préférant les racines de ces plantes à toute autre nourriture, ne manquent pas de s’y porter. Dès que l’on apercoit le feuillage d’un fraisier ou d’une laitue se flétrir, on cherche à la racine, on y trouve le ver et on le tue. 35. Les riquers, ou altises bleues, insectes de l’ordre des coléoptères, attaquent les semis de choux, de radis, de navets et autres plantes de la famille des crucifères, et, dans de certaines années, les détruisent entière- ment. Îls sautent avec beaucoup d’agilité et échap- pent aisément à la main qui veut les saisir. On les dé- truit ou les éloigne en arrosant les plantes qui en sont infectées, avec des décoctions de tabac, de feuilles de noyer , de sureau, ou d’autres plantes âcres. L'eau de potasse ou de suie peut encore être employée avec avantage. 36. Les cHEeNILLES sont peu à craindre si ona la pré- caution d’écheniller avec soin en hiver. Cette opération consiste à rechercher leurs nids, à les couper et les brûler. Les. chenilles qui se forment dans le courant de l'été et que l’on trouve éparses sur les plantes ne peu- vent échapper aux recherches d’un jardinier vigilant. 37. Les ARAIGNÉES qui attaquent quelquefois en grand nombre les jeunes semis, surtout ceux de carottes, et qui y font beaucoup de dégât en piquant les petites tiges pour en sucer la sève, s’en écartent aisément au MALADIES DES PLANTES. 361 moyen d'arrosemens soutenus, car ces insectes fuient l'humidité. 38. Les cuires gâtent beaucoup de fruits en les enta- mant aussitôt leur maturité. Pour en diminuer le nom- bre, 1l faut rethercher leurs nids et les détruire. Ceux que l’on trouve suspendus aux branches des arbres ou appliqués-contre les murs s’enlèvent et s’écrasent. On parvient à détruire les guêpes des nids enterrés ou cachés dans des troncs. d'arbre, en y introduisant le soir un chiffon soufré et embrasé ; on bouche les issues du nid pendant que le soufre brûle, et ces insectes pé- rissent asphyxiés. On peut encore les faire mourir en y versant de l’eau bouillante. Lorsqu'un fruit est attaqué par les guêpes, il faut bien se donner de garde de l’ôter de dessus l’arbre ; pendant qu’elles mangent celui-là elles ne pensent pas à en attaquer un autre. Si l’on est piqué par un de ces animaux , il faut aussitôt arracher l’aiguillon de la plaie pour empêcher qu’il ne s'enfonce davantage, puis on applique sur la blessure une petite compresse trempée dans de l’alcali, ou un peu de pou- dre de chaux vive. Les mêmes moyens apaisent la dou- leur causée par la piqûre d’une abeille. ‘39. Les rimaces et les EscarcoTs mangent les jeunes feuilles des végétaux, attaquent même les fruits. On ne vient à bout de les détruire qu’en leur faisant continuel- lement la chasse et les écrasant à mesure qu’on les ren- contre. C’est surtout au printemps, après une pluie douce, qu’ils sortent de leur retraite et qu'il est facile de les trouver. 4o. Les Lomsrics, vers de terre ou achées,, ne nuisent guère qu'en bouleversant la terre des semis de graines débcates, et en creusant des boyaux qui entraînent l’eau des arrosemens ; du reste ils n'attaquent jamais les ra- cines des plantes. On les recherche le matin à la rosée, pendant le printemps et avant le soleil levé; on les trouve alors à la surface de la terre. On peut encore les ‘ 382 PHYSIQUE VÉGÉTALE. faire sortir de leur retraite en ébranlant le terrain au moyen d’un pieu que l’on y enfonce et que l’on agite en tous sens pendant quelques minutes. Il faut écraser entièrement les lombrics eu les donner à la volaille, et non les couper en deux avec la béche, comme font quelques jardiniers, car ees animaux ont la singulière faculté de se reproduire entier d’une de leurs parties, et un ver coupé en forme deux. 41. Les réRoTs, les mucots, les muscarpns et les souRIS sont des rats tous fort nuisibles dans les jardins, parce qu'ils attaquent les fruits et souvent les écorces des arbres. Pour les détruire on doit employer les piéges de toute facon et la mort aux rats. En automne, après le coucher du soleil, on peut se mettre à l'affût à proxi- mité des espaliers, et l’on est assuré de tuer à coup de fusil une grande quantité de lérots, les plus nuisibles de tous. 42. Les rauPes bouleversent un jardin en creusant leurs voûtes souterraines. On a indiqué plusieurs moyens pour les empoisonner : des noix bouillies dans de Ja lessive et placées dans leur trou ; des vers de terre coupés en troncons de deux à trois pouces, roulés dans de la: râpure de noix vomique, ete., etc. Mais nous pensons que la meilleure manière pour parvenir à les détruire est de leur tendre des piéges dont on doit tou- jours être pourvu au besoin dans un jardin bien admi- nistré. Nous ne décrirons pas ces sortes de piéges; cha- que pays a les siens et tous sont également bons quand ils conduisent au but qu'on se propose. L’ouvrier qui les fait ou le marchand qui les vend, indiquent Ja manière de s’en servir. Nous terminerons ce chapitre en offrant au lecteur Fapercu d'une classification nosologique établie par Philipe Ré. MALADIES DES PLANTES. 383 Casse Ir, Maladies constamment sténiques. Elles sont produites par un excès de substance nu- tritive , ou par excès de chaleur, lumière ou électricité. Genres. 1. Anthéromanie. Lorsqu'il y a plus d’anthères que dans l’état ordinaire. 2. Petalomanie. Nombre surnaturel de pétales. 3. Prolification. Partie sortant d’une autre partie. 4. Perianthomanie. Multiplication de calice. 5. Carpomanie. Surabondance de fruit. 6. Sphrygosapanthésie. Accroissement excessif du végétal. 7. Polyanthacarpie. Avortement de tous les fruits. 8. Phyllomanie. Abondance de feuilles, dans la- quelle on doit faire entrer la lussuria delle biade (Ré), qui attaque quelquefois les moissons. g. Cormemphrytège. Greffe naturelle des rameaux. 10. Gourmand (Suchione ); lorsqu'un rameau pré- domine. 11. Pinguedine. Obésité végétale des racines de cer- tains arbres. 12. Gomme. Extravasion du mucilage. 13. Brülure ( Arsura des Italiens ). Feuilles des arbres noircies. 14. Desséchement (Secchereccio, Ré ). Lorsque tout Le végétal se dessèche spontanément. 15. Feu. Sécheresse des parties du pêcher en feuilles et fruits. 16. Pleurs ( Lacrimazione ). Abondance d’écoule- ment de sève. 17. Calle ( Scabbia). Rugosités extraordinaires des végétaux. 18. Teigne des pins (Tarlo de pini). Nécrose par- ticulière aux pins, que des auteurs ont rangée dans la pourriture. a 384 PHYSIQUE VÉGÉTALE 19. Rachitis (Carolo, Ré). Dépérissement du riz. Casse IL. Aaladies des végelaux , constamment asléniques. Genres. 1. Siérilité. Toutes les parties de la fleur impropres à concourir au développement du fruit. 2. Apanthérosie. Défaut d'anthère , Soit en totalité, soit dans le nombre. 3. Apétalisme. Manque de pétales. 4. Carpomosie. Avortement des fruits. 5. Distrophie. Inégalité dans le développement des parties semblables des mêmes végétaux. 6. Phyllosystrophie. Enroulement et altération des feuilles. 7- Chlorose. Pileur ou jaunisse des végétaux. 8. Taches. Altération du tissu des feuilles dans un point de leur surface. 9. Callosité. Dérivation de la sève pour former les tubercules inutiles. 10. Le blanc ( Albugine ). Feuilles couvertes de blanc. 11. Léthargie. Suspension de la végétation , sans mort de la plante. 12. ÎNécrose. Mort des végétaux. | 13. Cadran (Quadrante ). Fente des troncs d'arbres. 14. La roulure ( Rotolo). Fente circulaire. 15. Faux-aubour. Aubier imparfait. 16. Carcinone. Excroissance toujours humide et al- térée dans les arbres. 17. Brouüre (Selone, Ré). Lorsque les épis de blé Sont sans grains. 18. La rage. Maladie particulière au pois chiche, qui rend les feuilles crépues. 19. Phriganoptosie. Chute naturelle des rameaux. 20. Sufjocation (Strozzamento ; Ré). Action de vé- gétaux sur d'autres végétaux qui en sont étouflés. MALADIES DES PLANTES. 385 21. Lèpre. Corps étrangers à l'arbre et croissant à sa surface. 22. Pieillesse. Caducité prématurée des arbres. Czasse III. Maladies qui tiennent et d'asténie et de sténie. Genres. 1. Moscoxéransie. Desséchement des pistils, et perte de leur onctuosité. 2. Anthophtosie. Chute des fleurs spontanément. 3. Carpoptosie. Chute spontanée des fruits. 4. Avortement. Lorsque les fruits n’ont pris qu’un développement imparfait. 5. Acaulosie. Privation extraordinaire de tiges. 6. Phyllorrhyssème. Crispation des feuilles. 7. Stéléchorriphyssie. Tortuosité contre nature des rameaux des arbres et arbustes. 8. Phylloptosie. Chute des feuilles à une époque dif- férente de celle qui leur est assignée par la nature. 9. Hétérophryllie. Modification accidentelle de la forme des feuilles. 10. Polisarcie. Croissance subite d’un végétal. 11. Anasararque. Gonflement aqueux de toutes les parties d’un végétal. 12. fente (Screpolo, Ré). Séparation spontanée des parties d’un arbre. 13. Phthisie. Dépérissement de toutes les parties d’un végétal. 14. Botanopsephide. Endurcissement des racines des végétaux. 15. Ulcère. Ouverture qui se fait au tronc des arbres, par où s’écoulent des sues altérés, provenant de la dé- composition du bois. 16. Jctère. Jaunisse des feuilles de toute une plante. 17. Gangrène. Pourriture spontanée du végétal. 18. Langueur. Etat maladif indéterminé. 386 PHYSIQUE VÉGÉTALE. 19. /Zémorragie. Ecoulement d'humeur d'un en- droit quelconque d’un végétal. Czasse IV. Lésions. Genres : r. Blessure. 2. Fracture. 3. Amputation.. 4. Secousse. 5. Contusion. 6. Excoriation. 7. Difjor- mité. 8. Flagellation. 9. Effeuillaison. 10. Lacéra- tion. 11. Perforation. CLasse V. Aliérations dont Les causes sont inconnues. Genres : r. Rouille. Eflet de l’uredo segetalis. 2. Jaunée. Melume des Lombards. 3. Miélat. Fumana dans la Lombardie. 4. Charbon. Fuligine et carboncino des [taliens. 5. Carte. Fama, volpe ou golpe des Italiens. 6. Ergot. Grano-Sprone, grano - ghiottone des Italiens. 7- Le fungus. Sorte de charbon du maïs. 8. Rachitis. 9. T'aches solaires. Avant on leur donnait le nom de blanc. 10. Asphyæxie. 11. Contagion radicale. 12. Maladie du Jasmin. MULTIPLICATION DES PLANTES. 357 CHAPITRE IV. MULTIPLICATION DES PLANTES. Ic faut, en horticulture , distinguer deux genres de multiplication : celle des individus et celle des variétés. En multipliant les individus on augmente le nombre des végétaux , tandis qu'en multipliant les variétés par la greffe on ne fait que modifier la nature des végétaux sans en augmenter le nombre. Aussi est-ce assez mal à propos que l’on a mis la greffe parmi les moyens de multiplication, et c’est par cetie raison que nous en traitons à part. Voyez le tome 2, page r. Les végétaux offrent un assez grand nombre de modes de multiplication que l’on pourrait réduire à deux, savoir : par voie de génération et par voie de séparation des parties. Mais nous suivrons ia marche ordinaire des cultivateurs ; etici, comme en toute occasion, nous sa- crifions à l'usage une philosophie qui serait inutile aux progrès de l'horticulture. On multiplie done les végétaux, r° par leurs graines ; > par leurs gemmes ; 3° par leurs racines; 4° par leurs tiges, rameaux et feuilles. Chacune de ces manières va être traitée en particulier et dans ses plus grands détails. Multiplication par graines. Secrion re, Choix des graines. ‘ La première chose sur laquelle lattention du jardi- ‘nier doit se porter, c'est sur le choix des graines. Elles doivent être fécondées, et ceci est la condition princi- pale de leur germination. On reconnait qu’elles ont été cueillies à leur point de maturité quand elles sont pleines, 388 PHYSIQUE VÉGÉTALE. lourdes , sans rides, et qu’elles ont conservé leur forme ordinaire après la dessiccation. Les graines conservent leur vertu germinative pendant plus ou moins d'années, selon les espèces, et l'expérience seule peut guider là- dessus le cultivateur. Une graine ne doit pas être consi- dérée comme vieille parce qu’elle aura un certain nom- bre d'années, mais seulement parce qu'elle sera plus rapprochée du terme où doit naturellement cesser sa vertu germinative, que du moment où elle a acquis cette vertu ou si l’on veut sa maturité, Toutes les graines dont le périsperme est farineux, et par conséquent facile à recevoir les impressions de l'humidité, à être délayé par l'eau, lèveront aussi vite vieilles que nouvelles, mais garderont moins long-temps leurs vertus germinatives : et cela parce que l'humidité de lair et les gaz qui le composent auront plus d'action. sur elles et dénatureront plus aisément le périsperme en se combinant avec lui par les lois des aflinités chi- miques. Celles dont le périsperme est d’une substance sèche, cornée, dure , lèveront aisément si on les sème aussitôt la maturité , c'est-à-dire avant qu'il se soit des- séché; plus tard, il faudra un ou deux ans , quelquefois même davantage, pour les faire développer. Ces graines conservent très-long-temps leurs vertus germinatives par les raisons contraires à celles des précédentes, Ce- pendant cette règle générale offre beaucoup d’exceptions. Beaucoup de graines paraissent manquer de périsperme ; elles se comportent de différentes manières dans la ger- mination. Cependant il est d'observation qu’elles lèvent d'autant plus vite que leurs enveloppes sont plus molles; une graine de rosier, par exemple, germera beaucoup plus lentement qu’un pépin de pomme ou de poire. On choisira les graines vieilles ou nouvelles selon les qualités que lon désirera dans le sujet. On croit que les vieilles graines donnent communément des fleurs plus doubles et des fruits meilleurs , mais que les sujets sont MULTIPLICATION DES PLANTES, 389 plus faibles, tandis que les graines nouvelles fournis- sent une végétation beaucoup plus vigoureuse en tiges, branches et feuilles. Ce fait ne me parait cependant pas assez prouvé, Les graines ne doivent se recueillir que lorsqu'elles sont en parfaite maturité, et l’on a plusieurs manières de le reconnaître. Les graines à péricarpe sec annoncent qu'il est temps de les récolter lorsqu'elles se détachent elles-mêmes de la plante pour se disséminer. On recon- naît la maturité des baies à leur mollesse et à une trans- parence plüs où moins remarquable. Les fruits charnus conservent quelquefois une certaine fermeté, mais ils changent assez rapidement de couleur; du vert ils pas- sent au jaune , ou au rouge , ou au violet, ou au moins ils se colorent d’une teinte plus ou moins prononcée de ces trois couleurs. Quelques fruits annoncent leur matu- rité par une odeur particulière. On doit toujours choisir parmi les graines que l’on recueille celles qui sont les mieux conformées, mais quelle que soit la partie du végétal qui les fournisse, leurs qualités sont absolument les mêmes. C’est donc une erreur de croire, comme l'ont imprimé quelques auteurs, que les graines cueillies sur la tige principale et sur la fleur terminale d’une reine-marguerite, par exemple , donneront des sujets à fleurs plus grandes et plus doubles. Ils disent que la sève, ayant naturellement une propension à s'élever verticalement, fournit une nourriture plus abondante à ces graines , mais ils ne cal- culent pas qu’une fleur terminale de marguerite étant toujours plus grande que les autres, la sève a aussi plus de graines à nourrir. Secriox II. Conservation des graines. Quand il ne s’agit de conserver des graines que d’une année à l’autre pour lusage ordinaire d’un jardin, les 590 PHYSIQUE VÉGÉTALE. soins à en prendre sont peu difficiles. Aussitôt qu’elles sont cueillies, on les laisse se ressuyer et se dessécher lentement à l'ombre et à un courant d'air, puis on les renferme dans un sac de papier et on les dépose sur des tablettes dans un lieu sec, d’une température peu éle- vée, mais cependant à labri de la gelée. On fera très- bien de conserver dans leurs enveloppes naturelles celles qui auront un péricarpe sec et n'attirant pas l'humidité , telles qu'une gousse, une silique, une capsule, etc. Mais quand, pour des raisons particulières, ils’agira de conserver des graines plusieurs années, ou qu'il faudra leur faire faire un long voyage, on emploiera des soins particuliers et indispensables. Des auteurs recomman- dent de les renfermer hermétiquement dans du verre ou du fer blanc, en les mêlant avec de la terre ou du sable frais. Ceci prouve qu'ils n’ont pas une idée bien nette de la physiologie des graines, et qu'ils n’ont jamais été dans le cas, comme cela nous arrive tous les ans, d’en faire venir des pays quisontles plus éloignés de la France. Une graine , quoique dans un état de léthargie, est ce- pendant vivante : elle a besoin d’air pour l'entretien de la vie, et toute la difficulté, pour assurer sa conserva- tion, c'est de lui en laisser assez pour empêcher lasphyxie, sans lui en donner une quantité suffisante pour stimuler sa force vitale. On parvient à ce but en dépouillant les graines de leur péricarpe quand il n'est pas adhérent avec elles, en les mélangeant avec du sable de rivière irès-fin et très-sec , et en les renfermant dans une boîte de bois mince et poreux, tel que le sapin ou le peuplier. S'il y avait la moindre humidité dans le sable ou dans les graines , il n'y a pas de doute qu’elles périraient. M. Des- fontaines a fait germer au Jardin des Plantes plusieurs haricots qu'il avait trouvés dars l’herbier de Tourne- fort, et, qui, par conséquent , devaient y être depuis l'année 1694, au moins. Sices haricots eussent été dans une bouteille hermétiquement fermée et avec de la terre MULTIPLICATION DES PLANTES. 30 humide, il n’y a pas lieu de douter qu'ils se seraient combinés avec l’eau et qu'ils auraient pourri. Du reste, les graines dépourvues.de périsperme, ou d’une nature sèche, peuvent voyager pendant deux ou trois ans dans des sacs de papier et renfermées dans des caisses. Nous en avons souvent recu ainsi des Grandes- Indes , etelles ont toujours très-hien levé quand elles n’a- vaient pas éprouvé d'avaries en route. On n’emploiera donc le premier procédé que pour les graines qui ne conservent pas long-temps leur vertu germinative, ce dont on doit scrupuleusement s'informer sur les lieux. Secrion III. Préparation des graines. Avant de semer, 1l faut donner aux graines quelques soins pour préparer leur germination, le semis, et pour entretenir la propreté de ce dernier. Il faut pour cela les vanner ou les éplucher avec soin, afin qu'il ne se trouve aucune graine étrangère mêlée à l'espèce que l’on veut semer. Si les graines sont munies de membra- nes, d’aigrettes, de poils où autres appendices capa- bles de les faire pelotonner, on les frotte dans les maius avec du sable fin ou de la cendre, jusqu’à ce qu'onles en ait dépouillées, mais avec précaution , afin de ne pas les blesser. Quelquefois il est utile de mélanger les graines très-fines avec du sable ou de la poussière, afin de faire le semis plus égal. . IlLest un genre de préparation que lon pratique, sur- tout pour les grandes cultures, pour préserver les grai- nes de la dent meurtrière des insectes pendant qu’eiles sont dans la terre. Elle consiste à éteindre de la chaux vive dans de l’eau, et à y laisser tremper le grain pen- dant vingt-quatre heures; ou on se contente de le met- tre en tas et de l’arroser avec ce mélange à plusieurs re- prises, jusqu'a ce qu'on soit certain que toutes les semences en soient parfaitement imbibées. On laisse sécher et l’on sème ensuite. Ce procédé, applicable à 392 PHYSIQUE VÉGÉTALE. toutes les graines que l’on sème ordinairement à la vo- lée, deviendrait inutile et peut - être même dangereux pour celles qui sont délicates. Aussi se contente-t-on de les semer sans préparations préalables , ou seulement après les avoir fait tremper vingt-quatre ou quarante- huit heures, plus ou moins long-temps , selon qu'elles sont plus ou moins vieilles et desséchées, dans de l’eau pure ou dans de l’eau à laquelle on a mêlé de la suie. Ce procédé ramollit le périsperme, gonfle l'embryon, et hâte souvent la germination. L'âcreté ou l’amertume communiquée à la graine par la suie, en écarte les in- sectes qui auraient pu l’attaquer dans laterre. Ce moyen doit surtout être employé pour les graines venues des pays étrangers, que l’on sait ou soupconne être restées en route fort long-temps. Outre qu'il facilite beaucoup leur développement, il sert encore à faire découvrir si les graines ont conservé leur vertu germinative . Quand après avoir séjourné pendant deux ou trois jours dans l’eau elles se sont évidemment gonflées et qu’elles ne rendent pas ce liquide par la pression, on peut être assuré qu'elles germeront. Mais si au contraire elles ont peu augmenté de volume, et qu’en les pressant dans les doigts elles laissent échapper de l’eau à la manière d’une éponge, il est à croire qu’elles sont mortes. On indique la spodogénète ou poudre anti- charbonneuse et végéta- tive comme devant remplacer avantageusement le chau- lage. Le secret de cette composition est encore la pro- priété de son inventeur, M. Vénard, rue Bleue, n° 27, à Paris. Les valves de quelques graines, comme par exemple celles des nelumbium, et autres sortesanalogues, sont tel- lement adhérentes que , si on ne prend la précaution de les user sur un grès avant de les semer ou faire strati- fier, l'embryon n’a pas la force de les séparer , et beau- coup ne lèvent pas, MULTIPLICATION DES8 PLANTES. 393 Secrionx IV. Stratification. On appelle ainsi l’opération par laquelle on fait ger- mer artificiellement des graines avant de les planter, “afin de hâter la végétation et d'avancer quelquefois d’un an ou deux la germination. La stratification, trop peu pratiquée par le plus grand nombre des cultiva- teurs, offre encore un moyen précieux pour forcer les graines très-fines à lever sans se perdre. Nous allons en- trer dans tous les détails nécessaires à la parfaite intelli- gence de ce procédé avantageux. 1. Stratification des noyaux. En novembre ou au plus tard en décembre, on choisit une caisse ayant au moins un pied de largeur sur dix de profondeur, afin que l'humidité puisse aisément s’y conserver sans néan- moins y être trop forte : et c’est pour cette raison qu’une caisse est préférable à un vase de terré. On étend au fond un lit d’un pouce et demi de sable, que l’on recouvre d’un premier lit de noyaux. Si ceux-ci sont d’une certaine gros- seur, on fera très - bien de les y placer de manière à ce que le côté de la plamule soit tourné en haut. On recou- vre d’un second lit de sable d’un demi-pouce d'épaisseur, et d’un second lit de noyaux, etc., jusqu'à ce que la caisse soit pleine. Alors on la porte dans une cave obs- cure et à l'abri des atteintes de la gelée; on donne un arrosement , et l'opération se es là. Cependant on doit de temps à autre visiter la caisse , afin de maintenir une humidité modérée mais constante, et pour voir si la germination n'avance pas trop vite. Dans ce cas, si on voyait les plumules percer le lit de sable et se mon- trer au dehors, on porterait la caisse dans un lieu moins chaud, et éclairé, où on la tiendrait jusqu’au moment de la plantation. Ce époque arrivée, c'est-à-dire lorsqu'on n’a plus de gelées à craindre et que la végétation com- mence en Hu air, on enlève les noyaux avec beau- coup de précautions pour ne pas casser ni blesser les ger- | DA 26 394 PHYSIQUE VÉGÉTALE. mes, et on les plante comme nous le dirons à l’article du semis. Cette opération avance tellement les sujets, que des amandes stratifices fournissent , dans le mois d’août suivant , au moins moitié d’amandiers assez forts. pour être greffés. On traite de la même manière quelques au- tres fruits d’une certaine grosseur , comme par exemple les glands , les châtaignes, etc. Si par hasard on n'avait pas à commodité une cave chaude et obscure , on pour- rait encore faire stratifier en enterrant la caisse dans le jardin au pied d’un mur au midi, avec la précaution de l’enfoncer assez profond pour que les gelées des plus grands froids ne puissent pas l’atteindre. 2. Stratification des pepins et autres graines ana- logues. L'opération est la même; seulement comme ils sont plus sujets à pourrir et que cette maladie se com- munique plus aisément par le contact, on entretient dans la caisse une humidité moins forte et on mêle les pepins sans ordre avec le sable. Cela ne nuit en rien à la planta- tion, parce qu'elle ne se fait pas graine par graine, mais bien comme le semis en sillon et avec le sable. 3. Stratification des graines fines. Celle-ci est la moins employée, et cependant elle est une des plus utiles, car sans elle il serait très -difiicile de multiplier par graine de certaines plantes telles, par exemple, que la primevère oreille d'ours; par son moyen on ob- tient aisément des sujets de plantes que beaucoup de personnes croient se soustraire dans nos Jardins à ce mode de multiplication; comme, par exemple, les or- chis, les mousses, les fougères, etc. On prend un pot ou une terrine, ayant cinq à six petits trous dans le fond, et quelques fentes sur les côtés comme ceux à ananas , mais large et peu profond. On le remplit d’une terre de bruyère très- fine et bien tamisée , si l’on doit semer des plantes croissant naturellement sur la terre, ou du terreau de saule, si le semis doit être de plantes parasites, telles que quelques espèces de fougères et de MULTIPLICATION DES PLANTES; 395 mousses. Si l’on n’a pas de terre de bruyère, celle de saule peut toujours la remplacer avantageusement. On presse la surface de la terre avec une petite planchette, de manière à la rendre très - unie et à lui donner de la fermeté. Cela fait, on étend la graine dessus, et pour la fixer on appuie une seconde fois la palette. On ne doit aucunement recouvrir les graines. On plonge le pot jusqu'a moitié de sa hauteur dans un second. vase rempli d’eau , et on l’y laisse continuellement. Il faut que cet appareil soit dans un lieu obscur, et à une température convenable à l'espèce que l’on fait stratifier : c’est-à-dire en serre chaude ou tempérée , pour les plantes qui exi- gent cette température, dans une cave pour celles qui sont indigènes. L'eau du second vase s’introduit dans le premier par le fond, humecte la terre en dessous, et, par intus-sus- ception, monte jusqu'à la surface. Les graines se gon- flent ét germent en peu de temps. On doit alors ne te- nir que peu d’eau dans le second vase , afin de diminuer Phumidité dont une trop grande abondance deviendrait nuisible dès que la radicule a percé ses, enveloppes. Les cotylédons, quand il y en a, ne tardent pas à se développer, et bientôt on aperçoit entre deux un point qui se gonfle et qui est le premier rudiment de la tigelle. Dès cet instant la germination cesse et la végétation commence. Les jeunes plantes ont besoin de lumière ; chaque jour on enlève avec un petit morceau de bois pointu les petites plantes parvenues à ce degré de dé- veloppement ; on les repique délicatement dans un au- tre pot et dans la même terre, on les porte dans an lieu éclairé, et on continue à les arroser par- dessous comme les graines, jusqu’à ce qu'elles soient assez for- tes pour résister à un arrosement ordinaire et donné avec précaution. Ces moyens, quoique paraissant mi- nutieux , sont cependant les seuls par lesquels on puisse espérer de multiplier les plantes dont les graines sont 396 PHYSIQUE VÉGÉTALE. tellement fines qu’elles échappent presqu’a l'œil. D’au- tre part, les amateurs d’oreilles d'ours, qui connaissent toute la difficulté de multiplier ces charmantes plantes par leurs graines, nous sauront gré de leur avoir ensei- gné un procédé par lequel ils ne perdront pas une seule de leurs semences. Quelques personnes emploient d’autres moyens pour la stratification des graines très-fines. Elles placent un lit de coton dans le fond d’une assiette qu’elles remplissent d’eau , elles étendent sur le coton une feuille de papier sans colle, sur laquelle elles jettent leurs graines. Elles. tiennent le tout dans un endroit obscur, renouvellent l’eau quand il en est besoin , et enlèvent les graines à me- sure qu'elles germent, pour les planter dans des pots comme nous l'avons dit. Enfin il en est d’autres qui se contentent de les semer sur une éponge tenue constam- ment humide. ; Nous terminerons cet article par une digression. Puis- que la germination donne aux graines un goût sucré, pourquoi ne les fait-on pas stratifier avant de les em- ployer en cuisine ? On sait quel parti les brasseurs tirent de l'orge par ce procédé pour obtenirune liqueur spiritueuse. Secrion V. Du semis. La première chose à faire c’est de préparer le terrain et de l’approprier à la nature de la plante que l’on doit semer. Plus le végétal est délicat et d’une germination difficile, plus le terrain doit être léger ; ceci est de principe rigoureux. Mais dans tous les cas la terre doit être parfaitement préparée par des labours et des engrais convenables ; elle doit être nettoyée de tous corps étran- gers , tels que racines, pierres, herbes, chiendent, etc., et l’on ne doit pas hésiter à la passer à la claie ; cette opération offre plusieurs avantages précieux : elle opère parfaitement le mélange des engrais, elle ameublit la terre , la rend plus poreuse et plus susceptible de se laus- MULTIPLICATION DES PLANTES. 