MÉMOIRES COURONNÉS L’'ACADEMIE ROYALE SCIENCES ET BELLES-LETTRES DE BRUXELLES. MÉMOIRES COURONNÉS PAR L'ACADEMIE ROYALE SCIENCES ET BELLES-LETTRES de Bruxelles. TOME XII. BRUXELLES, M. HAYEZ, IMPRIMEUR DE L'ACADÉMIE ROYALE. 1837, 4 | pa? Har, : Nr DA : Th : 4 15-N2 ; Re NT Lie Fr PAU oi AN ANANANANAMAN ANA AAA ARE EE AAA AA AAA AA AAA AAA TABLE , DES MÉMOIRES CONTENUS DANS LE TOME XII. Mémoire sur l'épuisement des eaux dans les mines, par M. Devaux. Recherches anatomiques et physiologiques sur la garance , par J. Decaisne. Mémoire sur la constitution géognostique de la province de Brabant, par M H. Galeotti. Mémoire sur les documens du moyen âge, relatifs à la Belgique, avant et pendant la domina- tion romaine , par A.-G.-B. Schayes. +4 nid TP MÉMOIRE SUR L'ÉPUISEMENT DES EAUX DANS LES MINES, EN RÉPONSE A LA QUESTION SUIVANTE: DÉTERMINER LE MOYEN LE PLUS AVANTAGEUX D'ÉLEVER L'EAU A DES HAUTEURS DE PLUS DE CENT MÈTRES , PAR LE MOYEN DE L'AIR ATMOSPHÉRIQUE. PAR M. DEVAUX, INGÉNIEUR DES MINES A LIÉGE, ETC. Et adhuc sub judice lis est. Ton. XII. 1 TaTh£ vo L 18 nr LA FU ES D ets 74 SORA He a PETTRS sa * mr pes Care NAN NAN AAA RAR AAA RAA AAA AR A AA AA AA MÉMOIRE SUR L'ÉPUISEMENT DES EAUX DANS LES MINES. Le merveilleux devant être banni de lindustrie, pour faire place à Vutile, il est clair qu’on ne doit chercher, dans l’emploi de l'air, comme intermédiaire entre le moteur et l’eau à élever, que des moyens plus simples, plus parfaits et plus économiques que ceux en usage pour épuisement des eaux. Il suffit d’ailleurs de posséder les notions prati- ques les plus simples, 1° pour reconnaitre que la plus grande cause de dépense d’argent et de force, que présente en général l'élévation des eaux à de grandes hauteurs, consiste dans la nécessité de relier les différens étages de pompes, par des attirails solides, pesans, com- pliqués et gênans, et 2° pour comprendre que, la résistance des maté- riaux dont on peut disposer pour la confection de ces attirails et de la machine elle-même n’étant pas indéfinie, nos moyens d’épuisement SUR L'ÉPUISEMENT DES EAUX + sont restreints, dans leur effet, à des limites assez bornées, quant aux masses d’eau à élever et surtout aux profondeurs auxquelles on doit aller les prendre. C’est donc principalement à remplacer, en tout ou en partie, ces attirails, qu’on doit viser par l’introduction de l'air comme nouvel agent dans l'épuisement des eaux. Bien que je n’aie point la prétention d'arriver à une solution satis- faisante de ce problème, dont les applications sont accompagnées de tant de difficultés pratiques, je me reprocherais de ne point mettre au jour les considérations auxquelles m'a conduit l'étude de cette ques- tion, attendu qu’elles me paraissent de nature, non-seulement à expliquer les causes des désappointemens des praticiens qui ont tenté l'emploi de ce moyen, mais encore à rendre plus circonspects et à guider dans leur marche ceux qui pourraient consacrer ultérieure- ment à cette recherche leurs soins et leurs capitaux. Je passerai donc en revue les différens systèmes auxquels j’ai été naturellement conduit, et qui renferment, à ce que je pense, tous ceux proposés jusqu’à ce jour par les praticiens. SYSTÈME À. Dans le premier de ces systèmes (/ig. 1), un cylindre à air X, placé à la superficie, et dont le piston P est mis en mouvement par un moteur quelconque , est employé à introduire de l'air comprimé , à un degré donné, dans un tuyau À qui descend dans le puits. Ce tuyau communique par des embranchemens D à des caisses B et B’ établies, dans ce puits, à des distances proportionnelles au degré de tension de l'air du tuyau À; des soupapes ou robinets S', adaptés à ces embranchemens , servent à interrompre ou à rétablir cette com- munication , et d’autres soupapes S, placées à la partie supérieure de ces caisses, sont destinées à établir ou intercepter, à volonté, la com- munication entre l'air de la mine et l’intérieur des caisses. Enfin un flotteur placé dans chaque caisse , est muni des accessoires nécessaires DANS LES MINES. . 5 pour ouvrir la soupape $’ et fermer la soupape S, chaque fois que la caisse est pleine d’eau, et pour produire l'effet contraire lorsqu'il arrive au bas de la caisse, c’est-à-dire, lorsque l’eau que celle-ci contenait a fait place à de Pair comprimé. Admeitant que l'expérience puisse apprendre à surmonter toutes les difficultés d'exécution que présente ce système, et notamment à régler le jeu des flotteurs de manière à en régulariser convenablement les effets; négligeant même, pour le moment, et les frottemens du piston dans le cylindre X , et la résistance que l'air éprouve en par- courant le tuyau À et ses embranchemens, je ferai remarquer que cet air ne peut servir d’intermédiaire entre le moteur et l’eau à élever, que lorsqu'il est amené à une tension au moins égale à celle due à la hauteur des colonnes d’eau partielles qui séparent les diverses caisses, et, qu’en le laissant échapper librement , après chaque ascension de l'eau, on perd évidemment toute la force qu'il a fallu dépenser pour lui donner cette tension. Cela posé : soient en général, t la tension à laquelle lair doit être amené dans le cylindre X et le tuyau descendent À , pour déterminer l’ascension de l'eau; Ÿ le volume du cylindre ; 2 la tension constante de l'air d’un côté du piston ; 3" celle de l'air intérieur du cylindre à l’origine du mouvement. Quand le piston aura engendré un volume quelconque », la tension EM V— 0 engendrer l'élément du volume suivant, dv, sera : intérieure sera devenue , et, par conséquent, l'effort à faire pour L'intégration de cette quantité, depuis # — 0, jusqu’à r— "(= =) qui correspond au point où la tension intérieure est {, donne, pour la force employée à opérer ce changement de tension, Ca EU rm Te à ac ((C) : \ = 6 SUR L'ÉPUISEMENT DES EAUX Cette formule convient indistinctement à tous les cas où il s'agirait de porter, soit par dilatation, soit par compression, de 9 à #, la tension d’un volume d’air donné V, pourvu que la tension 9 de l'air, d’un côté du piston, reste constante. Dans le cas représenté fig. 1, où 9 — 9’ — 1, en prenant pour unité la tension ordinaire de l'air sous la pression moyenne de l’atmosphère, cette expression se réduit à — 1 a =v(u NES UE MANU RE (a') Quant à l'effort à faire, pour pousser dans les caisses l'air comprimé, et produire l'ascension de l’eau, il est évidemment ©: =T(«— 1), qui est aussi l'effet utile produit. La force totale employée pour produire un effet utile E — v(: — =), est donc Q, + Q, — Q = V/# et le rapport de ces deux quantités t.l.t est - = Y Ce rapport, ainsi qu’on pouvait le prévoir, est indépendant des volumes du cylindre, des tuyaux À, et des caisses à air, et ne varie qu’avec la tension {, à l’aide de laquelle on veut opérer. On remarquera d’ailleurs que, £ étant > 1, puisqu'on opère ici par l'air comprimé, ce rapport augmente sensiblement avec /, en sorte que plus on voudra simplifier ce système, en diminuant le nombre de caisses, plus il deviendra désavantageux. C’est ainsi, par exemple, que pour {= 1,20, le rapport entre la force dépensée et l'effet utile ne serait que de 1,09 : t— 2 de 1.38. Tandis qu'il serait pour — 6 de 2.16. t — 10 de 2.55. Etc., etc. C’est sans doute l’ignorance de cette loi et le désir d'apporter la plus grande simplicité possible dans l'appareil des pompes, qui auront con- duit les praticiens à des essais décourageans de ce mode d’épuisement. DANS. LES MINES. 7 \ Les calculs qui précèdent semblent autoriser à conclure que ce système deviendrait très-avantageux, si l’on ne donnait à l'air qu’un faible degré de compression ; mais il est aisé de voir que les difficultés pratiques qui en résulteraient, entraineraient des inconvéniens plus graves encore que ceux auxquels il s’agit de remédier. Supposons, par exemple, qu’on ne porte la tension de l'air qu’à 1,20, et qu’il s'agisse d'opérer ainsi l'épuisement de 1200 litres d'eau par minute , à 300 mêtres de profondeur ; ce qui revient à 360 dynamies par minute. Dans ce cas, chaque mètre cube d’air envoyé par le tuyau À, dans les caisses du puits, ne produira, en supposant (pour simplifier les calculs) que la pression atmosphérique corresponde à une colonne d’eau de 10 mètres, qu’un effet équivalent à deux dynamies ; il faudrait donc : 1° Établir dans le puits au moins 150 caisses B, B’. 20 Que le piston du cylindre X engendrät, par minute, un volume de 216 mètres cubes. 30 Que les 180 mètres cubes d’air, à la tension 1, 2, résultant de cet effet, fussent transmis dans le même temps, et sans résistance sen- sible, par le tuyau À, aux diverses caisses du puits. On pourrait, à la vérité, parer à la complication résultant de la première de ces conditions à l’aide de la disposition, /ig. 10, qui permettrait de donner telle hauteur qu’on voudrait aux divers étages de pompes; mais cette disposition ne diminuant en rien la quantité d’air en mouvement, on n’obvierait ni à l'inconvénient d’avoir à sup- porter, dans le cylindre X, un frottement sensible, eu égard à la faiblesse de la puissance mécanique de Pair qu'il met en jeu, ni à celui de devoir donner au tuyau À un diamètre considérable, pour atténuer la résistance que l’air éprouve à le parcourir. Nous manquons encore d'expériences suffisantes pour procéder rigoureusement à l'évaluation de cette résistance ; cependant quelques essais que jai été à même de faire, et que je me propose de renouveler et d'étendre à l’occasion, ne m’ayant présenté que des différences peu 8 SUR L'ÉPUISEMENT DES EAUX considérables , avec les résultats fournis par les formules données à ce sujet par M. l'ingénieur Daubuisson, je me bornerai, jusqu’à plus mur examen , à en faire l'application aux divers cas de ce mémoire. D’après cet ingénieur, on aurait : M° X (L+ 47 D) X d ÉETT: LECR PNSA Mol RE ba à a À M représentant le volume d’air sortant en une seconde ; L la longueur du conduit; D son diamètre ; d la densité de l’air en mouvement, et ? la hauteur d’eau correspondant à la pression nécessaire pour déterminer ce mouvement, celle due à la pression de l’atmosphère (10 par hyp.) étant prise pour unité. Dans le cas qui nous occupe, on peut admettre que les 180 mètres cubes d'air parcourent en totalité la demi-longueur du conduit À, en 50 secondes, puisque le ! de la minute est employé à en opérer la compression, ainsi lon aurait L — 150, et M — © — 3,60. On a d’ailleurs d — 1,20, en sorte qu’on obtiendra successivement D 0,3 o — 0.41 } environ. D = 0.2 ? — 1.90 Pour — — D — 0.4 » — 0.06 Le piston du cylindre X, étant obligé de vaincre cette résistance, pendant toute la génération du volume de 180 mètres, ces valeurs de doivent, dans chaque supposition ci-dessus, être multipliées par 180, pour conduire à la résistance totale par minute, résultant de ce chef, c’est-à-dire qu’on aurait successivement : R 342 Di 00 E 36 Pour { p — 0.30 À 22 788 E 36 DE vins ES E 8 DANS LES MINES. 9 Le rapport $ trouvé plus haut pour le cas de £— 1,20 étant déjà égal à 1—09, on voit qu’on aurait, dans ces différentes suppositions, pour le rapport de la force fotale employée à l'effet utile produit, IE — 10,59; E R FAURE pe E R A 0 E Ainsi il ne suffirait pas encore, pour arriver à un résultat satisfai- sant, de donner au conduit A un diamètre de 40 centimètres. SYSTÈME B. Dans le second système (fig. 2 et 3), le cylindre X, au lieu de com- primer, aspire sans cesse l'air du tuyau À et des caisses. Chaque fois que, par leffet de cette aspiration, une des caisses est remplie d’eau, elle est mise en communication avec l'air atmosphérique, par l’ouver- ture de la soupape S, et isolée du tuyau À par la fermeture de la soupape S’. Les choses étant réglées de telle sorte que l'effet contraire ait lieu en même temps dans la caisse immédiatement supérieure, il est clair que l’eau contenue dans la première, s’élèvera dans celle-ci, par le tuyau C,et sera remplacée par de l'air, à la tension 1, puisé dans l’atmosphère. Faisant encore abstraction de toutes les difficultés d’exécution, ainsi que des frottemens du piston du cylindre X, et de l'air dans le tuyau À et ses embranchemens, je supposerai, pour fixer les données du calcul : To. XII. 2 10 SUR L'ÉPUISEMENT DES EAUX 1° Que # soit la tension à laquelle doit être amené l'air d’une caisse, pour que, la caisse inférieure étant en communication avec latmos- phère, l’eau s'élève de celle-ci dans la première, en vertu de la force 1—{ ; 20 Qu’à chaque coup de piston du cylindre pneumatique X , l’eau d’une moitié des caisses passe dans les caisses supérieures; 3° Que cet effet commence lorsque le piston est arrivé à un point de sa course, tel que le volume qui reste à engendrer par ce piston, soit précisément égal à celui de l’eau élevée, ou des caisses qui se vident ; que l’air des caisses qui se remplissent, ne fasse que se dé- placer , sans changer de tension, et qu’en conséquence ce déplacement se termine avec la course du piston. Cela posé, soient : V le volume du tuyau À et de ses embranchemens ; V' celui de chacun des cylindres pneumatiques X. (Ces cylindres dans le cas représenté fig. 2, sont à simple effet. Dans le cas représenté fig: 3, on n’emploie qu’un seul cylindre à double effet) ; 2nle nombre des caisses à air; v le volume de chacune d’elles; 3! la tension de l'air dans le volume. (V + V' + nv), au moment où, la moitié des caisses venant de se vider d’eau, pour se remplir d’air atmosphérique, et étant mises en communication avec le tuyau À et le cylindre X, le piston va recom- mencer sa course en sens contraire ; a la hauteur d’eau exprimée en mètres, due à la pression unitaire d’une atmosphère ; L H la hauteur totale en mètres, à laquelle l’eau doit être élevée; E l'effet utile produit, correspondant à chaque coup de piston du, ou des cylindres X ; On aura d’abord : (V+ V' + nv) d'=(V + V')t+ nv DANS LES MINES. 11 et (V + no) d'=(V + V'}é, d’où À V+ nv nt Lou 2 (2) et nv d'=— (2) On aura aussi : Pr EST MORE Toi") (3) et H H An = ON IN COL NCA SIDE IU(4) Selon que l’on prendra le mètre ou la hauteur + pour unité. Aïnsi, quand on connaîtra trois des sept quantités E, V, V', n,, 'eté, on sera conduit à la détermination des trois autres, par les quatre équations ci-dessus. Calcul de la force dépensée. Pour évaluer, dans le cas de la fig. 2, la force employée pour faire passer le volume d’air V + nv de la tension 9’ à la tension #, néces- saire pour déterminer l’ascension de l’eau, je me servirai de la for- mule (a) trouvée précédemment, en y remplaçant V par V + »v et o par l’unité qui est la pression constante exercée au-dessus du piston. J'aurai ainsi 0, = (V + ms (Lt — 19) —— =} 12 SUR L'ÉPUISEMENT DES EAUX A ce point, l’eau des caisses isolées du tuyau À, commence à entrer dans celles qui sont en communication avec lut et le cylindre aspirant, et le piston engendre encore un volume xv sans faire varier la tension de l'air qui est £ à l’intérieur et 1 à l'extérieur ; la force dépensée pen- dant cette seconde période d’action, est donc Q, — nv (1—+). Ces deux parties réunies donnent l’expression de toute la force absorbée par lascension du piston, depuis le commencement jusqu’à la fin de sa course. La même force devra étre développée pour déterminer et achever l'ascension du piston du second cylindre; mais si l’on observe que cette ascension est aidée par la descente du premier piston, et que celle-ci est sensiblement assistée par l’excédant de la pression exté- rieure À, sur la pression intérieure primitive 9’, on reconnaitra que pour avoir la dépense réelle de force, correspondante à chaque coup de piston, il faut retrancher de la somme Q, + Q, ci-dessus, la force Q, qui est rendue pendant la descente. Or cette dernière force étant égale à celle qu’il faudrait employer pour amener, par dilatation, un volume V'3' de la tension 1 à la tension D”, la tension extérieure étant con- stante et égale à 1 , la formule (a) me donnera encore : Q,=va(1. (2) — ie -) x \ fe Donc la force totale dépensée pour chaque coup de piston, sera : t t— d’ LR) Q—0, + Q:—Q3:—(V sn 5 ae no (1 == vefur- “n L Si l’on se rappelle d’ailleurs, qu’en vertu des équations (1) et (2) V+ V no= Vi et V + Vo" d' art DANS LES MINES. 13 on pourra ramener cette expression à la forme plus simple jen, ; fte) à Q = V'o (1 — à) — V'J"L.0" Ft ah ER s.) TR HUE (E) \ Le premier terme est l’effet produit et les deux autres termes repré- sentent la force perdue. Dans le cas de la fig. 3 , on arrivera directement à l'évaluation de la force dépensée par le calcul ci-après. Quand le piston pneumatique a parcouru un volume quelconque +’, la tension 2”, qui existait de part et d’autre, à l’origine du mouvement, est devenue, du côté où s'opère la compression — , et du côté d', sera donc . L’eflort à faire, pendant la génération du volume V'J'dv' (V + nv) d'dv' Fac] |, 2 NV + no +0 quantité qui, intégrée depuis v’ = 0 jusqu’à ©’ — V'— V'}, donne pour cette partie de la force dépensée V+V = Volo — (V + Va") dl, 1 LE GrMenan S De ce point, jusqu’à l’extrémité de la course, le piston engendre encore un volume V'9— #v, et la tension de l’air est, et reste, d’une part Let de l’autre £, ainsi la force dépensée sera Q', — nv (1 —{), qui est précisément l'effet utile produit : La force totale dépensée est donc : t PQ Ga (DV (Na Va À) à 1) expression qui est et devait étre identiquement la même que celle (b), trouvée dans le cas de la figure (2). 14 SUR L'ÉPUISEMENT DES EAUX Dans ces deux cas, le rapport entre la force dépensée et l'effet utile produit, est donné par la formule : taf (+ )e (2) ÉLPMNE A0) Or, il suffit d'interroger cette formule, combinée avec les équa- tions (1), (2), (3) et (4), trouvées précédemment, pour reconnaitre que ce système devient très-désavantageux quand # diminue, c’est-à- dire quand on veut, comme semble l’exiger la pratique, dilater forte- ment l'air, dans le tuyau À, afin d'éviter la complication et le trop grand rapprochement des caisses. On trouve, en effet, que pour les mêmes valeurs de E et de V, celles par exemple de E—36 et de V—10, Les valeurs de à sont : Q É— 10,1 1:92 E Q Pour { 4 = 0,5 À E — 1,219 t — 0,8 : è — 1,07,etc.,etc. Ces considérations me conduisent donc encore, pour ce cas, à la source principale des désappointemens des praticiens qui ont tenté l'application de ce système, et, je le répète, mon but et surtout mon espoir, en traitant cette question, est moins d’en trouver la solution que d'éclairer la pratique sur les écueils qu’elle doit éviter, et de l’ar- rêter dans les dépenses considérables auxquelles pourrait l’entrainer l'ignorance des principes de physique qui s’opposent irrésistiblement au succès de ses tentatives. Le rapport À se rapproche beaucoup de lunité, quand on dilate peu l'air du conduit À, on pourrait aussi, dans ce système, avoir l’idée d’obvier au grand rapprochement des caisses, en employant une dis- DANS LES MINES. 15 position analogue à celle de la figure 10; mais, outre que les observa- tions qui ont été faites à ce sujet dans l'étude du système À, peuvent être imvoquées ici, pour détourner de cette combinaison, par la nécessité où l’on se trouve de donner un très-srand diamètre au con- duit À, il est aisé de voir que, dans ce cas, le rapport L augmente en même temps que le volume de ce conduit, et que cette augmentation serait encore plus sensible, si l’on cherchait à corriger les grandes dimensions que doit recevoir le cylindre X, en multipliant le nombre de ses coups de piston; tandis que, lorsqu’on agit par l'air comprimé, ce rapport est indépendant du volume du tuyau À, et reste aussi le même, soit que l’on donne un seul ou plusieurs coups de piston du cylindre X, pour produire un effet utile E, dans un temps donné. Ces considérations suffisent pour établir, dans tous les cas , l'infé- riorité du système B sur celui A. Averti par les détails qui précèdent, on renoncera évidemment à l’idée de faire l'application de l'un ou l’autre de ces deux systèmes à l'épuisement des eaux, puisque, d’une part, si l’on comprime ou dilate fortement l’air, on perd plus de force que dans les systèmes en usage, où le rapport : de la force dépensée à l'effet utile produit, est moyen- nement égal à 1,50; et que d'autre part, si l’on ne modifie que faible- - ment la tension ordinaire de l’air, on est conduit, surtout dans le système B, à des difiicultés et à des frais d’exécution incompatibles avec la pratique. SYSTÈME C. Ayant reconnu une source capitale de perte de force, dans l’évacua- tion immédiaie de l'air des caisses, après chaque ascension de l’eau, J'ai essayé d'utiliser ce ressort par un troisième système, représenté lig.4,5et6. Dans le premier cas, l'air comprimé, sortant des caisses, après avoir opéré l'ascension de l’eau, se répand dans le tuyau A’ jusqu'à la sou- 16 SUR L'ÉPUISEMENT DES EAUX pape S’, qui est fermée pendant que le piston remonte et s’ouvre au moment où il va recommencer à descendre. La soupape S, se fermant au même moment, cet air presse pour aider à la descente du piston. Soient, dans ce système : V, et V, les volumes des tuyaux A et A’ et de leurs embranchemens; v le volume de chaque caisse et 2» leur nombre ; V' le volume du cylindre à air X; t,etf, les tensions auxquelles Pair doit être amené dans les tuyaux A et À’, et dans les caisses correspondantes , pour déterminer l’ascen- sion de l’eau. Chaque coup de piston descendant, devra introduire dans le tuyau À un volume d’air #v , à la tension £,, donc le volume V'— nv, (indépen- dant de V, et de V.). Pendant que cette portion d’air passe dans les caisses, la tension dans le tuyau À’, doit étre et rester £,, et sa masse V, 4. À cette masse vient se joindre, pendant que le piston remonte, la masse »vf,, et le volume de ce côté, redevient V, + nv, à la tension V,t, + not, Ç V, + nv Enfin, quand le piston a engendré, en descendant, un volume V'—nv, cette tension doit être ramenée à £,, sans que la masse d’air ait changé, donc on doit avoir Vit, + not, = (NV, + nv + V'—nv)t,, d’où V't, vou not, — nuit, d’où enfin LS — 12 C'est-à-dire que, pour opérer régulièrement à l’aide des dispositions adoptées fig. 4, la tension de l’air, au-dessus du piston et dans V,, doit être ramenée à l'unité, au moment et pendant tout le temps de l'ascension de l’eau, ou, plus généralement, cette tension doit étre DANS LES MINES. 17 ramenée au même degré que celle de l'air emprunté par le cylin- dre X pour fournir à la compression. Dans cet état de choses, la force dépensée pour donner un coup de piston correspondant à un effet produit E = nv(t, — 1) sera Re V, + nv et Te DE | Een 2e AU (d) Cette formule fait voir, qu’aussi long-temps que V, aura une valeur finie, il y aura encore de la force perdue; que cette perte sera d'autant moindre, abstraction faite des autres résistances, que V, et f, seront plus petits; et qu’elle serait tout-à-fait nulle, quel que fût #,, si l’on pouvait avoir V, — 0. C’est pour envisager cette question d’une manière plus générale, et me débarrasser de la condition particulière £, — 1, résultant des dispositions de la fig. 4, que j'ai essayé celles nr fig. 5, par lesquelles l'air, qui a opéré dans les caisses, au lieu de se rendre _ au-dessus du piston du cylindre X, agit par l'intermédiaire du tuyau A! au-dessous du piston d’un second cylindre X’. Dans ce cas, on a d’une part. V' — not, quel que soit V,, et de l’autre, V’’ étant le volume du cy- lindre X’, & ve (NV, + VE =Nt, + nvt,, d’où quel que soit V.. Quant à la force dépensée pour donner un coup de piston corres- pondant à un effet utile E — nv (4—#,), elle se compose de : 1° L’eflort à faire pour amener le volume V’ de la tension 1 à la Tom. XII. 3 18 SUR L'ÉPUISEMENT DES EAUX tension £,, ou Te v(re — — 1) £, 20 L’effort nécessaire pour amener le volume V, + nv de la ten- N,t,+ not, à sion —=—"" à la tension £, ou V,+ no = VE + nvt V,t, + not no. ft; —+t \ Ni ne) "| Lt, I = ——© | — _{ | . ; V, + nv V, + nv V, + no\ À, / ? 30 L’eflort à faire pour chasser l’eau des caisses pleines dans les caisses vides, ou 20 (f, —#,); 4 L’effort à faire pour ramener, de la tension #, à la tension 1, le volume V'', où V'(—£Lf,_,,,) (effort négatif puisque é, dans le cas de la figure 5, doit avoir 1 pour limite supérieure). L'ensemble de ces effets donne la force dépensée t, Vt,+ not, Q=nv(t, —t,) + not, l. En (V,t, + not,) L. 2 ———— . (e) V.t, + not, La supposition de ?,— 1 rend cette formule identique avec celle (d) du cas précédent. Il suffit d’ailleurs de quelques applications pour reconnaître que cette disposition est plus désavantageuse à la force motrice que celle fig. 4, et comme elle est aussi plus compliquée et plus coûteuse pour l'exécution, je n’en ai dit quelques mots que pour la condamner. Le moyen employé fig. 6 comprend en quelque sorte les deux qui précèdent, dont il ne diffère qu’en ce qu’il n’emprunte et n’évacue aucune partie d’air à l'extérieur, et qu'il est applicable à des valeurs quelconques #, et #.. Le calcul de ce cas est très-simple et conduit, pour la force dé- DANS LES MINES. 19 pensée à la valeur générale : t V.t, + not, Q—no(t, —1,) + net,l = + (Né, + not.) 1 = A : V,t, + not, donnée par la formule (e) ci-dessus. not, . Quant au volume du cylindre à air, il est évidemment égal à Ce procédé a, sur celui de la fig. 5, l'avantage pratique de la sim- plicité, et celui fhéorique , de convenir à des valeurs quelconques de f,, mais ce dernier avantage disparait dans l'application , puisque si £, était plus grand que 1 , on serait réduit à enfoncer profondément sous l’eau la caisse inférieure, ou à employer un mécanisme parti- culier pour y faire rentrer le liquide après chaque ascension, et qu'il deviendrait impossible de rendre aux tuyaux l'air perdu pendant le jeu, sans consacrer une nouvelle dépense de force à cette alimen- tation. Il a d’ailleurs , sur le procédé de la fig. 4, l'avantage d’un emploi plus continu et plus uniforme de la force motrice. Cest donc sur cette disposition que je baserai les calculs ci-après, qui ont pour but de compléter l'étude du système C, quant à ses applications aux cas ordinaires de l’épuisement des eaux. Partant toujours de l'hypothèse, qu'il s’agisse d’épuiser 1200 litres d’eau à 300 mètres de profondeur, par minute, j'aurai successivement, en me servant des formules (e) et (f), trouvées précédemment, et en supposant qu’on ne donne qu’un coup de piston par minute : 20 SUR L'ÉPUISEMENT DES EAUX TENSION, VOLUME ee RÉSISTANCE VOLUME DES CAISSES ET DU DE FORCE DÉPENSÉE s ET DIAMÈTRE DES CONDUITS À ET À’, DANS LE CONDUIT À, CYLINDRE X. POUR UN EFFET E. a Pression due à la résistance dans le tuyau A, ou Si V= V,—9%5 .... g—0,054 ( lo. Q — 37,80 D'ou D 0820. ee D'où force dépensée pour vain AE cre cette résistance Pour ; j R— 0,054 X 72 — 3,888: Lib si V, = V: — 97 a g— 0.018, ino— 36 d'où D —0,40.. LES) d'où R—0,018X 721,296 = 1|n0— 72 : fac [ Re SAGE mi: Sin 6 | » R — 1.296. V'— 108 d’où son diamètre — 0,4, . . . CPIQUEMNA ADN TURN d’où son diamètre — 0,32... SEGA k | a Si MINE 25% Q — 40.91. Lx — ee (à é nn On 0e 01 La d'où R—0,032X36 —1,152 | Le 21e | Pour Si UE = 2 — 0,017 | —; 3 OO 2 = 1 PRE PTIT AT “A PT À où R=0,017x36—0,612 | Ki oO ; D'où | no — 36 d’où son diamètre — 0,4. . . . se | R — 0,612 { V=72 et que Na 2h cr d’où son diamètre 0,32. . . . . Q— 41. à F NE —=NE—= 2h. e = 0,03 (d - — 151871; î 4 x d'où D — 0.32... ù ! | d’où R=— 0,03 X 18—0,5 , SNS MEN VÉNUS LE ? — 0,03 Pour ; » b 1 d’où son diamètre = 0,32. . d'où R— 0,03 X 18 — 0,5 ebquenVe Dr Une 0e d'où en diamètre 0,142 . Fi Q — 39,742. à | no —:18 D'où Si NE Die ue le à ls MERE 10.2: DOME LE CAMNAT ON k ne ELŒUEMN:— T0. } PR d'où D—02....,.. ee: à DANS LES MINES. 21 RÉSISTANCE RAPPORT DE LA FORCE DÉPENSÉE A L'EFFET Observations. DANS LE CONDUIT À’. PRODUIT. | ssion , dueàlarésistance, dans (*) Le volume engendré sous la pres- | £ tuyau À’, ou sion due à la résistance est de . 72" g9 — 0,03 FT Q+R+R 44988 Densité de l'air en mouvement . . 11 36 A 3 | ù force dépensée pour vaincre E (*) Volume engendré. . . . . . 108 | ette résistance Densité moyenne . . . . .. 1,20 | M— 0,03 X 108 — 8,24. ? — 0,0104 (aa) Q+R+R + 10,779 eye (aa) Volume engendré . . . .. 108 1R/—0,0104 X 108—1,123. E TETE EU Densité moyenne. . . . .. 1.15 Q+R + R, 42,846, « R' — 8,24. E 36 en. ue dd rire MAR er MERE (aa) Volume engendré . . . . . 36 ? — 0,012 (bb) | Q+R+R 42,916 119 DenStER ECM TER e 2 1 R'— 0,012 X 72 — 0,854 E 7 86 ” ‘ | (bb) Volume engendré . . . . . 72 Densité moyenne. . . . . . 1,3 g —0,0041 (cc) | Q+R<+R 43,094 0 (cc) Volume engendré : . . . . 72 i R'—0,0041 X 72 — 0,295 E DES GE D nie Densité moyenne. . . . . . 1,25 R' = 0,854. (a) Volume engendré . . . . . . 18 Densité Pr Lo 3 (b) Volume engendré . . , . . . 54 Densité moyenne . . . . . . 1,42 ( g = 0,005 (b){[Q+R+R 1 R—0,005 X 54 — 0,27. E 36 ? = 0,26 (c) Q+R+R 54,322 : (c) Volume engendré. . . . .. 54 Densité moyenne . . , . .. (d) Volume engendré. . . . . . 54 = 1:27; TT Densité moyenne . . . . . . 1,65 E 36 | LR — 0,056 x 543,02. 22 SUR L'ÉPUISEMENT DES EAUX Ces résultats n’offrent rien de satisfaisant pour la pratique, puis- que les faibles avantages qu’on pourrait y trouver, quant à l’écono- mie de la force motrice, sont plus que compensés par la nécessité coûteuse de donner des dimensions considérables, non-seulement aux conduits À et À’, mais encore au cylindre X. Vainement on tenterait d'éviter les grandes dimensions de ce dernier, en donnant plusieurs coups de piston, pour chaque ascension de l’eau. Cet avantage d’exé- cution serait acheté aux dépens d’une nouvelle perte de force, puis- qu'une partie de l'air sortant des caisses serait alors refoulée dans le tuyau À, ayant d’avoir restitué au moteur tout ce qu’elle a conservé de la force employée à sa compression. On peut donc conclure, avec assurance, que le système C ne mérite pas plus que celui B, et méme moins que celui À, d’être accueilli par les praticiens. SYSTÈME D. L’inconvénient que je viens de signaler, d’une perte de force ré- sultant de l’envoi d’une partie d’air comprimé, d’un conduit dans l'autre avant restitution entière de sa puissance mécanique, se présen- tera également dans le cas de la fig. 7 , toutes les fois qu'il faudra donner plus d’un coup de piston, pour déterminer chaque ascension de l’eau. Dans cette disposition , Pair est alternativement foulé et aspiré, par le piston du cylindre X, dans les tuyaux A et A’. Cet effet alternatif s'obtient par le jeu des glissières o , 0’, f' et f', dont la marche se règle par celle de Peau dans les caisses du puits. Or, il est aisé de reconnaitre qu’on doit supporter ici, outre la cause infirmante dont je viens de parler, et les résistances notables dues au mouvement rapide d’un grand volume d’air dans les tuyaux, l’incon- vénient très-grave, qu'après chaque coup de piston l'air du cylindre soufflant est remis immédiatement en communication avec le tuyau dans lequel doit s’opérer le refoulement, en sorte que, du moment où la tension dans ce dernier commencera à l'emporter sur celle de l’autre DANS LES MINES. 23 tuyau et par conséquent du cylindre, il y aura, chaque fois, à l’ori- gine et pendant une partie de la course du piston, retour vers le cylindre, de lair déjà comprimé, d’où résulteront une grande ré- sistance de plus à vaincre en même temps qu'une cause puis- sante d’irrégularité. Enfin, lorsque j'ajoute à ces défauts la condi- tion difficile à remplir, de mettre en rapport parfait la marche de l’eau dans-les caisses avec le jeu du cylindre à air X, de manière à changer à propos le sens dans lequel doivent fonctionner les glissié- res 0, 0’, fet f’, je n’hésite point à conclure que ce procédé rentre, comme la plupart des précédens, dans le domaine exclusif de la théorie (voir la note a), et que, considéré sous ce point de vue, il le cède sans contredit, à celui représenté figures 8 et 9, dans lequel : 1° Chaque coup de piston détermine l'ascension de l’eau ; 2° L'air ne passe plus d’un côté à l’autre du piston, mais reste toujours dans le même tuyau, où il est alternativement comprimé et dilaté au degré voulu, de telle sorte que la force employée à cet effet, par le piston du cylindre X, lui est intégralement restituée, après chaque coup, et qu’on n’a plus à supporter en perte que la résistance due au frottement de l'air dans ses conduits. 30 Enfin, on n’a plus besoin, ni de flotteurs dans les caisses, ni de glissières aux cylindres X. Mais plus cette disposition est séduisante, plus je n’empresserai de faire remarquer que sa simplicité et tous ses avantages seront large- ment compensés, dans la pratique, par des dépenses et des difficultés d'exécution plus qu'ordinaires, attendu que, d’une part, les tuyaux A et A et le cylindre X devront recevoir des dimensions considéra- bles, et que d’un autre côté, la moindre fuite ou perte d’air, soit par les joints des tuyaux et caisses, soit entre le piston et les parois du cylindre, soit enfin par le contact de l’eau, sera une cause de déper- dition de force et d’irrégularité dans le jeu des pompes, inconvénient auquel on ne remédierait que très-imparfaitement au moyen de sou- papes alimentaires #, s’ouvrant sous une pression donnée. ( Voir la note b ). SUR L'ÉPUISEMENT DES EAUX 19 En SYSTÈME E. Ces diverses considérations m'ont conduit à l’adoption d’un dernier système, que je crois exempt des principaux inconvéniens que j'ai eu l’occasion de signaler dans ce Mémoire, et auquel je ne puis repro- cher que le défaut d’un peu de complication. Dans ce système représenté fig. 11, le cylindre X, placé à la surface, puise dans l’atmosphère tout l'air nécessaire à la transmis- sion de la force motrice, le comprime à une tension #, et l’introduit sous cet état, dans un tuyau ou conduit À , descendant jusqu’à une certaine profondeur dans le puits. Cet air est admis, à différens étages, dans des S Paln æ, aux pistons desquels il imprime un mouvement de va et vient, qu’on ap- plique immédiatement au jeu des pompes qui doivent élever l’eau. Pour retrouver toute la force employée à la compression de lair, quelle que soit la tension £ à laquelle il est amené par le travail du cylindre X, on a soin de le faire agir par expansion, dans les cylin- dres +, de telle sorte, qu’à la fin de chaque coup de piston, il est ramené à la tension # sous laquelle il a été emprunté à l'atmosphère. Il en résulte que la tension primitive doit avoir sur celle nécessaire au soulèvement des colonnes d’eau à élever, un excédant de force sufh- sant pour compenser ce qui manque de ressort à ce même air vers la fin de son action. De là, la nécessité d’un volant à chaque cylin- dre +, pour entretenir et régulariser le jeu des pompes. On profite du mouvement de va et vient de la tige de chaque piston P : 1° Pour régler l'ouverture des glissières G et G’, de manière à ad- mettre dans les cylindres x, les quantités d’air nécessaires à l’action du système ; 2° Pour ouvrir et fermer à propos les soupapes $ et S’ par lesquel- les l'air s'échappe après restitution de toute sa puissance expansive. Il est d’ailleurs facile de déterminer, en raison des circonstances DANS LES MINES. 95 dans lesquelles on se trouve, les dimensions relatives et les disposi- tions à donner aux diverses parties de ce système en ayant égard aux observations générales ci-après : 1° Le tuyau À et ses embranchemens, ainsi que les soupapes et glissières des cylindres X et x, auront des dimensions suffisantes, pour nopposer qu’une résistance insensible au mouvement de l’air, auquel ils doivent livrer passage. 2° Ce conduit offrira, soit par lui-même, soit par l'addition d’un ou plusieurs réservoirs latéraux R, un volume assez grand, pour qu’on puisse négliger les variations qu'y éprouvera la tension de l'air, chaque fois que l’alimentation qui s'opère par le cylindre X, ne coïn- cidera pas rigoureusement en temps ou en quantité, avec la dépense qui a lieu par les cylindres +. 3° L'air devant entrer , dans chaque cylindre +, sous une tension #, et en sortir à la tension 1 , après avoir rempli tout le volume » de ce cylindre, le jeu des glissières d'admission devra être réglé de manière à ne recevoir chaque fois, dans celui-ci, qu'un volume d'air = à la tension £. L'effet mécanique de cet air, pendant toute la durée de son ad- mission sera = (—1), celui dù à son expansion sera r( ls =) , l’ef- fet total correspondant à un coup de piston du cylindre , sera donc vlt. En conséquence le volume » de ce cylindre, s’obtiendra, en divi- sant, par le logarithme népérien de la tension f, l'effet utile partiel e qu'il doit produire, en raison de sa position dans le puits. 4° Quant au volume V', engendré, dans un temps donné, par le piston du cylindre général X, il sera évidemment mesuré par la somme des volumes », v', v’’, engendrés dans le même temps par les pistons des cylindres æ, puisque l'air sort de ceux-ci à la tension 1, sous laquelle il a été emprunté à l'atmosphère par le cylindre X. Les dimensions de ce dernier, et le nombre de pulsations de son piston ne seront donc assujettis qu’à la condition que « V' soit égal » au quotient, de la somme des effets partiels e+e'+e'"+, etc. ; ou Tow. XII. 4 26 SUR L'ÉPUISEMENT DES EAUX » de l'effet utile total E, correspondant au même temps, divisé par » le logarithme népérien de la tension £. » 5° La course des pistons de chaque étage de pompes sera la même que celle du piston du cylindre à air z correspondant; quant à la surface p' de ces pistons, elle sera pour chacun d’eux égale à =7* p étant la surface du piston à air correspondant, et 4 la hauteur par- tielle de la colonne d’eau à élever, celle due à la pression de l’atmo- sphère étant prise pour unité, ( Cette surface p sera double si lon donne , comme dans la figure 11, deux coups de piston pour une ascension. 6° Les volans de chacun des cylindres x et du cylindre général X, auront respectivement des dimensions proportionnées aux quantités de mouvement qu'ils sont destinés à recevoir et à restituer aux diver- ses parties de ce système. 70 Pour simplifier autant que possible l’ensemble du système, en réduisant à un minimum le nombre des cylindres à air +, on donnera aux divers étages des pompes, les plus grandes longueurs reconnues admissibles par la pratique. Or il est prouvé par l'expérience que l'emploi des cylindres plongeurs permet de refouler l’eau , sans incon- vénient, en un seul jet, jusqu'à 80 mètres au moins de hauteur ; qu’avec la vitesse moyenne des pompes, l'aspiration s’opère, sans perte de force sur 5 à 6 mètres de hauteur; et qu’enfin on peut, sans difli- culté porter à 40 mètres la hauteur de la colonne d’eau qui est re- foulée, par soulèvement dans le système ordinaire de nos pompes de mines, en sorte qu’en adoptant, pour les pompes, la disposition re- présentée figure 11, les cylindres à air +, pourraient être éloignés les uns des autres de 120 à 130 mètres. Ce système a beaucoup de rapport avec celui À, aidé de la dispo- sition auxiliaire figure 10, mais il a sur lui et sur tous ceux dont j'ai parlé jusqu'ici, des avantages marqués qu’il devient facile de saisir. En effet : Le volume V', engendré par le piston du cylindre X pour un effet utile donné E, ou en d’autres termes le volume d’air emprunté à DANS LES MINES. 27 l'atmosphère, pour être envoyé, sous une tension {, dans les cais- ses ou cylindres æ, est donné, dans le système À, par l'expression Lo 5 ; et dans celui-ci, par l’expression V'— = : or, la ten- sion £ pouvant être ici, sans inconvénient de 3 à 4 atmosphères au moins, tandis qu’elle ne peut dépasser 1+, dans le système A, on n'aura besoin de mettre en jeu que le ? au plus de l'air qui serait nécessaire dans ce dernier cas, ce qui réduira à peu près dans la même proportion les frottemens du piston dans le cylindre X, et le volume des cylindres + du puits. Quant à la résistance due au mouvement de l’air dans le tuyau A, résistance dont l’expression générale est ici, comme dans le système A,R—» L; il est aisé de comprendre qu’elle sera atténuée dans une proportion bien plus grande encore, pour une même longueur et un même diamètre de ce tuyau, car, si l’on met pour + sa valeur dans cette expression, elle devient CT LL M NUL — 3408960 x D° > + et si l’on remarque que dans cette expression d=t, et M— T étant le nombre de secondes pendant lequel on produit l'effet utile E, elle pourra se mettre sous la forme L + 47D = 68960 x D° x T x VE qui fait voir, puisque le premier facteur est constant, que la résis- tance en question sera réduite en proportion des troisièmes puissances des masses d'air mises en jeu. Cette résistance, dans le système que je propose, ne serait donc pas, toutes choses égales d’ailleurs, la 64e partie de celle qu’entrai- nerait l’emploi du système A. Je terminerai l'examen de ce système, par un aperçu de son ap- plication, au cas d’un épuisement de 2,650 litres par minute, dont 28 SUR L'ÉPUISEMENT DES EAUX 1,650 litres proviendraient de 80 mètres de profondeur, 600 litres de 180 mètres, et les 400 litres restant de 300 mètres de profondeur : ce qui revient, comme dans les exemples choisis, pour l'application des autres systèmes, à un effet de 360 dynamies par minute. Je suppose la tension { de quatre atmiosphères. L'effet utile total étant égal à 36 par minute, le volume engendré, dans le même temps, par le piston du cylindre X , devra être Fe 26 mètres cubes, un cylindre soufflant d’un mètre cube de contenance, donnant 26 pulsations par minute, suffira pour cet effet. Je placerai, dans la mine trois cylindres x. Le premier établi à 75 mètres environ de profondeur, amènera au jour, par un seul jeu de pompes foulantes, avec cylindre plongeur, terminé par une très- courte aspiration, toutes les eaux recueillies à 80 mètres , plus cel- les élevées par les cylindres inférieurs. Son effet partiel sera donc 2,650 x 8 — 21,2 ou 212 dynamies. Le second, GE à 145 mètres environ, étvarst jusqu’au puisard établi à 80 mètres, à l’aide d’un étage de pompes foulantes avec plon- geur de 70 mètres de haut, et d’un second étage de pompes aspirantes et soulevantes de 30 mètres, toutes les eaux provenant de 180 mé- tres, plus celles élevées par le 3° cylindre. Son effet partiel sera donc 1 X 10 — 10 ou 100 dynamies. Enfin le 3%e fixé à 255 mètres environ de profondeur élèvera à l’aide de deux étages de pompes semblables, c’est-à-dire foulant sur 80 mètres, et aspirant et soulevant sur 40 mètres, les 400 litres provenant du puisard inférieur. Son effet utile partiel sera de 0,4X 12 — 4,8 ou 48 dynamies. ' Si je fais faire au 1er volant du puits 15 tours, et aux deux autres 10 tours par minute, ce qui correspond, pour chaque cylindre à pa- 1 Pour ne pas charger inutilement l'effet des volans, on devra, dans la détermination des hauteurs relatives des pompes foulantes d'une part, aspirantes et soulevantes d'autre part, avoir égard au poids des cylindres plongeurs, des tiges et des pistons du cylindre qui met ces pompes en jeu, afin que l'air ait, autant que possible, le même effort à faire, pour soulever, que pour faire descendre le piston de ce cylindre. DANS LES MINES. 29 reil nombre d’ascensions de l’eau, et à un nombre double de coups de piston, et si je donne aux deux derniers une course d’un mètre, et au premier une course de 1 mètre 50, pour éviter l'inconvénient d’un trop grand diamètre pour le plongeur : le premier de ces cylindres devra avoir un volume de 21,2 —— — (jm. cube 519 80 X 1,3& 4 et une section de 0"°",341. D'où la section du cylindre plongeur correspondant 0,341 X 1,38 —AN a car. 116 environ. Le second cylindre aura un volume de 10 a (r cube 36 20 X 1,38 et une surface de 0" “",36, d’où la section du cylindre plongeur et celle du piston des pompes soulevantes 0,36 X 1,38 * 10 — 9 On. car. 10, Le troisième cylindre + aura pour volume 4,8 en De ° ns m,. cube 175. 20 x 1,88 0 7178 Sa section horizontale sera de 0,175 et celle de ses pompes 0,175 X 1,38 2 # 12 — 0,04. Chacun de ces cylindres admettra, à chaque coup de piston, le ? de son volume d’air à 4 atmosphères puisé au conduit A. À chaque étage de pompes, la section des tuyaux à eau montans, 30 SUR L'ÉPUISEMENT DES EAUX DANS LES MINES. devra être au moins égale à celle des pistons correspondans, pour atténuer le frottement de l’eau contre leurs parois. On arrivera aisément à obtenir, pour les divers cylindres, les diffé- rences de vitesse et d’effet que comporte leur situation dans la mine, en réglant en conséquence la largeur des passages ouverts et fermés alternativement par leurs glissières. Il suffira d’ailleurs de donner au conduit A un diamètre de 20 cen- timètres, pour qu’il soit permis de négliger la résistance de l'air auquel il doit livrer passage, puisque cette résistance se réduit, dans ce cas, à © * —0,55 pour un eflet produit de E — 36, ce qui ne porte qu'à 1,015 environ le rapport de la force dépensée à l'effet produit. Enfin, si, profitant des excavations naturelles de la mine, pour y former un ou plusieurs réservoirs d’air comprimé on ajoute, par ce moyen économique, un volume de 40 à 50 mètres cubes à celui du conduit À, les défauts éventuels de simultanéité d'action entre le cylindre X et les cylindres +, seront suffisamment corrigés, puisque le premier de ces cylindres pourrait jouer seul pendant plus d’une minute sans qu’il en résultàt d’inconvénient sensible. J'ai passé sous silence les frottemens nouveaux que lemploi des cylindres + et de leurs volans, introduisent dans ce nouveau système ; non que je les considère comme insignifians; mais parce qu'ils ren- trent dans la classe de ceux connus par les praticiens, et qu’en réalité ces frottemens sont de nature à n’infirmer que faiblement les effets de la force motrice, si la confection des appareils est confiée à un con- structeur habile. FIN. NOTES. Nore A. La recherche des changemens de tensions de l'air, et de la force dépensée , après un certain nombre de coups de piston, dans la première disposition du système D . donne lieu aux calculs ci-après : V étant le volume de l’un ou l’autre des tuyaux A ou A’ ; © celui d’une caisse à air et 2 » leur nombre ; #: la tension dans le tuyau A et dans une moitié nv des caisses, au moment où l’eau vient d’être chassée de celles-ci ; t: celle dans le tuyau A’, et par conséquent dans le cylindre X au même moment; c le volume de ce cylindre. Après un nombre quelconque P de coups de piston tendant à soutirer l'air du tuyau À pour le fouler dans celui A’ ( pourvu , toutefois, que l'on s'arrête avant que la différence entre les nouvelles tensions suffise pour déterminer l’ascension de l'eau). La tension du tuyau A, du cylindre et des caisses pleines d'air, tension que je désignerai par #, (P), sera devenue V + nv % V+no+c) Celle du tuyau A’ aura été un instant V+C V+no V+nvo P—1 TP) = +, — té, nn) —1| V Y Vnv+c Mais elle se sera immédiatement changée, par la communication entre ce tuyau et le cylin- dre, en ss nv Vænv P t,E) = 6, + 1— (ET ) . V+no+c Quant à la force dépensée dans le même temps, elle se composera évidemment, de la somme de toutes celles employées pour produire chacun des P coups de piston, et aura pour ex- pression V-nv) Vno NP—1 Qu [P(N+0)8, + (21) (Van) à à | =) 1 x] Me | L ie A (Væ+nv) (V+nv+c) x [( V+no ) 1] ou Væno+c c Vnvo+c Vne 32 NOTES. Nore B. On se fera une idée du peu d'espoir que la pratique doit fonder sur cette disposition, en pro- cédant comme suit, au calcul des dimensions des diverses parties de cet appareil , et à l’appré- ciation approximative des pertes de force auxquelles il donnerait lieu , du chef de la résistance qu'éprouve l'air à se mouvoir dans les conduits A et A’. Soient : V le volume des tuyaux À ou A’, que je suppose égaux en longueur et en capacité ; æ, celui d’une caisse à air; 2n le nombre de ces caisses ; V! le volume du cylindre à air X; 4, et #: les tensions respectives de l'air dans les tuyaux A et A’, ou réciproquement, pendant tout le temps que dure l'ascension de l’eau. Chaque fois que le piston commencera son mouvement dans un sens, on aura : d’une part, un volume d’air VV’ à la tension #:et de l’autre, un volume V-+-»v à la tension #, et comme ces deux masses d'air sont égales, on pourra poser l'équation (V+V')#4:=(V+nv)h, d’où, V' —(VN-+nv) e Ve 2 Quant à l'effet produit E, correspondant à chaque coup de piston, il sera évidemment donné par l'expression E = nv ( #:—#: ). - C'est de la combinaison de ces équetions , avec la formule ( F ) que l'on devrait faire dépen- dre, dans chaque application, le choix des valeurs les plus avantageuses de #, t:, E et V , eu égard à la résistance opposée au mouvement de l'air et à toutes les convenances d'exécution. Quant à cette résistance, elle s’évaluera avec une approximation suflisante pour la pratique en admettant : 7. à la tension Z (#,+#,), passe, tout entier , du cylindre X dans l’un des tuyaux A ou A’; et qu'un pareil volume rentre, de l'autre tuyau dans ce cylindre ; en sorte qu’on aurait dans la formule (f), 1° Qu’à chaque coup de piston un volume d'air au = 3 (#, 2) € = 'e (ht rÉrEEe" 1 2 T représentant le nombre de secondes correspondant à un coup de piston. 9% Que ces deux masses d'air V’, parcourent respectivement Ja moitié de la longueur de ces tuyaux, ce qui détermine L et D. 3° Enfin que la résistance totale correspondante à chaque coup de piston soit représentée par 2oV'. En partant de ces données, on ne tarderait pas à reconnaître que ce ne serait qu’en opé- rant avec de faibles différences de tension , #—#>:, et en donnant de très-grands volumes, V’, au cylindre X, et V, au tuyau A, qu’on pourrait arriver à une disposition satisfaisante, quant À l'économie de la force motrice. FIN DES NOTES. 1e k £ Es V =. z [A 7 ent le jeu de leurs soupapes 21207 % 221 CRT f “t À 07 9p 2y109 2p 79 2.470 p sododnos s2) sodold » Ë ë | PL AYAOS OP 79 22.400 D sado di108 2 4N 2 à 5n ES Jura} puotono SUP) AP] SUID) SIYPRO SAN2)70/ Sep à del < < És i À EN Ê "lent Leurs SOUPapes de des flolleurs dans Les (uisses re le jeu mn ” 1 - , * Les | | - 4 * | | À : 0] \ | è | DS : id ù = : » | nn peprmite] l { i A DS SR RD PTS 1 minier then Cnnrmer eme PRET E r fa ee m4 DA 3 3 are Ra Rs FT: per A - tiens, pi i \ Û Ste D ‘F L | 1] luee Es a | des ftotteurs dar ler Cxsses renlenl degen de leunrsozpares _— ———— ces flolleurs dans les Causses, réglent le, Jeu de leurs soupapes 2ytap nr TE 2110102 D D 2dpdu0 = 20IJU0 P 2 y RECHERCHES ANATOMIQUES ET PHYSIOLOGIQUES SUR LA GARANCE, SUR LE DÉVELOPPEMENT DE LA MATIÈRE COLORANTE DANS CETTE PLANTE, SUR SA CULTURE ET SA PRÉPARATION, SUIVIES DE L'EXAMEN BOTANIQUE DU GENRE RUBIA ET DE SES ESPÈCES ; PAR J. DECAISNE, ’}, AIDE-NATUBALISTE AU MUSÉUM D'HISTOIRE NATURELLE DÉ PARIS. To. XII. Ï INTRODUCTION. Un fait bien vu est une connaissance précieuse; il y en a peu qui soient connus dans tous leurs détails, (SENEBIER, Art d'observer, chap. vit, p. 278.) La question que nous avons à traiter peut être envisagée sous plu- sieurs points de vue, soit qu’on l’étudie comme fait anatomique, soit qu’on la considère d’après les rapports qui doivent la rattacher à l’in- dustrie et à l’agriculture, soit enfin, et c’est le but essentiel vers lequel ont duü tendre mes efforts, qu'il s’agisse d'observer la formation et de suivre le développement du principe colorant de la Garance. L'histoire du développement des matières colorantes, de même que la connaissance précise du siége où s’organisent la plupart des prin- cipes immédiats, est un de ces sujets sur lesquels aucun physiologiste ne s’est arrété ; aussi est-il resté, pour ainsi dire, inconnu. Quelques observations isolées sont tout ce que la science possède sur les sécré- tions ; car il ne paraît pas qu'aucun mémoire ait été entrepris dans le but spécial de les faire connaitre. Il est vrai que les études auxquelles il faut se livrer pour approfondir une question aussi complexe, exigent . . . Q 4 ? non-seulement une connaissance intime de l'anatomie végétale qu'on 4 INTRODUCTION. ne possède pas encore, mais elles offrent des difficultés inséparables de l’observation des faits qui dépendent de leur action vitale, limite à laquelle trop fréquemment les notions physiologiques que nous pos- sédons aujourd’hui nous obligent à nous arrêter. Aussi, après avoir cherché à rassembler ce qui se rattachait d’une manière à peu près directe à notre sujet, nous n’avons pas tardé à nous apercevoir des difficultés qu’il présente, soit par le défaut d'ouvrages spéciaux qui auraient pu nous guider, soit à cause de l’obscurité qui règne dans les parties de la science relatives au tissu cellulaire, lequel, sous le point de vue physiologique, joue un rôle si important, par l’ex- citabilité dont il jouit, et dont il parait être seul le siége dans les vé- gétaux. Quant à cette excitabilité, elle ne peut être regardée non plus comme une propriété première , simple, mais bien plutôt comme le résultat dernier et complexe de telle ou telle série d'actions organiques, qui restent elles-mêmes à déterminer, et qui semblent être la prmei- pale cause des phénomènes que nous allons signaler dans cet écrit. Plusieurs des principaux faits que nous avons à étudier, et les phé- nomènes qui en dépendent, pouvant néanmoins s'expliquer par les connaissances acquises sur la respiration des végétaux, j'ai pris ces connaissances pour point de départ de mes expériences, afin d'expliquer une partie des phénomènes que j'avais à faire connaître. La théorie de la coloration des plantes établie, en outre, sur des observations directes et des principes généraux, se trouve également appuyée sur la connaissance des fonctions des feuilles qui sont elles- mêmes assez généralement le siége de cette coloration, et comme lac- tion de la lumière exerce une grande influence sur la respiration, laquelle se lie intimement aux phénomènes de la production des prin- cipes immédiats dans les végétaux ; comme les cultivateurs mettent en usage, sur la Garance, certaines pratiques qui déterminent l’étiolement INTRODUCTION. 5 des tiges où ils veulent faire développer la matière colorante, j'ai dù chercher les effets que l’action des agens extérieurs les plus puissans et les plus universellement répandus, c’est-à-dire, la lumière, l'air atmosphérique et l’eau pouvaient avoir sur la production du principe colorant, lorsqu'ils sont transmis à la plante, à différens degrés d’in- tensité. Il me restait à constater dans la plante vivante sur quelles parties du végétal cette influence s’exerçait le plus directement, et quelles étaient celles dont les principes préexistans étaient plus particulière- ment modifiés. On comprendra, toutefois, qu’il ne m’a pas été permis de diriger à mon gré l'influence de ces agens, afin d’en étudier les effets, sur toutes les parties du végétal. Je sais qu’il aurait été surtout impor- tant que j’eusse pu les faire porter directement sur les racines, siége habituel du principe colorant dans la Garance, mais, malgré tous mes soins, j’ai du renoncer aux essais tentés dans ce but, à cause des dif- ficultés qu’ils moffraient, car je ne pouvais agir que sur de très-jeunes sujets dont les racines, à peine colorées, et dont les tissus encore im- parfaits, pouvaient me faire espérer le développement de la matière verte que j’observais dans la tigelle. Je voulais intervertir la production du principe colorant jaune. En suivant mes observations depuis l’époque de la germination, j'ai cherché à découvrir si les racines, vivantes ou mortes, offraient avant leur pulvérisation , des points où se fixaient de préférence les diverses matières colorantes qu’on en extrait, et sur lesquelles le programme de l’Académie appelait notre attention. Il est résulté des observations les plus simples, que tous les principes immédiats tirés des racines de Garance, ne sont que des combinaisons chimiques d’un seul produit, répandu dans tout le végétal inégalement. Cette remarque pourra, je l'espère, apporter quelques modifications 6 INTRODUCTION. avantageuses dans les manipulations dont la racine de cette plante est l’objet avant son emploi comme teinture. Un voyage fait dans une partie de la France qui produit les meil- leures Garances, m'a mis à même d’en voir la culture et de recueillir, à Avignon , des renseignemens nouveaux qui pourront offrir de l’inté- rêt par leur application dans les pays du Nord. J'ai pensé ne devoir renfermer dans ce travail que l’exposé d’ex- périences faites avec attention et d'observations souvent répétées, et comme, avant de l’entreprendre, je n’avais aucune hypothèse à faire prévaloir, il ne sera que l'expression fidèle des faits que j'ai cru, après les avoir réunis, pouvoir rattacher à une théorie déjà admise et qui m'a paru de nature à les expliquer d’une manière satisfaisante. Je sens néanmoins que je laisse encore plusieurs points douteux à éclaircir, mais qu’on vueille bien se rappeler alors que le sujet me ramenait incessamment, et comme par force, à des questions sur les- quelles les observateurs les plus distingués sont eux-mêmes peu d’ac- cord, et qu'enveloppe encore la plus grande obscurité. Mon travail se divise en deux chapitres principaux , subdivisés eux-mêmes en deux parties; dans le premier chapitre je traite de tout ce qui a rapport à l'anatomie et à la physiologie, en examinant sépa- rément le développement de la racine et celui de la tige. Le second se compose de la partie d'application se rattachant à la culture et la dessiccation dela Garance. J'ai dessiné moi-même toutes les figures au moyen d’un microscope horizontal d’Amici et à un grossissement de 500 à 700 diamètres; le plus généralement mes dessins, calqués à la camera-lucida , ont été réduits afin de les faire tenir dans un cadre plus étroit. J’ai cherché à les lier et à en former un ensemble, de manière à retracer le déve- loppement de la plante dont nous avons à étudier quelques-unes des INTRODUCTION. 7 plus importantes fonctions. Enfin j'ai taché de donner une explication des planches assez détaillée, et toutefois aussi précise que possible, afin qu’elle puisse en quelque sorte tenir lieu de résumé après la lec- ture du mémoire, et que faite préalablement elle en facilite l’intelli- gence et en indique d’avance les principaux résultats avec les faits desquels on peut les déduire. L’anatomie et la physiologie sont liées si intimément l’une à l’autre, et il est si difficile de séparer l'exposition du jeu des organes, de celle de leur structure, que je n’ai pas cru devoir les traiter dans des cha- pitres différens. On trouvera donc les considérations de ces deux ordres entremélées ici, bien plus positives et plus nombreuses il est vrai, pour la partie anatomique, comme cela est nécessaire lorsqu’on préfère l'expérience et l'observation immédiate aux déductions et aux hypothèses auxquelles se borne trop souvent encore dans l’état actuel de nos connaissances, et se bornera peut-être long-temps encore l’histoire de la vie. Je n'ai pas cru devoir limiter cet examen anatomique et physiolo- gique à la racine de la Garance, quoiqu’elle soit la partie où semble se concentrer la formation du principe colorant, partie appelée à jouer un rôle important dans l’industrie, et par là recommandée presqu’exclusivement à nos recherches. Toutes les parties d’un même végétal, aériennes ou souterraines, sont solidaires l’une de l’autre dans leur action, et on ne connaît complétement celle de lune que quand les autres ont été soigneusement étudiées dans leurs rapports. J'ai donc soumis la structure et la végétation des tiges et des feuilles de Garance à un examen également attentif, d'autant plus que la différence même des phénomènes me paraissait propre à éclairer la question. Je m’occuperai donc successivement de la partie de la plante qui 8 INTRODUCTION. est sous terre, de celle qui est hors de terre, et je cherchera à consta- ter quelles modifications éprouve la seconde, lorsqu’on la place dans les mêmes circonstances que la première. RECHERCHES ANATOMIQUES ET PHYSIOLOGIQUES SUR LA GARANCE. CHAPITRE PREMIER. ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. DE LA RACINE. Les racines de Garance appartiennent par leur forme, à celles qu’on désigne généralement sous le nom de racines rameuses ; d’abord sim- ples dans leur jeune âge, elles ne tardent pas à se diviser, le tronc principal conservant toujours un diamètre plus grand; leur anatomie, que je vais tracer en peu de mots et suivre dans les différentes pé- riodes de leur accroissement , nous en fera connaitre la structure. Dans les premiers jours de la germination , et lorsque la plante west encore pourvue d’autres feuilles que de ses deux cotylédons”, 1 En étudiant les changemens de nature des granules contenus dans l’intérieur des cotylé- dons au moment de la germination, on est frappé de la mobilité de ces granules lorsqu'ils s'échappent des cellules du parenchyme. Leur diamètre est variable, les plus gros semblent immobiles, tandis que les autres s’agitent en tous sens par des mouvemens de trépidations. Ces mouvemens avaient lieu également dans l’intérieur des cellules, à travers les parois desquelles on peut voir les granules; j'ai pu m’assurer qu'ils ne passaient pas d’une cellule à l’autre. On Tow. XII. 2 10 RECHERCHES la racine est simple, et ne présente aucune ramification. Sa partie supérieure, immédiatement sous le collet, est couverte de fibrilles très- tenues retenant fortement les grains de sable avec lesquels elle se trouve en contact. Si on pratique dans cet endroit une coupe ho- rizontale de cette jeune racine cylindrique, on voit qu’elle est formée, en allant de la circonférence au centre, d’abord d’un rang de cellules corticales assez minces, dont quelques-unes émettent à l’extérieur un prolongement très-fin, simple, non cloisonné, constituant les fibrilles que je viens de citer, de même que le tissu épidermique des feuilles donne naissance aux poils. Après ce rang de cellules corticales, vient une masse plus ou moins épaisse de tissu cellulaire, dont les parois n’ont au plus qu’un 300 de millimètre d'épaisseur , et qui va en dimi- nuant de grandeur à mesure qu’on l’examine plus près du centre ; sa portion la plus interne se confond en partie avec le tissu fibreux qui entoure les vaisseaux occupant tout le centre de la racine. La coupe verticale d’une jeune radicelle nous montre les cellules corticales disposées en séries longitudinales à peu près régulières , plus minces que les autres, puis celles qui composent la partie char- nue en séries d'autant plus régulières qu'on s’avance davantage vers le tissu fibreux, lequel enfin est formé de cellules beaucoup plus allon- gées, et disposées avec la même régularité (pl. E, fig. 12). C’est vers cette partie fibreuse qu’on rencontre plus habituellement que dans toute autre, des cellules contenant des cristaux, ainsi que les vais- seaux du latex; ceux-ci, que je n’ai pu découvrir qu’une seule fois et les voit souvent se réunir plusieurs ensemble puis se séparer de nouveau pour s’agiter chacun isolément. M. De Mirbel a déjà fait des observations analogues et a dépeint avec la plus grande vérité, ce joli phénomène dans son Mémoire sur le pollen des Cucurbitacées joint à ses Obser- vations sur le Marchantia. I est à remarquer que l'agitation est très-prande dans une cellule, tandis qu'un calme parfait règne dans la cellule qui lui est contiguë. Cette observation me conduisit à examiner avec attention l'intérieur des cellules du péris- perme dans les premiers temps de la germination , afin de m’assurer si le même phénomène s’y produisait ; j'ai cru le reconnaître, mais à un moindre degré; peut être aussi, et Je suis porté à le croire, l'épaisseur des cellules me cachait-elle une partie des plus petits granules , car à leur sortie du tissu du périsperme , leur mouvement était aussi facile à apercevoir que dans celui des cotylédons. SUR LA GARANCE. 11 par macération, n’ont paru aplatis, avec des renflemens de distance en distance (pl. IX, fig. 1). Quant aux cellules qui forment le tissu fibreux, on voit qu’elles sont allongées, et terminées souvent en biseau, transparentes, à parois plus épaisses que celles du tissu cellulaire renfermant la matière verte, et appliquées intimement les unes contre les autres. Le centre de la racine est presqu’entièrement formé par des vais- seaux; si on l’examine, toujours au même àge que dans les observa- tions précédentes , ces vaisseaux sy présentent sous la forme de cellules transparentes, allongées, placées généralement bout à bout, et formant, dans leur ensemble, une sorte de cylindre placé au centre de vaisseaux annelés séparés entre eux par de grands intervalles, et entouré dans toute sa longueur par les couches cellulaires et fibreuses précédemment décrites ; il se prolonge un peu au-dessous d’elles et forme une saillie légère qui constitue la spongiole (pl. E, fig. 12). À cet état incomplet d'organisation, ces vaisseaux paraissent rem- plir un rôle semblable à celui du tissu cellulaire ou de la moelle. Plus tard, et lorsqu'ils ont atteint leur complète organisation, au lieu d’être minces et transparens, ils présentent , lorsqu'on examine, à un fort grosissement, leur coupe horizontale, des parois épaisses de 4" de millimètre, d’une couleur fauve plus ou moins claire, où j'ai pu distinguer nettement les cavités sur lesquelles MM. De Mirbel et Hugo Mohl ont attiré récemment l'attention des anatomistes (pl. IX, fig. 13). Ils appartiennent à ceux qu’on a désignés sous le nom de vais- seaux ponctués, ont un diamètre très-variable et laissent entre eux des espaces vides. Ces espaces vides, ou méats inter-vasculaires, con- tiennent de la matière colorante analogue à celle du tissu cellulaire ; il est probable que les poudres de Garances provenant de la partie centrale ou vasculaire des racines, ne doivent leur qualité supérieure à celle du tissu cellulaire ( ou aubier des fabricans) qu'à labsence complète des matières étrangères *. En effet, jamais je n’ai observé de 1 Il faut d'autant plus admettre la présence du principe colorant dans cette partie vasculaire 12 RECHERCHES cristaux entre les vaisseaux ; et c’est la seule différence qu’il m’ait été possible de saisir entre les parties de deux tissus renfermant le prin- cipe colorant. Cependant, la partie ligneuse dépouillée entièrement du tissu cellulaire environnant, produit les plus belles poudres d’après les observations des fabricans du midi de la France. Ces remarques sont en contradiction avec celles de M. E. Kæœchlin comme on le verra plus loin. Je dois faire remarquer que j'ai coupé ces vaisseaux à différentes époques de leur vie, et que je ne les ai jamais trouvés remplis de liquide. Ce sont eux qui paraissent, dans leur jeune âge, donner naissance aux radicelles; en effet, en examinant des jeunes racines, j'ai vu plusieurs fois, après avoir enlevé le tissu cellulaire par macération, le corps ligneux, formé des vaisseaux que je viens de décrire, émettre de sa circonférence des saillies ou des bosses plus ou moins apparentes, qui plus tard en s’allongeant constituent les radicelles, que je viens de décrire (pl. IT, fig. 9). Si maintenant nous observons la racine arrivée à un âge beaucoup plus avancé, nous verrons que sa structure intime n’a pas varié, et que l’organisation que j'ai signalée se retrouve exactement la même. La seule différence appréciable consiste dans un accroissement proportionnel des tissus, dont les diverses couches se sont épaissies par l'addition de rangs nouveaux. D’un jaune pâle dans la première époque de développe- ment, la racine de Garance a pris une couleur plus foncée * comme cela arrive avec l’âge dans les diverses parties de la plupart des autres végétaux. D'après ce qu’on vient de voir, on a pu se convaincre que la de la racine , que celles des Galium (Rubia) Walteri, chilensis, hypocarpica , ete., employées en Amérique aux mêmes usages que la garance en Europe, n'offrent presque pas de tissu cellu- laire et sont formées au contraire presque exclusivement par le tissu vasculaire. Dans l’Oldenlandia umbellata ( Chayaver ) en usage dans l’Inde, la partie vasculaire est com- plétement incolore, tandis que le tissu cellulaire renferme seul des granules jaune-orangé, fixés aux parois internes fort épaisses de ce tissu. 1 Le même phénomène a lieu pour les cotylédons; en effet, si, au moment où la tigelle fait saillie hors de la graine, on en fait une section, on voit s'échapper du tissu des cotylédons un liquide jaunâtre qui ne tarde pas à prendre une couleur rousse très-prononcée. SUR LA GARANCE. 15 Garance rentre dans la structure ordinaire des racines, par tout ce qui dépend de la disposition de ses différentes parties. On n’y recon- nait aucune des cavités spéciales désignées sous le nom de réservoirs de sucs propres. Si le liquide que contiennent les vaisseaux du latex différait en quelque chose de celui qui s’observe dans toutes les cel- lules de la racine, ce ne pourrait être que par un degré plus faible de coloration , puisque c’est avec grande peine qu’on parvient à les trou- ver; enfin, la présence des cristaux dans quelques cellules n’offre rien d’extraordinaire, puisqu'il s’en rencontre aussi très-fréquemment dans d’autres plantes. Il nous reste à voir quels sont les phénomènes qui se passent au sein du liquide répandu dans tout le tissu cellulaire de la racine. Nous venons déjà de remarquer que, dans leur jeune âge, les racines sont d’un jaune pâle, et qu’en vieillissant elles prennent une couleur plus foncée. Si on examine avec soin ce fluide, on n’y voit aucune matière tenue en suspension; et s'il est observé, soit à travers les parois des cellules, soit au moment où une lésion quelconque l’en fait sortir, il paraît d’une limpidité parfaite. Cependant dans l’intérieur de la ra- cine, parfaitement desséchée, on trouve les cellules encore teintes en jaune (lorsqu'on les met ramollir), quoique le liquide ait complétement disparu : il semble donc que le liquide ait tenu en solution un principe colorant solide; mais même en cet état, telle est sa ténuité que les gros- sissemens les plus considérables ne permettent pas de l’apercevoir. Nous supposons dans l’observation précédente que les parties sont restées à l’abri des agens extérieurs, car si on permet l’accès de ces agens, les choses ne se passent pas de la même manière; ainsi lors- qu'après avoir pratiqué des coupes minces, soit horizontales, soit ver- ticales d’une jeune racine, on les soumet à l'examen microscopique, on ne tarde pas à voir que le suc, si limpide dans la plante vivante, se trouble, devient nuageux, et passe, de la couleur jaune päle qu'il avait d’abord, à une teinte rosée. En répétant cette observation sur des racines plus âgées, on voit les mêmes phénomènes se reproduire ; mais , comme à cette époque le li- 14 RECHERCHES quide jaune a pris lui-même une couleur plus brillante, sa conversion en rouge offre une intensité proportionnelle, et au lieu d’avoir, comme dans le cas précédent , une teinte rosée , on obtient une couleur rouge des plus belles. Si l’on fait attention aux circonstances dans lesquelles s’est produite cette coloration en rouge, qui n’existe pas avant la section des par- tes, on est porté à soupconner que l’action de l'air à laquelle elles étaient soustraites auparavant et à laquelle cette opération les a sou- mises, est la cause ou l’une des causes de ce changement. Mais cette opinion acquiert beaucoup plus de vraisemblance , lorsqu'on multiplie les observations et les expériences. On peut suivre, sur une tranche mince, les modifications que Vair fait éprouver à la couleur jaune : ainsi la coloration en rouge com- mence habituellement à se manifester dans la partie du tissu cellulaire la plus voisine des vaisseaux parmi lesquels se trouvent ceux du latex, puis dans les cellules qui occupent les intervalles des vaisseaux ponc- tués du centre de la racine, puis enfin à différentes places du tissu cel- lulaire formant la partie charnue, principal dépôt du liquide jaune. Il est facile, sur une coupe mince de racine, de se rendre compte de ces phénomènes et d'expliquer cette production de la couleur rouge à des places déterminées ; le passage de l'air a lieu plus librement, et, par conséquent , avec plus de rapidité dans la partie occupée par les vaisseaux, qui, coupés aux deux bouts, lui livrent, par ces ouver- tures, un libre accès, et qui du moins dans un certain espace ne lui apportent pas l'obstacle des diaphragmes transversaux que présente le tissu cellulaire. Les vaisseaux propres, situés immédiate- ment auprès d'eux, habituellement plems de liquide et revêtus de parois très-minces, à travers lesquelles l’action d’un gaz peut facile- ment s'exercer, seront, par conséquent, les premiers à se colorer, ainsi que les espaces compris entre les vaisseaux sur lesquels j'ai ap- pelé plus haut attention ; enfin, le tissu cellulaire se composant de plusieurs couches de cellules superposées et offrant ainsi des obstacles multipliés à l’action de l'air, on conçoit facilement que ce seront SUR LA GARANCE. 15 d’abord les cellules les plus extérieures qui recevront son influence, et que dans les couches moyennes il reste des portions sur lesquelles il ne puisse agir qu'après un temps plus ou moins considérable >'et\qui, par conséquent, conservent plus long-temps leur couleur jaune au milieu de cellules devenues rouges. Ce sont toujours les cellules qui se trouvent sur les bords amincis de la section, qui se colorent les pre- mières, par la raison qu’elles se trouvent le plus immédiatement en contact avec l'air. On peut à volonté faire changer une ou plusieurs cellules de cou- leur : il suffit pour cela d’enlever sur une racine qui a été séchée con- venablement, une tranche mince, mais cependant assez épaisse pour laisser quelques cellules intactes; alors, avec un peu de précaution et au moyen d’une pointe courbe, on perce les cellules où l’on veut ob- server l’effet résultant de l’action de l'air, et lon voit la matière dont elles sont remplies, jaune jusqu’à ce moment, passer au rouge immé- diatement après l’opération. J'ai mis des tranches de Garance dans de l’eau privée par l’ébulli- tion de lair qu’elle contient toujours; elles y ont complétement con- servé la teinte jaune qu’elles avaient avant l'expérience !. J'ai essayé l’action directe des différens gaz recueillis sous des éprouvettes plongeant dans le mercure ; j'y ai fait passer des tranches minces soit horizontales, soit verticales de racines fraiches; elles y ont séjourné huit jours sans subir le moindre changement de coloration. Au moyen d’un chalumeau recourbé, j'ai fait passer sous les éprouvettes contenant du gaz oxigène, quelques gouttes d’eau, et la coloration en rouge a eu lieu presque instantanément. Tant que ce gaz a été pur, c’est-à-dire sec et seul, la coloration en rouge n’a pas eu lieu, parce qu’il avait desséché les cellules superficielles ; mais aussitôt qu’il a pu se dissoudre lui-même dans l’eau, il a produit presque subitement les phénomènes que nous voyons se passer à l'air. Le gaz acide carbonique, dans les mémes circonstances, ne m’a pas ! 1 faut que les racines ainsi coupées soient complétement soustraites à l'influence de l’air dans un flacon bien fermé , car sans cela elles rougissent un peu. 16 RECHERCHES présenté les mêmes particularités que le gaz oxigène. Je dois encore, à la vérité, de dire que de l’eau oxigénée mise en contact avec des tran- ches de racines, soit fraiches, soit sèches, n’a pas produit de colora- tion en rouge plus rapide que de l’eau ordinaire. Des tranches minces de jeunes racines exposées pendant quelques heures à l'air, après avoir subi les changemens habituels de coloration, prennent souvent une teinte violacée ou noirâtre, ce qu’on ne remar- que pas sur les racines âgées. Il résulte de tout ce qui précède, que la racine de Garance, à l’état vivant, n’a d'autre couleur que la couleur jaune, et que ce principe colorant ne varie que par l’intensité croissante qu’il prend avec l’âge. Ces degrés divers d’intensité se trouvent représentés dans la série des dessins où j'ai reproduit les différentes colorations des racines, depuis la germination jusqu’à un âge avancé. L'observation immédiate de ces faits est facile : il suffit de rompre deux racines d’un âge différent en suivant leur coloration soit au moment méme de la lésion , soit lorsque l'air a changé la nature du liquide : on verra alors que ce liquide est d’une transparence parfaite quand on l’observe renfermé dans les cel- lules, avant qu’il n’ait subi l’influence de l’air atmosphérique, qu’il ne parait tenir aucune matière en suspension, mais qu'aussitôt que cette influence vient à agir, il se trouble, devient granuleux et obscurcit les parties des cellules avec lesquelles il se trouve en contact. J’ajouterai maintenant que ces granules qui me paraissent être de la nature des gommes-résines , sont en partie solubles dans l’alcohol. La teinture d’iode ne m'a pas paru les colorer en bleu, ce qui aurait montré leur identité avec la fécule'. Leur diamètre est à peu près égal, mais ils ne sont appréciables que réunis en masse; isolés, il sont à peine visi- bles, puisqu’au moyen d’un excellent micromètre divisé en 300: de millimètres, on ne parvient pas encore, à cause de leur ténuité, à les mesurer exactement * . 1 M. De Gasparin semble regarder la couleur rouge comme une matière féculente. ( Hém. sur la culture de la Garance.) 2? Cependant en observant dans les premiers momens de la germination des tranches minces, SUR LA GARANCE. 17 Les racines de Garance, âgées de plusieurs années, ne présentent pas d’autres points colorés que ceux que je viens d'indiquer , et cette observation se représente, soit qu’on examine la plante fraiche, soit qu'on ait mis ramollir des racmes séchées. L'existence de la couleur jaune est tout ce que j'ai pu observer sous le rapport de la colora- tion, et cette remarque si simple de l’absence du principe colorant rouge avant la pulvérisation de la racine paraît avoir été généralement ignorée jusqu’à ce jour. Cependant cette observation déjà faite par M. Chevreul', se trouve aussi consignée dans une notice de M. E. Kæchlin, insérée dans le n° 3, vol. Ier des Bulletins de la société de Mulhausen, où il s’ex- prime ainsi : «En comprimant la partie charnue de la racine fraîche, on en retire une liqueur acide, de couleur jaune; mais qui rougit à l'air. Cette liqueur, appliquée sur une toile mordancée d’acétate d’a- lumine, donne un rouge clair, qui, par le passage au savon, produit un rose un peu terne. Elle colore l’ammoniaque en pourpre, et l'acide sulfurique concentré en rouge; enfin, une addition d’eau à l'acide coloré en précipite la substance colorante. Ces expériences semblent prouver que la substance colorante est dans un état de solution dans cette liqueur. » On a employé séparément la tige de la Garance, la racine en- tière, sa partie charnue et sa partie ligneuse, à teindre des échantillons de méme grandeur et imprimés de mordans rouge, rose, violet et noir, et on a trouvé que la partie charnue de la racine contient presque soit verticales ou horizontales de jeunes racines ou tigelles avant que les cotylédons ne soient dé- gagés de la graine (pl. I, fig. 5), on voit le tissu cellulaire rempli de globules plus ou moins réguliers, parfois de formetriangulaire, qu'il est facile de reconnaitre pour de la fécule, à leur coloration en bleu violâtre par l’action de l’iode. C’est encore à cette époque, et avant la colora- tion en vert du tissu cellulaire , qu'on peut reconnaître dans l’intérieur d’un grand nombre de cellules, la présence d’un nucleus central, toujours arrondi, d'apparence granuleuse , et plus petit que la cellule. Dans un Âge plus avancé, lorsque la matière verte remplit en partie le tissu cellulaire , il semble que la fécule et le nucleus disparaissaient ; au moins m’a-t-il été im- possible de bien constater plus tard la présence de ce dernier ; quant à la fécule, on en retrouve encore quelques grains , surtout dans les cellules qui avoisinent l’étui médullaire. 1 Chevreul, Leçons de chünie appl. à la teinture, pag. 29—30. Tow. XII. 3 18 RECHERCHES toute la substance colorante, et que sa partie ligneuse n’en contient guère plus que les tiges de la plante. » Ces différentes parties de la Garance, étant employées parfaite- ment fraiches, ont toujours produit des couleurs moins nourries que les mêmes parties desséchées avant la teinture; quoique ces dernières aient avant leur dessiccation le même poids que les premières. » Ces essais ont été répétés plusieurs fois et ont toujours donné les mêmes résultats. » En examinant la racine au microscope, on ne peut distinguer aucune trace de substance colorante séparée; sa partie ligneuse est très-poreuse, comme dans tous les végétaux, et sa partie charnue semble composée des parties mucilagineuses liquides, contenues dans un réseau de filamens ligneux, sans offrir aucun indice de porosité. » Les alizaris d'Avignon se composent de tiges et de racines; les tiges de la plante, étant recouvertes de terre, prennent l'apparence de la racine, sans en acquérir les propriétés tinctoriales, et le culti- vateur qui augmente ainsi sa récolte, en altère nécessairement la qualité. Comme ces tiges ne contiennent que très-peu de parties colorantes, on peut supposer que c’est là un moyen employé pour falsifier la Garance, et que sa qualité dépend beaucoup de la tige en- terrée pendant la croissance de la plante et récoltée avec la racine. » Néanmoins les auteurs qui ont traité le plus complétement de cette matière regardent les racines comme ayant déjà pendant leur vie la couleur rouge, et n’éprouvant aucun changement par les opérations qu’elles subissent ultérieurement ’. Plusieurs fabricans ignorant ce fait, et à qui j'ai soumis mes observations et montré les racines passant par tous les degrés de coloration jusqu’à celui qu’elles atteignent, réduites en poudre, tan- dis qu'auparavant elles n’offraient aucune trace de couleur rouge, 1 De Candolle , Propriétés médicales des plantes , 2° édit. 1816, p.168, 66.—D.C. Prodromus, vol. 4, p. 589.— Wahlenberg, Tractatio anatomica de sedibus materiarum immediatarum in plantis , in-4°, Upsaliae 1806, p. 50.— Bastet, Essai sur les garances de Vaucluse , in-8°, 1835, pag. 17. SUR LA GARANCE. 19 n’ont assuré que cette remarque apporterait nécessairement des mo- difications dans leur fabrication. La coloration en rouge est donc un phénomène chimique tout-à-fait indépendant de la vie ; la coloration en jaune au contraire, parait résulter d’une action vitale qui empêche lautre; ainsi, si je mets comparative- ment dans un flacon deux tronçons de racines, l’un vivant et l’autre séché, le premier conserve sa couleur jaune, tandis que le second se co- lore en rouge, et finit, en deux jours, par acquérir une teinte violâtre. Enfin, pour mieux constater encore la puissance vitale des cellules et prouver que la production du principe colorant était entièrement déterminé par leur action propre, je fis croître de jeunes Garances dans de l’eau distillée; elles ont pris peu de développement, mais le tissu de leurs racines a néanmoins sécrété un liquide jaune, et je n’ai pas remarqué qu'il fut moins coloré que si les jeunes plantes, de grandeur égale, se fussent développées dans la terre. Cette coloration dépend donc d’une action particulière des mem- branes des cellules; mais vouloir aller plus loin et arriver à son explication, ce serait entreprendre de résoudre un problème vital, jusqu'ici insoluble. DE LA TIGE. Avant d’entrer dans les détails des expériences physiologiques dont la tige va être l’objet, je crois devoir en exposer brièvement la structure. On sait que ces tiges, comme beaucoup d’autres plantes à tiges carrées et à feuilles opposées , présentent presque toujours quatre angles bien prononcés; dans celles de la Garance, deux correspondent aux feuilles, et alternent avec ceux qui se trouvent en rapport avec les appendices foliacés, généralement en nombre égal aux feuilles, et forment ainsi un verticille de quatre parties. Dans le cas où le verticille est formé par un plus grand nombre de folioles, de cinq par exemple, on voit que ce sont les appendices de ces feuilles, aux- quels on avait donné le nom de stipules, qui se sont dédoublés; leur 20 RECHERCHES pétiole, encore entier à la base, correspond, comme dans le cas où elles sont simples, à un des angles de la tige. J’ai eu souvent l’occasion d'observer toutes les transitions que présentent ces ap- pendices dans leur division; j’en ai vu dont le limbe était échancré seulement au sommet, plus ou moins bifides, enfin dédoublés jusqu’à la base, et formant alors avec les deux feuilles un verticille de six pièces ; c’est le cas le plus fréquent dans la partie supérieure des tiges. Les feuilles se reconnaissent, soit par leur longueur, soit par le bourgeon qu'elles portent à leur aisselle. Cette manière de considé- rer les parties foliacées alternant avec les feuilles, comme des appen- dices nés des côtés du pétiole et soudés entre eux au point de former pour ainsi dire une véritable feuille, a été très-bien établie par M. À. Ri- chard ‘et antérieurement par M. R. Brown, dans son Mémoire sur les plantes du Congo *, où en parlant de la division en deux groupes de la famille des Rubiacées, il s'exprime ainsi : « La première ( division ) se distingue par les feuilles opposées ou plus rarement verticillées, et par des stipules intermédiaires; quoiqu’elle constitue la majeure partie de la classe, le nom de Rubiacée ne peut lui être appliquée, parce qu’elle est entièrement équinoxiale; pendant que la seconde est celle des Rubiacées étoilées, ayant des feuilles verticillées ou plus rarement opposées, mais jamais de stipules intermédiaires... » | Chacun des angles, qui disparaissent aux articulations arrondies et renflées, est formé d’un assez grand nombre de cellules allongées, qui, de distance en distance, se dirigent en dehors en s’entrecroisant et sup- portent un poil dur, épais et recourbé en crochet (pl. HE, fig. 7et8). La partie corticale de la tige ne se compose que d’une seule couche de cellules allongées ; immédiatement après elle, se trouve le tissu cellu- laire, ne renfermant ordinairement de matière verte qu'aux parties anguleuses. Les cellules qui composent ce tissu vont en avançant vers le centre de la tige, en diminuant de grandeur au point de se 1 A. Richard , Mém. soc. hist. natur., Paris, 1830, p. 90 , etc. 2 R. Brown, Botany of Congo, p. 28. SUR LA GARANCE. 21 confondre avec les cellules allongées qui constituent avec les vaisseaux, l’étui médullaire; c’est entre les dernières utricules du tissu cellulaire que se rencontrent les vaisseaux du latex. Le tissu médullaire qui occupe le centre de la tige contient de la matiére verte comme dans beaucoup de tiges herbacées. Les différentes coupes, soit horizontales, soit verticales, que j'ai données des tiges, complèteront la connaissance nécessaire de leur structure. Je dois cependant appeler l’attention sur l’organisation des articulations correspondant à l’insertion des feuilles. Dans cette partie, le tissu cellulaire est beaucoup plus serré, et on le voit généralement s’y colorer en jaune, de préférence aux autres parties aériennes de la plante’ ; ce fait ne dépend pas seulement de l’accumulation des sucs, mais de ce qu’ils s’y trouvent plus élaborés dans cette masse de tissu cellulaire beaucoup plus dense, qui joue ici le rôle de tissu glandu- laire ; les glandes étant souvent formées, comme on le sait, par le tissu cullulaire qui devient de plus en plus dense, à mesure qu’il arrive à circonscrire le réservoir où se dépose le suc qui s’y trouve produit par une sorte de distillation. Les feuilles ne présentent rien de particulier dans leur organisa- tion, elles sont munies de stomates sur les deux faces; seulement, comme dans presque toutes les feuilles coriaces, ces ouvertures sont moins nombreuses sur la partie supérieure ; elles ne se colorent jamais à l’automne ni en jaune ni en rouge ; elles brunissent et se sèchent. Cependant on remarque souvent sur les tiges qui commencent à se développer, que les feuilles les plus inférieures , avortées et réduites à l’état d’écailles, sont colorées en violet. L’anatomie m’a démontré que cette coloration, limitée à certaines cellules, était due à un li- quide contenu dans la couche épidermique*, ne s’étendait pas aux 1 Voy. pl. VI et VII. 2 Voy. pl. IV. M. Lindley a observé un fait analogue sur les tiges de la Balsamine. ( Zmpatiens Balsamina ) (Lindl. Zntrod. to Bot. , 2° édit. 1835, p. 7). J'ai fait des observations assez nombreuses sur la matière colorante des feuilles; lorsqu'une 22 RECHERCHES cellules du parenchyme, et n’influait en rien sur la chromule ; l’action de l’air ne modifiait pas la nature de ce liquide. La Garance, comme presque tous les végétaux, présente dans quel- ques parties de son tissu, des cellules remplies de cristaux tellement nombreux, et se moulant si bien dans l’intérieur de la cellule qui les produit, qu’ils la rendent opaque (pl. V etIX). Ces cellules ne con- tiennent jamais ni de matière verte, ni de liquide coloré ; elles sont parfaitement transparentes , lorsqu'on est parvenu à en retirer les cristaux; ceux-ci ne paraissent pas affecter de place déterminée dans le tissu cellulaire ; cependant, sur des tiges étiolées, où je les ai trouvés très-nombreux , je crois avoir remarqué qu’ils se rencontraient plus fréquemment autour de lanneau fibreux de l’étui médullaire, que vers la circonférence de la tige ”. Il ne parait pas que les circonstances extérieures du sol et du climat aient sur la production de ces cristaux, la même influence que sur les autres parties constituantes. Maintenant, que nous venons de jeter un coup d’æil rapide sur la structure de la tige, nous allons aborder les phénomènes de la pro- duction du principe colorant. En examinant le tissu cellulaire , on voit celui de la racine sécréter un liquide jaune, tandis que celui de la tigelle qui n’en diffère nul- lement d’après l’observation, se remplit de matière verte. Cette diffé- rence si grande des sécrétions est-elle le résultat invariable du tissu seule des faces de la feuille est colorée, cette coloration n’est due ordinairement qu’aux cellules de l’épiderme : c’est ce qu’on peut voir sur certains Ruellia, Justicia, Tradescantia , Begonia, Portulacca , etc. ; dans ce cas la couleur est violâtre, tandis que , dans les plantes où la colora- tion s’observe sur les deux faces des feuilles et tire sur le vermillon , c’est la chromule qui est colorée. Telles sont les feuilles du Caladium bicolor , ete. Celles du Dracæna terminalis, qui deviennent vertes en vieillissant, ont les cellules supérieures et inférieures colorées en rouge, tandis que les couches intermédiaires sont remplies de matièreverte.M.Meyen a donné l’anatomie d'une feuille de ce Dracæna où cette coloration se trouve exactement représentée (Meyen , Mikros- kopische Abbild., tab. I, fol. 7). 2? Dans quelques plantes, le dépôt des cristaux affecte une place bien déterminée ; ainsi dans certaines Melastomacées , dont la moelle à cellules articulées est parcourue par des faisceaux vasculaires, chacun des faisceaux est accompagné de quelques rangées de cellules d’un diamè- tre plus petit, dans lesquelles on observe des agglomérations de petits cristaux prismatiques. SUR LA GARANCE. 23 des racines, comme cela a lieu pour certaines plantes, ou bien l'influence des agens extérieurs contribue-t-elle à reproduire ce phénomène sur d’autres parties du végétal? Cette question se présente naturellement lorsqu'on s’est assuré que la matière colorante ne se trouve ni dans des vaisseaux propres, ni dans des réservoirs particuliers bornés à cer- tains points du tissu cellulaire. Afin de mw’assurer d’abord de l'influence de la lumière sur la pro- duction du principe colorant dans les tiges de Garance, j'en soumis six jeunes individus à l’action de différens rayons lumineux. Ces jeunes plantes, gardées jusque-là sous un chàssis , afin de hâter leur végétation et assurer bien leur reprise, commençaient à se ramifier ; chacune fut mise dans un pot séparé, rempli de terreau de bruyère, que je plaçai dans un lieu exposé au midi et bien aéré. Quatre d’entre elles furent entourées d’un étui carré composé de lames de verre d’un pouce et demi de large et hautes de cinq environ; l’une des extrémités de cet étui était enfoncée en terre, l’autre, qui laissait sortir la partie supérieure de la plante, était bouchée avec du coton; les lames de verre se trouvaient fixées entre elles au moyen de mastic. Trois de ces plantes furent ainsi enfermées en partie dans des étuis de verres colorés en rouge, jaune et vert ; une quatrième était entourée par des verres blancs, une autre resta à l’air libre, et la dernière enfin fut couchée en terre, et recouverte de trois pouces environ de terre légère. Ces expériences commencées le 23 juin furent laissées ainsi jusqu’au 1er juillet. Je retirai alors le coton qui bouchait la partie supérieure de ces appareils ainsi qu’une des lames de verre. Huit jours, pendant lesquels la chaleur fut assez vive, avaient suffi pour altérer sensiblement les jeunes feuilles qui s'étaient trouvées privées du contact de Pair, et qui n’avaient reçu d’humidité que par la faible évaporation qui se faisait dans ces étuis; elles étaient géné- ralement pâles et affaissées, sans être entièrement flétries ; la base des tiges présentait les mêmes caractères. La plante exposée sous le verre rouge semblait surtout présenter cet état d’altération à un plus haut degré; quant aux trois autres, 24 RECHERCHES toutes trois se trouvaient dans le même état d’altération que celui que je viens de décrire. Aucun bourgeon ne s'était développé à l’aisselle des feuilles privées d’air ou en partie de lumière, tandis qu’on en voyait paraitre sur la jeune plante exposée à l'air libre. Je retirai de la terre (que j'avais tenue très-légèrement humide à la surface ) la jeune plante soustraite ainsi à l’action de l'air libre. Elle ne paraissait pas avoir sensiblement changé ; les feuilles me sem- blèrent plus vertes et moins raides que dans les autres leur couleur en général n'avait pas éprouvé d’altération bien sensible. Les appareils furent refermés et replacés comme précédemment et laissés avec les mêmes soins jusqu'au 15 juillet, c’est-à-dire huit jours de plus que dans la première observation. À cette époque, la portion des tiges enfermée sous les verres colo- rés, n'avaient pris aucun développement notable en diamètre dans leur partie inférieure, elles étaient grèles et d’un vert päle, et auraient paru flétries si la partie exposée à l'air n’eût été en pleine végétation. La même remarque, quant aux tiges, s’étendait à la jeune plante mise sous l'influence du verre blanc ordinaire, mais dans celle-ci, les feuilles étaient sèches et cassantes. Les plus inférieures avaient un peu jauni, tandis que chez les autres, ce changement de couleur n’était pas appréciable. Dans la plante enterrée, les feuilles se trouvaient dans un état peu différent de celui que présentaient celles qui avaient été placées sous l'influence des verres colorés, mais les tiges étaient moins grèles et moins pâles; elles paraissaient plus flexibles , les parties angulaires étaient moins blanches et moins opaques; je crus remarquer que cha- cune des articulations présentait, sans être sèches, une teinte jaunatre qu’on ne voyait pas sur les autres. Ces observations notées scrupuleusement et avec beaucoup de détails , les plantes furent remises en expériences et laissées jusqu’au 29 juillet. J'omets de citer les remarques que je fis à cette époque, tant étaient SUR LA GARANCE. 25 légères les différences que je pus noter comparativement aux obser- vations antérieures, faites sur les plantes soumises aux verres colorés. Mais je ne fus pas peu surpris en voyant que les renflemens de la tige enterrée étaient visiblement colorés en jaune, et surtout le plus inférieur, sans que la plante en parüt souffrir. La partie exposée à l'air n’avait présenté aucun changement et se trouvait dans un état de parfaite végétation. Afin d'apprécier les modifications qui s’étaient produites sur cette jeune tige, je la coupai pour en étudier les tissus. Voici les observa- tions que je pus faire à l’aide de coupes minces que j'opérai dans la longueur de la tige, et en particulier dans les renflemens qui, d’abord, m’avaient paru étre seuls colorés en jaune (pl. VI, fig. 1). La masse entière du tissu médullaire était d’un vert olive ; ses cellules contenaient des granules qui, isolés, paraissaient jaunâtres, dans un état maladif et avaient subi des changemens notables dans leur coloration, habituellement aussi verte que celle des feuilles. L’étui ligneux était d’un jaune fauve ; le tissu cellulaire qui en était le plus voisin, participait de cette couleur ; enfin les cellules de la partie extérieure de la tige ne renfermaient plus de matière verte ; quelques granules isolés se montraient seuls dans quelques cellules, qui toutes paraissaient contenir un liquide jaunâtre. Ces portions de tiges exposées à l’air sur une légère couche d’eau pour lobservation microscopique, prirent une couleur terne et rougeätre ; à un grossis- sement de 700 diamètres , on trouvait à ces cellules colorées en rouge, un aspect opaque et nuageux. Ce premier état de coloration obtenu, je voulus le reproduire de nouveau, en remplaçant la jeune Garance que je venais de détruire, par trois autres de même âge. Trois semaines après avoir été mises sous terre, l’une manifesta aussi nettement que dans le cas précédent, le même phénomène de coloration que je viens de décrire. Les deux autres furent coupées à huit jours d'intervalle pour suivre les change- mens qu’elles avaient pu subir. Dans celle qui fut observée la première, la matière verte ne paraissait pas être diminuée, seulement elle avait Tow. XII. À 26 RECHERCHES pris une teinte olivätre ; huit jours après, le tissu cellulaire de la seconde renfermait une quantité notablement moins grande de ma- tière verte, mais la couleur de celle-ci n’était pas autrement modifiée que dans la précédente ; la chromule était d’un vert olive. Par ces expériences, nous venons de voir que la transition de la matière verte contenue dans le tissu cellulaire s'effectue dans un es- pace de temps assez court ; vingt jours suflisent pour son changement de nature ou sa résorption, environ autant, pour que le liquide con- tenu dans les cellules ait acquis une couleur jaune bien décidée. Ce sont les cellules les plus extérieures qui, les premières, per- dent la matière verte qu’elles renferment, surtout aux angles des tiges ; le tissu médullaire est plus long à subir cette conversion. Il reste ici un point à éclaircir, sur leqeul je n’ai pu avoir que des données trop insuffisantes, pour pouvoir avancer une opinion à cet égard, c’est de savoir si les granules verts, qui remplissent les cellules, sont simplement décolorés et deviennent alors invisibles, ou bien s'ils sont successivement absorbés et détruits par le liquide qui remplit les cellules. Cette dernière opinion, me paraît la plus probable, sans que je puisse toutefois apporter à l’appui, des remarques qui pourraient servir à la justifier ; dans des objets d’une telle ténuité, la dissection est impossible ; ce n’est donc que par l’examen d’un grand nombre de faits et par des expériences dirigées dans ce but, qu’on pourra par- venir à éclaircir cette question. Aucune des jeunes Garances dont les Ras avaient été soumises à l’action des verres colorés, ne présenta à la fin du mois de septem- bre, la moindre coloration en jaune dépendant de cette expérience. En voyant les tiges développées dans la terre, se colorer naturelle- ment en jaune, et en me rendant compte de la pratique du buttage de la Garance, je voulus constater si l’humidité était indispensable pour la production du principe colorant ; je pris à cet effet, le 26 juil- let, plusieurs jeunes pieds de Garance dont je renfermai environ la moitié inférieure dans des cylindres de carton assez épais et noirci extérieurement; leur partie supérieure était fermée avec du coton, et la SUR LA GARANCE. 27 terre amoncelée autour de leur base, ne laissait arriver aucun rayon lumineux. Ces expériences laissées ainsi pendant un mois entier (26 août) mirent pour moi hors de doute l'influence de l’humidité dans la con- version de la chromule en principe colorant. Aucune des jeunes plan- tes mises à l'obscurité complète et à l'abri de toute humidité, ne manifesta le moindre changement de coloration , et c’eût été avec diffi- culté qu’on eùt pu s’apercevoir que les feuilles avaient été pendant un temps aussi long soustraites à l’influence de la lumière. L'idée d’entourer les tiges avec du coton tenu humide an moyen de l'eau distillée ne m'est venue que trop tard, pour m’assurer si, en les recouvrant ensuite d’un cylindre obscur ou clair, je pourrais déter- miner un changement de coloration, sans l’addition de quelques sels qui peuvent pénétrer dans la partie de la plante en contact avec le sol. J'ai limité le changement de couleur du tissu cellulaire de plusieurs tiges en recouvrant de terre quelques-uns des entre-nœuds seulement, ou bien l’articulation elle-même ; dans lune ou l’autre de ces expé- riences, le chromule disparaissait dans l'endroit recouvert de terre, et le tissu cellulaire se colorait en jaune comme dans les autres expé- riences citées antérieurement. Afin d'étudier l’étiolement complet et rapide en faisant développer à l’obscurité totale plusieurs jeunes Garances, je pris le 5 décembre plusieurs pots contenant chacun un pied de cette plante qui y avait crû les mois précédens ; les tiges étaient mortes et les bourgeons qu’on remarquait sur la tigelle, appartenaient aux insertions cotylédonaires. L’une de ces plantes fut recouverte avec un cylindre de verre, de 2 pouces de diamètre sur une hauteur de 7, fermé supérieurement, et recouvert de toute part d’un papier noir assez épais. L'autre reçut un cylindreégal au premier, mais sans papier. Ces pots furent placés devant les vitres d’une serre chaude. Dans l’espace de huit jours, l’une de ces plantes soustraite à l’action de la lumière, produisit des tiges colorées semblables à celles que J'ai représentées ( pl. VIE, fig. 1). La végétation fut moins active sous l’autre cylindre; le rameau prin- 28 RECHERCHES cipal était loin encore d’atteindre le sommet, lorsque la plante étiolée s'était déjà contournée sur elle-même , à cause de la gène qu’elle éprouvait en touchant le couvercle de verre qui fermait la partie su- périeure du cylindre qui la contenait. La plante laissée à l’air libre était encore moins vigoureuse que celle du n° 2 placée sous le verre blanc. Les Garances ainsi étiolées étaient au nombre de six ; toutes m'ont fourni les mêmes résultats. Je dois faire remarquer que j'avais toujours entretenu une humidité assez grande sous les cylindres dans les premiers jours de la végétation; cette humidité était sur- tout fournie par un tampon de coton mouillé placé au fond du récipient, que je retirai ensuite dans la crainte que l’eau ne fit pourrir les jeunes tiges qui auraient pu se trouver en contact direct avec elle. Dans les tiges où cette coloration en jaune peut avoir lieu, selon notre volonté , c’est en les mettant dans l’obscurité , en les en- tretenant humides, qu’on détermine le tissu cellulaire à changer sa production de matière verte en un liquide coloré, semblable à celui des racines. Il arrive dans ce cas que les parties vertes, qui, expo- sées à la lumière, absorbent l'acide carbonique de l'air en dégageant l’oxigène et augmentant ainsi la quantité de carbone que la plante renferme , absorbent au contraire dans l’obscurité une partie de l’oxi- gène de l'atmosphère qui les environne, et le remplace par de l’acide carbonique : or, la soustraction de ce gaz parait être la cause essen- tielle d’où provient l’absence de formation de la matière verte et de la production de la matière colorante jaune, que l’on peut considérer dans cette plante comme un cas particulier d’étiolement, et dont le développement, dans cette circonstance, suit la même marche que dans les jeunes racines qui, d’abord à peine colorées, finissent par prendre une couleur jaune des plus brillantes. Sénebier a remarqué ’ qu’une plante exposée à l’obscurité complète, cesse subitement de transpirer et continue à absorber, de manière ! De Can., Physiol., p. 1078. SUR LA GARANCE. 29 qu’elle tend à se remplir de sucs qui, n’étant plus élaborés, contiennent une plus grande proportion d’oxigène; ce phénomène détermine sans doute dans la Garance, la production du principe colorant. Les expé- riences que j'ai tentées dans le but de colorer en jaune quelques parties habituellement vertes de la Garance, et que j'ai exposées plus haut, m'ont conduit aux mêmes conséquences, et expliquent également bien les procédés employés par les cultivateurs pour colorer les tiges de cette plante; car en les enterrant, ils ne font que disposer les parties her- bacées de manière à ce qu’elles cessent, comme dans le cas précédent, de rejeter du gaz oxigène, sans cesser d'en absorber et qu’ainsi la chromule, en s’oxigénant, passe, comme dans celle des feuilles de certains végétaux, de la couleur verte à une couleur jaune, et dispa- raît enfin complétement au milieu du liquide que contiennent les tissus. Comme dans les expériences que je viens d’exposer, l'humidité nous a paru nécessaire à la production de la matière colorante de la Garance, je demanderai si les rosées abondantes de l’automne ne détermineraient pas, concurremment avec l’oxigène, les changemens de coloration que présentent les feuilles à cette époque. M. De Can- dolle a fait observer qu’il arrivait souvent que les parties foliacées d’une plante, lorsqu'elles étaient piquées par un insecte , se coloraient à cette place comme elles le font naturellement à l’automne ; linfiltra - tion de l’eau dans le parenchyme, dans ce cas, détermine peut-être la coloration. Les jardiniers savent au reste que certaines plantes dont les feuilles présentant naturellement des couleurs autres que la verte, prennent des nuances plus vives à l'automne, sans que la plante soit sur le point de mourir ; je citerai pour exemple les feuilles de lama- ranthe tricolore, dont les couleurs sont plus brillantes à l'automne que pendant l'été. Maintenant, que nous venons de constater l'influence des agens extérieurs , lumière, air et eau, sur les changemens de la matière verte et sur la production du principe tinctorial de la Garance, je deman- derai s’il existe des preuves plus concluantes à l’appui de la théorie 30 RECHERCHES aujourd’hui admise de l’action de l’oxigène, et s’il ne paraît pas net- tement démontré par les faits que je viens d'exposer, et dont il me serait facile de multiplier les citations, que dans les organes herbacés de la Garance, la coloration est due aux modifications de la chromule, et que ces changemens résultent principalement de son degré d’oxi- génation ’. 1 Un fait qui, s’il était exact, eût pu acquérir une haute importance, est celui rapporté par M. De Gasparin *, Les tiges de la Garance, garnies de feuilles, dit-il, et données comme fourrage aux bestiaux, déterminent la coloration en rouge , d’une partie de leurs os et de quelques au- tres parties de leur économie. Ce phénomène en effet, eût été des plus curieux, puisqu'il tendait à établir le changement de nature de la chromule ou matière verte, soit pendant son séjour dans l'estomac , soit au moment où le chyle passe dans la circulation. Les expériences de M. Ma- caire sur la nature chimique de la chromule ** ayant établi que quand elle est colorée en jaune, les alcalis la ramènent au vert, tandis que les corps facilement désoxigénables la font passer de la couleur jaune à la couleur rouge, on sent de quelle importance eût été le fait cité par M. De Gaspa- rin, s'il était au pouvoir de la chimie de convertir rapidement les parties herbacées de la Garance en principe tinctorial. On verra bientôt qu'il est plus raisonnable de supposer que la coloration des os et du lait des bestiaux , est causée par la base des tiges, ordinairement colorée en jaune et extirpée par les faucheurs. Je vaistranscrire le résultat de plusieurs observations faites par mon frère, le docteur Decaisne, dans le but de constater, au moyen d'expériences rigoureuses, le fait émis par M. De Gasparin. Bien que ces expériences n'aient pu porter sur des ruminans, elles n’en seront pas moins cu- rieuses et propres à éclaircir le point qui nous occupe. Sur douze lapins mis en expériences , six furent nourris exclusivement avec la partie supé- rieure des tiges de garance, et ont présenté les caractères suivans après leur mort, qui eut lieu de 4 à 8 jours d'intervalle. Les matières contenues dans l'estomac offraient la couleur verte des épinards cuits ; celles de l'intestin grèle, quoique plus liquides , présentaient la même coloration ; dans le gros intestin, elles avaient pris une teinte beaucoup plus foncée, et tirant sur le noir. Les vaisseaux chylifères étaient très-blancs ; l'urine qui se trouvait dans la vessie du dernier lapin était laiteuse et ne dénotait aucune coloration. Un de ces animaux eut les os du tibia et péroné brisés , afin qu’on püt s'assurer si la coloration n'aurait pas lieu plus facilement à l’en- droit de la fracture , mais rien de ce genre ne se manifesta. Quant aux six autres, ce n’est qu'après un jeûne assez prolongé qu’ils se sont décidés à man- ger les racines qu’on leur offrait, et avec lesquelles on continua à les alimenter exclusivement. Chez eux, l'urine s’est colorée, les vaisseaux chylifères étaient colorés en rose, l'estomac conte- naitune matière brune, l'intestin grèle en renfermait une liquide, d’un brun chocolat, matière qui devenait plus foncée encore dans sa partie inférieure etpresque noire dans le gros intestin. Les os * De Gasparin, Mémoire sur La culture de la yarance, in-8°, 1824, p. 35. *# Macaire-Princep., Mémoire sur la coloration automnale des feuilles. ( Extr. du vol. 6. Acad, de Genève). Gen. 1828, br. in-d. SUR LA GARANCE. 31 CHAPITRE IL. APPLICATION DU CHAPITRE PRÉCÉDENT A LA CULTURE ET A LA DESSICCATION. DE LA CULTURE. ! Lorsque les cultivateurs établissent une garancière, ils choisissent de préférence un sol profond et léger ; la longueur des racines et l’ac- tion de l'air tenu en dissolution dans l’eau qu’elles ont besoin d’absorber, justifient suffisamment cette coutume, qui, du reste, est généralement adoptée pour toutes les plantes à racines pivotantes. ? étaient de couleur rose päle. Cette coloration des os a eu lieu pour le premier de ces animaux mis à mort, après sept jours d'expériences. Les mêmes phénomènes se répétèrent d’une manière à peu près analogue sur quatre de ces animaux ; le dernier mourut avant la fin du mois, terme fixé pour les observations. À son ouverture, la membrane muqueuse de l'estomac fut trouvée complétement ramollie, surtout vers le grand cul-de-sac, au point qu’en enlevant les alimens contenus dans l’estomac, cette membrane se détachait sous forme de matière pultacée blanche. Ces matières colorées , au sortir de l'estomac, blanchirent promptement par leur exposition à l'air. D’après ces expériences , il est évident que la matière verte n’a manifesté aucune tendance à se colorer en jaune ou en rouge , et que le fait annoncé par M. De Gasparin doit s'expliquer comme je le supposais d’abord , par l’extirpation d’une certaine portion de racines ou de bases de tiges colorées en jaune, accompagnant les parties herbacées données comme fourrage, ! Qu'il me soit permis d'exprimer ici toute ma reconnaissance à M. Requien d'Avignon, pour les précieux renseignemens qu’il a bien voulu me communiquer au sujet de cette partie de mon travail. ? Je ferai observer ici, que dans certains cas, les parties qu’on désigne sous le nom de racines, RECHERCHES Q2 Lol La nature particulière du terrain a été regardée jusque dans ces derniers temps comme à peu près indifférente, par les hommes qui ont écrit sur la culture de la Garance *. Cependant on doit penser que des essais tentés sur ce point ne sont pas sans importance, depuis queles expériences de M. Schlumberger * ont fixé l'attention des industriels en montrant que la qualité si supérieure de la racine provenant du Palud des environs d'Avignon, était due en partie à la nature du sol où elle croît. Avant de connaïtre les résultats obtenus par M. Schlumberger , j'avais également pensé que la nature du sol pouvait avoir quelque influence sur la production du principe colorant ; à cet effet, je semai quelques graines dans des terres de nature différente, telle que cal- caire ou siliceuse. Mais les expériences que j'ai tentées pour m’assurer si la qualité de la terre exerçait une grande influence sur la coloration, ne m’ont présenté jusqu’à ce jour aucun résultat satisfaisant, au moins sous le rapport anatomique ; il est vrai que mes jeunes Garances ne sont âgées que de quelques mois ; et jusqu’ici, leur diamètre est à peu près égal, et leur coloration semblable, que la plante ait végété dans un sol, soit calcaire, soit siliceux. M. De Gasparin a remarqué que les terres du Palud, qui produi- sent les plus belles Garances, renferment toutes une quantité plus ou moins grande d’hydrochlorate calcaire , tandis que les autres ter- rains, qui donnent les racines d’une qualité inférieure, ne contiennent que des nitrates; cependant, au rapport de M. De Gasparin, comme ces dernières sont aussi des terres sèches, il est possible que la cou- ne sont réellement que des tigelles, et qu’on y trouve un canal médullaire, très-fin à la vérité, mais entouré de véritables trachées déroulables ; la betterave est dans ce cas ; on sait qu’il en est de même du radis, ete. ! Duhamel, Mémoire sur la garance et sa culture, in-4°. Paris, 1757, p. 8. — Althen, Mémoire sur la cult. de la garance , Journ. de Phys. , tom. Il, p. 152-162. — E. J.J. Q, Traité sur la cult. de la garance , Avignon, 1827 , bro. in-8°, p. 14. — Verplanken, Description de la culture de la garance, pag. 11. 2? H. Schlumberger, Observat. sur la garance, Bulletin dela soc. indust. de Mulhausen, n° 40. — L’Agronome, journal mensuel, juillet , 1835. Paris, in-8°, pag. 204. SUR LA GARANCE. 33 leur des racines ne tienne qu’à cette dernière qualité. On sait, en effet, que l’eau absorbée par le végétal, est chargée de principes divers, de sels terreux et alcalins, tenus en dissolution, et que c’est surtout à la présence du carbonate de chaux, d’après les expériences de M. Schlumberger, que parait due la qualité si supérieure des Garances croissant dans le Palud ; ce terrain est presque uniquement composé de carbonate de chaux, car il en renferme près de 90 à93 °.. M. Schlum- berger qui a incinéré 500 grammes de Garance d'Alsace et autant de celle du Palud, séchées toutes deux, à une égale température et dans le même lieu, en a retiré, pour la Garance d'Avignon, 59,79 de cendres, qui, traitées convenablement, lui ont fourni 26,58 de car- bonate de chaux; la Garance d’Alsace donne 45,46 de cendres pro- duisant au plus 6,32 du même sel; c’est, comme on le voit, une quantité quatre fois moindre. Le Palud, que j'ai parcouru et examiné avec soin en 1534, ne comprend que quelques lieues carrées dans les terroirs des commu- nes de lIsle, Villeron, Le Thor, Monteux et Entraigues. C’est un val- lon qu’on traverse pour aller à Vaucluse; la terre végétale qui produit la belle Garance, a environ un pied d'épaisseur; elle est blanchätre et ressemble à de la cendre; au-dessous de cette couche en est une autre de 8 à 10 pouces environ d’épaisseur plus blanche, plus crayeuse encore ; elle se mêle ordinairement avec la couche supérieure , soit lorsqu'on recouvre, soit lorsqu'on arrache les Garances ; plus infé- rieurement enfin se trouve un tuf qui semble de même nature que la couche qui lui est superposée ; on y observe très-fréquemment des dé- bris de plantes fossiles monocotylédones, qui semblent appartenir par leur forme à des feuilles de Typha. La terre du Palud, malgré le sens étymologique de ce nom, n’est pas plus humide supérieurement que les autres terrains où croissent les antres qualités de Garance; cependant on remarque qu’il coule à environ 14 à 18 pieds de pro- fondeur, une nappe d’eau au-dessus de laquelle se trouve le gravier qui supporte le tuf renfermant des débris de végétaux. On m'a assuré que ce terrain a le privilége de produire presque Tom. XII. 5 34 RECHERCHES constamment et uniquement de la Garance, tandis que dans les autres terres plus fortes, qui fournissent la qualité de Garance dite rosée, on ne peut semer cette plante qu’une ou deux fois, si on ne suit pas un mode particulier d’assolement, en alternant avec le blé, l'avoine, la luzerne, puis encore le blé ou lavoine, pour revenir enfin à la Garance '. Il resterait maintenant à déterminer si le sol qui produit en Hollande une qualité de Garance qui, de même que celle d'Avignon, n’a pas besoin pour avivage de l'addition de chaux, toujours nécessaire à celle d'Alsace, pour obtenir des couleurs solides, est d’une nature analogue à celle du bon terroir des environs d'Avignon. M. Verplanken*, dans son traité sur la culture de la Garance , nous apprend seulement que les meilleures racines se récoltent en Hollande ; dans l'ile de Schowen (Zélande ), dont le sol est saumâtre. J’ai moi-même vu cul- tiver la Garance aux environs d'Arles ( dans la Camargue ), dans des terrains anciennement baignés par la mer, et où croissent encore aujourd’hui une foule de plantes maritimes, telles que les Salicornia, Atriplex portulacoides , Statice , ete. Quoi qu’il en soit, il paraît résulter des expériences des agronomes les plus distingués, et en particulier de M. De Gasparin, que lesbonnes terres à Garances doivent être légères et humides, ce qui confirme les observations que nous avons suivies en commençant ; on peut ajou- ter que ces terres doivent être d’un grain homogène; ne pas contenir de gravier qui, lors de l’arrachement, nuit et diminue la récolte en brisant les racines. Il résulte de la connaissance que nous possédons maintenant du siége principal de la matière colorante, que plus le tissu cellulaire ainsi que le tissu vasculaire (aubier des fabricans ) * seront développés dans 1 De Gasparin, 1. ec. chap. VII. 4ssolemens, p. 64-77. 2? J. A. Verplanken , Description de la culture de la Garance , in-8°, brochure de 35 pag. avec planch. Bruxelles, 1835. 3 Les fabricans et les cultivateurs ne donnent pas une signification identique aux noms des parties qui renferment le principe colorant ; les uns les désignent sous le nom d’aubier, les au- SUR LA GARANCE. 