HARVARD UNIVERSITY ps qe à IL LIBRARY ke OF THE MUSEUM OF COMPARATIVE ZOÜLOGY 159 REA Bougtt. | ut 20, 1942 | Ho Ë à se a VER Ê (EU DIN NI DSNE à at, © = AU PRE CE; (AS C7 1e [LULU Ï .M ÉMOI RE S - TA CADÉMIE ANPÉRIALE ET ROYALE | DES . SCIEN CES ET BELLES-LETT RES DE BRUXELLES. TOME PREMIER. Chez J. L. Dx Bourrs, Imprimeur de P Académie. M DCC. LXXVII. dar Ÿ Faut 20 1942 159 La (Ce) DISCOURS PRÉLIMINAIRE. . Sur l'État des Lettres dans les Pays-Bas € fur l'Érestiontde l Académie JT mpériale & Royale des Sciences & Belles-Lettres de Bruxelles. Bas de fes États l’ignorance & les fuites qu’elle entraîne; exciter dans fes fujets cette émulation no- ble, qui fait éclorre le génie, qui conduit à des entre- prifes utiles, à des découvertes intéreflantes, voila les motifs qui porterent L'IMPÉRATRICE-REINE à ériger une Académie des Sciences & Belles Lettres dans fes Provinces des Pays-Bas. . Ï1 paroït.étonnant, que malgré l'exemple de tant de Nations, un: établiflement fi utile ait été retardé fi long-temps. Mais lorfqu’on jette les yeux fur la fitua- tion critique de ces Provinces dans le fiecle pañlé, & dansle commencement de celui-ci, l’'étonnement cefe : lon eft convaincu, que les Lettres devoient languir jufqu’au Regne de MARIE-THÉRESE, & que leur rétabliflement ne pouvoit s'effectuer que fous les aufpices : de cette augufte Mere de la Patrie. | Si l’on impofe filence aux préjugés nationaux, qui, malgré les lumieres dont notre fiecle fe vante, offuf- Toine I. a j DISCOURS quent encore quelquefois la raifon , on conviendra fans difficulté, que depuis l'aurore de la Litrérature jufqu’aux temps de nosguerres civiles, les Pays-Bas ont toujours partagé avec leurs voifins la gloire qui accompagne ! les Lettres, & les ont furpañlé néelaiefos Le béau jour qui fe leva pour les fciences , fous l’Em- pire de Charlemagne , fut fuivi dans toute l’Europe d’une nuit également longue & ténébreufe. Dans ce dé- clin univerfel, les Provinces Belgiques conferverenten- core long-temps les précieux reftes des connoiïffances hu- maines. Liege, S. Amand, Lobbes, S. Bertin eurent des é- coles célébres, d’où la France & l'Allemagne tirerent plus d’une fois des Profefleurs habiles. Les fciences y furent en honneur encore au treizieme fiecle. L'amour des lettres avoit jetté de fi profondes racines dans nos contrées , que ni lesdivifions inteflines , ni les fréquentes révolutions , ni la fureur des Normands ne purent les détruire. Il eft vrai que les gens du monde étoient fort igno- rans, que tout le favoir étoir confiné dans les Monaite- res, & que les plus profonds Philofophes , les plus grands Mathématiciens & les meilleurs Littérateurs de ces temps- là, s'ils reflufcitoient dans le nôtre, feroient renvoyés au College & remis à AA (a) mais fi nous s jur (a ) On en peut dire autant des Savans Etrangers du moyen âge ; mais en exceprant pour l’Angleterre le Cordelier Roger Bacon. Il n'y a point de fiecle auquel ce grand génie n’eut fait honneur ; & néanmoins, s'ilvivoit dans le nôtre , il y cRprÉNAEON à fe guérir de cetre fuperfti- tion exceflive qu’on lui reproghe à à fijufte ütre; il fe détromperoit fur l'Aftrologie Judiciaire, à laquelle il étoir fouverainement atraché. o gt Se, à PRÉLIMINAIRE ii geons fainement des chofes, il faudra convenir que c’é- toit la faute de leur fiecle plutôt que la leur. Néconnoif- fant ni les plus beiles parties de l'Orient, ni l’hémif phere occidental , pouvoient-ils décrire les plantes de [a ‘Chine & de PAmeérique ? Sans le fecours des inftrumens devoïent-ils découvrir les fatellites de Jupiter ? Dépour- vus de livres, pouvoient-ils égaler les Ducange & les Mabillon ? Aurefte, il ne s’agit pas ici du parallele d’un fiecle avec l'autre. Tout ce que nous prétendons éta- blir, c’eft que les fciences, flon l’idée qu'en avoit alors toute l'Europe, étoient cultivées dans les Pays-Bas & que les Savans qu'ils produifirent, n’étoient point infé- ‘rieurs à ceux des autres Nations. Sil pouvoit refter le moindre doute à cet égard , ils #eroit aifé de le diffiper entiérement. Il ne faudroit que confulter les Ouvrages de ces Auteurs qui ont pañlé jufqu’à nous. Les livres d'Halitgaire, Evêque de Cam- brai, au ge fiecle , font remplis d’érudition. Les lan- gues grecque & latine étoient également familieres à lP'Auteur ; fes ambaflades à la Cour de Conftanti- nople font une preuve , qu'il n’étoit pas moins habile Politique que favant Théologien. 260 le fiecle fuivant, Radbod, Evêque d'Utrecht, joignit à beaucoup de favoir un talent fingulier pour la Poëfie latine ; les vers qui nous reftent de cet Ecri- : vain font voir à quel point il poflédoit les Auteurs pro- fanes ; & l’on y trouve des penfées & des expreflions , qu'on chercheroit en vain dans les autres Poétes de fon temps. Hucbalde, Moine de St. Amand, ne fut pas a ÿ iy DISCOURS moins célébre ; & généralement, ce fiecle auquel les autres Nations ont-attaché le titre deshonorant de Siecle de fer , fut marqué par de très-beaux jours pour la Littérature Belgique. Ils furent eflacés par léclat de l’onzieme fiecle. L’Evèque Adelbolde, un des plus polis Ecrivains du moyen âge; Alger, a qui Erafme même a donné de fi beaux éloges; Adelman, Auteur d’une Let- tre excellente à Béranger , montrent aflez par leurs écrits combien devoient être eftimables les écoles qui produi- foient de tels Difciples. Sigebert de Gemblours ne leur fit pas moins d'honneur; fans parler de la Chronique intérefflante que nous avons de lui, ni de plufieurs de fes Ouvrages qu’on croit perdus fans reflource , les cor- rections qu'il fit à la Vulgate fur le texte Hébreu, & fon Epitre ad Leodienfes , méritent l’eftime d’un fiecle plus éclairé, & font un phénomène dans celui de l’Au- teur. Paflons rapidement ces temps où la France fut inondée de Romances, & les Pays-Bas de Chroniques rimées ; & venons à la renaiflance des Lettres & au regne à “jamais célèbre de la Maifon de Bourgogne, Froiflard, Chaftellain, Monftrelet, Olivier de la Marche, égale- rent les Hiftoriens étrangers de leurs temps ; mais Phi- lippe de Comraines les furpafla tous. Ce fut à la Cour de Bruxelles, la plus polie & la plus magnifique qu'il y eût alors en Europe, que ce beau génie puifa cette élégance & cette politique lumineufe qui diftinguent fes écrits, &- qui ont fait dire à la poftérité , que Philippe de Com- Le PRÉLIMINATRE. 9 mines avoit le génie de Tacite , comme Philippe le Bon fon maitre avoit l'ame de Trajan. Ainfi les Sciences furent en honneur dans les Pays- Bas & cultivées par les premiers Seigneurs de la-Cour, qui, certainement , ne croyolent point qu'il y eût une efpece de gloire à ne favoir pas écrire leur nom, quoi- que la plupart des Nobles de ce temps fuflent encore imbus de cet étrange préjugé. La Bibliothèque des Princes de Bourgogne étoit une des plus fameufes de l'Europe : on en peut voir les reftes magnifiques confervés à la Bibliothèque Royale. En les examinant , on reconnoîtra que la plupart de ces Ouvrages leur furent dédiés, ou avoient été entrepris par leur ordre ; preuve certaine de l'amour _que ces Princes avoient pour les Lettres , & des foins qu'ils prirent pour les faire fleurir. © Marguerite, fille de Maximilien , ne démentit point le fang d'Autriche & de Bones » qui couloit dans {es veines. Elle fut pour les Pays-Bas ce que François E fut pour la France. Jamais Princefle ne fit plus de bien aux Lettres, & ne récompenfa mieux, ni plus noblement ceux qui les cultivoient. La Reine Marie fuivit {es principes & gouverna comme elle. Le mé- rite caché & timide ofa fe produire ; ou plutôt ces deux Femmes célèbres furent le déterrer au-dedans & au-dehors du Pays. L'Hiftorien Molinet, Bibliothécaire de Marguerite ; Agrippa, Confeiller de Charle-Quint ; Mercator , le créateurdela bonne Géographie; Erafme , , biscou Le 5" | qui n’a pas befoin d’épithere, & d’ autres grands hom- mes reflentirent plus d’une fois l'effet dé leur püiffante protection. Sous Philippe IT, nos guerres civiles, quelque af freufes qu’elles fuflent, ne détruifirent point les Let- tres; parce qu'un protecteur auffi grand que Mécène & Colbert veilloit à leur confervation. Cé protec- teur fut Granvelle, Il eft furprenant que dans les cir- conftances les plus fâcheufes, la Littérature Belgique ait pu prendre un vol fi haut, cette époque ayant été illuftrée par plus de trente Auteurs du premier ordre, à la tête defquels la poftérité a placé Arias Montan (a), . Ortélius & Jufte-Lipfe : mais quand on confidere que (a) Quoiqu’Arias Montan aît pailé en Efpagne les premieres & les der- nieres années de fa vie, nous ne faifons point difficulté de le ranger parmi ceux qui ont illuftré la Littérature dans nos Provinces. Il y fut envoyé par Philippe IT pour préfider à la Sociéré des Gens de Ler- tres qui devoient publier la Polyglorte d'Anvers. Cette ville fut le théatre de fes travaux Littéraires ; théatre fur lequel il s’eft attiré les regards de fon fiecle & ceux de la poftérité. Cela fuffit pour mettre cet habile homme au nombre des Savans qui ont éclairé les Pro- vinces Belgiques. Au refte, les Sciences n’y étoient pas moins cultivées que les Let- tres. Bruxelles vir naître Simon Stevin. Les Snellius & les Grorius ont fait l'éloge de cet habile Mathémarticien , en traduifant fes Ouvra- 8es. Plufeurs de fes Traités n’ont rien perdu de leur mérite; & quoi- que de notre temps ce genre d'étude ait été porté f@t loin , ils fonc encore généralement eftimés, o PRÉZIMINAIRE. si Granvelle n'épargna rien pour attirer les beaux ef- prits étrangers .& nationaux , & que les dignités les plus éminentes de l’état furent conférées à des Savans diftingués , que Viglius fut Chef & Préfident du Con- fil Privé, Hopperus Confeiller d'État, & Peckius Chancelier de Brabant , la furprife eft moins grande ; & combinant avec un Gouvernement fi fort ; la foi- ” ble régence du fiecle fuivant, on eft triftement convaincu qu’une guerre fanglante n°eft pasle plus grand mal qui puif { arriver aux Lettres: le Regne de Louis XIV a fourni en France une feconde preuve de cette aflertion. Les foins de Granvelle furent fecondés par le zele du fa. meux Plantin. Les Mufes Belgiques ont placé hardiment cet Imprimeur à côté du Miniftre d'État. Ce digne rival de Turnebe & des Etiennes , contribua autant que Gran- velle aux progrès de la Littérature , non-feulement par cette infiniré de belles Éditions , qui fortirent de vingt-. trois Prefles qu'il faifoit rouler , mais par les riches penfions , qu'il payoït aux Gens de Lettres, qui avoient befoin de fecours pour fe produire ; ayant toujours auprès de lui des Savans très-diftingués , qui s’hono- roient du titre de Correcteurs de fon Imprimerie, la- quelle étoit fans contredit la premiere & la plus ma- onifique de l'Univers (a). —— a (a) Voyez Gyicciardin ; les Lettres de Jufte-Lipfe | & du Cardinal Baronius , Valere André, Malinckrot, Baillet, &c. vi. DE SCONU RS von Tel fut l'état des Lettres pendant les guerres civi- les des Pays-Bas. Qui eût cru que Kà Paix de Munf-* ter dût être l’époque de leur décadence totale 4 CCE néanmoins ce qu'on ne peut diffimuler, car il faudroit avoir d’étranges préjugés pour croire que depuis ce temps-là, notre Littérature ait pu foutenir aucun pa- rallele avec les Nations voifines. Des Souverains top: foibles pour tenir le timon des affaires, des Miniftres tels qu'il en faut pour décourager les talens (a) ; des partis acharnés contre d’autres partis , employant la brigue & les menées les plus fourdes pour écrafer leurs adverfaires ; voilà les caufes véritables qui hâterent la chûte des Lettres, & qui étoufferent tout le génie qui reftoit du fiecle précédent. Si les Pays-Bas ont produit encore quelques Au- teurs de réputation, c'étoit ou un Savant ifolé , qui, fans appui , fans protection, ne pouvoit donner le ton à la multitude; ou un Religieux , dont les Ouvrages, après avoir fait quelque bruit dans fon ordre, deve- noient (a) Un.exemple le prouvera fuffifamment. Le Roi de France avoit accordé une penfon à Gevartius, Sécretaire d'Anvers , fameux Poéte Latin. Le Gouvernement ordonna à celui-ci d'abandonner cette pen- fion , le Poéte obéir, remercia le Roï, perdit fa penfion , & ne fur jamais indemnifé par le Gouvernement. Woyez Elog. Imp. Gevartii. Manufcrie. , PRÉLIMINAIRE. ix noient inutiles à la Nation, parce que le goût des Let- tres & les-bonnes études une fois éteints, elle ne re- gardoït ces produétions qu'avec des yeux indiffé- TENS» Les Pays-Bas changerent de Souverain à la fuite du Traité d'Utrecht; & cette révolution combla les vœux de tous les bons Citoyens. L'amélioration des ter- res , les progrès du commerce, les bruyeres incultes changées en campagnes riantes , les Villes embellies, un air d’aifance répandu même dans les villages, un peuple plus nombreux que jamais, ce font là les té- moins irréprochables qui font voir combien ces vœux étoient fages & légitimes. Les Lettres feules furent né- gligées , foit que l'attention de guérir les plaies de l'État occupât feule les fins du Gouvernement, foit Par d’autres caufes qu'il feroit inutile d'approfondir, elles demeurerent dans un état de langueur, qui em- piroit de jour en jour. Pour les en tirer , il fallut quele ciel mit fur le Trône une Princeffe, qui fait de l'amour de fes peuples , la bafe de fon Gouvernement , & qui repar- de, comme un devoir facré, le foin d'éclairer fes fu- jets. Il fallut que la paix & l'abondance fiflent lever fur fon Empire des jours heureux & tranquilles, & que le Déporfitaire de fa puiflance fuprème für un Prince chéri des peuples , un Protecteur déclaré des arts & des talens utiles , afz bien-faifant pour les accueil 6 # SICVOT EE RS dir, affez épis pour en apprécier le mérite. Il l- fut qu'un Miniftre, ami des lettres, & doué d’un gé- nie profond , fecondât fes glorieux defleins ; qu’il con- cût un projet de rétabliflement & les moyens de le réalifer , qu’il eût aflez de fermeté pour ne point fe décourager par la rencontre de quelques obflacles , qui accompagnent toujours les entreprifes de cette nature. Toutes ces circonftances fe trouverent réunies en 1769 , lorfque le feu Comte de Cobenzl, Miniftre Plé- nipotentiaire de S. M. aux Pays-Bas, animé par les confeils de M. Schoëfflin , Profefleur d'Hiftoiré & de Droit public à Strafbourg , procura l’éreétion .de la Société Littéraire. L'illuftre étranger, dont on vient de parler , avoit propofé cet établiflément au Mini£. tre, comme le feul moyen de faire fleurir les lettres aux Pays-Bas : quelques Savans de ces Provincesavoient déja formé depuis long-temps des vœux à ce fujer & préfenté leurs idées au Gouvernement. M. Schoëfflin fe rendit exprès à Bruxelles ; &., fans une maladie qui lui furvint , & qui hâta fon retour dans un cli- mat auquel il étoit plus accoutumé , il eût affifté à la premiere féance , il en eût fait l’ouverture par un dif= cours qu’il méditoit, & que le Comte de Cobenzl l’avoit prié de prononcer à cette occafion. S.M. ayantaffigné les fonds néceflairespour la diftribu- tion de deux prix annuels & pour les autres befoins de Ce | PRÉLIMINAIRE. zj corps ,on fut convaincu dès le premier coucours que la Litrérature Bel gique n’étoit pas fi profondément enféve- lie qu'il ne fût facile de la reflufciter. Mais la mort inopinée du Comte de Cobenzl fut une nouvelle preu- _ve du peu de fonds, qu'on peut faire quelquefois {ur les apparences les plus flatteufes. La Société naïflante, foible , fans appui , fans chef, fe vit à deux doigts de fa perte , & le Public ne douta plus qu’elle n’allâc tomber dans un oubli éternel , dès la feconde année de fon exiftence ; en effet, le Le diftingué de deux ou trois de fes Membres , qui fe roidifloient contre les obftacles , ne pouvoit produire que des efforts im- puiflans. Heureufement pour les Lettres, le Comte de Cobenzi avoit été remplacé par M. le Prince de Starhemberg, Dès fon arrivée à Bruxelles , on fentit renaître un rayon d’efpérance , & bientôt ce Prince en excita de grandes , qui n’ont point été fruftrées. S’étant fait ren- dre compte de létat de la Société Littéraire, il com- prit facilement, que ce corps n'étoit engourdi & foi- ble , que, parce qu’il étoit deftitué de cette influence heureufe , qui émane du Trône , & qui porte la vie & la force dans tous les états. Il connoïifloit les in- tentions bienfaifantes de MARIE-THÉRESE ; perfonne ne favoit mieux que lui, combien cette Augufte Prin- cefle défiroit , & Late elle étoit digne de regner fur des Nations éclairées. b ÿ … AU + ADL SC JOUR: Si Il y avoit loifi d’une Sociéré maltétayée, &! pour ainfi dire , éphémere , à une Académie permanente! @c munie ‘dela Sanétion Royale. Ce pas fut franchiltout d'un coup. S. À. le Miniftre Plénipotentiaire, obtint des ‘Lettres - Patentes honorées de la fignature &c munies du grand fceau de S. M. par lefquelles la So= _ciété Littéraire fut érigée en Académie Impériale & ‘ Royale des Sciences & Belles-Lettres ; ainfi qu'un rè« glement qui prefcrivoit la forme de l’établifflement & les devoirs des Académiciens. Ce fut à la faveur de ces deux monumens de la fagefle & de la bienfaifan- ce de notre Augufte Souveraine , que la nouvelle Académie prit naïflance fous les aufpices de S. A. R. le Séréniflime Duc CHARLES de Lorraine & de Bar, Gouüverneur-Général de ces Provinces ; & quels auf pices plus heureux pouvoit-elle défirer ? Le Prince de Starhemberg , que la poftérité regardera avec raifon comme le créateur de l’Académie, fut défigné en mé- me-temps par l’Impératrice pour la repréfenter dans ce corps en qualité de protecteur; c’étoit par lui que l'Aca- démie devoit apprendre les ordres & les volontés de S. M. & ceux de S. A. R. Il fallut un chef à cette compagnie, pour diriger les affaires, concilier les opinions différentes, mainte. nir le bon ordre & le règlement, animer ta Aflo- ciés, rendre compte au Miniftre Plénipotentiaire de Vétat du corps, de fes befoins , de fes progrès , en- fin des Membres qui fe diftingueroient les plus : S. M. PRÉLIMINAIRE. æiÿ.. jetta- les yeux fur M. de Crumpipen , Chancelier de Brabant, qui de concert avec M. fon frere, Sécretai- re d'État & de Guerre, avoit contribué beaucoup par fes confeils &: par fes avis, à l'érection de l’Acadé- mie. On affigna à celle-ci la falle de la bibliothèque Royale pour le lieu ordinaire de fes aflemblées , dont la premiere fut tenue le 13 Avril 1773. On peut voir les avantages & les prérogatives accordés à l’Académie en corps & aux Membres en particulier, dans les Let- tres-Patentes & dans le règlement qui f trouvent à la fin de ce Difcours. : L'ancienne bibliothèque des Ducs de Bourgogne fubfiftoit toujours à Bruxelles ; mais elle étoit dans un état déplorable. Le peu de foin, pour ne rien dire de plus, de ceux à qui la garde en avoit été confiée dans un fiecle où le Gouvernement s'embarraf- foit fort peu des progrès des Lettres , la rapacité de ceux qui pouvoient y avoir accès, enfin les malheurs du temps l’avoient prefque réduite à rien. Le Minif- tre Plénipotentiaire réfolut de lui rendre fon premier luftre, & de la faire fervir à l’ufage des Savans : fur les inftances de ce Prince , S. M. Ia rendit publique, y établit un bibliothécaire, l’enrichit d’un grand nom- bre de manufcrits précieux , & y fit faire les chan- gemens & les décorations néceflaires. M. Gerard, & après lui M. l'Abbé Chevalier, tous deux Membres æiy DISCOURS : ‘de l'Académie , y avoient remis l’ordre. Le Séréniffi- me Gouverneur-Général , le Prince de Starhemberg, jes principaux Seigneurs du Pays, les Corps les plus refpectables de l'État , les Évêques & les Abbés, plu- fieurs particuliers , en un mot toutes les clafles des citoyens , concoururent à l’augmenter , avec cette émulation & cet empreflèment que le patriotifme inf pire, & qui a été de tout temps le SE caractérifti- que de la Nation. Voilà en peu de mots l’état des Lettres de ces Provinces , joint à l’Hifoire de l’établifiement de J Académie. On continuera cette Hiftoire, en mettant à la tête de chaque volume qu'on publiera un jour- nal des Séances Académiques. Ce journal annonce. ra les Mémoires qui feront préfentés à l’Académie ; il renfermera un extrait de ceux qu'elle ne jugera pas à propos d'imprimer en entier ; il rendra compte au Public de toutes les opérations qui peuvent l’intéref- fer, & des objets qu’on aura traités dans les À flem- blées ; on n'en retranchera que les détails minutieux, -& certains articles, qui pourroient regarder la confti- -tution ou la police intérieure du corps , & dont la connoiffance ne fauroit être d'aucune utilité au Public. C'eft cette utilité qui a été conftamment & qui fera toujours le but principal de l’Académie. Déja les Efprits fages & dépouillés de tout préjugé l'ont apperçue dans ‘PRÉLEMENATHRE. %v les queftions , qu’elle propofe tous les ans; on ofe efpé. rer qu'ils acheveront de s’en convaincre en lifant cevo= lume de Mémoires , le premier qu’elle leur préfenre. IL fera bientôt fuivi du fecond & fucceffivement de plufeurs autres, qui deviendront plus intéreflans à mefure qu'on fe procurera des fecours &c des inftrumens néceflaires, dont ‘les Académiesnaiflantes manquentle plus fouvent, Certe réflexion, qui toucheauffi la claffe de Phyfique & de Ma. chémätiques, regarde fur-tout les produétions qui doivent éclaircir l'Hiftoire de ces Provinces. Il ya fans doute des découvertes à faire ; des anecdotes à déterrer ; mais el. les font enfévelies dans la poudre des archives , ou dans des manufcrits difperfés. Il faut du temps pour en rafs fembler un affez grand nombre , & plus encore pour les déchiffrer, c'eft à quoi l’on travaille actuellement. Et quel champ à défricher que notre Hiftoire naturelle? Nous marchons fur des tréfors inconnus. On ouvrira fa terre qui les renferme, & ce travail ne peut offrir que des fuccès. Quel parti à tirer de nos minéraux & de nos foffiles abondans! Quelles lumieres fortiront de ces amas prodigieux de pétrifications de toute efpece ? Quel f{e- cours pour l'humanité fouffrante dans nos’ eaux miné- rales, fi peu connues, fi mal décrites par nos prédécef- feurs? l'Académie doit s'occuper de tous ces objets utiles, & le Public trouvera dans une fuite de volumes le réfulrat de fes opérations. er DISCOURS Blufieurs Auteurs, fans être Membres de l’Académie, Jui ont adreflé des Mémoires. Parmi ceux-ci il en.eft fans doute, qui mériteroient de voir le] jour. C’eft avec. quelque rRBsee qu’elle fe voit obligée de lesexclure d’un volume où 1il ne doit entrer que les feuls ouvrages de. fes Membres. On pourra y revenir dans Îa fuite, IL eft dit dans l’article 18 du règlement, que l'A. cadémie n’adoptera aucun fentiment particulier fur les objets fufceptibles de conteftation. En conféquence i feroit injufte de la rendre refponfable des opinions foutenues par les Auteurs des Mémoires qu’elle publie. Elle laïfle à ceux-ci une entiere liberté de fentiment; elle n’exclud que les erreurs manifeftes, & les idées contraires à la religion & aux loix de l'État. Et ne voulant point ouvrir un nouveau champ aux difputes littéraires, fi quelque Savant S'avife de critiquer fes Mémoires , il eft prié de s’addreflèr aux Auteurs ref. peétifs, qui feuls ont contracté l'obligation de foutenir leurs fentimens s'ils le croient folides , ou de les ré- tracker , s'ils ont tort. Beaucoup moins encore fe croit. elle obligée de répondre à ceux qui voudroient chi- caner fur des mots, ou des phrafes, Parmi les Aca- démiciens, auteurs de ces Mémoires, il en eft quel- ques-uns , à qui la langue Françoife LE étrangere. S'ils Jont préférée, ceft dans la vue d’être utiles à plus d’une Nation, cette langue étant nus enten- due ARR PNR ÉTAT, MI NAT R ER vi) due en Æurope. Quoique fort ufitée dans ces Provin- ces, elle n’eft pas tout-à-fait celle du Pays; & cette confidération doit mériter quelque indulgence & écar- ter bien des critiques. D'ailleurs les perfonnes fenfées S'attacheront moins aux mots qu'aux idées qu’ils préfen- tent, & ne rejetteront pas une vérité nouvelle, une découverte utile , par la feule raïfon qu’elle auroit pu être annoncée dans des périodes plus arrondies , ou dans des termes plus conformes au bel ufage de la langue Fran- coife, zvitj LÉTTRES-PATENTES. LETTRES-PATENTES D'éreétion de l’Académie Impériale & Royale - des Sciences & Belles-Lettres de Bruxelles. MARIE THÉRESE , par la grace de DrEu , Impé- ratrice Douairiere des Romains , Reine d'Hongrie, de Boheme , &c. &c. À tous ceux , qui ces préfen- tes verront, Salut, Nous étant fait rendre compte de l'état actuel de la Société Littéraire , qui, avec notre agrément , s’eft formée en 1769 dans notre Ville de Bruxelles , il nousa été repréfenté, que pour rem- plir completement le but de cet Établiffément, il feroit convenable de lui donner une formé ftable & légale, & comme nous adoptons toujours avec plai- fir tout ce qui tend à exciter , entretenir & répandre le goût & l'étude des Sciences utiles & de la bonne Littérature. Nous avons érigé & inftitué, comme par les préfentes, nous érigeons & inftituons , ladite So- ciété en Corps permanent, fous le titre d'Académie Impériale & Royale des Sciences & Belles - Lettres, en lui affignant pour la tenue de fes Aflemblées la Sa- le de notre Bibliothèque Royale que nous venons de faire adapter & ouvrir à lufage du Public. Voulons, que les Membres de cette Académie fe conforment exactement au Règlement attaché fous notre Contre- Scel , à la fuite des préfentes, tel que nous l’avons agréé pour déterminer plus particulierement les objets, l’or- LETTRES-PATENTES. mix dre & la forme de leurs Affémblées, Conférences & Exercices. Permettons , par une fuite de la confiance que nous avons dans la fagefle & dans les lumie- res des Membres de cette Académie, qu'ils puif- fent faire imprimer, fans avoir recours à l'Approba- tion des Cenfeurs de Livres, tant les écrits & pro- ductions Littéraires qu'ils compoferont eux-mêmes , que les Mémoires , qui, après avoir concouru pour les prix k diftribuer chaque année , feront jugés dignes d'être communiqués au Public, pourvu que ces Ecrits, : Productions & Mémoires ayent été examinés & ap- prouvés par l'Académie. Agréons, que ladite Acadé- mie puifé fe choifir pour l’impreffion de ces divers ou-. vrages, un Libraire, auquel nous ferons expédier les Privileges convenables : Accordons à cette Académie la faculté de fe fervir pour toutes les aflaires , qui la concernent, d’un Sceau particulier, confiftant dans les armes de Bourgogne ; avec la Légende :Sigillum Cæ- farce Regie Scientiarum & Litterarum Academiæe , dont le Sécretaire perpétuel aura la garde. Finalement pour donner une marque ultérieure de l’eftime particuliere que nous accordons aux talens utiles , & à ceux qui favent les cultiver avec fuccès, Nous déclarons, que la qualité d’Académicien communiquera à tous ceux qui en front décorés, & qui ne feroïent pas déja an- noblis ou de naiflance Noble, les diftin&ions & pré- 2 RE rh e rogatives attachées à l’état de Noblefie perfonnelle, & o © « ce en vertu de l'Acte de leur Admiflion en cette Com- a LETTRES-PATENTES. Sous autant qu vil en HE ja Pt est & ainfi qu'il appartiendra. Chargeons Son ALresse Rovaze le Duc CHARLES ALEXANDRE pe LorraINE Er DE Ban, notre Très-cher & Très-aimé Beau-Frere & Coufin, Adminiftrateur de la Grande Mai- trife en Prufle , Grand-Maïtre de l’Ordre Teutonique en Allemagne & en Italie, notre Lieutenant-Gouverneur & Capitaine- Général des Pays-Bas, & donnonsen man- dement à tous nos Confeils, Jufticiers, Officiers & Sujets , que ce pourra regarder ou toucher aïnfi qu'aux Rois & Hérauts d’Armes en nos provinces Belgiques, qu'ils faflent & laiflent pleinement & paifiblement jouir ” & ufer notre dite Académie des Sciences & Belles- Lettres, de même que tous les Membres qui la com- pofent , de tous les honneurs, privileges, prérogati- ves & diftinétions qu’il Nous a plu d’y attacher, & de tout le contenu en ces préfentes, ceflant tous con- tredits & empéchemens au contraire; Car ainfi Nous plait-il : en témoignage de quoi, Nous les avons fi- gnées & Nous y avons fait mettre notre grand Scel. Donné à Vienne le 16 Décembre l’an de grace mil fept cens foixante-douze, & de nos Regnes le trente- troifieme, paraphé K. Rd: Signé MARIE-THÉRESE, plus bas étoit par r’ImPÉRATRICE DOUAIRIERE & Reine, contrefigné À. G. de Lederer, & y eft ap- pendu le grând Sceau de S. M. imprimé en cire ver- meille , renfermé dans une taifle de fer blanc. © -æ+] REGLEMENT De irAonanre ImMPÉRIALE & RoyAzE DES SCIENCES & BELLES - LETTRES de Bruxelles. . L'IMPÉRATRICE REINE s'étant fait repréfenter le Règlement provifionnel de la Société Littéraire de Bruxelles, & voulant, d’après ce que portent les Let- tres-Patentes , auxquelles le préfent Règlement eft at- taché, donner à cette Compagnie une derniere forme plus propre à remplir le but de fon Inftitution, SA MAJESTÉ a réfolu de lui prefcrire le pe Rè- glement. ARTICLE PREMIER. Cet établiflement qui doit fa naïffance fous le nom de _ Société Littéraire , & fon érection en Académie Impé- riale & Royale, aux aufpices de SON ALTESSE Rovaze, le Séréniffime DUC, Gouverneur & Ca- pitaine-Général des Pays-Bas & aux Bienfaits & Fayeurs . que JIMPÉRATRICE REINE fe plait de répan- - drefans cefle fur ceux qui cultivent les Sciences & les _ Belles-Lettres, continuera dans tous les temps d’éprou- ver les effets de la même bienveillance; SA MAJESTE Exÿ REGLEMENT étant perfuadée , qu'éclairer fes fideles Sujets , c'eft ajouter au bonheur, dont ils jouiffent fous fon Regne, & s'aflurant que l'Académie par fon zele, fon appli- cation & un travail continu , méritera des marques ultérieures de fon approbation, & fe rendra digne de Pappui de S, A. R. auprès du Trône. AR TLCrE LT * Dans cette confiance SA MAJESTÉ a nommé fon Miniftre Plénipotentiaire pour le Gouvernement-Gé- néral des Pays-Bas , Protecteur de l’Académie, & ce fera par lui que l'Aflemblée apprendra les ordres & réfolutions de SA MAJESTÉ , ainfi que de fon Son Sérénifime Répréfentant, Autre Ci Et DEL: L'Académie fera compofée de trente-fix Académi- ciens , dont dix Honoraires, & vingt-fix Ordinaires, ART IC:LE | IV, Les Honoraires feront tous d’une condition diftin- guée par leur naiflance ou par leurs emplois , & re- commandables par leurs connoïffances & par leur zele pour les progrès des bonnes études; deux d’entr'eux pourront être étrangers. ARRETE V. Dix places d’Académiciens ordinaires devront nécef. DÉ L'ACADÉMIE. 2777) fäirement être remplies par des Gens de Lettres, do- miciliés à Bruxelles, & le Directeur , ainfi que le Sé- cretaire de l'Académie feront tirés de ce nombre : dix autres places pourront être données à des Sujets de- meurant dans les Provinces de la Domination de L'IMPÉRATRICE REINE aux Pays-Bas, & -pourle furplus de ces places , on pourra faire choix des Savans Étrangers. ARTICLE VI. Lorfqu'il s'agira de remplir une ou plufeurs places d'Académiciens , l'élection fe fera à la pluralité des voix des Membres préfens , & le Préfident en rendra compte au Miniftre Plénipotentiaire , Protecteur, pour obtenir l'agrément de Son Arresse Royaze. ARTICLE VII. L'Académie ne pourra propofer pour les places d'A- cadémiciens ordinaires que des Sujets connus avarnta- geufement par leurs talens diftingués & par leur fa- voir , & eftimables d’ailleurs par leurs bonnes mœurs & probité. : ARTIcLe VIII. L'Académie s’aflemblera une fois dans chaque mois, & sil arrivoic , que le jour deftiné pour {es æxiv RECGLEMENT Séances tombât fur une Fête, dans ce cas l’affem- blée {eroit fixée à la veille ou remife au lendemain, ARTICLE IX, L’aflemblée commencera ordinairement à dix heu- res du matin ; mais il dépendra du Préfident de la fai- re tenir de meilleure heure , de l’étendre pendant la matinée ; de la faire continuer laprès-diner & au be- foin de la reprendre même le lendemain, felon que pourront le demander la nature , l’objet & le nom- bre d’affaires, qu’on aura à y traiter, ARTICLE X. Tous les ans, le 14 Oëtobre , veille de la Sainte Théref , Patronne de l’augufte FonDATRICE de l’Académie , on tiendra une aflemblée extraordinaire, où l’on proclamera les auteurs des Mémoires ou Dif fertations , auxquels les deux prix, fondés par SA MAJESTE, l’un pour la clafle des Sciences , & l’autre pour celles des Belles-Lettres, auront été ad- | jugés par l’Académie ; on déterminera enfüite les füjets des queftions à propofer pour l’année fuivante , & l’on finira la Séance par la le&ure d’un ou de plufieurs Ouvrages fortis de la plume des Académiciens, ARTICLE (XI. L'Académie vaquera depuis le premier de Juillet jufqu'au dernier Septembre. ARTICLE DE ha dE 25 E dr ja RTI CLE XII. TA däniciens ordinaires, établis à Bruxelles ; affifteront à toutes les aflemblées; à moins qu'ils n'aient. -quelque empêchement légitime , dont, dans ce cas, ils devront informer le, Préfident, ou en fon abfence le Directeur : quant aux Honoraires, ils feront toujours invités à s’y rendre pareillement. ARTICLE XITI, Les Académiciens ordinaires, non Eden à Bruxel- les; mais domiciliés dans les États de SA MAJESTÉ aux Pays-Bas, f rendront chaque année au moins à quatre aflemblées , & dans le cas, où ils en feroïent empéchés pour caufe légitime , ils en informeront éga- : Jement & d’avance le Préfident , & en labfence de celui-ci , le Directeur, ARTICLE XIV. L'Académie aura pour objet dans fes recherches & ” fon travail, les Sciences & les Belles-Lettres , & par- ticuliérement les Mathématiques & la Phyfique , ainfi * que l'Hiftoire Naturelle, Eccléfiaftique , Civile & Littéraire des Pays-Bas, ARTICLE XV. Les Mémoires & Diflertations que les À cadémiciens Tome I. #77] REGLEMENT remettront à l’afflemblée, feront lûs dans les Séances de la Compagnie : les Membres ordinaires feront te- nus tous les ans de produire au moins un Mémoire, Difértation ou autre Ouvrage, & ceux qui pour rai- fon légitime ne pourroïent pas fe rendre aux affèm- blées, adrefleront leurs Productions au Sécretaïre de l'Académie , qui en fera la le@ture dans l'une ou lau- tre Séance. ARTicte XVI. Dans les affmblées, où fe fera la lecture des Ou- ‘vrages des Académiciens , chaque Membre pourra pro- pofer fes remarques & fes doutes ou objections, & de- mander à l’auteur les éclairciffimens , dont l’une ou l'autre partie de lOuvrage lui paroîtra être fufcepti- ble : les Auteurs de leur côté auront également droic de demander à leurs Collegues le fecours de leurs lu- mieres & de leurs connoïflances fur les objets qu’ils fe propoferont de traiter, & trous les Académiciens fe porteront avec empreflement & complaifance à cette communication mutuelle de notions & de lumieres, ARTICLE XVII. Tous les Écrits que les Académiciens apporteront aux aflemblées, feront laïiflés par eux en mains du Sécretaire , & l'Académie ne pourra les rendre pu- blics par limpreflion, que du confentement des Au- teurs. se 1 Pt DACADÉMIE, 899N69% 25! nf COR ArRrTricre XVIII. .. Cémme les Sciences & les Beltes-Lettres préfentent également des points & des faits fur lefquels les Savans -& les Auteurs les plus célebres penfent encore diffé- remment, l'Académie n’adoptera fur les objets de cet- te efpece, aucune opinion déterminée , & laïiflera À fes Membres une entiere liberté de fentiment ; bien entendu pour autant qu'il n’y entre rien de contraire à la Religion & aux Loix de PÉtat , mi de IHARMEE tement erroné, ArRTIcLrEe XIX. .. L'Académie examinera attentivement les Ouvrages _que fes Membres fe propoferont de faire Imprimer , & n’y donnera fon approbation qu'après un mür exa- men & une leture entiere faite dans l’aflemblée : fi les Ouvrages étoient d’une étendue confidérable, ac- compagnés de preuves hiftoriques , ou de calculs ma- thématiques , ou s'il s’y trouvoit des objets de natu- re à devoir être vérifiés par quelque expérience ou recherche, dans ces différens cas l'affemblée nomme- ra deux Commiflaires pour examiner ces Ouvrages , les approfondir, demander des éclaircifflemens fur iles objets qui en feroient cepHpipee & elle ne pourra y donner fon approbation qu'à la fuite du rapport de ces Commiflaires , & d’une délibération formelle : au ne ÿ œEVE] REGLEMENT furplus les Auteurs ne pourront mettre le titre d'Aca: démicien fur leurs Ouvrages, que lorfqu'ils auront été ainfi approuvés par Faflemblée. » DA Dr mor XXE L'Académie examinera , lorfque le GOUVERNEMENT GÉNÉRAL lOrdonne , les projets qui regardent de nouvelles Fabriques, Manufactures, Machines, ou la perfettion de quelqu'art utile , & elle s’expliquera en même temps fur le genre & l’étendue des avantages, qui pourroïient dériver de l'exécution de ces projets. AR TIT) CD EI L'Académie nommera quelques-uns de fes Membres pour examiner les Manufcrits de la Bibliothèque Royale, ainfi que ceux des autres Bibliothèques du Pays, & les Membres chargés de cet examen, feront rapport à la Compagnie de ce qu'ils y auront découvert d’inté- reflant, relativement à la Géographie, aux antiquités & à l'Hiftoire des Pays-Bas. A'ORIT ECOLE EX I L'Académie nommera tous les ans deux de fes Mem- bres , pour faire un voyage Littéraire dans les Pays- Bas , & leur donnera des inftructions fur les objets , dont ïls auront principalement à s'occuper pendant leur tournée. DE L'ACADÉMI'E. xxla ArTicze XXIII. Comme il importe que l'Académie foit en relation avec les Savans tant Étrangers que Nationaux , afin de profiter par ce moyen de leurs lumieres & de leurs découvertes ; elle £ura foin d'établir & d'entretenir cet- te correfpôndance par la voie, tant du Sécretaire que de fes autres Membres, & ceux defdits Savans, qui fe feront livrés avec le plus de zele à ce commerce Littéraire , auront , s'ils fe préfentent , la préférence dans les élections pour les places d’Académiciens, ARTICLE XXIV, Le Préfident qui fera nommé par SÀ MAJESTÉ. aura la direion générale de l’Académie , il préfide= ra à toutes les affemblées , où il aura la premiere voix & féance ; il fera délibérer fur les différentes matieres qui font du reflort de l’Académie, recucillera les opi- nions des Membres de cette Compagnie, felon l’ordre & l'ancienneté de leur admiffion , & prononcera les réfolutions à la pluralité des voix. Il fera obferver trous les articles du préfent Réglement , tiendra particulie- rement la main à ce que dans les aflemblées tout fe paffe avec ordre & décence, & rendra compte au Protecteur tous les mois de l’état de l’Académie , de fes progrès, de fes befoins, en l'informant au furplus, ee REGLEMENT nommément de “ceux des Membres qui fe Fr le PJ diftingués. ARTICLE X x V. Le Directeur fera choiïfi tous les ans à Ja dliniité des voix des Académiciens préfens à il préfidera aux affemblées de l’Académie en l’abfence du Préfident, & aura la premiere voix & féance après lui, pendant l'année, où il fera Directeur. ArTicLEe XXVI. Pour remplir la place de Sécretaire, lafflemblée élira, à la pluralité des voix des Académiciens préfens, un fujet qu’elle propofera au Proteéteur , pour en avoir lPagrément de Son AzcTesse Royaze. ARTICLE XXVII, Le Sécretaire fera perpétuel, & aura voix & féan- ce fuivant l’ordre de fon admiffion : il tiendra Rest- tre des délibérations, fignera les réfolutions, délivre- ra les certificats d'approbation & autres, donnés par PAcadémie, recevra les Mémoires & Lettres adreffés à elle, & y fera les réponfes ; & lorfque par mala- die ou autre empêchement légitime, il ne pourra pas affifter aux aflemblées, il en informera le {Préfident, qui commettra tel autre Académicien qu’il jugera con- venable pour en fuppléer les fonétions, LE l'ACADÉMIE. mr Anricue XXVIIT. | Les Regitres, Titres & Papiers, concernant l’Aca. ; démie , demeureront toujours entre les mains du Sé- -cretaire , à qui ils feront remis , accompagnés d’un in- “ventaire, que le Préfident fera rédiger & qu'il fignera à la fin de chaque année: au furplus le Préfident fera auffi “tous les ans le récolement des pieces, qui feront an- notées dans ces Inventaires , dans lequel il fera infé- rer , en même temps, tout ce qui fera préfenté du- rant l’année. | ARTIcLzEe XXIX. Aucun des Académiciens ne pourra concourir pour les. Prix que la munificence de SA MAJESTÉ a fon- dés en faveur de ceux, qui, au jugement de la com- pagnie, auront facisfait le mieux aux Queftions pro- pofées : au furplus aucun des Membres ne pourra don- ner des inftruétions à ceux, qui éoncourront pour les mêmes Prix. ARTICLE XXX. Les Mémoires ou Differtations qu'on deftine au concours , devront être -écrits en caracteres lifibles , en langue Latine , Francçoife ou Flamande, & être adreflés au Sécretaire de l’Académie avant le 15 Juil- let; on les accompagnera d’un billet cacheté, portant le nom , les qualités & la demeure de l’Auteur; & la 27) REGLEMENT même devife ou fentence qui aura été mife à È tête du Mémoire , devra fe trouver auffi fur l'enveloppe. ArTiIcze XXXI. On exclura du concours les Mémoires , dont les Auteurs { feront fait connoître de maniere ou d’au- tre, & on ne couronnera pas non plus ceux qui ayant déja remporté trois prix fur des fujets tirés d’une mé- me Science , écriroient fur une quatrieme Queftion qui y froit également relative, ARTIrIcLE :XXXII. Les Académiciens qui auront donné les Program. mes des Queftions propofées pour les Prix annuels, feront les premiers Examinateurs des Ouvrages qui au- ront concouru , & ils en feront un rapport détaillé & par écrit, qui fera {à dans une Séance de l’Acadé- mie, & expolé avec ces Ouvrages jufqu’à l A fflemblée du :4 O&tobre , à l'examen & aux obfervations de tous les Membres , afin que les Prix foient adjugés en en- tiere connoïflance de caufe à la pluralité des voix de tous les Académiciens préfens. On pourra auffi accor- der un accefir à un fecond Mémoire , qui, au juge ment de la Compagnie, aura mérité cette diftinétion, & fi aucun des Mémoires préfentés ne remplit les vues de l'afflemblée, le Prix fra remis à une autre année, ARTICLE DE L'ACADÉMIE. _æxxéif ArRTIcLE XXXIII Lorfqu'il paroîtra néceflaire ou convenable de fai- re quelque changement ou addition au préfent Règle. ment, fon objet, après mûre délibération de l'aflém- blée , fera porté par le Préfident à la connoiflance du Mr niftre Plénipotentiaire , qui fignifiera à l’Académie par le mème canal , les intentions & les ordres de S. A. R. Veut Sa Majefté, que le préfent Règlement foit ob= fervé lon fà forme & teneur, à quelle fin Elle ya fait appofer fon contre-fcel & l’a fait figner par fon Con- feiller Aulique aétuel & Official d'Etat, chargé des affaires du département des. Pays-Bas. Fait à Vienne le r6 Décembre 1772. Signé A. G. de Lederer , & y eft appofé le contre-fcel de Sa Majefté. Tone 1. e xxxiY EXTRAIT EXC LUR A TE D'une Lettre de S. À. le Minifire Plénipoten- tiaire à M. Le Chancelier de Brabant , datée du 2 Avril 1773 SUR le compte que j'ai rendu à S. À. R. du rapport, que vous m'avez adreflé le 26 Mars dernier, & par le- quel vous portez à ma connoïfflance les obfervations que le comité nommé par vous pour examiner le RE- glement , que S. M. a décrété pour la direétion de l'A- cadémie des Sciences & Belles-Lettres, a cru devoir faire fur quelques articles de ce Règlement, je vous fais la préfente pour vous dire que le Séréniflime Duc, Gouverneur-Général, a agréé & réfolu par forme d’ad- dition au Règlement mentionné ci-deflus, les points & articles fuivans. 19. Sur Particle 6; ».que ceux qui feront propofés dans » une aflémblée pour remplir une place d’Académi- » cien, foit honoraire , ordinaire ou étranger , ne pour- » ront être choifis dans la même aflemblée; mais que » léleétion s’en fera dans l’aflemblée fuivante par la voie du fcrutin, 2°, Sur Particle 17, » que les Académiciens ne pour= » ront également, fans le confentement de l’Académie, TT PE PRE + DUNE LETTRE. -- x: »-sendre-publics. par l’impreffion les Mémoires, qu'ils » auront produits, & lus dans les aflemblées ordinai- ».res de l'Académie, en conféquence de l’obligation, » qui leur eft impofée par l’article 15 du Règlement. 3°. Sur l'article 23, » que la correfpondance géné- » rale de l'Académie proprement dite {e tiendra par le » Sécretaire perpétuel de l’Académie, comme étant » l'organe, & l’interprête naturel de cette compagnie, Et 4°. fur l'article 27 , » que le Sécretaire perpétuel, » en cas de maladie ou d’abfence, pourra commettre » avec l'agrément du Préfident tel autre Membre de _» PAcadémie, qu’il jugera à propos, pour tenir en fa » place le regître. ARTICLES AJOUTÉS. AU REGLEMENT. - Réfolu » que déformais on ne pourra procéder à an » l’admiflion de quelque nouveau Membre qu’une feule féance du » fois par an, favoir, dans la {ance du mois d'O&to- ons » bre de chaque année; bien entendu néanmoins que les » afpirans, qui ne fe feront pas fait connoître avant le » premier Juillet précédent, feront renvoyés par rapport » à leur admiffion à la féance du mois d'O&tobre de » l’année fuivante. Réfolu » que les vacances de l’Académie , commen- DE » ceront à la fin du mois de Mai, &c pr à la fin nie du al » du mois d'Août.. 1774. Réfolu » que les avis des Examinateurs fur les Meé- Dans les zx EXTRAIT D'UNÉ LETTRE, fances du > moires compofés par des Académiciens ne feront com 1774 _. » muniqués qu'au Préfident, & au Sécretaire perpé- an, ° rue » tuel qui doivent en rendre compte à l’Académie , fans » qu'il leur-foit permis de découvrir le nom de l’Exa- » minateur. gD% ER Réfolu» que les Membres de l’Académie ne pour- Fo DR » ront dans aucun cas publier, fans le confentement de » l'Académie, aucun Mémoire lu dans les féances, foit » que cette Piece ait été faite par un Académicien , foit » qu'elle ait été adreflée à l’Académie par un étranger. Dans la Réfolu » de commencer toujours la féance générale féance du à 20 Mai » du mois d'Oétobre, par la lecture du Règlement. on a Réfolu » que les Auteurs qui préfentent des Mémoi- Lee » res au concours annuel , feront tenus de les envoyer 1776. » déformais, avant le 15 Juin, au lieu du 15 Juiller, » comme il étoit d'ufage avant que l’Académie pu- » bliät fes queftions deux ans d’avance. Dans la Réfolu » que fi un Académicien étranger laïfle paf ou » fer trois ans, fans fournir quelque Mémoire, il ne 1776» fera plus cenfe étre de l’Académie ; & fi cet Acadé- » micien ainfi exclu continue à f décorer du titre qu'il » a perdu réellement, on le préviendra que sil ne’cefle » d’en ufer ainfi, on aura recours aux nouvelles publi- » ques pour annoncer fon exclufon. Dans la : féance du Réfolu » d'envoyer aux Membres étrangers, aïnfi ee » qu'aux regnicoles un exemplaire de tout ce que l'A- » cadémie fera imprimer. PDT RUE DeS. A, le Minifire Plénipotentiaire à Meffieurs de l'Académie Impériale & Royale des Scien- ces & Belles-Lettres. Messieurs, Comme S. M. en érigeant la Société Littéraire en Académie des Sciences & Belles-Lettres, & en décré- . tant le Règlement joint*aux Lettres-Patentes pour la direction des Membres, qui la compofent, a trouvé bon de nommer en même temps fon Confeiller d'Etat & Chancelier de Brabant, M. de Crumpipen, Préfident de l'Académie, & de’ continuer M. l'Abbé Needham . pour une année, & M. le Sécretaire au département de la Sécretairerie d'Etat & de Guerre, Gerard, dans leurs poftes refpectifs de Directeur , & de Sécretaire perpétuel de. cette compagnie, je vous fais la préfente que M. le Préfident vous remettra à l'ouverture de vo- tre aflemblée d’après demain , pour vous informer de ces difpofitions, Je fuis avec beaucoup de confidération, MESSIEURS, &c. | Jigné STARHEMBERG, Bruxelles le 22 Ayril 2773. RXVEE) ME D'ANTUAEL'E Si Ox a cru faire plaifir aux. Lecteurs en faifant graver les Médailles . & le Sceau dont il eft parlé dans : Fe . glement. A. Eft la Médaille que l'Académie diftribue tous les ans. Le ii B: Le revers portant Mean comme elle étoit : du temps de la Société Littéraire. : € Le-revers portant linfcription faite depuis Déco tion de l'Académie. D. Le grand Sceaue + Æ Le. jetton: frappé à l’occafion de p établifflement. de l'Académie & de la Bibliohèque publique | F. L'infcription au revers de ce jetton. LR 1e, AR 7 COR Time Z. Lge XXXW/II. 2 pe } (son LITER° WE N, BRUXELL EX jy AUGUSTAE SCLEINT °ÆE/T IUT e ACADEDMA RE GIA INS'TITU/L'A. BIBLIOTHECA PUBLe EREC/TA BRUXo : M°D CC °LKXIM Ætxix NOMS DES ACADEMICIENS Regnicoles & Étrangers felon la date de leur | .admiffion. PRÉSIDENT. M. DE Crumriren, Chevalier de l'Ordre Royal de Ne St. Étienne, Confeiller d'Etat, Chancelier de Brabant. tue Æ Bruxelles. Mr. Turservizre Nerpnam, Chanoine de l’É- S HbRee glife Collégiale & Royale de Soïgnies, Membre de ‘769- la Société Royale des Sciences & de celle des Anti- quaires de Londres, de la Société Royale Bafquoife , des Amis de la Patrie établie à Vitoria en Efpagne , & Correfpondant de l'Académie des Sciences de Paris ; Directeur de l’Académie. À Bruxelles. Mr. Van-pEer-Vynexr, Confeiller au Confeil de Flandres. À Gand. Mr. »E Neuis, Chanoïne de la Cathédrale de Tour- nay , Grand-Vicaire de Mer. l'Evèque de Tournay, Député ordinaire & Préfident des États du Tournefis; de la Commiffon Royale des Études à Bruxelles. À Tournay. M2. GerarD, Sécretaire de S. M. Auditeur de la xl NOMS 1 Chambre des Comptes attaché au département des Ar- chives, & Membre de l’Académie des Sciences de Zélan- de. À Bruxelles. É Mr. Vouxck, Doëteur en Médecine, Profeffeur d'Anatomie, en l’Univerfité de Louvain. MR. PAQUOT, Confeiller Hiftoriographe de S. M. &c. À Bruxelles. . Verpussen , Échevin de la Ville d'Anvers : : NB mort en 1773 (a). an Mr. Caussin , Aumônier de S. À. R. Gouverneur 1970. de fes Pages, Chanoiïne de la Cathédrale de Gand. A Bruxelles. Mr. 0e HEespiN, Roi & Héraut d'Armes de S. M. à titre de fa Province de Namur. À Bruxelles. MR. De Limsourc, le jeune, Docteur en Médecine de la faculté de Montpellier. À Theux, près de Spa. 16 Odob. MR. l'Abbé CuevaLzter , Chanoine de P'Églife Col- HE légiale (2) Mr. Van Roflum, Docteur Primaire de Médecine en l’Uni- verfité de Louvain. NB. Il n’a affifté qu'aux premieres Séances de Ia Sociéré Lirtéraire, & s'eft retiré depuis. Mr.Seumoy , Phyficien , demeurant à Bruxelles : NB. Il a afüifté à routes les Séances de la Société Littéraire & y a lû plufeurs Mé- moires. Il s’eft retiré dans l’incervalle qu'il y eût entre la derniere affemblée de la Société & la premiere de l’Académie. DES ACADÉMICIENS. 77 légiale de Leuze, Membre de la Société Royale de Londres, Correfpondant de l'Académie Royale des Sciences de Paris, Bibliothécaire de la Bibliothèque Royale de Bruxelles. MR. Picot, Gentilhomme Anglois, Membre de la 13 Avsi Société Royale de Londres. En Anglererre. 1773° Mr. De Necker, Botanifte de S. À. E. Palatine, Membre de l'Académie de Manheim, Hiftoriographe des Duchés de Berg & Juliers. À Manheim. Me. Messrer, Aftronome de la Marine & Mem- bre des Académies des Sciences de Paris, de Berlin, de la Société de Londres, &c. À Paris. Mr. MoranD, Docteur Régent de la faculté de Paris , Bibliothécaire de l’Académie des Sciences, Mem- bre de plufieurs Académies, &c. 4 Paris. Mr. l'Abbé DE Marcy, Prévôt de l’'Eglife Collé- giale de St. Pierre & Chancelier de l’Univerfité de Louvain, Chanoine de la Cathédrale de Leutmeritz en Bohême & du Chapitre Royal de Soignies; de la Com- miffion Royale des Études, &c. A Louvain. Mr. Des Rocues, de la Commiffion Royale des _ Études, Sécretaire perpétuel de Académie. 4 Bruxel- les. Mr. Du Rorxpgau , Médecin. À Bruxelles. Tome I. Ha J SE NOMS : MR. D'ÉVERLANGE DE Wirry, Sur-Intendant des ‘Cabinets de Raretés, Aumônier d'honneur de S. A.° R. Chanoine de la Cathédrale de Tournay. À Tournay. MR. DE Beunie , Médecin. À Anvers. | 25Mai MR. Goparp, Docteur en Médecine, Membre de 773 l’Académie de Dijon. À Werviers. 7 Fevri MR. l'Abbé Mann, Chanoine de l'Églife en à 774 de Courtray. Z Bruxelles. Mr. Varmont DE Bomare , Membre de plufieurs Académies, Profefleur d'Hiftoire Naturelle. À Paris. 1404 Mr. Van Wyw, Penfonnaire de la Ville de Brille, "774 Membre de l'Académie des Sciences de Zélande. À la Brille. 1408 MR. DE ra Lanpe, Confeiller du Roi, Leéteur 1776 Royal en Mathématiques , Membre de l’Académie des Sciences de Paris, de la Société Royale de Londres, de l’Académie de Pétersbourg, & de plufieurs autres. A Paris. Mr. Moreau, Confeiller de la Cour des Aydes de Provence, premier Confiller de Mr. le Comte de Provence » Hiftoriographe de France , Bibliothécaire de la Reine. À Panis, Dow Berrtaop, Bénédiétin de la Congrégation de 1 a sn te On É à | DÉS ACADÉMICIENS. xl S. Vannes, Bibliothécaire de l'Abbaye de S. Vincent à Bezançon, Membre de l’Académie de Bezançon. MR. le Comte de FRAuLA. À Bruxelles, Mr. DE Launay, Avocat au Confeil de. Brabant, A Bruxelles. : Mr. Bounrows, Officier du Corps de Génie au fer- vice de S. M. Imp. & R. réfidant aétuellement à Bruxelles, fi D 3 JO) GR IN 4 T5 406 F:O,U RNA E. Des Séances tenues par la Société Littéraire , € enfuite par l'Académie Impériale & Royale L: Sciences & Belles-Lertres de Bruxelles. SE AN CE D'u"s (M\Atz) 1760: LA lettre circulaire, écrite le premier Février 1769 par le Comte de Cobenzl aux perfonnes deftinées à compofer la Société Littéraire, peut être regardée comme l’époque de cet établiffement : elle portoit en fubftance » que S. M. avoit réfolu d’établir une So- » ciété Littéraire en ces Provinces, dans la vue d’y faire » revivre les Sciences & les Lettres; que pour compo- » fer cette Société , elle avoit nommé M. Needham (a) » dont le nom étoit déja très-connu des Savans; M- » Vander Vynckt, Confeiller au Confeil en Flandre; (a) Mr l’AbbE Turberville Needham , Membre de plufieurs Acade- mies , faifoit fa réfidence à Paris du temps de l'érection de la Société Littéraire. Mr le Chef & Préfident Comte de Neny lactira à Bruxel- des, à la réquifition du Miniftre Plénipotentiaire, pour occuper une : place dans ce nouvel établiffement. DRE DES SÉANCES. x » M. Van.Roflum, Do&eur en Médecine en l’Univer- » fité de Louvain; M. Paquot, Confeiller Hiftoriogra- » phe; M.deNelis, Chanoine de Ja Cathédrale de Tour- » nai; M. Gerard, qui feroit Sécretaire perpétuel ; M. » Verduflen, Echevin de la ville d'Anvers, M. Vounck, » Profefleur en Chymie en l'Univerfité de Louvain; & » M Seumoy, Phyficien demeurant à Bruxelles. Que les » membres de cette Société s’attacheroïent principale- » ment à l’Hiftoire ancienne, eccléfiaftique, civile & » naturelle de ces Pays , ainfi qu'aux Arts & aux Scien- »_ ces.” Le Miniftre Plénipotentiaire témoignoitenfuite,, com- » bien il étoit perfuadé que les membres employeroient s, tous leurs talens pour remplir les vues & juftifier le 5 Choix deS. M. Qu'il fouhaitoit que tous lui remiflent , >) même avant la premiere aflemblée, un Mémoire, » Contenant les moyens qu’ils croiroient les plus pro- » Pres à donner à ce corps la meilleure forme & la plus » grande activité. Que ce feroit-là le principal objet de » Ja premiere Séance, à laquelle il fe propofoit de pré- fider , de même qu'aux fuivantes ; qu’on y fixeroit les » Opérations ; qu'on y règleroit les devoirs des mem- . bres, & qu'enfin on y conviendroit des fujets des » deux prix, que S. M. avoit réfolu de donner, & dont » la diftribution devoit f faire tous les ans le lende- » main de la fête de Ste Thérefe. En conféquence de cette lettre, les membres nommés zh JOURNAE par S. M. s’affemblerent le ÿ Mai pour commencer le cours de leurs: opérations. | Il falloit convenir des queftions à propofer ji l'Hiftoire & pour la Phyfique, & concerter un règle- ment provifionnel. On débuta par le premier point, & l'on fit annoncer au public les programmes fuivans. Queftion d'Hiftoire. » Quels éroïent les: endroits compris dans l’étendue des , Contrées, qui compofent aujourd’hui les 17 Provin- 2 ,». voient pañlér pour villes avant le feptieme fiecle > Queflion de Phyfique. , Quelles font les mines principales de la Province. 5» de Namur, leur qualité, leur valeur en détail, la » hauteur à-peu-prèsides élévations où elles fe trouvent. & leur direction; la profondeur de ces mines, les ë fommet; le nombre & la qualité de ces couches, la » Jargeur de chacune à mefure qu’on y defcend, & tou- » tes les autres circonftances phyfiques les plus inté- » reflantes, qui regardent les mines en général ? ÿ Les Mémoires fur ces queftions devoient être remis au Sécretaire perpétuel de la Sociéré avant Je 1 Septem- bre de la mème année , & les prix diftribués le 16 O&o- bre, Le terme étoit court; mais on croyoit que le zele ces des Pays - Bas, & le pays de Liege, qui pou- différentes couches qui fe trouvent par-deflüs jufqu'au : ei D rs rén MT PR ATEN SR STE UT DES SÉANCES. ælyi des concurrens, excité par la nouveauté ‘du fujet, dans “un pays où l’on n'avoit jamais fait pareilles publica- tions , fuppléeroit à ce qui manquoit du côté du temps, La faire a fait voir qu'on avoit raifonné jufte ; ce con- Cours ayant été un des plus nombreux qu’il y ait eu jufqu'à préfent. | Mr Gerard lut enfuite un projet de règlement pro- vifionnel, qui fut adopté fous l’agréation du Gouver- nement, & dont quelques articles ont été confervés dans celui qui fut décréré pour l’Académie, & qui f trouve à la tête de ce Journal. Avant que de termi_ ner la féance, on iprocéda à l’éleétion d’un Directeur. Tous les fuffrages fe réunirent en faveur de Monfieur Needham. LR" | SÉANCE Du 14 OcToBRre 1760. L'objet principal de cette féance étoit l’examen des Mémoires préfentés au concours. Pour la queftion Hiftorique, on diftingua ceux de Mrs. Des Roches, Cauffin & de Hefdin, Le premier fut couronné, les re ‘autres remporterent l’accefjir. Les Mémoires ont été imprimés dans le temps. Quant à la queftion de Phyfique, malgré le grand motif qu'on avoit de diftribuer le prix, pour exciter l'émulation fi néceflaire à une Société naïflante , on ne put couronner aucun des auteurs qui avoient concou- æbiÿj TOURNAL ru, puifque aucun n’avoit donné une réponfe fatisfai- fante, ni rempli en quelque maniere les vues de la Société. Ainfi on réfolut provifionnellement de .pro- pofer cette queftion une feconde fois pour l'année fui- vante, en doublant le prix, & de joindre au pro- gramme certaines explications qui puflent diriger les au- teurs dans leurs recherches. SÉANCE Du 15 OcToBreE 1760. Le défir d’éclaircir la Géographie du moyen âge, fcience fi négligée, fi obfcure, & toutefois fi néceflaire pour étudier avec fruit MHatore Belgique du même temps, fit adopter la queftion fuivante, qui, traitée convenablement, pouvoit répandre de grandes lumie- res fur cet objet prefque inconnu. Queftion d'Hifioire pour l'Année 1770. » Quelles ont été depuis le commencement du fep- » tieme fiecle jufqu’au neuvieme exclufivement, les bor- » nes des différentes Contrées, Cantons, Pays. Com- » tés & États renfermés dans l’étendue , qui compofe » aujourd’hui les 17 Provinces des Pays-Bas & la . » cipauté de Liege? La queftion de Phyfique qu’on avoit traitée d’une maniere fi peu fatisfaifante fut annoncée de nouveau avec les explications contenues en ce programme. » La ST TS UT OS PES SAN C RS Mere » La Sociéré { trouve obligée de propofer pour » l’année prochaine la même queftion phyfique qu'elle . » a déja préfentée, & le prix qui eft remis fera dou- » ble pour celui qui la réfoudra aux termes propofés. » On prie les concurrens ‘de s'y tenir, & de répon- » dre exatement aux demandes , ce qui fera d’autant . » plus facile, qu'ils auront plus de temps pour faire » les recherches nécefläires. Il ne s’agit pas de donner » une énumération fcrupuleufe de chaque mine de la » Province de Namur en forme de fimple nomencla- » ture , ni d'entrer dans un calcul purement économi- » que fur leur valeur; mais de faire connoître les prin- >» cipales & les plus riches mines, feulement d’une ma- » niere fuccinéte, & de fe borner enfuite à la defcrip- » tion détaillée d’une ou deux des plus confidérables, » comme celle de Vedrin, avec un deffein, ou même » une efquifle qui en préfente la feétion perpendicu- » laire; on y ajoutera l’échelle fur laquelle le deflein » doit fe former, qui fe tirera naturellement des ob- » fervations faites & des mefures données dans le corps » du Mémoire : dans la partie de la diflertation rela- _ » tive au deflein, on exige un détail phyfique, qui en » même-temps qu'il y réponde, fatisfafle à la queftion: » que laSociété a déja propofée fur les principales minés » du Comté de Namur, favoir, leur qualité, leur rap- » port par quintal en pur métal, la hauteur à-peu-près » des élévations, où elles fe trouvent, & leur direétion; Tome I qi g 1 JOURNAL » la profondeur de ces mines, les différentes couches ».qui fe trouvent par-deflus jufqu’au fommet, le nom- » bre & la qualité de ces couches : la largeur de cha- » cune à mefure qu’on y defcend, & toutes les autres » circonftances phyfiques les plus intéreflantes qui re- » gardent les mines en général. SÉANCE VD v16N OCTO RE 1769. M. le Comte de Cobenzl fit l'ouverture de cette Séance par un Difcours analogue aux _circonftances. Après avoir expolfé les vues de S. M. en établiffant la Société Littéraire, ce Miniftre ajouta, qu’il ne dou- toit point que les Membres ne fiflent les plus grands efforts pour répondre à ce que S. M. attendoit d'eux. Qu'il étoit fortement perfuadé que de tous les motifs qui pouvoient les y engager, l'honneur d’être employés par Jeur Souveraine au rétabliflément des Lertres dans leur Patrie, étoit feul un affez puiffant aiguillon pour exciter leur zele ; puifqu'ils partageroiïient avec cette augufte Protectrice des Arts & des Sciences, la gloire qui devoit réjaillir de cette grande entreprife. Que de fon côté il concourroit en toute occafion au bien de la Société. Qu'il en protégeroit les Membres; & qu'il feroit toujours parvenir au pied du Trône de S. M. les fruits de leurs travaux avec l'éloge qu’ils auroïent mé- rité. DESYSÉANCES. ñ - Après ce Difcours, le Sécretaire préfenta au Miniftre Plénipotentiaire le réfultat des deux affemblées précé- dentes, S. E. ouvrit elle-même les billets qui conte- noient les noms des auteurs couronnés, qu'on a mar- qués par anticipation à la Séance du 14 Oétobre. On avoit plufieurs rapports à faire fur quelques points de l’Hiftoire Naturelle des Pays- Bas. On tenoit à Ou- denarde, & dans les environs, pour un fait conftant, qu'en 1742, lorfqu’on travailloit aux fortifications de cette ville, on avoit trouvé, en creufant, une grande quantité de mercure-vierge. Comme ce fie étoit at- tefté par des témoins oculaires , la Société en avoit ré- folu la vérification. En conféquence Mr Needham en- gagea deux Officiers du corps d'artillerie (a), verfés dans les connoiflances minéralogiques , à fe rendre fur les lieux. Ceux-ci s'étant fait conduire à lendroit d’où Jon avoit tiré ce mercure, ils le trouverent comblé, & ne purent reconnoître aucun ïindice minéralogi- que. si | On avoit attribué des vertus minérales à plufieurs fources au quartier d'Oudenarde, comme à la fontaine de Dyckelvyne, fur la rive gauche de l’Efcaut, à cel- les d'Edelaer & de Maeter, ainfi qu'à quelques autres fources vers le pays d'Aloft. La Société réfolut de fou- mettre ces eaux à l’analyfe ; elle en chargea Mr Vounck, eq Re mn (a) Meffieurs Springer & ?*t Kint. 8y lj JOURNAL qui rendit compte de fes opérations à l’aflemblée fui- | vante; mais pour ne pas revenir à cette matiere, on. dira ici que les efpérances ont été fruftrées, & que l’a nalyfe a fait voir que ces eaux n’étoient pas minérales... Si l'examen des articles qu’on vient de marquer n'a . point répondu à l'attente de la Société , les fuivans pour- ront encore mériter attention. Les mêmes Officiers trou- verent aux environs de Leffines, petite ville du Hainaut, différentes carrieres, les unes remarquables par la quanti- té prodigieufe de dépouilles marines & pétrifiées qu’elles renferment; les autres, en ce qu'elles produifent un grais fin & très-dur. Ils affurerent auffi d'y avoir découvert cette “efpece. de pierre connue en Saxe fous le nom de Wilder Bafalke ou Bafalte fauvage, & d’en avoir vu des pyramides tronquées, pentagonales, qui ne le cé- dent point en grandeur à celles de Stolpen. On avoit trouvé dans les environs d'Oudenarde, au village de Volckeghem, une efpece de tripoli, qui pour- roit parfaitement remplacer celui que nous tirons de l'étranger. Le fable & la terre argileufe d’une montagne au- deffus de la ville de Grammont , fournirent encore quelques remarques. Une ouverture qui fait un pro- fil à une partie de la montagne, laifle appercevoir deux couches de fable fin & gris, entre lefquelles f trou- ve une autre couche compofée de terre argileufe : cel- les de fable ont chacune deux à deux pieds & demi in tt ie ES DES SÉANCES. Eÿ d’épaifleur, & celle de terre argileufe a environ un pied. Après ces couches, on trouve jufqu’à la profondeur de 60 pieds, un lit d'argile mêlée de fable; on y rencon- tre des rognons d’un grais fin, qui préfentent à leur extérieur des taches d’un rouge approchant de celui du cinabre natif, Comme à la fimple vue on ne put re. connoître ce que ces taches pouvoient indiquer, la So- ciété f propofa de foumettre à une analyfe chymique les foffiles dont il s’agit. Tous ces rapports finis, on pafla à la leure d’un Mémoire de Mr Seumoy für les moyens de perfection- ner l'opération de la cataracte par extraction. ANCE Du 26 AVRIL 1770. Deux nouveaux Membres regnicoles furent intro- duits dans. cette. Séance, l’un Mr l'Abbé Cauflin, Au- mônier de S. À. R. & Gouverneur de fes Pages; l’au- tre Mr de Hefdin, Roi & Héraut d’armes de S, M. pour la Province de Namur; Mr de Limbourg, le jeune Doéteur en Médecine de la Faculté de Montpellier ; fut admis comme Membre étranger. : Mr Needham lut un Mémoire fur la maladie con- tagieufe des bétes à cornes, qu'il fit imprimer enfuite. Comme il y a fait depuis des changemens confidéra- bles, on y reviendra au fecond volume, où il doit en- trer ou tout entier ou par extrait. liy Y O'U'RN A LH A Mr Seumoy avoit trouvé en 1753 une nouvelle ef- pece de polype, dans un étang aux environs de Bruxel-. les. Ce polype, que S. À. R. avoit fait deffiner, four- nitau Phyficien le fujet de quelques obfervations, dont: il fit la lecture en cette Séance. © On y lut enfin un Mémoire de Mr Paquot fur les différentes langues qui ont eu, ou qui ont cours dans les Contrées qui forment aujourd'hui les dix -fept Provinces des Pays-Bas & la Principauté de Liege depuis les temps les plus reculés jufqu'à préfent. SÉANCE Du 16 OcToBre 1770 Depuis la mort du Comte de Cobenzl, la Société continuoit à la vérité fes aflemblées ; mais aucune per- fonne en place ne l’appuyant de fon crédit , il étoit à craindre qu’elle ne pûc f foutenir , & que la mort de fon chef ne fut l’époque de fa décadence, qui ne manqueroit pas d'entraîner un anéantiflèment total. Dans cet état des chofes, elle députa le Directeur &c le Sécretaire perpétuel pour demander l’appui de S. A. le Prince de Starhemberg, que S. M. venoit de nom- mer fon Miniftre Pléniporentiaire. Ce Prince s’étant fait remettre un écrit détaillé, qui repréfentoit l’ori- gine & la fituation préfente de cet établiflement , ré- folut de rendre à ce corps mourant la vie & l’aftion, DES SÉANCES. Ta Dès - lors'il Soccupa des moyens qui pouvoient faire réufir cette entreprife, commençant par faire les dé- marches néceflaires pour aflurer à la Société la protec- tion immédiate de S. M. & de S. A.R, . Ce fut dans cette Séance que les deux Députés rap- porterent le fuccès de leur commiffon. Ils firent con. ñoître en même temps les intentions du Miniftre Plé- nipotentiaire fur un autre article que la Société avoit foumis à fa décifion. Aucun Mémoire n'ayant fatisfaic à la queftion Phyfique fur les mines de la Province de Namur, il s’'agifloit de déterminer s'il falloit propofer la queftion une troifieme fois, en triplant le prix, ou la remplacer, par trois queftions nouvelles fur des fu- jets différens: S. A. embrafla ce dernier parti. On dé. cerna à Mr Des Roches le prix d'Hiftoire fur les limites des différentes Contrées & Cantons des Pays- Bas, & l’on publia les queftions fuivantes pour l’année 17710 Queftion d'Hifioire. » Quel a été l'État civil & Eccléfiaftique des Pays- » Bas & du pays de Liege pendant les cinquieme & » fixieme fiecles ”. Premiere Quefiion de Phyfique. » Quelles font les plantes les plus utiles du Pays, &c » quel cft leur ufage dans la Médecine & dans les Arts”? bj JOURNAL Deuxieme Queftion. » Quelle eft la meilleure méthode & la moins dif- » pendieufe.dé teindre en noir le fil de lin & d’autre » matiere végétale, en forte que la couleur pénetre » intimement la matiere à teindre, & qu’elle puifle » réfifter à l’ufer, fans toutefois en altérer confidérable- » ment la qualité ou la force; comme cela réuffit très- » bien fur la matiere animale?” Troifieme Quefton. » Quelles font la qualité, la nature, la valeur, ou le » rapport de la mine de Vedrin dans le Comté de Na: » mur, avec une expofition des couches fupérieures en » détail , la hauteur de la montagne , la profondeur » de la mine , & un plan perpendiculaire par feétion, » qui repréfente l’intérieur de ladite mine?” M. l'Abbé Chevalier , Membre de la Société Royale de Londres, Correfpondant de l’Académie des Scien-. ces de Paris, préfentement Bibliothécaire de la Biblio- thèque Royale, ayant demandé une place à la Société: Littéraire , on fit l’éleion dans la forme: accoutu- mée : fon admiffion fut réfolue & préfentée à É : tion de S. A. R. La Séance fe termina par la leéture d’un Ai notes de M, Seumoy, contenant la defcription d’un polype en mnt ants tata dc à on t-on Tue RS SC à ns ds nn DES SÉANCES. bi en arbre, qu'il avoit découvert en 1753 dans les en- virons de Bruxelles. SÉANCE Du 16 OcToBre 1771 - Le Gouvernement s’occupoit férieufement à donner à la Société une confiftance & un éclat qu’elle n’avoit point eu jufqu’alors. Plufieurs Membres avoient communiqué leurs idées far ce fujet. M. le Chancelier de Brabant, confulté par le Miniftre Plénipotentiaire s’étoit chargé du foin de les rédiger & de les accompagner de fes remarques; & l'on n’attendoit plus que la décifion fouveraine de S. M. l’émañation des Lettres- Patentes , & la San@ion Royale, dont le règlement perpétuel devoit être muni, Déja le Prince de Starhemberg avoit jetté les yeux fur M. le Chancelier pour le mettre à la tête du nouvel établiffément , & ce fut dans cette intention qu'il le chargea en vertu d’un ordre particulier de S. A. R, de tenir la préfente aflémblée chez lui & d’y préfider. ‘Il s'agifloit d'abord de la diftribution des prix ane nuels. On accorda celui d'Hiftoire à M. des Roches, Je même que la Société avoit couronné les deux années précédentes. Elle réfolur à cette occafion d’exclure du concours tout Auteur , quiaprès avoir remporté trois prix d’Hiftoire ou de Phyfique ,'écriroit dans la “ie fur des fujets tirés de la même Science, Toine I. h ii JOURNAL ©" Des trois queftions de Phyfique propolées en 1770, il n'y en eut que deux fur lefquelles la Société reçut des réponfes fatisfaifantes. M. de Beunie éroit l’Au- teur du Mémoire qui avoit pour objet les plantes les plus utiles du Pays. Un fecond Mémoire fur la meil- leure méthode de teindre en noir le fil de lin & d’au- tre matiere végétale fortoit de la même plume : ces deux pieces remporterent le premier prix. Un troifie= me de M. Du Rondeau furles plantes obtint Pacceffir La Société abandonna la queftion fur la miüe de Vedrin, & fit annoncer les programrmiés fuivans, Fr Queftion d'Hifloire. 5, Quel étoit l'habillement, le langage, l’état de Pa= , griculture, du commerce , des lettres & des arts chez les Peuples de la Belgique avant le feptieme fieclé 2° Premiere Queflion de Phyfique. » Quel eft le moyen le plus efficace & le plus prompt , pour faire tomber & périr les chenilles qui s’attachent aux arbres & aux plantes, & fi on peut parvenir » à les détruire par certaines fumigations qui ne foient 3» pas trop coûteufes ; ou par quelques procédés fim- » ples & peu difpendieux ; pourvu que les remedes » propofés ne foient pas nuifibles aux arbres & autres » Végétaux ? ? DE SA SÉANCES : de Seconde Queflion de Phyfique. » Quelles font les plantes de ces Pays qui ont quel- », ques mauvaifes qualités, ou qui font vénéneufes aux :,, hommes ou aux bêtes? Les fymprômes & les effets » qu’elles font naître dans les uns & dans les autres, » & les moyens les plus efficaces & les plus sûrs pour » Y porter un prompt remede ? Cette Séance fut la derniere de toutes celles qui ont été renues fous le nom de la Société Littéraire. Dans _ Lintervalle qu'il y eût jufqu'au temps que S. M. érigea cette Société en Académie Impériale & Royale, les aflemblées furent interrompues; mais les Membres ne laïffèrent pas de travailler fouvent en comité, pour con- . certer les arrangemens & préparer les conftitutions de la nouvelle Académie. Plufieurs comités pareils avoient été tenus dans les longs intervalles des Séances précé- dentes; & la plupart des articles qui reglent encore aujourd’hui les opérations Académiques, en furent le réfultat. Au refte fi les afflemblées générales dans ces - premiers temps ont été peu fréquentes, fi la Société à produit peu de Mémoires , on ne doit attribuer qu'aux circonftances où elle fe trouvoit ; peu nombreufe en fon origine, incertaine fur fa deftinée, diftraite par les mefures à prendre pour fa confervation , elle devoit nécefäirement perdre de vue fon principal objet, & trouver peu de loifir pour rédiger des Mémoires & pour les préfenter au Public. ki] a. JOURNAL: SÉANCE Dur A VENDEE 1773. De toutes les Séances Académiques, celle-ci eft fans doute la plus intéreffante & la plus mémorable. Elle fit cefler l’inquiétude qu’on avoit fur le fort des Let- tres en ces Provinces, & releva les juftes efpérances de les y voir refleurir. La Société Littéraire érigée en À ca- démie par Lettres-Patentes de S. M. un règlement dé- crété par cette augufte Princefle ; la nomination de M. le Chancelier de Brabant à la préfidence de la nouvelle. Académie; des Lettres du Miniftre Plénipotentiaire , qui contenoient des difpofitions fur différens objets, & de nouvelles aflurances de fa protection; tout cela fer- voit de preuve que le Gouvernement prenoit l'affaire à cœur , qu'il acheveroit fon Ouvrage, que l’Acadé- mie puiflimment foutenue, continueroit à fe former & à prendre croiflance à l'ombre du premier Trône du monde, en un mot, que l’état des Lettres en étoit à l’au- < rore d’un beau jour , dont l'éclat diffiperoit les ténèbres épaifles, qui les enveloppoient depuis fi long-temps. Tous ces points étoient touchés dans le Difcours que M. le Préfident prononca dans cette Séance. Toutes les pieces dont on vient de voir l’énumération, y furent lues avec applaudiflément. L'affemblée avoit plus d’un objet à traiter. Il falloit DES SÉANCES Lj adjuger les prix aux Auteurs qu’on trouveroit avoir le mieux fatisfait aux Queftions propofées en 1771 , par ._ la Société Littéraire. Il falloit convenir des program- mes à publier pour l’année fuivante, & difcuter l'affaire de Padmiffion de plufieurs candidats étrangers & re- gnicoles , qui follicitoient une place d'Académicien. On procéda avec ardeur à toutes ces difcufions , la Séance ayant été continuée l'après-midi & même le lendemain. Pour les Mémoires hiftoriques, la fupériorité de celui de M. du Rondeau , lui valut la palme ; mais comme la Diflertation du Pere du Jardin, Jéfuite, en appro- choit d’aflez près pour balancer quelque temps les fuf- frages, on demanda & l’on obtint de S. A. R. la per- miffion de donner également une médaille d’or à fon Auteur : M. Heylen, Profefleur en Philofophie à Lou- vain remporta l'accefjir. Quant à la premiere queftion de Phyfique, l'Aca- démie diftingua les Mémoires de Meffieurs Munnichuy- fen & Godart; elle couronna le premier & accorda l'acceffi au fecond. Mais pour ce qui regarde l’autre queftion, M. Caels avoit laiflé une diftance fi grande entre Jui & fes concurrens, qu’on ne fit aucune men- tion de ces derniers : lui feul fut couronné. L'Académie publia le programme des queftions füi- vantes. Premiere Queftion d'Hifloire. » Quels font les changemens que l'établifment des Exi ATOUT ONRIN AT Y » grandes Abbayes aux Pays-Bas dans le feptieme fiecle, » & l’invafon des Normands dans le neuvieme ; ont ap- » portés à nos mœurs, à notre police & à nos ufages ? Deuxieme Queftion d'Hifloire. » Donner une defcription abrégée des principales » rivieres qui arrofent les Pays-Bas; difcuter les chan- » gemens arrivés à leurs lits; narrer les travaux entre- » pris , foit pour rendre ces rivieres plus navigables, » foit pour établir une communication entre elles & » différentes villes ou cantons, jufqw'au commence- » ment du regne de Charles-Quint. Queftion de Phyfique. » La pratique des enclos , tels que la nature du ter- » rein en admettra, adoptée en Angleterre, eft - elle » avantageufe aux défrichemens? Et en général quel eft » lé moyen le plus expéditif de fertilifer les terres nou- » vellement défrichées ? - Reftoit le troifieme objet, le plus important, l’ad- miflion des nouveaux Membres. On avoit fous les yeux les ouvrages des candidats; mais ces ouvrages deman- doient un éxamen mür & détaillé auquel une feule Séance ne pouvoit fufhire. Mr le Préfident fit partager la befogne, nomma des Commiflaires pour faire cet examen & pour en rendre compte à la Séance du mois fuivant. DESYSÉANTES Lrèiy SEANCE Dies MM LA Lui t77 de Les Commiflairés ayant fait leur rapport, l’'Acadé. tie choifit par la voie du fcrutin, Mrs de Marci, Des Roches, du Rondeau, d’Everlange de Wätry & de Beunie, Membres resnicoles, & Mrs Pigott, de PRES Meflier & Morand, Membres étrangers. | Mr le Doéteur Godart venoit d'augmenter le nom- bre des candidats, ayant remis au Sécretaire perpétuel différens ouvrages de fa compofition, qui furent diftri- bués comme d'ordinaire. On pafla enfuite à l'examen d’un Mémoire communiqué par Mr de Limbourg ; lë jeune, fur une machine à feu, & fur le moyen d’en éten- dre l'ufage à toutes fortes de cas. C'eft une defcription lumineufe de toutes les parties dont cette machine de voit être compofée. Les principes fur lefquels auteur fe fonde, .ont été appliqués avéc fuccès à divers in- ventions analogues x la fienne. Ce qui diftingue cette derniere, c’éft un double barillet racoutci, qui recoit les vapeurs en plus grande abondance, fubftitué à un feul , dont la longueur exceffive afloiblit néceffairément l'effet; c'eft un robinet d’une conftruétion particulie- re; C’eft enfin l’application de [a puiflance expanfive du feu à divers ufages, comme de tirer des voitures très- chargées, de faire aller des moulins & des pompes, Teis TFOURNAL de fcier le bois ou les marbres, de tirer les minéraux de la terre, de charger ou décharger les vaifleaux; en un mot, de s’en fervir dans toutes les circonftan- ces qui demandent une grande force motrice, fuf- ceptible d’une augmentation à volonté. Malgré l'utilité frappante d’une pareille machine, on n’entrera ici dans aucun détail fur fa conftruétion. Un fimple extrait ne fuffit point pour l’expliquer; & d’ailleurs ces fortes d’in- ventions, quoique appuyées fur une théorie folide, ont befoin d’un eflai en grand pour en conftater le mé- rite; puifqu’il eft reconnu que la dépenfe, les obftacles du terrein, le frottement, les réfiftances imprévues, produifent fouvent les plus grandes difficultés dans la pratiques. Cet examen achevé, Mr l'Abbé de Nélis lut un Mé- moire fur l'ancien Brabant, où l'on recherche l’origine de cette Province 6: l'étymologie de fon nom. Après avoir rapporté les interprétations fingulieres que nos auteurs ont données à ce mot; interprétations qu'on elt difpenfé de réfuter, Mr de Nelis fe déclare pour celle qu’on tire du pont que les Romains avoient fait fur lEfcaut. Voici les raifons fur lefquelles ïl s’appuye. L'Hifloire nous apprend que du temps des Ro- mains, l’un des endroits les plus fréquentés de la fe- conde Belgique s'appelloit Pons Scaldis; c’eft le feul endroit marqué dans lItinéraire d’Antonin & dans la carte DES SÉANCES. dry carte de Peutinger, entre Tournay & Bavay; d'où l’on conclud que c'étoit le plus confidérable. Les voies mi- litaires y pafloïent, & ce Pont étoit peut-être alors le feul qu'il y eût fur VEfaut. Il importe aflez peu de _favoir s'il étoit fitué à Condé, ou au village d’ Eftau- pont, ou même plus haut: ce qui paroît certain, c’eft que les peuples, qui occupoient les environs de ce pont, étoient appellés Proponti, Ou par corruption Propanti, c’eft-à-dire , pro ponte, ante pontem. Philippe, Abbé de Bonne Efpérance, qui écrivoit en 1150 , leur donne ce nom : en parlant de l'Abbaye de St Amand, locus eff, dit-il , intra Menapiorum pofitus fines, Propontis , fe Yiisque conterminus, ; Æn donnant à ces Propontii une terminaifon Beloi- que; quel moten réfultera-t-1l? Obfervons d’abord qu'il n’y a rien de plus commun dans le Dialecte Franc ou Teuton, .que le changement du P. en B. deux lettres d’ailleurs qui, dans toutes les langues Æ, convertiflènt fi aifémént l’une en l’autre. C’eft ainfi que nous avons fait Bifcop , d’ Epiftopus, € Bedeau ou Bedel de Pedelus: ainfi au lieu de Proponters, on aura dit naturellement Brobonsers, ou ce qui, eft moins dur à prononcer Bra- banders.. Cela. eft.fi vrai, dit V’Auteur » que,fi le mot étoit ençore à créer, Lane de même. Pour écarter tout ce qui pourroit avoir un air de conjecture , M, de Nelis rapporte iles diplomes du Tome:l. è “esj TOURNAT moyen âge, qui indiquent la fituation & l'étendue de l'ancien Brabant. Ces diplomes y placent Condé, Perwez, Ville, & tout ce canton à l'Orient de Tour- nay jufqu'à la Haine ; de même qu'Herines, Efcanafle ; Rhenay, en fuivant la rive droite de l'Efcaut; puis Lef- fines & Melin, en tirant vers la ville d'Ath; & enfin Velaines & Leuze , en rétournant vers Tournay. Ainfi l'ancien Brabant étoit tout-à-fait hors du Brabant, c’eft- a-dire , hors des limites de la Province -qui en porte au jourd’hui le nom. | Il eft vraifemblable que les premiers Propontii, ren- fermés entre la Haîne & l’Efcaut , ne s’étendoient gut- re au- dela d’Ath & de Rhenay; c’eft-ù-dire, qu'ils occüupoient ce canton en de-cà de la Haîne, où Pon parle éncore aujourd’hui Wallon, & où lon a parlé anciennement Latin. Mais dans la fuite des temps, ce nom s’eft propagé & a été communiqué aux peupla- des voifines, fur-rout lorfque Lambert eut époufé la Princeff= Gerberge, & recu à titre de dot, le Comté de Bruxelles, & peut-être celui de Lonvain. Quoique ce Prince eut cédé à fon frere Raginier, l’appanäge qu'il avoit du côté de Mons entre la Haïîne-& l’E£ caùt, Ceft-à dire, dans le Brabant connu alors; quoi- qu'il fûc allé demeurer dans fes nouveaux Etats, ayant choifi Louvain pour fa réfidence , & qu’il fe contencät, ainfi que fes premiers fuccefleurs , du titre de Comte de Louvain, le nom de Brabant, fon premier domaine, DES SÉANCES. lxvi, percoit toujours, étant bien plus connu & bien plus ancien que celui de Louvain. ; Lis Dans la fuite des temps, à mefure que les fuccefs feurs de Lambert étendirent leurs poffeffions , le nom de Brabant fut communiqué à leurs nouveaux États. Le quartier d'Anvers, la Campine, toutes les nouvel. les acquifitions jufqu’à la Meufe, ne furent plus défi- gnées que fous ce nom ; tandis qu'il fe perdoit entière« ment dans le Pays qui l’avoit porté autrefois, & qu'il f fondoit, pour ainfi dire, dans celui de Hainaut, à me- fure que les Comtes de cette Province s’aggrandifloient de leur côté vers Condé & Valenciennes. C'eft ainfi que le nom de France ne fut point donné d'abord à toutes les parties des Gaules, occupées par les Rois Francs. Il a fallu des fiecles pour introduire ce changement. Bien long - temps après Clovis & fes fuccefleurs, on trouve encore dans les Hiftoriens cette facon de parler : : ex Galliïs ivir in Franciam, pour quel- qu'un qui de la Guyenne ou de A UMeEBne s’en alloit à Paris. Tel eft en fubftance le Mémoire de M, l'Abbé de Nelis. Ce fut à cette même Séance que M. l'Abbé Needham préfenta le fien fur la Province de Luxem- age bourg, & cette derniere le&ture mit fin à l'aflemblée, 157. on vi TOURNAET SÉANCE Du 24 Juin 1973 Après l’admiffion de M. le Doéteut Godart, com: me Membre étranger , on paflà à la lecture de plüfieurs Mémoires produits par les A cadériiciens nouvellement admis, auxquels on ävoit fait entendre que l’Acadéz mie verroit avec plaifir quelque Ouvrage de leur com- pofition ; au lieu du compliment ufité en cés occafions dans quelques autres compagnies favantes. Voici le ti- tre de ces Mémoires dont a plupart paroïiffent en cé Recueil. - Réflexions fur les Académies & les Univerfités pat M. l'Abbé de Marci. | v. page Mémoire fur la Nature du Sel commun, dontles an- 347° ciens Gaulois & Germains faifoient ufage, par M. du Rondeau. V.page Obfervation für PÉle@ricité, par M. Abbé d’Ever: 181. lange de Witry. V. pare Mémoires fur une Maladie produite par des mou- 231. les vénimeufes, par M. de Beunie. NU ee Mémoire fur la poffibilité & les avantages de na 45° turalifer les vigoghesdans la Province de Luxembourg: par M. PAbbé de Nelis. Obfervations fur la caufe de la Commotion & fur {a D ES: SÉMINWICES. Luiz vertu dés contads (@ ) Électriques , par le Docteur Godart. On fait la maniere différente dont Mr Franklin & Mr ? Abbé Nollet ont expliqué le phénomene de la commotion; mais voici uneexpérience qui femble met- tre les deux explications en défaut. Éleétrifez deux carreaux à la fois, puis détachez-les de la machine : l’un & l’autre fera en état de produire la commotion. Mais au lieu de toucher les deux fur- faces du même carreau, n’en touchez qu’une de cha- que, la non-éledrifée en premier lieu, l’éleétrifée en fecond : il ne fe fera aucune commotion; cependant elle devroit avoir lieu; puifque, lon le fyftêéme Fran- klinien, on fait communiquer une furface électrifée er moins avec une aujourd’hui par les Maiïfons d'Autriche & de France, D ES SÉAN, CE S æcj 3 Que dans'le Pays de Liege; avec la defcription de » Ces monumens ? La queftion de Phyfique étoit conçue en ces termes. :» Quels froient les moyens de perfetionner dans » les Provinces Belgiques la laine des moutons? ”? Mr Van Wyn, Membre de l’Académie de Zélande, & Penfionnaire de la Brile avoit demandé une place d'Académicien étranger, il avoit préfenté à cet eflet dans une des Séances précédentes , quelques Ouvrages im- primés, ainfi qu’un Mémoire manufcrit en Flamand, ayant pour titre (a) Differtation dans laquelle on brouille la confufion caufée dans l'Hifioire par la reffem- blance des noms Borne, Horne, Woorne & Veurne. Son admiffion fut décidée en celle-ci, &la Diflertation dont _on vient de rapporter le titre, paroïtra dans le fecond Volume de ce Mémoire. SÉANCE Du 16 NOVEMBRE 1774. Mr de Marci lut un Mémoire [ur la façon de donner une meilleure forme à l’enfeignement des humanités | pour les rendre plus utiles & moins épineufes à la jeuneffe & (z) Verhandeling tot voorkoming der verwarringen , welke door de gelykluidendheid der benaemingen van Borne, Horne, Woorne cn Veurne in de Hiftorie-Kunde gefchied zyn. æcij TOURNAL { plus analogues aux hautes Sciences, auxquelles elles fer: vent de préparation. Les perfonnes éclairées fouhaitoient depuis lons-temps qu'on introduisit un changement dans les études. La conjoncture qui paroifloit favorable, détermina Mr de Marci à communiquer fes vues; l’Académie ne penfa point que cet objet fut indigne d'elle, & ce Mémoire fut bientôt fuivi de deux autres, dont on rapportera ici les titres, quoique la le&ture ne s’en fit que dans les Séan- ces fuivantes. L'un étoit intitulé : Mémoires fur les Éco- les & les Etudes d'humanités contenant des Réflexions ti- rées de l'Hifloire avec une notice alphabétique de quelques favans Maîtres d’'Ecole du feizieme fiecle, par Mr l'Abbé: de Nelis : l’autre: Difcours fur la méthode dont on pourroit fe Servir pour enfeigner à la jeuneffe le Latin & les aurres Sciences mentionnées dans le Mémoire de Mr de Marci, par Mr des Roches. L'Académie ayant préfenté ces trois pieces au Gouvernement, qui feul pouvoit intro= duire la réforme, le Prince de Starhemberg penfa com- me elle far l'importance du füujet, & témoigna fa fatis- faGion de la maniere dont les Auteurs l’avoient traité. Autres Mémoires lus à cette: Séance. Mémoire de Dom Mann, fur les Marées aériennes ; ou fur l'effet produit dans latmofphere terreftre par Paétion combinée du foleil & de la lune, NB, Renvoyé au fecond Volume. DES SÉANCES. æcij :Obfervations fur le danger de la propriété purgati- ve & vomitive de quelques plantes médicinales, par Mr Morand. Les plantes dont Mr Morand a décrit les qualités dangereufes, font la racine de bryone , & les femen- ices. du genèt ordinaire. Témoin oculaire des eflets.ter- æibles qu’elles ont produites, il s’eft empreflé d’aver- ‘tir du danger les-perfonnes qui feroïent tentées d’en faire ufage. Peut-être les femences de genêt ne font-elles nuifibles que lorfqu’elles font vieilles; celles dont Sagit dans ce Mémoire avoient été gardées depuis huit ans. SEANCE Du 29 DÉCEMBRE 1774. Mr Du Rondeau, Auteur de la queftion propofée en Octobre fur les “moyens de perfectionner la laine des moutons dans les Provinces Belgiques, préfenta à l'Académie un Mémoire aflez étendu fur ce fujet, Nous aurons occafion d’en parler au fecond Volume. * »Ce qui avoit porté l'Auteur à compofer ce Mémoi- re, cefut le fentiment de quelques Académiciens, qui ‘jugeoient à propos que celui des Membres dont le pro- -gramme auroit été préféré , feroit obligé de faireun Mé- moire détaillé fur la matiere qu'il renfermoit ; matiere qu'il devoit être cenfé pofléder à fond , & dont la dif- cuffion pourroit faciliter l’examen des Mémoires qui feroient préfentés au concours. Mais cette regle n'ayant ci RENE VAE point été adoptée formellement, ne.fut point obfervée dans la fuite, & l’on s'eft toujours tenu à l'ancienne pratique, qui eft de faire circuler les Mémoires par- mi les Membres de la claffe refpe“ive, & d’afleoir le jugement de l’Académie fur les meilleures raifons ti- rées de tous les rapports en général, ce qui n’exclud point le draït awon a d'attendre de l’Auteur de la queftion préférée un plus grand détail & un rapport plus étendu. 3 SÉEANCE Du 30 JANvIER 1775. T.7in. Deux mémoires de Mr le Doëteur Godart fur les #°:P-599> couleurs accidentelles. AN. B. Imprimés dans le Journal Juin 1776, à 2e de Mr l'Abbé Rozier. eg j SÉANCE. I, Juil 1776. Du 3 Mars 1775. Mémoire de Mr l'Abbé Necdham für la profondeur qu'il convient de donner aux canaux navigables, relari- vement à la charge des bateaux qui les parcourent & à la quantité de leur enfoncement. N.B, Renvoyé au fecond Volume, Indication fur les Gloflopetres, par Mr l'Abbé de Wi- cry. NV. B, Renvoyé au fecond Volume. DÉS SÉANCES. ser SÉANCE Diu ÿ'AVRIE 17975. … Mémoire de Dom Mann fur les moyens d'augmen- ter la population & de perfeétionner Ia culture dans les Pays-Bas Autrichiens. NN. B. Renvoyé de même que les précédens. SÉANCE Du 3 Mar 1775. Mr V'Abbé Ne hu ayant fait remarquer dans la Séance précédente que l’année de fa direétion étoit ex- pirée, on procéda en celle-ci à l’éle&ion d’un nou- veau Directeur. Tous les fuffrages fe réuniflant en fa- veur du même Académicien, la direction lui fut con- fiée de nouveau. Mr Des Roches lut la premiere partie d’une Di/fer- tation fur la Langue Belgique ancienne & du moyen âge, L'Académie en rendra compte dans la fuite; Auteur fe propofant d'achever cette Diflertation, qu’il n’a in- terrompue que pour travailler fur des matieres moins feches & plus intéreflantes. On lut encore un Mémoire de Dom Mann fur les principes qui fervent à déterminer la quantité de la preffion latérale des fluides, & autres corps qui gravitent comme fluides, tels que les fables, les terres nouvellement remuées, Gc. N.B. Réfervé pour le fecond Volume. æcy TJTOURNAE ss SÉANCES Du 6 SEPTEMBRE ET 11 OCTOBRE 177$: Le principal objet de ces deux Séances étoit l’exa= men des Mémoires préfentés au concours annuel. On difcüta les rapports des Commifläires, dont on verra le réfultat dans la Séance fuivante. SÉANCE Du 14 OcToBre 1775. L'Académie avoit demandé la defcription des mo- numens Romains qui exiftent dans les Pays-Bas Autri- chiens & François, ainfi qu'au pays de Liege. Les rap- ports peu favorables des Commiflaires lui ôterent toute efpérance de pouvoir diftribuer les prix ordinaires. L’Auteur d’un Mémoire François avoit traité au long des antiquités de Bavay, mais cette partie avoit déja paru dans le Journal Encyclopédique; quelques au- tres defcriptions fuperficielles ajoutées à cet Ouvrage, n'éroient point aflez intéreflantes , & il y avoittrop d’o- miffions pour le pouvoir couronner. Un autre concur- ent avoit décrit avec foin les monumens anciens des Pays-Bas Hollandois, fur lefquels l'Académie n’avoit point demandé des éclairciflemens, & avoit négligé LE plus grande partie. de ceux qui exiftent dans les Pro- ï vinces PÉUDLESUS ÉAUN CE &. æevij vinces défignées dans le programme. Le refte des Mé- moires ne méritoit aucune attention. Ainfi avec la meil- leure volonté du monde, & malgré les inftances de quelques Membres , qui vouloient que pour ne pas dé- courager les Auteurs on usät d’indulgence , l’Académie entraînée par la pluralité des fuffrages , fe vit forcée de refufer ja palme, & d’abandonner la queftion; en fe contentant de diftinguer honorablement dans les fuil- les publiques les deux Mémoires qw’elle eût voulu cou- ronner : l’un portoit pour devife ces mots Flamands : Zeert Rechtveerdigheyd en geen Godtheyd te veragten ; autre étoic fans devife. L'Académie en ufa de même à l’égard des Auteurs qui avoient concouru pour le prix de Phyfique promis au meilleur Mémoire fur l'amélioration de la laine des moutons. Ses vues n'étant point fatisfaites , elle n’en couronna aucun ; en faifant toutefois mention honorable d’un Mémoire Latin fous l’Epigraphe füuperat pars altera curæ , ainfi que d’un Mémoire Francois diftingué par celle ci : Non tibi fed Domino. Outre ces deux prix vacans, il en reftoit un troifie- me à la claffe hiftorique depuis l’an 1774. D'ailleurs on venoit de prendre la réfolution de publier les pro- grammes deux ans d'avance ; par conféquent l’Acadé- mie n’avoit pas moins de fept queftions à publier : elle les annonça de la maniere fuivante. Tome I. nl œcytiÿ J Ô DRNAE Pour l'année 1776, Premiere Queftion d'Hifloire. :5 De al does écrit » s’eft-on fervi dans les Provinces Belgiques, depuis le > feptième jufques vers le commencement du treizieme » fiecle; & ‘quelles éroïent en ce ‘temps-là:les formes de # Ja Juftice? à Seconde. » Dans quel temps depuis le commence- » ment de la Domination dès Frances jufqu’à la naïffan- ‘» ce de Charles-Quint peut-on dire, que État de la » Belgique ait été le plus floriffant, les mœurs publi- » ques les plus faines, & le peuple le plus heureux ? Queftion de Phyfique. » Quels feroient les moyens de'perfeétiônner dans-les Provinces Belgiques la laine “» des moutons? C'étoit ba méme qu’on ‘avoit propofée 5 l'année précédente. Potir l'Année 1777> ‘Premiere Queflion d'Hifloire. » Quels étoient les droits » & les prérogatives du Duc de-Lothier ou de la Bafle -» Lorraine du temps de Godefroi le Barbu, c’eft-à- 5'dire, au commencement du douzieme fiecle? En quoi »-confiftoïent les pofleffions allodiales de ce Prince, ÿ'& celles qi’il acquit en vertu de fon invefliture ? Seconde. -» Quel'étoit l'État des Manufa@ures & du » Commerce au Pays-Bas. -péndant le :treizieme & le » quatorzieme fiecle ? DES SÉANCES. Mae Premiere Queftion de Phyfique. » L'emploi des » Bœufs dans nos Provinces, tant pour l’agriculture » que pour le tranfport des marchandifes fur les canaux, » &c. ne feroit-il pas préférable, tout confidéré, à ce- _» lui des chevaux dont on fe fert généralement ? Seconde. » Indiquer les meilleurs moyens de culti- » ver & de perfectionner les terres trop humides, ma- » récageufes & fouvent inondées, qui fe trouvent en » différentes parties de nos Provinces & particuliére- » ment en Flandre. SÉANCE"" D'utrl DÉCEMBRE 1775. . Celle de Novembre ne put avoir lieu, à caufe de labfence du Sécretaire perpétuel ; qu'une commiffion du Gouvernement retenoit en d’autres Villes. Dans celle dant il s'agit, on s’occupa de quelques pieces préfen- tées à l’Académie par des favans étrangers & de quel- ques difpofirions relatives à fon état intérieur. On y lut un Mémoire de Dom Mann fur la Nature du Sol, de l'Atmofphère & du climat de la Flandre maritime, des Phénomènes météorologiques qui y-regnent, © de l'influen. ce de toutes ces chofes fur le génie, le tempérament € la fanté des habitans & des animaux de ces Répions. Enfin à-cette lecture fuccéda celle que fit Mr de Marci de fon Mémoire fur Putilité des engrais artificiels ; avec Panalyfe des cendres de Hollande, des terres à fro- n i] € TJOURNAE s ment , des marnes & de la chaux confidérée comme en grais. NB. L'une & lautre Piece trouveront place au Volume fuivant. : SÉANCE Du 18 Janvier 1776. Mr de Nelis s’étant propofé de préfenter à l’Acadé- mie une fuite de recherches fur différens points, de lHi£ toire Belgique, fit la leture du premier de ces Mémoi- res, dont le fujet étoit les différentes époques des défri- aan des terres. NB, Réfervé pour le Volume fuivant. S ÉRAINIC,E Du 7 FÉVRIER 1776. Mémoire de Dom Mann fur les difflérens moyens de fe garantir des funeftes effets de la foudre dans les orages. NB. Renvoyé au fecond Volume. LG FL ALNÈCÉE Du 6 Mans 1776. Mémoire de Dom Mann für la congélation de l'eau Re Page Je mer , déduit d'une fuite d'expériences faites Jur ce fujer. Obfervations & remarques fur le froid de l’hyver pré- fent ( 1776) par Mr l'Abbé Chevalier. NB. I en fera parlé dans la fuite, DES SÉANCES. SERANCE | €} Du 2 Avrir 1776. * Mr le Préfident informa l’Académie d’une siouvelle difpofition de S. M. au fujet de ce corps. Mr Gerard, Sécretaire perpétuel venoit d’être nommé Auditeur de la Chambre des Comptes au département des Archives. Les devoirs de ce nouvel emploi, joints à ceux d’une commiflion importante &c de longue durée , dont le Gouvernement l’avoit chargé, ne pouvoient guère lui permettre de continuer les fonétions attachées au pofte de Sécretaire, fur-tout dans les circonftances préfentes, où il s’agifloit de foigner l'Edition des Mémoires Aca- démiques qu'on avoit réfolu de ne plus différer. La dé- miffion de Mr Gerard fut fuivie de la nomination de Mr des Roches, qui tint le regître pour la premiere fois à la Séance fuivante. Deux Mémoires avoient été préfentés à celle-ci, l’un de Dom Mann, dans lequel on examine, les effets & les phénomenes produits en verfant différentes fortes d'huiles fur Les eaux, ou tranquilles ou en mouvement , d'après une Juite d'expériences faites à ce fujet (a), l’autre de Mr Du Rondeau fur les Druides & particuliérement fur les facrifices humains. En voici un extrait, EE (e) On en parlera au fecond Volume, Cÿ JOURNAL La férocité & une cruauté barbare font..fes prin- cipaux traits fous lefquels les Hiftoriens Grecs & La- tins, du moins le plus grand nombre, nous retra- cent le tableau des Nations Gauloifes; comme fi ces . peuples euflent été altérés de fang & antropophages par goût & par principe d'inhumanité. On eft faifi d’hor- reur quand on lit ces triftes déclamations contre les facrifices humains des Gaulois ; opprobre dont les Romains eux - mêmes ne purent f laver, & qui eft configné dans les annales de leurs meilleurs Écrivains: Ce m'eft pas que Mr Du Rondeau veuille juftifier les Gaulois par cette jufte récrimination. Il va plus loin. Il prouve que la cruauté, tant reprochée à cette Nation, n'appartenoït qu'aux feuls Druides, qui abu- foïent fans pudeur de la crédulité de leurs concitoyens, dont l'honnéteté & les autres vertus fociales ont mé- rité plus d’une fois les éloges de leurs vainqueurs, Ici l’Auteur fait voir jufqu'où alloit l'autorité-excef- five des Druides, l'influence qu'ils avoient fur les gran des affaires, & lès reflorts qu'ils faifoient jouer pour établir leur pouvoir : puis paflänt aux facrifices, il air une réflexion qui démontre la fourberie des Ses teurs, & combien peu ils étoient perfuadés de la né. cet des victimes hurnaïnes, qu'ils ne cefloient d'in. culquer aux autres, » Voyons, dit Mr Du Rondeau, » quelle étoit la clafle d'hammes qui fournifloit ces » victimes, lorfqu'on manquoit de malfaiteurs. Immo- DES SÉANCES. ai » Joit-on' des Druides? Il femble qu’ils devoient être » & plus perfuadés des maximes qu ils enfeignoient, & » plus difpofés àles pratiquer ; mais par une contradic- » tion, que nous n'avons garde d'attribuer à la négli- » gence des Auteurs contemporains, nous ne connoif- _» fons pas d'exemple qu'un Druide ait confenti à être » immolé, C’étoit donc le peuple qui portoit tout le fardeau de la fuperftition ; ces bonnes gens croyoient ferme- ment que ces facrifices étoient agréables à Ja Divinité, & qu’en courant ainfi à une mort volontaire, ils fai- foient un acte de religion, digne des plus grandes ré compenfes. Imbus de Popinion de la métempfycofe, ils f promettoient une exiftence plus heureufe & un état bien relevé au-deflus de celui qu'ils quittoient fans regret, & dans lequel ils n’avoient ceflé d’être la _proie des perfonnes puiflantes & la viétime d’un pou- voir arbitraire. Sur qui tombera donc l’accufation de cruauté dont on les noircit? Eft-ce fur le gros de la Nation? Point du tout, répond l’Auteur, elle n’étoit que crédule. Le blâme doit réjaillir fur fes Miniftres fanguinaires, qui regardoient le pauvre peuple com- me le jouet de leur politique abominable, & qui feuls ont fourni les traits éffrayans fous lefquels les anciens Auteurs ont dépeint les Nations Gauloifes. ciy TOURNAI SÉ AN CE DD v 20 Er 208 MANS 1776 Mr le Préfident ayant concu'le deflein d'enrichir fa Bibliochèque Royale des meilleurs Manufcrits de cel- le de feu Mr Verduflen, Membre de l’Académie, propofa à l’afflemblée l'examen du catalogue & la ré- daction d’un Mémoire à préfenter fur ce fujer au Mi- niftre Plénipotentiaire. Mrs de Nelis, Gerard & Des Roches furent chargés de cette commiffion. Le Prince de Starhemberg entra dans les vues de l'Académie, & chargea Mr Des Roches de f rendre à la vente. Les acquifitions qu'il y ft, ont été dépolées enfuite à la Bi- bliothèque Royale. ; Après divers arrangemens touchant la publication des Mémoires Académiques & la maniere d'examiner le travail des Académiciens, on pafla à la leéture dé quelques nouvelles produétions, préfentées fous les titres fuivans. Mémoire de Mr de Nelis fur la conftitution mu- nicipale & fur les privileges accordés aux Villes des Pays-Bas. Mémoire de Mr de Witry fur un poële plus propre à échauffer les appartemens. Mémoire de Mr de Beunie fur un morceau de bois pétrifié, trouvé dans les environs de Bruges. NB. Ré- Jervé tous trois pour le Volume fuivant. À SÉANCE DES SÉANCES. cv SÉANCE Du :r8 SerTemMnRE 1776. Les objets qui devoient occuper l’aflemblée n'ayant "pu être terminés qu’à la Séance d'Oétobre, à caufe de leur nombre & de leur importance, on en trouvera ‘Je réfulrat à celle-là. S É A N € E Du 14 OcToBReE 1776. . Mr le Préfident ouvrit cette Séance par la combi- naïfon des rapports qu’on avoit lus à la précédente fur les Mémoires qui difputoient les Prix. Deux Auteurs avoient très-bien traité la queftion fur le droit écrit & fur les formes de la Juftice dans les Provinces Belaï- ques : L'un dans un Mémoire Latin, fous la devife : Frmatur fenium juris prifcamque refumunt canitiem leges, &c. L'autre dans un Mémoire Flamand, qui portoit au Frontifpice ce vers: Hinc tibi Barbaries, illinc Ro- mania plaudit. On remarqua dans ce dernier un raï- fonnement folide & une vafte connoiïfflance de la Ju- rifprudence Belgique; mais ces avantages étoient ba- lancés par des omiffions confidérables, l’Auteur n ayant point parlé des loix Frifonnes , & par quelques inexac- titudes hiftoriques. Le premier étoit exempt de ces dé- fauts, & préfentoit toute lérudition de l'autre. Aiafi Tome I, 4 ei JOURNAL. on décerna d’un commun accord la palme à, Mr le Profefleur Heylen, Auteur de cer Ouvrage. Le Mé- . moire Flamaud , compofé par Mr d'Hoop, Avocat au Confcil Provincial de Flandre, fut jugé très-digne d’un accefit. Il y avoit une feconde Queftion Hiftorique. » Dans >» quel temps, depuis la domination des Francs jufqu’à » la naiflance de Charles-Quint , peut-on dire, que l’E- » tat de Ja Beloique ait été le plus floriflant , les mœurs » publiquesles plus faines & le peuple Île plus heureux ? Oa décida que parmi les Mémoires préfentés fur ce fujet, il ny en avoit qu’un feul qui mérität attention; .Jes autres étant trop informes, pour pouvoir foutenir le parallele. Il étoir écrit en Flamand & portoit pour -devife ces paroles de Pline. ÆAutorem neminem unum /e- quar, fed ur quemque veriffimum in quaque parte arbi- crabor. Un tableau fidele, qui précédoit la folution, repréfentoit les principaux traits denotre Hiftoire, & expofoit l'État de nos Provinces dans tous les fiecles de la période prefcrite ; & ces traits n’éroient point telle- mentpris dans l'Hiftoire particuliere de la Flandre, qu'ils ne puflent convenir à l'État des autres Provinces. L’Au- teur accordoit la préférence au Règne de Philippe d’Au- triche , fentiment contraire à l'opinion commune, qui affigne celui de Philippe le Bon, comme l'État le plus floriffant & l’époque du bonheur des Peuples; mais on obferva que ce fentiment nouveau ne pouvoit nuire au DES SÉANCES. cp: fuccts du Mémoire, l’Auteur ayant affez bien prouvé ce qu'il avance. Les bonnes loix, difoit-on, ajoutent certainement au bonheur des Nations ; mais s’il s’en trouve de pareilles fous Philippe le Bon, ce qu’on ne peut nier, on en voit un bien plus grand nombre, & des plus falutaires, fous Philippe d'Autriche, Un puif: fant commerce eft aflurément une fource d’opulence pour l'État ; mais où eft l'homme qui osât foutenir que le commerce ait été plus grand & mieux entendu fous le premier que fous le fecond Philippe? On envifagea : enfuite cette produdion du côté du ftyle; & on remar- qua avec plaifir que les phrafes étoient mieux tournées, les périodes plus fonores, & les expreffions plus juftes, qu’elles ne font d’ordinaire dans les écrits compofés en ces Provinces. Ainfi l’Académie fe détermina fans peine à couronner l’Auteur, qui étoit Mr Pluvier. Elle ré- folut même de faire traduire ce Mémoire en François, & chargea de cet SES le Sécretaire perpétuel. |” Cette affaire terminée, on remit fur le tapis la com- paraifon des Mémoires Phyfiques, fur les moyens de ‘perftionner la laine des moutons, Un de ces Mémoi- res , écrit en François & diftingué par cette devife : Les hommes fe font trop écartés de la Nature , avoit une {üpériorité réelle fur les autres par les réflexions fen- es & les vues utiles qu'il offroit. On adjugea la pal- me à Mr Foullé, Auteur de cette Piece; & Pacceffir o evig TOM RINATLS au Révérend Pere Norton. On convint auff de publier les programmes fuivans pour l'année 2778 Queftion d'Hifloire. | à » Donner un précis des principales expéditions où | » émigrations des Belges dans les Pays lointains, de- > puis le temps les plus reculés, jufques & compris ce- » lui des croifades. Examiner quelle a été l'influence » de ces expéditions fur les mœurs & fur le caradtere » national. | Queftion de Phyfique, » Décrire la température la plus ordinaire des faifons » aux Pays-Bas, & en indiquer les influences, tant » fur l’économie animale que végétale, marquer les fui- » tes ficheufes que peuvent avoir des changemens no- » tables dans cette température, avec les moyens, s'il »y ena, d'y obvier. Ke Reftoit à remplir quelques places d’Académiciens étrangers & regnicoles. Dans limpoffibilité de fatisfaire_. à l’empreflement de tant de perfonnes de mérite qui s’é- toient mifes au rang des poftulans, prefque toutes les places étant remplies, l'Académie fut obligée de fe bor- ner dans fon choix. Meffieurs Moreau & de la Lande, & Dom Berthod, Bénédiétin, furent élus Membres étrangers : Mr le Comte de Fraula, Meffieurs de Lau- nay & Bournons, Membres regnicoles. La Séançe DES SÉANCES be avoit! été longue ; il ne reftoit plus de temps pour la Jeéture des Mémoires nouvellement compofés. On lut . cependant la découverte de Dom Mann fur les loix de . la projettion & de la defcente des corps graves dans les fluides en mouvement uniforme ou oppofé, & fur celles de la rencontre des courans, Ouvrage dont on parlera dans la fuite; & l’on termina la Séance par la lecture d’une note de Mr de Witry, fur la vertu magnétique reconnue dans des outils de Fontainiers. En voici la fubftance. Un Gentilhomme des environs de Lille en Flandre, ayant fait forer à une profondeur confidérable dans un terrein marneux, pour découvrir des fontaines , on s'apperçut qu'un des forets | compofée de feize verges de fer, mi- _ fes bout à bout , avoit acquis dans deux articulations une vertu magnétique, aflez forte pour attirer violem- ment une grofle clavette de fer à quelque diftance. La même opération ayant été répétée à l'Abbaye de Mar- quette, quelques parties des verges furent également aimantées, » Je fuis très-éloigné de croire, dit Mr de » Witry, comme on a fait dans ces cantons, que des » mines d’aimant ont communiqué leur force magné- » tique à ces forets. On fait de refte aujourd’hui la ma3 » niere de faire de fort bons aimans artificiels, fans lin- » tervention des aimans naturels, par le fimple frotte- » ment en certains fens : ce qui a induit en erreur, c’eft » que la terre paroïfloit noirätre. Quelqu'un en ayant » fait l'analyfe chymique, n’y a trouvé que de la ma- El LU 4 ex PO TRI A EX » ticre terreufe , ainfi qu’un -peu de fer & de fouffre. » Il eut fufñ de voir fi cette terre attiroit la limaille de » fer, ce qu'elle ne fait nullement. SÉANCE Du 6 NovEeMBxes 1776. On avoit fouvent remarqué à quel point il feroit utile de tenir ,outre les Séances ordinaires, tous les mois une affmblée particuliere, du moins des Membres réfidens : Bruxelles. Le nombre de ces derniers augmenté con- fidérablement & la nouvelle vigueur qui fe répandoit de jour en jour dans tout le corps, ne permettoit plus de différer la tenue de ces fortes d’aflemblées, dans lef- quelles on pouvoit examiner les Mémoires, & prépa= rer les matieres qui f doivent traiter dans les Séances générales. Auffi dès que la propoñition fût faite , tous les Membres Pappuyerent. D’un commun accord elle paf en regle, & la premiere aflémblée de cette efpece a été tenue le 20 du mois fous la préfidence de Mr le Direteur. L'examen de la traduétion du Mémoire de Mr Plu- vier, les mefures à prendre pour l’impreffion des Ou. vrages couronnés, & plufieurs lettres des correfpon- dans occuperent tout le refte de la Séance; fans qu'il fût poffible de pañlèr à la lecture des nouvelles pro- ductions des Académiciens. DES SÉANCES. | « PARIS PE ANNUC E Du 20 NovEMBRE 1776. Mémoire de Dom Mann, fur l'Hiftoire Naturelle de la Mer du Nord, & fur la pêche qu'on y fait. Mémoire de Mr du Rondeau fur les caufes de la décadence du Royaume de Lothier. NB. C’eft une pre- miere partie qui n’expofe que la diminution du domaine Royal d’Auftrafie, jufqu’au temps que le Royaume de Lothier en füt démembré. L'Aureur fe propofant de continuer cet Ouvrage, on aura occafion d’en faire part au Public dans un autre Volume, ainfi que du Mémoire de Dom Mann. ; sh tee SEANCE Du 4 DÉCEMBRE 1776. On lut dans cette Séance le Mémoire de Mr des Roches qui a pour titre Explication d’un paflage difficile qui fe trouve dans une des lettres de la Colleétion de cel. V. page les de St. Boniface , avec des réflexions Jur l'ancienne Poé. 499: fie des Peuples Belgiques. OBSER VATIONS ASTRONOMIQUES,.. FAITES AUX PAYS-BAS AUTRICHIENS EN 1779 ET 1779, PAR M PIGOTT, Gentilhomme Anglois, de la Société Royale de Londres, & Affocié Etranger des Académies de Caen & de Bruxelles. (Tome 1I- : 4 AVANT-PROPOS. Le goût aujourd’hi, fi généralement répandu pour les Sciences & les Beaux:- Arts, femble particuliére- ment fe manifefter par le nombre d’Obfervatoires que chaque Nation s’emprefle d'élever. On à fenti l'utilité de l’Aftronomie, cette Science {u- blime, à l’aide de laquelle l’homme étonné ofe fran- -chir l’immenfité des mers d’un Pôle à l’autre, & tran- quille dans un frêle navire, fait éviter les écueils qui l'environnent. Mais, fi le Marin en retire des avan- tages auf précieux, l'homme étant {ur terre ne fauroit fe pañler du fecours que lui prête cette Science: ce n’eft. que par fon moyen qu'il peut décider fà pofition fur le Globe; & toutes Cartes géographiques, de quelque maniere qu’elles foient faites, doivent néceflairement l'être en conféquence d’un ou de plufeurs points dé-. terminés par des Obfervations Aftronomiques. (*) Ces confidérations ont engagé prefque toutes les Puif- fances à encourager cette Science utile; l’Angleterre far-tout l’a fait par des libéralités dignes d’une grande Nation. Ce zele a produit chez les Angloïis des découvertes, qui feront la gloire de ce fecle : celles de lP'Abberra- tion & de la Nutation des Etoiles fixes : l'invention des Lunettes Achromatiques; la perfe&tion des Horloges, = [*] Elles fonc uftées encore pour la vérification des Cartes conf. - æruîtes fur des mefures géodéfiques : l'exactitude des Angles pris & des Bâfes mefurées fur le rerrein fe manifeftera par la comparaifon des diftances des lieux, déduites de l’une & de l'autre méthode. a i} 15. AVANT-PROPOS. ii portée 4 ut point étonnant; une précifion ineroyable dans la divifion des Inftrumens, font de nos jours lé fruit de l’érilation fâgèrnent encouragée. La France de fon côté a envoyé plus d’une fois des vaifleaux faire l’eflai de fes Moñtres marines, & on les a vus voyager jüufques dans le nouveau Monde, pour éprouver la bonté des machines inventées par d’ha- biles Artiftes de Paris. LA: OUUR Se Les particuliers des deux Nations n’ont pas été moins empreflés de marcher dans la carriere des Sciences. Les Mémoires de l'Académie de Paris, & les Tranfactions Philofophiques de Londres fourniflent chaque année d'ex- cellentes Obfervations Aftronomiques, faites. dans des Obfervatoires élevés à leurs frais, par des perfonnes d’une fortune & d’une naïfflance diftinguées. Il étoit ré fervé à notre fiecle d'effacer la mémoire de ces temps ineptés , où un Géntilhomme fé piquoit abfurde- ment d’être ignorant, Mais tandis qu'en Allemagne, en France, en Angletérre on mulriplioit les Obfervations Aftronomiques, elles avoient été abfolument négligées _ dans les Pays-Bas, où jufqu’à préfent il ne s’eft pas en- côre élevé un feul Obfervatoire. # rai Par une fuîte de ce qu’on vient de dire, on ne doit pas être étonné de trouver peu d’accord entre les Géo- graphes qui ont conftruit des Cartes des Pays-Bas Au- trichiens : féceflairèment incertains fur les vraies pofi- tions des lieux, ils ont été obligés de prendre pour gui- des les Géopraphes qui les avoient précédés; ou bien ils ont tâché de corriger les erreurs de leurs dévanciers, par des conjectures fouvent plus erronées encore. Un coup d'œil jêtté fur différentes Cartes modernes & efti- méès fuffira pour juftifier ce qu'on vient dé dire, & en les comparant on vérra, avec furprife, qu'il y a telle ville déplacée de 5, de ro, de 15 lieues & même da- AVANT-PROPOS. r vañtage de fa véritable fituation : il feroit auf inutile que défagréable d'entrer dans un plus grand détail à cet égard, D'après ces confidérations, on defiroit que les Cartes dés Pays-Bas Autrichiens fuffent rectifiées. Vers le com- mencement dé 1772 on me le fit fentir ; je me prétai bien volontiers à un travail, dont j'avois lieu de croire qu’on me fauroit gré, & d’ailleurs j’étois trop fenfble au plai- fir d’être utile, pour m’y refufer. J'aurois defiré me mettre en route dès le mois d'A. vril, Jupiter commencoit à s'éloigner du Soleil, & j'auroïs pu dès-lors obferver quelques Immerfions de Satellites dans fon ombre; mais des affaires indifpen- fables m’obligeoient de pañler en Angleterre, & je n'ai pu commencer mes opérations qu'au mois de Seprem= bre. Mon fils, exercé depuis quatre ans à obferver les Satellites de Jupiter , ‘devoit n’accompagner; & les Af tronomes favent combien des Obfervations faites de concèrt par deux perfonnes, font préférables à celles d'un feul Obfervateur , quelque bonnes qu'elles paroif- fent d’ailleurs. : | AU M. Needham, de la Société Royale de Londres & Direéteur de l’Académie Impériale des Sciences à Bruxelles, s’offrit de faire ce voyage avec nous; je pouvois tout efpérer de ce favant Académicien, & je ui dois la juftice d’avouer que jai profité en mille occafions de fes lumieres. Nous portions avec nous deux Baromêtres d’une conftruttion nouvelle, faits par Ramfden à Londres, très-propres à mefurer des hauteurs, & d’une telle pré- cifion, que nous pouvions conftater jufqu’à = d’un us d’élévarion du vif argent dans le tube. M, Needham a pris fur lui de rendre compte de ce quia été fait à cet égard; il le fera avec d'autant plus d’em- VI. AVANT-PROPOS. preflement qu'il juge , d’après des Ingénieurs entendus, . que ces Inftrumens pourront devenir très-utiles à l'Art : militaire. D: Nous ne reftâmes que peu de jours à Namur, parce que la faifon pour l’obfervation des Satellites étoit déja avancée, & que je defirois d’être à Luxembourg, ville la plus orientale, auffi-bien que la plus méridionale de celles où j'avois defléin d’obferver : en conféquence, je crus y devoir féjourner aflez long-temps, afin de m’af- furer exa@tement de fa pofition, par un nombre fuffi- fant d'Obfervations; auff je penfe qu’il y a peu de villes dont la Laritude & la Longitude foient mieux déter- minées. Des raifons femblables m'ont décidé à multiplier mes Obfervations à la Heefe, proche d'Hoogftraten ; ce Bourg étant le lieu le plus feptentrional de ceux où je me propofois d'aller. >} Nous arrivâmes le quatre Décembre à Oftende, mais la pluie ou des nuages continuels m’empêcherent d’ob- ferver jufqu’au dix-neuf. À Tournay le temps fut plus contraire encore. De- puis le 26 Décembre, jour de notre arrivée, je ne pus faire une feule Obfervation jufqu’au 10 Janvier ; je pro- fitai, ce jour-là & les fuivans, du beau temps pour prendre des hauteurs méridiennes du Soleil & des étoi- les, d’où j'en ai conclu la Latitude; mais il me fut impoffible de voir une feule Emerfion des Satellites; je ne pus même prendre des hauteurs correfpondantes pour tracer une Méridienne & pour déterminer la dé- clinaifon de l’Aiguille aimantée. J'aurois defiré d’obferver des Occultations des Etoi- les par la Lune, mais le Ciel étoit couvert, lorfque l’oc- cafion s’en préfentoit, ou bien nous étions en route. II me reftoit donc à déterminer les Longitudes par les - AVANT-PROPOS. IP A 4 Emerfions des Satellites de Jupiter; mais comme tous les endroits d’où j’obfervois font à lorient de Paris, javois à craindre que ces Emerfions feules ne donnaflent une différence des Méridiens un peu trop grande; l’ob- fervation. de l'Eclipfe de la Lune du 11 Oétobre a levé tout doute là-deflus, & na donné un réfultat plus d’ac- cord .que je n’aurois ofé l’efpérer ; fruit fans doute de la bonté de mes inftrumens & des attentions les plus fcrupuleufes de ma part. He Comme je ne fuis pas dans le cas de pouvoir prendre un milieu entre un nombre égal des Immerfions & des Emerfions du premier Satellite, méthode la meilleure & la plus ufitée dans les Obfervations fixes, j'ai fondu toutes mes Obfervations enfemble, & quoique de cel. les faites à la Heefe, une paroïfle S’écarter des autres, je n’ai pas voulu la rejetter : fi on juge à propos de le faire , la différence des Méridiens entre Paris & Hoog- ftraten fe trouvera moindre de fept fecondes que je ne l’ai donnée. : 11 me refte à parler de la vérification du quart de cer- cle avec lequel les hauteurs Méridiennes ont été prifes : la Société Royale de Londres m'a confié cet inftru- ment; c’eft le même qu’elle envoya en Amérique pour le dernier paflage de Vénus : il eft de la conftruétion de Bird, un des plus habiles Artiftes d'Angleterre ; le mien, d’un pied & demi de rayon, m'a fervi en mé- me temps pour prendre des hauteurs correfpondantes. La méthode ordinaire de vérifier ces inftrumens eft d’obferver des Etoiles au Méridien proche du Zénith, les tournant tantôt du côté du Nord, tantôt du côté du Midi, & cette vérification eft fort bonne en elle- même, mais fi incommode, lorfqu'on n’eft pas fixé dans un lieu, qu'elle n’eft guères praticable. La mé- thode fuivante eft facile & peut fe pratiquer commodé- VIII AVANT-PROPOS. ; ment prefque par-tout : comme elle eft peu connue, je vais la décrire dans l’efpérance qu’elle pourra de- venir utile à ceux qui plus tard feront peut-être des Ob- {rvations Aftronomiques dans ces pays-ci : elle elt de M. Maskelyne , Chef de lPObfervatoire Royal d'An- gleterre à Greenwich. Il faut mefurer exactement la diftance du centre de la lunette du quart de cercle dans fà pofition droite, & : puis dans une pofition renverfée : fur une planche à fond blanc tirez deux lignes noires bien paralleles, éloi- gnées de la diftance fufdite ; & puis à cent ou deux cens pas, plus ou moins, placez cette planche bien vertica- lement au plan de l’horifon; trouvez enfuite la diftance du Zénith de la marque inférieure : fi la fomme de ces deux diftances au Zénith fait exaétement 189° l'erreur eft nulle. Si la fomme fait plus ou moins, la moitié de la différence fera ce qu’il faudra fouftraire dans le pre- mier cas; ou ajouter , dans le fecond, à toutes les diftan- ces au Zénith obfervé. On en pourra voir le détail dans les Obfervations fuivantes. Si mon féjour dans ce pays-ci le permet, & fi on paroît le defirer, je communiquerai plus tard les Ob- fervations que j'ai deflein de faire, pour déterminer les pofitions de Bruxelles, de Louvain & de Malines. DBSERVATIONS DS PRO. N O0 M 1 O UXE S. FAI TES AUX PAYS-BAS po En 1772 SR—— SORT 7 De HAUTEURS correfpondantes du Soleil & des Etoiles, &c. Pafise au . , méridien ‘par 1772 A A l'horloge non Bord du So- M les Hauteurs. ; corrigée du |leil ou Étoile OIS. l'Orient. |. l’Occidenticentre du de obfervée. ï k leil, ou de l’é- L ‘ toile. . ; A [Heu 7 o D Heu. P 16 Heu 1 M Mémento |] O2 0 5 9. . - 25° - . . - 5 i . = K oùt 30. | 8. 