397 ser pénétrer par les influences atmosphériques ; elle la rend plus légère et plus propre. Les modes de semis varient selon la nature des végé- taux, la grosseur des graines, et même la nature du terrain. Dans les sols argileux ou humides on ne doit semer que tard, quand la saison est assez avancée pour avoir échauffé le sol ; les graines doivent aussi s’enterrer moins profondément. On peut semer plus tôt, et même avant ou pendant l'hiver, dans lesterrains légers, chauds et à bonne exposition. La différence des climats fait aussi varier l’époque des semis ; dans ceux où l'hiver se fait peu sentir, il est avantageux de semer certaines plantes en automne, tandis que dans ceux où les froids sont rigoureux, on trouvera plus d'avantages à ne semer qu'au printemps. Plus un pays se rapproche du nord, plus les semis sont tardifs, mais la nature, par une sorte de compensation fort extraordinaire et qui n’a pas été assez étudiée par les physiologistes, a doué les ré- sions froides d’une force et d’une rapidité de végétation inconnues dans les climats tempérés. Telle plante qui , chez nous, demande six ou huit mois pour parcourir toutes les périodes de sa végétation, se sème, croît, fruc- üfie et se récolte dans l’espace de trois mois en Sibérie. La plus grande partie des graines peut être avanta- seusement semée au printemps. Cette saison convient surtout à celles dont les enveloppes sont molles, le périsperme farineux ou charnu ; à celles dont la ger- mination est prompte, et enfin à celles qui craignent le froid. L'automne est plus convenable pour les graines robustes, grosses, à enveloppe osseuse ou coriace ; à celle dont la germination est lente, ou à celle dont la plan- tule rustique ne craint pas les gelées. Beaucoup de graines demandent à être semées aussitôt la maturité , sans quoi elles mettent plusieurs années à lever : telles sont par exemple les graines de rosier. Cependant on remédie quelquefois à cet inconvénient par la stratification. 398 PHYSIQUE VÉGÉTALE. . Il arrive parfois, quelque soin que l’on prenne d’un semis , que des graines restent plusieurs années dans un état d'engourdissement dont les causes sont jusqu’à ce jour restées inconnues. Si le semis est de plantes pré- cieuses , il ne faut pas se hâter de le détruire, car il arrive ordinairement qu'après un laps de temps plus ou moins considérable les causes secrètes de cette léthargie ex- traordinaire venant à cesser , les semences se réveillent et poussent avec autant de vigueur que de coutume. Cependant, pour ne pas s’exposer à une perte inutile d'espace et de soins, il est bon de s'assurer de temps à autre , en déterrant quelques graines, qu’elles ne sont pas désorganisées , car dans le cas contraire il n’y aurait plus d'espérance raisonnable. Il y a deux modes généraux de semis : 1° en pleine terre, 2° en vase. Nous comprenons les semis sur le ter- reau d’une couche avec ceux de pleine terre, parce qu'ils s’exécutent de la même manière et que Ja différence ne consiste que dans la fabrication de la couche. 1° SEMIS EN PLEINE TERRE. Il y a plusieurs manières d'exécuter ces semis, savoir : à la volée , en rayons, en pochets, en capots et en pépinière. Pour le semis à la volée, on aplanit la surface du sol au rateau, après l'avoir préalablement labouré et amen- dé; on jette les graines à la main, el on les recouvre en passant une seconde fois le rateau. Il faut avoir une grande habitude pour répandre également les graines, afin que le semis ne se trouve pas plus épais dans un endroit que dans l’autre. Il faut encore très-bien con- naître la nature du végétal que l’on sème, savoir approxi- mativement la place nécessaire à chaque pied, afin de proportionner la quantité de graines à l’espace du ter- rain. Si l’on désire que les plantes s’effilent, comme le lin et le chanvre, il faut semer épais. Si l'on veut au contraire que les plantes soient vigoureuses et acquièrent tout leur degré d’accroissement , on doit semer clair. MULTIPLICATION DES PLANTES. 399 Cependant il vaut mieux semer un peu trop épais que trop clair, parce qu'il est plus avantageux d’être obligé d’éclaircir le plant quand il est trop épais, que d’être obligé de repiquer ou ressemer dans des endroits vides ; les derniers plants étant plus tardifs que les autres, en sont fort souvent étouflés, et quand il réussissent ils n’ont jamais la même vigueur que les premiers. Pour le semis en rayons, on prépare le terrain comme pour le précédent, puis au moyen du cordeau et d’un sarcloir ou seulement d’un plantoir, on trace des rayons plus ou moins profonds et plus ou moins éloignés les uns des autres , selon l'espèce que l’on veut semer. La profondeur ne doit guère varier entre un pouce ou deux. On y jette la graine et on la recouvre au rateau avec la terre que l’on a déplacée en creusant les sillons. Cette méthode est employée pour les plantes qui demandent plus de soins que celles qu'on a l’usage de semer à la volée , parce qu’on peut aisément passer entre les rayons pour arracher les herbes, biner , sarcler , etc. Le semis en pochets consiste, quand le terrain est préparé , à faire, avec la pioche ou la binette , un trou plus ou moins large et profond , selon l’espèce que l’on doit semer , et à y jeter de trois à huit graines qui doi- vent former une touffe. À une distance déterminée on fait un second trou , et on jette la terre dans le premier pour le remplir et couvrir les graines; on passe à un troisième trou en remplissant le second, et ainsi de suite jusqu’au dernier que l’on recouvre avec de la terre prise à coté, après y avoir mis le même nombre de graines que dans les autres. On place ordinairement les pochets en échiquier ou en quinconce, et on les espace selon le développement présumable que doit prendre chaque touffe de plantes. Cette méthode s'emploie pour les végétaux que l'on est dans Fusage de butter lors- qu'ils ont atteint un certain degré de développement. Le semis en capots ne s'emploie guère que pour. 400 PHYSIQUE VÉGÉTALE. Jes plantes qui , sans être très-délicates , exigent cepen- dant un terrain préparé et de la chaleur, comme par exemple celles de la famille des cucurbitacées. On fait un trou de dix-huit pouces à deux pieds de profondeur sur autant de largeur , on en remplit le fond de bon fumier chaud, jusqu'a six pouces du bord, puis on achève de le remplir avec un mélange de moitié terre légère substantielle et moitié terreau consommé, le tout parfaitement amalgamé. Il faut que le terreau dépasse d’un pouce ou deux la surface du sol, afin qu’il se trouve sur le même niveau quand le fumier du fond se sera tassé. On place quatre ou cinq graines au milieu, et l'on recouvre de deux ou trois pouces de terreau pur mais très-consommé. Quand on fait plusieurs capots, il faut les espacer de manière à ce que les plantes de l'un ne puissent pas gêner les plantes de l’autre. Le semis en pépinière ne diffère guère du semis en rayons que parce qu’on place les graines une à une dans les sillons, après les avoir le plus ordinairement fait stratifier. Pour espacer les rangs les uns des autres et les graines sur la longueur de chaque rang , il faut calculer par avance le développement probable des espèces dans un temps donné. Il est clair s: des sujets de poiriers ou de pommiers que l’on greffe à six pouces de terre à l’âge de trois ans, et que l’on enlève de la pépinière un an ou deux après celte opération, n’ont pas besoin pour chacun d’un espace aussi grand que si on les destine à former des arbres de plein vent qui ne seront greflés que sur une tige de six à sept pieds et qui resteront six ou sept ans dans la pépinière. Ces derniers eux-mêmes peuvent être plus rapprochés que des noyers , des mar- ronniers d'Inde, des tilleuls, etc. C’est au jardinier à prévoir tout cela par avance; de plus il ne doit pas ou- blier que , quelle que soit l'espèce qu'il sème et le temps que les sujets doivent rester en pépinière , il faut qu'il y ait toujours entre eux suflisamment d'espace pour que MULTIPLICATION DES PLANTES. foi l'air puisse y circuler aisément , et la lumière y pénétrer. Il faut encore qu’un ouvrier puisse passer entre les rangs pour biner, grefler, et enfin donner tous les soins que les circonstances exigent. Quand on plante une pépi- nière au lieu de la semer , les mêmes considérations doi- vent être présentes à l'esprit. Les pepins ne s'enfoncent guère qu'à un pouce de profondeur, et les noyaux à deux. Comme on ne sème guère en pépinière que des végétaux ligneux, dont, par conséquent , les racines sont fortes et le plus ordinairement pivotantes, 1l faut que le sol ait été défoncé de deux pieds au: moins pour qu'elles puissent aisément y enfoncer leur pivot et y étendre leur chevelu. Il n’est pas nécessaire que le sol en soit beaucoup amendé quand il est de bonne qualité, car si un jeune sujet a été élevé dans un terrain très-riche en sucs nutritifs, et qu’on le sorte de là pour le trans- porter dans une terre médiocre, il y croîtra mal et pourra même quelquefois être attaqué de langueur ou de rachi- tisme ; si au contraire il sort d’un sol médiocre pour être transporté dans un bon, ses progrès seront plus remarquables et sa végétation beaucoup plus vigoureuse. Cependant il ne faut pas espérer d'établir jamais avantageusement une pépinière dans un terrain maigre et de mauvaise qualité, car cet excès serait bien plus préjudiciable que le premier. Les sujets y contracteraient des maladies constitutionnelles qu'il est toujours fort difficile et même le plus ordinairement impossible de guérir. Les arbres qui en sortiraient auraient encore quelque végétation pendant la grande force de la jeu- nesse, mais en peu d'années leurs tiges se couvriraient de mousses , de chancres, et ils auraient bientôt atteint toute la caducité d’une vieillesse prématurée. 2° SEMIS EN VASES. On sème en pots, en terrines et en potelots. Le semis en pot, terrine ou caisse, se fait pour les plantes délicates qui exigent une température plus 402 PHYSIQUE VÉGÉTALE. chaude que celle du pays où l’on fait le semis. On sème aussi quelquefois en pots , en caisses ou en terrines les graines fines qui sont facilement dévorées par les insectes ou désorganisées par les intempéries de l'air, quand on les Pose à la pleine terre. Telles sont par exemple les semences de la plupart des plantes appartenant à la fa- mille des bruyères , des rosages, etc.; la terre de bruyère pure ou mélangée avec une partie de terreau extrême- ment consommé , est celle qui convient le mieux à la généralité des plantes délicates. D’antres exigent une terre plus substantielle et préparée d’une certaine ma- nière. Pour faire un semis quelconque en vase , on choisira Ja terre que nous indiquons dans nos deux derniers volumes pour chaque espèce de plantes; seulement on la rendra plus légère en y ajoutant un tiers de terreau très-consommé , ou un tiers de terre de bruyère. Quand pour une espèce de plante nous n’indiquons que cette dernière terre , on l'emploie pure pour faire le semis. Le choix du vase n’est pas indifférent. Il faut qu'il soit percé dessous de plusieurs trous afin que l’eau des arrosemens me puisse pas s'y amasser et y occasioner une humidité stagnante ; 1l faut encore que sa largeur soit Dé en nee plus considérable que sa hau- teur, afin qu'il y ait plus de surface pourle semis, sans que le pot soit plus pesant et plus diflicile à transporter. Pour cette raison on donne la préférence aux terrines quand on n'a pas besoin de les enfoncer sur une couche chaude. Les caisses ne sont bonnes que lorsqu'un semis consi- dérable doit rester en place et être abrité l'hiver avec un châssis. Pour cela la caisse, ou plutôt l’encaissement , doit être enfoncé dans la ste à un pied au moins, et la partie hors de terre doit être faite en forme de châssis, afin qu'on n'ait plus à y poser queles panneaux quand on veut abriter le semis. On remplit de terre de bruyère jus- qu'à un pouce ou deux au-dessus du niveau du sol, et MULTIPLICATION DES PLANTES. 403 l’on sème dessus les graines fines qui, sans demander de la chaleur pour lever, ont cependant besoin de beau- coup de soins; telles sont , par exemple, les graines de rosage. On les recouvre très-peu d’une petite quantité de terre que l’on tamise dessus, et on paille le semis avec de la mousse hachée (comme nous Je dirons à l’article des soins à donner au semis), pour empêcher les arrosemens de battre et plomber la surface de la terre. Quand on a fait choix d’un vase de grandeur conve- nable au semis que l’on se propose, on étend au fond un lit de gros sable d’un à deux pouces d'épaisseur, afin de faciliter l'écoulement des eaux d’arrosement , et l'on remplit ensuite de terre convenable. Si les semences sont très-fines on les recouvre de très-peu de terre, et on paille avec de la mousse hachée, ou, ce qui vaut mieux, on arrose par-dessous en enfoncant le vase dans un autre rempli d'eau, jusqu’à moitié de sa hauteur , comme nous l'avons dit à l’article de la stratification des graines fines , page 394. I faut semer clair , afin que les jeunes plantes puissent développer quatre oucinq feuilles au moins avant que l’on soit obligé de les transplanter, car lorsqu'elles subissent cette opération il faut qu’elles soient assez fortes pour résister à l’eau des arrosemens sans en être ni renversées ni déracinées. Les pepins, comme par exemple ceux d'oranger, seront enterrés d’un pouce au moins. Il n’est pas nécessaire de les pail- ler avec de la mousse, parce que la plumule a toujours assez de force pour percer la terre quand elle n’est pas trop plombée, et elle ne l’est jamais trop sielle a été con- venablement préparée. Les noyaux s’enfoncent à deux pouces de profondeur ainsi que toutes les graines qui .sont au-dessus de la grosseur ordinaire d’un haricot. Le semis ainsi fai , on lui donne les soins que nous détail- lerons plus bas. Quelques végétaux craignent beaucoup la transplan- tation , et les déraciner pour les enlever d’un semis et 404 PHYSIQUE VÉGÉTALE. -. les replanter serait s’exposer à la presque certitude de les perdre. Pour ceux-ci on a de petits pots de trois à quatre pouces de’profondeur sur une largeur propor- tionnée ; on les remplit de terre préparée, et l’on sème une seule graine dans chaque potelot. On enfonce en- suite chacun d’eux dans une couche si la plante l'exige, ou, dans le cas contraire, dans un lit de sable humide. Cette précaution est nécessaire pour empêcher l'humi- dité de s’évaporer trop vite, vu la petite dimension des vases. Lorsque les sujets sont assez forts pour exiger des vases plus grands , on les dépote aisément avec la motte etils ne souffrent pas de la transplantation. Des soins À DONNER AUX semis. Jusqu'ici nous n'avons envisagé le semis que sous un point de vue presque mé- canique, mais quand il s’agit de favoriser la germina- tion et le développement des graines que l’on a semées, c'est alors que le jardinier a hesoin d'employer toute son intelligence, de s'appuyer de toutes les connaissan- ces qu'il a acquises par l'étude, l'observation et une longue expérience. Dans beaucoup de circonstances la faute la plus petite, ou seulement quelques heures d'oubli ou de négligence peuvent le mettre dans le cas de perdre sans retour un semis précieux , l’objet des plus belles espérances. Nous allons tâcher de prévoir tous les cas ordinaires , et nous enseignerons pour cha- cun les méthodes les plus sûres , celles qui ont toujours été employées dans notre établissement avec le plus de succès. | Soins des semis en pleine terre. Les semis à la volée et en rayons n'appartenant jamais qu'à des plantes rus- tiques , sont aussi ceux qui exigent le moins de soins. On arrose, on sarcle, non-seulement pour détruire les mauvaises herbes , mais encore pour ouvrir les pores de la terre et pour empêcher qu’elle ne se plombe , c’est-à- dire que sa surface ne se durcisse et ne forme une croûte dure , épaisse, que les plantules ne peuvent pas percer. MULTIPLICATION DES PLANTES. 405 On évite cet inconvénient en paillant le semis. Cette opération consiste à le couvrir avec une certaine épais- seur de terreau très-peu consommé, tel qu’on le retire d’une vieille couche, ou de paille menue provenant des débris d’une couche , ou enfin de mousse hachée. Cette dernière matière est préférable pour les graines fines qui sont peu enterrées ou seulement jetées sur la sur- face du sol, parce qu’en même temps qu’elle empêche la terre de former croûte, elle intercepte la lumière qui nuirait à la germination, et elle maintient une hu- midité favorable. Si le semis a été fait en automne et - que les froids de l'hiver soient rigoureux , 1l est bon de le couvrir avec de la grande litière pendant les gelées, ou avec des paillassons s’il n’est pas d’une trop grande étendue. Les feuilles sèches , si on peut s’en procurer, sont excellentes pour cet usage. Dès que les plantes sont levées, il faut redoubler de soins. Lorsque le soleil est très-ardent il est quelquefois utile de les garantir de ses rayons pendant une partie du jour, au moyen de toiles ou de paillassons étendus sur des perches fixées sur des pieux. Cette précaution est utile surtout après une pluie. On maintient une humi- dité douce et égale au moyen d’arrosemens réitérés sou- vent, mais peu abondans à chaque fois. On défend le jeune semis des insectes par les moyens que nous avons indiqués au chapitre maladies des plantes, page 262. On indique comme un très-bon moyen contre les limaces et les escargots des écailles d’huîtres grossièrement pi- lées ; leurs fractions étant toujours pointues et tranchan- tes, piquent, dit-on, ces animaux et les contraignent à s'en écarter. On visite toutes les parties du semis pour voir s’il est également garni partout. Dans le cas où quelques en- droits se trouvent un peu clairs, on lève avec précaution du plant où il y en a de trop et on le repique où il en manque. On éclaircit s'il est trop épais; on arrache les 406 PHYSIQUE VÉGÉTALE. mauvaises herbes, on sarcle de nouveau; on bine si l’espace entre chaque sujet le permet, et l’on continue ou recommence ces divers travaux toutes les fois que les circonstances le commandent. Le semis en pochets exige les mêmes soins, mais quel- quefois les plantes demandent une pratique particulière que l’on nomme buttage. Cette opération consiste à re- lever la terre autour de chaque touffe ou même de cha- que plante, et à l'amonceler en forme de petite butte au- tour des tiges pour les raffermir et leur faire pousser des racines autour du collet. On butte le maïs , les pommes de terre, etc.,etc., mais cependant le plus grand nom- bre des végétaux n’a pas besoin de cette opération. Le semis en capots ne se pratiquant guère que pour les plantes qui aiment beaucoup la chaleur, demande aussi des soins particuliers. Aussitôt que les graines sont semées on donne un arrosement, mais très-modéré pour ne pas pénétrer jusque sur le fumier placé dessous, ce qui lui empécherait de fermenter et lui ferait perdre sa chaleur. Puis on pose dessus une cloche, et si la saison est peu avancée et que l’on ait encore à redouter quelques nuits froides, on entoure la cloche, jusqu’à moitié de sa hauteur, de réchauds faits avec du fumier sortant de l'écurie. Dans le cas où la saison est favorable, on se contente de les entourer et de les couvrir , pendant la nuit seulement , avec de la litière sèche. Quand les graï- nes sont germées et que la plantule est sortie de terre, la saison doit être plus assurée, il s’agit d’accoutumer peu à peu les plantes à l'air libre. Pour cela on soulève très-peu le côté de la cloche tourné au midi, et on le maintient dans cette position, pendant les deux ou trois heures les plus chaudes de la journée , au moyen d’une petite pierre ou d’un morceau de bois que l’on intercale entre le sol et la cloche. Si le temps est beau et que la saison soit chaude, on soulève tous les jours de plus en plus la cloche, et on la laisse plus long-temps soulevée. MULTIPLICATION DES PLANTES, 407 On se sert alors, pour la maintenir en position, d’un petit morceau de bois ayant des entailles et portant le nom de crémaillère. Toute plante semée en capots sous le cli- mat de Paris doit supporter le plein air au mois de mai. Dans cette saison on enlève la cloche pour toujours. Le semis en pépinière exige les mêmes soins que celui à la volée , aux arrosemens près qu'il n’est pas nécessaire de rendre aussi fréquens. Aussitôt que les jeunes sujets commencent à se développer, il faut veiller leur crois- sance afin de faire prendre une bonne direction à la tige et aux branches. On redresse et donne des tuteurs à ceux qui en ont besoin ; on retranche à la serpette les rameaux diffus Ou mal placés ; on sarcle , on bine et 6n amende le terrain au moyen de bons engrais consommés. Dans la seconde année de leur germination, il faut déjà les soumettre aux principes de la taille, que nous ensei- gnons, tome 2, page 123. Le semis en vase a deux buts : ro celui de garantir les graines et les jeunes sujets des accidens qui pourraient leur arriver en pleine terre; 2° celui d'obtenir la germi- nation des graines et la végétation des sujets sous un climat trop froid pour qu'ils puissent germer et se con- server en pleine terre. Dans le premier cas un semis ne demande que les soins ordinaires. Il s’agit de l’entretenir dans une humi- dité constante, mais pas trop forte, afin de ne pas arrêter la fermentation de la terre et par conséquent la forma- tion des gaz nutritifs. On l’abrite , pendant la première jeunesse des plantes, des intempéries de l’air, et surtout des pluies fortes qui pourraient déraciner ou coucher Les plantules. Si on l’a fait en automne, quand même on au- rait semé une espèce ne craignant pas le froid , il est toujours bon de lui faire passer l'hiver en orangerie éclai- rée , les sujets en seront beaucoup plus vigoureux au printemps. On sarcle légèrement pour empécher la terre de faire croûte; on détruit les herbes parasites à mesure 408 PHYSIQUE VÉGÉTALE. qu'elles se montrent, et, quand le plant a acquis une certaine force , on le sépare avec précaution pour ne pas briser les racines et en conservant un peu de terre autour si cela est possible ; puis on Le replante en place, en pleine terre, ou en pots. Mais le plus ordinairement on sème en vase des plantes étrangères qui ne peuvent vivre qu'en serre dans nos climats. Pour favoriser la germination de celles-ci on emploie des précautions indispensables. Il faut d'abord connaître la nature de la plante que l’on a semée, c’est- à-dire savoir si elle est de serre chaude, de serre tem- pérée ou d’orangerie. Si on a recu des graines de pays étrangers et qu'on n’en connaisse pas la culture , on se dirige d’après la connaissance que l’on a du climat où elles croissent naturellement. Toute plante qui croît spon- tanément entre les tropiques, ou même un peu en decà et en delà est de serre chaude. Il arrive cependant quel- quefois que ces plantes n’exigent que la serre tempérée ou même l’orangerie , quand elles sont alpines, c'est-à- dire indigènes des hautes montagnes du monde; mais ces circonstances sont assez rares. Toutes les plantes du midi de l'Europe sont d’orangerie ; celles du nord et du midi de l'Afrique sont de serre tempérée et plus souvent encore d’orangerie. On cultive en serre chaude les plantes des îles de France et de Bourbon, de Mada- gascar, des Grandes-Indes. La Chine fournit des végé- taux d’orangerie, de pleine terre et quelques-uns de serre tempérée. On apporte de la Nouvelle-Hollande des plantes de serre tempérée et orangerie. L'Amérique septentrionale fournit des plantes de pleine terre dans les états du nord ; d’orangerie dans ceux du midi. Le Mexique nous envoie des plantes de serre tempérée et d’orangerie. Le Pérou des plantes de serre chaude , de serre tempérée et des plantes alpines d’orangerie. Le Brésil, et toute la partie méridionale de l'Amérique , des végétaux de serre chaude , etc., etc. MULTIPLICATION DES PLANTES. 