39 la racme, que moins elle aura d’écorce proprement dite, plus aussi elle renfermera proportionnellement de matière colorante. Ainsi le but essentiel auquel doivent tendre les cultivateurs, c’est de faire prendre au tissu cellulaire et ligneux le plus d’accroissement possible , et c’est là la considération qui doit les diriger dans le choix du sol et des engrais. Après l'abondance de la matière colorante, vient en première ligne, la qualité du principe lui-même : les cultivateurs ont remarqué que dans les sols arides et secs, ce principe se développe peu, tandis que le contraire a lieu dans les terres humides et légères. D’après ce que nous avons vu au sujet de la coloration et de l’in- tensité que prend avec l’âge de la plante, le principe colorant, on com- prend pourquoi les principaux propriétaires n’arrachent leur Garance qu’à la troisième année". Habituellement les cultivateurs font leur récolte au bout de 18 mois; mais il me paraît prouvé que, depuis cette époque jusqu’à la 3 an- née, la racine acquiert des qualités qu’elle n’a pas à 18 mois, et qui lui donnent une valeur beaucoup plus considérable. Il paraît qu’après ce terme, non-seulement le principe colorant se développe encore, comme nous l'avons vu, d’après la série de coloration que j'ai repré- sentée, mais que le tissu cellulaire prend en outre un accroissement sensible. Des renseignemens que je suis en droit de croire exacts, il résulte que ce qu’on désigne sous le nom de mordant, se développe surtout depuis l’âge de 18 mois jusqu’à celui de trois ans ; ainsi, pour n’en donner tres sous celui d’écorce, de manière que les renseignemens qu’on obtient de différentes sour- ces, paraissent contradictoires. M. De Gasparin lui-même regarde la racine de garance, formée, dit-il, comme toutes les autres, « d’écorce, d’aubier et de bois; au centre est le canal médul- laire » . On voit que cet observateur avait à la fois sous les yeux des racines et des tiges souter- raines. Quoi qu'il en soit , j'ai indiqué (pl. VIIL, fig. 6) par des lettres , les différentes parties d’une racine, avec les noms que leur donnent les fabricans d'Avignon. Ainsi la rangée externe ou écorce avec la terre adhérente prend le nom de Billon , la lettre b a celui d’aubier, et le c, formé entièrement par le tissu vasculaire , sert à la garance extra fine. ? DeGasparin,l. c., p. 69. L'orcanette paraît être dans le même cas; dans la première année, les racines de cette plante bisannuelle sont presque incolores, tandis qu’à la deuxième, le prin- cipe colorant y est très-apparent. 36 RECHERCHES qu’une preuve, des poudres fabriquées avec des racines de 18 mois, ont été composées avec le tissu cellulaire, plus une portion de l'écorce, et ces poudres, employées aux mêmes usages que les qualités dési- gnées dans le commerce par les lettres E XF ( exfra fine ) fabriquées avec des racines de 3 ans, ont produit les mêmes résultats à la teinture. Ce mordant ne parait être formé que des bases terreuses qui se de- posent à cette époque dans la plante, mais dont l'anatomie ne peut nous démontrer la présence et n’a d'autre but que de fixer et de faciliter la combinaison du principe colorant avec les tissus que l’on veut teindre ’. Quoi qu’il en soit, les Garances ne peuvent être arrachées avant d’avoir atteint au moins 18 mois, sans offrir une diminution sensible dans leur produit, à raison du peu de développement du tissu cellu- laire, et surtout de la qualité imparfaite du principe colorant qu'il renferme ; et cette observation dont la justesse est bien reconnue dans les pays méridionaux, doit à plus forte raison s'étendre aux pays du nord, où la végétation de la Garance s’arrête vers la fin du mois de septembre, tandis que, dans le midi de la France, et surtout dans certaines terres qui retiennent l'humidité, comme celles du Palud que j'ai observées plus particulièrement, la végétation se continue jusqu’en novembre, et reprend avec vigueur au mois de mars. On voit qu’en étendant à la culture du nord le précepte d’arracher à 18 mois, les racines n’ont réellement pas profité autant que si la plante avait végété dans un pays plus favorisé. «On a observé que la Garance cultivée dans les pays chauds donne une couleur plus solide, et il est prouvé par la pratique, que la Ga- rance rouge d'Avignon donne un peu plus de parties colorantes rou- ges que celle d'Alsace, que les rouges qu’elle fournit résistent mieux 1 C’est probablement aussi à cette combinaison plus intime, plus parfaite de ces bases dans les tissus, que la Garance du Palud doit sa supériorité, car il faut supposer qu'une combinaison particulière , qu'on ne peut obtenir artificiellement, se passe dans la plante, puisque l'addition de la craie ou de la chaux dans les teintures ne produit qu’une partie des résultats qui s’obtien- nent naturellement en employant la Garance du Palud. SUR LA GARANCE. 37 aux avivages, quoiqu’au sortir de la teinture, leur nuance n’ait pas une apparence plus foncée ‘. » Le temps que l’on doit laisser la Garance en terre, dit M. De Gaspa- rin *, dépend de plusieurs considérations : le prix de la rente ou loca- tion , l'augmentation du poids de la racine, et l’assurance qu’elle méprouvera pas de mortalité par un plus long séjour. « Quand la rente de la terre n’est pas forte, et que la terre est fertile, on peut avec avantage prolonger la durée de cette culture ; c’est ainsi que, dans la Livadie, la racine reste cinq à six ans en terre *. » Dans les terrains légers, où la racine s’empare avec facilité des sucs de la terre, on regarde le terme de trois ans comme le plus avan- tageux; il peut n’en être pas de même dans des terrains compactes, surtout dans ceux des pays du nord, où la Garance laisse une plus grande quantité d’engrais non consommés. L'opinion des cultivateurs français est que , sur ces sols, la quatrième année augmente la récolte d'environ 3 à 4 quintaux par hectare. On voit par tout ce qui précède, que les notions exposées dans ce mémoire, sur l'intensité et les qualités que prend avec l’âge le prin- cipe colorant de la Garance, se trouvent en rapport direct avec les résultats auxquels les cultivateurs sont arrivés depuis long-temps par une pratique et des observations journalières , et qu'ainsi, en partant de points différens, nous arrivons au méme but“. Bullet. indust. de Mulb. , n° 8. De Gasparin, 1. c., p. 68. 3 Mém. soc. agr. Paris, semestre d'hiver, 1817, p. 91. Je n’entrerai ici dans aucun détail relativement au mode de semer ou de planter la Garance ; plusieurs raisons me paraissent devoir sinon exclure, du moins discréditer l'emploi du semis dans les pays septentrionaux, où l'usage de planter par éclats de vieux pieds, semble établi depuis fort long-temps. Je ferai remarquer à ce sujet un fait physiologique assez curieux, c’est la forme de fuseau (assez analogue à celledes racines du Spiræa filipendula) que prennent souvent celles de la Garance lors de sa première année de plantation ; c’est du moins ce que j'ai remarqué sur des pieds vivans de cette plante, qui m'ont été envoyés de Belgique. 1 2 38 RECHERCHES DE LA DESSICCATION. L'observation si simple , au moyen de laquelle j'ai démontré au commencement de ce Mémoire, que la racine de Garance à l’état vi- vant, contient seulement le principe jaune, et que la matière rouge est produite par les différentes manipulations auxquelles la racine est soumise, aménera sans doute les fabricans à changer quelques-uns des procédés actuellement admis. Toutes les préparations auxquelles on soumet les racines de Ga- rance, après leur dessiccation ont pour but (sans qu’on s’en soit rendu compte ), de multiplier les points de contact entre l'air et ces parties, et par suite, d'opérer la conversion de la matière jaune en rouge. On sait que les poudres les plus fines sont les plus recherchées pour les belles teintures, que, pour en essayer la qualité, on les expose en couche mince sur du papier où l’action de lair, après toutes les pré- parations auxquelles elles ont été soumises, détermine encore un degré de coloration en rapport avec la qualité de la Garance. L'emploi de meules d’un grain plus fin que celles dont on fait usage, produira peut-être un bon effet. Si on parvenait à écraser les racines lorsqu'elles sont encore fraiches , et à soumettre à une chaleur vive la pâte étendue, on obtiendrait sans doute aussi des résultats avanta- geux. Je n’ignore pas que l’écrasement des racines fraiches peut pré- senter des obstacles difficiles à vaincre dans les procédés en grand, à cause de la viscosité et de la tenacité du liquide jaune, qui, au contact de l'air, s’épaissit et s’attache aux instrumens dont on fait usage, car les moyens employés en exposant les racines à une température élevée, n’ont d'autre but que de les rendre friables. Une macération dans l’eau, et des préparations analogues à celles qui se pratiquent pour l'indigo, détermineraient-elles, sans le détériorer, une plus grande quantité du principe colorant ? Ce sont autant de problèmes à résoudre. Il suffit de se rappeler que les procédés employés ont été fondés sur ce principe faux, que les SUR LA GARANCE. 39 racines renferment, avant leur pulvérisation, la matière colorante rouge toute formée, Sans entrer dans des détails de fabrication de la poudre, dont je n’ai eu que rapidement l’occasion de saisir l’ensemble, je pense qu’en conservant les procédés de pulvérisation usités aujourd’hui, le meil- leur mode de dessiccation est la chaleur rapide d’une étuve. Cette dessiccation offre un avantage très-grand, qui consiste en ce que les racines ne contiennent plus d’eau, et qu’elles peuvent être pulvérisées plus facilement. Dans le midi de la France, on les sèche sur les aires à battre le blé; ce moyen économique ne peut être mis en usage dans le nord, où les racines séchées en plein air contiennent encore 12 à 15 7 d'humidité. Lorsqu’elles sont enfermées dans des magasins, elles éprouvent sou- vent une fermentation qui altère le principe colorant, comme lorsqu’el- les restent sur le sol, exposées aux injures de l’air et surtout aux gelées blanches, lesquelles semblent carboniser le tissu cellulaire, lui don- nent une couleur violâtre, et détruisent le principe colorant. Il est généralement reconnu, même dans le midi de la France, que les pou- dres fabriquées pendant les mois d'août et de septembre, sont plus belles que celles fabriquées pendant les mois de novembre et de dé- cembre , avec les mêmes racines, et prises dans le même terrain. Aussi les fabricans font-ils leurs efforts pour arracher, sécher et mou- dre pendant les premiers mois, la plus grande quantité possible de racines. Les racines séchées peuvent attendre le moment de leur pulvérisa- tion sans éprouver alors de détérioration, si on a soin toutefois de les tenir à l'abri de l’humidité; car nous avons vu avec quelle rapi- dité elles s'emparent de celle répandue dans l'air. « On augmente la coloration en rouge de la Garance, en la faisant sécher quand elle est un peu mouillée. Des magasins légèrement humi- des développent aussi la couleur rouge dans les Garances qui y sont conservées; mais, dans ce cas, il y a aussi à courir le danger de la moisissure, et une Garance qui a une odeur de moisi perd presque 40 S RECHERCHES toute sa bonté. » Ce passage que j'extrais du Mémoire de M. De Gaspa- rin s'accorde parfaitement bien avec ce que nous venons de voir du développement de la matière rouge par la présence de l'humidité, et si cette matière rougie se détériore, suivant M. De Gasparin, ce ne peut être que lorsque cet état se prolonge. Les poudres gagnent en qualité si elles sont renfermées depuis plus d’une année dans les tonneaux ; c’est la troisième qui semble leur avoir fait subir des modifications qui en augmentent la valeur. On sait que la Garance pulvérisée est mise dans des barriques, et foulée avec force ; cependant ses molécules retiennent entre elles une quantité d'air atmosphérique qui finit, à la longue, par agir dans toute la masse et à la colorer uniformément. On peut facilement se convaincre que ces poudres retiennent de l'air entre leurs molécules, en en pre- nant dans une barrique une poignée qu’on plonge dans de l’eau distil- lée, et comme dans cet état les molécules sont agglutinées entre elles, on voit pendant le temps-qu’elles se séparent, des globules d’air s’en échapper et venir crever à la surface de l’eau. Ainsi, nous pouvons encore ici expliquer les phénomènes qui se passent sur les poudres renfermées dans ces barriques, et reconnaitre l'influence de l’air sur leur coloration, comme nous l'avons vu pro- duire tous les phénomènes que nous venons de suivre et d'étudier en détail *. 1 Commeil existe entre les chimistes la plus grande divergence d'opinion au sujet de la com- position du principe colorant de la Garance, et qu'il règne encore la plus grande obscurité sur tous les produits qui en dépendent , je me contenterai de rappeler ici les observations que j’ai été à même de faire dans le cours de mes expériences au moyen de quelques réactifs; les acides nitrique , hydrochlorique , l'eau oxigénée, ne déterminent pas la coloration en rouge du principe jaune. L’acide acétique étendu lui communique une couleur jaune plus vive, qui tend au rouge, sans le déterminer nettement. Enfin les alcalis , la potasse et l’ammoniaque , font passer la couleur jaune à la couleur rouge, instantanément ; les acides la ramènent au jaune. Comme il paraît que l’ammoniaque se forme au contact de l’eau et de l'air , toutes les fois que l'hydrogène et l'azote se rencontrent à l’état naissant, on concoit que des phénomènes analo- gues peuvent se passer dans les expériences que nous avons faites, sans que rien puisse nous le prouver. Je n’entrerai pas dans de plus longs détails sur ce sujet; j'ai cru devoir seulement exposer SUR LA GARANCE. 41 RÉSUMÉ. Il résulte de tout ce qui précède : 1° Que la Garance à l’état vivant n'offre dans sa racine d’autre prin- cipe colorant qu’un liquide jaune; que ce principe réside dans le tissu - cellulaire et les vaisseaux du latex, et non dans des cavités spéciales, et que par conséquent il est analogue à la séve descendante, élaborée dans les cellules ; Que ce liquide est d’autant plus foncé et plus abondant que l’âge est plus avancé; Que ce liquide peut se produire dans les parties herbacées et vertes de la Garance, quand elles se trouvent dans des conditions telles, qu’el- les contiennent une plus grande quantité d’oxigène ; 20 Que, sans aucun doute, c’est à l’action de l'air qu'est dü le changement de couleur du liquide jaune en principe tinctorial rouge; Que ce liquide jaune mis en contact avec l’air, après la suspension de la vie, prend la couleur rouge et un aspect granuleux, au lieu d’être liquide et transparent comme il l'était antérieurement ; 30 Que la culture la plus convenable est celle qui facilitera le déve- loppement des parties où le liquide jaune est sécrété, c’est-à-dire du tissu cellulaire et du tissu vasculaire, entre les intervalles duquel il se dépose également; l’expérience apprend que le sol le plus conve- nable pour la culture de la Garance, est celui qui a le plus d’affinité pour l’humidité , et qui se dessèche plus lentement ; 4° Que le climat ne parait avoir aucune influence sur le degré de coloration du principe tinctorial ; Qu'avant 18 mois, ce principe est en trop petite quantité; que de les essais que j'avais tentés pour me rendre compte des colorations que je voyais se produire, sans vouloir prendre pour base les phénomènes que m'avait présenté l’action de certain réactif, sur un principe encore aussi peu connu que l’est celui de la Garance, Je renverrai pour ce sujet aux différens mémoires insérés dans le Bulletin de la société industrielle de Mulhausen , dans lesquels se trouvent ceux de M, Kuhlmann (Bull. n° 3), Kæchlin-Schouch (n° 3, p.175), et au vol. 4. Bull. 17, p. 125, ainsi qu’à plusieurs autres notices insérées dans les 4nnales de Chimie et de Physique. Tox. XII. 6 42 RECHERCHES cette époque à 3 ans, il acquiert son maximum de développement, qu’ainsi la Garance ne doit être arrachée qu’au bout de 3 ans; que cette règle doit surtout s'appliquer aux pays du nord, où la végétation dure moins long-temps; 5° Que les manipulations ont pour résultat de mettre en contact avec l'air les parties remplies du principe coloré en jaune; qu’en con- séquence, plus la division sera complète pour obtenir de belles tein- tures, plus la conversion en rouge sera considérable. Je crois utile en terminant la partie principale de ce Mémoire, d'y ajouter, en appendice, quelques observations générales sur les diffé- rentes espèces de Garance, et de passer rapidement en revue leur prin- cipaux caractère et végétation. L'examen attentif que j'ai fait de l'espèce commune, étendu à toutes celles du genre Rubia, tel que l'a judicieusement circonscrit M. À. Richard, m'a fourni je crois, d’un côté, une connaissance plus complète des caractères spécifiques de chacune des espèces en particulier; de l’autre, une idée générale plus précise de l’organisation de la fleur, et surtout du développement de l’ovule et de l'embryon. Ces dernières observations, quoique n’ajou- tant que peu de chose aux belles recherches de M. De Mirbel sur le développement de l’ovule, n’en sont pas moins dignes de fixer latten- tion des physiologistes, en ce qu’elles ont rapport à une famille sur laquelle aucun travail de ce genre n’avait été entrepris. Enfin, j'ai cru devoir ajouter à la suite de ce Mémoire, la figure et la description d’une plante cryptogame, particulière à la Garance, et qui fait d'immenses ravages dans les départemens méridionaux, en s'étendant sur les racines de cette plante et faisant périr ainsi sur place une grande partie des récoltes. GARANCES. Caractères de hvé Si on excepte les deux espèces de garances particulières aux tation. iles Canaries, on ne connaît parmi les autres que des végétaux her- SUR LA GARANCE. 43 bacés. Leur port varie peu ; ce sont des plantes qui, à l’aide de poils crochus, dont leurs tiges et leurs feuilles sont munies, s’accro- chent aux corps voisins et atteignent souvent ainsi plusieurs pieds de hauteur. Cependant les tiges des Æ. anqustifolia et Olivieri se pré- sentent toujours droites, et acquièrent au plus six ou sept pouces d’élé- vation. Celles du À. tinclorum sont les seules qui se détruisent tous les ans; les autres espèces du même groupe persistent pendant l’hiver en conservant leurs feuilles; à l’exception des poils raides et courts dont sont armés chacun des angles que présentent ces tiges ; on n’en observe presque point d’autres, si ce n’est, toutefois, dans le R. Oli- vierii, où elles sont couvertes de très-petits poils courts, réfléchis, qui donnent aux tiges une couleur cendrée. Les feuilles sont toujours opposées, décussées, et je ne puis citer aucune exception à cette règle, malgré le nombre considérable de germinations et de branches que j'ai eu l’occasion d’examiner ; elles sont toujours simples, sessiles ou longuement pétiolées, et cette diffé- rence a servi à séparer en deux groupes très-distincts, toutes les espè- ces du genre ; leurs surfaces sont glabres ou couvertes, sur l’un ou sur les deux côtés, de poils raides. Dans le premier âge, elles sont d’abord dépourvues d’appendices stipulaires; ceux-ci se montrent ordinaire- ment vers le troisième mérithalle; cette observation peut également s'appliquer aux rameaux provenant d’un pied déjà ancien, et chez lesquels la base souterraine présente de distance en distance des feuilles réduites à l’état d’écailles charnues. Les appendices stipulai- res se distinguent des feuilles avec lesquelles on peut les confondre par l'absence de bourgeons à leur aisselle. L’épiderme qui les recouvre, offre des différences assez notables, suivant qu’on examine la face supérieure ou inférieure de la feuille : ainsi dans le 2. tinctorum, les deux côtés offrent à peu près la méme organisation, les cellules sont sinueuses , et on aperçoit des stomates sur les deux surfaces, quoique plus abondantes sur l’inférieure. Dans le R. lucida, lépiderme de la face supérieure des feuilles est complétement dépourvu de stomates, et les cellules, excessivement sinueuses, présentent seulement à leur Feuilles, Nervures. Préfoliaison. #4 RECHERCHES centre un petit mamelon ou rudiment de poil. Les cellules épidermi- ques des feuilles du X. anqustifolia , semblables à celles de l'espèce précédente, sont différentes toutefois , par la présence de quelques sto- mates sur leur côté supérieur; dans l’une ou l’autre, le côté inférieur en est pourvu. Les nervures sont pennées; dans un des deux groupes du genre, chaque feuille en présente seulement une moyenne, de laquelle partent des nervures secondaires qui finissent par s’anastomoser entre elles et former un réseau, lequel se dessine légèrement en creux sur la face supérieure et en saillie sur l’inférieure ; généralement les ner- vures de cette dernière sont couvertes de poils, tandis que la supérieure est lisse. Les espèces chez lesquelles les tiges persistent, v’offrent sur leurs feuilles qu'une seule nervure moyenne, saillante sur les deux faces, et les poils dont leur limbe est bordé, sont dirigés de haut en bas. Leur degré de rigidité tient à la disposition des cellules de la face supérieure qui se trouvent immédiatement au-dessous de l'épi- derme; celles-ci sont presque cylindriques, verticales, et sur deux rangs superposés, très-serrés les uns contre les autres; les utricules inférieures sont irrégulières, et laissent entre elles des lacunes corres- pondant aux stomates. Dans le À. angustifolia, immédiatement au- dessous des cellules verticales, on en voit une rangée formée d’utricules presque ovoïdes, après lesquelles on observe une partie assez épaisse, formée de cellules irrégulières en contact avec l’épiderme de la face inférieure. Dans le groupe à feuilles cordiformes, outre la nervure principale, on en observe une ou trois latérales, qui se détachent de sa base, pour former ainsi une feuille tri- ou septem-nerviée. Les feuilles à l’état de préfoliaison sont dressées , appliquées les unes contre les autres par leur face supérieure, et offrent l’inférieure tournée en dehors; les deux ou quatre appendices qui les accompa- gnent, également dressés, se placent directement ou un peu oblique- ment entre chacune des feuilles. Il m'est arrivé fort souvent de voir ces appendices foliacés, en restant soudés seulement d’un côté de la tige, offrir une lame échancrée au sommet et former ainsi avec les SUR LA GARANCE. 45 deux feuilles, un verticille de cinq pièces; les deux autres folioles sti- pulaires étant distinctes. Ces variations de nombre et de soudure peu- vent se remarquer très-fréquemment sur la Garance commune. La disposition des fleurs n’offre rien de remarquable , ce sont de petites cymes axillaires ou terminales ; les pédoncules les plus infé- rieures ne portent souvent que trois fleurs, et dans ce cas, les deux fleurs latérales sont accompagnées de bractéoles; la moyenne ou ter- minale, qui en est privée, se trouve aussi portée sur un pédicelle plus long, et s’épanouit la première. En avancant vers le sommet des rameaux, les pédoncules prennent plus de longueur pour aller ensuite en diminuant ; les fleurs, aussi plus nombreuses , quoique générale- ment groupées trois par trois sur chacune des ramifications du pé- doncule, constituent une cyme dichotome ; la fleur terminale de chaque axe partiel étant plus précoce que les latérales, forme une inflorescence définie, marchant du centre à la circonférence. Il n’est pas rare de voir la fleur terminale de ces axes munie d’une corolle à quatre lobes : ce cas exceptionnel ne doit diminuer en rien la valeur du caractère assigné au genre Aubia. Il n’est arrivé plusieurs fois de trouver des fleurs de Galium à trois divisions, et alors, comme dans la Garance, il était facile de reconnaitre la soudure des deux lobes de la corolle, quoique souvent de grandeur égale aux autres, à la dis- position des nervures dans les parties soudées. Cette soudure des deux lobes en un seul, entraînait l’avortement de l’étamine. Il arrive souvent aussi que deux rameaux se développent aux côtés de la fleur terminale, et continuent l’ordre d’inflorescence que je viens de décrire, sans présenter d’avortement ; d’autres fois, au con- traire, les rameaux secondaires se terminent seulement par une fleur à l’aiselle de laquelle naït un rameau tertiaire, qui rejette la fleur sur le côté extérieur et nous montre ainsi les premiers degrés de la cyme unilatérale. Du reste, ces cas d’avortement, encore aujourd’hui assez mal définis dans leur ensemble, se rencontrent presque constamment dans les inflorescences en cyme qu’ils masquent quelquefois. Le calice est ou globuleux ou presque turbiné, très-intimement Inflorescence. Calice Corolle. Étamines. 46 RECHERCHES soudé à l’ovaire avec lequel il se confond. Le limbe est nul, ou réduit à un rebord à peine visible; l’épiderme, dans le jeune âge, est inco- lore, et le péricarpe, composé de tissu cellulaire rempli de matière verte, ne montre aucune organisation qui lui soit propre. Les fleurs qui varient de nuances, mais restent néanmoins toujours dans la série de couleur désignée par M. De Candolle sous le nom de série xantique, ou oxidée de MM. Schubler et Funk; ainsi elles sont verdâtres dans le À. cordifolia, jaunes dans l’espèce commune, et rouge-foncé dans notre À. atropurpurea. La forme de la corolle est généralement rotacée comme celle des Galium , et je ne l'ai bien vue campanulée que dans la Garance com- mune. Le limbe, dont la préfloraison est valvaire, est à cinq divisions, variant peu dans leurs formes : elles sont ovales ou lancéolées, et gé- néralement terminées, comme dans la plupart des Galium et des Cru- cianelles, par une petite pointe charnue d’abord infléchie sur le limbe, puis s'étendant horizontalement. Chacune des divisions est en outre munie de trois nervures : la moyenne la parcourt directement dans toute sa longueur, sans se ramifier d’une manière sensible , les deux latérales se dirigent de côté et gagnent les filets staminaux qu’elles quittent ensuite pour se reporter vers le sommet de ces divisions. Cel- les-ci sont généralement de la longueur du calice, néanmoins il n’est pas rare de les observer plus longues que lui, surtout lorsque la co- rolle tend à devenir rotacée. Leur couleur , comme je l'ai déjà dit, est jaune ou jaunâtre dans les Rubia tinctorum et les autres espèces voisines; de couleur herbacée dans le À. cordifolia, rouge-foncé ou pourpre dans deux espèces nouvelles. La base interne du tube dans le À. tinctorum est couverte de pa- pilles semblables à celles qu'on remarque sur le disque avec lequel elles paraissent se confondre sous le rapport de l’organisation. Les filets des étamines sont cylindriques, généralement assez courts, presque nuls dans quelques espèces, toujours glabres , et placés aux angles de chacune des divisions de la corolle. Le con- SUR LA GARANCE. 47 nectif est peu apparent. Les anthères insérées vers le milieu sont ova- les ou ovales-oblongues , et leur déhiscence a lieu dans toute leur longueur suivant deux fentes presque latérales; au moment de la fé- condation, on les voit s’incliner sur les stigmates qu’elles protégent simultanément. Néanmoins, il arrive presque constamment sous le climat de Paris, et dans les pays du nord, que les ovaires avortent en partie. Après la fécondation, les anthères se recourbent souvent en arrière et sont alors réniformes. En sortant de l’anthère le pollen est de couleur d’or; les grains sont ovales ou elliptiques, présentant sur leur surface plusieurs lignes net- tement prononcées, parallèles à leur grand axe; plongés dans l’eau, ils prennent un peu plus de largeur ou s’arrondissent presque com- plétement et finissent même par se déprimer. Dans ces deux cas, ils offrent généralement six ou sept bandes bien prononcées, quelquefois cependant je n’en ai observé que quatre; celles-ci vont souvent en se rétrécissant et cessent d’être visibles avant d’arriver aux extrémités du grain. Dans d’autres cas elles se joignent entre elles vers le sommet et forment, par leur réunion, des sortes d’arceaux en laissant aux deux pôles du grain, une surface plane entièrement occupée par la mem- brane externe beaucoup plus opaque. M. H. Mohl, dans son Mémoire sur le pollen, a décrit l’organisation de celui du Rwbia tinctorum. Le disque n’est pas également développé dans toutes les espèces; il ne parait nettement qu'après la chute de la corolle, alors il se présente formé de deux petits corps charnus en fer à cheval, appar- tenant chacun à une carpelle, et formant par le rapprochement de leurs extrémités, un cercle parfait. Sa substance est cellulaire et sa couleur jaunâtre, sa surface est papilleuse. À en juger d’après la place qu'il occupe, il est nettement épigynique ; l'insertion de la corolle ayant lieu sous son contour extérieur ; l'ovaire étant fort épais, tandis que le calice est réduit à une simple membrane, il est évident dans ce cas, comme dans celui des Composées et Ombellifères, que la corolle prend naissance sur le sommet de l’ovaire; l'insertion ne doit donc pas être regardée comme périgynique. Pollen Disque. Style, Siüigmates. Ovaire, 48 RECHERCHES Sa longueur varie suivant les espèces et l’époque où on l’observe; dans la Garance commune, il est très-court et dépasse très-peu le dis- que au-dessus duquel il se divise de suite ; dans d’autres cas, il conti- nue à rester simple après s’être dégagé d’entre les deux carpelles, et ne se divise ainsi que plus haut; ces divisions ou branches sont cylin- driques ou comprimées sur une de leurs faces : d’abord dressées, elles s’écartent ensuite après la fécondation; elles sont formées de tissu cellulaire transparent, au centre duquel on peut facilement aper- cevoir un tissu continu avec les stigmates dont il a la couleur. Cette différence dans le tissu du style cesse d’être appréciable après la fécondation, surtout dans sa partie inférieure correspondant au point où les vaisseaux nourriciers, partant de la base du fruit, pénè- trent dans la loge pour y former le funicule. Un point important reste ici à déterminer, c’est le mode de féconda- tion. Dans les diverses espèces de Garances ou de Caillelaits, malgré des recherches assidues et souvent réitérées, je n’ai jamais pu décou- vrir, soit à l’intérieur des loges, soit vers la base du style, aucun tissu particulier qui se trouvât en rapport avec le point de l’ovule corres- pondant au micropyle. Ceux-ci sont habituellement plus larges que les branches du style qu'ils terminent; ils sont globuleux ou coniques, couverts de papilles sécrétant, au moment de la fécondation, un fluide visqueux auquel adhèrent fortement les grains du pollen. En parlant du style, jai fait mention d’un tissu de couleur différente, occupant le centre des sti- gmates, se continuant dans chacune des branches du style et servant probablement à transmettre le fluide fécondant aux ovules. Sa forme est turbinée ou arrondie ; peu de temps après la fécon- dation et lorsque la corolle est tombée, il se trouve couronné par le disque et le style, mais celui-ci ne tarde pas à s’en détacher. Il est toujours glabre. Les loges sont constamment au nombre de deux, ren- fermant chacune un ovule, mais il arrive fort souvent qu'un seul d’entre eux se développe; ce côté de l’ovaire prend alors seul un grand accroissement et laisse à sa base le rudiment de la loge avortée. Quel- SUR LA GARANCE. 49 quefois le nombre des ovaires avortés est extrémement considérable et souvent même j'ai observé des pieds de Garance qui n’en offraient aucun arrivé à maturité; ils persistent fort long-temps dans cet état sans se détacher. Au moment de la floraison l’ovule remplit toute la cavité de la ovuie. loge; il se présente sous la forme d’un petit corps ovoïde, verdâtre, fixé par le milieu de sa face ventrale à la partie moyenne et interne de la loge. On remarque souvent à la partie supérieure un petit épais- sissement, ou seulement même une différence de coloration qui indi- que la place de la chalaze ; le micropyle est invisible ; on ne retrouve sur l’ovule à cette époque aucune trace du mamelon d’imprégnation. Aujourd’hui, après les belles observations de M. De Mirbel sur le développement de lovule, mes recherches sur ce point sembleront très-faciles; cependant quand on considèrera l’époque à laquelle il est nécessaire de chercher l’ovule pour observer l'apparition de ses tégumens, la chose n’est plus aussi simple. En effet, après des recher- ches assidues et multipliées sur des ovaires pris dans des boutons d’une dimension encore bien au-dessous de ceux que j'ai représentés, je reste convaincu que l’ovule à cette époque est déjà recouvert par tous ses tégumens. Car en observant les ovules au moment où lovaire apparaît, pour ainsi dire, on les trouve déjà recourbés sur eux-mêmes, et le côté correspondant au micropyle, tourné vers la base de la loge, a déjà pris toute son extension. L’ovule à cette époque est à peu près transparent, formé d’une masse de tissu cellulaire au centre de laquelle on ne distingue encore rien, Peu de temps après, l’ovule, gêné dans son développement in- férieur, s’accroit alors vers la partie supérieure, de manière que le point d'attache qui se trouvait d’abord situé en haut, se trouve main- tenant placé vers le milieu de sa face ventrale. En même temps que ce changement a eu lieu, on aperçoit à l’in- térieur de l’ovule un corps de même forme que lui, mais un peu plus petit, dont l'existence est facilement constatée par un cercle transpa- rent qu’il présente sur son contour, et qu’on ne distinguait pas aupara Tom. XII. 7 50 RECHERCHES vant. Plus tard, cette membrane externe et le corps interne sont si intimement appliqués les uns sur les autres, qu’on ne peut les séparer qu'avec peine. Ce corps interne celluleux et transparent, que je considère comme le nucelle, est attaché au point de l’ovule correspondant à la chalaze. Quelque temps avant l’épanouissement de la fleur, il semble former à lui seul toute la masse de l’ovule, et de transparent qu’il était il est devenu opaque et vert; jamais son tissu, quoique rempli de ma- tière verte, ne présente des cellules renfermant des cristaux, comme on l’observe dans les autres parties herbacées. Une coupe verticale montre également à cette époque le funicule recouvert par un ac- croissement du nucelle, mais se distinguant de la masse de celui-ci par sa forme et l’organisation de ses tissus, ainsi que par la présence de quelques vaisseaux très-rares et d’une grande ténuité. Le centre du nu- celle, moins coloré que la partie extérieure, se compose de cellules plus lâches et remplies d’un liquide mucilagineux. Quelque temps après la fécondation, le centre de la masse verte ou nucelle se dilate, devient de plus en plus muqueux, se creuse légèrement vers le point correspondant au micropyle, sans se trouver cependant en rapport avec la partieexterne. C’est à cette époque qu’au moyen de dissections délicates, on trouve, dans le tissu ainsi ramolli et creusé, une petite vésicule ovoïde, cel- lulaire, remplie de liquide mucilagineux mélé à des globules d’une extrême ténuité. Les cellules qui forment cette vésicule présentent souvent un noyau central. Comment ce sac membraneux s'est-il dé- veloppé au milieu d’un tissu avec lequel il ne paraît avoir eu aucune continuité ? C'est un point que je n’ai pu éclaircir ; mais ce qui est de toute évidence, c’est que cette vésicule se développe de plus en plus, refoule le tissu cellulaire du nucelle au milieu duquel elle a pris naïs- sance, et se remplit d’une matière laiteuse qui paraît elle-même à cette époque offrir quelques traces d'organisation cellulaire. Cette matière laiteuse épanchée sur le porte-objet du microscope est, comme tous les sucs laiteux et colorés, formée par un liquide contenant des granules d’une extrême petitesse, doués de mouvemens moléculaires très-visibles. SUR LA GARANCE. 51 Enfin, à l’époque où cette vésicule remplit en grande partie tout l’in- térieur de la masse verte ou nucelle, on voit se former à l’un de ses bouts, correspondant au micropyle, une agglomération de très-petites cellules au milieu desquelles s’en élèvent quelques autres superposées assez régulièrement (fil suspenseur Mirb. ) et supportant un petit corps cellulaire, globuleux , légèrement déprimé au sommet. Ce petit corps est l'embryon, la vésicule que je viens de décrire, est le sac embryonnaire, et la masse verte, le nucelle. Ici, contrairement à ee que j'ai observé dans les Véroniques, les Plantains, etc., la matière qui entoure l'embryon est formée dans le sac embryonnaire, tandis que dans ces autres familles, cette matière se développe dans la masse verte. Nous devons donc, ce me semble, reconnaître cette masse laiteuse formée dans le sac embryonnaire comme un endosperme et non comme périsperme *. En supposant que 1 On avait donné indistinctement jusqu'à ces derniers temps le nom d’endosperme, de pé- risperme ou d’albumen, à cette partie de la graine qui entoure directement l'embryon, cepen- dant MM. R. Bronn et Ad. Brongniart, dans leurs belles Recherches sur le développement de l'ovule, ont établi la différence que présentaient le périsperme et l’endosperme , suivant que ces organes prennent naissance dans le tissu du nucelle ou dans le sac embryonnaire. Je transcris ici le passage du mémoire de M. Ad. Brongniart, relatif à ce sujet. « Quelle que soit la grandeur relative du sac embryonnaire et de l'amande ( nucelle Mixb. ) au moment de l'impréonation, bientôt on voit de grands changemens s’opérer ; le plus souvent le sac embryonnaire augmente rapidement; il se dilate dans tous les sens, repousse le tissu de l'amande, et bientôt il a réduit ce tissu à une couche mince : c’est ce qui forme le tégument interne de la graine de la plupart des auteurs, ce que Gaertner a nommé ”embrana interna, M. Mirbel fegmen, M. Dutrochet eneïleme. Le sac embryonnaire aiusi développé finit souvent pas être entièrement occupé par l'embryon. Dans ce cas , la membrane du sac ou disparaît com- plétement, ou se confond avec le parenchyme de lamande , pour former la membrane interne : c’est le cas des cucurbitacées, des crucifères, des rosacées, des légumineuses et de toutes les plantes dépourvues d’endosperme. Dans celles qui en sont pourvues, au contraire , il se dépose sur les parois du sac embryonnaire de nombreux grobules qui, par leur agglomération ou leur développement , forment cet endosperme au centre duquel se trouve ordinairement l'embryon... » Dans quelques plantes, au contraire, le sac embryonnaire ne se développe qu’autant que l'exige le volume de l'embryon ; ses parois sont toujours appliquées contre lui, et le parenchyme de l’'amande qui persiste dans la graine mème, se remplit de globules amylacés, et devient un endosperme ou un périsperme d’une autre nature quele précédent, etauquel nous conserverons, pour le distinguer , le nom du périsperme, en donnant à celui dont nous avons décrit le mode de formation en premier, le nom d’endosperme. » Pour exprimer avec clarté et précision la nature et l’origine des diverses parties de la 52 RECHERCHES ce sac, après avoir pris un certain accroissement cessät de grandir, comme il serait entouré des restes du nucelle, celui-ci formerait une substance particulière, charnue ou farineuse correspondant au pé- risperme, et la matière formée dans le sac embryonnaire constitue- rait un périsperme interne ou endosperme entourant directement l'embryon. Maintenant, tandis que le sac embryonnaire va de son côté en gran- dissant et refoulant le tissu cellulaire vert du nucelle, l'embryon porté sur un support plus élevé (fil suspenseur Mirb.) continue à s’accroître, se développe et s’allonge sur la ligne parallèle au point d'insertion de lovule, puis enfin, il suit la courbure que présente la jeune graine. À cette époque, le tissu du nucelle a presque complétement disparu , et se trouve réduit à une mince pellicule. L’embryon dans ses premiers développemens offre, ainsi qu'un grand nombre de dicotylédons, un fait assez curieux, l'inégalité des cotylé- dons, et cette différence de grandeur persiste même dans certains cas, jusqu’à l’époque de la maturité de la graine. J'ai cherché à suivre, sans être arrivé à un résultat satisfaisant, la formation de l’endosperme, en rattachant cette étude à celle des dé- veloppemens de l'embryon. J'ai dit plus haut que la masse laiteuse remplissant le sac embryon- naire, paraissait elle-même offrir quelques traces de cellules dans son graine, nous pensons qu’on pourrait employer les expressions suivantes, qui, sans introduire de nouveaux mots dans la science, recevraient ainsi une définition plus précise. Conserver à l’enveloppe externe que parcourent les vaisseaux nourriciers le nom de festa ; donner à l'enveloppe interne, lorsqu'elle est ouverte près du micropyle et qu’elle provient par conséquent du tegmen, ce même nom de tegmen; désigner par le mot de périsperme le paren- chyme de l’amande rempli de granules amylacés ; lorsqu’au contraire ce parenchyme s’est ré- duit à une membrane mince qu’on distingue du tegmen , ainsi que M. R. Bronn l’a observé, en ce qu’elle se termine par un mamelon noirâtre qui n’est percé d’aucun trou, l'indiquer par le nom de membrane périspermique; enfin donner le nom d’endosperme, employé par Richard pour toutes les substances comprises entre les tévunmiens de la graine et l'embryon, à la matière dé- posée autour de l'embryon, dans le sac embryonnaire lui-même; c’est-à-dire à ce que la plupart des botanistes ont désigné successivement par les mots d’albumen , de périsperme et d’endosperme. Ad. Brong. Mém. sur le dévelop. de l'embryon végét. chap. VI, p. 107-112. SUR LA GARANCE. 53 intérieur ; en effet, si on examine cette masse à différentes époques de son développement, on voit la solidification marcher de la cir- conférence au centre; la partie moyenne entourant l’embryon est encore entièrement mucilagineuse, lorsque l’extérieure déjà blanche parait composée de cellules. A l’époque de la parfaite maturité des graines , l’endosperme qui paraît d’un blanc hyalin à l’œil nu, est formé de cellules oblongues, séparées les unes des autres par une substance diaphane homogène, et dans laquelle les cellules semblent enfoncées ; celles-ci, qui m'ont paru avoir une enveloppe propre, sont plus ou moins complétement remplies de granules de couleur fauve, lorsqu'on les observe au mi- croscope. Cette organisation , qui se trouve dans un grand nombre de graines périspermées, n’est cependant pas particulière à celles où l'ont voit la matière périspermique développée dans le sac embryonnaire. Les fruits sont ou globuleux ou à côtes comme le À. cordifolia qui les a d’un beau rouge vermillon passant au noir, suivant l’obser- vation de M. Fischer; dans tous les cas, la coloration parait être limitée aux cellules épidermiques, le tissu cellulaire sous-jacent, con- servant toujours sa couleur verte, quoique fort réduit à la maturité. La grosseur du fruit dépend entièrement du degré de développe- ment de la graine, car à la maturité, le péricarpe est extrémement mince. Sous l’enveloppe épidermique, appartenant en même temps au calice et à l’épicarpe, on trouve, quelques minces couches de tissu cellulaire, puis immédiatement après, l’endocarpe appliqué sur la graine. Dans le jeune âge, il n’en est cependant pas ainsi, car le pé- ricarpe présente alors une assez grande épaisseur due au tissu cel- lulaire du sarcocarpe, de couleur herbacée ; mais à mesure que la graine se développe, elle le repousse, le refoule et le réduit enfin à une simple lame de tissu cellulaire. C’est entre cette partie du fruit et l’endocarpe que rampent les vaisseaux nourriciers qui se divisent à partir du sommet du pédicelle pour se rendre à la corolle et aux éta- mines. C’est encore entre le sarcocarpe et l’endocarpe qu’on rencontre Fruits. 54 RECHERCHES des cellules remplies de raphides, je ne les ai observées nulle part ailleurs dans le fruit, et à l’époque de sa maturité et par l'effet de l’amincissement du sarcocarpe, on les trouve presque sous l’épiderme; celui-ci se remplit alors d’un liquide de couleur violâtre ou rouge. Maintenant que nous venons d’examiner successivement les princi- paux caractères de la Garance, et de suivre en détail les organes repro- ducteurs de cette plante, qui trouveront encore quelques éclaircisse- mens dans les figures et leur explication, il me reste à dire quelques mots de l’épiderme des fruits du genre G@aliuwm comparé à celui des Rubia. Dans les Garances, comme je lai dit plus haut, cette couche épidermique est formée de cellules presque hexagonales , renfermant à la maturité un liquide coloré en rouge ou en violet. Il n’en est pas de même dans plusieurs espèces de caillelaits à fruits mous, chez les- quelles les cellules de l’épiderme présentent des réticulations de la manière la plus nette; tels sont par exemple les G. articulatum , Apa- rine, rubioides , etc. Dans cette première espèce on voit les réticula- tions passer d’une cellule à l’autre et d’autres fois, au contraire , n’en pas atteindre les bords. Dans une espèce à fruits tuberculeux, les cellules de l’épiderme sont également mamelonées et les réticulations partant de la base, vont en se dirigeant vers le sommet du mamelon. Ces cellules réticulées, qui sont propres à certaines espèces du genre, manquent au contraire dans le plus grand nombre Ces cellules épidermiques réticulées du péricarpe des Galium , dif- férent de celles des anthères sur lesquelles M. Purkinje, et plus tard M. De Mirbel, ont attiré l’attention des botanistes : en effet, dans celles- ci, le réseau se trouve toujours dans la couche cellulaire ou utriculaire , immédiatement au-dessous de la couche la plus superficielle, de sorte que ces cellules, par la destruction de leur membrane, n'offrent plus que les filets épaissis, développés dans leur intérieur et qui restent à claire-voie. Dans le péricarpe des Galium au contraire, les réticula- tions appartiennent à la cuticule la plus externe et non aux cellules ! Au moment d'imprimer cette partie de mon travail, j'apprends par M. De Mirbel que des observations analogues lui ont été communiquées par M. Purkinje. SUR LA GARANCE. 99 ou utricules sous-jacentes. Il est facile de constater cette observa- tion au moyen de coupes horizontales ou verticales très-minces ; on obtient ainsi des cellules qui présentent à la fois plusieurs de leurs faces. On remarque alors l’extérieure beaucoup plus épaisse , et comme formée de deux lames minces superposées et intimément soudées entre elles; la supérieure offrant seule des réticulations saïllantes lorsqu'on les examine de profil; les autres parois de ces cellules parfaitement closes, n’offrent aucune trace de réticulations et sont de beaucoup plus minces que le côté extérieur. Dans les Garances, ce sont ces mé- mes cellules qui renferment un liquide coloré, tandis que dans les caillelaits à fruits mous, elles sont constamment remplies de fécule. L’analogie de l’épiderme des fruits du G@alium avec les parties herbacées de ces plantes, m'a engagé à rechercher ces réticulations sur les feuilles des deux espèces sur lesquelles s'étaient dirigées mes premières observations. En enlevant avec soin une partie de l’épiderme d’une feuille du G. articulatum ou rubioides, on découvre facilement, et à un faible grossissement , des réticulations analogues à celles qu’on voit sur le pé- ricarpe de ces mêmes espèces; toutefois avec une grande différence dans leur degré de netteté, suivant qu’on observe l’épiderme de la face supérieure ou celui de l’inférieure ; sur celle-ci, elles sont à peine visibles, et pourraient échapper à l'observation, si l’on n’était conduit à les retrouver par leur examen facile sur l’épiderme de la face supé- rieure des feuilles. Après avoir jeté un coup d’œil rapide sur la partie organogra- phique de la Garance commune, et avant de passer aux caractères spé- cifiques des diverses espèces de ce genre, je crois utile de dire un mot ici de la principale maladie qui affecte cette plante dans les départe- mens méridionaux de la France, je veux parler du Rhizoctonia Rubie ' 1R. subterraneum, filis tenuissimis bissoideis fuscis, ramosis, super radices arctè cohærentibus, tuberculis introrsam purpureo-fuscis. Rhizoctonia Rubie , Req. mss. vulgd farum. Cresc. ad radices Rubiæ tinctorum sativæ in agro Avenionensi. 56 RECHERCHES qui, suivant certaines circonstances encore mal appréciées, malgré les recherches des agriculteurs les plus distingués, se développe avec une rapidité effrayante dans les garancières, s'attache aux racines du ÆRuwbia, les enlace et les revêt si complétement de ses filamens ténus, que celles-ci ne peuvent opérer l'absorption des sucs nourriciers, meurent épuisées et hors d'état d’être employées. Cette singulière production paraît être le thallus souterrain d’un champi- gnon plus complet. Au microscope, les filamens qui tapissent les racines se montrent simples ou rameux, cloisonnés à de grands intervalles, légèrement aplatis, de couleur de bistre ; ils se réunissent quelquefois pour former des pelotons qui atteignent la grosseur d’une noisette. Ceux-ci, coupés par le milieu, ne présentent pas d'organisation qui puisse faire soupçonner l’existence de corps reproducteurs ; leur cou- che externe, d'apparence feutrée, se compose d’abord des filamens que je viens de décrire, ceux-ci en allant vers le centre du peloton, deviennent de plus en plus courts et se réduisent enfin à des utricules ovoïdes ou oblongues, quelquefois irrégulières, adhérant légèrement entre elles, de couleur brune comme les filamens extérieurs ; la couleur noiratre du centre du peloton ne paraît due qu’à la masse des cellu- les ou utricules pressées les unes contre les autres; vues isolément, elles ont toutes la couleur et l’organisation des filamens. On n’en distingue aucune dont l’organisation puisse faire admettre leur faculté reproductrice, et même aucun globule ne parait mêlé avec elles. Cette production n’est donc, comme je viens de le dire, que l’état ru- dimentaire d’un être plus parfait; c’est aussi le sentiment de M. le Dr. Leveillée, qui, en me communiquant d’autres espèces de Rlizoc- tonia, ma facilité les moyens de les étudier comparativement avec celle de la Garance. Une espèce nouvelle de Ruwbia m’a présenté une Uredinée voisine du Puccinia Valantiæ Pers. couvrant les deux surfaces des feuilles. SUR LA GARANCE. 57 Les Garances réduites aux espèces comprises dans les deux premières divisions du Prodromus systematis regni vegelabilis de M. De Can- dolle, appartiennent toutes à l’ancien monde. Elles se reconnaissent au premier abord des autres genres appartenant à la famille des Étoi- lées, à leur corolle à cinq lobes , à leur fruit charnu et coloré, à la grandeur et surtout à la consistance presque toujours coriace des feuilles. Mais il n’en est pas de même de la circonscription des espèces, puisqu'il a suffi de la variation dans la forme des feuilles de quelques- unes d’entre elles, pour engager certains auteurs à réunir, d’une part, comme variétés de la Garance commune, toutes les espèces à feuilles lancéolées ou arrondies, atténuées en pétiole à la base; de l’autre, de réduire également au À. cordhfolia toutes les plantes qui lui sont voisines. Je dois convenir qu’au premier aperçu, cette manière de voir paraît assez Juste, mais elle cesse de l’être par un examen plus at- tentif. En effet, on ne tarde pas à remarquer, pour chacune des espè- ces anciennement admises, quelques caractères qui peuvent servir à les faire reconnaître. Que ces diverses plantes soient des formes ou des races d’un même type, c’est ce qu’il me parait difficile d'admettre, lorsque nous en voyons quelques-unes dont les tiges se détruisent au commencement de l’automne, tandis que d’autres, sous les mêmes conditions, conservent même leurs feuilles, malgré les froids les plus rigoureux ; enfin quelques-unes d’entre elles nous offrent des fleurs vertes ou jaunes , tandis que d’autres espèces voisines nous en pré- sentent de rouges. Quoi qu’il en soit, comme toutes ces plantes peuvent se distin- guer assez entre elles pour les faire reconnaitre sans trop de vague et de difficulté, en attendant que des observations faites sur des maté- riaux plus complets que ceux que j'ai eus à ma disposition viennent compléter cette partie de mon travail, je vais tâcher de faire sallir les caractères propres à chacune d’elles, au moyen de phrases spé- cifiques. Tow. XII. 8 58 RECHERCHES. RUBIA. $ 1. Fois oblongo-lanceolatis v. rotundo-obovatis , basi in petiolum attenuatis. * Folüs annuis, penninerviis, membranaceis. 1. R. fructicosa. — Foliis 3-6“ supremis interdum passim oppositis , lanceolatis petiolatis, utrinque nisi nervis marginibusque lævibus ; cymis axillaribus paucifloris, folio brevioribus ; corollæ lobis ovatis cal- loso-mucronatis ; antheris ovatis ; stigmatibus globosis. Rubia fructicosa Aït. h. kew. 1. p. 147. Jacq. Ze. rar. t. 25. D. C. Prod. 4. p. 589. À. canariensis et À. galioides Poir. ! Ency. supp. 2. p. 707. Crescit in Ins. Canaris. (V. s. sp. in herb. mus. Par.) 2. R. tinctorum. — Foliis 4-6 lanceolatis v. oblongo-lanceolatis mucro- nulatis, submembranaceis penninerviis; corollæ lobis ovato-lanceolatis apiculatis ; antheris ovato-oblongis ; stigmatibus conoïdeis. Crescit in Græcia. ( V. v. cult. et sp.). ** Foliis perennantibus, marginatis , uninervis, coriaceis. 3. R. peregrina.—Foliis 4-6°* lineari v, oblongo-lanceolatis passim infimis subrotundis mucronatis , coriaceis uninerviis; corollæ lobis oblongo-v. ovato-lanceolatis longè mucronato-aristatis ; antheris ovatis; stylis lon- giusculis ; stigmatibus capitatis. Rubiu peregrina Linn. Spec. 158. D. CG. F1. fr. 4. p. 267 n. 3389 ! Crescit in Afr. bor., Gallià , Angl. meridi. ( V. s. sp.). Observations. — C’est, je crois, à cette espèce qu’il faut réunir le R. Requienii Dub. et non au R. longifolia Voir., dont je n’ai vu, au reste, que des fragmens dépourvus de fleurs et de fruits, Dans la plante de Corse, les feuilles sont scabres sur leurs deux surfaces , et la corolle longuement apiculée; le premier de ces caractères ne se retrouve pas sur le À. longifolia. 4. R. lucida. —Foliis 4"* ovato-lanceolatis infimis ovato-rotundis passim- que obovatis mucronulatis coriaceis supra lucidis ; corollæ lobis ovato- lanceolatis mucronatis ; antheris ovatis ; stigmatibus capitatis. SUR LA GARANCE. 59 Rubia lucida Linn. Syst. XII. p. 732. D. C. F1. fr. 4. p. 268 n° 3390! Crescit in Gall. circa Nemausum, Monsp., Telon. ,(v. s. sp. spon.) Observations. — Cette plante se reconnaît à ses feuilles coriaces , d’un vert sombre et luisantes sur la face supérieure , toujours verticillées par quatre , les supérieures et les inférieures quel- quefois orbiculaires ; les pédoncules sont plus courts que dans les espèces précédentes; les fleurs sont d’un jaune pâle. 5. R. Bocconi.— Foliis 4° lanceolatis v. ovatis obtusis, gradatim ad apicem angustioribus , ramulorum passim 5" rotundatis coriaceis supra lucidis læte viridibus; corollæ lobis ovatis apiculatis; antheris ovatis; stigmatibus capiltalis. Rubia Bocconi Petagn. Ten.! F1. Neap. t. 10. Crescit circa Neapolim. ( V. s. sp. in herb. mus. Par. Observations. — Ce serait plutôt à l'espèce précédente qu’au À. peregrina, qu’il faudrait réunir celle-ci, comme le fait M. Reichenbach. D’après des exemplaires originaux, envoyés au Museum par M. Tenore, le À. Bocconi se distingue du R. lucida, par ses feuilles moins coriaces , d’une couleur plus pâle , plus lancéolées , souvent obtuses, ayant leurs bords recourbés en dessous, de manière à border complétement la feuille. 6. À. Olivierii.—Foliis sæpius 6°" ovalibus v. obovalibus mucronatis, corollæ lobis lanceolatis apice calloso-attenuatis asperulis ; antheris parvis ; stylis capitatis. Rubia Olivierii Ach. Rich.! Rub. Mém. soc. hist. nat. Par.p. 132. D. C. Prod. 4. p. 590. Crescit in insula Scio. (v.s. sp. in herb. mus. Par.) Observations. — Cette espèce se reconnaît facilement à ses tiges et surtout à ses jeunes ra- meaux couverts de poils très-fins, serrés et réfléchis, Les feuilles beaucoup plus petites que dans le R. lucida ressemblent à celles du R. rotundifolia. Les corolles sont assez grandes, rotacées , couvertes de petites aspérités , à lobes épaissis à leur extrémité et atténués en pointe ; les an- thères sont plus petites que dans les autres espèces. 7. R. angustifolia. — Foliis #* linearibus acutis utrinque aculeato-scabris : corollæ lobis ovatis acutis ; antheris ovatis; stigmatibus capitatis. Rubia angustifolia L. Mant. 39. D. C. Prod. 4. p. 589. — À. tinctorum var. Camb.! F1. Bal. Crescit in Insul. Balearicis ( v.s. sp. in herb. mus. Par.) Observations. — Je ne saurais me ranger à l'avis de M. Cambessèdes, qui considère cette plante 60 RECHERCHES comme une simple variété de la Garance commune ; je regarde celle-ci comme bien distincte de toutes les autres, et, de plus, je suis convaincu que, si, au moyen de matériaux bien complets, on réunit quelques espèces , ces réunions ne porteront pas sur la R. tinctoruwm. D'après des observations trop incomplètes pour être citées , je crois que l'examen des fruits pourra être uti- lement employé pour servir de caractère spécifique , c’est au moins ce que la forme de l'embryon du R. lucida me porte à croire. { 2. Foliis longe petiolatis omnibus v. inferioribus cordatis 3-7-nervis. 8. R. clematidifolia. — Foliis #* ovato-lanceolatis subcordatis 3-5-nerviis tantum scabris, petiolis superne ad limbum tumidis; corollæ lobis ova- us reflexis apice dense papilloso-incrassatis ; antheris ovatis. Rubia clematidifolia BI. Mss. Crescit in ins. Javæ. Leschenault, Blume. ( v. s. sp. in herb. mus. Par.) Observations. — Cette espèce se distingue par ses feuilles larges, analogues à celles de la Clematis integrifolia, marquées de nervures saillantes ; par sa corolle dont les divisions sont ter- minées par une agglomération de papilles au lieu de former un appendice plus ou moins allongé, comme on le voit dans les autres espèces, 9. R. Munjista. — Foliis 6" cordatis acuminatis 5-7-nerviis , interdum sub- sessilibus utrinque asperis; corollæ lobis ovatis calloso-apiculatis ; anthe- ris ovalis. Rubia Munjista Roxb. F1. ind. 1. p.388. D. C. Prod. 4. p. 588. Wall. cat. n° 6209 E. Crescit in Ind, orient. ( v.s. sp. in herb. mus Par.) 10. À. cordifolia. — Foliis 6** ramulorum #* , lanceolatis v. ovato-lanceo- latis passim medio subcoarctatis, supra retrorsum scabris, 3-5-nerviis subtus scabris ; corollæ lobis ovatis breve apiculatis ; antheris subrotundo- ovatis. ( Flores virescentes ). Rubia cordifolia. L. Mant. 197. D.C. Prod. L. c. Crescit in Sibiria, Dahuria. ( V. s. sp. spec. Fischerianum). 11. R. alata. — Foliis 4-6"° oyato v. oblongo-lanceolatis acutis basi rotun- datis 1-3-nerviis; corollæ lobis ovatis extrorsum hispidulis calloso-api- culatis; antheris ovatis. Rubia alata. Wall. in Roxb. F1. ind. 1.p. 384. D. C. Prod. — R. javana D. G. Prod.— R. cordifolia. Wall. eat. 6209 ( c. a. 6208 a ). Grescit in India orient. (V. s. sp. specimen Wallichianum in herb. Delesser.) SUR LA GARANCE. 61 12. R. Wallichiana. + Foliis 4°-6** lanceolatis longe acuminatis, 5-ner- viis utrinque glabris nisi nervis, marginibus denticulato-asperis ; petiolis pedunculisque elongatis; corollæ lobis lanceolatis apiculatis. Rubia cordifolia. Wall. cat. n. 6209 B. Observations. — Les feuilles de cette plante sont extrêmement allongées, membraneuses , marquées de 5 nervures et portées sur des pétioles excessivement longs, les pédoncules et les pédicules qui partagent également cette longueur sont très-étalés. 13. À. atropurpurea. + Foliüis #*-6"* lanceolatis acuminatis basi interdum rotundatis supra asperrimis, subtus hispido-scabris ; corollæ lobis lanceolatis calloso-apiculatis ; antheris ovatis (flores atropurpurei, magn. Galii veri.) Cressit in Cachemiriæ regionibus calidis, a Pechana ad Thonna. (Jacquemont). 14. R: asperrima. + Foliis 4-6" lanceolatis v. ovatis acutis , basi sæpe rotundatis supra asperrimis , subtus hispido-scabris; corollæ lobis lan-- ceolatis calloso-apiculatis extrorsum hispidis. antheris ovato-rotundis. ( Flores lutescentes mag. præced. ) Rubia asperrima ; herba asperrima basi lignosa ramis ad nodos dense pilosis, præalta , scandens , floribus lutescentibus. Jacquemont Mss. — R. alata Wall. cat. n. 6208 c. Hab. in Cachemiria inter Tchigaon et Mirou, 12 julio. (Jacquemont). SPECIES MIHI IGNOTÆ. Rubia petiolaris. D. C. R. acalyculata Cav. R. lœvis. Poir. R. splendens. Hoflms et Link. R. Thumbergii. D. C. En résumant les caractères des diverses plantes que je viens de passer rapidement en revue, je pense que les deux premières espèces doivent être séparées , et former une petite section, à cause de leurs feuilles membraneuses, à nervures pennées apparentes sur les deux surfaces , n’ayant point leurs bords roulés en-dessous, comme celles 62 RECHERCHES SUR LA GARANCE. de la seconde section qui ont en outre les feuilles coriaces. Quant aux caractères propres à chacune des plantes de ce groupe, la manière dont M. De Candolle a tracé ceux des deux espèces de sa Flore Fran- çaise permet de les reconnaître facilement, et je ne doute pas que l'étude des autres espèces, faite sur le vivant, ne vienne limiter plus nettement leur caractère, Ceux employés jusqu’à ce jour ont été tirés de la forme des feuilles , de leur degré de villosité, tandis que les or- ganes floraux ont été rarement mis en usage; on voit que j'ai cherché à établir mes distinctions spécifiques sur la forme des fleurs et la présence des appendices qui terminent leurs lobes; j'ai cru devoir joindre ce caractère à celui tiré des feuilles qui, seul, me parait in- suffisant. Ma manière de voir, au sujet des espèces à feuilles cordiformes à nervures palmées, diffère de celle de M. Walker Arnott, qui réunit sous le nom de À. cordifolia les différentes plantes que je viens de signaler. On concevrait facilement cette réunion, si ces plantes ne présentaient toutes que de légères différences dans les feuilles ; mais la forme, la grandeur et la couleur des fleurs doivent s’opposer à cette complète réunion, jusqu’à ce qu’il ait été bien établi, d’après l'examen de ces plantes vivantes, que les formes et les couleurs des fleurs de chacune d’elles ne sont que de simples variations d’un même type. En décrivant une partie des espèces du genre Awbia, je n'ai pas eu l’intention de donner une monographie spécifique des plantes qu'il renferme, car il m’a été impossible d'observer plusieurs d’entre elles dans les herbiers de Paris; mon but n’a été que de fixer avec plus de certitude qu’on ne l'avait fait jusqu'ici les espèces sur lesquelles j'ai fait mes observations, et de faire ressortir quelques différences de structures qui pourront, lorsqu'on étudiera les espèces à l’état vivant, éclaircir mieux encore leur caractère. EXPLICATION DES PLANCHES. PLANCHE I. Fig. 1. — Fruit frais de grandeur naturelle; le péricarpe charnu , formé de deux carpelles, simule une baie didyme. Fig. 2. — Une des coques dont se compose le fruit , telle qu'on la trouve dans le commerce; le péricarpe est desséché et appliqué sur la graine. Fig. 3. — La même considérablement grossie, on ne découvre pas le testa qui fait corps avec l’endosperme. En a le péricarpe. En b l’endosperme. En c l'embryon coupé dans sa longueur. Fig. 4. — Embryon retiré de la graine. En « collet, tigelle, etc. En b point correspon- dant à la radicule. En c les cotylédons. Graine en germination, on voit la tigelle ou la radicule faire saillie en dehors de la graine, en déchirant et les tégumens de la graine et le péricarpe en a. En b la tigelle. En c la radicule. Fig. 6. — La germinatiou est plus avancée quoique les cotylédons soient encore enfermés dans la graine. En a péricarpe. En b endosperme. En c cotylédons. En d tigelle ou collet. En e fibrilles qui se trouvent correspondre immédiatement à la tigelle et un peu au-dessous. En / radicules. Fig. 7. — Un peu plus avancée que la précédente ; les cotylédons sont sur le point de se dégager de la graine. En a tigelle ou collet. En b radicule ; on apercoit déjà à cette époque entre elle et le collet ou tigelle une différence de coloration, On remarquera en c les fibrilles qui se trouvent sur presque toutes les plantes en germination. Fig. 8. — Une partie de l’épiderme de la radicule ; on n’y apercoit point de stomates quoi- qu'il en existe déjà à cette époque sur les cotylédons et sur le collet : on voit quelques cellules en «a donner naissance aux fibrilles b décrites ci-dessus ; elles sont simples et renferment un liquide analogue à celui de la jeune racine. © Fig. Fig. 9. — Une de ces fibrilles après son exposition au contact de l'air, le liquide est coloré en rouge très-pâle ; on y voit des granulations en a. Fig. 10. — Germination ; les cotylédons dégagés de la graine sont colorés en vert, la jeune racine a déjà donné naissance à deux ou trois radicelles en aa dont une part immédiatement au-dessous du collet b. 64 EXPLICATION Fig. 11. — La même plus avancée; on voit en a le premier article ou mérithalle qui a percé la base ( ou pétiole ) soudée des deux cotylédons; la jeune racine a pris aussi plus d'épaisseur , et quelques radicelles se sont en outre développées. Fig. 12. — Radicelle considérablement grossie , prise sur la jeune garance de la fig. 11. Ena, cellules corticales extrèmement minces ; immédiatement après se trouve le tissu cellulaire composant la presque totalité de la racine a’ vers la base de laquelle, ce tissu cellulaire va tellement en diminuant d'étendue , qu'il forme presque des utricules arrondies e. En b vaisseaux annelés dont l'extrémité inférieure paraît ne pas être organisée D’ ; je ne les ai vus dans cette partie que très-obscurément. En c vaisseaux très-jeunes et encore à l’état de cellu- les ; ils forment en d la spongiole qui se trouve entourée par le tissu cellulaire très-serré, quoique fort délicat et sur lequel je n'ai pu apercevoir de cellu- les corticales. Ordinairement la spongiole est un peu plus colorée que le reste de la radicelle. Fig. 13. — Cellules de la partie inférieure de la radicelle prise en e de la fig. 12, après leur exposition à l'air. 5 PLANCHE II. Anatomne de jeunes racines. Fig. 1. — Très-jeune racine de grandeur naturelle. Fig. 2. — La même grossie afin de montrer sa coloration ; comme on le voit par les traces des fibrilles du collet, la coupe supérieure se trouve faite immédiatement sous la tigelle. En aa radicules. Fig. 3. — Coupe horizontale de la racine ci-dessus. En a les papilles ou fibrilles. bb le tissu cellulaire, où se dépose la matière jaune. En c le tissu fibreux com- posé de cellules allongées, d la place occupée par les vaisseaux du Jatex. En eles vaisseaux ponctués formant le centre de la racine. Fig. 4. — Cellules prises sur la jeune racine fig. 1. Elles sont faiblement colorées en jaune; leur coloration en rouge est également très-peu prononcée à cette époque. Fig. 5. — Extrémité d’une radicelle prise sur la fig. 2 en a, afin de montrer la spon- giole a. Fig. 6. — Coupe transversale de cette même radicelle, les mêmes lettres indiquent les parties décrites dans la fig. 3. Fig. 7. — Coupe verticale d’une racine plus âgée que la précédente aa cellules corticales, b üissu cellulaire, c tissu fibreux ou cellules allongées; on voit que le tissu vasculaire ne se compose que de vaisseaux annelés et ponctués. En d vais- seaux annelés, e vaisseaux ponctués. Fig. 8. — Radicelle prise sur une racine beaucoup plus âgée. En a sa coupe transversale afin de montrer les différences de coloration avec les jeunes racines des fig. 2. Fig. 9. — La même coupée verticalement, pour montrer l’origine des radicelles sur le corps central, composé entièrement de vaisseaux ponctués ; les mêmes lettres indiquent les parties représentées sur la fig. 3. DES PLANCHES. 65 Fig. 10. — Portion de tissu cellulaire voisin du corps fibreux de la racine ci-dessus. Fig: 11. — Portion du tissu cellulaire au moment où on vient d’en faire la section. En a cellules de l'écorce. En b cellules renfermant le liquide jaune. Fig. 12. — La même après être restée à l’air ; on aperçoit quelques cellules plus profon- des bb’ qui ont conservé leur couleur jaune; toutes les autres, à l'exception de celles de l'écorce où le principe colorant se trouve détruit, sont remplies de matière rouge et présentent nettement des granules très-fins. PLANCHE III. Anatomie des cotylédons , des feuilles et des poils. Fig. 1. — Jeune Garance âgée de 3 semaines environ. En @ racine. En a’ les radicelles , b collet; c cotylédons sur lesquels on n’observe pas de poils ; d jeunes feuilles simplement opposées sans appendices stipulaires; e jeunes feuilles du second article, accompagnées d’appendices en e’; ceux-ci, de même que les feuilles, sont munis de poils raides sur leurs bords. Fig. 2. — Épiderme de la face supérieure des cotylédons , a stomates. Fig. 3. — Épiderme de la face inférieure; on voit que les stomates a sont en ‘nombre a peu près égal à celui de la face supérieure. Fig. 4. — Épiderme de la face supérieure d’une jeune feuille du premier article, On voit en a des cellules allongées correspondant à une nervure; b un poil, dont la base est formée d’une rangée circulaire de cellules. Fig. 5. — Épiderme de la face inférieure avec des cellules sous-jacentes «,a remplies de matière verte; le nombre relatif des stomates a changé, on voit qu'ils sont bien plus nombreux sur la face inférieure de la feuille, tandis que sur les cotyiédons ils étaient en nombre égal sur les deux côtés. Fig. 6. — Coupe verticale d’une feuille parfaite et déjà assez avancée en âge. En a cellu- les de l’épiderme coupées verticalement; bh cellules sous-jacentes placées verticalement; c cellules moyennes plus arrondies et irrégulières ; il est à remarquer que dans cette feuille, les cellules du parenchyme de la face su- périeure ou inférieure sont presque semblables , ce qui n’a pas lieu ordi- nairement. É Fig. 7. — Un poil, pris sur un des angles de la tige. La base a est formée par les cel- lules allongées ou tissu fibreux qui forme chacun des angles de la tige. Fig. 8. — Un poil, avec une portion du tissu fibreux a; on voit la manière dont ce tissu s’entrecroise a’ pour former la base du poil, lequel n’est composé que d'une seule cellule b assez épaisse, dure et creuse au centre D’; on ne rencontre jamais de granules dans ce tissu. PLANCHE IV. Anatomie d’une jeune feuille. Fig. 1. — Épiderme d’une jeune feuille dont quelques cellules se sont remplies d’un li- Tom. XI. 9 66 EXPLICATION quide rose aa. On voit contre ces cellules, ou peut-être dans leur intérieur, des granules verts disposés régulièrement en cercle bb. On peut suppo- ser que cet arrangement presque symétrique des granules, et leur réunion en globules d’un diamètre plus gros, dépendent d'un effet de cyclose dans l'intérieur de la cellule. Ce qui ferait supposer que ces granules ne sont pas tous contenus dans les cellules épidermiques, c’est qu’on en voit qui sont placés sur les limites de deux cellules c ; mais ce cas est rare. En d cel- lules sous-jacentes appartenant au parenchyme de la feuille. En e un sto- mate dont les utricules sont remplies de granules verts. Fig. 2. — Coupe verticale de la même feuille. On n’apercoit pas de granules verts dans les cellules de l’épiderme a&a, et la coloration qui est toute locale, n’influe en rien sur celle du parenchyme qui contient de la matière verte. Il paraît que dans les feuilles plus Agées, il se forme à la face inférieure un rang de cellules verticales comme dans celle que nous venons d'observer sur la planche III. Un joli sujet de recherche, serait de déterminer rigou- reusement comment s'étendent et s’agrandissent les feuilles. Fig. 3. — Cellules isolées et très-grossies renfermant quelques agglomérations de matière Fig. verte aa. En b on apercoit des granules plus petits, paraissant simples. PLANCHE V. Anatomie d'une jeune tige. 1. — Représente une très-jeune tige fendue verticalement, afin de montrer l'identité de forme du tissu cellulaire de la jeune racine et de la tige. Le premier ren- ferme de la matière verte, celui de la racine n’en contient pas; mais il est coloré en jaune pâle par la présence d’un liquide. On voit par cette coupe, la terminaison de la moelle et la présence de trachées déroulables dans la par- tie aérienne; la portion inférieure radiculaire paraît uniquement composée de vaisseaux annelés et ponctués. En à cellules corticales ; on ne voit pas encore sur les jeunes tiges et surtout sur cette partie inférieure, les angles fibreux qu’on observe , à un Âge plus avancé, dans la partie plus supérieure de la tige. En b tissu cellulaire rempli de matière verte; dans un âge plus avancé, il ne se trouve pas en quantité aussi grande , toute proportion gar- dée; à mesure qu’on s’avance vers les vaisseaux on voit le tissu cellulaire, être moins coloré, plus serré et constituer l'anneau fibreux ou étui médul- laire ; c, d vaisseau annelé, En e vaisseau ponctué; f trachée ; g moelle terminée en cæum à l'origine du collet. En À l'espace qu'occupe le collet; 2 fibrilles déjà observées dans les planches précédentes. 2. — Cellules remplies de matière verte ( dessinées à la camera lucida ) prises dans le tissu cellulaire b de la fig. 1. Fig. 3. — Coupe d’une jeune tige ayant long-temps macéré ; j'ai pu facilement alors en- lever le tissu cellulaire avec l'anneau fibreux, de manière à isoler les DES PLANCHES. 67 faisseaux vasculaires qui entourent la moelle, On aperçoit quelques cellu- les remplies de cristaux c. On voit en a les cellules de l'écorce ; D tissu cellulaire ; c cellules renfermant les cristaux ; d tissu fibreux; c’est vers ce tissu.et.celui qui forme la masse charnue de la racine, ou dans ce cas de la tige, que se trouvent les vaisseaux du latex ; e faisceaux vasculaires for- més de trachées, vaisseaux annelés et ponctués ; j'en ai compté jusqu’à 28 environ par faisceau, ils vont en s’avancant en pointe dans le tissu mé- dullaire /; dans un äge plus avancé, d’autres vaisseaux se forment entre ceux-ci, et l’étui médullaire se trouve ainsi complété et formé par l'addition de nouveaux faisceaux. Fig. 4. — Cellules renfermant des cristeaux ; & une cellule isolée. Fig. Fig. 5. — Cellules du tissu cellulaire plus près de l'écorce, prises sur la portion de tige macérée (fig. 3.); on voit qu'elles sont sinueuses et comme plissées vers leur extrémité; la matière verte était entièrement décolorée par la macéra- tion, et avait à peu près la couleur que montre le dessin. 6. — Coupe transversale d’une tige encore assez jeune. On voit que la moelle ren- ferme de la matière verte; l’étui médullaire est ovale et formé de vaisseaux de nature diverse. La plupart cependant sont de gros tubes ponctués ou vaisseaux en chapelets, puis vient le tissu fibreux assez épais et coloré en jaune pâle , les vaisseaux présentent une couleur fauve. Le tissu cellulaire est presque toujours privé de matière verte, si ce n’est aux angles de la tige où se trouvent les cellules allongées, incolores, qui en forment les angles ; on reconnait les cellules corticales par un diamètre différent et par leur continuité autour de la tige. En a cellules de l’épiderme enveloppant la tige. En b tissu fibreux, épais et très-résistant, formant les angles de la tige arrivée à un certain âge. En c tissu cellulaire rempli de matière verte occupant les angles des tiges, sa coloration diminue en allant de la circonférence au centre. En d cellules allongées ou tissu fibro-vasculaire entourant les vaisseaux ; d' place occupée par les vaisseaux du latex. En e vaisseaux de nature différente mais par- ticulièrement ponctués , formant avec les cellules fibro-vasculaires, l'étui médullaire. En f moelle. On voit les cellules du centre incolores, tandis que celles avoisinant les vaisseaux sont colorées, comme on a pu l'observer au sujet de la coloration du tissu cellulaire extérieur à l'étui médullaire. Fig. 7. — Coupe verticale d’une jeune tige passant par l'intersection des angles, afin de montrer la disposition des parties analogues à celles quenous venons d’obser- ver sur la fig. 6. Les mêmes lettres indiquent les mêmes parties. PLANCHE VI. Tiges à différens degrés de coloration , racine. Fig. 1. — Cette première figure représente la coupe verticale d’une tige ayant perdu la matière verte qu’elle contenait dans son tissu cellulaire après avoir été mise 68 Fig. Fig. Fig. Fig. Fig. EXPLICATION 15 jours en contact avec de la terre humide ; on aperçoit encore un assez grand nombre de granules verts dans certaines parties du tissu cellulaire, mais on voit qu'il a souffert des changemens notables , soit dans sa quan- tité, soit dans sa couleur qui est devenue vert-olive. On remarque plus particulièrement la coloration en jaune à l'insertion des feuilles, à cause de la plus grande quantité de cellules qui seules élaborent les sucs. En a tissu fibreux cortical formant les angles. En b tissu cellulaire ou par- tie décolorée. En € coussinet ou renflement du tissu fibreux cortical corres- pondant aux insertions des feuilles. On voit en d le passage des vaisseaux qui se rendent aux feuilles. En e quelques poils subulés qu'on observe presque uniquement dans la Garance, à la base des feuilles. x 1. — A Cellules renfermant des granules ; d’après un calque fait à la camera lucida. On voit que les granules , très-peu nombreux déjà, semblent envi- ronnés d’un liquide jaune très-pâle ; c’est le premier degré de coloration. 2. — Tige à un degré plus avancé de coloration ; on remarquera que dans celle-ci ce sont les cellules les plus extérieures et celles se trouvant entre l’étui li- gneux, qui sont principalement gorgées de sucs; on ne trouve d’utricules renfermant encore de la matière verte que vers la portion centrale du tissu cellulaire. Les lettres pour cette figure et les suivantes, répondent aux par- ties semblables de la fig. 1. A Cellules contenant quelques globules de matière verte; on voit les change- mens que les granules verts ont éprouvés; ils sont de couleur olive ou jau- nâtres au lieu d’être verts. 3. — Représente une tige arrivée à son degré de coloration le plus avancé; je n'ai pu faire augmenter cette coloration, à cause de la position presqu’aérienne de la tige et par la fin de la végétation. On concevra que si j'avais pu la laisser sous terre pendant un temps plus long, elle aurait pu passer par tous les autres degrés plus avancés de coloration , pour arriver à celle repré- sentée sur la fig. 7 de cette planche. La fig. 3, À, montre des cellules entièrement privées de matière verte et rem- plies d’un liquide jaune bien prononcé. 4. — Coupe de la tige appartenant à la jeune Garance dont nous avons observé la coloration en rose-violâtre des cellules épidermiques des feuilles. On voit encore dans cette jeune tige cette coloration n’occuper que la partie des cellules constituant l’épiderme que recouvrent quelques cellules fibreuses corticales a; en D’ les cellules renfermant le liquide coloré; les autres let- tres correspondent à celles des autres figures. 5. — Coupe verticale d’une tige développée naturellement sous terre ; les feuilles a sont réduites à des sortes d’écailles. Les renflemens de chacun des mérithal- les ou articles, sont toujours plus vivement colorés, à cause du grand nombre de cellules vers cette partie des tiges, comme on peut le voir dans les fiqures 1, 2, 3, 4. Je n'ai jamais vu ces tiges se désarticuler à cause de la continuité des tissus ; l'enveloppe fibreuse , très-résistante , s’opposant à cette désarticulation. En b le tissu cellulaire. En c l’étui médullaire. En d la moelle. DES PLANCHES. 69 Fig. 6. — Portion de tige tout-à-fait avortée; les feuilles, comme dans le cas précédent! sont réduites à des écailles a. Cette tige souterraine est presque cylindrique dans quelques-unes de ses parties, Fig. 7. — Tige souterraine (rhizome) 1 ayant atteint un âge fort avancé; les cellules cor- ticales sont fortement colorées en brun-violâtre, couleur que prennent or- dinairemeni les cellules restées long-temps en contact avec l'eau > Ou exposées aux gelées. Ces rhizomes présentent un fait assez curieux de la superposi- tion des bourgeons, aux places que devaient occuper les feuilles. Dans cette tige, le nombre des bourgeons est de trois ; le supérieur a est détruit, il a appartenu à la végétation antérieure; celui du milieu b se développe ; enfin il en reste un inférieur ç qui prendra, plus tard, un accroissement égal aux deux autres. On sait qu'un fait analogue s’observe sur quelques espèces de Chèvre-feuilles appartenant à une famille voisine des Rubiacées. J'ai vu quelquefois, sur des rhizomes de Garance, des bourgeons se développer aux aisselles des feuilles stipulaires, et se trouver ainsi au nombre de 4, ce qui porterait à regarder ces appendices comme ayant la valeur de véritables feuilles, opinion émise, au reste, par M. Steinheil, dans ses différens mémoires sur le développement et la valeur des fouilles. Fig. 8. — Racine de Garance âgée de 6 mois; on voit la couleur qu’elle possède inté- rieurement par les diverses sections que j'ai représentées a, a, a; au centre de la section supérieure se trouve le corps ligneux. PLANCHE VII. Anatomie d'une tige étiolee. Fig. 1. — Représentant une tige développée sous un cylindre obseur et humide, quelques jours (huit ) ont suffi pour colorer ainsi ces tiges, et amener leur colora- tion à un degré presqu’ésal à celui que nous venons de décrire, fig. 3 de la planche précédente. Il est vrai que cette tige ainsi étiolée si rapidement au- rait fini par périr, si cet état, pour ainsi dire d’hydropisie, se füt prolongé. L’article le plus inférieur a est coloré en rouge vif, mais on peut facilement s'assurer que cette coloration est limitée seulement aux cellules de l’épiderme en contact plus direct avec l'air extérieur. La couleur jaune est toujours plus intense aux extrémités des entre-nœuds b; j'en ai déjà fait comprendre la raison, Quoi qu’il en soit, on voit parfaitement la coloration de cette tige marcher de la base au sommet, c’est-à-dire, qu’elle prend de l'intensité en rapport de son développement, Fig. 2. — Représente la tige précédente dans une coupe verticale passant entre le second mérithalle, On observe la coloration en jaune orangé que cet article présente dans la fig. 1, limitée aux cellules les plus extérieures du tissu cellulaire a, constituant la couche épidermique. On remarque en b un point coloré en rouge qui se rencontre très-souvent à l’aisselle des feuilles dont les branches ! Du Petit-Thonars, Zuitième essai sur lidentité des racines et dos tiges, page 125 (au sujet de la Garance), 70 Fig. Fig. Fig. Fig. Fig. Fig. Fig. Fig. Fig. EXPLICATION ont été étiolées. Je n’ai pu déterminer s’il se fait habituellement à cette place une sécrétion sur les tiges vertes. 3. — Cellules de cette même tige, dessinées à la camera lucida. On voit qu'il n'existe de granules que sur les cellules aa , les plus voisines du tissu fibreux consti- tuant, avec les vaisseaux , l'étui médullaire; ces granules sont grisâtres ou paraissent dépourvues de coloration ; l'exposition à l'air de ces cellules leur a communiqué une légère coloration en rouge, représentée /ig. 4. Bb. — Cellules de la moelle. Dans les tiges qui prennent un accroissement très-rapide, ce tissu se trouve presque toujours déchiré et incolore , néanmoins dans celles que je figure ici, prises dans la partie voisine des vaisseaux, on remarque quelques granules presque transparens en aa. 6. — Montre une portion de la coupe transversale de cette même tige où la moelle est détruite comme je viens de le dire. En a tissu cellulaire cortical très-mince , composé d’un seul rang de cellules: En b tissu cellulaire de la tige. En c cellules allongées où nous avons ob- servé les granules (/ig. 3). En d tissu fibreux, formé de cellules allongées. En e vaisseaux. En / la moelle; g cellules centrales et déchirées par l'effet de la rapidité de la croissance. 7. — Portion de tige morte naturellement à l'automne. Le tissu cellulaire de la moelle présente des cellules de deux sortes, les unes parfaitement transpa- rentes , les autres renfermant des granules rouges qui ne sont évidemment ici, comme l’a établi M. Turpin dans d’autres cas, que de la matière verte altérée. Ces cellules renfermant ces granules rouges , occupent et les parties de la moelle où se voit habituellement la matière verte et le point correspon- dant à l'insertion des feuilles. 8. — Représente quelques-unes de ces cellules isolées sur lesquelles on remarque nettement des ponctuations aa, analogues à celles des vaisseaux, mais beau- coup plus espacées. M. Rœper a déjà signalé l'existence de ces ponctuations dans les cellules de la moelle du Sureau. En b, b, granules rouges provenant de l’altération de la matière verte. PLANCHE VIII. 1. — Rondelle d'une vieille racine, au moment où la section vient d’en être faite ; de grandeur naturelle. 2. — La même, séchée, destinée à être moulue. En a le tissu cellulaire réduit à une couche mince paraissant brune. En b le centre vasculaire qui parait s'être de beaucoup contracté. En plaçant une tranche mince de cette racine ainsi séchée sur une légère couche d’eau, on voit le tissu cellulaire se distendre et reprendre sa couleur jaune primitive. 3. — Coupe transversale et horizontale d’une racine, afin de montrer en même temps et la place et l'étendue de chacune des parties du tissu, soit cellulaire, soit vasculaire qui en occupe le centre. 4. — Portion du tissu cellulaire au moment où il vient d’être coupé sur une racine âgée, afin de montrer l'intensité du principe colorant. DES PLANCHES. 71 Fig. 5. — La même, après que l’action de l'air et de l'eau ont converti la couleur jaune en principe colorant rouge. Fig. 6. — Coupe transversale et très-mince du même troncon de racine, après son expo- sition à l'air; on voit en a la partie corticale désignée par les fabricans sous le nom de billon; en b la masse de tissu cellulaire nommée aubier dans le commerce ; en c les couches de cellules allongées ou fibreuses renfermant les vaisseaux propres. C’est, comme je l'ai déjà fait observer ailleurs, vers ce point qu’apparaît toujours le plus tôt la coloration en rouge. En d tissu vasculaire ou cœur de la racine, servant à fabriquer les poudres les plus : estimées, J'ai appelé ailleurs l'attention sur ce point de la coloration de cette partie de la racine. Fig. 7. — Rondelle d’un rhizome frais, grandeur naturelle. En a le tissu cortical coloré. En b le tissu cellulaire; ce étui médullaire , composé de vaisseaux fibreux et ponctués; d la moelle. Fig. 8. — La même séchée ; le tissu cellulaire extérieur ainsi que la moelle se sont colorés naturellement en jaune, mais la dessiccation a produit ici un phénomène analogue à celui que nous venons de voir sur la racine. Les cellules se sont contractées et tellement pressées les unes contre les autres, qu’elles semblent renfermer un principe rouge; il suffit pour se convaincre du contraire, d’ex- poser cette tranche sur une goutte d’eau, on voit alors le tissu cellulaire se distendre, devenir jaune, pour passer ensuite à la couleur rouge. Fig. 9. — Coupe verticale du rhizome ( passant par le grand diamètre de la fig. 8) ; c’est- à-dire par le centre de la moelle dont nous venons de voir les coupes trans- versales. Fig. 10. — Coupe analogue à celle de la fig. 3 , afin de montrer la relation des parties. On voit ici que la moelle occupe une étendue presque aussi considérable que le tissu cellulaire cortical de la figure précédente, Les lettres indiquent les par- ties correspondantes de la fig. 7. Fig. 11. — Représente une coupe transversale du rhizome décrit plus haut, afin de mon- trer aussi sa coloration, lorsqu'il est exposé à l'air. On voit que le principe colorant s’est épanché souvent après la section entre les vaisseaux et dans le tissu cellulaire de la moelle. En a les cellules corticales, b tissu cellulaire , c étui médullaire, d cellules de la moelle. Fig. 12. — Coupe verticale d’une portion du tissu vasculaire de la fig. 11, pour montrer le point a où se dépose le principe colorant , et afin de bien établir la non colo- ration du tissu vasculaire ; la matière colorante en s’épanchant dans les inter- valles de ce tissu, tend seule à le colorer. Fig. 13. — Poudre telle qu’on la trouve dans le commerce; elle a une teinte analogue à celle de l'écorce du Canelier. Fig. 14. — La mème observée au microscope, On voit qu'elle se compose de granules très- fins, dont la forme est insaisissable, puis de débris plus gros parmi lesquels on peut reconnaître très-distinctement des parties de tissu cellulaire a, et sur- tout de vaisseaux ponctués b. Fig. 15. — Raphides (cristaux aciculaires) , vues à un grossissement de 700 diamètres. 72 Fig. EXPLICATION Elles ont été retirées des cellules qui avoisinent l'étui médullaire, En a elles sont vues à un grossissement encore plus puissant. En b leur projection. 16. — Cristaux d’alizarine figurés d’après M. Raspail; leur couleur différente de celle qu'il a représentée est prise ici d’après des cristaux obtenus par M. Robiquet. PLANCHE IX. La série de vaisseaux que je représente ici me semble fort importante, en ce qu’elle démontre qu’on peut observer sur une seule plante toutes les formes , de ces organes, qu’on avait signalées jusqu'à ce jour sur des végétaux différens et sans vue d'ensemble. Je ne doute pas que l'anatomie précise et comparée de plusieurs familles différentes n'amène à de beaux résultats, en dési- gnant, non pas des caractères anatomiques propres à certaines familles, mais au moins la prédominance dans quelques-unes de tissus particuliers. Vaisseaux du latex observés une seule fois sur un troncon de tige , figuré PI. V., fig. 3. Ces vaisseaux s’affaissent très-promptement et sont alors fort peu apparens. Vaisseau en chapelet, avec impression a, a, a, des vaisseaux avec lesquels il se trouvait contigu. En b ligne de jonction des cellules qui composent ces tubes, Vaisseau ponctué, à articles très-courts et rentrant presque dans la forme pré- cédente: ces deux sortes de tubes ponctués se rencontrent surtout dans les racines. : Vaisseau ponctué, observé dans les racines où il est souvent déroulable. Il faut chercher cette sorte de vaisseau lorsqu'elles sont très-jeunes. Vaisseau rayé à articulation renflée a; observé dans de jeunes tiges. Vaisseau réticulé. ( Id.) Vaisseau annelé à anneaux imparfaitement développés, résultant probablement de la gène que leur accroissement aura éprouvé au point de dépression qu’on remarque dans le tube a; observé dans de jeunes tiges. Vaisseau annelé offrant la transition des anneaux séparés en une fibre spirale, qui s'interrompt elle-même pour former des anneaux a; observé dans de jeunes tiges. Vaisseau muni d’un double fil spiral s’entrecroisant. (Id.) Trachée déroulée inférieurement et se terminant en alène. Trachée à articulation oblique et en biseau a a. Trachée à double spire a ; quelquefois les fils restent soudés. Vaisseaux ponctués de la racine, coupés horizontalement et observés à un gros- sissement de 700 diamètres. On voit entre eux des espaces vides a dont nous avons parlé au commencement de ce Mémoire, et dans lesquels se dé- pose le principe colorant. Les cavités bb qu’on observe dans leur épaisseur, sont toujours opposées entre elles dans deux vaisseaux contigus; c'est à ces cavités que correspondent les ponctuations qu'on observe sur le vaisseau représenté séparément dans la fig. 14. DES PLANCHES. 73 La découverte de ces cavités correspondantes entre elles, appartient à M. Hugo Mohl, qui a le premier appelé l'attention des anatomistes sur ce faitimportant, Fig. 14. — Les ponctuations se présentent sous la forme de points ovales a colorés en rose, par un effet d'optique, et offrant dans leur milieu une raie b parallèle à leur longueur. Cette raie indique-t-elle une ouverture jouant un rôle analogue aux ouvertures des stomates, ou bien n'est-elle aussi qu’un effet d'optique ? Cette dernière manière de voir me paraît plus probable, Entre chacune de ces sortes de boutonnières, on suit un réseau qui parait les circonscrire, cc. On concoit de quelle difficulté il est d’arriver à une explication satisfaisante au sujet de ces ponctuations , lorsqu'on voit les observateurs les plus distingués ètre encore partagés d'opinion sur le rôle que remplissent les vaisseaux, S'il m'est permis d'avancer une opinion à cet égard , je dirai que ces vaisseaux peuvent, selon les époques , être remplis d'air ou de liquide indistinctement. Ici encore on arrivera à avoir une solution de la question, en faisant des observations régulières et comparatives. Fig. 15. — Section transversale d’un des gros tubes ponctués (fig. 2) d’une racine, pas- Fig. 16. — Fig. 17. — Fig. 18. — . 21. — sant par le point de jonction de deux grosses cellules et laissant voir des filamens rameux b, b, qui me paraissent être des réticulations tres-lâches de la paroi tranversale de ces cellules, et dont les intervalles ; ici très-grands, correspondraient aux ponctuations des parois verticales, D’après cette ma- nière de voir , il s’en suivrait que les cellules formant ces gros tubes ponc- tués offriraient un double mode de réticulations, l’une arrondie et très- serrée, l’autre irrégulière et très-lâche. Quoi qu'il en soit, il ne m'a jamais été possible de reconnaître nettement la présence d’une membrane entre ces réticulations. Ces réticulations a a, très-grossies et isolées, afin de montrer leurs interval- les en b, b. Ruzocronra RUBIÆ. Troncon de racine sur lequel s’est développé le Rhisoctonia Rubi. Cette cryp- togame bisoïde se présente sous forme de filamens. Filamens isolés. Portion d’un de ces filamens très-grossis , afin de montrer leur mode d’articu- lation , et leur membrane lisse est presque transparente. Coupe transversale d’un des tubercules. Utricules isolées du centre des tubercules, pour montrer qu’elles sont dépour- vues de granules intérieurs. PLANCHE X. Plan symétrique de la fleur du Rubia tinctorum dans ses rapports avec l'axe. En a cercle extérieur indiquant le calice, parfaitement entier et sans indice de divisions. En b corolle à préfloraison valvaire ; c étamines ; e échancrure indi- quant la ligne de déhiscence de l’anthère ; f le filet. En g ovaire ; k loges, ren- Tow. XII. 10 74 - EXPLICATION fermant chacune un ovule ; 2 styles correspondant à chacune des deux loges. Fig. 2. — Un bouton; a léger rebord correspondant à la partie supérieure du calice; b la corolle ; c l'ovaire. Fig. 3. — A. Très-jeune bouton dans l'ovaire duquel a été observé l'ovule qui se trouve placé en avant. A cette époque, l'ovule déjà recouvert par ses membranes, s'est recourbé vers le fond de la loge et le micropyle est presque oblitéré. En a le hile. En b le micropyle. Il m'a été possible de disséquer des ovaires encore moins avancés que celui que j'ai représenté, sans pouvoir y découvrir les premiers développemens de l’ovule. Fig. 4. — Ovule pris dans un ovaire un peu plus âgé; la membrane externe semble avoir entièrement recouvert le nucelle ; on n’apercoit plus à l'extérieur qu’une légère dépression indiquant la place correspondant au micropyle. En b le nucelle en se développant vers la partie supérieure c, de l’ovule , semble avoir ainsi ramené le funicule a vers le milieu. . — Un ovule, du même âge que le précédent, coupé verticalement, On voit que le nucelle, de nature homogène, en forme la totalité ; il est formé de tissu cellu- laire coloré en vert, surtout vers la partie externe. En a le funicule recouvert à sa partie supérieure par une partie du nucelle. En b le nucelle. En c la chalaze indiquée seulement par une différence de tissu avec celui qui compose la masse du nucelle ; leur couleur est à peu près la même. Fig. 6. — Une fleur grossie; chacun des lobes de la corolle est terminé par un petit prolongement charnu, à peu près cylindrique, réfléchi et appliqué les uns contre les autres dans le bouton. ox Fig. 1 Fig. Coupe verticale d’un ovaire au moment de l'épanouissement de la fleur. En a coupe du tube de la corolle. b fragment de filet d’une étamine qui s'y insère. En c calice recouvrant l'ovaire; on ne distingue pas l'épicarpe avec lequel il est confondu. En d le sarcocarpe charnu, formé de tissu cellulaire rempli de matière verte; e endocarpe mince et papyracé. En f disque épigyne peu développé encore à cet Âge; mais acquérant plus tard un plus grand dévelop- pement ; il est couvert de très-petites papilles que s'étendent également sur la partie inférieure du tube de la corolle. En g le style divisé profondément en deux branches. En À les stigmates. En à vaisseaux nourriciers rempant contre la partie externe de l’épicarpe pour se rendre à la corolle; les plus internes en partant du pédicelle se rendent aux ovules. Fig. 8. — Pollen. Observé au moment où il sort de l’anthère, il est de forme elliptique, avec 6 bandes; j’en ai observé quelques grains où ces bandes étaient réduites à quatre. Placé dans l’eau , il s’arrondit; ordinairement les bandes restent indépendantes les unes des autres b, cependant je le ai vues une fois se réunir pour former, aux deux pôles du grain, un sorte d'étoile a. Fig. 9. — Styles et stigmates. Les branches du style sont composées dans le jeune Age de tissu cellulaire transparent a, a; mais on apercoit dans l’intérieur de cha- DES PLANCHES. 75 cune d’elles et vers leur face interne, une bande jaunâtre bb communiquant avec le stigmate qui offre également cette coloration. Chacune de ces bandes suit toute la longueur des branches du style pour se réunir ensuite en une seule à sa partie inférieure qui est simple. Les stigmates cc sont de forme conique, papilleux, un peu aplatis sur leur face interne et convexes sur l'externe, de même que les branches du style. Fig. 10. — Ovule quelque temps après la fécondation. Fig. Fig. Fig. Fig. En a portion du sarcocarpe. En b portion de l'endocarpe. En c funicule épais coloré en vert. En e’ vaisseaux nourriciers composés en partie? de trachées qui le parcourent dans toute sa longueur pour aboutir au hile, En d nucelle: la partie antérieure est fortement colorée en vert. En e portion de la mem- brane externe détachée du nucelle auquel elle adhère très-intimement. En fl le sac embryonnaire se montrant vers la partie du nucelle correspondant au micropyle. Il ne m’a pas été possible de découvrir un point de connexion entre ce sac et le nucelle; la cavité creusée au milieu de ce dernier n’est pas ordinaire; habituellement le tissu cellulaire, quoique plus lâche vers la partie centrale du nucelle, n'offre cependant pas de lacune. 11. — Sac embryonnaire isolé. Il est rempli à l'intérieur de liquide mucilagineux te- nant en suspension une grande quantité de granules doués de mouvemens moléculaires ; on remarque aussi au milieu de quelques-unes des cellules com- posant ce sac, un nucleus central. +: — Un ovule séparé, offrant le sac embryonnaire déjà très-développé et occupant presque tout l'intérieur de nucelle. En a, point correspondant au hile. En b, tissu cellulaire du nucelle; c, sac em- bryonnaire. — Un ovule encore plus âgé ; le sac embryonnaire en a été retiré. En a portion du funicule; b le nucelle; c cavité occupée par le sac em- bryonnaire, 14. — Ovule plus âgé encore que le précédent , au moment de l'apparition de l’embyon 15. sous la forme d’un globule; celui-ci a pris naissance dans le sac embryon- naire , au point de ce sac correspondant à l’exostome ou micropyle. En a portion du funicule parcouru par quelques vaisseaux. En bb portion de l’endocarpe. En c le nucelle. En d le sac embryonnaire. En e l'embryon vu par transparence. — L'embryon, lors de son apparition, se présente sous la forme d’un petit corps sphérique, légèrement déprimé à sa partie supérieure, attaché à l’autre ex- trémité par quelques cellules formant une espèce de petit support composé d'utricules superposées assez régulièrement ; c'est à ce pédicule que M. De Mir- bela donné le nom de /il suspenseur. I est à remarquer que celui-ci prend nais- sance sur un amas d’utricules d’un diamètre plus grand , groupées sans ordre et renfermant des granules à l’intérieur. La figure que je donne ici de l'em- bryon et de ces cellules est faite d’après un dessin à la camera lucida. En a cellules donnant naissance au fil suspenseur b. En c embryon. Fig. 16. — Embryon à un âge plus avancé : le fil suspenseur s’est accru en proportion de Fig. 17. — EXPLICATION l'embryon: celui-ci est en forme de croissant; une des cornes esl un peu plus développée que l’autre; ce cas est presque général. Les cornes sont d’autant plus écartées les unes des autres que l'embryon est plus jeune. A cet Age les deux cornes du croissant se sont appliquées les unes contre les autres ; on y reconnait nettement les deux cotylédons. La forme de cet embryon, restée à cet état, se retrouve dans un grand nombre de graines périspermées. La tigelle (radicule) b a pris proportionnellement aux cotylédons un assez grand accroissement ; le fil suspenseur est ici presque imperceptible, quoique les cellules a soient fort distinctes. Fig. 18. — Embryon observé dans une jeune graine où le sac embryonnaire était déjà Fig. 19, — Fig. 20. — rempli de matière solide et blanche. En a le fil suspenseur, très-développé. En D la tigelle presque cylindrique. Une des coques composant le fruit, observée quelque temps avant son entier développement, afin de montrer toutes les parties qui entrent dans son orga- nisation et qui finissent plus tard par disparaître en partie. En a portion du funicule et du péricarpe ; on voit au centre les vaisseaux nour- riciers se rendant à l’ovule (voy. fig. 7-10-14). En b épicarpe intimement soudé au sarcocarpe; lors de la maturité, cette membrane épidermique se colore seule en violet par la présence d’un liquide renfermé dans ces cellules. En c sarcocarpe; composé de tissu cellulaire renfermant des granules verts ; à l'époque de la maturité complète, cette portion du péricarpe est fort amincie et se distingue à peine. En d endocarpe; c’est une membrane papyracée, mince, contre laquelle se rencontrent , seulement à la face externe, un assez grand nombre d’utricules renfermant des raphides. En e nucelle; composé de cellules remplies de matière verte; la membrane externe est tellement soudée avec lui, à cette époque , qu’on ne peut l'en séparer. En / le sac embryonnaire dans lequel s’est déjà organisé l’endosperme , qui, à cette époque , est d’un blanc pur; le centre est encore à l'état mucilagineux. En g l'embryon. À mesure qu'il s'accroît, il remplit la partie centrale du sac embryonnaire , qui, se développant lui-même, refoule le tissu cellulaire du nucelle , au point de le rendre presque méconnaissable. Portion d’une graine mûre, coupée parallèlement à son point d'attache, afin de montrer la structure de l’endosperme. En a épicarpe. b le sarcocarpe. En c pellicule formée par l'endocarpe ; la mem- brane du nucelle et quelques cellules appartenant à ce dernier; ces trois parties sont tellement unies entre elles qu’on ne peut les séparer. En d, cellules remplies presque en totalité de granules, qui, vus à un fort grossissement, semblent de couleur fauve. Ces cellules ou utricules m'ont paru avoir leurs membranes propres, comme leurs sections e semblent aussi l'indiquer , et paraissent enfoncées dans une matière transparente, insoluble dans l'eau, sur laquelle je n'ai pu découvrir les moindres traces d'organisation. DES PLANCHES. 7 Cette matière se présente avec les mêmes caractères dans les différentes coupes de l’endosperme. Fig. 21. — Épiderme du fruit de la Garance, lors de sa maturité. Fig. 22. — Épiderme du fruit du Galium articulatum , remarquable par les réticulations qu’on y observe; celles-ci paraissent quelquefois traverser d’une cellule à l’autre , comme on le voit en aa. Fig. 23. — Épiderme d'un cotylédon pris dans la graine, afin de montrer les changemens que subit cet organe dans les premiers temps de la germination (v. pl. III, fig. 2, 3). En observant cet organe sur des embryons avant tout commencement de ger- mination, on voit qu'il est composé de cellules régulières, presque hexago- nales , semblables à celles du péricarpe. Il est très-difficile de séparer, à cette époque, l’épiderme du tissu sous-jacent dans lequel il ne s’est pas encore formé de cavités aériennes; je n’ai pu également y découvrir de stomates, mais au moment où les cotylédons, quoique enfermés encore dans la graine, ont déjà pris une teinte verdâtre , par l'effet de la germination, on voit que les cellules épidermiques se sont allongées. Les stomates sont à peine visibles à cet âge, mais c’est alors qu’on peut bien observer dans le centre d’un grand nombre de cellules , le nucleus , signalé par M. R. Brown, dans l’épiderme de plusieurs Monocotylédones , et figuré par M. De Mirbel, dans les cellules du Momordica. Ea détachant l’épiderme du tissu cellulaire, dans les premiers temps de la ger- mination , on voit le liquide répandu dans ce tissu, prendre une couleur rousse à son contact à l’air. FIN. 1 RENE EVE ia ) y (ER LL ni 4 (4 OR re a di? M 1 de . « e ue à \nalonue de la Garance Fig. HU. \nalonne de la Garance A Daet Anatomie de la Garance. LD. del © Anatomie de la Garance. FRTHAEN TA l| Borromée dir! : # ‘ | . Ÿ + 4 # + . Es N. E " 3 ' : L] " | , © L Li A L n LA 313 15 p \ [ = fe { N * « \ , 'e ” Dorromées dir! Anatomie de la Garance. (pus = à sé tm mms ë 1 ”, mn og — Eng : $ ; À. : we. - EE. | CRE ; I. Ne LA “ 2 ; Ë - È , LA S es | æ - 4 TL | Le. Le dé d À . 4 bo de rabat 4 rs - \ | | : 4 | gun" ; L ‘ É ” ; | L Ÿ o a : \natomie de la Garance \natomie de la Garance Aou. des Seeneer de Brux. Lom 11. Lig.1 Zig.2 Na (4 À CA Fig. 6. FC F4 J6e : — É (l À f. Lig 13. Zig.10 n Z Ddet © Doro dir Anatomie de la Garance. Acad. das pee hig.1 Jesencesr de Prur Zom. 1. ig.2 = fly ) Æg.6. A | » Il = > 3 : = =3 1 = | 4 l = = 3 = | D | Er | c1 | 1 | r E j F + £ 3 £ = 1 æ| AD. del f Anatomie de la Garance. => Porrvmee der t hi. 20. RÉRESUEE me IMAMIT op om men s 7 «où 2 Anatomie de la Garance . MEMOIRE SUR LA CONSTITUTION GÉOGNOST IQUE DE LA PROVINCE DE BRABANT, EN RÉPONSE A LA QUESTION SUIVANTE : DÉCRIRE LA CONSTITUTION GÉOLOGIQUE DE LA PROVINCE DE BRABANT, DÉTERMINER AVEC SOIN LES ESPÈCES MINÉRALES ET LES FOSSILES QUE LES DIVERS TERRAINS RENFERMENT ET INDIQUER LA $Y- NONYMIE DES AUTEURS QUI EN ONT DÉJA TRAITÉ. Par M. H. GALEOTTI. Ton. XII. I ANANANANANANANANANANANAAN AAA AE AAA AAA AR PRÉFACE. a Felix qui potuit rerum cognoscere causas. VIRGILE. Depuis plusieurs années, l’Académie des sciences de Bruxelles avait proposé au concours la description géologique du Brabant ; personne n’avait encore traité cette question lorsque, revenu de longs voyages que je fis en Saxe, en Bohême, au Harz ,etc., dans le but d'approfondir les sciences géologiques, auxquelles je me vouais depuis plusieurs an- nées, je me hasardai à répondre à cet appel. Mes faibles talens et mon jeune âge me faisaient peut-être un devoir de ne point entreprendre une si rude tâche ; mais le désir orgueilleux de marcher sur les traces, frayées par tant de succès divers, des D'Omalius d’Halloy, des Cauchy, des Dumont, des Sauveur, des Schmerling, et d’autres qui honorent la Belgique par leurs travaux géologiques, et l'exemple que m’offraient ces savans, ont fait naître en moi l’idée présomptueuse que je pourrais soumettre une description géognostique du Brabant à leur approbation. Jusqu’à présent, on s’était peu occupé de la paléontologie de cette pro- vince; ce fut donc surtout vers ce point que je dirigeai toutes mes vues, toutes mes pensées. La description minéralogique que M. D'Omalius d’Halloy en avait donnée dans ses mémoires, me laissait bien peu à faire de ce côté; ce fut donc en appliquant les résultats zoologiques aux résul- % PRÉFACE. tats géologiques, que je parvins à fixer mon opinion sur l’âge de ces grands dépôts calcaréo-sablonneux qui composent le sol du Brabant ; âge que le savant dont je viens de citer lenom, avait déjà établi. La lecture des divers ouvrages de M. D’'Omalius d’Halloy touchant notre province, de l’'Oryctographie de Bruxelles par M. de Burtin, des mémoires de MM. Cauchy, Dumont et Drapiez, m'ont été d’un grand secours dans mes recherches et ont beaucoup facilité mes explorations : il est donc naturel que je témoigne ici toute la gratitude que je dois aux auteurs de ces divers ouvrages. Puissent mes efforts, si puis- samment aidés par de tels auxiliaires, être couronnés de quelque suc- cès, et l’idée de toutes les peines que je me suis données et de toutes les fatigues que j'ai dù supporter, disparaîtra devant la seule approbation de mes juges ! MAMAN AA AE AAA AAA AAA AR AN AMAR AAA MÉMOIRE SUR LA CONSTITUTION GÉOGNOSTIQUE DE LA PROVINCE DE BRABANT. PREMIÈRE PARTIE. —2R— SITUATION GÉOGRAPHIQUE DU BRABANT. — DÉMARCATIONS POLITIQUES. — ÉTENDUE. — CONFIGURATION DU SOL. — VALLÉES. — BASSINS. — NATURE DES EAUX.— TEMPÉRATURE. — OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES, VÉGÉTAUX. La province de Brabant (ancien département de la Dyle), de même que la plupart des divisions territoriales établies par les hommes, pré- sente des bornes tout-à-fait arbitraires ; ses limites politiques sont : au Nord la province d'Anvers, au Sud les provinces de Namur et de Hai- naut , à l'Ouest la Flandre orientale , à l'Est les provinces de Limbourg et de Liége. Relief du sol. 6 SUR LA CONSTITUTION GÉOGNOSTIQUE Sa figure est celle d’un rectangle, dont les quatre angles sont situés à Diest, Perwez, La Genette et Londerzeel. Les points extrêmes de la province sont situés vers le Nord par 51° 4 à 5! ! de latitude boréale, vers le Sud par 50° 32 à 34' de même latitude; la différence entre ces deux points est donc d'environ 0e 31’, indiquant une longueur d’à peu près 12 à 14 lieues. Les deux autres points extrêmes sont situés vers l'Est, par 2° 47! longitude orientale de Paris, et vers l'Ouest, par 1° 42’ méme longitude; la différence entre ces deux points étant de 1°5/, indique, sous notre latitude, une largeur de 17 à 18 lieues de France. Si tous les angles rentrans étaient remplis, le rectangle serait complet et la surface de la province présenterait une étendue d’en- viron 230 lieues carrées. : Cette surface offre un relief qui se distingue nettement de celui qui caractérise le sol à formations anciennes des provinces de Hainaut, de Liége et de Namur ; ce ne sont point ici des montagnes plus ou moins escarpées qui encaissent les rivières et qui dessinent d’agréa- bles vallons ou qui donnent naissance à des gorges profondes, mais ce sont des collines qui se lient les unes aux autres, par des vallées peu profondes, et qui finissent par se transformer en plaines assez vastes. Cette ondulation de terrain présente l’image parfaite d’une mer calme, qui élève et abaisse successivement ses flots arrondis. Il serait difficile de préciser la direction générale de ces collines, vu que les matières meubles et peu cohérentes qui les ont formées, ont été cause qu’elles se sont modifiées , arrondies, en partie détruites par divers agens, tels que les inondations produites par la crue des eaux.des ruisseaux, la décomposition, x situ, des roches, et par dessus tout, le dernier phénomène géologique, dont les effets destructeurs avaient beau jeu sur des dépôts aussi peu cohérens que ceux qui for- maient le sol de ces temps reculés; cependant la direction générale à leur attribuer, pourrait étre à la rigueur du SSO. au NNE,, direction qui caractérise le cours de la plupart des rivières. 1 L'observatoire de Bruxelles, qui sert de point de départ, est situé par 80° 51’ 10” de lati- tude boréale, et par 2 2’ de longitude orientale de Paris. DE LA PROVINCE DE BRABANT. 7 Les collines du centre de la province sont peu escarpées, se fondant insensiblement dans les vallées, et présentant tantôt des formes allon- gées, tantôt dessinant des massifs circulaires ; les collines de l'Est et du NE. sont plus escarpées, plus entassées ; mais en s’approchant de celles du centre, elles en adoptent la conformation et finissent par se perdre avec celles-ci dans les plaines d'Anvers, et de là, par des grada- tions insensibles, dans les eaux de l'Océan, pour aller reparaïître avec les mêmes caractères sur la côte opposée d'Angleterre. La hauteur de ces collines paraît varier depuis 400 jusqu’à 700 pieds au dessus du niveau de la mer ; les points les plus élevés ne sont point connus. Les environs de Laeken, de Louvain, de Saintes et de Ninove, jouissent probablement de cette prérogative, si l’on s’en rap- porte à des calculs approximatifs. Les cours d’eau qui sillonnent le Brabant, en tous sens, sont nom- breux , mais aucun d’eux ne peut aspirer à l'honneur d’être rangé dans la catégorie des rivières même de second ordre ; le plus considérable d’entre eux est la Dyle, qui prend naissance près de Jenappe; son cours, du N. au S., divise la province en deux parties inégales; vient ensuite la Senne, dont la direction parallèle à celle de la Dyle, divise aussi la portion la plus grande, située sur la rive gauche de la Dyle, en deux autres parties; enfin la Gette, tributaire du Demer (dont les eaux arrosent les communes septentrionales du Brabant), coule aussi parallèlement à la Dyle; cette petite rivière se partage en deux bran- ches à qui la différence de volume d’eau, a fait appliquer les noms de grande et de petite Gette; voilà donc trois rivières coulant paral- lèlement entre elles, représentant trois bassins hydrographiques de différens ordres. Le cours de ces rivières estlent ; leur vitesse dans les eaux moyennes est de 2 à 3 pieds par minute; dans les crues d’eaux cette vitesse s’aug- mentant.en raison directe de la masse d’eau, atteint celle de 20 à 30 pieds par minute; leur largeur varie entre 4 et 40 pieds, leur pro- fondeur entre 2 et 12 pieds; leur pente est très-faible; ainsi la Senne, depuis sa source jusqu’à sa jonction avec la Dyle, présente approxi- Cours d’eau Observations météoro- logiques. 8 SUR LA CONSTITUTION GÉOGNOSTIQUE mativement une pente d’eau de 18 à 20 pieds; la Dyle offre une pente un peu plus forte, qui peut varier de 20 à 30 pieds. La moindre hauteur des eaux est de 8 à 10 pouces, leur plus grande de 10 à 12 pouces au-dessus des vallées. La pureté des eaux dépend de la nature du sol où elles coulent; ainsi celles de la Senne, traversant une plaine où s’est amassée une couche épaisse de terre végétale, sont bourbeuses, épaisses, et im- propres à la boisson ; mais celles de la Dyle et de la Gette, traver- sant dans presque toute leur étendue des plaines sablonneuses, sont beaucoup plus pures, parce que les sables tendent à les purifier , et à les rendre, par conséquent, propres à la plupart des usages domes- tiques. Les observations météorologiques ont fourni au savant M. Quetelet, directeur de l’observatoire, des résultats très-intéressans, tels que ceux-ci : la température moyenne de l’année paraît étre de 10 à 11° (term. cent.); l'élévation moyenne du baromètre de 754 à 755 milli- mètres ; les 2 points extrêmes de température : de — 120 à — 18 pour les froids rigoureux, et de + 270 à + 300 pour les fortes chaleurs. Les vents dominans sont ceux du SO. qui règnent, année commune, 150 à 160 jours, tandis que ceux de l'Est au Sud ne soufllent que 20 à 25 jours (année commune). De ces observations il résulte que le climat est plus ou moins és mide, puisque les vents dominans SO. amènent avec eux les pluies; les vents Est et NE. sont secs en été, mais froids en hiver ; ceux du Sud sont humides et chauds , mais rigoureux en hiver. La quantité d’eau tombée en 150 jours (terme moyen des jours plu- vieux pendant une année) est d'environ 650 à 660 millimètres; cette quantité donne de 15 à 26 pouces d’eau évaporée pendant une année entière. Quand on sera parvenu à des résultats aussi intéressans pour la géognosie dans les divers pays du globe; et qu’on pourra comparer les observations recueillies dans les pays situés sous une zone tempérée avec celles faites dans les contrées brülantes de la zone torride, on par- DE LA PROVINCE DE BRABANT. 9 viendra probablement à expliquer, au moyen de comparaisons exactes, bien des phénomènes géologiques qui sont encore inexplicables quand on veut les envisager d’une manière rationnelle ! On peut dire que la température de la province est, en général, ciimat. douce en été; si elle s'élève quelquefois à un point extraordinaire, cet excès ne dure jamais long-temps ; en hiver, elle est froide et saine ; les mois de novembre, décembre et février sont cependant générale- ment pluvieux. Quant à la végétation, elle se ressent nécessairement des différentes végétation. natures du sol, qui, tantôt formé d’un sable quarzeux , meuble et presque pur, est alors stérile et se refuse à rendre le tribut dû aux travaux du cultivateur , et tantôt formé de ces mêmes sables mais aux- quels se sont mélées des matières de nature argileuse et calcaire, ou qui sont surmontés d’une couche assez épaisse de terre végétale, rend souvent avec usure et se fait remarquer par sa fertilité ; la grande vallée de la Senne, que les débordemens annuels de cette petite rivière viennent encore exhausser, se distingue surtout par la qualité des terres. Tox. XII. 2 10 SUR LA CONSTITUTION GÉOGNOSTIQUE ANANANANANANANANANANA ANA AAA AAA AAA AAA ANA ANANARARANANAANANANANAN ANA DEUXIÈME PARTIE. 0 CONSTITUTION GÉOGNOSTIQUE. Considérations générales. Les masses minérales qui composent le sol du Brabant appartiennent toutes, à l’exception d’une seule, au groupe fossilifère ou neptunien, et constituent six différentes formations qui se succèdent les unes aux autres dans l’ordre suivant : 1° formation récente; 2° formation al- luvienne ancienne ; 3° formation médio-marine ; 4° formation infra- marine ; 5° formation crétacée ; 6° formation schisteuse. Les formations récente et alluvienne ancienne sont partout plus ou moins développées, tantôt gisant au fond des vallées, tantôt couronnant le sommet des collines. La formation médio-marine ou bétasique” constitue la partie sep- tentrionale du Brabant; la nature des roches, l’absence des fossiles et la direction des collines , la séparent nettement de la formation infra-ma- rine : elle passe aux dépôts campinois. La formation infra-marine ou tritonienne constitue la plus grande étendue du sol; elle repose tantôt sur la formation schisteuse et tantôt sur des dépôts crétacés; un examen approfondi de la nature des roches, et une étude spéciale de la paléontologie de cette formation, nous ont 1 Elle constitue le sol du pays appelé het Haegeland par les Flamands et qui correspond à la Betasia des Latins. ‘ DE LA PROVINCE DE BRABANT. 