199.2 Library of tbe Museum 4 or COMPARATIVE ZOÜLOGY, AT HARYARD COLLEGE, CAMBRIDGE, ASS. Jounden by private AUbebuEntEO. in 1861. DR. fe. DE KONINCKS LIBRARY. No. 166. ni qu 4 SOCIÉTÉ LINNÉENNE DU CALVADOS. F Tes LES MÉMOIRES SOCIÉTÉ LINNÉENNE DU CALVADOS. es CŒunée 1324. CAEN, CHEZ CHALOPIN FILS, IMPRIMEUR DE LA SOCIÉTÉ. | MDCCC XXIV. STATUTS DE LA SOCIÉTÉ LINNÉENNE DU CALVADOS. ARARAR UE UAR LUNA VUE VUE VULUVUUVULUVIUUL UM MU LA VUVR ARTICLE PREMIER. LA Société Linnéenne du Calvados se compose d’un nombre indéterminé de membres résidants, honoraires, et correspondants. ART. IL. Les membres honoraires ne sont pas tenus d’as- sister aux séances ; maisils y jouissent de tous les droits des membres résidants. Apms Tir Pour être recu , tout candidat devra réunir les quatre cinquièmes des voix des membres présents à la séance. ŸI STATUTS Il sera procédé à Pélection , un mois après la présentation. Anar TV: Le candidat qui aura été rejetté ne pourra être proposé de nouveau, qu'après six mois révolus, à dater de la séance où Le rejet aura eu lieu. ART. V. Les dignitaires de la société ne peuvent être pris que parmi les membres résidants. Ils sont au nombre de cinq : président , vice-président, se- crétare , archiviste et trésorier. Ils sont nommés tous les ans, Le président et le vice-président ne pourront occuper les mêmes fonctions deux fois de suite. Les élections auront lieu à la première assemblée du mois de Juin , à la pluralité des suf- frages. ART. VI. Les fonds de la société se composent d’un droit de diplôme et d’une cotisation annuelle , dont le montant pourra varier, selon les besoins de la société , et qu’elle déterminera. ART: VIP. Les élections , les admissions, les exclusions ne pourront se voier que par scrutin ; les autres délibérations ordinaires seront simplement mises aux Voix. La société ne pourra délibérer s’il n’y DE LA SOCIËTÉ LINNÉENNE. VI a la moitié des membres résidants présents à la séance. | : ART. VIII. Le président, ou en son absence le vice-prési- dent, dirige les travaux des séances , ei signe tous les actes de la société. ART. IX. Le secrétaire est chargé de rédiger le procès- verbal des séances , de rendre le compte général et annuel des travaux de la société, de tenir la correspondance , de signer tous les actes, de di- riger la rédaction et publication des mémoires de la société. ATX . L’archiviste tiendra note exacte des objets qui lui auront été remis ; 1l conservera les ouvrages imprimés et manuscrits. Sous aucun prétexte 1l ne pourra se dessaisir des manuscrits : les ouvra- ges imprimés pourront être prêtés aux membres résidants et honoraires, sous récépissé; ces ou= vrages ne pourront rester entre les mains des membres , qu'un temps déterminé. ART. XI. Le trésorier tient les fonds, et rend ses comp- tes chaque année, à la première séance de Juin. ViIr STATUTS ArT. XII. La societe Linnéenne du Calvados s'occupe de toutes les branches de l'histoire naturelle exclu- sivement. ART. XIII. Trois productions seront lues dans chaque séance : les membres seront désignés à cet effet, au moins trois mois d'avance. ART IXIV: Le membre qui ne présentera point son ou- vrage à la séance désignée , n’aura plus le droit de prendre part aux délibérations, jusqu’à ce qu'il Vait présenté, à moins qu'il ne se soit fait remplacer par un autre membre d’accord avec lui , et dont il prendra le rang dans l’ordre des lectures. ART. X V. Un ou plusieurs membres , suivant Pimpor- tance du sujet, seront désignés par le président, pour faire un rapport sur chaque production. Celui ou ceux qui seront désignés à cet effet ne pourront refuser , s’ils n’ontun motif légitime et agréé par la société. Ils devront le présenter à la séance qui suivra la lecture de l'ouvrage, l'auteur aura la faculté de répondre verbale- ment ou par écrit. | DE LA SOCIÉTÉ LINNÉENNE. IX ART. XVI. Une commission nommée au scrutin chaque année, et composée de trois membres honorai- res et de trois membres résidants, sera chargée de ‘désigner les mémoires qui seront imprimés en entier ou par extrait , ainsi que ceux qui devront être lus en séance publique. Le président, le se- crétaire et l’archiviste y sont adjoints. ART. XVII. Aucun mémoire ne pourra être lu en séance publique , s’il n’a été entendu dans une séance parüculière. | AR me XVII 5 Il y aura chaque année au moins une séance publique. Elle aura lieu le 24 mai, anniversaire de la naissance de Linné, patron de la société : à cette séance seront lus, 1°. le résumé des tra- vaux de la société, fait par le secrétaire ; 20. la liste des nouveaux membres, et les notices sur ceux dont la mort aura privé la société, faites également par le secrétaire ; 5°. les mémoires des membres désignés par la commission. Les membres résidants et honoraires devront assister aux séances publiques ; les correspon- dants , principalement ceux du département, y seront invités. x STATUTS ART CRE La société tiendra une séance ordinaire, le pre- mier lundi de chaque mois , à 6 heures précises. ART: XX. Tout membre résidant qui quittera le chef-lieu de la société deviendra de droit membre corres- pondant. [lreprendra son titre de membre rési- dant , lorsqu'il reviendra au chef-lieu. AT NE: Les membres résidants sont tenus d’assister ré- gulièrement aux séances ; en cas d’empéchement , ils devront , autant que possible , en prévenir le président ou le secrétaire : s'ils ne l'ont pas fait, ou que leurs qgxcuses ne soient pas jugées vala- bles , ils seront passibles de l’amende de 2 fr. AtrT. XXII. Les autres infractions au règlement sont punies par un rappel à l’ordre. La société pourra même , suivant la gravité des cas ; décider que le membre cesse de faire partie de la compagnie. L’exclu- sion pour toute autre cause ne pourra être pro— noncée qu’à la majorité des trois-quarts des mem- bres présents à la séance. ART. NX XIII. Tous les objets dont il sera fait hommage à la société seront offerts en son nom au cabinet d’his- DE LA SOCIÉTÉ LINNÉENNE, x toire naturelle de la ville de Caen; et M. le Maire sera prié de permettre qu’à l'étiquette soit ajouté: Donne par la société Linnéenne du Calvados. AB TON AIN. Les mémoires de la société seront imprimés sous format in-8°. Chaque année un volume pa- raîtra sous le titrede Mémoires de la Societé Linnéenne du Calvados. Chaque membre ré- sidant et honoraire en recevra un gratis : nul ne pourra être correspondant ; s’il ne prend l’en- gagement de s'abonner au recueil. La société déterminera chaque année le nombre des exem- plaires et leur prix. A sin, X AV, Les auteurs des mémoires, qui voudront les augmenter de planches , seront tenus de fournir … les desseins et les planches ; le tirage et le papier seront aux frais de la société. Arr. X X VI Les auteurs dont les mémoires seront impri- més , sont autorisés à faire tirer pour leur compte autant d'exemplaires que bon leur semblera, Ils traiteront directement avec l’imprimeur pour les frais, ART. XX VIT. Tout manuscrit remis à la société devient sa XII STATUTS propriété ; l’auteur pourra en prendre des copies, mais ne pourra le retirer. On ne pougra non plus le faire imprimer soit en entier , soit par extrait, à moins que la commission n’ait déclaré qu'il ne fera point partie des mémoires de la société. ANRT. NEC TT Tous les frais d'impression seront supportés en commun par les membres résidants et hono- raires. L'argent provenant de la vente des mémoires sera versé dans la caisse pour les frais des pu- blications suivantes , après que les membres ré- sidants et honoraires auront été remboursés des avances qu'ils auront pu faire pour la publica- tion des volumes précédents. ART. XXIX. Les sociétés savantes qui enverront leurs tra- vaux à la société Linnéenne du Calvados , rece- vront les mémoires de la société , mais d’après la délibération spéciale à cet effet. ART. XX X. Le présent règlement ne pourra recevoir d’ad- ditions , qu’autant qu’elles ne seront point en contradiction avec les articles précédents , et au- cunes modifications ne pourront avoir lieu, que DE LA SOCIÉTÉ LINNÉENNE. XIII sur la demande faite , et textuellement exprimée, des trois-quarts des membres ; elle sera discutée en assemblée générale extraordinaire convoquée à cet effet, et ne deviendra règle, qu’autant qu’elle aura réuni les quatre cmquièmes des suffrages des membres honoraires et résidants , présents à la séance. Certifié conforme par le Secretaire, Arcisse DE CAUMONT. Vu par le Président, ROBERGE. N. B. Les lettres et paquets doivent être adressés francs de port à M. DE CAUMONT, secrétaire de la socitté, rue Guil- bèrt , n°. 24, à Caen. La IAA LUE LA VIS VIA LUE LAS AAA LA UMA LULU UAUUE LISTE DE MM. LES MEMBRES RÉSIDANTS, HONORAIRES ET CORRESPONDANTS DE LA SOCIÉTÉ LINNÉENNE DU CALVADOS. DIGNITAIRES. RoBERGE ( Micmer ), licencié en droit, membre de la Société des antiquaires dé Normandie , de la société d’É- . mulation des Sciences et Belles-Lettres de Caen, président. EUDES-DESLONCHAMPS , chirurgien, membre de la société Linnéenne de Paris, vice-président. - DE CAUMONT, licencié en droit , secrétaire - adjoint de la société des antiquaires de Normandie , membre de la so- ciété d’émulation de Caen , secrétaire. Cx. THOMINE , professeur à l’université de Caen , membre de la société des antiquaires de Normandie, de la société d'Émulation de Caen, archiviste. HARDOUIN, docteur en médecine , trésorier, RÉSIDANTS. BOURIENNE , docteur en médecine. CHAUVIN, avocat. FAUCON , docteur en médecine. HUBERT , pharmacien. LAIR, ancien conservateur du jardin de botanique. LE NEUF DE NEUVILLE , élève de l’école militaire de Liancourt , ancien géomètre de première classe du cadraste du Calvados, et commissaire voyer de l’arrondissement de Caen. LUARD , docteur en médecine. MIGNOT , bachelier ès sciences. MONTAIGU , conservateur du jardin de botanique de Gaen. ORANGE , sous-censeur au collége royal de Caen. PREL , inspecteur de l'enregistrement. MEMBRES HONORAIRES. XV RENOU , licencié en droit, * RICHOME, membre de la société des antiquaires de Normandie. HONORAIRES. AMELINE, professeur à l’école de médecine , associé rési- dant de l’académie de Caen, membre de la société de mé- decine , etc. BACON ( jeune }), professeur à l’école de médecine , associé résidant de l’académie de Caen , membre de la société de médecine , etc. ; DE LA FOYE, professeur de physique à l’université de Caen, membre de l’académie de la même ville , de la société des antiquaires de Normandie , etc. DE LA RUE (l’abhé), professeur d'histoire à l’université de Caen, correspondant de l'institut royal de France , directeur de la société des antiquaires de Normandie. DE MAGNEVILLE, vice - président de l'académie royale de Caen , président de la société des antiquaires de Normandie , membre de la société d’agricalture de Caen , de la so- ciété Linnéenne de Paris, etc. DE MAUPASSANT , directeur des contributions directes , ad- ministrateur des hospices , etc. DE MONTLIVAULT ( le comte } , gentilhomme de la cham- bre du roi, conseiller-d’état , préfet dun Calvados , membre de l’académie de Caen , de la société des antiquaires de Normandie, etc. bus DE MONTLIVAULT ( Cuanses ), secrétaire-général de la pré- fecture du Calvados, membre de la société des Antiquai- res de Normandie , etc. D'OSSEVILLE ( le comte Louis }, maire de la ville de Caen, membre de la société des antiquaires de Normandie, etc. HÉBERT + secrétaire de l’académie royale de Caen, mem- bre de la société des antiquaires de Normandie , etc. HÉRAULT , ingénieur en chef des mines, membre de l’aca- démie de Caen, de la société d’agriculture , de la société des antiquaires de Normandie, etc. JAMET ( labbé ), recteur de l’université de Caen , membre XVI MEMBRES HONORAIRES, de lPacadémie de la même ville ; directeur de l'institution des sourds-muets , etc. LAIR, conseiller de préfecture , secrétaire de la société d’a- = griculture et de commerce de Caen, membre de l'académie de la même ville , de la société des antiquaires de Norman- die , étc. | LAMOUROUX , professeur d'histoire naturelle à l’université de Caen, correspondant de l'institut royal de France, membre de l’académie , des sociétés d’agriculture et de médecine de Caen, etc. LANGE, docteur en médecine , trésorier de la société des antiquaires de Normandie , membre de l’académie de Caen, de la société d'agriculture , membre honoraire de la société de médecine , etc. LÉCHAUDÉ- D’ANISY , vice D du de la société des an- tiquaires de Normandie , associé résidant de fasse euse de Caen , de celle de Strasbourg , etc. MAUCOMBLE (le vicomte ) , maréchal des camps et armées du roi, commandeur de l’ordre royal de la légion d’honneur. PATTU, ingénieur en chef des ponts et chaussées, secrétaire de la société des antiquaires de Normandie ; membre de l’académie de Caen, de la société d’agriculture de la même ville, etc. PRUD'HOMME ; membre de déni de Caen, de la so- ciété d'agriculture de la même ville , etc. SPENCER SMYTHE, membre de la société royale, de celle des antiquaires , de celle pour l’encouragement des arts, ma- nufactures et commerce de Londres ; docteur en droit civil de l’université d’Oxfort ; membre de la société des antiquai- res de Normandie , associé correspondant de l’académie de Œaen , membre des sociétés asiatique et de géographie de Paris. THIERRY , professeur de chimie à l’université de Caen, membre de l’académie de la même ville, etc. TROUVÉ , médecin en chef de l'hôpital civil et militaire de Caen, membre de l’académie de la même ville, etc. CORRESPONDANTS NATIONAUX. XVI£ MM. ÂLIBERT ( à Paris ), LÉ du roi , professeur à la fa- culté de médecine. ARISPURE ( Vicdessos, Arriège )}, médecin des mines, Cor- respondant de lacadémie de Caen. AUDOUIN , naturaliste à Paris , membre de plusieurs socié- tés savantes. BALBIS ( à Lyon )}, docteur en médecine, président de Ja société linnéenne, correspondant de la société linnéenne de Paris. BLOCHE ( à Lisieux }, avocat. BLOT ( à Colleville ), docteur en médecine. BOUCHET ( à Montpellier ) , docteur en médecine, natu- raliste. BONNEMAISON , pharmacien à Quimper , membre de plu- sieurs sociétés savantes. BORY DE St.- VINCENT ( le colonel), ( à Paris), cor- respondant de l'institut royal de France, etc. BOSC ( à Paris) , naturaliste, membre de linstitut, seul fondateur restant de la première société linnéenne. BOURDON ( à Paris ), membre de la société linnéenne de la même ville, correspondant de l’académie de Caen. BRARD (à Terrasson ), ingénieur en chef des mines. BRONGNIART ( à Paris ), professeur au jardin du roi. BRONGNIART fils (à Paris )}, naturaliste, membre de plu- sieurs sociétés savantes. | BROUARD ( à Évreux ) , docteur en médecine, membre de la société d'agriculture. CANIVET ( à Falaise ), docteur en médecine. CHAUBARD ( à Agen ), avocat. CHESNON ( à Bayeux ), licencié ès lettres, professeur au collége de Bayeux. CLARION ( à Paris } , botaniste, professeur à la faculté de médecine. xVLLL | CORRESPONDANTS COLLET ( à Noyers ), docteur en médecine. CORDIER ( à Paris ), professeur au jardin du roi, membre de Pinstitut. CUVIER ( le baron ), (à Paris }, conseiller d'état , secrétaire perpétuel de Pinstitut, professeur au jardin du roi, etc. COSTIN ( à Paris )}, docteur en médecine. D’AUBUISSON DE VOISINS , ingénieur en chef des mines, correspondant de l'institut, secrétaire perpétuel de l’acadé- mie des sciences, belles-lettres et arts de Toulouse , ete. D’AUDEBARD DE FERUSSAC (le baron ) ,( à Paris ), of- ficier supérieur d’état-major , membre de plusieurs sociétés savantes. À DE BASOCHES ( à Falaise } , membre de la société lin- néenne de Paris. DE CLINCHAMPS (à St.Lo), membre de la société des antiquaires de Normandie , ancien officier de marine , etc. DEBEAUX ( à Agen ), naturaliste. DE BEAUCOUDREY ( à Grainville ), naturaliste. DE BONNARD , sécrétaire de la société philomathique de Paris, etc. DE BOURNON ( le comte },( à Paris ) conservateur de la collection minéralogiqne particulière du roi, membre de plusieurs sociétés savantes , françaises et étrangères , etc. DE BRÉBISSON père ( à Falaise ) , membre de plusieurs sociétés savantes, françaises et étrangères, de celle des an- tiquaires de Normandie. DE BRÉBISSON fils, ( à Falaise) , membre de la société linnéenne de Paris, et de celle des antiquaires de Norman- die , etc. | DE HUMBOLDT ( le baron }, ( à Paris ), membre hono- raire de l'institut, etc. B. GAILLON ( à Dieppe ) , membre de plusieurs sociétés . savantes. DE CÜUSSY ( l'abbé ), ( à Bayeux ), membre de la légion d’honneur , etc. DEJEAN ( le baron ), naturaliste , à Paris. NATIONAUX. XIX DE JOLIMONT (à Paris )}, correspondant de la société des antiquaires de Normandie et de l’académie de Caen. DE LACÉPÈDE ( le comte }, pair de France, membre de ._ Pinstitut, professeur au jardin du roi, etc. DE VENDEUVRE ( le comte ), préfet de l’Isle-et-Vilaine, membre de l’académie de Caen , de la société des anti- quaires de Normandie. DE LA CHAPELLE ( à Cherbourg ); pharmacien. DE LA FRESNAYE ( à Falaise ) , membre de la société linnéenne de Paris ét de celle des antiquaires de Normandie. DE LAMARCK ( à Paris) , professeur au jardin du roi, membre de linstitut. DE LANGLE ( à Bernay ) , dôcteur en médecine , membre de la société d’agriculture de l'Eure. DELESSERT (le baron), ( à Paris), naturaliste, membre de Pinstitut. DELEUZE ( à Paris ), conservateur des galeries de botanique au muséum d'histoire naturelle. DE FRANCE ( à Sceaux ), membre de plusieurs sociétés sa- vantes. ; DE LAUNAY ( à Bayeux }, membre de la société des an- tiquaires de Normandie , correspondant de lacadémie de Caen. DE FORMEVILLE ( à Lisieux }, juge au tribunal de pre- mière instance, membre de la société des antiquaires de Normandie. ï DE LIESVILLE ( à Liesville, département de la Manche }, naturaliste. DELILE correspondant de l'institut , professeur de botani- que, à Montpellier , etc. DELISE (à Vire |, chef de bataillon ; membre de la lé- gion d'honneur , de la société linnéenne de Paris. DELMOTTE , officier au corps royal d’état-major. DESFONTAINES , professeur au jardin du roi, membre de l'institut, DESNOYERS , ( à Paris } , membre de la société géologique XX CORRESPONDANTS de Paris, des sociétés d'histoire naturelle et linnéenne de la même ville. DE WIMPFFEN (le baron), { à Bayeux ) ; membre de la so- ciété des antiquaires de Normandie. DESMAREST ( à Alfort ), professeur à l’école vétérinaire. DE St. HILAIRE ( Avceusre), ( à Orléans ), correspondant de l'institut. DE St. -PIERRE ( à Caën }, membre du conseil général. DE VIETTE ( à Mathieu ) , juge de paix. | DUBOURG - D'ISIGNY ( à Vire ), président du tribunal civil, docteur en droit , licencié ès sciences, membre de De des antiquaires de Normandie. DUBUISSON ( à Nantes } conservateur du muséum ; C0r- respondant de la société linnéenne de Paris, etc. DU HERISSIER DE GERVILLE, ( à Valognes }, membre de la société royale des antiquaires de France , de celle des antiquaires de Normandie, des sociétés linnéenne et philo- mathique de Paris, membre de lacadémie de Caen. DUFOUR ( à Lisieux ), pharmacien. DUMÉRIL ( à Paris ) , docteur en médecine, professeur à l’école de médecine, membre de Pinstitut. DUMONT-DURVILLE, lieutenant de la marine royale, mem- bre de la société linnéenne de Paris. DUPERREY ( à la Martinique }),, ingénieur hydrographe. DUVAL ( à Lisieux ), pharmacien. DUVAU ( Aveusre ), naturaliste à Paris. FARGEAUD ( à Besançon ) professeur de physique. GAIMARD , docteur en médecine , naturaliste à Paris. GEOFFROY-St.-HILAIRE, pAieus au jardin du roi, mem- bre de l'institut. GRAVE ( à Beauvais ) , secrétaire-général de la préfecture. GROGNIER , secrétaire de la société linnéenne de Lyon, professeur de chimie et de botanique à l’école vétérinaire de la même ville. HERVIEU ( l'abbé ), principal du collège, à Falaise. LAMARE ( à Bayeux) , ancien élève de l’école polythecuique.. NATIONAUX,- | XX! LAMBERT ( à Bayenx }, membre de la société des antiquai- res de Normandie , correspondant de la société d’émulation de Caer. LENORMAND (à Vire ), avocat. LE PRÉVOST ( Auc. ) (à Rouen) , membre dela société royale des antiquaires de France , de la société des antiquaires de Londres, de la société des antiquaires de Normandie, Ge l'académie ‘des sciences, belles-lettres et arts de Rouen , de la commission pour la recherche des antiquités dans le dé- partement de la Seine-fnférieure , &e la société linnéenne de Paris, des sociétés d’agriculture de Caen, Rouen, Évreux et Bernay. LAMOUROUX ( à Paris ), docteur en médecine. LEMAN ( à Paris ), naturaliste , membre de plusieurs s0- ciétés savantes. LIÉGARD (à Paris ), étudiant en médecine. LABILLARDIÈRE ( à Paris }, membre de l'institut. LE COMTE ({ l'abbé }), principal du collége, à Bayeux. EATREILLE, professeur au jardin du roi, membre de lins- titut, etc. LANCE (à Littry ), directeur des mines de houille , cheva- lier de la légion d'honneur , membre du conseil général, etc. LARUE ( à Évreux ) , secrétaire des sociétés d’agriculture et de médecine de lPEure. | LUCAS fils ( à Paris }, conservateur des galeries de minéra- logie au muséum d'histoire naturelle. LE PRÊTRE ( à Paris ), étudiant en médecine. MICHEL ( Juces) , ( à Cherbourg }, officier d’artillerie. MAGENDIE ( à Paris ) , docteur en médecine, naturaliste et membre de l'institut. DE MIRBEL ( à Paris ) , professeur à la faculté des sciences, membre de l'institut. MOUGEOT ( département des Vosges ), docteur en médecine. MERAT (à Paris), docteur en médecine, naiuraliste. MARQUIS ( à Rouen }, membre de la société des anii- quaires de Normandie , de l’académie de Rouen, et de le XXII c CORRESPONDANTS société d’émulation de la même ville. NICOLLE , docteur en médecine, naturaliste à Paris. POUPART fils, ( à Pont-l’Évèque ), naturaliste. PACOTTE DE FONTANES ( à Caen }), ancien élève de l’é- cule polythecnique , capitaine au corps royal d’état-major. POIRET ( à Paris ) , ancien professeur d'histoire naturelle. PELLETAN ( Gabriel ), ( à Paris ), docteur en médecine. PLUQUET ( à Bayeux ), correspondant de la société royale des antiquaires de France, membre de la société des an- tiquaires de Normandie , de l'académie royale de Caen, etc. RICHARD ( à Paris ) , professeur aggrégé à la faculté de médecine de Paris, membre de plusieurs sociétés savantes. REVER ( à Pont-Audemer), correspondant de l'institut, mem- bre de la société des antiquaires de Normandie. SAVIGNY (à Paris }, membre de Pinstitut. SIMON ( à Lisieux ) , docteur en médecine, membre de la société des antiquaires de Normandie. SURIRAY ( au Havre ), docteur en médecine. TINEL ( à Melun }, secrétaire général de la préfecture de Seine- et-Marne. THOUIN ( à Paris }, professeur au jardin du roi, membre de l'institut. TURPIN , naturaliste à Paris. TROLONG DU TAILLIS, docteur en médecine. VAUQUELIN ( à Paris ), professeur au jardin du roi , mem- bre de l'institut. VIREY , docteur en médecine, membre de plusieurs sociétés savantes, CORRESPONDANTS ÉTRANGERS. À GARDH ( à Lund ,en Suède ) , professeur de botanique. BONELLI ( à Turin ), conservateur du muséum. BREISLACK ( à Milan) , correspondant de linstitut royal de France. DAWSON TURNER ( à Yarmouth }, botaniste. DE CANDOLLE ( à Genève ) ,; botaniste, membre corres- ÉTRANGERS XXXIII pondant de l'institut royal de France. DE CHAMISSO ( à Berlin ), botaniste. DE KAY, docteur en médecine, membre de plusieurs socié- tés savantes, à New-Yorck. GOLDFUCHS (à Bonn), professeur de botanique. HOOKER ( à Glascow ) ; professeur de botanique. KUNTH ( à Berlin) botaniste, correspondant de l'institut de France, LE SUEUR ( à Philadelphie ), naturaliste. MERTENS , ( à Bremen }), professeur de botanique. SOWERBY ( James ) , (à Londres ) , membre de la société lin- néenne de la même ville. SOWERBY (G£onces ) , (à Londres }), membre de la société linnéenne. Lacommission remplissant les fonctions de conseil d’admi- nistration , et chargée , aux termes de l’art. 16 des statuts , de désigner les mémoires qui seront imprimés en entier ou par extrait, ainsi que ceux qui seront lus en séance publique , est composée présentement de MM. DE MAGNEVILLE , Crances THOMINE , FAUCON ; ROBERGE , DESLONCHAMPS , LAMOUROUX , DE LA FOYE et DE CAUMONT. RAR AAA AA LAA VAL LUS VU UE UUE VV LAN VAL URL UT VAN LULU UE UIRUVS SOCIÉTÉS SAVANTES En correspondance avec la Société Lin- néenne du Calvados. À canëmre royale des sciences, arts et belles- lettres de Caen. Académie royale des sciences , arts et belles- lettres de Marseille. Académie royale des sciences, belles-lettres et arts de Toulouse. Société philomathique de Paris. Société d’histoire naturelle de Paris. Société linnéenne de Lyon. Société linnéenne de Bordeaux. Société d'agriculture et de commerce de Caen. Société académique de Nantes. Société géologique de Londres. Société de médecine , chirurgie et pharmacie du département de l'Eure, à Évreux. RARE VAR AA VAN LV'UV RAR LAN VIN VALUVUR VAL VULUVL LAS LUI VIE VAR UVILUVLLARLAR Liste des ouvrages imprimés, offerts à la So- ciété Linnéenne du Calvados. Es T'anceaux synoptiques du système de Linné, — par M. Lamouroux , docteur en médecine & Paris. Pièces pour servir à l’histoire du Bessin, — par M. Pluquet. Observations sur les localités propres à cer- taines espèces d'insectes, et sur l’analogie qu’elles semblent avoir avec certaines plantes, — par M. Frédéric de La Fresnaye. Notice sur les travaux dela commission d’an- tiquités du département de la Seine-Inférieure , — par M. Auguste Le Prévost. Expériences microscopiques et physiologi- ques sur une espèce de conferve marine , — par M. Benjamin Gaillon. | s Monographie des greffes, — par M. Thouin. Mémoire sur la bataille de Formigny, — par M. Lambert. Philosophie botanique ,un vol. in-8° ; Éloge de Linné ; Réflexions sur le Népenthès d'Homère; Considérations sur létat actuel des sciences , XXVI LISTE DES OUVRAGES IMPRIMÉS. et plan raisonné d’un cours de botanique ; — par M. Marquis. Icones selectæ plantarum , — par M. Benj. Delessert, 2 vol. in-fol. Collection des ouvrages publiés par la so- ciété d'agriculture et de commerce de Caen, — par M. Lair, secrétaire. Journal d'agriculture , de médecine et des sciences accessoires, — par MM. les membres des sociétés d'agriculture, sciences et arts, médecine , chirurgie et pharmacie du département de l'Eure, n®, 1 et 2, — par M. de la Rue. Description du muséum d'histoire naturelle de Paris, _ par M. Deleuze, > vol. m-—680. Traité de minéralogie, — par M. Brard, 1 vol. in-6°, | | Mémoire sur le bois fossile à odeur de truf- tes, — par M. Jules Desnoyers. Mémoire sur les terrains du Calvados, — par M. Hérault. Note sur la fructification du phormium tenax, ou lin de la nouvelle Zélande, à Cherbourg et à Toulon ; sur la germination particulière de ses graines .et leur culture, — par M. Gillet de l’Aumont. PROCÈS-VERBAL De la séance solennelle et publique du 24 mai 1824. + Présidence de M. Roberge. À une heure, les portes de la grande salle de la bourse furent ouvertes au public; à une heure et demie, les membres résidants, les membres hono- raires , et plusieurs correspondants, nationaux , occupèrent les places qui leur étaient destinées. M. Roberge, président, ouvrit la séance par le discours suivant : « MESSIEURS, « La Société Linnéenne du Calvados ne « compte pas encore une année d'existence , et ES déjà ses travaux ont attiré l'attention sur elle, «_ et lui promettent un rang distingué parmi les « compagnies savantes. Pour la seconde fois, « elle se présente aux yeux du public, à quielle XXVIII SÉANCE PUBLIQUE vient rendre compte du résultat de ses recher- ches. Le résumé général va faire connaitre les productions qui ont été lues dans ses séances particulières , et elle a ordonné l'impression de celles qui ont été jugées dignes d'entrer dans le recueil de ses mémoires. Le premier volume , actuellement sous presse, paraîtra dans le courant du mois prochain , et , tous les ans, à la même époque, un pareil rapport et un volume nouveau constateront l’état et la marche de ses observations. On y verra que, fidelle au plan qu’elle s’est tracé, la Société Linnéenne , tout en s’occupant de l’histoire naturelle en général , se propose spécialement de l’étudier dans Les objets placés autour d’elle, afin de se mettre en état d’en donner par la suite un catalogue complet et raisonné, qui fixe la mesure des richesses naturelles du dé- partement , et le venge de lPoubli dans lequel il est resté jusqu'ici , faute de documents exacts sur ce qu'il offre d’intéressant. « Voilà , Messieurs , l’entreprise à laquelle chacun de nous est appelé à concourir , selon son goût et ses lumières. Elle sera couronnée du succès, si l’on en juge par le zèle que vous avez témoigné jusqu'ici, et par l'accord par- DU 24 Mar. XXIX fait qui n’a cessé de régner entre vous. Le premier pas est franchi; l'impulsion est donnée, et il ne reste plus qu’à poursuivre comme vous avez commencé. Les difficultés seront vaincues par votre persévérance , et le temps vous met- tra à portée de remplir l'engagement que vous avez contracté. La carrière n’est pas aussi longue qu’on se l’imaginerait d’abord : pour atteindre le but que nous désirons , il suffira de quelques années , au bout desquelles nous pourrons jouir de la satisfaction d’avoir con- tribué , autant qu’il était en nous , au perfec- tionnement des sciences naturelles , d’en avoir répandu le goût, et facilité l'étude dans le pays que nous habitons. « Le premier fruit que vous recueillerez , Messieurs , des recherches auxquelles vous allez vous livrer ; sera une foule de jouissan- ces particulières, qui accompagnent toujours la contemplation de la nature et l’exa- men des phénomènes qu’elle présente. En même temps que vous satisferez ce besoin de connaître qu’elle a imprimé dans le cœur de l’homme , vous occuperez votre espril de tout ce qu'il y a de beau , de grand, dadmirable dans la sphère de ses ouvrages. Lui Le] XX: SÉANCE PUBLIQUE La science des animaux a-t-elle de l'attrait pour vous ? quel charme n’éprouverez-vous pas à considérer cette variété presque infi- nie d'êtres si différents par leur figure , leurs habitudes et leur manière de vivre, à épier leur instinct, et à rechercher leur uti- lité dans le plan général ! Étes-vous épris des agréments de la botanique ? que d’heures dé- licieuses vous coulerez à examiner cette mul- titude de végétaux de toutes les grandeurs , de toutes les formes , qui ornent nos jardins, émaillent nos prairies , et font la richesse de nos vergers et de nos campagnes ; à voir se succéder leurs feuilles , leurs fleurs et leurs fruits ; à étudier leurs produits divers et les usages auxquels ils sont propres. Enfin, votre penchant vous porte-t-1l vers la minéralogie ? lesein de la terre vous promet des jouissan- ces non moins vives, non moins désirables, dans la nature et dans la disposition des cou- ches dont elle est formée, dans le grand nombre de roches, de bitumes, de sels, de métaux qu’elle renferme , et surtout dans ces débris d’êtres organisés qui attestent les révo- lutions dont elle a été le théâtre. Chaque pas que vous ferez sera marqué par une observa-- La DU 24 MAT. txt tion nouvelle et par un nouveau plaisir. Vous savez tous , aussi bien que moi, le contente- ment que l’on goûte à trouver un rapport ou une propriété qui avait échappé jusque-R , à passer d'une découverte à une autre, et à saisir chaque jour un nouvel anneau de la chaine qui lie ensemble tous les êtres. « Mais ce n’est encore là , Messieurs, que le moindre des avantages que procure la branche de connaissances que nous cultivons. Toute science qui ne produit rien d'utile à l’homme estune science vaine , et c’est surtoutaux nom- breuses applications qu’elle sait fournir que l'histoire naturelle est redevable de la considé- ration dont elle jouit. En indiquant la nature des êtres, leur structure et les lois auxquellesils sont soumis, elle met sur la voie pour découvrir l'usage auquel 1ls peuvent être employés, et la manière de les faire servir aux besoims ou à l’ornement de la vie. Instruite à son école, l’agriculture se perfectionne , l’industrie étend ses ressources , et les arts atteignent plus süre- ment le but qu'ils se proposent. C’est à de zélés naturalistes que l’Europe doit la plus grande partie des objets d'utilité ou d'agrément qu’elle offre aujourd’hui à ses habitants. Que defruits KXXTI | SÉANCE PUBLIQUE « «  a CN PS Lan] ils ont ajoutés à nos fruits ! que de fleurs à nos fleurs ! que d’ombrages à nos ombrages ! Si nous voyons le Dahlia du Mexique fleur à côté de la Camellie du Japon, et Acacia mêler sa verdure gaie à la sombre verdure des Thuyas ; si uneinfinité d’autres plantes, remarquables par leurs couleurs, par leurs parfums , sont venues habiter notre sol, c’est à leurs soins, et quelquefois à leur dé- vouement que nous en avons l’obligation.Ils ont traversé les mers , visité des côtes lointaines, et parcouru des déserts immenses , pour en- richir nos jardins , nos ménageries , nos col- lections. L'espoir de rapporter quelque végé- tal uule, quelque animal intéressant, a suflh pour les arracher à leur patrie , à ce qu'ils avaient de plus cher, et pour les soutenir contre les fatigues et les dangers inséparables d’un long voyage. C’est par eux que nous avons acquis la connaissance des diverses par- es du globe, des productions qu’elles ren- ferment, et que nous jouissons de ce qu'il y a d’agréable ou d’avantageux dans l’univers entier : notre reconnaissance pourra-t-elle ja- mais nous acquitter envers eux de ce que nous leur devons ? «( « DU 2/4 Mal. XXXIIT « Des recherches moins difficiles et peut-être aussi profitables nous attendent. Il ne s’agit point pour nous d'aller recueillir les. produc- tions étrangères , mais d'étudier celles qui nous entourent : nous aurons assez de quoi exercer notre sagacité, et nous pourrons rendre des services non moins importants. Déjà lhis- toire naturelle a été cultivée avec:succès dans notre département ; mais la: plupart de ceux qui s’en sont occupés ont gardé pour eux le fruit de leurs observations: rassemblons ces maté- riaux épars, joignons=y nos propres décou- vertes, et élevons-en au milieu de nous un mo- nument à la science. Que la Société Linnéenne soitun centre où les connaissances aboutissent, et d’où elles se répandent sur tous les points de notre territoire ; que les jeunes élèves y viennent puiser des lumières, en attendant qu'ils puissent nous en fournir à leur tour. Facilitons l’étude de la nature , et nous en inspirerons le goût : ceux qu’une marche em” barrassée et des principes épineux auraient rebutés se sentiront attirés par sa simplicité, et elle deviendra pour eux, comme elle l’est pour nous, une source inépuisable de jouis- sances et de consolations, » : 5 YXXIV. SÉANCE PUBLIQUE DU 2/4 MAI. M. DE Caumont , secrétaire , fit ensuite l'analyse des travaux de la société , depuis son origine jusqu’au 24 mai 1524. On entendit un mémoire de M. Pruquer , correspondant à Bayeux, sur quelques plantes du Bessin, et sur leur synonymie en patois de ce pays. M. Desconcnawps lut au nom de M. l'abbé De za Rue un mémoire historique sur l'étude de la botanique à Caen. M. Harpourx lui succéda ; 1l lut une notice de M. DE France, correspondant à Sceaux , sur Îles reptiles qu’on dit avoir été trouvés dans les pierres et dans la substance ligneuse de certains arbres. À trois heures la séance fut levée. Pour copie conforme : DE CAUMONT, ROBERGE, secrétaire. Fine président. AAA RE VVR VAR VAR VAN UVUUULLUURUUAUVR LA UV VAR LARUTULLASR VU UVR AAA AVR RAPPORT Sur les travaux de la Société Linnéenne du Calvados , depuis son origine jusqu'au 24 mai 1824, par M. DE CAUMONT, secre- taire, MEsstEuRs, La ville de Caen, située au centre du dépar- tement, sur un sol riche en terrains variés, et voi- sine de la mer, offre un vaste champ à l'étude de la géologie , de la botanique terrestre et mari- time, et de la zoologie. Ces circonstances heureu- ses y attirèrent souvent de savants étrangers ;: l’histoire naturelle y fut cultivée avec fruit, et le nombre des naturalistes s’accrut de jour en jour : bientôt le besoin de se communiquer réciproquement leurs idées se faisant senur d'avantage , ils résolurent de se réunir pour former une société ; tout sembla favoriser cette heureuse idée, conçue par M. Lamouroux, vers la fin de mai 1825 :le mois suivant vit son entière XXXVI RAPPORT SUR LES TRAVAUX exécution. Aussitôt que votre association fut connue, les savants les plus distingués du dé- partement , de la France, et de l’Europe entiere, s'empressèrent de s’unir à vous ; l’autorité pro- tégea vos efforts , et vos travaux obtinrent l’ap- probation de notre auguste monarque , qui se plaît à protéger tout ce qui contribue au progrès des connaissances humaines: de tels encoura- gements ne pouvaient produire que d’heureux résultats. La Société , bientôt formée sous le nom du plus célèbre des amis de la nature, distribua ses membres en trois sections, pour faciliter la répartition des travaux. La section de zoologie concut l’idée d’une faune départementale, ,. la section de: botanique s’oceupe avec succès dela Flore. du Calvados , et la section de minéralo— aie etde géologie décritles productions minérales de notre province (1). … Tels sont, Messieurs, l’origine et le but de nos réunions : appelé, dans ce jour solennel:ounous célébrons la mémoire de Linné, à rendre compte (1) Une commission , composée de MM. Ch. Taomine , Har- poux , Desconcuamrs, Roserce et ne Caumonr ; fut chargée de présenter un projet de division et répartition des travaux-re: latifs à la faune , la flore et la minéralogie du département. Le plan proposé fut imprimé et distribué à tous les membres, dans le courant du mois d’octobre 1823. DE LA SOCIÉTÉ LINNÉENNE. XXXVIL des travaux de la société depuis son institution, je vais vous en présenter un rapport succint , auquel les branches diverses de l'histoire natu- relle serviront de division. HISTOIRE NATURELLE ( Principes généraux |. M. Liécarp vous a communiqué ses idées sur l’affinité : 1l pense que cette force exerce la plus grande influence sur toutes*les molécules organiques et inorganiques qui constituent l’u- nivers. Les élérnents étaient confusément entassés, et composaient une masse informe , mçapable de rien produire , lorsque Dieu créa Paffinité , et la nature , gouvernée par ce puissant agent , forma bientôt un monde régulier , soumis à des lois in- variables. Votre confrère, après avoir rapporté à laffinité la formation des différentes masses minérales qui composent le globe terrestre , a examiné les phénomènes de la végétation. Il a prétendu que la germination , l'accroissement et la nutrition des plantes étaient dus en grande partie à la même force. L'économie animale est aussi sous beaucoup de rapportssoumise aux lois de affinité; la digestion et l'assimilation des païties nuirilives en sont lerésultat , et, dans les étres les XXXVIII RAPPORT SUR LES TRAVAUX plusparfaits, cette puissanceinconnue, qui agitdans le phénomène de la fécondation , n’est elle-même que l’affinité. Tels sont , en peu de mots, les prin- cipes que vous a développés votre confrère. SECTION DE ZOOLOGIE. M. AMELINE a soumis à la société plusieurs pièces artificielles destinées à reproduire avec une srande exactitude les parties du corps humain les plus composées. Cette ingénieuse invention, qui déjà a mérité les éloges de l’institut , facilite beaucoup l’étude de l'anatomie, en faisant dis- paraître toutes les difficultés de la dissection , et en permettant d'étudier cette science dans tous les temps et dans tous les lieux. Vous avez pu juger, par cette utile découverte , des profondes connaissances anatomiques de votre collègue. M. LamserT, de Bayeux, vous a appris que la baleine, qui habite aujourd’huiles mers gla= ciales , fréquentait autrefois les côtes de la Man- che : on assure que, dès l’année 675, il est question de baleines que l’on prenait. sur nos rivages ; Guillaume-le-Conquérant donna à Pab- baye de Sainte-Trinité de Caen la dime des baleines prises à Dives ; Raoult Tortaire, moine _ DE LA SOCIÉTÉ LINNÉENNE:. XXXIX de l’abbaye de Fleury-sur-Loire, qui a écrit en vers latins la relation d'un voyage qu'il fit à Bayeux au commencement du douzième siècle, décrit une-pêche de cétacés à laquelle il assista , et dont le résultat ne fut pas heureux. Il dit que les pêcheurs ont lPusage de percer les en- trailles de l’animal avec un trident, et que, lors- qu'il est blessé, 1ls Pamènent sur la rive. M. Debras rapporte un fait plus positif, en disant que long-temps avant lui une grande baleine vint s’échouer sur le sable de Bernières. Dans quelques bâtimens de la ville de Bayeux, on a trouvé à différentes époques des vertèbres employées comme matériaux dans la construc- tion des murs, et probablement placées à dessein pour perpétuer le souvenir de quelque capture de ce genre. Ces autorités sont-elles assez concluantes pour nous porter à croire que les animaux dont 1l s’agit étaient réellement des balemes? c’est une question que vous à adressée votre collègue, tout en se prononcçant pour Paflirmative (1). Vous avez entendu deux mémoires sur les (1) Peut-être ces animaux étaient-ils ‘des cachalots ou des. souffleurs, XL RAPPORT SUR LES TRAVAUX oiseaux, qui tous deux vous fourniront d’utiles documents pour la faune du Calvados : lun de M. CHesnon, sur les grimpeurs, signale dans notre pays le torcol, le pic-vert , le pic varié, le petit-pic, le moyen-épêche, le petit- épêche et le coucou; l’autre de M. ORANGE, sur les mésanges , nous fait connaître les mœurs singulières et la cruauté de ces petits oiseaux, dont il indique six espèces dans le département. Ce sont : la mésange charbonnière, la mé- sange nonette , la mésange bleue, la huppée, la petite charbonnière et la mésange à longue queue. La physiologie des reptiles offre des faits curieux pour l’observateur. M. Rever, votre sa- vant correspondant à Conteville, vous a entrete- nus de l’extrémedilatation des yeux du crocodile dans lobscurité, et de leur grande contraction quand ils sont exposés à la lumière ; cette fa- culté , qui appartient peut-être à la plupart des reptiles, donna probablement lieu à lopinion des riverains du Nil, qui croyaient, au rapport: de Plineet d'Hérodote , que les crocodiles avaient la vue percante au grand jour, et presque en- tèrement couverte au fond de l’eau. La dimi- nution de la lumière en ce dernier cas devait DE LA SOCIÉTÉ LINNÉENNE. XLI permettre à la pupille de se dilater , et l’éten- due qu'on lui voyait prendre pouvait être re- gardée comme le produit d'un effort de l’œil, comme s'il n’eût pu voir qu'avec peine les objets d’alentour. M. Rever vous a fait observer que notre langue manque encore de mots pour exprimer la faculté de voir la nuit, et pour indiquer les animaux qui en sont doués. il pense, avec un savant helléniste |, que l’on pourrait qualifier de nyctiope l'animal qui voit la nuit, et nom- mer nyctiopie la faculté de voir dans l’ombre. On a souvent ‘annoncé que, dans la substance hgneuse de certains arbres, dans des couches de houille et dans des masses de pierre, il s'était trouvé des êtres vivants, tels que des serpents , des crapauds, des lézards, des insectes, etc. sans que l’on ait pu concevoir comment ils y avaient pénétré, ni comment ils avaient pu y conserver la vie. Dernièrement encore un jour- nal anglais { Sillimans Journ. et Edimb. phil. Journ. av. 1820, p. ho2 ) à dit que des ouvriers occupés à tirer des pierres des couches de Erié canal à Lockport, dans le comté de Niagara, ont découvert, dans une pe- .: XLIT RAPPORT SUR LES TRAVAUX lite cavité du roc, un crapaud à l'état d’en- Sourdissement, et qui mourut quelques minutes après avoir été exposé à l’air : on ajoûte que la cavité pouvait à peine le contenir, elle ne communiquait en aucun point avec l’atmosphére, dont elle était séparée par un couche de six pouces d’épaisseur ; on n’a pas dit si c'était du grès ou du calcaire, cependant le voisinage de ce dernier fait penser que c'était du calcaire se- condaire. M. DsFrance, votre correspondant à Sceaux, vous a prouvé, dans une notice, l’im- possibilité de pareils faits, qui sont en contra- diction avec les principes fondés sur les obser- vations physiologiques les plus constantes, et ne pourraient s'expliquer qu’en supposant contre toute