24. 100 RIM OISE 15-0232 25, Oo. |11. 53: 20, 5. rieur du foleil. || 8. 27: 46,,.0:1| .0 30: 45. 15. 19-554 O0. |[nr. 53: 501, 5: : | en [Par un Milieu. . .. rt 3.512: É 7. A7. 13, ©. 24. O0. 15. 47. 5,0. |11. 47. 0,0. k 7: 50. 34, 0. 24. 30. + |15..43.45, 0. | 11.47% 0,5: s Sept. S-..) 753-6320)" 25: 001115. 40/2640. |11, 47. 9,0: |, Bord fupé- |} 7Z- 57- 18, O: 25. 30: 15. 36.50,0. |11.47. 8,5. [rieur dufoleil. |à 8. 39. 32, 0. 31-130: 14. 54: 42;, O. | LI. 47. 17, 0: ; à Fr «|. 8° 41. 24, o. 37. 45. M /|14. 52. 52°, ©. | 11. 47. (8, 0: 3 ï 8: 43. 18, O. 32. 00. 14. 50, 58, 0. | 17, 4. 8, 0! Ë * é Par un Milieu... ..lrr. 47. 8, 4 Nora fup. du foleil À L | 8. 22. 44,0 1 22. FE RATES M dure : . . . 5. . CR RC U + … … =. |ges; pour deéduirt à : eo das tet HU pret RAT Ie NL LIRE MINE Sérurener era # 12 dito. & 29. 35 , ©. 15. tte ai Er tetl AMREr PS FTIsoUss Sun F ‘330850. LOS STI LORS 2) LR po EAN Ce AN EUA PANIERS AUS = 8: 36: 39 ; ©. - 27° 15. def Se a à APR: (COM EN + HEees L : Hair raadamee | on ou lis 4 igo. lorgagse Le 0 |) 19 dito. | # 23: 24,0. | | 25, 0 |15.41.33,0. | o 228,5. | Bord fupé- |} rte less 8. 26.57,0. | -- 25. 30. 15. 38. 3,0. | ©. 2.30,0. [rieur dufoleil. |k 8: 30.23, O: .26. 00: 15. 34:30, 0. | ©. 2.20, 5. k Par un Milieu .....|o. 2.29,4. fi i 2 O BIS'E R VAT 1°0 17702 x He e Hauteurs. ; Mois. | l'Orient. l'Occident Heu, / !/! o ! Heu. ? {l 22. 44, ©. 23. 45. CR Er 8. 35. 12,0. 25. 30. 15. 18. 51 , O. HET NIO; 255. HE VAUBE CE Sept. 19. 8 8 8: 40.42, ©. 26. 15. 15. 13.24, ©. # 42.33, 0. 26: 30. 15. II, 30, O. 8 : 44: 24, 0. 26. 45. 15. 9:41, 0 . 46. 15, ©. 27. O0. 15. 7.48, 0. 28.13, O. 245. 15. 20. 34, O. AAC: 24. 45. 15. 17. OO, O. 38-830 0; 25. OO. 15. 15. 12, O. 21 dito. LORL ES CHE ÇoCS [25] = Par un Milieu .....! 8.32.10,0. | 21.15. |ig. 29.48,0. 8. 34. 18,5. 21 30. 14. 27. 40, 5. x 8. 36. 26, 5. 21. 45- 14. 25. 34, O. 1x dito. | 8. 38:32,5. 22. OO. I4- 23. 20, O. 8. 40. 40,5 22. 15 14. 21. 22, O. 8. 42. 43, 5. 22. 30. 14. 19. 16,0. 8. 44.55, 5: 22. 45. |14: 17. 4,5. 9: 51.47, 0. 29. 15. 13. 10. 18 , ©. 9. 55. 3,0: 29. 30. 115: 6.55, o. A'Pécun Milieu 0" ® | 9. 58. 8,5. 27. 30: 12. 46. 23, ©. 7 10 2-00: 27. 45. 12. 42. 21 , 5. 0) dito. 10. 6. 19, Fe 28. C0. 12. 38. 13 : oO: IO. IO. 45 , O. 28. 15. 12.33. 40, On 10. 15. 15,5. 28. 30. 12. 29. 12, O. Par un Milieu... . 38.50, 0. 26. oo. 15. 15.15 ,0., Par un Milieu ...... 35. 26, ©. 25. 15. ne Ms 2200; 37: 16,, ©. 25. 30. 15: 11. 30,0: Par un Milieu .. . 8. O.12,0. TP 0. 14. 85.20, 0. 8. II. 9,0. 18. 45. 14. 53.28, O. 813.085 19. 00. 14. 51-1330 5. Oo. ro. | 5: 16-56,0 19. 30. 14. 47: 38 , 5. 8. 18.49, 5 19. 45 14. 45-44: , 0 8 20.47,5 20: O0. 14. 43: 47,0 8. 22.45,5 20. 15. 14- 41. 46,0 8. 24.44, 5. 20. 30: 14- 39-49 , 5: NS Paflage au méridien par| l'horlose non| Bord du So- corrigée du |leil ou Étoile centre du fo-|obfervée. leil , ou de l’é- toile. HR EAU à ES TE 72 s 5- | . Bord fupé- 11.57. 2,5. |rieur du foleil. HO TANE ICE 11.57. 1,5 DORA ENG) HONTE 11. 54: 23 , 5. Bord fupé- 11.54.23, ë rieur du foleil. x s Bord fupé- 11-32. 16, 7. rieur du foleil. 11.31. O, 8.— Bord fupé- 11.31. 1, 7-+ rieur du foleil. 11.30. 50 ; 7. 11-31. O,O.+ 13e 2515: FF. 30. 59 ,-O. He. 0,2: IF.22. 15 , 8.— 11.22.14 57: Bord fupé- 11.22. 10; 3:—|rieur du foleil. 11.22. 12, à. 11.22.13, 8.— Re 11.22. 14, 6.+ ASTRONOMIQUES > EE Paflage au 1772: méridien par À A horloge non! Bord du So- Mors. tr Hauteurs. : à | corrigée du |leil} ou Étoile È l'Orient. l'Occident centre du D obfervée. k €e1l, ou de l’é- toile. Heu. ? 1 Ï o 11! Heu. ! (! Heu. { 11 PE nr O. 19. 14, O. 24. 15. 13. 23- 11 ,O. |11.21.12, 5. OM22M0UTS. 24. 30. 13: 20.22, 0. |HI.21.12, 25. Bord fupé- Octo. 20. 9. 24. 56, o. 24. 45. 13- 17. 28 : O. II.21.12, oo. rieur du oeil, 0. 27-50, 5. 25. O0, 13+ 1430, 5. |TI.21.13, 5. 0 ISO S, 1 MRS NS: LINGE Ses STE RTE A TR Par un Milieu ..... 11.21.12, 55. 9 13.32, 0 23. 30. 13. 26.52,0. |r1.20.12, oO. di 9. 10. 13, 5. 23. 45. 13. 24. 10, 5. |II.20.F2, ©. 21 ditO. | 9. 19. 4,5. 24. CO. 13. 21.106,53: |II.20.10, 5. Bord fupé- 9. 22.-1,0 24. 15. 13. 18.24, 5. |I1.20.12,75. |rieur du foleil. 9. 24.56, 5 24. 30. 13- 15.27; 0. | 11.20.11, 75. 9: 27.58 , O 24. 45. 13- 12: 26,5. |11.20.12, 25. , Par un Milieu ..... |rr.zourr, 85. ‘ D SONA: 12. 15. 15-011. 58, 0: St D 5. 7 |:9- 32-42,0. 12. 30. 15.- 9.31,0. | 0-21. 9, 5: Bord fupé- . a. | 9: 37-46, 0. 13. O0. I5. 4.30,0. | ©.21°8, Oo. |; re Nov 9 # e 1 “ re ei col OI. 7, 5. rieur du foleit. 9. 42. 48,0. 13. 30. 14. 59. 26,5. | O.21. 7, 25. Par un Milieu.....|oz21.7,35. | Je II. 3.41,0. 19. 00. 13. 42.10, 5. | O.22.55, 75. Bord fupé- 11 dito. HOME 32,0. 10. 15. 13. 25. 13, 5. 0.22.52, 75. rieur du foleil, II. 13.48, 5. 19. 30. 13. 32. 1,0. | O.22.54, 75. Par un Milieu..... | 0:22.54, 42. 0 10. 33.38, 5. 16. 39. 14. 15.41 ,0. | O.24.30, 75. Bord fnpé- || 13 dito. |1o: 37 10 , 0. 16. 45. [é 12. 10 , O. 0.24.40, oo. |rieur du folei. | 10. 40.51 , 0. 17. CO. 14. 8.209,53. | O.24:40, 25. Par un Milieu..... | 0.2440.— 9. 3.22,0 7. 45. 15. 46.25, 0. | 0:2453, 5. | a 9. 5:36,0 c 00. |15. 44. 2 , 0. | 0.24.53, 5: 9: 7-51,0 . 15. 15. 41.50,0. | O.24.54, 5. Bord fupé- J fs 3 , k P 4 dito 9. 10. 5,0 8. 30 15. 39.45, 0. | 024.55, ©. |rieur du foleil. 9. 12. 18,0 8. 45.r 15. 37. 32,0. | O.24.55, O \ 9. 16.58,0 9. 15. 15. 32.51, O0. | O.24.54, 5 Par un Milieu..... 0.24.54, 23.7 4 ; méridien par 1772: À À l'horloge non| Bord du So- RE Hauteurs. ; Ë corrigée du |leil ou Étoile Mors. l'Orient. l'Occidentlcentre du fo-|obfervée. ' leil, ou de Vé- Ë .[toile. Heu. { {1 o { Heu. ! Heu./ Il 9- 41.51, 0- 10. 00. |15. 18. 41,0. | 0.30.16, o. 9. 44. VrS IO LS, F5. 16. 9,0. | 030.17, 75. 9. 47. 1, 5- IO. .30. 15. 13. 20, 5. | O.30.15, 50. Nov 20. | 0. 40.37,5. | 10. 43. 15. 10.57, 5. | 0.30.17, 50. Bord fupé- 11. 451,0. 16130: 13-55. 44, 5. || .0.30.17, 754 rieur du foleil. 11. 9-31, 0« | + 16. 45. 13. 81:55 5.103018, 254 ir. 14.230. |: 17.00. (13. 46.10,5. | 03046, 75. #u Par un Milieu ..... | o3017,07+ ; 0 5. 49.38, 0. 5. 00. 9 7. 17. ©: | 7.28.27, s. | Fomahaut.. 20 dito. | 3 4.26,0. ANS. | 9. 2.325. | 728.20, 23. |l'e. grandeur. 5 59: 10, 5: 5, 30. 8. 57-44,0. | 7.28:27,25. | Par un Milien..... | 72828, o. , 6. 33: 36, 0. 7. 00. 8.17. 3,5. | 7.2310,7s. | Fomahaut. 21 dito. 6. 42.31, 5. Cote | g- 8-8 Here a 1e. grandeur. Par un Milieu ...., | 72510, 88. Déc. » 20. 17. 45. 7.750. 16,0. | 6.30.38, 7.+ M 1] 23 | S 343130. |. 18. oo. | 7 44.45,5. | 630.38, 2.— 2'HE NB AnCEIE Par un Milieu... | 63038, 5 | © He 500 Ch 10. 30. 14. 26.18,0. | O.19. 7, 0. ; à ° 10,15. 14,0. || . : 10..45. 14-2300 o0M|NOI0 7 MO: Bord fupé- 24. dito. lo. 18. 38, 5: II. CO. 14. 10. 38; 5. | o.19. 8, 5. |rieur du foleil. 10-22-50: IT. 15... | 14. 16. To, ©. | ©.19: 7, 5. OBSERVATIONS Pafñage au Par un Milieu. . . | o1o 715. L’Horloge dont je me fuis fervi a été faite par le Sr Le Paute de Paris; elle eft conftruite fur les principes du Sr Hariflon de Londres, avec des verges alternativement de cui- vre & d'acier, pour obvier aux effets du chaud & du froid. SE a D ERIFICATION du Quart de Cercle re un ne ae de Rayon , avec lequel les Hauteurs Méridiennes ont ete prifes. Je plaçai à la diftance de 600 pieds deux raies noires, éloi- gnées l’une de l’autre de 11 5; de pouces, quantité exa@ement égale à celle du centre de la Lunette, lorfque l’Inftrument étoit | droit, puis renverfé. Diftance au Zénith de la marque fupé- rieure. °(T 1n0Y S À TOI bay S 9[2199 p J1enb ag *aJIa AUOT 2[21992p31en Milieu. Ci-deflus. / | o (ea 00: 3. 22, F} 2e: 22, za 22, 90. Marque ïin- férieur. 89. 52. 37, 901322, ee 55: 59» 3ime; “PI erquordac J101p F 919199 9pyrenb 97 9JIaAUOI 3121999p J1enb 977 Milieu. Ci-deflus SR Diftance au Zénith de la marque fupé- rieure. ou 90. 3-12,9: 14,9. 14,9. 11,0. IT ,9. 90: 3-13,3 © Marque in- férieure. 89.52.46, 4. 46,4: 51,4. 49 , 4- 49 ; 4- *6T _ Diftance au Zénith de la ‘|marque fupé- J101p ap11enb 9"f De - el F 919199 Milieu. *2JI9AU9I 92/2199 3p }1enb9rT Milieu. Ci-deflus. Le vent étoit fi fort que le fil STE étoit ao en mouvement. Par un milieu on a 1° $8",7. ou $9", du il falloit ajouter à toutes les diftances au Zénith obfervées. Let Janvier 1773 ,je vérifai de nouveaule quart de cercle ,rou- tes les obfervations Forent faites, & l’erreur fut trouvée la même. rieure. CR ont Marque in- férieure. 89.51.52, 7. 51, 7- 52; 7: 5237: 52 5 7° Re. 2. 89. 51.52,5. 90. 4.14, I. OBSERVATIONS OsservATIONs au Méridien du Soleil & des Etoiles, faites à Namur en 1772, dans la rué Saint-Nicolas, avec un quart de cercle d’un pied Anglois, conftruit par le Sieur Bird de Londres, Parall, | : Soleil ou Diffances ap- ren du foltil, prrewr | Diftances |Déclin. le Nutat. | Déclinaifons Barome. | ‘Therm. 772. l'Étoile obfer- | parentesau tion. | Morifons Ge: inf- vraies au Zé| du Soleil & en en apparentes Latitude. P. L de vée. Zénith. 8 8 'trument. niths des Étoiles. |Déclin. | Déclin.| des Étoiles. * /° | Réaume =0,0: in NAMUR À + + Sept. | à Aigle. Lo rw 11! #0 |o 1 1 o Pl ut M |o 11 o D 1! | 4 SR 42. 8.19, 0.10:49,9.| « « « |1.58,7. 42.11. 2, 2.| 8.16.53,4.| F9,4.| + 8,7.| 8.17.12,5. 50.28.13, 7. + 17. à Capri. : See: 63:39. 5, 2:|1-50,9: 63.42.49, 4113.14 7,4] — 437:| — 8,6.,13.13.54, 1. 50.28.55, 3. # Pegañ 5tdito. de ne 41:35: O, 5. 0.40, 1. 41.37.42, 0.| 8.50.33, 1.| + 8,4.] + 7,5.| 850.40, re s Pega ‘ ' ; dito. |41.34.35, 8.|0.48,0. + 41.37.17, 1.) 8.50.33, 1.| + 8,4.| + 7,5.| 8.50.40, Œ 50.28. 6, 1. à Aquarii ) dito. |51.49.58, o.|1.12,8. ECERE CE à 1.24.56, 0.| — 7,5:| —7,0.| 1.24.41, 5. 50.28.22, 6. » Pegañ ee 40:46:52, 5. 0.454. 40.40.31, 2.| 9.39. 7,0:| + 7,6. + 5,9] 9-39.20, Fee à Pegal Ë 2me, grand, 36.26. 2, 7.|0.40,2. 36.28.36, 2: 13-59-13, 0° 70 NE 55: 13-69-25, sl Par un Milieu . . . . . . . : . 50,2832. 50:28. 1,7.|. STRONOMIQUE A = x ‘Le |:0 6S:0€:6b x ‘zS'oS"g 1:86 +lofSE'oS"s |:8 0 ‘et'or *1"26ot'ol"b Cr Ct:ob|"oap £-39a “x 2x "€ 6S'OC'6V | 1 Er" 21e “£Étor+|'o ‘rS'or'e |‘ ‘or'O1 1r +|"€2tol-z *CC'6t *211099 ‘SO ‘or — | ‘wup wa \ ; è ‘0 ‘x. ‘6t'6P|*snpyurprog “MP TE "1 0b'0€ 6% 9 *€r"21'8 "DES'or'g |ro ‘EC-6rrt *Sot'or1p|'e13 7 or "2 FS1"2C"6p Er 0 ‘0£"Yz'o «1 6E:zr 6Y b Ch:6 “Or +911099 il 10 il 1 0 ïh 0 110 € 2"ES:gp|"s npray 104 *S (ES'Sz' Obs npurpaog| 1% 1 o . |[raidas ‘8 ‘o= , :ndne LE °sorroix Sp | “ums2cr|‘ut22@ Sono S3p æ| -yuusz ne |auounrs uaruz ne | -224197qo || 2p pe S2PUET saiusiedde AT U2 |*{[0S np saiera UE -JUtI LE “peau | Sauoiedde AO 7221 “WOW, si. SUOJTEUt22 NE "119qY | suoJteurp2q SaoueyiŒ | IN211Z | jo np Saouey1Q no 119105 | | -rre2ea ‘2% ‘uOÂEr 9p SIOJ8UY7 pard un,p 2[9199 » ap 11enb un 2948 9HNOŒNAXANT & SONEF UOIPHIN ne SOJIOMX S2p Ÿ [JOS NP SNOILVAUASEC) OBSERVATIONS #9 "2E:6b * * : narA Un 1vq gs vx Stgi 26 6r d° E # AAA “27 | “0 ‘gr 2£-6b Oh :2£-6b LE g1-2€-6b «2x "82 *2E-6b 2e “ba "2 6b cho “26-6v °2°2 *2£:6V 18 ‘6 ‘ZC:6b DA4 *2x “1 “aS-9E "Gb. {! 4 o Dit "ose g °apHEuT “6Fo+'hz°r *£zSos's *1 0 ‘hl'6r *£ ‘oS:6S:€r | ‘# Oo ‘hr'61 :6(cc'oS:2T #Sa1to1x sap shuaredde LUCTICUT ET DORE où + 62 + ua ‘neJnN | e .pe2 — +6 6 + *urn3p uo °112qVY | DATE LS ‘oS£'05.8 *€ (21:VE:9 “Oo Sr'hr'61 C(Sr'6S'Er ‘1 O£'Sz'S “O‘Sr‘br'6t “otr110S.23 : “1 Gz:z GC VI O S2110 S2p no *[0S np soresA GEGSr “1S “oc gt'or|°S"OS:Sr"o9: ©: CR Ve *O“S£"r1"0S este “Cr"1S:20 ie DINTE:Z EC DAC “So£tz ES *2“pS°1 "8 “C1"1S*09 e » 0 6 Stop 12 . | “a S21-6E-bS “20 UT, °ysru97 ne SaredA [o) W 1 + ŒMEUTLES) , JUL 2p | SuOFIeUt122 7 ‘Soauex | 102134 | “ol °2 ‘2 2 ‘88 1 *UOzrIOu os np HE d “ÉS9E I ‘081724 ‘Bmoquioxnry Y SANEF SUOHEAII{O S9p uns ‘1 (Ec:cr'09 € ‘2Vv:gc"09 ‘6 ‘eS'SC6c ‘Oo ‘9 de) “ze :0S "6 “6z'bz 05 | PARA SE 6e roi A 8 ne 7 sr te de Ko) "Se8c l'E or Sr'1S re Oprgsrg | 2624 rer toc cran Or Eagle + le + rer tro Chh-CE-zS | 3 ae | ee TO CC Ne En Sr QU derriere lee ue re): 91| :Zo—| *1c+ lo (See «ro eg El. + : 9'EVr|'8 Ec'ob'6S|urs8 1 108 x | -S-gcl 60 Sr1S 0 ‘Srbr'6r Lo bio ao Res SE En de or ee 26 | -c-ocl.6 6 Srie | 1Soréro : *| + :hotghz|"8 ‘g7 tro }r38 emo = ( GCf'r Lee TE DD ler Mot MA | nee ES ‘ SES. : e 3 ss AE OMOHORIES | EEE PE | AfES x SG" OEe 2 TE oert2 nues à LES TS" +2 ?S np'}ur prog Sp | bec) ep Cr Greigl er Gb 11:02" V2 |*S np'dny “ro |. à ‘ "Oz: 7 o—| 5 PRES TE E | :1p) € + nue arsris «6 Shore | eg] foto eos |eemegpl. + 2 + liceol totueto| #9 1 wo: À 88 °2 ro Sr'iS ‘bp Ob'gcg | 224) 2c+loc metres. - ce : «lors + g0t-cc| Sr uouo 5: | EE ne donnee td la teen eo re CAE LA ES RÉ Peer so 5 [got Gris Roue on 0) rc t'o Sue on og tree). : | - ae RS) EL ne S |++:8c/-0‘oZS1 19) «0 ‘oG-zz ; DE 9fz+|:o “ObE rien bE-rroE le * “le 2 2.ceepoler rs coéle eqoPIV g‘gSczcc| ofz—| 004 lo hg-zz-zc leo ‘czzgec le : |. Et£b'o|'r ‘198 ‘0€ |'38 € uner ç gS | “h'ecl'ozrSris) - - É : [rAc£o|"9 ‘o'Gb'8c | 8 € soray # 1 S e = -< lo (of:2z €zl ca Cob-zbr Des g $ —————— | —— : ES 9E'Zz' Eco ‘ebetiv2 Se PA -2 CGz-2£:p2| ‘anuso = ; : ‘Oo “6S'EC:F2 |:s np'yurprog ; al "€ CaS'oz:+2 :snp-ay: : 6 = 87 ‘9 SSr1e| 2 tog-rar | ofg+| -Eto—lo CGperzer |€ ex -2e- Demi £ SSPSMTON JD &c G og. C6, 20:76 o 82 "O6 b “Gr'1S) "9 +8: cpe7 ü Dose “lLzcer. € À o 1 cos Hoover | CU er Ne nERrS CCS IL 10 11 D © 11 11 0 "258£"1| 1 Sr'op'6S|'e13 rx posry| 61 1 IL y © IL 11 I 0] y po ‘399 JUNE | °T'd DE) noix sap | - : ‘9 fo TP) | a *apn3ne"T ete He? MP?Œ|Sen014 SP @|) "quusz ne |juoun 8 8m “x |"woreg Un | *10S np SaierA ne 1 : suoyreum2 |°1emnN | “x S np $9? SATA =jur tmiusz ne *29A1a}q0 IOprEUS ; 14W)| suopeup>a | sooueyiq HN “uoznoy || PEH?U | F Sausredde 211034 ‘GZ21I 3 *10oS np SOUEYI noir se | os np Tol0$ s S V I F Ï ( ; O 4 . 2} U I . 1 N (CL 4 F $ Ï I S l O "O1" S11S * © * MOIAI ut DS Ds Soge ee + “Sr rS|'O pp'oz "2 ne Eg=jr fo jo Esros2 |ro'GrbSEr: : : Re ao en oo lint uote al 2 +083 “Srrig|-+ f2S"17"1 | «6 2 Eh “So +|'o “6pe1z'x |:1 °b :2£"eg -z (Cp: CE zS exp z uoxO 3 T:0'8c “Gre1g| € Core 91 | "2 “g—|'ofz+| 0 ‘Sr'e 91e eS"cI" DE "€ or‘or'SE loup x “depty 2:08c “Grere | rare lo h=—|'E€ o+|to grrr |'r CES: Ds 1|:€ ‘ot'o -gÿ|‘onp z n°0 # | Srogc|°1 “Zi Srt rs | S Soc tes | "6 1 —|"b 9 +|"0 bS'cz ec | "0 “orage "€ fob:6p'gc| "3m 7 ‘uv? OBSERVATIONS Hrorgz| rh € “1-18 lo “ha rbr6r "€ fx —|:2 66 +0 1€ rbr61|P (OE-EE-1E SEZS'OE1E MSP E "Sy ©) orge |-1 Co “Srig|"2 Sr br'6x "€ x —|-o€2 +|'o ‘or‘tr 61/8 ‘16702 ‘0 oz" bz: 2 zn309 | Va H 1 o HU 4 Oo! 1 Il I 1 o Pres , il 1 à 199€ + cg | “t'à |. *Sarro1g Sop | “Up? Nue S2r014 sap no| ‘qyusz ne quan ‘ynusz ne ‘a9,19q0 “z221 us 1 °2pnin ET etre Fi a7S *10S 1e A Dee JUL °P voa, “pr saiusiedde 21014 L SUPUL | UOAU Suopeur22Œ | ‘1383 NT or suopeupoq | SsooueyiŒ | 201717 | “10 S np SaDuEICT no ro10$ 2 j ‘reed \ : “2pUAJO € SO1EZ “UOIPEISIA NE SOJIOIY Sp 2% JIJ0S np SUONEAIJAQ SP SANS . 22 ASTRONOMIQUES | AUOWS]QEHISA 1019] SU LD pUEIS :snjd snbreu jo auorvdde anotueip uoy s1oj anod % fourod e a1oyonos sa] ‘anp-E-y9,9 ‘jisjos np sproq Xnap xne auosut] |aun 31ouS40p ONSUN] ef 2p [UuojrIoU |} af anb 2310} ue srojonbjenb sroyrez af SUJSP-19 SUOHEAISJQO 0] SUEC °Y'N *aiurjpmoq nee] 1nod s9189p Sg onbyeur auawunxu 125 anb 1o412jqo & {jo je ste Éamnrnyy ap a]je® onb OWQUU ET Jo US Vouenpris ET ‘SE & do) sed a187 939 e ‘saiuepoopid suoneaïsjqO se suep TA} smy ou of iuop ‘anowouey] OT + s25:0€"0$ 5 9 * MOI Un JE |} ——_—————————— — " " —" “at |cig ‘2e l'E “612€ "08 |'e fcb'oz:2 | ‘Etg—| ‘Séz—|"o(ESoz2 er 2E-on Eble + pe + -l'ottSolre ‘Eb-Cr-Cbi-19 1 vouo | Eté °2t rie “8 ra oi ‘6to—| ‘béotlofSr-z ‘orlz cri Se-vele + -|. . . Lpto À Hecepe Las En "SEC Sp Zc|'o gbot'oS lo frr'rre | 1) <6z—|rofgr- 11€ |'o (2£-Cz2+ :2feSr|e * clrofz ‘2 SE:zc 2bl18z 109» “AP 81 “Stp+ 06 "27 |"v.‘oS'9E"0S], + : + |: : - Toma. + -!:26rz6t'ozler 7 era 72 : + «lt LECrS-z |: G OC-ree 12 *2NUu99 é Cr *9€*12 |'S npur prog "GK6S'E 12 *snp'ary "ro lp 91 SUYE on Erhe à »|e, : “otb+ | Z'orZz|r1 ‘oy*2€"0S|"6 € +z ‘0r| ‘ato—| ‘Loto tSr:z orl-z tr Sete. « |. . “ot+|Z'or"2c|"S 125 :0€"o8|"S Site | “np He l-ot mur lrocipez/tle + «|. “oo lo0'€ "gs |"9 “Sp:0£:0S "6 Czz'b£'or 29 “1 l'of €‘H£"or ge tele » |. "Sto+ ot "8c\"1 ‘g$0E"o|'o fEp'oz:2 | £co—| «267.0 (ECoz:2 leiecrorcple + le © “EtrtS'z *gslra ‘oo’2€'o£|:z 6 -z "or : De ‘o‘r+|'ofSr:e ‘91 ee SEE ne D) se Let Gr "oc |" € (Ecr08'0S | 'o Chh'£ «Gr 0e Certl'o <6tE “Gr 8 e speocl. «+ |. . Æut er geo fot:9E05 |1e cr ite | ob) 265 lo fgrtrie |rtégz Ce-2ple + «|. - “orbite :gc|r0‘6€0€'0S|"S EEE-1b:61| -Sér—|) roc lro Cr£'rt6r|» animaux féroient une excellente acquifition pour l'Eu- à ‘» rope, & produiroient plus de biens réels que toutle » métal du nouveau monde, qui n’a fervi qu'à nous » charger d’un poids inutile, puifqu’on avoit aupara- J M 2 SUR MANMF INC OIGNER .» vant pour un gros d'or ou d'argent, ce qui nous » coûté une once de ces mêmes métaux, » Rien ne devroit donc ñous empêcher, ce femble, de tenter cette acquifition; tout au contraire nous y in- vite, ce que nous favons de la nature & des goûts de la Vigogne, & le climat fur-tout qu’elle fe choifit de ptéférence ; climat qui, dans le nouveau monde paroît exattement le mème que celui de notre pays de Luxem- bourg: La plupart de nos animaux d'Europe, tranf portés en Amérique, s'y font multipliés prodigieufe- ment; nos Chevaux, qui donnerent d’abord tant de frayeur aux Américains, nos Vaches, nos Taureaux, nos Brebis & nos Cochons; en un mot prefque toutes : lès efpeces de l'ancien Continent inconnues au nou- veau. Et nous croirons que rien de ce qui étoit parti- culier à l'Amérique ne pourra réuflir chez nous, pas fous la même Zone, fous la mème température d'air, ni avec unenourriture toute femblable ? Quelques raifons qu'une phyfique plus ingénieufe fans doutequefolide puiffe nous donner de la prétendue diflérence, ce n’eft point le raïfonnément, ce n’eft point une épreuve ou deux, c’eft une expérience longue & fuivie qui feule, ce fens- ble, devroit nous convaincre que cette différence exif- te, & par conféquent ètre capable de nous décourager. Les Anglois n’avoient pas moins d’obftacles à crain- dre que nous, lorfqu’ils ont introduit dans leur pays, avec Je fuccès que tout le monde fait, les Béliers & 1a Fem- les Brebis de Caftille? Ce fut une de nos Princefls me de qui rendit cet important fervice à l'Angleterre. Hélas! tartes Re diftraite fans doute par d’autres foins, elle ne fongea re, Mar-pas à le rendre en même temps au pays qu’elle avoit guére adopté. Edouard IV, Prince pafonné pour le bonheur ce arde fes peuples, employa le crédit qu'elle avoit auprès les Laines,du Roi de Caftille , pour en obtenir la permiflion d’en- un du + less sise sta pe RES de “nt Ed I ep ET TE L { ÿ SES TER TS PR ET NT, PIS OS CAS 2 \ ET SUR RUES UNE DES LAINES. PL lever de fes Etats un nombre limité de bêtes blanches conne C deftinées à faire race en Angleterre, F1 envoya même A ronné miens. une ambaffäde extraordinaire pour cet objer. Le Prince V. Journ. obtint l'exportation de trois mille bêtes à laine, qui PÉNLE réuffirent parfaitement en Angleterre, » & sy multi- » plierent en peu de temps, moyennant les ménage- » mens dont on ufa pour élever & conferver cette race » précieufe, Voici comment on sy prit. | » On établit une commuflion pour préfider à l’en- » tretien & à la propagation de cette efpece. Cette com- » miflion, qui fubfifte encore aujourd’hui, dit l'Auteur » du Mémoire que nous fuivons, fut compofée de » perfonnes intelligentes & d’une exafte probité. » La répartition des bêtes nouvellement arrivées de » Caftille, leur fut affignée, & l’événement juftifia Vat- » tente du Souverain, qui ayoit mis en eux fa con- » fiance. _» D'abord ils envoyerent deux de ces Brebis Caftil- > lanes, avec un Bélier de même race , dans chacune » des SE dont la température & les pâturages » leur parurent favorables à ces bêtes, … » On fit en même temps de férienfes défenfes de tuer » ni châtrer aucun de ces animaux pendant l’efpace de » fept années. La garde de ces trois bêtes fut confiée Fo à-peu-près comme celle des Chevaux étalons dans » certains pays, à un Gentilhomme ou au plus nota- » ble Laboureur du. canton, attachant à ce foin une: » exemption de taille, de dE, ou quelqu’ autre droit » honorifique ou utile, » Et afin de tirer des conjectures tout ne ge pof- » fible, on méla les Béliers Efpagnols avec les Brebis » communes, les Agneaux qui provinrent de cet ac— » couplement, tenoient de la force & de la fécondité » du pere, à nn tiers près.....,. Ceft ce qui fai, Vr.1755 Jour. Eco- nom. 1755 56 SUR DA VI G OÏG N'E » ajoute l'Auteur, qu'il y a aétuellement en Angle- » terre trois fortes de bêtes à laine.” L'exemple d'Edouard IV fur fuivi As par Hen- ri VIII, qui fit encore un traité pareil avec PEfpa- gne, pour multiplier dans fs Etats une race d'animaux fi parfaite & fi utile. C’eft ainfi .que l'Angleterre, en annobliffänt fes Bi bis, a gagné plufeurs centaines de millions. Le nom- bre des toifons qui sy coupe chaque année eft in- croyable; il monte à plus de trente millions, & cha- nue que toifon porte au moins quatre livres de laine. » A Médic. de » l’occafion d’une gageure, on a dreflé un étac des Géof- » Moutons qui fe trouvent aux environs de Dorchefter, 31 4£. Rr. » feulement à deux lieues à la ronde; on en a compté naud de 5 fix cens mille. ” L’excellence de cette laine , & l’im- DA portance de s’en aflurer la pofleffion exclufive, ont . [ Regne fans doute déterminé le Miniftere Anglois à défen- ie ]dre l’exportation des Moutons fous des peines très- 109. P'rigoureufés; défenfes que l'appas du gain sat fait éluder tous les jours. Ce que l'Angleterre a fait pour les Brebis d’Efpa- gne, l'Efpagne elle-même l’avoit fait auparavant pour Ve Georg. celles de Barbarie. Du temps de Virgile, les’ Efpa- lib.3- gnols étoient réduits à voler les laines d'Italie. » Ce V. Mém. » fut un riche métayer de Cadix, nommé Marcus Co- furles Lai-;, Jumelle, & oncle du célebre Auteur de ce nom, He 5 qui, voyant débarquer des Moutons d'Afrique, ame- 1755 » nés pour les Spectacles, fut frappé de la blancheur » de leur laine, & réfolut d’eflayer à apprivoifer ces » bêtes, & à ch établir la race dans les environs de » Cadix. Il fit plus, il accoupla des Béliers Afriquains 5 avec des Brebis communes, il réuffit dans l’un & lPau- » tre projet. Mais fon exemple ne fut ni fuivi ni au- : .»torifé, & plus de douze fiecles s’'écoulerent , fans » qu'une ° ‘« ET SUR L'AMÉLIORATION DES LAINÈS, 7 # qu'une épreuve fi heureufe engageñt perfonne à l'i- » miter. ? Dans le quatorzieme fiecle, D. Pedre IV, Roi de Caftille, le fit avec lé plus grand fuccès. Le Cardinal Ximénès marcha enfuite fur fes traces, & profitant de quelques avantages que les Efpagnols avoient rempor- tés fur les côtes de Barbarie, il en exporta des Mou- tons de la plus belle efpece, qu'il établit aux environs de Ségovie, où croît actuellement cette Laine fi renom- mée, qui porte le nom de cette Ville; Laine la plus belle de toute l’Efpagne. Des Citoyens pleins de zele ont fait la même chofe pour ainfi dire de nos jours, jufques dans le fond du Nord. Rien de plus remarquable en ce genre, ni de plus propre peut-être à aïguillonner la parefle de nos cultivateurs, que ce qu’a fait le Chevalier Jonas Alftrom pour améliorer les Brebis de Suede, & pour rendre les foins, que ces animaux demandent, plus lucratifs aux propriétaires. Il forma fon projet, après avoir con- fidéré les profits immenfes qu'avoient fait les Anglois par l'introduction des Béliers & des Brebis d'Efpagne V. Journ: étranger. Fév. 1755: dans leur pays. I] fit, à leur imitation, venir des Bé- liers d'Efpagne & d'Angleterre, pour les donner aux Brebis de Suede. On s'imagina d’abord que les eflorts de M. Alftrom feroient inutiles; mais fans fe découra- ger, il établit à Hoyenterp & à Berga, non-feulement de grandes bergeries, mais encore des Académies de Bergers, où depuis quelques années de jeunes gens ap- prennent ce métier méthodiquement, & ne font em- ployés ailleurs, qu'après avoir fubi un examen fur tout ce qui regarde leur profeffion. Le Royaume entier à fuivi cet exemple. IL n’y auroit pas tant de chofes à faire pour établir & Tome LL L 58 SU R0LA PT GC OMNENT TS pour naturalifer la Vigogne chez nous.‘ Cet animal n'eft pas comme la Brebis y qui ne fauroit vivre fans les foins & les fecours de l'homme. La plus prandèe difficulté fans doute feroit d'avoir un certain nom- bre de ces animaux, jeunes, fains, vigoureux, &en état de faire fouche. Mais quand il s'agit d'objets d une auffi grande utilité, la difficulté doit-elle nous arrêter? N'y at-il pas long-temps que Platon a dit, & quand il ne lPauroit pas de ne feroit-il pas vrai, que tout ce qu eft beau eft diffici le? Nous avons vu plus haut un Roi recourir à la médiation d’une Puiflance voifine, & envoyer des Ambaflades pour avoir des Moutons. Il ne s'agit pas encore de tout cela; laccès aux Terres Magel- laniques n'eft point fermé; un Armateur ou quel- ques Boucaniers en feroient toute l’affaire. La orandeur de l’objet & des efpérances mérite bien qu'on hafarde quelque chofe, fi toutefois on puifle dire que ce feroit hafarder. I] ne s'agit de rien moins que de faire le bon- heur de la Province de Luxembourg, en y ouvrant la mine la plus riche qu’on püût imaginer. On ranimeroit nos Manufaëtures de Limbourg, où 1l n'y a guères que cinquante fabriquans aujourd’hui, & dont les draps ne s’élevent point jufqu'au mérite de ceux des Manufa&tu- res voifines de MM. Roufleau & Pagnon à Sedan, en- core moins jufqu' aux draps d'Angleterre. C’eft à l À ca- démie à qui j’ai l'honneur de foumettre mes vues, de ju- ger quelle fuite on pourroit leur donner, foit en invi- tant des particuliers à s'en occuper, foït en y inté- reffant le Gouvernement(*). Ce qui me paroît certain, D a mm [+] En fait de particuliers, les riches Abbayes de S. Hubert, d'Ors. val & d’Echternaht feroient fans doute le plus à pores) dé commen- cer & d'achever certe entreprife. ne LE os TS nee > “ce a nine > ET SUR L'AMÉLIORATION DES LAINES, «9 c’eft que les efpérances dont il s’agit font bien plus étendues & moins éloignées que celles d’éduquer des Vers à foie. Il sagit d’ailleurs d’une branche d’in- duftrie, qui a fait autrefois la gloire & les richefles de notre pays, & l’objet des plus cheres complaifances de nos Souverains, : FLN: 0] MEMOIRE SUR HAINE MENU FAT DE LA FLANDRE MARITIME, Sur Les Fr fucceff fs qui y font arri- vés , & les caufes qui lés ont produits ; fur la nature de fon climat & de Jon fol ; fur les marées de cette Côte, & Leur comparaifon avec La hauteur de différentes parties du Pays ad- Jacent. PRÉSENTÉ À l'Académie fmpériale & Royale des Sciences & Belles-Lettres à Bruxelles, Par Dom MANN, PrIEuR DE LA CHARTREUSE AneLorse A NïIEuroRT. Lu dans la Séance du 6 Oëfobre 1773. sat me AA RARE 5: us is 44 k rai Eu € pe 8: 1 + s. ac SE au 1 0. 23h “y: PE st y don mo Ne UT CE sas ne nano} RTUT ASE any Ja À het Lan, ÉN ant ie sb Re vend ad ES Ê + GA FR : 134 es PE: Æ DAME Ni 4 Her SNA LS PM Amor SORA ; RC à PAT Re sb. Su sn si e æ A jà rr 'e — — Sur l’ancien état de la Flandre maritime, fes changemens fucceffifs, & les caufes qui les ont produits. PREMIERE PARTIE. QT Théorie générale de la Terre. 1, Pour déterminer , avec quelque précifion, l'ancien état d’un pays, les changemens qui y font arrivés dans Ja fuite des fiecles, & les caufes de ces changemens, il eft nécefläire, avant toutes chofes, de conftater une vraie théorie générale de la terre, fur laquelle on puifle fonder toutes fes recherches particulieres. Parmi un grand nombre de Théories de la terre; que les philofophes ont imaginées, l’on en diftingue fur-tout quatre, qui font les plus connues : celles de Burnet, de Woodward, de Whifton & de M. de Buf- fon, qui eft à préfent le plus en vogue. Il y en a quel- ques autres qui n’ont pas fait fortune, comme celles du grand Leéibnits, de Scheuchzer, de Bourguet, de 16% SUR DANCIEN ÉTAT, Ray, de Stenon, dont on peut voir des analyfes & des jugemens critiques dans le premier Tome de l'Hiftoire naturelle de M. de Buffon. 10 . Sans entrer ici dans la difcuffion du mérite de ces différentes Théories, on peut dire, en général, qu'il y .en a qui péchent contre la poffibilité, en contredifane les loix méchaniques de la.nature, ou en attribuant des effets à des caufes infuffifantes; il y en a d’autres qui, quoique poffibles , font néanmoins très-improbables; car quoiqu'il n’y ait pas d'impoffibilité abfolue, il y a fi peu de probabilité à chaque point, pris féparément, qu'il en réfulte une efpece d’impoffbilité pour le tout pris enfemble, comme l’obferve très-bien M. de Buf- fon à l'égard de Whilton, le plus conféquent & le plus lié de tous. Il y en a d’autres enfin dont le fond n’eft pris que des obfervations fur des eflets particuliers ; & qui ne font rien moins que généraux & univerfels dans toute la nature; or, c’eftpécher contre la bonne logique que de tirer des conféquences générales des eflets partieu- liers. Me feroit-il permis de dire en paflant, que peut-être il ne feroit pas difhcile de démontrer mathématiquement, Jetäche- par les loïx méchaniques & générales de la nature, que rai de le Je célebre de Buffon, cet excellent & fublime Hifto- Upon rien de cette même nature en détail, péche de plus d’un de ces côtés dans la partie fyftématique de fon ouvrage ? Je vais donc, fans difcuter davantage ces diférentes Théories, tâcher de déterminer celle qui me paroît fans .comparaifon la plus conforme aux loïx méchaniques de la nature, aux effets les plus généraux & aux obfer- vations les plus univerfelles. 2°. C'eft un premier principe de nos connoïiffances für la nature des êtres, ( comme j'ai râché de le démon- trer métaphyfiquement dans un autre ouvrage qui pa- roïtra bientôt) que rout eft univerfellement analogue & | harmonique DE LA FLANDRE MARITIME, 65 harmonique dans la nature, foit que l’on confidere les chofes créées entrelles, foit qu'on les envifage par rap- port à leur Auteur, PEtre infini & néceflaire, dont tous Jes êtres crées font des images infiniment variées & plus ou moins parfaites, felon le rang qu’elles tiennent dans l’échelle des êtres; échelle dont la gradation indé- finie nous eft manifeftée par tout ce qui tombe fous nos connoiffances. En partant de ce principe, nous trouvons par-tout la matiere en mouvement, & ce mouvement produit univerfelement une aétion & réac- tion, dont leflét eft toujours relatif & proportionné aux caufes combinées qui le produifent. Ceci n’eft que le réfultat des axiomes ou loix de la nature pofées par Je grand Newton dans fes principes. 3°. Nous n’entrons point ici dans la queftion méta- phyfique; favoir, s’il y a une aëtion & réaction, ou en d’autres termes, une vraie force & réfiftance efen- tielles à route matiere prife univerfellement, analogues & relatives au rang d’exiftence dans l'échelle de gra- dation indéfinie. Nous n’examinons pas non plus fi Ja réaétion ou réfiftance de la matiere eft autre chofe qu'un moindre degré d'action. Nous avons ailleurs difcuté ces chofes, & le fujet que nous traitons ici en eft indépendant. Il fufhit que tous les vrais Phyficiens, après Newton, admettent univerfellement une ation & réaction, foit ‘effentielles, foit communiquées, & que leur eflt ou réfultat foit toujours proportionné, & en raifon de la combinaïfon des caufes. °. Nous trouvons manifeftement cette a@ion & réaction dans notre propre être, dans fes modifications, tant intelleétuelles que matérielles : dans la production de nos idées par l’action des êtres extérieurs fur nous; nous les trouvons dans les loix générales de l'univers, ou la force projectile & centrifuge des planetes & des co- Tome I. | M _ 68 . SUR L'ANCIEN ÉTAT metes eft évidemment une réattion, une réfiflance con- tinuelle; nous les trouvons enfin dans la gravitation univerfelle, qui eft évidemment une aétion, de quelque caufe qu'elle provienne. Toutes les loix méchaniques de la nature ne font que des combinaifons d’aétion & réaction, de force & de réfiftance, variées à infini. La dynamique & la méchanique, Phydroftatique & Phydraulique, l'aëérométrie, & tant d'autres branches de la phyfique, ne font que la détermination des mo- difications & des combinaïifons de lation & réaction des corps, des vraies forces & des vraies réfiftances. <°. La conféquence immédiate que je veux tirer de tout ceci, eft que fi nous trouvons cette action & réac- tion, ces forces & ces réfiftances , en tout ce qui tom- be directement fous notre connoïflance (N°9. 2,3,4.),.. il s'enfuit de-là néceflairement par l’analagie 6 l'har- monie univerfelles des étres (N°. 2) qu’il doit exifter des. forces & des réfiftances dans le refte de la nature, & fpécialement des forces d’expanfion & de réfiflance dans la fubftance & l'intérieur même du globe que nous habi= ons. ë 6°. Ces principes nous aident à découvrir quelle eft Ha véritable théorie de la terre, parmi le grand nom bre de celles que lon a imaginées. Jai cru la trouver expofée avec plus d’exaétitude & aflez au long dans les nouvelles Recherches Phyfiques & Métaphyfiques de M. Needham. Cet ouvrage excellent, & de la plus forte & lumineufe métaphyfique , imprimé à Paris, chez La- combe, 1769, me difpenfe d’entrer ici davantage dans les preuves de cette théorie, que j’embraffe par exclu-+ fion à toute autre, comme plus conforme aux loix mé- chaniques de {a nature, aux phénomenes & obferva- tions, à l’écriture-fainte, à la tradition & à l'autorité de tous Les fiecles & de toutes les nations, dont il nous: . DBLAFIANDRE MARITIME. 67 refte des monumens, J'ai effàyé, dans l'ouvrage dont j'ai déja parlé, de démontrer combien cette théorie et conforme aux plus exactes connoïfflances métaphyfiques ue nous ayons. L’unique chofe que j’aie maintenant à Éireel d'en déduire les principes dont j'ai befoin dans ce Mémoire. 7°. Les deux grands principes, qui font la bafe de cette excellente théorie, font 1°. une force expanfive, dont le phlogiflique ef? Le reffort, & qui agit continuelle- ment fur la matiere brute, ou moins aétive 6 moins élaf- * sique que lui, en produifant des effets qui font toujours le réfultat proportionné de la force d’'expanfion & de la ré- fftance combinées enfemble. Le fecond principe de cette théorie eft que Le phlogiftique gagne perpétuellement par la fuite des temps fur le principe d'humidité, & tend par- 12 continuellement vers la pétrification d’une efpece de US & vers l'inflammation des autres. 8°. Les raifons & les obfervations qui démontrent fa vérité & la réalité de ces deux principes, fe trou- vent exactement détaillées dans l’excellent ouvrage, dont j'ai tiré ces principes; je ne dirai qu’un mot de a loi, que fuit à-peu-près, & qu'a toujours fuivi la force d’expanfion depuis le commencement du monde, autant que j'ai pu m'en appercevoir. Tous les Géome- tres favent qu’il n’y a aucune loi d’aétion, de mouve- ment, &c. aucune équation enfin, dont les propriétés & les conditions ( quelles que foient ces propriétés } ne puiflent être exprimées par une courbe. Il femble donc par les phénomenes & les monumens phyfiques & hiftoriques qui en reftent, que le développement de cette force expanfive fut bien plus grande, & la force de réfiftance ‘bien moindre en temps égaux, dans les Premiers ‘fiecles du monde, qu'à préfent; ces deux Forces étant toujours & univerfellement de raifon in- i 68 SL RITAUN OC TE NL ESA FE verfe l’une de l’autre. De forte que la loi de la dimi- nution de ce développement peut être exprimée par _une fluxion décroiflante à l'infini, {lon une certaine loi; celle d’une hyperbole par exemple. 15 Soit À le centre & B le fommet de l’hyperbole, ou plutôt de Ja courbe hyperbolique B D, foit B C fon. abfciffe , & À E fon afymptote; donc es, à, n9, 0, sr &C.. À feront des femi-ordonnées de lhyperbole, & Bb; By» st, 0, uv, Er, cc. feront des efpaces hyperbolo-afymp- totiques, décroiflant à l'infini. Je compare la fomme des principes d'humidité dans la fuite des fiecles à l’abfcifle de l’hyperbole BC, l'a- néantiflement entier de toute humidité, & la pétrifica- tion ou conflagration univerfelle des fubftances à fon affmptote AE; la loi de développement des forces DE LA FLANDRE MARITIME. € d'expanfion & de réfiftance, provenante de la combi- naifon de ces deux principes, eft la fluxion du point qui décrit la courbe B 6:6% 8 D, felon la loi qui lui eft propre. Je fuppofe donc qu’au premier dévéloppement de cette loi, au commencement des chofes, c’eft le point décrivant, qui part du point vertical B de l’hyperbole,. & de-là s'éloigne de l’abfcifle BC, & s'approche de fon afymptote A E, en bien plus grande raïfon en ef- paces égaux de l’abfcifle Be, «?,%, &c. qu'après un long développement de cette courbe, c’eft-à-dire, la quan- tité Bb, furpañle &, & eft plus grande que #4, m que #r, & ainfi des autres à l’infini. Donc plus cette courbe eft prolongée, moins elle s'éloigne de labfciffe BC, & s'approche de l’afymptote À E en temps égaux, mais toujours felon cette loi uniforme , que toutes les femi- ordonnées font en raifon quarrée de la fomme de l'axe & d’une abfcifle quelconque, multipliée. par cette mé-- me abfcifle ; & les efpaces hyperbolo-afymptotiques Bb, #y, æ,&, &cc. donnent une fuite infinie décroiflante, & ne peuvent jamais, quoiqu’infiniment continués, deve- nir égaux à o : de forte que la fluxion de l’hyperbole conftitue une fuite infinie décroiflante felon cette mé- me loi; & ainfi de toute autre. Tout ceci n'eft que pour expofer ma maniere de concevoir Île développement des forces d’expanfion & &e réfiftance, fans prétendre que dans la nature elles. fuivent exactement la loi d’une courbe hyperbolique ou d'aucune autre connue en particulier, ni même que. ce développement foit toujours uniforme dans fon dé-- croiflement, à caufe des obftacles particuliers à différen-. tes fubftancés. Il y à même lieu de croire qu'il feroir impofhble d’avoir jamais des élémens fufhifans, pour: en déduire le développement de cette loi par ‘un cal- cul géométrique. Tout ce que je me propofe, eft de 5 SUR L'ANCIEN ÉTAT faire entendre la nature de la loi, dont le développe: mént provient de la combinaifon des deux principes & des deux forces qui en réfultent, | 9°. L'on voit par-là pourquoi dans les premieres pé- riodes du monde, le développement de la force d'ex- panfion ou du phlogiftique à dû produire une quantité d'effets indéfiniment plus grande qu’à préfent, en temps égaux; & qu'ainfi, les périodes des prémiers grands développemens de laterre, oules fix jours indéfinis de la création, fi bien décrits par M. Needhàm, ne devoïent point avoir befoin de beaucoup de temps pour produire ces grandseffets. Il fuitde plus que la terrearide, jufqu’au point où nous la voyons aujourd’hui, devoit paroître au-defflus des eaux, & gagner aïnfi für. le principe hu- mide dès les premiers fiecles du monde, en toute ap- parence , à proportion de la multiplication des ani- maux & des végétaux. On voit par la même raïfon, combien l'effet du développement de la force expanfive, & de l’accroiflement du phlogiftique fur l'humidité, doit être peu fenfible à préfent, même dans un fiecle en- tier ; quoique les meilleurs Phyficiens croient remarquer cet eflet, & qu'il devienne fenfible par la comparai- fon d’une certaine période de temps:nous en donnerons des exemiplés dans ce Mémoire. Enfin il fuit de ce princi- pe,'que de fiecle en fiecle la quantité de ce développe- ment diminuéra'; mais quoique la quantité diminué continuellement & que celle de la pétrification & vi- trification augmente, ce fera toujours en moindre rai- fon én temps égaux, & fans que la combinaifon de ces forces arrive peut-être jamais naturellement jufqu'à l’anéantiflément de toute humidité, & à une vitrifica- tion complette; non plus que le côté de l'hyperbole, quand il feroit prolongé à l'infini, ne coincideroit ja= DE LA FLANDRE MARITIME. 9e mais avec fon afymptote puifque les efpaces wv, &, &c. a l'infini, feront toujours affignables, & ne pourront jamais devenir égaux à zéro. Nous favons toutefois par la révélation que cela doit arriver un jour, par l’in- tervention furnaturelle de la puiflance divine, au cas que les caufes naturelles n’ayent pas été combinées pour produire cet effet. » Les cieux, dit PApôtre S. Pierre, su » & la terre d’à préfent font réfervés pour être brû-ur. “cap.ITE » lés par le feu...... Alors, dans le bruit d’une ef-v.v.7.10. » froyable tempête, les cieux pañléront, les élémens y» embrafés fe difloudront, & la terre, avec tout ce » qu’elle contient, fera confumée par le feu. ” o 10°. De la confidération de cette loi, il femble auffi s’enfuivre qu'on peut la regarder comme une des prin- cipales caufes, pour lefquelles les terres les plus éleyées & les chaînes des grandes montagnes abondent en pier. res, marbres, minéraux, &c. à proportion de leur élévation, d'autant que ce principe de pétrification & vitrification, ayant dès le commencement furmonté le principe contraire, y agit depuis plus long-temps, & que lefler eft toujours en raifon du remps. Cette même loi nous explique encore, & pent-être avec autant de folidité, que les creux & les fentes, que l'on fuppofe dans lintérieur des montagnes, & le moins de réfiftance que l’on en fait réfulter , pourquoi les volcans sy manifeftent toujours, & pourquoi les. efforts des tremblemens de terre y font plus fenfibles que partout ailleurs. C’eft fans doute par la même raifon que nous venons d’alléguer, que le phlogifti. que y à dû furmonter le principe oppofé d'humidité , & depuis plus long-temps & plus parfaitement que dans: les pays plats, prefque toujours humides & quelquefois: marécageux. À Je ne m'arrèterai pas davantage à ces confidérations à ‘SUR PANCI EN "ÉTAT générales fur la Théorie de la Terre. Les réflexions ci-deflus indiquées font les feules dont j'ai befoin dans ce Mémoire, & je me propofe de déduire ailleurs, d'une maniere plus étendue, ces principes généraux avec leurs preuves, & d’en montrer les applications principales au {yftême général des chofes. 4. IT. Application de ces Principes généraux à l’ancien Etat de la Flandre & à fes changemens Jascee Tee Ex faïfant l'application de ces principes géné- raux fur la Théorie de la Terre au fujet de ce Mémoi- re, Jen conclus que les Pays-Bas, dans toute cette étendue du plat pays, où il ne fe trouve ni montagnes, ni collines, ni rochers, ont été certainement couverts de la mer, & qu'ils en faifoient le fond dans des fie- cles très-reculés, mais beaucoup plus récens que le dé- luge univerfel. Je crois cette aflertion. vraie, non-feu- lement à l’égard d’une petite partie de la Picardie, dé- puis la côte élevée qui commence entre Boulogne & Calais, & de toute la Flandre maritime, de la Zélande & de la Hollande; mais auffi par rapport à une partie du Brabant & de la Gueldre, de la Frife Occidentale & Orientale, de la Weftphalie, des Duchés de Bremen & de Ferden, des Duchés de Lunenbourg, de Lawen- bourg, d'Holftein, de Mecklenbourg & de la Pomé- ranie, jufqu'aux terres où commencent les côtes éle- vées dans la Mer Baltique, vers les montagnes de Wal- dow. Il y a lieu de croire que ces terres ont été autre- fois toutes inondées, long-temps après que l’intérieur de ces pays, qui eft élevé & montagneux eut été à fec. 12°, Je tire cette aflértion, (qui pourra paroître étrange © DE LA FLANDRE MARITIME. 73 étrange à la premiere vue) de tout ce que j’ai vu moi- même de ces pays, & de rout ce que j'en ai appris d’ail- . Jeurs. Les parties qui font vers les côtes, font bafles, plates, peu élevées au-deflus du niveau de la mer, en quelques endroits même elles font au-deflous ; fans montagnes & fans autres collines que celles qui paroif fent manifeftement avoir été des bancs de fable dans la mer. En examinant de près le pays entre Gand & Aloft, on a des preuves frappantes de cette aflertion ; cette partie du pays ayant une parfaite reflemblance avec les bancs de fable fur la côte de Flandre, qui font appellés Bancs Flamands, & dont une partie eft a découvert dans les bafles marées. Il y a de l’appa- rence qu'avec le temps ces bancs feront auffi laiflés à fec, comme nous le dirons ci-après. Quelques parties de ces pays ne préfentent encore que des fables, que la mer a laiflés à découvert, fi on en excepte certaines: bruyeres, comme au nord du Brabant, (au-delà d’An- vers vers Bréda & Bois-le-Duc) une partie de la Guel- dre, de la Weftphalie & du Luxembourg. D’autres confiftent en ces mêmes fables, déja couverts d’un fol: de marne ou de terre labourable de plus ou moins d'épaifleur & de richefle, felon les caufes qui l'ont pro-. duit, ces caufes font principalement le fédiment, dont: la: pluie abonde, & la quantité de limon que les rivie- res & les courans d’eau ne ceflent d'amener & de ré- | fles & plates; mai Ôt qu'on pandre fur les terres bafles & plates; mais auffitôt qu'on fouille ce fol à une profondeur convenable, on trouve immanquablement les anciens fables de la mer, rem- plis de coquillages, d'os de poiflons, & d'autres fubf--Vid- Verf- 24 tegen. p. RG tances marines, quelquefois dans leur état naturel, quel-! quefois changées, pétrifiées ou incruftées, {lon la na- ture des fucs qui y abondent. C’eft ce qu'on voit dans Tome L. | : 03 NN o ® (0) © hf SMRUPAUN CHEN ÉTAMS prefque toute la Flandre maritime, la Zélande, la Hoë: lande, &e. | D'autres parties enfin reftent encore pleines de lacs & de terres marécageufes, faute d'une pente {uffifante- ur l'écoulement des eaux qui y ont été laiflées au-- trefois par la mer, & que la pluie & l’écoulement des eaux des terres élevées dans l’intérieur des pays ne cef-- fent d’entretenir ; telles font différentes parties des Pro vinces-Unies., le Nider-Munfter , le Comté d'Embden les Duchés de Bremen, de Ferden, d'Holftein & de: Mecklenbourg. 13°. Si quelqu'un avoit les moyens, & vouloit pren- dre les peines de parcourir ces pays, je crois qu'il dif tingueroit très-facilement ce qui a fait anciennement les côtes de la mer, fes promontoires & fes caps, fes bayes & fes golfes, avec leurs entrées & enfonce- mens au-dedans de l’ancienne côte élevée. L'on voit par-tout que cette élévation de terrein n’eft pas comme les montagnes ordinaires , dont la déclivité s'étend com- munément quelques lieues dans le pays; ici le change- menteft fubit, & l'afcente commence tout d’un coup, comme on le voit prefque par-tout aux bords de la: mer. Ce qui peut encore fervir À faire connoître lan cienne côte élevée, c’eft la grande différence qui fe: trouve entre le terrein qui eft dans lintérieur de cette: côte, & celui qui eft entre elle & la. côte nouvelle, l’ur étant oufablonneux ou marécageux ; l’autre élevé, pier- reux & inégal. : 14°. C’eft du moins ce que j'ai fouvent remarqué. en commençant entre Boulogne & Calais, vers Wit- fan & Blancnés, la côte y eft manifeftement différente; vers Boulogne elle eft élevée & remplie de rochers, vers Calais au contraire elle eft fablonneufe, telle qu’on la trouve fur toutes les côtes de Flandre & de Hol- DE IA FLANDRE MARITIME. 9$ Jande. L'ancienne côte élevée pañle fur la droite de . “Guifnes & d'Ardres, par le Mont-de-Ruminghem juf- qu'a Watte, où, au temps de Céfar, & même jufqu’au neuvieme ou dixieme fiecle, il y avoit un golfe ou enfoncement de mer jufqu'à Saint-Omer , Blandeque & Wifernes Ceci fe prouve clairement par un diplôme -de Louis VII de lan 1156 & par Ortelius, cités l’un ;8. & l'autre par M. Des Roches dans fon Mémoire de 47 © «P. 57e 70. je Malbrancq dit qu'a Guifnes, Ardres, Marickercke, + Mo- Watte, &c. à fepr ou huit pieds-de profondeur, on ne rinis Tom. trouve que des fables de la mer, remplis de coquilles, P-54 de conques & de toutes fortés de fubftances marines: il fait mention de quelques ancres d’une grandeur ex- traordinaire, qui ont été trouvées profondément enfe- velies fous la terre à Clairmarais & Blandeque, de mé- me que la proue d’un navire, trouvée à Wifernes, au- -defflus de Blandeque. Le petit Monaftere de S. Mom- molin, entre Saint-Omer & Watte, étoit alors dans une ifle, & l’on foutient qu'a Watte on trouve encore les marques du mouillage des vaifleaux. De Watte, cette ancienne côte élevée va aflez droit à Mont-Caffl par Ravesberg, Balemberg, Domberg, qui font toutes fituées fur des hauteurs, comme leurs noms l’indiquent. De Caffel cette chaîne pañle par Ecke, Carsberghe, Cramberg, Locre, Swartsberg, Mont Ke- amele ( qui eft très-élevé ) Witfecatte, Meflines Rofen- _ Dberg & la Hutre, jufques vers Warneton. De-là en -côtoyant la gauche de la Lis, la chaîne pañle par Houtem, Holbeck,, Ghélewe, Mont-Dadzeele, & tour- ne par Wincle-Cappele jufqu'à Courtrai; maïs au midi de la Lis, la chaîne commence vis-à-vis de Meffine, par Mont-Vervick, Mont - Hallewyn, Pottelberg, &c.' jufqu'à Courtrai, y donnant fortie à la Lis dans le plat pays. N De Mo- #inis Tom. Ep. 54. Antig. p. IIS. GE. SU RON ANN CUT E Ne VER AT) ne . De Courtray, la chaîne de montagnes va fur Ou- denarde par Clythberg, Suevelghem, Wulsberg, Caf- tre, Spyteberg & Moreghem. L’Efcaut fort du pays élevé ‘près d’Oudenarde, & la chaîne d’élévation tourne à une lieue ou environ à V'EfE d’Aloft, près d'Affig- hem : on y trouve encore une quantité de fubftances marines dans les carrières. De-à, la chaîne de l’ancienne côte élevée tourne vers Merchten , Grimberge; Laecken, &c. jufqu'a Vilvor- de, où il doit y avoir eu originairement un enfonce- ment de la mer jufqu’à Bruxelles, de chaque cèté de la Senne, où préfentement fe trouve l’Allée verte. Le Parc, qui eft à l'endroit le plus élevé de la ville de Bruxelles, contient prefqu’a la furface de Îa terre des pierres nummulaires, des oflelets d'étoiles de mer & autres débris de corps marins en abondance. Le fort de Monterey, près de Bruxelles, ainfi que toutes les hauteurs qui l’environnent jufqu'à Fleurgat, confiftent en débris de corps marins, qui font, pour ainfi dire, à découvert dans les endroits où l’on n’a pas fouillé. KE en eft de même des hauteurs qui dominent l'Abbaye de Foreft. Dans la vie de S. Rumold , Apôtre de Malines, on lit que l’année 700, la mer avec fon flux & reflux venoit jufqu'a Malines, qui en prenoit même fon nom, felon Malbrancq, qui dit que Malines & Ledone fignifient flux & reflux. Verftegen dit que lorfqu'on fit le canal de Bruxelles, qui pafle par Vil- vorde, & qui fut commencé en 1ÿ50, & achevé en 1561, on y trouva beaucoup de débris & de dépouil- les de la mer, comme ancres, & os de poiflons, & entre autres le fquelette d’un hippopotame, qu’il nom- me Elephant marin, & quil dit avoir vu lui-même. On conferve une côte de Baleine, trouvée dans une carriere près de Vilvorde à plus de 60 pieds en terre. Lo] DE LA FLANDRE MARITIME. 97 De Vilvorde, la côte élevée va aflez droit par Cor- teberghe, &c. jufques près des portes de Louvain. Cette ‘derniere Ville eft en partie dans le pays élevé; fes rem- parts, du côté de Bruxelles & de Malines en faifoient manifeftement partie, comme un coup d’œil fur la na- ture & la conformation du terrein en convaincra un obfervateur éclairé. À V'EfE de Louvain, & rout près de la Ville, il y a eu originairement un golfe ou en- foncement de la mer, qui entouroit cette côte vers l’Abbaye de Parcq & le château de Heverlé. De Lou- vain, l’ancienne côte tourne vers le Nord, jufqw’à Aerfchot, de-là à Sichem & Dieft, & fe retourne vers Leeuwe & Borcholen jufqu'àa Tongres, autrefois port de mer célebre, (fi l’on en croit Verftegen ) & capitale de tout le pays d’alentour. De Tongres, la chaïne d’élévation va jufqu’aux bords de la Meufe près de Maeftricht : de-là elle pañlè par Valckenberg, à Aix-la-Chapelle, où on trouve encore une infinité de fubftances marines & de débris, qui montrent que la mer y eft venue dans des temps poitérieurs au dé- luge. D’Aïx, la chaîne pañle aux environs de Dueren, Lechenich, &c. jufques vers Herfel, fur les bords du Rhin, entre Bonne & Cologne. L'on trouve encore vers cet endroit des veftiges évidens qui montrent qu'il doit y avoir eu un volcan, ou une éruption ignée - paflagere dans des temps très-reculés, puifque l’on y trouve de la lave & des pierres-ponces en quantité, dont j'ai vu différens morceaux dans le riche cabinet de curiofités naturelles de Son Alteffle Royale le Duc Charles de Lorraine à Bruxelles. Il y a de la matiere propre aux volcans à Steflen, village fitué entre Mal- medi & Andernack, où il y a des rochers noirs, fem- blables à des briques que le feu a vitrifiées & bour- foufflées en cellules : ces rochers ne différent en rien des © 79 US RS AU. C HE UN. UT ALTER : laves du Mont-Vefuve, & il en réfulte une preuve a£ Anna, (ÆZ forte qu'il y a eu autrefois un volcan dans ces en- Lib. x1ix. droits. Tacite rapporte que de fon temps ce pays fut c.57 brûlé par des feux fortis de la terre. $ 13°. Mais les monumens phyfiques & hiftoriques, qui exiftent encore à l’égard de quelques uns de ces derniers endroits, m’obligeront de m'arrêter un mo- ment li-deffus. l Voyezla À Aïx-la-Chappelle 1l y a une élévation ou colline Théorie sbpellée le Loesberg, qui eft ifolée au milieu d’une par Mr. plaine entourée de montagnes, qui forment une efpece Seedham, d'amphithéatre , Ouvert du côté qui regarde le bäffin Dr ? de la mer; cette élévation, ou montagne marine, eît plus près de cette ouverture que des autres côtés, qui font à cinq ou ou fix lieues de diftance; elle meft compofée que de fabies, de coquilles, de coraux, de madrepo- res, & de mille autres dépouilles marines qui y ont été dépofées par les courans des eaux de la mer, à leur ‘entrée dans ce golfe & à leur fortie Le Mont S. Pier- re, près de Maeftricht, contient une irfinité de fubf- tances marines, comme conques, coquilles, poiflons pétrifiés , débris de navires, &c. dont ïül exifte une multitude dans le cabinet de curiofités naturelles de Son Altefle Royale à Bruxelles (*). Après cela on ne peut saifonnablement douter que la mer n’y foic venue bri- fer fs flots, & dépofer toutes ces fubftances marines dans quelque période de tempsreculée, & qu'alors toute la Campine de Prabant, le pays de Bréda, Bois-le Duc, Horne, &c. n'aient fait partie de Ja mer. ne (*) Environ Van 1770, on a trouvé, en fouillant ce Mont S. Pier- re, la tête d’un Crocodile en entier & pétrifiée. Suivant fes dimenfions , l'animal entier devoit avoir quarante pieds de long : on en a envoyé un deffein exaéten Anglecerre, pour le montrer aux Phyficiens du pays. - RS 7 Er 2 DE LA FLANDRE MARITIME. 79 … De même à l'égard de Tongres, les monumens tant hiftoriques que phyfiques qui reftent encore, ne laif- ent aucun lieu de douter qu’elle n’y foit venue, & qu’elle n'ait couvert tout le pays intermédiaire. Cette Vilie, comme on le fait, 2 été autrefois célebre, & la Ca- pitale de tout le pays d’alentour, fous le nom d’Atua- taca, Atuatica où Tungrenfium-Civitas; c’eft le fenti- ment de Cellarius, d'Anville, & des Auteurs les plus judicieux , qui d’après Céfar , Pomponius-Mela, & quel- ques autres anciens, foutiennent que Tongres eft la même qu'Atuataca. Elle fut bâtie par les Cimbres, qui y laiflerent fix mille hommes en allant à leur ex- pédition contre les Gaules & l'Empire Romain, & qui (après la défaite de cette multitude de Barbares par Marius, près d’Aix-en-Provence) s’y fortifierent & s'y défendirent, malgré les efforts que firent tous les ha- bitans d’alentour pour les détruire. Au temps de Cé- eur far , ils furent en état de mettre fur pied une armée dé Gall. Lib. 29000hommes. Atuataca fut faccagée premiérementpar I » d'arbres grands & touflus, qui atteignent de ce côté- » là jufqu’a la forêt Hercynienne. On ajoute, que les » Cimbres font fitués fous cette partie du ciel où le » pôle eft fi élevé, à caufe de la déclinaifon des paral. » leles, qu'il paroït prefque directement au-deflus de » leurs têtes, & que leurs jours & nuits, étant pref- » qu'égaux, & n'en ayant qu'un en chaque année, ils » la divifent en deux parties. (**) « $ (*) C'eft ici une vive image des premieres difperfions & popula- tions du monde. *e) Maximè conje@ura erat Germanorum effe Nutiones, eorum qui ad Septentrionalem Oceanum pertinent, funiptz ex magnifudine corpo- rum, &c. & quia milites Germant Cimbros dicunt. Ali Germaniam re- gionem ampliffimaem, ab exteriort mari & partibus ad Septentrionem ver=. gentibus adortum folis quxte Moœotidem paludem refle@i, atque ibi Scy= thiam Ponticam contingere dicunt. Inde Gentes eas inter fe permaifceri. Hos non uno lomnes\impetu, neque continenter, fèd quoftennis , verno tempore, fedibus fuis exire , atgue femper ad ulteriora progredi; hoc mo- do per multun tempus tllos per Continentem armis vagatos ; itaque etft multa fint peculiuria adepti nomina, tamen Germano-Scythes eorum exer= , _ DE LA FLANDRE MARITIME. 99 L'on ne peut rien dire de mieux conje@turé ni de plus jufte fur l’origine, les migrations & les premieres demeures des Cimbres, avant qu'ils aient été connus des Romains, que ce que nous venons de citer de Plu- tarque. Strabon s'accorde parfaitement avec lui , en . difant : » il y a lieu de conjecturer que les Cimbres me- » nerent la vie errante , fans demeure fixe, & qu'ils » avoient ravagé tout le pays jufqu'au Palus-Méoti- y de (*). C’étoit d'eux que le Bofphore Cimmérien » eut fon nom, comme fi on difoit Cimbrien ; car ceux » que les Romains nomment Cimbres , font appellés -» Cimmériens par les Grecs ((). Pline paroït n'avoir pas remonté fi haut vers l’ori- gine des Cimbres, puifqu’il ne fait autre chofe que dé. terminer à quelle Nation Germanique ils apparte- noïent. » Il y a cinq efpeces de Germains, dit-il; les » Vindels, les Ingevons, dont les Cimbres & les Teu- #» cons font partie; les Iftevons, dont les Cimbres Mé- » diterranéens ( ou ceux qui habitent l’intérieur du citum vocari. Quidam Cimmerios primkm à prifeis Græcis cognitos , non -magnam mortaliunr portionem in Afiam à Moœotide tranfivifle autumant. Horum mazimam & bellicofiffimam partem , in extremis ad mare ultimum partibus fedes pofuifle quæ ufque ad Hercyniam fylvam introrfum per- singunt. Polum verd Septentrionalem haud multum ab eo cœli pundo, gzuod direcè ab eorum vertici imminet, abefle , &c. Plut. in Vità C. Ma- ri. Tom. I. p. 411. Edit. Lugd. Bat. apud Elzevir. 1655. Gr. & Lar. 2 vol. in-fol. C) dr txrbor À 5 à xywmepl@ nds Birpop@>, die xoBeinss, xspuspiae rés xijuBeE d'ounoaÿlay Tai AA lu ay. : (6) Idem non inepté conjeäuré colligit Cimbros homines fuiffe præ- dones az vagos armifque ad Moœotin ufque lacum progreffos : \6 fuifle "ab is Cimmerium Bofphorum denominatum, quuft Cimbricum , cum Græ- ci Cimbros, Cimmeriorum nomine afficiant. Swab. Geog. Lib. VII. p. 450. Edit. Edir. Amft. 1707. 2 vol. in-fol. Gr. & Lat. : Q i Loc.fup. cit, too ::-S, URL IIAAN: CITE. NN) ENT'AUT 3 pays) font partie; les Hermions ou Hermandures , » & enfin les Peucins (*). « Ici Pline diftingue deux Nations de Cimbres, l’une apparemment qui habitoit fur les bords de la mer, & occupoit la Cherfonefe Cimbrique; l’autre plus au-dedans du Continent. 3°. L'on ne fait pas exactement non plus quelle . fut la raifon qui fit {ortir les Cimbres de leurs pre- miéres demeures en Allemagne, pour en chercher d’au- tres dans les Gaules & dans l'Empire Romain. Plu- fieurs caufes pouvoient y contribüer ; comme des guer- res inteltines, ou que leur pays n’étoit plus en état de les nourrir, à caufe de l’accroiflement de leur nom- bre, comme le veulent Strabon & Plutarque. Florus au contraire dit en termes exprès, que ce fut l’Océan qui fe déborda fur leurs terres, qui caufa cette migra- tion, & les obligea de chercher ailleurs des demeu- res.» Les Cimbres, les Feutons & les Tigurins, ( dit-il) » s’enfuyant des extrémités de la Celtique, à caufe que » l'Océan avoit inondé leur pays, cherchoient par-tout » de nouvelles demeures : étant chaflés des Gaules & » de l'Efpagne, ils fe rournerent vers l'Italie, & en- » voyerent des Ambafladeurs au Sénat, priant les Ro- 5 mains de leur donner quelques terres, où ils puflent » habiter ((). . Strabon fe moque de cette opinion, maïs avec quelle = = —— mm (*) Genera Germanorum quinque. Windelici , Ingevones, guorume purs Cimbri & Teuton:; Iffæevones ; quorum pars Cimbri Mediterranet ; Hermiones five Hermanduri; quinta pars Peucini. Plin. Hift. Nat. Lib. : IV. c. 14. Edir. Froben. Bafl. 1525. in-fol. mag. (6) Cimbri, Theutoni; atque Tigurini ab extremis Galliæ profueæ, cùm terras eorum inundaflet Oceanus, rovas fedes toto orbe quærebani : exclufique Galli4 & Hifpanié, cm in Tialiem remigrarent mifére legatos ad Senatum; petentes ut Martius populus aïçquid fibi terre daret, &c. Flor. Lib.IlI. c. 3. Edit. Salmañi cum Notis varior. apud Elzevir. 1660. in-8°. DELAFILANDRE MARITIME. 2o# taïfon? Voyons fes propres termes. » Par rapport aux » Cimbres, une partie de ce qui sen dit eft faux, » üne autre partie n’eft guères croyable. On auroit » de la peine à admettre que ce peuple ait erré & ra- » vagé fi loin de chez eux(*), parce que demeurant dans » une Péninfule , ils en furent chaffés par une trés-grande » inondation ; ce qui ne peut point étre vrai, parce qu ils » y tiennent encore la même demeure qu'ils y avoient au- » trefois. 11 eft: ridicule de fuppofer que les hommes » fe fâchent ainfi contre des effets tout à-fait naturels » & qu’on voit conftamment deux fois par jour, juf- » qu'au point de s’exiler de leur pays par indignation. » Ü n’y a pas la moindre apparence de vérité en ce » qu'on a dit que les Cimbres prirent les armes pour » combattre contre ces inondations, car la fuite des » marées & de la fubmerfion ordinaire des terres qui » en réfulte, ne devroit pas donner lieu à de pareilles » abfurdités ((). Et ce paroft être un conte fait à plai » fir, qu’il étoit arrivé une marée extraordinairement » grande, qui avoit de beaucoup furpañlé les ordi- » naires (+). A 34 2 xéppomoer oxeier meyéay TAmwuupie sÉeAle Éx mév Témar x) yae vw Sxuct ru) joe) Li bpor mp olsger. [O1 one dE mrdoals, 70 SuwBUSe more Manwuvzidh ÜreeBa ns. (+)-De Cimbris fenè nonnulle male diferuniur, quædam verd medio- criter credbilia. Haud enim hujus generis caufam admiferis, ut inde errabundi jach fint, ad latrociniaque converfi, quia Peninfulam habitan- tes, ingenti quadam inundatione compuifi, natalia loca deferuerint; etenim nunc tenent eandem Regionem quam prius tenuerunt. Div profe“ù ridiculum eff, ut homines ad eventus, quos perpetud natura ef- fecit, per dies fingulos bis accidentes \\ indignatr à patrio folo digrede- rentur : minemèe entm veré dixifle videtur, qui ait Cimbros adverfus inun- dationes arma fumpfiffe. Ipfa enim æffuariorum feries, 6 vulgata regio- nis mmerfio, tales exhibere abfurditates non debuit. Res enim fiéta effe videtur, quod ingens ade6 Æftus obvenerit aliquando, ut reliquos exceflerit. Geogr. Lib. VII. pp. 283. 284. Edit. Bafil. il a 102 SUR l'ANCIEN ÉTAT Pourquoi traite-t-il de fiétion ce que l’on dit des ma- rées extraordinaires dans les premiers temps, où la mer éroit plus haute en comparaifon des terres (N°. 27.) qu’elle n’eft à préfent, puifque nous voyons encore au- jourd’hui aflez fouvent de telles marées qui mettent les pays voifins en danger d’être inondés? Strabon, tout judicieux qu'il eft en général, raifonne ici aflez mal, faute de connoiflances plus étendues & plus exaétes des mers du Nord. Il eft manifefte par toute la fuite de fon difcours, que la tradition & l'opinion communes étoient, qu'il y avoit eu une telle inondation, & que cette inondation chafla les Cimbres de leur pays natal, qui paroît conftamment par tous les monumens avoir * été la Péninfule de Jutlande, appellée de leur nom la Cherfonefe Cimbrique. 4°. L'on fait le peu de profondeur de la mer fur les côtes de Jutlande, de Schlefwic & de Holftein, fur- tout depuis le Jutfche Rif jufqu’à l'embouchure de PEI- be; ce n’eft qu'une fuite de bancs de fables, entrecoupés par différens canaux. Il refte encore des monumens certains que l’Ifle appellée Heyligheland ou Helgoland, fiameufe pour avoir été le cheflieu des facrifices des Cimbres à leur Déefl Fofta, fut autrefois bien plus étendue qu'elle ne left à préfent; l’on connoiït les def. . tru@ions faites par les inondations des années 800, 1300, Er r$00o & 1649. L'on connoît de même les ravages faits ching. To. par les inondations de la mer fur toute la côte de Schlef L-p-270. wic & de Dithmarch, principalement pendant les an- nées 1300, 1354, 1362, 1483, 1532 & 1615; mais enfin celle de 1634 y mit le comble, Il périt lonze d'O&obre de cette année-là dans les Ifles de Nord- ftrandt & d’Evderftedt feules jufqu’à 8515 perfonnes; id. p. & à préfent il ne refte qu'une très-petite partie des an- 269. ciennes Ifles fur cette cote, DE LA FLANDRE MARITIME. 203 Par conféquent tant de ravages modernes, pour ainfi dire, nous donnent une forte préfomption .de croire qu'anciennement ces Ifles devoient être bien plus confidérables, pour les rafons ci-deffus déduites; & que ce fut quelqu'inondation, qui, ayant autrefois diminué grandement cette Péninfule Cimbrique, fut caufe de * cette émigration, qui leur devint cependant funefte par leurs guerres contre les Romains & leurs défaites pref- que totales par le Conful {. Marius, dont la derniere arriva 102 ans avant.l’Ere chrétienne & la 652me. an- née de Rome, après une guerre de douze ou treize ans. . L'on peut voir le détail de tout ce qui regarde la guerre des Cimbres dans les Auteurs cités ci-deflous en note (*), & dans toutes les Hiltoires Romaines; mais ces détails ne font point de mon fujet. 35°. Cependant il eft aflez certain, à caufe des mo- numens qui en reftent, qu'avant l’irruption des Cim- _bres dans les Gaules & dans l'Empire Romain, des corps de cette Nation fe fixerent ailleurs; car Mal- brancq dit expreflément : » nous favons que les Cim- » bres vinrent du Danemarck ou de la Germanie Sep- » tentrionale; & qu'avant de faire leur irruption dans » la Gaule Celtique ( que Parercule place à Pan 443 » de Rome, du temps de Minucius ) ils vainquirent par » le moyen de leur très-grande.mulritude les Britanis » qui avoient fubjugué les Morins. Ils s'emparerent ee a [*] Epir. Livi. 67. 68. Plucarch. in Vit. Mar. c. 36. &c. & in Pa- rail. Appian Celtic. Val. Max. 5.8: 4. 6. 9. 14: Auét. de Viris Illuft. c. 67. Plin. Hift. Nat. 7. 22: 16. 33: 17. 1. 36. 1. Frontin. 1. 3. 6. z. 5. 3- 2. 2. 8. Eutrop. 5.1. Orofium. 5. 16. Velleium Patercul. 2. 12. Cæfar. de Bell. Gall. 1. 33. 40. 7. 77. Vegetium. 3..... fin. Et præzcipuè Pontanum in principio Hift. Daniæ, & Comit. du Buar Hift. des anciens Peuples de l’Europe. : 104 SUR L'ANCIEN ÉTAT » de tout le pays que les Frifons, les Hollandoiïs, les » Zélandois, les Flamands & les Brabancons occupent » aujourd'hui, de même que toutes les parties du pays des » Morins, qui compofent aujourd’hui les Diocefes de » Gand & de Bruges (*). va - Maisici Malbranca fe trompe aflurément en difant que. Parercule place l’'émigration des Cimbres & des Teutons, dans l’année 443 de Rome, qui revient à 311 ans avant Jefus-Chrift. Velleius Patercule dit feulement : » Alors les Cimb es & les Teutons pañlerent le Rhin, » Célebres peu de temps aprés par toutes nos défaites, » ainfi que par les leurs : en même temps Minucius » triompha des Scordifques ((), Æ C. Cecilius Metellus eut auffi part à ce triomphe, & immédiatement après on célébra le retour du luitre. Ces circonftances déterminent pofitivement l'époque de cet événement & dela premiere excurfion des Cimbres & des Teutons en-decà du Rhin; car il eft conftanc que Minucius & Metellus triompherent des Scordif- ques, un refte d'anciens Gaulois établis dans la Thrace, l'année 640 de Rome, fuivant les faîtes du Capitole, 113 Ou 114 ans avant J'Ere chrétienne, Les Auteurs s'accordent généralement que c'étoit. | sicette —— —— [*] Verum Cimbri, quos à Danid feu Germanié Septentrionali pro=. fedos novimus, priufquarr in Celticam irrumperent (:dpfum Parerculus refert ad annum urbis conditæ 443 florentibus Minutr rebus ) ingenti [ud multitudine Britannorum apud Morinos machinationes diffolverunt. Quid guid modo Frifii, Hollandi, Zelandi, Flandri, Brabanté occupant in- vafere; eaque Morinorum loca tenuere quæ modo Gandenfem & Brugen- Sem infulam venerantur. Malbrancq de Morinis Tom. I. p. 86. Torna- ci. 1639. 3 vol.in-4. Tortell. Achill. Gaff. d ($) Tum Cimbri & Teutoni tranfcendere Rhenum, multis mox noffris fiufque cladibus nobiles : per eadem tempora Minutius ex feordifcis trium- phum accepit clarum. Vell. Paterc. Lib, IJ. c. 12. Edir. Lipf. apud Plae= tin, 1627. in-fol. ; é male Von RE DRE 7 ea LITE TIR LA A 14 _ DE LA FLANDRE MARITIME. 7105 cètte même année que les Cimbres fortirent comme un eflain de la Cherfonefe Cimbrique, & fe joignirent aux Teutons, leurs voifins, pour chercher fortune dans les pays plus méridionaux. Ils furent pour la premiere fois aux mains avec les Romains dans le Norique, & y dé- firent le Conful Cn. Papirius Carbo, qui sy étoit avancé pour leur fermer le paflage : ceci arriva pen- dant le Confulat de C. Cæcilius Metellus & Cn. Papi- rius Carbo, l'an de Rome 639, fuivant Caton, De- nis d'Halicarnafle & Tite Live. Mais fuivant les Faf tes du Capitole 640, & 114 avant l’Ere chrétienne. Cependant, au lieu de marcher dès lors vers l’Ita- lie, comme on avoit lieu de le craindre, ils fe tour- nerent vers Îes Gaules & l’Efpagne pendant dix ans. [ls furent chaflés de l’Efpagne par le Préteur M. Fulvius, & rentrerent dans les Gaules, lan de Rome 65o, pour venir fondre fur l'Italie. Les Teutons & les Ambrons furent battus près d'Aix par Marius dans fon quatrieme Confulat, l’an 6$r de Rome, & les Cim- bres en 62, dans fon cinquieme Confulat dans la plai- ne de Verceil. Donc il eft manifefte , par le texte de Velleius Pa- rerculus : » alors les Cimbres & les Teutons paf- » ferent le Rhin, célebres bientôt après par nos dé- » faites, ainfi que par les leurs (*), » que cette pre- miere excurfion n'arriva que peu d’années avant leur défaite totale par Marius; & il n’eft pas moins évident par ce que difent Strabon & Florus, qu’une inonda- Locis fup. CIC, : tion dans la Cherfonefe Cimbrique fut caufe de leur Æmigration & de leur irruption dans les Gaules & dans JEmpire Romain 114 ou 115 ansavant l’Ere chrétienne ; { 1e) Tum Cimbri & Teutoni trarfcendere Rkenum multis mox noffris fuifque cladibus nobiles. Loc. cit. Tome I. | | R & 2669 . SUR DANCFE NAT de forte qu’en combinant les circonftances, on aura de la peine à reculer le déluge Cimbrique au-delà de vingt ou trente ans avant leur apparition fur le Rhin, dont parle Patercule, & au-delà de 130 ou 140 ans avant la naïflance de Jefus-Chrift;, & les Auteurs qui placent cet événement entre lestermes derr2ansjufquar4éans | avant Jefus-Chrift, comme la plupart le font, paroïf fent le plus s'approcher de la vérité; & M. Picard, qui le recule jufqu'à 340 ans avant J. C. vraifemblable- ment doit être tombé dans la même méprife que Mal- brancq, que Tortellius, qu'Achille Gafläre ou quelques autres modernes que je ne connois pas, mais dont l’au- torité n'eft affurément pas aflez grande pour prévaloir contre ‘les anciens que nous avons cités. “RTL 36°. Nous avons dit au commencement du dernier Päragraphe( N°. 35. ) qu'avant l'irruption des Cimbres dans les Gaules @ dans l'Empire Romain, des corps de cette Nation s’étoient fixés ailleurs que dans la Cherfo- nefe Cimbrique, & en particulier dans la Frife, la Hol- lande, la Zélande, la Flandre & le Brabant. Les annales fabuleufes, tant de la Grande-Bretagne que des anciens Morins , prétendent unanimement, mais je ne fais fur quelle autorité ou fondement, que divers Rois Bretons firent des irruptions fur le Continent, & fubjuguerent entre autres les Morins. | Elles placent ces événemens bien des fiecles avant l'Ere chrétienne; mais leur autorité eft de fi péu de poids, . qu'il ne vaut pas la peine de les difcuter. Ces annales légendaires ajoutent que les Cimbres vainquirent les ! Brétons & s’emparerent à leur tour de prefque tout ce que nous appellons préfentement les dix-ept Provin- | ces des Pays-Bàs. Ils y auroiïent fait fans doute un plus M long féjour, s'ils n'avoient point eu à combattre en même temps la fureur de la mer & les habitans ori- M au a > of 0 DE LA FLANDRE MARITIME. ‘toy ginaires du pays, ce qui eur fit prendre à la fin le parti de traverfer les Ardennes, tandis que les autres Cimbres paflerent la forêt Hercynienne pour pénétrer dans les Gaules & dans PEmpire Romain. Cependant ils ne quitte: rent pas entiérement le pays des Belges; une partie d'eux, appellés Saxons, fe fortifierent entre l'Océan & les rivie- res de l'Efcaut & de la Lis, vers l'Eclufe & le pays de Waes. C’eft d'eux que la Flandre Maritime prit le nom de Côte Saxonique. Une autre partie des Cimbres fe for- tifia à Atuataca , appellée depuis Tongres , felon que dit expreflément Céfar. » Ceux de Tongres furent » les defcendans des Cimbres & des Teutons qui, pen- » dant qu'ils firent leur irruption dans les Gaules & » dans lPltalie, laïffèrent leurs bagages & tout ce qui » embarrafloit leur marche, en-decà du Rhin, {ous 1x » garde de 6000 de leurs gens. Ceux-ci, après la dé- » faite des autres, furent long-temps en guerre, en at: » taquant leurs voifins ou en étant attaqués, jufqu'à ce » qué , d’un confentement général, onfit la paix, & ils » choîïfirent cet endroit pour demeure (*). _ De forte que les anciens Morins ou aborigenes du pays, pour autant qu’on peut fe fier à leurs anciennes traditions & annales légendaires, furent premiéremenc infeftés par les irruptions des Bretons, puis par les Cimbres , jufques vers l’an 682 de Rome, du’Ario- vifte, Roi des Germains, leur fit fubir fon joug; es — ————“ (*) Aduatici erent ex Cimbris Teutonifque propmati ; qui eum îter în Provinciam noffram atque Italiam facerent, his impedimentis, quæ fecum agere & portare non poterant, citra flinen Rhennm depofitis, cufs: todiæ ex.fnis ac præfidio 6000 Hominum reliquerunt. .Hi, poft eorum _ obitum, mulios annos exasitati, qum aliäs bellum inferrent, aliès il latum defenderent. confenfi. omnium .pace faë@x, hunc fibi domicilio lo- cum delegerunt. Cæfar de Bell. Gall. Lib. IT. c: 29. p. 53. Edit. in u£. Delph. Par. 1678. in-4°. Rÿ Cladem fcilicet per C.Marium Loco fup. cit, N°.33. © 308 SUR l'ANCIEN ÉTAT qui dura jufqu’à l'entrée de Jules Céfar, qui arriva vers l'an de Rome 696, & cinquante-fept ou cinquante- huit ans avant Jefus-Chrift. Alors les Morins, ainfi que routes les autres Nations où les Romains purent péné- trer, furent contraints de fubir leur joug fucceflive- . ment. Mais tout ceci n'eft point de mon fujet. : 37°. Revenons aux Cimbres : après toutes leurs cour- fes & leurs défaites, une partie d’entre eux s’en retourna dans fon ancien pays, s'y fixa de nouveau, comme le marque expreflément Strabon. Tacite, qui fleurit au temps de Trajan, environ un fiecle après Strabon, en parlant de l’état actuel des Cimbres de fon temps, dir: » les Cimbres demeurent dans la même plage de la » Germanie, & les plus près de tous de POcéan; ils » font maintenant un petit peuple, mais fort renommé. Ï1 s’y voit encore les traces de leur ancienne gloire » & grandeur : favoir, des forts & des retranchemens » fur l’un & l’autre rivage, par le circuit defquels l’on » peut juger de la grandeur & de la force de la Na- » tion, & ajouter foi au prodigieux nombre où l’on » fait monter leur armée. Ce fut l'an 630 de la » fondation de notre Ville, quon entendit parler » des Cimbres pour la premiere fois, Cæcilius Metel- » lus & Papirius Carbo étant Confuls CE . L'on ne peut guères douter que la plupart des ha- bitans modernes de la Jutlande ne foient les defcendans de ces anciens Cimbres qui y éroient reftés, ou quiy rétournerent de nouveau après leurs courfes. 33°. Nous en avons aflez dit pour démontrer que ÿ (*) Eundem Germeniæ finum proximi Oceano Cimbri tenert , parva AUn1C CÉVITAS,, fed gloria ingens : veterifque famæ latè veffigie manent, utrague rip cuffre, ac fpatia, quorum ambitu nunc quoque metiaris mo- lem, manufque Gentis, & 1m magnt exercités fidem, Tacit. de Mor: Gérman, €. 37- p. 661. Edit. Gronov. Amit. 1685. cum Not. varior, DE LA FIANDRE MARITIME. 209 le déluge Cimbrique, de l’exiftence duquel on ne peut douter, ne pouvoit être la caufe de la rupture de l’Ifth- me entre la France & la Grande-Bretagne; & confé- quemment ce n'eft point ce qui força la mer d’aban- donner la Flandre Maritime & ces autres pays dont noûs avons fait mention, & qu nous avons prouvé N°-11& avoir été originairement ‘dans le même cas. Ce pays F1 étoit déja l'habitation des Cimbres, quand ils en fu- rent chaflés par le déluge Cimbrique ; & par confé- quent toute cette région, au lieu d’être mer, comme nous avons prouvé qu elle l'étoit au temps de la grande révolution que nous avons décrite au commencement de ce Mémoire, étoit dès lors habitée, & même ex- ee traordinairement peuplée au temps du déluge Cimbri- N°. 3oin- que, comme le prouve la multitude de Er qui en a fortirent alors. L'on ne peut raifonnablement oi l’époque de ce déluge au-delà de 150 ans avant l’Ere chrétienne, par ù les raifons que nous avons fpécifiées plus haut : cepen- N°: 3: dant, par ce que je vais dire, il paroïtra décifif que, quand même on feroit fondé de reculer le déluge Cim- brique jufqu'à 3 ou 400 ans avant l'Ere chrétienne, (ce qui n’eft pas) on ne pourroit néanmoins y attribuer cetre grande révolution ci-deflus décrite, & dont il refte tant de veftiges dans tous les pays que nous avons N°.17, nomimés. ei 39°. Pour démontrer pofitivement que ie déluge Cimbrique ne fut pas caufe de tous ces grands chan- » gemens, il n’y a qu'à prouver que le détroit entre la ÿ He & l Angleterre & les côtes de.ces deux Royau- mes , auffi-bien que celle de la Flandre, &c. étoient à-peu- D près dans le même état 3 Ou 400 ans auparavant , que nous … les voyons à préfent, dü moins autant que cela peut regarder ces grands événemens, 50 SUR L'ANCIEN ÉTAT. Je tire cette preuve de ce que les anciens nous ont dit & confervé de Pythéas, qui naquit près de 40oans avant Jefus-Chrift, & fut au moins contemporain d’A- riftote (*); il étoit natif de Marfeille, colonie des Fho- céens, & {e rendit habile dans la philofophie , les ma- | 1 thématiques, laftronomie & la géographie. On con- jeéture avec raïfon que fes concitoyens, prévenus en faveur de fes connoïfflances & de fes talens, & dans la” vue d'étendre leur commerce, lui fournirent les moyens d'aller tenter dans le Nord de nouvelles découvertes, tandis qu'ils employerent Euthymenes à découvrir les pays du Sud. On ne fait guères plus de celui-ci ((). Mais quant à Pytheas, il parcourut toutes les côtes de l'Océan, depuis Cadix jufqu’aux derniers confins de l'Europe vers le Nord. Il obferva qu'a mefure qu'il s'avancoit vers le Pôle Arétique , les jours Sallon- geoient au folftice d'été, & qu’à l'Ifle de Thule, où il pénétra, le foleil, au folftice d'été, touchoit feulement horizon & remontoit auflitôt. Ce phénomene, qui ar- rive dans les parties Septentrionales de la Norvege & dans l’Ifle d’Iflande, & nullement dans les autres I£ les que nous connoiïflons entre l'Europe & lAméri- ue, eft une preuve de la vérité de fa relation, en ce qu'it dit avoir été dans ces pays Septentrionaux, & conf-. tate en même temps lidentité de PIflande moderne ou de la Scandinavie, avec la Thule de Pythéas, comme nous le dirons plus bas. De ee per chs «] Voyez-en les preuves & un Recueil de tout ce qu'on fait de Fr dans l'Hiftoire Liuréraire de la France, Tom. I. Part, I. pp. JE. 78. | à JR [6] On trouve le peu de circonftances. qu'on en connoîc recueil. ie dans PHiftoire Littéraire de la France. Tom, I, Parc. 1, pp. 78, 79 9. Ft 4 13 L nn 1 DE LA FLANDRE MARITIME. ve . La relation des voyages de Pythéas a paru fabuleuf à Polybe & à Strabon; mais Hipparque & Eratofthene fu- rent d'un fentiment différent, & en firent beaucoup: d'ufage;, & Gaflendi, Rudbech, Sanfon & M. de Bou- Mém. de gainville ont été de leur opinion en prenant la défenfe FR a de cet ancien Géographe , que les navigateurs moder- XX. nes ont pleinement juitifié. fe _ 40°. C’eft à lui donc qu’on doit la découverte de Pfle de Thule, & certe Ifle étant, felon lui, à fix jours v. Pin. de navigation du Nord de la Grande-Bretagne, & le. Hif- Nar- foleil ne s’y couchant pas au folftice d'été, ne PEUL cap! . être que l’Iflande ou la Scandinavie, alors Ile. Cepen-, dant, feion le rapport qu'en fait Tacite, qui dit que , In Vi la flotte Romaine, en faifant lé tour de la Grande- 8" Bretagne fous Agricola ,au temps de l'Empereur Vef- ; pañien , étant auprès des Orcades, pouvoit voir l’Ifle de Thule; par jconféquent cette Thule ne pouvoit être l'Iflande, qui en eft à 100 lieues plus au Nord, mais quelques-unes des Ifles de Scherlande , qui ne font éloi- gnées que d’environ vingt lieues des Orcades, & leurs montagnes & Rochers étant fort élevés pouvoient ètre vus de la flotte Romaïne. Ainfi on ne peut pas rai- fonnablement douter que la Thule de. Tacite ne foit toute autre que la Thule de Pythéas. 13 C’eft fans raifon que quelques -uns croient que la Thule de Pythéas fut l’Ifle de Bus, dans la latitude de 57°. 35. N. & r40 lieues au Sud-Oueft de PEflande, qui eft préfentement enfoncée & perdue dans la mer, fans qu'on en trouve prefqu'aucun veftige; puifque ni fa latitude, ni fa fituation à l’égard de la pointe Septen- trionale de la Grande-Bretagne, ne répondent aucune- ment, à ce que difent Pythéas & Pline aux phéno- menes du foleil qu’on y voyoit. . 41°. Cet.habile Marfillois eft le plus ancien écri- Tom. N° ut Î , €. 10. 122 SUR L'ANCIEN ÉTAT vain des Gaules qui nous foit connu; le plus célebre de fes Ouvrages étoit intitulé : De ambitu Terræ;, mais ni cet Ouvrage, ni aucun autre de lui ne nous font parvenus, quoique quelques- uns exiftaflent encore à la fin du quatrieme fiecle; ils étoient écrits en Grec, qui étoit alors la langue des Marfeillois. Strabon le cite fouvent, fur-tout dans le premier Livre de fa Géo- graphie. Maïs ce que Pline dit de lui eft décifif pour le fentiment que je foutiens ici. » Les Ifles Britanni- » ques, dit-il, renommées tant chez les Grecs que chez » nous, font entre le Nord & l’Oueft, vis-à-vis de la » Germanie, de la Gaule & de l’Efpagne , qui font les » parties principales de l’Europe, & féparées d’elles par » une mer aflez confidérable. La côte de la Bretagne « eft éloignée de Gefloriacum(*), fur la côte du pays » des Morins, en prenant le trajet le plus court, au » moins de $o milles. Le circuit de l’Ifle Britannique, » fuivant Pythéas & Ifidore, eft de 382$ milles ((). Par conféquent Pychéas l’avoit reconnu pour Ifle de fon temps , ou par la relation des habitans, ou par fa propre expérience, puifqu'il donna la quantité de fa cir- conférence ; & ceci dans un fiecle antérieur , ou pour le moins égal à celui jufqw’où il feroit poffible de reculer le déluge Cimbrique; ce qui ne laïfle aucun doute que ce déluge ne pût être ni la caufe ni l'effet de la rup- ture — ——— re *] Boulogne, felon Cellarius, d'Anville, & la plupart des Auteurs; mais felon Malbrancq, c’étoit un port de mer près de Saint-Omer, à 5o milles de Douvres. fe us - , [$] Britannia Infule clerz Græcis moffrifque monumentis, enter Sep- éentrionem & Occidentem Jacet, Germanie, Galliz, Hifpanie , mulib maximis Europæ partibus magno intervallo adverfa; hæc abeff à Gefo- riaco Morinorum Gentis littore, proximo traje@u. . . L. M. minimum; circuitu verd patere tricies octies viginti-quinque M. Pytheas & Ifis dorus cradunt, Plin. Hift. Nat. Lib. ÎV. c. 16. Edit. fup. cit. DE LA FLANDRE MARITIME. 3 ture de l’Ifthme entre l'Angleterre & le Continent; puifque dans un temps antérieur à ce déluge, l'Angle- terre étoit déja reconnue pour Ifle, fans qu'il HRtoiE fe: le moindre monument ou la moindre trace d’un phénomene, auffi étonnant que l’auroit été la rupture récente de cet Ifthme & de l’abandonnement de tant de terres par la mer. Ainfi il paroît manifefte & évi- demment démontré que ce grand événement doit être néceflairement placé bien des fiecles ( peut-être dix ou douze) avant le deluge Cimbrique. 5 à GruVLE Inondations pofiérieures au Déluge Cimbrique, € quelques réflexions générales la-deffus. 42? Our ce grand événement & le déluge Cimbri- que, qui ont fait jufqw’ici le fujet de ce Mémoire , il y a eu dans la fuite des fiecles d’autres inondations fur différentes parties de ces pays plats & délaiflés par la mer ; & même il eft raifonnable de croire qu'an- ciennement ces inondations furent beaucoup plus fré- quentes & plus confidérables , que dans les fiecles pof- térieurs, & qu'à l'avenir elles feront moins fréquen- tes que ci-devant. Les principes que nous avons pofés (N£. 7, &c.) & fur-tout la diminution graduelle de la mer menent direétement à cette conféquence. La mer s'abaïfle, les terres au contraire s’élevent peu-à- peu par la quantité de fédiment & de limon dépofés par les pluies & les courans & par les débris des fubf- tances végétales & animales. Ces caufes doivent avoir, rendu, & rendront à l'avenir graduellement la mer moins en état de fe déborder fur les terres en dimi- nuant à hauteur relative, & la fituation des terres moins expofée à des inondations, jufqw’à les rendre à la fin Tome I, + 284 , SUR LANCNEN ÉTAT vraifemblablement impoflibles; quoiqu’à préfent elles ne le foient nullement, comme nous le dirons plus bas. 43°. Il refte des monumens hiftoriques & phyfi- ques de beaucoup de ces inondations particulieres dont nous parlons; & il ne me paroïît pas hors de propos de donner ici un petit détail par ordre chronologique de celles que j'ai recueillies dans différens Auteurs. L’an 18 de l’'Ere chrétienne, l’Ifle de Zélande, qui faifoit auparavant partie du Continent, a été coupée en plu- fieurs Ifles par une inondation de la mer accompa- gnée d’une tempête. La même irruption des eaux, en déchirant la terre, forma au Nord plufieurs embou- chures au Rhin,-qui n’en avoit auparavant qu'une feu- le, abimant en même temps une large étendue de ter- rein, d’où eft provenu le lac Flevum, connu des Ro- mains. Pline raconte que de fon temps la Zélande étoit continuellement ravagée par les eaux de la mer : il eft mort l’an 79 de Jefus-Chrift, enfeveli fous une irrup- tion du Mont Vefuve. En 860, la violence des vents & la force de la tempête furent fi grandes, que le Rhin ayant perdu la plus grande partie de fes eaux par le Vahal, par le canal de l'Iffel & par plufieurs autres canaux ; les fables fermerent tellement l'embouchure de cette riviere, près de Catwick, que n'ayant plus de {ortie, fes eaux fe répandirent dans le pays, rompirent les digues du côté de fa Meufe, & formerent une ri- vicre que l'on nomme le Leck, par laquelle la plu- part des eaux du Rhin fe déchargent (*). Vers la fin de lonzieme & au commencement du douzieme fiecle arriverent de vaftes inondations de la [*1 Ces faus font rirés des Auteurs dy pays. . conne . Voyez là - deflus dans la Principauté de Galles, où leurs defcendans -fleu- d'Angle- riflent jufqu’à ce jour avec des mœurs très-diftinétes de terre. En ::170, la Hollande, la Zélande, & même la Flandre Septentrionale jufqu’auprès de Bruges, furent inondées par l’eflet d’une grande tempête. Vers l'an 1225, la mer forma avec le lac Flevum ou Flavon, un golfe de neuf lieues de longueur, & connu aujourd'hui fous le nom de Zuyderzée. Le lac de Harlem fe forma, ou en même temps, Ou quelques années après. En 1277, la mer rompit fubitement fes digues, & fubmergea trente - trois villages entre Groeningue & Embden, & forma le golfe de Dollaert, qui eft tou- jours refté depuis une mer peu profonde. L'an 1337, une paralle inondation abima dix-neuf villages à l’'Oueft de l'embouchure du Hondt. En 1421, la mer fe déborda, & couvrit-toute cette étendue de pays qui fe trouve entre le Brabant & la Hollande, & forma le lac Biefbos, en inondant tout le terrein depuis Dordrecht jufqu’àa Gertruydenbersg: de maniere que plus de cent mille perfonnes furent noyées, & foixante & douze villages fubmergés. La . mer fe retira en partie, mais vingt-deux villages & deux Monafteres reftent encore fous l'eau Le ; Novembre 1530, prefque toute la Zélande fut inondée. nu En 1532, l'Île de Nord-Bevelande fut entiérement S i F #16 SUR TANCIEN ÉTAT fubmergée. Celle de Sud-Beveland perdit trois villes quelle contenoit, dont Berfele ou Borfele la Capitale. Romerfvalle, un grand nombre de villages, & plus de la moitié de fon territoire fut englouti ; & al en refte un bon tiers fous les eaux. En 1551, un pareil débordement inonda une partie. de la Flandre Septentrionale. Ea : 57°, une inondation fit beaucoup de ravages, & la moitié du village de Schevelingue fut emportée. En 1651, la mer rompit les digues de Harlem & de Saint-Antoine, & fit des dégâts extraordinaires en plufeurs autres Provinces. Au mois d'Oftobre 167$, arriva une inondation - dans la Province de Hollande, de Frif & d’Utrecht qui fit des dégats incroyables; en mème ie Oftende courut rifque. de. périr. Le 26 Janvier 1682, une tempête extraordinaire if joignant aux grandes marées de la pleine lune, durant un hiver fort pluvieux, les digues furent rompues en plufieurs endroits de la Flandre, du Brabant, de la Zé- Jande & de la Hollande; la mer sy jetta avec une telle violence , que les eaux fe trouverent de dix-huit pieds plus élevées que les terres, à la réferve des dunes. Les Provinces de Hollande & ‘de Zélande coururent rifque d’une perte totale; le dommage y fut fi grand, qu'on Peftima à plus de cent lions dtonn. Ballons dre, les eaux monterent jufqu'aux portes d'Anvers, de Dendermonde & de Bruges, & s’étendirent dans tout le pays de Waës & dans toute la Flandre Sep- tentrionale avec des pertes prefqu'incroyables. Les vil- les d'Oftende & de Nieuport en fouffrirent beaucoup, & leur dommage fut eltimé plus de quatre millions. On en peut voir un très-long détail dans les Mémoires. du temps. DC ni ja 2 DELAFLANDRE MARITIME. 229 En: 1717, linondation à Campen, en Overyfll, fur 4 plus haute dont on f foit fouvenu. Les 14 & 15 Novembre 1775, arriva une inon- dation dont toute la Hollande à extrêmement foufert: les villes d’'Amfterdam, de Munickdam, d'Edam, de Dordrecht, de Rotterdam, &c. les Ifles de Blancken- berg , de Roofenberg , EU RL inondées. T'inondationt à Campen en Overyflel, fut d’un pied trois pouces plus haute qu'en 1717. On pourroit afligner, s’il étoit néceflaire, beaucoup d’autres inondations, qui font arrivées depuis Vantiquité la plus reculée dans ces pays, outre celles que j'ai rapportées. 44°. Ces inondations proviennent principalement des grands vents de Nord-Oueft au Sud-Oueit, qui arri- vent quelquefois pendant les hautes marées des pleines & nouvelles lunes. Les caufes agiflent alors en com- mun & dans la même direction, & pouflent la mer avec tant de violence, qu'ils la forcent d'entrer en plus. grande quantité qu'aux marées ordinaires par le Nord de l'Océan Germanique & par la Manche. Les flots ainfi accumulés, fe jettent contre les côtes de la Flan- dre, dela Aaades de la Hollande, de la Frife, de la Jutlande, &c. à caufe du gifement de ces côtes, com- biné avec la fituation des mers; de maniere que ceux qui font fouvent témoins oculaires de ces deux caufes ‘combinées, font furpris que ces inondations ne foient pas plus fréquentes, plus terribles & plus défaftreufes dans. leurs effets qu'elles ne le font. 45°. Quoïque tout ce Mémoire tende à démontrer que la Flañdre Maritime & route cette grande étendue de pays, dont nousavons parlé, ont été ‘Conquifés fur la mer, dans des fiecles reculés, ce ne fut pas cependant, comme quelques-uns fe le font imaginés, par l'induf- 228 SU BILAN GTI EN. ÉTAT trie des hommes laborieux, qui ne manquerent pas de repoufler & de contenir la mer par des digues énor- mes, dès qu’ils jugerent pouvoir tirer parti d’un ter- rein qu'ils l’auroient forcé d’abzndonner : au contraire nous avons prouvé fort au long que ces grands chan- gemens font arrivés par des caufes naturelles, généra- les & communes à toute la terre, & que les anciens peuples voifins des mers, les Flamands entr'autres , ont feulement fait écouler dans la mer aux baflés marées, par des foffés & des coupures, les eaux qu’elle avoit laiffées en arriere de ce long. banc de fable, recouvert enfuite de dunes, { dont nous avons parlé N°. 29) dans des endroits profonds & plus bas que le niveau de la nouvelle côte, formée par ce grand événement, Fnfuite on y a conftruit des digues & des éclufes pour empècher le retour des eaux de la mer dans ces en- droits aux hautes marées, ordinaires ou extraordinai- res. La protection naturelle des bancs de fable & des dunes fur les terres du pays, femble yavoir fait oublier le danger qu’amenent de temps en temps des marées extraordinaires. Cet oubli fait négliger fouvent les di- gues, qui fe trouvent aufli quelquefois trop bafles. Toute l'attention des habitans s’elt portée à fe débarrafler des. eaux douces qui incommodent leurs terreins. On a de tout temps recherché pour cet effet la pente des terres à la baffle mer par les grands canaux & les éclufes qui y menent & qui empêchent le retour des eaux. C’eft ce que le local de ces pays préfente , de quelque côté qu'on fe tourne. | . 46°. Tout ce que j'ai dit ci-deflus fur la diminution graduellé de la mer d’environ un demi-pouce par an; m'autorife à faire ici une réflexion, dont jai lieu de croire qu'on reconnoiîtra la juftefle, fi jamais le Gou. \ DE LA FLANDRE MARITIME 3219 vérfement trouve convenable d'en ordonnér la véri- fication. C’eft que les fonds des canaux d'écoulement. des eaux du pays & de leurs éclufés n’ont pas dans le Peut-être temps préfent la profondeur qu'ils pourroient avoir, quils l'a & qu'il conviendroit qu'ils euflent pour le plus grand fecle pañlé bien du pays. J'ai lieu de croire que, felon l’état ac- tuel des plus baflés marées des Syzygies fur cette côte, on pourroit les approfondir de trois pieds, & peut-être même de quatre, & être toujours en état de mettre ces fonds à fec dans toutes les bafles marées des Syzygies, qui eft tout ce dont on a befoin pour y travailler; & comme il ne faut qu'une pente de 5°. partie de l’é- tendue dans les rivieres des Pays-Bas pour y confti- tuer le courant & un écoulement parfait, comme je Queje lai trouvé par un calcul exact tiré des loix de l'Hy- donnerai drodynamique, l’approfondiflement des fonds des éclu- fes & des canaux d’écoulement, feulement de trois pieds davantage, fera le defléchement du fol par un écoule- ment complet des eaux jufqu'à la profondeur de trois pieds de plus qu’à préfent, dans l’étendue de prefque toute la Flandre Maritime, dont les canaux ont déja la perte néceflaire pour l'écoulement de leurs eaux jufqu’à leurs fonds. Et comme tous les grains & les végétaux n’ont guères befoin de plus d’un pied, ou d’un pied & demi de fol convenable pour y croître, on fera en état de fe- mer les meilleurs grains & végétaux dans une grande étendue de pays, qui à cette heure eft incapable de les produire, & quelquefois même entiérement incapable de toute cultivation utile, tout ce terrein n'étant à préfent qu'un marais prefque toujours inondé. Ce plus profond écoulement des eaux & ce deflé- chement des terres ne contribuera pas moins à augmen- ter la falubrité du fol & de l'air, en y diminuant la #20 SUR l'ANCIEN ÉTAT quantité d’exhalaifons malfaines, & par-là FarAbuere grandement à la fanté des habitans. Mais nous allons développer ces matieres a au long dans la feconde Partie de ce Mémoire, par quel- _ ques confidérations fur le climat & le fol de la Flan- dre Maritime , & fur les élévations des différentes ma- rées & de quelques parties du pays. Fin de la premiere Partie. \ SECONDE DE LA FLANDRE MARITIME. se DAT SES S à à à RSA NARNRN LA SAS A SECONDE PARTIE. Quelques Confidérations fur le Climat & fur le Sol de la Flandre Maritime & fur les . Marées de cette Côte, & leur comparaifon avec la Hauteur des différentes parties du pays _ adjacent. Sir VE Sur le Climat. n°] E ne prétends pasici raflembler fur le Climat & le Sol de la Flandre Maritime tout ce qu’on trouve là- deflus dans les Livres des Géographes & les defcrip- tions du pays; mon intention eft feulement de mar- quer quelques obfervations générales que j’aifaites depuis ma demeure dans ce pays, & qui font moïns connues d’ailleurs, au moins ne les ai-je vu nulle part. 489. Toute la côte de la Flandre Maritime depuis Gravelines jufqu'a l’Eclufe eft expofée à la mer du Nord , même jufqu'au Pole Arétique, fans aucune in- terpofition de terres, au moins qui foient connues. Les Méridiens de cette côte pañflent à-peu-près au milieu de la mer, laiffant vers le levant les côtes de la Hol- lande, de Dannemarck, de la Norvege & de Spitz- bergen; & fur le couchant celles d'Angleterre, de VEcofR, des Ifles d'Orcades, de Schetlande & de Fa. ro, celle d'Iflande & la côte de Groenlande : en forte (Tome I. 222 SUR L'ANCIEN ÉTAT qu'il ny a point de terres connues qui approchent de ces Méridiens; mais toujours une mer ouverte jufqu'au Pole Ar@ique. À cet égard cette côte peut devenir remarquable & intéreflante aux Phyficiens, fur-tout pour les obfervations météorologiques. Prefque toute cette côte eft comprife entre la Latitude de s 1°. & $ 1°. . & depuis Dunkerque, elle eft comprife dans le premier degré de Longitude à PEft de Paris. 49°. Quand on confidere cette expofñtion, l’on ne doit pas ètre furpris que les vents, fur-tout ceux du Nord vers l’Ouelt ,: y foient fi fréquens & fi violens ; quelquefois ils y font cffroyables. Les vents qui domi- nent le plus fur cette côte font ceux qui viennent de- puis le Nord-Ouelt jufqu'au Sud-Oueit; & prefque tous les orages de tonnerres, éclairs, grèles &c. vien- nent du même quartier. Les vents d'ÉÎt y regnent or- dinairement depuis le commencement de l’année juf- qu’au printemps, & y amenent prefque toujours ]a gelée; on n’y attend le dégel qu'avec ur changement de vent vers lOueft ou Sud-Oueft, qui eft ordinai- rement doux & humide, & ne manque guères d’ame- ner le dégel. Mais ces vents d'Ef, qui font froids & piquans, Ÿ caufe qu'ils trouvent un ‘Continent immenfe fans aucune mer jufqu’à la Sibérie, ne durent rarement dans aucune faifon plus de trois ou quatre fmaïnes à la fois, & fouvent moins long-temps. Jufqu'au mois de Mars, ils font favorables à la végétation, parce que la geléé qu'ils amenent, amollit le fol, l’enrichit par fes nitres, y détruit les infeétes qui abondent dans les hi vers doux, & arrête la végétation qui feroit trop pré- maturée. Mais quand ces vents viennent trop tard dans le printemps, ils détruifent fouvent les tendres bour- geons, & font évanouir l'efpérance des cultivateurs. Les gelées qui fuivent la chûte des neiges, contribuent DE LA FLANDRE MARITIME. 223 _fe plus à enrichir la terre & à augmenter la végéta- tion, & font moins de tort aux grains, &c. déja fe- més, à caufe que la neige eft remplie de nitre, dont la nature bien connue et de produire tous ces “eflets. Les vents d'Oueft font ceux qui dominent le plus dans l’automne & jufqu'à la fin de l’année; &, quoi- qu'ils foient ordinairement doux & idée) iSÿ font, comme nous avons dit, fouvent d'une violence i incroya- ble. Il y a rarement fur cette côte des gelées de grande durée jufqu'au commencement de Janvier ; dans les mois de Novembre & Décembre, il fait le plus fou- vent un temps ouvert & pluvieux , & quelquefois fi peu froid, que jai fouvent vu fortir les groflés mou- ches d'été & les moucherons vers Noël; mais quelque-. fois l'hiver commence par une courte gelée de huit ou dix jours : il eft rare qu’elle dure plus long-temps. 50°. Le froid fur cette côte, pendant les grandes ge- lées eft extrême, & plus grand que je ne l'ai jamais connu dans l’intérieur des pays, jufqu'à 54°. de Lati- tude. La chaleur quelquefois en été n’eft pas moïns ex- trème, & prefqu’aufli infupportable que je l’ai trouvé dans les Provinces Méridionales de PEfpagne & fur les côtes de la Méditerranée ; mais ces chaleurs ne durent guères, rarement plus de trois ou quatre jours à la fois. Les orages de tonnerres & d’éclairs y font quelquefois terribles, ce qu'il faut attribuer au pañlage de la mer fur la terre, où ils trouvent une grande différence dans la denfité & l’état de l’atmofphere. Cette tranfition fait développer ces eflets, comme M. Needham l’a très-bien remarqué & expliqué dans fa Théorie de la Terre. La nature du pays y doit néceflairement rendre les tremblemens de terre très-rares. Le grand tremble- ment de terre à Lisbonne le 1 Novembre 1755, fe fit fentir jufques fur la côte de Flandre, & y caufa une T j 124 SUR LANCIEN ÉTAT. marée extraordinairement haute & agitée par un témps très-calme. L'année 1756 le 18 Éevrier à fept heures & trois quarts du matin, on a reflenti un tremblement de terre fur toute cette côte, qui dura deux fecondes, & pendant lequel le mercure tomba fubitement dans. le barometre à vingt-fix pouces & demi, il fut fuivs. d'un ouragan le foir du même jour. Depuis ce temps. on n'en a fenti qu'un feul, & il paroïfloit être plutôt une répercuffion du choc, ‘dont le foyer étoit bien loin de cette plage. Il fut fenti avec bien plus de force ail- léurs : ceci arriva l’année 1760 le 20 Janvier vers les dix heures & trois quarts du foir, & ne dura tout au plus que deux ou trois fecondes. Les aurores boréales y font très-communes, & quel- quefois très-remarquables: j'en ai obfervé une en 1767 aufli extraordinaire pour le brillant & la diverfité des. couleurs, & pour l’univerfalité dans tous les côtés de l'horifon, vers le midi autant que vers le Nord, qu'au- cune de celles. Cents j'ai lu la defcription. Has die | Sur le Sol G La Salubrité de la Flandre Maritime. se. T ow le monde fait que le fol des plaines ferti- les de la Flandre eft prefqu'inépuifable pour la force de la végétation; qu'on n’y trouve prefque nulle part ni mines , ni carrieres de pierres, ni même des pierres détachées où caïlloux. À une certaine pro= fondeur , l’on ne trouve prefque par-tout que des fa- bles de la mer & des débris de füubftances marines ;: comme je l'ai plufieurs fois remarqué dans la premiere Partie de ce Mémoire; & ces fables, &c. font cou- verts d’une couche plus bu moins épaifle de fol gras, riche & très-propre à la végétation; car il n'eft gub- PR rer Ci DE LA FLANDRE MARITIME. 