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MÉMOIRES
DE LA SOCIETE
D'ARCHÉOLOGIE LORRAINE.
MÉMOIRES
DE LA SOCIÉTÉ
D'ARCHÉOLOGIE
LORRAINE.
SECONDE SÉRIE. — VIIe VOLUME.
NANCY,
IMPRIMERIE DE A. LEPAGE , GRANDE-RUE, 14.
1865.
THE GEïTY Utmt«
L'ÉGLISE D'ALLAMPS
PAR M. E. OLRY.
Dans un précédent article1, j'ai parlé, d'une manière sommaire, des anciennes constructions qu'on rencontre aux environs de Colombey. Aujourd'hui, je me propose de donner une description plus développée de l'une des églises citées, dont le style et le caractère particulier mé- ritent de fixer l'attention des archéologues : l'église d'Al- lamps, qui remonte à la transition , à cette époque inté- ressante qui continue toujours d'exercer la sagacité de ceux qui se livrent à la recherche de l'origine de l'ogive.
M. Bigot, dans sa notice sur l'église de Laitre-sous- Amance2, annonçait qu'il avait formé le projet « de com- poser un aperçu général sur les caractères particuliers que présentent les églises romanes et ogivales de la Lor- raine » , mais qu'il en avait ajourné l'exécution, parce
1. Journal de la Société d'Archéologie, novembre 1863.
2. V. Bulletins de la Société d' Archéologie, t. III.
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qu'il avait été arrêté, en partie, par la pénurie de rensei- gnements1.
Une étude de cette nature, faite par le consciencieux auteur de nos deux histoires de Lorraine et d'Austrasie, aurait rendu un service signalé à la science et offert un intérêt tout spécial à ceux qui, dans le pays, s'occupent de l'archéologie religieuse.il est donc regrettable que ce pro- jet ne se soit pas réalisé. Quant à la difficulté signalée, elle n'est pas insurmontable, pour peu qu'on y veuille mettre de bonne volonté. En effet, les édifices de quelque impor- tance qui appartiennent à ces deux époques, et qui offrent un caractère monumental, sont à peu près connus. Il suf- firait donc d'indiquer ceux d'une importance moindre qui se trouvent comme perdus au fond des campagnes , et qui n'ont pas encore été signalés ; d'en donner autant que possible une petite description ; de faire surtout ressortir les particularités . intéressantes qu'on pourrait y rencon- trer, car c'est là qu'on peut puiser des matériaux utiles, et l'auteur ferait le reste.
Tel est le motif qui m'a engagé à fournir une mono- graphie de l'église d'Allamps. Malgré des mutilations dans l'intérieur, des réparations de détail et même des change- ments partiels d'une certaine importance qu'elle a subis, elle a néanmoins assez bien conservé son caractère pri- mitif, notamment à l'intérieur. Mais ce petit travail n'of- frira au sujet que j'ai en vue qu'un intérêt très-secon- daire, car je ne pourrai donner, à l'appui de ma notice, aucun document relatif à la construction de cette église,
i. Ma notice, écrite avant la mort du regretté M. Digot, lui fut soumise ; l'accueil approbatif qu'il y fit avait donné l'espoir (qui ne fut pas de longue durée, hélas !) que le projet dont il entretenait ses lecteurs eu 1853 n'était pas abandonné.
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ni conséquemment citer aucune date pour en fixer l'épo- que d'une manière précise. Les recherches qu'on pourrait faire à ce sujet auraient-elles quelques chances d'aboutir? c'est peu probable, car la plupart de nos églises de vil- lage, érigées par les habitants ou les communautés, ne furent pas, lors de leur construction, comme les églises abbatiales, conventuelles ou même comme les simples chapelles adossées à plusieurs de ces églises , l'objet de chartes ou de titres émanés des fondateurs ou des bien- faiteurs.
Sous le rapport de l'histoire locale , Allamps n'offre aucun intérêt ; c'est cependant l'un des plus anciens vil- lages du pays, car il en est déjà fait mention au vne siècle, avec Housselmont1, petit hameau situé à un kilomètre, dans Y Histoire des Evêques de TouP, sous les noms d'Alona et Huccilini-Mons.
L'église d' Allamps a la forme d'un rectangle ayant, dans œuvre, 19m 20 de longueur sur llm 70 de largeur ; les murs ont un mètre d'épaisseur. 11 est probable qu'on a cherché à l'orienter; mais l'axe incline vers le nord et occupe à peu près la direction du nord-est.
Elle est formée d'une nef principale , flanquée de deux collatéraux très-étroits. On y compte quatre travées, dont trois pour la nef proprement dite et la quatrième qui tient lieu de transept. Cette dernière n'offre en plan aucune différence avec les autres, sinon que, pour y arriver, on doit monter deux degrés ; mais on peut remarquer qu'à l'intérieur, les voûtes des croisillons sont plus élevées que
1. Ces deux localités n'ont qu'une même église, celle qui nous occupe.
2. V. Dom Calmet. Preuves. Histoire des Evêques de Tout, ch. 32.
celles des bas-côtés, et qu'à l'extérieur, la tour est cons- truite au-dessus du croisillon droit, tandis que le croisil- lon gauche est accuse"' par un pignon.
Dans l'origine, il devait y avoir au moins une travée de plus, de forme rectangulaire, pour l'abside, qui occupait tout au plus la largeur de la nef principale ; elle a été supprimée à une époque qu'il n'est pas possible de dé- terminer, et remplacement en est aujourd'hui occupé par la sacristie, qui semble dater du siècle dernier. L'exis- tence de cette abside ne peut faire l'objet d'aucun doute, car la forme de l'église l'annonce d'abord ; on remarque à l'intérieur l'arc triomphal à plein-cintre surbaissé, au- jourd'hui muré, qui séparait l'abside du transept ; à l'ex- térieur, le revers d'eau qui accuse la forme aiguë du toit primitif.
La nef semble être construite en moellons recouverts d'un crépis grossier ; mais le transept et tous les contre- forts sont en moyen appareil. Je serais disposé à croire que, primitivement, tout l'édifice était d'une construction uniforme et semblable à celle du transept et des contre- forts, c'est-à-dire en moyen appareil.
La hauteur des voûtes sous clef, de la nef centrale, est de 7m 45 ; des collatéraux, de 5m 10 ; du transept , croi- sillons compris, de 7m 40, jusqu'au pavé, qui est, comme on sait, plus élevé que le sol de la nef.
Les fenêtres actuelles sont modernes. On a remplacé les fenêtres primitives dans le but d'obtenir probablement plus de lumière, car ces dernières étaient de très-petites dimensions. Il en reste un spécimen dans l'une d'elles, qui est murée et qu'on remarque à l'extérieur entre l'an- gle du croisillon nord et la sacristie : elle taisait consé- quemment fond au collatéral gauche, et elle a du être
EGLISE D'ALLAMPS.
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C Maître -autel.
1) Tourelle pour monter sur les voûtes
h Quatre feuilles au transept.
F Coupe des arcs doubleawx du transept
G Coupe des nervures .
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supprimée quand on a érigé l'autel Saint-Nicolas. Cette fenêtre est à plein-cintre et mesure lm 20 de hauteur to- tale sur 0m 60 de largeur. En tenant compte de l'ébrase- ment et de l'épaisseur des murs , il est facile de com- prendre la petite quantité de lumière que de telles baies pouvaient fournir.
Le transept était en outre éclairé par deux ouvertures circulaires E1, ou deux roses qui ont été conservées; elles se trouvent au-dessus des deux fenêtres actuelles. Ces deux baies, très-ébrasées, forment un quatrefeuilles d'une bonne exécution, et les moulures principales, à l'intérieur comme à l'extérieur, consistent en deux tores lisses, pla- cés en retraite, dans des rentrants.
La fenêtre du croisillon droit appartient au style ogival dé la troisième période ; mais elle produit un effet assez disgracieux, attendu qu'elle a été maladroitement placée en dehors de l'axe vertical de la tour et du quatrefeuilles, et que la pointe de l'ogive vient entailler les premières moulures de la rose.
A la partie supérieure du mur méridional de l'église, au fond de la nef centrale, on remarque une fenêtre gé- minée dont les deux ouvertures sont séparées par un meneau prismatique d'une forte dimension, mais sans aucune moulure. La partie supérieure des deux baies est terminée par une ogive simple, et, à l'intérieur, la fenêtre tout entière est encadrée par un arc à plein-cintre.
La porte actuelle appartient à la renaissance. L'orne- mentation dénote un certain goût et ne manque pas d'é- légance ; mais elle contraste singulièrement avec le style de l'édifice et avec la partie de la construction dans la- quelle elle a été percée.
!. Voy. les planches ci-jointes.
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Les piliers qui séparent la première travée de la se- conde sont assez simples ; ils ont la forme prismatique. Les deux suivants offrent plus d'intérêt. La coupe que j'en donne (v. planche II, K) peut figurer une croix grec- que dont les extrémités sont flanquées de quatre colonnes engagées et dont les angles rentrants sont garnis chacun d'une colonnetle. Quant aux piliers qui séparent la nef du transept, ils ont un développement tout à fait extraor- dinaire, qu'on ne peut guère expliquer que par le besoin qu'on a cru avoir de fournir une assise solide à la tour, élevée au-dessus du croisillon droit (v. planche II, J). La plus grande largeur du socle sur lequel reposent ces piliers est de 2m 20 ; la hauteur des colonnes engagées qui supportent la retombée des arcs doubleaux des bas- côtés et des formerets, n'est que de 2m 50, base et chapi- teaux compris ; quant aux deux autres colonnes engagées et aux colonnettes intermédiaires qui correspondent aux arcs de la grande nef et du transept, elles ont 5m 64 de hauteur. On compte dans le pourtour de chacun de ces piliers, outre les quatre colonnes engagées dont je viens de parler, onze colonnettes accouplées par trois, excepté en face des collatéraux, où, au lieu de trois, on n'en voit que deux. Enfin, les pilastres des murs latéraux ont gé- néralement la forme et le développement des piliers aux- quels ils correspondent.
L'ornementation des chapiteaux, comme je l'ai dit ail- leurs, est très-variée et demanderait une description dé- taillée pour chacun d'eux ; mais je suis obligé de me borner à des indications. On remarque notamment des branches de vigne et de lierre ; des feuilles de rosier, de persil, de chardon et une espèce de feuille d'acanthe ; des feuilles d'eau largement dessinées, terminées par des
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crosses ; des feuilles à crochets sur un rang et sur deux, enfin des figures grossières, fantastiques, des enroule- ments, des galons perlés, etc. Un badigeon épais les re- couvre et empêche de se rendre un compte exact du mérite de la sculpture et des détails. Cependant quelques- uns ressortent parfaitement et sont bien fouillés ; d'autres, au contraire, ne semblent qu'ébauchés ou timidement dessinés. On remarque ensuite des empâtements à quel- ques bases de colonnes engagées.
Les voûtes sont d'arête et les nervures se composent d'un moyen tore (G) accompagné de deux petites mou- lures cylindriques en retraite ; on remarque des rosaces aux clefs de voûte. Les arcs doubleaux de la nef et des bas-côtés, ainsi que les formerels, sont très-saillants ; ils ont la forme prismatique des pilastres de la première tra- vée. Quant aux arcs qui séparent la croisée des croisil- lons et de la nef centrale, ils sont cannelés et offrent en coupe la figure que j'en donne (v. planche I, F).
L'ogive qui se présente ici en compagnie du plein-cintre est très-obtuse. Celle de l'arc doubleau, séparant la nef du transept (v. planche I, H) , caractérise à peu près l'ogive employée dans la construction. Mais je me hâte d'ajouter que cette forme n'a rien d'absolu, car les formerets sont plus obtus , tandis que les arcs doubleaux des bas-côtés ont une forme plus aiguë, qui présente de l'analogie avec l'ogive en lancette.
Les voûtes laissent beaucoup à désirer sous le rapport de l'exécution, et, en les examinant, on est porté à croire qu'elles ont été l'objet de remaniements, car on y remar- que des reprises, et les nervures offrent des jarrets. La poussée des voûtes est reçue à l'extérieur par des contre- forts qui ont le peu de développement de ceux de la Iran-
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silion. Ils soin rectangulaires, sans redants et terminés à la partie supérieure par un larmier ordinaire. Trois d'entre eux, près de la porte, sont plus développés, mais il faut attribuer ceux-ci à une époque évidemment postérieure et à des réparations que cette partie de la bâtisse aura nécessitées : pour consolider l'édifice, on aura donné de l'ampleur à ces contreforts.
A la partie supérieure de la tour et dans le pignon op- posé du transept, on remarque deux meurtrières verti- cales, longues et étroites ; on trouve ensuite d'autres pe- tites ouvertures carrées, espèces de meurtrières aussi, qui présentent à l'intérieur des arcs droits à encorbellement convexe (I). La fenêtre principale de la tour mérite aussi d'être notée : elle est à deux jours formés par une colonne cylindrique qui supporte la retombée de deux arcs à plein- cintre. La baie entière est terminée, à sa partie supérieure, par une ogive obtuse, encadrée par un revers d'eau très- saillant qui descend jusqu'à la naissance des arcs, pour se contourner en volute. Les autres fenêtres de la tour sont carrées ; elles ne présentent rien de particulier.
Je termine en signalant, à l'intérieur de l'église, près de la porte d'entrée, des fonts qui remontent aussi à la période romane ; ils sont formés d'une cuve hémi- sphérique, cantonnée de quatre colonnettes cylindriques, de l'i à 18 centimètres de diamètre, adhérentes à cette cuve, mais à la partie supérieure seulement, et lui ser- vant de support avec une cinquième colonnette de même diamètre que les premières, placée sous le réservoir et au centre, faisant l'office d'un pédicule. Ces colonnettes ne reposent sur aucun soubassement, et elles n'ont ni base, ni socle.
Telle esl l'église d'Allamps : les changements qu'on y
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a opérés sont très-regrettables ; mais ce qui ne Test pas moins, ce sont les mutilations purement gratuites qu'on a fait subir aux piliers, sous prétexte de faire de la place : on a coupé les socles et supprimé, jusqu'aux chapiteaux, des colonnes engagées. Cette église, il est vrai, n'est plus en rapport avec la population de la paroisse, et déjà il a été question de la démolir pour en élever une autre. Il serait cependant à désirer que ce qui nous reste de ce curieux spécimen de la transition nous fût conservé. Ne serait-il pas possible de restaurer cette église, de réta- blir ses socles, ses colonnes supprimées, de lui rendre son abside, et, si on pouvait en outre l'agrandir d'une ou de deux travées, on donnerait ainsi satisfaction aux vœux légitimes des paroissiens, tout en sauvegardant les intérêts de l'art.
LES
VOIES ROMAINES
DE
L'ARRONDISSEMENT DE SARREBOURG,
PAR M. LOUIS BENOIT.
Parmi les tribus guerrières de la Gaule, dont les dis- sensions intestines favorisèrent la conquête de Jules- César, on remarquait celles de la Belgica Prima. Cette province avait Trêves pour métropole et pour principales villes Metz, Toul et Verdun , formant entre elles autant de chefs-lieux de districts, assez semblables à nos dépar- tements actuels1. Les limites du district de Metz ou de la
1. Le district ou la civitas renfermait un grand nombre de cir- conscriptions appelées pagi. Chaque pagus avait, à son tour, des villes et villages. Celui de Deccmpagi, dont il sera question plus loin, aurait renfermé, suivant certains antiquaires, dix vicos, tels que Guermange, Alteville, Assenoncourt, etc.
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civitas des Mediomatricii, après avoir varié, coïncidè- rent avec celles de l'évêché primitif : au nord se trou- vaient les Trevires, au midi les Leuci (Toulois), à l'ouest les Virodunenses et à l'est les Triboeci, tribus germaniques mentionnées dans les Commentaires de César. Ce dis- trict comprenait donc la partie moyenne du cours de la Moselle, la moitié de celui de la Sarre depuis ses sources, et celui de la Seille.
Si l'on n'y rencontre pas, comme en Alsace, des débris de poterie portant les estampilles des légions romaines qui stationnèrent dans le pays et y furent cantonnées, non-seulement pour le maintenir sous le joug, mais aussi pour le coloniser, en revanche, il est peu de localités où l'on ne puisse signaler des vestiges d'antiquités : fci un Mercure, là des monnaies d'empereurs, partout des tuiles à rebords, rappellent le séjour des Romains dans cette partie de la Gaule Belgique1.
Par d'immenses routes, véritables artères qui mettaient en communication entre elles toutes les provinces de l'Empire, le simple soldat, muni du livret sur lequel étaient marquées les étapes, pouvait facilement se rendre à son poste, grâce aux colonnes itinéraires échelonnées le long de la route. La Table Théodosienne, dite carte de Peutinger, et Y Itinerarium provinciarium Anlonini Augusti nous fournissent des renseignements précieux
i. Il n'entre pas dans le plan de ce simple exposé de signaler tous les monuments de la période gallo-romaine trouvés dans l'arrondisse- ment de Sarrebourg ; la plupart sont énumérés dans le Dictionnaire des Communes, dans la Statistique de M. Lepage et dans notre Répertoire archéologique. Ajoutons que, chaque jour, le Musée lor- rain s'enrichit de nouvelles trouvailles ; nous citerons, entre autres, la pierre tombale d'un vétéran des légions romaines, découverte à Hé- range, et figurant sous le n° 22 du Catalogue.
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sur les principales voies romaines à la fin du ive siècle'. Celles que nous avons pu étudier, grâce au concours de MM. les agents-voyers de l'arrondissement de Sarre- bourg, ont généralement 7 mètres de largeur; leur cons- truction n'est pas la même partout ; elles sont formées de couches de pierre, ordinairement de muschelkalk, assez grossièrement taillées, mais parfaitement jointes, posées de champ, tantôt dans une tranchée profonde, battue dans du mortier ; tantôt dans un mince lit de sable, ou simplement appliquées sur du gravier. Ces chemins, que détruisent chaque jour le soc de la charrue dans les champs, sillonnent la plaine et la montagne, sans tou- jours affecter une ligne droite. Tantôt construits en dé- blai, Ils sont recouverts par les terrains qui ont coulé ; tantôt la pioche du défricheur les retrouve sous les arbres des forêts qui les recouvrent de leurs racines, comme dans la forêt de Berthehning. Aux environs de Dieuze on a découvert une inscription qui rappelle le nom des fonc- tionnaires spécialement chargés, sous les ordres des décu- rions, de l'entretien de ces voies : c'étaient les quatuoT- viri viarum curandarum*. Une autre inscription, con- servée au musée d'Epinal, nous apprend que les chemins vicinaux étaient confiés aux vicani. Ces différentes voies ne semblent pas avoir été exécutées au temps de Jules- César, mais longtemps après le règne d'Auguste3. Elles
1. Voy. Schœpfflin, Alsatia illustrata; on y trouve des détails très-étendus sur ces anciens documents conservés à Vienne. — Ibid. La carte de la Gaule par d'Anville.
2. Voy. le P. Benoit Picart, Histoire de Toul, p. 12.
3. Au vie siècle, ces \oies furent réparées par la reine Bruneliaul, dont le nom est ainsi devenu légendaire. Voy. Aug. Digot, Histoire d'Austrasie, t. II, p. 110.) — On voit, d'après le Code tliéodosien, que le gouvernement impérial s'était occupé de l'état de ces diffé- rentes chaussées.
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ont été classées en deux grandes catégories : 1° les grandes voies militaires, consulaires et prétoriennes ; 2° les voies vicinales.
Nous avons rangé dans la première de ces catégories, au chapitre I , la grande voie de Reims à Strasbourg par Metz, traversant l'arrondissement de Sarrebourg de l'ouest à l'est1.
Dans les autres chapitres figurent des voies vicinales, qui ne sont pas sans importance au point de vue straté- gique.
I.
La principale voie romaine de l'arrondissement de Sar- rebourg est celle de Reims à Strasbourg par Metz. Elle appartenait au réseau de l'est et mettait en communica- tion le Rhin avec Lyon , dont Agrippa avait fait le centre des voies de la Gaule, ainsi que nous l'apprend Strabon.
Cette voie consulaire, après avoir traversé la Germanie Première à Strasbourg (Argcntorale), franchissait les Vosges (sylva Vosagus), pénétrait dans la Belgique Pre- mière et passait la Sarre à Sarrebourg (Ponte Sar- ravi). D'après la carie de Peutinger, Sarrebourg se trouvait à douze lieues gauloises de Saverne ( Tabernœ) et à dix lieues gauloises de Tarquimpol (ad decem Pa- gos ou Decempagi). Ajoutons que Y Itinéraire d'An- tonin indique les mêmes stations. Les distances données par ces itinéraires, calculées en lieues gauloises de 2,221 mètres, se rapportent aux localités désignées et ne per-
i. Voy. M.Alex. Bertrand, Les Voies romaines en Gaule. Voies des Itinéraires ; résumé de la commission de la topographie des Gaules. Paris, 1864.
2
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mettent pas de mettre en doute le témoignage de ces an- tiques documents1.
Au xe siècle, cette voie était encore désignée sous le nom de s t rata publica tabernensis*.
Suivant 31. le colonel de Morlet, auquel nous devons le Tracé des voies romaines du département du Bas- Rhin*, elle sortait de Saverne par le chemin dit Herren- iceg, pour franchir les Vosges au nord de la route impé- riale, au canton de YAltsleig (ancienne route de la côte de Saverne) et se dirigeait sur Phalsbourg, en laissant à sa droite des habitations gallo-romaines découvertes ré- cemment au Fahlberg , ainsi qu'une voie qui se dirigeait vers Trêves en côtoyant la montagne.
Suivant M. le colonel Uhrich", la voie consulaire pas- sait au-dessous du rocher appelé le Saut-du-prince- Charles, au sud de la route impériale, qu'elle allait re- joindre à la maison forestière de la côte de Saverne, tandis qu'une autre voie suivait la vallée de la Zorn , passait à Lutzelbourg et se dirigeait, comme les précédentes, vers Tarquimpol.
Quant à nous, il nous semble que la principale de ces trois voies est celle de la vallée de Lutzelbourg ; elle pas- sait à Dannelbourg et près de l'ancien télégraphe de Saint- Jean-Courtzerode, se dirigeait en ligne droite vers le clocher de Réding et venait se perdre entre Eich et le
1. Voy. M. Alex. Bertrand (loco citato). Le mille romain est d'environ 1,481 mètres. La lieue gauloise valait un mille et demi.
2. Voy. Digot, Histoire d'Austrasie, t. IV, p. 222.
3. Voy. Mémoires de la Société pour la conservation des mo- numents historiques d'Alsace, 1860-1861.
A. Voy. Mémoires de l'Académie impériale de Metz, 1850- 1851.
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chemin de fer, sur le ruisseau de la Bièvre1, à quelque distance de Sarrebourg. Cette voie pavée était encore parfaitement visible au xvie siècle2.
Le pont qui reliait les deux rives de la Sarre à Sarre- bourg devait se trouver devant l'ancienne porte de France, aujourd'hui démolie, et donner une grande importance à la station romaine de Ponte Sarravi ou Ponte Sarvix, ainsi désignée dans différents documents anciens3.
Nous n'avons plus rencontré les traces de la grande voie de Strasbourg à Metz qu'au-delà de la Sarre, sur la ferme de Foudenhoff, commune de Haut-Clocher, et dans l'étang du Stock, où les travaux du canal des houillères de la Sarre ont mis au jour du béton romain*.
Après avoir traversé le Stock , la forêt de Fribourg et les terres de Desseling3, cette voie quitte l'arrondissement de Sarrebourg pour pénétrer dans celui de Château- Salins. Sur le plateau qui s'étend entre les bassins de la Seille et de la Sarre , dans l'immense plaine de Lindre, dont les marais et les prairies ne furent convertis en étang que vers le xive siècle, se trouvait une station militaire importante désignée par les itinéraires sous le nom de Decempagi ou Ad decem pagos : c'était Tarquimpol.
1. En allemand Bieber (caslor).
2. Voy. le voyage de Jodocus Sincerus, traduit dans les Mé- moires de la Société d' Archéologie lorraine.
3. Voy. M. H. Lepage, Dictionnaire topographique, p. 124. Cet ouvrage est surtout utile à consulter parce qu'il fait connaître les fréquentes altérations de l'orthographe des noms de lieux.
4. Ce béton est composé de gravier de la Sarre, de quartz, felds- path, serpentine, amphibole et chaux grasse (communication de M. l'ingénieur Hirsch, 1864).
5. A quelque dislance de Desseling, près de Bisping, on trouve . des restes d'une chaussée pavée.
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Quelques antiquaires ont placé à tort cette station soit à Bisping, soit à Dieuze, localités qui ne renferment pas de restes de temples, de fortifications, de tombeaux, d'aque- ducs, comme Tarquimpol, autrefois le centre de plusieurs voies, dont on retrouve encore les nombreux tronçons. La Table de Peulinger fixe, il est vrai, la distance de A d decem pagos à Delme, à douze lieues gauloises ; mais c'est une de ces distances données inexactement par des chiffres altérés, ainsi que le démontre une savante disser- tation à laquelle nous empruntons le tableau suivant, au- quel nous n'avons trouvé à rectifier que le nom de Delme, chef-lieu de canton1 :
LES VOIES ROMAINES EN GAULE.
VI.
DE REIMS A STRASBOURG, par Metz.
STATIONS. |
«à a u a> es S u. ~ |
H u • T. <0 < == |
JNATION cuments. |
IDENTIFICATION. |
|
H 2 CA •3 |
a |
DÉSK des do |
|||
7. |
Divodurum |
Metz. |
|||
8. |
Ad Duodecimum |
Xll |
12 |
T. P. |
Desme. |
9. 10. |
Ad Decem Pagos Pons Saravi |
XII X |
15 10 |
T. P. T. P. |
Tarquimpol. Sarrebourg. |
11. |
Tabernse |
XII |
12 |
T. P. |
Saverne. |
12. |
Argentoratum |
XIII |
14 |
It. 240 |
Strasbourg. |
II.
Les hordes germaniques, enhardies par les divisions et l'affaiblissement de la puissance impériale, avaient pris
i. Voy. M. Alex. Bertrand (loco citato), p. 15, 46 et 49.
— 21 —
l'habitude de franchir le Rhin. Ces irruptions devinrent de plus en plus fréquentes jusqu'à la fin de l'année 406, où eut lieu la grande invasion. Des nuées de barbares en- vahirent le sol des Gaules. Depuis longtemps les légions romaines cantonnées sur la frontière avaient été obligées de se replier dans l'intérieur ; les populations ne pouvant rester sans défense, on avait fortifié les villes et créé, sur la cime des Vosges, des vigies, des camps retranchés, ces murs des payens, derrière lesquels venaient s'abriter les colons, lorsque les signaux transmis d'un poste à l'autre annonçaient l'approche de l'ennemi. Des Germains auxi- liaires, recrutés chez les populations tudesques, avaient été incorporés dans les légions, et les ripuaires cultivè- rent les champs que leurs pères avaient si souvent rava- gés ! Barbares et Romains étaient devenus les milites militanei, qui, pendant longtemps, résistèrent avec suc- cès aux irruptions étrangères1.
Le massif des montagnes qui s'élèvent entre les vallées de la Bœrenbach et du Schackeneck, était couronné par des constructions destinées à défendre le passage de la Zorn. Les villages de Garrebourg, Hùltenhausen et le château de Lutzelbourg, furent construits avec les débris du castrum gallo-romain du Gross-Limmersberg, d'un pourtour de six lieues, dans l'intérieur duquel une popu- lation tout entière pouvait se réfugier avec ses troupeaux ; de curieuses statues en pierre y ont été trouvées , entre autres un Mercure qui a été transporté au Musée lorrain2.
On remarque une autre enceinte fortifiée au Heydens- tadt, foret des quatre communes dans le Bas-Rhin.
1. Voy. Digot, Histoire d' Austrasic, t. I, p. 67.
2. Voy. M. Goldenberg, Notice sur le castrum gallo-romain du Gross-Limmersberg.
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Nous citerons aussi les Heidenmauer (murs des payens) de la forêt de Haberacker, la Schanz, enceinte fortifiée de Ilazelbourg, le chemin dit des Princes, voie pavée en cubes de grès, qui, de la montagne de Dabo, se dirige d'un côté vers l'Alsace, et de l'autre vers la vallée de la Bœ- renbach. Cette chaussée, remarquable par ses restes de pavés de pierre de taille, nécessaire dans un pays de sable, remonte sur le Holhvalsch, traverse la nécropole gallo-romaine du Trey-Hciligen , dans la forêt de Wals- cheid1, et descend dans la plaine par la vallée de la Bièvre.
Un embranchement du chemin dit des Princes se diri- geait de Saint-Léon de Walscheid sur Voyer ( Via ro- mana), après avoir traversé les ruines des villages de Dû- renstein2.
Non loin de là, à l'opposite de la forêt de Barville, s'é- levaient les gradins étages de la ligne de défense de Wasperwillër, sur le plateau appelé le Bas-Bois, qui domine le cours de la Sarre-Rouge.
Un chemin, dont on perd fréquemment les traces, suit les sinuosités de la montagne qui sépare les départements de la Mcurlhe et du Bas-Rhin, et pénètre jusqu'au Do- non, dans le département des Vosges. Le Donon était couronné, non-seulement par des fortifications, ainsi que le constate la visite de Dom Alliot en 1G923, mais aussi
1. Les plus curieuses des tombes du Trey-Hciligen sont conser- vées dans les musées de Strasbourg et de Savcrne, où elles ont été transportées assez récemment.
2. Voy. Beaulieu, Le comte de Dagsbourg, p. 291.
3. Voy. Journal de la Société d' Emulation du département des Vosges, 1827, I. Il, p. 18.
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par un temple dédié à Mercure, dont l'incurie et le van- dalisme ont fait disparaître les curieux vestiges1.
La chaussée romaine de Wisch , mentionnée sur la carte des voies romaines du département du Bas-Rhin, passait sur le Donon par la Charaille, faisait la séparation des rivières de la Plaine et de la Sarre-Blanche , descen- dait dans le département de la Meurthe et se trouve dési- gnée sous le nom de chemin d'Allemagne.
III.
Toutes les collines qui s'étendent depuis Hattigny jus- qu'à Sarrebourg, dans la direction de Fraquelfing , Her- melange, Imling, étaient habitées du temps des Romains, qui y avaient probablement, suivant M. Bégin, élevé une seconde ligne de retranchements, dont la grande muraille vosgienne formait la première2.
A Niederhoff, au lieu dit le Paquis, se trouve un re- tranchement s'étendant jusqu'à Heille , écart des Métai- ries-de-Saint-Quirin. Plusieurs voies, qui ont encore conservé des tronçons pavés , viennent s'y rattacher3 :
1° Le chemin du canton deBlâmont, qui, se bifurquant sur le ruisseau de Vacon, se dirige d'un côté vers Ancer- viller et de l'autre vers lgney.
2° Celui d'ibigny, Foulcrey et Avricourt.
3° Celui de Fraquelfing, Landange, Moussey, Ketzing, ferme située près de l'étang de Gondrexange, où l'on re-
1. Pour se convaincre de l'importance de ce temple, il suffit d'exa- miner les bas-reliefs conservés au musée d'Epinal.
2. Voy. Mémoires de la Société des Antiquaires de France,
1836.
3. Nous avons eu recours, dans cette partie de notre travail , aux indications fournies par MM. les agents-voyers et par M. le docteur Marchai, de Lorquin.
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marque un retranchement. Une bifurcation faisait com- muniquer cette route avec Tarquimpol par les étangs de Xirxange et de Hellocourt.
4° Le chemin dit d'Allemagne, dont nous avons parlé.
5° La voie de Niederhoff à Sarrebourg, passant entre Hermelange etNitting, croisant, près de Schncckenbùsch, le chemin dit des Princes et traversant liesse au canton de Marjac.
On ne retrouve plus le tracé des voies qui rayonnaient autour de Sarrebourg. Celle d'Imling, village qui , sui- vant la Statistique, semble avoir été un poste important, va se perdre par la ferme de la Forge dans les terres du canton Bettling. Entre Saint-Ulrich et la Landbach, com- mune de Dolving, on trouve le tronçon d'un ancien che- min pavé dont nous ignorons la direction. Au nord de Sarrebourg, au canton Krentznacker, commune de Ré- ding, on rencontre une voie qui rattachait Lixheim à Sar- raltroff.
Sur le plan cadastral de Sarraltroff, les noms caracté- ristiques de Romansbcrg, Heidenmat, Heidenmauer, Heidenschloss, Heidenbronn , Ileidenfeld (mont des Romains, pré, mur, château, fontaine, champ de payons), dans la campagne des mureaux ou l'on remarque des restes de constructions d'origine romaine, des médailles et d'autres indices, ne permettent pas de douter de l'an- quité de ce village, dont le nom, en français, signifie vieux village de la Sarre1.
1. Sur le versant d'uue colline qui sépare Sarraltroff tle Hilucs- heim, où l'on rencontre aussi d'anciens chemins, on remarque une enceinte fortifiée qui porte le nom A'Alt-Castel. Selon quelques ar- chéologues, ce nom, assez commun du reste, désignerait les châteaux d'origine gallo-romaine, tandis que celui d'Alt-Schloss, qui a la même signification, se rapporterait aux ruines des burgs du moyen-âge.
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La voie, connue sous le nom de Hunweg (chemin des Huns), était parallèle à la Sarre qu'elle traversait sur un pont, dont il existe encore des débris à Romel - fing ; elle gagnait Fénétrange, par la route départemen- tale n° 17, autrefois désignée sous le nom de Herrenweg (chemin des Seigneurs). Cette voie se bifurquait à Obers- tinzel , pour gagner Hellering, Kirchberg et les termes de Mackwiller (département du Bas-Rhin)1.
Au-dessus de Fénétrange on trouve un tronçon de che- min pavé se dirigeant vers Postroff.
Sur la rive gauche de la Sarre, deux voies se ratta- chaient à celle de Metz à Strasbourg : l'une passait à Haut- Clocher, Bébing et Xouaxange ; l'autre partait de l'étang du Stock , passait près des ruines romaines de l'Ait— Schloss, non loin d'une tuilerie située derrière Langatte, traversait les terres de Gosselming, Saint-Jean-de-Bassel et Berthelming, où elle quittait la ferme de Thelung pour se perdre dans la forêt de Schwanhals, sur les bords de l'étang de Mittersheim, dans la direction de Tarquimpol.
Avant de clore cette liste, bien incomplète, nous signa- lerons la voie qui venait aboutir à Tarquimpol en passant par Inswiller, la ferme de Rotherhoff, Vibersviller, Alt- viller et Sarre-Union, en se dirigeant vers Trêves.
IV.
En suivant les voies pavées que nous venons d'étudier, on rencontre non -seulement de nombreux débris de tuiles à rebord, mais aussi des trous de forme conique, plus ou moins larges et plus ou moins profonds, dont le diamètre varie de 10 à 40 mètres et la profondeur de 2 h
1. Celte voie passait à l'est de Kirchberg en coupant la route de Phalsbourg à Fénétrange.
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10 mètres. Dans les forèls ce sont des mares couvertes de plantes aquatiques ; dans les plaines, les travaux de l'agriculture les ont desséchées et en partie nivelées. Ces enfoncements circulaires ne furent pas destinés à servir de campements aux légions en marche, comme l'ont supposé quelques antiquaires, qui leur ont donné le nom d'excavations romaines1.
La découverte de la nature et de l'usage de ces cu- rieuses cavités appartient à l'Allemagne, où elles sont plus nombreuses qu'en France2. Creusées par les Gau- lois, sur la pente des coteaux, pour faciliter l'écoulement des eaux, elles furent destinées à leur servir d'habita- tions ; les plus simples n'étaient que des huttes sembla- bles à celles de nos charbonniers.
Sur le Rotherhoff, entre Millersheim et Munster, on a trouvé des fragments de poterie et des troncs d'arbres au fond d'une de ces mares que l'on avait cherché à vider et à combler. Ces baliveaux, rayonnant du centre de la mare, avaient dû se rejoindre au sommet et former un abri, couvert de paille, de terres, de fascines ou de fumier, pour servir de demeure aux anciennes populations. In- clinés et areboutés les uns contre les autres, ils formaient un toit conique, recouvrant une habitation de forme cir- culaire.
Dans une autre de ces mares, mise à sec à la suite des travaux du canal des houillères de la Sarre, nous avons
1. Voy. M. l'abbé Lcdain, Notices sur les musées de Maycnce et de Wiesbaden (Société d' Archéologie et d'Histoire de la Mo- selle, 18G2, p. 53 et 70).
2. Voy. Dunuliaupt, Antiquités saxonnes, 1718. — Ibid. Ar- chéologie britannique, 1785. — Ibid. Mémoires de la société des Antiquaires de France, 1838.
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remarqué des troncs de chêne, noircis par leur long sé- jour dans l'eau, façonnés grossièrement à la hache et mesurant 6m,50 de longueur sur 0m,54 de diamètre ; ils étaient enfoncés profondément dans le sol. Aux environs d'Albecheau, le long du canal, on rencontre en moyenne par kilomètre trois de ces excavations coniques, qui ne sauraient être des affaissements du sol ; mais autour des- quelles on ne remarque pas de débris de tuiles à rebords ni terrassements ; c'est sans doute ce qui a fait supposer, ainsi que d'autres indices, que c'étaient des réservoirs d'eau, des citernes à ciel ouvert, que les populations an- tiques y avaient établies ; opinion que nous ne saurions partager1.
Dans la Lorraine allemande, on donne à ces mares le nom de Heidenpullen (mares des payens) , en Angle- terre celui de pennpits, et en France, de margelles ou fosses à loup.
On s'est demandé si, en faisant un relevé exact du nombre de ces excavations, il ne résulterait pas, de l'en- semble de cette étude, des données précieuses sur la dis- tribution géographique de l'ancienne population de la Gaule. La solution de cette question, que nous trouvons posée dans le 24e volume du Magasin pittoresque, est d'autant plus difficile que ces mares ont disparu aux alen- tours des villages ; leur position sur la pente des co- teaux a facilité leur dessèchement ; elles ne se sont con- servées que dans les cantons éloignés et surtout dans l'intérieur des forêts.
1. Voy. M. Maud'heux, Notice sur les mares, maies ou mortes du département des Vosges, insérée dans les Annales de la So- ciété d'Emulation des Vosges, 1861 et 1862.
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Si nous descendons dans la vallée de la Sarre, dont l'importance, comme voie militaire et commerciale à l'é- poque gallo-romaine, a été remarquée1, nous y trouvons des vestiges de camps fortifiés et de burgs du moyen-âge, où l'on a découvert des antiquités romaines ; ces points stratégiques semblent avoir été, avant leur transforma- tion, les castra Sarrœ pro militum cuslodia, men- tionnés sur une ancienne inscription2.
Nous signalerons les ruines de Xouaxange et de Gé- roldscck près de Niederslinzel, situées au milieu des prés ; les restes de pierres calcinées, de pierres de taille, de cendres et de tuiles à rebord dans un canton appelé All- Schloss, près de Berthelming, lmling et Sarreck, où il y avait des châteaux ; Sarrebourg, où , jusqu'à la fin du moyen-âge, se percevait le péage des flottes qui condui- saient les sapins de la montagne jusqu'aux pieds du mo- nument romain d'Igel, à l'embouchure de la Sarre. Tous ces postes étaient situés sur la rive droite. On peut faci- lement admettre que les natitœ saravl étaient protégés par ces lieux fortifiés , quand ils descendaient la rivière chantée par Ausone dans son poème intitulé Mosella :
Naviger undisona dudum me mole Saravus Tola voce vocat : longum qui distulit amnem, Fessa sub Augustis ut volveret ostia mûris.
Dans ce travail, entrepris à la recherche des voies ro- maines du pays, il est de nombreuses lacunes que des découvertes ultérieures, dues surtout au hasard, parvien- dront sans doute à combler : c'est ainsi que, tout récem- ment, nous avons rencontré un chemin pavé très-impor-
1. Voy. M. de Morlel (loco citato), p. 6-2.
2. Voy. Gruler, fnscriptiones, p. 225.
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tant au milieu de la tranchée qui sépare de la forêt domaniale du Kempel le quart en réserve du Burgerwald de Fénétrange, entre les routes d'Albestroff et de Dieuze ; suivant les uns , ce chemin reliait Tarquimpol à Féné- trange ; suivant d'autres, il allait traverser la Sarre de- vant les ruines de Gérolseck, en se dirigeant vers Postroff. Dans la forêt du Kempel, près de ce chemin, se trouvent des tuiles romaines, des mares des payais, habitations gauloises placées sur le penchant des coteaux pour l'écou- lement des eaux, et enfin quelques fragments de sculp- tures, que nous avons signalés dans le Répertoire ar- chéologique de l'arrondissement de Sarrebourg .
MÉMOIRE
SUR L'EMPLACEMENT DE LA BATAILLE
GAGNÉE PAR JOV1N SUR LES GERMAINS,
DANS LA LORRAIN!!,
PAR M. AUG. DIGOT.
La question que nous allons essayer de résoudre a déjà été l'objet de plusieurs mémoires spéciaux. Le R. P. Le- bonnctier, prémontré, dernier curé de Scarpone, se livra, relativement à l'histoire de cette ville ancienne, à d'im- menses recherches dont il consigna les résultats dans trois volumes in-4°, manuscrits, aujourd'hui déposés à la bibliothèque publique de Nancy1. Comme ces notes in- formes et confuses ne pouvaient être consultées que diffi- cilement, M. le docteur Lamoureux, de Nancy, en fit un extrait méthodique, clair et substantiel, qui fut imprimé
1. Cabinet des manuscrits, u° 88.
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dans les tomes VI11 et X des Mémoires publiés par la Société royale des Antiquaires de France. Le P. Le- bonnetier et son abréviateur ont tous deux examiné la question qui nous occupe, et c'est en grande partie d'après les renseignements par eux recueillis que nous entreprendrons de la résoudre. Une autre dissertation sur le même sujet a été insérée par M. Beaulieu dans le 1er volume de son ouvrage intitulé : Archéologie de la Lor-
raine*.
Nous venons de dire que nous nous servirions des ren- seignements recueillis par le P. Lebonnelier; mais il ne faut pas conclure que notre mémoire ne renfermera qu'une analyse de ses recherches ; la lecture de ces pages suffira pour prouver que nous avons suivi son opinion seulement quand elle nous a paru conforme à la vérité, et que, sur des points importants, nous avons cru devoir formuler des conclusions toutes différentes des siennes.
Pour bien préciser la question à l'examen de laquelle nous allons nous livrer, il importe de recueillir les ren- seignements que nous a conservés sur la bataille, ou, pour mieux dire, sur les deux batailles livrées près de Scarpone, Ammien-Marcellin, le seul des auteurs anciens qui en ait parlé ; et nous ne pouvons mieux faire que de reproduire les propres expressions de cet historien. Après avoir rapporté la défaite de Sévérien et de Carietton, au commencement de l'année 566, Ammien-Marcellin ra- conte que les Germains se répandirent dans le nord-est des Gaules, où ils commirent de grands ravages. L'em- pereur Valentinien 1er, qui se trouvait alors dans cette province, se hâta de prendre les mesures nécessaires
1. Pages 107-109.
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pour arrêter le torrent. « Quà clade cuni ultimo mœrore » compertà (dit l'historien latin), correcturus seciùs gesta » Dagalaïphus à Parisiis mittitur. Eoque diù cunctante, » causanteque diffusos per varia barbaros semet adoriri » non posse, accitoque paullo post ut cum Gratiano » etiam tum privato susciperet insignia consulatùs, Jo- » vinus equitum niagister accingitur : et instruclus para- » tusque cautissimè observans utrumque sui agminis » latus, venit propè locum Scarponna : ubi inopinus ma- » jorem barbarorum plebem, antequam armaretur, tem- » poris brevi puncto prœventam ad intcrnecionem ex- » tinxit. Exultantes innoxii prœlii glorià milites ad alterius » globi perniciem ducens, sensimque incedens rectos » eximius speculatione dedicit fidà, direptis propiùs vil- » lis, vastatoriam manu m quiescerc propè flumen : jam- » que adventas, abditusque in valle densitate arbustorum » obscurâ, videbat lavantes alios, quosdam comas ruti- » lantes, ex more, potantesque nonnullos. Et nactus ho- » ram impendiô tempestivam, signo repenti per lituos » dato, latrocinalia castra perrupit : contraque Germani » nihil praeter inefficaces minas jactanter sonantes et fre- » mitum, nec expedirc arma dispersa, nec componere » aciem, nec resurgerc in vires permittebantur, urgente » instantervictore. Quocirca forati pilis et gladiis cecidere » complures, absque iis quos versos in pedes texere » flexuosi tramites et angusti. Hoc prospero rcrum effectu » quem virtus peregerat et fortuna, auctà fiducià, Jovinus » militem ducens, diligenti speculatione prœmissa, in » tertium cuneum qui restabat, properè castra com- » movit1 »
1. a Valenlinien ayant appris avec un grand chagrin cette défaite » (celle de Sévérien et de Carietton), envoya pour y remédier Daga-
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Ainsi, il résulte du récit d'Ammien, que Jovin surprit et extermina près de Scarpone une première troupe de barbares ; qu'il se mit ensuite à la recherche d'une autre bande qui se reposait sur les bords de la Moselle , après avoir dévasté les villas voisines ; que le général romain profita d'une forêt pour couvrir sa marche et arriver jus-
» laïf, qui se trouvait alors à Paris. Mais celui-ci, différant toujours » d'attaquer les Germains, et donnant pour motif que leur division » en plusieurs bandes l'empêchait de leur livrer bataille, fut rappelé » peu de temps après pour prendre les insignes du consulat avec » Gratien, qui n'était pas encore en charge ; et Jovin, maître de la » cavalerie, fut chargé de le remplacer. Celui-ci, après avoir pris » toutes les précautions et tous les renseignements nécessaires , el ii surveillant avec grand soin les deux flancs de son armée, s'appro- ii cha du lieu nommé Scarpone ; là, il surprit une troupe considérable » de Germains et la massacra, avant même que les barbares eussent ii pu saisir leurs armes. Profitant de l'ardeur des soldats, encouragés » par ce combat glorieux qui ne leur avait point coûté de sang, Jovin » les conduisit contre une autre bande. S'avançant avec lenteur, cet h excellent général apprit par des éclaireurs, sur lesquels il pouvait n compter, que les barbares, après avoir dévasté les villas voisines, » se reposaient près du fleuve. II s'en approcha et, caché dans une » vallée par l'épaisseur d'une forêt, il aperçut les Germains, les uns n se baignant, les autres se teignant la chevelure en rouge, selon leur n coutume, et les autres buvant. Trouvant le moment favorable, il M ordonna aussitôt aux clairons de donner le signal et se précipita n sur le camp des barbares. Ceux-ci ne purent que faire entendre des ii cris et des menaces aussi vaines que ridicules ; les vainqueurs, » fondant sur eux avec rapidité, ne leur laissèrent le temps ni de sai- » sir leurs armes dispersées çà et là, ni de se mettre en bataille, ni » de se réunir en force. Un grand nombre tombèrent percés de coups » d'épées ou de javelots ; il n'y eut de sauvés que ceux qui gravirent » des sentiers difficiles et tortueux. Après ces heureux suecès, dus « au courage et à la fortune, et qui augmentèrent la confiance du » soldat, Jovin envoya devant lui des éclaireurs, et conduisit promp-
ii tement son armée contre une troisième bande de barbares » —
V. Ammiani Marcellini rerum gestarum qui de XXXI supersunt libri XVIII ; lib. XXVII, cap. 2, édit. Valois, in-folio, page 476.
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qu'auprès des Germains ; que cette foret était située clans une vallée, et que, près de là, se trouvaient des hauteurs, puisque les fuyards s'échappèrent par des sentiers diffi- ciles et tortueux.
Tels sont les renseignements historiques qu'Ammien- Marcellin nous a transmis sur ces deux combats ; nous n'en possédons pas d'autres , et Zosime , qui rapporte la défaite de Sévérien et de Carictton1, ne parle pas des exploits de Jovin, sans doute parce que le général était chrétien.
Le but que nous devons nous proposer d'atteindre est de déterminer, soit d'après le texte d'Ammien, soit par l'examen des localités, l'emplacement des deux batailles dont nous venons de rapporter le récit.
La première partie de cette tâche est assez difficile, car l'historien latin, parlant du premier combat que livra Jo- vin, dit seulement que ce combat eut lieu près de Scar- pone. Pour arriver à quelque chose de plus positif, il serait nécessaire de savoir quelle route Jovin avait suivie pour s'approcher de celle ville. Au rapport d'Ammien, Dagalaïf avait quitté Paris pour aller se mettre à la tête de l'armée destinée à repousser les barbares ; d'un autre côté , une partie des Germains s'étaient avancés jusque dans les environs de Chàlons-sur-Marnc (Calalauniy ; il est par conséquent probable que les troupes romaines se trouvaient à peu près vers la frontière de la Belgique Première et de la Belgique Seconde, et que Jovin , après avoir pris le parti d'attaquer d'abord les deux bandes de Germains qu'il jugea les moins redoutables, marcha dans
1. Y. l'ouv. de Zosime, édition d'Oxford, livre IV, page 210.
2. V. Ainmien, loc. cit.
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ïa direction de l'occident à l'orient, suivant la grande voie qui conduisait de Nasium à Metz , en passant par Tullum (Toul) et Sarpone. S'il en fut ainsi, et on verra plus bas que les choses ne purent guère se passer autrement, la première action eut lieu sur la rive gauche de la Moselle, près de Scarpone, et vers le point que nous avons indi- qué sur le plan joint à ce mémoire.
Le P. Lebonnetier et d'autres personnes ont pensé que le lieu du combat devait, au contraire, être cherché sur la rive droite de la rivière ; mais ils ne songeaient point alors au changement survenu depuis le ive siècle dans la topographie de cette contrée. La ville de Scarpone était primitivement située sur la rive gauche de la Moselle et faisait partie du diocèse de Toul ; mais cette rivière chan- gea plus lard de lit, et Scarpone se trouva alors sur la rive droite et dans le diocèse de Metz1. En 566, elle était encore sur la rive gauche ; et si le combat livré par Jovin eut lieu près de Scarpone , il est plus vraisemblable de supposer que ce fut du même côté de la rivière. Nous ajouterons plus bas à cette probabilité d'autres considé- rations qui suffiront , nous l'espérons du moins, pour la changer en certitude.
Jovin, après le premier succès qu'il venait d'obtenir, ne s'arrêta probablement pas sur le champ de bataille, et conlinua sa marche pour atteindre une autre bande de Germains , qui continuait ses ravages sur la rive droite
1. Scarpone est située dans une île, parce que. l'ancien bras est aujourd'hui rempli d'eau et se trouve même seul navigable ; mais, au moyen-âge, le bras occidental de la rivière semble avoir été beaucoup plus important que le bras oriental ; on ne comprendrait pas, sans cette circonstance, comment Scarpone aurait été réunie au diocèse de Metz, après avoir été longtemps réunie à celui de Toul.
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de la Moselle , mais dont il ne connaissait pas au juste la position. Pensant, selon toutes les probabilités, que les barbares s'étaient rapprochés de la Moselle, et ne voulant point aller à eux en suivant le fond de la vallée, afin de n'être pas découvert, il traversa la rivière sur les ponts de Scarpone et se dirigea de l'ouest à l'est, en traversant les territoires actuels des villages de Bezaumont, Ville— au-Val et Landremont. Arrivé à la pointe sud-est de la montagne Sainte-Geneviève, au pied et sur le flanc de laquelle sont bâtis les trois villages que nous venons de nommer, il changea tout à coup de direction et s'avança vers le nord, au milieu d'une foret qui devait être à cette époque beaucoup plus étendue qu'aujourd'hui. Il mar- chait alors parallèlement à la Moselle , mais à une assez grande distance de la rivière, et tous ses mouvements étaient dérobés par la montagne Sainte-Geneviève, qu'il laissait à gauche. Il devait être parvenu vis-à-vis la pointe nord-est de cette montagne, où se trouve aujourd'hui la tuilerie Sainte-Geneviève, lorsque ses éclaireurs lui rap- portèrent que les Germains, après avoir dévasté les villas voisines, se reposaient sans défiance sur la rive droite de la Moselle. Jovin forma aussitôt le projet de les attaquer à l'improviste. Pour parvenir du lieu où il se trouvait jusqu'au bord de la rivière, il faut suivre une vallée con- nue sous les noms de Fauquemine et de Hollanbois. Cette vallée est aujourd'hui couverte de bois presque dans toute sa largeur, et il est probable qu'au ive siècle, la forêt couvrait la croupe de la montagne Sainte-Geneviève. Quoi qu'il en soit, le bois actuel, nommé forêt de Facq, est assez vaste pour dérober la marche d'une armée peu considérable , et s'avance assez près de la Moselle pour qu'on puisse s'approcher de cette rivière sans être aperçu.
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Arrivés à l'extrémité de ce bois, les Romains aperçu- rent les barbares qui étaient répandus fort en désordre sur la rive de la Moselle, à l'endroit où cette rivière fait un coude vers l'orient, entre les villages de Loisy et d'At- ton. C'est là qu'attaqués à l'improviste et avec une grande vigueur, les Germains furent taillés en pièces avant d'a- voir pu se réunir et se mettre en défense.
Sans parler d'une tradition conservée dans le pays et selon laquelle une bataille aurait été livrée en ce lieu , on rencontre encore entre les deux villages que nous venons de nommer quelques traces de la victoire de Jovin. Ainsi, une pièce de terre, située près de la rivière, porte le nom de Terre maudite, et la tradition rapporte que cette dé- nomination lui fut donnée à cause des torrents de sang dont elle avait été abreuvée. Un autre canton, placé vers le village d'Atton et l'ancien étang d'Arbonne , à peu de distance, par conséquent, de celui dont nous venons de parler, s'appelle encore aujourd'hui l'Atrêe des Alle- mands. On sait que le mot atrêe ou ailre signifie cime- tière, et il est très-probable que l'on réunit et que l'on enterra en ce lieu les nombreux cadavres des Germains dont le sol était jonché. Enfin, près du village de Loisy et toujours à peu de distance du champ de bataille, se trouvait une croix qui a subsisté jusqu'en 1793, et s'ap- pelait Croix Ma ttirion. Une tradition, dont nous n'avons pas à examiner la valeur, faisait dériver ce nom des mots latins crux martyrorum, et rapportait que la croix avait été élevée sur l'emplacement où furent ensevelis les sol- dats chrétiens qui faisaient partie de l'armée de Jovin. Nous ne pouvons dissimuler que cette étymologie ne nous satisfait pas complètement, et il nous répugne d'ad-
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mettre que l'on ait décerné le titre de martyrs à des sol- dats tués dans une bataille1.
Il est utile cependant de faire observer que la majorité de l'armée de Jovin devait être chrétienne, et que, sous l'empire de Julien, lui-même s'était toujours fait remar- quer par l'inébranlable fermeté de ses convictions reli- gieuses2. Il n'est donc pas impossible qu'il ait érigé une croix pour conserver le souvenir de ceux de ses coreli- gionnaires, en petit nombre, du reste, qui venaient de périr sous ses yeux. Enfin, nous devons mentionner une der- nière circonstance qui s'accorde avec les faits que nous venons de rappeler pour fixer le lieu du combat entre les villages d'Atton et de Loisy. Ammien-Marcellin rapporte que les seuls Germains qui parvinrent à s'échapper, sui- virent en fuyant des sentiers difficiles et tortueux. Or, on ne peut contester ce caractère aux sentiers qui con- duisent de la vallée de Hollanbois et des environs de l'étang d'Arbonne sur la montagne Sainte-Geneviève et sur la colline où s'élève le village d'Atton. On comprend facilement que les Romains, fatigués d'une longue marche et chargés d'armes pesantes, n'aient pu atteindre des hommes désarmés et à qui l'instinct de la conservation prêtait de nouvelles forces.
Telles sont les conclusions auxquelles nous ont con-
i. On peut voir l'opinion de M. Clouet sur celle croix, dans son Histoire ecclésiastique de la province de Trêves, lonic I , pages 355 et 356.
2. Jovin élait de Reims, et on voit encore, dans la cathédrale de cette ville, un tombeau antique en marbre blanc que l'on prétend être celui de ce général. Avant la révolution, ce tombeau élait placé dans l'église Sainl-Nicaise, dont Jovin passait pour être le fondateur. V. Morlot, Melropolis Remeusis Ilistoria, I, 503.
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duit une étude attentive du texte d'Ammien-Marcellin et un examen consciencieux du plan topographique des en- virons de Scarpone. Nous ne devons pas, au reste, dissi- muler que le P. Lebonnetier et son abréviateur n'ont pas adopté la même manière de voir.
Selon le P. Lebonnetier, Jovin, qui se trouvait sur la rive droite de la Moselle, aurait marché du sud au nord et aurait attaqué la première troupe des Germains sur le territoire de la commune de Loisy, à peu près dans le canton où s'élevait la Croix-Matlirion, et de là, conti- nuant sa marche vers le nord, il aurait surpris la seconde troupe non loin de la colline d'Atton, au lieu que l'on regarde comme celui où se livra le dernier combat1. Dans le même système, la Croix-Matlirion aurait été élevée sur la tombe des soldats chrétiens tués dans la première bataille.
Nous croyons qu'il n'est pas difficile de faire com- prendre que cette explication ne peut être la véritable. L'espace qui sépare les deux villages de Loisy et d'Atton n'est que d'une demi-lieue. Par conséquent, si les Ro- mains avaient attaqué la première bande dans les envi- rons de Loisy, il est certain que les fugitifs n'auraient pas manqué de se diriger vers le lieu si rapproché où ils savaient rencontrer leurs compatriotes, et, dès lors, une seconde surprise serait devenue impossible. Ammien- Marcellin semble dire, il est vrai, que les Germains, ren- contrés d'abord par Jovin, auraient été exterminés ; mais on sait que des expressions semblables ne doivent pas être prises à la rigueur. Nous admettons que très-peu
1. V. le manuscrit n° 84 de la bibliothèque publique de Naucy, et Mémoires de la Société royale des Antiquaires de France, lomeVIH, pages 17G et 177, et tome X, pages 57 et GO.
— 40 —
de barbares parvinrent à s'échapper, mais nous ne pou- vons croire qu'ils aient péri jusqu'au dernier. Supposons cependant qu'il en ait été ainsi ; eh bien ! le système du P. Lebonnetier ne sera pas plus vraisemblable : si le premier combat a été livré à Loisy, les Germains, campés sur la rive droite de la Moselle, ont, à deux kilomètres de distance tout au plus, dû entendre le bruit du combat, le son des instruments militaires, les cris des mourants, la rivière a dû rouler devant eux les cadavres de quel- ques-uns de leurs compatriotes. Mais il y a plus, et nous soutenons que les Germains, du point où ils se trouvaient placés, devaient voir le lieu où se serait livré le premier combat d'après le P. Lebonnetier. Ils se seraient, par conséquent, hâtés d'accourir au secours de leurs frères, et ne se seraient pas laissé surprendre bientôt après.
Il faut d'ailleurs faire observer que, si les choses s'étaient passées comme le croyait le curé de Scarpone, Jovin n'aurait pu suivre la vallée de Hollanbois pour marcher contre la seconde troupe des Germains ; pour pénétrer dans cette vallée , il aurait été obligé de gravir la mon- tagne Sainte-Geneviève, de traverser le petit plateau qui la surmonte , et d'en redescendre la pente orientale. Un pareil mouvement n'aurait pu s'effectuer sans être re- marqué, et, du haut de la colline d'Atton ou même du bord de la Moselle , les Germains n'auraient pu manquer de s'en apercevoir.
Enfin, nous croyons que la Croix-Mat tir ion ne peut être un souvenir du premier combat ; il parait que les Romains y perdirent bien peu de soldats , puisque Am- mien emploie à cette occasion les mots innoxii prœlii, tandis que l'on peut très-bien admettre que la seconde bataille a été plus sanglante. La Terre maudite et VA-
— 41 —
trêe des Allemands sont, d'ailleurs, assez rapprochés de Loisy pour que les soldats romains aient pu être enterrés près de ce village.
Nous ferons encore observer qu'Ammien ne désigne pas l'emplacement du premier combat d'une manière po- sitive, et que, par conséquent, rien, dans son récit, n'o- blige à croire que ce combat a été livré près de Loisy.
M. Beaulieu , dans son ouvrage intitulé Archéologie de la Lorraine, a parlé également de la victoire de Jo- vin ; mais il n'a pas cherché à déterminer le lieu de la première action ; il ne la mentionne même pas. Il croit que le général romain, parti de Metz , s'avança du nord au sud, jusqu'à l'entrée orientale de la vallée de Hollan- bois, et suivit, pour atteindre les Germains campés au pied de la colline d'Atton, l'itinéraire que nous avons in- diqué1.
Nous ne pouvons adopter complètement ce système. D'après Ammien, il y eut deux batailles distinctes , l'une près de Scarpone, l'autre sur les bords de la Moselle. M. Beaulieu parle de cette dernière action, mais il ne rend pas compte de la première ; son système en exclut même formellement la possibilité, car si Jovin arrivait de Metz au moment où il a pénétré dans la vallée de Hol- lanbois, il n'avait pu d'abord rencontrer et vaincre les Germains près de Scarpone, la vallée dont nous venons de parler, les villages d'Atton et de Loisy se trouvant entre Scarpone et Metz. De deux choses l'une, ou M. Beaulieu croit qu'il n'y eut qu'un seul combat, et, dans ce cas, il se trouve en contradiction avec le texte d'Ammien, ou il reconnaît qu'il y en a eu deux, et alors le
1. V. tome I, pages 102 et 108.
— 42 —
premier ayant dû être livré avant que Jovin atteignit la vallée de Hollanbois et la pente septentrionale de la montagne Sainte-Geneviève, le premier, disons-nous, aurait eu lieu loin de Scarpone ; ce que le récit de l'his- torien latin ne permet pas d'admettre.
Au reste, M. Beaulieu pense, comme nous, que la Croix-Mat tir ion se rattache au comhat livré sur le bord de la Moselle ; il pense même que la troupe de Germains que Jovin extermina en ce lieu y avait établi un camp fortifié, dont on verrait encore aujourd'hui quelques ves- tiges sur le territoire de Loisy1. Mais nous ne pouvons partager cette opinion , et nous croyons qu'il résulte du texte d'Ammien que les barbares n'étaient arrivés sur le bord de la rivière que depuis peu de temps quand ils furent surpris et passés au fil de l'épée.
En résumé, nous admettons, comme M. Beaulieu, que la principale action a eu lieu entre les villages d'Atton et de Loisy, à l'endroit où la Moselle fait un coude vers l'orient, et Jovin a suivi, pour y arriver, la vallée de Hollanbois, depuis la tuilerie Sainte-Geneviève; mais nous croyons que ce général a livré un premier combat aux Germains sur la rive gauche de la Moselle et à peu de distance de Scarpone ; que, pour gagner l'ouverture orientale de la vallée dont nous venons de parler, 11 a tourné la montagne Sainte-Geneviève ; en un mot, qu'il a suivi un itinéraire différent de ceux que l'on avait ad- mis jusqu'à présent.
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J, V. tome I, page 109.
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POÉSIES POPULAIRES
DE LA LORRAINE.
La Société d'Archéologie, pour répondre à un désii émané du ministère de l'Instruction publique, a déjà pu- blié, dans le quatrième volume de ses Bulletins, un cer- tain nombre de poésies populaires de notre pays. Elle pensait que cette manifestation appellerait l'attention de ses membres sur un genre de littérature qui n'est pas sans intérêt, et provoquerait, de leur part, des commu- nications qui lui permettraient de grossir le recueil qu'elle avait commencé à former. Elle ne s'était pas trompée : des envois assez importants lui ont été faits de divers points de la Lorraine et la mettent en position de donner aujourd'hui un supplément à sa première publication.
Ce supplément aurait pu être considérable si la So- ciété avait voulu faire imprimer toutes les pièces qui lui
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ont été adressées; mais notre honorable confrère, M. l'abbé Marchai, chargé de les examiner, a jugé que plusieurs d'entre elles devaient être écartées, pour divers motifs : quelques-unes ont trop peu de valeur, sont fades ou un peu crues ; les autres ne sont pas spéciales à nos contrées et se chantent presque partout en France, excepté peut- être dans les provinces du midi.
Voici celles que M. l'abbé Marchai a signalées comme méritant d'être publiées.
FRAGMENT.
Sainte Marguerite,
La vierge bénite,
Endormez le p'tit enfant
Jusqu'à temps qu'il sera grand,
Qu'il dira papa, maman. Dodo, l'enfant do, L'enfant dormira tantôt.
J'm'en vais à Saint- Jacques.
Quoi faire à Saint-Jacques ?
Chercher des images
Pour donner au plus p'tit,
Au plus mignon
De la maison
Et au plus sage. Dodo.
Sur le siège d'Epinal défendu par le comte de Toruielle'.
1 . Ce couplet et le suivant ont été communiqués par M. Maud'heux, père, président de la Société d'Emulation des Vosges.
— 4o —
Et vous sieur Brebagotte, où étiez-vous alors Quand le comte Tornielle nous fit un si grand tort ? J'étais en sentinelle sur la tour Saint-Goery, Et je faisais feu et flamme dessus les ennemis.
Sur M. de Beaubourg, intendant en Lorraine.
Nous porterons encore des souliers de roussi1, Malgré Beaubourg qui avait entrepris De nous mettre en sabots ; Qu'il est sot, Ah! qu'il est sot, Ce bigot, Ce cagot , Ce mangeur d'escargots2.
CHANSOiN3.
J'ai un beau château, va-t-en verre, verre, verre, J'ai un beau château, va-t-en verre, verre, veau.
Le mien est plus beau, va-t-en verre, verre, verre, Le mien est plus beau, va-t-en verre, verre, veau.
1. On appelait, et on appelle peut-être encore, roussi le cuir qui n'est ni ciré, ni verni. M. de Beaubourg l'avait probablement assujetti à une taxe qui fut levée.
2. On voit, par ce couplet, que nos anciens Lorrains faisaient peu de cas des escargots et se scandalisaient d'en voir paraître sur la table de l'intendant.
3. Communiquée par M. Chapellier, instituteur à Epinal.
— 4G — Je le détruirai, va-t-cn verre, verre, verre, Je le détruirai, va-l-en verre, verre, veau.
Comment feras-tu, va-i-cn verre, verre, verre, Comment feras-tu, va-t-en verre, verre, veau.
Je prendrai une fleur, va-t-en verre, verre, verre, Je prendrai une fleur, va-l-en verre, verre, veau.
Quelle fleur prendras-tu, va-t-en verre, verre, verre, Quelle fleur prendras-tu, va-t-cn verre, verre, veau.
Je prendrai une rose, va-t-en verre, verre, verre , Je prendrai une rose, va-t-en verre, verre, veau.
J'en ferai plainte au roi, va-t-en verre, verre, verre, J'en ferai plainte au roi, va-t-en verre, verre, veau.
Tenez, la voilà, va-t-en verre, verre, verre, Tenez, la voilà, va-t-en verre, verre, veau.
CHANSONS1.
I.
Vouron qu'et cteu aivrie Que voci maie ;
1. Celle pièce el les suivantes, jusqu'à la dernière, exclusivement, nous ont été adressées par M. Gaudé, instituteur à Vaudeville (Meuse). Notre zélé confrère ne s'est pas borné à recueillir un très-grand nom- bre de poésies, que nous n'avons pu imprimer toutes, pour quelques- uns des motifs exposés ci-dessus, il a encore eu le soin de joindre au texte patois la traduction française, qui est on ne peut plus fidèle, et de noter les airs de plusieurs morceaux. Ils sonl reproduits sur la plancbe ci-après, avec des numéros correspondant à ceux des pièces.
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— 47 —
Eume cœur je n'sarau tenie Tant que Tôt gaie. Tant venie Et tant aller, Tant oyie Le maie chanter, Oyie le maie.
J'on éteu ch'la vouye d'S'raumont, J'y on trouvet tros bés gâchons ; Y nous ont tant robrasset, Que ç'ot c'ia qu'j'ons tant d'moret ; Oyie le maie.
J'ons éteu avau lot biés, Et jTos ont trouvet si bés, Et los vins, écot les prés, Et los gâches à mener ; Oyie le maie.
Quant vout houme viret au boue, Ponn'det-ly la sarpe au doue, Qu'y ni saut ni prie, ni moue, Ni boquet don boque boue ; Oyie le maie.
Bounes foumes de céans, Faïet don pou Diu le Grand, De voue bins, de voue férines, Et dos yus de vous gélines ; Oyie le maie.
Tiret let bouche don ponn'dant Et r'ouéetet c'qui niet dedans,
— 48 —
Pou douer à ços ofants, Que s'o vont le maie chantant ; Oyie le maie.
TRADUCTION DE LA CHANSON PRÉCÉDENTE.
Où a donc été avril
Que voici mai ;
Mon cœur je ne saurai tenir
Tant il est gai.
Tant venir
Et tant aller,
Tant entendre
Le mai chanter ;
Entendez le mai.
Nous avons été sur la voie de Seraumont, Nous y avons trouvé trois beaux garçons ; Ils nous ont tant embrassé, Que c'est cela que nous avons tant demeuré; Entendez le mai.
Nous avons été parmi les blés, Et nous les avons trouvés si beaux, Et les vignes, encore les prés, Et les filles à marier ; Entendez le mai.
Quand votre homme ira au bois, Pendez-lui la serpe au dos, Qu'il n'y soit ni pris, ni mort, Ni becqué du becque bois (oiseau) ; Entendez le mai.
— 49 —
Bonnes femmes de céans, Faites don, pour Dieu le grand , De vos biens, de vos farines, Et des œufs de vos gelines (poules) ; Entendez le mai.
Tirez la bourse du pendant Et regardez ce qu'il y a dedans, Pour donner à ces enfants, Qui s'en vont le mai chantant ; Entendez le mai.
II.
Je m'a levé de bon métin, Quand eu 1' selot eus' cueuieche, J'a prie mè charrue chue mos reins, Mos bues déchue mè tête.
Tralalala, i, tralalala,
Tralalala, i, t raine.
J'a prie mè charrue chue mos reins, Mos bues déchue mè tête, J'mon' allèye rabourer in champ, Vouron qu n'avô pon d'terre. Tralalala, etc.
J'rn'on' allèye rabourer in champ, Vouron qu' n'avô pon d'terre, Dos m'chemin j'a rocontrè In groue pouierèye d'cirèyeches. Tralalala, etc.