vraisemblance qu'un reptile s’est trouvé vivant dans les eaux de l'Océan, -qu'il y a été saisi par la pétrification, et que pendant plusieurs siècles 1l a conservé la vie sans prendre de nourriture et sans respirer: s’il en était ainsi, on trouverait également à l'état vivant des poissons et d’autres animaux dont on voit les squelettes en si grande quantité dans les pierres. Il est également impossible qu’un animal se soit trou- vé vivant dans la substance ligneuse des arbres, dont l'accroissement a lieu par l'application de DE LA SOCIÉTÉ LINNÉENNE. XLIII nouvelles couches sur celles qui sont déjà formées. M. LamBerT vous a donné sur l’esturgeon une note qui trouvera place dans la faune dé- parlementale, et vous a signalé la présence de ce poisson dans la baie d’Isigny. . Vous devez à M. FRÉDÉRIG DE LAFRESNAYE, votre correspondant à Falaise, un mémoire sur les calmars subulé et sépiole ( Lamk }, et sur la coloration spontanée dont tous les sépiaires pa- raissent susceptibles. M. Garon, de Dieppe, vous en a présenté un sur les causes de la co- loration des huîtres ; ils seront imprimés l’un et l’autre. M. BLor, de Colleville, vous a communiqué un travail sur les insectes des environs de Caen, et sur leurs qualités utiles et nuisibles; votre premier volume en contiendra lextrait. Il me reste à vous rappeler les travaux qui ont eu lieu sur la classe nombreuse des zoophytes. M. Lamouroux, auquel l’histoire naturelle doit déjà plusieurs ouvrages, vous a communi- _qué deux mémoires, l’un sur les échinoder- mes , et l'autre sur les éponges. Les échino- dermes appartiennent à la première classe des rayonnés où zoophytes : ils ont des muscles tres- XLIV RAPPORT SUR LES TRAVAUX distincts qui leur servent à exécuter des mou- vements compliqués; un système nerveux se distribue dans toutes les parties de leur corps, et, quoique peu apparente, son existence est cer- taine : les échinodermes n’ont point de sexes séparés, mais ils ont une grande puissance re- productive, et dans plusieurs genres une seule de leurs parties , isolée du reste du corps, con- tinue de jouir de la vie , et s’environne bientôt de ce: qui constitue l'animal parfait : l’organe di- gesuf est en général fort simple dans ces ani- maux; quelquefois c’est un canal intestinal à deux ouvertures, la bouche et l'anus; d’autres fois cet organe est en forme de sac à une seule ouverture , qui sert à la fois à introduire les subs- tancés alimentaires et à en rejeter le superflu. Les échinodermes ne se réunissent jamais pour former des animaux composés , aucun d’eux ne jouit des facultés phosphorescentes ou lumineuses ; répandus dans toutes les mers, ils sont plus grands et plus variés entre les tropi- ques; enfin, on trouve des échinodermes fossiles dans tous les terrains, depuis ceux de transi- tion jusqu'aux plus modernes. | Les éponges ont fourni à M. Lamouroux le sujet de son second mémoire, dans lequel, après DE LA SOCIËTÉ LINNÉENNE. XLV avoir résumé brièvement ce qu'il avait écrit de ces amimaux dans son ouvrage sur les polypiers coralligènes , il vous a exposé. les différents sys- tèmes émis jusqu’à nos jours sur les éponges ; on peut les réduire à trois hypothèses principales: la première considère la substance gélatineuse de l’éponge comme l’animal lui-même, dont la forme est subordonnée à celle de la masse fi-- breuse qui lui sert de squelette ; la deuxième diffère de la premitre par la présence de po- lypiers dans la substance gélatineuse, peu im- porte la: simplicité de leur organisation ; la dernière consiste à regarder les éponges comme une masse ‘entièrement animée, que l’on ne peut diviser sans détruire le principe vital ré- pandu dans toute son étendue , dans laquelle il n'existe point d'organes apparents,et qui se nourrit d’animalcules où bien uniquement des éléments de l’eau qui se décompose par un phénomène difficile à concevoir. | Cette dermière hypothèse paraît la moins pro- bable : en adoptant l’une ou l’autre des deux premières, les éponges sont évidemment des polypiers corticifères. M. Lamouroux, passant ensuite à la descrip- uon des êtres qui font le sujet de son travail, KLVI RAPPORT SUR LES TRAVAUX vous a appris que, dans les éponges, la repro- duction paraît s’opérer , tantôt par des corpus- cules analogues aux œufs de plusieurs z00- phytes, tantôt par une sorte de scission, de pullutation de la manière gélatineuse ; ce sont des espèces de bourgeons qui se détachent de la surface du corps lorsqu'ils ont acquis un cer- tan accroissement. Les éponges, comme les autres animaux, ont des organes propres à la digestion ; elles se . nourrissent de ces infusoires si nombreux ‘dans les mers, et dont le mycroscope nous fait voir des lésions innombrables dans une seule goutte d’eau ; elles sont très-varices dans leurs formes , les fibres qui les composent sont plus ou moins tenues, plus ou moins élastiques , quel- ques-unes ont des fibres aussi roides, aussifragiles, et presqu’aussi dures que celles de la pierre-pon- ce , et pourraient servir à expliquer l'état fossile dans lequel on trouve un grand nombre d’épon- ges, silétait prouvé que des polypiers mous ne pussent se pétrifier, Les éponges offrent dans leur contexture des trous. plus ou moins lar- ses , plus où moins profonds, situés régulière- ment ou irrégulièrement, et dont la destination est peu connue : on prétend qu'ils servent à DE LA SOCIÈTÉ LINNÉENNE. XLVIE l'introduction de l’eau dans les parties centrales du polypier , afin que les polypes de l’intérieur puissent prendre de la nourriture ; cependant cette destination n’est pas prouvée, puisque beaucoup d’éponges sont privées de ces trous. En général les éponges sont variées en cou- leur : parmi celles que M.Lamouroux a observées sur les côtes du Calvados, il en a vu qui, au sortir de la mer, étaient d’un beau rouge, d’autres qui étaient fauves , blanchätres , ou d’un jaune citron très-vif. La grandeur des éponges varie depuis un mil- limètre ( une demi-ligne } jusqu’à quinze déci- mètres et au-delà (‘environ cinq pieds ); elles sont très-communes entre les tropiques, leur nombre etleur grandeur diminuent en se rappro- chant des pays froids; elles disparaissent pres- que entièrement dans le voisinage des cercles polaires, bien différentes en cela des plantes marines , qui tapissent en si grande quantité les mers glacées des deux pôles ; les éponges se trou- vent à toutes les profondeurs, sur les rochers, et dans les lieux les moins exposés à l’action des vagues ; quelques-unes sont parasites, ces dernières sont rares et en général tres-petites ; XLVIIT RAPPORT SUR LES TRAVAUX la vie de ces êtres varie dans sa durée autant que celle des polypiers. On connaît maintenant plus de 250 espèces d’éponges ; le nombre de celles qui ont échappé aux voyageurs doit être plus considérable, si l’on considère la quantité croissante de ces animaux vers les tropiques. ie Les éponges fossiles ne sont pas très-com- munes dans la nature , plusieurs: zoologues ont mème douté de leur existence, mais à tort; les environs de Caen en présentent une grande quantité, et sont une des localités les plus ri- ches en cé genre de productions : parmi celles que votre confrère y a trouvées , quelques-unes ont leurs analogues vivantes. | Enfin M. Suriray, docteur en médecine au Hâvre, vous a lu un mémoire sur les polypes d’eau douce:1l a répété et confirmé plusieurs expé- riences du célèbre Tremblai, qui lni ont donné lieu de faire des. observations nouvelles sur la physiologie de cette classe d’animaux : dans les environs du Hävre ils sont peu abondants, on n’y a encore renconiré que l'hydre verte, l’hydre grise, Phydre pâle et l’hydre brune. DE LA SOCIÈTÉ LINNÉENNE. XLIX SECTION DE BOTANIQUE Votre savant confrère, M. l'abbé De La Rue, vous a lu un mémoire sur l'étude de la Bota- nique à Caen jusqu'à l'établissement du Jardin des plantes ; cet inléressant travail sera im- primé. Il semble que l'obscurité où vivent les ra- cimes les ait fait négliger des naturalistes, ou au moins les ait souvent soustraites à l’obser- vation. M. Cosrin vous a soumis quelques con- sidérations physiologiques sur cet important organe des plantes. La place des racines est constamment déterminée , et toutes les parties des végétaux polycotylédonés ligneux peuvent en produire , lorsque ces parties sont envelop- pées de terre ou d’une atmosphère humide. Cet organe se développe plus ou moins, et se dirige dans tous les sens, suivant la nature du végétal auquel 1l appartient et du milieu dans lequel il croit. Sous le rapport de l’organisation des racines, votre confrère a prétendu, contre l'opinion de M. pe Caxporre, l’un de vos cor- respondanis, que la moelle existe dans la racine des plantes polycotylédonées ligneusés, et ne s’ar-  L RAPPORT SUR LES TRAVAUX rête point au collet après avoir parcouru toute la longueur dela tige, comme le prétend cet auteur célèbre. Ce n’est, suivant M. Cosris, que dans les ramifications qu’elle disparaît ; mais, quoique privées de moelle centrale, ces parties offrent encore des rayons médullaires di- vergents du centre à la circonférence, et la moelle intérieure semble être remplacée par le grand développement du tissu cellulaire ordmairement blanc et très-poreux qui existe entre le corps ligneux et l’écorce. Votre confrère a ensuite considéré les racines’ sous le rapport de leur développement et de leurs fonctions , dans les différents milieux où elles se trouvent, eu égard aux différents âges de la plante. La terre qui environne les racines est plus onctueuse que l’autre, et quelquefois elle ré- pand une odeur fétide , ce qui, selon M. Cosrin, ne peut être produit que par l'humidité de la partie extérieure des racines. En effet, on ne peut guère supposer une absorpiion sans une excrétion , et les sucs continuellement absorbés par les racines ne se combinent pas entière- ment avec les végétaux. On a souvent nié l’existence des racines dans les plantes qui s’attachent aux corps les plus durs, DE LA SOCIÉTÉ LINNÉENNE. Li telles que les fucus et les lichens, ou qui flottent sur les eaux, comme les conferves ; cependant cette opinion ne sera pas décisive, si l’on con- sidère l’extrémité de celles-ci comme des racines flottantes dont nous ne pouvons distinguer la tige, et l’eau comme un point d'appui assez solde eu égard à la ténuité de ces végétaux : dun autre côté, suivant M. Lamouroux , beaucoup de” plantes marines, des lichens et d’autres plantes terrestres, semblent choisir les substances qui doivent leur servir de support ; elles en retirent donc, du moins à la première époque de leur croissance , quelque aliment qui leur est absolument nécessaire, et ces subs- tances ne servent donc pas uniquement à les empêcher d’être le jouet des vents, ainsi que quelques botanistes l'ont avancé ; une expérience aisée à faire confirmera ces propriétés des racines : si l’on met les semences de plusieurs fucus dans un vase très-grand, dont lé fond soit couvert de fragments de roches de nature différente , on pourra reconnaître l’affinité qu'ont certaines espèces pour certaines matières ; afli- nité, si l’on peut se servir de cette expression , qui ne varie jamais, et qui souvent se déelare de la manière la plus évidente , au point que, LIT RAPPORT SUR LES TRAVAUX si l’on sort du vase la matière propre à recevoir une espèce quelconque , cette espèce ne paraîtra point, tandis que, si l’on y laisse Le moindre frag- ment de cette matière, ne puüt-elle supporter qu'une seule racine, on verra le végétal naître et se développer ; beaucoup de plantes lichena- cées ne croissent que sur des rochers ou sur des plantes qui leur sont propres, et on ne les trouve jamais sur d’autres corps , semblables aux insectes parasites qui ne peuvent vivre qu'aux dépens d’une seule espèce , soit animale , soit végétale. On sait que les polypes s’attachent indistinc- tement à tous les corps solides, qu'ils peuvent se fixer sur une lame de verre , de métal, et qu'ils n’en altèrent pas la surface : 1l n’en est pas de mème des végétaux ; on peut toujours remarquer, sur le corps qu'ils ont choisi , une rugosité , une altération qui indique une décomposition de la matière. Ges faits constatés ont porté votre col- lègue à conclure qu'aucun végétal n’est dépourvu de racines. M. Alphonse DE BRÉBiISsOoN vous a envoyé, sous le titre d’Aerborisations dans les environs de la ville de Falaise ,un mémoire sur les plantes peu communes qui eroissent. spontanément dans DE LA SOCIÉTÉ LINNÉENNE. LIT le voisinage de cette ville : lauteur y indi- que le site et la localité de 354 espèces , tant cryptogames que phanérogames , dont près de la moitié n’ont point encore été trouvées dans Par- rondissement de Caen, ou y sont très-rares. Il en a même décrit quelques-unes qu'il regarde comme tout-a-fait nouvelles (1) ; le grand nombre de vé- getaux intéressants que M. DE BRÉBrsson a re- cueillis dans un espace aussi borné, en même temps qu'il atteste la richesse et la variété de la végétation de Parrondissement de Falaise, fait honneur au zèle et aux recherches de notre cor- respondant. Je regrette de ne pouvoir citer toutes les plantes curieuses indiquées dans la notice de M. pe Br£Bisson , qui trouvera place dans la Flore du Calvados. Il en est beaucoup qui ap- partiennent spécialement aux provinces méridio- nales de la France, d’autres qui ne se trouvent que dans les pays de montagnes ; je me conten- (1) 1°, Euphorbia intermedia (De Bréb. ). Gaule basi ramo- so , ramis adscendentibus , fertilibus , foliis distantibus , obtu- sis , umbellà dichotomä , involucellis cordatis, petalis lunatis, capsulis glabris. 2°. Rhinanthus secunda ( De Bréb.). Gaule ramoso , glabro, atro-purpureo, foliis lineari-lanceolatis, serratis, floribus termina- Jibus, spicatis secundis , calycis compréssi carinis ciliato-hirsu- tis; flores lutei ; corollæ infcriore labio duobus punctis nigres- centibus notato. Junio. Liv RAP PO :T SUR LES TRAVAUX terai de mentionner les espèces suivantes, qui sufiront pour donner une idée de ce que les en- virons de Falaise offrent d’intéressant aux bo- tanistes : Narcissus Poeticus (L.) ; Ornithogalum Pyrenaicum ( F1. fr. ) ; Allium Carinatum (L.) ; Coridalis Claviculata (F1. fr. ); Ur- tica Pilulifera (L.); Marchantia Fragrans ( Balb. ) ; Ranunculus Gramineus (LL. ); Teu- crium Montanum (Schreb. ) ; Cirsium Tu berosum ( All. ); Datura Stramonium (1. ); Jungermannia F'entricosa(Dicks.);Corricula- ria Bicolor ( Ach. ) ; Phascum Curvicollum (Hedw.); Galium Bocconi ( Al. ); Coro- nilla Minima (1. ); Epipactis Mycrophylla (Sw. ); etc. Vous devez encore à votre laborieux confrère, M. Alphonse ne BrÉgisson, un mémoire fort intéressant sur les orchidées qui croissent na- turellement dans notre département ; ce travail , destiné à former le n°. 22 de la Flore du Cal- vados , signale 3/4 espèces d’orchidées , ce qui surpasse tout ce qu’on en avait découvert jusqu'ici dans notre pays, et ce qui fait presque les deux DE LA SOCIÉËTÉ LINNÉENNE. LV tiers de ce qu’on en connaît dans toute la France. Plusieurs autres numéros de la Flore ont été traités : M. Harvouin vous a lu deux mémoi- res, l’un sur les genres Salicornia, Hyppuris et Callitriche ; Vautre sur les genres Ligustrun, Syringa et Veronica. | Deux tableaux synoptiques des genres compris dans la didynamie , et destinés à précéder cette classe, vous ont été présentés par M. userr, qui se propose de traiter le n°. 15 de la Flore, et qui déjà vous a décrit les différentes espèces des genres Æjuga et Teucrium. Un Bromus singulier trouvéà Sallenelles , sur les bords de l'Orne, a donné lieu à M. Tno- MINE de vous en faire la description, qui se trou- vera dans votre premier volume. La cryptogamie sera toujours la casse la moims connue du règne végétal : la plupart des plantes qui la composent offrent peu d'intérêt parelles- mêmes; la manière dont elles croissent et se re- produisent est encore enveloppée de ténèbres , et, malgré les recherches de plusieurs savants mo- dernes , leur histoire est loin d'être complète. M. RoBerGE, votre président , vous a présenté sur ce sujet quelques idées générales , dans lesquelles il considère sous leurs différents points LVI RAPPORT SUR LES TRAVAUX de vue les végétaux cryptogames, et signale les principaux caractères par lesquels ils diffèrent du reste des végétaux. Le même vous à communiqué un mémoire contenant la description détaillée de plusieurs espèces de mousses qui croissent dans les environs de Caen. 5 On a souvent trouvé dans les départemenis- de l'Orne, du Calvados et de la Manche , des truffes inconnues jusqu'ici : M. Desroncramrs Vous en a décrit une espèce , recueillie dans les environs de Caen; son travail sera inséré dans voire premier volume. | : Quoique Pétude des productions naturelles du Calvados doive nous occuper spécialement, il nous importe cependant de connaître aussi celles des départements voisins ; ce rapprochement fera juger de ce qui leur est commun à tous, et de ce qui appartient exclusivement à chacun d'eux. La végétation de la Manche n’avait été étudiée que superficiellement et en passant ; M. pe Gervizce, votre savant correspondant à Valognes, a envoyé à la société le catalo- sue des plantes qu'il-a recueillies dans son dé- partement ; ce catalogue contient lindication précise du site et des localités de 981 espèces, DE LA SOCIÈTÉ LINNÉENNE. LVit rangées suivant le système sexuel, et appartenant toutes à la phanérogamie et au premier ordre de la cryptogamie, qui comprend les équiséta- cées, les fougères et les rhizospermes de la mé- thode naturelle: la plupart de ces plantes se trouvent également dans le Calvados; mais il en est un certain nombre qui paraissent propres au midi de la France et aux côtes de la Mé- diterranée et de l'Océan, avec lesquelles les côtes de la Manche ont beaucoup d’analogie sous le rapport atmosphérique (1). De son côté, M. ps La CnaPezze, votre cor- (1) Dans le nombre des plantes recueillies par M. De Gerville, voici celles sur lesquelles j’ai cru devoir principalement fixer l'attention. Pinguicula Lusitanica (L.); Ixia Bulbocodium (L.); Schænus. Ferrugineus (L.); Scirpus Cœspitosus (L.); Scirpus Glaucus (Smith.); Lagurus Ovatus (L.); Alopecurus Monspeliensis (L.); Milium Lendigerum (L.); Agrostis Setacea (Smith.); Poa Ma- ritima (Wild.); Poa Distans (L.); Dactylis Stricta (Wild.); Cynosurus Echinatus (L.); Rotthboellia Incurvata (L.); Bufonia Tenuifolia (L.); Vinca Major (L.); Scandix Odorata (L.); Smyrnium Olusatrum (L.); Statice Oleifolia (Scop.); Linum Augustifolium (Huds.); Narcissus Poeticus (L.); Convallaria Verticillata (L.); Rumex Scutatus (L.); Dianthus Caryophyllus (L.); Dianthus Cosius (Smith.); Arenaria Peploïdes (L.) ; $e- dum Dazyphyllum (L.); Euphorbia Peplis (L.) ; Euphorbia Port- landica (L.); Prunus Insilitia (L.); Aconitum Napellus (L.); Helleborus Niger (L.); Scrophularia Scorodonia (L.); Lepidium LVIII RAPPORT SUR LES TRAVAUX respondant à Cherbourg, vous a adressé une notice sur lPétat de la végétation aux environs de cette ville: il annonce qu'il y a recueilli 1000 espèces de plantes, parmi lesquelles :l s’en trouve un certain nombre qui n’ont été indiquées jusqu'ici que sur les côtes de Océan et de la Méditerranée; tels sont : lixia bul- bocodium, le statice plantaginea , le triticum acutum;le sticta crocata,les roccella phycop- sis et fuciformis , le physcia flavicans , Vhy- menophyllum tunbridgense et l’asplenium ma- rinum. L'auteur attribue à l’état géologique de Petreum (L.); Geranium Moschatum (L.); Geranium Malacoi- des (Wild.)}; Fumaria (Claviculata (L.); Genista Pilosa (L.); Onvnis Repens (L.); Lathyrus Latifolius {(L.); Vicia Sylvatica (L.); Trifolium Alpestre (L.); Trifolium Suffocatum (L.); Hy- pericum Androsœmum (L.); Tragopogon Porrifolium (L.); San- tolina Maritima (Smith); Erigeron Canadense (L.); Erigeron Viscosum (L.); Senecio Aquaticus ( Huds.); Senecio Sarace- nicus (L.); Doronicum Pardalianches (L.); Anthemis Mariti- ma (L.); Satyrium Albidum (L.); Ophrys Loeselii (L.); Garex Pauciflora (Smith.); Carex Axillaris (Good.); Garex Teretiuscula (Good.);CarexClandestina(Good.); Urtica Pilulifera(L.);Salix ros- marinifolia (L.); Salix myrsinites {L.); Salix Herbacea (L.); Salix Argentea (Sowerb.); Mirica Gale (L.); Atriplex Pedun- culata (L.); Asplenium Marinum (L.); Asplenium Lanceolatum (Huds.); Polypodium Phegopteris (L.); Polypodium Thelyp- teris (L,); Polypodium Rhæticum (L.); Polypodium Cristatum E.); Hymenophyllum Tunbridgense (L.); DE LA SOCIÉTÉ LINNÉENNE. LIX celte partie du département de la Manche la richesse et la variété de la végétation dans l’arron- dissement de Cherboure. Il est intéressant de connaître le nom des plantes dans le moyen âge, de savoir quelles idées superstitieuses nos ancêtres y ontattachées, et quelles vertus médicinales on leur attri- bue encore dans les campagnes. Un de vos con- frères, M: Pruquer, qui depuis long-temps consacre constamment ses loisirs aux études ar- chéologiques , vous a entretenus de l’origine, la culture et l’usage de quelques plantes du Bessin, avec leur synonymie en patois de ce pays; ce travail sera inséré dans le recueil de vos mé- moires. SECTION DE GÉOLOGIE. Les progrès de la géologie sont mcontestables: encore dans l'enfance 1l y a peu d’années, elle est parvenue de nos jours au niveau des scien- ces le plus anciennement cultivées. Les géologues de Pancienne école voulaient tout expliquer à l’aide des conjectures et deshypothèses les plus invraisemblables ; presque tous les au- teurs de pareils systèmes, a dit M. Cuvier, IX RAPPORT SUR LES TRAVAUX n'ayant eu égard qu’à certaines difficultés qui les frappaient plus que d’autres, se sont attachés à résoudre celles-à d’une manière plus où moins probable, et en ont laissé de côté d’aussi nom- breuses et d’aussi importantes: tel n’a vu, par exemple, que la difficulté de changer le niveau des mers ; tel autre que celle de faire dissou- dre toutes les substances terrestres dans un seul et même liquide; tel autre, enfin, que celle de fare vivre sous la zône glaciale des animaux qu'il croyait de la zône torride : épuisant sur ces questions les forces de leur esprit, ils croyaient avoir tout fait en imaginant un moyen quelconque d’y répondre; il y a plus, en négli- geant ainsi tous les autres phénomènes , ils ne songeaient pas même à déterminer avec préci- sion la mesure et les limites de ceux qu'ils cher- chaient à expliquer. Les géologues modernes , instruits par les erreurs de leurs devanciers , se contentent d'observer les faits et d’en tirer les conséquences que l’on peut en déduire rigoureusement , mais sans chercher à en expliquer les causes. M. Faucon a passé en revue toutes les hy- pothèses émises sur la formation du globe ter- restre : je regrette de ne pouvoir vous parler DE LA SOCIÉTÉ LINNÉENNE, LXf des nombreux systèmes reproduits par notre col- lègue avec une grande clarté ; mais, outre que ces sortes de matières sont peu susceplibles d’a- nalyse, la simple exposition de leurs théories diverses dépasserait de beaucoup les bornes que je me suis prescrites. Il y a déjà plusieurs années que M. DE ra Foxe découvrit le béril dans les environs d’Alencon ; vous lui devez sur ce minéral une note qui sera insérée dans votre premier vo- lume. Le département du Calvados contient une grande variété de terrains intermédiares ; M. HerauzT vous en a fait la déscripüon dans un mémoire qui sera imprimé. M. Lauserr, de Bayeux, vous a prouvé que le marbre de Vieux a été employé avantageuse . ment sous les Romains et dans le moyen âge ; il s’est ensuite attaché à faire connaître la nature de ce calcaire intermédiaire , et l’avantage que l'on retirerait d’une exploitation bien conduite. M. Micnor vous a appris que les roches de Falaise, situées au sud-ouest de la ville près de la route de Vire, sont un quartz grenu au- quel succèdent les grès, les phyllades ets autres substances du terrain intermédiaure ; elles lais- LXTI RAPPORT SUR LES TRAVAUX sent entre elles un vallon étroit baigné par la ri- vière d’Ante. La pente générale est vers le nord- est; on voiten face du château, à l’extrémité de la bruyère de Noron, un banc de schiste , dont la puissance augmente de plus en plus vers le faubourg Saint-Laurent à l’est de la ville: les rochers quartzeux de Saint-Quentin, qui for- ment la gorge connue sous le nom de Brèche- au-Diable, à deux lieues au nord de Falaise, sont analogues aux précédents. Votre confrère - n’a pas négligé de vous entretenir de la Grotte- aux-Fées, de l'autel du dieu Teutatès et des traditions attachées aux roches de Noron : con- vaincus sans doute, par une profonde connais- sance du cœur humain, que l'émotion prépare aux sentiments religieux, et que l’admiration , l’étonnement , la crainte, en un mot toutes les grandes sensations morales , portent invincible- . ment vers l’auteur de toutes choses, les Druides choisissaient pour leurs sacrifices les lieux où la nature se montre le plus imposante ; et, tandis qu’à Bayeux 1ls célébraient leurs mys- tères dans la sombre forêt du mont Phaunus, les rochers et les bruyères arides de Falaise étaient témoins de leurs cérémomies en lPhon- neur des divinités gauloises. DE LA SOCIÉTÉ LINNÉENNE. LXI1 M. ne CaumonT vous a fait part de ses ob- servations sur la nature et sur la superposition des terrains situés aux environs de St. - Clair , de Carentan et de Valognes ; son travail se trou- vera dans votre premier volume. Lemême vous a lu,sur la géologie de l’arrondis- sement de Bayeux , deux mémoires qui seront im- primés : dans Le premier,il a fait connaître lé sable des environs de cette ville, etles bancs de galets quartzeux d’ancienne alluvion, inférieurs au grès rouge allemand , qui se voient au Molay et autres lieux voisins : dansle second, il s’est attaché à faire connaître la nature et l'étendue des bancs calcaï- res de l’arrondissement de Bayeux , et a donné la description des falaises qui bordent les côtes entre l’embouchure de la Seule et la rivière de Vire. Vous devez à M. De Macnevize deux mé- moires sur le calcaire à polypiers , qui font con- naître , non seulement cette formation, mais. encore tout l’ensemble des terrains secondaires du Calvados : votre collègue est le premier qui ait écrit sur la géologie de ce département , et ses ouvrages ont été un guide fidelle pour tous ceux qui l’ont étudiée après lui ; ces deux mémoires seront insérés dans le volume que vous publierez prochainement, LXIV RAPPORT SUR LES TRAVAUX M. zeNeur ve Neuvizce a décrit avec détail la nature et l'épaisseur des différents banes du calcaire de Caen dans les carrières de la Mala- derie ; il a donné sur chacun d’eux des rensei- gnements qui non-seulement seront d’une très- grande utilité pour les travaux publics et parti- culiers , mais qui ne sont pas sans intérêt pour l'étude de la géologie. Ce travail sera imprimé par extrait. M. LuarD vous a donné des détails curieux sur les terrains calcaires qui occupent le terri- toire de Vaucelles, Allemagne, Mondeville, [fs et Cormelles , aux environs de Caen ; il y a joint une coupe soignée des carrières de Vaucelles et d'Allemagne. Votre confrère est un de ceux qui découvrirent, en18 18, le superbe crocodile fossile qui orne noire muséum. M. Pruquer, votre correspondant à Bayeux, a jeté un coup d’eal sur la plupart des substan- ces minérales ou fossiles des environs de cette ville. Voici quelques-uns des faits dont il vous a entretenus : | Les phyllades occupent le territoire de Plan- query et de Castillon ; dès le XIVE. siècle, il y avait, comme aujourd’hui, dans ces deux pa- roisses , de vastes carrières d’ardoise , qui était DE LA SOCIÉTÉ LINNÉENNE. LXV. alors appelée pierre arguëne , argéne ou argenne. | La mine de houille de Littry , source impor- tante de prospérité pour Pagriculture et le com- merce du pays , fut découverte en 1740 par M. Auguste De la Cour, de Balleroy , en cherchant du minerai de fer. La couche exploi- tée se trouve à 300 pieds de la surface du sol, parmi des bancs de schistes ; on y voit des em- preintes de fougères exotiqnes, des troncs de palmiers et plusieurs autres plantes monoco- tylédones : il paraît, d’après les recherches de. HÉRAULT , ingénieur en chef des mines, que des terrains volcaniques très-variés forment le mur inférieur. La terre de Lison est voisine ou fait partie du terrain houiller ; aussi la retrouve - t - on au Molay et autres communes environnantes, où ce terrain existe. On fabrique avec la terre de Lison une poterie assez grossière ; mais 1l y a lieu de croire que des mains habiles pourraient en obtenir une plus belle , car les débris de vases romains que l’on trouve si souvent à Bayeux, dans le quartier dit de la Poterie, sont fabriqués avec une terre de même nature. Les troncs d'arbres plus ou moins carbonifiés ‘9 LXVI RAPPORT SUR LES TRAVAUX que l’on a trouvés au pont du Vey, à une pro- fondeur de12 à 15 pieds,sont pesants, très-tendres en sortant de la terre , mais susceptibles d’acqué- rir une grande dureté au contact de lair ; ce bois peut servir à la menuiserie, il brüle lente- ment et sans flamme , sa cendre contient de la chaux , de la silice, de la magnésie et du fer: ce bois se découvre en énorme quantité dans beaucoup d’endroits , et notamment aux environs de Carentan dans le bassin de la Tante. Je vous ai présenté moi-même quelques ob- servations sur les catastrophes qui ont ainsi renversé des forêts entières , et je vous ai rappelé des faits très-étonnants : dans certai- nes localités, au milieu de buttes élevées , on voit des marais circonscrits et sans écoulement, qui sont remplis de pareils arbres :1l n’est guère probable que ces végétaux soient tombés des buttes voisines , souvent arides et stériles, et l’on ignorera probablement long-temps leur or1- oine ; ce qu'il y ade certain, c’est que presque tous les lieux marécageux et tourbeux présentent le même phénomène. | | M. PLUQUET à terminé son mémoire en vous parlant de M. Petite , qui publia une carte du diocèse de Bayeux en 1676 ; cet ecclésiastique, l'un des premiers naturalistes du Bessin, fait DE LA SOCIÉTÉ LINNÉENNE. LXVIL ainsi l’énumération des merveilles que ce pays renfermait de son temps : 1°, Le bois de sapins et les avenues de Bal- leroÿ. — 20. L’if du cimetière de St.-Germain- d'Elle. — 3°. Le chêne de St.-Nicolas-de-la- Chênaye. — 4°. L’orme de Longues. — 5°. Le ülleul de Cangy. — 6°. Les fosses du souci, — 70. Le rocher du Calvados. — 8°. Les herbes et la mousse pétrifiées de Sts.-Honorine. — g°. Les grèves déliées d’Asnelles. — 10°. La terre tremblante de Cremelles. _ 1r°. Le jardin des plantes curieuses de M. Dozeville à Ver. — 120, Le flux de la mer qui soulève le sable, et coule en ruisseaux deux fois par jour entre Vaucelles et Bayeux. Votre collègue vous a observé que la dernière merveille lui semblait tout-à-fait fabuleuse , et vous a exposé les raisons qui le portent à croire que ce phénomène n’a jamais eu lieu ; quant aux autres, qui d’ailleurs seraient pour nous des choses très-ordinaires , plusieurs d’entre elles n’existent plus. | Les terrains du pays que nous habitons sont très-riches en fossiles ; des bancs d’une étendue considérable semblent n'être formés que de co- quilles | d’autres présentent une multitude de madrépores : plusieurs de vos collègues s’occu- LXVIII RAPPORT SUR LES TRAVAUX pent avec succès de recueillir et de classer ces différentes pétrifications. M. DesroncHamps vous a fait on les Gervillies (1), genre de coquilles fossiles très- intéressantes et incomplètement décrites jusqu'ici; on n’en connaissait encore qu’une espèce, notre collègue en a découvert quatre nouvelles, dont vous trouverez la description dans votre premier volume. Un autre de vos confrères, M. DE Basocnes de Falaise , a trouvé dans le calcaire à polypiers une coquille turriculée d’une très-grande dimen- sion; votre premier volume en contiendra le des- sin et la description. Mais, s’il est utile de décrire des espèces nou- velles, 1l n’est pas moins intéressant de jeter un coup d'œil sur l’état de la science dans les siècles qui nous ont précédés ; votre correspon- dant, M. Jules Desnovers, vous a entretenus des préjugés enfantés par ere de l’orycto- gnosie. L'histoire seule des ammonites, ce genre de fos- siles si nombreux, si Un Li et dont les na- iuralistes ont été quelquefois embarrassés , sufli- rait pour étonner : adorées par les Éthiopiens qui (1) Ce genre a été dédié par M. ve France à M. ne Ger- ViLLE , naturaliste distingué de Valognes. | DE LA SOCIÉTÉ LINNÉENNE. LXIX y retrouvaient les cornes de leur Jupiter Am- mon, douées à leurs yeux, selon Pline, de la merveilleuse vertu d’inspirer des songes divins , ces coquilles ont été ensuite, durant de longs siècles, considérées comme des serpents naturel- lement ou miraculeusement pétrifiés , offertes en exæ-voto, regardées comme des jeux du hasard; encore aujourd’hui , sur les bords du Gange , elles sont consacrées au culte de Brama, que les In- diens croient caché sous leur enveloppe mysté- rieuse. Votre confrère vous a encore entretenus des bélemnites long-temps crues lancées par foudre , des dents de squale prises pour des langues de serpent , des empreintes merveilleuses de pieds devinés souvent dans des empreintes de coquilles , des ossements de grands animaux qua- drupèdes et de cétacés , conservés comme des os de géants ou de monstres miraculeusement détruits , et d’une foule d’autres préjugés en his- toire naturelle : je vous ai dit à ce sujet que, dans le XEVE. etle XVe. siècle, on ornait le maitre- autel de la cathédrale de Bayeux avec des objets curieux ; les Le fossiles RIRE: servaient surtout à cet usage. La minéralogie appliquée aux arts ne doit pas moins nous intéresser que l’étude même de cette ; science : nous devons à M. Mrcuez { Jules }, LXX RAPPORT SUR LES TRAVAUX officier d'artillerie à Cherbourg, un mémoire fort intéressant sur le procédé suivi à Yndret, près Nantes, pour la fonte des canons en fer. Une partie intéressante de votre tâche , Mes- sieurs , est de contribuer à enrichir le muséum d'histoire naturelle que les soins de M. de M4- GNEVILLE ct la coopération efficace de l’adminis- tration ont créé dansla ville de Caen : cet établis— sement précieux , destiné à contenir les produc- tions animales, végétales et minérales du Calvados et des départements voisins , renferme plusieurs objets de cette nature recueillis dans vos courses. Je ne terminerai pas sans payer un juste tribut d’éloges au zèle de plusieurs de vos confrères qui ont formé un atelier de lithographie: M. Desconcuamps , aidé de MM. Tnomxe, Har- DOUIN, DE CAUMONT , et de votre imprimeur M. Théodore GHaropin, est parvenu à vaincre la plupart des grandes difficultés attachées au ti- rage des dessins lithographiés ; vous en sentirez bientôt l'avantage , et tout porte à croire que dé- sormais vous pourrez vous passer des presses de la capitale. Telle est, Messieurs, l'analyse succinte de vos travaux depuis la fondation de notre ‘société jusqu’à ce Jour : 1ls prouvent le zèle que vous mettez dans vos recherches, el mériteront à notre associa- DE LA SOCITÉ LINNÉENVE. LXXI üon un rang distingué parmi les compagnies sa- vantes ; mais, s il est flatteur de pouvoir avant une année d'existence offrir au public le recueil de nos ouvrages , n'oublions pas, Messieurs, que nous n'avons fait que quelques pas dans la car- rière des sciences, dont l'étude doit occuper notre vie entière ; que nous n'avons encore recueilli que quelques épis de l’abondante moisson qui nous attend sur le sol fertile de notre province ; et redoublons d’ardeur afin de mériter de nouveau la bienveillance et lintérêt par le résultat de nos nouvelles recherches. | BIOGRAPHIE. Il me reste, Messieurs , à remplir un devoir d’autant plus douloureux qu'il s’agit de vous rappeler la perte d’un de mes intimes amis. Lorsque vostravaux se poursuivaient avec acti- vité , M. ALEXANDRE, avocat , licencié ès-lettres, membre résidant de la société, expirait avec le regret de ne pouvoir concourir à vos succès , et la mort nous privait d’un laborieux collaborateur. Sans parler ici de la bienfaisance de notre collè- gue, et des qualités nombreuses que mon inti- mité avec lui m'a mis à même de découvrir, mais qui doivent rester inconnues , ses talents et ses connaissances lui méritent les regrets de tous ses confrères. M. ALEXANDRE avait fait ses études LXXIT . RAPPORT SUR LES TRAVAUX au collége royal de Caen, et s’y était constam-- ment distingué. Comme le premier élève de la classe de rhétorique , il eut honneur , en 1817, de haranguer S. A. R. Monseigneur le duc d'Angoulême , ce qui lui mérita de la part du prince les éloges les plus flatteurs. Après avoir ierminé le cours de ses humanités , il se destina au barreau, et fut à l’école de droit ce qu'il avait été au collégeroyal , c’est-à-dire , un des sujets les plus marquants. Ayant recu le titre d’a- vocat, ilse livra plus particulièrement à la litté- rature , et devint membre de la société d’ému- lation des sciences et belles-lettres de Caen , où il lut plusieurs ouvrages qui prouvent combien sa plume était facile , et son jugement sain et profond ; son traité de lidylle et sa dissertation sur le genre classique et le genre romantique sont dignes d’être publiés. Ne croyez pas, Messieurs, que son goût favori pour la littérature lui eût fait négliger l'étude des sciences exactes: ma- thématicien , physicien et naturaliste, ces titres seuls lui ont mérité d’être recu parmi vous ; mais , lorsque vous l’admîtes au nombre de vos confrères , 1l renfermait déjà dans son sein le germe de la maladie qui devait lui donner la mort : une phthisie pulmonaire l’enleya le 16 septembre 1823 , à l’âge de 24 ans. | RAA VAT VAL UVA LAS VUE VULUR/S MUR VUL VEN UUL LALUER VAE L'URL VEN WEAR VAN VAS ÉLOGE HISTORIQUE DE LINNÉ. Prononcé , à la séance publique du 12 février 1824 , Par M. ROBERGE, PRésipenr. MEssIEURS, (Juaxn la nature se propose de donner aux hom- mes le spectacle d’un génie supérieur , elle ne le prend point ordinairement dans le sein de la mollesse, qui énerve les sens, au milieu de la prospérité, qui éblouit l'esprit , ni de la flatterie , qui corrompt le cœur. Elle n’ouvre point devant ses pas une carrière droite et unie ; elle ne lui prépare point des jours coulés dans l’aisance et dans le repos. De pareilles circonstances , loin 2 ÉLOGE HISTORIQUE de favoriser le développement des talents, ne ser- viralent , au contraire, qu’à les émousser , en plongeant l’ame dans un engourdissement funeste. Mais elle le met souvent aux prises avec tout ce que la fortune a de plus rigoureux : quelquefois elle entoure son berceau des horreurs de lPindi- gence , et le forme à l’école des Privations et de l’adversité. Pour l'exercer de bonne heure à vaincre les difficultés , elle multiplie autour de lui les obstacles et les traverses : et, comme elle veut qu'il ne doive qu’à lui tout son mérite et toute sa célébrité, institutrice sévère , elle l’a baisse, pour qu'il s’élève par ses propres forces ; elle l’enchaîne , pour que sa liberté soit son ou- vrage ; elle labandonne à lui-même , pour qu'il trouve en lui seul toutes ses ressources. Tel est, Messieurs , le sort de la plupart des grands hommes. En butte aux chagrins et aux contrariétés , 1ls traversent la vie sans en connaî- tre les douceurs. Rarement appréciés par leurs contemporains, ils n’en obtiennent souvent qu’une froide indifférence. On ne leur tient point compte d’avoir tout sacrifié au désir d’être utiles, et l’on recueille le fruit de leurs lumières et de leurs ser- vices, sans songer à ce qu'ils ont coûté. L’envie s'attache à leurs succès, et, jusque dans leur 4 DÉ LINNÉ. 5 source, empoisonne tous leurs plaisirs. Mais , si la génération presente les méconnaît, si la mé- diocrité cherche à se venger d'eux en rabaissant leurs travaux, s'ils ont la douleur de voir passer à d’indignes rivaux le prix de leurs veilles , la postérité impañtiale s’avance pour acquitter le tribut d'estime qu'ils méritent , lavenir , les marquant du sceau de la gloire, fixe la place qu'ils doivent occuper dans la mémoire des hom- mes , et une renommée immortelle est leur ré- compense. Quelque affligeant, Messieurs, que soit Le tableau que je viens de vous présenter, au lieu de refroi- dir votre amour pour la science , qu'il ne serve qu’à l’enflammer davantage. Si vous vous rappe- lez les peines et les fatigues qu’il en coûte pour l’acquérir, songez aussi aux avantages sansnombre qu'elle procure. Que sans cesse présent à votre pensée , l'exemple du naturaliste célèbre dont je vais vous entrelenir , Vous encourage dans vos travaux , et vous console dans vos disgrâces. Issu d’une basse origine , vous le verrez, pendant la première moitié de sa vie, lutter à la fois et contre les difficultés de la science et contre les rigueurs de la misère. Vous serez témoins de ce que peuvent À ÉLOGE HISTORIQUE le courage et une volonté ferme dans une grande ame. Vous le verrez ensuite , donnant l’essor à son génie, dicter des lois aumonde savant, et jeter les fondements de cette réputation qu'aucun nuage ne peut obscurcir. Enfin , je vous le présenterai jouissant de la considération publique, comblé des faveurs de son souverain , formant des élèves dignes de lui succéder, et, au sein d’une douce tranquillité , consacrant encore ses dernières an- nées aux progrès de la science qui fit sa gloire et ses délices. Charles Linné recut le jour à Roeshult, vil- lage de la province de Smoland. La Suède, à laquelle les sciences naturelles ont tant d’obliga- tions , le vit naître le 25 mai 1707. Il eut pour père un ministre luthérien , qui partageait ses moments entre la culture desfleurs et les fonctions de son état. C’est dans les lecons et dans les exemples de cet homme respectable que le jeune Charles puisa les principes d'honneur et les sen- timents de religion qui ne labandonnèrent jamais dans la suite. À peine eut-il atteint l’âge de dix ans, qu’il fut envoyé dans la petite ville de Wexioe, pour y étudier la langue de Cicéron et de Vir- oile. Mais le goût de la botanique. qui s'était déjà DE LINNÉ. 