1225. res compofé que de limon & du fédiment de la pluie, mêlés de fable & autres fubftances marines, animales & végétales pourries; ce qui fait un engrais des plus riches, fur-tout en y ajoutant, où les fubftances ani- males & végétales abondent le moins, quelques engrais chauds, comme la marne, la chaux ou la fiente d’ani- maux, à caufe de la froideur & de l'humidité naturel- les du fol. … s En mélant & combinant ces fubftances en différen- tes proportions, felon que le demande la nature de chaque fol en particulier, il y a lieu de croire qu'on pourroit augmenter la force de la végétation dans ce pays, au point à ne guères être furpaflée ailleurs. Dans les terres fablonneufes, il ne faudroit que des engrais végétaux, dont les herbes marines pourries font. les meilleures, à caufe de l’abondance de leurs fels; mais fi ces terres font trop froides, il faut les mêler avec la fiente d'animaux; celle des oïifeaux eft la plus chaude. Dans les terres grafles, il faudroit ajouter les fables & les fubftances calcaires, afin de les rendre plus légeres & plus chaudes. Dans les terres marécageufes & trop humides, il faudroit commencer par donner un écoulement parfait aux eaux, & le terrein étant _defléché, le rendre de la maniere que deflus plus lé- ser & plus chaud par les engrais convenables dans une fuite d'années. 52°. L'on croit ordinairement que les eaux falées. de la mer, ayant inondé les terres, les rendent beau- coup moins propres pour la végétation, & cela eft vrai pendant quelques années. Il faut qu'il & fafle d’a- bord. par la chaleur du foleil une concoétion & maru: ration de ces fels, qui font par après un engrais des plus riches, & donnent une force de végétation pref- qu'incroyable, comme nous en avons ici l’expérience s L 2 sn. SU RL TANN CIE N VETTAINT depuis bien des années; car nous trouvons que les terreins le plus près de la mer, & même ceux qui ont été inondés par les eaux de mer au temps de la guerre de 1740, donnent les meilleurs grains; & une quantité égale de ce bled produit plus de farine & fait un meilleur pain que celui qui vient de trois ou qua- tre, même de fix ou huit lieues au-dedans du pays : je crois devoir attribuer ce fait prefque uniquement a la concoétion & maturation des fels marins. 53°. C’eft auffi une remarque que j'ai faite généra- lement pendant la derniere maladie épidémique des bé- tes à cornes, que les fermes qui font le plus près de la mer, en ont beaucoup moins fouflert que celles qui font plus avant dans le pays ; ce que j’attribue entiérement à la plus grande quantité de {els marins, qui abon- dent dans les herbes, dans les eaux & que les vents élevent, pour les répandre enfuite fur les terres près de la mer. Ces fels réfiftent à cette diflolution, qui tend à la putréfaétion, & qui produit toutes ces maladies, manifeflement putrides; contre lefquelles tous les {els & tous les anti-feptiques font des remedes fouvent efficaces. Par la même raïfon, les moutons, qui font fi fujets à des maladies putrides , le font beaucoup moins près de la mer, que dans des endroits plus éloignés. Mais, comme je l'ai dit plus haut, les premieres années après les inondations des eaux falées, tant la végétation que la falubrité de l'air & la vie animale en fouffrent étrangement, à caufe du grand nombre d’exhalaïifons humides & quelquefois corrompues, qui proviennent du limon & du fédiment des eaux falées & de tant de fubftances animales & végétales qui & corrompent dans ces eaux ftagnantes, & qui après leur retraite ou évaporation font laïflées à fec, où avec le temps elles deviennent tourbes. DE LA FLANDRE MARITIME. 227 540. Hors de ces cas & dans de lon gs intervalles de ces inondations, & fur-tout depuis qu’on a eu foin d’en- tretenir le libre écoulement des eaux , auparavant fta- gnantes dans les terres & foflés, l’on ne peut pas dire que la Flandre Maritime foit malfaine. On y refpire, à Ja vérité, un air plus groflier & plus humide que celui des pays montagneux ; mais cet air eft prefque continuellement nettoyé & purifié par les vénts qui viennent de la mer, & qui ceflent rarement de fouffler _& de la teñir en mouvement. Ces vents chaffent & dif fipent Les brouillards , qui fonc bien plus rares ici qu'on ne le croiroit, & qu’on ne les voit en difiéren- tes parties de l'Angleterre & même des pays méridio- naux de l’Europe. 55°: C'eft aufli une remarque qu’une quinzaine d’an- nées m'a fait faire. & qui m’a toujours été confirmée d’ailleurs, que les fafons pluvieufes font les plus faines fur cette ‘côte. Je crois que cela provient de ce que, dans les étés, chauds & fecs, la quantité d’exhalaifons qui 5 ’élevent par la chaleur du foleil, &c. d’un fol qui elt toujours & par-tout plus ou moins humide, fe cor- rompt dars l’atmofphere, & enfuite corrompt la mafle du fang & des humeurs dans le corps humaïn, & engendre les fievres intermittentes, le fcorbut, & d’au- tres maladies de ce genre, dont où voit qu'une humi- dité ffagnante & corrompue eft la principale caufe. Au contraire, dans les fäifons pluvieufes, la chaleur du fo- leil n’a plus la force d'attirer une f grande quantité dé ces vapeurs; & même celles qui fe font élevées dans Patmofphere font pour la plupart précipitées encore dans L terre avec la pluie qui tombe. 528 SUR L'ANCIEN ÉTAT SEX Phénomenes des Marées fur la Côte de Fndes € dans prefque tout l'Océan Germanique. 56°. FAffons maintenant à ce qui fait le principal fu- jet de la feconde Partie de ce Mémoire; favoir les Ma- rées fur cette Côre ; & leur comparaifon avec les terres voifines. ie Plufieurs des obfervations fuivantes fur les marées, dans l'Océan Germanique, m'ont été fournies par ce refpedtable ami dont j'ai parlé ci-devant (N°. 17.).Son état, l'étude qu'il a toujours fait de ces objets & de tout ce qui concerne les mers du Nord, jointe à beau- coup d'intelligence & à l'expérience la plus confom- mée, le rendent plus propre qu'aucun autre à connoiï- tre à fond ces matieres, & à en parler avec beaucoup d’exactitude & de précifion , comme tous ceux qui le connoiflent en feroient perfuadés, s'il avoit voulu me permettre de le nommer. La plupart des obfervations fur Ia hauteur des ma- rées, & leur comparaifon avec difiérentes parties de l'intérieur du pays ont été faites par les Ingénieurs François, & communiquées dans un Mémoire à lA- cadémie Royale des Sciences de Paris, par un Acadé- micien , Ingénieur en chef: ce Mémoire m'a été com muniqué. Pour les obfervations fur les marées à Nieu- port, je les ai faites moi-mème, Celles d’Oftende, con- tenues dans le fufdit Mémoire, ont été vérifiées à ma priere par des amis intelligens, J'ai cru devoir marquer de cette forte les autorités d'où ; j'ai tiré ces obfervations, pour bien des raïfons, & entr'autres afin d'y donner plus de poids & de force, 57% Les marées, dans la mer du Nord, font très- "différentes ET CS DE LA FLANDRE MARITIME. ?»9 différentes de ce qu'elles étoient avant la rupture de l'Ifthme, entre l'Angleterre & la France, comme nous l'avons infinué ci-devant (N°.22,23.). À préfent mê- me l’irrégularité de ces marées eft telle , qu'il paroît im- poflible “d'en déduire aucune théorie, ou de les calcu- ler avec certitude & précifion. Cette irrégularité ré- fulte manifeftement de la forme de cette mer, du gi- fement de fes côtes & d’une infinité de bancs de fable & de bas fonds, dont prefque toute cette mer eft rem- plie. La largeur de cette mer, par où les marées en- trent principalement ; c’eft-à-dire, entre les côtes de Norvege d’un côté, & les Ifles de Schetland , des Or- cades & la côte de PEcof de l'autre, eft d'environ 80 lieues. La largeur de l’autre bout de cette grande mer, qui êft le détroit de Calais qui devoit fervir de fortie ou de débouché pour. ces eaux, n'eft que de fept lieues. Cette diflérence de largeur de ‘Ventrée & de la fortie des marées dans cette mer, y caufe, vers le détroit de Calais & fur les côtes de la Flandre, de la Zélande & de la Hollande, & fur les côtes oppolées d'Angleterre un régonflement & un tournoiement dans les eaux de la mer, très- faciles à concevoir par les loix de l'Hydrodynamique; mais peut-être impofhble à fou- mettre à un calcul certain & exaét, parce qu'il fau- droit toujours combiner avec ces caufes générales tou- tes les caufes fecondaires & accefloires, telles que la grande inégalité du fond de cette mer, qu’il eit im- offible de conftater par-tout avec précifion, & qui ce- pendant influe confidérablement fur la quantité des ma- rées fur différentes côtes : tels font encore les courans &c les vents qui regnent dans la mer entre la Norvege & l'Ecofle, lorfque. ces marées y entrent, &: qui peu- vent augmenter ou diminuer très- fenfiblement leur quantité au fond de cette mer, vers le détroit de Ca- Tome I, V #g0 SUR CEANNCEE NYÉTAT., Jais : telles font enfin les marées & courans que. les vents & les orages peuvent chaflèr de la Manche dans la mer du Nord par le même détroit de Calais. Toutes cescaufes manifeftes & certaines de l’irrégulari- té des marées dans cette mer, démontrent clairement la foibleff des argumens que quelques Phyficiens Francois en ontvoulu tirer contre la gravitation univerfelle, com- ‘me caufe des marées ; mais cette difcuflion trouveraplace dans un autre Ouvrage : ce meft pas ici le lieu de a faire, & il fuffit de lavoir infinué pour mettre toute per- fonne intelligente en garde contre de pareilles obje“tions. 53: Cetre même “conformation de la mer du Nord & ie gifement de fes côtes, bancs, &c. font caufe du phénomene extraordinaire des marées qu'on y remar- que, & qui eft prefquunique à cette mer, felon le fentiment de divers marins qui ont fréquenté différen- tes parties du globe terreftre. C’eft ce que les marins Anglois nomment tyde 6 half tyde, c’eft-à-dire, marée & demi marée ou flux & demi Aux. Ce phénomene . donne une variation & une irrégularité dans la direc- tion & fa durée du flux & du reflux dans ces mers, dont la connoiflance eft effentiellement néceflaire à tous les marins qui les fréquentent. Ce phénomene de flux & demi flux commence à fe _ manifefter vers l’'Ifle de Vlie & le Texel, qui font un angle faillant dans la mer, & fe fait remarquer en dif férens degrés fur toutes les côtes des Pays-Bas Hollan- dois, Autrichiens & Francois jufqu’'a Calais. Voici la maniere dont les marins expriment & les particula- rités qu'ils en obfervent. 59° 1°. Sur toutes les côtes Hollandoïfes & Fa: mandes il y a flux & demi flux, ce qu'ils expliquent de la maniere fuivante : quand il eft haute marée au milieu de la mer entre ces côtes & l'Angleterre, il eft DE LA FLANDRE MARITIME ge _ demi flux fur l'une de ces côtes & baffle marée fur Ia Côte oppofée; & quand il eft haute marée fur une cô- es ee le demi flux ou demi juflant au milieu de Ja “mer, & bafl marée fur l’autre côte, & aïnfi vice verfa. 29. De l'Ifle de Fexel, la côtes rérend vers le SSO. environ 18 lieues juqu'x la Meufe en Hollande; fur toute cette étendue de la côte, la marée entre fule- ment pendant trois heures jufqu'au flux, & defcend alors pendant neuf heures jufqu’au jufant ; mais vis-à- vis, en haute mer, le flux monte encore trois heures, _& alors commence le juflant; de forte que le demi flux en mer, fait la haute marée fur cette côte. nest Devant la Meufe, £ Se entre pendant 4h. 25" & le juffant fort pendant 7b. 35. & court vers le Sud. Oueft. 4°. Sur la côte de la Flandre, le flux dure cinq “heures ou quatre heures & demie, & le juffant fept heu- ‘res ou fepc heures & demie, comme je lai fouvent ob- frvé moi-même. Plus on examine ces variations qe temps, plus on 1 trouve proportionnées à la différence qui doit ré- fulter du différent gifement des côtes refpectives. 3°. Les effets de ce phénomene ne font pas à beau- Coup près fi fenfbles fur la côte de PEIt d'Angleterre, _ fur-tout au Nord du banc de fable appellé Kertishknock, ‘qui eft à environ quatre lieues au Nord-Nord-Fft de a North - Foreland, où la marée court du Nord au Sud, mais ils influent fur la direction & la durée des marées par toute la Manche; car le Capitaine Collins, dans fes Cartes marines de cette Manche, y marque la rencontre & la jonction des marées qui viennent de la mer du Nord par le détroit de Calais, avec celles qui viennent de l'Océan Atlantique par l'entrée de la Manche, PRE vis-à-vis de Winchelfea en Suflex, N° © 232 - SU-R cUANCIEN ÉTAT qui eft environ à vingt lieues à l'Oueft de Douvres; ce qui montre évidemment combien le.peu de largeur & de profondeur du détroit de Calais, en comparaifon de l'entrée de cette mer versle Nord, retarde le mouvement des marées vers l’Oueft, puifque le flux qui pañle par le _vafte Océan fans obftacles, s’'avance fi loin dans la Manche vers l’Ef, avant que de rencontrer celle qui eft retardée à fon paflage par le détroit de Calais: ceci {e- roit peut-être un des élémens les plus certains fur lef- quels on pourroit fonder la théorie & les calculs des marées dans la mer du Nord. Nous en indiquerons bien- tôt un fecond pareil. 62. Cette même caufe eft la raïifon pourquoi, dans le canal de Saint-George, entre l'Angleterre & l’Ir- lande, les deux marées, c’eft-h-dire, celle qui entre par le Nord & celle qui entre par le Sud de cette mer, fe rencontrent entre Liverpool & Holyhead d’un côté, & Dublin de l'autre, & y caufent un tournoiement & un bouillonnement par la rencontre des flux oppolés, & y fufcitent les vagues, les rourmentes.& les tempêtes fréquentes, qui rendent le pañlage de cette petite mer. fi dangereux & fi connu pour fes naufrages. | 60°. Tous ces eflèts proviennent manifeftement ; comme nous l'avons dit, de ce que lentrée de cette mer eft dix ou douze fois plus large entre la côte & les Ifles au Nord de l’Ecofle d'un coté & la Nor- vege de l’autre, que n’en eff la fortie par le détroit de Calais. Cette grande ouverture au Nord laïflé entrer une bien plus grande quantité d’eau de POcéan Hyperbo- réen, par le mouvement naturel des marées, & fur- tout quand les vents du Nord & du Nord - Oueit y regnent, que ce qui peut fe décharger en même temps par le détroit de Calais; & l'entrée de ce grand amas DELAFLANDRE MARITIME. 3:33. d'eaux dure fi long-temps, qu'il eft arrivé à l’équili- bre avec le régonflement & la rétrogradation des eaux “envoyées du fond Méridional de cette mer vers le Nord, avant que le détroit de Calais puifle décharger chaque marée. De forte que le flux, dans différens en- droits de cette mer, doit néceflairement être plus court ‘que le juffant; mais cela en diflérens degrés d’irré- gularité , fuivant les fituations & le gifement des cô- tes & des bas fonds. Le principal effet, comme nous avons dit, eft qu'au milieu de la mer devant les côtes de la Flandre & de la Hollande, le flux dure plus long-temps que le juf- fant; & au contraire fur les côtes, le juffant dure quel- quefois deux fois plus long-temps que le flux ; & ceci neft qu'une fuite néceflaire des loix de l'Hydraulique, comme il feroit facile de le démontrer par un calcul de Géométrie. FA ae 61°. La jonction ou [a rencontre des eaux produite par le régonflement, la rétrogradation & le tournoie. ment des flots renvoyé du fond méridional de l'Océan Germanique vers le Nord, (à caufe que le détroit de, Calais ne peut les décharger en proportion qu’elles y arrivent } {e fait principalement entre Ia Province d'Yorck en Angleterre, & la Jutlande en Danemarck ; c’eft ce quia produit le grand banc de fable, fi fameux pour la pêche , appellé Doggers-Banc, qui traverfe pref- que toute cette mer, & qui a été formé par la quan- tité de fable & de limon que les flots contraires y ont dépofé. Les marées dans cet endroit, à caufe de cette rencontre de courans, perdent leur mouvement régu- lier, fe troublent, & y font un bouillonnement très- connu des pêcheurs qui fréquentent ce banc. Ces eaux troublées, remplies de limon, de fables & d’autres fubf- tances, font vraifemblablement la caufe de l'abondance #12 SUR EANETEN ETAT. de poiflons, qui y eft plus grande que dans tout le refte de cette mer. On pourra vraifemblablement attribuer la forma uon de la Welle, autre banc de fable au Sud du Dog- gers-Banc, du Bree-Viertien fur la côte de la Hollan- de, & même de la fameufe Jutfche-Riffe, à la même cauf. Et la fituation de ces différens bancs donneroit les feconds élémens pour la théorie & les calculs des marées dans la mer du Nord. PHARES _ 62°. Un autre phénomene, qui n’eft que leffèt de ce même flux & demi flux, & qu'on obferve fur les côtes, eft que dans les dernieres heures du flux, avant Ja haute marée, la mer entre & séleve bien plus vite & en plus grande proportion que pendant les premie- res heures après la bafle marée; de même la mer s’a- baïffe & fe retire des côtes beaucoup plus vite les pre- mieres heures après le flux ou haute marée, qu’elle ne fait pendant les dernieres, & immédiatement avant [a baffle marée. 63°. Les Pilotes les plus expérimentés fur cette côte obfervent que les plus grandes marées arrivent ordi- nairement le troifieme ou quatrieme jour après les pha- fes de la lune dont elles dépendent; bien entendu quand elles ne font point afleétées des vents, &c. Aïnfi les plus hautes & plus bafles marées arrivent le quatrieme jour après les fyzygies & les oppofitions du foleil & de la lune, & les plus petites marées arrivent de même le quatrieme jour après les quadratures. Ceci n’eft qu'un efler de la gravitation umiverfelle qui produit les marées, modifiée par les loix du mouvement des flui- des dans cette mer, comme il ne fercit pas difficile de le démontrer. RE de CE OT = DE LA FLANDRE MARITIME. :55 s) æ J É \(E X. La quantité des Marées fur les Côtes de Flandre, Ec. 6 leur comparaifon avec la hauteur de différentes par- - ties du pays adjacent. 64%. Enons enfin à la derniere partie de nos confi- dérations fur les marées de cette côte, je veux dire leur quantité & leur comparaïfon avec le pays adjacent. Tout ce que nous avons dit ci-deflus fur les diverfes caufes d’irrégularité de ces marées fera bien juger de l'impoffbilité de les déterminer exa@tement. Peut-être que la production ou le changement des bancs de fa- ble au fond de la mer, peuvent les rendre différens er divers temps; de même que le changement des côtes, caufé par des tempêtes, &c. & bien d’autres caufes qu'il nous eft impofñfible de connoître avec précifion. Ainfi outre la caufe univerfelle de gravitation, qui produit les marées, il y a une infinité d’autres caufes particu- licres, qui ont chacune leur influence là-deflus; comme la conformation de la mer, fes bancs de fable & fes bas fonds, le gifement particulier de fes côtes, les vents qui peuvent agir fur différentes parties de cette mer. & produire des effets dans les marées des endroits où ces mêmes vents ne fe font point fentir, les embou- chures des grandes rivieres , & ainfi du refte. Je m'en vais extraire cependant toutes les obferva- tions qu'on m'a fournies là-deflus, auffi-bien que mes propres obfervations, afin de déterminer aulfi exaéte- ment que la nature de la chofe le permet, à quoi l’om peut s’en tenir là-deflus dans la pratique. 65°. A l'Ifle de Vlie, au Nord du Texel, la direc- üon du juflant eft du Sud au Nord; mais en-decà du 236 STI ER VAN CIE N dE TR ALT: Texel & fur la côte de Hollande, Zélande & Flandre; la direction du juflant eft vers le Sud-Ouelt. : Au Texel & à Yarmouth vis-à-vis, en Angleterre, la quantité des marées n'eft que de” quatre où cinq pieds, depuis le flux au juflant; à l’Ifle de Goerée en. Hollande, la quantité de la marée n’eft que de huit pieds, depuis le flux au juflänt; mais à la ba marée 1l refte ordinairement quinze pieds d’eau à l'entrée. A Flefingue, la quantité des marées de vives eaux y a été trouvée ( par M. Frazer , Commiflaire de Sa Ma* jefté Britannique à Dunkerque ) de feize pieds & demi, ‘ mefure d'Angleterre, qui font quinze pieds cinq pou ces & huit lignes de France. À Weft-Cappel, qui eft le point avancé vers l’Oueft de l’Ifle de FWaicheren =. il Ja trouvé de dix-huit pieds & demi d'Angleterre, qui font dix-fept pieds quatre pouces & deux lignes, mefure de France, & il a trouvé ceci tant par fes pro- pres mefurages, que par les recherches exactes de ma: rins expérimentés. Tous les Navigateurs, Pilotes-Cotiers & Maîtres de : Bâtimens Hollandoiïs, & ceux d’Oftende & de Dun- - kerque, qui fréquentent continuellement la côte de . Flandre & de la Hollande, s’accordent unanimement à aflurer que la quantité des marées en vives eaux €ft , la même, fans aucune différence remarquable, à Dur- kerque, à Oftende & à Fleffingue, & qu'on l’évalue de même fur la côte extérieure de la Hollande jufqu'au Texel; car nous avons vu qu’en quelques endroits de Zélande elles différent beaucoup, fans doute à caufe des embouchures des grandes rivieres, comme l'Efcaut, la Meufe, &c. & ils S'accordent à fixer la quantité de ces marées à dix-{ept pieds fix pouces, mefure de Fran- ce, tout au plus. A Calais, on a trouvé par des obfervations les plus exactes, DE LA FLANDRE MARITIME. 237 exaûles, faites par ordre du Miniftre de Ia Marine de France, que la quantité des marées en vives eaux eft de dix-huit pieds fix pouces de France. À Douvres, les plus hautés marées de vives eaux font , comme à Calais; de dix-neuf pieds neuf pouces d'Angletérre, qui font dix-huit pieds & demi de France à-peu-près. Dans les # marées ordinaires des Syzygies, elles font de quinze à . dix-fpt pieds de France, & dans les marées moyennes des quadratures, de dix à douze pieds de France. Ces mefures ont été prifes par le nommé Richardfon, Lieu- tenant pendant plus de quarante ans d’un Paquet-Bot à Douvres. Il ajoute que dans ce dernier port, le flux vient de VE Sud-Ef, ce quieft une preuve mänifefte que ces marées font caufées par le régonflement, le tournoiement & la xétrOgradATION de la côte oppofée du Continent. ‘* À Margate, près de la Northforeland, au point mé- ridional de l'embouchure de la Tamil, la quantité des marées de vives eaux ordinaires eft de Se à quinze pieds de France. Selon le rapport de feu M. ete long-temps Ce taine des Pilotes à Oftende, _& très-intelligent dans cés Mefure de matieres, la quantité des marées des quadraturés eff dé France. feize à dt pieds (a), de Bruges & d' Oftende, & D 135 des marées de vives eaux depuis dix - huit à vingt- : s deux pieds (b), quelquefois de vingt-quatre pieds (os: de LE à caufe des vents, dans des bourrafques de No a 20!. Oneft, de vingt-fix pieds (d); & dans les orages, de MS 4 vingefpt pieds (e), le tout mefare de Brüges & d'Of tende, dont le pied contient onze pouces d'Angleterre, & ft au RE Anglois dans la proportion d'onze à douze. Jai fait moi-même grand nombre d’obfervations far la quantité des marées à Nieuport ; au-dedans du port ‘Tome I. X 22, ie 138 SR L'ANCIEN DA RS mème , je n'ai pas trouvé les marées des pleines & not velles lunes, & qui n'étoient pas affectées de vents, au: delà de fire pieds de France; les marées des quadra- tures ny étoient que de onze à douze de ces pieds. Mais hors du port de Nieuport, & fur la côte de la mer devant cette Ville, les marées ordinaires de vives. eaux f trouvent de vingt pieds de Bruges, qui font dix-fept pieds & demi de France, comme fur tout Là refte de la côte de Flandre. Les plus habiles Pilotes de Nieuport que j'ai con- fultés là-deflus, ainfi que d’autres perfonnes fort intelli- -géntes dans ces chofes, m'ont afluré unanimement que des marées de vives eaux. qui ne font pas affectées par des caufes accidentelles & étrangeres, ne fe hauflent & ne s’abaiffènt pas au-delà de feize pieds de France dans le havre de Nieuport. En recherchant d’où pouvoit ve- air une telle différence entre la quantité dé marées au-dedans de ce port, & de celles dans la mer devant ce même port, & dans ceux .d'Oftende & de Dunker- que, qui en font fi près; j'ai trouvé par diverfes ob- férvations qu’une caufe de certe différence réfulte de ce que le fond même de ce port eft plus haut que la li- gne de niveau des bafles marées de vives eaux. Une {- - conde caufe qui y contribue, procede de Pécoulement prefque continuel des eaux “douces tirées de toute VOueft-Flandre, qui fe déchargent dans ce port par $ _éclufes; ce qui Ai que fi ce port étoir aufhi profond. que le niveau des bafles marées de vives eaux, comme en eflet il ne left pas, cet écoulement cependanr des. eaux douces du pays, empécheroit qu’on n'y eût pref- que jamais le vrai niveau des bafles marées de vives - eaux. I réfulte évidemment de {a combinaïfon de ces de caufes, que la quantité des marées dans le havre de DE LA FLANDRE. MARITIME. 239 Nieuport, doit paroître moindre qu'en pleine mer ime médiatement devant ce port. . Outre ces marées ordinaires, différens Fclufiers de cette Ville m'ont afluré que la violence des vents & des orages qui viennent du Nord au Nord-Oueft, ré- foule & gonfle les eaux dans ce port jufqu’à donner des marées extraordinaires de 22, 24, 26, & même de;27 pieds de Bruges, qui font 18$, 205, 22 & 23 pieds de France, au-deflus du vrai niveau des baffes marées de vives eaux, Ceci s'accorde exactement avec ce qui a été obfervé à Oftende en pareilles occafons, séais que nous venons de le dire. «Voilà une très-petite partie des obfervations fur les marées que j'ai déja raffémblées; j'efpere d'en augmen- ter le nombre avec le temps, de %es corriger Avec toute la précifion dont ; je fuis capable, & d’en former à A Mémoire à part. 66°. Pour venir à un réfultat général fur les. mä- rées, il fur partir d’un point fixe, auquel on peut ré- férer toutes les autres variétés. Le point le plus pro- ‘pre pour cela me paroït l’état de la mer dans les hau- .tes marées de vives eaux, que ne font FOIRE afle@ées de vents. La premiere chofe que nous devonsexaminer Re oE fi la furface dela mereft par-tout fur cettecôte dansun “niveau parfait. Le régonflement des eaux au fond de - Ja mer du Nord. & fur la côte de Flandre, qui deur donne un tournoïiement & une rétrogradation vers le :Nord.( Voyez N°. 58, 62.) devoit, felon les loix de l'Hydrodynamique , donner une légere pente vers le :Nord d’environ un.pied.ou un. pied & demi par:lieue: mais un autre courant, qui n'eit pas moins ‘efficace à -donner une pente contraire, exifle .dans .le mouve- ment naturel des marées vers l’'Oueft ,-en .paflant le dé- Km 4e RS DIR SEAINEIC 2 EN É TA re toit: de Calais dans.la Manche; & la: ‘pente: que caufe -ce courant.naturel , détruit la pente contraire, quipro- . - vient du régonflement & de lx rétrogrädation des eaux :vérs. le. Nord. De forte qu'on ne rifquera guères de : tomber dans une erreur, du moins confidérable “en 4 fuppofant la mer fur toutes les côtes de Flandre, à 4 «haute marée, à-peu-près de niveau. Je fuis: cependänt. | - perfuadé que ‘des caufes accidentelles peuvent, en diffé- - rentes fituations, donner la pente, tantôt vers le détroit de Calais & rintôr vers le Nord; comme diflérentes obfervations faites le long de cette côte fembloienrie : prouver, Ces obfervations ont fait tomber- dans des Îy£. .“tèmes erronés ceux qui n’ont confidéré que les obfer- -vations qui tendoient à conftater Pure 1e ces Hi -par exclufion à lautre.. : | 67°. Le réfulrat de plus & ÿ00 GB ar que ..ÿai entre les mains, fur les marées entre Calais & Of rende, ne dérangent pas ce niveau parfait de Ja mer, dans les hautes marées de vives eaux qui ne font point -'afféées de vents, de plus d’un pied de France vers fe - détroit de Calais; & d’autres obférvations qui ne font s moins exactes, ni moins précifes, ni faites avec moins d'intelligence, donnent une pente contraire VETS! Je : Nord- Et, comme on peut avoir déja remarqué au Ne 6$ ; & je penfe même que ces dernieres obfer- ‘vations font les mieux fondées... à Je crois donc qu'on peut par AS d Re : fondées fur toutes ces obfervations prifes & combinées enfemble, contituer cette regle pour certaine & con-- forme à la vérité : -favoir ; Plus les marées font gran- des & élevées, plus leur mouvement du Nord au Sud eft - rapide, € conféquemment plus leur régonflement € rétro- “gradation vers le Nord font violentes ; ce qui’ doit pro= ” duire aulfi une plus grande pente pers se Nord. Au con k . DE LA FLANDRE MARITIME igr appelle pour cette raifon marées des eaux mortes ; moins : Guffi leur régonflement contre la côte de Flandre, € leur rétrogradation vers le Nord font grandes ; d'où il s'en «fuit que le courant naturel des marées par le détroit de : Calais vers POueft, furpafle dans la même proportion le courant contraire, @ leur donne d'autant plus de pente * vers le détroit de Calais & l'Oueft. Tout ceci n’eft qu’une : déduction des loix connues & démontrées de l’'Hydrody- 'ramique. es We - 68°. Une quantité de caufes particulieres peuvent -- déranger le niveau de la mer dans les bafles maréés, . "comme les courans entre les bancs de fable, les em- bouchures des rivieres, &c. Elles les rendent bien moins “propres à fervir de point fixe de comparaïfon, que lé- - tac de tranquillité prefqu’univerfeHément répandue däns . Fétendue de la haute marée pendant un certain efpace de temps, après que le flux a ceflé, & avant que le + juflant commence. J'appelle étendue d’une même haute. marée, tout cet efpace où il eft haute mer au même 2 moment, & qui eft moralement de niveau en même -! remps. Cette étendue varie à Pinfini, fuivant la forme des mers & fuivanc le plus ou moins d’obftacles qui -:{e rencontrent aux courfes des marées. Toutes les ob-- fervations des marins & toutes les tables des marées: “marquent qu'il eft haute marée en même temps fur toute la côte de Flandre (*); mais ce flux, fuivant M. -Sigorgne, n’eft point dû à Pa@ion préfente des deux. -+ Juminaires, mais à celle qui a précédé douze heures: auparavant, Toute la côte de Flandre n'a que 1°. 7°. Re —_——_—_—— ——————_——————— ste (*) Voyez’ entrautres The Fiery fea Column: infol. Amft. 1644. | _ Barr, Îl..p. 16. L'Hydrographie du P. Fournier. in-fol. Paris. 1653. = p. 44%, Inftitutions Newtoniennes de M. Sigorgne. 1769. p. 227 2e ESUNR MIMNICRELN.LÉ TANT © de Longitude; car Gravelines, qui eft à une de fes ex: trémités eft à 59°. 474 de Longitude à Eft de l'Ile de Fer, & l'Eclufe, qui eft à l’autre extrémité, eft à 200. 541 «de Longitude. Or, 1°. 7/. tourné en temps _ne donne que quatre minutes & demie, qui-eft la quan= üté de temps que la lune prend à traverfer tous les méridiens de cette côte. Mais à la haute & bafle ma- _ées, la mer refte tranquille & fixe un temps aflez con- fidérable, fans qu'on puifle y voir ni augmentation ni diminution. Cet intervalle de tranquillité à la haute, marée eft fouvent d’une bonne demi-heure, & à la bafÆ quelquefois d’une heure entiere, fans qu’on y voie: du changement. Ainfi, quant à l'effet de la lune, al doit être haute marée en mème temps fur toute la côte de Flandre, à fi peu de chofe près, que la différence de temps eff imperceptible. Elle arrive ordinairement: {ur toute cette côte; une demi-heure après que la lune a pafñlé le méridien, ou à peu de chofe près, ce. que je dis à caufe que les vents, fuivant leurs divertes. directions, peuvent accélérer ou retarder les marées, comme je l’obferve journalierement. rt 8 69°. Nous prendrons donc pour un point fixe de: comparaifon le niveau de la mer dansles hautes marées de, vives eaux communes, qui ne font point affeétées de vents, en fuppofant ce niveau exact par toute la côte, depuis. Calais jufqu’à Oftende, Nous comparerons avec ce point fixe différentes parties de l’intérieur des pays voifins,: nous y ajouterons enfuite les hauteurs de quelques ma-, rées extraordinaires fur cette côte, & leur comparai-. fon avec le pays adjacent; enfin nous en tirerons la, “hauteur convenable que devroient avoir lesdigues de mer: für route la côte de Flandre, depuis Oftende jufqu’a Calais. , 70°. L'on peut dire en général, comme nous l'avons : déja remarqué plufieurs fois dans ce Mémoire, que. TT DE LA FLANDRE MARITIME. 3243 prefque: toute la Flandre Maritime décline graduelle- ment de ce grand banc de fable couvert de dunes , qui, fait préfentement la côte de la Flandre, vers l’intérieur, . du pays, pendant une étendue de deux, trois, quatre, & en quelques endroits même, jufqu’à cinq lieues de diffance de la côte, comme au-delà de Dixmude & du Fort Quenocke, dans la Flandre Autrichienne, & vers Bourgbourg & Warte dans la Flandre Francoiïfe :en forte que le niveau du pays au pied des dunes fur la côte eft généralement de trois ou quatre pieds aw-def- fus du point fixe des hautes marées de vives eaux or- dinaires (N°. 69.); c’eft-à-dire , quand elles ne font point augmentées par les vents, ni d’autres caufes acci- dentelles; & par conféquent ces mêmes terres auprès des dunes font à vingt: ou vingt & un pieds de France au-deflus des bafles marées des Syzygies; pendant que les parties bafles de l’intérieur du pays, qui font à dif- férentes diftances des côtes, font jufqu'à fix & fept eds, & même quelques-unes du Bas-Calaifis & de a Châtellenie de Bergues, font jufqu’à huit & neuf pieds de France au-deflous du niveau des hautes marées de vives eaux ordinaires; & ce qui eft même bien plus, celles de la Moere font environ de treize pieds de Fran: ce au-deflons de ce niveau, comme nous allons. le dire: plus en particulier. ds re 712. Par ce que j'ai dir au N°. 4$, l'on verra qu'il refte encore dans ce fiecle une très-grande poffibilité , que plufieurs parties-de la Flandre Maritime fojent de nouveau inondées par les hautes marées de vives eaux, & encore plus par des. marées tout-à-fair extraordinai- res, qui arrivent. de temps en temps fur cette côte, ( & dont je vais parler inceflamment) fi on n’a pas fois d'entretenir les digues déja conftruites pour empêcher ces inondations. L’on compte que dans la feule Flan- dre Francoiïfe il y a plus de cent mille arpens de terre dé CR ABAENEC PENGÉ ABS & des plus riches terres peut-être de toute la France; dont le niveau eft au-deflous des hautes mers, & par-lx éxpofées à étre de nouveau inondées, fi on n’avoit foin d’entrétenir les digues néceflaires pour contenir la mér dans fes bornes. Il y a lieu de croire que la quantité de ces terres bafles & expofées aux inondations de la mer, dans la domination de Sa Majefté Impériale, ef bien plus grande, fi à celles qui fe trouvent dans la Chätellenie de Furnes & au-delà de Dixmude, on sjou- te celle du Franc de Bruges & du pays de Waës. : 72°. Je prie d'obferver une fois pour toutes que les quantités fuivantes font en mefures de France, & font prifes fur des nivellemens faits plufieurs fois avec foin par des Ingénieurs François. RP PER SRESER Les rues d’Oftende ne font qu'environ d’un pied au- deflus des plus hautes marées de vives eaux; & celles de Dunkerque & de Gravelines font près de trois pieds; & celles de Calais près de cinq pieds au-deffus de ces mêmes marées. Les plus hauts points de cette vafte &, riche plaine entre Calais, Dunkerque & Saint-Omer, qui faifoit au temps de Céfar un golfe de mer appellé Sinus Jccius, atteignent à peine, & dans les feuls en= vironsde Bourbourg, la furface des grandes marées des Syzygies; & les terres les plus élevées vers Graveli- nes, Dunkerque & Furnes font ordinairement de trois pieds plus baflès que le niveau de ces mêmes ‘hautes marées de vives eaux. u Les plus hautes terres du Bas-Calaïfis font à quatre pieds & demi au-deflous de ce niveau, & celles qui {ont le long de la riviere de P'Aa de près de cinq pieds. = Les bafles terres du Calaifis, celles des environs de Bergües, & quelques-unes de la Châtellenie de. Fur-. nes aux environs de Loo, & de-là au Fort Queno- que, & à Merckhèm dans le Franc de Bruges, rue à re EL nn cr dt DE 1A FIANDRE MARITIME, 45 hit & neuf pieds au-deflous du niveau des hautes ma- ‘rées de vives eaux, qui ne font pas affectées de vents. Celles aux environs d'Uxem, qui eft fitué entre fà Grande-Moere & Dunkerque, font d’un pied encore plus bafles, ou près de dix pieds au-deflous du niveau des hautes marées. Enfin les Moeres, entre Furnes & Bergues, qui con- tiennent 7 à 8000 arpens, font pour Ja plupart d’en- viron treize pieds au-deflous du niveau dés hautes ma- rées de vives eaux, & ne font peut-être chaque jour que pendant fix heures au-deflus de la furface actuelle “à la mer. 6. : X % Marées extraordinaires. 73. Sr: à la hauteur ordinaire de la mer dans les hau- tes marées de vives eaux, qui ne font point affectées . de vents, on ajoute tout ce que les marées énormes & _irrégulieres, caufées de temps en temps par les vents & les orages qui viennent du Nord & jufques vers le Sud-Ouelh. Y produifent de plus, en refoulant & empor- tant les eaux d’un côté plus que d’un autre, fuivant la direction du vent qui regne, on feroit encore plus con- vaincu de la néceflité extrême qu'il y a d’entretenir avec foin les digues de mer,:afin de ne pas être expofé x voir inonder par les eaux falées, ainfi accumulées, ces belles & riches terres. I1 eft parlé dans PArchitecture Hydraulique de, Monfieur Bélidor d’une marée qui arriva le 307 ou 31 Décembre 1720, & qui détruifit le Batardeau. par lequel les Anglois avoient barré le port de Dun- kerque en 1713. En 1736 & en 1737, plufieurs marées furmonte- “Tome Y DS IL . 106 236 SSSR MANNICSTIEENSBTRANE © rent & briférent des portions de digues entre Dun- kerque & Calais, & inonderent beaucoup de terres. . En i750, une marée éleva fes eaux jufqu’au point d’inonder les rues bafles de Gravelines. Je fus moi-même témoin le 2 Décembre 1763, qu'il farvient quelquefois dans les quadratures du foleil & de la lune, des marées dont le flot furpafñle la plus grande hauteur de toutes les vives eaux, qui ne font pas affectées de vents : cette marée rompit une digue près de Nieuport; &, s’il en étoit furvenu une pareille, im- médiatement après, tous les environs auroient été inon- dés. Enfin, j'ai été aufli témoin oculaire de la marée de vives eaux du 2 Janvier 1767, augmentée d’un orage au Nord-Oueft, & qui eft la plus haute dont on a connoiflance fur la côte de Flandre; fes eaux furent élevées jufqw'au point d’entrer au milieu de la ville de Nieuport, & de pañler les digues de mer en cinq ou fix endroits entre cette Ville & la côte, comme je l'ai vu moi-même. À Oftende en même temps il y avoit un pied & demi d’eau fur la grande place, & la plupart des rues furent inondées & les caves remplies, avec des dégâts & dommages très-confidérables. | 74°. Voici une table qui contient le réfultat de tout ce que j'ai pu trouver fur la quantité de ces marées extraordinaires & irrégulieres. A À DELA FLANDRE MARITIME. 247 Quantité E P O Q UES N OMS d’élévation: ; deleurs flots au-deflus du niveau des: plus hautes marées non aflédtées de vives eaux. Mef.de Fran: Pieds. Pouces 2, — DES DES MARÉES EXTRAORDINAIRES. | VIÉRRS. a à Le 31 Déc. 1720 . . . . . . à Dunkerque, Le27 Fév. 1736 &en 1737. à Gravelines, Gravelines, Oftende, | O (l O © NI À O O DO O EU U) Rétre Mars 1750 Ame { à Calais, (. Gravelines, Le 2 Déc. 1763 . . . . . à Dunkerque, | Hs Ô Nieuport, à Oftende, à Calais, à Gravélines, à Dunkerque, à Nieuport, à Oftende, \ Léandanyiamémit LE TE Hnb pb PH LR PR # H O m HR 1 mn | 75°. Une expérience conftante a fait connoître que toutes les hautes marées extraordinaires, fans exception fur cette côte, font accompagnées, ou plutôt caufées par de grands vents & des orages, qui viennent du Sud-Oueit jufqu'au Nord. De forte qu'il n’eft nulle- ment contraire à ce que nous avons dit ci-deflus (N°. 66.) fur la direction des marées & les pentes de Ja mer, de voir que ces marées extraordinaires s’élevent plus haut au-deflus du niveau des plus hautes marées ordinaires de vives eaux à Oftende & à Nieuport, que vers Dunkerque & Calais; car il eft évident par la Y i 248 SUR: SANT EN É TA TG carte des mers du Nord, que ces bourafques de vents & ces orages doivent réfouler fur les parages d’Often- de & de Nieuport, l'abondance des eaux qui vien- nent de la mer du Nord; pendant que la Manche & le Pas de Calais en font à l'abri, étant couverts par H Grande-Bretagne. ï . I n’eft donc pas étonnant que toutes ces grandes marées foient de moins en moins fenfibles fur la côte -de France, à mefure que l’on s'éloigne d'Oftende. Et même, fous les vents du Sud-Oueft, qui caufent quel- -quefois de ces marées extraordinaires vers Oftende & fur les côtes de la Zélande & de la Hollande; Calais, Gravelines, &c. doivent en être tout-à-fait exemptes,ou plutôt ces marées y doivent être moindres que les hau- tes marées ordinaires de vives eaux, à caufe que ces -vents chaflent les eaux du détroit de Calais vers le Nord- Eft; & c’eft ce qu'on à toujours remarqué par l’expé- rience. On ne voit prefque- jamais inonder les côtes de. la France & de l'Angleterre, qui bordent la Manche, non plus que celles de l'Eft de l'Angleterre; pendant que celles de la Zélande & de la Hollande en fouf- frent tant de défaftres de fiecle en fiecle, depuis les temps les plus reculés jufqwà préfent; j'en ai donné une fuite d'exemples au N°. 43 de ce Mémoire. & XII. Digues de Mer. 76° L/On peut déduire d’ici les hauteurs que l’expé- rience démontre convenables de donner au fommet de toutes les digues, éclufes , batardeaux, & autres ou= vrages deftinés à mettre les terres en sûreté contre les irruptions de la mer : ouvrages dont la conftru&tion, la Dm — DE LA FIANDRE MARITIME #f9 -#éparation, ou l'entretien ne devoient jamais être né- gligés en aucun temps ni en aucun câs. On trouve quantité de fautes anciennement commi- fes contre linduétion que je tire ici, & l’expérience: Ya fouvent démontré dans les marées extraordinaires, par les ravages qu’elles ont faites fur ces côtes. : 77%. Je penfe donc que ces ouvrages ne doivent pas être de moins de quinze à dix- huit pouces fupérieurs au niveau de la plus haute marée connue dans chaque canton, comme celle du 2 Janv. 1767 » & cela pour les environs des places de guerre, où les Here trop -élevées ont des inconvéniens par rapport à la défenfe de ces places. Hors la portée de leur canon à 500 toifes de leurs. paliffades, je crois qu’il convient d’élever toutes les di- gues de 30 à 36 pouces ( & même davantage, flo qu’elles font plus expofées aux flots de la mer ) plüs hautes que cette même marée, attendu que leur entre- tien eft ordinairement beaucoup plus négligé que dans le voifinage des Villes, & les fecours plus éloignés en. -cas d'accident. Par ces moyens bien obfervés, on pour roit efpérer de mettre à l’avenir ce riche pays conf tarmment à l'abri des ravages de la mer ne FIN. 250 LUE MAR Q'U ES : De De REMARQUES . Sur la Carte hydrographique du Nord-Ougft de l'Europe _ qui fe trouve ci-jointe. Pour rendre plusintelligible & plus diflin& tout ce que j'ai dit dans ce Mémoire, foit fur le changement lo- cal arrivé. dans les pays qui bordent les mers Ger- mañiques, foit fur la forme & les bancs de la mer du Nord, j'ai cru devoir y joindre une carte hydrographi- que des pays & des mers, depuisle Nord de l’Iflande & de la Norvege jufqu'à l'Efpagne , & depuis l'Océan Atlantique jufques dans la mer Baltique, au-delà de Dantzic. J'ai deffiné dans cette carte, d’après les car- tes marines Hollandoifes, toutes les côtes de ces mers & tous les banés de mer qui font un peu confidéra- bles, dont j'ai parlé dans ce Mémoire. La forme de la mer Germanique qui reflémble à un vafte golfe, sy voit diftinétement, añn de pouvoir mieux juger par-là de ce que j'en ai dit par rapport à fes eflets fur les marées. Mais la principale particularité qui s’y trou- ve, c’eft l’ancienne côte de mer, dont j'ai traité fort au long dans la premiere Partie de ce Mémoire, & que j'ai tracée dans cette carte avec autant d’exactitude qu'une chofe, fondée en partie fur des conje&ures, peut admettre. On voit cette ancienne côte s'étendre depuis le détroit de Calais jufqu'au Rhin, entre Co- logne & Bonn, & de-là tourner au Nord-Eft jufqu'a l'Elbe, & pourfuivre la même direction jufqu’à la mer Baltique, vers les confins de la Poméranie & dela Prufle. Le refte de cette carte eft fi clair &ficommun, qu’il ne me paroit avoir befoin d'aucune explication. REMARQUES. 25t K SRE LOR EU REMARQUES Sur le Profil des élévations des Marées fur la Côte de Flandre , comparees avec les niveaux des pays adjacens, qui fe trouve ci-joint. 2 : | EN CE — J te) ( A = +. ) ; Âr rapport au profil des élévations comparatives des marées fur la côte de Flandre & de difiérentes par- ties des pays adjacens, il me paroît qu’il y a peu d’ex- plications à donner ici, à caufe de celles qui fe trou- vent écrites aflez au long fur chaque ligne du profil même, & par le moyen.defquelles, ceux qui veulent fe donner la peine de lire avec un peu d'attention les. quatre dernieres feétions de ce Mémoire, (N°.56...77.) comprendront facilement tout ce qui fe trouve dans ce _ profil. La fule réflexion qui me refte à faire, c’eft _ fur Pénorme difproportion qui s’y trouve entre la me- fure de l'étendue du pays que ce profil renferme & celle des élévations comparatives des marées & des pays adjacens. Ce profil comprend au-delà de dix-fept lieues : en long, pendant qu’il n’a qu'entre quatre & cinq toi- fes d’élévation : en forte que quatre pieds d’élévation y occupent plus de place qu'une lieue en long. Mais dans les plans & profils qui renferment une gran de étendue de pays, on ne peut jamais les allonger fuffifamment pour rendre fenfbles les élévations prifes fur la même échelle que l'étendue : en forte que cette difproportion de parties y eft prefqu'inévitable. POUR ë5 TABLE DES MATIERES RTRARTEMILD MODE TIRTIENRTE TABLE TV? DÉS MATOERLS PREMIERE PARTIE. "GT Exe tant de Théories de la Terre, conftater la vraie. N°. f pufqu'au N°. 6. page 65 & fuiv. D’en tirer les principes généraux d’ex- panfion & de réfiftance, du phlogiftique & de l'humidité, avec les loix de leur aétion & développement. N°. 7 jufqu’au N°. lo. page 67 6 fuiv. $- II. Application de ces principes généraux à l’ancien état de la Flandre & à fes changemens fucceflifs, en y déduifant leurs caufes; où l’on montre quel a éré le changement général arrivé dans les Pays= Bas, la baffle Allemagne & l’Angleterre. N°. II. jufqu'au N°. 16. page 2 &c fuiv. F 6. III. De l’exiftence d’un Ifthme entre la France & l'Angleterre, & fes preuves. N°. 17 jufqu’au N°. 21. page 81 & fuiv. Etat de la mer & des marées pendant que cet Ifthme exiftoit. N°. 22 jufqu’au IN°. 23. page 87 & fuiv. - 6. IV. Application des principes généraux rirés de la Théorie dela Terre aux fujets préfens. N°. 24. page 89. Premier grand principe, ou force d’expanfon, manifeftée dans une irruption ignée, caufe de la recraite des eaux de la mer de la Flandre Maritime & de la Hollan- de. N°. 24. Ibid. Que cette même caufe, jointe à la retraite violente des eaux & aux marées, a rompu l’Ifthme, & formé le détroit de Calais. N°. 25. page 90. Que le détroit formé a été caufe que les baf- fes terres, autrefois mer, n’ont plus été inondées. N°. 26. Ibid. De l’effer du fecond grand principe, la diminution graduellé de la mer, qui a contribué à étendre & deflécher les terres délaiflées par la mer. N°. 27 jufqu'au N°. 29. page 91 & fuiv. Que l’époque de ces grands changemens eft bien antérieur au déluge Cimbrique & à tous les mo- numens hiftoriques. N°. 30. page 95. 6. V. Détail hiftorique des Cimbres & du déluge Cimbrique. N°. 31. page 96. On prouve par les relations de Pythéas, &c. que le dé- £roit de Calais & les mers du Nord furent à-peu-près dans le même érat 200 ans ayant le déluge Cimbrique qu'a préfenr. N°. 41. page TII. . VI. Suite chronologique des inondations poftérieures au déluge Cimbrique , & quelques réflexions générales là-deffus. N°. 42 jufqu’au N°, 46. page 113. & fuiv. SECONDE — Page 153 N°2 PRET ne. | pe Po Al des Variations de la Pleine Mer, compartes à op eee des Terres de ll «Flandre Maritime. pour. servir à divers Memoires de M. L'Qbbe ann. sur L'SOstoire Naturelle des Pays À “ Ga Æ ve et de 7 Ter. du Nord, ne Les Révieres = Canaux de la tes < | L = ‘4 Use 23. Foutar les Echelles des Ports de Mer sont ie divisées en Pieds de France - “ Lu Gravelines. , Dunkerque Nieuport Oftende 2 4 ae He G 7 8 de °9 10 11 iveau 12 13 24 15 16 17 L'écuos. Ë [ao Er 20Ë ë "| our empecher las nondations de ses Caire 7 «Pas 14] de Gravelines au Deus de Per Pleine Mer Per de Durfcerque du L Tanver 140 Pound du 2 Decembre Mer la plus haute Pleine Mer das Syeygias et der Opposctions Pline Mer ll \ Aiveau des Terres vers Bourbouty Mayenne T ar des dyxygies et des Oppasitions Te Aa Rennes Dirnat erres vers Dr nhergue 2} Ferrer aux Environs -d'Uxem Pense Mer 2 4 7E DS 1 14 réduite entre Les Hauts et Baies Maress 2 Ha (Ferrer vanr Grasvelinar | 8h 8l : , sl [a (a 2 Plaine Pier la plus ba De das Ppyaies et la plus haute des Quadratires | I pla hasta Taras de Bose Cas 1h TH F7 F7 8 \ ch Ferrer Le Long de Ha 6 Le He 5 4 n, sl des Duadratures de [le ] Pline Mer il oyenne : all 4 4b { 52 f+ H4 Ferrer aelEtrons de Frirsiar 3h all :}] des Duadratures IE lE a RE £ RS RE PTE CET Fever aux Ensirens de Loo. Port Diano||que & Movkhem | H2 du Piveaw Moen de la Per, Terres. dà Le dus Moërar: entte Furnes We Berquas. Bafie Mer das yygies et dus Oppasitions 10 Licues Communes 1 Pagr 153 N°1 Tome I. CARTE HYDROGRAPHIQUE DES PARTIE s DUNoRD-WEST DE L'EUROPE «Poux setvirau Memoire de A L'Obe Aunn, sue L'Eat Plaque, ancen et Vloderne, de ves Pays et Pers. Dasignée pas l'auteur Le € SP Me d'un Mayen LIsRAR Meridien de Paris Drontheim 2 A « | d. #. fu é ee À Baies de Foro s > 1 be k D e o\ 2 Jutsehe RFF 9 PE IT è @ | à no Le Lea Vlan Sorlingues 240, Rouen 4 TABLE DES MATIERES. 253 SECONDE PARTIE 6. vi Sur le climat de la Flandre Maritime. N°. 47 jufqu’au N°. 50. page 121. à ’ Fe VIII. Sur le fol & la falubrité de la Flandre Maritime. N°. 5y juiqu'au N°. 55. page. 124. 6. IX, Phénomenes des marées fur la côte de Flandre & dans pref- que tout l'Océan Germanique. N°. 56 jufqu’au N°. 63. page 128 & fuiv. $. X. La quantité des marées fur la côte de Flandre, &c. & leur comparaifon avec la hauteur de plufeurs parties des pays adjacens. N°. 64 jufqu'au N°. 73. page 135. $. XI. Marées extraordinaires. N°. 73 jufqu’au N°. 75. page 145 & fui. $- XII. Hauteur convenable des digues de mer. N°. 76 & 77. page 149. & fuiv. : Remarques fur la Carte Hydrographique du Nord-Oueft de l’Euro- pe, qui fe trouve ci-jointe. 150 Remarques fur le profil des élévations des marées fur {a côte de Flandre, comparées avec les niveaux des pays adjacens, qui fe trouve ci-joint. 25 Fin de la Table. Tome I. Z RECUEIL D E QUELQUES OBSER VATIONS BAEMIVRS,: D'ONUNES Mi Faites principalement dans la Province de Luxem- bourg , en 1772 , pendant un voyage Aftro- nomique avec M. Pigor, Gentilhomme An- glois , de La Société Royale de Londres, Af° Jocté étranger de l'Académie Impériale & Royale des Sciences & Belles - Lettres de Bruxelles. è PAR Me. NEEDHAM, Directeur de ladite Académie, Membre de la Société Royale des Sciences, & de celle des Antiquaires à Londres, Affocié étran- ger de la Société Royale Bafquoïfe en Ef pagne, & Correfpondant de l’Académie Royale des Sciences, à Paris. Lu à la Séance du 25 Mai 2773. Z jj ÿ LRU NS satirot sur tisse je: Le AR RARE | AUDE ne L. fe Re AN: Mia 28 ANUS de M RNA LATE 5 Mari A PAUSE NS AE" ant ; D / 4 Q : iris ï 5 are PAIE < ‘ x \ 191 : pi Lt à K ‘ Ÿ: EM , 11 : Ste al | M, 1 1 ‘ ii  pe | k ; ue % “ist ai Y 3 1 : ‘ L] % nt LE Le ee MAHGAAM ÿ SRNNEe UE : à axe LaimbhedA. au ris wa É UiDet. AA PRE ab KE énonsie 5h slsyof brbio ï LR et ni ene0b OA: embnod de Bb Dr » ARR ARR Hiouplatl afvoil dtiinoë sf sf 133 | 1} sheet Un. 8 ‘1 AT ru MR DT 1 CAT 1 VEUT MA ES M LT RM OUTE . ay Br cd LES — enr en = n 3 CE NA HER RENTRER RER & 74 US Fe pe ti FL. LASER 4 ll + ee RSR ee E c Us a NW D 7 used | = = CE four... 20 a Nantes ec rer ee sl ENS TT RECUEIL 4 D E QUELQUES OBSER VATIONS PHYSIQUES, Faites principalement dans la Province de Luxembourg , en 1772. Ps les grandes vérités phyfiques, dont les fuites La propag:. immédiates font de la derniere conféquence pour l’hu- £ Xafon manité en général, une des plus étendues & des plus pipe importantes , cet, que la propagation, fi un obfta-ture, cle purement accidentel ne l'empèche , eft toujours proportionnelle à la quantité de nourriture dans un pays quelconque. à Les bœufs, les moutons, les cochons, Îa volaille Comes prefque toutes les efpeces graminivores ou granivores ,maux car. >IMaux Car- dont la multiplication prodigieufe eft au-deflus de tous?iv- ivec nos calculs, fe propagent fous nos yeux fans cefle, & graminiv. . & graniv fe confervent fans diminution , malgré le nombre infini £ de ces animaux qui périflent journellement, dévoués à nos befoins , ou victimes de notre luxe; pendant que les animaux carnivores fe réduifent à peu de chofe com- 158 RECUEIL parativement , même dans les déferts & au milieu des chaleurs d'Afrique, fi favorables à leurs éfpeces, où les hommes ne troublent ni leur repos, ni leurs amours. On chître des milliers, tant de Moutons que de bé- tes à cornes, on en égorge fans nombre, pendant que les loups, dont la force prolifique excède beaucoup à chaque portée, celle des animaux domeftiques, fe pro- menent en sûreté dans nos vaftes forêts; cependant quelle proportion en fait de multiplication trouve- t-on entre ces diflérentes races? & à quoi peut-on at- tribuer l’immenfe difparité en nombre, finon à la quan- tité comparative de leur nourriture refpective ; dont l'excédent, en faveur des animaux domeftiques, eft . comme un million à l'unité. Ce n’eft pas au célibat en général, ni aux grandes armées entretenues par nos Souverains en Europe, qu’il faut fe prendre pour caufes de la dépopulation, dont fe plaignent certains Philofophes. Plufieurs milliers de . Bonzes Célibataires fe trouvent à la Chine, des cen- 9 e Preuve tirée de la nation Chinoife. taines de milliers y font entretenues dans leurs armées nombreufes; cependant le Royaume, loin de fe dépeu- pler, regorge fi fort d’habitans, que les Loix n’empé- chent pas les peres d’expofer leurs enfans, & de les abandonner à la mort, quand ils ne font pas en état de les entretenir. Speétacle affreux, mais fpectacle qu'on y voit tous les jours ! Ne foyons pas la dupe de nos préjugés, défrichons des terres nouvelles, comme on fait en Amérique; augmentons le produit des anciennes, comme les Chinois font par tous les moyens poffbles, & la population y augmentera toujours en raifon de notre induftrie. On en voit également un exemple frappant dans lef pece humaine , & une confirmation de ce même prin- cipe à la Chine. Le peuple qui fait la mafle de [a na- Mio D E QUELQUES OBSERVATIONS. 159 tion, compofée de cent millions d'individus pour le moins, fur un terrein qui n’eft gueres que la dixieme partie du continent d’Afie, vit des végétaux , dont le ris fait une partie principale, & dont la quantité, comme on fait, excède beaucoup toute autre nourriture tirée du regne animal. C’eft un degré de population, où nous warriverons jamais en Europe, dans la partie même la plus fertile d’une égale étendue, où il nous faut des terres en pâturages, en vignobles & en grains, pour entretenir le luxe exorbitant de nos tables, en chairs & en boïflons fermentées de diverfes efpeces, inconnues aux Chinois. (a) Le Gouvernement, toujours attentif aux befoins de sien humanité, tourne, depuis quelque temps, toute fonment. attention du côté de l'Agriculture. Si la province de - Luxembourg fe dépeuple, il en connoît la vraie caufe, & il en excite, par fes fages édits, l’induftrie languif- fante : fi dans quelques autres parties de fes domaines il f trouve des terres abandonnées, il en ordonne, il en encourage la culture, même aux dépens de fes droits naturels. Les nouvelles terres, que tant de citoyens patriotes font actuellement défricher à leurs dépens dans le Mar- quifat d'Anvers & ailleurs, font fituées avantageufement, le climat favorife leurs entreprifes, les moyens ne peu- vent manquer aux entrepreneurs , dont les facultés es («) On remarque ordinairement une population plus forte dans les ports de mer, en raifon de leur étendue, que dans les Villes méditerranées; on l’attribue très-fonvent à la qualité de la nourriture, qui s’y trouve, dont une partie confidérable fort de la mer. Mais fi on confidére, que les oïfeaux de mer, qui vivent entiérement de poiflon , ne pondent, en général, que deux œufs, & que la viande eft: indubitablement plus fubf- tantielle & plus nourriflante que les poiflons; on attribuera la force pro- lifique, qui paroît prédominer dans les ports de mer, plutôt à la quantité de nourriture , en coquillages, &jautres poiflons., que le peuple y trouve facilement fans fraix , qu’à la qualité, qui çertainementn’égale pas en force celle de la viande en général, D) 160 RECUÉIL : font puiffantes, dans des endroits où les engrais nécef- faires à la nouvelle création, arrivent abondamment des pays circonvoifins qui en régorgent, & la cou- vrent de leurs richefles. La grande province de Luxem- bourg, bien loin de & trouver dans des circonftan- ces fi heureufes, eft un pays, au contraire, fans aucune reflource de cette efpece, qui dévore fes habitans au lieu de les nourrir. Si on y travaille encore malgré la nature; fa fituation, qui s'éleve à mefure qu'on avance vers Arlon, jufqu'à plus de 309 toifes, ou 1854 pieds de France, hauteur perpendiculaire au-deflus du Canal de Bruxelles, eft un obltacle prefqu'invincible à la cul- ture. Des barrieres de cette efpece , pofées par les mains de la nature à la végétation , ne peuvent jamais être vaincues parfaitement, & pour peu qu'une induftrie forcée les outrepañle , elle trouve malheureufement des bornes infurmontables, & lene plus ultra de toutes fes : peines. Preuveti Quiconque a traverfé les Alpes ou les Apennins; are des quiconque voyage dans un pays compofé de monta- montag.en ghes, appercoit bientôt la vérité de ce grand principe, SL qu'il y a par-tout une gradation de tempérament dans le regne végétal, dépendante autant de la fituation & du climat, que de la nature du fol, où les végétaux fe trouvent placés; que l’atmofphère , cet élément fi différent de lui-même, felon la diverfité des matieres hérérogenes, & le local du terrein qu'il couvre, y con- tribue autant qu'aucun autre élément; qu’une certaine jufte proportion de chaleur & d'humidité y eft réquife, & qu'en général la végétation diminue toujours jufqu’àa s'arrêter totalement, en raifon de la hauteur du ter- rein qu'on veut cultiver. Obferv.de Te Chevalier Hamilton, Miniftre de Sa Majefté - Chev. Ha- icon, fu Britannique à la Cour des Deux Siciles, Membre de Env. montEtna. + la L2 DE QUELQUES OBSERVATIONS, 16% la Société Royale de Londres, & célébre par fes ob- {ervations fur les environs des deux volcans des monts Etna & Vefuve, vient tout récemment d'en donner une defcription phyfielogique , exaétement conforme à ces idées. Le tableau qu'il en préfente, mous trace la vue des effets produits dans ce pays de feu par le plus an cien de.ces deux volcans, pendant une période de plu- . fieurs fiecles, depuis l’époque hiftorique la plus réculée. : La nature dans ces régions travaille fans cefle à fe dé- truire & à fe réparer fucceffivement; c’eft une guerre perpétuelle, un: combat, pour ainfi dire, acharné entre 3 la vie & la mort. Le terrein., au tour de {a bouche fumante de cette. montagne, s’exhaufle continuellement, la matiere enflammée qui fort à grands flots de fes en- trailles, les cendres qu'elle élance jufqu’à des diftances prefqu'incroyables de fiecle en fiecle, en dévorent par intervalles toutes les productions les: plus.éloïgnées, un nouveau fol, formé enfuite & fertilifé par les parties terreftres, mêlées d’une quantité très-abondante de fels, couvre l’ancienne lave, quienfaicla bafe; les végétaux de divenfes: efpeces, dont les: femences arrivent fur les aïles des vents, s’y. placent, en y: ajoutant annuellement une nouvelle couche produite par les feuilles: qui tom- bent, & les: débris qu’ils: y laïflent, & tant la profon- deur &:la fertilité du: fol, que la force végétative, . marquée par l’état floriflant , ou par l’efpece des végé: taux qu'il nourrit., eft toujours-en raïfon inverfe de la hauteur. En effet le climat propre pour tous les végétaux du © monde entier, depuis les plus aromatiques, les plus, chauds, les plus fucculens, les plus doués d’une grande: force végétative, jufqu’aux plus foibles, les plus arides,, les plus pauvres, les moins nourriffans, peut fe trouver entre letropique, fous l'équateur même, s'ils font-placés Tome I. À a @ æ@ @ 162 RE CU EST dans un certain ordre rélatif de gradation, refpeétive- ment à la diverfité de leurs températures, fur une très- haute montagne, égale à la plus haute des Cordellieres. C’eft précifément cet ordre même que la nature ne manque jamais d’obferver, & des continens entiers ne font enefletque de grandes montagnes, desIfles placées au milieu du baffin de la mer, dont le terrein s'éleve à mefure qu’il s'éloigne de fes rivages. C’eft un fait gé- néralement connu , que les mêmes plantes fe trouvent fur les Alpes, les Pyrenées, les montagnes d'Ecofle , le mont Liban &-le mont Ida, malgré leur différence de latitude, & qu'on les voit encore fur celles de La- ponie & du Groenland. M. Tournefort a trouvé, au pied du mont Ararat en Afie, les plantes ufuelles d’Ar- mérnie, un peu plus haut celles d'Italie, encore un peu plus haut celles des environs de Paris; enfuite, en mon- tant toujours, il a vu les plantes de la Suède, & en dernier lieu jufqu’au fommet & parmi les neiges, dont le mont Ararat eft toujours couvert plus ou moins, étoient les plantes des montagnes de l2 Laponie. Il y a même moyen, comme le célébre Linnæus obferve, de connoiïtre les différentes hauteurs, par les plantes qu'on y trouve; ce que j'ai éprouvé plufeurs fois, ajoute le même Auteur, avec fuccès, en comparant les montagnes de la Dalecarlie avec celles de la La- ponie. (a) (a) Le même Auteur fuppofe, avec raïfon, conformément à l'Hiftoire facrée , que le Paradis Terreftre, où Dieu a placé le premier homme au milieu: de la création animale &végétale, étoit fitué fur une haute monta-- gne vers l’Equateur, dont les parties différentes, en raifon de leur hau- teur préfentoient des climats propres à chaque efpece. Leur propagation fe fit enfuite, depuis l’Equateur jufqu’aux deux Poles, par un enchatne- ment des montagnes avec leurs valons refpe@tifs, dont le monde actuel renaiflant des débris de l’ancien , bonleverfé par le féluge univerfel, &. mille autres révolutions locales, nous préfente encore destraces éviden- tes au: travers de la: terre & de la mer. Voyez la Mappe-Monde phyfique . extraite de celles de Danville., de De Lille, &autres Géographes. ee ee OS ER RE US SO UE US CS SNS DÈ QUELQUES OBSERVATIONS. 163 Ces vérités phyfi ques, fi conformes à l’enchaînement des chofes, qu’on obferve dans la nature, y montant par des dégrés infenfibles dans une feule échelle pro- longée jufqu'à Zero, s'appliquent au premier afpedt à J'élévation, au climat, au terrein & à l’atmofphére du pays de Luxembourg. Il en fuit directement que celui qui veut établir des On doit principes certains & lumineux, d’où il lui fra permis Rs SuiG de partir pour efleétuer la meilleure cultivation poñlible bien auela dans la province de Luxembourg, ne doit pas fixer fes yeux uniquement fur le fol, tel qu il eft actuellement, ni prononcer témérairement , qu avec une induftrie forcée & de l’engrais, on y opérera les mêmes mer- veilles, que le voyageur voit au'ourd’hui dans le pays de Vaes. La métamorphofe d’un {ol aride#& fablon- neux, dont l’expofition eft heureulfe, par les effets d’une culture obffinée, fur un terrein moins élevé, fans com- paraïfon, que Îa plupart de la province de Luxembourg eft très-naturelle, & ne paroïtra jamais merveilleufe aux yeux d’un Phyficien. On aura grand tort, par confé- quent , de former des jugemens précipités fur ce pays très-élevé, & fonciérementftérile, ou d’accufer de fainéan- ui@ les malheureux habitans, comme certains voyageurs, qui nés fous un ciel plus heureux, veulent tout réduire à la mème mefure. Mais quoique ce pays ne produife, pour la plupart, rien de mieux, en fait de grain que l'avoine ou le feigle, & ne Pournife que très-peu de foin ou de pâturage, il ne s'enfuit pas néanmoins, qu'il ne produira pas par-tout le froment & le pâturage enabon- dance, s’il étoit cultivé d’une maniere plus parfaite. Dans certains cantons, même les plus élevés, le fro- ment y vient en quantité, & les bons pâturages auffi bien que le foin, ne font rien moins que rares. Mais toutes fes productions fe reflentent de la fituation trop À ai 164 ss ReBLOU EI élevée du fol, qui le rend naturellement aride & froïd, & le froment, quoiqu’aflez abondant dans les environs d'Arlon, & de quelques autres diftriéts, ne pourra jamais être porté, telle culture qu’on lui donne, au degré de perfetion où il arrive dans les autres Pro- vinces Beloïiques, fous la domination de Sa Majefté Impériale. I men Avant donc que de chercher les meilleurs moyens Peel poflbles pour en perfeétionner les produétions, & pour * étendre généralement par-tout le pays, celles qui, dans l’état préfent des chofes, ne: fe trouvent que dans cer- tains cantons. Je reviens à ma propofition préliminaire, dont j'ai établi, comme il me femble, les fondemens d'une maniere fatisfaifante : que des Barrieres pofées par la main de la nature, ne peuvent jamais étre vaincues parfaitement ; & que pour peu qu'une induftrie forcée les outrepalfe , elle trouve bien-t6t des forces infurmontables, & Le ne plus ultra de toutes fes peines. Il eft d'autant plus important de fe pénétrer d'avance de cette vérité générale, que fà connoiffance eft eflentielle pour fixer le terme de nos travaux, & pour nous empêcher de former des efpérances chimériques fur l’objet de nos recherches, Pourquoi Cela pofé, la premiere queffion qui fe préfente dans crains Je cours de mes recherches, fur le moyen d'améliorer font plus le fol de cette province, autant que fà fituation le per- gnsque mettra, eft, pourquoi le froment, les bons pâturages k & une certaine abondance de foin, matiere premiere Fe des plus riches engrais, fe trouvent dans les environs d'Arlon, de Luxembourg & de quelques autres can- tons de cette province, fans que la même induftrie, exercée plus ou moins ailleurs dans le pays, foit auf: heureufe ? Cependant les terres d’Arlon & de Luxem- bourg, font abfolument les plus élevées dupays, ju£ | qu'à la hauteur même de trois cens vingrtoifes envi- | DE QUELQUES OBSERVATIONS. 165 ron, en ligne perpendiculaire au-deflus du niveau de la mer. Les terres d’Arlon & de Luxembourg , font fituées fur une plaine, qui fait comme la fommité de. la hauteur totale du pays. L'eau du Giel qui l'arrofe ne s’écoule pas, maïs pénétre & { diftribue par-tout , bien loin de former des torrens comme ailleurs, “ d’emporter avec elle le fuc de la terre & le fol, lieu de le fertilifer: Cette raifon eft très- faillante, & nous frappe au premier afpeét, mais on ceflera abfo- lument de s'étonner de fa re pe ; fupérieure à celle: de bien d’autres cantons de la province; quand on faura d’après des recherches exactes que jy ai faites, que le ° fond même du terrein fans culture eft naturellement “plus riche, & compofé entiérement jufqu’aüx rochers même de matieres calcinables. Ces mêmes matieres fe trouvent dans quelques autres cantons du pays; qui nous donnent les mêmes produits, & leur communi- quent cette qualité defirable d’un fond fapérieurement riche , pour bafe de la culture. De-là provient cette facilité naturelle d'y pouvoir cultiver tons les différens végétaux qu'on pofléde dans des pays plus heureux, malgré lPélévation du fol & malgré fon expofition à un air maigre & fec, qui travaille par laridité qui l'accompagne, à détériorer les efpeces. De-Ià, la nour- riture du cultivateur & des animaux néceflaires à fon travail, d’où proviennent ; fans peine, les engrais les. plus riches, par une fuite naturelle ; le {ol végétal s'ac- cumule fans cefle d’une maniere très-fenfible; les hom- mes & les animaux fe multiplient en proportion de la nourriture fournie par la terre, & la nature y opére: fans obftacle. | Les matieres calcinables, dont je parle, ne font autre L'origine chofe que les débris des corps organifés de toute efpece, res e dus dépouillesanciennes de la mer, pour la plupart réduites? < Preuves d'un délu- ge univer- sel. 166 RE-CUEIL en poudre, qui compofent la partie fertile de notre fol végétal en grande partie, ou amalgamées en mafles pétrifiées & entremêlées de coquilles, qui confervent en entier leurs formes primitives. Ces marques certaines de quelque déluge local, ou de la retraite de la mer, quand elles ne-font pas trop éloignées de fes rivages, ou trop élevées au-deflus de {on niveau, deviennent en raïfon de leur hauteur aux yeux d’un Phyficien , qui les tourne du côté de la théorie générale de la terre, des monumens d’une bien plus ancienne date, & le trifte fouvenir d’un boule- verfement univerfel. On les trouve difperfées fur toute la fuperficie, enterrées à différentes profondeurs dans les entrailles, & accumulées en quantités énormes fur les montagnes les plus élevées & les plus éloignées de la mer. (a) On voit des efpeces hétérogenes entremé- lées dans une confufion toute contraire à ce bel ordre d'emplacement que la nature leur donne quand elles font en vie. On trouve des Conques Pélagiennes, ces coquilles énormes, ainfi nommées parce que nous ne les voyons jamais fur nos côtes, & parce qu’elles font deftinées par leur conftitution phyfique, à vivre dans des profondeurs , qui vont quelquefois jufqu’à trois mille toifes ; on les trouve près de la fuperficie de la terre, au milieu d’un tas immenfe de coquilles litto- rales. Que conclure d’après tous ces phénomenes fi étranges aux yeux du vulgaire, finon qu’ils font des marques évidentes d’une ruine vafte, fubite, univer- felle, & que nous n'avons aucun droit de les attribuer à une retraite lente, & infenfible de la mer, nullement © Ca) M. de Luc, célébre Phyficien de Genève , a trouvé des cornes d'Ammon fur les Alpes, à la hauteur de huit mille pieds au-deflus du niveau actuel de la mer, Voyez fes Recherches fur les modifications de Vatmofphere, 1 DÉ QUELQUES OBSERVATIONS. 167 analogue aux effets dont nous cherchons les caufes, à une retraite, qui, par fon progrès trop tardif de quel- que milliers de fiecles imaginaires, doit enterrer à Ja profondeur de trois mille toifes environ, toutes les conques Pélagiennes où elles font nées, & laifler tou à-peu-près, dans l’ordre primitif que la providence leur a donné en les formant. (a) 2 eu qui n'abandonne pas le monde comme une Ontroure machine, à fes propres forces, & qui, pendant qu'il ae punifloit limpiété de nos peres, a voulu en même temps NE tirer le bien du mal, a beaucoup mieux fait, n’en dé- plaife à certains Philofophes , en rejettant ces coquilles maflives & les autres dépouilles de la mer, vers la fu- perficie de la terre, par un Bouleverfement de ces deux élémens. Ce font de riches dépôts chargés de fels al- kalins qu'on reconnoît facilement, en y mélant quel- ques gouttes d'acide nitreux ; les principes d’une végé- tation forte, sy trouvent nf dépofés pour notre ufage. depuis des fiecles nombreux , & les femences en quel- que facon d’une vie nouvelle, qui fe dévéloppant en- fuite, fous la forme de chaux par la force du feu, for- tent du tombeau de la nature. Les environs d’Arlon & de Luxemboure, auffi- sn EE que ceux de l'Abbaye d’Orval & de plufieurs autresabondance endroits placés par intervalles dans cette province , en ‘#isen- fourmillent; les marbres du pays, dont les Eglifes on os Luxem-- bourg, ae [4] Selon les idées de l’Auteur du Télliamed, adoptées par M. de Buf- fon dans fa théorie de la terre , chaque partie, la plus élqignée maintenant de laterre habitable , doit avoir été autrefois côte de la mer ; les cornes d’Ammon, & les autres conques Pélagiennes , qu’on trouve aujourd’hui par-tout près de la fuperficie de latterre, étoient, par conféquent,, jadis des: conques littorales, phénomene abfolument contraire à l’ordre préfent des. chofes. Pour les tranfpoïrter des plus grandes profondeurs jufqu’à la-fuper-- RUE de la terre, il ne faut pas moins qu'un bouleverfement univerfel :: la feule retraite lente dela mer, &le changement fucceñif de mer en-terre.. & de cerre en mer,. ne faura jamais réfoudre çe problème. @ 168 R'ÉCUEITT ornées, & les rochers les plus durs que j'ai effayés très- fouvent avec mon acide, les décélent ; les carrieres de Namur , qui fourniflent des matieres inépuifables aux fours à chaux, qui brûlent jour & nuit dans fes : environs en grand nombre, le démontrent; toutes les pierres, qui compofent une grande partie de nos bâtimens, indiquent par leurs fueurs (a) en temps hu- mides, les fels dont elles font impresnées, & le terrein qui eft toujours analogue aux rochers, qu'il couvre, dont il n’eft en effet que les débris, où la matiere pre- micre, en, attefte l'exiftence. a PER Entourés de tant de richefles, dans un pays qui dé- taus dans cline toujours par une defcente aifée depuis Arlon juf LS dE qu'à Namur, fera-t-il croyable , que les habitans, pour % la plupart, ne connoïflènt encore d’autre moyen de y foutenir une vie toujours languiflante par quelques ré- coltes chétives d'avoine & de feigle , que de brûler fuc- ceffivement tous les quinze ou vingt ans, le fol avec la . bruyere qui le couvre, & que la nature abandonnée à elle-même fous un Ciel ingrat, forme très-lentement ? Ces mêmes habitans qui doivent favoir, par une expé- rience de longues années, que le feu ne fait autre chofe qu’extraire le peu de fels, que ce malheureux fol avoit amañlé en aflèz petite quantité, après un travail de tant : d'années; quine peuvent ignorer, par conféquent, que la récolte, qu’ils font enfuite, toute chétive qu'elle eft, n'eft due qu’à la force végétartive de ces mêmes fels AI- kalins, ne voient pas en même-temps. que séprise ainfi ne ne ee TE (a) Je ne parle pas de cette humidité générale, qui s’attache aux pier- xes fans diftinction, quand l’air en eft extrêmement chargé, mais de cer- “aines efpeces de pierres, qui, très-fouvent, annoncent par leur humi- dité un changement du temps, pendant que les autres pierres d’une ef- pece différente, qui les entourent, demeurent dans un état de fécherefc. “Ce font des hydromêtres d’une qualité particuliére. : ; DE QUEIQUES OBSERVATIONS. 169 ainfi le fol, de l’anéantir même à mefure que la na- ture le forme, au lieu de tirer d’ailleurs une nourriture toute femblable pour l’enrichir, & pour en augmen- ter les couches, c’eft vivre d’un fond trop mince pour / les fuftenter, au lieu de le mettre à l'intérêt de cent pour cent; c'’eft égorger la poule qui fe difpofe à pon- dre des œufs d’or, pour tirer un repas chétif d’un pau- vre fquelette. | On me demandera peut-être quel eft le but de ce trifte & morne tableau, que je viens de donner du pays de Luxembourg dans fon état préfent, & quels font les remédes que j'ai à propofer aux maux phyfiques, fous lefquels il languit aétuellement ? les voici en peu de mots. Qu'on bätifle des fours à chaux par-tout où fe trou- Moyen vent déja dépofées par les eaux de la mer des pierres meilleure calcinables, ces matieres premieres d’une fertilité future. te Toutes les matieres terreftres dans les deux genres de pierres ou de terres fe partagent en troïs clafles, il y en a de calcinables, de vitrifiables & de réfra@taires. On diftingue facilement les matieres calcinables des deux autres, en y laïffant tomber quelques gouttes d’eau forte. L’acide nitreux bouillonne, & fermente toujours quand H f mêle avec des fubftances calcaires; qu’on en dif- tribue enfuite les produits calcinés,. qu’on les voiture, avec la facilité que la nature elle-même a tracée fur un plan incliné ‘dans un pays de déclivité, en partant tou- jours de quelque pointe fupérieure, où les fours fe trouvent, pour defcendre aux parties inférieures du pays; qu’on fache que la raifon pourquoi chaque habitant ne trouve pas ces matieres premieres à {a porte, eft que les eaux de la mer, en fe retirant avec rapidité des pays les plus élevés, les ont émportées en grande partie avec elles, pour les femer cà & là dans des cavités, & pour Tome I. 170 RENCU ET TL ne laifler prefqu'ancune autre trace de leur cours fur des terres, qui déclinent rapidement vers la mer. Les fommités d'un pays, qui s’éleve ainfi, quand ces fom- mités s'applaniflent dans une fuperficie de quelque éten- due, comme font les environs d’Arlon & de Euxem- bourg , où les fonds & les petites plaines qui fe pré- fentent fur la fuperficie en defcéndant, comme les rer- res voifines d'Orval, de Ville folie, de Namur , & de plufieurs autres endroits pareils, à moï inconnus, font les grands Magafins de la nature, où ces matieres. fe trouvent en abondance. Qu'on fe ferve enfuite de ces matieres calcinées , pour aïder la nature au lien de la détruire, pour la faire circuler en prolongeant fes opé- rations d'année en année , pendant qu’elle travaille à réparer , fans en interrompre lé cours ; qu'on fe fou- vienne toujours que ces matieres, dont on ne fait aucun ufage actuel ,étant brûlées & rédies en poudre , four- niflent les MÊMES fels alkalins, que leur malheureux fol qu'on maltraite tous les quinze ans, & en telle abon- dance qu'on voudra; qu'on apprenne que le fol pris mitif, formé par la nature malgré fes entraves & les déftrudtions périodiques que les hommes y font en le brûlant, s’accumulera par ce moyen, au lieu de sa- néantir, & que la terre vésérale augmentera de jour en jour, jufqu'à donner des produits annuels, au lieu d’une récolte chétive après des moyens forcés & déftruc- üf$; qu'on { conforme aux fages confeils du: Gouver- nement, en y multipliant les bois qui attirent & arrè- tent les vapeurs aqueufes, condenfent l’atmofphere & en fixent l'humidité, qui fervent à mafquer un pays - déja trop aride par fa fituation contre les vents impé- tueux, qui defléchenc la terre par-tout où ils foufflent, & à briderles Ouragans, qui y regnent defpotiquement, ravagent, emportent & brülent le fol avec les pro- _ DE QUELQUES OBSERVATIONS. 7x duétions, fans que rien fe préfente pour tempérer fes fureurs, qu'on y ajoute à limitation des Anglois, quand ils travaillent à convertir leurs dunes en terres labourables , des enclos ferrés, des hayes vives, telles que la nature du terrein y admettra dans fon état pré- fent , pour y fubftituer d’autres plus fortes & plus avantageufes, à mefure que le fol fe bonifie avec le double effet de rompre le vent & de tenir les terres chaudes, qu’elles partagent par-tout en petites divifions proportionnées aux befoins de fes habitans; que ces hayes ou enclos foient entourés de foflés aflez profonds pour tenir les eaux de la pluye & des neiges fondues en affez grande quantité , tant pour difloudre les feuil- les qui y tombent annuellement, & former ainfi des engrais nouveaux pour les terres qu’elles entourent , que pour les humecter par cette portion de fluide, que ces terres abforbent & qu’elles ne ceflent jamais d’imbi- ber d’aufli loin que leur force attraétive peut s'étendre: qu'on remarque les bords verdoyans des rivieres, & - les prairies qu’elles parcourent, quelle fraîcheur, quelle force vépétative dans l’herbe qui lui eft voifine ! Sa douce influence s’érend même jufqu'à des diftances con- fidérables; & qu’on doute enfuite en voyant des effets pareils, fi un fimple bonnier de terre, entouré de hayes vives, qui couvrent de leur ombre des fofles profon- des remplies d’eau, ne doit pas profiter de l'humidité qu'elles entretiennent, & en imbiber une partie confi- dérable. Tout eft ation & réaétion entre les élé- mens, & les parties analogues qui compofent notre globe quand elles ne font pas trop éloïsnées les unes des autres, & l’atmofphere même, échauffé & nourri par l’action des corps organifés qui s’y élevent, y pom- pe & prépare les fucs & les fels qui s’exhalent, pour les rendre enfuite avec la pluye aux terres & aux vé- Bbij 172 RECU Ed gétaux d’où ils fortent; c’eft ainfi que tout circule dans la nature, quand {es opérations font libres, & quand on lui fournit les moyens fans la gêner; que ce bon- nier de terre, dont nous venons de parler, ainfi placé à l’abri des’vents, qui le defléchent, & humeété par un furcroit de fluide qui l’entoure, foit traité enfuite comme on traite les terres nouvellement défrichées en Angle- terre, qu'on y feme des végétaux proportionnés à fa force , dans fon état d'enfance, pour ainfi dire, comme des navets d’une efpece choifie propre au fol, tel qu'il eft, & deftinés à nourrir un certain nombre de Mou- tons; quand les navets font arrivés à leur maturité, qu'on y place le troupeau enfermé de tous côtés par lenclos qui l’entoure : cette terre ainfi foulée & en- graïflée par la crotte de ces animaux, & labourée en- fuite fera bien-tôt en état de porter des femences d’une autre nature, pareilles à celles qui forment en général nos prairies artificielles, & le gros bétail en remplacera le menu, qu’on tranfporte ailleurs pour former de nouvelles terres. Tel eft l’ordre de culture en Angle- terre, en tout conforme à celle de la nature, dont les opérations procédent toujours du plus petit au plus grand par des deprés infenfibles , c’eft là le vrai moyen de donner de nouvelles forces aux terres épuifées ou fériles, d'augmenter enfin le fol végétal, jufqu’à ce qu'il puifle être en état de porter toutes fortes de grains, jufqu'au froment, le chef-d'œuvre de lagri- culture. (a) a ——— a ns = (a) Je fuppofe que mon Lecteur ne fe méprendra pas; un mercure ne fe fait pas de tout bois; je ne prétends pas qu’on puifle employer les méthodes que je propofe, par-tout dansiles Ardennes ; il y a des endroits où elles ne font pas praticables, où on ne pourra pas fe procurer des ma- tieres calcinables, fiaon à des frais exorbitans, où même les matieres cal- cinables ne conviendront pas au fol; tout cela doit s'entendre avec des modifications aflez connues, dont le détail n'entre pas dans cette vue générale, que je donne du pays. Re Re PR PRE SO EN NIUE DE QUELQUES OBSERVATIONS. 173 Pour diminuer la féchereffe de la partie pratique de R£c ce Mémoire, j'ai cru devoir réduire mes recherches & en diftribuer les conféquences en préceptes courts, ar- rangés felon l’ordre naturel des chofes, & applicables _ par-tout où les circon{tances en permettront l’ufage. Je finirai ma différtation par en récapituler les principes, & par préfenter un court détail des obfervations, fur lefquelles mes raifonnemens font fondés. Rien n’eft plus certain, comme je viens de démontrer par les faits , que la population eft toujours en proportion de la quan- tité de nourriture ; qu'on peut l’augmenter, comme il fe pratique aujourd’hui à la Chine, auffi loin que les caufes phyfiques & les puiflances naturelles d’un pays peuvent s'étendre, qu'on trouvera dans un peuple ainfi multiplié, un nombre toujours fufhfant pour répondre aux befoins de l'Etat & aux demandes de la Religion, . fans en craindre aucune diminution defavantageufe; que dans les vues qu'on aura d’améliorer la culture dans un. pays quelconque, on doit non-feulement regarder la nature du fol fur lequel nous marchons , mais auf fon climat, fa forme & fa fituation, que par-tout il eft de la derniere néceffité, après avoir écarté les obf- tacles locaux qui empêchent le progrès phyfique des chofes, de fuivre l’ordre prefcrit par la nature, & qu’en- fin cet ordre eft très-facile à reconnoiître par fa facon d'opérer , toutes les fois, qu'abandonnée à fes propres forces, elle commence à couvrir les rochers d’une in- cruftation mouflufe , & procéde enfuite par toute la clafe des moufles, & de plantes naines d’échelon en échelon, pour former un nouveau fol capable dans la fuite de nourrir des végétaux plus robuftes, depuis l’hy- fope qui croit fur les vieilles mafures, jufqu’au cédre du liban. | C’eft cet ordre de chofes que j'ai recommandé pour apitwi- u. 174 RUE CU ENIRT le pays de Luxembourg, pratiqué depuis long-temps en Angleterre & ailleurs, avec le plus grand fuccès, quand il s’agit de renouveller un terrein maigre ou flérile. Les matieres premieres & les fels végétaux qui y font contenus, ne peuvent pas, pour la plupart lui manquer, elles y font déja diftribuées plus ou moins par les mains bienfaifantes de la nature en différens cantons du pays; j'en ai fait des eflais répétés avec l’acide nitreux en divers endroits & fur-tout dans les plaines autour d'Arlon & de Luxembourg. Les matieres cal- cinables, jufqu’aux rochers même, font en fi grande abondance, qu'on trouve des milliers de coquilles or- dinaires de la mer, entremêlées de débris de cornes _ d'’Ammon très-maflives , de plus de trois pieds de cir- conférence & tout à fleur de terre. Si on confidére enfuite la hauteur prodigieufe du pays, au-deflus du baflin de la mer; on reconnoîïtra facilement les traces évidentes d’un bouleverfement total par les eaux de la mer, & que ceseaux , en f retirant le long d’une dé- clivité aflez rapide, ont emporté avec elles une partie très-confidérable des dépouilles marines, qu’elles ont dépofé fucceflivement dans des cavités qui fe préfen-. tent ca & là dans le pays, en forme de vallons pro- fonds & prefque tous enfermés par des hauteurs voif- nes. C’eft par-tout dans des endroits pareils, comme font les environs d’Orval & ailleurs, qu'il faut fouiller pour trouver ces matieres calcinables, fi néceflaires à la répa- ration d’un fol épuifé & pour y diftribuer avec égalité ce que la nature a difperfé fur un terrein, dont la dé- clivité & l'inégalité jointes avec fon élévation, ont caufé tout le malheur. Ces caufes ne ceflent d’agir plus ou moins aujourd’hui par la fonte des neiges & l’action continuelle des torrens , formés par la pluye, en y em- portant le fol vers les bas lieux, dont les terres fertiles DE QUELQUES OBSERVATIONS. 17$ de Namur, jointes à la quantité prodisieufe des matiéres calcinables, qu'elles renferment dans leurs entrailles, font les preuves. Il faut donc, de toute néceffité, fi Port veut rétablir pe fe terreïn du pays de Luxembourg , eñ rénouveller le (ol, en augrnenter la profondeur, & la conferver, éncou- rager par-tout les moyens pofhibles, rant les Seigneurs que leurs Vaflaux, à eflayer [a culturé que je viens de recommander, par=tout où la nature du fol {4 permets tra, à pratiquer des enclos fur toute la füperficie, à les entourer de foflés profonds & à planter des arbres de haute futaye, pour étendre & pour nourrir les pros duits naturels qui sy trouvent : c’eft le fommaire en peu de mots, de tout ce qui fe préfente à mon efprit, fur un fujet qui m'a paru très-important, & le fruit de toutes mes obfervations. Je fouhaite, avec ardeur, que les eflais à faire en conféquence, puiflent répon- dre au defir que j'ai de mé rendre utile à la patrie, qui m'a fait l’honneur de m’adopter parmi {es citoyens. I] ne me refte maintenant que de parler de mes opéra- Précis de tions barométriques , que j'arétablies par-tout en corref- D pondance avec M. de Poederlé, le fils, pour déterminer romêtriq, les hauteurs refpectives des lieux & leur élévation au- _ deflus du niveau du Canal de Bruxelles. Comme la maniere d’obferver avec le baromètre, pour cette fin, eft aflez généralement connue, il eft inutile que jentre dans un grand détail fur cette matiere; il fufhra de dire que d’après des expériences multipliées, faites avec les baromèêtres du célébre Ramsden, dont l'exactitude eft portée fur une échelle graduée jufqu’à la centieme par- tie d’un pouce, aflez fenfible. pour marquer la diffé- rence de hauteur entre lieu & lieu, aufli loin qu’on doit la defirer, j'afigne douze toifes & demie d’élé- vation perpendiculaire fur le terrein que j'ai mefuré, 6 RECUEIL a: à chaque ligne de defcente dans le baromètre; c’eft une mefure dont nous avons vérifié la juftefle avec la derniere rigueur fur des hauteurs mefurées enfuite pied par pied, à l’aide d’une ligne perpendiculaire, dont la - longueur n'excédoit pas vingt-cinq toifes. Il ne peut refter par conféquent aucun doute fur l’exaétitude fuf- fifante de la table des hauteurs correfpondantes, par laquelle je conclurai ce Mémoire, d'autant plus que dans la comparaïfon des endroits très-élevés, pour en tirer toutes les conféquences phyfiques dépendantes de leur fituation refpeétive, il ne s’agit nullement de quelques toiles plus ou moins d’erreur. RÉ gs à + Tr DES HAUTE URS Coeurs Hauteur Hauteur |moyenne du| Nombre des moyenne du| Baromètre, |Obfervations Différence Plus haut que Baromètre, | obfervée en comparées en-| © haweurs Sainte à obfervée à | correfpon- |femble. HENRI L dance à Arlon. Saintes. È pouc. lig. 10m. pouc. Lg. 10m. lignes. dixiemes. toifes, pied LOMME ARO, 2843-00: 24. & De. Fe de France. Luxembourg. Saintes. ; DONNER ONE 28. o. 5. h À à !I8I. 1086. Namur. Saintes. 27. ire MO 27° 4 TON 5- Tournay. Saintes, 27. 8. 9. | 27. 10. o. Louvain. Saintes. 27. 9 2. | 27: T0. o. $ he nn Plus bas que que Saintes. Hochfraten. Saintes. PRO EN I IRONIEE Oftende. Saintes. | 28. 1. 27. 11. 7. 25. J| NV B. Que Saintes, où M. de Poederlé, le fils, alk M fait pendant les mois de Septembre, O&tobre, No-|} llvembre, Décembre & Janvier 1772 & 1773, les ob-|à A fervations correfpondantes , eft un petit Village fur la|h H|route d'Anguien, éloigné de quatre lieues de Bruxelles. |} H|Ce Village étant plus élevé que le Canal de Bruxelles|f d'environ 56 pieds, comme il paroît par une longue : [fuite d’oblervations, faites par M. Poederlé, fils, il|£ d|faut ajouter ce même nombre de pieds à la hauteur de|h H chaque lieu plus élevé que Saintes, pour en avoir les|£ Hihauteurs refpectives au-deflus du Canal de Bruxelles. || 4 Aa eu PES À 28210 a ni) En. ji È l ea Lh s La de 4 Monet nos, ‘Lao el, en BH ELT à ct mt sat dog oufla: sende Broad eOiENT lents ae Sarup 3b SU SiQls: . trost: 0 N'hoo l'est of (onsQ of su volé eula are se F DrANl ann 1Eg tio1sq Ni sabmos à ic dx FN etét Usb M sl dont, 2 L'autre baton 2 ere ir del 13 Std. | 18) 6 ph das enlaui sAeRus ah -UR Mens arm tm vomir | : re nent RC EN TE et e MÉMOIRE SUR LÉLECTRICITÉE, Relativement à [a qualité de fluide moteur dans les végétaux ; €& dans le corps humain. PAR L’ABBÉ D'ÉVERLANGE DE WITRY, Membre de l’Académie Impériale & Royale, des Sciences & Belles-Lettres de Bruxelles, Aumônier d'honneur de S. A. KR. ze Duc CHARLES DE LoRRAIïNE, Sur-lntendant de fes Cabinets de raretés, & Chanoine de Tournay. Lu à la Séance du 24 Juin 2773. Cci Sousaun) (sn pes e, ‘ (CR a era Æ x % \ ÿ SEE ra / MÉMOIRE SAULR M EC LR LOU LE. Relativement à fa qualité de fluide moteur dans les végétaux, & dans le corps humain. P oRTONS une vue réfléchie fur les phénomenes de lEleétricité, d’où, par une gradation naturelle, dé- rive leur rapport avec l'utilité publique : Attachons- nous ici à ce qui prefente une idée nette du fluide éleétrique. Que font (a) les plateaux de verre, ou ee Ca) 11 paroît aujourd’hui généralement reconnu que les plateaux de verre d'Angleterre, ou de certaines Verreries de France , font ce qu’il y a de préférable pour procurer l’éleétricité : néanmoins en faveur de ceux qui feroient attachés aux boules de verre ;. voici les qualités eflentielles à leur faculté éleétrique. ls doivent être d’une matiere qui ne recoive pas d’élec- tricité par communication. Il faut , à cet effet , qu’au fortir du fourils foient RATE recuits : feul moyen d’obvier à leur éclatante difruption, en écouvrant par le frottement quelques-unes de fes loges remplies d’air con- denfé, & en faifant en grand ce que fait en petit, la caflure de la queue des larmes bataviques. Quant à la qualité du verre, j’ai remarqué que celui où entre quelque partie d’étain, ce qui lui donne un œiïl blanchâtre, y étoit le plus propre; c’eft ce qui a fans doute fait préférer à quelques-uns les globes de porcelaines. Il feroit aifé en fuivant laméthode de M. de Reau- mur, de convertir nos boules de verre commun en porcelaine ; maïs fup- pofé que l'on s’en tienne à ces dernieres, leur volume n’eft pas chofe in- différente. Quoique l’Abbé Nollet m’eftime pas qu’il y ait à gagner, d’excé- der la mefure d'un pied de diamêtre ; j’ai éprouvé conftamment dans Îles fpheres de criftal blanc de Bohême, de 15 à 16 pouces de diamètre, des 182 ._ MÉMOIRE ‘ | autres (a) corps équivalens frottés dans la mafle de lat. moivhere ? finon par le froiffement des parties de l’air entre le corps frotté & le conffinet, d'extraire de cet élément des particules d’un air fi fubtil , fi dégagé des corps hétérogenes auxquels il étoit adhérent, que fa pré- . fnce nefe manifelte que par des ondulations fines. Îlen réfulte, que fiune matiere d’un tiflu propre à admettre. ce fluide éleétrique, telle que les végétaux, les corps animés, les métaux, fe trouve dans la fphere de cette émanation éleétrique , ou ce feu élémentaire; ils en font dans l'inftanc impregnés, pénétrés, fans aucun changement à leur contexture : fe bornant, s’il rencon- tre dans ces corps, des parties déja en mouvement, à ÿ ajouter celui dont il elt plein : ce qui peut le faire regarder comme Palcohol le plus fubtil qui foit: dans la nature, & bien moins comme feu, que comme un fimple fluide moteur, qui laifle intaës les lieux de fon affage. On ne fäuroïit trop S'imprimer cette derniere idée du feu électrique, pour bannir la crainte d'y expo- fer les corps vivans. | Depuis long-temps , lexpérience juftifie cette qua- ent effets fupérieurs à ceux des plus grands plateaux ; mais la rotation doit fe fäite par une roue de 7 à 8 pieds de diamêtre. La monture la plussüre eft celle d’un axe de bois on de métal enduit de réfire qui traverfe le globe, ‘ayant deux ouvertures correfpondantes. Queiqw’il paroifle égal d’opéter le frotte- sent par descouflinets rembourrés de matiere quelconque ; il m’a paru que ceux remplis d'ouate bien cardée,, produifoient l'effet le plus conftant , in- dépendemment des poudres terreufes ou métalliques , dont on les faupou- dre. Jelaifle aux Maitres dans l’art de guérir, à décider, fi les parties mer- curielles , que quelques-uns y employent, ne peuvent pas nuire aux Opé- TAtEUTS « (aÿ L'on vient de trouver en Italie un nouveau moyen de procurer l’é- jeékicité par une plaque de métal, enduite de réline. Si, aprèSävoir frotté la partie réfineufe , omdlaife defcendre par-deffus une autre plaque, fuf- pendue par des cordons de foie ; lon tire des érincelles de ces deux pla- ues réunies : En relevant la plaque fupérieure & la tenant éloignée de celle enduite, elle demeure quelque-temps empreinte de fluide électrique ; lot que celui-ci eft épuifé, 1lfufit de la faire defcendre far la plaque inférieure, qui conferve long-temps fa vertu. Lo] SUR PÉLÉECTRTCITÉ. 183 fité de fluide moteur attribuée à l'éleétricité. Pour sen aflurer, rappellons-nous Pefler d’un fiphon capillaire plonsé dans de Peau non éleétrifée ; l'on fait que fi par la branche la plus longue on afpire la liqueur, elle dégoutte . foiblement, mais que fi dans cette eau on amafñle, ou condenfe du fluide éleétrique , l’écoulement devient fré- quent, rapide, avec une divergence en tout fens, qui forme une aigrette aqueufe : preuve évidente de la préfence d’une matiere étrangere, qui meut les globules du fluide. Rien de plus connu que ce fait, qui ne devoit pas être regardé avec indifférence, vu fon ana- logie direéte avec d’autres corps de nature approchante; auffi na-t-on pas tardé à en faire l’application. | Toute la furface de la terre eft couverte de ces êtres vivans, nommés végétaux , formés d’un amas de fiphons, par où s’opére la circulation des fucs qu'ils pompent de la terre; l'air, moteur principal de ces machi- nes hydrauliques, par fa preflion fur la terre, en fait monter les fucs dans le corps- des plantes, & sy in- troduifant lui-même, entretient , par {on élafticité, la circulation des fucs nutritifs. | Cependant malgré l’admirable méchanique intérieure de ces plantes, fi bien décrite par les Malpighi & autres Obfervateurs ; combien de cas, où, par défaut d’aétion fuffifante dans la mañfle de l'air de latmofphere, ce moteur eflentiel; ou par des embarras dans les divers filtres des trachées , dans les véficules , le jeu des liqueurs fe rallentic & cefle d’être conforme aux vues de Ia na- ture? On devoit croire qu'un nouveau moteur infinué dans le tiflu des parties tubuleufes, ainfi que dans le - fimple fiphon capillaire, rétabliroit le mouvement di- minué dans les végétaux : l'effet répondit à l’attente des Phyficiens les plus exaéts, entre autres de PAbbé Nollet, & de M. Jallabert de Genève; les journaux « 184 MÉMOIRÉ qu'ils ont dreffès des progrès d'accélération fenfible dans la ‘ végétation. des plantes ou de leur guérifon, peuvent fe voir dans les ouvrages de ces favans. Comment ce moyen fi réel, fi efficace n’a-t-il pas pris une faveur plus générale? pourquoi n’a-t-on pas profité de cette découverte? Cela vient fans doute de ce que tous les Electriciens n’ont pas découvert les mêmes merveilles dans ce fluide moteur, plufieurs plantes malades, n'ayant reçu aucun foulagement fenfible par l'électrifation. C’eft ce qui devoit néceflairement arriver en bien des cas. Suivons ce qui fe pafñle dans le fluide du tube capillaire, notre bouflole. Si nous y voyons le cours de ce fluide accéléré, c’eft en fappofant l'intégrité du tube. Eft-il fèlé, endommagé? fon action cefle : que de même le plus grand nombre de ceux dont elt tiflu le corps d'une plante, foient viciés par des folutions de cont- nuité , caufées par des mortifications des parties chan- creufes ou toute autre maladie; il n’eft pas étonnant que ces fucs ne gagnent,rien par l’aétion du nouveau moteur. Il fera toujours vrai qu'il accélére le mouve- ment dans les tubes capillaires : mais il faut avant tout que ces tubes puiffent avoir leur jeu; c’eft le nœud ef- fentiel. La maladie des végétaux doit provenir de lenteur dans la circulation , & non de deftruétion de leurs ca- naux : remarque importante pour la fuite de ce Mé- moire. Ce n’eft qu'en fuppofant de telles conditions que l'on trouvera vérifiées les cures annoncées par les Phy- ficiens. Dès qu’une plante eft en état de foutenir l’opé- ration électrique, un moyen de la hâter, qui a échappé à la fagacité des Phyfciens , feroit de communiquer l’é- le“ricité par des arrofemens à tout le corps de la plante. On éleétrifera un baquet d’eau de telle capacité que l'on voudra; de maniere à être tout-à-portée des plan- test: NILIR BE T EC T RTCITE, 18$ tes : prenons les exotiques ifolées, de façon qu’elles communiquent avec le conducteur par un ou plufieurs fiphons plongés dans l'eau de ce baquet éleétrifé, L'eau, attirée par fuccion, formera une rofée éleétrique, qui abreuve en même temps la couronne de la plante & Ja terre où elle croit. Sans appuyer fur cette méthode, l’on fent que le fluide moteur en queftion acquiert plus d’intenfité par l’humide dont il eft envéloppé, qui em- pêche fa diffipation, & qu’agiflant immédiatement fur les feuilles, dont l'ufage eft f eflentiel felon M. Bonnet, & qui font le principal corps de bien des plantes, des ananas, des aloës, des fedums, ils frappent par-tout {es points, les parties infirmes. C'eft une obfervation conftante des Jardiniers, que la pluye naturelle, étant plus ou moins impregnée d’une certaine portion de feu éleétrique, convient mieux aux végétaux que les arrofemens faits avec d'autre eau ; lon jugera par-là de l’eflet des pluyes fenfiblement élec- trifées que l’on obferve en tout temps. L’Abbé Nollet en cite des exemples confirmés par l'Hiftoire Naturelle de l'air, & des Météores de M. l'Abbé Richard, tom. pages 36 & 37. On a aufir l'exemple d’une pluye élec- trique des plus rémarquables, arrivée à Skara en Of trogothie , le 23 Septembre 1773, qui fut accompa- gnée de tonnerre & fuivie, le 25 du même mois, de tremblement de terre. En voilà aflez fur le traitement des végétaux, pour éviter de répéter ce qui a été dit à ce fujet. Ayant toujours préfente l’idée d’un fluide moteur, dont la tendance naturelle foit d’accroitre le mouve- ment des corps déja müûs; concevons un autre être vi- vant, que l’Auteur de la nature a le plus fpécialemenc animé de fon fouflle, & dont les agens intérieurs ont un caractere plus diftin®, plus marqué que dans les Tome I 186 MÉMOIRE végétaux. On entend que c’eft de l’homme que je parle, en qui fe trouvent tant de vifceres différens, où l'air, la principale des caufes fecondes, anime cet être, & qui étant infpiré ou afpiré, met en jeu toutes les par- ties de ce microcofme. L’imagination f perd à la vue de cet aflémblage, de cette multitude aufli variée qu'in- nombrable de chevelus canuleux; couloirs impercep- à À L. tibles où fe filtrent les Auides fervant à {à nutrition, à fon accroifilement, enfin à fà vie. Une machine fi com- pliquée doit être expofée à une infinité de défordres; tant dé chofes étant néceflaires à fon harmonie ; fans parler des maladies fans nombre auxquelles il doit être fujet; il ne fe peut que dans l’état de fanté mème, quel- ques parties les plus diflantes du centre de l’aétion prin- cipale, ne tombent quelquefois dans l’inertie; défor- dre fur-tout plus commun chez ceux qui refpirent um air trop peu actif, trop peu renouvellé, qui manque de l’élafticité néceflaire au mouvement requis pou Pentretien des fonctions animales. | Rien ne dût paroître mieux convenir à cet eflet que le fluide éle&rique pour le cas de ffafes. dans les liqui- des. L'aventure des tubes capillaires, confirmée dans ceux qui compofent les végétaux, fe vérifia dans l’hom- me; les mouvemens de diaftole & de fyftole, marquant par le battement de l'artère le pañlage du fang dans. les cavités du cœur, devinrent par l’éleétrifation plus fréquens dans un temps donné. Ce qui le vérifia, fut que le fang, jailliffant d'un fujet électrifé, à qui lon avoit ouvert la veine, agifloit comme dans le tuyau capillaire, & qu’au lieu de tomber dans la palette par: des lignes paraboliques, il s’élançoit dans l'air par des: lignes horifontales : preuve complete, de la préfence: du nouveau fluide moteur dans le fang: On ne tarda pas à l'appliquer aux paralytiques,, en qui il y a: fouf-- SUR ILE TL EICIT IR C L'TE. 197 traction de tout mouvement, comme de fentiment : . mais ce moyen employé par léle&rifation fimple ou du premier degré, ne procura guere plus que dans les vépétaux tous les effets attendus. L'impatience trop or- dinaire aux patiens cu aux enthoufiaftes de cette nou- velle médecine, fit préférer à la voie doucé de la na- ture, le moyen viclent de la fcintillation, & même de la commotion éleétrique; ceft-à-dire, l’éle&tricité du fecond & troifieme degré. Tous les journaux, & les Recueils Académiques furent remplis de cures opérées par cette forte d'électricité forcée. T1 y a fans doute de ces cures bien atteftées: j'ai été témoind’une opérée à un Religieux Minime, vers l'an 1752, jen omets le dé- tail que peut faire beaucoup mieux un ancien Membre de cette Académie , qui adminiftroit l’életricité au malade. En revanche , ces fortes de cures n’ont pas été toutes aufli heureufes; quelques-unes n’ayant caufe aux patiens que des fouflrances extrêmes. Revenant toujours à la nature de ce fluide moteur, on trouvera fans doute que dans ces fujets à qui il na pas procuré de foulagement , il y avoit privation en- ere de fentiment , occafionnée par quelque vice dans les tubules des vifcéres : qu’au contraire dans les fujets où l’action a été rétablie, les parois des tubules , fétant peut-être que dans le premier dégré de ftupeur , d’en- gourdiflement ; le trémouflement imprimé à ces mêmes parois nerveufes, tendineufes, a pû, par les commo- tions électriques, ranimer le mouvement arrêté ou ral- lenti. Ce n’a fans doute été qu’à l’aide d’une de ces fecouffes de Pélectricité aërienne qu'un paralytique s'eft trouvé tout-à-coup guérien Angleterre, l'an 1770, par un éclair. L'on peut voir dans le Revgiftre Hiftorique de cette année, où l’on indique le nom de la perfonne, le lieu de fa naiflance & l’état de fa maladie. Dd à 188 MÉMOIRE On obfervera que dans ces cures la marche naturelle de notre fluide moteur eft troublée; n’étant plus tel qu’on le puife immédiatement à fa fource; je veux dire au corps électrique ou à fon conducteur : qu'au contraire -la fcintillation, & encore plus la fcoufle éleétrique, revenant à la qualité de feu matériel, elle perd celle de feu élémentaire fi fubtil, qui sinfinue doucement , écale- ment, & follicite plusau mouvement qu'il n’y force. Pour en juger, que l’on voie comment s'excite l’étincelle élec- trique & la fecoufie. Elles le font par le choc, la col- lifion qu’efluye l’effluve contre la matiere qui le rem- place tout-à-coup : ou pour parler le langage du ceélé- bre M: Franklin, entre une Electricité quelconque po- five d'un côté, & négative de l'autre. Au contraire dans le contaét immédiat du conducteur, où il ne s’excite pas d’étincelles ; tout le corps humaïneft abreuvé, trempé de ce fluide moteur: fon cours n’eft pas interrompu, & peut bien plus sûrement en'recevoir les fecours indiqués par la nature, laquelle ne va pas dans fes opérations par cafcade ; mais tient une marche uni- forme. D'où je conclus que hors quelques cas parti- culiers très-rares ; l'électricité du fecond , & troifieme degré ne doivent pas faire planche en médecine ; ; dès que l’on'ne peut proportionner le degré de force à celui de réfiftance. Une drogue cefle d’être un remede dès que fa dofe incertaine s’'adminiftre au hafard, & qu’elle peut, au lieu de guérir, être nuifible par la déftruétion -des folides, ou l’extravafation des liquides, au lieu que l’admiffion du fimple fluide moteur électrique laïfle les chofes dans leur état primordial. S’il ne peut les changer, au moins rétablit-il le: mouvement dans les liquides, s’ils en {ont encore fufceptibles. Je fuis donc intimement perfuadé que lPufage du fluide éleétrique long-temps continué, par fa feule mobilité, auroit plutôt guéri des SO RME ENCUT RAR CT TUE, 189 -paralytiques, que ces moyens fur-ajoutés ; auffi eft- ce que fi mon fentiment étoit de quelque poids en phyfi- que, je confeillerois toujours le premier moyen avant de pañler aux autres, comme étant le plus propre à préparer les voies aux remedes plus a&ifs, à-peu-près , comme les potions rafraichiflantes, dans ceux que l’on doit purger pour lubréfier les .vaifleaux & détremper les humeurs fur lefquelles doivent agir les catarétiques. Si j'ai peu de confiance à l'électricité compofée dans les cas d'obftruétions de nerfs, & de tous vaïfleaux ca- pillaires; j'y en aurai encore moins à l'égard des autres -efpeces de maladies, dont elle ne peut qu’étendre les ravages : je doute mème que le fluide électrique le plus doux y puifle être efficace. Nous ne lui connoifions aucune vertu balfamique , carminative , anodine; mais uniquement celle de fluide moteur. Que peut celui-ei dans les effervefcences, les fermentations, les furabon- dances d’humeurs ; finon de les accroître? Tout au plus feroit-il propre à atténuer, divifer celles trop épaiflies. C’eit par conféquent une erreur de prétendre faire de l'électricité la médecine univerfelle. Un moyen de tranfmettre. plus intimement le fluide moteur, dontil s’agit ici, fur-tout aux membres para- lyfés , feroit d'employer les arrofemens électriques ainfi qu'aux plantes : remede d'autant plus efficace, qu'il y a moyen d'augmenter fa vertu en appropriant les li- queurs les plus convenables à dompter le mal, en fubf- tituant à l’eau élémentaire, celle de mer, ou des fpiri= tueux rendus plus pénétrans par le fluide électrique. Ce n’eft pas battre l'air que de préfenter des idées neu- , fondées fur des principes certains. La déduétion que nous avons faite des qualités du fluide moteur élec- trique, nous conduit à connoître enfin plus particulié- rement fa vraie place. Si nous nous rappellons bien la 190 MÉMOIRE néceffité abfolue de l'air, pour donner le branle aux parties les plus intérieures de notre individu ; n’eft-il pas une infinité de perfonnes incapables par état, de participer pleinement aux bienfaits de cet élément aërien? tels que ces refpectables êtres, qui, fe vouant tout entiers à l’avancement des lettres & des fciences, toujours cloués, pour le dire ainfi, à leur table d° étude, ne refpirent que l'air d’une même chambre, font trop peu d’exer- cice pour que leurs liquides circulent librement, fur- tout dans les replis tortueux de ces pelottons de tubes vraiment capillaires ; ce qui les expose à à toute forte de dérangemens. Dès que cet accident ‘annonce par des péfanteurs de lombes, des.aflettions hypocondriaques, des malaifes; y a-t-l le plus léger doute que l’on n’en prévienne les fuites enrecevauele did motue imple, ou l'électricité du premier degré ? que l’on compare à ce moyen, ceux indiqués par fee partifans de l’Hygiene moderne, l’ufage de tant de trémoufloirs ; il leur man- que d'ordinaire les qualités eflentielles; ayant le carac- tere dangereux de la commotion éledrique, & de tout remede fouvent plus fort que le mal. Un mouvement violent à Ja fuite d’un long repos, où toutes les parties nerveufes font tombées dans un état de flaccidité, ne peuvent pafler à l’extrêmité oppofée, fans retomber dans cette atonie , cet atterrement , ce proftratio virium , ficon- nu des gens à vie fédentaire , à la fuite de l'exercice forcé. Le jeu des liquides ne fe rétabliroit-il pas plus ef- cacement par lEleétricité fans courir les rifques du mouvement violent, & par des voies plus sûres, plus courtes que celle de l'exercice doux 8e moderé, ou enfin par le plein repos, lequel par la ceflation du tra- vail , occafionneroit la perte de ce temps précieux , dont l'emploi utile eft la feule vraie vie des hommes ftudieux ; rien n’empéchant qu'ils ne recoivent le mo- SIDORNUPRENENE CNE R D CTITIÉ. 