Dos m'chemin j'a rocontrè
In groue pouierèye d'cirèyeches ,
4
— 50 —
J'y houle en haut, j'y houle en bas,
Y eheuièye dos neuiejottes.
Tralalala, ete.
J'y houle en haut, j'y houle en bas,
Y eheuièye dos neuiejottes,
Iné poure vie foume que passôt, M'dijô qu' ç'atôt sos couèches. Tralalala, etc.
In' poure vie foume que passôt, M'dijôt qu' ç'atôt sos couèches, Elle m'ovouièye eus' chin, eus' chat, Eus' groue chin bian m'moudèye. Tralalala, etc.
Elle m'ovouièye eus' chin, eus' chat, Eus' groue chin bianc m'moudèye ,
Y m'attrappèye au talon, Et j'saignôt z'et l'épaule.
Tralalala, etc.
Y m'altrapèye au talon, Et j'saignôt z'et l'épaule,
On ovouièye querr in méyedecin, Ç'atôt in fondoue d'tioches. Tralalala, etc.
On avouièye querr in méyedecin, Ç'atôt in fondoue d'tioches , Nout' cochon qu'atôt dos s'bogi, Que pinçôt d'iet guitare. Tralalala, etc.
Nout' cochon qu'atôt dos s'bogi. Que pinçôt d'iet guitare,
— 51 —
Nout' couchot qu'atôt sans chemige , Que gitôt let leuchive. Tralalala,
Nout' couchot qu'atôt sans chemige, Que gitôt let leuchive, Nout' chette qu'atôt dos l'coin d'nout' feu, Que nous fayôt dos blies. Tralalala, etc.
Nout' chette qu'atôt dos l'coin d'nout' feu, Que nous fayôt dos blies, Et pue elle let v'iéye goûter, Elle se brûlèye les griffes. Tralalala, etc.
Et pue elle let v'ièye goûter, Elle se brûlèye los griffes, Los mouches qu'atint au pienchi, Que s'tenint l' votre d'rire.
Tralalala, i, tralalala,
Tralalala, i, traine.
III.
Réjouissons-nous mes chers amis Dans ce grand jour de fête, Jamais je n'ai de grands plaisirs Lorsque je suis à table, Buvons, mangeons, chantons, rions, Je suis le maître d'ia maison,
Bon, bon, Content par-ci, joyeux par-là,
— 52 —
Ma femme est morte d'aujourd'hui. Oui, oui.
Le plus beau nom qu'elle me donnait, C'était : cochon d'ivrogne, Gros mal bâti, vilain mal fait, Va-t-en faire ta besogne, T'accoùtumer à le chauffer, Car tu n'es bon qu' pour y aller.
Va, va. Va-t'en Colas, chercher du bois, Et va-t'en donc vite à grands pas.
Va, va.
11 me fallait à tout moment Bercer l'enfant qui crie, L'envelopper bien chaudement, Lui faire de la boulie, Et puis de suite courir à l'eau, A faire laver les drapeaux.
Là, là. Frotter par-ci, laver par-là, Dans la neige et dans les verglas.
Là, là.
11 me fallait dans la maison
Arranger le ménage,
Donner à boire à nos cochons,
Aller tirer les vaches
Et récurer poêles et poêlons,
Les marmites avec les chaudrons.
Bon, bon. Et puis dresser, sur les buffets, Les assiettes avec les plats.
Là, là.
— 53 —
Quand madame avait bien diné,
Me disait d'un air fière :
Si vous voulez aller manger,
Dégagez vos manières,
Il y a de la soupe et des choux,
Manges-en tout ton crevé-saoùl.
Loup, loup. La viande est là, n'y touche pas, Et relave-moi tous ces plats-là.
Là, là.
Je lui faisais encore son lit ; Mais enfin pour mes peines, Je n'y couchais pas mes amis , La chose en est certaine ; Il y avait d'sous la montée Un peu de paille fracassée.
Là, là. Pour traversin, un peu de foin ; Il y avait là dedans un sac.
Là, là.
IV. J'aveuie jeuré pâ Saint Colas, Patron de let Lôréyene, Que j'aie m'reuie meuie me mott' souldat, Tambour ou capitéyene, Que d'm'on' allie logie à Taoue (Toul), Avot ços vies barbeus de baoues ;
Au diabe los suminèyeres I . .
Ecot los missiounèyeres1 '
1. Séminaires et missionnaires.
— 1)4 —
Veu v'Ievôz, veu Y'vêtizôz,
V'v'on' allôz à l'ocolle, V'dijôz l'pâter et l'credo Devant los mèyetes d'ocolies, Y v'fayont débeurtiller tout haut L'Benedicamus Domino ; Au diabe, etc.
Si v'ètes malade ie vie motont, Chue in' pougnèye d'iéyetière, Dos lavemots d'greus ie vie boyont Avot dos grousses trinsneuieres (seringue en sureau) , I v'bayont in' ue (œuf) penà, Prod c'Ia m'poure diabe te v'ia bin réfâ ; Au diabe, etc.
Je v'motont dos in galâtiàs, Ç'ot bin let diabe de chambre, Sans heuche (huis) ni f'nèt' nout' poure Colas, Pou dos piats dos pots d'ehambre, On dirôt in' hopitiau, Los arignées servont d'rideaux ; Au diabe, etc.
Si m'meurôz ie v'oterront,
Je fiont los feunérailles,
Je s'o vont tourtous chantont,
On dirôt dos cigaillcs,
On dirôt clos acoùchaoues (écorcheurs) .
Qu' trèyenont let charougne au laoue ;
Au diabe los suminèycrcs
Ecot los missiounèyeres.
— 85 — V.
LE NOUVEL AN EN PATOIS DE LA GRANDE-VOëVRE1.
Lo bei jo, mes émins, que l'preumin de l'ennaye ! Les pérans, les fliétoux, les janes émoroux S'en vont pé monts, pé vaux, corant tôt corn' des foux ; S'at è qui v'embress' rèt pendant tôt' lèt jonaye.
Les preusents, les pois d'seuq' se r'pandent è pognaye Aux dem's, aux demoinsel's on beille des joujoux Des promasses sans fin aux pours sollicitoux ; Veus n'ateum' sèlet mit, que vot' bourse at vudaye.
C'te moùde let, dit-on, nos viet de l'ancien temps,
L'entreut'nôt l'émitié, reconcil'ot lo gens ;
S'iet s'peut beun ; mais aujd'hu ce n'at que des grimèces ;
Ce n'àt qu' per intérêt qu'on vos fàt des quéresses ; On n'wouêt que politiqu' jusques dans les ofants Et tel que vos héyit vos jette au nez de l'encens.
VI.
Quand j'atôs chie mon pèyre, Gachon et mérier, Je n'aveuie rin et fèyere, Qu'ine foume et chercher ; .
Voïet, T'arez maoue d'maux m'paure houme, T'arez maoue d'maux.
Je n'aveuie rin et fèyere, Qu'ine foume et chercher,
1. Copié dans le Narrateur de la Meuse, u° 1625, 29 décembre 1825, p. 10.
— 56 —
Ma auj'd'heuïe j'on'a ieune, C'n'ot qu' pou m'fèyere orager; Voïet, etc.
Ma auj'd'heux j'on'a ieune, C'n'ot qu' pou m'fèyere orager, AU' m'ovouïe et let vingne, Sans bouïere et sans mainger; Voïet, etc.
AU' m'ovouïe et let vingne, Sans bouïere et sans mainger ; Quand je r'vins de nout' vingne, J'soïe tout mouillet, crottet ; Voïet, etc.
Quand je r'vins de nout' vingne, Je soie tout mouillet, crottet, J'm'échit déchue nout' heuche, Et peuïe j'n'ouse cot on'trer ; Voïet, etc.
J'm'échit déchue nout' heuche, Et peuïe j'n'ouse cot on'trer, On'tre, groùs cochon, on'tre, Avance eut' rachauffer ; Voïet, etc.
On'tre, groùs cochon, on'tre, Avance eut' rachauffer, J'a mie cueuïere in' belle poule, Et peuïe cot in poulet ; Voïet, etc.
J'a mie cueuïere in' belle poule. Et peuïe col in poulet ;
— 57 —
Los ousses sont d'zous la taie, Tins ç'ot poue ti mainger ; Voïet, etc.
Los ousses sont d'zous la tàïe, Tins ç'ot poue ti mainger, Et peuïe qu'ot los maingeant, Qu'ie pouvinssent t'otraindier; Voïet, etc.
Et peuïe qu'ot los maingeant, Qu'ie pouvinssent t'otraindier, J'ara bin in' aut' houme Avot tet vilaine pé ; Voïet, etc.
VII.
POÉSIE HISTORIQUE.
Procession à Saint-Gibrien de Moncourt (écart de Sauvigny) pour faire cesser la sécheresse, le 29 juin 1719.
O mil sept sot déich' nieuf
Dou mouïe de Jun l'vingt-nieuf,
On v'nèye et saint Jeubrin (Saint-Gibrien).
Pà tourtous les chemins.
Trâveron et Sauvigney
Avôt loue bôgne cueurey1,
Que poutôt nout' Saint-Laoue (Saint-Loup),
D'argeot, qu'o vaut bin daoue.
1. Le curé de Sauvigny, en 1719, était Grimon. Il avait été vi- caire de Clcrey et Trâveron quelques années auparavant ; il était borgne.
— 58 —
Et peuïe nout' mèyete d'ocolle1, Que n'vaut pue daoues pistoles, Poutôt T Asperges me Et noue gacb' lou pèné.
Taillocoue et Beurey
(Taillancourt et Burey),
Goussaincoue et Breuchey
(Goussaincourt et Brixey),
Jeubinville et Tiairey
(Jubainville et Clérey),
Pùn'rot et Màtigney
(Punerot et Martigny),
Auteurville et Pàgney, (Autreville et Pagny 1. bl. c.)
Hermonville et Machey
(Harmonville et Maxey-sur-Meuse),
Gerbonval ecôt Groue (Gerbonvaux aussi Graux),
Bermont v'nèrent et Moncoue (Moncourt).
Je faut bin dire tourtous, De d'peuïe bin octante joues, L'selo (soleil) iun après l'aute Brùlô tourtous sans faulte.
Poues, febves, fruïes, seilles et bieds, Avoines, oûges étint bieds, N'y avôt pon d'berbaiges N'o preis, n'o pesturaiges.
1. Le maître d'école, à cette époque, était François Noël, qui y resta depuis l'année 1706 jusqu'en 1737. Il n'était généralement pas estimé.
— 59 —
Bin malheuïeraouse année, In' tarre si dassochéye, Let Muse (Meuse) atôt si coûte, Beurey n' n'avôm' in' goutte.
Forteune o set méchancetez, Ovouïèye d'aute pertalitez Comme dos l'tôt d'Isréel On r'vie eot des saul'rell's.
C'aîôt pou noue peschez, Fallôt los chuepouter, Diùe qu'on ellèye prier N'ios fièm' pou c'iet pesser.
Onques noue pèlerins Chantant dos les chemins, Dos milles, chèye (six) atint bin Qu'atint tourtous chagrins.
Pou prier, s'ovenint Nout' Moussue Saint-Jeubrin1 Epeuïe cot let Boun' Virge3, On lie d'nèye in bé cirge.
Frère Toussaint3 que riôt Et que carillonnôt, Comptôt je los denèys Que l'arôt de set joûnèye.
1. Monsieur saint Gibrien
2. Et puis encore la bonne Vierge.
3. Frère Toussaint était ermite ou garde-chapelle de Moncourt, depuis 1706 ; il mourut le 20 mai 1740, à l'âge de 70 ans.
— 60 —
Vlel qu'on s'mot et chanter, Jeubrin, qu'ie bin aiemet Mignon d'iet Virge, Oyet, Davue chaud, j'on bin esset.
On s'o r'va o creuyant Qu' n'y arô chaing'mot d'temps, Ma let pugnition d'Diùe D'morèye inco pavue pue.
Poutant nout' Saint Jeubrin Vlèye cot nous fèyere daoue bin, Ca n'grièm' los razins Et on fie daoue bon vin.
Et chi conséquentement, On v'ovouïat té temps Fayet bin pénitence Et v'arôt indeulgence.
V11I.
MARDI GRAS DE SAUVIGNY, EN PATOIS DU MÊME LIEU.
Ç'ot ineuïe l'màdi-gras,
Dondaine, Ç'ot ineuïe l'màdi-gras, Demain on n'mainge pue de chà,
Dondon, Demain on n'mainge pue de chà.
Fêtons don saint Crevâz, Dondaine,
— 61 —
Fêtons don saint Crevàz,
Ca d'main on mainge daoue là ,
Dondon, Ca d'main on mainge daoue là.
Ma qu'ot-ce qu'on coue là-bas,
Dondaine, Ma qu'o-ce qu'on coue là-bas, Niet don dos màdigràs,
Dondon, Niet don dos màdigràs.
Didiche qu'ot d'sûs in ché,
Dondaine, Didiche qu'ot d'sûs in ché, Et l'rô dos in teum'ré,
Dondon, Et l'rô dos in teum'ré.
Ma tout c'qui niet d'pùe bé,
Dondaine, Ma tout c'qui niet d'pùe bé, Ç'ot los fiots d'ioues chépés,
Dondon , Ç'ot les fiots d'ioues chépés.
Ç'ot dos ribans d'papie,
Dondaine, Ç'ot des ribans d'papie Qu' l'ont tourtous pà dérie,
Dondon, Qu' l'ont tourtous pà dérie.
Qu'ot-ce que ç'ot d'cie-là, Dondaine,
— 02 —
Qu'ot-ce que ç'ot d'cie-là, J'crôs qu'çot in' avocat,
Dondon , J'crôs qu'çot in' avocat.
Le v'ià qu'et in rabat,
Dondaine, Le v'ià qu'et in rabat ; Qu'ot-ce qu'ot de c'provost-là,
Dondon, Qu'ot-ce qu'ot de c'provost-là.
Avot s'bounot carré,
Dondaine, Avot s'bounot carré, Qu'ot-ce qu'i vont jeuger,
Dondon, Qu'ot-ce qu'i vont jeuger.
Ç'ot l'paouere màdi-gràs,
Dondaine, Ç'ot l'paouere màdi-gràs, Qu'ot-ce qu'i loue z'et fà,
Dondon, Qu'ot-ce qu'i loue z'et fà.
Màdigràs n'ème soupe,
Dondaine, Màdigràs n'ème soupe, Si v'velet lit dounet,
Dondon, Si v'velet li dounet.
Caoupet haut, caoupet bas, Dondaine,
— 65 — Caoupet haut, caoupet bas, Ma caoupet-Iie tout pien d'chà,
Dondon, Ma coupet-lie tout pien d'chà.
Si v' n'os pont d' caouté,
Dondaine, Si v' nos pont d' caouté, Dounet-lie 1' mouché,
Dondon, Dounet-lie I' mouché.
Qu'ot ç'ot d' ços faoues-ci,
Dondaine, Qu'ot ç'ot d' ços faoues-ci, Ch' dos bourriques devant dérie,
Dondon, Ch' dos bourriques devant dérie.
Ç'ot l'rô quîe venont quérie,
Dondaine, Ç'ot 1' rô qu'ie v'nont quérie, Vlà qu'ie l'vont f ziïe,
Dondon, Vlà qu'ie l'vont f'ziïe.
Tôt v'ià avot in' civèyere,
Dondaine. Tôt v'ià avot in' civèyere, Ç'ot pou l' fout' dos let rivèyere,
Dondon, Ç'ot pou Y fout dos let rivèyere.
— 64 —
TRADUCTION DE LA CHANSON PRÉCÉDENTE.
C'est aujourd'hui le mardi-gras, Dondaine,
C'est aujourd'hui le mardi-gras, Demain on ne mange plus de viande,
Dondon, Demain on ne mange plus de viande.
Fêtons donc saint Crevaz1, Car demain on mange du lait.
Mais qu'est-ce qu'on court là-bas,
Il y a donc des mardi-gras (mascarades).
Claude qui est sur un chariot, Et le roi sur un tombereau.
Mais tout ce qu'il y a de plus beau, Ce sont les flots de leurs chapeaux.
Ce sont des rubans de papier Qu'ils ont tous par derrière.
Qu'est-ce que c'est de celui-là ; Je crois que c'est un avocat.
Le voilà qui a un rabat ; Qu'est-ce encore de ce prévôt-là.
i. Le mardi gras n'est point un jour fêté par l'Eglise ; il est, au contraire, l'objet des censures ecclésiastiques, en raison des excès auxquels beaucoup ont l'habitude de se livrer. Ce jour, nommé dans les provinces du midi de la France 5. Crapazi , est appelé saint Crevaz en Lorraine, parce que les intempérants boivent et mangent à l'excès. Ainsi, vouer quelqu'un à saint Crevaz, c'est, suivant le lan- gage figuré du peuple, désirer qu'il (crève) meure.
— 65 — Avec son bonnet carré, Qui est-ce qu'ils vont juger.
C'est le pauvre mardi-gras ; Qu'est-ce qu'il leur a fait.
Mardi-gras n'a pas soupe, Si vous voulez lui donner.
Coupez haut, coupez bas.
Mais coupez-lui tout plein (beaucoup) de viande.
Si vous n'avez point de couteau, Donnez-lui tout le morceau.
Qu'est-ce que c'est de ces fous-ci,
Sur des bourriques (ânes) le devant derrière?
C'est le roi qu'ils viennent chercher, Voilà qu'ils le vont fusiller.
En voilà avec une civière,
C'est pour le jeter dans la rivière.
IX.
CHANSON BADINE.
Refrain. Ah ! ne vous zeste, zeste, zeste,) Ah ! ne vous estimez pas tant. J Bls'
A vous fières gens de la ville, Ah ! ne vous estimez pas tant. Vous nous traitez d'imbéciles Parce que j'sons des paysans.
Ah ! ne vous, etc. 5
— 66 —
Si vous avez les cheveux poudrés, Ah! ne vous estimez pas tant. Au moulin quand nous allons Les nôtres le sont tout autant. Ah S ne vous, etc.
Si vous avez des beaux plumages, Ah! ne vous estimez pas tant. Les dindons de not' village Sur la queue en ont autant. Ah ! ne vous, etc.
Si vous avez des belles dentelles, Ah! ne vous estimez pas tant. Si les nôtres n'sont pas si belles, Nous ne devons rien au marchand. Ah! ne vous, etc.
Si vous avez des beaux carrosses, Ah! ne vous estimez pas tant. Bien souvent ce n'sont que des rosses Par devant et par dedans. Ah! ne vous, etc.
X.
RONDEAU.
Nous avons un charmant rosier (bis). Qui porte rose au mois de mai (bis).
Entrez, entrez, charmant rosier (bis), Et puis vous embrasserez La rose que vous aimerez.
— 67 — XI.
AUTRE RONDEAU.
En passant par la Lorraine
Avec mes sabots, J'ai rencontré trois capitaines Avec mes sabots dondaine, avec mes sabots (bis).
J'ai rencontré trois capitaines
Avec mes sabots, L'un me prend, l'autre m'emmène
Avec mes sabots, etc.
L'un me prend, l'autre m'emmène
Avec mes sabots, Et l'autre m'appelle vilaine
Avec mes sabots, etc.
Et l'autre m'appelle vilaine
Avec mes sabots, Je ne suis pas si vilaine
Avec mes sabots, etc.
Je ne suis pas si vilaine
Avec mes sabots, Car la reine est ma marraine
Avec mes sabots, etc.
Car la reine est ma marraine
Avec mes sabots, Elle m'a donné pour étrennes
Avec mes sabots, etc.
Elle m'a donné pour étrennes Avec mes sabots,
— 68 —
Un bouquet de marjolaines Avec mes sabots, etc.
Un bouquet de marjolaines
Avec mes sabots, S'il fleurit, je serai reine
Avec mes sabots, etc.
S'il fleurit, je serai reine
Avec mes sabots, S'il ne fleurit pas, de même
Avec mes sabots, etc.
S'il ne fleurit pas, de même
Avec mes sabots, Il a fleuri, je suis reine
Avec mes sabots, etc.
XII.
AUTRE RONDEAU.
J'ai trente-six filles à marier, Et je n'ai rien z'a leur donner, Comment, comment, comment, comment, Marierai-je tant d'enfants ?
Belle, on dit que vous vivez d'amour (bis), Faites un tour, un demi-tour, Embrassez tous vos amours.
— 69 — XIII.
RONDEAU.
Refrain.
La violette se double, double La violette se doublera.
J'ai z'une commission à faire, Je n'sais à qui la donner, Si j'ia donne à l'alouette, Ma commission se saura. La violette, etc.
Si j'ia donne à l'alouette, Ma commission se saura, Si j'ia donne au rossignol, Ma commission se fera. La violette, etc.
Si j'ia donne au rossignol, Ma commission se fera ; Le rossignol prend son vol, Au château des dames s'en va. La violette, etc.
Le rossignol prend son vol , Au château des dames s'en va ; Bonjour l'une et bonjour l'autre, Bonjour mam'zelle qui voilà. La violette, etc.
Bonjour l'une et bonjour l'autre., Bonjour mam'zelle qui voilà ; Voici une lettre que j'apporte
— 70 —
De votre frère Nicolas. La violette, etc.
Voici une lettre que j'apporte
De votre frère Nicolas,
Et marque sur cette lettre
Que vous ne l'oubliiez pas.
La violette se double, double, La violette se doublera.
XIV.
AUTRE RONDEAU.
Hélas ! mesdames, où allez-vous com'çà, Beau cordonnier, nous vons nous promener. Hélas ! mesdames, vous userez vos souliers. Beau cordonnier, vous les raccommoderez. Hélas ! mesdames, qui est-ce qui m'ies paiera. Beau cordonnier, c'sera celle que t'attrapperas.
— ^S&S^î —
XV.
AUTRE RONDEAU.
Nous étions trois filles, toutes les trois sœurs, On nous fit chacun' un pelit jupon blanc. Tout autour galonné, galonné, Tout autour galonné d'argent.
— 71 —
On nous fit chacun' un p'tit jupon blanc, J'étais la plus jeune et j'eus le plus grand. Tout autour, etc.
J'étais la plus jeune et j'eus le plus grand, Avec les rognures j'en ai fait des gants. Tout autour, etc.
Avec les rognures j'en ai fait des gants ; Je ne les mettrai que deux fois par an. Tout autour, etc.
Je ne les mettrai que deux fois par an, Le jour de mes noces, qui sera l'plus charmant. Tout autour, etc.
Le jour de mes noces, qui s'ra le plus charmant, Et le lendemain, qui s'ra l'plus chagrin. Tout autour galonné, galonné, Tout autour galonné d'argent.
XVI.
AUTRE RONDEAU.
Par derrière chez mon père,
Vive l'amour, Une rose il y a.
Vive ci, vive ça, tralala, Une rose il y a,
Vive la rose et le lilas.
J'demandis à mon père, Vive l'amour.
bis.
— 72 —
Quand est-ce qu'on les cueillera. Vive, etc.
Mon père me répondit,
Vive l'amour. Quand la saison viendra.
Vive ci, etc.
La saison est venue,
Vive l'amour. Mon père n'en parle pas.
Vive ci, etc.
Je pris mon éehelelte,
Vive l'amour, Et puis je la cueilla,
Vive ci, etc.
Et je la portai vendre,
Vive l'amour. Sur le marché du roi.
Vive ci, etc.
XVII.
CHANSON.
Mergouton vè et l'iau , l , .
Evoq sou creuchon. (
Le font'notte étôt crùze,
Elle cheuièye è fond. Aïe, aïe, aïe, aïe, Dijôt Mergouton.
— 73 —
Le font'notte étôt crûze, ) . Elle cheuièye è fond. ) Toulè vie t'è pessire, Très bés jiones gaichons. Aïe, aïe, etc.
Toulè vie t'è pessire , i Très bés jiones gaichons.) Qu'ot-ce que y'donn'rô, mè mie, Je vos retirerons. Aïe, aïe, etc.
Qu'ot-ce que v'donn'rôz mè mie , i Je vos retirerons. | ^s-
Je n'è rin è v'donnire, Si ce n'étôt m'creuchon. Aïe, aïe, etc.
Je n'è rin è v'donnire, } Si ce n'étôt m'creuchon.) bls' Doune moins que celet mè mie, Je te robrasserons. Aïe, aïe, etc.
Doune moins que celet mè mie, \ Je te robrasserons. j
Robrassème chue le bouche, Et robrassème chue l'front,
Aïe, aïe, aïe, aïe,
Dijôt Mergouton.
XVIII.
RONDEAU.
Laquelle choisirez-vous,
— 74 —
Dans ce joli jardin d'amourettes, Laquelle choisirez-vous, Dans ce joli jardin d'amour.
La belle, ce sera vous, Dans ce joli, etc.
La belle embrassez-nous, Dans ce joli, etc.
La belle retirez-vous, Dans ce joli, etc.
— -«•sy^ — XIX.
AVouthon-Bas (Meuse), les enfants avertissent les fidèles des trois coups des offices de ténèbres par les chants suivants, après quoi ils font entendre un roulement de crécelles.
Voilà le premier coup, Mesdames, entendez-vous. Voilà le second coup, Mesdames, habillez-vous. Voilà le dernier coup, Mesdames, dépèchez-vous.
A Bonnet (Meuse), les enfants crient pour annoncer les mêmes offices :
Vlà l'premèye eawe, hèye, Vlà rduziemc cawe, hèye, Vlà l'dai èye cawe, hèye.
XX.
CHANSON.
Quand j'atôs chie nous gos, Qu'j'avôs quinze ans,
— 7b —
On m'rébiièye de pire qu'en parc, Coume i vrai galant.
Sapristi, On m'rébiièye de pire qu'en parc Coume i vrai galant.
J'avôs n'belle payere de guettes, Dos sabots niùes,
On m'ovouyà gouadier noue vaches, Ainsi qu'noue bues. Sapristi, etc.
J'avôs in' belle cueulotte
A la brayotte,
Qui me bout'nôt on'tre los jambes,
Avot i bouton.
Sapristi, etc.
J'avôs n'belle veste neuïere, Cousue d'fie bianc ; On me peurnôt pà l'devant Pou i président,
Sapristi, etc.
J'avôs in' belle cravate
De fin canevas,
Que me bieucôt dezous la gaoule
Avot i cadenas.
Sapristi, etc.
J'avôs in' belle perruque
A trôs martiaux ;
On me peignôt fàtes et dimoches
Avot i ràtiau.
Sapristi, »
— 76 —
On me peignôt fàtes et dimoches Avot i râtiau.
XXI.
MÈMECHANSONQUELAPRÉCÉDENTEAVECQUELQUESVARIANTES.
Quand j'atoï'e chi mon père, Je n'avoïe qu' quinze ans, J'alloïe ouader los bues aux champs Coume i vrai galant.
Sacriïer, J'alloïe ouader los bues aux champs Coume i vrai galant.
J'avoïe i bê chépê A tros ponnetus (cornes), Que me coûtôt cinquante niûe sous, Mogne in p'tiot écu. Sacriïer, etc.
J'avoïe in' belle perreuque A tros martiaux ; J'ié dacmoloïe fêtes et dimoches Avot i ràtiau.
Sacriïer, etc.
J'avoïe in' belle cravate
De fin bourras,
Qu' me r'ievôt pà d'zous let gaoule
Avot i cadenas.
Sacriïer, etc.
J'avoïe in' belle chemise De fin canevas •
— 77 —
Que m'grattôt la pare de fesses Dou haut on bas.
Sacriïer, etc.
J'avoïe in' belle cueulotte A la braïotte ;
La bavaroise atôt d'fer bianc, Que r'luzôt coume de l'argent. Sacriïer, etc.
J'avoïe i bel hébit nô Couseu d'fie bianc ; On me purnôt pertout let ville Pou i président.
Sacriïer, etc.
J'avoïe dos bès soûlés
O pès d'chaton ;
On me purnôt pertout let ville
Pou Napoléion.
Sacriïer, etc.
XXII.
NOOUÉ.
Colas, v'ià Nooué qu'ot v'neu, Mot le souche déchue nout'feu, Eur'ouéet' don in bé charbon, Ços ofants-là 1' soufieuront.
Que vot (vent) qu' doune ? — Ma ç'ot l'Téheut, Jean n'vinre'me, ca le pieuche cheut ,
— 78 —
On n'gitrôme in chin è l'euche , Mè foume, apoute-mi 16 creuche.
Franços, vinoz voïre l'ofant, T'ming'ré le quiche ot r'venant,
Ca j'crô bin qu' tè foume le fat ; I m'sonne que j'dô o n'avouïe in' pà.
Colas, t'ovirète sans rin ? Ços houmes-lè ça n'change (songe) è rin : J'ii donnereuïe bin d'noute véïen (pelle à feu) ! — Ç'ot vrà, foume, j'n'y chongeôme z'ot bin.
Ma qu'ot-ce que t'veux que j'poutié ? Daoue là (au lait) pou li féiere do blie? Nout' vache n'ot n'è pu essez, Pisqu'elle ferait bintoue vé.
Si j'avins tiè nout' cochon, J'pout' reuie ine échitèye de chons ; Ma doune-mi ine pagneréie d'ues, Ça vôret meuïe poue noute bon Diue.
Babotte, qu'ot-ce que t'ii poutre ?
J'ii poutra in bé drépé
Avot in maoue bé béguin,
Et m' n'houme ine tripe de boudin.
Et ti Jeannette, qu'ot-ce que t'donneré ?
J'ii donnera n'paiïre de soûlés
Avot in bé davotèye,
Ecot ine paillasse pou s'ièye.
J'iie pout'ra nout' bie (berceau) tout niû, D'peuïe trôje ans on n'y cueuèeche pu,
— 79 —
Ecot ine petiote jaquotte,
Et in mouché (morceau) d'noute michotte.
Ma montrème don no.ut' Nanette, Lo moufleu et co los guettes ; Ma ça iot bin trop grand frère ; Ç'ot don pou l'père et le mère.
Vlà l'diréïe que vint d'siner, L'oïève bin carillouner, Les tioches sinont VGlouria. Ma fô, ç'ost tant pèye qu'ç'ot fàt.
XXIII.
LE MAI OU TRIMOZA.
Quand v'arô z'enie pà li prés, Que v'ii trouv'rô co chi bés, Li Jàsu on soi loué, Di chet divine boun'tè,
0 trimôzà. Ç'ost li ma, ô bé ma, O ç'ost li bé moue di ma.
Not' Pierot et not' Diaudot Fiont moue bin' li apoulots, Quand i s'ront i poue pu grands, L'apanront li meutèye d'ticherand. O trimôzà, etc.
Si ve n'veulez rin douner, Eun' nous fiémes tant arr'ter,
— 80 —
Ca ailloue i faut eller Pou gaignie tantoue li souper. O trimôzà, etc.
4
Si quelque chose tombe dans la bourse ou le panier, les jeunes filles chaulent :
Not' dame no vous remarcions De vos binfàts, de vos présents ; Ma ce n'ost mi pou nous ços dons, Ç'ost pou li virge inco s'n'afant. O trimôzà, etc.
Si rien ne tombe dans la bourse, le dernier couplet se remplace par cette malédiction.
J'avons chanté, ma j 'déchantons, J'avons béni, ma j'maudissons ; J'vo souhaitons autant d'afants Qui n'iè d'pierottes dedos li champs. O trimôzà, etc.
XXIV.
REFRAIN D'UNE CHANSON CONCERNANT LE CHATEAU DE
BRIZEY.
Lé bombarde, Que bin arde, N'eé mi opéchè , Que l'chàté De Breuchey E n'sôt bin àdè.
— 84 — XXV.
UNE CHANSON LORRAINE EN L'HONNEUR DU ROI STANISLAS.
CHANSON VILLAGEOISE EN DIALOGUE,
Sur l'air de Brugnette.
GARO. LVRIN. GARO.
Ç'ai ! rions, chantons, compère,
Et point de sôcis : J'allons fêter io bé-pere
Di rô de Péris.
Di rô de Péris, compère !
Di rô de Péris.
LVBIN.
N'as-ce meû note bon Sire,
LO Rô Stanisla ? Que l'a dégne, qu'on l'edmire
Et qu'on l'aimeùsse ca !
Et qu'on l'aimeùsse ca! compère!
Et qu'on l'aimeùsse ca !
GARO.
Oui, ça lu, que tant on vante,
Et si jeustement : Çat ein Prince, qu'en vôt trente,
Et qui meùïe l'entend,
Et qui meùïe l'entend, compère !
Et qui meùïe l'entend.
— 82 —
LVBIN.
Nanccïe at ein empiraïe,
Dcpu qui baiti, Non, jcmais i ne fut faie,
Qui si ben œuvrit,
Qui si ben œuvrit, compère,
Qui si ben œuvrit.
GARO.
I vo chainge les Maijures
En de grands pailais, Et fàt des enjolivures,
Qu'on ne vit jamais,
Qu'on ne vit jamais, compère !
Qu'on ne vit jamais.
LVBIN.
Sai piaice a tôte en sceulptûre
En marbre, en pilliers ; C'a des fleurs, de lai dorure,
Jusques à guèurniers,
Jusques à guèurniers, compère !
Jusques à guèurniers.
GARO.
Quoites pôtes, en grillaige,
Dein got tôt nôvé, L'i font si clairement cortège,
Que ren n'a pu bé,
Que ren n'a pu bè, compère!
Que ren n'a pu bé.
— 83 —
LVBIN.
D'i moïetan sort la streucture D'ein grand pi d'esta : De soû genre lai figure Seroit drote en hà, Seroit drote en hà, compère ! Seroit drote en hà.
GARO.
Je ne vorôme, en nature,
Po ben des Looïs Eté dans telle posture
Tojo su mes pids,
Tojo su mes pids, compère!
Tojo su mes pids.
LVBIN.
Ate tra de soûne histoire,
Ç'àt les pores gens : Dans soû cœur et sai mémoire,
I sont ses enfants,
I sont ses enfants, compère !
I sont ses enfants.
GARO.
Mas s'çais tu ben qu'i les leûge
Et qu'i les neûrit ? Que celai fa soûn éleùge,
Meièuë qu'àcun écrit,
Meièuë qu'àcun écrit, compère!
Meièuë qu'àcun écrit.
— 84 —
LVBIN.
I dotte et mairie zos feilles,
Ai de bons pairtis. Mas i campe les Godreilles,
En caige à Glaicis,
En caige à Glaicis, compère.
En caige à Glaicis.
GARO.
L'ai volu qu'on enseigneusse,
Nos gaîchons pô ren, Que zos mates en ranteusse,
Di fond de sou ben,
Di fond de sou ben, compère !
Di fond de sou ben.
LVBIN.
Et quand je sommes mélaides,
'L'a des Médecins, Que l'envoie et des remèdes,
Po nos rende sains,
Po nos rende sains, compère !
Po nos rende sains.
GARO.
I nô encà des Frères
Cirurgins vantés, Chémistes, aipoliquères,
Axparimentés,
Axparimentés, compère!
Axparimentés.
— 85 —
LVBIN.
Point ne vut que je plaindinssent
Que quoique scévans, Voyant nos faits, ne deùjinssent,
Plaidez mes afans,
Plaidez mes afans, compère !
Plaidez mes afans.
GARO.
Lai fa compter grosse soumme,
Po rematte en pids Ç'os, que lai fortune essoumme,
Merchands déconfis,
Merchands déconfis, compère !
Merchands déconfis.
LVBIN.
I vut ca, que l'onpràcheusse
L'Evangile à champ, Qu'à pores gens l'on baieusse,
De l'argent comptant,
De l'argent comptant, compère !
De l'argent comptant.
GARO.
Sai novelle Àcaidémie
Fa ben pu de brut I fat été bon génie,
Pô qu'on sô reçu,
Pô qu'on sô reçu, compère !
Pô qu'on sô reçu. .
— 86 —
LVBIN.
Les gens qu'ont bonne l'oquence Et qu'ecrivont ben
Entrons, lai pà préférence A gens, queun' d' jont ren, À gens, queun' d' jont ren, compère A gens, queun' d' jont ren.
GARO.
Ce grand Roi ne s'éteudie,
Qu'ai baier tojo, 1 n'étend mi, qu'on l'en prie,
A devant i corre,
A devant i corre, compère !
A devant i corre.
LVBIN.
Les jos Fêtes de lai Virge,
Ne Faites pai vu ? Ai Bonsecours, comme ein Cirge ;
1 fond devant Du,
I fond devant Dû, compère!
I fond devant Dû.
GARO.
Assi di Ciel ait i graice,
Ses jôs sont bénis, I voit son Auguste Raice,
Dans trois petias fils,
Dans trois pelias fils, compère !
Dans trois petias fils.
— 87 —
LVBIN.
Sans compter tant de Basselles.
Dont l'a cô Papa, Tôtes ben faites et belles,
Pu saiges en ca,
Pu saiges en ca, compère !
Pu saiges en ca.
GARO.
A donc que ses ans faiënssent
Les jours de Noué, Et qu'ai laige y l'ou moinissent
De Methieuselé,
De Methieuselé, compère!
De Methieuselé.
LVBIN.
Jerni, je grille de boire
Vite ai sai santé, Je chanterons meiûe sai gloire,
Quand j'aurons pinte,
Quand j'aurons pinte, compère!
Quand j'aurons pinte.
EPITRE EN PATOIS
ADRESSÉE PAR LES HABITANTS DE GÉRARDMER
A S. EXC. LE MINISTRE DE L'INTÉRIEUR, EN 4809,
COMPOSÉE PAR M. POTTIER, CURÉ DE CETTE COMMUNE.
NOTICE.
Au commencement de ce siècle, la France nouvelle, que la révolution de 1789 avait faite, se constituait, et la statistique s'appliquait à en dénombrer toutes les forces et les richesses pour apprendre à les développer. On avait compris que cette science nouvelle, par ses recherches et par ses chiffres, est un des éléments de la puissance et de la prospérité d'un état ; rien n'échappait à ses études, à ses investigations.
Or, comme la variété des dialectes parlés en France avait appelé particulièrement l'attention des linguistes, on voulut se rendre un compte exact de cette diversité. Les travaux de la philologie française, antérieurs à ce
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siècle sur les dialectes parlés chez nous du nord au midi, étaient trop systématiques, ou trop incomplets , ou faits sans vue d'ensemble ; la science ne pouvait en accepter les conclusions.
C'est alors que l'on conçut peut-être l'idée d'un labeur immense qui consistait à réunir de tous les points de la France des échantillons de tous nos patois et dialectes ; on pensait, sans doute, avec raison, qu'une étude compa- rative pourrait en faire sortir des faits scientifiques. Que cette pensée ait été entrevue avec ses conséquences, d'une façon plus ou moins complète, toujours est-il que M. Co- quebert Montbrel, chef du bureau de la statistique au ministère de l'intérieur, fut chargé de demander par voie officielle à tous les préfets et sous-préfets de l'Empire des notices sur le langage des diverses populations du pays avec des pièces originales de leur littérature. L'en- voi fut fait, mais il ne parait pas qu'il ait servi à un tra- vail quelconque d'analyse ou de synthèse sur nos patois.
Néanmoins, le ministère possédait dans ses cartons une masse de documents précieux. On les voit employés, sous la Restauration, mais sans indication de source, à grossir les Mémoires de la Société des Antiquaires de France. Plus tard, M. Coquebert Montbret îui-mème les reprend dans cette collection archéologique, pour en former un volume in-8°, qui, outre la traduction de la Parabole de l'enfant prodigue dans presque tous les patois de la France, contient quelques glossaires particu- liers, des observations , des études particulières sur nos dialectes, dont plusieurs sont dues aux correspondants de la Société des Antiquaires ; mais , il faut le dire , le texte du patois est, en général, si étrangement défiguré
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par les copistes ou par les imprimeurs, qu'il est impos- sible d'en tirer un parti réellement sérieux.
Ces archives littéraires et linguistiques, qui auraient pu servir à une vaste enquête, sont malheureusement in- complètes. Nous avons pu nous en assurer sur une copie exacte que possède M. Burgaud des Marets, en 4 vol. in- folio. Il y a nombre de pièces absentes ; quelquefois il ne reste pas même de trace de la correspondance des préfets de certains départements avec le ministre de l'intérieur au sujet des questions qui leur étaient posées.
Quelle que soit la cause de ces disparitions, nous n'en avons pas moins à déplorer, pour notre part, la perte complète des documents qui concernaient les patois de la Lorraine. Les préfets de notre province ont assurément répondu ; mais leurs envois, leurs lettres même, qui de- vaient renfermer des pièces importantes, font défaut dans celte belle collection. Ces papiers curieux ont été prêtés, sans doute, distribués entre les mains des amateurs, et si bien égarés définitivement, qu'il n'y en a pas le moindre vestige dans les archives dont nous parlons. La Lorraine semble n'avoir pas existé pour la statistique des dialectes, entreprise en 180G, et dont les travaux durèrent cinq ou six ans.
Nous sommes porté à croire que YEpitrc des habi- tants de Gérardmer faisait partie des documents en- voyés par le préfet des Vosges. Outre que la date de 1809 nous est donnée par un manuscrit fait du temps de l'au- teur, le début même de la pièce nous en donne la preuve : ce premier vers « Votre Excellence est bien aise de sa- voir comment on parle à Gérardmer », ne peut être qu'une réponse à une question posée, et il est probable que c'est
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au curé Pottier que le sous-préfet de l'arrondissement avait communiqué la demande du minisire.
M. Pottier répondit d'une façon remarquable, qui res- tera, nous le croyons , comme un témoignage historique de l'état de Gérardmer et des mœurs des habitants au commencement de ce siècle1.
Telle est, pour nous, l'origine de cette remarquable Epilre. Nous sommes également persuadé que M. Pottier dut ajouter à son envoi la Parabole de l'enfant pro- digue, parce que cette traduction était demandée par le bureau de statistique, et que nous possédons un ancien manuscrit fait à Gérardmer, contenant seulement Y Epilre et la Parabole'2.
Nous avons insisté sur cette origine, parce qu'il y a une tradition et des manuscrits qui témoignent que YE- pitre a été adressée à l'impératrice Joséphine, le 25 juillet 1809, à Plombières. Celle-ci est-elle antérieure à l'autre? Les archives eussent pu nous le dire ; mais les pièces probantes n'y existent plus. Nous avons, toutefois, des conjectures assez puissantes pour soutenir notre asser- tion. V Epilre, en effet, répond à une question venue de haut lieu, et on sent que l'auteur a saisi une bonne occa- sion pour exposer à un ministre tout puissant les moyens de venir en aide aux pauvres ouvriers de Gérardmer. Elle a donc une double raison d'être. A quoi, au con-
1. Cela nous parait d'autant plus vrai que la Statistique des Vosges, par le citoyen Desgouttes, préfet, ne consacre que dix lignes à celle commune.
2. La traduction envoyée par M. Richard à la Société des Anti- quaires n'est point la même; elle est d'un patois presque illisible. Celle du curé Pollier a élé publiée par nous pour la première fois dans notre Coup d'œil sur les patois vosgiens.
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traire, eût pu servir une pétition en patois à bout portant à l'impératrice? En quoi l'eût intéressée une description inintelligible pour elle, même avec une traduction ? Nous comprenons que, dans sa curiosité, elle ait voulu en- tendre le chef d'une députation d'une commune lointaine lui parler son singulier patois ; et c'est ce qui arriva. M. Pot lier, se rendant à son désir, lui adressa un com- pliment en vers qui a été réellement débité à Plombières, et qui est cousu à YEpîlre dans un manuscrit de la main même de l'auteur, que nous possédons. 11 n'est pas pos- sible que Joséphine ait subi la lecture de cent vingt-six vers d'un langage incompréhensible. M. Pottier, dans sa nouvelle rédaction, a remanié YEpître au ministre et y a rattaché des compliments à l'impératrice, à laquelle il la présentait. Celle copie ne doit assurément être que la seconde forme de ÏEpitre.
Bien qu'il en ait été répandu quelques exemplaires ma- nuscrits, nous pouvons affirmer qu'elle est presque in- connue des Vosgiens1. Jusqu'à ces derniers jours même, nous croyions que cette pièce était inédile , qu'on n'en avait, du moins, publié qu'une trentaine de vers dans un ouvrage sur les Vosges. Le hasard seul vient de nous la faire découvrir tout entière dans le tome IV (2e série) des Mémoires de la Société des Antiquaires de France (année 1835). Elle avait été envoyée par M. Richard , de Remiremont ; mais elle est restée si obscurément enter- rée dans cette collection, que personne ne l'a citée jusqu'à présent, que nous sachions2. M. Richard lui-même, qui
1 . Les manuscrits se sont perdus. Ceux que nous possédons, nous les devons a l'obligeance de M. l'abbé Maingon , aujourd'hui curé à Mandray (Vosges), qui les lient de la succession de M. Potlier.
2. Elle n'est ciléc par aucun bibliographe ou philologue.
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a pris soin de réunir en deux volumes tous les opuscules qu'il a publiés, et renvoie souvent à ses divers travaux, ne cite nulle part cette Epître si curieuse, ou n'y fait pas allusion.
C'est donc avec surprise et plaisir que nous l'avons rencontrée. Notre plaisir, toutefois, n'a pas tenu devant les fautes manifestes de l'éditeur ou du typographe. Outre que M. Richard la croit, mais à tort, composée en 1812, son texte patois est loin d'être irréprochable, et la tra- duction jette parfois dans d'étranges erreurs1. Fautive, ignorée et sans commentaires, cette publication était et est encore comme non avenue.
Aussi nous croyons qu'une édition nouvelle , faite sur des documents authentiques , accompagnée de notes et destinée aux Lorrains, peut être utile à l'histoire du pays et à l'étude du patois. Avant de connaître celle de 1835, qui ne nous confirme que mieux dans notre pensée, nous nous plaisions un jour à annoncer que cette œuvre ne périrait pas ; notre espoir en est encore plus certain, car nous la confions à la Société d'Archéologie lorraine.
Louis JOUVE.
OBSERVATIONS SUR LA PRONONCIATION.
L'apostrophe remplace toujours la lettre e ; elle est destinée à faire sonner la consonne sur laquelle elle s'ap- puie.
H est toujours aspirée, mais elle procède plutôt du pa- lais que du gosier.
i. Nous citerons, entre autres, celles-ci, qui, du reste, est la plus forte : a Nos femmes font du satin ; c'est pour ce pays-ci une fort bonne chose. » Il faut lire salin.
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IN est une nasale particulière à la Lorraine ; il est Im- possible d'en noter la prononciation.
Le son représenté par o est toujours bref, comme dans abricot ; celui qui est représenté par ù se rapproche un peu de Va.
Le son représenté par c est bref comme dans paquet.
YE (yeu) est une syllabe féminine qui correspond à noire Me ; knô//e, quenou///c. Nous écrivons y' devant une consonne, quand cette muette ne doit pas compter dans le vers.
Y entre deux voyelles, se prononce toujours séparé- ment comme dans payai ; il fait l'office d'une consonne.
Y nous a servi, dans quelques cas particuliers, pour mouiller la consonne qui le précède. 11 n'est alors qu'un signe, à défaut d'autre plus connu, pour indiquer que la consonne qu'il affecte est modifiée dans sa prononciation, comme, par exemple, e dans « il mangea » , et la cédille dans « il lança. » Ainsi le d, le /, etc., suivis d'un y, de- viennent en style d'école dieu, tien, etc. : polyi, partir, ne peut s'écrire inlclligiblement dans notre langue sans une convention ou une explication préalable ; y mouille t, d, comme i mouille / ou //.
Nous écrivons dès, nos, au lieu de de, no, quand il faut faire sonner s devant une voyelle ; de même bè, bien, devant une consonne et bé-n devant une voyelle pour faire sonner n sur le mot qui suit.
En général, nous nous sommes attaché à n'introduire dans le texte aucune lettre qui ne se prononce. Nous avons fait exception pour la conjonction et pour un très- petit nombre de mots que l'on reconnaîtra facilement.
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ÉPITRE EN PATOIS ADRESSÉE PAR LES HABITANTS DE GÉRARD- MER A S. EXC. LE MINISTRE DE L'INTÉRIEUR, EN 4809, COMPOSÉE PAR M. POTTIER, CURÉ DE CETTE COMMUNE.
1.
Seigneur, vot' Excellence o bé-n ah' de saoue
Inoq o proche è Girômouè. Et je lo son tan bé de povo dire ènn foue
Que de met' Français è n'i pouè. Seigneur, voire Excellence est bien aise de savoir — Comme on parle à Gérardmer. — Et nous le sommes autant de pouvoir dire une fois — Que de meilleurs Français il n'est pas.
2.
Vos ollè cet' trovè grossi not' Girom'heye.
Ma fau bé possè, monseigneur, Q'nof sentimo vau mè, qu'el o quéq' peu pi beye,
Et q'not' longue en' vau mi not' cœur. Vous allez certes trouver grossier noire langage de Gérardmer. — Mais (il) faut bien penser, Monseigneur, — Que notre sentiment vaut mieux, qu'il est quelque peu plus beau — Et que notre langue ne vaut pas notre cœur.
V
3.
E n'i po l'empereur ré d'mèt' que neu montaine.
E n'i pohène, ou ç'no ré d'ii, Qu'o r'nôtesse jemà quéque peute trouaine.
Oh ! d'hé li q'je n'prého ré d'pi. Il n'est pour l'empereur rien de mieux que nos montagnes. — Il n'est personne, ou ce n'est rien de lui, — Qui en raconte jamais quelque vilaine aventure. — Oh ! dites lui que nous n'aimons rien plus.
4.
To quan q'fau de soudar, j'n'on mi èvi in r'belle. En fau pouè d'gendarme toci
96 —
Po fàr potyi au jo terti ço qu'o-z épelle : El o von et n'déserto mi.
Toutes les fois qu'il faul des soldats, nous n'avons pas eu un re- belle. — Il ne faul point de gendarmes ici — Pour faire partir au jour tous ceux qu'on appelle : — Ils s'en vont et ne désertent pas.
Je n'son mi bé hostou, vo lo pô bé sooue ;
Je n'on mi clou procès par an. Neu contribution èss' péyo bé tocoue ;
L'an-ci j'n'on èvi qu'in sorjan.
Nous ne sommes pas bien turbulents, vous le pouvez bien savoir ; — Nous n'avons pas deux, procès par an. — Nos contributions se paient bien toujours ; — Celte année nous n'avons eu qu'un sergent
(buissier).
Je fron steu bé d'vo dir\ po in peu pi vo piare,
Cou q'ç'o do péï ci, cou q'ç'o D'not' foçon de viquè qu'o extraordinare.
Je lo diron dô not' prôch'mo.
Nous ferons peut-être bien de vous dire, pour un peu plus vous plaire, — Ce que c'est (de ce pays) que ce pays, ce que c'est — Que notre façon de vivre qui est extraordinaire. — Nous le dirons dans notre langage.
Je d'mouro dô lé Vôge et dô in fameu léye.
Ouss viss qu'èss' seusse, o lo se bè, Se ç'n'ir' de Girômouè, steu co quéq' peu Nancéye, Le Lorraine en serô cet' ré. Nous demeurons dans les Vosges et dans un lieu fameux. — Où que ce soit, on le sait bien, — Si ce n'était de Gérardmer, peut-être encore quelque peu Nancy, — La Lorraine ne serait certes rien.
— 97
S'o voiyin, Monseigneur, tan de pir, tan de reuche,
Qu' èvo do slè je son spandi, Et s'o no voyin fàre in fremége ou dé peuche, Oh! vo sré cet' bé-n ébaubi. Si vous voyiez, Monseigneur, tant de pierres, tant de roches, — (que parmi cela) parmi lesquels nous sommes épars, — et si vous nous voyiez faire un fromage ou des poches, — Oh ! vous seriez certes bien étonné.
Je féyo not' canton, j'non qu'in quiré, qu'in mare,
Et nos on troze section. E fau bé pi d'in jo è çôlo q'vouron fàre
Lo tô de dèrére môhon.
Nous faisons notre canton, nous n'avons qu'un curé, qu'un maire, — Et nous avons treize sections. — Il faut bien plus d'un jour à ceux-là qui voudront faire — Le tour des dernières maisons.
10.
E'ni mohovorou, tôt au mon heuy' cent deuze ;
Quéqu'ène è douze oure de lan. Prèq' to potyo (ç'o cet' ènn' bé mah cheuse),
Lo léye o rèle et bé médian. Il en est par-ci par là, tout au moins huit cent douze ; — Quel- ques-unes à deux (heures) lieues de loin. — Presque tout partout (c'est certes une bien mauvaise chose), le (lieu) terrain est raide et bien mauvais.
11.
O-z o chèp' co bé-n ah', dô qu'o son è l'onaye.
Ma dô le nôge è fa mou ma Rollè, quéq' peu chôgi, po drohô le montaye.
E fau pourtan, pià ou non pià.
7
- 98 —
On en échappe encore bien aisément, dès qu'on est en été. — Mais dans la neige il fait bien mauvais — Revenir, quelque peu chargé, à travers les montées. — Il faut pourtant, plaise ou non (plaise).
12.
O ! cet je son pi d'mille et nouante et cin mate ;
C'o euyt' cen septante et clou tô. Po lo villége è n'i trô cen quarant'quouéte àte ;
Ç'o clou cen cinquante heuy* chesô.
Oh ! certes, nous sommes plus de mille et nonanle cinq maîtres ; — C'est huit cent septante deux toits. — Pour le village il y a trois cent quarante-quatre (àtres) feux ; — C'est deux cent cinquante-huit (chëseaux) maisons.
13.
Nos on trô bôle mô et co trobé de chaume
Qu'ètiro trobé de quiriou. El y v'no po couéri dès erbe q'son de baume,
Et dô qu'è 'n on, è son èvrou.
Nous avons trois belles mers et encore beaucoup de chaumes — Qui attirent beaucoup de curieux. — Ils y viennent pour chercher des herbes qui sont des baumes, — Et dès qu'ils en ont, ils sont heureux.
14.
Le gran, dô qu'è fà chau, aimo d'boure è le guiesse ;
El on do mau po le vodiè. Et no, évô pohi, dô li pi gran soh'resse,
F 'n on in grô n'vô dô in potyè.
Les grands, dès qu'il fait chaud, aiment de boire à la glace ; — Ils ont du mal pour la garder. — Et nous, par ici, dans les plus grandes sécheresses, nous en avons un gros tas dans un trou.
15.
Je n'son cet' mi bé lan de quoét' mil se cen tête ; Et nos on, po viquè terti,
— 99 —
Le vèhelle, le pouhe et le tôle et neu bête : Le terre o bé lan d'no néri. Nous ne sommes certes pas bien loin de quatre mille sept cents têtes ; — Et nous avons , pour vivre tous, — La vaisselle (de bois), la poix et la toile et nos bètes : — La terre est bien loin de nous nourrir.
16.
Et dô qu'è ni pi d'noye, o sohelle, o brossie ;
Ç'o èdon q'io mou d'mâ ervé. Je son trobé quoy'tou po lo prè, le fouyie,
Et po euvrè lo beu d'èoué.
Et dès qu'il n'est plus de neige, on nettoyé les prés, on fume ; — C'est lorsque le mois de mai revient. — Nous sommes fort pressés pour le pré, les essarts, — Et pour (ouvrer) préparer le bois de l'hiver.
17.
Le fôme è soin de birr', do stôye et do Iacéye,
Et neu éfan dev'no pouhar. Eprè q'iè b'sogne è fàte et qu'o chauff lo fonéye, E'n i trobé que son tounar. La femme a soin du beurre, de l'étable et du lait, — Et nos en- fants deviennent extracteurs de poix. — Après que la besogne est faite et qu'on chauffe le fourneau, — II en est beaucoup qui sont tourneurs
18.
E'n i trobé-n aussi que n'pon q'filè lou knoye ;
Et dè-z aute euvro lo bohon Po de sole, de boéte ou quéque aute erqueboye.
E féyo terti ce qu'è pon. Il en est beaucoup aussi qui ne peuvent que filer leur quenouille; — Et d'autres travaillent le hêtre — Pour des (souliers) sabots , des boîtes ou quelques autres menus objets. — Ils font tous ce qu'ils peuvent.
— 100 —
19.
El i co enne aut' cheuse èto d'què o s'ertône :
Neu fôme féyo do solin. Ç'o po lo péï ci en' cheuse qu'o bé bône.
Le fôme è slè po so tréyin.
Il est encore une autre chose de laquelle on s'étonne : — Nos femmes font du salin. — C'est pour ce pays-ci une chose qui est bien bonne. — La femme a cela pour son ménage.
20.
El i de peure gen que tote le jonàye
En' féyo ré que do cherpi. C'o in mouyè d'viquè que n'èrè qu'en binâye ;
Eprè le guerre o n'o fron pi. Il est de pauvres gens qui toute la journée — Ne font rien que de la charpie. — C'est un moyen de vivre qui n'aura qu'un moment : — Après la guerre on n'en fera plus.
21.
Not' andro o bé kni, surtou po lo freniège.
Je vourô mou v's o perzotè, lnoq dô lo vi to neu père, è lou longuége,
D'non è lou prince dé sole. Notre endroit est bien connu, surtout pour le fromage. — Nous voudrions bien vous en présenter, — Comme, dans le vieux temps, nos pères, en leur langage, — Donnaient à leurs princes des sabots.
22.
Vlè-vo q'no vo lo d'hè ? Lé keblar, lé moutréye,
Qu'è 'n i don tan évô pohi, On terti b'so do beu pou lou vèche, lou m'téye ;
Et ç'o tolo qu'è son spéni.
— 101 —
Voulez-vous que nous vous le disions ? Les cuveliers, les fermiers, — Qui sont si nombreux (qu'il en est donc tant) parmi nous, — Ont tous besoin de bois pour leurs vaches, leurs métiers ; — Et c'est de cela qu'ils sont privés.
•23.
O vo de beu an grô, po z-o fare dé piainche ;
Et volo d'ouss que lo mau vé. O n'o pi obteni ne po cô, ne po mainche.
E n'i qu'è rèh' q'cè fà do bé.
On vend des bois en gros pour en faire des planches ; — Et voilà d'où vient le mal. — On n'en peut obtenir ni pour corps (de fontaines) ni pour ustensiles. — Il n'est qu'aux riches que cela fait du bien.
24.
E v'Io fourni lou seg, et no, peures euvréye,
Je n'on ré po guégni do pain.
Oh ! créyi, Monseigneur, q'no ravo bé de néye
E mouyé d'èn'mi moéri d'faim. Ils veulent fournir leurs scieries, et nous, pauvres ouvriers, — Nous n'avons rien pour gagner du pain. — Oh ! croyez, Monseigneur, que nous rêvons bien des nuits — Aux moyens de ne pas mourir de faim.
25.
Oh ! s'o v'iè détéyi è chèquin des euvréye
Dès abe ossè po so défri, Piteu que d'Iè lèhi è strainge mochoquéye,
O vigrô bé, o n'piandrô pi. Oh ! si vous vouliez détailler à chacun des ouvriers — Des arbres assez pour sa consommation, — Plutôt que de les laisser à des n'im- porte-qui étrangers. — On vivrait bien, on ne (se) plaindrait plus.
NOTES SUR L'ÉPITRE.
(Les chiffres romains se rapportent aux nos des stances). I. E n' i pouc. Cette troisième personne i du présent
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de l'indicatif du verbe être nous donne lieu à une obser- vation grammaticale très-curieuse. La forme ordinaire, quand le sujet est déterminé est o, comme dans la plus grande partie des Vosges : lo léye o réle, le lieu est rapide ; el o méchan, il est mauvais. Mais quand le sujet est indéterminé ou neutre, comme dans le français il est des gens, il n'est pas vrai, cette impersonnalité ne tombe pas sur le pronom comme dans notre langue, en allemand et en anglais, mais sur le verbe qui se trans- forme ; on dit alors î au lieu de o. Nous pouvons rap- procher ici cette autre singularité du changement de terminaison d'un verbe : on dit v'ni, venez, quand on s'adresse aux personnes et v'na quand on parle aux bètes.
On trouvera trois manières d'écrire cette expression impersonnelle, mais avec trois sens différents : è n' i, il n'est ; è 'n i, il en est ; et è-n î, il est, pour el i qui se dit également.
II. Girâmouè est le nom du village, giromhéye, l'ad- jectif qui en est formé, comme un habitant de Couni- mont (Cornimont) s'appelle un Courihêye. Au 4e vers, en' est une interversion pour ne, comme on verra plus loin èss' pour se.
IV. Le département des Vosges s'est particulièrement distingué dans la révolution par son dévouement à la patrie. Loin d'avoir eu des déserteurs , Gérardmer a fourni pour le premier départ de volontaires, 104 hommes dont les trois quarts au moins ne sont jamais rentrés. 3e vers : o pour on; le z n'est ici qu'une lettre eupho- nique ; au 4e, o est pour en.
Vil. Ire, ancienne forme française de était, originaire du latin. La pensée exprimée dans ce passage est deve-
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nue proverbiale. Nous ne savons de quelle époque elle date.
VIII. S'o pour si vous, ellipse très-forte qui donne bien l'idée de la rapidité de ce langage.
IX. Le canton d% Gérardmer, malgré son étendue, n'était composé que de la seule commune de ce nom. On a détaché depuis une des treize sections pour en faire la commune de Liézey. 5e vers, vouron, voudront. Touz ceulx qui vourront riens demander (Joiaville). Jà quant il se vaura mouvoir. (Roman de Amadas et Idoine, 45e s.)
X. Tout-partout, locution populaire en Lorraine.
Irai-je tout partout sans ma foy parjurer. (Chronique de Bertrand Duguesclin, 44e s.)
XI. Piâ ou non piâ, vieille expression. Et je sais bien, plaise ou non plaise, Qu'entre tous honsseurs je suis homme.
(Farce d'un ramoneur). On disait de même : Veuille ou ne veuille. (Guill. de Machaut, 44e s.)
XII. Il y a dans ce passage et dans les vers qui sui- vent une statistique intéressante, où toutefois l'arithmé- tique, à cause de la rime ou de la mesure, sans doute, a reçu une légère entorse. Gérardmer contenait en tout 872 maisons, dont 642 étaient dispersées sur le flanc des collines ou dans la vallée et 258 se groupaient près du lac autour de l'église. Ces deux derniers nombres ne donnent, il est vrai, que 870 ; mais nous ne sommes pas loin de compte, on le voit : la poésie n'est pas une sta- tistique. On appelle chèseau (vieux mot français), l'em- placement même où est bâtie une habitation ; mais deux habitations peuvent ne former qu'un chéseau. M. Pottier,
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en effet, compte 344 àtres ou feux pour les 258 ché- seaux du village, dont alors 86 au plus possèdent deux feux. Or, comme d'après lui il y a environ 1100 chefs de famille, il faut que dans les 612 maisons isolées, il y en ait 157 au plus qui aient deux feux.
On remarquera en outre le chiffre de la population : 1095 chefs de famille pour 4700 tètes. D'après de vieux titres, la population de Gèrardmer n'était en 1687 que de 22 pères de famille, soit au plus 150 personnes ; en 1753, elle était montée à environ 2550 ; en 1809 elle est presque douhlée, et enfin aujourd'hui elle s'élève à 5921 hahilants.
XII. Les trois belles mers sont Gèrardmer, Longemer et Retournemer, que tous les touristes connaissent au- jourd'hui. Le nom de mer est bien prétentieux pour des lacs dont le plus grand n'a que 116 hectares de super- ficie sur une profondeur de 55 mètres ; mais ce n'est pas la faute des habitants si l'écriture les accuse d'orgueil ; ils s'obstinent à prononcer Gérômé et Géromouè, dès les temps les plus anciens, malgré les statistiques offi- cielles dont l'orthographe déroute souvent les étymolo- gistes. Gèrômé est la me de Géraud ou Girard, pre- mier duc d'Alsace. Géraud, Giraud est encore dans toute la montagne la traduction de Girard. Qu'est-ce qu'la me ? Mé, mcy, maix et souvent ma en patois, désigne une terre, une métairie et n'a aucun rapport avec l'idée de mer. C'est un mot qui appartient à la langue celtique. Longemer et Retournemer sont des désignations plus modernes calquées sur une orthographe vicieuse.
On appelle chaumes les vastes pâturages et prairies au gazon épais qui couvrent les hautes montagnes des
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Vosges. La végétation rabougrie de petits hêtres tordus s'arrête sur leurs pentes et forme au front chauve des monts comme une couronne de sombre verdure au- dessus de laquelle s'arrondit leur tête. C'est là que les botanistes et les chercheurs de simples sont heureux, comme dit M. Pottier. Parmi les plantes utiles qu'on recueille sur ces hauteurs, il faut surtout citer la gen- tiane qui ne sert pas seulement dans les officines médi- cinales, mais l'habitant du pays en fait aussi une eau-de- vie délicieuse et stomachique.
XIII. El y v'no, ils y viennent. Pas plus que nos aïeux lettrés, nos paysans Vosgiens ne font sonner s à la fin du pronom ils sur la voyelle qui suit. On trouve presque partout dans Joinville il a voient, il alèrent, il estoient, il attendoient, etc.
XIV. II n'y a pas de glaciers dans les Vosges. Ce sont quelques circonstances naturelles qui font que la glace se conserve sous des roches à l'abri du soleil. Telle est la glacière de la vallée de Granges, près de Gérardmer; elle est la seule qui conserve de la glace en tout temps ou à peu près.
Le curé Pottier emploie quelquefois nous pour^'e à la lre personne du pluriel. C'est tout à fait contre la gram- maire du patois de Gérardmer; soit besoin de la mesure, soit parce qu'il n'était pas originaire de ce pays, c'est à tort qu'il a contrevenu à la règle.
XV. Parmi les diverses industries de Gérardmer, il y en a trois qui ont fait et qui font encore la fortune du pays , la fabrication de la toile , celle du fromage et la boissellerie. La première est la plus importante de toutes et produit pour le pays des sommes incroyables. Quant aux fromages dits Gérômé, ce n'est pas Gérardmer seul
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qui les fabrique. M. Vacca1 en évalue à 40,000,000 de kilogr. pour le seul arrondissement de Remiremont la production annuelle.
« Il existe à Gérardmer une branche d'industrie d'au- » tant plus précieuse pour celle commune que tout est » bénéfice de la main d'oeuvre ; c'est la fabrication des » cuveaux, de la vaisselle de bois et des boites de sapin. » Les habitants se livrent pendant l'hiver à ce travail. Us » vendent leurs ouvrages à des négociants du pays qui » les répandent dans toute la république. On évalue le » produit de ce commerce à \ 50,000 fr. » (Statistique de l'an X.)
XVII. Après que la besogne d'été est faite et qu'on chauffe le fourneau en hiver. L'extraction de la poix est ancienne dans les Vosges. Flodoard , au 10e s., dit que les Vosgiens étaient tenus de fournir à l'église de Reims toute la poix nécessaire à l'entretien des vaisseaux où elle gardait ses vins.
XVIII. Les montagnards qui n'ont pas d'industrie ou qui manquent d'ouvrage filent la quenouille comme les femmes. Nous avons vu deux vieillards qui n'avaient pas d'autre moyen de gagner leur vie ; ils filaient à eux deux pour huit sous par jour.
Le mot bohon, hêtre, vient de l'allemand bûche. 11 n'y aurait à relever dans cette Epître qu'un petit nombre de mots d'origine allemande. Nous citerons proche , parler, sprechen; yodié, garder, warten; spéni, privé, spànen, (sevrer) ; seg, scie, scierie, sage; iiostou, vif,
1. Fabrication des fromages dits Gérômé, Journal d'Agriculture pratique, 1864.
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turbulent, hastig, drohô, à travers, dure h ; ce dernier terme s'étend jusqu'à Luné ville.
XIX. Le salin est le produit brut des cendres de la bruyère, de la fougère, etc., desséchées jusqu'à siccité ; elles sont employées pour faire la soude nécessaire aux verriers. Dans un pays pauvre alors, où la matière pre- mière est si abondante, le rapport de cette fabrication était assez considérable. La Statistique de l'an X l'évalue à 100,000 fr. Ce salin, vendu à des négociants de Saint- Dié et de Raon-1'Etape, qui le convertissaient en potasse pour les verriers, était d'autant plus recherché que les femmes avaient soin d'en augmenter la force, en arrosant de leurs urines les tas de fougères et d ^bruyères qu'elles faisaient près de la maison.
XXIII. Les plaintes qu'on trouve à la fin de cette Epilre sur la difficulté des habitants d'avoir à leur disposition le bois de leurs forêts sont assez naïves. Elles témoignent à la fois de l'ancien régime qui précipitait les forêts à leur ruine, et du nouveau qui, par de bonnes mesures d'ordre, voulait en arrêter la destruction et les régénérer.
Les habitants des Vosges jouissaient du droit illimité d'envoyer leur bétail vain pâturer en tout temps et dans toute l'étendue des forêts, et, d'un autre côté , les droits d'usage qui leur étaient immodérément accordés pour les bois de chauffage et de construction nécessaires à l'entre- tien et aux réparations de leurs habitations étaient beau- coup trop multipliés et excédaient la possibilité des forêts {Statistique de l'an X). Aussi les usagers avaient-ils vu réduire leurs droits, et,. comme dit VEpitre, le pauvre ne pouvant acheter du bois, se trouvait dans la misère ; les étrangers avec leurs scieries enlevaient presque tout, et il ne pouvait en avoir assez pour son dé fruit, sa jouissance personnelle.
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VARIANTES ET ADDITIONS DANS L'ÉPITRE ADRESSÉE A L'IMPÉRATRICE JOSÉPHINE.
Madame Joséphin', not impératrice,
Que la France préhe1 don tan, Qu'o vo di2 bé-n aimée et bùne protectrice,
J'vos aimo inoq les aut gens.
Po l'empereur, po vo, ré n'o mè q'neu montaine. (Le reste de la stance comme la 5e de VEpi(re).
Vos ollè cet' trovè grossi not girom'héye ;
Ma vot 31a j esté pos're bé3 Q'not sentimo vau mè, qu'cl o quéq'peu pi béye",
Que not' longue en' vau mi l'idé.
Vos o dné in chèplo5 è en' de neu béyesse.
Nos o-n on bé préhi l'honneur, Et ço qu'el vos è di, terlole lé poroisse
Lo posse6 et l'è pri dô not cœur.