5 emparé de lui, vint contrarier les projets pater- nels. Effet ordinaire du génie ; la moindre cir- constance suffit pour l’éveiller : un seul moment, en lui montrant ce qu'il-doit être , décide du sort d’un grand homme, et toute sa vie est employée à perfectionner l’idée que ce moment a fait naître. _ Élevé dans le jardin dé son père, Linné avait reposé ses premiers regards sur des fleurs : les fleurs occupèrent ses premières pensées, accom- pagnèrent ses premiers sentiments, et se lièrent aux premiers mouvements de son ame. L’habitude de les voir , de les observer , laissa dans son cœur une impression profonde , qui se réfléchit sur tout le reste de sa vie. Indifférent aux amusements de son âge, 1l fuyait la société de ses camarades, pour chercher des plantes qui n’eussent point en- core frappé ses yeux. Il examinait leurs diverses parties, s’enquérait de leurs noms, recherchait leurs usages , leurs propriétés ; et c’est ainsi qu’il devint botaniste avant de savoir ce que c'était que la botanique, Bientôt il n’eut presque plus d’autre occupation que celle de parcourir les plaines, de gravir sur les montagnes , et d’esca- lader les rochers, pour découvrir quelque ri- chesse nouvelle, aliment nouveau de sa passion, Il négligeait souvent les exercices du collége , 6 ÉLOGE HISTORIQUE pour étudier la nature : les tableaux tantôt riants, tantôt majestueux , qu’elle déployait à sa vue, les productions variées qu’elle offrait partout à son admiration , en disaient plus à son esprit et à son cœur que tout ce qu'ont écrit les plus beaux génies de Rome et de la Grèce. Né pour la bo- tanique , comme Pascal était né pour la géomé- trie , Linné n’avancait point dans les sciences qu’on lui enseignait , et faisait des progrès rapi- des dans celle qui lui étaitinterdite : ses maîtres se plaignaient de sa négligence et de son inaptitude ; et déjàses observations l'avaient conduit à des dé- couvertes qui auraient fait honneur aux premiers naturalistes de son temps. Instruit de sa conduite , et ne ‘soupconnant point ses dispositions , le père de Linné ne put voir sans chagrin un fils qu'il aimait rendre inu- tiles les soins qu'il prenait de son éducation. II lui exprima ses inquiétudes dans des remontran- ces amicales ; mais s’étant apercu qu’elles restaient sans effet, 1l y fit succéder .des menaces et des reproches dictés par le mécontentement. Ce moyen mayant pas mieux réussi que le premier, et Linné apportant toujours dans ses études la— tines la même indifférence et la même inapplica- tion, on le jugea incapable d'acquérir jamais des DE L{NNÉ. 7 connaissances , et propre, tout au plus, à quelque profession mécanique et grossière. Tel fut lPavis d’un de ses maîtres, qui conseilla à son père de le retirer du collége, et de le mettre en appren- tissage chez un cordonnier. C'était en 1724, et Lanné avait alors dix-sept ans. Îl se soumit à tout sans murmure , et fit voir, par la manière dontil la supporta, qu’il ne méritait point la punition humiliante qu’on lui infligeait, Il s’efforca sans doute bien des fois de vaincre le penchant qui le domimait, dans la vue de ne point contrister son père , et, pour conserver sa bienveillance , il aurait volontiers renonce à l’a- venir glorieux qui l’attendait. Mais 1l ne put que émir sur sa destinée , et déplorer la méprise fa- tale dont il était l’objet. Toutefois, c'en était fait de son talent, si quelqüe circonstance favorable ne füt venue promptement l’arracher à la profes- sion à laquelle seule on le croyait propre. Les ressorts de son ame se seraient relâchés , faute d'exercice , et son gémie , privé d’aliment , n’au- rait enfanté que des idées vulgaires. Sa vie aurait été inutile à la science , et son nom serait main- tenant oublié. La botanique serait long — temps encore restée dans l’enfance ; le créateur aurait perdu un de ses admirateurs les plus sincères, 8 ÉLOGE HISTORIQUE et la nature un de ses plus fidelles inter- prètes. Heureusement Linné n’eut point à souflri long-temps dans l’état où il était réduit : un méde- cin, nommé Rothman , ayant eu occasion de le voir, s’aperçut sans peme , en s’entretenant avec lui, qu'il était digne d’une autre destinée. Il lui préta les /nstitutions de Tournefort, qui contenaient ce qu'il y avait alors de plus complet sur la science des végétaux. Je me fais un plaisir de vous rappeler , Messieurs , que le premier livre de botanique que Linné ait parcouru , était louvrage d’un Français. Rothman s’occupa en- suite de la fortune de son jeune ami : après avoir tenté inutilement de le réconcilier avec son père, il le plaça chez Kilian Stobœus, médecm et savant antiquaire , qui professait l’histoire naturelle à l’université de Lund. Stobœus l’employa d’abord comme copiste ; mais l'ayant surpris étudiant au milieu de la nuit , 1l eut pour lui quelques égards , et lui permit de se servir de sa bibliothèque. Il finit par reconnaître en lui un talent qui méri- tait d’être cultivé , et, à aide de quelques libé- ralités, il le mit en état de se rendre à l’université dUpsal , qui devait lui procurer plus de moyens d'instruction que celle de Lund. DE LINNÉ. 9 Dans cette université célèbre , dont il devait un jour être le plus bel ornement, Linné ne trouva pas d’abord la fortune plus favorable pour lui. Sans argent , sans protection, il y vécut assez long -temps dans un état voisin de l’indigence. Ilne subsistait qu’en donnant à d’autres élèves des lecons de latin dont il savait à peine les premiers éléments. On assure même qu'il était réduit à rac- coîñnmoder , pour son usage, les vieux souliers de ses camarades. Ce fut encore un de ses maîtres qui le tira de cette misérable situation. Olaüs Celsius , profes- seur de théologie , et fondateur de l’histoire na- turelle en Suède, travaillait alors à son Âiero- Botanicon, ouvrage qui a pour but de faire connaître les plantes dont il est parlé dans l’É- criture-Sainte. Jugeant qu’un jeune homme déjà instruit en botanique pourrait le seconderutilement dans sesrecherches, il accueillit Linné dans sa mai- son, lui fournit le logement et la nourriture , et lui ouvrit sa riche bibliothèque. Il fit plus : 1l Paida de ses conseils , dirigea ses pas encore incertains , et l’encouragea à une entreprise qu'il méditait de- puis long-temps. C’était la réforme complète de l’histoire naturelle , dont les objets n’avaient été jusque-là soumis à aucun ordre méthodique dans 10 ÉLOGE HISTORIQUE leur ensemble , ni l’étude assujettie à aucune règle. Celsius le recommanda ensuite au vieux Olaüs Rudbeck, professeur de botanique à Upsal. Rudbeck lui confia la direction du jardin , et prit même bientôt une idée si avantageuse de son savoir, qu'il n’hésita point à le charger plu- sieurs fois de le remplacer dans ses cours. Dès qu'il ne fut plus captivé par la misère , le génie de Linné commença à prendre l'essor. Il donna plus de suite à ses observations, mut plus d'ordre dans ses recherches, et plus d'ensemble dans ses vues. Tout en interrogeant la nature, il étudia les auteurs, examina les différents sys- temes , se familiarisa avec les connaissances ac- quises , avant d'y joindre les siennes , et se pénétra de l’état de la science , en attendant qu'il pût le changer. Ce fut à l’âge de vingt-trois ans, et en travaillant pour Rudbeck et pour Cel- sius , que, fatigué du désordre et de l’irrégula- rité qui régnaient dans les méthodes de botanique, et surtout dans la nomenclature des végétaux , 1] s’occupa sérieusement de refondre entièrement cette science , et d’en poser les principes sur des bases tout-à-fait neuves. On voit même, dans un catalogue qu’il donna , en 1731 , du jardin d'Up- sal, les premières indications du système sexuel, DE LINNÉ. IE Ilse fit assez connaître dès-lors pour étre envoyé, aux frais de la société royale des sciences , dans la Laponie, afin d’en recueillir et d'en décrire les plantes. Nicolas Celsius , père d’Olaüs , dont j'ai parlé plus haut, avait déjà fait un voyage botanique dans ce pays, en 1695, par ordre du roi Charles XI; mais 1l n'avait publié que le premier volume de ses observations : les six autres avaient été consumés dans le grand incendie d’Upsal , en 1702. Linné , chargé de reprendre ce travail , par- courut , pendant l'été de 1752, avec des peines et des fatigues incroyables, les cantons les plus remarquables de cette affreuse contrée , séjour presque éternel de la neige et des frimas , où la nature languit sans vigueur sous un ciel rigou- reux. Îl en suivit la principale chaîne de monta- ones, exposé à mille dangers , ayant à souffrir la faim, la soif, et des incommodités de toute es- pèce , chez un peuple rare et misérable. Il des- cendit jusqu'aux bords de la mer dans la Laponie Norwégienne, et, après avoir fait le tour du solfe de Bothnie, revint par la Finlande et les îles d'Aland. Deretour à Upsal, il ouvrit un cours particulier de botanique, dans la vue de se pro- eurer une existence plus honorable et moins dé- 12 ÉLOGE HISTORIQUE pendante : un médecim, nommé Rosèn, professeur de l’université , homme puissant, et que la répu- tation de Linné inquiétait déjà , vint lui arracher impitoyablement cette ressource. Enflammé d’un juste courroux, Linné se répandit en plamtes et en menaces ; mais le crédit de son persécuteur lemporta, et il fut obligé , pour éviter de nou- veaux désagréments , d'abandonner Upsal : ilse retira à Falhun , bourg dé Dalécarlie , célèbre par ses forges et par ses mines de cuivre. La prati- que de la médecine fut le moyen qu'il employa d’abord pour y subsister : le mauvais succès qu'il en obtint l’engagea à donner des lecons de mi- néralogie , du produit desquelles 1l se procura, pendant quelque temps , une existence chétive. Peut-être serait-il demeuré toute sa vie dans celte position obscure, si un nouvel aiguillon n’eût . donné un élan nouveau à ses facultés. Lamour fut le mobile dont la nature se servit pour faire rentrer Linné dans le sentier de la gloire. Pendant son séjour à Falhun , il remarqua une jeune per- sonne , fille d’un médecin , nommée Élisabeth More. Il la vit, l’aima et la demanda en mariage. Mais cette demoiselle, qui prévoyait mieux que lui tout ce qu'il pouvait devenir , profita de l’as— cendant qu’elle avait sur son esprit pour mettre DE ETNN PRE | 15 en même temps à l’épreuve et son amour et son génie. « Linné, lui dit-elle, j’approuve votre «a attachement ; mais le moment qui doit nous « unir n’est pot arrivé. Quittez Falhun pour « visiter l’Europe. Ajoutez de nouvelles connais- « sances à celles que déjà vous possédez , et, « danstrois ans , revenez fidelle et digne de moi: « mon cœur et ma main seront à vous. » Il n’en fallait pas tant pour réveiller Linné de son assoupissement. Heureux de trouver dans l'objet qui flattait le plus ses goûts le moyen de parvenir à l’accomplissement de ses vœux, 1l se soumit avec joie aux conditions qu’on lui impo- sait, pour mériter la récompense qui lui était promise, sûr que l’amour le dédommagerait am- plement des sacrifices qu’il ferait pour la gloire. 11 sortit de la Suède, et se mit en route pour la Hollande ; mais à peime étut-il arrivé à Ham- bourg, que ses ressources pécuniaires se trou- vèrent épuisées. Il parvint toutefois à gagner Leyde , ou il se présenta devant l’illustre Boër- haave, fils d’un ministre , comme Linné , et qui, comme lui, avait été forcé de donner des lecons particulières pour subsister. Ces ressemblances de fortune, et plus encore l'instimct merveilleux qui fait qu’un grand homme en devine aisément 14 ÉLOGE HISTORIQUE un autre, intéressèrent promptement le célebre professeur Hollandais au sort du jeune natura- liste Suédois , errant loin de sa patrie , et réduit à chercher , dans une terre étrangère , un état honorable et de la célébrité. Boërhaave fit pour lui ce qu'il avait déjà fait pour le jeune Artédi, Vami et le compagnon d’études de Linné à l’uni- versité d’Upsal. Non content de l'aider de sa bourse, il l’encouragea , ranima ses espérances, et le fit connaître à un riche propriétaire , nommé Georges Cliffort, passionné pour l’histoire natu- relle , et qui possédait à Hartecamp , entre Leyde et Harlem, un jardin , un cabinet et une biblio- thèque magnifiques. Ce fut alors que la fortune commenca vérita- blement à changer pour Linne, et qu'il dut s’es- timer heureux, en comparant l’état dont il sortait avec son état présent. Rassuré sur les premiers besoins de la vie , jouissant de tous les secours qui pouvaient étendre ses connaissances , et fa- voriser le développement de ses idées : près d’un homme écluré , capable d'apprécier ses talents , d’un bienfuteur généreux qui cachait ses bienfaits sous le voile de la délicatesse ; rien ne lui man- quait pour perfectionner ses vues , pour en faire des applications générales , et pour mürir les DE LINNE. | 15 projets de réforme dont 1l était occupé. Aussi ; les trois années qu'il passa chez Cliffort furent- elles l’époque la plus brillante de sa vie, celle où son génie se montra dans toute sa force , et où 1l opéra, dans l’histoire naturelle , une révo- lution complète , dont les avantages se font sentir chaque jour de plus en plus. Depuis la renaissance des lettres en Europe, cette partie intéressante des connaissances hu- maines avait déjà été traitée savamment dans des ouvrages nombreux. Dès le commencement du XVI. siècle, Pierre Belon , en France , avait créé l'anatomie comparée , et posé les premières bases de la zoologie. Conrad Gesner sentit le premier la nécessité de diviser les plantes en clas- ses, genres et espèces. La botanique s'enrichit des découvertes de Jacques Daléchamps (1), de Clusius, de Lobel et de Prosper Alpin. Mal- heureusement le peu d’accord qui régnait entre ces auteurs , à l’égard des noms qu'ils attachaient aux plantes, rendait leurs écrits presque inu- (1) Notre pays peut se glorifier d’avoir donné le jour à un des restaurateurs de la botanique. Jacques Daléchamps naquit à Caen , en 1515 : il est auteur d’une Histoire générale des plantes, en 2 vol. in-fol. 11 exerça la médecine à Lyon , et mourut en 1568. 16 ÉLOGE HISTORIQUE les à la science. Jean et Gaspard Bauhin s’oc- cupèrent du soin de concilier toutes ces syno- nymies. P’anglais Ray chercha un ordre naturel dans la distribution des végétaux , et prépara la voie aux Jussieu etaux Adanson. Césalpin donna, en 1585 , la première classification des plantes, à laquelle succédèrent celles de Morison , d’'Her- man, de Rivin et de Tournefort. Jusqu'ici, la science n'avait eu que des principes incertains et obscurs : Tournefort l’assujettit à des règles sages et précises. Il enseigna la manière de distribuer les classes et de fixer les genres ; et la botani- que apprit sous lui à suivre une marche assurée. Cependant les deux autres branches de l’his- toire naturelle avançaient aussi, quoique d’un, pas moins rapide , vers leur perfection. Ulysse Aldrovande, Redi, Swammerdam , etc. , faisaient fleurir la zoologie. Plus tardive , la science des minéraux avait fait peu de progrès , malgré les travaux de Georges Agricola, de Bernard de Pallissy et de Joachim Beccher. Tel était, Messieurs, l’état de la science , lorsque Linné concçut le hardi projet d’y intro- duire une réforme générale, Chacun des natu- ralistes qui l’avaient précédé avait cru faire déjà beaucoup que de traiter d’une classe d'êtres ; LA DE LINNÉ. 17 aucun n’avait pu , ou n’avait osé en embrasser l’ensemble : de là l’incohérence et le manque d’uniformité qui régnaient entre les différentes parties qui devaient composer un seul tout. Per- sonne n'avait essayé de donner un catalogue complet des productions naturelles. Les espè- ces n'étaient point nettement distinguées les unes des autres. Les descriptions n'étaient point ré- digées sur un même plan, et chaque auteur se servait de mots arbitraires pour désigner les di- verses parties des êtres et leurs différentes mo- difications. Les méthodes étaient incomplètes ou inexactes. Enfin, les noms spécifiques, variant sans cesse, embarrassaient ce qu'ils auraient dû éclaircir, etles phrases descriptives , auxquelles on était forcé d’avoir recours, faisaient de la science de la nature la plus difficile et la plus. ennuyeuse de toutes les sciences. Vivement frappé de ces inconvénients, Linné voulut d’abord y remédier,sentant bien qu’il devait élever l’édifice de la science, avant de l’enri- chir de ses propres découvertes. Il était néces- sare , avant tout, quil établit un système gé- néral de classification , dans lequel il fit entrer tous les êtres naturels , distribués, dans leurs di- visions et leurs subdivisions , suivant les carac- 2 À | 18 ÉLOGE HISTORIQUE tères plus où moins importants qu’ils présentent. Il fallait ensuite qu'il inventât des termes assez nombreux pour peindre la prodigieuse variété de leur conformation , et qu'il attachât à ces termes une signification précise, qui en rendit l’emploi facile et sûr. Il fallait, en outre, qu'il trouvât le moyen de désigner les êtres par des noms simples, aisés à retenir , et qui ne fussent pas muluiphiés au point de devenir un fardeau pour la mémoire. Il fallait enfin qu'il fit lui-même l'application de ces premières règles, en classant tous les êtres con- nus suivant sa méthode, en les décrivant d’après sa terminologie , et en leur imposant des noms propres à les distinguer les uns des autres. Voila, Messieurs, ce qu’exécuta , dans l’espace de quelques années , le génie d’un seul homme. Quelle patience ne fallut-1l pas pour rassembler toutes les observations qui avaient été faites ! Quel talent pour les vérifier ! Quelle sagacité pour les soumettre au creuset d’une sage critique, et les faire accorder ensemble autant qu'il était possible ! Mais ce n'étaient encore là que des ma- tériaux confus qu’il fallait disposer dans un ordre régulier ; ce n'étaient que quelques linéaments épars d’un vaste tableau qui devait être refait dans toutes ses parties ; c'était un chaos informe qu'il DE LINNÉ. 19 fallait débrouiller, pour en faire jaillir la lumiere. Que d’additions à faire, pour remplir les vides que les auteurs in laissé subsister dans la science ! Que de nouveaux rapports à observer, pour établir entre tous les êtres les ressemblan- ces qui les rapprochent, et les différences qui les éloignent ! Que de principes 1l fallait confir- mer par l'expérience ! Que de points douteux à éclaircir ! Que d’erreurs à combattre ! Après avoir ainsi étudié séparément chaque espèce d’êtres , 1l fallait les considérer dans leur ensemble, déter- miner la place que chacun d’eux devait occuper, et former cette chaîne admirable dont la nature a dispersé tous les anneaux. Il fallait embrasser d’un coup d’œil la création entière , non pas seu- lement depuis l’homme qui raisonne , mais depuis l'être éternel qui a tout créé et qui régit tout, jusqu’à la pierre qui ne se meut point ; Lo l’astre qui se perd dans la profondeur des cieux , jusqu’à l’insecte enseveli dans les entrailles de la terre , et le polÿpe caché dans les abimes de l’o- céan. De tous les naturalistes anciens et modernes $ il n’en est point, si l’on excepte Pline, qui ait travaillé sur un plan aussi vaste que Linné. Mas les ouvrages du premier , quoique remplis 50 ÉLOGE HISTORIQUE d’une foule de connaissances précieuses, ont été bien moins utiles à la science que ceux du second, dans lesquels ces connaissances sont digérées, et rangées dans l’ordre le plus propre à les faire ressortir. L’un, riche et varié comme la nature, étincelle de beautés, mais ces beautés sont isolées, et aucun fil ne les lie; l’autre , exact et métho- dique, marche pas à pas, comme l'esprit humain : le naturaliste latin dessine des tableaux à grands traits ; le naturaliste suédois, entrant dans les plus petits détails , fait des portraits d’une res- semblance frappante ; Pline est le poëte de la na- ture ; Linné en est l’historien. Ce fut en 1735 qu’il donna la première ébauche de son travail, dans le Systema Naturæ , ou exposition méthodique des trois règnes en clas- ses , ordres , genres et espèces. Îl y fitsuccéder, l’année suivante, le Fundamenta Botanica, ou- vrage qui contient tous les principes qui devaient donner à la science des végétaux une forme plus régulière que celle qui avait existé jusque - là. Ces principes recurent de nouveaux développe- ments dans le Bibliotheca Botanica, qu parut en 1756,dans le Critica Botanica, qui fut publié en 1797, et enfin dans le Casses Plantarum , ‘qui parut en 1758. Ces différents ouvrages com- DE LINNÉ. aT mencérent la grande réforme dela botanique , et, quinze ans après , toute la doctrine de Linné fut reproduite dans son ensemble, coordonnée dans ses parties ; et appuyée d'exemples nom- breux, dansle Philosophia Botanica , le chef- d'œuvre de notre auteur , et le meilleur traité que l'étude de la nature ait encore inspiré. On y découvre, à chaque pas, des preuves de la finesse d'esprit la plus rare, et de la pro- fondeur de génie la plus étonnante. Linné ne s’y montre point comme un savant ordinaire, s’effor- çant de faire quadrer les faits avec sa méthode, ou sa méthode avecles faits ; il semble créer etnon point décrire : on dirait que la nature l’avait ap- pelé à son conseil , et qu’elle lui avait dévoilé, jusque dans ses moindres détails, toute l’écono- mie du règne végétal. Il a tout connu, tout ob- servé : il n’est point de rapports vraiment intéres- sants , point de principes fondamentaux qu'il n'ait découverts où au moins entrevus , et qui ne se trouvent dans ce livre , fruit de trente années d'observations. Linné a plus fait pour la bota- nique que tous les autres savants ensemble. Leurs ouvrages peuvent périr : tant que les siens sub sisteront , la plus aimable des sciences naturelles sera toujours la plus méthodiquement , la plus ingénieusement , la plus complètement traitée. 22 ÉLOGE HISTORIQUE Les principes de Linné n'étaient pas applica- bles seulement aux végétaux ; 1l nous a montré lui- même qu’ils peuvent guider utilement dans l’étude et dans la classification des autres règnes de la nature. Sa distribution des animaux est même beaucoup plus conforme aux rapports naturels que celle des plantes , et 1l aurait obtenu en zoologie la même prééminence qu’en botanique , s’il n’eüt pas eu pour rivaux les Buffon , les Pallas , les Fa- bricius. Sa méthode etran tomba pres- que dans l'oubli, quand on vit paraître celle de Wallerius, son compatriote et son contemporain ; cependant, guidé par cet esprit d'observation qui lui faisait saisir habilement les caractères essen— tiels des êtres, il montra le premier que les mi- néraux devaient être classés d'après les formes qu'ils présentent dans leur crystallisation, prin- cipe que Romé de l’Isle développa dans la suite, et dont notre célèbre Haüy a démontré la vé- rité dans ses immortels ouvrages. Au reste, si quelques savants ont surpassé Linné dans ces deux branches de l’histoire naturelle , ils lui ont l’obli- gation de leur avoir ouvert la carrière. C’est lui qui avait défriché le terrain où ils ont si abon- damment moissonné, et une partie de la gloire qu'ils ont acquise doit rejallir sur celui qui la leur avait préparée. S'il est resté au second rang DÉ LINNÉ. 23 dans deux parties de la science , auxquelles il ne s'était appliqué qu’en passant , et qui étaient peu cultivées dans le temps et dans le pays où il vi- vait , il s’est placé au premier dans la botanique ; qui avait été Pobjet principal de ses études , et personne jusqu'ici n’a osé Le lui disputer. Il compléta sonsystème de botanique dans deux ouvrages qu'il publia, le premier en 1737, intitulé Genera Plantarum , oùila classé les végétaux d’après le nombre et les autres rapports des organes de la fructification ; et le second , en 1755, quia pour ütre Species Plantarum , et dans lequel il donne lénumération des espèces, avec leur syno- nymie. | À Le sexe des plantes, entrevu par les an- ciens , avait été reconnu successivement par Zaluzianski , Millingion , Camérarius , Geof- froy et Vaillant. Si Linné n’a pas en cela le mé- rite de l'invention , il a celui d’avoir démontré jusqu'a l’évidence ce qui n'avait été qu'ndiqué avant lui, et d’avoir fait un corps complet de quelques observations isolées. On lui a disputé l’honneur d’avoir découvert la classification sexuelle ; dont on attribue la première idée à un médecin de Wolfenbuttel, nommé Burckhard ; mais qu'il y a loin d'une simple idée , dont l’auteur lui-même avait regardé l'exécution comme 2 ÉLOGE HISTORIQUE impossible, à un système général , régulier dans son ensemble , et exact dans ses détails ! En supposant que Linné ait eu connaissance de l’ob- servation de Burckhard , sa tâche n’en était pas moins difficile à remplir, sa gloire n’en doit pas être moins pure, et il n’en mérite pas moins l’é- ternelle reconnaissance de tous ceux quise livrent, à l'étude des végétaux. Le système sexuel, le plus ingénieux qui ait été imaginé, non seulement a fait oublier tous les systèmes précédents, mais a survécu même à la plupart de ceux qui l'ont suivi. IL n’en est pomt dont le plan soit aussi facile à saisir, l’ap— plication aussi facile à faire, et qui conduise d’une manière aussi directe et aussi sûre à la dé- termination des espèces. Il a de plus l'avantage de se prêter sans efforts aux progrès de la science ; les plantes que l’on découvrira dans la suite vien- dront s’y placer comme s’y placent celles que l’on découvre tous les jours : c'est Le cadre le plus vaste et le plus complet du règne végétal. Les plantes , 1l est vrai, n’y soni pas toujours rangées dans l’ordre que la nature semble leur avoir assi- gné : Linné à rapproché des espèces que leur structure éloigne les unes des autres , et il a éloigné des espèces voisines ; il a formé des grou- DE LINNÉ. | 25 pes de plantes disparates , et morcelé des grou- pes naturels ; mais ces inconvénients sont insépa- rables de tout système fondé sur des caractères purement arbitraires. Comment, d’ailleurs , es- pérer de disposer dans un ordre méthodique par— faitement régulier l’ensemble du règne végétal, où la nature paraît se jouer à chaque pas de nos distinctions , et fait naître des exceptions à côté de nos règles les plus générales ? Saisir quelques- unes des lois auxquelles elle s’est assujettie , pré- senter quelques fragments de sa marche dans la chaîne de ses ouvrages , voilà où se borne le pouvoir de l’homme : la connaissance exacte de leurs rapports et de leur ensemble n'appartient qu’à Dieu, En créant sa méthode, Linné n’a point prétendu distribuer les plantes selon leur ordre naturel , qui peut-être ne sera jamais bien connu dans toutes ses parties: il a voulu seulement faciliter leur étude , en présentant un fil qui pût guider parmi la variété indéfinie de leurs espèces; et l’on doit avouer que, de tous les systèmes de botanique , le système sexuel est celui qui à le mieux atteint ce but. Linné ne tarda pas à recueillir le fruit de ses travaux. Sa nomenclature fut généralement adop- tée , et remplaca le langage incomplet et bizarre 26 ÉLOGE HISTORIQUE: que l’on avait jusque-là fait parler à la science. Les savants purent s'entendre et communiquer entre eux: Linné leur avait créé une langue et un style; une langue énergique et riche d'ima- ges ; un style précis , facile et clair. Sa manière de désigner les êtres par un nom générique et un nom spécifique a été imitée par le plus grand nombre des naturalistes qui l'ont suivi, et c’est un des services les plus importants qu'il ait rendus. La nature ne présente partout que des analogies et des différences ; les premières constituent le genre , les secondes l'espèce : de là la nécessité d'employer deux termes , et deux termes seule ment, pour distinguer les uns des autres tous les êtres qui existent. Linné substitua des noms de convention aux dénominations triviales dont on se servait auparavant , et saisit quelque caractère saillant pour former ses noms spécifiques, beau- coup plus faciles à retenir, et, sans contredit, plus propres à donner une idée nette et précise que les anciennes phrases , trop longues, si elles n'avaient pour but que de désigner les êtres, et trop courtes, si elles étaient destinées à les dé- crire. Parmi ceux qu'il inventa, il s’en trouve sans doute qui sont inexacts , arbitraires et même insignifiants ; cependant , on aurait dû s'en con- DE LINNÉ. 27 tenter par respect pour leur auteur , et parce qu’en multipliant les synonymes, on embarrasse la science, sans qu'il en résulte aucun avantage réel. Au reste , quelque heureux qu’aient été à _ cet égard les changements des naturalistes mo- dernes, partout on est entendu, quand on dési- gne un être par son nom linnéen , tandis que les autres dénominations sont toujours renfermées dans un cercle plus ou moins étroit. | Le système sexuel mit le comble à la répu- tation de Tinné. Fondé sur les organes princi- paux de la fécondation , ce système présente les plantes sous le point de vue le plus aimable, le plus touchant, sous le point de vue qui les rap- proche le plus des êtres animés. Il nous met contmuellement devant les yeux lacte le plus important de la vie végétale , et nous oblige sans cesse à nous rappeler que, partout où il y a orga- misation 1l y à génération, et que toute re production a son principe dans l’union des sexes. Ces diverses considérations , et surtout la grande facilité du système de Linné, en ont rendu l’u- sage universel. C’est celui dont on se sert pour apprendre à connaître les plantes ; C’est celui que l’on consulte quand on est embarrassé ; c’est celui auquel on à recours lorsque les autres sont 28 ÉLOGE HISTORIQUE insuffisants: Dans quelque partie du globe que l’on étudie les végétaux , on suit, pour les dé- crire, l'exemple et les règles de Linné, on les nomme suivant ses principes , on les classe d’après son système, et l’on peut dire que l'empire du botaniste suédois est aussi étendu que celui de la botanique. Pendant son séjour chez Cliffort, Linné pu- blia encore son #/ora Laponica , qui sera toujours le modèle de ce genre décris. IL fit imprimer l’Æistoire des Poissons du jeune et malheureux Artédi, son ami et son compatriote, quise noya, à l’âge detrente ans, dans un canal d'Amsterdam. [ls étaient convenus que celui des deux quisurvivrait à l’autre , sauverait de l’oubli la mémoire du défunt, en faisant paraitre ses ou- vrages , et Linné s’empressa de s'acquitter de ce devoir douloureux et-sacré. Il se fit rece- voir docteur en médecine dans la petite uni- versité de Haderwick , et quitta ensuite son bien— faiteur, dont il avait immortalisé le nom dans ses ouvrages. Il se rendit en Angleterre , où sa réputation et les recommandations de Boërhaave lui promettaient un accueil favorable. Cependant, il ÿ fut recu d’une manière peu flatteuse par Hans Sloane et Dillénius, les deux plus fameux natu- DE LINNÉ. 29 ralistes de ce pays: aussi les quitta-t-1l bientôt pour venir à Paris, où il vitle célèbre Bernard de Jussieu, avec lequel il se lia pour la vie de la plus tendre amitié. Il aurait pu alors obtenir de l’em= ploi à Leyde ; mais Van Royen , qui haïssait Boërhaave , à qui il avait succédé , y mettait pour condition que les plantes du jardin seraient ran- _gées suivant la méthode sexuelle. Linné ne vou- lut point outrager la mémoire de son protecteur, en dérangeant l’ordre qu'il avait établi, et il re- tourna dans sa patrie, où l’attendait la récom- pense de tous ses travaux. Il n’y fut point recu d’abord comme 1l devait l’espérer. Peut - être aurait-il abandonné tout-a-fait les sciences pour la pratique de la médecine , s’il eût trouvé des malades ; mais cette ressource même lui manqua. La fortune se lassa enfin de le persécuter. Le moment s’approchait où la Suède, que Linné a le plus contribué à placer au premier rang parmi les nations savantes , devait lui rendre justice, et s’acquitter envers lui dela gloire qu’elle à recueillie de ses veilles. Il trouva à Stockholm deux protec- teurs puissants et dignes de l’apprécier: c’étaient le baron de Géer , maréchal de la cour dela reine ; à qui l’on doit d'excellents mémoires surles insec— tes, et le comte de T'essin, sénateur du royaume, et 20 | ÉLOGE HISTORIQUE gouverneur du prince royal. En 1739, Linné obtint, par le crédit de ce dernier , la place de médecin de l’amirauté , et fut chargé de profes- ser la botanique dans la capitale. L'année sui- vante , 1l joignit à ces emplois le titre de premier médecin du roi, et celui de président de l’aca- démie des sciences qui venait de se former à Stockholm sous sa direction. Mademoiselle More consentit à couronner son attachement et cinq années de constance , en lui donnant sa main. Enfin , l’université d’Upsal lui ouvrit son sein en 1741 : il fut promu à la chaire de botanique , qui était le dernier terme de ses désirs, à la place d’Olof Rudbeck, fils du vieux Olaüs, dont j'ai fait mention plus haut. Il l’a occupée pendant trente-cimq ans, sans cesse entouré de disciples studieux et d'amis zélés, voyant de jour en jour s’accroître sa considération , et profitant de tous les moyens qu’elle lui procurait pour perfection ner ses ouvrages, et pour étendre l'influence de ses principes. Ilfit, par ordre des états du royau- me, des voyages dans plusieurs provinces de la Suède, afin d’en recueillir les productions na- turelles : la faune et la flore de ce pays furent les fruits de ces nouvelles recherches. Pour se pro- curer la connaissance des productions étrange- DE LINNÉ. Sr res, 1l prit la peine de décrire et de classer les grandes collections qui se trouvaient à, sa portée. Il publia, en 1747 , une flore de Ceylan , à l’aide d’un herbier recueilli autrefois dans cette île par Jean Burman. Animés du zèle qu'il leur avait ins- piré, de nombreux élèves, qu’il avait fait passer dans les différentes parties du globe, lui envoyaient de toutes parts ce qu'ils trouvaient de plus in- téressant. Tandis que le docteur Martin visitait les glaces du Spitzberg , et Montin les neiges de la Laponie, Astræmer bravait les chaleurs de l'Europe australe, Kalm parcourait le Canada, Osbeck la Chine, Troën et Pontin les Indes, Forskal l'Arabie, Solander les îles de la mer du Sud, Thumberg le Japon , Kœhler lTtalie , Lœ- fling l'Espagne , Sparmann le Cap de Bonne- Espérance , Hasselquist la Palestine et l'Égypte , où il mourut victime de son amour pour les sciences. Leur généreux dévouement n’est point resté sans récompense : Linné a eu soin de con- signer dans ses ouvrages leurs noms intéressants, de manière qu'ils ne périront jamais. Il a aussi trouvé le secret d’honorer les grands botanistes, et de témoigner sa reconnaissance à ceux qui l'avaient obligé , en donnant leurs noms à des genres de plantes nouvellement établis. 32 ÉLOGE HISTORIQUE C'est par ce moyen, aussi ingénieux que flat- teur, qu'ont été formés les genres Cliffortia , Jussiea, Avicennia , WMichelia , etc. Amsi se trouve réuni tout ce qu'il y a de plus illustre dans la science et de plus aimable dans la nature. Souvent même, 1la su susir quelque analogie entre une plante et un savant; 1l a donné un langage aux végétaux , et les a chargés de redire, non seulement des noms qui lui étaient chers, mais encore les talents ou les vertus de ceux qui les ont portés. Ainsi, le surnom d’Orientalis, donné à espèce qui sert de type au genre Celsia, indique à la fois la patrie de cette plante, origi- naire de l’île de Crète, et la profonde connais- sance des langues orientales qu'avait Celsius, ce généreux protecteur de Linné. Îl consacra à la mémoire d’Artédi un genre de la famille des Om- bellifères , que ce malheureux jeune homme avait étudiées d’une manière spéciale , et la seule es- pèce qui le compose, ayant son fruit entouré d'un rebord membraneux élégamment crénelé , recut le nom spécifique d'É'cailleuse, qui fait allusion aux poissons dont Artédi avait composé l'histoire. Le genre Bauhinia rappellera à la postérité les deux Bauhin, les restaurateurs de la botanique ; mais un des caractères des espè- DE LINNÉ. 53 ces dont il est formé , et qui consiste à avoir des feuilles divisées en deux lobes réunis à leur base , perpétuera sans cesse le souvenir de Pa- mitié dont ces deux frères étaient unis. Tel était le charme que Linné savait répan- dre jusque sur les noms des végétaux. Les diver- ses parties qui les composent , et les fonctions de la vie végétale fournissaient aussi à son esprit, naturellement porté à l’allusion et à la métaphore, l'occasion de faire les rapprochements les plus agréables et Les plus piquants. Les organes sexuels sont les époux de la fleur ; le réceptable est le lit nuptial dont les pétales sont les rideaux. Par noces des plantes 11 désigne le moyen que la nature emploie pour assurer leur fécondation ; les changements de position que leursparties éprou- vent pendant la nuit constituent le sommeil des plantes. Ces dénominations singulières, que des rapports touchants avaient fait naître , répandent sur le style de Linné des grâces inexprimables , etinspirent pour les végétaux le plus vif mtérêt. Linné voyait chaque jour s’accroître sa répu- tation , et l'impulsion qu'il avait donnée à l’his- toire naturelle se communiquer à toute l’Europe. Des gouvernements, de riches propriétaires éta- blissaient à grands frais des cabinets , des jardins, 34 ÉLOGE HISTORIQUE où ils rassemblaient les richesses de leur terri- toire et les richesses étrangères. L’Autriche, la Russie, le Danemarck, à limitation de la Suède, faisaient recueillir les productions de leurs pro- vinces , et envoyaient des naturalistes dans les pays éloignés. La science prenait un essor pro- digieux : Linné sentait qu'il en était la princi- pale cause, et cette pensée était pour lui une ample récompense de ses travaux. Cependant les honneurs ne lui manquèrent point : plusieurs princes lui donnèrent des marques éclatantes de considération. Anobli par son souverain, décoré de l’ordre royal de l'Étoile Polaire , il rejeta les offres qui lui furent faites par les rois d'Es- pagne et d'Angleterre , qui voulaient l’attirer dans leurs états. Louis XV lui envoya des graines de plantes rares recueillies de sa propre main dans le jardin de Trianon ; et le roi Gustave IIT, qui était chargé de les lui remettre , ne crut pas des- cendre de son rang en faisant une visite au pre- mier savant de son royaume. Il n’était point d’Académie qui ne s'empressât de l’admettre au nombre de ses membres. Tous les naturalistes s’ef- forçaient de se mettre en rapport avec lui, et lui envoyaient ce qu'ils croyaient le plus digne de lui être offert. Mais, dans la simplicité de sa DE LINNÉ. 55 vie, 1l était peu accessible aux honneurs du monde. Vivant au milieu de ses élèves qu’il traitait comme ses enfants , quelque plante nouvelle, quelque animal d’une forme singulière avaient seuls le droit de lui procurer de vraies jouissances. Trop grand pour connaître l'envie , 1l n’était nullement troublé par celle des autres. Quoique souvent traité avec injustice par des antagonistes célè- bres , tels que Buffon, Adanson , Haller, il ne prit jamais la peine de leur répondre, suivant en cela un conseil que Boërhaave lui avait donné dans sa première jeunesse. Il eut, de son ma- riage, quatre filles et un fils qui lui a succédé dans sa chaire , et qui est mort sans enfants, peu’ de temps après lui. Lainné était de petite taille : sa physionomie ouverte sollicitait la confiance des autres ; ses yeux vifs et perçants savaient discerner ceux qui méritaient la sienne. La gaîté était son état ha- bituel ; il aimait les divertissements sans passion , et la retraite sans misantropie. Il joignait à une erande sensibilité un caractère très-aimable. Sa société était pleine de charmes, et tous ceux qui lapprochaient ne pouvaient lui refuser leur at- tachement. Îl n’était pas insensible à la louange, et l’on s’apercevait aisément qu’il n’ignorait point 56 ÉLOGE HISTORIQUE sa supériorité ; mais ce qui s’appellerait vanité dans un autre n’était en lui que la conviction in- time de son mérite. Admirateur passionné de la nature , à n’en parlait qu'avec enthousiasme , et faisait partager à tout ce qui l’entourait la chaleur de ses sentiments. Son amour pour la religion était aussi pur qu'éclairé. IL s’entretenait souvent de la divinité avec ses amis et ses élèves ; mais c'était toujours avec le respect qu’un pareil sujet exige, et 1l saisissait avec un plaisir marqué les occasions nombreuses que lui offrait l’histoire naturelle pour faire connaître la sagesse de la Providence. | Sa santé, qui s'était assez bien conservée, malgré son infatigable activité, fut altérée en 1750, par une forte attaque de goutte, dont il prétendit s’être guéri en mangeant beaucoup de fraises. Il vécut ensuite exempt d’infirmités jusqu’en 1779, oùun affaiblissement de sa mémoire lui fit prévoir d’autres accidents. Il fut en effet frappé d’apo- plexie , en faisant une lecon, au commencement de mai 1774. Une seconde attaque, en 1776, le priva de la plus grande partie de ses facultés. Il mourut enfin d’une hydropisie , le 10 janvier 1778, âgé de soixante et onze ans. Gustave I[Tté- moigna les regrets de la Suëde sur cette perte , DE LINNÉ. 37 dans un discours prononcé devant les états du royaume. Ce prince composa lui-même l’orai- son funèbre de Linné, qu’il fit lire publiquement à Upsal. Depuis cette époque, on lui a fait ériger, dans le jardin de laniversité , un monu- ment ayant la forme d’un temple , destiné à réunir toutes les productions naturelles. Des mé- dailles ont été frappées en son honneur (1); Gro- novius lui a dédié un genre de plantes de la famil- le des Caprifoliacées. Plusieurs sociétés de natu- ralistes se sont formées sous les auspices de son nom , comme si ce nom, illustré par tant de gloire , était un gage presque assuré de leurs suc- cès. Nous-mêmes , malgré notre juste admiration pour les grands botanistes que la France a pro- duits, nous avons suivi cet exemple, et nous sommes rassemblés ici pour payer à Linné le tribut de louanges qu'il mérite.” Le docteur Smith , botaniste distingué , a transporté en An- oleterre ses herbiers et ses manuscrits (2) ; mais (1) Tout récemment encore, un Français, M. Durand, vient de rendre cet hommage à Linné , en consacrant à sa mémoire une médaille à l’instar de celle qu’a fait frapper, en l’honneur de Mal- herbe , M. Lair, notre collègue , ami zélé des sciences et de ceux qui les cultivent. (2) On rapporte qu'après la mort de Linné, le docteur Smith alla trouver son fils, à qui il offrit une somme considérable pour prix des herbiers et des manuscrits de son illustre père, Le 35 ÉLOGE HISTORIQUE si un coin de l’Europe possède ce fruit précieux de ses veilles , le monde savant s’en console , en pensant que les productions de son génie, plus précieuses encore, sont répandues dans toutes les parties du globe, ou elles portent, avec le goût des sciences naturelles , les principes sim— ples et féconds auxquels Linné les a soumises. Voila, Messieurs , les détails historiques que j'a1 cru devoir vous présenter sur la vie et les ouvrages de Linné, que la société dont nous faisons partie a choisi pour son patron. C’est en marchant sur les traces d’un modèle aussi 1l- lustre , et non en nous parant d’un vain titre, que nous mériterons d’être comptés au nombre de ses disciples. Que ce zèle ardent, dont il était pénétré pour l’étude de la nature, se com- munique à chacun de nous. Les productions de notre territoire , peu observées jusqu'ici, nous promettent une riche moisson et des jouissances nombreuses. Dans quelque lieu que nous soyons, à quelque époque que nous observions, à quelque marché fut conclu et lesobjets embarqués sans que personne, autre que jes contractants, en eût connaissance. Ayant appris ce qui s’était passé, le gouvernement suédois envoya une frégate à la poursuite du bâtiment anglais; mais il était trop tard, et le docteur Smith arriva dans sa patrie, fier de l’acquisition dont il avait enrichi PAngleterre. DE LINNÉ. | 39 branche que nous nous attachions de préférence , nous trouverons chaque jour, comme l’a dit un de nos plus célèbres correspondants , le comte de Lacépède , un nouvel être à décrire, une nou- velle propriété à reconnaître, un nouveau phé- nomène à signaler. Mais, si l’histoire naturelle offre sans cesse à ceux qui s’y livrent des plaisirs toujours vrais , toujours purs, toujours variés , souvenons-nous que ce n’est point sur de vaines idées spéculatives que notre zèle doit s’exercer. Peu nous importe que les savants admirent nos découvertes , si notre pays n’en tire aucun avan- tage. Rappelons-nous combien de fois la science que nous cultivons a servi à perfectionner l’agri- culture , à étendre l’industrie , à ouvrir de nou velles sources au commerce, et aspirons à la sorte de gloire la plus capable de flaiter un cœur généreux , celle de bien mériter de nos sembla- bles. Si quelque revers nous atiriste , si quelque calamité vient affliger notre cœur , souvenons- nous de la jeunesse de Linné, et nous verrons notre courage renaître; pensons à la dernière moitié de sa vie, et nous nous sentirons enflam- més d’une nouvelle ardeur, pour mériter , comme lui, une renommée glorieuse , qui , tôtoutard, ne manque jamais de couronner d’utiles travaux. ANR USE VV SUR VLR LYS VUE VAR LAS LUBLVEULE LAURE VUE VUE VAR VAR VU VUUAY EXTRAIT D'un Mémoire lu , à la séance du 14 juillet 1823, par M. Cuartes THOMINE-DESMA- SURES , sur une graminée trouvée dans les dunes de Sallenelles ,en juin 1817. Bromus arenarius. Droue des sables. Csrre plante ne s’élève pas beaucoup au-dessus de la surface du sol, et pousse des jets longs de trois à quatre pouces au plus , couchés , et garnis d’un duvet très-court et assez épais. Sa racine est composée de fibres menues , à peu près de la même longueur , et garnies tout autour d’un chevelu si épais et si fin, qu'il ressemble à de longs poils. Ses feuiiles sont pointues, longues de un à deux pouces, et médiocrement larges : elles sont couvertes de quelques poils longs et rares , tandis que leur gaîne esl presque coton- TC Engelnañn. A LIT PÉA LOC BROMUS ARENARIUS. Aa neuse. Ses fleurs sont disposées en panicule simple, serrée, composée de huit à dix épil- lets au plus, et souvent de beaucoup moins. . Les épillets, composés en général de neuf fleurs, sont ovales ; presque sessiles et entièrement glabres. Les valves du calice sont sillonnées , ovales et aiguës ; la valve intérieure de la co- rolle est ovale, presque transparente et bordée de cils longs et roides placés de distance en dis- tance ; l’extérieure est ovale, presque cordi- forme , sillonnée , et quelquefois couverte d’une légère teinte violette. Son sommet est terminé par une arête assez grosse , un peu toriueuse , à peu près de la longueur de la valve. Elle fleurit pendant tout lété. Son aspect la place entrele Bromus mollis et le Bromus secalinus. Peut-être n’est-ce qu’une variété du premier ; c’est un fait que l’on ne peut vérifier qu’en la semant. On peut la décrire ainsi : PB. repens , paniculé erectä ; stricté ; spicis ovatis , glabris ; aristis flexuosis ; radicibus Joliisque mollissimè villosis. Flores ncrbacei. Æstate. © In arenosis maritimis , ad ostia Olne. RARA VALRAS LVL VUE AR LA VUE UUL UT LULU VER UA UE LA ALAIN UUUVE MÉMOIRE Sur une Truffe trouvée dans les environs de Caen, lu, à la séance du 14 Juillet 1825, par M. EUDES-DESLONCHAMPS. Les truffes sont connues depuis un temps im— mémorial ; les anciens, ainsi queles modernes , ont fait leurs délices de cette production végé- tale, plus agréable au goût qu'utile à la santé. Seules de tous les végétaux, elles naissent, croissent, fructifient et meurent dans le sem de la terre, sans venir à sa surface jouir de lin- fluence de la lumière. Elles n’ont point de ra- cines ; toute la plante consiste en une fongosité charnue , de grosseur variable, irrégulièrement ovoide ou arrondie, à surface lisse ou rugueuse, à substance consistante, veinée dans son inté- rieur. Les botanistes modernes ont réuni les trufles dans un genre particulier , qu'ils rapportent à la famille des champignons ; ils en reconnaissent MÉMOIRE SUR UNE TRUFFE. 