107 teur électrique, étant ifolés , ainfi que leur table d’étu- de, leur fiége , ufqu'à leur lit : voilà l’exercice mode- ré au milieu du repos apparent. Que veut-on de mieux ? Quoique tout ce qui a été énoncé ci-deffus con- duife naturellement à démontrer avec évidence com- bien l'efficacité de notre fluide moteur eft fupérieure à tout ce quia été jufqu'ici connu, relativement aux moyens de détourner les maladies des gens de lettres : voici un raifonnement qui me paroit décifif pour ache- ver de diffiper les nuages qui pourroient refter touchant mesidées. S'il eft contre l’ordre de la nature qu’un corps vivant accomplifle exaëtement fes fonétions vitales, à moins que par fon action modérée, égale, tranquil- le, il n'agite, ne travaille, pour ainfi den , les par- ties motrices de l'air dont il eft criblé , de maniere à imprimer le degré de mouvement requis à entre- tenir celui des vifceres : il eft prefque également con- tre la nature des gens de lettres de vivre de maniere à entretenir le concours d’aétion de l'air intérieur du corps avec celui du dehors, à caufe de la vie médi- tative qui fuppofe l’inertie de la machine, & par con- féquent le défaut de mouvement néceflaire à cette cor- refpondance ;. il faut donc un moyen qui fupplée ce vuide d’aétion dans l’air intérieur ; ; celui que lon ref. pire, étant auffi infufnfant à cet eflec qu'a un foyer endormi, fi ce dernier n’eft concentré, rendu plus ac- tif dans un fouflet. De même notre propre fluide moteur, c’eft-à-dire, l'air que nous contenons , étant accru par l'introduction d’un nouveau moteur, ou le fluide éleétrique , il opére dans le corps humain ce qu'il ne faifoit plus qu'imparfaitement & rétablit ce: concours interrompu. Âu refte toute objection s’é-- vanouit vis-a-vis de l'expérience. Pour ne pas dépen-.. dre de la rotation. continue du moulin éleétrique ; j'ai: ‘ 192 MÉMOIRE SUR L'ÉLECTRICITÉ, trouvé que l’on pouvoit au defaut de (a ) bonnes bouteilles de Leyde prolonger lefiet de Pélectricité au-delà du terme de la rotation , en multipliant à vo- lonté des tubes de verre remplis aux deux tiers de limaille de fer , dans laquelle plonge une verge de métal ; moyennant que les extrémités fupérieures de ces verges réunies en un point touchent le conducteur. Par ce moyen très-fimple il fera aifé de faire ufage de la méthode que j'indique (b) pour préferver les gens de lettres, {ur-tout des maladies dont ils font me- nacés. Quoique ce ne foit pas la réduire à peu que de l’employer fi utilement, fi je paroiïs rabaïfler les phé- nomenes frappans de la fcintillation & de la commo- tion; ce n’eift que relativement à la médecine : con- noiflant leurs avantages dans les divers cas énoncés dans les livres modernes de phyfique. Ceci fuffira pour montrer quelques-unes de mes idées fur léleétricité , efquelles ne font que partie de celles dont je ren- drai peut-être compte un jour, pour achever de la tirer à jamais de la clafle des chofes dangereufes ou inutiles. (&) Celles faites en Angleterre, recouvertes en dedans & en dehors d’une feuille d’étain à deux pouces près du goulot, armées d’un bouchon de liege, d’où defcend une chaîne jufqu’au fond, étant bien chargées d'électricité, donnent encore des étincelles au bout de deux ou trois jours. Celles dont je me fers ont huit pouces de hauteur fur fix de diamêtre. (ë) Voici un moyen de s’aflurer d’un degré conftant de l’efluve éleétri- que. Je me fers du tuyau de verre de fix pouces de longueur, & d’eutant delignes de diamêtre, ouverts par les deux bouts. Un cylindre gradué de métal, dont l'extrémité eft terminée en demie fphere d’un poli exatt, glifle dans le tube qu’il remplit exaétement. [e pofe le tube du côté de la partie ar- rondie du cylindre, contre le conduéteur, en attirant à foile cylindre, il excite l’étincelle ; plus eft grande la diftance à laquelle elle eft excitée, plus eft forte l'électricité; je puis, par ce moyen, la tenir à tel degré que je veux, en augmentant ou diminuant larotatiou. Le favant Dom Mann , Membre de cette Académie, qui trouve dans mon éleétromèêtre l'utilité réunie à la fim- plicité, eftime , ce me femble avec raifon , qu’il conviendroit d'adapter deux fils courts & très-fins à l’extrêmité ronde du cylindre: lefquels, par leur plus ou moins de divergence à l’approche du conducteur, feroientconnoîtrejuf- qu’au plus foible degré d'électricité. En ce cas il conviendroit d’avoir deux cylindres , l'un garni de fils pour les cas d’éleétricité foible, & l’autre non garni pour l’éleétricité plus forte. Pour connoître combien il faut de rota- tion pour un certain degré d’éleétricité ; celui-ci pourroit être déterminé-par uue aiguille fur un cadran gradué, où feroit marqué le nombre des tours de roue, requis par le degré de l’éleétromèêtre. FIN. 22 MEMOIRE | SUR M L'HISTOIRE NATURELLE. D'une partie du Pays Belgique. PAR M. ROBERT DE LIMBOURG; LE JEUNE, Dofteur en Médecine de la Faculté de Mont- pellier, Membre de l’Académie Impériale € Royale des Sciences & Belles- Lettres , de Bruxelles. Lu à la Séance du 16 Odobre 2770. Tome I E e MÉMOIRE | SUR x L'HISTOIRE NATURELLE, D'une partie du Pays Belgique. La Phyfique, la Chymie, la Médecine, l’Agricul- ture & généralement toutes les Sciences & les Arts, qui contribuent au bien-être de la fociété, exigent pour leur avancement, une connoiflance plus parfaite de lHiftoire naturelle du globe de la terre , que celle qu'on a eue jufqu’à prefent; Hiftoire trop peu éclaircie, fans doute ; malgré fon importance & la multipli- cité des objets qu’elle renferme : ce qui provient du défaut de bonnes obfervations. Les recherches que j'ai faites dans cet endroit de notre globe, que j'ai eu le plus d’occafions de par- courir, & qui comprend une partie des Pays de Lim- bourg, de Luxembourg, de Stavelot & de Liese, fitués entre la Meufe & le Rhin, jufqu’aux confins des Pays has vers le fud, pouvant éclaircir l’Hiftoire na- turelle de la terre & particulierement celle de ce Pays, en les comparant avec celles que j'ai faites (ainfi que d’autres ‘obfervateurs) en difiérens pays étrangers ; E e ï] Q 56 = MÉMOIRE j'en ai fait le fujet de quelques Mémoires , que je pré- fenterai à l’Académie. Je me propofe dans celui-ci d'examiner ce que les vicifitudes de POcéan , les éruptions fouterraines, les courans , & les méteores ont pu opérer en concou- rant à former l’état de ce pays , qui préfente une fur- face plus inégale que celle des pays fitués de l'autre côté de la Meufe & vers la Hollande, où ce fleuve, qui reçoit les eaux de toutes nos rivieres, fe jetre dans la mer. Je me flatte de faire voir d’une maniere af- fez vraifemblable que cet état, ou cette forme actuel- le, qui paroît ne tenir que du hazard , n’eft que l’ef- fet naturel des agens fubordonnés à [a toute-puiffance du Créateur de l'Univers. Ce Pays offrant dans plus d’un lieu de fon étendue à-peu-près les mêmes Phénoménes à obferver, je choï- firai pour exemple un endroit particulier , auquel les autres peuvent être comparés prefqu'àa tous égards , j'en ai fait lever une carte Géométrique pour faciliter la defcription. Ce terrein comprend lesenvirons du Bourg de Theux, chef-lieu du Marquifat de Franchimont , où je fais ma réfidence. Le fol de cet endroit qui occupe pref- que le milieu de la carte , eft le point d’où je com- mence à compter la mefure de l'élévation & de l’a- baïflément de tous les environs. Elle y eft marquée en toifes de fix pieds de France ou du Rhin, dont environ 3000 font la lieue du pays repréfentée par l'échelle y jointe. Cette carte pourra éclaircir quel- ques points des autres Mémoires que je compte don- ner dans la fuite. Voici ce qu'il y a à obferver en général. 1°. Une grande furface plane , ou pour mieux dire, une vafte plaine étendue par toute la hauteur, ? SUR L'HISTOIÏIRE NATURELLE. 197 féifant partie de la rondeur apparente du globe de la terre, paroiïflant à ceux qui y font placés, fe termi- ner à l'horifon & même y être parallele , quoique in- clinée du Sud-Eft , vers le Nord-oucft, en fuivant la dire&tion & la pente générale des deux fleuves , qui la renferment de loin (la Meufe & le Rhin.) - Je nomme plaine ici, toute la furface du terrein qui eft parfaitement plate & parallele à Thorifon ; mais fous ce nom je comprends encore toute furfa- ce qui n'en elit gueres différente , pourvu qu’elle ait moins de cing degrés d’inclinaifon fur l'horon, ou moins d’une toife de pente; fur dix de longueur. "Cette grande furface, dont ; je viens de parler n’eft gueres interrompue que par des enfoncemens qui pa- roiflent en faire diftinguer à la vue plufeurs por- tions féparées, que je nommerai Plaines Japérieures , pour »e point les confondre avec les autres efpeces de plaines, dont je ferai mention ci-après. On peut parcourir ces plaines fupérieures de point en point fans prefque monter ni defcendre fenfiblement , fi- non aux endroits où il y a des enfoncemens , par où les eaux des Pluyes, des fources, des torrens & celles des rivieres prennent leur cours. Ces plaines fupérieures font diftinguées dans l& carte par les N © 1. la Forêt de Stanneux, 2. Forêt d’Otmont, 3. Fo- rêt de Chinhez, 4 Forêt de Rahaimont, ÿ Bruye- re de la Commune de St Remacle, 6 Forêt de TFancremont. 2°. Une autre forte de furface plate ‘qui occupe les enfoncemens que l'on rencontre parmi les plaines fupérieures ; laqnelle commençant infenfiblement en- tre les plaines fupérieures, s'étend delà en longueur par une pente doucement inclinée vers la mer , en fuivant une direction tortueufe & en recevant des ra- (O] 198 MÉMOIRE We, mifications de pareilles plaines dans toute Ia Jongueu de fon trajet. Ces plaines, tant la principale que celles des ra- mifications , je les nomme Plaines inférieures, & je les ai repréfentées dans la carte, par les N°. 7. au ruifleau de Chawion; 8. au ruifleau de Turon ; g. ruifleau de Targnon ; ro. riviere de Polleur ; tr. ruifleau de Sauceore; 12. ruifleau de Weiot; 13. ruif feau de Fond-doneux ; 14. ruifleau de Wiflez ; x5, ruifleau de Quenwai; 16. ruifléau de Chinhez ; 17. riviere de Vefdre venant de Vervier & du Duché de Limbourp. | Le fol au N° 7. eft de fept toifes plus élevé qu’au N.° 12. & le N° 12, eft de r6. toifes plus élevé que le NS. 17. 3.9 Des Plaines Mitoyennes ou à mi-côte. Elles font moins élevées que les plaines fupérieures & moins enfoncées que les inférieures. Elles font fituées à des hauteurs différentes , elles font aflés bornées tant en longueur qu'en largeur & terminées ordinairement des deux côtés par des furfaces obliques, dirigées l’une vers les plaines fupérieures , & l’autre vers les infé- rieurés. Les plaines de cette efpece font indiquées par les NC. 18, 59, 20, 21, 22, 23, 24, 25, 26, 27,28 ; 201030 1, &c. FÉ. On peut remarquer que généralement elles s'éten- dent d’un côté le long des bords des plaines inférieures & de l’autre le long des fupérieures, & que fi les intérvalles qu'il y a entre les plaines moyennes prin- cipales N°9. 18, 19, 20, 2r &c. qui font à PER, & les autres N°9. 24, 25, 26,27, &c. qui font à l’Oueft étoient remplis , elles feroient toutes enfemble une plaine étendue en longueur à-peu-près comme la plai- ne inférieure; mais dirigée, quoiqu'avec une largeur SUR L'HISTOIRE NATURELLE. -199 variée, en une ligne plus droite que ces mêmes plai- nes inférieures ; qui font ordinairement fort tortueu- fes, & tout auffi inégales en largeur. | 4° Des furfaces inclinées de plus de dix degrés far Jhorifon. Elles s'étendent du bord des plaines fupé- rieures en defcendant jufqu’au bord des plaines moyen- nes ou des plaines inférieures : ceft ce qu'on nom- me ordinairement Montagne , Colline ou Côteau. Ces plaines inclinées font repréfentées & ombrées dans la carte par une fuite de traits ou hachures paral- Jeles , dont le bout le plus renflé eft vers la plaine la moins élevée, & le bout aminci vers la plaine plus élevée. Je Jaiflé le nom de Montagnes à ces furfaces incli- nées qui {ont les plus confidérables ; à celles fur-tout qui s'étendert avec plus de dix degrés de pente de- puis une plaine fupérieure , jufqu’a une plaine infé. rieure. : Je nomme Colline une furface en pente ou une partie de montagne qui defcend d’une plaine fupérieure juf- qu'à une plaine mitoyenne. Le nom de côteau pourra exprimer une furface pans chée en defcendant d’une plaine mitoyenne jufqu’à une plaine inférieure, où il y a ordinairement une riviere ou un ruifleau. Et comme certaines furfaces inclinées ne peuvent fe rapporter précifément au rang des côteaux, des colli- nes ou des montagnes, telles que celles qui font au bord de quelques plaines mitoyennes, alors on peut les nommer indifféremment côteaux ou collines. Ces trois efpéces font faciles à reconnoître par les ombres de Ja carte. s°. Des cimes; par ce terme j'entends des points élevés & environnés d’une pente de tous côtés; elles = ue os 200 MÉMOIRE font fouvent partie des plaines moyennes. Voyez les n°: 36 837 | 6°. Des précipices : ce font des endroits où les mon- tagnes, collines ou côteaux font efcarpés, ou à-peu- près. Les précipices laïflent ordinairement entrevoir les rochers à nud & font le plus fouvent placés fur les cô- teaux qui font vis-à-vis de l'infertion d’une branche de plaine inférieure dans une autre : j'en ai marqué quelques-uns dans la çarte, par les n°. 38, 39, 40 & 41. 4 7°. Des gouffres : ce font des ouvertures aflez vifi- bles & permanentes, par lefquelles les eaux des pluies, des torrens où des rivieres fe perdent fous les rochers. Ils font quelquefois dans les plaines moyennes, mais plus fouvént dans les plaines inférieures. Voyez dans la carte les numéros 42, 43 , 44, 45, 46, 47 48, 40. 89. Des fources ; j'entends par ce mot des ouvertu- res par où les eaux fouterraines ont leur fortie : j'ai marqué dans la carte, les principales de nos environs aux n°. 50, $1, 52, 33. 9°. Des champs & détroits, des vallées & campagnes, ce font des efpaces renfermés entre les montagnes, collines & les côteaux : je nomme campagne une grande étendue de terrein, comprife entre deux plaines fupé- rieures, & qui contient des plaines moyennes & des inférieures. Je nomme fond ou champ un grand efpace renfermé entre deux côteaux, & qui contient une grande plaine inférieure , qui les fépare. Je nomme vallée un efpace fort large, & détroit un endroit fort reflérré entre deux côteaux : il y a tantôt Pun, tantôt l’autre de ces objets le long des rivieres de Spa, de Poilleur & de Theux. « Toute cetre étendue de pays, dont je viens de dé- criré SUR FHISTOIRE NATURELLE. nor _crire la fituation & la forme générale, eft recouverte -prefque par-tout de végétaux qui végétent aétuellement, _ & de débris d’une quantité très-grande d’autres végé- - taux, en partie putréfiés & réduits en un terreau, qui : donne à la terre du fol une couleur grife ou noirûtre, - faïfant avec elle un mélange qu'on nomme commu- -nément terre franche; avec ce terreau & fous ce ter- -reau, l’on rencontre aflez fréquemment une couche plus où moins épaifle d’une terre plus ou moins ar- -gileufe, qui eft quelquefois mêlée de marne, de fable . & d’autres productions foffiles. Dans quelques endroits où il manque des végétaux actuellement fur. pied de végétation, & fur-tout vers -les bords de quelques plaines fupérieures , l’on ren- .contre une couche confidérable de tourbes, qui ne font que des débris entaflés de végétaux, qui paroïflent originaires d’un autre fol que celui où ils font couchés, . & qui font auffi légers & aufli molafles, que du bois _ .flotté fur l’eau pendant un très-long efpace de temps. Cette couche: de tourbe a depuis un pouce jufqu’à dix ou quinze pieds d’épaifleur, & s'étend en longueur de -quelques lieues , dans une fituation horifontale ou pref- .que telle. Il-fe trouve dans quelques endroits parmi la tourbe. des-couches d’argile, de fable , de flint & de -pierres différentes, toutes matieres analogues à d’autres, -que lon rencontre dans les plaines inférieures, parmi lefquelles ferpentent nos rivieres , comme dans le fol .de Spa, où il y a un lit de tourbes fous un lit épais -d’argile bleue & de fable, & fur-tout vers la Hol- -lande, où l’on découvre de pareïlles matieres dans un ‘arrangement aflez femblable. : : Sous argile on rencontre prefque par-tout des rochers d’un volume énorme & dont la partie, quieft élevée con- -fidérablement au-deflus du niveau des plaines inférieu- Tome IL Ff -202 * MÉMOIRE: res, compofe la mafñle générale du pays; les plaines, montagnes & vallées s'étendent communément: fur ces rochers. | Ces rochers font toujours compofés d’une: très-crande quantité de couches-ow de lames plates, qui font aflez .généralement.paralleles les unes aux autres, mais dont a; plupart! font :fort différentes en épaifleur, en confif -tence, émpefanteur:fpécifique, comme aufli en com- -pofition -de leurs ;principes::chymiques. | Les plans des couches de ces rochérs font.prefque toujours fort inclinés fur lhorifon & rarement paral- -leles. On-ne' voit guereside ces derniers que ceux des -petits rochers, qui paroïflent n’être que des morceaux rompus & détachés d’un plus grand , enfuite précipités -en s’écroulant vers -les plaines mitoyennes & les plai- :nes inférieures. ‘La mañle de: ces grands rochers, quoique compofée -de' couches préfque : perpendiculaires, :eft aflez conf- tamment brifée &applanie à la furface fupérieure, en ‘formant les plaines fupérieures , les moyennes -&les -inférieures. Les rochers, du moins la plupart de ceux :qu’ôn ‘rencontre dans: ce pays, contiennent, outre Îles pro- du&ions foffiles qui font. particuliéres à chaque ‘efpéce de: leuts couches, uneitrès-grande quantité de coquil- lages, des:bivalves, tuyaux de mer, coraux & d’au- tres productions , analogues: à: celles de’la‘mer , “8 qui font la plupart mafle commune avec la matiere'de leurs couches. De ces coquillages, quelques-uns font .aflez femblables à ceux qü'on trouve encore aujourd’hui dans les mers qui baïgnent l'Europe ; quelques-autres qui font des bivalves ,: (:& il m'a paru que c’étoit le plus grand nombre:) .en font diflérens, en ce:qu’un ‘des -battans eft relevé dans le milieu de fa partie convexe e MOSUR L'HISTOIRE NATURELLE, 20% ° par une crête faillante, qui'en partage la furface en deux: parties’ pareilles, tandis-que l’autre bartant'eft enfoncé! au- même endroit en formant un fillon rentrant; quel+ ques-uns les nomment dés rérébratules: 1 On diftingue généralèment les rochers de ce pays en déux: efpeces;, en rocher de matière vitrifiablé , que les Naturaliftes’ nomment ordinairement fchifleux, & en rocher de matiere calcinable , qu’ils nomment cal- caires : les ouvriers qui-travaillent aux mines de fer, donnent le nom de: pays: noir à celui qui ne contient que dés rochers dé la premiére efpece, &' le nom de pays blanc à celui: qui:en contient. de: la: feconde : & C'Eft dans le pays blanc qu'ils cherchent. la mine de fer. - Mais comme il y a-des:foffiles,. qui, de.calcinables qu'ils .étoient, font dévenus.incalcinablés, &. qu'à la rigueur’ils font tous vitrifiables, on pourroit, me: fem- ble, qualifier du nom derocher quartzeux, ceux dela premicre-efpece; dénomination tirée du fuc quartzeux, qui-en lié lamaflé, & les autres du nom de rochers Jpatheux., d’après un fuc fparhieux, qui lie la matiere de ceux de cette autre efpece. - Je:me propofe d'en: donner! ailleurs les ‘raifons:, je me, contenterai,de dire. ici ,.que les. rochers. quartzeux réfiltent en général aux acides, participent’ de la’nature des argiles, des fables , de l’alun, du grais, des ardoi- fes, des-terres. vitrifiablés,. &: contiennent, par: préfé- _ rence, de li ‘houille &'des matieres métalliques, mais déces dernieres féulement‘en:petites mañlés difperfées ; & que. ceux que je. nomme. fpatheux ,, (auxquels. jé rappoïte la craiè, lés-marnes, lés difiérens marbres, parmi lefquels on: rencontre les: plus: groflés mafñles de minéraux ) tiennent pricipalèment de la.nature des pier- res calcaires, étant ‘diflolublés- par les rot jy rap- à j ij o 204 111 MÉMOIRE ; porte auff le plâtre ou le gypfe & le filex , autrement dit Jlint ou la pierre à fufil, qui font d’origine calcaire, quoiqu'ils foient indiflolubles par les acides : car on. peut même former de ces pierres par l’art avec des ma- ticres calcaires : M. Geoffroi ayant compofé un filex, en difflolvantc la chaux vive, par un acide végétal : (a) & M.La Vorsier ayant fait du plâtre en diflolvant la craie par l'acide vitriolique. (b) pH be cure a (a) Mémoires de l’Académie des Sciences!de Paris, de l’année 1746. Le, Mémoire-Ill contient quelques. eflais, fur la formation. artificielle. du ftlex : M. Geoffroi mit dans une terrine de grais, une livre de chaux vive de Mélun, il verfa déflus peu à peu deux livres de vinaigre! diftillé. I! fe fit une lésere fermentation [oz mouvement d’effervefcence] & à mefure Que la liqueur s’évapora , il fe forma à la furface de la mañle une croute faline d’un goût amer & un peu âcre. La mañe fe fendit en fe féchant , &+ au bout de quelques mois il trouva fous cette croute faline des morceaux d'une pierre coinpacté!,! femblables à des pierres de fufl.: il ne leur man quoit que le poids & la dureté néceflaire pour faire du feu. à Origine du . M, Geoffroi remarque qu'on enlevoit avec l’ongle pendant les premie- fes res’ années des parcelles-de cette: pierre faétice, mais au bout de dix-huit: H ans il fallut employer le fer. La dureté de cette compoftion augmente donc avec le temps, & peut-être \obferveroït-on là même chofe! dans la pierre à fufil, fl l’on, pouvoit fuivre fes ‘progrès «dans les endroits où elle. fe forme. Cé\mélangé de vinaigre & de la chaux tit naître à M. Geoffroi le deflein de tenter la même expérience fur la chaux non! cuite 3 mais ül ne fe trouva deflous qu’une couche de terre fine & épaifñle environ de deux ou trois lignes; elle n’étoit ni liée ni folide; elle contenoit deffous un amas de grains de fable aflez gros & détachés les uns! des autres. Il n’a pu parvenir à faire le filex qu’en employant la chaux vive &le vi- Origine du faigre : il lui a été impoñible: de réuflir avec tous lestacides qui font dé- faSle de nués de matieres grafles. Si lefilex artificiel acquiertavec le temps la dureté montagne qui lui manque, le fyftême de la nature paroîtra découvett: on a vu qu’ilt &mica. étoit déja certain qu'il falloit un grand nombre d’années pour opérerce changement. ; ÿ (b) Vol. V. des Mémoires des favans étrangers, publié par l’Académie dés Sciences de Paris ; M. Lavoifier, en faifant l Analyfe du Gypfe, fait woir que la pierre fpéculaire, qui eft, comme on fait, le gypfe le plus pur, acquiert par la calcination la propriété de former un corps très-dur qu’on appelle plérre : que ce plâtre eft un fel vitriolique à ‘bafe terreufes ce qu’il prouve-par les expériences les plus décifives, & qui ont fourni à l’Auteur quelques vues pour faire du plâtre artificiel & en procufer par-là aux cantons; qui n’en ont pas de naturel..Cette idée n’eft pas nouvelle: M. Margraff en avoit parlé à M. de Montigny dans les Mémoires del’Aca- démie. M. Lavoilier, après! avoir prouvé que l’endurcifement du plâtre avec l’eau n’étoit autre chofe qu’une véritable cryftallifation ; donne la fa- con de faire du plâtre daus leS pays où il ne s'en trouve pas &où l'huile de vitriol feroit à bon compte, en la tirant des pyrites : On étend de o © È Oo SUR L'HISTOIRE NATURELLE. 05 . Au refte parmi les rochers quartzeñx de ce pays ; on rencontre aflez généralement , outre les coquilla- ges fus-mentionnés , des couches de, pierres de grais où fablonneufes, des fchiftes noirâtres, ou des ardoifes avec empreinte de végétaux , des pyrites, des houil- lés ou charbons de terre, &c. Quant aux rochers fpatheux ou calcaires, les bancs en {ont aufli très-différens en péfanteur , en couleur, en confiftence & en principes qui les compofent. Ces bancs contiennent fur-tout beaucoup de coquillages de mer. Il y a deces bancs qui font de marbre fin - & dont la matiere elt purement calcaire ; ceux-ci font les plus rares. Le rocher le plus commun, & qui fert à bâtir, eft mélé d’un peu de fable vitrefcible : ilyena, maïs fort rarement, qui contiennent un peu de craie. Quelques bancs de rochers fpatheux plus confondus entr'eux que les autres , font compofés de plus de fable & de flints que de matiere calcaire , & renferment des pyrites & des minéraux en plus gran- de quantité & en plus groffes mañles , qu'il ne s’en trouve dans les autres rochers : c’eft ce qu’on nom- me communément la marne grife, qui eft plus tendre & plus fablonneufe que le marbre commun. e Ces deux fortes de rochers (les quartzeux & les Phuile de vitriol dans vingt ou trente fois fon poids d’eau : on y jette peu à peu de la craie avec un tamis fin : Il fe fait une vive effervefcence ac- compagnée d’une odeur pénétrante. On continue aïnf à jetter dela craié jufqu’à ce qu’on ait atteint le point de faturation: les premieres portions + de félénite qui fe forment, fe diflolvent dans la liqueur. Maïs lorfqu’elle én eft chargée autant qu’elle en eft capable, elle tombe au fond du vafeà me- fure qu’elle eft formée & s’y difpofe enfilets cryftallins extrêmement fins, qui, vus avec une forte loupe du microfcope , font autant de petites portions irféculieres d’aiguilles à fix côtés, telles que nousles avons décrites plus baut dans la cryftallifation de la félénite ; ces petits cryftaux féchès &: calcinés enfuite , deviennent un véritable plâtre, qui prend parfaitement corps avec l’eau. Ce plâtre fa@ice, fait à Paris, reviendroit à quinze où. - wviogt{ols la livre. P u L Û 206. HOME AONNNR"E; calcaires ) ont afféz généralement leurs couches tra- verfées par dès féntes irréguliéres; mais perpendicu- Jaires plutôt qu'obliques fur le plan dé ces couches : de ces fentes , celles qui font parmi les couches les plus expofées à l’air ou qui font fort ouvertes , ne font ordinairement remplies d'aucune matiere folidé , fi ce n’eft d'argile &. de quelques fragmens de pier- res. ou quelque fois de cailloux, mais celles qui font plus intérieures font remplies d'ün fuc pétrifié ou cryf= tallifé & propre à chaque efpece de ces rochers ; c’eft: à-dire , quartzeux ou fpatheux. Les ouvriers des carrie- res nomment ordinairement Limés les féntes qui ne font pas remplies, &c Veines, celles qui le font par une matiere blanche qui.eft formée par la cryftallifätion düu.fuc pierreux. Ges rochers, fur-tout les Spatheux, font par grands morceaux, & bancs quelque fois abfolument. détachés & brifés. , mais fans que ces bancs foient recourbés d’une montagne à-l'autre, comme, on prétend, ( peut- être fans fondement ) que dé pareils le font en d’au- tres pays , où les rochers calcaires différent au moins en ce qu'ils n’ont pas des: coquillages fémblables. On y trouve afléz fouyent dés cavernes ; il y en a de fort grandès parmi les rochers fpatheux, fur lés pa- rois -defquels-le-fuc-fpatheux- à formé-des concrétions coniques & d’autres., auxquelles. on. donne, le. nom. de: Stalaëtite, Stalacmiter,, &c. - Les: rochers quartzeux s'étendent; fous: prefque ton . tes, les. plaines fupérieures &aflèz fouvent encore fous les mitoyennes & les’inférieures, Maisiles fpatheux-n’occupent guères que:les:lieux.en- foncés.plüs. bas que. lés plaines fupérieures & s'étendent * probablement: par-tout: fous. les rochers’ quartzeux-, dont ils font quelque fois.la continuation; c’eft au = Mrs re D que SUR L'HISTOIRE NATURELLE. 207 moins ce que l’on obferve facilement dans quelques “endroits, & ce queje conjeéture avoir lieu dans d'autres “où il ne paroït à la vérité aucune pierré à chaux, mais ‘où l’on en reconnoit la préfence dans l’eau de quelques ‘fources qui en viennent, au moyen du favon & des matieres alcalines que j'y-ai verfées & dont s’eft en- ‘fuivie la précipitation d’une poudre calcaire. Les:foffiles métalliques , & fur:tout le fer, ‘qu'on ‘rencontre en abondance datis-ce pays, font répandus parmi les rochers quartzeux & parmi‘les fpatheux ; mais ‘le plus fouvent & en plus grande quantité , aux en droits des plaines moyennes, où les:rochers fpatheux fe rapprochent: des rochers quartzeux : c’eft parmi ‘la marne gif , qui n'eft qu'une continuation du marbre commun , qu'il y a‘le plus de minéraux; maïs com- me cette marne n’elt guères que du fable ‘fans confif- .tence & du flint groffier , les eaux en ont 'boulever- 4 toute la mafle en confondant leurs bancs. Voilà en général ce’que l'on ébferve par ‘tout Île "pays, qui fait le fujet du préfent Mémoire. Je vais maintenant parcourir ce qu'il offre de plus particulier, en propofant mes conjeëtures touchant cette forme du terréin & l’arrangement de fes matieres, occafionnées comme il me paroît par les eaux de /la mer, les éruptions fouterraines , ‘le courant des rivieres & les “météores qui en ont été les principaux agens. ‘Car premierèment cés grands rochers qui font la mafle générale de tout ce pays ‘& qui ‘font compofés de couches plates difpofées parallélement l’une à plat ‘contre l’autre ; parmi lefquelles'on trouve tant de co- quillages propres à la mer ,‘ont été formés fous un vafte océan qui a couvert pendant un très-long temps le fol de l'Europe, qui a été'fujet non-feulement aux mouvemens journaliers des marées ; maïs encore aux o 208 MÉMOIRÉ éruptions de matieres de toute efpeces, lefquelles fe font enfuite dépofées pendant le calme qui fuccédoit alternativement aux agitations. Cette mer a enfin aban- -donné fon lit, quia été foulevé de plus en plus par les éruptions en fe retirant au nord vers la Hollande, où le fol en a été afhaiflé en aflez peu de temps par des fecouflés très-violentes, qui y ont produit un gout fre d’une profondeur immenfe , à l'endroit, où il ny avoit auparavant qu'une terre ferme , ou bien. une mer peu profonde; c'eft de la même façon que lifle Atlantique, dont il eft fait mention dans le Ti- -mée de Platon , felon la tradition de ce temps-là, peut avoir été anéantie dans les eaux, &c. La plupart de ces produétions de la mer qu'on re= trouve f1 fréquemment parmi les couches, les bival- ves , ‘les coraux , les tubulites & les coquillages de toutes. efpeces , font en effet , malgré leur état de pé- trification, faciles à reconnoître pour être originaires .de la mer, où l’on en retrouve encore de pareils de nos jours. Cette origine de nos coquillages, elt con- firmée ultérieurement par la reflemblance exacte de quelques-uns de ces coquillages pétrifiés avec ceux des montagnes & des terreins des autres pays; par exem- -ple, avec ceux de la montagne de Courtagnon en Champagne à trois lieues de Rheims , où il y a une très-grande quantité & diverfité d'efpeces de coquil- lages, parmi lefquels on reconnoît prefque toutes cel- les. des.mers qui. baignent l’Europe. Parmi les coquilles bivalves des rochers de ce pays , les plus plates font difpofées , enforte que le. plus grand plan de leur fection elft prefque toujours parallele au plan des couches du rocher, Il y en a même un très-grand, nombre de fermées , reftées entieres ; ée qui fuppofe que les animaux qui habitoient ces coquilles, non o SUR L'HISTOIRE NATURELLE. 209 non-fulement exiftoient quelque temps avant la for- mation des couches; mais vivoient encore au moment que les couches des ‘rochers ont été formées : car les ob'ervateurs exacts favent qu ’aufli-tôt que ces animaux périflent, leurs coquilles s’entrouvrent & fe féparent entiérement par la corruption des ligamens qui lient les deux pieces ou les deux battans. Dans ces rochers, chaque couche eft prefque toujours plate & à-peu-près parallele à celle qui lui et conti- gue; au moins rarement eft-elle courbée en portion de cercle ou autrement; & c’eft précifément comme il arrive à la vafe que la mer dépofe , tant fur fes bords que fur toute l'étendue de fes fonds; ainfi qu’ on ira Pobferver facilement fur les côtes maritimes, où il des atterriflèmens qui f forment par la va & Re toute forte de terres & de pierres que la mer entraîne durant l'agitation de fes eaux , & qu'elle dépofe en- fuite en couches à-peu-près horifontales, lorfqw’elle revient à un état plus calme. Si les couches de nos rochers font plutôt perpendi- culaires que paralleles à l’horifon, tandis que celles de la mer y font paralleles; il eft facile d'en reconnoître Ja caufe dans l’aétion des éruptions fouterraines chaque fois qu’elles ont changé le foyer de leur a@ion : (a) comme on a lieu de préfumer qu'il arrive dans les mers par les violentes tempêtes, dont on ne retrouve la caufe que dans les éruptions fouterraines : car ce qui prouve encore plus la violence avec laquelle nos rochers ont été bouleverfés, c’eft que dans les environs des endroits où il y a des rochers fpatheux , j'ai vu très- (a) En continuant mes Obfervations, j'ai été conduit à une autre expli- un peu différente de ce phénomene; on la trouvera dans un autre moire. Tome I. G g e 219 MÉMOIRE fouvent qur les couches des rochers quartzeux étoient panchées vers les premiers, & que les couches de ceux- ci panchoient en fens contraire, qu’ils étoient même entre-ouverts par de très-grandes cavités, par où les eaux des pluies & des torrens s’enterrent pour en for- tir enfuite à une diftance aflez confidérablement éloi- gnée de leur entrée. En efler , fi parmi les scale d’un même rocher il y en a qui fe terminent à une moindre diftance que les autres couches contigues & paralleles , cela peut avoir lieu comme dans la vafe de la mer, par lé chan- gement de la direction des eaux agitées & Pa d’autres circonftances. Si parmi ces couches il en eft qui ont en épaiffeur moins d’une ligne, & d’autres à leur côté qui en ont plufieurs pieds & cela fans aucun ordre conftant; sil y a enfin quelquefois de l’inégalité dans l'épaifRur , la pefanteur. & la confiftence d’une même couche, tout cela leur eft commun avec les autres formées des dépôts de la mer, & peut provenir encore de la même caufe que je viens de rapporter, favoir de l'inégalité de leur étendue & de leur ation. É Il entre une très-grande diverfité de matiere dans la formation des rochers quartzeux : car outre les co- quillages & les autres produétions dont j'ai parlé, l'on y trouve des couches entieres formées d’argile, réduites en fchiftes, des couchés compofées de ble, réduites en pierres ‘de grais, enfin des couches compofées de cailloux, pareils à ceux de nos rivieres & dont on fait des meules , toutes matieres que les rivieres & les cou- rans qui exiftoient long-temps avant la production de ces rochers, ont pu charier dans la mer. Enfin l'on appercoit fur quelques couches des rochers quartzeux de ce pays des empreintes de végétaux etran- SUR L'HISTOIRE NATURELLE. ar gers à l'Europe, marquées dans une pierre noïre fif file, & dans les couches qui leur font contigues, on rencontre des couches entieres de houille (ou charbon de terre) que différentes raifons font préfumer ne provenir que d’une quantité immenfe de végétaux dé- _ truits & altérés par des caufes, qui, jufqu'a préfent, ne font pas encore bien connues. Ces végétaux, ou plutôt leurs types, comme on le remarque, font bien étendus & pofés fur leur plat, parallelement au plan des couches de pierres qui les renferment; ce qui prouve que les végétaux qui ont laiflé leur empreinte, étoient ou flottans à la furface des eaux, ou couchés fur la vafe inférieure par des eaux miles en un mouvement horifontal, & comme de balancement , lorfque la vafe immédiatement dépofée par-deflus, les a recouverts. Les rochers quartzeux couvrent une plus grande étendue de pays que les rochers fpatheux; les quart- zeux occupent les plus grandes hauteurs, les fpatheux tiennent les lieux plus enfoncés; les rochers quartzeux ont la plupart de leurs couches très-minces, les fpa- theux les ont ordinairement d’une très-grande épaifleur ; enfin les quartzeux ne contiennent pas de fi grandes pieces , ni un fi grand nombre de charillages que LE rochers fpacheux.. Tout cela doit, en effet, avoir lieu, fi les tn des rochers ont été formées par la mer. Car on doit préfumer, que d’un côté le dépôt des fleuves débordé vers leur embouchure, & que de l’autre les vents. im- pétueux & les éruptions fouterraines, accompagnées d’une agitation extraordinaire des eaux de la mer, ont été fréquens, & qu'ils ont fourni plus au loin & plus fouvent que ne le font les marées plus tranquilles, des | matieres telles que l'argile, le fable, les cailloux, &c. parmi lefquelles il fe trouve des plantes PRE que des 212 SAME MNIO RCE coquillages, enfin toutes matieres vitrifiables qui font: particulières & analogues à nos rochers quartzeux, & qu'ontrouve dans les couches que le Rhin & la Meufe ont dépofées vers la Hollande, comme analogues auffi à celles dont le Mone Véfuve à récouvert des campa: _gnes très-étendues & quelques anciennes villes de fes: environs (entr'autres Ja ville d'Herculane ) où l'on voit une quantité de fable & de matieres de toute efpece & de différentes couleurs, qui font arrangées par cou- ches, & qui, fans être noyées des eaux de la: mer, se laifenc pas que d’avoir pris une certaine confiftence en: forme de pierre de grais, probablement par un fuc quartzeux que les eaux de pluie ont détrempé en paf fant à travers des matieres recuites par ce volean, & qui, en eflet, produifent dans les cavernes une: cryftal- lfation quartreufe, telle que celle dont le célebré Pere de la Torre fait mention dans fon Hiftoire du Véfuve, & qu'il m'a donné lieu d’obferver pendant mon féjour à Naples. Tout au contraire , les coquillages qui ne fe multi- plient gueres que dans. les lieux où la mer plus pro- fonde eft moins-agitée, n’ont pu dépofer fur fon fond qué pendant l'intervalle d’un calme de longue durée, les débris de leur pieces détruites, dont nos rochers fpatheux font prefqu’entiérement compofés & en former : ainfi des couches plus épaifles & de matieres plus uni- formes, parmi lefquelles d’une quantité de coquilla- -ges,il s'en elt plus facilement trouvé de grands & de moins dégradés que parmi les couches des rochers quartzeux, dont les coquillages ne font fouvent plus vifibles, qu'à caufe que la couleur en différe Eee de celle: de la pierre. If n'en a plus été de même lors qu'une nouvelle | éruption a foulevé & brifé les couches des rochers fpa- SUR L'HISTOIRE NATURELLE. 213 theux , qui { formerent de ces coquillages, car la mul- tiplication de ces coquillages alors a ceflé, ou tout au moins a été de beaucoup diminuée, & ceux, dont les animaux vivoientencore ont été enveloppés parle dépôt de cette éruption, quia fourni la matiere à des couches de rochers quartzeux, dans laquelle efpece de pierre les co- quilles me paroïflent plus rares & plus petites, quoique fouvent plus entieres que dans les rochers fpatheux. On confirme encore tout ce que je viens d'avancer par l’état dans lequel font les rochers fpatheux de ce pays, qui portent des indices particuliers de boulever- fement, puifque fort fouvent ils fotit confidérablement minés & ébranlés comme des ruines, de forte qu'il s’y cft formé des gouffres, comme aux numéros 45, 46, 47, 48, où fe perdent des torrens entiers, qui repa- roiffent au jour après quelque trajet aflez long fous terre, en fortant indifféremment par les fources $o & 52, quoique la riviere de Theux & des Collines, les féparent l'une de lautre : ce qui fait voir qu’il y a fous ces rochers de grands efpaces fort étendus , qui s’entrecommuniquent les eaux qui sy rendent. Ajoutez à tout cela Les fources des plaines infé- rièures, qui font voifines des rochers calcaires, con- tiennent toujouts beaucoup de principes de cette matiere, ce qui prouve le trajet que l’eau a fait parmi les pierres calcaires, au lieu que les fources des plaines fupérieu- res n’en contiennent point. (4) FT refte encore des traces de ce que la mer a pro- duit fur notre pays, foit en balançant fes eaux, foie en $ rétirant vers la Hollande; lés plaines infériéures en font Peflet : les couches de nos rochers qui font (a) J'ai reconnu que cette matiere eft purement calcaire & non une fé- lenite ; nom fous lequel les Chymiftes défignent un fel neutre , compo- fé d’une terre calcaire , difloute par l'acide vitriolique. 214 MÉMOIRE prefque toutes obliques en defcendant du Nord au Mi- di & même fouvent perpendiculaires à l'horifon, font toutes tronquées ou rafées vers l’extrémité fupérieure par une fection plane & parallele à l’horifon , en for- mant ainfi les plaines fupérieures ; ce qui n’auroit point lieu , fi des eaux d’un volume immenfe n’en euflent point rafé & emporté par leur courant les parties les plus faillantes & inégales, pour les dépofer fur des lieux plus enfoncés, & c’eft probablement le courant qui tendoit du Sud-Eft , au Nord-Oueft, qui a ren- verfé auffi les bancs de ces Rochers , qui font fouvent inclinés en faifant face au midi. L’Argile qui recouvre en général tous les rochers de ce pays, même les fpatheux, tient comme Jje lai déja dit de la nature des rochers quartzeux, plutôt ue de celle des rochers fpatheux; elle paroît avoir été formée & détachée de ces couches de rochers quartzeux, qui avoient le moins de confiftence : en effet jen ai trouvé des couches entieres, renfermées parmi celles de grais & de fchiftes de ce pays. La pierre alumineufe tient de la nature de ce rocher, puifqu’avec de largile & l'acide vitriolique on forme de l’alun, felon les dé- couvertes des chymiftes modernes : elle n’a donc pu être fi généralement répandue fur tous les rochers de ce pays, que par des eaux qui les couvroient entière= ment. Les tourbes qu'on retire dans ce pays occupent le plus fouvent le bord des montagnes & des plaines fu- sérieures : ce font des plantes qu'on peut foupçonner ru moins pour la plus grande partie étrangeres au fol, qui les fupporte, (a) peut-être y en a-t-il qui font [z] Ces plantes pourroïent bien avoir été produites fur le fol voitin de -lui où on les trouve entaflées. Ceci mérite quelqu’attention de la part gs Obfervateurs. à SUR L'HISTOIRE NATURELLE, xs _étrangeres À l'Éurope ; elles ont probablement flotté, fur la furface des eaux de la mer, qui, en fe retirant de fon lit, les a dépofées par préférence fur certains endroits, {lon diverfes circouftances, comme la direc- tion du vent, &c. En effet, encore aujourd’hui l'océan fait flotter fur fes eaux une quantité prodigieufe d’her- bes & d’autres végétaux , que les fleuves y entraînent de temps en temps des campagnes qu'ils ont parcou- rues dans leur débordement. Les plaines moyennes appuient aufi les conjectures que J'ai formées. Dans les premiers temps que ce pays fut à découvert & qu'il ne recut plus que les eaux du Ciel; toute cette étendue de plaines moyennes qui f fuivent, n’étoit probablement qu’une efpece de grande plaine, où il n'y avoit guere autre chofe à la furface, que de l’aroile affife fur un tas de rochers, les uns plus grands que les autres, & dont les efpaces intermédiai- res entre les grands, étoient remplis par les débris de ces mêmes rochers, en même temps que d'argile, de fable & d’autres matieres que la mer y avoit dépofées : ainfi, les eaux reftées ou furvenues après la retraite des eaux de la mer, ont d’abord pris leur cours, en for- mant, dès leur départ, les plaines moyennes pour rou- ler à l’aide de leur fluidité & de leur pefanteur fur ce terrein incliné jufqu’à la mer. Ces eaux du Ciel alors produifoient fans doute un courant plus volumineux que préfentement, à caufe qu'il refta encore pendant quelque temps, une quantité d’eaux de la mer, rete- nue dans des efpeces de lacs formés aux endroits les plus enfoncés parmi les principaux rochers : dans ce temps-la, le courant des eaux, a pu, eu égard à fon volume, être aufi plus rapide & à proportion de cette rapidité, il aura eu plus de force & de tendance en ligne droite , pour fe creufer un lit fur les plans incli- 216 | MÉMOIRE nés qu’il rencontroit, en y formant les plaines moyen- nes, qui firent d’abord entr’elles une fuite non inter- rompue de furface plane , ou à-peu-près telle, avant que d’autres plaines moyennes plus enfoncées, & fur- tout avant que les plaines inférieures euflent été creu- fées. C’eft ce que j'ai tâché de repréfenter dans la carte où j'ai défigné quelques-unes de ces plaines mitoyen- nes. Ce pays alors ne préfentoit fans doute à fa furface aux endroits où nous voyons aujourd’hui les plaines moyennes & les plaines inférieures, qu’une efpece de plan incliné afléz uniforme , mais qui cependant étoit plus qu'aujourd'hui interrompu à certains en- droits par des rochers qui le traverfoient, & qui étant difpofés en forme de digues, y occafonnoient des caf cades & de grands lacs, lefquels enfuite ont difparu après le laps d’un certain temps, par l'effet ultérieur & continuel des eaux du Ciel. Je préfume qu’il en fera de même de l'Amérique, qui, dans quelques fiecles, n'aura plus tant apparence d'une nouvelle terre, lorf- que la plupart de fes lacs & de fes marais feront com- blés, que les rochers qui y forment des digues & des cafcades, y feront détruits, & que les eflets des eaux de la mer & des éruptions fouterraines feront plus effacés que préfentement. L’Air alors y fera aufli plus fec, il s'élévera moins de nuages & il tombera moins de pluie fur ce continent que ci-devant & jufqu’à cette époque. Aïnfi les eaux du ciel , en continuant leur cours, avec d’autres caufes, ont achevé de brifer & d’entrat- ner les rochers , qui formant des digues à leur paffà- ge ,occafionnoient fréquemment des cafcades & deslacs; & lorfque ces rochers à force d’en être minés peu-à-peu, ont tout d’un coup été culbutés , il s'en eft encore en- fuivi de nouveau lacs & de nouvelles cafcades & quel- quefois un grand débordement, qui a roulé & entraîné toutes = SUR L'HISTOIRE NATURÉLIE. 217 toutes les matieres différentes qui fe font détachées des rochers des environs, & même quelques arbres qu'il rencontroit dans fon paflage, pour le laifler dans des lieux plus profonds au moment qu'il s'eft ralenti. C'elt ainfi qu'ont été produites les couches encore actuellement horizontales d'argile , de fable & de pier- res de toute efpéce & même d’arbres, que nous voyons . dans les plaines inférieures parmi lefquelles les rivieres ferpentent aujourd’hui : c’eft encore ainfi que dans quel- ques endroits de leur lit, les rochers ont été mis à nud, & que dans d’autres il s’eft dépofé des couches d’une argile entre-mèlée de toute forte de terres, de fables, & fur-tout de ces débris de la nature des ro- chers quartzeux, auxquels on donne aflez communé- ment en ce pays le nom de cailloux de riviere , que cependant il ne faut pas confondre avec les cailloux que les Naturaliftes nomment autrement pierres à fufil, qui font d’une autre nature, & qui doivent probablement leur origine à une matiere calcaire difloute par un diflolvant particulier, & enfuite figée, puifqu'il s’en trouve parmi les rochers fpatheux de ce pays, & que dans d’autres contrées on en rencontre dans la craie, & que même il yen a qui font parfaitement entre- mêlés de coquillages de mer ; puifqu'enfin le céle- bre GEoFFROr en a compofé de pareils avec la chaux difloute par un acide végétal. D'ailleurs , ce qui prouve encore que ces cailloux de nos rivieres ne font pour la plüpart que des dé- bris de rochers quartzeux, quele courant des eaux a arrondis , en les faifant rouler l’un contre l’autre, ou autrement, c'eft la grande variété qui s’en trouve pêle-mêle , car on y recopnnoît des pierres de grais de toutes les efpèces , des fchiftes ou ardoifes de toutes les différentes couleurs, dont les couches des rochers quart- Tome I. ARR 218 MÉMOIRE zeux des endroits d’où les eaux découlent , font com- pofces. On ÿ retrouve même à la plupart la forme plate qu’ ils -avoient lorfqu’ils fafoient encore partie de la couche du rocher. On y voit aufi des cailloux plats quine font qu’une piece compofée de plufieurs cov- ches de ces rochers. L'on y voit enfin également de ces productions blanches & tranfparentes formées du fac quartzeux cryfallifé, qui remplit ordinairement les fentes & les gerçures des couches de rochers fchifteux ; productions qu'on nomme vulgairement des Weines. Enfin, que les eaux puiflent arrondir les angles de ces pierres ; foit par érofion, foit par collifion , (sil m'eft permis de me fervir: de ces expreflions) Von sen convaincra facilement à la vue de quelques morceaux de tuile , de fcories, de verre &: d’autres productions de lart, qu'on retrouve parmi ces cail- Joux , dont les eaux, foit en les roulant & frottant les uns contre les autres , foit autrement:, ont effacé les inégalités. Il ne faut donc pas être farpris de retrouver parmi les plaines inférieures des couches d’argiles de toutes. les couleurs, & mêlées de roures les différentes efpeces de matieres qu’on rencontre fur les plaines moyennes & fur les plaines fupérieures des environs; les rivieres les en ont détachées & entraînées principalement lors de ces débordemens extraordinaires , qui ont dû arriver dans les temps reculés , lorfque de gros quartiers de ro- chers déja détachés, ou à-peu-près minés par un cou- rant d’eau qui les traverfoit, fe font écroulés , & ont arrêté le courant, qui, au bout d’un temps, les a entraînés plus loin, tantôt fubitement , rañtOt autre ment. L'on peut bien Er dns encore qu’autrefois «Y D, “Jupérieu Les SAPI Forêt de ANtanneuæ A : Fa Sos Forêt D'Otmont... 75 Fozèt de Cheinhe ER Reree 74 Forct de Rahaimont B ruere de S'Remacle.…. Foxèt de Tanctemont Pr AINES ÎINFE RIEURES ET RUISSEAUX (o)] Chauwion Turon Targnon Riviere de Polleur Riv. de Sa Dore West. > Pente Fond-d oneuæ. Wislers- Querat Cheinhexs Riviere de Vesdie. GRANDES PLAINE S MOYENNES Thier de Chien Chnsiomont Arr) : Enfoncement de Charwiomont Chaviushez x T huex d'oneux Johan Libnamt Ho M a? De à AUX 2) / PAEA D ati LU di une Panrie pu Pays Brerçerqeve Ourlaine Chevaumont.. --_- pi nfoncement de Chevaumont. Tillot Hersecomine Hautfart PerTires PLAINE» MoYENNES ELU) T 2 Devant Stanneux Thiex de Franchimont Pérreux Champs. Heid Copette e Heid de Suslenville Maures ci Q o & «a E à & © Jrm0 TD [AT 2€] @ à au There Franchimont à Heid Copette PrEcIPICES Vis-a -Wis de Turon L Vis-à-Vis de la Riv_ de polleur Visa Vis de Chawion Visa Nis de la Rx Spa GovrrRrESs Au Fond d'oneux Au R. de quenuras AR der Juxon AuR. de Ueiot Au Déllage de Mont Prés de Wisler, Au Rufr: de Wisler, Pres de à Mages Sources nine Sr cbgrandetdlenville Tous Pohar a Prés la petite ile Suslenville a ta uv de Pesdie Drrserron prs Rocxers en k œ "00 ,T FAI] 70,7 D COTE VAT es © Ï ren0 7 D pra Ligne prorctuce d'est-nord-ert à louestAud- Ouest Covre Des Monraanes #7 VALLErS Ligne Couvbe au bas de la Carte du midi Au Nord 5. Brujere de la Commune de 2 Le Remacle Vi 43 Hé. pret à 1 1} Rahaumont = pu M IT (Le 1} ja ic M, D. GT LA LL res R US Fs Pet de (9 | Kb (| SA fl d W AAA unlenvélle 2250 —— —— Rhin qui Font la Lieie « Rahaimont Copette Chievaumont SUR L'HISTOIRÉ NATURELLE, 219 les inondations durent être plus confidérables & les eaux plus charzées de corps étrangers que préfente- ment ; parce qu'au moment que la mer commença à { retirer , & avant que le pays fût entiére- ment recouvert de végétaux , & de ces vaftes forêts qui fe font enfuite étendues par toute l’Europe & l’an- cien continent, enfin , avant que les hommes n’y ha- bitaflent , il arrivoit , probablement des changemens plus violens & plus fubits dans la température de latmofphére, pour. y occafionner plus fouvent la chû- te des pluies, & même des pluies plus abondantes. , Mais lorfque les végétaux s'y furent multipliés ; & que tout fut couvert de grands boïs , qui, par les brouillards qu’ils occafionnent, étant mouillés, & par l’ombre que font leurs feuilles en été, ont pu em- pêcher les rayons du foleil d'agir fur le terrein & d'y imprimer une chaleur aufli forte que préfentement: ( car comme on l’a remarqué en Amérique , le froid des hyvers y eft plus modéré depuis qu’on y a détruit une grande partie des Forèts); alors les rivieres ont pu être fujettes à des débordemens moins exceflifs & sentretenir dans une plus conftante égalité ; du moins penfe-t-on aujourd’hui en Europe que les inondations y font plus rares , mais aufli plus fubites & plus paf fageres que par le pañié. : Hhÿ D ue aiod me a Ilitioën er | Fr 2 1 Biol, 3h + Sopr sb 1h: s% _ Mo. ous aol etols antors vb : il M ae silo pla sou euobsbneni el Sup SUOMI : ne uit À Hs euh | l 4 SUPPLÉMENT AU MEMOIRE, Dans lequel il s'agir de la forme extérieure de la terre. | Tour ce qui eft avancé dans ce Mémoire touchant ation générale des eaux fur le globe, d’après les dé- pouilles de la mer & les autres veftiges qu’elle y a Jaïflés , fe confirme encore par les effets particuliers ; que les eaux ont produits fur les plaines, montagnes & vallées des environs de Theux, repréfentés dans la carte jointe à ce Mémoire. 1°. On remarque une pente ou diminution régüliere de hauteur aux plaines fupérieures, depuis la forêt de Staneux (N°. 1.) & de Rahaimont (N°. 4.) jufqu'à 1a forêt de Chinhez( N°. 3.) & de Tancremont (N°. 6.) Cette direction eft à-peu-près du midi au nord, mais en inclinant un peu de left à l’oueft, comme celle de la pente de l’Europe, qui commence au midi vers les Alpes, d’où defcendent les principaux fleuves qui fe rendent dans ce pays & les environs, jufqu’à la: mer du nord. ; _ Cette forme du pays eft une preuve, comme caufe & comme effet du courant général des eaux, qui, après avoir féjourné fur le continent, rouloient dans la même direction, en entraînant les matieres qu’elles avoient détachées des lieux élevés plus en avant vers les lieux plus bas à la mer du nord, où elles font préfentement dépofées par couches horifontales fur des rochers dont 222 SUN PH BIMNÉE MPEUN DT. Jes bancs, plus anciens que ces matieres, tiennent une fituation difiérente, quelquefois même perpendiculai- re, comme on les appercoit fur-tour à la rive gauche de la Meufe entre Namur & Maftrichte, & mémetdans la Hasbaye entre Liege, Hui & Saint-Trond A cette époque le pays étant faubmergé, n'étoit donc qu’une vafte plaine continuée en une pente aflez réguliere, fans aucun de ces grands -enfoncemens , ‘où font nos vallées, qui parurent enfuite, lorfque le volume des eaux étant diminué & laifflant à découvert quelques éminences en maniere d’écueils ou d’ifles, commen- coit à creufer le lit du Rhin & de la Meufe , avec ceux des rivieres qui s’y rendent. 2°. On y remarque une autre forte de pente gra duée, qui regne parmi les plaines moyennes ; favoir du côté de left |, parmi celles de Chawiomont, { N°. 19.) d'Oneux (N°: 22.) & de Sohan (N°. 23.) & du côté de l’oueft parmi celles de Chevaumont (N°.25.) de Mont (N°. 27 ) & de Haut-Sart (N°. 20.) La pente de ces plaines moyennes eft encore un effet affez apparent du courant général, tæl qu’il étoit, lor£ que la mafle des eaux, continuant à décroitre de plus en plus, laifloit des terres à découvert, & qu’une por- tion détachée fe retirant vers le nord par ce pays, fe. réduifoit en un courant particulier, qui fe creufoit un nouveau lit, en emportant ce qui réfiftoit le moins à fa rencontre; car il y a une reflémblance aflez parfaite quant à la forme, la matiere & la hauteur, entre la plaine de Chawiomont & celle de Chevaumont, entre celles d'Oneux & de Mont, entre celles de Sohan & de Haut-Sart; reflemblance par laquelle il paroït que tout cet efpace n’étoit autrefois qu'une feule plaine, qui étoit panchée du fud-eft au nord-oueft & conti- nuée fans interruption, avant que les plaines inférieu- SE PPEÉMENTT. 223 res qui les féparent en plufeurs portions ne fuflenc déja formées. 3.2 On remarque enfin une pente ou gradation af feétée particuliérement aux plaines inférieures : l’en- droit où aboutit le ruifleau de Chawion (N° 7.) eft plus élévé , que celui où finit le ruifleau de Tu- ron (N.° 8.) C'eft fans doute d’abord après les autres plaines, que furent formées les plaines inférieures avec les vallées qui les renferment. La plaine inférieure de Pepinfter vers le nord (N° 17 ) , où la riviere de Theux fe joint a celle qui vient de Vervier, a été une des premie- res à fe former , lorfque -les eaux , qui couvroient toutes les plaines moyennes, rompirent la digue qu'y formoient (entre la forêt de Chinhez N.9 3. & la fo- rêt de Tancremont N.° 6 ), des rochersfort durscom- pofés de cailloux & de fragmens de quartz, comme le font les pierres meulieres de ce pays , & dont les bancs épais qui y barroiïent le paflage, fubfiftent en- core en partie en forme de muraille avancée aux deux côtés de la plaine dans la direction d'Eft-Nord-Eft - à l’Oueft-Sud-Oueft, repréfentée par la ligne droite ponctuée N.9 54. Les gens crédules du pays nom- ment ces rochers le mur du diable, prétendant qu’il l’en- treprit autrefois avec les cailloux de la riviere en vue de noyer le Bourg de Theux. Ce ne font ce- pendant que des bancs de rochers parralleles à d’autres bancs de rochers moins durs , que l’on rencontre fouvent dans la même pofition prefque par tout le pays. À mefure que le courant principal creufoit la plai- pe inférieure , d’autres parties detachées de ce courant, après plufieurs détours parmi les rochers , formerent en y revenant de part & d'autre, les plaines inférieu- 224 SUPPLÉMENT. res avec les vallées, à peu-près dans l'ordre füuivant ; favoir les plaines inférieures des.ruifleaux de Chinhez N°, 16 ; de Quenwai N°, 15 ; de Wiflez N°. 14; Fond-Doneux N°.:1:; de Weiot N°. 12; &c, De cette maniere la plaine moyenne fut alors par- tagée en différentes portions ou plaines plus petites , par les enfoncemens ou vallées , où font les plaines inférieures avec leurs ruifleaux particuliers. Les eaux qui couperent ainfi la plaine moyenne en plufieurs portions, y produifirent en même-temps dif- férens autres changemens : car en fe déchargeant de deflus chaque portion ou plaine moyenne , pour fe rendre dans les enfoncemens , elles en emporterent les matieres détachées & en inclinerent la furface vers chacune des vallées, qui étant plus au Nord , en recurent les eaux; d'où il eft arrivé que le côté , ou le côreau de la vallée qui eft au bord méridional du ruifleau, préfente ordinairement une pente plus douce que le côteau oppofé du côté du Nord. En effet la plaine moyenne des environs de Sohan , penche vers le ruif- feau/de Chinhez; celle d'Oneux panche vers le ruif- feau de Quenwai; celle d’entre Chawiomont & Fays panche vers le fond d'Oneux, &c. Voyez dans la car- te la coupe des montagnes & des vallées N?. 55. Mais le changement le plus remarquable qui arri- va alors, fut celui de faire paroître, pendant un cer- tain temps, plufeurs portions de ces rochers , qui font la bafe de nos montagnes & de tout le: pays, en for- me d’ifles; entre autres à cés endroits où font les hau- teurs de Chawiomont & de Chevaumont, qui n’étoient probablement alors qu'une feule plaine!, qui regnoit fur les mêmes bancs de rochers continués; & dirigés de l'ENord-Eit, à l'Oueft-Sud-Oueft. Alors cet- t efpèce de digue , partagca la mafle des eaux, à mefure SUPPLÉMENT. 225 mefure qu’elle décroifloit, en deux ou trois parties ou courans , dont le principal pafloit par l'endroit enfon- cé N.° 20, proche du village de Fays , en creufant enfuite la plaine inférieure du fond d'Oneux, & dont une autre partie.sraverfoit un endroit un peu plus en- foncé mais moins large N © .26, proche la Cenfe de la Haye, en formant la plaine inférieure où coule le ruifleau de Weiot; tandis qu'une autre portion plus petite des eaux s’échappoit par une breche plus pro- fonde, mais moins libre, & qui s’eft approfondie de plus en plus entre Renaud-Foffe & Theux, N°.39 & 4x. La plus grande quantité d’eaux, arrivant, comme il y a tout lieu de le conjeéturer, dans ce pays, de ces hauteurs fort élevées qu'il y a au midi au-delà de Sra- neux , fe portoit donc par les environs de Polleur di- rectement fur l’enfoncement N © .20 près de Fays, par lequel elle entraîna fur la plaine inférieure du fond d'Oneux un tas volumineux, (dont s’eft formé la plaine moyenne N © .32,) decaillouxou fragmens de pierres, entremêlés de fable & d’argile , que l’autre courant qui arrivoit par Ja Cenfe de la Haye, & celui qui { pré- cipitoit par la brêche d’entre Theux & Renaud-Foffé, emporterent & étendirent en grande partie parmi la plaine inférieure & tortueufe, où eft fitué le Bourg de Theux, & dans laquelle les eaux, arrivant par difié- rens détours, firent différens tournoyemens, comme dans une efpece de lac, qui n’eut point d’iflue fort libre, & fur-tout pendant les débordemens que les pluies, les arbres déracinés , ou les rochers abattus par des tremblemens de terre ou autres accidens, occafionne- rent enfuite de temps en temps, lorfque le pays n’étoic pas encore tout-à-fait formé comme il left préfente- ment. En effet, il paroît aflez fenfible à vue de pays, Tome I. Ii 226 SUPPLÉMENT. , que les grandes plaines inférieures, telles que celles entre Theux & Pepinfter, ne fe font applanies que lorfque les rochers, ne laïflant qu'un pañlage. étroit vers Pepinfter, y arrêtoient comme dans un lac, des eaux chariant de l'argile, du fables des cailloux, &c. & fujettes à des débordemens accompagnés de tour- noyemens différens & très-compliqués. _ Ce qui confirme que la plus grande partie des eaux venoit alors du côté de Polleur & de Fays, c’eft 1°. que cette plaine moyenne entre Chawiomont, le fond d’'Oneux & Theux, eft toute formée de cailloux en- taflés, dont ceux qui font plats, font inclinés vers le village de Fays, comme les cailloux plats des rivieres le font ordinairement contre le fil du courant. 2°. C’eft que parmi ces cailloux il fe trouve de gros rochers à “mine de fer, arrachés entre Oneux & Fays, oùil yen a des minieres parmi les cailloux. 3°. C’eft enfin la forme même du pays, fur laquelle on peut faire d’au- tres remarques, en confidérant, par exemple, les ci- mes N°. 36, 37, les précipices N°9. 38, 39; remar- ques qui pourront trouver place dans un Mémoire par- ticulier fur le fol des environs de Theux, dans lequel j'examinerai fi le rocher , qui forme tant la mafle de Chawiomont que celle de Chevaumont, & qui regne même fous le lit de la riviere entre ces deux hauteurs, n’a point été détaché entre Renaud-Fofle & Staneux, & entrainé en avant fur les débris des matieres fablon- neufes , calcaires & argileufes, parmi lefquelles font les pyrites & mines de fer, qui auparavant avoient bou- leverfé ce terrein, où il arrive fouvent que les eaux s'enterrent comme aux gouffres N°. 45, 46, 47, 48; puis reparoiflent à quelque diftance, comme aux ou- vertures N°. 50 & 52. Les eaux ayant continué à perdre de leur volume SAUTER PULL LÉ JMNEUNMT 227 ne pañlerent plus à la fin qu’en maniere de cafcade par la brêche entre Chawiomont & Chevaumont, qu’elles minerent & approfondirent bien-tôt au niveau des plaines inférieures; comme peu peu cela arrive- ra encore dans le cours de quelques fiécles proche de Cooz, village entre Stavelot & Spa, où l’eau de la riviere d'Ambleve , lorfquelle eft débordée , fe précipite en cafcade de 40 à 60 pieds par les bré- ches d’un rocher, qui eft à l’un de fes bords & dont les bancs perpendiculaires forment par leur crête ou bord fupérieur , une efpece de digue dirigée à-peu-près de l’Eft à l’Oueft. | Le courant principal s'étant donc, après un laps de temps, frayé un pañlage libre entre les hauteurs de Chawiomont & de Chevaumont , à l’endroit où fe réuniflent la riviere de Polleur & celle de Spa , qui en ont efcarpé les bords en maniere de précipice, à certains endroits N°. 39 & 41, où les rochers font à découvert , ce fut alors que les eaux qui couvroient encore les plaines plus au midi, creuferent les autres vallées, où coulent les ruifleaux de Targnon , de Tu- ron, de Chawion & la riviere de Spa, comme auff le ruifleau de Saflore & la riviere de Polleur : il fe fit auffi dans le même temps différentes modifications aux plaines moyennes de cesendroits, favoir des cimes & d’autres précipices N°. 38 & 40 , & fur-tout aux endroits où il y a des rochers à bancs perpendi- culaires & dirigés de l’Eft à l'Oueft;, tels qu'il sen préfente fouvent dans le pays. Au refte il n’eft prefque point poffible de dévelop- per tout ce qui dut arriver dans les temps reculés en conféquence des loix de l’hydraulique , tant à caufe de l’ation compliquée des fluides ou courans d’eau, que de la diverfité de réaction des Hi réfiftans, \ij 228 SUN PPT É MIE, NT: Ce qui eft le plus probable , c'eft qu'a proportion que l'eau étoit élevée au-deflus de tout le pays, plus fon cours étoit uniforme & direét , & fi la mer ny faifoit point de réfiltance, plus rapide en parcourant Pétendue des plaines fupérieures ; comme aufli à pro- portion qu'il parut des rochers & des terres hors des eaux , plus le cours -en fut irrégulier, divifé & ralenti en parcourant les plaines fubalternes ; & lorfqu'il ne refta plus que les eaux fournies par les pluies & les fources , elles quitterent les plaines moyennes, pour fuivre un cours plus égal, plus tortueux & moins ra- pide dans les plaines inférieures | qu’elles modifierent différemment felon la forme & la qualité des matie- res qu’elles y rencontroient. Enfin il eft encore moins poflible d’expofer claire- ment par écrit, ni même à l’aide d’une carte , tout ce qui f préfente dans plufieurs endroits de ce pays, tendant à expliquer l'effet que les eaux y ont pro- duit : ce qu'il y à de certain, c’eft qu'on s’en apper- coit fort aifément par l’infpection des lieux lorfqwon le parcourt avec attention, ce qui eft plus facile ici qu'ailleurs , puifqu’en une étendue de moiïns de deux heues en quarré on y. rencontre une plus grande va- rieté de plaines, de montagnes & de vallées, & mé- me de matieres qu'en beaucoup d’autres pays, dont le terrein eft ou tout plat & uniforme , ou entre- coupé par des montagnes & des vallées , qui ayant dix ou douze fois plus d’étendue en tout fens, ne per- mettent point de faifir d’un coup d'œil le rapport qu'il y a entrelles. ; # | MEMOIRE Préfenté à l’Académie Impériale & Royale ; de Bruxelles. PAR MOULE DE BEUNIE. Le 24 Juin r773. Sur une maladie produite par des Moules vénimeufes. ù rs £ ee » LES mis ee [4 “Niemsss G———_— — 5 MÉMOIRE Préfenté à l’Académie Impériale & Royale V de Bruxelles. DE tout temps on a obfervé des maladies caufées par des Moules vénimeufes. Werlhof, Cautiones VMedie, it, qu'un homme robufte, immédiatement après avoir mangé des Moules, fut attaqué d’une cardialgie, des VOmiflemens & d’une fievre pourpre (purpura urtiaria } qu'il eft mort le troïfieme jour. Selon Baukmannus, une Dame de Meckelenbourg , ayant mangé des Moules vénimeufes, a eu, outre les fymptômes ordi- naires , une très-grande hémorragie uterine. Le même Auteur dit: Vidi enim non paucas matronas, virgines G infantes ex mytilorum efu male fe habentes, fentientes præcordiorum anxierates, fudores frigidos , lipothymias ; Jentris, faciei 6 extremitatum intumefcentiam > iQ ut ac- tum de earum vita putaffes. Eph. nat. Cur, dec. 2. ann. oétavi obf. 48, pag. 122. Mentzel ajoute d’avoir ob- fervé outre les fufdits fymptômes, des convulfions con- tinuelles (ibid. .obf. 194 »1 PA 498. F. A, Guldenklee cite plufieurs fpmptômes produits par des Moules vé- nimeufes. Conf. dicf, cap. 11, page 155. H. Meibomius parle des paflions illiaques, propuies par des Moules _ vénimeufes. Ainf il LY a long-temps qu'on connoit la qualité vé- Do ee SMÉÉSM O' TRE" nimeufe des Moules, mais la nature de ce venin a été inconnue jufqu’à nos jours. Quelques- uns crurent que la fubftance de la Moule même étoit vénimeufe , d’au- tres qu’elle contenoit de jeunes crabes, des araignées marines , &c. &c. Ainfi les opinions furent partagées. Par la fuite du temps l’on obferva que ces conchyles r’étoient vénimeufes que dans certaines faifons; des obfer- vations réitérées ont donné lieu au proverbe, les mou- les’ font mal-faines dans les mois où la lettre R n'entre point : ce qui fe confirme réeulierement tous les ans, cette maladie ne regnant que pendantles mois de Mai, Juin, Juillet & Août. Dans ce temps j'ai ouvert une grande quantité de moules, pour développer la caufe de cette maladie; mais toutes mes recherches n a pas réufh ,! je dus à la fin au pur hazard, ce que j’avois cherché “envain pendant bien des années. L'an 1769 au mois d’Août , un de mes confre- res étant empoifonné par ces conchyles & fe croyant près de fa fin, me fit appeller ;' je lui ordonnai un vo- mitif qui lui fit rejetter cet infeéte, nommée étoile marine, de là grandeur de trois lignes, & d’abord les fymprômes affreux de la maladie difparurent. Mima- ginant dès-lors que cet infecte avoit des qualités vé- nimeufes *je me tranfportai fur les lieux, où bancs d’où l'on tire les moules; ma furprife fut extrême d’y trou- ver prefqu'autant de petites étoiles marines que de moules. Jen ramafñlai une bonne quantité, pour fiire mes expériences projettées. Je queftionnai beau: coup les Barcliers fur l’origine de ces étoiles; tout ce qu'ils purent me dire , fut qu'avant le mois d’Août on nen trouve que de grandes , & dans le courant de ce mois de petites, qui parviennent à leur gran- deur naturelle vers le moïs d'Oétobre, & qu’en plein hyver \ SUR UNE MALADIE, 6e 233 hiver leur nombre diminue confidérablement , mais .qu'alors par la conftruétion de leurs rayons elles ont une Pre prefque fphérique. En maniant cet infeéte, j’eus les mains enflées , engourdies, :& enflammées ; fymp- tomes, dont j'aurai occafion dé parler ci après. à De retour chez moi ,-je donnai trois de ces petites étoiles-marines, enveloppées d’un morceau de viande à un chien de taille médiocre, il en mourut dix heu- res après. Je donnai deux de ces infeétes à un autre chien, il fut très-malade; mais lui ayant fait avaler beaucoup de vinaigre, il guérit dans peu. : ASS Ces expériences plufieurs fois répétées, j’obfervai conftamment, que lorfque les chiens ayoient pris ces étoiles toutes crues & ne les rejettoient pas, ils étoient fort malades, mais que ces infectes étant cuits, ou ayant fimplement bouilli, bien que donnés en plus grande quantité, ne produifoient pas, d'effet dangereux. L’expofition que noûs venons de faire, doitnous ai- _der à porter nos vués plus loin, & nous engager à faire de nouvelles récherches furune matiere fi intéref- fante :.Pline , Aldovrande , Rondelet, Jonfton, Cy- priani, Frifch,. Godard , l’'infatigable Reaumur, Bon- net, & plufieurs autres ont fait l’'Hiftoire Naturelle des infedtes , mais n’ont rien dit de celui-ci, ou ne font pas mention de leur qualité vénimeufe, c’eft pourquoi un Abrégé d'Hiftoire Naturelle, tant des étoiles-marines que des Moules, ne fera point déplacé dans ce Mémoire. Tome I, _Kk 354 ‘ MÉMOIRE HISTOIRE NATURELLE ans | D E LÉ TO E L'EMOA RAIN E. Lérorre-marrne eft une efpece de poiffon ou d’in- fete marin, qu’on trouve aux embouchures de plufeurs rivieres , fur-tout de l’Efcaut; elle repréfente par fa forme un petit cercle d’où fortent plufieurs cornes ou rayons, qui lui ont fait donner le nom d’étoile. Lorf que ces infectes font jeunes, leur chair mollaffe ref femble à laglue, mais à mefure qu'ils grandiflent, elle prend plus de confiftence : leur furface fupérieure eft couverte d’une peau calleufe & chagrinée; au centre de fa furface mférieure eft placée la bouche, garnie d’un fucoir dont elle, fe fert pour tirer: fa nourriture ordinaire des coquillages. Ces rayons très-flexibles lui fervent de jambes, & chaque rayon a encore fur quatre doubles rangs plus de trois cens reflorts ou petites arrêtes, femblables à des cornes de limacon, faifant l'office d’autant de jam- bes pour ramper fur des corps marins. Malgré ce grand nombre de jambes , le mouvement progreflif de.cet infecte eft très-lent. TA PH | J’a1 trouvé des étoiles marines qui avoient perdu quelques-uns de leurs rayons , & ‘où il commençoit à en poufler de nouvelles; ce qui pourroit faire ranger ces infectes dans la clafle des polypes. Ces étoiles étant defféchées ne paroiflent plus qu'us T SUR UNE MALADIE, &r. 235 : affemblage d’arêtes d’une finefle & d’une ftruéture admirable, Cet infeéte eft appellé par Aldovrande fiella marina ; par Sylvaticus Cremonenfis magia , rafirum marinum ; par Rondelet fidus marinum. Les Auteurs en comptent jufqu’à vingt différentes efpeces ; maïs Jonfton dit : » Tamvarie & multiplices flellarum formæ confpiciuntur , » ut quærendi @ contemplandi nuilus fit futurus finis. ” Et quoique nos Bateliers prétendent en avoir trouvé plufieurs efpeces dans l'Efcaut, je n’en ai jamais pu rencontrer que de ceux à cinq rayons. | De la Hire & Sedileau croient, mais fans la moin- dre preuve, cet infecte de différent fexe; mais d’après Teftorius, & les plus. célébres Naturaliftes modernes, je le crois hermaphodite de même que les huitres, moules & autres, qui fécondent leurs propres œufs, C'eft à la fin d'Avril , ou au commencement de Mai, (fuivant les chaleurs plus ou moins précoces) que ces infectes frayent ; car cette année (1773 )ils mont frayé qu'à la fin de Mai. On voit fouvent flot- ter entre. deux eaux une quantité prodigieufe de ce frai , reflemblant à de la gèlée de viande, ou au frai de grenouilles. Ce frai, appellé en langue des Bateliers Qual, on VVatergroey, fait par fa qualité glutineufe précipiter les impuretés de l’eau à tel point qu’elle paroïît beaucoup plus claire, & plus tranfpa- rente, qu'en toute autre faifon de l’année , enforte qu'il fait le mème effet que la colle de poiflon au vin & à la biere. Ce frai obfervé les premiers jours au microfcope ; ne repréfente qu'une mafle morte & informe de gé- lée ; mais après quelques jours de chaleur elle pa- roît vivante, & remplie d’animalcules, qui, après leur développement , fe. métamorphofent en étoiles-mari- k i 236 MÉMOIRE nes très-vifbles, qui fe précipitent alors au fete de l’eau. Ce frai f voit ordinairement jufqu'au commen- cement du mois d'Août , mais les grandes chaleurs en développant plutôt ces .animalcules , le font aie quefois difparoître : à Ja mi- Juillet. Ce frai elt fi vénimeux , fi cauftique, qu'il fait gon- fler & enflammer avec une démangeaifon infupportable toute partie de la perfonne qui le touche immédiate- ment, & la roiïdit à tel point, que quelqu'un inexpe-= rimenté croit que la gangrène va s’enfuivre ; mais cet accident fans danger difparoit d’abord, fur-tout fi Pon frotte la partie attaquée de vinaigre. Ce n'’eft pas feulement aux hommes & aux quadru- pedes, comme je le prouveraï ci-après, que ce frai eft nuifible ; il l'elt auffi à quelques poiflons. Lorfqu'il n'y a point ou peu de ce frai dans PEfcaur, l’éturgeon & le faumon font apportés ordinairement pleins de vie à la poiflonnerie d'Anvers, au lieu que quand il y'a beaucoup de ce frai, la plus grande partie de ces poiflons meurt en route. Il ne paroît pourtant pas vénimeux aux moules auxquelles il fert peut-être au contraire de nourriture ; les moules n'étant jamais plus grafles que vers les moisde Juillet & d’'Août , & on ne trouve pas plus de moules mortes dans la faifon de ce frai, qu’en toute autre. Les huitres qu’on trouve fur les mêmes bancs mé- léesavec les moules, & qui ont, commeelles, les écail- les entr’ouvertes, devroient auf être vénimeufes par la même raifon; elles ne le font pourtant pas , autant que j'ai pu favoir ; foit qu elles rejettent ‘cette efpece de venin , foitque le peu qu'on en mange dans cette faifon né faffit pas pour conftater la chofe. S'il eft apparent que le Qual, fert de nourriture SUR UNE MALADIE, Ge 2137 aux moules, l'on croit également qu'il ‘n’eft pas vé- nimeux pour les poiflons del Efcaut, puifqu’ils ne man- quent pas dans le temps que cette riviere charie abon- damment ce venin ; il réfulte de ces obfervations qwil n'eft nuifible qu aux poiflons , dont j'ai parlé plus haut, à l’éturgeon , au faumon ; aux hommes; à certains qua- drupedes , aux chats & aux chiens, & plus à ces ie tiers qu'aux autres. : * J'ai auffi conftamment expérimenté que le vinaigre étoit un véritable antidote , qui fait cefler en, peu de temps les effets de ce poifon. Le frai bouilli n’eft nullement dangereux aux anis maux dont jai parlé, d’où l’on pourroit conclure que ce venin eft un volatil, qui n’exiite que durant la vie de linfecte. C’eft peut-être : auffi la raïfon pour- quoi, de cent moules, on n’en trouve pas une véni- meufe , & que ce font les moules crues, qui cau- fent cette maladie ; ; du moins, je ne fais qu'un feul exemple où les moules cuites_ ont produit cet effet funefte. J'aurois continué ces expériences, mais Ja chaleur au commencement de Juillet, ayant fais fubitement “difparoitre le frai, il me fut impofhble de les pour- fuivre. HISTOIRE NATURELLE DES MOULES. La Moule, mytulus en Latin, eft un infeéte marin de la clafle des bivalves, trop connu dans ces Provinces pour en faire une defcription détaillée. Je me borne- rai à décrire les parties qui fervent à montrer comment elles fe nourriflent , avalent le venin & le communi- quent à l'homme; les plus curieux peuvent confulter Gefnerus, Reaumur , & fur-tout A. de Heide, qui a fait une Anatomie exacte de cet infecte. On obferve que les Moules aiment à vivre en com- munauté, car quoiqu'on les trouve çà & là au fond des rivieres, ifolées ou égarées par les flots, on en trouve par millions attroupées dans d’autres endroits ; on appelle ces places des bancs de Moules & on les y trouve en telle abondance que quelques heures fuffi- fent pour en remplir des barques entieres. Elles fixent leur demeure dans des lieux où l’eau eft très-falée, où il y a des pilotis de bois ou des pierres pour foutenir les digues, & où la marée ne defcend pas affez' bas pour les laifler à découvert, & afin de n'être pas emportées par les vagues ou par le flux, elles s’at- tachent au bois, aux pierres, & même les unes aux au- tres par une efpece de filafle ou de foie verte. Cette foie elt filée par la mouie même & provient d’une humeur gluante qui fort de fon corps; cette humeur fe durcit dans l'eau. Ces foies ou cordages lui fervent d’ancre, fans quoi N SUR UNE MALADIE, Sc. 239 le premier coup de vent ou les vagues pourroïent les emporter. Ce méchanifme très-ingénieux fe fait par la langue ou la trompe de la moule, qui eft cette partie noire ou brune , qu'on obferve en ouvrant les écailles ; elle _ a dans fon état de contradtion quatre à ciriq lignes de longueur & deux de largeur : mais elle fe peut pro- longer jufqu’à un pouce & demi. Cette trompe lui {ert de main, de jambe , de filiere & de fonde pour cher- cher les endroitsoh elle puifle fe fixer. Dans le long de fa trompe fe trouve une cannelure, qui va d’un bout à l’autre; l'animal difpofe les levres de fa trompe de maniere à en former un tuyau contenant une liqueur gommeufe, qui forme les cordages avec lefquels il s’at- tache, & fe colle fur divers corps, tellement qu’une moule ancrée reflemble à une tente munie de fes cor- des & piquets. Ses fils récemment faits, font plus blancs, plus tranfparens que les autres, & font quelquefois au nombre de plus de cent pour ancrer une feule moule. Sa langue ou trompe, n’eft proprement qu'un muf cle, ou aflemblage de plufieurs petits mufcles blanchä- tres couverts d’une peau brune où noirûtre. Cette langue ou trompe lui ferc de jambe; quand linfeéte veut faire quelque mouvement progreffif, il la fixe fur quelque corps, la racourcit; & tirant vers la pointe le refte de fon corps, il décrit s chaque pas l’ef- pace d’un pouce & demi. Quelques Auteurs croient que la moule contient une huméur :diflolvante pour difloudre fes cables, quand elle veut faire quelque mouvement progreflif; mais il me paroît plus probable qu’elle les coupe par fes écail- les, qui ont afléz de reflort & de tranchant pour faire cette manœuvre. C’eft un moyen bien plus fimple & 240 MÉMOIRE plus naturel, qui paroît fe confirmer par la quantité qu'on trouve très-fouvent de ces Core accumulés & abandonnés, Le vuloaire croit que la partie noirâtre que lon Y obferve, eft le cœur de la moule; mais J'en ai trouvé quelques- -Unes , qui n’avoient que al moitié OÙ UNE partie . de ce vifcere prétendu; apparamment coupé par d’autres moules, lorfque cette partie s’encage dans les coquil- les adjacentes, qui fe ferment toujours lorfque quel- que corps étranger les touche. Mais comme nul animal. ne peut fabfifter fans avoir le cœur en entier, il eft vifible que lon fe trompe groffierement en donnant ce nom à la partie fufdite. D’autres croient que la cannelure de la langue fert d’œfophage ; il eft vraifemblable qu'ils fe trompent. II eft vrai qu'entre les quatre paires de mufcles de Ja langue , on trouve une ouverture, qui eft une continuation de la cannelure; mais des injections fai- tes dans cette ouverture , pénétrent dans le corps graif- feux & ; jamais dans l'eftomac de la moule ; par con- féquent c’eft à tort qu'on la nomme l'œfophage. La bouche de la moule eft fituée vers langle aigu de cet infecte, & garnie de quatre franges flottantes en forme de mouftaches, qui lui férvene de lévres. Ce n'eft pas la trompe où la langue feule, dont la ftruure foit fi artiftement sat eel à les De Des ou les franges qui bordent prefque la moitié de la mou- le, offrent un nouveau fpeétacle d’admiration : ces franges font un tiflu admirable de fibres creufes, qui fervent d’ouies , ou d'organes de la refpiration , de vaifleaux pour la circulation des humeurs , &" vrai- femblablement de coins pour ouvrir les écailles, car .on obferve deux mufcles ou tendons pour les fermer , & SUR UNE MALADIE, &c. 241 & on cherche envain leurs antagoniftes ou ceux pour les ouvrir. ë state Lorfque la moule veut s'ouvrir , elle relache les deux mufcles ou tendons, fait.gonfler les franges qui fervent de coins , qui font écarter les écailles ; du moins on ne voit jamais de moule s’ouvrir , qu’elle ne pouf fe fes franges en dehors. Tout ce fpettacle intéreflant aux yeux du Naturalifte , ne lui font-ils point con- cévoir les plus hautes idées de la fécondité de la na= ture & de fon Créateur? Nous pourrions ici ajouter plufieurs autres particularités intéreflantes des parties internes ; mais comme dans ce Mémoire notre but principal eft moins d’exciter la curiofité, que d’être utile à l'humanité, nous finirons ici l’hiftoire: naturelle de la moule, vû que ces parties inférieures feroient inintelligibles fans le cours des figures. Nous allons parler du danger où :l’on sexpofe en mangeant les moules crues dans la faïfon ou le fraï des étoiles-ma- rines ( ou le Qual) eft dans les rivieres. Tome L } SEL 559 L 1 242 | MÉMOIRE DESCRIPTION De la maladie caufée par des Moules vénimeu Ifess avec fes fignes diagnoftiques. | Quriques minutes après avoir mangé les moules vé- nimeufes, le malade fe plaint d'une ardeur' dans la bou= che, dans la gorge, l'œfophage & leftomac. D'abord les levres, la langue & la gorge s’enflent à un tel point, qu'après quelques minutes la-parole lui devient dificile & toute la tête fe gonfle confidérabfement ; puis Îles yeux deviennent enflammés comme dans une grande ophtalmie, & paroïflent auffi rouges &c étincellans que dans une manie ou frénéfie. Enfuite toute la fuperficie du corps devient gonflée & enflammée & même plus rouge que dans un éréfipêle, à quoï {e joint une dé- mangeaifon infupportable & une extrême roïdeur dans tous les membres; enforte qu'il paroît dans un degré de catalepfie, avec une refpiration très-gênée, beaucoup d’inquiétudes, quelquefois des convulfions & des dou- leurs épouvantables. LAN CM US E. Nous avons prouvé que le frai des étoiles-marines ou le qual, appliqué extérieurement fur le corps humain, produit des ardeurs, des gonflures, des roideurs, en un mot, les mèmes f”mptômes que Îles moules véni- meufes prifes intérieurement, avec cette feule différence que dans l'application extérieure ce ne font que les parties oùf l’application a été faite & les parties adja- \ SUR UNÉ MALADIE, 6. 243 centes qui fouffrent , au lieu que quand le venin eft pris intérieurement, les fymptômes font univerfels. Ce frai ou qual donné aux chiens & aux chats, pro- duit les mêmes effets que les moules vénimeufes aux hommes, & comme les moules ne font vénimeufes que dans le tems où le frai des étoiles-marines { trou- ve dans les rivieres , nous croyons pouvoir aflurer que les moules ne font vénimeufes que lorfqu'elles contien- nent ce frai. L'on ne doit par conféquent pas ac- cufer la couleur orangée des moules , leur corruption, leur maigreur , les phafes de la Lune , ni aucune ma- ladie particuliere des moules , ni leurs puftules, ni le nauplie d'Albert le Grand , ni les araignées, ni les crabes que le vulgaire croit la caufe de cette cruelle maladie ; mais uniquement le frai des étoiles-marines. P.R 0,G. N O S$S E. Si les fymptômes de cette maladie font affreux , îls ne font pourtant pas auffi redoutables qu’on le croi- roit; le malade en meurt rarement, quoiqu'il y ait des exemples de perfonnes qui ont péri après avoir fouflert trois ou quatre jours des tourmens horribles : mais fi les remedes appropriés leur font adminiftrés à temps, ils guériflent en trois ou quatre ‘heures , quoique l'engourdiflèment fubfifte quelquefois pen- dant plufieurs jours. | G U°R E. Le premier foin qu’on doit porter au malade , c’eft de le faire vomir, pour évacuer au plütot la matiere vénimeufe ; mais fi le venin a féjourné quelques heu- res dans l’effomac du malade & qu'il foit pléthori- | HE) 344 É MOIRE. que , ou fort 4 À F convient, crainte d’inflamma- tion, de faire précéder la fignée. (a) Te me fus toujours fervi avec beaucoup de fuccès de l’hypeca- cuana pour vomitif, je ne crois pourtant pas que ce médicament mérite quelque préférence fur les autres émétiques. Si la faignée n’a pas précédé, on doit la faire fui- vre, pour calmer l'irritation du genre nerveux & pré- venir le dangereux fymptôme de l’inflammation ; puis on fait coucher le malade, on lui fait boire copieu- fement quelque potion rafraichiflante, & on lui donne trois onces de vinaigre un peu délayé dans de l’eau ; par heure, à mefure que le malade commence à fuer, les fmptômes difparoïflent , & au bout de cinq a fix heures il fe trouve enticrement rétabli , excepté qu’il lui refte un peu d’engourdiflement pendant quel- ques jours. Peut-être le vinaigre feul eit-il capable \ d’émoufler ce venin, caren oies & en Zélande, où on man- ge autant de moules crues que dans nos Provinces Âutrichiennes, cette redoutable maladie y eft à peine connue. Ce font pourtant les mêmes moules tirées des mêmes lieux ; toute la différence eft que dans ces deux Provinces on les mange crues; mais toujours avec du vinaigre feul, ou avec le vinaigre mêlé d’un peu de poivre. Ainfi, il eft afléz apparent que le vinai- gre émoufle le venin, & l'expérience nous fait voir que l’inflammation ulée par Papplication externe du Qual, eft guérie en peu de minutes par cet acide. Pour fe garantir donc de cette maladie funefte, le plus court fera de ne pas manger de moules crues ne a (a) Cette maladie doit être plus fréquente à Anvers qu'ailleurs, caf jufqu'aux enfans de trois ans, tous mangent des moules crues. SUR UNÉ MALADIE, Ge. 24 pendant les mois de Mai, Juin, Juillet & Août ; ou les manger comme en Hollande avec du vinaigre & du poivre , quoique je ne garantifle pas infallible- ment cette derniere précaution. Pour celles qui ont pañlé par le feu , je crois qu'on peut s’en fervir en tout temps, n'ayant jamais vu, ni oui (quoique je m'en fois fcrupuleufement informé à plufieurs de mes confreres ) qu’elles aient été nuifibles, dès qu’elles étoient bouillies , roties ou étuvées, excepté dans un feul cas, qui ne m’a pas été fuffifimment conftaté pour croire que les moules foient vénimeufes lorfqu’elles font cuites. HUTIN. SUR LES 2 2 ÿ 1. 1 LAUX MINERALES HODÈUE SAMU/GI HN OA KR, Lu le 6 Oétobre 1773, à l’Académie Impériale & Royale des Sciences & Belles- Lettres de Bruxelles, PAR M. L’'ABBÉ D'ÉVERLANGE DE WITRY: AE RTE | 4 amie as & SE » | SUR LES EAUX MINÉRALES DU SAUCHOIR, Lu le 6 Ofobre 1773 1 @ PoAeadene Tmpériale & Royale des Sciences & Belles- Lettres de Bruxelles. sui Base minérale du Sauchoir , fituée à une de- mi-lieue de la ville de Tournay , & de fa montagne dite Mont de Trinité, abonde en mine de fer. Cette montagne étant voifine de la fontaine , l’on préfume qu’elle en tire fa fource, quoique jufqu’ici , -je n’aie pu m'en aflurer. Diverfes fontaines , tant fur le pen- chant qu’au pied de la montagne, ne s’annonçant nul- - lement comme minérales ; l’on pourroit en inférer , que les véines martiales qui lui communiquent leurs vertus , étant plus profondes en terre , que les fontai- nes, dont je viens de parler , cette eau minérale dé- coule en eflet de Ja montagne, puifqu'il ne fe trou- ve pas aux environs de notre fontaine , de matieres ferrugineufes. (Tome I. Ra M m BNC u MÉMOIRE F La fontaine du Sauchoir , plus empreinte de fer que celles qui l’avoifinent, eft enfermée dans un baffin quarré , conftruit aux frais d’une Abbaye de filles, fur un terrein qui lui appartient ; cette fontaine a eu de la vogue dans les temps les plus reculés. La tra- dition porte, qu’en cet endroit , il y a eu un des hôpi- taux nommés #aladreries, établi vraifemblablement en vue des fecours que l'humanité pouvoit retirer de ces . eaux falutaires : je ne fache pas, qu'avant la fin du fiecle dernier , l’on fe foit appliqué à connoître leurs principes; vers ce temps , le fieur Heroguele Médecin, en a écrit, mais, de l’aveu de fes confreres, exceffi- vement mal; s’en étant tenu aux eflais informes de l’an- cienne chymie. Il exalte les vertus de l’eau du Sau- choir en tant qu’elle eft jointe à un {el martial de fa facon , ce qui réduiroït à peu, la -propriété de cette fontaine , fi elle avoit befoin de ce mélange. Ce n’eft pas ici un examen fuperficiel , que j'ai entrepris, mais une analyfe approfondie , faite & ré- pétée avec tout le foin dont je fuis capable. L'on fait combien de telles opérations font délicates, com- bien les principes de ces eaux échappent à la vue la plus pénétrante ; jefpere qu'au moins l’on reconnot- tra dans mon travail , la patience requife à tout ob- fervateur : qui fe défie .de fon imagination , &'ne décrit que ce qu'il croit avoir bien vu. Notre fontaine s'annonce au, premier coup-d’æœil , comme martiale par un fédiment de terre noire, & d’une ochre jaunâtre qui tapifle les parois du baflin, & charge la moufle qui y croit; la partie noire contient du fer , confervant fon phlogiftique , la folubilité dans les acides. ,: la faculté , étant fêche, d'être attiré par l’aiman ; fa matiere jaune eft un Crocus, ou faf fran de mars, en grande partie déphlogiftiqué , in- _ SUR LES EAUX MINÉRALES, ‘961 foluble dans les acides , peu ‘attirable par, l’aiman ; fur la furface de la fontaine , nage en quelques en- droits une pellicule noirâtre qui paroît ferrugineufe. Comme l’on juge en grande partie, des principes - d’une eau minérale: # par fon dépôt, j'ai commencé par celui-ci mes opérations , en rempliflant de cette boue noire, la moitié d'une cucurbite à laquelle adap- tant un balon de verre très-blanc ; j'en ai diftillé par un feu gradué , le phlegme; lorfqu'il a ceflé d’être limpide , j'ai féparé le récipient , & verfé la liqueur dans unverre; voulant -énfuite m’aflurer s’il contenoit quelques parties fpiritueufes, volatiles!, ou , de nature à fermenter avec les acides, ou les alkalis ; je n'y: ai trouvé qu'une eau très-pure que l’efprit de vin alkoho- Hé, ni les ls minéraux ne troubloient pas fenfible- ment; ayant continué à diftiller ce dépôt, il a pañlé dans le b2zlon une eau de faveur fäde; dès qu'il na plus rien monté , la matiere fèche mife dans une pe- tite cornue que j'ai fait rougir peu-à-peu , il en eft {or- ti quelques gouttes d’huile empyreumatique | qui pa- roifloit faire partie du fédimént ; mais pouvant croire avec Mrs. de Buffon & Baumé , que la chaux pouflée au grand feu , donnoit une huileanimale: inhérente aux Crufiacées , auxquels , fuivant plufieurs Naturaliftes , les pierres calcaires doivent leur origine’, je me füis afluré de lexiftence de cette. matiere bitumineufe , par des preuves plus convaincantes ; cette boue noire, répandug|fur une pêle chaude , il. s’en eft élévé par ondulations , ou viveroufles , une flamme bleuâtre avec l'odeur propre au fouffre; ce que ne produifoient pas les terres calcaïres des fontaines non-minérales; le {é- diment de notre fontaine calciné en blancheur a donné après lotion, filtration , & évaporation beaucoup de A _ cie LU»: Ji 292 (24 MÉMOIRE se matièré calcaire, de la terre vitrifiable, un peu de fel terreux non-criftallifable, attirant l'humidité de l'air. Procédant à l’analyfe de Peau , pour découvrir de quel- les parties fédimenteufes de la fontaine , elle & trouvoit faturée, j'eus les réfulrats fuivans : cette eau’ très-lim- -pide ne m'a parû donner aucun figne de gaff , ou efprit aéré, ni par la diftillation , ni par la pompe pneuma- que ; elle eft très-froide à fa fourcé , le thermo- mètre de Fareinheit s'y tient à 38 degrés, un très-bon péfe-liqueur Anglois s’y enfonce de deux degrés moins -que dans l’eau de puits, & de cinq deorés moins, que dans l’eau diftillée, indice certain de corps hété- rogenes dans l’eau du Sauchoir ; elle préfente à l’odo- rat, & au goût, une faveur martiale qui f perd au bout de deux jours, quelque bien fcellées qué foient . Les bouteilles. Cette: éan évaporée au tiers , où au Quaît ,;a la faveur âpre de la terre abforbante , &c après certain temps, dépofe comme l’eau de la fontaine , de l’ochre , & quelques parties qui réftent ferrugineu- fes; fi l’on éprouve cette eau fraichement puifée, par da noix de galle , elle prend une couleur purpuri- ne, verdit , & enfuite noircit un peu ; confirmation pleine, de la matiere ferrugineufe. b, D Pour favoir fous quel stat s’y trouvois le fer, & raf fembler tout celui d’une certaine quantité d’eau, ÿy veñfainde Palkali phlogiftiqué, .parfaitément neutre, nommé par M. Paumé, Alkali Pruffien, m’attendant, felon cet Auteur, & M: Marteau de Grandvillièrs, à y voir. le fer. fe précipitériien bleu de Prufle ; j'ai répété cette expérience fans fuccès (4) : j'aiapperçu une feule ——— a LN" 12 à ns ns 2 — (a) M.Planchon, Médecin de Tournay, déterminé fans doute par la fenle vue delmtiltté) publique en cherchant à vérifier mes procédés dans {on Mémoire, paroît à-peu-près d'accord avec moi en ceci, comme dans tout le refte. Hors qu'il traite avec plus d’étendue que moi, des vertus € cette eau, ; SUR LES EAUX MINÉRALES. ‘253 _ fois quelques molécules bleues f dépofer, encore foup- connai-je mon alkali, de n'être pas parfaitement fa- turé, le réfultat de tous mes autres procédés, a été de voir précipiter le mars en nature. Je nentre pas dans le long procès littéraire entre Meffieurs Marteau & Monnet; le premiér veut, que toute eau martiale étant néceflairement vitriolique , elle précipite le fer en bleu de Prufle ; fon adverfaire fou- tient, avec aflez de vraïifemblance , qu'une eau peut être martiale fans étre vitriolique ; M. Raulin, Médecin, char- gé d’analyfer les eaux minérales de France , tient au fenti- ment de Mr. Monnet ; quant à moi, je puis “atrefter , qu'il eft rare que jufques dans une cuillerée de cette eau, Poñ ne voie de petits floccons de fer fe dépofer ; &'à la longue , { convertir en crocus. Pour. favoir fi cette même eau étoit purement acide ou alkaline, ayant employé le fyrop de violettes étendu, il y à verdi, épreuve toutefois équivoque, les eaux martiales verdiflant communément par ce fyrop; la dif. folution d'argent par l’efprit de nitre, étendu dans de l'eau diftillée , a formé un précipité violet, preuve de a combinaifon d’un acide avec l’afkah, & du précipité d'argent par Îles matieres fulphureufes obfervées dans le fédiment de la fontaine ; le mercure diffous par l’acide nitreux , s'eft précipité en jaune & en fe} neutre , en partie déliquefcent , & en partié fublimé à la furface du vaiflau; l’eau de chaux & les alkalis minéraux ont donné un fdimebt terreux & martial, ce qui EURE que l'acide de l’eau minérale quitte fa ba, pour s'unir à un autre alkali;, notre eau concentrée étant verfée fur la diflolution de vitriol, forma un précipité de faffran de mas, d’où réfulte un {el neutre par l'acide du vx £riol avet la baf alkaline de cette eau. | Je me fuis affuré par tous les moyens des Chymif- 254 MÉMOIRE tes, que l’eau du Sauchoir ne contenoit aucune par- tie nuifible au corps humain, telles que celles cuivreu- fes, arfénicales & autres dangereufes : 3 MES remarques conftantes ont été, que cette eau fubit des changemens par tous les alkalis purs, par quelques fels neutres, tel que le vitriol , l’alun, & n’en recoit aucun de fenfible par les acides libres, ce qui doit ÿ faire préfumer des {ls neurres, Comme je pouvois être induit en erreur par la trop grande quantité d’eau , rélativement aùx matieres difloutes, j'ai pris le parti de les examiner par la diftillation ; mais n’y trouvant aucun principe capa- ble d’altérer le couleurs; les étoffes bleues ou rouges, placées dans la rainure du chapiteau, ne changeant pas fenfiblement leur teinte, j'ai préféré, comme moyen plus court, lévaporation. J'ai donc fair é évaporer cent pintes d’eau minérale dans de grandes jattes de por- celaine; à mefure qu'elle seft concentrée, il s'eft for- mé une forte de crême brillante à fà furface ; plufieurs précipités terreux d’un blanc fale, entremélé de parti- cules de fer, & de petites écailles féléniteufes fembla- bles au mica. J'ai mis à part, à chaque filtration, tous ces fédimens , & continué l'évaporation dans lefpoir que s'il s’y trouvoit quelque fel criftallifable, je l’ob- tiendrois après la formation de la pellicule, & le re- froidiffement de la liqueur; j jai été trompé dans mon attente , bien que je m’y fois repris à diverfes fois, il a'eft point venu de criftaux ; voyant l’inutilité de mes tentatives, m'en étant tenu à TPévaporer jufqu’à deflica- tion, il m'eft refté au fond du vaifleau une mafle fa- line d’un blanc jaunûtre , où étoient figurés des criftaux, affectant la forme du fel d'Epfom, s'imbibant de lhu- midité de l'air, & devenant peu folubles dans les acides; j'ai efpéré qu'en purifiant ce fel fort terreux , par plu- fieurs filtrations, je parviendrois à le criffallifer. Ma SUR LES EAUX MINÉRALES. $$ liqueur ainfi concentrée & réduite à deux onces, elle a jauni confidérablement, ce que j'attribuai au mars; le goût de la liqueur ni cauftique, ni lixiviel, tenoit de l'amertume du fel d'Epfom; mais la liqueur refroidie & laïflée à la cave, je n'y apperçus que des parties rameufes , grafles au toucher. Impatienté de ne pas réuffir , foupconnant la matiere bitumtineufe , d'embar- rafler les parties falines; & de s’oppofer à la criftal- lifation ,,. je m’avifai de depécher cette matiere, & d’en remplir la moitié d’une petite cornue de verre que je pouflai par un feu gradué , il en fortit une liqueur (a) onétueufe : ayant augmenté le feu jufqu'à faire rougir la cornue , il fortit quelques gouttes d’huile d’odeur agréable, telle que l’avoit obfervé Mr. Raulin, dans certaines eaux minérales ; mon fel calciné à blan- cheur , & diflous dans de l’eau diftillée duement fil. trée, & mife à évaporer , j'ai enfin eu la fatisfaétion, lorfque la liqueur a commencé à fe troubler, d’'ap-= percevoir des aiguilles falines très-fines , nager dans la liqueur , dont une partie, lors de la formation de la pellicule, elt demeurée adhérente aux parois des phio- les évaporatoires. Ces petits criftaux afféétent conf- tamment ceux du fel d’Epfom , tel que celui fait en petite quantité, dont les aiguilles font plus fines ; la matiere non-faline fe dépofe en poudre terreufe, _& en petits criftaux féléniteux qui croiflent en nom- bre, fur-tout fi l’on y verfe un acide. Celui-ci entrant en fermentation violente avec la terre abfor- bante , forme un {el neutre plus cara@térifé que celui obtenu avec la terre non-calcinée , & toujours en ED) Par une forte ébullition du fédiment dans de l’eau diftillée, il furnage quelque-fois dans la liqueur des floccons d’une vraie matiere Jfibacie , un Chymifte ma dit avoir obfervé la même matiere, 256 MÉMOIRE fines aiguilles de fel d'Epfom; ce n’eft pas gratuitement que je lui en donne le nom, ce fel ordinaire des bou- tiques étant diflous en même poids ,afiecte la méme figure & comme le mien, étant bien purifié, prend moins l'humidité de l'air, ne f diffout pas dans les acides , réfifte au feu le plus violent , facilite la (a) fufion de l'argent ; le defir d’abréger mon opération, & .de conferver la matiere huileufe , que l’aétion du feu pouvoit difliper, ou altérer ,. me. fit effayer d’ex- traire cette huile par l'efprit de vin bien alkoholifé, ce qui me réuflit comme à Mr. Raulin ; lefprit s’en eft _empreint , s’eft coloré en jaune, & le el s'eft pré cipité fous une couleur blanche que j'ai fait criftallifer quoiqu' un peu plus difficilement qu "après qu'il a éprou- vé la violence du feu. J'examinai enfuite les fédimens de mon évaporation, pour les comparer à ceux de la fontaine ; voici mes divers, eflais ; la matiere fulphureufe , remarquée fi abondamment dans les premiers & indiqués dans ceux- ci, par la folution d'argent, me porta à croire que j'y trouverois du fouffre; je ne me trompai pas. Cette pou- dre projettée fur une pêle on fur une brique à demi rougie, donne quelquefois une flamme d’un bleu ; jau- nâtre; de l’acide verlé fur cette terre, rendit une odeur de DE de fouffre ; ce fédiment dons dans de l’eau filtrée, mife à évaporer, fournit une terre blanche f6- léniteufe, du fer & un peu de fel fort terreux non crif- tllifable qui paroït alkalin ; foupconnant ce fédiment d’être en grande partie calcinable , l'acide végétal du vinaigre en fépara beaucoup de terre calcaire, qui, après avoir été lavée & defléchée, fermentoit avec l’'a- cide Te pe pe mn mt (æ) Ayant voulu faire calciner ce fel dans une cuilliere d’argent , elle s’elt fondue en partie. … SUR LES EAUX MINÉRALES 247 cide vitriolique ou marin, donnoit toujours le fel d’Ep- fom & avec l'acide nitreux un fèl déliquefcent; avec celui du vinaigre, un tartre folié non fufceptible de l'humidité de l'air ; cette matiere calcinée & dégagée par la vitrification de toute fa terre vitrefcible , étant triturée avec du fel ammoniac, il s’en dévéloppa une odeur d’efprit volatil urineux. Comme je voyois conf tamment dans la diflolution des matieres calcinées des parties féléniteufes, j'ai voulu favoir fi elles étoient vi- trefcibles ou purement calcaires : pour en obtenir une certaine quantité, j'ai fait évaporer très-rapidement plu- fieurs livres de notre eau minérale dans une baffine d’ar- gent, il s’en: eft féparé beaucoup de félénite, qui, au lieu. d’adhérer aux parois du vaifleau, sen eft féparé par groflés écailles qui f& font précipitées; ces félénites, felon leur nature, n’étoient pas folubles à l'air, diffi- cilement dans l’eau, & nullement dans les acides; mais étant calcinées & privées de la partie vitriolique qui les neutralifoit; elles font devenues une vraie chaux qui a. fourni des fels neutres avec tous les acides. Comme malgré cette calcination , il fe régénéroit toujours dans fa diflolution par les acides de nouvelles félénites de la figure de petits grains de fable, je les crus de nature vitrifiable, vu leur réfiftance à l'aétion du feu; mais - les ayant expofées à fa plus grande violence, dans un petit creufet, elles fe calcinerent enfin comme les pré- cédentes, dès quele vitriol, auquel elles étoient unies, fut entiérement dégagé de fa bâf; toujours il reftoit une terre fur laquelle l'acide végétal, n1 minéral, n’a- voit pas de prife, & que je crus vitrifiable : elle l’eft en. eflet, foumife au feu de fonte elle s’eft vitrifiée, in- filtrée dans les paroïs du creufet, & les particules de fer ont été réduites en faffran de mars, Je crois avoir rendu un compte fidele des principes dé (Tome I, . OMINEN 258 MÉMOIRE Se | cette eau minérale, par fonanalyfe, faite auf exaétemenit qu'il m'a été poffible : refte à décider quelle eft vrai- ment fa nature, À juger de la quantité de matieré ab- forbante ou de fer, on devroit, ce femble, la qualifier d’alkaline, ou de martiale, fuivant l’ufage reçu de nom- mer ainfi les fontaines ferrugineufes ; mais n’eft-il pas plus dans l’ordre des chofes, en trouvant celle-ci com- pofée de parties falines, huileufes, abforbantes, de la regarder comme favonneufe, eu égard au fel fixe remar- qué (a) fiabondamment dans fon fédiment, ce qui lui donne un objet plus étendu que celui, attribué jufqu’ici, d’être fimplement ferrugineufe, féléniteufe, abforbante & réduite à la clafle des fimples toniques , (b) par-là uniquement propre à donner du reflort aux fibres trop lâches, ou par fa terre abforbante, à fixer les acides furabondantes de nos humeurs, &les neutralifer ; mais {es . grands effets reconnus depuis long-temps, d’être pur= gative, (c) de pouffer par les urines, d’être un vrai ftimulant, propre à diffiper les flatuofités de l’eftomac, de faciliter les fécrétions dans les premieres & fecondes voies; ne paroïifloient qu'accidentels & dus à la difpo- es nt [a] Il réfulte évidemment de toutes ces expériences que l’eau du Sau- choir contient un peu de fel neutre, & beaucoup de fel alkali. F1 M: Dumonceau, Médecin, qui juftifie la réputation qu’il a dans cette Ville , ma dit d’avoir vu fouvent de bons effets de cette eau, comme tonique. [cl M. Planchon, autre bon Médecin ,- qui a envoyé à notre Acadeé- mie plufieurs Mémoires , & qui a travaillé fur ces eaux, les regarde comme très-falutaires: M. Maifonfort, Chirurgien des Armées de S. M. très-Chrétienne, voit depuis long-temps ces eaux mériter que l’on y faffe attention. 11 n’y a qu’une voix dans toute l'Abbaye du Sauchoir, fur la verte purgative de cette eau. Je n’ai rien trouvé de plus efficace contre les pefanteurs d’eftomac, auxquellesi je fuis fujet, que fon ufage après les repas. Divers étrangers ainfi que beaucoup de perfonnes de Tournay , fe trou vent bien de l’ufage de l’eau du Sauchoir, | SUR LES EAUX MINÉRALES.: 259 fition des humeurs, ou pour le dire en un mot, paroïf- foient tenir de l’exagération. HG Le voile tombe depuis que l’on y découvre des prin- cipes qui doivent néceflairement opérer ces eflets falu- taires, tel eft entr’autres celui du principe fulphureux, qui diflous dans la partie huileufe de l’eau minérale, devient un baume de foufire, propre aux maladies de poitrine. . La haute idée que je donne de cette fontaine pour rétablir fa vogue chancelante depuis quelques années, femble s’évanouir aux yeux de ceux qui croient que cette eau en perdant fon goût , eft privée de fa pro- priété , fur quoi je prie que l’on me permette quel- ques reflexions. | Cette eau perd de fa faveur , j'en conviens ; maïs qu’elle perde fa vertu, cela n’eft vrai que felon ceux. qui admettent dans certainés eaux martiales, un ef- prit vitriolique volatil , évaporable ; d’où s'enfuit la déperdition de fes principes; mais , felon d’autres , rien de plus fixe, que l'acide martial , fes parties conf- tituantes inclinant par leur poids à fe précipiter, vü que les matieres ferrugineufes, où l’on fuppofe réfider toute leur vertu minérale , ne ceflent pas plutot d’é- tre foutenues par le même volume d’eau que dans la fontaine , qu’en cherchant à fe dépofer , elles rencon- trent les terres ablorbantes , s'y embarraflent , & font corps avec elles, Cela fe prouve en ce que , fi lon fature ces terres par quelques gouttes d'acide vitrio- lique, elles ne fe mêlent plus aufli intimement avec le fer, & l’eau conferve plufieurs jours fa faveur mar- tiale ; teint là noix de galle ; dans tout ce méchanifme fi naturel, il n’y a aucune diffipation de matiere ; mais. un fimple déplacement de parties, qui , au lieu de nager dans le fluide, s’uniflént à d’autres matieres fans Naï 260 MÉMOIRE combinaifon (a) nouvelle qui puifle changer ; ni al- térer les propriétés de l’eau; tout , à l’arrangement près, y fubfifte dans l’état primordial, le fel, le fouf- fre , l'huile, la félénite, la terre abforbante, le fer, la terre vitrifiable ; ce qui me feroit adjuger à l’eau du Sauchoir la préférence fur celles qui ne doivent leur grande vogue qu’à leurs parties volatiles fpiritueufes : d’où il réfulte, que ces dernieres, fujettes à perdre promp- tement leurs qualités, ne peuvent étre de bon ufage, qu’étant bues à la fource, ou tranfportées avec d’ex- trêmes précautions, pour empêcher leur évaporation. D'autres eaux qui ne font que ferrugineufes, & abfor- bantes, comme l’on a toujours cru la nôtre, ne dif: férent gueres de celles faites artificiellement par le mars, & font fouvent nuifibles par les engorgemens , ou les mouvemens convulfifs qu’elles peuvent occafionner aux fibres déja trop roides, au-lieu que celle-ci favonneufe, fülphureufe , met à l'abri de ces eflets dangereux. L'autre objection contre la vertu de notre eau mi= nérale eft, qu’elle a peu de principes relativement à la grande maffe de liqueur, où ils font, pourroit-on dire, noyés. Que peuvent, dira-t-on , des particules de fel, de fouffre , dans le volume immenfe de fon délayant? Mais cette objeétion croule près de ceux qui con< noiflent l'extrême divifion , la tenuité des particules falines & aqueufes , leur faculté à s’empreindre des principes falins, & à faire corps avec les globules du fluide de l’eau minérale ; autant en doit-on dire des parties fulphureufes difloutes dans la partie huileufe, devenues par-là un foie de fouffre; preuve que ma conjecture n'eft pas hazardée, il n’eft fi petite quan- a mm (2) Qui auroït lieu s’il fe formoit quelque nouveau fel, ® SUR LES EAUX MINÉRALES, 662 tité «de cette eau, où l’on n’apperçoive-à la loupe, ‘üne multitude de parcelles de fr ; -qui y flottent, &laifflent fentir diftinétement dans fon fédiment après l’évapora- tion, le goût flin, fulphureux, -& terreux. . Quoique j'aiet fait évaporer plufieurs centaines 4 divres de, cette ‘eau minérale ; pour fournir aux expé- riences que j'ai rapportées ; voici.le poids des divets fes matieres qu'une quantité déterminée m'a donné; cent livres d’eau m'ont fourni plus de deux, gros de matiere grife entremélée de parties luifantes , :& de terre noire ferrugineufe , leur diflolution m’a donné deux grains aux environs d’un fel impur non crif- tallifable, & qui, étant purifié, produifit quelques parcelles de (a) fel neutre falin, & amer, bien qu’en trop petite quantité pour pouvoir être criflallifé ; le refte du fédiment confiftoit en félénites, en terre cal- caire , vitrifiable , & du fer ; l’eau concentrée à deux onces, a donné quelques grains de fel d’'Epfom mêlé d’un peu de fel marin, à en juger par la criftallifa- tion ; le refte confifte en matiere calcaire , en terre vitrifiable , en félénites, en fer ; car après plufieurs . filtrations , il & dépofe toujours de ces matieres ; les perfonnes de l’art favent que ; quelques précautions que l’on prenne , il fe perd toujours beaucoup de matiere fur les filtres, dans les lotions , & les éva- porations, par les adhérences aux vaiflèaux, enforte que l’on ne peut regarder le poids jufte à retirer d’une eau minérale , que comme un à-peu-près. | Quant à la vertu de ces eaux que je n’ai fait qu'in- diquer ci-deflus, c’eft aux Maïtres dans l’art de guérir à déterminer à propos leur ufage; la befogne du Phy- ficien & réduit à expofer leurs principes. (c) Ne fermentant pas avec les acides, 262 MÉMOIRE SUR LES EAUX MINÉRALES, Rélativement à cette vue, fur-tout depuis le tariffe- ment des eaux minérales de Marimont, fitué à quel- ques lieues de la ville de Bruxelles, je fuis très-difpofé, fi l'Académie le juge à propos, à m'occuper de l’ana- lyfe de celles qui f rencontrent dans les provinces Belgiques, dont le terrein par fa fituation, eft moins abondant en fources minérales, quelles pays montueux; cette tâche, quoique laborieufe & ingrate, n’eft pas indigne d’un Académicien, qui a en vue, de procurer de nouveaux fecours à l'humanité. FLN EXPLICATION à DE LA | CAUSE DES VUIDES, Qe l’on obferve fous les glaçons des chemins raboteux. PAR M. LE DOCTEUR GODART, Membre de l'Académie Impériale & Royale des Sciences & Belles-Lettres de Bruxelles, & de celle de Dijon. Lue à la Séance du 7 Février 2554 Len Qi e (tac a lee EE ÉMUE 41 " ai rat ryyiei Ma cerner CUP pi Luc DU ji 4e pou æ. En) ait allo a D aaæné en eu g1139 ee) PERRET Nn JS MERE ni | 7 er: FX SPA BR APTE eu tes d IL > MRC CHERS NN Anar RTS TS BE D | à HAE HS IN ir VE diaug at Ca EXPLICATION D E L À | ; CAUSE DES VUIDES, Que l’on obferve fous Les glaçons des chemins : raboteux. Pate le gêle après que les pluies ont rompu les chemins; les pas des chevaux, les ornieres des voitures, les petites inégalités du terrein offcent quantité de gla- cons, que l’on eft furpris de trouver appliqués fur autant de vuides, parce que l’eau qui remplifloit la veille tous. ces lieux, étoit trop abondante pour s'être évaporée en. une nuit, & que le fond qui la contenoit les jours an- térieurs, femble devoir la retenir encore mieux , étant condenfé. par le froid. GES b Ce phénomene a piqué ma curiofité; j'ai été tenté d’en connoître la caufe & une expérience bien fimple me la dévoilée. SV : Un foir qu'il alloit gêler , la nuit après avoir plû les jours précédens, je pratiquai dans de la terre ré pandue fur une terrafle de plomb , différens enfonce- mens que je remplis d’eau. Ayant levé le matin les glaçons que la gélée de la, Tome D'OR 266 EXPLICATION nuit avoit produits fur tous les creux, je trouvai que l'eau avoit entiérement difparu; mais à proportion que le foleil échauffa l’atmofphére, je vis cette eau y “revenir & remplir à-peu-près toutes les excavations. | La nuit fuivante nouveaux glaçons fur les mares éga- lement vuides, & quife remplirent en partie, lorfque laftre du jour parut fur l’horifon & fe fit fentir. La caufe de ce retour de l’eau m'apprit celle de fon départ. Je compris que la condenfation de l'air, ren- _fermé dans les pores de la terre, permettoit à l'atmof- phere de poufler par fon poid, l’eau dans les places abandonnées, ce qui Ja faifoit difparoître, & que la raréfaétion de ce même air la. repoufloit à fon tour, ce qui la faifoit reparoître. | Ce jeu Thermo-barométrique des tuyaux de la terre, m'offrit la folution d’une autre bizarrerie qui m’avoit fouvent furpris; favoir que la terre, dans les temps de gêlées durables, eft feche, poudreufe, refte telle quoique préfentée au feu, & que cependant elle de- vient boueufe dès que le foleil commence à échaufler le terrein : Pabforption de l'eau dans les lits inférieurs de la térre par le froid; fà répulfion, vers les fupérieurs par la chaléur, rendent une raïfon évidente de ce phé- nomene. SAT nt: Mais pout. revenir aux vuides de nos glaçons, il eft à remarquer que toute forte de froidure n’eit pas pro- pre à les produire. © ah. si | . Une gêlée brufque & trop forte, faifit à linftant: toute la furface de l’eau, :& interrompt la communi- cation entre les deux airs néceflaires à la formation dé ces vuides. © iut su Une gilée lente & trop foiblé ne pénetre pas ‘af fez la verre, pourien referrer Pair* ou-elle ne le con- $ DE LA CAUSE DES VUIDES. 