Après ces quatre premières stances vient le reste de VEpitre que nous avons donnée plus haut avec quelques transpositions, puis l'auteur ajoute ce compliment qui fait que la pièce se termine comme la femme d'Horace, turpiter atrum desinit in piscem, sans rime, ni nie- sure, ni raison, correspondant au morceau si complet par lui-même :
1. Aime.
2. Qu'on vous dit.
3. Pensera bien.
4. Que notre sentiment vaut mieux, qu'il est quelque peu plus beau, que notre langue ne vaut pas l'idée.
5. Chapelet.
6. Le pense.
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Vot' Majesté è vi q'not longue o bé grossire ;
Ma s'el voiyo not' sentimo, El voro que j'son fran, que j'en' féyo poué d'chiret1,
Que son amour o dô not' cœur
lnoq el o dô not' proch'mo ;
Que j'sévo séti lo bonheur
Q'iè France è d'oou2 po màtrosse
En' gen si dign' de l'empereur. O nou préyo bé Déy qu'è lo dnesse en' gran vie,
Po to net' échirie3 Lo bé qu'èl on jo fà, qu'èl è-z tan coté.
J'èré pichi moèri* Po lêchie è-z effan le gran félicité
Qu'è vlo lo-z y fàre veni.
Nou préyo déy' que le santé
De tertole en' si bon' famille
Diress' bon pèç's po lé prospérité
De nation qu'o r'civo lou bonheur, Et qu'è s'ess' dô lo cil inoque dô neu cœur.
1. Poinl de cérémonie.
2. D'avoir pour maîtresse.
3. Pour assurer (tout net le bien qu'ils ont déjà fait, qui leur en a tant coûté.
4. J'aurais préféré mourir pour laisser aux enfants.
5. Dure bonne pièce (longtemps) pour la prospérité des nations qui en reçoivent leur bonheur et qu'ils soient dans le ciel comme dans notre cœur.
LE BIENHEUREUX
JEAN DE VANDIÈRES,
PAR M. AUG. D1G0T.
On entend répéter tous les jours que le dixième siècle est véritablement le siècle de fer de l'Eglise ; que les invasions des Normands et des Hongrois, dans le nord et dans le centre de l'Europe, les descentes et les ravages des Sarrasins dans le midi, la décadence des études , l'affaiblissement de la discipline, la corruption des mœurs, qui accompagnent presque toujours les grandes calamités publiques , ont justement valu à cette époque le nom d'âge des ténèbres et de la barbarie. Cette peinture des malheurs et de la dégradation intellectuelle et morale du dixième siècle manque de vérité, et, quand on étudie l'histoire ecclésiastique et civile de celle époque dans les sources, et non dans les mauvais abrégés, dans ces com- pilations sans couleur, qui circulent parmi nous, sous des titres plus ou moins pompeux, on ne tarde pas à recon-
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naître que, si de grands scandales vinrent affliger l'Eglise, de grandes vertus parurent pour la consoler ; que, si les dernières invasions des peuples barbares furent terribles, elles ne purent du moins arrêter la formation de la société nouvelle, qui allait paraître si brillante et si forte, au moment des croisades.
Ce fut vers le commencement de ce dixième siècle tant calomnié que naquit l'homme, le saint, le négociateur, dont nous allons esquisser l'histoire. Jean dut le jour à des parents riches et vertueux. Son père qui était alors fort avancé en âge, habitait Vandières, village situé sur la Moselle, à une lieue et demie au-dessous de Pont-à- Mousson. C'était, comme on sait, une des maisons royales des princes Carlo vingiens ; ce fut, plus tard, le séjour d'une femme qui, malgré sa beauté et son esprit, n'a laissé que de tristes souvenirs : la fameuse Alix de Champé, maîtresse du duc de Lorraine Raoul.
Jean ne tarda pas à faire preuve d'une intelligence remarquable, d'un noble penchant pour la vertu, et d'un grand zèle pour l'étude et la méditation. Très-jeune encore, il manifesta l'intention d'aller à Metz, pour y suivre les cours de la fameuse école que les évêques de cette grande ville avaient fondée, auprès de leur cathé- drale, pour l'instruction, non-seulement des jeunes gens clercs, mais encore de tous ceux qui voulaient acquérir quelques connaissances dans les lettres sacrées ou pro- fanes (comme l'on disait alors). Les parents de Jean ne consentirent qu'avec peine au projet qu'il avait formé, et ne le virent point sans crainte quitter le toit paternel, à une époque où la sécurité générale paraissait un rêve impossible à réaliser. Il finit cependant par arracher leur consentement, se rendit à Metz et parcourut avec rapidité
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le cercle, alors peu étendu, des études. Son amour pour la science était sans bornes, et, ayant appris, pendant qu'il se trouvait à Metz, qu'un fameux professeur, nommé llildebold, et élève du célèbre Remy, donnait des leçons de grammaire dans l'abbaye de Sainl-Mibiel , il quitta Metz, et vint suivre les cours de Hildebold.
Ces occupations scientifiques, qui lui étaient si cbères, furent alors interrompues violemment par un malheur qui vint le frapper. Son père mourut, et sa mère, qui était jeune encore, lui imposa, en se remariant, l'obliga- tion de s'occuper de l'instruction de ses deux frères, et de l'administration des biens que son père leur avait laissés en mourant.
Jean montra alors tout ce que le ciel avait mis dans son âme de force et d'énergie. Dès qu'il sent que sa pré- sence est nécessaire à Vandières, il quitte ses études, ses maitres, ses amis ; il part, et va veiller sur ses frères et sur leur fortune; il consent à demeurer dans un village obscur, parce qu'il comprend que toute sa sollicitude est due à ceux qui lui sont unis par les liens du sang.
Cependant son mérite l'avait fait connaître, et sa mo- destie, loin de le cacber, n'avait servi qu'à en rebausser l'éclat. Le comte Rieuin1 le nomma son chapelain ; et Jean, qui sentait qu'il ne pouvait rester toute sa vie enfoui au fond des campagnes, accepta l'offre de Rieuin, ainsi que celle que lui fit, quelque temps après, le noble Warner, qui lui confia l'administration de l'église de Fontenoy, près de Toul. L'évèque de Verdun essaya aussi de l'attacher à son diocèse, mais ses tentatives demeu- rèrent sans succès. Jean, content de sa position, remercia
l. C'est celui dont parle Vassebourg ; i° 78.
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le prélat, et consacra tous ses soins à l'accomplissement des modestes fonctions dont il était revêtu. Mais, quoi- qu'elles lui enlevassent une partie de ses journées ; quoi- que, par piété, il passât quelquefois dans l'église un temps considérable, il n'abandonna point les sciences qui avaient fait le charme de ses premières années. Il voulut écouter les leçons de Berner, diacre de l'église de Toul, et fit de profondes études sur le texte des Saintes Ecritures. — Sa charité n'était pas moins grande que ses lumières : ayant un jour rencontré un vieux prêtre que les inva- sions des Normands avaient forcé de quitter sa patrie, il
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lui donna l'hospitalité, ne voulut jamais lui permettre de quitter sa demeure, et lui céda même son église de Fon- tenoy.
Le goût de la retraite commençait à dominer toutes ses autres inclinations; Jean revint encore une fois à Vandières, où le rappelaient peut-être, d'ailleurs, quel- ques-uns de ses souvenirs d'enfance , qui ne meurent jamais, et prit soin de l'église de ce village. Cette église dépendait de l'abbaye de Saint-Pierre-de-Metz, et Jean, que ses nouvelles fonctions obligeaient quelquefois d'al- ler dans cette ville , s'y lia avec deux hommes d'une grande vertu, Roland, maître de chant de la cathédrale, qui passait presque toutes ses journées en prières dans l'oratoire de Saint-Michel, le lieu le plus retiré de la basi- lique, et Warimbert, qui vivait aussi dans une retraite presque absolue. Leur conversation lui inspira le désir de mettre à exécution un projet qu'il avait formé depuis longtemps, celui de se retirer dans la solitude. Il se rendit alors à Verdun pour consulter un reclus, nommé Humbert, qui avait acquis, par ses austérités et ses étu- des, une grande réputation de vertu et de science. Ses
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conseils ayant affermi Jean dans sa résolution, il alla trouver un solitaire, qui vivait au milieu des forêts de l'Argonne, et se construisit une cellule auprès de celle de l'ermite. Mais les manières de son nouveau compagnon, homme bizarre et singulier, lui plurent peu, et, cédant aux conseils de Humbert, il partit pour l'Italie, où il vou- lait aller prier sur les tombeaux des saints Apôtres. Jean parcourut en pèlerin cette contrée, qui offre un si puis- sant intérêt aux cœurs vraiment catholiques. Il visita Rome, la ville éternelle; le mont Garganus, sur lequel, si l'on en croit une tradition respectable, saint Michel apparut à l'évêque de Sipontum ; le mont Cassin, célèbre par sa fameuse abbaye de Bénédictins , et enfin les humbles cellules des ermites du Vésuve.
Jean, revenu en Lorraine, se fixa à Verdun, auprès du pieux Humbert, et y fit l'apprentissage de la vie érémi- tique; mais la modeste habitation fle Humbert ayant été détruite par accident , le solitaire vint à Toul trouver Einold, ancien archidiacre de cette église, qui, après avoir distribué tous ses biens aux pauvres, s'était en- fermé dans une cellule , qu'il ne qu ittait que pour se rendre à la cathédrale. Einold et Humhert formèrent alors tous deux le projet d'aller chercher dans les forêts une solitude, qu'ils ne pouvaient, maigre tous leurs efforts, rencontrer si près des demeures des Mommes. Ils quit- tèrent donc Toul, sans en rien dire à personne, traver- sèrent la Moselle, s'enfoncèrent dans h forêt de Haye, et, ayant rencontré une caverne, ils en fnent leur demeure, et invitèrent Jean à venir partager ) ;ur retraite, leurs travaux et leur vie contemplative. Olui-ci ne se rendit point à leu- invitation; il consulta plusieurs de ses amis, et, loin de ne résoudre à vivre avec Hu abert et Einold, au
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milieu des forêts, il les engagea à se retirer avec lui et quelques-uns de ses amis en Italie, où les véritables règles de la vie religieuse étaient en vigueur dans plu- sieurs monastères, qu'il avait visités lors de son voyage. Einold et Humbert y consentirent, et tous se disposaient à se mettre en route pour Rome, lorsque Randincus, chanoine de Metz, demanda à Adalbéron, son évèque, la permission de les accompagner. Celui-ci, loin d'y con- sentir, s'empressa de mettre obstacle à l'exécution d'un projet qui allait enlever à son diocèse et à celui de Toul plusieurs hommes, non moins distingués par leur piété et leurs vertus, que renommés pour leurs connaissances et leurs talents.
Adalbéron les fit tous venir à Metz, et, pour les retenir, offrit de leur abandonner celle des abbayes de son dio- cèse qui leur conviendrait le mieux. Après en avoir déli- béré entre eux , ils résolurent de demander l'abbaye de Gorze, croyant qu'Adalbéron ne la comprenait pas dans les monastères parmi lesquels il leur permettait de choisir, et que, sur son refus, ils pourraient réaliser un projet auquel ils attachaient, pour ainsi dire, leur des- tinée. Leur étonnement fut grand lorsqu'ils virent Adal- béron leur accorder aussitôt ce qu'ils avaient demandé. Ils n'eurent plus alors aucune raison à faire valoir pour se dispenser d'obéir, et, en 993, ils entrèrent à Gorze, au nombre de sept : Jean, Einold, le diacre Bernacer, le chanoine Randicus et trois autres.
Cette célèbre abbaye, fondée en 749 par Crodegang, évêque de Metz, et dont l'église avait été dédiée en 761, en présence du roi Pépin-le-Bref, de vingt-quatre évê- ques et d'une foule de seigneurs ; cette célèbre abbaye était alors dans le plus triste état. Les biens en avaient
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été usurpés par de puissants seigneurs du voisinage, et les quelques moines, qui erraient encore dans cette abbaye, avaient à peine assez de ressources pour vivre. Le relâchement s'y était d'ailleurs introduit, et les pra- tiques delà vie monastique étaient tombées en désuétude.
Adalbéron , qui avait l'ait vœu autrefois de rétablir Gorze, s'empressa de faire exécuter les travaux néces- saires pour que les nouveaux habitants pussent se loger aisément ; et le monastère, grâce aux talents et aux ver- tus d'Einold , qui avait été élu abbé, et de Jean, qui devint l'économe et l'âme de la nouvelle communauté, le monastère, disons-nous, ne tarda pas à changer complè- tement de face. Les anciens moines, qui avaient eu le choix ou de quitter l'abbaye, ou d'y rester en se confor- mant à la règle, se réunirent aux compagnons de Jean et d'Einold, et retrouvèrent bientôt, dans le commerce de ces derniers, une ferveur que les malheurs des temps avaient éteinte. Jean , pour subvenir aux besoins de la communauté , lui abandonna la propriété de tous ses biens, qui étaient considérables, et engagea ses frères, qui, entraînés par ses exhortations, avaient embrassé la vie monastique, à se dépouiller également, en faveur de Gorze, de tout ce qu'ils possédaient.
Jean, non content d'avoir pourvu de la sorte aux be- soins les plus pressants de ses compagnons, entreprit une tâche plus difficile encore ; il forma le projet d'en- gager à une restitution tous ceux qui avaient usurpé ou qui possédaient, à quelque titre que ce fût, les biens du monastère. Quelques succès partiels augmentèrent son courage, et il osa aller trouver seul Boson, fils de Richard, roi de Bourgogne, qui était détenteur de presque tous les biens de l'abbaye. Ce seigneur, qui résidait à Vitry-
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le— Brûlé, et qui gouvernait en maître une grande partie de la Lorraine, du Barrois et de la Champagne, non con- tent de repousser avec hauteur et mépris les justes de- mandes de Jean de Vandières, le menaça de lui faire sentir les effets de sa colère. Il en serait peut-être venu à des actes de violence, si son épouse ne l'eût engagé à ne pas s'écarter du respect qu'il devait avoir pour un serviteur de Dieu. Jean retourna à Gorze; il y était à peine arrivé qu'un officier du comte Boson vint lui ap- prendre en toute hâte que ce dernier était tombé malade subitement, et demandait avec instance à lui parler. Jean retourna aussitôt à Vitry, et éprouva le double plaisir d'entendre le comte lui annoncer qu'il restituait tous les biens de l'abbaye, et de le voir recouvrer promptement la santé. Cette difficile négociation une fois accomplie, l'humble religieux se hâta de regagner son monastère. Ainsi qu'on vient de le voir, il lui avait rendu d'éminents services : non content de lui abandonner la propriété de tous ses biens ; non content d'avoir engagé ses frères à imiter son noble désintéressement, il était parvenu, à force de démarches, et en s'exposant aux plus grands dangers, à obtenir la restitution de toutes ses anciennes posses- sions; on croit peut-être qu'il va se prévaloir de ses -ser- vices, qu'il va profiter de l'ascendant que ses talents ont dû lui donner, pour monter au premier rang, pour s'em- parer du gouvernement de l'abbaye? Nullement. La der- nière place est, à l'entendre, celle qui lui convient le mieux. Lorsqu'il était entré à Gorze, avec ses nouveaux compagnons, ceux-ci l'avaient nommé économe ; et le pieux cénobite avait accepté, quoique cet emploi dût le mettre continuellement en rapport avec un monde qu'il voulait fuir, et lui enlever un temps qu'il aurait désiré pouvoir consacrer à la prière et à la contemplation.
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Einold, qui voulait l'éprouver, ne lui laissa pas longtemps cet emploi, et le chargea successivement des fonctions de prévôt et de doyen ; quelque temps après, et pour s'as- surer de son humilité, il le nomma cellérier et gardien du vestiaire. Ces fonctions étaient les plus humbles qu'on put lui confier; mais Jean accepta sa nouvelle tâche avec plaisir. 11 se consacra alors tout entier au service des pauvres et des malades ; il veilla, avec un soin particu- lier, à ce que les voyageurs reçussent dans le monastère une hospitalité généreuse.
Redevenu procureur de l'abbaye, il exécuta les projets qu'il avait formés pour l'embellissement de l'église, du cloître et des bâtiments. 11 acheta des ornements magni- fiques, pour augmenter la pompe du culte, et fit fondre un certain nombre de cloches, fort remarquables pour l'époque.
Loin de s'enorgueillir de tout ce qu'il exécutait pour la prospérité de l'abbaye ; loin d'agir en maitre dans la sphère de ses attributions, il ne faisait rien sans consulter Einold, et se glorifiait de son obéissance et de sa soumis- sion.
Son humilité égalait ses talents. Le prévôt Friderick, homme vertueux, mais vif et emporté, se permit un jour, je ne sais à quel sujet, d'accabler Jean de Vandières des reproches les plus amers et des paroles les plus dures. Le solitaire, qui n'avait point commis la faute dont Fri- derick l'accusait, ne voulut pas même prendre la peine de prouver son innocence. 11 se prosterna devant le pré- vôt, et garda le plus profond silence.
Friderick sentit ce qu'avait d'admirable la conduite du bienheureux Jean, et, lui ayant ordonné de se lever, il se jeta lui-même à ses pieds, en lui disant : « Jean, vous
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m'avez tué ! — Moi ! Comment? — Votre patience m'a tué. — Non, reprit le saint homme, c'est votre emporte- ment qui vous tue. »
Et cette patience, il ne la montrait pas seulement à l'égard de ses supérieurs ; mais il en faisait preuve aussi lorsque ses égaux se permettaient de lui adresser quelque reproche ; il leur répondait doucement, et leur deman- dait pardon d'avoir agi d'une manière qui ne leur plaisait pas, ou hien gardait modestement le silence.
Les soins que l'administration du monastère exigeait de lui, ne l'empêchaient point de vaquer aux exercices du chœur avec une régularité exemplaire. Pour s'ac- quitter avec une égale exactitude des nombreux devoirs que ses fonctions lui imposaient et ne négliger cependant aucun des exercices religieux, qu'il regardait comme les plus importants pour un solitaire, il dérobait au sommeil une partie du temps que saint Benoît permettait d'y con- sacrer, et passait de longues heures dans la prière et la méditation. L'étude des Saintes Ecritures, qui avait fait le charme de sa jeunesse, et la lecture des ouvrages des Pères l'occupaient aussi pendant une partie des nuits.
L'exemple des vertus des solitaires, qui avaient relevé de ses ruines la fameuse abbaye de Gorze, inspira le désir de les imiter : les novices se présentèrent en foule, et bientôt les moines furent à Gorze aussi nombreux qu'ils l'avaient été aux plus beaux jours de sa prospérité, sous les règnes de Pépin et de Charlemagne.
Parmi les hommes pieux que les vertus de Jean et d'Einold attirèrent à Gorze, nous remarquons : Humbert, ce reclus que le bienheureux Jean de Vandières avait visité plusieurs années auparavant ; André, qui fut, dans la suite, envoyé à Rome, sur la demande du pape Agapet,
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pour établir l'observance régulière dans le monastère de Saint-Paul ; Odilon , chanoine de la cathédrale de Ver- dun ; Angilram, primicicr de la cathédrale' de Metz ; Hugues, qui fut, plus tard, évêque de Liège ; Rambert, abbé de Senones, et plusieurs autres, dont nous tairons les noms, pour ne point trop allonger ce récit.
Au moment où Jean de Vandières édifiait Gorze par ses vertus, l'empereur Othon Ier commençait à régénérer l'empire d'Allemagne , qui, sous les faibles successeurs de Charlemagne, était déchu du haut rang que ce grand prince avait su lui conquérir. Ses succès étendirent au loin sa réputation, et le khalife Abdérame III, qui régnait alors à Gordoue, lui envoya une ambassade.
La lettre, qui fut remise de sa part à l'empereur, con- tenait plusieurs assertions erronées relativement au chris- tianisme, et le fils de Dieu n'y était point traité avec le respect convenable. Othon, qui avait résolu, à son tour, de députer vers le khalife , voulut que l'on choisît pour ambassadeurs deux hommes d'église, car, seuls alors, ils avaient conservé le dépôt sacré des sciences ; et il ne voulait envoyer en Espagne que des hommes qui pussent, au besoin, soutenir la vérité des dogmes de la religion chrétienne, si le khalife, qui paraissait aimer à discourir sur ces matières, entamait quelque discussion. Einold fut chargé de choisir les deux ambassadeurs parmi les moines de son abbaye ; Jean de Vandières et Angilram, ancien primicicr de la cathédrale de Metz, furent désignés. Leurs talents leur valurent cette haute distinction, et leur firent confier cette mission honorable. Ils s'occupèrent aussitôt des préparatifs nécessaires pour un voyage d'aussi longue durée. Mais nous croyons , sans en avoir cependant les preuves bien certaines, qu'Angilram ne put accompagner
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le bienheureux Jean ; ce dernier se fit suivre par un moine de Gorze, nommé Garamann, et par un Verdunois appelé Ermenhard, qui connaissait la route, et se chargea de la garde des présents destinés au khalife.
Les envoyés de l'empereur partirent en 9S3, traver- sèrent la Lorraine, passèrent à Langres, à Dijon et à Lyon ; dans cette dernière ville, ils s'embarquèrent sur le Rhône, le descendirent jusqu'à son embouchure, et, étant montés sur un navire qui faisait voile pour l'Es- pagne, ils arrivèrent en peu de temps à Barcelone, et bientôt après à Tortose, première ville du khalifat de Gordoue ; dans cette direction ils y furent retenus un mois entier ; enfin, on les conduisit à Cordoue, où Ab- dérame se trouvait alors.
Jean de Vandières dut être vivement frappé du spec- tacle qu'il eut sous les yeux , depuis le moment où il quitta Tortose pour pénétrer dans les provinces cen- trales du khalifat. C'était alors le temps de la puissance des musulmans en Espagne ; alors florissaient à Cordoue des écoles célèbres, d'où sortirent, un siècle plus tard, Averroès et Abenzoar. On y enseignait la géométrie , la chimie, la médecine. Les arts d'agrément y étaient éga- lement cultivés, et les poètes célèbres faisaient l'orne- ment de la cour d'Abdérame.
Ce prince tint les rênes du gouvernement pendant cin- quante années, et, pendant ce long règne, la puissance et l'ascendance du khalifat allèrent toujours croissant. L'al- liance d'Abdérame était ambitionnée par les princes les plus éloignés, et l'empereur de Bysance, Constantin IX, lui envoya une ambassade célèbre, pour la réception de laquelle Abdérame déploya un luxe et une magnificence
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qui nous rappellent ce que nous avons lu de plus extraor- dinaire dans les Mille et une Nuits.
Nous ignorons si le khalife fit à l'humble envoyé de l'empereur d'Allemagne une réception aussi brillante. Irrité de ce qu'Olhon n'avait point immédiatement donné audience à son ambassadeur, il menaça Jean de Vandières de ne l'admettre en sa présence qu'au bout d'un laps de temps fort considérable.
Abdérame fixa enfin le jour de l'audience ; les officiers du prince voulaient forcer Jean à quitter, pour ce mo- ment solennel , l'humble habit des disciples de saint Be- noit. Abdérame lui-même envoya au solitaire une somme assez considérable pour qu'il pût se procurer des vête- ments magnifiques ; tout fut inutile ; il voulut être admis à l'audience sans rien changer à son extérieur, et le kha- life, admirant sa fermeté et son attachement pour les régies qui lui étaient imposées, finit par y consentir, le reçut avec bonté , et promit d'empêcher les courses des corsaires sarrasins, qui répandaient la terreur sur les côtes de Provence et d'Italie. Quelques jours après cette audience solennelle, Abdérame, qui avait été frappé de la manière dont Jean de Vandières s'était acquitté de sa mission , le fit venir dans son palais, s'entretint long- temps et familièrement avec lui, et lui fit de nombreuses questions sur l'état de l'Europe et sur les événements qui s'étaient passés en Allemagne depuis l'avènement de l'empereur Othon 1er.
L'envoyé, satisfait de l'heureuse issue de sa mission, se hâta de quitter l'Espagne et fit le chemin de Cordoue à Metz dans deux mois et demi ; c'était alors voyager avec une promptitude extraordinaire.
Adalbéron l'accueillit avec une grande joie, et Jean,
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ayant appris que l'empereur se trouvait à Francfort , s'y rendit aussitôt. Othon le reçut honorablement et le com- bla de louanges. Jean de Vandières retourna probable- ment dans son monastère ; mais les courses des pirates sarrasins n'ayant pas discontinué, l'empereur chargea le solitaire d'une nouvelle mission. L'infatigable envoyé se remit en route, accompagné d'un bourgeois de Verdun, nommé Dudon, et se rendit de nouveau à Cordoue. Nous ne connaissons pas le succès de son nouveau voyage, car nous avons perdu la dernière partie de son histoire, com- posée par Jean, abbé de Saint-Arnould. Nous croyons cependant pouvoir conjecturer qu'il eut des résultats aussi heureux que les circonstances pouvaient le faire espérer.
Jean de Vandières avait quitté le cloître avec joie, parce qu'il s'agissait du salut d'une foule de chrétiens, et parce qu'il espérait que sa mission mettrait un terme aux des- centes et aux ravages des Sarrasins. Sa tâche une fois accomplie, il regagna sa cellule avec autant de contente- ment qu'il l'avait abandonnée.
Le vénérable Einold mourut peu de temps après, et les moines, d'une voix unanime, lui donnèrent Jean de Van- dières pour successeur. Mais il ne jouit pas longtemps de cet honneur, qu'il n'avait point ambitionné, et dont il ne se croyait pas digne, et mourut saintement au commen- cement du carême de l'année 965, laissant florissante et remplie de nombreux serviteurs de Dieu, une abbaye qu'il avait trouvée délabrée et déserte lorsqu'il y était entré, avec ses six compagnons, trente ans auparavant.
Telle fut la vie d'un homme qui mérite d'être connu à plus d'un titre, et dont le nom est aujourd'hui plongé dans le plus profond oubli ; son histoire a été composée,
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comme nous l'avons dit plus haut, par Jean, abbé de Saint-Arnould ; mais cet ouvrage est écrit dans un latin barbare et extrêmement difficile à comprendre, et la vo- lumineuse collection des Bollandistes, dans laquelle il est comme enfoui1, est trop rare pour qu'un grand nombre de personnes puissent la consulter. Nous avons donc cru, en publiant cette biographie peu connue, et cependant digne de l'être , rendre un véritable service à ceux qu'in- téresse encore l'histoire de notre vieille Lorraine.
1. Ad diem xxvu februarii.
TRADUCTION EN PATOIS
DU PAYS DE TOUL, d'une
BULLE DU SOUVERAIN PONTIFE
PIE IX, PAR M. L'ABBÉ GUILLAUME.
AVANT-PROPOS.
Quelques jours seulement avant sa nomination au siège épiscopal de Nancy, Mgr Lavigerie, alors auditeur de Rote pour la France à Rome, fut prié de demander, au Souve- rain Pontife , l'autorisation de lui dédier le recueil de la traduction, dans toutes les langues, de la bulle du 8 dé- cembre 1854, définissant le dogme de l'Immaculée Con- ception de la Vierge Marie. Sa Sainteté Pie IX agréa cette demande avec une satisfaction marquée, et se réjouit beaucoup d'un dessein si pieusement ingénieux et dont l'exécution se poursuit actuellement avec autant d'intelli- gence que d'ardeur.
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Arrivé dans son diocèse, le nouvel évèque de Nancy et de Toul s'étant convaincu du bon esprit qui anime les populations qui le composent, désira le voir figurer d'une manière particulière et nominale dans une collection po- lyglotte qui sera, sans conteste, unique dans l'univers. Ne pouvant l'y faire représenter, delà sorte, ni en français, ni en allemand, puisque la France et l'Allemagne y por- teront leurs idiomes, il imagina de le faire par l'ancien langage du pays, et nous demanda s'il ne serait pas pos- sible d'obtenir une traduction patoisc du document pon- tifical précité. Nous avons pensé n'avoir reçu l'honneur de telle demande qu'en tant que membre de la Société d'Archéologie lorraine, et c'est surtout à ce titre que nous nous sommes mis en devoir d'y répondre au nom de notre Compagnie. Nous avons essayé d'abord, puis ayant entrevu la possibilité d'une complète réussite, nous avons mis résolument la main à l'œuvre et nous avons pour- suivi le travail, jusqu'à entière confection, avec tout le soin que nous avons pu y apporter.
Pour mieux atteindre notre but, c'est-à-dire, pour don- ner à notre traduction la tournure et la physionomie pa- toiscs, pour lui imprimer un caractère de sérieuse au- tonomie, ne pas nous borner à la ridicule substitution de quelques expressions villageoises à des mots français, ou nous exposer à ne donner qu'un amalgame de patois dif- férents, nous avons pris les plus minutieuses précautions.
Nous étant tout d'abord convaincu qu'il n'existe pas d'idiome patois identiquement commun à toute une con- trée, à tout un canton ; qu'il se trouve, au contraire, de paroisse à paroisse, des variantes dans le choix des mots et dans la manière de les prononcer, dans les voyelles et dans les consonnes qui se reproduisent de préférence ;
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ayant remarqué, d'autre part, que, depuis un certain nombre d'années, le français a pénétré dans le langage rural et l'a singulièrement modifié ; nous avons compris qu'il fallait nous fixer à l'idiome d'un seul village et que notre choix devait s'arrêter sur une commune qui, située à l'écart, n'étant pas traversée par de grandes voies, ayant par conséquent moins de communications avec les voya- geurs et les cités, aurait plus fidèlement conservé les lo- cutions natives de l'ancien langage. Pagney-derrière- Barine, situé à quatre kilomètres au N.-O. de Toul, nous a paru réunir, pour notre objet, les conditions dési- rables, et nous sommes allé nous y installer. Introduit chez ses parents, par M. l'abbé Raison, vicaire de Malzé- ville qui , déjà , nous avait prêté son concours pour la traduction, que j'appellerai théologique, de la bulle Inef- fabilis, nous y trouvâmes des ressources , pour ainsi dire, inespérées : des personnes d'une politesse exquise, d'une intelligence remarquable, parlant correctement le français , mais n'ayant jamais quitté la localité , ayant longtemps vécu avec leurs aïeuls décédés plus qu'octo- génaires et conservé avec un respect religieux les cou- tumes et les traditions de famille. Elles eurent bientôt compris le service que nous réclamions de leur obli- geance, et grâce à leur concours empressé, nous avons pu minuter notre traduction patoise comme elle l'eût été, il y a un siècle et davantage, par le plus expérimenté villageois de la commune.
Tel est le motif qui nous a fait entreprendre une tra- duction d'un genre nouveau ; tels sont les moyens mis en œuvre pour la rendre aussi parfaite que possible. C'est le patois d'une seule localité, nous le répétons ; il n'y aura donc pas, de la part de tels ou tels, à s'étonner
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de n'y pas rencontrer les locutions en usage dans leur paroisse natale ou dans celle qu'ils habitent, ou de les y remarquer avec certaines modifications. Après l'exacti- tude théologique, réclamée par l'importance et la gravité du sujet, l'homogénéité du langage nous a surtout préoc- cupé et nous pensons l'avoir obtenue. Nous avons aussi apporté une attention toute spéciale à former l'euphonie des mots de manière à en préparer la prononciation sans trop de recherches ni d'efforts. Nous laisserons ensuite à chacun toute latitude de se prononcer sur l'harmonie, l'originalité, l'énergie, la clarté même de ce langage an- tique, toutes choses, qu'à notre surprise, il nous a sem- blé y découvrir après une lecture suivie et quelque peu préparée.
Que si l'on choisissait pour type du patois de l'Evêehé de Toul , celui de Pagney-Bariue, il serait facile, au moyen de quelques rapprochements, de se faire une idée exacte du patois de presque tout le pays. Par exemple, à Pagney : l'a et l'o comme voyelles, le t, comme consonne se reproduisent plus fréquemment; à Francheville et dans la Woivre, dominent l'e et l'o comme voyelles et le z comme consonne. Ainsi pour exprimer l'imparfait du verbe être à la troisième personne du pluriel, on dit à Pagney : Vètaint to, à Francheville l'èlaint zo\ ailleurs on dit l'èlaint ta et dans un autre endroit Vètaint za. Tout se dit à Pagney : tourlou, à Francheville : teurteu, dans les environs de Lunéville : torlo. Eh bien se dit à Pagney : Eh bi, à Francheville : Eh bcn. Ma foi mo foué mo fri.
Porte euche euchk'.
Garçon gàchan gàchon ou guéchon.
Une chose in' hiac in' hiec.
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Beaucoup maùe moue.
Vous, nous vous, nous veus, neus.
Nous avons été j'ans éieu j'ons éteu.
Nous menons de la paille; — j'mounans d'iet paille; — j'mounons d'I'étrain.
Nous irons encore, — j'y v'rans dans co, — j'y v'rons don co.
Mon Dieu se dit à Laneuveville, mon' Du; à Bruley, me un' Dea.
On le voit, à l'exception de quelques substantifs pro- pres à certaines localités, et que nous ne pouvons ni ne voulons indiquer ici , le radical des mots se reproduit généralement dans tous les patois de notre contrée ; avec quelque attention aux finales et à la prononciation, quand on en comprend un, il est facile de comprendre aussi les autres.
Sans revenir sur les remarques générales faites par M. Jouve, au sujet des patois vosgiens, et que l'on peut appliquer, pour la plupart, aux idiomes ruraux de nos contrées, mais seulement pour faciliter la lecture et l'in- telligence de la traduction, que nous donnons ici, d'un document minuté dans une langue morte, nous allons la faire précéder d'un vocabulaire des mots qui s'y trouvent plus fréquemment répétés et leur signification; quant aux phrases ou membres de phrases que nous avons supposés ne pouvoir être facilement compris, nous en renvoyons le sens littéral ou l'explication au bas de la page qui les contient. Cette double précaution épargnera, au lecteur, toute contention d'esprit et lui rendra plus attrayant, nous l'espérons, le langage, qu'ont parlé nos pères, comme l'indique la racine du mot patois qu'on lui a donné ; langage non point de dégénérescence ou de
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corruption; mais langage plein de sève et de vigueur qui, heureusement cultivé par des intelligences d'élite et par de nobles cœurs, est devenu ce français que nous admirons , à bon droit , dans les compositions de nos écrivains les plus distingués, que la littérature actuelle ne respecte guère et qu'elle aurait néanmoins autant de profit que d'honneur à conserver avec toute son élégance, son harmonie et sa précision.
Substantifs.
Buisson,
Une chose,
Clarté,
Connaissance,
Crainte, ,
Croyance, dogme,
Les docteurs,
Eglise (temple),
Eglise romaine,
Fils,
Fille,
Germe,
Maison,
Milieu,
La neige,
Noël,
La nuit,
Les prêtres,
La porte,
Tache, souillure,
Les Saintes Ecritures,
Bouchan.
In' hiac.
Tiatet.
Counechance.
Paûe.
Le Credo que j'dijans.
Los kerets qu'ant écrit.
Mouti.
Eglise de nout' Saint-Père.
Gàchan.
Gâche.
Geormant.
Màjan.
Moiëtant.
Let noche.
Noé.
Let noïti.
Lot kerets.
L'euche.
Ouétine.
Los paupis de l'bon Diù.
Le trône élevé, Les siècles passés,
Le, la, les, Du, des, Un, une,
11, elle, ils, elles, Lui, leur, elle, Son, sa, ses, Tout, toute, Celui, celle,
Déclaré, A couvert, Meilleur, Prédécesseurs, Pris, prise, Seul, seule, Vert, verte. Vieux, vieille.
Appeler,
Chercher,
Clouer,
Conserver,
Descendre,
Donner,
- 131 —
Let chaïère élouvet. Lo vi tôt.
Articles.
Lo, let, los. De Y, d'iet, dos. I, in'.
Pronoms.
I, ill', is, ill's. Li, lou, leï.
Se, set, sos.
Tourtou.
Le eu, let celle.
Adjectifs et participes.
Détiaret.
A couï.
Miaiïe.
Ceaùes qu'étaint d'vant.
Prins, prinche.
Tout pà lou, tout pâ leï.
Vot, vote.
Vi, vie.
Verbes.
Hauyeï.
Quoiri.
Tiooueï.
R'teni.
Dévalei.
Bailleï, d'neï.
— 132 —
Entendre, |
Auyï. |
Enseigner, |
Recoudei. |
Fleurir, |
Fiorigcï. |
Laisser, |
Layeï. |
Noircir, |
Norigeï. |
Nourrir, |
Nieuèri. |
Oter, |
Roulei. |
Pousser, |
Baùesseï. |
Regarder, |
R'ouëiteï. |
Régir et gouverner, |
Mouneï et morigéneï |
Ressembler, |
Ressonneï. |
Renverser, |
R'vocheï. |
Sortir, |
Sauteï fû. |
Suivre, |
C neutre. |
Tomber, |
Choïre. |
Adverbes et conjonctions.
Au-dessus,
Autant,
Beaucoup,
Bien plus,
Constamment,
Comme cela,
Encore,
Ensemble,
Ferme,
Fermement,
Mieux,
Nettement,
Plus loin, bien loin,
L'infinitif des verbes de
A d'chus.
Auchtant.
Maûe.
Bi pu, eico pu.
Toujou.
Einlet.
Eico.
Ossonne.
Roide su pattes.
Sans broncheï.
Moïe.
Sans bioùatter.
Pu lang, bi lang.
la première conjugaison est
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généralement terminé en eï aimer , aimeï , donner ,
d'neï.
Le participe passé l'est en et, aimé, aïmet, donner, d'net.
La 5e personne plurielle du présent de l'indicatif finit en ant : is d'nant, is fin'chant, is r'cevant, is rondant.
Celle de l'imparfait l'est en aint, is aïmaint, isfin'chaint, is r'cevaint, is rondaint.
Au parfait : l'ait aïmet, Tant aïmet, etc.
Au plusque-parfait, l'avaut to' aïmet, l'avaint to, etc.
Futur, l'aïmeret, l'aimer ant.
Conditionnel, l'aiemeraut, l'aimeraint.
Subjonctif, que l'aïmeuss, qu'i peurneuss, que l'aï— menss, qu'is peurnenss.
Pour rendre le sens de cette proposition : exemple de la tache originelle, nous n'avons rien trouvé de plus exact que cette tournure : comme si elle était baptisée, encore mieux et bien plus, le premier membre de la phrase indiquant l'exemption de la souillure originelle au moment de la naissance, et le second cette exemption, avant même la naissance, c'est-à-dire, dès la concep- tion.
LETTRE APOSTOLIQUE
DE N.-T.-S.-P. PIE IX, PAPE PAR LA DIVINE PROVIDENCE, TOUCHANT LA DÉFINITION DOGMATIQUE DE L'iMMACULÉE CONCEPTION DE LA VIERGE, MÈRE DE DIEU,
EN PATOIS LORRAIN.
PIE EVECK
serviteur dos serviteurs de l'bon Diû , pou qu' l'en saut toujou souvenance1.
Diû qu'ot si bon qu'an ne l'saraut dire2, qu'ot toujou prot à pardouner et que n'dit jamas de monteris3, que put tourtou c'qui vut, que fa tout bi et arrange tourtou sans broncher et tout bellemot* ; l'avaut veu , quand l'monde n'ataum to co5, que tourtous los hoummes, éico los foummes périraint pà let faute de nout' père Adam, et pà i secret coichct à fond de l'éternitet6, l'avaut to meint do set tète que, quand s'petiot vira à moud7, i
1. Pour qu'il en soit toujours mémoire.
2. On ne le saurait dire, pour ineffable.
3. Qui ne ment jamais.
4. Qui dispose tout avec force et douceur.
5. De toute éternité.
6. Mystère caché dans la profondeur des siècles.
7. Quand son fils naîtrait.
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coumoceraut in hiac en n' saraut miaue et qu'an n' saraut saoùi coumot qu'i l'araut fà1, pou que l'houmme, que l'diape tiraut do sos greffes, n' périjeuss' mi maugré Diù qu'ot si bon et pou que si le premeï Adam douvaut to cheuïre, lo su qu' vanraut après lou li bayeuss' let main pour le r'iouver. Ot coumonçant et quand l'monde n'ataum' t'o co2, lo bon Diù démolet et arongea tout bi in' mère à c'petiot gàcban3 pou quand i vauraut venint dot' l'monde que soupiraut to maûe après lôu et i l'ai tant aimet qu'y n'vouyaut to ri que leï et qu' pou li piare l'araut fà tourtou\ Ç'ot pou celet que, bi pu qu'à tourtous los Einges et qu'à tourtous los Saints i li d'net dos bounes chouses qu'i tiraut de s'trésor qu'ot toujou pien, et tant et tant qui n'quitaut jamas ; ç'ot pou celet que los ouétines que d'nant lo péché ne Tant jamas gàtet, et ç'ot co pou celet que l'ot si belle, si boune, si sainte, si inôcente et que l'ait tant de hiacs que n'y ait que l'bon Diù qu'o n'aut pu que leï et que pl'euss' bi le saouïs.
An daut dan bi compenre que let boune Virge d'vaut t'o été pu belle que l's'laue et qu'o venant au monde, ill'saut coume si l'ataut batiée eico meuïe et bi pu6. Ç'ot pou celet que l'ait détrut le diape coume pàcheun' ne l'avaut p'ieu fare. Le bon Diù ot n'onviant s'gàchan dot l'monde velaut' to qu'i so o meim' tôt de lou et de leï que s'gàchan avaut to print pou qu'ill' saut set mère et
1. Une œuvre excellente et mystérieuse.
2. Dès le commencement et avant les siècles.
3. Choisit et prépara une mère à son fils. ■4. Il mit en elle toutes ses complaisances.
5. Elle a tant de perfections qu'il n'y a que Dieu pour le savoir et la surpasser.
6. Exempte de la tache originelle.
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que rSaint-Esperit v'iaut to co que le siî que li baille let procession, eun' veneuss' au monde que pà s'n'opération1. Let premeire inôcence de let boune Virge, que n'fayaut qu'in' liiac avaù set belle sainteté! et avaù l'houneur d'ête let mère de l'bon Diù, nout' saint' Eglise que recoude toujou le Saint-Esperit, qu'ot 1' boun' eyde eico let pre- mcïre pire de let véritel2 ; nout' saint' Eglise l'ait toujou maùe bi cxpiiquet, bi répandeue et baùessée deùsch'qu'à de l'aut' coutir avaù dos résons eico dos chouses ébiaùis- santes. L'ait fà celet, pass' que c'étaut to in' doctrine ve- neuc de l'paradis et que l'bon Diù n'avaut to d'net3. Tout d'jet bi lang tôt devant lo vi tôt4, los anciens l'avaint ora- cinét dos lous cueurs ; los évêques avaù lous kerets l'a- vaint soumet tout-par-tout. Ç'ot pou celet que nout' boun' Eglise l'at ossignét sans biôuatter8, et qu'ill' n'recu- in' laum' to de fare de let Conception de let boune Virge fcle que los bounes geos ne manqueremm' de bi ouadei. Ç'ot pou celet que nout' boun' Eglise a rouëitét let Con- ception d'nout' boune Virge coum' in' chouse étounante, maùe sainte, maùe vénérabe, ne ressonnamm' o ri à let eue dos autes offants, qu'an n'avaum co veue et qu'an ne r'voraumm'6, et ç'ot si bi n'einlet que nout' boun' Eglise ne fàt dos fêtes que pou los grand' s ebouses. Ç'ot pou
1. Le Sainl-Esprit a voulu que, par son opération, fui conçu et naquit celui dont il procède lui-même.
2. L'Eglise, toujours enseignée par le Saint-Esprit, est la colonne et le fondement de la vérité.
3. Doctrine venue d'en haut et que Dieu lui-même avait révélée. i. Dès les temps les plus anciens.
5. Sans hésiter.
6. Une Conception à part, merveilleuse, entièrement distincte de l'origine des autres hommes.
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celet qu'an ait veu l'Eglise quoiri, pou los panre, do los paupis de l'bon Diù, los meimes mots que d'jant let sai- gesse qu'ataut d'vant qu' los créateures ne seint et re- montrant s'n' origine éternelle pou los dire de let forma- tion de c'te meime Virgc qu'avaut éteu, do los conseils de l'bon Diù, pou v'nint dos let meime résolution que s'gàchan qu'ot aussi honnête que lou1.
Le Credo let que j'dijans et tourtou caque j'fayans do l'mouti eico chet nous fant bi vore cambi let boun' Eglise de nout' Seigneur qu'ost let màtrosse de tourtous los autes, aïmaut to d'jel let Conception ébiaiùssante de nout' sainte Virge. Bin ottondeu que tourtou ce qu'ait fâ l'E- glise de Roume daut iet' repeïtet partout, pou celet que l'ot let premeïre de tourtous los autoritets , et le moïlant de tourtou c'que j'savans d'pu vrà et que n'fà qu'ung. Ç'ot de pà ley que l'ai ouadet, sans que pàcheun'ouseuss', y touchei , tourtou ce qu'avaut dit l'bon Diù , et ç'ot ce qu'ill' crôt que tourtous los autes douvant crore et ne mi y manquei.
Ç'ot pou celet que c'te meime Eglise de Roume s'ait tant remuet, que l'ait fà tourtou c'qu'ill pi' aut to, pou montrei, pou j'tei partout, pou soutenint son pipet que let boune Virge atau veneue au monde coume' si l'alaut bàtiée eico moïe et pi pu2. Et je l'vouyans maùe bi, et que je n'ne trompamm', do los paupis si bés et que n'y ot n'ait tant d'ios Saints Pères de Roume qu'étaint to devant nous3. Saint Piere fust le permet et ç'ot à lou qu' nout'
1. La Vierge avait été, dans les conseils de Dieu, destinée à venir dans le même but que son fils aussi sage que lui.
2. Pour propager et défendre le culte de l'Immaculée Conception.
3. Nous en voyons un témoignage évident, manifeste, dans les actes si nombreux et si remarquables des pontifes romains , nos pré- décesseurs.
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bon Jésus d'net de ouadei los agnés eico los borbis, de los nurie tourtous, d'ofoncer lous frères do lct foué, d' mouner et moriginer l'Eglise qu'ot partout, pou que sos offans jamas ne broncheunss'1.
Ç'ot pou celet que eaux qu'ateint t'o d'vant nous ant meint tourtous lous houneurs, pàss' que l'étaint los mâ- les, à mott' dot' l'Eglise de Roume let fête de let Con- ception, avaù in' mosse que n'ataum' to co2, epeu dos vêpres et lourtou ce que p'iant dire los kerets do lous offices3, pou qu' tout chacun saveuss' bi que let boune Virge n'ataum' coume tourtous los autes que faut bâtiéi ; pou qu'an ouyeuss' moïe, pou qu'an fayeuss' pu grand 's et qu'allenss' pu lang los cérémounies qu'an fayaut to d'jct et d'Ios aurichi en lous d'nant dos indeulgcnces, so qu'an d'neuss' permission à los grandes villes, à los con- trées, à los royaumes de panre pou lou sainte* let mère de Thon Diù, o lethoyant let Conception Immaqueulée sô on éprouvant los confréries, los congrégations, los couvents élouvets pou l'honneur de Y Immaqueulée Conception ; sô o poutanl bi haut let religion de ceaûs que fereint dos couvents aussi bi que dos hôpitaux, dos autels, dos moutis, qu'is diraint toujou de ïlmmaqueu- lée Conception ; sô qu'is peurnenss' let résolution, et le jurant d'vant l'bon Diù, que s'battreint deuch qu'à sang pou défonde let Conception Immaqueulée d'iet binheui- reauss' Virge, mère de l'bon Diù.
Eico pu, l'an éteut an n's'araut pu contents de v'ior et
i. Pour que ses enfants jamais ne chancellent.
2. Une messe propre.
3. Tout ce que peuvent dire les prêtres dans leur office. A. Prendre pour patronne.
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d'prochéi1 qu'in' fête de let Conception seraut établie pou tourtous los chrétiens, ni pu ni moins que let fête de Noôué ; que let fête let de let Conception seraut fàte do tourtou reunivers pendant hiëue jous et maiie saint'ment2 fêtée pà tourtous los geos coume tourtous los autes qu'is douvont ouadei, et qu'in' foue chaque année do nout' grand' mouti de Libère5, lot' Saint Père y v'raut avaù sos pu grand's geos*, let joùnée qu'an feraut let Concep- tion de let Virge ; de pu, et pàce qu'is v'iaint toujou moïe ofoncer do los cueurs dos fîdels ce qu'is avaint recoudei de l'Immaqueulée Conception de let boune mère de Diù, et ocouraget lou dévoution à bi honorer et vénérer let Virge conceue sans l'péchet de nout' premeï père, 1s n'se possédaimt' to de d'ner let permission de crier bi haut do los lytainies de Lorette eico do let préface de let mosse, let Conception Immaqueulée de c'te meime Virge, si bi que let louët de crore sautraut fuer tout' fàte de let louët de priy. Cheuïvant dan l'cbemin d'ceâus qu'étaint de- vant Nous et si savants, J'ans aprouvet et prins los hiacs que Tant si bi dévotement et si saigemot aronget ; ma bi pu, do let souvenonce de c'qu'ait fàt Sixte quate, J'ans couvri de nout' autoritet dos prières fàtes ri que pou let Conception Immaqueulée et Je jubilens maùe ot d'jant qu'an los chanteraut partout l'monde.
Ma coume los chouses qu'an fà do los moutis s'tenant si bi ossonn' que n'fant qu'ung avaii le Çu pou qui qu'
1. Ils se sont grandement réjouis de décréter.
2. Saintement solennisée pendant huit jours (avec octave).
3. La basilique patriarcale de Libère.
4-. Le Saint-Père irait avec ses plus hauts dignitaires (il y aurait chapelle pontificale).
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s'ot1, et coum' 111* nep'lant dcmorcr sons bougier counie dos piquets si l'aut' cy cheinprc counie in' girouante2, e'ot pou celet que ceâus qu' otaint d'vant Nous couine Saints- Pères à Roume, n'sangeant qu'à réponde, et bi lang, los hiacs qu'an l'a vaut pou lct Conception, Tant fà tourtou c'qu'is p'Iaint pou espiiquei à los geos et far' ontrer bin avant dos lous tètes et c'que e'ot et se n'osignernot. Ç'ot si vra, que Tant maùe et maùe si bi proebet que let fêle qu'an fayaut, ataut let Conception de let boune Virge et qu'an n'pouvaut s'y trompei ; Tant r'bausset coum' in' grousse monteri5 los raisons de ceaus que s'avisaint to de soutenaint, coum' dos effrontets, que ce n'alaum let Conception meime, ma seulemol let sanctification de let Virge que l'Eglise honouraul to. Et is n'anm' v'ieu ête miaûes pou los ceâus que, pou r'vochei l'Immaquelée Conception de lct boune Virge ot mottant i moument outre le coumoncemot et let finition de let Conception let, d'jaint qu'ill' n'avaum éteu do l'coumoncemot, ma solemot y paii après et qu'avaù faleu attonde* ; e'ot bi pou celet que ceâus qu'étaint d'vant Nous s'san creus forcets d'sout'ninl et d'dèfonde mordicueuss* et let fête de let Conception de let boune Virge et let Conception do l'premeï moument coume let chouse qu'an d'vant to
1. Les choses qui appartiennent au culte sont unies par un lien in- time avec leur objet.
2. Elles ne peuvent demeurer sans bouger comme des piquets , si cet autre change comme une girouette (ne peuvent demeurer stables si cet objet est lui-même incertain et douteux).
3. Ils ont repoussé comme un gros mensonge.
i. Mettant un moment entre le commencement et la fin de la Con- ception, disaient qu'elle n'avait pas été dès le premier moment, mais seulement un peu après et qu'il avait fallu attendre.
5. Sans démordre (avec tout le zèle possible).
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crore et ouadei. Ç'ot d'toulet que v'nant los mots si tran- chets de l'Saint-Père Lexandre VII, quand i montraut si bi c'que croyaut nout' boun' Eglise, o d'jant : « L'ot » certes bi tout vie1 let dévotion dos offans d'nout' bon » Jésus pou set binheuiraùss' mère let Virge Marie ; let » dévotion let que croyaut to que do l'premeï moument » que s'n'ame ontrei do s'corps, l'ataut sauvée et ouadée » de let ouétine de l'premeï péchié , pà i privilège et let » grâce de l'bon Diù, que vauyaut to c'qif avaut fà s'gà- » chan neut' Seigneur pou sauvei tourlous nous aules ; » et ç'ot lei que los ait amounets à fare de lou moïe let » fête de let Conception2 ».
Ceaùs qu'étaint d'vant Nous, s'sant échinets à mott' tourtous lous soins et lous voulontés à r'tenint sons que pàcheunn' y p'ieuss' touché3 lét doctrine de l'Immaquelée Conception de let boune mère de Diù. Et ç'ot si bi einlet, qu'is n'ant jamas souffri qu'on d'jeuss' queue que c' saut au bi qu'an louveuss' le nez d'i coutir ou d'i n'aute su ce que l'o n'avaint to dit4. L'ant éteu bi pu Iang ; Tant dit sans bioiiatter et tont pien de fouës que 1' Credo que j'dijans su l'Immauquelèe Conception, ataul et d'vaut to été prins tout de meime que let fête que j'fayans do los moutis; Tant dit que TCredo let méritaut, pou c'que l'ataut si vi, et qu'an l'chantaut do tourtou l'monde, ête bi receu et souteneu pà nout' Eglise de Roume, et pou n'ri layé à dire, qu' méritaut tout pien qu'an l'chanteuss' do tourtou6
1. Elle est certainement ancienne.
2. C'est elle qui les a menés à célébrer de leur mieux la fête de la Conception.
3. Sans que personne y puisse toucher (dans toute son intégrité). i. Ils n'ont jamais souffert que cette doctrine fût censurée ou mé- prisée par qui que ce fût et d'aucune manière.
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los moutis de l'monde do los jous de feïtes. Ce nom'
ê
tourtou, pou que l' Credo de let boune Virge imma- quelée demoreuss' franc et net sans que pacbeun' ou- seuss' y touchiei, is défondeint, avaii toutpiende menaces, de soutenins sô d'vant los geos, sô derri, i n'aute Credo, pà c'qu'is v'iaint le revocbei et l'tripler d'euch' qu'a ri. Et pou que, ce que l'avaint tant et si bi dit, ne d'moreuss' mi coume in' moût' de tarre, que n'bouge mi1, is motaint à coutir los scellets que je r' trouvans avaù ce que j've- nons de dire do los paupis de c'Saint-Père Léxandre VII que feut d'vant Nous et maùe admirct :
« Je, considérant que nout' saint' Eglise de Roume fà » tout bi let fête de let Conception Immaquelée de Marie » toujou Virge, et que l'ait fà, do l'vi tôt, o s'n'honneur » in' mosse et ce que dv'ant dire los kerets que li avaut » soufflé le bon Saint-Père Sixte quate qu'ataut d'vant » Nous, et v'iant tout coum' lou et los autes que J'venins » après, los Evecks de Roumc, bi protégei let pieuse dé- » votion let, c'te fête et ce que Tant fà depeuï le coumon- » cemot et si bi arongé, que l'Eglise n'y ait ri mint ni ri » cheinget. V'iant de pu, soulenint let dévotion let eico » c'genre de prôner et de relouver let binbeuirauss' » Virge Marie, que, pà sos soins, l'Esperit-Saint avaut » t'o amounel dot l'mond' bi pu et moïe, qu'in' bàtiée ; » v'iant co que do l'bé troupe d'nout' bon Jésus tourtous » los esperits saint liets pà let paix coum' pa in bat2, ot
1. Pour que la doctrine de la bonne Vierge immaculée demeure intacte, sans que personne ose l'altaquer, ils défendirent avec de grandes menaces de soutenir soit devant, soit derrière toute per- sonne, une autre doctrine : voulant la renverser et la réduire à rien ; et pour que ce qu'ils avaient tant et si bien dit ne demeurât pas inerte comme une motte de terre qui ne s:agile pas.
2. Voulant que dans le troupeau de Jésus-Christ, tous les esprits soient liés par la paix comme par une hart.
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» détrujant los reincueunes et los dispeutes et ot mottant » fue ceàus que gàteraint los autes ; et pou c'que los » Evecks que j'ans dit, avaù lous chaloines, l'Ro Ph'lippe » avaii tourtous sos seugets, n'ant priet et n'ant fà priï, » sous v'ior ne layer tranquille : Je r'nouvelans tourtous » los bés paupis qu'ant écrit ceàus qu'ataint d'vant Nous » et pà dessus los aùtes Sixte IV, Paul V et Grégoire XV, » pou proteigeï d'Iou moïe le Credo que j'chantans har- » dimot, que l'ame de let boune Virge Marie, quand » l'bon Diù l'ait fà et l'ait mint do le corps de let boune » Virge, ait reçeue let grâce de l' Saint Esperit et que l'ait » éteu ouadée de let ouétine de l'premeï père ; J'd'jans » qu'avaù celet, J'protegeans let fête eico tourtous les cé- » rimounies qu'an fà pou let Conception de let Virge » Marie mère de l'bon Diù, coum' an los ai oronges o » coumonçant et coum' Je l'an dit pu bà, tout de meime » et maiie bellemot coum' le Credo que J'disans, et » v'ians que tourtou ce qu'an ot écrit do los paupis que » J'venans de dire, so fà bï à point et sans rater, pou ce » qu'outremot J'puniraïns sons miséricorde de tourtous » los cbàtimots que sant marqueïs do ços paupis et » qu'ant daut rr'douteï1 .
1. Nous déclarons par là, favoriser la fête et le culte de la Con- ception de la Vierge mère de Dieu, tels qu'ils ont été établis, comme nous l'avons dit plus haut, conformément à celle pieuse doctrine, et nous ordonnons que l'on observe lesdiles constitutions et décrets, sous les peines et censures qui y sont spécifiées ; mot à mot :
Nous protégeons la fête et toutes les cérémonies que l'on fait pour la Conception de la Vierge Marie, mère de Dieu, comme on les a ar- rangées en commençant et comme nous l'avons dit plus haut, tout de même et bien bellement comme la doctrine que nous professons, vou- lant que tout ce qui en est écrit dans les papiers susdits, soit fait à point et sans difficultés, parce qu'autrement, nous punirions sans mi- séricorde, de lous les châtiments qui sont marqués dans ces papiers et qu'on doit redouter.
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» Bi pu, que si n'y o n'avaut to que v'ienss bronche! » su l'conteneu dos paupis que J 'venons de dire, coum' » si is routaint lo bé coutir à ce que J'ans dil avaû los » au tes1, à let fête, au bi à los belles cérimounies que » v'nant après; au bi qu'ouseraint dispeuter su tour- » tous los bell' biacs let que j'aiemans tant, sô qu'is gra- » chenss' dessus, d'ï coutir où d'in' aute, sô qu'is fayenss' » eanss' pou n'se m'i vond', de rouéiteï si l'Credo let ot » bi lier, de barbouillei eico de farfouille? do los paupis » de l'bon Diù, au bi de los Saints-Pères, au bi de los » saints los pu savants, aîi bi enfin, pou sancte que » saint que cso*, au bi eo pou ce qui croraint v'ior, qu'is » l'écrivainss, au qu'is pàlenss', qu'is prochenss', épan- » denss', dispeutenss', jeurenss' patou avaii lous daûes » mains que n'y ait ri de pu vra, au bi on allant chor- » cher dot let leune dos raisons qu'an n'panraum' let » poëine d'y réponde ; au bi enfin qu'ot jaseraint J'ne » savons coumot; fourtous et chaqu'ung de ceaùs-let, » en seuss' dos punitions, apeuï de ce qu'on hauïe los » censures que sant bi à lang minches do los paupis de » Sixte quouatc3 J'otendans que l'is fuchenss' soumis et » J'ios y soumettans pà los paupis qu' voss'", Je v'ians » que pou celet et sans pu pâler, is n' p'ienss' pu jamas
t. Comme s'ils étaient le beau côté à ce que nous avons dil avec les autres.
2. Soit qu'ils crachent dessus d'un côté ou d'un autre ; soit qu'ils feignent, pour ne pas se rendre, d'examiner si celte doctrine est bien claire, de chercher dans les Ecritures, dans les Saints-Pères, dans les saints les plus savants (les docteurs), ou enfin sous tel pré- texte que ce soit.
3. En sus des peines et de ce qu'on appelle les censures qui sont mises bien au long dans les écrits de Sixte IV.
i. Les écrits que voici (pour les représenter).
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» prochei, fare los mat' d'écoles, d'nei lou savoir et l'ex- » piiquéi, qu'is n'plenss' pu votei an ri ni pou qui que » c' soi1 ; et sons tant barguignei, Je v'ians los fare cheuïre » desous los poënes de n'p'lor pu jamas prochéi , » non pu que d'fare lous magisters do los écoles, de » d'neï lou science au dos interprétations à lous fan- » taisie , et qu'is n'plenss' mi ète pardounnets que » tout pà Nous-meime au bi pà ceaùs qu' vanrant après » Nous su let chaière de Saint-Piere ; et Je v'ians co, » qu'is choyenss' desous los autes pouënes que J'pau- » reins lous y infligeï au que lous y infligeraint ceaùs » que vanrant après nous, los évecks de Roume, tout » coum' J'ious y condamnans pà nous présents paupis, » que n'fayant que r'nouveleï los paupis si savants et si » dévois que J'ans d'jet dit de Paul V et de Gré- » goire XV.
« Et si n'y ait dos lives pou pàlé let dessus coum' Je » n'ie v'iamm', au bi pou dire que let fête et los ceri- » mounies qu'an fa pou ley, layant dos doutes do l'espe- » rit au bi qu'an y araut mint pou le leire, queue que ce » sot que n'seraum coum' J'I'an dit put haut2, au bi eico » si l'y avaut dos phrases, dos prônes, dos sermons, dos » dispeutes pou soutenint que ce n'om' ni tout bi ni tout » vra, si an los ait eimprimet après l'ordonnance que » J'ans rapoutet pu haut de le Saint-Père Paul V, au bi » si an los eimprirne pu là, n'importe coumot ; J'ios dé- » fondans et desous los pouënes et los censeures que
1. Qu'ils ne pourraient jamais prêcher, faire les maîtres, étaler leurs savoir et l'expliquer ; qu'ils ne puissent plus voter en rien ni pour qui que ce soit.
2. Ou bien qu'on y aurait mis quoi que ce soit qui ne serait pas selon ce que nous avons dit plus haut,
io
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» s'troilvant do le registre dos lives qu'an n'daum' leïre ; » JVlant et J'ordounans que pà celet meime tout pà lou » et sans pu pàler, ils seinss' reouëitets coum' défondeus » sons remission. »
Tourtous los geos savant bi coumot los pu bés cou- vents, los pu ebiaùïssanles écoles dos évecks et los pu savants kercts do los chouses de l'bon Diù1 ant r'teneu pou le r'motte à z'autes, ant souteneu et defondeu mor- dîcucus le Credo de let Conception Immaquelée de let boune Virge mère de Diù. ls savant bi aussi cambi los évecks s'sant d'nct d'poënes, sons se coicheï et meime quand y n'y avaut to' que dos kerets2 pou montréi qu'is croyaint to sons bronchcï que let boun' sainte Virge Marie, mère de l'bon Diù, pà los mérites de l'Rédempteur Jésus- Christ nout' Seigneur, que li avaut to d'nnet d'avance, n'ait jamas éteu tachée de l'péché de l'premeï houmme ; ma que l'on ait éteu bi n'a point ouaclée et tout pien, et pou celet, raichetée bi moïe que tourtous los autes.
Le concile de Trente que n'riaum' to3 et qu'ot let pu haute autoritet, a veneu fàre d'avaù* tourtous ceàus que J'venans d'dire. Ç'ot si vra, qu'ot fayant, su l'péché de nout' premeï père se Credo que devaut ressonner au eu dos Apôtres et que pou celet l'ait print do los bés paupis de l'bon Diù, dos Saints-Pères et dos assemblées d'évecks
i. Les plus savants prêtres dans les choses de Dieu pour : les docteurs les plus considérables dans la science des choses divines.
2. Même quand il n'y avait que des prêtres, pour même dans des assemblées ecclésiastiques.
3. Qui ne riait pas.
4. Faire d'avec ceux que nous venons de nommer, pour dire : se joindre à eux.
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los meuïe ecaiïetées1, l'ait dit et montret sons qu'i saut obliget d'y r'venint, que tourtous los hoummes venant au monde opoisounnets pà le péché de l'premeï père ; di- jant pourtant, pou qu'an n'o p'Ieuss douteï, qu'i n'v'laum' mott' do se Credo nan pu que do sos paroles , let bin- heuiraùss'Virge Marie, mère de l'bon Diù. Et tout jeuste, d'jant celet, los pères de l'concile de Trente, ant montret autant qu'i l'falaut to, o (ayant attention à los tots et à los pays, que let boune Virge feut franche de let tache origi- nelle, et ainsi montraint tout bi qu'an n'saraut ri penre en boun' aloy, sô do los paupis de l'bon Diù, sô do los chouses2 que j'tenans d'nous Saints-Pères, que sô de quéq' façan cont' l'ebiauuissant privilège que let Virge avaut to de pâ ley.
Et d'bi vra, le Credo de l'immaquelée Conception de let boune Virge répandeu tous los jous pu lang, avaù pu d'force et d'tiatetj pà l'idée si saint'mot amouraùiss' de l'Eglise, pà l'ossignemot, pà l'étude, pà le savoir et let sagesse, détiaret, raid' su pattes, et soumè coum' l'éclair do tourtous los pays de l'inonde catholique, l'ait toujou demoret do c'te meime Eglise, coum' héritache dos pu vis grand'pères3 et coum' le Credo que n'ait d'net l'bon Diù ; ç'ot ce que d'jant, ç'ot ce que repeytant à tue tète tourtous los pu bés hiacs qu'an r'trouve chei los offants de l'Saint-Père que sant depoïèl'ondro que s'iouve le s'iaùe
1. Les assemblées d'évèques les mieux écoutées ; pour les con- ciles les plus accrédités.
2. Et ainsi montraient tout bien qu'on ne saurait rien tirer, en bon aloi, ni dans les divines Ecritures , ni dans les choses que nous te- nons des Saints-Pères qui soit, d'une façon quelconque, opposé à l'éblouissant privilège accordé pour elle seule à la Vierge.
3. L'héritage des ancêtres.
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deuch'qu'à l'ondroqu'i s'càùeche4. Tout de meime l'Eglise de nout' bon Jésus, ouadross' et que n'd'reum', de tour- tous los vériteis* (|ue sant do l'Credo , r'vaucheraut ['monde pou ompechei qu'au y toucheuss', n'y cheinge ri, n'y route ri, n'y ajoute ri. Ma quand avaù set sagesse et set screupeulosité, 111* vi à pàlei dos chouses quant print lou germe do l'vi tôt et que l' Credo dos Saints- Pères ait pianteï do los âmes, 111" mot tourtout sos soins à los ratiei , à los frottci3 si bi que los premeïs Crcdos que l'bon Diù d'net à sos offants, dev'naint saines et nets, tiars coum' de l'our, et que d'morant toujou piens , sons r'vocher, sons ri pàde de c'qu'is valaint ni de c'qu'is pouvaint, et ne r'baùissant que su lous racines, au pou moïe dire, do l'meime Credo, do let meime compeur- neùirc et do l'meime sentiment'*.
Et tout d'mcime, los Pères et los kerets qu'ant écrit, instrus pà l'bon Diù n'ant ri tant aveu à cueur dos los livres que l'écrivaint pou expiiquei los paupis de l'bon Diù, pou rincei, ma tout bi, los ennemis de l' Credo5, instrure los fidels, que de criei à qui moïe et d'proché su los tôts, et tout pà tout do lourtous los pàlés et d'iet pu magnifiqu' façan, let si haute" saintetet de let boun' Virge,
1. Tous les enfants du Saint-Père qui sont depuis l'endroit où le soleil se lève jusqu'à celui où il se couche, pour : chez tous les peu- ples et nations de l'univers catholique.
2. Gardienne qui ne dort pas de toutes les vérités pour : gardienne vigilante.
3. Pour à les limer, à les polir.
<i. Pour ces dogmes primitifs de la céleste doctrine acquièrent l'évidence, la clarté, la précision, et qu'ils retiennent en même temps leur plénitude, leur intégrité, leur propriété, et ne croissent que dans leur espèce, c'est à-dire dans le même dogme, dans le même sens, dans le même sentiment.
5. Vaincre les ennemis du dogme.
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se rang élouvet, s'n' inôcence onteïr' et pu bianche que let noche, et let grand' victoire qu'ill' ropouteit chu 1' diape que creuv' do set pé de n'p'lor n'étreinguié tour- tous1. Ç'ot pou celet, dijant ce que l'bon Diù ai dit quand i t'naut co l'mond' do set main2, su los médecines qui préparaut si bounemot pou guéri los hoummes et los r'motte à ravi do l'espérance que l'avaint to pàdeu , o'd'jant : « J'mottra ontre ti et let foumme, ontre tos offans et los sines in' haine à meuri », Tant recoudet que l'grand jeug'ment let de l'bon Diù, fayaut counotl' bi lang d'vant, sons barguigner et coum' si an l'voyaut d'jet, 1' miséricordieux Rédempteur dos hoummes, à saôui : l'eunique gàchan de l'bon Diù, nout' Seigneur Jésus- Christ, layaut vore set binheuirauss' mère let Virge Ma- rie, et montraut avaù l'doïe3 let haine de l'gàchan et d'set mère cont' le démon.
Ainsi, tout coum' le Christ que s'ait piecet'1 ontre l'bon Diù et los hoummes, o peurnant nout' paure nateure, à chànet le paupi que n'condamnaut to', ot l'tioùant à let croie coum' i gênerai qu'ait tourtous tiet3, ainsi let boun' Virge que n'fà qu'ung avaù lou, mounant de pu en pu lang, avaù lou et pà lou, set heïne que n'finira jamas cont' le vi serpent, ait do s'triomphe non pareil, broyet avaù s'bian pi, let tète de l'monstre let toujou pien d'poison.