43 cinq espèces , dont plusieurs peuvent servir d'a- liment ou d’assaisonnement. Ce sont : La truffe comestible. T'uber cibarium. Bull. — Verrucis exasperatum , nigrescens. 20, La truffe musquée. TC moscatum. Bull, — Nigrescens , leve. 30. La truffe grise. T’uber griseum. Persoon. _— Rotundo-difforme, læve , molle , gri- seum. 4°. La truffe blanche. T'uber album. Bull. — Ex albido-rufescens , subrugosum. 59, La truffe blanc de neige. T'uber niveum. Desft. — Globulosum, vel pyriforme, cortice et carne albidis. Les truffes ne paraissent pas très — répandues dans la nature : peut-être leur retraite cachée les a soustraites aux recherches des natura- listes. Les quatre premières espèces se trouvent dans quelques parties de l’Europe , principale- ment en France : lapremière a été également rencontrée en Âste, et la dernière en Afrique, dans les états de Barbarie, par M. Desfontaines. 41 MÉMOIRE Jusqu'ici personne n'avait indiqué la présence des truffes dans nos environs , ni même dans le département. En 1820 , l’un des correspondants de la société, M. Blot, docteur en médecine à Colleville , trouva, vers le mois de septembre, aux environs de son habitation, un tubercule enfoncé de quelques pouces dans la terre : 1lle reconnut pour une truffe à ses caractères géné- raux. L'année suivante , il trouva dans le même lieu deux autres truffes pareilles à la première. Il me communiqua deux de ces productions végé- tales, une de chaque année, en m’engageant à faire quelques recherches pour savoir si la truffe trouvée par lui pouvait se rapporter à l’une des espèces connues, ou sil’on devait la regarder comme nouvelle. De toutes les espèces de truffes connues , une seule (le T'uber cibarium ) est couverte d’inéga- lités, les autres ont la peau lisse. La truffe trouvée par M. Blot, présentant à sa surface des aspéri- tés prismatiques très-grandes, ne peut avoir de rapport qu'avec le T'uber cibarium. Jusqu'à Bulliard , les botanistes n'avaient point établi de différences dans l'espèce de la trufle comestible ; ce naturaliste en a distingué quatre variétés : SUR UNE TRUFFE. 45 10, La truffe noire. D'un noir très-foncé en dehors , noirâtre en dedans, traversée par des veines roussâtres réticulées. 20, La truffe grise. Blanche dans sa jeunesse, elle devient ensuite d’un brun cendré. 39, La truffe violette. Sa couleur est d’un noir tirant sur le violet. 4°. La truffe cendrée ; à odeur d’ail très-pro- noncée. La truffe découverte par M. Blot ne peut se rapporter à la première variété, ou truffe noire. Les rugosités prismatiques de celle-ci sont pe- ‘ttes, irrégulières , tandis que les éminences de celle dont nous nous occupons sont très-grandes | presque régulières et striées transversalement. Les couleurs , tant de la surface , que de l’intérieur, sont très-différentes, et , en comparant la truffe noire elle-même ( la seule que j'aie vue ), ou la figure très — exacte qu’en a donnée Bulliard , avec la production végétale trouvée par M. Blot, il ne peut y avoir de doute sur le défaut d'i- dentité. Les trois dernières variétés que Bulliard n’a _ pas figurées pourraient avoir quelques rapports de couleurs avec la nôtre , surtout la grise ; mais lon ne dit point si la forme de leurs rugosités 46 MÉMOIRE diffère de celles de la première variété : ce ca- ractère est trop apparent pour que Bulliard n’en eût point fait mention. L’odeur alliacée de la dernière ne permet pas de la confondre avec la nôtre, dont l'odeur est toute différente. Il y a donc lieu de penser que notre truffe doit constituer une espèce particulière , remar- quable surtout par la grandeur et la forme de ses aspérités. Ilest probable , cependant, que la truffe qui nous occupe a élé connue de quelques anciens naturalistes. La figure donnée par Tournefort (Inst. R. Herb., Tab. 353 ), etsurtout celle de Micheli (Nov. Gen. PI. P. 221, Tab. 102), se rapportent très-bien à notre espèce par la gran— deur et la saillie de leurs aspérités. Les auteurs citent néanmoins cesfigures pour la truffe comes- tible. Seraent-ce des variétés locales ? N’est-il pas plus naturel de penser que, faute de les avoir comparées , les botanistes ont confondu toutes les truffes à peau rugueuse sous le nom de truffes comesübles ; et qu’elles forment plusieurs espèces , parmi lesquelles on doit spécialement distinguer celle qui croit dans nos environs ? D'après ces considérations , j'ai cru devoir la faire connaître aux naturalistes : qu’il me soit SUR UNE TRUFFE. 47 permis de la dédier au botaniste zélé à qui la ville de Caen doit son jardin des plantes, M. Blot , aïeul de celui quinous à communiqué celte cryptogame. TRUFFE DE BLOT. Tuber PElotii. T. verrucosum , verrucis maximis , polygonatis , subregularibus ; transversè striatis ; intüs fuscum , venis flavis varie- galum. Les échantillons que je possède offrent à peu près le volume et la forme d’un petit œuf de poule ; leur couleur est d’un gris noirâtre exté- rieurement ; leur surface est couverte de grandes saillies d’une forme à peu près pyramidale, presque régulière, à sommet légèrement enfoncé en godet. Le nombre des angles de ces pyramides varie de trois à huit, le plus grand nombre en présente cinq; ils sont presque saillants en arête ; les côtés sont inégaux, offrant quelques fentes verticales et profondes. Vus à la loupe , 1ls sont finement striés en travers. La largeur des saillies pyra- ÂS MÉMOIRE SUR UNE TRUFFE. midales varie d’une ligne à trois, et leur hau- teur d’une demi-higne à une ligne. La substance interne est assez consistante , sa couleur est bru- nâtre , parsemée de veines jaunâtres. Fraîches, ces truffes répandent une odeur que je ne puis comparer qu'a celle qui se fait sentir lorsque l'on entre dans un lieu où l’on a mis à cailler une grande quantité de lait. Desséchées , elles n’ont aucune odeur. Elles ont été trouvées à Hermanville, près Colleville, par M. Blot, dans un enclos boisé, appartenant à M. Hue de Prébois (1). EXPLICATION DE LA PLANCHE. Fig. JT. La truffe de Blot de forme et de grandeur naturelles. | Fig. IT. Trois saullies pyramidales grossies à la _ loupe. | Fig. III. Coupe pour faire voir l'intérieur de la truite. (1) La même truffe a été trouvée à Alençon, dans un jardin, et reconnue alors pour une espèce nouvelle ; mais elle ne fut pas décrite. ( Note du rapporteur, ) 1; | Hs F 4 a Mere € Le la € ee in d'u Ca el TRUFFE de BLOT. Eneen | Mio. Lithite CET gel arr 1 Destongchamp del . y DO a nm 4 UE d AA 0 F4 RRARAR AA LULU US LUE LIL ELLE UE VE LUE LULU ULB VAR ULAUVIILULLUERVE Première Course Géologique dans le départe- ment de la Manche. OBSERVATIONS Communiquées par M. DE CAUMONT, dans la séance du 4 août 1823. L: département de la Manche , renfermant une grande variété de terrains, depuis les plus anciens jusqu'aux plus modernes, présente beaucoup d’in- térêt au géologue. J’ai fait les observations que je présente 1c1, en parcourant le canton de St.-Clair, arrondis- sement de St.-Lô, les rives de la Vire jusqu’à son embouchure, et le pays au nord-ouest de _ cette rivière, jusqu'aux environs de Valognes. En suivant la route qui conduit de la mine de Litry au bourg de St.-Clair, c’est à Baynes que l’on commence à apercevoir les phyllades 4 50 GÉOLOGIË arénifères et les grès quartzeux phylladifères grauwacke schistoïde à grain fin ). Ces terrains de transition occupent un grand espace .. le département de la Manche. À Rieu , Lahaye - Piquenot, Cérisy, ils se présentent en masse plus ou moins schisteuse , souvent: très-dure et traversée par des filons de quartz hyalin. Surlarivédroite dela rivière d’Elle, en face du village de Savigny , règnent les phyl- lides à couches très-inclinées; de l’autre côté de la rivière , ôn voit reparaître les grès quartzeux phylladifères : ces deux roches occupent suc- cessivement les communes de Clouay (1), Cou- vains , St.-Georges-d’Elle , St.-Quentin-d’Elle , Bérigny, Mesnil -Rousselin , Villers - Fossart , St.-Clair, et une partie du territoire de Moon et de Sémilly (2). (1) À Clouay , près du château, sur le haut d’un plateau presqu’entièrement formé de phyllades et entouré de vallons assez profonds, on trouve un banc calcaire d’une médiocre épais- seur : malheureusement le peu d’avantage qu'offrait son exploi- ‘tation a forcé M. de Clouay à combler la seule carrière qui fût ouverte. D’après les renseignements qu’il m’a communi- qués , ce calcaire repose sur les schistes , et est recouvert par une couche assez considérable d’argile. Il appartient évidem- ment aux terrains secondaires : sa dureté n’est pas grande ; la chaux que l’on en a faite était de mauvaise qualité. (2) Le grès rouge ancien des allemands occupe une partie de la commune de Moon; il est possible qu’il se montre sur d’autres points du canton de St.-Clair. Lu © DU DÉPt. DE LA MANCHE. Di A la Mauffe, Cavigny , Bahais , on trouve un calcaire noir de transition qui s'étend des deux côtés de la Vire , et se lie aux phyllades, comme le marbre de Vieux se lie aux grès de Feugue- rolles : inclinaison des couches est de douze à irente-cinq degrés. Il est très-dur , très-difficile à extraire et à polir , de sorte qu’on ne lex- ploite qu'à l’aide de mines , pour faire la chaux, Les fissures qui s'y trouvent sont souvent rem— plies d’un enduit de fer oxidé. Enfin , la couleur qui est plus ou moins noire , et souvent d’un bleu foncé , devient d’un bleu-gris marbré de blanc , en descendant la rivière, vers le Rond- Buisson. Dans presque ioute l'étendue du ter- rain que nous venons dé décrire, la surface est recouverte d’une couche de spath calcaire, dont l'épaisseur varie depuis un pouce jusqu’à un pied. La roche dont je viens de parler , et que j’ap- pellerai calcaire intermédiaire de Bahais, parce qu’on y en trouve de vastes carrières , reparaît sur différents points du département de la Man- ‘che, avec quelques légères différences, comme nous le verrons plus tard. Par exemple , ellé est très-dure à Bahais , et ne contient que des téré- bratules et des encrinites , tandis qu’elle présente un grand nombre d’autres fossiles à Néhou , Cou- ba GÉOLOGIE tances , etc. (1). Dans la localité que nous exa- minons , elle forme sur les bords de la Vire des rives assez escarpées dont l’aspect est très-pitto- resque , et se termine d’un côté à Airel , de l'autre à SL.-Frémond. C’est-là que l’on commence à voir un banc calcaire considérable, renfermant en abondance des fragments de phyllades , de grès, de marbre, etc. ; 1l présente dans son intérieur des cavités tapissées de chaux spathique : quelques coquilles y ont été trouvées, m’a-t—on dit, mais je n’ai pu n’en assurer. À St. - Frémond cette roche disparaît bientôt ; on la retrouve à Mont-Martin. Elle se montre sur la rive droite de la Vire, à Lison et à Neuilly, où le sédiment calcaire aré- nacé devient tantôt rouge , tantôt verdâtre : enfin elle se prolonge jusqu’au petit Vey , et s’y enfonce sous le calcaire à gryphites arquées. ( Aux environs de Carentan , on ne voit que des terrains d’alluvion, qui renferment une grande quantité de bois; ce n’est qu'à une lieue de cette ville, vers Valognes , que le calcaire à gryphites arquées commence à reparaitre. Le calcaire à gryphites arquées de la Manche ‘est parfaitement semblable à celui du Calvados ; (1) Banc des orthocères de M. de Gerville, = DU DÉP:. DE LÀ MANCHE. 53 comme lui, il est stratifié assez horizontalement. Alternant avec des couches peu épaisses d’ar- agile ou de glaise, il renferme aussi des bancs de pierre lithographique et de marne bleuâtre, peu de silex, et une plus ou moins grande quan- tité de gryphites , d'ammonites, de bélemnites, de peignes , de plagiostômes , etc (1). Ce calcaire occupe successivement leterritoire de St.-Côme- Dumont, Angoville, Houesville , Beuseville, Oseville , Hiéville, Vierville, Liéville, Bruche- ville, Ste. - Marie - Dumont, Boutteville , Blo- ville, Sebeville, Chef-du-Pont , Ecoqueneau- “ille, Audouville, Ste.-Mère-Église, Turqueville, Neuville, St.-Martin , St.-Germain , Beuseville- au-Plain, Foucarville, Ravenoville, Émonde- ville , Azeville, Joganville et St.-Marcouf. (2)! À Bloville on trouve , dans ce calcaire , une couche peu épaisse, presqu’entièrement formée de coquilles, et susceptible du plus beau poli. A Ste.-Mère-Église, l'on rencontre desagglo- mérations coniques qui paraissent formées exté- rieurement par une multitude de fragments de (1) Pour plus de détails, l’on peut consulter les excellents mémoires de M. de Gerville, sur les fossiles de son départe- ment. (2) Je dois à M. de Gerville un grand nombre d'indications de lieu, 54 GÉOLOGIE coquilles et d’encrinites. Ces blocs pèsent de ro à 20 kilogrammes (1). Le calcaire de Valognes, postérieur au cal- caire à gryphites, et antérieur au calcaire à ba- cuites , est ordinairement blanchâtre , assez dur, quoiqu'il n'ait pas le gram serré , et renferme des oolites et des pectinites. Les carrières que j'ai visitées m'ont présenté jusques à S ou 10 cou- ches de deux à trois pieds d’épaisseur , ordinaire- ment horizontales, quelquefois bouleversées , et présentant alors des crevasses remplies de terre. On voit vers le milieu une couche de marne bleue très — foncée , dont l’épaisseur est de quelques pouces, et les bancs inférieurs sont en général bleuâtres. Cette roche se voit à Valognes , Alau- ne, Le Ham, Urville, Le Homme , Cretteville , Beaute et Appeviile. Le terrain à bacuhites, amsi nommé à cause de la prodigieuse quantité de fossiles de ce nom qu'il renferme, ne m'a pas présenté d’oolites, quoiqu’on ne puisse le séparer des terrains ooli- tiques supérieurs. [l est compacte , pesant : il a quelque analogie avec le calcaire à polypiers des environs de Lisieux ; 1l renferme différents fos- (1) J’en ai remis un échantillon à M. de Magneville, pour le cabinet d'histoire naturelle de Gaen. DU DÉPt. DE LA MANCHE. 55 siles qui se trouvent dans la craie et dans le cal- caire à polypiers. Enfin , on le voit souvent dans le voisinage du caleaire de Valognes , sur lequel. je pense qu’il repose quelquefois , et il occupe dit férents points dans les paroisses de Fréville, Pi- cauville , la Bonneville, Règne-Ville , Ste.-Co- lombe, et Golleville. C'est à Golleville, Ranville-la-Place | Cré- ville, Gourbesville , Orglande et autres lieux voi- sins de ceux que nous avons indiqués pour le calcaire à baculites, que l’on trouve une forma- tion analogue à celle de Grignon. Les coquilles y sont tellement nombreuses, que M. de Gerville en a recueilh plus de mille espèces. On y voit assez fréquemment des dents de requin, des os de cétacés , ettoutes les coquilles de Grignon parfaitement conservées. Il est certain que ce banc appartient aux terrains de troisième forma- tion. On l’appelle Falun dans le pays , où il est exploité comme engrais pour la culture des terres. Il nous reste maintenant , pour terminer cet aperçu rapide, à parler du tuf qui se trouve communément entre Carentan et Périers, et qui occupe le territoire d’Auxais, Sainteny , St. André-de-Bouhon, St.-Georges-de-Bouhon , Nay, Gonfreville ; Gorges, etc. Ce calcaire cu- #6 GÉOLOGIE DU DÉP',. DE LA MANCHE. rieux est doué d’une grande légèreté, son grain très-grossier ressemble à celui de certains bancs de calcaire à polypiers. Enfin , il contient aussi un grand nombre d’espèces fossiles , décrites pa: M. de Gerville, et s'emploie avantageuse- ment dans les constructions. T'elles sont les observations que j'ai faites jus- qu'ici : de nouvelles recherches me mettront à même de continuer mon travail sur la son gie de ce département, BRAS VI LIR VUR LEA PUB UVE VULUBE LUS LA UVEE LEE LES VULULE LV'UR EI LULU f / EXTRAIT \ D'un Mémoire sur le calcaire de Caen, lu, dans la séance du 1°. Septembre 1823, par M. LE NEUF-DE-NEUF VILLE. L’expcorrarron des carrières de la Maladrerie a lieu par des galeries souterraines. Une seule bouche ou fosse communique à chaque exploi- tation, et l’on n’en change , que lorsque le ter- rain est tellement fouillé qu’on aurait trop loin pour approcher les blocs de pierre ; alors on voüte l'entrée de celle que l’on quitte, pour pré- venir tout danger , et on la recrouvre de terre. C’est par ces bouches que Pon descend dans les carrières , au moyen d’échelles, et que l’on fait toute l’extraction de la pierre, avec le secours d’un cabestan. Des piliers , laissés sur deux li- gnes, distants environ de huit métres les uns des autres , soutiennent les ciels des carrières. En imaginant un plan vertical qui coupe lune 58 MÉMOIRE de ces carrières,nous voyons quetoutes cescouches conservent , à peu de chose près, une horizon- talité parfaite: examinons ces couches dans leur détail, par ordre de succession en partant du sol : La terre végétale de la plaine de la Mala- drerie est plutôt sabloneuse qu'argileuse, Elle est assez fertile. Son épaisseur moyenne est def 0er TORONTO OS On a remarqué que la végétation était plus active dans les parties où il existe des galeries souterraines, que dans celles où il n’en existe pas. Les plantes y conservent , en général, plus de vigueur et plus de fraicheur. La terre végétale repose sur une eouche de fragments calcaires, dont l’é- paisseur moyenne est de. « . + + + I 0 Le vert-banc vient ensuite. C'est ET = un calcaire dur, entouré de pointes cristallisées. Cette pierre est propre à bâtir. Elle est plate ; on lemploie comme moellon. Sa hauteur est de. . 0 52 Suit le banc de bitte : c’est une pierre dure et compacte, On l’emploie peu à la construction , excepté en libage. Ge AMREPORTERAIL ffelite 1 60 SUR LE CALCAIRE DE CAEN, , RHÉDRBN 2 He Nate banc se subdivise en huit strates fa- ciles à distinguer par les fissures qui sont remplies de silex-pyromaque. La hauteur de la première est de. Plus , pour l'épaisseur du silex. . La hauteur de la deuxième est de . Plus, pour l’épaisseur du silex. . . La hauteur de la troisième est de. Piustiidena init eut elite La hauteur de la quatrième est de. Plus d'édérrs 2h00 Apr La hauteur de la cinquième est de. Plus, dem: Sue on La hauteur de la sixième est de. . Plus’, rdenm 2) ON en HR La hauteur de la septième est de. Plus jédern, 0 er La hauteur de la huitième est de Mais 1c1 cesse la fissure de silex. Le banc galeux succède. Il tire son ©. & à © & © S 2: 9 © S © © ©. nom , sans doute , de ce que l’on y rencontre souvent des corps allongés fort irréguliers de nature siliceuse, nommés chevilles par les ouvriers. À REPORTER, , . à Ga MÉMOIRE REBORT. à 1 de Ils sont toujours , à peu de chose près, dans une position verticale. Cette pierre est d’un grain fin ; elle durcit à Pair ; elle est très-propre à la construction , mais difficile à tailler , à cause de ces espèces de chevilles que l’ouvrier ren- contre. L’épaisseur moyenne de ce banc sde. us es aber) Vient le banc pineux. Il est lié par les corps siliceux dont nous avons parlé , au banc supérieur. Ce banc est propre à toutes constructions , sa hauteur est den niv cialis Dans la fissure de stratification mfé- rieure de ce banc, on commence à trouver, des ammonites, etc. Suit le banc chambranle, qui tre son nom de l'épaisseur analogue au chambranle , quoique lon ne s’en serve point à cet usage. Îl n'existe point dans toutes les carrières. Quel- quefois il se confond avec le banc su- périeur, et d’autres fois avec l’inférieur. À REPORTER, »« «+ « 6 Embge o 56 O BI SUR LE CALCAIRE DE CAEN. | REPORT. .\ .. On y trouve quelques pétrifications, Sa plus grande épaisseur et de. . Le banc de deux pieds et un quart succède : il est, en général, propre à toutes les constructions , mais parti culièrement à faire des soubassemenits. Son grain est fin. Cette pierre résiste à la gelée, pourvu qu’on l’emploie lors- qu’elle est ressuyée des eaux de la car- rière. Son épaisseur ordinaire est de. Il est à remarquer que , lorsque le banc chambranle n'existe pas, l’autre se délite en deux, ce qui forme le banc de dessus et de dessous, et son épaisseur augmente jusqu'à 0 ® gg €. C’est dans ce banc que les fossiles abondent le plus. Ils se trouvent tou- jours dans la partie inférieure. Le banc rouge est situé au-dessous de celui-c1. Il est ainsi nomméà cause de la nuance ocracée qu'il présente dans son lit inférieur. Cette pierre ne peut être employée utilement que dans les A REPORTER. « + Gt Gmn one o /Ao 8 oë8 6a MÉMOIRE RBPORT Se Nat étages supérieurs, parce qu’elle se dé- lite à la gelée. IL s’y rencontre des fils qui coupent le banc dans sa hauteur. Il ne présente de particulier que ce que les carriers appellent vulgaire- ment lames de sabre , espèce de matière qui ressemble à du bois fos- sile un peu pulvérulent. Ces lames varient d'épaisseur, depuis 0,015 millimètres jusqu’à 0,027 mil- limètres. L’épaisseur de ce banc est de. Vient ensuite le gros banc, pierre tendre , franche , de bonne qualité, employée à faire des corniches et en- tablements. On y trouve encore des corps siliceux , mais courts et minces, dont la position est verticale. Dans la fissure de siratification avec le banc du fond, on rencontre des cristaux d’un blanc mat, opaque, rem- plis de cavités quadrangulaires, qui ont dû renfermer primitivement des cris- taux prismatiques tétraèdres, dissous par l’action des eaux, ou quelqu’an- A REPORTER. « + » 8 mo8 (se) 54 G2 SUR LE CALGAIRE DE CAEN. RÉBONDER ere tre agent ; car il n’en reste plus que le moule. On a présumé que le sel cristallisé était de la strontiane sulfa- tée. C’est un quartz - calcédonieux- pseudomorphique. C’est dans ce banc, qui porte ordi- nairement un mètre d'épaisseur. . . . que l’on trouva, 1l y a quelques an- nées , un très-beau crocodile-fossile, qui fut porté à Caen par les ouvriers qui en avaient fait la découverte. Enfin , l’on arrive au banc du fond. Cette pierre est d’une contexture plus serrée et plus fine que celle du gros banc. On y voit des nœuds tirant sur le bleu, qui sont extrémement durs : elle est d’un usage étendu pour la construction. On y trouve des ammo- nites que les ouvriers appellent plards, à cause de leur dureté. Une chose re- marquable, c’est qu’elles sont debout. Ce banc varie du double dans son épaisseur. Il à quelquefois o"86c ; d’autres fois 1l ne conserve que À REPORTER, « «+ « 65 6m(2c 0 00 ——— 62. GA MÉMOIRE REPORT, + + + OM"062 o mA43 ,cequipeut le faire considé- rer comme deux bancs. Épaisseur moyennes ie Hé antsféstte Dole DIGMIOR L'on y remarque encore la conti- nuation de trous ayant de 8 à 15 cen- timètres de diamètre (comme des trous de taupes ), provenant du banc des airs, qui est le banc suivant , duquel | nous allons dire un mot, À cette profondeur qui est de. . 10 26 dans cette description, et qui peut augmenter d’un mètre ou de deux, selon la position , cesse l’extraction ordinaire des carrières de la Mala- drerie. à Cependant , on connait encore deux bancs au— delà de ceux que nous venons de décrire; mais on ne les exploite pas. Le premier est le banc des airs , ainsi nomme à cause de l’air que l’on sent sortir par lestrous dont nous venons de parler. Cet air est très- froid , fétide, et incommode les ouvriers. Ces ventouses sont capables, dans certains endroits , d'étendre une chandelle. Le deuxième n’a point de nom particulier. La SUR LE CALCAIRE DE CAEN. 65 pierre est excessivement dure, Ce banc a 0” 81° d’épaisseur. Les trous du banc des airs n’y pénètrent point. Son lit inférieur est d’une ho- rizontalité parfaite. Plus avant c’est encore du cal- caire de Caen , et s1 l’on creusait 20 mètres au- dessous , il ést probable que l’on arriverait à la couche d’eau qui règne partout et à un niveau déterminé suivant les lieux, et qui, ordinaire- rement, coule sur le banc bleu (x). Après avoir décrit d’une manière rapide les carrières en exploitation , ce serait 1c1 le lieu de parler des carrières abandonnées ; mais comme elles ne présentent rien de nouveau au minéra- logiste , nous nous bornerons à dire que les an- ciennes et les nouvelles carrières communi- quent entre elles presque partout par des passages qu’il faut bien connaître, dansla crainte de s’ÿ égarer. Quant au prix de la pierre, il est umiforme. Comme le débit en est assuré par la prodigieuse quantité de constructions entreprises à Caen et dans les environs, les propriétaires des exploi- tations n’ont établi aucune différence ; ils livrent donc bonne et mauvaise qualité , sans avoir égard (1) Calcaire marnenx de M, Hérault, 66 MÉMOIRE au banc qui la produit , à mesure qu’elle sort de la carrière, pour le prix de 8 fr. le mètre cube: Ainsi, pour savoir ce qu’elle vaut rendue à Caen, ou dans un autre lieu , il ne s’agit que d’ajouter à ce prix les frais de transport , à raison de la dis- tance à parcourir. Tel est l'usage actuel. - RAR NRA A LAURE LUR VUR LUP VEVLULR UALTAN VAR AULUUILUUUIUULULE A/R EXTRAIT Du premier Mémoire de M. DE CAUMONT, sur la Géologie de l'arrondissement de Bayeux, lu à la séance du 6 octobre 1823. Lx sable des environs de Bayeux est peu connu: quelques géologues , qui l'ont indiqué en passant, ont commis de graves erreurs, en le considérant comme du grès rouge ou comme un terrain d’al- luvion. Il se rencontre souvent dans le voisinage des calcaires oolitiques ; cependant, jenel’aipas vu reposer sur eux (1). Je l'ai trouvé souvent sur des rognons calcaires et siliceux supérieurs au calcaire à gryphites arquées : je l’ai vu égale- ment, dans la partie occidentale du département, sur di galets roulés, sur le grès rouge ancien des allemands et les phyllades ; mais 1l est rare (1) I est possible qu’il soit superposé à ces calcaires , dans des lieux que je n’ai pas visités, 68 GÉOLOGIE qu’il repose immédiatement sur ces diverses for mations , presque toujours une couche d'argile plus ou moins épaisse se trouve intercallée. Des galets roulés, mêlés à de l’argile, recouvrent la surface du banc, qui ordinairement est très= inégale : ces galets sont des fragments de roches intermédiaires et des silex: ils forment quelque- fois une espèce de poudingue par leur réunion. Dans plusieurs localités , cette couche vient à manquer , et une terre végétale plus ou moins argileuse , combinée avec du sable, se trouve en contact avec lui ; d'autrefois la surface est recouverte par une veine d'argile ou de glaise grisâtre et sablonneuse , de deux à quatre pou- ces, surmontée elle-même par une légère couche de gravier. | Ce sable est très-siliceux , brun , jaune ou pres- que blanc , suivant qu'il est plus ou moins coloré par l'oxide de fer : la grosseur des grains varie ; en général, ils sont d'autant plus gros que la cou- leur est plus foncée. Des veines plus ou moins nombreuses présentent à peu près, dans la masse du sable , les mêmes accidents que l’on remarque dans les grès et autres formations ; elles sont sou vent inclinées de deux côtés différents, dans un espace très-rapproché. Elles paraissent quelque- DE L'ARRONDISSEMENT DE BAYEUX. 69 fois avoir éprouvé un brisement ; d'autrefois elles forment des cercles, à peu près comme lesgrès en présentent à May , Feuguerolles, etc. L’épaisseur du banc est de trente à quarante pieds : il ne renferme jamais de fossiles; on ÿ trouve , par petites couches stratifiées , des frag- ments siliceux d’un beau blanc. Ce sable est d’un fréquent usage: combiné à la chaux, il forme un excellent ciment ; il est pré- férable à tout autre pour sabler les allées des jardins; les chimistes l’emploient dans les opera- tions où la distillation se fait sur le bain de sable. Je vais successivement donner la coupe des dif- férentes carrières que j'ai eu occasion d'examiner. Carrière de St.-Vigor (1). p®. 1°. Terre argileuse mêlée desable . . . . 6 20% Sable e ee e e 0) e ee ® e e e- e e C2 30 9% Argile. e e [1 L ] e e LI L_] L1 & e e [2]  4°, Rognons calcaires et siliceux avec ar- aileet marne oo ste bo, Calcaire à gryphites arquées. (2) J'ai eu l’avantage de visiter plusieurs carrières avec M, Hérault , ingénieur en chef des mines, dont les lumières n'ont beaucoup aidé dans l’étude du sable, qui fait le sujet de ce mémoire, 0 GÉOLOGIE Carrière de Barbeville. por Terre végétale s ® e e e e * LD 201S4BI6 terreux:, sobre iso Sa breile, daim aient 4°, Calcaire à gryphées arquées. Carrière d'Esquay. T9, MArile Hutétirea cutter at 29, Sable. 2 e 2 e [3 e L] e e ® e 5°, Rognons calcaires et siliceux mêélés d'argile S'OPNMAE le Toro lei TSiTe 4°. Calcaire à gryphites. Carrière des Capelles. 19. Poudingues et galets . .., .:... 2 Sable nn ae, Ces 39, Argile jaunâtre. Carrière de Caugr. 10. Galet roles eee 29, Sable e e e * ee e e [2 e e e 5°. Arsile. pr Het D 78 EE © DE L’ARRONDISSEMENT DE BAYEUX. DE Carrière de Molay. 30. Galets rouléset sable . . . . . . . 4 29, Grès rouge des allemands. . . . . . 5 3°, Galets et terre rouge . . . . . . . 30 4°, Eau. . Carrière de la Haye-Piquenot. 19. Argile et galets. . . Le set 2OMSAblE 1. ur. S age EE BOIRE ON 3°. Phyllades. Ce banc occupe une grande partie de la pa- roisse d'Esquay , se prolonge sur celle de Vienne, où il se montre aux Capelles et à Caugy. Là il disparaît sur les confins de la paroisse de St.- Vigor, et reparaît abondamment dans la partie de cette commune qui avoisine Bayeux ; 1l est à fleur de terre à St.-Exupère. Enfin, on le voit à Barbeville et à Vaucelles sur la route d’Esignv. Vers la mine de Lütry, il occupe une partie des paroisses de Cotun , Crouay , Lebreuil , Le Tron- quay , Latry ; 1l se trouve également entre la mine et Isigny, à Bernecq, Vouilly, etc. , de sorte que 72 GÉOLOGIE DE L’ARR;. DE BAYEUX. l’on peut induire qu'il se rencontre dans un espace de dix lieues, mais avec de nombreuses inter- ruptions. Il est assez difficile de lui assigner une place précise ; cependant je l'ai vu reposer à St.- Vigor sur des rognons calcaires ayant beaucoup de rapport avec le calcaire de Caen : d’un autre côté, un sable analogue , inférieur à la craie, et supérieur au calcaire à polypiers , a été remar- qué par M. de Magneville, dans l’arrondissement de Lisieux. Ces raisons me portent à croire qu'il est pos- iérieur aux calcaires oolitiques ; c’est aussi l'opi- nion de M. Hérault. RRAVIS LAN AB UIA VER VALUAAR LA TEA SU LVUELVLUULLVIEVULUVELUIUUIUVEVUR OBSERVATIONS Sur la mobilité des taches que l’on remar- que sur lapeau des Calmars subulé eë sé- piole ( de Lamarck), et sur la coloration spontanée dont les sepiaires paraissent susceptibles, par M. Fr£néric DE LA FRESNAYE ( lues à la séance du 1°r. dé- -cembre 1823 ). dx me trouvais à Dieppe dans les premiers jours d'août 1822. Je me réunis à M. Gaillon , cor- respondant de la Société Linnéenne , pour faire une promenade sur la grève, à marée basse. Après y avoir trouvé en assez grand nombre plusieurs espèces de radiaires, telles que des astéries et des actinies, nous nous arrétämes près dun filet. tendu circulairement , et dans l’enceinte duquel restaitencore une flaque d’eau assez étendue. Nous _y aperçümes plusieurs animaux d’une couleur ro- sacée , longs de quatre a cinq pouces , nageant avec assez de rapidité, et par élans , comme [a 7 4 MÉMOIRE plupart des poissons, mais à reculons, en sorte qu'en s’éloignant de nous , leur tête restait diri- gée de notre côté. Par suite même de cette marche extraordinaire , nous parvinmes , en les effrayant, à les faire échouer sur le sable. Là, nous reconnümes bientôt que ces animaux étaient de la famille des sépiaires ; car un d’eux, quoique hors de l’eau , nous lança une assez grande quan- tité de l'encre brune particulière à cette famille. L'opinion générale est que les sépiaires répan- dent cette liqueur pour noircir l’eau de la mer, lorsqu'ils sont inquiétés par un ennemi quel- conque , et se sauver, à la faveur de cette obs- curité , du danger qui les menace. Jobserverai ici que, ce jour-là et le suivant, où j’en trouvai encore un assez grand nombre, jé ne les vis jamais ré- pandre leur encre dans les flaques d’eau où ils étaient restés, quoique no$ mouvements pour les saisir parussent les effrayer beaucoup ; et cela n’avait lieu, au contraire,que lorsqu'ils étaient échoués sur le sable, ou lorsque je les eus mis dans un bocal plein d’eau qu'ils noircissaient à chaque instant. Ce fait semblerait prouver que ce n’est qu’à la dernière extrémité que les sé- piaires , ou du moins les calmars , emploient ce moyen de défense. Nous reconnümes à notre SUR LES CALMARS. 75 retour qu'ils étaient dû genre Calmar , .Loliso (Lamarck),etle Loligo subulata de cet auteur ( Sepia media ; Linné. Ce qui nous frappa plus particulièrement , fut le changement de couleur que nous remarquämes sur ces animaux , tant avant de les avoir pris, qu’après ; car ils passaient alternativement de la couleur rosacée assez vive au blanc jaunâtre ; changement qui , probablement , était le résultat de la frayeur que nous leur causions par nos mouvements. Lorsqu'ils furent dans le bocal, nous remarquâmes de nouveau ces changemenis de nuance sur toute la surface de leur corps, et de plus ; nous vimes qu'ils étaient couverts de tachés d’un rouge- violet , plus ou moins foncé ; que ces taches étaient de différentes di- mensions , et qu’elles régnaient particulièrement sur toute la partie supérieure du manteau , de la tête et des bras ou pieds dont la tête de ces céphalopodes est comme couronnée. En les . considérant attentivement, nous vimes que ces taches étaient mobiles, c’est-à-dire, qu’elles pa- raissaient et disparaissaient tour à tour. Les plus grandes pouvaient avoir une ligne au plus de dia- mètre ; elles étaient rondes ou ovales , et en gé- néral d’une nuance plus claire que les plus pe- tites. | 76 MÉMOIRE Je remarquai qu’à chaque endroit où une tache disparaïssait , 1l restait néanmoins, vers le centre , un petit point presque noir , et à peine visi- ble à lœil, et que chaque tache reparaissait toujours de nouveau sur ce même point. Toutes les taches répandues sur la surface de l’animal disparaissaient donc tour à tour, mais seule- ment par portions qui reparaissaient quelques secondes après , lorsque d’autres devenaient in- visibles. 7. . Au bout d’une demi-heure, nos calmars , commencant probablement à souffrir, soit du mouvement de notre marche , ou de la trop pe- tite quantité d’eau dans laquelle ils étaient ren- fermés , perdirent presqu’entièrement la teinte rosacée qu'ils avaient au moment où nous les avions pris, et devinrent d’un blanc mat ; ou blanc de cire. Mais les taches avaient toujours lieu, quoiqu’en moms grand nombre , etleur mo- bilité nous parut beaucoup pluslente. Arrivés à la maison , nous renouvelâmes leur ean de mer ; quelques instants après , ils redevinrent plus colorés , et les taches continuërent toujours d’être mobiles , jusqu’au moment où je les mis dans lalcool, qui, en les faisant périr , fixa enfin la mobilité de ces taches ; elles sont restées d’une SUR LES CALMARS. 77 couleur purpurine plus ou moins foncée , et leur nombre, comme leurs dimensions, varient sur les différents individus que j’ai conservés. En ouvrant plusieurs de ces calmars , je me suis assuré que l’épiderme qui recouvre tout le manteau , la tête et les bras, était entièrement transparent et d’une extrême ténuité , et que les taches n’existaient que dans l’épaisseur de la peau. Soupconnant que leur mobilité ne devait être que le résultat du mouvement du sang > J'espé- rais découvrir intérieurement quelques traces de ce fluide coloré ; mais j’ai trouvé au contraire le cœur , les branchies et toutes les parties inté— rieures ( excepté la bourse à l'encre ) d’un blanc de cire, J'ai examiné de nouveau les taches de la peau , j’ai essayé d'enlever, à l’aide du scalpei, les plus grandes de ces taches, sans y réussir; mais en faisant le même essai sur ces petits points presque noirs que j'avais vus remplacer les taches, au moment où elles disparaissaient sur lani- mal vivant, je suis parvenu, en râclant légèrement avec la pointe du scalpel , à étendre ces points et à en former des taches presque analogues aux autres, et qui sont devenues comme elles, par cette extension artificielle , d'une couleur rougeâtre , de de noires qu’elles ot Ç s3 GE MÉMOIRE J'ai reconnu alors que les unes et les autres étaient formées par la présence du même fluide coloré; que les plus grandes n’étaient d’une nuance plus claire, que parce que la portion du fluide S'y trouvait très-dilatée à la surface de la peau, et que les autres , au contraire, ne paraissaient beaucoup plus petites et d’une nuance plus fon- cée , que parce que cette même portion du fluide se trouvait plus réunie, et comme resserrée dans l’épaisseur de la peau. Get effet ne peut donc provenir que d'une très-grande contractilité de la peau des calmars , qui ,en se dilatant, permet au fluide de venir s’'épancher à sa surface sous la forme de taches, et qui, en se contractant , au contraire , réunit cette même portion de fluide dans son épais- seur , où elles occupent alors un bien moindre espace. | J’ai recueilli aussi, à la même époque et au même lieu , plusieurs calmars d’une autre espèce, le Calmar Sépiolé, Loliso sepiola (Lamarck ) ( Sepia sepiola ; Linné ). Je n’ai pu me les pro- curer vivants , parce que, ne s'aventurant pas autant que le Calmar subulé , on ne le trouve point comme ce dernier dans les filets qui restent à découvert sur la grève à marée basse. Ils ne SUR LES CALMARS. 79 sont pris que par les pêcheurs de crevettes, qui traînent de petits filets à marée montante et des- cendante, ayant l’eau jusqu’à la ceinture. Ces pè- cheurs m’en ont fourni un certain nombre, mais tous étaient morts. J'ai remarqué toutefois que ce Calmar , le plus petit du genre , est couvert de taches entièrement semblables, pour la couleur et la disposition, à celles du Calmar subulé. M. Suriray, médecin naturaliste , que j'eus occasion de voir quelques jours auparavant, à mon passage au Hävre , me dit qu’en accompagnant les pêcheurs , lorsqu'ils vont en pleine mer lever leurs filets, on leur voyait souvent prendre la grande Sèche , Sepia officinalis ( Linné ; La- marck ), qui offrait alors un spectacle curieux par le changement de couleurs qu’elle présentait suc- cessivement. Cette faculté appartiendrait donc non-seulement au genre Calmar, Loligo ( La marck ), mais aussi au genre Sepia de cet auteur, et peut-être , comme Je le présume fortement, à toute la famille des Sépiaires de Lamarck. S'il en est ainsi, comment n’a-t-on pas en- core fait mention de cette particularité , que l’on pourrait en quelque sorte comparer au phéno- mène que nous présente le Caméléon, et qui aurait peut-être Île même principe ( les mo- 80 MÉMOIRE difications dans le mouvement du sang , du cœur à la surface ) ? Ce sang est d’un bleu violet chez le Caméléon « ..… c’est à la combinaison de cette « nuance, avec la couleur jaune de sa peau , « jointe aux diverses sensations, et principale- « ment à la frayeur qui imprime un mouvement « plus ou moins vif à la circulation chez ce rep- « tile, qu'est due en grande partie la mutabilité « de ses nuances » ( nouv. dict. d’hist. nat. , art. Caméléon ),. | « Chez les mollusques , en général, le sang est « blanc ou bleuätre » ( Cuvier , Lamarck ). Les taches mobiles que j'ai remarquées sur les calmars, ainsi que la coloration générale spontanée de leur peau , coloration qui a lieu aussi, à ce qu'il paraît, chez la Sepia officinalis (ou grande sèche de nos côtes ), ne devraient-elles point leur cou- leur purpurine ou rosacée à une combinaison du même genre ? Ou bien, cette famille des Gé- phalopodes qui , sils étaient plus connus , comme le dit M. de Lamarck , mériteraient sü- rement de former un ordre à part et distinct de celui des mollusques, n’aurait-elle point le sang d’une couleur naturellement purpurine , comme ces taches mobiles de la peau du Calmar, et en cela différent de celui du reste des mollus- SUR LES CALMARS. 8r ques ? C’est ce que je laisse à décider à des ana- tomistes plus habiles que moi. Comme je n’ai (trouvé, en ouvrant plusieurs de ces Calmars , ( à la vérité conservés dans l'alcool depuis plu- sieurs mois ) aucune trace intérieure de ce sang coloré , je serais encore porté à croire que, sl est blanc ou bleuâtre naturellement , cette nuance purpurine, qu'il acquiert à la surface de la peau , serait peut-être due , en partie , à l’impres- sion de l'air que faciliterait l'extrême ténuité de leur épiderme. M. Cuvier semblerait autoriser cette opinion; car il dit, en parlant des mol- lusques en général, Règne animal , tom. 2, p. 553 : «il y a lieu de eroire que leurs veines font les fonctions de vaisseaux absorbants. » M. de Lamarck ( Animaux sans vertèbres, tom. 7, p. 665 }) à la fin de la description du Loligo Sagittata, dit que « la variété B de cette « espèce , qui estau Muséum , est bleuâtre sur le « dos , par le grand nombre de petits pomts « pourprés dont elle est tachetée » ; et dansla des-. cription de la Sepia officinalis ( même vol. , p. 665 }, il dit « que cette espèce a l’épiderme « de couleur blanchâtre , mais parsemé de pe- « tits points pourprés ou bleuâtres qui lui don= « nent une teinte grisâtre ou plombée. » (E S2 IÉMOIRE Les taches observées par ce savant sur des individus probablement morts et conservés dans l'esprit de vin , semblent avor la plus grande analogie avec celles de mes deux Calmars, et étaient vraisemblablement mobiles lorsque ces deux espèces étaient vivantes. J'ailu attentivement les articles Céphalopodes, Sepiaires et Calmar , dans le règne animal de M. Cuvier , dans les invertébrés de Lamarck, dans le dictionnaire d'histoire naturelle de Déter- ville , et de plus, l’article Sepia dans Linné : je n’aitrouvé, dans ces différents ouvrages, rien de relatif à la mobilité des taches et à la co- loration spontanée que j'avais remarquées sur les Calmars. ou . En cherchant, dans le 27©.tome du dictionnaire des sciences naturelles qui vient de paraître, Par- ticle Loliso , jy trouve enfin cette phrase : « La « peau qui recouvre le manteau est toujours « fort mince; mais ce qu’elle offre de remar- « quable » C'est qu’elle est colorée de taches « rouges , irrégulières, et qui sont dans un mou- « vement continuel de dilatation et de resserre- « ment, ou de diastole et de systole : elles sont « plus nombreuses en dessus qu’en dessous. » Mon observation n’a point échappé à l’auteur de SUR LES CALMARS. 