11 fait voir que l’âge relatif que leur avait assigné M. D’Omalius-d’'Halloy ‘ était exact, et ne correspondait point à des formations plus nouvelles, comme l’ont cru quelques géologues. La formation crétacée supporte en partie, vers les régions orientales de la province, la formation infra-marine et repose sur la formation schisteuse ; on y reconnait trois étages, savoir : 1° le calcaire friable ou de Maestricht ; 2° la craie proprement dite ; 3° l'argile gault. Les premier et dernier étages sont peu développés; les fossiles sont peu abondans dans cette formation, la plupart d’entre eux ayant été dissous. La formation schisteuse (schiste ardoisier) se présente dans l'extré- mité méridionale de la province; vers ces points, elle supporte quelque temps la formation infra-marine, tandis que vers PEst elle supporte et cette formation et la formation crétacée; jusqu’à présent nous n’avons point trouvé de corps organisés fossiles” dans ces dépôts d’un antique Océan; tous ont été dissous. Une seule masse minérale de nature plutonique apparaît dans la pro- vince ; c’est la Diorite que l’on exploite à Quenast ; cette roche est inter- calée au milieu des schistes et fait partie de la même masse plutonique située à Lessines (Hainaut), à Pitet et Hozemont, dans la province de Liége* ; l’âge de déposition nous paraît difficile à assigner, puisque cette roche semble alterner avec les schistes par l'intermédiaire de certains schistes porphyroïdes. 1 Journaldes mines, t. XXIV, n° 140. 1808, page 149. 2 On vient de nous assurer que l'on avait trouvé un frilobite dans le schiste verdâtre de Rebecq. ! 3 Nous doutons fortement maintenant si la Diorite de Quenast fait partie de la Diorite lié- geoise ; ces dykes n’ont aucune liaison entre eux, quoiqu'ils aient apparu à la mème époque. 12 SUR LA CONSTITUTION GÉOGNOSTIQUE CHAPITRE PREMIER. TERRAINS RÉCENS OU MODERNES. Synoxvutes.— Terrains modernes, D’Omal. d’Halloy’. Période jovienne ou actuelle, A7. Brongniart?. Terrains d’alluvion et de transport, Aubuis- son des Voisins, Cuvier et Al. Brongniart et de beaucoup de géoloques. Attérissemens et alluvions, Alluvium, Bucklandet Sedqwick, Alluvial land. Groupe moderne, La Bècheÿ. Ordre supérieur, Conybeare et Philips. Aufgeswemte Gebirge, des géoloques allemands. Neueve alluvial Bildungen, Bou. 1° Formation alluvienne. Syxonvmies.— Terrains alluviens, D'Omal. d’'Halloy. Terrain alluvien H- moneux, /l. Brongniart. Alluvions, attérissemens , deltas , etc., de beau- coup de géoloques. Alluvium, Buck. et Sedgwick. La formation alluvienne est abondamment répandue sur toute la sur- face du sol du Brabant; son épaisseur est variable et dépend de sa na- ture : ainsi, dans la plaine où coule la Senne, elle est de plusieurs pieds, tandis que dans les vallées bordées de collinestrès-sablonneuses, ce dé- pôt est pour ainsi dire nul. Les alluvions récentes se trouvent le long de toutes nos rivières, dont elles tendent continuellement à exhausser le lit; elles s’accumulent en grande quantité, à cause du peu d’escarpement de leurs bords, et for- Élémens de Géologie. Paris, 1831, page 85. Tableau des terrains qui composent l'écorce du globe. Paris, 1829 , page 27. Traité de Géognosie. Paris, 1829, t.IT, p. 459. Recherches sur les ossemens fossiles. Paris, 1825, t. IL, 2° partie, p. 557. Manuel Géologique. Paris, 1833, page 46. Outlines of the Geology of Englandand Wales, London, 1822, part. 1, page 3. 1 2 3 4 5 6 DE LA PROVINCE DE BRABANT. 13 ment même des attérissemens limoneux plus ou moins étendus. (Senne, etc.) Si nous voulons examiner la nature de nos alluvions, nous trouverons que le fond ou lit des rivières est occupé le plus souvent par un limon vaseux toujours impur, renfermant des vestiges de l’industrie humaine, tels que des briques, des poteries , etc., et les débris des êtres organisés qui ont vécu dans leurs eaux; la Senne, dont le lit est le meilleur exem- ple de ces limons, donne lieu, à chaque débordement, à la déposition d’une petite couche limoneuse lorsque les eaux se retirent ; c’est par l'accumulation de ces couches limoneuses, que s’est formé ce dépôt si puissant de terre végétale qui caractérise la vallée de cette rivière. Les ruisseaux qui ont leur cours dans des vallées et plaines sablon- neuses, ont un lit de même nature, c’est-à-dire qu’il est presque en- tièrement composé de sables et n’est altéré que par quelques particules argileuses : on y trouve, de même que dans toutes les alluvions, des dé- bris de l’industrie humaine et d’êtres organisés; dans leurs crues, les eaux de ces ruisseaux minent les collines qui les bordent et y produisent de fréquens éboulemens. La vase ou limon des lacs etdes marais consiste en une terre végé- tale mélangée de débris de végétaux lacustres pourris, et recélant les restes des coquilles qui ont vécu dans leurs eaux. Nous ne nous étendrons pas plus long-temps sur la composition des dépôts d’une formation qui ne nous offre, dans le Brabant, que peu de variété ; nous ajouterons que l’on n’y trouve point de galets , de graviers et autres matériaux du même genre, qui caractérisent généralement le lit des ruisseaux de pays à formations plus anciennes. 2° Formation détritique. Synonvuies.— Terrain détritique, D’Omal. d’Hall. Détritus de beaucoup de géoloques. Terrain alluvien caillouteux, A7. Brong. Dégradation des continens, La Bèche. Éboulemens et désagrégation des roches de quelques géoloques. La majeure partie du sol étant composée de sables et de grès, il s’en Nature. Éboulemens. Désagrégation ên situ. 14 SUR LA CONSTITUTION GÉOGNOSTIQUE suit qu’il se forme facilement des éboulemens dans ces dépôts meubles ; les vents, les pluies, les orages, la gelée et le dégel sont les puissans agens de destruction qui nivellent les collines sableuses. C’est à des éboulemens semblables que nous devons rapporter ces espèces de nappes de cailloux roulés qui se trouvent dans quelques bas- fonds; les talus qui se forment au pied de quelques collines par des éboulemens successifs, sont encore remaniés par les eaux des ruis- seaux, qui vont étaler dans leurs vallées les matériaux qui composaient ces talus; au nombre de ces matériaux se trouvent les cailloux roulés qui surmontaient les sables avec lesquels ils se retrouvent alors pêle- mêle. La désagrégation des roches précède ou accompagne les éboulemens; les roches de grès à ciment calcaire, sont les plus exposées à une désa- grégation 2x situ; les roches calcaires résistent beaucoup mieux aux effets de ce phénomène. Le principal moteur de cette destruction est l’eau, soit à l’état liquide, soit à l’état solide; nous pouvons citer, comme un exemple de cette désagrégation, les roches de grès des environs d’Assche : ainsi on voit des amas de huit à dix pieds de puissance et de vingt à cinquante pieds de longueur, résultant de la décomposition 2n situ de cesroches. Les coquilles que ces grès contenaient sont dispersées cà et là, et n’ont point subi le sort de celles des environs de Forêts, où les élémens destructeurs qui ont désagrégé une grande partie des grés, ont aussi attaqué le test mince et fragile des fossiles qu’ils recélai ent dans leur sein; c’est grâce à la décomposition des grès d’Assche , que l’on trouve entiers et bien conservés de beaux peignes, des térébratules, des huiîtres, etc. Les roches calcaires se décomposent difficilement en un sable blan- châtre mêlé des grains de quarz, qui entraient dans la composition de ces roches. Quelques schistes se décomposent assez facilement en une terre peu argileuse, douce au toucher, faisant rarement pâte avec l’eau; cette terre se trouvant située au pied des plateaux schisteux, est en partie ba- layée par Les eaux qui vont la déposer plus loin, et former une terre vé- DE LA PROVINCE DE BRABANT. 15 gétale très-bonne par son mélange avec de la silice et du carbonate de chaux; la plus grande partie de ces vastes dépôts, qui signalent si avan- tageusement la vallée de la Senne, sont dus à la décomposition de ces roches schisteuses. D’après le mode de formation de ces dépôts, ils doivent se trouver dans toutes les positions possibles; ainsi, tantôt ils couronnent le som- _met des collines en s’y annonçant par une légère couche de terre vé- gétale, formée du détritus des roches et de celui du règne végétal et ‘animal; tantôt ils sont situés au pied des collines ou étalés au fond des vallées. 30 Formation lysienne ou chimique. Synonymes. — Terrains lysiens, A7. Brong. Terrain tuffacé, D’Omal, d'Halloy. Tufs de beaucoup de géoloques. Dépôts formés par les sources , La Bèche. Terrain de transport lysien, Davreux. Tuffo des Italiens. Tuffa des Anglais. Quelques eaux, en sortant du sein de la terre, contiennent divers sels qui en altèrent plus ou moins la pureté; un excès de saturation donne naissance à des dépôts qui prennent différens noms, selon leur nature. Ces dépôts sont rares dans notre province; ils consistent en dépôts calcaires nommés {fs et en dépôts ferrugineux. Les {ufs se trouvent dansles environs de,Laeken; les eaux du ruis- seau de Pippereype en déposentaussi sur les corps qu’elles rencontrent. Ils sont légers ; d’un jaune clair (quoique à Laeken les ruisseaux qui les forment contiennent beaucoup d’oxide de fer), stratifiés, et renfer- ment des feuilles de saule, d’orme et des diverses autres plantes qui vivent au bord de l’eau. Quelquefois l'acide carbonique ense dégageant au jour, abandonne l’oxide de fer (toujours plus ou moins siliceux ) avec lequel il était tenu en dissolution dans les eaux ; cet oxide forme, à la longue, un dépôt ferrugineux qui tapisse le lit du ruisseau; c’est une terre fine, jaune ou rougeâtre qui jouit, dans certaines circonstances, de la propriété de cimenter les divers objets qu’elle rencontre : ainsi, Origine. Fer limoneux. Nature des eaux, Caractères. 16 SUR LA CONSTITUTION GÉOGNOSTIQUE dans les environs d’Anderlecht, nous avons trouvé des cailloux, des morceaux de brique et de bois agglutinés ensemble par de l’oxide de fer. L’oxide de fer se dépose, aux environs d’Assche, dansde la vase qu’il zone de bandes brunes et rougeûtres ; à Dilbeek, il revêt d’une légère croûte rougeâtre les racines d’arbres et d’autres végétaux. L'eau de tous nos ruisseaux contient une certaine quantité d’acide carbonique, de chaux, d’alumine et d’oxide de fer, mais les proportions quantitatives sont difficiles à assigner, puisqu'elles varient selon les lo- calités; quelques eaux tiennent aussi en dissolution une petite partie de sulfate de chaux. 49 Formation tourbeuse. Syxonyutes. — Terrain tourbeux , D’Omal. d’Halloy. Terrains alluviens phytogènes, Al. Brong. Tourbe de la plupart des géoloques. Turf des Anglais. Cette formation est assez répandue dans notre province, c’est surtout dans le nord qu’on la trouve; la vallée du Demer en renferme de grandes masses; la Woluwe, suivant Burtin, est garnie de tourbes depuis Boïits- fort jusqu’à sa jonction avec la Senne; les environs de Tourneppe, de Lombeek-Sainte-Catherine, de Bincom, d’Hauwaert, de Diest, etc., nous offrirons de nouveaux exemples de sa présence. Dans ces diverses localités, elle se présente avec des caractères cons- tans; c’est-à-dire que sa partie supérieure est toujours fibreuse, tandis que sa partie inférieure est plus ou moins compacte, selon les degrés de décomposition qu’ont subis les végétaux qui lui ont donné naissance; sa couleur est le brun noirâtre; quelques parties moins bien décomposées sont ou d’un brun clair, ou d’un noir foncé; exposée au feu, elle exhale comme toutes les tourbes une odeur fétide. La formation tourbeuse repose tantôt sur des sables (Tourneppe, Hauwaert ?)et tantôt sur de l'argile (Woluwe, Assche); les couches sont plus ou moins épaisses et horizontales; on y rencontre des lits d'argile DE LA PROVINCE DE BRABANT. 17 impure à peu près analogue à celle qui se dépose au fond de nos marais et des lits de sable (Woluwe); ces faits indiqueraient des débordemens passagers dans les eaux où croissaient les végétaux générateurs de la tourbe. La partie inférieure des tourbières renferme de gros troncs d’arbres troncs d'avbres, devenus noirs comme le jais (environs d’Aerschot, Woluwe); mais leur présence n’est point due à la même cause que celle qui forme et forma les tourbes; en effet, l’une est due à des phénomènes d’un ordre tranquille, tandis que l’autre est le résultat d'actions perturbatrices ; aussi rangeons-nous ces arbres brisés dans la série des phénomènes alluviens anciens. La puissance de la formation tourbeuse nous est inconnue; dans quel- ques endroits elle parait varier de 8 à 10 pieds. Quelques tourbières recélent des débris végétaux reconnaissables : népris reutermés. telles sont les tourbes de la Woluwe, qui renferment des glands, des noisettes; d’autres contiennent les restes de certains animaux qui ont vécu dans les lacs dont elles occupent maintenant la place : ainsi, les environs d'Over-Yssche ont offert dans leurs tourbes des restes de carpe (Cyprinus carpio L.) ; les mêmes tourbières de Woluwe ont aussi pré- senté des ossemens de cerfs et des coquilles terrestres et lacustres; enfin M. Burtin, dans son Oryctographie de Bruxelles, cite dans cette même localité d'anciennes armes, des monnaies, de petites statues et d’autres anthropoïdes. Doit-on rapporter à cette formation tourbeuse un dépôt dont les ca- ractères minéralogiques se rapprochent de ceux assignés aux lignites, et qui contient beaucoup de fer phosphaté pulvérulent? Ce dépôt est situé dans la vallée de la Senne, mais comme nous n’avons pu en ob- server les circonstances de gisement, nous sommes encore dans le doute si ces lignites appartiennent à des dépôts récens, ou s’ils dépen- dent des sables tritoniens. Cependant leurs caractères minéralogiques et quelques circonstances particulières nous ont engagé à les placer, quoique avec défiance , dans le groupe tritonien. Puissance. Tow. XII. 3 Composition. Cailloux roules. 18 SUR LA CONSTITUTION GÉOGNOSTIQUE CHAPITRE IT. — TERRAINS ALLUVIENS ANCIENS. Synonvues.—Terrain diluvien, D'Omal. d’Halloy. Terrains clysmiens ou diluviens, Al. Brong. Terrains de transport, d’alluvion, d’attérissement, diluviens, de Bonnard. Terrains de transports anciens, Awb. des Voisins et d'autres gcoloques. Diluvium, Buckland et Sedgwick. Aluvions anciennes (aelterealluvial Bildungen), Bouc. Aufgeschwemmtes Gebirge, Keférstein. Groupe des blocs erratiques, La Bèche. Diluvio des géoloques italiens. Les alluvions anciennes se composent ici de couches de cailloux roulés , dont le volume varie depuis la grosseur du poing jusqu’à celle d’une noisette (un ciment ferrugineux réunit fort souvent ces cailloux entre eux); de couches de sables quarzeux plus ou moins colorés par l’oxide de fer, qui, assez souvent, les agglutine légèrement; de couches d’argile sablonneuse jaunâtre ou rougeûtre, et enfin de débris de végé- taux qui ont assez bien conservé leurs formes, quoiqu’ils soient deve- nus noirs comme le jais. Les cailloux roulés gisent tantôt dans du gros sable quarzeux, avec lequel ils sont cimentés par une légère couche d’oxide de fer (Dilbeek, Assche), tantôt dans des sables jaunâtres assez fins (Dieghem, Wemmel, Jette, etc.), tantôt enfin dansde l'argile sablonneuse plus ou moins souil- lée d’oxide de fer (Bincom, Melsbroeck, Loo); ils sont de même recou- verts par une de ces couches meubles; leur disposition horizontale est fort claire, quoiqu’une couche éprouve de fréquentes ondulations, des interruptions et des gonflemens; dans beaucoup d’endroits la couche suit les contours de la colline, fait qui démontre que le creusement d’une partie de nos vallées est antérieur à la déposition des alluvions anciennes. DE LA PROVINCE DE BRABANT. 19 Les eaux alluviennes anciennes, en coulant sur les Diorites de Que- nast, ont rempli de cailloux roulés, cimentés par de l'argile ferrugineuse, des espaces qui séparaient entre eux de gros blocs arrondis dioritiques ; ce remplissage est une preuve en faveur de l'opinion que M. D'Oma- lius d'Halloy avait émise, que la tendance de la Diorite à s’altérer se rattachait à un état de choses qui n’existe plus. Dans quelques localités (Uccle, etc.), la couche de cailloux roulés supporte une assise puissante d'argile jaunâtre, assez pure pour étre em- ployée à la confection de briques; plusieurs de nos collines présentent à leur sommet des dépôts semblables qui contribuent beaucoup à leur fertilité. Les sables sont bien peu différens de ceux de la formation infra-ma- rine ; ils sont, comme nous avons dit, tantôt à grains très-gros , tantôt à grains de quarz très-fins; du reste ils ne présentent rien de parti- culier. Les débris végétaux consistent en gros troncs d’arbres, les uns entiers, les autres plus ou moins brisés ; ils sont tous devenus noirs comme le jais : ils sont situés dans la partie inférieure de la tourbe, sur un limon argileux noirâtre (Woluwe, environs d’Aerschot). M. de Burtin, fils du savant auteur de l'Oryctographie de Bruxelles, a trouvé une vertèbre lombaire de 6 pouces de haut , qui paraît appar- tenir à un hippopotame ( Æ. minutus?); nous ne pensons pas avec M. Desnoyers ', que la présence de ces ossemens et les restes del’ lephas Primigenius, dont on a trouvé une dent à Melsbroeck (dans le dépôt argileux alluvien ancien) , puisse faire rapporter tout le sol des envi- virons de Bruxelles (même la formation infra-marine) à la formation su- pra-marine ou du crag, en les confondant avec les os trouvés dans le voisinage d'Anvers, que nous sommes pleinement d'accord avec lui de rapprocher de l’époque de déposition qu’il leur a assignée. La présence ! Observations sur un ensemble de dépôts marins plus récens que les terrains tertiaires du bassin de la Seine, et constituant une formation géologique distincte (consignées dans les 4n- nales des sciences naturelles , 1. XVI, 1829 , p- 171 et 402). Sables. Débris organiques. Étendue. Usages. 20 SUR LA CONSTITUTION GÉOGNOSTIQUE des ossemens d’hippopotame et d’éléphant est le résultat de phéno- mènes plus récens; ils gisent dans les dépôts lacustres dus aux alluvions anciennes ; dépôts par conséquent bien différens de celui d’origine éminemment marine qui constitue le sol inférieur. Des couches de cailloux roulés, près de St-Josse-ten-Noode, con- tiennent des fragmens roulés de coquilles; on y reconnait le Pecten plebeius, le Dentalium Deshayesianum Nob., des Nummulines , etc. Ces coquilles ont été arrachées du dépôt tritonien. Le terrain alluvien ancien occupe toute la surface de notre sol, mais il n’est point développé avec tous ses caractères dans toute cette étendue ; dans la plupart des vallées il n’existe plus, ou, si nous y trou- vons des lits de cailloux roulés, des éboulemens et des transports d’une date récente sont, comme nous l'avons déjà dit, les agens de cette déposition fictive. Vouloir énumérer toutes les localités où se trouvent déposées des nappes de cailloux roulés ou des couches de sables et d’argiles, nécessitérait une liste longue, fastidieuse et dénuée d’intérêt; nous citerons cependant les environs d’Assche, qui présentent un dé- pôt de cailloux roulés et de gros sables fort important , et d’une puis- sance de 9 à 10 pieds; les cailloux roulés et les sables sont agglutinés par de l’oxide de fer; nous citerons encore les environs de Chapelle- St-Laurent, où la couche de cailloux roulés renferme aussi des mor- ceaux arrondis de ces rognons de grès si abondans dans les sables tritoniens, et des morceaux de fer hydraté. C’est avec la terre argileuse déposée par les eaux alluviennes an- ciennes, que se fabriquent la plupart des briques dont sont bâties les maisons de Bruxelles et des environs. Les cailloux roulés, bien qu’abondans, ne sont point utilisés; leur emploi serait cependant bien peu dispendieux pour ferrer les routes communales, qui sont impraticables dans les saisons pluvieuses. Observations sur le terrain alluvien ancien. Quels sontles phénomènes qui ont concouru à former les dépôts al- DE LA PROVINCE DE BRABANT. 21 luviens anciens répandus à la surface de notre sol? Telle est la pre- mière question de l'observateur : nul doute que ce ne soient les eaux qui ont été chargées de ce rôle; mais ceci entraine naturellement et conduit de prime abord à une nouvelle question dont la solution se fonde sur des hypothèses, fragile édifice souvent renversé avec d'autant plus de facilité qu'il aura été construit avec des données trop générales, ou fondé sur des comparaisons trop peu suivies entre les phénomènes actuels et les faits observés sur les phénomènes an- ciens. Qu'on ne croie pas, par ce préambule, que nous ayons la pré- tention de trancher ce nœud gordien , nous ne voulons que présenter les fruits de nos observations. Les nappes argileuses, sableuses et caillouteuses sont le résultat de vastes inondations. Les eaux, en courant sur un sol aussi meuble que l’est celui de la formation tritonienne du Brabant, ont dù y exercer beaucoup de ravages ; aussi est-il fort probable qu’une partie de nos vallées ont été creusées par elles, tandis que d’autres n’ont été qu’ap- profondies. Les cailloux roulés ont été les premiers à se déposer, d’après les lois de la pesanteur; viennent après les sables et les argiles. Tous ces résultats sont fort naturels; mais d’où provient cette quantité d’eaux alluviennes? et quelles sont les causes de cette inondation ? Que l’on songe bien que le climat ante-alluvien ancien représentait le climat brûlant de l’Afrique d'aujourd'hui ou de l'Asie; la tempé- rature devait approcher de celle de 25 à 28° centig., nécessaire à la vie des éléphans et des hippopotames ; on sait aussi que les orages et les pluies font de fréquens et puissans ravages sous la zone torride : or, un changement dans cette température (changement survenu soit à la suite de la disparition des mers du sol d'Anvers et de Nordfolk, soit par quelque cause inconnue encore) donnant lieu à une plus grande transformation de vapeur en liquide, qui, retombant sur notre sol, fit déborder les rivières, peut avoir déterminé la retraite des grands animaux vers des régions plus propres à leurs habitudes. Du reste, la hauteur des eaux n’a pas dû étre aussi considérable qu'on pourrait le croire ; en effet, les vallées d’alors étaient moins nom- 22 SUR LA CONSTITUTION GÉOGNOSTIQUE breuses qu’elle ne le sont de nos jours; elles étaient moins profondes, et les rivières plus larges ; les eaux de pluie n’ont eu que peu à faire pour élever l’inondation au-dessus des collines ; ainsi la masse d’eau nécessaire à cette inondation n’est point impossible. D’après ce que nous venons de dire, il paraitrait que, lorsque la mer se fut retirée dans son bassin actuel , il survint. un changement de tem- pérature dans le climat ; hypothèse qui semble étre appuyée par la- néantissement de la race des grands animaux qui, alors, peuplaient les plaines et les marais de la Belgique, et qui ne se trouvent plus maintenant que dans les pays chauds. Le brisement des arbres, le creusement de quelques vallées, la mort de quelques grands animaux, seraient le résultat inévitable ou plutôt un corollaire qui découlerait de l’hypothèse ; effets peu compatibles, par leur minime importance, avec ceux que l’on a long-temps attribués exclusivement à un cata- clysme diluvien qui eût bouleversé le globe entier : aussi sommes-nous porté à croire que ce phénomène, regardé comme fortuit et accidentel, est un des moyens que la nature a mis en œuvre pour lier les terrains anciens aux dépôts qui se forment aujourd’hui sous nos yeux ? | DE LA PROVINCE DE BRABANT. 23 CHAPITRE IL. TERRAINS FLUVIO-MARINS SUPÉRIEURS. Synonymes. — Terrains tertiaires, A7. Brong. et Cuvier, Rozet, Des- noyers, Aubuissons des Voisins, etc. Terrains secondaires tertiaires, D'Omal. d'Halloy. Terrains yzémiens thalassiques ou de sédiment supérieur , A!. Brong. Terrain supra-crétacé, La Bèche. Tertiary rocks des géoloques an- glais. Superior order, Conybeare et Philipps. Tertiar Gebilde des géolo- ques allemands. Mergelkalk, De Hof. Périodes éocène, miocène et phiocène, Lyell1. Considérations préliminaires. La longue période qui s’écoula entre la grande déposition de la formation crétacée et les dernières inondations, que l’on décore du titre de cataclysme diluvien, a vu la mer baigner, pendant un long es- pace de temps, cette grande étendue de pays qui constitue maintenant les provinces de Brabant, d'Anvers, des deux Flandres, une partie de celles de Liége et de Hainaut, la Hollande, la Prusse, l'Angleterre, la France, etc., et s'étendre probablement jusque sur les côtes du Da- nemarck, de la Suède et de l'Islande. Cette vaste et antique mer a laissé de nombreux témoignages de sa présence dans ces divers pays. Les environs de Bruxelles, de Paris, de Londres, le Norfolkshire, la pro- vince d'Anvers, etc., en sont de frappans exemples ; mais l’abaissement suecessif, ou plutôt l'éloignement gradué de cette mer (éloignement produit par le rehaussement toujours croissant de ces continens, que l'Océan concourait à former, en les refoulant de plus en plus), a dû 1 Principles of Geology, 1830 à 1833. London , 3 vol. in-8°. 24 SUR LA CONSTITUTION GÉOGNOSTIQUE donner lieu à différens ordres de dépositions dans les sédimens et les débris organiques. De là, la différence que l’on remarque entre les êtres organisés qui peuplent les couches d’une époque plus rapprochée de la nôtre (c’est-à-dire des bassins actuels des mers), et les fossiles que l’on trouve enfouis dans les dépôts plus proches des rivages primitifs (c’est-à-dire les plus éloignés de nos mers). Le pays que nous allons considérer, et qui est connu de nos jours sous le nom de Brabant Méri- dional, se rapporte en grande partie à cette dernière époque. Une autre partie semble devoir occuper une place située entre cette époque et la première ou plus nouvelle tritonienne; or, d’après l'éloignement gradué des mers, il doit s’ensuivre le passage insensible d’un dépôt à l’autre, et c’est en effet ce qui a lieu, puisque la formation tritonienne la plus ancienne se fond dans la plus nouvelle, par une série de nuances im- perceptibles. Nous distinguerons donc dans nos terrains fluvio-marins supérieurs deux ordres de dépositions, savoir : 1° formation medio-marine ; 2 for- mation infra-marine ou plus ancienne ; la supra-marine ou plus nouvelle ne se trouve pas dans le Brabant ; la première est peu intéres- sante, vu l'absence totale de fossiles, tandis que la seconde présente un haut degré d'intérêt, tant par la variété de ses roches que par labon- dance des débris de corps organisés. PREMIER GROUPE. FORMATION MÉDIO-MARINE QU BÉTASIQUE. Syxonvaes. — Terrain ysémien thalassique protéique , A. Brong. Ter- rain marin supérieur, A. Brong. et Cuvier. Terrain tritonien , D’Omal. d’Hall. Sables et grès, Aub. des Voisins. Bagshot Sand. Conyb. and Phil. Période éocène, ZLyell. Zweite tertiare Sandstein und Kalk-formation , Boué. Molasse oder Postpaleotherium-mergel-formation, Keferstein. Calcaire moellon, Marcel de Serres. Nous rapportons à cette formation toutes ces collines parallèles entre DE LA PROVINCE DE BRABANT. 1 5 elles qui courent dans la direction de Est à l'Ouest, et qui constituent la partie septentrionale du Brabant, connue sous le nom flamand de het Haegeland (ancienne Bétasie des Latins). Cette fraction de la pro- vince se distingue nettement de la formation infra-marine, par la di- rection de ses collines ‘, par l’absence de fossiles et surtout par sa configuration géographique, qui nous indique clairement qu’elle est plus nouvelle que le sol des environs de Bruxelles; quiconque se rend à Diest ou à Aerschot (que l’on peut considérer comme les points les plus importans de cette région) est frappé de l’aspect tout particulier qu'offre cette formation : les vallées sont profondes, plus ou moins larges, les collines qui les bordent sont hautes, assez escarpées, et couronnées de sapins. C’est grace à cette végétation que l’on par- vient à fixer les limites de la région bétasique, limites assez difficiles à tracer, vu que les parties les plus rapprochées de la formation méridionale alternent avec elles, et que les sables qui composent respectivement ces deux formations diffèrent bien peu les uns des autres. Nous avons trouvé dans la théorie de l'éloignement graduel de l'Océan de notre continent , une preuve de l’âge de ces dépôts; nous en trouverons une autre dans l’opinion dont M. Kickx nous a fait part, d’après laquelle il y aurait une formation lacustre dans la Campine, qui s’appuierait par conséquent sur les collines bétasiques *. Les masses minérales qui composent la formation médio-marine de la région septentrionale du Brabant, sont bien peu variées; ce ne sont que des sables quarzo-ferrugineux de différentes couleurs, des grès ferrugineux et des couches de fer hydraté; ces masses minérales dif- fèrent par conséquent bien peu de celles de la formation infra-marine, quand on vient à examiner en détail chacune d'elles; mais prises dans leur ensemble, dans leur position relative, dans toutes leurs allures 1 Celles de la formation infra-marine sont généralement dirigées du NNE. au SSO. et beau- coup plus irrégulières dans leur cours. ? Nous espérons que ce savant fera bientôt paraître son travail, dont nous nous sommes ainsi permis de dérober une des conclusions les plus intéressantes. Tox. XII. _ Composilion Sables. 26 SUR LA CONSTITUTION GÉOGNOSTIQUE particulières, elles impriment au pays qu’elles constituent, un air tout- à-fait étranger au sol plus méridional. Les sables quarzo-ferrugineux sont l’assemblage d'une multitude de grains de quarz arénacé, constituant une variété de sables généralement à gros grains, et de grains de fer hydraté d’une pareille grosseur; les grains quarzeux sont toujours plus ou moins transparens, rarement opaques, anguleux ou arrondis; ils ont toujours une teinte jaune, qui passe quelquefois au vert-jaunâtre; cette transparence sépare assez bien ces sables de ceux du système plus ancien , où ils sont généralement opaques et plus fins ; les grains ferrugineux entrent pour moitié dans le plus grand nombre de cas, dans quelques autres ils dominent; ils sont arrondis ou plutôt aplatis, d’un brun-rougeûtre foncé ou d’un vert- noirâtre; ces deux différentes couleurs donnent lieu à des masses sablonneuses rougeâtres ou verdâtres, selon la couleur des grains fer- rugineux, qui se font remarquer en outre par un poli et un luisant tout particuliers. Lorsqu'ils sont de couleur brun-rougeàtre, leur dureté est aussi très-grande; cette quantité de fer hydraté arénacé que contient le système bétasique, est un phénomène pour ainsi dire parti- culier, quand on le compare avec le système infra-marin , où il est très- rare de rencontrer le fer hydraté sous cette forme. Les grains quarzeux et ferrugineux n’ont aucune liaison entre eux, tandis que dans les sables de la formation tritonienne, il y a presque tou- jours une poussière ferrugineuse ou calcaire, qui unit tant soit peu les grains entre eux (sa présence est décelée par les doigts qui en sont tachés). Les masses sablonneuses se présentent, comme nous avons dit, tantôt avec une teinte rougeûtre, tantôt avec une teinte verdàtre plus ou moins foncée; celles de la première catégorie dominent ; celles de la deuxième sont moins abondantes : elles sont généralement interca- lées dans les sables rougeâtres auxquels elles passent facilement par l'addition de grains bruns de fer hydraté; du reste il n’est souvent facile d'apprécier cette couleur que sur de grandes masses, car les grains quarzeux pris isolément sont presque incolores. Il est à remar- quer que souvent la couleur verte se compose au moyen de l’assemblage DE LA PROVINCE DE BRABANT. 27 et du mélange de grains quarzeux jaunes et de grains ferrugineux noirs. Quelquefois les sables contiennent des paillettes de mica blanc transparent. Les qrès ferrugineux ne sont autre chose que ces mêmes sables @rès frrugiaeux. fortement agglutinés ensemble et teints par de l’oxide de fer; leur inté- rieur passe même à du véritable minerai de fer (environs d’Aerschot, Hauvwaert, Bincom, Diest), qui indique par conséquent une action chimique qui a dissous le fer lors de son transport, et qui, par une saturation convenable , a agglutiné les sables et est parvenue à former ces grès si ferrugineux que nous trouvons intercalés dans les sables ‘. La couleur varie du jaune de rouille au brun-noirâtre ; la première est généralement la teinte de la surface extérieure de ces grès, tandis que leur intérieur est d’un brun-rougeâtre assez foncé ; leur dureté est variable et leur texture plus ou moins grenue. Ils ne constituent que rarement des couches continues; ils se pré- sentent le plus souvent sous forme de lits interrompus, ou sous celle de gros blocs allongés plus ou moins volumineux, et dont la surface est irrégulièrement mamelonnée; on y voit des nids remplis de sable verdätre ou rougcâtre. L’épaisseur des lits de grès ferrugineux varie de 0,5 à 1,00; entre deux lits on voit assez souvent du grès ferrugineux, soit en plaques, soit en rognons fistuleux , mais différens de ceux de la formation infra- marine , puisqu'ils sont composés presque uniquement de fer hydraté. Leur stratification généralement horizontale (nous avons vu des couches inclinées de 10 à 15°) indique celle des sables qui les ren- ferment. Le fer hydraté pur est assez rare; il constitue de petites couches rer nyarau. horizontales de peu de puissance ; il s’en trouve aussi dans l’intérieur des grès ferrugineux , où il passe à une véritable hématite (Aerschot, Hauwaert, etc.). Les limites de la formation médio-marine passent par les points étendue. ! Cette idée a été émise par M. D'Omalius d’Halloy pour la formation des grès ferrugineux de la Campine (Journal des Mines, t. XXIV, p. 148). Fossiles. Détails locaux. 28 SUR LA CONSTITUTION GÉOGNOSTIQUE suivans : Cortenaeken, Glabbeek, Bincom, au Nord de Louvain et de Campenhout, etc.; du reste la carte géologique que nous avons an- nexée à notre travail descriptif, indiquera beaucoup mieux l'étendue qu’occupe la région bétasique, qu’une longue suite de phrases ne pourrait le faire. Elle s'appuie vers ses limites méridionales sur la formation infra- marine, tandis que vers le Nord elle sert de soutien, ou plutôt de frontière aux sables campinois. Jusqu'à présent nous n’en avons point aperçu. On trouve dans les environs d’Aerschot une rangée de collines parallèles au cours du Demer ; une coupe verticale d’une de ces col- lines nous a donné les résultats suivans : IPNTENTE VÉDERIE NP NE eee De De TON LUS 2. Sables d’un vert foncé . . . . . . . 0, 50. 3. Banc de grès ferrugineux . 1, 00. 4. Autre banc . See ces Ne ee LU NEUS 5. Sables d’un vert noirâtre . . . . . . 9, 00. 6. Couche de fer hydraté. 0, 15. 7. Sables d’un vert rougeñtre 1, 00. 8. Banc ferrugineux 1, 00 et plus. 9. Sables rougeâtres Ce n’est, depuis le sommet de la montagne jusqu’à son pied, qu’une série alternative de bancs ferrugineux et de sables verts ou rougeâtres. On voit aux environs de St-Jooris-Winghe , une colline très-haute et donc les flancs présentent une inclinaison de 15 à 20°, tantôt vers lO. et tantôt vers l'Est, mais vers son centre les couches paraissent repren- dre leur position horizontale ; une coupe de cette montagne donnerait le même résultat que nous ont offert celles près d’Aerschot, résultat qui peut servir de type pour toute la formation bétasique ; seulement à St- Jooris-Winghe nous avons remarqué, sous une couche de fer hydraté siliceux assez inclinée, une espèce d’argile sablonneuse et ochreuse. Configuration et aspect Le relief du sol est, comme nous avons dit , assez différent de celui du sol. situé plus au Sud; les collines sont élevées, à pentes méme rapides, DE LA PROVINCE DE BRABANT. 29 leurs plateaux assez peu étendus et recouverts d’une bien légère couche d’humus, que les pluies entraînent dans les vallées qui offrent une végé- tation assez riche. Les vallées sont profondes , sillonnées par des cours d’eau qui y forment des mares, où croissent beaucoup de végétaux facilement dé- composables, et par conséquent propres à donner naissance à de la tourbe ; aussi cette partie de la province produit-elle abondamment ce combustible, qui y croit pour ainsi dire naturellement. La fertilité n’est pas un trait distinctif de la Bétasie; les sables fer- vision. rugineux sont peu propres à la culture : les sapins et quelques chênes semblent seuls se complaire dans ce terrain ingrat. Nous n’en s’avons rien : elle paraît peu considérable. Puissance. Quand on compare notre formation médio-marine avec d’autres déjà connues, on trouve qu’elle a plus d’un point de ressemblance avec les sables de Bagshot * situés dans la partie orientale de l'Angle- terre : en effet, ceux-ci sont composés de sables siliceux sans ciment, et de grès ; ce sont aussi les mêmes matériaux qui ont formé la Bétasie; la stérilité remarquable des dépôts de Bagshot est un motif de plus en faveur de ce rapprochement, que la rareté des fossiles rend plus vrai- semblable encore. DEUXIÈME GROUPE. FORMATION INFRA-MARINE OU TRITONIENNE. Syxoxymes.— Terrain yzémien thalassique tritonien, A7. Brong. Terrain tritonien , D'Omal. d’Hall. (Partie) calcaire grossier marin , A7. Brong. et Cuv. Formation du premier calcaire tertiaire, A. Boué. Calcaire à cérites, et bancs de cérites, De Gerville. Calcaire à miliolites, Desnoyers. Période éocène, Lyell. Argile de Londres (London clay), Conyb. et Philips. Grobkalk des Allemands. La formation infra-marine, ou tritonienne, se compose dans le Bra- composition générale. ? Outlines of the Geology of England et wales, by Conybeare and Phillips. Part, 1, p. 14. Divisions. 30 SUR LA CONSTITUTION GÉOGNOSTIQUE bant , de sables toujours plus ou moins altérés par des matières étran- gères. Ils renferment, comme roches subordonnées : du calcaire noduleux, des grès tantôt fistuleux, tantôt noduleux , ou enfin quel- quefois massifs, variant dans leur nature minéralogique comme dans leurs allures, et comme roches auxquelles ces sables font place : de la glauconie sableuse et grossière ; les seules substances minérales que l'on y rencontre sont : du fer hydraté qui est fort abondant, de la calcédoine, de la chaux carbonatée cristallisée, et du fer phosphaté dans les lignites. Toutes ces roches que nous venons de passer en revue semblent au premier coup d'œil être jetées cà et là péle-mêle, et présenter un véri- table chaos ; mais si on poursuit le cours de ces observations, on ne tarde pas à s’apercevoir qu’un certain ordre, qu’une harmonie dont on parvient facilement à saisir les fils, ont présidé à la formation de notre sol tritonien ; on verra que certains sables contiennent plus de calcaire noduleux (ou à l’état arénacé) que d’autres, qui eux-mêmes renferment des matières souvent étrangères aux sables à calcaire no- duleux , tandis qu’un autre district est caractérisé par la présence des glauconies. Ces trois différentes manières d’être conduisent naturelle- ment à la distinction de nos dépôts en trois systèmes, qui peuvent, selon la nature des matériaux qui ont servi à leur distinction, porter les noms suivans : 1° Système des sables à calcaire noduleux ow calca- réo-sableux ; 2° Système des sables à grès fistuleux ; 3° Système des glauconies. Si nous cherchons maintenant quelle est la place relative qu’occupe chacun de ces systèmes l’un à l'égard de l’autre, nous trouverons que le système calcaréo-sableux est le plus nouveau, et qu'il se lie au système glauconien au moyen du deuxième. La moindre ancienneté du premier est prouvée par son plus grand éloignement des anciens rivages, et en conséquence, par son plus grand rapprochement du bassin des mers actuelles ; par les débris d’êtres organisés qui y sont fort abondans, et dont quelques-uns, de leur nature, se rapprochent beaucoup plus de ceux d'aujourd'hui que ne le font, par exemple, les fossiles du der- DE LA PROVINCE DE BRABANT. 31 nier système ; quant à l’âge relatif du deuxième, il ne peut exister de doute à son égard, puisqu'il repose sur le système glauconien (Orp-le- grand , Folx-les-Caves). Ce dernier repose directement sur les terrains crétacés. Du reste, cette division en sytèmes est dans le seul but de faciliter l'étude d’une formation aussi étendue que l’est la formation tritonienne dans notre province, car il est hors de doute que la nature ne procède point brusquement dans ses changemens ou dans ses perfec- tionnemens ; c’est-à-dire que les deux termes extrêmes d’une même pro- gression géologique sont liés entre eux par une série de points qui les fondent insensiblement lun dans Pautre : ainsi la glauconie passe au calcaire et au sable, qui se transforment eux-mêmes en sables calca- riféres et en calcaire noduleux. | Les trois divisions que nous avons établies peuvent se résumer en : 1° Système supérieur ou calcaréo-sableux ; 2° Système moyen ou quarzo-sableux; 30 Système inférieur ou glauconien. I. SYSTÈME SUPÉRIEUR ou CALCARÉO-SABLEUX. Des sables généralement calcarifères, quelquefois ferrugineux ou un caractères généraux. peu argileux, renfermant des couches subordonnées de calcaire nodu- leux ou en blocs, de calcaire sablonneux et argileux, de calcaire coquil- lier; et des couches de grès fistuleux blancs, des grès noduleux, des grès lustrés et des grès ferrugineux ; enfin des amas de lignites, contenant du fer phosphaté que nous rapportons avec quelque doute à cette époque, caractérisent le système calcaréo-sableux. L'intérêt qu’il offre déjà par une certaine variété de roches est de beaucoup accru par l’abondance de fossiles qu’il renferme, lorsqu'on vient à comparer les trouvailles faites dans ce système avec celles faites dans les deux autres. Les fossiles sont assez bien conservés dans les sables calcariféres, Sables. 19 Sables calcarifères. 32 SUR LA CONSTITUTION GÉOGNOSTIQUE mais dans les grès on ne retrouve plus que leur moule etleur empreinte, assez souvent reconnaissables. Il est à remarquer que les gros nautiles, les emydes, les débris de scie et tous les gros fossiles, sont renfermés dans le calcaire noduleux , tandis que les fossiles d’une moindre taille gisent dans les sables. La nature de ces débris est tantôt calcaire et tantôt siliceuse, selon les roches ou masses minérales dans lesquelles ils se trouvent. Description des roches. Les sables peuvent constituer diverses variétés, selon qu’ils sont plus ou moins chargés de carbonate de chaux, de matières argileuses, ou ferrugineuses ; ilen est de purs, c’est-à-dire uniquement composés de grains de quarz. Les sables calcarifères contiennent du carbonate de chaux en pro- portions diverses : ces proportions varient entre 10 et 60 pour 100; dans ce dernier cas ce n’est plus pour ainsi dire qu’une poussière cal- caire, qui est blanchâtre ou légèrement jaunâtre, à grains très-fins, ta- chant les étoffes en s’y fixant, salissant fortement les doigts et faisant une vive effervescence dans les acides. Ce sont ces sables très-calcari- féres qui contiennent les nodules ou blocs de calcaire à Melsbroeck, Dieghem, Forêts, Loo, etc.; un de leurs caractères distinctifs est de contenir rarement des couches de fer hydraté. Les fossiles y sont assez bien conservés, mais peu abondans. Quand le carbonate de chaux di- minue et que la silice augmente, alors le sable résultant de ce mélange devient plus fossilifère, sa couleur se rembrunit, ses grains sont plus gros, l’eflervescence produite par les acides est vive mais instantanée; enfin ces sables passent à d’autres qui ne contiennent plus que peu de matières calcaires, mais où vient se présenter un peu d’hydrate de fer, qui est attesté par la couleur jaune-rougeûtre qui signale ces sables. Ils renferment en outre un peu de matières argileuses, et sont par consé- quent un mélange à peu près égal de carbonate de chaux, d’hydrate de fer et d’argile; ils font une effervescence légère dans les acides ; les DE LA PROVINCE DE BRABANT. 33 grains qui les composent sont plus ou moins gros. C’est principalement dans cette variété de sables que se trouvent renfermés un grand nombre de fossiles; les environs de Forêts, de S'-Gilles, d'Uccle, de Laeken, de Jette, etc., sont formés de ces sables, où le calcaire et l'hydrate de fer sont plus ou moins abondans. Les sables souillés de matières argileuses renferment en outre une ? Sbtes argileux. petite quantité d’oxide de fer, qui leur communique une teinte jaunâtre, etun peu de carbonate de chaux; ces sables font quelquefois une pâte courte avec l’eau, sont même susceptibles d’être un peu pétris, et re- tiennent mieux l’eau que les autres sables. En se chargeant de matières argileuses, ils finissent par se transformer en une argile brunâtre plus ou moins pure (environs de Laeken, Jette, Dilbeek). Les sables argi- leux sont toujours intercalés dans des sables soit calcaréo-ferriféres soit ferrifères. Les sables ferrifères ne contiennent point de carbonate de chaux ni 3° subies ferrifères. d'argile; ils sont l'assemblage d’une multitude de grains de quarz: ces grains sont arrondis ou anguleux, plus ou moins transparens (plus sou- vent opaques), assez gros, libres ou légèrement réunis entre eux par de loxide de fer; ils ne renferment point de fossiles, mais en revanche beaucoup d’hydrate de fer, soit en couches continues, soit en rognons (Groenendael, Auderghem, Wemmel, Woluwe); quelques localités, comme Capelle-S'-Ulric et Wemmel, offrent de ces sables qui, outre les grains de quarz, contiennent des grains arrondis et luisans de fer hydraté ; leur couleur est soit le rouge-brun foncé, soit un vert-noi- râtre. Les sables purs sont blancs ou d’un jaune-clair (Calevoet, Beer- sanxes pur: sel); ils contiennent très-souvent de petites paillettes de mica (St-Josse- ten-Noode, Schaerbeek) ; ils sont intercalés au milieu de sables calca- rifères (S'-Josse-ten-Noode) ou dans des sables ferrifères (Calevoet) ; ces sables sont quelquefois traversés par des sables colorés ou par de minces couches d’argile. Toutes ces variétés de sables alternent ensemble et passent de lune à l’autre avec la plus grande facilité ; rarement se présentent-ils libres Tou. XII. 6] Calcaire. 1° Calcaire noduleux compacte. 20 Calcaire noduleux grenu,. 34 SUR LA CONSTITUTION GÉOGNOSTIQUE sur une grande étendue; du reste ils sont assez bien caractérisés soit par l'absence de fossiles, soit par leur abondance, ou par la grande quantité de fer hydraté. Roches subordonnées aux sables. Le calcaire noduleux ou en blocs forme la partie la plus importante et la plus intéressante de ces roches, quand on le considère et sous un point de vue économique et sous un point de vue géologique ou zoolo- gique. Il se présente sous différens états, tantôt compacte et dur, tantôt plus grenu et moins dur, et enfin quelquefois presque friable (Steeno- kerzeel) ou sablonneux (Forêts); dans le premier état, il est générale- ment bleuâtre (Assche, près Melsbroeck, et Campenhout) , à grains tellement serrés qu’il passe à la variété compacte et ne ressemble pas mal à certains calcaires oolitiques; il est lourd, d’une grande ténacité, très-dur, à cassure conchoïdale et répandant, par le choc, une odeur fétide, qui rappelle celle de l’hydrogène sulfuré ; ilest peu silicifère; ce- pendant on peut distinguer au milieu de sa pâte des grains de quarz ; il fait, par conséquent, une effervescence prolongée et assez lente dans les acides; il raie légèrement le verre; ces caractères assez tranchés suffiront pour le séparer minéralogiquement des deux autres ; en outre il est peu fossilifére. Les carrières situées à une demi-lieue d’Assche en offrent de bien caractérisés; les environs de Melsbroeck en sont aussi pourvus. Ce calcaire passe insensiblement au calcaire du deuxième état, par un relâchement dans les molécules et par une texture plus grossière; ses caractères sont d’être moins dur que le calcaire ei-dessus; sa cou- leur est aussi différente; elle est jaunâtre; quelquefois l'intérieur, en devenant plus dur et plus compacte, est d’un gris-clair ; il est assez sou- vent mélé d’argile et de quelques grains de quarz; ilexhale aussi l’odeur que nous avons signalée dans le calcaire bleuätre; sa cassure est con- choïdale ou irrégulière selon sa compacité. Mais c’est par les fossiles qu’il renferme , qu'il est surtout intéressant : c’est au milieu de ces gros blocs que se trouvent d'énormes nautiles, des émydes, des crabes, des DE LA PROVINCE DE BRABANT. 35 noix de divers arbres, des scies, etc., qui rendent notre formation tri- nienne si curieuse. Le gisement de ces deux variétés de calcaire est à peu près le même; le premier consiste en couches interrompues donnant naissance à de gros blocs allongés gisant au milieu de sables calcarifères ; le deuxième consiste en blocs moins épais mais plus étendus; leur forme se rapproche de celle d’un parallélipipède allongé dont la surface est toujours sa- blonneuse; il parait qu'à mesure que l’on creuse plus profondément, ces blocs deviennent plus volumineux, plus allongés, et passent proba- blement à des couches continues. Le calcaire friable ou sablonneux est l’agglomération d’une multitude de grains de quarz hyalin liés entre eux par un ciment calcaire ; outre les grains quarzeux il s’y trouve une grande quantité de petites co- quilles microscopiques, dont une partie a probablement fourni le ci- ment; quelquefois les grains de quarz sont en partie remplacés par du calcaire. Cette roche est plus ou moins solide, tantôt elle est très-friable et n’est pour ainsi dire qu’un sable calcaire un peu agglutiné (Forêts), tantôt le degré de cohésion augmente, comme à Steenokerzeel près de Melsbroeck; la couleur de ce calcaire est jaunâtre ou grisâtre; il est ten- dre, à cassure terreuse, irrégulière à cause des fossiles qu’il contient; il fait une effervescence vive, mais peu durable, dans les acides, en laissant un résidu dont lanature est ou argileuse ou siliceuse. Le calcaire friable de Forêts contient une quantité notable de matières argileuses ; celui de Steenokerzeel contient plus de silice. Il ne se présente pas comme les deux autres, ilest en masses ou en couches continues, peu éten- dues, il est vrai, puisqu'elles passent à des assises sableuses ou aux bancs de calcaire noduleux. Des calcaires siliceux lient les calcaires que nous venons de passer en revue aux roches de grès; ils contiennent 8 à 10 pour 100 de car- bonate de chaux, le reste est de la silice; ces calcaires siliceux sont riches en fossiles, nous n’aurions besoin que de citer St-Josse-ten- Noode et Afighem pour appuyer cette assertion; le calcaire de ces localités abonde en moules eten empreintes plus ou moins reconnaissa- 30 Calcaire friable. 4° Calcaire siliceux, 50 Calcaire coquillier. Grès. 1° Grès fistuleux. 36 SUR LA CONSTITUTION GÉOGNOSTIQUE bles, parmi lesquels nous signalerons seulement le Cerithium gigan- theum qui se trouve à Afflighem, le Fusus No et la Cypræa inflata à St-Josse-ten-Noode. La couleur du calcaire siliceux est tantôt d’un blanc-grisätre, tan- tôtd’un brun clair-rougeâtre (Afflighem) ; dans ce dernier cas il contient quelques grains de quarz; il git au milieu des sables plus ou moins calcarifères et sous forme de blocs irréguliers plus ou moins volumineux. Nous distinguerons en dernier lieu un calcaire formé par l’accumu- lation de débris de coquilles diverses, dont le test a servi à cimenter entre elles toutes ces coquilles, de manière à former une roche assez poreuse, à cassure très-irrégulière, dont la couleur est un jaune-clair, la texture entravée par les coquilles disposées en tous sens, la solidité moyenne et le gisementen couches continues et horizontales ; ce cal- caire est bien caractérisé dans les environs de Watermael, où il git au milieu de sables plus ou moins calcaréo-ferrugineux. Parmi les roches siliceuses nous remarquerons : des grès fistuleux , des grès noduleux, des grès ferrifères friables, des grès ferrugineux en gros blocs, des grès quarzeux, des grès lustrés et des grès calcarifères. Les grès fistuleux sont remarquables par leurs formes irrégulières, cylindriques ou fusiformes ; mais ce qu’ils ont de plus extraordinaire, c’est de présenter dans leur centre un noyau cylindrique et mobile qui se retire facilement de cette espèce de fourreau. On serait tenté, comme le dit fort bien M. D'Omalius d'Halloy, d’attribuer l’origine de ces grès à rognons mobiles, à la présence d’un fragment de branche d’ar- bre autour de laquelle se serait agglutiné le sable. L'origine en partie végétale de ces grès fistuleux, est assez probable : des branches d’'ar- bres apportées du continent ont pu fort bien étre enveloppées par du sable; mais ne pourrions-nous pas aussi rechercher l’explication de ce phénomène dans la grande famille des Polypiers, dont quelques- uns nous offrent de ces formes allongées, bizarres et ramifiées, qui les font ressembler à des branches d’arbres? nous asseyons notre opinion sur ce que nous avons trouvé dans des grès quarzeux à Loo, des tiges d’alcyons qui ont les plus grands rapports avec celles figurées par DE LA PROVINCE DE BRABANT. 37 M. Webster * (et décrites sous le nom d’Alcyon tulipiforme par ce sa- vant), puisque nous avons trouvé la tête en forme de tulipe ( pl. HE, fig. 2) qui caractérise ceux de l'ile de Wight; or, la tige ressemble beau- coup aux noyaux mobiles des grès fistuleux, de sorte qu’il est assez probable qu’ils sont les restes de cette classe d'animaux. La ressem- blance qu'ils ont avec des tiges de bois a aussi été signalée par M. Webster, qui rapporte qu'on les confondait avec des débris du rè- gne végétal. Les grès ferrugineux, les calcaires noduleux de Melsbroeck, de Dieghem, de Forêts, d'Orp-le-Grand, etc., nous en offriront de fré- quens exemples. Ce sont surtout les grès fistuleux ferriféres qui ont de ces noyaux mobiles; ceux qui passent à un grès lustré en sont assez souvent dé- pourvus. Les caractères minéralogiques des grès fistuleux sont : de con- sister en un grès à grains plus ou moins cohérens, d’être beaucoup mois souvent ferrifères que dans les systèmes moyen et inférieur; ils sont généralement beaucoup plus durs, et présentent, sous une enve- loppe grossière et blanchätre, un intérieur qui passe à un silex blond translucide (St-Gilles, Schaerbeek, St-Josse-ten-Noode, etc.); leur cas- sure est conchoïdale dans ce dernier cas, grenue et irrégulière lorsqu'ils sont ferrifères (Uccle, Louvain, Boitsfort, etc.). Ces grès fistulenx ferri- fères diffèrent des grès fistuleux quarzeux: ils sont composés de la réu- nion de grains de quarz hyalin cimentés plus ou moins fortement par de l’hydrate de fer, qui leur communique une couleur brune et foncée. Cest ici le lieu de remarquer que là où l’oxide de fer a coloré les ro- ches, la cohésion diminue en raison directe de augmentation de cet agent, mais arrivée à un certain point, cette augmentation produit un résultat en sens inverse, et ne tend plus qu’à rendre les roches de plus en plus cohérentes; une action chimique puissante a présidé à la for- mation des autres grès fistuleux. Ils gisent selon leur nature minéralogique dans des sables calcari- fères (S'-Gilles, Loo), quarzeux (Uccle) et ferrifères (Uccle, Louvain, etc.) ! Transactions of the Geological society of London. T. Il, page 377 et suivantes. PI. 27 et 28. 2° Grès noduleux. 39 Grès quarzeux. 38 SUR LA CONSTITUTION GÉOGNOSTIQUE en stratification horizontale, sous forme de couches interrompues et mélangées de blocs de grès noduleux et de calcaire noduleux. Les grès noduleux présentent des formes très-bizarres et très-irrégu- lières, tantôt imitant des étoiles branchues , tantôt ressemblant à des os (la ressemblance est quelquefois si étonnante qu’il faut un examen minutieux pour trancher la question); il est de ces grès que l’on a com- paré à des têtes de cochon, à des lapins, enfin à des objets encore plus dissemblables. Ce ne sont pas ces seules formes irrégulières qu’adop- tentles grès noduleux; les appendices qui les décorent disparaissent et font place à de gros blocs cylindriques et à de petites masses parallé- pipédiques à surfaces mamelonnées et ondulées, qui ont fait dire avec beaucoup de justesse, à M. D’Omalius d’Halloy « que ces surfaces mamelonnées présentent le même aspect que celles qui se forment à la superficie d’une pâte molle sur laquelle on projette , d’une certaine élé- vation, d’autres parties de la même pâte »;il est fort possible qu'ils soient le résultat d’une action à peu près analogue. Leurs couleurs sont blanchâtres ou grisâtres; leur extérieur n’est, fort souvent, qu’un sable quarzeux grossièrement agglutiné, passant dans l’intérieur, à un grès à grains très-fins et luisans; la cassure est conchoïdale et la dureté très-grande. Ils passent par le mélange d’une petite quantité de carbonate de chaux à des grès calcarifères, et de là aux roches calcaires; ils gisent dans des sables un peu calcarifères (St-Gilles, Schaerbeek , Loo, etc.) en couches interrompues, à stratification horizontale, et situées sous les bancs calcaires (Loo, Dieghem, St-Gilles, Assche, Schaerbeek, etc.); ils ne récèlent point de débris de corps organisés, cependant, nous y avons remarqué des tiges d’alcyons. Quelques-uns de ces grès noduleux passent à des grès quarzeux (en- virons de Rouge-Cloitre, Loo, Dieghem) d’une dureté ramarquable, à cassure conchoïdale, à texture serrée, dense, rayant fortement le verre; ils contiennent , comme à Rouge-Cloître, des fossiles dont le test est converti en calcédoine bien caractérisée par sa translucidité ; sa cou- leur jaune-clair et sa surface mamelonnée. Ils gisent dans des sables un DE LA PROVINCE DE BRABANT. 39 peu calcarifères soit en gros blocs (Rouge-Cloïtre), soit en couches continues dont la surface est calcaire (Loo, près de Dieghem) et d’une épaisseur de 0,25: à 0,35c. Quelques grès quarzeux de Rouge-Cloitre et de Loo passent à de vé- s Grès tués ritables grès lustrés, assez semblables à ceux du bassin de Paris ; leur couleur est le gris-bleuâtre clair, leur dureté très-grande , leur luisant remarquable; ils se présentent sous forme de gros blocs (Rouge-Cloitre) et de couches continues stratifiées (Loo). Les grès ferrifères sont formés de sables qnarzeux plus ou moins AG 5° Grès ferrifères. glutinés par de l’hydrate de fer, constituant, d'après la cohésion des grains, des grès friables et des grès ferrifères durs ; les premiers se ré- duisent par le choc, en sables ; leur couleur est le brun-rougeûtre (S'-Gilles, etc.) ou le jaune-rougeâtre d’oxide de fer ; les seconds sont d’un jaune plus ou moins clair, selon la plus ou moins grande abon- dance de fer hydraté qui les fait passer souvent à un véritable minerai de fer, et même à de l’hématite bien caractérisée (Groenendael); quel- ques-uns de ces grès sont fort durs et présentent des petits points de quarz cristallisé, dus à une action chimique qui a dissous la silice d’a- bord à l’état de sable, pour la transformer après en silice cristallisée ; les coquilles nombreuses que contiennent ces grès ont perdu leur test, mais leurs moules et leurs empreintes ont si bien conservé leurs formes, qu'il est assez facile de reconnaître non-seulement le genre, mais même l’espèce auxquels appartiennent ces fossiles. Ces deux variétés de grès ferrifères gisent dans des sables quarzo- ferrifères, soit en masses (environs de Louvain, Groenendael), soit en couches énormes et interrompues (Groenendael), soit en présentant des blocs de plusieurs pieds cubes à surface mamelonnée, ou profondé- ment creusée par de larges gouttières ; ces blocs contiennent dans leur intérieur des espaces remplis d’un sable quarzeux très-pur et très- blanc ; ils se divisent quelquefois en grandes plaques que l’on peut détacher avec beaucoup de facilité, et qui ressemblent alors, comme l’a fort bien dit M. D'Omalius d'Halloy, « à de vieilles plaques de fonte rouillée »; leur surface irisée ne contribue pas peu à cette ressem- Fer bydraté. 40 SUR LA CONSTITUTION GÉOGNOSTIQUE blance. Les grès friables rougeûtres de St-Gilles sont en grandes masses gisant dans les sables calcaréo-siliceux de ce plateau; les fossiles qu’ils renferment sont fragiles. Cette substance minérale est abondamment répandue dans tous les dépôts de notre formation ; c’est à elle que l’on doit la diversité des teintes qui colorent nos roches. L’oxide de fer ne se borne pas au seul rôle de principe colorant, il constitue lui-même des masses ferrugineu- ses plus ou moins importantes ; rarement est-il pur, il est vrai, étant le plus souvent mélangé de silice ; cependant il passe comme nous avons dit à de l’hématite fibreuse, et à du fer hydraté mamelonné très-pur. Vu à la loupe, un échantillon de fer hydraté de Groenendael présente une multitude de grains de fer mélangés de quelques points brillans dus à du quarz arénacé; ses autres caractères minéralogiques sont de rayer plus ou moins le verre, d’avoir une texture serrée, dense, d’être tenace, assez lourd, d’avoir une cassure grenue, brillante ; la surface est souil- lée par une couche plus ou moins épaisse d’oxide à l’état pulvérulent et d’un jaune nommé jaune de rouille, tandis que l’intérieur est d’un rouge-brun. Les différentes formes sous lesquelles se présente le fer hydraté sont d'offrir tantôt des plaques de un à deux pouces d'épaisseur, tantôt des géodes plus ou moins volumineuses et de formes diverses , quelquefois ce sont des espèces de calottes, d’autres fois ce sont des boîtes renfer- mant de l’oxide pulvérulent, tantôt enfin d'énormes blocs allongés, rarement purs dans toute leur étendue. Quelques morceaux de fer hydraté présentent une surface ondulée ou de nombreux mamelons; d’autres sont revêtus d’une mince couverture d’hématite fibreuse ; on en voit ornés des brillantes couleurs de l’iris, cachant ainsi sous une splendide enveloppe un commencement de décomposition ; quelques- uns ont une surface unie , luisante et polie comme un miroir ; d’autres affectent des formes imitatives généralement fistuleuses, ceux-là sont hérissés de tubercules, tandis que d’autres se montrent avec des formes bacillaires. Le plateau de Groenendael est surtout riche en échantillons de fer hydraté qui se présentent sous différens aspects. DE LA PROVINCE DE BRABANT. 41 Le gisement du fer hydraté est en couches continues, assez irré- gulières, mais se ramenant à la position horizontale, d’une puissance variant depuis huit lignes jusqu’à sept ou huit pieds (Groenendael, Cale- voet), et situées dans des sables plus ou moins mélangés d’oxide de fer. Enfin les lignites que nous rapportons avec quelque doute à la for- mation infra-marine, consistent en masses ligneuses mélangées intime- ment d'argile brune et tenace ; les parties ligneuses sont aussi d’un brun foncé marron, se coupant et se râclant facilement; la râclure offre un luisant brillant, comme lorsque le bois a été verni ; leur texture a aussi cet aspect fibreux qui caractérise les arbres ; la cassure est très-irrégu- lière, donnant lieu à des morceaux peu volumineux ; la densité moyenne est plus grande que celle des tourbes compactes. Ces lignites pré- sentent des nids et de petites masses globuleuses de /er phosphaté ter- reux, d’un beau bleu de cobalt, et qui font un joli effet sur la masse rem- brunie des lignites. On voit par ces caractères que ces masses ligneuses tiennent beaucoup plus des lignites que des tourbes, dont elles sembleraient se rapprocher au premier abord. Les lignites sont probablement intercalés dans les sables ; nous di- sons probablement, car n’ayant été mis à découvert que lors du perce- ment du canal de Bruxelles à Charleroi, nous n’avons pu en étudier les circonstances de gisement ; mais ne seraient-ils pas venus dans la place où nous les trouvons de nos jours péle-méle avec les autres sédimens apportés par les rivières ? En effet, l'embouchure d’une de ces rivières était bien peu éloignée de cet endroit, puisque le continent schisteux qui servait de rivage à cette antique mer était seulement à 3 ou 4 lieues de l'endroit où se déposaient les lignites ; la présence des émydes, de bois percés de tarets qui se trouvent dans les collines bordant la vallée de la Senne, s’expliquerait très-naturellement par leur transport et leur déposition dans le lieu où ils gisent aujourd’hui, au moyen de courans sous-marins ou simplement par l’action prolongée des eaux fluviatiles, qui déposent méme de nos jours leurs sédimens à plusieurs lieues de leur embouchure. Tow. XII. 6 Lignites, 42 SUR LA CONSTITUTION GÉOGNOSTIQUE Ces faits contrediraient l’idée d’une formation lacustre, intercalée dans la formation tritonienne , qu'avait émise M. Morren ‘, opinion qu’il établissait uniquement sur la présence des émydes et de petites coquilles rapportées au genre Bulime (et que nous n’avons jamais été assez heureux de trouver dans la localité qu’il cite); mais si on fait attention à la petite quantité d’émydes, et qui de plus reposent pêle- mêle avec des nautiles, des crabes, des scies, des nummulines , des huîtres et d’autres débris d'êtres jadis habitans de l'Océan , on trouvera que ces raisons s’opposent suffisamment à admission d’un er d’eau douce. Détails locaux. Plateau de Melsbroeck. Ce plateau, par la nature des roches qui le compose et par la présence de certains fossiles qu’elles renferment, est l’un des points les plus intéressans de la province. IL comprend les carrières de Steenokerzeel, de Melsbroeck, de Die- ghem, de Loo, de Saventhem, de Woluwe-St-Étienne, de Campen- hout et de St-Josse-ten-Noode ; il s'étend d’un côté aux bords de la Senne et de l’autre à Nosseghem. Ce vaste plateau présente partout les mêmes roches; ce sont toujours des sables plus ou moins calcarifères, renfermant des blocs decalcaire noduleux et des grès noduleux ;on yren- contre des assises de sables très-blancs comme à S'-Josse-ten-Noode et à Campenhout. Nous signalerons aussi des bancs horizontaux de grès lustrés dans les environs de Loo ; des couches de fer hydraté qui sont rares dans ce plateau, et consistant en un minerai plus ou moins chargé de silice, d’une épaisseur de 2 à 3 pouces ; des argiles toujours im- pures qui se trouvent en lits assez minces et peu étendus au milieu des sables calcarifères de Schaerbeek et de St-Josse-ten-Noode. La coupe d’une carrière près de St-Josse-ten-Noode nous a offert : 1° Terre vépétale. . . . eme tte IMDIEQS 2° Argile brune avec cailloux té et morceaux de fer hydratéshnl) cucal fer der utiles ucct 1 Revue systématique des nouvelles découvertes d’ossemens fossiles. Gand, 1828, p. 29. DE LA PROVINCE DE BRABANT. 43 3° Sables jaunâtres avoisinant des sables très-blancs . . 2 à 3 pieds, 4° Couche de coquilles (Nuwmulina lœvigata, dents de re- MS) CR ee ee … OF HONUCES 5° Sables jaunâtres . . Je. e + + + 2à 5 pieds. 6° Grès coquilliers ! et grès nn RL sh Ge où 1. Assise de sables jaunâtres ... ... . .…. … * » Une carrière de Melsbroeck présente sous les couches n° 1 et 2 : 3° Sables calcarifères jaunâtres, . . . . . . . . 2à3 pieds. 4° Calcaire noduleux avec fossiles . . . . . . . . 0,9 pouces. buSabples calcaritieres. 5.1. he ne lee eee Men Re D Pied: 6° Calcaire (comme n° #4) . . . . . . . . . . 0,9à 10 pouces. Les ouvriers prétendent que le calcaire devient très-fossilifère et se trouve en couches continues dans les parties inférieures. Une carrière située à Loo présente une coupe très-intéressante : 1° Terre végétale et cailloux roulés - 2° Sables ferrugineux veinés de sables plus ARE . 2à 3 pieds. 3° Sables calcarifères blancs . . SU SN Ten Ps MO Ta 4 Première couche de calcaire en A SE - - lipiedi6ipouces, 5° Sables blancs calcarifères 5 6° Deuxième couche de calcaire noduleux EM Gt 7° Deuxième couche de sables calcarifères . . . + — » — 8° Calcaire noduleux siliceux STE — 6 — 9% Trosième couche de sables calcaréo-siliceux . . . _— » — 10° Grès blanchâtre en couches presque continues 11° Calcaire friable schistoïide . . . . . . . — ÿgu— 12° Calcaire siliceux passant au grès lustré (bien stratifié) . 13° Calcaire schistoïde en couches continues . 14 Calcaire friable schistoïde en couches continues. REMGRÉSINUSNEL VIE COMENT TPE SNPROPNEUES 5. © ni bi bd bi © jui @O et de Mi | Les autres carrières ne présentent rien de remarquable. Les fossiles sont changés soit en calcaire soit en matière siliceuse , rossies. selon la nature des roches dans lesquelles ils sont renfermés ; à St-Josse- ten-Noode, leur test est souvent chargé de petits cristaux de chaux ! Ce sont surtout des Fusus Noæ , des Lucina divaricata, des Mactra semi-sulcata et des Car- dium porulosum. Émydes. 44 SUR LA CONSTITUTION GÉOGNOSTIQUE carbonatée translucide dont la forme cristalline se rapporte à la variété métastatique. Parmi les nombreux débris d’êtres organisés qui peuplent ce plateau, et dont nous allons donner la liste, nous distinguerons quelques espèces qui méritent d’être décrites; en premier lieu viennent se ranger les émydes ou tortues d’eau douce, ensuite les crabes, les nautiles et les restes de scie. Les émydes, dont on n’a jusqu’à présent trouvé que 8 à 9 carapaces à Melsbroeck et à Steenokerzeel, appartiennent peut-être à diverses espèces ; mais peut-être aussi que les différences qu’on a remarquées proviennent uniquement de la différence dans les âges ou dans les sexes. L’illustre et immortel Cuvier a prouvé dans son grand ouvrage sur les ossemens fossiles que la carapace décrite et figurée par Burtin, pl. V, fig. À , sous le nom de fortue de mer, n’appartenait pas à la sec- tion des chélonées mais bien à celle des émydes ; nous extrayons en par- tie de l’ouvrage de M. Cuvier ', la description suivante de cette tortue : «L'’émyde de Bruxelles se rapproche de l'Emys centrata (espèce vivante) par son contour un peu rétréci en arrière, par la courbure de ses côtes qui est la même ; du reste les côtes au nombre de 8 s’unissent sans inter- ruption avec les pièces marginales comme dans toutes les émydes et les tortues de terre ; mais elle s’éloigne de lEmys centrata par ses plaques vertébrales qui sont singulièrement étroites ; la septième et la huitième côte s’unissent chacune à leur opposée entre la huitième et la neuvième plaque vertébrale ; cette particularité se retrouve dans l’émyde de Scheppey (espèce fossile), mais seulement dans la septième paire; une circonstance analogue a lieu par rapport à la huitième paire et à la face interne seulement, dans l'Emys centrata. L’Emys expansa, autre espèce vivante, se rapproche beaucoup de notre émyde , puisqu’elle présente la même particularité qui signale celle-ci. (IL est un caractère spécifique qui éloigne les émydes des chélonées ou tortues de mer, dont la carapace offre la méme longueur : l'émyde l Recherches sur les ossemens fossiles , troisième édition. Paris 1825, t. V, deuxième partie, pages 236, 237. DE LA PROVINCE DE BRABANT. 45 de Melsbroeck a les intervalles des côtes complétement ossifiés ; il ne reste aucun vide entre eux et les pièces du bord, lesquelles pièces sont aussi beaucoup plus larges à proportion que celles des chélonées. Une tortue franche dont la carapace a 13 à 14 pouces de longueur (qui est celle de notre émyde) renferme entre ses côtes un espace non ossifié qui égale presque la moitié de la longueur de la côte. » On peut ajouter à ces caractères donnés par Cuvier : que la cara- pace est plus large vers la partie antérieure, dont l'extrémité est rétré- cie, moins cependant, comme Cuvier la observé, que la postérieure ; que sur la ligne médiane et au milieu de la première pièce vertébrale, on trouve un enfoncement triangulaire ; que le nombre de pièces ou plaques longitudinales est de dix, tandis qu’il est de quatorze dans les émydes vivantes, mais dans lesquelles ‘on doit observer que la onzième et la douzième sont petites. D’après toutes les différences ostéologiques qui signalent l’émyde de Melsbroeck , bien que quelques-uns de ses caractères tendraient à la rapprocher des Emys centrata, expansa et de l’'émyde fossile de l'éle Sheppey , nous proposons de donner à cette espèce évidemment particulière le nom d’Emys Cuvieri, en l'honneur de l’illustre savant qui sut assigner à cette intéressante tortue la place qu'elle doit oc- cuper. Une carapace trouvée par M. De Burtin fils, dans les carrières de Steenockerzeel et décrite par M. Morren ', ne paraît pas devoir être séparée spécifiquement de celle de Melsbroeck; les différences obser- vées pourraient dépendre de l’âge ou de toute autre circonstance , ainsi que le dit M. Morren lui-même. Les débris de scies sont rares dans nos dépôts ; on trouve bien quel- sci. quefois les pointes osseuses qui s’implantent dans le long museau déprimé de ces animaux, et qui les rendent si terribles dans l'attaque et dans la défense, mais la pièce que nous allons décrire est unique. Ce fut au mois de juillet 1834 que nous trouvämes, M. Nyst et moi, au | Ouvrage cité, page 30, 81 , etc. 46 SUR LA CONSTITUTION GÉOGNOSTIQUE milieu d’un bloc de calcaire provenant de la carrière de Melsbroeck, une portion très-bien conservée de ce long museau déprimé dont nous venons de parler ; à côté de ce bloc gisaient, dans le sable calcarifère, deux pointes osseuses provenant sans doute de ce museau, puisque l’une d'elles correspond parfaitement à l’une des cavités imprimées dans le calcaire, cavités qui indiquent la place ou l’alvéole dans laquelle s’im- plantaient ces pointes. La longueur du fragment est de 14pouces. La profondeur des alvéoles est de 9 lignes, leur largeur de 7 à 8; la distance d’une alvéole à l’autre est de 2 pouces vers l'extrémité la plus large et de 1 pouce et demi à l’autre bout ; 2 alvéoles opposées sont séparées l’une de l’autre par une distance variant entre 2 pouces et demi et 1 pouce 6 lignes, selon les extrémités; la longueur des épines osseuses est de 2 pouces 5 lignes ; elles dépassaient d'environ 1 pouce 4 lignes les alvéoles (voir la pl. IT). Une surface composée de petits cylindres durs, bruns et fibreux de 1 ligne de hauteur, indiquant l'emplacement de cette espèce de cuir qui recouvre le bec ou museau déprimé des scies, est restée intacte et très-reconnaissable sur plusieurs points. En comparant ce débris avec le museau déprimé de la scie com- mune (Pristis anliquorum , Larman), il nous a semblé que le frag- ment devait appartenir à une espèce distincte, mais voisine de la scie commune (autant qu’il était possible d’en juger d’après une pièce ainsi tronquée et mutilée); en effet, on remarque dans l'espèce vivante 18 à 24 grosses dents ou épines qui sont moins triangulaires, moins larges et moins longues que celles de la scie fossile ; dans celle-ci, le côté de l’épine qui offre une gouttière (pl. IL, fig. 2) est droit, tandis qu'il est toujours plus ou moins irrégulier dans la scie commune; les épines de celles-ci sont beaucoup plus cylindriques et irrégulières dans leur direction ; de plus les deux côtés venant à se réunir à l’extrémité de l’épine, forment une pointe plus ou moins aiguë, au lieu que dans l'espèce fossilé l'extrémité est arrondie mais tranchante ; on peut com- parer fort bien les épines osseuses fossiles à une lame de couteau, DE LA PROVINCE DE BRABANT. 47 tandis que les autres ressembleraient plutôt à de gros clous. Les alvéoles présentent aussi quelques différences ; elles sont plus larges dans l’espèce fossile, la distance qui les sépare entre elles est beau- coup plus considérable que dans la scie commune, de telle manière qu’elles sont (portions égales) dans le rapport de 6 : 10, c’est-à-dire que 6 alvéoles occupent la même étendue que 10 de Pespèce vivante. Faut-il déduire de ces différences importantes que c’est la même P q espèce que la scie commune, mais parvenue à des dimensions gigan- tesques ? ou, plus raisonnablement, que c’est une espèce distincte non encore connue et particulière à nos dépôts ? Nous nous prononçons pour cette dernière opinion, et nous proposons de décorer cette nouvelle et unique scie fossile du nom de Pristis Lathami, en l'honneur du savant James Latham qui démembra ce genre de la grande famille des Squales de Linné. Quelques dents en pavés plats que l’on trouve à Melsbroeck, ap- partiennent peut-être à cette espèce : le rapprochement n’est pas im- probable, puisque la mâchoire de ces poissons est armée de dents en forme de pavés aplatis. Plusieurs espèces de crustacés ont laissé leurs dépouilles dans les assises calcaréo-sableuses du plateau de Melsbroeck, mais la seule qui soit bien caractérisée appartient au genre crabe, et ne se rapporte à aucune espèce vivante ni à aucune des espèces fossiles décrites et figurées par M. Desmaret ‘; le crabe de Melsbroeck est donc une espèce particulière à notre formation infra-marine, et que nous dédions au savant auteur de l'Oryctographie de Bruxelles *, M. de Burtin , qui l'a figuré dans son ouvrage sous la lettre S de la deuxième planche, et que nous donnons planche IT, fig. 3. La forme de la carapace est celle des crabes en général; elle est peu bombée en dessus, légèrement dentelée sur ses bords antérieurs, qui décrivent un arc de cercle; la région stomacale est bien marquée, la région génitale se prolonge en pointe sur le milieu de la précédente ; ! Histoire Naturelle des Crustacés fossiles. Paris, 1822. ? Oryctographie de Bruxelles. Bruxelles, 1784. Crabes. Nautiles. 48 SUR LA CONSTITUTION GÉOGNOSTIQUE les régions branchiales sont bien développées, éloignées l’une de l’au- tre par un espace assez large occupé par la région génitale ; la région cordiale est aussi très-large, enfin la région hépatique postérieure se confond avec celle-ci; les bords latéraux postérieurs sont peu rap- prochés. Ce crabe se distingue du Cancer macrochelus (Desmaret, pl. VIE, fig: 1, 2) par sa carapace moins bombée, par sa moindre taille et par ses bords postérieurs moins rapprochés; ses régions sont aussi plus prononcées; le doigt mobile ou pouce des pinces est lisse, dépourvu de dentelures du côté interne; il est plus long que dans le Cancer macro- chelus * dont le Cancer Burtini se rapproche un peu; il se distingue aussi du Cancer quadrilobatus * (Desmaret, pl. VILLE, fig. 1, 2), par l'absence de ces quatre pointes ou saillies qui caractérisent le bord inter-orbitaire de celui-ci, et par sa carapace moins bombée. D’après les différences que nous trouvons entre notre crabe et les deux espèces fossiles dont il se rapprochait le plus, il est évident que c’est une espèce nouvelle, dont on peut établir la caractéristique de la manière suivante : Cancer Burn. Crabe de Burtin. /Vob. Carapace peu bombée, bords latéraux-antérieurs sinueux; régions stomacale, bran- chiales, hépathique et génitale bien marquées, pinces lisses, grosses, sans tubercules. — Longueur 0®,0552% ; largeur 0,070", Parmi les coquilles fossiles que l’on trouve enfouies dans les roches du plateau de Melsbroeck, se font remarquer quelques espèces dont nous n’avons point trouvé d’analogues ni à l’état fossile, ni à l’état vivant; parmi ces espèces on distingue particulièrement un céphalo- pode d’une grandeur peu commune; c’est un nautile qui se trouve fréquemment renfermé dans les blocs de calcaire noduleux des environs de Dieghem, de Loo, de Saventhem, de Melsbroeck , etc. 1 Espèce fossile des Indes. ? Espèce fossile de Dax. DE LA PROVINCE DE BRABANT. 49 Cette espèce se distingue de ses congénères par sa grande taille et par la disposition de ses cloisons sinueuses : elles sont nombreuses et percées d’un ombilic assez étroit et rond ; la spécification de ce nautile est difficile, tant par sa mauvaise conservation que par l’analogie plus ou moins frappante qui existe entre cette espèce et d’autres fort voi- sines; en attendant que de nouvelles observations viennent éclaircir ce fait, nous proposons de dédier cette espèce à M. De Burtin, qui l’a représentée dans son Oryctographie à la planche XIV. Parmi le grand nombre d’huitres que l’on trouve dans ce plateau, nous ne signalerons qu’une seule espèce fossile nouvelle, dont les ca- ractères spécifiques sont tranchés et faciles à saisir. Cette huître affecte une forme triangulaire particulière , de telle manière qu’elle est tout-à-fait sur le côté; le dessin que nous en don- nons (pl. IT, fig. 4) fera mieux entrevoir les caractères de cette huïître qu’une longue description ne saurait le faire; nous pouvons ajouter que sa surface externe est sillonnée de trois à quatre côtes assez élevées. La forme triangulaire qui caractérise cette nouvelle espèce d’huitre, lui a mérité le nom de {riangulaire que nous lui imposons , en la spé- cifiant ainsi : OsrREA TRIANGULARIS. Huïître triangulaire ( pl. III , fig. #). Testa trianqulari , tribus vel quatuor costis ornata. Une fort belle espèce de cabochon que l’on trouve dans les sables calcarifères d’une carrière située à + de lieue à l'Est de Dieghem, se distingue de tous les cabochons connus par des caractères particuliers, nous le spécifierons ainsi : Pizcoprsis vartBiis. Cabochon variable (pl. III, fig. 8, @ , b, c). Testa irregulari, variabili , flezuosa, basi sinuosa variabilique. Cette espèce est très-reconnaissable par la variété de ses formes; Tow. XII. 7 Huîtres. Cabochons. Serpules. 50 SUR LA CONSTITUTION GÉOGNOSTIQUE tantôt le test est abaissé, tantôt droit, élevé et cylindrique, quelquefois situé sur le côté, enfin d’autres fois il est tout en arrière; sa spire par- tage ces variations, ainsi elle est droite, élancée au sommet, ou sur- baissée et placée sur un côté : la base est flexueuse , sinueuse , ondulée et obtuse; le test est quelquefois sillonné de stries longitudinales irrégulières, rarement visibles , vu qu’elles se confondent avec les lames qui composent la coquille et qui en font une pièce assez épaisse et solide. Sa taille varie de 5 ou 6 lignes à un pouce de longueur, et de 4 ou 5 lignes à 9 ou 10 de hauteur. On trouve à la surface des blocs calcaires de Melsbroeck et dans les huiïtres, une espèce nouvelle du genre Serpule. La forme carrée de son test nous a suggéré le nom de quadranqulaire que nous lui imposons avec les caractères suivans : SERPULA QUADRANGULARIS. Serpule quadrangulaire (pl. IT, fig. 5). Testa rugosa, quadranqulari, apertura quadrilatera, duobus crassis circulis apice circumdato. Tuyau de 2 à 3 pouces de longueur et d’environ 1 ligne de diamètre, présentant différentes circonvolutions dans sa direction; le dos est large , parallèle à la base, légèrement ondulé; une petite carène court le long de chacun des bords latéraux du dos; les côtés ont une sur- face assez inégale, sillonnée de petits bourrelets transversaux ; la tête ou sommet du tube est formée par un gros bourrelet presque circulaire; un autre bourrelet aussi gros est placé à 1 ligne en arrière du premier. Ces deux bourrelets et la forme quadrilatérale du tuyau suffisent pour distinguer de prime-abord cette serpule de toutes les autres. Nous donnons ci-après la liste des fossiles que renferme le plateau de Melsbroeck , en les rapportant aux roches qui les contiennent gé- néralement. Nummulina lavigata _ globularia, — lenticula . Biloculina ringens . , Quinqueloculina saxorum Pileopsis variabilis. . . Terebratula trilobata , Anonua 0 Re Ostrea cariosa . — flabellula. — plicatella. . — triangulairis. Spondylus rarispina Pecten plebeius. — infumatus . — solea: . , Pectunculos granulatoides Nucula margaritacea . . Lucina divaricata . , — hiatelloides. Eryoinnêge 242 - Corbula pisum . . Serpula triangularis Turbinolia sulcata , — crispa . Lunulites radiata . Kétépores, . . . Cestracion Phillippii . Notidianus griseus ? Carcharias verus Lamna cornubica . Squalus auriculatus Scyllum , , . Aetobatus , LA PROVINCE DE BRABANT. 51 CALCAIRE. Emys Cuvieri. , Pristis Lathami , Cancer Burtini . . Nautilus Burtini. Nummulina lævigata . . . Quinqueloculina saxorum Melania marginata . . Turritella imbricataria Cerithium umbilicatum Cassidaria carinata . Pileopsis variabilis . Ostrea cariosa . , — flabellula — plicatella Lima obliqua. . Modiola . . . Pinna margaritacea Cardium porulosum Mactra sehi-sulcata Cytheræa . Solen vagina, . . Pholaaz f:12. 2: Teredo navalis . . Serpula quadrangularis — triangularis, Spirorbis elegans . Bois fossiles. Nuix fossiles. . . KIUATES EE D 0 le Orbitolites complanata Rétépores . Alcyonium tulipa , GRÈS CALCARIFÈRES. Nummulina lævigata. Quinqueloculina saxorum. Bulla cylindrica, — elliptica. Melania marginata. Turritella imbricataria. Natica lineolata, — canaliculata, Ampullaria. Trochus agglutinans. Solarium marginatum. — trochiforme. — Nysti. Cassidaria carinata. Murex. Pyrula. Fusus Noæ, 2 autres fuseaux. Pleurotoma. Rostellaria fissurella Conus deperditus. Ancillaria. Cypræa inflata. Volvaria bulloides. Voluta spinosa. — harpula. Sigaretus canaliculatus. — lævigatus. Dentalium Deshayesianum. — entalis. Terebratula trilobata ? Anomia striata. Ostrea plicatella, — flabellula. Pecten solea, Avicula phalænacea. Pectunculus granulatoides. Mytilus rimosus. Pinna margaritacea. Cardium porulosum. Lucina divaricata. RS SO CS SU CSS CS Usages. 52 SUR LA CONSTITUTION GÉOGNOSTIQUE SABLES. CALCAIRE. GRÈS CALCARIFÈRES. Lncina saxorum. — concentrica. Mactra semi-sulcata. — depressa? Crassatella ? Corbula rugosa, Alcyonium. Cestracion Phillippii. Les principaux endroits où se trouvent les fossiles sont : St-Josse- ten-Noode , Loo, Dieghem, Campenhout, Saventhem, Melsbroeck, pour les gites sableux ; Melsbroeck , Dieghem et Loo, pour les gîtes calcaires (en comprenant la carrière de Steenockerzeel dans ces gites); St-Josse-ten-Noode pour les gites de grès calcarifères. Les grès lustrés et les calcaires siliceux de Loo renferment des tiges d’alcyons. C’est dans ce plateau que se trouve le plus grand nombre de carrières ouvertes dans la province; on exploite le calcaire soit pour en faire de la chaux, soit pour payer les routes ou pour construire les maisons; les grès noduleux servent à orner les portes des jardins , à faire des grottes et à jeter les fondemens des maisons; les sables sont employés à sabler les maisons et à faire du mortier. Plateau de Laeken. Ce plateau est situé en face de celui de Melsbroeck , dont il est sé- paré par la vallée de la Senne; il comprend des couches coquillières au milieu d’assises sableuses, des grès ferrugineux, du fer hydraté et du calcaire noduleux ; il s’étend de Wemmel à Molenbeek-St-Jean; sa direction est du NE au SO; il ne constitue pas une surface continue, mais divers petits plateaux qui, se rattachant tous ensemble, forment le plateau de Laeken ; c’est près de Jette que se trouve l’un des points les plus élevés des environs de Bruxelles. Les matériaux qui composent ce plateau sont surtout des matières DE LA PROVINCE DE BRABANT. 53 meubles , consistant en sables peu calcarifères et jaunâtres , qui ren- ferment les belles coquilles de Jette, et en sables quarzeux plus ou moins ferrugineux, où sont intercalées des couches interrompues de fer hydraté toujours plus ou moins siliceux (Wemmel); quelques sables contiennent un peu d'argile et des rognons de grès fistuleux (Molen- beek-St-Jean); outre les sables, on rencontre des couches d'argile qui en sont plus ou moins chargées (Jette) et des roches cohérentes in- tercalées dans les matières précédentes; ces roches sont : du calcaire noduleux analogue à celui de Melsbroeck , et les rognons de fer hydraté et de grès fistuleux dont nous venons de parler. Des quinquéloculines, des débris de dentales, des nummulines et d’autres petites coquilles forment quelquefois de petites couches con- nues au milieu des sables; ces débris sont liés ensemble par un ciment calcaire; c’est près de Laeken que l’on rencontre cette roche acci- dentelle. I n’y a point de carrières établies dans ce plateau : aussi est-il moins connu que ceux où l’on a cette ressource ; c’est le hasard qui a voulu que l’on creusàt un puits pour la recherche de moellons, et qui a mis ainsi à découvert une couche assez riche en coquilles d'espèces variées. Cette couche paraît étre épaisse de 2 à 3 pouces: elle se retrouve dans divers vallons et toujours à la même hauteur. La coupe de ce puits nous a offert : 1° Couche deterreyégétale. M". à … . :.….... L. picdet ;pouce. 2° Argile brunâtre très-tenace, . . . . . . . . . 9 _— nn — S°2Couche de’cailloux roulés "1. 11, /0UN EN; — 8 — 4, Argile comme, ci-dessus... 4. . .n.ul.on ss +12a4— » — 5° Sables jaunâtres . . . é ss + 2àB— . » — 6° Couche de coquilles (Nénmulns ans et etc. » — 3 — 7° Sables jaunâtres . . . 2 — n — 8 Argile sablonneuse d’un bre id avec cd Les de sable ns que sératistes els shÉau ts CL .18à 25 — 1 % Sables peu Aatres. ST bio OT NA — "9 — À Laeken, la couche de coquilles est dans des sables argileux qui avoisinent des sables plus ferrugineux et à grès fistuleux. Fossiles. Operculines, Cadran. 54 SUR LA CONSTITUTION GÉOGNOSTIQUE Nous n’avons point trouvé jusqu'à présent des restes provenant d'animaux d’une grande taille, tels que de nautiles, de crabes, de tor- tues, etc., tout y est délicat et mignon ; une seule dent de Zamna cor- nubica s’est présentée parmi un grand nombre de coquilles. Quelques espèces dont nous n’avons point trouvé d’analogues vivans ou fossiles signalent ce plateau; elles se retrouvent dans d’autres pla- teaux , mais beaucoup moins bien conservées : aussi celles de Jette et de Laeken nous serviront-elles à les spécifier. Il est une espèce de la famille des Céphalopodes que l’on trouve fré- quemment dans les sables de Jette, de Laeken et dans ceux du plateau de Forêts, et que nous rapprochons du genre Operculine de d'Orbigny ou Zenticulite de Lamarck; cette coquille est très-aplatie, mince, à cloisons nombreuses, contiguës, peu saillantes, mais bien visibles à l'extérieur ; ces cloisons déterminent deux tours de spire signalés par un petit bourrelet un peu irrégulier dans son cours; les cloisons sont en outre demi-circulaires; la grandeur de la coquille est variable tantôt de 2 lignes, tantôt de 4 à 5 ; le test est brillant et lisse. Nous dédions cette nouvelle espèce d’operculine à M. d’Orbigny, avec la caractéristique suivante : Orencuzina OnBienn. Operculine de d'Orbigny (pl. IT, fig. 13). Testa complanata, Papyracea, carinata, septis maxime contiquis, semilunaribus. Le cadran que nous allons décrire est fort commun dans nos dépôts; il se retrouve aussi dans les sables de Gand ; il caractérise fort bien nos assises tritoniennes par son abondance et la variété d’endroits où on le trouve. Ce cadran, que nous nous faisons un honneur de dédier au savant et modeste M. H. Nyst’ (dont les talens m’ont été d’une grande assistance dans la détermination de nos fossiles), se distingue par la caractéris- ! Ce jeune savant possède une des plus belles collections conchyliologiques de la Belgique. DE LA PROVINCE DE BRABANT. 59 tique suivante : Sozarium Nysrn. Cadran de Nyst (pl. IV, fig. 1). Testa crassa, solida, orbiculataque , convexo-depressa ; anfractibus lævigatis, inteqgris; margine carinato; basi ampla; umbilico lœvigato; apertura rotunda , sinistra. Le cadran de Nyst a un test épais, lisse ou rarement un peu cha- griné, déprimé et orbiculaire ; on y distingue cinq tours de spire dont la suture est plus ou moins bien marquée ; le centre de ces tours de spire est un peu renflé ; quelquefois de légers sillons transversaux viennent rider leur surface généralement lisse ; le dernier tour forme une base plane et donnant naissance à une ouverture ronde et petite, qui pré- sente la particularité remarquable d’être tournée à gauche au lieu de l'être à droite; l’ombilic est grand, lisse ou un peu ridé. Cette même couche nous a offert de fort jolies scalaires qui se rap- prochent baucoup de la Scalaria tenui-lamella de Deshayes *, mais que l’on ne peut s'empêcher de regarder comme une variété assez tran- chée ; aussi les considérons-nous comme la variété À du type qui se trouve à Grignon et à Mouchy; sa caractéristique sera : Variété À de la ScazariA TENuI-LAMELLA de Desh. (pl. IV, fig. 3). Testa compressa inflataque. Son test est beaucoup plus comprimé que dans l’espèce type; le der- nier tour de spire devient beaucoup plus renflé à cause de cette com- pression. Un pétoncle que nous considérons comme caractérisant fort bien tous nos dépôts tritoniens, se trouve en assez grande abondance et surtout très-bien conservé dans les sables de Jette et de Laeken ; cette espèce, que nous regardons comme particulière et non décrite se rapproche beaucoup , au premier abord, du Pétoncle granulé* de Lamark, mais 1 Coquilles fossiles des environs de Paris, t. I , pl. 22 , fig. 11 , 12, 13, 14. ? Annales du Musée, 1. IX. pl. 18, fig. 6, ab. Scalaires. Pétoncles. 56 SUR LA CONSTITUTION GÉOGNOSTIQUE un examen attentif fait bientôt reconnaître une différence importante ; cette différence consiste en l’absence de la fosse triangulaire qui distin- gue si bien le pétoncle granulé qui est beaucoup plus rare ici, bien qu'il se trouve avec celui que nous décrivons ; la ressemblance qui existe entre ces deux espèces pour la granulation du test et la grandeur de la coquille, nous ont engagé à le nommer péfoncle faux-granulé, avec la caractéristique suivante : Pecruncuzus GRANULATOIDES. — Pétoncle faux-granulé (pl. IV, fg. 17). Testa solida, crassa, granulata , obliqua ; cardine anqusto, non interrupto fovea trianqulari ligamento. Le test est plus oblique que dans le Pétoncle granulé, toujours dé- jeté sur un côté; le bord, crénelé comme dans l’autre, s’évase, s’aplatit et donne à la coquille la forme d’une petite spatule, tandis que le gra- nulé est régulier et orbiculaire; enfin, l'absence de la fossette trian- gulaire remplacée par de petites dents qui se disposent comme dans la plupart des pétoncles , sont autant d’excellens caractères négatifs. LISTE DES FOSSILES TROUVÉS DANS LE PLATEAU DE LAEKEN 1, Lamna cornubica. Turritella granulosa (abondante ). Sepia Cuvieri. Solarium trochiforme (rare). Nautile ? (des fragmens). — Nystii (abondant). Operculina Orbignii (abondante). Bifrontia marginala (rare). Nummulina lævigata. Scalaria tenui-lamella. Var.A. (rare). — yariolaria. Cerithium (rare). — elegans. Calyptræa trochiformis (rare). — planulata ? Dentalium abbreviatum (rare). Triloculina trigonula. = brevifissum. (rare). Quinqueloculina saxorum. — fissura. (rare). Alveolina Boscii. Anomia à: Fabularia discolithes. Ostrea cymbula (bivalve). Bulla constricta. — flabellula. ! Ils proviennent tous des sables de Jette et de Laeken. DE LA PROVINCE DE BRABANT. 57 Pecten plebeius. — infumatus. — solea. (rare entier). — reconditus (rare). Avicula frapilis. (rare). — trigonata. (fragmens). — phalænacea (fragmens). Pectunculus nanus (rare). — granulatus. — granulatoides. Nucula margaritacea. — Mucronala. — striata. — fragilis (rare), Pinna margaritacea (rare). Venericardia planicosta? — elegans. — imbricata. Cardium porulosum. Donax? Tellina. Lucina divaricata,. Lucina hiatelloides. Erycina . : Crassatella trigonata (abondunt). — compressa. Astarte Henkeliusiana (rare). Venus? pectinifera. Cytheræa nitidula (rare). — pusilla (rare). Corbula striata. — rugosa. — pisum (abondant). Fistulana? personata. Vermilia ? Scutella. Cidarites. Flusires. Turbinolia suleata. — elliptica. — crispa. Lunulites radiata. Orbitolites complanata. Ovulites margaritula. Alcyons ? Nous devons signaler parmi le grand nombre de Jolies espèces qui se trouvent dans ce plateau la Venus pectinifera de Sowerby ‘, qui se rencontre assez fréquemment dans les sables de Jette. Cette espèce in- téressante n'avait encore été trouvée qu’une seule fois à Barton (Argile de Londres), et encore n’était-ce qu’une valve; la Turritella granulosa de Deshayes, qui est fort abondante, l’Avicula phalænacea, qui ne se retrouve qu’à Bordeaux, ainsi que la Zucina hiatelloides de Basterot ? qui est rare à Léognan, tandis qu’elle est assez commune ici ; nous l'avons représentée à la pl. IV, fig. 11. Plateau d Assche. , Ce plateau est le plus occidental de notre province ; ses limites sont : ! Mineral Conchology. P1. 422, fig. 4. * Mémoires de la société d'histoire naturelle de Paris, page 87, pl. V, fig. 13 du tome Il, 1" partie, Ton. XII. 8 58 SUR LA CONSTITUTION GÉOGNOSTIQUE au Sud les plaines de la Belle-Beek ; à l'Ouest la Dendre; à l'Est, les deux ruisseaux près de Meysse lui servent de frontières du côté du pla- teau de Laeken. C’est entre Esschene et la petite ville d’Assche que se trouve établie une carrière très-intéressante par ses roches et par ses fossiles; à un quart de lieue d’Assche existe l’abbaye d’Affighem , dont les carrières bouchées depuis long-temps ont fourni un calcaire pétri de coquilles. Les matériaux qui ont formé ce plateau sont : des sables tantôt blan- châtres et un peu calcarifères (près d’Assche), tantôt jaunâtres et mêlés d’un peu d’'hydrate de fer (Esschene, Beckerseel, Capelle-S'-Ulric) ; quelques sables sont composés de gros grains de quarz hyalin jaunâtre et transparent et de grains de fer hydroxidé; ils forment des nids et des veines au milieu des autres sables (près de Grand-Bigard); d’autres sables contiennent une petite quantité d'argile (Capelle -St- Ulric, Berchem-St-Agathe); ils sont fossilifères près d’Assche; les coquil- les et les oursins qu’ils renferment , sont disposés par couches; mais ces débris sont malheureusement si friables, qu’on ne peut les tou- cher. Les sables contiennent : des grès fistuleux tantôt ferrugineux et un peu friables (près d’Assche), tantôt purs et durs comme à Capelle-S'-Ul- ric; des grès coquilliers qui forment des masses assez importantes d’une couleur jaunâtre; ils passent au calcaire siliceux (Afflighem , Assche) : ces grès coquilliers renferment un grand nombre d'empreintes de di- verses coquilles; des couches interrompues de calcaire tantôt pur, bleuâtre et compacte (près d’Assche), et renfermant peu de fossiles ; tantôt siliceux , rougeâtre (Affighem) ou blanchâtre (Capelle-St-Ulric) et très-fossilifère (Assche , Affighem, etc.). Le calcaire siliceux rougeà- tre contient beaucoup de grains de quarz; le blanchätre, surtout celui d’'Assche, en contient moins; ce dernier se désagrége facilement à l'air et abandonne ainsi des coquilles bien conservées. Les dimensions des roches calcaires sont généralement plus grandioses que dans les autres plateaux. Une carritre près d’Assche nous a donné la coupe suivante sous deux DE LA PROVINCE DE BRABANT. 59 à trois pieds de terre végétale et de cailloux roulés : ’ 1° Sables argileux jaunâtres. 2° Couche de coquilles très-friables. 3° Sables calcarifères d’un blanc-grisätre. 4° Couche non continue de calcaire , tantôt blanchâtre , tantôt bleuâtre et compacte. 5° Sables calcarifères blanchâtres mélangés de sables jaunâtres. 6° Grès calcarifères coquilliers. 7° Sables, etc. Près de Capelle-St-Ulric , la couche de terre végétale, de cailloux roulés et d'argile, recouvre des assises de sables jaunätres, dont les parties supérieures contiennent des lits de grès fistuleux, et dont les parties inférieures renferment d'énormes blocs de calcaire siliceux, dont la surface est pétrie de millions de Vummulines lentillon et parsemée de fragmens de Dentales. LISTE DES FOSSILES TROUVÉS DANS LE PLATEAU D'ASSCIIE 2. EN ANR Sepia Cuvieri. As. UL. A. . . Nautilus Burtini. As. Ul, . . Nummulina lœævigata. ASUS Ne — variolaria. AU ao _— lenticula. As. UI. . . . . Biloculina ringens. AG, LE ES fe Triloculina trigonula. AS ARE be — communis. As. AfF. UI.. . Quinqueloculina saxorum. AS APE = de — striatula. AS ADAM AE _— lœvigata. As Ul -tes Alveolina Boscii L'ÉSRRMER LS Fabularia discolithes. As. Aff. . . . Melania Marginata. As. Aff. . . . Turritella imbricataria. JTE RARE Ampullaria. As. AfF. . . . Solarium Nystii. ATERDRLE, SE. Cerithium gigantheum. Aff. ..... Cerithium? ASTRA PeUE. Cerithium. As. Aff. . . . Cassidaria carinata. ARC TEE Rostellaria fissurella. AMAR — columbaria. LV TR EME à à Conus deperditus? AFS LE Terebellum convolutum. AFF Te ARR Voluta spinosa. AfF. As. . . . — harpula. AE Eee Calyptræa trochiformis. As. UI. . . . . Dentalium Deshayesianum. As. Af. . . . Teredo navalis. AS. «+ + . Anatifa. AS ue Serpula. ASSURE Vermilia. ASE. Spirorbis. ASE Le Scutella. As. ,.... Cidarites. ! Afin de faciliter les explorations, nous indiquerons par lesabréviations suivantes les localités principales du plateau : 4s., Assche; 4f., Afllighem; Ul., Capelle-St.-Ulric. Téréhratules. 60 SUR LA CONSTITUTION GÉOGNOSTIQUE ASP MT LS {sterias. As. Aff. . . . Pinna margaritacea. AB re Végétaux fossiles. AT sn Venericardia planicosta. ASUS 27e Terebratula trilobata. A. As. . . . Cardium porulosum. ASS Me IS Pete — Kickrii. Af. As. . . . Lucina divaricata. As. TARN Anomia striata. A. As. . . . — . mutabilis. AS Re Anomia . « . ASE EE à — hiatelloides. AS LS RER Ostrea cariosa. AS ee 2 Corbis lamellosa. ASE Rte — inflata? As. AfF. . . . Mactra semi-sulcata. ASE. — cymbula. AE nn ASE Cytheræa tellinaria ? LS ON — plicatella. NE RRe — lœvigata? ASE ET: +. à — flabellula. ASTM TE le late Corbula pisum. Am rs tete — deltoidea. ASE MOTOR Flustres (plusieurs espèces ? ) Asrhr@1tinr..# EE. L'aCE Asus atece Idmonea triquetra. INSÉRER 20 Spondylus radula. ASE Se pie Turbinolia sulcata. ASTUR Sem Pecten plebeius. ASE a ee te — crispa. As. Aff.7?... — infumatus. As. . .... Lunulites radiata. As. Ul. ...,. !: — solea. CPE PE — urceolata. ASSURER MT ere re Mile ASS Ode rer Dire Orbitolites complanata. ASE AET à Pectunculus granulatoides. AS MMCRENIONS Dactylopora cylindracea. AS NME. Nucula margaritacea. ÉNMASR sand Rétépores. M. Brongniart cite comme provenant d'Affighem des Delphinula, l'Ampullaria patula, un Cerithium différent de celui que nous avons vu, le Pecten orbicularis et infumatus que nous avons trouvé, les Cardium obliquum? et porulosum, et les Cytherœa lœævigata? telli- naria? et nitidula (nous avons trouvé les deux premières). M. De Burtin a trouvé l'empreinte d’un poisson dans les carrières d’Affighem , il l’a figurée pl. VI. Parmi les fossiles que nous venons de signaler, il en est trois que nous n'avons trouvés dans aucun ouvrage , ce sont : 1° Une térébratule (figurée dans De Burtin, pl. VITE, fig. L, P) que M. Nyst a surnommée trilobée, à cause de sa forme particulière ; il la caractérise ainsi : TeneBrATULA TRizoBATA. Térébratule trilobée (pl. IV, fig. 6). Testa lœvigata, crassa et trilobata. En effet, cette coquille est parfaitement lisse, ce qui la distingue net- ! Description du Bassin de Paris, article de quelques terrains analogues au calcaire grossier. Pages 431, 452. DE LA PROVINCE DE BRABANT. 61 tement de la Terebratula vespertilio de Brocchi ! (Anomia vesperti- lio de cet auteur) avec laquelle elle à quelque ressemblance , mais la térébratule italienne est sillonnée de côtes ; lanôtre a un test épais, dur, transparent , de couleur de corne; le crochet de la grande valve est percé d’un trou rond; l'appareil apophysaire de la petite valve est fourchu, lisse, très-gros , assez long et très-solide; la division trilo- baire de la térébratule ne se laisse pas apercevoir à la surface extérieure de la coquille, mais elle est déterminée dans l’intérieur par deux sillons assez profonds, donnant naissance à trois lobes dont le moyen dépasse de beaucoup les deux autres; nous ne savons pas si le bord des lobes était lisse ou dentelé, il est probable qu'il était lisse. La forme des lobes est assez irrégulière, tantôt arrondie, tantôt plus ou moins pointue. Cette coquille étant assez commune dans les dépôts meubles de Ja formation tritonienne, et se trouvant dans plusieurs localités, peut ca- ractériser fort bien ces dépôts. 2° Une autre térébratule que nous avons dédiée à M. Kickx, comme un hommage d'estime pour ses talens; nous la figurons à la planche IV, fig. 15 et 15 a ; sa caractéristique est : TeresraruzA Kicxxu. Térébratule de Kickx. Testa nitida, inflata, oblonga , sulcis tenuibus reqularibus concentricisque or- nata; marginibus reqularibus , fragilibus , æqualibus ; foramine apicis tenuissimo. Cette coquille a un test mince, fragile, translucide, de couleur cor- née et brillante ; il est renflé et oblong, sillonné de stries fines, serrées, élégantes et concentriques, plus visibles vers les crochets; la petite valve est toujours mieux sillonnée que la grande; les stries dans celle-ci sont surtout très-apparentes au crochet; le crochet est petit, son sommet est perforé d’un petit trou rond ; les bords sont minces, tran- chans, égaux et très-fragiles ; les lames apophysaires sont minces, plates, spathulées, quelquefois bilobées ou triangulaires : ces lames sont placées verticalement sur la coquille et légèrement inclinées l’une vers ! Conchiologia subapennina. Milano , 1814, tom. II, pages 470 et 666. PI. XVI, fig. 11. Dentales. 62 SUR LA CONSTITUTION GÉOGNOSTIQUE l’autre ; en se prolongeant elles se réunissent sur la charnière, en don- nant naissance à un assez gros osselet bilobé que surmonte un petit ap- pendice trilobé, ayant la forme d’un ». Nous n’avons encore trouvé cette jolie espèce que dans les sables d’Assche, où elle n’est pas rare. 3° Un dentale très-abondant dans quelques localités, surtout dans les assises sableuses de Forêts, de St-Gilles, d’Assche, etc., caractéri- sant fort bien notre formation infra-marine, etc., que nous dédions à M. Deshayes, l’illustre auteur de la Monographie des Dentales, comme un juste hommage dù à des talens aussi distingués. Ce dentale peut se spécifier de la manière suivante : Denrauum Desnayesianum. Dentale de Deshayes (pl. IV, fig. 7). Testa tereti, subarcuata , lævigata, non striata, apertura paucim inflata. Cette espèce appartient à la division B de la 1re section des den- tales *, où les coquilles sont lisses etnon fendues à leur extrémité pos- térieure; son test est lisse, par conséquent peu ou point brillant, assez épais, solide, subarqué, quelquefois un peu irrégulier dans sa direc- tion ; le milieu est un peu renflé ; le sommet a son bord mince et tran- chant, un peu globuleux, moins fortement que dans le milieu du dentale, sa longueur varie entre 45 et 55 millimètres, son diamètre, à l’ouverture, est de 3 à 5 millimètres. Parmi les coquilles intéressantes de ce plateau nous devons remar- quer le Cerithium giganteum que nous avons trouvé dans le calcaire siliceux rougeâtre qui a servi à construire l’abbaye d’Affighem; ce n’est qu'un moule de cette coquille, mais sa grandeur suffit pour le rapporter au cérite géant; déjà M. De Burtin avait cité cette coquille en la nommant grande vis (qu’il a figurée pl. XVE, fig. G); il ajoute qu’on trouve une vis tout-à-fait analogue à Courtagnon en Champagne, mais 1 Monographie du genre Dentale (insérée dans les Mémoires de la Société d’histoire naturelle de Paris ; tom. Il, 2° partie. Paris, 1826, page 345). DE LA PROVINCE DE BRABANT. 63 qu’il y manque souvent la tête et la queue : ces données sont positives, puisqu'on sait que cette espèce se trouve rarement avec la pointe ou avec la bouche. Le Spondylus radula est fort rare, on en trouve des fragmens dans les sables d’Assche. La Lucina mutabilis est aussi fort rare; nous ne l’avons trouvée que dans le calcaire siliceux d'Affighem et dansle calcaire bleuâtre d’Assche. L’Zdmonea triquetra, qui se retrouve aussi à Grignon et dans le cal- caire de Caen, n’est pas très-rare dans les sables ; c’est bien la même espèce que celle que l’on trouve à Grignon, espèce qui se retrouve dans un ancien calcaire à Caen. Plateau de Foréts. Ce plateau, l’un de plus riches en fossiles de notre province , com- prend les collines de St-Gilles, d’Uccle, de Vleurgaet et de Forêts; il s'étend de Bruxelles jusqu’à Calevoet, et du village de Forêts à La Cambre. Les divers matériaux qui constituent ce plateau sont : 1° Des sables tantôt plus ou moins calcarifères (Forêts, St-Gilles) fai- sant une effervescence vive dans les acides : ils renferment des couches interrompues de calcaire noduleux pareil à celui du plateau de Mels- broeck (Forêts, St-Gilles); ils sont riches en fossiles divers ; des sables tantôt argileux (Forêts), tantôt légèrement colorés en jaune par de l’oxide de fer; c’est dans cette variété de sables que se trouve la couche denum- mulines, etc., épaisse d’un pouce ou deux aux environs de St-Gilles, Vleurgaet, Uccle et Forêts; quelques sables plus ferrifères contiennent des lits de grès fistuleux (Uccle) ; d’autres sables blancs renferment des nodules de grès blanc (St-Gilles). 2° Des assises composées de calcaire friable argileux, renfermant une assez grande quantité de fossiles disséminés : ce calcaire est peu étendu (Forêts). 30 Une roche solide, composée de grains de quarz hyalin et forte- ment colorée par l’hydrate de fer qui lui communique une couleur 64 SUR LA CONSTITUTION GÉOGNOSTIQUE brun-rougeûtre ; cette roche est facilement réductible en sable et ren- ferme beaucoup de fossiles , mais difliciles à déterminer à cause de la friabilité de la roche ; elle forme des massifs de 40 à 50 pieds de puis- sance, divisés en grands solides prismatoïdes par des fentes longitudi- nales et transversales. 40 Des grès coquilliers renfermant une grande quantité d’huitres bien conservées ; ils sont disséminés dans les sables qui surmontent la roche friable précédente. | Un vallon situé sur la route de Bruxelles à Uccle nous a donné la coupe suivante : 1° Terre végétale. MN Ne CO nc fl pied » pouce. 2% Cailloux roulés dans argile . . . ONE NAT 8 Sables peu calcarifères avec dE ou oursins, CH ova- lis, Dentalium Deshayesianum, etc. . . 1 —à4dr6 — 4° Couche de Nummulina lævigata, d’Ostrea flabellula et ie catella, de dents de squales . . . . . . . . . »n —2à3 — Be Sables comme n° 8 avec huîtres . : . . . . . . 1 — nn — 6 Grès calcarifère friable . . . . RTE SALES T Grès ferrugineux friable avec Ostrea flabellule phcdielle. Fostellaria, Cardium porulosum, ete . . .: . . . 40à50— » — Une carrière située à Uccle présente la série suivante sous 1 à Î pied de terre végétale , de cailloux roulés, etc. 1° Sables blanchâtres. . . AE TWMEUCID ALT Mpieds IL pouces 2° Grès fistuleux à noyaux noble AA AN" » Se (LEE 3° Sables blanchâtres ou veinés de sables jaunâtres et Sd fs- tuleux: . + * ete Ne .25 — » — 4° Couches de sun æ peignes, de enele. etd'hultres. » —2à8 — 5° Sables jaunâtres peu calcarifères . : 5 — D 6° Grès coquilliers (huîtres, vénus, lucine, ge et dr de squale). . . . DR POSER COR 9288 — » — 7° Sables jaunâtres et ARE ST SM ES ED ECO »n — La carrière de Forêts offre la coupe suivante : 1° Terre végétale, cailloux roulés dans l'argile. . + . 1à2:— De 2 Couchesdenummulines, palais de raies, dentsdesquale,ete. » — 8 — 3° Sables calcarifères. , . . s LENS 3 — » — 4 Première couche de calcaire noduleux. : + + : . . 1 — Pa —— 5° Sables calcarifères, ; 3 — » — 6° Deuxième couche de calcaire. 1 — » — DE LA PROVINCE DE BRABANT. 65 Les fossiles de ce plateau sont généralement bien conservés et carac- rose. térisés; les huîtres, les nummulines et les dents de squales sont tou- jours entières; les oursins ont leur test changé en spath calcaire cliva- ble en rhomboïdes ; les pinces de crustacés ont subi le même sort etsont généralement fragiles; les fragmens de bois sont silicifiés et quelque- fois légèrement agathisés (St-Gilles). LISTE DES FOSSILES TROUVÉS DANS LE PLATEAU DE FORÊTS Le (s.),G.(s.),U. Cestracion Phillippii. SL (SEC Notidianus griseus ? (sd) ee Sclache maximus? . (s.), G.(s.),U. Carcharias verus. . (s.),G.(s.),U. ZLamna cornubica. . (s.),G.(s.),U. Squalus auriculatus. (s.) . . . . . Zygœna malleus? . (s.), U. . . . Squalus ferox. . Scyllium. = 121 Le (æ (s.), F. (s.). . Mustellus ? (s.),U.G.(s.). Æetobatus. Gheruie Pagurus. (s) . . . . . Astacus. (Chrome Cancer ? . (e.), U. . . . Sepia Cuvieri. (c), 4.2 Nautilus Burtini. . (s.) . . . Nodosaria? F. (s.) . . . . . Polymorphina. F. (s.). . Operculina Orbignii. F.(s.),G. té ) %. v. Nummulina lævigata. F. (s.),G.(s.),U. — variolaria, UC cas Me — elegans. F.(s.), G. (s.),U. — globularia. F.(s8.),G.(8.),U.V. — lenticula.. — planulata. F. (s.) . . . . . Biloculina ringens. F. (s.), G.(s.) … Triloculina trigonula. communs. RASE F. ! )G.(s.c.)U. vi Che à saxzorum. E-N(S)NSERCRE —_ striatula. FAs)c — lœævigata. F. (s.),G. (s.). v. Alveolina Boscti. F. (s.),G.(s.). . Fabularia discolithes. NC) EE Bulla ? HAS) Turritella granulosa. F.(s.), G.(s.),U. So/arium Nystii. FA(SD)EREEE Scalaria crispa. GULC)ERORE Cassidaria carinata. G. (c.), F. (c.)? ÆRostellaria macroptera. G. (g.c.),F.(c.). — fissurella. DAMGPOE EE Terebellum convolutum. G. (c.), F. (c.). Voluta spinosa. G. (c.), F. (c.). — harpula? CNE PE APE F. (c.s.) . Calyptræa PARA) à GS) Pileopsis G. (s.) . . . . . Fissurella. F.(s.), G.(s.), U. Dentalium entalis. F.(s.),G.(s.),U.V. — Deshayesianum. EAN PAM Patella. F.(s.),G.(s.),U.V. Terebratula trilobata. 1 Nous distinguerons par les abréviations suivantes les quatre principales localités du plateau : F., Forêts; (c., calcaire; s., sables;) G., S'-Gilles ; (c.,calcaire; s., sables;) U., Uccle; V., Vleugat. Ton. XII. 9 66 SUR LA CONSTITUTION F.(s.), G.(s.),U. Anomia striata. V....... Ostrea cariosa. U. G. (s.) + — fnflata? er RE — heteroclita. F. (s.), G. (s.). — bellovacina. F.(s.),G.(s.),U.V — plicatella. — — — flabellula. DE G. (s.), U.. one dnbiune F.(s.),G.(s. )U. Y. Pecten plebeius. U. — infumatus. F.(s. 5,6. té ) v. v. — solea. F°f{s.) ee: + 2 autres espèces de peignes. F.(s.). . . . . . Arca quadrilatera. FR) EE Pectunculus nanus. LCD NE TÉE — granulatus. F. (s.), G.(s.),U. —_ granulatoides. F.(s. ‘ G.(s.), U. Nucula margaritacea. F: (8). 4 « — mucronata. Eos) Large — striata. HAS) MÉCic ec — fragilis. F.(s.), G.(g). . Pinna margaritacea. F.(s.)?..... Wenericardia planicosta. FAGNUraRer — elegans. Fa) Er — imbricata. F. (s?c.), G. (c.). Cardium porulosum. F.(s.c)G.(c.s)U.V. Lucina divaricata. Fos) era + — ambigua. V. (c.), U. — mutabilis. F. (8)... 02. — hiatelloides. G, (6:10) . Mactra semi-sulcata F1) Re Erycina. F. (s.) . Crassatella trigonata (s.) UN (GE. — Ms) UNE TES ER Se M VER NL € PE + LE: GÉOGNOSTIQUE . Crassatella compressa. Venus? pectinifera. (s.) . . . . . Cytheræa. Corbula Gallica. (trade — striata. CENT — rugosa. Hole ec — radiala. (s.), U. ? — pisum, (a Jeu Pandora Defrancii. . Solen vagina. Teredo navalis. (Mgr. . Fistulana personata ? mor - Balanus tintinnabulum. (s.), G. (s.). . Serpula triangularis. (CRIME Vermilia ? . Spirorbis. . . Galerites ovata. . Spatangus. . Scutella (2 espèces.) . Cidarites. . . Clypeaster. (a) Asterias. (8)... . Flustra(2espè. au moins.) .(s.),G.(s. VE. Y. Turbinolia sulcata. elliptica. crispa. (chere es -— . (s.), G.(s), U. ZLunulites radiata. . (8 ce.) . .« .« Orbitolites complanata. (s.).. . . . . Ovulites margaritula. elongata ? (s) . . . . . Polytrype. (s.) . . . . . Dactylopora cylindracea. . Retepora. . Alcyonium . Végétaux fossiles. . F:(c.).. M. De Burtin cite en outre, dans son Oryctographie, des volutes figurées, pl. XV, fig. D., une pyrule, pl. XVI, fig. L, un solarium , pl. XVIE, fig. B, le Trochus agglutinans, pl. XVIL, fig. R, une patelle? pl. VILLE, fig. F, un pileopsis et des pholades. Les sables de Forêts et de St-Gilles recèlent les débris d’une ser- pule que nous n’avons trouvée décrite nulle part; nous la caracté- DE LA PROVINCE DE BRABANT. 67 risOns ainsi : SERPULA TRIANGULARIS. Serpule triangulaire (pl. IL, fig. 6). Testa triangulari, irrequlari, transversim costata, costis distantibus, attenuatis: basi ampla , rugosa. Son test est irrégulier, triangulaire; les deux côtés venant à se réunir, forment une expansion crétiforme, irrégulière, sinueuse, ondulée et plus ou moins saillante ; des côtes ou plutôt des rides irrégulières sillon- nent transversalement les côtés. Ces rides sont assez éloignées les unes des autres et tantôt grosses tantôt fines; la base est large, rugueuse, ri- dée , formant avec les côtes des expansions pareilles à celles du dos; l'ouverture est ronde et assez large (12 millimètres). Les fragmens que l’on trouve ont souvent plus d’un pouce. On voit par la liste que nous venons de présenter que ce plateau est lun des plus riches en espèces variées et intéressantes; de ce nombre sont les Scalaria crispa, Rostellaria macroptera (pl. IV, fig. 9), Ostrea inflata qui ressemble beaucoup au dessin qu’en a donné M. Deshayes (pl. 59, fig. 1, 2) et dont les caractères s’accordent avec sa description ; nous n’en avons trouvé qu’une valve; Spondylus rarispina, rare et belle espèce de Chaumont, gite qui a beaucoup de ressemblance avec ceux de St-Gilles, et de Forêts, Venus pectinifera toujours friable, Corbula radiata , rare et belle espèce, Pandora Defrancii qui est aussi dans le même cas, enfin le GŒalerites ovalis qui se trouve dans les sables d’une petite butte située sur la route de St-Gilles à Vleugat. C’est surtout après des éboulemens ou de fortes pluies qu’on trouve ce bel oursin dont nous avons figuré un individu d’une grandeur peu ordinaire (pl.IV, fig. 19). De Burtin l'a figuré pl. VI, fig. PO. Plateau de Groenendael. Ce plateau forme le passage du système moyen au système supérieur; 68 SUR LA CONSTITUTION GÉOGNOSTIQUE il est placé sur leurs frontières et comprend les gites de Groenendael, Boitsfort, de Rouge-Cloitre et de Watermael. Il est principalement composé de sables fortement colorés par de l’oxide de fer (Groenendael, près d’Auderghem et de Boitsfort) ; ces sa- bles renferment des couches horizontales et presque continues de fer hydraté d’une grande étendue, qui présentent en quelques points des renflemens plus ou moins considérables et d’une puissance de plusieurs pieds de sables calcarifères blanchâtres ou légèrement jaunâtres (Baitsfort, Rouge-Cloitre), recélant des blocs de calcaire noduleux sem- blable à celui de Forêts et de Melsbroeck, et des grès blancs noduleux (entre Boitsfort et Auderghem), des sables peu calcarifères et blan- châtres (Rouge-Cloitre) qui renferment des grès fistuleux, des blocs mamelonnés et cylindriques de grès coquillier passant au grès lustré, des blocs de grès lustré non coquillier et quelques grès ferrugineux ; des sables coquilliers qui alternent avec ces sables , proviennent de la décomposition des grès coquilliers. Outre ces sables, on rencontre de petites couches d'argile sablon- neuse (Rouge-Cloitre, Boitsfort) intercalées au milieu de sables calcari- fères jaunâtres. C’est dans ce plateau que l’on trouve le fer hydraté réuni en masses assez considérables, se présentant tantôt sous des formes allongées, cylindriques, concrétionnées, mamelonnées, tabulaires, géodiques, etc., tantôt à l’état pulvérulent ou à l’état de belle hématite; la puissance des couches varie de 3 pouces à 2 pieds : la couche principale offre une épaisseur à peu près constante de 2 pieds ; des couches secondaires sont beaucoup moins puissantes. Les fossiles à Groenendael sont changés en grès ferrugineux analo- gue à celui dans lequel ils se trouvent; ceux de Rouge-Cloitre sont silicifiés; dans quelques grès très-quarzeux de cette localité, ils sont de- venus calcédonieux; les fossiles de Boitsfort sont calcaires aïñsi que ceux de Watermael. DE LA PROVINCE DE BRABANT. 69 - LISTE DES FOSSILES DU PLATEAU DE GROENENDAEL Le B.R.?. . . Sepia Cuvieri. BEEN Nautilus Burtini. M ENTee Nummulina lævigata. Le — variolaria. L'URL UC — lenticula. Red Bulla cylindrica. 1 Et eS Melania marginata. RAM Turritella granulosa . Ro értsyes — dmbricataria. Rs ANSE — terebellata. Liishee yen Natica lineolata. R......…. — canaliculata. GARE Ampullaria sigaretina. Cane — gigantea. CRT. — patula ? GMAO 2 autres espèces d’ampullaires,. KA PEUR Tornatella inflata ? Rene — sulcata. RAEOSAMNE Trochus agglutinans. R:EPNAET Solarium marginatum. GPRSES. 