267 tracte qu'après avoir recouvert le fabot, ou la mare, d’une glace qui arrête leftet de l'Atmofphére. Il faut donc pour la production de notre phéno- mene une gêlée médiocre d’entre quatre, & huit de- grés au thermometre de Mr. de Réaumur , qui ne foit ni trop brufque, ni trop lente ; c'eft-à-dire, qui foic telle qu’elle refroidifle l'air contenu dans les pores ou tuyaux de la terre: après avoir formé, ou en for- mant des rayons de glace fur la furface de l’eau , & avant d’avoir fermé ou affermi les efpaces d’entre deux. Je m'explique . Monfieur de Maïran a découvert que les élémens dé la glace font des rayons écartés les uns des autres par une divergence de foixante degrés , & des cor- des , qui foutendent des arcs de cent vingt degrés ; par conféquent l’eau qui fe gèle par un froid médio- cre, ne fe fige pas tout à la fois; mais elle com- mence par tracér des aiguilles qui laiflènt entre elles des intervalles non gélés, ou dont les glaces font d’au- tant plus minces que l’eau baïfle davantage pendant la formation des aiguilles; ce qui eft également vrai des lunules comprifes entre les cordes, & les arcs qui font _ partie desbords desmaresen queftion : or cela pofé; il eft évident , que fi le froid eft aflez percçant , pour condenfer: V’air renfermé dans les pores de la terre dans le temps qu'il élela fuperficie de l’eau contenue dans lesenfoncemens, ilatrivéra que quelques intervalles des derniers gé= lés, quelques-unes dés lunules ne fe fermeront pas entierement, ou feront bouchées par des glaçons qui n'auront pas aflez de force pour foutenir le poids de Patmofphere , qui les prefle d'autant plus que Pair intérieur, # condenfe davantage dans les tuyaux ou finuofités de la terre. Ces endroits feront donc enfon- Oo i 268 ERP INC, AUTANT ON cés , & entretiendront une libre communication entre Veau de deflous la glace & l’atmofphére ; le poids de laquelle poufléra cette eau dans les interftices de la terre , juiqu'à l'entier rétabliflement de l'équilibre entre Pair intérieur & l'extérieur. po be ire Le vuide fera parfait , fi l’eau employée à ce réta- bliflément eft d’un moindre volume, ou d’un volume égal aux places abandonnées par l'air intérieur; il {era im- parfait , fi la quantiré d’eau eft plus que fuffifante , & alors il fe formera une feconde glace fous la pre- müere , s'il gêle aflez fort pour cela. Cette feconde glace pourra même tapifler le fond des mares , fi le temps de fa formation coïncide avec celui de l’abforp- tion totale de l’eau. : Les trous de communication entre l'air externe & Vinterne font ordinairement très-fenfibles, Ce: font des pieces triangulaires, emportées du difque de la glace , des efpeces de digitations , qui atteignent fa circonférence, des échancrures autour de fes bords ; c’eft louvent la glace elle-même, qui , à l'exception de quel- ques rayons , a été toute déprimée , ou qui , vu l’abbaif- fement trop foudain de leau, ne seft pas formée en lame, ou s'eft brifée en poudre glaciale dans fa chû- te trop précipité. Mais quelquefois il n’eft pas pof- fible de découvrir les ouvertures. Cela arrive lorfque la gêlée étant modérée dans fon commencement; la glace a eu le temps d'élargir fes rayons ou aïguilles, de retenir les efpaces qui les féparent ; avant que l’eau füt afpirée, ou qu’étant devenue plus rude après cet- té afpiration ; elle a bourfoufilé tellement les rayons , & les bords des mares , que toutes les fen= tes ont été bouchées. | Cette obfervation fert à expliquer l'écoulement pé- SUR LA CAUSE DES VUIDÉS. 269 riodique de certaines fontaines , qui coulent le jour & tariflent la nuit : on y trouve la caufe de l’accroiffe- ment des ruifleaux le matin, & de leur décroifflement le foir : elle fournit une raifon très-naturelle des vents qui s'élevent avec la fonte des neiges & les dégels fubits : elle répand auf quelque jour fur la caufe des veaux de Mars & des bourrafques d'Automne. L'air fortant de la terre & y rentrant, eft aflurément l’agent principal de tous ces effets. FIN. je “heu st Pre MEMOIRE Sur les moyens de parvenir à une T héorie complette des MÊTÉORES: PRÉSENTÉ A l'Académie Impériale & Royale des Sciences & Belles-Lettres de Bruxelles ; PAAUR: DOM A. T. MANN, Membre de cette Académie ; le 7 Mars 1774. Tome I. P p j Heat 1F x mnt sp ernsl SUR LES Moyens de parvenir à une Théorie Météorolo- gique complete. 1. ÎL froit fort inutile ; & même horsde propos, de parler de l'utilité des obfervations Météorologiques , à une Académie des Scierices , & à des Savans qui ont pañlé leur vie à obferver la nature. Malgré cette grande utilité , nous fommes fi éloignés de pouvoir ju- ‘ger fainement de la nature exacte & des caufes fpéci- fiques des différens Météores & de leurs divers déve- loppemens , par les fuites d’obfervations qu’on a faites jufqu'à préfentc, & fi peu en état de pouvoir parve- nir par-là à une théorie générale fur tant de Phéno- menes qui fe paflent fous nos yeux dans l’Atmofphere terreftre , je ne dis pas journellement, mais à tout mo- ment, que peut-être dans la plupart des endroits ces cours d’obfervations font encore à faire. 2. En parlant ainfi, mon intention n’eft nullement de déprifer les foins & les peines que tant de Savans eftimables fe font donnés pour tenir des notes exactes de leurs obfervations Météorologiques. Tout ce que. je veux dire, c’eft que, pour parvenir à une théorie bien fondée, & tant foit peu complette en Météoro- dan Eli 266 MÉMOIRE logie, il faut néceffirement avoir une longue ‘fuite d’obfervations faites en même temps, & fur les mé- mes principes , en différens endroits, par des Savans qui travaillent unanimement & uniformément à cette fin , & avec des inftrumens de la même efpece , ou au moins tels, qu’il foit facile à comparer leurs réful- tats enfémble. Il faut , de plus , que tous les regiftres de leurs obfervations foient exa£tement réduits fur un même & unique pied , avant que de les remettre à l’Aca- démie, ou à celui qui fera chargé de rédiger la théo- rie , afin de pouvoir lés comparer d'un coup-d' œil ; fans quoi , on ne feroit guère en état d’en tirer les conféquences néceflaires pour établir une théorie gé- nérale. Car d’avoir à réduire à une bafe commune toutes les obfervations de tant de régiftres faits en dif férens endroits , & chacun fur un différent pied , ce qui eft abfolument néceflaire avant que de pouvoir en comparer les réfultats, ce feroit un Ouvrage dont perfonne ne feroit en état devenir à bout. Ce défaut, qui rend fi inutile les différentes fuites d’obfervations qu'on ne-peut point comparer , & auquel : il eft fifacile de remédier par un confentement unanime des Phyfi- ciens chargés-de faire ces obfervations Météorologiques, me paroït fe préfenter comme la ‘premiere chofe à quoi il faut faire attention .& qu'il faut régler avant que de pañler outre, fiune Académie entreprenoit cette matiere fi délicate & fi. compliquée. 3. Une féconde attention à faire , & :qui eft même bien plus eflentielle., -que la premiere ,.c’eft, de de- terminer d'avance quels font les différens Phénome- nes que chacun doit ôbferver en même temps, &:com- biner, pour être en état d'en tirer des réfultats, qui it peu-h:peu à une théorie générale des caufès 6 effets Méérologmues Rieñ au monde ne paroît SUR LES MOYENS DE PARVENIR, @c. 167 plus inconftant & plus arbitraire, pouraïnfi dire , que le temps, les vents , & prefque tous les Phénomenes femblables. Un Obfervateur attentif y voit développer des effets, & arriver des changemens fubits, qui con- tredifent les meilleurs Baromètres & Thermomitres, fans qu'il en puiflé même foupconner la caufe. Cependant c’eft un premier principe de touteslnos connoiflances, & de celle de la Phyfique en particulier , que rien n'arrive fans caufe analogue & correfpondante, & je fuis intimement perfuadé que cette infinité de modifications variées & de Phénomenes de l’Atmofphere terreftre , qui nous paroïflentfi arbitraires, procede de combinaifons à l'in- défini de fort peu de caufes, peut-être cinq ou fix, très-fimples & uniformes en elles-mêmes & dans leurs effets, mais qu'on a eu peu foin d’obferver , d’ana- lyfer , & de combiner dans les réfultats communs. 4. Ce qu'on devroit appeller une théorie Météorolo- gique complette ; ce feroit de conflater exaélement ces caufes en général, d’être en état de les analyfer, & de calculer combien chaque caufe auroit contribué dans la combinaifon à la production de chaque effet & Phénome- ne en particulier ; de la même forte à-peu-près qu’on ‘peut déterminer par le calcul intégral, dans le problé- me qu'on appelle des trois corps, la quantité de l’at- traction ou gravitation réciproque, qui appartient au Soleil & à chacune des planetes en particulier, dans les mouvemens céleftes. s. Je m'’attends que bien des perfonnes s’écrieront ici que l’idée eft aflez belle, mais impoffible à réali- fer &c à réduire en pratique. Toute ma réponfe fera -qu'il y a eu un temps où l’on a cru que les caufes des “irrégularités obfervées dans les mouvemens céleftes étoientide même indéterminables , & incapables d’une analyfe exaéte. Cependant on en eft venu à bout; & 268 ME MIOUWRNE il eft très-poffible | quoique peu facile, de calculer combien Jupiter & Saturne dérangent les mouvemens l'un de l’autre , en raifon directe de leurs mañles, & inver- fe de leursdiftances,quandils font dans les parties de leurs orbites vis-à-vis l'un de l’autre. L’on peut calculer aufii, combien une planete & une comete fe troublent dans leurs mouvemens , quai elles s’approchent dans l’ac- ceflion ou réceflion de cette comete du Soleil dans une orbite connue. Enfin , par les longues obferva- tions Aftronomiques de Halley, de Bradley & de Mayer on eft venu à bout de la théorie de la Lune, dont les ir- régularités innombrables, caufées par des combinaifons de différentes attra@ions variées à l'indéfini, lavoient long-temps fait reléguer entre les Defideranda impra- ticables. Telle eft cependant la nature compliquée de ces problèmes aftronomiques , que je fuisperfuadé que bien moins d'efforts, moins de veilles, & moins de peines, fufiront pour déterminer & perfettionnerune théorie Mé- téorologique , qu'on n’a dû fubir pour perfeétionner la théorie de la Lune, fi les obfervations étoient faites avec autant d'intelligence , & pourfuivies avec autant d’appli- çation & d'exactirude que celles-là. Je m'en vais propofer mes idées là-deflus en peu de mots à cette Académie avec une entiere déférence à fon jugement; fi elle les approuve , je les dévelop- perai plus au long ciaprès, en y apportant des preu- ves plus en détail : il me fufhira à préfent d'indiquer mes vues en général. 6. Sans entrer dans la difcuflion de l’homogénéité ou hétérogénéité générale des premiers élémens de la matiere, qui n’elt point de mon fujet ici, & qui fe trouvera pleinement difcutée dans mes principes Méta- phyfiques des êtres ; que j'efpere donner bien-tôt au Public , je crois que tous feront d’accord que nous SUR LES MOYENS DE PARVENIR , &c. 269 connoiflons quatre élémens primitifs , aflez homoge- nes , chacun en foi, & très-diftinés entre eux , le Feu, l'Air, l'Eau, & la Terre, qui admettent cepen- dant & qui font une infinité de combinaïfons variées entre eux. Nous ne connoiflons que ces quatre élé- mens généraux, fous lefquels toutes les fubftances ma- térielles font comprifes ; & par conféquent il ne peut entrer dans la formation des Météores quelconques que des fubftances pures ou mélangées qui en proviennent. Sion peut donc parvenir pardifférens moyens à fe- parer chacune de ces fubftances , qui forment les Mé- téores , de ceux avec lefquelles elles yfont combinées, & en même temps conftater la quantité précife des forces & d'attion dont chacune en particulier con- tribue à la formation & au développement des Mé- téores , on aura fait un grand pas vers une théorie com- plette. Une longue fuite d’obfervations après cela fer- vira à la perfectionner , & donnera des regles généra- les pour déterminer aflèz exactement quels Météores feront produits par une combinaifon quelconque de fubftances dans l’Atmofphere ; & réciproquement en voyant le développement d’un Météore , on faura pa- reillement déterminer les quantités refpectives des fabf tances qui le compofent. 7. Je crois que chacun des quatre élémens contri- bue pour fa part, quelquefois plus, quelquefois moins, à la formation & au développement des différens phé- nomenes Météorologiques. Mais je penfe que c'eft cer- tainement le Feu , le Fluide-éleétrique, le Phlogifiique, enfin , qui eft par-tout répandu & combiné en dif. férentes quantités avec toutes les autres fubftances ma. térielles ( & plus étroitement encore avec les métal. liques & minérales , à caufe de leurs attractions ré- ciproques & fpéciales très-connues ) qui y a la plus A Paris, 1771. 270 MÉMOIRÉ grande part, en caufant & en variant tous ces eflets Météorologiques ; d'autant plus qu'il eft très-vraïfem- blable que ce phlogiftique eft le premier & princi- pal reflort dans prefque tous les grands phénomenes de la nature entiere. Un Elettromètre donc, ou inftrument par lequel on peut ifoler le fluide éleétrique, & en conftater la quan. tite actuelle dans l’Atmofphére en tout temps, fur cout dans les temps des développemens des grands phéno- menes Météorolopiques, feroit la premiere chofe dont on doit être pourvu, & par fon moyen faire des ob- fervations exactes, conftantes & fuivies, pour en avoir de longues fuites. On en a conftruit fur différens prin- cipes ; mais tous ceux qu’on a jufqu’à préfent , font aflez défeétueux. On peut voir un détail de tout ce qu'on a imaginé pour cette fin, dans le 16me Chapitre du Traité de l’EÉlectricité de M. Sigaud de la Fond : on y verra combien on eft encore éloigné de la perfec- tion qu’on peut efpérer : mais on travaille ,en Angle. terre & ailleurs , avec ardeur à les perfectionner. 8. Différentes obfervations m'ont fait croire que Ia variation magnétique dépend beaucoup des modifica- tions du fluide électrique , ou même n’en font fouvent qu'une fuite. J’ai vu l'été pañlé , au temps que la par- tie du Nord-Oueft de l’Atmofphére s'étoit fortement chargée de Phlogiftique , par une accumulation ex- traordinaire des vapeurs ignées, comme les éclairs pref- que continuéls dans. cette partie du ciel pendant plu- fieurs jours & nuits de fuite le prouvoient ; j'ai vu, dis-je, dans ce temps une aiguille fortement aimantée & fufpendue à un fimple fil de foie de 10 à 12, pieds de long( ce qui lui donnoit la plus grande facilité de fe tourner au-deflus d’une bouflole ) .tremblotter avec des vibrations fubites , mais d’une vitefle qui fe BE : Oit SUR LES MOYENS DE PARVÉNIR, Ëc, 291 foit facilement diftinguer. Je l’ai vu attiré vers l’'Ouelt par la force électrique , qui régnoit de ce côté-là prin- cipalement, comme fi elle y eût été dirigée par un morceau de fer qu'on auroit approché de l'aiguille, aflez près pour l'affkéter légérement , & trop loin pour Pattirer au conta&. Après que cette partie de l’Atmof- phere fe fut épuifée & déchargée de cette furabondance de phlogiftique , par des éclairs de plufieurs jours de fuite, & par des orages réitérés , qui l’ont remife en équilibre , j'ai obfervé cette aiguille aimantée , & toujours fufpendue de même, revenir à fa tranquillité ordinaire , & fe fixer depuis 19° 50’ jufqu'a 19° 47/de déclinaifon Occidentale , felon les circonftances du temps ; & c'eft à peu-près cette quantité que j'ai tou- jours trouvée à Nieuport pour la déclinaifon magné- tique à l’Oueft , par des obfervations réitérées faites avec des aiguilles aimantées de 10 pouces de longueur, fufpendues à un fil de foie de 12 à 13 pieds fur une ligne Méridienne tirée par des obfervations Aftrono- miques. Cette quantité 19° 5o’ ft quelque chofe de moins de ce que Mrs. Needham & Pigot l'ont obfer- vée à Oflende : la diftance de ces deux Villes &-d'au- tres circonftances peuvent caufer cette différence de quantité; j'ai de fortes raifons de croire qu'il y a de petites variations locales dependant des circonftances du temps , outre la variation féculaire. J'ai fouvent obfervé le même phénomenede variations magnétiques irrégulieres fort {enfiblement pendant ide grandes Auro- res boréales , & {ur-tout en 1767. | Je crois donc ,quece phénomene magnétique , que je voudrois appeller attractions éleétriques 6 vibrations magnétiques irrégulieres & momentanées , doit être pref- qu'uniquement attribué à la quantité de Phlogiftique, “fortement chargé de particules métalliques qu'il a fou- Tome I. Q q 272 VMUÉEMN OT RUE levées avec lui du fein de la terre, & qu'il ent fuf- pendues dans VAtmofphére, qui en ft pourtant char- gée irréouliérement, de quelques côtés plus que d’autres. Je pente qu'une fuite d’obfervations fera voir qu'il eft toujours en raïfon de l’état électrique de l” l'Atmofphere ; comme en étant un eflet immédiat, en/orte que l'in- tenfite électrique de l'Atmofphere augmente toujours er méme raif[on l'intenfiré déchinatoire magnétique. Ces vi- brations magnétiques irrégulieres donneront donc des principes pour déterminer les fubftances phlogiftiques & métalliques, qui entrent dans la formation des Mé- téores ignés, & pour analyfer , à-peu- près, leurs quan- tités refpectives dans la produétion des effets. Monfieur Needham m'a communiqué l’année paf fée, l’idée d’un Magnétomètre , qu'il avoit inventé ; & qui me paroït très-propre à remplir les vues que je propofe ici : j'efpere qu'il ne privera pas le public d’une découverte auffi curieufe. Je m'imagine qu'il ne feroit pas difficile de fufpendre une aiguille aiman- tée par la feule force magnétique. Il ne Audroi, pour cela, que placer verticalement une barre d’acier forte- ment aimantée , & dont le bout d’en bas feroit par- faitement fphérique , ou plutôt paraboloïdal ou hyper- -boloïdal, & très-poli. En y appliquant une aiguille balemnent aimantée , fur laquelle il y auroit un bou- ton ou nœud au milieu, qui feroit de même force que la partie inférieure de É barre verticale, afin de ren- dre le contact le plus leper, & le mouvement de l'aiguille le plus facile qui {oit poffible ; on auroit un magnétomêtre très-propre à mefurer les variations de l'intenfité magnétique. . L'Élément de l'air a fes moe très-va- riées & fujettes à des changemens fubits. IL fe trou- ve toujours plus ou moins chargé de fubftances hé= SUR LES MOYENS DE PARVENIR, &c. 273 térogenes, comme le phlogiftique, les vapeurs & les par- ticules métalliques , minérales & terreftres, les exha- laifons aqueufes, &c. Ses modifications fe montrent fous différentes appa- rences qu'on peut réduire en général aux fuivantes ; . fon élaflicité plus ou moins grande ; 2°. fes degrés de ‘chaleur & de froid ; 3°. fa plus grande ou moindre pefanteur ; & 4°. fes degrés de Jéchereffe ou d'humidité. On a déja inventé divers moyens de conftater la quantité de chacune de ces modifications de l’Atmof- phére , en les ifolant par des inftrumens qu'on nom- me Élaflomètres , Thermomètres, Baromètres, & Hygro- mètres Ou Hygrofcopes. Je dira lun imiot , en pañlant, de chacun de ces inftrumens ; car mon defléin, dans cette vue générale, ne me permet point d'entrer dans” aucun détail là-deflus. Il faudroit un mémoire à-part fur chacun, pour les traiter avec l’étendue que mérite l'importance du füjet. 10. 11 y plufieurs moyens de conftater la quantité a@tuelle de l’élaflcité, de l'air ; mais on pourroit en- core les perfeétionner , enforte de pouvoir la déter- miner facilement en tout temps. On peut voir le dé- tail des moyens déja connus & en ufage pour cette fin, dans Defaguliers | Mufchenbroeck, & autres. Ccpen- dant , il ne fera pas inutile d’obferver ici , avec un Aureur très-eflimable , (a) que la regle de l’élaftici- - té de l'air, donnée par Boyle & Mariotte > qui dit que le ‘reffort de l'air s’ augmente & Je bande à propor- tion des poids dont il eft chargé , n’eft pas toujours exac- te: car en comprimant l’air fortement, en le réduifant à un volume, : par exemple , quatre fois plus petit, le réfultat ne répond plus à cette regle. ee ee à à (a) M. Sigaud de la Fond, daus fes Leçons de Phyf. Experim. Qaqïi C9 MÉMOIRE Cet air commence alors àfaire plus de réfiflance, & il exige un poids plus grand que celui qui eft indiqué par la regle, pour acquérir ce deoré de condenfation. De plus, lorfque l'air ef tellement comprimé , que {es parties fe touchent & ne forment plus qu'une mafle folide , il ne fera plus poflible de le comprimer davantage , puifque les corps font impénétrables. On eft déja parvenu à le réduire à -—.de fon volume ce qui le rend près de deux fois bras denfe que Peau. (a) Il n’eft pas moins évident que l'air ne peut fe ra- réfier à l'infini : d’où il fuit que la regle de raréfa&ion, en raifon inverfe des pieds comprimans , n’eft pas plus exacte que celle des condenfations ; car il faudroit, fuivant cette regle, qu'à un degré quelconque de ra- réfation de Pair , on trouvât un poïds corréfpondant qui empêchät cette raréfaétion d’être plus grande : or, lorfque l'air elt raréfié le plus qu'il foit poffible CHA il ef alors chargé d’aucun poids, & il occupe ce- pendant un efpace très-limité & aflëz déterminable par la réfraétion des rayons de lumiere qui y entrent. 11. Les Thermomètres & Baromëtres, de tant de fortes qui font en ufage, font trop connus pour que jen parlé ici. Ceux qui s'occupent à faire des obfer- vations météorologiques, feront bien cependant de parcourir le grand ouvrage que M. de Luc de Ge- nève vient de publier, pour connoître les précautions néceflaires à prendre pour avoir des Baromètres & Thermomètres juftes, & qui donnent des réfultats toujours exa@s & fur le même pied ;: fans être af fe&és de caufes étrangeres. 12. On connoiït tous les fyftêmes qui ont été ima- a —————— Ca] Voyez Hales, Statique des végétaux ; MM. de Buffon & d’Alem- bert , à Particle er dans l'Encyclopédie. SUR LES MOYENS DE PARVENIR, Gc. -27$ ginés pour expliquer le principe & la caufe des mou- .vemens du mercure dans. le Baromètre, par les Docteurs Lifler & Halley , par le grand, Leiïbnits, par le P. Af clepi & par d’autres. J’avoue qu'aucun de ces fyité- mes ne m'a jamais fatisfait. Sans condamner les au- tres, je vais dire tout uniment ce que j'en penfe. On ne doute point que la fufpenfion du mercure dans le Baromètre ne doive être attribuée à.la pefanteur de l’atmofphere terreftre, comme à fa caufe efficiente. On ne doute pas non plus que la chaleur ne doive raréfier le mercure , & que le froid ne le condenfe dans le Baromètre , auffi bien que dans le Thermomètre. Maisce qui furprendavec raifon, c'eft de voir defcendre le mercureen raifon que l’atmofphere eft plus chargée de vapeurs humides, qui , fans doute, en augmententla pe- fanteur ; & de le voir monter en raïfon que l'air devient pluspur &-léger : il femble que l'effet devroit être jufte- ment le contraire de ce qu’il eft; car on ne peut pas douter que les exhalaifons. & les vapeurs ne foienc des corps péfans, & que leur fufpenfion dans lat mofphere n’en doive augmenter la pefanteur; & l’on ne peut nier que quand l'air eft plus pur & dégagé : de toute humidité, il ne doive auffi être plus léger & pefer moins. Il me paroït qu'on a oublié de faire ici une dif- tintion très-eflentielle & très-néceflaire entre les ef- fets de Pélafticité de l'air & ceux. qui réfultent de fa pefanteur. Je crois même que les diverfes variations de hauteur ; où le mercure fe tient en différens temps dans le Baromètre , doivent bien plutôt être attribuées au plus ou moins d’élafticité de l'air , qu'aux varia- tions de pefanteur de l’atmofphere entiere. IL s'enfuit de cette diftintion , que plus l’atmofphere eft pure & légere , plus le mercure doit être fufpendu dans le > 2356 * MÉMOIRE Baromètre , parce que c’eft alors que l’élafticité de l'air elt la plus grande ; & , au contraire , il yen a ‘moins de fufpendu, quand l’atmofphere pefe le plus; car c’eft alors qu’elle eft la plus chargée de vapeurs humides & d’autres exhalaifons qui, fans doute, font des corps pefans; mais-c’eft auffi alors que l'élafticité de l'air eft la moindre, à caufe de la furabondance ‘d'humidité qui y regne. Aïnfi, pendant que le poids “de lPatmofphere augmente , l’élafticité de Pair dimi- nue; & pendant que le poids entier diminue , l'élafti- cité augmente en mème raifon.. Mais l’eflet que pro- duifent les variations de l’élafticité de l'air , eft beau- coup plus confidérable que celui produit par le plus ou moins de pefanteur de l'atmofphere , toujours op- pofée au premier : enforte que les variations de cet- te pefanteur ne font autrement fenfibles par’ le Baro- mètre , qu'en tant qu'elles reflerrent & diminuent l’ef- fet produit par les variations de l’élafticité de l'air, qui, fans cela, feroit beaucoup plus fenfible & plus confidérable qu'il ne paroît à préfent. Il me Æmble que la diftinétion que je viens de donner entre les effets de l'élafticité & de la pefanteur de l'air, qui font toujours en fens contraire l’un à l’autre, eft très- réelle & abfolument néceflaire pour fatisfaire à tou- tes les difficultés qu’on objeéte avec’ raïfon contre les “fyflêmes & explications ordinaires de ce phénomene. 13. Il ya plufieurs moyens de déterminer la quanti- té de Jéchereffe & d'humidité de l'air , G leurs diverfes variations ; mais je ne crois pas qu'on foit encore par- venu à conftruire un Hygromètre d'une exaétitude fufffante pour réuflir dans cette forte d’obfervations Météorologiques que je propofe dans ce Mémoire. _ J'en ai eflayé de plufieurs efpeces, fans pouvoir me fa- tisfaire jufqu’a préfent : je me flatte cependant de ve- SUR LES MOYENS DE-PARVENIR, Ëc. 277 nit à quelque chofe de plus exaét & de plus certain avec le temps, & à force d’eflais & de comparaifons. On ne parviendra jamais à une théorie complette en Météorologie , fi on n’a préalablement le moyen de conftater en tout temps l'état comparatif de J'at- mofphere par rapport à la fécherefle & à l’'humidiré. Tout le monde fait que la formation des principaux & plus fréquens phénomenes Météorologiques, com- me les nuées, les brouillards, la pluie , la grêle , la neige , depend prefqu’entiérement de la fufpenfion , de la réunion & des différentes modifications des exha- laifons aqueufes ; de même que prefque tous les Mé- téores qui ne confiftent que dans la pure vifion, tels que larc-en-ciel , les parhélies , les parafélènes , &c. Tous les Phyficiens favent par expérience combien la féche- reffe & l’humidité affectent l’élafticité de l'air, & com- bien elles facilitent ou dérangent les développemens & les eflets du phlogiftique en particulier. Deforte qu'il eft abfolument néceflaire d'être en état de pouvoir déterminer en tout cas la quantité de fécherefle & d’hu- midité qui regnent aétuellement dans l’atmofphere, de même qu'on peut déterminer fes différens degrés d’é- lafticité & de pefanteur combinées par le moyen du Baromètre , & fes différens degrés de chaleur ou de froid par le Thermomètre. 14 Voilà donc toutes les fubftances qui entrent dans la formation des Météores, & toutes les modi- fications particulieres de ces fubftances qui paroiflent influer dans leurs développemens & dans leurs effets ; ainfi que tous les inftrumens qui me femblent nécef faires pour les ifoler & en déterminer les quantités ref. : pedtives. Je m’imagine que ces inftrumens perfection- nés fuffiroient pour conftater peu-à-peu une théorie géné- rale Méréorologique , par le moyen des fuites d’obfer- 278 MÉMOIRE vations faites en même-remps & fur les mêmes prin- cipes, par différentes perfonnes & en divers lieux. Je les range “ii Pordre fuivant. . Un Eleétromètre ; 2e Un Magnétométre ; 39. Un Elaftometre ; 4°. Des Thermomètres ; 5°. Des Paromètres ; 6°. Des Hygrométres. es Les Aneémomètres , les Hydromètres , &c. me fm- blent moins néceffaires à notre but, ne fervant qu'à conftater la quantité de quelques effets Météorologi- ques particuliers , qui peuvent être produits par une infinité de combinaïifons variées : au lieu que les fix inftrumens que je propofe , fervent à déterminer la quantité des caufes mêmes, qui influent plus ou moins dans la production de tous les Météores. Ceperidant il n'y a aucun de ces inftrumens qu'on puifle dire entiérement perfectionné , fi on en excepte le Ther- “momètre & le Baromètre ; & à l'égard de ceux-ci, Monfieur de Luc a bien fait voir combien de précautions il y a à prendre encore, pour “réuffir à en faire un ufapé qui foit parfait & sûr à rous égards. Mais Vétat d'imperfe&tion , où fe trouvent enco- re les autres, eft-il une raïfon pour les abandonner ? Coûteraitil plus de perfe@ionner les Éle&romètres , les Magnétomètres , lés Élaftomètres & les Hyÿgro- mètres, qui font encoref defé&tueux , qu'il n’en acoû- té à mener au pointde perfection où font aujourd’hui Jes Baromètres &cles Thermomètres , & encore plus les Microfcopes , les Télefcopes &. tant d’autres inftru- mens , par le moyen defquels la Phyfique & PAftro- DO ont fait des’ progrès, fi étonnans depuis un fie- cle ? Que feroïent devenues ces fciences’, fi dès le mo- ment x SUR LES MOYENS DE PARVENIR, Ge. 279. ment qu’on eût imaginé ces différens inftrumens , on eût négligé de les perfectionner ? Après ce qui a été dit, il me-femble que tous les phénomenes Méréorologiques doivent avoir pour cau- {e de leur production, de leurs divers développemens & variations , les différentes combinaifons &_ modifi- cations du Phlogiftique, de l'Air, de l'Eau, & des particules terreftres , métalliques & minérales , exha- lées de la terre & fufpendues dans l’Atmofphere. Nous ne pouvons «pas même imaginer d’autres caufes de leur formation & de leurs effets. Nous n'avons pas le moindre indice , par toutes les obfervations & expé- riences du monde entier , d'aucune autre fubftance qui puifle y entrer pour quelque chofe. Dans la natu- re , ces différentes caufes font toujours combinées & dans un état de mêlange. Mais les fix inftrumens fuf dits n'étant affectés fenfiblement que par les fubftances & modifications qui leur font analogues, ils font fuf- fifans, étant perfeëétionnés, pour ifoler & analyfer ces différentes caufes, & pour déterminer combien chacu- ne contribue aux eflets communs. Il doit, par confé- quent, paroître évident, qu'avec une fuite d’obfervations moins longues & moins pénibles quecelles qui ont perfectionné la théorie de la Lune, dont j'ai parlé plus: haut, on parviendra à -dérerminer quelle combinaifon de caufes produira tel phénomene Météorologique quelconque. 16. Il elt vrai qu'on ne connoïtra ces caufes , & les effets qui en:doivent fuivre , que par l’aétion de ces caufes fur nos inftrumens; ce qui peut-être ne précé- dera pas de beaucoup l’explofion & le développement actuel de ces effets dans l'Atmofphere même. On pour- roit peut-être inférer de-là que tous ces {oins feront de peu d’utilité à la vie humaine ; mais, outre l’ouver- ture à de nouvelles connoiflances phyfiques que cette Tome I, Rr 280 . MÉMOIRE théorie perfectionnée donnera aflurément , on pourroit pareillement , & pour la même raïfon , méprifer &. rejetter l’ufage des Baromètres & des Thermomètres, qui ne nous prédifent point, non plus, ce qui doit ar- river long-temps avant qu'il arrive ; ils ne montrent, en effet, que l’état aétuel de l’atmofphere qui agit fur ces inftrumens en conféquence de fa chaleur, fa pe- fanteur & élafticité , un peu plus 6 plutôt qu'il n’eft {enfible à nos fens fans l’ufage de ces inftrumens. Maïs comme les vues que je préfente font autant plus éten- dues, que ces différens inftrumens fervent à nous faire : connoître, par une exacte analyfe , la. quantité de cha- que fubftance diftinéte qui entre dans la compofition des Météores, & toutes les modifications de l’atmof phere qui exiftent pour lors, tandis que les Thermo- mètres & Baromètres ne nous font connoître que quel- ques modifications de l’air feul, on fera d'autant plus en état de prévoir les explofions & les grands dé- veloppemens des Météores, aufli-bien que leurs dif- férens degrés , par les afleétions des fufdits inftrumens, combinées enfemble. 17. On peut déduire de ces principes les regles gé- nérales ou élémens de calcul fuivans : 19. Les mêmes combinaïfons d’élémens dans ’at- smofphere , & en même degré , combinées avec le cli- mat & la faifon , donneront toujours les mêmes effets & phénomenes Météorologiques. II9. Pareille variation d’une ou de plufieurs de ces caufes en pareïlles circonftances, donnera toujours des effets variés en raïifon de la variation des caufes. III°. Les mêmes combinaifons de caufes, fous difié- rentes circonftances, donneront toujours des effets va- riés en raifon des combinaïfons. HR | 1V°. Le manque entier ou l’abfence d’un ou de plu- SUR LES MOYENS DE PARVÉNIR, 6e. 28r fieurs de ces élémens dans la combinaifon des caufes diminuera toujours, dans leflet, tout ce qu'une lon- gue fuite d’obfervations faites fur ces principes aura Fe Voir réfulrer de ces caufes particulieres qui y man- quent. 9. Des caufes, dredeniene oppofées en tout ou en partie, produiront des effets directement contrai- res en tout ou en partie, en raifon des caufes. Er ainfi de plufieurs autres élémens de calcul qu'il feroit faci- le de déduire des principes pofés dans ce Mémoire, & dont une longue fuite d'obfervations faites fur ces mèmes principes fournira les Data néceflaires & fpé- _cifiques. Je ne crois pas qu'aucune fuite FAT Mé- téorologiques , faite jufqu’à préfent, ait compris tou- tes les caufes qui certainement doivent influer dans la formation & développement des Météores'; & c’eft peut-être la grande raïfon pourquoi ces phénomenes font regardés ufquà ce jour comme arbitraires &c in- capables d’être réduits à des aies certains & à des loix générales. Mais c’eft aflez pour le préfent der propofé fim- plement ces idées qui me femblent nouvelles , jufqu’à ce que les Phyficiens en aïent porté leur jugement, auxquels je les foumets avec beaucoup de déférence. 18. Avant que de finir ce Mémoire , je donnerai une lifte des différentes obfervations Météorologiques , dont il fera convenable de tenir un regiftre exa&, & ‘dont la plupart feront faciles à faire par ceux qui fouhar- tent contribuer au progrès de la Météorologie. Je donnerai aufli une formule d’un regiftre d’obfer- vations ou de Tables Météorologiques complettes , telles que je crois qu’elles doivent être exécutées pour rem- plir les vues que je PiORoe , & telles que je tâche- ri] 282 MÉMOIRE rai de les faire peu-à-peu dans celles que j'envoie ; de fix mois en fix mois à l'Académie, fi elle juge que mes vues & travaux dans ce genre puiflent tour- ner à quelque utilité en avançant nos connoïflances phyfiques. 19. Lifte des différentes obfervations Méworologi- ques qui doivent compoier des tables complettes en ce genre. 1°. Les différens degrés électriques de l'air, & d’au- tres fubftances particulieres qui peuvent fervir à “conftater en tout temps la quantité de phlogifique qui exiite dans latmofphere, & fes variations. II°. La quantité d'attractions magnétiques , pour en déduire le degré de fon intenfité d’un côté du ciel plus que d’un autre ; &qui fervira auffi à déterminer la quantité d'éleétricité dans une partie quelconque de l’atmofphere , & les fubftances métalliques qui font combinées avec elle. : IJI9. Les desrés de l’élaflicité de Pair Mec des varia= tions de fa pefanteur. IV°. Les deorés de chaleur .& de froid , par les hau- teurs des Thermomètres de vif-argent & d’efprits. V9. Les variations de pefanteur de l’atmofphere {é- parées, autant qu'il fe peut, des effets de fon élafficité. VI°. Lesdegrés de fécherefle ou d'humidité dans l’at- .mofphere, pris par des hygromètres de comparaifon. VII°. Les vents qui regnent, leurs changemens , leur force & vitefle. VIII. L'état du temps , comme beau , férein , cou- vert, &c. marqué à tous fes changemens confidérables. IX°. Les pluyes, leur durée, leur force, &cc. X9. La neige , fa durée, &c. XI°. La quaniité ou lépaiffèur de De & dei nei- ge qui tombe, .__ SUR LÉS MOYENS DE PARVENIR, &e 283 . XTII°. La quantité d’évaporation de pluie & de neige. XIII°. La gelée, fes commencemens, {a force , fa du- rée : fon épaifleur ; les dégels. XIV®. Lesbrouillards, leur durée, leur odeur, &c. XV°. Les orages. grêles, Tonnerres, éclairs ; dif- tances des explofions fulminantes, & autres circonf- tances notables. XVI®. Les auroresboréales , les lumieres zodiacales, leur intenfité, durée , & autres phénomenes. XVII. Autres Météores ignés, comme globes de feu , exhalaifons enflammées , &e. XVIII. Météores lucides ou apparens , comme arc- en-ciels, parhélies, parafélenes, &c. XIX°. Etat de la végétation , ou le temps précis du mouvement de la féve, foit qu'elle monte, foit qu’el- le defcende ; les époques des feuilles , féurs, fruits ; l'abondance ou ftérilité des faifons. XX°. Etar de la vie animale, comme Îles temps de l'apparition ou difparition des oïfeaux de paflage ; l’a- bondance des vermines & d’infeétes ; ou leur rareté, avec leurs efpeces, &c. ; XXI°. Maladies qui reznent parmi les hommes & les animaux ; leur nature , leurs caufes apparentes, leurs fuites , &c. XXII. Lenombre de naïflances & de morts, com- paré avec le nombre d’habitans de chaque lieu. Et autres pareilles obfervations. . Form de Table £ CIE: 2 O A SIP 22107 2p S9182Q s2Q ‘SiU9A S2p AJaUA 2p S9192Q État général du Temps , par|k | rapport au beau , couvert ,|k pluie, neige, &c. TUaIuI 2P n0 ‘simof % sIo uv ‘INNVIN 2p 21]AUOUISU],, NP S9152 ‘1nof np sainoH auusIuex 9p 21]2HOmMIUJ, NP S219a Sau$i| Ÿ Sa2nod ‘arjamoieg np sinsine *Ipl-Saide NO JuEAE ‘ 2H9MOIQUSEJAI NP S2182q “HBX 2P 210IJESJ 2p n “anemoyeja 2P S?189 ‘219m018ÂH.] 2P S2182Q ‘2HQuOMeIHI 2P SA 4 °p 2nbr19219 91 *SJU9A “ODUEIMH 2P EC > [=] = (7 (ri) e © [= = w fet [er (=) © m s. ‘SUSU9SUEHI So] Sno) e Sanbieu sJu9 *2Joudjouv ‘sonbnouseu SUONETIEA S9p © S1JUaUI,] 2p NO N| Za troifiene Page du Regiftre de chaque mois férvira pour le détail de Ta quatrieme page du Regifire de cha- toutes les autres Obférvations 6 Phe- que Mois férvira pour les combinaïfons normenes Météorolopiques , fpécifiés dans de modifications de P Atmofphere , 6 pour Ale dernier paragraphe (19) depuis N°. les réfultats généraux qu’on en tire. 22. inclufivement , jufqu’à La fin. TRE ETS à PERRIER Es PES MÉMOIRE SUR HAE . L'EAU DE MER, Déduit d'une fuite d'expériences faires | fur ce fujer. | PAR JD OM .Æ4 + MAN N'; Lù à la Séance du 6 Mars 1776, Fr 3 ee 2 NO 4, Lee Sinon DC * x MÉMOIRE. SUR LA Congélation de l’Eau de Mer , déduir d’une fuite d'expériences faites fur ce fujer. 1 Les Voyageurs & les Phyficiens ont fuppofé géné- ralement , & c’eft encore l’opinion commune que l'eau de mer ne fe gele point. (a) On foutient que les vaftes amas de glaces qui rempliflent les mers au- dedans des cercles polaires & dans les climats qui en approchent , ne proviennent que de la neige fondue, ou des eaux douces des fleuves qui fe jettent dans la mer-glaciale.(b) On a même avancé que ces immen- fes plaines & montagnes de glace qu’on voit dans les mers vers les poles | ont été entiérement for- mées dans les grands fleuves qui s’y jettent, & qui les charient fans cefle, ou au moins à tous les dégels; & on veut que ces vaftes glaçons s'amoncelent & sat- tachent enfemble , en forte de former ces immenfes & rudes plaines qui reflemblent à des collines & à des ro- ee Re ms | (a) Voyez les différens voyages au Nord, dans les colleétions géné- rales de voyages. (&) Voyez les Tranfaétions Philofophiques de Londres N°. 118 & l’A- brégé de Lowthorp Tom. IL pag. 613. s * S Tome I, 288 MÉMOIRE chers, ou plutôt à de valtes ruines éparfes à perte a VUE. » Les glaces, dit M. de But. (a) ” fe for- Fa auprès des terres, @ jamais en pleine mer; car, quand même on voudroit fuppoler , contre tou= te apparence , qu'il pourroit faire aflez froid au pole pour que la fuperficie de la mer füt glacée , on ne concevroit pas mieux Comment ces énormes glaces qui flottent , pourroient fe former , fi elles ne trouvoient pas un point d'appui contre les ter- res , d’où enfuite elles fe détachent par la chaleur: du foled. Les fleuves, tels que lOby, le Jenefea, & les autres grandes rivieres qui tombent dans les mers du Nord , entraînent les glaces qui bouchent, pendant la plus grande partie de l’année , le détroit de Waigats, & rendent inabordable la mer de Tar- tarie par cette route, tandis qu ‘au-delà de la nou- velle Zemble.& plus près des poles, où il y a peu de fleuves & de terres, les glaces font moins com- munes, & la mer plus navigable. Si donc on vou- lut tenter le voyage de la Chine par les mers du Nord, il faudroit diriger fa route droit au pole , » & chercher les plus hautes mers , où certainement il » n'y à que peu ou point de glaces : ; car on fait que » l’eau falée peut , fans fe geler, devenir beaucoup » plus froide que l’eau douce glacée : & par confé- » quent, dans la fuppofition même qu’au pole le froid » » » É SO VOS VV SJ %V € V D 5 LV VU VU vV y y fût exceflif , ce froid pourroit rendre l’eau de la mer plus froide que la glace, fans que pour ce- la la furface de la mer fe gelât; d'autant plus qu'à a ———— [al Cité daus le Supplément au voyage de M. de Bougaînville, pages 321, 322, 323. Voyez.auñi fon. Hfftoire naturelle tom. Il. pages 108, 109 ; 110, 1x , 12 de l'édition de l'imprimerie Royale , iu-12, SUR LA CONGÉLATION DE L'EAU DE MER 289 quatre-vingts ou quatre-vingt-deux degrés la furfa- ce de la mer, quoique melée de beaucoup de nei- ge & d’eau douce , n'eft glacée qu’auprès des côtes. Si le paflage du Nord a ouvent été tenté inurile- ment , c’eft parce qu'on a toujours craint de sé loigner des terres , & de s'approcher du pole.” Voilà ce que pente, fur ce füjet, le célebre M. de Buffon, dont la grande autorité , chez les: Phyfciens modernes ASIE caufe que je l'ai cité tout au long ; quoique j'ai lieu de croire, pour des raifons qu'on verra ci-après, que la plupart des fuppofñitions qu'il y fait, & des conféquences qu’il en tire , font faufles & mal fondées. L’Auteur de la Lettre fur le paflage au Nord, im- primée dans le fupplément au Voyage de M. de Bou- gainville, par M. de Treville , qui cite ce pañlage de, Y # © Y V 5% À Paris 1772. in-8° jiee: 3215 23 322» M. de Buffon & fe fonde principalement fur les fup- 323. pofitions qui y font contenues, ajoute ” qu'il eft bien » vraifemblable que la quantité prodigieufe de gla- » ces, formées des eaux douces de rivieres , qu’on trou- ve vers. les rivages du continent & des illes ; & qui eft chaflée fouvent au Nord & au Nord-Eft , peut quelquefois couvrir un peu la mer : mais en com- parant cette quantité de glace avec Îa grande éten- due de la mer, quieft de treize degrés en latitu- de dans fa moindre largeur, & de plus de 150 -en longitude , fans y comprendre celle au Nord de l'A- mérique, ces glaces peuvent être tellement difper- fées, que les vaifléaux n’en doivent guère être em- » barraflés”” Voilà un À uteur qui parle d'une immen- fe mer inconnue , & dont l'exiftsnce elt feulement fuppoée , comme sil lavoit traverfée en tout fens & qu'il avoit navigué par toutes fes côtes. En effet , ces ConjEAueS font fi généralement US & crues, s C1 Y LU OU S$ € v EE 3 Pag.323, 24» 290 MÉMOIRE qu'il paroït que les Auteurs les plus exacts n’ont point douté qu’elles ne foient fondées & vraies. M. de Maï- ran (a) aflure que ” ce n’eft abfolument qu’auprès des » côtes, & jufqu'à une vinstaine de lieues par de-là, » que la mer f gele. ” Le Pere Cotte (b) dit » de même , que toutes les obfervations prouvent » que la mer n’eft glacée que fur les côtes. ?” M. VAbbé Richard (c) prétend ” que les mers glacia- » les ne gelent que parce que fur leurs côtes, & plus » de 20 lieues au-delà , la falure de la mer eft tem- » pérée par une grande quantité d’eau douce. ... On » peut d'autant moins douter , continue-t-il, que ce » ne foit l’eau des fleuves & des rivieres qui contri- » bue à la congélation de la mer, que fous la mé- » me latitude, à 25 ou 30 lieues de terre, on trou- » ve une mer ouverte, libre , & fans glaces; pen- » dant que les mers qui avoifinent les terres , quoi- » que beaucoup moins avancées vers le pole, font im- » pénétrables à caufe de leurs glaces continuelles. ” M. l'Abbé Pluche (concorde de la Géographie 1756; page 170 ) dit que ” tous les Naturaliftes concou- » rent à remarquer que la haute mer ne fe gele nulle » part, non pas mème fous le pole. ” Voilà aflez d’autorités pour faire voir que je ne m’oc- cupe point dans ce Mémoire à combattre un phanto- me de mon imagination , ou une opinion que per- fonne ne foutient plus. Rien de plus facile que d’au- gmenter fans fin les citations en même fens. 3. En conféquence de ces conjeétures, on foutient que les vraies eaux falées de la mer ne fe gelent ja- (a) Differtation fur la glace p. 272. de l'édition de l'imprimerie Roya- le de-1729. Cb] Traité de Météorologie in-4°. pag. 20. [c) Hiftoire Naturelle de l'Air & des Météores Tom. II. pag. 71 9 72e SUR LA CONGÉLATION DE L'EAU DE MER. 26x mais ; qu'il ny a que le mélange des eaux douces des rivieres , de pluie & de neige fondue, qui fe ge- le en mer; que les glaces fixes & unies ne s'étendent point au-delà de 15 ou 20 lieues tout au plus des côtes, & que plus loin , l'intérieur des mers vers les poles, @ Jous le pole même, (a) eft toujours ouvert, & les eaux libres , fi ce n’eft qu'il faille excepter les glaçons détachés , & flottant au gré des vents & des diverfes directions des marées & courans, qui les em- portent plus ou moins de côté & d’autre. C’eft , en fe fondant fur ces fuppofitions, que l’o veut qu'a l'intérieur des grandes mers , c’elt-à-dire, dans les parties éloignées de toutes terres , quoique proche des poles , il ne fe rencontre d’autres empé- chemens à une navigation conftante & toujours prati- cable en Eté que ces glacons épars & flottans On avoue qu'en Hiver le peu de lumiere & le froid ex- ceffif de ces climats y feroient un furcroit de difficultés. 4 On fait combien de tentatives inutiles ont été faites fur ces principes, pour trouver un paflage par le Nord dans la vaïte mer pacifique, au Japon , à la Chine , & aux Indes-Orientales. Willoughby la eflayé en 1553, Bourroughs en 1556, Pett & Jack- man en 1580 , Barents & Heemskercke en 1596 ,Hud- fon en 1610 ; (b) après cela on a été dégoûté de ces dangereufes entreprifes pendant plus d’un demi fie- cle. Les Hollandois l’ont tenté de nouveau vers 1670, & prétendent y avoir réufl. Wood l’eflaya inutile- ment en 1676 avec deux vaïfleaux, dont le fien fe brifa (a) Lowthorps abbrigement. of Phil. tranf. vol. III. p. 610. (&) On peut voir les relations de tous ces Voyages dans les collec- tions- générales de Hackluit , de Purchas, de Harris, de Prevôt ; &c. &on en à donné une connoiflance abrégée au commencement du Voya- ge de M. Phipps , imprimé en 1774, in-40. 292 MÉMOIRE contre les rochers de la nouvelle Zemble. Après cet- te malheureufe entreprife d’un Marin très-inftruit, & à caufe des raifons qu'il alléguoit contre ce paflige 1 parofe que l'envie de le tenter par des voya.es ex- près s’eft: beaucoup rallentie jufqu'a ce que les Fran- çois, il n'y-a que peu d'années, fe propofaflènt de nouveau cette entreprife. ( Lettre fur le paflase au Nord, page 287.) Le Gouvernement Britannique.a Ven ment envoyé deux vaifleaux commandés par les Ca- pitaines Phipps , & Lutwige pour s'approcher autant qu'on pourroit du pole arélique. Malgré leur infruc- tueux effai , n’ayant pû pénétrer au-delà de 81° , 39 de latitude boréale , il paroïît qu'on r’eft pas revenu de l’idée de fa poifibilité, puifque le Parlement d'An- gleterre , par acte paflé le 22 Déc. 1775 , vient d'of- frir une récompenfe de 20, coo livres ferlins pour celui qui réuffira à trouver & à con'tater ce pañlase, (a) fi lonstemps recherché & avec fi peu de fuccès jufqu’àa préfenr. $- Ainf on perfifte à croire la poffibilité du pañh- ge par la mer glaciale | & à efpérer une meilleure réuffite des tentatives à faire , à caufe de nombre de raifons & motifs de crédibilité qu’on peut voir raflem- blés dans les tranfa@ions Philofophiques de Londres , (b) dans la collection générale des voyages, (c) dans le Journal des Savans, (d) & aïlleurs. Les principales raifons de crédibilité de l’exiftence de ce pañlage font les fuivantes. Ie. Que l’eau falée ne fe gele point ou fort peu, (a) Cet aëte ne parle cependant que d’un pañläge par le Nord-Oueft. F (©) Des 118 paze 417 ; ou dans l'Abrécé de Lowthorp , vol. Ill. pp, 10 , GI @) Dé Harris, vol, I, in-F ©. I, 1V, chap. 36 & . 610 , 616, (d) Oétobre 1773. Br, 60 > GeN BE o SUR LACONGÉLATION DE L'EAU DE MER. 293 & que la glace fixe ne s'étend jamais au-delà de 20 ou 30 lieues des côtes. II°, Qu'en Eté la longue durée du foleil an-deffus de lhorizon au-dedans des cercles polaires | d’aurant plus longue qu’on s'approche plus du pole, doit au- gmenter en même raion la quartité entiere de cha- leur , rendre ces climats fort doux , même chauds, & ces mers très dégagées de glaces , & ouvertes pour la navigation au moins pendant les trois mois d'Eté. IIT°. Comme les vents ne manquent pas de diffi- per les brouillards & les brumes , qui infeétent les chi mats polaires, on pourroit efpérer au moins que sl f rencontroit des brumes , il n'y auroït pas en mé- me temps des tempêtes ; s’il y avoit des tempêtes, il n'y auroit point de brumes. IV°. Qu'il ny a aucune difficulté à pañler par les poles mêmes , puifque les polesmagnétiques en font fort éloignés , & que leur direction eft aflez exaétement dé- terminée pour cette fin: ainfi la déclinaïifon & linclinai- fon de l'aiguille aimantée donneroïent des moyens faciles en tout temps de connoîïtre & diriger fa route. De plus, un regiftre exact du temps , connu par des montres Aftronomiques, auquel le foleil devroit pañler par les différens méridiens , ferviroit également fous les poles à la même fin, & cela avec une très grande facilité, V®. Les mémoires Rufles , communiqués en Hol- lande, & en Angleterre , foutiennent conftamment qu'au Nord de la Siberie, & au Nord, & Nord- EI de la nouvelle Zemble, il y a une grande mer ouverte & libre de glaces. VI®. On foutient que des vaïfleaux Hollandoïs ont été plufieurs fois fous le pole-boréal, & même à quel- ques degrés au-delà du pole, fans y trouver de gla- ces; mais une mer ouverte, & un temps très-modéré 294 MÉMOIRÉ RE & auffi chaud qu'à Amfterdam en Eté. C’eft ce que portent différentes relations communiquées par M. Moxon , (a) & par le Capitaine Goulden. (b) - VII® On a publié dès 1675, (c) que les Hollan- dois en 1670 avoient pénétré jufqu'à 300 lieues dans les mers à l'EfT de la nouvelle Zemble, ce qui eft au moins à la hauteur du Lena : & en effet on voit dans les cartes Hollandoifes de ce temps-là un navire défi- gné vers cet endroit avec ces mots, Hucufque Hollan- di pervenerunt. On dit qu'ils y trouverent une gran- de mer ouverte & libre de tout empêchement à la navigation ; mais que leurs découvertes ultérieures fu- rent arrêtées par les tracafleries de la compagnie Hol- Jandoif& des Indes-Orientales, qui prévoyoit des defavan- tages pour elle de ce pañlage par le Nord une fois con- nu & pratiqué. VIII°. L'on trouve fur les côtes de Spitsbergen beaucoup de bois flottant dans la mer, percé & ron- gé par les vers. (d) Or ces vers ne fe trouvent que dans les climats chauds , & de-là on conjecture que les courans & les tempêtes doivent lavoir amené de la mer du Sud par le détroit de Kamtfchatka. IX. Des Hollandois naufragés & long temps pri- fonniers en Corée au Nord-Eft de la Chine , préten- dent avoir vu fur les côtes de cette prefqu'ifle , des baleines échouées, percées & portant enfoncés dans leurs chairs des harpons Anglois, Hollandois, & de la Gafcogne , très-reconnoiflables par les marques refpec- (a) Voyez tranf. Phil. NO. 218, & la relation même de M. Moxon daus la collettion de voyages de Harris. : CB) Voyage de Wood dans la colle&tïon de Harris. Cc) Tranf. Phil. NO. 118, & dans le voyage de Wood. Voyez auf 1e fupplément au voyage de Bougainville , p. 298 & fuivant. (d) Voyage de Wood & de Phipps. Le bois que M. Phipps y a vu n'étoit pas rougé de vers. o SUR LA CONGÉLATION DE L'ÉAU DE MER. 295 refpectives, dont ils étoient chargés. (a) Or:, fi ce rapport eft vrai, il eft sûr qu'il y a une mer ou- verte depuis le Spitsberg jufque dans la mer pacifi- que , par une communication entre la Sibérie & l’A- mérique-Seprentrionale , puifque les baleines ne tra- verfent jamais les mers de la Zone Torride. X°. Enfin, on a plufeurs relations des navigations des Rufles depuis l'embouchure du Lena juiqu’à cel- le du Kowima ou Kolima, toutes deux dans la mer glaciale ; & depuis le Kowima ou Kolima jufqu’à l’A- nadir dans la mer de Kamtfchatka, en doublant le Cap Schalaginskoy. (b) Or, depuis l’Anadir jufqu’à Kamtfchatka, & de-la au Japon & à la Chine , la mer eft certainement ouverte & déja connue. Ainfi, fi on peut fe fonder fur ces relations, la découverte de ce paflage eft déja faite; puifque les Hollandois ont na- vigué dans la mer glaciale jufqu’à la hauteur du Lena ou au-delà ; & que les Rufles ont fouvent fréquenté les mers & les côtes depuis le Lena jufqu’au Kowima, & depuis le Kowima , en doublant le Cap Schalaginskoy, jufqu’à l'embouchure de l’Anadir, & du Kamtfcharka. Tout récemment des prifonniers Polonois exilés en Sibérie, fe font échappés du port de Kamtfchatka au mois de Mai 1771, dans la frégate le St. Pierre au nombre de 62 perfonnes, fous la conduite du Colonel Benyorski, Hongrois de nation. La ville de Kamit- fchatka , dans la prefqu'’ifle du même nom, d’où ils font partis, eft à 63.9 de latitude feptentrionale, & à 175,° de longitude ,Eft. Ils tournerent vers le Nord, & furent arrêtés par les glaces vers le 67.° de lati- ————— ———— [el] Tranfa@tionus Philofophiques N 0. 118. voyages de Wood, &c. &c. [6] On trouve la fubftance de toutes ces relations dans la lettre fou- veut citée, /ur le pafflage au Nord, & dans la Géographie de M. Engel. Tome I. Te 296 : + NOMEUN ONINRPE rude : les vents variables les porterent jufqu'au 238.9 de longitude. De-là ils changerent de courfe, & tou- cherent aux ifles Marianes. Enfuite une tempête les jetta fur les côtes du Japon, é ils prirent des provi- fions à Nangafaki; d’où ils remirent à la voile, & ayant paflé les ifles d’Ulima, de Formofa & de Baf ché, ils arriverent heureufement à Macao le 23 du mois de Septembre de la même année 177r. Les cir- conftances de ce hardi voyage ont été écrites, au mois de Novembre fuivant , de Canton à Eondres & à Faris & les relations Ruflés n’en difconviennent pas, quoiqu'elles tâchent de donner une autre couleur à la qualité des perfonnes qui l’ont exécuté, ce qui ne fait rien à notre cas. On peut voir ces pieces en dif férens Journaux du temps , & nommémernt en celui de Euxembourg (a). 6. Contre toutes ces raifons & motifs de crédibili- té qu'on allégue, on a des relations de voyages bien plus certaines , & qui montrent un état des chofes très- oppofe. La premiere eft du Capitaine Wood, Marin très-habile , & pleinement inftruit de tout ce qu'on allésuoit avant lui, pour prouver la poflibilité de ce pañlage , comme on peut le voir par fa propre rela- tion qui fe trouve dans la colleétion des Voyages [b]. Ce Capitaine étant envoyé en 1676 à la découverte de ce paflage , examina toute la mer entre Spitsberg & la nouvelle Zemble, fans pouvoir avancer au Nord au-delà de 76.9 de latitude. TI y trouva une glace im- menfe continue & fixe comme un mur, qui tenoit à ces deux terres fi éloignées ,.& fermoit fans interrup- ion toute l’étendue de cette vafte mer : glace qui, Ca) Clef de Cabinet pour Juillet & Sept. 1772. pages 74-77: & 106-108, &c. [6] Harris , vol. I. liv. IV. chap. 36-37, CFE ; SUR LA CONGÉLATION DE L'EAU DE MER. 297 felon lui. auroit demandé des fiecles entiers à dége- ler & à fe fondre dans un climat bien plus chaud que celui-là Cependant des raïfons que je dirai plus bas, me font croire qu’il fe trompoit en ce point. Le Commandeur Zorgdrager , Hollandois, après avoir fréquenté les mers de Spitsberg, Groenlande , la nouvelle Zemble, &c. au-delà de 30 années de fui- te , a donné une relation en langue Hollandoife de la pêche de baleine, où il montre autant de bon fens & de jugement , que d'expérience & de connoiffan- ces pratiques dans cette matiere. Je donnerai ici quel- ques extraits de fon Ouvrage , qui repandront beau- coup de lumiere fur le fujet que je traite dans ce Mémoire. » Il dir que le 1 Juin 1698, il amarra fon na- vire à un vafte champ de glace à 77! degrésde latitude feptentrionale | avec laquelle glace il chafla en 18 jours de temps jufqu’à la latitude de 751° , & prit $ ba- leines dans cet. intervalle. C’étoit le 26 Juin quand il quitta le champ de glace , & il dirigea fa rou- te à V'Eft pendant 18 lieues, & puis à PET ! au Sud pendant 20 lieues, entre les glaces détachées avant que d'arriver à la mer ouverte. Il ajoute que, fui- vant une eltimation très-exacte de fa courfe , il trou- va à fa fortie , qu'il avoit été enfoncé jufqu'àa 40 lieues Hollandoifes ( qui font so lieues de France) dans » les glaces. ” Comment réconcilier celui-ci avec ceux qui foutiennent que les glaces ne s'étendent jamais au de là de 20 lieues des côtes ? » Le 22 Mai 1701, Zorgdrager fe trouvant entre les glaces Occidentales, où on trouve à préfent le plus de baleines ; il furvint une gelée qui l'enferma dans ce qu'ils appellent la jeune glace, qui dans l’ef- pace d’une nuit couvrit toute la mer au de-là de Te y SE vs LE LE 5 EE v y & ÿ 208 MÉMOIRE » toute portée de vue, & dans un endroit très éloi- » gné des côtes. L’équipage fe promenoit fur certe » jeune elace, & voyoit fouvent des baleines qui la » rompirent avec leurs têtes afin de refpirer : ils en » auroient pu tuer plufieurs , mais ne pouvant fe » fervir de leurs chaloupes pour les fuivre & les pren- » dre, il n’auroit fervi de rien de les harponner.” Voilà donc encore un fait qui eft incompatible avec l'opinion de ceux qui veulent que la mer ouverte ne fe gele jamais. Si on prétend que ces glaces Occiden- tales , ( entre lefquelles Zorgdrager fe trouvoit quand la gelée, dont il parle , furvint & l’enferma, ) étoient compofées d’eau douce des rivieres, qui chafloient au gré des vents en haute mer ; comment foutenir que cette jeune glace, qui prit dans une nuit & couvrir la mer à perte de vue , étoit formée d’eau des rivie- res? Veut-on, que tout l’'Océan-Septentrional , dans ce moment-là , n'ait été compofé que d’eau douce des rivieres ? Dans un autre endroit Zorgdrager s'exprime ainfi : Pendant l’'Hyver , & fur-tout dans les Hyvers rigou- reux, la mer vers lepole, & dans une étendue d’envi- ron 25 degrés de latitude à l'entour du pole , ef entiérement glacée. Alors l'ifle de Jean Mayen, Spits- bergen ; Bear-Iflandt , la nouvelle Zemble, Gc. font entiérement enfermés dans cette vaite croute de glace , ainfi que nous Lavons trouvé par expé- rience plus d'une fois à notre arrivée dans ces mers plütot que d’ordinaire. ? Et ailleurs : dans les Hyvers rudes toute la mer eft folidement glacée jufqu'à la latitude de To Hédtelde) la vicille|Groelrde jufqu’à 70.9 , & entre la Groenlande & l'Iflande, la Mer left jufqu'a 68 degrés de latirude vers la nouvelle Zemble; dans ces rudes faïfons , la glace ÿ ÿ % VV Y Y v YU ON EU U v SUR LA CONGÉLATION DE L'EAU DE MER. 199 s'étend au-delà du détroit de Waïigats , & , en tou- te apparence, jufqu'a la er blanche & au Cap du Nord. Comme les baleines doivent néceflaire- ment refpirer au deflus de l’eau, elles font obligées alors de quitter ces mers glacées , & de fe retirer dans les mers ouvertes plus au midi. Car quoique, pour refpirer , la baleine ait la force de rompre la jeune glace de deux ou trois nuits , qui eft cepen- dant aflez forte pour foutenir pluf eurs hommes en- femble & l'un près de l’autre , il lui eft impoffi- ble de cafler la glace d'Hyver ; qui a [en raïfon de la rigueur des Hyvers] depuis $ jufqu'à 10 pieds d'épaiffeur. ” Voilà les faits que raconte ce vieux Marin, plein de bon fens & d’expérience , qui a été témoin oculaire pen- dant plus de 30 ans de ce qu’il rapporte. Il parle dans ce même traité du paflage à la mer pacifique par le Nord-Eft; fon fentiment eft, que ” ce paflage » n’eft pas praticable aux navires une fois en $o an- » nées; parce que, dans ces régions polaires ; il gele » fouvent jufqu'au mois de Juin, & que les gelées » Automnales commencent avant la fin d'Août. Il ajoute cependant, que ” peut-être un tel paflage n’eft » pas abfolument impoffible après un Hyver fort doux, >» & pendant un Été extraordinairement chaud. Maïs » dans la pratique ditil, on n'aura jamais une route » conftante & réguliere par-là à la Chine & au Japon.” Ce même Auteur fait une obfervation fur les gran- des glaces de mer , que je ne dois pas omettre ici : favoir, que la partie fupérieure de cette glace eft tou- jours beaucoup plus douce, compaéte & pefante que la partie inférieure ; & que quand les vafles champs de glaces font rompus, par les orages , &c. en grands glaçons , ceux-ci fe renverfent ordinairement fens | deffus HO Y VO Y % E v UV vY vw EE 300 MÉMOIRE deflous. On en verra clairement la raïfon dans mes expériences fuivantes. Le Capitaine Jacob Janflen a donné un Journal [ imprimé à Hambourg en langue All:mande] de fon voyage au Nord en 1769 , dans le navire nom- mé Vrouwe Maria Elifabeth de Hambourg. Il évoit enfermé dans les glaces, vers 73.° de latitude , depuis le 8 Juillet jufqu'au 21 Novembre 1769, & n’arri va à Hambourg que le 13 Décembre. Ses obferva- tions fur la Congélation de l’eau de la mer & fur les glaces qui en réfultent, font entiérement confor- mes à celles de Zorgdrager ; que je viens de donner. La mer fe geloit & dégeloit à l’entour d’eux en temps calme , plufieurs fois pendant cet intervaile. La par- tie fupérieure des grands glaçons , étant fondus , leur donnoit une eau douce potable. Durant ce long emprifonnement , & en chaffant de côté & d'autre avec le champ de glace qui les renfermoit , ils ne virent la terre qu’une feule fois & à la diftance de 15 lieues : c’étoit Gail Hamkes landr, partie de Spits- bergen. Pendant cetre trifte fituation, ils firent des obfervations , qui, quoique étrangeres à mon fujet actuel, font fi remarquables que je ne puis les omettre. La premiere eft, que pendant tout le temps qu'ils étoient enfermés au milieu des vaftes champs de gla- ces , ils ne virent aucune aurore-boréale ; mais qu'auf- fi-tôt qu'ils rentrerent en mer ouverte, ils en virent comme à l'ordinaire. La feconde eft, que pendant leur emprifonnement dans les glaces ,ils avoient ce qu’en appelle en Anglois the Blinck of the Jce très fort, & Ja Lune y éclairoit plus fortement que dans nos lati- tudes plus méridionales. La troifieme , qu'ils y voyoient conftamment le Soleil de même couleur & grandeur, qu'il paroit à nous autres au moment quil fe à |] SUR LA CONGÉLATION DE L'EAU DE MER. 301 Jeve, & que les éroiles paroïfloient toujours de cou- leur rougeätre de flamme ; & tour ceci par un temps Clair & ferein. Jefpere qu'on voudra bien m’excu- fer d’avoir rapporté ici ces phenomenes étrangers à mon fujet , en confidération que ces obfervations font uniques, par rapport à la latitude , à la faifon & aux circonftances dans lefquelles elles ont été faites. Tout récemment, en 1773, les Capitaines Phipps & Lutwige ont parcouru & examiné route l'étendue de la mer entre Spitsberg & Groenlande, qui comprend 20.° de longitude , & Pont trouvé entierement fer- mée par une immenfe plaine de glace fixe, à la hau- teur de 80.° à 82.° de latitude feptentrionale, qui, comme un mur impénétrable , refufoit toute poffibili- lité de paflage aux vaifleaux plus loin que les 81.° 39., comme on peut le voir au long dans la Relation de leur voyage. 7. Auinfi toute la mer entre la Groenlande & la Si- berie a été parcourue à différentes époques , & trou- vée fermée de glaces impénétrables. Cependant ces glaces doivent quelquefois fe fondre | ou fe rompre & être emportées ailleurs par des tempêtes & cou- . rans de mer, parce qu'il eft sûr que Heemskerke & Barents ont pénétré bien plus loin dans ces mers vers l’Eft en 1596, que les bornes de la glace vué par Wood en 1676. On peut voir dans les voyages dudit Barents & du Capitaine James dans la Baie de Hudfon en 163r, à quels changemens fubits les gla- ces de mer font aflujettiess On a vu qu'une tempête d’un ful jour de durée a brifé & emporté de vaîtes plaines de glace qui couvroient la mer à perte de vue, & l’a nettoyée de forte à n’en laïfler aucun veftige. On a vu un pareil exemple dans le voyage au Nord de MM. Phipps & Lutwige ; leurs vaïifleaux furent enfer- En Fran- cois à Paris 1774-in-3 9 o 502 MÉMOIRE x més tellement dans les glaces pendant 10 jours, qu'ils les avoient déja abandonnés par le défefpoir de ne les plus voir libres dans cette faifon ; quand les glaces fe rompant fubitement, ils furent remis denouveauen mer ouverte le 9 Août 1773. Barents, James , & d'autres affurent avoir fouvent vu d’immenfes glacons fe bri- fer fubitement & tomber à la fois dans une infinité de morceaux, ce qui doit accélérer infiniment leur fonte dans la mer. Il eft très-poffible donc que ces immenfes glaces qui rempliflent ces mers en certaines années, & les rendent impraticables aux navires, ne fe trouvent point du tout, ou feulement par glaçons dé: tachés & épars en d’autres temps. Ainf les eflais qu'on a faits jufqu'ici, ne démontrent point l’impoffibilité d’un paflage par le Nord. Mais 1l eft à croire que fi ce paflage tant defiré & tant cher- ché exifte réellement , il fera toujours très-incertain ; & quand même il fera praticable ce ne fera que pour peu de temps, & avec beaucoup de danger & de dif- ficulté ; ce qui le rendra de très-peu d'utilité dans la pratique du commerce ; fi on réuffit à en conftater l'exiftence. 8. Les Capitaines Cooke & Furneaux partirent de. Plymouth le 13 Juillet 1772 pour examiner les mers polaires du Sud , & pour pénétrer aufi près qu’il éroit pofible du pole antarétique. Ils firent le tour du glo- be principalement entre les ÿs.9 & 6r1.° de latitude méridionale , fans trouver d'autres terres que quelques ifles éparfes dans cet immenfe Océan Ils rencontre- rent les glaces flottantes vers le $o.° de latitude, & ne purent jamais pénétrer au-delà du 72.° de latitude méridionale , à caufe des glaces immenfes , fixes & continues. Dans ce voyage ils trouverent les glaces impénétrables à une bien moindre latitude , comme on SUR LA CONGÉLATION DE L'EAU DE MER. 303 on peut le voir dans leur Journal imprimé [a] peu de mois après le retour de M. Cooke, qui ar- riva à Portfmouth le 30 Juillet 1775. M. le Capitai-, ne Furneaux y étoit de retour dès le mois de Juil- let 1774, s'étant féparé de M. Cooke près de la nou- velle Zélande le 29 Novembre 1773 pour s’en re-° tourner en Angleterre , pendant que celui-ci pour- . fuivoit-des découvertes ultérieures. En conféquence de ce voyage très-curieux , exé- cuté par les plus habiles Marins & Phyficiens, il y a tout lieu de croire qu'il n’exifte aucun continent auf tral au-delà du 5o.® de latitude , & on connoit depuis long-temps le peu de terres quien approchent du co- té du Nord , qui font les pointes méridionales de PAmérique, de l'Afrique , de la nouvelle Hollande, & de la nouvelle Zélande; terres qui ne fourniflent que très-peu de rivieres & d’eau douce à ces vaftes mers auftrales. C’eft ce qui mérite aflurément d’être remarqué contre ceux qui veulent qu'il ny ait que leau douce, amenée par des fleuves dans les mers gla- ciales , qui s’y gele , & que l’eau falée de la mer ne fe gele point, ou feulement près des côtes où la glace peut trouver un point d'appui. On ne voit au contraire M. deBuf. dans la mer glaciale auftrale aucun veftige de conti 7” nent , & très-peu d'ffles pour fournir de l’eau douce à ces Mers; elles font cependant remplies d’une glace immenfe à une bien plus grande diftance du pole auf tral , que ne font les mers du Nord vers le pole bo- réal ; puifque MM. Cooke & Furneaux rencontrerent de vaftes glacons à la latitude méridionale, de 49.9 (az) À Londres 1775 in-80. La Relation complette de ce Voyage fe- ra compofée par M. Jean Rheïnhold Forfter , favanc Phyficien qui a accompagné M. Cooke, Tome I, V y 304 MÉMOIRE. ail 394, le 26 Déc. 1772 au milieu de l'été decesclimats, &s que pendant la premiere moitié de leur navigation , ils . ont jamais pu poufler au-delà du 68.2 delatitude, n'ayant même été qu'une feule fois jufque-là vers le $o.° de longi- tude à l’Eit de Londres. Le refte du trajet ils ne pu- °rent guère poufler au-delà du 60.° de latitude à cau- fe des glaces impénétrables qui fermoient les mers, Les vaifleaux Francois l'Aigle & la Marie rencon- trerent les glaces le 15 Décembre 1738, à 4s.° de fatitude auftrale, & 5.° de longitude à l’'Ef de Fero; & ne les quitterent qu'en fe tournant au Nord le 26 Janvier 1739 à 53.2 de latitude auftrale & 53.2 d’Eft longitude. [ls fonderent tous les jours de ce long tra- jet fans trouver fond avec 180 brafies. Ces glaces pa- rurent avoir de 2 à 300 pieds de haut ; & depuis une demi-lieue jufqu’à deux ou trois lieues de tour; & tout cela au plus fort de FEté. M. Halley vers 1700 a vu les glaces à 53.° de fa- titude auftrale , & à 13.° à l’'Oueft de Fero. On ne voit rien de pareil dans les mers du Nord à ces latitudes, même en Hiver. g. Ayant entrepris de traiter dans ce Mémoire de Ja’ Congélation de l’eau de la mer , après une fuite d'expériences que j'ai faites là-deflus, j'ai cru néceflaire de le commencer par donner une idée fuccinte, & en même temps un peu détaillée , de tout ce qu'on a dit & fait fur ce fujet jufqu'a préfent. Ce petit détail Hif- torique fera d’autant plus intéreflant à cette époque, que l’on verra, fans doute , bien des raifonnemens fur cette matiere, & peut-être des eflais, tout frayeux & *L'A@e dangereux qu’ils font, pour obtenir la magnifique ré- du Parlem. ne parle que d’un pañlage par le N. O. compenfe offerte par le Gouvernement Britannique à celui qui réuffira à trouver ce pafñlage * fi long-temps: & fi inutilement cherché par différentes Nations. SUR LA CONGÉLATION DE L'EAU DE MER. 30$ . I] y a long-temps que je n’ai pu me perfuader de la réalité de ce que tant d’Auteurs célebres ont avancé contre la Congélation des eaux de la haute mer : il m'a toujours paru que leurs raifons n’étoient rien moins die concluantes , ou plutôt contraires à ce qu'il me fembloit devoir arriver fuivant [a nature des chofes, & fuivant ce que j'avois vu arriver efléétivement en plus d’une occafion. Différentes circonftances m'ont empêché plufieurs années de fuite de faire les expé- riences néceflaires pour confirmer ou réfuter mes dou- tes, & pour vérifier ce qui en étoit, par des faits. inconteftables. On ne peut guère être plus à portée de faire ces expériences , que je ne le fuis fur cette côte & dans un port de mer, dont les Pècheurs fréquentent toute la mer du Nord, depuis la Flandre jufqu’au Schetland & l'Iflande , m’étant enfin réfolu à ne plus diflérer ces expériences, je me fuis fait apporter , vers la fin de l’année pañlée, un tonneau d’eau de mer pufée à- peu-près à diftances égales des côtes de la Hollande & de l'Angleterre & éloignée des embouchures de la Thamife, de la Meufe & de l’Efcaut, afin de l'avoir la moins mélangée qu'il étoit poflible des eaux dou- ces des fleuves. J'ai trouvé cette eau parfaitement clai- re & tranfparente , preuve qu’elle n’étoit point mêlan- gée d’eau de rivieres ; & elle éroit aufi falée au goût qu'en aucun autre endroit de [a mer Germanique, car j'en ai bu en haute mer, &-de ce qui en a été apporté ici de diverfes parties. Voici le journal & le détail de mes expériences. z0. La grande gelée de: cet Hiver a commencé fur cette côte de Flandre la nuit du 8 au 9 de Janvier 1776 : le 11 il commenca à neiger , ce qui continua avec aflez peu d'interruption le 12, 13,14,1$, & V 1] 306 MÉMOIRE ne cefloit entiérement que le 16. il regnoït pendant ce temps-là un vent d'Eit au Nord-Eft très-fort, quel- quefois violent , qui emportoit la neige , qui étoit très-fine & fêche, & l'amonceloit d’une maniere qu'on n'a guère vu. Il geloit pendant tout cet intervalle, mais non pas avec beaucoup de force , le Thermomè- tre de mercure de Reaümur depuis le 9 jufqu'au 18 du mois inclufivement , métant variable qu'entre le terme de congelation & de 2'. degrés au-deflous de cette poinite, & ne fortant point de ces limites. J’ex- pofai, pendant tout ce temps, de l’eau falée de mer, & de l’eau douce de pluie , dans deux vafes à coté Pun de l’autre. L’éau douce fe geloit aflez fortement: l'eau de mer perdoit fa limpidité , mais non pas fa fluidité, devenant épaïfle par les glaçons qui la rem- plifloient entiérement , fans adhérer enfemble. Dans cet état de confiftence, la neige tomboit deflus, fans fe fondre, & y reftoit ainfi de jourien jour, de mé- me qu’elle reftoit für la glace d'eau douce dans le vafe à côté. Barents & James ont remarqué la même chofe , l’un dans la mer de la nouvelle Zemble, lau-. tre dans la Baie de Hudfon. "Les glaçons détachés, qui remplifloient l'eau de mer, étoient aflez falés au goût , mais moins que l’eau même, & à beaucoup près, pas tant que la partie de cette eau de mer, qui reftoit liquide dans le vafe entre ces mêmes glaçons : celle-ci étoit beaucoup plus falée que l’eau venant de la mer. ÇQuoique jufqu'à prélent le temps ne fût point du tout propre, le froid n'étant pas aflezvif pour completter cette expérien- ce , Je comtnençai néanmoins à entrevoir aflez claire- ment le procédé de la nature à cet égard. 11. Le 19 & le 20 du mois la gelée augmenta juf- qu'à s & 6 degrés de Reaumur au-deflous du terme , SUR LA CONGÉLATION DE L'EAU DE MER. 307 de la congélation. J'expofai d'autre eau de mer prife nouvellement du tonneau, & d’autre eau de pluie t- rée du puits, en les plaçant à côté l’une de l’autre en plein air ,expofées au vent qui étoit à PEfT ,le temps étant clair & fans nuages. Voïci ce que j’obfervai. I Je remarquai très-diflinement qu'avec ce de- gré de froid les glaçons commencoient à fe former à peu-près aufli-tôt dans le vafe d’eau de la mer , que dans celui d’eau douce placée auprès ; que cette eau falée commencoit en même-tempsà s’épaiflir & à per- dre defaliquidité , mais qu'après celà la glace unie & adhérente s’y formoit beaucoup plus lentement & plus tard que dans l’eau douce à côté. Pendant que cet état duroïît, qui étoit de 2 à 3 heures au commence- ment de la nuit, l’eau de mer étoit remplie de petits glacons détachés & flottans, quoique fe touchant de toutes parts , repandus & mêlés uniformement dans toute la mafle d’eau : ils furent cependant un peu plus épais vers la furface fupérieure, que vers le fond & parois du vafe. IT.° Après cet intervalle fa limpidité & fa fluidi- té ceflerent entiérement ; les glacons s’unifloient &cs'at- tachoient enfemble; au point de ne faire qu’une feule maf-. fe complette de glace,mais qui étoit beaucoup plus poreu- fe, fpongieufe, & peloit environ ! moins à mafle -éga- le, que la glace formée d’eau de pluie. La glace d’eau falée -n’eft point du tout tranfparente , elle eft beaucoup moins folide & moins compaéte vers le fond & les parois du vafe, que vers la furface fupérieure. III.° Cette glace d’eau de mer n’étoit que peu fa-: lée (:à-peu-près comme une foupe à manger) au ra- port de trois diverfes perfonnes qui en ont goûté; elle m'’étoit pas, à beaucoup près , aufli falée que les glaçons que j'ai décrits au N.° 10; & je ne pus at- (o] 68. 11 OR TNANENTIONTIRNE tribuer cette différence qu’à la plus forte gelée , qui a expulfé plus complettement les particules falines dans la formation de cette derniere glace, que dans les glaçons détachés formés par une moindre gelée. Le grand Boerhave , que je citerai plus bas, N.° 19, le dit très- expreflement, & ceci détruit en partie l’afler- pote tion trop-générale adoptée par M. de Mairan, que la glace, pag. SLACE formée en mer étoit auf]i falée que la mer méme. 2 IV.° Cette glace étoit peu adhérente aux parois du vaf; ‘elle s’en détachoit fort facilement, & fans dé- gel préalable, dans une feule maf de la forme du vale qui la contenoit. Ceci reflémble parfaitement o phénomenes conftamment obfervés dans les immenfes glaçons des mers polaires, qui ont leurs parties infé- rieures très-poreufes, & qui ne s’attachent pas au fond de la mer, Martens, dans fa Relation de Spitsberg , dit, que la partie inférieure de ces glaces ejt auffi fpongieufe que la pierre ponce. Cette mafle de glace ayant été Otée du vafe, où elle avoit été formée la nuit auparavant , & renverfée , on voyoit la partie de deflous très-po- reufe , ouverte & pleine d’interftices: elle étoit formée de petits faifceaux de filets longs d’un pouce , un peu plus ou moins , qui fe rencontroient à des angles, dont ia plupart approchoiïent de 60 deprés, Ces faif- ceaux de filets reflembloient , la couleur & la réfiftan- ce exceptées, à des morceaux d’asbefte : les filets ola- cés, en les frottant entre les doigts, fe féparoient de même avant que de fe fondre. Je laiflai ces mafles de glaces, ainfi renverfées, expofées à l'air, au vent, au foleil, une femaine entiere, fans que j'aie remarqué aucune variation dans leur apparence, ni autre changement, excepté qu’elles s’endurcifloient ; les filets devenoiïent plus friables entre les doigts , en raifon que la gelée augmentoit en force, SUR LA CONGÉLATION DE L'EAU DE MÉR. 30 V.9 En détachant , ainfi que jai dit plas haut, ces glaces d’eau falée du vafe où elles étoient formées , il s’en écouloit par tout les parois du vafe, & de tous les pores & interftices de la furface inférieure de la glace, jufqu'à ! partie de toute l’eau de mer expofée dans le vafe , qui reftoit non-gelée dans un état de parfaite liquidité, mais d’une falure extrême ; dou- ble, à ce que je pouvois juger par le coût, de celle de l’eau pure de mer. Il eff évident que la gelée , en raifon de fa force, fépare la partie douce de l'eau de la mer & la fixe , de la partie faline qu’elle ex- pulfe latéralement & encore plus vers en bas. C’eft la -raifon de la féparation fi facile de ces glaces des vafes _où elles étoient formées, de l’eau liquide qui couloit par les parois des vafes en les féparant, & de celle qui couloit de tous les interftices vers le fond , qu'elle avoit formé en sy logeant, VI. L'eau de la mer eft à l’eau de pluie , à mafle égale ,comme 73 eft à 70: or, il reftoit de liquide une feptieme partie de l’eau de mer après a premiere congé- ation , mais deux fois plus falée que la fimple eau de mer, & la glace étoit fort poreufe ; d’où j'ai con- clu que le poids d’un volume de glace formée d’eau de la mer par $.° de Reaumur de froid au-deffous . du terme de glace, eft à un volume égal de glace for- mée d'eau douce , comme r à 1 !. Les nuits du 20 au 21, & du 21 au 22 Janvier ,fe glacerent de cette forte les $ de l’eau de mer expofée à l'air, j'ai fait pefer les parties féparées par la congélation ; & cha- que fois &en chaque vafe que j'ai répété cette nd ce, je l'ai trouvée toujours fous les mêmes apparen- ces éd pareille formation. 12. Ayantainfi recueilli à différentes fois & dedivers vafes d’eau de mer congélée , une quantité aflez confi- 310 MÉMOIRE dérable de la partie très-falée, qui reftoit liquide après que les autres 6 parties furent folidement congélées dans l’efpace d’une nuit, par un froid de $.° au-def- fous de glace , j'étois très-curieux d’éprouver fi plus de temps ou un plus grand degré de froid auroit glacé cette * partie très-falée qui reftoit liquide. La journée du 22 étoit très-belle, & la chaleur du foleil aflez fenfible. La nuit & les jours fuivans juf qu’au 25. étoient de même. Le Thermomètre de Reau- mur montoit depuis 3.2 jufqu’à un degré au-deflous de glace. Le 24 il dégeloit, mème après le foleil couché, & je défefpérois de me fatisfaire en achevant pour lors mes expériences : c’étoit à tort. Le 2$ le vent fe fixa au Nord-Eft, & devint piquant à l’ex- trême , paroïflant rempli de /picules glacées qui dé- chiroient la peau de celui qui sy expofoit. J'avois placé en plein air, & expofé perpendiculairement au vent de NE, un bon Thermomètre de vif argent fait fuivant M. de Reaumur. Le 25 à 7! heures du matin le mercure étoit def- cendu à 9.° au-deflous du terme de Congélation. Le 26 à 8 heures du matin il étoit à 10.2 au-deflous. Le 27 à 6 heures du matin à 12.02 & à 8 heures il étoit defcendu jufqu’à 13.1.° ;à midi il étoit à 8.2.9 ; à r heu- re après-midi à 9.° ; à 3.! heures à 11.1 & à $ heures du foir à 13°. Le vent avoit été coute la journée très- fort & piquant au-delà de toute expreflon ; il le fut. encore toute la nuit fuivante, de forte que le 28 à 7. ! heures du matin je trouvai le mercure du même Thermomètre fixe à 142.° au-deffous du terme de congélation ; & ce fut à ce moment-là l’extrême où il elt defcendu fur cette côte pendant toute cette ge- lée rigoureufe. Le 29 fa plus grande dépreffion étroit de 13) 0e Ronde mr LE era tante : E SUR LA CONGÉLATION DE L'EAU DE MER. 31r Le r Février le vent tourna au SE, il fe renforcoit & parut ramener une furabondancede fpicules glacées, tant il étoit piquant : à 7 heures du matin le mercu- re fe trouvoit à 13:.° au-deflous du terme de congé- ation : à 4 heures Paprès-midi il étroit monté à 7.e fur la côte de Ka mer, où je me trouvai. ÆEe 2 de Février à 7° heures du matin, il étoic feulement àr1* au-deflous de glace; à 9! heures du même matin le mercure pafloit l'O , ou le point de congélation, & continuoit de monter aflèz vite; le dégel fe manifef- toit vifiblement, avant 10 heures , & ne difcontinuoit plus ; en forte que 3 où 4 jours après , le mercure étroit conftamment de 7° à 10° au-deflus de glace. J'ai donné ce détail du temps tout d’une haleine , afin de pouvoir y référer , fans plus interrompre, le cours de mes expériences. 13. L'eau falée comme elle venoït de Ia mer, que j'expofois pendant ce redoublement du froid , fe gla- çoit entiérement de même que celle dont j'ai parlé, fans autre différence, fi ce n’eft que la congélation fe faïfoit plus vite, que la glace étoit plus dure & moins falée, & la partie expulfée plus falée qu'auparavant ,, mais aufli en moindre proportion , environ .! du tout. Ainfi je n'infifterai plus R-defflus. Les nuits du 25 & du 26 Janvier j'expofai à l’air & au vent, de cette partie très-falée qui reftoit liquide, & que j'avois recueillie après la congélation du relte de l’eau de mer. Le lendemain, cette eau que je crois être près de deux fois plus falée que celle de la mer du Nord, {© trouva prefque entiérement glacée , même jufqu'au fond du vafe: par un froïd moindre que ro.° de Reaumur au deflous du terme de la congélation : il n'en reftoit dans fes pores en état de liquidité qu’en- viron une cinquieme partie de fa totalité , & celle-ci Tome I, X x N©.:£; 312 MÉMOIRE. étoitexceffivement falée au goût, prefque comme de l’eau faturée de fel. Mais la partie glacée étoit encore plus poreufe, moins compaéte , & moins adhérente en- femble, que celle de la premiere congélation : elle fe cafloit & fe féparoït en morceaux beaucoup plus facilement , & fe fondoit en partie par le peu de cha- leur que donnoit le foleil, trop foible cependant pour caufer de la moiteur fur la glace de la premie- re congélation de l’eau de mer, ou fur celle de l’eau douce. La contexture de cette feconde glace étoit beau- coup moins diltinéte & moins tenace que dans la pre- miere, au lieu de filets, elle repréfentoit plutôt des criftallifations imparfaites. On ne peut attribuer cet- te différente configuration , ainfi, que fon peu d’adhé- rence , & fa facilité à fe fondre, qu'à la plus grande quantité de fel marin qu’elle contenoït ; car cette glace confervoit une grande partie de la falure & de Pamertume de l’eau très-chargée dont elle étoit for- mée. - Cette feconde glace fe féparoit encore plus facile- ment , que la premiere, du vafe , où elle étoit for- mée ; mais on ne put le faire fans qu'elle fe caflät en plufieurs morceaux : il s’en écoula par les parois du vale, & de tous les pores & interftices de fa partie inférieure , environ ! partie. de la totalité d’eau qui avoit été expofée : (car je compte pour rien l’évapo- ration d’une eau fi fort chargée de fl), cette partie demeura liquide ; la congélation l’avoit expulfée vers les parois & le fond du vaf: c'étoient fes parties les plus falines , & je laifle à imaginer qu’elle en étoit la falure & l'amertume. J’ofe dire, qu’elle étoit trois fois plus forte qu'aucune eau de mer, dont j'ai goùû- té , ou dans ces mers du nord, ou dans la mer mé- diterranée & dans la baye de Bifcaie : l’eau de mer, SUR LA CONGÉLATION DÉL'EAU DE MER. 343 dans fon état naturel contient depuis ,' jufqu'à ,! par- tie de fel : l’eau peut difloudre & tenir en diflolution environ ! de fon poids: or, en faifant évaporer au- près du feu une petite partie de cette eau féparée en dernier lieu par la congélation , & qui reftoit liquide dans le vafe après en avoir retiré la glace, elle me donna environ une cinquieme partie de fon poids de fel bien criftallifé. 14. Il me reftoit affez de cette eau prefque faturée du fel marin par la derniere féparation, que j'avois retirée de deux vafes, où la congélation, dont j'ai parlé dans l'article précédent , s’étoit faite, pour remplir une pe- tite jatte. Comme la violence du froid & de la ge- lée alloit toujours en augmentant, l’on peut penfer fi J'étois curieux de voir ce qui arriveroït en y expo- fant cette eau fi exceflivement falée, je ne laïflai point échapper une fi belle occafion de l’eflayer. J’expofai.: donc auprès du thermomètre, une petite jatte remplie de cette eau, à l’air & au vent toute la nuit du 26 au 27 Janvier. Le 27 à 6 heures du matin, le mercure étant à 12.2 au-deflous de glace, j'ai trouvé cette eau gelée , fixe & adhérente jufqu'au fond. À 8 heures le mercure étoit defcendu à 13.1°, & la glace étoit proportionellement plus dure. Mais fa dureté & co- hérence alors n’étoient que telles que je pouvois fa- cilement y enfoncer le doigt & le tourner de côté & d'autre, en féparant les petits glaçons auparavant unis. Par cette manœuvre il demeura un peu d’eau liquide au fond de la jatte ; mais en la comparant au goût , avec les glacons , on ne put diftinguer s'il y avoit plus de falure dans l’une que dans l’autre. Les glacons formés de cette congélation étoïent fort pe- tits, la plupart depuis : jufqu’a ! pouce de long : en les féparant un à un, ils étoient tranfparents ; dans X x ij at MÉMOIRÉ leur configuration & la direction de leurs filets, ils refflembloient à de petites feuilles d'arbres. J’ai placé cette glace, fi peu dure & adhérente , devant le feu , & j'ai remarqué qu'elle f fondoit en moins de la moité du temps qu'il falloit pour fondre une quan- tité égale de glace formée d’eau douce. J'ai confervé une partie de l'eau exceflivement fa- lée qui revenoit de ces glaçons, pour fervir de preu- ve à mes expériences, & pour démontrer quelle falu- re de mer peut ètre glacée : j'ai fait évaporer le ref. te de ces glaçons fondus qui m'ont donné environ un cinquieme de Îeur totalité de {el marin dur, très- fort, très-amer , & qui, à en juger par la couleur, paroît mêlé d’une très-petite portion de terre. Je le conferve auffi (a). 15. En recueillant, le 26 du mois, de deux diffé- rens vafes, l’eau qui reftoit liquide après la feconde congélation, & qui s’écouloit des glaces, dont j'ai par- lé au N°. 13, pour lexpofer la nuit fuivante à une troifieme congélation , ainfi que je l'ai marque au Ne. 14 , quelques petits glaçons s’étoient attachés au fond & aux côtés de ces vafes, auxquels je ne fis plus at- tention pour lors. Mais comme ces vafes reftoientau même endroit la nuit & le jour fwivant expofés à l'air & aux vents, jétois fort furpris le 27 de les voir parlemés d’une poudre prefque impalpable , par- faitement blanche. Je croyois au moment qu'on y avoit jetté, à mon infu, de la farine de froment ow du blanc d'Efpagne : mais me reflouvenant aufhi-tôt d’avoir lu dans les tranfaétions philofophiques de Lon- dres (b) que le Doëteur Lifter avoit obfervé un pa-. C — + nn (a) Si PAcadémie le defire, j'enverrai de l’un & de l'autre, pour y être. dépotés en preuve des expériences décrites dans ce Mémoire. (2) NO .167,p.835, Lowthorps Abement, vol. Ir. p. 164 #4 SUR LA CONGÉLATION DE L'EAU DE MER. 515 - reil phénomene en faifant évaporer , devant le feu ; des glacons formés d’eau de mer , je mis de cette poudre blanche & impalpable fur la langue, & je trouvai que c’étoit un {el pur & parfaitement fin, qui reftoit attaché au vafe ,après que toute l'humidité en fut enlevée par lair, le vent & le foleil. 16. Parfaitement fatisfait par des expériences variées & réitérées, je ceflai mes obfervations fur la congé- lation de l’eau de mer. Mais avant que d’en tirer les conclufions qui me paroïflent en réfulter direétement, j'ajouterai ici quelques expériences que jai faites fur d’autres fubitances, les nuits du 27 au 28, & du 28 au 29 du même mois de Janvier 1776, qui, quoi- qu'étrangeres en quelque forte à mon fujet , {erviront au moins à montrer jufqu'où seft porté la rigueur de cette gelée fur la côte de Flandre. Jai expofé à l’air toute la nuit du 27 au 28, qui étoit la plus froide de toutes, & celle du 28 au 29, du vin blanc de Chalofle, du vin rouge de Barcelo- ne, qui eft très-fort, du vin fec de l’ifle de Ténerife , d’une forte eau-de-vie, du taffha on romme de Jamaï- que, & de lefprit de vin rettifié de Londres, en au- tant de foucoupes. Les matinées fuivantes , le thermomètre étant le 28 à 1429, & le 29 à 13.2° au-deflous de glace, pai trouvé tous les vins , l’eau-de-vie, & le tafñia tons gla- cés, enforte qu'il n’en reftoit aucune partie liquide ; & leau-de-vie & le tafha autant que les vins: mais leurs glaces, pour la confiftance , reflembloient aux conf- tures glacées, qu'on fert à manger. Toutes ces li- queurs avoient perdu beaucoup de leur force par la congélation ; les vins & l’eau-de-vie entrérement ; le taffia , qui eft fort huileux, en confervoit davantage, L’eau-de-vie étoit le plus changée en goût & en odeur, 16 MÉMOIRE Fans comme-un refte de mauvais miel. Le tafia étoit celui qui confervoit le mieux fon goût & fon odeur; & entre les vins, c'étoit le vin rouge qui avoit le moins fouflert à ces égards. ; L'efprit de vin re@ifié contenoit un cercle de pe-. tits glaçons attachés aux bords de la foucoupe ; le ref. te n'étoit pas glacé, & fe trouvoit fort peu dété- rioré , en force , en goût , en odeur : les gla- çons cependant, qui s'y étoient formés, confervoient très-peu de force; ce qui me faifoit conjeéturer, que, fi le froid eut été aflez violent pour le glacer entiére- ment , il en auroit fouffert autant que les autres. Confequences tirées des expériences précédentes. 17. Il s'enfuit évidemment de ce que nous avons vu ci-deflus , 1°. que l’eau la plus falée de la mer peut f geler, & être entiérement convertie en glace par un froid proportionné, qui eft en tout cas beau- coup moindre que celui qui exifte actuellement tous les hyvers dans les régions polaires. " II©. Qu'un froid inférieur à celui marqué par 10 ©. de Reaumur , au-deflous du terme de la congéla- tion, avec un vent d’Eft ou de NE ,.eft fuffifant pour convertir en glace ferme & unie l’eau la plus falée de ces mers du Nord, quand elle eft tranquille dans un vafe & expofée à toute la rigueur de Pair. Mais il n’eft pas douteux qu'il ne faille un degré de froid beaucoup plus grand, pour glacer cette eau en mou- vement & dans une vafte mafñle , comme les vagues de la mer. IIL©. Qu'un froid, moindre que 15.° de Reau- mur , au-deflous de glace , eft capable de congéler © ê& de fixer une eau de mer deux & trois fois plus SUR LA CONGÉLATION DE L'EAU DE MER. 317 falée que l'ordinaire , quand elle eft en petite quanti- té & tranquille dans un vafe, comme il eft arrivé après les féparations ci-deflus marquées. Et quoiquene.r; # cette glace fût peu compaëte & peu adhérente, on ‘* a vu qu’elle s’unifloit davantage & sendurcifloit par l'augmentation du froid. Aiïnfi l’on ne peut raifonna- blement douter qu'un froid égal à celui qu'on fait exifter dans les régions polaires ne l’eût fixée entié- rement. 18. On fait par expérience que l’eau fe gele d’au- tant plus aifément qu’elle eft plus pure : l’eau de pluie prend plus facilement que l’eau de riviere ; l’eau de riviere que l’eau de [a mer ; une eau de mer peu fa- lée, qu'une eau de mer fort falée. Il eft certain que l'eau de la mer n’eft pas par-tout également falée : elle contient plus de fel dans la Zone torride , que dans les Zones tempérées, & plus dans celles-ci, que dans les Zones glaciales, elle a auffi une amertume indé- pendante de fa falure ; or, il fuit de-là, que-dans les mers glaciales , qui font les moins falées de toutes, l’eau fe gele par un degré de froid qui ne feroit point fufifant dans des régions plus méridionales, où l’eau de mer contient beaucoup plus de fel. Si on combi- ne ce principe tiré des obfervations de tous les voya- geurs ; avec le froid énorme qu’on fait exifter tous les hyvers dans les régions polaires, on aura une caufe , plus que fuffifante , pour glacer toutes ces . mers jufques vers leurs fonds, qui refteront toujours liquides pour les raïfons que nous avons vu plus haut, N°. 17. Dans l’année 1709 , le froid qui étoit le plus grand, sn qui {oit connu dans ces pays, ne pañloit guères à Paris 15° de Reaumur au-deflous du terme de la congéla- tion; tandis qu’à Tornco en Lapponie, à près de 66° de latitude , en Janvier 1737 les Acadériciens Frans NO. x. Ee 3e \C MÉMOIRE çois trouverent le mercure du même .thermomètre à 37° au-deflous de glace ; (a) & M. le ProféfRur Gmelin trouva le froid en Sibérie à 58° & 58.9 de fatitude fi exceffif dans les années Na o Gare & 8, que le mercure defcendit à 48, 64, & 70° li: Reau- mur au-deflous du terme de la congélation (b) : froid inconcevable à nous autres qui habitons les régions tempérées. Or, après le réfultat. des expériences à décrites dans ce mémoire , qui peut douter qu’un pa- reil froid, ne foit plus que fufhfant, pour glacer & fixer un Océan entier, aufli peu falé que le font les mers pglaciales , malgré leur profondeur, malgré le mouvement, prefque continuel, de leurs vagues ? Ces vagues & ces mers commencent par {e remplir de glaçons flottans; elles s’en épaiffiffent & perdent leur fluidité de plus en ‘plus, par laccroiflement du froid ; à la fin elles fe fixent entiérement dans une glace fer- me & unie : & c’eft ainfi que toutes les relations des Voyageurs décrivent uniformément la marche de fa nature dans ces régions glacées. On peut voir, fur- tout , celles de Barents & de James, qui ont tous deux hyverné dans ces triftes climats. +9: Pourfuivons nos conféquences : d’après nos ex- périences, nous avons vu que la glace formée fi impie- ment d’eau de la mer par la premiere congélation , quoique beaucoup moins falée & moins amere que l'eau dont elle étoit formée , ne l’étoit cependant pas _aflez, à beaucoup près, pour être potable : mais que la partie qui reftoit fluide après cette congélation , . étoit beaucoup plus falée & plus amere que Ia pre- miere ne a (z) Voyez Maupertuis. Figure de la terre. À C4) Voyez la Préface de M. Gmelin à fa flore Siberéca, & le quatries me Efai für le thermomètre du Doéteur Martin. SUR LA CONGÉLATION DE L'EAU DÉ MER. 319 miere eau de mer. D'où il fuit, que la gelée en- leve à l’eau de mer une grande quantité de fa partie aqueufe , expulfe & concentre vers en bas fa partie fa- line , qui fe gele & s’'évaporé beaucoup moins facilez ment. Tout cela eft parfaitement conforme à ce que dit lé grand Boerhave dans fes Elémens de Chymie : (a) » Aqua quo magis calefcit, eo plus falis folvit, » & tenet folutum. Prout vero plus frigefcit; pluf- » que præcipitabit falem in fundum ; eo tandem ut » in acutifimo gelu omnis ferè fal expellatur. Sed » rurfus aqua prius falfa, quæ acerrimo fub frigore » falem expulcrat , lonoè citius regelafcet appofitio- . » ne falis , quam finulis aqua fincera , in eodem » gelu. ” C’eft auffi ce que j'ai vu arriver dans toutes fes par- ties, ainfi que je lai marqué plus haut. Ceci rend rai- fon de la fonte & difparition fubite des immenfes gla- cons des mers polaires par un adouciflement du temps, dont jai cité des exemples plus haut ; & auf, de ce qui eft dit dans le Journal du dernier voyage de M. Cooke dans l’hémifphere auftrale. On y marque qu’é- tant entre 61° & 66° de latitude, ils trouverent que leur.eau douce devenoit mauvaife, & que pour y re- médier ils pêcherentdans la mer entre le 1 & le 12 Janvier 1773 , des morceaux de glace , qui, étant fondus , fervirent à remplir tous leurs tonneaux de la meilleure eau douce , qu'ils euflent goûté depuis leur départ d'Angleterre. (C’eft une preuve non-équivo- que de Ia violence extrême du.froid & de la gelée du climat où ils fe trouverent. 20. I] s'enfuit encore de tout ce que nous avons vu, que tous les aroumens allégués contre la con- | C2) De aqua. pp. 488 476 de l'édition de Leiplick, 1732. Tome L Yy [a 329 MÉMOIRE gélation & [a formation des glaces dans es hautes mers vers les poles, font mal-fondés & contraires à la nature & à l’état réel des chofes. Donc, ce qui a été rapporté de l’état des mers entre la Groenlan- de & Spitsberg par le Capitaine Phipps en 1773 & de celles entre Spitsberg & la nouvelle Zemble par le Capitaine Wood en 1676 eft très-jufte & très-con- forme à la vraie phyfique. Ce qui n’empèche pas ce- endant que ces mêmes mers ne fe trouvent quelque- L ouvertes & libres de glaces. Ainfi tout ce que j'ai dit dans ce mémoire, & toutes mes expériences , ne prouvent point du tout l’impofhbilité d’un paflage par la mer polaire , foit vers le NE, foit vers le NO. La mer entre Spitsberg & la nouvelle Zemble , que le Capitaine Wood a trouvée entiérement fermée en 1676 d’une glace continue de 60 à 80 brafles d’é- paifleur , fut trouvée ouverte par Barents & Heems- kerke en 1596 & g7, & par les Hollandois qui pouf- ferent leurs découvertes en 1670 jufqu’à 300 lieues à VE du cap défiré, la pointe la plus orientale de la nouvelle Zemble ; fi toutefois on peut fe fier à cet- te derniere relation ; car par rapport à celle de Ba- rents , il n’y a aucun doute de fa vérité. Il eft donc très-vraifemblable que ces mers glaciales fontquelquefois navigables; mais que cela n'arrive pas , à beaucoup près , toutes les années : de plus , quand cela arrive , 11 n’eft nullement croyable que ce foit toujours précifément dans un, même intervalle de l’année ; par- ce que le tout dépend entiérement du plus ou moins de rigueur des faifons, & de la violence des tempé- tes ; chofes qui ont leur étendue de variation dans ces affreux climats , aufli-bien que dans ceux qui font plus fréquentés & connus. Je finis par cette conféquence générale qu'un paf: SUR LA CONGÉLATION DÉ L'EAU DE MER, 41% fage par le Nord eft une chofe qui fera toujours très= äncertaine @ fort inutile dans la pratique de la vie. Note de Mr. Needham. Les conclufions que Dom Mann tire de toutes ces obfervations, font 1°. que fi quatorze à quinze degrés de froid ont produit fur l’eau de la mer ordinaire, & même fur cette eau impregnée du fel au double, des effets tels que nous venons de voir, trente-fept degrès de condenfation obfervés par M. de Maupertuis à Torneo, & mê-= me bien au-delà obfervés ailleurs plus près du Pole, doivent produire des effets bien plus fenfibles fur l’eau de la mer , fur-tout dans les calmes, qui regnent alors dans ces régions remplies de brumes, comme M. Ellis a remarqué dans la Baye de Hudfon, jufqu’à former des mafles immenfes de glace en pleine mer fans aucun obftacie. 2°.Qu'’en fe rappellant dans la premiere expérience que l'eau de la mer expofée à 2 de froid feule- ment commencoit déja à s’épaiflir, & à fe former en glaçons fi nombreux, quoique très-fubtils, qu’elle foutenoit la neige qui y tomboit, fans la fon- dre, on concoittrès-aifément quela même eau en pleine mer, fur-tout pen- dant le calme d’une atmofphere chargée de brumes, fi elle eft expofée fous des latitudes polairés depuis foixante degrès jufqu’au pole même à un froid vingt & même trente fois plus confidérable & aux neiges qui s’y pré- cipitent prefque fans cefle, pendant fix mois de l’année, cette eau doit s’épaiflir non-feulement jufqu’à devenir folide bien plus vîte que fur nos côtes , & fe glacer entiérement ; mais aufli s’amonceler en glaçons qui s’at- tachent enfemble, en formant des montagnes, telles que lès voyageurs en trouvent dans ces régions. En effet fi 14 à 15 degrés de froid ont été aflez puiflans pour former près de Nieuport , comme on a vù ci-devant, dans peu de jours des mafles glacées de 6 à 8 pieds d’épaifleur, on pourra facilement par la regle de proportion imaginer quelle fera la hauteur des glaces formées dans les régions polaires, par un froid quatre ou cinq fois plus fort pendant plufieurs mois de fuite. 3°. Qu’il eft prefque certain d’après toutes les autres expériences, que l’Auteur a faites enfuite par un froid qui s’eft augmenté graduellemeut depuis 2: jufqu’à 15 de con- denfation près , que les deux poles de la terre font toujours plus ou moins inveftis de glaces formées en pleine mer, loin de toute terre ou de tout mélange d’eau douce par les rivieres qui s’y précipitent ; de facon qu’il fera impofñlible d'y pénétrer, ou même d’en approcher de plus près que certains voyageurs n’ont fait déja, c’eft-à-dire , depuis 80 jufqu’à 84 de la- titude feprentrionale tout au plus, & depuis 60 jufqu’à 71 de latitude auftrale. 4°. Que le plus ou moins d’àpprorimation au Pole (fi j’ofe me fervir de ce terme) dépendra toujours des vents qui rompent quelque- fois, & chaffent devant eux les glaces, mais jamais avec aflez de vio- lence pour les emporter totalement, & les difperfer au point de rendre libre la navigation jufqu’au pole. Enfin fa derniere conclufñon eft, que fi cela pourroit arriver quelquefois par la force des ouragans extraordinai- res, l'incertitude d’un événement de cette efpece fera fi grande , qu’il } a tout à parier contre l’arrivée de quelque Vaïfleau jufqu’à l’un ou ’autre des deux poles ; &telle, en un mot, qu’on doit abandonner toute idée, de chercher dans notre Hémifphere par cette route ( foit en gagnant du côté de l'Eft, foit en fe tournant vers l'Oueft) les moyens de par- Venir par la mer pacifique aux Indes orientales ; cette concluñon qui me paroît bien & duement tirée des expériences précédentes eft directement Ye 1 contraire à tout ce queles Phyficiens ont cru devoir penfer à ce fujee jufqu’à préfent , & doit nous mettreen garde contre leurs faux raifonnemens, NB. On a cru qu’il étoit à propos de ramaffer fous in feul pont de vue goutes das conféquences qui dérivens de ce Mémoire, MÉMOIRE CONTENANT LA FORMATION D'UNE FORMULE GÉNÉRALE POUR LINTÉËÉGRATION, Ou la Sommation d’une fuite de Puiflances quelconques , dont les racines forment une progreflion arithmétique à différences f- nies quelconques. PAR M BOURNONS:;: Sous-Lieutenant & Ingénieur au fervice de S. M.I.R.6 À, Lù à la Séance du 8 Janvier 1777. Lettre de l’Auteur du Mémoire à Mefieurs de LP Ace. démie , pour fervx de Préface. - Msssreurs , Les Mémoires que publient les Académies, con- tiennent , ou la découverte d’une vérité, jufqu’alors , cachée, (a) ou, fi la vérité étoit déja connue, une route toute différente de celle que l’on connoifloit pour ÿ parvenir. Si on ne publie pas alors la découverte d’une vérité, on fait du moins connoître un nouveaw chemin; On naugmente pas dans ce dernier cas le nombre des connoïfflances, mais on en facilite l’accès, en augmentant les routes qui y menent. Je ne fais point fi la formule générale qui fait le fujet du Mémoire ci-joint, fe trouve déja dans quel- qu'ouvrage ; je penfe cependant qu'il ne fe trouve nullepart. M. Sauri donne douze formules pour ce que jexprime par une feule, qui n’eft encore qu’une formule particuliere , déduite de la générale que je pu- blie. Les Auteurs & les ouvrages que cite M. Sauri font nombreux & choifis ; s'il avoit trouvé quelque- part cette formule , il eft à préfumer , qu'ayant enta- mé la matiere , il leût donnée. Si cependant la formule, dont je crois être l’in- venteur, exitoit dans quelque ouvrage, il feroit en- core vraifemblable que je n’ai pas juftement rencon- tré la même route qu’on auroït tracée avant moi pous + Ç) Peu importe que fon utilité foit évidente. Le célebre Woif die quelque part : ” Les inventeurs doivent peu fe foucier & ce qu’ils on& æ trouvé eff utile; mais s’il eff vrai y parvenir; mais fi lune & l'autre eft déja connue ; cet écrit ne mérite pas une place parmi les Mémoi- res de l'Académie, & tout ce qui me refte de ce il, eft la farisfaétion d’avoir fai i-mê travail, eft la fatisfation d’avoir fait par moi-mé- me ce que je croyois mavoir pas encore été fait, & de le favoir mieux que fi je l’eufle appris dans quel- que Auteur (a). [e] Et c’eft pour cette raifon , dit M. d’Alembert quelque part dans fes mélanges , qu’on ne fait jamais bien que ce que l’on a trouvé foi-mêmes MÉMOIRE MÉMOIRE CONTENANT LA FORMATION D'UNE FORMULE GÉNÉRALE, POUR LINTÉGRATION, Ou la Sommation d’une fuite de Puiffances guelconques , dont les racines forment ume progreffion Arithmétique , à différences finies quelconques. z. 2 Sorr une prosreffion Arithmétique ,Z. 73. C'. &c. ... ..æ; dontle premier terme = ,/;7, la difiéren- co — p, le nombre des termes =n, & le dernier terme — x , tous nombres quelconques. Il eft évi- dent que x = 4 + (n-1)p; que le terme fuivant de dernier x, dans Ja même progreffion ED A+ np, & que n— X +P — 4: 2. Soit une fuite de nu formée de Ë mé me progreflion , 4". 7. €”. Hp". &c. +°; on exprime la fomme de cette fuite par fx”. Ai fe fgnifie Ja fomme de la progreflion fimple , dont le Tome I. Z z 328 MÉMOIRE premier terme = 7%, & Cr SE 22 fignifie la fomme des quarrés 4° 74 CA T4 &c, + x*, & ainfi des autres. On met roujours le figne (J) fimplement devant le dernier terme de la fuite , pour marquer la fomme de la fuite entiere. 3. Si on exprime par a. b, c. d. e. f. &c. les coéf- ficiens du binome 4 + JR de Newton élévé à la puiflance m + 1 ,ou de ( Z + Bt", ana, comme (n° 1°), B—= A+ p; C=8B+ p. H) = C + p.&c.,on a dis-je : ARS ZA mi A m -2 B A +ragp+bÆ p+e,xg p+ ko Ad re | C ep +opr+bB p+cB p'+&c + BE Br 5 m+1 mi 1 7 4 fr1=1 : m-2 D =C +aCp+b6C p'+0€C p+ &c, +C Dit &c — &c. + &c. + &c. + cc. + &c. mix mTE m1 TI= A1 2: 1-2) Exp) = % +axp + BRU ES CRIER ER DEPNarirer PIE, Donc, ajoutant enfemble de part & d’autre jes ter- mes de ces équations, & retranchant de chaque côté = ô + L es termes communs , qui font 7°"; 7", c"'", Dr &c. z"*', on a évidemment... (4) (xtp} — apfe" + bp'fe" + pif" + &c. + np rt Le pénultieme terme p”** fx° et — np", pui£ qu'il provient, comme on voit, par p" pris autant de fois qu'il y a de termes dans la progreffion , de- puis 7} jufqu'à x 5, ou depuis 7 jufqu'à x; or (n° 1°) ce nombre de termes eft — 7; donc la fomme de trous ces termes, ou fx, p"* = np"tt, à CONTENANT LA FORMATION D'UNE 6c. 329 4. Comme (n°1°) n=x + p=_ 7,onap"* mt P? Jzx°, ou np res — (z+p) P— pr: 2 den l'équation A ci-deflus devient(x+p) a = dpfe + bp fa + cpfz +&c.+p(+p)+ CT gr J. Divifant tout par ap, on a (x Hoi) PER + ne ; ap | bpfe + cpfe +&c + p(zp) + A a a La (.A-p ); donc fr = (z+ ri __Epfz _ . a ie z in I coëfficient que l’on veuille,par sxemple Boss Rs ceux qui précédent immédiatement Ajite l’on veut avoir, s celui qui précéde le ARE Tr: fi tous les coëfficiens feras qui précédent » D. ue aufTi 1 I I REA it P, DE Rae 5 font connus, on a T = -S55- Ris L pas, res ss &c. 23 dunre +. Le dernier ter- o CONTENANT LA FORMATION D'UNE , Ge. 337 me ne contient plus de coëfficient, & le dernier fac: teur de fon dénominatenr eft n#r, x1. De Pinfpection des valeurs de . & — &c. fuit encore une méthode facile de déduire un coëfficient quelconque , de celui qui précéde , & de toutes les fractions dont ce Se a été compofé. Soient les I fraions ci-deflus == Sie a R12.3 HE de 2.3. pr == &c. fe préléntées L\pari da: /b:1ce déc & en qui eft la fom- me de toutes ces fraétions — #, on n’a qu'à mettre la valeur de #, avec fon figne contraire , avant cette fuite pour avoir ; LUE NE ir eee d Bec. & LE ls ares par ceux de la fuite. 2.13. 4. 5.6. &cc. la fommie = Æ ; 2 + a + b + © + d &c. fera égale au coëfficient 5 pe 7 6 g fuivant + ou k. 12. De cette regle fuit évidemment une maniere facile de calculer ebCIR Émaene = coëfhiciens conftans, I te R &c. Nous aVORS. «7 RAT &-r— 4 done pour former É on a + _ 1 = , Ou plütot T1 I I Fes (Na x) donc : ei de OC TE = se Ch LME Enr Donc pour former & on a Feel + 3—2) & R — masi) me Cr )— 2. Pose former 5 on ares (0-1 +21 )donc tr ( 2 12e) Æ Lag4s6 (O— 10 + 1 à 6) —— Ta3456. À aa ij 338 MÉMOIRE 1 $ Y Pour former Fiona |: (Ml NET I I ( + 1.0. — 10 + 15 — 6 ); donc T = 12.3.45.6 E (io 137) =ragasén (HI10-$ + 6-2); L: É | QU ci — (0) x Z Pour former y on 1.2,3.4.5.6.2. (0-+1.0—ÿ+6--2) ; I 1 donc y = 1234562 (0+5, 01417) =. Sn Let 1.2.3.4.5.0.7.2.%e (O+74+O— 21 + 21 — 6) = 4 I Z.2.3.4-5.6.7.2.3.. I I Pour former ÿ Ona 12.3.4.5.6.7.2.3.(-1.0+7.0=21 421-6); I ï donc 5 — 1.2.3.4.5.6.7.2.3 ( — 2.0. + LHO—I+3— 2: f T à OUU— L2.3.4.56.7.8.3(— 2.0. 7.0 144 12—3) —0O. De la même maniere j'ai calculé les fix fuivans , ainfi que les treize premiers coëfliciens conftans, de la formule générale, font : I T LE IT ÉtUoe T 1 I 2 = + ragae » NO . 3° = O ML LE = R Li I = — 1234.56 - - = S L € Case 2 SIT 5 —= de = T L I (Ds qe ———— ee 6° = + 1:2.3.4.5.6.7:2.3 —= V I ep — £ —= GUN Lit PTE CONTENANT LA FORMATION D'UNE, Ge. 339 x 8° — — 12.3.4.5.6:7.8.3.10 O I 9° | és pi: ( AN SN DURE 10° — “+ 1.2.3.4.5.6.7.8.9.11.12: I EU ds o Gox 12° — — 1.2.3:4.5.6.7.8.9.10.11.124 13.14.15. e 1 o & les fraétions pour trouver le r4° font .:,.::,;: I 23450700 ipuidi5.2. ( O + 691.0— 2275. Oo + 3003. 0 — 2145. 0 + 1001. 0. 455 + 210 — 3G )s à divifer , comme ci-devant , par la fuite 2: 3. 4. 5. GA. re 13. Donc fa formule générale , dont on a calculé les coëfficiens conftans des 13 termes, qui fuivent le premier du fecond membre, fe réduit à f&"=(x+pY*" (mr) )p — (x ue. Y +. G+n p.0— Bima(x+p) °p;. TR ETES 1.2.3.4.5.6 o + Des (Hp) pe o— Fre(ztp} 7pr. RE —— 1.2.3.4.5.6.7.8.3.10 o + J.(m-8)Xxp)p’. 0 — 691 KE. (m-r0) (25) "p ee O:IT, FT 6 Due is me 0 + 14. di le dernier terme o, exprimé ici, ré- pond à Ja puiflance (x+p)"**, il fuit par la remarque n° $ que ce terme o eft à la place du dernier de la formule qui exprime la valeur de fx'3; ainfi, en ôtant de la formule générale le dernier terme exprimé par o & 349 MÉMOIRE ‘ a marque (&c.), & mettant à deur place une conftan- te C, on aura une formule particuliere, qui exprime la valeur de treize premieres puiflances , & dont les coëfliciens conftans font tous calculés. 