409 Si l’on ne connaît pas le pays d’où vient une graine , on ouvre un species plantarum ; on cherche son article à la table, et l’on trouve non-seulement le nom du pays dont elle est originaire , mais encore une description dont on peut déjà, par les analogies, tirer quelques notions de culture. On voit si la plante croît sur les montagnes , d’où on tire la conséquence qu'il lui faut une terre sèche et graveleuse ; sur les rochers, d’où une terre sèche et rocailleuse ; dans les champs, d'où une terre franche, légère et substantielle ; dans les sables, d’où une terre sèche , légère , chaude et sa- blonneuse ; dans les forêts , d'où la terre de bruyère ; dans les marais , dans les eaux, etc. Si la graine ne porte pas d’étiquette et qu’on ne puisse pas reconnaître son genre ou au moins sa famille par quelque analogie de forme qui pourrait donner au culti- vateur intelligent quelques indices de sa culture , à tout hasard on la traite comme si elle était de serre tempérée, et en employant ce terme moyen, on est à peu près sûr d'obtenir un demi-succès. Aussitôt que le jeune sujet sera développé , pour peu que le jardinier ait l'habitude des plantes , il reconnaîtra ses besoins et lui appliquera une culture convenable. Cependant il ne marchera qu'en tâlonnant , car une erreur pourrait être sans re- mède , et dans le doute il vaut mieux donner trop de chaleur que d'exposer un végétal au froid. On a conservé le marronnier d'Inde et l’hortensia pendant plusieurs an- nées en serre chaude avant de les risquer en pleine terre, et il n’en est résulté aucun inconvénient pour la multi- plication de ces deux belles espèces, tandis qu'on en a perdu beaucoup et sans retour pour ne leur avoir pas donné la serre chaude. On peut généralement reconnaître à de certains carac- tères d’un sujet, s’il est originaire de climats chauds ou tempérés; mais ces indices sont souvent trompeurs et nous ne les donnons que comme des moyens de tâton- DE 27 f1o PHYSIQUE VÉGÉTALE. nement. Une plante ligneuse, dont les gemmes sont écail- leux , appartient à un élimat tempéré ou au moins peut y croître ; plus les enveloppes seront nombreuses et épais- ses, plusil y aura de raisons pour en risquer quelques pieds en orangerie et en pleine terre. Quand les gemmes sont nus, la planté appartient nécessairement aux pays chauds, et devra être cultivée en serre chaude ou au moins tempérée. Les végétaux dont les feuilles sont larges , persistantes et d’une certaine épaisseur, ne peuvent guère résisier à nos hivers ; aussi ne doit-on en risquer quelques pieds en pleine terre que lorsqu'ils sont beau- coup multipliés. Les plantes à feuilles épaisses et succu- lentes sont dans le même cas. La plus grande partie des monocotylédones à stipe, est de serre chaude ou de serre tempérée ; trés-peu sont d’orangerie. Les plantes à tiges sucCculentes sont dans le même cas. Semi des plantes de serre chaude. H est de prin- cipe que la chaleur doit être plus forte pour stimuler les organes engourdis d’un embryon renfermé dans ses en- veloppes , de manière à les forcer à se développer, que pour stimuler ces organes de manière à entretenir la vie et la croissance de la plante en végétation. Il ne faut donc pas seulement placer le semis dans la serre chaude, mais il faut encore enfoncer le vase dans une couche préparée à cet effet, et dont la température soit élevée à trente degrés, terme moyen. Il faut encore que cette chaleur se soutienne au même degré, jusqu’à ce que la plante soit assez développée pour être stimulée par deux autres agens de la végétation, Pair et la lumière. Pour conserver ce degré constant de chaleur, on place une cloche sur le semis. Comme nous l’avons vu dans notre physiologie , la lumière , si nécessaire à une plante for- mée, nuit beaucoup à la germination ; en conséquence , si les graines sont fines et peu enterrées, on se servira, pour couvrir le semis, d'une cloche de verre dépoli , et même, si les graines sont tout-h-fait à la surface de la MULTIPLICATION DES PLANTES. fui terre, on recouvrira encore la cloche avec une toile. La cloche a encore cet avantage qu’elle empêche l’évapo- ration et par conséquent le desséchement de la surface du semis. Les gaz n'ayant pas d’issue fermentent plus aisément; l'oxigène se dégage, pénètre l'embryon, arrête la fermentation putride en s'emparant du car- bone et métamorphosant le périsperme en une matière sucrée propre à nourrir et développer la plantule. Enfin l'opération de la germination se trouve favorisée par une réunion de circonstances produites par Part. Mais lorsque la plumule se trouve hors de terre, elle a besoin de se raffermir et de se colorer; car sans cela son état de langueur ne lui permettrait pas d'accomplir les opations, dont la nature l'a chargée, c’est-à-dire la nutrition, la transpiration, l'expiration, les déjec- tions , etc. Ge nous savons que C est Ja fixation du Raibe par l'effet de la lumière qui produit ce phéno- mène, nous favoriserons son accès en remplaçant la cloche dépolie par une autre dont la transparence lui livrera aisément passage ; outre cela nous donnerons de l'air, mais peu dans les commencemens et seulement pour mettre la jeune plante en contact avec les gaz qu'elle doit absorber. À mesure qu’elle prendra de la force , elle aura moins besoin d’une chaleur concen- trée, et bientôt on pourra l’exposer à l'air libre de la serre comme les autres plantes. Les autres soins à prendre du semis consistent à n’ar- roser que modérément, afin de ne pas refroidir ou noyer la terre , et à se servir d’eau à la même température que celle de la couche, ou à peu près. La terre ne doit jamais être assez mouillée pour prendre au doigt, et cependant son humidité doit être constamment soute- nue. Le seul bon moyen de mettre l’eau des arrosemens à un degré de chaleur convenable, c’est de la laisser séjourner pendant quatre ou cinq jours au moins dans la serre avant de l’employer. 4v2 PHYSIQUE VÉGÉTALE. Lorsque l’on enlèvera un jeune végétal de son semis pour le placer dans un autre vase , ce qui doit se faire aussitôt que les plantes sont assez développées pour se nuire les unes les autres, on le plantera avec précaution, et jusqu’à sa parfaite reprise, on le plongera dans une couche chaude , on l’étouflera sous une cloche dépolie, et on lui donnera absolument les mêmes soins que ceux que nous venons de détailler. Si l’on n’avait pas de place dans la serre chaude pour y élever une couche à semis, on pourrait faire toutes ces opérations dans une bâche ou même sous un simple châssis ; seulement on aurait plus de précautions à pren- dre pour entretenir constamment la chaleur au degré indiqué , et l’on serait obligé de laisser les cloches sur les semis pendant beaucoup plus long-temps. Il serait même prudent , dans un châssis, de recouvrir les jeunes sujets de leurs cloches, tous les soirs et pendant Ja nuit, jusqu’à ce qu'ils soient assez forts pour être transportés dans la serre chaude. Les semis de plantes de serre tempérée se condui- sent absolument de la même manière ; il y a cette seule différence qu'il ne faut pas à la couche une température aussi élevée, et que vingt degrés , terme moyen , sufli- sent à la réussite de l’opération. Les semis de plantes d'orangerie se traitent de la même manière, mais sur une couche tiède dont la cha- leur ne soit pas au-delà de quinze degrés, et sous châs- sis. On peut aussi se dispenser d° étoufler dés semis sous des cloches, pourvu que Fon maintienne les graines dans l'obscurité au moyen d’un paillage de mousse, de toiles ou de paillassons. Encore cette opération n'est-elle nécessaire que lorsque les graines ne sont point enter- rées, et que, par conséquent, la lumière pourrait nuire à la germination. THEM plantes d’orangerie qui conne plus lhu- midité de l'hiver et ses variations de température que le MULTIPLICATION DES PLANTES. 413 froid , se sèment de même sous châssis, mais simple- ment sur une couche froide de terre de bruyère, ou autre approprice à l'espèce du végétal. Beaucoup de plantes, quoique se cultivant'très-bien en pleine terre, sont cependant délicates à la germina- tion et ont besoin de beaucoup de chaleur pour lever. D'autres fois, pour hâter la floraison ou la fructification de certaines espèces, on les sème avant que:le soleil du printemps ait échauffé l'atmosphère. On fait ces sortes de semis sur couche et sous châssis, ou-simplement sur une couche chaude à Pair libre, en les recouvrant de: cloches que l’on borde de réchauds de fumier «chaud jusqu'aux trois quarts de leur hauteur. La nuit , ou seu- lement quand le temps est froid et-couvert, on place sur le tout une bonne quantité de paille brisée ou de litière, et l’on étend des païllassons par-dessus pour én écarter l’eau des pluies et les frimats. On profite de tous les jours de beau temps pour enlever les couver- tures et donner de Ja lumière quad les jeunes plantes sont germées, et toutes les fois que la température n'est pas à la gelée on saisit le moment où les rayons du soleil ont quelque force, pour soulever un peu les clo- ches. et donner de l'air. Cette sorte de semis se fait en potelots quand les plantes peuvent souflrir de }a trans- plantation, et simplement en plein térreau de la cou-! che, quand il en est autrement. C’est par ce procédé: que les maraichers avancent leurs légumes, et pringipa- lement Âeurs, melons, pour en obtenir de première! saison. Multiplication par gemmes. . Nous comprenons ici sons le nom de gemmes les ognons, caienx , bulbilles on soboles. Les ognons ou bulbes sont de trois sortés : les'uns pleins:et formant comme une masse charnue, n'ayant que quelqnes enveloppes extérieures. Lorsqu'on les 414 PHYSIQUE VÉGÉTALE. relève de terre, on trouve autour de leur couronne plu- sieurs petits ognons nommés caïeux et servant à multi- plier lindividu. On ne doit détacher ceux-ci que lorsque les tiges et feuilles de la plante sont desséchées, ce qui annonce leur point de maturité ; mais, lorsqu'ils tien- nent à la mère par une portion charnue qu'il faut bri- ser, 1l vaut encore mieux attendre le moment de la plantation pour éviter la pourriture qui pourrait s’empa- rer de la plaïe. On plante les caïeux ét on les cultive ab- solunient comme les ognons faits, avec la précaution cependant de les enterrer moins, et de ne les enfoncer que-proportionnellement à leur grosseur. Une observa- tion qui a échappe à beaucoup de jardiniers, c’est qu'ils exigent aussi une exposition et un terrain plus chaud et plus léger que pour les plantes faites. Lés ognons écailleux , comme par exemple celui du his commun, offrent un moyen de multiplication très- rapide, assez facile , mais qui cependant demande quel- que précaution. Il consiste à enlever une écaille, la planter dans un pot rempli de terre de bruyère sablon- neuse, ét enfoncé dans une couche tiède, afin d'éviter la pourriture . On soutient une légère humidité, on pose une cloche, et au bout d’un certain laps de temps on obtient une feuille. Quand elle est desséchée, on déterre le jeune caïeux qui s’est formé et on le traite comme les autres. Plusieurs lHliacées produisent aux articulations des branches, à l’aisselle des feuilles et souvent à la place des graines, des petites bulbes nommées bulbilles ou soboles , que l’on détache lorsque les fanes se dessè- chent et qui, traitées comme les caïeux , servent à mul- üplier les plantes. On peut aussi, pour beaucoup d’es- pèces de liliacées, couper les tiges après la floraison de la plante, les placer entre deux feuilles de papier gris dans une serre d’une température moyenne, et où l'hy- gromètre ne soit pas au-dessous de quinze à vingt de- MULTIPLICATION DES PLANTES. 415 grés. On obtient souvent, par ce moyen, beaucoup de petites bulbilles qui sortent des aisselles des feuilles et que l’on met en terre lorsqu'elles sont suffisamment for- imées. Les tubercules sont, comme nous Pavons dit, des es- pèces de colles ou réceptables, portant des yeux eapa- bles de se développer et de fournir de nouvelles tiges. Les uns ont des gemmes placés sur divers points de leur surface , les autres sur une partie seulement. C’est à quoi l’on doit faire attention. Quand le feuillage d’une plante est entièrement desséché , on soulève ses racines avec précaution et l’on détache tous les tuber- cules , petits ou gros, pourvu cependant que chacun soit muni d’un œil au moins. Il est bon, dans la plupart des espèces ; de laisser cicatriser la plaie résultant de leur séparation , avant de les replanter; il en est même quelques - uns qui, levés en automne, se conservent parfaitement en lieu sec et à l’abri de la gelée jusqu’au printemps, pour n'être remis en terre qu'a cette époque. Une précaution essentielle en les replantant, c’est de toujours placer l'œil du côté du ciel , car sans cela plu- sieurs espèces ne fleuriraient pas et s’af/oleraient, pour nous servir de l'expression des jardiniers ; d’autres ne pousseraient pas du tout. Lorsqu'un tubercule est d’une certaine grosseur et qu'il est pourvu de plusieurs yeux, on peut le couper en tranches ou en tronçons , en autant de parties qu'il y a d'yeux, et chacune d'elles reproduira une nouvelle plante. Mais, pour empêcher ces fragmens de pourrir avant que le gemme soit développé et ait poussé des racines, il est indispensable de laisser dessécher les ci- catrices faites par la section des morceaux. C’est ainsi que, dans plusieurs provinces, on a l’habitude de cultiver en grand la pomme de terre, Toutesles parties souterraines tuberculeuses ne portant des gemmes qu'à leur partie supérieure et émettant des 416 PHYSIQUE VÉGÉTALE. racines sur d’autres points de leur surface, comme par exempleles tubercules de dahlia , nesont, dans notre opi- nion, que de véritables racines, et manquent même des propriétés qu'ont les racines des végétaux ligneux, c’est- à-direde celles de servir àla multiplication des plantes par le moyen de la bouture. Cependant on peut encore en tirer partie en les fendant longitudinalement , avec la précaution de laisser un gemme au sommet de chaque partie. D’autres racines tuberculeuses , nommées griffes ou pattes, etcomposées d’un faisceau de plusieurs tuber- cules allongés, vulgairement appelés cuisses, se séparent par éclats et peuvent reproduire autant de fois la plante qu'il y a d'yeux. Multiplication par racines. Nous distinguerons d’abord trois sortes de racines, outre celles que nous venons de mentionner plus haut. Les premières sont molles, arnuelles, et appartiennent à des plantes annuelles, ou à des plantes qui ne sont vivaces que par leurs bulbes, comme par exemple tou- tes celles à ognons. Ces racines ne peuvent servir à la multiplication. Les secondes sont sous-lisneuses et vivent plusieurs années, quoique leurs tiges se dessèchent et meurent tous les ans. Elles appartiennent aux plantes herbacées vivaces. Enfin, les troisièmes sont ligneuses, revêtues d’une écorce , d’un liber, et de même structure que les tiges et les branches des arbres ou arbustes qu’elles fixent au sol. Ces deux espèces de racines sont très-avan- tageusement employées à la reproduction des individus, | mais d’une manière différente et analogue à la nature de chacune d’elles. | Parmi les racines sous-ligneuses des plantes vivaces , les unes forment un faisceau de fibres qui s’enfoncent perpendiculairement dans la terre , les autres s'écartent MULTIPLICATION DES PLANTES. 417 horizontalement presqu'à la surface, ou au moins à peu de profondeur, et sont nommées tracantes. Les ramifi- cations des premières se réunissent toutes à un sommet commun qui est un véritable collet muni d’un ou plu- sieurs yeux devant se développer l’année suivante. II ne s'agit donc, pour multiplier la plante, que d’éclater ce collet en autant de parties qu'il y a d’yeux , moyennant cependant que chaque œil éclaté emporte avec lui une quantité suffisante de racines pour l’alimenter pendant son repos, et favoriser son développement lors du temps de la végétation. Cette opération se fait avantageuse- ment en automne, quand les toufles de racines sont fortes et que le terrain dans lequel on cultive craint plus la sécheresse que l'humidité, plus la chaleur que le froid. La raison en est que la reprise des racines précédant l’époque de la végétation des tiges, celles-ci en croîtront beaucoup plus vigoureusement au printemps.Mais si l’on a à redouter la pourriture résultant des eaux stagnantes pendant l'hiver où un excès de froid est toujours redou- table à une plante qui n’est pas encore parfaitement re- prise, il vaudra beaucoup mieux attendre qu'une tem- pérature douce vienne aider au succès de l'opération. Du reste, il est peu de plantes qui se refasent à la reprise, même lorsqu'on éclate leurs racines pendant d’autres époques de l’année, c’est-à-dire pendant que Jes tiges sont en végétation. Dans ce cas, pour s'assurer un plein succès, on donne aux jeunes sujets tous les soins nécessaires. On Îes plante dans une terre plus lé- gère que la plante ne l'exige en état de santé, afin de favoriser l’émission du nouveau chevelu. On leur donne un degré de température plus élevé que de coutume, afin de hâter la végétation; on étouffe les plants au moyen d'une cloche pour empêcher que les fluides ne s’'évapo- rent avant que Îles racines puissent leur en transmettre de nouveaux ; enfin, on les prive de la lumière pendant quelque temps, pour empêcher le travail des tiges et 418 PHYSIQUE YÉGÉTALE. des feuilles par la fixation du carbone. Mais ces soins ne sont utiles que pour des plantes extrémement dé- licates. Il est d’autres attentions plus générales à avoir. Elles consistent à ne jamais éclater une plante trop faible, car on s’exposerait à perdre, surtout si lopcration se faisait en automne, et le jeune plant, et la mère qui l'aurait fourni. Pour éclater des racines, il n’est pas tou- jours nécessaire de déplanter la souche, et toutes Les fois qu'on pourra s’en abstenir on fera très-bien. Pour cela onse contentera de découvrirseulement du côté que l’on veut séparer , et on rebouchera le trou après l'opération. Autant qu’on le pourra, on fera la séparation des racines avec les doigts et par déchirement, et l’on se servira pour cela le moins possible d’un instrument tranchant. Ce n’est pas, comme le croient quelques personnes peu physiologistes, que le fer soit un poison pour de certaines plantes. La raison en est aussi simple que na- turelle. Les vaisseaux constituant la fibre herbacée ou ligneuse des racines, se trouvent toujours placés longitudinalement, et comme leur force de conti- nuité est beaucoup plus considérable que celle qui les fait adhérer les uns aux autres pour former le faisceau , ils se séparent plus aisément qu'ils ne se rompent. Or, quand on éclate une racine par déchirement, les vais- seaux se disjoignent, se détachent les uns des autres, mais ne se rompent pas ; leurs orifices n'étant point mis à nu, il y a peu de perte de substance et presque point de désorganisation ; tous continuent leurs fonctions, qui consistent à charrier les fluides de extrémité des racines au collet. Mais si l'opération se fait par section à l’aide d'un instrument tranchant, 1l n’en est plus de même. La lame d’un outil, quel qu'il soit, ne peut suivre le sens des fibres ; elle les coupe partout où elle les ren- contre , elle ouvre les vaisseaux , et les fluides destinés à la nourriture des gemmes s’échappent et se perdent MULTIPLICATION DES PLANTES. 419 par les ouvertures avant d’avoir parcouru quelquefois la moitié de leur route. Outre cela, les vaisseaux in- terrompus se désorganisent, pourrissent ; la contagion gagne les autres parties, et la plante-mère périt ainsi que le sujet qu’on en a séparé. Quoique dans ce genre de multiplication il n’y ait ja- mais que séparation des racines, les jardiniers se ser- vent assez improprement de deux mots différens pour désigner cette opération. Ils disent éclater les touffes, quand les racines portent encore leurs tiges et leur feuillage, er éclater les racines, quand les fanes sont desséchées. Quant à la multiplication par la séparation des racines traçantes, rien n’est plus aisé. On gratte autour du pied d’une plante-mère jusqu’à ce qu'on ait rencontré une racine. On découvre celle-ci dans toute sa longueur, avec l'extrême précaution de ne pas la blesser, et. on l’enlève de terre. La plupart des racines tracantes sont articulées, ou au moins portent de distance en distance des gonflemens ou des étranglemens donnant naissance à des gemmes organisés de manière à pouvoir se déve- lopper en bourgeons et en fibrilles , selon que leur dé- veloppement a lieu dans les ténèbres ou à la lumière. Cependant il est remarquable que ce sont toujours les gemmes de lextrémité qui ont le plus de tendance à s'organiser en bourgeons. Si la racine enlevée est séparée de la plante-mère à une certaine longueur, on peut la couper en plusieurs lroncons, pourvu que chacun d'eux soit muni de quelques boutons et de quelques fibrilles , encore ces fibrilles ne sont-elles pas d’une né- cessité rigoureuse, surtout dans les racines articulées. , Dans un terrain convenablement préparé, on creuse des sillons d’une longueur et d’une profondeur calculées sur la longueur des tronçons et sur la uature du végétal. Rarement ces fosses doivent avoir plus de six pouces de profondeur et moins de deux. On y étend les racines, 420 PHYSIQUE VÉGÉTALE. avec la précaution de les incliner un peu, de manière à ce que Ja partie où sont les gemmes se trouve toujours à fleur de terre. On recouvre de terre , et on conduit à la manière ordinaire. Les racines ligneuses , c’est-à-dire celles qui appar- tiennent aux dis ; re er et arbustes, nous of- frent divers moyens de multiplication. Sous ce rapport on peut les comparer aux branches, et encore croyons- nous que si l’on calculait les compensations;, une racine deviendrait plus intéressante entre les mains d’un jar- dinier habile. En voici la preuve : 1° Nous ne doutons pas que si un végétal précieux périssait par ses tiges, un jardinier intelligent ne püt, en greffant ses racines sur un sujet analogue, obtenir des boutons à tige et par conséquent des individus de même espèce. 2° Les raci- nes peuvent très-bien servir de sujet pour recevoir toutes les grefles que le sujet aurait recues. 3° Elles peuvent, de même que les tiges, reproduire l'espèce par boutures et marcottes. Nous allons entrer dans les détails suflisans pour chacune de ces méthodes de multiplication. 1° Greffe. de racine sur racine. Nous renverrons, pour ce mode de multiplication, à l’article monographie des greffes de cet ouvrage. Seulement nous ajouterons que pour opérer la grefle en fente, ou autre analogue, il faut prendre le rameau sur la partie la plus près de la surface de la terre , et par conséquent, la plus propre à développer des bourgeons à feuilles et à bois. Quelle que soit Ja manière dont on ait opéré, il faut étoufler la sreffe et surtout la priver de lumière jusqu’à la reprise; on Rp pour cela une cloche de verre dépoli. ° Greffe de racines sur tige ou rameau. Elle de- rs les mêmes soins que la précédente pour sa réus- site et se fait de même. 3. Boutures, de racines. Noici un des moyens de multiplication des plus faciles, et qui cependant est irès- peu usité sans que nous puissions nous en rendre MULTIPLICATION DES PLANTES. 42 compte. Il consiste à couper un morceau de racine, au- tant qu’on le pourra près de son extrémité supérieure ; à le planter en pot et de manière à ce que le gemme su- périeur seulement soit hors de terre, ce qui ne doit ja- mais porter le talon hors de la surface du sol à plus de six à quinze lignes. On étouffe, on entretient une humi- dité égale mais pas trop forte ; on donne de la chaleur, et on prive de lumière jusqu’à la reprise. Le troncon ne tarde pas à développer du chevelu à sa partie inférieure et des bourgeons au sommet. Si on ne tient pas à se pro- curer plusieurs individus de la même racine, le succès sera plus prompt et plus rapide en faisant la bouture dans toute sa longueur, et par conséquent, avec tout le chevelu qu’elle peut avoir à son extrémité inférieure. Marcottes de racines. On découvre une racine laté- rale, la plus longue que l’on puisse trouver, et on la soulève de terre dans une partie de sa longueur ; là, on Pétrangle au moyen d’un fil de fer, ou on écorche son écorce , on lui fait une entaille, etc., etc., de manière à y faire former un bourrelet ; peu de temps après il se déve- loppe des bourgeons sur la cicatrice. On choisit Le plus vigoureux pour l’élever à tige; puis on entaille peu à peu la racine pour la détacher de la souche, et l’on finit par sevrer tout-à-fait le jeune sujet. ‘On emploie encore un autre moyen de multiplication qui consiste à soulever l'extrémité d’une racine, à lex- poser à l'air et à la lumière après en avoir retranché l'extrémité, où des bourgeons se développent bientôt après. Quand on en a élevé un à tige, on le sèvre en cou- pant la racine près de la souche. Enfin on peut encore se servir, pour les racines li- gneuses, des mêmes moyens de multiplication que pour les sous-ligneuses. 422 PHYSIQUE VÉGÉTALE. Muläplication par tiges, rameaux et feuilles. Les tiges, les rameaux et les feuilles fournissent un grand nombre de moyens de multiplication, qui, tous, rentrent dans un de ces deux genres : la bouture et la marcotte. Chacun va nous fournir un article détaillé. Des boutures. La bouture consiste à couper une partie aérienne d’un végétal, et à lui faire produire artificiellement des ra- cines et des bourgeons, de manière à reproduire un in- dividu entier et complet. Quoique l’on en ait dit, toutes les plantes vivaces et ligneuses, sans exception, peu- vent se reproduire par bouture, mais, il est vrai, avec plus ou moins de diflicultés. On peut poser comme prin- cipes généraux, que 1° les végétaux les plus faciles à multiplier par ce procédé, sont ceux qui offrent dans leur organisation une plus grande portion de tissu cellu- laire parenchymateux; par exemple, les plantes char- nues, d’un tissu mou, les arbres moelleux, etc. Les végétaux d’un tissu sec, cassant, tout-à-fait ligneux, se montrent les plus rebelles et exigent de beaucoup plus grandes précautions. 2° La température doit être cal- culée de manière à ce que la bouture ait toujours vingt à vingt - cinq degrés de chaleur, c’est-à-dire beaucoup plus qu'il n’en faut à la plante -mère en santé. Cependant ceci n’est rigoureusement néces- saire que pour les plantes exotiques ou rebelles. Il en est même, surtout celles des arbres aquatiques , qui re- prennent très-bien dans les endroits frais, au-dessous de leur température ordinaire, mais sans néanmoins dé- roger au principe, car celte fraicheur n’est favorable que parce qu’elle empêche lévaporation des fluides or- ganisateurs. 3° Le degré de chaleur convenable étant connu pour chaque plante, doit être maintenu égale- ment le plus possible. Ceci est positivement le contraire MULTIPLICATION DES PLANTES. 423 de ce qu’il faut à l'entretien de Ja santé dans un végétal formé. Dans ce dernier, l'expérience nous a prouvé que la chaleur devait descendre de cinq ou six degrés pen- dant la nuit, et peut-être est-ce cette variation régulière de-température qui est la cause première du phénomène de la circulation. 4° L’humidité doit, comme Ja cha- leur, se maintenir au même degré ; le terme moyen le plus généralement favorable est de quinze à vingt, de lPhygromètre de Réaumur. Cependant on conçoit qu'il doit y avoir un très-grand nombre d’exceptions. Par exemple , plus une plante sera charnue, plus elle aura de propension à pourrir, et par conséquent moins il lui faudra d'humidité, et le contraire arrivera pour un végétal d’une nature ligneuse et sèche. 5° Comme toute bouture doit rester un certain espace de temps sans re- cévoir une quantité de nourriture suflisante à la végéta- tion, il est donc utile de la placer dans une circonstance telle qu'elle fasse le moins possible déperdition de subs- tance. C’est pour parvenir à cette fin qu’on la recouvre d’une cloche de verre, d’un bocal, etc., en un mot, qu’on l’étoufje, pour nous servir de l'expression techni- que en jardinage. Par la même raison, on doit ménager les organes aériens propres à absorber ces gaz nutritifs, les feuilles, les stipules, etc. 6° Comme les organes ab- sorbent principalement l’acide carbonique, on préparera un terreau léger, propre à la fermentation et à fournir une plus grande quantité de ce gaz par la décomposition. On sait que les terreaux formés par des détritus ani- maux d’abord, végétaux ensuite, jouissent de cette pro- priété au plus haut degré. 7° L’acide carbonique étant fixé par la lumière, durcit les parties, et peut, par cette raison, empêcher le développement des gemmes dans un végétal languissant dont la force de végétation est presque à zéro. Il est donc essentiel de priver les bou- tures d’une Inmière vive, jusqu'à ce que la végétation ait acquis une véritable force ; un degré de lumière égal 424 PHYSIQUE VÉGÉTALE. au crépuscule nous a paru le terme favorable. 8° Comme: tout être vivant peut être fatigué, ou même désorganisé par la transition subite d’une manière d’être à une autre, on devra accoutumer peu à peu, avec prudence, une bouture à se retrouver dans les circonstances ordinaires d’une plante en bonne santé, c’est-à-dire qu'on ne lui rendra que peu à peu , et selon que ses besoins l’annon- ceront, lair, la température ordinaire et la lumière. Voici le phénomène physiologique qui se passe à la reprise d’une bouture : un fragment de végétal se trou- vant tout à coup séparé de la plante-mère, éprouve su- bitement une contraction dans son système vasculaire qui empêche ses fluides de s’écouler entièrement. [l'en résulte le desséchement de la plaie et la concentration des sucs vers le centre du tronçon. On concoit que s’il n’y avait pas contraction dans les vaisseaux, la sève d’une branche nouvellement coupée et plantée s’échapperait dans la terre par la plaie, et cependant e’est ce qui n’ar- rive pas. Jusqu'à ce que la bouture se soit, pour ainsi dire, accoutumée à son nouvel état, elle reste dans un repos parfait, sans donner d’autres signes de vie que celui de ne pas se dessécher. Il m'est arrivé parfois d'en conserver ainsi pendant une année entière sans aucune marque de végétation , et de les voir ensuite se déve- lopper avec la même vigueur que les autres ; mais ceci n'arrive guère que pour les boutures faites en plein air. Placée dans une circonstance favorable, la chaleur vient stimuler ses organes et donner de l’activité à sa force vitale. Par les pores dont son écorce et ses feuilles sont criblées, elle absorbe le gaz acide carbonique , l’as- simile à sa nature, et forme un nouveau cambium qui augmente l'énergie de celui qui existait déjà. Il se porte aux gemmes, les gonfle, les développe. Ceux qui se trou- vent dans la terre, exposés à une plus grande somme d'humidité et à une privation totale de lumière, émettent des racines, les autres des bourgeons, et la reprise est MULTIPLICATION DES PLANTES. 