83 cet article ; mais s'il est le premier qui lait pu- bliée, comment ne s'est-il pas plus étendu sur un fait aussi singulier , et qui est , selon toutes les apparences , commun à tous les Sépiaires (1), au moins quant à la coloration spontanée. (1) Tout porte à croire que la présomption de M. de la Fres- naye est fondée ; cette mobilité des taches avait déjà été si- gnalée sur le Poulpe commun, Octopus Fulgaris de Lamarck, par M. Cuvier, dans son important ouvrage intitulé : Mémoires pour servir à l’Histoire et à l’Anatomie des Mollusques ; premier mé- moire ; sur les Céphalopodes ; p. 7, où se trouve le passage sui- vant : « Toutes ces parties ( les organes du Poulpe commun }) « sont revêtues d’une peau lâche , épaisse, pointillée de brun; « un lascis de vaisseaux y forme partout des aréoles de diverses « grandeurs ; une liqueur rousse , épanchée dessous , y produit « des taches de même couleur qui changent de situation à cha- « que instant. » ( Note du rapporteur. ) VAR UV UE LAN LA ALU URI VARAVAI UE VAN VAN VAL LAN UUI VU URI AA V8 EXTRAIT Du premier Mémoire de M. BLOT, sur les propriétés des insectes des environs de Caen, lu à la séance du 1°". Decembre 1823. Cz mémoire contient les Coléoptères , les Hymé- nopières et les Hémiptères (1). COLÉOPTÈRES. Cet ordre est le plus nombreux de tous; il renferme plus de 200 genres. Ie. Famrzce. CaRNASsIERS. — Genres : Ca- rabe , Tachype , Scarite , Elaphre , Bembi- dion , Cicindèle, Drypte, Brachin. Aucun insecte de cette famille ne nous porte préjudice ; aucun n’est venimeux ; tous vivent de petits animaux vivants ; ils purgent nos jardins de limaces , de vers, et de mille petits êtres des- (1) L'auteur a suivi la classifi ation adoptée par M. Du- méril , dans sa zoologie analytique. DÉS ENVIRONS DE CAEN. 85 tructeurs. Sous ce rapport, ils nous sont utiles. On croyait que le T'achype doré (1) faisat périr les animaux, lorsqu'ils l’avalaient. Cette croyance est démentie par le fait suivant: en au- tomne, onrencontre fréquemment desexcréments de renard remplis de débris de différents insectes, parmi lesquels on en voit qui appartiennent au Tachype dont il est question : à coup sur , iln’en serait pas ainsi, s'1l était venimeux. Lorsqu’elles sont inquiétées, la plupart. des espèces de cette famille laissent sortir de leur bouche une humeur noire , fétide , qui leur sert sans doute de moyen de défense. Cette ma- tière n’est cependant pas vénéneuse. Acre et salée, elle n’est pas non plus brülante. Introduite sous l’épiderme , elle fait naître à la peau un léger bouton peu prurigineux , qui disparaît bientôt : mise dansla bouche d’un autre insecte,ou enfoncée dans sa substance, elle ne le fait point périr. Cependant , il serait à désirer que des chimistes lexaminässent. On la trouve en abondance dans le T'achype coriace ( Procruste de M. La- treille }, gros insecte commun en automne. (1) Autrefois Bupreste : gros insecte d’un beau vert-doré luisant , très-commun dans nos jardins , et connu sous le num de Sergent. 56 PROPRIÉTÉS DES INSECTES On a pensé que plusieurs insectes brillants de cette famille jouissaient de la propriété vési- _cante des Cantharides : j’ai appliqué sur ma peau grand nombre de fois, comme vésicatorre , les T'achypes doré, violet, jardinier; les Carabes bronzé, cuivre ; les Cicindèles champétre , si- nuée , germanique , réduits en poudre, et jamais je n’a pu obtemir la plus légère vésication. IVe. Famicze.LaAmeLrricoRnes.—Genres: Geo- trupe , Bousier , Aphodie, Scarabée , Han- neton, Cétoine, Trichie ; Trox. | Ces genres fournissent un grand nombre d'es- pèces. Quelques Hannetons seulement nous sont préjudiciables. Cest l'espèce vulgaire qui l’est le plus : à l’état parfait, elle dévore les: feuilles , les bourgeons et les fleurs des arbres, et le mal est sans remède ; à l’état de larve ( c’est le Mans), attaquant les végétaux par les racines , elle leur fait encore plus de tort : le plus souvent même elle les fait périr. IL faut remarquer que le Mans, après avoir détruit une plante, passe à la voisine, à laquelle 1l fait subir le même sort: je l'ai vu plusieurs fois anéantir en entier des bordures de fraisiers. Pour éviter ce dommage, il faut arracher sur-le-champ la plante qui paraît attaquée par lui, et comme il est aisé de le dé- DES ENVIRONS DE CAEN. 87 couvrir , 1l l’est également de le détruire. Par-à on préserve de son atteinte toutes les plantes du voisinage. Les autres espèces de Hannetons commettent dans les récoltes de pareils déoâts ; mais là, nous ne pouvons nous en débarrasser. On a cité la Cétoine dorée, et la Trichie noble, deux beaux insectes que l’on rencontre commu- nément sur les roses , comme jouissant de la pro- priété irritante des Cantharides : des expériences faites à ce sujet sur moi-même, m'ont prouvé que ces Goléoptères nesont nullement vésicans. €, FamiLLce. SERRICORNES. — Genres: Lu- eane , eo Les espèces peu nombreuses que furnisent ces deux genres sont généralement connues sous le nom de Cerf-volant. Insecte parfait, le plus srand mal qu’elles puissent faire est de pincer légèrement:larve, elles pratiquent des trous sinom- breux dans les arbres de haute futaie, que non- seulement elles gâtent leur bois, mais qu’elles les font le plus souvent périr. C’est la larve du Cerf-volant proprement dit, qui fait le plus de donimage dans nos environs : volumineuse , longue d’un pouce et demi, à corps blanc, à tête dan bran-roux, elle atta- que de préférence les Ormes. de au bas de 55 PROPRIÉTÉS DES INSECTES leur tronc, à l’aide de ses michoires , elle \ creuse des trous, de profondes galeries, qui, par leur direction circulare, décolent l’écorce du tronc dans une grande étendue. Cet insecte est d'autant plus à redouter , qu'il vit fort long temps (1), qu'il existe presque toujours en nom- breuse société , et que, comme le Mans , il atta- que les végétaux les uns après les autres. On l’a vu plusieurs fois faire périr en entier de longues avenues. Les habitants de la campagne , ne con- naissant pasla cause de cette mortalité, lattribuent à une maladie épidémique. s La couleur jaune d’un arbre , la chüte de ses feuilles , la présence de différents trous au bas de son tronc, celle d’une matière analogue à du tan sur le terrain où il est planté , décèlent chez lui l’existence de cet insecte ; dès -lors il faut labattre , et tuer avec le plus grand soin toutes les larves qu’on pourrait découvrir sous l'écorce , et même jusque dans les racines. Dans une avenue voisine de mon bail ï ua très-bel arbre devint malade ; on disait que ses voisins le seraient bientôt comme lui, et qu'ils périraient tous : l’ayant fait abattre, je ® (1) Roësel dit que la Jarve du Cerf-volaat vit sept ans. DES ENVIRONS DE CAEN. 69 trouvai au pied de son tronc, sous son écorce , trente-deux grosses larves de Cérf-volant que je détruisis : depuis, aucuns ne se sont trouvés at- teints par le même insecte. VIS. Famirre. CLaviconnes. — Genres : Sphéridie , Scaphidie, Byrrhe, Nécrophore, Bouclier , Elophore , Silphe , Nitidule , Hydrophile, Parne , Dermeste. Parmi les insectes de cette famille , les Der- mestes du lard et des pelleteries méritent seuls de fixer l'attention. Les tissus animaux , les col- lections anatomiques et d'histoire naturelle sont continuellement le siège de leurs dévastations ; ce sont leurs larves qui occasionnent les plus grands dégâts. De tout temps on a cherché à préserver de leur atteinte les substances qui y sont exposées. De mille moyens préconisés pour atteindre ce but, l’arsénic seul a paru véritable- ment efficace. Les huiles essentielles de rhue, de sabine, les décoctions améres, même celle de coloquinte, l'essence de térébenthine ne sont que des moyens temporaires, Le camphre tant vanté ne vaut pas mieux. Jai vu souvent, dans des boîtes d'insectes , des larves de Dermestes montées sur des morceaux de camphre que j'a- vais mis tout exprès pour les en chasser, 90 PROPRIÈTÉS DES INSECTES Les moyens qui m'ont le mieux réussi pour con- serverles différents objets d'histoire naturelle, sont: 1°. D'enduire d’un épais vernis les boftés qui les contiennent ; | 29, De les Lies hermétiquement ; 9°. De répandre un peu de CRE darsénic dans leur intérieur. C’est encore l’arsénic qu’on emploie pour conser- ver les animaux empaillés. On s’en sert sous la forme d’un savon , dont la composition est due au pharmacien Becœur , et qui peut être remplacé par une dissolution d’arsénic , à laquelle on ajoute du savon. Quoique, dans le cas dont il s’agit, les pré- parations arsénicales soient les meilleures , on peut encore, selon les circonstances , ürer un grand parti dela vapeur du soufre et d’une chaleur élevée : en y exposant des substances infectées de Dermestes ou d’autres insectes , on les en débar- rasse promptement. Les acides forts, surtout le sulfurique, la dissolution de sublimé , ne sont pas encore des moyens à dédaigner , en en imbibant légèrement les peaux qu’on veut conserver. À l'égard des gros insectes , il est toujours bon, en même temps qu’on les vide, de répandre dans leur abdomen une légère pincée de poudre d’arsénic. L' DES ENVIRONS DE CAEN. OT IXe,. Famzre. Perce-Bois. — Genres: Ly- mexylon, Wrillette , Piine. Si aucun de ces genres ne fournit d'espèces venimeuses , toutes sont nuisibles. Celles des deux premiers détruisent nos boiseries, et les vernis qu’on leur oppose ne les garantissent pas pour long-temps. Plusieurs expériences me permet- tent d'avancer qu’en imprégnant , par la macéra- tion , le bois de décocüons de tabac et de colo- quinte, on le préserve de l'atteinte de ces in- sectes. On peut aussi, en l’exposant à une chaleur vive, ou à la vapeur du soufre , tuer les larves qui y sont contenues. Quant au troisième genre , ses espèces com- mettent absolument les mêmes dégâts que les Dermestes ; mais 1l paraît qu’elles sont plus aisées à détruire : outre qu'on s’en débarrasse par les mêmes moyens , on leur oppose encore avec avantage le camphre , la coloquinte et gé- néralement tous les amers. Lorsqu’elles attaquent les herbiers, on les en chasse avec le camphre et la térébenthine ; cependant ces moyens sont souvent infructueux. Je pense que le savon arsé- nical, ävec lequel on frotterait légèrement le pa- pier de l’herbier , serait beaucoup plus efficace. . Dans la colle avec laquelle on prépare ce pa- 92 PROPRIÈTES DES INSECTES pier, on pourrait encore faire entrer avec avan- tage la décoction de tabac, ou plutôt celle de coloquinte ; par là on mettrait pour toujours les plantes à l’abri de ces msectes. On sait que les tapissiers se servent de ces substances , ainsi que de vinaigre, pour garantir les papiers de leurs dégâts. XIe. Famrizze. Vésicans.— Genres: Dasyte, Eagrie , Méloë, Cantharide. | Le genre Cantharide, qui est le plus intéressant de cette famille , ne fournit qu’une seule espèce à nos environs , encore y est-elle assez rare , c’est “celle dite J’ésicatoire : tout le monde connaît l'usage fréquent qu’on en fait en médecine. Les Lagries les Dasy tes n'ont point la propriété 1r- ritante qu'indique lenom de leur famille. Mais, en revanche, les Méloës, qui nous donnent en abondance les espèces Vernale , et Presca- rabé, Vont à un haut degré. Cependant ces in- sectes n’agissent pas sur la peau précisémentcomme les Cantharides ; ils Penflamment bien, maisils n'y font point naître de vésicules. La cuisson qu'ils occasionnent est plus mordicante et plus durable. La médecine n’a tré aucun parti jusqu'à ce jour du Proscarabé ; cependant,appliqué comme vésicatoire,il ne semble pas irriter la vessie comme DES ENVIRONS DE CAEN. 93 les Cantharides : employé au traitement des dar- tres, aucun moyen ne m'a paru aussi avanta- geux. Les habitants de la campagne y ont recours très-fréquemment: ils l’'employent en poudre, mêlé à de la graisse , ce qui forme une sorte de pom- made. La dartre, frottée une ou plusieurs fois avec ce mélange, s’enflamme d’unemanière aigue , sup- pure long-temps et abondamment , puis se guérit. La douleur que produit ce moyen irritant n’est guère plus vive que celle d’un vésicatoire ordi- daire. Les nombreux malades guéris par ce procédé ont été le sujet de mes observations, et je puis attester qu'aucun n’a éprouvé d'accidents après sa guérison. Ne pourrait-on pas employer le même moyen pour la teigne, si toutefois cette maladie est curable ? De nouvelles expériences faites à ce sujet , pourraient être très-fructueuses pour l'humanité. +) Le Proscarabé est employé comme topique irritant dans la médecine vétérinaire, On n’a pas besoin de dire que, s’il était avalé , il agirait comme un très-violent poison. Cet insecte laisse exsuder de ses articulations un liquide jaune , limpide, qu’on pourrait croire 94 PROPRIÈTÉS DES INSECTES caustique ; cependant , il n’est qu'irritant. Appli- qué sur une peau délicate , il y fait naître des boutons prurigineux ; introduit sous l'épiderme, il y détermine une ampoule, analogue à celle que produit la piqûre d’une punaise. XVIIe. Famrzze. Rosrricornes. — Genres : Bruche, Anthribe, Attelabe, Charançon , Rhynchène. | Gette famille contient un grand nombre de nouveaux genres. Tous sont nombreux en es- péces ; aucunes d'elles ne sont venimeuses ; pres- que toutes sont nuisibles ; leurs larves vivent aux dépens des grains , des fruits , des légumes, etc. Les Bruches attaquent les pois, les fèves ; les Aticelabes coupent les jeunes branches des ar-. bres ; c’est l'espèce dite bleue ( taille-bois des jardiniers ) qui coupe si fréquemment les pous- ses des poiriers et des pommuers. Le genre Charançon fournit encore des es- pèces plus nuisibles. Je ne parle pas de celles dont la larve dévore la plupart de nos meilleurs fruits , ni d’une autre espèce qui attaque les noi- settes. Le Charançcon des grains, qui fait aujour- d’hui partie du genre Calandre , est beaucoup plus pernicieux, puisqu'il anéantit en très-peu de temps d'immenses magasins de blé , et qu’on DES ENVIRONS DE CAEN. 05 n’a pu jusqu’à présent trouver d'autre moyen de le détruire , que de faire réduire le blé en fa- rine dès qu’on s’est apercu qu'l en est attaqué. X VIILe. Famizze. CYLINDRIQUES. — Genres: Clairon, Corinete, Bostriche. Ces genres ne donnent qu’une seule espèce remarquable ; c’est le Clairon apivore. Sa larve détruit les abeilles, et fait beaucoup de dégât dans les ruches; mais on n’a encore trouvé aucun moyen de l’en chasser. XXE. Famirre. Licnivores, — Genres : Lepture, Capricorne, Lamie, Callidie, Clyte, Saperde. | Les insectes de cette famille, peu nombreux dans nos environs, recherchent en général les gros troncs d’arbres. Leurs larves y font des trous; mais comme elles vivent isolément , elles ne les font point périr. On dit que le Capricorne musqué remplace en Angleterre les Cantharides. Les expé- riences que j'ai faites sur moi-même me font considérer ce fait comme très - hasardé. IL est vrai que cet insecte est irritant , et je ne doute pas qu'introduit dans l’estomac , 1l n’agit comme poison; mais je n'ai jamais vu qu'il füt vési= cant, 96 PROPRIÉTÉS DES INSECTES XXIe. Famicze. HerBivores — Genres: 4/- tise, Galéruque , Chrysomèle , Clythre, Gri- bouri ,Criocère, Donacie , Casside. Cette famille, nombreuse en genres et en espè- ces, fournit la plupart des Goléoptères quidévastent nos jardins. Aucuns ne sont venimeux ni vési- cants. Îl en est cependant, les Chrysomèles, qui laissent sortir de leur bouche une humeur jaune, âcre , d’une odeur désagréable , et qui, appliquée sur une peau délicate , y fait naître une multi- iude de petits boutons très-prurigineux. Quant à ceux qui attaquent nos plantes potagères, ils sont appelés T'iquet par les jardiniers , et appar- tiennent aux genres Altise, Galéruque et Chryso- mèle : l’Altise du naveten veut aux plantes cru- cifères ; elle fait périr les semis de choux, de raves, de giroflées , et les repiques de julienne. L'Erytrocéphale attaque les mal- vacées ; élle dévore les passeroses , les guimau- ves, etc. La Galéruque potagère vit aux dépens des plantes que son nom indique. La Chryso- mèle de loseraie fait beaucoup de tort aux plantations W'osier et de saule. | Pour se débarrasser de ces insectes, il faut sau- poudrer les plantes qui en sont attaquées avec de la cendre de tabac, les arroser avec des décoc- e DES ENVIRONS DE CAEN. 97. üons de la même plante , de feuilles de noyer, de sureau ; il faut arroser la terre d’alentour avec des dissolutions de potasse, de suie, et surtout avec la composition de M. Tatin, quine fait, dit-on, aucun tort aux feuilles des plantes. En général tous les insectes que j’ai citésne com- mettent de dégât que dans les jardins, oules autres lieux souvent engraissés et toujours abrités. Ils at- taquent de préférence les jeunes plantes ou celles qui souffrent ; celles qui sont vigoureuses et déve- loppées semblent peu les redouter ; ainsi, lors- qu'on garmit de plantes un jardin où il y a du 7%- quet, il ne faut y mettre que des plantes vigoureu- ses, et chercher par des arrosements fréquents à augmenter encore leur vigueur. | Les Criocères vivent particulièrement aux dé- pens des lys et de l’asperge. L'espèce qui porte le nom de cette dernière plante la fait assez sou- vent périr, lorsqu'elle est encore en semis. Il faut alors combattre l’insecte par les moyens que je viens d'indiquer. Cependant, il vaut mieux couper les jeunes asperges dès le pied , et brüler les tiges, pour détruire les œufs ou les larves qui pourraient y être attachés , et par des bmages très-superficiels et des arrosements réitérés , re- donner de l'énergie aux plantes, qui repousseront avec rapidité. . 7 Ê 95 PROPRIÈTÉS DES INSECTES XXII. Famizze. FRIDACTYLES, — Genres : Endomyque , Coccinelle. Tout le monde connaît les Coccinelles (1). Ces jolis petits Coléoptères ne sont pas si in- nocents qu’on le croit généralement ; en effet, lorsqu'on les agace , ils laissent sorür de leur bouche une humeur jaune, fétide et tellement âcre , qu'appliquée sur la peau, elle y fait naître une éruption analogue à une dartre ; elle n’a point cependant de propriété vésicante. Leur intro- duction dans l’estomac pourrait déterminer des accidents graves. Du reste , loin d’être nuisibles aux Végétaux , ils produisent beaucoup de bien , en détruisant les pucerons, dont leurs larves se nourrissent exclusivement ; en effet, on ne trouve guère de nids de pucerons, sans y rencontrer une troupe de larves appartenant à la Coccinelle à deux points. * HYMÉNOPTÈRES. Toutes les femelles et les neutres des Hyménop- tères sont munis d’un aiguillon ou d’une ta- rière ; la présence de l’une ou l’autre de ces par- (1) Les enfants appellent ces insectes des Poulettes aw lion Disu ou Barbelottes. DES ENVIRONS DE CAEN. 99 ües nous servira à établir ici deux divisions , d'autant plus commodes qu’elles seront basées sur ce que ce sujet présente d’utile à considérer. Hyménoptères à aiguillon. Tous sont ve- nimeux ; 1ls le seraient même plus que les autres animaux , s'ils avaient plus de volume , et si l’aug- mentation de leur grosseur entraînait celle de la dose de leur venin. Si celui de l’Abeille pro- duit , insimué dans nos chairs en quantité inappré- ‘cable , de si vives douleurs , quels terribles ac- cidents ne devrait pas déterminer l’animal qui y en verserait seulement une goutte ? Mais ici, comme dans toutes ses productions , la nature prévoyante n’en a mis que de si petites quanti- tés à la disposition des êtres qu’elle en a doués, qu'ils ne peuvent s’en servir pour opérer de orandes destructions. Cependant, il ne faut pas juger de son activité par son action appliquée au corps de l’homme. En pensant qu'il ne tue jamais , on serait dans lerreur. Comme celui de la Vipère, il est d’autant plus meurtrier qu’il agit sur de plus petits animaux. Ainsi, siune Guëpe pique un frêle Diptère, un Dolichope , elle le fait expirer sur-le-champ ; si elle en pique un plus gros, le Syrphe Bourdon, il en soufre beaucoup, mais il n’en meurt pas toujours ; si c’est 100 PROPRIÈTÉS DES INSECTES un vigoureux Coléopière, le T'achype doré, il en souilre peu et ne périt que très-rarement. En général, le venm des Hÿménoptères est d'autant plus énergique qu'il agit sur des êtres plus sensibles. Tandis qu'il éveillera à peine la torpeur dû Crapaud , il occasionnera à la Souris une tor- ture convulsive. Si on accumule plusieurs piqures sur un animal, en proportionnant leur nombre à son volume et à son degré de sensibilité, on parviendra toujours à le faire périr. Cinq Guëpes m'ont suffi pour tuer une Souris : elle meurt avec des convulsions et dans un état de tuméfaction extraordinaire. On sait qu’un essaim peut faire périr un de nos plus gros bestiaux. Swammerdam dit quele venin des Hymé- noptères est limpide, clair et transparent comme le diamant. Chez eux il est renfermé dans une pette vessie, située à la base et au-dessous de l’aiguillon: mis dans 'la bouche , il y fait naître une sensation amère, puis âcre et cuisante ; la membrane bucco-gutturale se trouve dans un état d’irritation tel qu'il en résulte bientôt une salivation analogue à celle que détermine la ra- cime de Pyrèthre; enfin , ces accidents dispa- raissent assez promptement , sans laisser rien de ficheux. DES ENVIRONS DE CAEN. 1œs D'après les expériences de Réaumur , la dose du venin des Hyménoptères s’épuise promp- tement. S’étant fait piquer par une Guëpe, il éprouva une douleur très-aiguë ; ayant soumis _son domestique à la même expérience avec le même insecte , la douleur fut supportable ; une troisième piqüre sur lui-même ne produisit plus qu'une sensation à pelue désagréable. Réaumur a encore observé qu’un insecte qui pique à tra- vers un vêtement , y laissant la plus grande partie de son venin , -n’occasionne que très- peu de douleur. La nature du venin des Hyménoptères est ab- solument inconnue. J’avoue que je n’en ai ja- mais pu découvrir un atome, quoique j'aie mis dans sa recherche'la plus grande attention. La manière dont Swammerdam s’y est pris pour en obtenir, en quantité suffisante pour en goûter, est encore une énigme pour moi. À la vérité à j'ai vu fréquemment couler le long de l’aiguillon des gros Bourdons où du Xylocope , lorsqu'on leur presse le ventre , un liquide limpide ; mais ce liquide, recueilli sur la pointe d’une aiguille , et insinué sous l’épiderme , ne fait naître aucune douleur ; mis sur la langue , il a une saveur meil- leure : assurément ce n’est pas là du venin. 102 PROPRIETÉS DES INSECTES L'activité du venin n’est pas la même chez tous les insectes qui en sont doués ; elle n’est pas non plus en rapport avec leur volume: la piqure d’une Guêpe est bien plus douloureuse que celle d’un plus gros Hyménopière d'un autre genre. Au contraire , dans chaque genre pris 1so- lément, cette activité s’accroit avec le volume de l’espèce. Ainsi, la Guépe Frelon produit une piqüre infiniment plus douloureuse que la Guépe commune , qui est plus petite. L'énergie du ve- nin dépend encore de la vigueur de l’insecte : tel, engourdi par le froid , piquera et fera peu de mal ; tel autre , corroboré par la chaleur, occasionnera une douleur tres-aiguë. Les Fourmis me paraissent contenir un venin d’une nature différente de celui des autres Hymé- -noptères. Par le genre de douleur qu'il occa- sionne , 1l a de l’analogie avec l’humeur brülante des orties (1). Les chimistes le considèrent comme (1) On n’a encore envisagé les Fourmis sous aucun point de vue médical. Je suis porté à croire qu’on pourrait en retirer quelques avantages. Un médecin, nommé Roux , dit qu'après avoir ramassé des Fourmis , il sentit de la chaleur au bout de ses doigts, qui ne tardèrent pas à se tuméfier et à rou- gir. Le lendemain l’épiderme tomba ; et il s’en suivit une in- flammation de quelques jours. Il cite encore plusieurs cas analogues, dans un journal dont il était le rédacteur. Je pense qu'en communiquant à un liquide la propriété irritante des DES ENVIRONS DE CAEN. 105 unacide particulier , qu’ils ont appelé Formique (1). Je ne suis pas entièrement de leur avis: insi- nué sous l’épiderme , cet acide ne produit nul- lement la douleur cuisante de la piqure de la Fourmi; et d’ailleurs ne se rencontre-t-il pas dans les Fourmis qui ne piquent point (2) ? L’aiguillon des Hyménoptères est composé de deux filets extrêmement déliés, contenus dans une sorte de gaîne , arrondie en dessus et sur les côtés, cannelée et ouverte en dessous. Ces deux filets , intimement accolés sont écailleux en dehors , et garmis vers leur extrémité de dix à douze dentelures , dont la pointe est diri- gée en sens inverse de celle de l’aiguillon. Lorsque l’Hyménoptère irrité cherche à pi- quer, les petits muscles qui de la dernière pièce de l'abdomen s’attachent à la base de l’aiguillon et à celle de sa gaîne, et surtout ceux qui de l’une Fourmis , on pourrait tenter de l’employer localement , en li- niment, en frictions, dans la vue d’opérer une révulsion lé- gère , et.je ne doute pas que son usage ne produisit de bons effets. (1) L’acide Formique paraît exister dans une humeur odo- rante que la plupart des Fourmis rendent par la bouche. La Fourmi rouge en fournit en abondance. (2) La Fourmi rouge est la seule espèce de nos environs qui m’ait paru munie d’un aiguillon, 104 PROPRIÉTÉS DES INSECTES de ces parties vont s’insérer à l’autre, se contrac- tent , et l’aiguillon est lancé avec force au dehors. Il ne faut pas croire cependant qu'il pénètre comme un trait, d’un seul coup , dans les chairs ; il ne s’y enfonce que par plusieurs efforts successifs , qui sont autant plus efficaces que sa disposition ne lui permet pas de se retirer. Les différents efforts que fait l’insecte pour enfoncer son dard ont non-seulement pour but de produire une plaie, mais encore d’y introduire du venin : les mêmes muscles qui font agir l’aiguillon , font éga- lement couler le poison en comprimant son ré- servoir , situé au milieu d’eux. Lorsque l’aiguillon vient d’être séparé de l’a- nimal , 1l cherche encore à s’enfoncer. Ce méca- nisme , qui paraît extraordinaire , vient de ce que les muscles qui s’attachent de l’aiguillon à sa gaîne conservent leur propriété contractile, même un instant après qu'ils sont séparés de l’insecte. L'Hyménoptère qui a piqué un animal à peau résistante n’est pas toujours maître de retirer son arme ; la construction de celle - c1 donne l'explication de ce fait. Lorsqu’elle reste en entier, comme tous les muscles attachés à sa base, sa gaine , la vessie à venin , demeurentavec lui, Pin- secte périt, S'il n’a piqué qu’un Diptère, un Pa DES ENVIRONS DE CAEN. 109 pillon , ou une larve, comme leur peau est très- peu résistante, il conserve son arme et 1l ne meurt DonEnt of Lorsqu'on est piqué par un insecte à aiguil- lon, on ressent bientôt une douleur vive qui s'accroît et est très-aiguë peñdant un instant ; puis elle diminue lentement , et enfin disparait. Il survient un peut durillon , ensuite un bouton entouré d’une auréole rose ; lorsque la piqure est au visage ou à un autre endroit également sensible , la tuméfaction devient considérable ; du reste , l'intensité de ces accidents est subordonnée au degré de sensibilité des personnes , quelque- fois à la frayeur qu’elles ont éprouvée , enfin à l’activité et à la quantité du venin qui leur est communiqué. | Lorsqu'on a été piqué, il faut sur-le-champ extraire l’aiguillon,et appliquer ensuite sur le point douloureux un des topiques suivants ; ils sont tirés de trois classes de médicaments : Causriques. Chaux vive; Eau de chaux ; Ammoniaque liquide, pure ou étendue d’eau; Eau de Luce ; dissolution de sel marin ; Fi- naigre ; Éau-de-vie. Toutes ces substances ont une efficacité prouvée par l’expérience : quoique douées d’une faible causticité , elles neutralisent ro6 PROPRIÉTÉS DES INSECTES suffisamment le venin qui pourrait exister dans la peute plaie, et la douleur qu’elles détermi- nent est légère. L’eau salée, qui est le moyen le plus usité , est le moins efficace. La chaux vive et l’ammoniaque réussissent mieux et plus promptement. ASTRINGENTS. Extrait de Saturne ; Suc =: Plantain, de feuilles de Cassis ; Encre ; Eau ferrée ; Eau très-froide. Ces médicaments qui tendent à opérer une résolution , bien que con- sacrés par l'usage , n’ont pas l'efficacité qu’on leur attribue ; j’a1 eu lieu de m'en assurer dans un grand nombre de circonstances. Cependant , il faut encore mieux y avoir recours que de ne rien faire. L’extrait de Saturne et l’eau très- froide méritent surtout la préférence. Axopins. Dissolution d'Opium ; Lauda- num ; Suc de Pavot, de Jusquiame, de Bel- ladone ; Huiles. Les moyens que nous présente cette classe de médicaments son vraiment eff caces. Îls agissent en engourdissant la sensibi- hté. Les dissolutions d’opium , le laudanum , le suc frais de pavot réussissent le mieux. Fort souvent même , s'ils sont appliqués à temps, 1ls préviennent la tuméfaction. J’ai eu, dans mille circonstances , lieu de me louer du suc de pavot ; DES ENVIRONS DE CAEN. 107 c'est toujours le moyen auquel j'ai recours lorsque je suis piqué. Lorsqu'une personne très-sensible a été piquée par une grosse Guêpe, ou par plu- sieurs Hyménoptères à la fois, 1l peut en résulter des accidents graves, convulsifs ou inflammatoi- res. Alors , il faut d’abord appliquer sur les ni- qüres un peu de chaux vive ou d’ammoniaque , et un instant après un cataplasme de graine de lin , arrosé d’une forte dissolution d’opium. Si la pi- qüre a lieu sur un membre, il faut le tenir immergé pendant long-temps dans une pareille dissolution préparée avec la décoction de racine de guimauve. Une résolution heureuse vient bientôt mettre fin aux accidents. Ün insecte à aiguillon étant avalé peut oc- casionner de plus graves accidents , en piquant, soit dans la bouche ou la gorge , soit dans l’œso- phage ou l’estomac. On conçoit même que, si la piqûre était à l’entrée du larynx , surtout chez un enfant , la tuméfaction pourrait devenir assez considérable pour amener une prompte sufloca- tion. J'ai été piqué autrefois dans la gorge par un très-petit Hyménoptère qui appartenait , je crois, au genre Guëêpe. Je puis répondre que la douleur qui en résulta fut atroce , et je suis per- suadé que, si elle eût duré long-temps, elle aurait OS PROPRIÈTÉS DES INSECTES déterminé des convulsions. L’eau très - froide fut le premier moyen qui parut opérer quelque soulagement ; j'y ajoutai du sel, du vinaigre, de leau-de-vie : ces substances , en diminuant l’acuité de la douleur, la changèrent en une vive cuisson , qui s’étendit à toute la gorge , la bouche et même à l’œsophage ; alors, j'avalai du lait doux , puis de l’huile d'olives : ces deux moyens amenèrent beaucoup de soulagement et diminuè- rent la chaleur de la gorge presque sur-le-champ ; il est probable que si je n’eusse pas employé au- paravant les légers caustiques dont j'ai parlé, je n'aurais pas obtenu des calmants un aussi prompt adoucissement. Voici en pareil cas, je pense, la conduite qu’il y aurait à suivre: 1°. Avaler lentement de leau très-froide , à laquelle on ajouterait dusel, de fort vinaigre, de l’eau-de- vie, ou quelques gouttes d’'ammoniaque; on pour- rait encore prendre de l’eau de chaux légère ; 20, Lorsque la cuisson vient à succéderàla do uleur, l'huile d’olives ou d'amandes douces, le lait doux, l’émulsion d'amandes, une potion dans laquelle on ferait entrer le sirop de guimauve ou de gomme et celui d’opium, seraientdes moyens utiles : dans quelques circonstances, on pourrait même être obligé d’avoir recours aux saignées, aux bains DES ENVIRONS DE CAEN. 109 üèdes et aux applications narcotiques. On ad- ministrerait à l'intérieur quelques antispasmodi-, ques, tels que l’Éther, la liqueur d’'Hofmann, pour prévenir les accidents nerveux, ou les combattre s'il s'étaient déjà développés. HYMÉNOPTÉRES À TARIÈRE. Aucun être de cette division ne porte de venin; aucun ne marque son existence par de grands dommages ; beaucoup font du bien , en détruisant les chenilles qui dévorent nos arbres ; quelques- uns offrent au commerce des substances pré- cieuses : telles sont les noix de galle, Leur tarière consiste : 1°. En une pièce écal- leuse qui a la forme d’une lance ou d’un filet, et qui est garnie à son extrémité libre de den- telures aiguës; 2°. En deux autres pièces accolées, cannelées en dedans, et servant de foureau ou de gaine à la première , située comme l’aiguillon à l’anus de l’insecte: la tarière n’est’pas comme lui cachée dans son abdomen ; elle se prolonge au-dehors comme une longue queue. Elle sert tout à la fois d'arme et d’oviducte , et n'existe que chez les femelles : comme arme , elle est peu à craindre pour l’homme et les gros animaux. Lors- FYIO PROPRIÉTÉS DES INSECTES qu'on prend certaines espèces d’/chneumons , de Banches et d'Ophions , il est dificile d’évi- ter leur piqüre, à cause de leur grande agilité, J'ai été piqué plusieurs fois par POphion jaune : j'éprouvais une douleur analogue à celle qu’au- rat produit un très-léger coup d'aiguille. Ce- pendant , il ne faut pas penser que cette piqüre soit aussi insignifiante pour tous les êtres ; je ne doute pas qu’elle ne puisse blesser grièvement, ou même tuer une Chenille, un Papillon, un Dipière. Lorsqu'un Hyménopière à tarière, de la famille des Insectirodés , en veut à une Chenille ou à tout autre insecte dépourvu de moyens de défense , il se précipite sur lui avec la rapidité de Péclair , le saisit du bout de ses longues pat- tes , et dans un clin d’œil il le perfore souvent d’outre en outre en vingt endroits différents. Con- sidérée comme oviducte , la tarière des Hymé- noptères leur sert à introduire leurs œufs dans l'intérieur des végétaux ou des animaux. Après y avoir subi une sorte d’incubation , ils donnent naissance à des larves qui vivent aux dépens des mêmes êtres. Sont-elles dans un végétal , elles y font naître des galles , des tumeurs, des ul- cères , etc. ? Se trouvent-elles dans l’intérieur d’une Chenille ? placées sous sa peau , elles dé- DES ENVIRONS DE CAEN. III vorent sa propre chair, en ménageant avec soin les organes essentiels à sa vie , qu’elles finis- sent même par détruire. Ire, FamiLLe. Aprarres. — Genres: Bembex, Eucère , Abeille , Andrène, Nomade. Les Bourdons et les Xylocopes , maintenant séparés des Abeilles (1), sont ceux dont la piqûre est le plus à redouter. Elle est cependant moins dou- loureuse que celle des grosses Guépes , qui ap- partiennent à la deuxième famille. IIIe. Famiz ce. Carysines.— Genre : Chrysis. Les espèces de ce genre , remarquables par leurs brillantes couleurs , produisent encore des piqü- res assez dangereuses , moins pourtant que celles des insectes précédents. IVe. Famize. Frorrrèces. — Genres : Cra- bron , Philante, Melline. Leurs piqûres se rapprochent de celles des Guêpes ; la douleur est plus vive et plus durable que celle que cau- sent les Abeilles. VIS Famizze. Formicaïres. — Genre: Fourmi. Leur piqure détermine une sensation douloureuse , analogue à celle que produisent les (1) M. Blot n’a pas jugé à propos de parler de ces insectes, qui sont parfaitement connus, et sur lesquels nous avons un grand nombre de bons ouvrages. °JI2 PROPRIÉTÉS DES INSECTES orties ; mais elle n’est nullement dangereuse. Les Fourmis occasionnent souvent des ravages dans les jardins , et surtout dans les couches. On con- naît les divers moyens employés pour les chas- ser ou les détruire, tels que la suie, la chaux réduite en poudre, l’eau bouillante, etc. Ces moyens ne réussissent pas toujours. VIIIS. Famice. ABDITOLARVES. — Genres : Chalcide, Diplolèpe , Cynips. Ce sont les es- pèces de ces genres qui produisent la noix de galle , les pommes de chêne, les excroissances, appelées bédéguard , qui se développent sur l’é- glantier , et mille autres productions qui méri- tent de fixer l’attention des naturalistes. 1X<, Fame. Uroprisres. — Genres: T'en- thrède , Urocère, Sirex , Cimbex. Leurs es- pèces, très-nombreuses, étaient connues autrefois sous le nom de Mouches à scie , à cause de leur tarière. Ce sont elles principalement qui enfon- cent leurs œufs dans la substance des végétaux, et occasionnent la plupart de leurs maladies. La connaissance de leurs larves jetterait beaucoup de , lé lumière sur la pathologie végétale, DES ENVIRONS DE CAEN, 113 HÉMIPTÈRES. Ie, Famizre. SancuisuGes. — Genres : Pu- naise, Miris, Æydomètre , Reduve. Tous les insectes qui composent cette famille vivent du sang des animaux; presque tous répandent une très-mauvaise odeur. L'espèce la plus in- commode pour l’homme est la Punaise des lits. Cet insecte fait naître sur la peau des pustules brülantes,très-prurigineuses, et dues à l’introduc- tion d’un venin dans la petite plaie qu'il a produite. Cependant ce venin n’est nullement connu. Il paraît agir de deux manières différentes : d’abord, il engourdit tellement la partie où 1l estinsinué , que la Punaise pique sans qu’on éprouve la moin- dre douleur; la vive cuisson qui survient ensuite ferait croire qu'il est irritant ; du reste la piqure de la Punaise est plus incommode que dange- reuse. L'huile d’olhves, celle d'amandes douces le suc de pavot, le laudanum , l’eau de guimauve, l'extrait de saturne , l’eau salée , lammoniaque étendue d’eau , sont les meilleurs moyens qu’on puisse employer pour hâter la résolution de la pustule qu’elle produit. Parmi les moyens nombreux que l’on a pro- 8 11/4 PROPRIÉTÉS DES INSECTES posés pour se débarrasser des Punaises, la vapeui du soufre et celle de charbon, l’huile d'olives, et surtout la propreté, sont les plus efficaces. On dit que la Reduve masquée , qui est très- commune dans nos maisons , pique comme Îa Punaise ; mais je me suis assuré que c’est une erreur. Ve. Fame. Pranrisuces. — Genres : Aleyrode, Chermès , Puceron, Myzoxyle(:), Psylle , Cochenille. Cette famille est une des plus remarquables par les déoâts que ces espè- ces commettent. Sans cesse vivant du suc des végétaux, elles semblent nous disputer les pro- duits de nos jardins et de nos vergers. Parmi les genres cités , les Pucerons , les Myzoxyles et les Chermès sont les plus nuisibles ; ils sont très- nombreux en espèces , et leur multiplication est si rapide que plusieurs générations de ces ani- maux se succèdent en très-peu de jours. Reau- mur et Sywammerdam ont dit sur les mœurs et (1) Genre nouveau détaché du genre Puceron , et auquel Pau- teur donne pour caractères distinctifs des antennes de cinq ar- ticles renflés , dont le second est le plus long, et le troisième est le plus court ; point de tubercules ni de cornes à l’anus ; des tarses de deux articles, et deux crochets accolés, difficiles à distinguer. Le nom de Myzoæyle vient de deux mots grecs, qui signifient suce-bois. ( Note du rapporteur, ) DES ENVIRONS DE CAEN. 115 la génération du Puceron des choses si extra- ordinaires , qu’on serait tenté de croire que leur microscope servait plutôt d'instrument à leur imagination qu'a leurs yeux. - Le Myzoxyle du pommier est la cause d’une grande partie des maladies de cet arbre ; c’est lui qui fait naître le plus souvent et entretient les galles et les ulcères qui arrêtent sa végétation, et le font même quelquefois périr. Pour s’en débarrasser , 1l faut couper les branches qui en sont les plus chargées , les ulcères et les galles ; nettoyer l’ar- bre avec une brosse rude , saupoudrer de tabac, ou imbiber d'huile les endroits où il pourrait rester quelques-uns de ces insectes ou de leurs larves. Les autres moyens indiqués , les lavages , la vapeur du soufre, etc. , sont insuflisans et presque toujours de nul effet. Les moyens que nous venons d'indiquer pour détruire les Myzoxyles, sont également efficaces . pour chasser les autres insectes de cette famille , des végétaux auxquels ils s’attachent de préfé- rence. MÉMOIRE Sur les coquilles du genre Gervirute , lu à la séance du 1°. décembre 1825, par M. EUDES-DESLONCHAMPS. P ARMr les nombreuses coquilles bivalves qui se trouvent fossiles dans les divers calcaires de notre département, quelques-unes , très-alongées, sub- transverses , à base fort oblique, avaient parti- culièrement excité mon attention : leur charnière, considérée extérieurement et sans ouvrir la co- quille , offre la plus grande analogie avec celles des Pernes, et long-temps je les avais considérées comme appartenant à ce genre. Étant parvenu à ouvrir entièrement une des plus grandes de ces coquilles et à la dégager complètement de sa gangue , je fus fort étonné de voir qu'il existait, en dedans de la charnière extérieure , une seconde charnière disposée tout différemment, et formée par de grandes dents fort obliques sur chaque DU GENRE GERVILLIE. 1:17 valve , qui s’engrenaient dans celles de la valve opposée. Cette remarque me détermina à ouvrir les autres coquilles plus petites qui présentaient de l’analogie avec la première , et je parvins, non sans beaucoup de peine et de travail , à dé- couvrir que toutes présentaient, outre la char- nière extérieure , une seconde charnière formée de dents obliques , intrantes, mais pourtant un peu différemment disposées suivant les espèces. Aucune coquille connue , vivante ou fossile , ne présentant de charnière ainsi disposée , je pen- sais avoir découvert un nouveau genre , lorsque j'eus connaissance de celui que M. Defrance ve- nait d'établir sous le nom de Gervillie ( dict. des se. nat. ), d’après un moule intérieur de coquilles qui se trouvent assez abondamment dans le calcaire à Baculites du département de la Manche. La description , et surtout la figure qui l'accompagne , me firent bientôt reconnaître que mes coquilles appartenaient à ce genre nou- vellement établi. Une de mes espèces, qui se trouve aux Vaches Noires et dans le calcaire à polypiers, me parut être identique avec celle que M. Defrance a décrite : j'ai reconnu depuis qu’elles étaient différentes , lorsque j'ai pu com- parer avec celles que viens de citer , des échan- 115 MÉMOIRE SUR LES COQUILLES üullons de la Gervillie du calcaire à Baculites que je dois à la complaisance de MM. de Bazoches et de Gerville, membres correspondants de la société. Les caractères du genre Gervillie , tels qu'ils ont été établis, ne peuvent néanmoins convenir entièrement à nos coquilles. M. Defrance n’en connaissait qu’une espèce d’une assez petite di- mension , et à l’état de moule intérieur. Quelques- unes des espèces de nos environs étant très- grandes , et surtout ayant conservé leur test, je proposerai quelques modifications dans les carac- tères du genre; mais auparavant j'extrairai textuel lement du Dict. des sc. nat. , Varticle Gervillie , afin de mieux établir le point de départ , montrer ce quiest déjà fat, et ce qu'il est nécessaire d’a- Jouter. | ‘ GERVILLIE. Gervillia. « On trouve dansles couches du calcaire compacte « des communes de St°.