2 — Nystii. Lin done ah Cerithium (2 espèces. ) Gare pahxce o— RCE Buccinum. Cover — R. G. B. . . Cassidaria carinata. Ra sites Murezx ? MNAMUÈTE . Fusus Noæ. (En fr Rostellaria macroptera. RG 0 = fissurella. R. G. . . . Conus deperditus. L'ENEMANE — 2 espèces différentes, R. G. .. . Ancillaria. Da te 6 Oliva mitreola. R. G. . . . Cyprœa inflata? 1 Em se eEÈeR a Volvarta bulloides. Brita Voluia. R. G. ... Sigaretus canaliculatus. Rave tite Calyptræa trochiformis B. G. ? . . Dentalium Deshayesianum . Rate Anomia striata. BR een SOL, R. G.?. . . Ostrea plicatella. eee — flabellula. R. B. . . . Pecten solea. G.. ... . Pectunculus granulatus. Ra 6 — pulvinatus. RAB Ge — granulatoides. R. G. . . . Nucula margaritacea. R. G.... Pinna margaritacea. FEES V'enericardia elegans. R. G. B.. . Cardium porulosum. Rereare ft Donaz nitida. R. G. . . . Lucina divaricata. 115 nn — sarorum. RIT. ECO — concentrica. R?4 510, = Matellodes. R. G. . . . Mactra semi-sulcata. RG .. — depressa. R. . « Erycina. LP EME Crassatella tumida. RENÉ — trigonata. RTS Cytheræa polita. Ray: ps — suberycinoïdes. Riu GLS Corbula Gallica. RON eu — pisum. R. G. . . . Solen vagina. Re RASE Flustra. RAS EPS Turbinolia sulcata. Re rtee — crispa. R...... Lunulites radiata. R.? . .. . Orbitolites complanatu. G. ..... Alcyonium tulipiformis? 1 Nous distinguerons : Rouge-Cloître par R ; Groenendael par G ; Boitsfort par B; Watermuel par W. 70 SUR LA CONSTITUTION GÉOGNOSTIQUE. Une seule espèce dont nous donnons la figure (pl. IV, fig. 14) se distingue par des caractères particuliers ; ils nous ont déterminé à en faire une espèce nouvelle et sa grande taille nous la fait nommer géante, en lui assignant les caractères suivans : | ANPULLARIA GIGANTEA. Ampullaire géante. Testa crassa , compressa, anfractibus compressis, spira brevi; aperturæ longi- tudo triplo major quam latitudo. Cette coquille a 3 pouces 6lignes de longueur et 3 pouces de largeur ; son test est très-épais, comprimé; les tours de spire le sont également : ils sont surbaissés; la spire est très-courte; l’ouverture est trois fois plus longue que large, et la columelle paraît être comprimée. Le mauvais état de cette ampullaire, qui se trouve dans les grès fer- rugineux, empêche qu’on puisse en donner une analyse aussi complète qu’on le désirerait; mais sa grandeur remarquable et son test comprimé sont les principaux caractères qui nous ont servi à sa spécification. Outre les fossiles dont nous venons d'offrir la liste, nous ajouterons ceux trouvés et figurés par De Burtin, ce sont : Un buccin qui a beaucoup de ressemblance avec le Buccinum in- versum (pl. VILL, fig. H), un Fusus Noæ (pl. IX, fig. B) des volutes et des buccins. Le Rostellaria macroptera est assez commun dans les grès ferrugi- neux de Groenendael, mais toujours en mauvais état : les deux belles es- pèces de fornalelles (inflata et sulcata) sont très-rares ie n’ont encore été trouvées qu’une seule fois. Le reste du système supérieur renferme quelques plateaux qui con- tiennent des coquilles plus ou moins intéressantes, mais la petite quan- tité qu’on y trouve dispense d’entrer dans des détails minutieux. Les environs de Louvain ont fourni des Vautiles de Burtin très- bien conservés, gisant dans le calcaire noduleux jaunâtre pareil à celui de Melsbroeck, des Rostellaria fissurella, des Lucina divari- cata et saxorum, des Crassatella, des Conus deperditus, etc., dans DE LA PROVINCE DE BRABANT. 71 des grès calcarifères que renferment des sables d’un blanc-jaunâtre. Les environs de Louvain présentent aussi des couches de grès ferru- gineux remplis de fossiles; ces grès passent à du fer hydraté (Monta- gne-de-Fer); nous avons reconnu dans ces grès les coquilles suivantes : Bulla? Nucula margaritacea. Melania marginata ? Pinna margaritacea. Rostellaria fissurella. Cardium porulosum. Voluta spinosa. Lucina divaricata. Terebratula variabilis. Mactra semi-sulcata. Ostrea flabellula. — depressa? Pecten 1er Corbula . Pectunculus granulatoides. Solen vagina. Les coquilles sont peu caractérisées; il est probable qu’il en existe un plus grand nombre. Des grès noduleux renferment des tiges d’alcyons. Les environs de Tirlemont présentent des sables jaunâtres renfermant des grès fistu- leux et noduleux. Nous avons aperçu dans ces derniers, une coquille bivalve approchant des cytherées, des tiges d’alcyons; les sables con- tiennent rarement des dents de squales. A Vossem, près de Tervueren, on voit des sables plus ou moins ferru- gineux , contenant des couches interrompues de calcaire jaunâtre et de grès noduleux. Le calcaire présente à sa surface des Dentalium Des- hayesianum, des Cardium porulosum , des Turritella granulosa im- bricataria, des Lucina saxorum et divaricata, des Cérites et des Nummulina lævigata, variolaria et lenticula ; ces couches paraissent être une continuation de celles de St-Gilles et de Rouge-Cloitre. Lesenvirons d’Éverbergh ont fourni des bois fossiles à M. De Burtin ‘. 20 SYSTÈME MOYEN. ou QUARZO- SABLEUX. Des sables plus ou moins purs, contenant des couches interrompues caractères généraux. 1 Oryctographie de Bruxelles, page 118. Sables. 72 SUR LA CONSTITUTION GÉOGNOSTIQUE de grès fistuleux, caractérisent ce système ; l’hydrate de fer joue un rôle fort important dans la coloration de ces roches, qui sont généralement d’une teinte rougeâtre; on y rencontre aussi, mais moins fréquemment, du calcaire noduleux, des grès calcarifères, des sables calcarifères et des sables argileux. La petite quantité de débris de corps organisés est un caractère dis- tinctif de ce système; caractère qui le sépare nettement du système supérieur : aussi est-il beaucoup moins intéressant sous tous les rap- ports que celui que nous venons de décrire. Description des roches. Les sables sont tantôt purs, et c’est le cas le moins ordinaire, et tantôt calcarifères argileux et très-souvent ferrugineux. Les sables purs sont l'assemblage Fil multitude D grains de quarz, généralement assez gros, translucides et plus ou moins roulés ; la couleur de ces sables est variable, mais le plus souvent c’est une teinte jaunâtre qui se rembrunit de manière à passer au brunâtre; il est à remarquer que plus ils sont exempts de mélange de matières hé- térogènes, plus les grains sont gros et limpides. Les sables ferrugineux sont très-répandus dans ce système dont ils forment au moins les trois quarts : ils sont formés des mêmes matériaux que les sables purs, et d’une quantité d’hydrate de fer variant d’une localité à l’autre ; aussi les teintes diverses que présentent ces sables sont-elles nt entre le jaune-rougeûtre vif et le brun-rougeàtre foncé, en passant par toutes les différentes nuances qui lient ces deux couleurs, que l’on peut considérer comme des points de départ; ainsi ils sont tantôt d’un jaune rougeûtre (Tourneppe, Alsemberg, Eskem- berg, La Roche, près Genappe), tantôt jaunâtres (Braine-l’Alleud, Wa- terloo, Nivelles, Marbais, Mellery, etc.), quelquefois brunätres (Esken- berg, Sart-Dame-Avelines, etc.), d’autres fois ils sont d’un brun-rou- geàtre foncé (Alsemberg, près de Beersel, etc.). Les sables ferrugineux d’un jaune assez clair, sont sillonnés fort DE LA PROVINCE DE BRABANT. 73 souvent de bandes sableuses d’un brun-rougeûtre assez vif et d’une épaisseur variable (Autgaerde, Sart-Dame-Avelines, Eskenbergh ); d’autres fois au contraire, ce sont des bandes sableuses blanches, qui bigarrent agréablement des sables ferrugineux (Opheylissem , Folx- les-Caves, etc.); quelquefois aussi, mais plus rarement, ce sont des bandes argileuses qui se chargent de cet office; l'argile de ces ru- bans est brunätre et toujours plus ou moins mélangée de sables (Aut- gaerde). Les sables purs et les sables ferrugineux contiennent des paillettes de mica blanc. Les sables calcarifères sont plus rares dans le système moyen que dans le précédent ; cependant ils n’en sont pas exclus; leurs caractères minéralogiques sont les mêmes que ceux des sables de même nature du système supérieur; il n’y a que les environs de Nivelles et de Go- bertange où le carbonate de chaux soit en quantité assez notable. Ils sont généralement à grains très-fins, blanchätres ou un peu jaunà- tres (Bornival), contenant quelques paillettes de mica blanc; ils passent par la présence de loxide de fer, aux sables ferrugineux (Bornival, près de Nivelles , Houtain-le-Val, etc.). Les sables argileux se confondent avec les sables calcarifères ; une couleur plus grisâtre et la propriété de faire une pâte courte avec l’eau, sont leurs caractères distinctifs; on en trouve à Houtain-le-Val, aux Quatre-Bras, près de Nivelles, etc. Roches subordonnées aux sables. Le calcaire est pareil à celui de Melsbroeck , et est de même employé à paver et à bâtir; il est jaunâtre à l'extérieur et grisâtre à l’intérieur où il est assez dur; son gisement est d’être aussi en couches horizontales et interrompues au milieu des sables calcarifères (près de Nivelles, Hou- tain-le-Val, Gobertange , etc.);il est rarement fossilifère, cependant on rencontre à sa surface quelques débris de corps organisés fossiles (Houtain-le-Val, Gobertange, près de Nivelles, Genappes). Tom. XII. 10 Calcaire. Grès. 74 SUR LA CONSTITUTION GÉOGNOSTIQUE Le calcaire passe au grès calcarifère; celui-ci se présente en nodules irréguliers, tantôt durs (Piétrebais-Chapelle-St-Laurent), tantôt as- sez tendres ou faciles à briser (Nivelles); dansle premier cas ils passent dans leur intérieur à une espèce de silex blond, dans l’autre ils se dé- composent assez facilement, sont plus grenus, grossiers et raboteux ; leur couleur dans les deux cas est le gris passant au blanchâtre et au jaunatre. Ils sont quelquefois fossilifères (Piétrebais-Chapelle-S'-Laurent). Le grès calcarifère passe à des grès plus ou moins lustrés (Piétrebais, Tourneppe) et plus ou moins quarzeux; quelquefois ces grès renfer- ment des veines de quarzagate, calcédoine transparente etmamelonnée (Tourneppe); la couleur des grès lustrés est le grisâtre, le bleuâtre- clair et le jaunâtre; leur dureté est très-grande; leur cassure conchoï- dale et leurs bords translucides; ils sont assez souvent zonés de parties compactes d’une couleur un peu différente de celle de la masse. Les grès fistuleux sont très-communs dans les sables de ce système, ils sont généralement ferrifères , c’est-à-dire composés de gros sable quarzeux agglutiné plus ou moins solidement par de l’hydrate de fer, le noyau mobile qui se trouve presque toujours occuper leur centre, se retire avec beaucoup plus de facilité que dans ceux du système supérieur ; ces grès fistuleux se présentent sous des formes cylindriques plus on moins allongées ou renflées; leur couleur est le plus souvent le jaune-rougeâtre (La Roche, Mellery, Eskenbergh, Tourneppe, Brame- l’Alleud, Alsemberg, Nivelles, Bornival, etc.) et quelquefois le blanc- grisâtre (Grez, Wavre, Overyssche, etc.). Ils gisent dans des sables plus ou moins ferrifères en couches hori- zontales et irrégulières. Les grès ferrugineux sont assez abondans; ils sont peu solides, d’une couleur plus ou moins rembrunie et d’un volume plus ou moins important (près Beersel, Tourneppe, Alsemberg, etc.); ils gisent dans les sables ferrugineux; soit en couches non continues, soit en amas assez considérables (près de Beersel) : ils sont quelquelois fossilifères (Beersel). DE LA PROVINCE DE BRABANT. 75 Le fer hydraté est abondamment répandu dans tout ce système; il s’y trouve et comme principe colorant et comme roche disposée en couches horizontales d’une épaisseur variable, gisant dans des sables plus ou moins ferrugineux; tantôt le fer hydraté est sablonneux et constitue alors des couches continues, et tantôt il est presque pur (Eskenbergh , La Roche, Alsemberg, etc.) et donne lieu à des couches composées de morceaux d’un volume variable, et d’une épaisseur qui va jusqu’à deux pieds. On se sert du calcaire pour paver les routes et construire des mai- sons ; les grès noduleux et mamelonnés des environs de Tourneppe servent au même usage; les sables ferrifères et blanchätres, à sabler les maisons; quelques sables d’un jaune-clair sont employés dans les environs de Nivelles, de Houtain-le-Val, de Tilly, de Marbais, etc., à amender les terres. Ce système présente des collines d’une hauteur assez considérable, d’une pente assez escarpée (environs de Nivelles, Bornival, Saintes, La Roche, etc.) et à plateaux beaucoup moins étendus que ceux qui couronnent les élévations du système supérieur. La puissance de ces dépôts est moins considérable que celle des sables calcaréo-siliceux, car dès qu’on vient dans des vallées un peu profondes, on voit percer les roches de la formation schisteuse; aussi, le long d’une bonne partie des cours d’eaux qui sillonnent le Sud de la province, trouve-t-on seulement ces roches, témoins d’un antique continent. Il est probable que dans quelques vallées (vallée de la Dyle) les dépôts imfra- marins ont été enlevés par les eaux alluviales des ruisseaux et de cette rivière, lorsque son cours n’était pas circonscrit comme de nos jours ; puisque de chaque côté de la rivière le schiste est surmonté à une certaine hauteur par des dépôts tritoniens qui des- cendent beaucoup plus bas de l’autre côté de ces collines (Bousval, Thy, La Roche, etc.). (Voir la planche de coupes). Détails locaux. Plateau de Piétrebais. — Des sables ferrugineux et jaunâtres con- Usages. Configuration du sol. Puissance 76 SUR LA CONSTITUTION GÉOGNOSTIQUE tenant des nodules de grès fistuleux, des sables blanchâtres, un peu calcarifères, recélant des grès noduleux, quarzeux et calcarifères, et quelques couches de fer hydraté (près Roux-Miroir), sont les matériaux qui composent ce plateau; mais ce qui attire l'attention du naturaliste c’est la présence de fort belles huitres et d’oursins qui sont renfermés dans les grès noduleux. C’est au pied de ces énormes roches de quarz grenu qui apparais- sent au bord d’un ruisseau tributaire de la Dyle, près du village de Chapelle-St-Laurent, que l’on trouve ces grès calcarifères fossilifères qui sont assez tendres, grenus et grisätres ; mais ce qu'il y a de plus remarquable dans ce gîte, c’est que, jadis existaient au milieu de l'Océan tritonien des eaux jouissant des propriétés chimiques néces- saires pour pouvoir dissoudre de la silice dont elles ont enveloppé des huiïtres incrustées dans les parties saillantes du quarz grenu du sys- tème ardoisier ; or, cette silice maintenant métamorphosée en grès approchant du grès lustré et fossilifère, n’a-t-elle pas été enlevée de ces rochers, de manière que les grès lustrés et le quarz grenu aient pu faire corps ensemble? L'aspect roulé que nous présente la sur- face des rochers ne serait-il pas dû aussi à cette action dissolvante ? La première inspection nous avait fait penser que ces masses pou- vaient appartenir au système tritonien, mais un examen plus appro- fondi nous a fait adopter les conclusions de M. D’Omalius d’Halloy, qui les range dans le terrain ardoisier. Les huîtres des grès noduleux calcarifères, sont un peu friables et happent à la langue; celles des grès lustrés sont silicifiées ; les oursins sont silicéo-calcaires. Ces huîtres sont : L’Ostrea latissima. Deshayes ! (PI. IV, fig. 18, a, b.) (Nob). — callifera. — flabellula? (PL IN, fig. 6, a, b.) (Nob). Nous n’avons pu déterminer les oursins. 1 Tom. I, planche 52, 53, fig. 1. DE LA PROVINCE DE BRABANT. 77 Nous avons remarqué en outre les coquilles suivantes dans quelques grès noduleux : Cassidaria carinata. (P1. IL, fig. 10.) (Nob.) Voluta spinosa. (PI. HI, /ig. 16.) (Nob.) Les sables jaunâtres des environs de Grez contiennent un pétoncle mais indéterminable, une {érébratule, une crassatelle et des huitres carices ? Les grès ferrugineux de Biez, de Chapelle-St-Laurent et de Grez; les grès noduleux de Piétrebais et de Chapelle-St-Laurent présentent des tiges d’alcyons ? Les grès lustrés fossilifères contiennent aussi des eschares? Les sables des environs de Wavre contiennent une fort jolie espèce de lucine (Lucina contorta), que l’on retrouve dans le calcaire de Gobertange, mais moins bien caractérisée ". Une coupe près de Wavre (route de Wavre à Grez) nous a donné sous la terre végétale : 1. Sables jaunâtres. 6. Sables jaunes et verdâtres. 2. Grès fistuleux ferrifères. 7. Calcaire siliceux compacte avec veines de 3. Sables jaunâtres passant à grès blanchâtres. 4. des sables verdâtres. 8. Silex formant la partie supérieure de la 5. Grès calcarifères compactes. craie. Les grès calcarifères et le calcaire des environs de Genappes présen- tent des tiges d’alcyons, des débris d’huitres (Ostrea cariosa et flabel- lula ?) et des cassidaires (Cassidaria carinata). Une montagne en face de La Roche nous a donné la section suivante : 1. Sables ferrugineux avec des couches 4. Sables blanchâtres. plus rembrunies. 5. Grès noduleux blanchâtres. 2. Grès fistuleux ferrifères. 6. Schiste ardoisier. 3. Sables comme n° 1. Les grès ferrugineux rougeûtres de Beersel offrent les coquilles sui- 1 Nous venons de retrouver cette coquille à Afflighem. 78 SUR LA CONSTITUTION GÉOGNOSTIQUE vantes, mais généralement mal caractérisées : Bulla. Nucula margaritacea. Melania marginata. Pinna margaritacea. Turritella ? Cardium porulosum. Conus? Tellina ? Lucina divaricata. Ostrea flabellula. Pectunculus granulatoides. Mactra semi-sulcata. Les grès noduleux du même endroit sont quelquefois revêtus d’une mince pellicule de calcédoine translucide , mamelonnée et grisâtre. Les grès ferrugineux sont en grandes masses intercalées dans des sables jaunâtres qui renferment des plaques et des géodes de fer hy- draté. Le calcaire d'Houtain-le-Val contient à sa partie extérieure, des huîtres cariées, le Dentalium Deshayesianum , les Nummulina va- riolaria et lenticula et des tiges d'alcyons. Entre Bornival et Nivelles, les grès noduleux d’un jaune -rougeûtre contiennent rarement une empreinte de cythérée. Enfin les sables ferrifères et à grès fistuleux de Jodoigne-Souveraine nous ont offert une nzwmmuline (N. lævigata) et des tiges d'alcyons. Nous avons vu, dans les environs de Saintes, des fragmens de co- quilles gisant dans des sables jaunâtres. Quelques blocs de calcaire provenant de Thines, contenaient des huitres (Ostrea flabellula et cariosa) des lunulites radiées , le den- tale de Deshayes et des nummulines. IL SYSTÈME INFÉRIEUR ou GLAUCONIEN. Caractères généraux. Ce système est caractérisé par la glauconie grossière , qui passe d’un côté au calcaire et de l’autre à la glauconie sableuse; outre ces glauco- DE LA PROVINCE DE BRABANT. 79 nies et le calcaire, on rencontre des sables jaunätres plus ou moins fer- rugineux, des grès noduleux et fistuleux et de l’hydrate de fer. La présence de certains fossiles nous a déterminé à ranger les glau- conies de cette portion de la province dans la formation tritonienne , à l'exemple de M. Dumont‘. Description des roches. La glauconie est une roche composée de calcaire, d’argile et mélan- gée de grains verts de fer silicaté ; elle fait une effervescence plus ou moins vive selon l’abondance du carbonate de chaux, et se présente en masses légères, tendres, d’un jaune-grisätre , à cassure grenue et ter- reuse, tachant les étoffes et se décomposant plus ou moins facilement. Cette glauconie grossière contient assez souvent des grains de quarz sableux (Folx-les-Caves, Orp-le-Grand) ; en se chargeant de carbonate de chaux, les grains verts diminuent de telle sorte que la glauconie passe à un véritable calcaire à couches continues, de couleur grisàtre; cette roche est assez lourde, tenace, difficile à casser; à cassure un peu conchoïdale , sa texture est subgrenue approchant parfois de la compacte (Orp-le-Grand); le calcaire forme la partie supérieure de la glauconie grossière. La glauconie grossière devient de plus en plus friable et passe à la glauconie sableuse qui renferme beaucoup de sable quarzeux; nous n’en avons trouvé qu'une mince couche à Orp-le-Grand, où elle renferme divers fossiles, mais moins bien conservés que dans la glauconie gros- sière. La couleur de la glauconie sableuse est le vert passant au noirà- tre, et quelquefois le gris-brunätre pointillé de vert-noiratre. La glauconie grossière en perdant le calcaire qu’elle contient, passe, comme M. Dumont l’a observé dans la province de Liége à Laer, etc., à une roche argileuse mélangée de grains verts (Maret, près de Noduwez); cette argile chloritée * est légère, sa texture est grenue, lâche et gros- 1 Constitution Géologique de la province de Liége, page 318. 2 Nous pensons avec M. D'Omalius d'Halloy* que la plupart de ces mélanges ne doivent point * Introduction à la Géologie. Paris, 1834, pag. 850. Glauconie. Calcaire. Glauconie sableuse. Argile chloritée Sables Fer hydraté. Usages. Configuration du sol. Puissance. 80 SUR LA CONSTITUTION GÉOGNOSTIQUE sière ; la cassure en est terreuse, irrégulière et grenue, la masse est tendre, d’un gris passant au jaunâtre et au verdâtre; la pâte est une argile grise parsemée de petits points noirs ou verts, et quelquefois de taches ferrugineuses d’un jaune-rougeûtre ; ces taches s’agrandis- sent, s’allongent et passent à de petites veines d’un brun foncé. Cette roche se présente en assises importantes non stratifiées , mais divisées en prismes irréguliers par des fissures verticales et horizon- tales ; nous n’y avons point encore trouvé de fossiles. Les sables sont toujours colorés en jaune par l’hydrate de fer, cepen- dant quelques sables près de Folx-les-Caves, sont d’un blanc plus ou moins pur ; des bandes brunätres viennent bigarrer les sables jau- nàtres. Ils contiennent des grès fistuleux ferrugineux (Orp-le-Grand , Folx- les-Caves) et des grès noduleux irréguliers plus ou moins blancs. Ces mêmes sables renferment vers leur partie supérieure de minces couches de fer hydraté sablonneux. La glauconie grossière est employée à faire des fours pour cuire le pain, elle est très-propre à cet usage, en ce qu’elle résiste fort bien au feu ; le calcaire vert sert à construire les maisons et à paver; les sables sont utilisés pour sabler les maisons. Les roches du système inférieur donnent naissance à des collines à plateaux assez étendus, à pentes douces, cependant les vallées sont profondes et resserrées. L’épaisseur de ces dépôts est très-peu considérable; à Folx-les- Caves le calcaire crétacé de Maestricht est situé sous 15 à 20 pieds de glauconie grossière; à Jauche la craie est recouverte par 10 ou 12 pieds de glauconie et de sables; à Orp-le- Grand, l'épaisseur parait être plus importante, puisqu'on n’a point encore traversé les couches glauconiennes ; néanmoins elle ne parait pas être fort grande. porter de noms particuliers, ainsi que le veut M. Brongniart à l'égard des calcaires chlorités dont il compose le genre Glauconie; c'est pourquoi nous avons appliqué le nom d'argile chloritée à la roche de Maret, DE LA PROVINCE DE BRABANT. 81 Détails locaux. Une carrière près d’Orp-le-Grand nous a offert la coupe suivante : 1. Couche de terre végétale et de cail- 8. Calcaire siliceux grisâtre passant à du loux roulés. 4. Calcaire sub-compacte. 2. Sables jaunâtres. 5. Glauconie grossière. Près d'Orp-le-Grand, une colline nous a présenté sous la terre végétale des sables jaunâtres renfermant une couche de glauconie sableuse fossilifère. La section d’une colline à gauche nous a donné sous la terre végé- tale : 1. Glauconie grossière verdâtre pas- 3. Silex pyromaques assez gros. sant au calcaire. 4. Craie marneuse. 2. Glauconie grossière grisâtre. Un creux profond, reste d'anciennes exploitations, situé à dix mi- nutes de Folx-les-Caves, nous a présenté la coupe suivante : 1. Terre végétale, 4. Silex roulés formant une couche de 2. Sables avec débris de glauconie. 7 à 8 pouces d'épaisseur. 3. Glauconie grossière avec arches, 5. Calcaire de Maestricht. crassatelles, vénus , etc. La couche de cailloux roulés de silex bruns ou noirâtres est com- posée de débris siliceux variant en grosseur depuis celle d’une noisette jusqu’à celle du poing; la couleur de ces cailloux est tantôt le noirâtre et tantôt le brunâtre; ils sont agglutinés ensemble par un ciment de glauconie. On voit les sables jaunâtres à grès fistuleux reposer sur la glauconie grossière dans une bure près de Folx-les-Caves. Le test des fossiles est changé en calcaire crayeux friable, qui les roses. rend par conséquent très-difficiles à caractériser ; quelques-uns, ren- fermés dans les glauconies, ont encore conservé leur aspect nacré Tow. XII. 11 82 SUR LA CONSTITUTION GÉOGNOSTIQUE (Orp-le-Grand) ; les ruines de l’abbaye de Villers nous ont offert des corniches extraites de la glauconie grossière d’Orp-le-Grand, qui re- cèlent des coquilles bien conservées. Le calcaire contient des fossiles de méme nature. Les carrières d’Orp-le-Grand nous ont fourni les fossiles suivans : Turritella ? Pinna margaritacea ? Natica. Venericardia elegans. Nummulina lævigata (gl. sableuse). Cardium porulosum. Bulla. Lucina divaricata et une autre espèce. Melania marginata. — hiatelloides. Cassidaria carinata? Mactra ? Voluta. Cytherœæa nitidula. Dentalium Deshayesianum. — tellinaria. Ostrea plicatella. Spatanqus? — flabellula. Turbinolia sulcata (gl. sab.) Pecten. Lunulites radiata. Pectunculus granulatoides. Orbitolites complanata. Nucula margaritacea. Alcyonium. La glauconie sableuse contient des fragmens d’une grande coquille qui pourraient appartenir à la Venericardia planicosta ; le calcaire renferme des moules de coquilles, mais trop peu caractérisés pour pouvoir être déterminés. | La glauconie grossière de Folx-les-Caves contient les fossiles sui- vans : Cytheræa nitidula. Arca. Nucula margaritacea. Crassatella. M. Dumont cite en outre de ces gros annélides semblables à ceux que l’on rencontre dans le gault; nous n’avons point trouvé ce dernier fossile. Les résultats paléontologiques que nous avons obtenus prouvent à l'évidence que ce petit système appartient à la formation tritonienne; sans des recherches que nous avous entreprises et qui ont été couron- nées de succès, nous aurions été enclins à le regarder avec M. D’Oma- DE LA PROVINCE DE BRABANT. 83 lius d’'Halloy”, comme un membre de la formation crétacée dont il a en effet quelques caractères. Conclusions. Après avoir examiné dans toutes leurs phases, les diverses modifica- tions que des circonstances particulières ont fait subir aux sédimens qui ont formé la plus grande partie du sol actuel du Brabant, il était naturel qu'avec le secours de cette réunion de faits , on cherchât à ex- pliquer les divers phénomènes qui ont présidé à la déposition de ces mêmes sédimens, c’est ce que nous avons essayé de faire en réunissant les diverses observations que nous avons pu recueillir. Nous avons vu que la partie du grand bassin Océanique infra-marin qui comprend notre province, était presque entièrement composée de sables plus ou moins exempts de mélanges, au milieu desquels se trou- vaient des couches interrompues de calcaire, de grès fistuleux ferrifères et blanchätres, de grès noduleux , de fer hydraté et d'argile, de glau- conie grossière passant aux sables et au calcaire grossier ; mais la pré- dominance de sables à calcaire noduleux , de sables à grès fistuleux, et de glauconies dans trois différentes régions de la province, a facilité leur étude par la division qui s’y est établie naturellement. La rareté des corps organisés fossiles dans les sables à grès fistuleux et leur abondance dans ceux à calcaire tritonien sont des caractères tranchés qui se déduisent évidemment de la nature du sol, puisqu'on sait que les animaux s’éloignent des parages où dominent la silice, tandis qu’ils abondent là où le carbonate de chaux est suffisamment répandu; on sait aussi que des circonstances locales telles que la présence de certains fucus, d’hydrophytes , de quelques animaux particuliers, modifient singulièrement la distribution géographique des êtres organisés; des circonstances analogues ont été cause que quelques localités possèdent certaines coquilles, qui sont très-rares ou 1 Élémens de Géologie, article Terraix Créracé , sect. 214, page 202. 84 SUR LA CONSTITUTION GÉOGNOSTIQUE ne se retrouvent plus dans d’autres endroits; ainsi le gite de Melsbroeck est le seul endroit où l’on trouve des débris de scies et de certains cra- bes , et où abondent les restes de squales, de nautiles ; les gites de St-Gilles et d'Uccle contiennent une grande quantité d’huitres striées , de nummulines, de dents de squales et de raies; tandis que celui d'Affighem est le seul où l’on trouve le cérite géant. La partie de la province où se trouvent les sables à grès fistuleux et la rareté des fossiles dans ces mêmes sables, sont des faits qui viennent à l'appui de la théorie des abaissemens que nous avons émise ; déjà M. Desnoyers‘ avait signalé des faits analogues lorsqu'il dit que : « l'ab- sence entre la déposition de la craie et les terrains de sédimens supé- rieurs de tout produit lacustre ou terrestre, favoriserait même l’opinion des géologues qui présument que les eaux marines ne se sont point reti- rées dans l'intervalle d’un des dépôts à l’autre. » Nous croyons aussi fortement au passage des terrains crétacés aux terrains fluvio-marins supérieurs ; c’est-à-dire, que la même mer qui a déposé la craie, s'étant un peu éloignée de ses rivages primitifs, a produit, après cette espèce d’abaissement, des dépôts variés et que nous classons dans des terrains post-crétacés. Mais, dira-t-on, l'absence de bélemnites dans ces terrains et leur abondance dans la formation crétacée contredisent ce passage d’une nature ancienne à une plus nouvelle. Que l’on fasse attention que, dans notre pays, la craie passe au calcaire friable de Maestricht, qui contient beaucoup d’êtres organisés, dont la nature se rapproche tant de celle des animaux tritoniens de la formation infra-marine. Les bélemnites sont abondantes, il est vrai, mais ce n’est qu’une seule espèce (B. mucronatus); ce genre, si riche dans les formations plus anciennes, est donc devenu de moins en moins nombreux en espèces jus- qu’à se réduire à une seule! Pourquoi cette bélemnite n’a-t-elle pas pu disparaitre lorsque les sédimens ont changé de nature, de même que celles des terrains antérieurs ont disparu graduellement à mesure que la 1 Terrains tertiaires du Cotentin, page 214, inséré dans les Mémoires de la Société d'histoire naturelle de Paris. T. IL, 2° partie, 1825. DE LA PROVINCE DE BRABANT. 89 série des êtres organisés se rapprochait dela série actuelle. De plus, l’é- loignement de l'Océan qui déposa la craie de ses limites originaires etun léger changement dans la température, qui sollicita peut-être cet éloignement, ont probablement influencé cette disparition ; aussi pen- sons-nous que cet abaissement de température, et l'éloignement des mers produit en partie par cet abaissement , sont les seuls phénomènes qui séparent la craie des dépôts du sol tritonien. D’après ces hypothèses, il s’ensuit le passage insensible de ces der- nières dépositions aux dépôts qui se forment encore de nos jours, et nous pourrons poser comme principes : 1° Que les mers actuelles qui baignent les terrains fluvio-marins supé- rieurs doivent leur état présent à une suite d'éloignemens successifs d’une mer antique, desquels on doit aller chercher le point de départ dans les collines crétacées qui servent toujours de frontières à ces terrains ; 2° Que l’âge des diverses formations qui composent ces terrains peut se juger par le plus ou le moins d’éloignement de ces formations des collines crétacées, dont l’âge croit en sens inverse de cet éloignement : c’est-à-dire que les portions les plus rapprochées de l'Océan actuel sont les plus nouvelles, tandis que les dépôts situés le plus près des collines crétacées sont les plus anciens; 30 Que si les contrées situées de l’autre côté de l'Océan présentent la mêmedisposition dans l'élévation progressive des collines jusqu'aux pre- mières crêtes crétacées, on pourra fixer, par la hauteur comparative de ces collines, l’âge analogue du pays situé de ce côté de l'Océan ; 4° Que la série des formations marines qui se succèderont, depuis les collines crétacées jusqu’à la mer, sera : formation infra-marine qui passera insensiblement à la formation médio-marine, dont les sédi- mens alterneront avec les dépôts supra-marins ou crag, dont une par- tie se confondra avec les sables et les graviers océaniques; le bord op- posé présentera la même disposition , mais en sens inverse. A l'appui des principes que nous venonsd’émettre nous citerons d’abord : toute l'étendue de terrain qui s'étend de la province de Liége jusqu’à la mer du Nord, en y comprenant une partie de la province de 86 SUR LA CONSTITUTION GÉOGNOSTIQUE Liége, celles de Brabant , d'Anvers, des deux Flandres, une petite partie du Hainaut et une portion du Limbourg, où nous verrons que la formation infra-marine est la plus rapprochée des collines créta- cées, tandis que la médio-marine en est plus éloignée; enfin le crag d'Anvers” est situé presqu’au bord de la mer du Nord. Nos dépôts sont séparés de ceux analogues en Angleterre par l'Océan; ceux-ci sont classés dans le même ordre. Les limites de ce vaste bassin sont peut-être assez proches de la Norwége et du Danemarck, en se liantavec la por- tion qu’occupe le Brabant par les sédimens du littoral prussien et hollandais. Une petite fraction de cet immense bassin, située dans la partie orientale de la presqu'’ile du Cotentin, etc., si bien décrite par M. Desnoyers, confirme pleinement les principes établis. Ces abaissemens graduels de température, ces passages insensi- bles d’une nature ancienne à une nature moderne, et ces éloigne- mens successifs des mers sont donc en harmonie avec les lois de la nature, qui procède à ses perfectionnemens par gradation, et non par sauts et par bonds; M. Parandier * a émis une opinion qui se lie inti- mement à la nôtre, lorsqu'il dit que «la diminution progressive de la température et de la densité de l’eau lui paraît prouvée par les traces horizontales des vallées.» Nous pourrions citer un grand nombre de savans qui ont déjà abordé la même question. La théorie de ces passages plus ou moins insensibles écarterait, jusqu’à un certain point, toutes ces classifications qui semblent indi- quer une transition subite dans chacun des dépôts fossilifères de na- tures différentes. Si on veut examiner l’âge relatif de notre sol tritonien, d’après la théorie adoptée par M. Deshayes, on trouve que les conséquences à 1 M. Nyst s'occupe en ce moment de la détermination des fossiles de cet endroit intéressant ; leur ensemble prouve que ces dépôts, placés mal-à-propos dans la formation infra-marine par M. La Jonkaire, appartiennent à une formation marine analogue au crag d'Angleterre; la spé- cification des fossiles anversois ne saurait être remise en de meilleures mains que dans celles de ce jeune savant. ? Causes de l’existence des cavernes en général, et de celles du Doubs en particulier. DE LA PROVINCE DE BRABANT. 87 tirer de cet examen sont telles, qu’elles coïncident parfaitement avec celles qui se déduisent par la manière ordinaire : en effet > On verra que sur 171 à 174 espèces de coquilles fossiles qui sont renfermées dans les diverses roches de notre formation, 6 seulement ont leurs analogues vivans, établissant par conséquent un rapport de 3 à 4 174 pour 100, rapport qui correspond exactement avec celui si judicieusement établi par M. Deshayes pour les formations fluvio-marines supérieures les plus anciennes (comprenant le calcaire grossier de Paris, l'argile de Londres et de l'ile de Wight) ‘. Sur les 167 coquilles qui n’ont point d’analogues vivans, nous trou- verons que : 11 sont particulières au sol du Brabant, que 75 se re- trouvent à Grignon, 14 à Chaumont, 26 dans l'argile de Londres (dont 5 particulières à ce bassin et au nôtre), 12 à Bordeaux (dont 2 ne se retrouvent que dans cette localité et dans les environs de Bruxelles), 5 seulement dans le Plaisantin, mais qui se trouvent aussi dans le bassin de Paris et 2 dans le crag d'Angleterre. On peut dire que plus de 130 coquilles sont particulières au calcaire grossier (dont une partie même signale l'étage le plus inférieur) et à l'argile de Londres : 25 à 30 sont renfermées et dans le calcaire grossier et dans les formations plus nouvelles ; 8 à 9 sont particulières à des formations marines plus nouvelles, et enfin deux sont propres au crag. En examinant la quantité d'êtres organisés fossiles, autres que les coquilles, qui se trouvent dans nos dépôts, nous aurons 11 espèces de poissons, dont 2 espèces n’ont encore été trouvées qu’à l’état fossile, tandis que les autres sont vivans et fossiles à la fois (il n’est pas très-sür que toutes ces dents de squales et de raies proviennent d'animaux analogues aux espèces vivantes) ; 3 espèces de crustacés nayant point d’analogues vivans; 7 annélides dont 4 au moins n’ont pas d’analo- gues vivans; quant aux 3 autres, leur mauvais état de conservation 1 Bulletin de la Société Géologique de France , tom. IN, page 262. (Rapport sur les travaux de la Société pendant 1831.) 88 SUR LA CONSTITUTION GÉOGNOSTIQUE empêche de pouvoir établir ces comparaisons, mais nous pensons qu’ils sont dans le même cas que les 4 premiers; 7 radiaires dont aucun analogue à des espèces vivantes ; 16 polypiers, dont 14 au moins sont dans la même catégorie que les radiaires. Quant aux restes de végétaux, ils paraissent tous appartenir à des espèces perdues. Le tableau suivant résumera toutes ces observations paléontologi- ques : NATURE UNIQUEMENT FOSSILES. FOSSILES ET VIVANS, PARTICULIERS DES DÉBRIS. FORMATION | FORMATIONS | FORMATION | FORMATIONS A NOTRE FORMATION. infra - marine. | plus nouvelles}infra - marine. |plus nouvelles 11 Poissons . 3 Crustacés 85 Céphalopodes . 83 Acéphales. ] a C] Le} = = m 2 Cirripèdes 7 Annelides. . 7 Radiaires. 16 Polypiers 23Zoophyt. 5 Végétaux. Totaux. Ces résultats zoologiques prouvent, d’une manière irréfragable, l'identité d’âge de nos dépôts avec ceux de Londres. Une carte , que nous ayons jointe à cet ouvrage, représente la situation respective de la France, de la Belgique, de l'Angleterre , etc., lorsqu'une partie de ces pays était couverte par l'Océan, qui y déposait les terrains de notre formation infra-marine. Cette carte rendra plus claire encore le rapprochement qui existe entre ces trois pays, dont les dépôts tri- toniens sont situés si près des collines crétacées : peut-être même soupçonnera-t-on que l'Océan s’est bien peu abaissé depuis cette antique époque jusqu’à la nôtre. Ce n’est point ici le lieu d'entrer DE LA PROVINCE DE BRABANT. 89 dans des discussions hypothétiques ; mais nous pensons qu’il en a été alors comme il en est aujourd'hui de ces prétendus abaissemens de l'Océan, dont le littoral de France pourrait nous offrir un exemple à son avantage, tandis que les côtes américaines y auraient perdu. N’est-il pas rationnel de penser que les sédimens apportés par les fleuves des contrées tempérées étaient plus puissans que ceux amenés par les cours d’eau des contrées boréales? Il s’en est suivi qu'à mesure que le sol de nos pays s’exhaussait, les côtes de la Suède, de la Norwége et de l'Islande perdaient de leur étendue; et peut-être l’Islande, que nous voyons île de nos Jours, se trouva-t-elle séparée du continent Hyperboréen par les invasions successives de la mer, dont chacune marquait une période d’accroissement pour le sol de la Belgique. Les profondes sinuosités qui découpent et festonnent les rivages de lIs- lande, de la Norwége et de l'Écosse, et les ilots nombreux qui élan- cent leurs têtes décharnées du sein de l'Océan, ne nous indiqueraient-ils pas les dernières marches de l'escalier naturel qui conduit du fond des vallées occupées maintenant par les eaux de l'Océan, jusqu’au som- met des Dophrines, et les invasions progressives d’une mer refoulée ? En comparant géologiquement et zoologiquement les dépôts du Brabant avec ceux de Londres et de Paris, on trouvera de grands points de ressemblance entre ces trois sols classiques. En effet, le bassin de Londres est composé d’une argile sableuse passant au sable et renfermant beaucoup de dents de squales, de dé- bris d’autres poissons, des crabes , des écrevisses, des bois percés de tarets, des fruits, le Rostellaria macroptera , le Cerithium gigan- teum, lOstrea flabellula, la Nummulina lœvigata , etc., tous fossiles indiqués par MM. Webster *, Phillips et Conybeare * comme provenant de Stubbington , de Highgate et de Barton ; or nos gites de Melsbroeck, d’Afflighem et de St-Gilles ne nous offrent-ils pas les mêmes débris? 1 On the freshwater formations in the Isle of Wight, with some observations on the strata over the chalk in the South-East part of England (insérée dans le tom. II des Transactions de la société géologique de Londres. Londres, 1814). ? Outlines of the Geology of England the Wales, pages 1, 2 du vol. I. To. XII. 12 90 SUR LA CONSTITUTION GÉOGNOSTIQUE Les sables qui dominent dans l'étage inférieur du bassin de Paris sont caractérisés par la Nummulina lævigata, le Cerithium gigan- teum, la Quinqueloculina saxorum , le Cardium porulosum , les turbinolies , etc., toutes espèces qui se trouvent abondamment dans notre bassin, à l'exception du Cerithium giganteum qui y est très-rare. Les coquilles suivantes nous ont paru caractériser les assises trito- niennes du Brabant, soit par leur abondance, soit par la variété d’endroits où elles se trouvent, ce sont : 1. Nautilus Burtini. 15. Terebratula trilobata. 2. Operculina Orbignii. 16. Anomia striata. 3. Nummulina lœvigata. 17. Ostrea plicatella. k. — variolaria. 18. — flabellula. 5. Quinqueloculina saxorum. 19. Pecten plebeius. 6. Melania marginata. 20. — solea. 7. Turritella granulosa. 21. Pectunculus granulatoides. 8. — imbricataria. 22. Nucula margaritacea. 9. Solarium Nystii. 23. Pinna margaritacea. 10. Cassidaria carinata. 24. Cardium porulosum. 11. Rostellaria fissurella. 25. Lucina divaricata. 12. Voluta spinosa. 26. Mactra semi-sulcata. 13. Calyptræa trochiformis. 27. Corbula pisum. 14. Dentalium Deshayesianum. 28. Teredo navalis. et parmi les poissons, annélides et zoophytes, nous avons choisi les suivans : 29. Squalus auriculatus. 33. Lunulites radiata. 80. Lamna cornubica. 84. Orbitolites complanata. 1. Dents d’œtobates. 35. Alcyons. 82. Turbinolia sulcata. Une bonne partie de ces espèces sont aussi caractéristiques pour les bassins de Paris et de Londres. M. Brongniart ‘ appelle l'attention sur les coquilles suivantes : Étage inférieur. 1. MNummulites lœvigata. 8. Nummulites numismalis. 2, — scabra. k, — rotundata. ! Description Géologique des environs de Paris, page 269 et 270. DE LA PROVINCE DE BRABANT. 5. Madrepora. 6. Astræa. 7. Turbinola elliptica. 8. crispa. SE _— sulcata. Reteporites digitalea. . Lunulites radiata. uwrceolata. . Fungia Guettardi. Donc 14. 15. 16. 17. 18. 19. 20. 21. 91 Cerithium giganteum. Lucina lamellosa. Cardium porulosum. Voluta cithara. Crassatella lamellosa. Turritella multisulcata. Ostrea flabellula. cymbula. sur ces 21 espèces caractéristiques nous en possédous 12, dont 5 caractéristiques pour le sol tritonien du Brabant ! . Orbitolites complanata. . Cardita avicularia. . Ovulites elongata. margaritula. . Alveolina Bosci. . Turritella imbricata. . Terebellum convolutum. I D x & Nm Étage moyen. . Calyptræa trochiformis. . Pectunculus pulvinatus. . Cytheræa nitidula. elegans. . Diverses milioles. . Cerithium. ? Nous possédons 12 espèces sur ces 13 caractéristiques signalées par M. Brongniart, 4 de ces 12 espèces sont très-caractéristiques pour notre formation. Etage supérieur. 1. Milioles. 2. Cardium lima ou obliquum. 3. Lucina saxorum. À. Ampullaria spirata. 5. Beaucoup de cérites. 6. Corbula anatina ? = 4. striata. Nous ne trouvons dans nos assises que 2 espèces sur les 10 à 11 in- P diquées par M. Brongniart; elles sont même l’une et l’autre assez rares. Or, n’est-il pas évident que nos sédimens se rapportent exactement ; P PP aux deux étages (inférieur et moyen) avec lesquels ils coïncident si bien, et que l’âge de ces mêmes sédimens est identique avec celui de ces deux divisions , que l’on ne peut établir aussi rigoureusement dans nos > P 5 dépôts, où elles semblent même étre mélées l’une avec l’autre. L’étage 92 SUR LA CONSTITUTION GÉOGNOSTIQUE supérieur reconnu dans le bassin de Paris ne parait point être développé dans le nôtre. Sur 131 à 132 fossiles différens, indiqués par MM. Webster, Conybeare et Phillips , comme se trouvant dans l’argile de Londres , nous en possé- dons plus de 35. | On sera frappé de lanalogie qui existe entre trois gîtes des trois différens pays; ces gites sont : Forêts, Liancourt, et Stubbington. On trouve à Liancourt : Nummulina lævigata. Forêts et Subbington. — lenticularia. — — Turritella terebellata. — — —= imbricataria. — — Crassatella sulcata. point. — Venericardia planicosta. Forèts. — Dents de squales. — _— Turbinolia elliptica. — point. Lunulites urceolaria. — — La disposition des diverses couches de Liancourt se rapproche beau- coup de celle que l’on observe à Forêts ; ainsi à Liancourt on a, comme dans ce dernier endroit, un banc de sable renfermant des nummulines; plus bas on trouve du calcaire à milioles, et ces céphalopodes sont assez communs dans le calcaire noduleux de Forêts. Nous terminerons par la comparaison des gites de Meudon et d’Af- flighem ; l’un et l’autre contiennent un calcaire plus ou moins friable, d’une couleur jaune d’ocre désagrégeable à l'air et composé de calcaire à gros grains de sable; la chlorite granulée de Meudon est remplacée par du fer à l’état d’oxide à Afflighem. Les fossiles trouvés à Meudon, sont les suivans : 1. Calyptræa trochiformis. 8. Tellina patellaris. 2. Terebellum convolutum. 9. Foluta harpæformis. 3. Ampullaria patula. 10. Modiola cordata. 4. Venericardia imbricata. 11. Turritella imbricata. 5. Pyrula lœvis. 12. Mytilus rimosus. 6. Lucina concentrica. 13. Turritella sulcata. 7. Lucina lamellosa. 14. Venus texta. DE LA PROVINCE DE BRABANT. 93 15. Cerithium giganteum. 21. Cytheræa nitidula. 16. Turbinolites. 22 Fungia Guettardi. 17. Cardium porulosum. 23. Pectunculus pulvinatus. 18. Pinna margaritacea. 24. Miliolites. 19. Crassatella lamellosa. 25. Cardita avicularia. 20. Orbitolites complanata. On voit combien est grande l’analogie entre ces deux gites. M. Élie de Beaumont ! cite à Cassel (département du Nord) des assises composées de sables quarzeux jaunâtres avec des veines ferrugineuses et du calcaire sablonneux, et contenant des nummulites en grand nombre, le Cerithium giganteum, le nautile analogue à celui de Chaumont, et qui paraît étre identique avec le nôtre (W. Burtini), des huïtres lisses et striées, probablement l’Ostrea [labellula, et les mou- les d’une crassatelle (C. tumida); ce gite a donc tant d’analogie avec les nôtres qu’il est difficile de la révoquer en doute. L'ensemble de ces caractères divers et la comparaison exacte de ces différens dépôts entre eux, nous ont suggéré les conclusions suivantes, tirées uniquement des faits géologiques et paléontologiques alliés en- semble : 1° Que l’âge relatif des sédimens composant tout le terrain qui com- mence aux collines crétacées liégeoises, et qui va finir dans la province d'Anvers, est identique avec celui de l'argile de Londres, de l’éle de Wight et du bassin de Paris. 2° Que cet âge relatif a été tiré de l’ensemble des fossiles qui ont donné un rapport de 3 à 4 espèces dont on retrouve lesanalogues vivans, sur 100 espèces fossiles observées; rapport établi par M. Deshayes comme caractérisant les formations les plus inférieures des terrains flu- vio-marins-supérieurs. 3° Que la plus grande partie de nos dépôts résultent d’actions méca- niques. 4° Que cependant, il y a eu des dépôts formés par voie chimique , ! Observations sur l'étendue du système inférieur dans le Nord de la France et sur les dépôts de lignites qui s'y trouvent (insérées dans la 1"° partie du tome 1 des Mémoires de la société géologique de France ; pag. 110. Paris, 1833). 94 SUR LA CONSTITUTION GÉOGNOSTIQUE qui ont donné lieu à des grès lustrés, à des grès quarzeux, à de la cal- cédoine et à de la chaux carbonatée métastatique. 5° Qu'il paraïtrait que cette chaux carbonatée a été formée aux dé- pens du test des coquilles qui aura été dissous par un liquide chargé d’acide carbonique. 6° Que la plus grande tranquillité a présidé à la déposition de tous ces sédimens, témoin la stratification horizontale du calaire noduleux, des grès fistuleux et noduleux, la disposition en couches régulières des coquilles et des dépôts argileux, l’atternance des divers produits et les lits de fer hydraté sablonneux. 7° Que la vitesse des courans sous-marins qui parcouraient, comme de raison, cette mer, a été peu considérable pendant la longue période durant laquelle se sont déposés les sédimens tritoniens. 8° Que l’on peut reconnaitre la direction d’un de ces principaux courans , dans le cours actuel de la Senne, par l’examen des collines qui bordent cette rivière et par la présence de fossiles d’eau douce qui démontrent évidemment un transport venant des rivages. 9° Que les endroits de la mer où venait expirer la force de transport des eaux fluviatiles s’exhaussaient de plus en plus par l'accumulation des sédimens qu’elles apportaient, et faisaient par conséquent reculer la mer, ou du moins, en rendaient les eaux moins profondes ; ce qui a permis à un grand nombre de coquilles littorales telles que les huitres, les nummulines, etc., aux crabes, aux écrevisses, etc., de s'établir sur ces bancs sous-marins; les gites de St-Gilles, de Forêts, d’Uccle, de Mels- broeck , prouvent cette vérité. 10° Que le pouvoir de transport de l’eau a toujours été uniforme et régulier, vu qu’on ne trouve point, comme à l’ile de Wight , des cailloux roulés qui annoncent des causes perturbatrices. 11° Qu’enfin l'abondance des sables, qui caractérise notre forma- tion, est due à des circonstances purement locales dépendant peut-être des terrains plus anciens , dont le détritus à formé nos dépôts. DE LA PROVINCE DE BRABANT. 95 CHAPITRE IV. TERRAINS FLUVIO - MARINS MOYENS. Synonvues. — Terrains de sédimens moyens et yzémiens pélagiques Al. Brong. Terrains secondaires, Cuv. et Brong., Aubuësson-des- Voisins , Rozet, Humboldt, Werner, etc. Terrains secondairesammonéens, D’Omal. d'Halloy. Super-médial order, Conyb. et Phillips. Flou-gebirge, Werner et autres géologues allemands. Nous ne possédons dans le Brabant qu’un seul membre parmi le grand nombre de ceux qui composent les terrains fluvio-marins moyens; c’est la formation crétacée qui est même fort peu développée et qui ne paraît nulle part isolée, étant toujours recouverte d’un chapeau tritonien. Formation crétacée. Syxoxyues. — Terrain crétacé, Omalius d’'Halloy. Terrains pélagiques crétacés, Al. Brong. Groupe crétacé, La Bèche. Formation crayeuse, Aub.-des-Voisins. Craie et sables verts, Rozet. Craie, Cuv. et Brong. Chalkformation , Conyb. et Phillips et des autres géologues anglais. Kreide des Allemands. Scaglia des Italiens. La formation crétacée ne se montre un peu à nu que dans les envi- caractères généraux rons de Jauche; partout ailleurs elle est recouverte par des dépôts plus nouveaux des terrains fluvio-marins supérieurs; le terrain ardoisier lui sert de base. Nous y avons reconnu trois étages, savoir : 1. Calcaire friable ou de Maestricht. 2. Craie. 3. Gault? Caractères. Roches subordonnées, 96 SUR LA CONSTITUTION GÉOGNOSTIQUE Le premier étage a été rapporté par M. Dumont au système supé- rieur du calcaire de Maestricht, dont il formerait même la partie supé- rieure, caractérisée par des cailloux de quarz noir, de quarz blanc et des grès blancs. Cette division étant d'accord avec notre manière de voir, nous nous rangeons de l’avis de ce savant, et nous comprendrons le calcaire friable de Folx-les-Caves dans la division qu’il lui a assignée, sous le seul nom de calcaire de Maestricht. Le deuxième étage ou craie proprement dite, est divisé en deux systèmes : A. Craie tendre avec beaucoup de silex. B. Craie assez dure sans silex. Le troisième étage comprend le gault des géologues anglais; c’est avec beaucoup de doute que nous rapportons au gault une argile bleuätre que l’on trouva sous la craie de Grez, en forant un trou; ses caractères minéralogiques et sa situation sont les seuls motifs qui nous aient engagé à l’en rapprocher. 1° Calcaire de Maestricht. Synonyuies. — Tuffeau de Maestricht, D’Omalius d’Halloy. Le calcaire de Maestricht est composé de grains de carbonate de chaux, présentant par conséquent une texture grenue, bien différente de celle de la craie blanche; les grains atteignent rarement la gros- seur du millet; vus à la loupe, ils sont arrondis. Le degré de cohésion qu’atteint la masse, varie assez pour que, d’un côté, elle s’égrène faci- lement au moindre choc, et que, de l’autre, elle soit dure et fort difficile à casser ; cette dernière variété est plus rare que l’autre ; on la trouve à Folx-les-Caves, donnant naissance à des blocs assez volumineux gisant en couches interrompues dans la variété friable. La couleur varie du blanc-jaunâtre au jaune peu foncé. Comme toutes les roches * calcaires, elle fait une vive effervescence dans les acides. Le calcaire de Maestricht contient, comme roches subordonnées, des grès disposés en couches ; ils sont formés de grains de quarz quel- DE LA PROVINCE DE BRABANT. 97 quefois mélés de calcaire ; ils sont durs, solides et sonores; la cassure en est unie; leur couleur varie entre le gris-jaunätre et le blanc-jau- nâtre ; on les a exploités pour paver. La puissance de la couche atteint environ 15 à 16 pieds; ces grès sont fossilifères et renferment des bé- lemnites (B. mucronatus?) et des huîtres que nous n’avons pu déter- miner. Le calcaire de Maestricht (de Folx-les-Caves) renferme en outre des lits de petits cailloux de quarz blanchâtre et de quarz noirâtre; la quantité de ces petits cailloux devient plus considérable, comme Pa remarqué M. Dumont, à une certaine profondeur; des bélemnites mucronées , des peignes, des huitres , dont quelques-unes couvertes de serpules, et d’autres coquilles brisées ou roulées accompagnent ces cailloux. Le calcaire de Maestricht n'offre par lui-même aucune stratification visible ; c’est une masse tout-à-fait indéterminable , mais les roches qu’il renferme font aisément parvenir à sa connaissance ; la stratification est indiquée comme étant horizontale par des blocs de calcaire de Maes- tricht beaucoup plus durs que la masse , et contenant des bélemnites, des huitres, des valves d'anatifes, des limes et des débris de poly- piers, et par les couches horizontales des grès. M. Dumont indique la stratification comme s’écartant un peu de lhorizontale; il assigne aux bancs une légère inclinaison vers le NO ; le peu d’étendue qu’occupe ce calcaire à Folx-les-Caves nous a sans doute empêché d'obtenir le même résultat. Nous ne savons rien sur la puissance de ce dépôt, il ne peut être fort considérable; le quarz grenu du système ardoisier apparaît à 1 lieue de là (Huppaye), dans un petit plateau situé à environ 50 à 60 pieds plus bas que le sommet de la colline de Folx-les-Caves ; l'exploitation a conduit jusqu’à la profondeur d’environ 30 à 40 pieds. Les immenses souterrains ou caves de Folx-les-Caves datent d’une époque très-reculée; ils ont servi tour à tour de carrières et d’asile à l’infortune et au crime : elles furent creusées dans le but d’en retirer des pierres de construction; ces pierres friables étaient employées à To. XII. 13 Stratification. Puissance. Usages. Fossiles 98 SUR LA CONSTITUTION GÉOGNOSTIQUE cause de leur légèreté, à former la partie supérieure des édifices, à élever des dômes, ou ces élégans arcs-boutans festonnés avec tant de gräce par les architectes de la période gothique ; l’abbaye de Villers près de Genappes a tous ses dômes, ses voûtes et les chapiteaux de:ses colonnes construits avec ce calcaire ou avec la glauconie grossière d’Orp-le-Grand, dont la légèreté explique l'emploi; il paraît aussi qu'on employa le calcaire de Maestricht à l’état arénacé pour amender les terres , prérogative que la craie tendre de Jauche lui a enlevée ; enfin le grès a été exploité comme pierre à paver. Détails locaux. Le calcaire de Maestricht n’est visible que vers un seul point de la province , ce point est Folx-les-Caves; son étendue paraît se borner au plateau sur lequel est situé ce village. La partie inférieure est un calcaire friable et grenu bien développé ; la partie supérieure consiste en ce même calcaire, qui renferme des blocs assez volumineux composés de la même substance endurcie ; mais ce qu'il y a de plus remarquable, c’est que les fossiles ont un aspect roulé : les côtes des peignes sont en partie effacées, les bélem- nites sont rarement entières, enfin les huîtres sont couvertes de ser- pules ; ces fossiles sont accompagnés de petits cailloux quarzeux de la grosseur d’un pois et au delà, Ces faits sembleraient mdiquer un chan- gement dans le cours des phénomènes; la couche des silex noirs con- firmerait cette opinion : en effet, ils indiquent qu’une période nouvelle va commencer, que la série des couches bélemnitiques est inter- rompue et que des causes perturbatrices signalent cette interruption ; mais , ils ne peuvent, selon nous, faire rien préjuger contre l'opinion émise que la même mer qui déposa les greensand, le gault, la craie et le calcaire de Maestricht, forma ensuite les dépôts infra-marins du Brabant; ils ne tendraient au contraire, qu’à la fortifier et à l’ap- puyer. Nous avons reconnu les fossiles suivans dans le calcaire de Maes- DE LA PROVINCE DE BRABANT. 19 tricht : Belemnites mucronatus. Ostrea vesicularis. Terebratula. Et une à deux autres espèces indéterminables. 3 Peignes indéterminables. Eschara. Lima. Serpula. Avicula. Fungia. Anatifa. Spatangqus. Achilleum. On trouve assez de fragmens de polypiers, mais brisés et impossibles à analyser. 2 Craie. La craie est un carbonate de chaux pur (Grez) ou un peu mélé d’ar- gile (Jauche); dans le premier cas elle est plus blanche , plus sonore, plus dure, sa texture est plus homogène et à grains plus fins que Le. le deuxième cas ; dans celui-ci, la craie est Fu blanc-jaunâtre, sa texture est terreuse; elle tache fortement en se collant aux étoffes. D’après bonté des silex dans l’une et leur absence presque complète dans l’autre, nous avons été porté à diviser cet étage en deux systèmes ou deux parties : A. Le système supérieur contient la craie très-tendre ou à silex; on peut suivre une petite bande composée de cette craie pendant un quart d'heure près de Jauche. Les silex y sont fort abondans et y sont déposés en lits interrompus; ce sont des tubercules plus ou moins bizarres dans leurs formes, des ovoïdes plus ou moins sphériques, dont la grosseur dépasse bien rare- ment celle de la tête, et toujours celle du poing. Ils sont presque tou- Jours recouverts d’une croûte calcaréo-siliceuse qui masque leurs couleurs; ils sont tantôt noirätres, tantôt et plus souvent d’un jaune- rougeâtre zoné de teintes plus rembrunies; leur cassure est conchoïdale ; ils sont légèrement translucides sur les bords. Caractères, Fossiles. Puissance. 100 SUR LA CONSTITUTION GÉOGNOSTIQUE Ces silex sont disséminés dans la craie en lits non continus, éloignés les uns des autres de 8 ou 10 centimètres au plus ; ils sont si nombreux que l’on peut dire sans se tromper qu’ils occupent autant de place que la craie, c’est-à-dire, qu’ils forment à eux seuls la moitié de ce système. Ce qu’il y a de remarquable, c’est que l’on ne trouve aucun fossile dans ce système; nous n’y avons même pas trouvé un fragment de bé- lemnite, coquille très-commune dans la craie sans silex. Sa puissance ne paraît guère aller au delà de 50 à 60 pieds. Rapports de gisement. Les rapports de gisement avec le calcaire de Maestricht ne sont point Usages Stralification. Silex. connus, quoique la craie de Jauche ne soit éloignée du calcaire de Folx-les-Caves que d’une demi-lieue au plus. Son seul emploi est d’amender les terres; elle est connue dans le pays sous le nom de marne. La stratification est indéterminable, mais elle est indiquée par les silex comme étant horizontale. B. Craie sans silex. Cette craie est plus dure et plus pure à la fois que celle de Jauche, aussi l’exploite-t-on à Grez près de Wavre pour en faire du petit-blanc. Les fossiles sont assez communs dans ce système ; leur test est assez bien conservé, mais souvent aussi il a entièrement disparu, et alors on n’en voit que l’empreinte; celui des échinides est spathifié. Nous avons dit que cette craie était caractérisée par l’absence des silex, cependant on en trouve, mais point disséminés dans la masse; ils sontréunis en gros blocs assez volumineux vers la partie supérieure, et y formantune couche non continue d’une épaisseur de 12 à 15 centi- mètres; ils sont immédiatement recouverts par les sables tritoniens. Les silex sont rarement noirs, leur couleur est le plus souvent le gris ou le jaune-rougeätre; tantôt la masse est unie, tantôt elle est agréablement zonée à la manière de certains jaspes ; leur texture est dense, compacte; la cassure en est conchoïdale; les bords en sont légèrement translu- cides. Ils se présentent sous forme de gros blocs tuberculeux à angles saillans assez vifs; ils contiennent aussi quelques coquilles (pecten et ostrea). DE LA PROVINCE DE BRABANT. 101 On a trouvé dans une galerie à Grez une grande poche creusée au : milieu de la craie et renfermant une argile verdätre, qui rougissait un peu au feu, mais en se réduisant en une terre friable et aride. Cette argile est mélée d’une certaine quantité de carbonate de chaux, et la couleur verte qui la caractérise est bigarrée de rubans d’une teinte brunâtre. Nous n’y avons point remarqué de fossiles ; la hauteur de cette poche pouvait étre d’un mètre, sa profondeur de 3 à 4. La puissance de la craie sans silex est de 40 à 50 pieds au plus (selon les ouvriers de Grez). La stratification est indiquée par de grandes fentes horizontales, qui sont sans doute les joints de la stratification : des fissures verticales di- visent la masse en grands solides à formes plus ou moins régulières. Les diverses exploitations de Grez nous ont fourni les fossiles sui- vans : 1. Poisson indéterminable. 7. 2 à 3 autres espèces d’huitres. 2. Belemnites mucronatus. 8. Pecten (2 espèces.) 3. — brevis ? 9. Lima. 4. Catillus Cuvieri (de beaux indi- 10. Avicula. vidus.) 11. Gryphæa. 5. Terebratula. 12. Spatangus. 6. Ostrea vesicularis. 13. Divers polypiers. Quoique les fossiles soient bien conservés, il est cependant fort dif- ficile de les avoir intacts. On emploie la craie à faire de la chaux et du petit-blanc ; on s’en sert aussi pour amender les terres. Les deux systèmes que nous venons de considérer n’ont aucun rap- port visible entre eux, mais il est probable qu'ils se rejoignent sous la masse des sables tritoniens et des glauconies qui les surmontent, en suivant la lisière de l’ancien continent schisteux, que l’on trouve à Huppaye , Jodoigne et Chapelle-S'-Laurent (voir la carte). 30 Gault ? Le qault consiste en une argile mêlée d’une petite quantité de car- Puissance Stratification Fossiles. Usages. Caractères. 102 SUR LA CONSTITUTION GÉOGNOSTIQUE bonate de chaux; cette roche a une texture terreuse; elle fait une pâte courte dans l’eau , dans laquelle elle finit par se désagréger : sa couleur est le gris-bleuûtre. Ses caractères minéralogiques, et sa situation au-dessous de la craie, sont les seules raisons qui nous aient porté à ranger cette argile à côté. du gault. Comme le gault de la province de Liége se présente avec des caractères minéralogiques semblables, il est assez probable que l'argile de Grez lui est aussi analogue sous le rapport géognostique. DE LA PROVINCE DE BRABANT. 103 CHAPITRE V. — TERRAINS HÉMILYSIENS OU SÉMI-CRISTALLISÉS. Synonvmies. —Terrains hémilysiens, D'Omal. d’Halloy, A1. Brong. Ter- rains intermédiaires, Awb. des Voisins. Terrain de transition, Æumbold, Rozet, Charpentier et d'autres géoloques. Transition, and transitory Rocks des géoloques anglais. Sub-médial order, Conyb. et Phillips. Uebergangs- gebirge , des géoloques allemands. Roccie di transizione, des gcoloques italiens. Nous ne possédons qu’un seul membre des terrains hémilysiens ; ce membre consiste en un ensemble de roches diverses constituant une formation schisto-psammitique assez étendue. FORMATION SCHISTO-PSAMMITIQUE OU ARDOISIÈRE. Synonyues. — Terrain ardoisier, D’Omal. d’Halloy. Terrain hémilysien schisteux ou traumateux, 47. Brong. Traumate et schiste traumatique , Aub. des Voisins. Groupe de la grauwacke, La Bèche. Schistes intermé- diaires, Cordier, Rozet. Grauwacke et Grauwackenschiefer , des géoloques allemands. Aeltere-Grauwacken-Formation, À. Boué. Greywacke et Grey- wacke-Slate des géoloques anglais. Grauwake, Brocchi. La formation schisto-psammitique ou ardoisière est principalement composée deschiste-ardoise, de psammites et de quarz-grenu ; le passage qui s'établit naturellement entre ces roches, se fait par une suite de modifications dans la texture, la structure et le coloris, qui sont telle- ment graduées qu’elles deviennent insensibles à l'œil et par conséquent difficiles à suivre et à observer. Des roches de nature évidemment plutonique ou ignée se sont fait Composition. 104 SUR LA CONSTITUTION GÉOGNOSTIQUE + jour à travers les couches du schiste ardoisier, avec lequel elles sem- blent se lier par une roche particulière, qui n’est autre chose qu’un schiste porphyroïde. La fixation de l’époque de lapparition de ces roches plutoniques est un des points les plus difficiles de l’histoire géognostique de notre pro- vince. Nous devons avouer que nous ne sommes point parvenu à tran- cher la question , seulement il nous paraît prouvé que cette apparition est assez postérieure à la déposition du schiste. Nous commencerons donc par l'étude des roches plutoniques comme étant les plus nouvelles. 5 1° ROCHES PLUTONIQUES. Nous distinguons sous ce nom deux espèces de roches, savoir : 1° Ze Diorite ; 2° le Schiste porphyroide. DESCRIPTION DES ROCHES. 1° Dionre. Hauy. Syxonvures.— Grœnstein, Linné. Grunstein, Æerner. Granitel, Galitz. Ophite, Palas- sou. Chlozitin, Haberlé. Diabase, Al. Brong., Aub., des Voisins. Greenstone des Anglais. à LL Une masse minérale que l’on exploite à Quenast (Brabant) et à Les- sines (Hainaut) présente des variations de texture et de composition qui en rendent la classification parmi des roches plutoniques déjà connues assez difficile ; mais le nom général de diriote que M. D’ Omalius d'Hal- loy ” lui ser nous semble appliqué avec raison. Le diorite est une roche essentiellement composée de feldspath, soit en cristaux ébauchés, soit amorphe et grenu, et d’amphibole vert com- muniquant sa couleur à la pâte ; on peut regarder comme partie acces- soire des points verdâtres, et quelquefois rosâtres de stéatite; cette substance se lie intimement avec la pâte, mais elle n’est point aussi ! Mémoires cités, page 39. # < DE LA PROVINCE DE BRABANT. 105 abondante à Quenast qu’on l’a cru jusqu’à présent. Beaucoup de taches et de points verts sont dus à l’épidote ; et comme parties accidentelles, des grains disséminés de quarz hyalin ; cette substance se trouve aussi sous forme de petites masses transparentes d’une belle couleur enfu- mée ; des cristaux ébauchés de fer titané ; rarement des lamelles de mica, et enfin de l’épidote tantôt aciculaire, tantôt en petites masses. Quelquefois l’'amphibole disparait, et il ne reste plus qu'une masse composée d’une pâte feldspathique et de cristaux de la même subs- tance ; les globules d’épidote sont assez abondans dans cette variété de la roche de Quenast. Ces faits nous expliqueront sans doute pourquoi M. Brongniart ”, sur la foi de quelques échantillons, avait nommé notre roche, eurile graniloïde ; mais ce nom ne peut nullement convenir à toute la masse, ni même à la fraction que nous considérons, qui mé- rite plutôt le nom de ewrite porphyroide épidoteux ; cette variété contient moins de cristaux informes ou grains de quarz; nous n’y avons _point observé de matière stéatiteuse. # D’autres fois la diorite renferme des sphéroïdes plus ou moins volu- mineux d’une diorite grenue, composée d’une pâte vert-foncé, à texture grenue; il est souvent fort difficile de reconnaitre le feldspath tant il est intimement lié avec Pamphibole; la couleur verte ou grise de ces sphéroïdes les fait aisément distinguer au milieu de la pâte variée qui les renferme. Cette variété se rapproche donc assez de la diorite orbi- culaire de M. Brongniart * : les sphéroïdes renferment du fer titané en petits points noirs. Outre les sphéroïdes de diorite grenue, on en ren- contre composés de diorite schistoïde et compacte d’un volume même assez fort. La structure de la diorite est très-variée; sa texture est toujours plus ou moins empâtée ; la pâte en est ou compacte ou grenue, et les parties anguleuses donnant lieu à la texture empâtée, sont régulières ou quelquefois sphéroïdales; la cassure en est, ou conchoïde ou droite, et tantôt ondulée ou raboteuse ; la ténacité et la grande dureté ! Classification et caractères minéralogiques des roches, pag. 75 , n° 3. Paris, 1827. ? Ouvrage cité, page 81. ï Tou. XII. 14 Eurite porphyroïde, Diorite orbiculaire. Décomposition 106 SUR LA CONSTITUTION GÉOGNOSTIQUE de cette roche rendent raison des immenses exploitations de Quenast. La diorite est peu éclatante, passant au brillant ; son éclat est gras; les fragmens minces sont un peu translucides; elle donne par l'expiration une odeur argileuse et amère qui, comme l’on sait, caractérise les roches amphiboliques; cette odeur est surtout très-forte dans des diorites compactes qui composent quelquefois d'énormes boules sphériques, résultant d’une antique décomposition. Quand on considère un échantillon de diorite, on observe que la base est composée d’un feldspath plutôt lamellaire que compacte et d’amphibole très-rarement appréciable ; dans ce dernier cas elle est grenue, à grains fins et peu serrés ; c’est cette substance qui donne à toute la masse une teinte verdatre, teinte tempérée par l'abondance des cristaux parallélipipèdes d’un /eldspath blanc-verdätre. Nous avons observé de ces cristaux qui étaient colorés en rose, peut-être par la matière stéatiteuse de même couleur qui y est plus ou moins abon- dante; la stéatile se présente tantôt avec une couleur verdâtre , tantôt avec une teinte rosâtre; elle est infusible au chalumeau, insoluble dans les acides ; son éclat est gras, un peu lustré; elle se laisse rayer par une pointe d'acier, enfin elle est onctueuse au toucher. L’épidote est d’un vert-jaunâtre, se présentant le plus souvent dans la roche sous forme de petites masses globuleuses, grenues ou un peu lamellaires, brillantes, inattaquables par les acides, mais se fondant sur les bords par l’action du chalumeau. Cette substance communique quelquefois une couleur vert-jaunâtre à la pâte; on trouve aussi l’épidote sous forme de prismes plus ou moins déformés et cylindroïdes , dont la réu- nion donne naissance à des étoiles fort jolies ; le même échantillon offrira des grains et des masses d’un beau quarz hyalin enfumé, des cristaux et de petites masses amorphes de fer sulfuré et de fer titané. Les couleurs de la diorite sont le verdàtre passant au jaunätre et au bleutre , le vert foncé passant quelquefois au noirâtre et le rosâtre. La diorite, de même que toutes les roches dont le feldspath est l’une des parties constituantes, est altérée dans plusieurs parties; c’est par laltération du feldspath que la décomposition de la diorite commence. DE LA PROVINCE DE BRABANT. 107 Le feldspath perd sa teinte verdatre, devient blanchâtre et terne ; l’amphibole perd de son éclat, sa couleur verte passe au jaune-brunâtre ; bientôt après apparaissent des taches brunes et de couleur de rouille, dues à la décomposition des pyrites, du fer titané et oxidulé qui se trouvent dans la roche; ces taches s’agrandissent et finissent par com- muniquer à toute la masse une teinte de rouille ; pendant ce temps, le feldspath devient de plus en plus opaque et terreux; enfin la dernière phase de la décomposition n’offre plus qu'une terre argileuse vert-jau- nâtre ou ocracée, que la simple pression du doigt réduit en poussière; ce sont principalement les parties dioritiques les plus épidotiques qui ont souffert cette altération. Ce sont surtout les parties supérieures du dyke dioritique qui sont décomposées et qui présentent un phénomène semblable à celui que l’on observe dans les granites ; nous voulons parler de certaines masses intactes à côté d’autres réduites en une poudre argileuse; on peut même observer à Quenast un filon, variant d'épaisseur, nommé par les ouvriers, banc pourri, entièrement composé d’une terre argileuse rude au toucher et de couleur verte; ce filon traverse des masses intactes d’une belle diorite. Les joints des fissures ont fort souvent une couleur de rouille, la roche y est friable et le feldspath est en état de décomposition. La diorite a encore subi un autre genre de décomposition, c’est celle par laquelle cette roche a été divisée en masses globuleuses ou en boules sphéroïdales, dont le diamètre varie depuis quelques pouces jusqu’à plusieurs pieds. Ces boules gisent dans de la diorite décomposée et quelquefois dans des sables et du gravier diluvien , qui se sont in- troduits dans les cavités et les vides qui séparaient ces boules. Nous n'avons pu reconnaître si ces boules, qui sont fort dures, sont formées de pièces concentriques ; cependant , quelques-unes des plus grosses se délitaient par le choc en grandes plaques peu épaisses et se rappro- chant de la forme concentrique; la surface de ces plaques est souillée par un mince enduit d’hydrate de fer. La diorite qui compose ces boules est d’un vert plus foncé que celle Stratification-. Fissures accidentelles, 108 SUR LA CONSTITUTION GÉOGNOSTIQUE du reste de la masse; sa composition ne peut soulever de discussions comme l’autre, c’est une véritable diorite, à pâte grenue ou sub-com- pacte; quelques cristaux de feldspath blanc-bleuâtre lui font donner l’épithète de porphyroïde; quelques boules sont cependant compo- sées de diorite porphyroïde rosàtre et verdätre. Cette tendance à s’altérer parait ne plus s’exercer très-fortement sur cette roche, quoique la décomposition 2x situ soit encore un peu en activité; mais cette altération semble être due, comme l’observe M. D'Omalius d’Halloy, à des phénomènes qui n'existent plus. Les cailloux roulés et les sables que nous avons aperçus enveloppant quel- ques-uns de ces sphéroïdes à dimensions grandioses, démontreraient aussi qu’elle est antérieure à la période alluvienne ancienne; peut-être ces parties, qui nous représentent la tête du dyke plutonique, ont- elles en partie subi ces avaries lors de leur apparition au jour ? La diorite de Quenast n’est point stratifiée; de grandes fissures acci- dentelles, provenant sans doute du retrait occasionné par le refroïdis- sement de la roche, mduisent facilement en erreur par leur fréquent parallélismes. Nous avons plusieurs fois examiné toutes les carrières, afin de nous convaincre si les apparences étaient trompeuses ou vraies ; mais, tantôt les fissures inclinent à l'Ouest et se dirigent du SE au NO, tantôt elles inclinent au contraire à l'Est, en se dirigeant du SO au N; quelquefois ces fissures sont coupées par d’autres sous un angle presque droit, et dont la direction et l’inclinaison sont également très- variables. Il est surtout une carrière plus rapprochée du village de Rebecq, dans laquelle ces fissures sont assez régulières et parallèles entre elles pour faire croire à la stratification; mais la vue d’une autre carrière fait bientôt revenir de cette illusion. Les fissures accidentelles qui traversent la diorite en tous sens, sont peu postérieures à l'apparition de la roche; l’épidote, le fer titané et sulfuré qui recouvrent leurs parois prouvent cette assertion. Le croise- ment des fissures dirigées en divers sens, divise naturellement la roche en énormes parallélipipèdes plus ou moins irréguliers. DE LA PROVINCE DE BRABANT. 109 C'est sans doute à ces fissures accidentelles que l’on doit attribuer l’origine des boules on masses globuleuses, parce que c'était par elles que l'air et l'humidité pénétraient la roche, l’attaquaient et finissaient par la décomposer. On n’a jamais trouvé de fossiles dans la diorite. Fossiles. Cette roche, par sa ténacité remarquable, donne lieu à de grandes ussse. L4 exploitations qui se font à ciel ouvert; on détache le roc au moyen de la poudre, on débite les grandes masses en cubes de 8 à 10 pouces, qui servent à paver les grandes routes et les rues des villes. On compte dix à douze exploitations toutes situées à côté les unes des autres. Ses rapports géognostiques avec les roches environnantes sont peu connus ; cependant, le schiste qui avoisine la diorite est sensiblement _altéré: sa couleur verdâtre est remplacée par une teinte noirâtre et grise, qui lui donne l’aspect de certains schistes houillers, ressem- blance tellement frappante, qu’elle a engagé les habitans de Rebecq à enfoncer un puits d'exploration dans l'espérance d’y trouver de la houille. Déjà les anciens avaient poussé une galerie de recherche, mais qu'ils avaient abandonnée en désespoir de cause ; maintenant les tra- vaux sont poussés avec vigueur à travers des couches verticales de schiste ardoise noir ; une couche de schiste décomposé ayant été prise pour de la terre-houille, a fait redoubler le zèle des exploitans ; la bure d'exploitation est à 10 ou 15 pieds au plus de la diorite….. Une galerie que l’on pratique en ce moment ! pour l’assèchement de quelques carrières, a présenté un schiste ardoisier grisätre passant au noirètre et renfermant une couche mince de schiste décomposé en une terre argileuse. Des personnes nous ont assuré que les parois de la diorite en contact avec celles du schiste, étaient très-unies et polies ; les parois du schiste étaient aussi fort brillantes et lisses. D’après l’inclinaison des couches du schiste, la diorite constituerait un véritable dyke ou énorme filon plutonique parallèle au plan des 1 Cette galerie offrira des résultats très-intéressans , elle doit avoir atteint la diorite pour le mois de mars 1835. Rapports de gisement. 110 SUR LA CONSTITUTION GÉOGNOSTIQUE couches (voir planche des coupes n° 2); cette manière d’être corres- pond parfaitement avec celle de la plupart des dykes plutoniques con- nus; nous en avons nous-même observé de fréquens exemples dans le Hundsdruck, en Saxe et au Harz. . À quelle époque faut-il rapporter l'apparition de cette roche? M. D'Omalius d’Halloy, dans son Cours de géologie, a rangé la diorite de Quenast dans son terrain porphyrique rouge, à cause des grains de quarz qu’elle renferme; mais il ajoute avec raison que la couleur verte qui caractérise cette roche et ses grains de stéatite la rapprochent du terrain serpentineux ou de son terrain porphyrique vert: ce serait peut- être avec celui-ci que nous serions d’avis de la ranger, puisque les diorites de Pitet et d'Hozémont ne présentent point de grains de quarz; mais la classification de notre roche plutonique dans l’un ou lautre des terrains indiqués par M. D'Omalius d'Halloy ne nous indiquerait pas l’époque de l'apparition. Beaucoup de terrains schisteux présentent des dykes plutoniques semblables au nôtre, et avec eux naissent les mêmes embarras sur leur origine, ce qui a fait dire à M. La Bèche ” « qu’il n’était pas certain si ces couches (dykes) n’avaient pas été pro- duites à la même époque que celles au milieu desquelles elles sont renfermées. » La diorite de Quenast a beaucoup d’analogie avec la diorite de Brest, observée par M. D’Omalius d’Halloy; avec celle de Coblence (intercalée dans le schiste ardoisier), et une certaine similitude de gisement avec celle décrite par M. Charpentier * sous le nom d’Ophite, et dont l’âge d'apparition a été rapporté par M. À. Boué à une époque antérieure au calcaire alpin. Peut-être serait-ce à une période analogue qu’apparut notre diorite : le manque de dépôts plus nouveaux que les schistes est un grand obstacle pour la détermination précise de cet âge. M. Sedgwick * a trouvé dans la forêt de Charnwood (Leicestershire) des schistes argileux verdâtres, alternant avec des masses tabulaires ! Manuel Géologique, traduit par M. Brochant des Villiers, pag. 548. Paris, 1833. 2? Essai sur la constitution géognostique de Pyrénées. Paris , 1823. 5 London and Edinburgh philosophical Magazine, pag. 68. Janvier 1834. DE LA PROVINCE DE BRABANT. dun de porphyre. L'époque du redressement est postérieure aux dépôts carbonifères et antérieure au dépôt du nouveau grès rouge : de ces comparaisons nous serions porté à croire que l'apparition de nos dio- rites date d’une époque semblable, c’est-à-dire qu’elle serait anté- rieure au grès rouge ou au calcaire alpin , et qu’elle se placerait à côté de celle des ophites des Pyrénées, des grünstein du Harz et du Hundsdruck ; du reste, nous avouons que la solution du problème est trop au-dessus de nos forces, pour que nous tentions, privés comme nous le sommes de données assez sûres, de discuter plus au long un point aussi difficile. Peut-être la diorite, par le peu de perturbations qu’elle semble avoir occasionné dans le schiste, et par l'espèce d’alternance qu’elle a avec le terrain ardoisier (alternance déterminée par des schistes porphy- roïdes), rentre-t-elle dans la classe des roches problématiques de M. La Bèche ? La diorite forme près de Quenast une petite colline peu étendue , à Détails tocaux. côtes arrondies, surmontée d’un plateau : vers le centre apparaissent des pics dioritiques; toutes les autres parties sont surmontées d’une couche assez épaisse de terre végétale ; la hauteur de cette colline au-dessus du niveau de la Senne parait étre d’environ 80 pieds; les collines en- vironnantes sont un peu plus élevées et le schiste ardoisier l'entoure de toutes parts. 20 SCHISTE PORPHYROÏDE. Nous rangeons dans le schiste porphyroïde ‘ des roches à texture porphyroïde et à base de schiste ardoisier, dont quelques-unes passent à une diorite schistoïde par la dureté de la masse et par la couleur vert- sombre qui les caractérise alors; mais la présence du fer sulfuré épi- 1 M. D'Omalius d’Halloy le range dans le psammite porphyroïde , et, en effet, il contient du mica , mais en petite quantité; comme toutes les roches qui environnent ce schiste porphyroïde sont uniquement schisteuses et contiennent les mêmes minéraux que lui, et que les psammites sont rares aux environs, nous avons été d'avis de ranger ces roches parmi les schistes plutôt que parmi le psammite. Caractères. Minéraux disséminés, 112 SUR LA CONSTITUTION GÉOGNOSTIQUE gène, du fer oxidulé octaèdre, et la pâte de schiste tendent à rapprocher ces roches plutôt du schiste porphyroïde que d’une véritable diorite. Le schiste porphyroïde est une roche à texture empâtée, à parties anguleuses régulières, constituées par des cristaux souvent fort nets de feldspath (Lembeek) et de grains plus ou moins volumineux de quarz hyalin limpide ; quelquefois la masse devient presque compacte (Glabbeek), d’autres fois au contraire elle a l'aspect d’un porphyre (Lembeek) et même d’une anagénite, lorsque les parties constituantes acquièrent un volume plus considérable ; c’est sous ce nom que M. En- gelspach-Larivière désignait une variété à gros grains de Lembeek , mais un examen un peu attentif ne peut faire adopter cette manière de voir. La dureté du schiste porphyroïde est variable : assez tendre près de Lembeek, il devient dur et assez difficile à casser, soit à cause de sa structure empâtée (Lembeek), soit à cause de sa structure presque compacte comme à Glabbeek (à la montagne de Glabbeek). La couleur du schiste porphyroïde est le vert variant du jaunâtre au grisätre-foncé ; la roche signalée par cette dernière couleur acquiert une grande dureté et passe à une espèce de diorite schistoïde (près Lembeek) bien caractérisée. La pâte du schiste porphyroïde est un schiste plus grenu que celui environnant ; ce schiste est quelquefois onctueux et luisant (Lembeek), mais le plus souvent cette pâte a une texture terreuse, empätant des cristaux ébauchés de feldspath blanc-opaque, et rarement quelques paillettes de mica blanc et de tale grisâtre. La cassure en est ou terreuse, ou grenue, ou raboteuse; l’éclat en est mat ou un peu scintillant au soleil; ces schistes répandent une forte odeur argileuse par l'expiration ; leur pesanteur spécifique diffère peu de celle du schiste ardoise ordinaire. Le schiste porphyroïde renferme de nombreux cristaux de feldspath dont quelques-uns sont susceptibles d’être analysés; et se rangent dans les variétés binaire et dihexaëdre de Hauy; mais le plus souvent ces cristaux sont déformés et cylindroïdes ; leur couleur est le blanc-mat DE LA PROVINCE DE BRABANT. 113 ou le blanc-rougeàtre ; en se brisant, ils offrent une structure lamel- laire ou sublaminaire; ils se fondent au chalumeau en émail blanc de porcelaine; quelques cristaux de feldspath ont jusqu’à 7 à 8 lignes de long. On y rencontre aussi du quarz hyalin non cristallisé; il est dissé- miné dans la pâte sous forme de grains limpides ou translucides et d’une grosseur variable ; à Lembeek ils atteignent le volume d’un petit pois, tandis qu’à Glabbeek ils sont fort petits ; l'éclat vitreux de ces petits grains les sépare facilement du feldspath dont l’éclat est ou mat, ou nacré ; la couleur du quarz est le jaunâtre ou le blanchâtre. Le mica se trouve en petites paillettes peu nombreuses d’un blanc nacré éclatant. Le falc est rare : on l'y trouve sous forme de petites paillettes allon- gées, grisätres ou blanchätres ; son onctuosité et son aspect gras servent à le séparer du mica, avec lequel il est aisé de le confondre. Le fer oxidulé est disséminé dans la masse en petits octaëdres presque microscopiques ; ils sont d’un noir-bleuâtre éclatant et agissent sen- siblement sur l'aiguille aimantée ; sa dureté est de nature à rayer le verre. Le fer oxidulé se trouve surtout dans le schiste porphyroïde de Lembeek. Le fer sulfuré épigène s’y rencontre en cubes plus ou moins parfaits, dont le volume ne dépasse guèreun centimètre, et à surface plus ou moins épigénée ou altérée; il est plus commun de le trouver en petits cubes d’une ou de deux lignes au plus ; on ne trouve fort souvent dans la ro- che que la place qui était occupée par les cristaux, et qui est restée libre par leur décomposition. Le schiste porphyroïde est très-clairement stratifié ; les couches sont suratiñeation. généralement plus puissantes que celles du schiste ardoisier ; leur incli- naison varie entre 45°, 50° (Glabbeek), 80 et 85° (Lembeek) ; cette inclinaison se fait à POSO; la direction générale est parallèle à celle des schistes environnans, c’est-à-dire, du SSE au NNO. Les feuillets du schiste porphyroïde sont peu nombreux : souvent on ne peut même les apercevoir (Lembeek), mais quand ils existent, Ton. XII. 15 Fissures accidentelles. Fossiles Usages. Rapports de gisement, 114 SUR LA CONSTITUTION GÉOGNOSTIQUE ils sont parallèles à la stratification ; la surface de ces feuillets est co- lorée en jaune-brunâtre par l’hydrate de fer provenant de la décom- position du fer sulfuré. De même que dans la diorite, des fissures accidentelles traversent les schistes porphyroïdes et divisent la masse en polyèdres et en pa- rallélogrammes irréguliers. Nous n'avons jamais remarqué de fossiles dans ces schistes. Le schiste porphyroïde de Glabbeek ayant une certaine dureté, et offrant d’assez grandes masses continues, a été employé pour construire des écluses au canal de Charleroy; on en a fait des dalles assez solides. Le schiste porphyroïde passe au schiste ardoisier verdâtre par des nuances insensibles, ainsi qu’on peut fort bien l’observer à Glabbeek ; la première roche que l’on aperçoit près de ce village est un schiste verdâtre qui ressemble plutôt à un schiste argileux qu’au schiste ar- doise commun. En montant la colline qui conduit au château de Glab- beek, on voit ce même schiste devenir jaunâtre, plus grenu , friable ; quelques points feldspathiques commencent à paraître; ils augmentent de plus en plus et avec eux la pâte devient plus grenue. La couleur est long-temps avant de se décider à une teinte uniforme, qui sera le vert-jaunâtre assez foncé. Avec cette couleur, la roche devient dure et peu schistoïde; le schiste porphyroïde avant de passer à cette dernière phase est très-facilement décomposable en un sable argileux, raboteux et verdâtre. À Lembeek le passage se fait plus brusquement, le schiste verdâtre se charge de feldspath et d’un peu de quarz; il est d’abord assez tendre, mais il devient bientôt après dur, solide et sonore; sa couleur s’assombrit fortement, il raie facilement le verre et se casse en éclats anguleux et tranchans. On peut remarquer ces phénomènes dans des couches presque verticales qui plongent dans le canal; l’épais- seur des couches va jusqu’à 4 à 5 pieds. Les rapports de ces schistes avec la diorite de Quenast, dont ils ne sont éloignés que d’une à deux lieues, ne nous sont point connus; cet espace est recouvert d’une couche assez épaisse de terre végétale qui empêche de faire des observations suivies. DE LA PROVINCE DE BRABANT. 115 La transformation de ces schistes, primitivement verdâtres et ar- doisiers , est un effet des agens pyroïdes qui ont donné naissance à la diorite et qui ont modifié la texture des schistes dans certains endroits, de manière à les rendre porphyroïdes. Nous pensons que ces schistes ainsi modifiés sont la partie supérieure de petits filons dioritiques trop peu considérables, et dont le pouvoir d’ascension était trop faible pour étre capable de vaincre la haute pression que lui opposait la masse schisteuse; mais l'effet le plus marqué de ces résultats pyroïdes, a été d'attaquer les schistes de telle manière qu’il les modifia considérable- ment en leur imprimant un caractère porphyroïde. Des ouvriers nous ont assuré que si on creusait plus profondément à Glabbeek, on ob- tiendrait une pierre aussi dure qu’à Quenast... Le schiste porphyroïde forme près de Glabbeek une petite butte qui se rattache à un système de collines schisteuses d’une hauteur beau- coup plus considérable; l’exploitation est maintenant abandonnée et remplie d’eau. À Lembeek ce même schiste forme de petites élévations qui vont rejoindre celles de Glabbeek , mais l’espace compris entre ces deux localités est entièrement composé de schiste argileux verdâtre. Le creusement du canal de Charleroy en a montré d’assez rapprochés de Hal. La formation schisto-psammitique, ou ardoisière proprement dite, est composée des roches suivantes : 1° Quartz grenu; 2° Psamimile schistoide ; 3° Schiste ardoise commun. DESCRIPTION DES ROCHES. 19 Quarz ere ! (Saussure, D'Omal. d’'Halloy). Le quarz grenu est une roche assez abondante dans le Brabant ; 1l se trouve toujours vers les limites septentrionales de la formation ar- doisière (Tourneppe, Sart-Moulin , Piétrebais, Jodoigne et Huppaye), dont il semble être, pour ainsi dire, l’avant-poste. Cette roche consiste en un quarz d’une texture quelquefois si serrée, qu'il passe à une ! C'est le quarz compacte de M, de Charpentier, Détails locaux. Caractéres. Stratification. Fossiles. Usages. 116 SUR LA CONSTITUTION GÉOGNOSTIQUE masse subcompacte qui se rapproche beaucoup du quarz compacte des Pyrénées, et d’une dureté parfois si grande, qu’il devient fort dif- ficile à casser. La cassure en est un peu raboteuse , quelquefois un peu cireuse, d’autres fois presque unie ou passant à l’écailleuse. Le quarz grenu est mat, rarement son éclat est-il un peu cireux ou légèrement vitreux; il est un peu translucide sur les bords. Ses fragmens sont à angles assez vifs et tranchans. Ses couleurs sont : le gris-bleuâtre (Jodoigne-Souveraine), le jaunâtre (Huppaye), le jaune-grisâtre et rougeâtre (Tourneppe, Sart-Moulin et Piétrebais), enfin le noir-bleuatre (Jodoigne-Souveraine); cette dernière variété est souvent traversée de veines de quarz blanc laiteux, offrant des fentes tapissées de cristaux prismés de quarz hyalin limpide ; ces veines de quarz sont quelquefois colorées d’une légère teinte de rose, et font alors un fort joli effet sur le fond noir et gris de la masse. Les variétés grisâtres et jaunàtres con- tiennent aussi des veines plus ou moins puissantes de quarz hyalin approchant parfois du vitreux. Le quarz grenu est toujours amorphe; il est tantôt pur, tantôt mêlé de quelques paillettes de mica. IL est fort difficile d'observer la stratification de cette roche; Jodoigne- Souveraine est réellement le seul endroit où l’on puisse s’assurer du fait. Le quarz grenu y est stratifié en bancs épais inclinant d’environ 45° vers l'E; de grandes fentes souvent perpendiculaires aux joints de stratifica- tion et quelquefois parallèles entre elles, tendent singulièrement à aug- menter la difficulté dans laquelle on tombe au sujet de cette stratification. Les parois des joints de stratification et celles des fissures sont ordi- nairement recouvertes d’un enduit couleur de rouille , dù à la présence d’une petite quantité d'hydrate de fer. Les fentes accidentelles divisent le quarz grenu en grandes masses presque rhomboïdales. Le quarz grenu ne contient point de fossiles. On emploie cette roche à faire des pavés, qui sont d’une grande solidité; les routes de Brainel’Alleud, de Tourneppe , de Jodoigne, etc. , ont été payées avec le quarz grenu provenant d'exploitations établies à Tourneppe , Sart-Moulin , Huppaye et Nil-Pierreux. DE LA PROVINCE DE BRABANT. 117 Le quarz grenu passe au schiste par une série de nuances presque rapport de gisement insensibles ; ce passage se fait surtout par l'intermédiaire du mica, qui, en augmentant plus ou moins rapidement dans la masse quarzeuse, donne lieu à des couches moins épaisses et plus nombreuses d’un quarz micacé ou psammite quarzeux beaucoup moins dur que le quarz grenu. Ce psammite passe rapidement au psammite schistoïde micacé, et bientôt après ce n’est plus qu’un schiste ardoisier verdâtre plus ou moins tendre. Quelquefois le quarz grenu passe à une espèce de grès micacé assez tendre et de couleur blanche ou rougeatre. Le quarz grenu n’occupe point d'espaces étendus, mais il est ré- étais locaux. pandu cà et là dans des vallées assez profondes; tantôt, il se présente en masses arrondies comme à Chapelle-St-Laurent, tantôt, en rochers à formes aiguës comme à Jodoigne-Souveraine (voir la planche des coupes); les roches de cette dernière localité sont sans doute un pro- longement de celles de Huppaye. Le plateau formé par le quarz grenu de Huppaye s'étend jusqu’au bord du ruisseau près duquel apparaissent les rochers de Jodoigne-Souveraine ; des dépôts sablonneux cachent les rapports qui existent entre ces deux gites. Le quarz grenu apparait près de Tourneppe au bord du ruisseau; on peut le suivre pendant le court espace de S à 10 minutes, après lequel il disparait sous les allu- vions fluviatiles, mais il va reparaître une lieue et demie plus loin, à Sart-Moulin. Les roches arrondies de Chapelle-St-Laurent lient par leur forme , leur couleur et leur aspect, les rochers de Tourneppe et de Sart-Moulin à ceux qui apparaissent près d’un moulin à Wavre, ro- chers qui sont les avant-postes du terrain ardoisier situé à moins de deux lieues de là. Le quarz grenu de Nil-Pierreux est également situé au bord d’un ruisseau. 2 Psaumire somsroïve, A7. Brong. SYNONYMES. — Quelques Grauwackenschiefer, des gcoloques allemands. Grauwake schisteuse, Charpentier et d’autres géoloques. Le psammite schistoïde est une roche composée d’une pâte argilo- carctères. Stratification. 118 SUR LA CONSTITUTION GÉOGNOSTIQUE sableuse parsemée d’une multitude de paillettes de mica, disposées dans le sens des feuillets, ce qui tend à rendre cette roche très-schis- teuse et fissile. Le mica est quelquefois si abondant (Thy, près Bousval) qu'il rend la roche fragile, se brisant difficilement, mais se déchirant pour ainsi dire. La dureté du psammite est variable ; tantôt il raie for- tement le verre (Fouqué, Villers), tantôt il se laisse tailler au couteau (Thy). Sa couleur est le grisâtre, variant du vert-grisätre au vert-jau- nâtre et au brunâtre. Sa cassure est irrégulière, le plus souvent elle est droite. L’éclat varie selon l'abondance du mica, qui tantôt com- munique un lustré soyeux éclatant, tantôt produit un scintillement plus ou moins vif; la pâte par elle-même est dépourvue d'éclat, son aspect est terreux ou grenu ; sa texture passe quelquefois à la subcom- pacte. Il est rarement traversé par des couches ou filons de quarz blane laiteux présentant des fentes où scintille du quarz hyalin prismé. La stratification du psammite schistoïde est parallèle à celle du schiste ardoisier ; les feuillets sont nombreux, assez réguliers, quel- quefois un peu contournés, parallèles aux joints de stratification et font avec l'horizon un angle de 50 à 55°; rarement les feuillets sont obliques à la stratification, en formant avec elle un angle de 5 à 10o. | La direction des strates est du SSE au NNO avec une inclinaison de 40 à 60° vers l'ENE (Thy, Châtellet, Villers, Genappes, etc.), et avec une autre inclinaison variant entre 50 et 80° vers l'OSO (Fouqué, près Bornival, etc.). Ces deux différentes inclinaisons tendent à former un bassin dont le centre est maintenant occupé par des dépôts trito- niens , et dont les deux extrémités apparaissent, l’une près de Hal et de Nivelles, formant une presqu’ile en forme de langue qui s’avance dans le sol plus nouveau du Brabant , et l’autre entre Genappes et Wavre, donnant naissance à deux bandes rendues irrégulières par les sédimens tritoniens qui surmontent les collines, dont les schistes et les psammites forment les bases. La surface des feuillets est souvent recouverte d’une croûte noirâtre DE LA PROVINCE DE BRABANT. 119 ou brunâtre, due à de l’hydrate de fer qui y forme des teintes et des zones plus ou moins rembrunies et plus ou moins variées. Des fissures accidentelles sillonnent en tous sens les roches psam- mitiques; quelques-unes renferment du psammite décomposé, d’au- tres du fer hydraté à l’état pulvérulent., La partie supérieure des strates est toujours plus ou moins altérée ou fendillée en longs éclats aigus, par l’action de l'humidité et du soleil. Nous n’avons pu découvrir aucune trace d'êtres organisés dans le psammite schistoïde. On l’exploite au Châtellet pour faire des dalles; on s’en sert con- jointement avec le schiste, pour construire des maisons et pour payer. Le psammite schistoïde alterne avec le schiste, auquel il passe avec beaucoup de facilité par la suppression des paillettes de mica : si les particules quarzeuses augmentent, on se trouve avoir un psammite quarzeux qui passe au quarz grenu. Il n’y a souvent pas de point de contact entre le psammite et le schiste ; le passage se fait insensible- ment, c’est-à-dire que le schiste devient de plus en plus dur, quel- ques paillettes de mica commencent à paraitre, et bientôt après on entre dans un psammite micacé et schistoïde bien caractérisé; d’autres fois le schiste devient brusquement beaucoup plus dur et se fond dans le psammite. Le relief du sol psammitique ne peut se distinguer de celui du sol schisteux; quelquefois il offre des saillies qui se dessinent au loin en pointes légèrement aiguës : ces saillies proviennent de parties plus dures qui ont résisté à la décomposition qui a attaqué les parties en- vironnantes. La forme des collines est, comme celle des collines schis- teuses, à pentes peu escarpées, à plateaux d’une étendue généralement peu considérable. Les vallées sont peu profondes et sont toutes d’éro- sion (Senne) ou de fracture (Dyle). 30 SCHISTE ARDOISE COMMUN. Le schiste ardoise commun est une roche susceptible de se laisser Fossiles. Usages. Rapports de gisement, Configuration du sol. Caractères. Minéraux disséminés, 120 SUR LA CONSTITUTION GÉOGNOSTIQUE diviser en feuillets d’une dimension assez grande, généralement sub- divisibles en plaques minces et à surface unie (Ripain, Glimes, Vergi- nal, Quenast); la cassure du schiste ardoise manifeste quelquefois la division schistoïde jusque dans ses fragmens les plus minces ; mais quelquefois aussi les feuillets sont peu ou point susceptibles de cette division indéfinie, et présentent une cassure terreuse, droite ; caractères qui rapprochent ces schistes du schiste argileux, dont il est parfois fort difficile de distinguer certains échantillons de Tubize ou de Glabbeek. Les couleurs du schiste ardoise sont le gris - bleuâtre (Quenast, Ripain, etc.), le bleu-grisätre (Ripain, etc.), le rouge lie-de-vin (Vergi- nal, près de Fouqué , etc.), le rouge-jaunâtre (Rebecq), le verdâtre plus ou moins vif (Hal, Tubize, Glabbeek, Rebecq), le noir-grisâtre (La Roche). Les variétés noirâtres ont une grande ressemblance avec des schistes houillers, ressemblance si remarquable près de Rebecq, qu’elle a fait croire à l'existence d’un précieux combustible, et a conduit , comme nous avons dit, à faire des travaux de recherche. Ce n’est point seulement dans notre province que le schiste s’est offert avec des apparences aussi trompeuses, les environs du Petit-Thier (Liége) ont présenté des schistes noirâtres et terreux, qui ont engagé des per- sonnes à y faire des explorations du même genre que celles de Rebecq. Quelques schistes ont un aspect terreux remarquable (près de Fouqué, Tubize), d’autres au contraire ont un aspect luisant et gras, dû à de la stéatite ou à de la chlorite, qui communique à quelques schistes près de Tubize et de Lembeek une fort belle couleur verte; quelquefois on trouve à la surface de certains schistes d’un blanc-bleuâtre de petites masses écailleuses ou terreuses de chlorite (Tubize). Quelques schistes (Fouqué) présentent des teintes très-tranchées et réunies sur un même échantillon : quelquefois c’est un schiste blanc- bleuàtre , zoné de bandes d’un bleu-grisatre assez foncé; d’autres fois c’est un schiste verdâtre bigarré de teintes blanchätres, jaunâtres ou bleuâtres. Quelques schistes contiennent des paillettes fort petites de m2ca blanc ou grisätre (Fouqué, Lembeek ); outre cette substance, le DE LA PROVINCE DE BRABANT. 121 schiste renferme encore des paillettes de /alc blanc ou grisätre, de petites masses granulaires et écailleuses de chlorite vert-foncé, de petits cristaux octaèdres de fer ovidulé; ces petits cristaux ne dépas- sent par la grosseur d’une tête d’épingle, et sont fort abondans dans les schistes pseudo-argileux de Tubize, de Glabbeek et de Lembeek, du fer sulfuré primitif épigène , en cristaux plus ou moins nombreux; à Fouqué les schistes jaunâtres en contiennent une grande quantité, mais ils sont moins gros que ceux de Lembeek. Le schiste ardoise renferme des couches et des filons de quarz hya- lin blanc, qui suivent la direction des feuillets ou des strates; on trouve dans ce quarz de fréquens cristaux prismés de la même sub- stance, quelques cristaux cubiques de fer sulfuré, qui, en se décom- posant , teignent ces couches d’une couleur de rouille ; et du manganèse oæidé hydraté en petites plaques concrétionnées d’un noir-intense, et en petits enduits ou dendrites (près Verginal); ce minéral est fort rare. Les schistes noirâtres de Rebecq présentent , entre leurs feuillets, de petits cristaux de fer sulfuré d’un jaune brillant, et des lamelles minces et peu étendues de la même substance. La stratification du schiste ardoise est très-claire et très-nette; mais, elle n’est bien visible que dans les carrières où les surfaces sont unies et point altérées ou fendillées par les agens atmosphériques ; les feuil- lets sont parallèles aux joints de stratification, ou font rarement un angle peu ouvert avec ces joints. La direction des strates est toujours du SSE au NNO; l’inclinaison varie entre 30 et 90° vers l'OSO (extrémité occidentale du bassin schisteux) et vers l'ENE (extrémité orientale du même bassin). Les feuillets ont quelquefois leur surface recouverte d’un enduit brunâtre ou rouge-brunâtre foncé ; cet enduit est souvent fort luisant ou irisé (Oisquercq, Verginal, Rebecq). Des fissures d’une grande étendue traversent et sillonnent le schiste en tous sens, leurs parois sont revêtues d’une teinte ocracée due à de l’hydrate de fer. Nous n’avons point vu nous-même de fossiles dans le schiste ardoise commun; cependant, on a trouvé dans du schiste de Rebecq, prove- Ton. XII. 16 Stratification Fossiles. Usages. Configuration du sol. 122 SUR LA CONSTITUTION GÉOGNOSTIQUE nant de la démolition d’un château, un #rilobite nommé hanneton fossile par les habitans. Le schiste ardoise sert à faire des dalles ; il est exploité à cet effet près de La Roche: à Ripain, on a fait des recherches d’ardoises qui ont donné des résultats peu satisfaisans ; à Glimes, on a retiré des ardoises de médiocre qualité. On se sert aussi du schiste pour bâtir et pour paver. Le schiste ardoisier forme des collines, généralement dirigées du SSE au NNO, quelquefois du Sud au Nord et rarement du SE au NO; ces collines ne forment point de chaînes continues, mais de petits groupes circulaires qui se lient les uns aux autres par des vallées peu profondes, dans lesquelles viennent expirer les pentes peu escarpées de ces collines; quelques-unes ont cependant des côtes assez roïdes (environ 50 à 60° degrés d’inclinaison); des plateaux arrondis et eou- ronnés d’une riche végétation de chénes achèvent le portrait des élévations schisteuses ; rarement rencontre-t-on de ces pics ou de ces saillies caractéristiques pour les formations calcaires, ce n’est que près de Fouqué que l’on voit un de ces pics isolés et d’une cinquantaine de pieds de haut. Près de Verginal, on peut suivre une rangée de rochers noirâtres et décharnés de schiste ardoise qui présentent un caractère tout-à-fait ardennais. Détails locaux. Des dépôts tritoniens plus ou moins considérables, surmontant la plus grande partie de l’ancien continent schisteux qui formait au moins la moitié du Brabant, ne laissent apercevoir le schiste que dans quel- ques points ; cependant on peut remarquer vers le SO de la province une presqu’ile assez importante , séparée d’une autre pointe schisteuse qui s’avance vers Nivelles; ces deux fractions de l’ancien continent n'ont point été recouvertes par l'Océan tritonien, mais, partout ail- leurs, le sol ardoisier avait été caché sous les eaux ; les bandes irrégu- lières entre Genappes et Wavre ont été mises à jour par la disparition des sédimens enlevés soit par les eaux alluviales anciennes, soit par DE LA PROVINCE DE BRABANT. 123 les eaux alluviales actuelles; le petit ilot près de Huppaye est recou- vert par des dépôts sablonneux qui paraissent appartenir à la forma- tion diluvienne. La presqu’ile du SO de la province a la figure d’un triangle, dont les trois points extrêmes sont situés à Hal, près de Steenkerque et près de Bornival ; la pointe schisteuse qui s’avance du Hainaut jusque près de Nivelles a une largeur d'environ 3 ou 4 lieues. Le schiste de ces deux presqu’iles a ses strates inclinées vers l'OSO avec un relèvement d'environ 40 à 45°, rarement de 80 à 85°; ces couches presque verti- cales ne se trouvent que près des dykes dioritiques. Ce redressement presque vertical ne serait-il pas le résultat de l’apparition de ces roches plutoniques ? L’étendue plus grande de la diorite, du SSE au NNO, semblerait confirmer cette manière de voir ? La section verticale de la bure établie à Rebecq nous a présenté les roches suivantes à différentes profondeurs : 1. Schiste noir-grisâtre assez dur avec de petites cou- ches de fer sulfuré trouvé à une profondeur de 100 Pieds. 2. Schiste grisâtre à texture feuilletée, peu dur, odeur argileuse très-forte par l’expiration, pro- HOHAEUTT TE PE SI PE ent le ee 0e MRLOU — 3. Schiste noir-grisätre peu dur avec fer sulfuré, profondeonide -s 15. MC 16e 1828 -tiED —— 4. Schiste d’un noir-intense brillant, ressemblant au schiste bitumineux; luisant avec fer sulfuré , trouvé à une profondeur de . . . . . . 170 — 5. Schiste luisant presque compacte sans apparence de texture feuilletée, trouvé à une profondeur Je ARS lens dette PP NE — BA Sete comme n° F0. AU. NOT 7 à — 7. Couche ou filon de quarz blanc laiteux avec cris- taux prismés de la même substance . . . . 205 — 8. Schiste grisâtre parsemé de petits cubes pyri- teux- profondeurs lui cent ea L -11208 rl — 9. Couche de schiste argileux et rempli de fer sul- furé presque arénacé , nommée terre-houille par les mineurs, puissance de 1 pouce . . . 206-7 — 124 SUR LA CONSTITUTION GÉOGNOSTIQUE 10. Schiste grisâtre à surface luisante et quelquefois Pieds. un peu stéatiteuse avec points de fer sulfuré , trouvé à une profondeur de . . . . . . 206 — 11. Schiste gris-noiratre assez clair, à aspect argileux comme tous les autres , avec des enduits de fer sulfuré, profondeur de. , , . . . . . 230 (!) — On doit remarquer que comme les couches sont verticales , on creuse toujours dans les mêmes, de là le peu de variétés que l’on obtient ; cependant, suivant les mineurs, les couches à 235 pieds commencent à s’abaisser et à faire un angle moins ouvert avec l'horizon. Les couches de schiste que l’on a traversées, en creusant une gale- rie pour assécher les carrières dioritiques, inclinent sous un angle de 50 à 55° vers l'OSO; le schiste est moins altéré que celui de la bure, mais cependant il est noir et a présenté également une mince couche de schiste décomposé; la surface de ce schiste est quelquefois enduite d’un luisant soyeux remarquable. Le schiste apparaît à Rebecq même avec des caractères bien diffé- rens; il est verdâtre, assez tendre, à cassure terreuse; ces schistes passent rarement au rougeâtre. Un rocher schisteux près du pont présente une inclinaison de 50° vers lOSO; on remarque dans ce schiste de petits cristaux octaèdres de fer oxidulé. Le schiste verdâtre passe au schiste gris-bleuâtre et gris-noirâtre ayant les caractères de l’ardoise; une structure feuilletée, une surface unie et une texture subcompacte l’en rapprochent au plus haut degré; passé Ripain, on retrouve le schiste verdâtre pareil à celui de Tubize, mais celui-ci se rapproche beaucoup plus que l’autre du schiste argi- leux; il est peu divisible en feuillets irréguliers à surfaces grenues et raboteuses et à cassure terreuse; enfin ces schistes verdâtres passent comme nous l'avons vu aux schistes porphyroïdes de Lembeek et de Glabbeek, et de là à de nouveaux schistes verdâtres se changeant bientôt en roches d’un brun-rougeâtre violacé, qui renferment près (1) C'était le point le plus profond des exploitations au 8 janvier, époque vers laquelle nous fûmes à Rebecq. DE LA PROVINCE DE BRABANT. 125 d’Esquempont des couches ou filons de quarz blanc laiteux avec du manganèse oxidé hydraté; ces schistes violacés vont jusque près de Fouqué, où ils redeviennent verdâtres et zonés, contenant beaucoup de cubes de fer sulfuré à surfaces épigénées. Pendant toute cette étendue, les schistes n’offrent point d’irrégula- rités dans leur direction ou dans leur inclinaison, celle-ci est de 45 à 500. Les schistes verdâtres de Fouqué sont séparés des collines schis- teuses Nivelloises, par d’autres collines tritoniennes à grès fistuleux et noduleux; ils reparaissent donc près de Nivelles, caractérisés par la même couleur verdâtre et par les mêmes cubes pyriteux ; l’inclinaison et la direction sont analogues à celles de la presqu’ile de Hal. Enfin, les roches de quarz grenu de Sart-Moulin et de Tourneppe appartiennent à la portion du bassin dont les couches sont inclinées vers l'OSO. La formation schisto-psammitique forme, le long de la Dyle et de la Genappes, des bandes qui suivent les sinuosités de ces rivières; ces bandes présentent des renflemens plus ou moins considérables près de Thy et de Villers. Le point le plus avancé de ces bandes est à Wavre, où apparaissent les roches de quarz grenu ; ces roches sont séparées des bandes schisteuses par des sédimens tritoniens; c’est près de Mousty que surgit le schiste qui se suit sans interruption jusque près de Sart- Dame-Avelines ; une autre bande se poursuit le long de la Dyle jusque près de Genappes; la partie supérieure des collines dont la base est formée de schiste, est couronnée de dépôts sablonneux à grès fistuleux et noduleux (voir la planche des coupes). Les psammites sont les roches dominantes dans ces bandes, surtout dans la bande qui se dirige vers le SE; ils sont bien caractérisés à l’ab- baye de Villers, où ils forment une colline assez élevée et à pentes escarpées; ils passent à La Roche, à un schiste ardoisier très-fissile et de couleurs variées, assez tendre et tellement facile à tailler qu’on en fabrique des dalles, des auges, etc. Dans la bande qui se dirige vers le SO, les psammites schistoïdes Bandes orientales. 126 SUR LA CONSTITUTION GÉOGNOSTIQUE très-micacés, passent à des schistes verdâtres siliceux (voër planche des coupes) et donnent lieu à un renflement circulaire d’une demi-lieue de diamètre. Des dépôts tritoniens séparent ces bandes schisteuses des rochers de schiste bleuâtre de Tilly, et de ceux de Marbais ; ces derniers rochers apparaissent au bord des divers ruisseaux qui passent près de ces villages. La stratification de toutes ces roches est très- régulière ; l’inclinai- son des couches est toujours de 45 à 50° vers l'ENE, et leur direction, parallèle à celle de la presqu’ile de Hal, est du SSE au NNO. Le centre du bassin déterminé par ces inclinaisons en sens opposés, parait être peu profond, puisque des roches quarzeuses apparaissent dans les vallées (Tourneppe, Sart-Moulin) ; la formation infra-marine des terrains fluvio-marins supérieurs, constitue dans ce centre des collines d’environ 250 à 300 pieds de hauteur. Les roches quarzeuses de Chapelle-S't-Laurent, de Wavre et de Nil- Pierreux appartiennent à ce système. L'ilot quarzeux de Huppaye, dirigé de VESE au NNO sous forme d'amande, se rattache à ce système, par les roches de quarz grenu qui surgissent au bord du ruisseau près de Jodoigne-Souveraine ; ces roches passent à un schiste assez tendre de couleur bleuâtre ou rougeûtre, mais qui disparait bientôt sous les sables à grès fistuleux de la forma- tion tritonienne, pour aller reparaitre plus loin, à Glimes, avec les caractères du schiste ardoise proprement dit. L’inclinaison et la stratification de cette portion sont identiques avec celles des bandes de Wavre et de Genappes. D’après ces détails locaux, les limites probables de cet antique con- tinent seraient situées à Hal, Tourneppe, Sart-Moulin, Wavre, Cha- pelle-St-Laurent, Jodoigne et Huppaye; des lignes plus ou moins irrégulières unissaient ces diverses localités entre elles (voir la carte). Nous terminerons en invoquant l’indulgence de PAcadémie, pour nos faibles travaux, mais peut-être que le but dans lequel nous avons entrepris ces travaux, nous fera pardonner les détails, sans doute trop DE LA PROVINCE DE BRABANT. 127 longs et trop fastidieux dans lesquels nous sommes entré; le but que nous nous sommes proposé était de faire connaitre tout ce qui avait trait à la constitution géognostique du Brabant, et de rapporter les faits qui forment son histoire géologique, purs et simples comme la nature nous les a offerts. Nous nous estimerions pleinement récompensé de nos peines et de nos fatigues , si quelques-unes de nos observations obtenaient l’assen- timent de nos juges, et nous nous compterions heureux si notre tra- vail pouvait, en donnant une idée du sol que nous habitons, ajouter un document de plus aux archives géologiques. (Voir ci-après les tableaux méthodiques et les notes et additions.) hhenunt ht a dé UNS | Au 1 PR TABLEAU MÉTHODIQUE DES ROCHES AVEC LES ESPÈCES MINÉRALES QU'ELLES RENFERMENT. NOMENCLATURE. Limon sableux . — vaseux Tuf calcaire Tourbe fibreuse — compacte . 2° TERRAINS ALLUVIENS ANCIENS. Cailloux roulés . SYNONYMIE. 1° TERRAINS RÉCENS. Sables impurs Vase, limons . Tuf, chaux carbonatée in- crustante. Galets, graviers. Argile sableuse plus ou moins fer- use: MAUR VE - Sables quarzeux agglutinés . LOCALITÉS. Affluens de la Dyle. Vallée de la Senne, etc. Laeken. Woluwe , Bétasie, Louvain. Partout. Dilbeek, Loo, Assche, etc. 3° TERRAINS FLUVIO-MARINS SUPÉRIEURS. Sables quarzo-ferrugineux Grès ferrugineux Fer hydraté hématite. Fer hydraté siliceux Argile ocracée . d iles CD à | a. Hématite brune . FORMATION MÉDIO-MARINE. Toute la formation bétasique. Diest, Aerschot et toute la formation. Diest, Aerschot, Hauwaert. St.-Joris-Winghe. 130 TABLEAU MÉTHODIQUE. NOMENCLATURE. SYNONYMIE,. LOCALITÉS. D. FORMATION INFRA-MARINE OU TRITONIENNE. A. Système supérieur. Sables calcarifères. Quarz xyloide . Sables blancs , — argileux , — ferrifères . . Fer hydraté sablonneux — hématite . — géodique . — pulvérulent . — massif . Grès ferrugineux — ferrifères friables fistuleux lustrés — ferrifères . blancs noduleux . quarzeux . , Ce © Quarz agate calcédoine mamelonné. Grés IMBTER Quarz agate calcédoine mamelonné Grès calcarifères Calcaire grossier noduleux . Chaux carbonatée grossière. Calcaire friable sablonneux . . Calcaire siliceux . . . . . Chaux carbonatée métastatique ILES CMRS 20 vo LE Fer phosphaté terreux bleu. , Argile brunâtre . — sableuse. Sables blancs — calcarifères, Hauy . . . Hydro - phosphate Beudant . . . Melsbroeck, Forêts, etc. St.-Gilles, St.-Josse-ten-Noode. Jette, Laeken. Groenendael, Auderghem. Groenendael. St.-Gilles, Uccle, etc. St.-Gilles , Schaerbeek. Rouge-Cloitre. Rouge-Cloître, Loo. Loo, St.-Josse-ten-Noode. Melsbroeck, Dieghem, St. Gilles, Forêts, etc. Steenockerzeel , Forêts. Assche, St.-Josse-ten-Noode. St.-Josse-ten-Noode. Vallée de la Senne. ? Assche, Jette. Calevoet, Wavre. Nivelles, Houtain-le-Val. Nos D'ORDRE, 45 46 47 48 49 50 51 52 53 55 a ee TABLEAU MÉTHODIQUE. 131 NOMENCLATURE: SYNONYMIE. Sables ferrugineux. TE BEPEUX ee LE Fer hydraté siliceux Grès fistuleux blancs . — — ferrifères . ÉAUETTEINENL ES rec I IT et. —vnodoleus/friables. 7. 2 NC — — jaunâtres. . . TEEN NRC E NN CHICANIENES D. Fe Calcaire grossier noduleux . . . |. . . . . . . . Are sablene CE ce lle, C. Système inférieur." Sables ferrifères Grès fistuleux ferrugineux —_ NONIENL ee AE = Mer eille es de Glauconie grossière . . . . .|. . — Mablense Re RUES Argile chloritée . . . . . . |. Calcaire grossier noduleux . . . |. . . . . . Poudingue siliceux de silex noirs . | . . LOCALITÉS. Tourneppe, Autgaerde, etc. Nivelles, Quatre-Bras. Eskenbergh, Tourneppe, etc, Wavre près de Nivelles, Tourneppe , Braine-l’Alleud, Beersel, Tourneppe, Nivelles, Eskenbergh, Tourneppe. Piétrebais. Nivelles, Piétrebais. Gobertange, Houtain-le-Val. Bornival, Quatre-Bras, ! Folx-les-Caves, Orp-le-Grand , Folx-les-Caves, Noduwez, Orp-le-Grand, Maret, Noduwez. Orp-le-Grand. Folx-les-Caves. 