425 opérée. Jusque-là c’est la partie aérienne qui a nourri la souterraine , puis il y a eu équilibre, et enfin la nou- velle racine, devenue vigoureuse, transmet à son tour de la nourriture aux bourgeons qui s'allongent et com- mencent à montrer une certaine force de végétation. C'est cet instant qu’on doit choisir Pour rendre peu à peu à la jeune plante les habitudes ordinaires. C'est le cambium seul qu opère la reprise, et dès qu'il existe dans une partie quelconque d’un végétal , tige, rameau, pédoncule, feuille , etc. » On peut en ob- tenir un individu complet par le‘moyen de la bouture. n’est pas nécessaire pour cela qu'il y ait des gemmes ; le cambium se fera jour dans quelque partie, s’organisera en bouton, et bientôt après se développera en bourgeons; seulement cette opération de la nature aura besoin d’être aidée par plus de soins et demandera un espace de temps plus long que pour une reprise ordinaire. Si on suit attentivement le phénomène, on apercevra d’abord, avec la loupe, une goutélette de cambium très-petite se faire jour à travers l'écorce, augmenter de volume, puis se coaguler, prendre une teinte roussâtre , et se couvrir d’une mince pellicule un peu velue. Peu de temps après, elle prendra une teinté verte , la pellicule se détachera, et l’on trouvera dessous un gemme ou bouton parfaite- ment organisé. HO} Section Jr. Des boutures à l'air libre, On les fait des végétaux indigènes d’une reprise fa- cile. On les place en térre légère ; amendée, un peu bu- mide , à exposition ombragée. 1° Boutures en plançon. Elle est spécialement em- ployée à la multiplication des arbres d’une reprise facile, tels que les saules et les peupliers. Au printemps, un peu avant que la végétation ne commence, on coupe une branche de dix à quinze pieds de longueur; on la nettoie de tous ses rameaux, à l'exception de ceux da 1: 28 426 PHYSIQUE VÉGÉTALE, sommet qu’on laisse pour lui former une tête. On aiguise un peu le gros bout en pied de biche, et la bouture est préparée. Dans un: terrain amendé et approprié à la nature de l’arbre, on fait un trou de deux pieds de profondeur, on y place le gros bout du plancon et on remplit de terre, que l’on foule avec les pieds autour de la tige , afin de donner de la solidité à la bouture. Tout se borne là. Quelques cultivateurs ne prennent même pas tant de, précautions : avec un pieu ferré et pointu qu'ils enfoncent en terre, à coup de maillet, ils font un trou dans lequel ils placent le plancon , sans autre soin que. celui de faire glisser un peu de terre entre la bou- ture et Les parois du trou. On conçoit que cette méthode est vicieuse en ce que la terre, comprimée et devenue très-compacte ; se laisse diflicilement pénétrer par les jeunes racines.Gependant, comme la bouture en plançon se fait ordinairement en place, il peut arriver que dans un lieu battu. des vents, cette méthode oflre quelque avantage , par la raison que le plançcon doit être plus so- lidement fixé. 2°. Bouture simple. C’est la plus employée pour la multiplication des arbres et arbrisseaux d'agrément. C’est celle que l’on est en usage de pratiquer pour multiplier les cognassiers. destinés à servir de sujet pour recevoir la greffe de poirier. Au mois de décembre jusqu'en fé- vrier, on coupe des rameaux de l’année précédente, de huit à dix pouces de longueur, selon l'usage auquel on destine les boutures. On les nettoie de leurs brindil- les, et on coupe net le gros bout au-dessous-d’un œil. Si on veut ne pas planter de suite ce qui convient dans les terrains trop humides, on réunit ces boutures en faisceau.et on:les enterre à moitié de leur longueur dans du sable humide et dans un lieu à l’abri du hâle et de la gelée. Lorsque la saison est devenue favorable et que le, terrain est assaini, c'est-à-dire depuis le commence- ment de février jusque dans les premiers jours de mai, MULTIPLICATION DES PLANTES. 427 on prépare et onamende le sol en choisissant, autant que possible, l'exposition du levant ou celle du cou- chant. On ne doit prendre celle du nord que quand on ne peut avoir une des deux premières, rarement celle du midi, à moins qu’elle ne soit ombragée. Avec un plan- toir on fixe les boutures à des distances calculées, et en les enfoncant à une profondeur convenable, c’est-à-dire qu'elles doivent avoir au moins deux ou trois yeux hors de terre, on paille; et, si la température se met au sec, il faut rigoureusement avoir le soin de donner des arro- semens soutenus afin de conserver constamment l'hu- midité de la terre. Les soins à donner aux jeunes sujets, lorsqu'ils sont repris, sont les mêmes que ceux qu'exige une pépinière résultant d’un semis. 3° Boutures en crossette. Elles se pratiquent avanta- geusement sur tous les arbres et arbrisseaux grimpans, et sur ceux qui sont moelleux. Elles se font à la même époque que les précédentes. On coupe une jeune bran- che à laquelle on laisse un crochet de vieux bois, long depuis six lignes jusqu'à deux pouces et même trois, selon la grosseur et la grandeur de la bouture. On creuse une rigole plus ou moins profonde, on y couche la par- tie inférieure de la erossette, on relève la partie supé- rieure et on la maintient dans cette posilion en la cou- vrant de terre. On laisse en dehors trois ou quatre yeux sur bois bien mür, et on coupe le surplus s'il y a lieu: Ce genre de bouture se fait ordinairement en place. C’est le moyen le plus général de multiplier la vigne. Pour cette dernière, on peut couper les crossettes dès février, au moment de la taille. On en fait des fagots que l’on conserve à l'ombre et à l’abri de la gelée, plon- gés dans l’eau jusqu’au tiers de leur longueur. On les plante depuis la fin de mars jusqu’au commencement de mai. 4 La bouture à talon ne diffère de la précédente que parce qu'au lieu de lui laisser une crosse de vieux 428 PHYSIQUE VÉGÉTALE. bois, on se contente de l’éclater et d’enleveravecelle le gonflement de la branche qui formait son aisselle.. Cette opération ne doit se faire qu'avec beaucoup de précau- tions pour ne pas trop fatiguer la branche-mère. Cegenre de bouture convient particulièrement aux arbres po- reux , tels que peupliers, saules, sureaux , etc. 5° La bouture à bourrelet ne se pratique guère que sur les arbres d’une reprise diflicile. Elle consiste à serrer une branche avec un fil de fer, ou à employer quelque autre moyen, une plaie, une écorchure, lincision an- nulaire , pour lui faire produire un empâtement de cam- bium, nommé bourrelet, et jouissant à un grand degré des facultés organisatrices. Cette opération se fait en juin. Au printemps suivant, on détache la bouture au- dessous du bourrelet et on la traite comme les autres. 6° La bouture en fascine n’est employée que dans la grande culture, et encore dans le cas seulement où il s’agit d'empêcher l’empiétement des sables sur les bords des rivières et de la mer. On coupe une très - grande quantité de rameaux et jeunes branches de saules, osier, ou autre espèce aquatique. On en forme des fagots ou fascines plus où moins considérables , selon le besoin , et on les plante, ainsi réunies, dans des fosses creusées en conséquence. Nous avons aussi employé ce moyen avec un grand avantage sur des arbres exotiques, par exemple des aucuba du Japon , qui ont développé des racines au-dessous de tous les gemmes, et les feuilles même ont donné naissance à de nouvelles plantules. Les plantes herbacées et sous-frutiqueuses se traitent de la même manière quelles ligneuses ; mais comme elles se font à différentes époques de l’année, elles sont mu- nies de leurs feuilles, ce qui amène quelques soins imu- tiles dans les autres. Avec un instrument tranchant on coupe les feuilles de la partie qui doit être enterrée, en ménageant le rameau, ou mieux en laissant un morceau du pétiole attaché à l'écorce; car la moindre plaie, la MULTIPLICATION DES PLANTES, 429 moindre déchirure, donneraient à l'humidité un pas- sage suflisant pour désorganiser les tissus intérieurs et faire pourrir la bouture. Les feuilles du sommet doivent être conservées pour alimenter le rameau jusqu’à ce qu'il ait poussé des racines. La terre la plus légère, celle de bruyère surtout, est celle qui convient le mieux à ce genre de multiplication des plantes herbacées ; elles y développent plus aisément leur chevelu. Quoique ce ne soit pas rigoureusement nécessaire, on augmentera les chances de succès en les recouvrant d’une cloche, pour les raisons que nous avons dites plus haut. Quant aux arbres verts, on ne doit les boutu- rer à l'air libre que lorsqu'on veut les multiplier en très-grande quantité, car le succès pour les espèces exotiques, présque certain sur couche et sous verre, est fort douteux différemment. On aura la précaution de laisser leurs feuilles. du sommet, et l’on se don- nera de garde d'attaquer l'écorce en retranchant celles d’en-bas. Ceci doit s'entendre non-seulement des arbres résineux, mais encore de tous ceux qui conservent leurs feuilles pendant l'hiver. : Secriox Il. Boutures des plantes de serre. Nous comprenons dans cette section les boutures des plantes de pleine terre qui ne réussissent pas ou peu à Pair libre. Avant de détailler la manière d'opérer, nous devons parler des objets nécessaires. Ces boutures se font dans une serre ou bâche, qui doit être enterrée jusqu'aux panneaux, afin que l'humidité et la chaleur puissent s'y conserver avec le plus d’éga- lité possible. On y établit une couche de fumier chaud et de feuilles sèches dans les principes que nous avons indiqués. On se procure 1° des bocaux de verre dans diflérentes dimensions, les uns de verre très-transpa- rent, les autres de verre trouble; 2° des entonnoirs de verre, de différentes grandeurs; 3° des cloches de toutes 430 PHYSIQUE VÉGÉTALE. : les dimensions, les unes de verre blanc, les autres de verre trouble ou dépoli. 1° Boutures de plantes d’orangerie. On prépare une couche capable de fournir, pendant un ou deux mois au moins, de quinze à dix-huit degrés de chaleur. La température de la bâche doit être de douze à quinze. On coupe, sur la plante que l’on veut multiplier, un rameau d’un ou deux aus, avec ou sans crochet, talon, bourrelet, etc., selon les circonstances, et on le pré- pare comme nous l'avons dit pour les boutures à l’air libre. Toutes les saisons sont favorables jusqu’à un cer- tain point pour bouturer, mais il vaut pourtant mieux le faire à l’époque des deux sèves, c’est-à-dire en avril et en août, si on en a la facilité. Cependant, nous avons remarqué que telles espèces, par exemple , des lauriers de Portugal, amande, et des sureaux panachés (ce qui n'a guère d’analogie ) donnaient beaucoup plus promp- tement des racines , lorsqu'on les bouturait en octobre. On prépare un pot d’une grandeur calculée sur l’es- pèce ou sur le nombre des boutures que l’on veut faire. On place au fond um lit de gros sable pour faciliter l’é- coulement des eaux; on le remplit d’une terre conve- nable, et ceci demande explication : 1° Pour les plantes ligneuses d’un üssu sec et serré, craignant peu le pourri, on prendra de la terre de bruyère mêlée à un quart de terreau consommé et à un quart de terre franche. 2° Pour les plantes ligneuses à bois mou, spongieux, moelleux, on emploiera la terre de bruyère pure. 3° Pour les végé- taux à tiges charnues, succulentes, tels que les aloës, pourpiers, etc., on mêlera un tiers au moins de sable fin à la terre de bruyère, si celle - ci ne se trouve pas déjà très-sablonneuse par sa nature. On arrosera ce mé- lange, s’il est nécessaire, et on enfoncera le pot dans la couche deux ou trois jours au moins avant d’y placer la bouture, afin que la terre ait le temps de se réchauffer à un degré favorable. MULTIPLICATION DES PLANTES. 437 Tout étant préparé, on fera un trou dans la terre du pot, et pour cela on se servira d’un bâton à pointe obtuse dans le plus grand nombre de cas; mais s’il s’agit d’une plante grasse, d’un pitcarpia , par exemple, on fera au plantoir une pointe aiguë, et on le fera pénétrer jusqu’au Bt de gros sable placé au fond du pot, puis on versera dans le surplus de la profondeur du trou du sable pur et très-fin. Cela fait, on placera la bouture et on la fixera en pressant avec les doigts la terre du pot autour d'elle. Si on place plusieurs boutures dans le même vase , les précautions à prendre pour chacune sont les mêmes ; seulement on aura le soin de les placer de manière à ce qu'elles soient espacées d’un demi-pouce au moins les unes des autres, et à ce qu'aucune ne soit plus près d’un pouce des bords du vase. On pose de suite une cloche de verre, mais le choix de cette cloche ne doit pas se faire sans discernement. Si la bouture est ligneuse, d’un tissu serré et peu paren- chymateux , il faut empêcher que la lumière ne vienne encore l’endurcir en fixant dans ses tissus l'acide carbo- nique exhalé par la terre du vase et par la couche. On la couvrira donc avec une cloche de verre dépoli, capable de lui intercepter la plus grande partie des rayons lumi- neux. Outre cela, on couvrira encore les panneaux de la bâche avec des toiles ou même des paillassons, au moins pendant que les rayons du soleil frappéront dessus. Mais si, au contraire , la plante est d’une nature succulente ou charnue, on se servira d’une cloche très-transparente ; on facilitera l'accès de la lumière, afin d'éviter la pour- riture, Autant qu’on le peut, on entretient la chaleur tou- jours au degré indiqué, en employant les réchauds de fumier, le remaniement des couches, le tan, et méme le feu de fourneaux , s’il est nécessaire. Au moyén d’un thermomètre enfoncé dans la couche ét d’un autre sus- pendu à un panneau de la bâche, on est sûr de ne jamais 432 PHYSIQUE VÉGÉTALE;- . faire d'erreur; il n’en esl pas de même pour s'assurer du degré d'humidité. L'instrument nécessaire pour cela est l'hygromètre de Réaumur. On est obligé d’en avoir plu- sieurs disposés dans différens endroits, et encore n’est-on Jamais sûr que l'humidité existant sous les cloches soit la même que celle dont l'air ambiant de la serre est im- prégné. Il est cependant un moyen de le reconnaître : chaque jour on visite les boutures , et lorsqu'on voit des gouttes d’eau s'attacher au verre, on peut croire que l'humidité est trop grande sous la cloche. Dans ce cas, on a le soin indispensable de l’essuyer à mesure qu'elle se forme en goutielettes contre les parois du vase. Ce- pendant il faut aussi calculer que si la température de la serre est à un degré plus bas que celle de la couche, les vapeurs peuvent se condenser sans qu'il y aitsurcroît d'humidité. Dans tous les cas, si on apercevait la moin- dre pourriture sur les boutures ; cet indice serait le plus certain de tous , et l’on devrait, après en avoir fait dis- paraître les traces , s'arranger de manière à ce qu’elles ne se renouvelassent plus. Pour cela , on les nettoierait avec précaution pour ne pas les ébranler, et on les laisserait se ressuyer à l'air libre de la serre pendant une heure ou deux. Les autres soins à prendre se bornent à leur rendre la lumière et l'air peu à peu , à les accoutumer, d’abord à l'air libre de la serre à bouture, puis à celui de l’atmos- phère, et à les transplanter dans des pots plus grands aussitôt qu'on à la certitude qu'elles sont suflisamment enracinées. 2° Boutures des plantes de serre chaude. On les fait dans la même bâche que les précédentes, mais avec cette différence que la conche ou tannée doit être constamment entretenue à vingt-cinq ou trente degrés de chaleur. On prépare le pot et la terre comme nous l'avons dit ; on y plante une bouture avec les mêmes précautions ; mais comme ordinairement on opère sur des plantes délicates, MULTIPLICATION DES PLANTES. 433 il faut les étoufler davantage. Au lieu donc de les re- couvrir d’une cloche, on les recouvre d’un bocal ren- versé , et l’on choisit ce vase d’une grandeur suflisante pour qu'aucune des parties de Ja bouture ne touche ses parois, sans cependant en être éloignée de plus d’un de- mi-pouce. Moins l'atmosphère de la plante sera étendue , moins il y aura de transpiration dans les feuilles et de déperdiioiee nourriture. Tous les jours, plutôt deux fois qu’une ,'on lèvera les bocaux pour essuyer avec un linge les gouttes d’eau que les vapeurs de la couche y dé- posent. On couvrira les panneaux de la bâche avec des toiles pour ne donner qu’une somme de lumière conve- nable , et enfin on prendra les mêmes soins que ceux indiqués dans le paragraphe précédent. Lorsque la bouture annoncera sa reprise par un com- mencement de végétation, il s'agira de l’accoutumer lentement à l’air hbre de la serre. Si elle est très-grande et très-feuillée, on pourra remplacer le bocal par une cloche qui luiformera une atmosphère plus considérable, et chaque jour on soulèvera le vase en le maintenant au moyen d’une petite pierre ou autre corps que l’on glis- sera sous un côté du bord. L'ouverture , pendant les trois ou quatre premiers jours , doit être fort petite, afin que l'air puisse seulement s’y introduire sans y circuler. On soulèvera davantage graduellement et avec le temps. Si la bouture est petite et délicate, on remplacera le bocal par un entonnoir en verre dont le tuyau sera bou- ché avec un petit tampon de papier. Peu à peu on sou- Jèvera le tampon afin de le faire fermer moins herméti- quement, et on finira par l'enlever tout-à-fait. Quand la jeune plante sera accoutumée à la somme d’air suscep- tible de se renouveler par le trou de lentonnoir, on pourra commencer à le soulever comme nous l'avons dit de la cloche. Une fois la plante parfaitement en végétation et tout- à-fait accoutumée à l'air libre de la bâche , 11 faudra en- 434 PHYSIQUE VÉGÉTALE. core user de précautions pour la transporter dans la serre chaude, afin qu’ellenes’y trouve pas surprise par une atmosphère trop sèche et d’une température différente. Pour l’habituer à ces variations , on aura encore recours àlacloche, s’il est nécessaire, et à la tannée. Pour étouffer les badhares des plantes de serre chaude , on agira dans les mêmes principes que ceux enseignés pour les végé- aux d’orangerie, c'est-à-dire que "en +0 de verres transparens pour les plantes d’une nature molle et charnue, et de verres dépolis pour celles qui sont d’un tissu sec et ligneux. 3° Boutures des feuilles. Avec des soins assidus et minutieux , nous avons la certitude que l’on parvien- drait à multiplier toutes les plantes vivaces et ligneuses, en n'employant que leurs feuilles pour faire des bou- tures ; mais il n’y a qu'une main très-exercée dans cette partie délicate de l’art du jardinier qui pourrait espérer un plein succès ; et l'utilité de ces expériences appar- üendrait tout entière aux progrès qu'elle pourrait faire faire à la science du physiologiste seulement. [l n’en est pas tout-à-fait de même de la bouture par feuilles des plantes et arbrisseaux toujours verts : celle-ci peut être utile dans de certains cas; par exemple, quand il s’agit de multiplier en très-grand nombre une espèce précieuse dont on ne possède qu’un sujet délicat. Nous croyons donc nécessaire d’entrer dans tous les détails de cette opération. Plus une feuille est épaisse, parenchymateuse , plus elle contient de cambium, et plus l'expérience offre des chances de succès. Les fers des plantes grasses sont, en raison de ce principe, celles qui donnent les résultats les plus faciles à obtenir. Nous ferons observer ici que nous ne donnons pas le nom de feuilles, dans cette oc- casion, à ces expansions ovales et plates , articulées les unes sur les autres , formant toute la végétation de cer- tas cactus, de l’opuntia, par exemple; ces prétendues MULTIPLICATION DES PLANTES. 435 feuilles ne sont pour nous que des tiges articulées et comprimées. | Après les feuilles des plantes grasses, viennent celles qui, sans avoir une grande épaisseur, ont néanmoins une certaine consistance et la nervure principale très- développée, telles, par exemple, que celles de quel- ques ficus, de l’aucuba du Japon, etc. Viennent après celles dont le tissu ne diffère guère de celui des feuilles caduques que par un peu plus de fermeté, par exem- ple, celles des citronniers. Ce sont par conséquent celles qui exigent le plus de soins pour l'opération dont nous parlons. Dans tous les cas, on doit choisir, pour faire une bou- ture, une feuille en pleine végétation, c’est-à-dire, parvenue à son dernier développement, et, sans être vieille , ayant acquis toute sa solidité. On la détache de la tige à son articulation avec elle, et l’on prend toute Ja précaution possible pour qu’il ne reste pas la plus pe- tite partie de son pétiole après la branche. Si la feuille appartient à une plante de pleine terre, on la porte dans la serre à boutures des plantes d’orangerie; si elle est exotique, on opère dans la serre à boutures des plantes de serre chaude. On remplit un très-petit pot de terre de bruyère très- fine et passée à un crible très-fin, on la comprime légè- rement avec le plat de la main, puis on enfonce le vase dans la tannée de la couche. Si la feuille est pétiolée, on fait un pétit trou oblique dans la terre , et on y en- fonce le pétiole dans la plus grande partie de sa lon- oueur, et l’on presse la terre dessus pour le fixer. Il en résulte que la feuille se trouve plantée dans une posi- tion inclinée, approchant pius de la ligne horizontale que de la ligne verticale. Il est entendu que son limbe supérieur doit être tourné en dessus et Le limbe inférieur en dessous. On glissera un peu de terre dessous , de ma- nière à ce que sa face inférieure soit en contact avec elle 436 PHYSIQUE VÉGÉTALE. à peu prés dans les deux tiers de sa longueur.On couvre le pot avec un entonnoir dont le tuyau est parfaitement bouché, et l’on ajuste sur cet appareil une cloche de verre dépoli. Au bout de quelques jours, on commence à aperce- voir sur la nervure principale, un peu au-dessus de la naissance du pétiole , un ou plusieurs petits points sail- lans, ovales , grossissant peu à peu et se formant en gemmes. Cest alors qu'il faut redoubler de soins pour maintenir un équilibre parfait entre la chaleur et l’hu- midité, afin d'entretenir la fermentation sans pourriture. Les gemmes ne tardent pas à se développer en une pe- üte plantule fort délicate, qui jette quelques fibriles ra- dicales en dessous et qui montre déjà une tigelle. On commence alors à donner de la lumière en enlevant la cloche dépolie, mais on ne donne de l'air en débou- chant le tuyau de l’entonnoir que peu à peu, et avec les précautions prescrites plus haut. Tout le reste de l’o- pération ne diffère en rien d’une bouture ordinaire. Le parenehyme et le limbe de la feuille pourrissent , et 1l ne reste plus dans le vase que la petite plante à laquelle. elle a donné naissance. Si on fait une bouture avec une feuille sans pétiole, on agit de la même manière et l’on ne couvre de terre: qu'une partie de sa base égale à peu près à la sixième partie de la longueur totale du limbe. 4° Boutures par tronçon de racine. Ce genre de mul- üplication se fait sur les plantes de pleine terre dans la serre à boutures d’orangerie, et sur les végétaux de serre dans la bâche à boutures de serre chaude. Autant qu'on le peut, on choisit une racine de la grosseur d’un tuyau de plume de poulet au moins, jusqu’à la grosseur du petit doigt au plus. On la coupe en tronçons de deux à quatre pouces , selon sa grosseur, et on plante.et traite ces morceaux comme des boutures ordinaires. Îl y a ce- pendant ceite différence qu'il faut les priver de lu MULTIPLIGATION DES PLANTES. 437 mière avec beaucoup plus de soin, jusqu'à ce que la formation d’un gemme se montre sur quelqu’ure de leurs parties. Nous finirons l’article des boutures en recommandant des arrosemens très-modérés jusqu’à la reprise, car la terre doit être constamment humide sans jamais être mouillée, On peut réussir à bouturer des pédoncules, et même d’autres parties plus éphémères encore, en les traitant avec les soins et les précautions que nous avons indiqués ci-dessus. Secrion III. Des marcottes. On appelle marcotter une opération par laquelle on force un végétal à émettre des racines sur une de ses parties aériennes que la nature semblait n'avoir destinées à produire que des gemmes, et par laquelle on multi- plie l'espèce en séparant de la plante-mère cette partie enracinée et la plantant avec les précautions d'usage. Toutes les plantes vivaces et ligneuses peuvent se mar- cotter et émettre des racines, mais il faut plus ou moins long-temps pour la reprise , selon les espèces. Comme ce n’est qu'en enterrant la partie de la tige, de la branche ou du rameau où l’on veut faire naître des racines, que l’on peut avoir une certitude de succès, il arriverait parfois que la position trop élevée de la marcotte pourrait embarrasser les amateurs d’horticul- ture , si nous n'entrions à ce sujet dans quelques détails nécessaires. Quand il s’agit de marcotter à une certaine élévation, on se procure des pots ou vases adaptés à la circons- tance. Nous allons décrire les plus employés : 1° Le godet à marcotter en l’air. Il consiste en un petit vase en terre cuite, ayant la forme d’un petit pot de fleurs auquel on aurait ajouté deux anses en forme d’oreilles d’écuelle. Ces oreilles sont percées de deux trous par où l’on passe des fils de fer ou des ficelles pour tenir le godet sus- 438 PHYSIQUE VÉGÉTALF. pendu. Il a un côté mobile qui peut s’enlever et se ra- juster à volonté. Après avoir fait passer la marcotte par cette ouverture, on rapporte la pièce et on la fixe au moyen d'un fil de fer. 2° Le pot à marcotte peut être plus simple encore. On prend un petit pot à bouture, on le scie en deux. dans le sens de sa longueur, de ma- nière à faire passer le trait de scie au milieu du trou qui est au fond. Lorsque l’on marcotte, on rapproche les deux moïiliés l’une de l’autre en faisant passer la branche par le trou du fond, et l’on maintient les deux parties réunies au moyen d’un fil de fer. 3° Le cornet en plomb offre l'avantage précieux de se plier à toutes les formes sous la main industrieuse du jardinier, et par conséquent de pouvoir être employé aux aisselles des branches et jusque sur leur articulation. On emploie des feuilles de plomb de différentes épaisseurs , depuis celle d’une feuille de papier jusqu'à une demi-ligne et même da- vantage s’il en était besoin. On les taille de manière à pouvoir aisément les rouler en cornet dont la partie la plus étroite embrasse la branche ou le rameau à mar- cotter. On maintient le cornet au moyen de quelques tours de fil de fer, si les circonstances l’exigent. 4° Quel- ques personnes ont employé un entonnoir en fer-blanc , s'ouvrant et fermant à volonté , au moyen d’une char- nière ; elles faisaient passer la tige de la marcotte par le tuyau. Cette méthode me parait vicieuse en ce que, dans un établissement un peu considérable, les frais dépasseraient de beaucoup les résultats qu’on pourrait raisonnablement en attendre. Le fer-blanc, quelque bien étamé qu'il soit, se trouvant exposé à une humi- dité soutenue, est bientôt oxidé et percé par la rouille. Nous doutons même qu’un seul vase püût servir pour faire une marcotte dont la reprise se ferait attendre deux ans, et cependant beaucoup de marcottes mettent ce temps pour la reprise. 5° On emploie encore des vases de verre ainsi faits : on prend trois, quatre, cinq ou six e MULTIPLICATION DES PLANTES. 