1. Le diable qui crève dans sa peau de ne pouvoir nous étrangler tous.
2. Pour dès les premiers temps du monde.
3. Montrant du doigt, pour indiquer expressément. i. S'est placé.
5. Comme un vainqueur.
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Ç'ot c'si lié triomphe de Ici Virgc qu'ill' ait de pà ley, e'ot s'n'inocence, set puretet, set saintetet an n'saraut pu moïe, ç'ot s'n'exemption de let tache de l'péché, ç'ot let pièn' meseur de tourtous los grâces, dos vertus, dos pri- vilèges qu'ot do ley que los incimes Pères antveu tantou do l'arche d'Noôué qui , pà in houn' rajon de l'hon Diù, ail sautet fù sainct' et notte dos aùcs que noyaint tourlou l'inonde ; tantou do c't' échelle qu'ait veue Jacob et que d'iet tarre mantaut jcus(|u'à firmament, que los einges de l'bon Diù o mantaint et dévalaint los échélans et que l'Seigneur étaut à boue haut ; tantou do l'houchan que vit Moyse, tout ofiammet do i saint ondro et qu'à moïetant do fiammes que biamaint maùe haut1, brculaut tôt sons s'euset, sons s'odommaget, sons dimineuct, devenant toujou pu vot' et haussant dos fleurs que ravissaint ; tan- tou do c'te citadelle que los ennemis n'pourraint jamas er'vochet eauïe que saut pendeus dos querasses o' masse et tourtous los sabres avaïi los piques et los haches dos pu terrib' souldats2; tantou do l'jàdin si by formel, qu'an ne saraut on' ofoncéi l'euche, sautei los meurailles, ni s'y faufilei de quéqu'façon <|ue c'sot3 ; tantou do let grand' ville de l'bon Diù qu'ol bâtie su let grand montagne que l'ai bénie ; tantou do Thé mouti de l'ciel que l'bon Diù équiare lou-meime, d'jeusqu'a ébiaùï et qu'ot tout pien d'iet gloire de l'Seigneur ; tantou do los imaches de meime façon, et Diù sait si n'y o n'ait*, que montrans let
i . Flammes qui s'élançaient bien haut.
2. Pour la tour inexpugnable de laquelle pendent mille boucliers et toutes les armures des forts.
3. On n'en saurait enfoncer la porte, sauter les murailles, ni s'y introduire d'une manière quelconque.
1. Et Dieu sait s'il y en a, pour nombreuses.
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haute dignitet de let Mère de l'bon Diû, et s'n'inocence sons ouétine, et ses saintetet bianche coum' in noche, qu'ant éteu, ainsi qu'los Pères l'ant layé do lous paupis, si bellemot prochées et maùe lang tôt d'avance.
Pou racanter tourtous los cadeaux que l'bon Diù li ait fà, tant et tant qu'an ne los saraut campter1 et pou dire let grand' saintetet qu'avaut ot venant au monde let Virge mère de Nout' bon Jésus, los meimes Pères peur- nant los mots de los prophètes, ne l'amm' chantée d'in' aute façan, c't'ebiaùissante Virge, si ce n'ot, coum' let bianche tourtourelle, let sainte Jérusalem, let chaïère élouvée de l'bon Diû ; let màjan et l'arche de sanctifica- tion que let sagesse éternelle s'ait bâti ; coum' let Royne let, qu'avaut tant d'bell hiacs o Tonton d'iey et que s'ac- coudaut si bi su s'Benjamin2, ait sauté fù tout coum' celet dos mains de lTout-Puissant , tout charmante , maùe chère à l'bon Diù et jamas gâtée pà let pu p'tite tache. Eh bi, los meimes pères et los kerets qu'ant écrit, san- geant de lous tètes eico de lous cueurs que let Binheui- rauss' Virge, quand l'boun' Ange Gabriel l'i venet dire qu'ill' manteraut si haut qu'ill' seraut let mère de l'bon Diù, et qu'ill' l'oyit, tout pà l'ordre et l'nom de l'bon Diù lou-mème, let hauyei pieïne de grâces, ant prochét que l'salut let, si bé et que jamais an avaut co oyït3, v'iaut to dire que let Mère de l'bon Diû ataut l'rassemblement de tourtous los grâces divines, que l'ataut parée de tourtous los cadeaux que li avaut fà le Saint-Esprit , bi pu , que l'ataut coum' i trésor qu'an ne veuïderaut jamasa, et
1 . Pour presque sans mesure.
2. Son bien-aimé.
3. Ce salut si beau et que jamais on n'avait entendu. i. Inépuisable.
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coum i grand poteu sons fond toujou pien1 dos meimes grâces, si bi que, n'étant in' ombre maudite9 et peurnant avaiï s'gachan, set bomf pà de let bénédiction que n'cess' de lou z'y d'net l'bon Diù, l'ait méritet que Sainte Elisa- beth , qu'aussi bi soufflant le Saint-Esprit3 li d'jeuss : « V'étei bénie entre tourtous los foummes, et l'ot eo béni » le frùt de vos entrailles. »
De tout let, lo sentiment que los meimes Pères, toujou coum' si n'fayaint qu'ung' ant si bellemol* espiiquet que let Virge let tant gloriauss' pou let queïe L'aut'let que peut tourtous ait fà tant de bell' chouses, que l'ait ébiaiii pà los hiacs let de l'ciel, que l'bon Diù li avaut' d'net et tant et tant que j'n'arains saveû eiaùe los molt'6, pà tout pien de grâces et in' si biancbe inôccnce, que l'ataut tout coum' i prodige de 1'Tout-Puissant qu'an n' saraut racan- teï ; bi pu, coum' le pu grand et le pu bé de tourtous los miracles, let si vénérabe mère de Diù se rapprouchant de lou, si près que l'peut fare in' créateure, et s'élouvanl à déchus de tourtous los louanges que p'Iant d'nei los hoummes eico los anges. Ç'ot pou celet que pou défonde l'inôcence et let premeire jeustice de let mère de Diù, is ne l'amm' comparet solemot, et maùe souvot, à nout' mère Eve quand l'ataut gâche, inôcentc, peure, et d'vant que l'serpent filou', ne l'aut fà cheuire do sos laçants ; ma bi pu, is Tant mint à d'chus de ley pà tourtous los
1. Un abîme sans fond toujours plein.
2. Pour soustraite a la malédiction.
3. Inspirée par le Saint-Esprit.
•4. Pour unanimement et clairement.
5. Celui qui est puissant.
6. Les dons célestes que Dieu lui a faits en si grande quantité que nous n'aurions su où les placer, pour abondance de dons.
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phrases et los pensées los pu belles qu'an p'ieuss' trouvy. Et de bi vra, nout' mère Eve an écaùetant le serpent coum' in' vie sorcire1 ; ol deveneue s'n'esclave, o pédant l'inôcence ; au conlrair', let binheuirauss' Virge on aug- mentant loujou pu c'que li avaut d'net l'bon Diù, on let mottant au monde, s'ait bi ouadée de protei jamas l'o- roïir à ce qu'araut v'ieu li dire l'oreget d'serpent2 ; ma pà let vertu que li avaut to d'net l'bon Diù, l'ait runet pou toujou let vayance et l'érogance de nout' ennemi.
Ç'ot pou celet qu'is n'amm' arrètet de hauyei3 let mère de Diù so i lys à moiëtant dos épines ; so in' tarre qu'an n'emm' co retoùnel4 ; in' Virge sans tache toujou bénie, toujou ouadée de let peste de l'péché et qu'ait sorvi à mott' au mond' l'Adam nouvé ; au bi i paradis sons re- prouche5, pien de tiatets eico de tourtous los agréments qu'an peut aoui, quand an n'ait ri à se r'prouchei et qu'an n'd'àut jamas meuri6 ; paradis tout piajant7 coichet pâ l'bon Diù lou-meime pou que l'serpent pien d'poison ne p'ieuss jamas l'attrapet; au bi i boù que n'purim'8 et qu' los vers de l'péché n'an p'ieu meinget ; au bi in' fantein' toujou tière et poutant lo scellet d'iet verteu de l'Saint- Esperit ; au bi i mouti tout de l'bon Diù ; au bi i trésor qu' opech'raut d'meuri ; au bi l'eunique bacelle non de
i. Pour ayant misérablement écouté le serpent.
2. S'est bien gardée de prêter l'oreille à ce qu'aurait voulu lui dire le serpent enragé.
3. Ils n'ont pas cessé d'appeler.
4. Une terre qui n'a jamais été retournée.
5. Irréprochable.
6. Qu'on ne doit jamais mourir, pour immortel.
7. Paradis de délices.
8. Qui ne pourrit pasç pour incorruptible.
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l'trépas ma d'I'exislence ; récine non de let fureur, ma de let grâce, que pà in' Providence tout' exprès de l'bon Diù ait bauûesset sons jamas pàde sos feuilles votes et sons cheuire los couleunies ordinaires, d'i geormant gàtet et opoisounet.
Ma coum' si los figueures let, bi que n'y ot n'aut point, de pu belles, ne d'jenss' my co assez ; l'an dit, ot peur- nant dos mots démolets tout exprès , sans dioubieu otonte1, que, quand l'ot question de l'pécbié i n'ie p'iaut toy iète de let boune Virge Marie , qu'ait receu in' grâce pu grande pou triomphei ot toute menière de l'péehié. L'ant dan déclaret que let tout glouriaùss' Virge ait éteù let Réparatrice de let faute de nous premeïs parots, in' source d'iet vie pou lous offants , preinche tout exprès devant que l'inonde ne so2, préparée pà le Çu que là tour- tou et que l'ait montrée tout coum' s'ill' ataut d'jet quand l'ai dit à l'serpent : « J'mottra dos heines ontre ti et let foumme » et que, an n'o saraut doutei, broya let tète opoisounée de l'meime serpent, et ç'ot pou celet que Tant afirmet que let meime bienbeuirauss' Virge ait éteu, pà let grâce, notte meime d'in' ombre d'ouétinede Tpéché, à couï (à l'abri) de tourtous los tàcbes de l'corps, de l'amc et de l'esprit, et que toujou vivant avaù l'bon Diù, ne fayant (ju'ung avaù Ion pà i mariache que n'finiraut ja- mas, jamas nan pu ill' n'ait demoret do let nouïti, ma toujou à pu grand jou et que pou celet, ill' ait éteu, pou nout' Jésus, in' majan que li piajaut bi ; seraut-ce pou let rajon de s'eorps? Nanny, ma pou let rajon de let graice que l'avaut to' djet bi n'avant qu'ill' n'arriveuss'.
1. Propositions spéciales et sans équivoque.
2. Choisie de toute éternité. *
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Eurmottant avaù celet, los si bés mots que Tant prins, pou pàlei de let Conception de let boun' Virge , quand Tant dit que let néteure.demoret sons bouget et trom- biante1 d'vant let grâce et si fort, qu'ill' n'ousaut conti- nuei se n'ouvracbe, pou ce que d'vant arrive* que let Virge, mère de l'bon Diù n'feut conceue pâ set mère Anne, d'vant que let grâce n'aut produt se frut, pou ce que, d'vaut iète bâtie coum' premeïre veneue, celle que d'vaut bâti l'premeï veneu de tourtous los créateures2.
D'après lous témoigniaches, let pé si bianche de Marie3 v'nant d'Adam n'ait jamas print les taches d'Adam, et ç'ot pou celet que let binheuiraùss' Virge Marie ait éteu let màjan fàte pà l'bon Diù lou-meime, bi rongée pà le Saint-Esperit, màjan tourtou d'bell' escarlate que l'nouvé Beseleel ait maùe bi paret et tourtou couvri d'our ; ç'ot pou celet que c'te meime Virge ot de bi vra , et que pà s'nom meim', daut iète chantée coum' le premeï et l'pu bel ouvrache de l'bon Diù lou-meime, que s'ait ouadet de los dards breulants de l'malin esperit ; tout bel!' pà ley- meime que n'ame l'semblant d'in' tache et qu'ébiaùït los oils de l'inonde" pà set Conception Immaqueulée, coum' le s'iaùe quand i vùt s'iouvei tout de gaud ebiaùissant los geos.
I n'araum' tout d'meime bin' éteu3 que l'bé vase d'é- lection let saut traïenet coum' tourtou l'rach'te dos
i. Immobile et tremblante.
2. Elle devait être ainsi conçue comme la première née, celle qui devait concevoir le premier-né de toute créature.
3. La peau si blancbe — pour la chair, le mot patois employé pour chair ne pouvant l'être convenablement ici.
4 Qui éblouit les yeux du monde. 5. II n'aurait pas été convenable.
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hoummes do let bourbe de l'péché ; pou celet que bin' aille que tourtous los aùtcs créateures, Marie ne fit d'avaii Adam que pou lel nateure et non jamas pou let faute1. Bi pu, i convenant lo que l'gàchan let qu'avaut do l'cicl i père que los chérubins chantant tros fous saint, aveuss' su let tarie, in' mère qu'in' ébiaûissante saintetet n'ait jamas délayet.
Los anciens ant r'foulei le Credo let si bin' avant do lous cueurs, que pà dos mots mirobolants, pà lous tour- nures et que feint roueïteïs chez eaiies coum' los cou- mandements de Diù2, Tant souvot hauïct let mère de Diù Immaqueulée et auchtant Immaqueulée qu'ant l'pau- raut compenre, Immaqueulée, inôcente et an n'saraut pu inôcentc, sons tache et an s'araut pu bianche, sainte auchtant que sans ouétine, peure, et que jamâs pàcheun' ne l'aprouchit ; ce qu' los savants hauyant le type épeu le modèle de let puretet et de l'inôcence ; pu bell' que ce qu'ot pu bé, pu graciauïss' que let grâce ; pu saint' que tourtous los saints, saint' loutpà ley3, r'bondissant d'bian- chaùe do s'n'ame et do s'eorps, bi pu haut que tourtous ceaiis qu'an hauie los intègres et los Virges, tout pà ley et d'ibaiie à l'àute fàte let majande l'Saint-Esperil et l'ma- gasin de tourtous sos richesses, et que, si ce n'ot l'bon Diù tout pà lou4, ot pu haut piacet que tourtous los créateures, ot bi, çont fouës pu bell' et pu sainte que los chérubins, los séraphins et tourtou le troupe dos anges ;
1. Marie n'eut de commun avec Adam que la uature et non la faute.
2. Pour comme ayant force de loi.
3. Seule sainte.
4. Dieu seul.
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let Virge, après tout, que tourtous los meusiciens et los chantaùes de l'ciel et de let tarre, ne saraint, coum' i fau- raut, meusiquei sos louanges1. El n'y ait pacheun' que n'saveuss' que los touneures de l'iangaiche ant passet tout coum' de zaiiies-meimes do los moneuments de ce qu'is hauyant let sainte liteurgie et do los offices de nout' boun' Eglise , qu'an los y trouv' à tout baùe de champ2 et que l'y trônant coum' dos roynes ; si bi que let mère de l'bon Diù y ot hauïée et invoquée coum' in' tourtou- relle bi bianche et bi jolie, coum' in' rouse toujou fleurie, coum' atant an s'araut pu peure, toujou immaqueulée, toujou sainte, et que l'y ot chantée coum' l'inôcence que n'ait jamas ri souffri en queuie que c'sô, coum' let daùe- zime Eve qu'ait d'net l'jou à l'Emmanuiel3.
An n'peut dant s'étounei que l'Credo de let Conception Immaqueulée de let Virge mère de l'bon Diù, marquet dos los paupis de l'bon Diù coum' l'an juget los Saints- Pères, rendu ferme pà l'imposant de lous témoignaches, oformet et poulet à pu haut do quasi tourtous los pu bés et los pu respectables moneuments de l'pu vi tôt qu'ant daut bin aiméï4, offri et maùe bi cimentet pà let sen- tence de l'Eglise que fà trombié los pu hardis3, l'ait éteu reçeu avaù lant de dévotion et de tendresse pà los kerets de let meime Eglise et pà tourtous los fidels que los uns
1. Celle dont toutes les voix du Ciel et de la terre ne sauraient proclamer dignement les louanges.
2. S'y rencontrent très fréquemment.
3. Comme l'innocence qui n'a jamais été blessée, comme la seconde Eve qui a donné le jour à l'Emmanuel.
4. Contenue et exaltée dans un si grand nombre d'illustres monu- ments de la vénérable antiquité.
b. Pour le jugement si considérable de l'Eglise.
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coum' los autes, se relequaint to ot la recounechant et let confessant toujou pu tièremot1, qui n'y ait ri aveu de pu daùe, que lous cueurs n'ant ri tant aimet que d'honorei, de chauyei9, de hauyei à lous aides let Virge Marie mère de l'bon Diù, conçeue sans let tache originelle et de criei pa-tout que l'ot einlet. C'ot pou celet, que depeuï dos centaines d'années los Princes de l'Eglise, tourtous los kerets, tourtous los mouènes, los empereurs meimes et los ros ant toujou boùisset los Papes pou qu'is piacenss' do l' Credo catholique let Conception lmmaqueulée de let maùe sainte Mère de Diù. Ce que Tant demandet de lou tôt, J'Ians tout souvot réclamet de l'nout', seurtout à l'bon Saint-Père Grégoire XVI, qu'étaut d'vant Nous et qui s'ot faut bi souvenint3 et los évecks, los kerets, los mouènes, los grands princes et tourtous los offants de l'bon Diù n'ant point aveu d'arrêt pou que J'iou z'y d'neuss'.
C'ot pou celet que ne réjoïssant maùe piaisament do nout' ame, peurnant onteire counechance de los témoi- gnaches let et y refléchissant coum' y faut, à pouène élouvet su let Chaïere de Saint Piere, pa i dessein coi- chet de let Providence de Diù, bin que Je n'ie méritenss' mi, Je v'nins to de penre le gouvernement de l'Eglise, que n'iayant condure à let vénération, à let dévotion, à l'amour que J'ons toujou aveu pour let Virge Marie, mère de l'bon Diù, J'nans ri aveu pu à cueur que d'fare ce que l'Eglise plaut to desirei pou augmentei l'houneur de let bienhcùraùss' Virge Marie et de fare relure sos fa-
1. Qu'ils se soient fait gloire de la confesser toujours plus claire- ment.
2. De choyer.
3. Dont il faut bien se souvenir pour : d'heureuse mémoire.
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veurs d'in' manière pu briante. Ma, coum' je v'iains apoutei o celet in' pieine maturitet, J'ans établi in' Con- grégation tout jeuste pou celet, de Nous bons frères qu'an dautbi respectei, los Cardinals de let Saint' Eglise de Roume, que bruant pa lou piétet, lou sagesse et lou science do los chouses de l'bon Diù ; J'ans chouasi tant parmet los kerets que pannet los mouénes, los hoummes que counechons l'moïe ce qu' l'oyant let théologie1 ; pou que l'aprofondigenss' avaù le pu grand soin tourtou c'que touche é l'Iinmaqueulée Conception et qu'is N'fayenss' counote lous idées let-dessus. J'avains to d'jet, si an veut, eurceù dos suppliques que N'priaint to de N'hâter à de- fini l'Iininaqueulée Conception de let boun' Virge, et que N'fayaint counott' l'idée de tout pieu d'évecks ; pà moins let douxième jounée de febvri 1849, J'onviens de Gaëte, aïaùe que J'étains, à Nous vénérabes frères los évecks de pàtout l'monde, dos lottes pou que, quand l'araint bi priet l'bon Diù, is N'onvienss' pà écrit coumot qu'ataut let pietet et let dévotion de lous borbis à l'endro de let Conception Immaqueulée2 et seur tout ce que z'auies- meimes, pasteurs, sangeraint et vouraint su let détermi- nation à panre ; pou que, avait los pu grandes cérimou- nies qu'an p'ieuss' s'imaginei, Je poutenss' noul' dareire sentence ; J'fuchainss' maùe et an n'saraut pu content o r'cevant los lottres de Nous vénérabes frères, et pou quoïe3 ? c'ot que l'auchaint i bounheur, in joie à n'm'y s'posséder,pou ce qu'on N'repondant , is n'aum" seulemonn'
1. Qui connaissent le mieux ce qu'ils appellent la théologie.
2. Ils fissent savoir par écrit quelles étaient la piété et la dévotion de leurs ouailles envers la Conception Immaculée de Marie.
3. Nous fûmes beaucoup et on ne saurait plus content.
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proclamel de nouvé lou piétet et let piétet de lous Kerets et de lous troupes pou let Conception Immaqueulée de let binheuïrauss' Virge Marie, ma bi pu, ç'ot quasi tour- tous ossones1 qu'is N'demandaint de défini pà nout' au- loritet et nout' dareire sentence let Conception de let binheuirauss' Virge let.
Et J'fuchenss' aussi joyoux quand Nous vénérabes frères los Cardinals d'ict saint' Eglise de Roume que fayaint to partie de let Congrégation que J'ans d'jet dit et los savants kerets que J'ans eboisis pou los conseultet, aprei y aoui tout pien sanget2, Ne d'mandaint souvot, et N'bauïssant tourtous auchtant iung que l'aut', let défini- tion let de rimmaqueulée Conception de let mère de Diù.
Après, o cheuïvant l'exemple de ceaùs qu'ataint to d'vant Nous et v'iant cheuïvre let règle et los formes exi- gées, J'ans convoquet et teneut ce qu' J'hauyans le Con- sistoire et tout let J'ans palet à Nous frères los Cardinals de let sainte Eglise de Roume et J'ios ans hauï avaù le pu grand bounheur Ne d'mandei à dauïes mains de N'hauï défini, coum' le f'raut le bon Diù3, le Credo de rim- maqueulée Conception de let mère de Diù.
C'ot pou celet que pien de confiance do Nout'Seigneur, et croyant que rmoument étaut lo veueu de d'net let dé- finition de 11 mmaqueulée Conception de let Virge Marie mère de Diù, définition ébiauïssante coum' le S'iaùe et que n'fa counotl' let parole de Diù, los paupis los pu res- pectels, rsentimot de l'Eglise que n'ait jamas cheinget, le
i. Avec une sorte d'unanimité.
2. Après un examen diligent.
3. Pour une définition dogmatique.
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boun' et eunique accord dos évecks et dos fidels de l'monde catholique, auch'bi que los paupis et los arrêts de ceaûcs qu'ataint d'vant Nous ; quand J'auchenss' le moïe que J'ans p'ieu examinet toute chouse1 , quand J'auchenss' tourtou répandeu nout' ame d'vant l'bon Diû ot priant, J'ans jeugeit que Je n'douvains pu hésitei à mott' la darreire main avaù Nous Scellets pou défini pâ Nout' sentence, coum' s'ill' venaut de l'bon Diù, l'Imma- queulée Conception de let boune Virge. Et ç'ot ainsi que J'sans parveneuàcontentei, let vive atonte de l'mon de ca- tholique et let dévotion que J'ans do Nout' cueur pout let très-saint' Virge, et ot meime tôt ot l'honorant J'ans v'Ieu honorer, de pu ot pu, s'fi eunique, Nout' Seigneur Jésus-Christ, pou ce que let gloire et l'houneur que Je d'nans à let Mère eurtoun' à s'gàchan.
Ç'ot pou celet et coum' Je n'ans jamas quittet d'offri, maùe humblement, o jùnant coum' los pu paures geos, los prières que J'dijains to chet nous et los prières que J'dijains to avaù los autes do l'mouti2 à l'gâchan pou qu'i los pouteuss' à s'père, et que l'père let v'ieuss' bi mounei et t'nint raide su pattes, pà let verteu de l'Saint-Esperit, nout'ame. Après aôui bi dos fous d'mandet let protection de tourtous los binheuiraùes, criet après l'Saint-Esperit que console, pou qui n'aideuss' et sontant qu'i n'baùissaut to de l'coutirlet3, pou l'houneur de let Saint' Trinitet que n'fa toujou qu'ung ; pou let gloire et let dignitet de
1. Quand nous eûmes le mieux possible examiné toutes choses.
2. Comme nous n'avons jamais cessé d'offrir, en jeûnant comme les plus pauvres, les prières que nous disions en particulier et celles que nous disions en public dans l'Eglise.
3. Sentant que le Saint-Esprit nous poussait de ce côté, pour : nous inspirait dans ce sens.
11
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let Virge mère de Diù ; pou l'élouvement de l'Credo ca- tholique et I'triomphe de let r'ligion chrétienne, pà l'au- toritet de Noul' Seigneur Jésus-Christ, dos saints apô- tres Piere et Paul et let Nout' : J'déclarans, J'prononcans, J'définissans que l'Credo qu'ossigne que let hinheuiraùss' Virge Marie, fuchée, do l'preineï moument de set Con- ception, pà in' grâce et i privileige singuelicr de l'Diû Tout-Puissant, et o veue dos mérites de Jésus-Christ, sauveur de l'genre humain, fuchée, coum' Je l'dijans, préservée de let tache de l'péché originel, ç'ot i Credo que J'tenans de l'hon Diù1, et que pou celet meime, tourtous los fidels douvont le crore sons bronchei et toujou.
Ç'ot pou celet que, si n'i o n'ait quéqu'ungs et n'y o daut point aôui, pâ let grâce de Diù, d'assez effrontets pou sangei do lou z'esprit i sentimot que ne r'ssonneuss' mi à l'Nout' que J'venans de défini2 ; qu'is apeurnenss', qu'is savenss' bi qu'is sant condamnets pà lou prope jeu- gement ; qu'is savenss' bi que Tant péri do let foué coum' i vaisseau su mer, qu'is n'sant pu d' l'Eglise que n'ot qu'eune, et de pu, pà tout let, is s'soumettant à los pouènes poutées pà l'dro, si l'ousant fare counott' c'que Tant do lous idées, so pâ dos paraules, so pâ dos écrits au n'importe pà que signe qu'is mottraint en évidence.
Nout' bouche ni nout' lingue ne saraint dire let joie que Je r'sentans de nout' cueur, J'rondans et J'rondrans toujou los pu grandes actions de grâces à Nout' Seigneur Jésus-Christ, tout coum' dos p'tits offants, de ce que, pâ
1. C'est une doctrine révélée de Dieu.
2. Si quelques-uns, ce qu'à Dieu ne plaise, ont la présomption d'avoir intérieurement un sentiment autre que celui que nous avons défini.
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i bifà mirobolant, sons que J' l'einss' méritet1, i n'ait d'net d'offri et, coum' îs d'jant, de décerner l'houneur et let louange let à set mère maùe sainte. Ainsi J'ans let pu ferme espérance, let pu ontière confiance que let bin- heuiraùss' Virge ; — Ley que, tout belle et immaqueulée, ait écrasée let tète veulnâuiss' de l'cruiel serpent2 et poutet le salut au monde ; — Ley qu'ant chanteï los prou- phètes et los apôtres, l'houneur dos martyrs, let joie et let couronne de tourtous los saints, le refeuche le pu seur et lo s'cours lo pu fidel de tourtous ceaùs que vont péri ; — Ley que défond toujou l'monde ontei an n'saraut moïe, pou ce qu'ill piad' son fin pou lou d'vot s'eunique gàchan3 ; — Ley que fà l'houneur et que répare an s'a- raut pu et que protège an n'saraut moïe l'Eglise ; — Ley qu'ait toujou détrut tourtous los hérésies, sauvet los na- tions dos calamitets los pu grandes et de tout' façons, et qu' n'ait Nous-meimes delivret de tant d'maux que ne m'naçaint to ; — Ley vauret bi pàce qu'ill' peut tourtou avaii s'gàchan et que l'ot nout' pafroun' fare que los dif- fiqueultets in' foue apianies, tourtous los erreurs eur'vo- chées, let saint' mère l'Eglise catholique prospereuss', fiorigeuss' de pu ot pu tous los jous, chet tourtous los peuples et de tourtous los pays ; qu'ill' étondeuss' se règne d'in' mer à l'aute deuchqu'au dareï boue de l'monde ; qu'ill' jouisseuss' d'in' paix complète , qu'ill' saut libre et tranquille autant qu'ill' peut ôte ; que los coupabes sint
{ . Un bienfait insigne, sans mérite de notre part.
2. La tète venimeuse du cruel serpent.
3. Elle qui défend sans cesse le monde entier on ne saurait mieux en plaidant sans fin pour lui auprès de son fils unique, pour : la mé- diatrice et l'avocate la plus puissante de l'Univers entier auprès de son fils unique.
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pardouneis, los malades guéris, los manres ocouragets1, los affligets consolets, ceàues que sant ot dangei secou- rcus et que tourtous eeâues que sant do l'éreur débrouil- lant los nuacb.es que norigeant lous anies2, curpeurnens- sent let sont' de let véritet et d'iet jeustice et qu'i n'y aut pu qu'i troupe et qu'i bergi.
Que los paroles que J'dijans saint bauyies de tourtous los offants de l'Eglise catholique que J'aiemans tant et qu'avaù in' ardeur de piétet , de r'ligion et d'amour tou- jou pu ofiammet is continuenss' è honorei, é invoquei, é supplii let binheuiraùss' Virge, mère de l'bon Diù, conceuc sons let tache originelle, et que do tourtous lous périls, lous torteures, lous besoins, lous incertitudes et lous paùes is recourenss' toujou , seurs de lous faits , à let si daùce Mère de miséricorde et de grâce. Car i n'y ait ri a aôui paûe3, i n'y ait ri à désespérei s'ill' veut bi n' condure, ne penre desous sos auspices, ne protégei, ne patrounei, Ley qu'ait pou nous i cueur de mère, ot peurnant do set main l'affare de nout' salut, étond sos soins su tourtou le genre humain ; Ley que, piacée pâ le Seigneur Reiene de l'Ciel et d'iet tarre, élouvée à d'chus de tourtous los chœurs d'einges, de tourtous los rongées dos saints, achite à let drôte de Nout' Seigneur Jésus-Christ, l'ot toute puissante pà sos prières de mère et ill' trouv' ce qu'ill chorche et n'peut jamas d'mandei sons qu'ill' n'obtenit.
Pou fini et fare counott' à tourtou l'monde catholique nout' définition de l'immaqueulée Conception de let bin-
1 . Les faibles encouragés.
2. Ecartant !es nuages qui obscurcissent leurs âmes.
3. Il n'y a rien à craindre.
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heuiraùss' Virge Marie, J'ans v'ieu que los lottes aposto- liques à" nées pà Nous , o conservenss' let souvenance ; J'an v'ieu que los paupis écrits à let main au bi imprimet qu'o seraint fà, couvris de let signateure de quecqu' no- taire peublic et marquets de l'sceau de quecqu' geos d'E- glise qu'on araint l'draut r'cevinssent de tourtous, let même croyance que seraut accordeï à ceâues-ci si l'étaint montrets au presentets. Que pacheun' ne s'aviseuss' de poutet let main su let pache let de nout' déclaration, dé- cision et définition ; que pacheun' ne sot assez hardi ni assez effrontet pour s'y opposei et let contredire. Si quecqu'ung se rondaut coupabe d'i pareil ettentet, qu'i saveuss' que l'ocoueret let colère de l'Diù tout-puissant et de los binheuiraùes apôtres Piere et Paul.
D'net à Roume, d'vot Saint-Piere1, l'an de l'Incarnation de Nout' Seigneur, 1854, le 6 dos ides de décembre, de nout' pontificat le nieuvîme.
PIE IX, pape.
Un exemplaire de cette traduction , format grand in-4°, écrit à la main, en caractères gothiques, orné de vignettes, de majuscules ouvragées et de peintures, par l'auteur, a été envoyé à Rome pour faire partie de la collection polyglotte dont on se propose de faire hom- mage à Sa Sainteté, comme il a été marqué plus haut.
1. Près Saint-Pierre.
RECHERCHES
SUR L'EMPLACEMENT ET LA DISPOSITION D'ENSEMBLE
DU
CHATEAU DU DUC RAOUL
A NANCY,
PAR M. Pr MOREY.
Les ruines nombreuses de châteaux féodaux retrouvées de toutes parts en Lorraine, particulièrement sur les bords de la Moselle , nous montrent que cette province n'était pas moins riche que tant d'autres dans lesquelles ce genre d'édifices est une source inépuisable d'études archéologiques et un but d'intérêt et de curiosité pour l'érudit et le voyageur.
— 167 —
On sait que Richelieu les fit démanteler. Depuis cette époque, ravagées par le temps, exploitées en quelque sorte comme des carrières par les habitants du voisinage pour fournir des pierres à la construction de leurs mai- sons, ces ruines ont disparu de jour en jour.
Cependant il reste encore assez de vestiges à Prény, Mousson, Blàmont, etc., tous châteaux, non inférieurs en grandeur et en solidité à ceux des bords du Rhin, pour nous faire espérer qu'un des zélés apôtres de l'histoire et de l'art prendra un jour à cœur de les étudier et de les faire connaître.
Notre but est beaucoup plus modeste : nous avons seu- lement l'intention d'exposer ce que l'examen d'un plan manuscrit de l'ancien château des ducs de Lorraine, re- levé en 1706, nous a suggéré d'idées et de conjectures sur l'emplacement et la disposition de l'ancienne demeure du duc Raoul à Nancy. Si , dans le cours de ce travail, nous avons donné place à quelques renseignements ou observations sur ces sortes d'édifices, c'est simplement pour apporter quelques lumières dans cette dissertation, et aussi pour aider ceux qui, plus tard, feront une étude complète du sujet.
D'après divers manuscrits anciens, il y a tout lieu de croire que le duc Ferry III , en donnant son palais de Nancy (Yantiquum palatium)1, en 1298, aux Dames prècheresses , pour être transformé en monastère, en avait déjà fait commencer un autre plus digne de son rang et assez vaste pour loger lui, sa famille et les nom-
1 . L'abbé Lionnois, dans son Histoire de Nancy, dit que ce palais a existé jusqu'au règne de Léopold, qui le fit abattre en 1720 pour faire l'hôtel de la Monnaie, tel qu'on le voit aujourd'hui.
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breux officiers et serviteurs de sa maison1. On peut encore admettre que ses successeurs, Thiébaut II et Ferry IV, poursuivirent les travaux commencés , et que Raoul , les ayant terminés et fondé la collégiale Saint- Georges2, la dénomination de château Raoul soit seule restée. Quoi qu'il en soit, cet édifice, non agrandi que l'on sache, jusqu'au règne de René II, devait être d'une assez grande importance, puisqu'on put y célébrer les fêtes qui eurent lieu, en 1445, pour les doubles fiançailles d'Iolande d'Anjou avec Ferry de Vaudémont , et de Mar- guerite de Lorraine avec le roi d'Angleterre.
Charles-le-Téméraire en fit également sa demeure, ainsi que celle de sa suite3. 11 est vrai qu'à cette époque, René II avait bien pu déjà augmenter ce château ; la Cour, comme on l'appelait, édifice qui eut beaucoup à
1. Un manuscrit, malheureusement incomplet, conservé à la bi- bliothèque de Nancy, commence ainsi : n palais une chapelle
» sous l'invocation de sainte Catherine , peut-être à cause de la sin- <i gulière dévotion de Catherine de Limbourg, sa défunte mère, à n l'égard de cette sainte martyre ». Or, on sait que Catherine de Limbourg était femme de Mathieu II et mère de Ferry III.
On lit encore dans le Temporel des paroisses, dressé dans les pre- mières années du xvme siècle par ordre de Léopold : u Raoul ayant » le dessein d'établir une église de chanoines à Nancy, choisit celte n chapelle castrale (celle de Sainte-Catherine) en l'église faisant par- ii lie de son palais et l'érigea en collégiale, n (II. Lepage, Palais ducal de Nancy.)
2. Dans le titre d'érection de la collégiale Saint-Georges, on y lit que Raoul fonde cette église dans une partie de son hôtel ou de sa maison (ûi quadam parte hospitii nostri seu domûs nostrœ).
3. n Sa personne en la cour fut pris un logis. Elle estoit pour ses gens moult noblement préparée, toutes les chambres bien aornées et la cuisine bien apprestée. n (Chronique de Lorraine.)
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souffrir pendant le double siège de Nancy par les Lor- rains et les Bourguignons1.
Ce qui peut encore faire croire que ce palais était très- vaste à cette époque, c'est qu'il communiquait , nous dit Nicolas Remy, avec les Cordeliers et avec l'église Saint- Georges2.
Examinons maintenant son emplacement et sa dispo- sition.
4° L'abbé Lionnois rapporte, dans son Histoire de Nancy, qu'en démolissant le bastion des Dames, attenant au Palais ducal, on trouva des restes de cuisines dans les tours qui flanquaient le château ; malheureusement il n'en indique pas autrement la place.
2° Le plan manuscrit du Palais, tel qu'il était en 1706, et dont nous avons parlé précédemment, nous montre qu'il y avait encore, à cette époque, des restes d'une tour d'environ dix-huit mètres de diamètre extérieur, avec des murs de plus de quatre mètres d'épaisseur. Cette tour énorme était placée à l'extrémité et sur le côté gauche du Jeu-de-Paume construit par Charles 111. On voit son élévation dans la charmante gravure de notre célèbre graveur Callot, représentant la Carrière telle qu'elle était de son temps.
5° A partir de cette tour, dans une direction presque perpendiculaire au mur de soutènement de la terrasse, était un mur assez long, de deux mètres d'épaisseur, qui servait à clore la face postérieure de l'orangerie ; mais sa
1. u En la court point ne peut logier (René), parce qu'elle estoit toute désolée en plusieurs lieux on avoit pris le bois pour chauffer ceux qui en la garnison estoient. » (Chronique de Lorraine.)
2. » Venant aussi à remarquer la commodité qu'il y a d'aller à couvert du dict palais à l'une et à l'autre des dictes églises. » (Id.)
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grande épaisseur, bien inutile dans cette circonstance, peut faire croire, avec plus de raison, qu'il appartenait aux constructions de l'ancien château.
4° L'inspection du plan nous fait voir encore, en re- tour, un autre mur de face de bâtiment de même épais- seur que le précédent, percé dans toute sa longueur de baies irrégulières. Evidemment, ce mur, d'une épaisseur si différente de ceux qui appartenaient aux constructions de René et d'Antoine , devait encore faire partie de l'an- cien château ; à l'extrémité de ce mur, du côté opposé à la tour, était une vaste salle carrée avec bas-côtés sé- parés du centre par huit piliers qui, dans le principe, vu sa grande importance relativement aux autres salles du rez-de-chaussée, aurait bien pu servir à un autre usage qu'à celui d'une cuisine. Les murs avaient également une fort grande épaisseur.
5° Enfin, ce qui frappe encore dans l'examen du plan, c'est la grande épaisseur du soutènement de la tour du Trésor des Chartes, de forme arrondie d'un côté, droite et irrégulière sur les autres, et d'un diamètre moyen d'environ vingt mètres, avec caves au-dessous. On se demande dans quel but on a fait un bâtiment aussi con- sidérable ? ce n'est évidemment pas dans celui d'en faire un simple Trésor des Chartes , ou un garde-meuble ; ce massif doit encore appartenir à l'ancien château.
En réunissant ces diverses constructions, on a un en- semble de forme à peu près régulière, composé d'un rec- tangle de cent dix-huit mètres de longueur sur environ quatre-vingt-dix mètres de largeur moyenne ; déplus, aux extrémités du grand mur transversal, il y a, d'une part, une grosse tour ronde et un bâtiment ou tour car- rée de l'autre.
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En face, sur l'emplacement du bastion des Dames, étaient les tours avec cuisines dont parle l'abbé Lionnois ; enfin, en saillie et comme avant-garde sur le tout, se trouvait la tour octogonale du Trésor des Chartes.
Ceci posé, examinons le but, la diposition, les moyens de défense et le caractère architectural des châteaux féo- daux des xne et xme siècles dans nos contrées.
Les premiers édifices de ce genre ne s'élevèrent d'a- bord qu'en vue de la garde et de la défense du domaine féodal ; ils ne consistaient alors qu'en de simples murs de clôture, formant souvent double enceinte avec tours. A partir du xne siècle, les ducs de Lorraine, toujours en guerre, s'emparèrent bientôt de l'esprit de ruse normande et l'appliquèrent à la défense de leurs châteaux - forts du xme siècle, époque où l'on peut faire remonter celui dont nous nous occupons. Les châteaux de la plaine af- fectaient généralement une forme régulière et se compo- saient d'un groupe de bâtiments, se défendant isolément, quoique réunis par une pensée de défense commune. Ils étaient entourés de fossés profonds, toujours remplis d'eau, ce qui les mettait à l'abri de la sape et de la mine, moyens les plus généralement employés par les assiégeants.
Les enceintes étaient flanquées de tours, de forme cy- lindrique et carrée, épaisses dans leurs œuvres et assez saillantes en dehors des courtines.
Les tours carrées ne se rencontraient généralement que dans les châteaux élevés, parce que la plupart étant situés sur des points inaccessibles, prenaient toute leur force dans leur situation même.
Le donjon était rarement placé au centre de la cour, comme au château de Prény, mais presque toujours
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dans la partie de l'enceinte la plus faible ; servant de de- meure à un maître méfiant, il était pour ainsi dire indé- pendant de la forteresse ; il avait des poternes particu- lières, sa sortie dans les fossés, etc.; c'était la citadelle des places fortes de nos jours.
Les souterrains jouaient un grand rôle dans la défense, comme sortie et comme moyen d'échapper à l'ennemi en cas de surprise ; ils servaient aussi de prisons et de ma- gasins1.
Toutes ces données, comme on le voit, s'appliquent parfaitement bien aux constructions désignées sur notre plan manuscrit : l'enqeinte, de forme rectangulaire allon- gée, est régulière ; elle est assez vaste pour renfermer tous les services nécessaires à l'habitation et à la défense. L'enceinte est garnie de tours : celles dont nous voyons des traces et celles qui ont été trouvées lors de la démolition du bastion des Dames ; le donjon, qui nous parait avoir été sur l'emplacement de la tour du Trésor des Chartes, remplissait toutes les conditions voulues de défense commune et d'i- solement ; il avait encore des souterrains. Enfin, autour de la forteresse il y avait des fossés2, et, en cela, la position du château avait été bien choisie, puisque les principaux ruisseaux des environs, provenant de sources intarissa-
1. Cet usage s'élait conservé en Lorraine : Lionnois nous dit que sous le bastion de Danemark, de la ville de Nancy, il y avait un sou- terrain pour passer quatre hommes de front, qui allait à environ une lieue et demie de la ville pour se sauver sans être aperçu.
Il y a quelques jours qu'en creusant les tranchées pour la cons- truction du canal qui doit passer devant la manufacture des tabacs, on a trouvé, à environ trois mètres au-dessous du sol actuel , une voie pavée de petits moellons qu'on peut supposer un reste de ces anciens souterrains.
2. Voy. le plan restauré ci-joint.
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blés, pouvaient, en tout temps, les alimenter ; d'ailleurs il suffirait de creuser le sol à une faible profondeur pour trouver ('es eaux abondantes. On sait que ces fossés existaient encore il n'y a pas très-longtemps, et leurs eaux formaient la mare où les filles et les femmes de Laxou étaient obligées de venir battre l'eau la première nuit des noces des ducs de Lorraine, usage aboli par Renée de Bourbon, épouse du duc Antoine1.
Il est probable qu'autour du château de Raoul il y avait encore un espace libre, un pré ou breuil, comme à celui d'en haut, dont parle la dotation faite par Ferry 111 : Ensi corne li mur porte lait ou l&praetz soloit estre ; ce qui signifie : jusqu'au mur où était d'ordinaire un pré.
Outre les moyens de défense dont nous avons parlé, les murs d'enceinte et les tours étaient couronnés de mâchicoulis, de créneaux, d'échauguettes, de bretèches avec chemin de ronde servant de défense et de commu- nication facile. Tout était prévu pour la défense la plus vigoureuse : aussi, en 1542, lors de la guerre entre l'évèque de Metz et le duc Raoul, l'armée épiscopale, après avoir tout ravagé sur son passage et dans les en- virons de Nancy, ne put songer à faire le siège de cette
i. Cet usage n'était pas particulier à ce village, il l'était encore à celui de Monthureux ; lorsque l'abbé de Luxeuil, son seigneur, y lo- geait, les paysans chantaient en forme de refrain :
Pa, pa, rainottcs pa ! Voici l'abbé de Luxeu, Que Dieu y a !
(Digot, Histoire de Lorraine, p. U2, t. II.)
Nous devons faire observer qu'un membre de la Société d'Archéo-
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ville à cause de la force imposante que présentaient ses murs d'enceinte.
On voit, d'après les restes des châteaux féodaux lor- rains, combien on apportait de soins dans les éléments de leur construction : les murs, d'une épaisseur moyenne de quatre mètres, étaient en bonne maçonnerie de moel- lons et mortier avec revêtement de grosses pierres de taille taillées en bossages et quelquefois ornées de grosses boules qu'au premier abord on prend pour des boulets, mais qui ne sont, en réalité, qu'un emblème de miches ou Dite hottes données aux ouvriers pour leur nourriture, et dont ils ont perpétué le souvenir. Il est vrai qu'en cas de guerre ou d'alerte, il y avait avantage pour eux en ce qu'ils trouvaient dans ces châteaux un refuge assuré ; aussi les seigneurs, non contents des corvées qu'ils leur imposaient, exigeaient-ils encore d'eux l'entretien et la fourniture d'une bonne partie du mobilier du château1.
Ces demeures, si imposantes et si grandioses, élevées avec tant de peine, n'étaient, en résumé, que d'affreuses prisons que les seigneurs abandonnèrent bientôt après avoir vu et habité, lors des guerres des croisades, les
logie, M. Louis Lallement, a publié, dans notre Journal (septembre 1834), une dissertation ayant pour objet de prouver qu'il n'y a rien de fondé dans la tradition relative à la servitude imposée aux femmes de Laxou. (Note du Bureau de la Société.)
1. Au cbàteau de Spitzemberg, situé près de Saint-Dié, le ban de Colroy-la-Rocbe devait demi-garde dans la forteresse pendant un an et un jour, et, de plus, une portion de la palissade qui bordait le fossé, le tiers de la toiture de la chapelle, la moitié de la loge du portier, la moitié de la hache et de la pelle à feu, une poêle et une chaudière assez grande pour y faire cuire un bœuf, etc. (Digot, His- toire de Lorraine, t. II, p. 142.)
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gracieuses et charmantes villa de l'Orient. On les con- serva encore, il est vrai, comme moyen de défense, mais on construisit à côté, dans le pré ou breuil, une nouvelle demeure, tenant par la disposition d'ensemble aux anciennes traditions du pays, mais décorée de tout le charme de l'architecture italienne et mauresque : c'est ainsi que les ducs René II, Antoine et Charles III firent du château de Raoul, qui devint plus tard une simple dé- pendance de leur palais, et ce qui explique la forme irré- gulière de ce dernier, ainsi que le voisinage trop immé- diat de maisons particulières.
Il est à remarquer que, dans ce palais, on ne rencontre dans la décoration de ses faces extérieures, comme on le voit dans la plupart des édifices du même temps, aucune tour, tourelle, créneaux, etc., rappelant la féodalité, pas même le moindre petit fossé ; il semble que les ducs lorrains aient cherché dans leur nouvelle demeure à éloi- gner tout ce qui pouvait rappeler ces sombres et tristes habitations de leurs pères , en conservant le caractère grandiose des vieux châteaux ; tout y est élégant, gracieux et riche et placé au milieu de jardins ornés des plantes les plus rares, de statues1 et d'admirables fontaines2. De longs portiques, de larges baies, des salles spacieuses dé-
i . Les deux stalues placées dans les niches de la face extérieure de la porte Noire-Dame, beaucoup trop grandes pour remplacement qu'elles occupent, proviennent peut-être du beau perron du jardin ducal.
2. Ces fontaines étaient alimentées par une source placée dans le jardin de la maison qui fait angle à la rue de la rue de Boudonville et du chemin qui conduit à la Croix-Gagnée, comme on le voit par un titre de vente de cette maison, qui autrefois appartenait aux ducs de Lorraine.
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corécs de peintures1, de riches tapisseries et les meubles les plus recherchés complétaient ce remarquable ensem- ble, et le palais ducal de Nancy devint un des plus beaux de l'Europe au xvie et xvnc siècles2 ; il n'est donc pas sans intérêt de posséder le plan exact d'une telle de- meure ; le faire connaître est un service que nous croyons rendre, car, à part les observations qu'il nous a suggérées, il contient une légende précieuse de la destination des différentes pièces et donne les plans exacts des églises Saint-Georges et des Cordeliers ainsi que divers locaux dont on ne pouvait se douter d'après le plan publié par Lionnois et celui du premier étage que possède la biblio- thèque publique de la ville. En résumé, une plus longue explication de ce plan est inutile, son examen vaut mieux que toute description.
Nous finirons par faire observer que, dans le reste de tour située près du Jeu-de-Paume, on verra peut-être celle qui est désignée dans la description du premier siège de Nancy par le duc de Bourgogne, sous le nom de grande tour5, que Dom Galmet place dans la gorge du bastion
\ . A part les peintures à fresque qu'on voit encore dans les ébra- sements des fenêtres de la salle des Cerfs» il en existait une autre, il y a peu de temps encore, au centre du mur du fond, côté des Cor- deliers ; elle était à quatre mètres au-dessus du sol ; quoiqu'elle fût en partie effacée, on distinguait parfaitement, dans un grand ovale formé de deux arcs de cercle, un prince et une princesse de gran- deur naturelle avec manteaux armoriés, agenouillés devant une vierge assise sur un trône.
Une petite portion de la voûte surbaissée de la même salle, cons- truite en bois et bardeaux, conservait également des anciennes pein- tures et dorures.
2. Voy. H. Lepage, le Palais ducal de Nancy.
3. L'auteur de la Chronique de Lorraine dit : » Maintenant disons i> comment li duc de Bourgoigne Kancey vient environner. Ceulx de
"1
PLAN RESTAURE DU CHATEAU DU DUC RAOUL A NANCY.
M
Nota: J,a teinte nuire indique les murs qui ùxistaient encore en 1706, ht teinte c/ ri.se tes murs resta /ires.
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de Salm, et que l'abbé Lionnois dit avoir été au milieu du bastion Notre-Dame. Ce sujet, tout intéressant qu'il soit, étant en dehors de celui que nous nous sommes proposé, nous laissons à d'autres le soin de l'examiner.
Nous avons cru pouvoir, en nous inspirant du plan de 1706 et des dessins d'architecture féodale du xive siècle, rétablir le château de Nancy, tel qu'il est permis de sup- poser qu'il existait au temps du duc Raoul.
La vue que nous en donnons doit donc être considérée uniquement comme une œuvre d'art ; nous n'y attachons pas l'importance d'une restitution archéologique1.
h ladicte Nancey à force de bastons à feu de tous coustels tiroient. « Lesdicts Bourguignons vers Sainct-Jehan, vers les faulxbourgs » tiroient por leurs lousgis panre. Quand tous furent lousgiés, la h première nuict et les allres en suyvant viendrent faire tranchiés au ti loing (le long) des fossés. En moins que de viij jours la ville fut ti environnée. On envoyé à toute diligence à la porte Sainct-Nicolas h et à la poterne faire boulewairds grands, lesquels leur feirent grands » dommaiges. De jour en jour plusieurs Gascons et Alemans bors ii de la ville saillirent, tant derrière la Court comme devers la Po- i» terne ; es Bourguignons faisoient bonne guerre. De toutes les tours n grande artillerie il y avoit : tosjors sur eulx on tiroit. Plusieurs » fois on ne failloit my. Ceulx de la grande tour ne falloient my [uu h coup]. C'estoienl gens asseurés. Maints en tuont et blessont que » en Flandres oncques ne retourneront. La tour de toutes que ils ii avoient plus d'envie, c'estoit elle ; car ils sappèrent [la vouloient » sapper] par les cops que encontre tiroient. «
1. C'est aussi l'opinion formellement exprimée par la Société. (Note du Bureau.)
12
TABLE
DE RENVOI AUX CHIFFRES DU PLAN DE 1706.
4. Petite cuisine de S. A. R. Madame.
2. Appartement de M. de Soreau.
3. Salle à manger des officiers de cavalerie.
4. Passage du jardin.
5. Suisses.
G. Appartement de M. le marquis de Lunaty.
7. Corps-de-garde.
8. Chambre ordinaire de l'officier de garde.
9. Bureau de l'hôtel et dépendances.
10. Descentes de caves.
11. Appartement de M. Paquotte, argentier de l'hôtel.
12. Chambre des heiduques occupée par des soldats. 15. Magasin d'ardoises.
14. Dessous de la tribune de la collégiale Saint-Georges.
15. Eglise Saint-Georges et dépendances. 1G. Portiers.
17. Dépôts des tables de l'hôtel, occupés par des soldats.
18. Appartement de M. Belleville, défunt.
19. Appartement de M. Cleret.
20. La verdure.
21. Chattcville ou Lorange, dépensier.
22. Garde-meuble.
23. Dépenses occupées par les soldats.
24. Pourvoyeurs.
25. Lingerie.
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26. Logement du sieur Blancpain.
27. Salles à manger des contrôleurs, et dépendances.
28. Officiers.
29. Cuisine de la bouche et dépendances.
30. Rôtisserie.
51. Cuisine du commun et dépendances.
52. Echansonnerie. 55. Prison.
54. Appartement de M. le comte de Stainville.
55. Couvent et église des Cordeliers.
La croix f indique le projet d'un chœur.
56. Chapelle ducale.
57. Latrines.
58. Appartement de M. le maréchal, défunt.
59. Charbonnier.
40. Cuisine de M. Duménil, défunt.
41. Logement du sieur Thomas, jardinier.
42. Orangerie.
45. Ecuries et remises.
Nota. Dans l'entresol du bâtiment, en face de l'oran- gerie, appelé appartement des ponpons, étaient les loge- ments de MM. Duménil, Wosnart, des Ours et le passage des latrines, appelées les Douze, etc.
TABLE
DE RENVOI AUX LETTRES DU PLAN DU CHATEAU DE RAOUL.
A. Tours démolies dont parle Lionnois.
B. Tour du Trésor des Chartes ; l'ancien donjon.
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D. Tour dont une partie existait encore en 1706.
E. Eglise collégiale Saint-Georges.
F. Emplacement de l'église des Cordeliers.
G. Mur d'enceinte de la ville aboutissant à l'ancienne
porte Saint-Nicolas , dite plus tard des Chameaux. H. Mur d'enceinte de la ville aboutissant à la porte de la
Craffe. 1. Entrée du château.
NUMISMATIQUE
DE LA LORRAINE ALLEMANDE,
PAR M. LOUIS BENOIT.
I.
ATELIER MONETAIRE DES DAMES DE REMIREMONT A FÉNÉTRANGE.
Dans ses Recherches sur quelques monnaies mérovin- giennes et carlovingiennes, publiées 'dans le premier Bul- letin de la Société d'Archéologie lorraine (t. 1, n° 1), M. l'abbé Klein a signalé les ateliers monétaires de Mar- sal, Moyenvic, Sarrebourg, Vic-sur-Seille. 11 est à remar- quer qu'il n'existe pas de monuments écrits antérieurs au vme siècle sur ces localités, où se trouvaient sans doute auparavant des ateliers romains. Nous ajouterons qu'à ces petites villes , assez rapprochées les unes des autres, il faut joindre Fénétrange. Des découvertes ulté- rieures viendront sans doute compléter ces recherches et permettront de reconstruire en partie l'histoire primitive de ces cités.
— 482 —
Au moyen âge, le collecteur de l'impôt , le fermier d'une saline, le régisseur d'un domaine, l'économe d'un monastère étaient autorisés à recevoir, au besoin, en paie- ment des prestations en nature, des monnaies étrangères ou anciennes, des métaux au poids. Il pouvait rendre le montant de ses recettes ou de ses fermages en espèces monnayées sur place , dans des localités si peu impor- tantes que l'on ignore le lieu de leur emplacement1.
C'est ce qui nous engage à donner ici quelques docu- ments qui ne peuvent laisser aucun doute sur l'atelier monétaire qui parait avoir existé à Fénétrange.
Non-seulement on semble avoir méconnu le droit que possédait l'abbesse de Remiremont de frapper monnaie à Fénétrange, mais on lui avait contesté celui d'en émettre à Remiremont2. Les prétentions des ducs de Lorraine, voués de Remiremont depuis Gérard d'Alsace, avaient soulevé de nombreux conflits avec l'autorité abbatiale. Aujourd'hui, cette question est tranchée, et l'on sait que les deux parties firent frapper monnaie à leur coin , à Remiremont même3.
La juridiction de ce monastère était très-étendue : il exerçait ses droits régaliens jusque dans le Westrich, où il jouissait, entre autres prérogatives, du privilège d'avoir un atelier monétaire dans le château de Fénétrange.
A quelle époque remonte ce privilège ? C'est ce qu'il semble difficile d'établir. Gérard d'Alsace, voué de nom- breuses abbayes, avait-il fait don à l'église de Remire-
1. Voy. M. Robert, Considérations sur les monnaies à l'épo- que romane,
2. Voy. Noël, Catalogue raisonné, t. III, p. 818.
3. Voy. les travaux de MM. Mory d'Elvange, de Saulcy, Robert, Rolin, Richard, sur les monnaies de l'Est de la France.
— 185 —
mont, lieu de sa sépulture, d'une partie de la terre de Fénétrange, franc-alleu suivant les uns, fief messin, qu'il avait usurpé, suivant d'autres ; ou faut-il admettre, comme le prétend Dom Calmet, entièrement dévoué à la maison de Lorraine, que les dames de Remiremont, sous la pro- tection des ducs, se soient emparées de ces droits réga- liens après la décadence de la maison de Charlemagne, lorsque les princes de la maison de Saxe se disputaient le royaume de Lorraine1 ? Ce qui parait certain , c'est qu'elles possédaient un revenu particulier à Fénétrange, au xie siècle, ainsi que le constate un titre découvert au Trésor des Chartes : on lit dans un diplôme de l'empe- reur Henri IV, daté de Mantoue, octobre 4070, que les monnayers de Remiremont contribuaient au service que l'abbesse du monastère de ce lieu devait à l'empereur, pour 7 livres de poivre , et ceuxMe Fénétrange^pour S : « Monetarii de Burgoromaricensi debent septem libras piperis, monetarii de Filistingis v libras ». Les représen- tants de l'église de Remiremont, qui signèrent avec ceux de l'empereur, furent : « Guidricus et Rembaldus can- cellarii, Normannus prsepositus Vosagi, Romaricus heb- domadarius et fulco, Hugo prœpositus de Alsatia, Cono de Corocello et Guidricus camerarius ducis Lotharingiœ »2. Cet acte, qui fut dressé avec la participation du duc de Lorraine, et qui énumère les redevances dues à l'empe- reur, prouve qu'il y avait alors à Fénétrange des mon-
i. Voy. Dom Calmel, Notice de la Lorraine, v° Remiremont.
2. Voy. M. H. Lepage, les Communes de la Meurthe , t. I, p. 339. Copie extraite de l'original, le scel de cire jaune à cordon de soye jaune pendant, et collalionnée par nous notaires apostoliques soubsignés, l'an 1366, le 12 juin. Signés : Hatton. — Io. Chauffour, notaire. (Trésor des Chartes, lay. Remiremont I, n° 1.)
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nayers. Y étaient-ils à poste fixe ou n'y résidaient-ils que comme les spengler en Allemagne, provisoirement ? C'est ce que ne dit pas le titre suivant, d'après lequel on voit que la ville de Fénétrange appartenait, sans doute en partie seulement, au chapitre de Remiremont.
« Mathieu duc de Lorraine et marchis, et le seigneur Merebode de Malsberg (dominus Mercbodus de Ma-
bercli) à tous ceux qui les présentes verront.
Qu'il soit notoire à tous présents et à venir que la véné- rable abbesse, la doyenne , et le couvent de Remiremont convenlus Romaricensis) ont fait cession au seigneur Merebode et à ses successeurs en la terre de Fénétrange in terra de Phylestangcs), de ladite terre et des hommes y demeurant avec toutes les dépendances , à savoir : les prés, forêts, pâturages, cultures et terres incultes. Cette cession irrévocable est faite en la teneur suivante : ledit seigneur Merebode ou ses successeurs viendront en per- sonne à l'église de Remiremont (in ccclesiam Romaricen- sem) reprendre ladite terre et ses dépendances de l'ab- besse, prêteront le serment de foi et hommage au couvent de Remiremont , et paieront une redevance annuelle de cent sous messins le jour de la Saint-Martin, comme re- connaissance perpétuelle de leur vassalité envers Remi- remont (Romaricum montem). Si, par hasard, l'abbesse ou son délégué se rendait en ladite terre, celui qui en sera possesseur les recevra honorablement ; de même l'abbesse et le couvent recevront avec deux chevaux le délégué du possesseur de la terre de Fénétrange , quand annuellement il apportera ladite somme à Remiremont. Mais si ladite somme n'était pas payée à la Saint-Martin, on attendrait quarante jours et encore quarante autres jours, après lesquels le possesseur ou les possesseurs de
— ras —
la terre de Fénétrange recourront pour leur négligence la peine dexcomniuni cation, à laquelle le seigneur Mere- bodedédai umettre. lui d ses s ■eeessenrs. Cette
: mmunication sera mise à exécution par les véné- rables archevêque de I - que diocésain de Metz; elle ne sera levée qu'après le paiement de la somme principale de cent sous messins d'amende et de la pleine
et entière satisfae;. . :. à FaUesi an c ouvert.
Mais s'il arrivait que cette satisfaction fût refusée . ladite terre de Fénétrange retournerai; :. te droits de pro- priété et de ■•-:.::. an couvert de Remiremon* . d k
sesseur ou les - - s de ladite terre en seraient à jamais privés. En foi de quoi nous avons se sur la
présente page notre sceau. Fait en l'an de grt l,-1 ».
La huitième abbesse de Remiremont, suivant Dom Calmet. était Gisèle II. qui succéda à Ode et qui se ren- dit, en 1070. à Mantoue. près de l'empereur Henri IY. Apr - viennent Félicité de Laurette 1090 . Gisèle TTT (11 13), Française, BHe du duc Thiery I11S . Judith I 1130), Gisèle IV 1112), Judith II 1152), Mathiîde (117s>. Cl. ... et Marguerite 1211-1231). Ce
fut - • ne abbesse que renqpbça Agathe de
1 ".-aine, fille du duc Ferry I. q .je de Mais:
devint le chef d'une dynastie : • - m - de nom et d'armes, dont la lig: ..:.-.- e éteignit à la fin du
xv^ -
Un de ses sa sears, Jean de Fénétrange. représenté par son écuyer Arnold de Hultenhach, se reconnut feu-
1. Vcy. M. H. L^- - l:>wuKMn,c Mevrthe, t. I.
p. 539. Original en parchemin, auquel il ne reste pi» qu'un : du sceau de Mérebode. tmirenont I, n' ■
— 186 —
dataire de l'abbesse Jeanne d'Aigremont, le 16 août 1392*.
Celle-ci, suivant Dom Calmet, appartenait à l'ancienne chevalerie de Lorraine (1569-1404).
Les seigneurs des deux branches de Schwanhals et de Brackenkopf étaient tenus de faire leurs reprises féodales, ainsi que le prouve la lettre suivante , datée du 26 no- vembre 14272 :
Je Henri, sire de Fenestrange, fais sçavoir qu'en mon nom et ecluy de Jehan de Fenestrange, mon cousin , ai repris de madame Isabelle de Demongeville , abbesse de l'église Saint-Pierre de Remiremont du diocèse de Toul, le fief du chastel et de la ville fermée de Fenestrange pour les cent sols messins à payer par moy. Présents : Thiéry Bayer (de Boppart)3, Jacques son fils, Simon, abbé de Gemaincourt (?), Jehan Turny de Saint-Firmin, Démange, Mathieu Guedet, chanoines , Willaume Tra- mousey de Rosières, curé d'Uxegney, Robert Waulthier, Jehan Ancel, Jacques Willemin de Bayon, prestres, Ni- colas Lulal boulanger, Colin ThiébaultFebvre (serrurier), Simon de Ban Parmentier, tous bourgeois de Remire- mont.
Arnould de Fénétrange, le dernier mâle de cette mai- son, fit ses reprises, en 1472, pour ce qu'il tenait à Fé- nétrange, d'Alix de Paroy, laquelle vivait en 1463 et
1. Voy. Trésor des Chartes, lay. Fénétrange II, n° 450. Sur l'o- riginal, en allemand, se lit le nom de l'abbesse : Iohanna von Aigre- mont, abtissin zu Romelsberg. — On trouve, près de Fénétrange, Romelfing (village de Saint-Romaric), dont l'étymologie rappelle cette époque reculée.
2. Voy. Trésor des Chartes, lay. Fénétrange III, n° H (copie).
3. Marié à Blanchcfleur, fille de Burckard, sire de Fénétrange.
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mourut en 1473, après avoir fait des fondations considé- rables à Remiremont, dont elle était abbesse1.
11 résulte des documents empruntés au Trésor des Chartes de Nancy, que les sires de Fénétrange firent leurs reprises féodales de la crosse et de l'église de Remiremont jusqu'à la fin du xve siècle, et qu'au xie il y avait des monnayers à Fénétrange.
II.
L'ATELIER MONÉTAIRE DE HENRIETTE DE PHALSBOURG
A LIXHEIM.
Les amateurs de numismatique lorraine connaissent les belles études consacrées à l'atelier monétaire de Lixheim dans les Monnaies féodales de la France, par M. Poëy d'Avant, et dans la Revue numismatique , par M. A. de Barthélémy2. Il aurait été superflu d'entre- prendre un nouveau travail sur ce sujet, si nous n'avions découvert quelques documents inédits, qui, de la collec- tion de M. Dupont de Romémont, sont passés dans celle de M. Noël, ancien notaire, et de là dans la nôtre, en 18573.
1. Voy. Dufourny, Inventaire, t. X, 2e partie, p. 224 (manuscrii de la bibliothèque de Nancy).
2. Voy. Poëy d'Avant, Monnaies féodales de la France, t. III, p. 301. — Ibid. Bévue numismatique française, 1846, p. 184. — Dom Calmet, dans sa Notice, a décrit cinq de ces monnaies et en a fait graver quatre dans son Histoire.
3. Voy. Noël, Catalogue raisonné des collections lorraines, 1850, t. I, p. 293, n° 1953. — M. Dupont, en 1755, fut chargé de faire des recherches historiques sur Lixheim et Crauflhal par M. Du- pin, le célèbre fermier général, l'ami de Jean-Jacques ; il réunit une grande quantité de matériaux précieux, qui, malheureusement aujour- d'hui, se sont dispersés à la vente du cabinet de M. Noël.
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Cependant on ne saurait parler de l'atelier monétaire de Lixheim , sans en même temps y rattacher quelques- uns des épisodes de la vie tourmentée de Henriette de Phalsbourg , fille de François de Vaudémont et de Chris- tine de Salin, née le 5 août 1605. Avec les princesses de Lorraine , elle se trouva mêlée aux passions , aux luttes et aux agitations de son époque , depuis les commence- ments de la guerre de Trente ans jusqu'à l'occupation de la Lorraine par la France. La destinée de Henriette, jetée dans tous les hasards de l'exil , les malheurs de sa sœur Marguerite mariée au triste Gaston d'Orléans, ceux de ses cousines, filles du bon duc Henri , Nicole, la femme de Charles IV et Claude, celle du prince Nicolas-François, présentent un grand intérêt*.
On voit ces infortunées princesses luttant avec éner- gie, contre des adversaires tels que Richelieu et Mazarin, pour défendre leur fortune et leur honneur, accablées sous les coups du sort et poursuivies, même après leur mort, par des haines implacables. Ame virile et tendre, Henriette fut sacrifiée par la politique égoïste de son frère, le duc Charles IV, et mariée, contre son gré, au fils naturel de Louis II de Lorraine, cardinal de Guise, assassiné à Blois, et d'Aimée de Hescherenne, dame de Grimaucourt. Elle épousa Louis de Lorraine, baron d'Ancerville, auquel le duc Henri donna la seigneurie de Phalsbourg, le 18 avril 1621, en raison de son mariage, qui eut lieu le 22 mai suivant. Henriette perdit son époux à Munich, en 1631. Elle se remaria, le 17 octobre 1644, à la cour des Pays-Bas, à dom Carlos Guasco, marquis de Solanos, général de l'artillerie d'Alsace au service du roi
i. Voy. les aventures de ces quatre princesses dans Y Histoire de la réunion de la Lorraine à la France, par M. d'Haussonville.
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d'Espagne1; avant 1659 elle était veuve d'un troisième époux, Christophe de Moura, après la mort duquel elle épousait François-Joseph de Grimaldi, à la merci du gouvernement espagnol , qui lui avait prodigué les pro- messes dans l'espoir d'en tirer parti, et qui l'avait abandonnée. Dépouillée de ses biens par la France, qui, malgré le traité de Westphalie (1648), auquel elle avait été convoquée, ainsi que les autres princes de l'Empire, continua à comprendre la principauté de Lixheim dans l'intendance d'Alsace, l'infortunée Hen- riette alla mourir, en 1660, à Neufchàteau. Par la protec- tion du cabinet de Versailles, Alexandre de Grimaldi succéda à son frère, mort en 1693, et, à son tour, il laissa, en 1702, faute d'héritier, sa principauté de Lixheim à la Lorraine, qui la gouverna d'abord comme une terre étran- gère.
On s'est demandé en vertu de quelle charte Henriette faisait battre monnaie ? Ce droit régalien est sous-entendu dans la lettre de l'empereur Ferdinand, du 12 février 1629, portant érection de la terre de Lixheim en franche principauté immédiate du Saint-Empire, en faveur du prince de Phalsbourg. Il est dit dans le récit de l'exposé de ce prince, récompensé un peu tardivement pour les services qu'il avait rendus à l'empereur, « qu'il a ac- questé la terre de Lixheim, ses appartenances et régales, scizes en l'Empire, proche la Sarre, en vray franc-aleuf avec tous droits de régale, haute, moyenne et basse jus-
1. C'est de cette époque que datent tes lettres de Mazarin à la princesse de Phalsbourg (1645). Voy. M. Cousin, Madame de Che- vreuse, p. 439. — Les registres des comptes de la ville de Lixheim nous montrent Henriette retirée à Neufchàteau en 1659 avec M. de Grimaldi, qui plus tard résida au château de Sampigny, qu'avait bâti le baron d'Aucerville.
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tice, et y joint diverses autres pièces pour le plus grand bien de l'Empire, lesquelles estoicnt auparavant en diffi- culté avec les François et les tenanciers d'ycelles1. »
Cette haute faveur fut réitérée et confirmée par l'em- pereur Ferdinand III, à Linz, le 25 novembre 1645.
La lettre d'érection ne dit pas non plus en quoi consis- tait cette principauté, à laquelle sa configuration géogra- phique donnait la forme d'un Y. On y remarquait Ars- chviller , en allemand Erschweiller ; les verreries de Glashutten et de Munsterhù2, situées entre ce village et celui de Saint-Louis, bâti en 1630, sur les ruines de Heigerst et de Roterbach"; le moulin de Farbach sur la Zorn, auquel, par sobriquet, on donna le nom de Spars- brot ; Dannelbourg, Weckersviller, Brouviller et Hé- range, l'ancienne chàtellenie de Heringen, d'où dépen- daient tous ces villages acquis par les seigneurs de .Lixheim; Fleisheim, Sainte-Marie, bâtie aussi vers 1630 et désignée en allemand sous le nom de Wickholtz ou Pick- holtz ; Hellering, les trois Hambach (le grand, le petit et Rodt, villages du comté de Morhange), enfin la seigneu- rie de Montbronn, dans le comté de Bitche.