4° TERRAINS FLUVIO-MARINS MOYENS. FORMATION CRÉTACÉE. A. Calcaire de Maestricht. Calcaire friable jaunâtre . Folx-les-Caves. Quarz hyalin TOI RD : ML: 0 LU nl PR _ — noir — Calcaire friable noduleux . . .|. . . . . . . . — Grès blanc . B. Craie. Craie tendre . Silexz pyromaques tuberculeux . Jauche, 132 TABLEAU MÉTHODIQUE. NOMENCLATURE. SYNONYMIE. LOCALITÉS. Craie blanche dure Silex tuberculeux jaunes C. Gault? Argile gris-bleuâtre 5° TERRAINS HÉMILYSIENS OU SÉMI CRISTALLISÉS. FORMATION SCHISTO-PSAMMITIQUE. A. Roches plutoniques. Diorite porphyroïde épidoteux . | Diabase. Awb. Eurite . Quenast. 7 — lorbiculaire. « - . DE SDS MER CNE LA: — Eurite porphyroïde . 5 ; MAR net, AUNE EE — Diorite schistoïde . . Le: : Are LT #7 — Fer titané . . . . : Fe 24 OA — me SUITE ee + ee à +7: HAS ë — — oxidulé . Feldspath binaire . — dihexaëdre — lamellaire . — amorphe. . Amphibole grenue . Quarz hyalin enfumé Épidote aciculaire radié. . — amorphe jaunûtre Sléatite amorphe verte . . . 6 Na ce: : _— — STARS taie LU LU SN — Schiste porphyroïde à petits grains, ONE ISA Glabbeek , près Lembeek. _— à gros grains. | . . . . : . :+ .- | Lembeek. Quarz hyalin limpide amorphe . |. . DRE PORUE — Feldspath binaire blanchâtre . . ES Ware Près Lembeek. —_ diheraëdres . . . . ANNEE TAPER QE — Mica blanc écailleux. . . . #42 + È — Glabbeek, Talc blanc écailleux . . . Léo te = — _ Fer oxidulé octaëdre . , . : Le OT : S _ Fer sulfuré primitif épigène TABLEAU MÉTHODIQUE. Quarz grenu jaunâtre . — noirâtre . Psammite quarzeux , B. Roches schisteuses proprement dites. Psammite schistoide de A2, Brong. Schiste ardoise gris-bleuâtre . — violacé . — verdât Fer oxidulé octaëdre . Talc chlorite évailleux re Fer sulfuré primitif épigène Schiste ardoise noir-intense _— argiloïde, Fer sulfuré cubique . — amorphe . Quarz blanc laiteux . Manganèse oxidé hydraté concré- tionné mamelonné Quarz hyalin prismé limpide . SYNONYMIE, Quarz compacte Charpentier Grauwackenschiefer . Ardoise . ELLES 133 LOCALITÉS. Tourneppe, Huppaye Jodoigne-Souveraine, Thy, Villers, Fouqué. Ripain, Glimes Asquempont. Rebecq, Quenast. — Tubize. Tubize, Fouqué , Tubize. Rebecq. Asquempont. Sr, Ur We” 4 y (los La Fo GA vob « sm mu ARS À a 4 A TABLEAU DES FOSSILES DE LA PROVINCE DE BRABANT. AAA AAA AAA AAA ANNE AAA AAA AAA Al. Brong. . Alexandre Brongniart. Blum. . . Brug. : Blain. . . Cuv. .. Gold. .. Lamzx. D'Orb. Schlot. Bast. TABLEAU DES ABRÉVIATIONS. . . Blumenbach, . . . Bruguières. . . Blainville. . . Cuvier. . . Goldfuss. . . Lamouroux. .. . D'Orbigny. . . . Schlotheim. . . .« Basterot Brübs etre Brocchi. BUYENSE- à Burtin. Conyb. et Ph. Conybeare et Phillips. Defr. à Defrance. Desk ie Deshayes. Dam PR Lamark. Tan OR ire Linné. Park. . . . . Parkinson. Sow... . . . Sowerby. AAA AAA AAA AAA AA AAA AAA AAA AAA DESCRIPTION DES FOSSILES DE LA PROVINCE DE BRABANT. I TERRAINS RÉCENS. 1° FORMATION LYSIENNE. 1. Feuilles de chêne et d’aune dans les tufs de Laeken. 2° FORMATION TOURBEUSE. 2. Ossemens de cerfs. Loc. — Dans les tourbières de la Woluwe, 5. Carpe vulgaire, Cyprinus carpio. Lin. Lin., Gmel., Syst. Nat., tom. XIII, pars 2, pag. 1411; Cuvier, Règne animal, tom. Il, page 291. Loc. — Fossile dans les tourbières d'Overyssche. Vivant dans les étangs voisins. 4. Des coquilles terrestres et lacustres ont été trouvées par M. De Burtin dans les tourbières de la Woluwe. 5. Des glands et des noisettes trouvés dans ces mêmes tourbières. II. TERRAINS ALLU VIENS ANCIENS. 1: Éléphant fossile? Cuv. Elephas primigenius ? Blum. Loc, — Fossile à Melsbroeck. 2. Hippopotame , Hippopotamus. Loc. — Fossile dans l'argile de Melsbroeck. 3. Fragmens de peignes, dentales , dans une couche de cailloux roulés à St-Josse-ten-Noode. Tox. XII. 18 138 TABLEAU DES FOSSILES Lil. TERRAINS FLUVIO-MARINS SUPÉRIEURS. FORMATION INFRA-MARINE. 1° MAMMIFÈRES CÉTACÉS ? FOSSILES. . Baleine? ou Baleinoptère? Balæna ? vel Balænoptera ? Loc. — Provenant, selon M. Morren, du sable blanc de Woluwe. 90 OISEAUX FOSSILES ? 1. Des débris appartenant, selon M. Morren, à des oiseaux palmipèdes ; il n'indique point de localité. 4. . Des débris appartenant à des passereaux, selon M. Morren. 5° REPTILES FOSSILES. Chéloniens. . Émyde de Cuvier. Emys Cuvieri. Nobis. (PI. 5, fig. 1.) Émide de Bruxelles. Cuv. Ossemens fossiles , tom. V, 2e partie, pag. 236, pl. 15, fig. 16. Loc. — Fossile dans le calcaire de Melsbroeck et de Steenockerzeel. Sauriens ? + Quelques débris de lézards? D'après M. Morren, qui, selon son habitude, n’indique point de localité. Ophidiens ? . Des débris se rapprochant, selon M. Morren, du Dendropsis picta. Boïé, qui vit à Java. Loc. — Sans indication de localité. Batraciens. Des restes de Bufo, que M. Morren dit être très-abondans, mais dont il n'indique point la localité. 4 POISSONS FOSSILES. . Des épines que l’on trouve à Melsbroeck, appartiennent peut-être à des Balistes? ou peut-être à une espèce du genre Torpedo. . Scie de Latham. Pristis Lathami. Nobis. (PI. 2, fig. 1). Loc. — Fossile dans le calcaire de Melsbroeck ; les épines osseuses du museau allongé de cette espèce gisent dans les sables du même endroit. (P]. 2, fig. 1, A). . Cestracion de Phillipp. Cestracion Phillippii. Less. Lesson et Garnot. Zoologie du voyage de la coquille. (Poissons). PI. II. Loc. — Fossile dans les sables d’Uccle, de S!-Gilles, de Forêts, de Melsbroek ? Vivant dans les baies de la Nouvelle Galles du sud. DE LA PROVINCE DE BRABANT. 139 4. Squale griset? Notidanus griseus ? Cuv. Squalus griseus. Linné. Brander, Foss. du Hampshire. PI. 9, fig. 3. De Burtin. PI. 1, fig. P. Loc. — Fossile à Melsbroeck , St-Gilles. Vivant dans la Méditerranée. 5. Pélerin très-grand ? Selache marimus? Cuv. Squalus mazimus. Blain. Ann. du musée , t. X. Loc. — Fossile à S'-Gilles dans la couche à Nummulines. Vivant dans l'Océan. 6. Le requin. Carcharias verus. Cuv. Squalus carcharias. Linné. Canis carcharias. Belon. Traité de aquatilibus , pag. 58 et fig. de la page 60. De Burt. PI.I, fig. À. Loc. — Fossile dans les sables de S'-Gilles , de Forêts, d'Uccle et de Melsbroeck. Fossile en Suisse, Sicile, Angleterre , Caroline, à l'ile de Malte, au Mont-Marius à Rome, à Maestricht et Malines. Vivant dans toutes les mers. 7. Lamie Nez, Lamna cornubicu. Cuv. Risso. Squalus cornubicus. Lacep. tom. I, pl. 11, fig. 3. Linné, Brander. PI. 9, fig. 114. Knorr. PI. H, I, fig. 7 et 9. (Pars 2). Park. , tom. LI, pl. 19, fig. 8. Squalus nasus. Artedi. Lamia. Rondelet , p. 399. Carcharias. Aldov. 383 , 388. De Burt. PL. 1, fig. K. Loc. — Fossile à Melsbroeck , Uccle , Forêts , S'-Gilles. Fossile à Grignon, Longjumeau, Mantes , Valognes , Léognan, Montpellier, Italie, Hampshire. Vivant communément dans les mers d'Europe. 8. Squale auriculé. Squalus auriculatus. Blain. De Burt., loc. cit. PL. I, fig. Q et R. Loc. — Fossile à S'-Gilles, Uccle, Forêts, Melsbroeck. Fossile à l'île de Malte. 9. Squale Marteau? Zygæna malleus ? Cuv. Squulus rygæna. Lin. Loc. — Fossile à Uccle, Forêts. Vivant dans l'Océan. 10. Squale féroce? Squulus ferox? Risso, tom. III, pag. 122. Loc. — Fossile à Uccle, S'-Gilles. Fossile à Malte, près de Soissons, dans la Touraine, dans le Hampshire. Vivant dans la Méditerranée. 9. Roussette. Scyllium. Cuv. Scylliorhinus. Blain, Loc. — Fossile à Melsbroeck , St-Gilles et Uccle. 10. Émisolle. Mustelus? Cuv. Loc. — Fossile à S'-Gilles et Forêts. Des dents en pavés plats appartiennent peut-être à ce genre. 11. Raie-aigle. Aetobatus Blain. ou Myliobatis. Dumeril. Loc. — Fossile à Uccle, Forêts, Melsbroeck ; la plupart des dents en petits pavés, des en- virons de Bruxelles, paraissent appartenir à ce sous-genre du grand genre raie. ÿo CRUSTACÉS FOSSILES. 1. Crabe de De Burtin. Cancer Burtini. Nobis. (P]. III, fig. 5). 140 TABLEAU DES FOSSILES Loc. — Fossile dans le calcaire noduleux de Melsbroeck; les pinces se trouvent dans les sables. 2. Pagure. Paqurus ? Loc. — Fossile dans les sables de Forèts. 3. Écrevisse. Astacus. Loc. — Fossile dans les sables de Forêts. 6° COQUILLES FOSSILES. A. Univalves. Cévnarorones. Cuvier. 1er GENRE. — Seine , Sepia. Lam. 1. Seiche de Cuvier. Sepia Cuvieri. D'Orb. Beloptera sepioidea. Blain. De Burt., Oryctographie de Bruxelles, pl.2, fig. A. Loc. — Fossile dans les sables de Boitsfort, d'Assche, de Jette, de Forêts et d'Ucele !. Fossile à Grignon , à Chaumont et à Gand. 9e GENRE. — Naunize, Wautilus. Lin. 2, Nautile de De Burtin. Nautilus Burtini. Nobis. De Burt. Loc. cit., pl. 14, Testa umbilicata, siphone continuo, septis sinuosis. C’est avec doute que nous rapportons celte espèce comme nouvelle, mais sa grande taille et ses cloisons sinueuses nous ont déterminé à la regarder comme nouvelle, et à la dédier au sayant De Burtin. ; Loc. — Fossile dans le calcaire de Melsbroeck, de Saventhem, de Woluwe-St-Étienne, de Dieghem, de Loo, de Boitsfort, d’Afflighem et de Louvain ?. Fossile à Chaumont près de Paris, suivant M. Al. Brongniart3; et à Gand. 5. Nautile. Nautilus. (PI. IV, fig. 4). Loc. — Fossile dans les grès ferrugineux de Groenendael. Peut-être n'est-ce qu’une variété du précédent , sa taille plus petite, est la seule raison qui nous l'en fait séparer. 5° GENRE. — Nonosune, Vodosaria. Lam. 4. Nodosaire..…. Vodosaria... ? Loc. — Fossile dans les sables de Forêts. 4° GENRE. — Porxmonvme , Polymorphina. D'Orb. Loc. — Les sables de Forêts contiennent quelques polymorphines. 1 M. I Nyst en possède de très-bien conservées. 2 M. De Koninckx de Louvain en possède un très-bien conservé. 5 Aecherches sur les ossemens fossiles , t, IL, 2e partie, p.431. DE LA PROVINCE DE BRABANT. 141 5e GENRE. — Orencuuwe, Operculina. D'Orb. 6. Operculine de D'Orbigny. Operculina Orbignii. Nobis. (PI. IUT, fig. 15.) Testa complanata , papyracea, carinatu, seplis maxime contiquis, semi-lunaribus. Loc. — Cette jolie petite coquille se trouve abondamment à Forêts , Jette et Laeken. Nous la dédions à M. D’Orbigny, qui sut si bien débrouiller le chaos que Soldani avait signalé dans cette partie si obscure des céphalopodes. 6e GENRE. — Nomuvuuxe, VNummulina. D'Orb. 7. Nummuline lisse. VNummulina levigata. D'Orb. (PI. HI, fig. 12). Nummulites levigata. Lam., Ann. du Musée, t. VIII, pl. 62, fig. 10. Camerina lœvigata. Brug., cyct. Méthod., pl. 399. Nummularia lœvigata, Sow. Loc. — Fossile dans les sables de St-Gilles, de Forêts, d'Uccle, de Vleurgat, d’Assche, de Jette, de Boitsfort, de St-Josse-ten-Noode et de Laeken, dans les calcaires de Forêts , de Dieghem , de Loo, de Melsbroeck, dans la glauconie sableuse d’Orp-le-Grand. Fossile à Grignon , dans l'argile de Londres, à Bordeaux et à Trauenstein. £En- 8. Nummuline variolaire. Vummulina variolaria. D'Orb. et Lam. Lenticulites vuriolaria. Lam. Nummularia variolaria. Sow., Min. conch. PL. 558, fig. 3. Loc. — Fossile dans les sables de Forêts, de St-Gilles , d’Assche , de Jette, de Laeken, dans le calcaire friable de Watermael. Fossile à Grignon, Chaumont, Parnes et dans l'argile de Londres. 9. Nummuline élégante. Nummulina elegans. Nobis et Sow. Nummularia elegans. Sow. Min. conch. (PI. 538, fig. 2). Loc. — Fossile dans les sables de Forêts, de Jette et de Laeken. Fossile à Barton dans l’argile de Londres. 10. Nummuline globulaire. Nummulina globularia. Lam. et D’Orb. Nummulites globularia. Lam., Ann. du Musée, tom. VII, et Anim. S. vertebres , tom. VIL, pag. 629, no 2, Fortis, Oryctog. d'Italie , tom. Il, pag. 101 et pl. 1 fig. S,T. Loc. — Fossile dans les sables de Melsbroeck, d'Uccle, de Forêts, de St-Gilles et de Cam- penhout. Fossile à Chantilly et en Transylvanie. 11. Nummuline lentillon. Nummulina lenticula. Def. Nummulites Lenticula. Defr., Dict. des 8. Nat.,tom. XXXV, pag.226, n° 10. Loc. — Fossile à Forêts, Uccle, St-Gilles, Vleurgat, Melsbroeck , Assche, Loo et Water- mael , dans les sables et le calcaire. Fossile dans les environs de Sienne, de Pise , dans les départemens de l'Oise et de la Somme. 12. Nüummuline planulée. Nummulina planulata. Lam. et D'Orb. Lenticulites planulata. Lam., Anim. S, vert., tom. VII, pag. 619, n° 1, et Ann. du Musée, vol. V pag. 187, n° 1, Loc. — Fossile à Forêts, Uccle, St-Gilles et Vleurgat. Fossile à Senlis, Soissons , Betz et Gilocourt (Oise). 142 TABLEAU DES FOSSILES 7e GENRE. — Brirocuuwe, Biloculina. D'Orb. 15. Biloculine grimaçante. Biloculina ringens. D'Orb. et Lam. Ailiolites ringens. Lam., Cog. foss. des environs de Paris. (PI. 15, fig. 1, a, b). Loc. — Fossile dans les sables de Forêts, de Melsbroeck et d’Assche. Fossile à Grignon et à Valognes. 8° GENRE. — Tnirocuune, Z'riloculina. D'Orb. 14. Triloculine trigonule. Triloculina trigonula. D'Orb. et Lam. Miliolites trigonula. Lam., Coq. foss. des env. de Paris. (PI.15, fig. 4.) Loc. — Fossile dans les sables de Forêts , de St-Gilles, de Jette et d'Assche. Fossile dans les environs de Soissons , à Paris et Valoges. 15. Triloculine commune. Zriloculina communis. Desh. Desh. Coguilles caractéristiques des terrains. (PI. 3, fig. 5, 6, 7.) Loc. — Fossile dans les sables de Forêts , de St-Gilles et d’Assche. Fossile à Grignon. 16. Triloculine.... Zriloculina ? Loc. — Fossile dans les sables de Forêts. 9e GENRE. — Quiquecocutine, Quinqueloculina. D'Orb. ! 17. Quinqueloculine des pierres. Quinqueloculina saxorum. D'Orb. et Lam. ( PI. IIT, fig. 19.) Miliolites saxorum. Coq. foss. des env. de Paris. (PI. 15, fig. 2.) Loc. — Fossile dans les sables de Forêts, de St-Gilles, d'Uccle, de Vleurgat, d’Assche, de Melsbroeck , de Loo et de St-Josse-ten-Noode, et dans les calcaires de Melsbroeck , de Steenockerzeel , de Dilbeek , de Forêts, d’Assche et de Dieghem. Fossile à Grignon et dans tout le calcaire grossier des environs de Paris. 18. Quinqueloculine striée. Quinqueloculina striatula. Desh. Desh. loc. cit, (PI. 3, fig. 1.) Loc. — Fossile dans les sables de Forêts et d’Assche. Fossile dans les environs de Paris. 19. Guinqueloculine lisse. Quinqueloculina læviqata. Desh. Desh. loc. cit. (PL. 3, fig. 4.) Loc. — Fossile dans les sables de Forêts et d’Assche.? Fossile dans les environs de Paris. 10° GENRE. — Azvéoune, Alveolina. D'Orb. 20. Alvéoline de Bosc. Alveolina Boscit. D'Orb. et Defr. Alvéolite. Bosc. Orizaire. Bosc. Def, Dict. des S. naturelles. Planches. (Vers et Zoophytes.) PL. 48, fig. 4,a6. Fasciolite, Park, Borelie, clausulie et miliolite, D. de mont. Loc. — Fossile dans les sables de Forêts, de St-Gilles , d'Uccle , d'Assche et de Jette. Fossile des environs de Paris, a+ DE LA PROVINCE DE BRABANT. 145 11° GENRE. — Fasuzame , Fabularia. Defr. 21. Fabulaire discolithe. Fabularia discolithes. Def. Defr. Diet. des S. N. Planches. (Vers et Zoophytes.) (PL. 48, fig. 5, a, b.) Loc. — Fossile dans les sables de Forëêts, de St-Gilles, d’Assche et de Laeken. Fossile aux environs de Paris et à Valognes. Gasrénorones. Cuvier. 12° GENRE. — Burze, Bulla. Lin. 22. Bulle cylindrique. Bulla cylindrica. Brug. Desh. foss. des environs de Paris. (PI. V, fig. 10, 11, 12.) Cog. Lam. Ann. du Musée, tom. I, page 222, n° 3. Defrance. Loc. — Fossile dans les grès calcarifères de Rouge-Cloître et de St-Josse-ten-Noode, Fossile à Grignon , Courtagnon, Parnes, etc. 25. Bulla constricta. Sow. Sow. Min. conch. (PI. 464, fiy. 2.) Loc. — Fossile dans les sables de Laeken et de Jette. Fossile dans l’argile de Londres à Barton. 24. Bulle elliptique. Bulla elliptica ? Sow. Sow. loc. cit. (PI. 464, fig. 6.) Loc. — Fossile dans les grès de S'-Josse-ten-Noode. Fossile dans l'argile de Londres à Hordwell. 15° GENRE. — Meranie, Melania. Lam. 25. Melanie bordée. Melania marginata. Lam. (PI. III, fig. 9.) Desh. loc. cit. (PI. 14, fig. 1,2, 3, 4.) Lam. Ann. du Musée, tom. Il, page 430, n° 3. Defrance, Bruguières. Loc. — Fossile dans les grès calcarifères de Rouge-Cloître , de S'-Josse-ten-Noode, dans les grès ferrugineux de Groenendael , dans le calcaire de Melsbroeck , d’Assche et d’Aflighem. Fossile à Grignon, Courtagnon et Liancourl. 1% GENRE. — Turnireze, Turritella. Lam. 96. Turritelle granulée. Turritellu granulosa. Desh. (PI. ILE, fig. 17.) Desh, loc. cit. (PI. 37, fig. 1, 2.) Loc. — Fossile dans les sables de Laeken, Forêts, Jette, Rouge-Cloitre ? dans la glauconie d’Orp-le-Grand. Fossile à Monneville, Assy et Maulle. 27. Turritelle imbricataire. Turritella imbricataria. Lam. Desh. loc. cit. (PI. 35, fig. 1, 2.) Lam. Ann. du Musée, tom. IV, page 216, n° 1, et tom, VIII, pl. 37, fig. 7. = Loc. — Fossile dans les grès de Rouge-Cloître, de St-Josse-ten-Noode ; dans les grès ferru- gineux de Groenendael ; dans le calcaire d’Afflighem , de Melsbroeck et d’Assche. 144 TABLEAU DES FOSSILES 28. Turritelle térébelle. Turritella terebellata. Lam. Desh. loc. cit. (PI. 36, fig. 1, 2. Lam. Ann. du Musée, tom. IV, page 218, n°6. Melania sulcatu. Sow. loc. cit. (PI. 39, fig. du milieu.) Loc. — Fossile dans les grès et les sables de Rouge-Cloitre. Fossile à Grignon , Courtagnon et Chaumont , à Stubbington dans l'argile de Londres. 15° GENRE. — Nanice , Vatica. Adanson. . Natice linéolé. Watica lineolota. Desh. Desh. loc. cit.(PI. 20, fig. 9, 10.) Loc. — Fossile dans les sables et les grès de Rouge-Cloître, dans les grès de St-Josse-ten- Noode. Fossile à Beauchamp et à Damerie. . Natice canaliculé. Watica canaliculata. Desh. Desh. loc. cit. (PL. 21, fig. 9 , 10.) Ampullaria canaliculata. Lam. Ann. du Musée, tom, V, p.32, nv8. Loc. — Fossile avec les précédens. Fossile à Grignon, Parnes et Mouchy. 16° GENRE. — Nénire, Merita. Lin. . Nérite ?... Nerita? Loc. — Fossile dans les grès et les sables de Rouge-Cloitre. 17° GENRE. — AwpurratRe, ÆAmpullaria. Lam. 52. Ampullaire sigaretine? Ampullaria sigaretina ? Lam. Lam, Ann. du Musée, tom. VIIL, pl. 61 ,fig. 1. Loc. — Fossile dans les grès ferrugineux de Groenendael. Fossile à Grignon. - Ampullaire géante. Ampullaria gigantea. Nobis. (PI. IV , fig. 14.) Testa crassa, compressa, anfractibus compressis, spira brevi. Aperturæ longitudo triplo major quam latitudo. Loc. — Fossile dans les grès ferrugineux de Groenendael. Cette ampullaire est la plus grande que nous connaissions. . Ampullaire ouverte. Ampullaria patula ? Lam. Lam. Ann. du Musée, tom. VII, pl. 61, fig. 2. Loc. — Fossile dans les sables de Rouge-Cloïître et à Grignon. 5. Ampullaire..... Ampullaria. Loc. — Fossile dans les grès ferrugineux de Groenendael. . Ampullaire.. Ampullaria. Loc. — Fossile dans les grès ferrugineux de Groenendael, dans les grès de Rouge-Cloitre et de St-Josse-ten-Noode. 18° GENRE. — Tonvarezze, Tornatella. . Tornatelle enflée. Tornatella inflata ? Ferussac. Desh. loc. cité. PI. 24, fig. 4, 5, 6. Ferussac , Tableau Syst. des Mollusques , page 108, n° 9 Defrance, , DE LA PROVINCE DE BRABANT. 145 Bast. Mém. de la Société d’'His. nat. de Paris, tom. IL, 1er partie, page 25, n°2. Brander, pl. 4, fig. 61.? Loc. — Fossile dans le grès de Rouge-Cloître , où elle est fort rare. Fossile à Grignon, Courtagnon, Valognes, Dax. 58. Tornatelle sillonnée. Tornatellu sulcala. Lam. Desh.loc. cit., pl.22, fig. 3, 4. Lam. Ann. du Musée ,tom. IV, page 434, no 1, et tom. VIII ; pl. 60, fig. 7. Loc. — Fossile dans les grès de Rouge-Cloître , où elle est très-rare. Fossile à Grignon, Courtagnon, Mouchy et Parnes. 19e GENRE. — Tourne, Zrochus. Lin. 59. Toupie agglutinante. Trochus agglutinans. Lam. Desh, loc. cit., pl. 31, fig. 8, 9, 10. Lam. Ann. du Musée, tom. IV, page 51, n°8, ettom. VII, pl. 15, fig. 8, a, b, Fripière. De Burt. loc. cit., pl. 17, fig. R. Trochus umbilicaris. Brander. Loc. — Fossile dans les grès de Rouge-Cloïtre et de St-Josse-ten-Noode (rare). Fossile à Grignon , Mouchy, Valmondois. 20e GENRE. — Canrax, Solarium. Lam. 40. Cadran marginé. Solarium marginatum. Desh. Desh. loc, cit., pl. 25, fig. 21, 22. Loc. — Fossile dans les grès de Rouge-Cloître et de St-Josse-ten-Noode (rare). Fossile à Rétheuil. 41. Cadran en forme de toupie. Solarium trochiforme. Desk. (PI. IV, fig- 2.) Desh. loc. cit., pl. 28, fig. 8, 9, 10. Loc. — Fossile dans les grès de St-Josse-ten-Noode ; dans les sables de Jette (rare). Fossile à Tancrou dans le grès marin supérieur. 42. Cadran de Nyst. Solarium Nystii. Nobis. (PI. IV, fig. 1.) Testa crassa, solida orbiculataque, convexo-depressa, lævigata , anfractibus lwvigatis, inte- gris, margine carinala, basi ampla, rotundata, umbilico lœvigato, apertura rotundu, senestri. Loc. — Fossile dans les sables de Forêts, d'Uccle, de St-Gilles, de Laeken, de Jette, de Loo ; dans les grès ferrugineux de Gronendael, dans le calcaire de Melsbroeck ? d’Assche et d’Aflighem ; dans de la glauconie sableuse à Orp-le-Grand. Fossile à Gand. 21° GENRE. — Birronnie, Bifrontia. Desh. 45. Bifrontie marginée. Bifrontia marginata. Desh. Desh. loc. cit., pl. 26, fig. 19, 20. Loc. — Fossile dans les sables de Jette (rare). Fossile à Grignon, Parnes, Mouchy et Valognes. Ton. XII. 19 146 TABLEAU DES FOSSILES. 99e GENRE. — Scazaime , Scalaria. Lam. 44. Scalaire crépue. Scalaria crispa. Lam. Des. loc. cit., pl. 22, fig. 9, 10. Lam. Ann. du Musée, tom. IV, page 213, n°1, et tom. VHI, pl. 37, fig. 5. Loc. — Fossile dans les sables de Forëts |. Fossile à Grignon , Mouchy et à Senlis. 45. Scalaire à petites lamelles. Scalaria tenuilumella. Desh. (PI. IV, fig. 5.) Desb. loc. cit., pl. 22, fig. 11,12, 13, 14, Variété À. Nobis. Testa compressa inflataque. Loc. — Fossile dans les sables de Jette. Le type se trouve à Grignon , Mouchy. Cette variété se rapproche jusqu'à un certain point de la Scalaria frondosa. Sow. loc. cit, pl. 577, fig. 1. Elle se trouve dans le crag. 95e GENRE. — Cénrre , Cerithium. Adanson. 46. Cérite géante. Cerithium giganteum. Lam. Desh. loc, cit., pl. 42, fig. 1,2. Lam., Ann. du Musée, tom. III, p.439 , no 57.T, VII, pl. 14, fig. 1. Grande vis. De Burt. loc. cit., pl. 14, fig. G. Loc. — Fossile dans le calcaire d'Afflighem. Fossile à Grignon, Courtagnon, Montmirail, Mouchy, Parnes ; dans l'argile de Londres à Barton ; et dans le grès marin supérieur de Valmondois et de Betz. 47. Cérite ombiliquée? Cerithium umbilicatum ? Lam. Lam. Ann. du Musée, tom. VIT, pl. 14, fig. 3, a, b. Loc. — Fossile dans le calcaire grisätre de Melsbroeck. Fossile à Grignon. 48. Cérite.... Cerithium..… Loc. — Fossile dans les grès de Rouge-Cloitre. 49. Cérite.... Cerithium..… Loc. — Fossile dans les grès ferrugineux de Groenendael. 50. Cérite.... Cerithium..…. Loc. — Fossile dans les sables de Jette, dans le calcaire d'Orp-le-Grand ? 24° — GENRE. — Buccin, Buccinum. Adanson. 51. Buccin... Buccinum.… Loc. — Fossile dans les grès de Rouge-Cloître. Cette espèce de Buccin est fort grande. . Buccin... Buccinum..…. Loc. — Fossile dans les grès ferrugineux de Groenendael. x 19 95e GENRE. — Cassipaine, Cassidaria. Lam. x A] . Cassidaire caréné. Cassiduria Carinata. Lam. (PI. IT, fig. 10.) Lam Ann. du Musée, tom. IT, vélins no 3, fig. 2. Buccinum nodosum. Brander, n° 181 (frontispice.) Cette jolie coquille a été trouvée par M. Nyst. DE LA PROVINCE DE BRABANT. 147 Loc. — Fossile dansles grès ferrigineux de Groenendael ; dans les grès de Rouge-Cloitre, de St-Josse-ten-Noode , de St-Gilles; dans le calcaire de St-Gilles, de Boitsfort, d’Assche , d'Afllighem et de Melsbroeck? dans les sables de Rouge-Cloitre? Fossile à Grignon. 26° GENRE. — Rocuen, Murer. Lin. 54. Rocher? Murer..….? Loc. — Dans les grès de Rouge-Cloitre et de S'-Josse-ten-Noode. 97e GENRE. — Pynuze, Pyrula. Lam. 55. Pyrule?.... Pyrula?.… Loc. — Dans les grès de S'-Josse-ten-Noode. 98e GENRE. — Fuseau, Fusus. Lam. #6. Fuseau de Noé. Fusus Noæ. Lam. Lam. Aun.du Musée, tom. VI, pl. 46, fig. 2. Loc. — Fossile dans les grès de Rouge-Cloître et de St-Josse-ten-Noode. Fossile à Grignon. 57. Fuseau ?... Fusus?..… Loc. — Fossile dans les grès de St-Josse-ten-Noode. 58. Fuseau... lusus. Loc. — Fossile dans les grès de St-Josse-ten-Noode. 29e GENRE. — Preunoroue, Pleurotomu. Lam. 59. Pleurotome?.... Pleurotoma ?.…. Loc. — Fossile dans les grès de St-Josse-ten-Noode. 50e GENRE. — Rosrezzaime, Rostellaria. Lam. 60. Rostellaire macroptaire. Rostellaria macroptera. Lam. (PI. IV, fig. 9.) Sow. loc, cit., pl. 298, 299 et 300. Sirombus amplus. Brander, Fossiles du Humyshire. PI. 6, fig. 76. De Burt. loc. cit., pl. 15, fig. À, B. Hippocrenes macropterus. D. de Montf., tom. II, pag. 523. Loc. — Fossile dans les grès ferrugineux de Groenendael, dans le calcaire de S'-Gilles et peut-être de Forêts Fossile dans le Hampshire et à Barton. 61. Rostellaire fissurelle, Rostellaria fissurella. Lam. (PI. TT, fig. 11.) Lam., Ann. du Mus., t. VI, pl. 45, fig.3, a, db. Loc. — Fossile dans les grès ferrugineux de Groenendael, de Beersel, de S'-Gilles et de Louvain; dans le calcaire de Louvain, de Forêts; dans les grès de Rouge-Cloitre et de St-Josse-ten-Noode; dans le calcaire rougeâtre d’Afflighem. Fossile à Grignon. 148 TABLEAU DES FOSSILES 62. Rostellaire colombaire. Rostellaria columbaria. Lam. l Lam., Ann. du Musée, tom. IL. Strombus fissura , Buucerin DES Sciences, Pl, 25, fig. 4. Loc. — Fossile dans le grès d'Aflighem. Fossile à Grignon, S'-Germain , Parnes. 51° GENRE. — Côxe, Conus. Lin. 65. Cône perdu. Conus deperditus. Brug. Lam., Ann. du Mus., tom. VIT, pl. 15, fig.1,a,ù. Loc. — Fossile à Rouge-Cloitre et à S'-Josse-ten-Noode ; dans les grès ferrugineux de Groe- nendael. Fossile à Grignon. 64. Cône... Conus.….. Loc. — Fossile dans les grès de Rouge-Cloitre. 65. Cône... Conus….. Loc. — Fossile dans les grès ferrugineux de Groenendael. 52e GENRE. — Tanière, Zerebellum. Lam. 66. Tarière en oublie. Terebellum convolutum. Lam. Lam., Ann. du Mus., tom. VI, pl. 44, fig. 3, a, b. Loc. — Fossile dans les sables de Forêts ; dans le calcaire d’'Afflighem. Fossile à Grignon, à Gand. 55° GENRE. — Ancicraume, Aneillaria. Lam. 67. Ancillaire..… Ancillaria.….. Loc. — Fossile dans les grès de Rouge-Cloître et de St-Josse-ten-Noode et dans les grès ferrugineux de Groenendael. 54° GENRE. — Ouive, Oliva. Brug. 68. Olive mitréole? Oliva mitreola ? Lam. Lam,, Ann. du Musée, tom. VI, pl. 44, fig. 4, a, b. Bulla sopita. Brander. Loc. — Fossile dans les grès de Rouge-Cloitre. Fossile à Grignon. 55° GENRE. — Poncecaixe, Cyprœa. Lin. 69. Porcelaine gonflée? Cypræa inflata ? Lam. Lam., Ann. du Mus., tom. VI, pl. 44, fig. 1, a, b. Loc. — Fossile dans les grès de Rouge-Cloître, de St-Josse-ten-Noode; dans les grès ferrugi- neux de Groenendael, dans la glauconie sableuse d’Orp-le-Grand ? Fossile à Grignon et dans le Plaisantin. 56° GENRE. — Vozrvame, Volouria. Lam. 70. Volvaire bulloïde. Volvaria bulloides, Lam. Lam., Ann. du Mus.,tom. VIII, pl. 60, fig. 12, a, b. DE LA PROVINCE DE BRABANT. 149 Loc. — Fossile dans les grès de Rouge-Cloître et de St-Josse-ten-Noode. Fossile à Grignon. 57e GENRE. — Vorure, Voluta. Lin. 71. Volute épineuse. Voluta spinosa. Lam. (PI. ILE, fég. 16.) Lam., Ann. du Mus.,tom.I, vélins n° 2, fig. 12. Strombus spinosus. Brander, fig. 65. Loc. — Fossile dans les grès de S'-Josse-ten-Noode ; dans le calcaire de St-Gilles . de Forèts et d’Aflighem. Fossile à Grignon. 72. Volute harpule. Voluta harpula ? Lam. Lam., dun. du Mus., tom. Il, vélins n° 3, fig. 4. Encyclop. méthodique, pl. 383, fig. 8. Loc. — Se trouve avec le précédent. Fossile à Grignon. 75. Volute.... Volute..… Loc. — Fossile à S'-Gilles. 38° GENRE. — Sicarer, Sigaretus. Lam. 74. Sigaret canaliculé, Sigaretus canuliculatus. Sow. Sow. loc. cit., pl. 384. Desh., loc. cit., pl. 21, fig.13, 14. Loc. — Fossile dans les grès de Rouge-Cloitre, de St-Josse-ten-Noode ; dans les grès ferru- gineux de Groenendael. Fossile à Grignon, Parnes, Courtagnon, Valognes , Senlis, et dans l'argile de Londres. 75. Sigaret lisse ? Siguretus lœvigatus ? Desh. Desh. loc. cit., pl. 23, fig. 5, 6. Loc. — Fossile dans les grès de S'-Josse-ten-Noode. Fossile à Dax, Grignon. 39° GENRE. — Carvernée, Calyptræa. Lam. 76. Calyptrée trochiforme. Calyptræa trochiformis. Lam. Desh., loc. cit., pl.4, fig. 1,2, 3. Lam , Ann. du Mus., tom. I, pag. 385, n° 1, et tom, VIL, pl. 15, fig. 3, a,b,c,d. Loc. — Fossile dans les grès ferrugineux de Groenendael; dans les grès de Rouge-Cloitre et de S'-Josse-ten-Noode ; dans le calcaire de Forêts et d’Afllighem; dans les sables de Jette et de Forêts. Fossile à Grignon et Parnes, à Woolwich et Plumstead dans l'argile de Londres. 40° GENRE. — Casocnox, Pileopsis. D. de Montf. 77. Cabochon variable. Pileopsis variabilis. Nobis. (PI. 111, fig-8,a,b,c.) Tesla irregulart, variabili, flexuosa, basi sinuosa variabilique. Loc. — Cette jolie espèce se trouve dans les sables près de Melsbroeck et à Forêts? 78. Cabochon.….. Pileopsis..… Loc. — Fossile dans les sables de St-Gilles, 150 TABLEAU DES FOSSILES 41° GENRE. — Fissonezse, Fissurella. Lam. 79. Fissurelle ?.… ÆFissurella ?.… Loc. — Fossile dans les sables de St-Gilles. 42° GENRE, — Denrazr, Dentalium. Lin. 80. Dentale lisse. Dentalium entalis. Lin. Desh., Monograp. du G. Dentale. ME, DE LA s. D’HiST. NAT. DE PARIS, tom, IL, 2e partie, pag. 869, nv 18. pl. 15, fig. 7. Lam., Anim. s. vert., tom. V, pag. 345, n° 18. Lion, Gmel., pag. 3736, n° 4. De Burt., loc. cit PI. 8, fig. T, V, et pl. 17, fig. O. Loc. — Fossile dans les sables de Forêts , d'Uccle et de St-Gilles , dans les grès de St-Josse- ten-Noode. Vivant dans l'Océan et dans la Méditerranée; fossile dans le Plaisantin , à Bordeaux et à Dax, dans les faluns de la Touraine, à Grignon et à Hauteville, dans l'argile de Londres à Hordwell. 81. Dentale raccourcie. Dentalium abbreviatum. Desh. Desh. loc. cit., pl. 18, fig. 21, 22. Loc. — Fossile dans les sables de Laeken. Fossile dans les sables de Soissons. 82. Dentale à courte fente. Dentalium brevifissum. Desh. Desh. loc. cit., pl. 17, fig. 13, 14. Loc. — Fossile dans les sables de Jette. Fossile à Angers et dans les faluns de la Touraine. 85. Dentale entaille, Dentalium fissura. Lam. Desh. loc. cit. PL.18, fig. 6, 7. Lam. Anim. s. vert. , tom. V, pag. 856, no AU. Loc. — Fossile dans les sables de Jette. Fossile à Grignon et Montmirail. Vivant dans les mers de l'Inde. 84. Dentale de Deshayes. Dentalèum Deshayesianum. Nobis. (PI. IV, fig. 7.) Testa tereli, subarcuata , lævigata, non strialu, apertura paucim inflata. Loc.— Fossile dans les sables de St-Gilles, d'Uccle, de Forêts, d’Assche, de Loo, de Vleurgat, de Boitsfort; dans les grès de Rouge-Cloître et de St-Josse-ten-Noode ; dans les grès ferrugineux de Groenendael ? dans le calcaire et la glauconie d’Orp-le-Grand. Fossile à Gand. 45e GENRE. — Pareuse , Patella. Lin. 85. Patelle.… Patella… Loc. — Fossile dans le sables de St-Gilles. B. Bivalves. ACÉPHALES. Cu. Aer GENRE. — Ténévnaruce, Terebratula. Brug. 86. Térébratale trilobée. Terebratula trilobata. Nyst 1. (PI. IV, fig. 16.) Testa lœvigata , crassa, trilobata. 1 Nous devons a l’obliseance de M, I. Nyst la spécification de cette espèce. DE LA PROVINCE DE BRABANT. 151 Loc. — Fossile dans les sables de S'-Gilles, d'Uccle, de Vleurgat, de Forêts, d'Assche et de Loo ; dans le grès de S'-Josse-ten-Noode? Fossile à Gand. 87. Térébratule de Kickx. Terebratula Kickxii. Nobis. (PL. IV, fig. 15 et 15. A.) Testa nitidu, inflata , oblonga; sulcis tenuibus, regularibus, concentricis ornata , marginibus regularibus , fragilibus œqualibus , foramine apicis tenuissimo. Loc. — Fossile dans les sables et le calcaire d’Assche. 88. Térébratule variable. Terebratula variabilis. Sow. Sow., Min. conchology. P1. 576, fig. ?, 5. Loc. — Fossile dans le grès furrugineux de Louvain. Fossile dans le crag de Suffolk. 2e GENRE. — Anoure, Anomua. Brug. 69. Anomie striée. Anomia striata. Sow. Sow. loc. cit. pl. 425, fig. 2. Anomia ephippium des autres auteurs. Loc. — Fossile dans les sables d'Uccle, St-Gilles, Forêts et Assche; dans les grès de Rouge- Cloître et de S'-Josse-ten-Noode. Fossile dans l’argile de Londres à Barton. 90. Anomie..…. Anomia...… Loc. — Fossile dans les sables d'Uecle, St-Gilles, Forêts, d'Assche , de Boitsfort et de Cam- penhout. 9° GENRE. — Hvuirne, Ostrea. Lam. 91. Huiître très-large. Ostrea latissima. Desh. (PI. IV, #g. 18, a, b.) Desh., Cog. des env. de Paris, t.1,pl.52, 53, fig. 1. Loc. — Fossile dans les grès calcarifères et quarzeux de Chapelle-S!-Laurent. Fossile à Chaumont et Valmondois. 92. Huiître callifère. Ostrea cullifera. Lam. Ostrea callifera. Lam. Animaur sans vertèbres ,t. VI, p.218, no 19. Ostrea hippopus. Lam. Ann. du Musée , t. VIE, p. 159, n° 2, et t. XIV, pl. 21, fig. 1. Desh., loc, cit, pl.50, fig. 1, pl. 51, fig.1, 2. Ostrea callifera. Gold., pl. 83 , fig.2,f. Loc. Fossile dans les sables et grès de Piétrebais-Chapelle-St-Laurent. Fossile à Roquencourt près de Versailles et dans le parc de Versailles. 95. Huïître cariée. Ostrea cariosa. Desh. Desh. loc. cit. pl. 54, fig. 5, 6, et pl.61, fig. 5,6, 7. Loc. — Fossile dans le sable et le calcaire de Melsbroeck; dans les sables blancs de Cale- voet? dans les sables calcarifères d'Assche? et d'Ucele. Fossile à Chaumont et à Mouchy. 94. Huitre enflée? Ostrea inflata? Desh. Desh. loc. cit , pl. 59 , fig. 1, 2. Loc. — Fossile dans les sables de St-Gilles et d'Assche. Fossile à Valmondois où elle est rare. 95. Huître hétéroclite. Ostrea heteroclita. Def. Desh., loc. cit., pl. 63, fig. 2,3, 4. 96. D je 98. 99 ; 100. 101. 102. 105. 104. TABLEAU DES FOSSILES Loc. — Fossile dans les sables d'Uccle. Fossile à Noyon. Iuitre bateau-plat. Ostrea cymbula. Lam. Lam., Ann. du Musée, t. VIT, p. 165, ne 17, et t. XIV, pl. 23, fig. 2,a,b, ec. Desh., loc cit., pl. 53, fig.2, 3,4, pl. 57, fig. 8 Chama plicata. Brand , n° 84. ? Loc. — Fossile dans les sables de Jette, Laeken et d'Assche. Fossile à Grignon, Parnes, Mouchy et Gand. Huïtre beauvoisine. Ostrea bellovacina ? Lam. Lam. dun. du Musée, t, VI, p.159, n° 15t. XIV, pl.20, fig. 1,a, b. Lau. Anim. s. vert, t. VI, p.218, no 3. Desh., loc. cit., pl. 60, fig. 6. Sow., loc. cit., pl. 888, fig. 1. De Burt.., loc. eit., pl. 10, fig. a, et pl. 11. Loc. — Fossile dans les sables de Forêts et de St-Gilles. Fossile à Bracheux, Noailles près de Beauvais , Charlton et Wolwich (argile de Londres), à Gand, à Saucats près de Bordeaux. Huiître plicatelle. Ostrea plicatella. Desh. Desh. loc. cit. pl, 50 fig. 2,3,4, 5. Ostrea virgata. Gold., pl. 76, fig. 7,a,b, d. Ostrea distincta. Def., Diction. des S. naturelles. Loc. — Fossile dans les sables de St-Gilles, d'Uccle, de Forèts et de Vleurgat ; dans les grès et sables de Rouge-Cloitre et de St-Josse-ten-Noode; dans le calcaire d’Assche? de Mels- broeck et de Bergh ; dans le calcaire et la glauconie d’Orp-le-Grand. Fossile dans le Soissonnais, Courtagnon et en Champagne. Huître flabellule. Ostreu flabellula. Lam. (PI. IV , fig. 6, a, b.) Lam., Ann. du Mus.,t. VII, p.164, n° 16, et t. XIV, pl. 20, fig. 3, a, b. Desh, loc. cit., pl. 68, fig .5, 6, 7. Gold., pl. 76, fig.6, a, c, g. Chuma plicata altera. Brander, n° 85. Ostrea flabellula. Sow., pl. 253. Loc. — Fossile dans les sables de S!-Gilles, d'Uccle, de Forêts, de Vleurgat ; dans les grès ferrugineux de St-Gilles et de Beersel; dans les sables calcarifères de Loo, Melsbroeck et Dieghem; dans les grès de Rouge-Cloitre et de S'-Josse-ten-Noode. Fossile à Grignon, Chaumont, Courtagnon, à Barton dans l'argile de Londres, à Gand, à Saucats et Leognan. Huître deltoïde. Ostrea deltoidea. Lam. Lam., Ann. du Mus., tom. XIV, pl. 21, fig. 3. De Burt., pl. 11. Loc. — Fossile dans le calcaire d’Afflighem. Fossile à Grignon. Huiître triangulaire. Ostrea triangularis. Nobis. (PI. III, fig. 4.) Testa triangulari , tribus vel quatuor costis ornata. Loc. — Fossile dans les sables près de Dieghem. Huitre...…. Ostrea.… Loc. — Fossile dans les sables près de Dieghem. Huïître cyathule. Ostrea cyathula. Lam. Lam., Ann.du Mus., tom. XIV, pl. 21, fig. 2, a, b. Loc. — Fossile dans les sables de Forêts et d'Uccle. Fossile à Grignon. Huiître.... Ostrea..… Loc. — Fossile dans les sables d'Uccle, de Forêts, de Melsbroeck et d’'Assche. 105. 106. 107. 108. 109. 110. 111. 112. DE LA PROVINCE DE BRABANT. 153 4e GENRE. — Spoxpxe, Spondylus. Lin. Spondyle râpe. Spondylus radula. Lam. Lam., Ann. du Mus., tom. VIII, pag. 351, n° 1, et tom. XIV, pl. 23, fig. 5. Desh., loc. cit. , pl. 46, fg.1,2,8,4,5. Loc. — Fossile dans les sables d’Assche (rare). Fossile à Grignon, Courtagnon , Mouchy. Spondyle rare-épine. Spondylus rarispina. Desh. Desh. , loc, cit., pl. 46, fig.6, 7,8,9, 10. Loc. — Fossile dans les sables d’Uccle , de St-Gilles et près de Dieghem. Fossile à Chaumont. 5e GENRE. — Puicxe, Pecten. Brug. Peigne plébéien. Pecten plebeius. Lam. Lam., Ann. du Mus., tom. VII, pag. 353, n° 1. Desh., loc. cit., pl. 44, fig.1,2,3, 4. Loc. — Fossile dans les sables de Jette, de Forêts, d’Uccle, de St-Gilles, d’Assche et de Dieghem; dans du calcaire à Vleurgat. Fossile à Grignon , Parnes, Mantes, Courtagnon. Peigne enfumé. Pecten infumatus. Lam. Lam., Ann. du Mus.,t. VIIL, p.553, n° 2. Desh., loc, cit., pl. 44, fig. 8, 9. Loc. — Fossile dans les sables d’Uccle, d’Assche et de Jette ; dans le calcaire d’Assche et d’Affighem ? Fossile à Grignon , Chaumon , à Senlis dans le grès marin supérieur, à Gand. Peigne sole. Pecten solea. Desh. (PI. IV, fig. 10.) Desb., pl. 42, fig. 12 et 13. Loc. — Fossile dans les sables de Forêts, d'Uccle, de St-Gilles, de Vleurgat , de Laeken, de Jette, de Dieghem , de Loo, de Rouge-Cloitre , d’Assche, de Boitsfort, de Laeken et de Melsbroeck ; dans du calcaire à Vleurgat et à Assche, dans les grès à St-Josse-ten-Noode et à Rouge-Cloître ? Fossile à Chaumont et à Gand. Peigne reconstruit. Peclen reconditus. Sow. Sow. loc, cit. pl. 575 , fig. 5, 6. Ostrea recondita ? Brander , fig. 107. Loc. — Fossile dans les sables entre Laeken et Wemmel. Fossile dans l'argile de Londres, à Stubbington et Barton, dans le crag de Norfolk et de Suffolk. Peigne..…….. Pecten.…… Loc. — Fossile dans les sables de Forêts. Peigne.... Pecten..… Loc. — Fossile dans les sables de Jette. 6° GENRE. — Lime, Lima. Brug. 115. Lime oblique. Lima obliquu. Lam. Lam., Ann. du Mus., t VI, p.462, n°8. Desh., loc. cit., pl. 43, fig. 9 , 10, 11. Tox. XII. 20 154 TABLEAU DES FOSSILES Loc. — Fossile dans le calcaire friable de Steenockerzeel. Fossile à Parnes, Grignon, Mouchy. 7e GENRE. — Avicuze, Avicula. Brug. 114. Avicule fragile. Avicula fragilis. Defr. Defr., Dict. des Se. Nat., t. NE, supplément, p. 141, Desh., loc, cit., pl. 42, fig. 10, 11. Loc. — Fossile dans les sables de Laeken. Fossile à Grignon et Senlis. 115. Avicule trigone. Avicula trigonata. Lam. Lam., Anim. s. vert. t. VI, p. 150, n° 14, Desh., loc. cit., pl. 42, fig. 7,8, 9. Loc. — Fossile dans les sables de Jette. Fossile à Grignon. 116. Avicule phalénacée. Avicula phalænacea. Lam. Lam., Anèm. s. vert, t. VI, 1fe partie, p. 150. Basterot, Mém. de la Société d’Iist. Nat. de Paris ; t. U. 1re partie, pag. 75. Loc. — Fossile dans les sables de Jette; dans les grès de S'-Josse-ten-Noode et de Rouge- Cloitre. Fssile à Léognan près de Bordeaux. 8° GENRE. — Anrcue, Area. Lam. 117. Arche quadrilatère. Arca quadrilatera. Lam. Lam., Ann. du Musée, t. VI, p. 221, no 7,ett. IX, pl. 19, fig. 1, a, b. Desh., loc. cit., pl. 34, fig: 15, 16, 17. Loc. — Fossile dans les sables de Forêts. Fossile à Grignon, Courtagnon, Parnes, Senlis. 9e GENRE. — Péroncze, Pectunculus. Lam. 118. Pétoncle nain. Pectunculus nanus. Desh. Desh., loc. cit, , pl. 36, fig. 4, 5,6. Loc. — Fossile dans les sables de Forêts et de Jette. Fossile à Grignon, Parnes , Mouchy. 119. Pétoncle granulé. Pectunculus granulatus. Lam. Lam., Ann. du Musée, t. VI, p. 117, n° 4, et t. IX, pl. 18, fig.6, a, à. Desh., loc. cit., pl.35, fig. 4, 5,6. Loc. — Fossile dans les sables de Jette, Laeken et Forêts. Fossile à Grignon, Parnes , Mouchy, Senlis, Monte-Biancano (Bolonais). 120. Pétoncle en oreiller. Pectunculus pulvinatus. Lam. Lam., Ann. du Musée,t. VI,p. 216, n°02, t.IX, pl. 18, fig. 9. Defrance, Dict. des S. Nat.,t. XXXIX, p.223. Desh., loc. cit., pl. 35, fig. 15, 16, 17. Desh., Coguilles caract. des terrains (Paris, 1831), p. 27, pl. 5, fig. 9,10. Loc. — Fossile dans les grès de Rouge-Cloître (rare). Fossile à Grignon, Chaumont, Courtagnon , Parnes, Valognes , Valmondois , Essex, Bognor, Stubbington (argile de Londres). DE LA PROVINCE DE BRABANT. ° 155 121. Pétoncle faux granulé. Pectunculus granulatoides. Nobis. (PI. IV, fig. 17.) Testa solida, crassa, granulata, obliqua, cardine .angusto, non interrupto fovea triangulari ligamenti. Loc.—Fossile dans les sables de Forêts , d'Uccle, deSt-Gilles, de Boitsfort, de Rouge-Cloitre , a St-Josse-ten-Noode, Laeken , Jette, Dieghem et Assche ; dans les grès ferrugineux de Groenendael , de Beersel , de S'-Gilles; dans les grès de Rouge-Cloître et de St-Josse-ten- Noode. Fossile à Gand. 10e GENRE. — Nucuze, MVucula. Lam. 122. Nucule nacrée. Mucula margaritacea. Lam. (PI. IT, fig. 14.) Lam., Ann. du Musée ,t, VI, p.125, n°1, t. IX pl. 18, fig. 3, a, 6. Desh., loc. cit., pl. 36, fig. 15,16, 17,18, 19, 20. VNucula similis. Sow., loc, cit., pl. 192, fig. 10. Arca nucleus. Brander, p. 40 , tab. 8, fig- 101. Lin. Gmelin, p. 3314, n° 38. Loc. — Fossile dans les sables de Forêts, d'Uccle, de St-Gilles, de S'-Josse-ten-Noode, de Jette, de Laeken et d’Assche ; dans les grès ferrugineux de Groenendael, de Beersel de Louvain et deS!'-Gilles ; dans les grès de Rouge-Cloitre ; dans le calcaire et la glauconie d’Orp-le-Grand. Fossile à Grignon, Mouchy , Courtagnon, Valmondois, Léognan , Saucats près de Bordeaux. Ile d'Ischia, Plaisantin , dans la vallée d’Andona , en Sicile, dans le Piémont, à Barton et Highgate (argile de Londres.) Vivant dans l'Océan européen, en Suède, en Angleterre , dans l’Adriatique et àSt-Domingue. 125. Nucule mucronée. Vucula mucronata. Sow. Sow. loc. cit. pl. 476, fig. 4. Loc. — Fossile dans les sables de Forêts, de Laekenet de Jette. Fossile à Ancliff, 124. Nucule striée. Vuecula striata. Lam. (variété). Lam., Ann. du Musée,t, VI, p.126 , n°2, t.1X, pl. 18, fig. 4, a, b. Desh., loc. cit., pl. 42, fig. 4,5, 6. Loc. — Fossile dans les sables de Forêts, de Laeken et de Jette. Fossile à Grignon, Parnes, Chaumont et Courtagnon. 125. Nucule fragile. Nucula fragilis. Desh. Desh. loc. cit, pl. 36, fig. 10, 11, 12, Loc. — Fossile dans les sables de Forêts et de Jette. Fossile à Abbecourt et à Noailles. 11° GENRE. — Mouxe, Mytilus. Lin. 126. Moule à crevasse. Mytilus rimosus. Lam. Lam., Ann. du Musée, t. IX, pl. 17, fig.9 , a, 4. De Burtin. Oryctographie de Bruxelles, pl. 19, fig. D. ? Loc. — Fossile dans les grès de St-Josse-ten-Noode et dans le calcaire de Melsbroeck. Fossile à Grignon. 12° GENRE. — Monroce, Wodiola. Lam. 127. Modiole..... Modiola..…. De Burtin, loc. cit., pl. 18, fig. F. Loc. — Fossile dans le calcaire de Melsbroeck. 156 TABLEAU DES FOSSILES 15° GENRE. — Jausonneau, Pinna. Lin. 198. Jambonneau nacré. Pinna margaritacea. Lam. Law. Ann. du Mus., t. VI, p.218, n° 1, t. IX, pl. 17, fig. 8. Desh., loc. cit., pl. 41, fig. 15. De Burtin, loc. cit., pl. 18, fig. B. Loc. — Fossile dans les grès de Rouge-Cloître, de S'-Josse-ten-Noode ; dans les grès ferru- gineux de S'-Gilles , de Beersel, de Louvain; dans le calcaire d'Aflighem, d’Assche et de Melsbroeck; dans les sables de Forêts et de Jette ; dans la glauconie d’Orp-le-grand ? Fossile à Grignon, Courtagnon, Parnes, Mouchy, Senlis, Valmondois, Londres? dans les grès de Mont-Parisel près de Mons, Gand? 14 GENRE. — Vévéricanne. Venericardia. Lam. 129. Vénéricarde à côtes plates. Venericardia planicosta. Lam. Lam., Aun. du Musée, t. IX , pl. 31, fig. 10, a, 4, ett. VIT, p. 55. Desh., loc. cit., pl. 24 ,fig.1, 2,3. Loc. — Fossile dans le calcaire d’Aflighem , dans les sables de Forêts ? et de Jette? Fossile à Grignon, Courtagnon, Assy, Hampshire, Touraine (faluns), Brukelsambay , Stub- bington et Selsea (argile de Londres), Gand. À 150. Vénéricarde élégante. Venericardia elegans. Lam. Lam., Ann. du Musée ,t. VIL, p. 59, n°10 ,ett, IX, pl. 32 ,fig. 3, a, b. Desh., pl. 26 ,fig. 14, 15, 16. Loc. — Fossile dans les sables de Forêts, de Laeken, de Jette, d'Uccle; dans les grès et sables de Rouge-Cloître ; dans le calcaire et la glauconie d'Orp-le-Grand. Fossile à Grignon , Montagne de Laon (Soissonnais), Gand. 151. Vénéricarde imbriquée. Venericardia imbricata. Lam. Lam., Ann. du Musée, t. VII, p. 66, n° 3, ett. IX, pl. 32, fig. 1. Desh., loc. cit., pl. 24, fig. 4, 6. Venus imbricata. Lin. Gmel., p. 3277, n° 34, Loc. — Fossile dans les sables de Forêts et de Laeken. Fossile à Grignon , Courtagnon , Parnes, Mouchy , Orglandes près de Valognes et à Gand. 15° GENRE. — Bucanve, Cardium. Lin. 152. Bucarde poruleuse , Cardium porulosum. Lam. (PI. TIT, ég. 15.) Lam., Ann. du Musée,t. VI, p. 343, n°11, et t. IX, pl. 19, fig. 9, a, b. Lam. Anim. s, vort., t. V1, 1re par- tie, p.18, n° 4, Desh., loc, cit., pl. 30, fig.1,2,3,4. Desh, Cog. caract. des terrains, p.22, pl.6, fig. 7, 8. Sow. , loc. cit., pl. 340, fig. 2. Brander, tab. 8, fig. 99. Seba. Loc. — Fossile dans les grès de Rouge-Cloitre, de S'-Josse-ten-Noode , dans le calcaire de Forêts, de Louvain, de Melsbroeck ? et d’Afflieghem ; dans les grès ferrugineux de St- Gilles, de Beersel, de Louvain et de Groenendael; dans les sables de Forèts? de Jette, de Laeken et d’Assche. Fossile à Grignon, Courtagnon, Mouchy, Damerie, Senlis, Valmondois, Assy, Bracheux, Abbecourt dansle Soissonnais ; à Hordwell et Barton dans l’argile de Londres , Gand? 155. Bucarde..…. Cardium..… Loc. — Fossile dans les sables de Jette. 16° GENRE. — Dowace. Donazx. Lin. 154. Donace brillante. Donazx nitida. Lam. Lam,, Ann. du Musée , t. VIE, p.231, n° 4, et t. XII, pl. 41, fig. 6, a, . Desh., loc. cit., pl. 18, fig. 3, 4 156. 157. 158 159. 140. 141. 142. 145 DE LA PROVINCE DE BRABANT. 157 Loc. — Fossile dans les grès de Rouge-Cloitre. Fossile à Grignon et Damerie. . Donace?... Donax?.……. Loc. — Fossile dans les sables de Jette. 1 17e GENRE. — Tezune, Tellina. Lin. Telline...… Tellina..…. Loc. — Fossile dans les sables de Jette. 18° GENRE. — Luce, Lucina. Brug. Lucine divergente. Lucina divaricata. Lam. (PI. III, fig. 18.) Lam., Ann. du Musée, t. VIL, p. 239. Desh., loc. cit., pl. 14, fig. 8 et 9. Tellina divaricata. Linn. Gmel., p.3241 , n° 74. Sow. , loc, cit., pl.417. Loc. — Fossile dans les grès de Rouge-Cloitre, de S'-Josse-ten-Noode, dans le calcaire de Forêts, d’Assche , de Dieghem? de Louvain; dans les grès ferrugineux de Groenendael, de St-Gilles, de Beersel, de Louvain ; dans les sables de Forêts, de St-Gilles, d'Uccle, de Vleurgat, de Jette, de Laeken et d’Assche. Fossile à Grignon, Parnes , Fleury-la-Rivière, Léognan, Mérignac et Saucats, à Hordwelle dans l'argile de Londres, dans le Plaisantin, à Gand. Vivant dans les mers d'Amérique , dans la Méditerranée et sur les côtes du Brésil. Lucine des pierres. Lucina saxorum. Lam. Lam. , Ann. du Musée ,t. VII, p.238 , n° 4, et t. XII, pl. 42, fig 5. Desh. , loc, cit., pl.15, fig. 5, 6. Loc. — Fossile dans les grès et les sables de Rouge-Cloître et de St-Josse-ten-Noode ? Fossile à Grignon , Courtagnon , Parnes et Beauchamp. Lucine sillonnée. Lucina sulcata. Lam. Lam., Ann. du Musée, t. VII, p. 240, n° 9 et t. XIE, pl. 42, fig. 9, a, b. Desh., loc, cit., pl. 14, fig. 12,13. Loc. — Fossile dans les grès et sables de Rouge-Cloitre. Fossile à Grignon. Lucine concentrique. Lucina concentrica. Lam. Lam., Ann. du Musée, t. XIX, pl. 42, fig.4,a, b. Loc. — Fossile dans les grès de St-Josse-ten-Noode et de Rouge-Cloître ? Lucine ambiguë. Lucina ambiqua. Def. Def., Dict. des S. Naturelles ,t. XXVIL. Desh., loc. cit., pl. 17, fig. 6, 7. Loc. — Fossile dans les sables de Forêts. Fossile à Valognes , Hauteville , Chaillot près de Paris. Lucine changeante. Lucina mutabilis. Lam. Lam., Animaux s. vertèbres, t. V, p.540 , n° 4, Venus mutabilis. Lam., Ann. du Musée, t. VII, p 61, t. IX, pl. 82, fig 9, a, b. Desh., loc. cit., pl. 14, fig 6,7. Loc. — Fossille dans le calcaire d’Assche, d'Afflighem et de Vleurgat; dans les sables d'Uccle? Fossile à Grignon. Lucine hiatelloïde. Lucina hiatelloides. Bast. (PL. IV, fig. 11.) e Bast, loc, cit. p.87, pl. 5, fig. 13. 158 145. 147. 148. 149. TABLEAU DES FOSSILES Loc. — Fossile dans les sables de Forêts, de Laeken, de Jette et d’Assche ? dans la Glauconie d’Orp-le-Grand. Fossile à Léognan où elle est rare. Gand? 19° GENRE. — Converzce, Corbis. Cuv. . Corbeille lamelleuse. Corbis lamellosa. Lam. Lucina lamellosa, Lam., Ann. du Musée, t. VIL, p.237,n°1,ett, XII, pl. XLIE, fig. 3. Loc. — Fossile dans le calcaire d’Afflighem. Fossile à Grignon , Courtagnon. 20° GENRE. — Macrre, Mactra. Lam. Mactre demi-sillonnée. Mactra semi-sulcata. Lam. (PI. IT, fig. 21.) Lam., Ann, du Musée, t. VI, p.412, t.1X, pl. 20, fig. 3, a, à. Desh. , loc. cit., pl. 4, fig. 7, 8, 9, 10. Loc. — Fossile dans les grès de Rouge-Cloître et de S'-Josse-ten-Noode; dans les grès fer- rugineux de Groenendael, de Louvain, de Beersel et de S'-Gilles; dans le calcaire de St-Gilles, d’Assche et d’Afllighem ; dans les sables de Rouge-Cloître. Fossile à Grignon, Parnes, Houdan, Valmondois, La Chapelle. . Mactre déprimée. Mactra depressa. Desh. Desh. , loc. cit., pl. 4, fig. 11, 12, 18, 14. Loc. — Fossile dans les grès de Rouge-Cloitre et de S'-Josse-ten-Noode? dans les grès ferru- gineux de Groenendael et de Louvain ? Fossile à la Chapelle près de Luzarches dans les grès marins supérieurs. 21e GENRE. — Envoie, Érycina. Lam. Erycine..… Ærycina..… Loc. — Fossile dans les sables de Forêts, de Laeken et de Jette, dans les grès de Rouge- Cloitre. 99e GENRE. — Cnassarecse , Crassatella. Lam. Crassatelle renflée. Crassatella tumida. Lam. Lam., Ann. du Mus.,t. VI, p.408, t. IX, pl. 20, fig. 7, a, b. Desh., loc cit., pl.3, fig. 10, 11. Loc. — Fossile dans les grès de Rouge-Cloitre. Fossile à Grignon, Courtagnon , Parnes et Mouchy. Crassatelletrigone. Crassatella trigonata. Lam. (PI. IT, fig. 20.) Lam., Anim. s. vert., t, V, p. 485, n° 17. Crassatella triangularis. Lam., Ann. du Musée, t. VI, p. 411, ett.IX ,pl. 20, fig.6,a,b. Crassatella trigonata. Desh., loc. cit. , pl. 3, fig.4, 5. Loc. — Fossile dans les sables de Jette, de Laeken, de Forêts et de Rouge-Cloître. Fossile à Grignon, Courtagnon , Parnes , Mouchy et Gand. 50. Crassatelle comprimée. Crassatella compressa. Lam. Lam., Ann. du Musée, t. VE, p. 410, n° 4et t. IX, pl. 20, fig. 5, a, 4. Desh. , loc. cit , variété C, pl.5, fig.3,4. Loc. — Fossile dans les sables de Forêts, de Laeken et de Jette. Fossile à Courtagnon et Chaumont. DE LA PROVINCE DE BRABANT. 159 95e GENRE. — AsrartTé, Astarte. Sow. 151. Astarté de Henckelius. Astarte Henckeliusiana. Nyst. (PI. IT, fig. 7.) Nyst, Cataloque des coquilles du Limbourg. (Dicrions. Gk0G. pu LImBouRG , par M. Vander Maelen). Testa crassa, solida. Loc. — Fossile dans les sables de Jette (rure). Fossile à Kleyne-Spauwen. 24e GENRE. — Véxus, Venus. Lin. 152. Vénus ? pecténifère. Venus ? pectinifera. Sow. (PI. IV. fig. 12.) Sow., loc. cit. , pl. 422, fig. 4. Loc. — Fossile dans les sables de Laeken, de Jette et de Forêts. Fossile à Barton , où l’on n’a trouvé encore qu’une valve. 25e GENRE. — Cyrnérée, Cytheræa. Lam. 155. Cythérée polie. Cytheræa polita. Lam. Lam., Ann. du Musée, t. VIX, p.134, n° 4, et t. XIL, pl. 40, fig. 6, a, b, Desh. ; loc. cit , pl. 23, fig. 3, 4,6. Loc. — Fossile dans les sables et les grès de Rouge-Cloitre. Fossile à Houdan, Parnes, Assy-en-Mulitien, Valmondois. 154. Cythérée sub-érycinoïde. Cytherœæa suberycinoides. Desh. Desbh. , loc cit., pl. 22, fig. 8,9. Loc. — Fossile dans les sables et les grès de Rouge-Cloitre. Fossile à Mouchy, Assy-en-Mulitien. 155. Cythérée luisante. Cytheræa nitidula. Lam. Lam., Ann du Musée, t. VIL, p. 133, n°3, et t. XII, pl. 40, fig. 1, a, b. Desh., loc. cit., pl. 21, fig. 3,4,5. Loc. — Fossile dans les sables de Jette. Fossile à Grignon , Courtagnon , Parnes , Chaumont , Assy. 156. Cythérée naine. Cytheræa pusilla ? Desh. Desh. , loc. cit., pl. 22, fig. 14. Loc. — Fossile dans les sables de Jette. Fossile à Abbecourt près de Beauvais. 157. Cythérée tellinaire? Cytherœa tellinaria ? Lam. Lam., Ann du Musée ,t. XIT, pl. 40, fig.4, a, b. Loc. — Fossile dans le calcaire d’Aflighem. Fossile à Grignon et à Gand. 158. Cythérée lisse? Cytheræn lœvigata ? Lam. Lam., Ann. du Musée , t, XIX , pl. 40, fig.5,a, b. Loc. — Fossile dans le calcaire d’Afflighem. Fossile à Grignon et à Gand. 26° GENRE. — Consuze , Corbula. Brug. 159. Corbule gauloise. Corbula gallica. Lam. Lam , Ann, du Musée, t. VU, p. 466, n° 1. Desh., loc. cit., pl. 7, fig. 1,2, 3. Corbula costulata. Lam , Anim. s.vert.,t. V, p.497, n° 11. 160 TABLEAU DES FOSSILES Loc. — Fossile dans les grès et les sables de Rouge-Cloitre et de Forêts. Fossile à Grignon , Parnes, Tancrou et la Chapelle. 160. Corbule striée. Corbula striata. Lam. Lam., Ann. du Musée, t. VIL, p. 467, n°3, Desh. , loc. cit., pl. 8,fig.1, 2,3. Loc. — Fossile dans les sables de Forêts et de Jeite. Fossile à Grignon. 161. Corbule rugueuse. Corbula rugosa. Lam. Lam. , Annal. du Musée, t. VIT, p. 467, no 2. Desh., loc. cit. , pl. 7, fig. 16, 17,22. Tellina revoluta. Brocchi, Conchiologia fossile subapennina (Milan , 1814), t. IL, p 516, n° 14, pl. 12, fig. 6. Corbula revoluta. Sow. loc. cit. t. IL, pl, 209, fig. 8, 13. Bast., loc. cit., p.98, Loc. — Fossile dans les sables de Forêts, de Laeken et de Jette. Fossile à Grignon, Parnes, Houdan, dans la vallée d'Andona (Italie), Dax, Léognan, Mérignac et Saucats (bassin de Bordeaux), à Barton-Cliff (Hampshire), Hordwell (argile de Londres). 162. Corbule radiée. Corbula radiata. Desh. Desh. loc, cit. pl. 9, fig. 11, 12. Loc. — Trouvée par M. Nyst dans les sables de Forèts. Fossile à Grignon. 165. Corbule pois. Corbula pisum. Sow. (PI. IV, fig. 8.) Sow. loc. cit. pl 209, fig. w. Loc. — Fossile dans les sables de Forêts , d'Uccle, de Rouge-Cloître, de Wemmel, de Lae- ken , de Jette , d'Assche ? et de Loo. Fossile à Hordwell et à Gand. 97e GENRE. — Paxpone, Pandora. Brug. 164. Pandore de Defrance. Pandora Defrancui. Desh. Desh. loc. cit. pl. 9, fig. 15, 16, 17. Loc. — Cette jolie coquille a été trouvée à Forèts par M. Nyst. 98e GENRE. — Sozen , Solen. Lam. 165. Solen à rebord. Solen vagina. Lam., Lin. Lam., Ann. du Musée,t. VIL, p. 427,n° 1, ett. XII, pl. 43, fig. 3. Desh, loc cit., pl. 2, fig. 20,21. Aldov., Zestacea, p. 529. Concha longa. Moscardi, p 209 Manche de couteau, De Burtin, loc. cit , pl. 18, fig. U. Loc. — Fossile dans le calcaire de Melsbroeck , dans les grès de S'-Josse-ten-Noode et de Rouge-Cloître; dans les grès ferrugineux de Groenendael , de Louvain et de S'-Gilles ? Fossile à Grignon , Parnes, Mouchy, dans le Plaisantin. Vivant dans toutes les mers. 99e GENRE. — Pnorane , Pholas. Lin. 166. Pholade.... Pholas..… Loc. — Fossile dans le calcaire d’Assche et de Melsbroeck. 50° GENRE. — Taner, Zeredo. Lin. 167. Taret naval? Teredo navalis? Lin. DE LA PROVINCE DE BRABANT. 161 Loc. — Fossile dans le calcaire (qui enveloppe ces tarets et les bois qu’ils ont forés) de Melsbroeck, d’Assche?, d'Aflighem, de Dieghem, de Schaerbeek, de Woluwe-St-Étienne, de Saventhem, de Loo et de S!-Gilles. Fossile à Stubbington, Portsmouth, Bognor, Highgate, à l’île Sheppey dans l'argile de Londres. Vivant sur nos côtes. 51° GENRE. — Fisruraxe, Fistulana. Brug. 168. Fistulane? masquée. Fistulana ? personata. Lam. Lam., Ann. du Musée, t. XIL, pl. 43, fig. 6. Loc. — Nous rapportons à la fistulane masquée , des tubes épais et gros que l’on trouve dans les sables de Forêts, de Laeken et de Jette. Fossile à Grignon et Courtagnon. C. Multivalves. CrrrirÈnes. Latreille. 1er GENRE. — Axamre, Anutifa. Lam. 169. Anatife... Anatifa..… Loc. — Fossile dans les sables d’Assche. 2e GENRE. — Baraxe, Balanus. Brug. 170. Balane clochette. Balanus tintinnabulum. Lin. Lepas tintinnabulum , Lin., Gualtieri. Tab. 106, fig. E, H, J. Loc. — Trouvé par M. Kickx dans les sables de Forêts 1. Fossile en Italie. Vivant dans l'Océan européen, indien, américain et septentrional. 7° ANNÉLIDES FOSSILES. 1er GENRE. — Seneuie, Serpula. Lin. 1. Serpule triangulaire. Serpula triangularis. Nobis. (PI. IT, fig. 6). Testa raravGurant, trregulari, transversim costata, costis distantibus attenuatis, basi ampla Tugosa. Loc. — Fossile dans les sables de St-Gilles, de Forêts, de Dieghem , de Jette ; dans le cal- caire de Melsbroeck. 2. Serpule quadrangulaire. Serpula quadrangqularis. Nobis, (PI. TT, fig. 5). Testa rugosa , QuanraNGuLARt , apertura quadrilatera. Loc. — Fossile sur les blocs de calcaire de Melsbroeck. 5. Serpule.... Serpula… Loc. — Fossile dans des huîtres d’Assche. 1 Ce balane est fort grand, Tow. XII. 21 2 TABLEAU DES FOSSILES 9e GENRE. — Vermue, Vermilia. Lam. . Vermilie?.. Vermilia ?.… Loc. — Fossile dans les sables de Forêts. . Vermilie ?.... Vermilia ?… Loc. — Fossile dans les sables de Laeken. 5° GENRE. — Srinonse, Sprrorbis. Lam. . Spirorbe élégant. Spirorbis elegans. Def. Def. Dict. des Sciences nat. Loc. — Fossile à la surface des blocs calcaires de Melsbroeck et de Dieghem. Fossile à Hauteville. . Spirorbe.... Spirorbis.…. Loc. — Fossile dans les sables d’Assche et de Forêts. 8° ZOOPHYTES FOSSILES. Radiaires. 1° GENRE. — Garérires, Galerites. Lam. . Galérite ovale. Galerites ovata. Gold. (PI. IV, fig. 19.) Gold. Loc. — Fossile dans les sables de Vleurgat et de Forêts. 9e. GENRE. — Srarancue, Spatangus. Lam. . Spatangue. Spatangus. Loc. — Fossile dans les sables de S'-Gilles. 5° GENRE. — Scurerxe, Scutella, Lam. 5. Scutelle..…. Scutella..…. Loc. — Fossile dans les sables de Forêts , de S'-Gilles , d’Assche et de Jette. 4. Scutelle.…. Scutella.……. Loc. — Fossile dans les sables de St-Gilles. 4e GENRE. — Cramre, Cidarites. Lam. . Cidarite.... Cidarites. Loc. — Fossile dans les sables de S!-Gilles, d’Uccle et d'Assche. Plusieurs autres espèces dans les sables d’Assche et de S'-Gilles. Be GENRE. — Crvréasrne, Clypeaster. Lam. . Clypéastre…. Clypeaster. Loc. — Fossile dans les sables de St-Gilles. DE LA PROVINCE DE BRABANT. 163 6e GENRE. — Asrénte, Asterias. Lam. . Astérie... Asterias. Loc. — Des débris d’articulations fossiles à Assche et à St-Gilles. Polypes a polypiers. 1e GENRE. — Fivsrne, Ælustra. Lin. . Flustre... Flustra contexta. Gold. Tab. 1, 2 af. Loc. — Indiquée par M. Goldfuss comme se trouvant dans le Brabant. . Flustre..….. ÆFlustra. Loc. — Fossile dans les huîtres de St-Gilles et d’Assche. . Flustre..…. Ælustra. 4 Loc. — Fossile sur les huîtres de Melsbroeck et de S'-Gilles. 20 GENRE. — Ipxonée, /dmonea. Lam. . Idmonée triquètre. /dmonea triquetra. Lam. (PI. IV, fig. 15.) Lam. Polypiers, pl. 79, fig. 13, 14, 15. Def., Dic. des Sc. Nat,, t. XXII, paye 364 et pl. 46, fig. 2. Loc. — Fossile dans les sables d’Assche. Fossile à Grignon et à Caen. 5° GENRE. — Turenoue, Zurbinolia. Lam. . Turbinolie sillonnée. Turbinolia sulcata. Lam. Al. Brong., Descript. du bassin de Paris. PI, 8, fig. 38. Loc. — Fossile dans les sables de Forèts, d’Uccle, de St-Gilles, de Vleurgat, d’Assche, de Jette, de Laeken, de Dieghem , de Rouge-Cloitre, de S'-Josse-ten-Noode. Fossile à Grignon et à Gand. ÿ. Turbinolie elliptique. Turbinolia elliptica. Al. Brong. Al. Brong. loc. cit. PI. 8, fig. 2, À, B. Loc. — Fossile dans les sables d'Uccle, de Forêts et de Jette. Fossile à Grignon et à Gand. . Turbinolie crépue. Turbinolia crispa. Lam. Lam., Encyclop., Pl, 483, fig. 4. AI. Brogt., loc. cit. PI. 8, fig. 4. Loc. — Fossile dans les sables de Rouge-Cloitre , de Forêts et de Jette. Fossile à Grignon et à Gand. 4 GENRE. — Lunurire. Lunulites. Lam. . Lunulite radiée. Lunulites radiata. Lamouroux. Lam., Polypiers. PI. 73, fig. 5,6,7,8. Loc. — Fossile dans les sables de Forêts, d'Uccle, de St-Gilles, de Jette, de Laeken, Rouge-Cloitre , d’Assche et de Dieghem? Fossile à Grignon et à Gand. 164 TABLEAU DES FOSSILES 9. Lunulite urcéolée. Lunulites urceolata. Lam. Brong. loc. cit. PL. 8, fig. 9. Loc. — Fossile dans des grès d’Assche. Fossile à Grignon. ÿe GENRE. — Onmrorire. Orbitolites. Lam. 10. Orbitolite aplatie. Orbitolites complanata. Lam. (PI. IV, fig. 5.) Lam., dnèm s. vertèbres (1816), t. IL, p. 196. Orbulite plane. Lam, loc. cit, Tab. 73, fig. 13, 16. Hélicite, Guettard. Loc. — Fossile dans le calcaire de Forêts, de Melsbroeck et d’Assche; dans les sables de Forêts, de Jette, de Laeken et d’Assche. Fossile à Grignon , à Gand et à Hauteville. 6° GENRE. — Ovoure, Ovulites. Lam. 11. Ovulite perle. Ovulites margaritula. Lam. Lam,, Anëm. s. vert., tom. IL, pag. 194. Lamouroux , loc. cit. Tab. 71, fig. 9, 10. Loc. — Fossile dans les sables de Forêts et de Jette. Fossile à Grignon et à Gand. 12. Ovulite allongée? Ovulites elongata? Lam. Lamouroux loc. cit. PI. 71, fig. 11, 12. Lam., Vélins du Musée , n° 48, fig. 8. Loc. — Fossile dans les sables de S'-Gilles et de Forêts. Fossile à Grignon. 7e GENRE. — Porvrnvre, Polytrypes. Defr. 15. Polytrype allongée? Polytrype elongata ? Defr. Def., Dict. des S. Naturelles , t. XLIX, p. 453, pl. 47, fig. 1, a, 6. Loc. — Fossile dans les sables de Forêts. Fossile à Grignon et à Hauteville. 8° GENRE. — Dacryrorore, Dactylopora. Lam. 14. Dactylopore cylindracé. Dactylopora cylindracea. Lam. Defr. Dict. des Sciences Naturelles (planches). Zool. des Zoophytes, pl. 47 et 51. Lam., Anim, s, vert. t. Il, p. 189. Loc. — Fossile dans les sables de Forêts et d’Assche. Fossile à Grignon (rare), Pontoise (sables). 9e GENRE. — Escuare, Eschara. Lam. ÿ Plusieurs espèces fossiles sur les huîtres d'Uccle, d'Assche, de Melskroeck. 10° GENRE. — Rérérone, Retepora. Lam. Quelques espèces fossiles sur les huîtres d'Ucele, de S!-Giïles, de Saventhem et d'Assche; dans les grès lustrés de Chapelle-S'-Laurent. DE LA PROVINCE DE BRABANT. 165 11° GENRE- — Arcxox, Alcyonium. Lin. 15. Alcyon tulipe? Ælcyonium tulipiformis ? Webster. (PI. IT, fig. 2). Tulyp. alcyonium , Webs.,.On some new varieties of fossil alcyonia (TRANSACTIONS DE LA SOCIÉTÉ GÉOLOGIQUE »E LONDRES), vol. LE, p.377, pl. 27, fig. 1, 2, pl. 28, fig. 7. Loc. — Fossile dans les grès ferrugineux de Groenendael, dans les calcaires de Dieghem. dans les grès lustrés de Loo, dans les grès fistuleux ? de St-Gilles, de Chapelle-St-Laurent et de Schaerbeek. Fossile dans le greensand de l’île de Wight. 9 VÉGÉTAUX FOSSILES. Nous ne pouvons citer que des noix de cocos ? (Cocos Burtini, Ad. Brong., Prodr. d’une histoire des végétaux fossiles) figurées dans De Burtin (pl. XXX , fig. À) et une fort belle noix inconnue trouvée par M. de Koninck dans les environs de St-Josse-ten-Noode. Les fragmens de bois percés de tarets sont communs à Melsbroeck, Louvain, St-Josse-ten-Noode , Dieghem et Loo. 1 Nous possédons une noix très-aplatie provenant du calcaire d’Afllighem. IV. TERRAINS FLUVIO-MARINS MOYENS. FORMATION CRÉTACÉE. 1° CALCAIRE DE MAESTRICHT. 1. Bélemnite mucronée. Belemnites mucronatus. Schlo. Sow. loc. cit., pl. 600. Blainville, Mémoire sur les Bélemnites, pl. 12 et 12 a. Faujas-St-Fond, pl. 32, fig. 3. Loc. — Fossile à Folx-les-Caves. Fossile de Maestricht. 2. Térébratule..….. Terebratula..… Loc. — Fossile à Folx-les-Caves. . Huïître vésiculaire. Ostrea vesicularis. Lam. Lam., Ann. du Musée, t. XIV, pl.22, fig.3, a,b, t. V1, p.219, n° 28. Cuvier et Brong., pl. 8, fig. 5. Qt Loc. — Fossile à Folx-les-Caves. Fossile à Meudon , Bougival , Périgneux (craie), Maestricht. 4. Peigne…. Pecten… (2 espèces indéterminables). Loc. — Folx-les-Caves. 5. Lime... Lima... Loc. — Folx-les-Caves. 6. Avicule... Avicula.…. Loc. — Folx-les-Caves. 7. Anatile... Anatifa..…. Loc. — Folx-les-Caves. 8. Achillée…. Achilleum..…. Loc. — Folx-les-Caves. 166 TABLEAU DES FOSSILES 9. Eschare.. ÆEschara… Loc. — Folx-les-Caves. 10. Fongie… Fungia…. Loc. — Folx-les-Caves. 11. Spatangue..…. Spatanqus… Loc. — Folx-les-Caves. 20 CALCAIRE CRAIE. 12. Bélemnite mucronée. Belemnites mucronatus. Schlot. Loc. — Grez. 15. Bélemnite courte ?? Belemnites brevis ?? Blainv. Blainv. loc. cit. pl.3,fig. 1etlaet2. Loc. — Grez. (Il est fort douteux que cette bélemnite soit la breis ; elle s'en rapproche ce- pendant assez). Fossile dans le lias du Calvados. 14. Huitre vésiculaire. Ostrea vesicularis. Lam. Loc. — Grez. 15. Huitre.... Ostrea.. (2 autres espèces). Loc. — Grez. 16. Peigne.. Pecten (2 à 3 espèces). Loc. — Grez. (1 espèce se rapproche du P. cretosus. Def., Cuv. et Brong. (PI. III, fig- T, À, B). 17. Lime... Lima. Loc. — Grez. 18. Avicule... Avicula… Loc. — Grez. 19. Térébratule..… Terebratula… Loc. — Grez. 20. Spatangue.… Spalanqus… Loc. — Grez. 91. Catille de Cuvier. Catillus Cuvieri. Al. Brong. Cu. et Al, Brong., pl. 4, fig. 10,A,E,F,G,H, I. Znoceramus Cuvieri. Sow., Parkinson, Loc. — Grez. (Celte espèce y est bien conservée et fort grande). Fossile à Meudon. 22. Gryphée..…. Gryplæa..…. Loc. — Grez. 25. Restes d’un poisson que nous n’avons pu déterminer. Loc. — Grez. 24. Quelques polypiers dans la craie de Grez. V. TERRAINS MARINS HÉMILYSIENS. FORMATION SCHISTEUSE. 1. Trilobites trouvés dans les schistes verdätres de Rebecq. DE LA PROVINCE DE BRABANT. 167 SUPPLÉMENT 1. 1. Lucine..……. Lucina contorta. Desh. Loc. — Fossile dans les sables de Wavre et dans le calcaire de Gobertange. 2. Acétabule antique? Acetabula antiqua? Defr. Defr., Dict. des Sciences Naturelles , tom. XLII, page 394. Loc. — Fossile dans les sables d’Assche (nous rapporterons à cette espèce un petit polypier d’une ou de deux lignes ayant une tige courte qui paraît être tronquée). Fossile à Grignon, à Orglandes et à Morfontaine dans le grès marin supérieur. 5. Coprolite.….. Coprolites. Buckland. De Burtin, loc. cit. PI.5, fig. KF, G. M. Buckland rapporte les fossiles figurés par M. De Burtin aux Coprolites. Loc. — Melsbroeck. 4. Idmonée corne-de-cerf. Zdmonæa coronopus. Defr. Defr., Dict. des Sciences Naturelles, tom. XXIT, page 665. Loc. — Fossile à Assche. Charmante petite espèce à base évasée. Fossile à Chaumont et à Hauteville. 1 Depuis la confection du tableau des fossiles, nous avons trouvé quelques nouvelles espèces que nous n'avions point encore rencontrées. » \ à YU 4 da A LÉ »: (TR d EN inde Auenr te Fa x ) TA Sete AND «éd nt ap er FN Lie AAA AU EU LL NUL UV LV LULU LL LUE LE LEA NE VU LVL VU EVA VUE LVL EXPLICATION DES PLANCHES. PLANCHE 1. Coupe théorique générale et coupes particulières. Fig. PLANCHE Il. 1. Débri du Pristis Lathami, représenté de grandeur naturelle (décrit pag. 46 et 47). 2A Pointes osseuses du museau ou bec rostriforme du même Pristis (vues de diffé- rens côtés). PLANCHE II. Melania marginata de Rouge-Cloitre, . Cassidaria carinata de Groenendael. . Rostellaria fissurella de Rouge-Cloitre. . Nummulina lœvigata de S'-Gilles. . Operculina Orbignü de Forèts. . Nucula margaritacea de Jette. Cardiwm porulosum de Rouge-Cloitre. . Voluta spinosa de S'-Josse-ten-Noode. . Turritella granulosa de Jette. . Lucina divaricata de Forêts. . Débri de l'Émys Cuvieri, représenté de grandeur naturelle (décrit pag. 44 et 45). . Alcyonium tulipiformis de Loo. . Cancer Burtini de Melsbroeck. . Ostrea triangularis de Loo. . Serpula quadrangularis de Melsbroeck. . Serpula trianqgularis de Forêts. . Astarte Henckeliusiana de Jette. . 8a,8 b, 8 c. Pileopsis variabilis dans ses différentes variétés de Loo. 22 Di ed di pi Gt Det Det pl Dé jet © © 1 @ x + © À M © © co 1 D Où + LE NE EXPLICATION DES PLANCHES. . Quinqueloculina saxorum de Forèts. . Crassatella trigonata de Jette. . Mactra semi-sulcata de Rouge-Cloitre. PLANCHE IV. . Solarium Nystii vu sous trois différens aspects , de Jette. . Solarium trochiforme de Jette. … Scalaria tenuilamella. Variété A, de Jette. . Nautilus... de Groenendael. . Orbitolites complanata de Forêts. . a, b. Ostrea flabellula de S'-Gilles. . Dentalium Deshayesianum de St-Gilles. . Corbula pisum de Jette. . Rostellaria macroptera de Groenendael. . Pecten solea de Jette. . Lucina hiatelloides de Jette. . Venus? pectinifera de Jette. . Idmonea triquetra d’Assche. . Ampullaria gigantea de Groenendael. .et15a. Terebratula Kickæi d’Assche. . Terebratula trilobata de S'-Gilles. . Pectunculus granulatoides de Jette. . a, b. Ostrea latissima de Piétrebais. . Galerites ovalis de Vleurgat. VA VV UUNV VVUUUVUAU LU NV AV UV NU VAN AAA AAA AAA TE AE TABLE ANALYTIQUE. ——— Prérace , 3. PREMIÈRE PARTIE. Situation géographique du Brabant et démarcation politique de la province, 5. — Relief du sol, 6.— Hauteur des collines, cours d’eau, 6, 7. — Observations météorologiques , 8. — Climat, température , végétation , 9. DEUXIÈME PARTIE. Considérations générales , sur la constitution géognostique. 10. CuaPITRE PREMIER. — Terrains récens ou modernes, 12. 1° Formation alluvienne , 12. — Nature des alluvions (vase , limons), leur formation, 13. 2 Formation détritique , 13. — Nature du détritus (éboulemens , désagrégation in situ), leur formation, 14. 3° Formation lysienne ou chimique, 15.—Tufs calcaires, fer limoneux , 15.—Nature des eaux, 16. 4° Formation tourbeuse. — Localités, 16. — Nature des tourbes (tourbes fibreuses et com- pactes), troncs d'arbre dans leur partie inférieure , puissance, débris organiques, 16-17. Cuaprrre peuxième, — Terrains alluviens anciens, 18. — Composition (cailloux roulés, sables), débris organiques , 18-19. — Etendue , usages , 20. — Observations sur ces terrains , 20. Cuaprrre TROISIÈME. — Terrains fluvio-marins supérieurs, 23. — Synonymie, considérations préliminaires , 23. 1° Formation médio-marine ou bétasique, 24.— Synonymie, observations préliminaires , 24-95. — Composition (sables, grès ferrugineux , fer hydraté), 25, 26, 27.— Etendue, 27.— Fos- siles, détails locaux, configuration et aspect du sol, 28. — Végétation , puissance, 29. 2% Formation infra-marine ou tritonienne , 29. — Synonymie, composition générale , divisions , 29-30. I. Système supérieur ou calcaréo-sableux , 31. — Caractères généraux, 31. — Description des roches , 32. (Sables calcarifères, 32.— Sables argileux, ferrifères , sables purs , 33). — Roches subordonnées aux sables , 34, — (Calcaire noduleux compacte, noduleux grenu, friable, si- liceux, coquillier, 34-36. — Grès fistuleux , noduleux , quarzeux , lustrés, ferrifères , 36-39. — Fer hydraté, 40. — Lignites avec fer phosphaté, 41). Détails locaux , 42. — Plateau de Melsbroeck , 42. — (Fossiles, Émydes, 43-44. Scies, 45. — Crabes , 47. — Nautiles, 48.— Huiîtres , 49.— Cabochons , 49. Serpules, 50. — Liste des fossiles, 51). — Usages , 52. Plateau de Laeken , 52. — Fossile (Operculines , 54.— Cadrans, 54.— Scalaires, Pétoncles, 53. — Liste des fossiles, 56. Plateau d’Assche, 57. — Etendue , 58. — Sol, coupe, 59. — Liste des fossiles, 59. — Téré- bratules , 60. — Dentales, 62. — Observations sur quelques fossiles, 62. Plateau de Forêts, 63.— Nature du sol, 63.— Coupes , 64. — Liste des fossiles, 65. — Serpu- les, 67. — Observations sur les fossiles, 67. 172 6 TABLE ANALYTIQUE. Plateau de Groenendael, 67.— Nature du sol, 68. — Fossiles et liste des fossiles , 69.— Am- pullaire, 70.— Observations sur quelques fossiles , 70.— Fossiles de Louvain , de Tirlemont, de Vossem, 70-71. — Bois fossile d’Everghem, 71. IT. Système moyen ou quarzo-sableux , 71.— Caractères généraux , 71.— Description des roches (sables, 72. — Calcaire, grès, 73-74. — Fer hydraté, 75). — Configuration du sol, puis- sance, 75. Détails locaux , 75.—Plateau de Piétrebais ,75.—Nature des roches, 76.—Fossiles , 76.— Coupes près Wavre, 77. — Fossiles de Beersel, de Houtain-le-Val , de Nivelles, de Jodoigne -Sou- veraine , de Saintes, de Thines, 78. IL. Système inférieur ou glauconien , 78.— Caractères généraux, description des roches (glau- conie , calcaire, glauconie sableuse , 78-79.—Argile chloritée, sables et grès fistuleux , 79-80. — Fer hydraté), usages, configuration du sol, puissance, détails locaux, coupes, 80-81. Fossiles, 81-82. — Liste des fossiles, 82. Conclusions , 83. — Comparaisons zoologiques d’après le principe établi par M. Deshayes, 86. — Comparaison de la formation infra-marine du Brabant avec les bassins de Londres et de Paris, 87. — Coquilles caractéristiques , 90. — Conclusions , 93. CHAPITRE QUATRIÈME, — Z'errains fluvio-marins moyens, 95. Formation crétacée. — Synonymie , caractères généraux, 95. 1° Calcaire de Maestricht , 96. — Caractères, roches subordonnées, 96. — Stratification, puis- sance, 97. — Usages, détails locaux, 97-96. — Fossiles, 98. 2% Craie, 99. — Caractères , 99. — Fossiles, puissance, rapports de gisement, usages, stra- tification , silex , 100. — Craie sans silex, 101. — Argile, puissance, stratification, fossiles , usages, 101. 3° Gault? — Caractères, 101. Cuarirre ciNQUIÈME. — Terrains hémalysiens ou semi-cristallisés , Synonymie, 103. Formation schisto-psammitique ou ardoisière. — Synonymie, 103. 1° Roches plutoniques , 104. — Subdivision : 1° Diorite, Synonymie , 104. — Composition, Eurite porphyroïde , Diorite orbiculaire, 104-105.—Détails descriptifs , 105.—Décomposition de la diorite, 106. — Masses globuleuses de diorite , 107.— Stratification , fissures acciden- telles, 108. — Fossiles , usages, rapports de gisement, 109. — Observations sur l'apparition de la diorite, 110. — Détails locaux, 111. 2% Schiste porphyroïde, 111.— Caractères minéralogiques, 112. — Minéraux disséminés , 112. — Stratification, 113.— Fissures accidentelles, fossiles, usages , rapports de gisement, 114. — Détails locaux, 115. Formation schisto-psammitique proprement dite. — Subdivisions, description des roches, 115. 1° Quarz grenu, caractères, 115. — Stratification, fossiles, usages, rapports de gisement, 116-117. — Détails locaux, 117. 2% Psammite schistoïde.— Caractères, stratification , 117-118.—Fissures accidentelles, fossiles, usages, rapports de gisement, 119. — Configuration du sol, 119. 3° Schiste ardoise commun. — Caractères, 119. — Minéraux disséminés, filons ou couches de . . . d . 7 . quarz , stratification, 120-121.— Fossiles, usages, configuration du sol, 121-122.— Détails locaux et coupes, 122-123. Tableau méthodiques des roches avec les espèces minérales qu’elles renferment, 129 à 135. Tableau descriptif des fossiles du Brabant, 137 à 167. Explication des planches , 169. Table analytique , 171. Notes additionnelles, 175. FIN. AAA AAA ANA AAA AAA AA AAA AAA AAA AA NOTE SUR LA COLORISATION DE LA CARTE. Il est nécessaire que nous développions le système suivant lequel nous avons coloré la carte géologique du Brabant: désirant faire connaître toute l'étendue de l'Océan qui a dé- posé les sédimens qui forment le sol de cette province, nous avons pensé que nous ne devions point sacrifier des assises tritoniennes , quelque peu importantes qu’elles parais- sent, à l'indication de terrains plus anciens, et quelquefois plus intéressans , il est vrai, que ces assises recouvriraient, puisque ce sera par la fixation précise de l'étendue d’une formation , que l’on pourra plus tard parvenir à dresser des cartes géographiques ou hy- drographiques du globe à ses différentes périodes d'immersion ou d'émersion. Nous avons donc recouvert d’une même teinte toutes les parties où paraissaient les sédimens trito- niens; mais désirant en même temps faire connaître , autant qu’il était possible, l'étendue des différens dépôts cachés par ces sédimens, nous avons indiqué par des lignes de diffé- rentes teintes l’espace occupé par ces dépôts; nous pensons avoir, par cette méthode (qui est moins facile que l’autre et qui entraine à beaucoup plus de courses) atteint le but que nous nous étions proposé. RAA f've , re à ; pau . Pa Rint [Lu s+ Lil Re j) EN LA à : PRE Mer ri AAA EE AAA ANA EAN ANA AA A AA A EE NOTES ADDITIONNELLES ‘. Les environs d’Ennines, près de Folx-les-Caves , présentent une glau- conie très-riche en coquilles qui se rapportent à la Cyprina æqualis (Venus æquauis, Sow.) ; la partie supérieure du gite consiste en sables Jjaunâtres très-pauvres en fossiles; ils passent à une glauconie sableuse où l’on découvre des fragmens d’oursins, des dentales, des T'urbinolia sulcata et crispa, et de petites vénéricardes; en même temps que la partie inférieure de cette glauconie acquiert un peu de consistance, elle devient plus riche en corps organisés fossiles. C’est dans cette glauconie que se trouve la couche de silex roulés cimentés entre eux par de la glauconie sableuse ; et, fait digne de remarque, c’est aussi dans ces espaces comblés que se font voir les plus belles cyprines, et elles y sont plus grandes et mieux conservées que dans la glauconie qui repose sur le banc de silex; les valves de ces cyprines sont posées horizontalement les unes sur les autres. On rencontre aussi des nautiles (N. Burtini?), la Pinna margaritacea, des volutes, de petits pétoncles et des dentales (D. incrassatuwm , Sow.); toutes ces coquilles ainsi que quelques oursins (Spatanqus et Clypeaster ?) accompagnent les cy- prines, soit entre les silex roulés, soit dans le sol supérieur; la nature friable de ces débris jointe à la grande humidité qui règne dans les dépôts qui les recèlent, s'opposent à leur spécification. La glauconie ? Le long espace de temps qui s’est écoulé entre la rédaction de notre Mémoire et le jugement de l’académie , nous a permis d'examiner de nouveau certains gites intéressans , où de nouvelles recherches favorisées par les travaux des mineurs nous ont engagé à présenter leur résultat sous forme de notes additionnelles. 176 NOTES ADDITIONNELLES. fossilifère repose directement sur le calcaire friable de Maestricht. Ce calcaire est, au contact de la glauconie, fortement coloré en jaune de rouille; mais il passe au blanc-jaunâtre en s’éloignant de la glauconie; cette teinte rembrunie est due à des infiltrations ferrugi- -neuses postérieures au dépôt calcareux. Nous avons remarqué dans ce calcaire de nombreux plagiostomes de petite taille et généralement en mauvais état, des peignes , des frag- mens de galerites, des valves d’anatife et peut-être des nummulines. Le calcaire qui avoisine la glauconie renferme une grande quantité de grains de quarz hyalin, liés entre eux par un sable calcareux gros- sier, qui, vu à la loupe, paraît être le résultat de la trituration de co- quilles et autres débris organiques composés de carbonate de chaux; on y distingue des fragmens de baguettes d’oursins, de pinces de crus- tacés, etc. : il y a donc bien peu de différence entre ces sables gros- siérement agglutinés et les sables tritoniens également grossiers de S'-Gilles et ailleurs; ces deux formations sont plus étroitement liées entre elles qu'on ne le croit généralement; quelques différences pa- léontologiques ont peut-être fait exagérer leurs limites. Les énormes rochers de quarz grenu de Chapelle-St-Laurent * ont servi de point de réunion pour une grande masse. d’huîtres (Ostrea latissima, callifera); ces mollusques épiphytes se sont surtout pro- pagés sur le versant NO de ces rochers; on trouve leurs coquilles tantôt libres et tantôt attachées à des blocs de pierre; elles recouvrent quel- quefois, mais plus rarement, des cailloux roulés avec lesquels elles forment des agglomérats très-solides. On doit surtout les chercher à la profondeur de 3 à 4 mètres; quelques peignes, des spatangues et des dentales accompagnent ces huitres. L’abri imposant qu'offraient les masses quarzeuses de Chapelle-St-Laurent semble rendre raison de la rareté des débris de corps organisés fossiles dans les sables du sol en-- vironnant. Quelques vertèbres de poissons et des dents des squalus cornubicus et auriculatus que nous avons remarquées dans les sables 1 Planche de coupes n° 6. NOTES ADDITIONNELLES. 177 et les grès qui recèlent les huîtres, attestent en même temps que ces parages étaient visités par des animaux qui venaient y chercher une proie facile. Le quarz grenu se montre à jour à Nil-Pierreux, à Blanmont et à quelques pas de la route qui conduit de Bruxelles à Nil-Pierreux. A Blanmont il est surmonté d’une légère couche de sables et graviers diluviens, dans lesquels on a trouvé, au dire des habitans, des ossemens de grands animaux. À Nil-Pierreux on a, dit-on, trouvé de la mine de plomb dans une gangue ferrugineuse. Nous avons observé que quelquefois les parois des fissures du quarz grenu étaient recouvertes d’un léger enduit de fer hydraté. L'exploitation du quarz grenu à Jauchelette, près de Perwez, est peu importante ; cette roche est, suivant les ouvriers, tantôt trop dure et tantôt trop tendre : dans ce dernier état elle est quelquefois rougeatre, et quelques paillettes de mica la transforment en une roche psammi- tique. Des masses peu importantes de ce quarz grenu se montrent à jour au bord du ruisseau qui traverse le village de Jauchelette. L'église de Jodoigne est bâtie sur des psammites verdatres assez durs, inclinant d'environ 45 à 50°. On y remarque des couches de quarzite plus ou moins souillé de fer hydraté. Ces glauconies ,très-pauvres en fossiles et presque arénacées, recouvrent les psammites des environs de Perwez. Ces glauconies passent vers leur partie supérieure à des sa- bles jaunätres qui renferment des blocs de calcaire grossier très- friable. Les habitans de Folx-les-Caves et d’Ennines, nous ont assuré que l’on a exploité une mine d'argent près de l’église de ce dernier village ; l'argent était à l’état pur et se présentait sous forme arborescente ou ramuleuse; il brillait dans une gangue lamellaire d’un blanc-jaunâtre ressemblant à du sucre; était-ce de la chaux carbonatée ? c’est ce que nous n'avons pu vérifier, faute d'échantillons de cette intéressante ex- ploitation. D’après les mêmes autorités, on aurait frappé en 1785 des pièces d’argent d’une petite valeur. On a depuis cette époque (en 1828 Tox. XII. 23 178 NOTES ADDITIONNELLES. ou 1829) cherché à exploiter de nouveau cette mine, mais son man- que de fécondité (peut-être absence totale de minerai) a fait cesser les travaux, et cependant le minerai ne serait situé qu’à la profondeur de 5 à 6 mètres. N’en serait-il pas de méme de l'existence de cet argent natif que de celle de tant d’autres minerais dont la présence ne peuple le plus souvent que l'imagination de quelques personnes toujours em- pressées à répandre le merveilleux ou à exploiter la crédulité ? nous sommes disposé à le croire. L’élévation à laquelle la mine est située indiquerait, pour une profondeur de 6 mètres, la présence de la glau- conie ou du calcaire de Maestricht. Le quarz grenu ou les schistes, seules roches dans lesquelles l'argent pourrait se trouver dans notre province, ne se rencontrent qu’à une profondeur plus considérable et dans les vallées. Nous avons de nouveau visité la bure près de Rebecq où l’on fait des recherches de houille. On pousse en ce moment deux galeries, l’une se dirigeant à l’Ouest et l’autre au Sud ; les actionnaires, loin de se décou- rager de leurs minces succès, continuent avec ardeur leurs fouilles ; mais, malheureusement, rien ne se présente de bien encourageant. Un individu nous a montré deux petits échantillons (qu'il disait pro- venir de la mine), l’un d’eux consistait en un fragment de schiste assez dur, où l’on remarquait des empreintes à peu près analogues à celles que l’on observe dans les schistes houillers ; mais le morceau était d’un si petit volume qu’il nous a été impossible de nous convaincre de leur nature; l’autre échantillon était un fragment de schiste avec de la chaux carbonatée laminaire, au milieu de laquelle se trouvaient des lamelles brillantes et d’un beau noir ; cette substance noire était, sui- vant cet individu, la houille si désirée. Nous n'avons pu, malgré toutes nos recherches, nous procurer un seul échantillon analogue ; le pos- sesseur du fragment que nous avons examiné le conservant avec un soin religieux, nous n’avons pu faire les expériences nécessaires pour lever nos doutes; l’anthracite n’a-t-elle pas de grands rap- ! Woir planche de coupes n° 2. NOTES ADDITIONNELLES. 179 ports extérieurs avec la houille ? Nous n’oserions même affirmer que cet échantillon provint de la bure de Rebecq, car nous avons été à même d'observer la méfiance que les intéressés témoignent envers les étran- gers qu'un motif de pure curiosité amène près de la bure : il paraîtrait même que l’on ne se ferait pas scrupule de faire passer des échantillons de schiste houiller de Houdeng (Hainaut), comme provenant de Re- becq, afin de donner le change. Nous ne saurions trop blämer ces combinaisons mises en jeu par l'intérêt aveugle ou mal dirigé de la plupart de ces personnes. Nous avons observé quelques morceaux de schiste provenant de la mine ; ils renfermaient des veines de chaux carbonatée lamellaire ro- sâtre, disposées de manière à faire prendre un échantillon, vu isolé- ment, pour du calschiste, et du fer sulfuré en petites masses lamellaires et en petits cristaux primitifs; mais ce que nous avons remarqué de plus intéressant sont des enduits et de petites masses de cuivre pyriteux tantôt d’un beau jaune et tantôt irisé violet ou bleuâtre. Ce métal se trouve surtout dans la chaux carbonatée ; il est aussi quelquefois mé- langé avec les pyrites ferrugineuses ; les veines de chaux carbonatée sont même assez souvent remplacées par des veines cuivreuses d’un millimètre d'épaisseur. Nous sommes enclins à croire qu’il ne serait pas impossible de parvenir à découvrir un gîte métallique, là où lon ne cherchait qu’un dépôt charbonneux : ce sont les seuls résultats, selon nous, auxquels le géologue et le mineur doivent s’attendre. Un autre fait intéressant que nous avons observé dans les carrières de Quenast, est le contact des schistes et de la diorite ; ce contact a été vérifié dans une galerie d'écoulement percée pour assécher la carrière de M. Bucheret. Cette galérie se dirige du NO au SE; elle est située sur le versant NO du monticule dioritique de Quenast, dont les bases sont occupées par des schistes noirâtres qui renferment des veines d’un schiste décomposé que l’on a baptisé à Quenast du nom de terre- houille. Des couches peu épaisses de quarzite se font remarquer dans ces schistes; le quarz est assez souvent fortement teint en jaune de rouille, on y rencontre même du fer hydraté en petites masses mame- 180 NOTES ADDITIONNELLES. lonnées et du fer sulfuré en petits cristaux cubiques. Lorsqu'on se rapproche de la diorite on observe d’abord une couche épaisse de quar- zite, puis du schiste qui se change soudain en une argile jaune, ténace, au milieu de laquelle se font remarquer des couches et des morceaux de schiste moins décomposé, mais cependant fort friable et d’un jaune d’ocre. Cest surtout près de la diorite que ces schistes friables sont abondans ; ils ont tout-à-fait l’aspect de morceaux schisteux que l’on aurait long-temps exposés au feu; ils happent quelquefois à la langue et leur couleur jaune se change aussi en un blanc sale. Ces schistes s'appuient sur une masse épaisse de 2 à 3 mètres; cette masse de cou- leur verdâtre picotée de blanc, est de la diorite décomposée en une terre argileuse (banc pourri ou roc pourri des ouvriers) dans laquelle on trouve des cristaux ditétraèdres de 50 millimètres de longueur et très- fragiles de feldspath blanc opaque ; il passe à l’état de kaolin; cette masse terreuse s'appuie, à son tour, contre de la diorite blanchätre assez tendre mais qui passe bientôt à une roche très-dure, ou véritable diorite. Ces nouvelles observations nous ont amené à tirer des conclusions un peu différentes de celles que nous avions primitivement émises. La nature plutonique de la diorite ne saurait être révoquée en doute, les faits que nous venons de signaler viennent confirmer cette opinion , et appuyer l’idée que nous avions déjà développée que le gîte de Quenast était un dyke dioritique qui s’était fait jour à travers les schistes en- vironnans qu’il avait plus ou moins altérés , auxquels il avait fait subir des métamorphoses plus ou moins variées, soit en les changeant en masses terreuses et argileuses, soit en les noircissant et en leur impri- mant ainsi des caractères trompeurs. D’après nos nouvelles observa- tions, l’âge d'apparition du dyke dioritique ou l’époque à laquelle il aurait percé les schistes serait peu postérieure à la formation de ces mêmes roches. Cette époque d'apparition serait donc antérieure à la déposition du calcaire anthraxifère du Hainaut, Namur, Liége , etc. ”; 1 Nous sommes heureux de pouvoir dire ici que M. Collegno de Prevano, géologue distingué, nous avait émis la même opinion sur l’époque d'apparition de la diorite, avantque nous lui ayons fait part de nos réflexions touchant ce sujet intéressant. NOTES ADDITIONNELLES. 181 les strates schisteuses du Brabant font un angle aigu avec la direction des bandes calcaires ; elles ont donc servi de rivage à la mer qui déposa les masses minérales qui composent ces bandes. L'apparition de la dio- rite fut, sans doute, un résultat du soulèvement SSE à NNO des strates schisteuses du Brabant méridional, qui déterminent l’ondulation du sol que l’on remarque depuis Lembeek jusqu'aux frontières du Hainaut ; la diorite d’'Hozémont et de Pitet (Liége) a apparu au soulèvement des schistes de la partie orientale de notre province, et de la partie ocei- dentale de la province de Liége; ces deux points dioritiques, celui de Quenast et celui de Pitet et d’'Hozémont, ont servi à déterminer la formation du bassin schisteux dont le centre est occupé à Nivelles, Wavre, Perwez, etc., par des dépôts tritoniens. Ce soulèvement, le plus ancien qui ait disloqué le sol de la Belgique, a été de fort peu d'importance; il n’a point donné naissance à des imé- galités de sol assez saillantes pour mériter le titre de montagnes; fait qui, seul, prouverait l’ancienneté de rang de ce soulèvement ; et qui sait s’il ne sera pas possible de poser plus tard, lorsqu'on aura enre- gistré un grand nombre de documens, des règles fixes pour aider à juger de l’époque de soulèvement de telle ou telle montagne ou série d’aspérités de sol par le moyen de tables de hauteurs comparatives ? Depuis la rédaction de notre Mémoire, nous avons recueilli de nou- velles suites de fossiles, ce qui nous permet d'ajouter, sous forme de supplément, les espèces suivantes à celles que nous avions déjà citées. I. TERRAINS FLUVIO-MARINS SUPÉRIEURS. A. Mollusques. 1er GENRE. — Buzza. Lin. 1. Bulla filosa. Sow. Sow., Min. conch., pl. 464, fig. 4. Loc. — Jette (nous n'en avons trouvé qu’un fragment.) Fossile dans l’argile de Londres. 2. Bulla acuminata. Sow. Sow., loc, cit., pl, 464, fig. 6. 182 NOTES ADDITIONNELLES. Loc. — Laeken (rare). Fossile dans l’argile de Londres, à Barton et Hordwell. 2e GENRE. — Auricuza. Lam. Auricula simulata. Sow. Sow., loc. cit., pl. 163, fig. 5 à 8. Zulla, Brand. pl. 61. PA Loc. — Jette (rare). Fossile dans l’argile de Londres , à Barton et à Highgate. 5e GENRE. — Narica. Adanson. 4. Natica glaucinoides ? Sow. Sow., loc. cit., pl. 5, les trois figures d’en haut. Loc. — Groenendael. Fossile dans l'argile de Londres, à Highgate , où elle est abondante. 4e GENRE. — Scaranra. Lam. S . Scalaria acuta. Sow. Sow., loc. cit., pl. 16. Variété mutique , pl. 577, fig. 2. Loc. — Dans la glauconie de Folx-les-Caves. Si 6. Scalaria spirata. Nobis. Nobis, Planche suppléme., fig. 8et 8 a. (Lamelles du test.) Observation.—De nouveaux exemplaires de cette belle coquille , que nous avions d’abord indiquée sous le nom de S. tenuilamella, nous ont forcé à l’en séparer, par l'étude plus approfondie de ses ca- ractères. Nous la spécifierons ainsi : Testa inflata , turrita, Spirata, inflata; anfractibus convexis , superne contabulatis, lamellis tenuibus, concavis, confertis, superne angulatis, apertura rotundata, incrassata, Loc. — Jette. Observation. — Nous en possédonsun individu qui a 180 mil], de longueur. ’ 5° GENRE. — Cassis. Brug. 7. Cassis striata. Sow. Sow., loc, cit., pl. 6, quatrième figure d’en bas. Loc. — Grès ferrugineux de Groenendael ; grès de Rouge-Cloitre , de S'-Josse-ten-Noode et de St-Gilles. Fossile dans l'argile de Londres , à Highgate. 6° GENRE. — Pynura. Lam. 8. Pyrula Greenwoodii? Sow. Sow., loc. cit., pl. 498. Loc. — Rouge-Cloître. Nous ne l'avons observé qu’une seule fois. Fossile dans l'argile de Londres, dans le Hampshire, où cette espèce est rare. 7e GENRE. — Fusus. Lam. 9. Fusus errans. Sow. Sow., loc. cit., pl. 400. Nobis, Planche suppléme., fig. 9. Strombus errans, Brand. fig. 42. NOTES ADDITIONNELLES. 183 Loc. — Dansles grès ferrugineux de Groenendael]. Observation.—Cette belle coquille, dont nous ne possédons qu'un seul individu, est d’une taille plus forte que celle des échantillons figurés dans Sowerby , ce qui nous a engagé à la figurer. 10. Fusus ficulneus. Lam. Lam., Vélins du Musée, pl. 2, fig. 4. Lam., Vé?. du Mus., n° 6, fig. 13. Lawk., Ann. du Mus., t. 11, p.386. Murex ficulneus.Chemnitz, Conch., vol. XI, p. 301 , tab. 212 , fig. 3004, 3005. Loc.—Groenendael (assez abondant), Rouge-Cloître (abondant) ,St-Josse-ten-Noode, Afflighem. Fossile à Grignon , Courtagnon , etc. 8° GENRE. — Awciczaria. Lam. 11. Ancillaria aveniformis ? Sow. Ancilla aveniformis. Sow., loc. cit., pl. 99, fig. du milieu. Loc. — Rouge-Cloître (mal conservé). Fossile dans l'argile de Londres, à Barton. 9e GENRE. — Cyrnæa. Lin. 12. Cyprœa oniformis. Sow. Sow., loc. cit., pl. 4. Loc. — Rouge-Cloitre (très-rare). Fossile dans l’argile de Londres à Highgate. 10° GENRE. — Vorura. Lin. 15. PVoluta costaria. Lam. Lam., Véz. du Mus., pl. 2 , fig. 4, Lam., Ann. du Mus.,t. 1, p. 477. Cochlea nixta , Chemnitz, Conch., vol. XI, p.303, pl. 212, fig. 3010, 3011. Loc. — Rouge-Cloitre (bien conservé), St-Josse-ten-Noode , Groenendael? Fossile à Grignon, Courtagnon , etc. 11e GENRE. — Carvprnxa. Lam. 14. Calyptræa echinulata ? Nobis. Infundibulum echinulatum. Sow., loc. cit., p.97, fig. 2. Loc. — Forêts. Observation.—Nous n’en avons trouvé qu’un fragment, mais qui se rapporte entièrement à la figure de Sowerby. Fossile à Plumstead. 12° GENRE. — Denrauum. Lin. 15. Dentalium substriatum. Desh. Desh., Monogr. des Dentales , pl. 18, fig. 1, 2. Loc. — Dans les sables de Jette, où il est rare. Fossile à Parnes, Mouchy et à la ferme de l’Orme. 15° GENRE. — Tenesnarura. Brug. 15 bis. Terebratula.…… Loc. — Jette. 184 NOTES ADDITIONNELLES. 16 LYE 18. Observation. —M. Nyst fils a trouvé cette belle térébratule dans les sables de Jette ; nous n’avons pu nous assurer si elle appartenait à une espèce connue ou si elle devait former une espèce distincte. Elle se rapproche par la forme de la 7. ampulla (Brocchi), mais le talon de la grande valve est percé d’une petite ouverture, tandis qu’elle est fort grande dans le talon de la 7. ampulla ; M. Nyst et moi pensons que cette espèce est nouvelle, mais le genre térébratule est déjà si nombreux en espèces qu’il devient fort difficile de les analyser. 15° bis. GENRE. — Pecruxcurus. Lam. . Pectunculus Nystii. Nobis. Pectunculus granulatoides. Nobis , pl. 4; fig. 17. Loc. — Jette, Laecken, Folx-les-Caves , Groenendael , Rouge-Cloître , Assche , etc. Fossile à Gand. Observation. — Nous avons changé le nom de P. granulatoides en celui de P. Nystii, parce qu’une espèce particulière à notre sol tritonien se rapproche beaucoup plus du P. granulatus de Lamark, que ne le fait celui-ci. Nous saisissons cette occasion pour faire hommage de cette jolie coquille à notre savant confrère et ami M. Henri Nyst, qui a traité avec tant de talent la description des coquilles fossiles du bassin d'Anvers, Note. — Nous avons trouvé le Pectunculus pulvinatus que nous avions déjà cité, à Zellick, dans des cal- caires grossiers, et dans les grès ferrugineux de Groenendael. 14 GENRE. — Triconocoeua. Nyst et Galeotti !. Trigonocælia auritoides. Nobis. Nobis , Planche supplétm., fig. 7. Bulletins de P Académie , tom. IL, p. 290, n° 3. Testa ovata, obliqua , superne angustata, granulata, cardine aurito magna fovea notato. Loc. — Dans les sables de Jetle (assez rare). Observation. — Cette espèce se rapproche et du Zrigonocælia granulata (Pectunculus granulatus. Lam.) et du 7. aurita (Arca aurita Brocchi); elle a le test granulé du premier et toute la forme du second, caractère qui nous a engagé à lui appliquer de préférence le nom d’auritoides. T... Lima. Nobis. Nobis, Planche supplém., fig. 12. Bull. de l’acad., tom. IE, p. 348, no 66. \ Testa ovato-oblonga, convera, longitudinaliter costata ; 10 vel 12 costis elevatis , conspicuis ; ad latera compressa ; umbonibus incurvis ; curdine arcuata , dentibus minimis ; margine antice 4 vel 5 dentibus notato. Loc. — Jette , Forêts. Observation. — Cette jolie petite espèce, que nous avions primitivement rapportée au Pectunculus nanus Desh., (Trig. nana. Nyst et Galeotti) en diffère essentiellement ; elle constitue une espèce distincte que son analogie de forme , de stries ou côtes avec la Lima nivea , Renieri (Ostrea nivea. Brocchi, pl. 14, fig. 14), nous a induit à baptiser du nom de 7. Léma ; sans sa charnière particulière on la pren- drait pour une petite lime ou pour un plagiostome. - Longueur : 1 à 1,50 millimètre. 15° GENRE. — Carprra. Brug. 19. Cardita pectinifera. Nobis. Venus ? pectinifera. Sow., Min. conch., pl. 422 , fig. 4. Nobis , pl. 4, fig. 12. 1 Bulletins de l'académie de Bruxelles, séance du 8 août 1835. NOTES ADDITIONNELLES. 185 Loc. — Jette, Forêts, Laeken, Folx-les-Caves ? Observation. — Cette jolie coquille que Sowerby avait à tort, quoiqu’avec doute, rapportée au genre vénus, appartient plus vraisemblablement aux cardites , bien que quelques-uns de ses caractères l’é- loignent de ces dernières pour la rapprocher des cypricardes ; nous pensons donc que l’on pourra éta- blir avec cette espèce un genre intermédiaire entre les cardites et les cypricardes. Nous la laissons provisoirement dans les cardites, coquilles avec lesquelles notre espèce a le plus de rapports. Vote. — Les crénelures du bord se continuent presque jusque sous les crochets comme dans la Venus radiata d'Anvers (Nyst, pl. 3, no 42), 16° GENRE. — Carnium. Lin. 20. Cardium nitens ? Sow. Sow., Min. conch., pl. 14, fig. d’en bas. Loc. — Jette. Nous n'en avons trouvé que des fragmens. Fossile dans l’argile de Londres , à Highgate. 21. C... semigranulatum, Sow. Sow., loc. cit., pl. 144, Loc. — Jette. (Des fragmens de cette intéressante coquille y sont assez communs.) Fossile dans l'argile de Londres à Barton, Regent’s Park, White conduit House à Islington. 29, C... turgidum., Sow. Sow., Min. conch., pl. 346 , fig. 1. Brander, fig. 96. Loc. — Jette (en fragmens). Fossile dans l'argile de Londres , à Barton. 17e GENRE, Teruixa. Lin. 25. Tellina zonaria , Basterot. Bast., pl. 1, fig. 5 Loc. — Gronendael, St-Josse-ten-Noode , Afflighem. Fossile à Anvers (Nyst) ; à Dax, Saucats , Léognan et Mérignac en France. 18° GENRE. — Cxpnixa. Lam. 24. Cyprina incrassata. Sow. Venus incrassata. Sow., pl. 155. Loc. — Dans les grès calcarifères de Rouge-Cloître (rare) et à Groenendael. Fossile dans l’argile de Londres ; à Kleine-Spauwen près de Maestricht (Nyst.) © . Cyprina islundicoides ? Lam. Law., Anim. s. vert.,t. V, p.558. Venus æqualis, Sow., pl. 21. Loc: — dans la glauconie de Folx-les-Caves et d’Ennines. Observation. — Nous doutons que cette cyprine soit bien l’is/andicoides ; sa charnière est plus étroite ; son test est moins convexe ; les mauvais échantillons que nous analysions ne nous ont point permis d'établir de comparaisons assez exactes pour trancher la question. Nous croyons cependant que les cyprines de nos glauconies pourraient former une espèce distincte voisine des ©. is/andicoides , Lam et C. angulata. Sow., pl. 65. 19° GENRE. — Macrna. Lam. 26. Mactra…. Loc. — Dans un bloc calcaire d'Ennines près Folx-les-Caves. Tom. XII. 24 186 NOTES ADDITIONNELLES. 90e GENRE. — CrassatezLa. Lam. 27. Crassatella compressa. Lam. Lamw., Ann. du Mus., t. IX, pl. 20 , fig. 5. Loc. — Jette. Fossile à Grignon. Mota, — Nous n'avions encore trouvé que la variété © de cette coquille. 91e GENRE. — Asranre. Sow. 28. Aslarte Maeleni. Nobis. Nobis, Planche supplém., fig. 6. Testa trigonata, rugosa, striatula; slriis minimis ad margines laterales evanescentibus ; mar- gine inlegerrimo ; cardine angusto. Loc. — Jette (rare.) Observation. — Diffère de l’Astarte Nystiana, Kickx, MMS. (Nyst, Rech. sur les coq. fos. d'Anvers , pl.2, fig- 32) dont elle se rapproche beaucoup par l’absence de crénélures , par ses stries moius fortes et qui ne sont guère visibles que sur les crochets, enfin par sa charnière plus étroite et ses crochets moins pointus. Nous sommes heureux d'offrir cette jolie et bien distincte espèce en hommage à M. P. Vander Maelen, dont les bibliothèques et les collections sont ouvertes avec tant de bonté à toutes les personnes qui s’occupent des sciences. 29. Astarte.... Mova species. Nobis. Loc. — Dans la glauconie d’Ennines (rare.) Observation. — Cette espèce , assurément nouvelle, est trop mutilée pour que nous puissions en donner une description ou une figure; sontest présente un grand nombre de côtes concentriques ; il est aplati, tronqué postérieurement , et ses crochets sont pointus. 29e GENRE. — Cyruznsa. Lam. 50. Cythærea Sowerbrii. Nobis. Venus lincolata, Sow., Min. conch., pl. 422, fiy. 2. Venus rotundata, Braud., fig. 91. Loc. — Jette (rare.) Fossile dans l'argile de Londres, à Barton , où elle est rare. Nota. — Nous avions dédié cette cythérée à M. Sowerby, bien qu’il l’eût décrite sous le nom de Venus lineolata, mais nous né pouvions conserver ce dernier nom qu’il avait appliqué, quelques années pré- cédentes, à une vénus beaucoup plus grande du grès vert de Blackdown. 95e GENRE. — Puoranomxa. Sow. 51. Pholadomya margaritacea. Sow. Sow., loc. cit. pl. 297, fig. 1,2,3,4. Loc. — Dans la glauconie de Folx-les-Caves (rare.) Observation. — Cette espèce caractérise la partie inférieure de l’argile de Londres elle se trouve à Rich- mond-Hill à la profondeur de 90 mètres, à Bogwell-Bay (île de Thanet), à Brentford, à Alum-Bay, etc. B. Vers. der GENRE. — Venmerus. Lin. 1. Vermetus Bognoriensis? Sow. Sow., loc. cit., pl, 696, fig. 1, 2,3. Vermicularia Bognoriensis, Mantell., p. 272. ot 1 NOTES ADDITIONNELLES. 187 Loc. — Sables de St-Gilles. Fossile dans l'argile de Londres, à Bognor, Sheppey et à Highgate. C. Zoophytes. 1er GENRE. — Mirrepona. Lam. - Millepora Dekini. Morren. Morren , Responsio ad quæstionem propositam, etc. + Groningue, 1828, 1 vol in-4o, pl, 5, fig. 1, p. 24 Ta. — Melsbroeck. 2e GENRE. — Escnana. Lam. - Eschara celleporacea. Munster. Goldf., pl. 36, fig. 10, p.101. Loc. — Forèts. Fossile dans les strates marneuses tritoniennes d’Astrupp près d'Osnabruck. 3° GENRE. — Rerepora. Lin. - Retepora trigona. Morren. Morren, loc. cit., pl. 10, fig. 1, 2,3, p.37. Loc. — Uccle. Observation. — Ne serait-ce pas l’Idmonea triquetra, Lamoureux, que nous avons trouvé à Forêts, St- Gilles, Assche, etc. ; la phrase caractéristique de M. Morren correspond fort bien à l’/d. triquetra ? 4e GENRE. — Fiusrna. Lam. + Flustra contexta. Gold. Gold , pl. 10, fig.2, a, 4, p. 32. Len. SUGilles Jette, Forêts, Saventhem, Dieghem, Melsbroeck, Nivelles, ordinaire- ment à la surface des huîtres. 5 GENRE. — Cenropora. Goldf. - Ceriopora variabilis. Gold., Munster. Gold., pl. 37, fig. 6, ab, p. 105 ; Morren, p. 40. Loc. — Environs de Bruxelles (Morren). Fossile à Astrupp près Osnabruck. 6° GENRE. — Lonvures. Lam. . Lunulites perforatus. Munster. Goldf., pl. 37, fig. 8, ab, p.106; Morren, p- 45. Loc. — Jette, S'-Gilles, Forêts et Steenockerzeel. Fossile dans les strates arénacées ferrugineuses tritoniennes de Cassel en Hesse, + L... spongia. Morren. Morren, pl. 12, fig. 1, 2, p. 43. Loc. — Nous avons trouvé cette espèce à Forêts, St-Gilles, Jette et près de Laeken. M. Mor- ren la cite des Flandres. 188 NOTES ADDITIONNELLES. S. L... rhomboidalis. Munster. Goldf., pl. 37, fig. 7, abc, p. 105. Loc. — Forêts. Fossile à Cassel en Hesse et à Dax en France. 7e GENRE. — Onsiroures. Lam. 9. Orbitolites macropora. Lam. Goldf., pl. 12, fig. 8, p.41. Loc.— Forêts, S'-Gilles. Fossile à Grignon. 8° GENRE. — Lrrnonexonox. Schweigger. 10. Lithodendron multostellatum. Nobis. Nobis. Plane. suppl., fig 11. L... lœvigatum ; stellis numerosis : stellarum lamellis reqularibus. Observation. — Cette espèce se rapproche du L. cariosum, Gold., pl. 13, fig. 7, mais elle s’en distingue par une taille plus petite, des étoiles plus nombreuses à lamelles régulières , tandis qu’elles sont irré- gulières dans l’espèce comparée. Loc. — Jette. DNota. — Notre individu étant très-petit et mutilé, nous n’avons pu nous assurer s’il appartenait à une espèce branchue. 9e GENRE. — Tunsinoua. Lam. 11. Turbinoliu intermedia. Munster. Goldf., pl. 37, fig. 19, p. 108. Loc. — Forêts, Jette? — Vleurgat (Morren). Fossile dans les sables tritoniens de Wilhemshôhe près de Cassel en Hesse. 10° GENRE. — Asrnæa. Lam. 12. Astræa porifera. Morren. Morren , pl. 20, fig. 1, 2, p. 60. Note. — M. Morren n'indique point la localité où il a trouvé cette jolie espèce; il assigne le Brabant comme patrie de cette nouvelle astrée. 11° GENRE. — Canvopayzua. Lam. 15. Caryophyllia affixa. Morren. Morren, pl, 15, p. 48. Loc. — Steenockerzeel (Morren). 12° GENRE, — Gzauconome. Goldf. 14. Glauconome marginata. Munster. Goldf., pl. 36, fig. 5, p. 100. Morren, p. 75. Loc. — Forêts, S'-Gilles. — Steenockerzeel (Morren). Fossile à Astrupp près Osnabruck. 15. Gl.... rhombifera. Munster. Goldf., pl.36, fig 6, p. 100 Morren, p. 75 NOTES ADDITIONNELLES. 189 Loc. — Forêts, Jette. — Steenockerzeel (Morren). Fossile à Astrupp près Osnabruck. 16. Gl.... tetragona. Munster. Gold., pl. 36, fig. 7, p. 100. Morren, p. 76. Loc. — Forêts. — Steenockerzeel (Morren). Fossile à Astrupp. 17. GL. hexagona. Munster. Gold., pl. 36, fig. 8, p. 101. Morren, p. 76. Loc. — Forêts, Steenockerzeel (Morren.) Fossile à Astrupp. Note. — M. Morren cite encore comme espèces du Brabant les suivantes, que nous regardons comme équivoques ? 1° Manon Bredanianum. (Morren, pl. 2, fig. 1, p. 19.) Loc. — Forêts. Observation. — Cette espèce que nous n’acceptons point avec autant de confiance que les précédentes, nous paraît ; à en juger par la figure et la phrase caractéristique, être un double emploi du Dactylopora cylindracea que nous avons déjà cité ? 20 Cyatophyllum ocellatum. (Morren, pl. 18 , fig. 1,2, 5.) Loc. — Brabant. Observation. — Nous doutons très-fortement que cette belle espèce provienne de notre sol tritonien ; il nous sera d’autant plus permis d’en douter que jusqu’à ce jour, toutes les cyatophyllées citées ne se sont trouvées que dans des formations très-anciennes (calcaire de transition de lEifel ; calcaire jurassique de Ramberg, en Suède, à Namur, etc.) ; il est donc probable qu’il y a erreur de localité, c’est ce qui nous a engagé à ne point accepter cette espèce pour le Brabant. 5° Astrœa gigantea. (Morren, pl. 22, fig. 1, 2,5, p. 65.) Loc. — Brabant. Observation. — Nous doutons que cette astrée provienne du Brabant ; notre sol est en général carac- térisé par de petites espèces ; M. Morren en citant cette nouvelle espèce, dit qu'il croit qu’elle a éé trouvée dans le sud du Brabant, portion de la province la plus pauvre en fossiles de tous genres? D. Radiaires. 1er GENRE. — Cinarires. Lam. 1. Cidarites granulosus. Gold. Goldf., pl. 40, fig. 7. Loc. — Assche et St-Gilles. Fossile dans la formation crétacée d’Aix-la-Chapelle et dans le calcaire friable de Maestricht. Observation. — Nos individus ressemblent entièrement aux figures de Goldfuss. 2e GENRE. — Garenires. Goldf. 2. Galerites Dekini. Nobis. Nobis, Planche supplém., fig. 10. Convexo ; ambitu subhexagono, fere orbiculari vel ovato; basi concava, areis ambulacrorum convexis; ano submarginali; ore magno centrali. Loc. — St-Gilles (rare.) Nota. — Nous n'avons pu donner de cette intéressante espèce, que nous dédions à feu M. Dekin, un dessin complet, notre unique individu s’étant brisé pendant que nous le décrivions. 190 NOTES ADDITIONNELLES. 5° GENRE. — Écumoxeus. Gold., Lam. 5. Echinoneus propinquus. Nobis. Nobis, Planche supplém., fig. 5. Convexo-plano ; umbitu ovato postice elongato, rotundo, antice bilobato ; lobis obtusis integris, æqualibus ; basi concava ; ano minimo ; ore magno, centrali; umbulacris elongatis poris crebris minutis. Loc. — St-Gilles, Forêts. Observations. — Cette espèce se rapprochant beaucoup de l’£. scutatus ( Gold., pl. 42, fig. 11, a mérité son nom de propinquus. Dans le jeune âge il ressemble encore plus à l’Z. scutatus, cependant la forme du test est plus allongée. 4 GENRE. — Nucreoures. Gold., Lam. 4. Nucliolites patelloide. Nobis. Nobis, Planche supplém., fig. 2. Depressus ; ambitu ovato-elliptico ; basi concava ; ambulacris linearibus dimidiatis ; tubereulis superne minimis, inferne majoribus marginalibus ; ano parvo dorsali margini maxime approximato ; ore sub centrali , magno. N.B.— M. patellari, valde affinis. Loc. — Jette et St-Gilles. Observations. — Cet oursin a les plus grands rapports avec le V. patellaris ( Gold., pl. 43, fig. 5). L'anus est plus rapproché du bord que dans l’espèce de Gold,; la bouche n’est point centrale; la base n’est point plane, mais rendue concave par un léger rapprochement des côtés latéraux; le bord anté- rieur est un peu relevé; il est plus mince que le bord postérieur, enfin le gisement du A. patel- laris (dans le calcaire de Maestricht) est différent. 5. Mucleolites rotundus. Nobis. Nobis, Planche supplém., fig. 4. Depresso ; ambitu rotundo; basi concava ; marginibus rotundatis; ambulacris linearibus in dorso convergentibus, tuberculis basi majoribus, ano dorsali, minimo, rotundo; ore imajori, centrali, integro, Loc. — A St-Gilles où elle n’est pas rare. Observation. — Jolie petite espèce bien distincte, 6. N. approximatus. Nobis. Nobis, Planche supplém., fig. 3. Convexo; ambitu ovato; basi concava; ore subcentrali ; ano tutra lacunam dorsulem. N,B. — NV. lacunoso maxime affine. Loc. — St-Gilles (rare). Observations. — Cette espèce se rapproche beaucoup du W. Jacunosus (Gold., pl. 43, fig. 8); mais la différence de gisement (l’espèce de Goldfuss se trouve dans la craie d’Essen) et peut-être la disposition non analogue des ambulacres , sont sans doute des différences assez sensibles pour motiver la distinction de notre espèce, que nous avons nommée upproæimatus, par sa grande analogie avec le N. lacunosus. Nous pensons que l’on pourrait, avec cette espèce, le M. lacunosus, le NW. canaliculatus (Gold., pl. 49, fig. 8) et le M. cordatus, Gold., pl. 43, fig. 9), établir une sous-division dans les nucléo- lites, caractérisée par des espèces où l’anus est situé au fond d’un canal supra-marginal ? NOTES ADDITIONNELLES. 191 5e GENRE. — Sparaxeus. Gold. 7. Spatanqus Omalii. Nobis. Nobis, Planche supplément. fig. 1. Depresso ; basi subconcava ; postice valde truncato ; canal lato ; ambitu vbcordato , ovato. subhexagono ; ore margini proximo et ano a margine remoto. Loc. — S!'-Gilles (rare). Observations. — Nous n'avons pu observer la position des ambulacres de cette belle et trop rare espèce que nous dédions, comme un hommage de notre reconnaissance, au savant géologue belge, M. D'Oma- lius d’'Halloy, qui s’est plu à nous encourager dans nos études par ses conseils et son expérience. 8. Spatangus.….. N. species. Nobis. Loc. — Dans les grès de Chapelle-St-Laurent. Observations. — Ne possédant point d'individus complets de ce spatangue, nous n’avons pu en donner une description rigoureuse ; quoique ce soit une espèce nouvelle. IL TERRAINS FLUVIO-MARINS MOYENS. (FORMATION CRÉTACÉE. ) 1. Pecten nitidus. Sow. Sow., Min. conch., pl. 894, fig. 1; Pecten nitida, Mantell. , page 202, pl. 26, fig. 4-9; Pecten cretosus et arachnoides, Defrance ; Brong., Géol. de Paris, page 383, pl. 3. Loc. — Grez (rarement bien conservé). Fossile dans la craie de Sussex, de Meudon près Paris, etc. 2. Peclen arcuatus. Sow. Sow., loc, cit., pl. 205, fig. 5, 7; Goldf,, pl. 191, fig. 6; Nilson, pl. 9, fig. 14, Loc. — Dans le calcaire friable dit de Maestricht , d'Ennines près Folx-les-Caves. Fossile dans le craie de Kôpinge en Scanie ; dans le grès vert d’Aix-la-Chapelle. 3. Plagiostoma.……. Loc. — Dans le calcaire friable d’Ennines. Observation. — Ces plagiostomes sont fort petits. 4. Plagiostoma.…….. Loc. — Dans la craie de Grez (en fragmens). CORRECTIONS. 1. Clypeaster affinis. Gold. Gold., pl. 42, fig. 6. abc. Nobis (PI. 4, fig. 19). Loc. — Vleurgat. Observation. — Indiqué par erreur dans notre Mémoire sous le nom de Galerites ovalis. 2. Ostrea flabellula. Lam. Sow., Min. conch., pl. 253. Observations. — Les Ostreu flabellula et plicatella de nos environs doivent rentrer sous une seule et même dénomination spécifique : celle d’Ostrea flabellula. Les figures de Sowerby conviennent parfai- tement à nos individus ; elles offrent toutes les différentes variétés de formes sous lesquelles nos huîtres se présentent; variations qui avaient donné naissance à la citation de deux espèces tellement analogues qu’elles doivent se fondre en une seule, 192 NOTES ADDITIONNELLES. L'Ostrea flabellula se trouve dans tous nos dépôts tritoniens, à Folx-les-Caves comme à Assche, à Piétre- bais comme à Nivelles ; on la retrouve dans l’argile de Londres à Barton, Hordwell, Lyndhurst , Ems- worth, Harbour, etc. 5. Serpula quadrata , Nobis. (Nobis, pl. 3, fig. 5, Sub. S. quadrangularis. Nobis.) Observation, — Lamarck ayant déjà nommé une serpule, guadrangularis , nous nous voyons forcé d’ap- pliquer le nom de guadrata à l'espèce que nous avions baptisée quadrangularis dans notre mémoire. Notre espèce ressemble assez au S. tetragona (Sow., pl. 599, fig. 1, 2); mais celui-ci se trouve dans des formations plus anciennes, et la taille du notre est plus petite. 4. Dentalium incrassatum. Sow. Sow., Min. conch. , pl. 79, fig. 3, 4. D. strangulatum. Desh., pl. 16, fig. 28. Nobis, pl. 4, fig. 7. Sub. D. Deshayesianum. Observations. — Le dentale que nous avions décrit sous le nom de D. Deshayesianum est le D. incras- satum, Sow., et peut-être le D. strangulatum , Desh.; l'ouverture dans nos individusest beaucoup moins étranglée que ne le représente la figure de Deshayes ; aussi les indiquons-nous plutôt sous le nom que Sowerby a imposé à cette espèce que sous celui du conchyliologiste français : du reste, ce dentale nous semble mal figuré dans les ouvrages de l’un et l’autre de ces auteurs ; ce qui nous avait empêché de le reconnaître Cette espèce Anvers lle of Wight Wu tténe DChuttans 134 7 Ml FÛ ,, DT) Je.» nn“: ROME CR re aa © tu | = mm L'LUVIO-MARINS SUPÉRIEL RS Maxi Bétasique Z | Infra- = Ma € = Tritonienne Crel: rubis Schisto- -Psumnitique ou Ardoisière a À NAS LM \ \ SE À ent Cynyiigue de À \°2. Coupe de Rebec { à Oisquercq par Quenast Planche de Coupes \ lice Dioritiqu KW Sables & yrer fütuleur et fer hydrut e Folx-les-Caves à Houppaye par Orp-le- Grand X Coupe à la Roche N°6.Rochers près Chapelle- PE = (Anmurs) = 4 = 24 dy Quarz grenu N°8. Vu d'une Carriere de Diorite à Quenast au LL Abe Prin ? = Vote merci Shute Sehcrte verdätre Sables à préc fotuteux ScAute nerdiätre os TE a —— La Hoche qe me PE NH Grandeur Faturelte l'L HI MÉMOIRE LES DOCÜMENS DU MOYEN AGE, A LA BELGIQUE, AVANT ET PENDANT LA DOMINATION ROMAINE, EN RÉPONSE A LA QUESTION SUIVANTE , PROPOSÉE PAR L'ACADEMIE ROYALE DE BRUXELLES : QUELLES RESSOURCES TROUVE-T-ON DANS LES CHRONIQUEURS ET AUTRES ÉCRIVAINS DU MOYEN AGE, POUR L'HISTOIRE DE LA BELGIQUE AVANT ET PENDANT LA DOMINATION ROMAINE, EN FAISANT CONCORDER CES MATÉRIAUX AVEC LES DONNÉES CHRONOLOGIQUES DONT ON NE CONTESTE PAS L'AUTHENTICITÉ, ET EN DISCUTANT LA VALEUR DE CES TÉ- MOIGNAGES HISTORIQUES ? PAR A.-G.-B. SCHAYES. Tom. XII. 1 Ne : Te £ em ObaMire À s4 ji) “oki dpt mr A AA A A AAA AAA INTRODUCTION. Res ardua vetustis novitatem dare, novis autoritatem, obso- letis nitorem, obscuris lucem, fastidicis gratiam, dubiis fidem. (Plin., Nat. hist., præf.) Les écrits des anciens, à commencer par César et Strabon, forment sans doute la base et les vraies sources de notre histoire primitive; mais n’ayant rapporté les événemens dont la Belgique fut le théâtre pendant les quatre premiers siècles de l'ère vulgaire, que pour autant qu’ils concernaient l’histoire générale de l'empire romain, les auteurs romains n’ont touché que légèrement tout ce qui regarde la géographie, l'état physique et politique d’une contrée en grande partie déserte et in- culte, et ne formant qu’un point presqu'imperceptible dans l’immensité de l’empire des Césars. C’est surtout depuis la fin du IV: siècle que les documens nous manquent presqu’entièrement. Pour remplir ces la- cunes et suppléer autant que possible au silence ou à l'obscurité des auteurs anciens, on peut recourir aux chroniqueurs, aux légendaires, aux chartes et autres documens du moyen âge, qui fourniront une riche moisson à l'historien ou à l’érudit qui les compulsera, mais avec saga- cité et une saine critique; car si les écrits du moyen âge contiennent 4 INTRODUCTION. beaucoup de faits propres à éclaircir l’histoire ancienne de la Belgique , ils renferment encore plus de fables qui dénaturent souvent les évé- nemens les plus importans et les mieux connus. Les auteurs anciens, grecs ou romains, devront toujours être la pierre de touche à laquelle on essaiera les écrivains postérieurs au Ve siècle. Si ces derniers rap- portent des faits qui sont en opposition manifeste avec les paroles d’un César ou d’un Tacite, s'ils ne citent pas les sources où ils les ont pui- sés, ou si ces sources sont elles-mêmes corrompues, si enfin ces faits contredisent les notions les plus claires et les plus simples de l’histoire et qu’ils choquent le bon sens par leur absurdité , il est inutile de dire qu'il faudra les rejeter comme des fables indignes de toute croyance. Les ouvrages du moyen àge qui peuvent fournir les documens les plus intéressans pour l’éclaircissement de l’histoire et de l’état politique de l’ancienne Belgique, sont les chroniques écrites avant le XIe ou le XIlme siècle, les légendes des premiers apôtres du christianisme en Belgique et les chartes. D'un autre côté il y a des auteurs du moyen âge qui, prétendant écrire l’histoire de la Belgique avant et durant la domination romaine, ne nous ont donné qu’un fatras de fables, les unes plus absurdes que les autres ; tels sont un Lucius de Tongres, dont le nom est peut-être aussi fabuleux que les écrits qu’on lui attribue, un Hugues de Toul, un Helinand, un Rucleri, un Clerembaut et un J. De Guise, qui s’est plu à compiler tous les contes enfantés par l’imagination déréglée de ces prétendus historiens. À en croire ces écrivains romanciers, nous descendons en ligne directe des Troyens, de Priam et d’Anténor; la Belgique formait, il y a quarante siècles, un royaume aussi respectable par sa haute civilisation que par sa puissance, renfermant une popula- tion décuple de celle qu’elle possède de nos jours, remplie de villes plus grandes que ne le sont aujourd’hui Londres et Paris, un état dans INTRODUCTION. 