439 morceaux de verre à vitre que l’on taille en cône tron- qué ; on les réunit au moyen du plomb comme les vi- traux des anciens, et on laisse à un des côtés la faculté de s'ouvrir et fermer par une charnière. On se procure ainsi la facilité de voir quand les racines sont assez dé- veloppées pour pouvoir sevrer la marcotte. Cette mé- thode est fort bonne, fort ingénieuse, mais elle ne peut convenir qu'à des amateurs qui possèdent un petit nom- bre de plantes à multiplier. Nous ne parlerons point ici des cornets de papier, avec lesquels quelques personnes prétendent remplacer les vases dont nous venons de donner la description; des poupées de toiles ou de canevas remplies de terre, qui peuvent cependant quelquefois être avantageuse- ment employées. Nous parlerons encore moins de ces paquets de mousses humides, au moyen desquels on se passe de terre et de pot. Mais nous dirons que, pourvu qu'on atteigne le but qu'on se propose, tous les moyens sont bons, s'ils sont expéditifs et peu coûteux. Le jar- dinier intelligent saura toujours y pourvoir. Quel que soit le procédé préféré, il faudra calculer si la branche fournissant la marcotte , est assez forte pour porter seule le vase et la terre qu'il remplit, sans en être trop fatiguée. Dans le cas contraire, on le soutiendrait au moyen d’un tuteur. Si l’on faisait plusieurs marcottes sur la même branche, on pourrait, en inclinant horizonta- lement celle-ci , s'arranger de mamière à ce que tous les sodets ou pots pussent se poser sur une planche placée en forme de rayon etsoutenue par deux pieux. C’estencore: là une de ces choses dont on ne peut pas prévoir toutes les circonstances , et'sur lesquelles'on’doit s’en rappor- ter à l'intelligence du jardinier. Quant aux marcottes qui se font sur des plantes en pots, et dont on né peut pas courber les rameaux jus- que dans la terre du vase, on peut employer un autre moyen que celui d'y placer des godets. On a un demi- 440 PHYSIQUE VÉGÉTALE. pot, c'est-à-dire un pot sans fond un peu moins large que celui sur lequel on doit opérer, et n'ayant pas plus de deux à quatre pouces de hauteur. On fait passer les tiges de la plante au travers de son ouverture, et on vient l'asseoir sur les bords de l’autre pot. On le remplit de terre, et la souche se trouvant enterrée, il en résulte que les marcottes peuvent fort bien se plier sans se rompre dans cette terre rapportée. S'il arrivait que les branches et les tiges de la plante fussent étalées et d’une nature cassante , au point qu’on ne püt les faire passer dans Le pot en couronne, on scierait ce dernier en deux parties égales que l’on rapprocherait en les placant sur les bords du vase de la plante ; on les maintiendrait en place au moyen d’un lien. Quant aux marcottes qui se font en pleine terre, ilest quelquefois nécessaire d'employer des procédés parti- culiers, soit pour avoir plus de facilité quand on les relève de terre et qu'on les sépare de la mère-plante, soit parce que quelques-unes craignent la transplanta- tion, et veulent être levées avec la motte, On emploie pour cela, r° des pots d’une grandeur proportionnée à la grandeur de la marcotte; on élargit le trou du fond, on y fait passer la tige et on enterre le tout ; 2° on se sert aussi de paniers d’osiers et de mannes préparées à ceteflet; on fait passer la marcolte dedans et on les enterre comme nous l'avons dit. Quand on marcotte en godets, ou en. pots et mannes enterrés, on a l'avantage de pouvoir donner aux mar- cottes une terre plus légère que celle qu’exige la plante- mère ; d'où il résulte plus de facilité pour l'émission des jeunes racines, Ce qui est une première raison pour em- ployer de préférence cette méthode. Il en est encore une autre qui est, que les jeunes plantes s’aperçoivent beaucoup moins du sevrage. En troisième lieu, les amateurs y trouveront l'avantage d'obtenir des produits de fleurs ou même de fruits, dans la même année que & hs MULTIPLICATION DES PLANTES. 441 l'opération. C'est ainsi que l’on voit au marché aux fleurs, à Paris, des marcottes de vigne en pots et cou- vertes de raisins, quoique n’offrant que du bois de l’an- nce précédente, Le sevrage d’une marcotte peut aussi exiger quelque- ‘fois des soins particuliers. Il consiste, quand la plante est délicate ou d’une reprise difficile , à la sevrer peu à peu , et à l’accoutumer lentement à se passer de la nour- riture qu’elle recoit de sa mère. Pour cela on fait une lé- sère entaille au point où elle doit être coupée, et le plus près possible de l’endroit où elle a donné ses raci- nes. Quelques jours après on augmente la profondeur de l'entaille, et ainsi de suite pendant plusieurs jours, jusqu'a ce qu'elle soit entièrement séparée. Une des conditions essentielles pour la reprise d’une marcotte, c’est que la terre dans laquelle on l’a faite soit constamment maintenue dans un certain degré d'humidité , sans lequel il n’est point de végétation. Dans nos grands établissemens, nous n’employons pas d’autres moyens que l’arrosoir, parce que nous avons des garçons jardiniers sur l'exactitude desquels nous pouvons compter , vu que leurs occupations sont distri- buées de manière à ce qne chacun ait la sienne sans em- piéter sur celles des autres, et sans pouvoir, par consé- quent , la négliger. Mais il n’en est pas de même dans la plus grande partie des jardins bourgeois, où un seul jardinier étant chargé de tous les soins , peut quelque- fois en oublier quelques-uns. On obviera à toute négli- gence en placant auprès du godet de la marcotte un vase rempli d’eau. On placera dans cette eau une mèche de coton, dont l’autre bout ira se rendre dans la terre du godet ; elle produira le même effet qu’un siphon, et l'eau du vase passera continuellement et insensiblement dans le godet, où elle entretiendra la terre dans un état permanent d'humidité. Il faut observer , pour la réussite de cette opération, que la distance que doit parcourir la 1. 29 442 PHYSIQUE VÉGÉTALE. mèche, de l’eau à la terre, soit la moins grande possible, et que plus cette distance sera grande , plus la mèche doit être grosse. Pour conserver une humidité permanente et soutenue également, il est encore bon de pailler la terre des marcottes avec de la mousse hachée et humide. Il en résulte un autre avantage, c’est que la terre se bat moins par les arrosemens. Nous allons donner les différentes sortes de mar- cottes. 1° Stolon, coulant. On donne ce nom à des filets qui partent de la souche de quelques végétaux, rampent à une certaine distance sur la terre , et prennent racine à un nœud ou à une articulation. Ce sont de véritables marcottes naturelles, dont les fraisiers, parmi Îles plantes herbacées, et le lierre , parmi les végétaux hi- gneux , offrent des exemples connus de tout le monde. Il ne s'agit que de les séparer de la plante-mère dans une saison favorable à la transplantation, et on peut en obtenir, en les plantant avec soin, autant d'individus qu'il y a de nœuds enracinés sur le même filet. s Marcottes simples, provins, marcottes en archet, recouchées. Ce sont les plus faciles et les plus usitées de toutes, surtout dans la grande culture de la vi- gne, etc. Au printemps, on choisit une tige longue, et de jeune bois s’il est possible. On creuse contre la sou- che un sillon plus ou moins profond , selon la grosseur de la branche que l’on y couche. On la tient dans cette position au moyen d’un crochet en bois que l’on enfonce dans Ja terre. La branche décrit ainsi un demi-cercle, dont les deux extrémités sont hors de terre. Toute la partie enterrée doit être dépouillée de ses feuilles et de ses rameaux. Si l’on opère sur une plante délicate, il peut étre avantageux à la reprise de mêler à la terre dont on remplit le sillon un peu de terreau consommé. On redresse avec précaution, pour ne pas la casser; MULTIPLICATION DES PLANTES. 443 l'extrémité hors de terre de la marcotte , et si cela est nécessaire, on Ja maintient dans une position verticale au moyen d’un tuteur. On coupe à deux ou trois yeux au-dessus de la surface du sol; on arrose; on détruit les mauvaises herbes , et enfin on cultive avec soin. On peut faire ainsi autour d’une souche autant de mar- cottes qu'il y a de branches, car une tige couchée peut fournir autant de marcottes qu'elle a de rameaux. 3° Marcotte en arceau ou en serpenteau. C’est la même que la précédente , à cette différence près que, lorsque la tige est assez longue, on lui fait faire plu- sieurs courbures dont les inférieures sont enterrées et les supérieures hors de la surface du sol ; d’où 1l résulte que les premières prennent racine , et que les secondes poussent des bourgeons. Lorsqu’arrive le moment de les lever, on coupe la tige en autant de plancons qu'il y a eu de courbures enracinées. 4° Marcotte par cépée. Celle-ci est très-avantageuse pour la multiplication de certains arbres robustes. On n'en emploie pas d’autres pour obtenir du cognassier une grande quantité de sujets enracinés propres à rece- voir des grefles de poiriers. Au printemps, on coupe une souche d'arbre ou d’arbrisseau rez-terre ; on recou- -vre de terre, et tout se borne là. Le tronc mutilé ne tarde pas à pousser un grand nombre de drageons, qui s’enracinent aussitôt, et peuvent être levés, du moins en parte , l’année suivante. 5° Marcotte à talon. Celle-ci est la plus usitée pour les plantes vivaces et particulièrement pour les œillets. On choisit une tige élancée et d’une grandeur convenable pour être recouchée : on la dépouille de ses feuilles et on la présente vers la terre , afin de reconnaître d’avance le point inférieur de la courbure qu'elle décrira lorsqu'elle sera enterrée. À ce point el au côté quise trouvera placé en dessous , on fait une incision comme nous allons le dire. On appuie la lame tranchante d’un instrument sur 444 PHYSIQUE VÉGÉTALE, la tige, et on l’enfonce transversalement jusqu’au milieu de son épaisseur ; parvenu à ce point , on tourne Ja lame par un mouvement de la main , et on continue à couper en remontant vers l'extrémité supérieure de la tige, et de manière à ne pas s’écarter du milieu. Dans de cer- taines plantes dont les tiges sont assez grosses, il n’est pas nécessaire d'atteindre jusqu’à l’étui médullaire, et l’on fera même bien de l’éviter. Cela fait, on creuse un trou près de la souche, on y enfonce la branche, de manière à ce que la partie entaillée et fendue forme une espèce de talon, qui, assez ordinairement , s’é- carte naturellement de la tige par l'effet de la flexion. D'ailleurs, si cet écartement n'avait pas lieu, on y remédicrait en intercalkant entre le talon et la cica- trice un petit corps étranger , tel qu’une petite pierre, un gravois, etc. On fixe la marcotte dans cette posi- tion, au moyen d'un petit crochet en bois, placé précisément sur la plaie ou un peu plus rapproché de la souche ; on recouvre de terre et on arrose. On doit choisir, pour entailler le talon, un endroit où il y aitun nœud si la tige est articulée, ou un gemme si elle ne l’est pas. Dans le premier cas, qui est ordinaire aux œillets, on entaille juste au milieu du nœud ; de manière à ce que la moitié au moins reste au bout du talon, car c’est de là que partiront principalement les racines. Si la tige n'a pas de nœuds, on fera l’entaille juste au-dessus d’un gemme, de manière à laisser à l'extrémité du talon le gonflement sur lequel le bouton:est placé. Ces marcottes s'enracinent promptement et facilement. La longueur du talon doit être calculée sur la grosseur de la branche : par exemple, pour un œillet, il doit être de trois à cinq lignes, et, pour une tige de la grosseur du petit doigt, de huit à dix. 6° Marcotte par incision compliquée. Elle se fait sur les arbres et arbrisseaux les plus rebelles à ce mode de multiplication. On prépare la branche et on la couche MULTIPLICATION DES PLANTES. 445 et maintient comme pour la précédente ; la différence n'existe que dans l’incision. On entaille plus profondé- ment et l’on soulève de même le talon, mais on fend celui-ci en trois ou quatre lanières que l’on maintient écartées au moyen de quelques petits corps durs que l’on intercalle entre chacune. 7° Marcotte par fente. La branche préparée, on fait, avec la pointe de la serpette ou d’un grefloir, une fente perçant la branche d’outre en outre par le milieu, et l’on tient les deux parties légèrement écartées en in- tercallant entre elles une petite pierre. 8° Marcotte par circoncision. Elle consiste à enle- ver au-dessous d’un œil et à la place où l’on veut qu’elle émette des racines, un anneau d’écorce plus où moins large, selon la grosseur du rameau. 9° Marcotte par torsion. Elle s'emploie pour tous les arbrisseaux dont l’écoree est très-mince. Elle consiste à tordre la branche dans l'endroit où on veut qu’elle prenne racine , et de manière à faire éclater longitudinalement la fibre ligneuse. En la maintenant dans cet état de tor- sion, les parties restent suffisamment ouvertes pour que le cambium puisse s’y accumuler et organiser des gem- mes qui produisent du chevelu. Cependant cette opé- ration doit se faire avec beaucoup de soin; car si l’on rompt les vaisseaux , le tissu se désorganise, l'humidité s'empare de la branche et la fait périr; il faut mettre au- tour de la torsion faite à la branche, une terre conte- nant beaucoup de sable, et ménager les arrosemens pendant quelque temps. 100 Marcotte par strangulation. Elle diffère des précédentes en ce qu’on fait une ligature avec un fil de fer, ou de lin si la plante est de nature à s’enraciner promptement, au-dessous d’un œil où d’un nœud ; il en résulte un bourrelet d'où partent les nouvelles racines. Nous n'avons pas besoin de dire que toutes les es- pèces de marcottes que nous venons d'enseigner peuvent 446 PHYSIQUE VÉGÉTALE. se faire également en pleine terre, en pot , en godet, en panier, etc. Quant à la manière de les traiter lors- qu’elles sont sevrées, elle rentre dans les principes gé- _néraux de culture. Nous observerons seulement qu’on les lèvera avec la motte autant qu'on le pourra, car ve- nant d’être sevrées d’une nourriture abondante qui leur ctait fournie par la plante - mère, et leurs racines ne jouissant pas encore d’un grand développement, il en résulte qu’elles doivent être plus sensibles à la trans- plantation. Aussi, quand il s'agira d’une plante délicate que l’on n'aura pas pu lever avec la matte, fera-t-on bien de la faire reprendre sur couche tiède, et même de l'étoufter à la manière des boutures. CONSERVATION DES PLANTES. 447 ja 2 2 22020 }0j30 7e} 21502220 De 20e} eu ee 6 ne ne ou ré a eu ue eu mé te CHAPITRE V. CONSERVATION DES PLANTES. Nous devons traiter dans ce’ chapitre de tous les moyens de culture à employer pour conserver les plan- tes formées et les maintenir dans un état permanent de santé. Nous ne parlerons ici ni des plantes potagères ni des arbres fruitiers, cette partie ayant été traitée spé- cialement dans leur ordre. Nous ne reviendrons pas non plus sur les soins à donner aux végétaux de serre, cette matière ayant été suflisamment détaillée aux articles des serres et des couches. Nous nous bornerons donc ici aux généralités dont nous n’avons pas eu l’occasion de nous occuper dans le cours de l'ouvrage, De la dégénérescence. On appelle ainsi une espèce d’aflection générale ou partielle qui fait qu'un végétal perd tout ou partie des qualités ou des caractères de variété ou même d'espèce, qui le distinguaient d’un autre végétal d'espèce ou variété voisine. Par exemple , un amateur recoit une plante à fleurs très-doubles; un arbre, à fruit délicieux et très- gros; un rosier dont le calice est mousseux , etc. ; 1l les plante , les cultive avec grand soin, et, quelquefois après plusieurs années, il ne recueille pour prix de sa peine qu'une fleur simple, qu'un fruit petit et.de médiocre qualité, une rose à calice glabre et lisse. C’est parce que ses plantes sont dégénérées. Nous ferons remarquer en passant que si l’on veut abandonner un moment de certains préjugés qui , de tout temps, ont fait juger les choses plus parfaiteset meilleures 448 PHYSIQUE VÉGÉTALE. en raison de ce qu'elles devenaient plus utiles et plus agréables aux hommes, on trouvera que le mot de dégé- nération est ici fort mal appliqué, puisqu'on l’emploie pour exprimer une chose tout-à-fait contraire à sa signi- fication. En eflet, cette fleur double ne l’est que par dé- génération et aux dépens de sa postérité; cette poire est d'autant plus grosse et plus délicieuse que l'arbre qui la porte a plus dégénéré , lorsque les sucs nourriciers, dé- viés et altérés par l’art du jardinier, ont abandonné les tiges et les branches qui ont perdu les trois quarts de Es dimensions naturelles, pour se ramasser et s'em- pâter dans un énorme péricarpe. Lorsque le calice de cette rose, altéré par des circonstances de culture, s’est couvert d'une maladie, d’une lèpre ressemblant à de la mousse, c’est alors que le rosier a dégénéré. Mais quand des circonstances quelconques font disparaître de dessus un individu les traces que la main de l’homme et une longue domesticité lui ont imprimées, quand il revient plein de vigueur et de santé dans l’état que la nature lui avait choisi, certes ce ne peut être que par un préjugé qu'on a pu dire que cet individu dégénérait. Quoi qu'il en soit, nous devons faire abstraction ici de toute phi- iüsophie qui né ‘pourrait qu'ôter de la clarté à notre ou- vrage pour beaucoup de lecteurs, et nous nous bor- nerons à l’observation que nous venons de faire, afin d'empêcher les amateurs encore peu versés dans les sciences naturelles, de prendre de fausses idées sur la marche dela nature. I y a plusieurs sortes de dégénérescences, et nous allons rapidement les parcourir, chercher les causes de chacune, afin de pouvoir y trouver des remèdes. ° Dégénérescence des plantes herbacées et an- nuelles. Les plantes annuelles sont généralement cul- tivées pour les graines utiles, ou pour l'agrément de Jeurs fleurs. Très-peu le sont pour lutilité spéciale de leurs tiges ou de leurs feuilles. Elles offrent aussi trois CONSERVATION DES PLANTES. 449 sortes de dégénérescences : 1° celle dans la quantité et la qualité de leurs graines ; 2° celle dans la dimension et le nombre des fleurs ou de leurs pétales; 3° celle dans la dimension de leurs feuilles et de leurs tiges. Nous allons d’abord nous occuper des premières. Les plantes céréales, oléagineuses et économiques, cultivées pour lutilité de leurs graines, sont celles qui offrent aussi le plus grand nombre de variétés. Le fro- ment, le seigle, l'orge, par exemple, présentent, dans un grand nombre de pays, de grandes différences de forme et de produit. Ces variétés ne peuvent apparte- niv qu'au climat et à la qualité particulière du sol, aussi né croyons-nous pas qu'on puisse jamais les naturaliser avec toutes leurs qualités, à moins que ce ne soit dans des localités offrant des circonstances semblables. Ce- pendant , l'expérience a prouvé qu’en semant chaque année dans des terrains et à des expositions différentes et même contraires, les caractères de la variété s’efface- ront beaucoup plus lentement, et se conserveront même si la variété est née dans le pays. Toute graine semée plu- sieurs années de suite, non pas seulement dans le même terrain, mais dans un terrain de même nature, dégénère rapidement. Les bons cultivateurs -fermiers savent fort bien cela ; aussi font-ils venir chaque année leurs graines de semence d’un-pays voisin, et rarement ils sèment dans un domaine le grain qu'ils y ont recueilli. Les plantes que l’on cultive pour l'agrément de leurs fleurs sont très-sujettes à dégénérer, c’est-à-dire que de doubles elles deviennent simples. On appelle également fleurs doubles celles dont les étamines et les pistils se sont métamorphosés en pétales, et celles qui, appartenant à la famille des composées, se sont couvertes sur leur disque de demi-fleurons au lieu de fleurons. Aussi cette expression manque-t-elle de justesse , et nous ne l’adop- tons que parce qu’un long usage l’a consacrée. Les va- riélés doubles sont évidemment le résultat d’une maladie 450 PHYSIQUE VÉ GÉTALE. occasionée par une surabondance de nourriture. Pour la conserver, il ne s'agira que de choisir ses graines sur les individus les plus doubles qui peuvent en fournir, et de les semer dans une terre contenant autant ou même plus de sucs nutritifs que celle où croissait l'individu porte-graine. Les fleurs doubles semées plusieurs fois de suitedans la terre maigre retournent promptement à leur pe naturel, et perdent ordinairement, au bout de trois ou quatre ans, cette richesse de forme, cette ampleur, et même quelquefois ce brillant coloris, qui les faisaient admirer. Dans un jardin, en sol médiocre, on empêchera la dégénérescence en leur préparant un terrain avec beaucoup d'engrais, en changeant totalement la nature de la terre. On aura aussi le soin de faire venir d’autres graines au moins tous les deux ou trois ans. On s'aperçoit de la dégénérescence des plantes cul- uvées pour leurs feuilles ou leurs tiges, comme par exemple, la nicotiane, le chanvre, la gaude, ete., par le déficit de la récolte et la mauvaise qualité du pro- duit. Les causes peuvent être une mauvaise culture, une terre trop maigre, ou un climat défavorable. On peut faire cesser l'effet des deux premières ; la troisième est sans remède. De bons labours préparatoires, des en- gras consommés, un choix de terrain approprié à Ja plante que l’on veut cultiver, le renouvellement des graines , tels sont les meilleurs moyens que l’on puisse employer. Cependant l'usage que lon fait des tiges de chanvre et de lin, est cause que ces plantes offrent quel- quefois une exception contraire. Dans des sols très-ri- ches en sucs nourriciers , les tiges deviennent très- grosses, ligneuses, et leur écorce endurcie ne fournit qu'une filasse grossière. On doit ,'dans ces circonstances, urer les graines d’un pays où le chanvre produit peu, parce que le climat a altéré ses dimensions ordinaires, le semer très-épais pour forcer les tiges à s’allonger, et le placer dans le terrain le plus sablonneux que l'on CONSERVATION DES PLANTES. 451 pourra trouver. Si les habitans de la partie du départe- ment de l’Ain qui longe la Saône n'employaient annuelle- ment cette méthode et ne tiraient leurs graines des monta- gnes ou de la Haute-Bresse, leur chanvre ne serait propre qu'à la fabrication des câbles de marine, et c’est même ce qui arrive aux eultivateurs qui négligent cette culture. De certaines plantes vivaces, continuellement multi- plices de boutures’, de tubercules, de bulbes, etc., dé- génèrent assez rapidement quand elles se trouvent dans un terrain peu approprié à leur nature. Le vrai moyen de les posséder avec toutes leurs qualités, est de les renou- veler quelquefois par le semis. Une question qui a été jugée, sans être débattue, par un grand nombre de cultivateurs et même par des so- ciétés d'agriculture, est celle de savoir si un végétal multiplié pendant un grand nombre de générations par les moyens que nous venons de dire, dégénère par une espèce d’épuisement de gemmes. Ils regardent la chose comme certaine.Une plante, disent-ils, n'apporte en.nais- sant qu'un certain nombre de germes, nombre prodigieux à la vérité, mais qui cependant doit s’épuiser à la longue. S'ils eussent réfléchi que la philosophie des germes préexistans a été réfutée d'une manière victorieuse par plusieurs hommes de génie, ils eussent au moins mis la chose en délibération. Il n'y a pas plus de germes préexis- tans dans les végétaux que dans les animaux. Le cambium destiné à nourrir toutes les parties d’une plante, peut toujours , quand les circonstances sont favorables, or- ganiser un gemme parfait; et, comme il n’y a point de végétation sans cambium, et que, quelle que soit la petite quantité de celui-ci, il est toujours dans le cas de se réproduire , il s'ensuit que, de quelque manière qu’une plante ait été reproduite, et à quel nombre de généra- tions que l’on veuille supposer sa reproduction, dès qu'elle végète elle contient du cambium et peut se re- produire encore à un nombre sans limite de générations, 452 PHYSIQUE VÉGÉTALE. : Depuis des siècles, on ne multiplie les saules et les peu- pliers d'Italie que de boutures, et l’on ne se plaint pas qu'ils aient dégénérés. Le topinambour, depuis qu’on le cultive en Europe , ne se propage pas de graines, et cependant on ne s’est pas apercu qu'il ait dégénéré ; nous pouvons assurer qu’il en sera de même de la pomme de terre. Nous pensons que s’il était possible de trouver un moyen pour avoir l'historique de nos vignes, on en trouverait qui, depuis la conquête de César, ne se sont multipliées que de boutures ; car, parler à nos cultiva- teurs d’un semis de raisin, est une chose entièrement neuve pour eux , dont la tradition orale ne leur a laissé aucun indice. Cependant il n’en est pas moins vrai que l’on voit des plantes dégénérer assez rapidement par l'effet de la bouture. Cela vient tout simplement de ce que de cer- tains végétaux souffrent plus que d’autres des effets d'une amputation, des chancres qui s’établissent plus ou moins dans la plaie. L’altération qui en résulte de- vient une maladie chronique dans le sujet. Les mêmes causes amenant les mêmes effets à chaque génération, laltération augmente et peut mener quelques individus au rachitisme. Le mal commence toujours à s’aunoncer par l'avortement des graines. Quelques plantes liliacées, la tulipe, par exemple, pour conserver tout l'éclat, toute la bigarrure de ses cou- leurs, a besoin d’être maintenue dans un état constant. d’altération. Si on laisse un ognon dans un terrain subs- tantiel sans le déplanter annuellement, on verra les brillantes panaches de la fleur s’eflacer graduellement et disparaître tout-à-fait au bout de quatre ou cinq ans. Veut-on empêcher cette dégénérescence , ou même faire revivre la variété? on arrache lognon, on le laisse se dessécher dans un lieu sec, on le replante dix mois après dans une terre maigre, sablonneuse, sèche, ne lui fournissant que l'humidité strictement nécessaire à la CONSERVATION DES PLANTES. 453 végétation ; l’ognon s’altère de nouveau , et les vives couleurs de sa corolle reparaissent aussi vite qu’elles s'étaient effacées. Quelques plantes à racines tuberculeuses dégénèrent quelquefois sans qu'on puisse en trouver une autre cause qu'une espèce de fatigue de végétation : telles sont quelques renoncules et anémones. En les conservant une année sans les replanter, elles reprennent toute leur beauté. 