Telle était la principauté de Lixheim, à laquelle il faut
1. Voyez le texte allemand et la traduction, certifiés le 4 mai 1629 par Stephanus Dufort, notaire apostolique (collection Dupont). — Il en existe une autre traduction dans les Communes de la Mcurthc, par M. H. Lepage, t. I, p. 606.
2. Nous ignorons à quelle époque ces verreries furent construites ; au commencement du xvme siècle, celle de Munsterhù' était déjà ruinée. (Voy. Communes, t. I, p. 44.)
3. A quelque distance de Heigerst, s'était élevé le hameau de Langmatt. Durival cite aussi, près de Brouviller, Holheff, (Voy. Des- cription de la Lorraine, t. II, p. 261.) et les Communes Krams- weiller. (Voy. Communes, t. I, p. 204.)
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joindre les terres de l'abbaye de Graufthal, sécularisée à la suite des guerres de religion1.
La principauté de Phalsbourg, qui fut réunie à la France par le traité de Vincennes, en 1661, après la mort d'Henriette, comprenait : Phalsbourg et Einartzhausen, Vilsberg et Lutzelbourg, qui avaient été des chàtellenies ; Mittelbronn, Hultenhausen, Hazelbourg, Danne et Hen- ridorf2.
Pendant la période palatine de la guerre de trente ans, le pays avait été ruiné par les soldats de Mansfeld, qui s'étaient établis, en 1622, à Lixheim, petite ville que l'électeur palatin Frédéric IV avait bâtie et fortifiée, en 1600, pour servir de boulevard au protestantisme, du côté de la Lorraine ; c'est ce qui avait décidé le duc Henri à y établir à son tour une garnison et à en faire l'acquisition comme apanage du prince et de la princesse de Phalsbourg. Les nouveaux souverains rétablirent les églises, appelèrent des pères de l'Oratoire et obtinrent du Saint-Siège, le 15 septembre 1631, un commissaire apostolique chargé de la juridiction spirituelle, qui fut l'abbé de Haute-Seille, Lixheim étant alors nullius clio- cœsis5. Ils agrandirent la principauté et y attirèrent de nouveaux sujets. La fontaine de 1627 et les armes de Lorraine sculptées sur les murs de l'ancien couvent, rap- pellent cette époque de prospérité ; le village de Saint- Louis, élevé sur des ruines, prit le nom du prince de
1. Voy. l'histoire de cet ancien monastère que nous publions dans le Bulletin de la Société pour la conservation des monuments historique d'Alsace.
2. Voy. Collection Dupont (loco citato).
3. Voy- Trésor des Charles de Nancy, Etat du temporel des pa- roisses en 1707. B. 295.
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Phalsbourg ; celui de Sainte-Marie dut son origine à un vœu que fit la princesse, égarée à la chasse dans les fo- rets de Bickenholtz1. En 4652, Lixheim comptait déjà 116 maisons. 11 y avait le bastion du Prince et le bastion de la Princesse2.
Ce fut pendant son premier veuvage, en 1631, que Henriette, qui avait alors 29 ans, s'efforça surtout de re- lever de ses ruines la principauté de Lixheim. Comme elle ne possédait pas de château dans la ville, elle y loua une maison particulière5 qui a conservé son ancien aspect et se trouve située rue de la Monnaie : c'est là que furent frappées, en 1655 et 1634, des monnaies de types variés, dont la gravure fut confiée à des artistes très-habiles. Sur quelques-unes se voit l'effigie de la princesse , qui était d'une beauté remarquable, comme sa sœur Marguerite ; tantôt elle est en cheveux avec chignon, tantôt elle porte la toque espagnole avec une plume*. Son profil rappelle le beau portrait de Van Dyck, qui faisait partie de la ga- lerie d'Orléans5. Elle y est représentée en pied; d'une main elle s'appuie sur l'épaule d'un jeune nègre costumé en page et portant une corbeille de fleurs, tandis que, de
i. Une tradition erronée fait remonter à la princesse Henriette l'établissement, en 1614-, du village de Henridorff. Mais celui de Montdidier (Didersberg), en 1628, appartient au prince de Phals- bourg, qui était aussi seigneur de Franc-Altroff, pour moitié avec M. de Helmestadt, de Léning-Altroff, etc.
2. Voy. les plans de Tassin et de Beaulieu.
3. Voy. Dom Calmet, Notice de la Lorraine, v° Lixheim. — L'hôtel de Phalsbourg à Nancy était situé place des Dames.
i. Voy. la description des monnaies à la fin de la présente notice, et les planches.
S. Ce tableau peint sur toile, hauteur, 6 pieds 7 pouces, largeur, 4 pieds , a été gravé par Voisand.
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l'autre, elle donne un pli gracieux à sa robe étroite, mais traînante, ouverte sur la jupe jusqu'à la taille ; son cos- tume est celui des élégantes dessinées par Abraham Bosse en 1653 : des nœuds de rubans, des pendants d'o- reilles, un carcan de perles, de longues manchettes, une ample collerette avec rabat s'épanouissant autour de ses épaules nues, le corsage étroit, la taille très-courte, les manches déchiquetées, se fermant au milieu du bras, et, ce qui lui permettait de quitter ces brillants atours pour se déguiser en homme , les cheveux coupés courts , dis- posés en touffes sur les côtés et en petites frisures sur le front1. Dans le fond du tableau on aperçoit une draperie d'or, derrière laquelle s'ouvre l'entrée d'un jardin terminé par un lointain de montagnes.
L'œuvre du maître a été très-inexactement interprétée par Cornélius Galle , qui a reproduit à mi-corps le por- trait de la princesse d'une manière lourde et d'un burin peu élégant. C'est une gravure dont le deuxième état est assez commun. Au bas, on lit la légende suivante, dont l'orthographe des noms de Lixheim et de Saint-Avold a été quelque peu altérée :
HENRICA LOTHARINGIE, PRINCIPISSA PHALSEBVRCE , ET RIXHEIM.E, COMITISSA BOVLAYE , BARONISSA ASPRIMONTIS, DOMINA NOVI-CASTELLI, PRENY, HOMBVRGI, ST-ANOLDI , AVANTGARDE, SAMPIGNI, FRANC-ALTORFFI ETCa. AlltOniuS
1. On voit assez fréquemment les grandes dames de cette époque revêtir l'élégant costume de cavalier : Madame de Saint-Balmont, dé- fendant son château contre les Croates ; la duchesse de Chevreuse, franchissant les frontières d'Espagne ; Marguerite d'Orléans, fuyant d'une traite à Thionville, et, au mois de mars 1634, Henriette de Phalsbourg, arrivant en Franche-Comté sans avoir été atteinte par les dragons du comte de Brassac envoyés à sa poursuite.
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Van Dyck pinxit Cornélius Galle sculpsit. Ioannes Mey- sens excudit.
Ce portrait fut peint pendant l'exil de la princesse Hen- riette à la cour de l'archiduc des Pays-Bas, en 1634*. Le 29 décembre , un ordre de Louis XIII faisait tomber les bastions de Lixheim et punissait ainsi la vaillante ama- zone qui avait défendu , l'année précédente , la ville de Nancy, assiégée par le roi en personne. Peu après , les Suédois pénétraient en Lorraine, amenant avec eux la guerre , la peste et la famine : l'atelier monétaire cessait de fonctionner, les pères de l'Oratoire étaient dispersés, les cérémonies du culte interrompues. En 1665, il n'y avait plus que 65 maisons, à Lixheim, qui fussent occu- pées, y compris 18 veufs ou veuves et 25 réfugiés : la période la plus terrible de la guerre de Trente ans avait couvert la Lorraine de ruines.
Pendant son existence éphémère, l'atelier monétaire de Lixheim avait produit des monnaies de types très-variés, imitant les doubles tournois du roi de France, les gros du duc de Lorraine Charles IV, les creutzer frappés à Haguenau au nom de l'empereur Ferdinand II, les esca- lins au lion, les testons d'argent et même les douzains du prince de Dombes.
Les deniers tournois de cuivre, sans être tout à fait communs , se rencontrent assez difficilement ; quant aux autres pièces , elles sont fort rares. Ces monnaies sont frappées avec un soin tout particulier2. On y remarque les armes des royaumes de Jérusalem et de Naples , sur
1. Nous ne mentionnons pas ici le portrait de la princesse par Meck, car nous ignorons s'il fut peint à cette époque. (Voy. Noël (loco citato), n° 5S35.)
2. Poëy d'Avant (loco citato).
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lesquels les princes de la maison de Lorraine et les Guise prétendaient avoir des droits.
Elles étaient destinées à circuler dans les pays contigus à la principauté deLixheim ; dans la Basse-Alsace, dans les comtés de Lutzelstein (la Petite-Pierre), de Bitche, de Dabo, de Hombourg, de Nassau, dans la seigneurie de Fénétrange, dans les terres de l'évèché de Metz et du duché de Lorraine, dans le Westrich , entre la France et l'Allemagne.
Quant aux monnaies d'or, elles semblent introuvables.
Les documents inédits, tirés de la collection de M. Du- pont, nous fournissent des renseignements précieux sur la valeur de l'argent à cette époque : on sait que l'acquisi- tion de la terre de Lixheim avait été faite moyennant la somme de 150,000 reichsthallers1, outre celle de 100,000 francs de Lorraine que le duc réclamait à l'électeur pala- tin pour l'entretien de la garnison qu'il avait été obligé de mettre à Lixheim pour la défense de ses frontières2. La moitié des 130,000 reichsthalers devait être soldée comptant et l'autre six mois plus tard à Metz , soit en reichsthalers, soit en pistoles d'Espagne, valant chacune trois reichsthalers et trois batz, soit en monnaie de France au cours des ordonnances du duc, c'est-à-dire que les trois quarts d'écu de France, surpassaient la va- leur du reichsthaler d'un gros et demy de cette monnaie, qui sont 12 pfennings d'Allemagne.
Par une lettre datée du 50 janvier 1624, le duc Henri avait reconnu que l'acquisition de la terre de Lixheim, qui avait eu lieu le 18 novembre 1625, était pour son
1. Le reichsthaler ou rixdaler valait environ 5 francs 60 centimes.
2. Il ne fut pas tenu compte de ces 100,000 francs.
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neveu, le prince de Phalsbourg, et que celui-ci en avait payé la totalité de la somme, faisant 65,000 reichstha- lers, valant 525,000 fr. de sa monnaie, sur la dotation que ce prince avait reçue de la Chambre des aydes, et qui lui avait été accordée par les Etals de Lorraine1.
Le 4 février 1626, le comte palatin Frédéric V, le roi de Bohême, donnait quittance, à La Haie, de la seconde moitié du prix de l'acquisition des terres et seigneuries de Lixheim, Hérange, Craufthal et Montborn. Aux 65,000 reicbsthalers étaient ajoutés 42,000 florins pour intérêts à 5 pour 100 de cette somme, dont le paiement avait dû être effectué au mois de mars 1624. 11 n'y est pas parlé du prince de Phalsbourg, malgré la lettre du 50 janvier 1624 ; la quittance fut passée purement et sim- plement au profit du duc Henri2.
11 n'est pas étonnant que le chef de l'union protestante, le roi d'un jour, comme le désignent les historiens, n'ait pas voulu traiter directement avec le favori du bon duc Henri, l'adversaire qu'il avait rencontré en Bohême et en Alsace dans les rangs de l'armée impériale3.
Nous venons de voir quel était le taux de l'argent à cette époque ; voici maintenant quel était le cours des monnaies de l'Empire en Lorraine, ce qu'il est important de constater à cause de la position hybride de Lixheim entre ces deux pays*.
1 Voy. Communes, t. I, p. 605. — Ibid. Collection Dupont (loco cilato).
2. Voy. Collection Dupont (loco citato).
3. On nous pardonnera d'insister sur ces détails ; mais il est des erreurs qu'il importe de relever ; c'est ainsi que l'on a supposé que l'érection de la terre de Lixheim en principauté avait eu lieu lors du mariage de Henriette; que Phalsbourg était un fief démembré de l'ancienne seigneurie de Lulzembourg, Lutzelbourg, etc.
4. Voy. Collection Dupont (loco cilato).
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Suivant les conditions de la vente du 6 juillet 1625, 1 gros 8 deniers, monnaie de Lorraine, valaient 12 pfen- nings d'Allemagne ; ce qui faisait revenir 2 gros , mon- naie de Lorraine, à 16 pfennings d'Allemagne, faisant 1 batz.
Les mêmes conditions apprennent que 5 reichsthalers et 5 batz valaient une pistole d'Espagne. Or, 5 reichs- thalers, chacun de 5 fr., monnaie de Lorraine, revenaient à 15 fr. et 3 batz à 2 gros l'une, faisaient 6 gros ; d'où il suit que la pistole d'Espagne valait 15 fr. 6 gros, mon- naie de Lorraine ; et c'est effectivement le prix auquel elle était fixée par l'ordonnance du duc Henri du 5 sep- tembre 1621 , dont l'exécution avait été maintenue par les ordonnances des 6 et 11 février, 4 avril et 22 juin 1623.
Enfin, les mêmes conditions de la vente du 6 juillet 1623 établissaient que trois quarts d'écus de France va- laient 1 reichsthaler et 1 gros et demi , monnaie de Lor- raine. Or, 1 reichsthaler valant 5fr., en y ajoutant 1 gros 8 deniers ; il vient 5 fr., 1 gros 8 deniers pour la valeur de trois quarts d'écus. Ce qui fait revenir le quart d'écus à 1 fr. 8 gros et 8 deniers , ou 20 gros 8 deniers , mon- naie de Lorraine ; et c'est effectivement le prix qui lui est donné par les ordonnances précitées , lesquelles fixaient le reichsthaler à 5 fr.
Les quarts d'écus étaient une monnaie d'argent au titre de 11 deniers d'argent fin à la taille de 25 1/5 au marc pesant 7 deniers, 12 grains trébuchants, alors fixés par les ordonnances de France à 16 sols pièce, mais qui couraient vraisemblablement pour davantage.
Quoi qu'il en soit, 25 1/5 quarts d'écus à 1 fr. 8 gros 8 deniers l'un, portaient le marc ouvré à 45 fr. 9 5/5 de-
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niers, monnaie de Lorraine, et le marc d'argent fin à 46 francs 11 gros 9 1/53 deniers, même monnaie. Or, divi- sant 750,000 iï\, prix de l'acquisition de Lixheim, etc., par 46 fr. 11 gros 9 1/33 deniers, il vient 15,969, environ 4/5, qui est la quantité de marc d'argent fin, qu'il fallait alors pour payer cette acquisition.
Le marc d'argent fin monnayé rend, en la présente année 1764, 54 1. 6e 6 6/11, cours de France ; ainsi les 15,969 4/5 marcs reviendraient à 867,599 1. 10e 4d 16/55 du même cours.
Ces notes, tirées de la précieuse collection de M. Du- pont, sont jointes à deux documents du temps, transcrits sur du papier marqué de filagrammes à la croix de Lor- raine et au double G couronné.
Au dos du premier on lit : Déclaration contenant la faculté de fabricquer monnoye dans Lixheim soubs les coings et effigies de Son Excellence. Coppié à Fénes- trange.
Au dos du second : Placet pour le sieur Gérard Gé- rard , lieutenant au bailliage de Pfalsbourg. Monnoye de la principauté franche de Lixheim ou Deux deniers de la principauté franche de Lixheim.
Sur ce que le sieur de Nunain a faict entendre à Son Excellence que certains Maitres monnoyeurs désiroient qu'Elle leur concédast la faculté de fabricquer monnoye dans Lixhein, soubs les coings de ses armes et effigies, Sadite Excellence auroit par responce requis dudit sieur de Nunain que les sieurs entrepreneurs ayent à donner déclaration de leur intention contenant les charges, moyens et ce qu'ils trouveroient estre à propos pour l'establissement de ladite monnoye.
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1 . A quoy satisfaisant très-humblement demandent pri- vativement les coings pour six ans.
2. Quand aux espèces, ils entendent travailler la mon- noye blanche, sçavoir en reistdaller et au desoubs jusques au quart inclusivement, pièce de douze, quattre, trois, deuz et demi creutzer, les fabriqueront conformément au tiltre des monnoyes voisines de l'Empire.
5. Les florins d'or au prix et tiltre de l'Empire a deux grains de remède.
4. Faculté de fabricquer espèces équivalante en bonté, pois ; les pistolles et demy pistolles d'Italie au remède d'icelle que Son Excellence qualifiera à son bon plaisir.
5. Que Son Excellence leur fournira des Con.ci:r, es- sayeur et graveur, gens de bien et capable, que les sieurs entrepreneurs gageront à leurs frais sur le prix de la ferme.
G. Que Son Excellence leur fournira logement capable pour eux, leurs ouvriers et serviteurs, présents et adve- nir tant pour la fabricque, demeureurances , pour mettre leurs étoffes, outilz, genaux et toutes choses à eux ap- partenants.
7. Que Son Excellence leur fournira ung bastiment avec ung moulin à eau , propre à fabricquer, et selon le deseing qui sera donné aux constructeurs ; les mouve- ments duquel moulin, tant dedans que dehors, se cons- truiront aux frais desdits entrepreneurs.
8. Que Son Excellence entretiendra lesdits bastiments à ses frais et despens pendant le temps dudit bail des vi- lains, fondoirs, tant seulement moyennant qu'ils leur se- ront mis en mains en bon et suffisant estât.
9. Qu'il aura les droits, franchise, libertés, immunités, exemptions, droicts, prérogatives, honneurs, jurisdic-
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tions, prééminences , et tel et semblables que les autres maîtres des monnoyes de l'Empire jouissent, peuvent jouir de droict.
10. Entendent lesdits entrepreneurs, veu le temps qu'il leur convien employer à s'esquipper, se fournir de tous les outilz qui se treuvent nécessaires pour accomplir parfaitement ladite monnoie, que la première année, commençant à la datte du jour du bail, ne sera comprise dans les six d'iceluy, à charge que lesdits outilz, de quel- que qualité elles soient propres à fabricquer, demeure- ront sans déplacer au profit de Son Excellence , le temps du bail expiré.
11. Offrent annuellement à Son Excellence pour re- connaissance la somme de mil reistallers en espèces.
PLACET.
Plaise l'Altesse de Madame la Princesse de Pfalzbourg, à la très-humble requeste et supplication de son très- humble et très-obéissant serviteur Gérard Gérard, lieu- tenant au bailliage dudit Pfalzbourg, luy vouloir per- mettre de faire fabricquer en sa monnoye de Lixheim, privativement à tous autres, pour la somme de 25,000 fr. (non plus), monnoye de Lorraine, de double de mesme estoffe et valeur que ceulx de France , mais à raison de huit pièces au lieu de six pour le gros, et leur donner cours pour tels soub les noms, armes et effigie de Vostre Altesse, avec cette circonscription : DEUX DENIERS DE LA PRINCIPAVLTÉ FRANCHE DE LIXHEIM. Ce sera une marque évidente et perpétuelle de ladite fran- chise à la postérité ; et chose (qui sans intérest de per- sonne) redondera du tout à l'honneur et réputation de Vostre Altesse , entre les pauvres et riches , et au grand
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soulagement , profil et utilité du public , particulièrement des pauvres ; car bien souvent à faute de petite monnoye (qui ne se treuve que peu ou poins) une personne qui aura volonté de faire aumosne et n'ayant qu'un gros ou deux blancs en pièces, au lieu d'un deux deniers, s'abs- tiendra le plus souvent d'aumosne, oultre qu'il se treuve plus petite denrée de laquelle l'on en peut achepter en suffisance pour deux deniers à une fois, joinct qu'il ne se treuve de quoi pour changer un demy gros ; et si le bon plaisir de Vostre Altesse est d'accorder au suppliant ce qu'il demande, il s'accordera avec le sieur maistre de la- dite monnoie pour la fabrication et oultre tous les béné- kirces (sic) , que par ce moyen Sadite Altesse fournira tant à ses sujets qu'aux voisins (qui sans doubte s'en ser- viront) , le suppliant priera Dieu à jamais pour sa santé et prospérité, et continuera de mieux en mieux le service d'Icelle.
Ces deux documents, malgré des incorrections de style qui dénotent un .allemand, et malgré le défaut de dates et de signatures, n'en sont pas moins précieux ; ils nous font connaître que les monnayers de Lixheim devaient, en reconnaissance de leur privilège , 4 ,000 reichsthalers par an, qu'ils s'engageaient à émettre annuellement pour 25,000 fr., soit en florins d'or, reichsthalers, pistoles et creutzer. M. Dupont suppose que l'on battait déjà mon- naie à cette époque , mais à d'autres coins qu'à ceux de la princesse, puisque la fabrication des doubles proposés devait être une marque perpétuelle de la franchise de la principauté ; il se base surtout sur l'engagement que prenaient les monnayers de s'accorder avec le sieur maistre de la monnoie. Ces raisons ne nous semblent pas concluantes : les conditions des monnayers, dont nous
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venons de reproduire le projet, durent être modifiées. Quant au maître de la monnaie, c'était sans doute M. de Nunenheim, l'intendant delà princesse, chargé par elle d'organiser ce nouveau service de son administration. Ce fut avec lui que dut s'entendre Gérard Gérard, lieutenant au bailliage de Phalsbourg, pour fabriquer les monnaies de Lixheim, et s'installer dans le bâtiment appelé encore aujourd'hui Hôtel de la Monnaie , d'où furent émises des pièces gravées avec un soin tout particulier.
C'est à tort, selon nous , que l'on fait remonter l'exis- tence de cet atelier monétaire à 1630 : ce n'est qu'en 1631 que mourut le prince de Phalsbourg. Le nom de l'époux de Henriette ne parait sur aucune des monnaies dont nous donnons ici la description, et dont la plus an- cienne ne remonte qu'à 16331.
1. MONETA. NOVA. L1XHENSIS. Ecusson aux ar- mes pleines de Lorraine, couronné, accosté de 16-53. — R. SIT NOMEN DOM1NI BENEDICTVM. Lion debout, couronné , tenant un glaive de la patte droite , la gauche appuyée sur un écusson ovale aux armes de Jérusalem.
ar. Escalin.
2. Croix de Lorraine. HENR. A. LOTH. PRIN. PHAL. ET. L1X. Buste à droite avec chaperon. — R. MONETA. NOVA. LIXEI. CVSA. Ecu couronné aux armes pleines de Lorraine ; au-dessus 1633.
ar. Teston.
5. HEN. A. LOT. PRIN. PHAL. ET. LIX. Buste à droite; au-dessus XX11II. — R. MONETA. NOVA. LIXEI. CVSA. 16-54. Grand alérion couronné.
ar. Teston.
1. Voy. Poëy d'Avant (loco citato).
' ■
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4. Croix de Lorraine. HENR. D. LOR. PRIN. PHAL. ET. LIX. Buste à droite. — R. Croix de Lorraine. DOVBLE TOVRNOIS. 1655. Champ semé de lis.
Cuivre. Double.
Une variété porte au droit la légende latine : HENR. A. LOTH. PRIN. PHAL. ET. LIX.
Le même double tournois existe avec la date de 1654. M. Ghautard, professeur à la Faculté des sciences, pos- sède une variété de ce double tournois, avec la même date (1654), et dont les légendes commencent par un point au lieu d'une croix de Lorraine.
5. HENR. D. LOR. PRIN. PHAL. ET. LIX. Même type. — R. DOVBLE TOVRNOIS. 1654. Champ semé de lis, brisé d'un lambel à trois pendants.
Cuivre. Double.
Une variété porte au droit la légende latine comme ci- dessus.
6. Croix de Lorraine. HENR. A. LOTH. PRIN. PHAL. ET. LIX. Ecusson couronné aux fleurs de lis sans nom- bre, accosté de deux H ; au-dessus 1655. — R. SIT NO- MEN DOMIN1 BENEDICTVM. Croix cantonnée de deux lis et de deux couronnes.
bil. Douzain.
7. HENR. A. LOTH. PRIN. PHAL. ET. LIX. Ecu portant un trèfle. — R. MONETA LIXHENSIS. Dans le champ II KREVTZER, en trois lignes.
bil. Kreutzer.
8. Même légende. Alérion couronné. — R. MONETA. NOVA. LIXHE. CVSA. Ecu couronné aux armes pleines de Lorraine.
BIL.
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9. Même légende et type. — R. Même légende. Ecu couronné parti de Lorraine et de Bar, et accosté de deux croix de Lorraine couronnées.
bil. Gros. (Collection de M. Chautard.)
10. M. Renier Chalon vient de publier (Revue de la Numismatique belge, t. III, 4e série) une pièce inédite de Henriette, faisant partie de la collection de M. de Cos- ter ; c'est un nouveau type à ajouter à ceux qui sont décrits plus haut.
D. NOVA. MONETA. LÏXHENS1S. Dans un entou- rage festonné, l'écu aux armes pleines de Lorraine cou- ronné.
R. S1T. NOMEN. DOMINI. BENEDICTVM. 4633. Croix ailée et fleurdelisée portant en cœur, dans un car- touche quadrilobé, un alérion. — ar.
LA PREMIERE TRAGEDIE
DE JEANNE D'ARC
PAR M. AUG. D1G0T.
Les représentations théâtrales ne sont pas prohibées d'une manière absolue ; l'Eglise , en condamnant l'abus, n'a pas proscrit le théâtre lui-même. Cette proposition est tellement évidente, qu'il serait absurde de vouloir ajouter quelque chose à son simple énoncé. Aussi , sans remonter à Hroswita , cette religieuse allemande du xe siècle , qui composa un certain nombre de drames latins assez remarquables ; sans parler des mystères qui furent représentés, au moyen âge , dans toutes les villes impor- tantes, il suffit de rappeler les nombreuses pièces que les jésuites ou les autres religieux enseignants faisaient jouer à leurs élèves , au grand contentement de tous ceux qui avaient le privilège d'assister à ces fêtes à la fois reli- gieuses, patriotiques et littéraires. Sans sortir de notre province , il serait facile de citer plusieurs solennités de cette nature ; ainsi le Père Pierre Mousson, jésuite, a fait représenter par les étudiants de l'Université de Pont-à-
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Mousson plusieurs belles histoires tragiques, dont l'une est Maurice sacrifié par Phocas1. Quelque temps après, Nicolas Romain, auteur de La Salmée, compo- sait une autre tragédie sur le même sujet2. Environ vingt années plus tard , on imprimait à Saint-Nicolas-du-Port une tragi-comédie , intitulée Hic/tecourl, que les Béné- dictins du prieuré de cette ville avaient fait jouer par leurs pensionnaires5. Au moment où cet ouvrage sortait des presses de Saint-Nicolas , en 4628, un imprimeur de Nancy, Jacob Garnich, mettait en vente une autre pièce, qui avait été composée par un prêtre nommé Etienne Grandjean, et représentée à Plombières, en présence des nombreux baigneurs qu'attirait la réputation des eaux thermales de cette ville. Cette pièce porte le titre suivant : Tragédie du martyre et mort de saint Sébastien soubs l'empire de Dioctétien'1. Interrompues pendant longtemps à cause des calamités de toute nature aux- quelles la Lorraine fut en proie , les représentations dra- matiques dans l'intérieur des établissements d'éducation publique furent reprises aussitôt après le retour de Léo-
1. V. l'avis au lecteur qui précède la pièce suivante.
2. Maurice, tragédie en cinq actes; Au Pont -à-Mousson , 1606, petit in-8°.
3. Richecourt, tragi-comédie, représentée par des pensionnaires des RR. PP. Rénédiclins de Saint-Nicolas, 1G28. Imprimé à Saint- Nicolas par Jacob François, à l'Echequin, à la Grand'Rue. Petit in-8° de 76 pages , plus deux feuillets blancs. Un des deux exemplaires connus de ce livre faisait partie de lu bibliothèque de M. Noël, notaire honoraire à Nancy.
i. m. dc xxviii. Petit in-12 de 48 pages. Nous empruntons tous ces renseignements bibliographiques au curieux ouvrage de M. Beau- pré, intitulé : Recherches historiques et bibliographiques sur les commencements de l'imprimerie en Lorraine et sur ses progrès jusqti'à la fin du XVIP siècle.
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pold, et les jésuites firent jouer par leurs élèves, les 22 et 24 février 1702, une tragédie intitulée : Abclolonime , qui a été imprimée à Nancy, chez Chariot1.
Le drame que nous allons analyser est antérieur en date à tous ceux dont nous venons de copier les titres. 11 a été joué à Pont-à-Mousson au mois de septembre 1580. Vers le mois de mai de cette année , le roi de France, Henri III et sa femme, Louise de Vaudémont, formèrent le projet d'aller prendre les eaux à Plombières. Comme ils devaient passer par Pont-à-Mousson , les Jésuites de cette ville résolurent de leur donner le spectacle d'une représentation dramatique , et le Père Fronton Du Duc, plus connu sous son nom latinisé Ducœus, composa un peu à la hâte, il est vrai, une tragédie, dont il emprunta le sujet à l'histoire de France. Il donne de ce choix d'assez bonnes raisons , dans VA van t-ieu, ou prologue de son drame, et les grands poètes du siècle de Louis XIV au- raient bien fait de se ranger à l'avis du Père Fronton.
Or, on n'a point choisi un argument estrange (un sujet étranger), Sçachant que cil (celui-là) est fol lequel, ayant sa grange Plaine de grains cueilliz, emprunte à son voisin, Laissant pourrir chez soy son propre magasin ; On a trouvé chez nous suffisante matière, Pour d'un poème tel fournir la charge entière : Prenant de ce pais ceux, les gestes desquelz Sont dignes d'esgaler aux los (à la gloire) des immortelz, On a doncques choisi les faicls d'une pucelle Qu'en France plus souvent d'Orléans on appelle.
Le P. Fronton n'eut pas, au reste, la satisfaction de voir jouer sa pièce en présence du roi de France ; une maladie contagieuse, qui se déclara en Lorraine au prin-
1. V. Mémoires pour servir à l'Histoire de Lorraine, par M. Noël, n" 5, t. I, pages 55 et 56.
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temps de l'année lb80, força ce prince à renoncer à son projet. Les Jésuites de Pont-à-Mousson ne voulurent pas cependant en être pour leurs frais ; ils demandèrent au duc de Lorraine Charles III de visiter l'Université , et la tragédie de Jeanne d'Arc fut représentée, au mois de septembre, en présence de sa famille, d'une foule de nobles Lorrains et d'un grand nombre d'officiers français appartenant aux garnisons de Metz, Toul et Verdun. Nous croyons que la représentation eut lieu avec une certaine solennité. Au reste, on n'était pas difficile à cette époque sur la mise en scène. Une salle ordinaire tenait lieu d'un somptueux palais , deux hommes faisaient l'office d'une armée, et les costumes n'avaient rien d'historique.
La tragédie du P. Fronton avait un autre danger à courir ; nous voulons parler de l'inexpérience des ac- teurs ; des élèves de rhétorique, malgré leurs prétentions habituelles au beau langage, sont assez ordinairement peu en état de déclamer une pièce de vers d'une manière passable , et ici il s'agissait d'autre chose que de décla- mer. Aussi l'auteur, craignant non pas les sifflets , qui n'étaient pas encore inventés, mais le mécontentement et les plaisanteries de son imposant auditoire, jugea-t-il à propos de réclamer son indulgence à la fin du prologue.
Or ie croy qu'il est temps qu'il me faille cesser ; Seulement donc (Messieurs), ie vous prie de grâce, Qu'à ceux qui me suyvront ung chacun de vous face L'audience qu'il fault. Ce sont princes et roys : Ils tiendront pour le moings et leurs lieux et leurs voix : Or, vous sçavez bien tous qu'il est raison qu'on face Tel honneur, .comme au Roy, à cil qui tient la place.
Le P. Fronton fut agréablement surpris, car non-seu- lement la pièce fut admirée des spectateurs, mais le duc de Lorraine voulut qu'on lui présentât l'auteur, et ayant
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remarqué (chose assez ordinaire chez les poètes) que son vêtement était fort délabré, il lui fit compter cent écus, et ordonna que, tous les ans, pareille somme fût versée, entre les mains des jésuites de Pont-à-Mousson, pour habiller trois de ces religieux1.
La tragédie eut même bientôt les honneurs de l'im- pression. JeanBarnet, conseiller et secrétaire ordinaire du duc de Lorraine, la retoucha et la donna comme l'ou- vrage d'un auteur inconnu. Dans la dédicace adressée au comte de Salm , Barnet dit qu'il a voulu lui offrir cette tragédie, « qui m'est, dit-il , tumbée en mains , sans que • ie congnoisse l'aucteur. Pour le moings j'ai pris la » hardiesse et la peine de la reuoir, et lasché qu'elle soit » mise en lumière ».
Le drame du P. Fronton parut sous le titre suivant : L'histoire tragiqve de la Pucelle de Dom-Remy, aul- trement d'ORLÉANS Nouvellement départie par actes, et représentée par personnages. A Nancy, par la vefve Jean Janson pour son filz imprimeur de son Altesse, 1581. ln-i° de 8 feuillets liminaires non chiffrés, de 46 feuillets numérotés et de deux autres feuillets non chiffrés. Ré- clames. Signatures A-02.
L'impression du volume est , du reste, très-médiocre . Le papier est mauvais ; les caractères sont loin d'être beaux, et on remarque une multitude de fautes d'im- pression.
Nous ignorons si ce petit livre fut tiré à grand nombre ; ce qui est certain, c'est qu'il est devenu d'une rareté ex-
1. V. Hisloria universilatis et collegii Mussipontani , auclore P. Abram, S. J., Lib. III. Ms. de la bibliothèque publique de Nancy, n« 83.
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cessive. La bibliothèque royale en possède un exemplaire ; mais M. de Solcinne, qui n'avait ménagé ni son argent, ni ses démarches , pour former une collection complète de toutes les pièces de théâtre, ne put jamais se procurer qu'une copie de la tragédie du P. Fronton.
Un exemplaire de ce livre a été récemment donné à un de nos compatriotes, M. le docteur de Haldat, membre correspondant de l'Institut, par une personne qui a pensé qu'un pareil ouvrage devait trouver asile dans la biblio- thèque d'un descendant de la famille de Jeanne d'Arc. Mais M. de Haldat n'a pas voulu conserver pour lui celte rareté bibliographique, et , après l'avoir fait magnifique- ment relier, il l'a offerte à la bibliothèque publique de Nancy.
Quelques notions générales sur le contenu de ce vo- lume précéderont utilement l'analyse que nous allons en donner.
On rencontre d'abord une dédicace : A Monseigneur, Monseigneur le comte de Salm, baron de Vivier, Fe- nestranges, Brandebourg, seigneur de Huppe, Dom- Remy-la-Pucelle, Maxey, Pargney-sur-Meuse, Dain- ville, Berthelevillc, Ubexey, etc., mareschal de Lor- raine, gouverneur de Nancy, etc.
Cette dédicace, datée de Nancy, le 20 mai 1 581 , est signée de Jean Barnet. Elle est assez longue ; l'auteur commence par faire observer que Jeanne d'Arc étant née à Dom- Remy, et que le comte de Salm étant seigneur de cette localité, la tragédie ne pouvait paraître sous d'autres aus- pices que les siens. 11 rapporte ensuite l'opinion de Du Bellay, qui, « au traité qu'il a fait de l'art militaire, a » bien osé dire (en parlant de Jeanne) , que c'estoit ung » vaillant capitaine, ainsi atillré par le conseil du roy,
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» pour faire revenir le courage failly aux François ». Pour réfuter Du Bellay, il se contente de citer les termes du jugement rendu contre la pucelle. « Sur la fin de may » 1451, il fut dit qu'elle avoit abusé de son sexe en pre- » nant l'habit d'homme. N'ayant ces gentils juges trouvé » pour la condamner plus grand prétexte, oultre une » miliasse d'impostures que l'on avoit faulsement forgé » contre elle , que cestuy la. Sur lequel ilz dévoient bien » entrer en cette considération, qu'encores que tous abus » soient odieux à Dieu , si est ce , toutesfois , que ceulx » qui se font pour le salut et délivrance d'ung pays , ont » tousiours semblé au jugement humain, par l'approba- » tion de toutes les nations, mériter plus de louange que » de punition, et dont l'exemple en est cler en Quintus » Mutius Scaeuola enuers Porsenna, roy d'Hetrurie. »
Cette dédicace est suivie de deux pièces de vers ; la première est intitulée : Sonnet dudit Barnet à mondit Seigneur comte, et la seconde : Ad eundem illustris- simum Comittem Salmaeum Epigramma. Comme on ne connaît guère les poésies de Barnet, nous reprodui- rons ici le sonnet dudit.
Monseigneur, si les roys de ceste grande France (De qui vous descendez, et des princes lorrains), Ne vous on recongnu les secours souverains, Qu'ilz ont eu de chez vous, en leur grande souffrance,
Tousiours vous déburont ilz : Et s'y pour assurance De l'obligation, vous aurez cest honneur, (Lequel chérissez plus que l'or d'un grand donneur), Que, comme de vos mains, ils ont eu délivrance.
Si les Assiriens ont aquis quelque gloire Par leur Sémiramis : les Cariens victoire Contre les guerriers Grecs, par Artemis la belle :
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Les Palmircniens du secour et service De leur Zénobia : les Anglois de Bondice : Les François la tiendront de la preuse pucelle.
Ce sonnet et l'épigramme latine précèdent immédia- tement la tragédie elle-même, qui s'étend jusqu'au recto du 46e feuillet. Le verso présente des vers adressés par C. Vallée à monsieur Barnet, conseiller et secrétaire ordinaire de l'Altesse de Monseigneur sur la présente Histoire. Enfin les deux feuillets non chiffrés qui termi- nent le volume contiennent : 1° Les erreurs principaulx trouvées en l'impression de cest œuvre (titre qui mé- riterait lui-même un erratum) ; 2° In historiam tragi- cam Ionnœ d'Arc, Virginis Epigramma. Per L. B.
La tragédie du P. Fronton est divisée en cinq actes, et chacun des actes est suivi d'un chœur. La pièce est précédée d'un Avanl-ieu ou prologue, qui semhle avoir dû être récité soit par l'auteur, soit par une autre per- sonne ne figurant pas dans le drame. Ce prologue débute ainsi :
Messieurs, c'est là l'honneur du Pais de Lorraine, Au fruict de la jeunesse affin qu'elle s'aprenne Aux arlz et aux vertus, que ce peuple ioyeux Est venu pour ouyr, non des comiques ieux. Mais, plustost, en poussant une voix plus hardie, L'on prétend vous monstrer, en une tragédie, Un spectacle plus grand, affin que gravement L'esprit se norissant se forme sagement.
L'auteur, après avoir fait observer, comme on l'a vu plus haut, qu'il n'a pas jugé à propos d'emprunter le su- jet de son drame a une autre source que l'histoire natio- nale, dépeint l'état de l'Europe au moment où Jeanne d'Arc vient trouver le roi Charles VIT. Il mentionne les
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empereurs Sigismond et Albert, ce roy turc Baiaselh ut Ce grand Tartare.
Ce fléau du genre humain, Tamler lam (Tamerlan) qui si tost De rustault se fit roy par l'effort de son ost (son armée).
11 parle ensuite de la rivalité de la France et de l'An- gleterre ; puis arrivant à la patrie de Jeanne d'Arc, il ajoute :
Et le pais Lorrain Recongnoissoit René pour prince souverain1, René qui, depuis, fut roy de cette ville. Tombeau de la Serène (la sirène) et de l'autre Sicile.
Enfin il décrit le bourg , ou pour mieux dire le village de Dom-Remy.
En icelluy esloit Une ieune fillette accoustumée à paistre, Tous les iours par les champs, les brebis de son maistre ; Dieu, duquel les conseilz nous ne pouvons sonder, Eslrangement voulut de celle-cy s'aider ; Dieu, celuy qui iadis de David la houlette Convertit en un sceptre, et de l'os d'une beste Fit un glave (glaive) à Sanson ; pour nous donner soûlas, Il fit d'une quenoille un tranchant coutelas ; Enuoyant ceste fille à Charles roy de France, Afin que par ses mains il eust la déliurance De ses pais saisis ; et que les fiers Anglois Sentissent, surmontez, la force de ses doigts.
Le nombre des personnages mis en scène par le P. Fronton est assez considérable. En voici la liste : Charles VII, roy de France. Jean de Valois, duc d'Alençon. René Daniou (d'Anjou), duc de Lorraine. Louys de Bourbon, comte de Clermont. M. Christop. de Harcourt, évesque de Cha[r]tres.
1. Ce qui est une légère erreur, car Charles II régnait encore
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Le seigneur de Trainel, chancelier.
La Hyrc, seigneur de Vignoles.
Le docteur en théologie.
Sainct Michel Archange.
Jeanne d'Arc, la Pucelle.
Le duc de Sommerset, Anglois.
M. Jean, seigneur de Talbot, Anglois.
M. Jean Cauchon, évesque de Beauuau (Beauvais).
Jean Destivet, l'Accusateur.
Le procureur fiscal.
L'abbé de Flescœmp (Fécamp).
Le sieur de Rais, mareschal de France (Pierre de
Le capitaine Glacidas, Anglois.
Le gentil-homme Anglois.
Le gentil-homme Gascon.
Le sieur de Culant, Admirai de France.
Le page de l'Admirai.
Le gentil-homme Ecossois.
Le 1 et II soldats d'Orléans.
Le gentil-homme de Rouen.
Le Messager.
Le chœur des enfans et filles de France.
Le premier acte de la tragédie commence par un long monologue du comte de Clermont. L'auteur pensant pro- bablement que les détails donnés dans YAvanl-ieu sur la situation de la France , ne suffisaient pas pour l'intelli- gence de son poème, a mis dans la bouche de ce person- nage une exposition complète de l'état des affaires au moment où s'ouvre l'action. 11 raconte les prétentions des Anglais, les défaites éprouvées par les troupes de Charles VII, le siège d'Orléans, etc. Les Anglais ne sont
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pas ménagés dans ce monologue, et pour s'expliquer l'animosité que le P. Fronton montre contre eux, non- seulement dans ce passage, mais encore dans le reste de la tragédie, il faut se rappeler qu'Elisabeth régnait alors, et que les atrocités dont elle s'était rendue coupable à l'égard des Irlandais, avaient excité contre elle une indi- gnation générale dans tous les pays catholiques. Tout à coup le comte de Clermont, s'adressant à la France, s'écrie :
Te voicy maintenant tout d'un coup accablée Sous le ioug des tyrans qui retiennent, emblée, La couronne à tes Roys, et par force ayant pris Des villes la moitié, mesme ton grand Paris, Ne laissèrent encor (tant se monstre nuysible Leur bruslant appétit) l'aullre moitié paisible, Des terres à celluy qui du royaume entier, Selon ton droict, en est le seul iuste héritier; Ton unique Daulphin, non ces sales Baleines, Non pas ces veaux Marins, qui leurs humides plaines Délaissent pour venir s'enrichir de noz biens, Oster à noz enfants, pour donner à leurs chiens, Les fruicts de nostre terre, etc.
Nous ne pousserons pas plus loin cet extrait du dis- cours débité par le comte de Clermont ; nous ferons ce- pendant encore observer que l'on y rencontre un éloge magnifique de la loi salique , éloge qui dut sembler au moins fort extraordinaire au souverain d'un Etat dans le- quel cette loi n'était pas admise.
A la seconde scène , nous sommes subitement et sans transition transportés de Bourges à Domremy, et ici en- core il faut braver un long monologue de Jeanne d'Arc. Elle délibère en elle-même sur le parti qu'elle doit pren- dre. Elle craint, en refusant d'écouter les avertissements qu'elle croit avoir entendus , de désobéir à Dieu et d'atti-
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rer sur elle une punition sévère ; elle redoute, si elle quitte son village, de céder à une suggestion de Satan, qui voudrait l'engager à violer son vœu de virginité. Tout- à-coup l'archange Michel lui apparaît et lui commande de suivre l'impulsion qui lui a été donnée. Il lui rappelle que non-seulement elle a reçu des avertissements cé- lestes , mais qu'elle a eu l'honneur de voir la mère de Dieu.
La Royne Vierge-mère, Auecques Marguerite, el celle qui son père Mesprisa et son sceptre, el tout mortel danger, Pour un terrien (terrestre) règne au céleste cschanger1.
Jeanne demande alors à saint Michel par quels moyens elle pourra accréditer sa mission. L'archange lui dit de révéler, en présence de Charles VII, une particularité connue seulement de ce prince ; il lui ordonne d'aller trouver le sire de Baudricourt , gouverneur de Vaucou- leurs, qui lui donnera des habits d'homme et une escorte. L'archange ayant disparu , nous assistons à un nouveau monologue de Jeanne. Elle sent que ses forces augmen- tent et que toutes ses appréhensions s'évanouissent.
le me sens plus hardie. Tieu ! Quoi ? ienlends déià les soldats fréniissantz. Il me semble que i'oy les cheuaulx hannissantz, Et le son esclatant des Françoyses trompettes, Mettant le cœur au ventre aux hommes et aux Lestes.
Je conçoy ia l'horreur des belliques aubades, etc.
A la troisième scène, nous sommes de nouveau trans- portés à Bourges, et Charles VII , dans un monologue aussi long que les précédents , déplore sa triste position
1. Sainte Catherine.
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et les malheurs de la France. Pour avoir une idée de l'inconstance de la fortune, il suffit, dit-il, de jeter les yeux sur lui ; il n'est plus nécessaire de citer les exemples que l'on indique ordinairement.
Si que, bien que iamais on n'eust point entendu Comme ce grand tyran de Prince fust rendu, Déchassé en Exil, poure (pauvre) Maislre d'cschole : Ou que cil qui ioua d'un grand consul de rolle Dedans Rome sept fois, chassé de ses hayneux, Fuyant se vit plongé en des marelz fangeux.
Charles VII expose ensuite tout ce qui s'est passé de- puis la mort du roi d'Angleterre Richard, et blâme la politique maladroite du duc de Bourgogne, qui, malgré sa parenté avec la famille royale de France , s'est allié avec les étrangers. 11 invoque la miséricorde de Dieu, qui abaisse et élève, à son gré, les rois et les nations. D cite les effets de sa bonté ou de sa colère à l'égard de David et d'Absalon , d'Ezéchias , de Sennachérib et de Nabuchodonosor.
Tu abaissas si fort le Roy de Babylone,
Que, des piedz et des mains, homme beste marchant,
Pour viande il alloit l'herbe moite cherchant.
Sur ces entrefaites arrive le comte de Clermont. Après avoir exprimé le désir de voir bientôt changer la fortune, il annonce l'arrivée d'une jeune paysanne, qui promet de délivrer Orléans et de conduire le roi à Reims. Charles ordonne d'introduire cette jeune fille, et, pour l'éprouver, fait placer le comte de Clermont sur son trône. Mais Jeanne reconnaît le roi, et, sur l'ordre de celui-ci, ra- conte les apparitions dont elle a été témoin, fait connaître sa mission et assure que la colère de Dieu est apaisée.
1. Denys, roi de Syracuse.
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Elle conseille à Charles de placer son trône sous la pro- tection du Tout-Puissant. Le comte de Clermont per- suade au roi de mettre Jeanne à l'épreuve ; et, pour sa- tisfaire ce prince, la Pucelle raconte une particularité qui n'était connue que de Charles VIL Le roi ne doute plus, mais le comte de Clermont, toujours défiant, l'engage à réunir son conseil et à lui soumettre l'affaire. Charles donne des ordres en conséquence et enjoint d'appeler un docteur en théologie.
Ici se termine le premier acte. Le chœur, ou pour mieux dire les deux chœurs, qui se trouvent sur le théâtre, chantent alors une strophe , une antistrophe et une épode1, exactement comme dans les tragédies grec- ques. Le chœur de la pièce française joue le même rôle que les chœurs de l'antiquité ; il complète l'exposition quand celle-ci laisse à désirer, il plaint, il prie, il exprime les sentiments que le spectateur doit éprouver. On a vu, par les citations précédentes, que la tragédie du P. Fron- ton était écrite en vers alexandrins ; les pièces que chante le chœur sont , au contraire , composées de vers de sept ou huit syllabes. Pour donner une idée de ces chœurs, nous citerons la strophe qui suit le premier acte.
Maudit le temps et la iournée, Et l'heure si mal fortunée, Que Robert le comte d'Artois, Euitant le iusle supplice Qu'il auoit pour son auarice, Mérité, selon toutes loix, S'en alla, de crainte irrité, Vers le Roy de la terre Angloise. Taschant, contre toute équité, Ressusciter la vieille noise,
1. On pourrait cependant supposer que l'épode seule était chantée •et que la strophe et l'antistrophe n'étaient que déclamées.
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Il fit que le prince Edouarl, Qui ià auoit quitté la part Qu'il prétendoit à la Couronne De la France, ainsi que l'ordonne La loi Salique et les Estats, Voulant encor brouiller les cartes, Alléguant nouuelles pancartes, Réueilla des nouueaux débats.
Au moment où le second acte s'ouvre, le conseil est assemblé. Le duc d'Alençon avoue qu'il avait d'abord tourné en ridicule Jeanne d'Arc et sa mission , mais que la conduite et les discours de cette jeune fille lui ont fait changer de sentiment.
Et les discours naifz que, sans rien chanceler, Elle nous proposoit, ne prennent point naissance D'une âme qui n'eût onc des lettres congnoissance. On ne pourroit apprendre, en gardant les brebis, A devvider aussi de si sages deuis.
Le chancelier craint que Jeanne ne soit inspirée par les fausses doctrines de la secte des Vaudois , ou par les maléfices des sorciers. L'évèque de Chartres, au con- traire, croit que la mission de la Pucelle est divine , et, comme le chancelier allègue qu'on ne peut attendre beau- coup de secours d'une jeune fille, l'évèque cite les femmes célèbres de l'Ancien Testament, qui ont rendu de si grands services au peuple juif. 11 nomme Judith, Esther et Débora.
Si est ce que iadis la sage Débora, Laquelle surmonta le cruel Sisara, Lieutenant général des trouppes Cananées, En Juge gouuerna durant quarante années, etc.
Puis le savant évèque cite encore , mais subsidiaire- ment, l'exemple des Amazones, ce qui, à son avis, com- plète la démonstration. Le docteur en théologie prend
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la parole à son tour ; il fait observer qu'il s'est entouré de toutes les précautions nécessaires pour n'être point (rompe ; il établit les caractères des apparitions céiestes et ceux des apparitions infernales , et termine en disant que la mission de Jeanne ne peut être attribuée qu'à Dieu désarmé par
Les sainctes oraisons qu'au ciel ont espandu, Et le Roy sainct Loys et le Roy Charleinaignc.
Le duc d'Alençon exhorte à ne pas attendre davantage, et le roi or onne d'introduire la Pucelle accompagnée des maréchaux de France. Charles VII annonce à Jeanne qu'il connaît sa mission et prescrit aux deux maréchaux de lui confier le commandement d'un corps de 1,800 hommes. La Pucelle, après avoir protesté que l'ordre seul de Dieu a pu la décider à se mêler aux combats, demande à Charles de lui faire remettre
Vne espée qui est au moustier de Fierbois, Que ià m'a adressé la Vierge Catherine, En laquelle cinq fois est engravé le signe De la croiz salutaire, et d'aultre ne veulx point.
Dans la scène troisième, Jeanne prie Dieu de lui per- mettre de battre les Anglais , afin que ceux-ci , étant vaincus
par les bras d'vne femme, Plus apte à manier le fuseau que la lame, Sentent aperlement son courroux irrité Contre le noir bourbier de leur iniquité.
Elle conjure ensuite les soldats dont on vient de lui confier le commandement , de n'avoir pas honte d'obéir à une femme, attendu que cette femme est envoyée de Dieu. Elle leur donne de bons conseils, les engage à ne pas blasphémer, à ne pas piller le pauvre peuple, et ajoute :
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Chassez loin d'auec vous ces compagnes lubriques, Ces pestes de voz corps, ces garses1 impudiques , Il n'y a mal si grand qui rende plus matiez Les hommes que l'amour des salles voluptez El pour lequel pluslôt la diuine justice Darde du Ciel sur nous le mérité supplice.
Un page vient avertir la Pucelle que les maréchaux de Boussac et de Rieux et l'Amiral de France l'attendent pour marcher au secours d'Orléans.
A la quatrième scène, nous sommes devant les murs de cette ville ; les capitaines anglais, Talbot et Glacidas, somment les assiégés d'ouvrir leurs portes. Ceux-ci re- fusent et allèguent qu'ils attendent le secours que la Pu- celle doit amener. Sur ce, Talbot, Glacidas, les assiégeants et les assiégés en viennent aux gros mots et s'adressent les injures les plus atroces.
La scène change tout à coup. Nous nous trouvons trans- portés à quelque distance d'Orléans. Jeanne d'Arc, le maréchal de Rieux et l'amiral concertent entre eux un plan d'opération, et prennent les mesures nécessaires pour attaquer les Anglais et pénétrer dans la ville.
Le chœur chante ensuite une slrophe , une antistrophe et une épode. Il prie Dieu de protéger la France et cé- lèbre les exploits de Jeanne, qui a fait lever le siège d'Or- léans et a conduit Charles VII à Reims , où la cérémonie du sacre a eu lieu. Les Français , dit le chœur, ne pou- vaient reconnaître
Le droit d'une fille, Car ces viriles nations Ne veulent point de Roy qui file.
i. Pour ne scandaliser personne, nous nous hâtons de faire ob- server qu'autrefois le mol g ar se ne voulait dire que fille; il ne sa prenait pas, comme aujourd'hui, en mauvaise part.
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Au commencement du troisième acte, le lecteur est obligé de subir un nouveau monologue de Charles VIL Le roi remercie Dieu de ses bienfaits et le prie de conti- nuer à le favoriser. Il énumère les victoires et les con- quêtes de Jeanne, et se prépare à se rendre au conseil, lorsqu'il voit venir son beau-frère et fidèle allié, René d'Anjou, duc de Lorraine.
René raconte que la guerre qu'il a eu à soutenir contre les Anglais et lés Bourguignons, commandés par Toulon- geon, maréchal de Bourgogne , l'a seule empêché de ve- nir plus tôt féliciter le roi de ses heureux succès. Il parle ensuite de ses propres exploits et de la défaite de ses en- nemis.
Et des Iasches fuyarz les trouppes poursuyuies Rapportèrent aux leurs, escrit dessus leur dos, Que le fer des Lorrains n'espargnoil point leurs os. Sire, vous eussies veu gaigner au pied, vers Troyes, Tant d'escadrons volants de ces Angloises oyes, De ces canars de mer : et comme Toulongeon Parmy ces bois taillis imitoit le Plongeon.
Le roi l'ayant remercié de son attachement pour la maison de France, René répond : Si j'agissais autrement,
Je m'estimerois né d'vn Tigre d'Ilicanie, Auoir d'vn dur aymant la poiclrine garnie, Au lieu d'un cœur humain, et penserois encor Eslre vn ours au dedans et vn homme au dehors.
Un instant après, survient La Hire , seigneur de Vi- gnolles. 11 annonce que les Français ont battu les Bour- guignons, qui assiégeaient Compiègne, mais que Jeanne, trahie par le gouverneur de cette ville , est tombée entre les mains de l'ennemi. Le roi témoigne sa douleur; mais René l'encourage et lui fait observer que Dieu mêle tou- jours quelque amertume aux grandes prospérités , afin
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d'empêcher l'homme de s'enorgueillir. Il conseille à Charles VII de faire immédiatement proposer une somme considérable pour obtenir que Jeanne soit mise en liberté et le roi se hâte de donner des ordres en conséquence. Le cœur déplore les crimes suggérés par l'envie.
Tousiours l'enuie traistresse,
La vertu poursuit et presse :
Mais aussi, d'aultre costé,
Le los d'vne iuste gloire
Faict quelle obtienne victoire
De l'enuyeux (l'envieux) surmonté.
Le commencement du quatrième acte se passe dans les prisons de Rouen. Jeanne d'Arc, chargée de fers , prie Dieu de mettre fin à ses souffrances. Ce qui me tour- mente surtout, dit-elle, est la crainte des geôliers ,
Desquelz les salles mains et les langues paillardes Ne cessent mon honneur tousiours solliciter.
Saint Michel lui apparaît alors ; il lui promet que Dieu ne l'abandonnera pas , qu'elle mourra vierge , mais que le Tout-Puissant veut l'éprouver encore pour lui ména- ger une couronne plus brillante.
La scène suivante a lieu dans le palais du gouverneur de Rouen. Le duc de Sommerset expose devant Talbot les prétentions et les espérances des Anglais. II croit que la France , une fois soumise , les autres nations de l'Eu- rope n'opposeront pas une résistance insurmontable , et que l'Angleterre arrivera à la domination universelle. Il se récrie contre l'outrecuidance des Français, qui mettent en avant leur loi salique pour ne pas reconnaître les droits du souverain d'Angleterre. Mais la plus grande partie du royaume est soumise , et le reste le serait déjà sans les efforts et les succès de la Pucelle. 11 demande à Talbot
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pourquoi elle n'a pas eneore été punie, et Talbol répond qu'il faut la faire souffrir longtemps1.
Le duc de Sommerset fait observer, à son tour, que le duc de Bedfort a commandé de traduire la Pucelle devant les juges ecclésiastiques, qui la livreront ensuite aux juges séculiers. Il craint que les uns et les autres ne montrent pas beaucoup de complaisance pour les désirs des Anglais. Talbot l'engage à se tranquilliser. On s'est assuré de Cauchon, évéque de Béarnais, et quant au bras séculier, Talbot n'a point d'inquiétudes.
Ne vous tourmentez point touchant la conscience Des Juges séculiers ; ilz perdent leur science Silost que dans leurs mains ilz voient iaunir l'or; Et si pour tout cela ils ne croient encor, Il ne faut que monslrer la pointe de l'espée. Mais, pour l'aullre côté, ie tiens ià occupée À mon commandement et lame et le caquet D'vng certain, lequel a si grand vogue au parquet, Qu'il peult tout par l'effort de sa langue aflilée...
Le duc de Sommerset s'éloigne ; il est remplacé sur la scène par Maislre Jean Deslivet, l'orateur dont Talbot vient de tracer le portrait. Destivet expose comment il s'y prendra pour obtenir une condamnation et promet de réussir.
Monsieur, me voicy prest, ie me suis emparé
De tous moyens, lesquelz m'ont semblé conuenables
A pouuoir inuenter des crimes vray semblables :
Je comprens en cinq poincts mon accusation.
En premier lieu ie mets la supertition,
Et ses arlz deffendus, Négromance et Magie,
En second lieu ie mets le crime d'Hérésie ;
1. Nous regrettons que l'auteur ait cru devoir faire jouer un rôle aussi indigne à un capitaine, qui, sous le rapport de la loyauté et de la bravoure, fut certainement un des chevaliers les plus remarquables du xve siècle.
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Puis tous ces grands débats par elle suscités, Dont à combattre sont les Princes incités ; Après, de ce qu'elle a, contre toute séance, Et l'honneur de son sexe, oultrée l'impudence, Osant prendre habit d'homme ; en cinquiesme lieu, Qu'elle se soit laissée adorer comme vng Dieu.
Nous assistons ensuite à la séance ecclésiastique. Le misérable Cauchon, qui était vendu à l'Angleterre, ouvre l'audience par ces paroles hypocrites :
Ce n'est pas seulement l'œuure d'un bon pasteur D'estre de ses brebis fidèle protecteur; Mais faut que tout bestail tellement il police, Que dedans et dehors en tout il le régisse.
Après le discours de Cauchon, maître Jean Destivet prend la parole pour soutenir l'accusation. Il reproche à Jeanne d'être adonnée à la magie.
Ceste doctrine elle a depuis si bien gardé Et si bien profilé, que jamais ni Médée, Melusine, ni Thrace, Vrgande, ni Circé Ne pourroient, par leurs arts, les faicts auoir brassé Qu'elle a ià mis à chef. Car, comme Proserpine, Il semble que l'enfer, paisible, elle domine. Celles-là ont bien peu (pu), rebarbotant leurs mots, D'vng fleuue doux coulant faire arrester ies flots, Faire parler les morts, ou la lune enchantée, Endormis d'vng lélarge (d'un profond sommeil) en sa coche
[argentée],
Cauchon interroge Jeanne d'Arc , qui se défend avec noblesse et dignité. Le procureur fiscal demande qu'elle soit condamnée à une réclusion perpétuelle au pain et à l'eau. Cauchon déclare qu'avant de prononcer sa sen- tence, il entendra les témoins d'après lesquels la Pucelle se serait fait décerner les honneurs divins.
Le chœur reproche à Cauchon sa vénalité et déplore la faiblesse de certains prélats.
15
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L'acte cinquième est peu intéressant : on entend d'a- bord un long discours d'un gentilhomme de Rouen , qui répète à peu près ce que le chœur vient de chanter. 11 se retire en voyant arriver le duc de Sommerset. Celui-ci est accompagné de l'abbé de Fécamp , auquel il adresse de vifs reproches relativement à la faiblesse et à la lenteur des juges ecclésiastiques. L'abbé allègue en vain que la prison perpétuelle est la peine la plus grave que ceux-ci puissent prononcer ; le duc ne veut rien entendre et exige que la Pucelle soit livrée au bras séculier.
Le gentilhomme de Rouen reparait alors sur la scène et s'élève contre la barbarie du duc de Sommerset , dont il vient d'apprendre les ordres.
Tel comme vng jeune fan d'vne affreuse lyonne, Que son naturel brusque et la faim espoiçonne, Aller, parmy les bois, son fourrage cbercher; S'il a peu (pu) vne fois sa rage deslacher Sur vng grand cerf cornu, ou des sauuages chèures, Dès qu'vne fois il a de leur sang teint ses lèures , Sa cruauté s'augmente, et sa chasse il poursuit D'vne fureur plus chaude, et plus terrible bruit.
On entend alors le son des trompettes. Le monologue du gentilhomme continue ; mais, un instant après, la ru- meur augmente et le messager arrive. C'est un enfant qui s'écrie :
Et quoi ? auons-nous donc pour chef de nostre ville Des tyrans enragés de la vieille Sicile ? Quel soupçonneux Denys, quel cruel Phalaris Fust iamais contre aucun de telle rage pris ?
Le gentilhomme l'engage à s'expliquer. Le messager
répond :
Hélas, encore j'ai peur, Que mesme le rapport de chose si meschante Ne m'enpaste la bouche ; et puis ma voix tremblante A peine peult sortir de Pestomach pantois.
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Après de nouvelles instances du gentilhomme, l'enfant raconte, avec détail, le supplice de Jeanne d'Arc, auquel il vient d'assister, et rapporte les prédictions qu'elle a faites et les paroles qu'elle a prononcées au moment où on la conduisait à la mort.
Le gentilhomme prie Dieu de venger la femme qui a sauvé la France ; le chœur déplore le trépas de Jeanne d'Arc et la compare à Judith et à Esther.
Judith et Esther tant firent Que iadis elles fléchirent, Par leur tant rare beauté, Du Roy qui Perse gouuerne, Et du superbe Olopherne, La cruelle maiesté, Non par force féminine, Mais bien virile et diuine, Ceste cy a commencé Reuancher nostre franchise, Et, qui plus, en l'entreprise La vie mettre a osé.
Telle est la tragédie du P. Fronton ; on voit par cette analyse , trop longue à notre gré , en quoi le poète se rapproche ou s'écarte des règles posées par les critiques. L'unité d'action est la seule que le P. Fronton ait cru devoir observer, et il est juste de dire que la matière du drame est bien distribuée, et qu'à l'exception du cin- quième acte , qui est un peu froid , l'intérêt va toujours croissant. Mais cette action dure fort longtemps, et le lieu de la scène change au moins douze fois, ce qui est con- traire aux principes suivis par les anciens et par les clas- siques français. Les unités de temps et de lieu ont donc été violées.
Les personnes qui ont lu Shakespeare ont dû être frappées, comme nous, de l'analogie singulière qui existe
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entre la tragédie du P. Fronton et les drames dont le poète anglais a emprunté les sujets à l'histoire de son pays ; à part toutefois cette circonstance que plusieurs des drames dont nous parlons sont des chefs-d'œuvre, et que la pièce française est l'ouvrage d'un versificateur as- sez ampoulé.
Au reste, le P. Fronton ne se faisait pas illusion sur le mérite de sa tragédie ; il ne voulut point qu'elle fût pu- bliée sous son nom, et il laissa à Monsieur Jean Barnel l'honneur ou le danger de la mettre au jour. Il n'eut souci de sa réputation de poète ; il se contenta d'avoir donné d'excellentes éditions de plusieurs pères grecs , de saint Jean Chrysostôme, de saint Jean Damascène et de Nicéphore Calisle , et ces éditions lui ont assuré une place honorable parmi les philologues de son époque.
L'HOPITAL
DE REVIGNY,
PAR M. J.-F. GAUDE.
L'hôpital ou Maison-Dieu de Revigny1, dont la fon- dation remonte au deuxième jour de mars 4538, et qui subsista jusqu'à la fin du siècle dernier, fut établi primi- tivement en dehors du bourg-, au lieu dit la Maison- Dieu^, où l'on peut apercevoir, à certaines époques de l'année, les traces des fondations de ce monument3, et où l'on découvre encore, de temps à autre, des débris de sa construction.
i. Revigny (Reviniacum) , ancienne ville du duché de Bar, est. aujourd'hui un bourg, chef-lieu de canton de l'arrondissement de B.ar- le-Duc,
2. Cette contrée, nommée en patois du pays Mason-Dé, est si- tuée à environ mille mètres de Revigny, près de la route de Bar-le- Duc.
3. Si l'on en juge par ces traces de fondations, cet établissement devait être fort considérable.
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Jacques Massart1, chanoine du chapitre de Saint-Maxe de Bar-le-Duc, son fondateur, le destina à recevoir les
pauvres passants (ad usum pauperum illuc
undique venientium ....); il y réunit un grand nombre de biens qu'il avait acquis pour ce, et y établit des frères servants et un chapelain qui devait en être le maître et le gouverneur. Ce prêtre , qui était chargé de procurer les biens spirituels aux pauvres que devait recevoir l'hôpital, et en même temps de célébrer l'office divin , devait être pauvre, libre et dégagé de tous liens.
Par l'acte de fondation, dont l'évêque de Toul, Thomas de Bourlémont, confirma les dispositions, le fondateur se réserva le droit de nomination à la chapelle ; droit qui, après sa mort , devait appartenir au comte de Bar Henri et à ses successeurs.
Le comte de Bar Edouard Ier, par lettres du 24e jour du mois de janvier de l'année 1355, avait autorisé le cha- noine Massart à fonder cette Maison-Dieu, à laquelle il conféra les mêmes droits et franchises dont jouissaient alors les hôpitaux de Bar-le-Duc et de Pont-à-Mousson.
Son fils et son successeur, Henri IV, par lettres du mois de mars 1342, transféra au chapitre de Saint-Maxe les droits qu'il avait en vertu de la fondation sur l'établis- sement créé du consentement de son père, à la condition que les administrateurs que le chapitre commettrait se- raient rappelés à volonté ; il n'en réserva, pour lui et ses hoirs, que la pure et franche garde.
Le fondateur lui-même , d'après ce transport fait par
1. Jacques ou .Taquet Massart, suivant une tradition populaire, na- quit à Verdun, puis fut receveur à Bar en 1321, et enfin chanoine de Saint-Maxe. Il faisait partie du Conseil d'Etat du comte Edouard Ier, en 1317.
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Henri, donna , sous la même condition , le 25 du mois d'octobre 1546, le droit de nomination à la chapelle, qu'il s'était réservé jusqu'à sa mort.
L'année suivante, en 1547, le chapitre assemblé statua que l'administration dudit hôpital ne serait jamais confé- rée à un chanoine.
On ne trouve plus de traces de l'administration de l'hôpital jusqu'en l'année 1429, qu'il fut incendié, ainsi que les moulins de Mussey et de Revigny qui en dépen- daient, par une troupe d'aventuriers conduits par un sei- gneur champenois nommé listasse de Warnencort , écuyer, ainsi que le constatent les informations , en date du premier jour de juing de la même année, faites à l'occasion des dégâts commis par ce capitaine1 dans les environs de Bar-le-Duc.
1. Le nom d'Uslasse ou Eustache de Vernancourt est resté dans les souvenirs des habitants de Revigny et des villages environnants, qu'il ravagea plus d'une fois. Ce chef d'aventuriers , seigneur, à ce que l'on croit, de Vernancourt (Marne) , fut un des deux capitaines de gens d'armes qui chassèrent les religieux de l'abbaye de Beaulieu enArgonne, et incendièrent cette maison après l'avoir pillée, en 1401. Le duc de Bar le prit depuis à sa solde, mais il ne put le garder longtemps. Ce capitaine, par de nouvelles dévastations qu'il fît aux environs de Bar, et particulièrement à Revigny, où il brûla la Maison- Dieu, les moulins et autres bâtiments, après les avoir livrés au pil- lage, et à Mussey, qu'il ravagea, après s'être saisi du château situé sur une hauteur voisine d'où il dominait les environs, etc. {Informa- tions du {"juin 1429, signées Jcnniri), obligea le duc René Ier à le traiter en ennemi. Assiégé dans la maison forte de Revigny, son dernier retranchement, par les soldats de René, Eustache tomba entre leurs mains après la prise du fort, arrivée le troisième jour d'avril 1429, et fut amené au château de Bar, où il fut enfermé dans la geôle, et où il mourut le 18 novembre de la même année. On peut lire, dans le compte de Jean Rouvel, receveur général du duché de Bar, année 1429, les articles qui suivent, relatifs à la prise, à la détention et à la mort d'Eustache de Vernancourt.
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Ce lut, il est probable, à la suite de celte ruine des bâ- timents, et alin d'éviter de nouvelles dévastations de la part des bandes exerçant le brigandage, qui étaient alors fort nombreuses, que l'hôpital chercha à s'abriter derrière les murs du bourg , et que le chapitre de Saint-Maxe le rétablit à l'endroit où il existait encore à la fin du siècle dernier, dans la rue nommée rue de V Hôpital.