5 lequel les sciences, les arts et tous les genres d’industrie avaient acquis le plus haut degré de splendeur et de perfection ! Nous avons compulsé avec soin toutes les chroniques, légendes et chartes imprimées à part ou publiées dans les grandes collections de Duchesne, dom Bouquet, Schardius, Freher, Pistorius, Goldast, Hei- neccius, Leibnitz, Matthæus, Canisius, Mabillon, Martène et Durand, Chapeauville, Miræus, Pertz, les Bollandistes, les Acta SS. Bel- gü, etc., etc., et nous en avons extrait jusqu'aux moindres documens qui se rapportent à l’histoire ou à l’état politique de la Belgique avant et durant la domination romaine; nous examinons avec soin, dans ce Mémoire, chacun de ces documens, la source à laquelle les auteurs ont puisé, en quoi ils sont conformes aux données historiques connues, en quoi ils en diffèrent et quel degré de croyance ils méritent. Nous comprenons sous le nom d’auteurs du moyen âge, tous les écrivains qui ont vécu depuis le VIe siècle, c’est-à-dire depuis l’en- tière expulsion des Romains des Gaules, jusqu’à la fin du XVme, Nous les avons classés par ordre chronologique, formant un cadre de chaque siècle et y renfermant les écrivains qui ont vécu dans cet espace de temps. N'ayant à indiquer dans ce Mémoire que les documens fournis par des ouvrages du moyen âge pour l’histoire civile et politique de l’ancienne Belgique, nous passerons sous silence toute chronique, lé- gende, etc., qui ne renferme absolument rien sur ce sujet; quant aux ouvrages qui contiennent des faits relatifs à notre question, nous ne parlerons que de ces derniers, sans entrer dans un examen détaillé du contenu de l'ouvrage entier; ce serait grossir inutilement ce Mémoire. Pour la même raison nous n’entrerons pas dans des détails sur la bio- graphie des auteurs, dont nous analysons les écrits, à moins que ces auteurs ne soient peu connus, nous contentant d'indiquer les ou- vrages où l’on trouve des notions suffisantes sur ce sujet. 6 INTRODUCTION. Nous ne parlerons également que d'ouvrages imprimés; car nous avons lieu de croire que l’on n’exigera pas que nous donnions l’analyse des chroniques et pièces encore inédites indiquées dans la Brbliotheca manuscripta Belgica de Sanderus , dans les Historici latini de Vos- sius et autres recueils de ce genre; les bibliothèques où ces manuscrits étaient déposés, étant depuis long-temps dispersées et détruites, il nous est impossible de savoir où ces ouvrages se trouvent aujourd’hui. D’ail- leurs les chroniques les plus anciennes, c’est-à-dire celles qui renfer- ment des faits importans relatifs à l’histoire de la Belgique avant le Vlme siècle, ont été publiées pour la plupart, et les documens que pourraient fournir les ouvrages encore inédits n’offrent guère que des répétitions qui ne nous apprendraient rien de nouveau sur cette ma- tière. ANANANANANANANANANANANANANANANANANANANANANANANANANANANANANANANANANANANANANANANANANANANANANANAN AA MÉMOIRE SUR LES DOCUMENS DU MOYEN AGE, RELATIFS A LA BELGIQUE AVANT ET PENDANT LA DOMINATION ROMAINE. ANALYSE RAISONNÉE ET CRITIQUE DE TOUS LES DOCUMENS RELATIFS À L'HISTOIRE OU À L'ÉTAT POLITIQUE DE LA BELGIQUE AVANT ET PENDANT LA DOMINATION ROMAINE, QUE FOURNISSENT LES CHRONIQUEURS ET AUTRES ÉCRIVAINS DU MOYEN AGE. Les plus anciens écrivains du moyen âge, dont les ouvrages con- Posmede ne Vite tiennent des documens relatifs à l’histoire de la Belgique, avant et pen- dant la domination romaine, sont Grégoire de Tours et Procope. Grégoire de Tours nous a laissé plusieurs ouvrages, mais le seul dont nous devons parler ici, est son histoire des Francs. Elle est divisée en dix livres et s’étend jusqu’à l’an 596, époque de la mort de l’auteur. Quoique cet ouvrage soit écrit dans un latin et un style barbares et que son auteur, Grégoire de Tours, ajoute souvent une foi aveugle aux 8 MÉMOIRE contes les plus ridicules, il est néanmoins fort précieux à cause du grand nombre de documens importans qu’il renferme ”. Nous allons indiquer les passages de l’histoire des Francs qui ont rapport à notre question. Ils sont d'autant plus intéressans qu’ils rela- tent des faits sur lesquels les auteurs romains ont gardé souvent le plus profond silence. Dans le livre I, chapitre XXXIT, Grégoire de Tours décrit invasion des Gaules par Crocus, roi des Allemands. Ce roi barbare, excité par sa mère, envahit, à la tête d’une forte armée, toutes les parties des Gaules (cunctas Gallias), et détruisit de fond en comble les édifices de construction romaine qu'il trouva sur son passage ; il fut défait et pris près d'Orléans et périt dans d’affreux supplices. Grégoire de Tours est le premier écrivain connu qui ait donné des détails sur cet événement remarquable. Dans le trente-quatrième chapitre du même livre, il parle de la des- truction de Tongres par les Huns; il rapporte que saint Servais, évé- que de Tongres, au bruit de l'invasion prochaine des Gaules par les Huns, se rendit à Rome, et, qu'après avoir passé plusieurs jours en jeûnes et en prières devant le tombeau des apôtres, il vit apparaître saint Pierre, qui lui annonça que l’irruption des Huns dans les Gaules était une catastrophe inévitable et l’engagea à retourner promptement dans son diocèse pour mettre ordre à ses affaires et pour préparer son tombeau, parce qu'il mourrait bientôt pour ne pas être témoin d’un si grand désastre ; que saint Servais revint incontinent à Tongres, exé- cuta les ordres de l’apôtre, se retira à Maestricht , et, qu’à peine arrivé dans cette ville , il y mourut à la suite d’une fièvre légère. Quoi qu’il en soit de l’authenticité de certains détails de cette rela- tion, nous devons toujours à Grégoire de Tours d’être le plus ancien écrivain qui ait rapporté quelques particularités sur la destruction de Tongres par les Huns. 1 Woy. Nossius, De historicis latinis, lib. IT, cap. XXII. Dom Bouquet, Recueil des historiens de France, 1. Il. Fabricii Bibliotheca lat. medieæ et infime latinitatis, art. Grecortus Turon. SUR LES DOCUMENS DU MOYEN AGE. 9 Dans les deux chapitres suivans, l’auteur décrit l'expédition des Huns dans les Gaules; mais il n’y est plus question de Tongres ni de la Belgique. Dans le chapitre IX du livre IT, il recherche quel fut le premier roi des Francs, et conclut du silence de Sulpice Alexandre, historien dont les écrits ne sont point parvenus jusqu’à nous, que les Francs ne furent pendant long-temps gouvernés que par des chefs militaires (duces). Ce passage de Grégoire de Tours est remarquable en ce que cet écrivain, le plus ancien historien des Francs dont les ouvrages soient parvenus jusqu’à nous, nous apprend que, de son temps, on ignorait quel fut le premier roi des Francs, et, par conséquent, que tout ce que des chroniqueurs postérieurs disent d’un prétendu roi Priam et de ses successeurs ayant Clodion, ne repose sur aucun fondement historique ; car toutes les preuves de l’histoire attestent que les Francs ne formèrent d’abord qu’une ligue composée d’un grand nombre de peuplades de la Germanie et qui, comme le dit Grégoire de Tours, devaient étre com- mandées chacune par leurs chefs nationaux *. 1 « De Francorum vero regibus quis fuerit primus, a multis ignoratur. Nam etsi multa de eis » Sulpitii Alexandri narret historia, non tamen regem primum eorum ullatenus nominat : sed » duces eos habuisse dicit. » 2 Quoiqu'il soit peu probable, malgré l'opinion de Vredius et de Raepsaet, que la ligue franque prit naissance sur le territoire même de la Belgique (en Flandre), il est néanmoins cer- tain que dès le III® siècle une grande partie de la Belgique était déjà peuplée de Francs, qui s'y étaient fixés avec ou sans le consentement du gouvernement romain. Dès l'an VIIL, avant l'ère vulgaire, Tibère avait transféré un grand nombre de Suèves et de Sicambres (qui plus tard firent partie de la ligue franque) dans les contrées des Gaules limitrophes du Rhin (Sueton, in Aug., c. XXI, in Tiberio, c. XIX; Eutrop., lib. VII). Probus en fit de même, en 277, à l'égard d’un grand nombre de Francs (Vospise. in Aurel.). Maximien peupla les parties désertes du pays des Nerviens et des Tréviriens, d’une multitude de Francs, vers l’an 291 (Eumen, Paneg. Constant.). Constance Chlore suivit l'exemple de Maximien, lorsqu'il eut repris, vers l'an 293 et 296, la Batavie sur les Francs (Eumen., Paneg. Constant). L'empereur Julien trouva les Campines ac- tuelles, ou le territoire des Toxandres, occupées depuis long-temps par les Franes-Saliens, qui s'étaient emparés de force de ce territoire (Amm. Marcel., lib. XVII, c. VIII; Sozim., Hist., lib. IT, c. VL.) L'histoire des Francs est donc intimement liée à celle des Belges sous la domination romaine ; et ce que Grégoire de Tours et d’autres chroniqueurs postérieurs disent de l’origine des Francs, sont des faits qui ne doivent pas être oubliés par l'historien de la Belgique sous la domination romaine. Tou. XII. 2 10 MÉMOIRE Dans ce même chapitre, Grégoire de Tours rapporte un long passage d'Alexandre Sulpice, dans lequel il est dit que lorsque Maxime était sur le point de perdre l’empire à Aquilée, les Francs, conduits par Genobald, Marcomir et Sunnon, firent une irruption dans la Germanie (c’est-à-dire la Germanie romaine dont dépendait une partie de la Bel- gique), et s’emparèrent de Cologne; qu’à cette nouvelle Nannius et Quintinus, maitres de la milice, auxquels Maxime avait confié la tutelle de son fils Victor, encore enfant, ayant rassemblé une armé et marché de Trèves sur Cologne , les ennemis, chargés de butin, repassèrent le Rhin, en laissant néanmoins sur le territoire gaulois un grand nombre des leurs pour continuer le pillage; que les Romains se mirent à la poursuite de ces derniers et en firent un grand carnage dans la forêt charbonnière (apud carbonariam) ” ; que Naunius n’osa poursuivre les Francs au delà du Rhin, mais que Quintinus, qui était d’un avis con- traire, passa ce fleuve près du château de Nuits (apud Novisium), mit le feu aux cabanes des Francs qu’il trouva abandonnées, et s’engagea témérairement dans les forêts, où les ennemis s'étaient mis en embus- cade; enfin, que les Romains se perdirent dans les défilés, et furent presque tous exterminés. Cet événement, qui eut lieu en 388, n’est décrit par aucun écrivain romain : Grégoire de Tours est le plus ancien auteur qui en ait fait mention après Sulpice Alexandre. À la suite de cet extrait du IIf"e livre de l’histoire de Sulpice Alexandre, Grégoire de Tours nous en donne un autre tiré du même ouvrage. Sulpice Alexandre, parlant du meurtre de Victor, fils de Maxime, dit que Carietton et Syrus, qui avaient remplacé Nannius, commandaient deux armées dans la Germanie romaine ; il décrit en- suite l’expédition d’Arbogaste contre les Francs”, et rapporte que le 1 La Silva Carbonaria s’étendait, selon Wendelin , sur tout le Hainaut moderne et la partie du Brabant où sont les quartiers de Bruxelles et de Louvain. Voy. Wastelain, Description de la Gaule-Belgique, 2"° éd., p. 88 et 414. Dewez, Diction. géogr. du roy. des Pays-Bas, art. Car- BONARIA SILVA. 2 « Collecto exercitu , transgressus Rhenum, Bructeros ripæ proximos , pagum Hetiam (etiam) » quem Chamavi incolunt, depopulatus est, nullo occursante, nisi quod pauci ex Ampsivariis » et Chattis, Marcomere duce, in ulterioribus collium jugis apparuere. » SUR LES DOCUMENS DU MOYEN AGE. 11 tyran Eugène conclut (vers l’an 389) la paix avec les rois des Francs et des Allemands. Dans le IX: chapitre du livre IE, Grégoire de Tours rapporte égale- ment un passage d’un auteur inconnu appelé Renatus Profiturus Fri- geridus. Il est relatif à la guerre des Francs contre les Vandales, à la révolte de Jovin, au second saccagement de Trèves par les Francs (vers 412) et à l'expédition de Castinus, comes domesticorum , contre ces derniers. Mais comme dans tous ces événemens il n’est point ques- tion de la Belgique, nous ne nous arréterons qu’au passage suivant , qui a un rapport plus direct avec le sujet de notre question. Après avoir transcrit un passage du livre VII"e de l’histoire romaine d’Orose, dans lequel il est parlé de la révolte de Stilicon, Grégoire de Tours ajoute immédiatement : « Hanc nobis notitiam de Francis memorati historici (Alexander-Sulpicius et Frigeridus) reliquere, regibus non nominatis. Tradunt enim multi eosdem de Pannonia fuisse digressos et primum quidem littora Rheni amnis incoluisse : de hinc transacto Rheno, Thoringiam transmeasse : ibique juxta pagos vel civitates, reges crinitos super se creavisse, de prima, et ut ità dicam , nobi- liori suorum familia. Quod postea probatum Chlodovæi victoriæ tradidere , idque in sequenti digeremus. Nam et in consularibus ‘ legimus Theodomerem regem Francorum, filium Richimeris quon- dam et Ascilam matrem ejus, gladio interfectos. Ferunt etiam tunc Chlogionem utilem ac nobilissimum in gente sua regem Francorum fuisse , qui apud Disparqum castrum habitabat, quod est in termino Dans le XIII livre de ses annales, Tacite nous apprend que les Ansibariens chassés de leur territoire (près de l’Ems dans le comté de Bentheim) par les Cauques, vinrent, sous le règne de Néron, occuper l'angle de pays compris entre le vieux et le nouvel Yssel et le Rhin, dans la pro- vince de Drenthe ; qu'ayant été expulsés de là par Curtilius Manso, ils se retirèrent chez les Usipètes et les Tubantes; que chassés également du territoire de ces derniers peuples, les Ansi- bariens , harcelés par les Cattes et les Cherusques, furent presqu'entièrement anéantis (Tacit. Annal., . XI). Le passage de Sulpice-Sevère rapporté par Grégoire de Tours, atteste néan- moins que les Ansibariens ou les Ampsivariens existaient encore en corps de nation, vers la fin du IV siècle. L'émigration de ce peuple chassé par les Cauques, n’aura donc été que partielle (voy. encore Æthici cosmographia et Amm. Marcel., lib. XX, c. X). 1 Les fastes consulaires. 12 MÉMOIRE Thoringorum. In his autem partibus , id est ad meridionalem pla- gam habitabant Romantiusque Ligerim fluvium, ultra Ligerim vero Gothi dominabantur. Burgundiones quoque Ahrianorum sectam se- quentes , habitabant trans Rhodanum qui adjacet civitati Lugdu- nensi. Chlogio autem, missis exploratoribus, ad urbem Camaracum, perslustrata omnia, ipse secutus, Romanos proterit, civitatem adpre- hendit : in qua paucum tempus residens, usque Sumnium fluvium occupavit. » Ce passage important donne lieu à plusieurs explications : en premier lieu, le terme non nominalis regibus atteste que les noms des pre- miers rois Francs étaient entièrement inconnus, ou plutôt, comme nous l'avons déjà dit, que la ligue franque ne fut point d’abord gou- vernée par des rois. En second lieu, Grégoire de Tours rapporte que les Francs occupaient la Pannonie, avant de s’établir sur les bords du Rhin. Cette fable a été adoptée par tous les chroniqueurs du moyen âge, qui y ont encore ajouté de nouveaux faits tout aussi apocryphes. Nous disons que la tradition qui fait sortir les Francs de la Pannonie est fabuleuse, parce qu'aucun auteur romain ne nous atteste l’existence des Francs dans cette contrée, mais bien celle d’autres peuplades qui n’entrèrent jamais dans la ligue franque. Le nom de Francs ne désigne pas un seul peuple, mais une confédération de plusieurs peuplades germaniques, tels que les Sicambres, les Saliens, les Bructères, les Tenchtres, les Usipètes, les Frisons et quelques autres peuples voisins de la rive droite du Rhin. Toutes ces peuplades s'étaient réunies pour la défense de l’indépendance germanique contre les Romains. Ce n’est que vers l’an 241 de l'ère vulgaire, sous le règne d’Aurélien, qu’on les voit paraître dans l’histoire et qu’on entend prononcer, pour la pre- mière fois, le nom de Francs‘. Nous aurons encore occasion de revenir ailleurs sur l’origine des Francs. 1 Si la table de Peutinger fut composée vers l’an 230, comme le prétend Mannert, ce serait le plus ancien document où il soit fait mention des Francs. Cette carte romaine place la demeure des Francs sur la rive droite du Rhin, dans le duché actuel de Clèves. Voir Bucherii Belgium Fomanum, 1. VI, c. XIII. SUR LES DOCUMENS DU MOYEN AGE. 13 En troisième lieu, Grégoire de Tours dit qu'après avoir passé le Rhin, les Francs s’établirent dans la Thoringie. C’est à tort que M. Raepsaet a pris la Thoringie de Grégoire de Tours pour la Thuringue : c’est la Tongrie ou le pays de Tongrois que ce dernier désigne ici. Il y a d’autres auteurs anciens encore qui ont écrit de cette manière le nom des Tongrois ’, tel est Procope, qui écrit Ge, Hariger et Gilles d'Or- val , qui appellent Tongres metropolis Thuringorum. D'ailleurs, pour venir de la Pannonie dans la Thoringie, les Francs n’auraient pas eu besoin de passer le Rhin. Ce n’est donc pas non plus à droite du Rhin, comme le prétend M. Raepsaet, d’après Adon, auteur du IX"e siècle qui n’a fait que copier Grégoire de Tours en le tronquant , qu'il faut chercher la position du château de Disparqum , première résidence de Clodion, mais à gauche de ce fleuve, et très-probablement dans les environs de Diest*. Enfin le dernier passage de Grégoire de Tours, que nous venons de transcrire, est intéressant, parce qu'il nous donne de plus amples dé- tails qu'aucun autre ouvrage aussi ancien sur l’expulsion des Romains de la Belgique par Clodion. Les passages de l’histoire des Francs par Grégoire de Tours, que 1 Morel, éditeur de la seconde édition de l’histoire des Francs par Grégoire de Tours (en 1561), dit avoir vu un manuscrit qui portait : « Dispargum quod est in confinio Thoringorum » vel Thongrorum. » 2 Onlit dans l'ouvrage de J. Trittenhemius intitulé : « De origine gentis Francorum compen- » dium : Eo tempore (Theodomiris patris Chlodionis) Francorum habitatio regum fuit in » regione Tungrorum non longè à Mosà flumine in castro quod Dispargum nuncupabatur. » Trittenhemius dit avoir composé son ouvrage d’après Vuastaldus et Hunibald, deux auteurs francs qui auraient écrit l'histoire de leur nation depuis l'an 439 av. J.-Ch. jusqu’à la mort de Clovis, dont Hunibald aurait été contemporain. Mais quoi qu’en disent Trittenhemius et Sin- cler, ces prétendus écrivains francs ne sont que des personnages fictifs imaginés par quelque inepte chroniqueur du XII" ou du XHI® siècle. « Verùm Hunibaldus iste,» dit avec raison Vossius, « nec tersus scriptor est, imo nibil illo ineptius, stultitiusque. Sanè quicquid de an- » tiquis Germanorum temporibus romanis indictum prodit, id omne comminiscitur. Nec enim » veteres Germani gesta sua mandabant literis, quas nesciebant. At ille ferrei oris, plumbei » cordis, Hunibaldus, non modè promit his indicta sed planè repugnantia, ut fidem ei habere » non possimus, nisi insimul Romanis omnibus detrahamus; quare Hunibaldus eo loco haben- » dus, quo Berosius Annii, et similis farinæ nugatores.» (De scriptorib. latinis, lib. IL, c. XXII). 14 MÉMOIRE nous avons analisés, sont les seuls qui aient rapport à notre question : tout le reste se rapporte à une époque postérieure à la domination ro- maine en Belgique. Pour dernière remarque , nous observerons que, dans le chapitre XX VIT du livre IE, il est parlé de la conquête du pays des Tongrois par Clovis’, et, que dans le chapitre XXIX du même livre, il est fait men- tion d’un Ragnachaire, roi de Cambrai (ou des Nerviens) *, que Clovis fit mourir pour s'emparer de ses états. Ceci nous apprend qu’après l’ex- pulsion des Romains, la Belgique fut d’abord partagée en plusieurs petites souverainetés indépendantes les unes des autres. De Grégoire de Tours, passons à l’historien le plus célèbre du VIe siècle, Procope. Cet auteur, un des meilleurs écrivains du bas empire , florissait à peu près à la même époque que Grégoire de Tours. Secré- taire de Bélisaire pendant toutes les campagnes de ce général en Perse, en Afrique et en Italie, il nous a laissé trois ouvrages sur ces événe- mens. Le premier contient l’histoire de la guerre contre les Perses, le deuxième l’histoire de la guerre contre les Vandales, et le troisième celle de la guerre contre les Goths *. Les deux premiers de ces ouvrages ne renferment rien de relatif à la matière que nous traitons; mais dans l’histoire de la guerre des Goths se trouve un passage qui jette un grand jour sur quelques points obscurs de l’histoire de la Belgique sous la domination romaine. Dans le chapitre XIT du livre I de la guerre des Goths, Procope dé- signant la position géographique des Francs, des Bourguignons et des autres peuples barbares, qui s’établirent dans les Gaules au Ve siècle, place à l’orient d’un peuple qu’il appelle les Arborusques, les Thuris- 1 «Decimo regni sui anno Thoringis bellum intulit (Chlodovœus) eosdemque suis ditionibus » subjugavit» (Greg. Turon., lib. IE, c. XXVII). Ce n'est point de la Turingue qu'il est ques- tion ici, comme l'ont cru plusieurs auteurs modernes, mais de la Tongrie; car la Thuringue forma encore un royaume indépendant plusieurs siècles après le règne de Clovis. 2? « Erat autem tunc Ragnacharius rex apud Cameracum » (Greg., tur. Aist., lib. IN, c. XLII). 3 On a encore, sous son nom , une histoire mélée, une histoire secrète et une description, en six livres, des édifices construits par Justinien. SUR LES DOCUMENS DU MOYEN AGE. 15 giens (Gevry4) dans un pays qui leur avait été concédé par l'empereur Auguste *. Ces Thurisgiens ne peuvent être autres que les Tongrois, dont il était permis à un écrivain grec d’ignorer le véritable nom * ; car nous venons de voir que Grégoire de Tours même écrivait T'horingiens pour Z'ongrois. D'ailleurs personne ne s’imaginera certainement que Procope ait voulu désigner ici les Thuringiens de la Germanie, con- trée dont Auguste n’était point le maître et où par conséquent il ne pouvait disposer de la propriété du territoire. Nous pouvons donc ex- pliquer, par ce passage de Procope, le silence que César a gardé sur un peuple aussi considérable que les Tongrois, qu’il n’aurait certainement point oublié de mentionner s’il avait existé de son temps en Belgique. On sait que César extermina la nation entière des Éburons. Le pays de ces derniers ayant été réduit en désert, Auguste y aura transplanté une peuplade germanique portant le nom de Tongrois; il est même probable que ces Tongrois auront fait partie de ces pri- sonniers de guerre germains que Tibère, lorsqu'il commandait les armées romaines sur le Rhin, transféra dans la Gaule vers l’an VIII avant l’ère vulgaire *. Il ne doit donc pas paraître étonnant qu'aucun auteur ancien avant Pline et Tacite, n'ait fait mention des Tongrois. Si quelques auteurs modernes avaient examiné attentivement ce pas- sage de Procope, ils n’auraient pas fait une foule de conjectures hasardées sur l’origine d’un des peuples les plus célèbres de l’an- cienne Belgique, et ils n’eussent point confondu les Tongrois avec les Éburons ‘. 1 « Secundum quos (Arborichos) ad orientem Tungri barbari concessam sibi ab Augusto im- » peratorum primo regionem incolebant » (Procop., Bell. Goth., 1. 1, c. XII). 2 Quelques lignes plus loin Procope écrit encore Bourgouziones pour Burgondiones. 3 Sueton. in Augusto, c. XXI, in Tiberio , c. XIX. Eutrop. 1. VII. 4 M. Raepsaet a cru que les Thurusgiens de Procope ne pouvaient être les Tongrois, vu la différence du nom. Mais nous avons déjà cité plusieurs exemples qui attestent que des écri- vains , plus à même que le grec Procope de connaître le véritable nom des Tongrois, écrivaient indifféremment Thoringiens pour Tongrois. M. Raepsaet a donc cru sur cette preuve fort peu concluante, que les Thurisgiens de Procope étaient une colonie établie par Auguste dans la Gueldre, où aucun auteur ancien n’a jamais connu un peuple dont le nom eût la moindre res- semblance avec celui désigné par Procope. 16 MÉMOIRE L'erreur de nom, que Procope a encore commise en écrivant Arbo- ruchoi pour Armorichoi, a également donné lieu , à quelques auteurs, de former des conjectures erronées sur le peuple que Procope a voulu désigner sous ce nom. Procope, en plaçant les Arboruches à locci- dent des Tongrois, leur a donné, pour territoire, les contrées voisines de la mer; or on sait que dans la Gaule on désignait en général sous le nom d’Armoricains tous les peuples habitant les côtes ‘. Rien ne nous empêche donc de conclure avec Du Bos, Wastelain et d’autres savans, que les Arborusques de Procope ne soient les mêmes que les Armoriques ou Armoricains. Celui qui aura lu attentivement le chap. XIT du livre Ier de l'Histoire de la querre des Goths par Pro- cope, sera persuadé que les faits que cet auteur y rapporte, ne peu- vent convenir qu'aux Armoricains *. Dans le même chapitre, Procope met les Tongrois au nombre des peuples libres (arwux). Ne pourrait-on pas conclure de là qu’ils auront obtenu d’Auguste les mêmes priviléges que possédaient, sous l'empire romain, les Bataves, les Caninefates, les Nerviens et d’autres peuples d’origine germanique, c’est-à-dire de pouvoir se gouverner d’après leurs propres lois et sous leurs chefs nationaux. Le reste de l’histoire de la guerre des Goths ne renferme aucune particularité qui ait rapport à notre question. Après les ouvrages de Grégoire de Tours et de Procope, les plus 1 On lit, à la fin de l’Ztinerarium a Burdigala Hierusalem usque , composé vers l’an 833 de notre ère : 4remorici, ante mare : are, ante; More, dicunt mare, et ideo Morini Marini. (Vide Wesseling, Ztineraria romana et de Châteaubriand, Jtinéraire de Paris à Jérusalem, pièces justif. du 8° vol.) 2? M. Le Page de la Laghe, dans son Mémoire sur l'établissement des Francs dans la Belgique et sur l'existence des Arhoriches dans la Toxandrie (Gand, 1770, in-4°), a voulu prouver que les Arboriches de Procope étaient un peuple de la Toxandrie (la Campine). Mais les preuves qu'il cite à l'appui de cette opinion ne sont rien moins que concluantes. Matthæus place, sans plus de fondement, les Arborichi dans la Zélande, loc. cit. Eyndius veut que les Thurisgi de Procope soient les habitans de Dordrecht, parce que, dans les anciennes chartes, cette ville porte le nom de Thuridrecht, Thoridrecht. Matthæus ne rejette point cette opinion ; cependant il dit ailleurs : Thuringi Tungri sunt in tractu, in agro leodiensi. Il croit que Dordrecht a pu être fondée par les Tongrois : Dordrecht ergo Thuridrecht a T] hurin- gorum trajectu. Nam drecht idem quod trajectus (Matthæus, de Nobilitate, lib. F, p. 86). SUR LES DOCUMENS DU MOYEN AGE. 17 anciens écrits du moyen âge qui répandent quelque lumière sur l’état ancien de la Belgique, sont les légendes des premiers apôtres du chri- stianisme dans cette contrée. Quelques-unes de ces légendes ont été écrites au VII: siècle; telle est celle de St-Amand, composée par Bau- demond, disciple de cet évêque. D’autres ne datent que de plusieurs siècles postérieurs, mais on reconnait néanmoins qu’elles ont été rédigées sur des documens plus anciens; et c’est pour cette raison que nous avons réuni ici la plupart des observations que nous ferons dans ce mémoire sur les légendes. C’est principalement pour la connaissance des mœurs et des coutumes des anciens Belges, et celle de l’état physique de la Belgique à cette époque reculée, sur laquelle nous avons si peu de données historiques , que ce genre d’écrits est des plus utiles. Il est vrai qu’il n’y est, le plus souvent, question que de la Belgique et de ses habitans aux VIe, VIE ou VIII siècles; mais nous pouvons cependant juger par l’état où se trouvait alors ce pays, quant au physique, ce qu'il devait être un ou deux siècles aupara- vant, à l’époque de la domination des Romains. Les légendes jettent encore un grand jour sur l’histoire ecclésiastique et sur l’époque de l'introduction du christianisme en Belgique *. La plus ancienne des légendes des premiers apôtres du christia- nisme en Belgique, est celle de saint Piat et de saint Chrysole, qui vinrent précher la foi sur le territoire de Tournai, sous le règne de Dioclétien, et furent mis à mort par ordre de Victricius Varus, gou- verneur de la seconde Belgique *. Parmi beaucoup de faits qui semblent peu vraisemblables, cette légendë en contient cependant quelques- uns qui méritent d’être recueillis. On y lit que saint Piat convertit, à Tournai, trente mille personnes, sans compter les enfans et les femmes *. Si ce chiffre est exact, il doit comprendre une multi- 1 Nous ne ferons mention ici que des légendes qui contiennent des faits relatifs à l’état ancien de la Belgique, et suivant le plan adopté pour ce mémoire , nous ne parlerons que de ces faits. -2 L'auteur de cette légende est un chanoine de Tournai, nommé Fulbert, qui vivait au X° ou au XI siècle; mais il l'aura certainement écrite sur des documens plus anciens, quoiqu’en partie fort apocryphes. 3 « Tornaco ergo diffundendo late sanctum Dei verbum, Christo convertit virorum ter dena Tow. XII. 3 18 MÉMOIRE tude d’habitans du plat pays, et probablement des villes voisines; car Tournai, qui ne figure encore que comme une simple station de poste dans la table de Peutinger, composée, selon Mannert, vers l’an 230 de l’ère vulgaire, et dont l'enceinte primitive atteste que cette ville n'avait, à l’époque romaine, que l'étendue actuelle de la ville d'Ath ?, ne pouvait certainement contenir, à la fin du Ie siècle, un aussi grand nombre d’habitans, quand même on supposerait que la ville tout entière eut été convertie par saint Piat *. Après les légendes de saint Piat et de saint Chrysole, lesquelles ne renferment point d’autres faits qui méritent de trouver place ici, vien- nent, pour l'ancienneté, celles de saint Materne, saint Euchaire, saint Valère et autres évêques de Tongres jusqu'au Ve siècle. Nous en par- lerons en traitant des Gesta pontificum Tongrensium, Trajectensium et Leodiensium par Hariger, Gilles d'Orval et Anselme. La vie de saint Vaast, évêque d'Arras à la fin du Ve siècle, nous apprend un fait bien curieux pour la connaissance de l’état physique de la Belgique ancienne. On y lit que, lorsque ce saint visita les ruines de l’église d'Arras, détruite par les Huns, il y trouva un ours *. En effet, ces animaux n'étaient pas rares en Belgique à cette époque et antérieurement. Le poète Venance Fortunatrapporte que de son temps, au Ve siècle, ils étaient, ainsi que les taureaux sauvages, les élans et les loups, très-communs dans la forêt des Ardennes, qui couvrait en- core alors une grande partie de la Belgique *. La légende de saint Ghislain atteste également qu’au VIE siècle, » millia præter parvos et secundi sexus turbam christicolam (Acta SS, Belgii, t. I, p. 139). » 1 Poutrain, Âistoire de Tournai, La Haye (Tournai), 1780, t. I, p. 91. 2? La légende de saint Piat, qui se trouve dans les annales du Hainaut par Jacques de Guise, ne dit point que ce saint convertit 30,000 personnes dans la ville de Tournai seule, mais dans le pays de Tournai. Poutrain dit seulement 15,000 (Æist. de la ville et cité de Tournai, t. I, p. 537). 3 « Ibique (in ecclesia Attrebatensi) habitatione ursi reperta, eum cum animi dolore a vallo » _verbis ultra progredi imperavit (Vita sancti Vedasti, ce. NI, Acta SS. Belqii, t. I, p. 40). » * Arduennæ an vosagi cervi, capræ, helicis, ursi Cæde sagitiffera silva fragore tonat Sed validi bubuli ferit inter cornua campum Nec mortem differt ursus, ornager, aper. (Fortunat. ad Gogonem). SUR LES DOCUMENS DU MOYEN AGE. 19 les ours habitaient les forêts du Hainaut. Au X° siècle, ces animaux étaient même encore très-nombreux dans les provinces de Drenthe et de Groningue. La vie de saint Amand, qui précha la foi dans la Flandre et la province d'Anvers vers le milieu du VII siècle, renferme quelques documens intéressans pour la connaissance de l’état ancien de ces provinces. Ces faits sont d'autant plus authentiques, qu’ils ont été décrits par un témoin oculaire et contemporain , par Baudemont, dis- ciple de saint Amand. C’est dans cette légende qu'il est fait mention, pour la première fois de Gand, qui n’était encore au VITE siècle qu'un petit bourg; ce qui du reste ne doit pas nous paraitre fort étrange, puisque les auteurs anciens ne font mention d’aucune ville ni d’aucun établissement romain dans la Flandre, au nord de Cassel (Castellum Menapiorum). S'il faut même en croire Vredius et Raepsaet (d’après Salluste), les habitans de la Flandre actuelle, ou les Ménapiens, ne furent jamais domptés par les Romains". Mais ce qui pourrait nous paraître plus étonnant, c’est qu’à l’époque de la prédication de saint Amand, le territoire de Gand était si stérile et si inculte, que les com- pagnons de ce saint durent abandonner ces lieux, faute d’y trouver de quoi se nourrir . Les habitans de cette ville célèbre sont dépeints par Baudemond comme une peuplade farouche et barbare *. 1 « Omnes Gallias nisr qua PALUDIBUS INVIA FuERE, ut Sallustio docetur auctore post decennalis » belli mutuas clades subegit Cæsar societatique nostræ fæderibus juxit æternis (Amm. Macel., » 1 XV, C. XIL). » « Res romana plurimum imperio valuit Sex. Sulpicio et M. Marcello coss. omnia Gallia cis- » Rhenum inter mare nostrum alque oceanum Mist QUA A PALUDIBUS 1NVIA FUIT, perdomita (Victo- » rin. et Auguslin.). » Il est curieux de rapprocher ces passages de ce que Vredius dit de l’état politique des peuples de la Flandre sous la domination romaine (Vredii, Flandr. ethnica). 2 « Propter ferocitatem gentis vel ob terræ infæcunditatem loci illius (Gandavi) se subtraxe- » rant (Baudemondi vita S. Amandi, apud Boland., t. 1, feb., p. 850), » 5 Namque ferox regio et terra infæcunda removit Pontifices cunctos, nec quisquam est ausus adire Silvicolas apros sævas feritate cohortes, (Milo , Vila metrica S, Amandi apud Boland, Ibid., pag. 880). Un auteur anonyme de la vie de saint Amand, mais qui était contemporain de ce saint, dit : 20 MÉMOIRE Ce n’est pas seulement la légende de saint Amand qui rend ce té- moignage des habitans de la Flandre au VII: siècle, mais aussi dans celle de saint Médard, évêque de Noyon, mort plus d’un siècle avant saint Amand, en 545. Venance Forturat, auteur de cette vie, y qualifie les Flamands de peuple féroce, sauvage et opiniâtre ”. Une lettre de saint Paulin de Nole, de l’an 399, atteste que, sous la domination romaine, la civilisation n'avait guère fait plus de pro- grès sur les côtes de la Flandre qu'aux VIe et VIT: siècles *. Tous ces passages, que nous venons de rapporter, jettent un grand jour sur l’état des mœurs des Ménapiens et des Morins sous la domi- nation romaine, et servent, en quelque sorte, à expliquer le silence des auteurs anciens sur cette belle partie de la Belgique, qui paraît avoir été beaucoup négligée par les Romains. La légende de saint Bavon ne contient aucun fait relatif à notre question, si ce n’est qu’elle nous apprend que jusqu'au VIT: siècle, le beau territoire de Gand était couvert en majeure partie par une vaste forêt * et confirme par là ce qui a été dit plus haut, en ana- lysant la vie de saint Amand, sur les changemens étonnans opérés « Audivit sanctus Amandus esse in confinibus Francorum et gentilium unum pagellum cujus » vocabulum est Gaudens (Gandavum).... qui propter ferocitatem gentis et INFÆCUNDITATEN TERRÆ » prædonibus derelictus est ; sed profanis et idolatriæ deditus (4cta SS. Belqii, t. IV, n° 6). 1! « Ferocem Flandrensium gentem suæ Noviomensi ecclesiæ sociavit.... Erat enim gens ipsa » fera et indomitabilis, duræ cervicis populus et implacabilis, pravis admodum subditus obse- »_quiis idolorum et cum multa obstinatione suorum defendens cultum deorum (ibid). » 2? « In terra Morinorum situ orbis extrema quam barbaries fluctibus fremens tundit oceani » gentium populi remotorum qui sedebant in latebris viæ maris arenosæ ubi quondam » (avant l’apostolat de saint Vitrice) « deserta silvarum ac littorum pariter intuta advenæ barbari aut » latrones incolæ frequentabant (Paulini epist.), » 3 « Digressus longa rursus per dispendia viarum alium requirit eremum athleta Dei Allo- » winus, Methmeding nomine, a sua Ganda distantem duorum tantum milliarium itinere. Lo- » cus ille in densissimum nemus silvescens, vasta ac pene inaccessibili palude distentus (Vata » sancti Bavonis, Acta SS. Belgii , t. N). » Leguntur, « dit Sanderus, » et hæc verba secunda die infra octayvam sancti Bavonis in » lectione quarta in officio SS. ecclesiæ Gandavensis : « Cumque Domilini presbyteri Thorol- » tensis, viri religiosissimi et familiaris quondam sui, præsentiam in extremis optaret, ut ab » eo præsertim, sicut consueverat ante, eucharistiæ viaticum acciperet, mox ille ad eum per SUR LES DOCUMENS DU MOYEN AGE. 21 dans l’état physique et les défrichemens de la Flandre depuis l’époque de la domination romaine. Nous apprenons dans l'Histoire de la translation des reliques de saint Wandregesile que, du temps de saint Amand, on voyait, sur la montagne de St-Pierre à Gand, un temple de Mercure (peut-être Odin ou Wodan ) que ce saint détruisit et sur l'emplacement duquel il fonda le célèbre monastère de Blandinium ‘. La vie de saint Éloi, évéque de Noyon et de Tournai, nous fait connaître que ce saint convertit au christianisme, vers l’an 651, les Anversois, les Frisons, les Suèves et autres habitans des côtes de la Flandre, que l’ancien auteur de cette légende qualifie de barbares, et qui, jusqu’à cette époque, n’avaient point encore reçu la foi *; ce qui nous semble une nouvelle preuve que le nombre des Romains, à l’époque de leur domination en Belgique, devait avoir été peu consi- dérable dans la Flandre, et que les édits sévères de Théodose et d’autres empereurs chrétiens, contre le culte païen, y furent très- mal exécutés. La légende de saint Éloi nous révèle encore l'existence d’une co- lonie de Suèves dans la Flandre. Peut-être étaient-ce les descendans de ces Suèves que Tibère et Probus transférèrent dans la Belgique; » vastas solitudines , angelo ducatum præstante , pervenit (Sanderi Flandria illustr., Ub.IX).» » Voyez encore Malbrancq de Morinis, lib. I et lib. HT, c. XVII. » 1 « In pago igitur Gandavo mons surgit aureus et cunctis in edito positus, claro nomine » Blandinium nuncupatus.... hunc ergo locum dilectus Deo et hominibus præsul eximius olim » adiens Amandus, tempore quo gloriosus rex Dagobertus honeste agebat in sceptris, cœnobium » 1bi construxit in montis vertice , ubi vetustissimum fanum fuit, in quo ex antiquorum more » gentilium ab stulto rusticorum populo Mercurius colebatur. Convertit ergo idolum, sub- » vertit aram, succedit lucos, atque ubi fanum destruxit, ibi cænobium construxit, cui Blandi- » nium vocabulum indidit, ob quod blanditiis ferocis populi animum delinivit (Hist, translat. » SS, Wandregisili, etc., sæc. 5, act. bened. , p. 202). » 2 « Præterea (Eligius) pastoris cura sollicitus, lustrabat urbes vel municipia sibi commissa, » sed Flandrenses atque Andoverpenses, Frisones et Suevi et barbari quique circa maris » littora degentes, quos velut in extremis remotos nullus adhuc prædicationis Vomer impres- » serat, primo eum hostili animo adversa mente susceperunt; postmodum vero, cum paulatim » per gratiam Christi his verbum Dei insinuare cœpisset, pars maxima trucis ac barbari populi, » relictis idolis, conversa est ad verum Deum ( Väta sancti Elegii, Acta SS, Belgii, t. WL).» 22 MÉMOIRE c'est l'avis de M. Raepsaet, qui fixe la position de ces Suèves dans l’espace compris entre Courtrai et la mer, et sur toute la côte de la Flandre et de la Zélande jusqu’à Anvers. Il croit que les villages de Sweveghem, Swevesele, etc., conservent la dénomination de ce peuple ‘. Un ancien auteur anonyme du IXe siècle rapporte que les Normands exterminèrent les Ménapiens et ces Suèves de la Flandre *. Dans la légende de sainte Waudru et celle de saint Ghislain, nous lisons que, sur l'emplacement de la ville actuelle de Mons, s’éle- vait anciennement un camp romain qui, selon les conjectures de plusieurs savans modernes, pouvait étre celui de Quintus Cicéron, un des lieutenans de César. Nous apprenons dans cette vie de sainte Waudru, qu'au VII siècle, la ville de Mons n'existait point encore, mais que son emplacement était un désert couvert de bois, de même que les environs, dans une étendue de plus de deux lieues, jusqu’à l'emplacement de la ville actuelle de St-Ghislain *, qui s’appela d’abord Ursidongus, parce qu’une ourse y avait sa tanière. Cette dernière circonstance prouve, comme nous l’avons déjà dit, qu’au VILe siècle les forêts de la Belgique étaient encore, comme au Ve siècle, 1 En parlant des Usipètes, qui désertèrent l’armée d’Agricola dans la Grande-Bretagne, Tacite dit de ces transfuges qui se sauvèrent par mer : «Pro prædonibus habiti, primum a Suevis, mox » a Frisiis intercepti sunt(Tacit. Vita Agricole , e. XXVIIL), » On ignore si les Suèves , dontilest question dans ce passage, habitaient au midi des Frisons ou au nord. Dans le premier cas, ils ne pourraient être que les Suèves de la Flandre ; s’ils habi- taient au nord de la Frise, c'était près de l’Elbe qu'ils devaient s'être fixés. En effet , Strabon place les Suèves entre l’Elbe et le Rhin. 2 « Menapios et Suevos usque ad internecionem deleverunt (Nortmanni), quia valdeïllis infesti » erant (Gesta Nortmannor. ab incerto auctore! ad ann. 880, apud Duchesne).» La chronique de saint Vaast copie ce passage (4nnales Vedastini ad ann. 880). 3 « Qui videlicet mons castrilocus a prædicti viri Gbisleni cellula quatuor fere millibus dis- »_tans in superiori parte deserti (Vita sanctæ Valderudis, Acta SS. Belgis, t. IV, p. 443).» Dans cette légende, on lit que saint Ghislain habitait : « In locis desertis circa fluvium , cujus est vo- » cabulum Hania » (la Haine). Dans la vie de saint Ghislain, ce saint, en adressant la parole à sainte Waudru, parle de l’empla- cement de Mons dans les termes suivans : « Nactus sum montem silvosum sic aptum si foret » extripatus Deo obsequi eupientibus ; illud si vales, eum, et ibi ædifica tibi habitacula tuisque » sequacibus , etc. (Vata sancti Ghisleni, Acta SS, Belgii, t. IN , p. 881). SUR LES DOCUMENS DU MOYEN AGE. 23 du temps de Venance Fortunat et de saint Vaast, remplies d'animaux sauvages, qui ne se rencontrent, de nos jours, que dans les contrées les plus incultes et les moins peuplées !. Dans la légende de saint Rombaut, nous voyons qu’au VIE: siècle, l'emplacement de Malines se trouvait, à peu près, dans le même état que celui de Mons et de St-Ghislain ; que c'était une forét remplie d'animaux sauvages et que la Jolie ville de Malines n’était encore qu’un hameau composé de quelques chaumières et du château d’un seigneur franc appelé Adon *. On a pu juger, par ce que nous venons de dire des ours, élans et autres animaux sauvages qui habitaient le Hainaut aux VIe et VIT: 1 Dans la vie de saint Ghislain, écrite au IX: siècle Par un auteur anonyme, on lit : « Ea qui- » dem tempestate totius regni Francorum monarchiam administrabat rex inclytus Dagobertus. » Sed tunc venationis causa erat in pago Brachant; quamobrem quadam die bujus negocii pera- » gran solitudinem Haniæ fluvio contiguam, ingentem moyerunt canes ursam quæ rapido » cursu petit locum quo præfatus antistes Ghislenus ærumnosæ Jabori insistebat (Vita sancti » _ Ghisleni ab auctoreanon. C. 1; Acta SS. Belqii, t. 1; Balderici Chron. Camerac., lib, IL, c. XL).» Dans une autre légende de saint Ghislain, il est dit :« Ursidongus ideo sic dictus quod ibi solita » erat ursa catulos fovere, » Voyez aussi Dewez , Dictionnaire géographique du royaume des Pays-Bas, art. saint Ghislain. 2? «Profectus inde ( Roma), vir sanctus Germaniam peragrayit ad Scaldim usque, tantisper » suæ habitationis quæritans locum, a cælesti nuntio sibi designatum, quo usque Mecbliniensi » solo vicinus esset, Erat is tum locus multum vastus et incultus, vepribus, sentibus et arbo- » ribus luxurians ac nil nisi ferarum domicilium. » L'ancien auteur de cette vie desaint Rombaut met, dans la bouche de ce saint, les paroles sui- vantes qu’il adresse à Adon , possesseur du territoire de Malines: « Ceterum vicinus est hic locus » quispiam palusiris isque incultus ac supra modum arboreus , locus inquam , ulnas sentes et » taxos abunde præferens atque vepres : hunc abste mihi donari postulo.... » Il ajoute ensuite : « Nemoris Deserta vir Dei Rumoldus lætus petivit, neutiquam a lupis atque ejus generis agres- » tibus remoratus, quorum haud exigua istic tune erat copia; quo loco et cellam sibi construxit »_sive domicilium foveis ipsum cireumfodiens aquis ( Vita sancti Rumoldi CAN )ei Ce terrain marécageux couvert d’aunes s'appelle encore de nos jours Olmen Broeck, et s'étend le long de la Dyle jusqu’à une lieue de Malines. La charte par laquelle le roi Pepin donna au comte Adon le désert couvert de bois et les marécages portant le nom de Maslinæ, confirme tout ce qui estdit dans la vie de saint Rombaut, sur l'état ancien de cette ville (Vide Gramaye, Mechlinæ) et l'opuscule flamand intitulé : « Korte kronyke van vele gedenchw. geschiedenissen s00 in de principaelste steden van Brabant als in de stad en provincie Mechelen voorgevallen. » On trouve dans ce livre une traduction flamande de la charte de Pepin. 24 MÉMOIRE siècles, de l’aspect sauvage que devait présenter cette province , même plus d’un siècle après l'expulsion des Romains; il ne doit donc pas paraitre étrange qu’à la même époque, les bois, qui couvraient le territoire de Malines et qui portaient le nom de Waverwald , étaient infestés par des loups. Ces animaux étaient si nombreux dans les Gaules du temps de Charlemagne, que cet empereur ordonna , en 813, que chaque chef de canton (vicarius) eût à entretenir deux louvetiers*. Cependant méme à la fin du XI siècle, les loups infestaient encore tout le pays de Waes, et particulièrement le lieu où fut bâtie l'abbaye de Baudeloo , fondée en 1197, au milieu d’une contrée déserte du pays de Waes *. Suivant la légende de sainte Dymphne et de saint Gerbert, toute l’é- tendue de pays entre Anvers et Gheel n’était, au VIT: siècle, qu'un désert, et ce bourg, comptant, de nos jours, plus de 6000 âmes, ne formait alors qu'un hameau de quinze chétives cabanes. Le pays en- vironnant, dans une étendue de six milles, était entièrement inhabité 1 Le Waverwald s’étendait proprement entre la grande et la petite Nèthe. L'empereur Henrill, dit dans une charte de l'an 1008 : «Notum sit qualiter vos. bannum nostrum bestiarum Baldrico » sanctæ Leodiensis ecclesiæ præsuli necnon Baldrico comiti super eorum proprias sylvas, » quæ sunt inter illa duo flumina quæ ambo Nithe vocantur et tertium quod Thila nominatur , » sitæ, et quæ pertinent ad illas villas Heiste et Heisten, ac Badfrido necnon Maclines nomi- » natas, quod tamen totum Wavrewald apellatur , in comitatu Gotizonis comitis, qui Antwerf » dicitur, situm, per hne nostram præceptalem paginam concedimus, etc. (Chapeauville , » Gesta pontificum Leodiens., tom. I.)» 2 «Ut vicarii luparios habeant unusquisque ministerio duos (capitul. 158.)» 3 On lit dans la vie de Baudouin de Bocle, fondateur de l’abbaye de Baudeloo : «Postea vero » cum ab Anglia esset reversus : et quodam tempore eremum inter Wasiam et Hacteyelde » jacentem per devia silvestria et nemorosa , quorum copia tunc temporis ibidem habebatur » maxima, perlustrasset, ad locum in quo nunc monasterium de Baudelo situm est, pervenit.… » Cum ad tantum pervenisset augmentum quod tres haberent (#onachi) capreas, pascuis eas » immittens, dominicæ curæ et custodiæ commendabat, præ timore luporum quorum magna ». multitudo tune temporis ibidem habebatur (vita MS. Balduini de Bocla, apud Sanderum Flan- » dria illustr., Gb. IX.)» L'abbé Baudouin avait coutume de sortir de nuit du monastère pour vaquer à la prière; les moines lui témoignèrent la crainte qu’il ne fût dévoré par les loups rôdant toutes les nuits en grand nombre autour du couvent : «Cum tot lupi hic sunt quod » fere singulis noctibus circa ædificium nostrum currentes et ululantes, vix nos intactos reli- » quant, miror cur de nocte ita per nemora incedere intendens, etc. » SUR LES DOCUMENS DU MOYEN AGE. 25 et inculte. Anvers n’y est désigné que comme un hameau sans im- portance ‘. La légende de saint Liévin, apôtre des Nerviens, nous donne quel- ques détails sur le Brabant, au VII: siècle, L'auteur de cette légende, qui n’est point saint Boniface, comme l'ont cru quelques savans, mais un anonyme du XIe siècle, fait une peinture très-agréable du Pagus Bracbantensis, beaucoup plus étendu que le Brabant actuel. On serait porté à croire que cet écrivain n’a composé ce tableau que d’imagina- tion, ou d’après l’aspect que présentait cette contrée à l’époque où il vivait; car saint Liévin lui-même, dans une lettre adressée à Florbert, parle d’une manière bien différente du Brabant, dont il fait passer les habitans pour des barbares plongés dans les ténèbres du paganisme *. Plusieurs autres documens nous prouvent que les paroles de saint Liévin méritent ici plus de foi que celles de l’auteur de la légende. Les légendes de sainte Gertrude, de saint Trond, de saint Vindicien et de saint Gomaire, attestent que l’existence de Nivelles, de St-Trond, de Bruxelles et de Lierre, est prostérieure au VITE siècle, et que l’empla- cement de ces villes était encore couvert de bois à cette époque; par conséquent que ce qu’on trouve dans les chroniqueurs du moyen âge sur la haute antiquité de plusieurs de ces villes, est absolument fa- buleux *. 1 «.. Cœptum iter iterum repetentes (ex Antverpia loco) viarum ac nemorum dilatatam per » solitudinem gradientes, sub celeritate ad villam cui Ghele est nomen,venerunt...excolebatur » autem tunc temporis locus ille raro inhabitatore, tantummodo quindecim hospitiis, veprium- » que densitate refertus , fere per sex millia dilatando arborum nemora magnitudine præstans » erat…… locum simul a spinarum aculeis et nocivis arboribus, emundantes prope dictam basi- » Jicam parvum habitaculum construxere (in pago hodierno Zammalia). (Petri canonici vita Stæ » Dymphnæ et St. Gereb. Acta SS. Belgii, tom. V , p. 314.)» 2 Impia barbarico gens exagitata tumulu, Hic Brabanta furit meque cruenta petit, etc. ( Mabillon, Acta SS. ord Bened.,t. IX, p. 314.) 3 Lorsque saint Bernard fonda l’abbaye de Villers , toute l’étendu de pays entre ce monastère et la ville de Nivelles ,quien est éloignée de deux lieues , était couverte de bois et inculte : «Erat- » que tunc quasi tota terra circumjacens fere usque ad Nivellam, invia, silvestris et nemorosa. » (Historia Monast. Villar., apud Martene et Durand Thesaurus novus anecdot. , tom. JIL.)» Dans une charte de l’empereur Henri III, de l'an 1041, les Nivellois sont qualifiés de gens fe- Tou. XII. 4 26 MÉMOIRE La dernière légende qui nous reste ici à examiner, est celle de saint Lambert, évêqne de Liége et apôtre des Toxandres,au VII: siècle, légende qui fut écrite vers 1120, par Nicolas, chanoine de Liége. De toutes les vies de saints, c’est celle qui renferme les faits les plus im- portans pour notre question. Dans le chapitre IV de cette légende, on lit d’abord que, lorsque le corps de saint Trond, évêque de Spire, fut transféré à Liége par saint Lambert, cette ville ne formait qu’un ignoble village (ignobalis vicus), et que Tongres, ruée parles Huns, deux siècles auparavant, ne contenait encore qu'un petit nombre d’habitans, qui étaient venus s'établir au milieu des débris de cette cité naguère riche et florissante *. Le chapitre VIE nous apprend que l'emplacement de la ville de rox et duræ cervicis. Le pape Léon IX, dans une bulle de lan 1141, ne parle pas plus avanta- geusement des habitans de Nivelles : « Juxta confinium quo Lotharingi junguntur Francigenis est » abbatia quædam sita, Nivella silicet, sanctæ Gertrudis virginis, terrarum quidem aflluens copüs, » sed miserrime perdita rabie indomitæ gentis. (Mirœi notitia eccles. CG. XXVII et XXVIIL. ) » On lit dans la légende de saint Vindicien, évèque de Cambrai et d'Arras: «Cum contigit eum » in quoddam diocesis suæ territorium quod Brosella dicitur devenire.….. ubi cum aliquandiu » decubuisset spiritum cœleste paradiso feliciter reddidit. (4cta SS. Belgii, t. UE, p.330 et331.)n Si Bruxelles, comme le prétendent quelques auteurs, est le Brosella où mourut saint Vindicien , en 695, cette ville ne pouvait être, à cette époque, qu’un simple hameau; mais il existe un endroit du même nom dans l’Artois, et par conséquent on est incertain lequel des deux fut témoin de la mort de saint Vindicien, évêque de Cambrai et d'Arras. Au X° siècle Bruxelles était encore renfermée dans la petite île de S'-Géry et au XIF siècle, le forêt de Soigne, s'étendait jusqu’au parc et couvrait l'emplacement entier de la ville haute et des faubourg de Namur et de Louvain. (L’abbe Mann, Æist. de Bruxelles, t. W, p.31.) . Les bords de la Senne étaient au VIE siècle et plus tard, couverts de boïs et de marais. Tel était, en particulier, l'emplacement du village de Dilbeek , vers l'an 640 : « Qui locus (Dilbeek) » juxta Sainam fluvium situs, ipsam contra gentilium incursus duplici valebat tuitione , » tum opaca silvarum densitate, tum copiosa aquarum inundatione. (Vüta sanclæ Alenæ apud » Boland. jan., tom. INT, p. 389. )» 1 «Relatum itaque tam sacratissimum pignus non sine magna exequiorum pompa sepelivit ; » quoque tumulo honoravit villamLegiam, tune quidem ignobilem vicum, nunc vero totius » hujus regionis caput, principatus domicilium. Eo siquidem tempore Tungrorum civitas » ab Hunnis jam pridem funditus eversa, evolutis ab excidio suo plusquam ducentis annis, » vix à paucis inhabitabatur , cunctaque suæ antiquæ nobilitatis et claritatis insignia , vasti- » tatis et solitudinis ipsius magnitudo obliteraverat : solum vero pontificalis cathedræ reti- » nebat dignitatem. (Boland., septemb., tom. V, p. 608. Chapeaville, Gesta pontif. Tun- » grens. elc., tom. [.)» SUR LES DOCUMENS DU MOYEN AGE. 27 Stavelot était au VII: siècle désert, inhabité et faisait partie de la forêt des Ardennes ”. Les chapitres X et XI sont surtout du plus grand intérêt pour notre question, en ce qu’ils renferment des détails précieux sur les mœurs des Toxandres, peuple ancien qui habitait la Campine. Pline et Ammien Marcellin, sont les seuls, parmi les écrivains anciens, qui aient fait mention des Toxandres, sans nous instruire de la moindre particularité relative à cette peuplade, que César n’a point connue, et qui ne vint probablement se fixer en Belgique que sous le règne d’Auguste. La légende de saint Lambert nous fait connaitre qu’au VII: siècle, la Toxandrie était une contrée couverte de bois et de marais, que ses babitans, encore plongés dans les plus épaisses ténèbres du paganisme, continuaient à vivre à la manière des anciens Germains, dont ils étaient issus, et n’habitaient que des villages épars : ils étaient réputés tellement sauvages et féroces, qu'avant saint Lambert, aucun missionnaire nw’a- vait osé pénétrer jusqu’à eux . Leur langue était le teuton *. Saint Lambert parvint à les convertir eux et les peuples voisins qui habi- taient près de l’embouchure de la Meuse et du Vahal *. 1 «Hic siquidem locus inter vastos et confragosos Ardennæ saltus, nulli tune humanæ habi- » tationi habilis, squallidus horrebat; sterili et emoriente terra, non sesibus, non pomiferis » arboribus apta, non alendis pecoribus grata , non commerciis quæstuosa , qu , exceptis ali- » quot rivorum seu pontium irrigationibus , horribiliorem non incoluerunt Paulus vel Antho- » nius eremi solitudinem. » 2 «Regio cui Toxandria nomen est quæ a Trajectensi versus septentrionalem vix tribus millia- » ribus disparatur , necdum evangelica gratia prædicationis cognita, idolatriæ cultu sordebat. » Hæc siquidem regio vastis et fere continuis paludibus obsita et ne finitimis quidem aliquo » commercii jure tunc satis et nota et pervia, multiludinem agrestis populi in se continebat, » cujus mores barbaros ipsa etiam solitudo et superstitio efferaverat. Hanc constanter in- » gressus est veritatis prædicator Lambertus, et quia incolæ repionis illius non continebantur » civitatibus sed pluribus et sparsis vicis inhabitabant, fana eorum in quibus frequentes et » celebres conventus habebant, intrepidus expetebat, prædicans et annuntians verbum, etc. » (Vita sancti Lamberti, autore Nicolao canonico ; Boland., sept., tom. V, p. 609.)» 3 «Tunc beatus Lambertus qui reuronicz LNGux peritus erat, et sine interprète sermone » conferebat, cœpit eis retexere humanæ creationis et prævaricationis originem , etc. (Ibid.) » # «Descendit evangelicæ prædicationis gratia ad populos Toxandriæ finitimos : quo fluvius » Mosa Rheni fluminis aquis infectus et tumidus, jamque se ipso major , fontique suo per om- 28 MÉMOIRE Le chapitre XVI contient encore une description fort remarquable de Liége, tel que ce lieu était du temps de saint Monalphe et sous l'épis- copat de saint Lambert : alors ce n’était qu’un pauvre hameau situé au milieu d’une vaste solitude *. Nous venons d'examiner toutes les légendes des VIe, VIe et VIII siècles, qui peuvent répandre quelque jour sur une des époques les plus obscures de notre histoire, celle de la Belgique sous la domination romaine. Les légendes nous ont fait connaitre plusieurs endroits exi- stant en Belgique avant le VIe siècle, et sur lesquels les auteurs anciens ont gardé le plus strict silence; d’un autre côté, elles nous ont appris que ce que quelques chroniqueurs du moyen âge rapportent de l’an- tiquité de plusieurs de nos villes actuelles, est absolument fabuleux, puisqu’aux VIle et VITT: siècles, ces villes n’existaient point encore ou n'étaient que des hameaux à peine connus de nom. Nous y avons vu qu’à cette époque, les habitans de la Belgique étaient encore livrés à toutes les superstitions du paganisme, malgré » nia dissimilis, non longe a mari Anglico, Toxandros et cæteros ejusdem regionis accolas, à » Frisonibus dividit.» Le témoignage de Stephilinus, auteur d’une relation des miracles de saint Trond , prouve qu'il n’y a rien d’exagéré dans le sombre tableau que trace de la Toxandrie l’auteur de la vie de saint Lambert ; il nous apprend que, du temps de saint Trond, au VIP siècle, cette contrée était pres- qu’entièrement inhabitable et servait de repaire à une foule de brigands : « In supradicto pago » Campania est late patentibus campis, solis ardore exusta et nullis humani neootii usibus » apta, sed solummodo latronum scrobibus plena, de quibus à longe perspicaci intuitu eorum, » nullis divinæ creationis obstantibus, facillime possunt deprehendi itinerantes, ete. (Stephi- » linus, de miraculis sancti Trudonis. Acta SS. Belgii, tom. V , p. 56.)» On lit à peu près la » même chose dans la vie de saint Evremare. » 1 «Eodem etiam tempore , morabatur sacerdos Lambertus in viculo (Legia), qui in valle situs, » inter opaca nemorum, inter ardua montium, fontibus et fluviolis per prona decurentibus , » valde erat delectabilis et irriguus. Hunc ergo locum vir Dei Lambertus valde diligebat et » frequentabat, ut illic orationi aut lectioni vacaret, inhabitabat ; quia tune temporis adeo erat » invius et solitarius, ut quamdam eremi videretur habere similitudinem. Nam ab occidentali et septentrionali plaga montibus et sylvis maximis claudebatur , meridianam vero partem, » Mosa fluvio, reducto et curvato paulatim sinu, ambiens, inaccessibilem faciebat, sed qua » orientem spectat adiri facilius poterat, montanis à Mosa aliquantulum recedentibus seseque » juxta ejus ripam quinque ferè millibus Trajectum , in directam et speciosam longitudinem » clementer extendentibus. » SUR LES DOCUMENS DU ‘MOYEN AGE. 29 les édits sévères des empereurs chrétiens et des rois francs, contre le culte des idoles; que leurs mœurs et leur manière de vivre, sur- tout celles des Toxandres, étaient presqu’en tout conformes à celles des Germains, décrites par Tacite ; enfin que les parties de la Belgique les plus peuplées et les mieux cultivées de nos jours, étaient alors couvertes d’épaisses forêts, incultes, désertes et infestées par des animaux sauvages qu'on ne trouve guère aujourd’hui que dans les pays les moins habités. Tout cela joint au silence des auteurs anciens et au petit nombre d’établissemens romains dans la Belgique *, semble prouver que notre patrie, comme beaucoup d’autres provinces de l'empire * fut fort négligée par les Romains, et que ses habitans, en vrais Germains, restèrent opiniätrément attachés aux mœurs de leurs pères * et n’éprouvèrent guère l'influence de la civilisation romaine. Certes, si la Belgique avait atteint, sous la domination Romaine, un haut degré de splendeur et de civilisation, comme l’ont avancé quelques écrivains modernes, elle n’aurait pu retomber sitôt dans la 1 On ne connaît , pendant la domination romaine , que deux villes dans la Belgique actuelle : Tongres et Tournai ; les autres endroits mentionnés sur la carte de Peutinger et dans l'itinéraire d’Antonin , n'étaient que des relais de poste , des villages et des forts. Aucune de nos grandes villes n’existait alors. Ainsi la Belgique, à l’époque romaine, ne contenait pas une ville sur 800 lieues carrées , au lieu que, dans le reste de Gaules, on en trouvait une sur environ 235 lieues carrées. L'Helvétie, qui ne comptait que 336,000 âmes lors de la conquête de César , et qui perdit par cet événement les deux tiers de sa population , possédait néanmoins, au commence- ment du V® siècle, jusqu’à neuf villes ou lieux réputés tels dans la notice des Gaules. La Pron- vence et le Dauphiné (la Provincia romana), quoique moins étendus que la Belgique, en ren- fermaient jusqu'à vingt-trois.. On pourra juger, par ce fait seul, combien la Belgique fut négligée par les Romains en comparaison du reste des Gaules. (Voyez la Notitia provinciarum et civitatum Galliæ. ) 2 L'état de la Bretagne, de l'Albanie, d’une partie de la Mauritanie , de la Pamphylie, des parties montagneuses de l’Helvétie et de la Norique, sous la domination romaine , prouve que les Romains n’introduisirent pas leur civilisation partout où s’étendit leur domination. ( Voyez Latour d'Auvergne, Origines Gauloises, chap. VIII; Mannert, Geographie des Griechen und Rômern ; Plin., Hist, nat.; Pomponius Mela, Procop., Bellum Vandal., etc., etc.) 3 «Treviri et Nervii circa affectationem germanicæ originis ultro ambitiosi sunt, tanquam per hanc gloriam sanguinis , a similitudine et inertia Gallorum separeruntur (Tacit., Mor. Germ. c. XXVIIL.) Sic instituere majores ,» dit Tacite en parlant des Germains, «posteri imitantur (ibid., c. XXXIL.)» « Mores nostros magis quam arma suspiciebant Germani. (Florus, lib. 4, ©. XII.) » 30 MÉMOIRE barbarie, et perdre entiérement en si peu de temps, tant et de si grands avantages, et elle se serait sans doute présentée sous un tout autre aspect que celui où elle nous apparaît un siècle après l'expul- sion des Romains. Enfin la Belgique se serait montrée telle qu’étaient encore aux VII et VII siècles, l'Italie, l'Espagne, le midi des Gaules et d’autres contrées où les Romains introduisirent leur civilisation, leurs arts et leur luxe. Un des documens les plus anciens et les plus intéressans du moyen âge pour la connaissance de l’ancienne religion des Belges, avant leur conversion au christianisme, sont les actes du concile de Leptines (aujourd’hui le village des Estines près de Binche), tenu l’an 743. Ces actes portant le titre de Zndiculus superstitionum et paganiarum , contiennent, en trente paragraphes, l’indication et la prohibition des pratiques superstitieuses de l’idolàtrie auxquelles les Belges nouvelle- ment convertis n'avaient point encore renoncé. On y reconnaît par tout le paganisme des peuples du nord, mais nulle part celui des Romains. C’est encore là une preuve nouvelle que ces derniers ne parvinrent pas à faire changer les Belges de mœurs et de manière de vivre aussi facilement que les autres peuples des Gaules. Nous n’entrerons pas dans des détails sur l’/ndiculus, ce document curieux ayant déjà été savamment commenté par Des Roches, dans son mémoire sur la reli- gion des peuples de l’ancienne Belgique ”. Ravennatis anonymi Geographia *. L'auteur de cette géographie, vulgairement connu sous le nom de l’'anonyme de Ravenne, vivait non au VIe siècle, comme l'ont avancé plusieurs auteurs, mais au VIII. C'était très-probablement un prêtre de Ravenne portant le nom de Gui de Ravenne, comme l’a assez bien prouvé le célèbre Muratori. Sa géographie n’est qu'une misérable compilation, sans choix ni discer- l Anciens mémoires de l’académie de Bruxelles , t. I. Eckhart, Keysler (Antiquitates septentrionales ), Meinders ( Antiquitates Saxvoniæ et Franciæ) et Calvoer (Saxonia inferior), ont aussi donné de sayvans commentaires sur l’/ndiculus supersti- tionum et paganiarum. ? Edit. Abr. Gronovü, Lugd. Bat. , 1722, in-8°. SUR LES DOCUMENS DU MOYEN AGE. 31 nement, et dans laquelle l’auteur confond pêle-mêle les noms des villes et des peuples anciens avec ceux du moyen âge. Les prétendus philosophes goths et autres, qu'il dit lui avoir servi de sources pour la composition de son ouvrage, sont des êtres fabuleux ou plutôt des géographes anciens, tels que Mela , Pline, Ptolomée, l'auteur de liti- néraire d’Antonin, etc., dont l’anonyme a travesti les noms. Au reste la compilation de l’anonyme de Ravenne ne nous apprend rien de nou- veau sur la géographie de la Belgique, à l’époque romaine. Les villes qu'il place en Belgique, sont Nasogne, Dinant, Hui, Namur, Maestricht”. Nous ne connaissons que trois ouvrages écrits au IXe siècle, qui nocumensdutxe siècle. renferment des faits relatifs à notre question : ce sont la chronique d’Adon, celle de Moissac et la Collectio historica-chronographica *. La chronique d’Adon contient une histoire abrégée des Francs jusqu’à la fin du règne de Louis-le-Débonnaire *. Ce que cet ouvrage nous apprend sur l’état de la Belgique, avant et durant la domination romaine, se borne à peu de faits. À l’an du monde 4754, Adon décrit la conquête des Gaules par César, mais sa relation est uniquement extraite des commentaires de . ce dernier. À l’an 375 après Jésus-Christ, Adon rapporte cette fable répétée par tous les chroniqueurs du moyen âge, que les Francs établis entre le Danube et les Palus Méotides, auraient aidé les Romains à vaincre les Allemands, sous le règne de Valentinien et de Valens; que, peu de temps après , ayant refusé d’acquitter le tribut annuel, qu’ils s’é- taient engagés à payer aux Romains, ceux-ci marchèrent contre eux, les défirent et les obligèrent à évacuer la Sicambrie ; qu’ils émigrèrent alors sur les bords du Rhin où ils habitèérent quelque années, gou- vernés par Marcomir et Sunnon; qu’ensuite ils se donnérent des rois, 1 Nasagu, Dinantis, Oin, Namon, Trega (lib. IV, e. XXVI.) 2 Les deux premiers de ces ouvages se trouvent imprimés dans la collection des historiens de France , par Dom Bouquet , et dans celle de Duchesne ; le troisième a été publié par Canisius , Lectiones antique , tom. If, édit, de Basnage. 3 Fabricii bibl. lat, ant., tom. I, art. 4do. 32 MÉMOIRE dont le premier fut Pharamond, et qu’ils formèrent un code de lois (la loi salique). Selon Adon, les Francs reçurent leur nom de Valentinien, qui le composa d’un mot grec qui signifie féroce‘. Sous l’année 379, Adon parle de la conquête de la Belgique par Clodion. C’est de Grégoire de Tours qu'il a tiré le récit de cet événement ; mais il a mal copié cet auteur : car, suivant Grégoire de Tours, le château de Dysparqum et non Dysporum, comme l'écrit Adon, était placé à gauche du Rhin; Adon le fixe à droite de ce fleuve. De là lincertitude et les conjectures des savans sur l’emplacement de ce lieu. Tout ce qui se trouve de relatif à notre question dans la chronique d’Adon, se réduit à ce que nous venons d’analyser. La chronique de Moissac * ne contient qu’un seul fait qui se rap- porte à l’histoire de la Belgique, avant la conquête des Francs et leur établissement dans ce pays, c’est l’histoire fabuleuse de l’origine et des premières émigrations des Francs : le tout est tiré de la chronique de Fredégaire, qui lui-même n’a fait que copier Grégoire de Tours. Ce pas- sage ne nous apprend donc rien de neuf. La chronique qui a pour titre Collectio historica chronographica”, fut écrite par un auteur anonyme, sous le règne de Charlemagne. C’est une compilation tirée d’Idace et de quelques autres annalistes. Dans les chapitres IV et V du livre II de cet ouvrage, il est parlé de l'origine des Frances. Leur premier roi fut, selon cette chronique, Priam , roi de Troye, auquel succéda Friga. Dans la suite les Francs formèrent deux corps de nation, dont l’un s'établit en Macédonie (Macédoine) et y prit le nom de Macédoniens ; le second corps après avoir erré long-temps sans avoir de demeure fixe, se choisit un roi nommé Francion, dont dérive le 1 L’orateur Libanus dérive le nom des Francs du grec fractoi, fortifiés. Isidore de Séville en attribue l’origine à un prétendu roi Franco (Origin. 1. IX). Ces étymologies, comme celle qui se trouve dans l'ouvrage d’Adon, sont aussi invraisemblables les unes que les autres. Le mot franc, dénomination qui fut prise par la ligue germanique formée contre les Romains , vers le mi- lieu du IF siècle, se traduit plus naturellement par liber ou fæderatus. 2 Duchesne , tom. II, Fabricii bibl. lat., tom. V, art. Moissacense chron. * Elle a été publiée par Canisius, Lectiones Antiquæ , tom. II, édit. de Basnage. SUR LES DOCUMENS DU MOYEN AGE. 33 nom de Francs. Ces Francs furent en guerre avec plusieurs peuples de l'Asie, et finirent par s'établir entre le Rhin, la mer et le Danube. Après la mort de Francion, les Francs obéirent à plusieurs chefs, jus- qu'à ce que le grand Pompée les rendit sujets des Romains avec le reste de la Germanie. Mais peu après, les Francs s'étant réunis aux Saxons , secouèrent le joug romain, et depuis lors ils conservérent toujours leur indépendance. Ce passage tout entier n’est qu'un tissu de fables, qui n’ont pas ombre de vraisemblance. Ce que Grégoire de Tours dit de lorigine des Francs a servi de base au récit de l’auteur de la Collectio historica; de même que la relation de l'expédition des Gaulois dans la Thrace, la Macédoine et l’Asie Mineure, décrite par Tite-Live, Polybe et Pausa- nias, événement que l’auteur de la Collectio historica a, par igno- rance, rapporté aux Francs en le dénaturant ”. On voit qu’à mesure qu’on avance dans les siècles du moyen âge, les vraies sources de l’histoire commencent à être négligées davantage, et que plus l'ignorance devenait grande, plus on devenait crédule et plus on aimait à se jeter dans le merveilleux. La saine critique ne peut s’al- lier qu’à une érudition aussi vaste qu'éclairée. La Collectio historica donne aux Francs pour premier roi, Priam, roi des Troyens. Grégoire de Tours, qui écrivait plus de trois siècles avant l’auteur de cette chronique, rapporte, d’après des historiens en-- core plus anciens, qu’on ne savait point quels furent les premiers rois des Francs. En effet, il est probable que la ligue franque, composée de plusieurs peuplades indépendantes les unes des autres, fut long-temps sans être soumise à un chef suprême , et que Clodion fut le premier roi qu’elle se choisit. Ce que l’auteur de la Collectio historica et d’autres chroniqueurs du moyen âge disent de Priam, roi des Troyens et pré- 1 L'auteur anonyme de la petite chronique intitulée : Gesta Francorum , avance que les Francs tirent leur origine de 12,000 Troyens qui se sauvèrent avec Priam et Anténor au sac de Troye. Si ce chroniqueur, comme le prétend Duchesne, vivait sous le règne de Thierri IF, à la fin du VIw®° ou au commencement du Vil”: siècle, il serait le plus ancien auteur qui eût rap- porté cette tradition fabuleuse sur l'origine des Francs. Mais plusieurs passages de sa chroni- que semblent prouver qu’il vivait à une époque moins reculée. Ton. XII. 5 34 MÉMOIRE tendu roi des Francs, n’est qu’une fable entièrement controuvée. Au reste, cette tradition d’une origine troyenne est très-ancienne : déjà, du temps de Lucain, les peuples de l'Auvergne se prétendaient issus des Troyens ”. Tacite rapporte que, de son temps, on racontait qu'U- lysse, dans sa course vagabonde, était venu jusqu'à un lieu appelé Asciburgium, sur les bords du Rhin, et qu'on avait trouvé, sur les confins de la Germanie et de la Rhétie, un autel élevé à ce prince et à son père Laërte, et quelques tombeaux sur lesquels se lisaient des inscriptions grecques *. Rien ne nous empêche de croire que ces tradi- tions fabuleuses n’aient pris leur origine qu’à l’époque de la domination romaine, au moins dans la Belgique et le nord des Gaules. Nous osons même supposer que la lecture des poèmes de Virgile n’a pas peu con- tribué à multiplier toutes les fables que les chroniqueurs du moyen àge ont débitées sur notre histoire ancienne et sur ces prétendus rois de Tongres issus des Troyens. La renommée de Virgile était si populaire au moyen âge, que, dans le midi de l'Italie, le nom du poète figurait comme celui d’un sorcier incomparable, qui avait fait non moins de prodiges qu’'Hercule *. Ses poèmes étaient la lecture favorite des let- trés, et servaient de livre classique dans toutes les écoles, tandis que les ouvrages des grands historiens de l'antiquité étaient rarement ! Arvernique ausi Latio se fingere fratres. Sanguine ab Iliaco populo. (Lucan, Phars., 1.1, v. 427). Voyez aussi Plin., ist. nat., lib. IV, c. XXXIII. Sidon. Apol., lib. VIT, epist. 7. Silius Ital., lib. IL, v. 420. 2 « Ceterum et Ulyssem quidam opinantur longo illo et fabuloso errore in hune oceanum de- » latum, adisse Germaniæ terras ; Asciburgiumque quod hodieque incolitur, ab illo constitutum nominatumque et tumulos quosdam græcis lilteris inscriptos in confinio Germaniæ Rhætiæ- que adhuc stare : quæ neque confirmare argumentis, neque refellere in animo est; ex ingenio suo quisque demat vel addat fidem. Tacit., Mor. Germ., e. XII. » 8 Voir Nodat, Æist. des grands hommes accusés de magie. Le livre du moyen âge dans lequel il a été débité les fables les plus étranges sur Virgile, est un petit roman francais écrit au XV° siècle, ayant pour titre Faits merveilleux de Virgile. Ce poète y est représenté comme un en- chanteur, fils d’un chevalier des Ardennes et né à Rome sous le règne de Numa-Pompilius. On trouve une analyse de ce roman le plus plat eten même tempsle plus extraordinaire de tous les romans composés au XVe siècle, dans les Mélanges tirés d’une grande bibliothèque , par le marquis de Paulmy, 2° partie, lettre 4, p. 185. SUR LES DOCUMENS DU MOYEN AGE. 39 consultés , et restaient enfouis et oubliés au fond des cloiîtres. Il n’est donc pas étonnant que les événemens de la guerre de Troye, tels qu'ils sont racontés par ce poète, n’influassent considérablement sur l’imagi- nation de chroniqueurs qui n’avaient aucune connaissance des vraies sources de l’histoire, et que leur ignorance, et l’amour du merveilleux, qui en est la conséquence, ne leur fissent adopter avidement et sans examen les fables les plus étranges et les plus absurdes, par lesquelles ils croyaient illustrer l’origine de leur nation. Des historiens anciens du plus grand mérite, Tite-Live par exemple, ont eux-mêmes donné dans cet écart, lorsqu'ils manquaient de documens authentiques sur les époques les plus reculées de l’histoire grecque ou romaine. Après ce que nous venons de dire, il serait inutile de réfuter les fa- bles que l’auteur de la Collectio historica débite sur l’origine des Ma- cédoniens , sur le prétendu roi Francion et la conquête de la Germanie par Pompée, à une époque où la Germanie était à peine connue de nom par les Romains. La saine critique a depuis long-temps fait justice de ces faits apocryphes, qui ne se trouvent point rapportés dans des ouvrages antérieurs au IXme siècle ”. Passons à l'examen des ouvrages du Xe siècle, qui contiennent des documens relatifs à l’état de la Belgique avant et durant la domina- tion romaine. Nous ne connaissons que deux écrits de ce siècle qui renferment des faits de cette nature. Ce sont la chronique d’Aimoin, intitulée : Gesta Francorum , et l'histoire des évêques de Tongres, de Maestricht et de Liége, par Hariger. Quoique Aimoin * entre dans de détails assez amples sur l’état ancien des Gaules, il ne nous apprend rien de neuf, parce qu’il n’a fait que co- 1 Ce qu'on trouve sur l'origine des Francs dans la vie de saint Remi par Hincmar et dans une ancienne vie de Sigebert IL, fils de Dagobert, est conforme à ce qu’en disent Frédegaire et la chronique de Moissac; par conséquent il est inutile d'entrer dans des détails sur ce sujet. (Ces deux légendes sont imprimées dans le tom, I de la collection du Duchesne). 2 Voir sur cet auteur Vossius De Histor. Latin., lib. IL, c. XXXIV. Fabricius, Babl. lat., t. 1, art. Amorxus, La chronique d’Aimoin est imprimée dans les collections de Duchesne et de Dom Bouquet , t. III. Documens du Xme siècle, 36 MÉMOIRE pier César , Pline et Orose. Dans le chapitre premier de l’introduction de sa chronique, il trace la division géographique de la Germanie , d’a- près ces deux derniers écrivains, et donne la description du cours du Rhin, de la forêt Hercynienne et des mœurs des Germains, copiée litté- ralement de César; les chapitres IT et TITI renferment la description des animaux sauvages de la forêt Hercynienne et celle des usages et de la manière de vivre des Germains, également extraite de LR Dans le chapitre IV, il trace la division des Gaules d’ après Orose. Le chapitre V est consacré au même sujet; l’auteur y ajoute la nomenclature des principales villes de la Gaule. Dans la Belgique (actuelle) il ne nomme que Tongres. Il donne à l'ile des Bataves le nom de Battua, le Bettau actuel * : c’est laplus ancienne mention qu’on trouve du Bettau dans des documens écrits. Les chapitres VE, VIT et VII traitent de l’origine , du culte et des mœurs des Gaulois d’après César, Tacite et Orose. Dans les chapi- tres T, IT et IIT du livre premier de sa chronique, Aimoin parle de lo- rigine et des émigrations des Francs, qw’il fait descendre des Troyens qu'Anténor conduisit dans la Pannonie où il fonda la ville de Sicam- bria *. Il rapporte l'opinion qui attribue à Valentinien la dénomination des Francs et celle qui la fait dériver du nom d’un prétendu roi Fran- cion. Ce qu'Aimoin raconte à ce sujet n’est qu'une fable inepte. Au reste Aimoin n’a fait, pour ainsi dire, que copier Adon et l’auteur de la Collectio historica , dont il a été question plus haut. Dans le cha- pitre V, il parle de la conquête de la Belgique par Clodion, et place, comme Adon, le château de Dispargum à droite du Rhin. Le chapitre VItraite de l'invasion des Huns dans les Gaules. Parmi les lieux qui di ; 1 «Scaldus, matrona atque Mosa profluens ex monte Wosepo, qui est in finibus lingonum et » parte quadam ex Rheno recepta quæ appellatur Vaccalus, vulso autem dicitur Vabalis, insu- » Jam eficit Batavorum, quæ rustico sermone vocatur Battua. » 2? Quelques chroniqueurs rapportent que Charlemagne, re avoir vaincu les Avares qui habitaient au VIII® siècle la Hongrie ou l’ancienne Pannonie , s’empara de leur capitale appelée Sicambria. Si Sicambria n’est pas un nom supposé, comme il est probable, on pourrait croire que ce sont les historiens de Charlemagne, qui, les premiers, ont imaginé d'attribuer aux Francs l’origine de cette prétendue ville FE Sicambria. SUR LES DOCUMENS DU MOYEN AGE. 37 furent dévastés par ces barbares, Aimoin n'oublie point le territoire de Tongres ‘. Le reste de la chronique d’Aimoin ne renferme que des faits entièrement étrangers à notre matière. L'histoire des évéques de Liége par Hariger, continuée par le chanoine Anselme et commentée par Gilles d'Orval”, est un des ou- vrages du moyen àge qui renferme le plus de documens sur l’histoire ancienne de la Belgique, principalement sur l’histoire ecclésiastique et sur l’état politique de ce pays. Mais, de même que dans la plupart des ouvrages historiques de ces temps, les faits y sont souvent dénaturés par des fables ; ce n’est qu’en usant d’une saine critique qu’on y pourra distinguer le vrai du faux. Hariger, comme nous l’avons déjà dit ailleurs, vivait sous le règne de l’empereur Othon IIT, vers l’an 890. Le chanoine Anselme écrivait en- viron 50 ans après Hariger la continuation de l’histoire des évêques de Liége, depuis l’évêque Théodard jusqu’à Wason, cinquante-deuxième évêque de Liége. Gilles d’'Orval, commentateur de ces deux écrivains, florissait vers l'an 1240. Quoique, dans ce Mémoire, nous tàchions, autant que possible, de suivre l’ordre chronologique dans l’examen des auteurs du moyen âge dont les ouvrages offrent des faits relatifs à la Belgique avant et durant la domination des Romains, nous réunirons ici les écrits de ces trois au- teurs qui vivaient à des époques assez éloignées l’une de l’autre, parce qu’ils forment un seul tout, un ouvrage suivi qui ne peut être divisé. Les quatre premiers chapitres de l’histoire des évêques de Tongres et de Liége par Hariger, sont entièrement étrangers à notre matière. Dans le chapitre V, il est question de la mission de saint Euchaire, de saint Valère et de saint Materne à Trèves, où ils allèrent précher la foi par ordre de lapôtre saint Pierre, le premier en qualité d’évéque, le second comme diacre et le troisième en qualité de sous-diacre. Marianus Scotus fixe à l’an 54 après Jésus-Christ la mission de 1 Tungrense devastant territorium. 2 « Apud Chapeauville, Gesta pontificum Tungrensium, Trajectensium et Leodiensium, t. DetIL. » 38 MÉMOIRE saint Euchaire, de saint Valère et de saint Materne. Le vénérable Bede, Usuardus, Adon (Martyrologium) et Grégoire de Tours (Vitæ patrum) font aussi mention de ces saints. Cependant plusieurs savans agiolo- gues, tels que Papenbroch, Henschenius et Ghesquière, ont élevé des doutes sur plusieurs circonstances de leur apostolat, et les critiques les plus savans et les plus judicieux sont tombés d'accord que la mission de saint Materne et de ses compagnons n’eut lieu que sous le règne de Constantin. L’historien devra donc user d’une saine critique pour tout ce qui se trouve dans Pouvrage d'Hariger sur ce sujet. Le chapitre VI ne renferme aucun fait qui se rapporte à la Belgique. Chapitre VIL Les trois missionnaires vont précher la foi à Trèves, à Cologne et à Tongres ; cujus , dit Hariger, en nommant cette dernière ville, Plinius secundus, qui temporibus Trajani Auqusti quadrin- gentis ante ejus subversionem annis claruit in libro de Natura aqua- rum mentionem facit in hœc verba : Tungris, etc. Suit ici le célèbre passage de Pline sur la fontaine minérale de Tongres; passage qui a donné lieu à tant de conjectures *. Jæc est Octavia, continue Hariger, ob honorem Octaviani Augqusti, vel matris ejus sororis Julii Cæsaris qui primus Gallias romano subgeit imperio, et fertur Germania fuisse nominata. On ne trouve dans aucun auteur ancien que Tongres eût porté le nom d’Octavie, dénomination qui, suivant notre auteur, aurait été donnée à cette ville en honneur d’Octave Auguste ou de sa sœur Octavie. Tous les historiens et géographes romains qui ont fait mention de Tongres, donnent à cette ville le nom d’Afuatucum, Aduaca, Aduatuca Tongrorum ; de-plus, il est peu probable que Tongres exis- tât déjà du temps d’Auguste. Ptolemée, qui vivait sous le règne d’Ha- drien, est le premier auteur qui ait mentionné cette ville. ILest vrai que Pline parle de la cité des Tongrois (civitas Tungrorum) en décrivant la fontaine minérale , dont il est question plus haut ; mais du temps de 1 Chron., lib. IL. 2 Voyez le baron de Villanfagne, Recherches sur l’histoire de Liége, et l'Histoire de Spa, par le mème, Liége, 1803, 2 vol. in-8°. A4brégé de l’histoire de Spa, par J. B. L., Liége, 1818, in-12°. SUR LES DOCUMENS DU MOYEN AGE. 39 cet auteur le mot civifas était généralement employé pour désigner un peuple entier et non une ville ”. Il est probable que la ville de Tongres ne forma, pendant long-temps, qu’un camp, castra stativa , qui conti- nua à subsister sur emplacement de celui de Q. Titurius Sabinus et de L. Aurunculeius Cotta , lieutenans de César, defaits et exterminés avec la légion qu’ils commandaient, par les Éburons sous la conduite d’Am- biorix *. Ce camp, bâti très-solidement, comme nous l’apprend César, portait, suivant la plupart des éditions des commentaires de cet auteur, le nom d’Aduatuca, le même que celui que portait anciennement la ville de Tongres *. Peut-être Tongres faisait-elle dans l’origine partie des cinquante forts que Drusus bâtit ou répara sur les bords du Rhin et de la Meuse *. Ceux qui adopteraient l'opinion d’Hariger, que Tongres porta véritablement le nom d’Octavie, pourraieut dire que cette ville fut fondée par Auguste, lorsqu'il transféra les Tongrois sur le territoire des Éburons. Mais ce ne serait toujours là qu’une conjecture qui ne s’appuierait sur aucune preuve historique. Hariger prétend que Tongres porta encore le nom de Germania ; ne serait-ce pas le passage suivant de Tacite qui aurait donné lieu à cette fable : Cæterum Germaniæ vocabulum recens et nuper additum : quoniam qui primi Rhenum transgressi Gallos expulerint, wunc Tuxerr, rune GERMANI vocali sunt : ita nationis nomen in nomen gentis 1 « Cœtus hominum jure societateque civitas appellatur. » Cicer., de Repub., Cæsar, de Bell. Gall. Passim. De Fortia d'Urban, Tableau histor. et géogr. du monde, t. IN, p. 279. 2 Cæsar, L. V, c. XXVII-XXXVII. 3 Cæsar, Bel. Gal., Lib. VI, c. XXXII. Quelques MS des commentaires de César, mais en petit nombre, portent, au lieu d’Aduatuca , Varuta ou Vatuca et la paraphrase grecque Bzesuruy. Mais nous regardons ces variantes comme des fautes de copiste, L’Atuatuca Tungrorum n'est certainement point, comme l'ont cru quel- ques auteurs, l’oppidum où se réfugièrent les Atuatiques après la défaite des Nerviens. César ne donne nulle part le nom de cet oppidum, dont la situation était entièrement différente de celle de Tongres. Ceux qui prétendent , comme Ortelius, Divæus, Pontus Heuterus et l'abbé Mann, que l’Atuatuca Tungrorum était originairement un château construit par les Atuatiques pour tenir les Éburons en échec, n’allèguent, à l'appui de leur opinion , que des conjectures vagues et dénuées de toute preuve historique. 4 Florus, Res Romanæ, lib. IH, c. XII. 40 MÉMOIRE evaluisse paulatim , ut omnes, primum a victore ob metum, mox a se ipsis invento nomine Germani vocarentur ‘? Les chapitres VIIE, IX et X de l'ouvrage de Hariger ne renferment que le récit de plusieurs miracles opérés par saint Euchaire. Le chapitre XI contient la relation de la mort de saint Euchaire. Cet évêque occupa le siége de Tongres pendant 23 ans, et fut enterré avec solennité, dans une église hors de la ville, parce qu’il était encore dé- fendu alors de déposer les morts dans l’intérieur des cités. Le chapitre XIT traite de l’épiscopat de saint Valère, successeur de saint Euchaire. Cet évêque occupa le siége épiscopal pendant quinze ans avec tant de fruit, qu’on comptait déjà alors, dit Hariger, plus de chré- tiens que de païens dans les Gaules et la Germanie *. Il brilla par ses vertus et sa piété, et fut enterré , après sa mort , dans le même tombeau que saint Euchaire. Cette vie de saint Valère a été presque littéralement copiée de celle de cet évêque par Golscher, moine de St-Mathieu à Trèves *. Les chapitres XIIL et XIV contiennent l’histoire de l’épiscopat de saint Materne, successeur de saint Valère, qui convertit à la foi les habitans de Cologne et de Tongres, et fonda un grand nombre d’églises dans le diocèse de Cologne. Dans les additions de Gilles d'Orval au chapitre XIII de l’ouvrage d’Hariger, on lit le passage suivant, que nous transcrivons tout en- tier, parce qu’il renferme des détails fort curieux sur l’ancienne ville de Tongres et sur Maestricht : Cumque prædicando et ægrotos sanando 1 Tacit., Mor. Germ., c. II. Toute personne qui aura fait quelqu’étude de l’histoire ancienne, comprendra que , par ces termes, Tacite a voulu faire entendre que la dénomination de Germains était nouvelle (ce nom signifie selon les uns guerriers, hommes belliqueux, et selon d’autres étrangers), qu’elle fut donnée par les Belges-Gaulois aux hordes teutoniques qui envahirent leur territoire environ un siècle avant J.-C., et que, du temps de cet auteur, ce nom générique (nomen nationis) avait été changé en celui d’un seul peuple (nomen gentis), les Tongrois. La ville de Tongres n’est pour rien dans tout cela. (Poir Tacitus, Mores Germ., c. Il, édit, Oberlini). 2 « Ut jam tunc per Gallias et Germaniam christiani paganos et religione superarent et nu- mero, » 3 Surius, t. I. SUR LES DOCUMENS DU MOYEN AGE. 41 per villas et oppida, transiret Trajectum ; ubi, in strata publica quæ appellatur via regia, dedicavit ecclesiam in honore Domini salva- toris et apostolorum principis. Populo ad fidem exhortato, pervenit ad florentissimam sive nobilissimam civitatem Tungris, quam Tun- grus cum Persis primo incoluit…. Hæc Turingorum metropolis Francorum Tungris, quæ juxta præsagium B. Servatii coram Hunnis jussu Dei corruit, florentissima famossimaque erat ; ur- bium quippe Europæ fulgebat et Africæ quatuor inter maximas, Romam, Carthaginem, Numantiamque nobilitate nominis æqui- parans. Nam post subversionem Troyæ plures duces ad ipsam pertinentes, cum suis agminibus diversas partes orbis adierunt et firmas civitates condiderunt, et in hoc quantum robore suo value- runt, sequacibus ostenderunt. À quorum progenie ædificata est illa fomosissima civitas Tongrensis , que magnitudine ædificiorum Romæ vel Carthagini, ut supra diximus, similis videbatur..…. Appellata porro traditur Tongris quasi TUNDERIS se4 TU UNGERIS, eo quod a latere tunderetur oceani undis, vel quod tanquam pig- mentosis ungerelur terræ marisque copüs per mare sibi allatis. Monstratur verum esse quod de mare dicitur, quia tumuli are- narum et curvamina bi adhuc spectantur littorum. Queæritur autem a multis, quomodo vel quare mare quod ibi fluebat, disparuerit? Et multi inde multa loquuntur : sed nos ab- solute dicimus, quod ira Dei in ullionem malorum commodum maris et abundantiam rerum ab eodem loco abstulerit. Sicut autem ci- vitas Tungris, ita omnis regio Tungria, incolæ vero dicebantur Tungri. L'auteur parle des peines et des difficultés que le saint évêque es- suya avant de vaincre lobstination des habitans idolâtres : Damnatur, ajoute-t-il ensuite, cullura Jovis ac Veneris : extruitur templum B. Mariæ perpetuæ virginis ; emundantur delubra dæmonum. De- dicantur ecclesiæ sanctorum usque ad numerum septuaginta dua- rum congregationum ; sed et per suos epicopos plurimas fundavit ecclesias, inter quas eminet ecclesia B. Mariæ Hoyensis, ut teslatur Tou. XII. 6 42 MÉMOIRE Theoduinus Leodiensis episcopus , qui in ea requiescit; sed et in vita B. Servatii legimus quod ipse fundaverit ecclesiam Trajectensem quæ modo dicitur ad sanctum Servatium in honore sancti Petri apostoli. D’après ce passage de Gilles d’Orval, Maestricht aurait déjà existé, comme ville, dès le premier siècle de l’ère vulgaire; ce qui est fort douteux. Tacite est le seul écrivain ancien, avant Grégoire de Tours, qui ait parlé de Maestricht; au moins on suppose que c’est cet en- droit qu’il a voulu désigner sous le nom de Pons Mosæ *. Maestricht ne parait avoir été, pendant toute l’époque de la domination romaine, qu’un endroit de fort peu d'importance. Dans plusieurs écrits des VIe et VIT: siècles, il n’est méme encore désigné que comme un village, vicus *. Ce n’est qu’à la destruction de Tongres et à la translation du siége épiscopal de cette ville à Maestricht, que cette dernière est redevable de son accroissement. Ce que Gilles d'Orval rapporte de Tongrus, des Perses et des Troyens, prétendus fondateurs de Tongres, est encore plus fabuleux que ce qu’il répète, d’après Hariger, du nom d’Octavie qu’aurait porté cette ville, Il ne blesse pas moins la vérité, lorsqu'il avance que Tongres était une des quatre plus grandes villes de l’Europe et de l’Afri- que et comparable, pour l'étendue et la magnificence des édifices, à Rome et à Carthage. Au contraire, Tongres ne fut, sous la domi- nation romaine, qu’une cité obscure, une simple ville de province d’une étendue assez médiocre *. Il ne parait pas non plus, par le 1 Tacit., Haist., 1. IV. ? Hariger, dans la vie de saint Servais , fait entendre que du temps de cet évêque Maestricht n'était qu'un village : vicum Trajectensem (Hariger, Acta S. Servatii). Eginhard même, qui florissait au VIIE siècle, ne qualifie encore Maestricht que de village : In vico qui hodieque Tajectus vocatur. Mais il nous apprend que ce lieu était déjà très-peuplé : « Estque habitantium et præcipue negociatorum multitudine frequentissimus. Eginhardus, » De translatione martyr. Marcellini et Petri. Valesii Not. Gall. in voce Trajectum supe- » TTus, » 5 Onlit,ilest vrai, dans Ammien Marcellin : Secunda Germania Agrippina et Tungris mu- nila, civitatibus amplis et copiosis, Amm. Marcel, 1. XV. Mais Ammien-Marcellin ne cite pas seulement Cologne et Tongres, parce que ces villes étaient SUR LES DOCUMENS DU MOYEN AGE. 43 peu de restes d’anciennes constructions qu’on y a découvertes en différens temps, que cette ville renfermät quelque monument re- marquable, tel qu'on en trouve, encore de nos jours, dans presque toutes les grandes villes qui tenaient un certain rang parmi les cités des Gaules *. Tongres n’était pas non plus une ville célèbre, car à peine est-elle nommée une ou deux fois dans l’histoire romaine *. Que dirons-nous de la ridicule étymologie du nom de Tongres donnée par Gilles d’Orval : Appellata porro traditur Tongris quasi tun- deris s. tu ungeris eo quod a latere tunderetur oceani undis, etc. Quoiqu'il soit très-probable qu’à une époque fort reculée, la mer s’étendit jusqu'à l'emplacement de Tongres, néanmoins cela devait avoir lieu bien des siècles avant la fondation de cette ville *. C’est chercher d’un peu loin l’étymologie du nom de Tongres, que l’auteur aurait dü trouver plus naturellement dans celui des Tongrois, peuple germanique, qui portait cette dénomination long-temps avant de venir babiter la Belgique. Mais les faits les plus simples et les mieux prou- vés sont sans cesse dénaturés par les auteurs du moyen âge , toujours disposés à ajouter foi au merveilleux et à l’invraisemblable. les plus grandes ou les principales cités de la seconde Germanique, mais parce qu’elles étaient les seules villes de cette province romaine, à l’époque où il écrivait. En outre le terme civitatibus amplis et copiosis que l’auteur ajoute au nom de Cologne et de Tongres , ne prouvent point que c'étaient en effet de grandes villes, mais seulement qu’elles l’étaient par rapport aux autres villes des Gaules, la plupart, fort petites. L’enceinte romaine de Cologne, encore subsistante en partie, le prouve suffisamment : cette enceinte n’avait pas une lieue de circuit. Celle de Tongres, dont il existait encore plusieurs vestiges, il y a deux siècles, était également d’une étendue médiocre. Voyez Wendelinus , De lege salica, et Heylen, Dissert. anti. Rom. monum. in austriaco Belgio repertis. Anc. Mém. de l'Académie , t. IV. 1 Voyez À. Ortelli et Viviani Ztinerarium per nonnullas Galliæ-Belgicæ partes. Tout ce qu’on a découvert jusqu’aujourd’hui d’antiquités à Tongres, se borne aux vestiges d’un castellum, à une pierre milliaire trouvée en 1819, à des figurines, monnaies romaines et autres antiques de petite dimension. (Æsprit des Journaux , mars 1780 , et février 1781. Essai sur l’anc. statist. de la Belgique, par le baron De Reiffenberg , p. 54). | 2 Vopiscus in Numeriano, c. I, Amm. Marcell., lib. XVIT, e. VIE, 8 L'abbé Mann , Mém. sur l’anc. état de la Flandre maritime. Belpaire, Mém. sur les changem. que la côte d’ Anvers à Boulogne a subis, etc. (dans les nc. mém. de l’Académie, 1. V, etles nou. Mém. couron., 1826-1827). La Marne ist. du comté de Namur , t. 1, préf. hist.; Ztinéraire de abbé de Feller, 1.1, p. 192. # MÉMOIRE S'il faut en croire Gilles d’Orval, Jupiter, Junon et Vénus avaient des autels à Tongres. Peut-être le chroniqueur n’a-t-il voulu dési- gner que le culte païen en général par les noms de ces trois divinités supérieures. Que saint Materne ait élevé, à Tongres, une église à la Vierge Marie, c’est chose possible; mais qu'il ait construit, dans cette ville jusqu’à 72 églises, c’est ce qu’il sera plus difficile de persuader. Saint Materne batit aussi à Huy, selon Gilles d'Orval , une église sous l’invocation de la Vierge. Huy aurait donc dù déjà exister à l’époque romaine, quoiqu’aucun auteur ancien n’en fasse mention. L’anonyme de Ravenne est, à notre connaissance, le plus ancien écrivain qui ait nommé cette ville *. Dans les chapitres XIV et XV, Hariger traite de lépiscopat de saint Materne, qui fut élu évêque de Tongres par le peuple de cette ville, selon la coutume de l’église primitive, et mourut à Cologne, en l’an 130 après Jésus-Christ selon Hariger, ou en 128 selon Ma- rianus Scotus. Il avait occupé trois siéges : celui de Trèves, de Co- logne et de Tongres. Le XVIe chapitre contient les noms de huit évêques qui occupèrent le siége de Tongres après saint Materne. Mais Hariger avoue qu’on ignorait entièrement ce qui se passa sous leur épiscopat ou la durée de ce dernier. x | Le XVII: chapitre, qui est de Gilles d’Orval, traite du même sujet, et ne nous instruit pas davantage. 1 Quelques auteurs ont cru que la civitas Juhonum, dont parle Tacite dans ses Annales, 1. XIIT, est la ville de Huy; mais d’autres savans ont fort bien prouvé qu'il y a faute dans le texte de cet auteur, et qu’il faut lire civitas Ubiorum (la ville de Cologne). Melart, historien de la ville de Huy, au commencement du XVIP siècle, rapporte, d’après des chroniques et autres pièces du moyen Age, beaucoup de fables sur l’histoire ancienne de cette ville. Suivant quelques chroniqueurs, la ville de Huy fut fondée du temps de César par un seigneur nommé Andreloye, suivi de quarante chevaliers ; selon Lucius de Tongres, le fondateur de Huy fut un prétendu Cambron, roi des Huns, quinze ans avant Jésus-Christ. D'autres pré- tendent que cette ville fut bâtie du temps de César par les Sicambres, les Tenchtres et les Usipètes. Enfin une quatrième opinion veut que les murs et le château de Huy furent bâtis en Van 142 par Godart, fils d’Octave, roi d’Agrippine (Cologne), et ensuite par l'empereur Antonin. Nous ne nous amuserons pas à réfuter toutes ce fables ridicules. Ce n’est que depuis le Ile siècle que l’histoire de Huy devient moins fabuleuse, (Joyes Melart, ist, de Huy.) SUR LES DOCUMENS DU MOYEN AGE. 45 Le XVIIL chapitre, par Gilles d'Orval, est consacré à l’épiscopat de saint Valentin, neuvième évêque de Tongres, mort en 308 et en- terré dans l’église de Notre-Dame près des évêques, ses prédéces- seurs. Ce chapitre ne renferme rien d’intéressant ni de nouveau. Les chapitres XIX, XX, XXI et XXII n’appartiennent en aucune manière à notre question. Le premier traite de l’hérésie d’Arius; le second de lirruption des Huns dans l’empire romain , sous le règne de Valens; le troisième de l’origine des Huns et de leur passage de VAsie en Europe. Hariger n’a fait ici que copier Jornandes. Le chapitre XXIIT traite de l’épiscopat de saint Servais. L’addition à ce chapitre, faite par Gilles d’Orval, contient la généalogie et des détails sur la naissance de saint Servais. Le chapitre XXIV, dont la première partie est de Gilles d’Orval, traite de l’élection de saint Servais à l'évêché de Tongres, sous l’em- pire de Constantin, et de invasion des Gaules par les Huns, d’après saint Jérôme, Epist. II ad Ageruchiam. Ce chapitre est terminé par un supplément de la main de Gilles d’Orval, où il est dit que les Ton- grois, ne voulant pas reconnaitre saint Servais pour leur évéque, ce prélat se retira à Maestricht dans l’église de St-Pierre, où il pré- dit la destruction de Tongres par les Huns, et proposa de déposer Euphrate, évéque Arien de Cologne; ce qui eut lieu dans un concile en 346. Dans le chapitre XXV, en partie de la plume de Gilles d’Orval, est décrit le voyage de saint Servais à Rome pour implorer l’intercession des apôtres saints Pierre et Paul en faveur de Tongres menacée par les Huns. Chapitre XX VI; vision de saint Servais devant le tombeau de saint Pierre. Le supplément qui termine ce chapitre et qui est de Gilles d’Orval, nous apprend qu'après son départ de Rome, saint Servais fut pris par les Huns; mais que ces barbares frappés de terreur à la vue d’un miracle opéré par le saint, le relächèrent immédiatement, et qu'il se rendit alors à Worms, Cologne et Metz, où il avertit les habi- tans de la catastrophe qui les menaçait. 46 MÉMOIRE Dans le chapitre XX VII, dont une partie est de Gilles d’Orval, il est parlé du retour de saint Servais à Tongres, où il convertit le peuple auquel il apprit ce qui devait arriver à la ville et la nécessité où il se trouvait de transférer à Maestricht le siége épiscopal de Tongres, les vases sacrés, les reliques et autres objets de la vénération publique ; le peuple accompagna en pleurant et en gémissant son évêque jus- qu'aux portes de la ville. Le chapitre XXVIIT, dont la fin est de Gilles d’Orval, traite de l’arrivée de saint Servais à Maestricht, où cet évêque fit construire au- dessous de l’église élevée par saint Materne, une crypte, dans laquelle il déposa les vases sacrés apportés d'Octavie (Tongres) et prépara son tombeau; il meurt peu de temps après, le troisième jour des ides de mai, l’an 388. Le chapitre XXIX est très-intéressant pour notre question : on y trouve la description du sac de Tongres par les Huns. Après un long siége, ces barbares s’emparèrent de la ville, en exterminèrent tous les habitans et finirent par la brüler; ils en agirent de même à Metz. A cause de ce désastre, suivi de l'invasion des Vandales, dit Hariger, on ignore pendant combien de temps Tongres fut privée de son évêque. Le petit nombre d’habitans qui s'étaient sauvés du sac de la ville, cherchèrent un refuge sur les montagnes et dans les cavernes. Le cha- pitre finit par le passage suivant : Vam et Franci qui ab Antenore ducebant originem et in Venetiis sicut et alir in Mauritania mul- titudine excreverant, qui et Sicambri, vel a quodam multitudine nimia, non possent sua eis sufficere loca , palantes hac illac , intenti prædis erant et rapinis , nec stationem hactenus certam invenerant, solum eis Torinqgia profugium erat : quibus Valens imperator, ad quem summa imperti pertinebat et proprium nomen qui Francus Attica linqua vocabatur, impartivit, et partem Galliarum ad inha- bitandum, sive vectigalium exactione concessit : et isti Hunnos ad Mootidas iterum paludes , vel in Pannoniam compulere, ubi post multas annos a Carolo Magno imperatore et filio ejus Pipino, penitus eliam nomine disperiere. Franci vero per avaritiam sequentium SUR LES DOCUMENS DU MOYEN AGE. 47 imperatoruw vectigalia ab eis exigentium , coacti sunt et Romanis fidem non servare, et civitates alias, quas adhuc tenebant per Gallias, occupare, quibus adhuc ritibus paganis inservientibus, mullæ civitates episcopis carebant. Nous ne ferons que deux observations sur ce passage. La première, c’est que l’auteur semble avoir confondu la Mauritania avec la Morin- genia, au nord de l'Elbe, où l’anonyme de Ravenne place la patrie primitive des Francs. La seconde observation, c’est qu'Hariger parle ici d’une cession du territoire des Tongrois aux Francs par l’empereur Va- lens, circonstance sur laquelle se sont tus les historiens romains et tous les chroniqueurs du moyen àge, à l'exception d'Hariger. Il est vrai- semblable que celui-ci a confondu le territoire des Tongrois avec celui que l’empereur Valens, selon quelques chroniqueurs, concéda aux Francs près des Palus Meotides pour les récompenser de l'avoir aidé à repousser les Vandales. Nous avons déjà réfuté cette dernière fable. Le supplément du chapitre XXIX, par Gilles d'Orval, traite égale- ment de l'invasion des Huns, mais ne nous apprend rien de nouveau. Il y est dit qu'Attila ne s’approcha point de la ville de Maestricht, qui n’eut rien à souffrir de la fureur des barbares. Chapitre XXX , Agricola , onzième évêque de Tongres, est élu par saint Remi. 11 déclare que désormais le siége épiscopal de Tongres sera établi à Maestricht. Ici finit l’histoire des évêques de Tongres sous la domination ro- maine. L'histoire des successeurs d’Agricola n'appartient plus à notre question. Il se trouve encore quelques autres passages dans l’histoire des évêques de Tongres et de Liége, par Hariger et Gilles d'Orval, qui ne sont pas sans intérêt pour la connaissance de la topographie de quelques parties de l’ancienne Belgique. Nous avons vu plus haut, dans la vie de saint Lambert, qu’au milieu du VII: siècle Liége n’était encore qu’un hameau; Gilles d’Orval nous apprend, dans l’histoire de l’évêque Monulphe , que du temps de cet évêque, vers lan 597, cet endroit n’était guère plus considé- 48 MÉMOIRE rable'. On pourra donc reléguer parmi les fables ce que certains chro- niqueurs et même des écrivains modernes, disent de la prétendue an- tiquité de Liége, dont l'emplacement, à l’époque de la domination romaine, ne devait présenter qu’un lieu désert et couvert de bois. Dans le chapitre XXXIV de son histoire des évêques de Tongres, Hariger nous représente l’évêque Gondulfe, visitant les ruines de Tongres, dont la mer baignait encore les murs et dont la splendeur, selon notre bon chroniqueur, surpassait de beaucoup celle même de Babylone et de Rome *. Un vieillard qui servait de guide à l’évêque, lui montra le palais d’Auguste *, la petite maison de saint Servais et l'église de la Vierge. L’évêque se sentit animé du désir de rendre à Tongres son ancienne splendeur : il fit venir de tous côtés de nou- veaux habitans pour repeupler cette ville. Mais Dieu ne permit point que Tongres füt retablie, à cause de l'injustice que saint Servais avait supportée de la part des habitans. Une troupe de loups envahit , en présence de l'évêque, la ville qui commençait à sortir de ses ruines, et le feu du ciel, accompagné d’un tremblement de terre, anéantit tous les travaux des nouveaux habitans que l’évêque Gondulfe retira aus- sitôt de cette cité infortunée ‘. 1 «Dionantem quoque visitaturus, castrum hæreditarium suum, in proficiscendo conspicans »._yillam in valle sitam inter opaca nemorum , inter ardua montium, fontibus et fluviolis per- » prona decurentibus valde delectabilem et irriguum.... Hune locum cum beatus episcopus » Monulphus cum suis comitibus intrasset, captus situ et amænitate ejus substitit. Vocabulum » loci quæsivit, Legiam nominatum audivit. Moxque prophetico tactus spiritu , eya ! inquit » astantibus, locus quem dominus ob salutem multorum fidelium suorum elegit, et quem » per merita cujusdam servi sui postmodum magnifice illustratum summis civitatibus æquavit. » Statumque descendit , locum orationis designavit, constructam ecclesiam in honore sanctorum » Cosmæ et Damiani martyrum Domino consecravit, quam postmodum sanctus martyr Lam- » bertus suo sacro sanguine nobilitavit. » 2 «Juxta civitatem Tungrensem die quadam contigit eum iter habere : et accedens propius, » altitudinem ejus et latitudinem quotidianosque maris accessus, aliaque multa quæ nusquam »_alibi erant in terra miratur : præponit eam Babyloniæ, præponit et Romæ nihil æstimat huic » simile et in urbibus Asiæ, etc. 3 « Ostendens ei palatium quod in honore Octaviani Cæsaris constructum erat , a quo et ipsa civitas dicta est Octavia. » «Conversus ad suos ex universa jussit convenire provincia qui eam citius innovarent, ibique SUR LES DOCUMENS DU MOYEN AGE. 49 Le chapitre XLIII de l'ouvrage de Hariger, traite de la mission de saint Amand en Flandre. Il y est dit que les habitans barbares du territoire de Gand, se livraient au culte païen le plus grossier, et qu'ils adoraient , à l'exemple des Germains leurs ancêtres, des arbres et des morceaux de bois ‘. Dans le chapitre LV il est question de la fondation, par saint Rema- cle, du monastère de Malmédi, dont l'emplacement formait alors un endroit désert et inculte. On y trouvait des débris d’un temple de Diane, et des sources d’eau qui avaient été anciennement l’objet d’un culte superstitieux *. La continuation de lhistoire des évêques de Tongres, de Maes- tricht et de Liége d’'Hariger, par le chanoine Anselme, ne contient qu'un seul fait qui se rapporte à notre question : c’est la conversion des Toxandres par saint Lambert. Encore tout ce que l’auteur dit à cet égard ne nous apprend rien de neuf, et se trouve plus amplement décrit dans la vie de saint Lambert par le chanoine Nicolas. Nous terminerons ici l'analyse de l’histoire des évêques de Tongres, de Maestricht et de Liége, par Hariger, Gilles d’Orval et Anselme, sans contredit un des ouvrages du moyen àge qui renferme le plus de » deinceps habitarent, Hæc dixit, et quod cœperat iter peregit. Cum vero rediret, et quod fac- » tum erat placeret, aliquot dies illic morari disposuit. » Cumque gaudens illic perendinaret , recordatus dominus malorum quæ fecerat urbs illa » superba, delecti sui Servatii zelans injuriam, subito redit ad yindictam, luporumque gra- » vissimorum immissà multitudine, in præsentia S. Pontificis civitatis perfidæ jussit devocari » colonos: quod constructum fuerat altrix flamma consumpsit : cœtera fulgur communuit, Terræ » motus insuper cœlitus immissus pergama multa subruit , adeo frequens et insolens ut ipse » pontifex mortem evadere desperaret , etc.» 1 «Ingressus interea Gandense oppidum (Amandus) Scaldi fluenti insitum diabolicis laqueis sic » invenit irretitum, ut ejus loci homines pro Deo colerent ligna et arbores. Cæteris circumqua- » que positis Christi fidei subjectis, isti vel propter efferas mores vel propter infæcundos » cespites adhuc idolis serviebant, etc. » 2 (De Malmundarii constructione.) « Accepta igitur sanctus sacerdos (S. Remaclus vigesimus «“ episc.) regià auctoritate et comitum necessariorum consolatione, vastum paludibus et confra- » gosis montibus Arduennæ saltum aggreditur. Reperit ibi manifesta satis inditia, quod loca »_illa idolatriæ quondam fuissent mancipata , lapides scilicet Dianæ et aliis portenticosis nomi- » nibus efligiatos , fontes hominum quidem usibus aptos , sed gentilium superstitione pollutos, » ac dæmonum adhuc infestationi abnoxios, etc.» Tom. XII. 7 50 MÉMOIRE documens relatifs à l’histoire et à l’état politique de la Belgique, sous la domination romaine. Documens du x Les ouvrages écrits au XIe siècle, qui contiennent des détails sur l’état ancien de la Belgique, ne sont pas plus nombreux que ceux du X° siècle; et ce qu’ils nous apprennent sur ce sujet est de moindre importance que ce qu’on trouve dans les documens du siècle précé- dent. Ces ouvrages se bornent à la chronique de Roricon, intitulée : Gesta Francorum ab ipsius gentis origine ad obitum usque Clodo- ver , à la chronique de Marianus Scotus : Mariani Scoti chronicon a Christi nativitate ad annum 1082; à la Sn de Balderic : Chronicon Cameracense et Attrebatense ; et à celle de Watten : Chronicon Wathinense. Le seul passage de la chronique de Roricon * re concerne l’histoire ancienne de la Belgique, se borne au récit fabuleux de l'origine troyenne des Francs, sur laquelle l’auteur s'étend longuement. Il parle aussi du passage du Rhin par Clodion. Mais tout cela est pres- que copié littéralement de l’auteur anonyme des Gesta Francorum, dont il a été parlé au commencement de ce mémoire. La chronique de Marianus Scotus * ne contient que le seul docu- ment suivant, relatif à l’histoire de la Belgique sous la domination des Romains : Anno 438 : Batavos, Tongros, Menapios, Teravanos Morinos, Ambionos, Cameracenses, Tornacenses, Atrebatenses , Belovacenses, et quidquid his regionibus interjacet , ultraque Sequanam et Ligerim, Clodius Francorum rex reqno adjecit. Ce qu’il y a à observer ici, c’est que tous les chroniqueurs du moyen âge qui ont décrit cet événement, n’ont parlé que de la conquête de Tournai et de Cambrai, par Clodion, et qu'ils ont passé sous silence 1 Cette chronique se trouve dans la collection de Duchène, tom. I, et dans celle de Dom Bouquet, tom. III. Voir sur cet auteur Fabricii bibl. lat. mediæ et infimæ latinit., tom. VI, art. Rorrco. 2 Apud Pistorium , scriptores rerum Germanicarum, tom. I. Voir sur cet auteur Vossius, De hist. latinis, 1. IL, c. XLVIT; Sigeb. gembl. chron. ad ann. 1061. La chronique de Marianus Scotus s'étend depuis la naissance de Jésus-Christ jusqu’à l'an 1083. Fabricii bibl, lat. tom. V, art. Marranus Scorus. SUR LES DOCUMENS DU MOYEN AGE. 51 les noms de toutes les peuplades désignées par Marianus Scotus. Balderic , auteur de la chronique de Cambrai et d'Arras, dont il existe deux éditions, publiées, la première par Colvener, en 1615, et la seconde par M. Leglay, en 1834, vivait au XIe siècle et mourut vers 1049 à Térouane, où il était chantre de la cathédrale '. Les faits contenus dans cette chronique et qui ont rapport à l’histoire de la Belgique, jusqu’à la domination franque, sont en petit nombre. Dans le chapitre IL du livre I de sa chronique, Balderic démontre qu'on ignore l’origine de Cambrai et d'Arras. Il croit néanmoins que César a fait mention de la seconde de ces villes, et il donne la rela- tion de son expédition contre Commius, d’après les commentaires. On montrait, jusqu’au temps où vivait notre auteur , des vestiges du camp de César près de Maroilles *. Balderic fait preuve de discernement en dédaignant les contes ridicules des chroniqueurs sur nos prétendues origines troyenne, romaine, cymbrique, albanaise, etc. M. Le- glay, dans ses notes sur la chronique de Balderic, conclut de cette réserve de l’auteur que, lorsqu'il écrivait, ces contes puérils n’étaient pas encore inventés. Nous avons cependant rapporté plus haut des passages de chroniques plus anciennes que celles de Balderic, qui offrent déjà des fables de cette espèce. Dans le chapitre IL, Balderic dit que, quoique l’on ignore l’époque de la fondation de Cambrai, cette ville est néanmoins très-ancienne, puisqu'il en est déjà fait mention dans la description de l'empire romain, composée par ordre de Jules-César, dans laquelle la distance de Cambrai à Bavai est portée à XVI milles. Cette description de l’empire romain n’est autre que la carte dite de Peutinger, composée, selon Mannert, vers l’an 230 de notre ère, ou l'itinéraire dit d’Antonin, écrit sous le règne de Théodose Ier. Ce sont là les deux ouvrages les plus anciens où le nom de Cambrai se trouve mentionné. Ni Strabon, ni Pline, ni Ptolemée, n’ont connu 1 Voyez l'édition de Balderic par M. Leglay, préface, 2? «Parent autem usque in hodienum constratis aggeribus loca apud Mariolum, ubi romanæ » acies castra melaverant, » 52 MÉMOIRE cette ville, qui ne fut probablement d’abord qu’une station (mansio ou mutalio ), laquelle n’acquit quelqu'importance et ne s’éleva au rang de ville, qu'après la destruction de Bavai. On sait que Cambrai devint alors le chef-lieu des Nerviens. Balderic ne dit rien de plus sur l’état de Cambrai sous la domi- nation romaine , et passe immédiatement à la conquête de la Belgique par Clodion. Ce qu’il rapporte sur cet événement est copié textuelle- ment des Gesta Francorum. Là finit le chapitre IL. Dans le chapitre IT, il traite du règne de Clovis, qui n’a plus rap- port à notre question. Quoiqu’on connaisse un Superior, évêque des Nerviens, sous le règne de Constantin, saint Vaast est désigné par Balderie, comme le premier évêque d’Arras et de Cambrai. Il est probable qu'après la destruction de Bavai, à la fin du IVe siècle, les Nerviens auront été privés de leur évêque jusqu’au temps de saint Remi. Dans le chapitre V, Balderic parle de l’irruption des Huns dans les Gaules, mais en termes généraux et sans relater aucun fait qui ait directement rapport à la Belgique. La chronique du monastère de Waten, écrite vers la fin du XIe siècle par Ebrard, chanoine régulier de ce monastère, ne renferme qu’un seul passage relatif à notre question : c’est celui dans lequel l’au- teur parle de l’opidum ou Castellum Menapiorum, dont il fixe la po- sition à Waten, distant de deux lieues de St-Omer, contre l'avis de la plupart des auteurs modernes, qui placent le chef-lieu des Ménapiens à Kessel, entre Ruremonde et Venlo *. 1 Sa véritable position paraît avoir été à Cassel en Flandre. (Voyez un mémoire de nous sur cette question dans les 4rchives hist. du baron de Reiffenberg , tom. V.) Voici le passage en question de la chronique de Waten : « Antiquissimum igitur oppidum » fuisse Menapiorum quod nunc Guatina vocatur vel Guatinum, nulli qui secundum historicos » ejusdem pagi confinia velsitum territorii novit, est ambiguum : quos etiam historiarum cogni- * tores Batavos appelant; ob cujus insigne rei aut eventus auspicium ignoratur. Ait enim de » his annalibus suis Orosius dum locorum atque insularum diversos situs describeret : Britan- » mia Oceani insula per longum in boream extenditur Ameridie Gallias habet, cujus protimum » littus, transmeantibus civitas apparet que dicitur Rutupi-Portus , unde haud procul à Morinis » in austro positis, Menapos Batavosque prospectat. Unde eum Rutupi-Portum in meridiana SUR LES DOCUMENS DU MOYEN AGE. 93 Parmi les écrivains du XIIme siècle, nous n’en avons trouvé que deux dont nous ayons à nous occuper ici : Sigebert de Gembloux et Suger, auteur des Grandes chroniques de France, dites Chroni- ques de St-Denis. Quoique Sigebert de Gembloux, dont nous avons une chronographie très-estimée, qui s'étend depuis la naissance de Jésus-Christ jusqu’à l’année 1082, soit réputé un des annalistes les plus instruits et les plus judicieux du moyen âge, il n’a pas laissé par- fois de payer un tribut aux préjugés de son temps, et de rapporter des faits fabuleux lorsqu'il écrivait sur un événement éloigné de l’époque où il vivait. C’est ainsi que, dans le prologue de sa chronographie, et à l’an 385, il fait descendre les Francs des Troyens. » ejusdem insulæ ripa situm noverimus, nec minus a Morinis, Menapos, Batavosque in boream » porrectos, eodem mari dividente , in ulteriori littore contiguos prospectum sui ad alterutrum » habere, nec dubium Guatinenses a scriptoribus jure Batavos appellari. Illud etiam eorum » epitheton, quo #eminà quâdam feritate inter alias nationes ab autoribus notati clarebant, si » transeamus; indicia romanæ vindictæ clamant. Patent enim avulsa murorum fundamenta, » ædificia partim diruta et, ut veterem ruinam testantur vestigia, quanto plus fuerant timori, » tanto crudelius ab adversariis sunt extirpati. Sed nec adhuc divinæ providentiæ visum est » suffecisse, quod primo illo eversionis momento reliquarum spes adusque internecionem » nullam veniam sit... quin etiam abindè per succedentia tempora, ad tantam solitudinem , » quasi civitas quæ devastatur, ipsa marmorum fragmenta devenere , ut silvestres feræ stabu- » larent, ubi deletæ domus, si quæ superfuissent, vivendi monumenta repararent. Sic hostili » vastitate etiam per christiana curricula consumtus, tanta ætate locus permansit vacuus , nihil » in se memorabile habens, præter desolatæ mansionis vetustatem , quæ cuncta quaque versum » obduxerat, sola tantum cum sui cantoris tugurio ecclesia , quam summo in verlice gestabat » perspicuam inter vepres et serpentium latebras, inter dumenta et querulos avium ramos, vili » admodum fabricà prominebat. Hanc missarum audire solemnia (sic) valde tenuis fidelium fre- » quentabat conventus , ubi et ipse aliquando curialem adhuc strepitum quasi mimiloginæ licet » clericus ambiens... cum comitatu transitum habui.... Tune ego nova rerum facie curiosus, » quæ in lanta vallis amplitudine solers antiquorum cura fuisset aspicio, miseratus locum, » miseratus excidium , nihil minus quam quod hodie videmus futurum æstimabam : apparebat » tamen ex facili, quoniam fuerit suis diebus celeber , in quo tanta destructionis monumenta » adhuc reservabantur. Nam quanta fuerit popularis frequentia, quantusque concursus, publicæ » atque regales viæ utrinque convenientes præmonstrant, quarum illa quæ a diffusa orientis »_plaga ad nos dirigitur, altera vero subterfluente clauditur; altera vero a pharo altissimo , quæ » domus olim specularia in hiberna Romanorum dicebatur, Bononiæ muro contigua, ad portum » Oceani sita, Britaniam Deciorum insulam prospectans, ab occidentali parte supra dictum » eumdem terminatur in amnem, etc. (Ghronicon Watinensis Monasterii , auct. Ebrardo ejusd. loci canonico regular. Apud Martene et Durand, Thes. nov. anecdot, tom IL. » Documens du XI1m2 siecle, 54 MÉMOIRE À l’an 382, Sigebert de Gembloux rapporte que l’empereur Gratien, changea le nom de la ville de Somonobriva, fondée par l’empereur An- tonin-Pie et son fils Marc-Aurèle, en celui d'Amiens. Notre chroni- queur ignorait, sans doute, que César avait déjà fait mention de Somonobriva, et par conséquent que cette ville existait long-temps avant Antonin-Pie ‘. Il est possible d’ailleurs que ce dernier Pait agrandie ou embellie, mais on n’en trouve aucune preuve dans les auteurs anciens. Sigebert de Gembloux fixe à l’an 385 le règne fabuleux de Mar- comir , fils de Priam et de Sumno ou Sunno, fils d’Anténor. Sous la conduite de ces princes, répète-t-il d’après les chroniqueurs anté- rieurs, les Francs sortirent de la Sicambrie, et se fixèrent sur les bords du Rhin *. Ce qui atteste combien ce fait est apocryphe, c’est que les historiens et les géographes romains parlent des Francs comme habitant sur les bords du Rhin plus d’un siècle avant l’époque désignée par Sigebert. De plus, à la fin du IVe siècle, chaque peuplade franque avait son chef particulier, et la confédération entière ne s'était point encore soumise à des chefs suprêmes et uniques. .