20 Dégénérescence des plantes ligneuses. Si l'on suit avec attention la dégénérescence des arbres, on fera des remarques si singulières que l’on finira par douter de la réalité de certaines espèces que les botanistes ont cependant crues parfaitement tranchées, et établies sur de bons caractères spécifiques. I s’est passé dans notre éta- blissement de Paris, un fait des plus curieux, qui a fait l’étonnement de tous les naturalistes auxquels nous l'avons fait remarquer, et qui cependant ne nous a sur- pris que médiocrement, parce que des observations précé- dentes nous y avaient pour ainsi dire déjà accoutumés. Le voici : J'avais planté dans mon jardin de Paris, rue du Faubourg-Saint-Jacques, divers sujets provenant de se- mis de l’érable de Montpellier. Ils avaient tous les ca- ractères de l'espèce bien développés. A la troisième année , quelques sujets donnèrent des feuilles d’une dimension plus ample, et enfin à la cinquième année, la métamorphose fut complète : ces arbres, aujour- d’hui, n'ofirent que très-peu de différence avec le syco- more ou pseudo -platanus de Linnée. Les robiniers offrent aussi, par le semis, des phénomènes très-extra- ordinaires. J'avais déja observé quelques faits analogues à celui-ci, mais jamais aussi frappans. Les arbres sont plus que tous les autres végétaux sou- mis à l'empire du climat. Quels que soient les soins que l'on en prenne, on n'empêchera jamais la dégénéres- cence d’un arbre des montagnes du nord transporté dans 454 PHYSIQUE VÉGÉTALE.. les plaines du midi, et les guirlandes de vignes qui pa- rent les branches du chêne-liége et de l'olivier dans le midi de la France, ne se méleront jamais aux branches des bouleaux et de pins qui peuplent les forêts de l'Écosse. Cependant la vigne peut résister aux froids de l'Écosse, mais elle y vivra toujours dans un état de dégénéres- cence sans remède ; car, comme nous l'avons déjà dit, nous ne croyons pas qu'un végétal puisse s’acclimater, malgré les belles phrases dont des cultivateurs de eabi- net ont enrichi nos bibliothèques. Chaque plante a recu de la nature une organisation particulière qui la con- damne à ne jamais ouvrir ses fleurs qu’à la température de son pays natal. Celles qui ont échappé à cette loi géné- rale se naturalisent, mais ne s’acclimatent pas, puis- qu'elles n’en ont pas besoin, l’étant déjà par avance. Une exposition contraire, quoique dans le même jar- din, suflit pour faire dégénérer un arbre. Si vous plan- tez à une exposition chaude et abritée un arbre qui aime à sentir Jouer le vent du nord dans ses rameaux, il res- tera contraint pendant toute la durée de son existence, ses branches ne se développeront qu’en partie, ses tiges seront diflormes , son feuillage jaunâtre, ses fleurs seront pour ainsi dire fanées avant d’éclore, et ses fruits tom- beront avant leur maturité; mais replacez-le à une ex- position favorable, les symptômes de dégénérescence disparaîtront aussitôt. Il en sera de même si l’on place à l'exposition du nord un arbre qui exige celle du midi. | Le terrain a aussi une très -grande influence sur la végétation de la plus grande partie des arbres. Les uns le veulent léger, sablonneux, maigre, et ils dégénèrent promptement dans un sol substantiel et riche en sucs nutritifs. Il en est qui ne se plaisent que dans de cer- taines situations , qui croissent néanmoins partout, mais qui refusent de donner leur fruit ailleurs que dans leur zone favorite. L’olivier, par exemple, cesse de fructi- CONSERVATION DES PLANTES. 455 fier et dégénère dès qual se trouve éloigné à plus de vingt-cinq ou trente lieues des bords de la mer. L'excès d'humidité ou de sécheresse est aussi une cause puissante de dégénérescence. Jamais on ne réus- sira À avoir «e beaux peupliers, des saules, des aunes, dans un terrain sec et élevé, tandis qu'ils croitront à merveille dans les vallées , sur le bord des ruisseaux , des étangs , etc. Quelques arbrisseaux d'agrément se font remarquer dans les bosquets par les jolis panaches blancs ou jau- nâtres dont leurs feuilles sont chamarées. Ils doivent cette parure à une maladie d’abord accidentelle, mais” que la greffe a perpétuée. Nous croyons que le siége particulier de cette espèce de virus est dans le cam- bium , et nous avons la certitude qu’elle peut se trans- mettre par l'inoculation. Voici sur quel fait nous ap- payons notre opinion. Il -nous est arrivé de grefler en écusson des variétés panachées sur des sujets qui ne l’étaient pas. Au prin- temps suivant nous nousapercümes que l’homme auquel nous avions confié l'exécution de ces greffesles avait fai- tes d’une main mal habile, car les trois quarts au moins étaient manquées et ne poussèrent pas du tout. Néan- moins on continua à donner des soins assidus aux sujets, afin de les disposer à recevoir de nouvelles grefles quand nous jugerions la saison favorable. Lorsqu'ils eurent poussé de nouveaux bourgeons , nous fûmes fort éton- nés de voir que plusieurs de ceux dont les greffes n’a- vaient pas repris n’en avaient pas moins contracté des panachures semblables à celles que nous voulions leur faire produire. Pensant que cette observation, si elle se vérifiait par de nouveaux faits, pourrait jeter de nou- veaux Jours dans les études physiologiques, nous réso- Iûmes de tenter l’inoculation sur plusieurs sujets. En conséquence , lors du moment de la plus grande sève , nous enlevâmes des écussons sans gemmes sur des indi- 456 PHYSIQUE VÉCÉTALE. : vidus à feuilles panachées de blanc et sur d’autres pa- nachés de jaune. Nous fimes sur les sujets des incisions en croix; nous y placämes deux de ces écussons, un d’un côté de la tige et l’autre du côté opposé; nous rap- prochâmes les bords de la plaie et nous fimes une liga- ture comme pour une grefle ordinaire, mais nous ajou- tâmes la précaution de recouvrir le tout avec de la cire à greffer, afin d’intercepter rigoureusement tout contact avec l’air. Nous coupâmes, au printemps suivant, la tête des sujets à trois ou quatre pouces au-dessus de la place où nous avions opéré l’inoculation, et nous eûmes la sa- tisfaction de voir plusieurs de nos sujets produire des feuilles panachées dans les couleurs blanches ou jaunes que nous avions déterminées pour chacun. Cependant nous ne pensons pas qu'on puisse Jamais tirer parti de cette expérience pour la multiplication des variétés pa- nachées, par la raison que les panachures sont toujours plus ou moins diminuées en nombre et en grandeur, outre que les chances de succès ne peuvent être aussi sûres que par le moyen de la grefle. Mais puisque, comme nous l’avons'dit, ces agréables bigarrures de couleur ne sont que le résultat d’une mala- die, il en résulte que la nature fait continuellement des eflorts pour l’éteindre, et que, pour peu qu’une variété à feuilles panachées se trouve dans une position favora- ble, son feuillage reprendra une teinte uniforme. Pour l'empêcher de dégénérer, il faut donc avoir le soin de la placer dans un terrain médiocre où même maigre, sans engrais, de ne pas lui donner beaucoup d’arrose- ment, et enfin de ne la multiplier que par la grefle, parce que ce mode de multiplication altère toujours plus ou moins le sujet. Les arbrisseaux à fleurs doubles, et particulièrement les rosiers, sont très-sujets à dégénérer. Je puis aflirmer avoir vu des variétés fleurir chez moi pendant plusieurs années d’une manière uniforme; puis tout à coup , et CONSERVATION DES PLANTES. 457 sans avoir pu me rendre toujours compte des causes, je les ai vu passer dans une variété plus ou moins analo- oue, mais offrant des caractères tout-à-fait tranchans. C'est ainsi qu'une mousseuse, plantée depuis cinq ans dans mon établissement de Fontenay -aux-Roses, n'a donné des roses mousseuses pendant les deux premières années ; la Lroisième, elle a donné des mousseuses par- faites, d’autres qui étaient mousseuses d’un côté du ca- lice et glabres de l’autre, une troisième sorte dont les folioles calicinales étaient symétriquement mousseuses dans la moitié de leur largeur, et parfaitement glabres de l’autre côté. L'année suivante les calices complétement mousseux avaient entièrement disparu. Et enfin, cette année (1826), les calices étaient tous entièrement glabres, de manière que ma rose mousseuse de 1822 est aujour- d’hui la rose non mousseuse connue sous lenom deRose & cent feuilles, avec cette différence cependant que la rose a perdu de son coloris, et que le feuillage d’un vert foncé qu'il était avant cette dégénérescence , est devenu d’un vert glauque. Les variétés à feuilles de laitue, à feuilles de chanvre, et à feuilles bipinnées, sont aussi très-sujettes à des métamorphoses. On ne peut guère empêcher la dé- générescence de quelques rosiers dans une collection nombreuse, mais il est facile de conserver ceux auxquels on veut donner des soins. Il ne s’agit que de les renouve- ler tous les trois ou quatre ans par le moyen de la greffe. Quant aux autres arbrisseaux à fleurs remarquables, -on observera que c’est particulièrement la vieillesse et les mauvais terrains qui les conduisent à la dégénéres- cence. Aussi, en les cultivant en terre substantielle et amendée tous les deux ou trois ans avec une quantité suflisante d'engrais consommés et appropriés à leur na- ture, surtout en les renouvelant souvent par la bouture, la greffe ou la marcotte, on est à peu près sûr, si du reste. le climat leur convient, de les conserver dans toute leur beauté. qe 30 458 : PHYSIQUE VÉGÉTALE. Les arbres fruitiers dégénèrent aussi très-facilement en raison du sol et de l'exposition. Entre mille exemples nous citerons celui de la crassane. Il n’est personne qui ne sache parfaitement que cette poire, cueillie sur un arbre planté à bonne exposition dans un terrain sec, léger, chaud et substantiel, est un fruit délicieux. Si, au contraire , le poirier est à mauvaise exposition, dans un terrain gras, argileux et humide, le fruit est pier- reux, âpre, et parfois détestable au point de ne pouvoir étre mangé cru. Quoique dans les autres fruits cette dif- férence de qualité ne soit pas aussi sensible, elle est tou- jours remarquable, et je puis assurer que l’on ne me trompera pas, en me faisant goûter un fruit, sur l’expo- sition et la nature du terrain dans lequel l'arbre qui l'a produit se trouve placé. li est encore beaucoup d’au- tres causes qui peuvent conduire un arbre fruitier à la dégénérescence ; mais en lui donnant une exposition et un terrain appropriés à sa nature, les labours et la taille peuvent parer à tout. IL est remarquable que les arbres et arbrisseaux à fruits en baie , comme par exemple les groseilliers, les framboisiers, les müriers, les broussonnetiers, etc. , dé- génèrent toujours en vieillissant, sous le rapport de la grosseur et de la qualité de leur fruit. Cette observation est surtout très-facile à faire sur les groseiiliers à maque- reau. Il parait que la première cause en vient de ce que ces végétaux usent promptement le terrain dans lequel ils croissent. Le moyen infaillible d'empécher leur dé- générescence est de les renouveler le plus souvent pos- sible, sans cependant le faire assez souvent pourse priver dé leur récolte ; de les changer de terrain chaque fois qu'on les renouvelle, et enfin de les soumettre à une taille courte et périodique. Ceci doit s’entendre des ar- brisseaux seulement, car les arbres mettant un certain nombre d'années à devenir adultes, et s’'emparant d’un grand espace de terrain , il serait difficile de suivre cette / CONSERVATION DES PLANTES. 459 marche. On se contente donc de les rapprocher jusque sur leur tronc tous les sept à huit ans , et de les renouve- ler ainsi en partie. C’est aussi ce qu'on fait généralement dans tous les pays où on élève des vers à soie, non pas pour obtenir des fruits meilleurs et plus gros, mais des feuilles plus tendres, plus larges, et d’une qualité beau- coup supérieure à celles qui se développent sur de vieil- les branches. On peut conclure de tout ce que nous venons de dire, que les moyens généraux les plus efficaces pour empé- cher la dégénérescence des variétés, consiste à les re- nouveler le plus souvent possible; et que ceux de lem- pêcher dans les espèces , c’est de leur donner toujours un terrain convenable à leur nature et une exposition fa- vorable. Des variétés. Il ne suffit pas au jardinier intelligent de savoir con- server Jes variétés qu'il possède, il faut encore qu’il ap- prenne à payer son tribut à l'utilité publique en en créant de nouvelles. Il n'est pour cela qu'un moyen, c’est celui du semis. Nous devons relever ici une erreur assez généralement répandue, celle qui a fait croire que les fruits pou- vaient être dénaturés par l'opération de la greffe au point de changer de forme, de saveur, de volame, de ma- nière à devenir des variétés nouvelles. Des auteurs, d’ail- leurs estimables, disent qu'en exécutant la greffe sur greffe, c’est-à-dire en plaçant plusieurs greffes les unes sur les autres, on parvient à ce but. Ce qu'il y a de vrai, c’est que la greffe fixe les varié- tés , les améliore peut-être un peu, mais ne les change pas. S'il s’agit d'obtenir des fruits nouveaux en poiriers et pommiers, en pêchers, prumiers , cerisiers, etc. , il faut semer. On choisit les plus beaux fruits pour en récolter 460. __ PHYSIQUE VÉGÉTALES la graine, afin de se donner un plus grand nombre de chances favorables ; on sème, et l’on conduit les jeunes sujets comme pour une pépinière ordinaire. Mais si l'on était obligé d'attendre l’époque où ces arbres donnent naturellement leurs fruits afin de juger des gains que l'on aurait faits, la vie d’un homme ne suflirait pas pour répéter deux ou trois fois cette opération, outre qu'il faudrait occuper un terrain immense pour n'obtenir, quelquefois au bout d’un très - grand nombre d'années, qu'un résultat peu important, car on n'est pas tou- jours heureux. Pour obvier à ceci, aussitôt que les sujets ont deux ou trois ans, on les visite les uns après les autres avec une-attention scrupuleuse , afin de re- connaître ceux dont le bois, le feuillage et le port se ressemblent ; car il serait inutile d'en conserver plu- sieurs de la même variété. Sur un semis de trois ou qua- tre mille sujets, un jardinier accoutumé à saisir les ca- ractères, même les plus légers, sera fort heureux sil lui reste trente ou quarante sujets à conserver. Les autres, néanmoins, ne sont pas perdus , puisqu'on s’en sert pour recevoir les greffes des anciennes variétés. Un hômme ayant acquis par une longue habitude ‘un tact assez sûr pour reconnaitre encore parmi ces trente où quarante individus choisis, ceux qui doivent reproduire des variétés déjà connues, s’évitera par-la des soins inutiles en les mettant à la réforme. En août, on grefléra en écusson , sur toutes les bran- ches d’une vieille quenouille fixée sur sujet coignassier, des échantillons de jeunes poiriers; on fera la même opération sur paradis pour les pommiers , et sur le ceri- sier Sainte-Lucie pour les cerisiers. Les pêchers et abri- couers seront greflés de la même manière, mais sur de vieux espaliers. Quant aux pruniers on les greflera sur la cerisette. Nous n'avons pas besoin de dire qu'à mesure qu'on prendra une greffe on numérotera le sujet, et que l'on attachera le même numéro sur la branche de la que- CONSERVATION DES PLANTES. 461 nouille ou de Pespalier que lon aura grelfé. Au printemps suivant on rabattra ces branches jusque sur Ia grefle, et “lorsque le bourgeon se développera on le dirigera par la taille ordinaire à ces formes d'arbres. Dès la seconde année, quelques-uns donneront leurs fruits, et l’on pére juger des résultats obtenus ; tous auront fructifié au plus tard la cinquième année. Par ce moyen on pourra faire des recherches immenses sans occuper un trop grand espace de terrain, et les produits récompenseront toujours les soins et les dépenses que nécessite ce genre de culture. Si par hasard les premiers fruits n'étaient pas d’une qualité supérieure , il ne faudrait pas encore se décourager , parce qu’une seconde greffe et une culture spéciale les amélioreraient infailliblement. Lorsqu'on n’est gêné ni par le nombre des individus que l’on peut destiner à ces sortes de greffes, ni par le terrain , on peut obtenir des résultats plus prompts et plus efficaces par le moyen que nous allons indiquer, et que nous faisons constamment pratiquer dans nos établissemens. Nous greffons sur de jeunes sujets analogues aux gen- res desquels découlent les variétés qui semblent nous donner des espérances; les grefles reprises, lorsque la végétation parait se développer avec force, nous fixons au pied de l'arbre un tuteur dans une direction oblique à la pente d’environ quarante-cinq degrés. Si la végéta- tion ne paraît pas devoir s’altérer assez promptement, nous lui donnons une direction horizontale, et à la deuxième ou troisième année on sera à même de juger des résultats de la fructification. Les variétés de plantes à fleurs d’ornemens s’obtien- nent comme nous l'avons dit à l’article de leur dégéné- rescence. Nous ajouterons ici, qu'il ne faut pas se dé- courager d'en semer, quand même on n'obtiendrait pas d’abord des résultats bien satisfaisans, car il faut quelquefois plusieurs années de semis des mêmes grai- nes pour les amener par degré à donner des produits. 462 PHYSIQUE VÉGÉTALE. différens de leur type. Nous en avons fait l'expérience d’une manière singulière. Dès que nous vimes les pre- miers dahlia qui se répandirent en France , nous conjec- turâmes que cette plante devait devenir un jour très-in- téressante pour les amateurs de collections , à cause des belles variétés qu’ellenoussemblait propre à produire. En conséquence, dès ce premier temps nous commençâmes à faire des semis considérables; mais pendant les dixpre- mières années nous n’obtinmes que des fleurs simples, et cependant quelques personnes en avaient déjà obtenu quelques belles variétés doubles. Nous attribuons ce suc- cès à ce que, sans doute, leurs porte-graines s'étaient déjà multipliés plusieurs fois dans les jardins par la voie du semis. Nous commencions à désespérer d'obtenir jamais un résultat satisfaisant , lorsque tout à coup nos semis nous donnèrent des dahlia doubles de la plus grande beauté et avec profusion. Les variétés à feuilles panachées, de plantes vivaces, d'arbres et d’arbrisseaux, ne sont jamais que le produit du hasard; jusqu’à présent l’art n’a pu encore rien pro- duire de semblable, mais c’est à lui que l’on doit les moyens de fixer ces accidens singuliers et de les propa- ger. Quand le hasard présente sur un végétal ou seule- ment sur une de ces parties, une anomalie constitution nelle, on s'empare du rameau sur lequel elle est plus apparente; on le greffe en fente ou en écusson, et on ob- tient ainsi un individu entier dans lequel cette maladie est à jamais fixée. On n’a pas employé d’autres moyens pour créer toutes les variétés à feuilles panachées, à bois comprimé, à fleurs prolifères, etc. Les hybrides sont, au contraire, des variétés entiè- rement dues à l’art, et même que la nature semble très- souvent réprouver, car beaucoup sontstériles et peuvent être comparées aux mulets provenus dé l’accouplement de deux espèces différentes dans les animaux. On pos- sède atijourd’hui des variétés hybrides charmantes , ré CONSERVATION DES PLANTES. 463 sultant de la fécondation artificielle de deux espèces voisines, par exemple, des crinum avec des amaryllis, des ixia avec des glayeuls, ete. On pourrait même ob- tenir des résultats avantageux à la perfection des fruits par le moyen de l’hybridisme. Nous avons pu en juger nous-mêmes par un fait. Il y a deux ans qu'un arbre a fructifié pour la première fois dans notre établissement de Paris; nous F'avons obtenu d’un noyau de prune fécondé par un abricotier. Comme il a le port et le feuillage du prunier, jusqu'à sa fructification, nous avons cru nos espérances décues ; mais enfin nous avons eu la satisfaction d'obtenir un résultat qui, s’il n'est pas très-avantageux sous le rapport de notre nouvelle va- riété, l’est au moins sous celui de la science, et doit en- courager à faire de nouvelles recherches. Notre prune- abricot tient de sa mère qui était un myrobolan par sa grosseur et sa forme; sa peau est veloutée comme celle d’un abricot, et son noyau est aussi absolument sembla- ble. Sa couleur est d’un violet assez foncé et sa saveur tient le milieu entre celle de la prune et de l’abricot. C'est par l’hybridisme que lon à obtenu dans ces dernières années un nombre si considérable de variétés de roses. Les espèces sont aujourd’hui tellement mé- lées, confondues, par le mélange continuel dés pous- sitres fécondantes , qu’il est impossible au plus habile botaniste de pouvoir aflirmer de bonne foi que telle va- riété qu'on lui présente appartient à tel ou tel autre type. Il y a plus, les types eux-mêmes ont tellement varié , que peut-être serait-il sage aujourd’hui de re- tomber dans l’opinion de Linnée , et de n’admettre que cinq ou six espèces de rosiers. [l y a trois manières d'opérer la fécondation artifi- cielle ; nous allons les enseigner’toutes les trois. 1° Quand il s’agit de deux espèces dont les analogies sont un peu éloignées , il faut opérer par la castration. On saisit l'instant où la fleur s'ouvre, et avant l’anthère 464 . PHYSIQUE VÉGÉTALE. (c'est-à-dire avant que les loges des anthères s'ouvrent}, on prend des ciseaux à pointes longues et fines, et l’on coupe toutes les anthères à leur point d'attache avec leur filament. On a un pinceau de poils très-doux et surtout trés-secs, avec lequel on va ramasser le pollen sur la plante que l’on veut croiser avec celle-ci. On rapporte cetie poussière sur les stigmates de la fleur qui a subi la castration, et avec l'extrême précaution de ne pas les froisser. Cette opération se renouvelle huit à dix fois par Jour pendant la floraison, ou au mois jusqu’à ce qu'on soit sûr que le fruit est noué. 2e Quelques plantes ont les fleurs tellement petites, ramassées et nombreuses, qu'il serait très-diflicile, peut- être même impossible de leur faire subir lopération que nous venons de dire. On se contente alors de pren- dre des rameaux fleuris de l’autre végétal et d’en venir secouer le pollen sur les stigmates de celui-ci plusieurs fois par jour.On laisse même les bouquetsde celle qui doit servir de mâle se dessécher jusqu’à un certain point sur ceux de celle qui doit porter la graine, Cette méthode est moins sûre que la précédente, cependant ses résul- tats sont souvent heureux. d 3° La troisième méthode est la plus employée, parce qu'elle exige moins de précautions ; elle consiste tout simplement à entreméler les plantes de variétés diffé- rentes et à les rapprocher les unes des autres; de ma- nière à ce que leurs rameaux fleuris s’entre-croisent. À mesure de la floraison, on a le soin d’agiter de temps en temps les rameaux, afin de faire voler le pollen et de le faire tomber des fleurs d'une variété sur les fleurs d’une autre variété. Nous observerons que la fécondation artificielle n’agit et ne peut agir que sur l’embryon naissant sous la der- nitre enveloppe d’une graine, qu'ainsi donc elle ne peut nullement influer ni sur la forme, ni sur la saveur du péricarpe, ou, si l’on aime mieux, du fruit. Elle n'in: CONSERVATION DES PLANTES. 405 flue donc que sur la génération à venir. Nous avons été fort étonnés de voir une société savante mettre en pro- posilion cette question, qui ne peut en être une pour l’homme qui a la plus légère teinture de physiologie vé- gétale. Culture générale. Sous ce titre nous comprendrons tout ce qui a rap- port aux soins généraux à donner aux végétaux pour maintenir la vigueur de leur végétation, favoriser la quantité de-leur produit, et enfin assurer leur conser- vation. Section Ie. De la transplantation. Cette opération est une des plus essentielles, qui de- mande le plus de soins et de précautions, et cependant nous devons le dire, c'est une de celles dont le commun des jardiniers s'occupe le moins. Avant de penser à déplanter un arbre, il faut d’abord choisir avec discernement ia place qu'il doit occuper. Nous ne devons traiter ici que du choix à faire de la qualité du terrain ; car, quant à ce qui regarde l’expo- sition et l'effet d'optique, nous en avons traité ailleurs, pages 130 et 137 de ce volume. Tous les végétaux ligneux ont des racines pivotantes ou tracantes , et c'est la pre- mière chose à prendre en considération. Il est clair qu’un arbre dont la racine s'enfonce verticalement dans la terre ne réussira que dans un sol très - profond et qui aura été préalablement défoncé de trois ou quatre pieds. Par la même raison, celui dont les racines sont tracantes se contentera d’un lit de terre végétale de dix- huit pouces à deux pieds, plus ou moins, selon la force qu'il doit acquérir. Nous ferons remarquer une chose, c’est que les arbres sont tellement sensibles à leurs ha- bitudes sous ce rapport, que telle espèce qui croît très- bien dans une couche de six ou huit pouces de terre 466 PHYSIQUE VÉGÉTALE.: cesse de prospérer quand elle est plus profonde. Ceci cependant doit paraître singulier et mérite explication. Toute racine tracante est appelée à courir entre deux terres par un besoin tenant à son organisation. Ayant plus d’analogie avec les tiges que les racines pivotantes, et ceci se prouve aisément par la facilité qu’elles ont à émettre des rameaux, il leur faut aussi une plus grande quantité d'air, et voilà ce qui les retient près de la sur- face de la terre. Or, si le sol se trouve composé d’un humus végétal très - profond, les racines, attirées par l'humidité et par une nourriture abondante, s’y enfon- ceront plus que de coutume. L'arbre, dans le principe, végétera avec vigueur ; mais bientôt les racines, alté- rées par le défaut de quantité d'air qui leur est né- cessaire, rempliront mal leurs fonctions, ne renverront à la tige que des sucs mal élaborés; la végétation di- minuera peu à peu de vigueur, finira par s'arrêter tout= à-fait, et l'arbre tombera dans le rachitisme. IL est aussi très-essentiel de préparer le terrain d’a- vance à recevoir les sujets. Pour les plantes potagères ou d'agrément, et même pour de petits arbustes, on peut se contenter d’un labour plus ou moins profond, selon que ces végétaux sont plus ou moins pivotans. Quand il s’agit de planter un arbre, il faut que le terrain soit défoncé à une profondeur calculée avec in- telligence sur la nature de ses racines. On prépare un trou pour le recevoir, et il est essentiel, dans Les ter- rains forts et compactes, que ce trou ne soil pas plus profond que le défoncage du terrain environnant. Comme ceci doit paraître singulier, même aux jardiniers prati- ciens, expliquons-nous. Nous n’entendons pas dire que l'on doive restreindre la profondeur du trou à celle du défonçage, mais bien calculer celui-ci sur la profondeur du trou. Si l’on agissait différemment, les eaux de pluie s'amasseraient au pied de l'arbre, rempliraient la fosse, y séjourneraient et y croupiraient, faute de pouvoir s’en CONSERVATION DES PLANTES. 467 échapper par ses parois trop serrées peus leur livrer pas- sage. Celles mêmes qui filtreraient à travers le terrain miné des environs s’y rendraient comme dans un vase. Les racines peu vigoureuses de l'arbre nouvellement planté, loin de produire du chevelu, pourriraient et détermineraient la perte du sujet. Dans les terrains Ié- gers, secs et poreux , cette précaution est moins essen- üelle; mais l'on ne peut guère s'en dispenser que dans les on tout-à-fait sablonneuses , ou sur les côteaux rocailleux et offrant une pente rapide. Le trou doit être large et profond en raison de la gros- seur ordinaire à l'espèce que l'on doit planter. Deux pieds de largeur sur autant de profondeur, sont, selon nous, le minimum des dimensions que l’on peut lui donner, même pour une quenouille sur cognassier et un paradis. Dans un terrain de qualité ordinaire, on peut réduire le maximum à quatre pieds de largeur sur autant de profondeur, à moins qu’on ne veuille planter un sujet tout formé, auquel cas on doit proportionner le trou au volume des racines, et s'arranger de manière à ce quil reste au moins un pied d'espace vide à rem plir autour des parois. Il faut au moins cette quantité de terre préparée autour des racines, afin de favoriser l’é- mission de leur nouveau chevelu. On peut quelquefois se trouver dans des circonstances telles qu’on doive faire des trous beaucoup plus grands _que les dimensions indiquées, pour assurer le succès d’une plantation. Il est de certains terrains, par exemple, les tufs, les sables crus, les galets, etc., dans lesquels toutes les espèces d'arbres refusent opiniâtrément de croître. Îl en est d’auires que des qualités chimiques -parüculières rendent propres à la végétation de certaines espèces , tandis que d’autres espèces n’y réussissent ja- mais. Avant de commencer une plantation dans des con- irées qui offrent ces particularités , 1l faut s'assurer que le vice provient du terrain et non du climat, car s'il en 468 PHYSIQUE VÉCGÉTALE. était autrement, Les frais que l’on pourrait faire risque- rent beaucoup d’être perdus. On a deux manières d’opérer dans le cas que nous venons d'indiquer. On fait creuser un trou de cinq ou six pieds de largeur et de profondeur pour le minimum, etplus grand si l’arbreà planterestdepremière dimension. On remplit ce trou avec une terre convenablement pré- parée, ou amenée d’un autre lieu, et Fon plante dans ce sol rapporté. Le sujet réussit très-bien dans cette espèce d’encaissement , s’il est assez grand pour que ses racines n'aient pas besoin d’en sortir au moins pendant les dix ou douze premières années. Mais si elles. sont obligées d'aller plutôt chercher en dehors une nourriture qui a cessé d’être assez abondante dans leur sol artificiel, le tempérament de l'arbre se détériore avant l’âge adulte, et Le jeune sujet tombe d’abord dans la langueur, puis dans le rachitisme. La seconde manière et la meilleure, consiste à creuser une tranchée profonde de einq ou six pieds , large d’au- tant, et de toute la longueur que doit avoir la planta- tion. On la remplit de terre rapportée et appropriée à la nature de larbre. Si le terrain est en pente, les tran- chées s’ouvriront dans le sens de la pente, afin de faci- liter l'écoulement des eaux. On est quelquefois obligé pour exécuter ces deux opérations, d’éclater des rochers, de faire jouer la mine, et d'employer tous les moyens dispendieux ordinaires aux grands déplacemens de terre; aussi ne doit-on se déterminer à faire une planta- on dans un sol stérile, que lorsque l’on a parfaitement calculé Ia dépense et ses facultés. Dans les terrains humides, sujets à retenir l’eau stag- nante, 11 ne faut pas penser à faire une plantation d’ar- bres fruitiers, avant de les avoir préparés à la recevoir en employant tous les moyens d'usage pour les assainir. On ouvre des tranchées au fond desquelles on construit ces canaux maconnés en pierres sèches et couverts en CONSERVATION DES PLANTES. 