Le premier directeur connu de cette maison de charité, après son rétablissement, est Vautrin Aubr y , que le chapitre nomma en 4447, et qu'il conserva à ce poste jusqu'en 4465. Mécontents de ce chapelain pendant les dernières années de son administration, les chanoines, usant de leur droit , « suivant la contenue es lettres du prince », le révoquèrent, et lui donnèrent pour successeur « pour governer, régir, administrer tout par soy-mème comme autre personne ledict hospital par la forme et ma-
»i 67 liv. 11 s. 8 d. ob. V. pour les frais de Ulasse de Varnencourt, escuier, et ses gardes, depuis le dimanche, tiers jour d'avril, l'an 1429, qu'il fut prins en la fort maison de Revigny, et admenez prison- nier on chastel de Bar, et mis en la geôle, jusques au dernier jour de juing en suivant ledit an.
ti 18 liv. 5 s. 7 d. ob. ts. pour les frais et dépens dudit Utasse, et desdits gardes, depuis le dernier jour de juing 1429 jusques au ven- dredi 28e jour de juillet exclus ledit an, que ledit Utasse demora seul en ladite prison sans avoir nulles gardes.
»» 46 s. 8 d. pour les frais dudit Euslasse, estant en ladite prison , sens gardes depuis ledit 29e jour de juillet inclus jusques au 26e jour d'aoust, qui sont 28 jours, par lequel temps le receveur l'a soiugnié de pain, vin, char et autres viandes convenables, et en compte ung gros pour jour, par accort fait à lui en la chambre.
it 3b s. pour pain baillé pour ledit Euslasse depuis ledit 26e jour d'aoust inclus qu'il fut mis à pain et à caue, jusques au vendredi 18e jour de novembre en suivant exclus, que ledit Eustasse alla de vie à trépassemeut ; par lequel temps y a 84 jours dont il compte pour jours S deniers tournois, par accort fait comme dessus. »
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nière contenue en la fondation », contrairement aux sta- tuts de 1547, Jean Carré , docteur en théologie et cha- noine en la collégiale de Saint-Maxe.
Le personnel de l'hôpital, à cette époque, parait com- posé du chapelain ou gouverneur, de quatre hommes appelés « frères hospitaliers », de deux « servantes » pour les aider et d'un boulangier ».
Ses biens d'alors figuraient parmi des assises sur l'hui- lerie et le moulin d'Ainville1, au finage de Revigny.
Il y avait dans la maison six « charlits » destinés à être occupés par des « étrangiers poures et passans , des lits, draps, couvertes, et autres meubles meublans , et ustensiles , comme aussi en la chapelle et autres dépen- dances ; la grande chambre » , citée plus haut, était une espèce de salle d'asile destinée à recevoir et loger en
!. Ainville était une censé située près du bourg de Revigny et sur le canal de dérivation de l'Ornain. Les habitants du lieu en ont tota- lement perdu le souvenir. Cependant cette censé existait en 1772, et elle dut encore subsister quelques années ; mais peut-être avait-elle un autre nom vulgaire.
Par contrat reçu par-devant Me Mercier, notaire au bailliage de Bar, le 14 avril 1768, le sieur Geoffroy-Dominique-Charles Décosse, lieu- tenant pour le service du roy au régiment Royal-Cavalerie, trésorier dudit régiment, demeurant à Bar, acquit du sieur Jean-Louis Biguet, laboureur à Revigny, et de Catherine Boudart, sa femme, auparavant veuve du sieur Nicolas Poriquet, procureur fiscal en la justice de Revigny, la censé d'Ainville située près de la ville , et consistant en une maison en pavillon, cour, grange, écurie, colombier, huilerie, jardin, pont et empalement sur le canal, et autres aisances, apparte- nances et dépendances, bornée par le canal au nord et par des fossés de toutes autres parts. Le 23 novembre 1772, visite des lieux fut faite par Pierre Martel, maistre masson, et Nicolas Collot, maistre charpentier, demeurant à Bar; ces experts concluent que les bâti- ments, moyennant quelques faibles réparations, peuvent encore sub- sister longtemps. Enfin, un autre acte , de l'année 1781 , indique que cette cense existait encore à cette époque.
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masse les mendiants et les gens d'armes traînards, qui, après chaque passage des armées , arrivaient en grand nombre à l'hôpital.
Cet état de choses dura jusqu'au milieu du xvie siècle. Mais, pendant les guerres qui commencèrent à cette épo- que, l'hôpital fut très-négligé et il perdit beaucoup de ses revenus. L'administrateur, souvent obligé de fuir pour échapper aux brutalités d'une soldatesque trop exigeante, laissait les vagabonds, soldats et autres, gaspiller les res- sources et emporter ou brûler les meubles , les usten- siles, les objets servant au culte, les lits et jusqu'aux portes de l'établissement.
A la mort du sieur Puiniot, chapelain, arrivée en 1629, le chapitre fit opérer une saisie, et il résulta de l'inven- taire dressé à cette occasion , qu'il ne restait pas pour plus de 100 livres de meubles en mauvais état, que les chanoines abandonnèrent au sieur Alexandre , son suc- cesseur.
En 1632, il y eut une transaction passée entre les cha- noines et la communauté de Revigny, par laquelle le chapitre consentit à délivrer annuellement aux pauvres habitants du lieu une quantité suffisante de grains prove- nant des revenus de la Maison-Dieu, pour leur nourriture. Ce grain devait être converti en pain par le boulanger de l'hôpital , et le pain distribué aux indigents par les soins du chapelain et du curé du bourg. Néanmoins, les admi- nistrateurs restèrent encore chargés de l'entretien des six lits destinés aux pauvres passants.
Pendant les années 1655, 1654, 1655 et 1656, l'hôpital de Revigny eut beaucoup à souffrir de tous les maux qui affligèrent alors la Lorraine et le Rarrois : le passage con- tinuel des armées françaises (régiment de Turennc, gen-
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darmes d'Estrée, régiment de Vernancourt, suisses, dra- gons du cardinal et autres) , la famine et la peste. Ce dernier fléau enleva , dit la tradition , plus du tiers des habitants du bourg*, et, du personnel de l'hôpital, il ne resta que le chapelain Alexandre.
En même temps que la peste décimait Revigny, les gens de guerre ravageaient les campagnes , incendiaient les maisons isolées, et massacraient leurs rares habitants échappés à la famine et à la contagion. Aussi, les terres de l'hôpital étaient-elles restées incultes, et les usines du lieu et des environs, sur lesquelles il avait des droits, avaient-elles perdu la majeure partie de leur valeur.
Les années 1657 et 1638 furent moins calamiteuses, et déjà Alexandre se prenait à espérer, quand , dans les premiers jours d'avril 1639, il apprit qu'un autre fléau, non„moins pénible que les précédents , allait fondre sur son hôpital. Les Suédois, qui, depuis 1636, ravageaient la Lorraine (pillant tout ce qu'ils trouvoient, viollant femmes et filles, brullant esglises, metant à grande géhenne hommes prisonniers, fesant mourir gens d' esglises par tourments inoys), les Suédois, dis-je, dévastaient les environs. Le jour du vendredi-saint, 21 avril 1639 , des habitants d'Huppémont2, qui étaient en
1 . Ces victimes de la contagion furent inhumées dans un terrain situé près de la contrée de Salmonpré, qui fut appelé longtemps, et que les vieillards nomment encore le Cimetière des Pestiférés.
2. Huppémont était, au moyen âge, un village formant commune et paroisse, comme il résulte de plusieurs documents qui parlent de l'église ainsi que du mayeur de ce lieu. Ce village, situé au bas de la côte de même nom que l'on voit à deux kilomètres et demi à peu près au sud de Nettancourt, et dont on aperçoit des vestiges sur le terrain, fut rasé complètement par les Suédois, et, depuis cette époque, il n'a pas été rebâti. L'église d'Huppémont était située sur le sommet de la
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fuite , annoncèrent à la population de Revigny que des bandes de Cravactes venaient de livrer aux flammes leur village et celui de Vroil. Apprenant tels cours cl ra- vages, les pauvres gens se retirèrent ait pro /fond des bois, aullres se retirèrent à Bar, de sorte que le jour de Pâques, Vcsglise estoit désert1.
Les Suédois ne tardèrent pas à arriver ; ils escaladèrent facilement des murailles qui n'étaient pas défendues , et pénétrèrent dans le bourg , qu'ils livrèrent aux flammes après y avoir commis les plus horribles cruautés. Il ne resta debout que la maison-forte, l'église2, la chapelle de l'hôpital et quelques maisons particulières construites en
côte ; on y voit encore des restes de sa construction. La tradition est muette en ce qui concerne cette localité, dont le territoire fut partagé entre les habitants de Vroil et de Nettancourt à la fin du siècle der- nier, après être resté en pâtis pendant cent cinquante ans. Vroil eut un tiers du finage pour sa part, et Nettancourt deux tiers.
1. Notes trouvées sur la couverture en parchemin de Yhistoire et cronique du très chrestin roy s. loys, par Jan de Jonville, édit. de Poitiers de 1561, ayant appartenu à Pierre Fleury, curé de Revi- gny de 1630 à 1670, et possédée aujourd'hui par M. Magron père.
2. L'église de Revigny, dédiée à saint Pierre, est d'architecture ogivale du xve siècle ; la toiture ayant été brûlée lors de l'incendie du bourg allumé par les Suédois en 1639 , et la charpente qui cou- vrait le chœur ayant été complètement perdue , cet édifice resta dé- couvert jusqu'en 1670, que les voûtes et les murs du chevet tombè- rent. Le chœur fut réparé deux ans plus tard , dans le même style que la nef, mais avec des contreforts parés d'ornements gothiques et de niches où se trouvaient des saints que fit disparaître le vandalisme de 1793. La toiture fut aussi réparée la même année ; les habitants s'étant adressés au duc de Lorraine Charles IV pour en obtenir les bois nécessaires pour refaire la charpente du chœur et de la tour, ce prince les autorisa à couper les chênes dont ils avaient besoin dans les bois de la Haye-Herlin, qui lui appartenait. Quant aux voûtes, elles ont été rétablies il y a quelques années seulement.
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pierres de taille ; les autres maisons du bourg, bâties en pierres et en bois, et même en bois seulement, recou- vert de glaise, furent anéanties.
Le chapelain Alexandre n'avait pas cru prudent d'assis- ter à ces atrocités, et il avait abandonné l'hôpital le pre- mier jour de mai , la veille de l'entrée des bandes sué- doises à Revigny. Il n'avait pas songé à mettre en sûreté les vases sacrés et les ornements de la chapelle , qui fu- rent, comme les ustensiles de la cuisine et les autres meubles, ou pillés, ou livrés aux flammes.
L'hôpital resta abandonné jusqu'au mois de mars de l'année suivante (4640), que le chapitre nomma le curé de Villers-aux-Vents pour en prendre soin ainsi que des revenus de 1659 et de 1640.
Plusieurs commis furent nommés par le chapitre pen- dant les années qui suivirent 1641 pour administrer si- multanément l'hôpital ; mais, en 1647, l'exigence brutale des soldats français qui étaient en garnison à Revigny leur ayant fait prendre la fuite , les chanoines de Saint- Maxe crurent ne pouvoir mieux faire qu'en conférant pour une durée de trois années la commission au sieur Gaynot, chanoine, qui était secrétaire du chapitre depuis longtemps. Ce chapelain ne pouvait ni aliéner, ni donner à bail , ni échanger aucune propriété sans l'assentiment du chapitre. Celui-ci devait nommer chaque année un commissaire pour visiter l'hôpital , et le chapelain était tenu d'obéir en tout au chanoine délégué , et de lui pré- senter les comptes de l'année.
En 1650, à l'expiration des trois années de sa commis- sion , Gaynot obtint encore la régie de l'hôpital pour six années, et même, disent ses lettres, pour tout le temps qu'il voudra, afin de lui donner le temps et le courage de
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réparer les bâtiments, entretenir les biens et faire les re- cherches nécessaires pour recouvrer les propriétés usur- pées pendant les guerres.
Le chapelain Gaynot était très-vigilant , aussi fut-il presque toujours en procès, et fit-il récupérer à l'hôpital plusieurs droits qui ne se percevaient plus depuis long- temps1.
En 1G52, nous le voyons réclamer à l'adjudicataire de la lance un droit de cens sur les revenus de ladite lance2; nous ne connaissons pas l'issue de ce procès.
i. Arch.de la mairie de Revigny, registres de la haule-juslice.
2. Cet usage ancien et curieux ne se pratique plus depuis long- temps à Revigny, mais on le retrouve encore à Villers-aux-Vents, village situé à i kilomètres du bourg. Le voici tel qu'il est décrit dans l'Annuaire de la Meuse pour l'année 1848, article Villcrs-aux-Vents (statistique) :
(i Le 22 octobre de chaque année, jour de la fête de saint Louvent, il patron de la paroisse, a lieu l'adjudication des fruits communaux n provenant du chemin de la fontaine Saint-Louvent. (Les fruits au- « tour de l'église sont adjugés au profit de la fabrique.) L'adjudica- » taire de l'année précédente , que l'on nomme lancier, muni de sa n lance, qui consiste en une ronce garnie de rubans, et d'une paire » de gants à l'usage d'homme, parcourt le village, le lendemain de la n fête, pour prévenir les habitants de se trouver a l'adjudication de n ladite lance , qui se fait le soir même, au milieu de la rue, et de- ii meure à la personne qui a la mise, au lever de la première étoile. « L'adjudication avait lieu moyennant une certaine quantité de cire, « qu'autrefois on convertissait en cierges destinés au luminaire de la i» chapelle du saint; mais, depuis 1S44 , cette redevance se paie en » argent, au profit de la commune, n
n Le lancier est tenu, en outre, de payer un décime par franc sur » le prix de l'adjudication ; ce surplus (espèce de don de joyeux avé- n nement) se distribue en trois parts : l'une pour les conseillers mu- « nicipaux, l'autre pour les bommes mariés , et la troisième pour les n garçons. La soirée se termine par un bal que donne gratis aux » jeunes gens de la commune le nouvel adjudicataire; si ce dernier
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Nicolas Gaynot mourut le 16 janvier 1653, et il eut pour successeur Gabriel Légaré , que le chapitre nomma administrateur à vie , à charge toutefois de se comporter en bon et fidèle économe, sinon le chapitre se réserve de conférer la commission à un autre.
Légaré fit quelques épargnes, et, en 1670, il voulut ré- parer la maison ; mais la somme qu'il avait amassée ne suffisant pas, il fut obligé de recourir à l'emprunt.
Sur la fin de cette même année , les voûtes du chœur de l'église paroissiale tombèrent ainsi qu'une partie des murs du chevet ; ces derniers furent réparés l'année sui- vante, aux frais des décimateurs, c'est-à-dire du chape- lain de l'hôpital, du chapitre de Ligny et du curé du bourg, et proportionnellement au nombre de seizièmes que chacun tirait dans la dime. Légaré fut encore obligé, pour payer sa part de cette reconstruction, de contracter un nouvel emprunt.
n est garçon, il se choisit une lancier e, qualité qui revient à sa femme » s'il est marié. Il faut ajouter que cette fête se célèbre de temps ira- it mémorial. »
A Revigny, c'étaient les récoltes de certaines terres que l'on met- tait en adjudication, et que le lancier de l'année précédente était dans l'obligation d'ensemencer. Il est parlé de cette adjudication dans tous les comptes des syndics de Revigny ; voici ce qui en est dit au cha- pitre des recettes des années 1707 et 1708 :
1707. — La somme de 12 livres 11 sols 6 deniers tournois, faisant en monnaie barrois 29 francs 4 gros , receue de Jean Hannion le jeune pour la lance qui lui fut adjugée le 2b octobre 1706, déduction faite de 4 francs 6 gros pour les joueurs de basses et violons.
1708. — 15 livres 11 sols 6 deniers faisant 36 francs 4 gros bar- rois pour les terres de ladite lance, laissée à Loys Porin par adjud. en date du 31 juillet 1707, déduction faite de 4 francs 6 gros à l'or- dinaire pour les joueurs d'instruments.
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11 mourut eu 1G81, ne laissant que des dettes , et il fut enterré dans le chœur de l'église*.
L'administration d'Etienne, son successeur, fut active, mais non profitable ; il eut plusieurs procès à soutenir, disposé qu'il était par caractère à en entreprendre. Le plus important , mais dont nous ne connaissons pas l'is- sue, fut celui qu'il soutint contre l'Ordre de Malte , à cause des fours banaux de Conlrisson, de plusieurs jours de terre situés sur le territoire de Revigny, lieudit à Braux, et d'autres propriétés sises à Rancourt , le tout appartenant à l'hôpital, et que l'Ordre de Malle, qui possédait une ferme à Rancourt, au lieu nommé la Com- manderie, lui voulait usurper. Ce procès, qu'Etienne porta jusqu'à Paris, le ruina complètement, ce qui le mit dans l'obligation de se démettre de sa charge , en sep- tembre 1715.
Barbillat, qui lui succéda, eut aussi sa part de diffi- cultés. 11 rebâtit la maison telle qu'elle existait encore au commencement de ce siècle, et y dépensa cinq mille livres de son patrimoine ; aussi, à sa mort, arrivée en 172G, « le chapitre voyant que les rentes suffisent à peine » pour payer les charges, ne réclame-t-il rien à ses hé- » ritiers. »
Un mémoire, dressé par Barbillat en 1725, pour être présenté aux députés du chapitre , donne l'état des biens de l'hôpital à cette époque et celui des pertes éprouvées
1. Voici l'acte de son décès :
1C81 — Le 12e aoust mourut messire Gabriel L'Egaré, prebtre hos- pitalier de Revigny, aagé de 75 ans ou environ , et fut enterré par moy curé de Revigny soubsigné dans le cœur de l'église paroissiale dud. lieu, nonobstant l'oppo[siti]on de MM. de Saint-Max qui disoient avoir ce droit. Signé : Nas Parmenlicr, curé de Revigny.
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pendant les guerres ; on y lit « qu'il y a perte de plus de » 100 livres de cens en vin , perte de 1 muid de préciput » sur la grosse dixme, surcharge de 15 paires sur la part » qui reste ; que l'on a retranché pareillement sur deux » seizièmes, pour quoy il y avait procès ; qu'il y avait 7 » muids 8 quarterons et 5 bichets de bled sur les moul- » lins de Mussey qui sont détruits ; assises sur Brabant » et Saudrupt qu'on ne percevait plus ; 27 quarterons » 1 bichet et 5/4 sur les fours bannaux de Contrisson ; 9 » muids à prendre sur les gros moulins de Revigny, plus » 41 quarterons sur des héritages audit Revigny ; 1 7 ar- » pents de bois à Gaumont ; et que le souverain a as- » sencé à M. deVendières, procureur général, ces objets. » Qu'il y a plusieurs terres perdues , et nottament plus » de 10 jours que les habitants retiennent comme allu- » vion, la rivière rongeant toujours d'un costé et rendant » du costé opposé aux habitants.
» Que l'hospital ne jouissait plus que de :
» Un gagnage à Revigny séparé en deux, de 200 paires ;
» Un gagnage à Fontenoy, de 70 paires ;
» Un gagnage à Contrisson, de 33 paires ;
» Quelques terres à Villers-aux-Vents, affermées pour » 12 minottes d'avoine ;
» Quelques terres à Rancourt , laissées 12 boisseaux ;
» Une portion de la dixme de Revigny, valant 60 paires ;
» Un jour 1/2 de vignes à Brabant.
» Que , malgré les recherches des préposés à la cha- » pelle , on n'a pu rien récupérer des censés ou assises, » ny pour les terres de Revigny et ailleurs perdues , non » plus que la portion de dixmes que les autres décima- » teurs avoient usurpées sur l'hospital dans le temps mal- » heureux des guerres qui ont infesté le pays depuis 1550
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«jusqu'en 1680. Que les moulins et usines n'ont point » été rélablys, ainsy aucuns droits à récupérer sur eux.
» Que, par une réclamation du sieur Leuralion, faite en » 1650, lors de la commission sur les grains délivrés au » sieur Puiniot , décédé depuis , on voit qu'il y avait en » rentes 45 muids moitange de grains ; mais que, par un » compte du sieur Etienne, en 1082, on ne voit plus que » il muids 28 bichets de bled et 11 muids 50 bichets » d'orge ; conséquemment perte de moitié depuis 1650 » jusqu'en 1680.
» Que, depuis cette perte des rentes, la quantité de » grains qui dévoient estre convertis en pain pour estre » distribués aux pauvres de Revigny d'après la transac- » tion de 1652 a été réduite, et que l'on n'a plus distribué » que le pain de 80 paires bled et orge , depuis le di- » manche qui suit la S. Martin jusqu'à la Madeloine, le » 22 de juillet. »
Guillaume , qui succéda à Barbillat , n'est connu que par sa démission, qu'il donna en août 1755. Son adminis- tration de neuf années n'a pas laissé de traces. Il fut rem- placé par Champrey, qui gouverna l'hôpital pendant 18 années. Ce fut ce dernier chapelain qui cessa, en 1746, l'entretien des six lits destinés à recevoir les pèlerins pauvres et infirmes ; entretien dont les administrateurs étaient encore chargés depuis la transaction de 1652. « Mais , — dit le journal des commissaires nommés par » le chapitre en 1784 — comme cette espèce d'aumône » ne donnait lieu qu'à la retraite des vagabonds et ne » servait qu'à les attirer dans le pays, ce qui occasionnait » beaucoup de désordres dans Revigny, ainsi qu'on pour- » rait le voir dans différentes plaintes portées sur les re- » gistres du greffe, et dans la requête présentée à S. A.
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» Léopold, en 1725, pour demander unebandouillère à ses » armées {sic), afin de contenir ces malheureux, ce qui fut » accordé ; de plus, le roy ayant défendu les pèlerinages » et les courses, et les revenus d'ailleurs ne pouvant suf- » fire à l'entretien du prêtre et de la maison, Champrey » et les derniers préposés à l'administration ont cessé » l'entretien de ces lits. »
Par suite de cette mesure , ce chapelain put faire des économies ; aussi fut-il le premier dont le chapitre put obtenir quelque chose pour réparer les bâtiments et la chapelle. Champrey donna sa démission le 30 avril 1753, mais il ne fut remplacé que le 10 novembre suivant , à cause des travaux de réparation que le chapitre fit exé- cuter à l'hôpital pendant l'été de cette année.
Le successeur de Champrey fut Gervaise, administra- teur vigilant, qui rechercha activement, mais vainement, les détenteurs des biens de l'hôpital ; il lui fut impossible de rien faire rentrer. Après une administration de 31 ans, Gervaise mourut, le 8 décembre 4784, laissant quelques économies ; « mais, » dit le journal, si on eut voulu exi- » ger avec les formalités de la justice, il n'y aurait pas eu » de quoy payer les frais et faux frais , et l'hôpital aurait » tout perdu. Les commissaires ont donc préféré de trai- » ter à l'amiable avec les successeurs, d'après l'avis et au- » thorisation du chapitre éclairé par ses conseils. »
Aussitôt après le décès de Gervaise, le chapitre nomma, pour lui succéder, le sieur Lacroix, chanoine, à qui il donna la commission pour le même nombre d'années et aux mêmes conditions qu'il l'avait conférée au sieur Ni- colas Gaynot en 1647. En même temps, et par délibéra- tion du 10 décembre, inscrite sur le registre ordinaire du chapitre , il délégua trois commissaires pour installer le
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nouvel administrateur et pour régler les droits de l'hôpi- tal à la succession du décédé. Ces délégués étaient MM . de Poirson, de la Morre et de Vassimont.
A leur arrivée, ils constatèrent que tous les papiers, titres, renseignements, baux, pieds-terriers, etc., qui se trouvaient dans la caisse de l'hôpital suivant le désir du titre de fondation, avaient été mis sous le scellé par MM. les officiers du bailliage de Bar, aussitôt le décès du cha- pelain Gervaise, puis inventoriés dans les procès-verbaux des 22 et 25 décembre 1 784 par les mêmes officiers , et enfin mis en liasses pour être déposés en leur greffe. A la levée des scellés, les commissaires réclamèrent à MM. du bailliage : 1° les titres et papiers, 2° les meubles et us- tensiles de l'hôpital , 5° les meubles et ornements de la sacristie, 4° enfin, les grains et revenus échus à la Saint- Martin ; mais ces officiers refusèrent les litres , quoique les commissaires eussent offert d'en donner récépissé, et de les représenter toutes fois et quand ils en seraient requis.
Il ne fut trouvé à l'hôpital que « cinq corbeilles avec » les outils du four, et peu de chose à la sacristie. »
Afin de suppléer à l'absence des documents que le bailliage leur enlevait, les délégués dressèrent , le 7 jan- vier 1785, pour servir à l'administration de l'hôpital , et au moyen des renseignements qu'ils purent se procurer, soit dans les archives du chapitre , soit des sieurs Guil- laume et Champrey, précédents commis, encore existants, soit dans les différentes visites qu'ils avaient faites audit hôpital du vivant du sieur Gervaise, le journal ou compte- rendu dont nous avons donné divers extraits.
Lacroix administra tranquillement l'hôpital jusqu'en 1790, que la réaction, qui opérait sur toutes les choses religieuses, se fit sentir à cet établissement , utile pour-
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tant, mais qui avait le tort, à cette époque , d'appartenir au clergé et d'être administré par un de ses membres. Lacroix fut expulsé , et l'hôpital, avec ses biens meubles et immeubles, fut confisqué.
Le 4 septembre 1790, les administrateurs du district de Bar demandèrent à la municipalité de Revigny un état des biens ayant appartenu au ci-devant hôpital. Cet état fut dressé le 7 septembre ; mais il était incomplet ; aussi le district réclama-t-il, le 23 du même mois , un état supplémentaire accompagné des renseignements propres à éclairer les administrateurs au sujet desdits biens , et que pourra se procurer la municipalité. Celle-ci, le 11 novembre suivant, fit cette réponse :
« La municipalité ayant pris en considération l'ordon- » nance de MM. du district, a fait toutes les recherches » pour découvrir si elle trouveroit quelques renseigne- » ments au sujet des biens-fonds qu'elle n'a point dési— » gnés dans sa délibération du 7 septembre dernier. Ce » qu'elle n'a pu rien découvrir de plus pour ce qui con- » cerne les biens-fonds dudit hôpital.
» Voicy une déclaration du sieur Révolte, officier mu- » nicipal , qui nous a dit que, du tems qu'un appelé Jac- » ques Renault faisant fonctions de sindic pour la com- » munauté de Revigny, luy avait donné à lire un titre ou » chartre qui parlait de la fondation dudit hôpital en disant » que l'hôpital de Revigny était fondé par François- » Jacques Massart, né à Verdun, chanoine de Saint-Maxe » à Bar, et que cet hospice était dédié pour recevoir et » donner l'hospitalité aux troupes du fanatisme appelées » Croisades qui se disaient aller combattre pour la Terre- » Sainte, et pour donner également l'hospitalité aux pè- » lerins et autres passants. Cet hospice est dit être fondé
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» vers l'an 1250 ; il y avait dans cet hospice pour servir » les passants deux servantes et un boulanger et quatre » lits pour coucher les passants. 11 paroit qu'insensible- » ment cette façon dadministrer l'hôpital s'est rallcnti » jusqu'au point de s'éteindre , puisque nous n'avons » point de connaissances plus positives , sinon que cer- » tains particuliers nous ont dit que par des plaintes réi- » térées par les voisins dudit hôpital à l'ancienne justice » des cy-devant seigneurs , ces passants restaient quel- » quefoys deux ou trois jours dans cet hôpital, s'eny- » vraient, tuaient les poulies et insultaient les voisins, » particuliers dudit hôpital, lesquels craignaient le feu de » la part de ces individus ; l'on nous a dit qu'à cette épo- » que il s'était fait un arrangement de consentement et » du gré de la part des chanoines de Saint-Max de Bar, » propriétaires des revenus de cet hôpital, avec l'ancienne «justice, et qu'ils avaient converti cette hospitalité au » profit des pauvres de la communauté de la quantité de » quatre-vingt paires qui ont été converti en pain par » l'administrateur dudit hôpital, ce qui s'est continué jus- » qu'à présent. Voilà tous les renseignements que nous » avons pu avoir tant de Revigny que des lieux voisins. » Les biens de l'hôpital furent divisés par lots et enfin vendus, au profit de la nation, dans le eourant de l'année suivante1 (1791), par-devant le district de Bar-sur-Ornain,
1. J'ai omis de dire que, dans le courant d'août 1781, MM. les vé- nérables doyen, chanoines et chapitre de l'insigne église collégiale de Saint-Maxe de Bar, administrateurs de la Maison-Dieu de Revi- gny, firent publier et afticher que, le 4 septembre 17S1, par-devant Me Baillot l'aîné, conseiller du roy et noltaire à Bar, et MeBoùillard, doyen et sindic des conseillers du roy, noltaire audit Bar, il serait pro- cédé audit lieu de Bar, à la vente en destail des biens appartenant à l'hospital de Revigny ; mais qu'à la requette des maire, sindic, ha-
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à l'exception des terrains que n'avaient pu ou su décou- vrir MM. les officiers municipaux de la communauté de Revigny.
Quelques années plus tard, il fut question de réunir à l'hospice de Bar-le-Duc les terrains ayant appartenu à l'hôpital de Revigny, et qui n'avaient pas été vendus en 1791, ainsi que d'autres propriétés provenant d'émigrés, que la nation promettait d'accorder à la commune de Re- vigny, en indemnité de celles qui avaient été vendues , à la condition que ladite commune pourrait disposer, dans cet hospice, d'un certain nombre de lits destinés à rece- voir ses indigents malades ou infirmes, et qu'elle aurait droit à la répartition des secours proportionnellement à la quantité des biens dont elle aurait pourvu cet établis- sement.
L'indemnité promise par la République ne fut pas ac- cordée, mais le projet de réunion des biens qui n'avaient pas été vendus reçut son exécution, et l'hôpital de Bar- le-Duc en jouit encore aujourd'hui.
bilans et communauté dudit lieu, poursuitte et diligence de Sébastien Antoine Hannion, sindic, en date du 29^oust, il fut signifié par huis- sier, le 31 aoust, à MM. du chapitre (en la personne et domicile de messire de Vassimont , chanoine et receveur du chap., où estant et parlant à sa servante) , de cesser les affiches et publications, et de disposer en manière quelconque des biens de l'hôpital ; les susdits hahitans s'opposant formellement à ce que mesdits sieurs du chapitre fassent procéder à la vente desdits biens , et protestans de déduire leurs moyens d'opposition. La vente des biens de l'hôpital n'eut pas lieu à l'époque annoncée.
INVENTAIRE
DU TRÉSOR
DE L'ABBAYE DE PRUM
PAR M. AUG. DIGOT.
L'importance que l'on attache aujourd'hui aux inven- taires contenant l'énumération, et quelquefois même la description succincte des vases sacrés, des châsses, des tapisseries et des autres objets de même nature qui ap- partenaient aux cathédrales et aux monastères, et la faveur avec laquelle sont accueillis les documents de ce genre, nous engagent à publier l'inventaire des reliques, des vases sacrés, des châsses, des évangéliaires, des tapis, etc., qui composaient le trésor de la riche abbaye de Prum , située dans le diocèse de Trêves. L'ancienneté de cet inventaire (il est de l'année 1003) lui donne un degré d'intérêt que n'ont pas beaucoup d'autres.
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La pièce qu'on va lire n'est pas inédite ; elle a été im- primée, il y a un siècle environ (1750), dans VHistoria Irevirensis diplomalica cl pragmalica, par Hontheim, évèque de Myriophite et suffragant de Trêves1 ; une par- tie de ce morceau avait même déjà été publiée dans les Annales trevirenses de Brower2 ; mais les deux ou- vrages dont nous parlons, celui de Hontheim surtout, le seul qui reproduise intégralement l'inventaire de Prum, sont tellement rares en France, que la plupart des ar- chéologues seraient dans l'impossibilité de consulter ce document précieux. Nous avons donc pensé qu'il aurait pour beaucoup de monde la valeur et le prix d'une pièce inédite3.
Nous avions d'abord jugé à propos de supprimer les passages qui contiennent exclusivement l'énumération des reliques ; après y avoir réfléchi, nous avons cru qu'il valait mieux les conserver ; il n'est pas sans intérêt de connaître quelles étaient en ce genre les richesses de quelques grands monastères'1.
La quantité et le prix des ornements que possédait l'abbaye de Prum n'étonne pas, quand on sait qu'elle fut autrefois une des plus importantes de la province ecclé- siastique de îrèves. Fondée en 765 par le roi Pépin et Bertrade, son épouse, dans la forêt des Ardennes, elle ne
1. Tome I, p. 348-350.
2. Deuxième édition, t. I, p. 414.
3. M. Digot entend parler du texte latin donné par ces auteurs ; mais nous avons cru devoir nous borner à reproduire la traduction qu'il en a faite. Ce morceau est extrait du Bulletin monumental, t. XV. (Note du Bureau de la Société.)
4. On remarquera que plusieurs des reliques mentionnées dans l'inventaire étaient évidemment de fausses reliques ; mais ncus n'a- vons pas à en faire ici la distinction.
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tarda pas à acquérir des biens considérables et à réunir un très-grand nombre de religieux. On rapporte qu'ils étaient au moins trois cents, et qu'on chantait l'office di- vin sans aucune interruption pendant le jour et la nuit. Pépin, fils de Charlemagne et d'Himiltrude, s'étant ré- volté contre son père, fut tondu et enfermé dans cette abbaye. Plus tard, l'empereur Lothaire, qui avait toujours beaucoup aimé le monastère de Prum, s'y retira et y mourut en 855. Ce fut à la libéralité de ce prince que l'abbaye dut une partie des richesses mobilières qu'elle possédait, et la première moitié de l'inventaire suivant reproduit la charte que Lothaire donna aux religieux à cette occasion. Enrichie par les générosités de plusieurs seigneurs, par celles des souverains , entre autres du roi Lothaire, qui lui concéda le droit de battre monnaie, l'abbaye de Prum était parvenue à un haut degré de prospérité et de splendeur, lorsqu'elle fut dévastée , en 892, par les Normands, qui massacrèrent plusieurs reli- gieux. Elle ne tarda pas à réparer ses pertes, et l'inven- taire que nous publions prouve qu'au commencement du xie siècle, elle était encore une des plus riches abbayes du royaume de Lorraine. L'empereur Henri II de Bavière la visita en 4005 ; il éprouva une telle admiration à la vue des ouvrages d'orfèvrerie dont l'église était ornée , qu'il demanda aux religieux de lui en remettre l'inventaire. Udon, quinzième abbé de Prum, fit aussitôt rédiger la pièce que nous allons reproduire, et c'est à ce caprice de Henri II que l'on doit de connaitre le trésor de l'abbaye de Prum. Nous ne parlerons pas plus en détail de ce mo- nastère, et nous nous contenterons d'ajouter qu'il jouit, au moyen âge, d'une grande renommée ; que son école fut célèbre, et qu'il compta au nombre de ses religieux
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plusieurs hommes d'un haut mérite. Dans la seconde moitié du xvie siècle, le titre abbatial fut supprimé , les revenus lurent unis à la crosse archiépiscopale de Trêves, et l'Electeur obtint une autorité absolue sur le spirituel et le temporel de l'abbaye. Le monastère de Prum dis- parut enfin au moment de l'invasion française ; mais il laissa une petite ville qui s'était formée autour de lui , et qui suffit pour conserver le souvenir de l'heureuse in- fluence exercée autrefois par cette grande fondation reli- gieuse.
INVENTAIRE DU TRÉSOR DE L'AEBAYE DE PRUM.
L'an du Seigneur mil trois, la * année du règne du
sérénissime et orthodoxe roi Henri, par ses ordres, et sous l'abbatiat de Udon, on a fait le recensement du tré- sor du monastère de Prum , qui a été fondé autrefois par le roi Pépin, de sainte et glorieuse mémoire, en l'honneur de notre sauveur et seigneur Jésus-Christ, et de sa sainte mère Marie , et de saint Jean-Baptiste , des bienheureux apôtres Pierre et Paul, du premier martyr Etienne, des saints martyrs Denys et Maurice, et des confesseurs Mar- tin, Védast,2 Germain et Benoit, de tous les saints, et dans lequel Pépin a déposé un morceau des sandales du Seigneur et des reliques des saints dont les noms pré- cèdent.
Plus tard, son arrière petit-fils, Lothaire, empereur,
1 . Le mot indiquant l'année du règne de Henri est omis dans le texte; mais, ce prince étant monté sur le trône en 1002, il est évi- dent que l'inventaire de Prum a été rédigé pendant la première ou la seconde année du règne de Henri.
2. Saint Védast est plus connu sous le nom de saint Wast ou Vaast.
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Auguste, animé d'une égale bienveillance pour ce mo- nastère, l'a enrichi de nombreuses possessions et l'a dé- coré de plusieurs ornements.
Pour être plus explicite, je rapporterai ici les propres paroles de cet empereur ; car, dans son diplôme, on lit, entre autres choses, au sujet du trésor de l'église, ce qui suit : Nous voulons que tous les fils de la sainte Eglise, présents et futurs, sachent que, pour le salut de notre âme et l'acquisition de la céleste patrie, nous avons offert à Dieu notre Seigneur, pour être employé au culte divin dans ce saint lieu, et servir perpétuellement à l'ornement de l'abbaye, un ouvrage que nous avons fait exécuter à nos frais, c'est-à-dire un évangéliaire sur lequel brillent l'ivoire, le cristal, l'or et les pierres précieuses.
Une bible avec des miniatures et de grandes lettres do- rées au commencement des volumes, et des serrures et de petites chaînes de vermeil. Une petite châsse d'or ap- puyée jsur quatre colonnes d'argent , avec l'autel sur lequel elle repose ; une autre châsse de petites dimen- sions placée sur l'autel, et une petite couronne d'or. La châsse est ornée de plusieurs pièces de cristal et d'un grand nombre de pierreries très-précieuses, et on y a déposé, en présence de Tendgaud, métropolitain de Trê- ves, de Rugnandus, métropolitain d'Arles, et de tous les moines de l'abbaye, les reliques suivantes : du bois de la vraie croix, des fragments du sépulcre de Notre-Seigneur, des rochers du Calvaire, de la crèche de Bethléem, de la table de la Cène, de la pierre sur laquelle Jésus-Christ a prié au jardin des Olives ; des morceaux du suaire du Seigneur, de l'éponge de la Passion et du vêtement de la Sainte-Vierge ; une main et une partie d'un bras de saint Jacques, frère du Seigneur ; la tète de saint Cosme ; un
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bras de saint Georges, martyr ; un bras de saint Théo- dore, martyr, sans la main ; un pied de saint Siméon, qui, dans le temple, a reçu dans ses bras le Seigneur enfant ; un os de saint Zacharie, fils de Barachie ; un os de saint Thomas, apôtre ; un pied et un bras de sainte Anastasie, vierge ; la tète de Sisinnius1, martyr ; un pied de saint Jérôme, prêtre, et un bras de saint Etienne, premier martyr ; des os des prophètes et des saints In- nocents.
Un calice d'or décoré comme la croix, orné de pierres précieuses, avec une patène d'or ; un ciboire2 d'or avec des pierreries , et un chalumeau également en or avec des pierres précieuses ; un offertoire3 d'or semé de pier- reries, avec une patène ; une fontaine* d'or avec des
{. Hontheim a supposé qu'au lieu de Sisineii, il fallait lire S. Irenei ; il s'est trompé ; le martyrologe romain contient les noms d'un confesseur et de quatre martyrs appelés Sisinnius ; il est certain qu'il est ici question d'un de ces derniers. „
2. L'inventaire de Prum fait lire deux fois le mot cœborium pour ciborium, et il est évident que ce mot ne doit pas être traduit de la même manière dans les deux passages. Dans le premier passage, cœborium signifie un vase destiné à contenir le vin eucharistique. Nous ne connaissons pas d'exemple aussi ancien de l'emploi du mol ciborium pour désigner ce que nous appelons aujourd'hui un ciboire V. Ducange, v° Ciborium.
Au surplus, le texte donné par Brower est ici fort différent de celui que nous traduisons; on lit après : û in crucis modum compo- situm ti les mots : a alium item gcmmatum cum cochleari aureo gem- matoque n ; ce qui veut dire : u un autre calice orné de pierreries, avec une cuillère d'or, décorée de même.
3. Le sens du mot offertorium est assez difficile à saisir; mais un autre passage de l'inventaire prouve que ce mot est synonyme de colatonium et représente un bassin destiné à recevoir les offrandes.
i. Fontem aureum. Nous ferons la même observation au sujet du mot Fons ; la suite de l'inventaire démontre que ce terme désigne un vase contenant l'eau préparée pour les ablutions.
— 235 — pierreries ; un voile1 rehaussé d'or et de perles ; douze chasubles2.
Vers la même époque, Marcward , trésorier du monas- tère, muni d'une lettre impériale, alla trouver le souve- rain-pontife Sergius5 et en obtint les corps précieux des martyrs Chrysantus et Daria, et des reliques de quarante- six autres martyrs, qu'il rapporta à Prum, avec le res- pect qui convenait à un homme pieux ; il en laissa une partie dans cette abbaye et transporta le reste avec de grands honneurs dans le prieuré appelé Neu-Munster", qui dépend de Prum ; et aujourd'hui encore Jésus-Christ y exauce, par l'intercession de ces saints, et pour la gloire de son nom, ceux qui lui adressent leurs vœux. 11 y a en outre dans ce monastère des reliques de plusieurs autres saints, savoir : d'André, apôtre ; quelques fragments des corps précieux des martyrs Himus et Félicien , Eusèbe et Pontianus, Gordien et Epimothée ; de Marius, Marthe, Audifax et Abacuc ; un grand nombre de reliques de Mau- rice et de ses compagnons ; des reliques de Crépin et de Crépinien, d'Hippolyte, de Thiburce, de Thimothée, de Jean et de Paul, martyrs ; de Laurent, de Christophe ; des morceaux de la colonne à laquelle on attacha le Sei- gneur pendant la flagellation et de la couronne d'épines.
1. Nous avons lu ici fanonem, et ce mot signifie un voile ; le même mot, écrit phanones, est pris plus bas pour synonyme de mani- pule, mais la copie reproduite dans les Annales trevirenses de Bro- wer porte paronem. Au reste, Ducange (v° Paro) pense que cette expression peut rendre la même idée que le mot fano.
2. Ici se termine le diplôme de Lothaire ; le reste de l'inventaire est de l'année 1003.
3. II est question du pape Sergius II.
4. Le monastère d'Eiffel, situé à peu de dislance de l'abbaye de Prum, dont il dépendait.
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Il y a aussi d'autres reliques de Corneille, de Calixte, de Marcellin et de Pierre, d'Abdon et de Sennes, de Pierre et de Hyacinthe, d'Agapet et de Sylvain, de Mag- nus et d'André et de leurs compagnons ; des reliques de saint Lupianus, confesseur ; deux dents de saint Goar ; des reliques de Gall., Benoit, Sylvestre, Basile, Amanus, Ouen, Amand ; une côte de sainte Marguerite, des reli- ques de l'évêque saint Rémi ; d'autres des vierges sainte Agathe, Cécile, Lucie, Barbe, Scholastique. Il y a aussi des vêtements qui ont appartenu aux confesseurs Paulin, Maximin, Willibrord, Rémacle, Hubert, Cunibert1, et à un grand nombre d'autres saints martyrs confesseurs et vierges, et que nous passons sous silence, tant parce que nous ignorons leurs noms que pour ne pas trop allonger cet inventaire. -
L'église de Prum possède aussi un autel d'or consacré au Saint-Sauveur ; quatre petites châsses, couvertes d'or et de pierreries , posées sur deux plus grandes châsses argentées ; une couronne formée d'or et de pierres pré- cieuses, suspendue au-dessus de l'autel2 ; autour de l'au- tel un ciborium orné d'or et d'argent, et autour du cibo- rium deux voiles3 couverts d'argent ; l'autel d'argent
1. Saint Paulin et saint Maximin sont deux des premiers métropo- litains de Trêves ; saint Willibrord est le premier évèque d'Utrecht ; saint Rémacle était évèque de Maestricht ; saint Hubert, évèque de Liège, et saint Cunibert, métropolitain de Cologne.
2. Nous n'avons pas rendu dans notre traduction les mots in mo- dum julei, qui donnent un sens assez ridicule.
3. Nous avons traduit ostiola par voiles , et nous avons, en pre- nant ce parti , suivi l'opinion du savant abbé Lebeuf (v. extrait du livre de litur g ia Romani Pontificis , imprimé à Rome en 1731, avec quelques observations ; dans le Mercure de France, déc. 1737, t. II, page 2848) ; nous avouons cependant que cette explica- tion n'est pas absolument certaine.
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donné par l'empereur Lothaire, et quatre petites châsses d'or semées de pierreries. A sainte Marie1, une châsse d'or, onze tables d'argent2 sur les autels , et huit petites châsses d'argent ; vingt philactères3 chargés d'or et de pierreries, dans lesquels sont enfermées des reliques ; trois pyxides , une d'argent et deux en ivoire avec des reliques ; six croix d'or ; trois crucifix d'argent. Dans l'abside, autour de l'autel, deux argentées*.
Devant l'autel est suspendue une roue5 formée de clo- chettes.
Quatre évangéliaires, y compris celui que nous a donné l'empereur Lothaire ; l'un d'entre eux est écrit en lettres d'or et couvert d'or ; et un autre qui sert tous les jours est couvert d'argent.
Quatre pupitres6 pour placer les évangéliaires ; deux
i. Ad sanctam Mariam, ces mots désignent soit une chapelle de l'église abbatiale, soit l'église collégiale de Sainte-Marie, fondée par les religieux de Prum, et située près du monastère.
2. Tabulée argenteœ ; ces expressions signifient des feuilles d'ar- gent sur lesquelles étaient représentés soit au trait, soit au repoussé, différents sujets religieux.
3. Le mot phylactère, qui peut recevoir plusieurs sens divers, est employé ici comme synonyme de coffret.
A. Nous n'avons pu traduire les derniers mots de cette phrase ; si, au lieu de parietis, nous lisions parietes, nous interpréterions ainsi ce passage : dans l'abside , autour de l'autel, les deux murailles sont couvertes de lames d'argent.
5. Nota, c'est-à-dire une couronne à peu près semblable à celles qui sont mentionnées dans d'autres passages de l'inventaire.
6. Nous avons traduit tabulée par pupitre; mais c'est en tremblant que nous avons hasardé celle interprétation ; nous n'en voyons, au reste, pas de meilleure. On lit dans le Glossaire de Ducange (v° Ta- bulée ad evangelia) un passage d'Udarilric (Lib. 1. Consuetudo Clu- niac, cap. 12°, de caena Domini), duquel il résulterait que les mots
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couverts d'or et de pierreries ; un autre1 tout entier en argent. Un missel orné d'or et de pierreries ; un lection- naire décoré de la même manière ; un antiphonaire avec des couvertures d'ivoire ; un tropaire2 également avec des couvertures en ivoire. Un pupitre que nous appelons analogium, en argent, orné d'arcatures3 ; au-dessus on voit un aigle doré, perché sur un globe d'argent ; à ce pupitre sont suspendues des machines composées de quatre parties, brillant d'or et d'argent et qui se nomment dans la langue française4 panthères5.
Sept couronnes d'argent et treize petites couronnes argentées suspendues dans les chapelles ; deux des cou- ronnes d'argent sont dorées ; entre elles est suspendu un vase de cristal. Devant l'autel du Saint-Sauveur, il y a sept lampes ; devant l'autel donné par l'empereur, il y a deux vases d'or et d'argent.
Quatre calices d'or, y compris celui dont notre sei- gneur Lothaire nous a fait présent, avec autant de pa- tènes et deux chalumeaux. Trois calices d'argent, sans compter ceux qui servent journellement au sacrifice.
Tabulœ ad evangelia signifient les lames d'argent qui servent de couvertures au livre des évangiles ; mais il nous semble que cette in- terprétation ne peut être admise ici.
t. Nous avons traduit comme si le texte eût contenu le mot alter- num ; altare doit être une faute de copiste ou de typographie.
2. Croparium est une locution vicieuse pour troparium. Le tro- parium était un livre de chœur qui contenait les tropes.
3. Nous ne garantissons pas l'exactitude de la traduction du mot arcubus.
i. Cette mention de la langue française (gallica lingua) est as- sez curieuse.
5. Nous ignorons ce qu'il faut entendre par le mot pant hères ; toutes les recherches que nous avons faites à cet égard ne nous ont procuré aucun renseignement qui nous satisfasse.
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Treize chandeliers d'argent, et un grand chandelier en ouvrage de fonte avec des figures de lions. Trois bassins pour recevoir les offrandes* ; un en or et semé de pierre- ries, que nous avons dit avoir été donné par l'empereur Lothaire ; deux autres : l'un couvert d'or et d'argent, le troisième d'argent, pour l'usage quotidien.
Deux aubes, que l'on nomme aussi éphod ; vingt ma- nipules que nous appelons fanons ; douze sont ornés d'or, six d'argent, sans compter ceux dont on se sert tous les jours.
Six ampoules2 avec trois patènes ; trois de ces am- poules, y compris celle que nous avons rappelée plus haut, sont en or et semées de pierreries, et les trois autres en argent.
Trois bassins : l'un d'or, avec un vase contenant de l'eau pour les ablutions, donné par l'empereur Lothaire ; un autre niellé , mais sans vase ; le troisième argenté, avec un vase pour les ablutions , servant tous les jours.
Quatre encensoirs : deux en or, un en argent et un en cuivre. Deux navettes3, une en ivoire, l'autre en argent.
Quarante-trois tapisseries suspendues aux murailles. Sur l'autel du Saint-Sauveur, cinq tapisseries rehaussées d'or, et une servant tous les jours. Sur l'autel donné par l'empereur, trois tapisseries également rehaussées d'or, et onze autres sur les différents autels.
i. Colatoria. Nous avons suivi le sentiment de Hontheim dans notre traduction ; Ducange et ses continuateurs n'ont pas indiqué toutes les acceptions de ce mot.
2. Les ampulice de l'inventaire de Prum étaient ce que nous ap- pelons aujourd'hui les burettes.
3. Les navettes sont, comme on le sait, les boîtes dans lesquelles on enferme l'encens.
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Sept tapis en laine destinés à être placés sur les autels pendant le carême, un autre en soie pour l'autel du Saint- Sauveur ; un autre, partie en soie, partie en plumes, pour l'autel dont l'empereur nous a fait présent ; dix pour les dossiers des stalles ; deux coussins en soie pour les sièges et quatre autres pour placer sous les évangéliaires.
Lisez les noms des saints de manière à obtenir par leurs prières la vie éternelle.
L'année de l'Incarnation, huit cent cinquante-deux, dans l'indiction xve, l'empereur Lothaire, la 35e année de son règne comme roi d'Italie, et la 15e comme empereur des Francs, arrivant dans le monastère de Prum , qui a été fondé en l'honneur de notre seigneur et sauveur Jésus-Christ, et de sa Mère, et de notre seigneur le bien- heureux Jean-Baptiste, son précurseur, et des très-saints apôtres Pierre et Paul et des autres apôtres, et du pre- mier martyr Etienne et de tous les saints martyrs, et des vénérables confesseurs Martin et Benoît , et de tous les saints ; l'empereur Lothaire a offert les objets décrits ci- dessus au Saint-Sauveur et à tous les saints prérappelés, dévotement et pour le salut de son âme, et celui de son épouse défunte et de tous ses prédécesseurs, et pour la paix de l'Empire. Lothaire est mort l'an du Seigneur huit cent cinquante-cinq.
NOTICE
SUR
L'ÉGLISE DE CHÀMP-LE-DUC
DÉPARTEMENT DES VOSGES,
PAR M. AUG. DIGOT.
i»t«
La Lorraine , malgré la richesse et l'industrie de ses habitants, est peut-être, de toutes les provinces de France, celle qui a conservé le plus petit nombre de mo- numents historiques. Elle fut autrefois couverte d'églises romanes et ogivales ; mais les calamités de toute nature qui pesèrent sur elle au xvne siècle, ont amené la des- truction de la plupart de ces admirables édifices. On sait que, sous le règne du malheureux Charles IV, la Lor- raine fut envahie et ravagée par les Français et les Sué- dois ; à cette époque désastreuse , beaucoup d'églises furent pillées, brûlées, démolies ou transformées en for- teresses par les bandes qui parcouraient le pays ; d'autres périrent par suite du défaut d'entretien, et quand Léopold vint, après le traité de Riswich, prendre possession des
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Etats qu'avaient gouvernés ses ancêtres, et ramener dans notre province la paix et l'abondance, on fut obligé de reconstruire totalement ou partiellement une foule d'é- glises rurales qui tombaient en ruine. Le mauvais goût du xvme siècle contribua encore notablement à diminuer le nombre des édifices élevés pendant le moyen âge. Au- jourd'hui, il n'est pas aisé de rencontrer dans nos cam- pagnes une église entière dont la construction remonte à cette époque. La plupart de celles qui ont échappé à tant de causes de destruction ne sont plus intactes, et presque toujours, un portail, une nef, une abside de formes mo- dernes viennent malheureusement et disgracieusement s'accoler à la partie ancienne qui a survécu.
Cependant plusieurs monuments curieux ont échappé tout entiers au sort qui les menaçait, et, parmi ceux qui ne sont plus intacts , il en est qui méritent de fixer l'at- tention des artistes , des archéologues et des historiens. Notre province a conservé , grâce à la bonne qualité des matériaux, quelques édifices des xie et xne siècles, qui suffisent, nous le croyons du moins, pour déterminer quels furent, en Lorraine, les caractères du roman se- condaire et du style de transition.
Ces observations seront neuves jusqu'à un certain point, car les études archéologiques ont commencé fort tard dans cette province. Le nombre des hommes qui s'y livrent est encore extrêmement restreint, et il est résulté de cette lenteur à s'instruire , des actes de vandalisme que tout le monde déplore aujourd'hui.
En première ligne des plus anciens édifices que possède notre pays, nous placerons l'église de Champ-le-Duc, qui nous parait avoir été élevée dans la première moitié ou au plus tard vers le milieu du xie siècle. Si l'archéologie était
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moins avancéede nos jours, on serait même tenté d'assigner à cette église une date plus reculée ; car une tradition, qui se conserve encore dans les Vosges, en attribue la construc- tion à Charlemagne et la fait, par conséquent, remonter à la fin du vme siècle ou au commencement du ixe siècle. Cette erreur, évidente pour toute personne un peu fami- liarisée avec les études archéologiques, doit être attribuée à une circonstance rapportée par Eginhard, par l'auteur des Annales metenses, et par un autre chroniqueur de la même époque. 11 résulte d'un récit de ces trois anna- listes, récit que nous rapporterons tout à l'heure, que les Carlovingiens possédaient à Champ une villa dans la- quelle ils se rendaient quelquefois pour se livrer aux dé- lassements de la pèche et de la chasse. Champ est, en effet, situé à l'entrée des grandes vallées et des profondes forêts des Vosges, à proximité de la Vologne et de plu- sieurs autres cours d'eau ; en un mot , il est admirable- ment placé pour faire une station de chasse digne d'un souverain.
Maintenant, il ne reste plus rien de la villa carlovin- gienne ; on montre seulement aux étrangers , au-dessus des fondations d'une maison , un vieux pan de mur, qui peut bien avoir deux mètres d'épaisseur, et que l'on sup- pose gratuitement avoir appartenu à la maison de Char- lemagne.
On a voulu voir aussi dans le nom même de Champ, en latin Campus , une preuve de la grande antiquité de ce village, et on a prétendu que cette dénomination lui a été donnée parce que Charlemagne y avait convoqué un champ de mai ou un champ de mars. Hàtons-nous de dire que rien dans l'histoire ne vient appuyer cette assertion, et que le nom de Champ, soit seul, soit réuni à d'au-
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très mots, se rencontre fréquemment en Lorraine. Nous citerons seulement, pour en donner la preuve, les vil- lages ou hameaux de Champenoux (Campus spinosus), de Champdray (Campus directus), de Champigneules (Campaniolœ) , de Champ-du-Pain, de Champ-des- Brayes, de Champ-à-Nabor, enfin un village et un ha- meau appelés tous deux Champ, situés dans les Vosges, et distincts de celui qui nous occupe1.
Malgré la fausseté de cette étymologie, on ne peut nier que le village de Champ-le-Duc ne soit un des plus an- ciens de notre province. Les séjours qu'y firent plusieurs princes de la famille de Charlemagne y attirèrent de bonne heure un certain nombre d'habitants. Nous avons dit que Charlemagne lui-même s'y rendait quelquefois. Egin- hard, l'auteur des Annales metenses et le rédacteur de la chronique intitulée Annales rerum francicarum quœ a Pipino et Carolo magno gestœ sunt, rapportent que, vers le mois de juillet 805, l'empereur se rendit d'Aix-la- Chapelle à Thionville, de Thionville à Metz et de Metz à Champ, pour chasser dans les Vosges. Ils ajoutent que, pendant son séjour dans cette villa, son fils Charles re- vint victorieux d'une expédition contre les Slaves de Bo- hême ; qu'à son entrée sur le territoire de l'Empire, il apprit que Charlemagne se trouvait à Champ, et qu'il se rendit dans cette localité pour annoncer lui-même à son père l'heureux succès de son expédition. L'annaliste mes- sin ajoute que l'empereur le reçut avec une grande joie, cum gaudio suscepil'2.
1. V. Durival, description de la Lorraine et du Barrois, t. III, pages 73-73 ; Calmet, Notice de la Lorraine, t. I , col. xxxiij, et, t. II, col. xxij etxxiij.
2. Nous nous bornons à reproduire le récit d'Eginhard ; celui des deux autres chroniqueurs est à peu près identique.
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L'importance de Champ augmenta encore dans les siècles qui suivirent, et son église devint le centre d'une paroisse très-considérable, de laquelle dépendaient les villages ou hameaux de Laveline, Prey, Fiménil, Beau- ménil, Fays, Laval, Belmont, Domfaing, Malien, La Cha- pelle, Tiriville, Neune, Biffontaine , Saint-Jacques-du- Statt, Vienville, Granges, Frambeménil, Evelines, Le- roux, etc., et enfin la ville de Bruyères, dont la cure ne fut érigée que le 15 juillet 1612*.
L'étendue et l'importance de cette paroisse expliquent comment on a pu construire dans une localité éloignée des grands centres de population un édifice aussi remar- quable que celui dont on va lire la description.
Cette église n'est malheureusement plus entière ; vers l'année 1720, époque où elle avait pour curé le savant Sommier, qui fut plus tard archevêque de Césarée et grand prévôt de l'insigne collégiale de Saint-Dié, on en reconstruisit le portail et les trois nefs, à l'exception ce-
«i ... Eodem anno (805) misit exercitum suum cum filio suo Karolo »» in terram Sclavorum qui Behemanni vocantur, qui omnem illorum » patriam depopulatus , Ducem eorum nomine Lechonem occidit ; » et inde regressus in Vogesum sylvam, ad patrem, venit in loco qui n dicitur Camp. Nain Imperator julio mense de Aquisgrani profectus, » per Theodonis villam atque Métis transiens, Vosegum petiit, ibique » venationi vacans, post reversionem exercitus ad Rumerici castra » profectus, ibique aliquantum temporis moratus, ad byemandum in » Theodonis villa palatio suo consedit ». V. Eginardi annales de gestis Caroli magni imperatoris, dans la collection de Duchesne, intitulée : Historiœ Francorum scriptores, t. II, p. 252 et 233.
Le passage de la chronique intitulé : Annales rerum francica- rum, etc., se trouve dans le même volume, p. 43 et celui des An- nales metenses dans le t. III, p. 291 et 292.
1. Pouillé ecclésiastique et civil du diocèse deToul, par le P. Be- noît Picart, t. II, p. 158-162.
18
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pendant des piliers et des arcades appuyées sur ces pi- liers.
L'église de Champ est orientée suivant les traditions catholiques. On y pénètre aujourd'hui en traversant une sorte de portique ayant 9 mètres environ de largeur et 4 mètres 20 centimètres de hauteur. Ce pronaos appartient aux nouvelles constructions ; mais, selon toutes les appa- rences, il a été élevé sur les fondations d'un ancien vesti- bule. On entre dans la nef actuelle par une seule porte qui n'a rien de remarquable, et on découvre immédiate- ment la disposition et l'ordonnance intérieure de l'église. Elle se compose d'une nef principale accostée de deux nefs plus petites, d'un transept et de trois absides : elle a par conséquent la forme d'une croix latine.
Les trois nefs, d'une longueur de 17 mètres, n'offrent plus d'autres vestiges d'antiquité que quatre gros piliers carrés, quatre piliers monocylindriques et les arcades qui viennent retomber sur ces piliers et séparent la nef prin- cipale des deux petites nefs. Les arcades dont nous ve- nons de parler sont au nombre de trois seulement de chaque côté. La plus rapprochée de l'entrée s'appuie sur un pilastre qui fait saillie dans le mur occidental et sur le premier pilier carré ; la seconde repose sur ce pilier et sur le suivant ; la troisième, enfin, sur le second pilier et sur un pilastre , engagé dans un des massifs soutenant la voûte du transept et la tour qui la surmonte, et que nous décrirons tout à l'heure. Mais ces grandes arcades sont elles-mêmes subdivisées en deux arcades plus petites, qui s'appuient sur les piliers carrés et sur les piliers mo- nocylindriques que nous venons de mentionner. Cette dis- position semble avoir été assez fréquemment observée en Lorraine pendant le xie siècle, et on la remarque dans
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l'un des côtés de l'église collégiale (aujourd'hui cathé- drale) de Saint-Dié, dont la nef a été, comme l'église de Champ, construite vers le milieu de ce siècle ; là on voit aussi de grands cintres embrassant des cintres plus petits.
Toutes ces arcades, comme, en général, les anciennes ouvertures de l'église, sont en plein-cintre ; elles n'ont aucun ornement, ni aucune moulure ; seulement, les grandes forment une saillie assez prononcée au-dessus des petites. Nous devons encore faire observer que la grande arcade voisine de la porte d'entrée n'est pas sub- divisée ; l'espace que les deux petits cintres auraient oc- cupé est envahi aujourd'hui par le buffet d'orgues ; mais nous pensons que, pour établir ce dernier, on a élevé de chaque côté de l'église un pilier monocylindrique et les arcades qu'il soutenait. Au-dessus des grands cintres règne un filet en pierre assez saillant ; la disposition de cette partie de l'église nous porte à croire que les trois nefs n'ont pas été voûtées et qu'elles n'ont jamais eu qu'un plafond plus ou moins orné, comme la plupart des églises construites à cette époque1.
La hauteur de la nef principale est de 7 mètres 50 cen- timètres. Nous passerons sous silence les nefs latérales, qui n'offrent absolument rien de curieux. Elles sont éclai- rées par des fenêtres modernes d'assez mauvais goût.
Les quatre gros piliers qui soutiennent les grandes arcades sont lourds et massifs. Leur couronnement, car elles n'ont pas de chapiteau, est formé d'un tailloir peu élevé, d'un quart de dond, d'une scotie et d'un tore.
1. On voit dans le mur, de chaque côté de la nef principale, et au- dessus du filet dont nous venons de parler, trois ou quatre modillons ou consoles en pierre, qui semblent avoir aidé à supporter l'ancien plafond. *
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Les quatre piliers monocylindriques ne se ressemblent pas ; les deux plus rapprochés de la porte ont des fûts parfaitement unis, et ces fûts sont surmontés d'un cha- piteau en forme de cube, arrondi par le bas et terminé à cet endroit par un gros tore. Les tailloirs, fort élevés, sont ornés de plusieurs moulures entièrement pareilles à celles qui surmontent les piliers carrés.
Les deux piliers monocylindriques, voisins du transept, ne sont pas semblables à ceux que nous venons de dé- crire. Celui qui est placé du côté de l'évangile porte un chapiteau godronné et les facettes de la corbeille se pro- longent sur le gros tore qui la termine et sur le fût du pilier jusqu'à la base. L'autre pilier et son chapiteau dif- fèrent beaucoup de ceux que nous venons de mentionner ; mais une description n'en donnerait qu'une idée fort im- parfaite. Les bases sont formées d'un simple chanfrein.
Le transept a 22 mètres 50 centimètres du nord au sud ; il est divisé en trois travées , dont la principale se trouve entre la nef et l'abside. Ces travées sont voûtées en arête, et celle du milieu, qui a 12 mètres environ de hauteur, est soutenue par des arcs doubleaux formés d'énormes boudins. Les retombées de cette dernière voûte s'appuient sur quatre gros massifs en maçonnerie, ornés de pilastres, de corniches et de colonnes engagées. Ces colonnes sont au nombre de quatre seulement et pla- cées les unes vis-à-vis des autres, deux vers la nef, et deux vers l'abside. Elles ont beaucoup d'analogie avec les piliers monocylindriques de la nef ; leurs chapiteaux sont analogues aux chapiteaux en forme de cube arrondi par le bas, que nous venons de décrire et que l'on re- trouve fréquemment, dans les églises de cette époque, sur les bords du Rhin et même en Lorraine , notamment
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dans la chapelle castrale de Mousson, l'église de Blénod- lès-Pont-à-Mousson, celle du prieuré de Flavigny et le vestibule placé sous la tour de l'ancienne église abba- tiale de Saint-Mihiel. Mais les tailloirs de ces chapiteaux sont tous différents de ceux que nous avons décrits. Ils sont façonnés en biseau et couverts d'ornements. Tantôt, ainsi qu'on peut le remarquer en jetant les yeux sur les dessins joints à ce mémoire, ce sont des espèces d'échi- quiers formés par des filets saillants qui se coupent en fasce, en pal, en barre et bande ; tantôt ce sont des palmes ou d'autres ornements empruntés au règne végé- tal et tous d'un fort bel effet, mais malheureusement em- pâtés par les nombreuses couches de badigeon qui re- couvrent l'intérieur de l'église.
Ces tailloirs servent de couronnement à des espèces de pilastres accolés aux massifs qui soutiennent la voûte ; ils se prolongent, en forme de corniche, sur les murailles du transept et des trois absides, dans une grande partie de leur étendue.
Les bases des colonnes engagées sont formées de trois gros tores d'une égale épaisseur, mais de diamètres iné- gaux, qui reposent sur un socle droit, auquel les tores se rattachent par des pattes de forme géométrique et angu- leuse. Les massifs de maçonnerie et les pilastres ont un socle droit surmonté d'un chanfrein.
Trois des chapiteaux surmontant les colonnes engagées sont entièrement nus ; mais le quatrième, celui qui ter- mine la colonne placée du côté du sud-est , présente un bas-relief qui demande une mention particulière. La face du chapiteau qui regarde l'abside offre un cercle dont le contour est tracé par un tore peu saillant. Au milieu du cercle se trouvent deux personnages à cheval allant l'un
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au-devant de l'autre et se tendant les bras. (V. la fig. 1.) Celui qui se trouve à la gauche du spectateur tient à la main un objet qu'il est difficile de déterminer, et qui peut être une palme ou une branche d'arbre. D'après une tra- dition, dont nous ignorons l'origine, le sculpteur aurait voulu figurer sur ce chapiteau l'entrevue de Charlemagne et de son fils Charles, au moment où ce dernier, de re- tour de sa glorieuse expédition contre les Slaves de Bo- hème, vint rejoindre son père dans la villa de Champ. Le rédacteur des Annales metenses dit que l'empereur reçut son fils avec beaucoup de joie : cum gaudio sus- cepil. Ce sentiment semble assez bien rendu sur le bas- relief en question, malgré l'extrême grossièreté du tra- vail. Dans cette hypothèse, l'espèce de rameau qu'un des deux personnages porte à la main, aurait été placé là pour faire connaître le fils de l'empereur, et pour indi- quer qu'il revenait victorieux de son expédition. Au sur- plus, nous ne nous rendons pas garant de l'exactitude de cette explication ; nous savons combien les sculptures historiques sont rares dans les églises du moyen âge , et nous n'ignorons pas à quelles conséquences absurdes on est arrivé en voulant interpréter historiquement les bas- reliefs et les différentes représentations figurées qui or- nent les édifices des périodes romane et ogivale.
Le cercle dans lequel est enfermé le bas-relief que nous venons de décrire, repose sur le dos d'un animal bizarre, qui paraît être une espèce de cheval. La face du chapiteau regardant la nef principale présente un autre cercle, ou plutôt un demi-cercle, au milieu duquel on voit un personnage debout, et tellement couvert de badi- geon, qu'il est impossible de deviner ce que le sculpteur a voulu représenter. Près des chapiteaux qui surmontent
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les quatre colonnes engagées du transept, se trouvent des portions de chapiteaux qui font saillie hors des massifs de maçonnerie, et sur lesquels viennent s'appuyer les arcs-doubleaux de la travée centrale. Celui de ces demi- chapiteaux qui est à l'entrée de l'abside du côté de l'é- pitre, présente une tête humaine sculptée, ou, pour mieux dire, ébauchée et d'un travail grossier.
Le transept n'est éclairé que par deux fenêtres ouvertes à deux de ses extrémités. Ces fenêtres sont ébrasées à l'intérieur aussi bien qu'à l'extérieur, et de fort petites dimensions.
Pour arriver des nefs latérales dans le transept, et pour pénétrer de celui-ci dans les petites absides, il faut passer sous des arcades à plein-cintre, très-basses, et qui n'ont rien de remarquable. Les petites absides sont voûtées et terminées par une muraille droite : leur forme est, par conséquent, quadrilatérale. Au fond de chacune d'elles se trouve une fenêtre qui ne présente plus aucune trace d'antiquité. On voit dans ces absides deux portes très- étroites, par lesquelles on parvenait aux escaliers con- duisant sur les combles et au sommet de la tour ; une de ces portes a été murée, et l'escalier voisin démoli , si nos souvenirs ne nous trompent pas.
L'abside principale, dans laquelle on n'arrive mainte- nant qu'après avoir gravi plusieurs .degrés1, se divise en deux parties bien distinctes. La première, qui forme, à proprement parler, le chœur de l'église, n'a qu'une seule travée éclairée par deux fenêtres, qui ont été refaites et agrandies pendant le siècle dernier. La seconde abside
1. II faut également monter quelques degrés pour pénétrer dans les petites absides.
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proprement dite est voûtée en cul-de-four. La longueur totale des deux parties est de 9 mètres. La hauteur est la même que celle du transept ; mais la portion arrondie du fond de l'abside a 5b centimètres de moins.
A l'extrémité orientale de l'église s'ouvrent trois petites fenêtres romanes fortement ébrasées à l'intérieur. Leurs pieds-droits sont accompagnés de colonnettes engagées. Les bases de ces colonnettes se composent d'un carré sé- paré par deux tores et s'appuient sur une espèce de chan- frein ; les chapiteaux cubi-coniques sont dépourvus de tailloirs et ne soutiennent pas d'archivoltes.