-Colombe et d’Anfréville, « département de la Manche , les traces d’une coquille « bivalve qui ne se rapporte à aucun des genres « connus. « Malheureusement on ne peut se procurer le test « de ces coquilles qui sesont trouvées dans une de ces « localités où toutes celles qui étaient dans le cas de « disparaître ont disparu ; mais les moules, lant ex- térieurs qu'intérieurs qu’elles- ont laissés , sont si ES « A « « DU GENRE GERVILLIE. I1O bien exprimés, que l’on peut aisémenten saisir tous les caractères. « Les voici : « Coquille bivalve, inéquilatérale, très-alongée longitudinalement, un peu courbe et aplatie , bâil- lante irès-probablement à l'extrémité antérieure où se trouve située la charnière et où chaque valve est un peu retroussée dans le plan de la courbure de la coquille ; trois fossettes obliques, qui ont dû contenir autant de ligaments, dont deux vis-à-vis les crochets et l’autre un peu éloignée ; cinq ou six petites dents obliques au-dessous des deux premiè- res, deux longues parallèles et quelques autres plus petites au-delà de la troisième fossette. Une impres- sion musculaire vis-à-vis de la charnière. « Ce genre n’a présenté jusqu’à ce jour qu’une seule espèce à laquelle nous avons donné le nom de Gervillie solénoide, vu les rapports qu’elle a, par ses formes extérieures , avec quelques espèces de Solens, mais avec lesquels elle ne peut jamais être confondue. Sa longueur est de trois pouces sur quatre lignes environ de largeur. On la trouve avec des Ammonites et des Baculites dans les commu- nes ci-devant désignées, et dans l’île d’Aix où elle a laissé aussi des moules intérieurs. » D’après l'examen réitéré de quatre nouvelles espèces que je rapporte à ce genre , et tout en adoptant le nom consacré par M. Defrance à un naturaliste à qui la science doit tant de dé- couvertes, je proposerai de rectifier les carac- 120 MÉMOIRE SUR LES COQUILLES ières des Gervillies et les énoncer , ansi qu'il suit : Coquille bivalve , inéquivalve , inéquilaté- rale, alongée , un peu arquée , subtrans- verse, très-oblique sur sa base, non bail- lante. Charnière double ; l’extérieure formée de sillons larges , peu profonds , plus ou moins nombreux , opposés sur chaque valve , destinés à recevoir des ligaments,comme dans les Pernes ; l’intérieure à dents très-obliques, alternes sur chaque valve etse recevant mu- tuellement. | Les Gervillies forment un genre très-distinct, mas voisin des Pernes dont elles diffèrent es- sentiellement par le défaut d'ouverture pour le passage d’un byssus et par la présence d’une char- nière intérieure ; caractères qui ne se remarquent dans aucune autre coquille de la famille des Mal- léacées à laquelle les Gervillies appartiennent : elles ont aussi quelques rapports avec les Avi- cules. Leur coquille est en général fort alongée , très- épaisse dans quelques espèces, renflée dans levoi- sinage de la charnière, un peu arquée et fort oblique sur sa base: celle-ci déborde des deux côtés ets’alonge plus ou moins comme dans les DU GENRE GERVILLIE. Y2:4 Avicules et les Marteaux. Le prolongement de celte base , placé du côté concave de la coquille, est toujours le plus long ; il est entier dans trois espèces, échancré dans deux autres. Les deux valves ne sont point égales. Celle que nous nom- merons l'inférieure , est plus renflée que Pautre ; son crochet déborde constamment le niveau de la base. La valve supérieure est un peu aplatie du côté du bord concave et renflée du côté op- posé ; son crochet ne dépasse point le niveau de la base. La surface extérieure des deux valves est couverte de stries d’accroissement assez ré- guhères ; on y remarque aussi quelques sillons et côtes longitudinales variant suivant les espèces. Leur face interne est concave et lisse ; elle s’é- tend en pointe très-alongée sous le prolongement placé du côté du bord convexe ; l’impression mus- culaire est placée un peu en dessous de la char- nière , elle est simple, ovalaire ou subtétragone. Les bords des deux valves sont entiers et ne pa- raissent présenter aucune ouverture pour le pas- sage d’un byssus : je me suis assuré de ce caractere sur les Gervillies Pernoïde et Silique ( les plus grandes du genre), en examinant attentivement les deux valves rapprochées ; quant aux trois autres , je n’en juge que par l'intégrité de leurs bords, n’en 122 MÉMOIRE SUR LES COQUILLES ayant jamais vu que des valves détachées et qui _ne se correspondaient point. E* La charnière des Gervillies est très-singulière : il ÿ en a véritablement deux, une extérieure, située le long de la base et formée par des sil- Jons , plus ou moins nombreux , séparés par des intervalles égaux ou inégaux; les sillons et les espaces qui les séparent sont opposés sur les deux valves; 1l donnaient attache aux ligaments, comme dans les Pernes. On peut voir très-bien la char- nière extérieure, sans ouvrir la coquille. Dans cet état, elle forme une sorte de goutière triangu- laire , écartée en dehors , rapprochée en dedans, et cet écartement dépend presque en totalité de la coupe très-oblique de cette charnière sur la valve supérieure: à la valve inférieure , elle est presque sur le même plan que la coquille. La charnière interne ne peut être aperçue qu'après avoir ouvert la coquille ; elle est formée par plusieurs dents obliques diversement dispo- sées suivant les espèces , et qui se recoivent ré- ciproquement sur chaque valve. Les Gervillies se trouvent fossiles dans les di- verses variétés de calcaire des environs de Caen, de Valognes et de Séez, et probablement dans les autres localités où Les mêmes formations se rencon- Le DU GENRE GERVILLIE. 129 trent. Les Gervillies qui se trouvent aux envi- rons de Caen ont leur test changé en spath cal- care ; celles qui proviennent des environs de Va- lognes n’offrent que des moules extérieurs et in- térieurs bien conservés ; la coquille a complète- ment disparu et a laissé un vide , de l’épaisseur de son test, entre les deux moules : je présume que celles des environs de Séez sont dans Île même cas; du reste, je n’en puis complètement juger, n’en ayant à ma possession qu'un seul échantillon que je dois à la complaisance de M. de Bazoches. Deux des plus grandes espèces de Gervillies , c'est-à-dire les Gervillies Pernoïde et Silique, pré- sentent à leur surface extérieure, sur le test spathi- que, une sorte d’épiderme assez épais dans quelques points, dont le tissu , bien différent de celui du reste de la coquille, est formé de fibres perpen- diculaires semblables à celui des Pinnites. Je n'ai pu apercevoir rien de semblable sur les au- tres espèces plus petites ; mais je présume qu’il aura été détruit à cause de sa ténuité. Ce fait remarquable, le devient encore davantage, quand on saura que, dans quelques localités , 1l n’est resté des Gervillies que l’épiderme à tissu de Pinnite ; tout le reste de la coquille a disparu. _— 1a4 MÉMOIRE SUR LES COQUILLES Cette sorte d’altération se rencontre dans quel- ques Gervillies du calcaire dit à polypiers ; mais elle est beaucoup plus fréquente dans le calcaire de Caen, proprement dit, où il est excessivement rare de trouver des Gervillies à test spathique , quoi qu’elles y soient fort communes, lorsqu’elles n’ont conservé que leur épiderme. Les personnes qui n’ont point vu ces coquil- les ainsi dégradées dans le calcaire de Caen , se formeront difficilement l’idée de ce que j’avance ici, et croiront que j’ai pris pour l’épiderme per- sistant d’une coquille, l’émpreinte pure et simple de ceite même coquille : mais il n’y a pas à s’y tromper. Cet épiderme , quoique mince , est assez épais pour qu’on puisse facilement distinguer sur sa cassure, et au moyen de la loupe, le tissu de Pinnite ; on y voit très-bien les stries d’ac- croissement qui souvent chevauchent l’une sur l’autre; ceci se remarque spécialement vers l’extré- mité opposée à la charnière. La singulière organisation de l’épiderme des Gervillies me fit naître l’idée de rechercher, si les coquilles vivantes de la famille des Malléa- cées présentaient un épiderme semblable. La plus simple inspection suffit bientôt pour ne point me Jaisser de doute à cet égard ; j'ai constaté ce fait DU GENRE GERVILLIE,. 129 de là manière la plus évidente sur plusieurs es- pèces d’Avicules , sur le Perna Éphippium , le Malleus Vulgaris et le Meleagrina Mar- garitifera ;l'épiderme (1), sur ces deux dernières coquilles , a plus d’une ligne d’épaisseur. Pour s’en assurer, 1l suffit d’en casser un petit morceau. J'ai fait la même remarque sur le Perna Myti- loides(Lamarck),qui se trouve fossile aux Vaches Noires,et que l’on ne doit pas confondre avec nos Gervillies. Cette observation , que je crois avoir faite le premier,paraîtra peut-être d’une assez faible impor- tance. Cependant, si l’on considère que les co- quilles du genre Pinne et celles à tissu semblable, telles que les Catillus, les Bélemnites , et peut-être d’autres encore , conservent, à l’état fossile et dans toutes les formations , le test qu’elles avaient (1) Je me sers ici du mot épiderme, faute d’un autre plus convenable : en effet , la couche extérieure au tissu nacré des Malléacées est bien différente de ce que les conchyliogistes enten- dent communément par épiderme des coquilles. 3’ai même ob- servé sur quelques petites Avicules vivantes un véritable épi- derme membraneux et légèrement barbu, tapissant à l'extérieur la première couche solide de la coquille , que j'appelle ici épi- derme , et dont la cassure est bien différente de celle de la nacre qu’il recouvre. Peut-être serait-il convenable de le nommer épt- nacre, si cette expression est conforme aux règles de la formation des mots- 126 MÉMOIRE SUR LES COQUILLES lorsqu'elles jouissaient de la vie, tandis que là plupart des autres coquilles fossiles , qui se trou vent dans les mêmes térrains , ont perdu leur test marin, et qu'il a été remplacé par un nouveau test spathique ; on ne pourra s'empêcher de re- garder comme une chose fort singulière que des coquilles qui présentaient dans leur structure à l’état vivant et le tissu des Pinnes, et Le tissu nacré, aient conservé, à l’état fossile , la portion de leur test ressemblant à celui des Pinnes, tandis que l’autre a été remplacé par de la chaux car- bonatée , crystallisée et transparente ; ou même que ce dernier ait complètement disparu , sans laisser de traces de son existence. On peut con- sulter à ce sujet un mémoire de M. Defrance , sur la disparition du test des coquilles fossiles, où l’on trouvera une foule de remarques neuves et intéressantes. Icre. GERVILLIE PERNOÏDE. Gervillia Pernoides. N. Ger. Testé magné , crassé , latiusculé ; auriculis integris , sulcis cardinis externi nu- merosis, magnis, parallelis, dentibus car- dinis interni polymorphis , obliquissimis. Cette coquille, longue de cinq à sept pouces, large d’un pouce et demi à deux pouces, a son test fort DU GENRE GERVILLIE, 127 épais, surtout du côté de la charnière. La surface extérieure offre des stries d’accroissement , nombreu- ses, serrées et assez régulières. Le prolongement de la base, situé du côté du bord concave de la coquille, est entier et tres-large. Il est aplati et presque sur le même plan à la valve supérieure, et fortement déprimé à l’autre valve. La coquille est très-renflée vers son bord convexe, et beaucoup moins du côté du bord concave. Elle n’est point bâillante. Les sillons de la charnière extérieure , au nombre de six ou huit , sont larges, peu profonds, parallèles entre eux et presque perpendiculaires à la base de la co- quille. Les dents de la charnière interne ressemblent à de gros plis irréguliers, très-obliques ; ils sont au nombre de trois ou quatre sur chaque valve. La Gervillie Pernoide est très-commune dans le calcaire de Caen, mais avec l’épiderme seulement; elle yesttrès-rare avec son test spathique. On la trouve aussi aux Vaches Noires ; elle y est fort rare et con- serve son test spathique ; elle a encore été trouvée à Glau, dans les environs de Lisieux , dans un banc siliceo-calcaire, coloré par de l’oxide de fer. Quel- ques échantillons ont un test spathique, d’autres n’ont que l’épiderme. Enfin, M. de Bazoches m'a commu- niqué un moule intérieur qui appartient très-proba- blement à cette espèce ; il se trouve à Gäprée proche Séez; ce moule est calcaire, blanc jaunâtre, assez dur et sans oolites. 128 MEMOÏRE SUR LES COQUILLES Ie, GerviL LE SILIQUE. Gervillia Siliqua. N. Ger. Test& elongaté , subcompressé , au- riculis integris , sulcis cardinis externi ter aut quatuor , dentibus cardinis interni , obli- quus , simplicibus. La Gervillie silique ne diffère guères de la précé- dente , que par de moindres dimensions ; mais cette différence est constante, et il est facile de voir, en comparant les stries d’accroissement, qu’elle ne peut être un jeune individu de la Ger villie Pernoïde. Comme celle-ci, elle n’est point bâillante : sa longueur est d’un pouce et demi à trois pouces ; sa largeur d’un demi pouce. En comparant soigneusement les deux espèces, j’ai remarqué les différences suivantes : La Gervillie Silique est plus alongée, eu égard à sa lar- geur ; le prolongement de la base placé du côté du bord convexe est proportionnellement plus long, le nombre des sillons de ia charnière extérieure est de : irois ou quatre ; celui qui est placé sous le crochet est oblique, les dents de la charnière interne sont au nombre de trois , et moins irrégulières que dans l’es- pèce précédente. Cette coquille se trouve, très-bien conservée, dans la marne bleue desVaches Noires ; elle yest rare. Elle se rencontre assez fréquemment dans quelques loca- lités du calcaire à polypiers, et notamment à Lébisey, DU GENRE GERVILLIE. 120 dans le parc de M. de Magneville. Son état de con- servation varie : on l’y trouve 1°. à l’état de moule intérieur, rarement bien entier; 2°. à l’état de moule intérieur recouvert partiellement par l’épiderme et une couche mince de test spathique. Cette portion de test est presque toujours très-tourmentée, plus ou moins cassée : ce n’est que la forme générale de la coquille qui peut la faire reconnaître; 3°. avee son test spathique de toute son épaisseur, recouvert par l’épiderme. Elle est assez commune dans ce dernier état ; on trouve des morceaux de pierre qui en sont comme lardés. Mais le test spathique est très-fragile et la pierre fort dure , de sorte que ce n’est qu’avec une peine infinie et presque toujours en fracturant plus ou moins le test , que l’on peut en dégager assez pour mettre les caracières en évidence. Ces diffé- rents états de conservation se rencontrent quelque- fois sur des morceaux de pierre de quelques pouces carrés : je possède un fragment de Gervillie silique de cette localité dont la valve supérieure a tout son test spatique, tandis que l’inférieure, amincie et tour- mentée, est presque réduite à son épiderme. Il faut voir et examiner long-temps un grand nombre de ces coquilles pour se former une idée de cet état bizarre de conservation. ITTe. GerviLLie SOLÉNOÏDE, Gervillia Solenoides (De France. ) Ger. Testé longissimé , angusté, auriculis integris ; Sulcis cardinis externi ter aut quas 0 150 MÉMOIRE SUR LES COQUILLES tuor, dentibus cardinis interni numerosis , inæequalibus , varié dispositis. Voyez, pour la description. l’article Gervillie du dic- tionnaire des sciences naturelles, cité plus haut. IVe. GERVILLIE À UNE SEULE OREILLE. Gervillia monotis. N. Ger. Testé parvé latiusculé , auriculis al- teré brevissimd alterd longé , emarginatd. Cette coquille, bien distincte des précédentes, est longue d’un demi pouce à un pouce, et large de trois à cinq lignes. La valve inférieure ( la seule que j'aie encore trouvée entière ) est assez bombée; les: stries d’accroissement sont très-fines et très-serrées ; on remarque une ou deux crêtes longitudinales, peu saillantes, qui croisent leur direction; la base est tres- oblique et le prolongement placé du côté du bord convexe est excessivement court; les stries d’accrois- sement y sont entassées en forme de petits plis sail- lants coupés par un ou deux sillons longitudinaux; le prolongement opposé est long et échancré. J'ai eu beaucoup de peine à bien voir la charnière; la co- quille est si fragile qu’on la brise presque toujours, lorsqu'on veut la dégager; pour bien la voir, il est nécessaire de se servir d’une loupe : la charnière ex- térieure présente deux ou trois sillons obliques, peu profonds; l’intérieure est formée également de deux DU GENRE GERVILLIE. 151 ou trois dents obliques simples, qui ne se confondent point avec les sillons de la charnière extérieure. J'ai trouvé quelques échantillons de ces coquilles dans une variété du calcaire à polypiers qui contient en même temps beaucoup de menus débris de poly- piers et d’oolites très-blanches, à Luc, Colleville et Sallenelles Je n’ai pu encore me procurer qu’un seul morceau de la valve supérieure ; .et la charnière y manque. Le test est mince et spathique. Ve. GERrVILLIE COSTATULE. Gervillia Costatula. N. Ger. T'esté parvd , latä, submuticé , costis quatuor aut quinque longitudinalibus exiguis,. auricul& longiori emarginatt. Ce n’est qu'avec doute que je rapporte cette co- quille au genre Gervillie; elle s’en éloigne déjà par plusieurs earactères essentiels. Vue extériearement, elle a tout le port d’une Avicule. Elle est large pour sa longueur { un pouce de long et environ trois quarts de pouce de large ) et assez bombée. La valve infé- rieure est légèrement et régulièrement marquée de siries transversales; celles-ci sont croisées par quatre ou cinq petites côtes longitudinales plus sensibles vers le crochet que sur le limbe. La valve supérieure m'a paru lisse et sans côtes ; mais je soupçonne que la seule de ces valves que j'aie vue est frustre, parce qu'on n’y aperr it pas même de stries d’accroisse- 152 MÉMOIRE SUR LES COQUIBLES ment, tandis qu’elles sont très-apparentes sur les pro- longements de la base. La Gervillie Costatule est bien moins oblique que les précédentessur sa base : celle-ci est presque aussi longue que la coquille ; le prolonge- ment placé du côté du bord concave est largement échancré. La charnière diffère beaucoup de celle des autres Gervillies, et n’a guères de commun avec elles que d’être double : l’extérieure ne présente qu'un seul sillon oblique superficiel, comme celui des A vicules ; intérieure offre une suite de dents sériales, presque rayonnées , saillantes dans la cavité de ia coquille, et offrant quelque ressemblance avec les dents des Ar- ches. Mais, outre les autres différences, on ne rap- portera pas notre coquiile à la famille des Areacées , si l’on considère 1°. que les dents sériales des Arches ne sont point saillantes dans l’intérieur de la coquille; 2°. que les dentsles plus petites sont au centre, tandis que, dans notre coquille, c’est tout le contraire ; 3°. que l’obliquité des dents des Arcacées est telle, que si on Îles supposait prolongées elles se rencontreraient, en formant un angle plus ou moins aigu, dans la concavité de la coquille, tandis qu'en faisant la même supposition pour les dents de notre coquille, elles se rencontreraient en dehors sous le crochet. On peut dire plus succinctement que les dents de ces deux sortes de coquilles sont obliques en sens contraire. J'ai trouvé quatre valves détachées de cette espèce, dont l’une supérieure, dans les mêmes localités que la précédente. DU GENRE GERVILLIE. 139 EXPLICATION DES PLANCHES. PLrancne Îre. Gervillie Pernoïde, vue à l'extérieur. Figure Ire. , valve supérieure. Figure Ile. , valve inférieure (grandeur naturelle ). L’échantillon qui m'a servi à faire ce dessin provient des car- rières de Quilly : il n’est point ouvert ; son test est spathique ; il fait partie de la collection de M. Larmeuroux, Quoique la coquille ne soit pas entière, ce qui reste est de la plus belle conserva- tion. On peut facilement voir les sillons de la charnière exté- xieure. L’épiderme s’y remarque sur plusieurs points , et notam- ment à la valve supérieure. Prancue Ile. Gervillie Pernoïde , vueen dedans..Figure Ire. , valve supérieure. Figure IIe., valve inférieure ( grandeur naturelle }. La coquille qui a servi pour le dessin provient de la marne bleue des Vaches Noires, et la gangue renfermait beaucoup d’00- lites ferrugineuses. L’extrémité opposée à la charnière est fractu- rée , il ymanqueun pouce ou un pouce et demi du test. Le pro- longement de la base situé du côté du bord convexe est éga- lement cassé dans l’étendue de quelques lignes ; mais cette der- nière cassure polie, et usée , fait présumer qu’elle a eu lieu avant que la coquille ne devint fossile. Son test excessivement épais , sa surface extérieure très-frustre sur les parties saillantes ( qui sont plus prononcées que sur l'échantillon précédent }) , l’épi- derme qui n’est visible que sur quelques points , tout cela porte à croire que cet échantillon appartient à une vieille coquille. Un léger glissement des deux valves l’une sur l’autre , et la cassure de l’extrémité opposée à la charnière , m’ont laissé la faculté de les séparer et de dégager entièrement la gangue dont lPintérieur était rempli. Cette gangue était beaucoup plus dure que ne l’est ordinairement la marne desVaches Noires, lorsqu’elle ne contient pas d’oolites. Les charnières sur les deux valves sont de la plus belle conservation. C’est sur cet échantillon que l’on peut voir bien évidemment, la coupe oblique de la charnière extérieure sur le plan de la valve supérieure. On peut, du reste, avec un peu d’attention , faire la même remarque sur les autres Gervils lies, 154 MÉMOIRE SUR LES GERVILLIES, Cette coquille fait partie de ma collection. PLrancue IITe. Gervillie Pernoide dont l’épiderme seutest conseruc. ( Grandeur naturelle. ) e L’échantillon qui m'a servi à faire ce dessin est un des plus. beaux , des plus entiers et des mieux disposés que j'aie vu: il a été trouvé dans les carrières d’Allemagaue , et appartient à M. Lamouroux ; sa valve inférieure est entièrement dégagée et se voit par sa face extérieure , où l’on remarque des stries d’accrois- sement très-évidentes ; elle recouvre plus de la moitié de la valve supérieure dont le reste se voit ici par la surface qui était appli- quée sur la portion nacrée. On n’apercçoit sur cet échantillon au- cune trace de test spathique, et les deux valves constituées par l’épiderme seul , sont plus aplaties que dans les coquilles entières; elles paraissent avoir glissé l’une sur l’autre et ne sont séparées que par une couche de gangue épaisse à peine d’une ligne. Au reste, j'ai toujours remarqué que , lorsqu'on rencontre ensemble les deux valves réduites à l’épiderme, qu’elles se correspondent ou non , l'intervalle rempli de gangue qui les sépare est toujours beaucoup moins considérable que lorsqu'elles présentent un test spatique. ï Praveus IVe. Gervillie Silique. Figure Ire., valve supérieure. Figure IT. valve inférieure ( grandeur naturelle ). Le dessin en a été fait sur un échantillon provenant de la marne bleue des Vaches Noires ; il est tres-bien conservé et n’a de frac- turé que lextrémité du prolongement de la base situé du côté du bord convexe. Il appartient à M. Lamouroux. | Les figures [II et IV représentent la charnière des deux valves | de cette coquille. Elle est coupée au niveau de Pempreinte muscu- laire. Cet échantillon , qui fait partie de ma collection , provient également des Vaches Noires. Pour l'ouvrir , j’ai été forcé de le scier en travers. Prancue Ve. Gervillie à une seule oreille. Figure Ire., valve in- férieure, gandeur naturelle, Figure 1i°c., charnière de cette valve { grossie environ quatre fois ). Elle fait partie de ma collection. Pranexe Ve. Gervillie Costatule. Figure IIIe., valve supérieure. Figure [Ve. , valve inférieure. Figure Ve., charnière de cette valve ( grossie environ quatre fois ). Elle est également dans ma collec- tion, GERVILLIA PERNOIDES UT AU ARS FUNE SAlRT GERVILLIA PERNOIDES. PEUT: GERVILLIA PERNOIÏDES. RVILLIA SILIQUA t #7] GE . GERNILLIA MONOTI GERVILLIA COSTATULA.. 2 LS. 1 F: te. 8 -$ RARUVRUAR VAL VAIUUR VALUAR LU UUMUVUUUVUUVUEUVULAR RAR UVLUAR AAUIR VI LA OBSERVATIONS Sur la cause de la Coloration des Huïtres et sur les Animalcules qui servent à leur nuiriäon ; par M. BensamN GAILLON ( lues à la séance du 5 janvier 1824 }, Lons QUE je publiai les observations (1) qui m'avaient conduit à découvrir que la teinte verte dont les huîtres se revêtent à certaines époques de l’année dans les divers réservoirs ou parcs de la côte, où, pour leur conservation et leur amélioration , on les met séjourner à la sortie de la mer, était due à une quantité inombrable d’animalcules naviculaires microscopiques chargés de cette couleur , je me promis bien d’ob- server ultérieurement le développement de cette espèce de petits êtres analogues au Fibrio Tri- (1) Essai sur les causes de la couleur verte que prennent les huîtres à certaines époques de l’année, in-8°. 1821 ; Rouen, imp. Périaux père. Acte de l’académie des sciences de Rouen, année 1820. Annales des sciences physiques 1821. 156 OBSERVATIONS SUR LA CAUSE punctatus de Muller et de l'Encyclopédie ; mais qui en est distinct par des extrémités plus poin- tues, une forme plus déliée, un mouvement plus prompt et plus animé. Le rapport de ces êtres avec le Mollusque auquel 1ls servent de: piture devait nécessairement captiver mon at- tention. Je devais m'occuper à découvrir les autres êtres analogues qui, en l’absence de ceux- ci, servaient d’aliment à lhuître. Enfin, je devais remonter à l'agent auquel appartient la production des divers animalcules nutritifs de l’huître. Ma découverte, déterminant la viri- dité des huîtres d’une maniere contraire aux causes vaguement présumées jusqu'à ce jour, je m'attendais qu'il me serait fait diverses ob— jections , auxquelles je me proposais de ré- pondre en rendant compte de mes nouvelles observations. Une des objections les plus pro- bables était celle qui considérait comme un vé- gétal la matière verte qui , à certaines époques de l’année, dans un concours nécessaire de tem- pérature déterminée et d'influence météorique , tapisse. le fond des parcs de petites ébullitions verdâtres et brillantes, forme une bande colo- rée tout autour des bords , ou s'élève en feu- tres floconnés à la surface de l’eau, On m’ac- DE LA COLORATION DES HUÎTRES. 197 cordait bien que les huîtres ne pussent broyer et digérer les wulves , les conferves et autres hydrophytes d’une organisation celluleuse aussi prononcée et aussi coriace; mais n’était—1l pas possible que cette matière verte füt un vé- gétal d’une texture moins consistante, analogue à ce qu’on appelle Byssus , ou bien à ces pro- ductions fugaces , gélatineuses , verdâtres, dé- signées vaguement sous le nom de matière verte de Priestley ; ou encore, et ce qui rentre à peu près dans la même nature , à ces filaments simples , ténus, qui couvrent d’une teinte ver- dâtre les murs et les pavés. Ces productions , comme on sait, presque généralement connues maintenant sous le nom d’Oscillatoria , sont uu objet de contestation entre les naturalistes ; les uns les regardant comme des végétaux extrè- mement contractiles , et les autres comme des êtres animés très-simples (1). Si en soumettant au microscope la matière verte, cause nutri- (1) Je considère ces filaments comme une aggrégation de corpuscules animés, de diverses formes. Je les nomme Wémaz6o- nes. Les animalcules quiles constituent ont une existence sé- parée , avant ou après l’état d’aggrégation filamenteuse. Le fiia- ment se forme par la matière mucomembraneuse qu’ils exsu- dent, Ge filament dépourvu de ces animalcules s'appelle Né- maltes, 159 OBSERVATIONS SUR LA CAUSE tive et immédiate de la wiridité des huîtres des parcs, j'eusse apercu des êtres de la nature de ceux dont je viens de parler ; certes , par égard pour la divergence d’opinion des naturalistes , je mefusse gardé , en cette circonstance , de pro- noncer brusquement et sans aucune distinction, que c’étaient des animalcules. Je dois done le répéter 1c1, les globules verts du fond des ré- servoirs ou parcs , qu’au premier aspect l'on prend pour des bourgeons séminifères , les par- ticules de la laise verdâtre qui garnit la partie intérieure du talus de ces parcs, les flocons noi- râtres qui flottent comme une écume confervoide à la surface des mêmes parcs , furent soumis au microscope et me présentèrent des milliers d’a- nimalcules gélatmeux ‘linéaires ; pointus aux extrémités, arrondis au centre , contractiles dans cette partie, chargés de matière verte mobile, et doués d’une vélocité admirable d'impulsion et de rétrogradation > N'ayant pour longueur en réalité que la cinquantième parte d’une ligne, s’entrefeutrant en si grand nombre , qu'ils for ment alors ces globules vert éméraude, que Von voit briller au fond des parcs, lorsque les hommes chargés de leur entretien disent qu'ils tournent en verdeur. Ces globules, au bout de DE LA COLORATION DES HUÎTRES, 159 quelque temps , s’élèvent insensiblement du fond de l’eau, prennent alors un caractère de sphé- ricité ‘encore plus déterminé. Si on les observe attentivement , on verra qu'ils tienneht à une membrane muqueuse , transparente , extrême ment déliée , formant au-dessous du globule un tube qui va s’élargissant vers la base, en une membrane arachnoïde qui est fixée au fond de l’eau. Si l’on soumet au microscope une partie de cette membrane , on y trouve un certain nombre des animalcules décrits ci-dessus, lâ- chement entre-croisés et dans un repos appa- rent; la laise verdâtre qui borde la partie in- térieure du talus des parcs , est formée d’une membrane semblable. Cette membrane , après avoir résisté quelque temps dans cet état, se détache et vient avec son globule flotter sur l’eau ; alors elle est refoulée dans les angles du parc, en forme d’une masse feutrée , noirâtre, écumeuse, qu’au premier coup d'œil on est excu— sable de prendre pour un amas de conferves dé- liées. Souvent même quelques conferves vien- nent s’amalgammer dans cette sorte d'écume, et peuvent un moment induire en erreur les meil- leurs observateurs. Est-ce dans cet état, deman- diera-t-on, que cette matière verte produit son 140 OBSERVATIONS DE SUR EAUSE effet sur le mollusque ? Non, car elle est hors de son atteinte et en amas indigeste. Mais cet état inerte, qui est celui de gestation des ani- malcules naviculaires qui constituent cette ma- ère verte, annonce la grande abondance de ces mêmes animaleules répandus en myriades agis- santes dans tous les globules qui consüutuent la masse d’eau du parc. Ces animalcules navicu- laires , que j’appellerai dorénavant Navicules , puisqu'ils font partie du genre Navicula de Bory, pullulent d’une manière si étonnante , que si Von s’abstient pendant un mois de renouveler l’eau du parc en verdeur, elle prend une couleur si foncée, qu’elle ressemble au liquide d’une cuve ‘de teinture. L’huître devient alors d’un vert si intense qu’elle en paraît presque noire ; et elle est tellement imprégnée de la couleur verte,qu’elle la conserve une partie de l’hiver , conséquem- ment très-long-temps après la disparition des ÎVavicules, mais avec une dégradation de nuance très-sensible, Ce qui explique l’assertion des per- sonnes qui prétendent que l'on peût avoir toute l’année des huîtres vertes. Ces personnes, qui probablement n’ont point vu les huîtres vertes dans toute leur splendeur , qualifient de ce nom celles qui sont à peine lavées d’une teinte gri- _Sâtre. DE LA COLORATION DES HUÎTRES. 141 Comment se fait dans l’huître l’imprégnation ! de la couleur verte, me demandera-t-on ? Par la propriété des matières alimentaires , par l’as- similation de leurs particules ; comme se fait la coloration en rouge des os des animaux auxquels on donne la garance pour nourriture. Nous avons vu , a l’aide du microscope, que chaque molé- cule d’eau d’un parc en verdeur , ou en état de faire verdir les huîtres, contenait plusieurs cen- taines de ÂVavicules vertes ; elles sont alors hu- mées et digérées par l’huître. Ce Mollusque s’en repait abondamment et continuellement, 1l devient tendre, prend de l’embonpoint et une saveur particulière, comme styptique et poivrée. L’estomac , le foie et les viscères qui, dans ’Huître, avant l'apparition des VNavicules vertes, étaient d’un brun jaunâtre, deviennent, lors de la présence de ces petits êtres, d’un brun vio- lâtre. Le canal excréteur prend une teinte vert- pâle. Quant aux Branchies, c’est par elles que se signalent, d’une manière plus apparente, les di- vers degrés d'intensité de la couleur verte. Quel- ques naturalistes respectables en ont inféré que les animalcules colorés agissaient sur ces parties et y imprégnaient leur matière colorée. Diverses expériences microscopiques , faites dans le des- 1/42 OBSERVATIONS SUR LA CAUSE sein de m’assurer de cette hypothèse , m'ont démontré qu'il y a impossibilité dans le fait. Des parties entières de branchies vertes , soumises au microscope, m'ont présenté un assemblage de filaments tubuleux dans lesquels circule ou vibre continuellement un fluide chargé de pe- tits globules extrêmement ténus. Ces globules , évalués au micromètre, sont de la 5oo€. par- tie d’une ligne. Les animalcüles , cause de la viridité des huîtres, ont une étendue dix fois plus grande, qui ne permet pas de supposer que ces animalcules naviculaires puissent circu- ler dans les filaments des branchies: concurrem- ment avec les globules ténus qui les remplis- sent. Toutefois , né voulant négliger À cet égard aucune expérience , je plaçai sous le micros- cope des morceaux de branchies , dans une eau chargée de Vavicules ; le mouvement continu de vibration des particules globuleuses de cette branchie détermina , vers cet organe , le courant de Peau , un grand nombre des Navicules s’y trouva entraîné et aucune n’y a pénétré. Quoi- qu'elles se présentassent la pointe en avant, elles glissaient le long de ce morceau de bran- chies , et réparaissaient plus loin à espace qu'il woccupait plus. Quelques-unes pourtant se sont DE LA COLORATION DES HUÎTRES. 143 fixées à la surface du morceau de branclues, elles y étaient retenues par la mucosité qui en suintait ; mais aucune , méme après l'espace d’une journée , ne s’esttrouvée assimilée aux parties de la branchie , les Vavicules ont entièrement con- servé leur forme : seulement la matière colorée verte de ces animalcules a pris une teinte jau- nâtre , 1l en a été de même de toutes les Navi- cules répandues sur le champ du microscope, quand Peau a été chargée du. mucus qui s’exsu- dait des branchies de l’huître. On voit dans cette expérience un effet chimique entièrement sem— blable à celui que j’ai obtenu , en versant sur une goutte d’eau remplie de Vavicules vertes , une demi-goutte d'acide hydrochlorique. Les quatre tubes charnus triangulaires et tentaculaires qui recouvrent la bouche de l’huître, sont aussiabon- damment pourvus de la teinte verte que les bran- chies. Comme les branchies, ils sont formés de filaments tubuleux , bullés ou contractiles, dans lesquels circule, avec encore plus de vélocité que dans les branchies, un fluide à petits globules ténus. J'ai voulu aussi éprouver la puissance de nos petites Navicules sur ces tubes. La vélocité et le cours du mouvement de vibration du fluide globuleux les attrait et les repoussait alternative 1/4 OBSERVATIONS SUR LA CAUSE ment ; mais j'ai la certitude qu'aucune Navicule n’a pénétré dans cette masse membrano-mucila- gineuse , dont les filaments tubuleux ne peuvent charier qu’un fluide à globules, beaucoup plus ténu que celui des branchies. Si quelques doutes peuvent encore s'élever sur le mode d’assimilation de la matière colorée de la Vavicule verte avec le tissu de l’huître et des autres Mollusques, placés dans les eaux chargées de cette sorte de f’ibrions naviculai- res , 1 suffit , pour les dissiper, de démontrer que chaque saison de l’année a ses espèces par- ticulières de V’ibrions naviculaires, qui pullulent dans nos parcs en aussi grande quantité que la /Va- vicule verie (1), etcontribuent en grande parue à la nutrition de l’huître. Dans les mois d’oc- tobre, novembre et décembre , vous voyez se former à la surface du sédiment du fond des (1) J'avais proposé, dans mon premier Mémoire sur la cause de la coloration des Huîtres , de distinguer le Fibrion Navicu- laire ou la Navicule qui fait verdir les huîtres par le nom Spé- cifique d’Ostrearius ( huîtrier ) ; mais la découverte que j'ai faite depuis de plusieurs autres espèces de Navicules qui, douées d’une autre ‘couleur, concourent à la nutrition de l’hui- tre et lui communiquent une autre teinte de coloration , ne permet plus de se servir du nom proposé comme distinctif d’une espèce, DE LA COLORATION DES HUÎTRES. 149 parcs , une teinte brunâtre , ou capucine. Si vous questionnez dans ce moment les hommes char- sés du soin des parcs, vous les entendez s’é- crier : « C'est un bien bon signe, Monsieur , que « cette bruneur ! Nous sommes sûrs , ajou- « tent-ils, que les huîtres vont s’améliorer , s’en- « graisser , devenir plus tendres ! » Ce qui a lieu en effet;et cela se concoit facilement, puisque cette matière capucine m'est autre chose qu’une pul- lulation de Vibrions naviculaires d’une au- tre espèce. Soumises au microscope ,ces Navicu- les se trouvent de forme lancéolée, chargées d’une matière jaunâtre brillante , ayant les extrémités atténuées , mais arrondies ; présentant à ces deux extrémités deux globules hyalins, et au centre un autre globule de la même nature, mobile, di- latable et contractile. Le: mouvement de pro- oression et de rétrogradation de cet animalcute est grave et mesurc: sa forme répond exacte- ment à la figure du ’ibrio tripunctatus de Müller et de l'Encyclopédie ; mais il en diffère par sa couleur, qui est jaune, tandis que l'espèce mentionnée par les auteurs cités est verte. Ces Navicules jaunâtres, n'ayant point la même léséreté spécifique , ni la même agi- lité que la Navicule verte huîtrière , ne s'élèvent 10 146 OBSERVATIONS SUR LA CAUSE point aussi facilement dans la masse d’eau des parcs , elles se tiennent constamment plus près du fond ; mais de la sorte elles fournissent à Vhuître un aliment aussi abondant. La chair de l’huître , observée pendant la durée d’existence de ces animalcules , prend en effet une teinte brune , et a une tendreté et une saveur qui est aussi délicate et moins piquante que celle pro- duite par les Vavicules vertes. D’autres Fi- brions naviculaires de couleur jaunâtre pul- lulent à d’autres époques de l’année , et quelque- fois concurremment avec ceux dont nous venons de présenter les bons effets. Les uns linéaires, présentent l’aspect d’une petite baguette courte , diaphane , tronquée aux extrémités , pourvue au milieu de deux globules dilatables et rétrac- iles de matière pulviscule colorée ; c’est le Vibrio bipunctatus (1), Müller 1, f. 1 ; En- cyclopéd. , pl. 5, f. 4. Leur longueur varie de la Got. partie d’une ligne à la 4o€. , suivant Pétat plus ou moins développé des animalcules. Ils se trouvent mélés avec une autre espèce de la méme nuance de couleur , ovoïde au centre et (1) Le Vibrio Paxillifer , Müller et Encycl. est peut-être la même espèce dont les animalcules se trouvent dans l’état d’aggrégation et ent la matière colorée plus étendue. DE LA COLORATION DES HUÎTRES. 1/47 terminée à chaque extrémité par un filament hyalin aciculé très-ténu et très-long. Cet ani- malcule , qui s’appuie sur chacune de ces extré-- mités comme sur un balancier, n’est point dé- crit dans Müller , ni dans l'Encyclopédie. La par tie ovoide de son être, qui renferme la matière colorée n’a pas en longueur la r00€. partie d’une ligne, tandis qu'avec ces extrémités aciculées, il en peut faire la 20€. partie. Une autre espèce encore non décrite dans Müller, cinq fois plus volumineuse que les précédentes , et dont la forme légèrement arquée d’un et d'autre côté de chaque extrémité , a quelque ressemblance avec deux SS romaines, peu cambrées et paral- lèlement accolées par leurs extrémités, se voit , où rampant gravement, ou stationnaire, sur le champ du microscope, mais toujours colorée d'une teinte uniforme et claire de jaune brillant. Une autre espèce , dont l’apparition ne manque pas de dé- plaire au conservateur des pares d’huîtres, doit être encore plus particulièrement signalée ; elle se manifeste sur le terrain par une nuance de coloration jaunâtre , qui est loin de présenter aux hommes chargés de soigner les parcs les mê- mes avantages que celle qu'ils appellent bru- neur, Cette dernière contribue à l'amélioration 148 OBSERVATIONS SUR LA CAUSE de l’huitre, tandis que l’autre , suivant eux, en détériore la qualité, Je distinguai d’abord avec peine, à la simple vue, la différence de ces nuan- ces ; mais le conservateur (1) du parc ayant fixé mon attention sur le sédiment jaune terne , je le soumis au microscope et je reconnus des Navicules jaunes d’une espèce différente de celles précé- demment décrites , beaucoup plus petites et s’ag- grégeant plus promptement en filaments muqueux confervoïdes. (2) ; je trouvar plusieurs huîtres couvertes de ces filamenis que j'appelle Ve- mazoones (3). Le fond des parcs était garni de ces Navicules extrémement ténues,commençant leur aggrégation muqueuse et filamenteuse. C’est probablement à cette faculté qu'est dû le pré- (1) Je dois des remerciements à M. Benoir, conservateur du grand parc de Dieppe , pour toutes les facilités qu’il m'a of- fertes chaque année, dans les expériences que j'ai tentées pour m'assurer de la cause de la Viridité des huîtres et de leurs moyens nutritifs. Je lui sais un gré infini des renseignements “qu’il m’a donnés et du soin obligeant que lui et ses agents ont mis à me prévenir des époques favorables pour réitérer mes observations. Je saisis cette occasion de dire que les parcs qui lui sont confiés sont des mieux gérés du pays. (2) Ges filaments appartiennent au Conferva Comoïdes ; Dil- lwyn , mais ils ne peuvent plus être considérés comme végé- taux ( voir mon mémotre , sur celte production marine ). (3) Voir la note à la page. DELA COLORATION DES HUÎTRES. 149 judice que ces sortes d’animalcules produisent sur la matière de l’huître qu’ils empâtent, et à laquelle ils n’offrent qu’une nourriture de dif- ficile digestion. Les Navicules peuvent être con- sidérées comme la nourriture la plus abondante de l’huître et celle qui lui est la plus profita- ble. Les espèces de Navicules varient, ou leurs formes se modifient, à chaque saison. J'ai la cer- titude que toutes les Vavicules que j'ai obser- vées ont la faculté d’exsuder un mucus , tantôt filamenteux , tantôt membraneux , dans lequel élles s’aggrègent plus ou moins près l’une do l’autre. Celles qui persistent le plus long-temps dans l’état libre sont celles qui me paraissent convenir le mieux à la nutrition de l’huître, ou , en des tèrmes plus généraux , aussitôt que les espèces quelconques de Vavicules atteignent à l’état d’aggrégation muco - membraneux , elles. cessent d’être un aliment convenable à l’huître. Ce qui forüfie de nouveau l’opinion que les. animälcules dans l’etat filamenteux sont un mauvais aliment pour l’huître , etquidonne , en même temps, une preuve nouvelle de Pefica- cité de la ÂVavicule verte pour la coloration de ce mollusque est le fait suivant. En novembre dernier, il se manifesta au fond des. 150 OBSERVATIONS SUR LA CAUSE parcs, etsur la valve des huîtres qui y étaient dépo- sées, de peutes élévations d’une teinte gris-verdä- tre. Comme la température avait été brumeuse , humide et douce .le conservateur des pares crut qu’ils tournaient à la verdure , 1 m’enfit préve- nir , je m'y rendis , età la vue des petits points gris-verdâtres qui garnissaient le fond du parc, je partageai un instant son espérance, en attri- buant toutefois à la saison la différence que nous remarquions dans la nuance de couleur. Mais cette illusion ne fut pas de longue durée ; je soumis au microscope des parcelles de ces petites élévations , et je reconnus des filaments hyalins d’une ténuité extraordinaire, dont la réu- nion en petites touffes forme cette teinte gris- verdâtre que l’on remarque sur ces élévations en quelque sorte déprimées, différentes en cela des ébullitions de la Vavicule verte, qui sont iout-à-fait globuleuses. Ces filaments sont sim— ples, comme tronqués aux exirémités: vus à la lentille d’une ligne de foyer , ils ne présen- tent aucune trace de cloisonnement, ni de rides ; dans cet état de grossissement , ils paraissent à peine de Îa dimension naturelle du cheveu le plus fin, ce qui suppose que la grosseur natu- relle du filament est cent cinquante fois au moins DE LA COLORATION DES HUÎTRES. 11 plus petite que celle d’un cheveu ; la longueur varie depuis le {oc. d’une ligne jusqu’au quart ; la première dimension est probablement celle des irès-jeunes filaments. Quand les filaments sont libres, 1ls ont un mouvement de natation anguillaire ; réunis, ils en présentent un d’os- cillation flexueuse. : | Cette production , que je considère comme une oscillatoire,est évidemmentle Z’ibrio Baccil- lus , Müller, pl. , f. 8 à 15 ( Encycl. , pl. 3, f. 4) ; il serait possible que le Conf. T'enuis- sima ; Sowerby, pl. 2584 et l’Oscillatoria T'e- nuissima ; Vaucher , pl. 15 ,f. 12, fussent la même espèce. Quoiqu'il en soit , l’action nutri- tive de cette production est de nul effet sur Phui- tre pour sa coloration en vert. L’eau des pares a été retenue plus d’un mois sans renouvellement, dans lespoir d'obtenir sur les huîtres un effet semblable à celui produit par la Vavicule verte ; mais cela inutilement. Il faut même avouer que l’huître , soumise si long-temps à la nourriture de cette oscillatoire, a coniracté un goût peu agréable. “ | Toutes les Navicules ou Vibrions Naviculai- res jaunes que j'ai cités ci-dessus , appartiennent à la mer ; je les ai retrouvés touts à la sur- 152 OBSERVATIONS SUR LA CAUSE face du sédiment que l’eau dépose dans les ports et sur les rochers du littoral. Quant à la na- vicule verte, cause de la viridité des huîtres, je Pai cherchée dans la mer ,et ne ly ar point trouvée. Le renouvellement fréquent de Peau “de la mer dansles parcs, détruisant la coloration en vert de ces parcs, est encore une raison de croire que cette espèce de Navicule n’ha- bite point habituellement l’eau salée. Jai aussi cherché dans les rivières affluentes la Vavicule verte huitrière, et je ne l’y ai point encore trouvée : peut-être , lorsque jen a fait la re- Cherche, la température de ces eaux n’était-elle point assez élevée ; car mon ami, M. Brouard , docteur en médecine à Évreux , observateur la- borieux et éclairé , m’ayant envoyé en jum der- mer ( 1625 ), dans des fioles, des productions confervoïdes des eaux courantes de Navarre , je trouvai, à ma grande satisfaction , la Navicule verte huîtrière dans le sédiment de Peau de la fiole qui renfermait des échantillons d’une es- pèce de F’aucheria. L'existence de cet animalcule, et son action nutritive et colorante pour les huîtres, ne pou- vant plus être révoquée en doute, c’est à recher- cher les lieux qu’elle habite et à étudier le con- DE LA COLORATION DES HUÎTRES. 