469 pierres plates; on les recouvre de terre, et l’eau qui s’y rend de toutes parts trouve un facile écoulement. Les ca- naux doivent être d'autant plus nombreux et rapprochés les uns des autres que le terrain est plus humide et plus compacte. On mine et on fait les trous dans les principes que nous avons enseignés plus haut. Nous n'avons pas besoin de dire ici, que le terrain doit être convenablement amendeé et préparé, ni de ré- péter ce que nous avons dit dans l’article des terres, des engrais et des travaux préparatoires. Voyez pour cela le tome premier , pages 137 et suivantes. 1° Transplantation des végétaux ligneux. Le mo- ment de planter les arbrisseaux et les arbres peut varier selon la température de la saison et selon le plus ou moins d'humidité du terrain. Aussitôt qu'un arbre est défeuillé et que la végétation est entièrement cessée, ce qui arrive quelquefois dès le mois d'octobre, on peut commencer les plantations et les continuer jusqu'à ce que la végétation reparaisse, c’est-à-dire jusqu’en avril et même au commencement de mai, si la saison est fa- vorable. On profite pour cela de tous les instans où la terre n’est pas gelée ou trop mouillée. Dans les terrains naturellement secset légers, les plantations d’automne se ront toujours les meilleures, parce que les racines ne cour- ront pas la chance de pourrir par l’ellet des eaux stag- nantes; elles travailleront pendant l'hiver, acquerront du chevelu, et la végétation en sera plus vigoureuse au printemps. Dansles terrains humides, on agira d’une ma- nière opposée, pour les raisons contraires, et l'on pourra même retarder la plantation jusqu'aux premiers Jours de mai. Ceci doit s'entendre, non-seulement des végétaux Hgneux , mais encore des plantes vivaces. Passons à la manière de déplanter les sujets et de les préparer à la transplantation. On peut se trouver quelquefois dans le cas de trans- planter un arbre gros et formé. Voici comment on agit 470 PHYSIQUE VÉGÉTALE. pour réussir à le faire reprendre. Une année d’avance et en automne, on découvre les grosses racines et on les coupe à deux pieds du collet avec une scie à main, et avec la précaution de ne pas trop les ébranler. Avant cette opération, nous supposons que l’on a rapproché quel- ques grosses branches de la tête pour ne pas trop dé- truire l'équilibre de la végétation. On soigné l'arbre plus que dans aucun autre temps par des binages, des engrais consommés , et même des arrosemens, si les saisons sont généralement sèches pendant le cours de l’année où il reste en place dans cet état; la nature fait un effort pour sa conservation, et un chevelu vigoureux et touflu se forme à son collet et sur les espèces de chicots de racines qui lui restent. L’année suivante, à une époque favorable pour la végétation, on ouvre une tranchée autour des ra- cines qu’on a ménagées, on prend le soin de lui laisser une motte de trois à quatre pieds de diamètre, dans la- quelle se trouve étendu son nouveau chevelu. Si la terre est extrêmement légère, on a soin de la soutenir autour de ses racines avec des morceaux de planches, ou par d’autres moyens que les circonstances indiqueront, jus- qu'à ce qu'il soit entièrement détaché du sol. Alors on l'enlève par quelques moyens mécaniques, on le trans- porte jusqu’à la place qu'il doit occuper ; on répand dans le trou qui lui a été préparé une quantité suffisante de terre amendée et convenable à sa nature; on l'y place, toujours en ménageant beaucoup sa motte de terre; on l'oriente absolument comme il l'était avant, c’est-à-dire que l’on tourne au midi les parties qui regardaient ce point de l'horizon. On remplit le trou de la même terre que l’on a soin de comprimer autour de ses racines afin de le fixer solidement et de le mettre dans le cas de braver l'effort des vents. Si la sécheresse des saisons l'exige, on arrose , et l’on donne les autres soins ordinaires. Nous devons dire que cette méthode ingénieuse a été nouvel- CONSERVATION DES PLANTES. 41 lement inventée en Écosse, et nous a été communiquée par la société horticulturale de Londres. Dans les cas ordinaires on doit déplanter les jeunes sujets et non pas les arracher comme le disent les jardi- niers. Cette opération doit se faire avec la bêche que l'on enfonce au-dessous des plus profondes racines, afin de les soulever avec la terre qui les environne et dont on ne les débarrassera que dans le cas où on doit faire voya- ger le jeune végétal. Autant qu'on le pourra, on ne por- tera pas la serpette sur ses racines, et encore moins sur son chevelu, sous le vain prétexte de les rafraîchir. On sait que la terre ne transmet sa nourriture à une plante que par l'extrémité des fibres radicales, qui est à cet effetmunie d’un sucoir ou bouche absorbante;touteautre partie de la racine ne peut rien transmettre à la tige avant qu'elle n’ait émis de chevelu. Si on avait été obligé d’enbriser quelques-unes trop profondes, il faudrait ra- fraîchir la plaie en coupant le plus net possible. On doit amputer aussi toutes les parties attaquées de pourri- ture , moisies ou malades; mais tout le reste doit être très-scrupuleusement ménagé. Nous devons surtout pré- munir les cultivateurs contre la funeste habitude qu’ils ont de couper le pivot des jeunes arbres dans toutes les circonstances. Cette opération, qui altère toujours plus ou moins un arbre , peut avoir quelquefois un but d’uti- hté , mais c’est seulement quand on plante dans un ter- rain peu profond un arbre d’une nature pivotante, ou quand on veut l'arrêter dans son développement natu- rel, et le réduire à l’état de nain. Si par une de ces causes on avait été forcé à retran- cher quelques racines d'un végétal, il faudrait, pour rétablir l'équilibre de la sève, lui retrancher aussi quel- ques branches. Il est entendu qu'on n'amputerait que celles mal placées ou diffuses, ou enfin celles qui le dé- formeraient le moins. Le végétal, en cet état, se présente sur le bord du 472 PHYSIQUE VÉGÉTALE. trou préparé, afin d'en remplir le fond de terre, à la hauteur nécessaire. Cette terre du fond se comprime avec les pieds suflisamment pour ne pas s’affaisser par les eaux de pluies et d’arrosemens, mais pas assez pour offrir de la résistance aux fibres naissantes qui doivent la traverser. On pose les racines de l'arbre sur cette terre, et pendant qu'un homme maintient sa tige dans une position verticale, un autre fait glisser une terre très- meuble dans les interstices des racines, et pour qu'elle remplisse tous les vides, de temps à autre on agite dou- cement le sujet de bas en haut, ce qui la fait couler partout où il en est besoin , sans faire prendre de fausses positions aux fibres radicales. Pour fixer le sujet avec solidité, on comprime légèrement la terre autour de son collet, et on la presse davantage à mesure qu'on se rapproche des parois du trou. Généralement on ne doit l’enterrer que jusqu’au col- let ; cependant cette règle offre beaucoup d’exceptions. Il est telle espèce qui veut voir sa racine, comme disent les jardiniers ; telle autre se trouve bien d’être enterrée profondément. On peut donner comme règle ordinaire que les arbres à tissu lâche et mou, reprenant aisément de boutures, ne craignent pas d’être enterrés au-dessus du collet, surtout les individus qui ont été obtenus de boutures. Ceux à fibres sèches, dures et fragiles, veu- lent avoir leur collet toujours découvert , et même quelquefois la base de leurs grosses racines, tels sont, par exemple, les orangers. L'expérience est le seul maitre que l’on doive consulter dans une foule de cir- constances qu'il n'est pas possible de prévoir. Quand un arbre a été transplanté, il lui faut encore des soins pour assurer où au moins pour faciliter sa reprise ; on doit le tenir propre, afin d'éviter que les insectes, les mousses, les moisissures ne l’attaquent, car dans cette première année de langueur, il ne serait pas assez fort pour résister à ces fléaux de la végétation. On l’arrose CONSERVATION DES PLANTES. 473 au besoin, on sarele pour détruire les herbes parasites , ou bien pour ouvrir les pores de la terre, ete. S'il est à haute tige, on lui donne un bon tuteur, sf de 1e main- tenir contre la force des vents, et de redresser sa tige peu à peu, si elle a pris une mauvaise attitude. De temps à autre on visite les liens qui y attachent pour voir s'ils ne forment pas bourrelets sur l'écorce, auquel cas on les desserre et on les change de place. Dès-lors le sujet peut être traité comme nous le disons à larticle de la formation des arbres fruitiers , tome >, page 176. S'il n'était pas d'espèce à être soumis à la taille, on l’aban- donnerait à la nature. Un arbre à haute tige, ou planté dans un verger ou- vert, est exposé à être attaqué par le bétail, soit pour manger son feuillage , soit pour se gratter contre sa tige, ce qui est plus dangereux encore. Pour l’en préserver, on l'entoure d’une espèce de fagot d’épines, ou on lé renferme dans une sorte de petite balustrade carrée, formée de quatre pieux et de quatré perches. 2° Transplantation des plantes herbacées, vivaces ou annuelles. Si l'on opère avec soin, cés végétaux peuvent reprendre dans toutes les saisons. Éepetiits pour les plantes vivaces, dont nous allons d’abord nous occuper, le printemps, dans les terres humides, et l’au- tomne, dans celles qui sont chaudes et'sèches, sont les saisons les plus favorables. Les plantes vivaces ; soit qu'on les aït obtenues d’é- clat, de marcotte ; où de semis, se plantent avec les mêmes précautions que nous avons indiquéés pour les arbres. On doit également préparer un trou pour Îles recevoir, y étendre leurs racinés À l’aise; lés recouvrir d'une terre fine et meuble, afin qu'ellé puisse s’insinuer aisément dans tous les vides qui se trouvent dans lé che- velu. On la comprime légèrement autour du collet , afin d’afférmir la tige, et l’on donné les'autres'soïins géné- raux. Avec un peu d'adresse et d’atténtion, il'est tou- he 51 44 PHYSIQUE VÉGÉTALEe jours facile d'enlever une plante vivace avec la motte, ce que l’on doit faire autant que possible, afin d’écarter toute chance malheureuse. Toutes les plantes ne reprennent pas également bien lorsqu'on les transplante à racines nues; il en est même qui sont très - sensibles à cette opération. Quand elles sont précieuses, on les abrite pendant quelques jours des rayons du soleil, au moyen de toiles ou paillassons, et même on peut les traiter à la manière des boutures, en les privant d’air au moyen d’une cloche. Nous ne comprendrons pas, dans le chapitre de la transplantation, les méthodes particulières employées pour le gouvernement des plantes bulbeuses et tubé- reuses, parce que chaque espèce exige, pour ainsi dire, des méthodes particulières et spéciales qui seront sufli- samment décrites dans l'histoire des familles, à l’article particulier de chaque espèce. L'opération de transplanter les plantes annuelles prend le nom de repiquage. I n’est jamais déterminé sur la saison, mais bien sur l’état de la plante. Ordinairement c'est lorsqu'elle a développé cinq ou six feuilles que le repiquage à racinés nues se fait avec le moins de chances de perte. Avec une houlette de jardinier, on la soulève doucement de dessus la couche ou de la plate-bande où elle a été semée ; on ménage soigneusement son chevelu délicat, et on y laisse toute la terre qui s’y trouve atta- chée. Avec la même houlette, on fait un trou à la place qu'elle doit occuper , on l'y place, et l’on ramène la terre sur ses racines en la comprimant légèrement au- tour du. collet. … | Mais comme les plantes annuelles sont ordinairement destinées à des bordures, des massifs ou des quinconces, et qu'il faut en planter une grande quantité à la fois, dans Ja crainte de;faire une perte de temps. on ne se donne pas même le peu de soins que nous venonsde dire, et l’on répique au plantoir. Cette méthode est essentiel- CONSERVATION DES PLANTES. {35 lement vicieuse, mais elle est quelquefois indispensable. Le plantoir ou fichet est un outil que nous avons décrit page 194 de ce volume. On s’en sert pour faire des trous aux distances calculées. On tient la tige de la plante de la main gauche, on la place dans le trou, et avec la main droite et le plantoir, on l’y fixe en pressant la terre contre ses racines; On passe à une autre, et ainsi de suite; puis on arrose et tout se borne là. Il arrive parfois qu’on laisse les plantes dans le semis jusqu’à ce qu’elles soient sur le point de fleurir, et qu’a- lors seulement on pense à les enlever pour les trans- porter dans les massifs, à Ja place d’autres plantes dont les fleurs sont passées. Il faut alors nécessairement les enlever avec la motte, opération qui deviendrait fort longue, si l’on n'avait inventé des instrumens qui la- brégent beaucoup. Nous les décrivons, ainsi que la ma- pière de s’en servir, aux articles éransplantoir à tubes, page 193, et éransplantoir à pinces, page 194. 3° Transplantation des plantes en pots. Sous ce titre nous comprendrons ce qu'on appelle en jardinage, l’em- potage, le demi-rempotage et le rempotage. Les plantes que l’on empote, qu’elles soient herbacées , vi- vaces ou ligneuses , exigent les mêmes soins, et se trai- tent de la même manière. La première chose dont on doit s'occuper, c’est de choisir un vase convenable sous le rapport de sa forme et de sa grandeur. Ceci sera dé- veloppé à l'article particulier de chaque plante; lé- cueil que lon doit se proposer d'éviter, c’est que l’eau ne séjourne au fond des vases, et ne fasse pourrir les racines. On pare à cet ne en placant dans le fond du pot quelques gravois, qui empêchent la terre de se mastiquer et de boucher le trou du fond. C'est surtout pour les plantes grasses que cette précaution est indispensable. Il s’agit ensuite de choisir une terre convenable à la culture de chaque espèce. En règle ge- nérale , elle doit être plus légère et plus poreuse que 476 PHYSIQUE VÉGÉTALE. lorsqu'il s’agit de cultiver en pleine terre, parce que: ne recevant les influences atmosphériques que par une surface bornée, il faut qu’elle s’en laisse plus facilement pénétrer ; les eaux de pluie et d’arrosement s’en écoulent aussi plus facilement. Mais surtout ce qui est très- essentiel, c’est qu'elle contienne beaucoup plus de sucs nutritifs, et cela pour deux raisons fort simples : r° les racines se trouvant renfermées dans un espace borné, sont obligées d'en tirer toute la nourriture qu'en pleine terre elles iraient chercher au loin; 2° les eaux d’arrosement lavant sans cesse cette terre, entraînent avec elles une grande partie des sels propres à la végétation. La terre une fois pré- parée , on en remplit le pol jusqu'aux deux tiers de sa hauteur, plus ou moins, selon la place que doivent oc- cuper les racines de la plante ; elle doit être légèrement comprimée, afin de ne pas trop s’aflaisser lors de la pre- mière mouillure. On place le végétal avec le soin de rendre à ses racines leur position naturelle; pendant qu'en le maintient d’une main, de l’autre on répand sur son chevelu une terre très-fine et passée plusieurs fois au crible. On comprime contre les parois dn pot, et on serre un peu contre les racines, mais de manière à ne pas les déplacer ni blesser ; on y remet de nouvelle terre , et ainsi de suite jusqu’à ce que le pot soit plein. Il est à remarquer que le collet de la plante doit étre un peu au-dessus du niveau des bords du vase, afin que lorsque la terre se sera affaissée , la plante ne se trouve pas enfoncée au-dessous de ce niveau. On donne un ar- rosement sufhisant, et si la plante est délicate, on la porte sous un châssis Jusqu'à sa parfaite reprise. L'empotage se fait dans les saisons indiquées pour les plantes ligneuses, vivaces ou annuelles, aux mêmes époques que celles que nous avons indiquées aux para- graphes précédens. Le demi -rempotage doit se faire tous les ans, et CONSERVATION DES PLANTES. 477 quelquefois deux fois par an, suivant l’activité de la vé- gélation. Il consiste à découvrir les racines de la plante, à enlever autant qu'il est possible toute la terre qui peut être remuée sans trop fatiguer le sujet, et à la rempla- cer par une terre plus substantielle. À mesure qu’on la met dans le pot et qu'on la fait glisser entre ses parois et la motte, on la comprime le plus possible en la foulant avec les doigts ou avecle bout arrondi d’un bâton. Cette opération est d’une grande importance, car sans cela les eaux d’arrosement s’imbiberaient dans la nouvelle terre, filtreraient entre le pot et la motte, et les racines ne se trouveraient mouillées qu’à leur extrémité. Le demi- rempotage se fait à l'automne ou au printemps. Pour les plantes de serre, on choisit ordinairement le moment où on les met dehors; mais il est bien préférable d’at- tendre qu’elles soient suflisamment habituées à l'air libre ; par la raison qu’en sortant elles éprouvent un ma- laise que l’on augmenterait en faisant cette opération immédiatement. Le rempotage estune opération qui est indispensable, et qui se fait aux mêmes époques que la précédente, mais à des intervalles beaucoup plus longs. On s'aperçoit qu'une plante a besoin d’être dépotée, lorsque son che- velu forme une perruque épaisse autour des parois du pot, et que ses racines font effort pour passer par le trou du fond. Il est tel végétal qu’on est obligé de dé- poter deux fois par an, et d’autres qui n’ont besoin de cette opération que tous les deux ou trois ans, ou même davantage. En général, plus le vase est petit, plus la terre se délave facilement et plus tôt il faut la changer. Supposons d’abord que l’on ait à faire le rempotage d’un arbre de grande dimension, comme par exemple un oranger occupant une caisse de quatre pieds de lar- geur. Aprèssasortiede l’orangerie,etlorsqu’onluia donné le temps de se rétablir de la privation d’air atmosphé- rique qu'il a éprouvée , on le place sous un pied de chè- 458 PHYSIQUE VÉGÉTALE. vre muni de moufles et de cordages; on enveloppe la ge avec des chiffons et de la paille, afin que les cordes qu'on y attache n'endommagent pas l'écorce. Des hommes s'emparent des extrémités des cordages et enlèvent l’ar- bre à force de bras; dès que la caisse a quitté terre , on frappe doucement de côté et d’autre , et on la tire par en bas jusqu’à ce qu’elle soit détachée de la motte. Alors, avec un instrument tranchant, on coupe la perruque for- mée par les racines, on rapproche toujours en coupant et en détachant la terre jusqu'à ce qu'on soit parvenu aux grosses racines, ce qui n'arrive guère que lorsque la motte est réduite à moitié de son épaisseur et de sa hauteur. On observe de ne laisser aucune racine écor- chée , et que toutes soient coupées net et transversale- ment. Pour réussir complétement, il faut que la terre soit assez sèche pour se maintenir. On s'occupe alors de la caisse que l’on change si on juge qu’elle soit devenue trop petite. On place des plâtras pilés dont on garnit le fond de la caisse pour empêcher le séjour de l’eau ; on recouvre d’un lit de terre préparée, d’une épaisseur égale à celle qu’on a enlevée de dessous la motte, et on Ja comprime pour les raisons que nous avons dites plus haut; au moyen des moufles on remet l'arbre en place; on remplit les vides qui se trouvent entre la caisse et la motte, toujours en comprimant beaucoup la terre, et quand la caisse est pleine l’opération est terminée. Quand il ne s’agit que d’une petite plante. il suflit de renverser le pot, de frapper légèrement sur le fond afin de lui faire abandonner la motte, et le reste s'exécute comme dans le paragraphe précédent. Tout végétal qui vient de subir un rempotage entier, demande, cette année-là , à être taillé très-court, afin de rétablir l'équilibre entre les branches et les racines. Outre cela on doit Jui donner tous les soins ordinaires indiqués pour une plante nouvellement transplantée. Il faut surtout le garantir des rayons du soleil, jusqu’à ce CONSERVATION DES PLANTES. 479 qu'il soit parfaitement rétabli, et si c’est une plante de serre, Jui donner quelques degrés de chaléur de plus qu'à l'ordinaire. Szcriox II. Des arrosemens. Nous avons traité, dans notre physiologie végttale, de l’action de l'humidité sur la germination, et à laru- cle de la nutrition , page 354 , de l’action de l’eau sur la végétation. Nous avons vu que le carbone; Fazote, l'hydrogène et l’oxigéné , étaient le dernier résultat que l'on obtenait de la décomposition des végétaux. L'eau étant un composé de quinze parties d'hydrogène et de quatre vingt-cinq d’oxigène, pourrait done seule, même dans son état de plus grande pureté, fournir des alimens à la végétation. Aussi des expériences ont-elles prouvé qu’une graine pouvait germer, se développer et prendre un certain degré d’accroissement dans de Peau distillée, Seulement la plante s’étiole promptement, parce qu’elle manque de carbone ; par conséquent de solidité. Par Ja décomposition , les végétaux offrent en- core des sels terreux dont les espèces les plus solubles dans l’eau, sont les plus abondantes. Nous concluons de cela, que la meilleure eau pour les arrossemens est celle qui contient le plus de ces principes de nutrition, sur- tout quand elle se trouve mêlée à des détritusde corps animaux etvégétaux qui lui fournissent une certaine quan- tité de carbone et d'azote. Il arrive cependant que lors- que ces deux gaz sont trop abondans , ils peuvent deve- nir nuisibles si on en fait un emploi immodéré., On doit encore conclure de ce que nous venons de dire, que les eaux chargées de matières insolubles, nuisent à la vé- gétation en obstruant les vaisseaux absorbans. Telles sont les eaux séléniteuses , elc. rt L'eau de pluie, approchant jusqu'à un certain point de l’état de pureté, doit être fort bonnèé pour les arro- semens, parce que n'étant point encore saturée elle doit 480 PHYSIQUE YÉGÉTALE. jouir au’ plus haut degré dela faculté de dissoudre les sels terreux!,qui avec elle et charriés par elle, sont propres à pénétrer dans le tissu de Ja plantes ss Les eaux de rivière doivent tenir le second rang, en ce que déjà elles se sont chargées dans leur route des sels nutritifs qu’elles ont pu dissoudre. | Les eaux de puits, comme les eaux de fontaine , peu- vent avoir différentes qualités selon qu'elles approchent plus où moins de l’état de pureté. Les jardiniers disent qu'elles sont crues quand elles sont séléniteuses , et que les Jégumes n’y cuisent pas. Dans ce cas, comme nous lavons dit, elles sont nuisibles à la végétation. Les eaux com posées artificiellement sont les meilleu- res quand on les emploie avec ménagement et intelli- gence. 7 Nous allons donner quelques composilions que l’usage nous’ a appris être les meilleures, maisen recommandant de ne les employer que pour les végétaux malades ou Jañguissans , car elles agissent toujours comme stimu- lans ; elles hâtent la végétation, mais elles finiraient biéntôt par épuiser les plantes si on en abusait. Dans cinq tonneaux, de la contenance d'environ deux c£ht quatre-vingt-dix litres, on place, savoir : dans le “N° x. Fumier de mouton. : un double décalitre. “Ee: Poudrette. ?. 22; qh double décalitre. —13"Colombitie!} 141110 double décalitre. — AB man rl depuitlivres — De Din fs LUE) ONE qérentédhtres: On,achève de remplir avec de l’eau, et on laisse fer- menter pendant trente ou quarante Jours. Si l’on em- pioyait ces compositions de suile, on courrait risque de nuire à quelques racines tendres. Dans de certaines circonstances on fait usage de l’eau de chacune de ces composilions séparément ; dans d’au- tres on les mêle par portions égales dans un autre vase, el CONSERVATION DES PLANTES. 481 on se sert du mélange pour les arrosemens. Je n’em- ploie généralement dans mon établissement ces diverses eaux mélangces que pour des végétaux voraces et de la nature de l’oranger,; il faut observer que ces arrosemens ne peuvent convenir que lorsque les plantes sont à l'air libre. Il ous reste à parler de Ja manière dont doivent se faire les arrosemens. Quant aux instrumens dont on se sert, nous les avous décrits pag. 194 et 195 de ce volume, aux articles Arrosoirs, Seringue, et Pompe à main. Le jardinier doit savoir calculer et le moment d’arro- ser et la quantité d’eau qu'il doit donner à chaque espèce. Telle plante pourrirait par trop d’eau, quand une autre, en en recevant une même quantité, se dessècherait faute d'en avoir assez, On peut établir en principes généraux que les plantes à tige et feuilles succulentes et charnues, sont celles auxquelles:il en faut le moins, et.que les vé- oétaux ligneux, secs, et à fibres serrées, sont ceux qui exigent qu'on leur en donne avec plus de soins. Néan- moins un très-grand nombre de plantes ne peuvent se plier à ce principe; telles sont celles qui croissent dans les terres humides , dans les marais et tout-à-fait dans les eaux. S'il était possible de connaître parfaitement les jocalités naturelles de toutes les plantes que l'on cultive, on en déduirait une série de faits qui seuls pourraient suppléer à une expérience qui coûte des années à ac- quérir. Parce qu’une plante exige beaucoup d’eau, il n’est pas à dire pour cela qu’on doive lui en donner une grande quantité à la fois (à moins que ce ne soit une plante aquatique ), mais seulement qu'on doit réitérer souvent les arrosemens , afin d'entretenir toujours la terre dans, un degré d'humidité suffisant pour maintenir la fermen- tation, mais pas assez fort pour la détruire, ce qui arriverail si on la noyait. Selon les saisons et la température, les arrosemens Â82 PHYSIQUE VÉGÉTALE. doivent se faire à des heures différentes du jour. Au printemps, lorsque les rayons du soleil ont encore peu de force et que les jours sont courts, il faut arroser le matin, afin que la terre ait le temps de se réchauffer. Il est clair que si on arrosait le soir, la fraicheur de la nuit se joignant à celle de l’eau , arréterait les progrès de la végétation. En été, au contraire, on arrosera le soir, parce que l’eau contribuera à entretenir la fraicheur de la terre pendant la nuit, ce qui réparera dans la plante les effets desséchans de la chaleur du jour. Si on arrosait le matin, en fort peu d’instans les rayons ardens du soleil auraient absorbé l'humidité, et l'effet serait à peu près nul. Nous en avons dit assez pour faire con- cevoir aux cultivateurs les raisons qui doivent les dé- terminer dans le choix des heures, pour arroser selon les saisons. Beaucoup de plantes annoncent, par des signes non équivoques, quand elles ont besoin d’eau. Leur feuil- lage pâlit , se penche vers la terre, et le sommet de leur tige fléchit. Mais il ne suffit pas toujours de mouiller leurs raci- nes. Quand la température a été pendant long-temps sèche et brûlante, leurs feuilles ont besoin qu'on leur rende cette humidité salutaire qu’elles ne trouvent plus dans l’atmosphère. On se sert alors d’un arrosoir à pom- me criblée de trous très-petits, pour faire tomber sur leur feuillage les arrosemens en forme de pluie très- fine. Pour les arbres, on emploie la pompe à main, page 195 de ce volume. On fera très-bien aussi, si l’on a de l’eau à discrétion, d’arroser le sol environnant, afin de rendre à Pair une partie de son élasticité, et aux végétaux les vapeurs dont ils font leur nourriture aérienne. L'hygromètre de Réaumur peut, dans ce cas, servir de guide; s’il est entre vingt-cinq et trente degrés, c’est alors qu'il convient de répandre beaucoup d’eau sur le CONSERVATION DES PLANTES. 