Telles sont les observations que nous a fournies l'exa- men intérieur de l'église de Champ ; elles ont suffi pour nous engager à fixer le milieu du xie siècle comme date de la construction de cet édifice. L'examen de son exté- rieur ne pourra que nous confirmer dans cette opinion.
Nef. — Elle ne présente plus au dehors aucun vestige d'antiquité.
Transept méridional. — La petite fenêtre dont nous avons parlé est accostée de deux pilastres à facettes, ou, pour parler plus exactement, de deux colonnes engagées qui reposent sur une plinthe assez haute et terminée par un chanfrein. Les chapiteaux de ces colonnes sont cou- verts d'ornements empruntés au règne végétal, et ne soutiennent rien. Leurs bases sont assez curieuses ; elles sont formées d'une sorte de chanfrein, de deux quarts de rond et d'un autre chanfrein, rattachés par des pattes à un socle droit. Enfin, les angles du transept sont soute- nus par deux contreforts très-massifs, mais peu saillants, surmontés d'un larmier qui règne sur toute l'étendue de la façade et sert à éloigner les eaux pluviales.
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Transept septentrional. — Il n'est pas entièrement semblable à l'autre. Les deux pilastres sont semi-cylin- driques au lieu d'être anguleux ; leurs chapiteaux en forme de cube arrondi par le bas, comme la plupart de ceux de l'église ; leurs bases composées de deux quarts de rond, d'un chanfrein, d'une espèce de doucine et d'un second chanfrein, rattachés par des pattes triangulaires à un socle droit, divisé en deux étages , dont le second est en retraite sur le premier ; enfin , ces pilastres s'élè- vent jusqu'au sommet de la muraille et soutiennent, ainsi que les deux contreforts des angles, une espèce de ban- deau , qui sert de corniche , et sous lequel se trouvent aussi des modillons fort simples.
Petites absides. — Elles n'ont au dehors rien qui mé- rite d'être remarqué. Leurs angles sont soutenus aujour- d'hui par d'énormes contreforts, élevés, il y a déjà plus d'un siècle, pour empêcher l'écartement des voûtes.
L'abside principale, ou, pour mieux dire, la portion ar- rondie de cette abside, présente à l'extérieur une orne- mentation fort curieuse ; malheureusement elle est en partie masquée par une sacristie de construction mo- derne et de l'effet le plus disgracieux. L'ornementation se compose de deux étages établis l'un sur l'autre. Im- médiatement au-dessus du sol règne un soubassement en saillie terminé par un chanfrein ; ce soubassement sou- tient six colonnes engagées , à bases fort simples , mais dont les chapiteaux, surmontés d'énormes tailloirs, sont couverts de différents ornements, de palmes, de galons, etc. Sur ces colonnes reposent les bases de six autres colonnes torses, dont les chapiteaux ont la forme de cubes arrondis par le bas. Enfin, immédiatement au-dessus se trouve une corniche formée d'un simple filet saillant et
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appuyée sur des modillons. (Voyez figure 2.) Les trois petites fenêtres que nous avons décrites un peu plus haut sont percées dans les espaces vides qui séparent les co- lonnes ; elles n'ont, à l'extrémité, d'autre ornement qu'un gros boudin qui suit leurs contours. Dans la partie de l'abside qui regarde le sud-est, au-dessous d'une de ces fenêtres, on remarque une ouverture qui a la forme d'un quatre-feuillcs encadré dans un cercle ; cette ouverture répond dans l'intérieur de l'église à une arcature ogivale, qui présente, ainsi que le quatre-feuilles, tous les carac- tères du xve siècle, et qui sert d'entrée à une espèce d'ar- moire, dans laquelle on plaçait soit le Saint-Sacrement, comme le supposent quelques personnes, soit une lan- terne destinée à éclairer le cimetière. Des ouvertures semblables à celle-ci se voient dans une foule d'églises en Lorraine, et l'absence absolue, aujourd'hui bien cons- tatée, de ces fanaux de cimetière, encore assez communs dans l'ouest de la France, a fait penser, non sans raison, qu'elles avaient une destination analogue.
L'arcature que nous venons de mentionner est fermée au moyen d'une grille en fer d'un travail très-délicat, et formée uniquement des lettres composant la prière de Y Ave Maria. Ces lettres, qui sont de belles capitales go- thiques, se trouvent réunies et liées l'une à l'autre, de manière à présenter une clôture suffisante sans cesser d'être assez lisibles.
Pour achever ce que nous avions à dire de l'extérieur de l'église, il ne nous reste plus qu'à parler de la tour, qui s'élève sur la travée centrale du transept. Cette tour, assez massive, est de forme carrée ; chacune des faces a 7 mètres de largeur, et la hauteur totale depuis la voûte du transept est de 13 mètres. La toiture est formée d'une
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flèche en charpente, octogone, et de mauvais goût. A peu près vers le milieu de sa hauteur, la tour est ornée d'un larmier ; plus haut encore se trouve un filet en pierre assez saillant, au-dessus duquel s'ouvre sur chaque face une baie romane fort large, atteignant presque le sommet du mur, et divisée en trois petites baies à plein-cintre, dont les retombées , portant des tètes humaines grima- çantes, s'appuient sur des colonnettes. Le cintre des grandes baies ne présente aucun ornement ; mais, dans l'espèce de tympan qui surmonte les petites baies, on voit une ouverture de forme ronde. Un filet semblable à celui que nous avons signalé réunit à la hauteur des cha- piteaux les fenêtres des quatre faces.
L'appareil de toutes ces constructions, qui est parfai- tement visible à l'extérieur, ne présente rien de particu- lier. La partie ancienne a été bâtie en blocs de grès rouge fort commun dans les Vosges. Ces blocs sont de dimen- sions très-inégales. Nous n'avons remarqué aucune bri- que, ni aucune trace des appareils romains que l'on re- trouve dans quelques édifices plus anciens que l'église de Ghamp-le-Duc. Nous ne pouvons terminer notre no- tice sans dire un mot du bénitier et d'un font baptismal que l'on voit dans cette église. Le bénitier, de forme pé- diculée, nous a paru fort ancien, mais il n'offre pas de sculptures ; les contours et les saillies ont été tellement ronges par le temps, qu'il est impossible d'en donner maintenant une description satisfaisante.
Le font baptismal, au contraire, est admirablement conservé. Il passe dans le pays pour être aussi ancien que l'église, et on les fait remonter tous deux à Charlemagne ; on sait ce qu'il faut penser de cette prétention relative- ment à l'édifice ; elle est plus malheureuse encore à l'é-
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gard du font baptismal : en effet, on ne peut lui assigner une date plus ancienne que le xv° siècle, et nous en don- nerons tout à l'heure la preuve.
Ce font, dont la forme est octogone, appartient à la classe des fonts pédicules1. Il se compose par conséquent d'un calice, d'un fût et d'un socle. (Voir figure 5e.) La surface supérieure du calice présente un réservoir hé- misphérique assez considérable ; mais, au bas de ce ré- servoir, on ne voit pas, comme dans la plupart des fonts très-anciens, un trou par lequel l'eau qui avait servi à l'administration du sacrement s'écoulait à travers la base, jusque dans les fondements de l'édifice. La partie infé- rieure du calice est ornée de plusieurs moulures ; ce sont d'abord deux quarts de rond de volume inégal, puis un caret, puis enfin un talon. Le pied ou pédicule est divisé vers la moitié de sa hauteur par une espèce de larmier, et ses faces sont couvertes de losanges. La base, séparée du pédicule par un chanfrein , est formée d'un talon re- versé et présentant des losanges d'une scotie et d'un socle droit.
Quand on considère tout cet ensemble , le caractère et la disposition de ces moulures, il est impossible de ne pas assigner au font baptismal de Champ la date du xve siècle ; mais il est encore une autre preuve qui achève la démonstration. Nous avons dit que le font est octogone ; la partie supérieure du calice offre par conséquent huit faces d'égales dimensions. Deux de ces faces n'ont reçu aucun ornement ; sur une autre on voit une fleur à six pé- tales encadrée dans un cercle ; la quatrième présente deux
i. Nous suivrons la nomenclature et classification proposée par M. de Caumont dans son cours d'antiquité, vie partie.
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draperies plissées, semblables à celles qu'on remarque sur les panneaux d'un grand nombre de portes sculptées au commencement du xve siècle ; et, chose plus signifi- cative encore, ces draperies sont surmontées de deux ogives en accolade ; or, comme on ne trouve pas d'ogives de cette espèce avant le xve siècle, on sera obligé de conclure avec nous que le font baptismal ne peut être antérieur à cette époque.
Une autre face représente Notre-Dame-de-Pitié, sou- tenant dans ses bras le corps inanimé de Jésus- Christ ; dans un des angles se trouve un calice, et les trois autres angles renferment des fleurons analogues à ceux qui ornent les édifices du xve siècle.
Les trois dernières faces du réservoir offrent des bas- reliefs, dont l'interprétation est assez difficile ; cependant, après y avoir bien réfléchi, nous croyons pouvoir en donner l'explication suivante. L'un des bas-reliels en question présente une tête imberbe, à chevelure courte, et coiffée d'une couronne qui a beaucoup d'analogie avec la couronne ducale. (Voir figure 5e.) Malgré cette faute de costume, nous pensons que le sculpteur a voulu figu- rer Gharlemagne. Son intention deviendra évidente , si l'on considère le bas-relief voisin, sur lequel on voit un personnage à cheval ayant une toque sur la tête, un sabre au côté et jouant de l'olifant. (Voir figure 6e.) Nous ne savons si notre conviction sera partagée, mais nous som- mes persuadé que ce bas-relief représente Charlemagne se livrant à l'exercice de la chasse. La dernière face du font baptismal est couverte par un bas-relief que nous regardons encore comme historique. A la droite du spec- tateur, un homme, qui parait déjà avancé en âge, est à genoux et les mains jointes. Plus à la droite, on voit une
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fleur de lys d'assez grande dimension. A gauche se tient debout un individu imberbe, vêtu d'une aube qui tombe jusqu'à terre. Il est coiffé d'une mitre et tient dans ses mains une longue draperie, ou plutôt un manteau qu'il a l'air de remettre au personnage agenouillé. (Voir fig. 6e.) Au risque de nous tromper encore, nous pensons qu'il faut voir ici le pape Léon 111 , présentant à Charlemagne le manteau impérial, cérémonie qui eut lieu dans l'église du Vatican le jour de Noël, la dernière année du vme siècle.
De tout ce qui précède, nous croyons devoir conclure : 1° que l'église de Champ, loin de remonter au commen- cement du ixe siècle, a été construite au commencement du xie ; 2° que cette église est néanmoins une des plus anciennes , peut-être même la plus ancienne que notre province ait conservée ; 5° que le font baptismal n'a été exécuté que pendant le xve siècle ; 4° enfin, que le chapi- piteau sur lequel on voit deux personnages à cheval, et trois des faces du font baptismal offrent, selon toutes les apparences, de véritables représentations historiques1.
1. On suppléera à l'insuffisance de notre mémoire au moyen des figures qui l'accompagnent, et qui sont des reproductions fidèles des dessins originaux exécutés, il y a environ vingt-cinq ans, par. M. Ho- gard père, d'Epinal. Nous devons les copies de ces dessins à l'obli- geance de M. Hogard fils, directeur des chemins vicinaux du dépar- tement des Vosges. Les originaux accompagnent une notice histo- rique, inédite sur l'église de Champ, composée en 1822 par M. Mou- geot, médecin a Bruyères.
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REPERTOIRE ARCHÉOLOGIQUE
DU
DÉPARTEMENT DE LAMEURTHE
RENSEIGNEMENTS
BlBLlOCRANftllES ET ABRÉVIATIONS.
Bull. Bulletins de la Société cl' Archéologie lorraine.
C. Communes de la Meurthe, par M. Henri Lepage.
D. T. Dictionnaire topographique de la Meurthe, par le
même.
«L Journal de la Société d'Archéologie.
M. Michel, Statistique de 1822.
Mém. Mémoires de la Société d'Archéologie lorraine.
S. Statistique de la Meurthe, par M. Henri Lepage.
Nota. La pagination de ce travail fait suite à celle du Répertoire archéologique de l'arrondissement de Sarrebourg, publié dans le t. IVe des Mémoires, afin que les amateurs puissent, plus tard, s'ils le désirent, réunir les différents Répertoires archéologiques qui au- ront été publiés par la Société.
RÉPERTOIRE ARCHÉOLOGIQUE
DES CANTONS DE
COLOMBEY ET TOUL-SUD
PAR M. E. OLRY.
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CANTON DE COLOMBEY.
ABONCOURT- EN -VOSGES. Époque romaine. Chemin ferré. Voie romaine venant de Vaudémont par Vandeléville, et prenant ensuite la direction du sud-ouest. Aux-Epices, ruines d'habitations, tuiles à rebords. Dans une forêt défrichée , à peu de distance du chemin ferré, monnaies antiques. | Ép. moderne. Ancienne voie dite Chemin-de-la-Borde (D. T.). Eglise paroissiale Saint- Pierre et Saint-Paul ; plan en forme de croix de Lorraine (C. table) ; chevet plat, du style roman de transition : longueur, dans œuvre, 5m 80 ; largeur, 4m 20 ; au fond, fenêtre ogivale de la 3e période, rapportée ; 1er croisillon formé, d'une part, par la sacristie, et, d'autre part, par la chapelle des seigneurs, du xvne siècle ou duxvme, car- rée, de 4m de côté ; avant-chœur de transition, au-dessus duquel s'élève la tour à bases romanes ; longueur, 4m 15 ;
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largeur, 4m 20 ; en avant, formant le 2e croisillon, deux chapelles dites de la Sainte-Vierge et de Saint-Joseph, des siècles derniers ; longueur, 4m ; profondeur, 5m 20 ; nef moderne, longueur, 8m 50 ; largeur, 5m; portail de la Renaissance ; dans l'intérieur, sur le devant du maitre- autel, bas-relief de la Renaissance, autrefois placé au- dessus du portail : le christ en croix et les douze apôtres ; dans la chapelle Saint-Joseph, un ancien rétable de la Renaissance, représentant le mariage de la Sainte-Vierge ; en face, un tableau peint en 1775 : la Sainle-Vicrge donnant le scapulaire à saint Dominique . A côté de l'église, château du xvinc siècle, saccagé en 1790 (C.)> grille monumentale avec les écus de Malvoisin et de Con- trisson (C.)«
ALLA1N-AUX-BOEUFS. Èp. romaine. Restes d'an- tiques constructions , tuiles à rebords , fragments de di- verses poteries, de meules en lave volcanique, aux lieux- dits la Haie-Mignot, les Plates-Pierres ; outre les produits antiques cités ci-dessus, on a trouvé un Vitellius et un Commode en argent, à la Sarrazinièrc ; des pierres plates sciées, avec des monnaies romaines en or, au Ga- gne-Petit ; au Poirier-Bécat, à 500 mètres au sud du village, dans des substructions gallo-romaines, depuis 1860, et en plantant de la vigne, découverte d'une foule d'objets : trusatyle, chaîne en fer ouvragée, fibule, clé, bague en bronze, mors de bride, petite lampe antique en terre cuite, fragments de poterie ornementée, monnaies romaines, etc. (Ces objets ont été offerts au Musée par E. Olry.) A la Haute-Borne, tronçon dévoie romaine, pavée en pierres debout sur 4m 50 de largeur et environ 50m de longueur, semblant relier la voie romaine de Lan- gres à Toul , aux Thermes de Crézilles. A la Poche ,
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plateau défriché vers 1826, trouvaille, depuis cette époque, de nombreuses monnaies romaines, de Trajan, d'Anto- nin, etc. ; en certains endroits, débris céramiques , frag- ments de meule en lave. A la Conielle, une soixantaine de moyens et petits bronzes romains frustes , trouvés à diverses époques dans un pâlis : quelques-uns de César, de Domilien et de Constantin. j| Ép. incertaine. Au Cercueil, à 200 mètres au nord du village, dans des car- rières, vers 1840, découverte de nombreuses sépultures (S.) avec débris d'armes, fers de lances. Au Han, à la sortie du village, du côté de Colombey, autres sépultures rangées et orientées, très-nombreuses, à 0m 50 ou 0m 40 de profondeur, quelques pierres plates protégeant la tête. || Moyen âge. Village très-ancien ; suivant Beaulieu, remontant au ve siècle ; mentionné d'ailleurs dans des chartes au ixe siècle. Au Monastère, à 2 kilomètres, dans la direction de Thuilley, traces d'anciennes habitations où la tradition prétend qu'il a existé une maison religieuse ; on y a trouvé divers objets au nombre desquels des pro- duits gallo-romains. A la Cour, quartier du village for- mant une enceinte carrée , constructions élevées sur les fondements d'un ancien couvent de femmes qu'on appe- lait les Dames de la Cour. Maison seigneuriale , à l'abbaye de Saint-Epvre ; salle du xve ou du xvie siècle avec fenêtre à meneau, surmontée d'ogives ; dans le tym- pan de l'une , un écusson fruste ; dans un mur de cette salle, où se tenaient les plaids-annaux, une arcade murée de 2m 50 de rayon , en pierre de taille calcinée , reste de constructions du xe ou du xie siècle. Maison de la cha- pelle Saint-Nicolas, bâtie au commencement du xvie siècle, résidence de l'abbé desservant sa chapelle, érigée sous ce vocable dans l'église, en 1594, par la famille Jo-
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bal. [| Ep. moderne. A la voie de Crépey, découverte, vers 1830, dans deux pots de terre, d'une grande quan- tité de pièces de menues monnaies, vendues pour seize sous. Village détruit par les Suédois ; traces des cons- tructions ruinées à cette époque ; trouvaille, dans des décombres , d'ustensiles de cuisine , d'objets divers et de monnaies en quantité, des ducs Charles III, Henri II, Charles IV et Nicole. Croix-Malhis, érigée à la mémoire d'une victime de la cruauté de la soldatesque qui rava- geait le pays à cette époque. Cimetière des pestiférés au N.-E. du village, dont il est séparé par un vallon seule- ment ; un quartier du village situé dans cette direction s'appelle la Bourde. Eglise paroissiale Saint-Maurice, reconstruite en 1788 ; dans l'intérieur, inscription lapi- daire avec la date 1594, rappelant la fondation de la cha- pelle Sainte-Nicolas. (Voy. notice sur Allain, par E. Olry; Journal, 18G1.)
ALLAMPS. Moyen âge. Village très-ancien, qui exis- tait déjà au vie siècle (C). Eglise paroissiale Saint-Pierre et Saint-Paul , du style roman de transition , sauf quel- ques changements opérés à diverses époques ; plan de forme rectangulaire : longueur dans œuvre, 19m 20 ; lar- geur, 1 lm 70 ; trois nefs de quatre travées, dont une pour le transept ; abside supprimée ; hauteur des voûtes : nef centrale, 7m 45 ; collatéraux, 5m 10 ; transept, déduction faite des deux degrés, 7m 40 ; voûtes sur nervures à bou- dins ; piliers intéressants, ceux qui avoisinent le transept notamment, reposant sur un socle octogonal de 2m 10 de diamètre; ce massif, en plan, a la forme d'une croix grecque, flanquée de quatre colonnes principales, et l'in- tervalle des bras offre encore onze colonnettes ; les cha- piteaux présentent une ornementation très-variée, con-
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sistant en des branches de vignes et de lierre , en des feuillages divers , feuilles à crochets , enroulements , ga- lons perlés , figures grossières ; dans le transept , deux oculi formés par un quatre-feuilles, à moulures toriques ; tour en pierre au-dessus de l'un des bras du transept ; porte d'entrée ornementée , dans le goût de la Renais- sance ; rétable du maitre-autel de cette dernière époque ; fonts du xne siècle. (Voy. notice sur l'église d'Allamps avec dessins par E. Olry ; Mémoires de la Société (VAr- chéologie,Xlle \ol.) \\ Ep. moderne. Dans le cimetière, près de la sacristie, découverte, vers 1850, d'un cercueil en pierre dont le couvercle était scellé ; il renfermait des ossements qu'on suppose être les restes d'un membre de la famille Ligniville, de Vannes. Près du moulin de la Grand-Saulx, tuilerie détruite.
BAGNEUX. Ep. romaine. Le Père Benoit Picart, deToul, explique ainsi l'étymologie de Bagneux : « Ban- niolum, lieu où les Romains avaient des bains » ; ce vil- lage, du reste, est très-ancien. Quelques auteurs ont parlé d'un camp et d'un fort sur le territoire, à proximité de cette localité ; mais on n'en retrouve aucune trace. Voie romaine de Langres à Toul par Soulosse , qui tra- verse le territoire du sud au nord , sur le sol de laquelle on a établi le chemin de grande communication n" 1 . En certains endroits, cette voie, qui s'élève en remblai, peut être examinée ; les fossés mettent à nu les couches de pierres au nombre de quatre dont elle est formée ; ces couches, superposées, sont formées de pierres plates in- clinées sous un angle de 43° environ , et l'inclinaison al- terne à chaque couche. En 1838, au Château-Rouge, en abaissant le sol pour adoucir la pente du chemin de grande communication, découverte de sept squelettes
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rangés à lm 50 de profondeur : au nombre des objets trouvés près de ces sépultures , on distinguait quelques assiettes aux pieds , des pots aux genoux , un verre près de la tète ; un squelette de femme portait au cou une mé- daille effacée. (Ces objets font partie de la collection de M. Dufresne, conseiller de préfecture à Metz) (S.). Subs- tructions gallo-romaines indiquées à la surface du sol par quantité de tuiles à rebords et à stries, par des frag- ments de poteries, de meules en lave, des monnaies, des pierres plates sciées, aux lieudits : le Viller, UAnglure, la Croix, la Sarrazinière ; on en rencontre aussi en Floriey, en Maizières, en Champagne , à la Pérelle, le long de la voie romaine, sur une étendue d'environ un kilomètre ; on a trouvé, en outre, de grandes briques très-épaisses et des étriers ; en labourant le sol, vers 1840, on y a découvert un puits à parois en terre glaise fortement battue. || Moyen âge. Fonts du xve siècle , à panneaux ornés d'ogives , relégués dans l'ancien jardin de la cure. Ancienne voie dite Chemin de la Bataille (D. T.) ^ se dirigeant vers Barisey-la-Côte. || Êp. mo- derne. Eglise paroissiale Saint-Remy, dont la nef, brûlée par les Suédois , fut reconstruite à la fin du xvne siècle et remaniée encore plus tard ; tour romane de la 5e pé- riode , dont le porche était autrefois l'avant-chœur de l'église, qui était alors orientée ; ce porche, dans lequel on remarque deux baies romanes murées, est voûté sur ner- vures à boudins de 0m 50 de diamètre, qui se rencontrent sans clé de voûte ; l'arcade, pour entrer dans la nef, est une ogive obtuse reposant sur des chapiteaux cubiques et colonnes engagées de lm 45 de hauteur et 0m 45 de dia- mètre ; les chapiteaux, à tailloir très-épais, sont ornés, l'un de larges feuilles d'eau, l'autre de galons perlés. Au-
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tel Sainte-Brigitte, but d'un pèlerinage fréquenté pour les maladies d'enfants. Au Moulin-à-Vent et au Vieux- Moulin, traces des constructions des moulins élevés à diverses époques dans ces deux cantons (G.). — Village in- cendié par les Suédois. A la Justice , entre Bagneux et Crézilles , un gibet avant la Révolution. (Voy. notice sur Bagneux, par E. Olry ; Journal, 4865.)
BAR1SEY-AU-PLAIN. Êp. romaine. Voie de Langres à Toul, le long de laquelle on a rencontré des sépultures, une hache et divers objets. M. de Beuzelin, dans sa Sta- tistique monumentale, dit qu'on a trouvé aussi près de cette voie une grosse pierre appelée vulgairement déma, à cause de quatre lettres qui y sont gravées et qui vien- nent probablement d'une inscription aux dieux mânes : Diis manibus (S.) ; cette pierre a disparu, et a servi, dit-on, à faire une borne kilométrique. A l Etang , à la Lochère et à la Folie, traces d'habitations antiques, tuiles à rebords, monnaies. Sur la vieille Pierrière, en 1864, dans des carrières, découverte d'un cercueil en pierre, brisé, renfermant des ossements ; à côlé, deux poteries romaines, l'une cassée, mais l'autre, intacte, a été déposée au Musée (J.). Dans le même canton et à proximité de ce cercueil, d'autres sépultures et trouvaille d'une dizaine de monnaies déposées au Musée (J. 1861) : les plus importantes étaient d'Agrippine, de Néron et d'Antonin. (Ces sépultures ont été décrites par E. Olry; Journal, 1864.) [| Moyen âge. Restes de deux châteaux ; le premier, à l'extrémité orientale du village, a été dé- truit après la Révolution , et il n'en reste plus que quel- ques parties du mur d'enceinte , le rez-de-chaussée des tours rondes aux angles et la porte surmontée de consoles de mâchicoulis du xve siècle ; le second , qui portait le
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nom de C hâ tenu- for t-des-lrois-Barisey , ruiné déjà au xvir siècle, occupait remplacement de l'église et du ci- metière actuel (S.) ; le cimetière est encore bordé par les anciens fossés, aux trois quarts comblés ; on peut sup- poser qu'au moyen âge, l'église et le château existaient simultanément, l'un protégeant l'autre ; la tour romane qui sert aujourd'hui de clocher semblerait le prouver.
Ép. moderne. Eglise paroissiale Saint-Martin, orien- tée, qui présente des caractères archi tectoniques de plu- sieurs époques ; nef reconstruite au xvic siècle ; au-dessus de la porte d'entrée, cette inscription en majuscules : Que toujours Jcs Christ en nos cœurs soil escript. 1383 ; chœur pcntagonal du style ogival de la 3e époque ; chapelle castrale ou presbytéralc adossée à la nef, occu- pant remplacement du bras gauche d'un transept, voûtée sur lierres et tiercerons ; belle vitre ogivale à meneaux rayonnants du xvic siècle ; une autre chapelle, plus petite, adossée à la première , semblant remonter au xme ou au xivc siècle ; à l'occident de la nef, tour romane à baies géminées; à l'extérieur de la nef, on remarque sur le mur septentrional des traces de l'architecture romane; restes de l'ancien chàteau-fort ; près de la tour, porte murée du xme siècle ; à l'intérieur, un confessionnal de 1357 dans la chapelle, et un bénitier en bronze, supposé vase antique, près de la porte d'entrée. A la Planche, près de la voie romaine, ruines de l'ancien village de Ba- risey-la-Planche, détruit pendant la guerre de Trente ans. Au village , nombreuses constructions du xv°, du xvic et du xvii0 siècles. Ancien chemin de la Croix- Rou(/c (D. T.), dans la direction de Barisey-la-Planche. (Voy. Journal, 1863.)
BARISEY-LA-COTE. Ép. romaine. Vestiges d'an-
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tiennes constructions avec tuiles plates, à la Corvèe-des- Templièrs. || Moyen âge. Eglise paroissiale sous l'in- vocation de Notre-Dame en sa Nativité , orientée , qui serait tout entière du style roman de transition si la nef n'avait été remaniée récemment ; sanctuaire carré de 5 mètres de côté, non voûté, percé de trois baies hautes, étroites et ébrasées ; celle du fond se termine en plein- cintre et les deux autres en ogive ; arc triomphal en plein- cintre , nef rectangulaire ; longueur, 15m 50 ; largeur, 7m. Avant la reconstruction, la nef n'avait que Gm 20 de largeur; tour rectangulaire , castrée, d'environ G mètres de côté , remaniée depuis longtemps , meurtrières ; près de la tour, une porte murée , du xme siècle, à tympan ogival couronné d'un revers d'eau saillant ; dans le mur latéral , porte d'entrée rapportée , très-ornementée , du style roman de la dernière période : de chaque côté, deux colonnes d'inégale hauteur, placées dans des rentrants, avec chapiteaux ornés, l'un d'eux d'un oiseau, et les au- tres de palmettes, de galons, de raisins ; l'archivolte est formée de trois moulures principales , séparées chacune par un filet : la première, de l'extérieur à l'intérieur, est chargée de dents de scie ; la seconde , de feuilles d'eau sur une moitié et sur l'autre, d'une double feuille de vigne avec un raisin au milieu , le tout entouré d'un ga- lon ; la troisième offre seulement des feuilles d'eau qui se retrouvent aussi dans le tailloir des chapiteaux. Dans l'église , pierres tombales du xve siècle et du xvie. Dans le cimetière, croix principale sur le fût de laquelle on trouve le millésime 1559. Ancien chemin dit de la Cour- Guarin (D. T.). || Ep. moderne. Village détruit pen- dant la guerre de Trente ans , anciennement bâti aux environs de l'église, dans les vignes , où , en fouillant le
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sol, on retrouve de nombreuses fondations et souvent des ustensiles de cuisine.
BATTIGNY. Ep. incertaine. En Chazeau, vers 1856, découverte d'une urne funéraire qui fut brisée par la charrue ; elle était en verre très-épais, de près de 0m 30 de diamètre et renfermait des ossements. || Moyen âge. Au xe siècle, les comtes de Vaudémont y avaient déjà un château (M.), mais il n'en reste aucune trace. Eglise pa- roissiale Saint-Germain, agrandie, orientée; plan en forme de croix latine ; dimensions des différentes parties dont elle se compose et dans l'ordre où on les rencontre : nef, 9m 50 de longueur sur 5m 50 de largeur ; porche de la tour, carré, de 4m 70 de côté ; transept : 4m 50 de tra- versée sur 5m 50 de croisée ; chœur pentagonal de 4m 70 de largeur ; les deux premières parties appartiennent au roman secondaire , et les deux dernières au style ogival tertiaire ; fonts du xie siècle : massif octogonal, cannelé, reposant sur un soubassement orné de huit rosaces vo- lumineuses et grossières ; dans le transept, dalles tumu- laires ; sur l'une d'elles , inscription en lettres gothiques, et en tète une couronne de comte ; sur une autre , on lit
seulement : Cigist Mss Simon , et plus loin, la date
1587 ; tour romane à trois étages, le 5e sur chaque face, est percé de deux baies couronnées par un bandeau , ac- compagné d'un tore rompu , figurant une archivolte ; le même étage est orné, aux angles de la tour et de chaque côté des baies , de colonnettes supportant une sorte de corniche ou cymaise qui règne sur le pourtour, sur la- quelle s'appuie en même temps une archivolte ; chapi- teaux cubiques avec cannelures. A l'angle d'une maison de ferme, qu'on décore du nom de château, niche, statue et dais du xve siècle. A l'angle d'une autre, arcatures ogi-
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vales et statue mutilée. [| Ep. moderne. A la Tuilerie, restes de constructions avec quantité de tuiles modernes. Dans l'intérieur du village, fontaine Saint-Germain, sur- montée d'une croix à laquelle on attribue la vertu de guérir des maladies d'enfants (G.). — Village dépeuplé pendant la guerre de Trente ans (C).
BEUVEZIN. Ép. romaine. A la Roche-des-Puits, vestiges d'habitations , débris céramiques , fragments de meule en lave, ciment, monnaies romaines, tronçon du fût d'une colonne de 28 à 50 centimètres de diamètre, deux clés et d'autres produits antiques. Ruines romaines sur la Roche-de-Lanfaud et sur le Grand-Trait, tuiles à rebords. — Sur la Louvière, à un kilomètre de Beu- vezin, trouvaille, vers 1854, d'un chaudron en airain, renfermant environ 1,600 pièces en bronze ou en cuivre, 70 en argent et 24 en or qui ont été vendues en partie ; un grand nombre étaient de César. (M. Rosquin, deMac- concourt (Vosges), en possède un certain nombre.) || Ép. moderne. Ancienne voie dite C hemin-des-Morts (D. T.). Entre Beuvezin et Tramont-Lassus, croix érigée au xvme siècle, avec des fleurs de lis sur le fût. Église paroissiale Saint-Georges, reconstruite en 1785 ; l'an- cienne se trouvait sur la hauteur au N.-E. du village, dans le cimetière actuel.
COLOMBEY. Ép. romaine. Voie romaine de Lan- gres à Toul , passant à l'extrémité occidentale du terri- toire, près de laquelle on a trouvé un joli Trajan en bronze (J.). Tuiles plates à rebords et autres débris anti- ques au Coin-Jeammaire, à VHamonville, au Haul- de-Charmetle et à la Sarrazinière, sur une grande étendue. Sous-le-Taillis, en 1858, fouilles dans des constructions souterraines bâties en moellons taillés au
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ciseau ; trouvaille , dans les décombres, d'une belle po- terie rouge ornementée qui fut brisée , de tuiles à re- bords, de cornes de cerf, etc. Aux Raics-Montans, subs- tructions dans lesquelles on découvrit, vers 1840, en provignant , des fers de lances, des lames de sabres et des monnaies romaines. || Moyen âge. Localité très- ancienne, mentionnée déjà au ixc siècle (S.). Chez Mme veuve Christophe, un chenet du xve siècle fleurdelisé, avec cette inscription, en lettres gothiques, sur la tige verticale: Vive le Roy. | Èp. moderne. Une maison de maître , avec porte cochère de la Renaissance ; à l'angle, statue, niche et dais dans le goût du xvc siècle. Bourg ruiné pendant la guerre de Trente ans. Eglise paroissiale Saint-Maurice, rebâtie en 1770; derrière les lambris du chœur, pierres obituaires du xvne et du xvme, dans l'avant-chœur, pierre tombale de M. Elie de Jouard Dumaignou, commandant de place de Toul (-{- 1770). Dans la chapelle érigée, sous le vocable de Notre-Dame- des-Anges, au fond de l'église, plusieurs petits tableaux, quelques-uns estampillés en métal, genre bizantin, pro- venant de Sébastopol, offerts par M. Serrière, capitaine , né à Colombey : le premier représente la Vierge noire au Suaire ; haut. 51 cent. ; Iarg. 24 cent.; peint sur bois et laque dorée ; avec cette inscription en russe : Mère, ne pleurez pas, il ressuscitera. Le deuxième, de mêmes dimensions et du même genre, représente saint Dmytry (saint Demètre ou Démétrius), évêque, l'un des patrons de la Russie, où il est en grande vénération; on suppose ces deux tableaux antérieurs au xive siècle. Le troisième, Noire-Seigneur assis sur un trône porté par deux anges ; d'un côté la Sainte-Vierge, de l'autre saint Jean; ce tableau, qui est le plus apprécié, à cause des deux
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tètes d'anges, a 45 cent, sur 55 ; il est supposé du xivc siècle, et il appartient a l'école bizanline ; la couronne, l'auréole, les mains, les pieds et le globe de la terre sont estampillés en argent. Le quatrième , donné par Mme Kazanowitzch, née Collin, de Colombey, est une copie d'un grand tableau qui se trouve dans la cathédrale de Moscou , dit la Vierge au canif, en grande vénération en Russie ; complètement estampillé en argent ; les deux têtes, les mains et les pieds de l'enfant Jésus sont seuls apparents ; dimensions : 28 centimètres sur 25. — On remarque, en outre, venant aussi de la cathédrale de Sé- bastopol , le tableau d'une oriflamme et la croix grecque en cuivre qui en surmontait la hampe.
GOURCELLES. Ep. romaine. Eglise paroissiale Saint-Nicolas, autrefois la mère église de Courcelles, Blémerey et Chef-Haut (Vosges), orientée et reconstruite en 4778 sur les débris d'une ancienne église romane dont il reste encore la tour à peu près intacte, sur laquelle , à l'étage supérieur, on remarque des baies géminées en plein-cintre ; au fond du chœur, un tableau qui repré- sente les patrons des trois villages. Dans la remise de la cure, quelques restes d'une ancienne chapelle, qu'on croit être celle de Sainte-Catherine , bâtie autrefois au fond du cimetière. Maison seigneuriale du xvne siècle.
CREPEY. Ep. romaine. Aux Tuillottes, à un ki- lomètre au sud de Crépey, fragments nombreux de tuiles plates et à rebords. [ Moyen âge. Village mentionné dans des chartes en faveur de Saint-Epvre, dès le ixe
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siècle (C). | Ep. moderne. Ruines d'habitations aux abords du village , notamment près du quartier dit en Diarou, et sous les vignes de la Ferté, où la tradition prétend qu'il a existé un ancien château et où l'on trouve,
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en fouillant le sol , des ustensiles de cuisine. En Cor- cieux, vers 1830, trouvaille d'une dizaine de pièces de monnaies dont on n'a pu indiquer ni l'âge , ni la prove- nance. Sur l'ancien chemin de Toul , à la Maladrerie, traces d'une ancienne léproserie, où l'on porta aussi, plus tard, les pestiférés (C). Sur la Bosse, dans la di- rection de Germiny, à l'Ermitage Sainte-Lucie, ruines d'une ancienne chapelle érigée sous ce vocable ; à peu de dislance, sépultures nombreuses avec des armes ; on y a trouvé aussi un boulet , vestiges d'un combat que la tradition fait remonter aux guerres de religion. A l'occi- dent de Crépey, chapelle de l'ermitage Saint-Lambert, remaniée , dans laquelle on trouve quelques fragments du xvc siècle. Village ayant beaucoup souffert pendant la guerre de Trente ans (S.). Église paroissiale sous le vo- cable de Notre-Dame en sa Nativité, reconstruite au vil- lage en 1787 ; l'ancienne, qui était la mère église de Ger- miny, s'élevait sur la hauteur, à l'orient de Crépey, au lieu dit à l'ancienne Église, où l'on trouve aussi l'an- cien cimetière et les ruines du presbytère.
DOLCOURT. Ép. moderne. Sur la côte, à l'occident de Dolcourt , chapelle de Coutances, remaniée, dans les murs de laquelle on remarque des fragments rapportés de fenêtres du style ogival tertiaire. Près de cette cha- pelle, sépultures nombreuses, qu'on croit être celles des victimes des pestes de 1650 à 1640; une croix, qui jonche le sol, offre encore le millésime 1652. Au Sorbier, sur la lisière de la forêt, une autre croix de la même époque, d'une autre victime de la peste qui mourut sur place en s'enfuyant. Village ayant beaucoup souffert pendant la guerre de Trente ans (G). Chapelle Saint-Claude, mo- derne , avec une petite cloche de 1693, à laquelle on
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attribue encore aujourd'hui la vertu de détourner les orages , à l'approche desquels on la sonne.
FAV1ÈRES. Ép. celtique. En Nabécote, pièces gau- loises dans des débris de constructions , elles ont été vendues. || Ép. romaine. A la Bonne-Fontaine, vers 4860, dans des fouilles, découverte de fondations et mise à nu d'un corridor et d'une pièce d'habitation dont l'aire était faite d'un ciment fleuri, espèce de mosaïque, d'une grande beauté ; dans les décombres, tuiles à rebords, avec d'autres débris gallo-romains , et du ciment en forme de tablettes de grandes dimensions, sur environ 46 centimètres d'épaisseur. (On en conserve un fragment chez Mme veuve Carel.) Dans le bois défriché du Mêtet , vers 4856, en deux endroits, restes de constructions, débris antiques et découverte d'une épée à poignée gar- nie en cuivre. Sons le Bois-du-Mètet, ruines d'habita- tions, tuilesplates, monnaies. Autour de l'ancienne église, sur la hauteur, à l'est de Favières, traces nombreuses d'anciennes constructions, avec tuiles à rebords. Entre le cimetière et les maisons du faubourg Saint- Antoine, cimetière gallo-romain, où l'on a fait des trouvailles nom- breuses de monnaies et d'objets antiques, notamment un anneau d'argent, une hache d'armes et un sabre, déposés au musée par M. Liébaut (J.) ; un vase en verre offert par E. Olry (J.). Dans la forêt du Grand-Rhinchard , vers 4830, dans un endroit où l'on remarque de nombreux pierriers , découverte d'un sarcophage antique , avec inscriptions et ornements. Reliques de Saint-Mansuy et de Saint -Amon dans l'église. || Ep. incertaine. A deux ou trois cents mètres au N.-O. de Favières, à la Croix-Porchat , vers 4790 , découverte de nombreux squelettes avec armures. || Moyen âge. Sous le Bois-
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de-Jersilol , trouvaille de monnaies mérovingiennes en or, de Ghildebert , de l'année b20 (S.). Suivant une an- cienne tradition, les rois francs auraient eu une habitation temporaire à Favières (S.). 11 existait autrefois une cha- pelle et un prieuré fondé en 10S1 (S.). Dans la forêt de 1 a\ ières, une ancienne voie porte le nom de Chemin des Princes de Vaiidémont, pour aller à Toul. Une autre voie, dite la Yiacelle , partait de l'ancienne église de Favières et allait à Gripport (S.)- Chemin des Ermites, de Favières à Saint-Amon (D. T.) . Au Haut-de-F civières, plusieurs constructions du xve siècle, que la tradition dé- signe sous le nom de Château des Princes de Vau- dèmont ; portes et fenêtres ornementées suivant le goût de l'époque ; à l'angle de l'une d'elles, niche et dais du xvc siècle ; dans l'intérieur, vastes cheminées, foyer pavé en briques vernissées, de plusieurs couleurs : vert, jaune, rouge ; escaliers en spirale ; dans le jardin , derrière ces constructions, découverte, en 1864, de fragments d'une élégante balustrade du xvc siècle, à ogives fleurdelisées. A Saint-Amon, antique ermitage saccagé en 181b, où se retira le saint évêque de Toul de ce nom ; grottes ; dans une roche , les pèlerins vont poser leur main dans une petite cavité , en forme de main, appelée Main de Saint-Amon. \\ Ép. moderne. Au cimetière, croix principale de 1604. Chez divers particuliers, dans des jardins, ou sur la voie publique , plusieurs autres croix du xvuc siècle. Chez Mlle Bellot, vierge peinte rapportée de Saint-Amon, à la Révolution. Dans la Forêt du Rin- chard, ancienne croix dite la Croix-Barcand ; et dans un vieil orme, une ancienne statue de la Vierge, appelée \foerge du Rinchard. A la Grateuse, foret voisine, dit le Grand-Bois, dans un vieux chêne , une autre statue
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de la Vierge, très-ancienne, à l'endroit où, suivant la tradition, les habitants de Favières auraient battu une troupe de Bar qui venait assiéger Vaudémont ; une croix, rapportée au village à la Révolution , avait été placée au lieu même où périt le chef de la troupe barisienne. A la Croix-du-Clou, sépulture des pestiférés. Bornes de ban avec fleurs de lis et croix de Lorraine. Eglise paroissiale rebâtie en 4785, au centre de la localité, sous le vocable Saint-Sulpice et Saint-Antoine ; l'ancienne se trouvait dans le cimetière actuel, à l'orient de Favières.
FÉCOCOURT. Ép. romaine. Voie dite Chemin des Romains, pavée en pierres debout, dans les pàtis com- munaux ; cette voie vient de Vaudémont, passe près de Vandelé ville et se dirige vers le S.-O. Au lieu dit la Grande-Maison, tuiles romaines. || Ép. incertaine, Sur-la-Côte, dans des pàtis, trouvaille, il y a une cin- quantaine d'années, de nombreuses pièces antiques. En Trimolot, vers 18130, dans un bois défriché, décou- verte d'une certaine quantité de monnaies, au milieu de fragments d'un pot de fer cassé. [| Moyen âge. Celte localité, au xie siècle, était un franc-alleu ; elle avait des seigneurs particuliers au xmc siècle, une maison forte et un château avec fossés au xve, qui furent ruinés au xvie. (C.) || Ép. moderne. Eglise paroissiale Saint-Remy , re- construite, en 1775, sur les ruines d'une église romane dont on retrouve encore des billettes rapportées dans la nouvelle construction ; chevet incliné. Croix principale du cimetière, très-ancienne. A quelque distance du vil- lage, chapelle Saint-Claude. — Sur une borne de ban, dite borne du Pied-de-Bœuf, croix de Lorraine.
GELAUCOURT. Ép. moderne. Vestiges de bâtiments au lieu dit les Neuves-Maisons, où l'on a trouvé des
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monnaies et des armes. Ancienne voie dite Chemin du Paradis. (D. T.) Au milieu du hameau, chapelle dédiée à saint Florentin , dans laquelle on remarque guelques traces du style ogival tertiaire. Près de cette chapelle, ancienne croix qui servait de démarcation entre les deux parties dont se composait Gclaucourt dans les siècles derniers : l'une dépendait de Battigny et l'autre de Lalœuf (S.).
GEMONV1LLE. Ép. romaine. Quelques monnaies à l'effigie des empereurs , trouvées sur le territoire. || Moyen âge. Il existait, dans cette localité, au xmc siècle, une maison (c'est-à-dire un château), avec ses dépen- dances, que les seigneurs tenaient en fief du comte de Vaudémont. (S.) Ép. moderne. On remarque quel- ques maisons offrant des traces de constructions du xvuc siècle. Église paroissiale Sainl-Privat, reconstruite en 4859 ; l'ancienne s'élevait au milieu du cimetière actuel, hors du village.
GERM1NY-AUX-TR01S-CIIATEAUX. Ép. romaine. Voie ancienne, dite Chemin de la Blanche-Dame (S), pavée en pierres debout, supposée voie romaine, allant de Vaudémont à Toul ; elle a environ 4™ 50 de largeur et n'offre que le summum dorsum. Ruines d'habitations gallo-romaines, à la Grande Voivre ; bois défriché, sur une grande étendue ; au Haul-Meix et au Jardin- Carré, aux deux extrémités du village ; dans ces deux derniers cantons, on a trouvé des tuiles, des briques de grandes dimensions, des fragments de marbre et d'autres objets antiques. A VEnfer, tuiles à rebords. || Moyen âge. Village très-ancien , mentionné au ixe siècle. Au xnie, trois châteaux construits par les seigneurs du lieu (S), et désignés, en raison de leur position dans le vil-
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lage, sous les noms de château (TEn-Haut , château Emmy et château cVEn-Bas. Le premier appartenait à la famille de Haraucourt, le second à celle de Dom- martin, et le troisième passa successivement à un Lutzel- bourg, à la famille d'Ourches (C) et aux Le Bègue, qui finirent par réunir les trois seigneuries au xvm° siècle. Au château iV En-Haut, ruines d'un immense donjon carré (S.) qui devait remonter au xue siècle; sur la façade du château, deux des quatre tourelles qui exis- taient autrefois ; quoique démantelées, on trouve encore les fonds-de-fosse, le rez-de-chaussée et le premier étage, constructions du xme siècle ; devant le château, maison forte, construite au xvie siècle avec cachettes dans l'épais- seur des murs ; le reste des constructions et les terrasses sont modernes. Au Château-Emmy , aujourd'hui mai- son de ferme , enceinte bordée de fossés ; granges et écuries de l'ancien château, avec porte orientale sur- montée de mâchicoulis du xve ou du xvie siècle. Au Château-cV En-Bas, il y a vingt ans , on voyait encore un pan de mur de l'ancien donjon. |j Ep. moderne. Eglise paroissiale Saint-Epvre , orientée et à sol en plan incliné ; chœur pentagonal et avant-chœur du style ogi- val flamboyant, donnés par les seigneurs à la fin du xvie siècle ; deux chapelles castrales, Saint-Jacques et Saint- Christophe, adossées à l'avant-chœur du côté de l'épitre, et de la même époque que le chœur et l'avant-chœur ; en face des chapelles , quelques restes d'un remarquable tombeau argué du xve siècle ; dalles tumulaires des siècles derniers ; nef et tour de la fin du xvie siècle. Village qui présente un cachet tout particulier d'ancienneté par le grand nombre de constructions du xve, du xvie et du xvne siècles qu'on y rencontre. Sur le territoire , restes
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d'une ancienne chapelle, à V lier mita (je ; d'un moulin à vent, sur le Mont ; d'un autre moulin, à la Prèle, et d'une censé entre le chemin de la Blanche-Dame et le moulin Saint-Mansuy, dit Moulin-au-Bas. Avant la Ré- volution, un gihet au lieu dit la Justice. Germiny fut érigé en comté, par Léopold, en 1724 , en faveur de Jo- seph Le Bègue, son garde des sceaux (S.)- (Voy. Jour- nal, novcmhre 1863.)
GIBEAUME1X. Ep. romaine. En Timois, sur un monticule, à l'est du village, découverte, vers 1835, de cercueils en pierre, ornementés (S.). |j Moyen âge. Quelques portes à linteaux ornés d'ogives ; dans le tym- pan de l'une, un écu chargé d'un Christ en croix. || Ep. moderne. Quelques traces du château qui existait déjà au xve siècle, et qui fut détruit en 1803 (S.). Une maison dite la Bergerie, dépendance de ce château, est une construction du xvie siècle ; dans des démolitions d'une autre dépendance, découverte d'une boite en ferhlanc renfermant environ 30 pièces d'argent, à l'effigie des rois de France du xvie siècle ; l'une d'elles était, de Charles X (cardinal de Bourbon). Eglise paroissiale Saint-Jean- Baptiste , orientée et remaniée ; chevet plat avec une fe- nêtre du xve siècle ; deux travées, du style romande transition, forment l'avant-chœur, qui a 7 mètres de lon- gueur totale et Gm 23 de largeur; pilastres et chapiteaux rectangulaires d'une ornementation uniforme ; nef de 1789 ; à gauche du chœur, chapelle castrale moderne, avec pierres tombales des seigneurs de Gibeaumeix dans l'intérieur. Au-dessus de la porte de cette chapelle, épi— taphe de Léopold de Raigecourt (f 1777) ; un peu plus loin, une autre épitaphe de 31. Dailly, seigneur du lieu (f 1616) ; tour faisant hache avec la nef sur le milieu du
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mur méridional. A l'extrémité occidentale du village, chapelle Saint-Maurice remaniée ; dans l'intérieur, petites arcalures ogivales en fronton et en bas-relief. Un hôpital de pestiférés, suivant la tradition, à quelque distance du village (S.), localité en partie détruite pendant la guerre de Trente ans (S.). Ancienne voie dite Chemin de la Potence, près de laquelle s'élevait un gibet.
GRIMONV1LLER. Moyen âge. Église paroissiale Saint-Epvre, du style roman de transition, sauf quelques changements partiels dans les baies de la nef ; plan en forme de croix latine ; chœur rectangulaire : longueur, 4m ; largeur, 4m 20 ; avant-chœur-, au-dessus duquel s'élève la tour; longueur, 4m 80; largeur, 5m 60. On y remarque deux arcs en ogive et deux baies romanes ; transept formé par les deux chapelles modernes de Nolre- Dame-de-la-Pitié et de Notre-Dame de Saint-Etienne et Saint-Jean-1'Evangéliste ; la première fondée en 1346 ; longueur, 5m 20 ; profondeur, 5m 50 ; nef, longueur, •ilm 10 ; largeur, 6™ 20 ; dans l'une des chapelles, pierre obituaire de 1618. A l'angle extérieur, près de l'entrée de l'église, à niveau du sol, une pierre cubique remar- quable , d'environ 0m 80 de côté , ornementée , qui a dû servir de chapiteau dans un édifice roman de la première période. On peut encore distinguer les feuilles d'acanthe sur deux étages , bien qu'assez grossièrement dessinées et taillées, et qu'elles aient été exposées aux dégradations de toutes sortes. Il existait à Grimonvillcr une maison (château) de seigneur au xme siècle (C). Au centre du village, ancienne croix, remontant à l'époque ogivale. Voie ancienne , dite Chemin de Diarville à Vicherey (S.). || Ep. moderne. —Village ruiné pendant la guerre de Trente ans (C).
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HOUSSELMONT. Moyen âge. Hameau mentionné dès le vnc siècle ; plus tard, franc-alleu en la possession des Ligni ville (S.)- Il Êp. moderne. Traces d'habita- tions dans les jardins et aux abords du village. Sur le bassin de la fontaine, croix avec la date 172Ii ; une autre croix:, à peu de dislance, avec fleurs de lis sur le fût, 1751. — A un kilomètre, dans la direction de Barisey- la-Cùte, chapelle sous le vocable de Notrc-Dame-des- Goulles, dotée et agrandie par la famille Ligniville de Vannes, en 1(570, comme l'indique ce millésime au-dessus de la porte ; chœur à fenêtres ogivales et crédence du xve ou du xvie siècle ; autel avec un rétable de la Renais- sance, orné d'un tableau de la même époque. — A 50 mètres au-dessous , fontaine de la chapelle avec croix et date 1670. La chapelle et la fontaine sont fréquentées par de nombreux pèlerins de la Meuse, des environs de Vau- couleurs. (Voy. Journal, 1865.)
MONT-L'ÉTROIT. Ép. romaine. A un kilomètre, à l'orient de cette localité , sur la Côte de Chapion, en- ceinte de forme ovalaire , d'environ 500 mètres de lon- gueur sur 150 de largeur, défendue , d'un côté, par l'es- carpement de la montagne, de l'autre, par un petit fossé. On peut supposer que c'était un poste d'observation pour surveiller la voie romaine de Langres à Toul, qui passe à peu de distance. La tradition parle aussi d'un cime- tière antique à proximité. (Cette position a été décrite par E. Olry ; Journal, 1865.) || Êp. moderne. Église paroissiale Saint-Remy, orientée , qui serait du style ro- man de transition si la nef n'avait été remaniée ; chœur rectangulaire, voûté sur nervures à boudins avec filet sur face ; arc triomphal en plein-cintre ; fenêtres dans le mur méridional de la nef seulement ; tour de la même époque
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que le chœur, et à baies rectangulaires ; deux tableaux dans la nef avec un écu pour signature (d'azur, à la cou- ronne d'or, au chef d'argent , chargé de trois étoiles d'a- zur, le tout surmonté d'une couronne de comte) ; dalles tumulaires du xvie siècle. Dans le cimetière, sur l'un des contreforts du chœur, pierre obituaire , érigée par Jean du Boys, chanoine de Saint-Gengout ; entête, l'écu de cette famille ; elle débute ainsi : ci-devant gisent les du
Boys A 1,500 mètres du village, ancienne croix
Saint-Remy, avec fontaine à côté , but d'un pèlerinage pour des maladies d'enfants. Bornes de ban, avec fleurs de lis ; sur l'une d'elles, la date 1746.
PULNEY. Ép. romaine. Traces d'anciens retranche- ments sur la crête de la montagne (S.). Sur le plateau et à quelque distance de ces fossés, tuiles romaines. A la Côte, sur le penchant de cette montagne, haches d'armes et fers de lances. En bas de la Côle , tuiles à rebords. Sur le sentier de Gugney , découverte d'un puits au fond duquel on a trouvé des ossements et une hache d'armes. || Moyen âge. Au xive siècle, Pulney était un fief qui relevait du comté de Vaudémont (C). Ep. moderne. Église paroissiale de Notre-Dame en sa Nati- vité, reconstruite à la fin du siècle dernier sur les fonde- ments d'une église romane dont on retrouve des vestiges ; tour faisant hache avec la nef ; dans l'intérieur, dalles tu- mulaires avec inscriptions gothiques dans l'encadrement ; sur les murs latéraux, pierres obituaires de 1604, 1617 et 1732. Au-dessus de Pulney, sur le penchant de la mon- tagne, chapelle en vénération (S.), dans laquelle on re- marque les millésimes 1654, 1674 et 1767 ; sur le côté de l'autel , une statue d'un certain mérite. Un ermitage détruit; à quelque distance, Fontaine V Ermite (S.).
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Signe patibulaire autrefois élevé à la Vieille- Justice. Les Trépassés (D. T.).
SAULXEROTTE. Moyen âge. Village (onde en 1242 par Hugues, eomle de Vaudémont (S.). Au lieu dit le Grand-Jardin, ruines d'habitations, où la tradition pré- tend qu'il a existé un couvent. — Église paroissiale Saint- Maurice, du xve siècle, sauf quelques modifications de détail ; plan en forme de croix latine ; une seule nef, transept formé de deux chapelles ; abside qui renferme, dans une châsse, le chef de saint Amon, en grande véné- ration , provenant de l'ermitage de ce nom ; une chaire de 1752, ouvragée, avec croix de Lorraine. Au village, sur plusieurs maisons, petites arcatures ogivales, en bas- relief, de la 5e époque. — Ép. moderne. Au Haul-de- Bcaumont, vers 1850, trouvaille de monnaies lorraines. 11 y a environ soixante ans , découverte d'un pot à huit pans renfermant plusieurs pièces d'or, au Haut-du- Hézeux. — Chez l'abbé Bith , un dessin offrant vingt- trois personnages, avec cette indication au bas : N. Pous- sin pinxit ex Museo Anlli? Stella parisys. Clauda Stella sculpt. et excud. cum privil. Régis, 1674.
SAULXURES-LÈS-VANNES. Ép. romaine. On ren- contre sur le ban quelques fragments de tuiles à rebords. || Moyen âge. Village ancien dont il est parlé dans des chartes en faveur de Saint-Epvre au ix° siècle (G.). Au- dessous et à côté du cimetière, lieu dit Aux Fossés, enceinte carrée , d'environ 50 mètres de côté , bordée de fossés larges et profonds , d'un ancien château féodal dé- truit de temps immémorial. A quelque distance, dans des fouilles à bâtir, découverte , en deux endroits , vers 1848, de plusieurs squelettes, les uns étaient écrasés sous d'énormes pierres avec des débris d'armes. A deux kilo-
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mètres , dans la direction de Mont-1'Etroit , ruines d'une ancienne localité détruite depuis longtemps , qui portait le nom de Saulxures-lès-Taprey , ou seulement Ta- prey. \ Ep. moderne. Commet , ferme à trois kilo- mètres au sud de Saulxures ; censé qui renfermait autre- fois deux maisons-fiefs (S.). Au-dessous des ruines de Taprey, en Mèrigny ou Marigny, traces du château de ce nom , autrefois fief , détruit depuis la Révolution ; il appartenait à la famille noble des Baillivy et était leur ré- sidence. — Eglise paroissiale Saint-Martin , rebâtie en 1818. Dans l'avant-chœur, pierre tombale de François de Baillivy de Mérigny (f 1686) et de Françoise de Rosières, son épouse (f 1687) ; en tète, l'écu des Baillivy, sur- monté d'une couronne de comte. (Voy. Journal, 1864.) SELAINCOURT. Ep. romaine. Substructions et tui- les à rebords Aux Tuilotles. j| Moyen âge. Des chartes, en faveur de l'abbaye de Saint-Epvre , font mention de cette localité au ixe siècle. Dans la rue du Bois, ancien- nement rue de l'Abbaye, il y avait autrefois une abbaye ou un prieuré de l'ordre de Saint-Benoit ; les vestiges de bâtiments se voient encore (C.) ; ce sont des construc- tions du xve ou du xvie siècle : fenêtres à croisillons, niche, statue et dais de cette époque ; à peu de distance, dans les vignes , cimetière de l'abbaye et découverte , en 1864, de sépultures. Croix principale du cimetière , très- ancienne, avec un groupe d'une bonne exécution ; au dos, une statue d'archevêque surmontée d'un fronton formant auvent. Ruines d'habitations au Haut-du-Trit, et digue au Vieux-Moulin. j| Èp. moderne. Maison seigneuriale du commencement du xvine siècle ; au-des- sus de la porte, dans une belle guirlande , un écu chargé d'une croix potencée et la date 1705. Devant cette mai-
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son, grande croix érigée en 1743. — Église paroissiale Saint-Epvre, reconstruite en 1778 ; dans l'intérieur, plu- sieurs pierres obituaircs des siècles derniers.
THUILLEY-AUX-GROSE1LLES. Ép. romaine. Dé- bris d'habitations avec tuiles romaines , au lieu dit la Côte-Claudin. Ancien chemin supposé voie romaine, continuation du chemin delà Blanche-Dame, que l'on ren- contre sur le territoire de Germiny. || Moyen àge.Ycs- tiges d'anciennes constructions à l'orient et près de Thuil- ley, dans un endroit appelé Au Château- Grignon, où la tradition veut qu'il y ait eu un château. Ce village existait déjà au xc siècle (S.). || Ép. moderne. Maison seigneuriale à l'abbaye de Sainl-Mansuy, du xvic ou du xvuc siècle, reconstruite sur l'emplacement d'un château féodal ; on a retrouvé la base des tours rondes qui le défendaient. A 500 mètres , à l'occident de Thuilley, ci- metière au centre duquel s'élevait l'ancienne église , déjà en ruines au commencement du xvmc siècle. — Eglise paroissiale Saint-Martin, reconstruite en 1854. — Village dépeuplé pendant la guerre de Trente ans (S.).
TRAMONT-EMY. Ép. romaine. Près d'un canton ap- pelé le Chûtelet, dans un taillis, restes d'antiques constructions, tuiles à rebords. || h 'p. incertaine. Sé- pultures nombreuses découvertes Au Tombois, dans des carrières. Moyen âge. Au milieu du village, une grande croix de la période gothique, à la partie supé- rieure de laquelle on remarque une belle rosace à huit lobes, fleurie, d'environ un mètre de diamètre. Une autre croix de la même époque , ù quatre lobes , sur le chemin de Tramont-Saint- André.
TRAMONT-LASSUS. Ép. romaine. Voie romaine de Vaudémont à Vicherey, par Vandeléville. || Moyen âge.
— 81 — Trouvaille de monnaies antiques. Ancienne croix au vil- lage, dont la colonne semblerait remonter au xmc siècle. || Ép. moderne. Vestiges d'habitations aux abords du village. Bornes de ban, dans la forêt, avec croix de Lor- raine. — Église paroissiale Saint-Remy, de la fin du siècle dernier.
TRAMONT-SAINT-ANDRÉ. Ép. moderne. Fon- taine-la-Malade, hors du village où l'on portait les pes- tiférés. Sur le chemin de Vicherey, statuette de la Vierge dans une niche ménagée dans un chêne plusieurs fois séculaire. — Eglise paroissiale Saint-André, reconstruite en 1852. Près de la porte du cimetière, bas-relief de la Renaissance rapporté dans le mur et provenant de l'an- cienne église. Dalles tumulaires du xvie et du xvne siècles, servant de degrés pour monter au cimetière.
URUFFE. Ép. incertaine. Près du village, vers 1850, dans des fouilles à bâtir, découverte de deux squelettes dont la tète était protégée par des laves. Voie très-an- cienne, dite Chemin Brabant, se dirigeant vers Trave- ron, fréquentée autrefois, suivant la tradition, par l'évê- que et les chanoines de Toul, pour aller de Blénod à Brixey et autres de leurs domaines sur la Meuse. || Moyen âge. Village très-ancien, mentionné dès le vne siècle (G.). Ép. moderne. Près du moulin, en ouvrant les fossés du chemin vicinal de Pagny, découverte de fondations qu'on croit être celles d'une ancienne chapelle. Église paroissiale Saint-Martin, reconstruite vers 1860, sur les débris d'une église ogivale. Suivant la tradition, l'emplacement de l'église aurait été autrefois occupé par un château féodal dont il reste encore quelques traces des fossés. A côté de l'église, maison seigneuriale du xvie ou du xvnc siècle.
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VANDELÉVILLE. Êp. romaine. Sur la montagne de Framont, à l'est du village, restes d'anciens retranche- ments formes de trois fossés, dont les terres ont été re- jetées à l'intérieur. Voie romaine privée en pierres de- bout, venant de Sion-Vaudémont et se bifurquant en avant de Vandeléville : l'un des tronçons, qui suit la val- lée , va sur les Tramont et Vichcrcy ; l'autre , qui passe entre Vandeléville et Fécocourt , se dirige vers le S.-O. (Voy. Mémoire de M. Bottin, inséré dans les Mémoires de la Société des Antiquaires de France, t. III.) Au pied de Framont, sur le sol de l'antique Rouille, détruite au xvie ou au xvne siècle, sépultures dans des cercueils en pierre (S.), médailles romaines d'Antonin. Tuiles plates et restes de constructions en Hercha/mp: Trouvaille de monnaies romaines sur le Monl-Curel, l'une de l'empe- reur Gordien. Moyen âge. Cette localité possédait autrefois un prieuré de l'ordre de Saint-Augustin , con- firmé en 1075. La maison pricuriale était franc-alleu (S.).
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\ Ep. moderne. Eglise paroissiale Saint-Léger et Saint- Pierre, qui semble avoir été construite en 1670, ainsi que l'indiquerait ce millésime qu'on voit sur la voûte delà crypte. Avant, elle était bâtie au village de Roville (S.) ; longueur de la nef, 17m 50 ; largeur, 6m 4a ; avant-chœur : lon- gueur, 5m 50 ; largeur, 5m GO ; abside terminée circulai- rement, ayant 2m 5a de rayon ; pierre obituaire de 1665. Cnpte sous les deux tiers de la longueur de l'église, l'une des plus belles ruines du pays , mais en très-mau- vais état, fondée par Mme de Lamotte (S.) ; plan rectan- gulaire terminé circulaircment aux deux extrémités ; longueur totale, 15 mètres ; largeur, 4*" 50 ; rayon des extrémités, 2m 10 ; voûte en berceau, ornée de cinq ar- cades ; extrémités voûtées en cul de four ; sanctuaire
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orné de quatre arceaux élégants ; aux voûtes et aux murs, fresques qui ont presque entièrement disparu ; en plu- sieurs endroits , l'écu de Cardon-Vidampierre ; pavé de briques en formes de larmes ; deux vitres élégantes (S.) ; rétable de l'autel, du xvne siècle. Au-dessous de la crypte, caveau qui renfermait autrefois quatre cercueils (S.), dont les ais et les ossements jonchent le sol ; l'entrée qui se trouve dans la crypte, en face de la fenêtre princi- pale, est ornée d'un arbre généalogique dont les écussons ont été mutilés. Sur le couvercle fermant l'entrée de ce caveau , il y avait des statues d'un remarquable travail (S.). Au lieu dit la Chapelle, traces de constructions, sépultures. A la limite du ban, dans la forêt, bornes avec croix de Lorraine et fleurs de lis. Château moderne du xvme siècle. — Vandeléville , qui était un fief dans l'ori- gine, fut érigé en comté par Léopold, en 1725, en faveur de M. Cardon-Vidampierre (C).
VANNES. Ép. moderne. A un kilomètre S.-E. de Vannes, Au Château, quelques restes d'un remarquable château, reconstruit, par Jean- Jacques de Ligniville, à la fin du xvie ou au commencement du xvue siècle, sur les ruines d'un ancien château féodal ; fossés aux trois quarts comblés ; caves et quelques fragments de sculptures épars, rapportés dans les constructions particulières éle- vées à l'époque des démolitions du château , c'est-à-dire vers 4830. En Sèche-Fonla'me, vestiges de constructions ruinées au siècle dernier. Au Genièvre, gibet avant la Révolution. Église paroissiale Saint-Martin , reconstruite vers 1848 ; sous le sol de l'ancienne église, caveau creusé par J.-J. de Ligniville, dans lequel se trouvait la sépul- ture de ses trois épouses. Dans la nef de l'église actuelle, au-dessus de ce caveau, qui est condamné, épitaphe de
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Mmc Suzanne de Gournay (-J- 1<>09), Tune des épouses de J.-J. de Ligniville. A côté de eette épitaphe et en bas- relief, neuf écus peints, parmi lesquels on distingue ceux de Ville et du Chastclct ; sur la façade de l'église deux statues : sainte Catherine et sainte Marguerite venant du caveau , comme l' épitaphe et le bas-relief généalogique.
CANTON DE TOUL-SUD.
(Chef-lieu : Toul.)
BA1NVILLE-SUR-MADON. Èp. romaine. Ancienne voie romaine pavée en pierres debout, appelée Chemin- le-Comte, venant de Xeuilley et aboutissant, près de Sexey-aux-Forges, à la Moselle qu'elle semble traverser pour se diriger ensuite vers le N.-O. Près d'un endroit appelé Chàleau-des-Sarrazins , lieu dit les Bécasses , débris de constructions, tuiles plates, monnaies romaines ; vers 1840, trouvaille, au même lieu, d'une tête en bronze d'un remarquable travail : yeux d'argent et deux ailes, dont l'une brisée. Cette découverte fut recueillie par M. l'abbé Garo, qui la fait remonter au Haut-Empire ; elle fait partie de sa collection (C). Aux Rondes- Vignes, en 1858, en construisant le chemin de la côte, découverte de nombreuses sépultures avec des fers de lances , des sabres, des flèches, etc. , déposés au Musée. (Voy. note sur cette découverte par A. Digot ; Journal, 1857.) || Moyen à (je. Dessus de portes ornés d'ogives de la der- nière période. | Ep. moderne. Maison franche rebâtie en 1611 par Jean Callot, et habitée par l'immortel gra- veur (C). On voit encore, au premier étage, la salle qui lui servait d'atelier ; sur la clé du cintre de la porte d'en- trée, la date 1611 avec l'écu des Bouligny, propriétaires
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actuels , qui a probablement remplacé celui des Callot (S.)- Dans la forêt de Bainville, Croix Haquart, érigée en 1630. Village ruiné et brûlé par les Suédois (C). Er- mitage de Fontenel sous l'invocation de Sainte-Anne (C.)« Église paroissiale Saint-Martin , rebâtie en 4 G66 ; autel en bois sculpté qui vient, dit-on, de la chapelle des Évêques de Toul ; en avant du sanctuaire , plusieurs pierres tombales , dont l'une d'une sœur de Callot avec le millésime 1611 (S.). Trois censés sur le territoire : le Château-fort, les Baraques et le Moulin (C).
BICQUELEY. Ep. romaine. Voie romaine de Langres à Toul passant à l'extrémité occidentale du territoire. Chemin antique, supposé voie romaine de Toul à Vaudé- mont, dit Chemin de Vézelise, ou Vieille-Route, pavé en pierres debout, séparant le ban de Bicqueley d'avec celui de Pierre, suivant une direction parallèle à la route n° 3 et à 1,500 mètres au nord. Au Trait-de-la-Meix, ruines d'habitations, tuiles à rebords. Ep. incertaine. Chemin Charlemagne reliant Bicqueley à la Vieille- Route dans la direction de Toul. Ancienne voie appelée chemin de C harmes-la-Côte , semblant être le prolon- gement du chemin Brabant. Découverte d'un vase an- tique, il y a quelques années , dans l'une des propriétés du château de Bicqueley. | Moyen âge. Un écu fruste incliné dans le tympan de l'ogive d'un linteau de porte. \\ Ep. moderne. A Valcourt, aujourd'hui maison de maître, censé avec une léproserie dès lexir3 siècle (S.) ; dans le jardin de M. Uriot, fondations qu'on croit être celles de la léproserie. Ruines de deux tuileries, l'une près de Valcourt et l'autre à l'extrémité du village. Châ- teau moderne ; dans le petit pavillon carré de gauche, en avant du corps de logis , restes d'une chapelle dévastée à
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la Révolution. Chez M. Perrin, une laque chargée de cinq écus frustes et de plusieurs croix de Lorraine. Église paroissiale Saint-Martin , rebâtie au siècle dernier ; un ancien maitre-autel en bois sculpté très-ouvragé, relégué au fond de l'église.