199 cours posilif des causes qui la produisent qu’on doit maintenant s'attacher. En atfendant que je puisse contribuer à fournir ces renseignements ; je présenterai encore aux zoologistes, sur cette espèce d'êtres, quelques détails physiologistes. Ces petites masses gélatineuses , linéaires , poin- tues aux extrémités, de forme naviculaire , sont contractiles transversalement ; la matière verdä- tre dont elles sont chargées change de position , suivant les divers effets de la contractulité et assez communément, quand l’animalcule che- mine tranquillement , soit par un mouvement d’impulsion en avant, soit par un mouvement de réduction en arrière, mouvements dus à une sorte de dilatation et de contraction de lPanimal- cule, et qui ne tiennent nullement de celui de réptation. Quand la matière verte se porte aux extrémités , 1l n’en reste au centre que la valeur d’un point, qui semble communiquer aux deux extrémités par une ligne très-ténue. Ce point central est quelquefois transparent et entouré d’un cercle verdâtre , qui communique de chaque côté aux extrémités de la Navicule par le trait linéaire coloré que je viens de signaler. S1 Pa- nimalcule roule sur lui-même , ou plutôt se con- tracte de manière à paraître s'être roulé sur lui- 154 OBSERVATIONS SUR LA CAUSE même , comme cela lui arrive souvent, alors on n’aperçoit dans toute la longueur de l’animal- cule qu’une ligne ou quelques points de la ma- tière verdâtre, qui semblent former comme une sorte d’arête sur la masse gonflée, linéaire et arrondie de la Navicule , qui paraît gélatineuse et transparente. Quelquefois la matière verte , quoi qu’occupant les extrémités , se montre repliée par- dessus la partie hyaline de la Navicule, comme une pointe de fichu colorée, étendue : il est présumable que le trait verdâtre, ou moyen linéaire de communication avec les extrémités, est alors replié dans la partie non visible de l’ani- malcule , parsuite de sa contraction. Cette ma tière verte forme quelquefois , dans toute la lon- gueur des Navicules , des endophragmes , comme dans certaines conferves ; mais ces sortes de cloi- : sons sont très-mobiles et disparaissent rapi- dement , pour faire place à un des aspects que j'ai précédemment décrits. Ces changements s’o- pérent toujours par une sorte de contraction et de dilatation transversale , c’est-à-dire, qui sem- blent n’affecter que la circonférence des points latéraux de la partie centrale, et nullement la longueur de la Navicule. Je puis assurer que les extrémités de cet animalcule ont une sorte d’im- DE LA COLORATION DES HUÎTRES. 195 mobilité , même lorsque la matière verdâtre qui les remplit est rappelée au centre, et qu'ils ont alors, comme cela arrive souvent , ces extrémi- tés transparentes. Ce quime confirme dans lo- pinion que ces extrémités sont immobiles et d’une nature un peu ferme, c’est qu’elles ne fléchissent pas quand la navicule s’élève et se tient droite sur une de sesextrémités. Il ma paru impossible de déterminer quelle est la partie antérieure ou postérieure de l’animalcule ; les. plus forts verres du microscope ne m'ont fait apercevoir aucune différence , et la facilité de la navicule à avancer d’un ou d’autre côté, me fait supposer que ni l’une ni l’autre des extrémités ne constitue la tête ou la queue de l’animal- cule, et que c’est au point central que se trou- vent les principaux organes. Le plus ou mois de densité de cette partie me semble donner lieu au plus ou moins d'intensité de la couleur verte des Navicules. Nul doute que cette teinte ne soit le produit d’une action chimique ana- logue à celle des végétaux, et que la couleur ne devienne plus intense à mesure que les par- ticules corpusculaires de l’animalcule s’augmen- tent. Aussi l’état de la gestation de la Navicule est-il celui où la teinte verte devient plus fon- 5G OBSERVATIONS SUR LA CAUSE cée ; il semble alors que chacun des corpuscules qui compose le frai pulvisculaire la reflète. C’est peut-être cet effet qui aura donné lieu au savant Bory De Sr.-VincenT de con- sidérer les Navicules comme absorbant ou déve- loppant des corpuscules de matière verte, et devenant dans cet état propre à imprégner les huîtres de cette couleur. D’autres animalcules ayant aussi, suivant notre savant naturaliste , la faculté d’absorber la matière verte, 1 pense que l’on pourrait trouver certaines circonstan- ces où les huîtres seraient colorées sans la par- icipation de la Navicule huitrière (1). L'exemple de l’oscillatoire verte, citée ci-des- sus , et dont l’action colorante est nulle sur l'huîire ; celui de plusieurs autres animalcules verts de la nature des volvoces , aussi sans ef- : fet sur l’huître pour sa coloration ; le retour deux fois chaque année de la Navicule verte décrite dans ce mémoire, l'effet constant de son influence pour la coloration de l’huître à ces deux époques d'apparition ,ne me laissent jusqu’à pré- (1) Voir l’article matière verte du dict. des sciences natu- relles, t. Paris 1825, imp. de et le mémoire de la matière sous les rapports de l’histoire naturelle, par M. Bory de St.- Vincent , in-8°., 32 pages. DE LA COLORATION DES HUÎTRES. 197 sent aucun doute sur l’action spéciale de cette Navicule. Quant à la formation de la teinte verte dans cette Navicule, comme dans d’autres êtres, jose hasarder une opinion différente de celle du sa- vant Bory de St.-Vincent : j’admets bien avec lui que la matière verte se développe dans toute la nature, partout ou la matière muqueuse se manifeste à la lumière ; mais je ne me la repré— sente point en corpuscules ovoïdes , indepen- dants , sans liaison entre eux (1). Sa forme , d’après mes observations microscopiques , est impalpable à l'œil le plus fortement armé ; c’est une zeinte que revêt probablement , par suite d’une action chimique , le elobule muqueux ani- mal , aussi bien que le globule mucilagmeux végétal: je puis assurer qué les corpuscules ovoïdes verts, les g/omérules de cette couleur, même les plus ténus , ont été d’abord hyalins : placés dans des circonstances plus ou moins fa- vorables à l’augmentation de leur densité, et dans cet état plus ou moins saturés d’acide carbo- nique , ils émeitent plus ou moins d’oxigène , et le carbone se fixant donne aux glomérules (1) Voir la note précédente, 158 DE LA COLORATION DES HUÎTRES. cette éeinte verte jusques à présent exclusive- ment attribuée au végétal. Ces apercus seront ultérieurement dévelop- pés dans un nouveau mémoire : il serait à dé- sirer que les chimistes auxquels mon opinion pa- raîtrait fondée cherchassent à déterminer quelle peut être la base de la teinte jaune d’or ou ocra- cée , et de la couleur rougeâtre que revêtent un grand nombre des Navicules de la mer. RAA LAN UT VU UV VU UT UT UUI UV UE UE URL VU LEVEL RAR AAA RECHERCHES HISTORIQUES Sur l’étude de la Botanique à Caen, jus- qu’à l’établissement du jardin des Plantes ; par M. l'abbé DE LA RUE ( lues à la séance du 2 février 1824 À. Îc est difficile de trouver dans le moyen âge des traces de l’étude de la botanique: cette science, et même celle de la médecine , se bornaient alors _à la connaissance de quelques simples. Théo- phraste , Dioscoride et Pline étaient enfouis dans nos biblicthèques , et presque inconnus ; enfin, l'étude de la nature fut à cette époque un art absolument ignoré ; il eût peut-être même été quelquefois dangereux de s’y livrer : dans ces temps superstitieux et obscurs , une découverte utile eût pu être regardée comme l'effet de la magie , et préparer un sort funeste à son auteur. Jugeons-en par ce reste d’ignorance qui infecte nos campagnes , où la connaissance des plantes fait encore regarder les bergers comme sorciers ; 160 RECHERCHES et pour vous donner une idée de l’ignorance qui dominait alors, même parmi les gens d’ail- leurs instruits , je vous dirai que Berthold d'An- jou , professeur en médecine à Caen, en 1482, ayant découvert dans une fouille une corne d’am- mon qu’on prit pour un serpent pétrifié , on re- garda cette pétrification comme un‘prodige , et, afin que tout le monde püt l’admirer , on déposa le serpent dans la cathédrale de Bayeux: on le placa, comme nn monument, contre un des murs de l’église , avec l'inscription suivante : Credite mira Dei; serpens fuit hic lapis extans : Sic transformatum Bartholus attulit hùc. D’après une ignorance aussi profonde de l’his- toire naturelle , on croira facilement que lart dembellir les jardins et d’orner les parterres des fleurs de chaque saison, fut totalement in- connu à nos ancêtres. Charlemagne, dans un de ses capitulaires , dé- termine la culture de ses jardins : parmi les plantes d'agrément, on ne voit que leslys, les ro— ses, les pavots , le romarin, l’aurone, le pou- lot et l’héliotrope. Les plantes médicinales sont au nombre de treize ; les plantes aromatiques et d’assaisonnement montent à dix-huit ; les SUR LA BOTANIQUE. 161 plantes potagères à neuf, et les légumes à qua- tre espèces ; enfin , pour éviter de plus amples détails , les plantes s’élèvent en tout à soixante- treize , sans compter les arbres fruitiers qui sont en rs nombre. Si Les jardins d’un monarque qui commandait presque à toute l’Europe offraient une culture aussi peu variée , on peut juger de l’état des jardins particuliers. Aussi, malgré les efforts de Charlemagne pour Pavancement des sciences et des arts , les siècles suivants n’offrent aucun progrès dans la botanique. Des fleurs en petit nombre et quelques plantes légumineuses et usuel- les firent tout l’ornement de nos jardins ; les sei- oneurs même et les propriétaires riches s'embar- rassèrent peu de la culture des fleurs ; quoique charmés de leur parfum , ils aimèrent mieux s’en procurer par des concessions de terre à des particuliers, que d'employer cette terre à les cultiver eux-mêmes. Pour vous donner, Messieurs , quelques LE à cet égard , je vous dirai que , dans le XII. siècle , l’abbesse de Caen fieffa la maison appe- lée la Pigacière, au haut du Vaugueux, par une vente d'un Chapel, ou couronne de roses ver- meilles, Le fieffataire était tenu de le lui appor- 11 162 RECHERCHES ter tous les ans le jour de la Trinité , et de le lui présenter à l'heure de vêpres , lorsqu’elle était assise dans sa chaire abbatiale (1). Le prieur des Croisiers de Caen devait une rente de méme espèce, le même jour et à la même abbesse , parce que , dans le XIIE°. siècle , elle avait permis de construire le premier mo- nasière des Croisiers , sur la paroisse de St.-Mar- tin, dont elle était patronne (2). En 1289, on fiefle une maison à St.-Gilles , par 6 sols de rente et une glane de lavande. En 1569, René Lecoutellier , grand bailly de Caen , fieffe une maison et un jardin à St.- Gilles, par 20 sols de rente et un chapeau de roses vermeilles , à la St.-Jean. . Dans le X VE. siècle , on trouve qu'une mai- son près le moulin de Gemares , une autre maison rue Cahbourg , et enfin une troisième dans la Basse-Rue , étaient tenues des prêtres de St.- Pierre de Caen , par des chapeaux de roses ver- meilles que les propriétaires devaient leur pré- senter le jour de la fête de la paroisse. Mais ce qui prouve combien les roses étaient rares , et par conséquent le rosier peu cultivé, quoique 1) Chartular. sanct. Trin. , Cadom. (2) Ibid. SUR LA BOTANIQUE. ATOS d’une culture facile , c’est qu’en 1425 , il est porté dans le titre nouvel pour la maison de la Basse-Rue, que le chapeau de roses devait être fourni en nature, ou 6 sols en argent. Or , avec 6 sols, on avait en 1421 trois boisseaux de blé, qui coûteraient aujourd’hui de 12 à 15 Liv. ; ainsi, àla St.-Pierre, dans le mois de juin , le chapeau de roses égalait alors environ 15 liv. de notre monnoie actuelle ; et si l’on remonte au XIIIS., époque du contrat primitif (1), et ou le blé ne valait pas plus d’un sol le boisseau, le chapeau de roses devait avoir été estimé 301. de notre monnaie courante. En 1442 , Mademoiselle Alis de Machue vend par 33 sols une rente d’un chapeau de roses vermeilles, qu’elle avait droit de prendre sur une maison rue Guilbert (2), et ce capitalre- présentant16 boisseaux et demi de blé, c’est-à-dire _8o liv. de notre monnaie, prouve de plus en plus combien les fleurs étaient rares à cette époque. Il y avait cependant dans l’année des fêtes où l’on faisait une grande consommation de fleurs : par exemple , le jour de la Pentecôte , c'était très-anciennement l'usage , pendant qu’on (1) Chartul. Sti. petr. Cadom. (2) Tabell, de Caen , 1443. 14 5) TR RECHERCHES chantait le 7’eni Creator , de jetter par les ouver- tures de la voûte des églises,des étoupes allumées. Mais soit que cette coutumedéplüt aux assistans, soit qu’on redoutit les incendies , qui souvent résul- tèrent de cette cérémonie abusive et dangereuse , on y substitua celle de jetter de la même ma- micre des fleurs de sept espèces différentes. Ce dernier usage subsistait encore à Notre - Dame de Caen en 1576. Mais ces fleurs étaient pour la plupart cueillies dans les campagnes et les prairies ; car les poëtes du temps ne nous par- lent que des roses, des violettes , des mar- guerittes , de la pervenche , des ancolies , des souviens-toi de moi et des verds-trèfles. Pour que nous eussions d’autres plantes d’or- nement , 1l fallut les faire apporter des régions étrangères par les voyageurs, les acclimater et les multiplier par les botamistes. Les croisés en apportèrent quelques-unes des jardins de l’É- gypte et de la Syrie ; mais elles ne furent cul- ivées, dit M. de Leuse, que par les moines dont elles charmèrent la solitude. La découverte de l’Amérique nous en proeura de nouvelles es- pèces ; enfin, la Suisse, la Turquie et la Chine nous en fournirent un grand nombre (1). {1) Annales du muséum d’hist, nat, vol. 8. SUR LA BOTANIQUE. 165. Quant aux plantes nécessaires à l’économie domestique , nous ne connaissons que très-peu de celles qui furent cultivées dans les jardins de nos ancêtres. On: ne trouve pont de légn- mes mentionnés dans les anciens actes, si l'on en excepte les pois qui figurent toujours dans les contrats pour nourriture ; et:même dans un détail qui nous reste d’un repas donné par l’ab- besse de Caen, à la chambre des. comptes. de Paris ,en 1427, on ne voit servir aucune espèce des légumes qui forment aujourd’hui la plupart de nos entremets. Nous devons cependant re- marquer ici, que les mêmes Communes qui cui- tivent aujourd’hui l'oignon , sur les bords de la mer, en faisaient dès le XII. siècle une branche de commerce considérable. À Isigny , c’étaitla culture de l'ail qui occu- pait particulièrement les habitans de ce bourg. L’é- vêque de Bayeux: et son chapitre y avaient beaucoup de rentes de cette denrée. Le premier, comme seigneur, y percevait des droits sur la vente de cette plante dansles foires et marchés, et lors de son exportation: dans les autres Commu- nes (1). Enfin, quant aux plantes qui intéressent les (1) Chart, Bajoc, et Troarn, 166 RECHERCHES arts , presque toutes les Communes de notre ar- rondissemeut cultivaient le vouede ;: presque toutes avaient des moulins pour la réduire en pâte ; on trouve dans les registres du tabellio— nage de Caen , qu'il y avait des mois:où lon en vendait plus de 40,000 livres en gros; et si l’on observe qu'il ne s’agit ici que des marchés notariés, comme ils n’étaient pas süre- ment les plus nombreux, on doit juger que cette branche d’mdustrie devait produire infini= ment pour ce pays.- Quelques Communes cultivaient aussi la ga rance ; car nous avons dans le chartulaire de Troarn des transactions pour la dîme de cette plante , dès l’année 1122 (1). Sidonc l’on excepte ces plantesutiles etquelques plantes aromatiques , je crois que toutes les au- tres furent foulées aux pieds, sans s’embarras- ser d'en connaître les noms et les propriétés. Quant aux arbres qui produisent nos fruits de dessert , il ma été impossible de trouver au- cune indication , soit sur ces arbres en général , soit sur leurs diverses espèces. Je trouvé seule- ment que le duc de Normandie, Henri IT, avait fiefé, vers la moitié du XII. siècle un ter- (1) Chart. Troarn. SUR LA BOTANIQUE. 167 rain sur St.-Jean, par une rente de dix poires de St.-Rieul, per decem pyra de santo Re- gulo (1). Le prévôt de Caen devait un cent de poires de la même espèce à l’abbaye de St.- Étienne pendant la tenue de la foire du Pré (2); mais je ne trouve ces poires dans aucune nomenclature moderne. Deux maisons à St.- Pierre. de Caen avaient été aliénées dans le XIIe. siècle par une rente d’une livre de pommes :au duc de Normandie, sans aucune désignation d’es- pèce ; ce qui prouve que les fruits étaient chers et rares à cette époque. Îl est , par conséquent , impossible de donner plus de détals sur, la. bo- tanique dans ces tempsreculés; nous passons done à l’époque où cette science commença à être connue et étudiée dans ses diverses partes. Henri VI, roi d'Angleterre , fondateur-de l'u- niversité de Caen, n’établit que successivement les cinq facultés dont 1l la composa : celle des droits,en janvier 1/31,qu'on doit compter 1/32; celle de théologieet. des arts ,.en février 1436, qu’on doit compter 1437; et le 1Q mars de l’année 1458 , il y ajouta celle de médecine. ‘Un des statuts de cette dernière faculté or (1) Rotuli turris Londin. (2) Registre de la vicomté de Caen. 168 RECHER OHES. donna sans doute un cours de botanique cha- que année ; car une conclusion de Pan 1553 , porte qu’on fera la visite des plantes, confor- mément aux imstitutions établies dès l’origine de la faculté. Juxta institutum ab nostri gym- nasü enascentis exordio fiat visitatio herba- rum (1). | . Ainsi, dès le berceau de l’université, on étu- dia la botanique , et comme cette étude se fai sait alors non pas dans des jardins consacrés à ce genre de travail, maïs en parcourant les plai- nes et les vallons, les bois et les rivages de la mer , on donna à cette étude le nom de visite des plantes. isitatio herbarum. Ordinairement la faculté annonçait cette vi- site un mois d'avance ; mais je ne trouvé pas qu’elle ait eu lieu plutôt que le 21 mai, et plus tard que le 5 juillet. | Il n’y avait pas de professeur en titre pour donner ces lecons ; mais tous les professeurs de la faculté, présidés. par le doyen , étaient obligés d'assister à la visite des plantes, et d’instruire les écoliers dans ce genre d'étude (2). : Pour procéder avec ordre, on se rassemblait (1) Matrologium facultatis medic. Cadom. (2) Ibidem. SUR LA BOTANIQUE. 169 ordinâirément au couvent des Jacobins , au jour indiqué , et de là on se transportait, soit à pied, soit à cheval, au lieu désigné par la fa- cuite. Tous les pharmaciens et tous les chirurgiens de la ville étaient obligés de suivre tous les ans le cours de botanique, et pour cela, d’accom- pagner la faculté et ses élèves dans leurs voya- ges pour l’herborisation. On notait annuellement sur lés registres ceux qui s’absentaient , et il faut convenir qu’on ÿ trouve rarement des absens , et.qu'ils y sont toujours en. irès-petit nombre. Arrivé dans le lieu désigné pour les lecons, chacun se livrait à l'étude. Comme on ne con- naïssait alors , ni les genres, ni les classifica- tions adoptés de nos jours, il est difficile de dire quelle méthode on suivait, dans ces temps anciens: je crois cependant qu'on avait adopté celle de diviser les plantes, en plantes des plai- nes et des prairies, en plantes des bois et en plantes marines ; on ne peut même douter que ce ne füt là toute la méthode alors recue , quand on voit-que la faculté conduit alternati- vement ses élèves , une année dans les plaines et les prairies, une autre année dans les bois , et la troisième sur le rivage de la mer. 170 RECHERCIES La prairie, depuis Louvigny jusqu’à la mer, les marais de Troarn , la vallée de la Dive et les campagnes qui les environnent , étaient le théâtre dés travaux de la première année ; les bois de Troarn , la forêt de Cinglais ,; d’autres bois appellés Silva Sasulensis , Silva Saumo- nea et Silva Lomea, dont j'ignore la position , formaient le champ qu’on devait parcourir la seconde année. Enfin, les rivages de la mer, entre l’Orneet la Seule , entre l'Orne et la Dive, étaient visités la troisième année. Voilà, Messieurs , toute la méthode alors con- nue ; du moins elle semble la seule suivie, d’après les anciens actes de la faculté de médecine. Cette foule de maîtres et de disciples, allant étu- dier la nature , partait ordinairement sans vivres et sans provisions , et cependant ne manquait de ren. Les abbayes de Troarn, de Barbery , de Fontenay et d’Ardennes , logeaient et nour- rissaient au besoin la troupe de Flore ; et quand elle était trop éloignée de ces monastères, elle était reçue et nourrie par les seigneurs du can- ton qu’elle parcourait. Toute sa reconnaissance était de consigner sur les registres de la faculté les noms de ceux qui lui avaient accordé Phos- pitalité , et on y lit encore ceux des La Court, SUR LA BOTANIQUE. KP seigneurs de Maltot, des Lemarchand , sergneurs de Rosel, des Révérend, seigneurs de Bougy,; etc. Au retour, 1 y avait un souper académique : tous ceux qui avaient suivi le cours d’herbori- Satioh:, les maîtres et les disciples , s’asseyaient à la même table , et les frais du repas étaient payés pr les écoliers, les apothicaires et les chirurgiens qui avaient commencé l'étude de la botanique däns l’année. Cette dépense est appelée joyeux avènement, jucundus adventus, dans les regis- ires de la faculté. Souvent le répas était terminé en buvant quelques amphores de vin: aromati- que , que présentait quelque pharmacien ‘de la ville , et on le payait aussi en Consignant sa géné- rosité sur les registres. | Ces travaux , répétés chaque année pendant la deuxième moitié du XVe. siècle, produisirent les plus heureux effets , et dans les prémières années du XVI. on vit le fruit de ces études. ÆEn l’année 1509, Guillaume Gueroult, alors simple écolier de médecine à Caen, donna une édition d'Emilius macer, de viribus herbarum, avec un commentaire sur cet auteur. L'ouvrage est dédié à Jean Courtin et à Noël Étienne , alors professeurs de la faculté, L'éditeur le leur offre comme le fruit de leurs lecons et comme un 172 RECHERCHES monument de sa reconnaissance ; mais ce qui rend l'ouvrage plus remarquable , c’est qu’on y trouve les figures des plantes gravées en bois , premier effort de l’art , qui rendit la science plus facile , et qui, accompagnant la figure de chaque plante d’un commentaire clair et précis sur ses pro- priétés , fit connaitre toute l'importance de Pétude de la botanique (x). On trouve à la tête de cette FL l'éloe de cette science, en vers latins , par Robert Buis- son, professeur ès=arts. C’est une invitation aussi éloquente'que pressante àla jeunesse de Caen, de se livrer à ceite étude. | L'ouvrage de Gueroult fut goûté des amateurs ; car il s’en fit deux éditions à Paris, la première sans date, et la deuxième en 1522. Il continua même d’être si estimé dans le X VIe. siècle , qu’en 1588 Luc du Tremblay le traduisit en français et le fit imprimer à Rouen , sous le titre suivant : « Les: fleurs du livre des vertus des herbes , « composé jadis par Macer Floride , et illustré « de commentaires de maître Guillaume Gue- (1) Macer ( Emilius ) de viribus herbarum, cum figuris ligno incisis et interpretatione Guillelmi Gueroaldr.. Impressum Cadomi per Laurentium Hostingue, expensis Michaclis Angier ct Joannis Macé, 1 vol, in-8°.,150g. SUR LA BOTANIQUE. 173 « roult, médecin à Caen, traduit en français, par « Lucas du Tremblay, professeur ès bonnes « sciences mathématiques. Rouen, in-60., « 1588. » Vous voyez par à , Messieurs, que Guillaume Gueroult fut docteur en médecine à Caen ; mais dans la suite il se retira à Lyon; dans un mo- ment nous suivrons ce botaniste dans cette ville. En 1539, Léger Du Chesne , autre écolier de l’université de Caen, publia un abrégé de l’ou- vrage de Ruel, sur les plantes, et en 1545 des mémoires sur les passages les plus difficiles de V’histoire naturelle de Pline. Ainsi, la science faisait des progrès utiles, puisqu'à l’étude de la nature se joignait celle des bons auteurs (1). En 1541, Jean Brohon, du diocèse de Cou- tances , bachelier de la faculté de médecine, et recteur de l'université en 15/2, fitimprimer dans cette ville un ouvrage intitulé : De stirpibus vel plantis ordine alphabetico digestis epitome , longè quam antè hac per joannem Brohon Constantinatem locupletior emendatiorque, Cadomi , in-t°., Michel Angier, 1541. Cette espèce de dictionnaire des plantes fut travaillé d’après les ouvrages grecs de Gallien, 1) Bibl. botan, DD, Seguier ct de Haller. 174 ie RECHERCHES de Dioscoride ; de Théophraste , d'Æuus et de Paul Éginette , et d’après les ouvrages latins de Pline et de Ruel. L'auteur dut consulter encore d’autres ouvrages que je ne connais pas; car il dit dans sa préface qu'il ne donne pas seule ment les noms grecs et latiñs des plantes , d’après les auteurs que je viens denommer; maisil ajoute, dit-il ; les noms français et arabes , et je ne sais ou 1} avait pris ces derniers. : Cet ouvrage fut encore un hommage rendu aux talents des docteurs de la faculté de médecine ; car c’est à ce titre que l’auteur le dédia à Jean Roger , Jean Huet, Guillaume de Guette , Jean Le Corsu et Jean Lorrey , alors professeurs à Caen. | _ Ces éléments de botanique furent recus avec applaudissement , puisqu'il y en eut cette même année 1541 une édition à Cremone et une troi- sième édition à Paris, en 1544. On trouve dans ces trois éditions deux éloges de l’ouvrage , composés tous deux en vers latins, l'un par Jean de Malherbe de Caen, et l’autre par Richard de Bonlieu, de St.-Lé ; et lun et l’autre poëte loue particulièrement l’auteur sur ses connaissances dans les langues grecque, hébraïque et arabe, : ed SUR LA BOTANIQUE. V4 Ce qui prouve qu’on prenait alors du goût, non-seulement pour la botanique, mais enccre pour l’histoire naturelle , c’est que Jean Brohon, à la suite de cet ouvrage, publia une nomen- clature de tous les oiseaux et des poissons alors connus en France , cui accesserunt volatilium et piscium magis frequentium apud gallias nomin«. Guillaume Gueroult, que nous avons dit c1- dessus s’être retiré à Lyon, y publia, en 1548, une traduction française de l’historia plantarum de Léonard Fuschs, et plusieurs autres ouvrages relatifs à l'histoire naturelle des animaux et des OISEAUX. J’ignore quel attrait eut la ville de Lyon pour les botanistes de Caen ; mais Gueroult y fut suivi par le fameux Jacques Daléchamp et par le savant Robert Constantin, tous deux nés à Caen. Mais cet éloignement de la mère patrie ne doit pas empêcher notre ville de les regarder comme ses enfans, et notre université de les réclamer comme ses élèves et ses docteurs. Daléchamp a laissé parmi Les botanistes un nom célébre. Ses Commentaires sur Dioscoride , Ceux sur Paul Éginette, 176 RECHERCHES Son édition de l’histoire naturelle de Pline, Son histoire générale des Plantes , sont des monumenis qui attestent les progrès de la botanique dans le X VIS. siècle , et combien les savants de notre ville y contribuèrent. Robert Constantin ne concourat pas moins à l'avancement de cette science par des travaux pré- cieux. Son édition de Dioscoride , avec les com- mentaires d'AmatusLusitanus,et ses propres notes; ses commentaires sur Théophraste, annoncent les les bonnes études qu'il avait faites à Caen , et la science et l’érudition qui en sont la suite. Malheureusement le cours de ces bonnes études fut interrompu par les guerres dereligion. La littérature et les arts fuient toujours les heux où la discorde vient secouer ses horribles flambeaux. À l’époque fatale de 1562 tous les monuments furent détruits, nos écoles presque entièrement désertes , les campagnes ravagées , les routes peu sûres , et par conséquent l'étude de la botanique impossible. Pour le malheur de l’humanité et des lettres, Les troubles se propagèrent pendant de trop longues années ; ce ne fut qu’en 1585 qu’on put ouvrir les cours d’herborisation ; et la mé- decine fut redevable de ce bienfait au célèbre Jacques de Cahagnes : visitatio herbarum , ve- luti obsoleta , hoc anno per jacobum de Ca- DE LA BOTANIQUE. 177 hagnes renovata (1). Pendant ces temps ora- seux , ce docteur avait charmé les ennuis de sa solitude ; en traduisant en francais le traité de vino et pomaceo , composé en latin par son ami Julien Le Paulmier, docteur des facultés de Caen et de Paris; c'était le premier qu’on éüt écrit sur la culture de la vigne et du pommier , et, pour que cet ouvrage füt utile aux agriculteurs , Caha- ones en publia une traduction en 1569. Après le calme rendu à la France, ce docteur _mit d'autant plus de zèle dans le cours régulier de botanique, que ses talents avaient donné à nos écoles de médecine la plus grande célébrité dans toute l’Europe. Il comptait tous les ans parmi ses élèves des anglais, des écossais , des hollandais, des allemands , des danois et des suédois ; on en irouve même parmi eux qui viennent du fond de la Silésie, pour prendre ses lecons ; enfin, tel était ascendant de la réputation qu'il avait acquise , que les médecins recus à Oxford, à Paris , à Montpellier et dans les autres univer- sités du royaume , venaient soutenir à Caen des thèses publiques , et recevoir une deuxième fois le bonnet de docteur dans nos écoles. Si, comme nous l'avons vu, Messieurs, le temps des guerres de religion avait interrompu les (1) Matrolog. facul., med, Cadom, 1585. 12 170 RECHERCHES SUR LA BOTANIQUE. cours dherborisation, la botanique y avait gagné dune autre mamère. Les amateurs , forcés par les troubles publics à une vie sédentaire , s’oc- cupèrent de la culture de leurs jardins. M. de Bras, dans ses antiquités , parlant du commerce de Caen en 1588, vante la beauté des jardins des environs de cette ville, les fruits délicats etexcellents qu'ils produisuent , les fleurs aussi variées qu'odoriférantes qu’on y cultivait, et les parterres, les treilles et les pallissades qui les embelhssaient. Le goût pour les fleurs devint même une passion si dominante chez nos ancêtres, que notre ville, dans la première moitié du X VITe. siècle, fut aussi renommée pour leur culture, que l’est aujourd’hui Harlem et quelques autres villes de la Hollande. Ge fut vers cette époque que La Chênée-Montreul publia à Caen son fleu- riste français , traitant des tulipes , dans le- quel on trouve la nomenclature des nombreuses espèces alors cultivées dans nos jardins ; malgré quatre éditions, on trouve difficilement cet ou- vrage , preuve de son mérite. Le même auteur publia encore un traité de l’oœillet , devenu ex- trêémement rare. J'arrive à l’époque où l’on commenca à former à Caen un jardin botanique , etje laisse cette par. ie aux professeurs chargés de cet enseignement RAS VAAUUR VULUVUL WU VILA ER VAR LVL VIN RAR VULUVALLALUVE VU UVULUIAUVULUUR SECOND MÉMOIRE De M. DE CAUMONT sur la Géologie de l'arrondissement de Bayeux , lu dans les séances du 10 novembre 18253 , et duS mars 1824. Dans l'arrondissement de Bayeux, le calcaire à polypiers et le calcaire marneux occupent la partie du nord; le calcaire à gryphites arquées la parte du mulieu , et les terrains plus anciens la partie méridionale. Ces derniers feront le sujet d’un mémoire particulier. | Avant de parler des prenuers, de faire con- naître leur nature et leur ordre de superposition, je dois observer qu'il n’existe pas encore de no- menclature exacte, pour désigner les grandes mas- ses que présentent ces terrains; je serai forcé d'employer les dénominations adoptées provi- soirement , malgré leur inexactitude (1). (1) J’observe encore que mes descriptions se rapportent aux terrains tels qu’ils se présentent dans l’arrendissement de Bayeux, et nôn aux variétés qui peuvent exister dans d’autres localités. GÉOLOGIE 2 © © Calcaire à gryphites arquées. Le calcaire à gryphites arquées présente ordi- nairement une texture plus Ou moins compacte, quelquefois lithographique ; sa couleur ordinaire est le gris bleuâtre, passant au gris jaunâtre , au bleu et au brun ; il est ordinairement ho- rizontal ; épaisseur des bancs varie, très-rare- ment ils se touchent , le plus souvent ils sont sé- parés par des couches d'argile dont la couleur est variable. Ce calcaire contient des bancs de marne comme le calcaire marneux, et des silex tuberculeux dans sa partie supérieure , surtout lorsqu’il supporte d’autres formations : les coquilles sont très-inégalement répandues dans ce calcaire , et des espaces d’une étendue considé- rable en sont dépourvus. Celles qui paraissent le caractériser sont les gryphites arquées , les bé- lemnites , les peignes , les plagiostômes , les nau- üles , les ammonites, etc. Les gryphites sont en général plus communes dans les bancs infé- rieurs , tandis que le contraire a lieu pour les bélemnites : on y trouve encore plusieurs espèces de bois fossile et des globules de fer oxidé. Il repose sur le calcaire magnésien, le grès rouge alle. DE L’'ARRONDISSEMENT DE BAYEUX, 191 mand , et autres terrains secondaires ou in- termédiaires. Lorsqu'il n’est pas à la surface du sol il est recouvert par les calcaires oolitiques inférieurs; à leur défaut, par le calcaire marneux, le calcaire à polypiers , le sable ou largile. Le calcaire à gryphites arquées est très-ré- pandu dans l'arrondissement de Bayeux, où il est l’objet d’une grande exploitation pour la fa- brication de la chaux et pour les constructions ; il borde la rivière de Seule , depuis Tilly jusqu’au delà de Vaux. Sur les rives de l’Aure , on le voit à Monceaux, Guéron, St.-Amator , etc. On le trouve encore à Arganchy, Subles, Renchy , Agy, Crouay , Blay , Barbeville , Cottun , Saon , Saon- net, Trévières , Ecrammeville , St.-Germain-du- Pert, Osmanville , l’'Épinay-Tesson , Lingèvres et dans la partie inférieure des carrières de Ma- eny, Vaucelles, Sully, etc. Voici quelques coupes de carrières ou le calcaire à gryphites n’est recouvert par aucune autre for- mation. Carrière de Subles, = Sur la rive droite de la Drôme. ro errervésétales à 64... 0, res 20 Assisescalcaineiee eu Le 0e CF #60 re 3°, Marne grise schisteuse . . . « . .« O0 49 152 GÉOLOGIE fo. Vingt couches alternant avec une marne plus ou moins calcaire , en- diront el Hot HN DM Les couches calcaires ont à peu près 20 centimetres d'épaisseur , et les _ couches d'argile en ont 12 ou 14. 59, Marne brune à cassure concoïde . 60. Deux bancs calcaires séparés par de la marne. . . . . ( appelésroc) 7°. Marneschisteuse , semblable au n°. 6. 8°. Plusieurs couches calcaires assez ser- DÉGS Lu, stael ie. 1e) ele Lab 9°. Banc lithographique . . . . . . . 10°. Plusieurs bancs peu épais, alter- nant avec la marne bleue , et con- tenant beaucoup de gryphites, ATGUEÉRS +, + bebe lc le Heat e Carrière d’Arganchy. 19. ‘Derre vébétale. 1. 4.) Se 20. Assise calcaire 407 41,40 RS 50. Moine crise). -/, . .,. . 4°. Marne grise avec des assises calcai- les peu serrées. .1\ "114 0 Ra 5°. Marne bleue schisteuse , à cassure Concoide Tips eee ne Sm » an | ei DE L’ARRONDISSEMENT DE BAYEUX. 199 6°. Bancacaleaine. sui soiree MSMOMOn.rG 70. Marne semblable à celle du n°. 5 . . o 48 8°. Deux couches calcaires très-régu- lières ae dre nambnensautlelitart dr itnie 100 9°. Plusieurs bancs calcaires peu épais , alternant très-umiformément avec _ des couches assez fermes de marne, dont la couleur jaune passe sou- vent au bles à 2002 0 0 el DR Carrière de Saon. 10, Terre végétale et pierres calcaires bel © Le) RouleeIiAteS Je Lame (e Dh 29, Différents bancs de 16 centimètres d'épaisseur environ , séparés par de! l'argile Jaune:s6520 0307 au» 30. Couches semblables aux précédentes, excepté que la marne est bieue . 1 64 Eau. Carrière d’Osmanville (1). TO ATOS tee tres 10 NOT 20, Argile grise remplie de gryphites ar- » QUES rate (or totief BilelUS wa 0m 0 10 ER (1) On voit à peu de distance de cette localité, vers la pa- roisse de St.-Germain-du-Pert des carrières à peu près sem- blables ; seulement il y a beaucoup moins de gryphites , et on y remarque une inclinaison constante vers le nord-est. 184 GÉOLOGIE 30. Fragments calcaires stratifiés avec de l'argile, d’un jaune pâle . . . 064 4°. Marne semblable au n°. 2 . . +. . 0 16 5o, Huit ou neuf bancsalternant avecune marne jaune , remplie de gryphites 1 48 60, Deux bancs calcaires plus épais . . 0 64 Calcaires oolitiques inférieurs. Le calcaire à oolites brunes est le plus ancien des terrains oolitiques. Dans l'arrondissement de Bayeux , 1l repose presque toujours sur le cal- eaire à gryphites arquées : il contient en quantité prodigieuse des oolites de couleur de rouille, qui, pour la plupart, ont la grosseur et la forme d’un œuf de ver à soie; mais on en voit aussi d'autant et plus grosses qu’une noix. Dans ce dernier cas elles forment un lit à part dans la partie la plus inférieure du banc, et reposent immédiatement sur le calcaire à gryphites ar- quées. Le calcaire à oolites brunes ne présente ordinairement qu’une couche horizontale , qui a rarement plus de trois pieds d'épaisseur ; son grain est grossier, sa dureté varie ; il contient un grand nombre de fossiles, dont je m'occupe de recueil lir les espèces ; le catalogue suivant indique celles que j'y ai déjà trouvées, DE L’ARRONDISSEMENT DE BAYEUX. 109 genres. espèces.| genres. espèces* YAmmonites......-..... 10 Nautile ...ssosssnosense 2 Alcyons.. .............. 2 | Orthocère........seoo.ee 2 ArChes MM Eten : 2 ÉCHIMILE eee ee CN à Bélemnites........... 612 Peignes.......ssssveese 2 Bucardes.i eu us, dj A Porpite.........s..ssee 1 AMUCDO Res late de € 800 eo 1 Térébratules............ 2 Dénile eee cn RIRE 1 Troqueses een LR LIRE 6 Cycloliteur us. 1 TrigONIES sosie nee 2 ee 1 Dauphinules. ........... 2 Vénus sors 4 Énorimibe. ne tee lee D DU BOBU) eee does 2 Méléagrines.:....:.... Lie Ossements .......:..... 1 Homes eee... 3 Cypricardes............. 3 Moules. ....... soso. 2 Polypiers............ CS RÉVES Sen ee nee 3 Ce banc, employé communément à bâtir, est rarement exploité pour faire de la chaux. On se sert pour cet usage des calcaires qui lui sont supérieurs et de ceux qui lui sont inférieurs ; il se trouve à Vaux-sur-Seule , au Manoir, à Vien- ne, Sommervieux, Magny , St.-Vigor, Vaux- sur-Aure , Sully, Vaucelles , etc. , et aû pied des falaises des Hachettes, à une denu-lieue de Port- en-Bessin. Le calcaire à oolites blanches recouvre or- |] (1) L’une de ces espèces est le fossile connu sous le nom de Tartufite. 156 GÉOLOGIE dinairement celui que nous venons d’examiner ; il forme une assise , dont l'épaisseur varie depuis un mètre jusqu’à douze , et renferme des oolites blanches et rousses ; sa couleur ordinaire est blan- châtre ; il a quelquefois le grain très-fin , et res- semble au calcaire de Caen , ou même à la craie. Plus souvent il est dur , cassant et d’un tissu gros- sier. Dans quelques lieux il présente des strates très-régulières , et se divise par bancs horizon taux d’un ou deux pieds d'épaisseur, quelque- fois séparés par une légère couche de terre ar- oileuse ; ailleurs il ne présente qu’un seul banc avec quelques fissures assez inégalement répan- dues. Dans quelques endroits, sa surface est for- mée par plusieurs pieds de chaussin très-serré ; il ne contient jamais de silex, et on y trouve or- dinairement peu de fossiles , quoique dans cer- taines localités 1l y ait des polypiers et quelques coquilles (+). | Le calcaire à oolites blanches acquiert une plus grande épaisseur , et s’incline un peu vers la mer : ainsi la fosse du Soucy , située dans la vallée de Maisons , et où les rivières d’Aure et de Drôme (1) M. de Basoches, naturaliste à Falaise, a trouvé une mâ- choire de crocodile dans le calcaire à oolites blanches de Port- en-Bessin. DE L'ARRONDISSEMENT DE BAYEUX. 197 viennent se perdre , est au milieu de ce terrain , tandis qu'il occupe à Sully la partie supérieure du coteau qui domine la Drôme. Ce banc se rencontre dans la plupart des lieux où j'ai indiqué celui des oolites brunes , et voici la coupe de plusieurs carrières ou ils sont réunis : Carrière du Manoir. 19, Calcaire à oolites blanches, . . . 264 20, Idem à oolites brunes. . . . . . o 64. 3°, Idem à gryphites arquées avec des Silextubereulenxc Le. eue à sue 92 Carrière de Sommervieux. 19. Derreveselale. . .,. 2 ., . : + 092 20. Calcaire à oolites blanches , . . . 5 32 30. Jdem à oohtes brunes . . . . + . 0 50 40. Jderm=lsryphites + as. 20, viTY OÙ bo, Zdem avec des silex. Carrière de Sully. 19, Terre végétale. e e [] e e e L] e © 32 20, Calcaire à oolites blanches par frag- menis e © e ee ®e + + e e ns e e O 8a 158 GÉOLOGIE 5°. Calcaire à oolites blanches par bancs réguliers ten. tirent CAN 4°. Idem à oolites brunes . . . . . . 59. Calcaire à gryphites. . + . . . . 6°. Silex. Carrière de St.—T igor.. 10) Terre Vénétie. sn Le So 29, Calcaire à oolites blanches par frag- ments. e + eee :te ele e.® e 3°. Idem à oolites par couches de 80 cen- AT 9 » a P » mètres d'épaisseur, séparées par de légères couches terreuses , en tout 4°. Idem à oolites brunes. . . . . . 5o, Calcaire à gryphites arquées . . . 60. Silex. Carrière de Vaucelles. 10: Terre vérétale +. 13 Se 20, Calcaire à oolites brunes avec des brèches et différenis accidents . 5°. Calcaire à gryphites arquées . . . °. Silex. Carrière de V’aux-sur-Seule. w7. Terre ycoctale. ne o 48. I Â8, o 52 o 32 DE L’ARRONDISSEMENT DE BAYEUX. 189 20, Calcaire marneux avec argile blan- châtrehhltgdiartelis la, Habit 5m y 30. Idem à oolites brunes , . + . . 0 16 4°. Calcaire à gryphites arquées. Calcaire marneux (1). Le calcaire marneux , supérieur aux ban cs dont je viens de tracer les caractères , aiteint sou- vent plus dè 50 mètres d’épaisseur : il consiste en couches alternatives de marne , d'argile et de pierres calcaires, qui passent de l’une à l’autre. Les couches d'argile ou de marne sont en gé- néralles plus épaisses , tantôt bleues , tantôt grises ou jaunes , tantôt très-tendres , quelquefois schis- teuses ou présentant une cassure concoïde ; leur couleur et leur consistance sont également va- riables ; le contact de l'air à la longue les durcit et les décolore. Les couches calcaires présentent les mêmes variétés que la marne qui les ren- ferme ; elles sont tendres ou dures, le plus sou- vent bleues et grises. Elles renferment des oolites dans plusieurs localités. Dans d’autres , elles se rapprochent beaucoup du calcaire à gryphites ar- quées. En général, les lits calcaires sont plus (1) Il paraît que le calcaire argileux des anglais, appelé lias, est absolument le même que le calcaire marneux du Calvados, 190 GÉOLOGIE fréquents aux deux extrémités de la formation que dans le centre, qui est très-argileux; mais sou vent cet ordre est interverti: tantôt on ne voit qu’un énorme banc de marne et presque aucunes couches de pierre ; tantôt c’est Le contraire. Enfin, ces deux substances semblent quelquefois se réunir pour former une masse homogène plus ou moins dure, et divisée par des fissures qui se prolongent avec une grande régularité. Dans d’autres lieux , la formation est de deux couleurs, jaunâtre à la partie supérieure, bleue ou grise à la partie inférieure ; quelquefois alors un lit cal- caire , un peu plus considérable que les autres, sert de ligne de démarcation entre les deux nuan- ces. Les fossiles que l’on trouve le plus abon- damment dans la formation marneuse, sont des térébratules , des ammonites, des nautiles, des bélemnites , des trochus, des trigonies , des ma- drépores ; on y voit aussi des débris d’icthyo- saures , etc. Le calcaire marneux forme la plus grande par- tie des buttes voismes de la mer ; on le voit dans les paroisses de Villiers-le-Sec, St.-Gabriel, Meuvaines , St.-Côme-de-Fresnay , Aroman- ches, Ryes, Tracy, Argouges , Hérils, Commes, Port-en-Bessin , St°.-Honorine , St.