… À l’année 387, Sigebert mentionne la défaite des généraux romains Quintinus et Heraclius par les Francs, près de Trèves. À l’an 388, il nous donne la généalogie de saint Servais, dixième évèque de Tongres, qu’il fait parent de Jésus-Christ ‘. À l’an 410, Sigebert mentionne la révolte de Stilicon et la dévasta- tion des Gaules par les Vandales. 1 «Civitatem quam Antoninus-Pius , cum filio Aurelio condidit , et Sumonobrivam adjacente » flumine appellavit. Gratianus imperator suo dominio mancipatam, mutato nomine, Ambianos » ab Ambitu fluminum fecit vocari. » 2 « Anno 885. Francis post Priamum, Priami filius Marcomirus, et Sumno, filius Antenoris, » principantur annis XXXXIV; quorum ducatu Franci, Sicambrià egressi, consedere secus » Rhenum in oppidis Germaniæ. » 3 « Anno 488. Servatius quoque decimus tungrensis episcopus, Domini nostri Jesus-Christi » consanguineus, non solum eo quod voluntatem Dei patris faciebat, sed etiam secundum carnem, » qui natus quidem in Perside, filius fuit Emmæ, cujus pater fuit Eliad, frater Elizabeth, quæ » peperit Joannem Baptistam. Mater vero Eliad , et Elizabeth Esmeria, soror fuit Annæ, quæ genuit Mariam , Matrem Domini. » PR 12 SUR LES DOCUMENS DU MOYEN AGE. 99 Sous lan 411, il parle de l'invasion de Crocus, qu’il fait roi des Vandales, tandis qu’il était roi des Allemands, selon Grégoire de Tours, que Sigebert a mal copié ‘. Il place à l’année 413 la défaite de 200,000 Vandales par les Francs, et la destruction de Trèves, ville fondée par Treber, fils de Ninus, roi des Assyriens. Sigebert a sans doute tiré ce dernier conte des annales fabuleuses de Trèves, dont nous parlerons plus loin. Il fixe à l’an 419 l'élection de Pharamond, successeur de Symeon (pour Sunno) et de Marcomir; et à l’an 422 la rédaction de la loi salique , dans les villages (villis) de Salegheim, Bodochaim et de Wingehaim, qu’il place dans la Germanie, contre l’avis de Wendelin, qui prétend que le code salique fut rédigé dans la Belgique. À l’an 431 il parle de linvasion de la Thoringie pour Clodion, qui fixa quelque temps son séjour à Dispargum, château des Toringiens *. Il nous semble que, par la Thoringie, Sigebert ne peut entendre que la Tongrie. C’est ainsi qu'il a compris Grégoire de Tours, dont il a tiré ce passage. Il fixe à l’an 445 la conquête de Tournai et de Cambrai par Clodion. C’est encore Grégoire de Tours qu’il a copié ici. Enfin il place à l’année 453 la translation du siége épiscopal de Tongres à Maestricht par saint Servais. Ce sont là tous les passages de la chronographie de Sigebert de Gem- bloux, qui ont quelque rapport à l’histoire de la Belgique, avant ou sous la domination romaine. Ce qu’ils nous apprennent se réduit à peu de chose, car, comme on a pu le remarquer, partout où Sigebert n’a point pris pour guide Grégoire de Tours, que souvent il copie encore mal, il ne fait que rapporter des faits apocryphes ou au moins très- douteux sur cette époque de notre histoire *. 1 Aïmoin fait aussi Crocus roi des Vandales, et ce sera probablement cet auteur qui aura induit Sigebert en erreur. 2 « Anno 431. Clodius Thoringiam invadit et in Dispargo castello Thuringiorum aliquamdiu » habitavit.» 3 Les meilleures édition de Sigebert de Gembloux sont celles publiées par Miræus et par Pistorius (Scriptores rer. Germ., t. 1). Nous avons suivi cette dernière. 56 MÉMOIRE Les grandes chroniques de France, écrites par Suger, ministre de Louis-le-Gros et abbé de St-Denis, ne sont, qu'une compilation d’ou- vrages plus anciens, faite souvent sans critique ni ordre *. Ce n’est que dans les cinq premiers chapitres de cette chronique que nous trouvons des faits qui concernent la Belgique ancienne. Dans ces chapitres, Suger a décrit l'origine troyenne des Frances et leur éta- blissement dans les Gaules. Au reste il n’y fait que copier Grégoire de Tours et Aimoin, en chargeant leur récit de fables nouvelles. Documens du xuts. Le XIIIe siècle fournit encore moins de matière à notre question, is que les siècles précédens. Nous n’avons guère trouvé que deux au- teurs qui, dans leurs chroniques, aïent dit quelques mots sur la Belgique avant la domination des Francs : ce sont Conrad de Lich- tenaw, abbé d’Uspergen, dans le diocèse d’Ausbourg, et Guillaume-le- Breton. L'abbé d'Urspergen, qui vivait sous le règne de l’empereur Fré- déric IT, nous a laissé une chronique assez intéressante, laquelle, comme presque toutes les chroniques du moyen âge, commence par la création du monde et s’étend jusqu’à l’époque où florissait l’auteur de cette chronique *. On remarque que labbé d’Urspergen, en parlant de temps anciens, a rapporté moins de faits apocryphes que ses con- temporains, parce qu’il a puisé dans des sources plus pures. Cependant en traitant de l’origine des Francs, c’est toujours des Troyens qu'il les fait descendre. Il est plus véridique dans ce qu’il dit de la con- quête des Gaules par César, parce qu’il a pris pour guide Suétone. Ces deux faits sont les seuls, de sa chronique, qui se rapportent à notre question. La Philippide, ou l’histoire en vers de Philippe - Auguste par Guillaume dit le Breton *, chapelain de ce roi, renferme un court passage qui peut jeter quelque jour sur un fait obscur de l’histoire 1 Elles ont été publiées dans la Collection des hist. de France , par Dom Bouquet, etc. ? Chronicon abbatis Uspergens. Basil. apud Henric. Petrum, 1539, in-fol. Fabricii bibl. latin., tom. I, art. Conradus à Lichtenau. 3 Wilhelmus Brito : De Gestis Philippi Augusti, apud Duchesne et Dom Bouquet. SUR LES DOCUMENS DU MOYEN AGE. 57 la Belgique sous la domination romaine. On sait que les Romains accordaient quelquefois à des peuples qu’ils avaient soumis à leur empire, le privilége de se gouverner selon leurs propres lois. Les peuples qui jouissaient de cet avantage , l’avaient obtenu ou à cause de l’ancienneté de leur alliance avec les Romains, ou pour les services qu’ils avaient rendus à ces derniers, ou bien les Ro- mains le leur accordaient par respect pour la valeur qu'ils avaient déployée en défendant leur liberté, et parce qu'ils sentaient qu'il était impossible de contenir autrement que par des bienfaits et par le sentiment de la reconnaissance, des hommes qui préféraient la mort à l’esclavage *. Dans le premier cas se trouvaient les Bataves et les Caninéfates, qui avaient contracté alliance avec César, et avaient combattu sous ses drapeaux dans la conquête des Gaules et dans la guerre contre Pompée. Ces peuples étaient exempts de tri- buts, et continuaient à se gouverner par leurs propres lois et sous leurs chefs nationaux. La seule obligation à laquelle ils étaient astreints, était de recevoir garnison romaine sur leur territoire, et de fournir annuellement un contigent de troupes qui servaient en qualité d’auxiliaires, et faisaient partie de la garde germanique des empereurs *. Pline a compris les Nerviens au nombre des peuples libres de la Gaule *. Il est le seul auteur ancien qui leur reconnait ce privilége; aussi, la plupart des savans modernes, qui ont parlé de l’état politique des Belges avant ou sous la domination romaine, ont-ils passé sous silence cette particularité. Aucun, que je sache, n’a fait attention au passage de la Philippide de Guillaume-le-Breton, qui confirme les paroles de Pline, et nous apprend, en même temps la cause pour 1 « Sunt et liberæ civitates, dit Strabon , aliæ ab initio per amicitiam , aliæ honoris gratia » libertate donatæ. » (Strab., lib. XVII. ) « Augustus interea subditos seu provincias ex moribus Romanorum ordinavit, fœderatos » contrà, patriis semper legibus suis gubernari voluit. » (Dio Cassius, lib. 4.) Voyez aussi Lex VII Digest. de Captivis et postlim., et Thierry , Histoire de Gaulois , tom II, p. 188. 2 Tacitus , Historia, lib. IV, c. XIT, Mores Germ., c. XXIX. 3 Nervii liberi Plin. hist, nat., lib. IV. Tom. XII. 8 58 MÉMOIRE laquelle les Nerviens avaient obtenu des Romains le privilége de se gouverner en peuple libre : Nervius omnipotens.….… Quem nunquam sibi prævaluit romana potestas Subjicere omnino cerlisve ligare tributis !. C'était donc en considération de leur valeur extraordinaire et de l’o- piniâtreté avec laquelle ils avaient défendu leur indépendance contre César que les Nerviens avaient été déclarés libres et exempts de tribut par les Romains *. La condition politique des Nerviens, sous la domi- nation romaine, parait donc avoir été la même que celle des Bataves : ils servirent comme ces derniers en qualité d’auxiliaires dans les armées romaines, et c’est comme tels qu’on les voit paraître avec les Tréviriens et d’autres peuplades germaniques, alliées des Romains, dans la bataille de Pharsale, dans l'expédition de Drusus en Ger- manie et dans la guerre contre Gildon en Afrique *. Plusieurs inscrip- tions tumulaires trouvées aux environs de Rome, attestent aussi que les Nerviens contribuaient à former la garde germanique des empe- reurs ‘. Il est probable que les Tongrois, dont un autre écrivain du moyen âge, Procope, nous a également révélé l'existence comme peuple libre sous les Romains, jouissaient des mêmes priviléges que les Nerviens. La Philippide renferme un autre passage assez intéressant pour l'étude de la topographie ancienne de la Belgique, et qui prouve, 1 Guill. Brito., Philipp, lib. IX. 2 Spener, sans avoir pris attention au passage de Guillaume-le-Breton , a bien jugé de la cause de l’affranchissement des Nerviens: « Quod etiam Plinius Nervios liberos adpellat, Roma- » nos suspexisse insignem eorum virtutem et libertatem generosæ genti, quantumvis victæ, » non invidisse , fides est (Spener, Motitia Germanie antique, lib. I, c. V, 633.) » C’est à cause de leur ardent amour pour la liberté et des tentatives réitérées qu'ils firent pour secouer le joug romain, que Lucain donne aux Nerviens l'épithète de peuples toujours rebelle, ninius rebellis Nervius. 3 Lucan., Phars., lib. 1, v. 499. Epitome TiliLivii, lib. CXXXIX Claudian., De bello Gildon., lib. I. 4 Gruter corpus inscript, et Dom Bouquet, Recueil des histoirens de France, tom. I. SUR LES DOCUMENS DU MOYEN AGE. 59 avec d’autres documens, quel étrange changement nos côtes mari- times ont dù subir depuis l'époque romaine. Guillaume-le-Breton, nous apprend donc qu’au XIII: siècle, la petite ville de Damme, au- jourd’hui à trois lieues de la mer, possédait un port maritime si vaste, que toute la flotte de Philippe-Auguste, forte de 1600 voiles (si l’on peut en croire les documens contemporains), y trouva un abri *. En parlant plus loin des ressources qu’offrent les chartes du moyen âge pour la connaissance de l’histoire de la géographie et de la Belgi- que avant et durant la domination romaine, nous citerons d’autres documens anciens relatifs à l’état ancien des côtes de la Flandre. Passons aux écrivains du XIVre siècle. Les ouvrages de ce siècle , qui fournissent matière à ce mémoire, sont au nombre de trois : les Annales de S'-Bavon, les Annales du Hainaut par Jacques de Guise et la Chronique de Martin de Pologne*. Les Annales de S'-Bavon, publiées pour la première fois par Pertz, Monumenta Germanie historica, t. IE, ont été écrites vers l’an 1350. Elles ne renferment que deux passages relatifs à notre question. Dans le premier il est dit que, lan XLVIT avant Jésus-Christ, Caïus Jules César bätit , au confluent de lEscaut et de la Lys, un château que de son nom de Gaïus (Caïus), il appella Gand; qu’en partant pour Rome, il confia la garde de ce château à quelques soldats et barons romains, desquels, dit l’auteur des Annales de S'-Bavon , les Gantois tirent leur origine et leur nom *. César, quoique les Annales de S'-Bavon le dé- 1 Portum læta subit a Damno nomen habentem Qui tam latus erat, tantæque quietis ut omnes In se sufficiat nostros claudere naves Qui valde speciosus erat Dam nomine vicus, (Philipp. lib. IX.) Portus famosissimus miræ amplitudinis, dit en parlant de Damme Rigordus, contemporain de Guillaume-de-Breton et, comme lui, auteur d’une histoire de Philippe-Auguste, 2 « Anno quadrigentesimo septimo ante nativitatem Domini nostri Jesu-Christi inclytus » Gayus Julius Cæsar Romanorum imperator construxit nobile castrum et famosum super flu- » mina Scaldis et Legie, ubi idem amnis Scaldis Legiam fluvium recipit, cui a nobile nomine suo » Gayo Ganda nomen imposuit. Qui dum sibi subjugasset Britanniam, ante regressum ejus » versus urbem Romam, reliquit quosdam milites ac nobiles barones suos, cives romanos, ad Documens du XIVme siècle 60 MÉMOIRE clarent fondateur de Gand, ni aucun autre écrivain romain, n’ont connu une ville de ce nom en Belgique. C’est dans la vie de saint Amand qu’on trouve la plus ancienne mention de Gand, qui, alors, n’était encore qu’un village ou petit bourg, pagellus *. Quant aux barons romains dont les Gantois auraient tiré leur origine, c’est là une petite vanité, pensons-nous, de la part de l’auteur des Annales de S'-Bavon, qui, probablement gantois lui-même, aura voulu donner une extraction noble à ses compatriotes *. Concluons en disant que César n'aura pas été plus le fondateur de Gand que de tant d’autres villes et châteaux de la Belgique, dont les chroniqueurs du moyen âge et la tradition populaire attribuent la fondation à ce conquérant romain, qui n’est venu remplir en Belgique qu’une mission de dévastation et d’extermi- nation. En France, en Belgique, dans la Suisse et en Angleterre, la tra- dition populaire attribue la construction de tous les anciens monumens à César ; dans l'Orient, c’est Alexandre qui est réputé le fondateur de toutes les villes anciennes. Un laps de temps de plusieurs milliers de siècles n’a pu faire sortir de la mémoire du peuple le souvenir de Scan- deroun et de César. Dans le second passage des Annales de S'-Bavon, qui se rapporte à notre question, il est fait mention, sous l’an 608, de la destruction de l'autel de Mercure érigé dans le château de Gand , sur les ruines duquel saint Amand bâtit une église *. Jacques de Guise, moine récollet de Valenciennes où il mourut » custodiendum castrum suum Ganda. Unde cives Gandenses originem et postmodum sibinomen » assumpserunt (4nnales $, Bavonis, initio). 1 Locus Gaent dans la chronique d’Assuerus et les Ænnales Francorum. Locus qui vocatur Gant dans la chronique de Reginon sur l'an 811. Vicus Gandavum dans la vie de saint Liévin et dans un diplôme de Lothaire de l'an 954 (Mirœus donat. piæ , t. II, c. XXXV.) 2 Ceci rappelle les sept seigneurs fondateurs de Bruxelles et de Louvain (l'abbé Mann, Hist. de la ville de Bruxelles, t. X. Parival, Louvain anc. ville capitale du Brabant.) 3 « Anno vero Domini nostri Jesu-Christi sexcentesimo octavo post ipsius nativitatem, sanc- » tus Amandus , tam Deo quam hominibus amabilis, Aquitaniæ provinciæ parentibus oriundus, » per Galliasque prædicationibus gloria clarescens, in dicto castro Ganda”primo verbum Do- » mini prædicans, contrivit ydolum Mercurii et aram ejus subvertit et ibidem ecclesiam con- » struxit. » SUR LES DOCUMENS DU MOYEN AGE. 61 en 1399 ”, est auteur d’une histoire du Hainaut écrite en mauvais latin et divisée en 22 livres ; elle commence à la guerre de Troye et finit au temps où vivait l’auteur. Nous ne devons parler ici que de la partie de cet ouvrage qui se rapporte à notre question. . Les huit premiers livres des Annales du Hainaut sont, à l'exception de beaucoup de digressions sur des faits étrangers, entièrement con- sacrés à la prétendu histoire du Hainaut et de la plus grande partie de la Belgique avant et durant la domination romaine; nous disons la pré - tendue histoire du Hainaut et de la Belgique jusqu’à l’expulsion des Romains, parce qu'il serait impossible de trouver, dans ces huit livres entiers , un seul chapitre où les faits les plus connus et les mieux con- statés ne soient défigurés et travestis de la manière la plus étrange et même la plus ridicule; en un mot, cette partie de l'ouvrage de Jacques de Guise n’est qu’une vaste compilation, faite sans aucune critique ni discernement, de tout ce que les chroniqueurs du moyen âge ont débité de plus absurde et de plus incroyable sur notre histoire ancienne. Il semble même que le bon récollet de Valenciennes ait pris plaisir à faire preuve de sa crédulité, de son peu de jugement et de son ignorance , en négligeant toutes le$ sources anciennes et en ne prenant pour guides que les écrivains les plus méprisables et les plus mensongers du moyen âge. Tandis que Jacques de Guise ne cite pas un seul bon écrivain de l'antiquité, il ne fait que copier et compiler les fables étranges débitées dans les rapsodies d’un Lucius de Tongres *, d’un Heli- * Voir sa notice biographique dans l'édition de ses Annales du Hainaut, par la marquis De Fortia , préf. du t. Lett. X, p. 303 et suiv. ? Le jugement que M. De Nélis porte de Jacques de Guise nous paraît beaucoup trop flatteur (Voir De Nélis, Belgicar. rerum prodromus, p. 51-58.) 3 Lucius de Tongres, le plus célèbre de tous nos chroniqueurs qui ont écrit l’histoire fabu- leuse de la Belgique, ne vivait probablement pas à une époque antérieure au XIV® siècle (Paquot, Mém. lit. des Pays-Bas, t. IV; De Reïffenberg, Notice sur Lucius de Tongres dans le troisième bulletin de la société de l'hist. de France). Au reste, Lucius de Tongres n’est connu que par les extraits qu’en ont donnés J. De Guise et quelques autres de nos chroniqueurs, mais en petit nombre. On ignore s’il existe encore des manuscrits de son ouvrage : Sanderus n’en connaissait, il y a plus de deux siècles, qu'un seul qui se trouvait dans la bibliothèque d’un Jean le Comte , seigneur de Jaudrain , etc., à Bruxelles (Sanderi biblioth. manuscript., p. 131). 62 MÉMOIRE nand ‘, d’un Barthelemi, d’un Hugues de Toul, d’un Clerembaud , d’un Nicolas Rucleri, etc., écrivains presque tous inconnus de nos jours, mais dont nous ne devons pas regretter beaucoup d’avoir perdu les ouvrages, du moins à en juger par les extraits qu’en a donnés Jacques de Guise. Avant de parcourir les Annales du Hainaut, par Jacques de Guise, nous croyons utile d'examiner jusqu’à quelle époque on peut remonter, pour avoir des données certaines sur l’histoire de la Belgique. Voyons d’abord vers quel temps les Grecs et les Romains, les seuls peuples de l'antiquité DS il nous reste des ouvrages écrits, ont connu la Belgique. Hérodote , qui florissait vers lan 420 avant Jésus-Christ, est le plus ancien hidtarite grec qui ait fait mention des Celtes, mais le peu de détails qu’il donne sur la Celtique sont si remplis d'erreurs, qu’il est facile de reconnaitre que, de son temps, la Gaule était à peine connue de nom aux Grecs *, Ce qu’Aristote a dit des Celtes, démontre que cet écrivain n’était guère plus instruit sur ce sujet qu'Hérodote *. Strabon observe que Timosthènes , Eratosthènes, et tous les géographes grecs qui les ont précédés , n’avaient aucune connaissance exacte des pays habités par les Espagnols et les Celtes ‘, et Polybe , qui florissait vers Van 130 avant Jésus-Christ, assure positivement que ni les Grecs, ni les Romains ne connaissaient encore de son temps aucune partie des Gaules au nord de la Narbonnaise. Enfin de tous les écrivains de Panti- quité, César est le premier qui ait parlé de la Belgique, et, comme le déclare positivement Cicéron, le premier qui ait eu connaissance de 1 Helinand, moine de Froidmond en Beauvoisis, vivait au commencement du XIII: siècle ; il a laissé une chronique, encore manuscrite, qui s'étend depuis le commencement du monde jusqu'en 1212. Ce qui, dans cet ouvrage, regarde les temps anciens, n’est qu’un fatras de contes absurdes. Tout religieux qu'était Helinand , il ne laissait pas de cultiver l’art du trouba- dour et chantait lui-même ses poèmes en présence des rois Louis-le-Jeune et Philippe-Auguste pendant qu’ils étaient à table, Le célèbre J. Loysel a publié une partie de ces poésies en langue romane. 2 Hérodote, Hist., 1. IL, 3 Aristote, Météorol., 1, 1, e. XIII. Strabo , Geogr., 1. IV. SUR LES DOCUMENS DU MOYEN AGE. 63 cette contrée‘. La Belgique était tellement inconnue aux Romains avant la conquête de César, que même trois ans après la célèbre dé- faite des Nerviens, Cicéron ignorait encore jusqu’à l’existence de ce peuple, le plus puissant de la Belgique et celui de tous les peuples des Gaules qui joue le plus grand rôle dans les commentaires de César : ubi sin ist Nervii, écrivait l’orateur romain à son frère Quintus, qui lui avait envoyé une relation de la révolte des Nerviens et de l'attaque de son camp par ce peuple, et quam longe absint, nescio *. Ce qui a pu contribuer à rendre si long-temps la Belgique inaccessible aux in- vestigations des Romains, c’est que l'entrée d’une grande partie de ce pays était strictement interdite aux marchands étrangers *; et certes aucun grec ni romain, menant la vie la plus voluptueuse dans les plus belles contrées de l’Europe, ne se füt avisé, selon l’expression de Tacite, de venir visiter ou habiter des pays aussi sauvages et aussi tristes que létaient alors la Belgique et la Germanie *. Il serait donc inutile de chercher des documens historiques sur la Belgique dans des écrivains grecs ou romains antérieurs à César. Voyons si c’est dans des anciens écrivains gaulois ou belges que les chroniqueurs ont pu puiser ce qu’ils rapportent de l’histoire de la Bel- gique avant la domination romaine. Les premiers habitans connus de la Belgique furent des Celtes ou Gaulois. Justin avance, dans son Abrégé de l'Histoire universelle de Troque Pompée, qu'avant la fondation de Marseille par les Pho- céens, le VI: siècle avant l’ère vulgaire, les Gaulois étaient une 1 C'est la Belgique que désigne Cicéron lorsqu'il dit dans un de ses discours : « Quas regio- » nes, quasque gentes nullæ nobis antea literæ, nulla vox, nulla fraus notas fecerat, has noster » imperator (Cæsar) nosterque exercitus ac populi romani arma peragrarunt, Semitem tantum » Galliæ tenebamus antea. Cæteræ partes a gentibus aut inimicis huic imperio, aut infidis, » aut incognitis, aut certe immanibus et barbaris et bellicosis tenebantur. (Cicero De provinc. » consul.) » ? Cicero, £pist. 1. TI ep. 8, ad Quintum fratrem. 3 Cæs., Bel, gall., liv.L, ce. I; 1. IT, c. XV. “ «Quis porro præter periculum horridi et ignoti maris, Asia aut Africa aut Italia relicta , Germaniam peteret, informem terris, asperam cœlo , tristem cultu aspectuque, nisi si patria sit, (Tacit., Mores Germ., c. IL.) 64 MÉMOIRE nation entièrement sauvage et dans une ignorance totale des arts les plus nécessaires à la vie *. Quoi qu'il en soit de cette assertion de Justin, toujours est-il certain que c’est des Grecs que les Gaulois apprirent l'écriture et qu’ils n’eurent, jusqu’à l’époque de la domination romaine, d'autre alphabet que l'alphabet grec. Il parait cependant que, quoi- qu’ils connussent l’usage de l'alphabet grec, les Gaulois ne parlaient point la langue même des Grecs, puisque César, dans une conférence avec Divitiacus, chef et druide des Eduens, eut besoin d’un inter- prète pour se faire comprendre. Au reste, il n’y eut, avant la con- quête de César, que les peuples du midi des Gaules qui eussent adopté l’halphabet grec; les Belges et les autres peuples de la Gaule septen- trionale ne purent profiter de la civilisation des Phocéens de Marseille, puisqu'ils leur restèrent totalement inconnus *. De plus, dans les parties méridionales de la Gaule même, où l'écriture était connue, il n’exi- stait, avant la domination romaine, aucun ouvrage scientifique, puisque les druides, les seuls parmi les Gaulois qui s’appliquassent aux lettres et aux sciences, avaient pour principe de ne jamais rien écrire sur ces maticres et le défendaient de même à leurs élèves *. Ils alléguaient pour prétexte de cette défense, qu’ils craignaient qu’en écrivant sur les ma- tières qu'ils enseignaient, leurs disciples ne négligeassent de cultiver la mémoire. La véritable raison est qu’ils voulaient tenir le peuple dans l'ignorance, de crainte qu’en s’éclairant, il ne s’affranchit du joug sacerdotal. Les druides gaulois conservèrent ce principe jusqu’à la fin de leur existence; car Origène, auteur chrétien du IEP": siècle, rap- porte que, de son temps, il n’y avait encore aucun ouvrage écrit par 1 « Ab his (Phocæensibus) Galli et usum vitæ cultioris, deposita et mansuefacta barbaria, » et agrorum cultus, et urbes mœænibus cingere didicerunt. Tunc et legibus non armis vi- » vere, tune et vitem putare, tunc olivam serere consueverunt (Justini, ÆHüst., 1. LXI, e. IV.) » 2? Cæs., Bell, Gall., 1. 1, ce. XXIX , L. VE ec. XXVI. 3 Le passage de Justin cité plus haut, prouve clairement que cet historien n’a voulu désigner que la Gaule méridionale. 4 Cæs., Bell. Gall., 1. NT, c. XIII. 5 Cæs., Bell. Gall., 1. VE, c. IV. Picot, ist. des Gaulois, t. NL, p. 75. SUR LES DOCUMENS DU MOYEN AGE. 65 des druides ”. Ainsi ce n’était que par la tradition orale ou par les chants héroïques de leurs bardes que les Gaulois pouvaient avoir quelque connaissance de leur histoire; mais les notions historiques, transmises de cette manière, devaient être en grande partie corrompues et défi- gurées par la fiction *. Nous en avons une preuve dans les fables étranges que les écrivains grecs et romains ont débitées sur l’origine des Gaulois, et qu’ils tenaient des druides et des bardes gaulois. Ce sont les druides qui apprirent à César que les Gaulois étaient issus du dieu gaulois Dis *. C’est d’après les druides que Diodore de Sicile débite gravement qu'Hercule , dans son expédition contre Géryon, bâtit la ville d’Alise, et eut, de la fille d’un roi celtique, un fils qui, ayant succédé à son aïeul , donna à ses sujets le nom de Galates, d’où pro- vient celui de Galatie et de Gaule *. À l’époque de la conquête de la Belgique actuelle , par César, cette contrée n’était plus habitée par des peuples gaulois, mais par des Ger- mains encore plus illettrés et moins civilisés que les premiers *. Tout ce que César put apprendre d’eux * sur leur origine et leur histoire, c’est que la Belgique avait été envahie par les Germains à une époque qu’ils ignoraient probablement ; que ces derniers en avaient expulsé les Celte- Belges et s'étaient emparés de leur territoire ”. La date de cet événe- ment important est inconnue et l'était également à César. Peut-être 1 Orig. contra Celsum , 1.1. 2 « À l'égard des ouvrages de poésie que l’on faisait apprendre aux Celtes , dit Peloutier, il y en avait dont le sujet était historique. On rapportait en abrégé l’origine des peuples, leurs émigrations, leurs guerres et tout ce qui s'était passé de remarquable au milieu d’une nation. Dès lors on doit cesser d’être surpris que l’ancienne histoire fut mélée de tant de fables. Elle était entre les mains des poètes, c’est tout dire. On a soutenu que Lucain n’était pas poète ; parce qu’au lieu de se livrer à son imagination , non-seulement pour le tour, mais pour le fond même des choses, il s'était attaché trop scrupuleusement à l’histoire, » (Peloutier, Hist. des Celtes, t. I, p. 212.) 3 Cæs. Bell. Gall., lib. VI, c. XVII. 4 Diod. Sic. Biblioth. Histor., \. N, et Ammi. Marcel., 1. XN , c. IX. Excerpta ex Dione in fragm. vatic. ab Angelo Maïo editis , 1.11, p. 486. 5 Cæs. Bell. Gall., 1. IL, c. IV et XV ; Oros. Hist. rom., 1. NI, c. VIT; Plutarch. in Ces. 6 Ou plutôt des Rémois, Belges d’origine celtique. 7 Cæs.,1.Il, c. IV. Tow. XII. 9 66 MÉMOIRE remonte-t-elle à plus d’un siècle et demi avant notre ère , s’il est vrai, comme l'avance Tacite, que le nom de Germain ne commenca à étre connu que de l’époque des invasions des Teutons dans les parties des Gaules voisines du Rhin ‘; or, ce n’est qu’à l’an 551 de la fondation de Rome que le nom des Germains paraît dans l’histoire romaine. On lit dans les Fastes capitolins que, cette année, M. Claudius Marcellus remporta une victoire éclatante sur les Gaulois et les Germains (Ger- manis) *. César apprit encore que les Belges avaient été les seuls, parmi les peuples des Gaules, qui eussent résisté avec succès à l'invasion des Cimbres (vers l’an 112 avant Jésus-Christ) *; que les Atuatiques, qui habitaient, de son temps, dans une partie de la province actuelle de Namur, tiraient leur origine des Cimbres ‘; et enfin, qu’une partie du littoral de la Grande-Bretagne avait été peuplée par des pirates venus des côtes de la Belgique “. Ce sont là toutes les notions que César et les auteurs anciens venus après lui, ont pu recueillir sur l'histoire de la Belgique avant l’époque de la domination romaine. * Tacit., Mor. Germ., c. Il, et ce que nous avons dit sur ce passage à la pag. 40 de ce mémoire. 2 « M, Claudius M. f. M. n. Marcellus cos. de Galleis, Insubribus et Germaneis R. Martique à spolia op. retulit duce hostium vir. clastid. (Reichard, Germanien unter den Rôümern, p. 1; Grævius, Thes. antiq. rom. t. I, p. 173 ; Spener, Not. Germ. antiq., 1. II, c. IV, $ 6, in nota). Claudius at Rhenum trajectos arcuit hostes BerGicA cui vasti parma relata ducis Viridumari, genus hic Rheno jactabat ab ipso Nobilis erectis fondere gesa rotis (Propert., 1. IV, eleg. 10). I ya des éditions qui ont, au second vers, bellica, au lieu de belgica. NT 6272008 1 | EE CN 4 Ibid. 5 Ibid, 1. V, c. V; Tacite, Vita Agricole, c. XI; Beda, Hüist, eccles. Angliæ, 1 I, c. 1; Roberts, Sketch of the early history of the Cymry or ancients Bretons, etc. (Lond. 1808, in-8°). Il est probable que quelques colonies belges s’établirent aussi en frlande ; au moins Ptolemée place, dans cette île, un lieu nommé Wenapia qui paraît dériver son nom des Ménapiens ; mais tout ce que les historiens d'Irlande ont dit là-dessus est trop mélé de fables, pour qu'on puisse avoir des notions certaines sur ce sujet (Voyez Mageoghan , Hist. de l’rlande, 1.1, p. 61). SUR LES DOCUMENS DU MOYEN AGE. 67 Il résulte de tout ce qui précède, que les auteurs grecs et romains sont les seuls écrivains anciens qui aient laissé des documens sur l’his- toire ou la géographie des Gaules; que César est non-seulement le plus ancien auteur qui ait parlé des Belges , mais qu’il est encore le premier des Romains qui ait connu ce pays ; enfin que notre histoire ne peut remonter que jusqu à l’époque de la conquête de la Belgique par les Romains”; par conséquent, que tout ce que nos chroniqueurs du moyen àge, et même des auteurs modernes, amis du merveilleux, ont écrit sur des temps antérieurs, à commencer par la guerre de Troye, doit étre traité de fable, et que ces auteurs ne méritent quelque croyance dans ce qu’ils rapportent sur l’histoire de la Belgique jusqu’au Ve siè- cle, que lorsqu'ils sont d’accord avec les écrivains anciens. Les observations que nous venons de faire, pourraient nous dispen- ser de parler de tout ce qui se trouve dans l’ouvrage de De Guyse sur l’histoire de la Belgique à une époque antérieure à la domination romaine ; mais, comme c’est dans les Annales du Hainaut que la plupart des chroniqueurs du XVe et du XVIe siècle ont puisé leurs récits, nous ne croyons pas inutile de donner une analyse abrégée et raisonnée des faits principaux concernant la Belgique ancienne qui se trouvent dans les huit premiers livres de cette compilation volumineuse, encore peu connue et d’un prix fort élevé *. Les Annales historiques des nobles princes du Hainaut (Annales lastoricæ illustrium principum Hannoniæ) commencent par un pro- logue fort long , divisé en vingt-cinq chapitres. Nous sauterons les onze premiers chapitres, dans lesquels l’auteur explique simplement les mo- tifs qui l’ont engagé à écrire son ouvrage; ils sont entièrement étran- gers à notre question. Dans le chapitre XII, J. De Guyse cherche la position d’une re 1 A l'exception du petit nombre de faits que César et Tacite, après lui, ont rapportés sur une époque antérieure , comme nous l'avons observé plus haut ; mais ces faits isolés ne constituent pas une histoire suivie. 2 Avant que le marquis de Fortia d'Urban n’eût publié une édition complète des {nnales de Jacques De Guise (Paris, 1826-1833, 15 vol. in-8°), il n’avait été imprimé de cet ouvrage que des fragmens et une traduction francaise fort défectueuse. 68 MÉMOIRE tendue ville de Belgis. Jules César, Orose, Isidore de Séville, Suétone, Hélinand et tous les écrivains anciens ont gardé, dit-il, le plus strict silence sur cette ville. Mais le manque absolu de sources authentiques, sur cette ville chimérique, n’arrête pas le bon chroniqueur, qui aime mieux s’en rapporter à des écrivains du moyen âge aussi crédules que lui, qu'aux histoires des Romains , des Troyens et des Grecs. L'histoire réputée authentique de Trèves, prétend que c’est Trèves qui est la fameuse ville de Belgis, et qu’elle reçut ce nom de Belgius, duc des Tréviriens; mais Jacques De Guyse y oppose l’autorité du Franciscain Barthélemi, auteur du XIVne siècle, qui, dans son ou- vrage intitulé Des propriélés des choses (De proprietatibus rerum), livre XV, place, d’après Érodoc, géographe inconnu du moyen àâge, la ville de Belgis à Beauvais‘. Dans les chapitres XIIT, De Guyse combat l’opinion de Bathélemi, par les argumens de la scolastique et par le témoignage de Nicolas Rucléri, de Clairembaud , de Lucius de Tongres et Hugues de Toul, sources peu authentiques pour nous, mais fort respectables pour un écrivain aussi crédule que Jacques De Guyse. Le passage de Hugues de Toul, dans lequel il est dit que le roi Bavo, de la race de Priam, bâtit la ville de Belgis et y fit ouvrir sept routes par lesqueiles on pouvait parcourir le monde entier, paraît surtout à notre auteur d’un grand poids pour décider la question. Ce qui le confirme davantage dans son opinion, c’est que Lucius de Tongres, dans le sixième chapitre de ses histoires, rapporte que cinq ans après la destruc- tion de Troye, Bavo, prince de Phrygie et cousin de Priam, roi de 1 On sait que César parle d'une contrée appelée Belgium , qu’il ne faut pas confondre avec la Belgique qui était beaucoup plus étendue. Le Belgium comprenait les anciens diocèses de Beauvais , d'Amiens, d'Arras, et probablement une partie de l'ile de France et de la Normandie à droite de la Seine (Raoux, Dissertation sur l’origine du nom des Belges; Nouv. MË. DE L’ACADÉMIE, t. IT , p. 413 et de Fortia d'Urban, Tableau histor. et géogr. du monde , t. VI, p. 273). Les chroniqueurs ignorans du moyen âge ont, comme de coutume, mal compris César, et ont pris le Belgium pour une ville. De là la fable d’une prétendue ville de Belgis, et comme ils ignoraient également la véritable position du Belgium , ils ont placé cette ville de Belgis tantôt à Trèves, tantôt à Beauvais, et plus souvent à Bavai, dont le nom leur semblait avoir quelque ressemblance avec celui de Belgis ou Belgium. SUR LES DOCUMENS DU MOYEN AGE. 69 Troye, jeta les fondemens d’une cité très-puissante sur les confins de l’Europe, en un lieu élève, éloigné des fleuves et des marais et ap- partenant aux Trévirois , à trente mille pas de l'embouchure du Rhin et de la mer; ville qui porta d’abord le nom de Belis, puis celui de Belgis et enfin celui d’Octavie. De tout cela, le chroniqueur conclut et démontre à priori et à posteriori, que la ville de Belgis ne pouvait être ni Trèves ni Beauvais. Nous passons encore le quatorzième chapitre, dans lequel l’auteur proteste de sa bonne foi à ne dire que la vérité et à rapporter conscien- cieusement les extraits des écrivains dont il s’est servi pour faire sa compilation. Dans le quinzième chapitre, il traite de la division du globe en trois parties, tel qu’il l'était de son temps , et de la position géographique de la Belgique, d’après Orose, Isidore de Séville et Barthélemi , Des propriétés des choses , liv. XV, c. XXVI. Il s’appuie de nouveau sur le témoignage de ce dernier pour prouver que la ville de Belgis était placée à Bavai, et que c’est de cette ville que la Belgique dérive sa dénomina- tion. Il conclut des nombreux restes anciens découverts journellement à Bavai , que c’était la plus grande ville de la Gaule-Belgique *. Jacques De Guyse tâche ensuite de répondre aux objections de ceux qui nient la réalité de l’ancienne histoire des Belges et l’existence de la ville de Bel- gis, parce qu'aucun écrivain romain n’en a fait mention. Le silence de ces écrivains ne prouve pas plus, à cet égard , selon notre chroniqueur, qu’il ne prouve la non existence des royaumes des Scythes, des Assy- riens, des Ammonites, des Philistins et de plusieurs autres royaumes qui existaient avant les Romains, ou même de leur temps, et dont leurs historiens n’ont point parlé. Ce raisonnement est faux : nous n'avons nullement besoin que les Romains aient écrit l’histoire de ces peuples pour croire à leur existence; il suffit que leur histoire ait été écrite par des écrivains contemporains, n'importe de quel pays ou 1 «Sed plura ædificia, plura mirabilia, plures maceriæ, plures novitates seu vetustates a ma- » _gnis temporibus repertæ sunt, et quotidie reperiuntur in territorio longaque circumferentia » et loco in quo dicta villa collocatur, quam in quibuscumque civitatibus Galliæ. » 70 MÉMOIRE de quel nation ils soient. Si les écrivains romains n’ont point parlé des Philistins et des Ammonites, les livres saints, bien plus anciens qu’au- cun des ouvrages romains qui nous restent, sont une source bien au- thentique et plus authentique même que ne le seraient les écrits d’auteurs romains, qui vécurent plusieurs siècles après l’extinction de ces nations. Mais quelles autorités peut-on invoquer pour l’histoire des prétendus rois belges antérieurs à la naissance de J.-C. ? Sont-ce des auteurs belges ou gaulois? Nous savons positivement qu’à l’arrivée de César, les Belges ignoraient jusqu’à l’écriture *, et que, long-temps après, les druides, seuls dépositaires de la science dans les Gaules, n'avaient encore écrit aucun livre. Il ne devait pas même exister une tradition orale chez les Belges à cette époque, puisqu'ils avaient à peine une idée vague de leur origine et de leurs récentes émigrations, comme nous l'avons déjà observé plus haut. Au lieu d'écrivains contemporains, nous n’avons, pour l’histoire de la Belgique avant l’arrivée des Romains, que des chroniqueurs igno- rans des XITIme et XIVe siècles , dont les ouvrages sont farcis de tant de contes ineptes et ridicules, qu’on ne peut leur accorder la moindre foi, eussent-ils même été écrits à une époque beaucoup plus reculée. Ces chroniqueurs nous représentent la Belgique comme étant, plus de 2000 ans avant l’ère vulgaire , aussi florissante, aussi riche , aussi civi- lisée qu’elle l’est de nos jours, et gouvernée par des souverains dont la puissance surpassait celle des plus vastes monarchies du monde ; tandis que César et des auteurs postérieurs nous dépeignent cette même Bel- gique comme un pays inculte, couvert de forêts et habité par des peu- 1 Litterarum secreta viri pariter ac feminæ ignorant, dit Tacite en parlant des Germains. La plupart des auteurs modernes prétendent que, par ces mots, Tacite faisait entendre que les Ger- mains n’avaient aucune connaissance de l'écriture ; d’autres sont d’avis que Tacite a voulu mar- quer qu’ils n'avaient pas l'usage des lettres d’amour et billets doux. On peut concilier l’une et l'autre opinion , en disant que Tacite rapporte que les Germains ignoraient cette dernière cou- tume, parce que l'art d'écrire leur était inconnue. Quoi qu’il en soit, il paraît certain que les lettres runiques, les premières dont on ait fait usage dans le nord de l’Allemagne, n’ont été connues que depuis le Ve ou le Vie siècle de l’ère vulgaire, bien que plusieurs auteurs mo- dernes leur donnent une origine beaucoup plus ancienne (voir sur ce sujet Mallet, Zntroduction à l'histoire du Danemarck). SUR LES DOCUMENS DU MOYEN AGE. 71 plades peu nombreuses, dont la manière de vivre ressemblait assez bien à celle des sauvages de l'Amérique ”. La ville de Belgis (ou de Bavai, car Jacques De Guyse se déclare pour l'opinion de ceux qui placent la prétendue ville de Belgis à Bavai) était, selon notre chroniqueur, la plus grande ville de la Gaule-Belgi- que. Suivant Hariger et Gilles d’Orval, c'était Tongres qui était la ville la plus considérable, non-seulement de la Belgique, mais même de toute » gique, la Gaule, puisque ces auteurs ne trouvent à lui comparer que Rome et Carthage. Mais la saine critique, basée sur les vraies sources de l’his- toire, prouve que Bavai et Tongres n'étaient, sous la domination des Ro- mains, que des villes médiocres, de simples villes de province. À peine trouve-t-on le nom de Bavai mentionné deux ou trois fois dans les ou- vrages des anciens, et seulement dans ceux du Ie et du IVe siècle *. Quoi qu’en disent des écrivains modernes , les ruines de cette ville sont bien moins remarquables que celles de plusieurs autres villes obscures des Gaules. Sa situation démontre évidemment qu’elle doit son origine à un camp romain; et il est certain que Bavai n’a pu exister, comme ville avant la conquête de la Belgique par les Romains, puisque les Gaulois, premiers habitans de la Belgique , ne construisaient point de villes *, et qu’il en était de même chez les peuples germains qui, à l’époque de la conquête de César, occupaient la Belgique *, à moins qu’on ne veuille donner la qualification de ville à quelqu’assemblage de chaumières ou à quelque retranchement construit en bois *. 1 César, Bell, Gall., 1. I-VI, passim. Strabo geogr., 1. IV. 2 Dans Ptolemée , la table de Peutinger et l’Itinéraire d’Antonin. La notice des Gaules, qui n’est autre chose qu’un catalogue des villes existant dans les Gaules à la fin du [V° ou au com- mencement du V®* siècle, ne connaît plus Bagacum ou Bayai, détruite probablement à cette époque et remplacée, comme chef-lieu des Nerviens , par Camaracum (Cambrai), simple station de poste au III” siècle. 3 Dulaure, Des cités, des lieux d'habitation, des forteresses des Gaulois, de leur architecture civile et militaire avant la conquête des Romains (M£x. DE LA soc, ROY. DES ANTIQ. DE France , t. Il). % Surtout les Nerviens qui habitaient le territoire de Bavai et passaient pour le peuple le moins civilisé de la Belgique. (Cés., Bell, gall., 1. IE, c. IV et XV, Orosii Hist. rom., 1. VI, ce. VI, Plutarch. in Cœsarem). 5 Tacit., Mor. Germ., c, XVII; Cæs., Bell. qall., 1. V, e. XX; 1. VI, c. XXX et XXXIV; Strabo, 1. IV et V; La Marne, Histoire du comté de Namur, 1. 1, préf. histor. 72 MÉMOIRE Revenons à Jacques De Guyse. Le chroniqueur finit le quinzième chapitre de son prologue par prouver que Trèves n’était point la ville de Belgis. Il convient qu’il fut un temps où Trèves portait le nom de Beleis, qu’elle reçut de Belgius, chef des Trévirois : « Mais ce Bel- gius, ajoute notre crédule compilateur, descendait de la ville de Belgis (en Hainaut), et était fils du grand-prêtre de Bel, de la cité de Belgis. » La grande Belgis ou Bavai, dit-il, s'appelait simplement Belgis ou Belgis fogata et armata , tandis que Trèves portait le nom de Belgis comata , et Bauvais celui de Belgis gallica. Le bon moine, ou les chroniqueurs qu’il a extraits, auront substitué à la Gallia to- gata et à la Gallia comata des Romains, la Belgica togata et armata ; et, comme ils ont fait une ville du Belqium de César, ils ont également métamorphosé en villes ces deux provinces, qui d’ailleurs n’ont jamais existé. Dans le chapitre XVI, Jacques De Guyse revient encore sur le plan de son livre, et sur l’ordre chronologique qu’il y a observé. Il déclare qu’il commencera l’histoire du Hainaut à la prise de Troye. Dans le chapitre XVII, il donne un extrait de l’histoire fabuleuse de Trèves ', dans lequel est décrite l’origine de cette ville. Trèves fut fondée, selon cette chronique fabuleuse, par Trebeca, fils de Ninus, premier roi d’Assyrie, l’an 1250 avant la fondation de Rome, et l’an 7 du patriarche Abraham. C’est là, sans doute, une origine fort respec- table , et il y a peu de villes en Europe qui pourraient se vanter d’une existence aussi ancienne *; toutefois il est probable que la ville de Trèves n’existait pas avant l’époque de la domination romaine. Les 1 Cette chronique est probablement la même que celle qui a été imprimée dans l’Æistoria diplom. Trevir, de l’'évèque ab Hontheim. N'ayant pas actuellement cet ouvrage à notre disposi- tion, nous n’osons l’assurer positivement. Massenius a fait avec beaucoup de jugement et une saine critique , des recherches savantes sur la cause et l’origine de toutes les fables imaginées au moyen âge, sur l’histoire ancienne de Trèves. (Massenii Antiquitates et Analles Trevirensium , lib. I). 2 Ilest parlé de ce Trebeca ou Trebeta dans le livre I de l'Histoire romaine d'Orose. La res- semblance entre le nom de Trebeta et celui de Trèves a engagé les chroniqueurs romanciers du moyen âge à attribuer à ce personnage la fondation de la ville de Trèves. SUR LES DOCUMENS DU MOYEN AGE. 73 Tréviriens étaient un peuple germanique, et les Germains n’habitaient point des villes *. Ce fut très-probablement Auguste qui fonda la ville de Trèves, à laquelle il donna le nom d’Auwgusta Trevirorum , et dont il fit une colonie romaine. Strabon est le plus ancien auteur qui ait fait mention de cette ville. Le chapitre XVIII traite de la position géographique de la Grèce. Dans les chapitres XIX-XXIIL, on trouve la relation de la guerre de Troye. Tout cela n’a aucun rapport à notre question. Il en est de même des onze chapitres suivans (XXIII-XXXIV), dans lesquels on lit une de- scription de plusieurs contrées de l’Europe. Dans le chapitre XXXV, où l’auteur donne l’étymologie fabuleuse du nom de différens peuples de l’Europe, il dit que les Ménapiens dé- rivent leur nom de Ménapus, chef des Morins. Ceci parait un peu étrange ; car il est connu que les Morins étaient un peuple d’origine celtique , tandis que des preuves nombreuses attestent que les Ména- piens étaient d’origine germanique. Les Morins habitaient une partie des Gaules (le territoire de Boulogne et de Térouane), bien long-temps avant que les Ménapiens n’eussent passé de la Germanie dans la Flan- dre. Et puis, qu’est-ce donc que ce Ménapus, personnage dont aucun historien n’a parlé avant Jacques De Guyse ou le chroniqueur que celui-ci copie ici sans le citer *? «Les Ménapiens prirent ensuite, ajoute le bon De Guyse, le nom de Tarquiniens, à cause du roi Tarqum, et ils tiennent de Turnus celui de Tournaisiens. » Tarquin, roi de Rome, n’aurait-il pas pu être celui des Ménapiens ? La chose ne souffre au- cune difficulté et paraît fort simple à un chroniqueur du moyen âge. Il faut être bien grand partisan des étymologies extravagantes, pour déduire le nom des Nerviens de celui de Minerve , comme le fait Jacques De Guyse. De Minerve, il ne faut que retrancher la première syllabe 1 Tacit., M. G., ce. XXVII ; Cæs., Bell. Gall., 1. VI; Strabo, I. V, Seneca de provid. div. 2 Il nous paraît hors de doute que du nom des Ménapiens, les chroniqueurs auront dérivé celui de ce prétendu Menapus, comme du nom des Bataves ils ont forgé celui d’un prétendu Batus, et de même que dans la dénomination de Brabant ils ont trouvé celle de Brabo, etc. Ton. XII. 10 74 MÉMOIRE pour trouver le nom des Nerviens tout entier. En vérité, Goropius Be- canus n’aurait pu être plus ingénieux. Mais ce qu’il y a de plus plai- sant, c’est que Minerve, la déesse des arts et des sciences, la divinité tutélaire des Athéniens, le peuple le plus civilisé de l’antiquité , est ici, sans doute, par antithèse, la divinité principale d’un peuple germa- nique , qui nous est représenté par César et d’autres écrivains anciens, comme la plus sauvage et la plus barbare de toutes les peuplades de la Belgique. Si Tarquin-l’Ancien était roi des Ménapiens, comme le dit J. De Guyse, rien n'empêche de croire que Tarquin-le-Superbe ne fut roi des Nerviens; à chacun sa part: «On les appelle aussi (c’est-à-dire les Nerviens) Brabantiens, continue J. De Guyse, ou plutôt Barbantiens et encore Tarquins Barbantiens ou Superbes (Tarquinii Barbantii aut Superbi), ce qui signifie la même chose en latin (guod idem sonat apud Romanos).» Mais c’est assez nous arrêter à ces niaiseries, la compilation du moine de Valenciennes nous en offrira bien d’autres. Le trente-cinquième chapitre, dont nous venons de parler, est le dernier du prologue. Ensuite commencent les Annales des illustres princes du Hainaut, comme l'annonce J. De Guyse en tête du pre- mier chapitre du livre premier de son ouvrage. Dans ce chapitre J. De Guyse traite de la naissance et de l’origine de Bavo, premier prince du Hainaut et fils de la belle-sœur de Laomédon , mère de Priam «de sorte, dit J. De Guyse, que Priam et Bavo étaient enfans des deux sœurs. » Priam, comme chacun sait, était roi de Troye; Bavo était roi de Phrygie. Priam et Bavo , pendant qu'ils étaient tous deux en Phrygie, ayant eu nouvelle de la mort funeste de Laomédon et de la destruction de Troye, conclurent ensemble un traité d'alliance. Priam retourna à Troye, dont il releva les murs, et envoya Anténor en Grèce pour de- mander satisfaction des injures qu’on lui avait faites et réclamer sa sœur Hésione. Mais les Grecs ayant très-mal recu Anténor, Priam se pré- ! Les peuples du Nord n’ont connu ni adoré aucune divinité grecque ou romaine. SUR LES DOCUMENS DU MOYEN AGE. 75 para à leur faire la guerre. Tel est le sujet du premier chapitre. Nous avons vu plus haut que les chroniqueurs font descendre les Francs de Priam et des Troyens. C’est, d’après cette fable, qu’aura été inventée la prétendue origine de Hennuyers. Il faut ajouter encore que les anciens chroniqueurs et annalistes, pour s’attirer les bonnes grâces et les faveurs des princes, leur composaient, souvent aux dé- pens de la vérité, une généalogie qui remontait jusqu'aux plus illustres héros de l'antiquité la plus reculée, voire même jusqu’à Adam ‘. C’est ainsi qu’en a agi J. De Guyse à l'égard des comtes du Hainaut. Mais quel était donc ce Bavo, roi de Phrygie, cousin-germain de Priam ? La chose peut, selon nous, s’expliquer de la manière suivante : comme le nom de Trebeca avait donné l’étymologie de celui de la ville de Trèves, la ville de Belgis ou Bavai, la plus ancienne du Hainaut, de- vait également fournir celle du sien à un personnage non moins fameux que Trebeca. Ainsi la fable de Bayo eut probablement pour fondement le nom de Bavai, et l’histoire de la guerre de Troye, sur laquelle les chroniqueurs brodèrent tous les contes qu’on trouve rapportés dans les annales de J. De Guyse. Chapitre IT, IE, IV et V. Bavo, qui était un grand astrologue et né- cromancien , découvre, à l’aide des sorts, la destruction de Troye. Il paraît, par toutes les explications que J. De Guyse donne dans ces cha- pitres, qu'il était lui-même fort habile dans l'astrologie judiciaire, qui faisait un des sujets les plus importans des études du moyen âge. Chapitre VI. Bavo, après avoir pourvu à la sûreté de son royaume de Phrygie , se rend, avec tous ses trésors et ses troupes, à Troye, pour remplir le traité qu’il avait conclu avec son cousin. Priam lui confie la garde d’une grande partie de la ville. Lorsque la guerre avec les Grecs eut déjà duré plusieurs années et après la mort d’Hector et de Troïle, fils de Priam, Bavo se souvenant toujours de la prédiction des dieux et du sort, sbsonililé Énée, Anténor, Anchise, Polidamus et les 1 La généalogie de la maison de Croy s'étend jusqu’à Adam et Êve; celle des ducs de Levi, en France , ne remonte que jusqu’à Salomon et la sainte Vierge, 76 MÉMOIRE autres conseillers de Priam, et les exhorta à s’unir, pour engager Priam à faire la paix et à mettre fin à cette guerre, dont l'issue devait être si funeste. Mais ils ne purent fléchir l'esprit du vieux monarque , et Troye éprouva le sort que chacun connait. Dès que la ville fut prise par les Grecs, tous les habitans se réunirent autour de Bavo, qui, comme souche des comtes du Hainaut, devait être indubitablement le plus brave des Troyens. Enfin Bavo sortit heureusement de la ville avec tous ses trésors, et suivi d’un peuple innombrable. Chapitre VIT. Les Troyens conduits par Bavo, après avoir long-temps erré dans la mer d'Afrique et le long des côtes de l'Espagne et d’Albion, débarquèrent à l'embouchure du Rhin. Chapitre VIIL. Bavo ayant tiré ses vaisseaux à sec sur le rivage de la mer, trouve un pays couvert de bois et inhabité, où il dresse ses taber- nacles. «Mais voilà que tout à coup, dit J. De Guyse, un loup blanc sauta au milieu des tentes. De jeunes Troyens se mettent à sa poursuite; et, après l'avoir suivi pendant trois jours, ils arrivent sur une montagne près du temple de Bel, où l'animal leur échappe, en s’enfonçant dans un antre. » Les chasseurs , après avoir pris différens renseignemens sur le temple et le pays qu'ils venaient de découvrir, se hatèrent de revenir auprès de Bavo pour lui en rendre compte. Bavo connut, par leur récit, que c'était là la terre que Jupiter lui avait assignée. Il plia aussitôt bagage, et se rendit avec son peuple au temple de Bel, construit en marbre et desservi par des prêtres tréviriens. IL était situé au milieu d’un pays élevé, riche et couvert de bois, mais ne renfermant qu’un petit nombre d’habitans sauvages. Bavo dressa ses tentes autour de ce temple, et y vécut en paix pendant plusieurs années, occupant plus de quatre mille pas de terres et forêts. Chapitre IX et X. Le roi Bavo, après avoir consulté sur le lieu, le plan, le temps, le jour et l'heure de la fondation de la ville qu’il dési- rait bâtir, les astres, l’hydromancie, la pyromancie , le nécromancie et autres arts semblables, dans lesquels les Grecs et les Sarrasins étaient fort habiles, dit J. De Guyse, jette les fondemens de la ville de Bavai. SUR LES DOCUMENS DU MOYEN AGE. 77 J. De Guyse fait de nouveau preuve, dans ce chapitre, d’une grande érudition astrologique. Chapitre XI. Le roi Bavo crée 60 ducs et autant de comtes pour gouverner son peuple et pour le conduire à la guerre. Il établit 60 chas- seurs sous chaque duc et 30 sous chaque comte. Chaque chasseur commande cent cinquanteniers, et chaque cinquantenier 50 cheva- liers. Cependant, deux ans ne s'étaient point encore écoulés depuis que les Troyens s'étaient fixés près du temple de Bel, que les Trévi- riens, comme propriétaires du territoire, exigèrent de ces nouveaux hôtes un tribut annuel de 1000 sangliers, 1009 cerfs et 1500 vaches, preuve qu’à cette époque, il n’y avait pas disette de bétail et de gibier dans le Hainaut. Mais Bavo, cousin de Priam, ne connaissant que le droit du plus fort, refusa nettement et déclara que c'était au contraire aux Tréviriens à lui payer le tribut. La guerre fut donc déclarée, et, comme on s’en doute bien, Bavo fut vainqueur. Les trente ducs et les quinze comtes qu’il mit à la tête de son armée, pillèrent et détruisirent Trèves. Bavo épargna cependant le dieu Bacchus, dont il emporta le simulacre et les objets destinés à son culte, résolu de lui bâtir un temple, en mémoire de sa victoire. Enfin il parcourut, pendant deux ans, les bords du Rhin, soumit toute la contrée, et revint dans le Hainaut chargé de butin. Chapitre XII. Son expédition contre les Tréviriens terminée, le roi Bavo envoya des messagers par toute l’Europe, l'Afrique et PAsie Mineure pour en faire venir des architectes, maçons, charpentiers et constructeurs habiles pour travailler à la construction de la ville de Bavai. «Quoique Nicolas Rucléri et Clairembaud semblent croire , ajoute le judicieux chroniqueur , que tous les temples et tous les palais (de Bavai ou Belgis), aient été construits par Bavo, le premier roi, cela ne me paraît pas vraisemblable, et je pense qu’il faut plutôt s’en rapporter à Lucius, qui déclare que plusieurs de ces édifices furent élevés par divers prêtres et à différentes époques. » Nous croyons pouvoir ne pas être de l’avis ni de Rucléri, ni de Clairembaud, ni de J. De Guyse; mais n’en déplaise à Bavo et aux prêtres de Bel, tous 78 MÉMOIRE les monumens de Bavai furent construits par les Romains, comme le démontre le Recueil des antiquités Gauloises du chanoine de Bast. Dans le chapitre XIIL, l’auteur fixe à l’an du monde 2788, la fon- dation de Bavai par Bavo. Dans ce chapitre et le suivant, on trouve un long extrait de Lucius de Tongres, qui renferme la description des édifices construits par Bavo dans la ville de Belgis. Les murs du palais de Bavo avaient 70 coudées de hauteur. Le palais était orné de quatre tours et de deux portes, hautes chacune de 100 coudées; chaque côté des tours avait 300 coudées carrées. L’épaisseur des murs du palais était de 18 à 25 coudées. Les murs de la ville étaient flan- qués de 1000 tours et percés de 7 portes bâties par Bavo, en l’hon- neur des 7 planètes à orbite oblique; enfin ces portes étaient surmon- tées de 7 temples. Le reste de la description porte le même caractère de vérité. On croyait, d’après Strabon, Pline et d’autres auteurs an- ciens, que les grandes routes des Gaules avaient été construites par Agrippa, gendre d’Auguste, mais Lucius de Tongres nous apprend que le grand Bavo eut aussi sa part à ces travaux. « Bavo, dit-il, fit aussi établir, dans des temps favorables, sept grandes routes, pavées de pierres carrées, en l'honneur des sept planètes ou fausses divinités , et ordonna que chaque route porterait le nom de l’idole de la porte ou du temple auquel elle aboutirait, etc." » Enfin nous ap- prenons de Lucius de Tongres et de Rucléri, que la ville de Bavai ou de Belgis, fut encore ornée par Bavo, de temples consacrés à Bacchus, à Linthie, à Minerve, à Vénus, au Soleil, au redoutable Mars , à Jupiter et à Saturne, le père bienfaisant des dieux. Dans le chapitre XIV, Bavo décide que ses états formeront un 1 Plusieurs chroniqueurs du moyen âge, entre autres Sigebert de Gembloux, attribuent à la reine Brunehaut , la construction des routes qui aboutissaient à Bavai. Peut-être que cette prin- cesse les fit réparer , et que, par flatterie ou par ignorance , on lui en attribua la première con- struction. Au reste un passage de Strabon et une inscription trouvée en 1777, au village de Quarte sur la Sambre, près de Bavai , prouvent à l'évidence que les routes anciennes de la Bel- gique, appelées vulgairement chaussées Brunehaut, furent construites par M. Vipsanius Agrippa, proconsul des Nerviens et gouverneur de la Belgique, sous le deuxième consulat d’Auguste. (Strabo. Geogr., L. IN et Heylen. Dissert. de monwm. Roman. in Austriaco Belg. repert). SUR LES DOCUMENS DU MOYEN AGE. 79 royaume héréditaire, dont le prince des druides sera le souverain. Sept archiflamines, dix ducs, autant de comtes et neuf autres prêtres institués dans les neuf temples de la cité, devaient assister Parchi- druide dans ses fonctions. Bayo institua également des chasseurs, des chevaliers, des augures, des magiciens et des pasteurs , qui devaient être élus par le collége des comtes, des chiliarques, des questeurs et des censeurs, choisis pour tout le peuple en corps; enfin, pour cou- ronner l’œuvre, Bavo nomma, devant l’assemblée du peuple, l’ainé de ses fils prince des druides. Dans ce chapitre, extrait en entier de Lucius de Tongres, on trouve un singulier amalgame de dignités civiles et religieuses et de magis- tratures gauloises, grecques et romaines. Ce que l’auteur avait lu sur les druides des gaulois, sur les chiliarques des Grecs, sur les flamines, les questeurs et les censeurs des Romains, il l’a adapté au gouvernement fabuleux du roi Bavo et de ses successeurs. Dans le chapitre XV, extrait du même Lucius de Tongres, tous les dieux des Belgis prédisent, chacun à leur tour, le sort futur de cette ville. Leurs oracles sont passablement obscurset conçus dans un style fort ridicule. Une des réponses les plus singulières est celle du dieu Bel : « Le Subtolanus, l’Eurüs et le Vulturne endommageront avec le temps les murs de la ville; et lAuster, lAfricus et le Notus, feront à jamais la guerre à ses fils; et quoique le Zéphyr semble leur être favo- rable, qu’ils ne sy fient pas, parce qu’à la fin les premiers les mor- deront comme une couleuvre. Les vents d’Aquilon et de Nord-Est, s’uniront avec Borée, et lorsque soufllera le Vulturne, on comptera les tours de la ville; enfin l’Eurus en fouillera les fondations. L'Eurus et le Notus enverront un réformateur ; mais le Vulturne renversera le tout.» Le chapitre XVII est encore extrait textuellement de l’ouvrage de Lucius de Tongres. On y lit que la réponse du dieu Bacchus, annon- çant qu’un reste de traitres vendengerait le royaume des Belges, occasionna une grave sédition dans la ville de Belgis. Le peuple appli- quait cet oracle aux Troyens, compagnons d'Énée et d'Anchise que Bavo avait rencontrés dans la mer de Toscane et qui l'avaient suivi 80 MÉMOIRE en Belgique. Il y eut des voies de fait et du sang répandu. Bavo, interposa son autorité et engagea les Troyens, qui avaient excité le courroux populaire, à s’éloigner de la ville de Belgis et à s'établir ail- leurs. Turgontus, un des chefs des émigrans, fonda la ville de Tongres, Mossellanus celle de Mosellane ou de Trèves, Morineus celle de Mo- riane ou de Térouane, et Clarineus ou Carineus celle de Clarinée. J. De Guyse ajoute un passage de Lucius, qui fait entendre qu’on ne savait point au juste où était placée cette ville de Clarinée, dont on ne trouve aucune mention dans les auteurs anciens. Les uns fixaient cette ville près de Compiègne, d’autres à Gand ; il y en avait enfin qui disaient que c'était la même que la ville de Mercurialis, appelée ainsi du nom de Mercure, et dans la suite Ablatona du latin ablata”, parce que César l'avait prise d'assaut, «de même qu'après l’irruption des Vandales, ajoute J. De Guyse, d’après Lucius de Tongres, la cité des Morins fut nommée Térouane.» Cette réflexion de Lucius de Tongres, admise sans contes- tation par J. De Guyse, prouve l'ignorance de ces deux chroniqueurs ; car la ville de Térouane portait ce nom bien long-temps avant l’inva- sion des Vandales au IVe siècle; Ptolemée et les itinéraires romains ne l’ont jamais désignée que sous cette dénomination. La ville de Cla- rinée ou de Carinée n’exista jamais que dans l’imagination de Lucius de Tongres ou des auteurs qu'il a suivis. Nous avons déjà parlé ailleurs de l’origine de Tongres; nous ne dirons donc rien ici de la prétendue fondation de cette ville par Turgontus, personnage dont l'existence est aussi bien prouvée que celle du géant Antigonus d'Anvers. Chapitre XVIIL. Mort de Bavo. Cet événement eut lieu du temps de Samson, environ 1175 avant J.-C. Le corps du héros fut brülé au théâtre de Bacchus, avec celui de plusieurs ducs, comtes, chasseurs et chevaliers, qui se dévouèrent à la mort pour accompagner leur mai- tre. L’archidruide Belgineus, fils aîné de Bavo, succéda à son père. Le chapitre XIX, traitant de l’origine des Latins et des Romains, n’a aucun rapport à notre question. ! Blaton, village de l’arrondissement de Tournai. SUR LES DOCUMENS DU MOYEN AGE. 81 Dans le chapitre XX, Lucius de Tongres décrit les événemens du règne de l’archidruide Bavo-Belgineus ". Ce prince défendit, sous peine de mort, l’usage de l'or , de l’argent et des pierres précieuses ; ordonnant au peuple d'offrir, dans les temples, tout l’or et l'argent qu'il pouvait avoir, pour en faire des statues aux dieux. Il ordonna encore que toutes les personnes des deux sexes passeraient en plein air et à la belle étoile les mardis et vendredis, jours consacrés à Mars et à Vénus. Il en agit ainsi, dit le chroniqueur, afin d’endurcir les corps de ses sujets à la fatigue. Il acheva la construction des temples de Bel, de Mars et de Mercure, et construisit des aquéducs pour pourvoir d’eau la ville de Belgis. Dans tout cela il n’y a rien d’extraor- dinaire; mais ce qui l’est davantage, c’est que Belgineus procréa quatre-vingt-cinq enfans mâles et cent filles. J. De Guyse ajoute que Clairembaud semble affirmer que Bavo, l’ancien favorisé de Diane et guidé par un cerf blanc, découvrit la fontaine des fleurs, dans la- quelle se baignaient les faunes, les satyres et les nymphes, et que c’est de cette fontaine qu’il tira l’eau pour alimenter les aquéducs de Belpis. Le chapitre XXI est encore une digression étrangère à l’histoire des Belges : il renferme l’histoire d’Héli et de Samuël, juges d'Israël , et l’origine fabuleuse du royaume de la Grande-Bretagne. Le chapitre XXII contient l’histoire du règne de Bavo-Leoninus, successeur de Belgineus et prince très-cruel, puisqu'il se nourrissait, lui et sa famille, de chaire humaine. Il acheva le temple de Bac- chus, et eut quarante fils que, malgré les lois existantes, il créa tous ducs et avec lesquels il partagea le gouvernement de ses états. Le peuple se révolta contre eux, et en massacra plusieurs; ceux qui échappèrent à la mort, se livrèrent à la tyrannie. Bavo-le-Lion, voyant le mauvais état où ils avaient réduit son royaume, rétablit l'élection ordinaire des ducs, et obligea les tyrans, ses fils, à se retirer au delà des montagnes. Bavo-le-Lion eut encore, dans sa vieillesse, 1 L'étymologie du nom de ce prince est Bavai Belgis. Tom. XII. 11 82 MÉMOIRE treize fils, dont l'éducation fut confiée aux archiflamines; ceux-là s’abstenant de se nourrir de sang humain, furent élevés dans la crainte des dieux. IL fit la guerre à Goffarius, roi d’Aquitanie , et s’empara de ses états jusqu’à la mer. Pour dernier acte, il établit douze de ses fils rois des diverses cités de ses états, et nomma l’ainé archidruide. À sa mort, soixante de ses officiers et vingt-deux de ses femmes se brülèrent sur son bücher. Le chapitre XXIIT traite de matières étrangères à notre sujet. Chapitre XXIV. Bavo-Lupinus, grand nécromancien et enchanteur, bâtit un palais à l'extrémité méridionale de la ville, près du temple de Jupiter. Ce palais qui portait encore, du temps de Lucius de Tongres, le nom de palais du Loup, donna, selon ce chroniqueur, le nom au village de Louvignies, à une demi-lieue S.-0. de Bavai. Il acheva aussi trois temples avec leurs idoles. Dans le chapitre XXV , J. De Guyse donne un abrégé des principes de l'astrologie judiciaire, dans laquelle il était fort savant, comme nous l'avons déjà observé précédemment. Le chapitre XXVII traite des enchantemens et transformations de Bavo-le-Loup. Nous nous croyons dispensé d’en donner l'analyse *. Nous n’en dirons pas davantage sur les chapitres XX VII et XXIX, qui traitent des Opinions des différens auteurs sur les sectes, et de la féte des faunes et des dieux cornus. Chapitre XXX. Bavo-le-Brun, successeur et frère de Bavo-le-Loup, acheva plusieurs temples à Belgis et dans le reste de son royaume, et défendit la communauté des femmes; ce qui ne prouve guère en faveur de la législation antérieure et de la moralité des Belges-Troyens. Il ordonna , sous peine de mort, qu'aucun homme n’eüt plus de quatre femmes et les prêtres seulement deux. Ce prince fut un second Licurgue : il établit dans son royaume la police des mœurs en vigueur 1 Nous avons lieu de croire que les contes du loup-garou ont servi de source pour la com- position d’une grande partie de l’Æistoire de Bavo-Lupinus. SUR LES DOCUMENS DU MOYEN AGE. 83 chez les Lacédémoniens , la communauté des biens, le repos public, défendit l'usage de l'or et de largent, voulut que les marchés se fissent par échanges, etc., etc., en un mot, s’il faut en croire le bon Lucius de Tongres, Bavo-Bruno fit de son royaume une seconde Sparte. Chapitre XXXI. Bavo-le-Brun s’allie avec les rois des Ruthènes et des Morins, et passe avec eux la mer pour attaquer l'ile de Brutus (la Grande-Bretagne), afin d’arrêter les courses d'Ébrancus, roi de cette île. Cette expédition n’eut aucun succès *. Voulant célébrer par une grande féte l'achèvement de la ville de Belgis, il sacrifia au dieu Bel et aux autres idoles de la cité, ses deux fils ainés, avec une quantité mnombrable de loups, de lions, d’ours et de sangliers. Dans la même année, à la fête de Bacchus, Bavo-le- Brun se dévoua lui-même en holocauste, en se jetant dans les flam- mes alimentées pour les sacrifices, ayec deux archiflamines, trois ducs, cinq comtes, sept veneurs et beaucoup d’autres personnes *. Cet événement frappa d’une si grande terreur tous les citoyens du royaume, qu'ils portèrent de concert une loi qui défendit, sous peine de mort, de transgresser les lois de Bavo-le-Brun et celles des dieux. C'est depuis lors que prévalut Pusage d’initier les fils des princes et des ducs aux ministères sacrés, et d’apaiser les dieux par leur sang. Il est facile de voir que les actions de Licurgue, législateur de La- cédémone, ont servi de base à toutes les fables débitées par Lucius de Tongres, sur le prétendu roi Bavo-le-Brun. Chapitre XXXIIL. Bruneholde, successeur de Bavo-le-Brun, renou- vela les lois des Troyens et celles de ses prédécesseurs, et força, sous peine d’étre écorchés vifs, tous les citoyens de son royaume à ho- 1 Comme le nom de la ville de Trève donna lieu , aux chroniqueurs romanciers d'inventer le personnage fabuleux de Trebeca , que celui de Bavo eut pour étymologie le nom de Bavai, que du nom des Ménapiens on composa celui du prétendu Menapus, etc., de même on imagina de dériver de la dénomination de Britannia le nom d’un prétendu Brutus I‘, roi de cette ile. 2 Rien ne prouve davantage le fabuleux des prétendues histoires écrites par Lucius de Ton- gres, Hugues de Toul, etc., que ces titres de duc, comte, veneur et autres qualifications du moyen âge donnés à des personnages qu'ils prétendent avoir vécu plus de dix siècles avant l'ère vulgaire. 84 MÉMOIRE norer les neuf divinités de la cité de Belgis. Ébrancus, roi des Bre- tons, ayant fait une descente dans les Gaules pour réparer et rétablir la ville des Morins, dont il s'était emparé après la mort de Bavo-le- Brun, et pour subjuguer ensuite le royaume des Belges, fut défait par Bruneholde, qui établit, pour roi des Morins, Aganippus, son frère. Peu de temps après , Brutus, surnommé Vert-Écu, fils d'Ébrancus, dé- barqua, avec une armée d’Albaniens, à embouchure de l'Escaut, et envahit tout le pays jusqu’à la Haine; il y bâtit des villes, des chà- teaux, des bourgs, dont plusieurs portent encore le nom qui leur fut composé par les Bretons. Cependant Bruneholde, voyant que les en- nemis n'étaient plus qu’à huit milles de Belgis, marcha contre eux, et, avec le secours de ses alliés, les tailla en pièces. | Chapitre XXXIV. Bruneholde qui, d’après la nouvelle loi, n’avait pris que deux épouses, eut de la première 22 enfans en sept couches, et de la seconde 12 garçons et 12 filles. Les Mosellans ayant attaqué les Tréviriens, Bruneholde vint au secours de ces derniers, défit les Mosellans, s’empara de leur pays, et répara la ville de Trèves, depuis long-temps ruinée par les Belges. Il prit également la ville d’Agrippine, qui s'était alliée aux Mosel- lans, en rasa les murs et soumit à sa domination toutes les villes si- tuées sur le Rhin. Chapitres XXXWV. Les Allobroges , les Celtes et les Séquaniens ?, ayant appris que la ville de Belgis était dépeuplée et sans défenseurs pendant l'expédition de Bruneholde contre les Mosellans, tentèrent de s’en emparer par surprise. Ils se rendirent en grand nombre à Belgis, se faisant passer pour des pèlerins qui venaient adorer le dieu Mars; mais leur ruse fut découverte, et la plupart furent mis à mort. C’est de la déroute de ces Séquaniens, dit le chroniqueur, que l’Escaut (il écrit le Secaut) prit son nom *. Bruncholde, de retour de son 1 L'ignorance du chroniqueur est si grande, qu'il ignore que le nom de Celtes était un nom générique donné à tous les peuples des Gaules, et qu’il en fait ici un peuple particulier différent des Allobroges et des Séquaniens , deux peuples de race celtique ou gauloise. 2 Nous ne devinons pas trop quelle analogie il y a entre le nom de Scaldis et celui de Sequani, Goropius Becanus ou Schriekius seraient peut-être plus heureux que nous. SUR LES DOCUMENS DU MOYEN AGE. 85 expédition contre les Mosellans, brüla de se venger. Il marcha contre ce peuple, soumit entièrement son territoire, celui des Celtes et des Séquaniens jusqu’au Rhône, aux Alpes-Pennines et au monts Cen- drés ‘ ; ravagea l’Aquitaine, la Touraine, l’Armorique, l’unaique et les monts Caspies, et étendit ses conquêtes jusqu’à l'Espagne. Il revient triomphant dans ses états au bout de dix ans , emmenant avec lui plusieurs rois captifs qu’il renvoya en liberté, après son retour à Belgis, et après avoir offert des sacrifices aux dieux, dans lesquels il immola son fils aîné à Mars. Chapitre XXX VI. Du temps de Bruneholde, les Saxons, les Suèves, les Alains et plusieurs autres nations ayant passé le Rhin, vinrent assiéger la ville de Trèves et ravager son territoire, jusqu’à Tongres et Mosellane * (Metz). Braneholde , vola aussitôt au secours de Trèves, attaqua les Saxons et les défit complétement *. Il les poursuivit au delà du Rhin, réduisit toute la Saxe, le Danemarck, la Norwége, la Prusse, lEsclavonie, la Hongrie et toute la Germanie, et rentra triomphant dans ses états, après une absence de huit ans, pendant lesquels il soumit à son empire tous les pays d’une mer à l’autre , et jusqu'aux Alpes-Pennines , aux Pyrénées, au Jura et aux monts Caspies *. Chapitre XXXVII. Bruneholde porte plusieurs lois relatives au culte, à l’uniformité des poids, des mesures et des matières d'échange de son royaume. 1 Nous ignorons ce que le chroniqueur entend par monts Cendrés, seraient-ce par hasard les Pyrénées”? 2 Il n’y eut jamais de ville dans la Gaule portant le nom de Mosellane ; mais au moyen âge un pagus mosellensis et au duché de Mosellane dont on ne commenca à parler que vers le milieu du X° siècle. ( Wastelain, Descript. de la Gaule-Belg., p. 64, 249, 274, 279). Le chroniqueur a donc transformé un pays en ville, comme il a fait à l'égard du Belgium, de la Morinie , etc. 3 Les détails dans lesquels entre le chroniqueur en parlant de cette bataille, ressemblent à un conte de la bibliothèque bleue. «11 (Bruneholde) avait préparé trois échelles et placé à cha- cune d’elles quatre rois, dix ducs et autant de comtes avec leurs chasseurs et soldats qui étaient sous leur commandement, etc., etc. » 4 Sans doute les montagnes voisines de la mer Caspienne ou le Caucase, dont les Romains eux-mêmes ne purent dompter les peuplades sauvages. Nous nous étonnons que Lucius de Ton- gres n'ait pas reculé les bornes de l'empire des Belges jusqu'aux extrémités de la Chine. 86 MÉMOIRE Chapitre XXXVIIL. Bruneholde, après avoir ordonné la promul- gation de ses nouvelles lois dans toutes les parties de son royaume, les fait graver sur les portes des villes, des forteresses et des villages, afin qu'aucun homme ni aucune femme ne püt s’excuser en prétextant cause d’ignorance. Il fait ensuite paver les sept grandes routes commen cées par Bavo l’ancien. Toutes ces routes avaient cent pieds de large, et quatre d’entre elles, dit le chroniqueur, étaient recouvertes de bri- ques cuites, ornées de colonnes de marbre et bordées d’allées de chênes ; c’étaient la route de Jupiter, celle de Mars, celle du Soleil et celle de Vénus. Les trois autres, c’est-à-dire, les routes de Saturne, de Mercure et de la Lune, étaient pavées de pierres recouvertes en marbre et revêtues d’écailles et de pierre noires. Le soin d’entretenir ces routes fut confié aux chasseurs. Au centre de la ville, Bruneholde fit placer une pierre heptagonale, d’où l’on pouvait voir les sept portes ou les sept temples de la ville. Sur chacune des faces de cette pierre, il fit sculpter l’image de l’idole qu’elle regardait, et ordonna que l’on érigeàt sur l’heptagone une statue de métal, haute de soixante cou- dées tenant une massue à deux mains et prête à frapper. Cette statue, qu’on prétend être celle de Bel, subsista jusqu’au temps de Jules César, qui la détruisit et fit de la chaux avec la pierre milliaire. Les sept grandes routes qui aboutissaient à Bavai, comme à un centre commun pour la Belgique et qui furent construites par Agrippa, gendre d’Auguste, vers lan 24 avant l'ère vulgaire, ont servi de motif à toutes les fables que J. De Guyse débite dans ce chapitre d’a- près Lucius de Tongres. La pierre heptagonale n’était autre chose qu’une pierre milliaire, sur laquelle étaient marquées les distances de toutes les villes et stations de poste, auxquelles conduisaient ces routes”. De la reine Brunehaut, à qui plusieurs chroniqueurs du moyen âge ont attribué la construction des voies romains de Bavai, parce qu’elle les avait peut-être fait réparer, Lucius de Tongres a fait un grand-prêtre belze en changeant le nom de Brunehaut en celui de Brunehold. 1 Voir De Bast, Recueil d'antig. rom. et gauloises. SUR LES DOCUMENS DU MOYEN AGE. 87 Les neuf chapitres suivans (XXXIX-XLVIIT) contiennent la des- cription des neuf temples de Belgis. La description des idoles de ces temples est copiée littéralement des Métamorphoses d’Ovide. Chapitre XLIX, Bruneholde fut le premier parmi les Belges qui fit peindre sur les étendarts, les écus et les boucliers, sur les pavillons et les tentes, sur les armures et les armes, les armoiries de la ville et du royaume. Elles consistaient, selon Lucius, en un écu à sept che- vrons, dont quatre d’or et trois noirs ou terreux. J. De Guyse conjec- ture , avec sa sagacité ordinaire, que Bruneholde choisit ces armoiries par allusion au sept routes de Belgis. Lucius, semble croire que tous les nobles qui portaient des armoiries à chevrons les avaient prises de Bruneholde, mais que les armoiries formées de figures de quadru- pèdes venaient des Huns, des Pannonniens et des Saxons, et que celles qui représentaient des oiseaux dérivaient des Romains. J. De Guyse conclut de là que les armoiries des contes de Hainaut, jusqu’à la mort de Jean d’Avesnes, en 1303, avaient subsisté pendant 2404 ans’. Chapitre L. Bruneholde, devenu vieux et craignant qu'après sa mort il ne s’élevät des dissensions entre ses trois fils, pour savoir à qui échoirait le souverain sacerdoce, consulta le dieu Bel sur le parti à prendre. Le dieu répondit que le sort devait régler le partage et que un des fils de Bruneholde serait nommé grand-prêtre, l’autre duc de Trèves et le troisième roi des Allobroges, des Aquitains et des Neus- triens. On obéit à l’oracle; Bruno obtint le souverain sacerdoce, Bel- gion devint duc de Trèves et Aganippus roi des Allobroges. Ce dernier ne voulut demeurer dans aucune ville de ses sujets, et en bâtit une nouvelle, à laquelle. il donna le nom de Belgis-la- Gauloise. Bruneholde établit ses autres fils, nés de son premier mariage, rois ou ducs dans différentes provinces et villes des Gau- les. « Quant à ses fils du second lit, il les envoya gouverner les provinces des Saxons, des Danois, des Norwégiens et toute la Ger- 1 Il est étonnant que les généalogistes n'aient pas eu recours à ce chapitre des Annales du Hainaut, pour prouver la haute antiquité de l’invention du blason. 88 MÉMOIRE manie, en les plaçant tous sous l'autorité du prince des prétres Belges. » Bruneholde, mourut à la soixante - dixième année de son sacer- doce. «Cent rois, mille ducs, douze cent comtes, plus de deux mille chasseurs, chevaliers et autres officiers se rendirent, suivant l’usage, à ses obsèques; et l’on vit jusqu’à cent rois, ducs ou comtes des plus illustres de son empire, se précipiter dans les flammes de son bûcher devant la grande statue de Bel, au milieu de la ville. » Des faits aussi fabuleux n’ont pas besoin de commentaire. Les chapitres LI et LIT renferment l’histoire de Salomon et celle des diverses Sybilles. Le chapitre LIT, extrait de Lucius de Tongres, comme tout ce qui, dans ce livre, concerne les prétendus rois ou prêtres Belges, contient l’histoire de Bruno, successeur de Bruneholde, dans le temps où régnaient, en Italie, les rois fabuleux Capis, Silvius et Carpentus. Bruno attaque, avec une flotte, l'ile de Brutus (l'Angleterre), met en fuite le roi Lear, et s'empare de tout le royaume. Il brüla la ville des Trinobans et celle d'Ébrancus, après avoir emporté les dépouilles qu "Ébrancus, roi des Bretagne, avait autrefois enlevées aux Morins et aux Ruthènes. II fit ensuite construire des routes royales dans toute l'étendue du pays, et transporta, dans la ville de Belgis, l’idole de Neptune, qui se trouvait dans la ville de Trinobante ‘. Après cela, il conquit l’Albanie, aujourd’hui l'Écosse, et l’'Hibernie (l'Irlande). Alors il reprit en triomphe le chemin de son royaume; mais une horrible tempête ayant éclaté, le vaisseau sur lequel se trouvait Bruno, fut englouti, et la flotte dispersée. Les compagnons de Bruno qui échap- pèrent à ce désastre retournèrent à Belgis, où Aganippus fut nommé grand-prêtre à la place de Bruno. Après la mort de Lear, roi de Bre- tagne, et sous le règne de son fils Hudibras, les îles se révoltèrent et refusèrent de payer tribut aux Belges. Le jeune Aganippus équipa une flotte immense pour soumettre les rebelles; mais Hudibras instruit de ces préparatifs, se hata d'envoyer les tributs dus aux dieux de Belgis, fit ses excuses et livra quelques-uns des révoltés. 1 Il n’y eut jamais en Angleterre une ville du nom de Trinobante, mais une peuplade. SUR LES DOCUMENS DU MOYEN AGE. 89 Chapitre LIV. Le règne d’Aganippus est troublé par de graves sédi- tions, des guerres intestines et un grand déchainement de tous les élémens. Les dieux consultés sur la cause de ces maux, l’attribuèrent à la présence de l’idole de Neptune dans la ville de Belgis. Aganippus, par le conseil de ses ducs, éloigna promptement de la ville le dieu des mers, et plaça sa statue dans un temple qu'il bâtit sur une montagne au confluent de la Sambre et de la Meuse, là où s'élève aujourd’hui la ville de Namur *. Aganippus ayant épousé cinq femmes dans la Grande-Bretagne, répudia ses deux épouses légitimes, dont il avait eu quatre enfans. Le peuple en murmura beaucoup, et, à la première occasion qui se présenta, mit en pièces le grand-prêtre qui avait transgressé la loi. Sa tête fut pendue, avec des crochets de fer, à la porte de son palais, et on porta peine de mort contre celui qui oserait enlever cette téte destinée à servir de leçon aux princes futurs. Les cinq femmes d’Aganippus furent enterrées vives. Aganippus IT, encore impubère, succéda à son père. Les chapitres LV-LVIIT traitent des matières étrangères à l’histoire de la Belgique. Chapitre LIX. Le commencement du règne d’Aganippus IT est signalé par une horrible famine qui désola la ville de Belgis : les habi- tans se virent contraints à se nourrir de chair humaine, et un grand nombre périt de faim. Les Belges ne recevant aucun secours des provinces dont plusieurs s’étaient révoltées , décrétèrent que le peuple, qui était devenu furieux, placerait le prince des prétres sur les épaules d'un Belge vigoureux, sortirait de la ville en corps d’ar- mée, se dirigerait plein de rage vers les provinces supérieures des Gaules, et pillerait toutes les villes approvisionnées. Cet ordre fut exécuté ponctuellement : tous les rois et les ducs qui avaient refusé des vivres, furent attaqués et pris ou tués. Par cette mesure étrange, l’abondance revint à Belgis et la famine disparut. Aganippus con- 1 La ville de Namur n’est point mentionnée dans l'histoire ou les anciens documens avant le VII siècle, (Valesii Not, Gall. in voce Namuncux.) Au IX° siècle ce n’était encore qu’un simple château. Tow. XII. 12 90 MÉMOIRE voqua tous les sujets de son royaume et leur proposa de payer un tribut à la ville de Belois, pour la dédommager des frais immenses que lui occasionnait l’affluence considérable de pèlerins qui s’y ren- daient de toutes parts aux temples des dieux. Cette proposition fut acceptée et passa en loi; mais en peu d'années, elle devint le sujet de grandes querelles entre les étrangers et ceux de la cité. C’est pour- quoi le prince décréta, par le conseil des ducs et des comtes de tout le royaume, que l’on bâtirait à une plus grande distance de la ville qu'auparavant les temples des dieux, surtout ceux qui attiraient une plus grande affluence, et que ce serait dans ces nouveaux temples que les étrangers viendraient sacrifier. L’idole du soleil fut transférée à Solème, appelé d'abord temple du soleil”; celle de Mars à Famars; celle de Mercure dans une ville appelée Caricie ou Carinée, et, depuis sa destruction, Blaton (qui signifie effacé, détruit”). On fonda aussi de grandes villes dans ces trois cantons, et on établit, dans chacune d'elles, un duc, deux comtes et autant de prêtres qu’en exigeait le service du temple. Enfin d’idole de la Lune fut placée au milieu du bois de la Fagne *. Du temps d’Aganippus IL, les Bretons et les Albaniens, qui étaient restés cachés dans les bois depuis la défaite de leurs compatriotes, sous Bruneholde et sous Brutus, surnommé l’Écu-Vert, roi de Bretagne, s'étaient tellement multipliés, qu'ils s’élevaient à plus de 30,000 combattans et occupaient les forêts depuis la mer jusqu'aux marais de la Haine. Comme ils incommodaient beaucoup les Belges, surtout les habitans de la nouvelle ville de Fanum Mercurii *, Aganippus envoya contre eux dix ducs et autant de comtes avec plusieurs chas- seurs et autres officiers sous leurs ordres. Ils trouvèrent les ennemis sur les bords d’une rivière, à laquelle la déroute des Albaniens fit 1 Solème est un bourg à 3 lieues du Quesnoy, département du Nord. 2 Blaton est un bourg ou village du district de Tournai. Il n’a jamais été plus considérable ni porté le titre de ville. 3 Voir sur la forêt de la Fagne ou Faigue, Valesi Not. Gall. Voce Faxia sizva. 4 Les chroniqueurs du moyen Âge ont désigné sous ce nom la ville de Bruges. La plus an- cien mention de cette ville se trouve dans la Wie de saint Eloi, par saint Ouen. SUR LES DOCUMENS DU MOYEN AGE. 91 donner le nom d’Albe; leur ville, située près de Chièvre, est encore aujourd’hui appelée Arbre *. On s’y battit avec fureur de part et d’autre; Lupus, chef des Albaniens, se voyant sur le point de perdre la bataille, demanda la paix: Elle lui fut accordée à condition que les Albaniens paieraient annuellement à la ville de Belgis, un tribut de 1000 pores, 1000 bœufs et 200 cerfs, moyennant quoi il leur fut permis d’oc- cuper paisiblement le pays qui se trouve entre l’Escaut et la Dendre, de manière cependant qu’ils ne seraient pas maîtres des ports. Alors les Albaniens élevèrent, sur une haute montagne, dite aujourd’hui le Mont-Saint-Aubert, un temple au dieu Janus Bifrons. Ils bâtirent dans les marais voisins une ville appelée du nom de leur chef Zuposa, au- jourd’hui Leuze*. Aganippus eut de ses deux femmes quatorze fils, dont l’ainé porta son nom. Les chapitres LX-LXIIT contiennent l’histoire apocryphe du roi Léar, extraite de l’histoire fabuleuse de la Grande-Bretagne par Geoffroi de Monmouth. Quoi qu’en dise J. De Guyse, ou plutôt Lucius de Tongres qu’il copie toujours, Geoffroi de Monmouth semble n’a- voir eu aucune intention de faire intervenir les Belges dans cette pré- tendue histoire. Lucius ajoute au récit de ce chroniqueur fabuliste, que le roi Léar séjourna à Zuposa ou Leuze, et que sa fille Cordeilla fonda trois villes, dont la première porta le nom de son père, la se- conde celui de Cordeilla et la troisième celui du premier chevalier de Léar. J. De Guyse, avec sa perspicacité ordinaire, conjecture que ces villes sont les mêmes que celles appelées vulgairement, dit-il, Ligne, Corde et Vélanie *, villes dont l'existence est aussi apocryphe que celle de Cordeilla même, « Il n’entre pas dans mon sujet, ajoute J. De Guyse, à la fin du chapitre LXIIT, d'examiner comment Lupus, duc des Albaniens, fonda par la suite la ville de Louvain *, ni de m’arrêter 1 Village du district d’Ath. 2 La ville de Leuze doit son origine à un monastère fondé par saint Amand. Valesi Not. Gall. Voce Lurosa. 8 Ligne et Cordes sont deux villages du district d’Ath. Vélanie est sans doute Velaines dans le district de Tournai. 4 Selon d’autres chroniqueurs , dont l'autorité est tout aussi respectable que celle de Lucius 92 MÉMOIRE à la fondation par le roi Léar de la ville qui porte encore aujourd’hui le nom teutonique de Lierre ”. Je ne dirai rien non plus d’un grand nombre d’autres villes dont parle Lucius, attendu qu'étant situées hors des limites du territoire de Hainaut, je n’ai pas à m'occuper de leur origine. » Le chapitre LXIV contient l’histoire d’Amasias, roi de Judée. Chapitre LXV. Ce chapitre est un de ceux qui renferment le plus d’absurdités. On y lit qu'Audengerius, successeur d’Aganippus second, enseigna aux Belges l'astrologie, la nécromancie , l’hydromancie et les évocations des esprits. Mais la passion qu’il montrait pour ces belles sciences lui faisant négliger le gouvernement de ses états , les Belges le chassèrent ; il rassembla alors les pasteurs et les chasseurs, «et les imitia si bien dans son art, qu’il subjuguait les pays, les peuples » et les nations par ses sortiléges. » Il se rendit de cette manière, maître de la ville de Mosellane, soumit les Tréviriens, ravagea le territoire de Tongres et de Cologne, détruisit les grandes routes du royaume de Belgis, et contraignit enfin les Belges à lui rendre le souverain sacerdoce. Mais Audengerius ne se fiant pas à eux, voulut demeurer à Trèves. Les Belges mécontens de cette résolution, élurent, à sa place, Herisbrandus, et marchèrent sur Trèves. Audengerius leur livra bataille, mais fut défait et pris. Les Belges le mirent en pièces. Ils envoyèrent son bras droit avec l’omoplate aux Saxons, pour les de Tongres et de J. De Guyse, Louvain fut fondée par Lupus, capitaine écossais, servant dans l’armée de César. Lupus traduit en français fait loup, et, disent ces étymologistes judicieux, comme ce loup ou Zupus était très-malin, on l’appela Loup fin , d’où est provenu tout simplement le nom de Louvain. Ceux qui comprennent le flamand savent que le nom flamand de Louvain Zoven , est composé de /00, hauteur boisée, et de ven ou veen , tourbière, marécage. La certitude de cette étymologie est constatée par la position même de cette ville, près de laquelle il existe encore une colline portant le nom de /00-berg. Avant le X° siècle, Louvain n’était encore qu’un simple hameau. (Voyez Just. Lipsii Lova- nium.) 1 La ville de Lierre , dont l'emplacement était, au VII: siècle , un lieu désert et couvert de bois, doit son existence et ses accroissemens au tombeau de saint Gommaire. (Van Lom, Bes- chyving van Lier.) SUR LES DOCUMENS DU MOYEN AGE. 93 suspendre au milieu du principal théâtre de la cité royale; le bras et l'épaule gauche tombèrent en partage à ceux de Cologne; la ville de Mosellane eut la cuisse et la jambe droites, et la jambe gauche fut donnée à celle de Tongres. Les Belges clouèrent la peau de leur grand- prêtre aux portes du palais de Trèves, et portèrent à Belgis la tête et le tronc qu'ils enduisirent de miel, et les exposèrent devant la grande statue au milieu de la ville pour être dévorés par les mouches. Enfin ils attachèrent sa tête aux portes du palais, à côté de celle d’Aganippus. Nous ne rapportons ces contes puérils que pour démontrer com- bien serait dénué de tout jugement celui qui ajouterait la moindre foi aux réves d’un Lucius de Tongres ou d’un J. De Guyse. Le chapitre LXVI contient l’histoire d’Osias, roi d'Israël. Chapitre LXVIT. Les Sénonais ayant, malgré l'opposition de leur roi, bâti un temple à Minerve, sans la permission du prince des Belges, Herisbrandus leva une armée pour les punir de cette innovation. Les Aquitains , les Celtes, les Séquaniens et les Neustriens, auxquels Herisbrandus avait demandé du secours, ne le voyant accompagné que de peu de gens, s’engagèrent, en secret, à prendre le parti des Sénonais, afin de s'affranchir des tributs qu’ils payaient aux Belges. Herisbrandus, informé de cette résolution hostile, pendant qu'il était déjà en marche, fut obligé de s'arrêter. Il campa le long de lAine et y bätit un chäteau fort qui, dans la suite, fut appelé Neufchâtel. Il y attendit le secours de Tréviriens, des Agripiniens et des Albaniens, qui vinrent au nombre de quinze mille commandés par Lupinus, leur duc, fils de Lupus. Lorsqu'Herisbrandus se vit à la tête d’une armée nombreuse, il marcha contre les Sénonais, prit d’assaut leur ville et la détruisit de fond en comble. Il enleva la statue de Minerve, qu’il fit transporter à Belgis, et s’avança ensuite jusqu’au Rhône et dans Aquitaine, subjuguant toutes les nations qui s'étaient armées con- tre les Belges. Chapitre LXVIIT. Herisbrandus place la statue de Minerve sur la porte de Mars; mais comme on craignait la famine à cause de l’af- 94 MÉMOIRE 2 fluence considérable des habitans de la Gaule-Supérieure vers cette idole, on la transféra peu de temps après sur la montagne de Janus- Bifrons. Plusieurs réponses des dieux et des comètes grosses comme la lune qui parcoururent les douze signes du zodiaque , annon- cèrent que le sacerdoce Belge allait être remplacé par la {yrannie. Chapitre LXIX. Peu d’années après la translation de Minerve , une multitude de Gaulois s'étaient rassemblés, au mois de mars, pour célébrer la fête de la déesse. Tout à coup, sur le soir et à l’heure de commencer les sacrifices, les Albaniens entourèrent la montagne, et massacrèrent tous les Gaulois. Herisbrandus, avec huit de ses fils, y périt également , et l’idole de Minerve fut mise en pièces. Mais, au lever de l'aurore, les Albaniens virent avancer contre eux les Belges, et furent contraints de repasser la rivière. Les Belges ravagérent le ter- ritoire de leurs ennemis, et, pendant quinze ans, firent périr tous les Al- baniens qu’ils purent atteindre ; de telle sorte, que dans toute l'étendue de pays entre l’Escaut et la Dendre et jusqu’à la mer, il ne resta plus un seule homme âgé de plus de quinze ans. Les ducs qui comman- daient l’armée belge, décrètent ensuite que les Albaniens de tout sexe, qui auraient échappé au glaive, seraient bannis à perpétuité du royaume des Belges, sous peine d’être écorchés vifs; ils les déclarèrent en outre hors la loi ‘, permettant de leur courir sus et de les tuer partout où on les rencontrerait. Comme la vue de la montagne de Janus-Bifrons rappelait le triste souvenir de la mort du grand-prêtre, les Belges changèrent son nom en celui de montagne de Minerve, et transférèérent l’idole de Janus dans une vallée appelée la vallée de Janus-Bifrons, aujourd’hui Briffœil *. Tous les fils d’Herisbrandus ayant péri, à l'exception d’un seul qui était encore en bas âgé, le peuple nomma, par acclamation , le chas- seur Ursus pour exercer la tutelle du jeune prince et la régence. Cette 1 « C’est de là, dit J. De Guyse, qu’est venu le proverbe que l’on applique encore de nos temps aux personnes mises hors la loi et aux ennemis des princes , et qui dit qu'il faut les traiter comme des Albaniens. » 2 Village du district de Tournai. SUR LES DOCUMENS DU MOYEN AGE. 95 élection fut accueillie avec indignation par les ducs, les prêtres et les archiflamines. Chapitre LXX. La mort du grand-prétre et l'élection du chasseur Ursus exaspérant les cités de l'empire belge contre la ville de Belgis, elles se révoltèrent toutes, à l’exception de trois qui étaient voisines de Belgis. La division se mit en même temps dans la ville de Belgis, où un grand nombre d’archiflamines, de ducs et comtes furent massacrés par l'assemblée du peuple et par Ursus. Ceux qui avaient échappé au danger quittèrent la ville. Ursus voyant la ville sans ducs et comtes et les temple sans prêtres, commença à craindre pour lui-même. Il proposa au peuple de faire revenir les archiflamines pour assister le grand-prétre mineur dans les fonctions du culte seulement, tandis que lui-même et ses officiers s’occuperaient du gouvernement de l’état. Le peuple approuva son projet. Ursus fit ensuite le dénombrement des citoyens en état de porter les armes, et il en trouva 480,000 depuis l’âge de vingt ans jusqu’à celui de cinquante. Le peuple honteux d’obéir à un homme qui n’avait que le titre de chasseur , éleva Ursus à la royauté, et ordonna à tous les citoyens, sous peine de mort, de porter au roi le méme respect qu’ils témoi- gnaient jadis au grand-prêtre. Tel est énnlyss abrégée du nie ge livre de l'Histoire du Hainaut, par J. De Guyse. Le livre deuxième des Annales du Hainaut commence par l’histoire du roi Ursus, qui occupe seule les dix premiers chapitres, le seizième, le vingt et le vingt-unième. Ursus fut élu roi des Belges, l’an 405 ou 401 de la ruine de Troye (vers l'an 775 ou 779 avant notre ère). Il reçut le nom d’Ursus, à cause de sa ressemblance avec un ours et du poil dont il était couvert. Il était d’une taille si élevée, qu’il surpassait de près de deux coudées les plus grands citoyens de Belgis. IL avait un courage inébranlable et une force si grande, qu’on rapporte qu'il mit, de ses propres mains, cinq ours en pièces, et qu'il attaquait et terrassait les sangliers et autres bêtes sauvages. IL était à peine monté 96 MÉMOIRE sur le trône que tous les peuples soumis à la cité de Belgis, se ré- voltèrent. C’est depuis ce temps, dit J. De Guyse, que l’empire belge a été divisé en quatre parties. La Saxe, la Hesse, la Servie, la Dacie et toute la Germanie Transrhénane fondèrent un nouveau royaume. Belgis-la-Chevelue ou Trèves, Agrippine ”, Tongres, Mosellane, Stras- bourg et toutes les autres villes entre le Rhin et la Meuse se liguèrent entre elles, et formèrent un autre royaume. Elles furent imitées par les Sénonais, les Celtes, les Séquaniens , les Allobroges, les Aqui- tains, en un mot par tous les peuples habitant entre les montagnes du Rhône et la mer d'Espagne. Enfin, Belgis-la-Gauloise ou Bavai, Rouen, Lutèce, la Neustrie *, Gand, Leuze, Moriane, les Ruthènes, les Bretons, les Albaniens ou les Scots formèrent la quatrième ligue contre les Belges. Les villes voisines de Belgis , telles que Solème, Famars, la cité de Mercure et quelques places fortes leur restérent seules fidèles. Ursus, effrayé de cette révolte générale , rassembla tout ce que les villes qui lui étaient restées dévouées contenaient d'hommes en état de porter les armes. Il leva 200,000 hommes à Belgis, 80,000 à Solème , 60,000 à Famars, 50,000 dans la ville de Mercure et 100,000 dans tout le pays voisin compris entre la mer, la Meuse et l’Aine *. Ursus commença par attaquer les Ruthènes et assiégea la ville de 1 Voilà donc la ville de Cologne existant plus de sept siècles avant sa fondation , et avant que la princesse, de qui elle reçut le nom de Colonia Agrippinæ, ne naquit. (Tacite, 4nnal., lib. XII). La Saxe et les Saxons ne commencèrent à être connus que vers la fin du III siècle de l'ère vul- gaire. Pendant toute la durée de l'empire romain la Hesse ne porta d'autre nom que celui de pays des Cattes , et la dénomination de Servie ne date que de la fin du V° siècle; antérieurement cette contrée n’était connue que sous le nom de Mœsia mediterranea. 2 Ici, comme ailleurs, J.De Guyse ne se fait jamais faute de confondre les temps et les lieux. Qu'on ne s'étonne pas de lui voir placer en Belgique une Neustrie plus de quatorze siècles avant qu'il n’existât une contrée de ce nom. V’alesii Not. Gall. Voce Nevstrra. 3 L'armée belge composée des habitans seuls du Hainaut, était donc de 490,000 hommes; ce qui ferait pour toute la population du Hainaut plus de deux millions d’âmes, tandis qu'il est constant que la Belgique actuelle tout entière n’avait pas, lors de la conquête de César , au delà de 100,000 hommes capables de porter les armes. (Voir Cæs., Bel. Gall., L. II.) SUR LES DUCUMENS DU MOYEN AGE. 97 Moriane. Pendant ce siége, il renouvela les anciennes lois de discipline militaire, par lesquelles il était défendu à tout soldat, sous peine d’être écorché vif, de tuer les enfans et les femmes enceintes ou sexagé- naires ; de mettre le feu à aucune maison sans la permission du roi, etc. Le gros de l’armée ayant formé le blocus de Moriane, le reste des troupes battit la campagne, et fit des courses jusque sur les frontières de la Neustrie et jusqu’à la mer. Mais ils n’y rencontrèrent d’autre ennemi que les Albaniens, qui implorèrent la clémence d’Ursus. Ce prince forma d’abord la résolution d’exterminer les Albaniens; mais il changea de projet par les remontrances d’un de ses ducs, et résolut de faire grâce à ce peuple, en exigeant de lui plusieurs conditions très- dures, et dont la principale était que les Albaniens resteraient à ja- mais esclaves des citoyens de Belgis, auxquels ils seraient contraints d'abandonner le cinquième du produit de leur travail et du butin qu’ils auraient fait sur l'ennemi, etc., etc. Le roi ayant transmis ces condi- tions aux députés des Albaniens, ils demandèrent trois mois pour se consulter. Après un siége de quatre mois, Ursus s’empara de vive force de la ville de Moriane, qui fut succagée et une grande partie de ses habitans passée au fil de épée. Après en avoir fait démolir les fortifications, il donna le gouvernement de la ville à son fils, et s’avança avec son armée contre Belgis-la-Gauloise. Les Albaniens, saisis de crainte, acceptèrent les conditions du traité proposé par Ursus, et suivirent les Belges au siége de Belgis- la-Gauloise. Les Gallo-Belges s’opposèrent au passage de la rivière que voulait effectuer l’armée d’Ursus : celui-ci, après avoir vainement tenté de la traverser de vive force, usa de stratagème, et pendant qu'il faisait semblant d'opérer le passage avec cent mille hommes, il fit jeter, à deux mille pas plus haut, plusieurs ponts « qui jusqu’à ce jour même, dit J. De Guyse, ont été appelés les ponts de Bères, c’est- à-dire d’Ursus *. C’est du grand nombre de ces ponts établis sur cette 1 Ursus, ours, en flamand beer. 98 MÉMOIRE rivière, pour débusquer les Gallo-Belges , continue le chroniqueur, que la contrée nommée aujourd’hui le Ponthieu a tiré son nom ‘. » Ursus, après avoir passé la rivière, fut obligé de livrer bataille aux ennemis qui l’attendaient de pied ferme sur un plateau, au nombre de cent cin- quante mille. Il remporta la victoire, non sans une grande perte des siens. Il marcha ensuite, sans obstacle, contre la ville de Belgis-la- Gauloise, dont il forma le siége. Après avoir soutenu plusieurs assauts, la ville fut obligée de capituler et d'accéder aux conditions stipulées par Ursus. Il la contraignit à lui payer annuellement un tribut de 400,000 bœufs, 4,000 tonneaux de vin et 500 tonneaux d’huile. Pendant son expédition contre les Gallo-Belges, Ursus apprit que ceux de Belgis-la-Chevelue, d’Agrippine et des autres cités de la ligue, informés que la ville de Belgis était dépourvue de ses habitans, en avaient entrepris le siége. Il cacha avec soin cette nouvelle à son armée ; mais après la prise de Belgis-la-Gauloise, il se hâta de voler au secours de sa capitale. Arrivé à dix milles de Belgis , il reçut la nou- velle que les Belges étaient aux prises avec les Germains qui avaient saccagé une grande partie du pays. Il se rendit incontinent au lieu de l’action; mais à son arrivée, le combat était terminé à l’avantage des Germains, qui avaient passé la Sambre en vainqueurs. Il périt, dans ce combat plus de 25,000 belges et plus de 15,000 germains. Au nombre des prisonniers belges était Héris, prince des prêtres, dont la capture avait jeté la consternation dans toute la ville. Ursus s'étant mis à la poursuite des Germains, les surprit désarmés près de Berlaimont, leur livra bataille et en tua, dans un jour, près de 30,000. Il en restait en- core 260,000. Ursus se préparait à les attaquer de nouveau, lorsque quatre archiflamines lui proposèrent d’être envoyés comme média- teurs auprès des Germains. Ursus le leur permit; mais les Germains leur répondirent qu’ils ne voulaient reconnaître pour roi que le prince des prêtres et non pas Ursus , qui n’était point de la race sacerdotale. Pendant que les archiflamines étaient en pourparler avec les Ger- 1 Voir Valesii Not. gall. v. Pontivus pagus. SUR LES DOCUMENS DU MOYEN AGE. 99 mains, Ursus , par le conseil des Albaniens, les attaqua à l’improviste et en tua 80,000, le jeune prince des prêtres et les quatre archifla- mines. Les Belges et leurs alliés ne perdirent que 20,000 hommes. Cependant la plupart des Belges, irrités de la mort de leur grand- prêtre, en qui finit la race des princes des prêtres , coururent à Belgis annoncer l’action cruelle commise par Ursus, et marchèrent ensuite contre lui ; mais ne gardant, dans leur marche, aucun ordre, ils furent taillés en pièces par Ursus, et laissèrent sur la place plus de 10,000 des leurs. Ursus éleva, de leurs cadavres, sur les bords de la Sambre, une montagne qui porte encore le nom de montagne des Belges, en français Berlaimont ‘. Il fit ensuite alliance avec les Germains, marcha de nouveau contre la ville de Belgis qui lui avait fermé ses portes. Après un siége de quatre mois, la ville lui fut livrée par des traîtres, qui y mirent le feu en diflérens endroits et massacrèrent toute la race des prêtres. Ursus, après s'être défait de tous ses ennemis, changea les lois à son gré. Ursus voyant la ville de Belgis ruinée , et craignant la vengence des fils des Belges qu'il avait fait périr au nombre de plus de 200,000, transféra sa résidence à Trèves. Il eut d’abord à étouffer plusieurs révoltes excitées par les Tongrois, les Agrippiniens , les Strasbour- geois * et même les Tréviriens fatigués de sa tyrannie. Afin de gagner la confiance des habitans de Trèves, il leur promit, s'ils voulaient lui jurer une obéissance constante, de partager avec eux les tributs que les peuples de ses États devaient aux dieux , et toutes les autres redevances de quelque nature qu’elles fussent. L'assemblée des Tréviriens ap- prouva cette proposition. Ursus publia donc un décret, par lequel la ville de Belgis et toutes les autres places fortes et villes de son royaume étaient déclarées tributaires de Trèves, et portant que toute personne rebelle à cet ordre, serait écorchée vive. Plusieurs cités refusèrent 1 Village du district du Quesnoi , département du Nord. 2 Chapitre XVI. 3 Le nom de Strasbourg n’est connu que depuis le VI: siècle ; antérieurement cette ville por- tait le nom d'Argentoratum. 100 MÉMOIRE cependant d’obéir à ce décret, à moins que la ville de Belgis, leur mé- tropole, ne l’eüt accepté la première. Mais lorsqu'on fit lecture du dé- cret, dans le théâtre de Bel, devant la grande statue, il s’éleva un grand tumulte parmi le peuple et surtout parmi les femmes. Elles se jetè- rent, pleines de fureur, sur celui qui publiait l’édit et sur les quatre ducs, fils d’Ursus, et les déchirèrent tous cinq à coups de dents et d'ongles, en autant de morceaux qu'elles étaient de personnes. Puis parcou- rant la ville, elles égorgèrent tous les partisans d’'Ursus, sans avoir égard ni à l’âge ni au sexe. Le lendemain les citoyens de Belgis s’as- semblèrent au théâtre de Bacchus; mais étant la plupart jeunes, timides, sans expérience des armes , ils n’osèrent prendre aucune ré- solution. « Les femmes qui étaient aussi rassemblées dans le temple de Bel, témoins de cette lâcheté, retroussèrent leurs vétemens comme des folles, et leur montrèrent le derrière, en cachant néanmoins les parties que la pudeur leur ordonnait de couvrir *. À cette vue les hommes frappés de honte et de crainte, s’enfuirent du théâtre de Bacchus , et laissérent le champ aux veuves des Belges.» Après avoir long-temps délibéré avec les femmes mariées, elles élurent, pour leur reine, la jeune Ursa, fille d’Hérisbrandus , ancien prince des prêtres. La reine fit le recrutement de toutes les femmes depuis l’âge de 20 ans jusqu’à celui de 45, et en trouva plus de 200,000 capables de porter les armes, Sans compter les femmes enceintes, malades ou infirmes. Toutes jurèrent qu’elles défendraient jusqu’à la mort la reine Ursa et les libertés de Belgis contre Ursus et les Tréviriens. Tous les faits que nous venons de rapporter en abrégé ont été ex- traits par J. De Guyse de l'ouvrage de Lucius de Tongres. Ils portent tellement le cachet de la fable la bles apparente que, pour en faire la réfutation, il suffit de les ph ce os 1 « Dictæ mulieres.... posterioribus thin et ipsis monstratis quasi dementes , secretis » tamen præ verecundia ac timore, etc. » Nous n’avons voulu rapporter cette phrase que pour démontrer que, non-seulement tout ce qui regarde notre histoire ancienne dans l'ouvrage de J. De Guyse est apocryphe, mais pré- sente souvent des contes tellement ridicules , que Lucius de Tongres ou autres chroniqueurs qui les ont inventés , semblent n'avoir eu dessein eux-mêmes que de faire un roman. SUR LES DOCUMENS DU MOYEN AGE. 101 Les chapitres XXII, XXIIT, XXVI contiennent l’histoire du règne d’Ursa, toujours d’après Lucius de Tongres. La reine Ursa décidée à poursuivre Ursus, commenca par offrir des sacrifices solennels aux dieux; cent jeunes vierges furent immolées à Mars et à Vénus. Rassurée par les réponses des dieux, elle envoya des députés aux cités voisines et principalement aux femmes, pour les ins- truire de son entreprise et demander leur appui. Toutes les citées ap- plaudirent à la conduite des femmes de Belgis, mais s’excusérent de prendre une résolution avant d’avoir consulté l’assemblée générale. Ursa envoya aussi des députés à Rivallon , roi de Bretagne, qui fit mar- cher aussitôt à son secours Gargunsius, son fils, avec une puissante ar- mée. Enfin les Gaulois s’étant joints aux Bretons, entrèrent dans Belgis, pour venir ou secours d'Ursa et attaquer Ursus. Ursa voulut que les veuves, dont Ursus avait fait mourir les époux, marchassent les pre- mières au combat. Ursus de son côté fit publier dans toutes les villes situées près du Rhin et de la Moselle , qu’elles eussent à rassembler toutes leurs forces pour marcher avec lui contre les Belges ; mais toutes, à l'exception de Mosellane, se révoltèrent. Il partit néanmoins avec une armée de 200,000 combattans et campa à trois milles de Belgis. Soudain au milieu de la nuit, Ursa sortit de la ville à la tête de ses femmes et tomba sur l’armée ennemie, dont elle fit un grand carnage. Ursus lui-même y périt. Le lendemain toute l’armée belge poursuivit les ennemis et en tua encore un grand nombre. La perte totale des Tréviriens, des Mosellans et des Albaniens, dans cette expédition, fut de 80,000 hommes. Du côté des Belges et des Bretons il ne périt qu'environ 40,000 femmes. L'endroit où fut livrée cette célèbre bataille, dans laquelle périt Ursus, fut appelé Mors malorum , Mort des méchans. On y planta, pour perpétuer le souvenir de cette victoire, des chènes et des hêtres; les premiers en mémoire des hommes qui y avaient péri , et les seconds en mémoire des femmes. C’est là l’origine de la forêt de Mormal! Après le partage du butin , les femmes se mirent à chercher le corps du roi Ursus parmi les cadavres, et l’ayant trouvé, lui coupèrent la 102 MÉMOIRE tête qu’elles emportèrent avec la peau du roi. On rendit ensuite des ac- tions de grâce aux dieux, et particulièrement à Vénus. « Dès que les ba- rons bretons eurent appris la nouvelle de la victoire des femmes belges, dit le chroniqueur, ils ressentirent pour elles un brülant amour et dési- rèrent ardemment d’avoir de ces héroïnes des enfans et des héritiers. » Plus de 20,000 jeunes filles furent par eux demandées en mariage et accordées par la ville de Belgis et par la reine. Ursa s’appliqua ensuite à réparer les ruines de Belgis et à faire refleurir les anciennes lois et coutumes , et un an après, elle épousa , du consentement de ses sujets, Gargansius, fils de Rivallon. Après avoir eu d’Ursa sept enfans , dont l’ainé, Sisilius, devint, du vivant de sa mère Ursa , troisième roi des Belges, Gargansius mourut à Trinobante. Dans le chapitre XXVI J. De Guyse décrit la prétendue origine de Reims, dont il attribue la fondation à un grand nombre de Romains qui émigrèrent après la mort de Rémus, frère de Romulus, pour se soustraire au sort dont les menaçait ce dernier. Pendant la construc- tion de cette ville, les Gaulois-Sénonais voulurent s’en rendre mai- tres ; mais la reine Ursa les repoussa. Elle bâtit, près de la rivière de l'Aisne, un château fort, qui prit du nom flamand de la reine, ce- lui de Berry. Elle défit ensuite les Sénonais près de Reims et y bâtit, sur le lieu de action, le château de Bevru. Le roi des Belges, fils d'Ursa, qui était allé se faire couronner roi de Bretagne à Trino- bante , ayant appris ce que la reine avait exécuté à Reims, passa sur le continent avec une armée nombreuse de Belges, d’Abaniens et de Bre- tons. Il séjourna deux ans à Reims et embellit considérablement cette ville. La reine fit aussi creuser, près des marais, une rivière qui porta le nom d’Ursa, mais que les habitans appelèrent dans la suite la Vesle, parce que la reine était alors devenue vieille *. Friscembaldus, second fils de la reine, fut envoyé avec l’armée que le roi des Belges avait con- duite d'Angleterre, pour soumettre les Allobroges, les Séquaniens et les Celtes révoltés. Il exécuta son entreprise en deux ans, et bâtit, en 1 L’étymolopie de Vesle déduite de vieille ou vetula est exacte, d’autant plus que les habitans de Reims étant compagnons de Rémus devaient parler le latin. SUR LES DOCUMENS DU MOYEN AGE. 103 mémoire de sa victoire, une grande ville qu’il appela Berri , toujours de Beere, traduction flamande d’Ursa ‘. Il revint ensuite triomphant à Reims; sa mère, qui était sortie de la ville pour venir au devant de lui, se noya, selon Hugues de Toul, dans une rivière à dix milles de Reims. Cette rivière prit dans la suite le nom de la mère du roi, et s’appela la Marne”. Lucius de Tongres dit au contraire qu'Ursa fut tuée par les Sénonais , que Sisillius mourut sans postérité, et que Friscembaldus, son frère et duc des Rémois, lui succéda et devint le quatrième roi des Belges. En ce temps-là, dans la 18° olympiade , les Bretons se révoltè- rent contre les Belges. Vers la 26€ olympiade Friscembaldus IE succéda à Friscembaldus, son père. Il soutint plusieurs guerres contre Jago et Kimarius , roi de Bretagne, et bâtit la forteresse appelée la Porte ou le Port des Belges , et en flamand Porteberge*, pour protéger les Belges contre les Albaniens et les Bretons, qui pillaient la ville de Mercuriale et les marchands qui venaient y trafiquer. Parmi les chapitres des Annales du Hainaut qui portent le cachet de la fable la plus évidente, il faut certainement comprendre les cha- pitres XXVIL, XXVIIT et XXIX du livre IE, dans lesquels il est traité de l’origme de Tournai, fondée par Tullus Hostilius, roi de Rome. Dans le chapitre XX VII, Hugues de Toul nous apprend que, sous le roi Friscembaldus IL, les Rémois, pour venger leur roi Rémus, résolu- rent d'attaquer les Romains avec le secours des Tréviriens et des Séno- nais ; que Tullus Hostilius, qui était alors roi de Rome, ayant appris leur dessein, prit conseil de son sénat, et fit demander au roi des Belges un sauf - conduit et une trève de trois ans. Ayant obtenu sa demande, il se rendit dans les Gaules avec un grand nombre d'hommes sages, et voulut d’abord s'entendre avec les Tréviriens. Ceux-ci refusèrent de le laisser approcher de la ville avec son armée, qui s'établit au pied 1 Si Lucius de Tongres avait connu une ville d’Asie ou d’Afrique portant le nom de Beerie ou Berry, nul doute qu’il n’en eût également attribué la fondation à la vaillante Ursa. 2 Marne de mère ou mater, L’étymologie est un peu forcée. 3 Porteberge est un village de la Flandre, non loin de Gand. Il est inutile d'observer qu'il n’exista jamais de ville du nom de Port des Belges au Portus Belgarum. 104 MÉMOIRE d’une montagne, sur les bords de la Moselle, où elle fonda la ville de Toul, qui porta le nom du roi Tullus ‘. Tullus Hostilius n'ayant pu rien conclure avec les Tréviriens, s’'avança avec son armée vers Belgis, et s'arrêta sur les bords de l’Escaut dans un lieu délicieux, où les Romains bâtirent une ville qu’ils appelèrent Hostilia du surnom de leur roi. Après avoir long-temps négocié avec les Belges, Tullus Hos- tilius conclut la paix, et laissa, en retournant dans son royaume, un nombre suffisant de Romains pour peupler les deux nouvelles villes de Toul et Tournai. J. De Guyse ajoute que, selon Lucius de Tongres, le principal but de Tullus Hostilius en se rendant dans les Gaules, était d'engager les Belges à se joindre à lui pour faire la guerre aux Grecs. Dans le chap. XX VIII J. De Guyse réfute ce qui se trouve dans l’Hist. vulgaire de Tournai concernant la fondation de cette ville par Tarquin l'Ancien et sa destruction par le roi Servius, successeur de Tarquin. : Dans le chapitre XXIX il donne un extrait de l’Histoire de Tournai, où est décrite la prétendue fondation de cette ville par Tarquin l'Ancien, l’an 143 de la fondation de Rome. Il y est encore dit qu'après la mort de Tarquin l’Ancien , Servius voyant que Tournai l’emportait de beaucoup en splendeur et en population sur toutes les cités d’alen- tour, en fit la capitale de 125 villes ou forteresses, en ordonnant qu’elles y porteraient leurs tributs; mais la petite Rome (c'était aussi le nom de Tournai) étant devenue trop puissante et ayant négligé d'envoyer les tributs à Rome, Servius fit partir une puissante armée qui, après un siége long et meurtrier , s’empara de cette ville : elle fut saccagée et ses habitans passés au fil de l'épée. Cependant la paix s'étant réta- blie entre les deux nations, les Romains voulurent que Tournai ne por- tât plus le nom de petite Rome, mais qu’elle prit celui d'Hostilie, à cause de la résistance opiniâtre qu’elle leur avait opposée *. ! Toul était la capitale des Leuci et portait, avant le VIe siècle, le nom de T'ullum Leucorum. ? Dansle chapitre XXVILJ. De Guyse a dit que Tournai fut appelée Hostilia par Tullus Hostilius son prétendu fondateur. SUR LES DOCUMENS DU MOYEN AGE. 105 Il est sans doute plaisant de voir un roi de Rome fonder des villes dans le nord des Gaules, à une époque où les parties de cette vaste con- trée, les plus voisines de l'Italie, n'étaient pas même connues de nom aux Romains. Il est inutile de réfuter de pareilles absurdités ; contentons-nous de dire que non-seulement Toul et Tournai n’existaient point encore du temps de Tullus Hostilius, plus de cinq siècles avant J.