BLÉNOD-LÈS-TOUL. Ép. celtique. On croit que Blénod, Belcnodium , lire son nom de Belcn, sous le- quel Apollon était adoré par les anciens Lcuquois. M"r du Saussay, évèque de Toul (1057-1075), rapporte que de son temps on trouva près de Blénod , en un lieu aujour- d'hui inconnu , une statue d'Apollon avec des colonnes et les débris d'un temple (S.). (Voy. aussi Baulieu, Ar- chéologie de la Lorraine, t. IL) || Ép. romaine. Il a existé, dit-on, près de celte localité, un camp romain dont l'emplacement n'est pas bien déterminé : les uns l'ont placé sur le sol de la Voivrc, bois défriché, où l'on trouve des restes de constructions avec tuiles plates et monnaies romaines ; les autres l'indiquent sur la crête de la montagne , au lieu même où s'élevait la forteresse de Galiaud dès le vic siècle et où l'on retrouve encore des traces de retranchements (S.). A quelque distance au sud de cette position, ruines de constructions d'un ancien signal qui aurait existé, suivant M. Dufresne , à l'époque de la domination romaine, fj Moyen âge. Au temps de Dagobert, le bourg de Blénod, déjà considérable, devint le siège d'une chàtellcnie dépendant de l'évêché de Toul, comprenant les villages de Bicqueley , Blénod , Chaude- ney, Ecrouves, Grandménil, Gyc et Pierre. Dans un val- lon, à 5 kilomètres , chapelle de Sainte-Mcnne , but d'un pèlerinage fréquenté de temps immémorial , restaurée au xvic siècle par l'évèquc de Toul , Hugues des Hazards, originaire de Blénod, dont on voit les armes sur plusieurs
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portes des constructions adhérentes ; dans l'intérieur, une crèche gothique très-remarquahle, primitivement peinte. En face, engagées dans le mur, plusieurs statues de la même époque ; devant d'autel à bas-relief moderne d'une bonne exécution ; sur l'autel, d'autres statues qu'on peut faire remonter au xvie siècle. A peu de distance de la chapelle , fontaine à laquelle la tradition attribue une origine antique et miraculeuse. Chemin de la Blanche- Voie ou de la Grand' croix, qui conduit à Uruffe ; se- rait-ce la continuation du chemin Brabant qu'on trouve sur le territoire de cette dernière commune ? Ruines d'un château féodal à 1,500 mètres au sud de Blénod, appelé Beauchanois. Au bas du bourg, porte de l'ancienne cha- pelle Saint-Clément , à fronton ogival ; inscription dédi- catoire et date 1420. A peu de distance, plus bas, grande croix avec le millénaire 1454, année de la naissance de l'évêque Hugues des Hazards. Sur le devant de la maison de M. Bouchon, non loin du presbytère, un bas-relief de l'époque ogivale avec les armes de l'évêque. Église pa- roissiale Saint-Médard , reconstruite à neuf en 150G par Hugues des Hazards , avec une partie des débris de la forteresse de Galiaud et sur les ruines d'une ancienne église qui tombait de vétusté ; plan en forme de croix la- tine ; 42 mètres de longueur totale, 18 de largeur dans la nef, 25 dans le transept et 17 de hauteur sous clé ; voûte sur ogive, supportée par huit piliers qui décrivent, de la base jusqu'à la moitié de la hauteur, une gaine à pans réguliers , et se terminent , dans la seconde moitié, par un fût cylindrique ; chapiteaux simples, imitant ceux de l'ordre toscan ; quatre travées, dont une pour le tran- sept ; fenêtres ogivales à réseaux élégants et vitraux co- loriés, très-appréciées, mais toutes mutilées ; portail dans
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le goût de la Renaissance, sur la frise duquel une inscrip- tion dédicatoire avec la date 1512 ; au milieu du tympan du fronton , une belle rosace ogivale et en avant les ar- moiries de l'évêque (sur champ d'azur, avec une croix d'argent cantonnée de quatre dés de même) ; tour au- dessus du portail avec une flèche qui s'élève à 75 mètres de hauteur ; charpentes très-remarquables. A l'intérieur de l'église, au chœur, dans le mur latéral du côté de l'É- vangile, tombeau de Hugues des Ilazards, dont la dépouille mortelle repose dans un sépulcre ménagé dans l'épaisseur du mur ; monument en relief , très-remarquable , de la Renaissance, ayant 4 mètres de hauteur sur 5m 40 de lar- geur ; le corps de l'évêque , de grandeur naturelle , cou- ché, est revêtu des ornements pontificaux, les mains jointes, la tête sur un coussin et les pieds reposant sur un lion accroupi ; au-dessus, sept statuettes debout avec emblèmes des sciences , des lettres et des arts ; au-des- sous , dix pleureuses en habits monastiques , soutenant une bande sur laquelle on lit : Vita hominis , nasci la- borare, mort; au-dessous de l'effigie du Pontife , une table de cuivre avec une inscription en lettres gothiques, ou notice sur la vie du saint prélat. (Voy. description de ce tombeau. Bull, de la Société d'Archéol., t. I.) En avant du sanctuaire, pierres tumulaires de plusieurs mem- bres de la famille de l'évêque, avec inscriptions en lettres gothiques ; d'autres pierres tombales des siècles derniers ; inscriptions tumulaires et obituaires du xvie siècle sur les piliers qui séparent la nef du transept ; dans le mur laté- ral méridional , un petit monument à deux colonnes avec inscriptions rappelant une fondation. Avant la Révolution, il existait plusieurs chapelles dans le transept et au fond du chœur, elles ont été détruites ; plusieurs tableaux d'un
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mérite douteux ; l'un d'eux, de petites dimensions, dans le transept , suivant la tradition , serait du xvie siècle et donnerait les traits du fondateur de l'église de Blénod. Peu de temps après sa construction , cette église fut en- tourée d'un chàteau-fort de forme quadrangulaire ; quel- ques parties sont encore conservées : on y remarquait autrefois les murailles hautes et épaisses , flanquées de tours rondes avec meurtrières aux angles, des fossés lar- ges et profonds avec pont-levis , guichet et une avant- cour bordée de murailles ; on disait cette forteresse im- prenable. Dans les constructions ménagées à l'intérieur, on trouve aujourd'hui encore le Brèdaine , salle des gens de justice; V Oratoire de l'évêque attenant à l'é- glise, et les Loges, bâties en 1516, qui ont servi de gre- nier dans l'origine à l'usage des habitants ; elles pouvaient aussi leur servir de retraite en cas d'attaque. — Ce châ- teau fut élevé sur les ruines d'une ancienne forteresse qui existait déjà en 1274, et qui fut réparée h diverses époques du moyen âge. Aqueduc de la grande rue, de 1554. Dans le bourg, un grand nombre d'anciennes habitations , quel- ques-unes du xve siècle et beaucoup du xvie. Le sentier qui monte à Galiaud s'appelle sentier de l'Evêquc ; un autre, qui gravit la montagne opposée , se nomme sen- tier du Moulin-à-Vent. || Ép. moderne. A Saint- Hubert, à 500 mètres de Blénod, dans les vignes, restes de constructions de la chapelle de ce nom : en 1865, près de ces ruines , découverte d'un grand nombre de sépul- tures à 0m 50 de profondeur. A l'orient et à quelque dis- tance du bourg, ruines d'habitations aux lieux dits Der- rière-ï Hôpital et la Rue, jusqu'où l'on suppose qu'au- trefois s'étendait le bourg de Blénod. Un quartier de cette commune porte le nom de Quarlier-des-Camisards.
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Aux Tuilières, tuilerie détruite. A la borne de ban dite Haute borne quadri banale, les syndics des quatre com- munes de Blénod, Bulligny, Allamps et Vannes , se réu- nissaient le 25 mars de chaque année en signe de con- corde. Celte coutume subsista jusqu'à la Révolution. (Voy. notice sur Blénod-lès-Toul , par M. l'abbé Guil- laume.)
BULLIGNY. Ep. celtique. Trouvaille sur le territoire d'une monnaie gauloise en argent. « Tout porte à croire, dit Beaulieu (Archéologie de la Lorraine, t. II, p. 1%), que Bulligny (Beleniacum) tire son nom de quelque temple consacré, dans ce lieu, au culte de Belen. \\ Ep. romaine. Sur le Fort, dans la direction d' Allamps , au milieu des vignes, à 1,500 mètres de Bulligny, substruc- tions gallo-romaines sur une longueur de U00 mètres au moins et sur une largeur de 2b0 , dans lesquelles , à di- verses époques, on a découvert un grand nombre d'objets antiques : débris céramiques , cruches, fragments de tru- satyles , de pierres plates sciées , de ciment et d'une es- pèce d'enduit en plâtre , dont quelques morceaux peints offrent des moulures ; monnaies romaines de César, de Valentinien ; enfin un bronze représentant un petit ani- mal d'environ cinq centimètres de longueur, qui est dé- posé dans la collection de M. Henriot, agent-voyer en chef. Près des ruines de l'ancienne chapelle de Notre-Daine-de- Pitié, détruite après la Révolution , et dans les cantons dits au Rupt-du-Frêne, aux Chènevières, en Châtil- lon et àlaSaulce, tuiles plates, traces d'habitations, monnaies romaines. || Moyen âge. Eglise paroissiale de la Sainte-Vierge en sa Nativité , du style ogival de la 5e époque, orientée et conservée sans changements bien importants ; plan en forme de croix latine ; une seule nef
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de trois travées : longueur, 15m 73 ; largeur, 7m 90; tran- sept de 6m 33 de longueur sur 17m 30 de largeur totale, les croisillons présentant deux travées ; abside pentago- nale de 5m 90 de largeur sur 3m 20 de profondeur ; hau- teur des voûtes : nef, 6m 13 ; chapelle, 4m 50. On pénètre de l'intérieur de l'église dans ces chapelles par une double arcade , et de l'extérieur par deux portes latérales avec impostes tréflées ; voûtes sur nervures en doucines ; pein- tures murales visibles dans les endroits où le badigeon est tombé ; fenêtres à réseaux variés avec fragments de vitraux historiés ; dans l'avant-chœur, dalle tumulaire du xvne siècle avec un écusson sur lequel on distingue un chevron et un cœur. En avant de la nef, tour de la même époque , mais remaniée à sa partie supérieure ; portail élégant sur lequel se dessine la Renaissance ; dans le tympan et dans le porche de la tour, statues gothiques. Dans la partie haute du village, chapelle Saint-Florentin, dans laquelle on remarque quelques fragments du xve siècle. Au village, linteau de porte orné d'ogives. || Ep. incertaine. Aux Tombois , dit aussi aux Trépassés, sépultures nombreuses sur une étendue d'environ 100 mètres, au milieu desquelles on a trouvé des armes , des armures et , à peu de distance , un biscaïen près de l'un des squelettes, supposé d'un chef; un sabre avec garni- ture élégante, boucles, agrafes, etc. || Ep. moderne. Tuilerie détruite au canton qui porte encore ce nom. Chez M. Pierrot, une taque avec écus de France, de Lor- raine, croix de Lorraine et la date 1G09. A un kilomètre de Bulligny, château de Tumejus du xvne siècle ou du xvme. Tumejus était une seigneurie qui existait déjà au xve siècle, à la possession des Ligniville. (Dictionnaire de la Noblesse-Ligniville.) Au xvne siècle, les seigneurs de Tumejus étaient comtes du Saint-Empire.
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CHARMES. Ep. romaine. Aux Poirielles , restes d'habitations, tuiles plates. Au Montignon, peu de temps avant la Révolution, découverte de sépultures nombreuses avec des débris d'armes et d'armures antiques ; les osse- ments étaient d'une taille colossale. (Michel , Statist. de 1822.) || Ep. incertaine. En Blussin, armes, casques. A l'extrémité N.-E. du territoire, chemin Brabant sup- posé voie antique , semblant relier la chaussée romaine de Langres à Toul , en face de Gye , à celle de Toul au camp de Void. || Moyen âge. A la sortie du village, du côté de Domgermain , restes de constructions de la cha- pelle Saint-Florentin qui existait dés le xe siècle , mais déjà détruite au commencement du xvne (S.). Près de là un canton s'appelle la Moincrie. Village incendié par les Bourguignons (M.). Au-dessus du village, sur une grande étendue, ruines d'habitations. || Ép. moderne. Près de la chapelle Saint-Fiacre (Meuse) , autrefois petit hôpital (S.), trouvaille, il y a quelques années, d'un certain nombre de monnaies lorraines. Eglise paroissiale de la Sainte- Vierge en sa Nativité, autrefois église mère de Domgermain (C.) ; nef de 1739 ; chœur ogival de la troi- sième période ; un écu fruste à une clé de voûte.
CHAUDENEY. Moyen âge. Au village , une croix de la période ogivale avec un chapiteau offrant un double rinceau. || Ép. moderne. Château de Moselly , autre- fois maison forte, rebâti en 1760 par Claude Drouas, évèque de Toul, pour servir de maison de plaisance (S.). Au village , à proximité et autrefois dépendances de ce château , plusieurs maisons du xvie siècle ; l'une d'elles était l'hôpital ; à l'angle d'une autre de ces constructions, niche avec clochette en pierre pour dais. Église parois- siale Sainte- Valburge reconstruite à la fin du siècle der-
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nier ; en avant, un gigantesque marronnier que la tradi- tion et d'anciens papiers désignent sous le nom d'Arbre de Sully. Fontaine Sainte-Valburge à laquelle on attri- buait autrefois des propriétés médicinales. Chez M. Gon- tois, une toile représentant Mgr Drouas , provenant du château de Moselly.
CHOLOY. Ép. romaine. A 500 mètres au nord du village, lieu dit en Champally, tuiles à rebords, briques et nombreuses monnaies romaines , trouvées il y a une vingtaine d'années. || Moyen âge. Suivant Dom Calmet, il y avait à Choloy une maison royale où les rois de France des deux premières races, et, plus tard, les comtes de Bar vinrent à la chasse. Au Val-de-Passey , petit hameau près duquel on trouve des restes de construc- tions ; un prieuré de Bénédictins de Saint-Maur, aujour- d'hui détruit, y fut fondé en 1236. | Ép. incertaine. Ancienne voie appelée Chemin-Brabant. \\ Ép. mo- derne. A la Fosse-la-Grive , sépulture des pestiférés. Au-dessus de Saint-Pierre , ruines de l'ancienne cha- pelle ou ermitage de ce nom , où se tenait autrefois un rapport très-fréquenté (S.). Église paroissiale Saint- Jean-Baptiste, reconstruite en 1771 sur les ruines d'une ancienne église ogivale de la première époque , dont il reste la tour faisant hache avec la nef près du chœur ; au rez-de-chaussée de cette tour, voûte sur ogive avec baies géminées et contreforts à deux rentrants. Suivant l'au- teur de la Statistique 1822, il existe dans cette partie de l'ancienne église une pierre grenasse offrant le millésime 1269, presque effacé, qui serait assez en rapport avec l'époque probable de la construction de l'église primitive. Dans l'une des baies murées de la tour, un marbre fu- néraire de M. Louis-Joseph du Barail de Saint-André (f 1756).
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CREZILLES. Ep. ce/ tique. Découverte, en 1863, aux Thermes, d'un fragment de hache en silex. || Ép. ro- maine. Voie romaine de Langres à Toul par Soulosse, sur laquelle passe le chemin de grande communication n° 1 de Toul à Colombcy. Trouvailles , le long de cette voie, d'objets antiques. Restes d'anciennes constructions, tuiles à rebords aux Sarrazinières , aux Petites- Pièces, à la Conncau (J.). Sur la place de l'église, trouvaille d'une pièce en argent de Nerva, offerte au Mu- sée par A. Gigoul. Aux Thermes, à environ 2,500 mè- tres à l'orient du village, sur la lisière du bois et sur une étendue de 4 à 500 mètres , débris nombreux de cons- tructions gallo-romaines , tuiles et pierres plates , frag- ments de meules en lave et de diverses poteries. En 4862, fouilles et découverte d'un petit pavillon de bains , de forme carrée, de 7m 60 décote, partagé en quatre pièces d'inégales dimensions, dans lesquelles on a pu re- connaître Y Aquarium, le Frigidarium, un cabinet par- ticulier de bains et l'officine où l'on chauffait les bains ; trouvaille, dans les décombres, d'un tronçon de colonne, d'objets en métal (slrigïles ?), de tuiles, de briques de diverses dimensions, de petits bronzes romains au nombre desquels un Constantin offert au Musée , ainsi que des briques de deux échantillons, par Ë. Olry ; tous les objets trouvés sur ce point, recueillis par M. Micard, inspecteur des forêts à Toul, ont été offerts à l'Empereur et déposés dans son cabinet. Vers 4852, ces bains furent déjà fouil- lés. (J., nov. 4862 et notice sur cette découverte par E. Olry, J., mars 4863.) || Ép. incertaine. Vestiges d'an- ciennes habitations s'étendant , à partir de l'église , sur 4 50 mètres de longueur, dans la direction du sud , dans lesquelles on a trouvé, il y a dix ans, un cercueil en
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• pierre , des débris d'une armure antique et un puits à peu de distance. Moyen âge. Quelques portes à linteau ogival et fenêtres à couvertes accusant les xve, xvie et xvne siècles. [ Ep. moderne. Maison seigneu- riale aux chanoines de Saint-Gengout de ïoul, seigneurs haut-justiciers, bâtie au xvie siècle, mais remaniée. Mon- naies lorraines trouvées à la Justice , près de l'endroit où était le signe patibulaire. Dans le cimetière, Calvaire, avec croix de Lorraine et le millésime 1748. Église pa- roissiale Saint-Gengout, reconstruite vers 1785; dans l'intérieur, quatre tableaux sans signature , de 3 mètres de haut sur 3m 50 de large , dont les sujets sont tirés de la vie de saint Vincent de Paul : 1° Saint Vincent chez les lazaristes ; 2° Sermon aux Dames de la Cour; o° Sermon au peuple; 4° Saint Vincent assistant Louis XIII à ses derniers moments. On suppose que ces tableaux sont de la fin du xvne siècle et qu'ils pro- viennent des églises de Toul.
DOMGERMAIN. Ép. incertaine. Chemin Bradant passant à l'extrémité septentrionale du territoire. Traces d'anciennes constructions au lieu dit le Bois-des-Moines. | Moyen âge. Village mentionné déjà dans des chartes au xe siècle (C). || Ép. moderne. Chemin de Bois-le- Comte construit en 1581 (S.). La seigneurie de Bois-le- Comte , aujourd'hui simple censé , à trois kilomètres et sur le territoire de Domgermain, ne semble pas remonter au delà de la fin du xvie siècle (C.). A quelque distance de Domgermain , dans la direction de Gholoy, chapelle Saint-Maurice remaniée récemment et construite sur l'emplacement d'une ancienne église qui servait de pa- roisse à ce village et à celui de Gholoy (G.). Autour de cette chapelle et de chaque côté du chemin jusqu'au vil-
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lage de Domgermain, traces nombreuses de constructions qu'on croit être celles de l'ancien village qui fut ruiné à une époque inconnue. A peu de dislance de la chapelle Saint-Maurice, au lieu dit le Cimetière-des-Moines , sé- pultures, trouvailles nombreuses de monnaies du -XVIe siècle. Au village, deux constructions des siècles derniers portent le nom de châteaux. Église paroissiale Saint- Maurice reconstruite au milieu de la localité en 1753, sur remplacement d'une chapelle fondée vers 1300, qui fut entourée de murailles flanquées de tours pour servir de retraite en temps de guerre (C.) ; dans l'intérieur de l'é- glise, croix de Lorraine aux clés de voûte ; plusieurs ta- bleaux d'un certain mérite venant, paraît-il, des églises de Toul : l'un d'eux, l'Ascension, est signé « de Senne- mont, peintre du Roy, 1780 ».
GYE. Ép. romaine. Voie de Langres à Toul par Sou- losse. En Nalléchamp, restes de constructions, tuiles à rebords. || Ep. incertaine. Chemin lîrabant. Moyen âge. Sur la place de l'église, il y a une cinquantaine d'an- nées, dans des fouilles, à une certaine profondeur, décou- verte, au milieu de fondations , d'un pavé en briques de différentes couleurs. Près de la voie romaine , au lieu dit l'Etanej-de-Gye, il existait une maison d'ancienne cons- truction, démolie vers 1840, qui pourrait bien répondre à l'indication Stagna de Gieyo, 1449-1472. (Epitaphia eps. tul. H. L., I, c. 188.) || Ép. moderne. Dans la prairie , au-dessous du village , ruines d'habitations au milieu desquelles on trouva, vers 1835, une épée dans le genre des dagues espagnoles du temps de la ligue (S.). Eglise paroissiale Saint-Mansuy, style roman de transi- tion , mais qui a subi diverses modifications et a été re- maniée à différentes époques ; plan en forme de croix
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latine si le bras gauche ne faisait défaut ; une seule nef ; chevet plat , voûte sur nervures toriques à filet sur face, reposant aux angles , sur des colonnes de lm 20 de hau- teur seulement ; arc triomphal en ogive obtuse ; quelques baies romanes ; chapelle du style ogival tertiaire ; arcade en plein-cintre séparant le porche de la nef ; tour réparée au xvme siècle. Sur la frise du portail, avec le millésime 4732, le verset : « Terribilis est locus iste, etc. Genèse, 28, v. 17 ». Dans l'intérieur de l'église, des fonts sur les- quels on lit : In nomine patris , etc. , 4674 ; plusieurs dalles tumulaires, dont l'une de 4653. — Village ruiné pendant la guerre de Trente ans (C.). A la limite du ban de Gye et de Toul , bornes avec une crosse d'évéque sur une face.
MAIZIÈRES-LÈS-TOUL. Ép. romaine. Vestiges d'habitations, tuiles romaines à la Petite-V 'Étrichamp, et au Colombier : ce dernier canton se trouve à une pe- tite distance du lieu où s'élevait l'ancien château ; on y a trouvé une foule d'objets antiques et des fragments de poterie. ([ Moyen âge. Maizières était le chef-lieu d'une chàtellenie, de laquelle dépendaient Bainville et Xeuilley, à la possession des évêques de Toul. Il ne reste plus que quelques traces à peine visibles des fossés de l'ancien fort qui fut bâti au xme siècle, qui subit bien des vicissitudes, soutint plusieurs sièges, et enfin fut détruit au xvne siècle. Très de ces fossés , découverte , il y a quelque temps, d'un boulet de canon et d'une certaine quantité de mon- naies du moyen âge , minces avec un cavalier sur face. Dans l'intérieur du village, un certain nombre d'anciennes constructions ; linteau de porte et dessus de fenêtres or- nés d'ogives ; dans le tympan de l'une d'elles, un écusson chargé d'une crosse d'évéque aux armes d'Antoine de
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Ncufchàtel ; quelques fenêtres basses et étroites : l'une d'elles offre un double trèfle ; au fond de l'allée du petit château, à l'entrée du village, un écu fruste avec une crosse d'évèque. (Voy. notice sur Maizièrcs, par M. l'abbé Guillaume. Bulletin de la Société d'Archéologie, t. I.) [ Ép. moderne. Carrière dite la Pierrière-de-Ravignans achetée par le duc de Lorraine Charles 111 en 1578. Sur le Jlaul-de-la-Câle , sépultures nombreuses avec dé- bris d'anciennes croix ; cimetière des pestiférés , selon la tradition. — Village saccagé et détruit par les Suédois (M.) Église paroissiale de la Sainte-Vierge en sa Nativité rebâtie au xvne siècle.
MÉN1LLOT. Ép. moderne. Cliapellc érigée sous le vocable de la Sainte-Vierge en son Assomption, agrandie ou remaniée dans les siècles derniers ; chœur pentagonal et avant-chœur du style ogival primitif ; largeur, b" mè- tres ; longueur de l'avant-chœur, 4m 40 ; profondeur du chevet , 5 mètres ; voûte sur nervures toriques dont la retombée est reçue sur des pilastres à chapiteaux dont l'ornementation est variée et dans laquelle on remarque notamment des feuilles à crochets ; rosaces aux clés de voûte , arc triomphal à ogive et vitraux peints , très- remarquables, du xiue siècle , dit-on , assez bien conser- vés. A l'extérieur, contreforts à deux rentrants et corniche qui règne sur le pourtour du chœur et de la première travée, ornée de mascarons et de modulons ayant de l'analogie avec une feuille à crochet privée de sa tète.
MONT-LE-VIGNOBLE. Ép. romaine. En Nallè- champ, fragments nombreux de tuiles plates, ainsi qu'à la Huie-de-V Ecluse, où l'on trouve en même temps des ruines d'habitations. | Moyen âge. Village mentionné dès le vne siècle dans l'Histoire des Evèques de Toul
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(D. T.)- Il Ép. moderne. Au village, quelques portes et fenêtres à fronton ogival. — Village dépeuplé pendant les guerres du xvnc siècle (G.)- Chemin de la Borde (D. T.). La partie supérieure du village s'appelle au Château. Sur la Côte, un moulin à vent détruit ; sur le sentier de Charmes, une croix de 1755. Eglise paroissiale Saint-Mansuy , reconstruite dans le courant du siècle dernier.
MOUTROT. Ép. celtique. Hache en silex qui fait par- tie de la collection de M. Dufresne, conseiller de préfec- ture à Metz. || Ép. romaine. Voie de Langres à Toul par Soulosse , près de laquelle on a trouvé des cercueils en pierre, en rétablissant les murs du cimetière vers 1850. Restes de constructions, tuiles à rebords, monnaies romaines en Voirimois, à la Terre-Monsieur, à la Sarrazinière et en Montant-les-Portions , dans la di- rection de Blénod. || Ép. moderne. Derrière-Latine et en Mollonville , près du cimetière, restes d'anciennes habitations formant un ensemble de ruines assez étendu qu'on suppose être celles de Mollonville ou de l'ancien Moutrot. A l'angle du cimetière, cbapelle Saint-Elophe avec la date 1727 ; dans l'intérieur, encastré dans le mur septentrional, petit monument funèbre de 1C37 (S.). A côté de la chapelle , porte du cimetière en plein-cintre avec deux écussons mutilés. A la Poche-Pierre, débris d'anciens bâtiments avec fragments nombreux de tuiles creuses peu épaisses. Aux abords du village, dans les jardins et dans des fouilles à bâtir, fondations et trouvaille d'objets divers et, entre autres , d'un boulet du calibre 8, par M. Coffigny, indice, peut-être, du combat livré, sui- vant nos historiens, par le duc de Guise aux protestants, en 1587, entre Grézilles et Moutrot. Au moulin de Bou-
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vade, laque en fonte avec cinq écussons de trois familles différentes ; celui du milieu donne les armes de la famille Chirot de Montrouge de Bcllaire, anoblie par Léopold. Chez M. Viard, autre laque chargée d'un écu indéchiffrable, surmonté d'une couronne de comte, entouré d'un collier de la Toison-d'Or, avec cette inscription au-dessus : « Dominas mihi adjutor. 1608 ». Église paroissiale Saint-Elophe , orientée et reconstruite dans les siècles derniers ; l'un des angles extérieurs du chœur offre une niche avec statue et dais dans le goût du xvc siècle. A l'intérieur, provenant , dit-on , des églises de Toul , trois autels d'un fort bon goût et d'un marbre précieux (S.) avec neuf tableaux , parmi lesquels La guêrison de l'A- veugle né, peint à Bruxelles en 1756 pariV.-J?. de Per- cey, passe pour un véritable chef-d'œuvre (S.). On re- marque ensuite : Le Christ au tombeau, et le Cruci- fiement, par P. Le Clère, 1775 ; la Résurrection, sans nom d'auteur apparent. Ces tableaux ont environ 5 mè- tres de hauteur ; les cinq autres sont plus petits.
OCIIEY. Ep. romaine. Ruines d'habitations, frag- ments de meules en lave et tuiles à rebords à la Grande- Haie, à la Haute-Borne , à la Haie-de-la-Foire , et à la Terre-Gadel. Entre Ochey et Thuillcy, lieu dit au Haut-de-la-Croix, près de la route, vers 1845, fouilles et découverte de nombreux fragments de tuiles et de po- teries romaines dans des restes de constructions antiques, où précédemment on avait déjà trouvé quantité de mon- naies à l'effigie des empereurs (S.). Voie antique suppo- sée voie romaine de Toul à Vaudémont, dite Chemin de Toul, longeant parallèlement la route actuelle ; mais à un kilomètre au nord, continuation du chemin de la Blanche-Dame. || Moyen âge. Église paroissiale Saint-
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Maurice, orientée , du style ogival de la 5e époque , saut la tour qui a été remaniée en 1750 (Journal, 1805) ; une seule nef à trois travées de 15m 50 de longueur sur 7m 85 de largeur ; chœur penlagonal de même largeur et de 6 mètres de longueur ; voûte sur nervures prismatiques avec pilastres à panneaux sans chapiteaux, supportant la retombée des nervures , fenêtres bien conservées , à ré- seaux élégants et variés qui étaient encore, il y a quelques années seulement , garnis d'anciens vitraux coloriés avec le millésime 1 539 , que la tradition attribue à l'un des peintres verriers d'Ochey ; dans l'intérieur, fonts pédi- cules du style flamboyant ; cuve très-ornementée , mais d'une médiocre exécution ; dalles tumulaires du xvie siècle. Dans le cimetière, pierre tombale avec un reli- gieux en relief et une inscription gothique dans l'enca- drement (Journal, 1863). — La maison d'Ochey, qui existait au moyen âge, portait : D'or à deux lions lèo-
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pardés de gueules (S.). [| Ep. moderne. Porte à lin- teaux ornés d'ogives , et fenêtres à menaux. Au nord du village, traces d'anciennes habitations au milieu des- quelles, vers 1840, en plantant des étocqs, on trouva une certaine quantité de pièces d'or, d'argent et de cuivre assez minces.
PIERRE-LA-TRE1CHE. Ép. celtique. Sur le sol du plateau de la Treiche, près du chemin de Maizières , on a trouvé, en 1804, des ébauches de haches, de couteaux, de lances et de flèches en silex du pays, taillés sur place, ainsi que des cailloux travaillés en forme de casse-tête et de haches. Dans la grotte dite le Trou-des-Celtes, près de la rivière , fouilles à la même époque et découverte d'un certain nombre de sépultures protégées par des pierres plates avec des fragments de poteries celtiques,
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quelques-unes à stries et quantité d'autres objets de même origine : couteaux, haches, flèches, lances en silex étranger et du pays ; grains en lazulithe et en terre, cou- teau de sacrificateur en métal, portions de fibules, os et coquilles travaillés ; enfin quantité d'os d'animaux dispa- rus du pays depuis longtemps. Dans les Trous de Sainte- Reine (S.), trouvailles d'un certain nombre d'objets ana- logues aux précédents et d'un vase gallo-romain , forme trompe, en verre émaillé , très-élégant. (Ces fouilles et découvertes sont ducs à M. Husson, pharmacien à Toul, (jui a composé , des objets trouvés , une collection dont on trouve le Catalogue avec la description des grottes dans une brochure qu'il a publiée sous ce titre : Origine de l'homme dans les environs de Toul). (Voy. aussi Journal de la Société d'Archéologie ; janvier 18Go.) || Ep. romaine. Au Camp, sur le plateau déjà nommé, position dominant la rivière (S.) , traces de retranche- ments , avec un petit mur, qu'on suppose remonter à la période gallo-romaine. Un peu au-dessous du Trou-des- Celtes; trouvaille d'une bouteille en terre cuite déposée dans la collection de M. Husson. Ep. incertaine. Au Champ-au-Cercucil , sur un plateau à un kilomètre à l'est de Pierre , traces d'anciennes fortifications près des- quelles, vers 1855, en ouvrant des carrières, on découvrit à un mètre de profondeur, quinze ou vingt squelettes ayant à leur côté une épée et un poignard ; ils étaient rangés autour d'un cercueil orienté, fait d'une seule pierre avec couvercle assujetti au moyen d'agrafes en fer, scel- lées en plomb ; le squelette qu'il renfermait avait sur la poitrine un anneau en bronze; à la main gauche, une bague en argent avec une onyx ornée d'un Mercure ou d'un Apollon ; à ses côtés, une épée et un poignard.
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M. Dufresnc pense que ce tombeau est celui d'un chef franc environné de ses leudes. (Revue d'Austrasie.) || Moyen âge. Localité très-ancienne dont il est déjà ques- tion au ixc siècle. A la Rochotle, un prieuré dédié à Saint-Nicolas , fondé au xic siècle et reconstruit au xvie, ainsi que la chapelle , bâtie un peu à côté , sur le rocher, sous lequel sort le ruisseau de ce nom. Le prieuré offre des fenêtres larges , à meneaux croisés , surmontées de frontons ; sur la façade et à la partie supérieure , une niche encadrée, style de la Renaissance ; dans le tympan du fronton des deux fenêtres voisines, l'écu rapporté des Vaullier anoblis en 1655, que l'on trouve aussi à la clé de voûte de la chapelle. || Ép. moderne. A l'extrémité orientale du village , autour du cimetière , traces nom- breuses d'anciennes constructions où l'on croit qu'était bâti l'ancien village de Pierre et dans lesquelles on a trouvé des sépultures et de nombreux ustensiles de cui- sine il y a une dizaine d'années. A la Treische, ruines d'habitations au lieu où était bâtie la ferme de ce nom qui a été détruite après la Révolution. A l'entrée des grottes de Sainte-Renne, quelques restes de la chapelle érigée sous ce vocable et démolie au siècle dernier. Eglise paroissiale Saint-Christophe, reconstruite en 1779 au centre du village ; l'ancienne , qui était bâtie près du ci- metière, était primitivement la mère-église de Bicque-
ley(S.).
SEXEY-AUX-FORGES. Ep. romaine. Ghemin-le-
Comte, venant de Bainville-sur-Madon et traversant la
Moselle sur le territoire de Sexey. Vestiges d'habitations
gallo-romaines , débris de tuiles à rebords , de poteries
rougeâtres en plusieurs endroits de la forêt communale
du Bois-le-Duc (C.) et dans les champs aux lieux dits le
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Champ-du-Mouton et au-dessus du Hal-de-Bourgogne. Près de la ferme des Gimées, en défrichant le bois, vers 4842, au milieu de tuiles plates cl sur un massif de ma- çonnerie, découverte d'un bloc en pierre rompu , d'envi- ron 50 à 35 centimètres de longueur, sur la face duquel on remarque, sculpté en relief, le buste de deux enfants au maillot, couchés côte à côte dans une espèce de ber- ceau (S. supplément) ; ce monument, attribué au style byzantin par M. l'abbé Garo, est conservé et déposé dans la chapelle de la ferme. || Moyen âge. Sexey, mentionné dans des chartes dès le xc siècle, fut, jusqu'au xvic, la mère-église de Pont-Saint-Vincent (C.). Église parois- siale Saint-Mansuy, orientée, du style ogival secondaire ; plan rectangulaire de 18ra 50 de longueur totale, dans œuvre, non compris la tour qui s'élève à l'occident, et de 7™ 10 de largeur, composée de trois travées seulement dont une carrée pour le chevet ; rosaces aux clés de voûte ; pilastres, arcs doubleaux et arceaux très-saillants ; pierres obituaires encastrées dans les murs dont l'une du xvie siècle et les autres de 1610, 1612 et 1660. A la ferme des Gimées , autrefois censé à la possession de l'abbaye de Saint-Mansuy de Toul , restes d'une chapelle dédiée à Saint-Christophe , but d'un pèlerinage pour les enfants convulsionnaires, érigée au xve siècle, ainsi que le prou- vent les baies murées à réseaux du style flamboyant et l'origine des arceaux qui supportaient la voûte aujour- d'hui démolie. A proximité de cette ferme , ruines nom- breuses d'habitations du moyen âge et découverte à di- verses époques de monnaies antiques , de médailles dont l'une en argent du xu° siècle est entre les mains des fer- miers ; enfin d'une foule d'objets curieux comme une paire de ciseaux de forme bizarre, une clé à tige recour-
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bée, etc. : ce dernier objet fait partie de la collection de M. le docteur Marchai, de Lorquin (C). La tradition pré- tend qu'au lieu dit le Hal-de-Bourgogne, à une petite distance de Sexey, une bataille fut livrée au duc de Bour- gogne (C.)- Sur une hauteur qui domine la commune, où l'on suppose qu'était bâti l'ancien village avec un châ- teau, on a découvert des fondations, des pierres de taille et, dans des fouilles, un squelette avec un casque. || Époque moderne. Un château très-élevé, du xvic siècle, flanqué d'une tourelle; on y remarquait, avant qu'il ne fût découronné, des créneaux et des meurtrières ; traces des fossés ; dans le mur septentrional, une tête casquée plus grande que nature ; au-dessus d'une porte, une ins- cription latine (S.). Sur la côte, dans les vignes, décou- verte, en 18G3 , d'une grande quantité d'ossements dans une vaste fosse. A la même époque, en ouvrant des fos- sés au périmètre de la forêt, trouvaille de plusieurs mon- naies. Dans la vallée, au-dessus de Sexey, vestiges des anciennes forges établies au xvie siècle et abandonnées au xviue. Plus haut, dans la même vallée, chapelle Sainte-Anne, autrefois ermitage et lieu d'un rapport fré- quenté.
VILLEY-LE-SEC. Époque incertaine. En 18G3, près de la Moselle, en Brifauvau (bois l'Evèque) , découverte, en faisant des déblais, d'un squelette entre quatre pierres détaille. || Moyen âge. Village très-ancien, déjà men- tionné au viic siècle dans la vie des évèques de Toul (C). | Ép. moderne. Quelques restes d'un château flanqué de tours, existant déjà au moyen âge, mais détruit depuis
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la Révolution. Eglise paroissiale de la Sainte-Vierge en sa Nativité, dont la nef a été reconstruite en 1650, ainsi que l'indique un millésime placé sur l'une des fenêtres ;
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chevet de l'ancienne église en partie conservé ; nu fond, fe- nêtre et vitraux historiés de la fin du xivc sièclcou du com- mencement du XVe ; crédence rapportée dans le mur la- téral de la nef, avec arcade en doucine ; pierre tombale de 1637. Cette localité eut beaucoup à souffrir pendant la guerre de Trente ans. Bornes de ban dont quelques- unes portent une crosse d'évéque. Un moulin à vent dé- truit depuis longtemps déjà à proximité du village.
ADDITIONS ET RECTIFICATIONS.
ABOiNCOURT-EN -VOSGES. A la suite de la description de l'é- glise, il faut ajouter : (Voy. notice sur l'église d'Aboncourt, par M. Georges Boulangé; Journal, 1854).
BULLIGNY. A la fin de l'article relatif à cette commune , et au lieu de lire : u Château de Tumejus , du xvne ou du xvine siècle », il faut : Château de Tumejus, construit en 1430 par Ferry de Ligni- ville , composé, primitivement., d'uu carié flanqué de quatre grosses tours , entouré de larges fossés, avec une porte d'entrée séparée du corps principal et surmontée d'uu donjon qui protégeait le pout-Ievis ; aujourd'hui, ce château féodal a subi des changements : il a perdu ses tours du sud et de l'ouest au siècle dernier; le donjon au-dessus de la porte, qui conserve, néanmoins, les crans de la herse. On re- marque encore les fenêtres larges à l'extérieur du château, et, à l'in- térieur, les murs épais , un bel escalier en spirale , un écusson aux armes de Philippe-Emmanuel de Lignivillc, prévôt de Saint-Georges, et un autre, incrusté dans la muraille, avec la date 1522. (Voy. no- tice sur le château de Tumejus, par M. Edouard de Barthélémy ; Journal, 1835.)
TABLE
DES NOMS DE LIEUX.
Aboncourt-en-Vosg. 55,106
Allain-aux-Bœufs, 56.
Allamps, 58.
Bagneux, 59.
Bainville-sur-Madon, 84.
Baraques (les) (Bainville- sur-Madon), 85.
Barisey-au-Plain, 61.
Barisey-la-Côte, 62.
Barisey-la-Planche, village détruit ( Barisey - au - Plain), 62.
Baltigny, 64.
Beuvezin, 65.
Bicqueley, 85.
Blénod-lès-Toul, 86.
Bois-le-Comte (Domger- main), 95.
Bulligny, 90,106.
Charmes, 92.
Château (le) (Vannes), 83.
Chàteau-lbrt (le) (Bainville- sur-Madon), 85.
Chaudeney, 92.
Choloy, 95.
Colombey, 65.
Commet (Saulxures-Iès- Vannes), 79.
Courcelles, 67.
Crépey, 67.
Crézilles, 94.
Dolcourt, 68.
Domgcrmain, 95.
Favières, 69.
Fécocourt, 71.
Gelaucourt, 71.
Gémonville, 72.
Germiny-aux-trois-Chà- teaux, 72.
Gibeaumeix, 74.
Gimées (les) (Sexey-aux- Forges), 104.
Grimonviller, 75.
Gye 96.
Housselmont, 76.
Maizières-lès-Toul, 97.
Ménillot, 98.
Mérigny ou Marigny, châ- teau détruit (Saulxures- lès- Vannes), 79.
Mollonville , village détruit (Moutrot), 99.
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Moiil- l'Etroit, 70.
Mont-le-Vignoble, 98.
Moulin (le) (Bainvillc-sur- Madon), 85.
Moulrot, 99.
Ochey, 100.
Pierre-la-Treiche, 101.
Pulney, 77.
Kochotte (la) (Pierre-la- Treiche), 103.
Roville, village détruit (Van- deléville), 82.
Saint- Amon (Favières), 70.
Sainte-Menne (Blénod-lès- Toul), 86.
Saulxcrotle, 78.
Saulxurcs-lès- Vannes , 78.
Saulxures-lès-Taprey , ou seulement Taprey , vil- lage détruit (Saulxures- lés-Vannes), 79.
Selaincourt, 79.
Sexey-aux-Forges, 105.
Thuilley-aux-Groseilles,80.
Tramont-Emy, HO.
Tramont-Lassus, 80.
Tramont-Saint-André , 81 .
Tumejus (Bulligny), 91.
Uruffe, 81.
Valcouit (Bicqueley), 8S.
Val-dc-Passcy(Cholov),93.
Vandeléville, 82.
Vannes, 83.
Villey-le-Scc, 105.
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LISTE
DES MEMBRES DE LA SOCIÉTÉ D'ARCHÉOLOGIE
PAR ORDRE ALPHABÉTIQUE.
Bureau de la Société pour Tannée 1S65-1866.
Président, M. Henri Iiepage.
Vice-Président, M. Alexandre Geny.
Secrétaire perpétuel, M. le baron Guerrier de Dumast.
Secrétaire annuel, M. Alexandre Melin.
Trésorier, Secrétaire honoraire, M. l'abbé Guillaume.
Bibliothécaire-Archiviste, M. Alexandre de Bonneval.
Secrétaires adjoints : MM. Lucien Wiener et Volfrom.
Agent comptable de la Société : M. Fuel, rue Sainl-Dizier, 14.
Membres honoraires.
A. Brun, ancien préfet de la Meurthe.
Buquet (le baron Alfred), maire de Nancy, député de la Meurlbe au
Corps législatif, président du Conseil général. Caumont (de), directeur de la Société française pour la conservation
des monuments historiques. Paye, membre de l'Institut (Académie des Sciences), ancien recteur
de l'Académie de Nancy.
Il
lenglé (Albert), ancien préfet de la Meurlhe. Iiavigerie (M8r), évèque de Nancy et de Toul. Monct, ancien maire de Nancy. Podevin, préfet de la Meurlhe. Saint-Paul (de), ancien préfet de la Meurlhe.
Membres titulaires*.
la Ville de Mirecourt, représentée par son Maire. MM. .
Adam (Lucien), substitut à Nancy.
Alexandre de Bonneval, propriétaire.
Alnot (Louis), sous-conservateur du Musée de peinture de Nancy.
Anoelon, docteur en médecine à Dieuze.
André, entrepreneur.
André (Edouard), à Paris.
Apte, chef d'escadron , commissaire impérial près le conseil de guerre de Bordeaux.
Arnaud, pharmacien.
Arnould, vérificateur de l'enregistrement, à Nancy.
Aubry (Maurice), ancien représentant des Vosges, banquier à Paris.
Audiat, substitut du procureur général près la Cour impériale.
Autreoourt (©'), maire de Champey , membre du Conseil d'arron- dissement.
Bailly, architecte à Blâmont (Meurlhe).
Balland (l'abbé), curé de Plombières (Vosges).
Ballon, à Epinal.
Balthasar (l'abbé), vicaire à Saint-Louis-en-i'IIe, à Paris.
Baraban, avoué au tribunal.
Barbaut, ancien pharmacien.
Barbey, propriétaire.
Barbier (l'abbé), professeur d'éloquence sacrée au grand séminaire.
Barnage (l'abbé), professeur d'histoire au grand séminaire.
* Les personnes dont le nom n'est suivi d'aucune indication de lieu, ont leur résidence à Nancy.
III
Barthélémy (Edouard de), auditeur au Conseil d'Etat, secrétaire du Conseil du Sceau des titres, à Paris.
Bastien, ancien notaire, membre du Couseil municipal.
Beau, avoué au tribunal.
Beaufort de Gellenoncourt (Amédée de), propriétaire.
Beaupré, conseiller honoraire à la Cour impériale, membre de l'A- cadémie de Stanislas.
Beaupré (Emile).
Bègue, commissaire central de police.
Benoi»t (Arthur), substitut du procureur impérial à S*-Dié (Vosges).
Benoit, conseiller à la Cour impériale.
Benoit (Louis), maire de Berlhelmiug, membre du Conseil d'arron- dissement.
Benoit (Arthur), propriétaire à Berthelming.
Berbain (L.-S.), propriétaire à Charmes-sur-Moselle (Vosges).
Berlet (Edmond), avocat à la Cour impériale.
Bemage (Alphonse), propriétaire à Sauvigny.
Bernard, avocat à la Cour impériale, membre du Conseil municipal.
Bert, avoué à la Cour impériale.
Bertin (le docteur Eugène), professeur suppléant à l'Ecole de mé- decine.
Besoin, architecte diocésain, à Rayonne (Basses-Pyrénées).
Birglin (Ernest), architecte à Bar-le-Duc (Meuse).
Blancheur, notaire.
Boiselle, ancien vérificateur des poids et mesures.
Boiselle (l'abbé), sous-diacre au séminaire de Sens.
Boiteux (l'abbé), curé de Saizerais.
Boulangé, ingénieur en chef des ponts et chaussées à Arras (Pas- de-Calais).
Bour (Edouard), greffier du tribunal civil.
Bourcier (le comte Ludovic de), à Bathelémont.
Bourcier (le comte Charles de), maire de Saint Médard.
Bourcier de Villers (le comte Charles), ancien député des Vosges au Corps législatif, à Paris.
Bourgon (Dieudonné), commis-greffier à la Cour impériale*
Bourgon (Jules), banquier.
IV
Bourgon (Léonce), négociant.
Boursier (Henri), notaire.
Bouteillier (de), ancien officier d'artillerie, secrétaire perpétuel de
la Société d'Histoire et d'Archéologie de la Moselle. Bouvier (de), conseiller honoraire à la Cour impériale. Bouzey de Champagne (le comte de), à Paris. Bretagne, directeur des contributions directes. Bretheau, conducteur des ponts et chaussées. Breton (l'abbé Charles), à Haroué. Bruneau (Albert).
Buffet (Aimé), ingénieur des ponts et chaussées, à Paris. Butte (Alexis), propriétaire. Carcy (de), ancien officier supérieur d'état-major. Casse, professeur de dessin au lycée impérial. Cauzier-Iiahaye, négociant. Caye, avoué au tribunal. Chabert, membre de l'Académie de Metz. Champagne (l'abbé), vicaire à Neufchàteau (Vosges). Chanzy, ancien juge à Epinal. Chappuy, chef d'escadron d'artillerie en retraite. Chariot (l'abbé), chanoine honoraire. Chariot, conseiller à la Cour impériale. Chariot (Edouard) , garde-général des foréls à Audun-le-Romau
(Moselle). Chariot (Alexandre), juge au tribunal de Remiremont (Vosges). Charmoy, entrepreneur. Chartener (G. -G.), propriétaire à Metz. Châtelain, architecte, conservateur des édifices diocésains, membre
du Conseil municipal. Châtelain, ancien négociant. •
Cherisey (le marquis de), à Cherisey (Moselle). Chevalier, avoué au tribunal de Toul. Chrestien de Beauminy, avoué au tribunal. Christophe, lithographe.
Circourt (le comte Arthur de), à Fontainebleau (Seine-et-Marne). Collenot (Louis), maire d'Amance.
Collenot (Félix), avocat à la Cour impériale.
Collesson (Louis), ancien notaire, aux Salières , près Blàmont,
Collin, imprimeur.
Colnot (l'abbé), curé de Fresse (Vosges).
Constantin (René), directeur de l'usine à gaz.
Costé, conseiller de préfecture.
Contai (Stanislas), avoué au tribunal.
Corrard des Essarts, architecte.
Cosserat, principal du collège de Saint-Amand-les-Eaux (Nord).
Cosson (Maurice), avocat à Lunéville.
Courcel (Valenlin de), à Paris.
Cournault (Charles), propriétaire à Malzéville.
Courtois (Victor), étudiant en droit.
Crépin, notaire.
Creton, professeur au collège de Pont-à-Mousson.
Cuny, architecte de la ville de Lunéville.
Daubrée, bijoutier.
Déblaye (l'abbé), à Lunéville.
Déblaye (l'abbé Alexandre), professeur au petit séminaire de Fé- nétrange.
Degoutin, conseiller à la Cour impériale de Nancy.
Delalle (Mgr.), évèque de Kodez, ancien vicaire-général de Nancy.
Demaidy (Oscar), avocat, à Charmes-sur-Moselle.
Demay. rentier.
Désazars , substitut du procureur impérial à Villefranche de Laura- guais (Haute-Garonne).
Descombes, architecte.
Didron aîné, directeur des Annales archéologiques, à Paris.
Dietz, banquier.
Dieudonné, propriétaire à Pompey.
Digot (Julien), étudiant en droit
Dœrflinger (Alfred), négociant.
Dolard de Myon (le comte), propriétaire.
Dormagen (l'abbé) , professeur de philosophie au grand Sémi- naire.
V!
Drouot (le vicomte A.) , dépulé de la Meurthe au Corps législatif, vice-président du Conseil général de la Meurthe.
Dufour (l'abbé), vicaire de la paroisse Saint-Epvre.
Dufresne, conseiller de préfecture, à Melz.
Duraont, juge au tribunal de Saint-Mihiel (Meuse).
Dupont de Romémont (Louis), propriétaire.
Duprat, professeur au collège de Lunéville.
Durand (Léon), receveur municipal à Remiremonl (Vosges).
Etie-Baille, président de la Chambre de Commerce, membre du Con- seil municipal.
Élie (Edmond), juge au tribunal de commerce.
Espée (le baron Casimir de t')i ancien député, à Sandronviller.
Espée (le baron Marcien de !•'), à Paris.
Espée (Henri de !•'), au château de Froville.
Faucheux, professeur, à Paris.
Fériet (Albert de), avocat à la Cour impériale.
Ferry-Schûtzenberger (Edouard), avocat à Saint-Dié (Vosges).
Fèvre, notaire.
Flamm, directeur de l'usine de Phlin.
Foblant (Maurice de), avocat, ancien représentant de la Meurthe.
Fontaine, architecte à Saint-Dié (Vosges:.
Fourier de Bacourt (Xavier), propriétaire à Ligny (Meuse).
François, ancien notaire.
Fremotte, peintre-verrier à Ncufchàteau (Vosges).
Gaignère (Eugène).
Gallet (l'abbé Charles), vicaire-général du diocèse de S'-Dié (Vosges).
Gaspard (Emile), notaire à Mirecourt (Vosges).
Claude, instituteur à Vaudeville (Meuse).
Gauvain (Charles de), propriétaire.
Geny (Alexandre), propriétaire, membre du Conseil municipal.
Georges (l'abbé), ancien curé de la Cathédrale de Toul.
Gigout (Léopold), architecte.
Godfroy, ancien médecin.
Golbéry (Philippe de), ancien magistrat, à Saint-Dié (Vosges).
VII
Gondrecourt (le comte Kené de), conseiller de préfecture à Amiens
(Somme). Gonneville (de), propriétaire.
Gouy (Jules), propriétaire à Renémont, commune de Jarville. Gouy (Albert), ancien officier d'étal-major. Gracieux (Jules).
Grand'Eury (l'abbé), curé de Moyen. Grandjaoquot (l'abbé), curé de Sanzey. Grandjean (le docteur), professeur à l'Ecole de médecine, membre
du Conseil municipal. Gravier (Auguste), professeur de physique au séminaire de Saint-Dié
(Vosges). Gridel (l'abbé), chanoine de la Cathédrale. Grosjean (Emile), ancien capitaine d'artillerie de marine, à Spincourt
(Meuse). Guérin, ancien notaire. Guérin (Raoul), étudiant en pharmacie. Guerrier de Dumast (le baron), ancien sous-intendant militaire,
membre de l'Académie de Stanislas, correspondant de l'Institut. Guillaume (l'abbé), chanoine honoraire, aumônier de la Chapelle
ducale de Lorraine. Guinet fils, entrepreneur.
Guiot de Saint-Remy, juge-suppléant au tribunal. Guyot (l'abbé), curé de Lay-Saint-Christophe. Guyot (l'abbé), professeur de mathémathiques au petit séminaire de
Pont-à-Mousson. Haldat du Lys (Charles de), propriétaire. Hamonville (le vicomte Louis d'), maire de Manonville, membre du
Conseil d'arrondissement de Toul. Harfort fils, vitrier.
Haussonville (le comte 0. d'), ancien député, à Paris. Hautoy (du), propriétaire à Amiens (Somme). Hequet (Charles), employé de commerce à Vitry-le-François (Marne). Henriot, agent-voyer en chef du déparlement de la Meurlhe. Henriot, juge de paix à Bar-le-Duc (Meuse).
VIII
Henry, curé à Clérey.
Henry, professeur d'histoire au lycée impérial. Hinzelin, agoni-général des écoles communales. Hinzelin (Alphonse), rédacteur-gérant du journal V Impartial. Hoffer (l'abbé), de Phalsbourg, prêtre missionnaire, curé de Louis- ville (Ohio), Etats-Unis d'Amérique. Huguet, ancien professeur à l'Ecole normale primaire de la Meurlhe. Humbert, architecte.
Humbert fils, architecte des Missions étrangères, à Canton (Chine). Humbert (Lucien), architecte à Tout.
Huot (l'abbé), ancien curé de Charmes-sur-Moscllc (Vosges). Jacquot, principal du collège de Vie. Jardot, chef d'escadron d'élat-major en retraite, à Paris. Jaxel, employé a la manufacture de glaces de Cirey (Meurlhe). Joly, architecte, bibliothécaire de la ville el conservateur du Musée
de Lunéville. Joly-Xahérard, juge de paix à Epinal (Vosges).
Joumar, avocat à la Cour impériale, suppléant du juge de paix du 3e arrondissement, à Paris.
Jouve, professeur, à Paris.
Keller (Edmond), propriétaire à Lunéville.
Klein (l'abbé), curé de Bourgaltroff.
Klopstein (le baron Frenlz de), à Ville-en-Woëvre (Meuse).
Kuhn (l'abbé Hcrmann), curé de Lixheim.
lâchasse, juge de paix à Charmes-sur-Moselle (Vosges).
Lacour (de), ancien maître des requêtes, à Vigneulles (Meuse).
Lacroix-, professeur d'histoire à la Faculté des lettres, membre de l'Académie de Stanislas.
lia Lance (Gustave de), propriétaire à Sainl-Mihiel (Meuse).
La Lance (Albert de), ancien officier, à Saint-Mihiel (Meuse).
Lallemand (l'abbé), chanoine de la Cathédrale, ancien professeur de belles-lellres.
Lallement (Charles), propriétaire.
Lallement (Louis), avocat à la Cour impériale.
Lallement (François), propriétaire.
Lallement de Mont (Frédéric) , capitaine d'artillerie, au château de Lupcourt (Meurlhe).
IX
Iiamasse., peintre à Lunéville.
Xiambel (le comte Alexandre de), maire de Fléville.
lambel (le vicomle Paul de), au chàleau de Fléville.
Iiamblin (l'abbé), vicaire-général du diocèse de Bourges (Cher).
landreville (le comte Edouard de), propriétaire.
Iiandreville (le comte Victor de), membre du Conseil général de la
Meurthe. Landrian (de), baron du Montet, propriétaire. Iianglard, agent d'assurances. lapaix (Constant), graveur.
Iiaprevote (Charles), propriétaire à Mireconrt (Vosges). Iiarcher, propriétaire à Toul. Iiaurent aîné (Jules), sculpteur. lazard-lévy fils , négociant.
leclerc, procureur gétiéral à la Cour impériale de Nancy. Xiedain (l'abbé), prêtre habitué à Metz (Moselle). Ziepage (Amédée), imprimeur. Lepage (Henri), archiviste de la Meurthe. Lévy-Bing, banquier. Xievylier (Edmond), banquier. lezay-Marnezia (le marquis E. de), propriétaire. Iihulière, entrepreneur. limon, receveur de l'asile de Maréville. Iiinas (le chevalier de), à Arras (Pas-de-Calais), lion (Edouard), substitut du procureur général, à Grenoble (Isère). lorrain (Charles), bibliothécaire adjoint à Metz. lorrain (l'abbé), chanoine honoraire, directeur du pensionnat Saint-
Léopold. Madelin (Jules), ancien juge au tribunal de commerce. Magnien, ancien pharmacien, maire d'Heillecourt. Magot, avocat à la Cour impériale. Malortie (comte de) , au château de Saint-Loup du Gast par Am-
bières (Mayenne). Mamelet (René), avocat à la Cour impériale. Mangenot (l'abbé), curé de Raoo-aux-Bois (Vosges).
Mangeot aîné, fabricant de pianos.
Mangeot jeune, fabricant de pianos.
Mangin (l'abbé), ancien directeur du pensionnai Drouol.
Manse (l'abbé), doyen du chapitre de la Cathédrale.
Marchai (l'abbé), chanoine honoraire, membre de l'Académie de Stanislas.
Marchai (l'abbé), curé de Leyr.
Marchai, avocat.
Marchai, docteur en médecine à Lorquin.
Marchai, inspecteur primaire à Montreuil-sur-Mer (Pas-de-Caiais).
Marchand (Justin), négociant.
Marchis (de), ancien professeur.
Mardigny (Paul de), ingénieur en chef des ponts et chaussées à Bar-le-Duc (Meuse).
Mardigny (de), ancien sous-inspecteur des forêts.
Marsal (l'abbé), curé de Vahl.
Martimprey de Roméoourt (le comte de), propriétaire à Romé- court.
Masson, avoué a la Cour impériale.
Mathieu (Léon), architecte.
Maud'heux père, avocat, maire d'Epinal, président de la Société d'E- mulation.
Maxant (Eugène), secrétaire du parquet de la Cour impériale.
Meaume, avocat, professeur de législation et de jurisprudence à l'Ecole impériale forestière, membre de l'Académie de Stanislas.
Meaume (Georges), substitut à Montraédy.
Meixmoron-Dombasle (Charles de), directeur de la fabrique d'ins- truments aratoires.
Melîn, architecte, professeur au lycée impérial.
Mengin-Xecreux (G.), général du génie en retraite, à Paris.
Mengin (Louis), avocat à la Cour impériale.
Metz-Noblat (Alexandre de), membre de l'Académie de Stanislas.
Michaut, licencié ès-lettres.
Michelant, employé à la Bibliothèque impériale, à Paris.
Millot, ancien directeur de l'Ecole normale primaire de la Meurthe.
Montangon (le comte de), propriétaire.
X!
Morel, iaspecleur des forêts à Nancy.
Morey, architecte de la ville de Nancy, membre de l'Académie de Stanislas.
Morville (le comte de), maire de Mailly, membre du Conseil d'ar- rondissement.
Mougenot (Léon), correspondant de la Société impériale des Anti- quaires de France et de l'Académie de Metz.
Muet, juge de paix du canton de Nancy-est.
Munich fils, à Malzéville.
Mutbs (l'abbé), curé de Neuves-Maisons.
Najotte (François).
Noël (l'abbé), supérieur du collège de la Malgrange.
Noël (l'abbé), curé de la paroisse Saint-Léon.
Noël, conseiller à la Cour impériale.
Olry, instituteur à Allain-aux -Bœufs.
Paillart, premier président honoraire de la Cour impériale, membre de l'Académie de Stanislas et du Conseil municipal.
Pardieu, greffier de la justice de paix de Thiaucourt
Parisot (Louis), avocat.
Paulus (Charles), artiste peintre.
Pemot du Breuil, ancien adjoint au maire de Nancy.
Petit, receveur à Dun-sur-Meuse.
Petitot-Bellavene, avocat à Verdun.
Piat de Braux (Gabriel de), à Metz.
Pichon (Albert), au petit château de Lunéville.
Pierson, président de chambre honoraire a la Cour impériale, membre du Conseil municipal.
Pierson (Charles), avocat à la Cour impériale.
Pierson de Brabois, père, propriétaire à Villers-lès-Nancy.
Piller, propriétaire à Saint-Dié (Vosges).
Piroux, directeur de l'Institution des sourds-muets, membre de l'A- cadémie de Stanislas.
Pitoy, capitaine commandant la compagnie des sapeurs-pompiers.
Poirel, juge de paix à Gondrecourt (Meuse).
Prost (Auguste), membre de l'Académie de Metz. Provensal, propriétaire.
XII
Puymaïgre (Je comte de), à Inglange , près Thionville (Moselle).
Quintard (Léopolcl), étudiant.
Kavinel (Charles de), étiulianl en droit, à Paris.
Reber, professeur d'histoire au collège de Blois (Loir-et-Cher).
Regnault, greffier en chef de la Cour impériale.
Régnier (l'abbé Joseph).
Renauld (Jules), avocat à la Cour impériale.
Renauld (Félix), avoué au tribunal.
Renauld du Motey , médecin en chef de l'asile de Sainl-Dizier
(Haute-Marne). Reverchon, ingénieur en chef des mines, à Troyes (Aube). Riocour (le comte René du Bois de), propriétaire à Vitry-la-Ville
(Marne). Riocour (le comte Edouard du Bois de), commandant d'artillerie
eu retraite, membre du Conseil général de la Meurthe. Rollot (Charles), négociant. Romer, avocat, adjoint au maire de Nancy. Roquefeuil (le vicomte de), propriétaire. Rosaye (l'abbé), curé du Val-d'Ajol (Vosges). Rosières (l'abbé), chanoine honoraire, directeur des sacristies de la
Cathédrale. Roubalet-Backes, négociant. Rouyn (Henri de), percepteur à Woinville (Meuse). Roxard de la Salle (Ludovic), propriétaire. Roxard de la Salle (Henri), officier au 5e lanciers, à Colmar. Rozières (Charles de), propriétaire. Saint-Florent (Domergue de), propriétaire. Saint-Mauris (le comte de), ancien introducteur des ambassadeurs,
membre honoraire de l'Académie de Stanislas. Saint- Vincent (le baron de), conseiller à la Cour impériale, membre
de l'Académie de Stanislas. Salmon, conseiller à la Cour impériale de Melz. Salmon (Camille), propriétaire à Manhoué. Santerre, capitaine au 5e dragons. Sauvage (l'abbé), curé de Burey-la-Côte (Meuse). Schmit, chef de bureau à la Bibliothèque impériale, à Paris.
XIII
Septenville (le baron de), correspondant «le la Société des Antiquaires de France, à Poix (Somme).
Silvain (l'abbé), chanoine de la Cathédrale.
Simette (Théodore).
Simon (Victor), conseiller à la Cour impériale, président de la Société d'Histoire et d'Archéologie de la Moselle, à Metz.
Simonin père (le docteur), directeur honoraire de l'Ecole de méde- cine, membre de l'Académie de Stanislas.
Simonin (le docteur Edmond), directeur de l'Ecole de médecine, se- crétaire perpétuel de l'Académie de Stanislas.
Simonin, conseiller à la Cour impériale.
Smyttere (de), médecin en chef de l'asile de Lille (Nord).
Sonnini, à Port-Louis (Morbihan).
Soulié (l'abbé), professeur au pensionnat Saint-Léopold.
Straten-Fonthoz (le comte de), de l'Académie de Metz.
Sucy d'Auteuil (de), ancien officier supérieur.
Thiéry (Jean-Baptiste), propriétaire.
Thiéry (Emile), conservateur du Musée de Nancy.
Thiéry, entrepreneur de serrurerie.
Thilloy, conseiller à la Cour impériale de Metz (Moselle).
Thiriet, professeur au petit séminaire de Pont-à-Mousson.
Thiry, propriétaire à Champigneules.
Thouvenel, ancien avoué.
Tourtel (Charles), notaire à Vic-sur-Seille.
Trambloy, géomètre-arpenteur à Brixey-aux-Chanoines
Trancart, commandant du génie en retraite, adjoint au maire de Nancy.
Trouillel (l'abbé), curé de Saint-Epvre.
Troup, directeur du pensionnat du B. P. Fourier, à Lunéville.
Uhrich, colonel en retraile, à Roissy-en-Brie (Seine-et-Marne).
Vagner, ancien professeur à l'Ecole forestière et au Lycée, gérant du journal l'Espérance.
Vanson (l'abbé), directeur de la Maison des Etudiants et du pension- nat Saint-Léopold.
Vatry (B. de), ancien député de la Meurlhe, à Paris.
Vautrin, architecte.
Ventz, serrurier à Lunéville.
Vergne, notaire.
XIV
Vincent (le baron René de), propriétaire à Lesse.
Vivenot, architecte.
Volfrom, négociant.
"Weiss (l'abbé), ancien principal du collège de Vie.
Welcbe (Charles), avocat à la Cour impériale, premier adjoint au
maire de Nancy. Widranges (le comte de), propriétaire à Bar-le-Duc (Meuse). Wiener (Lucien), négociant. Zéler (l'abbé), curé d'Aouze (Vosges).
Membres correspondants.
MM.
Barbier de Montault (MonsigQor), chanoine de la basilique d'Ana- gni, à Jaulnay (Vienne).
Bonnin, inspecteur des monuments historiques pour le déparlement de l'Eure, à Evreux.
Bouille (le marquis René de), à Paris.
Chalembert (V. de), à Paris.
Conestabile (le comte Giancarlo), professeur à l'Université de Pé- rouse (Italie).
Corblet (l'abbé Jules), directeur de la Bévue de l'Art chrétien, à Amiens (Somme).
Cuypert (de), statuaire, trésorier-adjoint de l'Académie d'Archéolo- gie de Belgique, à Anvers.
Forgeais (Arthur), fondateur de la Société de Sphragislique, à Paris.
Galitzin (le prince Augustin), au château de Chenonceaux (Indre-et- Loire).
Juillac (le vicomte de), ancien officier supérieur, secrétaire de l'A- cadémie de Toulouse (Haute-Garonne).
Xiaoroix (Monsignor), camérier secret de Sa Sainteté Pie IX, clerc national de France à Rome.
Iiebeurier (l'abbé), chanoine honoraire, archiviste de l'Eure, à Evreux.
Mélano (le comte de), secrétaire perpétuel de l'Académie des Scien- ces, Lettres et Arts de Londres.
XV
Montalembert (le comte de), de l'Académie française, à Paris.
Reume (de), membre du conseil de l'Académie belge d'Histoire et de Philologie, à Bruxelles.
Sohayes, conseiller de l'Académie, directeur du Musée d'armures et d'antiquités de Belgique, à Bruxelles.
Silvy (Auguste), sous-chef de bureau au ministère de l'Instruction pu- blique.
Soland (Aimé de) , secrétaire-directeur de la Société linnéenne de
Maine-et-Loire.
TABLE DES MATIÈRES
CONTENUES DANS CE VOLUME.
Pages
L'église d'AIIamps, par M. E. Olry S
Les voies romaines de l'arrondissement de Sarre- bourg, par M. Louis Benoit 14
Mémoire sur l'emplacement de la bataille gagnée par Jovin sur les Germains, dans la Lorraine,
par M. Aug. Digot 50
Poésies populaires de la Lorraine 43
Epître en patois adressée par les habitants de Gé- rardmer à S. Exe. le Ministre de l'Intérieur, par
M. L. Jouve 88
Le Bienheureux Jean de Vandières, par M. Aug.
Digot 110
Traduction en patois du pays de Toul d'une bulle du souverain pontife Pie IX, par M. l'abbé Guil- laume 425
Recherches sur l'emplacement et la disposition d'ensemble du château du duc Raoul, à Nancy,
par M. Morey 466
Numismatique de la Lorraine allemande, par M. Louis Benoit 481
XVIII
La première tragédie de Jeanne d'Arc, par M. Aug.
Digot 205
L'hôpital de Revigny, par M. J. Gaudé 229
Le trésor de l'abbaye de Prum, par M. Aug. Digot. 249 Notice sur l'église de Champ-le-Duc, département
des Vosges, par M. Aug. Digot 261
Répertoire archéologique des cantons de Colombey
et Toul-Sud, par M. E. Olry : . . . . 281
PLANCHES.
Détails et plan de l'église d'Allamps, par M. E.
Olry 8
Carte des voies romaines de l'arrondissement de
Sarrebourg, par M. Louis Benoit 28
Plan des environs de Scarpone, par M. Aug. Digot. 42 Airs notés des poésies populaires, par M. J. Gaudé. 46 Vue du château présumé du duc Raoul, à Nancy,
et plan restauré de ce château, par M. Morey. . . 176 Plan du rez-de-chaussée du château de Nancy, en
1706, par le même 180
Hôtel de la Monnaie de la princesse de Phalsbourg,
à Lixheim, par M. Louis Benoit 192
Monnaies de Lixheim, par le même 202
Détails de l'église de Champ-le-Duc, par M. Aug.
Digot 218
NANCY, IMPRIMERIE DE A. LEPAGE, GRANDE-RUE, ^i.
ETTY CENTER LIBRARY
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