15. [1 eft évident ( n° 2 ) que, fi à fr", on ajou- te (x*p)" on aura f(x +p }"; donc ajoutant à chaque membre de la formule générale Gpjison a f(x) = (xtpYT + (ap) + &c. Tous les termes du fe- (m+1)p | cond membre reftent comme dans la précédente ; il n’y a que lé fecond terme (x+p)”, qui change fon fig- SE 2 ne. Donc fi par-tout on met x au lieu de x+p, la formule devient fr"= 2" La Z'x"p.o —&c. (m-H)p 2 1,232 16. Pour trouver la conilante C à ajouter , pour avoir l'intégrale complette; comme pour x on peut pren- dre un terme quelconque de la progreflion, 4. JB. CD. :&c., "(nn )5 onlna qu'à. fuppoler que la fuite que l’on cherche , n’a que le premier terme À" , on aura donc par la formule générale (n.rÿ) { 4” ou fimplement ZX" = A" + ve Ke (+1 )p 2 KA p. o — &c. + C; retranchant de part & d'autre As on 4 O — Dee AT “e A LE (m+1 )p Lou 1.2:3-2 0 — &c. LIT), où QUE PLATE ANNEE (+1 )p 2 AT: Où va Rene Donc l'intéorale finie complet- te, ou le terme formatoire complet , eft fx" — . CONTENANTLA FORMATION D'UNE &x., 341 gr + Loi A "3p SE &c. met MTL ME (m+i)p 2 1.2.3.2) G+1)p Li + À LD &C, 1.2. 9.2 17. LE On demande Ia fomme des quatrie- mes puiflances des nombres. 30. 37. 44. &c. jufqu’à 100, qui fera le dernier, & dont la différence eft 7, Comme m—4 & p—7, la formule donne pour cette fomme 2° + #t + 4X 7 %7 — 4.3.2. 343.7 LC— x» 35 2 1.2,3:2: D 20456 35 nette mt — 3432 AA +7 A — 343.4) Br AUTRS UE CON MONUMENT OM EINETs ÿ 5 / où 2 7 + rt Al + 7 UN) 343 (A). 35 2 G : 3° L Mettant à préfent 100 au lieu de x & 30 au lieu de À , on trouve la fomme demandée — 28020000 + 50405000 + 973000 — 2401 = 335748533. 3 3 18. M. Sauri, après avoir donné dans fon cours complet de Mathématiques douze formules | pour la fommation des douze premieres puiflances des termes de la prosreffion dont la différence eft 1 , dit ” En » examinant ces fuites , on s’apperçoit qu'il y a une . » loi par laquelle les termes de la faivante peuvent » fe déduire de la précédente , f on en excepte le » dernier terme dans Les féries qui contiennent la Pre- » miere puiflance de x. Omertant donc ce dernier » terme, pourfuit le même Auteur, fi on a fx — AE ON IEEE ACER EN EC AE » hxt9 — &c. la fomme fuivante fera fat — (n+r) (n+2) patte 4 (ati) bar D nr cat — nr exr? (n+1) 12 .R=2. 342 MÉMOIRE p(nti)xT4 cc. ? (m4) te vérité, que les formules particulieres ne font qu'ap- percevoir , & démontre qu’elle a lieu quelque foit le HER p; car fcs la formule générale on a... La formule générale démontre cet- a — Ga, b=— P. G—np;e = n (1) Ga Q &c. , & les coëfficiens des termes de la nee fui- vante , en confidérant n comme déterminé , & l’aug- mentant de 5 , feront par conféquent le premier — TA I (n+2)p = nt a; le fecond — p — Bb; le troifie- n+2 me—={n+i)p=(ntr)c ; le quatrieme —{n+1) n(n-1)p° = ROMANE SCT THEY — e &c. Généralement, fi # eft le coëfficient d’un a-2 terme quelconque x p', & lle coëfficient du terme y correfpondant dans la fuite fuivante , & qui fera x7# p°, on voit évidemment, par la formule généra- le qu 'après les réductions des Facteurs que + &l auront de commun, il viendra 1=—(ntr)#,n. étant gr: l’expofant des termes de Îa fuite précédente, & n+i celui des termes de la fuivante. REMARQUES. T. Soit une fonétion compofée de puiflances d’une variable x & de conftantes a, b,c, &c., telle que ax" + bx" + cx? &c.; fi on y met pour x fuccef- fivement les nombres d’une progreflion es quel- CONTENANT LA FORMATION D'UNE, €c. 343 quelconque, il eft évident que la formule générale ci- deffus, donnera la fomme de la fuite qui en réfulte- ra : d’où il fuit que la même formule {ert également pour fommer les fuites des nombres figurés & poly- gones, II. II fuit encore que fi on a une fuite A.B.C.... &c. À , dont les premieres, fecondes, &c. difiéren- ces, forment une fuite de puiflances d’une progref- fion arithmétique ,ou dont le terme général eft une . fonétion telle que ci-deflus, il fuit, dis-je , que la for- mule générale donne la fomme de telles fuites. Par exemple. Suppofons que les premieres différences de Ja fuite A. B. C. D.... &c. X forment celle des quar- rés 1. 4 9... &... 100; on trouve par la formu- le , que les termes de la fuite À. B. C. D.... &cc.... X ont pour terme général la fonétion x° + x° + +; . ï 3 2 6 Où r —ralpremienterme , x — 2 lau fecond , &c. & x —10 au dernier : & ayant par la formule .... , fé =: TR 1) — 3 304 2 4 se NRA me 2 GIMP ENT 3 ; M ea). ed ete e MU ES: 12 3 12 6 3 — 1210 = (puifque z HO) + 100 + me etre 0 12 3 12 6 Tome I. Bbh 344 MÉMOIR E, Ge. T1 eft évident ( n°. 16.) que la conftante C dans ce cas — 0; car C — la fomme de la fuite formée par la progreffion arithmétique entiere qui peut précéder la donnée, & qui — o dans ce cas-ci.° IIS. La différence p étant indéterminée dans Ja for- mule (n°. 15.) , fi on la fuppofe moindre que toute fra&ion affignable, tous les termes, depuis le fecond, s’'évanouiflent dans le deuxieme membre, & on a fa 0 > Ou pa = "ar 0" fommulktauides (m+1)p mti montre généralement ce principe fondamental du cal- cul intégral que fx" dx — x"; ce qu'on ne prouve ME ordinairement qu'à Pofieriori. FIN. MÉMOIRE SUR mx M ENdA RE U RUE D U SEL COMMUN:; Dont les anciens Belges & Germains faifoient ufage. PAR M. DU RON DE.AU- … Lu àla Séance du 24 Juin 1773. SUR L À NATURE D U SEL COMMUN, Dont les anciens Belges & Germains faifoiens ufage. Le &t commun a été Pobjet d’un fi grand nombre de recherches & d'expériences, qu'il eft furprenant que perfonne n'ait jetté un regard fur la nature du fel, dont nos ancètres fe fervoient pour aflaifonner & conferver leurs alimens : Agricola s’eft borné à don: ner le moyen de faire du fel en jettant de l’eau falée fur le bois allumé ; mais ni lui ni d’autres m'ont. pouffé leurs recherches jufqu'à la découverte de la, A nature de ce fel. tall. lib. 12 On croit communément que nos ancêtres ne con- noiïfloient qu'une feule méthode de faire du fel com- mun ; mais on verra par la fuite que la nature tou- jours induftrieufe leur en fit connoître plufieurs, afin qu'ils puflent sen fournir dans toutes les poftions- poflibles.. 348 MÉMOIRE Je me propofe donc, premierement , d’expofer les divers moyens, dont ces peuples fe fervoient pour fe procurer du fel commun ; & fecondement d’exami- ner de quelle nature devoient être ces préparations, I1 feroit fort inutile de donner l’analyfe du fl ma- rin ordinaire ; elle eft connue de tous les Chymiftes, & tant d’Auteurs en onc parlé fi favamment, que je me tiens difpenfé de rapporter ou de répéter leurs expériences : on fe rappellera feulement, que le fel en général eft un corps qui f diflout dans l’eau, qui fe fond au feu & qui imprime une cerraine fenfation fur la langue : que le caractere diftin@if du fl marin eft, que fes criftaux ont toujours une figure quarrée : qu'il pétille au feu : qu'il sy fond difficilement & qu'il altere l'humidité de l'air dans les temps couverts : que ce fel eft naturellement neutre, c’eft-à-dire, for- mé par l’union d’un acide fpécial & d’un alkali fixe, qui lui eft particulier. Le fl marin elt donc compofé de deux fels , dont Pun plus fulphuré, qui f condenfe aïfément, lorf- que l’eau s’évapore au foleil dans les marais falans ; Vautre plus acide , piquant plus la langue , & qui ne fe fépare de l’eau de mer qu'en achevant de l’évapo- rer entierement. M. Pott dit, que l'acide du fl marin eft fi vola- til qu'il f diffipe entierement , lorfqwon le diflout fouvent dans l’eau commune, & que c’eft à l’abfence de cet acide volatil qu’on doit attribuer la fadeur du fel blanchi que lon fert fur nos tables. Si lacide du {el marin eft la bafe de fa faveur , cet avantage eft bien payé par l’amertume bitumineufe qui Paccompa- gne; car ce n’eft qu'en le privant de l’un , qu’on le purge de l’autre. Les diverfes méthodes de nos an- cêtres obvioient à cet inconvénient. Elles réunifloient SUR LA NATURE DU SEL COMMUN. 349 l'avantage de priver le fl marin de fon amertume bitumineufe , & de fubitituer à fon acide naturel un al- kali fixe quille rendoit piquant fans le rendre defagréa- ble. Les belles expériences du célebre Docteur Prin- gle juftifient la conduite de nos ancêtres , elles prou- vent que le fel, dont ces peuples fe fervoient , n’étoit pas moins falubre , ni moins antifeptique que notre fel marin ordinaire. Je ne fuis entré dans ces détails que pour pouvoir mieux comparer notre fel commun avec celui dont fe fervoient les anciens Gaulois & Gérmains, & pour faire voir que le fel de nos ancêtres valoit infiniment mieux que celui dont nous faifons ufage. | Quoique nous ne connoiflions aujourd’hui qu'un très-petit nombre de puits & ruifléaux falans dans la Belgique & dans cette partie de la Germanie, qui fu- bit le joug Romain, il n’en eft pas moins probable qu'il en exiftoit autrefois d' avantage : pourquoi donna- t-on le nom de Zoutleeuw à la petite ville de Leeuw en Brabant, fi-non parce que cette ville étoit fituée au milieu d’un marais falant?... (a) Je conviens que les chofes ont changé depuis, &c que le marais qui enveloppe cette villette ne fournit plus d'eau falée, mais je ne fuis pas plus furpris de voir qu'un marais cefle de donner du fel , que de trouver des coquilles & des plantes marines x deux & trois mille toifes au-deflus de la furface actuelle de la mer. IT feroit inutile, je crois, de chercher ailleurs lori- screnren gine du mot Sallant petit pays fitué au nord de Zur fancois phen, de Zalt-bommel en Gueldres & du comté de ié. Zutphen même , que je conjecture avoir été nommé fa. ms (a) Zout en francois fel & Leeuw par corruption de Zoo mare ou maraïs. 250 MÉMOIRÉ Lac faié, primitivement Zout-veen; mais malgré que toutes Îes fources falantes que nous fuppofons avoir exiftées au trefois foient taries pour nous, on n’eft pas en droit d'en inférer qu’elles n’exifterent jamais : celles de la Lorraine & de la Franche-Comté nous prouveroient le contraire. Quant au fleuve falant, dont parle Ta- cite , à l’occafion des Cätres & des Hermundures , c’eft la Sala. Cette riviere eft aflëz connue & l’on devine facilement la raifon de la falure , puifqu'une grande partic' des pays qu’elle arrofe, eft remplie de falines, mais l’on ne devinera pas fi aifément quelles étoient les fources d'où les habitans des environs du Rhin tiroient des eaux falantes pour préparer leur fel, fi non, que de jeur accorder des fources qui ont difparu dans la fuite. Il réfulte de tout ceci, que les Gaulois & les Germaïins connoïfloient plus d’une méthode de pré- parer le fl commun & celt ce que je vais tacher de développer. | Le naturalifte Pline nous dit bien, que les Gaulois & les Germains faifoient du fel en jettant de l’eau fa- lée fur le bois allumé; mais cette expofition laconi- que ne nous inftruit pas de l’endroit où ils prenoient l’eau falée, ni de la nature de cette eau, ni des dé- tails , ni du réfultat de leur préparation , ni enfin de la maniere dont ils en faifoient ufage. Mais fi cette plain- te eff jufte, à l’égard de Pline, nous n'avons guère fujet d’être plus contents du récit de Tacite. Cet Hifto- rien célébre paroît même avoir pris plaifir à nous cacher ce fecret , tandis qu'il a bien voulu inférer, dans le même article, où il parle du fel , le moyen dont les Ubiens fe fervirent pour étoufler les émana- tions phofphoriques , brûlantes, qui fortoient de la ter- ré & qui ravageoient les Métairies , les Champs & les Bourgs de ce malheureux peuple, Je conviens que ce grand SUR LA NATURE DU SEL COMMUN. 351 grand homme nous a appris quelque chofe de plus, que Pline ; puifqu'il rapporte que les Hermundures & les Cartes fe livrerent un grand combat au fujet d’un fleuve , dont les eaux avoient la propriété de produire le fel, & que les Dieux entendoient de-Jà les prieres des mortels plus diftinétement , que de tout autre endroit. Que pour cette raifon, par une faveur toute particuliere , ils avoient accordé à cette riviere & à ces forêts la propriété de former le fl, non com- me chez les autres peuples par l'évaporation des eaux de la mer, mais en verfant celles de ce fleuve fur des piles de bois allumées. J'ai rapporté ce paflage en entier afin que lon foit inftruit de la nature de ces eaux. On connoît encore aujourd’hui le pays dont parle Tacite ; on fait qu'il eft rempli de falines, & que les eaux que l’on en tire ainfi que le fel même, ne diflérent pas des eaux ni du fel de mer. Nous voilà donc parvenus à favoir que les Cattes & les Hermundures verfoient des eaux falées de la même nature que celles de la mer fur du bois embrafé pour en former du fel. Mais n’eft-il pas furprenant , que le curieux Pline & le favant Tacite ayent également pu ignorer ou négliger de répéter ce que Varron avoit obfervé plus d’un fiecle avant eux ? Oui, fans fon ex- cellent traité de re ruflica, nous ignorerions encore les fuites du procédé de ces peuples & nous en ferions en- core aux conjectures fur les moyens , dont ils fe f{er- voient pour tirer parti de cette préparation. » Lorfque je commandois l’armée du Rhin, dit l’Au- » teur, j'eus occafon de pafler par certains cantons, » où l’on eft dans l'ufage de fe fervir de charbons fa- » lés, provenant des buches brülées au lieu de fel ma- » rin ou concret.” C’étoit donc de ces charbons falés, Tome I, Ccc 352 MNEÉAMONTNRR E ; c’eft-à-dire, incruftés de fel marin , dont ilsfe fervoient pour aflaifonner leurs mets, & pour conferver leurs provifions. Je me referve à parler de la nature de cette efpece de fel dans la feconde partie. On auroïit tort de croire que cette préparation étoit la feule qui fut d’ufage fur toute la furface de ce vafte pays. Ceux qui étoient éloignés & des falines & des côtes, en pratiquoient fürement. d’autres pour fe procurer une matiere fi néceflaire à la confervation de leur fanté & de leurs provifions. Prétendre que nos ancêtres n’étoient pointaflez verfés dans la chymie pour en tirerdes fecours que les eaux falées leur refufoient, c’eft démentir l’hiftoire. (a) Celui qui fait faire du favon , doit néceflairement favoir faire du fel. Les notions fimples ont précédé celles qui font plus compliquées , & les connoïflances humaines ne fe font perfectionnées que par gradations. Les Germains & les Gaulois qui habitoient les can- tons trop éloignés des fources falantes & des côtes de la mer , fe fervirent d’un fel compofé de terre nitreu- fe & d’une leflive tirée des cendres de bois. Tirer du fel de cette façon , n'eft pas plus difficile que d’en faire felon la méthode précédente. Agricola qui nous a tranfmis cette opération , nomme ce fel halini- trum & nous le connoïflons fous celui de falpétre. La nature de ce mélange eft trop connue pour que j'en fafle la defcriprion ; il {ufira d’avoir obfervé qu'il fut de tout temps d’ufage dans ces provinces , & que Von s’en fert encore journellement pour faler les vian- des que l’on veut conferver : on le préféreroit même (a) Les Bataves faifoient deux efpeces de favon , un qui étoit liqui- de & l’autre folide. Ils le compoloient avec du fuif, de lachaux & du fel alkali fixe , tiré des cendres de bois. SUR LA NATURE DU SEL COMMUN. 353 au fel commun pour cet ufage , sil ne communiquoit à la chair une couleur rouge , qui ne plaît point à tout le monde ; mais sil a le défavantage de rou- gir les chairs, il a en récompenfe le précieux avanta- ge de les attendrir, tandis que le fel commun les durcit. Je ne fuis cependant pas éloigné de croire, que nos ancêtres connurent l’art de raffiner le falpé- tre au point de le rendre tout-à-fait femblable au fel marin ; on y parvient, felon la remarque de M. Lemeri, par des évaporations & criftallifations réitérées. La Chronique de Zeelande par Boxhorn nousapprend, que les peuples qui habitoïent nos Provinces maritimes, fai- foient du fel avec de l’eau de mer & des cendres de tourbes. Les Hollandois, les Frifons & les Zeelandoiïis en conferverent l’ufage jufqu'an commencement du feizieme fiecle. Je ne déciderai pas fi ce fut la néceffité ou la ré- flexion qui fit adopter cette troïfieme méthode : on pourroit foutenir l’un & l’autre, par de fort bonnes raifons. Les Partifans de la néceflité diront, que la difette de bois la fit inventer ; tandis que leurs adverfaires foutiendront , que l’économie ou l’efpoir de profiter du fel des cendres mêmes , la fit préférer. Quoi quil en foit, il eft notoire que l’on 2 fait de tout temps du fel fur les côtes de Hollande, de Zeelande & de Frife, avec de l’eau de mer & des cendres tirées des tourbes ou des gazons pris fur les Landes, dont ces Se/arners Provinces étoient autrefois couvertes. On nommoithences. ces fauniers brüleurs de fel.... Les Chroniques de Hollande rapportent, au fujet de cette découverte, qu'un nommé Loringus , chaflé de Hongrie par fon frere Lalande, arriva en Zeelande , où il introduifit l’ufage de faire du fel felon la mé- Cccij 354 MÉMOIRE ie de fon Pays ; qu'il fit d’abord tirer des tour- bes, qu'il les fit fécher & réduire en cendres, & vil ft bouillir ces cendres avec de l'eau de mer dans de grandes chaudieres pour en extraire le fel qui { trouva fort blanc. : L’Auteur ajoute d’après Corneille Battus , que ces cendres furent primitivement tranfportées à Zirickzee, enfuite à Rommerfwal & plus tard dans plufieurs autres villes pour en extraire le fel, enfin, que les habitans de. cette Province s’en fervirent habituelle- ment fans en défirer d'autre , jufqu'au commencement du 16 fiecle. Quoique je ne veuille pas garantir l'au- thenticité de cette origine , elle prouve au moins que cette méthode eft très-ancienne. C’eft le fentiment de Boxhorn , d’Alkemade, Van der Schelling & d’une infinité d'autres Auteurs Hollandois. Il eft appuyé fur une tradition immémoriale & fur un grand nombre d'Édits que les Souverains furent contraints de faire promulguer , lorfque cette pratique dégénéra en abus; car vers la fin du 14 & au commencement du 15 fie- cle, on ne cefla de fe plaindre de ce que les brüleurs de fel convertifloient les champs les plus fertiles en marais infects & pernicieux , tel eft l’Edit de la Com- teffe Marie de l’an 1476 , par lequel elle promet qu’el- le ne permettra plus, dorefnavant , à aucun de fes fu- jets, de tirer de fes héritages des rourbes pour faire du fel. L Il eft néanmoins apparent , que cet Edit ne fut point obfervé ; car l’on trouve une Ordonnance pu- bliée en Zeelande en 1515, par laquelle il eft défen- du de brüler du fl, & conféquemment de faire ces fortes d'excavations ; dont je viens de parler. C’eft le plus moderne des Édits portés à ce fujet. Les Souverains étoient trop intéreflés à le faire ob- SUR LA NATURE DU SEL COMMUN. 535$ ferver, pour n’y pas faire veiller ; premierement parce que ces excavations préjudicioient à l’agriculture & à 12 falubrité de la province , & fecondement parce qu’il éroit devenu poffible de fe procurer du fel de France, d’'Efpagne & de Portugal ; il eft donc indubitable, que nos ancêtres faifoient du fel en verfant l’eau falée fur le bois embrafe. Cette préparation leur donnoit des incruftations falines , qu’ils détachoïent des char- bons ; (a) nous ne trouvons rien dans les Auteurs Grecs ou Latins qui puifle nous faire croire, que nos ancêtres diflolvoient ces incruftations dans l’eau falée ou commune , pour en receuillir par évaporation & criftallifation un fel pur & blanc; mais rien n'empè- che non plus que nous ne fuppofions qu'ils euflent af- fez de notions chymiques pour fe procurer cet avan- tape. I1 eft prefque inconteftable , que tous les peuples de la Belgique & dela Germanie, qui habitoient des cantons éloignés des falines & de la mer , { donne- rent un fel compofé de nitre & de fel fixe alkalin, tiré des cendres. La tradition immémoriale , & la . pratique conftante jufqu’à nos jours nous invitent à le croire & à nous le perfuader. Mais fi nous n’avons que des probabilités à alléouer en faveur de cette feconde préparation, nous avons des garans sûrs, qui dépofent en faveur de l’ancienneté inconteftable de la troifieme. Celle-ci confiftoit dans un mélange des cendres de tourbes ou de mottes de terres bouillies dans l’eau de mer: on filtroit ce mé- lange, & la liqueur filtrée étant évaporée, on en re- tiroit par criltailifation un fel blanc & très-pur. (a) J'entens! par les Carbones falf: de Varron les incruftations falines & non les charbons mêmes. , ® 356 MÉMOIRE SECONDE PARTIE. J'ai verfé fur une pile de bois de hêtre, bien allu- mée , huit livres d’eau chargée d’une livre de {el brut de Liverpool; & après avoir détaché, fort exa@ement, la croute faline, qui s'étoit formée autour des buches, j'ai trouvé que mes douze onces de fel étoient ré- duites à $ & 49 grains, ÿ compris une certaine quan- tité de charbons, qu'il ne m'a pas été poffible de dé- tacher des incruftations. On fera furpris de la grande perte de fl, que cette opération a occafionnée ; mais on ceflera de l’être, fi lon fait attention que la plus grande partie de la faumure s'eft perdue dans les cendres, d’ailleurs com- me la quantité m'importoit moins que la qualité, je ne m'en fuis guères inquiété. Ce fel n’eit pas mauvais; mais il eft plus infipide que notre fel ordinaire. Étant impoffible de m'aflurer d'aucune expérience, tant que la matiere faline ne feroit point abfolument dégagée de quelques parties de charbons attachées aux incruftations, jen ai fait réduire trois onces en pou- dre; je l'ai fait fondre à froid dans dix onces d’eau commune, & la liqueur filtrée & évaporée m'a don- né deux onces $2 grains de fel pur, Ce fel a rendu linfufion de violettes plus verdâtre : que la même quantité de fel de Liverpool; celui-ci, au contraire, lui a communiqué une couleur plus jau- _pâtre. Jai verfé fur une dragme de ce {el purifié, &fur une autre dragme de fel de Liverpool , une même quan- tité d’efprit de vitriol ; & jai remarqué que celui de Liverpool jetta beaucoup plus de vapeurs que l’au- tre; ce qui m'a convaincu , que le premier conte- noit plus d'acide que le dernier, SUR LA NATURE DU SEL COMMUN. 357 Au refte ce fel eft infiniment plus agréable que le {el ordinaire , quoique purifié plufeurs fois. Cette dif. férence provient, comme la très-bien remarqué le Comte de Marfigli, dans fon Hiftoire Phyfique de la mer , de l'abfence des parties grafles & bitumineufes, que le feu a détruites , tandis que ces matieres demeu- rent fi intimement attachées à notre fel commun, que les préparations ordinaires ne fuffifent point pour en détruire le goût. Voulant voir fi tous les bois me donneroient indifié- remment les même réfultats , j'ai eflayé le chêne & le cou- drier fivantés par Agricola ; mais je n’ai point été trompé dans mon attente ; car la même quantité de {el de Liverpool , verfé fur des piles de l’un & de lautre bois, m'a fourni exaétement les mêmes réfultats, c’eft- à-dire, un fl , en tout, femblable à celui que j'avois receuilli fur les charbons de hêtre. Le falpêtre qui fe fait au moyen des cendres , eft de la même nature que le falpètre de Houflage & que celui qui nous vient de l'Inde. Ses criftaux font les mêmes, & les altérations qu’il occafionne à la tinéture de violettes ne différent en rien. Les expériences du Docteur Pringle prouvent que, nos ancêtres ne devoient point s’en trouver mal, puif- que ce fel eff quatre fois plus antifeptique que le fel marin, & trois fois & demi plus que le fel gemme. I1 eft indubitable que l’art de faire du fel avec des cendres de tourbes & l’eau de mer, n’a pas été uni- quement connu des Zeelandoiïis , des Frifons & des Hollandoïis , puifque plufeurs de leurs voifins jouif- foient abondamment de l’une & de l’autre de ces ma- tieres. C'eft ce qui m'a engagé à ne point borner mes ex- périences aux feules cendres des courbes de Hollande, 58 MÉMOIRE jai voulu voir fi les nôtres donneroient les mêmes ré- fultats, & je n’ai point été trompé dans mon atten- te : je ne prétends cependant point en inférer que cet- te méthode a percé jufqu'au lieu que nous habitons, jene connoiïs auçun monument qui me porte à le croire. J'ai fait évaporer au feu , jufqw'a l'apparence de pellicule , huit livres de faumure faite avec une livre de fel brut & autant de leflive tirée des cendres des tourbes de Hollande , après l'évaporanion & criltalli- fanion, j'en ai receuilli 18 onces & trois dragmes de fel pur, dont les criftaux étoient cubiques. La même opération faite avec une leflive tirée des cendres de nos tourbes , m’a fourni la même quantité de fl. J'ai éprouvé ces fels avec l’infufion de violettes, & j'ai trouvé qu'ils lui communiquoient également une cou- leur verte; mais beaucoup plus foncée que le fel for- mé par l’incruftation , dont j'ai parlé ci-deflus. Ayant verfe de l’efprit de vitriol fur une dragme de chacun des fels , tirés de cendres des tourbes, & fur la même quantité de fel commun mais raffiné; j'ai trouvé que le fel brut ou commun a jetté infiniment plus de vapeurs que les fels des cendres de tourbes. Non content de ces expériences , j'ai voulu eflayer tous ces fels par la précipitation. Jai verfé conféquemment fur une dragme de fel com- mun brut, & fur la même quantité de fel raffiné , une même dofe d’efprit de fel ammoniac ; les mélanges fe font troublés d'abord, & il s’en eft précipité une ma- tiere blanchàtre ; mais le {el brut en a fourni beaucoup plus que le raffiné. Cette augmentation m'a paru dé- pendre d’une plus grande quantité de matiere terref tre , dont le fel brut étoit chargé, que le rafñné. La même quantité d’efprit de fel ammoniac, verfé fur une dragme de fl, produit par incruftation , a pré- Cipite SUR LA NATURE DU SEL COMMUN. 359 cipité plus de matiere blanchätre que la dragme de {el raffiné; mais moins que la dragme de fel brut, Cette expérience faite fur le fel pur, obtenu au moyen des cendres de tourbes & de la faumure de fel commun , a donné beaucoup plus de matiere blanchâtre, non-fulement que le {el commun raff- né, mais que le fel brut même. Les mêmes expériences, tentées avec l’huile de tat- tre , ont produit conftamment les mêmes eflets. Il en réfulte que le fel fait avec des cendres de tourbes & l’eau de mer, eft beaucoup plus alkalin que le fel commun & même que celui qui fe fait felon Varron, Tacite & Pline, par incruftation ; qu'on n’en infére cependant pas, qu'il étoit moins falutaire. : Les expériences du fameux Docteur Pringle doi- vent nous avoir guéri du préjugé, que les fels al- Kkalins ne font point antifeptiques. Il fe trouvera en- core des perfonnes qui croiront que ce fel, fait, ou par incruftation , ou au moyen des cendres de tour- bes , poflede un goût âcre & urineux ; mais je les prie de fe détromper ; car je puis les aflurer, que les fels faits au moyen des tourbes, font plus agréa- bles que celui qui fe fait par incruftation ; & que celui-ci eft incomparablement moins defagréable , que le fel commun dont nous nous fervons habituellement, (Tome I. Dad MÉMOIRE FOUR SERVR A L'HISTOIRE NATURELLE DES FOSSILES DES PAYS-BAS, PAR M. DE LIMBOURG » te jebne: -Lü à la Séance du 7 Février 1774. Dddi MÉMOIRE POUR SERVIR 4 L'HISTOIRE NATURELLE Des Foffiles des Pays-bas. L’uisrorRe naturelle du globe que nous habitons ; fa forme, fes produétions & Es phénomenes , méritent, par les avantages qu’on en peut retirer , l'attention du. Gouvernement ; d’ailleurs, par les difficultés que préfente cette matiere, elle eft digne que les fociétés favantes s’en occupent. Le globe.eft fujet : à divers changemens; à des trem- blemens de terre , à des inondations! Ba ‘Il a une certaine forme générale , fes parties en: ont de particulieres ; il y a des montagnes, des plai- nes , des vallons , des fources, des lacs, de fleuves, des mers, &c....… qu il importe aux hommes de connoitre , pour y habiter , voyager , travailler , & pourvoir à leurs befoins. Ce globe produit des foffiles , des végétaux , des animaux. » Chaque partie du globe en produit de » particuliers ; 5 il faut en faire la ’recherche pour four- » nir les matériaux propres aux diflérens arts; à Pagri- 364 _ MÉMOIRE > culture, à la métallurgie, à l'archite@ure, à la ver- » rerie , à la médecine, &c. . .. Pour ne m'en tenir qu'aux foffiles , dont je fais le fujet de ce Mémoire, il en eft peu dont on ne puiffe tirer parti pour difié- rens ufages. Il nous faut de quoi faire des brie ques , des murs, des pavés , des meules, &c.. fable, argi- le , caillou , craie, marne, ardoife , marbre, grès ; fouffre | vitriol , alun, métaux , ce font tout au tant de matieres fi utiles & même fi néceflaires : à la fociété, que dans tout pays où l’on en manque, on eft obligé de feles procurer d’ailleurs & à grands frais. On comprend donc par cette feule vue “générale de quelle importance eft l’'Hiftoire naturelle. Il y a deux méthodes de traiter l’Hiftoire naturel- le ; l’une, plus fimple & plus Ænfible, confifte à fai- re une colleétion de cabinet, avec une défcription mé- thodique de diflérens objets palpables , & à les ex- pofer aux curieux, afin qu'a force de les voir & de les remanier , on les diftingue par leurs noms, défi- nitions & caracteres , & que l’on fe mette en état de reconnoître par la comparaifon fenfible de ces ob- jets, comme d’autant d'échantillons, ceux de la même efpece , qui fe rencontrent par toute Ja terre. Cette maniere a encore l’avantage de préparer à des connoif- ‘fances plus élevées. L'autre méthode plus philofophique & plus diff- cile, exige qu'on examine les différens objets, leur qualité k quantité, fituation , ftru@ture, connexion , ana- le , & propriétés; qu'on y applique les regles de la phyfique générale , de méchanique, d'hydraulique : de chymie , &c..., Qu'on les compare entr'eux & avec tous les autres déja connus ou à connoïtre ; & enfin qu'on raifonne du connu à l'inconnu, des effets aux caufes , & des caufes aux eflets, pour connoïtre , 1 POUR SERVIR À l'HISTOIRE NATURELLE. 365 autant qu'il nous eft poflible, leurs qualités, & prin- cipalement celles, qui font rélatives aux ufages, qu’on en peut faire ; par exemple , leur fituation, quantité, indice , &c... C’eft par cette méthode, que des objets qui ne paroiïflent que de fimple curiofité, ne font rien moins qu'indiflérens ; tels font , par exemple, ces coquillages foffiles & pétrifiés , qu'on trouve renfermés & con- fondus parmi la fubftance des rochers ; ils exiftoient, fans doute , avant ces rochers , qui les contiennent ; la mer les y a donc dépofés ; elle a donc couvert tous ces rochers ; elle a donc formés ces rochers en couches paralleles & horizontales : de plus, fi les cou- ches font préfentement perpendiculaires à l'horizon, c’eit donc que des éruptions ou des abîmes ont pro- duit cette révolution; & fi quelques rochers préfentent aujourdhui un autre arrangement , c’eft que des inon- dations, des mers, des lacs, des fleuves & divers ac- cidens les ont dérangés : c’eft encore une confé- quence ultérieure, que non-feulement les rochers, mais que d’autres matieres qui les accompagnent, comme les métaux &c. en ayent fuivi les révolutions : enfin, puifque la mer, qui couvroit ces rochers , ne les cou- vre plus, elle s’en eft donc retirée , ou peu-à-peu, ou tout-à-coup , & en fe retirant fuivant des direc- tions différentes de celle de nos rivieres , elle a formé alors des plaines, des montagnes , des vallées, &c, J'ai jugé à propos, d'entrer dans ce préliminaire , efpérant que la difficulté, autant que l'importance du fujet, me feront trouver quelqu'indulgence, fi j'ofe eatreprendre lHiftoire naturelle de ce pays für un plan qui exige plus de connoïffances que je n’en ai. Le pays de Franchimont, que j'ai fouvent parcou- ru, de même qu'une partie de Limbourg , de Luxem- bourg, de Licse , de Stavelot & quelques autres, 366 MÉMOIRE renferme une très-grande variété de foffiles, que l'on peut, fans faire beaucoup de chemin , voir dans leur entier & dans leur véritable fituation; tels, en un mot, qu'ils y font raflemblés par la nature. C’eft cette col- leétion finguliere, dont je me propofe d’ébaucher la defcription : & bien qu’elle ne foit , peut-être, pas fi variée , que celle de quelques cabinets, elle ne laïfle pas d’être plus exacte & plus inftruétive par l’ordre qu'il y a entre ces différens objets. Cette defcription des foffiles du pays pourra fervir de fuite au mémoi- re que j'ai préfenté, depuis environ deux ans, à notre Académie fur la forme extérieure de cette contrée, en faifant voir comment les eaux, en y féjournant, & enfuite en fe retirant, en ont formé les plaines, les montagnes & les vallées ; (a) elle fervira auffi de Pré- liminaire à un Mémoire plus étendu, que j'ai entre- pris fur l’Hiftoire naturelle , tant de ce pays en particu- lier, que de tout le globe de la terre en général. Jedécrirai ici, autant qu'il me fera poffble, les fof- files dans l’ordre où on les rencontre, à commencer par les lieux les plus élevés & proche de la furface de la terre, & en finiffant , par ce qui eft plus intérieur & dans les lieux les plus bas. Voici, en dix articles {éparés , ce qu'on y rencon- tre & le réfultat de quelques reflexions qu’on peut y faire. ARTICLE I. (a) J'ai entrepris, depuis deux ans, un modele en plâtre, qui re- préfente en général la forme extérieure du pays que je décris. je comp- te y ajouter des échantillons de la plupart des fofiles , qu’on y ren- contre. Ce plan , quand il fera achevé , fervira beaucoup à éclaircir ce que j'avance fur l’Hiftoire naturelle, POUR SERVIR A L'HISTOIRE NATURELLE. 367 ARTICLE PREMIER. Des Tourbes. ‘C'eft un amas de plantes de différentes efpeces ; mais en débris, d’une couleur brune-noirâtre : la con- fiftance & les autres qualités en font très-altérées. On y reconnoît parfaitement la bruyere & le bouleau avec leurs écorces, troncs, branches & racines : il y à des troncs ou branches de bouleau de huit à dix pouces de diamètre. Il y en a des couches prefqw’hori- zontales dans des marais fur les hauteurs entre les ri- vieres de Spa, de Polleur, de Vefdre & de Roër à l'Eft du pays de Limbourg & de Franchimont : ces couches ont depuis deux ou trois pouces jufqu'à dix ou douze pieds d’épaifleur ; dans quelques endroits la couche eft féparée en deux par un lit d'argile blan- che ou bleuâtre, & quelquefois par des fragmens de rochers quartzeux. L'on rencontre encore un lit de tourbes pareilles fur quelques plaines inférieures, entr’autres près de Spa, fous un lit d'argile bleuâtre , l’un & l’autre de l’é- paifleur de quelques pieds : les troncs d'arbres de ces tourbes font couchés horizontalement : a voir leur con- fiflance & leur fituation on reconnoît que ces couches de tourbes ont flotté f& les eaux, qui couvroient les endroits où elles font préfentement dépofées avec lar- gile qui les accompagne. On feroit aufli tenté de croire, que ces plantes n’ont point végété dans le fol où elles font entañlées; ce- pendant, comme ce ne font que des plantes indigenes, il faut fuppofer qu’elles fe font ainfi multipliées dans Tome L Éce 363 MÉMOIRE ces temps reculés ; que notre continent , à peine for- ti des eaux, qui l’ont autrefois recouvert , & n'étant point encore peuplé d’hommes ni d'animaux, fe cou- vrit des végétaux , que des efpeces de ruifleaux for- més des pluies alors abondantes, ont entraînés fur les endroits les moins élevés des environs où il y avoit des lacs & des marais, dont l’eau & le froid en ont retardé le corruption. Je ne connois au rivage de la Meufe aucun endroit où il y ait des tourbes ; mais j'ai appris , que près de Jupille, village fitué à une démi-lieue plus bas que Liege fur la rive droite de la Meufe , l’on a depuis peu découvert un arbre très-gros, couché horizontalement fous une mafle de fable & d'argile à plus de trente pieds de profondeur. On retrouve aufli, près d'Amfterdam , des couches horizontales de tourbes, parmi lefquelles il ya des cou- ches d'argile & d’autres matieres , qu’autrefois la mer ou les fleuves ont pu y entraîner des hauteurs de ce pays, au moins en partie : car au-deflous de ces tour- bes de la Hollande, on rencontre à plus de quatre- vingts pieds de profondeur, des lits horizontaux de coquillages de mer: ce qui prouve que la Hollande étoit autrefois un grand golfe, qui a été comblé par les atterriflemens que la mer , le Rhin & la Meufe y ont formés. AAC CE IL Du Sable & du Flint. Ce fable eft vitrifiable , anguleux ou rude au tou- cher. Ce flint eft une pierre à fufil commune , opa- POUR SERVIR A L'HISTOIRE NATURELLE. 369 que & blanche à l’extérieur , un peu tranfparante & colorée à l’intérieur ; il eft en maflès raboteufes, irré- gulieres. On trouve ce fable & ce flint , entre Mal- medi & Spa, dans une plaine près de Hoquai, vil- lage au midi du Marquifat de Franchimont , fur la hauteur nommée les Fagnes, par les habitans du pays. On trouve les mêmes matieres dans une autre plai- ne près de Beaufays, village du pays de Liege, fur une hauteur qui eit entre Franchimont & Liege : 1l y a encore de pareil fable & flint dans la plaine éle- vée , dans laquelle eft fituée la citadelle de Liege fur la rive gauche & feptentrionale de la Meufe : ces matie- res y font dépofées en une couche horizontale peu épaifle & répandue fur le rocher , qui s'étend fous la plaine fupérieure de ces endroits : de Hoquai à Beaufays, & de-là à la citadelle de Liege, il y a une pente aflez réguliere dans la direction du Sud-Eft au Nord-oueft: ces trois plaines élevées ne font interrompues, que par des enfoncemens irréguliers, où font les plaines infé- rieures & d’autres intermédiaires , ou moyennes : c'eft à peu-près cette direttion qu'ont pu prendre les eaux du déluge ou de la mer, en fe retirant de ce pays vers les côtes de Hollande, avant qu'il y eût des rivieres entretenues par les pluies & qu’elles euflent formé les plaines de différens ordres , en creufant leur lit à l'en- tour des rochers, qui font la bafe de nos montagnes. Parmi Les fables & les flints de Hoquai , je n'en ai point trouvé qui décele la matiere calcaire par l’ef fervefcence avec les acides , au lieu que ceux de la citadelle de Liege contiennent une forte de craie ; c’eft apparemment , parce que les eaux, qui ont couvert autrefois tout le pays, en ont laiflé, en fe retiranr, le plus maflifen arriere, & ont charié plus en avant la matiere du marbre & des coquillages pulvérifésou dif. Here) 7o MÉMOIRE fous , qui seft dépofée en Brabant & ailleurs en for- me de craie ou de marne; parmi lefquelles il fe trou- ve des coquillages de mer. On remarque encore du fable & duflint pareil fur d’autres hauteurs du pays, entr’autres, près d’Aix-la- Chapelle & à Henri-Chapelle, village du pays de Lim- bourg , & près de Maftrichr. Les flints de tous ces endroits paroïflent contenir quelques veftiges de ver-à-tuyau,. d’orthoceratites, & d’autres coquillages de mer : j'ai même trouvé un morceau de Belemnite dans un flint ou caillou de Beaufays. ARTICLE III De l’Argile. Il y en a de différentes couleurs , blanche , rouge ;. jaune , bleuâtre , noire : l'argile jaune eft la plus com- mune. L’argile pure eft une terre, qui ne fait point. d’eflervefcence avec les acides , mais qui fe gonfle ,. fe divife dans l’eau, f réduit en une pâte ductile, &: enfin en fe defléchant à l'air & au feu devient folide ,, & même fe vitrifie, quelquefois en { bourfouflant en. une mafñle celluleufe , comme la pierre ponce & quel- ques efpeces de laves : elle contient toujours un peu: d'acide vitriolique , prefque toujours auffi une terre . ferrugineufe , & mème fouvent du fable , du mica, . des parties calcaires. La jaune & la rouge contiennent ordinairement du fer en ocre. On nomme glaife l'ar- gile la plus duétile , la plus tenace & la plus pefan- æ, & c'eft communément la rouge. Il'y a de Pargile , en couches. horizontales, fur POUR SERPIR À L'HISTOIRE NATURELLE. 374 toutes les plaines du pays & en couches inclinées fur les pentes des montagnes ; mais il n’y en a nulle. part en fi grande quantité, que fur les plaines infé- rieures & aux bords des rivieres. | L'argile fur les plaines élevées & dans quelques autres plus bafles , eft entremélée de fragmens angu- leux de rocher quartzeux,d’autant plus gros qu’elle eft plus enfoncée & proche du rocher qui forme labafe de la plai- ne ; ces fragmens font même affez fouvent de la nature de ce rocher même, qui paroïît fe convertir en argile. L’aroile dans les plaines les moins élevées, & fur- tout dans les inférieures , parmi lefquelles les rivieres ont leurs cours, contient outre des fragmens angu- leux , pareils à ceux , dont je viens de parler , des. fragmens & des débris des pierres arrondies de toute. efpece; ce fontles cailloux & les graviers de nos rivieres.. Parmi l'argile des plaines bafles , on rencontre quel- quefois du fable de montagne, du flint, des tourbes,, des mines & des fofliles de toute efpece , que les: eaux ont entraînés avec l'argile des lieux plus élevées. . AURVMEMRACGUENE 0 LOS Des Cailloux. Ces cailloux ne font pas des flints comme ceux des environs de Paris & des Pays-bas, où il y a beau- coup de marne & de matiere calcaire , entraïnées de: plus haut avec les flints; ce font , pour la plupart. des fragmens de rochers quartzeux ,de fchifte , de grès. &c….. que l’eau a détachés & entraînés des lieux plus élevés dans les plus bas , qui ont été arrondis par le frottement ou même par la diflolution , & enfuite de 72 . MISE MNO RIRNE 0, ER polfés par couches horizontales fur les plaines inférieu- res & particulièrement fur celles où coulent nos ri- vieres, Car on reconnoît parmi ces cailloux , les mé- mes couleurs , les mêmes lames, les mêmes variétés de couleur & de confiftance , que dans nos rochers quartzeux ; fur-tout on y retrouve ces criftallifations, qui paroiïflent comme des veines aux endroits où leur mafle a été divifée , & enfuite rejointe par un fuc pierreux & criftallin , avant que d’être entraînés loin des rochers, d’où ces cailloux proviennent. On ne ren- contre, parmi les cailloux de nos rivieres, que fort peu de flints irréguliers, & encore moins de flints arrondis : mais il y a, parmi ces cailloux une varié- té de matieres , quiont paflé par les fourneaux, com- me tuile, verre, laitier , &c.. qui font fouvent auf arrondies que les cailloux ; quoique ce foient des marie- res indiflolubles par les acides, & que leur mafñle , en fortant de la main des hommes, fût en fragmens an- guleux & très-irréguliers, II fe trouve enfin parmi ces cailloux une efpece de fable ou de menu gravier , qui ne font propre- ment que de petirs cailloux arrondis, comme auf un peu de fable de montagne. À RTC TEL (VE Des Rochers-quartzeux. Ce font des pierres d’un très-grand volume , com- pofées de matieres en lames paralleles , quelquefois différentes en couleur, épaifleur, confiftance, pefan- teur, &c.. Leur fubitance eft vitrifiable & indiflolu- ble dans les acides. Il ÿ a quelques blocs de pareils POUR SERVIR A L'HISTOIRE NATURELLE. 373 rochers , ifolés & pofés fur la furface des plaines ; mais ce font des morceaux de bancs épais , détachés d'un principal rocher par quelque accident naturel. Car les rochers qui forment la mafle générale du pays & fur-tout denos grandes montagnes , font abfolument en mafle compofée de couches paralleles de matiere femblable à ces blocs , qui paroïflent ifolés. Ces ro- chers font d’une matiere analogue à l'argile , les plus tendres des lames fe réduifent en argile , par une pul- vérifation opérée par le temps ; on peut même en former par trituration de l'argile propre à en faire des briques , & même de l’alun , moyennant l'addition de Vacide vitriolique. | _ Ï y à une fuite non interrompue de grands ro- chers quartzeux , fous les montagnes & les valées, depuis Salm jufqu’à Franchimont ; le plan de leurs la- mes eft quelquefois perpendiculaire à l'horizon, mais plus fouvent incliné en faifant face au fud-fud-eft. Le bord fupérieur de ces mêmes lames , eft conftamment dirigé en longueur de l’eft-nord-eft vers l’oueft-fud- oueft. Elles font fouvent brifées par des fentes irré- gulieres, la plupart, à-peu-près perpendiculaires à leur plan , & qui font remplies par une matiere pierreufe criftallifée en une fubfiance blanchätre & un peu tranf- parente. Je vais rapporter les matieres & qualités de ces lames de rochers dans l’ordre qu'elles tiennent , depuis Salm jufqu'au château de Franchimont. Dans les environs de Salm au pays de Luxembourg, ce font des lames de l’efpece des quartz, qu'on nom- me fchiftes , à caufe de leur peu d’épaifleur : elles font bleuñtres & en quelques endroits verdâtres; quelque- fois ftriées , comme fi elles étoient compofées de fila- mens , elles contiennent auffi, dans leur fubftance, un fable noirätre à facettes : on fair de ces lames des ar- doifes pour couvrir les édifices , $74 MÉMOIRE Au nord de Salm en approchant de Stavelot, ce font des fchiftes d’un jaune-brun, couleur qu’elles tien- nent d'une terre ferrugineuf : ces fchiftes font très-com- imuns dans tout le pays. bre Entre Stavelot & Malmedi & au midi de ces en- droits, ce font des lames compofées d’un fable lié foiblement par un fuc qui participe un peu de la na- ture du marbre. Enfuite on trouve des fchiftes bleuä- tres, d’une matiere entremélée de pyrites cubiques, ou marcaffites , dont l’épaifleur eft depuis une ligne jufqu'à quatre. . Au nord de Malmedi, on rencontre des lames ou des bancs épais compofés de fragmens, dont la plu- art font de quartz, & quelques-uns de marbre; pref- que tous ces fragmens font arrondis comme les cail- Joux de nos rivieres, & liés par un fuc , en partie ferrugineux , en partie calcaire. Parmi ces cailloux de marbre , il yen a debleus , de blancs, de jafpés & qui contiennent une quantité de coquillages de mer. Plusen deca, entre Malmedi & Spa, ce fonttantôtdes bancs épais de rochers quartzeux , & tantôt des la- ames de fchiftes d’un jaune-brun , excepté près de Spa & du Sart, où l’on rencontre encore des fchiftes bleuà- æres, dont quelques lames font propres à faire de l’ar- doife , & dont quelques autres, qui contiennent des pyrites, font propres à fournir de lalun. Entre Spa & Franchimont, il y a tantôt des fchiftes d’une couleur brune-jaunâtre , quelquefois rougeître, & tantôt , mais plus rarement , des lames ou des bancs épais d’une pierre fablonneufe , qu'on nomme grès , & des bancs d’une pierre compofée de fragmens de quartz , la plupart arrondis comme les caïlloux. Ces bancs caïllouteux reflémblent à ce que quelques Au- teurs nomment Poudingue, & même un peu au gra- nit, POUR SERVIR À L'HISTOIRE NATURELLE, 375. nit, excepté qu'ils ne font point mouchettés de talc noir. On en fait des meules à tan & à farine. C’eft fur les côtés des montagnes , qui penchent vers les rivieres, qu'il eft le plus facile de voir à dé- couvert la fituation des lames de ces rochers, (a) & für-tout le long de la chauflée, qui conduit de Theux à Spa; mais il y à des quartiérs de rochers détachés de la mafle principale, & dont la fituation eft déran- gée : ce n’eft ordinairement que dans dés foffés pro- fondes, creufées au milieu des plaïnés füupérieures, &c non à la furface d’un rochèr dérangé par les inonda- tions & par d’aütres accidens, qu'on pourroit voir exac- tement la véritable fituation des lames d’un rocher, qui forme la bafe d’une montagne ; elles y font fou- vent plus perpendiculairés , & rarement fort inclinées fur l'horizon ; cependant les lames ne font pas tou- jours plates ni Continues , elles font même quelque- fois courbées en forme de voütes, & terminées en s'aminciflant en forme dé coin; mais cela arrive ra- rement , tant aux lames de rochers-quartzeux , que des rochers calcairés : lorfque cela arrive, il me pa- roit que c’eft ordinairement proche dés endroits où il y a des pyrites où des métaux. | T1 eft à remarquer qu'aucun rôcher, depuis Salim jufqu'a Franchimont , ne contient des coquillages de mer , à l'exception des cailloux calcaires de ces rochers caillouteux, qui font au nord de Malmedi ; ces cailloux ont fait partie d’an marbre, d’une formation anté- rieure à celle des lames de ces rochers , dans léfquels on les-voit aujourdhui, & qui cependant, n'ont pu (æ) Quoique les frochers foient prefque par -tout récouverts de fra- amiens & d’aroile , je citerai quantité d’endroits, entre Salim & Liege , où Ton voit leur fituation perpendiculaire. Tome I. Fff 376 MÉMOIRÉ | être formés que dans la mer, auffi-bien qué les mar- bres à coquilles , qui y font réduits en cailloux ar- rondis (a) & que les fchiftes où il n’y a point de coquillages. Depuis Franchimont jufqu'à Liege , & au-delà, le pays eft encore prefque tout rempli de rochers-quart- zeux, qui occupent principalement les hauteurs du pays, mais dont la plupart ne confervent plus la même fituation , que ceux qu’on voit depuis Salm juf- qu'à Franchimont : car ici le bord fupérieur des la- mes de rochers-quartzeux me paroît, à la vérité, le plus fouvent dirigé de left-nord-eft à l’oueft-fud-oueft ; mais il l’eft quelquefois autrement , & leur plan eft incliné à-peu-près auffi fouvent vers le nord, que vers le midi; il y en a même, dont le plan eft horizon- tal ou penché vers l’eft ou vers l’oueft. Les rochers de marbres qui paroïflent , par intervalles & parmi les enfoncemens ou vallées, qui font entre ces ro- chers-quartzeux , font tes feuls , dont les lames gar- dent aflez conftamment la même fituation , que celle des rochers-quartzeux d’entre Salm & Franchimont. On rencontre des rochers caillouteux , dirigés de l'eft-nord-eft à loueft-fud-oueft entre la Reid & Pol- leur , entre Mangonbroux & Pepinfler , entre Fraipont, & Beaufays, & encore ailleurs : parmi ces cailloux, Re (a) Il weff prefque point de marbre, proprement dit, dans lequel lon ne reconnoifle des coquillages de mer : dans certains marbres , tels que les pierres lumachelles | on ne diftingue que polypiers, madrepores,, coraux. bivalves. &c. de maniere à ne pouvoir les méconnoître : tous les marbres de ce pays. & même la plupart des marbres étrangers fe: convertiflent , par le feu , en chaux , ainfi que tous les coquillages qu'on retire de la mer : ils font aufli tous arrangés par bancs paralle- les : tout démontre enfin qu'ils font compofés de coquillages marins , ou entiers ou brifés, & même la plupart en difolution fpatheufe , criftal- lifée, par conféquent dans le fond de la mer. Voyez Chymie experim.. de M. Baumé, tom, I. pag 165. Es - 0 étietelntitet Out . _— POUR SERVIR À L'HISTOIRE NATURELLE, 377. il y en a de noirs qui reflémblent au bafalte, étant propres à fervir de pierre de touche; ils {ont plus pe- fants & plus noirs qu'aucun autre rocher-quartzeux du pays ; les lames de cette forte de rocher-caillou- teux font fort épaifles & plus conftamment perpendi- culaires que celles des autres rochers-quartzeux. Quant aux pierres de grès, (a) ou pierres fablon- neufes incalcinables, &c. elles ne font pas rares, de- puis Franchimont jufqu’à Liege : on croit remarquer qu’elles font plus communes proche des endroits où il y a des houilles & que c’en eft un indice. Mais les fchiftes noirâtres , qui renferment des empreïntes de végétaux , en font un plus afluré ; on trouve des - fchiftes’ pareils , à côté des bancs de houilles parmi les rochers-quartzeux , entre Franchimont & Liege : jen dirai encore un mot ci-après. On trouve quelquefois des pyrites globuleufes de fix à huit lignes parmi la fubftance des grès. Mais la plupart font décompofées, & ne font plus qu'une mine de fer ; on rencontre mème , maïs rarement, des couchestrès-minces de mine de fer, parmi les bancs de grès & de rochers calcaires. Entre Franchimont & Liege, les lames des fchiftes bruns font fouvent ren- verfées prefque perpendiculairement fur les lames des calcaires, & ces fchiftes contiennent fouvent des co- quillages de mer : je conjecture que leurs lames étoient autrefois continues avec celles des calcaires, mais que les inondations ou d’autres accidens les ont rompues & ont renverfé la portion quartzeufe fur la portion calcaire. (a) Le fable & les pierres de grès font plus communs dans le voif- nage des mines de fer & des pierres calcaires : ne proviennent-ils point au moins en partie de matieres calcaires , aufli-bien que la marne gri- fe qui ne conïifte que dans un fable vitrefcible avec un peu de flint & de matiere calcaire ? ge F ff ij 378 MÉMOIRE ARTICLE VI. Des Marbres ou matieres calcaires. Le marbre de l’efpece la plus commune., eft mêlé d’un peu de fable anguleux & vitrifable ; il eft d’une couleur bleue-päle , que les impreffions de l'air blan- chiflent avec le temps. Tel eft celui des carrieres de Namur ; on en fait des pierres de taille & de la chaux dans tout le pays. Les lames ou bancs de ces. rochers ont quelquefois plus, de fix pieds d’épaifleur. Le bord fupérieur de leur banc eft aflez conftamment dirigé de l'eft-nord-eft à l’oueft-fud-oueft , & Jeur plan eft prefque toujours perpendiculaire à l'horizon , ou penché plus où moins vers le fud, comme tous les rochers-quartzeux, d’entre Salm & Franchimont, El y a cependant quelques lames de rochers-quartzeux, qui font paralleles aux bancs des marbres, mais elles en font éloignées ordinairement , & les lames d’une. efpece ne font que fort rarement confondues & mé- lées parmi les lames de l’autre. Car les rochers-quart- zeux s'étendent prefque par toutes les plaines des hau- teurs & par quelques inférieures en couvrant les ro- chers de marbres, qui ne paroïflent ordinairement .. que dans les enfoncemens ou vallées , qui font entre les rochers-quartzeux. Aüïnf tous les rochers du pays , tant les calcaires que les quartzeux , à l’exception de quelques portions fuperficielles , renverfées accidentellement, y font dans un ordre très-régulier , & ils y tiennent une fituation aflez conforme & conftante , le bord fupérieur de leurs lames fe dirigeanten longueur de left à l’oueft, . POUR SERVIR A L'HISTOIRE NATURETLE.-379 & ‘leur plan étant à-peu-près perpendiculaire à l’hori- zon , comme fi ce n’étoit qu’une feule mafle très-éten- due au loin parmi le pays, & opus en terre. Ceft un phénomène , qui mérite, fans doute , la plus grande attention, que ce parallelifme ou cette fui te remarquable de toutes ces lames perpendiculaires appliquées (a) parallelement l’une à plat contre l’au- tre , que l’on rencontre conftamment depuis Salm juf qu'au château de Franchimont ; parallelifme , que l’on retrouve, du moins par intervalles, depuis Franchi- mont jufqu'à Liege , & au-delà parmi la plupart des rochers, & fur-tout parmi les calcaires : car fi ia maf- f totale de ces différens rochers , tant les quartzeux que les calcaires , qui forme du fud au nord une épaifleur de plus de douze lieues (ou de 36000 toi- fes ) prouve par fa difpofition en lames paralleles . & par les dépouilles de la mer, qui en font fouvent par- tie, que les matieres en ont été dépofées autrefois em couches horizontales les unes par deflus les autres fous les eaux d’une mer très-vafle & très profonde , cela ne pouvant phyfiquement être arrivé d’une autre maniere ; ileft de toute conféquence , que l’un ou Pautre bord de cetre maflé énorme de rochers ( le méridio- nal ou le feptentrional ) a été élévé ou abaïflé dans des temps poftérieurs au point , que le plan des la mes , dont il eft compolé, fat à-peu-près perpendi- nie à l'horizon , comme nous le voyons aujour- d’hui. Cesremarques, qui font dela plus grande importance: oo à + (a) Ce rocher à bancs paralleles pourroit être. comparé à un livre. entrouvert , dont les feuilles font moulues , déchirées & repliées irré- gulierement ‘fur tranche : dans ce fens où peut dire. que le monde eff un gxand livre , dont les débris récouvrent les bords. Un cabinet! eft un abregé de ce livre fi difficile à déchiffrer. 380: MÉMOIRE, ; pour la recherche des fofliles, feront expolées plus amplement à une autre occafion, lorfque je ferai ob- ferver que le même ordre paroït avoir lieu parmi les plus anciens rochers, qu’on rencontre par toute laterre, & dont, felon les Minéralogiftes, font formées les montagnes, qu'ils prétendent être primitives & les plus fertiles en minéraux (a). Dans quelques endroits le marbre commun eft rem- pli de beaucoup de fable : lorfque le fable eft lié fo- lidement par une matiere partie calcaire , partie fer- rugineufe , il forme une pierre dure , propre à paver; mais quand ïl eft lié foiblement par une matiere pw rement calcaire & grisâtre, il porte le nom de mar- ne ; il peut fervir à compofer du ciment & à fertili- fer les terres aroileufes. Il y a dans les environs de Theux & ailleurs de la marne , en bancs contigus & paralleles, à ceux de marbre commun ; de forte que la marne grife paroïît n'être que ce marbre dé- compofé. Enfin, lorfque le fable eft lié par une ma- üere calcaire analogue à la craie & au plâtre, c’eft une pierre de taille propre à bâtir, tels font les ro- chers des environs de Luxembourg & celui des envi- rons de Maftricht à la rive gauche de la Meufe; ils contiennent l’un & l’autre des coquillages de mer, & celui des environs de Maftricht, qui eft en couchés horizontales , & par conféquent d’une origine pofté- rieure à celle des marbres du pays ,eft en bancs fé- parés par des lits de flints, qui font en petites pieces difperfées. T1 y a à Theux( chef-lieu du Marquifat de Franchi- (az) Voyez entrautres le Traité de l'exploitation des mines, traduit de l'Allemand , par M Monnet. in 40. imprimé en 1773., à Paris chez Didot, pag, 3 & fuivantes, 3 L'iag POUR SERVIR À L'HISTOIRE NATURELLE, 381 mont ) du marbre d’un beau noir, fans fable, qui prend un poli parfait : on en trouve un pareil, ou peu s’en faut, près du château de Montjardin, dans la province de Luxembourg , à deux lieues de Theux : il y a à Limbourg du marbre jafpé , .mais mélé de . fable; il n’eft pas fufceptible d’un poli exact ; ce mar- bre eft bigarré d’une quantité de coquillages de mer du nom d’orthoceratites , qui y forment des lignes blanchätres : mais le plus beau marbre du pays, eft celui qu'on tire de la carriere de St. Remi, près de Rochefort, au pays de Liege ; il eft bleu , blanc & rougeätre , & prend un poli des plus fins & des plus éclatans. Il y a auffi dans ce pays de Ia craie blanche, par- ticulierement aux environs de Clermont, village du pays de Limbourg & à Spawen , village fitué fur la rive gauche de la Meufe proche de Maftricht. Ces craies contiennent des coquillages de mer. La craie eft une matiere calcaire provenant du marbre & de coquillages ; car ces matieres , en fe diffolvant à l’air ou dans l'eau , ou en { divifant par la trituration réduifent alors en une poudre blanche , qui reflemble ‘à la chaux éteinte & deflechée; c'eft, à-peu-près, l’ori- gine de la craie. ‘ Les marbres & les autres matieres calcaires con- tiennent aufli différentes matieres étrangeres, & fur- tout une très-grande quantité de coquillages de mer pétrifiés : il en fera fait mention dans un article féparé, 202 MÉMOIRE ARTICLE VII De la Houille. (a) Ceft un combuftible foffile & pétrifié; ré- pandant au feu une odeur-de poix fulfureufe ou de pétrole. On la nomme communément charbon de ter- re: cette matiere elt en lames paralleles à celles des rochers quartzeux ; elle y eft renfermée; mais elle en eft très-différente , en ce qu’elle elt plus légere , ref- femblant par fa couleur & fa confiftance à une forte de poix ‘endurcie par le mêlange de foufre & par un fuc calcaire , répandu parmi les fentes en forme de criltallifation pierreufe. . Les fchiftes qui leur font contigus & paralleles ; font noirs & portent des empreintes de végétaux , qui, de méme que l’odeur & l’analyfe de la houille, indïi- quent, que cette matiere combuftible provient de vé- gétaux , elle eft parfemée de pyrites en mafles , pe € (a) Ce n’eft qu'improprement que la houille a été nommée carbon de terre & même bitume. La houille n’eft que le‘produit des végétaux, mais altérés autrement, que par le feu. Car outre qu’elle fe réduit per le ‘feu en charbon , & même en une efpece de vitrification , on ne la rencontre dans les fouterrains qu’en lames (paralleles , & contigues à des lames de fchiffes, fur lefquelles font des empreintes d’une très-srande quantité & diverlité de végétaux : elle n’y eft point accompagnée de pierres volcaniennes ou vitritiées, ou formées en mañle irréguliere , àla maniere des laves, comme l’eft le vrai bitume connu fous ce nom, & qu’on rencontre auprès des volcaus. Gn pourroit dire plutôt, que la houille eff une matiere grafle , figée & minéralifée par l'acide vitriolique & par différentes matieres minérales, végétales, argileufes, calcaires, ferrugineufes : aufli peut-on en former ou retirer fans additions par les procédés chymiques , du pétrole , du bitume , du nephte , du jayet,, des alkalis , du foufre , de l'acide vitriolique , du fer, du vitriol de mars, de terre argileufe, de l’alun ; une terre abforbante , de la félénite calcaire. POUR SERVIR À L'HISTOIRE NATURELLE. 383 le fer contribue avec quelqu'autre matiere végétale à à noirceur, qui { perd parle feu, tant dans la houille, que dans les fchiftes noires. Au refte \ on n'y voit aucune efpece de coquillages, mais il y en a quelque- fois, parmi les fchiltes bruns du rocher, dont les houilles font partie , & d’ailleurs le marbre commun qui en contient toujours , n’en elt jamais fort éloigné ; car on ne rencontre en ce pays des houilles que dans les endroits où il y a des marbres, & l’on doit pré- fumer que les animaux à coquilles, dont les marbres font formés , devoient trouver leur fubfiftance parmi les végétaux, qui ont fourni la matiere de la houille, que , par conféquent , ils ne pouvoient en être fort éloignés (a). T1 n’y a de la houille que dans une bande de ter- rein qui s'étend d’eft-nord-eft à l’oueft-fud-oueft , ayant en longueur plus de 40 lieues, fur environ ro de largeur , s'étendant depuis les environs de Rolduc & d’Aïx-la-chapelle, par les environs de Limbourg, de Herve, de Liege, d'Hui , d'Andenne & de Char- leroi jufqu'à Valenciennes. On en retire une quantité à Herve, pays de Limbourg ; à Soumagne pays de Liege ; dans tous les environs de Liege , dans le terréin entre Liege & Hui , à Andenne , à Charle- — (a) Lesrochers à houilles de ce pays font à la proximité des rochers calcaires , comme ceux-ci ils renferment fouvent des coquillages de mer: . ces rochers qui contieunent les houïlles font compoñfés de lames paral- leles entrelles ; lesthouilles qui y font renfermées:, font également en lames qui leur font paralleles-: les lamés de fchiftes contigues aux lames de houille , «portent ici comme ailleurs, conftamment des empreintes de végétaux d’une grande variété d’efpeces: la houiïlle & les pyrites qu’on y rencontre, font ex quelque maniere criftallifées: tout porte à conjettu- rer que cette pierre combuftible provient de végétaux, alterés, diflous & pétrifiés , & qu’elle eft noircie par la matiere ferrusineufe, analogue à celle des pyrites : tout enfin tendà prouver que le regne minéral ne tient fon phlogiftique que du regne végétal & quelque peu du regue animal, Tome L. Gpg 334 MÉMOIRE | roi & à Valenciennes. Il paroïît que cette bande fe prolonge encore plus loin à left & à l’oueft : enfin on en a même trouvé un peu dans le Marquifat de Franchimont , aux environs de Theux. On ne trouve dans le pays ni naphte, ni pétrole, ni jayet ; mais la houille fournit par la diftillation une huile bitumineufe , qui reflëmble au pétrole & qui s’épaiflit, par la chaleur, en vrai jayet; elle four- nit auffi par la diftillation de l’acide vitriolique & à la fin un alkali volatil. Les pyrites qu'on y trouve, font propres à fournir tous les produits, qu'on ob- tient des pyrites ordinaires , le foufre , le vitriol de mars , GC... Comme c’eft dans les pays mélangés de rochers quartzeux & calcaires , qu'on rencontre la houille, & ‘qu'il paroït qu'il y a de pareils rochers enterrés à une certaine profondeur fous la marne & le limon ou terreau du Brabant & de la Hollande, il eft à con- jeurer qu'on pourroit y trouver auffi de la houille, comme on en trouve dans un terrein, à-peu-près fem- blable fur la rive gauche de la Meufe en Hesbaïe , en- tre Liege & Hui; & comme on vient d'en trouver, depuis trois où quatre ans, entre Hui & Namur, près d’Andenne, fur la rive droite de la Meufe. { ARTICLE VIII. Des Crifaux foffiles. Ces pierres criftallifées font anguleufes & tranfpa- rantes. Il y en a en général de deux fortes : quel- ques criftaux font quartzeux & engagés dans la maf fe de ces rochers ; ils ont une origine commune avec. POUR SERVIR À L'HISTOIRE NATURELLE. 385 eux & participent de leur qualité , entr’autres de celle d'être vitrifiable & de faire feu avec l'acier : prefque tous les rochers quartzeux du pays font remplis dans leurs fentes de ces concrétions blanches & plus ou moins tranfparantes , qu'on nomme communément des veines; c'eft la criftallifation quartzeufe La plus commune. La plus belle criftallifation quartzeufe que je con- noifle dans le pays , fe trouve parmi les rochers quart- zeux des environs de Vifé, à deux lieues au-deflous de Liege , fur la rive droite de la Meufe; elle eft dure, tranfparente & en belles facettes : elle imite en quelque forte le diamant. Certaines pierres de grais font compofées de gros grains de fable un peu tranfparans & à facettes unies: on trouve cette forte de criftallifation dans la forêt de Theux, fur la rive gauche de la riviere de Spa, prefque vis-à-vis du village de Marteau (a): quelques pierres de graïs, au lieu de ces gros grains de fable, contiennent de ces paillettes luifantes qu'on nomme mica & qu'on retrouve également parmi l'argile du pays ; avec de la matiere calcaire , on a compofé du fable & du flint (b}), avec des matieres vitrifiables, telles que le flint, le quartz, l'argile, on a formé du mica (c). On peut rapporter , à cette efpece, une criftallifa- tion fort irréguliere & celluleufe, qui renferme dans fes interftices des parcelles de pyrires & de mine de a es RE ne men * (a) J'ai un gros criftal de roche à fix pans, trouvé dans les argiles des environs de Theux , & encore un petit dans un caïllou de grais, trouvé à la riviere : ce qui prouve que nos rochers quafzeux en con tiennent dans certains endroits. £ (5) Hiftoire de l'Académie des Sciences de Paris, 1746. Me (c) Voyez Chymie expérimentale & raifonnée, par M. Baumé, Impri- mée à Paris en 1773. tom. I, pag. 332 , 362, 363 > 364. 561) 236 st MÉMOIRE | fer. On en trouve près de Theux, & près du village du Sart : des Naturaliftes nomment Drufens ces {or- tes de criftallifations. Les autres criftallifations font des matieres calcaires, ou participent de leur nature; la plus commune eft celle qui fait corps avec les marbres, qui en tire fon origine & qui a, comme eux, la propriété d’être cal- cinable ; on la nomme Spath. Elle remplit les fentes dans les marbres & paroït à leur furface en maniere de veines blanches : dans les grottes couvertes de mar- bre , elle forme des incruftations, des ftalaétites, des ftalagmites , &c.…. J'ai même des coraux & d’autres coquillages réduits en fpath par criftallifation, que j'ai trouvés dans les environs de Franchimont é&c ailleurs. Les fpaths d’un certain volume ; font compofés de lames plates, paralleles & rhomboïdales; les italaci- tes en font formées : ce font des cones attachés au haut des cavernes par leur bafe, & produits par le fuc du marbre diflout, qui s’introduit dans le centre de la bafe du cone renverfé , qui, de-là, fe porte dans toute la mafle qu’elle fait croître en tout fens, comme par une efpece de végétation : il y a par-tout le pays des cavernes qui en renferment ; les principales font fous les marbres de. Remonchamps au pays de Luxem- bourg , & fous les marbres de Rochefort, au pays de Liege ; les rivieres qui s'enterrent, ont donné lieu s à ces cavernes. | Autre forte de criftallifation calcaire. Ce font des mafles laiteufes, celluleufes & comme cariées de Ja même maniere, que les pierres meulieres de la Fer- té fous Jouarre en France, elles reflemblent un peu a l'éponge pétrifiée, & ne font point calcinables au feu , ni diflolubles par les acides: comme elles tien- nent à des rochers calcaires, & qu'elles font dans des L-] POUR SERVIR A L'HISTOIRE NATURELLE. 387 endroits, où l’on trouve du plomb & du fer, il me paroït qu’elles proviennent d’une terre calcaire , dif- foute & neutralifée par l'acide vitriolique , ou par quelqu'autre diflolvant. C’eft encore une efpece de drufen felon des Naturaliftes , on en trouve près de Theux , à un endroit qui porte le nom de Fond- d'Oneux. Le gypfe, quoiqu'indifloluble par les acides , eft encore une criflallifation d’une matiere calcaire, que l'acide vitriolique a diffoute : il y en a beaucoup dans le Duché de Luxembourg ; il eft orainelé , & non feuilleté ; c’eft une forte d’albâtre. 1 pourroit s’en trou- ver dans le Marquifat de Franchimont , pays rempli de marbre & de pyrites, dont on peut en faire d’arti- ficiel , le plâtre n'étant formé que d’une craie diffou- te par l'acide vitriolique ; aufli en ai-je trouvé dans la riviere de Theux un morceau pefant plus d’une li- vre , & dans lequel f trouvoit une pyrite enchaflée. . Je range le flint, quoique vitrifiable , à la fuite des: criftallifations calcaires ; parce qu'il eft compofé de. matiere calcinable , qu’il eft prefque accompagné de marne & de craie, & qu'on peut limiter, comme l'a fait le célebre M. Geoffroi , avec la chaux & le, Hit. de vinaigre diftillé. Cette forte de foffile mérite d’au- Sc.de Paris: tant plus le nom de criftalliftion, qu'il eft tranfpa-17# rant , & quelquefois chargé de criftaux à facettes ; tels que j'en ai vu dans un morceau de flint, trouvé près de Beaufays, & tels qu’en contiennent aufh quel-- ques agathes. Outre le flint de nos montagnes, dont j'ai parlé , on- trouve encore une efpece particuliere, qui, par fa couleur, ne différe guères du marbre commun. Il y en a, dans quelques endroits du Marquifat de Franchi- mont, parmi la marne grife &cfur la rive gauche de la 88 MÉMOIRE Neue , entre Liege & Maftricht, parmi Îes pierres de fable & de craie : ils font , à-peu-près, de même couleur, mais plus cranfparens : les environs des ri- vieres du Brabant contiennent une quantité de flints de différentes couleurs, la plupart arrondis en for- me de cailloux : on en trouve qui égalent en beau- té les agathes, cornalines , calcédoines , &c..: qui font des pierres précieufes analogues au flint. On peut en faire de très-beaux ouvrages de gravure. AUR) DCE TOME Des Pyrites, des Métaux & demi-Meétaux. Les pyrites du pays font de ces foffiles à brillant métalliques , de couleur jaune , comme celle du laiton, & dont on peut retirer du fouffre , du vitriol mar- tial , du fer & de l'acide vitriolique. Parmi ces py- rites, il y en a de cubiques & d’autres ftriées & glo- buleufes. Les cubiques font plus jaunes, plus brillan- tes , plus dures, moins corruptibles à l'air & contien- nent probablement plus de foufre ; les autres plus pä- les, plus obfcures , plus altérables, en contiennent peut- être moins. Les pyrites cubiques font plus communes parmi les fchiftes, & les globuleufes parmi les pierres de grès ; les globuleufes font ordinairement ifolées. Il y a auffi quelquefois des pyrites cubiques & des pyrites confu- fes dans le marbre commun, mais fort rarement. Les pyrites , & fur-tout les confufes, ne font nulle part fi communes, que parmi les mines de fer & parmi les houillieres & dans leurs environs, où elles font ordi. nairement entaflées en mafles irrégulieres, POUR SERVIR À L'HISTOIRE NATURELLE. 389 Les pyrites font proprement du fer minéralifé par le foufre , mais on ne les exploite pas pour le fer, parce qu'il y en a fort peu , & que d’ailleurs le fou- fre rend le fer aigre & caflant, & même le calcine en confumant fon phlosiftique dans les fournaux. Les endroits du pays où l’on retire le plus de pyri- tes pour avoir du foufre & du vitriol , font Haut- heim près de Limbourg (a) & Chaufontaine, dans la Principauté de Liege , où elles font mêélées avec une quantité de mine de plomb. On en a tiré autre- fois , dans les environs de Theux, aux endroits où il y a des mines de fer & de plomb. Il y a encore des pyrites du côté d'Aix la-Chapelle & de Rolduc, où il y a des houilles également, & c’eft de ces pyrites que provient la chaleur des eaux minérales d'Aix, qui fourniflent des fleurs de foufre (b). Toutes les mines qu’on travaille dans le pays, & fur-tout dans les environs de Theux, qui en font rem- -plis,.ne font qu’une chaux defer ou terre ferrugineu- fe, dépourvue de phlosiftique :elles font, ou fous la forme d’une terre ocreufe ou de pierre, & contiennent une matiere vitrifiable , qui eft , ou quartzeufe , ou gypfeufe, ou filicée, (c) ordinairement en mafle dure, irréguliere , & quelquefois en mafñle celluleufe , quel- quefois auffi en ces mafles arrondies & creufes, qu’on nomme geodes ou étites , ou pierres d'argile, d’un volume aflez gros , comme depuis un jufqu’à huit ou dix pouces: les parois intérieures des étites & de quel- (a) Les pyrites de Hautheim, qui font près de la furface de la terte, font converties en mines de fer, en perdant leur phlogiftique , par l’ac- cès de l’air humide. (Bb) Voyez l'Eflai fur les eaux minérales d’Aix-la-Chapelle, par M. Lu- cas , traduit de l’Anglois, aux articles 73, 280, &c. (c) De la nature du flint, autrement //ex. 390 MÉMOIRE ques autres portions de mines, font ordinairement ta- piflées d’une croûte mince de matiere ferrugineufe criftallifée en aiguilles noires, qui font perpendiculai- res à la furface intérieure. Parmi ces mines de fer il s'en trouve quelquefois, dont l’intérieur eft encore minéralifé en pyrites : jen ai trouvé près de Theux , & au-delà de Liece , ce qui fait préfumer qu'elles ont été toutes dans l’état de pyrites ; qu’elles ont enfuite perdu de leur foufre, & qu'il n’en eft refté qu'un peu d’acide ou d’efprit fulfureux , neutralifé par la terre ferrugineufe & par la matiere pierreufe , qui en a endurci la mafle. Cette partie pierreufe de la mine provient probablement d’une matiere calcaire , altérée comme le flint, ou le gypfe, par l’union d’un acide fulfureux, ou d’un autre dif- folvant particulier ; car les mines du pays repofent ordinairement fur un terrein de marbre ou de mar- ne; de plus quelques teftacées, que j'ai trouvés, & dont je ferai encore mention à l’article fuivant, font convertis en mine de fer; ce qui vient encore à l’ap- ui de cette conjecture, c’eft que pour abforber l’a- cide du foufre, refté dans les mines de fer, autant que pour fondre & purifier ce métal, l’on y mêle dans le fourneau de la pierre à chaux, qui sy vitri- fie conjointement avec la matiere terreftre ou pierreu- f de la mine en forme de fcorie ou de laitier. Dans les environs de Theux , où l’on tire du fer en abondance depuis plufieurs fiecles, les endroits où l’on en trouve font ceux , qui forment la féparation des rochers quartzeux d’avec les rochers calcaires, en- tre le pays blanc &c le pays noir, comme difent nos Mineurs ; entendant par le pays blanc , le calcaire, & par le pays noir, le quartzeux. Dans Re] POUR SERVIR A L'HISTOIRE NATURÉELE. 39€ Dans ces endroits la mine eft comme répandue par tas irréguliers dans des terreins, au fond defquelles on rencontre aflez fouvent le marbre ou la marne grife : mais la mine y eft ordinairement recouverte & enve- loppée d'un gros volume d'argile , de fable & quel- quefois de fragmens de rochers quartzeux. L’argile . & le fable , qui accompagnent les mines, font noirs, jaunes , rouges ou blancs. L’argile noïre avoifine les meïlleures mines, qui font brunes ou noires & pleines d'étites. L’argile jaune ou blanche ne couvre guères que les mines en grofles maflès plus pierreu- fes que ferrugineules, reflemblant , en quelque facon, au flint le plus groflier , par une petite tranfparence de l'intérieur & à une mine de fer, par la couleur jaune ou rouge de quelque portion de l'extérieur. On voit près de Chevaumont & d’Oneux , au milieu de campagne, de ces pierres qui ont, depuis un demi- pied jufqu'à fix ou huit pieds d’épaifleur ; on les nom- me roches de minieres. Le terrein aux mines du Marquifat s'étend en lon- gueur de l’eft-nord-eft à l’oueft-fud-oueft, de Polleur à la Reid , & d'Oneux à Hodbomont ; les rochers quartzeux y ont une fituation moins réguliere & moins conforme qu'ailleurs ; car leur plan s'enfonce affez fouvent vers le nord , prefque perpendiculairement fur les plans des pierres-à-chaux qui font face au mi- di : quant aux filons des mines , ils defcendent obli- quement du nord au midi, parallelement aux plans des rochers calcaires ; qui terminent ce terrein au nord & quelquefois aufli perpendiculairement à leur plan, comme les fentes des rochers : rarement trouve-t-on des mines de fer hors de ce terrein, finon en cou- ches minces , renfermées entre deux bancs de pierres Tome I, Hhh 2 AN MNÉUM LOWER FE") de grès, dans les rochers quartzeux, qui font près de ce terrein. l . L'état de pyrites & celui de mines, font les feuls dans lefquels l’on trouve le fer dans le pays ; il ne sy trouve point de fer foffile entierement formé, ni aitirable par l’aimant : il y a, cependant, parmi les mines de fer de ce pays une grande variété, ce qui provient principalement des matieres étrangeres, qui leur fontalliées, telles que la matiere calcaire, le plomb, le zinc , le cuivre, &c. _ On retire du côté de Hui & de Namur, une mi- ne de fer particuliere de couleur de brique; elle pa- roit comme un aflemblage de petits graviers rou- eâtres ; elle contient un peu de matiere calcaire, qui la rend facile à fondre (a). Il y a dans quelques endroits , des mines de fer, qui peuvent tenir un peu de plomb, comme à Oneux, & Beaufays, parce qu'il y a du plomb dans les en- virons ; ces mines font le meilleur fér : d’autres con- tiennent aufli un peu de zinc, qu’on retrouve fubli- mé au haut des parois des fourneaux. El y a auffi une efpece de mine, qui, probablement contient quelque peu de cuivre, qui fe décele par une couleur verdä- tre , qu'elle occafionne à la flamme des fourneaux ; elle donne un fer aigre & caflant. MAT - Il y a, comme je viens de le dire, des mines de plomb dans les environs de Theux , aux endroits où l'on retire la mine de fer, ainfi qu'a Chaufontaine, dans le même endroit où l'on retire les pyrites. On trouve aufli à Theux de la terre d'ombre ; ce fofile EE —— ————— ——— —— ——————— (a) Ce qu’il y a de fingulier, c'eft que , malgré cette matiere calcai- re, la criftallifation . qui en remplit les fentes & qu’on nomme veines, y eft de nature quartzeufe & vitrifiable. [O] POUR SERVIR A L'HISTOIRE NATURELLE, 303 me paroît avoir quelque rapport avec la mine de plomb & de fer, proche defquelles on le trouve. Peut-être qu'il a quelque chofe de commun avec le plomb dans on origine. On m'a dit qu'il y a auffi de la Manga- nefe dans le pays, mais je n’en füuis pas certain. On y trouve encore du zinc. C’eft un demi-métal, dont on retire une très-grande quantité dans un endroit du Duché de Limbourg , qu'on nomme la Calmine proche d’Aix-la-Chapelle : ce minéral reflémble aflez aux mines de fer, pour la couleur & le poids; il con- tient même un peu de fer. Selon ‘une tradition du pays , on aexploité près d’'Oneux, village du terri- toire de Theux , des mines pareilles , dans la vue den re- tirer du zinc : on en retire aufli proche de Namur. Le cuivre pourroîit fe trouver parmi les métaux du pays, quoiqu’on n’en exploite aucune mine: car quelques mines de fer donnent à la flamme des fourneaux une couleur verte, comme les mines de cuivre; de plus, fur quelques ardoiïfes de Salm , j'ai vu des portions très-petites d’un minéral qui fait avec l’eau forte une diflolution verte (a) ; il y a même fur quelques ar- -doifes des taches verdâtres ; indice d’une terre cuivreu- fe ou de cobolt. Je range dans la même clafle que les métaux , les #ofliles qui les accompagnent fouvent en terre, ou qui participent des métaux ; entr'autres l’alun , qui eft un fel produit par la combinaïifon de Vlacide fulphureux des pyrites avec la terre argileufe de cer- tains fchiftes, & le vitriol , que l’on produit par lu- nion du même acide avec la terre ferrugineufe des py- rites : on fabrique du vitriol par-tout où l’on traite a ————— ———— ————— ————— ———— — ———— ————— ———— ———_— ——— (a) Cette diflolution verte ne change point de couleur en la mêlant avec les aftringens végétaux : preuve qu’il n’y a point de fer. Hhhi 404 ‘MÉMOIRE # les pyrites pour en retirer le foufre, comme à Chau- fontaine & à Hautheim ; quant à l’alun, on en retire feulement dans les environs de la Meufe proche des houillieres , quoiqu'il y ait entre Malmedi & Theux quantité de fchiftes pareils, parfmés de pyrites , & propres à fournir l’une & l’autre efpece de fel. Je ne ferai pas mention du nitre, parce qu’on en trouve par-tout où il y a des végétaux & des matie- res calcaires, dont il paroît ètre le produit; ni d’un fel alkali végétal, qu'un Auteur prétend avoir recon- nu dans les eaux de Spa; parce que les analyfes , qu'on a faites de ces eaux jufqu'à préfent , font dé- fetueufes , & qu'il y a beaucoup de contradictions à cet. égard. Les eaux minérales , les dépôts auxquels les Natura- liftes donnent le nom de guhr, les ocres jaunes & rouges ne font pas rares dans les endroits du pays où il y a des mines de fer; j'en dis un mot en parlant des métaux , parce qu'ils en font des indices. Il y a au nord de Malmedi vers l’eft, une fontaine minérale, pétrifiante & qui dépofe fur le gazon une matiere calcaire , qui f durcit en un corps folide , que les Naturaliftes nomment ruf : & quelques-uns fielechites : dans le même endroit à l’oueft, il y à auffi des eaux minérales ferrugineufes : on trouve em- core de ces eaux. dans plufieurs endroits du Marquifat de Franchimont, mais principalement à Spa où font les plus rénommées du pays ; ces eaux dépofent une ocre jaune dans leur trajet & tirent leurs matieres calcaires & ferrugineufes des pyrites & minéraux, qui font dans quelques rochers des environs. On rencontre de l’ocre jaune & de l’ocre rouge: avec les minieres de fer ; mais la plus grande quanti- té d’ocre rouge eft auprès.des foufrieres, & tient fou POUR SERVIR A L'HISTOIRE NATURELLE, 393 vent cette rougeur du feu employé pour les exploi- ter. On peut ajouter aux ocres , comme y ayant quelque rapport , les terres jaunes , rouges & noires qui accompagnent les mines de fer tant à l'extérieur, que fort avant dans l’intérieur de la terre. _ Comme tout ce qui regarde la connoïflance des mines peut-être de quelque importance , il eft à propos que je fafle obferver ici, que les pyrites & les mines de fer , fofliles qui ont aflez de rapport entr'eux , ne font point répandues indifféremment par toute l'éten- due du pays , & fur la furface des rochers, comme la tourbe & l'argile, quoique cependant prefque tous les rochers quartzeux & les terres argileufes contien- nent généralement un peu de terre ferrugineufe ; mais ces mines font, ou parfémées parmi la fubftance des lames de quelques rochers quartzeux & calcaires, ou dépofées entre leurs lames en couches qui leur font paralleles , ou bien ( & c’eft la portion la plus con- fidérable , & les feules qu’on exploite dans le pays: } mêlées, parmi une mafle compofée de toutes fortes d'argile & d’autres matieres confondues , formant une bande de terrein , qui occupe Pefpace de plufieurs Îa- mes de rochers paralleles à celles: des rochers. calcai- res, qui étendus comme les bancs: de marbre d’eft- nord-eft à lPoueft-fud-oueft , senfonceroient prefque perpendiculairement en terre , en- s'inclinant fouvent un peu vers le midi; mais il faut auffi remarquer , que les inondations on déluges & divers accidens ayant dérangé ce terrein métallique , en ont entrainé une partie, qu’elles ont dépofée avec confufion parmi la ma- tiere des couches des plaines inférieures , fur Jefquel- les les torrens & les rivieres ont aujourdhui leur cours: de forte que les mines , & même celles qui paroif- fent le plus en défordre avec les matieres qui les ac-- 396 MÉMOIRE compagnent, ont , autrefois faic partie de bancs plus ou moins épais, qui étoient paralleles aux bancs des rochers calcaires ou engagés parmi leurs fentes, & qui ont été formés en couches dans le même temps fous les eaux de la mer. Peut-être les mines principa- les , ont-elles fait partie d’un banc partie calcaire, partie quartzeux à l'endroit qui en faifoit la féparation & où le banc a été enfuite rompu ; quoi qu'il en foit, il me paroît que les principaux filons des mines for- ment prefqu'un banc compofé confus & confidérable, qui s'enfonce à-peu-près perpendiculairement en terre & s'étend en longueur horizontale d’eft-nord-eft à loueft-fud-oueft, parmi ou à côté des bancs des ro- chers calcaires, qui paroiflent dans les environs. Ily à quelque apparence que les pyrites & les mines de fer ont été produites par des matieres répandues ho- rizontalement fur un fond de mer , par des éruptions fouterraines ; car il y a des mines endurcies & mou- lées contre la furface de quelques pierres de grès fans y faire aucune empreinte , & d’autres qui ont eu la forme qu’elles ont encore avant que d’être enfermées parmi la fubftance de quelques pierres de grès, où leur forme eft imprimée. On trouve d’ailleurs en beaucoup de pays diverfes efpeces de coquillages qui font changés en pyrites, & ici plufieurs changés en mines de fer : d’un autre côté , j'ai remarqué avec M. Needham & M. le Chevalier Web, tous deux membres de la Société Royale de Londres, à la Cal- mine où miniere de zinc du pays de Limbourg , quelques mines noirâtres qui étoient fragiles comme le verre & bourfouffléess comme la pierre-ponce en cellules fphériques comme fi elles euflent paflé par un feu violent. Cependant quoiqu'il paroïifle que l’éretion des bancs Lo) POUR SERVIR A L'HISTOIRE NATURELLE. 397 de nos rochers puifle être attribuée à une éruption fouterraine , on ne voit aucune matiere propre aux volcans , qu’à Steflen, village fitué entre Malmedi & Andernat, où il y a des rochers noirs femblables à des briques, que le feu a vitrifiées & bourfoufflées en cellules : ces rochers dont on fait des meules, ne différent en rien de quelques laves que jai vues en Tralie au Mont-Vefuve, & au Pui-Dome ancien vol- can en Auvergne; ils font une preuve affez forte , qu'il pourroit y avoir eu un volcan renouvellé dans Tacite ces endroits, dont Tacite rapporte, que de fon tempsannai lib. le pays fur brûlé par des feux fortis de la terre. II eft tout-à-fait remarquable , que ce volcan fe foit rencontré au midi des rochers de Franchimont & pro- bablement dans ces endroits, d’oùa pu être lancée hors de terre une partie des matieres qui font la mañle fou- terraine de ce pays , lorfque les lames des rochers fe formoient fous les eaux de la mer, & que ce volcan y mettoit fes laves (a). ARTICLE X. Des pétrifications de Plantes, de Coquillages de-mer & d’ Animaux terreftres. Ce font des produétions qui n’occupent plus le lieu de leur origine , & elles ont fubi des changemens —— a (&) La houille eft comme un bitume pétrifié, qui provient de végé- taux : le bitume & le fer ont formé les pyrites : l’état de criftallifation des pyrites & les coquillages pyriteux, prouvent que les pyrites ont été formées dans les eaux de la mer , au moyen d’un phlogiftique pro venant, à ce qu’il me femble, du regne végétal. XIIL ; cap À Lo) 498 MÉMOIRE confidérables en terre : on les nomme ordinairement fofiles accidentels. Parmi les’ pétrifications des plantes il y en a de fchiteufes & de calcaires. Les fchiftes contigues aux houilles font empreintes de quelques végétaux étrangers à ce pays ; ils reflèm- blent aux fougeres & aux gramens, & à d’autres plantes qui me font inconnues. Peut-être y a-t-il des algues & des fargafles. J'ai trouvé près de la fontaine de Sauveniere , au territoire de Spa, une piece de {chifte brune , dont la formation , tant intérieure qu’extérieure repréfente parfaitement l’organifation d’un gros morceau cylin- drique de bois, ayant fa moëlle, fes couches ligneu- fes, fes fibres tranfverfales & longitudinales, &c aufli fon écorce (a): l’on m'a donné un morceau d’un au- tre bois pétrifié qu’on a trouvé dans du fable près de Hougarde, vers les frontieres du Brabant : on a trou- vé pareïllement un gros bois pétrifié près de Henri-Cha- pelle, au pays de Limbourg. Je ne connoïs dans ce pays aucune pétrification cal- caire de végétaux , finon des incruftations fur de la moufle, du gramen , & quelques arbrifléaux formés par une fontaine pétrifiante , fituée au nord de Mai- medi. C’eft ce que des Naturaliftes nomment oftéo- colle , ftelechites, & encore mieux du tuf. Quant aux pétrifications de coquillages, il y en a une très-grande quantité : ce font en général des co- ralites ou autrement polypiers : des cochlires, nom fous lequel (a) En .examinant ce morceau fur le local, j’ai reconnu que cette production r’eft point originaire du regne végétal, mais un jeu de ls Hature, l POUR SERVIR 4 L'HISTOIRE NATURELLE. 309, lequel j'entends toutes les coquilles roulées : des con- chylites qui comprennent tout ce qu’on nomme ordi- nairement bivalve : & d’autres enfin, qui font pour ainfi dire, des lithophytes anomales. IL feroit difficile & il importe peu d’en rapportet ici toutes les varié- tés. Parmi les corallites on reconnoît des tubulites, des orthoceratites , des hyppurites , des aftroites. Il y a de plufieurs fortes de cochlites & même des cornes d'ammon : parmi les conchilytes je n’ai guères vu que de ceux, qu'on nomme térébratules , mais dans une très-grande variété. Les lithophytes anomales font pour la plupart polypiers, des efcarres , des réteporites, &c. enfin des tuyaux tortueux, longs de plufieurs pieds, du diamètre d’un demi-pouce , que j'ai reconnu être les dépouilles de ce qu’on nomme 7er-d-tuyau qu'on rencontre dans toutes les mers; ils font fouvent par- femés à l’extérieur de quelques filés épars , comme _des éguilles, de la nature des polypiers. La plupart de ces coquillages , tant des rochers- quartzeux que des calcaires , retiennent leurs proprié- tés ; telles que celles d’être calcinables , diflolubles par les acides , &c. Il y en a beaucoup qui font réduits en criftaux fpatheux ; quelques-uns font con- vertis en pierre vitrifiable , & un aflez petit nombre en flint ou mine de fer. Parmi les fchiftes , qui avoifinent les pierres cal- caires , j'en ai reconnu de toutes les efpeces, que je viens de nommer, excepté des anomales : les coquil- lages qu'on y voit le plus, ce font des rérébratules , qui font des bivalves étrangeres aux mers qui bai- gnent l'Europe , ayant un de leurs battans replié en une crête , qui le partage en deux moitiés pareilles , tandis que l’oppofé s'enfonce en gouttiere vis-à-vis de la crête : ils y font ordinairement couches & enchaflés à Tome I. non: En. 400 MÉMOIRE plat contre fa furface des lames de fchiftes , le plan ée lun étant parallele au plan de autre. Je crois auf avoir reconnu parmi des fchiftes des empreintes dé deux fcolopendres.de mer. * Cependant parmi leslames différentes de rochers-quart- geux , qui fe fuivent fans interruption dans une fitua- Ébnié à-peu-près perpendiculaire depuis Salm dans la province de Luxembourg, jufqu’au château de Franchi- mont , ce qui fait une étendue de plus de huit lieues du fud au nord, je n'aipu, quelque foin que j'aie pris, rencontrer aucun coquillage que dans les cailloux calcaires de ces rochers caïllouteux, qui font au nord de Malmedi & de Sravelot : on y retrouve outre les coquillages que contiennent les autres rochers de ce pays , des porpites , des numifmales , des ‘échinites & des belemnites , dont la plupart font étrangers à l’Europe. On verra par Ja fuite de ce Mémoire les conféquen- ces qu'on peut tirer de ces cailloux touchant les épo- ‘ques des révolutions arrivées ‘au globe terreftre. C'eft principalement parmi la fubftance des mar- bres & des matieres calcaïres entre Franchimont & Lieze, qu'on rencontre des coquillages, & fur-tout des bivalves , plus renflés &-moins applattis, que ceux des fchiftes , foit en entier , foit.en débris : les matieres calcaires en font prefqu'entierement compofées & en ont fi parfaitement les propriétés , qu'on eft fondé , comme également par le parallelifme de leurs bancs, à les regarder comme des corps compofés prefqu’ unie quement de coquillages , mais qui font fort dénaturés , leurs débris qui font pour la plupart imperceptibles étant changés en petits criftaux fpatheux, & probable- ment en fable vitrefcible , & mème en flint qu'on y trouve quelquefois entremêlé, POUR SERVIR A L'HISTOIRÉ NATURELLE, 407 La marne grife , qui n’eft qu'une continuation ou partie des bancs de marbre commun, mais qui eft en bancs plus dérangés, foit à caufe de fon peu de con- fiftance , foi par l'effet des pyrites & desmétaux, qui Sy trouvent, contient parmi fes coquillages des pro- duétions en forme d'os de feche du poids de pluñeurs livres. La fubftance de la plupart de ces coquillages, de calcaire y eft devenue vitrefcible, étant ordinaire- ment changée en quartz ou en flint, & mème en une efpece de criftallifation quartzeufe, & quelque- fois auffi , mais rarement, en mine de fer (a) Parmi les coquillages convertis en mine de fer, il y a des tubulites , (b) des orthoceratites, des térébra- tules, & des volutiles : j'ai trouvé un affroïte de mar- bre blanc parfemé de petites pyrites cubiques; une partie de cet aftroïte elt convertie en mine de fer, qui a pris parfaitement la forme de çet aftroite. _ La métallifation de ces coquillages , comme auff leur converfion en Jilex , en quartz, & même, felon que je crois le remarquer , en argile ou terre vitri- able , eft un phénomène aufli remarquable , que le contraire , que préfente l'argile, qui, paflant dans les végétaux & enfuite dans Îles animaux teftacées , devient calcaire & minéral. La métallifation on changement de matiere calcaire en métal , paroït avoir fur-tout Cho MM TT ECS D NE - . EEE ET ET EE LU 7 GUN ALU EN EN Mere mot (a) Il me paroït que le faz/ceau minéral du Dictionnaire des foffiles de ME: Bertrand eft le tubulite ferrugineux , & que toutes uos mines de fer d’abord ont été calcaires, puis pyriteufes & enfin ferrugineufes ; j’en ai quelques obfervations , & d’ailleurs les terres & pierres calcaires con- tiennent ordinairement une certaine quantité de fer dans état d’ocre , qui dans Ja diflolution faturée qu’on en fait par les acides , fe précipite au bout d'un temps. : ji (6) Voyez Chymie expérim, de Baumé tom. I. pag. 225. & fuivant. Tiii 40ù - MÉMOIRE folution vitriolique du cuivre, qui, en fe précipitant ; s’approprie fon phlogiftique & fe revivifie fur la furfa- ce du fer diflout, dont il prend aflez exaétement la figure. Enfin parmi les couches horizontales de toutes ces matieres calcaires & fablonneufes, qui recouvrent des rochers à lames perpendiculaires & pareils à ceux de ce pays, dans ces couches qui font au nord de la Meufe au- delà de Liege, Namur & Maftricht, comme également parmi des couches horizontales de femblables matieres, qu'on rencontre vers le midi aux environs de Luxem- bourg jufqu'en Lorraine, & qu'on peut regarder, en quelque maniere ; comme la croûte, qui y recouvre les plus anciens rochers de granit & de roc vif qui re- paroiflent. en défordre dans les plus hautes montagnes des Vofges, on retrouve outre les efpeces de coquil- lages, dont je viens de faire mention, une quantité d’autres efpeces, dont la plupart font plus analogues à ceux des mers de l’Europe , tels que des moules , des cames, &c. Pour me borner à ce qui dans ces couches eft le plus à remarquer pour mon objet, qui eft d'éclaircir particulierement l’Hifoire naturelle de cet efpace de pays , compris fur la hauteur entre Luxem- bourg & Liege , où s'étendent de left à loueft les forêts des Ardennes, je me contenterai d’ajouter ici qu'on a trouvé en Flandres, parmi les couches hori- zontales remplies de toutes fortes de dépouilles de la mer, des os d’éléphans (a). Le lieu de ces reftes d’ani- ——— _ = (a) Les pétrifications d'animaux terreftres font très-rares. On afluroit d'avoir déterré des crocodilles dans les cavieres des environs de Mañftricht: mais après des informations prifes auprès de M. Hofman, chirurgien cé- lebre à Maftricht , qui pañloit pour.les avoir dans fon magnifique ca- binet , j’ai appris qu’au lieu de crocodilles, ce n’étoit que des machoi= ses de quelques gros poifons , qu’on foupconne d’être des baleines, * mie 4 POUR SERVIR À L'HISTOIRE NATURELIE, 403 Maux quadrupedes originaires des plus chauds climats, fi on le compare avec celui d’autres pareils trouvés en Sibérie fort avant vers le nord & dans la direction d’eft-nord-eft vers l’ouell-fud-oùeft , fait conjecturer que cette partie du globe , non-feulement a été re- couverte des eaux de l'Océan , mais que ce même globe a paflé par les plus grandes révolutions, com- me fi fes poles euflent changé depuis la révolution , qui a élevé les anciens rochers perpendiculairement & les a recouverts enfuite par de nouvelles couches horizontales (a), qui font plus rares entre Liege & Luxembourg , que dans les pays voifins , probable- ment parce que les anciens rochers y font plus fail- lans & plus élevés à proportion de la pente des eaux qui s’en font retirées du fud au nord. C’eft ce que jexaminerai encore dans un autre Mémoire projetté depuis quelque temps & dont j'ai tiré la matiere de celui-ci, que je propole comme un eflai fur l’Hiftoi- re naturelle des fofliles de ce pays, & en même-temps comme un répertoire des principaux fofliles qu’on peut y rencontrer. C’eft pourquoi je terminerai ce Mémoi- re , déja long , par quelques conclufions générales , fur {es différens articles pris enfemble , en vue de contri-. buer , tant à étendre nos connoïflances fur l’état du globe de la terre, qu’à établir des regles pour la re- cherche des foffiles. (a).C’eft une ancienne tradition dans ce pays , que Tongres fat au- trefois un port-de-mer : l’on fe fonde fur ce que l’on a trouvé aux an- ciennes murailles de cette Ville , de gros anneaux de fer propres à y at- tacher les vaifleaux : on pourroit ajouter ce que j'ai entendu dire d’un témoin oculaire & digne de foi , qu'on a trouvé dans les environs de Lie-. ge un pot de terre cuite renferme dans une carriere de pierre de grès: quoi qu’il en foit, Tongres eff la plus ancienne ville des Pays-bas, mais: dans un terrein plus nouveau que ceux qui font au midi de la Meufe, il paroït même que la mer s’y eft arrêtée plus long-temps pour ÿ dépo- fer fes couches horizontales de fable pétrifié & rempli de coquilla- ges, & qu’elle ne s'en eft retirée que peu de temps avant l’arrivée de Jules-Céfar , qui nous apprend que ces pays étoient alors beawxcoup plas . remplis de marais qu’aujourdhui, 404 MÉMOIRE 0 : CONCLUSION I. Les corps que l’on rencontre en ces pays ont pañlé ar des états très-différens , & ont fubi des révolutions confidérables arrivées à trois époques très-éloignées. En voici les preuves: I. Les couches horizontales de flint, d'argile, de marne, de craie ; ces couches de petits cailloux de quartz blancs tels qu'on en voità Hozemonten Hesbaie, écc. en général toutes ces matieres rangées par cou- ches horizontales avec des coquillages de mer , ces couches, fur-tout, qu’on rencontre fur la rive gauche de la Meufe, au-delà de Liege, Namur & Maftriche, jufqwà la mer d'Hollande, & fous lefquelles an dé- couvre le long de la Meufe & dans les houillieres à certaine profondeur d’anciens rochers à bancs perpen- diculaires, pareils à ceux qu’on voit fous les flints de Hoquai, de Beanfays & de la citadelle de Eiege; autres matieres pareilles qu’on retrouve par intervalles far les hauteurs entre Salm & Liege, & fur-tout au fad vers Luxembourg , & au-delà , en un mot, toutes ces couches aétuellement paralleles à l'horizon, ne font , du moins quant à la plupart , que des dépots & les effets d’une mer, qui couvroit généralement tous les rochers anciens déja perpendiculaires. C'’eft auf l'effet d’un courant vafte , dont la direétion prin- cipale tendoit du fud-eft au nord-oueft des Alpes, vers la mer du nord fur un plan aflez uniforme, éta- bli d’abord fur les plaines fupérieures de ce pays & £nfuite fur les plaines comprifes aujourdhui fous le POUR SERVIR A L'HISTOIRE NATURELLE. 405 nom de Pays-bas. C'eft ce qui dut arriver, lorfque le volume immenfe des eaux, après avoir féjourné fur notre continent, s’en reuroit en s’abaiflant fucceflive- ment jufqu'au niveau aétuel de la mer; & avant que les pluies , les fources, les torrens & les rivieres euf- fent formé les plaines inférieures , & y euflent creu- {é leurs lits tortueux , en côtoyant les éminences prin- cipales des rochers de nos montagnes. C’eft l’efflet de la révolution qui fait l’époque la plus récente , à la- quelle on peut rapporter encore la retraite infeufible que la mer a faite & continue de faire journellement de deflus les côtes d'Hollande, qu’elle a couverte plus long-temps, que les rochers de la rive méridio- pale de la Meufe, fur le haut defquels elle n'a pas eu le temps de laïifler tant de couches horizontales qu'a la rive feprentrionale. II. Sous ces couches, fous ces bancs horizontaux, dont je viens de parler, des rochers de toutes fortes de qualité en lames paralleles & perpendiculaires s'é- tendent , par tout le pays ; en une longue fuite du fud au nord : on les découvre fous les débris de ro- chers &, fous les terres horizontales ; dans les pays, qui font fur la rive droite de la Meufe vers le fud,, même fort au-delà de Salm & dans divers endroits de l’Europe très-éloignés l'un de l’autre ; l’on en voit rême encore fur la rive gauche de la Meufe & à quel- ques lieues au-delà, au village d’Hozemont en Hef- baie; ce qui fait prèfumer qu’il y a encore de pareils rochers fous terre dans tout le refte jufqu'à la mer du nord, Q Ces rochers en lames perpendiculaires, qui furent auparavant horizontales , atteftent une révolution arri- vée quelque temps avant que les eaux s’en fuflent re- tirées, & cuflent depofé les couches horizontales qui 406 MÉMOIRE les recouvrent, c’elt à cette époque plus ancienne que la précédente , ou au temps qui la fuivit immédiate- ment , qu'on pourroit rapporter non-feulement l'incli- naïfon de l’axe de la terre , que quelques-uns conjec- turent par les circonftances du déluge décrit par Moyfe, (a) mais encore la direction oblique du nord-eft au fud-oueft du bord fupérieur des lames perpendiculai- res ; direction, qui, peut-être, auparavant étoit en ligne exaétement parallele à l’équateur de l’eft à l’oueft, lorfque ces éléphans , dont on a retrouvé les dé- pouilles en Flandres & en Sibérie parmi les couches ho- rizontales, qui y recouvrent d'anciens rochers, fubfif- toient dans un climat plus chaud, tel que fous l'équateur. Cela paroïît f confirmer encore par la direétion que je crois remarquer à la figure générale de tout lan- cien continent, qu'on peut confidérer comme une bande de terrein étendue d’eft-nord-eft vers l’oueft- fud-oueft , & à contrefens du nouveau, qui, dans l’hémifphere oppofé, fe préfente, au contraire , com- me une bande étendue d’eft-fud-eft vers l’oueft-fud- oueft (b). III. Les rochers caïllouteux de Malmedi , dont les pieces arrondies en caillou différent autant l’une de l'autre que de nos autres rochers, en poids , en cou- leur & confiftance, n'étant que des fragmens d’au- tres rochers plus anciens & détruits; les coquillages, dont an me a | (æ) Voyez entrautres /e Spectacle de la Nature tom. III. Édit de Paris x744 pag. 519. jufqu'à 528. fur l’ufage du SpeGacle de la Nature. Ce n’eft qu'après le déluge, felon la Genefe, que paroît l-/rc-en-Crel en fi- gne d’alliince entre Dieu & les hommes; pour le produire, il y eut, peut-être dès-lors des pluies plus groffes & pendant le jour avec une plus grande irrégularité dans les faifons , & cela a pu être occafionné ar le changement des poles. (Bb) l’ancien continent s'étend du Japon au Cap verd & le nouveau ges côtes du Brefl , vers la Californie ou l’Archipel de St. Lazare, POUR SERVIR À L'HISTOIRE NATURELLE. 407 dont les cailloux, les calcaires fur-tout, font remplis; les lames paralleles, dont font compofés principale ment les cailloux quartzeux & qui font des portions d'anciens rochers formés en bancs ; tous ces autres: rochers caillouteux en fituation perpendiculaire , que l'on rencontre de diftance en diftance , depuis Fran. €himont jufqu'a Liege, les cailloux noirs de ces ro- chers , plus femblables au bafalte qu’à aucun rocher du pays & qui ne font aufli que les débris d’autres rochers détruits ; les pyrites globuleufes, les pyrites cubiques, les plantes avec les houilles, qui en pro- viennent, enfin les coquillages pétrifiés , criftallifés , filifiés, métallifés (a), tous ces corps, enfin, fi diffé- ,C: a: 4: rens & en fi grand nombre, qui ont été formés avantäex , en les lames de nos rochers, dans lefquels ils ont enfui-%*t; Kc: te imprimé leur forme, ce font tout autant de monu- mens d’un état fort ancien du globe fuivi d’une révo- lution, dont l’époque eft encore plus reculée que les autres, que je viens de remarquer. Mais l’époque de cette révolution eft cependant encore aflez éloignée du temps de la création du monde, puifque les végé- taux & les animaux , qui ont laïiflé leurs dépouilles ou empreintes dans les rochers, font en partie étran- gers aux mers de l’Europe, & fubfifterent en fe mul- tipliant pendant une durée relative à la quantité pro-. digieufe de matiere combuftible & calcaire , qu’on rencontre dans la maflé de ces anciens rochers, dont la fituation a été d’abord horizontale , enfuite per- pendiculaire & enfin irréguliere , mais feulemenc , quant à cette partie faillante, qui en a été brifée &. renverfée avec les terres , fables, cailloux provenus de leurs débris fur la mafle la plus enfoncée des rochers: de forte que ce globe que nous habitons a pañlé par: différens états, avant que d’être ce qu'il eft de nos jours, Tome I. Kkk 48 MÉMOIRE CONCLUSION Il. Six la Defcription que je viens de faire de ce pays; on peut établir les regles fuivantes : | TI. La tourbe, le fable de montagne, les cailloux, l'argile & toutes les matieres qui font en couches hori- zontales fur les plaines de ce pays , ayant ordinairement aflez d’étendue en longueur& largeur , mais foùvent peu en profondeur , finon, dans quelques plaines inférieu- res, felon l’effec des différens courans ou lacs qui ont accompagné & fuivi la retraite de la mer; on doit régler les opérations dans leur recherche par la con- noïffance qu'on a de l'effet qui a dû en réfulter. If. Les rochers quartzeux & fchifteux entre Salm & Franchimont , les rochers tant calcaires que quart- zeux entre Franchimont & Liege, étant compolés de lames & de feuilles ou perpendiculaires ou inclinées vers le fud & dirigées de l'eft vers l’oueft & toujours avec un parallelifme conftant , x l'exception de quel- ques-uns des rochers , où il y a des houilles & des minéraux , dont les bancs paroïflent culbutés & éten- dus horizontalement fur des rochers perpéndiculaires, par l'effet des exhalaifons minérales ou, par des délu- es. C’eft encore une regle générale de percer dans les fouterreins, felon la connoïfflance qu'on a de l’angle que font les bancs avec la furface horizontale des plaines ; comme en eflet cela fe pratique dans l’ex- ploitation de la mine de zinc du Duché de Limbourg, & des houillieres du pays de Liege, dont on a eu POUR SERVIR À L'HISTOIRE NATURËÈLLE. 409 fes premiers indices par l'infpéétion des couches qui s'y montrent au jour, principalement fur le penchant dés montagnes aux endroits où les orages & d’autres accidens ont creufé & découvert le terrein : par exém- ple, dans ce pays on découvre une carriere de grès à paver , Où de rochers à caïlloux pour des meules , ou de marbre pour les édifices , au bord oriental d'une riviere, on la rétrouve,. comme cela m’eft arri- vé dans plus d’un cas , au bord occidental; sil y a une carriere dans une montagne établie fur un rocher de marbre , dont les bancs fe dirigent d’eft-nord-eft à loueft-fud-oueft, en s’enfonçant prefque perpendicu- lairement, elle fera- plus étendue & les bancs en {e- ront plus uniformes , quefielle étoit dans une autre fitua- tion ; ce qui s'applique également aux minéraux. … Enfin fi une carriere fe trouve dans un rocher , dont les bancs font inclinés vers le midi, ou vers le nord, c’eft une regle que la fuite de ces bancs qu’on décou- vre à la furface horizontale du rocher, doit fe retrou- ver vers le midi ou vers le nord en defcendant par un puits ou büre à un point plus bas, à déterminer par le degré d'inclinaifon. des bancs du mème rocher ; inclinaifon., qu'il eft ordinairement facile de recon- noître en enlevant l'argile , qui couvre le rocher, ou par la fimple vue de ce que les rivieres en ont décou- vert accidentellement fur le côté de ces rochers , qui bordent les rivieres & les valées. M Une autre regle, c’eft que plus les bancs approchent de la perpendiculaire & fe dirigent horizontalement en longueur d’eft-nord-eft à l’oueit-fud-oueft , plus ils ont d’épaifleur , de continuité & de folidité ; qua- lités qui les ont mis en état: de réfifter:,. tant au cou- rant général des eaux de:la: met. lorfqu'en fe reti- rant du midi vers le nord',. ellèssemheurtoient: &: ren KR K'K:ij; AïÔ MÉMOTRE, Ge. che verfoient la partie élevée, qu'aux eaux ordinaires des pluies & des rivieres, qui en minent la partie inférieure &c la renverfent de plus en plus ; car j'ai obfervé que la partie élevée des bancs, eft ordinairement plusin- clinée que là partie inférieure , & qui s’enterre. IIT. Comme parmi les rochers quartzeux il n’y à de coquillages que dans ceux qui font auprès des marbres , & qu'il n'y a guères de mines de houil- les & de fer que dans les pays entremélés de marbre & de fchiftes, c'eit encore une regle de ne chercher des marbres que dans le voifinage des fchiftes à co- quillages, & des houiïlles dans les pays entremélés de marbre & de fchiftes. - IV. Les rochers quartzeux , & les calcaires , qui font entre Franchimont & Liege , font fouvent bou- leverfés & voutés proche des endroits où il y a des minéraux : c'eft donc là un motif de les confidérer & de rechercher la qualité & la fituation de ces mi- néraux , par le contenu des fources minérales, & parmi l'argile, & les différentes matieres , que le cou- rant des rivieres a entraînées de leur fituation primi- tive, pour les dépofer fur les plaines. Les différens articles de ce Mémoire pourront être traités plus à fonds féparément ; j'ai jugé à propos de les réunir ici en un point de vue général, pour faire obferver le rapport que divers objets , indiffé- rens en apparence étant féparés, peuvent avoir entre eux , & les conféquences qui s’enfuivent. is MÉMOIRES HISTORIQUES. 