-C., mais que même, au [me siècle de Père vulgaire, la dernière de ces villes, n’était qu'une simple station de poste qui n’acquit quelqu'importance et ne devint une ville peu considérable qu’à la fin du IVe siècle ”. Le chapitre XXXI traite du règne de Wariger, fils de Friscembal- dus, de Léoninus, fils de Wariger, de Léopard, frère de Léoninus, de Léopard IT et de Léopardinus *. Sous le règne de tous ces princes, la Belgique jouit d’une paix profonde , dit notre chroniqueur, et ne fut témoin d’aucun événement tant soit peu important. Le chapitre XXXIIL, extrait de Lucius et de Hugues de Toul, traite de la prétendue ligue que Servius Tullius conclut avec les Huns près du Palus Méotide, ainsi qu’avec les peuples de l’Istrie, les Anténorides *, les Sicambres, les Chèvremontains et les Durbians avec le secours des- quels il envahit la Souabe, la Saxe, la Dacie et beaucoup d’autres pays. Ce chapitre est encore plus extraordinaire que ceux qui traitent de la fondation de Toul et de Tournai. Ici on ne se contente pas de faire voyager Servius dans les Gaules, mais on l’envoie jusqu’au Palus Méo- tide, pour y faire alliance avec les Huns, qui ne parurent dans ces lieux et que les Romains n’apprirent à connaître que vers le commencement du Ve siècle de l’ère vulgaire, et pour envahir le centre de la Ger- manie, où jamais aucune armée romaine, même du temps des empe- reurs, ne mit le pied. 1 Poutrain, istoire de Tournai, t. IL , p. 539. 2 Il serait curieux de savoir pourquoi Lucius de Tongres a donné à la plupart des prétendus rois de Belgis des noms d'animaux sauvages tels que Leo, Lupus, Ursus , Ursa , Leopardus, etc. Nous croyons que la science du blason n’a pas été entièrement étrangère à ces dénominations. # Les descendans des compagnons d’Anténor le troyen. Tom. XII. 14 106 MÉMOIRE Dans le chapitre XXXIV, Léopardinus veut s’opposer à l'invasion des barbares dans ses états : il s’avance contre les Huns et les Pannoniens avec une armée de 600,000 hommes, mais il perd la bataille. Servius et Camber, roi des Huns, s’emparèrent ensuite d’Agrippine, de Trèves et de toutes les places situées entre le Rhin, la Meuse et la Moselle. Ser- vius passa la Meuse près de Trajectum (Maestricht), et défit une seconde fois les Belges commandés par le fils de Léopardinus , près de Tongres; puis, il assiégea et prit cette ville qu'il pilla, et dont il emmena tous les habitans propres à porter les armes. Enfin il soumit, sans obstacle, le reste du pays, et entra dans la Rhétie, dont il fit la conquête jusqu’à l'Océan ‘. Dans le chapitre XXXV, J. De Guyse rapporte que les Huns fon- dèrent en deçà du Rhin plusieurs villes , telles que Ninove, Nimègue, Jupile, Chèvremont, Durbuit, le haut et le bas Maestricht; que le roi Servius bâtit sur la Meuse la forteresse de Servie, et Condro *, duc des Istriens, la ville de Huy qui reçut son nom des Huns, ainsi que plu- sieurs châteaux que Condro bâtit le long de la Meuse. J. De Guyse nous apprend encore dans ce chapitre que les Huns, après avoir passé la Meuse, divisèrent leur armée en deux corps, commandés, l’un parle duc Camber, l’autre par Vermendion, duc des Pannoniens, et marchèrent sur la ville de Belgis. Chemin faisant, ils construisirent plusieurs cités, forteresses, maisons et châteaux, et pillèrent le temple de Neptune, bâti près de la Sambre, rivière à laquelle le duc de Camber donna son nom, en changeant la première lettre de Camber dans la lettre S. Ce qu'il y a de plus ridicule dans ce récit, c’est qu'on y attribue, comme nous l'avons déjà observé, la construction de quantité de villes, 1 M. De Fortia croit que la Rhétie est mise ici pour le Brabant : en effet l'Océan est bien éloi- gnée de la première de ces contrées. Peu importe d'ailleurs, puisque tout le récit de J. De Guyse n’est qu’une fable. 2 Le nom de ce personnage fabuleux paraît être dérivé de celui de Condrusi, peuple qui, du temps de César, occupait la position du Condros actuel dans la province de Liége. Woir Dewez, Dict. géogr. du roy. des Pays-Bas, art. Coxprusr. Tous les endroits que cite ici le chro- niqueur ne datent que du moyen âge, à l'exception de Nimègue qui doit son origine à un chà- teau ou un camp romain, et Maestricht dont nous avons déjà parlé ailleurs dans ce mémoire. SUR LES DOCUMENS DU MOYEN AGE. 107 de bourgs et de forts aux Huns , peuple nomade qui avait le séjour des villes en horreur, et n’habitait, comme les Tartares, descendans des Huns, que sous des tentes ou sur des chariots *. Chapitre XXXVI. Le roi Servius bâtit la ville de Servie, aujour- d’hui le village de Sart de Servin, et s’empara ensuite des villes de Fanum Mercurii , de Port-Belge et d’'Hostilie. Pendant que Servius était occupé à construire la ville de Servie, les habitans de Belgis défirent une partie de l'Armée des Huns près d’Hugnies, qui reçut le nom d’Hu- gniacum, à cause de cette bataille et de la position des Huns *. Camber et Vermendion ayant appris ce revers, rassemblèrent leurs forces et retournèrent auprès de Servius, pour étre en état de se prêter un se- cours mutuel. Alors Camber bâtit, près de la ville de Servie, sur le ruisseau de l'Aube, un château qui, au temps de J. De Guyse ou de Hugues de Toul, s’appelait encore le château de Cambre ou Cambron le Châtelet *. Il disposa en même temps le reste de ses troupes le long du ruisseau , qui fut d’abord appelé Hugnia ou Hugne. Sur une mon- tagne, près de ce ruisseau , il bâtit un temple au dieu Pan * auquel, s’il faut et croire notre chroniqueur , les Huns vouaient un culte par- ticulier. Le pays fut long-temps appelé à cause de cette idole de Pan, la Pannonie ou la Propancie (le Brabant). Ce temple de Pan fut en grande vénération chez les Huns, les Pannoniens, les Romains, les 1 Tout cela n'empêche point que , dans la plupart des livres qui traitent de la géographie de la Belgique , on n’attribue sérieusement aux Huns et aux Goths la fondation de plusieurs de nos villes, apparemment parce qu'on ignore que c’est d’un Lucius de Tongres , d’un Hugues de Toul ou d’autres chroniqueurs de cette espèce que proviennent uniquement ces traditions fabuleuses ; car celui qui, après avoir lu en entier l’ouvrage de J. De Guyse rapporterait encore de pareils contes, ferait certainement preuve de peu de jugement. 2 C’est sans doute le village d'Oignies dans le district de Charleroi. 3 Probablement le village de Cambron-Casteau , district de Mons. 4 Ce qui prouve encore l'extrême ignorance et le peu de jugement de Lucius de Tongres ; de Hugues de Toul et de J. De Guyse, c'est qu’ils prètent indifféremment à toutes les nations le culte des dieux des Romains et des Grecs, comme nous l'avons déjà observé plus haut; en outre, il est bien connu que ni les Huns , ni les Germains , ni même les Gaulois n’élevaient ni temples ni sta- tues à leurs divinités ; les forêts et les montagnes tenaient lieu des premiers ; une épée ou un tronc d’arbre remplacaient les dernières. 108 MÉMOIRE Rhétiens et tous les autres peuples alliés, jusqu’au temps de Jules César, qui détruisit l’idole, et changea le temple en une forteresse. Chapitre XXXVIIL. Les garnisons de Fanum Mecuri, d'Hostilie et de Port-Belge surprennent, à l’improviste, pendant la nuit, l’armée de Servius occupée à la construction de Servie, et en font un grand car- nage. Servius ayant réuni ses forces à celles des Huns et de ses autres alliés, attaque la ville d’Hostilie, la prend après un siége opiniâtre, en rase les murs et passe tous les habitans au fil de l’épée. Ayant ensuite marché contre Port-Belge, il livre bataille aux Albaniens, aux Bretons et aux Belges réunis, et remporte la victoire. Après cette vic- toire les Huns soumettent les Albaniens, les Bretons et ceux de Fanum Mercurii, jusqu’à l'Océan. Chapitres XXXIX et LX. Les Huns, après avoir soumis tout le pays depuis la Haine et l'Escaut jusqu’à l’Océan , instituent des prêtres dans le temple de Pan et établissent, dans la ville du roi Servius, un duc, des chasseurs, des centurions, des décurions et des chevaliers * pour gouverner la ville et tout le pays depuis la Haine, l’Escaut et l'Océan, jusqu’au fond des bois, y compris les Rhétiens et Codron *. Ils se pré- parent ensuite à assiéger la ville de Belgis; mais prévoyant une rési- stance opiniâtre et craignant d’être assaillis par les habitans de Famars et de Solème, ils commencent par construire trois forts pour la garde de leurs bagages , pour servir de réfuge en cas de nécessité et pour diriger de là de fréquentes attaques contre la ville de Belgis. Le premier de ces forts fut bâti sur la petite rivière de Hunel, et reçut le nom de Servius ou de Servain. Le deuxième porte aujourd’hui le nom d’Avesnes, qu’il doit aux étrangers qui y furent placés sous la conduite de Heppron, leur chef, qui donna son nom à la rivière d’'Hepre. Le troisième fort occupé par Camber était bâti sur l'emplacement de Chäteau-Cambresis ou de Cambrai. J. De Guyse se décide pour Cambrai. 1 On voit par ce chapitre que J. De Guyse, d’après Lucius de Tongres et Hugues de Toul, ne se contente pas de donner des centurions, des décurions, des chevaliers romains aux Belges- Troyens , mais qu’il en place même auprès des Huns! 2 Sans doute le Condros. SUR LES DOCUMENS DU MOYEN AGE. 109 Après quinze mois de siége, Belgis, Solème et Famars furent prises par les Huns, qui élurent alors pour roi Camber', autrefois leur duc. Celui-ci prit pour épouses des femmes du sang royal, adopta le culte et les mœurs des Belges, et les soumit entièrement à son au- torité. Le roi Servius voyant avec déplaisir que l’armée voulait rester avec Camber, et que celui-ci employait à son propre profit des troupes qui avaient été levées pour le service commun, résolut de faire alliance avec Heppron, duc des étrangers, et Vermendion *, duc des Pannoniens, afin d'attaquer Camber. Ce dernier craignant le danger qui le mena- çait, offrit au roi Servius 160,000 belges pour marcher sur Rome et s’en rendre maitre. Servius accepta cette proposition. Alors Camber publia un édit général, par lequel il ordonna à tous les hommes de Belgis, de Solème, de Famars et de Port-Belge, de l’âge de vingt-cinq à quarante ans, de sortir, sous peine de mort, du royaume des Belges pendant dix ans, et de se conquérir une nouvelle patrie. Servius ayant ainsi rassemblé une armée innombrable, marcha sur Rome. Camber fit alliance avec Vermendion , qui avait refusé de suivre Servius, et lui assigna un territoire au delà de la Somme, où celui-ci bâtit la ville de Vermende *. Chapitre XLI. Servius est attiré dans la ville de Rome par trahison, et aussitôt mis à mort par Tarquin-le-Superbe, qui tenait en main les rênes du gouvernement et avait excité le peuple contre Servius ‘. Tar- quin est élu roi en sa place , et fait alliance avec les étrangers que l’on recut alors dans la ville. Après cet événement, Camber craignant la révolte des habitans de Belgis, se retire dans la ville qu'il avait bâtie, 1 Il est probable que le nom des Sicambres a servi d’étymologie à celui de ce prétendu chef des Huns. 2 Il n'est point douteux que le nom des Veromandui ou les Vermandois dont il est déjà parlé dans le livre Il des Commentaires de César, n’ait servi aux chroniqueurs à inventer un Vermen- dion , prétendu roi des Pannoniens. 8 Walesii Not. Gall. V. Veromanour. 4 Quiconque a la moindre teinture de l’histoire romaine s’apercevra aisément combien les faits historiques les mieux connus sont dénaturés dans ce récit romanesque. 110 MÉMOIRE et en fait le siége de son gouvernement. Après sa mort Melbrand, son fils, règne sur Belgis. Sous le règne de Tarquin-le-Superbe, dit l’histoire de Tournai, la ville de Tournai fut reconstruite et acquit le plus haut degré de splendeur. Le chapitre L, extrait de Hugues de Toul, rapporte que, du temps de Tarquin-le-Superbe, le roi des Sénonais profitant de la désolation où se trouvait la Belgique , envoya des députés aux habitans de Belgis pour leur enjoindre de lui envoyer, sans retard , l’idole de Minerve et de réparer les dommages qu’ils lui avaient jadis causés, sinon qu’il vien- drait lui-même les y contraindre. Les cités de Belgis et d’'Hostilie ayant refusé sa demande, le roi des Sénonais fit alliance avec les rois des Allo- broges et de Bretagne, et entra avec une puissante armée dans la Bel- gique. Les Bretons assiégèrent Belgis la Gauloise, et les Sénonais avec les Allabroges la ville de Reims ; mais Melbrand , roi des Belges, les défit avec le secours des habitans du Condros, des Huns, des Panno- niens , des Vandales, des Sicambres, des Anthénorides et de toutes les autres provinces, et ravagea le pays des Sénonais eux-mêmes jusqu’au Rhône. Après cette victoire, Melbrand fut élu roi par les habitans de Belgis la Gauloise ou Beauvais, où:il fixa sa résidence, et qu’il agrandit considérablement ; il la nomma cité royale , y bâtit un temple à Bel, et dispensa ses peuples de porter les tributs accoutumés aux dieux de Belgis. Depuis lors, Belgis cessa d’être la résidence royale. « C’est de cette époque, dit le chroniqueur, que date la haine violente que les Belges et les Huiniens conçurent les uns contre les autres, au point qu’ils ne pouvaient se voir ni se parler. » Au chapitre LI, Hugues de Toul raconte que le fils de Tarquin-le- Superbe ayant été bani de l'Italie, rassembla une troupe de Gaulois et d’autres soldats avec lesquels il passa dans le royaume des Belges. Il demanda à être reçu dans la ville de Belgis; mais ayant essuyé un refus, il se retira sur le territoire des Morins, dans un lieu qui fut appelé de son nom Torquoin (Turcoin), où il bâtit une ville et un château fort. Peu de temps après, il fit alliance avec les habitans d'Hostilie, qui le nommèrent leur duc. Il répara cette ville détruite par SUR LES DOCUMENS DU MOYEN AGE. 111 Servius , et se disposa à envahir tous les pays environnans et à dé- truire tout ce qu'avait fait Servius. Dans le chapitre LIT, Hugues de Toul décrit l’expédition de Tarquin- le-Jeune contre la ville de Servie, dont il ne put se rendre maître, mais il soumit toute l'étendue de pays, depuis la montagne de Pan, jusqu’à celle de Minerve, et toute la contrée que le roi Servius avait réduite sous l’obéissance de la cité de Servie et qu’il céda aux Hostiliens. Il s’empara aussi, sur les Morins et les Ruthènes, de tout le pays qui s’é- tendait depuis la ville d’Hostilie jusqu’à la Lis. Il y fonda une ville qu’il appela Tarquinie, et voulut que toute cette contrée et celle qu’il avait cédée aux Hostiliens, portät le nom de Burbantie, de son surnom de Burbantius (l’Orgueilleuse ou la Superbe) *. Chapitre LIT (extrait de Hugues de Toul et de Lucius). Les Belges assiégèrent la ville d'Hostilie. À cette nouvelle, Tarquin abadonna le siége de Servie pour aller défendre Hostilie. Néanmoins, après un siége de quatre mois, la ville d’'Hostilie est prise, détruite de fond en comble, et tous les habitans passés au fil de l'épée. Tarquin lui- même y périt. La ville de Tarquinie essuya le même sort que celle d’'Hostilie. Chapitre LIV. Hugues de Toul rapporte que Blandinus, en action de grâces pour cette victoire , immola à Bel , à Minerve et à Pan, trois de ses fils et autant de ses filles ; qu’ensuite il se fit prétre de Minerve; qu’il construisit, près de la montagne de Minerve, une forteresse qu’il appela Blandinus, et une autre près du Sas de Gand, dans laquelle il: mourut. Cependant Lucius rapporte que Blandinus fut tué par les Belges, dans un château fort qu’il construisit contre la ville de Belgis, près de Crepin. Le même auteur écrit que, du temps de Blandinus , Gorboga- 1 La Burbantie n’est autre que le Brachantum, d’où les chroniqueurs fabulistes du moyen àge ont dérivé le nom d’un prétendu Burbantius. Voir sur le Brachantum , Dewez, Diction. géogr. du roy. des Pays-Bas, art. Bracranrra; Devadder, Traité de l’origine des ducs et du duché de Brabant; De Roches, Mémoire sur la question : Quelles ont été depuis le commencement du VII: siècle jusqu'au IX" siècle inclusivement , les limites des différentes contrées , cantons, etc., renfermés dans l'étendue que comprennent aujourd'hui les dix-sept prov. des Pays-Bas? 1774, in-4° (Anc. mém. couron. de l’acad.), et Valois, Not. Gall., V, Bracsanru. 112 MÉMOIRE don , roi de Bretagne, fit une invasion dans le pays des Ruthènes et vint assiéger la forteresse de Blandinus près du Sas de Gand; que Blandinus après, l'avoir battu à trois reprises, le contreignit à lever le siége; que Gorbogadon attaqua ensuite la ville de Moriane, mais qu'il fut de nouveau défait par Bladinus, venu au secours des Ru- thènes; et que les Morins et les Ruthènes élevèrent par reconnais- sance, sur le trône de leur nation, Suardus, fils de Blandinus, qui, dans la suite, épousa la fille de Gorbogadon. Chapitre LVI, extrait de Lucius. Blandinus , duc des Belges, étant mort, Suardus, son fils, roi des Morins , lui succéda. Il rétablit sur le trône le roi de Bretagne, frère de son épouse, et périt dans une révolte des habitans de Belgis, qui, au préjudice du successeur de Suardus, élurent pour duc un nommé Léogarde, forestier d'un chasseur". Après la mort de Léo, ils élurent Walacrinus, homme du peuple et sans illus- tration, mais doué d’une force prodigieuse. Au chapitre LXIV , Hugues de Toul rapporte que Walacrinus *, suc- cesseur de Léo, gouverna avec tant de tyrannie, que les principaux citoyens de Belgis abandonnèrent la ville et se retirèrent dans celle de Blandinus « on dit qu’alors ils fondérent, peuplèrent et agran- dirent la ville de Blandinium appelée aujourd’hui Gand *, et une autre ville du même nom de Blandinus, qui fut nommée dans la suite Nervie et qui aujourd’hui porte le nom de Tournai *. » Dansle chapitre LXV, J. De Guyse donne des extraits de l’ Histoire de Tournai et de celle de Henri, chanome de Tournai, relatifs à la res- tauration d’Hostilie ou de Servie par les fugitifs de Belgis. «Iln’est der- 1 Le nom de Léogarde est probablement dérivé de gardien des lions, fonction qui coïncide assez avec celle de forestier. 2 Le nom de l'ile Walcheren a sans doute servi d'étymologie à celui de ce Valacrinus. 3 Les chroniqueurs ont dérivé le nom du prétendu Blandinus de la motagne de Blandinium à Gand, sur laquelle saint Amand fonda, en 636, le monastère de Saint-Pierre. Voir Dewez, Dict. géogr. etc., art. Ga»; De Bast, Recueil d’antiquités qaul.; Dierick, Mémoire sur la ville de Gand. 4 Toutes ces différentes origines de Tournai démontrent assez quelle foi méritent les contes débités par les chroniqueurs sur ce sujet. Tantôt c'est Tullus Hostilius qui est censé le fonda- teur de Tournai, une autre fois c’est Servius Tullius qui bAtit cette ville, puis c’est le per- sonnage fabuleux de Blandinus, etc. SUR LES DOCUMENS DU MOYEN AGE. 113 nièrement tombé entre les mains, dit-il, en terminant ce chapitre, une histoire en vers vulgaires, mais fabuleuse , qui raconte des choses mer- veilleuses de la seconde Rome, Hostilie, Nervie ou Tournai, et dont l’auteur parait se nommer Bucalis ou Buscalus ; mais comme il rapporte beaucoup de faits incroyables et faux, et que s’il en rapporte quelques- uns de vrais, ils sont en très-petit nombre et nullement placés à leur temps; J'ai fait peu de cas de ses récits, et les ai regardés comme indi- gnes d’être relatés ”. » Si J. De Guyse avait pensé de même à l’égard de Lucius de Tongres, de Clérembaud, d’Hugues de Toul et de Rucléri, nous ne pourrions qu'applaudir à son bon sens. Chapitre LXVI et dernier du livre IF, extrait de Hugues de Toul. Valacrinus dépouille les temples des dieux, usurpe les fonctions du sacerdoce et condamne le grand-prêtre à mort. Le peuple exaspéré se révolte, chasse le duc et le poursuit jusqu’à la mer. Il est contraint de se sauver sur mer avec ses partisans, et cherche un réfuge dans une île qu'il fortifie et qu’il nomme Valchère (Walcheren). Les Belges dé- crètent qu’ils éliront tous les ans un nouveau duc, afin de mettre un obstacle aux projets ambitieux de leurs princes. Varingerus fut leur premier duc annuel. Le troisième livre est divisé en 95 chapitres; mais il n’y en a guère qu’une quinzaine qui traitent de l’histoire des Belges. Suivant notre plan, nous ne parlerons que de ces derniers , etnous passerons les autres sous silence. Dans le chapitre I, J. De Guyse donne la liste de tous les pays et des villes principales soumis au royaume des Belges. D’un bout à l’autre, ce chapitre n’est qu'un tissu de fables dénuées de toute vraisemblance. Au reste ce n’est qu'une répétition de ce qui se trouve déjà sur ce sujet dans les deux livres précédens. Il suffit de dire que, selon notre chro- niqueur, la domination belge s’étendait entre le Rhin, la Meuse, les Alpes et l'Océan. J. De Guyse va même jusqu’à rendre les Russes tri- butaires ou sujets de Trèves. 1 Voir sur ce Buscalus, Massenius, Antiquit. et Annal. Trevirens.. 1. I. Tom. XII. 15 114 MÉMOIRE Au chapitre VIT, Lucius et Hugues rapportent que, sous le règne d’Artaxercès, les Condrusiens et les Rhétiens, peuples sauvages qui habitaient le territoire de la ville de Dinant, nommée aussi la Lune”, vivaient sans lois, et se nourrissaient d'herbes et de fruits; les jeunes gens allaient tout nus et les vieillards se couvraient de feuilles, d’écor- ces d’arbres et rarement de peaux de bêtes. Les débris de cette nation fondèrent, sur la Meuse, la ville de Dinant, qu’ils appelèrent ainsi du nom de Diane pour conserver la dénomination de leur ancienne cité. Chapitre XIV, extrait de Lucius et de Hugues. Vers la 96° olympiade les Belges, soutenus des cités voisines, se préparèrent à tirer vengeance des maux qu’ils avaient essuyés de la part des Saxons, des Huns, des Pannoniens et des Romains. Les Condrusiens et les Rhétiens, qui n’ap- prouvaient point ce projet, se joignirent aux Saxons et aux Germains, aux Vermandois, aux Cambrésiens, aux Nerviens, aux Serviens et à plusieurs autres cités, et mirent tout à feu et à sang dans le pays des Belges. Ces derniers, dans leur détresse, firent, de leur côté, alliance avec les Sénonais, les Gaulois, les Allobroges et autres cités; ces cités confédérées rétablirent, dans ses états, Brennus, fils du roi de Bre- tagne *, chassé de son royaume par son frère. Chapitre XV. Missenus, duc des Belges, continuant à séjourner en Bretagne, après avoir rétabli la paix entre les deux frères Bremus et Brennus, la ville de Belgis lui enjoignit de revenir sans retard, pour résigner sa charge, sous peine de bannissement. Le duc s’étant plaint de cet ordre à Brennus, celui-ci écrivit une lettre aux citoyens de Belgis, pour les engager à différer de quelque temps la nomination d’un nouveau duc; mais ne faisant aucune attention à cette missive, les ha- bitans de Belgis élirent un autre duc, et bannirent, comme rebelles, Missenus et /es 160,000 Belges qui composaient son armée. 1 Lucius de Tongres a sans doute cru trouver dans le nom de Dinant celui de Diana, ou la Lune. 2? Ce Brennus est sans doute le même que le prince Gaulois de ce nom qui pilla le temple de Delphes. Au moins le nom de celui-ci aura fait inventer le prétendu roi de la Grande-Bretagne dont il question ici. SUR LES DOCUMENS DU MOYEN AGE. 115 Chapitre XVI. Brennus outré de la proscription de Missenus, résolut de tirer une vengeance éclatante des Belges, et de rétablir ce chef dans son ancienne dignité. Mais Missenus apprenant avec douleur ce projet de Brennus, le supplia d’épargner la ville de Belgis et de donner à lui et à ses compagnons des vaisseaux qui les conduiraient aux rivages de la Neustrie, et avec lesquels ils iraient chercher une nouvelle patrie. Brennus leur accorda cette dernière demande, mais ne se désista pas de son projet de vengeance. Il s’embarqua donc avec ses alliés belges pour conquérir, pour son compte, le royaume des Belges, celui des Romains et d’autres encore. Entrés dans les ports de la Neustrie, les Bretons cédèrent leurs vaisseaux aux Belges, et se mirent à parcourir le pays des Sénonais, qu'ils subjuguèrent entièrement. De là continuant leurs conquêtes, ils soumirent tout ce qui se trouva sur leur route jus- qu'à Sens qu'ils agrandirent. Bremus conduisant plus loin son armée fonda une ville qu’il nomma Brémen . Cependant les Belges, auxquels Brennus avait fourni des vaisseaux, arrivèrent, après de fréquens dangers, au royaume des Saxons, où ils fondèrent une grande ville qu’ils appelèrent le Zieu des Belges, aujourd’hui Lubec, et soumirent toutes les contrées maritimes et le royaume de Saxe, après avoir fait prisonnier le roi Ansénorius. Missenus fonda une autre grande ville à laquelle il donna son nom *. Les chapitres XX, XXI et XXII se rapportent à l’histoire fabuleuse de Belinus et de Brennus, fils de Danvallon, roi de la Grande-Bretagne ; mais aucun des faits qui y sont relatés ne ooncerne l’histoire des Belges. Chapitre XXIIL, extrait de Hugues et de Lucius. Vers l’an de Rome 315, les Sénonais, les Gaulois, les Allobroges et les Bretons, sous la conduite de Bremus et de Brennus, envahirent les Gaules et le royaume des Belges; ils incendièrent la Neustrie, le Beauvoisis et toutes les 1 Cest la ville de Brême en Allemagne. La conformité de noms entre Bremus et Brême a été la cause que Lucius a attribué la fondation de cette ville à ce prétendu roi des Bretons. 2 Le chroniqueur ne dit pas quelle était cette ville. Il est probable que c'est Meissen en Saxe. 116 MÉMOIRE villes de ces provinces; ils rasèrent Lutèce, Yseum ou Melun ', et retournèrent triomphans à Sens qu'ils agrandirent considérablement. Ils prirent ensuite la résolution de fonder un nouveau royaume et bà- tirent une nouvelle ville sacerdotale, qu’ils appelèrent Auxerre *, c’est- à-dire le séjour le plus élevé des dieux. Enorgueillis par leurs succés, Bremus et Brennus envoient des députés à tous les peuples des Gaules, de l'Italie et de la Grèce , pour les sommer de se soumettre à leur domi- nation; mais ces ambassadeurs furent éconduits avec mépris. Alors Bremus et Brennus jurèrent, dans leur colère, de détruire tous les peu- ples qui avaient méprisé leurs ordres. Pour mettre leur projet à exécu- tion, ils commencèrent par mettre sur pied une armée très-formidable. Les six chapitres suivans , qui ne sont qu’une continuation du pré- cédent, contiennent le récit de l’expédition de Bremus et de Brennus contre les Belges. La première année de leur règne, Bremus et Brennus attaquèrent les Belges, mais ils trouvèrent d’abord une forte résistance au passage de l'Aisne. Bremus, qui s’y vit presque cerné, fonda avec les Sénonais une ville qu’il appela la Session des Sénonais , aujourd’hui Soissons. Il fonda aussi la ville de Braine, sur le bord de la Veile *. Après s’étre ménagé ces deux retraites, les deux princes s’emparèrent de Reims, passèrent l'Aisne, par stratagème, et défirent les Belges qui ne s’at- tendaient pas être attaqués. Ravageant ensuite tout le pays, ils brü- lèrent Vermande. Arrivés sur les bords de la Somme, ils s’aperçurent que les Belges les attendaient avec de nouvelles troupes ; mais lorsque ceux-ci eurent reconnu qu'ils avaient à faire à deux armées, fortes cha- cune de plus de 200,000 hommes, ils n’osèrent pas se mesurer avec un ennemi aussi formidable et se retirèrent dans leurs villes fortes. 1 César fait mention de Melun sous le nom de Æelodunum (lib. VII). Ce ne fut pendant toute la durée de l'empire romain et jusqu'au VIE siècle qu'un simple bourg, castrum. Valesii Not. Gal. V. Mezonunuw. ? Ammien Marcellin est le plus ancien auteur, après la carte de Peutinger , qui ait fait men- tion d'Auxerre , 4ntessiodurum. Valesii Not. Gal. V. ANTESSIOpURux. 3 Braine dans le Soissonais. C’est toujours la ressemblance de nom qui porte le chroniqueur romancier à attribuer la construction de cette ville à Brennus. ’alesii Not. Gal. V. Brexacun. SUR LES DOCUMENS DU MOYEN AGE. 117 Lorsque les Sénonais eurent appris la retraite des Belges, ils réso- lurent d’assiéger toutes leurs villes. Après s'être avancés jusqu’à l'Es- caut, ils construisirent, au milieu des marais , pour leur servir de place d'armes, une ville très-forte qu’ils nommèrent Vallée des Sénonais, mais qu’on appelle aujourd’hui Valenciennes *, Bremus et Brennus campèrent l’un à Breviticum, nommé ainsi de Bremus, et appelé au- jourd’hui Breuvage; l’autre , à l'endroit dit Brenna, aujourd'hui St- Sauge. Les marais d’alentour reçurent le nom de marais de Bruel, en l'honneur de Brutus, c’est-à-dire des Bretons qui y avaient fixé leur camp. Lorsque les troupes ennemies s’approchèrent de Belgis, elles fon- dèrent, sur un petit canal, un bourg qu’elles appelèrent Bourg des Sénonais, aujourd’hui Sebourg. Bremus et Brennus allèrent ensuite attaquer Famars, à laquelle ils livrèrent quatre assauts. Bremus résolut de continuer le siége de cette ville pendant que Brennus irait assiéger Belgis. Pendant ce temps, des éclaireurs sénonais apportèrent à Bre- mus lidole de la montagne de Minerve. I la reçut avec joie, et la destina à la ville de Sens. Il déclara en même temps que, par respect pour Minerve, on laisserait la ville des Belges intacte, si ceux-ci vou- laient faire alliance avec les Sénonais et les Bretons, et les suivre dans leur expédition. Brennus ne partagea pas l’avis de Bremus ; mais les Belges, avertis de leur résolution, demandèrent une trève de huit jours, et finirent par conclure un traité de paix avec les Sénonais. Les conditions de ce traité portaient que le tiers de tous les Belges propres à la guerre, suivraient les Sénonais dans toutes leurs expéditions, principalement contre les Romains et les Grecs; qu’à chaque olympiade ”, les Belges enverraient au secours de leurs alliés 600,000 bons guerriers, joints à un pareil nombre de Sénonais; qu’il y aurait amitié perpétuelle entre 1 Le nom de Valenciennes est connu dans l’histoire dès le VI: siècle ; cependant au IX° siècle ce n'était encore qu'un simple village ou bourg, vicus, villa. (Valesiè Not. Gal. V. Varentiwaz.) 2 Il parait que les Belges-Troyens n’adoptèrent pas seulement le culte des Grecs et les lois de Lycurgue, et ne se contentèrent pas de créér des magistratures grecques et romaines, mais qu’ils suivirent encore la chronologie et la division des temps des peuples de la Grèce. 118 MÉMOIRE les Belges et les Sénonais ; que Léo, fils du duc Missenus qui avait été proscrit, serait couronné roi des Belges; que la couronne passerait à ses descendans ; que le gouvernement des ducs serait aboli, et que les cent principaux citoyens de Belgis, qui avaient jadis proscrit Missenus et rompu l'alliance avec les Sénonais , seraient mis à mort; enfin que, pendant deux ans, tout le blé des Belges serait apporté aux marchés des Sénonais. Ce ne fut qu'avec peine que la ville de Belgis et les autres villes du royaume des Belges acceptèrent ce traité. Peu de jours après, les Sénonais se disposèrent à attaquer les Rhé- tiens, les Ruthènes, les Ménapiens, les Huiniens et toutes les nations rassemblées à l'entrée de la Rhétie. Bremus fit ses préparatifs de guerre à Soignies, ainsi nommé à cause du séjour qu’y firent les Sénonais ‘. Les Belges, sous la conduite de Belgion, leur duc, furent postés à Lembeek *, c’est-à-dire, Lieu des Belges : l'armée des Rhétiens et des Ruthènes venue au devant des Sénonais, s'arrêta à Rhétia ou Reux *;. les Ménapiens et leurs alliés à Megnapia ou Migneau ‘ ; et les Huiniens à Hennuyères *. Après ces préparatifs, le combat s'engagea, et les Sénonais remportèrent la victoire. Après leur victoire, les Sénonais bâtirent, sur les frontières de la Rhétie, une grande ville pour leur servir de réfuge en cas de nécessité. Ils la nommèrent le bourg des Sénonais ; c’est aujourd’hui la ville de Bruxelles; et ils appelèrent la rivière qui passa par cette ville la Senne °. Ensuite ils assiégèrent Louvain et Anvers’, et finirent par se rendre 1 La petite ville de Soignies, dans le Hainaut, doit son origine à un monastère fondé par saint Maldegaire en 650. (Dewez, Diction. géogr., art. Sorextes). 2 Village de l'arrondissement de Bruxelles. 3 Petite ville à deux lieues de Mons. Elle doit son origine à une église et un monastère fondés sur le tombeau de saint Feuillen. (Dewez, Dict. géogr. des Pays-Bas, art. Roeux). La légère res- semblance de noms entre Rœux et Rhetia a seul pu engager le chroniqueur à placer cette ville dans son récit romanesque ; il en est de même des villages de Migneau et Hennuyères. 4 Mignault, village du district de Soignies. 5 Village à une lieue de Braine-le-Comte, 6 Voir ce que nous avons dit plus haut sur l'origine de Bruxelles. (Dewez, Dict. géog. des Pays-Bas, art. Bruxezxes ; L'abbé Mann, Histoire de Bruxelles , t. I.) 7 Anvers n’était encore aux VII et VIIL siècles qu'un simple château. Vita sanctæ Dympne , c. IE, n° 10. Miræi, Diplom.,t.1 , p. 10. Dewez, Dict. géogr., art. ANvers. SUR LES DOCUMENS DU MOYEN AGE. 119 maitres de tout le pays. Ils changèrent le nom de Æhétie en celui de Brabant, et après en avoir confié le gouvernement aux Bretons, ils conduisirent leurs armées dans l'Italie, s’emparèrent de Rome et rava- gèrent ensuite la Grèce. Puis étant entrés dans la Galatie, ils périrent tous par ordre de Dieu, à l'exception de Bremus qui était retourné de- puis long-temps dans son royaume avec les Bretons. Là finit l’histoire fabuleuse de l'expédition de Brennus. J. De Guyse termine par quelques extraits d’Eusèbe, d’Isidore de Séville, d'Orose, de Vegèce et d’un historien inconnu nommée Fabius, sur le siége de Bois par les Gaulois. Il serait inutile d'entrer dans de longues discussions pour démontrer tout ce qu’il y a de fabuleux dans les prétendus exploits de Brennus et des Sénonais , tels qu’ils sont ici décrits. Nous nous contenterons de renvoyer à l’histoire des Gaulois par Peloutier, Picot et Thierry et aux Vindiciæ Celticæ de Schæpflin. De toutes les fables que contiennent les Annales du Hainaut, la plus étrange est, sans contredit, celle qui est racontée au chapitre XXXVI du livre IFE. On y lit Moss Cri après avoir conquis lAn- gleterre et l'E Écosse, fit don dela Forét Charbonnière ou du Hainaut, à Liriope, jeune fille d’une grande beauté et du sang royal. Les nobles de la Grande-Bretagne et d'Écosse s’étant un jour rassemblés après le départ d'Alexandre pour songer à mettre à exécution sa promesse, lillustre comte de Périgord, nommé Taurus, s’offrit par amour pour cette fille de s'emparer avec ses propres armes de la Forét Charbon- nière qu'Alexandre n’avait pas conquise, quoiqu'il en eût fait don à Liriope. Le comte de Périgord rassembla donc une grande armée dont il donna le commandement à son écuyer Anthonitus, et après avoir équipé une flotte il débarqua sur les côtes de la Neustrie. Il envahit la Forêt Charbonnière, défit et tua le roi de Famars et s’empara de cette ville après un siége de six ans. Claremundine, fille du roi défunt, fut donnée en mariage à Harados, cousin de Taurus de Périgord, et on lui confia le gouvernement de toute la Forêt Charbonnière jusqu’à lar- rivée de Liriope qui était devenue l’épouse de Taurus. Celui-ci se 120 MÉMOIRE rendit avec Liriope et un grand nombre d’Albaniens dans sa nouvelle conquête et jouit paisiblement de la donation d'Alexandre. Cette belle histoire , de laquelle J. De Guyse ose cependant. douter contre son ha- bitude , est extraite de l’histoire des Écossais ou Albaniens par Cresus, annaliste aussi apocryphe que le pseudonyme Lucius de Tongres. Il ne reste plus qu'un chapitre du livre HT relatif à notre histoire : c’est le quarante-neuvième. Il a pour titre : De finali rebellione Saxo- num contra Belgas et Tungrinos , et est extrait d’un ouvrage intitulé : De Gestis Saxonum. On y lit que les Saxons, qui étaient restés long- temps paisibles, tuèrent plusieurs belges qui séjournaient parmi eux, se révoltèrent contre Léon IIF, roi des Belges, et contre les Tongrois, et envoyèrent à Belgis et à Tongres la tête de leur roi qui était Belge de nation. Les Belges et les Tongrois n’osèrent d’abord se venger des Saxons par crainte des Piconiens (Piconiorum ”) et des Romains, dont ils étaient entourés de tous côtés. Enfin, après le départ de ces derniers, ils conclurent, avec les Piconiens, une trève de dix ans et passèrent le Rhin pour attaquer les Saxons. Ils leur livrèrent bataille au milieu de la Souabe, et après avoir combattu pendant cinq jours ils remportèrent la victoire. Affaiblis par le combat, les Belges et les Tongrois ne purent poursuivre les Saxons , et furent bientôt obligés de repasser le Rhin, sur la nouvelle que les Romains étaient revenus sur leurs pas attaquer la cité de Tongres qui opposa une telle résistance à l'ennemi, qu’il fut obligé de se retirer. Le quatrième livre des Annales du Hainaut est entièrement con- sacré à l’histoire de la conquête des Gaules par César. Tout y est encore défiguré par les contes les plus apocryphes, que nous distinguerons d'autant plus facilement, que les vraies sources de l’histoire ne nous manquent pas pour cette époque, particulièrement les Commentaires de César. Ces derniers ne sont pas cités une seule fois par J. De Guyse, qui, toujours entrainé par l'amour du merveilleux , a préféré de s’en ! Ce sont les habitans de la Picardie, province francaise dont le nom n’est point connu dans les documens écrits avant le XI siècle. Valesii Not. Gall. V. Prcanpra. SUR LES DOCUMENS DU MOYEN AGE. 121 rapporter aux récits puérils des chroniqueurs les plus décriés du moyen àge. Le chapitre I de ce livre contient la division des Gaules, d’après une version française de Lucain et de Julius Celsus; mais on voit bien, par les anachronismes dans les noms des peuples qui y sont cités, que cette traduction ancienne ne devait être rien moins que fidèle". Ce qui est dit dans ce chapitre des mœurs farouches et de la vie sauvage des Belges, est plus conforme à la vérité, que ce qui se trouve dans les livres précédens des Annales du Hainaut, où les Belges sont repré- sentés comme un peuple très-civilisé et très-industrieux. Le compila- teur est si peu judicieux, qu'il n’a pas eu le bon sens de remarquer qu’en parlant ici des anciens Belges, comme d’un peuple barbare, il était en contradiction avec tout ce qu'il avait écrit précédemment. Le reste du quatrième livre jusqu’au chapitre XXIV, traite exclusi- vement de l’expédition de César contre les Helvétiens, que notre chroniqueur a travestis dans le peuple fabuleux des Hercyniens, en tronquant, de la manière la plus absurde, tout ce que César rapporte dans ses Commentaires sur ce sujet *. C’est encore dans la traduction vulgaire de Lucain, de Celsus et de Suétone que J. De Guyse prétend avoir puisé ces faits. Quoi qu’il en soit, ilest certain qu’on chercherait vainement, dans le texte latin de ces auteurs, aucune des fables dont J. De Guyse a farci son récit. Dans le chapitre IE, Orgétorix , homme noble et puissant de l’Her- cynie-Belge, dominé par le désir de régner, promet à ses compatriotes d’en faire des rois, des ducs et des comtes s’ils veulent sécouer le joug de Belgis et l’aider à conquérir les Gaules et l'Italie, voire même Rome. L'assemblée générale approuve son projet, lui confie le commande- ment de l'expédition et le charge de gagner le reste des cités qui 1 Voyez sur ce Julius Celsus, que plusieurs savans regardent comme un auteur apocryphe et un nom supposé, Vossius, Æist. latinis, lib. Il, ce. XIII. 2 Il n’y eut jamais de peuple portant le nom d'Hercyniens, mais la vaste forêt Hercynienne qui, d’après César, Strabon, Pomp. Mela, Tacite et autres auteurs anciens couvrait une grande partie de la Germanie. Tom. XII. 16 122 MÉMOIRE n'étaient pas encore entrées dans le complot, et de renouveler les traités avec leurs alliés. Dans le chapitre II , Orgétorix va trouver un prétendu Castamentus fils d’un roi des Ziégeois, et Dumnorix, frère de Divitiacus, duc d’Au- tun, et leur promet de les faire rois de la Gaule-Celtique et de la Pic- tavie, et de leur assujettir les Hercyniens. Mais ces derniers découvrant la trahison d'Orgétorix, l’obligent à comparaître devant l'assemblée générale. Orgétorix tâche de temporiser, tombe malade et meurt. Les Hercyniens persistent toujours dans la résolution de quitter leur pays et de conquérir les Gaules. Trois peuples prennent part à l’expédition : ce sont les Tongrois, les Tréviriens et les Thuringiens. « Toute cette multitude se choisit des ducs, des chevaliers, des centurions, des soixanteniers et des décurions pour gouverner et juger l’armée ainsi que tout le peuple. » On voit ici, de la manière la plus évidente, que les chroniqueurs copiés par notre auteur n’ont fait que travestir ridi- culement le livre premier des Commentaires de César. Les quatre peuples, dont il est question dans ce chapitre, et dont le premier , les Hercyniens, n’exista jamais que dans l'imagination blasée des ignorans chroniqueurs du moyen âge, et dont le dernier , les Thuringiens, n’est point connu dans l’histoire avant le Ve siècle de notre ère, remplacent les Helvétiens, les Rauraciens, les Boiens et les Latobriges, dont il est parlé dans le livre premier des Commentaires. Dans le chapitre IV est décrite l'expédition des Hercyniens dans la Gaule, Comme les Helvétiens de César, ils commencent par brûler douze villes, quatre cents bourgs, tous les châteaux et forteresses, sept cents maisons fortifiées, les métairies, les récoltes, enfin tous ce qu’ils ne peuvent emporter. Les Helvétiens prirent leur route par Genève et le Jura; mais comme nos Hercyniens habitaient la Belgique, ils pas- sérent entre Belgis et Tournai, ravageant à leur aise toute la contrée. La troisième division des Belges-Chevelus, composée de Tréviriens, reçut un rude échec entre Beauvais et Mantes de la part des Sénonais, ! C’est probablement le séquanien Casticcus, fils de Catamentalis, dont César a fait mention, SUR LES DOCUMENS DU MOYEN AGE. 123 des Séquanois et des Celtes. Le reste de l’armée hercynienne ayant trouvé un gué pour passer la Seine, vengea cruellement les Tréviriens, en mettant tout à feu et à sang dans la Bretagne, le Poitou, sur les bords de la Garonne et dans le pays des Bourguignons. Ici encore l’auteur ne se fait pas faute de commettre des anachronismes; car voilà les Bourguignons établis dans les Gaules avant les conquêtes de César , c’est-à-dire plus de quatre siècles avant qu’ils ne sortissent de la Germanie. Les chapitres suivans, jusqu’au vingt-troisième, contiennent le récit de l'expédition de César contre les Hercyniens. Cette relation est plus conforme à ce qu’on lit dans les Commentaires que ce qui précède, à l'exception toutefois d’une partie du chapitre XXIIT, qui est entiè- rement apocryphe. Au reste de Guyse applique toujours aux prétendus Hercyniens les faits qui, dans les Commentaires, se rapportent aux Helvétiens. Dans les chapitres XIV à XVIIT est décrite l'expédition de César contre ÂArioviste, toujours d’après la prétendue traduction de Lucain et de Celsus. Le fond du récit est conforme à ce qui se lit dans les Commentaires de César; mais les détails sont souvent erronés et il s’y trouve des anachronismes assez graves, par exemple: Quintius Fabius y est cité comme ayant vaincu les Flamands et les Nerviens (Flamingos et Nervios), au lieu des Arvernes et des Ruthènes, comme il est dit dans les Commentaires de César. Ce que nous disons ici du contenu des chapitres XIV à XVIII, on peut le dire de celui des chapitres XIX à XXV qui contiennent la rela- tion du commencement de l’expédition de César contre les Belges. Le compilateur n’a fait que copier les prétendues traductions de Celsus , de Suétone et d’Helinand, qui est ici un peu moins ami du merveil- leux que de coutume ”. 1 Dans le chapitre XXI on trouve le tableau des forces militaires des différens peuples formant la confédération belge. Ce tableau est conforme à celui qui se trouve dans les Commentaires , excepté qu'on y litle nom des Adubes, dont il n’est point fait mention dans César. J. De Guyse examine sérieusement, dans le chapitre XXI de ses Annales pourquoi le nom de Belgis ne se 124 MÉMOIRE Si dans les vingt-cinq chapitres du livre quatrième des Annales du Hainaut , 3. De Guyse s’est contenu tant soit peu dans les bornes de la vérité historique, il s’en dédommage amplement dans les dix-neuf cha- pitres suivans. En effet les chapitres XXVI à XLV ne sont qu'un long tissu de contes sur une prétendue expédition de César contre la ville de Belgis, dont le roi était alors un Ursarius. On y lit, qu'après avoir défait l’armée des Belges, forte de 120,000 hommes (dont il n’en échappa que 15,000), dans un champ près de Bavai, appelé encore du temps de J. De Guyse Champ de douleur ou la Montagne de la mort, il mit le siége devant Belgis défendue par une garnison de 740,000 hommes ! Cette garnison était composée, au rapport de Nicolas Rucleri, de Ro- mains transfuges , de Belges, Tongrois, Tréviriens, Saxons, Analdes, Hainiques et Nerviens, et était commandée par Galba, fils de Galba, roi des Soissonais, et par Odomarcus, frère de Publionatus, duc des Nerviens. Le roi Ursarius, avant de livrer à César la bataille dans laquelle il périt, avait fait sortir de Belgis les vieillards, les infirmes et les femmes, surtout les femmes grosses et les nourrices avec leurs enfans , au nombre de dix mille. Ces fugitifs se retirèrent dans les bois, et, selon Hugues de Toul et Rucleri, descendirent vers la mer Ruthé- nique , au delà de l’Escaut, sur le territoire des Ruthènes soumis aux Morins, c’est-à-dire dans la Flandre actuelle, où, dans la suite, elles formèrent une grande nation, celle des Flamands. Conduits par Odoa- trouve point désigné dans ce tableau; il croit que c’est parce que la ville de Belgis n’entra pas dans la ligue , ou, suivant Lucius de Tongres, qu’elle était trop déchue de son ancienne puis- sance pour avoir été remarquée, et que les autres peuples n'avaient pas voulu se liguer avec elle, depuis que ses habitans avaient assassiné leurs prêtres et leur roi. Trèves, Metz, Tongres et le Hainaut ne paraissent pas non plus dans le tableau de la confédération belge, parce que, dit notre auteur, ils avaient déjà été soumis par César. Ce qui est faux par rapport aux Mediomatri- ques et aux Nerviens. Quant aux Tongrois, César n’en pouvait point faire mention , puisque ce peuple ne vint s'établir en Belgique que sous le règne d’Auguste. Enfin Famars, le château de Valenciennes, Solème, Cambrai, Sebourg, Mercuriale et Chièvre ne sont point mentionnés par César , dit De Guyse, parce que ces villes dépendaient des cités de Belgis ou de Nervie. Si J. De Guyse avait eu la moindre connaissance des vraies sources de notre histoire, il aurait su qu'aucun de ces lieux n'existait lors de l’expédition de César, et il se serait épargné toutes ces réflexions puériles. SUR LES DOCUMENS DU MOYEN AGE. 125 cre I, ces Flamands conquirent l'Italie en 460 et furent maitres de Rome pendant 14 ans ‘! Les Belges, après la mort d’'Ursarius, choisirent pour roi, Andro- mades , de la famille des anciens prêtres. « Son premier soin, dit le chroniqueur, fut d’invoquer les dieux à son aide et d’immoler l'aîné de ses fils au dieu Mars, pour apaiser cette divinité. » Après avoir pourvu à l’approvisionnement et à la défense de Belgis, il fit une sortie contre les assiégeans, détruisit leurs machines de guerre, et tailla en pièces les deux tiers de leur armée. Ce ne fut qu'avec grande peine que César put rallier les débris de son armée , avec lesquels il alla camper sur la montagne de Pan, qui se trouvait à l'emplacement de la ville actuelle de Mons. Pendant que César attendait les renforts qu'il avait demandés, les Belges eurent le temps de ravitailler en sûreté leur ville, et virent courir à leur aide une foule d’Arnaldes *, de Saxons et de Suèves trans- rhénans. Le roi des Belges envoya alors un détachement de son armée pour punir les Rémois de l'alliance qu’ils avaient faite avec les Ro- mains. Les Rémois, prenant pour des Celtes-Séquanois qui venaient au secours de César, les troupes de Belgis, leur permirent d'entrer dans leur ville qui fut aussitôt saccagée , détruite et tous les habitans passés au fil de l'épée *. Cependant César ayant reçu des renforts de l'Italie, de la Gaule Celtique et du royaume des Belges, dont toutes les villes lui envoyèrent des secours à l'exception de Nervie, Famars, Mercuriale, Chièvres, Port-Belge, Arras et Moriane, reprit ses anciennes positions autour de Belgis. Ardopatras, général des troupes étrangères que le 1 Voilà Odoacre, roi des Hérules, transformé avec son peuple en Flamands. Avec des histo- riens aussi habiles que J. De Guyse et Lucius de Tongres, il n’est pas de peuple si obscure qui ne pourrait se composer les Annales les plus glorieuses du monde. Odoacre et les Hérules, trans- formés en Flamands, nous rappellent les louables efforts de M. de Grave pour métamorphoser la Belgique en Champs-Élysées d'Homère et de Virgile. 2 Le nom de Æainaut a sans doute servi à trouver l’étymologie de celui de ce prétendu peuple inconnu à tous les auteurs anciens. 3 Ce que César dit du siége que les Nerviens vinrent mettre devant la ville des Rémoïs, parce que ceux-ci s'étaient détachés de la ligue belge, a servi de fondement à cette fable, (Cæsar, Bell. Gall., 1. IL.) 126 MÉMOIRE roi Andromades avait envoyé à Famars' et Hancride, duc de cette place, virent attaquer, à l’improviste, la division de l'armée romaine campée au Quesnoï, laquelle fut mise dans une déroute complète. César instruit de ce désastre ordonna à Labienus, à Marc, à Antoine * et à Caton d'attaquer Famars; ce qui fut exécuté. Les Romains commen- cèrent par s'emparer du château de Sebourg et de plusieurs autres; mais ils durent plier devant Hanwide et Ariopatras *, auxquels le roi Andromades avait envoyé de nouveaux renforts par un souterrain qui s’'étendait de Belgis à Famars. César envoya Cicéron au secours de Labienus qui marcha contre la ville de Famars, dont il s’empara après plusieurs assauts, et qu’il livra aux flammes; mais il ne put prendre le château. César résolut alors de marcher lui-même à la tête de toute son armée pour se rendre maitre de cette place; mais il échoua dans la première attaque, et perdit beaucoup de monde. Il assembla son conseil ‘, et il fut décidé de bloquer le château de Famars et de le réduire par famine. Son armée, dit Hugues de Toul, prit position sur la Montagne de Pan (Mons) et à Aimeries, plaine délicieuse entre Maubeuge et Berlaimont. César fit construire un château extrémement fort, nommé Chier-Edeu, au milieu des marais de la Haine et y placa plusieurs légions qui inquiétérent continuellement le château de Famars et portégèrent les postes romains. Pendant que César formait le siége de Famars, il se rendit maître de la ville de Mercure, de Chièvre et des autres villes jusqu’à la mer, lesquelles il réduisit en cendres. La garnison de Famars réduite de 120,000 (?) à 15,000 hommes, se 1 Cet endroit n’était qu’une simple station de poste romaine, et par conséquent n'existait pas avant la conquête de la Beloïque, par César, comme l'indique son nom latin Fanum Martis, qu'il tira probablement d’un temple bâti par les Romains. Ce ne fut qu’à la fin du IV° ou au com- mencement du V° siècle, que les Romains en firent une forteresse assez importante. Valesii Not. Gall. V. Faxom Manris. 2? J. De Guyse fait ici deux personnages d’un seul Marc-Antoine. 3 Ces noms grecs, latins, teutons d’Ariopatras, Andromades, Hanwide, etc., tiennent au système de Lucius et d’Hugues de Toul de confondre les temps, les lieux et les peuples. 4 Hugues de Toul prétend que le lieu où César tenait son conseil était une vaste plaine, appelée par les Romains extranullus et par les gens du pays Hornu. SUR LES DOCUMENS DU MOYEN AGE. 127 voyant enfin hors d'état de résister plus long-temps contre les forces réunies des Romains, capitula à des conditions très-avantageuses; on comprit dans la capitulation le château de Valenciennes. Après la prise de Famars, César poussa avec vigueur le siége de Belgis, qui fut bientôt désolée par la plus affreuse famine. On fit alors sortir de la ville 16,000 femmes et enfans qui, sous la conduite de Flamineus, fils aîné d’Andromades, âgé de 13 ans, et sous celle de Flandebert , fils d'Ursarius, allèrent s'établir en Flandre, où ils fondèrent , dans la suite, une ville du nom de Belgis *. Andromades désespérant du sort de Belgis, tenta une sortie, à la tête de 20,000 hommes. Hanwide, duc de Famars, parvint néanmoins à rétablir ordre et à pourvoir à la défense de cette ville, qui aurait pu encore se sou- tenir quelque temps, sans la trahison de Quintus Curius. Ce der- nier ouvrit les portes du palais aux Romains, qui livrèrent aussitôt un furieux assaut à la ville, dans lequel périrent Ursarius, Galba et Odomarcus. Le duc Hanwide prévoyant le sort de Belgis, sortit, pendant la nuit, par le souterrain, accompagné de la plupart des femmes , qui emportèrent avec elles les trésors de la ville. Le troisième jour après son départ, les Romains entendant les cris de désespoir des 1 Il est inutile d'observer d’où sont dérivés les noms de ces deux prétendus personnages, Ce qui prouve quelle foi méritent les contes débités sous le nom d'histoire par Lucius de Tongres et autres romanciers ejusdem farinæ, c’est que Meyer, d’après des chroniqueurs également apo- cryphes, fait vivre le prétendu Flandebert, non du temps de César, mais au V° siècle. Il rap- porte que ce Flandebert était neveu de Clodion , que celui-ci, après avoir vaincu un prétendu Goldverus, duc des Ruthènes et des Cimbres, donna la fille de ce prince pour épouse à Flande- bert, et fit ce dernier commandant ou gouverneur du littoral de la Flandre, ?s Flandbertus, ajoute-t-il , nomanis Flandrici conditor parensque fuisse creditur, Cymbrosqueet Ruthenos nomine suo Flandros fecisse (Meyer, Ann. Fland., 1. 1, p. 1). Dès le temps où vivait Tacite les Cimbres n'étaient déjà plus connus que de nom (Tacite , Mor. Germ.), et à plus forte raison on ne devait plus trouver des Cimbres dans la Flandre au V° siècle. Les Rutenis ont été encore moins con- nus dans la Flandre, puisqu'ils habitaient le midi des Gaules, dans la Rouergue. (Valesii Not. Gall. V. Rurexi). Enfin les Flamineus et les Flandebertus doivent être mis sur la mème ligne que les Brabo , les Batus, les Friso et autres héros fabuleux de cette espèce. 2 Le crédule Van Vaernewyck place cette prétendue ville de Belgis à Velsecke , village à quatre lieues de Gand. I se livre à de longues discussions pour prouver que c'était la fameuse Belgis sur laquelle J. De Guyse débite tant de contes puérils. 198 MÉMOIRE femmes qui étaient restées à Belgis, assaillirent la ville de tous côtés, et y pénétrèrent par différentes brèches. Tous les habitans furent passés au fil de l’épée, à l'exception de cinq cents guerriers qui s’é- taient renfermés dans le palais avec une troupe de femmes. Après s’y être défendus pendant plusieurs jours, ne voyant aucun espoir d’être secourus , ils mirent le feu au palais, se sauvèrent par le souterrain de Famars, et se dispersèrent dans les bois et les marais. César fit réparer le palais et boucher le souterrain. Aussitôt après la prises de Belgis, ceux de Famars vinrent, suivant les articles de la capitulation du château, en offrir les clefs à César. Il pardonna à toute la garni- son, mais il fit décapiter Hanwide sur le théâtre de la ville, où il fut enterré, et cet emplacement portait encore du temps de J. De Guyse, le nom de Mont Hanwide. La garnison de Famars sortit librement du château et bâtit, avec la permission de César, un bourg autour du château de Valenciennes. Une partie de la garnison alla s'établir de l’autre côté de la rivière sur une montagne, à laquelle elle donna le nom de Rus martisium. César, après avoir complété ses cohortes, les envoya en garnison dans les douze châteaux qu’il avait bâtis autour de Belgis, et éta- blit Crispus, avec la moitié d’une légion, dans le château de Qua- régnon ‘. Ce général se rendit maître de tous les forts situés sur les rivières, depuis le château de Quarégnon jusqu’à Nervie, et bätit plusieurs places fortes. Tel est l’abrégé de ce que contiennent les chapitres XXVI à XLIT des Annales du Hainaut. Rucleri. Helinand et Lucius de Tongres sont les seuls autorités sur lesquelles s’appuie J. De Guyse. IL n’est pas nécessaire d’observer que tous ces faits doivent être considérés comme fabuleux, puisqu’aucun auteur ancien n’en a parlé : le silence seul de César, qui, dans ses Commentaires, n’aurait certes pas oublié des événemens de cette importance, le prouve suffisamment. Dans les chapitres XLIII à LV on trouve l’histoire de la guerre de 1 Village du district de Mons. SUR LES DOCUMENS DU MOYEN AGE. 129 César contre les Nerviens et de la révolte des Éburons et des Nerviens, d’après la version vulgaire d'Hélinand, de Suétone, de Julius Celsus, de Hugues de Toul et de Henri, chanoine de Trèves. Pour le fond, les faits sont assez conformes à ceux qui sont rapportés dans les Commentaires de César, mais les détails sont, en majeure partie, apo- cryphes. Ainsi les Atuatiques de César y sont remplacés par les pré- tendus Analdes, et les Tenchtres et les Usipètes par les Saxons. Les noms anciens des pays y sont souvent remplacés par des dénominations modernes ;les noms propres de personnes sont également altérés. Il y est fait mention d’un siége du château de Nivelles (appelé autrefois, dit J. De Guyse, castrum Nerviense) par les Nerviens”. On y attribue aux Saxons, aux Tréviriens et aux Éburons la construction des châteaux d’'Escanaflle, sur le bord de l’Escaut, du Mont de Brutus, vis-à-vis de celui de Quarégnon, de Grammont, de Leuze, de Belgis ou Baluel, de Buri et d’Anvin; enfin la fondation de la ville de Gand y est attribuée à Caïus Fabius, un des lieutenans de César, et à Caïus Caligula *. Les chapitres LITE, LIV et LV renferment l’histoire du siége et de la destruction de la prétendue ville de Nervie (appelée depuis Tour- nai) par César. Le récit de cet événement, dont la fausseté est suffi- samment prouvée par le silence de César, a été puisé par J. De Guyse dans une ancienne chronique de Tournai (ex communi historia Tornacensi), et dans la chronique de Henri, chanoine de l’église de Notre-Dame de cette ville. Les ouvrages de ces deux chroniqueurs ne sont point, à ce que nous sachions, parvenus jusqu’à nous; au moins ils n’ont jamais élé imprimés. ! Nivelles n’était encore qu’un simple village ou bourg en 1041. Dansune charte datée de cette année l’empereur Henri II lui donne le titre de burgus et villa. Une charte de 992 ne le qualifie même que de locus, et au VIE siècle, lorsque sainte Gertrude y fonda un monastère, ce n’était qu’un lieu couvert de bois. (Dewez, Dict. géogr., art. Niveues.) Ainsi il ne pouvait pas encore être question de cette ville plus de sept siècles auparavant. ? Il n’est point fait mention de Gand dans des documens authentiques, avant le VII: siècle. Ce n’était alors qu'une petite bourgade (voyez De Bast, premier supplément au Recueil d’anti- quités romaines et gauloises, et ce que nous avons dit plus haut sur la légende de saint Amand). Ton. XII. 17 130 MÉMOIRE Les chapitres LVII à LIX contiennent l’histoire abrégée de la guerre de César contre Pompée, et quelques détails sur la vie privée et la mort de ce grand général. Comme ils mont aucun rapport à notre sujet, nous les passerons sous silence. Des cent et deux chapitres contenus dans le cinquième livre des Annales du Hainaut, 1 n’y en a guère qu’une quinzaine qui traitent de faits relatifs à la Belgique, et presque tous ces faits sont apo- cryphes. Le reste du livre se borne presque tout entier à l'histoire des empereurs romains et à celle de Jésus-Christ. Le chapitre I, extrait de Hugues de Toul, décrit le retour des Belges échappés au massacre, On y lit que, dans la cinquième année de son règne, Auguste, sur les informations des Romains qui tenaient gar- nison dans les anciens châteaux des Belges, permit aux Belges fugitifs qui s'étaient retirés dans les marais de la Flandre, de venir habiter le territoire désert de Belgis et de rebätir cette ville; qu’il mit pour condition à ce retour , que les Belges ne fabriqueraient point d’armes, qu'ils ne fortifieraient point leurs villes sans le consentement de l’em- pereur, et qu'ils paieraient tous les ans une capitation aux Romains. Une partie des Belges qui ne voulut point se soumettre à ces condi- tions, se retira chez les Tréviriens. Peu d’années après leur retour, les habitans de Belgis obtinrent de Crispus et des Romains la permis- sion de fortifier leurs villes. Ils bâtirent alors plusieurs hameaux sur une partie des ruines étendues de l’ancienne Belgis, tels que Belgien, nommé aujourd’hui par corruption Bellignies, Louvignies, ainsi appelé de l’ancienne porte Lupina, Breangies, etc., etc. On n’a pas besoin de faire observer que tous les écrits anciens et au- thentiques gardent un silence absolu sur ces événemens. Il est toutefois probable que, non la restauration, mais la fondation de Bavai remonte au règne d’Auguste . La situation de cette ville semble indiquer que, dans l'origine, ce fut un simple fort ou castrum stativum, lequel, comme beaucoup de lieux de cette espèce , et à cause de sa situation à l’em- 1 Les monnaies romaines trouvées à Bayai prouvent que cette ville existait dès le règne de Tibère (voyez De Bast, Recueil d’antiquités romaines et gauloises). SUR LES DOCUMENS DU MOYEN AGE. 131 branchement de plusieurs routes romaines, aura contribué à former insensiblement une ville autour de son enceinte. Ptolemée, qui écri- vait au IIIe siècle, est non-seulement le premier auteur ancien qui ait donné à Bavai le titre de ville, mais il est encore le premier qui ait fait mention de Bagacum. Le chapitre IL (que J. De Guyse dit avoir extrait d’un petit livre en lanque vulgaire intitulé : Restauration de Tournai par Galba) traite de la prétendue restauration de la ville de Nervie ‘ ou de Tournai par Galba. Ce général romain, après avoir appelé dans cette ville tous les habitans qui avaient échappé à la destruction de Nervie par César, y établit, suivant la coutume de la ville de Rome, des sénateurs et des officiers pour les gouverner et recueillir les impôts. 11 changea le nom de Nervie qu’elle portait en celui de Tournai. Il rétablit en outre tous les châteaux voisins, ainsi que la cité de Mercure (dont il changea le nom en celui d’Ablata) et celle de Chièvres, dont il fit le lieu de sa résidence; enfin il fit rebâtir neuf châteaux qu’il donna à ses fils et à ses filles. J. De Guyse rapporte encore, d’après le petit livre précité, que le cri de Gaure! Gaure! que les chevaliers de Tournai faisaient faire de son temps, dans le pas d'armes, voulait dire Galbe! Galbe! Tous ces faits peuvent être regardés comme autant de fables. D’abord la ville de Tournai ne porta jamais le nom de Nervie, qui lui fut im- posé par les chroniqueurs du moyen âge, dans la fausse idée qu'ils avaient que cette ville était le chef-lieu des Nerviens et non des Ména- piens, comme nous l’avons déjà dit. En second lieu, non-seulement Galba ne restaura point la ville de Tournai, mais cette ville n’exista même que long-temps après lui. La table de Peutinger, composée, selon Mannert vers l’an 240 de l'ère vulgaire, est le plus ancien ou- vrage romain qui fasse mention de Tournai, laquelle n’y figure encore que comme une simple station de poste. Il paraît que ce n’est que 1 Cette dénomination de Nervie , donnée par les chroniqueurs du moyen âge à Tournai , pro- vient de ce qu’on croyait autrefois que Tournai était la capitale des Nerviens et non des Ména- piens. (Voir Catullus, Tornacum civitas metropolis Nerviorum ? et Poutrain, Hist. de la ville de Tournai , 1. 1). 132 MÉMOIRE vers la fin du IVe siècle, probablement après la destruction du Cas- tellum Menapiorum (Cassel en France et non Kessel sur la Meuse comme ou le croit communément), que Tournai obtint le titre de ville. La Notice des Gaules, composée sous le règne d’Honorius et d’Acadius, est le plus ancien document qui lui donne ce titre. Quant aux villes de Mercure et de Chièvres, que J. De Guyse prétend avoir été également restaurées par Galba, quiconque a la moindre connais- sance de notre géographie ancienne, sait qu'il n’y a jamais eu une ville de Mercure dans le Hainaut, et que la ville de Chièvres ne fut fondée que plusieurs siècles après l'expulsion des Romains. Nous passons les six chapitres suivans, qui ne sont nullement relatifs à notre sujet. Le chapitre VIIT, extrait de Hugues de Toul , traite dela prétendue restauration du temple de Mars à Famars, la douzième année du règne d’Octavien. L’inauguration du nouveau temple eut lieu avec grande pompe de la part des Belges : «Les uns, dit l’auteur, immolaient leurs fils ou leurs filles, d’autres leurs femmes, plusieurs répandaient leur propre sang : on égorgeait aussi toutes sortes d'animaux; enfin la dévotion du peuple était si grande, que rien n’était épargné pour se rendre la divinité propice. » Les chapitres IX, X et XI contiennent le récit d’un différend qui s’éleva entre Galba et Crispinus , à l’occasion du temple de Mars, où le premier ne voulait pas laisser sacrifier, contre l'avis du dernier. On y trouve l’édit impérial, par lequel Auguste donna gain de cause à Crispinus, ordonna l'entière restauration du temple de Mars, et que tout le pays compris entre la Meuse et l'Oise, l'Escaut et la mer, pren- drait le nom de province Martisienne. « Quatrièmement, dit J. De Guyse d’après Hugues de Toul, il était défendu sous peine de mort, à qui que ce fut, d'employer dans ses écrits, dans ses discours publics ou familiers, les dénominations de Belgis, Belge et Belgique ; cax on voulait abolir le nom de Belges et en effacer le souvenir de la mémoire des hommes. » Cinquièmement, que dorénavant toutes les dénomina- tions de ce genre qu’on trouverait écrites dans les livres, les chartes, SUR LES DOCUMENS DU MOYEN AGE. 133 les lettres ou sur les murs, entraineraient la peine de mort pour leurs auteurs, et que même la ville entière ou le bourg qui conserverait des noms pareils serait à jamais détruit. Auguste ordonna enfin qu'aucune autre divinité que Mars ne füt adorée dans la province Martisienne, que Famars continuerait à être la capitale de sa province, et que Trullus en serait le gouverneur. J. De Guyse croit que ce Trullus donna son nom à la riviève de la Trouille. Ce qu'il y a de plus absurde dans tous ces faits aprocryphes, c’est la prétendue défense qu'Auguste fit aux Belges, sous les peines les plus sévères , de porter désormais leur nom national. Comment Hugues de Toul a-t-il pu imaginer un pareil conte si contraire à toutes les notions positives ? Tous les auteurs anciens ont-ils jamais donné à la Belgique une autre dénomination que celle qu’elle porte encore de nos jours, et Auguste, loin de supprimer le nom Belge ou de Belgique, ne créa- t-il pas lui-même, en organisant le gouvernement des Gaules, une Provincia Belgica , que, dans la suite, Constantin divisa en première et en seconde Belgique, dont Reims et Trèves étaient les capitales ? Quel est encore l’auteur romain qui ait jamais connu une province Martisienne , non-seulement en Belgique, mais même dans toutes les Gaules? Trouve-t-on un nom semblable dans la Notice de l’Empire, dans celle des Gaules ou dans tout autre ouvrage ancien de ce genre ? Dans le chapitre XIII, qui est de la composition d'Hugues de Toul, on trouve l’histoire de la révolte de Tréviriens, l’an vingt-quatrième du règne d’Auguste *. On y lit qu'après que les habitans de Strasbourg eurent tué leurs juges romains, les otages des villes de Toul, de Liége (qui n'existait point encore à cette époque), de Metzet autreslieux, otages que les Romains tenaient captifs à Trèves, furent condamnés à mort, pour avoir écrit en lange Belge à leurs compatriotes ; que lorsqu'on les mena au supplice, ils excitèrent la commisération des Tréviriens, qui 1 L'an 9 avant l’ère vulgaire. Selon Tacite , la révolte des Tréviriens eut lieu l'an de Rome 774 ou 24 avant J.-C. Tout ce qui se trouve sur ce sujet dans les Annales du Hainaut est fabuleux , comme on peut s'en convaincre en comparant les faits tels que les rapporte J. De Guyse, avec la relation de Tacite, Annales, 1, HI. 134 MÉMOIRE se soulevèrent aux cris de mort aux Romains! Vivent les Belges! Qu'ils exterminèrent tous les Romains qui se trouvaient à Trèves; enfin que les habitans de Metz et autres villes applaudissant à leur entreprise, chassérent de même les Romains de leur territoire. Dans le chapitre suivant il est question d’une révolte des Germains et d’une grande partie des Gaules. Mais, sur l’ordre du dieu Mars, les Gaulois rentrérent dans la soumission, et ne voulurent point prendre part à la révolte des Tréviriens. Chapitre XV. Les Tréviriens détruisent la ville de Reims pour la punir d’avoir trahi les Belges. À cette nouvelle, toutes les villes des Gaules demandent à l’empereur de pouvoir rétablir leurs anciens murs, ou qu'il leur soit envoyé de prompts secours de Rome. Trois semaines après la destruction de Reims, Drusus arrive dans cette ville avec cinq légions. Les ducs de la Gaule se rendent auprès de lui et lui découvrent la conspiration. Ils prennent la résolution de relever les anciennes villes et les anciens châteaux, et distribuent les légions dans les différentes places de leurs gouvernemens. Chapitre XVI. Claudius, envoyé de Rome avec huit légions, au secours des Gaules, en fortifie toutes les villes et les châteaux, au nombre desquels étaient Reims, Vermande, l’ancienne Belgis, Fa- mars, dont il fit rétablir le souterrain, Arras, Cambrai, Tournai et Tongres, et il met, à la disposition du duc Trullus, trois légions et trois cohortes, pour la défense du camp de César à une lieue N.-0. de Bavai. Drusus fixe sa résidence à Reims, et Claudius à Belgis, à qui il rend son premier nom de Bavonie. Pendant les deux premières an- nées de son gouvernement, Drusus vengea les Rémois des Tréviriens, et détruisit Verdun et plusieurs autres villes. Dans le chapitre XVIII, Hugues de Toul fait venir, dans les Gaules, avec cinq légions, Quintilius Varus, dont la tyrannie avait causé la révolte des Tréviriens. Après avoir dompté la Gaule-Celtique et détruit la ville de Lingons ", ce général arriva avec quatre légions à Tongres, 1! Langre. SUR LES DOCUMENS DU MOYEN AGE. 155 et fit, pendant plusieurs années, la guerre avec peu de succès contre les Tréviriens. L’avarice et la cruauté de Varus furent cause de la ré- volte de plusieurs peuples qui se réunirent aux Tréviriens. Tous ces faits sont controuvés : ce ne furent point les Belges qui se soulevèrent contre Quintilius Varus, mais les Germains de la rive droite du Rhin, notamment les Suèves”'. Au chapitre XXII, Hugues de Toul parle de la prétendue destruc- tion de Tongres, vers l’an 9 avant J.-C. Trois légions romaines, avec une multitude innombrable de Tongrois , périrent, dit-il, dans le sac de la ville. Les Tréviriens enorgueillis par ce succès, s’emparèrent de toutes les places et villes fortes sur la Meuse, le Rhin et près de l'Océan, jusqu’à Tournai et la Haine. Au bout de quelques semaines, Néron et Claude arrivèrent dans les Gaules avec sept légious, et ordonnèrent à Drusus et à Tibère de re- passer le Rhin pour punir les Tréviriens. Claude établit sa résidence à Reims, et Néron à Tournai : « C’est le même Néron, ajoute Hugues de Toul qui, le premier, répara la route royale qui conduisait de Tour- nai à travers les marais, les montagnes et les bois. Il fit de plus con- struire près de Pile de Valenciennes, un pont de bois qui, jusqu’à ce jour, s’est appelé pont de Néron. Dans la suite Annolius, sous le règne de l’empereur Néron, changea la direction de ce pont et le fit bâtir en pierres, dans l’alignement de la route royale qui va de Tournai à Bavaï.» Ces derniers faits peuvent être vrais, quoique l'autorité de Hugues de Toul seule ne suffise pas pour en constater la réalité. Ce qui regarde la révolte des Tréviriens ne mérite aucune croyance. ILen est de même de ce qui se trouve dans le chapitre XXIIE, sur la prétendue défaite des Tréviriens près de Binche. Plus de 160,000 gaulois, dit Hugues de Toul, y perdirent la vie, et Drusus, Claude , Quintilius et Tullus péri- rent avec onze légions! Mais les Gaulois et les Tréviriens furent entiè- rement défaits. Il suffit de rapporter ce récit pour prouver son absurdité. Le chapitre XXIV, extrait d’une histoire (fabuleuse) de Trèves, 1 Paterculus, ist. rom., lib. Il; Tacit. 4nn., |. I. 136 MÉMOIRE contient la relation de la même bataille, dont le lieu de laction est placé non près de Binche, comme on lit dans le chapitre précédent, mais à Bingen sur le Rhin. Drusus, y est-il dit, périt dans le com- bat; ce qui est évidemment faux; car ce général romain mourut de mort naturelle ou par une chute de cheval. Nous passons les treize chapitres suivans, qui n’ont absolument aucun rapport à notre question. Dans le chapitre XXXIIL, Hugues de Toul nous apprend qu'Auguste ayant fait faire le dénombrement de toute la terre, la 42me année de son règne Qil se trouva que le nombre des habitans de Bavonie, c’est-à-dire de l’ancienne Belgis, excédait de plus de quatre-vingt mille le nombre de ceux de toutes les villes des Gaules. » Hugues de Toul nous apprend en outre qu'Auguste, après avoir fait restaurer la ville de Belgis et les sept routes qui de cette ville conduisent à tous les pays de la terre, lui donna le nom d’Octavie, la déclara ville ro- maine, et lui accorda de grands priviléges. Observons brièvement que tout ce que contient ce chapitre n’est qu'une fable pitoyable : 1° Bavai, loin d’être la ville la plus peuplée et la plus considérable des Gaules, n’était pas même un chef-lieu de province. Ce ne fut jamais qu’une ville obscure, dont Ammien-Mar- cellin, en donnant le catalogue des villes des Gaules, n’a pas seulement daigné faire mention, et dont Ptolemée, la carte de Peutinger et l’Iti- néraire d’Antonin nous ont seuls révélé le nom et l'existence ‘;2° Aucun auteur ancien n’a dit qu'Auguste donna son nom à Bavai; s’il en avait été ainsi, Strabon, Mela, Pline, Ptolemée, etc., etc., n'auraient pas négligé de nous en instruire, comme ils ont fait à l'égard des autres villes qui portaient le nom de cet empereur, telles que Trèves, Lyon, Autun , etc., etc. *. Dans le chapitre XL, Hugues de Toul rapporte qu’en la 50% année de son règne, Auguste établit à Octavie, le siége de la perception de ! Les ruines anciennes de Bavai ne prouvent rien : on trouve des vestiges de cirques et de temples dans beaucoup de villes très-petites et très-obscures de l'empire romain. ? Valesii Not. Gall., p. 56 et seq. SUR LES DOCUMENS DU MOYEN AGE. 137 tous les impôts des provinces, iles et villes soumises à l’empire romain, en deçà des monts, et qu'il y institua des juges, des sénateurs, des tribuns, des patrices, des censeurs, des questeurs, des édiles, des chiliarques et des décurions, pour les administrer; qu'il rebâtit en même temps les villes de Tongres et de Trèves, détruites toutes deux dans la révolte des Tréviriens. Les absurdités contenues dans ce peu de lignes n’ont pas besoin de réfutation. | Le reste du cinquième livre ne renferme plus que des choses tout-à- fait étrangères à notre sujet. Les soixante-cinq premiers chapitres du sixième livre se rapportent tous à des matières également étrangères à l’histoire de la Belgique, si l’on en excepte les suivans : Les chapitres V, VI et VIIT contiennent la légende apocryphe de saint Eucher, saint Valère et saint Materne, premiers apôtres pré- tendus de Trèves. Nous avons suflisamment parlé ailleurs de cette légende. Dans les chapitres XVI, XVIT et XVIII, Hugues de Toul nous donne l’histoire d’une prétendue révolte des Saxons et des Gaulois, sous le règne de Néron ; ce dont aucun auteur ancien n’a fait la moindre men- ton. Il dit que toutes les Gaules se soulevèrent, à l'exception de quel- ques villes fort dévouées aux Romains, comme Sens, Auxerre, Octavie et Tongres; que Néron n’attacha d’abord aucune importance à cette rébellion, et que les choses restèrent dans cet état pendant plusieurs années; qu’enfin, touché par les plaintes des villes demeurées fidèles aux Romains, il envoya Annolius, préfet de Rome, avec douze légions dans les Gaules, et Galba avec dix autres en Germanie; qu'Annolius employa d’abord la douceur pour soumettre les Gaulois, sans parvenir à ses fins; que Néron envoya, pour le soutenir, six nouvelles légions commandées par Pison, qui dévasta entre autres villes Macénie ’, Stras- bourg, Metz, Toul, Verdun, Troies, Chälons, Amiens, Térouane, 1 Il n’exista jamais une ville de ce nom dans les Gaules. Ton. XII. 18 138 MÉMOIRE Arras, Vermande et Tournai, et les obligea à envoyer, à Octavie, le tribut ordinaire ; qu'il assiégea et prit Famars, mais qu’il épargna cette ville par respect pour le dieu Mars, et qu'il laissa, pour souvenir de sa victoire, son nom au village voisin d’Aulavit; qu’il fit construire une route royale en pierres entre Tournai et Octavie, et établit sur l’'Escaut, près de Valenciennes, le port de Néron qui était auparavant à Famars, et plus anciennement à Escaupont; qu'ayant été reçu avec solennité à Octavie, où il alla camper pour prendre quelque repos, il agrandit cette ville, et voulut qu’une légion entière y füt toujours en garnison pour protéger les Romains contre les rebelles; qu’il fit rassembler les ossemens des Romains tués à la bataille de Binche, les fit enterrer sur des collines, et leur éleva des monumens à Estines, sur la montagne de Beaumont , au Mont des Tombes et en seize différens endroits dans un rayon de quinze milles autour de Binche ; que de là, il alla à Trèves, et fit une expédition malheureuse contre les Germains et les Saxons ; et enfin que la Gaule resta, dans cet état de désolation, jusqu’au règne de Trajan. Les chapitres XXIX à XXXIT contiennent la légende apocryphe de saint Clément et de saint Memme, évêque de Chàlons, tous deux envoyés par saint Pierre dans la Gaule-Belgique pour y prêcher la foi. Dans le chapitre XLIX , Hugues de Toul trace un tableau de l’état déplorable des Gaules sous le règne de Domitien et de Nerva. « Dans ces temps de trouble, dit-il, les Gaulois assiégèrent Trèves et Octavie, pour se venger des exactions des Romains. Un grand nombre d’habi- tans périrent; mais les Romains firent une résistance si opiniâtre, que ces villes n’éprouvèrent aucun dommage. Les Gaulois, désespérant de s’en rendre maitres, tournèrent leurs armes d’un autre côté : ils détruisirent Rheims, Auxerre et Sens, et répandirent la désolation dans toute la Gaule. » On chercherait vainement, dans les historiens romains la relation de quelque soulèvement des Gaulois sous le règne de Domitien , mais on trouve dans Tacite l’histoire très-détaillée de la fameuse révolte des Bataves et des Belges sous le règne de Vespasien. Si Hugues de Toul SUR LES DOCUMENS DU MOYEN AGE. 139 et le compilateur J. De Guyse n’ont pas dit le moindre mot de cet événement très-grave, c’est que Tacite et tous les bons auteurs de l'antiquité leur étaient entièrement inconnus; qu’ils n’ont consulté, en écrivant, que leur imagination romanesque ou des documens fabu- leux, que leur crédulité et leur ignorance leur ont fait regarder comme des sources vraies et authentiques. Dans le chapitre L, Hugues de Toul fait venir Trajan à Octavie. Pen- dant son séjour dans cette ville, il rétablit l’ordre et la paix dans toutes les Gaules. Ce fut à Octavie, dit ce chroniqueur, qu’il fut élu empereur, et à Cologne qu'il reçut les insignes de l’empire. « Il expulsa les Saxons du château de Valenciennes, au moyen d’un traité, et y établit une garnison romaine qui l’occupa jusqu’au temps du tyran Maxime.» Tous ces faits sont aussi apocryphes que ceux contenus dans le chapitre précédent. Les quatre derniers chapitres du sixième livre contiennent l’histoire d’un prétendu soulèvement des Gaulois et des Germains, sous le règne de l’empereur Commode. Ils sont extraits de l’ouvrage de Hugues de Toul. Il y est dit que la première année de son règne, Commode envoya des députés à Trèves, à Octavie, à Mayence et à Cologne, à l'effet de révoquer l’exemption d'impôts accordée aux Gaulois par Marc-Aurèle, et d’ordonner, sous peine de mort, aux habitans d’ap- porter à Rome, dans un délai de cinq mois, deux années d'avance du tribut. Ceux de Mayence, aidés des Germains, massacrèrent les envoyés de l’empereur et, sous la conduite du Westphalien Sorric, tuèrent ou chassèrent de leur territoire tous les Romains. Les Tréviriens ré- solurent d’abord d’obéir à l’ordre de Commode; mais la perfidie dont cet empereur usa à l'égard des députés qu’ils avaient envoyés pour le supplier de leur accorder quelque délai et qu'il fit mettre à mort, les poussa également à la révolte : ils massacrèrent ou expulsè- rent tous les Romains et firent alliance avec les Germains. Verric, duc de Trèves, et Sorric , duc des Germains, ayant réuni leurs forces, s’emparèrent de Toul, d'Haguenau, de Strasbourg et de Tongres. De là ils allèrent ravager la Rhétie, et, arrivés sur les rives de la Meuse 140 MÉMOIRE et de la Sambre, dans le Hainaut, ils s’y arrétèrent quelque temps, et bâtirent , en divers lieux, des villes, des villages et des forteresses , dont plusieurs conservèrent, dans la suite, le nom de Sorric. Ayant appris que la plupart des Romains de la Gaule inférieure s'étaient ré- fugiés à Octavie et à Tournai, ils résolurent de les ÿ poursuivre. Ils mirent d’abord le siégé devant Octavie, dont les habitans leur ouvrirent les portes, après avoir chassé les Romains. Les habitans de Famars en firent de même, et se rendirent à Sorric. Pendant que ce chef s’occu- pait à chasser les Romains de la partie septentrionale de la Gaule inférieure, Verric purgeait tout le comté des Nerviens de la présence des ennemis, et vint ensuite mettre le siége devant la ville de Tournai. Il défit d’abord les assiégés sortis au devant de lui et réunis à Varnest, duc des Morins, venu à leur secours, mais il périt dans la bataille. Après un siége de sept semaines, la ville fut prise d’assaut. Cependant les habitans qui avaient rompu les portes, se défendirent encore pen- dant trois jours, et se rendirent enfin à des conditions très-favorables. Après la prise de Tournai, les vainqueurs allèrent assiéger Douai ', Arras et la ville des Morins. Pendant le siége de cette derrière, toutes les cités des Gaules envoyèrent aux deux ducs des ambassades solen- nelles pour se déclarer ennemies de Commode et jurer de rester fidèles à la ligue. Les deux ducs retournèrent dans leur patrie, et, pendant douze ans, les Gaules supérieure et inférieure soumises à Ver- ric, duc de Trèves, furent exemptes de tout tribut et entièrement affranchies du joug Romain. Le septième livre des Annales du Hainaut, divisé en soixante-douze chapitres, n’en renferme également qu’un très-petit nombre relatifs à: l’histoire ancienne de la Beloique, mais remplis de contre-sens, d’ana- chronismes et de faits apocryphes. Dans le chapitre I, que J. De Guyse a extrait de Hugues de Toul, il décrit l'expédition de Numérien, maître de la milice, envoyé par 1 Il n’est point parlé de la ville de Douai dans des documens authentiques avant le X° siècle, Valesii Not. Gall. Voce Duacrun ATREBATUM, SUR LES DOCUMENS DU MOYEN AGE. 141 Néron à la tête de huit légions contre les Gaulois révoltés. Après avoir ravagé le territoire de Mayence, Numérien vint assiéger cette ville. Le vingt-cinquième jour du siége, il fut assailli par Verric, à la tête de huit légions de Gaulois, et par Sorric commandant huit légions de Germaius. Numérien perdit la bataille et périt avec la plupart des siens. Après la défaite des Romains, les Gaulois se maintinrent libres jusqu’à la quatrième année du règne de Sévère, qui, après avoir sub- jugué les Germains, se contenta d'imposer aux Gaulois la moitié du tribut qu’ils payaient autrefois. Les chapitres XX VIT à XXXVIIT contiennent la légende de saint Piat, premier apôtre du christianisme dans le Tournaisis sous le règne de Dioclétien. Nous avons déjà parlé ailleurs de cette légende. Le chapitre XL, que J. De Guyse dit avoir extrait de l’histoire des Bretons (probablement celle de Geoffroi de Monmouth) et d'Almeric, auteur inconnu, traite de la conquête des Gaules par Constantin, après qu’il eut été créé empereur dans la Grande-Bretagne. Il y est dit que l’armée de Constantin , commandée par Johélin, Trahère et Ma- rius, oncles d'Hélène et frères de Cæl, duc de Glocestre, envahit la Gaule inférieure, et se rendit maître en peu de temps de Rouen, de Beauvais, d'Amiens, de Tournai, d’Ablaton, de Chièvres, de Port des Belges et des autres places fortes dans le comté des Nerviens, de Fa- mars et d’Octavie. Après quoi Johélin et Marius passèrent dans la Gaule supérieure, et accompagnèrent Constantin à Rome. Le chapitre LXIX, extrait d’Alméric, donne la relation de la pré- tendue restauration de Valenciennes, par les empereurs Valentinien et Gratien. On y lit que cette ville s'appelait d’abord le Val des Saxons, et que Valentinien , attiré par la beauté du pays, voulut y demeurer quel- que temps, après avoir résidé auparavant, avec son collègue Gratien, à Solème et à Famars. Il entoura la ville de murs et de portes, changea son ancien nom en celui de Valentinienne, lui accorda de grandes fran- chises et publia un édit, portant que toute personne de la religion chrétienne qui aurait manqué, en certaines occasions, aux décrets de l’empereur, ne pourrait être poursuivie à Valenciennes ou dans la 142 MÉMOIRE banlieue de cette ville. «Il résulta de ce décret, dit l’auteur, que plusieurs villes achetèrent des places, des quartiers, des rues et des maisons autour du château de Valentinien pour la sûreté de leur com- merce, et y bâtirent des demeures. » On voit, par ce passage, que notre chroniqueur a donné au droit de commune et aux franchises de la ville de Valenciennes une origine beaucoup plus ancienne qu'ils n'avaient véritablement et qu’ils ne pouvaient avoir; car il n’y a point de ville de la France ou de la Belgique qui possédat le droit de commune avant le XII siècle. Le chapitre LXX, également extrait d’Almeric, traite de linvasion des Gaules par le tyran Maximien et par Caradocus, duc de Cor- nouailles. Maximien, y est-il dit, après avoir pillé Arras, Tournai, Solème et les villes voisines, forma le siége d’Octavie. Après avoir pris la ville , il tua tous les Romains qui s’y trouvaient, pilla la caisse des impôts publics, et changea, en signe de mépris pour les Romains, le nom d’Octavie en celui de Bavai, que cette ville portait avant le règne d’Auguste. Il se réunit ensuite à Caradocus qui était occupé au siége de Valenciennes. Après la prise de cette ville, Maximien attaqua et prit Césarlieu (Mons), envahit le comté des Nerviens ou le Brabant, et, après l'avoir soumis, il revint au château de César, bâti sur une mon- tagne appelée anciennement Propantie. Il s’en rendit maître après un siége très-meurtrier, en répara les fortifications, et y mit une garni- nison bretonne, d’où lui vient le nom de Mont-Breton qu'il porta quelque temps et que porte encore un quartier de la ville appelé Bertaimont. Maximien réduisit aussi, sous la domination romaine , tout le pays jusqu'au Rhin, et après avoir établi le siége de son empire à Trèves, il attaqua et défit les deux empereurs Gratien et Valentinien. J. De Guyse ajoute que les peuples de la Germanie firent aussi rentrer dans le devoir les habitans de Cologne, de Brême, les Féliciens, ceux d'Aix, de Ruremonde, de Clèves, de Juliers, de Duisbourg; les Mi- siens (sans doute les Misniens), les Westphaliens, les Limbourgeois, les Weseliens, ceux de Coblentz, d'Andernach, les Merlins, les Luxem- bourgeois, ceux de Trèves, de Bar et de Metz. Les peuples qui lui résis- SUR LES DOCUMENS DU MOYEN AGE. 143 tèrent et qu’il ne put soumettre, furent les Hessois, les Gismariens, les Gottingiens, les Gravenbergiens, les Herfodiens, les Marienbourgeois, les Frizlariens et les Fuldiens, qui étaient soutenus par les Saxons. J. De Guyse ajoute encore que Caradocus augmenta considérablement les fortifications et l'enceinte de Valenciennes, que les Cornouailliens de son armée bâtirent le village de Cournoue, aujourd’hui Cornue ou Cornu, près de Valenciennes, et que Maximien donna Famars à Mau- rice, fils du duc Caradocus. Il suffit d'exposer tous ces faits pour en prouver la fausseté et en même temps l'ignorance d’un chroniqueur qui toujours confond les temps et les lieux, parle de peuples et des villes qui n’existèrent que plusieurs siècles après le règne de Maximien, et soumet à l’empire des Romains des contrées de la Germanie, où non-seulement les Romains ne mirent jamais le pied, mais même dont ils ignorèrent jusqu’à l’exis- tence. La première partie des Annales du Hainaut, par J. De Guyse, finit au livre septième. Il ne nous reste plus qu’à examiner le huitième livre , par lequel commence la seconde partie de l’ouvrage. Nous passe- rons sous silence, comme au livre précédent , tout ce qui n’a absolu- ment aucun rapport à notre sujet, et nous ne mentionnerons que les chapitres qui traitent de l’histoire ancienne de la Belgique. Dans le chapitre IT, J. De Guyse cherche l’étymologie du nom de Hainaut, et il rapporte, à cet égard, les opinions de différens auteurs, les unes plus ridicules que les autres : telles sont celles qui le font dé- river du mot Haïtnon , c’est-à-dire Haïdes , des haies ; d’Annona , à cause de la fertilité du terroir; d’Agonia, « parce qu’on trouve toujours dans cette province, depuis la plus haute antiquité des agonistes, c’est-à-dire des soldats combattans, ou parce qu’on livra plus de combats sur son territoire que sur celui d’aucun autre. » L’étymologie la moins absurde est, sans doute, celle qu’on déduit du nom de la rivière la Haine. Sans rejeter aucune de ces opinions, J. De Guyse préfère de croire, avec Hugues de Toul et Lucius de Tongres, que ce furent les Huns qui donnèrent au Hainaut le nom de Hunie, d’où serait dérivé celui du Hainaut. 144 MÉMOIRE Au chapitre IT, il examine quels furent les noms que parta successi- vement le Hainaut. La Belgique tout entière eut premièrement, selon notre chroniqueur, le nom de, Gaule inférieure, celui de pays de Trèves, parce qu’elle fut d'abord occupée par les Tréviriens, et celui de Belgique à cause des Belges et de la ville de Belgis; et, pendant que cette dernière dénomination subsistait, la Belgique était encore ap- pelée Picardie inférieure. Dans la suite elle prit le nom de Lorraine inférieure et d'Allemagne inférieure. Le Hainaut, dans une étendue plus restreinte, fut, selon notre auteur, appelé Forêt Charbonnière ou Servie de Cambron, Albanie, comté de Brabant, à cause des braiettes que portaient les habitans, et comté de Nervie, à cause de Nervie, sa ville capitale. Tout ceci n’est qu’un résumé de ce qui se trouve exposé plus am- plement dans la première partie des Annales du Hainaut et, de toutes ces dénominations, il n’y en a qu’une seule que le Hainaut ait véritablement portée : celle de Silva Carbonaria, par laquelle cette province est déjà désignée dans Grégoire de Tours ‘. Au chapitre IV, J. De Guyse cherche l’origine de la dénomination du comté d’Ostrevant. Plusieurs auteurs ont déduit le nom d’Ostrevant des rois Austrasiens de Germanie. Mais J. De Guyse préfère adopter l'opinion de Tomellus, historien de ce comté, et d’Almeric, suivant laquelle lOstravant tire son nom des Ostrogoths. Ils disent que, lan 453, Attila, roi des Huns, avec Valamer, roi des Ostrogoths, Ardaric, roi des Gépides, et Hernar, Guindhzit et Tuidemer, leurs fils, suivis d’une foule innombrable d'hommes du Nord, envahirent la Gaule inférieure et, se répandant dans l’Austrasie inférieure, dévastèrent Bavai, Famars, le château de César, Valenciennes, Ablaton, Chièvres, Tournai, Arras, etc., et se fixèrent dans cette contrée dont ils chan- gèrent le nom; qu'ils ÿy bâtirent plusieurs forteresses, entre autres celle de Valers, qui reçut son nom du roi Valamer, celle d’'Hornain, 1 Wales Not. Gall., et Dewez, Dict. géogr., art. Carsowaria Sizva. La dénomination de Hai- naut est beaucoup plus récente. Valesius in v. Harvoun ; Dewez, Dact. géogr., art. Hatvaur. SUR LES DOCUMENS DU MOYEN AGE. 145 construite par Hernar, fils d’Attila, celle d’Ardres, bâtie par Ardaric, et celle de Tuder, aujourd’hui Douai, élevée par Tuidmer. Peu d’années après, ces chefs accompagnérent Attila dans son expédition en Italie, et, après sa mort, Valamer et Tuidmer revinrent dans l’Ostrevant, qu'ils défendirent contre les attaques des Romains, des Huns, des Francs et des Vandales. Ils accordèrent de grands priviléges à l'Os- trevant et l’érigèrent en franc-alleu ‘. Tous ces faits sont contraires à ce que les sources authentiques de l'histoire rapportent sur l'invasion des Gaules par Attila; car il est connu que ni ÂAttila, ni les Huns ne séjournèrent point dans les Gau- les, et qu'ils ne firent qu'y passer en les dévastant. Des barbares no- mades, qui ne savaient pas même construire une simple chaumière, n'étaient pas en état d'élever des forteresses entourées de murs, de fossés et de retranchemens, comme le dit J. De Guyse d’après Al- meric. Les seuls forts et retranchemens qu’ils connaissaient, étaient des chariots qu’ils rangeaient en cercle et derrière lesquels ils se dé- fendaient. Dans les chapitres V et VI J. De Guyse revient encore sur la déno- mination de Hainaut imposée à cette province par les Huns *. Dans le chapitre VIT il extrait le passage de Sigebert de Gembloux, qui traite de l’origine des Francs. Nous avons examiné ce passage en parlant de ce dernier auteur. Dans le chapitre XI il donne le catalogue des princes belges depuis Bavo, roi de Phrygie, jusqu’à l'invasion des Francs, des Huns et autres peuples barbares. Ce n’est qu’un résumé de ce qui se trouve dans la première partie de ses Annales. Le chapitre XXIT, extrait d'Almeric, traite de l'invasion des Gaules par les Francs, sous le règne de Théodose. Ils assiégèrent Bavai, mais furent défaits et contraints de repasser le Rhin, par les Morins, les Tournaisiens, les Nerviens, les Ménapiens, les habitans de Famars, 1 Voir sur l'Ostrevant Walesii Not. Gall. Ausrresanrux , et Dewez, art, AUSTRERANT. 2? L’unique raison qui ait pu engager les chroniqueurs romanciers à chercher la dénomination de Hainaut dans celle des Huns, c’est la légère ressemblance entre ces deux noms, Tou. XII. 19 146 MÉMOIRE de Cambrai, de Trèves, de Metz, de Toul, de Strasbourg et de Mayence, venus aux secours de Bavai. J. De Guyse ajoute à ce cha- pitre un passage de l’histoire de Trèves, où l’expédition des Francs est décrite d’une manière moins apocryphe. Le chapitre XXV, extrait textuellement de Sigebert de Gembloux, traite de l'invasion de Croscus (Crocus), roi des Vandales (des Alle- mands). Au chapitre XXVII J. De Guyse décrit, d’après Hugues de Toul et Almeric, l’'irruption des Vandales dans les Gaules, sous le règne d’Ho- norius. Il confond cette expédition avec celle de Crocus, qu'il fait en même temps roi des Vandales, des Allemands et des Suèves. Ces peu- ples, dit-il, après avoir dévasté toute la Germanie et rasé toutes les villes de cette contrée (qui, à cette époque, n’avait point de villes), envahirent les Gaules et saccagèrent Strasbourg, Trèves, Cologne, Ton- gres, Besançon, Langres , Bâle, Metz, Troies, Sens, Auxerre, Provins (qui n'existait point encore), Paris, Amiens, Beauvais, Châlons, Rheims, Laon (qui n’était point encore bâtie), Saint-Quentin, Moriane (Térouane), Arras, Tournai, Famars et Bavai. Ils se contentèrent de piller cette dernière sans la détruire. Ils assiégèrent ensuite une ville peu considérable, mais très-forte, située au pied du mont Blan- digni, sur les bords de l’'Escaut et de la Lis. Après l'avoir prise, ils la choisirent pour étre à jamais le lieu de leur demeure et lui donnèrent leur propre nom en l'appelant Wande ou Gand. Ils l’agran- dirent et lui donnèrent, pour insignes, leurs armoiries consistant en un écu noir au milieu duquel était un gant d'argent. Si cette dernière circonstance ne démontrait suffisamment le fabuleux de ce récit, ce que nous avons dit ailleurs de l’origine de Gand, d’après des écrits authentiques du VII: et du VILLE: siècle, attesterait que cette ville, loin d’avoir été considérablement agrandie par les Vandales, qui détrui- saient et ne bâtissaient point, n’était encore qu’un simple hameau (pagellus) plusieurs siècles après l’irruption de ces barbares. «Dans la suite, continue J. De Guyse, Attila, roi des Huns, ayant construit, pour lui servir de retraite, un fort dans la Forêt Charbonmière, SUR LES DOCUMENS DU MOYEN AGE. 147 au confluent de l’A/ba et de la Dendre, prit plusieurs fois ses quar- tiers dans ce pays. C’est de ce roi qu’au rapport de plusieurs his- toriens, ce lieu a tiré son nom, et s’est appelé Vieux-Ath en francais.» Croirait-on qu’un fait aussi évidemment apocryphe ait néanmoins servi d'autorité à plusieurs auteurs modernes, pour attribuer la fondation de la ville d’Ath aux Huns et aux Vandales ‘? Il est certain d’ailleurs qu’Attila ne passa point par le Hainaut, mais qu’il dirigea sa marche sur Trèves et Châlons. Au chapitre XXVIIT Hugues de Toul et Almeric parlent de la pré- tendue cession de la Forêt Charbonnière et du territoire de Gand aux Visigoths, par l’empereur Honorius; Alaric, roi des Visigoths, alla trouver cet empereur, disent ces chroniqueurs fabulistes, et lui laissa le choix ou de sortir de Rome avec les sénateurs, ou de céder à perpé- tuité aux Visigoths, une province de son empire. L'empereur préféra . cette dernière condition, et leur assigna les provinces rebelles qu’on mavait jamais pu soumettre, à condition que les Visigoths en expul- seraient les ennemis des Romains. Il céda donc la ville de Bordeaux et Toulouse dans Aquitaine”, et celles de Bavai et de Gand avec toute la Forêt Charbonnière. Après s’être rendu maitre de l’Aquitaine, Alaric mena son armée dans la Forêt Charbonmière et s'établit dans une for- teresse appelée maintenant Gotignies *, et qui tire sa dénomination des Goths. Il envoya ensuite des députés aux Vandales pour leur ordonner de sortir du pays; mais ceux-ci ne voulant pas se rendre à cet ordre, il leur livra bataille et les défit dans la Forêt Noire. Après cet exploit il s'empara de Bavai, dont il augmenta les fortifications. Il ne put néanmoins se rendre maître de Gand, et fut contraint de revenir dans la Forêt Charbonnière; mais pour garantir cette contrée de toute attaque de la part des Vandales, il fit bâtir, pour tenir en respect la ville de Gand, deux forteresses, auxquelles il donna son nom. Ce sont Alost et Audenarde. 1 Voir De Boussu , Æist. de la ville d’Ath, p. 1 et suiv. 2? Toulouse ne fit jamais partie de l’Aquitaine. 3 Gotignies , village du district de Soignies. 148 MÉMOIRE Les Visigoths restèrent paisibles possesseurs de la Forêt Charbon- nière jusqu’à l'invasion de Bleda et d’Attila, qui s’emparèrent de la Forêt Noire et prirent Bavai, après un siége de huit mois. Les Huns l’habite- rent quelque temps, la réparèrent et fortifièrent tous les lieux d’alentour. Mais bientôt, fatigués des incursions des Ostrogoths, ils mirent le feu à la ville, la rasèrent et sortirent du pays. Ce fut, selon Almeric, pendant qu’ils occupaient la Forêt Charbonnière, que les Huns donnèrent de nouveaux noms à plusieurs châteaux forts, aux rivières et à plusieurs villages de cette contrée, et que le Hainaut reçut la dénomination d'Hunonia. Lorsque toutes les villes des Gaules supérieure et infé- rieure eurent été détruites par les Huns, les Romains réparèrent celle de Cambrai, qu’ils avaient d’abord abandonnée. Cette ville, depuis cette époque, commença à dominer sur toutes celles de la Forêt Charbon- nière, et fut redevable aux Romains de l’emporter enfin sur les villes de Famars et de Blaton, qui paraissaient lui disputer le premier rang *. Tout ce chapitre porte l’empreinte de la fable la plus évidente : il est démontré par les vraies sources de l’histoire, que jamais les Visi- goths n’eurent un établissement dans la Belgique ou dans le nord des Gaules. Ce fut dans le midi des Gaules qu’ils se fixèrent. Alaric ne laissa pas à Honorius le choix de sortir de Rome ou de lui céder quelque province de son empire : il s'empara de cette ville et contraignit le faible empereur à se réfugier à Ravenne. Enfin ce ne fut point Alaric [er qui régna dans les Gaules, où il ne mit jamais le pied, mais Alaric IE, qui fut défait et chassé par Clovis *. On sent par là avec combien peu de fondement quelques auteurs ont attribué aux Visigoths ou aux Vandales la fondation d’Alost, d’Audenarde et d’autres villes de la Belgique *. 1 Jusqu'à la fin du [V° siècle Cambrai ne fut qu'une simple station romaine, qui acquit quel- qu'importance par la destruction de Bavai; mais vers le VIII siècle Cambrai n'était encore qu'une bourgade (castellum ) agrandie et entourée de murs en 850 , 1030 et 1091 ( Gramaye, Camaracum ). 2 Ce fut sous Ataulfe, successeur d’Alaric [*, que les Goths fondèrent un royaume dans le midi des Gaules , vers l’an 412 (Picot., Hist. des Gaul., t. IL, p.77). 3 Meyer, Ann. de Fland., ad ann. 411. Dewez, Dict, Geogr.,art. Azost, AUDENAERDE, NiNOvE, etc. SUR LES DOCUMENS DU MOYEN AGE. 149 Le chapitre XXX, qui traite de l'invasion de la Forêt Charbonnière par Clodion, n’est qu'un extrait de la chronique de Sigebert, ce qui nous dispense d’en parler plus au long. Tout le reste du huitième livre est exclusivement occupé par l’his- toire fabuleuse d’Attur, roi des Bretons. Comme la domination des Romains en Belgique cessa par la con- quête de cette contrée par Clodion, nous finissons ici le résumé de l'ouvrage de J. De Guyse. On a pu juger, par cette analyse, que ce chroniqueur n’a consulté, pour l’histoire ancienne de la Belgique, que les sources les plus cor- rompues et les annalistes les plus ignorans du moyen âge, tandis qu’il semble n’avoir eu aucune connaissance des documens authentiques et des auteurs anciens, tels que César, Strabon, Paterculus, Pline, Ta- cite, Ammien Marcellin, Sozyme, etc.; par conséquent nous croyons ne pas avoir exagéré, en disant qu'il serait diflicile de trouver, dans cette vaste compilation, un seul chapitre où les faits les plus simples et les mieux connus ne soient dénaturés par les fables les plus étranges. Quoique la compilation de J. De Guyse ne puisse être d’aucune utilité pour la connaissance de notre histoire ancienne, nous avons cru néanmoins devoir en faire une analyse détaillée, parce que la plupart des chroniqueurs du XVIe siècle, tels que Lemaire, Van Vaerne- wyck, etc., y ont pris les fables qu'ils débitent sur nos temps his- toriques ; parce que nous avons voulu prouver combien peu serait basée l'opinion des savans qui voudraient trouver quelque fond historique dans les fables de Lucius et d'Hugues de Toul, recueillies par J. De Guyse; enfin parce que nous avons voulu faire voir de quelle source corrompue dérivent tous les contes ineptes qui ont été écrits, même par des auteurs modernes, sur l’origine de la plupart de nos villes ‘ ! Ce qui nous a surtout engagé à entrer dans des détails si étendus sur les #nnales du Hai- naut, c'est que le marquis de Fortia, éditeur de J. De Guyse, a prétendu que l'ouvrage de ce der- nier offre des documens très-précieux pour la connaissance de l’histoire de la Belgique avant l’ère vulgaire, et que si l’on y rencontre quelques fables, le fond de la relation peut être con- forme à la vérité. Pour démontrer l'invraisemblance de cette hypothèse, nous avons cru qu'il Documens du XVe siècle, 150 MÉMOIRE Nous avons dit plus haut que nous ne connaissions que trois auteurs du XIV: siècle, dont la presse a reproduit les ouvrages , qui aient rap- porté quelques particularités relatives à la Belgique avant ou sous la domination romaine. De ces trois auteurs, nous en avons déjà analysé deux. Le troisième, dont nous m’avons pas encore parlé, est Martin de Pologne (Martinus Polonus), auteur d’une chronique universelle de- puis le commencement de l’ère vulgaire, jusqu’à l’an 1372 *. Ce qu’on trouve dans cet ouvrage sur l’histoire ancienne de la Belgique se borne à deux passages peu remarquables. Dans le premier, Martin de Pologne parle de l’origine troyenne des Francs; il remonte même au delà de la prise de Troye. Le second passage est celui où il décrit l'invasion des Gaules par Attila. Dans le nombre des villes détruites par ce barbare, il n’oublie pas de compter la ville de Tongres. Mais dans tout cela il n’y a rien de neuf où qui n’ait déjà été dit par des écrivains beaucoup plus anciens. Les chroniqueurs du XVe siècle, qui rapportent des faits relatifs à l’histoire de la Belgique avant ou sous la domination romaine, sont en fort petit nombre, et ce que leurs ouvrages disent sur ce sujet, a été pris dans des auteurs plus anciens dont nous avons déjà parlé. Ainsi pour ne pas grossir davantage ce Mémoire par des redites inutiles et superflues, nous ne ferons mention que de deux ou trois ouvrages de cette époque : savoir le Hagnum Chronicon belgicum , le Pseudo- Berose d'Annius de Viterbe et la Chronique des évéques de Liége. Le Magnum Chronicon belgicum est une chronique assez exacte et assez détaillée de la Belgique et des contrées limitrophes du Rhin, depuis l’an 54 après J.-C. jusqu’en 1474. Elle eut pour auteur un chanoine régulier de l’ordre de saint Augustin près de Nuits, et a été publiée par Pistorius (Script. rer. Germ., tom. III). L'auteur de la était nécessaire d’entrer dans un examen détaillé de tout ce que les 4nnales du Hainaut renfer- ment sur notre histoire ancienne. 4 1 Lorsque ce mémoire fut écrit, le Ie" vol. de Ph. Mouskes n'avait point encore paru. Pour un motif semblable nous ne parlons pas non plus de la Chr. de St: Bav., publiée par M. Van Lokeren. 2 Vossius, De hist. lat. Lib. Il, c. 60. Fabricii bibliotheca latina mediæ et infimæ latinit. . t. V,art. Marrmus Poronus. : SUR LES DOCUMENS DU MOYEN AGE. 151 Grande Chronique belge s’est montré plus judicieux que la plupart des annalistes de son temps, en ne consultant que de bonnes sources, et en n’ajoutant pas une foi aveugle aux fables débitées par les chroniqueurs des deux siècles précédens. Au reste, il ne fournit rien de neuf à notre question. Il donne la liste des anciens évêques de Tongres et de Maestricht, et parle, avec assez de détails, de l’épis- copat de saint Materne, qu'il fait vivre sous le règne de Ves- pasien; mais dans tout ceci, il a suivi Hariger et Gilles d'Orval, comme il le déclare lui-même. Il décrit ensuite l’origme des Francs d’après Sigebert de Gembloux. Cest là tout ce qu’on trouve dans le Magnum Chronicon belgicum, qui ait quelque rapport à notre matière. Annius de Viterbe, jacobin italien, né en 1437, a mis au jour vingt-sept livres d’antiquités qui contiennent les ouvrages prétendus d’un grand nombre d’auteurs anciens, tels que Philon, Berose, Manethon, etc.; mais dont il est facile de voir qu’Annius lui-même est l’auteur ‘. Nous ne citons ces ouvrages supposés que parce qu’on trouve, dans les Pseudo-Berose et Manethon, la chronologie fabu- leuse des rois des Gaules, depuis l’an 2000 avant J.-C. *. Nous ne connaissons la Chronique des évéques de Liége , écrite au XV: siècle , que par l'extrait donné par Lambinet dans les anciens mé- moires de l’Académie *. L'auteur anonyme de cette chronique ‘ com- mence son ouvrage par le siége de Troye, et le termine à l’an 1455. Pour les temps antérieurs à l’ère chrétienne, l’anonyme n’a fait que copier Lucius de Tongres, Hugues de Toul et J. De Guyse. Il fixe la naissance de Jésus-Christ au règne de Lotringus, sixième roi de Ton- Vossius, De hist. latin., lib. HE, c. VIII. Voir le Tableau histor. et chron. du monde, par M. De Fortia d’Urban, t. II. 3 Lambinet, Notice de quelques manuscrits qui concernent l’histoire des Pays-Bas, faite à la bibliothèque de Berne en juin 1779, dans les Anciens Mém. de l’acad. royale de Bruxelles. Ne serait-ce pas Jean d’Outre-Meuse ? Il est vrai que la chronique de ce dernier ne s'étend que jusqu’à la fin du XIV* siècle, mais elle a pu être continuée par une autre main. (Voir 1 2 M. L. Polain, Recherches sur la vie et les ouvrages de Jean Desprez, dit d'Outre-Meuse, chroni- queur du XV° siècle, Messager des sciences et des arts (année 1834), 3° liv. 152 | MÉMOIRE gres, et rapporte une foule de fables sur le poète Virgile, qu'il fait passer pour un grand sorcier : «L'an après la création de notre pre- mier père Adam 5157, ditl entre autres, Virgile mit Rome en grand danger, car il esteignit tout le feu, et tous ceux qui soulèrent en avoir, il leur falloit venir quérir près la fille de Julius César, pour- tant qu’elle avoit pendu Virgile en sa corbeille aux murs du chasteau de son père, pour lui faire honte et villainie. » Le chroniqueur rap- porte qu’à Naples, Virgile avait fait mettre une horloge d’airain sur une des portes de la ville, et que, durant huit ans qu’elle y resta, aucune mouche ne put entrer dans la ville. C’est encore à ce pouvoir magi- que du poète sorcier que l’auteur attribue la construction de la cathé- drale de Pise, ete., ete. « Mon étonnement de voir Virgile accusé de magie, dit Lambinet , m’a engagé à chercher l’origine de cette accu- sation risible; je l'ai trouvée : 1° dans l'ignorance et la barbarie des siècles et des auteurs, qui ont attribué au pouvoir de l’enchanteur des effets naturels dont la cause leur était inconnue; 2° dans la connais- sance des mathématiques que ce poète avait acquise, et surtout dans la description qu’il donne, dans sa huitième églogue, des bandelettes , de la verveine, des rubans de diverses couleurs et de tout ce qui appartient à la magie. Les détails qu'il a donnés de cet art imposteur sont peints avec tant de vérité, que plusieurs anciens l'ont soupconné de l'avoir pratiqué ".» Le peu de lignes que nous venons d'écrire sur la chronique des évé- ques de Liége, prouvent que cet ouvrage ne peut étre d'aucune res- source pour l’histoire ancienne de la Belgique, et que son auteur, trop crédule, a ajouté une foi pleine et entière aux fables les plus ridicules de Lucius de Tongres et d’autres chroniqueurs de ce genre. Nous terminerons ici la liste des ouvrages historiques du moyen âge qui offrent des matériaux à l’histoire de la Belgique avant et pendant la domination romaine; les recherches étendues que nous avons faites pour la composition de ce travail, nous portent à croire que les docu- 1 Voir ce que nous avons dit à ce sujet à la page 34. SUR LES DOCUMENS DU MOYEN AGE. . 153 mens que nous avons pu oublier de mentionner dans ce Mémoire sont en bien petit nombre et de peu d'importance. Nous avons dit, au commencement de ce travail, que les chartes du moyen âge pouvaient, aussi bien que les chroniques et les légendes, fournir des ressources précieuses pour l’histoire et la géographie de la Belgique avant et pendant la domination romaine. Ce n’est qu'en com- pulsant les chartes du moyen âge, qu’on est parvenu à fixer la position géographique et les limites exactes de plusieurs peuples anciens de Ja Belgique, tels que les Ménapiens et surtout les Toxandres, dont Pline et Ammien Marcellin ont seuls parlé parmi les auteurs de antiquité, et en- core d’une manière obscure et très-concise ". Les chartes servent encore à nous faire connaître l’origine certaine de la plupart des villes actuelles de la Belgique, et à confondre les chroniqueurs du moyen âge et des auteurs modernes, tels qu'un Van Vaernewyck, un Lemaire, un Guic- ciardin, un Gramaye, un Lambiez, etc., qui ont émis tant de fables sur ce sujet “. Enfin les chartes sont de la plus grande utilité pour la connaissance de létat physique et des changemens naturels ou artifi- ciels opérés dans le sol de l’ancienne Belgique, particulièrement dans les Flandres et la Campine. Nous nous contenterons d'indiquer, pour cette dernière question, les ouvragessuivans : Miræus, Opera Historicaet Diplom. Sanderus, Brab. Sacra et Fland. illustr.; Vanden Bogaerde, Statist. beschryv. van het 1 Voir Des Roches, Mémoire sur la question : «Quelles ont été depuis le commencement du » VIF siècle inclusivement les limites des différentes contrées, cantons, pays, comtés et états » renfermés dans l'étendue qui comprend aujourd’hui les dix-sept provinces des Pays-Bas, et » la principauté de Liége. » Bruxelles 1774 (et dans les Anc. Mém. cour. de l’Acad.); Imbert, De pagis cisrhenanis, dans les Annales de l’univ. de Louvain (1819). 2 Des Roches, Caussin et de Hesdin, Mémoires sur la question : «Quels étaient les en- » droits compris dans l'étendue des contrées qui composent aujourd'hui les dix-sept provinces » des Pays-Bas et le pays de Liége, qui pouvaient passer pour villes avant le VII siècle. » Brux. 1774, in-40 ( Anc. mém. couron. de l’Acad. ) .…... et Stals, réponses aux questions : « Quelles sont les places dans les dix-sept provinces des Pays-Bas et le pays de Liége, qui , depuis le VIF siècle jusqu’au douzième exclusivement, ont pu passer pour des villes? » Brux, 1818. Nouv. Mém. cour. de l’Acad., 1.1. Dewez, Dictionnaire géogr. du royaume des Pays-Bas, Brux. 1819 et 1829 , in-0°. Hadr, Valesii Notitia Galliarum. Varis , 1676, fol. Ton. XII. 20 154 MÉMOIRE SUR LES DOCUMENS DU MOYEN AGE land van Waes ; Kluit, Chron. Holl. diplom., 4. T, p. 125 et passim ; Butkens, Troph. Sacrées et prof. du Brabant, tom. 1; Malbrancq, De Morinis et Morinor. rebus ; Gramaye, Antiquit. Brabantiæ. Une étude approfondie des lois du moyen âge, particulièrement de la loi salique, de celle des Ripuaires, des Allemands et autres lois barbares, des capitulaires et de nos anciennes coutumes, pourra ra- mener sur la trace de beaucoup d’usages existant en Belgique avant et sous la domination romaine. M. Raepsaet a démontré, dans son Analyse de l'histoire des droits civils et politiques des Belges et Gaulois, combien la connaissance du droit du moyen âge était utile pour celle de nos antiquités nationales et pour l’interprétation de César, de Tacite et autres écrivains anciens, dont les ouvrages renferment des faits qui concernent l’état politique des peuples d’origine germanique ”. Enfin pour terminer, nous dirons que, pour avoir une connaissance plus exacte du culte des anciens peuples de la Belqique, on ne pourra négliger de consulter l’'Edda et autres documens sur la mythologie des peuples du Nord, écrits aux XIe, XIIe et XIIIe siècles, ainsi que les canons de différens conciles tenus en France et en Allemagne pendant les VIe, VIE, VIIL et IX: siècles; car c’est principalement dans ce qui est relatif à la religion des peuples germains que César, Tacite et Pline, ont été le plus concis, le plus vagues eten même temps le plus inexacts ”. 1 Reynier a fait un fréquent et judicieux usage des lois du moyen âge pour la composition de son excellent ouvrage sur l’économie publique et rurale des Celtes , des Germains et autres peu- ples du nord et du centre de l'Europe (Genève, 1818, in-8°). Voir encore Guizot, Cours d'histoire, 1829, Wendelini Leges Salicæ illustr. Antv., 1649, in-fol.; Baluzii capitularia requm Francorum, etc., Paris, 1677, 2 vol. in-fol.; Leges Francorum Sulicæ et Ripuariæ opera et studio J.G. Eccard. Francf., 1720, in-fol.; De Buat, Les origines ou l’ancien gouvernement de la France, de l'Allemagne et de l'Italie. La Haye, 1789, 3 vol. in-8°; Toulotte et Riva, Histoire de la Barbarie et des lois au moyen âge. Paris, 1829, 8 vol. in-8° ; P. Hachenbergi Germania media. Edit. tertia , Halæ-Magdeb., 1719, in-3°. 2 Mallet, Zntroduction à l'histoire du Danemarck. Geschiedenis des heidendoms in Europa buiten Griekenland en Rome, naar het Hoogd. van Mone en Munter , Haarl., 1824, 2 deel., in-8°; Westendorp , J’erhandeling over de vraag : « Eene beknopte voordragt van de noordsche mytho- logie ontleend uit de oorspronkel. gedenkstukken, etc.» (Nieurve 1verken van de maatschappy der Nederl. letterkunde, %°e deel.) FIN. ANANAAANANA AAA AE EAN AAA ANA CORRECTIONS ET ADDITIONS. NB. La bibliothèque de la ville de Bruxelles ayant été fermée pendant plusieurs jours, lors de l’im- pression de ce Mémoire , l’auteur n’a pu vérifier certains passages latins dans lesquels il s’est glissé des fautes. Il croit devoir les rectifier dans cet errata. Page 18, note 5 , au lieu de ornager, lisez : onager. 20, — 2, — barbaries fluctibus , lisez : barbaris fluctibus. äb., —ib., — oceant , — oceanus. b., — b., — gentium populi remotorum, lisez : gentium populi remotarum. 21. Légende de S'-Éloi. V’allocution pastorale adressée par ce saint aux Belges païens contient des détails très-curieux sur les superstitions et les cérémonies religieuses de ces derniers. (Acta SS. Belg., tom. III, pag. 244.) 22, note 5, au lieu de #/lud si vales, eum , lisez : illud si vules, eme. 25, — 1, — hujus negocit , — huic negocto. b., — ib., _ œrumnoseæ labort, — ærumnoso labori. 24, — 1, — notum qualiter vos, — notum qualiter nos. ib., — 9, — unusquisque ministerio, lisez : unusquisque in suo ministerio. tb, — 5, — cum lot lupi hic sunt, — cum tot lupi hic sint. 1b., — ab, — intendens , . — intendas. 25, — 1, — nemora magnitudine , — nemorosa magnitudine. 1b., —1b.,. — vita sanctæ Dymphnæ, — vita sanclæ Dympne. 28, — :b., — Monalphe, — Monulphe. 29, — 5, — Separeruntur, — Separentur. 54, — 5, — Nodat, Histoire des grands hommes, lisez : Nodet, Apologie pour grands hommes. 36, — 1, — Vahals, lisez: Walis. AE D — des Palus-Meotides, lisez : du Palus-Méotide. 48, note 1, au lieu de statumque , lisez : statimque. 49, — 1, — efferas mores , lisez ; efferos mores. 55, au lieu de Toringiens , lisez : Thuringiens. 56, _ Ausbourg, lisez : Augsbourg. 60, — plusieurs milliers de siècles , lisez : plusieurs milliers d'années. ib., note 1, au lieu de Chronique d’Assuerus , lisez : Martyroloque d’Usuardus. 66, — 92, — Belgica cui, — Belgica cum. 65, — ubi sin, lisez : ubi sint. 75, — XXIII-XXXIV , lisez : XXIV-XXXIF. 85, — les monts Cendrés : c’est probablement le Mont Cénis. 95, innovation , — désobéissance. 141, — derrière, — derniére, 149, — Attur, — Artur. 152, — une horloge d’airain , lisez : une mouche d’airain. e sas + teur 1 mis RU ds AL ü Spy # £ è it tr étant +5 HET pe ne tn Fri HAUTS] à