483 sol environnant. Dans Îles serres chaudes , enété, on en verse à diverses reprises dans les chemins de manière à maintenir l'hygromètre entre vingt et vingt-cinq de- grés. Toutes les fois qu'on mouillera les feuilles, on devra Je faire le soir, lorsque les rayons du soleil auront perdu toute leur force, et pour qu'elles aient le temps de se ressuyer parfaitement pendant la nuit. S'il restait quel- ques gouttes d'eau lorsque le soleil est remonté sur lho- rizon , chacune d'elles produirait l'effet d’un verre con- vexe, brûlerait la partie sur laquelle elle se trouverait, ou au moins y laisserait une tache résultant d’une dé- sorganisation partielle. Les plantes de serres étant toujours en pots, ont be- soin, pendant l'été, d’arrosemens plus soutenus , par la raison que l'évaporation est plus prompte dans un vase qu’en pleine terre. On les ménagera cependant beaucoup l'hiver pour éviter la pourriture. Dans les grandes cha- leurs, quand le thermomètre de Réaumur monte entre vingt-cinq et trente degrés, les mouillures dans les sentiers deviennent insuflisantes: il convient alors;d'é- tablir des courans d'air en ouvrant les portes des deux extrémités, où au moins tous les jours du côté du nord. Du reste, on leur donnera les soins que nous avons dé- taillés à l'article des serres, pages 240 et suivantes. 484 EMBALLAGE CHAPITRE VI. DE L’EMBALLAGE ET DU TRANSPORT DES PLANTES. Nous regardons ce chapitre comme un des plus inté- ressans de l’ouvrage, parce qu'il pourra être utile aux Jeunes négocians jardiniérs qui débutent dans la carrière, etaux amateurs, pour savoir si, en cas denon reprise des sujets qu'ils recoivent, ils doivent attribuer la perte à des accidens, ou à l’imprévoyance du négociant qui les leur a expédiés, L’emballage des plantes se fait de diverses manières, selon la saison et le temps qu’elles doivent rester en route, et l'espèce de chacune. S'il ne s'agit de faire voyager que des végétaux ligneux à une certaine dis- tance , qu'ils peuvent franchir en quatre ou cinq jours, on fait ce qu’on appelle un demi - emballage. On dé- plante les arbres, on les nettoie parfaitement de tous les corps étrangers qui peuvent se trouver à la bifurca- tion des branches, on met leurs racines à nu, et après avoir eu l'attention de les étiqueter soigneusement, on les réunit en un faisceau dont on calcule la grosseur de manière à ce qu'un homme puisse toujours le porter ai- sément. On enveloppe leurs racines avec de la paille brisée, mais sèche, que lon maintient avec plusieurs liens d'osiers. On rapproche leurs tiges et on les lie en- semble le plus solidement possible. Cela fait, on prend de la paille longue, on en enveloppe la base des tiges en plaçant le côté des épis vers la partie supérieure des tiges. Cette première chemise , comparable à celle que lon place sur les ruches de mouches à miel, est main- tenue par deux ou trois liens, selon la longueur de la paille. Un peu plus haut on en place une seconde sem- ET TRANSPORT DES PLANTES. 485 blable à la première, et qui la recouvre jusqu’à un tiers de sa longueur. On la fixe de la même manière. Après celle-ci on en met une troisième, une quatrième, et ainsi de suite s’il est nécessaire. On tortille le sommet de la dernière, on le renverse vers le bas, et on place le dernier lien d’osier. Des arbres ainsi rangés peuvent, à la rigueur, rester un mois en route et braver un froid de quatre à cinq degrés, plus ou moins , selon la na- ture des végétaux que le ballot renferme. Il est en- tendu que nous ne parlons que des espèces indigènes, ou étrangères bien acclimatces, ainsi que de toutes les espèces de fruits cultivées dans nos jardins. Quant à l'emballage pour un long trajet, ilse fait en paquet, de la même manière que le précédent, mais on double ou tierce en Cpaisseur la première che- mise, suivant le climat que doit parcourir le colis. On emploie de la corde au lieu d’osier, pour le main- tien des enveloppes. Suivant les saisons, on fait usage de mousse sèche ou humide, pour garnir les racines dans l’emballage ; à automne, il convient de les garnir fortement de mousse bien sèche et de mettre beaucoup de paille brisée autour de Ja culée et dans les bran- ches; au printemps, lorsque les fortes gelées ne sont plus à craindre, on emploie de la mousse mouillée pour envelopper les racines. Quelques jardiniers ont la mauvaise habitude de faire tremper les racines de leurs arbres pendant vingt-quatre heures dans de l’eau de fumier, ou dans une composi- tion plus où moins épaisse formant comme une espèce d'engluement qui les recouvre. Ils les enveloppent en- suite de mousse ou de paille mouillée, afin de maintenir une humidité constante. Il en résulte que, si pendant le voyage les arbres sont exposés à une gelée un peu forte, leurs racines se trouvent au milieu d’un glacon qui dé- sorganise leur écorce et les détruit sans ressource en vingt-quatre heures. Si au contraire la température se 486 EMBALLAGE soutient à quelques degrés au-dessus de zéro, ces ma- tüères fermentent, et la pourriture fait périr les végé- taux tout aussi infailliblement , quoique dans un laps de temps un peu plus long. Quand il s’agit d'emballer des végétaux pour leur faire faire un trajet, de plusieurs mois, la méthode est tout- à - fait différente. On doit choisir des échantillons de quatre ou cinq pieds au plus, si l’on ne veut faire des frais considérables, à cause de la grandeur des caisses qu'il faudrait faire construire et du peu de sujets qu’elles renfermeraient. Emballage en caisse pour les végétaux à feuillage caduc. Ces arbres.s’expédient lorsque la végétation est terminée et que les feuilles sont tombées. On metun lit de mousse et un lit d'arbres, les racines sont déjà mous- sées et ficelées , et on les range ainsi lit sur lit jusqu’à ce que la caisse soit pleine; on a surtout la précaution de bien garnir de mousse sèche les parois de la caisse. Les em- ballages de cette nature doivent toujours se faire avec de la mousse bien sèche et les caisses doivent être bien closes. Emballage pour les plantes à feuillage persistant. Les caisses dans ce cas comme pour le précédent sont or- dinairement en carré long, aussi hautes que larges ; on les fait en bois solide , et il n’est pas nécessaire qu’elles soient assemblées d’une manière extrêmement juste, car il faut toujours qu’une certaine quantité d’air puisse y pénétrer, et même quand les plantes sont en végé- tation au printemps, on y fait des trous afin de faciliter sa circulation. Si les végétaux sont dans de très-petits vases, on en- veloppe le pot avec une poupée en mousse que l’on com- prime avec plusieurs tours de ficelle. Dans le cas où le vase est grand ,.et lorsque les racines tapissent bien les parois du pot, on dépote, on fait tomber la terre qui n'est pas retenue par les racines, et on enveloppe la motte ET TRANSPORT DES PLANTES. 487 d'une épaisse poupée de mousse serrée et maintenue par un grand nombre de tours de ficelle. . Nous allons supposer que l’on a une caisse à remplir. On pose d’abord un lit de mousse dans ses deux bouts; au niveau de cette mousse on fixe une tringle en bois plus ou moins forte, qui a pour but d'empêcher les plantes de glisser vers Le milieu de la caisse. On Ja main- tient solidement de chaque côté au moyen de clous. Cela fait, on place sur la mousse un premier rang de plantes, de facon que les mottes posant sur elle , soient alignées du côté du collet de la tige et appuyées sur le bord de la tringle; c’est-à-dire, que s'il y en avait de plus grosses les unes que les autres, la différence en grosseur soit sallante ou dépasse le rang du côté du bois de la caisse; de cette facon les tiges viennent se ranger au centre de la caisse, et s’entre-croisent avec celles d’un autre rang placées de la même manière à l’autre bout de la caisse. On maintient les mottes en position en bour- rant de la mousse entre elles etremplissant par son moyen les vides qui peuvent se trouver vers le bois de la caisse. On place une seconde tringle précisément au - dessus de la première, et de facon que toutes les tiges se trouvent entreelles deux, sans cependant être trop ser- rées, et en proportionnant la hauteur de cette tringle, pour qu’elle puisse à la fois maintenir ce premier rang de mottes et celui que l’on place dessus, de la manière indiquée pour le premier. On place ainsi plusieurs rangs les uns sur les autres à chaque bout de la caisse, on maintient chacun d’eux par une nouvelle tringle, et tous les vides existant entre les mottes doivent être remplis de mousse très-bourrée , afin que dans le transport rien -ne puisse se déranger. Quant aux tiges, elles se trouvent rangées dans le vide de la caisse, afin que l'air puisse librement circuler autour de leur feuillage. La caisse pleine, on place le couvercle que l’on assujettit par des clous, et on corde ensuite. Ainsi emballées, les 488 EMBALLAGE plantes peuvent sans danger faire un voyage de deux ou trois cents lieues et mêmé davantage, suivant la sai- son et leur nature. | Quand un voyageur veut rapporter des végétaux des Indes, ce sont des moyens tout-à-fait différens à em- ployer. Comme ils doivent rester un an à dix-huit mois en route, il faut Jes placer dans des circonstances telles, que la végétation puisse avoir son cours ordinaire. Trois ou quatre mois avant de les embarquer, on les trans- plante dans des vases les plus petits possibles, ou on en réunit plusieurs ensemble dans une même caisse, ce qui nous paraît préférable et est aussi le plus usité ; lon rabat leur tige à cinq ou six pouces du collet, ct on les conserve ainsi jusqu’à ce que la reprise soit assurée. On choisit une place sur le pont du bâtiment de trans- port, dans le lieu le moins embarrassé par les manœu- vres, et l’on y construit une espèce de cage en tringles de bois, laissant entre elles un facile passage à l’air et à Ja lumière ; celte cage doit avoir plusieurs étages distancés les uns des autres en proportion de lahauteur des pots ou caisses et des plantes qu'ils doivent contenir. On y place les vases les uns contre les autres, et on les y fixe de ma- nière à ce que le roulis de la mer ne puisse aucune- ment les faire balotter. En partant, on donne un arro- sement convenable , puis on bourre entre les pots avec de la mousse mouillée; on en met aussi une bonne épaisseur sur la terre ; on la comprime et on la main- tient au moyen de petites tringles en travers. On donne un second arrosement sur cette mousse pour l’imbiber d'humidité autant que possible, et l'on part. Pendant la traversée, toutes les fois que l’on touchera Ja terre on profitera de cette ch'constance pour se pro- curer de l’eau et donner des arrosemens. On sera forcé, quand ces ressources manqueront , de mouiller avec l'eau conservée à bord. Dans ce cas, pour en perdre le moins possible , on commence à arroser l'étage supérieur ET TRANSPORT DES PLANTES. 489 afin que la surabondance d’eau qui s’en échappe retombe sur les autres plantes. Nous terminerons ce chapitre par l'indication des moyens à employer pour faire voyager des rameaux à grefier. Pour la grefle en fente du printemps, toute la difficulté consiste à empêcher qu'ils ne se dessèchent pendant la route. L'expérience a démontré que les meilleures boîtes pour cet usage étaient celles de fer- blanc. On emploie aussi de la terre grasse très-humide, dans laquelle on pique les rameaux que l’on enveloppera ensuite d’une poupée de mousse humide, pourempêcher qu'ils ne dessèchent. S. A. R. madame la duchesse de Berry a bien voulu nous faire adresser de Naples des greffes de fruits nouveaux qui étaient contenues dans des boîtes de fer-blanc, et piquées dans de l'argile hu- mecté d’eau. La plupart de ces greffes ont eu une pleine réussite. Quelques personnes se contentent de les piquer dans un gros navet ou dans une betterave. Pour la greffe à écusson il faut couper les feuilles de la même manière que pour greffer de suite ; établir l'or- dre pour la reconnaissance des espèces, et ensuite les disposer comme nous venons de le dire. 490 AMÉNAGEMENT CHAPITRE VII. DE L'AMÉNAGEMENT DES JARDINS, OU TRAVAUX DONT LE JARDINIER DOIT S'OCCUPER EN CHAQUE SAISON. Nous allons exposer ici, autant que possible dans leur ordre naturel, les travaux que le jardinier doit suc- cessivement exécuter dans ses cultures. Nous ne les don- nerons pas mensuellement ,-parce que notre ouvrage n’é- tant pas écrit pour une province en particulier, mais pout l’Europe entière, on conçoit que la différence des cli- mats et des températures doit faire varier beaucoup l'é- poque précise des travaux. Outre cela, les variations de température que l’on remarque dans les saisons selon les années, sufliraient seules pour empêcher qu'un calen- drier püt être fait avec précision. Dans tous les cas, c’est donc à l'intelligence du jardinier à savoir saisir le temps opportun pour chaque chose. Pourne pas manquer d'exac- titude, nous ne devons donner ici que des généralités. Nous ne présentons cette espèce de tableau que comme un mémorial à consulter, afin de prémunir l'amateur contre des oublis qui pourraient quelquefois retarder ses Jouissances d’une année , et nous n’y attachons pas d’au- tre importance. Du jardin potager. C'est pendant l'hiver que le jardinier qui cultive les légumes doit accomplir ses travaux les plus importans, car d'eux dépendront les produits de primeur qu'il ob- tiendra dès Les premiers jours de printemps. Au com- mencement de cette saison il établit ses couches et les tient plus étroites que dans d’aûtres temps, afin que les réchauds qu'il sera obligé de renouveler souvent DES JARDINS. Â91 puissent plus aisément leur communiquer de la chaleur. Il y repique les plants. semés. avant les froids ; 1l y fait des semences de laitue, de radis, de cresson, de cer- feuil; il y plante de l’oseille, de l’estragon, du persil, des grifles d’asperges, afin d'obtenir des produits pen- dant l'hiver. Un peu plus tard, il commence à semer des concombres hâtifs, et même à risquer quelques me- lons sous châssis. S'il a des serres à primeur, c’est le mo- ment d'activer la végétation au moyen d’une chaleur artificielle et soutenue. En pleine terre il peut risquer à exposition très- chaude et bien abritée des pois hâtifs, des fèves de ma- rais. Il butte et enterre les brocolis. Dans une cave: obscure il peut déjà dresser des couches à champignons. Vers le milieu de l'hiver, si le temps est rigoureux et que la terre soit gelée profondément, le jardinier s'occupe des travaux extérieurs, du transport des ter- res, etc. Il construit des couches tièdes et chaudes, sur lesquelles il sème des choux-fleurs tendres, des melons. et concombres. On y cultive des laitues crépe et gotte ,: des fournitures de salade, des radis, des raves, du: pourpier, de l’oseille, de la chicorée sauvage, etc., etc.z Dans ses serres à primeur , il force des petits pois, des: haricots, des melongènes, cardons, etc. Si l'hiver n’est pas rigoureux, on peut semer en pleine terre, en plate- bande au midi, des fèves de marais, des pois hâtifs ; mais’ on s'expose à perdre le fruit de ses travaux si la tempé- rature ne continue pas à être douce. Dès que les grands froids sont passés, et que lon peut compter sur le beau temps, les travaux du potager prennent une grande extension. On continue à forcer sur! couche, et l'on peut semer en pleine terre, non-seule- ment les plantes déjà mentionnées, mais des laitues, des choux, des ognons , poireaux et ciboules, du panais, des carottes, des épinards, du persil, des pois, des fèves de marais, etc. On repique les bordures de plantes vi- 492 AMÉNAGEMENT vaces; on met en place les choux élevés sur couche, on fait des melons, on plante les grifles d’asperges , on œilletonne des artichauts. Au commencement du printemps, on sème des bet- teraves , carottes, scorzonères, cardons, concombres, céleri hâtif, haricots, chicorée, raves et radis, et en général toutes les plantes que nous avons mentionnées. On finit d’œilletonner les artichauts. Tous ces soins peuvent se continuer jusqu'au milieu du printemps, épo- que à laquelle il faut penser à faire les semis pour les pro- duits d'automne, par exemple ceux des brocolis, choux- navets à grosses côtes, des navets, chicorées et esca- rolles , des laitues; des haricots, des pois de Clamart, des fournitures et des assortimens pour l'usage journalier. Au commencement de l’été on peut encore semer les espèces indiquées pour la fin du printemps, à l’ex- ception du choux à grosses côtes et des choux - fleurs. Vers le milieu de cette saison on: n’a plus guère de se- mis à faire que ceux de poireaux et ciboules pour être plantés en septembre, d’ognons blancs pour être re- plantés en octobre, et de scorzonères. Sur la fin de la saison on sème les laitues d'hiver, des navets, de l’o- seille , des épinards, des choux, des petits radis, des raiponces, des panais, de la mâche ; on sème encore des choux-fleurs destinés à être repiqués sur ados pour y passer l'hiver, des choux d’York pommés, et autres espèces bâtives. On replante des bordures de fraisiers afin d’en jouir l’année suivante. En automne, dans le commencement de la saison, on peut encore risquer de la mâche et de l’épinard. On fait la seconde semence de laitues, on hasarde des pois michaux aux pieds des murs à exposition chaude. On re- pique des choux: de l’ognon blanc, des laitues ; vers la fin de la saison, on élève des couches, et l’on com- mence des semis pour primeur, que l’on doit continuer pendant l'hiver. DES JARDINS. 493 Du verger. Les soins à donner aux arbres fruitiers pendant lhi- ver, se bornent à fort peu de chose. Pendant cette sai- son , on peut planter des arbres tant que la température est douce. On fait stratifier lesnoyaux. On recherche les nids de chenilles que l’on coupe et que lon écrase ‘on brüle. Vers la fin de l’hiver, on opère Ja taille des ar- bres dans l’ordre que nous avons indiqué dans le cha- pitre qui traite de cette matière. On peut même déjà commencer les greffes en fente. Dès le commencement du printemps, on met en terre les noyaux que l’on a fait stratifier, et l’on fait les semis de pépinières, principalement ceux d'arbres verts et ré- sineux. Si la taille de quelques arbres à noyaux a été retardée , on peut encore la faire sans danger ; c’est aussi l’époque de faire les boutures de cognassiers et autres de même nature. Vers la fin de la saison, ôn palisse, on ébourgeonne, on écussonne à œil poussant. En été, on continue à ébourgeonner et palisser, et lon saisit le moment de la seconde sève pour écusson- ver à œil dormant ; déjà l’on commence à recueillir le fruit de ses travaux. La greffe en écusson peut se prolonger jusqu’à la fin de l'été, et même l’on trouve encore quelquefois des jeunes sujets qui ont encore assez de sève au commen- cement de l'automne pour pouvoir subir cette opération. Les jeunes amandiers sont dans ce cas. En automne, aussitôt que les feuilles commencent à tomber, on peut déjà transplanter avantageusement, surtout dans les terrains secs et légers. Sur la fin de cette saison, on commence à faire stratifier les noyaux d’une germination très-longue ; c’est aussi le moment d’amen- der les terres, et de les préparer au labour du prin- temps. 494 AMENAGEMEXT Da jardin fleuriste: C'est pendant l'hiver que le jardinier a le plus de sol- Bcitude pour assurer la conservation de ses plantes, soit de serre , soit de pleine terre. Dès le commencement de cette saison, 1l s'occupe spécialement des soins de ces premisres, et les traite selon les principes. que nous avons enseignés à l'article du gouvernement de chaque espèce de serre. On commence à couvrir de litières ou de feuilles sè- ches les plantes de pleine terre les plus sensibles au froid et à la pourriture. On plante, si on ne l'a fait en temps plus opportun , les plantes bulbeuses, telles que tulipes, couronnes impériales, narcisses, etc., ainsi que les renoncules et anémones. Sur la fin de cette saison, si la température le per- met, on peut semer en pleine terre les pieds d’alouette, pavot, thlaspi , immortelle , et autres plantes robustes. On sème sur couche les plantes annuelles destinées à être repiquées sur couche avant la fin de l’année, et les- plantes vivaces, mais délicates ou dont la floraison a besoin d'être avancée. Vers les derniers jours de l'hiver, on éclate les racines de quelques plantes vivaces, telles que campaoule , julienne, hépatique, corbeille d’or, œillets de bordure et autres. Dès le commencement du printemps, on sème en pleine terre, si on ne l’a déjà fait sur couche, non-seu- lement toutes les fleurs indiquées pour la saison précé- dente, mais encore un grand nombre d’autres parmi lesquelles nous citerons les reines - marguerites, balsa- mines, œillets d'Inde, quarantaine, etc. Il ne reste plus a semer sur couche que celles qui sont les plus délica- tes. On plante les ognons de tubéreuses en pots et sur couche. Vers le milieu de la saison , on peut encore semer la plupart des plantes annuelles; on continue de DES JARDINS. 495 multiplier par éclat les touffes de plantes vivaces de toutes espèces. Les arbrisseaux délicats et les plantes de pleine terre de bruyère se plantent alors avec succès. C'est aussi le moment de sortir les arbres verts et résineux, et de les mettre en place. On fait aussi des grefles en fente , en couronne et en flûte, sur les arbres et arbrisseaux d'a- grément, ainsi que des marcottes et boutures de tous les végétaux de pleine terre. On accoutume à l'air les plantes d'orangerie , et l'on peut même déjà sortir celles qui sont les moins déli- cates, afin de donner plus d'espace aux autres. À la fin du printemps , lorsque la saison est parfaite- ment assurée , on sort tous les végétaux de l’orangerie, on les taille, dépote, nettoie, etc. On sème encore quelques graines de fleurs d'automne, choisies parmi celles qui mettent peu de temps à se développer. On sème aussi des œillets et des giroflées pour fleurir au printemps suivant. C'est la saison la plus favorable pour faire les semis d’arbres d'ornemens à fleurs légumineu- ses , ainsi que les boutures et marcottes des plantes d'o- raugerie., Les travaux sont immenses pendant cettesaison; mais les jouissances sont nombreuses. On commence à greffer les églantiers et autres en écusson à œil poussant. Pendant les premiers jours de l'été, on peut encore continuer à greffer, mais ordinairement la sève ne tarde pas à se passer. On continue à marcotter et bouturer quelques plantes de serre. Les feuilles de tulipes se des- sèchent, et l’on commence par elles à déplanter les ognons à fleurs à mesure qu'ils perdent leurs fanes; les paites et griffes ne tardent pas à suivre. Dans le milieu de l'été, on continue les mêmes opé- rations. Déjà l’on récolte des graines ; on commence à marcotter les œillets; on fait encore des boutures de plantes grasses , et l’on peut aussi faire quelques grelies à œil dormant. On veille surtout à ce que les plantes ne 496 AMÉNAGEMENT DES JARDINS. souffrent pas de la sécheresse, et l’on ne ménage pas les arrosemens. À Ja fin de la saison, les travaux deviennent plus nombreux. On replante les ognons des plantes délicates qui craignent de resler trop long-temps hors de terre. On continue à arroser au besoin, à écussonner, à mar- cotter les œillets. On sème en place les plantes qui ne craignent pas la gelée et que l’on destine à fleurir au printemps suivant, comme, par exemple, immortelle, thlaspi, adonide, bleuet, pied d’alouette, pavot, etc. Dès le commencement de lautomne, on replante les ognons à fleurs, tels que tulipes, narcisses, jacinthes, et autres; mais ces premières plantations sont plus sen- sibles au froid que celles que l’on fait vers le milieu de la saison. On sème encore toutes les plantes indiquées pour la saison précédente , des anémones , renoncules, et des graines de plantes bulbeuses et autres qui ne crai- gnent pas le froid. Les mêmes travaux peuvent se con- tinuer jusqu'à la fin de l'automne, mais alors beaucoup d'autres viennent se joindre à ceux-ci. On fait des plan- tations de toutes sortes d'arbres et d’arbrisseaux d’orne- - ment. On rentre les plantes dans les serres ; on sème les graines et noyaux d’une germination lente, tels que ceux de sainte-lucie, etc. On continue à planter les ognons à fleurs qui auraient été oubliés jusqu'alors. On refait dans les serres, les couches et tannées qui n'auraient pas encore été rctablies. On butte le pied des végétaux de pleine terre pour les défendre contre les pluies et les gelées. On empaille les lauriers, figuiers et autres ar- bres qui craignent le froid. Enfin on recommence la ro- tation des travaux que nous avons indiqués pour l'hiver. FIN DU PREMIER VOLUME. Lg. Créstaluration du Feld-spath . Lig. 2, Crurtalésation du Quartz , Lg. 3. ul. en pyramides adosrees . Lg.4 . Crurtalisation de la chaux carbonate Lg. d. Cristalisation de & chaur phosphate. Lig.8.Crataliwation de la potasse rnitratee Lig.9.Crértalwwaton de Lx soute muriatee. Lig.10 Créstalisation de le soude carbonatee. A /nstrunens. Pl2. 7x) Ur L 144 r , (ll N d di == (0 a = = || = \ j part Lee 2) di 1%! (re à 2 Bache eleloches. PL a, LA 49 , / 4/£ 2.C oupe° QT me 4. Fig.8. | À À “4 ay AS LUN L , Jerre in Manuel complet du Jardinier Lableau des inelnarsons Lt s NE UNICE | R ni D di. | ii nn ' 17 do deyres 1$- 45 degrés N | 11-10 jo deyres [20 | LP] de) Te 2] 4 i a Jo degres D) 6-9 ao 20 degres 2-9 Len vue h_2 ‘ V1 l 4 EN: 20 degres #4 je ed | 4-4 18 degre. + 18 degres se Fe Die 10 degrés | 222 5" 1 12 pleds ù À COEUR A OTA va LS 1 ’ Ü Lassts , Wu À LT ARLES SAT L RA ns n da hnnà À dde à aéré 1) M. 4 Aid pl ge ci 18 PU D A UE des EL débute OU der ele DAUE Me 1 Lehelle de 15 Pieds. Lchelle de wur Torres. lg. 2. Jerres , | Pl > = Jerres. PL. 8. RC = PS A DR L'an nt ou a EM ea AN MR £Echelle de 12 Pieds, pour les deux coupes . R RS 78 SQ NN ÿ SNS NN ds AA SNS LS ] CÀ — A Manuel complet du Jardinter . pra hi Naryile | 4 PA ot ee SERRE AI Jerres. E ui EG # Les. HAE : /_ Sa ÉRERRRSENRES fi p #| Jerr'es , ; PL. 10. - 7 € Serres . - . Pl. Tr = chelle de 3 lignes, pour Le pied . one A RAS ? Jerres PLr2. APR ONE DRE DRE ST IR | Échelle de 6 pieds, pour les deur coupes Manuel complet du lardnier . A et l-Q ‘2 “pee SEE AE SL hr Detals de B olanique PI || \ | | (LL al pal SB Noisette, Louis Claude 453 Manuel complet au N8 jardinier 2. ed. 1835 : A N Biological & Medical PLEASE DO NOT REMOVE CARDS OR SLIPS FROM THIS POCKET UNIVERSITY OF TORONTO LIBRARY