1 0 M PREESE MER si [EL pe MÉMOIRE RELIGION DES PEUPLES D E LANCIENNE BELGIQUE; PAR M. DES ROC ILES: La à la Séance du 6 O&obre 1773n An 4 ; = Ê EE "a CL { EE 4 ER 13e Nr: a 707 MÉMOIRE RELIGION DES PEUPLES L'ANCIENNE BELGIQUE. Cie la religion de nos ancètres fe peut confidé- rer fous trois points de vue différens, favoir, 1°. telle qu’elle étoit avant la conquête de ces Provinces par les Romains : 22. Après cette conquête; & enfin tel- le qu’elle parut à la prédication de l'Évangile; je di- viferai ce Mémoire en trois parties, dans chacune def quelles je ferai le tableau de cette religion , relative- ment à l’époque où je l’envifage. Et comme divers Auteurs ont déja traité cette matiere, je pañerai lé- gérement fur tout ce qui eft aflez connu, pour m’ar- rêter à ce qu'ils ont pañlé fous filence , ou qu’ils ont traité trop fuperficiellement. Tome I, LI 416 MÉMOIRE PREMIERE PARTIE. Duxs cetre premiere époque, c’eft-à-dire, avant l’ar- rivée des Romains dans ces Provinces , la religion des: Belges n’étoit point par-tout la mème. Les nations voi- fines du Rhin tout récemment forties de Germanie , gyant encore trop peu de commerce avec les Gaulois Belgiques , s'attachoïent uniquement à la religion de leurs ancètres , plus fimple que celle des Gaulois , qui étroit chargée de fuperftitions. Les Germains ne connoïfloient point cette multitude de Dieux & de Déefles ; ils n’en voulurent point qu’ils ne puflent voir de leurs yeux ; & quine leur fuflent utiles (a). S'ils rendoient des honneurs divins au feu, c'eft que cet élément leur parut le plus aétif & le plus néceflaire de tous les êtres. S'ils adoroïent le Soleil , c’eft qu'ik les échaufloit de fes rayons; s'ils adrefloient des prié- res à la Lune , c’eft qu'ils en retiroient beaucoup d’u- tilité dans un pays où les nuits d'hiver font aflez lon- gues , outre qu'ils la voyoient préfider à la nuit qui leur fervoit à ue le temps, comme le jour chez les autres nations ; ufage qui leur étroit commun avec les Gaulois, & dont les Anglois, originaires de la Ger- manie, & quelques peuples des Pays-bas ont confer- (a) Deorum numero eos folos ducunt , quos cernunt , & quorum opi- bus apertè juvantur ,; Solem & Vulcanum & Lunam: reliquos ne fami quidem acceperunt. Cæ/. comm. d. 6.c, 21. °° ° SUR LA RELIGION DES PEUPLES, &r. AIT vé les traces jufques aujourdhui (a). Au refte ils n’a- voient ni druïdes, ni temples , ni facrifices (b); & tandis que les nations policées offroient à leurs Dieux, tant de viétimes fanglantes, les fauvages Germains ne préfentoient aux leurs que l’offrande de leurs prie- res, offrande criminelle, fans doute, puifqu’elle met- toit la créature à la place du ‘Créateur : mais loua- ble du moins en ce qu'elle n’éroit point fouillée du fang précieux des hommes. | Je fais que ce récit, tiré des commentaïres de Cé- far, n’elt point conforme à celui de Tacite , & que plufieurs Savans ont cru trouver une contradi@ion æntre ces deux Auteurs également inftruits, également æxaës. Le premier nous apprend qu'ils n’avoient point de facrifices : & le fecond qu’ils offroient des viétimes Bumaïnes à Mercure, & des animaux à Hercule & à Mars (c). Cependant il n’y a ici aucune contradic- tion. ÆCéfar nous dépeint les Germains, tels qu'ils étoient jo ans avant la naïffance de Jefus-Chrift, dans wo fiecle où ils n’avoient aucun commerce avéc des nations plus policées & par conféquent plus corrom- pues Tacite les décrit , tels qu'il les a connus r$o ans plus tard , lorfqu’ils avoient perdu leur ancienne fim- plicté, & qu'à l'exemple des Gaulois & des Romains, En ms né = eee nnte pm nes C4) Tes Anglois difent Jérrighe , fortrighr, Jèpt nuits , gitarorge -auits , pour dire /éptjours, guatorge jours. Dans l’ancien ferment qu'on appelle des 12 à Nimegue, on trouve ces termes : Z£ eloove dat if van vonniflen, diermymet regt gevraest worden, myn beraed niet langer dan dry PEETLLER NATIEN en qal. On voïit des formules femblables dans l’Oppr- Sum Sn A Smerties pag 112. & dans plufieurs manufcrits. Tacité Mifoit de nos ancêtres: nec diérium numérum , 4t nos, JEd nocleum rompue am. Sicconflittunt, fic condicunt: nox ducere diem videtur. Gerrm. cap. IL (8) Neque druides habent, qui rebus divinis prælint $ neque facrif- sis fudent. Ce. L. 6.6. 2x. \ AS 1 Cc) Deorum maximè Mercurium colunt , eui certis diebus Humanis uoque hoftiis litare fas habent. Herculum ac Martem concefüis animals “ous placant: pars Suevorum & Midi facrificat. Tac. Germ..c. 4. 1j MTS. 1 MÉMOIRE oh ils avoient mis au nombre des Dieux les plus illuf- tres de leurs ancêtres , & ajouté à leur religion les Dieux & les ufages de leurs voifins. : J'ai déja averti que ceci ne regarde que les colonies Germaniques nouvellement tranfplantées fur les rives du Rhin , comme les Ufipetes, les Bructeres, les Tench- teres, les Sueves, les Sicambres, & peut-être les Ba- taves & les Frifons. Pour les autres nations Fel,iques, comme les Eburons, les Ménapiens , les Condrufiens, les Nerviens, les Morins & les Atrebates , quoiqu’ils fuffent prefque tous anciennement fortis de la Germanie, & qu'ils fiffent même gloire de cette origine, ils avoient pourtant adopté les Dieux & les facrifices des autres Gaulois. Auffi leur religion fut-elle un mélan- ge bizarre de toute efpece de fuperititions. Ils ado- rerent Jupiter , Mars, Apollon & Minerve (a). ou du moins des Divinités Gauloifes, auxquelles on don- noit les attributs des premiers (b). Tharamis , le Dieu du ciel ne reflemble pas mal à Jupiter. Héfus fut le Mars , le Dieu de la guerre, quoique dans les fiecles plus reculés ce nom eût fervi à marquer l’Étre Su- prême. Belénus le Dieu de la Médecine eft Apollon. Une Déefle dont on ignore le nom, maïs qui préfi- doit aux ouvrages de fil & de laine, femble être co- piée fur Minerve. Mais Mercure étoit celui de tous les Dieux pour qui ils avoient le plus de refpett, Ils —— = — (a) Deum maximè Mercurium colunt : hujus funt plurima fimulacra : hunc omnium inventorem artium ferunt : hunc viarum atque itinerum Ducem, hunc ad quæftus pecuniæ mercaturafque habere vim maximam arbitrantur. Poft huuc Apollinem, & Martem , & Jovem, & Minervam. De his eamdem ferè quam reliquæ gentes , habent opinionem; Apolli-- nem morbos depellere ; Minervam operum atque artificiorumainitia tranf- dere; Jovem impérium celeftium tenere , Martem bella regere. Ce/ar, comm. dl, 6. ©. 17: ee APACHE Schedius dé DIS Germanis, & l’Auteur de la religion des aulois. SUR LA RELIGION DES PEUPLES, Éc. 419 Pappelloient Theutates, & l’honoroïent comme le Dieu du commerce , Foredene de tous les arts, le gui- de des voyages & le Dieu tutélaire des grands ‘chemins. Ts rendoient auffi les honneurs divins à Dis , qui eft le même que Pluton, dont les Gaulois prétendoient être iflus (a). On connoit l’Hercule Gaulois qu'ils nom- moient Ogmius. Ilsle repréfentoient avec les mêmes attributs que l’Hercule des Grecs, comme la peau de Lion, la maflue, le carquois & les fleches. C'étoit en même temps le fymbole de l’éloquen- ce : car de Ja langue du Dieu partoient des chaînes d’or, où une infnité d'hommes étoient attachés par les oreilles , & paroifloient fuivre leur vainqueur d’un air gai & content (b) On fait que la plupart de ces Dieux étoient des Princes, qui avoient regné fur les Titans, & auxquels la folie des hommes avoient accordé les honneurs de lApothéofe. Les Gaulois étoient iflus des Titans; les plus anciens Auteurs l’af- furent; entr'autres Callimaque , qui les nomme tou-° Jours éfiybef Tire, La pofiérité des Titans (c). Jupiter, dont le vrai nom étoit Jou (d), & dont les Latins, en ajoutant Pater , on fait Jupater ou Jupiter , avoit été Roi des Titans. Maître d’un vafte Empire en Orient , il céda une partie de l'Occident à Dis ou Flu- ton fon frere : c’eft ce que nous apprenons de Laëtance, qui n’a fait que recueilli les anciennes traditions Ce). (a) Galli fé omnes ab Dite Barre prognatos prædicant Cf. Z. 5 G 18. (6) Voyez dans Lucien l'Hercule Gaulois, de la traduétion de eourt, Tom. Il. pag. 211. l’édit. de 1709. 4 = (c) inalese hymu. in Del. NO. 170. & feq. Schol. ES (4) Relig. des Gaulois , Tom. I. pag. 283. Pezron , antiq. des Celtes, ag. 287. Pée) M Illud in vero eft, quod reznum orbis ita partiti fint, ut orien- tis imperium Jovi cederet : Plutoni cui cognomen Agellao fuit , pars occidentis obtingeret. Lacfent, Div. énfi. 2, 1. c. nn, 420 MÉMOTRE k Apparemment ce Pluton conduifit la premiere cofonie en Gaule, car nous lifons dans Céfar, que les Gau- lois lui rapportoient leur origine : Galli fe omnes ab Dite Patre prognatos predicanr. (L. 6. cap. 18.) Mer- cure , après lui , acheva fon ouvrage, inventa les arts & le commerce, établit des loix; auffi les Gaulois, comme je l'ai déja dit, lui rendirent des honneurs finguliers. Malgré cette pluralité de Dieux fecondaires , il eff fort vraifemblable que nos ancêtres ont connu à l’imi- tation des autres Gaulois un Etre Suprême, qu'ils n’ofe- rent repréfenter fous aucune forme extérieure & qu'äls nommoient Héfus. Qu'on ne dife point qu’on aït trou- vé la figure d’un Héfus dans la cathédrale de Paris, cette figure étoit vifiblement du temps des Romains, comme il paroîït par l’infcription qui fait mention de l'Empereur Tibere (az). Lorfque le commerce avec les Romains eut introduit de nouvelles Divinités, & ‘que tout fut brouillé & confondu, Héfus aura pris le nom du Dieu Mars, & la tradition immémoriale d’un Dieu Suprême fe fera éteinte. L’Auteur de la religion des Gaulois a attribué ce beau dogme à f@ nation, & rien n'empêche d’embrafler fon fentiment. L'idolâtrie, je lavoue , a inondé la furface de la ter- re; mais l’idée d’un Étre Suprême, établie par-tout par les enfans de Noé, quoique altérée & afloïblie par la fuperftition du peuple ; par les fourberies des Pré- tres & par les fictions des Poétes, n’a jamais pu être entiérement détruite. On en trouve des veltiges écla- tans dans les ouvrages des plus beaux génies de Gre- ce & de Rome, & Plus encore dans le confentement nn - ones A4) Antiq. des Gaulois, Tom. II. pag. 44. * - .ora confecrant , ? SUR TA RELIGION DES PEUPLES, Gc. 2x des nations les plus ifolées: IL n’eft donc pas furpre- fant que nos ancêtres , fimples comme ils étoient & peu répandus , ayent confervé quelques reftes de la _ plus ancienne & la plus univerfelle de toutes les tras ditions. E d' Ils paroïffent même avoir connu la fpiritualité &-la toute-préfence de la Divinité, puifqu'ils ne croyoient pes qu'on dit l’enfermer dans des murailles, ni la repréfenter fous une forme humaine (a) , mais qu'il falloit adorer ä l'ombre dés forêts & dans le filence des bois. Ces bois facrés leur tenoïent lieu de Tem- ples , les anciens Auteurs en parlent fouvent, Ce fut dans un bois facré que Civilis aflémbla les chefs des Bataves pour les porter à la guerre contre les Ro- mains (b). Ce fut dans un de ces bois, près de Ru- remonde , qu'on trouva Îles Idoles auxquelles les ha- bitans des environs de la Meufe faïifoient leurs facrifi- ces (c). Plufieurs nations Germaniques avoient con- facré une forêt nommée Caflum nemus , fituée dans une île de l'Océan, à la Décflé Hertha ou la terre. LesTac.Germ. Sueves , autre peuple Germanique, s'aflémbloient auf 7" dans une forêt vénérable, où l'horreur des myfteres augmentoit celle du Heu. Perfonne n’y entroit qu'il ne füt lié, en figne de fa foiblefle & de la puiflance du Dieu qu'on y adoroit. S'il tomboit ,.il étoit dé- fendu de le relever; il falloit qu'il roulât par ter- re , jufqu'à ce qu'il fût hors de la forêt. Je pañleïb-c30. fous filence le bois des Naharvales (4) , & cette au- (a) Cæterum nec cohibere parietibus Deos , neque in ullam humani oris fpeciem adfimulare , ex magnitudine cœleftium arbitrantur : lucos ac ue- deorumque nominibus appellant fecretum illud , quod folà reverentià vident, Tue. Ger. c. 9. ; (Bb) Specie epularum facrum in nemus vocatos. Tac. Aifé. Æ 4. ©. 14. (c) Knippenberg. Hift. Eccl. Gelriæ pag. 8. j €d) Apud Naharvalos, antiquæ religionis lucus oftenditur, Tac, Gersre,c.43. Mela I. 3. piog.Laert, ue 422 MÉMOIRÉ Éitiqa || tre forêt célebre , où Germanicus trouva les trifles re- liques des Légions Romaiïnes, facrifiées fur les autels des Germains , après la défaite de Varus (a). J’omets les bois facrés des Gaulois , fi fameux dans toute l’an- tiquité. Je ne m’arrête pas non plus au culte qu'ils ren- doient aux arbres même, j'aurai lieu d’en parler dans la fuite de ce difcours. L'immenfité de tre Suprême ne fut point [a feu- le tradition que les Belges avoient confervée. Ils croyoient l’immortalité de Pame , &' par conféquent une vie à venir (b).: Ce dogme infpiroit de la valeur à une nation d’ailleurs fi belliqueufe & qui faifoit de a bravoure un article de religion : car les principaux points de leur doctrine , fe réduifoient à ceux-ci : ado- rer les Dieux : ne jamais faire le mal : être brave en toute occafion. Nos ancêtres euflent été les moins criminels des Idolitres, s'ils n’avoient contracté dans le commerce des Gaulois l’affreufe coutume de facrifier les hom- mes. C’eft un article fur lequel il n’eft point poffi- ble de les juftifier. Bien au contraire, dès qu'ils eurent adopté ce funefte ufage , ils femblerent y prendre un goût que rien ne put afloiblir. Même du temps des Romains , les Empereurs eurent beau défendre fous eine de mort ces infames facrifices, la coutume l’em- porta fur la Joi. On la retrouve plus forte que ja- mais du temps de Tacite & même des fiecles après 1 Eufébe le dit formellement, Vers le milieu du fixieme Ça) Lucis propinquis Barbaræ aræ , apud quas tribunos 2c primorum ordinum centuriones.mactaverant. Tac. Annal. 1, 1. c. 61. C8) Luçan. I. 1. Cæf. 1. 6. c. 14. Mela 1. 3. NB. ce dérnier] s’ex- plique bien clairement: æernas efle animus , vitamque ad manes alre- Fam, SUR LA RELIGION DES PEUPLES, Ëc. 423 fixieme fiecle, les foldats de Théodebert , Roi d'Auf. trafie | étant entrés en Italie , Gérifiérent juf- qu'aux enfans & jufqu'aux femmes des Goths qu'ils avoient pu furprendre, C'eft Procope, Auteur con: temporain qui rapporte ce fait (a) & il n’y a point de doute qu'il ne regarde les Belges; car la plupart de nos provinces faifoient partie du Royaume de Théo- debert, & leurs habitans toute la force de fes armées, D'ailleurs les Fondateurs de Ja Monarchie Francçoife éroient généralement iflus de la Belgique : & quoique les plus confidérables d’entre les Francs euffent embra£ fé le Chriftianifme , on fait quels Chrétiens c’étoient que ces premiers Francs, on fait qu'ils ne laifloient pas d’obferver , ou du moins de tolérer les fuperfti- tions de leurs ancêtres, outre qu'il y avoit toujours un grand nombre de Payens parmi le peuple. Quoi- qu gi en foit, après avoir rapporté ce fait, Procope. ajoute ces paroles remarquables : » Les Francs tout » chrétiens qu'ils font, obfervent encore une grande » partie de leurs anciennes fuperftitions ; ; ils offrent » des viétimes humaines, & pratiquent des chofes exé- » crables qu’ils font férvir à à divitation Bien plus encore au huitieme fiecle, St. Vulfran allant prêcher l'Évangile en Frife , vit de fes propres yeux ces facrifices abominables. Un jeune homme, fur qui le fort étoit tombé, alloit être pendu .à loccafion de la fête de Mercure. Il le fut en effet, & ïl fallut un miracle pour ‘lé rendre à la vie(b). On peut voir par-là com- me me, Ca) Tum Franci .. . uxores l‘berofque Gothorum quos ibi deprehen- derant immolare ... corporaque in belli primitias in flumen jacere. Nam Barbari hi, et Chriftum jam colerent, pleraque tamien prifcæ opinio- nis & cultus vel ad id temporis fervant : nam & hoftiis uiuntur humauis, ,Procop. de bello. Gotñ. . 2 (8) Mos autem erat au Frifones, ut quemcumque fors contingeret, offerretur dæmonibus immolandus; ad hoc tunc ele@tus eft forte quidam puer Tome LI, M m m 424 MÉMOIRE : T bien cette horrible coutume étoit invétérée. Les Ro- mains la combattirent vainement ; fouvent s'en fouil- lerent-ils eux-mêmes. C’eft l'Evangile, c’eft le con- cours des Princes chrétiens, qui feul a pu labolir, La maniere d’immoler ces victimes n’étoit pas tou- jours la même. Souvent on les pendoiït aux arbres , comme dans l'exemple que je viens de citer. Tantôt ils les percoient à coup de fleches, & tantôt ils leur enfoncoient l'épée dans le dos , obfervant la maniere de tomber , & les palpitations des mourans, par lef- quelles ils prétendoïent deviner les chofes futures (a). Quelquefois ils les faifoient brüler tout en vie, & plu- fieurs à la fois, dans des ouvrages d’Ofier d’une gran- deur énorme (b). On offroit ces facrifices en toute oc- cafion. Dans les dangers éminens , ils faifoient vœu d'en offrir , perfuadés qu’il n’y avoit que la vie d’un homme qui püt racheter celle d’un autre homme (c), T1 paroïît qu'on chargeñt quelquefois la viétime de malé- diétions, car on a vu des autels avec un pañlage étroit au-deflous , par lequel l’homme dévoué à la mort étoit forcé de fe traîner , tandis que tout le peuple lui jet- toit des ordures (d). Il n’y a que peu de tèmps qu'on voyoit dans la province de Drenthe un monument femblable , peut-être exifte-t-il encore aujourdhui. Ono nomine .. appenfus eft ergo puer prædiétus in patibulo. Joann.2à Lei dis. 2. c. 21. Vide & vit. S. Wulfrani c. 5. in tom. 3. AG. San@t. menf. Marti. (a) Hominem immolatum, fupra tranfverfum peétoris feptum, enfeferiunt: auo cæfo prolapfoque , tum è cafu & convulfñone membrorum, tum è cruoris floxu , quid eventurumiit, præfagiunt, Diod. Sic.l.5, c.31. (5) Immani magnitudine fimulacra habent; quorum contexta viminibus membra vivis hominibus complent; quibus fuccenfis, circumventi flammä exanimanturhomines. Cæf. comm. 1. 6. 16. (c)Quod pro vita hominis nifi vita hominis reddatur, non poflealiter Deo- sum inmortalium numen placari arbitrantur. ibid. €4) Matth. Anal. tom. I. pag. 41. de l’édit. in 42. SUR LA RELIGION DES PEUPLES, Gc. 425 On choïfifloit ces malheureufes viétimes parmi les malfaiteurs & les prifonniers de guerre ; au défaut de ceux-là , ils jettoient le fort fur leurs propres compa- triotes (a), ou bien ils faififloient au hazard le pre- mier étranger qui leur tomboit entre les mains (b), En temps de guerre , ils dévouoient quelquefois à leurs Dieux toute une nation (c); alors s'ils étoient victorieux, ils facrifioient fans miféricorde jufqu’au der- nier de leurs ennemis. Les têtes de ces malheureux étoient ordinairement coupées & expofées fur des are bres; mais dans les combats ordinaires ils emportoient ces têtes chez eux, & s'en fervoient pour parer les murailles de’leurs maïfons. Dans les fêtes folemnel: les, rien n’étoit plus glorieux que de boire dans le crane d’un ennemi vaincu. Si c’étoit la rête de quel- que homme illuftre , ils la gardoient avec foin. C’étoit un héritage qui pafloit de pere en fils; & ils contoient, avec une efpece de complaifance, les offres qu’ils avoient refufées pour ne point fe défaire de ces marques infignes de leur propre valeur ou de celle de leurs ancètres (d). Au refte comme les Belges avoient adopté les rits & les facrifices des Gaulois , ils fe donnerent encore à leur exemple des Miniftres de la religion , dont les principaux furent les Druïdes , les Druïdefles , les Bar- des. J’omets les Eubages de Marcellin, aucun des anciens qui traitent des peuples Belgiques, n’en ayant fait mention. Tout le mpnde fait que les Druides s’occupoient (a) Supplicia eorum qui in furto, autlatrocinio , aut aliqua noxafintcom rehenfi,gratiora Diis immortalibus efle arbitrantur :fed cum ejus generis co- pia deficit, etiam ad innocentium fupplicia defcendunt. Cæf. 1. 6. c. 16. (6) Aueleët. Matth. t. I. pag, 4r. de l'édit. in 40. (c) Tac. Ann. lib. 13. c. 57. F - (d) Diod, fic. ], 5, c. 29. Paul. Diac. & ali. 2 mm m 1} Tac.Germ. C7 Tbid, c. rr. 426 MÉMOIRE des affaires de la Fa re , qu'ils immoloient les vic- times , & exercoient la médecine & la divination. Ils étoient en grand crédit , & toutes les affaires de la nation pañloient par leurs mains (a). Du temps de Ta- cite , ceux feuls avoient le pouvoir d’infliger des châti- mens : non pas comme dépofitaires de la puiflance civile ; mais comme Miniftres de la Divinité, dont ils exécutoient les Arrêts. Ils faïfoient obferver l’or- dre & le filence dans les afflemblées de la nation.! Chez les Gaulois ils éroient les Inftituteurs de la jeunefle ; mais je ne crois pas qu’ils fuflent chargés de cette fonc- tion chez nos Belges , dont toute l’éducation confif- toit dans les exercices de la chafe & de la guerre , & dans tout ce qui peut former des corps agiles & vigoureux, Aucun ancien ne l'a dit; & pour ap- prendre ces exercices , il femble qu’on r’avoit pas be- foin des lecons des Prètres, Je voudrois pouvoir donner une interprétation sûre du mot de Druïde ; mais fi on eft fouvent embarraf {E dans nos étymolosies » par la difette de mots anciens, ici c’eft l'abondance qui caufe la difficulté. EÉcartons d’abord l’origine grecque tirée du mot %%, chêne ; ce n'eft point des Grecs, que nos peres ont pris leurs Druïdes, L’embarras eft de choiïfir parmi les dériva- tions des anciens Dialeétes qui ont concouru à for- mer notre langue. Ce mot vient-il de Druto, Minif- tre, de Druth , fidele, de Druhtin, Seigneur : ou eft- ce un compofé de dera , arbre & de wido , faint ou facré ; comme fi on difoit les faints des bois, ou les facrés habitans des foréts? Le génie de notre ancien- ne langue permettoit de dire derwide , en retranchant re nee nt (2) Cæf. Diod. Plin. Strab. Mela & al, ° SUR LA RELIGION DES PEUPLES, &c. 427 l'a de dera ; & les Romains qui n’avoient point de #, ont dû écrire Druide. J’avouerai que cette étymo- logie me paroît la plus naturelle & la plus vraifem- blable. On fait combien les Druides des Gaules re- cherchoïent la folitude des bois, & la vénération qu'ils ‘avoient pour les arbres, & nommément pour le ché- ne; vénération qui pañla bientôt dans ces provinces, & dont nous verrons aflez de traces dans la fuite de ce Mémoire. Les Druidefles, ces femmes célebres, à qui le vul- gaire attribuoit des connoiflances furnaturelles & un commerce immédiat avec les Dieux , vivoient féparées du refte des mortels, fe communiquoient peu, fi ce métoit aux chefs des nations, Leur fon@ion principa- le étoit de prédire l'avenir. Si elles le faïfoient avec fuccès , on en venoit jufqu’à leur accorder les hon- neurs divins ; tout le monde leur faïfoit des vœux & des offrandes, pour fe les rendre favorables, Telle fut une Velleda , après avoir promis aux Bataves la vic- toire fur les Romains (a). Telles furent Arinie , & cette autre femme Druide, qui, voyant l'Empereur Alexandre marcher contre les Germains, lui cria en langue gauloife : Was , mais ne t’attends pas à vain- cre , défie-toi de tes Soldats (b). Telle fut encore cette Druidefle de Tongres qui prédit l'Empire à Dioclé- tien (c); & enfin celles dont parle l’infcription trouvée SR a) Mummius Lupereus , legatus legionis,, inter dona miflus veledæ. Ea virgo nationis Bructeræ , latè imperitabat, vetere apud Germanos more, quo plerafque fœminarum fatidicas , &augefcente fuperftitione , arbitrantur Deas. Tuncque veledæ auétoritas adolevit : nam profperas Germanisres & excidium legionum prædixerat, Tac. Hift.:1. 4.c. 61. (&) Lamprid. in Alexandro. p. 135. (e) Vopifc. in Numeriano. c. 11. 428 MÉMOIRE , à Nimégue en 1669 (a). C'eft à des femmes fem- blables qu'il faut rapporter tant d’autres infcriptions dé- couvertes en ces provinces & dans les pays étrangers: comme Matronis Vacallinehis, Matribus Galliacis , Brit- tis, Treviris, Frifavis, Matronis Aufaniabus, Aufanis, Ma- tronis & Marribus panoniorum & Dalmatiarum , & un {bid- p.92. orand nombre d’autres. &feq. d Les Bardes étoient des Poétes, qui chantoïent fur un inttrument aflez femblable à la lyre des éloges & des fatyres en vers de leur compofition. Selon Sulpice, Barde fignifie chantre en langue Celtique : comme ils étoient fans contredit les plus grands gefticulateurs du monde , je crois qu'il faut chercher l’origine de leur nom dans le verbe Teuton Baren , qui veut dire : gefticuler en criant de toute fa force. De-là le Flamand gebaerden ; &l’'Anglo-Saxon gebær, pour dire de grands geftes. Les Bardes fervoient fur-tout à la guerre, pour relever le courage des foldats en chantant les aétions héroïques des grands hommes. Ils poufloient des fons rudes & farouches , que la réverbération de leurs bou- cliers rendoïent encore plus effroyables ; car l’affoi- bliffément de la voix eût été un mauvais augure pour la victoire. Tel étoit le pouvoir de leurs vers , ou plûtot la vénération qu'on avoit pour leur miniftere, qu'ils arrétoient deux nations près a combattre, en .fe jettant entre deux. Si nous avions les chants : de ces Bardes , les feuls annales de nos ancêtres, ils répandroient fans doute un grand jour fur les premiers: Ca) Matribus mopatibus... fuis. M. Liberius à « -. « Viétor, Cives Nervius Neg, Fru. V.S.'L. M... Voyez les Antiq. neomag. de Smetius p.92. SUR IA RELIGION DES PEUPLES, Ge. 429 temps de notre hiftoire. Charlemagne témoigna aflez le casqu’il en faïfoit , en ordonnant de tranfcrire tout ce qu’on puttrouver de ces vers , de peur que le temps ne les fit fortir de la mémoire ( a) : précaution di- gne de Charlemagne , mais inutile pour la poftérité, Un Religieux de l'Abbaye d'Egmond en Hollande, qui vivoit au douzieme fiecle , aflure qu'il a vu les chants des Bardes que l’on confervoit dans fon Monaf- tére (b}). Ils ont péri apparemment dans la ruine to- tale de cette célebre Abbaye, brülée en 1574, pen- dant les fureurs de nos guerres civiles , par les ordres de l’infame Sonoi, Lieutenant du Prince d'Orange , fi acharné contre les Catholiques , qu’il ne voulut jamais permettre qu'on fauvât une partie de ce Monaftére, même pour y loger fes foldats (c). ns Pnee Ce (a) Barbara & antiquiflima carmina quibus veterum Regum aë@us ac bella canebantur, fcripfit, memoriæque mandavit. Eginh. apud du Chefne. Tom. 2. pag. 103. Nec non quæ veterum depromunt prælia Regum, À Barbara mandavit carmina litterulis. Poëta Sax, ibid. pag. 182, (6) En ti Barden woiïizen lezen Ti noch overich haben wezen Minen daghe binnen Hesmonde. Zolckes hab ic zo bevonden. Colyn.*. 158. &feq. pag. 64. del’éd. de van Loon. &) Noord Hollandfche oudheden , tom. I. pag. 475. Z < N 12 3 5} GI «W =, 430) 00 MÉMOIRE SECONDE PARTIE. L'arrivée des Romains en ces Provinces ajouta de nouvelles fuperititions aux anciennes , & augmenta con- fidérablement le nombre des Divinités Car, quoi- que ce peuple conquérant ne s'opposât jamais au culs te des Dieux étrangers , fon exemple, la réputation de fa fagefe , & l'influence d’un pouvoir prépondérant, manquoit rarement d'introduire fa religion chez les Narions vaincues. Rome d’ailleurs fe faifoit un point de politique d’inftruire fes nouveaux füjers , & fai- {oit élever nombre de jeunes gens dans des maifons deftinées à cet ufage, où on Jeur apprenoit la langue & la politefle des Romains (a). Il y avoit une éco- le femblable dans le château de Brittenburg, à l'em- bouchure du Rhin, & if n'eft point douteux qu’il n'y en eût plufieurs autres. À cette époque on vit difparoïtre jufqu'aux plus foibles reftes de l’ancienne fimplicité. Une vafte fo- rêt n’étoit plus le fymbole de limmenfité de l’Étre Divin ; ce fut une Divinité elle-même , & tous les arbres devinrent autant de Dieux. Alors on bâtit des #temples , témoin celui de Jupiter, que St. Willebrord abatit Chez les Frifons , témoin ceux dont on voit les ruines à Bavai, & plufieurs autres détruits par St. Éloi à () Voyez van Loon aloude Hiftorie , tom. I. pag. Gi.compar € avec la page 70. & 101. : SUR LA RELIGION DES PEUPLES, &c. 43? àAnvers & en Zélande (a). Enfin c’eft à cette épo- que qu'il faut rapporter ce grand nombre d'Idoles, qu'on a déterrées en différens temps, ou dont il eft fait mention dans les monumens anciens. En voici les principales, Jupiter. Son temple en Frife fut abattu par St. Wil- lebrord, comme je viens de dire. Il en avoit un autre au nord de Bavay à quelque diftance de la vil- le, dont il refte encore des veftiges, ainfi que de plufieurs autres. On a déterré de fes images à Nime- gue & en divers autres endroits (b).- … Mercure. Il étoit finguliérement honoré à Weft- capelle en Zélande, juiqu'au temps que St Wille- brord vint brifer fa ftatue (c). On montre l’image de ce Dieu dans léglife de la Vierge à Utrecht ainfi qu'une efpece de trompe ou de cor de chafle , dont on fe fervoit pour annoncer les heures de prieres (d). L'une & l'autre furent trouvées à Katwyk en Hollan- de ; on déterra une trompe toute femblable dans l’île de Goerée à l'endroit nommé de oude W/ereld , on en peut voir la figure dans Pars, pag. 108. C’eft principale- ment à ce Dieu qu'on offroit des victimes humaïnes. Les Germains fur-tout lui rapportoient leur origine, en le confondant avec leur Dieu Theut où Tkuifco, que les Gaulois appelloient Theutates. L'étymologie de ce mot n’eft pas bien obfcure. (C’eft un compo- * {é de theut, qui fignifie peuple , & de taer, qui fignifie pere. Ainfi theutates vouloit dire pere du peuple. Ces mots ne font point tellement hors d’ufage, qu’on n’en trouve des veftiges dans notre langue ancienne. Diet (a) Beka, pag. 0. de l’édit. de Buchelius. , @) Antiq. Néomag. p 69: 229. & 230. (c) Melis Stoke. pag. 4- de l'édition d’Alkemade. à À (d) Pars, Katwykfche oudheden. p. 243, & 108. de la derniere édition. Tome L Nnn 432 MÉMOIRE {e difoit encore au quatorzieme fiecle pour Zik ; comme il paroït par ces paroles de Melis Stoke :’* ei. den diet ; dat Wrieffche diet, pour dire : le peuple payen ; le peuple Frifon (a). On trouve la mème expreflion dans plufieurs endroits de la Chronique de Colyn (b). \Taet pour Wader, eft encore ufité en RE fra Les petits enfans par toute la Hollande s'en fervent pour dire papa, Hercule. On a trouvé à Nimegue ,.en Zélande & ailleurs des images de ce Dieu. Les deux infcriptions de Wei tcapelle : Herculi Macufino & Magufino ont bien exercé les favans : ils ont mis à contribution l'ancien Celtique & le Teuton, le Grec & l’'Hébreu , pour y trouver un fens raifonnable. If eft étonnant que parmi tant d'explications recherchées , on n'ait jamais dit un mot de la plus fimple de toutes, & qui devroit la premiere fe préfenter à l’efprit. On fait que prefque rous les peuples ont eu la fantaifie d'avoir un Hercule de leur nation. On connoïît l’Hercule Ty- rien , PHercule Crétois , l’'Hercule Indien , l’'Hercule Gaulois, l’Hercule Germanique , fans parler du Ro- main , du Thébain & de plufeurs autres qu'on peut voir dans Varron au nombre de 43. Aiufi l'Hercu- Je Magafan aura pris fon nom des Magufens , peu- ple de la Perf , dont il eft fait mention dans Éutébe & dans St. Clément (c); ou fi Pon veut de la ville de Magufa en Éthiopie, dont parle Pline au fixieme livre de fon hütoire { à). Quoiqu'il en {oit, Hercu= le étoit un grand objet du culte de nos ancètres. Une ville confidérable # Pile des Bataves portoit fon (a) Rym-kronyk van Melis Stoke, pag-4. & 5, del’édit. d’Alkemade, () Rym-kronyk van Klaes Kolyu ; p. go. &180 de l'édition de van Loon:” Voyez auffi Maerlant, van Velthem , Jean de Helu , &c. (c) Euf, præp, Evang, k 6,8. Clem. in recoguit. (d) Cap. 29. SUR LA RÉLIGION DES PEUPLES, &c 433 nom (a). DÈs le temps de Tacite on tenoit par tra- . dition , que ce Héros , non pas le Thébain, mais le _Germanique avoit été dans ces Provinces & y avoit érigé fes fameufes colonnes (b). On prétend même qu'il en fubfifte encore des reftes dans ces mafles énormes de pierres qu'on voit dans la province de Drenthe , & qui aflurément font très-anciennes ( c). Neptune. Le plus beau monument de ce Dieu eft celui qui a été trouvé en Zélande, portant un trident à la main & un Dauphin fous le bras, pour marquer que le domaine de la imer & des poiflons lui appar- &noit (d). Il eft fort naturel de croire que le culte de Neptune a été le grand objet des häbitans de la Zélande , eux, qui dès le temps des Romains, sadon- noient plus que tous les autres Belges à la navigation & au commerce maritime, comme on le pourroit prouver par des monumens inconteftables. Priape. On a trouvé des monumens de ce Dieu dans prefque tous les endroits de la Belgique. Ses images mutilées fervent, à ce qu’on prétend , encore aujourdhui d’ornemens aux édifices publics d'Anvers, de Louvain (e}) & de plufieurs autres places. Il .eft fort probable que nos peres ne le regardoïent qu'avec des yeux religieux, & comme le facré fymbole de la (a) Caftra Herculis . on- croit que le château de Malburg dans la Be- tuwe fupérieure a eté bâti fur fes ruines. Voyez le mémoire quia rem- porté le prix de la Société Littéraire de Bruxelles en 1769.pag 22. (b) Fuifle apud eos & Herculem memoravt ,.primumque omnium viro- rum fortium ituri in prælia cauunt. Tac. Germ. c. 2. Superefle adhuc Herculis-columnas fama. vulgavit. Ibid. c. 34. (c) Picard Antiq. van Vriefland. pag. 33. (ad) Voyez Smallegange , Chronyk van Zeeland, van Rhyn oudheden van Zeeland, Tom. I. & plufieurs autres. ; (e) De Priapo autem culto equidem nolim dubitare, cujus effigiem mutilam portarum una præfert , adeoque in veteri facellorum urbis indi- ce quem Leodico accepi , lego citari facellum Deiparæ in porta priapæa Lovanii. Grammaye Lovan, pag. 14. Edit, in folio. nnij 434 MÉMOIRE fécondité , & qu’en cette qualité ils l’ont jugé digne de leur culte. S'il eût été pour eux un aïguillon de la lafciveté ; les hommes les plus chaftes de la terre, car aucune nation ne leur difpute cet honneur, euflent- ils voulu" fouficir qu'on exposât les mœurs de la jeu- neffe , la pudicité de leurs femmes & de leurs filles à un objet de tentation fi chatouilleux ? Eux qui pro- diguerent tout leur fang dans la guerre contre les Ro- mains, parce que ces maïtres de la terre enlevoient leurs enfans pour s'en fervir à Rome à des ufazes in- fames (a)? Eux, dis-je, à qui leurs ennemis & leurs vainqueurs ont rendu ce glorieux témoignage: que les bonnes mœurs chez eux avoient plus de pouvoir qu'ail- leurs les bonnes loix (b}? Néhalennie, la Lune, Ifis , Cerès, Diane. Je ne fais qu’un feul article de toutes ces Divinités, parce qu'on les confondoit fouvent, ou pour mieux dire, parce qu’on les regardoit comme un même objet, auquel on donnoit différens attributs. Les figures de la fa- meufe Néhalennie nous repréfentent une Déeffe tan- côt affife , tantôt debout , tenant dans fon giron un pannier de pommes & d’autres fruits. On remarque fur-tout fes longs habits & fes fouliers. On voit à fes côtés un chien , un autre panier de fruits, quelque- fois un troncon de colonne , une proue, des rorches ou des cornes d’abondance, un Hercule, un Neptu- ne, deux victoires qui foutiennent le rideau d’un dais fous lequel la Déeffe eft affife, ou deux arbres, dont les branches & les feuilles occupent les côtés du relief (c). Cette Néhalennie n’eft autre chofe que la nouvel- (a) Tac. Hiftor. I. 4. c. 14. (8) Tac. Germ. c. T9. (ec) Smallegange Kronyk van Zeeland, pag. 82, & feq. Religion des Gau= lois, tom. 2. p. 78. & feq. SUR LA RELIGION DES PEUPLES, Ëc 435 le Lune. Son nom Grec we in, qui fignifie là nou- velle Lune +, ne laifle pas lieu d'en douter. D'ailleurs les attributs y conviennent le mieux du monde. Por- phyre, cité par Eufébe ,:en parlant de la nouvelle Lune , a rendu trait pour trait les fymboles de Né- halennie. » La nouvelle Lune, dit il, porte des ha- » bits blancs, des fouliers d’or & des torches arden- » tes. Le pannier qu’elle tient , fignifie qu’ellé contri- » bue à {a production des fruirs qu’elle fait poufler à » mefure que fa lumiere augmente. Quand elle por- : » te des fouliers d’airain , elle repréfente la pleine Lu- » ne. Les branches de laurier marquent fa chaleur & » les pavots fa fécondité. ?” Et dans un autre endroit le même Porphyre rapporte un oracle de la Lune fur la maniere dont elle vouloit être repréfentée. » Vous » donnerez , dit-elle ,à ma ffatue, l’air , les traits & la » mine de Cerès, tenant toute forte de fruits , mes » habits feront tout blancs & mes fouliers d’or ? (a). Voilà donc les attributs de Cerès donnés à la Lu- ne ; & tout cela fe trouve dans les monumens de Néhalennie. Le chien qui l'accompagne fortifie enco- re cette preuve : c’eft l’attribut de Diane. Or Diane n’eft autre chofe que la Lune, comme il paroït par ‘une infinité de paflages (b). On en peut dire autant dIfis, étant certain que les anciens la confondoient fouvent avec Cerès & la Lune (c). La fignification de la Déefle Néhalénnie n’eft donc plus un problème ; & il ne faut point écouter Ly- dius ( d ) ni fes copiftes, qui en font une Nympbhe des Se + La premiere lettre de «sy s’elt changée en afpiration , ce qui eft fort commun en Grec (a) Præp. Evang. 1. 3. Item IL. 5. c. 13. (6) Voyez Schedius de Dis Germanis. pag. 158: & 160. | éc) Relig. des Gaulois, t. I. pag. 222. Aurel. Havr, de cognom. Deor: gentil, 1, 3. pag. 2784 ( 4) In Belgio gloriofo. 436 MÉMOIRE eaux ; invoquée par les Bateliers qui vosuoient fur les rivieres de la Zélande, & qui l’appelloienc ANeel- je ou ÂNelleken hael-inne , ou haelt de [chepen in, ex- plication puérile , que ces Auteurs ont puifée apparem- ment chez quelque Meelrje de village en Hollande ou en Zélande. Quoi qu'il en foit, les Déefles , qui font le fujet de cet article, n'étoient point inconnues à nos ancêtres » & il ne manque point de monumens anciens , qui les resardent féparément. : D'abord la Lune étoit une des grandes Divinités de la Belgique. Tant Gaulois que Germaïins regardoient les premiers jours de la nouvelle Lune comme un temps facré. Les Germains croyoient qu'il n’étoit point per- mis de livrer bataille avant la nouvelle Lune , à la- quelle feule ils vouloient attribuer l’honneur de la victoire. C'eft Céfar qui le rapporte (a). Selon Taci- te (b), le plus heureux Augure parmi les Germains étoit d'entamer une affaire au temps de la pleine ou de la nouvelle Lune. Pline nous apprend (c), que le fixieme jour de la Lune étoit confacré chez les Gaulois par les plus grandes folemnités. Un Prêtre, vêtu de blanc , offroit deux taureaux de même cou- leur. On pañloit ce jour en réjouiflances & en prieres à l’honneur de la Lune, à laquelle ils donnoient un nom, qui fignifie en leur langue : celle qui guérit de tous les maux. Ce jour étoit encore remarquable , en ce qu'il commencoit leurs mois, leurs années & leurs fiecles. Outre la puiflante influence , qu’on attribuoit Re em (a) Cæf. Comm. 1. r. c. 50. (5) Coeunt... certis diebus, quum aut inchoatur luna , ant impletur: ñam agendis. rebus hoc aufpicatiffinum initium credunt. Tac, Germ. c. 1x Çe) EL. 16. c. ultimo, ün fine, SUR LA RETIGION DES PEUPLES, €c. 437 à la Lune , fur les fruits, les plantes , les pâturages . & les faifons, on la croyoit encore la Directrice des vents & des tempêtes ; & les géns de mer. n’oublioient rien pour fe la rendre propice. Nous avons éncore leurs ex-voto & leurs infcriptions. C'eft une des rai- fons pour lefquelles on lui élevoit des temples fur les bords de la mer, des fleuves & des lacs, comme ce- lui, de Domburg en Zélande & plufeurs autres fur les bords de la Meufe & autrés rivieres des Gaules & de la Germanie ; & c’elt encore une raifon pour 1a- quelle on trouve une proue fous les pieds de Néha- lennié dans les figures qui nous reflent de cette Déef. Diane n'étoit pas moins célebre. La forêt d’Arden- nes , la plus grande des Gaules lui étoit fingulierement confacrée ; on lui en fit même porter le nom. Dans une in{cription rapportée par Gruter & par l’Auteur de la religion des Gaulois (a), elle eft appellée Deana Ar- duinna, & dans une autre fimplement Arduinne (b). Dans un Bois près d’'Epternach au pays de Luxem- bourg , qui faifoit autrefois partie des Ardennes , ona trouvé une troifieme infcription avec ces paroles Deæ Diane (c), C'étoit de toutes les Déeffes celle pour qui les habitans de cette forêt & les peuples voifins : avoient le plus de dévotion. Encore au fixieme fie- cle, l’image de cette Déeffé étoit adorée fur une mon- tagne à 4 lieues d'Ivoi où Carignan, & ce ne fut qu'a- vec des peines & des travaux infinis, que St. Wulfi- laïc parvint à la fire abattre (d). Cent ans plus tard, lorfque St. Kilien vint prêcher la foi en Auftrafe, les habitans s’écrierent : » Nous voulons fervir la gran- (a) Tom. IL pag. 46, (8) Tom, I. pag: 486.) (c) Tom, L pag, 50; (4) Greg Turon. |. 8 ç, Es, 433 MÉMOIRE » de Diane à l'exemple de nos ancétres, pour qui » le culte de cette Déeflé a toujours été une fource » de profpérité (a). Et lorfque St. Remacle alla por- ter dans les Ardennes le dernier coup à Tidolêtrie expirante, il eut encore à exterminer les pierres de Diane, objet perpétuel de l'adoration des Peuples (b} Ce ne font point les feules Ardennes qui nous four- niflent des monumens de cette Déefle. Onen a trou- vé à Utrecht, à Rynsburg , à Valkenburg , à Alfen & autres endroits de la Hollande. Je ne m'y arrête- rai plus. Il exifte moins de monumens de la Déefle Ifis. Schedius n’en rapporte qu'un feul avec cette infcrip- üon : ISIDI SACRUM, fans nous apprendre en quel Pag.rss endroit de la Belgique on lait déterré. Un Aureur Hollandois nous aflure qu’une image d’Ifis fut trou- vée à Noordwykerhout en Hollande, on peut voir là- deflus deux lettres intéreflantes dans la nouvelle édi- tion du livre de_Pars ; nommé Katwytkfche oudheden, pag. 474 & 507. > D Je n'ai rien à dire fur Cerès, prife féparément , & fous fon propre nom. Je ne crois point qu’on en ait découvert quelque monument confidérable dans nos Provinces. Les autres Divinités ne nous occuperont guère , il fuffira d'y jetter rapidement un coup d’œil. J'ai déja parlé du Jupiter Frifon ou Jupiter Stavo , à qui l’on offroit tous les ans une viétime humaine (c). Fofle , autre Divinité des Frifons avoit fon temple dans le Foffeland , temple fi vénérable , que c’eût été un (a) AGta S, Kiliani apud Mabill. in Tomo 2. aét. pag. 093° , () Harig. cap. 55. in Tom. I. Chapeav. pag. 93. (c) Lyd. Bel. Glor, in initio. SUR LA RELIGION DES PEUPLES, Ge. 439 ün facrilege que de boire de l’eau d’une fontaine qui s’y trouvoit, ou de tuer les beftiaux qui paifloient . herbe dans le voifinage.* La terre étoit adorée fous le nom de Hertha , ou plutôt Eriha , {lon Tacite ; je ne doute point que le ciel ne le fût fous celui de Hafve ou Heafen. Il exifte dans la Bibliotheque des Jéfuites de Bruxelles une curieufe infcription qui com- mence par ces mots: Herculi macufano & Hafre. Dom Martin, Auteur de la religion des Gaulois, en ayant reçu une copie , tâcha d'expliquer ce mot Hafvx (a), qui lui faifoit de la peine, & voici comme il sy prit, 11 changea lHen N,l'Fen E, &l A & VE en diph- tongue , ce qui lui donna NÆVA; de-là il n'y a pas loin à NEHA, dont, en ajoutant Lennie, on pour- roit faire Néhalennie. Je ne réfuterai point cette ref titution. C’eft une pure ignorance de notre ancienne langue , qui fait trouver des difficultés où il n’y en a point. Hafven fignifie le ciel. Ce mot fe trouve dans tous les Gloflaires Anglo-Saxons , avec cette feule dif férence que dans la premiere fyllabe , on trouve tan- tÔt & , tantôt e, tantôt ea, ou 60, parce que ancien- nement toutes ces voyelles avoient le même fon. L’an- cien Pater, en Anglo-Saxon, commence par ces mots: Our Father which art in Heaven, & l’ancien Ecoflois par ceux-ci : Our father quhilk art in Heawinne (b). Hea- ven vient du verbe Heaffan , qui fignific élever, c’eit comme fi nous difions het verheven | pour dire den Hemel. : % ÿ Les rivieres & les fontaines de la Belgique furent bientôt converties en autant de Divinités, Du moins il eft inconteftable qu’on rendoit les honneurs divins (a) Religion des Gaulois, t. Il. pag. 85. (@) °T Vader ons in XX. oudetaelen, pag. 32, & 43. à Tome I, O o o î * Ibid. 440 MÉMOIRE | à plufieurs d’entr'elles. Le Rhin fur-tout étoit en gran de vénération. Les pierres & les ftatues trouvées à . Cologne, avec l’infcription Deo Rheno en font une bonne preuve (a). Claudius Civilis, près à livrer bataille fur les bords de ce fleuve , anima au com- bat les Bataves & les autres peuples Belgiques, en leur repréfentant qu'ils alloient combattre fous les yeux & fous les aufpices du Rhin & des autres Dieux de la Germanie (b). Julien rapporte , dans une de fes e lettres, que le Rhin étoit regardé comme le Juge & le Vengeur de la chafteté conjugale (c). En cas de foupcon, une mere couchoit fon enfant dans le creux d’un bouclier , & le confioit en cet état à la merci des ondes ; s'il périfloit, on le regardoit comme un fruit adultérin, perfuadé que fi la femme eût été chafte, le bouclier eût flotté fur la furface des eaux, & le fleuve lui eût rendu fon enfant. On trouve en divers anciens Auteurs des allufions à cette pratique fingu- lire, comme en ce vers de Claudien : Et quos naf- centes explorat gurgite Rhenus ; & en cet autre vers de St. Gregoire de Nazianze : Karl pur waisses yéro Pivao feéreae. (d). C’eit-à-dire, les Celtes jugent leurs enfans dans les eaux du Rhin. Et plus clairement en cette Epigram- me ancienne, rapportée par Cluvier (e) : \ \ = " ? (3 Oxpradsa gEATos FOTAL & Can pue Pays Téyie TaAMTÉUSOE ae S Tepes ETS Toi Te may ed eiguce AcAsusues Vurc apres En voici le fens : les Celtes expofenr leurs enfans fur ee mn (2) Aldenbrouck, de rel. ant. ubiorum. pag. 25. @) Rhenum & Germaniæ Deos in adfpectu m numine Capeñereui pugnam. Tac. hift. 1. 5. c. 17. d » D TEE : 7 (e) Epift. 16, (4) In Ruff. !, 2. (e) Germ, Ant. ], 3. ds nm tal SUR LA RELIGION DES PÉUPLES, Ëe. 44r les eaux du Rhin, pour juger s'ils font légitimes ; G ne. font Peres qu'après les avoir vu lavés dans ce fleuve vé- nérable. T1 eft des Auteurs modernes qui affignent une au- tre raïfon à cet ufage, prétendant qu'on n’expofoit ainfi les nouveaux nés que pour les fanétifier par l’ab- lution de ces eaux qu'on croyoit falutaires & divines. Et il faut avouer que dans le temps du Chriftianifme, & qui plus eft, au quatorzieme fiecle, on a trouvé des traces d'une pareiïlle fuperftition. François Pétrar- que, témoin oculaire, aflure avoir vu , la veille de St. Jean Baptifte, une infinité de femmes venir fur les bords du Rhin pour sy plonger les bras, les manches retrouflées, parées de fleurs & d’herbes odo- riférantes , & marmotant de certaines paroles. L’Au- teur, curieux de favoir la raifon d’un fpeétacle fi étran- ge , eut pour réponfe : quele peuple , & fur-tout les femmes , avoient cru de toute antiquité , qu’en fe lavant de la forte, on noyoit dans les eaux les calamités de toute une année, & l’on fe procuroit des jours heu- eux ; que pour cette raïfon, il falloit répéter tous les ans, en pareil jour, une ablution fi falutaire ( a). Pendant les quatrieme & cinquieme fiecles plufieurs peuplades Germaniques vinrent fondre fur ces Provin- ces , & y fixerent leur demeure, Les Francs & les peuples Goths ; fortis de la baffle Saxe , font ceux qui ont fait le plus de figure. On peut simaginer de quelle foule de nouveaux Dieux & de nouvelles fu- perftitions la religion de nos Peres fe fera alors ac- crue. Sur-tout on aura multiplié les victimes humaï. nes. Les Francs enoffroient, comme nous l'avons prou- mn > Ça) Lib. I. Epift, 4. ad Cardinalem, Colonnam. Oooï 442 MÉMOIRE vé ci-deflus, par l’autorité de Procope. Les Goths, iflus des Scythes, y étoient fort attachés , & ont été les derniers de l’Europe à fe defaire de cette horri- ble pratique, puifque , encore au dixieme fiecle , ils facrifioient tous les ans, dans un endroit de l'ile de Sélande en Danemarc , 99 hommes , autant de che- vaux , de chiens, de coqs & d’éperviers. Dans le mé-' me temps on pratiquoit en Suéde des facrifices tout femblables ( a). : Je crois que l’on ne fe trompera guère, fi on fixe à l’arrivée des Goths lufage de décorer quelques jours de la femaine du nom des Dieux feptentrionaux, car avant cette époque, les Belges comptoïent par nuits. Ces jours font aifés à reconnoïtre par les noms qui les défignent en Flamand; fur-tout fi on les compare à la langue Anglo-Saxonne , fœur de la nôtre, & aux autres langues feptentrionales, dont l’ufage a moins varié. Les deux premiers jours de la femaine, Zon- dag , Maendag , c'eft-à-dire , le jour du Soleil & de la Lune, n’ont pas befoin d’explication. Mais le troifie- me eft plus difficile à déterminer. Prefque tous les Auteurs ont cru qu'il étoit confacré au Dieu Teur, Teutates ou Tuifco, que les Gaulois & les Germains regardoient comme l’Auteur de leur origine. Cette opinion n’eft pas fans difficulté. C’étoit Mercure, que lon honoroit fous le nom de Teurates. Son tombeau trouvé à Carthage , au rapport de Tite-Live (b) , avec linfcription Mercurius Teutates , & beaucoup d’autres preuves invincibles qu'on en donne , ne laiflent point Jieu d'en douter. Il n’eft pas moins certain que ce a (a) Ditmar. Merfeb:Chron. I. r. pag: 327. Ed. Leïbn, & Ol. Mag. I. 3. c. 7. (6) Quod ubi verfus Scipio in tumulum , quem Mercurium Teutatem appellant, advertit , &c. Liv. Déc, 3. 1, 26. c. 44. À © _ SURLA RELIGION DES PEUPLES, 6c. 443 même Mercure füt adoré des Goths, fous le nom de Woden , auquel le quatrieme jour de la femaine étoit confacré. C'eft ce que les anciens Auteurs atteftent unanimement, & voilà le nœud de la difficulté. Le Mardi étoit donc le jour de Mercure fous le nom de Teut ; le Mercredi lui étoit encore dédié fous celui de Woden , voilà deux jours de fuite confacrés au mé- me Dieu, ce qui paroît incroyable , & ce qui feroit fans exemple, je ne dis pas chez les nations de l’Eu- rope , mais chez toutes les nations de la terre. II paroït donc plus raifonnable d'attribuer ce jour à quel- que autre Dieu des Goths, & l’on n’eft point embarraf- 4 à faire un choix. Les Goths adoroient la Déeffe Thifa, Thyfa ou Dyfa, femme du Dieu Thor (a); c’eft à celle-là qu'ils ont confacré le troifieme jour de la femaine , comme ils donnerent le cinquieme à fon époux. L’analogie du mot y revient infiniment mieux. Jamais on ne trouvera dans les anciennes lan- gues Tuifcos-dag ou Teuts-dag. Nos peres l’appelloient Dyfdag ou Dyfendag , c’eft-à-dire , le jour de Dys. Les Danois Tyfdag , & les anciens Frifons Tyfdey. La conformité de toutes ces langues. forme une preu- ve auff claire qu’on la pourroit défirer dans un chaos fi obfcur. Le quatrieme jour de la femaine étoit confacré à Woden, qui eft le même qu'Oden ou Odin, n’y ayant d'autre différence que celle des différens dialeétes des peuples du nord. C’étoit un ancien Héros, fous la con- duite duquel les Goths s’étoient établis dans le fepten- trion de l’Europe. Pendant fa vie on l’avoit recardé comme un grand Magicien, & même comme un Dieu. (a) Vide Thom. Marefchall. obferv. in verfion. Anglo-Sax. ad cale, Evang. Goth. pag. 513. & feq. édit. 1684. 444 MÉMOIRE On ne croyoit point qu'il fût mort, maïs qu'il s'étoit retiré dans quelque terre heureufe & inconnue dans VAfie, où il préparoit un féjour délicieux à tous ceux de fa nation qui imitoient fa valeur. Dans quelques parties de la bafle Saxe le Mercredi elt encore appel- Îé Hodentag , c’eft-à-dire, le jour de Woden (a). Tous les Dialectes de l’ancien Gothique ont confervé des tra ces de cette étymologie. Les Flamands difent Woenf- dag, qui n’eft qu'une abbréviation de Wodens-dag. Les Anglois Wednes-day ; les Danois Wonfdag; & d’autres peuples feptentrionaux Odens-dag & Vodendag, Le Jeudi étoit confacré au Dieu Thor, fils de Wo- den (b). L'ancien nom de ce jour, Thorfdag , c’eit- à-dire, le jour de Thor, fe conferve encore dans la langue Angloife où Thurfday fignifie Jeudi. Le Fla- mand & les langues feptentrionales ont changé Thors- dag en Donderdag & Donnerflag, c’eft-à-dire , le jour du tonnerre : à caufe qu'on croyoit, que depuis fon Apothéofe, Thor étoit chargé de la direction. du ton- nerre & de la foudre ,comme Woden préfidoit à la guerre & Freya à la propagation de l’efpece humaine, Peut-être le nom feul de ce Dieu 2-t-il fait tout le fondement de cette opinion ; car dans les anciennes langues du nord Thor fignifñoit tonnerre. Autrefois le mois de Mars lui étoit également confacré fous le nom de Thormaanet , le mois de Thor. Le Vendredi , que les Anglo-Saxons appelloient Frige dag , que nous appellons Vrydag, les Anglois modernes Friday, les Allemans Freytag, les Danois , Fredag étoit dédié à la femme de Woden , nommée (a) Sched. de Dis Germ. pag. 110. (@) Thor Orhini Filius. Marefchall. loco fup. citat. Menfis Martius ab eo vocatur Thormaanet , & Thorfdag ; quin & Tonitru adhuc vocatur Thor- Cum, quañ fonitus Thorenis. lib, manufc. ex eddà apud Marefchall. ibid. SUR LA RELIGION DES PEUPLES, Ëc. 445$ Freya, Fria, ou Frigga (a). C’étoit la Venus des peu- ples feptentrionaux ; les Suédois la confondoiïent avec leur Dieu Fricco , auquel ils donnoient les mêmes at- tributs. Les Goths faifoient grand cas des trois dernie- res divinités, HE Adam de Breme nous apprend qu’on leur avoit éle- vé à Upfal en Suéde un temple fuperbe , où l’or re- luifoit de routes parts [b]. On y voyoit la ftatue de Thor , & à fes côtés celles de Woden & de Fricco. En temps de pefte & de famine on facrifioit au premier: pour la guerre on invoquoit le fecond; quand on cé- lébroit des nôces, on sadrefloit à la troifieme de ces Divinités. Je nai rien pu découvrir fur le Dieu du feptieme jour. Ainfi je ne déciderai point s’il y a eu chez les Saxons un Dieu particulier nommé Seater , ou fi ce n'eft que le Saturne des anciens, Jufqu’a ce que de nou- velles découvertes nous donnent de nouvelles lumie- res, on peut s’en tenir au fentiment de Yerfiegen, adopté par prefque tous les Auteurs, favoir que les Saxons adoroïent Saturne fous le nom de Seater, & que c’eft de lui que le dernier jour de la femaine a eu fon nom, Ça) Fre, aliter Frigge Venus eft. Ab hac dei dies fextus hebdomadis nomen habuit. ibid. F Woden, de quo omnium ferè barbararum gentium Regium genus lineam trahit; quemque gentes Anglorum Deum efle delirantes , ei quartum diem feptimanæ , fextum uxori ejus Freæ perpetuo ad hoc tempus confecra- verunt facrilegio. Wäüll. Malmesb. de geit. Reg. Angl. 1.E. c. 1. [5] Adam Brem. hift. Ecclef. c. 233. Item c. 234. ubi hæc : Si peftis & fames imminet, Thor idolo immolant; fi bellum, Wodani; fi nuptiæ celebrandæ funt, Fricconi. Æjoure; à ce palage ce vers de Saxo, |. 2. C. 34,. Sipotero horrendum!Friggæ fpectare maritum, Ercer horrible époux de Frigga, eft appellé Othin ÆArmipotens, Es vers plus haut. Au se se nos Peres la prononciation de Fria & de Frigga &oit exa&tement lz même. 446 MÉMOIRE Voilà ce que j'avois à dire fur la religion des ha bitans de la Belgique avant & après l’arrivée des Ro- mains. Religion infectée dès les premiers temps du vénin de l’Idolätrie qui inondoit la terre; mais fimple en fon principe & telle qu’elle devoit être chezun Peu- ple ifolé & fauvage. Religion digne enfin des regards de notre fiecle par les traces qu’elle confervoit des plus importantes vérités , dont la tradition étoit aufli an- cienne que le monde. On a vu ces foibles lueurs s'é- teindre par le commerce avec des peuples plus cor- rompus , & l’ancienne fimplicité faire place aux fa. bles les plus abfurdes & aux coutumes les plus affreu- fes. Un plus grand détail des pratiques payennes , découvertes pendant la prédication de l'Evangile , re- pandra un nouveau jour fur tout ce qui précéde , & fera voir en quel abime de folie & d’erreurs peut tomber la raïfon égarée de l’homme, quand elle n’a d’autres guides que l'ignorance & la fuperftition. III. PARTIE SUR LA RÉLIGION DES PEUPLES, 6e. 447 TROISIEME PARTIE. O: ne peut douter que dès les premiers fiecles àl n’y ait eu des Chrétiens dans la Belgique. On fait qu'il y en avoit un grand nombre dans les légions Ro- maines ; & il feroit furprenant qu’il ne s'en fût point trouvé dans cinquante forterefles fur lesbords du Rhin, & en tant d’autres places au milieu des terres, où les Romains entretenoient des earnifons. S'il en falloit des. preuves , il ne faudroit que produire les antiquités de la feule ville de Nimégue. On y verroït des pier- res, & des anneaux ornés des fnmboles du Chriftianif- me: un agneau; une croix, Ou une ancre entre deux petits poiflons; des médailles qui portent le monogram- me de JESUS-CHRIST, ou les lettres Alpha & Omega [a]. Mais fi ces chrétiens Romains ont fait beaucoup de profélytes parmi les naturels du pays , c’eft de quoi l'on peut raifonnablement douter; du moins pour les Provinces feptentrionales, car on con- vient que dans celles du midi, il y eut des chrétiens au troifieme fiecle & même auparavant. J'ai fait voir dans un autre ouvrage , comment les invañons des Barbares ont éteint ces premiers rayons de lumiere, II feroit inutile de répéter ici ce que j'en ai. dit, d'autant plus que les monumens eccléfiaftiques de ce temps-là ne repandent aucun jour fur les ufages du Paganifme , qui font le feul fujet de ce Mémoire, C’eft Ta] Vide Smetii Antiquitates Neomagenfées, Tome E, P pp JD MÉMOIRE tn fous les Roïs Francs de la premiere & de la feconde race , c’eft dans les écrits du feptieme fiecle & des deux fuivans, qu’il faut chercher un plus ample détail, L'idolätrie aux abois découvrit alors toute fa turpitu- de. Pour inftruire les nouveaux convertis, gens igno- rans & barbares, qui ne faifoient point fcrupule d’al- - lier les fables des faux Dieux aux myfteres de JESUS- CHRIST , les zélés Pafteurs de l'Églife étudierent à fonds les pratiques Payennes & fe communiquerent leurs découvertes dans des fynodes convoqués À. cet effet. On lit encore avec plaifir ces curieux catalo= gues qu'ils dreflérent des fuperftitions du temps, fur- tout celui qui fe trouve à la fuite du fynode de Leptines; maintenant Leflines, en Hainaut , tenu fous Charles Martel en 743 , par l'explication duquel je finirai ce. Mémoire. IL eft intitulé : Indiculus fuperfiitionum & Paganiarum ; &c. c’eft-à-dire , Index ou regître des fuperfhtions & pratiques Payennes, dont les Evèques tâcheront de détour- ner les peuples. Holfienius découvrit le premier ce cu- rieux monument, ainfi qu’une rénonciation au diable, & une profeflion de foi en langue Théotifque , däns un très ancien manufcrit de la Bibliothèque Palatine. Tout cela fe trouve dans le fixieme tome des Conciles du Pere Labbe & en d’autres compilations. Jean Geor- ge Eckhard , un des plus favans hommes de l’Allema- gne , en expliqua les endroits difficiles dans fes com. mentaires fur la France orientale [a], ouvrage plein d’érudition , qui m'a été d'un grand fecours pour la compofition de celui-ci. Si ce Mémoire n’étoit fait que pour les Savans, j'en aurois retranché toute la troifieme partie , en renvoyant [a] Tom.I. pag. 407. & feq. SUR LA RELIGION DES PEUPLES, 6c. 449 le lecteur aux commentaires d’Eckhard, où les fuper- ftitions mentionnées dans l’index de Leptines font ex- pliquées au long. Mais parmi les perfonnes qui liront mon ouvrage , combien n’en eft-il pas qui ne lifent jamais les livres latins , fur-tout ces grands in-folio ; & qui ignorent profondément qu'il y a eu un Jean George Eckhard au monde? J’ai cru faire plaifir aux Lecteurs de ce genre , en leur préfentant en racour- Ci, & dans une langue qui leur eft plus familiere que le latin , les principaux traits par lefquels ce favant homme a peint les pratiques religieufes de nos Bar- bares ancêtres. Il m’eût été impoffible de traiter cette matiere de nouveau , fans me rencontrer avec lui, & fans faire ufage des mêmes autorités qui appuyent fon explication. Si mon amour propre ne trouve pas fon compte dans cet aveu, il doit fe taire devant Puriliré du public. Quelques perfonnes du moins s’inftruiront dans cette partie de mon ouvrage; voilà ma récom- penfe , je n’en défire point d'autre. Les Savans n’ont qu’à fauter cette partie. D'ailleurs je ne fuis pas tel- lement copifte, que.je ne préfente en quelques endroits des particularités nouvelles , & des explications , fi jofe le dire, plus fatisfaifantes que celles de mon Au- teur ; par exemple, fur les Spurcalia., fur les Nimi- das, les Tombeaux , le Petendo, les Ÿrias, &c. Ajou- tons que l'attention que j'ai eue d’écarter tout ce qui n'eft point propre aux Belges, méritera , peut-être , quelque reconnoiflance de la part de mes Compatrio- tes, que j'avois principalement en vue. La premiere de ces fuperftitions eft intitulée : de facrilegio ad fepulchra mortuorum ; & regarde, fans dou- te, les funérailles. Les anciens Belges brüloient les corps morts. Ceux des provinces méridionales imi- tant la magnificence des autres Gaulois , faifoient, fans Pppi 450 .. MÉMOIRE doute , cette cérémonie avec plus de pompe que Îles peuples feptentrionaux ; mais les uns & les autres S’ac- cordoient à mettre fur le bucher du défunt, fes armes & fon cheval de bataille [a]. Pour brüler les corps des grands, on fe fervoit d’un bois plus précieux ; on en- terroit avec leurs cendres quelques médailles d’or ou d'argent, quelques curiofités de grand prix, la tête de quelque bête confacrée particulièrement à la Divinité tutélaire du mort, comme la tête de bœuf dans le tombeau de Childeric ; car le bœuf étoit l’animal du Dieu Thor. Souvent un ferviteur fidele, un ami inti- me , pour témoigner fon attachement au défunt, fe donnoit la mort fur fon bucher , & faifoit mêler fes cen- dres aux fiennes [b]. Les femmes mêmesne s’exemptoient point de ce cruel devoir. Chez les Hérules , nation Germanique, une époufe fe feroit deshonorée , fi elle eût voulu furvivre à fon époux [c]. Comme ces peu- ples belliqueux attachoïent une efpece d’infamie à mou- rir de mort naturelle , ils coupoient quelquefois la tête aux mourans, afin qu'ils paruflent mourir de mort Ce] Funera funt, pro cultu Gallorum,, magnifica & fumptuofa, omnia- que, quæ wvivis cordi fuifle arbitrantur, ün ignem inferunt , etiam ani- malia ac paulo fupra hanc memoriam fervi & clientes , quos ab iis di- lettos efle conuftabat, juitis funeribus confectis , unà cremabantur. Cæf. comm. |. 6. €. 19. Funerum nulla ambitio: id folum obfervatur , ut corpora clarorum vi- rorum («certis Jlignis crementur. Struem rogi nec veftibus, nec odoribus cumulant ; fua Cuique arma, quorumdam äigni & equus adjicitur. Tac. | Germ.c. Dr tele NB. Voyez auf l'Anaftañs Childerici de Chifletius. [6] Erantque qui fe in rogis fgorum velut un victuri libenter immit terent. Melua \ . [e] Herulo viro defunéto , necefe fuifle mxorem quæ virtutis exiftima- tionem coufequi , gloriamque apud jpofteros relinquere vellet , laqueo. apud wviri fepulchrum, non longe poff , vitam finire : quæ hoc facerere- cufaret , hanc ignominiæ notam manffle, & à propinquis mariti infefta- tionem. Pracop. Bell. Gorh. 1, 2, . SUR LA RELIGION DES PEUPLES, Ge. 45r violente, ce qu’ils croyoient utile pour la vie future [a]. Âu refte, comme les richefles, qu'on enterroit avec les morts , euflent pu tenter la cupidité des vivans, la loi falique condamna à une amende de 100 fous d’or, celui qui dépouillefoit un tombeau ; amende confidé- rable , puifqu’il n’en falloit payer que 45 , pour avoir tué un homme [D]. “Al La feconde fuperftition de cet index eft intitulée : de facrificio fuper defunétos , id eft dads-ifas.. Ce der- nier mot eft compofé de dads ou deads, qui figni- fie des morts, & de ifan.ou effen, qui veut dire man- ger. Nos peres offroient des facrifices & faifoient des repas fur les rombeaux des perfonnes, dont la mé- moire leur étoit chere, Cet ufage étoit fi profondé- ment enraciné, qu’on eut toute la peine du monde à le détruire après qu'ils eurent embraflé le Chriftiani{- me, De-là tant de décrets dans les conciles du temps contre ces facrifices impies , & ces repas fuperftirieux. De-là les exhortations du Pape Grégoire III, aux nouveaux convertis de renoncer aux facrifices des morts. [ec] De-là enfin la réponfe du Pape Zacharie à S. Bo- niface, qui lavoit confulté fur ce point : Pro facrile- gis presbyteris habendi, ut fcripfifli , qui tauros & hir- cos , düs paganorum immolant, manducantes facrificia MOrIUOTUM. La troifieme fuperftition eft exprimée en ces paro- les : de fpurcalibus in Februario. Terme Barbare, qui © — [el Ut languentis capite amputato, cadaver, more gentilium, ignibus comburendum ,traderetur. Vita S. Arnulphi: c.2. b] Si quis hominem mortuum exfodierit & expoliaverit , Malb. Thur- vichalt, IUT M. qui faciunt folidi C, culpabilis judicetur. Lex Sal. t. 13. NO. 2. p. 12.ed. Wendel. Si quis Romanum tributarium occiderit MDCCC den. qui faciunt folid. XLV. culpabilis judicetur. Ibid. t, 444, N°. 7: ag. 31. : Rue [el Ep. Greg. inter Bonifacianas 128, 45 2 MÉMOIRE a bien embarraflé les interprètes. Les Hoflandois qui ‘ont mieux confervé que nous les éxpreffions de l’an- . cienne langue, appellent le mois de Fees Sprokkel- ‘maend ou Sporkelinaend , d'où les Jpurcalia feroient dé- rivés. Kilien a cru qu'on à nommé ce mois Sprokkel- maend, à caufe dufroid qui s’y fait encore fentir, Eckhard prétend qu’on a.voulu dire par ce mot , que le froid cft alors le plus rigoureux ; mais ces deux Auteurs fe trompent : jamais dans notre langue, Sprokkel n’a fi- ‘gnifié le froid. Nous nous fervons de ladje@if fprok ‘pour dire, fec, aride, mort; & du fubftantif fprok- houtou fprokkelhout , pour dire du bois mort , & vermoulu. Ainfi forotkelmaend fi fi gnifiera le mois où le bois eft fec, flérile, & dans un état de mort, jufqu'à ce que la {eve du Drinternps lui communique une nouvélle vie. Aünfi les fpurcalia auront été une fête & des facrifi- ces en l'honneur du Soleil pour lui demander le re- nouvellement de la nature, la fertilité de la terre & les plus heureufes influences ; au mois de Février les peuples feptentrionaux offroient au folcil le pourceau facré, qu ‘ils engraïfloient avec le plus grand foin. Cet animal étoit en fi grande vénération, que dans les cas es plus graves, on mettoit la main fur Les fois, pour Eire \ des lermens plus inviolables , & que la veille du facrifice les Rois fe.le faifoient amener, pour prononcer, en le touchant, des vœux & des prieres folemnelles [a]. Les habitans de ces provinces, fortis du feptentrion, conferverent cet ufage: & c’eft-là ce que les peres du concile de Leptines ont voulu marquer par ces paro- les : de fpurcalibus in februario. Le quatrieme article traite de cafulis , id eft fanis. ‘Quand les Belges eurent appris à fe faire des Idoles , [e] Voyez Olofs Saga & Gothriks Saga, cités par Eckhart. t. 1. p 409. o | SUR LA RELIGION DES PEUPLES, Gc. 453 ils les enférmerent dans de petites chapelles , faites d’abord de fimples branchages , & énfuite plus régu- liérement de bois au de pierre; mais toujours dans quelque forêt facrée. C’eft ce qu'on appelloit cafule. ls alloient fouvent y faire des facrifices , mangeant les viandes offertes à l’Idole du lieu. Fanum, com- . me tout le monde fait, fignifie un temple des Gentils,; 3 d’où vient le nom de fanatici, fanatiques , dont on fé fervoit au moyen âge pour dire les Payens [a]. Le cinquieme titre porte : de facrilegus per Ecclefias. C’eft que ces nouveaux chrétiens à moitié convertis , & encore tout barbares, alloient danfer & s'enivrer dans les Eglifes, à l'honneur des Martyrs, chantant des cantiques profanes , & offrant des victimes felon les rits des payens [ b]. | La fixieme fuperflition eft intitulée : de facris fyl. varum quæ nimidas vocant, Le culte que les premiers habitans de ces Provinces rendoient à la Divinité au milieu des bois , pafla enfin aux arbres mêmes. Les Prédécefleurs de Clovis les adoroiïent & y offroient des facrifices, au rapport de Grégoire de Tours {c]. Baudemond l’aflure en paroles bien formelles des ha- bitans de Gand [d]. Le Pape St. Grégoire exhorte la Reine Brunehaut à ne plus fouffrir en fes Etats les. adorateurs des arbres [e]. Les lettres de St. Boniface, [el Voyez Du Cange au mot Fenatici. I] cite ce paflage du 65. chapitre : de Fredeoaire : fereur eorum Deum fiiffe locurum, guem jfanatici nom nant /odanum ; & cet autre du 10. chap. des Gefta Regum Francorum : erit ipfe [ Chlodoveus ] senc fanaticus & paganus , & enfin les Annales Lambeciani janne 708: W/ Aborridi fanatici erant. [é] Non licet in Ecclefa choros fecularium vel puellarum cantica exer-- cere, nec convivia in eccleña celebrare. Statut. Bonif. c. 21. Hoftias im. molatitias , quas ffulti homines juxta Ecclefias ritu pagano faciunt , fub nomine Sanctorom Martyrum vel Confeflorum, Deum & Sanctos fuos ad : iracundiam provocantes. Syn, Bonif. anno 742. c. 5. {cl L: 2. c. 10. [d] In vita S. Amaudi. [e] L. 7.Ep,5; ASA MÉMOIRE 1 les capitulaires de Baluze , les fynodes du temps en fourniflent une infinité de preuves. C’eft dans ces bois & au pied de ces arbres qu'ils -célébroient la faimeufe neuvaine, offrant pendant neuf jours du neuviéme mois de l’année, chaque jour , les têtes de neuf animaux , d’où ce mois fut nommé Ha- Legmonath, qui veut dire le mois facré [a]. Je crois avec Eckhard que le mot de Nimidas eft corrompu, & qu'il faut lire niun heads, c’eft-à-dire, neuf têtes , où plutôt miun days qui fignifie neuf jours. de forte que ces paroles : de facris Sylvarum que ni- midas vocant, voudront dire , des dvi des bois qu'ils appellent la neuvaine ou les neuf jours. Le feptieme titre eft concu en ces termes: de his que faciunt fuper petras. On fait que nos peres fai. fvient les tombeaux en rafe campagne , & fouvent le long des grands chemins. Ils avoïent coutume de les couvrir de trois grofles pierres, deux à quelque diftance l’une de l’autre , & la troifieme par deflus. On trouve encore de ces tombeaux en plufieurs pays du nord, mais nulle parten fi grande quantité qu’au pays de ‘Drenthe dans la province d'Overiflel [8]. Com- - me ces pierres couvroient les cendres des morts, on croyoit que leurs Manes y habitoïent, ou du moins, que de temps entemps ils venoïient y faire quel- que féjour. Les Payens , foic pour honorer ces morts , foit pour apprendre l'avenir par le fon qu'on faifoit rendre à ces pierres, y venoient fouvent prier , faire des facrifices , & allumer des cierges & des flambeaux. Les nouveaux convertis ne quitterent : que [«]-Ol. mag. Ad Brem. Beda &e. [é] Picard , Antiq. pag. 23. & fea. SUR LA RELIGION DES PEUPLES, &c. 4$ÿ que difficilement cet ufage ; de-là cette formule d’in- terrogation dont fe devoit fervir l'Evêque en faifant la vilite de fon Diocefe : Si aliquis vota ad arbores , vel ad fontes, vel ad lapides quofdam quafi ad altaria Jaciar | aut ibi candelam feu quodlibet munus deferar : (a) & cet endroit d’un ancien pénitentiel : Wenifti ad aliquem locum , ideft ad fontes vel ad lapides, € 1bi aur candelam auf faculam pro veneraione loci incendifh. Et enfin cette loi de Charlemagne, de arboribus vel pe- tris, vel fontibus , ubi aliqui fiulti luminaria vel alias obférvationes faciunt : omnino mandamus ut ifie peffimus ufus G& Deo execrabihs , ubicunque invenitur , tollatur 6 deftruatur. L. 1. Capitul. cap. 64. Je ne nvarréterai point au huitieme titre de facris Mercurii vel Jovis. J'ai aflez parlé de ces Divinités : je pañlérai auffi le neuvieme : de facrificio quod fit ali- cui fanétorum. | Le dixieme titre porte : de Phylatteris 6 ligaturis. Phylaëtere fignifie préférvatif , du- verbe Grec gorarcu conferver, garder, préferver. C’éroit de vrais Talifmans de papier , de bois ou de métal, avec le nom de quelque Divinité , ou des caracteres fuperfti- tieux , auxquels on attribuoit la vertu d’éloigner tout malheur de celui qui les portoit. Ces caracteres étoient Gothiques ou Saxons. Car il faut remarquer , que nos ancêtres , tout barbares qu'ils étoient, fe fervoient de certaines lettres gravées fur des tablettes de bois de frêne , avant qu'ils euflent appris le Latin, avant l’u- fage de l'encre & des plumes, & même avant qu'ils euflent adopté le mot de letter, qui vient vifiblement de lirtera. {IS appelloienit ces anciens caracteres runa, Re mn | (a) Regin. de Eccl. Difcipl. I. 2. pag. 210. edit. Balnz. Tome I. : Qa q 456 MÉMOIRE mot Gothique, qui fignifie fecret, myfiere (a). Voyez la verfion d'Ulphilas , ouvrage du quatrieme fiecle , au chapitre IV. de St. Marc, verfet IT. où ces paroles -Wobis datum eft noffe myfterium regni Dei , font tra- duites par celles-ci : izwis atgiban ift kunnan runa thiud | angardgos Goths. Voyez aufli St. Luc chap. 8. ÿ. 10. : c’eft de ces caracteres qu'il faut entendre ces vers. de Fortunar. À Barbara Fraxineis pingatur runa tabellis, 5 © Quodque Papyrus agit, Virgula plana valers. Comme tout le monde ne connoifloit pas ces lettres ;. on les appelloit runa, myfteres ; on. donnoit ce mé- me nom aux Phylaéteres, qu’on regardoït comme de très-grands fecrets.. I1 y en avoit de toute efpece: un ancien Glofflaire nous apprend les fept fuivantes , que: je me difpenferai de traduire (b). » fig-runar. (fig fig- » nifie victoire). Runas viétoriales callere debes , ff. » fapiens , aftutufque atque callidus evadere cupias. » Incide eas capulo , vel retinaculo enfis tui, &c. » Brun-runar. ( Brun fignifie fontaine) runas fontanas. » adhibe, fiquando merces tuas fartas , teétafque mas: » ritimifque periculis exemptas habere cupias. Eas pup- » piincidas & gubernaculo, &c. Mäl-runar ( Mela fig- » nifle écriture , parole écrite & non écrite) Logo- » runas,... Ufurpato in penfandis & ulfcifcendis inju- » riis: eas incidito fepimentis, tentorüs & fedilibus » fori, ubi judicia peraguntur. ÆAul-runar. ( Aul veut: » dire Bierre, d’où vient le mot Anglois Ale). Ru- » nas cerevifiarias adhibeto, ne te aliena mulier de- a (@) Voyez le Gloflaire de Junius au mot Runa, (6) Apud EckKhart, €. J. pags 418, [O SUR LA RELIGION DES PEUPLES, Ec. 457 cipiat , eas cornu potatorio infculpito , &c. Biarg- runar. ( Bairgan fignifie fauver , d’où vient le ver- be Flamand bergen ). Auxiliatrices runas addicas, fi fæminam onere partus facile levari cupias, ifque artus & membra cingito, opemque Dyjarum , (id eft parcarum ) implorato. Lim-runar , ( Lim fignifie » arbre) runas arboreas nofle debes, fi egregii medici » nomen fuftinere velis | vulneraque ex arte curare. » Eas incidito cortici & foliis arborum, quæ fe ver- > fus auftrum potiffimum fleétunt & inclinant Hug- » runar. ( Hug fisnifie haut, élevé, d'un grand cœur ). » Runas cordiales fcire debes fi quolibet virorum ani- » mofior efle velis. Kas delineato in pudendis & pec- » tore tuo. ” Dans l’Hiftoire de Gretter, on trouve l’exemple d'une runa d’une autre efpece C’eft une fem- me qui veut perdre Gretter. Illa, dit l'Hiftorien, cul- tro accepto , runas -ligno incidit , fanguineque fuo illivit, deinde ineantamenta canens , retrogradè & contra curfum folis lignum circuivit | multafque diras protulit ; deinde lignum in mare projici curavit . precata ut fluctibus ad Drangoam Infulam pulfum , Grettero omnium malorum caufa foret. Aux Phylaëteres il faut joindre les ligatures. Elles étoient compofées de je ne fais quelles herbes , car St. Grégoire de Tours les appelle Ligamina herbarum. (a) Les Pafteurs chrétiens eurent toute la peine du mon- de à déraciner cet abus; c’eft ce qu'on peut voir dans tous les écrits de ce temps-là Je ne rapporterai qu’un paflage remarquable de St. Eloi : Nullus, dir cet hom- me Apoltolique , ad colla vel hominis , vel cujuflibet animalis ligamina dependere præfumat , etiamft à clericis _fiant , etf dicatur quod res fanéta fi , & lectiones divi- a RE ne CE 0e COENNMNNNE RSR (a) Liv. IV. de Mir. S. Martini, cap. 36. © [Q) ©, à58 MÉMOIRE. 12 vinas Contineat, quia non efi.in eis remedium Chrifh , fed venenum Diaboli (a). e Ce fut peut-être la difficulté de détruire ces Phy- laéteres , qui porta les chrétiens à transférer ce nom aux reliquaires & aux fainres reliques. En Grant un ufage fuperftitieux , ils y auront fubftitué Ja jufte con fiance , qu'il eft permis d’avoir en l'interceffon des Saints; & pour faire goûter ce changement à un peuple groffier , ils auront confervé un nom auquel on le voyoit fi fort attaché. Il eft du moins cenftant que les reliquaires de ce temps-là étoient appellés Phylac- teres. On peut voir dans Vireus le teftament du Com- te Everard, qui laïfle à fon fils Unroch duo Phylac- teria in cruce pendentia ; à Bérenger : Phylaéterium de criflallo cum auro paratum unum ; à Adelard : Phylaëte- rium unum in quo reliquiæ S. Remigiüi, & enfin à Rudol- phe : Phylaéterium de almandinis & criflallo paratum unum (b}). On trouvera un grand nombre d'autres citations dans le Gloflaire de Du Cange , à l'article Phylaéteria. La onzieme fuperftition eft intitulée : de fontibus facrificiorum. L’utilité des fources , l'ignorance totale où l’on étoit fur leur origine, fufhfoit pour en faire des Divinités & leur attirer des facrifices. La douzieme : de incantationibus , regarde les chants & les vers magiques. On y attribuoit dans ces fie- cles d’ignorance les effets les plus terribles. Mummol fut étranglé par les intrigues de Frédegonde , qui lac- cufoit d’avoir tué le. fils du Roi par des vers magi- ques. Plufeurs femmes , foupconnées d’avoir eu part à ce crime , furent traïnées au fupplice, c’eft Fréde- (7) Audoën. de vita Elig. L 2. ç. 15. (2) Co, don. piar. cap, 15; SUR LA RELIGION DES PEUPLES, &c. 459 gaire qui le rapporte (a). Aimoin change un peu les circonitances & y ajoute de plus grands détails; voyez fes paroles en marge (b). . VAE Dans les combats judiciaires , on exorcifoit les com- battans de peur qu’ils ne portaflent fur eux des amu- lettes ou des vers magiques (c). On trouve dans les inftitutes de Juftinien des Sorciers qui tuent les hom- ‘mes , en marmotant des paroles & des vers en- chantés. La treizieme fuperftition eft celle de tirer quelque augure des excrémens des oïfeaux , des chevaux & des bœufs, ou d’une perfonne qui éternue : de Augu- ris vel avium, vel equorum , vel boum flercoribus , vel fiernutatione. T1 n’eft pas furprenant que des Gaulois , des Germains , des peuples feptentrionaux, qui éroient, fans doute , les plus fuperftitieux des hommes, fe foient fervi de toutes ces ordures pour connoïtre l'avenir. Heureufement le Chriftianifme nous a fait perdre juf- qu'à la maniere , dont on obfervoit ces ridicules au- gures. Il n’y a que la formule dont on fe fert envers un homme qui éternue , qui ait pu fe conferver jufqu’à nos jours. (z) Fredes. Epit. cap. 90. Apud du Chefne. tom. I. pag. 739. (2) Relatio quorundam ad Fredesundem cucurrit reginam , dicentium puerum quitunc defun@us erat, téchnis Mummoli fui præfeéti, per quaf- dam mulierculas malefñiciis & incantationibus vitam amilifle. Is Reginæ jamdudum erat infenfus. Quæ talia de eo audiens , rapi meretrices ad fupplicia jubet, quæ fe fetebantur carminibus multos interemifle innocen- tes.... de Mumolo verd apud Recem quefta eft. Quem Rex oneratum cateuis adduci , trabeque revinétis poft terga manibus fufpendi præcipiens, quidmaleficii noflet , interrogabat. Sed nil fe de morte filii Regis nofle di- cens, hoc folummodo confeflus eft , quod potiones præcantationefque varias à memoratis accepiflec mulierculis ad promerendam Regis & Resi- næ gratiam. Tandem depoftus mandavit Reoï fe nil fenfiffle pœnarum. Ille eum maleñicum efle proteftatus , loris durifimis flagellari ac gladio percu- ti imperavit. Pro cujus vita, Regina, ægrè licet, obtinuit. Qui tamen non poft multum dolore ipforum tormentorum interiit. Aimoin, L 3. c. 52. apud du Chefue, t. IL. pag. 71. (c) Du Cange Glof. in voce infortiare, k A60 MÉMOIRE La quartorzieme de Divinis & fortilegis, et à-peu- près de la même efpece ; je ne m'y arrèterai plus. Dans la quinzieme il elt queftion du feu fuperiti- tieux qu'on produifoit par le frottement de deux bois {ecs : de igne fricato de ligno , id eft nod-fyr ; car c'eft ainfi qu'il faut lire. Que ce mot vienne de ned né- ceffaire, ou de neod, fervice , devoir , toujours eft-il conf tant que c'étoit un feu facré , auquel on attribuoit des effets fuperftitieux. On s’en fervoit pour brüler les morts , & pour faire des feux de joie aux fêtes des Dieux & des Déeflés. Le peuple fautoit par def- fus, & croyoit que l’attouchement des flammes .& de Ja fumée lui attireroit des bénédi@tions fans nombre. Les feux de St Jean & de plufeurs autres Saints qu’on allume encore en Allemagne & aux Pays-bas, en font des reftes. Les petits garçons pañlent encore au-travers des flammes & de la fumée, mais on ne croit plus que cela puiflé apporter du bonheur. La feizieme fuperftition eft intitulée : de -cerébro animalium. Apparemment qu'on prédifoit l'avenir par Jinfpettion du cerveau des bêtes qu’on immoloïit. La dix-feprieme : de obfervatione pagana in foco vel ‘inchoatione alicujus rei , regarde en premier lieu la fa- con d’obferver la fumée quand elle monte. Si c'étoit en ligne droite, on en tiroit un bon augure; mais s’il lui arrivoit de fe répandre de côté, on étroit me- nacé de quelque grand malheur. C’eft ce que les Pein- tres ne manquent pas d’obferver dans les tableaux qu'ils font du facrifice d'Abel & de Caïn. Dans celui du premier , la fumée monte en ligne droite ; mais dans J'autre, le vent le difperfe & l’empêche de monter. La feconde partie : de inchoatione alicujus rei, re- garde les préfages qu’on prétendoit trouver dans la :fa- -con de commencer quelque ouvrage, ou de faire SUR LA RELIGION DES PEUPLES , 6e. Aëôt. quelque aétion. Par exemple, fi on étoit forti de Ha: maifon par le pied droit ou par le pied gauche ; fi la premiere perfonne qu’on rencontroit étoit vieille ou jeune ; fi on avoit vu pafler une corneille à droite ou à gauche; fi on avoit planté des choux à la pleine. Lune ou à la nouvelle , & mille autres qu'on peut voir dans le- livre. intitulé : la Philofophie de la Que- rouille: Les deux titres fuivans , qui ne regardent que les nouveaux chrétiens , ne font pas de mon fujet (a). Je pañlerai aufli le vingtieme de Feriis quæ faciunt Jovi & Mercurio: J’en ai aflez parle. Le vingt-unieme regarde les Eclipfes de la Lune : de Lunæ defectione , quod dicunt : vince Luna. Nos an- cêtres ne fe piquoient point d’aftronomie; ils croyoient bonnement , que du temps d’une éclipfe , le Soleil li- vroit un furieux combat à la Eune. Comme ils fup- pofoient au premier des forces fupérieures , ils crai- . gnoïent que la Lune n’en fût accablée , & fe mettoient- de toute leur force à poufler des hurlemens & à pro- noncer des vers magiques, qu'ilscroyoient lui devoir être d’un grand fecours (b). | ——— en nome) (a) De incertis locis quæ colunt pro fanétis. De petendo + quod bo- pi vocant S. Mariæ, + Le Savant Eckhart n’a point entendu ce mot. Il: le croit corromp. & le change en Perenfiro , qui pourroit fignifier le /érpoler, cette plante. étant nommée wn/fer frauen Berftro en Allemand. Æeæc nofira, ajoute:t-il, eft conjeétura ; fortè alrus acutiès cerner. Pour expliquer ce mot, on n’a- pas befoin de conjeétures. Perendo eft le gerondifde l’ancien verbe Perñrian, . qui en Anglo-Saxon fgnitie marcher par des fentiers. Nôus avons perdu : l’ufage de ce verbe; mais en confervant fon fubftantif Pzd, fentier , plur. Paden; de même qu’en Anglois « path, un fentier. Ainfi.dans ce: pañlage il n’eft point queftion du ferpolet ; mais probablement d’une pro. ceffion en l'honneur dé la Vierge, accompaznée de quelques fuperfti. . tions payennes , qui attirerent fur ces procelions la cenfure des Peres, du Synode de Leptines. ; e (ë) Nullus fi quando luna obfcuratur vociferare præfumat, quia Deo jubente certis témporibus obfcuratur. Aud. de vita Elig. 1. Il. c. 16. Cum ante dies plerofque de veftræ avaritiæ cupiditate pulfaverim, 1p9. A6n Eu MÉMOIRE Le vinet-deuxieme fait mention de Tempeftatibus cornibus & cocleis. ls prétendoient pouvoir {oulever les tempêtes & les calmer à leur gré, par la force de leurs enchantemens ; fecrêt que es Lapons de nos jours fe flattent encore de pofléder. Les Cornes dont il s'agit en ce paflage , étoient cel- les de l’Ure ou du Bœuf fauvage , dont ils { fer- voient, felon Pline & Céfar , en guife de verre ou de coupes dans leurs feftins Il en eft fait mention dans l’ancien Gloflaire, que j'ai cité plus haut , dans le teftament d'Everard , & en plufieurs autres endroits (a). Quelquefois elles étoient garnies d’or ou d'argent. On les vuidoit dévotement dans les contrats d’achat & de vente, qui en recevoient leur confirmation , ufage qui s'eft maintenu en plufieurs Provinces fous le nom de Wynkoop. On s'en fervoit fur-tout dans les fêtes des Dieux. Au lieu des Libations dés Grecs & des Ro- mains, nos peres remplifloient leurs cornes de vin ou de bierre | & les vuidoient tout d’un trait , la premiere en l'honneur de Wodan pour la profpérité du Roi ; la feconde en celui de Frea , pour la fertilité de la ter- re ; la troifieme à l'honneur des Héros & des grands hommes; la quatrieme en mémoire de leurs amis morts & ainfi du refte (b), Convertis au Chriftianifme, ils ne purent fe réfoudte de quitter cet ufage délicieux, feulement ils èn changerent l’objet, & au lieu de boi- re en l'honneur de Thor & de Wodan , ils continue- rent fa die ciréa vefperam tanta vociferatio populi exftitit, ut irreligioltas ejus penetrarèt ad cœlum. Quod-cum requirerem quid dibi clamor hic velit, dixérunt mihi quod laboranti lunæ veftra vociferatio fubveuiret, :. _efeétum ejus fuis clamoribus adjuvaret. Max. Taur. Homil. de Defeét. te: Plin. 1. I c. 37. Cæf. Comm. 1. 6. c. 28. Mir. cod. don, piar. c. 15 (&) Eckhard , Coins t. L p. 430. SUR LA RELIGION DES PEUPLES, &e, 463 rent de s’enivrer en mémoire de St. Jean & de St. Martin. De-là cette formule d'interrogation que l’Evé- que devoit faire aux Prêtres dans la vifite de fon Diocefe : {t quando ad anniverfarium diem ; tricefimum , feptimum vel tertium alicujus défunéki vocatus fuerit ; fe inebriare præ- fumat ; & precari in amore fanétorum vel ipfius animæ bibére & alios ad bibendum cogere , vel fe aliena preca- tione ingurgitare & plaufus & rifus inconditos | & rur pia joca 6 cantus indecentes facere præfumat (a). Les Gochleæ étoient des coquilles qui tenoient lieu de cuillers. Elles étoient d’ufage dans les factifices pour faire les afperfions avec le fañng de la vi@ime, peut-être s’en fervoit-on à d’autres pratiques fuperfti- tieufes qui nous font inconnues. Le vingt-troifieme titre eft de fulcis circa villas : c'eft-à-dire , des fillons qu’on tracoit avec la charrue autour des cabanes & des champs avec de certaines prieres & cérémonies pour éloigner les efprits malfai- fans & les empècher de nuire. | Le vingt-quatrieme fait mention de Pagano curfu, quem Yrias nominant. Les Payens faïfoient des mafca- . rades, les calendés de Janvier comme nous en faifons au carnaval. Les femmes fe traveftifloient en hommes, & les hommes en femmes. D’autres prenant des peaux & des cornes, fe transformoient en bêtes. Tous cou- : roïent par les rues, hurlant, fautant & commetrant mille extravagances (b). C’eft cette cérémonie, qu’on nommoit dans le Latin de ce temps-là cervulos face Ça) Regin. de Ecel. Difcipl. 1. I. p. 25: Edit. Baluz. (&) Audoen. de vita Elig. 1. 2. c. 15. | . Quis enim fapiens credere poterit invenire aliquos fânæ méntis, qui cérvulum facientes in ferarum fe velint habitus commutare ? Ali veftiun- tur pellibus pecudum ; alïi adfumünt capita beftiarum... Viri natitunicis myliebribus veftiuntur… Barbatas facies præ fe ferunt & videri fe fœmi- gas volnnt, &c. Fauft, Epifc. Sérm. de Kalend. Januariis. Tome I, Rrr 464 MÉMOIRE re; & que St. Éloi, St. Boniface & les autres Pafleurs ont tant frappé d’anathême. Le mor: d’Yri rias, où irias eft vifiblement corrompu. La correction d’Eckhart , qui change Ÿrias en Schu- rif, eft trop viclente pour être 2dmife (a). En fait de reftitution , celui qui fait les chofes à moins de fraix , doit être préféré. Il ny a qu'à changer trias en hirtas, plurier de hirt qui fi gnifie un cerf, on aura exa@ement les cervuli du Latin. Le vingt-cinquieme de eo quod fibi fanétos fingunt quoflibet mortuos, regarde les nouveaux chrétiens , qui, accoutumés aux ‘A pothéofes de leurs peres, mettoient fans facons au nombre des faints tous leurs parens & amis que la mort leur enlevoit. Le vinet-fixieme traite de fimulacro de confparfa farinas C’étoient des : images des Dieux, faites de. farine dé- trempée dans de l’eau , & peut-être dans du miel. Les bifcuits & les pains d'épices, dont on regale les: enfans le jour de l’an y ont fuccédé. Le vingt-feptieme , de fimulacris de pannis fathis: C’étoient des poupées comme celles qui amufenc nos petits enfans. Les filles payennes , devenues nubiles, les offroient à la Déefle Venus , voulant déclarer par: là, qu'elles étoient deformais fous fa puiflance (b). - Le vingt-huitieme nous apprend , que nos peres pros menoient leurs idoles par les campagnes, apparem- ment pour obtenir des moiflons abondantes. Le titre porte : de-fimulacro quod. per campos portant. Le vingt-neuvieme regarde les ex-voto des Payens : Ca) Eckhart Comm. t. I. pag. 433. (&) Puppæ dicuutur quædam {fatunculæ quas Virgines. folent facere im modum filiarum & veftibus obvolvere : quas pofteaquam ad annos nubi- les veniebant & pubilibus abrenuntiabaut , quali fub poteftate veneris futuræ, veneri facrificabant, [oann. de Jauua vet, Glof. An ER SEE A RE fe es TRANS EE SUR LA RELIGION DES PEUPLES, @e: 465$ de ligneis pedibus vel manibus , pagano ritu. On fait que les Grecs & les Romains confacroient à leurs Dieux des figures de pieds, de mains, de têtes ou de quel- que autre partie malade; foit pour en obtenir la gué- rifon, foit en aétion de graces après l'avoir obtenue. Ce vitre nous apprend que les peuples Belgiques avoient adopté cet ufage. Nous lifons dans St. Grégoire de Tours, qu'en détruifant à Cologne un temple d’ido- les fort fréquenté , on y trouva parmi d’autres offran- des, des figures de plufieurs membres du corps hu- main , taillées en bois, que les malades faifoient fu£ pendre à l’image du Dieu, dont ils invoquoient le fecours. Wifi enim in eo barbari , gentili fuperfitione , modo auri argentique dona , modo fercula ad potum vo- anitumque ebri offerre cultumque quo nihil infanius , if- tic fimulacrum inanis Dei, ac utquemque affcéti membre dolor prefferat , fculpebat in ligno effigiem fufpendebat- Que opitulaturo idolo (a). : La derniere fuperftition de ce régitre eft conçue en ces paroles : de eo quod credunt , quia feminæ lunam comendent , quod point corda hominum tollere ; juxta paganos. Des femmes qui commandent à la Lune, & qui dévorent le cœur des hommes, c’eft-a-dire, qui les tuent par leurs regards. Les Germains étoient in- fatués de la fcience & du pouvoir de ces femmes , avant qu’ils euflent des Druides ou des Sacrifices.. Dans les commentaires de Céfar , les prifonniers Ger- mains déclarent à ce Capitaine , que c’étoit aux Ma- ærones de la nation à décider par le fort & par la fcience des Augures, sil falloit livrer bataille (B). a (a) Greg. Tur. de vit. Patr. cap. 6. (6) Cæf. Comm. 1. L. cap. 50. 4: Rrri 266 MÉMOIRE Dans {a premiere partie de ce Mémoire, ps parlé de Velleda & de plufieurs de ces Matrones. Ee titre de cette fuperftition confirme ce que j'en ai dit. Les fem- mes blanches, connues en Allemagne fous le nom de Weiffe frauen , & dans nos Chroniques fous celui de Witte vrouwkens , en confervent aflez la trace. On montre en plufieurs endroits , mais fur-tour au pays de Drenthe , les cavernes qu’elles habitoient , & tous les environs rétentiflent encore des prodiges qu'elles y ont faits (a). Lorfque les Francs eurent embraflé l'Évangile, la réputation de ces femmes reçut un ter- rible échec. Au lieu de les regarder comme des Déef- {es , on les punifloit comme des forcieres, fur-tout fi. elles s’avifoient de mangerles cœurs des hommes. Ence dernier cas , la loi falique les condamnoit à une amen- de de260 fous d’or(b). Les pauvres viétimes de la vo- racité de ces femmes ne mourroïent pas tout d’un coup; puifqu'on parvint à leur affisner un remede, qui de- voit les guérir infailliblement. Ce remede étoit de brü- ler la magicienne , & de manger de fa chair rotie, On trouve à ce fujet ne loi bien fage dans les capitulaï- res de Charlemagne. La voici : » Si quelqu'un prête » l'oreille aux tromperies du Diable , au point de » croire avec les Payens qu'une mme foit for- » ciere ou qu’elle mange les hommes , & que fous > ce prétexte il la faff& brûler , ou mange de fa chair , ou » en fafle manger les autres; qu'il foit puni de mort ( c) Ca) Picard. antiq. 9. Diffin@tie , pag. De. C6) Si ts homer comederit, & convicta fuerit VIIIM. Denar. qui faciunt fol. CC. culpabilis judicetur. Leg. fal. tit. 67. NO. 3. pag. 45: Edit. Wendel. (c) Si quis à Diabolo deceptus crediderit, fecundum morent Paganc- zum Virum aliquem aut fœminam ftrigam efle , & homines comedere ; & propter hoc ipfam incenderit, vel carnem ejus, ad, comedendum de- derit., vel ipfam comederit , çcapitis fententià CRAFT Capit. Car, magni de part. Sax, Cap. 5. à tire Ce, “en > SUR LA RÉLIGION DES PEUPLES, &c. 467 Mais c’eft aflez fouiller dans les ordures du Paga- nifme , que l'Évangile a fait difparoîïtre. Ses ridicu- les Dieux ne purent tenir contre la fouveraine raifon. Woden & Frea tomberent pour ne fe rélever jamais. Sinous ne buvons plus dans le crâne d’un Ennemi ; fi nous ne cherchons plus l'avenir daris les entrailles pal- pitantes d’une viétime humaine , fouvenons- nous que la gloire en eft due au feul Chriftianifme. Il eft vrai que dans la clafle du peuple la plus nombreufe & la moins inftruite , on ne découvre que trop fou- vent des reftes de fuperftitions Payennes, & de l’an- cienne Barbarie. Il eft encore fujet à de folles ter- reurs , dirigé par des vifions creufes, & attaché à des pratiques qui ne font nullement de l'Evangile, Une pauvre vieille, qui a la mine hagarde , ne court à la vérité plus rifque d’être brülée |, ou que l’on mange fa chair révoltante ; mais elle n’eft que trop fouvent en horreur à fes ftupides voifines ; & fi quelque fléau na- turel frappe les hommes ou les animaux , elles pourront bien l'en rendre refponfable & lui faire foufirir beau- coup de perfécutions. Ce font des inconféquences qu'on ne peut diffimuler. C’eft le trifte fort de l'humanité, que , tant qu'il y a des hommes, il y aura des folies. Mais enfin la plus faine partie de la nation eft éclai- rée & raifonnable. Parmi ceux qui font chargés de linftruire , on en voit aflez qui s'acquittent de ce glorieux emploi avec un zèle & une prudence digne des plus grandséloges, Tout doit les animer à pourfuivre: tout doit porter les autres à imiter leur exemple. Quel- le fatisfaétion pour moi , fi mes efforts y pouvoient contribuer ! Si cet Ouvrage peut fervir à éclairer mes compatriotes , à augmenter la mafle de nos connoif- fances , je me croirai couronné du plus brillant fuccés. { - Hi di RÉFLEXIONS SUR UN ANCIEN MONUMENT D U TOURNAISIS, APPELLÉ VULGAIREMENT LA PIERRE BRUNEHAUT, P A R M. LABBÉ DE NELIS: Lues à la Séance du 5. Novembre 1773. A MU Fe 1x k à ‘ Lu. % SET sur ARE , de my s LI : Er $ \ à Va i À ui à % ! \ POORSC * ; : i 1 \ : h re , ÿ di gi RÉFLEXIONS ANCIEN MONUMENT D U OPERA PTS “ESS APPELLÉ VULGAIREMENT LA PIERRE BRUNEHAUT, Ux Monument fingulier , qui fubfifte pour le moins depuis douze fiecles, qui porte le nom d’une Reine iluftre, autant, ou plus, par fes malheurs, que par beaucoup d'actions d’éclat & de courage ; une pierre du plus grand volume, ifolée au milieu des champs, & qui ne préfente aucune marque , même effacée, def fon origine : fans figures, fans infcription, fans aucu- ne trace du temps paflé ni de la main des hommes; ce monument à qui l’on ne connoït dans la Belgique qu'un feul monument femblable près de Binche , & qui même, depuis vingt ans, ne fubfifte plus; la pier- re Brunehaut, en un mot, fi foigneufement marquée Tome I, : Sss A7? RE PIE XT OS par tous nos Géographes (a), une telle fingularité auroit dû piquer , ce femble, la curiofité des Hifto- riens & des Antiquaires, &c reveiller parmi eux l’efprit de recherche. Cependant nous voyons qu'ils s’en font. fort médiocrement occupés ; la plupart ont pañlé la chofe fous filence, fuivant, peut-être, la Rge maxi= me d'Horace, De Arte ad & quæ Defperat traétata niteftere pole : Telinque : : maxime très - prudente à la vérité , mais faite fans doute pour des Poétes, & non pour des Hiftoriens. Enfin tout ce que j'ai pu recueillir fur ce fujer, de tous nos Hiftoriens pris enfemble , ne rempliroit pas une page d'écriture. Le Pere de Montfaucon qui à raffemblé en cinq volumes in-folio les anciens mo- numens de la Monarchie Francoiïfe, ne dit pas un feul mot de celui-ci, quoiqu’un des plus vieux & des plus remarquables ; & cela, foit qu'il ne l'ait pas connu, foit qu l nait fu qu’en dire. Réparons . sil eft pof- fible | cette négligence ; fur-tout prévenons Je St heur, dont notre monument eft menacé , d’être brifé ou enfoui fous terre. Déja il penche vers fà ruine; & ce. que tant de révolutions auxquelles Ja Belgique a été fujette , ce que Pintempérie des faifons ,.& le tem- pus edax rerum n’ont pas fait, un Payfn, un Pâtre depuis peu a manqué de le faire. Par défœuvrement ou par quelque autre motif ,. il s'eft amufé à creufer une fofle cout le long de la pierre du. côté où elle étoit déja un peu inclinée ; les eaux, les neiges ont -achevé de creufer cette foffe, & l inclinaifon de la pier- (az) Voyez les Cartes d’Ortelius , Hondius, Mercator, De Wit, Otteus, Fricx, Jaïllot , Vaugondy ; la carte du Diocçefe de Tournai, &c SE v Ne LS \ A ARE Tree Jéures (HS tue POS RER LT À anmen SUR UN ANCIÈN MONUMENT , &c. 47: re eff: beaucoup plus grande aujourdhui qu’elle n’étoit au commencement de 1768, lorfque.je la vis pour la premiere. fois. Ce malheur enfin eft déja arrivé à la pierre de.Braye , près de Binche , comme je l'ai dir plus haut. En 1753. on l'a brifée & employée aux ré- parations d’un aqueduc, fuivant la note que jen ai recueillie, & que l’on trouvera ici au bas de la pa- ge (a). otre. monument , tel qu'on le voit aujourdhui , eft une: pierre informe & brute , haute d’environ quin- ze pieds, large de dix , & épaifle de deux. On la trouve à une lieue & demie de Tournai , entre les villages de Hollain & de Rongy, au milieu de la campagne. Elle elt un peu échancrée par le haut , & inclinée , à-peu-près , comme la figure ci-jointe la re- préfente. tale _ Ileft:à croiré qu'elle a d’abord été élevée perpen- diculairement ; mais préfentant, comme elle fait, fa plus grande furface aux vents de fud-oueft, qu’on fait être, très-violens dans nos contrées (b) ; cette caufe a dû fuffire pour lavoir: fait. baïfler, confidérablement 2 a — —— a ———— _(e) Note qui m'a été envoyée per M. Mondet, Doyer de Binche. ».La.pierre de Braye , ‘près de.Binche, ne fubffte plus ; elle a été dé- » molie en 1753. & employée à rétablir le Canal, qui conduit l’eau au -smoulin, de Binche, moulin appartenant à S.:. M. NS ohne » C’étoit une pierre de grais très-dure ; l'emploi qu’on en à fait , Le s juftifie. L Ë ÿ û cie cà » Elle avoit dix-huit pieds hors de terre, cinq pieds fous terre. Elle .# étoit large: d’un côté ‘de treize ‘pieds, de l’autre côté de quatre :& demi. : »(8). Notre Médecin. de. Louvain Plempius, dans fon curieux Traité, adreffé au célebre, Stokmans, de Togatorum yalerudine, titend&., a donné des Obfervations intéreflantes fur les effets opérés par ce vent. Je ne citerai ici que la grofle tour de Louvain , connue d’un, chacun & ap- pellée Verlore-Koft, dont le côté expofé aux-vents. de fud-oueft eft tota- lement démangé. & dégarni .des: pierres, de taille. qui le revétoient.; tan dis que les autres côtés font fins &. entiezs: \ £ s sij Pieds de Roi ou de 2. pouces. Voyez la figure. A7 RÉFLEXIONS du côté oppolé ; enfin elle fait aujourdhui avec [a ter- re un angle d'environ cinquante degrés. Pour que ce monument ait pu fe conferver fur pied pendant tant de fiecles, fa bafe doit fe trouver très- profondément enfoncée dans la terre , & égaler pour le moins , fi elle ne furpañle pas la partie qui eft hors de terre. Je crois même abfolument qu’elle la furpaf- fe; & c'eft ce que des expériences , qu’on dit avoir été faites pendant le fiege de Tournai en 1745. , fem- blent confirmer. Au refte en attendant que je puifle réitérer ces expériences, & en rendre un compte plus exat , d'après les fouilles que j'ai deflein de faire ; je ne crois pas donner trop de profondeur à cette ba- { , en lui donnant ici, par conjeéture , vingt pieds fous terre; ce qui, joint au refte de la mafñle, forme un volume de fept cent pieds cubes; volume d’autant plus extraordinaire que tout ceci n'eft que du grais, . D'où a-t-elle été tirée cette lourde mañle? Par qui? : Comment ? En quel temps? Et pour quel ufage ? Voi- là plufeurs queftions qui fe préfentent naturellement à l’efprit, fans qu'on puifle le taxer d’être trop cu- rieux. Le dernier Hiftorien (a) de ja ville de Tournai, qui, comme tous les autres , parle fort fuperficielle- ment de ce monument , prétend qu'on ne trouve pas de grais aux environs (b). Il fe trompe. Les Habitans de ee —— .. (a) Le Sr. Poutrain : fon Hiftoire a été imprimée à la Haye en 1750.in-4°. . (b) Tom. I. page 72 & 73. ©: 5 » À une lieue plus loin (que le château de Céfar qu'on appelle) & à » deux cent pas de la riviere [ l'Efcaut | , Vers le couchant, re pier- » re qui paroît taillée, & n’avoir jamais tiré fa forme que de la main des 5 hommes , fur-tout dans un pays , où l’on ne fait ce que c’eft que des 5 rochers , du moins qui s’élevent hors de terre, &c. Et il ajoute dans une note : » cette pierre eft un monument d'autant 5 plus remarquable, qu’elle eft de grais , & agu’ël ne fe tire pas de certe » efpece de pierre dans le pays. SUR UN ANCIEN MONUMENT , &c. 475 l'endroït m'ont afluré le contraire ; & j'en ai trouvé moi-même , en me promenant , fans faire beaucoup de recherches , fans faire aucune fouille, d’aflez gros, femés ca & là, à-fleur-de-terre. Il eit donc vraïfemblable que notre morceau aura été trouvé dans l'endroit même , ou non loin de-là. La fingularité de fa mañle aura invité à l’employer dans quelque occafion d'éclat , dans un événement extraor- dinaire qu'on aura voulu faire pañler à la poftérité. Mais en quelle occafion, & à propos de quel évé- nement ? Voilà ce qu'il s’agit d'examiner , & ce qui n'eft' pas aifé à découvrir. Un homme d’efprit, & d’un efprit cultivé par l’étu- de , avec qui jexaminois, il n’y a pas Îong-temps , cette difficulté, voulut la trancher , & foutenir que ce monument n'étoit pas l’ouvrage des hommes, mais celui de la nature. Comme il propofa fon opinion étant à table, le mèts qu’on fervoit en ce moment, -offroit une comparaïfon fort naturelle & fort propre : à le combattre. Je lui dis donc, qu’il métoit pas vrai-: - femblable qu’une pierre d’une telle hauteur & d’un tel volume , feroit venue d’elle-même au milieu des champs, comme une afperge ; feule, & en dépaflant la terre de quinze pieds ; que c’étoit là un joli. jeu d’ima- gination , mais pour ce qui étoit de la nature , qu'elle ne jouoit pas ainfi. Qu'on voyoit bien à la vé-. rité des pointes de rocher s'élever jufqu'a cette hau- tour, @& beaucoup plus haut; maïs que pour lors ces : pointes tenoient à d’autres pointes , & toujours au ro- cher même ; qu'elles étoient inégales , hériflées ; & rarement, Ou peut-être jamais , de grais : tandis que notre pierre étoit liflé & unie en forme de table, & fort mince à proportion de fa grandeur; qu’elle étoit iolée, ne tenant ni à un fonds de pierre, ni à d’autres 47.6 RÉELÉ XLO.N S 0. “mañles ; .qu elle étoit de .grais ; & depuis que. celle .&e Binche étoit détruite » la feule qu'on connût dans ce goüt-là, non-feulement aux environs, mais dans tout le pays ; enfin qu'il ne falloit que fe rendre fur les lieux, & ouvrir les yeux, pour reconnoître un: mo- nuinent , vifiblement placé de la main des hommes, … ne Un Écrivain nouveau , aufli homme de beaucoup d’efprit, qui nous a donné fous une forme agréable, lHiftoire de France &:des François,, n'a guère paru plus embarraflé de ce point de “critique. : ; il le traite “avec une légéreté furprenante ; une demi-ligne. d'écri- ture renferme & fon jugement _& toutes fes difcuffions. 103. Ce font des refles, dit-il, de quelques vieux. bâtimens. - de edit Je fuis bien sûr que Mie Écrivain n'a jamais. Exami- EEE ces vieilles refles. Auf ‘pour toute réponfe , à lui -&.à tout autre qui pourroit ètre tenté de juger com- me lui , 1h faudroit le prendre par la. main, le mener fur les lieux,, . & lui dire, regarde. Ce qu'on: a dit jufqu'ici de plus. es > Ou: plutôt de moins invraifemblable au fujet de notre. pierre, c'eft que c’eft un monument des Romains. Un hom- me aflez verfé dans les antiquités de Tournai, lAr- chidiacre Catulle (a) , a été le’ premier qui a ” penfé, que ce pouvoit être un mémorial (b) de la victoire remportée par Céfar fur les Nerviens ; & il dit à cer égard certaines chofes , qui, fi on n’y prenoit gar- de, feroient prefque capables de faire penfer comme Jui. Mais les Romains, dans le plus beau fiecle de leur gloire, .auroient-ils imité jufques-là des peuples vain- | cus, qu'ils traitoient de barbares, & qui létoient en ; (ae) C’eft l’Auteur du Torrzacum Nervioruma Metropolis. 49. [on Vrai non étoit Catheul. ou! à-peu-près. (6) Voyez “Mfs. Eccl..Catb. Torn. - SUR UN ANCIEN MONUMENT, Ge. 477 efft ? Ne voyons-nous pas combien ce monument: eft éloigné du coftume des Romains? Vouloient-ils en ériger un? Tous les aris venoient à l’enyi fervir le goût & les defleins des maîtres de la terre. Des Colonnes , des Statues , des Arcë-de-triomphe , des Temples, des Infcriptions & des Médailles; voilà les monumens par lefquels ils ont confervé à la poftérité la mémoire de leurs établiffemens & de leurs conqué- tes. L'Europe & l’Afie en ont été couvertes; ces mo- numens ont brayé les injures du temps, & grand nom- bre , encore aujourdhui, furvit , depuis tant de fie- cles, à la ruine de l'Empire Romain. La ville de Ba- vay , bâtie à fix ou fept lieues de diftance de notre pierre, eft une preuve fenfible de ce que j’avance. Les monumens des Romains font par-tout accompa- gnés d’infcriptions ; & la conduite de nos Conqué- rans à été à cet égard fi uniforme, que, lorfque le temps ou les matériaux leur ont manqué, ils ont tail- lé desinfcriptions dans le roc , comme nous en voyons jufques fur les bords du Danube , dans le fond de la Hongrie ; où le Comte Marfigli les a vues & co-. piées, & que tout le monde peut voir dans fon grand Ouvrage (a). | Enfin une mafle lourde & informe , telle que [x nôtre, bien plus grofle que celle dont parle Virgile, en décrivant le combat de Turnus avec Enée : Saxum antiquum , ingens , campo quod forte jacebat > mneiat 12. v. 497. une telle mafñle eut pñ fervir aux Latins de mé- morial au temps du bon Roi Evandre ; & Hercule , s'il avoit eu la fantaifie de marquer par quelque mo- Ca) Voyez la Defcription du Danube, 6. vol. in-folio. V, vol. 2, pag... « 4 RÉBPEETON TE nument {es exploits contre [a voleur Creis5 auroit pü l'employer. à SOIURMS “Mais à qui donc aRBuee notre monument? À la Reine Brunehaut ? Tout d’abord porte à le croire ; cependant cette opinion, pour peu qu'on Papprofon diffé, ne paroît guère plus réfléchie : ni plus foutena- ble que les autres. En premier lieu cette Reine n’a jamais été maîtref- fe de Tournai , ni de fon territoire. Elle étoit Reine d'Auftrafie ; & Tournai appartenoit au Royaume de Soïflons , “Tournai éroit de lappanage de Chilperic. I eft vrai que Sigebert, mari de Brunehaut , ayant por- : té la guerre dans les états de Chilperic fon frere, alla” afhéger celui-ci dans Tournai, où il s'étoit renfermé -comme dans fon domaine. Mais qu'a cela de commun avec notre monument ? Nous ne lifons pas même qu'il ÿ eût une bataille donnée près de Tournai; nous’fe- vons que Sigebert y fut affäffiné dans fon camp par les émiflaires de F rédesonde ;: & ce ne fut pes du côté où fe trouve notre pierre (qw on auroit pü en ce cas prendre pour le maufolée de Sigebert), ce fur à plu- fieurs lieues de-là, à Virry , où ce Forfait a été com- mis. De plus, quand il y auroit eu quelque avantage remporté par la Reine Brunehaut où par fon mari, une querelle entre deux freres pouvoit-elle” fervir de prétexte à élever un monument, & un monument dont la folidité devoit braver la plus longue fuite de fiecles? À ce compte toute la France devroit { trou- vèr pleine de pareils monumens; car il y eut tant de divifions, tant de guerres & de querelles entre les Rois de la premiere & de la fconde race. D'ailleurs fi c'é- toit ici un trophée de la Reine Brunchaut, le viéto- rieux Chilperic , & l’altiere Frédesonde , ‘Pauroient- ils laiflé fubfifter après la mort de Sigebert ; ë Ja fui- LE SUR UN ANCIEN MONUMENT , @é: _ 479 te de fa veuve? En ne faifant que le quart des réflexions que nous faifons ici, on ne fauroit fe perfuader que notre monument doive fon origine à la Reïne dont il porte le nom. _ Jai fouvent penfé d’où pouvoit être venue cette fantaifie qu'on a eue dans nos Provinces, d’attr b'er tant de chofes à notre Reine; car la pierre Bruneh ut n’y eft pas la feule chofe , dont on lui ait fait hn- neur. On lui a attribué encore ces fameufes chauftes Romaines, qui alloient aboutir à Bavay, & dont la fixieme pañloit (a), fuivant Miræus , par Efcaut-ponr, Châreau-l Abbaye, Hollain (à trente ou quarante pas de la pierre Brunehaut }, & de-la à Tournai, Pont- d Efterre | Caffel ; & finifloit au Portus Iccius | ou Mardick. Ces chauflées portent jufqu’à ce jour le nom de Chauflées de Brunehaut, mais à tort Il fe peut que cette Reine ait donné fes foins pour rétablir les che- mins publics & les chauflées , qui étoient en decà de l'Efcaut (b), dans le Royaume d’Auftrafie. Elle a fait fürement cela en Bourgogne, où elle a élevé encore plufieurs édifices, & bâti des Monafteres, ce qui lui a attiré, parmi d’autres éloges, ceux du faint Pape Grégoire le Grand (c). L’Auftrafie & la Bourgogne étoient du domaine de cette Reine. Mais de dire qu'el- ‘le a réparé les grands chemins dans le Tournaifis, comme le peuple Pa dit, & comme le vulgaire des Hiftoriens la cru, ceft à mon fens, dire ou croire une grande abfurdité ; car ce n’eft pas à quoi on fon- (a) Sexta vié. Voyez Chron. Belg. Miræi, ad ann. 613. (8) Nota : ceci eft écrit pour être lû à Bruxelles. (c) Voyez dans les Recueils de Du Chêne , & de Dom Bouquet les Lettres de ce Pape, (Tome I. PE EC 480 ‘2 TARMÉDPDEMDONSS RIQ À ge dans un pays ennemi, & parmi de grands reversz . & quand on y fongeroit, les moyens d’exécuterine ES 5 ? | manqueroïent que trop certainement. D'où vient donc cette erreur ? Voici comme je concois la chofe. La haine du peuple de Tournai con- tre Frédegonde , qui, parmi d’autres aétions qu'on pou: voit lui reprocher, avoit fait tuer quelques Bourgeois de cette ville , en trahifon, & dans un répas qu’elle leur donnoit , action racontée avec toutes fes circonf- ae jo: tances par Grégoire de Tours : cette haine , & l’ad- " """ miration qui en découloit naturellement pour fa riva- le, qui méritoit bien d’ailleurs ces fentimens par fs grandes qualités, qualités qu’il eft étonnant que l’'Hif- toire ait fi fort obfcurcies ; tout cela a contribué: fans doute à rendre le nom de Brunehaut auffi céle- bre parmi les peuples du Tournaifis , que celui de Fré- degonde y étoit détefté ; & on aura été porté à attri- buer à la premiere tout ce qui étoit un peu remar= quable , tont le bien qu’elle n’avoit pas fait. : Une anecdote que j'ai apprife, & que je croïs très volontiers, fans être contraire à ce que je viens de di: re touchant les fentimens des peuples pour la Reine ' Brunehaut, prouve , d’une nouvelle maniere , que no= tre pierre ne doit pas fon origine à cette Reine. | M.Charles Le Curé d’'Hollain, dans la paroïfle de qui fe trou- Eté ve cette pierre , ma dit, d’avoir vu dans d’ancien- nes notes de fes prédécefleurs, qu'avant le quatorzie- - me ou quinzieme fiecle cette pierre s’appelloit la brune pierre, & que ç'a été fous ce nom qu’elle fervoit de limite ou de borne à quelques portions de fa dîime. On appel: loit alors, comme on fait encore aujourdhui, du nom de brun, cé qui étoit gris; & le peuple qui d’ordi- naire m’eft guère foucieux de connoître les origines, aura nommé ainfi tout bonnement cette pierre, d'a- SUR UN ANCIEN MONUMENT, Ge. 48e pres fa couleur, qui étoit la feule chofe qu'il y dé- £ouvroit, ( ! : Plus tard, après la renaiflance des lettres, nos pre- #miers Géographes fans beaucoup d'examen , & pour fe donner peut-être un air d’érudition, ayant enten- ‘du parler d’ailleurs des chauflées de Brunehaut , qui pañfent R tout près ,en auront pris occafion d'attribuer ce monument à notre Reine , changeant le nom de brune pierre en Brunehaut-pierre , dont ils l’auront cru un abrégé. Voila comme peut être venu le nom de pierre-Brunehaut. La chofe eft très-probable ; & ce qu'il y a de sûr , c'eft que beaucoup de noms n’ont pas une origine plus recherchée.’ Ce qui paroït bien sûr encore , & ce qui nous fuffit, c’eft que la pierre même ne doit pas fon origine à cette Reine. = Mais jufqu'ici je n’ai fait que détruire des opinions; ik eft temps d’en bâtir une. 34 Je la bâtirai fur la tradition ancienne & orale du pays ; tradition qui s’'eft confervée d’âge en âge : je lappuyerai fur des noms & des faits, qui fubfif- tent aujourdhui, & que j'ai examinés avec foin. IL y à dans le village d’Hollain un chemin creux , - qui va aboutiflant à Îa pierre Brunehaut , & qui s’'ap- pelle le chemin, ou comme difent les Payfans , la Crête des Hurelus. C’eft ainfi que tout le monde l'ap- ‘pelle , & ce nom eft auffi ancien pour le moins que celui de la pierre, dont nous nous occupons. La tra- dition porte, que des troupes de Barbares étant venues anciennement faccager le village (a), comme ils avoient faitle refte du pays , ont été furprifes & défaites dans © Notez que ce village doit avoir été un lieu confidérable autrefois. Son nom fe trouve latinifé dans'les Chartres, [ Ho/lnium ] ; & une par- tie du Village s'appelle encore aujoudhui {a Baffe-ville. Tcci Car.Bovil- lus , Orte- lius,Hon- dius, &c. a lis mu CRÉRIE AION KS AV | . ce défilé (a); que ces Barbares, en combattant , pouf | foient des hurlemens ou des: cris affreux ; hurlemens,, d’où les Payfans prétendent qu'eft venu le nom de | Hurelus. Voilà ce que difent les babitans, ce qu'ils ont appris de leurs peres, & ceux-ci de leurs ayeux. Jnter- roga. patres tuos & dicent tibi. Eft-il poffible de. ne pas reconnoître dans des traits fi bien confervés, les nations. venues autrefois du fond de la Germanie ou du Nord, pour piller & faccager nos Provinces , & parmi ces 1 nations, les Hérules, dont le nom en tranfpofant une feule lettre , eft vifiblement le même ? Arf Regio Fons Belgarum , ‘difoit Salvien; & le bruit de cet événement ‘a retenti fi fort au loin’, , que St. Jerôme Fa entendu jufques dans fon défert de Paleftine ; d'où il écrivoit lan 409. de l’ére Chrétienne ( b) à la veuve Ageruchia: Innumerabiles & ferociffimæ nationes univerfas Gallias occuparunt .... Quadus , Wandalus , Sarmata; Alani, Gepides, Heruzt, 6c. ToRNA CU M … Caprum fe. . Am biani , Atrebates, Morini, 6. inara ie Voilà donc mon opinion bâtie, non far des: fuppo- fitions, mais fur des faits. La pierre Brunehaut ;iou-la | brune pierre , eft un monument de la viétoire desha bitans du Tournaifis fur les Hérules , ou autres Bar- | bares, Les gens du pays , après avoir tué ow chaffé ces terribles hôtes, auront trouvé cette mafle extraor- | dinaire de grais, gifante dans leurs terres ; ils auront | _dreflée pour fervir de monument de leur délivrance & de leur joie. Tout convient à cette explication. - Notre monument fe trouve au milieu d’une belle cam- pagne , & au bout d’un chemin ; qui , depuis envi- -ron quatorze fiécles s'appelle du nom de ces Barbares, LS — (e) Les Payfans ajoutent que des ruifleaux de fang coulaient 7 ce chemin creux jufqu’à la riviere qui enseft éloignée de pluside r50ou 200 pas H (5)S. Hier, Epife ad ET viduam , anno 409. inter Es opter 4 ne rm SUR UN ANCIEN MONUMENT , &c. 483 ‘C'eft une pierre qu'il n'a pas fallu faire venir de fort loin, comme a fait l'Auteur de P'Hiffoire de Tour- Kane" nai (a); elle a été trouvée fur les lieux , ou non loin ‘de-tà ; car tous les champs y abondent en grais. La -circonftance d’une mafle aufli extraordinaire , & la joie .qu'infpiroit la défaite des Barbares , auront fait ériger “cette mafle en monument & en trophée. C'eft où le #ilidé la tradition nous a conduit ; c’eft ce que l’on trouve en combinant des faits, dont la mémoire fubfifte, + Il ne nous refte qu’à récapituler les principales preu- «ves que nous avons raflemblées. Il paroît d’abord ‘certain , que notre monument ne fauroit être un mo- -nument de la Reine Brunehaut. Cette Reine , après ‘le meurtre commis dans la perfonne de fon mari, en préfence & dans les états de la terrible Frédegon- de, ne peut avoir eu ni le temps ni la fantaifie de ré- parer les grands chemins & d’ériger un monument ; outre qu'on ne fauroit dire à propos de quoi ce mo- nument. ts | -4 I n’eft guère vraifemblable non plus que ce foit un monument de Jules-Céfar, ou dequelqu’un de fes Lieu- -tenans. Cen’étoit pas dans ce goût-là que les Romains érigeoient leurs trophées. Ils en ont érigé par-tout, & pas un dé tous ceux qui nous reftent , ou dont l’'Hif- toire ait confervé le fouvenir , n’a quelque chofe de commun avec notre pierre. Par. quelle bizarrerie , dans la Belgique feule , & fi près de Bavay, ville qu'ils ont bâtie dans un tout autre goût, auroient-ils voulu marquer leurs viétoires par une pierre brute, fans inf- cription ? Laiflons donc ces idées , & fi on ne veut pas que notre pierre foit un mémorial de Ja victoire remportée {ur les Hérules, ou fur quelque autre na- tion Barbare ; comme les noms donnés aux lieux fem- Ee] Cette Hiftoire a été imprimée en Hollande en 1750. in-49. au 2. TURÉRIRE ÆMONN SU AUS blent: l'indiquer , croyons plutôt que-ce. monumiene appartient. À un âge bien plus reculé-encore;, & qu'il eft antérieur à tous. les événemens dont nous parle PHiftoire, Croyons.qu'il vient des premieres peupladés des Celtes ,qui font venues s'établir dans ce pays. I feroit bien plus ancien par conféquent. que l’Zrminful des Saxons, & contemporain peut-être de ceux de: ces anciens Héros, avant le fiege-de Troye ,. qui en.érie geoïent de femblables par-tout le monde, comme il Geog. 1.3.a été remarqué par Strabon. Il, eft parlé jufques dans nos livres: facrés de cette coûtume , l’une des plus am ciennes:, peut-être, de lunivers. Dans le livre de la Gen.c. »8. Généfe , Jacob:, après la vifion myftérieufe qu'il avoit v18.&feq.eue., fe leva de grand matin, prit la pierre qu'il avoit eue fous fa crête, & l’érigea comme un monument: erexit Gen.fupra. lapidem in titulum. Jofue, avant de mourir, prit une très-grande pierre, & la: placa d’une maniere parti- culiere, pour fervir aux ffraëlites,. dans les fiecles à venir, de monument & de re de ce qui ve- JE noit de fe pañer: tulir lapidem prægrandem … pofuirque leg. eum. fubter quercum quæ.erat in fanttuario Domini. C’é- toit-là route la façon que dans ces premiers âges du monde on mettoit aux monumens, Nul art, nul luxe, nulle recherche. Et le but qu’on fe propofoit , de faire pañlèr une chofe à la poftérité la plus reculée., étoit bien mieux rempli ainfi, par une pierre du plus grand volume , d’une feule piece, & fort dure, que par beau coup de petites mafñles, entaflées les unes fur les aus tres , telles que pourroïent être des Colonnes, des Pyramides, des Arcs-de-Triomphe. Séfoftris , ce fa- meux Roi d'Égypte, au rapport d’Hérodote, avoit laiffé de pareilles pierres dans tout Orient , où ilavoit | étendu fes conquêtes Alexandre le Grand voulut auffi imiter cette antique facon de marquer les exploits , lors de fon expédition dans les Indes. | SUR UN ANCIEN MONUMENT, &c. 485 "Notre pierre eft certainement digne de figurer à côté de celles que je viens de nommer ; elle nous rap: pelle l’origine des fociétés , l'enfance , la fimplicité des Arts, & les premiers âges du Monde. Elle eft d’un poids, d’un volume , & d’une dureté, à braver une fuite incroyable de fiecles. On peut juger de fa du- reté par celle de quelques morcaux que j'apporte ; & que l’on a eu beaucoup de peine à détacher. Enfin il faut ou la main des hommes , ou quelque boule- verfement extraordinaire de notre globe pour la ren- verfer. . CR 5 " se ML 145% le del ne LH QE 2738 ON 8 18 a ro. re L MS EXAMEN LA QUESTION AY * Langue des Étrufques a eu du rapport avec celle des Peuples Belgiques ? PAR M. DÆS ROCIHES.. Lu la Séance du 11 Avril 1774. (Tome I, Vv sv LA QUESTION Si la Langue des Étrufques a eu du rapport avec celle des Peuples Belgiques ? 1 Ms at paflage de Scrieckius qui a donné lieu à cette difcuflion. Cet Auteur rapporte , qu’étant à Pa- ris, où il faifoirt un cours d’études, on lui communi- qua une infcription Étrufque , tirée d’une table d’ai- rain qu'on avoit apportée de Rome : elle commence par ces paroles : Sururont, pefnimumo , fururont, deitu , etaias , eno, prinvatur, fimætuto, era font, via:,pora, benufo. On peut voir le refte dans le livre des origines, pag. 32. & feg. Scrieckius qui voyoit du Flamand par-tout (a), De marqua pas d’en: crouver en cette infcription. Il ——— "Sn ee ne : Ça) Il'en: trouvoit, fur-tout dans J'Hébreu, de la Bible:: voyez fon ex- plication du Pfeaume 150. Hael- al: hoh-hy: By: gaich-hodhert.. y. î Hael- al-hoh-hy. Gaar- by, ga- hod-al hy,, hael- al Lok- ky. Ce font des. paroles que l'Auteur prétend’appartenir à la langue Flamau- de , &. dont le fon approche des mots: Hébreux: du Pféaume: Zoyez cec- te explication 4 la fin dés Monita fecunda , de l'édition de 1615. Vovvi dge : CADRES LL LE s'en frvit pour confier fon: me & Bvortt Avoir; que les Étrufques étoient une colonie des Germains &c des Belges, qui foumirent la plus grande partie de V'Italie plus de mille ans avant Romulus ; & que leur langue n’étoit guère différente de la nôtre ; ces prin- cipes pofés , il expliqua les premiers mots de Pinferipi tion par dés mots Flamands : en rétranchant les let tres incommodes, & y fubftituanc d’autres plus, favo- rables, il trouva que ces premieres paroles vouloient dire : Ter ueren 7y niemand,. ter ueren die doe iet aefs. In bringhe water. Indien mifdoet, hier af, ende wyt voor wende ut. C'eft-à-dire : à Fheure quil ej? ; que-per- fonne, à l'heure qu‘il ef, ne faffe rien de Jinifire. Ap- “portez de l'eau. S'il et : hors d'ici ? se il IG rétire loin d'ici. % Remärquons d'abord: que ce ftyle né téfmble guère à celui des infcriptions. Mais il y a plus. Les Etrufques n’écrivoient point comme nous de la gau- che à la droite ; mais comme les Hébreux de droite à gauche. Il ne faut que voir les monumens de Aon- te puleiano., ceux de Werone, ceux qu’on a publiés dans l'Etruria regalis, & dans le Mufeum Etrufcum, ceux qu'on trouve dans les Offervazioni litterarie-du Mar- quis. Waffei, principalement ceux qui portent des'noms propres : fi ce font de vraies infcriptions. Etrufques , & non.pas en langue Pélafgue ou Latin primitif, on les trouvera toutes > fans exception , écrites de droïte à gauche : il doit donc paroïtre affez fingulier, que. Scrieckius y trouve du Flamand, même en les Hfat à rebours. Difons mieux. L'infcription qu’il rapporte n’eft point Étrufque. Elle eft tirée de la derniere des tables Eu gobines, ainfi nommées de la ville de Gubbio dans VOmbrie, dans le voifinage de laquelle on les déter- ET EE NE COPIE ER ES Rd DE LAÏQUESTION, &c. … A49r ra aunombre de fépt. Le Sénat de cette ville en fit ae quifition en: 1456. Plufieurs Auteurs en ont parlé. Demfierus les publia toutes dans le premier tome de fon Etruria regalis (a); ; copiées trait pour trait fur les tables ‘d’airain qu'on conferve dans les archives de Gubbio ; mais ni lui » ni Gori, ni Bourguet (b) n'y ont rien entendu. Il étoit réfervé à l'illuftre Muffei de diftinguer lEtrufque d'avec le Pélafoue ou l’ancien Latin (c); & de montrer avec la derniere. évidence , que ces tables, & particulièrement celles qui ont des caracteres Vatins , font toutes écrites dans l'ancienne langue des maîtres du monde. : Il eft difficile de concevoir commént on a pu s" An On y trouve fouvent poni fetu ( pour pone fecit) : Uflentu ( pour offento), abrof ( pour arbos ). On y lit : Juve Patre, Frater : seftru karu fratri ; eff, ‘caprum , carne , ‘arvis , ‘facra, Jpina , aves , via, fontes, -ater ,. Jalbvum , virum, nomne ( pour nomen je, : fubra fcrebitor fent (pour fupra fcripta funt ), Buf ‘reis, “Toru Treis (pour Boves tres, Tauros tres); Uva, mer- Jus, fas eff , cueflur & mille autres mots Latine. Mais -ce qu'on y rencontre le plus fouvent, ce font les noms propres des villes & des nations : Tarfinates Trifori, «Tarfinates TFufci, Nomnes (pour Nomentani). Les ha- -bitans de: Gubbio y paroïflent plus de 60 fois fous le -nom de Popl. Totar. Fate que les anciens abbré- LC) TH Demfteri de Etruria regali Tom. L p.01. Florentiæ 1723, - Voyez Giornale de’ litterati T. 38. p. 1. pag. 398. & T. 40. pag. 407. (6) François Gori, Auteur du Mufteum Étrufeum ; imprimé à Floren- ce 1737: M. Bourguet, Auteur de la Bibliothéque Italique. Si Scriec- kius trouva du Flamand dans les tables Eugobines, ces. Auteurs y trou- verent du Grec , & les expliquerent en cette langue avec la même: fa- “cilité & le même fuccès: - (©) Voyez Oférvazioni Letterarie che poffono fervir di continuazione- 21 Giornal de’ litterati d'Italia, Tom, 3, 4,5 & 6. DDÉTHDÉES à Verone -1737, &C, feq. ; 49% : EXAMEN: at vioientainfi: pour dire Eugobingrum, en y. fous-énten< dant civitatum, ou partiurm, ou quelque autre, plurier féminin. Comparons maintenant à cet ancien Tecin des joatl fcriptions véritablement. Écrufques » & nous en fenti-. _rons l'énorme différence, En voici quelques-unes ; il : faut fe fouvenir que dans l’orisinal on les lit de droite : à gauche , : & qu’elles y paroiflent en lettres Étrufques : que nous n'avons pu rendre , faute de caraéteres.. | I. Cehen futhi hinthiu chuem flanm etve taure laut- namcle carefri aulem LEarthial precuthurami larthia- | lifvle ceftnal clenarami eth fanu lautn precumipa murxua cerurumein hecxri Tunur Clutivaxelur. r. #7 Oferv. Lett. T. 5. p. 302. IE Mi Thana Larthiam Vanl, AE mai ce. F. s, Oferv. Lett. T. 6. p. 126. IT. Larchi pefrli Thurmnam hetei, F. Derpfieri Etrur. Reg. T. 1 p. 413 ci Les curieux en peuvent voir d’autres dans les obferva= tions de Maffei , dans le Mufeum Etrufum , ‘dans l'Etruria regalis & par-tout ailleurs. J'ofe les. aflurer que dans plus de 400 infcriptions véritablement Étruf … ques qu'on a publiées, il ne trouve pas un mor qui ; approche le moins du monde de ceux qu'on trouve : dans les tables Eugobines; d'où il s'enfuit que Pinfcrip- : tion rapportée par Scrieckius ne fauroit être Étrufque, & par conféquent qu’elle ne prouve point du tout la. reflémblance de ce dernier avec lPancien Flamand. Rien d’ailleurs ne porte à croire que Îles Étrufques fuflent une colonie Germanique, & que leur langue aix eu quelque rapport avec la nôtre. Éls écrivoient comme les Hébreux de droite à gauche. La quatrie- me voyelle (a) c'eft:à-dire l'O manquoit à _kur lan (a) Voyez Offervaz. Lett. T. 5. P. 353: DE LA QUESFEON,Éc\ir40%: gue ; ainfi qu'à celle des Hébreux. La plupart de leurs noms propres étoient fignificatifs , -& paroiïflent tous. tirés de PHébreu & du Syriaque: témoins Lucumu , qui fignifie Guerrier; Bruntac, qui veut dire Fulminant ; . Nuran, terrible. Efar : nom que les Étrufques don- naient à l’Étre Suprême, fignifie Seigneur. Adkarna- ham, Ahala, Arnun , Farfar ,| Maftarna , Rafena, Sern- lam, Thana & autres noms de ce peuple ne s’éloignént guère des noms Hébreux. D’anciens Auteurs Grecs & Latins , fur-tout Hefychius & Fefte , nous apprennent plu- fieursautres fignifications. Agalletor, veut dire garçon; nous difons eenen Jongen. Falando ; le Ciel , c'eft chez nous den Hemel. Trunut, Arufpice, eenen Waerzeg- ger. Ril , des années, Jaeren. Antar , aïgle ; eenen Arend. Damnos , Cheval , een Peérd (a). Il faut avouer qu'on ne fauroit trouver là le moindre trait de ref. femblance. Il en eft de même de tous les autres mots Étrufques , dont on a pu connoître la fignification ; pas un ne donne le moïndre indice qu'il y ait eu ja- mais du rapport entre ces deux langues. | En effet, plus on. contidere le caraétere des deux peuples, plus on y trouve d’oppofition. Nos Germains conftruifoient des cabanes aflez femblables à cel- les des Æorrentots , quand les Etrufques avoïent dé- ja inventéJ’un des ordres de l'architecture. Ils difpu- toient aux Grecs le prix des beaux arts, avant que nous fuffions qu'il y eüt des arts au monde. S'ils n’ont inventé la fculpture, le deflein , la peinture , ils les porterent du moins à un degré de perfeétion , dont (a) Si la quatrieme voyelle fe trouve dass quelques-uns de ces mots, il ne faut point s’imaginer que ce foit une contradiétion de ce que nous avons dit plus haut. Il faut fe fouvenir que ce font des Grecs & des Latins-qui nous tranfmettent ces mots ortographiés à leur mode. D’ail- leurs il faut diftinguer les temps , ce n’eft que dans les premiers que cette voyelle a manqué à Ja langue Étrufque. 408 ESS AM ET 2 enr les plus habiles modernes ont fait gloire d'approcher. (a) Leurs belles ftatues faifoient l'admiration de Ro- me & de la Grece : on difoit par excellence un ou- vrage Etrufque, comme nous dirions de la porcelaine - de Saxe, ou de la Mufique Italienne. Et tout cela dans un témps où nos ancêtres ignoroient jufqu'a l’Agri- culture, & qu'une peau de bœuf fauvage leur fervoit d'habillement. Je ne pouflerai pas plus loin ce paral Ile , ou plutôt ce contrafte vifible. Il eft bien févi- dent que le caraétere de ces deux nations eft auffi oppofé que celui de leur langue; & qu'en faifant des Étrufques une peuplade de Germaïns , parmi toutes les nations de la terre, Scrieckius ne pouvoit plus mal choiïfir. LU os RS AUS On dira , peut-être, que la reflemblance du nom dé-- montre affez une même origine: que plufieurs anciens ont donné aux Etrufques le nom de Tufti, changé en- faite en celui de Tofcans : que le Fondateur de la. mation Germanique s’appelloit Thuifco , & fes defcen- dans Thuifci ou Teutons; & qu'entre Thuilci & Tufci il n'y a que fort peu de différence. Je répondrai que cette conformité de nom eft un pur effet du hazard, dont on pourroit rapporter mille exemples. Delphes dans la Béotie & Delfr en Hollande fe reflémblent de même. Troyes en Champagne ne diffère guère de la fimeufe Troïe capitale de la Troade. Les Frifii ou les Frifons & les Siléfiens d'Allemagne ont ä-peu-près le même nom que les Phrygiens & les Ciliciens Afiati- ques Les Vénitiens & la Phénicie, les Samaritains &. Sarmarcande ne font pas moins approchans. Ce font les | mo- a — — (2) Has primum Tufci in Italia invenifile feruntur Cafiod. var. Le 7.15, Foyer offerr. Lett. T. 4. p. 76. & feq. DE LA QUESTION, (072 495 monumens hiftoriques’, c’eft la: conformité de la rç- ligion'; des mœurs , du langage &c., . qui font juger ‘fi'üné nation defcend d’une autre. Une fimple reflem- “blance ‘de nom, déftituée de toute autre circonftance , ‘ne fera jamais regardée commeune preuve concluante ‘ence genre de difcuffions. : Et quand même on ne voudroit admettre d’autres “preuves que celles qui fe tirent de l’étymologie , en- core ne feroit-il point démontré que les Étrufques fuf- “fent une colonie Germanique. Les Romains qui ap- “prirent d'eux les rits des facrifices & les cérémonies “réligieufes , “les appelloient quelquefois Tufci, d’un moc qui fignifie Sacrifier. -Servius pe PEnéide , & le ju- ditièux Denis d'Halicarnafle le difent en (a) termes formels. Les Auteurs Grecs plus anciens ne fleur ont jamais donné ce nom : ils difoient Tyrrhenia & - Tyrrhéniens. Hérodote , le Pere del'Hiftoire, nous ap- “prend que ce nom vient de Tyrrhenius (), Prince : Lydien , qui conduifit en Italie une colonie d’Afiati- - ques. Mais ni Tufci ni Tyrrhenoi n'é étoit l’ancien nom des. Etrufques. Deux pierres antiques , dérerrées dans le Véronefe , les défignent fous celui d’Arufnates, c’eft-à- dire , originaires d’Arus (c). Du temps de Ptolomée , de Flavius Jofephe & d’Étienne le Géographe , il y ‘ avoit encore des veftiges d’Arus en Syrie ; & plufieurs Savans ne doutent plus que les Étrufques ne foient ve- : nus de-là (d). Tout doit nous porter à le croire : le témoignage des plus anciens Hiftoriens, l'écriture de (a) Serv. in Æneid. L. ro. v. 164. Dion. Hal. I. r. (&) Lib. I. ‘(c) Offerv. Lett. T. 4. p. 14. d) Pour ce qui eft du nom d'Étrufque., Servius à cru que c’étoit celui d’un des anciens Héros de ce Peuple ; mais Denis d’'Halicarnafle bien fupérieur à Servius dans la critique & dans la connoïiflance de l’an- tiquité, nous aflure que c’eft le nom du Pays qu’habitoit cette Nation avant que d'aborder en Italie. Tome I. ; X x x 496 EXAMEN, &c. droite à gauche , la reflémblance des noms propres avec ceux des Hébreux & des Syriens, la conformi- té des Dieux & des cérémonies religieufes , leur goût our le luxe, & leur habileté Ée tous Îles arts ve- nus de l'Orient ; aulieu qu’en les comparant aux Ger- mains , on trouvera qu'il n’eft point- poihble- de-voir des peuples plus oppolfés. i. Concluons de tout ce difcours que les nice & les Belges n'ont rien de commun ; que leurs langues . #ont aucun trait de reflemblance ; & qu’en fait d’an- : tiquités Belgiques , il ne faut pastrop f fier auxlumieres de Scrieckius , fi lon ne veut quelquefois courir pue que de s’égarer avec lui. | EXPLICATION LETTRE DIFFICILE ù Qui fe trouve dans la Colle&tion de Colles de 7 $t. BONIFACE ; AV E C - Des réflexions fur l’ancienne Poéfie D ES PEUPLES BELGIQUES. PAR M. D ÆS ROC ILES. _ Lä à ia Séance du 4 Décembre 1776. Le X x xij 6e EX BPLICATION DUNE à LETTRE DIFFICILE Qui fe trouve dans la Colleétion de celles de St. Bonrrace; avec des Réflexions fur l’ancienne Poéfie des Peuples Belgiques. Ce Lettre , qui eft la fixieme, eft concue en ces termes : » Reverendo atque fan@iffimo N.... ego minimus, » nomine Latito [+] , fine fine falutem in Domino.lt]F.Lite. » Audio de te quod ïter vis incipere, hortor ut non » defeceris. Eja, fac-quod incipifti. Memento Saxoni- » cum verbum : of dead lata dome foreldir figi fithaga- » huem fuurltit tiana. Sed tamen tale quid in te haud » fcio. Non eft hic operandum; fed tende ubi meffs ». eft, Deo adjuvante , ficut falvator dixit : Meffis qui- » dem multa , operari autem pauci , &c. De me quid » dicam minimo , qui fub regula alterius vivo , nihil » habens lucri, ficut omnium moris eft hic habitan- » tium , nihil habentium , nifi quotidiana ftipendia? Sed » tamen non doleo propter nimiam paupertatem , quo- » modo Dominus confolavit nos, dicens: Beari pau- » peres fpiritu, quoniam ipforum eft regnum cælorum. $00: EXPLICATION Hotte Le dote Serrarius | qui a publié les Jettres. de. St. Boniface avec un commentaire , avoue nettement qu'il ne comprend rien à celle-ci; fans doute, à.caufe de ces paroles Anglo- -Saxonnes , & il en laifle l’explica- tion à ceux qui ont fait une étude plus profonde .de cette ancienne langue. Veteris , ditil , linguz Saxonice peritiores iflud explicent, Après lui. ,ni Éckart, ni Schilter:, ni Lye, ni même le célebre Hichefes ,ni Hs Auteur, que je fache , n’a ofé entreprendre cette explication. ‘Comme de toutes les langues de l’Europe, la Fla- mande, l’Angloife & l’Allemande, font celles qui ap- prochent le plus du Saxon du fiecle de St. Boniface, c’eftedans ces trois dialectes, non pas tels qu’on les parle à préfent , mais tels qu’on les trouve dans les écrits du moyen âge, qu'il faut chercher l'interprétation des paroles dont il s'agir. C'eft ce que j'ai fait, & voici ce que j'ai trouvé “de plus fatisfaifant, 2 Off , participe du verbe Ofan e fi ignifie ruiner , : faccager (a). Dead ( on écrit. Thead, Theada, Thiods & Diet , a & on prononce Dide ) : ce mot fignifie Peuple, on le trouve non-feulement dans les Évangiles. d'Otfride & de Tatien, dans les Pfeaumes de Notker, dans l'Épinicion du Roi Louis; mais encore dans nos Chro- niques Flamandes, voyez les citations en marge (b). Lata, c’eft le verbe Flamand laeten , laiffer. La ter- minaifon en a fait voir qu’il eft à la feconde perfon- ————_————— me se Ca) Voyez Gloffarium Monfeenfe ne schilterum tom. 3. p. 651 CB) Dat heydens diet CL. Colyn rymchron. v. 462. Te bekeeren ’t or diet 2. Mel. Stoke rymchron. p. ; j - Gi Fo nu fiet! Ginder komt op ons een Michel diet ‘ : Lod. van Veltiem rymchron. p. 206. j à D'UNE LETTRE DIFFICILE, Gc. SO ne de l'impératif. Voyez la Grammaire Anglo-Saxon- ne dans le Thefaurus linguarum feptentrionalium du Doc- teur Hickefius Tom, 1. pag 4x. Dome fignifie maifon. Dans le premier volume de VPexcellenté Colletion de Schilterus, on trouve une verfion Teutonne du Traité de St. Ifidore de Chrifii Aativitate &c., ou ces paroles de l'Ecriture flatuam eum in domo mea & in regno meo , font traduites ainfi: ih inan Chifhiftu in minemu dome endi in minemu ryhhe. Cette verfion remonte du moins au fiecle de Charle- magne. : El eft très-poffible que nos Peres fe foient fer- vis de ce mot Dome, pour dire une églife ; puifqu’en- core de nos jours, tant en Allemagne qu'aux Pays- bas , il fe prend pour églife cathédrale : den Dom van Keulen ; den Utrechtfen Dom. Comme fi l’on difoit la maifon par excellence , ou la maifon du Seigneur. Quoi qu'il en foit , dans le paflage que j'explique, Dome fi- gnifie maifon.. ‘ - Foreldit figi. En Flamand on diroit verhaeld’et zegen,. c'eft-à-dire , s’il profpere, s’il ef comblé de bénédiétions. Sigi, pour dire zege fe trouve dans tous nos anciens Au- teurs, & fe prend tantôt pour triomphe ouviétoire , tantôt pour bénédiction. 1 Sitha gahuem. Sit,veut dire, foyez (en Flamand zyt)c’eft l'impératifdu verbeAnglo-Saxon wefan. Voyez Hickefrus. . Tha fignifie la , non-feulement en Saxon , mais dans tous les dialeétes qui en approchent. Gahuem d’où eft venu l’adverbe Flamand gauw , veut dire promp- tement. On le trouve à tout moment dans les Evan- giles d'Otfride. Le Gloflaire de Schilter ( au mot ga- hun ) en préfente aflez de citations; je l'ai rencontré en bien d’autres Auteurs du moyen âge. Suurktit. La lettre f, qui commence ce mot, tient la place de l’article Saxon fe ou feo. Les deux uu va- C.o. 6.7, s02 EXPLICATION “lent la confonne que nous appellons we ou double u. Comme c’eft une fyllabe fans voyelle, 1l faut la fup- pléer, peu importe laquelle on préfère ; l'a fe confond avec lo, & l’on trouve également dans les anciens li- vres worlti, werlti, wureltit, d’où dérive le mot Fla- mand wereld , qui veut dire monde. Thiana. C’eft l'impératif du verbe Saxon Thianan, fervir. Reprenons maïntenant le pafläge en queftion : Off dead , un peuple eft-il ruiné ; lata domæ , abandonnez fes maïfons, foreldit figi, fi fes affaires {ont en bon érat, sil eft viétorieux; fitha gahuem, foyez-là promp- tement , accourez-y en diligence, fuurlrit thidna pour y fervir les gens. ; | On dira, fans doute , que ces paroles font peu d’hon- neur à ce grand nombre dereligieux qui abandonnoïent PAngleterre pour fervir dans les miffions d'Allemagne & des Pays-bas. J'en conviens volontiers , & ‘c'eft ce qui doit confirmer mon interprétation; car P'Auteur de la Lettre ajoute immédiatement ces paroles remar- quables : fed tamen tale quid in te haud fao. À Dieu ne plaïfe que je fafle réjaillir la honte d’un fentiment fi bas fur un St. Willebrord , un St. Boniface, ‘un St. Adalbert, & tant d’autres grands perfonnages, qui, pouffés par un zele Évangélique , ont quitté leurs monafteres pour établir la doétrine de Jefus-Chrift fur les ruines de lidolâtrie. Une telle penfée feroit fort déplacée dans un Mémoire Académique, & dans une province où la religion & les hommes A poftoliques qui nous la firent connoître , furent toujours refpeétés. Mais cette foule incroyable de Moines qui remplifloient alors l'Angleterre n’étoient pas tous des Saints, C’étoïent des hommes , fouvent fort corrompus, & nullement exempts des paffions humaines. C’eft ce qu'on voit non .. D'UNE LETTRE DIFFICILE, 6. $03 non + feulement dans les véhémentes déclamations de Gildas le Sage , mais dans les lettres de St Boniface même & dans lhiftoire Eccléfiaftique du vénérable Bede. Il eit très-poffible que les vues intéreflées de ces mauvais moines leur ayent attiré l’application des paroles que j'ai expliquées. Confinés dans un Mo- naftere dès la feptieme ou huitieme année de leur âge, forcés enfuite de demeurer fans vocation dans un état où la providence n’appelle point tout le monde, ils voyoient les travaux de leurs freres en déca de la mer récompenfés par de bonnes Abbayes , par de riches Evêchés., & par de grands biens que la piété de nos Princes & des Grands de la nation prodiguoit aux églifes. Quelle tentation pour des gens ainfi difpofés, & qui démeuroient dans une île où ces avantages étoient bien plus rares , à caufe du nombre exceffif des afpirans? Et qu’on ne dife pas que j’exagere ce nom- bre. On peut s’en rapporter au vénérable Bede qui f- nit fon Hiftoire en 731, c'eft-à-dire, vers le temps même que la Lettre fut écrite. Ce grand homme, après avoir parlé en différens endroits de quantité de Monaftères qui exiftoient avant fon fiecle , & entr'au- tres du Couvent de Bancor, où plus de 2000 Moines Lib.2.c.2. étoient enfermés, termine fon ouvrage, en fe plaignant beaucoup de ce qu’à l’occafion de la paix que le Roï de Nord-humbrie venoit de conclure , un trop grand nombre de citoyens, nobles & roturiers , les Peres ainfi que leurs enfans, abandonnoient les fonétions de la vie civile , & les exercices de la guerre, pour prendre la ton- fure & fe lier par les vœux monaftiques, que res, ajoute-t- il, quem fit habitura finem pofterior ætas videbit.Ceciparoit : concluant; mais ce qui fuit left davantage. Dans une Lettre (a)à l'Evêque Egbert , écrite peu de temps avant 7 (a) Exedit Waræi 1664. citante Hickelio. Tome I, Yyy 504 EXPIICATION fà mort, il fe déclare hautement contre cette me tude de nouveaux Monafteres, dont les féculiers, dé- oûtés du monde & des embarras de la vie civile, reme plifloient Angleterre. Il blame également cette fou- le de particuliers qui sy renfermoient , & les Rois qui les encourageoient par des donations qu il appelle in-. difrétes: & il ajoûte que ni l'État ni l’'Eglife ne peu- vént , ni ne doivent plus tolérer cet abus. Maintenant la Lettre s'expliquera facilement. Ce n’eft point St. Boniface , c’eft un bon Religieux, nommé Eatito ; ou ( comme on lit en marge ) Baie qui ea eft l’Auteur, De tous les Moines contemporains de St. Boniface ; je ne trouve que Lanto où Lando, Réligieux de Fontenelle (a), à qui cela & puifl rapporter. Si ma conjecture éft jufte , la Lettre à été écrire avant lan 731 [b], que ce Lando füt fait Abbé de fon Monaftere. Plus tard il mauroit pu dire : de me quid dicam minimo qui fub régula alterius vivo ? Ces paroles : non efl hic operan dur , conviennent bien à uñe péifible Abbaye, éntourée de Chrétiens, & d’un grand nombre d'Eccléfiaftiques. Sed rende ubi meffis efé C'elt cara@érifér aflez clairement les miflions de St. Boniface. C'eft la carriere qu'il propole < à fon ami, en le détournant de fe rendre auprès de lui; où il ny auroit point de fortune à faire, point d'argent à ga- gner, où il devroit fe contenter ‘Ainfi que Îles autres moines, de la fôbre pitrance qu'on leur diftribuoit tous les jours. Nihil habens lucri, ficut omnium moris efè hic habitantium hilul habentium ; nifi-quotidiana flipendia. Mais pour revenir au pañage Saxon, qu'il me foit (a) L'Abbaye de Fontenelle au pays de Caux en Normandie à un quart de liene de la Séine. Elle eft plus connue préfentement fous le nom de: St. Vandrille. [61 Annal Mab. T. 2, p. 82, 85 & 05. D'UNE LETTRE DIFFICILE , Ge. 505 permis de remarquer que ce font quatre vers, & de faire à cette occafion quelques ‘obfervations fur notre ancienne poéfie. Pour trouver ces vers, il ne s'agit que d’arranger les paroles de la maniere fuivante : ‘Of? ‘dead lata dome : Foreldit figi ; Sitha gahuem Suurlrit thiana. La cadence & lharmonie .de .ces vers front apper- cues fans peine de trous ceux dont l'oreille eft accou- tumée aux poéfies du feptieme ou huitieme fiecle , {oit dans le dialeéte Saxon., {oit dans le Franco-Théo- tifque , dialectes les plus répandus dans nos Provinces, L'un & l'autre fourniflent aflez d'exemples de fembla- bles -poéfies [a]. J'en donnerai quelques exemples, aux- quels je joindrai une traduction Flamande très-Jittérale, qui fera voir les changemens arrivés dans l’ortogra- phe;, dans les mors & dans le tour des phrafes. La tra- duttion Françoife eft bien plus libre. On fait que " cette langue , qui eft très moderne, n’admet point cet- te grande briévété & cette concifion fi propre au Fla- mand,, au Latin, au Grec., .& à toutes les langues an. ciennes , dans léfquelles on Sentend à demi-mot. Cette ville eft célebre Le Saxon. I partoutl’Empire desBre- e tous ; le chemin par le-l Ts deos burch breome!Dezen burchtis beroemt quel on y monte eft fort | Geond Breoten rice Que geheel Britten-ryke efcarpé. Steora gefta dolad, Stylftaet den toelaet[toe- -Elle eft environnée de ! .gank.] rochers, on voitdes vé- {Stanas mb utan Steenen daerom van buy. gétaux finguliers , dans : jlhotens : les-intervalles. lWundrum gewWæxen. Wondere gewaïñlen. oo oo [a] Carmen de fitu Dunelmi ex thefauro Hick. ln. p.4rr6. SAT 506. EXPLICATION. Elle eftentourée de lal Weor ym eornad. De Were hem omringts © Here, riviere rapide qu |Ean ydum ftrong Een water fterk fert de demeure à des|And derinne wunad En daerinne woonen poifons de différentes | Fifca fela kinn, . |Vifichen veeler foort efpeces, qui fe mêlent| On flodagemong In de vloed gemengt dans les flots. sp And there gewæxen \En daer wañlen I1 y a des forêts im-| Wuda feftern mycel Wouden wonder groet menfes, habitées par une | Wuniad in them wicum | Daer-woonen in die wy-- infinité d'animaux fauva-| 1. Ken 7 ges , les vallées n’en four-| Wilda deor monige: | Wilde dieren menige aiffent pas moins. . In deopa dalum In diepe dalen Deora ungerim.. | Dieren ongerymt veel. Ces vers font tirés de la defcription de Dunelm. J'ai pris les fuivans dans l’ancienne verfion des poéfies- de Boéce : ) [a] Nous favons tous [Hivæt we ealle witon. | Wat wy-alle weten les actions infames que Hwælce ærlefte Welkeeerloosheden . commit le terrible Né- | Geneah ge feor | Genoez gevreeft - son, Roi des Romains, | Neron worhte,, Nero uytwerkte - dans le temps que RATES Cyaing Der Roomeren Koning- empireétoitle plus grand | Da his rice wæs Daer zynryke was qui fût fous les cieux. |Henf under heofonum, | Hoosft onder den hemel.… Je citerai encore le commencement d’un beau Ca-. lendrier poétique, publié dans le premier come d'Hic-- Kkefius pag. 203. age. Le Chrift , ce Roiglo- | Chrift wæs acennyd. |Chriftus was geboren: rieux & tout-puiflant de Den Koning heerlyk) Cyning wulder , tous les peuples, naquit | On midre winter - Op midden winter au milieu de l'hiver :|Mære deoden Aller volkeren le huitieme jouril rashi ace ælmihtig OCE almagtig le nom de Sauveur. On thy eahreothan dæg | Op den achtiten dag - [Hælend gehoten. . Heyland geheten. . Hbid. 1894. Le Franco: Théotifque: Plufieurs ont ofé en-| Mänega waron | Mènige waren den - treprendrela publication | The fia iro mod gefpon: |Die hunne moed fpan-- de la parole de Dieu ; |Thas fia bigunnun : Dat zy begonnen [Kken: cette. parole: admirable | Word-Godos. reckean, |’twoordGodsuytterey=- [ce] Ibid. p. 184: Metr. Boeth:. D'UNE LETTRE DIFFICILE, Ge. 5077 QueJefus-Chrift annODÇa| That girum thatthi ricco | us geroemde dat au genre humain, & qu’il Chrift en ryken Chrift confirma par fes difcours | Undar mancunnea. |Onder mannen-künne . & par fes actions. Maritha ,gifrumde | Vermelde , en gevroom-- Mid wordun endi mid,de met woorden en met- | Werçun: | werken.., C’eft le commencement d’une harmonie Évangéli-- que , tirée de la fameufe Bibliothéque Cottonienne :. Hickefius nous en donne des fragmens confidérables dans le premier tome de fon tréfor. J’ai choiïfi ce mor- ceau par préférence , parce qu'il nous intérefle plus: que tout autre, en ce qu'il eft écrit dans un dialecte. qui n'avoit cours que dans ces Provinces. En efet: quoique le manufcrit ait été trouvé en Angleterre, _ce dialeéte n’eft point l’'Anglo-Saxon ; il fuffit d’en li-- re deux lignes pour s’en convaincre. Ce n’eft pas le. Franco-Théotifque tel qu’onle parloiten Allemagne : car, au lieu de thaz de waz & de thiz, on y trouve prefque. toujours that & sat & thit: un Allemand auroit-il pu: dire : etan endi drincan , thiet efkmin lichamo endi bloud,. ik fargibu thi himilriccas flutila , & mille autres expref fions qui. dénotent évidemment lidiome de nos pro- vinces ?° | | d Il neft donc pas fi rare de trouver chez nos anciens: Poétes des vers fans rime, & le quatrain de notre Let- tre eft certainement de cette efpece. Qu'on ne dife pas que ces paroles fe trouvent dans le manufcrit écrites tout de. fuite & fans aucune diftinétion de vers; car. dans ce temps-là & avant l’ufage de la rime , prefque tous les vers s’écrivoient de la forte. L'harmonie dont je viens. de rapporter une partie ne left point autre- ment; ceft Hickefius qui laflure , & j'en pourrois citer: d’autres: exemples.. Ainfi on peut afligner à notre poéfie ancienne. deux. époques. différentes... La. . Cap. 0. 508 EXPLICATION premiere, où l’ufage de la rime étoit inconnu , a duré juiqu'à la fin du huirieme ffiecle ,avant ce itemps je’ doute qu'on trouve des vers rimés. La poéfie confif- toit alors dans une certaine mefure de quatre , de cinq fyllabes.ou davantage. Certainement nos Poëtes igno- roient les pieds de Pindare & d'Horace ; mais la na- ture y fuppléa facilement dans une langue où la difié- rence des longues & des breves eft au moins aufli {en- fible qu'en Grec ou en Latin. Les Ghaldéens , les Égyptiens, les Hébreux, en un mot les plus ancien- nés Nations du monde, n’y mettoient pas plus de f- nefle, & chez leurs Poëtes,, ainfi que chez les nôtres, la nature ténoit lieu de l’art, da nature faifoit tout, Aiïnf Ja poéfie ne diféroit de la iprofe que parila vi- vacité ‘dés expreffions , da hardiefle des figures, les trarifpoftions ‘extraordinaires , :& ‘un ‘certain nombre de fyHlabes, qui, fans être foumifes à des regles inva- riables , ne laifloiént pas de former des modulations, une cadence & quelque chofe de chantant qu'on ap- percoit avec plaïifir , & qu'on préfére, fi j’ofe ile dire aux Tinstins iifipides de nos rires modernes, dont la fcrupuleufe ‘répularité éroufle !le génie & ralléntit æout Je feu des paffions. Nos Peres tenoient cette poéfie ;ain- fi que leur langue, des peuples féptentrionaux dont ils étoient lus. (On la retrouve telle que je lai dé- péinte ‘dans!les ‘écrits ‘des Scaldes qui étoient les Bar- des ‘du Inord. On peüt voir plüfieurs de ces poémes dans le livre de Vérelius, je n’en tirerai que ce cotn- encément du ‘dialogue d'Hérvare lorfqw'’elle évoqua lés rnaniés de fon père Angantyr., pour dui demander Pépée fitale qu'il avoit émpottée au tombeau. Sors “Angantyr Gu/fom- j'Waknadu/Angantyr | OrtwaektAngantyt meildelamert {.. Ex + C’eft Hersore qui téveille lVékuraig'Hervor L Firètv or wektn D'UNE LETTRE DIFFICILE , êc: 09 a Filleunique | Einka Dotter [Uw eenige Pogter le de-Srafi : Vkar Suafu En ook van Suafu: Du fond de ce tombeau | Sel du mer ur hauge | Geeft my uyt uw graf Doune moi ce glaive Hardan mækir Het harde zwéerd Tranchant, que | Dan er Suafurlama | Dat voor:u floeg fitjadis pour toi Slogu duergar. Suafurlama den dwerg. Le Nain Svafurlame. | | l Telle étoit donc la poéfie pendant cette premiere époque. Le neuvieme fiecle, où commence la feconde, vit naître lesrimes. Otfride qui pafle avec raifon pour l'Écrivain le plus élégant & le plus poli de fon fiecle , y mit afféz d’exaétitude ; je crois cependant que les ri- mes qu'on appelle riches, & qui fe trouvent au pre- mier quatrain de fon Épitre dédicatoire , font un pur effet du hazard, car je n’ai trouvé que ces quarre-là dans tout fon ouvrage. Les voici : Louis le vivilant, JEudowig ther fnello | Lodewyk den fnellen Louis plein de fagefle, |Thes wifduamesfollo à: van wysheyd vol. qui gouverne toutel Auf- | Er Oftarrichi rihtit al, [die Ooftenrykberegtetal trafie. |So Franckono Kuning | zoo eenfrankifchen Ko- comme il convientà un” fcal. - . pin Roi des Francs. {za [ of moet doen:]. Les autres Poétes n’étoient pas fi fcrupuleux ; dans: les quatrains ils fe contentoient fouvent de deux vers rimés , fans obferver la moindre confonnance dans les deux autres. Voyez les ftances Saxonnes publiéés par: Hickefius T, 1. p. 222. dont je rapporte ici les deux: premieres : la rime ne s’y trouve qu'au fécond & au: quatrieme vers. le fnis plus-âgé que je I. JE benjouderdanik was, n'étois Icamelderdanneicwes,/}Een winter en ook een D'un hiver & d’uelan:: A wintre, and ec a Jore jaer. née entiere; Ic ealdi more danne ic|ik veroudere meer dan En avançant en âge, dede 1 ik deed, Mon efpric devroit croî-} Mi wit oghte to bi more. | Myn verftand zou moe: tre de même. | TI. | ten meerder zyn. Très-lonstemps je n'ai] Wellonge ic habbe child) Wel lang hebik een kind: été qu’un enfant, | ibien , fl geweeft 2.1. p. 231. fendre mon peuple con- $ÿto EXPLICATION dans mes paroles & dans | on worde and on dede |in woorden en in daeden mes actions. [ésen ic bion winter eald |alboewel ik een wintéf Quoique plus âgé d’un | to jung icam onrede. . ouder ben hiver, maraifonn’en eft| ltejong ben ik inreden. pas plusavancée. | | II femble qu'on ne sattachoit pas fcrupuleufement au mélange des vers féminins & mafculins. Otfride même y manque fouvent. L’Aureur Anglo-Saxon:d’u- ne fatire contre les Moines, qui fe trouve dans le-tré- for d'Hickefius , débute par quatre vers féminins, fui- vis de quatre mafculins, après quoi , il place les au- tres au hazard, Dans la mer qui baigne | Furin fee bi weftSpayn-| Voor in zee by weft Efpagne occidentale ,il| ge Spanje. y a un pays qu’on appel- | Isalondihote Cokaygne|Is een land geheten Co- le Cocagne. Aucun pays | Der nis lond under he-| canje $ fousle cielneluieftcom-| venriche Daer is geen land onder parable en. aifance & en Of wel of godnis hit ili-! Hemelryke : fertilité. Le Paradistout| che: vanwelzyn en goedheyd agréable & tout brillant | Doy Paradisbe miriand| zynsgelyke briyt Cokaygnis offairir fiyt. Whatisther in Paradis Bot grafle and flure and Greneris ? Hoewel ’t Paradys aen- genaemzy en ichoon, Cocanje is van fchooner gezigt. Wat is’er in’t Paradys Als gras , en bloemen en ] groente? qu’il eft , ne préfente point ce charmant afpect dont on jouit en Coca- gne. Qu’y a-t-il en Pa- radis , fi-non de l'herbe .& des fleurs ? Voyez encore ces vers de l’Épinicion du Roi Louis, Lodewyk koning myn, helpt myne lieden tegen den Noordman hard bedwingen[of krag- ‘telyk befchermen ]: dan fprak Lodewyk : Heere zoo doen ik. de doodzalmy niet be- letten te doen al:dat gy gebied. Louis , mon Roi, prè- Hludwig Kuning min tez votre bras pour dé- Hilph minan livutin Heigun fa Nordman Harto bedwungan. Thanne fprach Hludwig, Herro fo duon ih, Dot ni retre mir itz Al thas thu gibieidift. tre les Normans. Seigneur, dit Louis, jy fuis bien difpofé , la mort même ne mempê- -chera point d’exécuter tout ce que vous com- -mandez. | l Cette irrégularité regne encore dans les poéfies du | treize 1 D'UNE LETTRE DIFFICILE, 6e, sri treize & quatorzeme fiecle ,.comme il paroit par mille eue de la Bible en rimes de Jacq. van Maerland © de la Chronique de Louis van Velthem , ainfi que du livre appellé , den Duytfchen Doëtrinael ; il faut ex- cepter pourtant les Poétes qui écrivirent en Hollan- de. Les vers de Colyn & de Mélis Stoke font plus.chà- tés, & le langage plus élégant & plus pur, Jobferverai encore qu’on regardoït comme une gran- de élégance l’ufage de Fur ftrophe par la lettre qui la commençoit, Toute J’Epitre dédicatoire d’Otfride elt dans ce goût-là. Pen ai donné un exemple, .en voici un autre. Qu'il apprenne en ce|Erhiarin thefenredion | :Hy hier in deze rede- “difcours l'Évangile ‘&{Mag'horen Evangelion || nen maghooren'tEvange- tout ce que Jefus-Ch. y | WazChriftusin then ge-|lium,wat Chriftus daerin ordonne au peupleFranc. biere ‘) gebied aen ”t Frankifche -|Francono ThietE. | volk, Je finirai ici les Obfervations que j'avois à faire fur notre poéfie ancienne. On eît difpenfé de la com- parer à la moderne ,puifque, grace à l'indifférence que nous avons pour notre langue, les Pays-bas ( je veux dire les Pays-bas Autrichiens ) depuis long-temps ne produifent plus de Poétes. Les étrangers, ceux-là fur- tout qui n'entendent pas un mot de Flamand , nous aflurent que la langue n’y eft point propre , & qu’ou- tre cela la nature avare n’a point mis dans les têtes Belgiques, ce feu célefte qui eft l'ame des beaux vers, On trouve cependant ce feu , & mème avec profufion dans les poéfies Latines de Joannes Secundus, & de Sidronius Hofcius. Grotius & Barlæus , que nous ap- pellons van Baerle ,en avoient une bonne dofe, & il faudroit être de mauvaife humeur pour en refufer du moins quelques étincelles à Jufte-Lipfe & à Erafme, Peut-on croire que ces beaux génies n'avoient de lef Tome I. AXE: S12 ERP LAC ASTON NEC prit que quand ils parloient latin ; & quetout leur feu les eût abandonnés, du moment qu'ils euffent vou- lu fe fervir de leur langue maternelle ? Ce ne fera donc pas l'influence du climat, maïs uniquement la pefanteur de la langue, qui nous empêche d’avoir des Poëtes, Elle eft dure, dit-on, & toute hériflée de confonnes. Je l’avoue; mais l’Anglois en a-t-il moins ; & les fyl- labes Allemandes font-elles moins rudes que les nôtres? Malgré ce caractere de la langue, dira-t-on que Pope _foit dur , & que Gefner manque d’agrémens ? Il eft des duretés qui ne fe font fentir qu’à des oreilles étran- geres ; il en eft que l’habile Poëéte fait éviter : l’un & lautre cas pourroit avoir lieu dans la poéfie Flaman- de. Pour moi, je croirai toujours que le défaut d’en- couragement, & l’efpece de mépris que nous témoi- gnons pour notre langue font les feules caufes qui nous empêchent d’avoir des Poétes ; & que fi la poéfie étroit ici, comme chez nos voifins , le chemin pour parvenir à la plus haute confidération, & le moyen de fe faire un nom immortel , Apollon auroit des favoris en Flandre comme ailleurs. La langue mieux cultivée, n'y mettroit plus tant d’obftacles ; & même pourroit fournir dans des fujets grands & férieux des facilités que le François ma pas, & qu’il ne peut avoir. FIN. NOUVELLES RECHERCHES SUR L'ORIGINE »: D E LINMPRIMERIE, Dans lefquelles on fait voir que la premiere idée en ejt due aux Brabançons. à PAR M DES ROCITES- . Lues à la Séance du 8 Janvier 1777. Expirante vapore Vides unde ignes cluet mortalibus divus. _ Nævius ap. Varr, de L. Lat. L. 6. Fo. 5. CN. a na il # 2: ME na rate ve : NO SARA UE MENT DS : NES, Det A ne ne si ra F E4 Le T4 ! : ! 22 5 à A ) x Te (l RAR À Lea æi ne dos NOUVELLES RECHERCHES sv R L'ORIGINE DE L'IMPRIMERTE ; due aux Brabançons. Dans lefquelles on fait voir que la premiere idée en efl QUE Villes f font difputé autrefois l'honneur d’avoir produit Homere : {pt religions ont revendiqué le-céle- bre Grotius: jufqu'ici om ne compte que quatre Na- tions qui prétendent avoir inventé lÎmprimerie; mais une cinquieme va fe mettre fur les rangs ; aïnfi il n’eft pas impofñfible qué ce nombre un jour re foit poufié jufqu’au fépténaire ; nombre, qui dépuis deux mille‘ans, femble confacré à ces fortes de prétentions. Jufqu'x la publication dés Origines Typographicæ de M: Mamans: les Savans étrangers n’ont point été favo+ rables au féntiment des Hotlandoïs qui regardoïent 12 ville: d'Harlém comme le: berceau dé l’Împrimerié : ces étrangers aVoient en cette difputé tout à la fois le plus grand tort & la plus grande raïfon poffible: Is avoient tort d'attribuer généralèment toute l'in- 16 NOUVEILES RECHERCHES vention à l'Allemagne, puifque les Hollandois leur mon- croient des livres imprimés long temps avant qu'aucun ouvrage ne füt forti des prefles de Strafbourg ou de Mayence. Ces livres ne fe trouvoient guère qu'aux Pays-bas; la plupart étoient écrits dans un dialecte qui n’a cours qu'aux Pays-bas. Les pages fans chiffres, fans réclame , fans fignature , imprimées d’un côté feu- lement , parce que le revers étoit tout barbouillé de l'encre qui pénétroit le papier ; le caractere en bois, mobile en quelques éditions , fixe dans les autres, mais toujours groffier & informe & parfaitement fem- blable à celui de nos manufcrits du même temps; l'encre la plus mauvaife qui:foit poffible ; l'embarras qui regne dans la divifion des mots, dont fouvent la derniere lettre commence une nouvelle ligne , tout enfin y porte le caractere d’une premiere tentative , tout indique un ouvrier peu sûr de fon fait, des matériaux mal choifis , mal préparés ; en un mot, un art naïflant. Àjoutez à tout cela l’aveu formel des chroniqueurs d’AI- lemagne même, qui témoins oculaires des produétions deGuttenberg,de Fuft & de Schoiffer,reconnoiflent ingénü- ment que ces créateurs de l'imprimerie ont pnifé l’idée de cet Art dans les eflais grofliers qu’on avoit faits en Hol. lande, Et quand nous n’aurions pas cet aveu intéref- fant, la vérité du fait eût été également inconteftable. La feule infpeétion de ces premiers monumens fuffit pour convaincre les Savans les plus incrédules , & les yeux. les moins connoïfleurs. Il y a fi loin des Donari au Pfeautier de Fuft, & du Speculum humane falva- tionis à la Bible de Mayence, qu'on ne peut qu'affigner. un intervalle confidérable entre ces différentes produc-. tions. C’eft une vérité que M. Meerman a mife en tout fon jour , qu'il a pouflée jufqu’a l’évidence, & que ceux qui ont lu fon livre, & plus encore CEUX qui LA SUR L'ORIGINE DE L’'IMPRIMERIE $17 ont eu occafion d'examiner les originaux, ne pourront jamais contefter. l Les Savans étrangers fe trompoïent ; ajoutons que l'erreur étoit inévitable. Ils avoient fous les veux les Y premieres éditions de Mayence , dont il exifte plu- fieurs exemplaires en France & en Allemagne. Ils ne connoiïfloient point la littérature Hollandoife ; ils igno- roient la langue , & n’avoient jamais examiné les ti- tres fur lefquels cette nation fe fonde; ils n’en raifon- noiïent que fur des oui-dire, & par conféquent ils en raifonnoient mal ; ils devoient confondre ( comme ils ont fait à tout moment) tantôt les impreflions en bois avec les impreffions en cuivre ; tantôt les lettres fixes avec les lettres mobiles. RETUU Mais s'ils avoient tort en ce point; en revanche ils étoient bien fondés de refufer à Laurent Janfloen l’hon- neur de la premiere invention. En effet les preuves qu'on en donne ne font pas d’un genre que la faine critique puifle avouer. De tant d’Auteurs Hollandois, contemporains de ce Laurent, pas un n’en fait men- tion ; tous ont gardé à fon fujet le filence le plus obf- tiné. Les Ecrivains modernes ne s’appuyent que fur le témoignage du Médecin Junius, qui tenoit ce fait de deux vieillards décrépits ; ceux-ci fe fouvenoient de Pavoir oui dire en leur enfance x un autre vieillard âgé de 80 ans, qui fe rappelloit que dans !fa jeu- nefle il avoit entendu conter cette hiftoire dans la bou- tique de Laurent, où il avoit travaillé , à ce qu’il di- foit , avec ce même (a) Voleur domeftique | qui em- Q (a) Ce voleur étoit un des ouvriers de Faurent Janfloen, Ea nuit de Noël, comme toutle monde étoit à l’églife , il emballa les caracteres & les outils de l'imprimerie, inventée par fon maître, & les emporta ail- leurs. Il y en avoit , fans doute, de quoi remplir pluñeurs chariots. Ce vol eff affez mal imaginé. Cet ouvrier qui vouloit porter l’inven- tion à Mayence , a-t-il pu croire que l'Allemagne ne fournifloit pas af- #18 NOUVELLÉS RECHERCHES porta les outils , invenrés par fon maître, & qui alla jouir des fruits de fon larcin à Mayence , {lon les uns, en Angleterrefelon lesautres; car on ne convient pas.du - Jieu ,.non plus que de la date de cette action. Je me contente ici de gliflér rapidement fur .ces.ob- jets; parce qu'il faudra y-revenir dans la fuite, après avoir indiqué Je fujer de ces nouvelles recherches, . J’avois.examiné,plufieurs fois ces rares impreflions.en bois, forties-des .prefles informes des Pays-bas, avant que. les Allemands euflent inventéles caraéteres de fon- te. J'étais -perfuadé , comme tous mes compatriotes , que ces ;précieux morceaux datoient de l'an .1440 , ou environ , & qu'il n’y avoit que la Hollande-où l'on eût-imprimé vers ce temps-là. Quelle-fut mafur- prife , lorfque l’année pañlée, un ami que j'ai à.-An- vers -me fit voir un aéte authentique du Magiffrat decette ville, daté-du 22 Juillet 1442 , dans lequel iLeft fait-mention. exprefle des Imprimeurs, fubfiflant en corps de métier? J'obtins tun extrait de cet acte finguker , bien .réfolu de poufler plus loin-mes recher- ches. FAR ut) Pluüfieurs :obfiacles ayant retardé ce deflein, mon ami, impatient de faire -part au public de cette dé- couverte , m'adrefl le Er Novembre 1776, un mé- moire fur -eet objet , dont il-convient de rapporter _ici-la fubftance. #» Ayant eu occafion de prendre une notice -exaéte ».de tous les documens qui repofent dans les archives » de.la Confrérie de St. Luc, appellée la chambre des » Peintres, à Anvers, j'y trouvai entr'autres un livre » d’une RE ES CR fez: desbois) paur cenfaire des préffes &. des caraëteres ? Woyey cetre: Hëf° “toire ow plutôt ce roman dans là Batevia de Junius pag, 256. SUR L'ORIGINE DE L'IMPRIMERIF. 519 » d’une ancienne réliure, contenant la plus grande par- » tic des privilèges & des règlemens de cette Confré- » rie, écrits fur parchemin & collationnés pour la plu » part, par le fameux Cornelius Graphæus , Sécretaire » de la Ville. Ce livre eft cotté N°. I, & le premier titre » qu’il renferme , & qui eft auffi le plus ancien en da- » te, cft un règlement du Sénat en faveur des Con- » frères de St. Luc , du 22. Juillet 1442 , touchant » les droits de réception à la maîtrife, ceux des Com- » pagnons, Apprentifs, &c. en voici le comménce- ment. ” | Wy.Jan vander Brugghen, Riddere, Heere tot Blaes- vel , Schoutet © Antwerpen ende Marcgraeve ?s Landts van Rien , Burghermeeftere , Schepenen ende Raede van der Stadt Antwerpen , doen condt eenen yegelycken , hoe dat de goede mannen ende ’t ghefelfChap ghemeynelic (genaemt) * van den Schilders | houte Beelrfnyders ,Cemotne Metfelry-fnyders, Gelafe-makers , Verlichters, PrEN- fe trouve point dans TERS .... en alle die den Gulde van St. Lucas aencle- Original. ven, ons te kennen hebben ghegeven , Gc. » La ifin de ce règlement eft conçue en ces termes, -... fonder fraude oft argliff in oirconde van al dat voorfz. es..... ghegeven int jaer ons Heere als men Screeff, duyfent vier hondert en teen viertick. tweer- twintig daghe in Julio. ... gecollationneert metten origi- naclen brieve , opten rugge gheteeckent A., is bevonden concordeerende van woirde tot woirde, by my , €. Gra- pheus. » On pourra former ici trois fortes de diffculrés ; » la prenriere , fur l'authenticité de cet inftrument ; la » feconde , fur l'exactitude de la date; & la troifieme, » fur la véritable fignification du mot Prenters, Im- » primeurs. ” ». Quant au premier & au fecond point , il fuffira, Tome I. À Aaaa $20 NOUVELLES RÈCHERCHES LA de dire que cette copie.a été authentiquée par le Sé- cretaire Corneille Graphée , qui mourut en 1556. Il déclare qu'il l’a collationnée lui-même , & qu'il l’a trouvée conforme à l'original de mot à mot, (van woirde tot woirde). Ce n’eft point une piece fuppofée ; - on fait l'endroit où elle exifte; on peut examiner fcrupuleufement , elle ne fournit aucune matiere au foupcon. Et il ne peut y avoir de l'erreur dans la date, puifqu’elle s'y trouve exprimée toute en lettres, telle que je Pai écrite ci-deflus. » Pour ce qui regarde la fignification du mot Prenters , Imprimeurs ; 11 n’eft guère poffible de sy méprendre. Dans le cours de tout ce fiecle , & mé- me pendant les quarante premieres années du fiecle fuivant, c’eft le feul qui foit ufité dans le regître de. la Confrérie : le mot de Drukker y paroït pour la premiere fois en 1542, & celui de Bouke-printere en 1558, dans le fameux règlement de Philippe IE; toutes les admiffions précédentes défignent les Im- primeurs par le mot de Printer. Par exemple Mar- tin Gheeraert , Printere , 1485. Kerfliaen ; Printere, 1486. Henneke D. Printere, 1486. Matthys vander Goes, Printere , 1487. & un grand nombre d’autres, jufqu'en 1542, où l’on trouve : Mathias Crum , » Druckere ; & ce dernier mot a prévalu dans la fui- ÿ ÿ & te. Ajoutez à cela le mot gheprent , qui fe trouve au lieu de gedrukr , fur les vitres de tous les livres qui font fortis des prefles d'Anvers pendant le pre- mier fiecle de l’Imprimerie. ” » On demandera, peut-être, pourquoi ces regiftres commencent fi tard , & pourquoi les noms des pre- miers Imprimeurs ne s’y trouvent point ? Je réponds à cela, que les plus anciens regitres ont péri, du moins on ne les a pu découvrir jufqu'à préfent, C'eft =} SUR L'ORIGINE DE L'IMPRIMERIE. $ar p ce qui paroît par celui même qui nous occupe , puif- D qu” il renvoye à un règlement du 15 Janvier 14235 ; » qui ne fe trouve plus. Même dans les regiftres qui » exiftent encore, il regne une négligence impardon- » nable. Souvencles Maîtres admisn’y font défignés que » par leur nom de baptême. l'Admiffion de Matkias » vander Goes y eft placée à lan 1487. On fait cepen- » dant que cet Ârtifle a imprimé à Anvers, plufieurs » années avant cette date, ainfi qu'il paroît par les » titres cités en marge (a). Bon nombre d'Emprimeurs, » dont on connoït les productions , ne s'y trouvent » point du tout. » On peut objeéter encore , que ce mot Prenters , pouvoit avoir, dans ces temps réculés , une fi ienifica- tion plus générale, & comprendre fous une feule dénomination les Imprimeurs d’eftampes , des car- tes à jouer , les Imprimeurs fur toile, ou autres étof- fes, fans qu’on foit obligé de borner ce terme à la feule impreffion des livres: » Je réponds que cette acception feroit inouie. Qu’on » me cite un feul endroit, je ne dis pas dans les re- » giftres de la Confrérie de St. Luc, mais dans tous » les livres & dans tous les manufcrits du quinzieme » ficcle, où ces fortes d’Imprimeurs paroïflent fous le » nom de Printers. Il eft conftant que ce terme ne » défigne que ceux qui impriment des livres. Jamais » on ne prouvera que ce nomaït été donné à d’autres. mm É y & Ov & (a) Vifioen van Tondalus, &c. gheprent t’Antwerpen, bi mi, Ma- tbys Goes. 1472. 49 Spiegel der kerften Geloeve, gheprent t’Antwerpen 1492. bi mi, Ma- thys van der Goes, 40. Leven en Lyden ons Heere Jhefu-Crifti, gheprent t’Antwerpen , bi mi, Mathys Goes. 1484.40. Aaaaï 522 NOUVÈLLES RECHERCHES .» Les Imprimeurs d’eflampes font appellés Heylige- » printers., Figuer-printers ou Beeldekens-printers , ja- » mais Printers abfolument. Les repiftres font la-def- » fus d’une exaétitude qui ne laïifle rien à défirer. Le » mot de Caerte-printers , Imprimeurs de cartes, n’y » paroît point du tout : ils y font nommés conftam- » ment Caerte-fpel-maelers. Les Imprimeurs fur étof- fes , font indiqués par le mot de Cleerftrivere, com- me les peintres fur verre par celui de Gelafe-fcrive- » re; mais, je le repete encore une fois, Printer n’y fignifie & n’y peut fignifier qu'un Imprimeur.” On dira, peut-être, que s’il y avoit eu des Impri- meurs à Anvers en 1442, on les auroit défignés dans laéte fous le nom de Boek-printers pour les diftinguer des Artiftes qui faifoient des empreintes d’un autre genre. Je réponds que cette objection porte à faux , puifqu'il en réfulteroit que ni Martin Gheeraert , ni Kerftiaen , ni Henneke, ni Mathias van der Goes, ni cinquante autres , n’ont pas été des Imprimeurs , parce qu'ils font appellés Printers, & non pas Boeck- printers dans la notice de leur admiffion. Avec une connoiflance médiocre du génie & de l’ufage de la langue Flamande, on fait que Prenter & Boekprenter , ou comme nous difons préfentement Drukker & Boek- ÿ ÿ Ë drukker fignifient la même chofe & fe prennent indif- - féremment l’un pour lautre. Cela eft fi vrai que lorf- qu'il eft queftion d’un autre genre d’Imprimerie , on ne fauroit dire fimplement Drukker, & l’on eft obli- gé d’y faire quelque addition, comme Plaet-drukier, Catoen-drukker , &c. fans quoi l’on ne fe feroit point entendre. En effet, tout doit nous porter à croire que les Printers mentionnés dans l’acte de 1442. étoient les Bocxprinters ou Imprimeurs des livres. Car le même SUR L'ORIGINE DE L'IMPRIMERIE. 523 préambule revient dans un autre aéte, daté du 9 No- vembre i470. On y lit ces paroles: » Alfoe wy in den » Jacre ons Heeren MCCCC. ende tyeenveertigh,tween- » twintich dage in Julio , den goeden mannen ende ge- » felfchape gemeynelik van den Schilders, houten Beeld- » fnyders,: Metfelry-fnyders, Gelafemakeïs ; Verlich- » ters , Printers ende allen den ghenen, die der Gulden » van St. Lucas aenclevende (fyn) met eenen anderen » onfen brieve verleent ende gegeven hebben fekere Or- » donnancien, punten ende vryheden, &c.” Un troi- fieme aëte de 1472 débute exaétement par ces mêmes: paroles, & ce dernier a été renouvellé dans un qua- trieme daté de 1488, toujours avec le même préam- bule, & toujours en nommant les Printers parmi les autres corps qui compofent la Confrérie. Dans ces trois derniers actes & dans plufieurs fuivans on n’a ja- mais douté que ces Printers ne foient les Imprimeurs; pourquoi donc balancer de dire que le même mot, employé dans la même phrafe & dans les mêmes cir-. conftances dans l’aéte de 1442 >. doit avoir felon tou- tes les reoles du bon fens la même acception dans la- uelle il a été pris dans tous les aétes fuivans, » Il eft donc prouvé ,; non pas par des conje&u- res, mais par un inftrument authentique , que l’Im=- » primerie étoit exercée à Anvers en 1442. & que les: » Imprimeurs étoient réunis dès-lors en corps de mé- » tier. Obfervons encore qu’ils n'y paroiflent pas com- » me des gens nouvellement admis; mais comme un » corps exiftant. Pour peu qu'on recule le terme de » l’admiffion , on:ne peut que parvenir à une époque: » bien antérieure à celle qui a été choifie par les di£- » férentes villes qui fe font attribuées l'honneur de » l'invention. ? Voilà un abrégé du mémoire qui m'a été addreflé:. «24 NOUVELLES RECHERCHÉS Je crois que l’Auteur a rencontré jufte quant au fens qu'il donne au mot de Printers. C'eit moi , qui dans un premier moment de furprife , avoit fait naître lob- jetion qu’il réfute fi vigoureufement. Je me rends à fes raifons ; & je me contenterai d’obferver , que quand il feroit vrai, que ce paflage regarde les feuis Impri- meurs d’eftampes, ce que je fuis fort éloigné de croï- re, la preuve qu’on en tire pour l’Imprimerie n’en feroit pas moins inconteftable, puifqu’on eft convain- cu à préfent, que les deux inventions font à peu-près de même date, qu’elles ont uns même origine, qu'’el- les ont paflé par les mêmes efläis , ou plutôt que ce n'eft qu'une feule & la même invention. Ceux qui ont exa- miné avec attention les Specula Humanæ falvationis, les Figuræ Typicæ des deux teftamens , les Figures du cantique des cantiques , l'Hiftoire de St. Jean l’Evan- gélifte, lArs moriendi , les Tentationes lzemonis ; con- viendront , fans doute, de cette vérité; ceux qui n’ont point fait cet examen, pourront s'en convaincre par la leéture du neuvieme chapitre de M. Meerman & dans les ouvrages cités par cet illufire Auteur. M. Schoefflin étoit d’un fentiment contraire ; on verra dans la fuite de ce mémoire que cet homme célebre s'eft trompé. J’efpere qu'on voudra bien écouter les preu- ves que j'en rapporterai. Il feroit trop injuite de pref- crire contre la vérité à la faveur d’un grand nom. La découverte dont je viens de parler, a excité en moi le défir d'en faire de nouvelles. Je crois avoir réuifi en quelque maniere. Le public en jugera. Car je n’ofe me flatter d’avoir prévenu toute objection. Je fens trop que pour établir invinciblement ce que javance , il faudroit avoir trouvé quelque eflai d'Im- primerie , dont le lieu & la date fuflent conftatés, ou quelque autre preuve équivalente, En atrendant qu'un SUR L'ORIGINE DE L'IMPRIMERIE, $2s heureux hazard en fafle découvrir , voici ce que jai rencontré. | | Ilexifte une chronique mañufcrite de Brabant, écri- te, à ce qu'on fuppofe ; par un certain Nicolas de Clerk (Clericus) Sécretaire de la ville d'Anvers. lAu- teur de cette chronique , quel qu'il foit, commenca fon ouvrage en 1318, comme il paroïît par quelques vers du prologue, cités en marge (a). Il y mit la derniere main en r350 (b). Après avoir décrit quel- ques événemens remarquables, arrivés durant le regne de Jean IE. Duc de Brabant, qui mourut en 1312 , il ajoute les paroles fv'vantes. In defer tyt fterf menfchelye Die goede Vedelare Lodewyc Die de befte was die voor dien In de werelt ye was ghefien Van makene ende metter hant Van Vaelbeke in Brabant Alfoe was hy ghenant (c) Hy was d’eerfte die vant Van Stampien die manieren . Diemen noch hoert antieren. T1 s’agit de donner une fidele interprétation de ces vers. Voici comme je les voudrois traduire : —_—— (a) Dit Boeck waert besonnen voorwaer Doemen fcreef Jhefus Criftus jaer Derthien hondert achtien mede Al te Antwarpen in die ftede. (&) Dus geviele defe dinc Alfmen dertienhondert fcreef Ende XLIX. ende dit bleef Toter helft datmen daer naere Screef dertienhondert ende Ljaere Int jaer van gracien bekent Onder\den feften Paus Clement. (c) 5. Bock , cap. 7. in fine. à 526 NOUVEILES RECHERCHES » En ces temps mourut de la mort commune à » tous les hommes, Louis cet excellent faifeur d’inf- » trumens de mufique , le meilleur Artifte qu’on eût » vu jufques-là dans l'Univers, en fait d'ouvrages mé- » chaniques. Il étoit de Vaclbeke en Brabant , & »il en porta le nom. Il fut le premier qui inventa » la maniere d'Imprimer ; 2 et préfentement en » ufage. ” Jai rendu Vedelare, par füfeur d'infirumens de mu: fique. Le mot radical eft Vedel, violon : par confé- quent Ÿedelare doit fignifier celui qui en joue, ou qui - en fait. Je me fuis déterminé pour le dernier, à cau- fe des vers fuivans, où il v’elt point queftion. de ; jouer, mais de faire. Si l'on préfère le premier , je ne m'y oppoferai pas ; rien n'empêche que cet habile hom- me n'ait été Muficien. Stampien vient du verbe Flamand ffampen, inflam- pen, met geweld indrukken; imprimer fortement. Ce mot ayant paf dans la balle latinité , y conferva la fignification que je lui donne. Srampus , dit du Can- ge, Nota, Impreffio, Signum , Charaëter, Exemplar, Gall. Émpreinte, Modele, Angl. Stamp. fral. Stampa. Il rappor- te enfuite ces paroles d’une chartre dé 1546 ;'qui {e trou- ve dans le quinzieme tome de Rymer, Licentiam damus . ad fignandum vice 6; nomine; noftro.….. cum uno ftam- po, vocato a drieftamp. Ad nofirum mandatum fignent , G& impreffionem faciant fine atramento.…. Et poft diétam fignationem & impreffionem cum diéto flampo ; G’ce Je fuis poflefleur d’un manufcrit du quatorzie- me fiecle , contenant des vies des Saints & une chronique aflez curieufe. A la fin du volume fe trouve un petit catalogue de la Bibliorhèque du Mo- _naftere de Wiblingen , dont écriture , fingulièrement abrégée SUR L'ORIGINE DE L'IMPRIMERIE. 527 abrégée; me paroiît dufiecle fuivant. Parmi les n- tres des livres on dit celui-ci, x À doicali ipuo libo fimp* à bappiro no fre En fuppléant les lettres retranchées , on aura les paroles fuivantes : er Item }): Dominicalia in parvo libro ftampato in papyro ,.non fcripto.. . L'amour du vrai m’oblige d’avouer que dansda prin- cipale abréviation ffmps ; lm ne fe diftingue que difficilement ; mais le donte qui en pourroit nai- tre eft entiérement levé par ces mots non fcripto, & plus encore par une note de la même main, au bas de la page , où on lit en abréviation Stampare Do- natos , qui veut dire imprimer des rudimens. J'aurai, bientôt occafion de revenir à cette note. Il fufit de remarquer ici, qu'il confte par ce manufcrit que l’on difoit en mauvais latin du moyen âge ffampare .libros. C'eftde-la que les Italiens ontpris leur ffampa, flampatore, fiampare ; pour dire Imprimerie ; Imprimeur , Imprimer. C'eit de-là enfin , que vient le mot François Eflam- pe; & comme l’origine de ce mot appartient à la langue Flamande; je crois pouvoir en conclure que du temps des premiers eflais d'Imprimerie , les Flamands fe font fervis du mot ffampen ou flampiën, au lieu de prenten ou drukken ; pour dire Imprimer ; & que par :confé- quent.le flampién de la chronique de Clericus fignife la même..chofe que le ffampare de la bafle latinité. Je ne crois point qu'on puifle contefter cette in- terprétation ; voyons ce qu'il en réfulte, & quelle a été l'invention du bon Louis. J'obferverai d’abord qu’il eft plus facile de dire ce qu'elle n’étoit pas, que de décider ce qu'elle étoi. Tome I. Bbbb 328 NOUVELLES RECHERCHÉS. Mais à force d’en féparer tout ce que les: connoiffäne ces que nous avons d’ailleurs ne permettent point d'y attacher , nous parviendrons, peut-être , à découvrir fon. genre éc-fa nature! 1/0) 88 0 hasghert 4 Ce n’eft point l'invention des caraéteres de fonte; invention admirable , que perfonne ne s'avifera de dif- &] putér à Pierre Schoëffer de Gernsheim, dont les premiers eflais font incontettablement le Rationale Durandi en 1459 , le Catholicon Joannis Januenfis en 1460 , lei Decor Puellarum en 1461 ( quoiqu'en dife M. de Bo- ze (a); ) & la Bible de Mayence en 1462. … Fe Ce ne font point les caracteres fculptés en cuivre, inventés par Gutenberg, Mentel & Fuft. Ces carac- teres parurent pour la premiere fois dans les Bibles: imprimées vers lan 1450, fans date , fans nom-de ville (b) ou d'Imprimeur , afin de faciliter la fraude de ces artiftes qui les vendoïent pour des manufcrits, Is fervirent encore à l’impreflion du Pfalmorum Codex, der4s7 , qu'on regarde avec raifon comme le premier livre de PEurope , qui ait porté la date de fa publication: C’eft encore moins l’art de graverune effigie @& des caracteres fur des fceaux qu’on imprimoit enfuite dans: Ja cire ou dans quelque autre matiere. Cette invention-a plus de deux mille ans de date; elle a été connue des Grecs & des Romains. Les Frances en ont conftam- ment fait ufage : témoin l’anneau de Childeric ; té- moin la formule fi commune dans les Chartres Si- gillo noftro infigniri juffimus ...... Sigilli noffri impref= fione. ..,+ Annuli nofiri imprefiione fignavimus . à... (c) témoin enfin ce grand nombre de fceaux qui ' (a) Voyez le Catalogue raifonné de M. Crevenna, vol. 2. p. 61. dela premiere édition. : 25: I] en exifte un exemplaire à la Bibliothèque Mazarine à Paris. FVoyex de Bure; Tom. 1. p. 32. (c) Mab. de re Dipl. L. 3: c. 10:46. 4 L SUR L'ORIGINE DE L'IMPRIMÉRIE. 529 muniflent, les diplomes antérieurs à la naiflance de no- tre Louis. : EE ; : Après avoir écarté de cette invention tout ce qui eft étranger , il ne refte plus que l'Imprimerie en bois, foit pour eftampes, foit pour caraéteres , telle enfin qu'elle paroïît dans les premieres produétions de l’art que les Hollandoïis ont attribues à Laurent d'Harlem. : Je conçois bien que le petit mot de notre Chroni- queur ne fuffit pas pour nous inftruire pertinemment de l'eflence & des particularités de cette invention. Louis a-t-il imprimé d’abord des figures fans lettres , ou des lettres fans figures ? Les lettres étoient-elles fixes ou mobiles ? Voilà des queftions importunes, plus aifées à propofer qu'à réfoudre, & dont , par conféquent, on ne doit parler qu'avec beaucoup de retenue. Tout ce qui paroït certain, c’eft qu’il s’agit d’une premiere tentative en fait d’Imprimerie. Ajou- tons qu'on na aucune preuve fatisfaifante des inven- tions de Laurent, qu’il n’eft pas poflible que tous les livres qu’on lui attribue, foient fortis de fa boutique, & qu’il eft prefque indubitable qu’on a imprimé avant qu'il fût au monde. C’eft ce qu’il faut tâcher de dé- velopper, autant que les bornes d’un mémoire le per- mettront. | - Sans parler des Figuræ typicæ veteris atque antitypicæe novi Teflamenti, ni de l'Hiftoria feu providentia Vir- ginis Marie ex Cantico_Canticorum iconicé exhibita , ni des fix éditions diflérentes de l'Hiftoria S. Joannis Evan- - gelifie , ni de tant d’autres livres de figures femblables, gravées’ en bois avec des fentences en lettres fixes, nous connoïflons quatre éditions du fpeculum humane fal- vationis, deux en Flamand & deux en Latin, dont il y en a trois, qui, de l’aveu de toutle monde, précédent de beaucoup la date des impreffions d'Allemagne, Le Bbbbi s3o NOUVELLES RECHERCHES pétit livre de prieres, dont M. Meerman a fait gra ver la figure , paroït encore plus ancien. Les différer tes éditions du Donatus, fi bien conftatées par ce fa- vant Auteur, né font pas inférieures en date. C’eft un petit rudiment de la langue Latine, dont on fe fervoit dans les écoles pour apprendre aux enfans à décliner & à conjuguer. Jé trouvé qu'il en eft fait mention dans un règlement fait en 1320 par le Duc de Bra- batit pour lés grandes & petites écoles de Bruxclies. Il exifté dans la chronique manufcrite de Biniterus + & Pon ÿ trouve ces expreffions : Quatuor fübreéto- res ad pueros ... de primis elementis ufque ad Donari introitum & non ultra jideliter infiruendos. Et dans un autre endroit : Ordine tamen de introitu Donati fupra- fcripti plenids obfervato. À la vérité on ignore fi le Donatus , dont parle ce Duc , étoit imprimé ou ma- nufcric ; mais un pareil doute feroit mal fondé à l'égard du petit caralogue que j'ai cité plus haut. Voïci la no- te qui fe trouve à la fin : elle forr de la même plu- me qui a écrit le catalogue , Anno D. 1340 viguir q fét fiapa Dnatos. | Si cetre note, eft exa@e, & aucun indice ne porte à ctoire le contraire, il faudra abfolument abandon- ner la caufe de Laurent d'Harlem , caufe qui indé- pendiämment de cette note me paroît, défefpérée. Si la prefle de ce Hollandois avoit enfanté coup. fur coup tant d'éditions différentes, & cela dès les premiers inf- ans, pour ainf dire , de l'invention , n’en doutons point , 1l eût fait un tout autre bruit ; il n’eut point été ignoré de tous. fes contemporains , de rous.fes compatriotes. Quoi! Ce Laurent & fon invention ont été inconnus à Jean Gerbrand , Prieur des Carmes, qui vivoit dans la même villz & dans le mème fie- cle que lui? Jean Veldenaer qui publia en 1480 une _ SÛR L'ORIGINE DE L'IMPRIMERIÉ $3i chronique , où il parle de l’Imprimerie, auroïit oublié fon compatriote ? On n’en trouveroit pas un petit mot dans Régnier Snoy , dans Braffica, dans Guillaume He- da , dans Gilles de Roya, dans Érafme & tant d'au- tres Ecrivains que le quinzieme fiecle vit naître, & qui ont répandu un fi grand éclat fur la littérature Hollandoife. Ce filence obftiné feroit un prodige. F1 eût pu avoir lieu dans les ténebres du quatorzieme fiecle ; mais dans le quinzieme il eft impoñfble. Et quel perfonnage fait-on jouer à ce Laurent Janf- foen ou Fils de Jean ? Tantôt c’eft un illuftre rejetton de la maifon de Brederode qui fortoit en droite ligne des Souverains de la Hollande : tantôt c’elt le fils d’un petit bourgeois, confondu avec la plus vile populace, artifan de troubles, affaffin & fententié comme tel. Eui-même eft à la fois Magiftrat vénérable, & ci- toyen turbulent; Echevin & Tréforier de la ville, auquel lès Peres de la patrie, pour récompenfe de fes fervices , ont déféré la charge importante de Sacriftain d’une églife , d’où il a pris le nom de Cofier, fous lequel il eft généralement connu. Mais on fait concilier ces con. trariétés apparentes ; & telles qu’elles font, on les prouve par des chartres authentiques. Voulez-vous la clef de ces Enigmes ? La voici. On a raflemblé tous les Lau- rent d'Harlem , qui avoient un Jean pour pere, on a fondu enfemble tous ces originaux , & il en eft for- ti le compofé qui nous occupe préfentement, Au refte tout ceci nous importe fort peu ; ce qui efteflentiel, c’eft qu'on n’a pas la moindre preuve que ce Laurent, quel qu'il foit, ait été l’inventeur de l’Imprimerie, Rendons encore hommage à la vérité. Le Patriotif- me des Junius, & des Scriverius, paroït avoir endor- mi leur critique. Mais lilluftre Meerman, pour avoir adopté l'opinion regnante , n'en eft pas moins eftima- 432 NOUVELLES RÉCHERCHES:. ble. Je reconnoïis dans cet Auteur un efprit de ‘recher- ches, une profonde érudition, & ce qui vaut ‘encore mieux , une candeur peu commune, Ïl a prouvé in- vinciblement l'ufage de lImprimerie aux Pays-bas ; avant qu'on y fongeñt en Allemagne. Il à même ap-: percu la foiblefle des argumens, fur lefquels la caufe de Laurent Cofter fe fonde; & il infinue aflez claire- ment qu'il ne la favorife que faute de connoître un prétendant plus autorifé, Mais, dira-t-on, cç’eft trop reculer cette invention que de la renvoyer au quatorzieme fiecle. Cette opi- nion ,inouie jufqu’à préfent, peut-elle fouffrir l'examen ? Eft-elle conforme à l’état des chofes & peut-elle qua-: drer avec les circonftances ? Je crois qu'oui. Louis de Vaelbeke aura fait les premiers eflais en bois. Peut-être quelques images avec le nom du faint , ou une pe- tite fentence gravée dans la planche même. L’érat où: fe trouvoit alors la littérature ne permet guère de croire qu’il ait prévu toutes les fuites de fon admirable inven- tion. Bientot lui-même ou quelqu’autre après lui, {. fera avifé d’ajouter quelques lettres mobiles ; car: dans: ce qui nous refte des premieres impreflions en bois, il: n’eft pas rare d’en rencontrer, & il y a tel exemplai-! re, & des plus anciens, où l’on trouve réunies les: lettres fixes & les lettres mobiles : ces dernieres: étant faciles à diftinguer , foit par quelque lettre -ren- verfée , foïit par d’autres moyens, aflez connus des: curieux en cette matiere. Enfuite on aura fait ufage: de ces caracteres pour imprimer les Donati, impref. fions groffieres & defagréables à la vue ( comme il paroït aflez par ceux qui font parvenus jufqu’à nous) maïs aflez bons pour être misentre les mains des écoliers, La modicité du prix les aura mis en vogue , les ma- aufcrits étant incomparablement plus chers, Car il ne SUR L'ORICINE DE L'IMPRIMÉERIE. _533 faut pas s’imaginer qu’on ait ufé dès-lors de la peute fourberie de vendre ces imprimés pour des manufcrits. Ils étoient bien trop mal exécutés , & peu de per- fonnes s'y feroïent laiflées attrapper. Cette efpece de fraude n’a été connue que des premiers Imprimeurs d'Allemagne. Les Guttenberg , les Fuft s'en fervirenc avantageufement , lorfqu’après avoir inventé les carac- teres en cuivre , il parvinrent à contrefaire parfaite- ment les manufcrits. Ils vendirent comme tels un grand: nombre de Bibles fans date , à un prix exorbitant ; jufqu'a ce que la mine ayant été découverte , par le’ trop-grand nombre d’exemplaires , ils fuffent obligés de renoncer à ce manege. Mais ne perdons point de vue nos premiers Inventeurs. - Les livres de dévotion fuivirent bientôt les Donati: & ce fut à ces deux genres d'ouvrages que fe borne. rent les vues de nos Ârtiftes. Jufqu'a ce jour on n’a découvert aucune Bible, aucune Hiftoire , aucun traité : de Théologie ou de Jurifprudence, qu'on puiffe re- garder comme une production de ces premieres Im- primeries , preuve certaine du peu de fuccès de cet art naiflant , & du peu de cas qu’en faifoient les gens de lettres. Ceux-ci ne fe trouvoient que parmi les Moi- nes, & vraiment les Moines n’avoient garde de fayo= rifer une invention , qui devoit retrancher pour eux une branche de commerce très-lucrative. Ils -occu- poïent autant de mains qu’ils pouvoient à copier des manufcrits , qu'ils vendoient enfuite à tous ceux qui avoient le moyen de payer ces chers morceaux. C’eft ce qu'on trouve entre autres dans le chronicon Win- defemenfe p. 6. Pretium laborum manuum fuarum de fingularium .fcripturis feptimanatim exaëlum in burfam communem reponentes. Et p. 158. Prior de Windefem. dedit eis bonum miffale | quod pofimodum pro 20 anti- 534 NOUVELLES RECHERCHÉS qüis fcudatis vendiderunt : pag. 409. Fratribus fuis pre pretio fcribere conceffir. Pour peu que la pratique fût bonne, le revenu devoit être confidérable. Le Mifl vendu 20 vieux écus en eft une preuve. Cetre même chronique en fournit une autre à la p. 126 où il eft dit : Totum corpus Bibliæ in tribus voluminibus optimè confcriptum , Centum coronarum in valore. Après. cela faut-il s'étonner que nos premiers Im- primeurs ayent fait fi peu de bruit ? Ils ne travailloiens: que pour le peuple & pour les enfans dans les peti- tes écoles; cependant on a lieu de croire qu'ils fe ré- pandirent petit à petit vers le commencement du quin- zieme fiecle, & qu'Anvers:ne fut point la feule vil- le , où ils f trouvaflent établis. C’eft ce qui eft indi- qué aflez claitement dans la chronique de Cologne, ouvrage du même fiecle. L’Auteur s'appuyant fur le témoignage d’Ulric Zell qui imprimoit à Cologne en 1467, après avoir fixé l'invention de Gutenberg , c'eft-à-dire , desccaracteresen cuivre à l'an 1440 , ajou- te ‘en termes exprès que la premiere idée de cet art avoit été prife dans les Donati qu'on imprimoit en Hollande dans des temps antérieurs (a). Aüinfi en reculant, comme nous avons fait, l’épo- que ‘de l'invention , loin de créer des difficultés nou- velles, on écarte les idées difparates & les :contrarié- tés qui enveloppoient cette matiere. On voit la fource des (a) Item wie waïl die kunft is vonden tz0 mentz, als vurfz.up-die: wyfe , als dan nu gemeynlich :gebruicht wird, fo is doch.die eyrfte vurbyldung vonden in Hollant uyfi den donaten , die daefelfft vur der tzÿt gedruckt fyn. Ind van ‘indluyfl den is genommen dat besynne der vurfz.Konft.Ind is vill.meyfterlicher ind fubtilichervonden dan die felve ma- nier wäs, und yelanger, ye mere kunitlicher wurden. Cronca der ill Stadt van Cuellen\fol. 311: Voyez auffile témoignage :d'Accurfius :& de Reg po Haccohen, parmi les Documente de M, Meerman NO. 0%. 0, } TA 7 SUR I'ORIGINE DE L'IMPRIMERIE 525 des incerticudes qui € rencontrent dans les Auteurs du quinzieme fiecle qui ont parlé de l’Imprimerie Allemande. On conçoit le filence de Jean Gerbrand, de Jean Veldenaer & des autres Hollandoiïs , contem- porains de Laurent Cofter. On n’eft plus {urpris de ce paflage remarquable du même Veldenaer fur lan 1450. Généralement tous les Artifies devinrent en peu de temps plus indufirieux qu'ils n’étoient auparavant ; & les Fmprimeurs fe multiplierent beaucoup en tout pays (a). Paroles qui indiquent un Ârt perfectionné , un ufage plus général ; mais qui prouvent auffi, que l’Auteur ne croyÿoit point que l'invention fe fût faite de {on temps, & pour ainfi dire , fous fes yeux , puifqu’en ce cas il en eût parlé indubitablement. J'ofe prefque me perfuader que fi le favant M. Schoëfflin étoit encore au nombre des vivans, il épou- feroit le fentiment que nous établiflons ; lui qui faifoit remonter au quatorzieme fiecle l’impreflion des figu- res, avéc des caracteres gravés dans la planche, tel- les qu'il les fuppofoit dans les cartes à jouer. - Il eff vrai que cet Auteur fe fonde ici fur un faux principe, que l’amour de la vérité ne me permet point d’embraffer (b). On faifoir des cartes à jouer au qua- torzieme fiecle ; mais il n'eft point prouvé que ces car- tes fuflent imprimées. C’eft ce qu'on voit dans le ii vre même que M. Schoëfilin a cité.(c). On y trouve un article des comptes de Charles Poupart, Tréforier de France fous Charles VI, où sl elt dit : Donne à Jaquemin Gringonneur ; Peintre, pour trois jeux de car- D ” (ze) Die Conftenaers ghemeenelick in allen conften fyn in corten tyden feer fchielike veel fubtylre gheworden dan fi HÉen te wefen. Ende De Po Ho worden feer vermenicht in allen Lunden. Fo/. 1o1. fè. 1480, ë : UE < (5) Vindiciæ Typ. p. 6. (<) Bullet, Recherches hiff, fur les Cartes à jouer p. 27. Tome I, | Ccce 536 NOUVEILÉS RECHERCHES tes à or & à diverfes couleurs , de plufieurs devifes. .:: 56 Jols Parifis. C'eft une cbiervarion que M. Me. mana faite avant moi (a), & que feront , fans doute tous ceux qui ont lu le livre de M. Bullet, Mais ce que, peut-être , M. Schoëfilin n’auroit poine accordé à nos Artiftes Hanande , c'eft l'invention des caracteres mobiles | qu'il attribue à Gutenberg , & qui feuls, felon lui , font toute la beauté & tout le mérite de l’Imprimerie. C’eft en quoi il s’eft trompé aflurément. Si M. Schoëéflin , au lieu de copier des erreurs cent fois répétées , avoit examiné par iui-même les Donati , les premieres éditions du Speculum Fla- mand & les autres titres fur lefquels les Hollandois fe fondent, il y auroit vu des lettres renverlées , des lignes en partie inégales , des lettres échappées de leur place, la marque des quarrés qui féparoient les mots, & tous les autres indices d’un caraétere mobile. Mais c'eft ce que M. Schoëfflin n’a point fait. Il n’a pas même confulté les premiers Auteurs Hollandois qui ont défendu la caufe d'Harlem. Il ignore jufqu’à leurs prétentions. Junioribus autem Baravis. dit-il , affentire non poffumus , qui Typographiæ verfatilis inventioneme Hirlemo attribuunt , quod nec Scriverius, nec. . Box- hornius , nec Bertius , nec Rutpertius facere auf funr qui principes tamen in oinni hoc argumento extitére [crip- tores (b). Un Auteur qui tient ce langage, affurément n’a point lu Junius, ni Scriverius, ni Boxhornius , qui foutiennent le contraire dans les termes les plus for- mels , qu'il foit poffiale d'imaginer Qu on ceffe donc de nous oppofer l'autorité de M. Schoëfflin. Tout grand homme qu'il étroit , il a pu @ ° (a) Orig. Typ. p. 222. & 22% () Vind. Typ. p. 86 \ ddl, ME nr a nc nc ri Er, er tes one“ ci je SE in GR D A à SUR L'ORIGINE DE L'IMPRIMERIE. 5ÿ37 tromper , & il s'eft trompé en effet. Il paroît qu'il pa point poflédé cette matiere, comme il paflédoit le droit public & lhiftoire d'Allemagne Au refte les défauts que je viens de relever, n’empêchent pas qu’il n’y ait dans ce même ouvrage des remarques excellen- tes & des découvertes bien curieufes. * T1 eft temps de finir cette Difértation. Pour voir ce qu'on.en peut conclure, fervons-nous de la mé- thode des Mathématiciens, en établiflant quelques pro- pofitions rétrogrades , qui nous menent du connu à l’inconnu. PREMIERE PROPOSITION. Les caraëteres de fonte , qui conftituent l'Impri- merie moderne ont été inventés à Mayence , par Pier- re Schoëffer de Gernsheim; & le premier livre imprimé avec ces caracteres eft le Rationale Durandi en 1459. II. PROPOSITION. Les çaraéteres fculptés en cuivre ou autres métaux, font de linvention -de Guttenberg , de Genffleis , de Mentel & de Fuft, qui s’en fervirent pour l’impref- fion de plufeurs Bibles , fans date, & quelques au- tres livres , comme Alexandri Galli Doëétrinale , Petri Hifpani traétatus logic. On croit que ces livres ont paru depuis 1440 , jufqu'en 1457 , que Fuft & Schoëfler ajouterent pour la premiere fois la date & l'annonce de l’Imprimerie à leur Pfalmorum codex. On regarde comme faufles & fuppofées toutes les dates antérieures qu’on trouve en certains livres, par exemple ceux ci: de Conceprione Immaculata B. Virg. 1314. (a). Præcla- (a) Vid, Bayle. in v. Aureolus N. E. Cccci «28 NOUVELLES RECHERCHES ri. Opus Valefci de rar 1401 Le Œuvres de te re d'Ailli ra1o (Bb), &c III. PROPOSITION. “En 1442, les Imprimeurs formoient à Anvers. un corps de métier , & faifoient partie de la Confrérie de St. Luc, fans qu’on fache la date de leur admiffion. IV. PROPOSITION. Long-temps avant cette époque; il y avoit des Im- primeurs aux Pays-bas, qui imprimoïent en bois des livres de figures, des rudimens pour les petites écoles, & des livres de dévotion, Les plus anciens exemplai- res qui en exiftent , font foi que ces Imprimeurs fe fervoient de lettres mobiles, aufli-bien que de lettres fixes. Ces livres font fans date ; mais la maniere dont ils font exécutés, démontre aflez clairement qu'ils font antérieurs de beaucoup à toutes les impreffions d’AJ- lemagne. Le caraétere de tous en général , & la lan- gue dans laquelle quelques-uns ont été imprimés, prou- vent qu'il n’y a que les Pays-bas qui puifiënt les ré- vendiquer. Toutes les circonftances favorifent l'opi mion qui les renvoye au quatorzieme fiecle ; & un Écrivain du quinzieme l’aflure poftivement. V. PROPOSITION. Les premieres tentatives paroiffent avoir été faites en Brabant par Louis de Vaelbeke ; mais on ignore à quel point cet t Artifle a poufé fon invention. (a) Antv. Chr. Nafe. t. 2, p.602. 1. Edit. (5) Bayie. in v. Ailli.N. %, SUR L'ORIGINE DÉ L'IMPRIMERIE. 534 Voilà les propofitions qui réfultent de tout ce qui a été dit en ce Mémoire. Elles y font démontrées, au- tant que l'éloignement des temps , lobfcurité de Ja matiere & la difetre des pieces originales , l’ont pu permettre. Pour parvenir jufqu’à l’évidence, pour con- vaincre les plus incrédules , il me faudroit des mor- ceaux que je n'ai pu découvrir jufqu’a préfent. Si quel- que Savant savife de critiquer mon ouvrage, je le prie de faire attention à cet aveu, Je ne défefpere nul- lement de trouver un jour quelque édition plus an- cienne que celles que nous connoiïflons, quelque indi- ce de temps ou de lieu. Les plus rares morceaux en ce genre , les Donati des Hollandois couvroiïent les dos des vieux livres; & quelle quantité de ces vieil- les réliures, n’eft-il pas dans les Bibliothèques des Mo- nafteres , qu’on n’a jamais daigné examiner ? Je me propofe de faire de nouvelles recherches dans ces lieux, & j'invite tous les gens de Lettres à en faire autant, 2 v'e li * 4 4 a rom NSP a En + in v x = F EXTRAIT DES CBSER VATIONS MÉTÉOROLOGIQUES , Faites à Bruxelles & dans quelques autres Villes du Pays-Bas. . \ Era OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES Faites à Bruxelles & en quelques autres Villes des Pays-Bas. Dans ce premier volume, on donnera feulement par extrait les Obfervations Météorologiques , faites en différentes Villes par les Membres de l'Académie, ou par d’autres Savans, qui en ont fait le fujet de plu- fieurs Mémoires qui ont été lus dans les Séances Académiques. Dans les Volumes fuivans , on compte de publier tout le détail de ce genre d’Obfervations, pour la plus grande utilité du Public. A A1 000) SM D ddd Re TRS AT Extrai des Obfervations Météorologiques , faites | a Bruxelles, depuis 1763 jufqu’a Que, ; a M. l'Abbé CHEVALIER. 1763. Les degrés de froid & de la chaleur ont été marqués fur un bon Thermomètre Anglois de Fahrenheit au vif argent , expofé au nord &:à l'ombre en plein aïr, & dans le quartier haut de la Ville, Le plus grand devré de froid, le 4 Janvier; le Mer- cure a defcendu à 7 degrés, le vent étant au Nord- EfT , le ciel clair, & le Baromètre à 28 p. 2 lignes. La nine grande chaleur , le 19 Août; le Mercure a monté à 81 degrés, par un vent de Sud. Le Baro- mètre à 27 p. 7. lig. ; La plus grande élévation du Mercure du Baromè- tre de 28 p. $ lig. le vent étant au Nord-Eft, & la moindre élévation de 27 P- 4 lig. le 2 Mars, par un vent de Sud-Oueft. 176 Le plus grand degré de froid , le 25 Décembre ; le Mercure du Thermomètre a delcendu re degrés, le vent au Nord-Eft, & le Baromètre à 28 p. 3 lig. La plus grande chaleur , le 13 Juillet de 79 degrés, le vent étant au Sud & le ciel couvert. Le Baromè- tre à 27 p. 10 lig, La plus grande élévation du Mercure de 28 p. 6 lig. le 25 Mai , le vent au nord , & la plus He “de 27 p. 4 lig. le 7 Novembre. RE DRE PPS RE RS eme The Um DESOBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES, &c.$45 1765. Le plus grand degré de froid, le 19 Février; le Mercure du Thermomètre a defcendu à 14 degrés, le vent étant au Nord-Nord-Eft , & le Baromètre à 28 p. 3 lig. La plus grande chaleur de 8ÿ degrés, le 26 Août par un vent d'Eft. Le Baromètre à 28 p. lig. ‘ . plus grande élévation du Mercure , de 28 p. $ lig. le 6 Juin ; le vent étant au Nord. La moindre élévatior du Mercure, de 27 p. 3 lig. le ; Oûtobre, par un vent fort du Sud-Oueft. : 1766. Le 11 Janvier, jour le plus froid, le Thermomètre a marqué 9 degrés, le vent étant au Nord-Nord-Eft, & le Baromètre a 28 p. La plus grande chaleur, le 20 Juillet. Le Thermomètre à 79 degrès, le vent étant au Sud , & le Baromètre à 27 p. 9 lig. La plus grande élévation du Mercure, de 28p. s I. le 18 Otobre, par un vent de Nord-Eft. La moin- dre élévation du Mercure, de 27 p. 4 lig. le 30 Mai, Le vent étant au Nord-Oueft, 1767. Le plus grand degré de froid , le 7 Janvier ; le Ther- momètre eft defcendu au zéro , le vent étant Nord-Eft, & le Baromètre à 28 p. 2 lig. Le plus grand dévré de chaleur, 12 Août. Le Thermomètre a monté à 83 degrés, le vent étant Sud-Oueit, & le Baromètre à 27 p. 10 lig. M RRRTEe 1 546 EUX DR A4 La plus grande élévation du Mercure, le 18 Avril de 28 p. 6 lig. le vent étant au Nord, La moindre élévation de 27 p. 3, lig. le 12 Février, le vent étant au Sud-Oueit, | 1768, Le plus grand froid , le ÿ Janvier ; le Mercure a defcendu dans le Thermomètre de Fahrenheit 3 degrés au-deffous du zéro , le vent étant au Nord-Eft, & le Baromètre à 28 p.6 lig. Le 3, le 4 & le &du mois, le froid a été à 1 degré. La plus grande chaleur , de 82 degrés, le 28 Juillet, le vent étant Sud-Oueft, & le Baromètre à 27 p. 8 lig. La plus grande hauteur du Baromètre , le ÿ Jan- vier, de 28 p. 6 lig. & la plus petite, lé 20 Novem- Dre, de 27 p. 3: lie. 1769. Le plus grand froid, le 21 Janvier ; le Thermomè- tre à 20 degrés, le vent étant au Nord-Eit, & le Ba- romètre à 28 p. La plus grande chaleur le 7 Août, le Thermomètre à 79 degrés, le vent étant au Sud- Oueft, & le Baromètre à 27 p. 9 lig. io La plus grande élévation du Baromètre , 28 No-. vembre, de 28 p. & 8 lig. le vent étant à l’'Éf, & la plus petite élévation |, de 27 p. 2 lig. le 23 de Novembre, le vent étant au Sud-Eft, 1770: Le plus grand froid, le 7 Janvier, le Thermomè- tre marquant 17 degrés, le vent étant au Nord-Ef, & le Baromètre à 28 p. 2 lig. La plus grande cha- leur, 9 Août, le Thermomètre a monté à 84 degrés, le vent étant Sud-Eft. DES OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES, &e.s 47 La plus grande élévation du Baromètre , de 28 p. 8 lig. le 29 Janvier , & la plus petite de 27 pi z lig, le 23 Otobre. | D77u . Le plus grand froïd, le 13 Janvier , de 9 degrés, le vent étant Nord-Eft, & le Baromètre à 28 p. 4 lig. La plus grande chaleur , le 17 Juillet, de 87 decrés, le vent étant Nord-Eft, & le Baromètre à 27 p. 11 lig. La plus grande élévation du Baromètre, de 28 p. 7 lig. le 18 Février, & la moindre élévation, de 27 p: 3 lig. le 16 Décembre. x 72 Le plus grand degré de froid , le 31 Janvier ; Ie Thermomètre marquant 7 degrés & demi, le vent étant Nord-Nord-Eft, & la plus grande chaleur, de 87 degrés, le 26 Juin, le vent étant Sud-Eft. La plus grande élévation du Mercure dans le Baro- mètre, de 28 p. 8 lig. le 24 Décembre, le vent étant Nord-Nord-Eft , & la plus petite élévation , de 27 p. 2 lig. le 16 Janvier, le vent étant à l’Eft. 1773° Le plus grand froid , de r$ degrés, le 6 de Fé- vrier , le vent étant Eft-Nord-Eft. La plus grande cha- leur , de 89 degrés, le 14 Août, le vent étant au Sud-Oueft. La plus grande élévation du Baromètre, de 28 p. 6 lig. le 4 Février. Le 12 Novembre, la moindre élévation , de 27 p. 2 lignes. 548 EXTRAIT k Extrair des Obfervations Méréorologiques , faites a Nieuport, depuis le mois de Mai 1775, Jufqu'au mois de Mars ve >. par JD: MANN. MAI. LA plus grande chaleur, de 28 degrés & demi au Thermomètre de Réaumur , le 1 Mai, le vent au Sud , à 2 heures après-midi. Les fix jours fuivans la chaleur a été auffi très-forte de 27 & de 26 degrés. La plus grande élévation du Mercure dans le Ba- romètre a été de 28 pouces ; lignes ler, le 28, & le 29 du mois : & la moindre élévation de 27 p. 10 lig. le 25. À J U I N. d La plus grande chaleur a été de 28 degrés & un quart le 9 du mois, le vent au Nord-Oueft. La plus grande hauteur du Baromètre, le 1, de 28 p. 3 lig. & trois quarts, & la moindre de 27 pe 9 lig. le 27 du mois. JUILLET. La rs grande chaleur, le 28 du mois , a été dE 28 degrés trois quarts , le vent étant au Sud, La plus grande élévation du Mercure a une ligne & trois quarts, le 18 & 19 du mois , & la moin- dre élévation de 27 p.8 lig. le 6 du mois, Il y a eu 6 Orages de Tonnerre pendant ce mois, mais aucun n'a été confidérable, ni par la violence , ni par la durée, ni par la proximité. 2 DESOBSERV ATIONSMETÉOROLOGIQUES,6c. 549 A OUT. La plus grande chaleur a été de 27 degrés & demi, les jours 18 & 19. La plus grande élévation du Mer- cure; de 28 p. 1 lig, & un quart, les jours 14, 17 &c 233 & la moindre élévation de 27 p. 9 lig. un tiers, le jour 22. | Il n’y a eu que trois petits Orages pendant ce mois, les jours 1, 4 & 16. SEPTEMBRE. La plus grande chaleur de 27 degrés & demi, le > du mois le vent étant au Sud. La plus grande hauteur du Baromètre de 28 p. 1 lig. & trois quarts le 4 du mois , & la moindre hauteur de 27 p. 8 lig. le 8 du mois. La nuit du 4 au $ commença à 10 heures & de- mie un des plus terribles Orages de Tonnerre & Eclairs, que j'aie vu fur cette côte, depuis 16 ans. La Fou- dre tomba au milieu de la ville de Nieuport & abat- tit la muraille d’un puits; elle tomba auffi à un quart de lieue de Nieuport & en diflérens endroits du Franc de Bruges & des Chätellenies de Furnes & d’Ipres. OCTOBRE. La plus grande chaleur a été de 23 degrés & un quart , le 2 du mois; la plus grande élévation du Mer- cure du Baromètre , de 28 p. 4 lig. 3 quarts le 26 du mois, & la moindre élévation de 27 p. & 5 lig. le 20, . La nuit du 19 au 20 Orage. Le vent étoit exceffi- vement fort , accompagné de Pluie, de Tonnerre & #50 EURNT: RLANTIIT d’Eclairs , à r heure du matin , du 20, le Baromètre étoit à 27 p. 5 lig. trois quarts, & le Thermomètre à 18, les coups de tonnerre & les éclairs furent très- forts entre deux & trois heures du matin, & dans ce temps le mât d’un Navire à Oftende fut embrafé: &. fendu du haut en bas , par la foudre. Cet orage, & les grands vents qui le fuivirent pen- dant cinq ou fix jours , firent beaucoup de dégat, & endommagerent la plupart des maïfons à la Campagne. ; NOVEMBRE. La plus grande chaleur de 13 & trois quarts , le 8 à deux heures après-midi. La plus grande hauteur du Baromètre de 28 p. $ & un quart, le 23 du mois, & la plus petite hauteur de 27 p. 4 lig. le 13. Depuis le 14 jufqu'’au r7 , les Tempêtes de vents ne ceflerent pas. Celle du 14 & 15 fut très-forte, & ac compagnée de grèle & pluie. Elle fut précédée par une defcente confidérable du Baromètre jufqu’à 27 p. 4 1. qui dura jufqu’au matin du r4. Alors le Mercure com- mença à remonter doucement, même pendant le fort de lOrage, ce qui mérite d'être noté. Le 18 à r heure après minuit, le Baromètre def- cendit de nouveau jufqu’au 27 p. 5 lig. & demi, & le matin & jour du 18, la tempête fe renouvella avec force , & ne cefla que le 19 , le temps devint alors tout-à-fait calme. DÉCEMBRE. La plus grande chaleur de x deg. & un quart, le 3 & le 4 du mois. La plus grande hauteur du Baromè- tre DESOBSERYATIONS MÉTÉOROLOGIQUES, ÿ$1 tre le 28 p. 9 lig. le 17. & la plus petite hauteur de 27 p. : lig. & demie. Jufqu'au vingt du mois le Baromètre a été conftam- ment, & extraordinairement haut, principalement fi on confidere l'extrême humidité du temps. Le vingt- quatre il defcendit à l’extrème oppolé , favoir à 27 p. r & demie , & le jour fuivant il fit un violent Ora- ge & Tempête. | JANVIER :776. Le, plus grand froid de 14 deux troifieme degrés äu-deffous du zéro le vingt-huit le matin. Le vingt-fept le Thermomètre a marqué 13 degrés au-deflous du Zéro le matin & le foir ; & dans la nuit du 27 au 28, je froid augmenta , le vent étant à l'Ef-Nord-Eft, très-fort & piquant , & le Baromètre à vingt-huit p. 4 1. & 1 quart: la plus grande hauteur du Baromètre a été le 31 du mois, de 28 p. 6 L. la plus petite de vingt-fept p. 7 lig. le 13. at : Le temps fut trèsvariable la derniere femaine de Décembre & la premiere de Janvier, changeant à tout moment de la pluie au beau temps, de la gelée au dé- gel, &c. mais le 8 , le vent fe fixa de VER au Nord, & la grande gelée & neige de cet hyver commenca. Depuis le 11 jufqu'au 16 , la neige ne difcontinua guère de tomber, pas en gros flocons, mais en pe- tits grains très-fins & légers, le vent qui étoit au mé- me temps très-fort, emportoit la neige & l’ammon- celoit vers les murailles, & dans les rues jufqu'à 6 & - 7 pieds de profondeur ; en d’autres endroits la ter- re n'étoit prefque pas couverte, & on peut juger, que fi la neige avoit refté également répandue par-tout , elle n’auroït pas furpañlé un pied ou un pied & demi de hauteur. Tome I. Ecce 52 EAU Re ANT FÉVRIER. . Le jour le plus froid a été le premier du mois. Le Thermomètre a marqué à 7 heures du matin 13 degrés un tiers au-deflous du zéro; mais le 2, le dégel a com- mencé. La plus grande hauteur du Baromètre de vingt- huit p. 4 lig. le premier du mois, La plus petite de vingt- fept , le 27 du mois au foir, par un temps orageux. À 6 heures après-midi les Eclairs commencerent. La direction de l’orage étoit du Nord-Oueft au Sud-Eft , il pafla exatement fur la ville de Nieuport. Le Tonnerre fut très-violent pendant une demi- heure. M À R SC Le jour le plus froid a été le 3 du mois le matin à 9 heures. Le Thermomètre marquoit 3 trois quarts au- deflus du zéro, & à 2 heures après-midi 4 & un quart le vent étant au Nord-Oueft, Le vingt-trois a été le plus chaud, le Thermomètre à deux heures après-mi- di a marqué 13 degrés & demi, & en général la cha- leur a été un peu extraordinaire depuis le vingt-un jufqu’au vingt-quatre. La plus grande hauteur du Baromètre , le 31 de vinot-huit p. 4 lig. La plus petite hauteur de vingt- fept p. 4 lig. le 8 du mois. { DES OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES, 6c.ss3 Extrait des Obfervations Météorologiques fai- tes à Louvain au mois de Janvier 1776 , par M. DE MaAnrcy , avec un Thermomètre de Reaumur & un Baromètre ordinaire. Tour l’hyver avoit été affez doux jufqu’au 12 de Jan- vier, auquel jour la neig& a commencé a tomber en grande quantité, & la gelée à être très-forte. Le 16 le Thermomètre a marqué ÿ degrés au-def- fous duzéro. Le Baromètre étant à vingt-fept p. ro lig. Le 19 le Thermomètre à 10 degrés & demi. Le vinot a 13. Le vingt-quatre à 4 degrés & demi. Le vingt-cinq à douze & demi, Le vingt-fept à 13. Le vingt-huit à 14. - Le trente & un à 15 degrés. Le Baromètre à vingt-huit p. 3 lig. & demie. Le premier Février , le Thermomètre a marqué 16, & ce jour a été le plus froid à Louvain, les jours d’après le froid a diminué & le dégel à commencé. Eceeij Lu # ÉTAT Monfieur le Baron de Poederlé le jeune, a préfenté àl Académie diflérens Mémoires contenant grand nombre d’Obfervations Mé- téorologiques faites par lui à Bruxelles , & au château de Saintes en Hainaut , à quatre lieues de Bruxelles ; defquelles on Que VExtrait fuivant :. Extrait des Oblérvarions faites au Château de Saintes : en Hainaut, Annéeti770. Thermornètre de Baromètre. Tempéreture. Reaumur. Plus gr: | Moindre je degréde | degré de Plus, gran. Métndre Chuleur | chajeur. | Elévation. | Élévation. Mois | Vents dominens | Janv.|O. &O.S.O. | 5 —3l— 61118 —8: 3127 — 4% Humide & froid. Févr. |O. & O.S. O. be 28 > 7 À |27 — 2 à Himidé 8 affes FL01. Mars N.E.&N.N.E. 12 — :|— 2 Re — 3 i 27 — 4 | Humide & froid. Avril O.& N. N.E. l15 — il— 11128 — 5 127 — 2 Humide & rempéré. Mai |N.Eñf. 23 — 3 1128 — 2 |27 — 9 |Tempéré &fec. Juin |O. &S. oO. is DRM le PASSAT PE NAT Humide & aflez froid. Juill. |O. &O.S.O. [22 — 3l— 10 1128 — s. |27 —10 |Humide& aflez chaud Août|0.&O.S.O. 116 — £l— 7 3,28 — 4 |27 —11 |Chaud & affezhumide Sept. !S.S.O.&O.S.0. 25 — 1|— 71128 — 3 |27 — 6 |Humide&aflez chaud Oct. |S.5.0.&0.5.0.|18 — 2 l58— 3 la7— :|Froid & humide. Nov. |S. O. & O.S. O.|13 |— 4 1128 — 1 [25 — 1 |Froid &humide. Déc. |O.&O.S.0. | 9 —5— o5i28 — 3 [27 — 6 |Hunide & froid. Il réfulte de cette Table que les Vents d'Ouelt & d'Oueft-Sud- Ouelt ont été les dominans. 2. Que la plus grande Chaleur a été de vingt-fi x &c trois quarts degrés le 9 Août, & la plus petite Chaleur a été de 6 degrés un quart au-deflous de zéro le 7 Janvier. 3. Que la plus grande élévation du Mercure a été de 23 p. 8 lig. & demie le vingt-neuf Janvier , & la plus petite élévation de vingt-fept p. 11. & 3 quarts , le cd Octobre.Le Tonnerre a grondé :9 fois cette année , & il y a eu trois grandes Aurores boréales. | DES OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES, &e. $55 Extrait des Obfervations Météorologiques faites à Bruxelles pendant les $ premiers mois de l'Année 1771. Mois LÉ Ventsdominans|\ Thermornèrre, Beromitre. | Tempérasure. Plus gr. | Moindre| Plus gran.| Moindre | | 3 degré de| degré de| Elévation.| Elévation. | chaleur. ‘ chaleur. . Janv. |N.E. & O.S.O.| 10 — — 91/28 — 3 | 27 — 4 |Froid& humide. Févr: |E & E.N.E 7— 5] —75|28 — 7 | 27 — 8 |Froid & humide, Mars FES NE. Al ms 5128 — 4 | 27 — 6 Froid &un peu fec. ‘Avri IN. N.E. 12 — 5] — o HI 28 — ÿ 1 27 — 7 | Froid &fec. Mai. [O.S.0.&5.0.113 — #1 — 8 | 28 — 4 | 27 — 10 | Afez chaud. ANNÉE 77. Les Obfeseiions faites en partie à Bruxelles @ en partie au Château de Saintes en Haiuaur. Mois | Venis dominans | Thermomètre. Baromètre. , Température. e Plus gr. Moindre | Plus gran.| Moindre | degré de\degré de | Elévarion. | Elévation. k chaleur.|chaleur. |P. L. Janv. |[N.N.E.&0.5.0) 8 — | — ro 1128 — ÿ la — x [Froid & humides Févr. S: O: 11 | — 41128 — 4 l27 — ÿ {Froid & humide. ne DA 10 —:| — 123128 — 4 |27 — 5 |Variab. froid & fec. Avril N.N.E. 12 — {| — 15128 — 6 [27 — 9 |Froid & humide. Mai N.&N.E. 1/16 — 3| — .4-1128 — 7 |27 — 10 |Froid & fec. Juin O. 28 — |— 10 |28 — 6 27 — 11 |Chaud &fec. Juill. [N.E. &O. S.O. 24 — 3| — 12 1128 — ÿ [27 — 8 |Chaud&fec. Aoët| O.&0O.S. 26 — |— 8:18 — 6 |27 — 6 |Affez chaud &fec. Sept. SO: 122 — | — 4 5128 — 4 |27 — 8 |Humide & tempéré. Oét. S. &.S.O. |19 — Ïj — 421128 — 6 qe 8 |Tempéré & fec. Nov.| S.O.&O.S.0. |16 — | — 21128 — 6 27 — 6 |Froid&aflezhumid, Déc 8. O, |9—3l— 4 118 —7 l27— 6 [Froid & humide. La plus grande chaleur a été le 26 Juin de 28 degrés, le vent étant Sud- Et : & le plus grand froid, le 3x Janvier diode grés & demi au-deflous du zéro. La plus grande Élévation du Mercure de 28 p. 7 1. le 24de Déc. , le vent étant Nord-Nord- ET. ; & la plus petite Elévation de 27 p. & demie lig. le 16 Tanvicr, le vent à l'Eft-Nord-Eft. œ s6 EXT RNA IUT Le Chevalier Englefield, Anglois fort curieux, & bien inftruit dans l’Aftronomie à préfenté à l’Acadé- mie l’Obfervation de l’Eclipfe de la Lune faite par lui à Tournai, le 30 Septembre de 1773 ; de laquelle nous publions ici le réfultat, l La Lune seft levée éclipfée, mais les arbres m’ont empêché d'obferver jufqu'à 6 h. 30 min. Alors j'ai obfervé ces phafes décroiflantes. Temps par le| Temps vrai. Pendule. ; > IGrimaldus — — — — — 6-43 - 5 |6- 34 - 22 S TLanSber pus — — — 16- 48 - 45dl6 - 39 -5 S |Keplerus — — — — — 7- o - 30 |6 =- 51 - 39 S URainhotdns NN NE le ds er4o lé Lie ac à ]Mare Neétaris — — — — |7- 6 - 50 |6 - 57 = 55 $ fAriftarchus — — — — —|7- 8- o |6 - 59- 5$ S ACopernicus — — — — — 7- 9- 5 |7- 0o- 9 Infula finûs medii — — — |7-12 - 0 |7 - 3 - 3 Bord Orient. de mare tranquillitatis.|7- 16 - 37 |7 - 7 - 37 Biffection d’Heraclides — — — |7- 19 - 25 |7 - 10 - 24 Langrenus — — + — — |7- 19 - 55 |7 - 10 - 54 À Promontorium Acutum .— — |7- 21 - 20 |7 - T2 - 10 & MManilius — — — — — 7-23 - 3 |[7-14- o $ JHeraclideg — — — — — 7- 25 = o |7 - 15 - 56 $ \Menelaus — — — — — |7-29 - 4 |7 - 19 - jo dPlinius— = — — — — 17-31 - 40d|7 - 22 - 33- à / Promontorium fomnii — — |7- 32 - 55d|7 - 23 - 47 Plato. — — — — — — 7- 34 - 40 |7 - 25 - 31 Mare Crifium commence à fortir -- |7- 37 - 1od|7 - 20 - o Des Nuages légers rendent ces Ob- - fervarions moins certaines. Sortie totale d’Ariftoreles - - = - |\7- 42 = 13 7 Mare Serenitatis — — — |7- 43 - o |7 - 33 - 47 s | 7 7 Mare Crifium — — — |7- 48 - 30 - 39 - 14 Hermes— — — — — 7- 54 - 12 = 44 - 53 Fin doureufe— — — — |7- 55 - 30 |7 - 46 - z2 Fin certaine — — — — |7- 56 - 20 |7 - 47 - o Fin dela Penombre dans le à Télefcope ä-peu-près — — |8- o - o |7 - jo - o Le bord de la Lune paroifloit terni endant quelques minutes après à l’œil fimple DES OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES, &c.$ 57 La nuit étoit afflez belle mais des nuages légers affoiblifloient quelque-fois la Lune jufqu’à rendre l’'Ob- fervation difficile. Les Obfervations douteufes font mar< quées d’un (d). Il y avoit beaucoup de Pénombrse. L'Abbé Chevalier a obfervé à Bruxelles la fin de cette même éclipfe avec une lunette Achromatique de 30 pouces de foyer, le ciel étant clair, & le difque de la Lune bien terminé. L’Éclipfe ayant commencé avant le lever de la Lu- ne , on n’a obfervé que les dernieres immerfions des taches , & la fin de l'Éclipfe. Temps vrai, h. m. Le Mare Crifium commence à fortir de l’Ombre à O7 - 32 - 16. Mare Serenitatis fort de l'Ombre à 7 - 38 - 3 Mare Crifium fort entiéremenc de l'Ombre 7 = 43 - 20 Fin doureufe de l’Eclipfe 7 - 50 - 30 Fin plus certaine 7 = 51 - 18 On voir encore bien la Pénombre 7 = 54 - 30 La Pénombre paroît finie à 7 = 59 = © Fin du Tome premier, RUSSE LEE SAP AR 140 nd st AGE sa 2 UT PUS V9: SUR ORT ON ESS M FE V4 À Q hab 11 ASS COUR CA. PR. Ext: Disco URS Préliminaire Page 7 Lettres-Patentes d'éreéfion de l'Académie Impériale & Royale des Sciences & Belles-Lettres de Poires xvit) Règlement de l’Académie. XX] Extrait d'une Lettre de S. A. le Minifire Plénipotentiaire à Mr le -Chancelier de Brabant. XTLXLY Lettre du méme à Meflieurs de 1 ‘Académie Impériale € Royale. xxx ij Médailles. xxxvii] Noms des Academiciens. ZXRIE Journal des Séances. xliv Obfervations Affronomiques faites aux Pays- Bas Autri- chiens, en 1772 6 1773, par Mr Pigort. 51 Fe Jur les proportions des tonneaux, € fur une jau- ge univerfelle, par Mr l'Abbé Marc. 29 Mémoire fur la Vigogne & fur l'amélioration des laines, par : Mr V'Abbé de Nélis. À 46 Mémoire fur l'ancien état de la Flandre maritime, fes chan- gemens fucceffifs, & Les caufes qui les ont produits, par Dom Mann. 6 Premiere Partie. Ibid. Seconde Partie: 2e Remarques fur lu Carte Hydrographique du Nord- Ouefl de l'Europe. 150, Remarques fur le profil des élévations des Marées fur les Côtes de Flandre, &c. 1$I Table des Matieres. Premiere Partie: Pr 20 2 T' A an Seconde. Partie. set 1 Li Recueil de quelques OhEturians, Phyfiques, faites principa- lement dans la FTOEROE de Luxembourg, en 1772, par. Mr Necdham. LS 157 Mémoire fur l'Elecfricité, relativement à " qualité de fluide moteur dans les végétaux & dans le corps humain, par Mr l'Abbé d'Everlange de Witry. ee 187 Mémoire fur l'Hifloire Naturelle d'une partie du Pays Bel- gique, par Mr Robert de Limbourg, le jeune. 194 Supplément, au Mémoire, dans lequel il s'agit de la forme extérieure de laterre, par le méme. 22E: Mémoire fur une maladie produite par des moules vénimeu- fes, par Mr J. B. de Beunie… PSE Hifloire naturelle de l'Etoile marine. 234 Hifioire naturelle des Moules. 238 Deftription de la maladie caufte par les Moules vénimeufes, avec fes fignes diagnoffiques, 6c. , 242 Mémoire fur les Eaux minérales du Sauchoir, par Mr l'Abbé d’Everlange de Witry. * 249 Explication de la cauje des vuides qui fe trouvent fous les glaçons des chemins raboteux, far Mr le Doéeur Go- .dart. 265 Mémoire fur les moyens de parvenir à une Théorie com- plette des Météores, par Dom Mann. 265$ Mémoire fur la congélation de l'eau de mer, deduit d'une Jüite d'expériences faites fur ce fujet, par le méme. 287 Mémoire contenant la formation d'une formule générale pour - l'intégration, &c. par Mr Bournons. 323 Lettre de l'Auteur à Mefieurs de l'Académie pour férvir de Préface. 324 (Mémoire [ur la nature du fel commun dont les anciens Bel- ges & Germains faifoient ufage, par Mr du Rondean. 347 TABLE. 3 Mémoire pour fervir à l'Hiflioire naturelle des Foffiles des Pays-Bas, par fr de Limbourg, le jeune. 363 Memoire fur la Religion des peuples de l'ancienne Belgique, par Mr Des Roches, … 4I$ Premiere Partie. 416 Seconde Partie. 430 &oifieme. Partie. 447 Réflexions fur un ancien monument du Tourñaifis , appellé vulgairement Va Pierre Brunehaut, per Mr l'Abbé de Nelson; ATIE Examen de la queffion ft la langue des Etrufques a eu du rap- port avec celle des Peuples Belgiques, par Mr Des Ro= ches. _. 489 Explication d'une Lettre difficile qui fe trouve dans la col- Leélion de celles de St Boniface, avec des Réflexions fur l’ancienne Poëfie des Peuples Belgiques, par le méme. 499 Nouvelles Recherches [ur l’origine de l'Imprimerie, dans lef- guelles on fait voir que la premiere idée en eft due aux Bra- bançons, par le même. s15 Extrait des Obfervations Metéorologiques, faites à Bruxel- les 6 en quelques autres Villes des Pays-Bas. 543 Fin de la Table. HET à CH sy 1 FAN FR FA DIGEST OF THE 4 sŸ LRRARY REGULAPIONS, No book sh be taken from pe cu” without the record of the Librarian. No person shall\be alloweds #0 D more than five vol- umes at any one «0 ufiless by special vote of the Council. Books may be Ron one calendar month; no longer without renewal, andfrenewa] may not be granted more than twice. 4 \ A fine of fivercents per day Nu red for every volume not returned within the time specified‘b the rules. The Lifrarian may demand the“return of a book after the expiration of ten days from the date of borrowing. Ceyfain books, s0 designated, canuob, be taken from the Library without special permission. N° FAI books must be returned at least UE previous to the Annual Meeting. LQ Persons are responsible for all injury or Ts of books charged to their name. NS La à ad Li