-Laurent , et beaucoup d’autres lieux. DE L’ARRONDISSEMENT DE BAYEUX. TO Calcaire à polypiers. Le calcaire à polypiers (1), partie supérieure des terrains oolitiques , surmonte le calcaire mar- neux (2). Le plus souvent 1l est très-dur , rempli de lamelles spathiques , contient un grand nom- bre d’oolites blanches dans certains bancs , et présente dans d’autres un grain tendre et gros- sier passant au sable calcaire, il renferme des couches très-régulières de silex noirs , jaunes ou rouges. Les fossiles n’y sont point abondants ; on y trouve quelques polypiers, des peignes, des servillies, des coquilles bivalves d’une petite di- mension , difficiles à déterminer , et très-rarement des baculites (3). Ce calcaire prend une assez srande extension dans toute la partie nord de lar- (1) Voyez les mémoires de M. de Magneville, sur le calcaire ( coral-rag des anglais ). (2) Dans plusieurs lieux, le calcaire à polypiers repose immé- diatement sur la marne , et il règne un contraste subit entre les deux formations ; mais dans d’autres, une espèce de transition s’opère , les couches supérieures du calcaire marneux n’alternent plus qu’avec très-peu d’argile , et se rapprochent beaucoup du calcaire à polypiers qu’elles supportent, et avec lequel elles semblent se confondre. (3) Je n’ai trouvé qu’une seule fois, au sommet des falaises de Port-en-Bessin , plusieurs individus fossiles que je crois devoir xapporter à ce genre, 192 GEOLOGIE L | rondissement de Bayeux , où on le trouve presque sur toutes les hauteurs, depuis Maisy jusqu'à Banville ; mais il ne $’étend pas beaucoup dans, l'intérieur des terres, et à une lieue de la mer environ , on cesse de le renconirer. Dans l’arrondissemeut de Bayeux, le calcaire à polypiers est quelquefois surmonté d’un banc de glaise jaune avec quelques veines ocracées , rempli de silex et de poudingues ferrugineux et silicéo-calcaires. Ce banc influe beaucoup sur la végétation , lorsqu'il est à la surface du sol : les joncs marins, les bruyéres, les mousses et les autres plantes qui croissent dans les landes de Formigny, en sont une preuve. Tels sont les divers bancs calcaires et argi- leux qui forment la masse principale des terrains secondaires des environs de Bayeux ; je vais donner plusieurs coupes qui prouveront combien est constant leur ordre du superposition. À Masons , le calcaire marneux , alternant avec une argile jaune ou grise, forme les buttes d’'Escures et de Commes, qui se prolongent jus- qu'a la mer, et dont le sommet seulement est formé par une couche de quinze à vingt pieds de calcaire à polypiers; cette petite mon- tagne qui peut avoir 55 mètres d’élévation, DE L’ARRONDISSEMENT DE BAYEUX. 199 est voisine de la vallée du Soucy ; je donne ces deux coupes ensemble ( Fig. :re, }, Les buttes du Huppin et de Commes se trou- vent séparées par une vallée qui se prolonge jusqu’à Port-en-Bessin , et qui est formée par la disparition du calcaire à polypiers et du calcaire marneux , de sorte que le calcaire à oolites blanches se trouve au fond , surmonté seulement par quelques couches inférieures du calcaire mar- node (Fiés :56411): Si nous voulons examiner dans une autre con- trée les buttes de Ryes et de Basanville, nous verrons encore les mêmes faits géologiques (rigni5ex)s À Vieux-Pont , sur la rivedroite de la Seule ( arrondissement de Caen }, le calcaire à ooli- tes blanches manque , le banc des oolites brunes est recouvert par le calcaire marneux , et ce dernier par le calcaire de Caen (1), ( Voyez la coupe de ces terrains depuis Vieux-Pont jusqu’à Martragny ( Fig. 4. ). (1) Le calcaire de Caen se prolonge depuis Martragny jusqu’à Bretteville-l’Orgueilleuse , où, il se trouve surmonté par le cal- gaire à polypiers. Î[l reparaît à la Maladrerie. 194 : GÉULOGIE Examen des falaises comprises entre la rivière de Seule et l’embouchure de la : ‘Fire. : Les falaises , coupées presque perpendieulai- rement , nous montreront avec la plus grande clarté la superposition des bancs ; à la vérité, nous n’y verrons rien que les coupes précé- dentes ne nous aient appris ; mais elles confir- meront ce que nous avons dit, et complèteront notre travail sur les terrains qui occupent la partie nord de l'arrondissement. Les falaises que nous allons observer s’a- baissent quelquefois au niveau de la mer ; leur plus grande élévation n'excède pas quatre-vingt- cinq mètres , et leur hauteur la’ plus ordinaire est d’environ soixante. La partie supérieure est occupée par le calcaire à polypiers, le reste par la marne et les calcaires oohtiques infé- rieurs , comme dans les lieux que nous venons d'indiquer. Nous avons vu plus haut ( fig. 1'€. ) que la val- lée du Soucy était située au milieu du calcaire à oolites blanches , quela vallée formée par Pabais- sement des buites de Huppin et de Commes, plus DE L'ARRONDISSEMENT DE BAYEUX. 199 élevée que la précédente , se trouvait au-dessus du même calcaire ( fig. 2°.) ; or, le village de Port, placé à son extrémité, doit être assis sur ce terrain ; c’est de ce point central que je parürai pour examiner le littoral, d’un côté jusqu’à la rivière de Vire , de l’autre jusqu’à la Seule. Falaises depuis le village de Port jusqu'au Ver. En se dirigeant de Port-en-Bessin , vers le couchant , on voit la marne bleue au niveau de la mer, et le calcaire à oolites blanches au fond ; mais bientôt ce dernier s'élève subitement de cinq mètres environ, et forme au - dessus des eaux un rempart solide supportant le calcaire marneux. es 3 Les terrains oolitiques inférieurs s’élèvent jus- qu'aux Hachettes , situées entre Port et St<.- Honorine , le lieu est appelé ainsi, parce que de distance en distance on y rencontre des masses qui s’avancent dans la mer , comme de grosses tours destinées à défendre le bas de la falaise, à laquelle elles sont collées sans ÿ être liées ; car les bancs ne se correspondent pas, et ces masses présentent 10 mètres de cal- 196 GÉOLOGIE caire à oolttes blanches sous la marne bleue, tandis qu’on n’en voit que cinq dans la falaise voisine ; elles sont du reste à peu près régulière- ment espacées et assez nombreuses, (1). Il résulte naturellement de cet exhaussement que les couches inférieures aux oolites blanches parais- . sent plus-tôt dans les masses dont nous venons de parler, que dans le reste de la falaise. Calcaire à polypiers 7 mètres. Calcaire marneux. 42 mètres. masses ou Hauteurtotaleenv. 54 m. | corps avancés. Calc. à oolites blanc. oolites blanches. Calc. à oolites blanc. 5 m. 10 M. 5 m. FRA a RARES EIRE ART pr OA EU PO GES Mer. Bientôt le banc des oolites blanches atteint sa plus grande hauteur ; l’on voit pendant quel- (1) Le calcaire à oolites blanches des Hachettes est fertile en polypiers , en oursins eten éponges ; j'en ai recueilli quelques espèces non décrites, que M. Lamouroux veut bien se char- ger d'examiner. DE L’ARRONDISSEMENT DE BAYEUX. 197 que temps le calcaire à oolites brunes et le cal- caire à gryphites, qui lui sont inférieurs ; mais le terrain ne tarde pas à s’abaisser, et on ne trouve plus ces deux derniers bancs qu'à une _ certaine profondeur dans la mer fig. 5°. ). Coupe de la falaise entre Port et Ste.-Ho- norine. 19 Der verte. om OA 26. (Caleaire à polypierss sus . +. 8:64 30. Marne bleue et calcaire marneux . 40 » 4°. Calcaire à oolites blanches . . . . 12 » 590. Calcaire à oolites brunes. .« . . + Oo 16 60. Calcaire à gryphites arquées . . . 1 32 7°. Idem avec silex au niveau des basses marées. Le village de Ste.-Honorine est situé sur le bord de la mer, au fond d’une vallée, au milieu de laquelle un ruisseau coule sur le calcaire à oohtes blanches ; on remarque , dans les falai- ses voisines, que d’un côté du vallon le cal caire marneux alterne avec la marne bleue , et de l’autre avec une argile jaune ; mais la partie infé- rieure conserve la couleur bleue. 198 GÉOLOGIE Cal. à poly. LL marne bleue. Blanc calcaire. Gale. avec Cal. à poly. Calc. avec argile jaune. Blanc calcaire. Marne bleue. Marne bleue. Ste.-Honorine. CRD CARTE Calcaire à oolites blanches. a Hauteur totale environ 55 metres, Mer. Je n'indiquerai pas un grand nombre d’autres vallées placées à différents endroits sur le bord de la mer; elles ne présentent rien de plus que celles que j'ai citées , et elles sont formées par l’absence de tout ou parüe des bancs supérieurs aux terrains oolitiques inférieurs. A une demie lieue au -delà de Ste. — Fono- rine, vers Collevile , le calcaire à polypiers devient plus épais , le calcaire à oolites blanches s’abaisse. Plus loin , l'escarpement des falaises s’a- doucit peu à peu , et, au lieu d’une butte presque perpendiculaire , on voit une pente douce et herbée, qui se prolonge dans l’espace d’une lieue et demie : les ouvertures que j'ai visitées à dif- férentes hauteurs sur ce coteau, m'ont prouvé que l’ordre des bancs n'avait pas changé; seu- DE L'ARRONDISSEMENT DE BAYEUX. 109 lement le calcaire à polypiers gagne en épais- seur, les autres bancs s’abaissent. Cet abaissement continue jusqu’à Vierville , où l’escarpement recommence ; le calcaire à polypiers occupe alors les deux tiers de la falaise, le cal- _caire à oolites blanches est disparu entièrement , _et le calcaire marneux se trouve sous l’eau et au-dessus. Argile. Calcaire à polypiers. Calcaire marneux. Hauteur environ 50 mètres. Près d’une anse remarquable, à l'extrémité du Cap de la Percée, les bancs s’inclinent et le calcaire à polypiers s'enfonce un peu dans la mer, tandis que le calcaire marneux en forme le pavé. Bientôt un nouvel abaissement a lieu, et.le calcaire à polypiers forme à lui seul _ #00 GÉOLOGIE . la base et l’élévation des falaises, hautes de 4o mètres; elles sont ici perpendiculaires , et différent en cela des précédentes, où le peu de consistance de la marne produit continuelle- ment des: éboulis. Le calcaire à polypiers de ces falaises et des en- virons est en genéral compact, très-dur et peu fertile en fossiles (je n’y ai pu trouver qu’une espèce de coquille bivalve ); quelques-unes de ses couches sont inclinées ; quelques autres con- tiennent des oolites blanches ; mais , ce qu'il y a de plus remarquable, c’est le grand nombre des couches de silex, qui alternent avec les assises calcaires , depuis le haut jusqu’au bas , et qui, stratifiées horizontalement , atteignent une épais- seur de 14 à 16 centimètres. Leur prolongement est souvent une argile feuilletée brune ; enfin, leur nombre est quelquefois tré conE ne J’en ai compté trente dans un endroit où la hau- teur de la falaise est d’environ 4o mètres. Ces silex sont quelquefois parsemés intérieurement de points blancs calcaires. Voici une coupe prise en face du village d’An- slesqueville. + DE L’ARRONDISSEMENT DE BAYEUX. 201, Verre végétale t.ke tale dan es Argile d’un jaune foncé , analogue à celle que l’on rencontre presque partout à la surface du sol aux environs de Birenx | du, cvalioceuucmdhin des Argile beaucoup plus pâle, quelquefois traversée de veines ocracées, conte- ON EN W nant un grand nombre de silex. . , Calcaire à polypiers par bancs plus ou moins durs, plus ou moins épais, et séparés par des bancs de silex moms épais que les premiers, environ. . 34 » Mer. A St.-Pierre, où la hauteur des falaises est à peu près la même, le calcaire marneux se relève et parvient promptement à 10 mètres au — dessus des eaux. Il présente ici un nou- veau fait à constater ; car les bancs supérieurs du calcaire marneux alternent avec les bancs me du calcaire à polypiers qui le recou- . Gite alternance est plus ou moins fré- Pa mais on remarque particulièrement un banc de calcaire à polypiers , épais d’un à deux mètres , qui règne presque constamment dans la marne , qu'il sépare en deux parties distinctes. 202 GÉOLOGIE Voici une coupe prise à St.-Pierre: Terre végétale nan, puis orties oieinrEt Argileetrsiles ina cage line si Reis Galcaire à polypiers avec silex. . . . . 16 » Argilése nai Mara Marne bleue et calcaire marneux . . «+ 3 32 Calcaire à polpplérs isa dat NO Marne bleue-eticalcaire 0 en ges On voit, à peu près dans la même localité et dans un espace très-circonscrit, un brisement qui interrompt la correspondance des bancs. A un demi-quart delieue plus loin, vers Grand- camp , on voit la même chose qu’au cap de la Percée , le calcaire marneux s’abaisse peu à peu, et le calcaire à polypiers occupe tout l’espace visible. À Plus loin encore, les silex sont un peu moins fréquents; à une demi-lieue en decà de Grand- camp, la hauteur des falaises diminue ; à Grand- camp elles ne présentent plus qu’une butte herbée qui s’écarte du rivage , et forme dans les terres la colline sur laquelle est assis le village de Maisy. Des carrières assez vastes , situées sur cette butte et exploitées pour bâtir , n’ont pré- senté des bancs épais de calcaire à polypiers. DE L’ARRONDISSEMENT DE BAYEUX. 209 Ce calcaire, qui d’ailleurs occupe dans l’inté- rieur des terres un assez grand espace , se pro- longe probablement sans interruption jusqu’à Os- manville , où on le voit à la partie supérieure des carrières qui sont exploitées pour les travaux du Vey. | vi Depuis Grand-camp jusqu'à embouchure de la Vire le calcaire à polypiers occupe le fond de la mer, et le rivage est un terrain d’alluvion, plat et marécageux , dont la couche la moins ancienne est de sable silicéo-calcaire , analogue à celui qui couvre la plage voisine , contenant des fragments arrondis de calcaire à polypiers ; on trouve ensuite de la tangue semblable à celle du petit Vey ; elle est supportée par une terre grasse, plus ou moins noire, accompagnée quelquefois d’une légère couche de tourbe. lalaises depuis Port jusqu’à la Seule. Si nous voulons revenir à Port et visiter les falaises situées au levant de ce village, nous trouverons : NCaCaire "at polÿpiérs 27,0 LL. OU, (05e D "Calcaire marneumest ou LT Se QT OAS Calcure à oolites blanches sous la mer. 204 GÉOLOGIE Le calcaire à polypiers manque aux envi- rons de la brèche appelée , sur les cartes , Gou- lette de Warg. Il reparaît bientôt et gagne une grande épaisseur à Marigny, où il est recou- vert par plusieurs pieds d'argile ; le calcaire à oolites blanches qui formait le pavé de la mer, à Port, est disparu, et remplacé par le cal- caire marneux. Voici une coupe, prise àl’en- droit où est située la carrière de M. Legouz, dont l'établissement mérite d’être signalé : Terre végétale. Aroile jaune - . + » ee 18 couches calcaires plus ou moins tendres ,séparées par des couches dures, en tom. + à » à - D à Banc d’un gram orossier . en D» Cinq couches de même épaisseur 1 64 Suez + à 0 . ee Se Re 1 #\bancs tres-durs. 2:44 0.101 MS 105 ( Chaque banc est séparé par un banc plus mince de calcaire tendre. Calcaire à polypiers. Couches qui ne sont pas encore ex- ploitées ( calcaire dur } . . « 7 » Bancs moins durs . .. 4 1 2 DE L'ARRONDISSEMENT DE BAYEUX. 209 Calcaire marneux, mêlé d’un peu d’ar- gile grise ( transition à la marne bleueejhpiisdsumeuoi ENS S SE Marne bleue et calcaire . . . , + 33 « Mer. Calc. marn. Plus loin, le calcaire à polypiers prend un grain très-gros et passe au sable calcaire ou alterne avec lui ; il en résulte des éboulements fré- quents, qui forment des vallons et des monti- cules. | ue À peu près dans la direction de Fontenailles , le calcaire à polypiers reprend sa dureté ordi- naire , et occupe les trois quarts de la falaise : on y trouve des oolites blanches. Coupe. Argile e ee e e e e e e © ®e ee e 3 QU » Sablescaleairesl shasor lol 2216; 18 20480 Caleaire pumitrer Le Ait. dir dot Mon Calc. à polyp. Avec des oolites blanches , . , , 2 » Caleaire à polÿpiers.: 1... 7,330 Calçaire marneuxis) Lire 21. 12040 206 GÉOLOGIE Depuis ce lieu jusqu’à Aromanches ,le cal- caire marneux s'élève, etle calcaire à polypiers diminue ; près d’Aromanches, le premier est d’un bleu presque noir, surtout dans la partie infé- rieure des falaises ; on y remarque un brisement et une inclinaison très-notable dans les bancs, près d’un lieu où ce caleaire est exploité me faire des marches d'escalier, Cal. à poly. Cal. Marn. Aromanches. x Jen Calcaire marneux. Le village d’Aromanches est situé au fond d’un vallon , entre la butte de Tracy et celle de Fresnay, un peu moins haute que Mamne et. formée par le calcaire marneux. Près du village de Fresnay,les falaisesmanquent, l’on trouve presque au niveau de la mer une vallée marécageuse , située au milieu de la marne bleue, et rémplie de troncs d'arbres ; elle se pro- longe jusqu’à Ver , où l’on voit des collines à peu de distance dela mer ; alors le calcaire à polypiers, DE L’ARRONDISSEMENT DE BAYEUX. 207 d qui forme la partie supérieure de ces éminences , s'incline vers l’est, le calcaire marneux s’enfonce dans la même direction ; et, jusqu’à la rivière de Seule, tout l’espace est occupé par le premier (1). OBSER VATIONS. Tuf. Dans les falaises, un grand nombre de sources sortent du calcaire marneux. Quelque- fois leurs eaux , Chargées de parties ferrugineuses, laissent partout où elles passent un enduit de fer oxidé ; plus souventelles charrient les parties calcaires qu’elles ont dissoutes, en incrustent les objets qu’elles rencontrent , et forment un tuf spongieux, dans l'intérieur duquel elles circulent pasiblement par une multitude de petits canaux. Le lieu où ce phénomène est le plus notable, est voisin de la chapelle St. - Siméon à Ste.— Honorine (2) , mais 1l semble que cette espèce dalluvion a été plus abondante autrefois qu’elle (1) Au-delà de la Seule, les falaises sont peu élevées en com- paraison de celles que nous venons d’examiner,et sont entièrement formées de calcaire à polypiers, jusqu’à l'embouchure de l'Orne. (2) M. Petite, dans sa carte du diocèse de Bayeux , publiée en 1676 , range au nombre des merveilles du Bessin , le tuf que nous examinons , et qu’il appelle les herbes et les mousses pétrilées de Ste.-Honorine. MS GÉOLOGIE ne l’est de nos jours; car , tandis que le rocher actuel est peu considérable , et ne s'accroît pres- que plus, on trouve dans la mer plusieurs blocs volumineux , qui prouvent la destruction d’une roche beaucoup plus étendue de même nature. D'un autre côté, les constructions anciennes nous montrent que le tuf de Ste.-Honorine a été em- ployé autrefois à bâtir (1) ; il est poreux , devient très-dur à la longue , et est percé d’un grand nom- bre de crevasses tapissées de spath calcaire : son grain est plus ou moins grossier ; sa légèreté est tres-grande. R Rocher du Calvados. Le rocher du Calva- dos , que j’ai eu occasion de visiter dernièrement avec M. de Magneville, est situé à une liene en mer, devant Aromanches et autres villages voi- sins ; il est formé par le calcaire marneux , et ne s’apercoit que dans les plus fortes marées. Il présente alors une surface plate, longue de plu- sieurs centaines de mètres sur 80 de large ; 1l est coupé perpendiculairement vers l’ouest , et s'élève en pente douce du côté des terres dans les hautes (1) Dans les bains romains, découverts à Bayeux, en 1821, on trouva des dalles en tuf de Ste.-Honorine ; plusieurs mai- sons du XIIIe. , du XIVe, et du XVe. siècle en présentent également dans leur construction. Fe At ES È ne 1) SU a Colc. & Oolites Blanches Fig. D QUE Cafe. a Poly p U) : mm me = + Cole. Marneux. = —» — =” = = — — — - AS —_ = > = 2 Cale.a Oolites Blanches. . a Oolites Blœnches, Rice de Basanville. Calc: Fi ù (ea Poly piers mm — pee 7 de. LENS NN Pt TEE RE ET PR OR CR ROME PR EE CE ARE Cale. Marneux Codc. Morneux. See > Le SOS D Ar [ = = — | Cal « Oolites Brunes. Sr HSE NES = EN 2 MANPATE L'RXTE-< 4 LAS 271 led CU #7 UT x Fe 1 nié (es PET: 2IUA 4 DT 2/ 1 4 À PTPUOT. PECIINT D TA 72 PUIUC AE PA POI LLLIS: de À 4 CT 2 ÉÉLDEe Er re Lu dé 2,85. - me 309 RMS = Ë RMS Re Pt de "TnoU-/0 A] ‘309 = = = — _ TAC OT ST MC DE EN ‘ed /jog D )D7 (31 ud fe) ÿ 6j 1e 107) z NC k jo : / \ | À ee ù | $ LE — es ee : ; ER | | Sc 1e. RP ‘à “ Ÿ A: # DE L'ARRONDISSEMENT DE BAYEUX. 209 marées, il est recquvert par dix-huit ou vingt pieds d’eau , d’après le témoignage des matelots. C'est ce rocher qui a donné à notre dépar- tement le nom qu'il porte aujourd’hui : il avait été question en 1790 , à l'assemblée constituante, de le nommer département de l’Orne-Inférieure, quand M. Delaunay , député de Bayeux, rap- pela ces rochers que le naufrage d’un vaisseau espagnol a, dit-on , fait nommer Calvados, et ce nom fut préféré (1): le vaisseau dont nous par- lons faisait peut-être partie de l’escadre que Phiippe IT envoya contre l'Angleterre, en 1588. Je termine en engageant ceux de mes colléeues qui s'occupent de la géologie du Calvados à lire le mémoire de M. Hérault , sur l’ensemble des ter- rains de ce département ; ce travail sera pour eux d’un grand secours , et il m’a moi-même beau- Coup aidé, (1) La mer voisine , entre les rochers et la côte, porte le le nom de la fosse d’Espagne , ce qui semble encore confirmer cette tradition. RAA LA VER L'ULA/VE LVL UV LVL URI UVLL VAN UULUUVLUVE VAR UVULUALUVE VULUIURLVY MÉMOIRE Sur un Mollusque Fossile, inédit et remar- quable , du terrain secondaire de l’arron- _dissement ‘de Falaise, par M. DE BASO- CHES ( lu à la séance du 8 mars ). 4 L L2 e J'avars recueilli, 1l y a quelque temps, dans la commune de Fresnay , située à une lieue à l’est de Falaise, un moule intérieur de coquille spirale et turriculée , ayant une longueur d’en- , ch . viron 12 centimètres, que Je supposai vague-— ment pouvoir être celui d’une Cérite, et 1l pa- rait que des noyaux semblables ont été rencontrés depuis aux environs de la même localité ; mais l'absence totale du test rendait impossible une” détermination positive. Enfin , d’une carrière ouverte sur la commune de Villy , adjacente à celle qui m'avait fourni mon morceau incomplet, M. Frédéric de la Fresnaye, correspondant de la société , m'a apporté dernièrement un superbe échantillon, lequel, par un heureux hasard, pré- MÉMOIRE SUR UN MOLLUSQUE FOSSILE. 211 sentait d’un côté le moule seul , tout analogue au mien, et de l’autre le test presque partout d’une précieuse conservation. L'ouverture , 1l est vrai, reste encore à désirer , et des recher- ches que j'ai fait faire depuis dans le même local, pour avoir au moins un fragment qui la laissät apercevoir, ne m'ont encore produit que des moules semblables au premier que j'avais eu et sans aucun reste de la coquille. Au premier coup d'œil on pourrait chercher à placer ce fossile avec les turrilites, et à Le rap- procher du T'urrilites tuberculata de Sowerby; mais un examen plus attentif a bientôt éloigné cette idée : toutes les Turrilites , distinctement connues, étant des coquilles simistrales , et la nôtre d’ailleurs n'offrant pas le moindre indice de cloisons. | Le genre Cérité semblerait aussi la révendi- quer ; mais, sur les divers échantillons que jai sous les yeux, nulle trace, nulle tendance ap- parente d’un canal à la base de l’ouverture. La rangerions-nous parmi les Turritelles ? Mais leur forme est plus élancée, et les tours de leur spire , sans tubercules , sont presque toujours munis de stries ou de carènes transverses. Enfin , c’est aux Mélanies qu'il me semble 219 MÉMOIRE convenable d'associer notre fossile , et le célè- bre ouvrage de Sowerby, sur ? English Concho- logy , m'en présente plusieurs espèces qui ont as- sez le port de celle-ci. D'abord, son Melania heddingtonensis, tab. 39, que j'ai recueilli à Gaprée , département de l'Orne , dans un gise- ment analogue à celui de Villy; puis son We- lania striata , tab. 47 , quireprésente la taille, et assez le facies de nos moules internes , et'qui provient de ce queles Anglais appellentCoral rag, lequel , comme l’on sait, est une assise du cal- caire du Jura , où se trouvait notre coquille. II est vrai que les Mélanies sont regardées comme des coquillages fluviatiles, et que toutes les espè- ces vivantes connues viennent des rivières étran- gères , tandis que notre fossile se rencontre avec des coquilles pélagiennes , telles que des ammo- nites, des térébratules, des peignes . de bé- lemnites. Mais cette observation, qui n’a pas échappé sans doute au savant Sowerby, n’a pas empêché non plus M. de Lamarck de placer dans ce genre une douzaine de Mélanies, recueillies dans le calcaire grossier des environs de Paris, avec une foule de coquilles marines. Des cou- rants ont pu entraîner ces dépouilles loin de leur origine , et un fragment de tartuüffite, bien re- op. SUR UN MOLLUSQUE FOSSILE, 219 connaissable à son odeur, et qui m'a été apporté de la même localité, vient à l’appui de cette sup- position, puisque cette substance est reconnue aujourd’hui pour représenter un végétal con- tinental , vraisemblablement monocotylédon : d’ailleurs , notre département même offre en plu- sieurs endroits le mélange de débris nombreux d'animaux fluviatiles, tels que les deux gavials de Honfleur et celui de Caen (r), confondus avec des ammonites , des bélemnites , des tri- gomies et autres productions pélagiques. Je passe maintenant à la description de cette espèce fossile, que je nommerai : Melania Lafrenayi. Nobis (2). M. test& conico- turrité ; anfractibus in- fernè costis 4 transversis tuberculoso - no- dosis , supernè lævibus , excavatis; margine superiore prominulo. Longueur , environ 2 décimètres ( 7 pouces }, diamètre de la base, environ 70 centimètres ( 2 pou. 6 lign. }. La spire complète peut être com- (1) Voyez le résumé des observations de M. Cuvier , sur les Crocodiles fossiles, dans le bulletin des sciences naturelles, 1824, n°. 1, page 93. (2) Du nom de M. Frédéric de la Frenaye, qui m’a fait con: naître ce bel échantillon , et qui s’est chargé d’en donner uus dessin exact, 214 MÉMOIRE UN MOLLUSQUE FOSSILE, posée de huit tours : le dernier est entouré depuis sa base, jusqu’au delà de sa moitié, de quatre côtes noduleuses , dont la dernière est munie de tubercules plus gros et plus saillans ; puis vient une large excavation , lisse, surmontée d’un rebord épais, qui marque profondément la su- ture. La partie inférieure des tours précédents est cachée dans les suivants , qui ne laissent plus voir au bas de chaque tour que la rangée de gros tubercules. Le moule intérieur , formé d’un calcaire semblable à celui qui constitue la pierre à bâur, dans laquelle la coquille est incrustée , est re- vêtu, sur une face senlement, d’une croûte spathique épaisse , qui a remplacé le test, et, sous ses traits , en a conservé une image fidelle. ‘Se trouve aux communes de Villy, Fresnay et environs , arrondissement de Falaise, dans une couche oolithique inférieure du calcaire juras- sique. Nota. Il serait possible que des recherches ul- térieures engageassent à transporter cette grande coquille , ainsi que plusieurs autres Mélanies fos- siles , à test épais, dans un genre particulier , qui serait composé d'espèces marines. Es, ns, 6 tan ms ko tiama etai E. DCE F, € de Lafrenaye det® LAFRENAYI. «460 BEL LR VAR VUE UE LVULUVLUVE VAR VU VU LAN ULIUAR UV RAR LU VARUAR AVR NOTE Sur le Béril - Aiguemarine d’Alencon , lue à la séance du 5 avril 1824, par M. L. ne LAFOYE. fr y a près de sept ans que je trouvai, au bois des vallées près d'Alençon, plusieurs échantillons de Béril, dans les débris d’une carrière abandon- née. Mes occupations ne-me permettant pas alors de faire autant de recherches que je l’aurais dé- siré, ce n’est qu’en 1820 que je suis parvenu à en découvrir des cristaux sur place , assez près de l’endroit où j'avais recueilli les premiers morceaux détachés. | : | Le granit dans lequel se trouve le Béril est formé de couches plus ou moins épaisses , incli- nées vers le levant d'environ 50°. On l’exploite sur une grande étendue de terrain ; mais lors- que les ouvriers tombent sur des parties char- gées de cristaux de quartz enfumé ( diamant d'Alencon ), ou contenant trop de mica , ils 216 NOTE abandonnent la carrière et reprennent leurs tra- vaux sur une autre point. Voilà peut-être pour— quoi le Béril n’a pas été signalé plus-tôt dans cette localité, quoiqu'il paraisse y être abon- dant. C'est dans une carrière, située à la droite de la route de Brétagne, à quatre cents pas du ha— meau, nommé le Pont-Percé, que j'ai trouvé le Béril. Une fissure verticale dansle granit, dont . on avait enlevé un des côtés, laissait un mur à nud , d’environ 12 mètres de long sur un mètre de haut, entièrement couvert de rosaces de ce cristal, qui avaient jusqu’à 8 décimètres de diamè- tre. Chaque rosace était composée d’aiguilles partant d’un centre commun, pour la plupart. irès-opaques et couleur de miel foncé. Jen aï néanmoins trouvé quelques fragments clairs , de la plus belle eau, sans glaces n1 fissures. Je crois que le béril d’Alencon , si on le prenait à l’instant même où 1l vient d’être mis à nud, serait transparent , et que l’action prolongée de l'air, les variations brusques de température al- tèrent seules sa pureté. En effet, un échantil- lon , trouvé dans un chemin , présente d’assez gros cristaux , dont quelques-uns commencent. à se décomposer en une poussière couleur de SUR LE BÉRIL-AIGUEMARINE D'ALENCON. 217 rouille ; dans quelques endroits le cristal même a disparu. | Ilest très-rare de rencontrer des cristaux ter- minés : les sommets ou n'existent pas, ou sont brisés par les efforts que l’on est obligé de faire pour rompre les masses qui les contiennent. Joffre cependant à la société un fragment de granit , sur lequel se trouve plusieurs cristaux de Béril, dont un présente un sommet terminé par des facettes très-distinctes. Quoique tous les échantillons trouvés sur place, soient en aiguilles plus ou moins fines, il en existe de bien plus volumineuses : un bloc de granit, déposé au cabinet de cette ville, con- tient des cristaux presque de la grosseur du pouce. Il provient des démolitions d’une église, qui était située à Alencon dans le faubourg St.- Blaise, et à été évidemment extrait des carrie- rières de Hertré, dont celles du Pont - Percé sont la continuation. Comme le Béril n’est pas exclusivement im- planté sur le granit, mais qu’on le trouve aussi sur le quartz et le felspath , il me semble que c’est principalement dans les bancs de Kaolin , si communs près d’Alencon, que l’on peut ‘s- pérer de trouver des cristaux entiers, bien purs 218 NOTE SUR LE BÉRIL-AIGUEMARINE. et susceptibles d’être employés a la bijouterie. Je terminerai, en observant qu’il ne peutexis- ter aucun doute sur l'identité du Béril , dont je viens de vous entretenir, avec celui qu’on a trouvé en France à Limoges , à Marmagne , etc. Notre collègue, M. Thierry, en a extrait la glucyne dont il se sert depuis plusieurs années dans ses cours de chimie. VAN VAR VAL URL UN EVA LAVAL VUE LULU LUL ULE VUE VUVEUVR ALAN VAR ULE we PREMIER MÉMOIRE DeM. DE MAGNEVILLE , sur un Calcaire renfermant une grande quantité de Po- lypiers qui fait partie des terrains secon- daires du département du Calvados , com- muniqué à l’academie des sciences, arts et belles-lettres de Caen, dans sa séance du mois de décembre 1820, et lu à la so- cieté Linnéenne du Calvados , dans la séance du 5 avril 1824. Parmi les différentes couches calcaires qu’of- fre le département du Calvados , une est remar- quable par le grand nombre et la variété d’es- pèces de polypiers qu’elle renferme. Ces fossiles y sont tellement multipliés dans quelques endroits, qu'ils composent à eux seuls la plus grande par- tie de la masse de calcaire ; c’est pourquoi je le désignerai sous le nom de calcaire à polypiers, 290 €ALCAIPE A POLYPIERS jusqu’à ce qu’on lui en donne un autre qui puisse mieux le caractériser (1). Son aspect varie au point que j'aurais eu quel- quefois de la peine à le reconnaître , si je n’eusse pas été à portée d’observer dans mon pare à Lébisey , commune d’'Hérouville , une grande parte des changements qu'il peut éprouver. Il se présente sous la forme de cailloutis et de plaquettes , ou moellon très-propre à la ma= connerie. Îl est teint en jaune par du fer qui se trouve souvent en petites masses entre les lits, et quelquefois dans le corps même de la pierre. Extérieurement cette pierre ne paraît composée que de débris de polypiers et de co- quilles ; mais quand on vient à la casser, on voit briller quantité de facettes de petits cris- taux de spath calcaire. Elle cesse quelquefois d’avoir une forme aplatie , elle devient brute, et les fossiles qu’elle renferme sont plus gros. On la trouve souvent en grosses masses au milieu de ces plaquettes , sous la forme de sable d’un grain un peu gros , de couleur jaune , con— tenant de l'argile. Dans quelques endroits ce sable (x) Il paraît que les Anglais ont nommé ce calcaire Coral-Rag. Essai gognostique sur le gissement des roches, par M. de Hemboldt. DU DÉPARTÉMENT DU CALVADOS. 9921 est très-blanc , et ne paraît pas contenir d'argile. Ses couches supérieures sont sans adhérence ; mais à une plus grande profondeur 1l s’agglutine , se durcit de plus en plus et se divise par bancs réguliers , comme de la pierre de taille. Il peut même la remplacer, pourvu qu'il soit à l'abri des injures de l’air ; car la pluie et la gelée l’au- raient bientôt réduit à son état de sable. Ce calcaire fournit aussi de très-bonne pierre de taille , c’est même la seule qu’on ait employée jusqu'à présent pour les ponts et les autres construc- tions maritimes. Les murs du quai de Caen en sont construits, On est obligé de la trancher ou de la scier au grès, parce que la scie à dents dont on se sert dans ce pays l’entame difficile- ment. Son grain n’est jamais aussi fin que celui de la pierre de Caen, et elle en a rarement la blancheur. Les principales carrières sont situées à Ran- villes, Sallenelles , Biéville , Reviers, Pierre- pont , Orval et tout le long de la rivière de _ Muë, depuis Reviers jusqu’à Caron. On remarque quelquefois dans cette pierre des oolites brunes et des oolites blanches. Les premières sont de grosseur inégale et de forme irrégulière ; on les trouve dans les carrières de 222 CALCAIRE A POLYPIERS Sannerville. Les blanches sont plus égales et plus arrondies. À Ranville, à Sallenelles et à Lébisey , elles sont disséminées avec des débris de coquil- les et de polypiers, dans quelques bancs des fa- laises de la rivière d’Orne , entre le bac de Bé- nouville et Oyestréham, et dans plusieurs autres endroits , elles sont plus petites et Formien toute la masse du calcaire. ; Outre les polypiers que cette pierre renferme , on y trouve encore beaucoup d’autres fossiles ; tels que lencrinite pyriforme et une pinnite d’une très- grande dimension (1) que je n'ai trouvée dans aucune autre formation. On y trouve outre cela plusieurs autres espèces d’encrin- tes, des térébratules en abondance , des ammo- nites, des nautiles , des bélemnites et des gryphi- tes en petite quantité, enfin des trochus, des peignes , des huîtres, des modioles;s des our— sins , etc. Il faut comprendre dans la formation du cal- (1) Cette pinnite est décrite et figurée dans le voyage de M. Saussure , dans les Alpes, tom. 1, pag. 263 , sous le nom de Pinnigénes ; il l’a trouvée au mont Salève , près de Genève. La description qu’il donne de certains bancs de cette mon- tagne , qui sont entièrement composés de débris de coraux et de coquillages, me fait présumer que ce calcaire est pareil à celui qui fait le sujet de ce mémoire. DU DÉPARTEMENT DU CALVADOS. 229 caire à polypiers une couche glaiseuse très- calcaire , qui se trouve immédiatement au-dessus de la première couche de pierre. Elle renferme aussi beaucoup de coquilles et de polyÿpiers. Ces derniers y sont plus entiers et plus faciles à extraire. J’en ai recueilli une collection très- nombreuse seulement dans mon parc. Une partie de ces polypiers sont décrits par M. La- mouroux, dans l'ouvrage qu'il vient de publier. Pour faire bien connaitre la position géo- gnostique du calcaire à polypiers , je le décri- rai tel qu'il se présente sur les falaises qui environnent le village d’Aromanche, situé sur le bord de la mer, près Bayeux. Je choisis ce lieu , de préférence , parce qu’offrant une coupe perpendiculaire de plus de 200 pieds, 1l laisse voir les différentes formations qui sont au-des- sous de celle-c1. Le vallon étroit et profond au bas duquel est situé le village d’Aromanche, sépare la falaise formée par la butte de Manvieux , de celle for- mée par la butte de Fresné ; elles se réunissent à la butte de Ryÿe, et donnent naissance au vallon dont 1lest question. Au bas de la butte de Fresné commence une vallée plus spacieuse ù où coule la petite rivière de Gronde, et où sont 294 CALCAIRE À POLYPIERS situés les villages de Fresné, Asnelles et Meu- vaines. Elle est bornée par la butte de Ver, qui ne forme point de falaises et va se terminer en pente douce au bord d’un marais qui la sépare de la mer. La partie inférieure de la falaise de Manvieux est formée d’une marne bleue qui s’élève à plus de 90 pieds au-dessus du niveau de la mer, et s'enfonce à une profondeur que je ne connais pas. Cette couche est parfaitement horizontale , se divise par bancs parallèles d'épaisseur diffé— rente et plus ou moins argileux. Quelques-uns n’ont que la consistance de la glaise, et d’au- tres ont une très-grande dureté. Ils se prolon- sent avec beaucoup de régularité dans la par- tie inférieure de la falaise de Fresné. Chaque banc n’est interrompu que par le vallon d’Aro- manche qui les coupe tous obliquement , suivant la pente de ses coteaux. Immédiatement au— dessus de cette marne bleue se trouve de la pierre calcaire à peu près de la même épais- seur , divisée aussi par bancs horizontaux, qui se prolongent dans la butte de Fresné, et qui sont interrompus de lamême manière par le vallon d’Aromanche. La falaise de Manvieux est ter- minée dans sa plus grande hauteur par le cal- DU DÉPARTEMENT DU CALVADOS. 229 caire à polypiers qui peut avoir de 15 à 20 pieds d'épaisseur. Mais comme :l repose sur l’autre calcaire qui est d’un niveau parfait, 1l en résulte qu'il devient mois épais à mesure que la falaise perd de son élévation , et qu'il dis- paraît totalement lorsqu’elle n’atteint plus sa hau- teur. C’est par cette raison qu’on ne le retrouve point sur la falaise de Fresné, qui est beaucoup plus basse, et qu'il reparaît sur la butte Rye; mais il y a peu d'épaisseur, parce qu’elle est moins haute que celle de Manvieux. La vallée entre la butte de Fresné et celle de Ver repose sur la formation de marne bleue, qui est treés-molle dans cet endroit , et dans laquelle , lorsque la mer est basse , on voit beau- coup de racines d’arbres. La butte de Ver est formée comme les autres buttes que je viens de décrire ; mais à parur de son sommet, les diverses formations cessent d’être de niveau et prennent leur pente vers Vest. Le calcaire à polypiers s'enfonce dans cette direction , et toutes les falaises , ainsi que toutes les carrières jusqu'à Sallenelles , au-delà de la rivière d’Orne , ne présentent plus que cette formation. Cependant, il est à remarquer qu'à la roche de: Sallenelles, on commence à 19 226 CALCAIRE A POLYPIERS apercevoir une autre formation calcaire qui re- couvre celle à polypiers. La ligne que je viens de parcourir de l’ouest à l’est nous présente l’extrémité septentrionale du calcaire à polypiers. Si nous nous dirigeons main- tenant du nordau sud,noustrouverons qu'il s'étend sans interruption depuis la mer jusque sur les hauteurs qui environnent la ville de Caen de ce côté ; voici de quelle manière 1l s'y ter- mine. La partie inférieure des coteaux de St.-Gil- les, du Moulin-au-Roi, de St.-Julien et de la Folie, est formée par le calcaire de Caen, et celui à polypiers est placé immédiatement au- dessus , et forme leur crête. Le terrain: s'élève encore vers le nord-est ; mais les couches s’in- clinent dans la même direction , et 1l se trouve avoir une grande épaisseur au plateau de Lé- bisey. Son inclinaison se fait remarquer dans toutes les carrières ainsi que dans tous les che- mins creux qui sont à l’ouest de la rivière d’Orne. Confiné sur le bord de la mer, dans l’arron- dissement de Bayeux, le calcaire à ‘polypiers prend un grand développement dans la partie sud-est du département ; mais comme je ne l’ai pas encore parcouru dans toute son étendue, je DU DÉPARTEMENT DU CALVADOS. 9227 n’indiquerai qu’une partie du terrain qu'il oc- cupe. 1e Il commence sur les hauteurs qui sont à l’est de la commune de Port-en-Bessin, et s’étend jusqu’à la butte de Rye. Il se trouve interrompu par la vallée de la rivière de Gronde. IL repa- raît sur la butte de Ver, d’où il s'étend sur les hauteurs dé Basanville ; il occupe tout le pla- teau où sont situées les communes de Crepon, Villiers-le-Sec, Ste.-Croix , Banville et Gray. Les carrières d’Orival et de Pierrepont ‘sont ouvertes dans ce calcaire, qui se termine d’un côté sur les communes de Camilly, Caïron, Rots. Il tourne ensuite à l’est sur les communes d’Authie, de St.-Germain-la-Blanche-Herbe, passe sur le territoire de Caen, en couronnant les coteaux de la Maladrerie , de St.- Julien, de la Folie, du Moulin-au-Roi et de St.-Gil- les ; le coteau de Calix , étant moins élevé que les précédents, n’est formé que par le calcaire de Caen ; mais on retrouve le calcaireà polypiers de l’autre côté de la rivière d'Orne , sur les co- teaux de Colombelle et de Mondeville. Il se termine au couchant sur le calcaire de Caen, entre le village deCormelles et les carrières du fau- bourg de Vaucelles , et entre le village d’Ifs, & 228 CALCAIRE À POLYPIERS et les carrières d'Allemagne. Il s'étend ensuite dans toute la plaine au sud-est de Caen, mais j'ignore ses limites. On le voit cependant encore à Valmeray ; à Vendeuvre et au Mont-d'É- raines, près de Falaise. Les débris de ce cal- caire qu’on trouve répandus aux environs de Lisieux y prouvent sa présence ; mais on n’en aperçoit plus de tracés au sud-ouest de Caen, entre la route de Bayeux et la rivière d’Orne, jusqu'a la limite des terrains calcaires. …Lorsqu'il ne repose aucune autre formation sur celle du caléaire à polypiers , «elle est re- couverte par plusieurs couches de terre, qui, quoiqu’elles ne soient jamais réunies, conser- vent entre elles un ordre dont elles ne s’écar- tent jamais. La plus inférieure est une terre jaune d’une extrème finesse , sans consistance , très - douce au toucher et très-friable, laissant écouler l’eau comme du sable. Elle ne renferme aucuns fos- siles, mais quelquefois des concrétions de la même couleur que je soupçonne avoir été des corps organisés moux. Cette terre est quelque- fois d’une couleur très-pâle , et alors ses con- crétions sont de la plus grande blancheur. Au-dessus de cette terre, il s’en trouve une DU DÉPARTEMENT DU CALVADOS. 290 autre de couleur rouge sombre qui s’agglomère et se durcit un peu en se desséchant. Elle re- tient l’eau modérément , se détrempe facilement et devient grasse au toucher. Elle ne contient jamais de fossiles et rarement des galets roulés ; c’est la base des sols les plus fertiles de nos plaines. Elle a depuis 1 Pie jusqu'a 9 d’é- paisseur. Ces deux couches de terre sont quelquefois remplacées par une autre de glaise de couleur jaune pâle, ou rouge vif, ou bleu, ou enfin marbrée jaune et bleu. Elle ne contient que des galets roulés de quartz, de psammite , de grès ou de diabase de même nature que les rochers qu’on trouve immédiatement au sud desterrains calcaires. Ces galets forment des couches très- solides à 6 pouces ou 1 pied au-dessous de la surface du sol. Ils sont quelquefois agglomérés par du minéral de fer , et forment des masses très-dures ; cette glaise à dépie r pied jusqu’à 20 dubisob. RAA VAR UVE LAS AL UVE LULU VAR VER LULU AL LES VUR LAN LVULULAAMI VULAVS SECOND MÉMOIRE De M. DE MAGNEVILLE , sur le calcaire à polypiers du département du Calvados , et sur plusieurs autres formations qui en sont voisines ; lu à l'académie royale des sciences , arts et belles-lettres , le 14 fe- vrier 1803 , et à la société Linnéenne du Calvados , le 5 avril 1824. D suis la lecture que j'ai faite de mon prenuer mémoire sur le calcaire à polypiers, j’ai eu oc- casion de faire sur cette formation de nouvel- les observations que je vais avoir l’honneur de vous communiquer. Ce calcaire n'offre pas an one des débris de polypiers ; il ne renferme quelquefois que des coquilles plus ou moins brisées. Ces deux genres de fossiles sont souvent réunis , où mélangés avec des oolites blanches ou brunes. Ces dernières se rencontrent rarement ; je ne les ai observées DU DÉPARTEMENT DU CALVADOS. 291 qu’à Sannerville et à Ste. - Honorine-la-Char- donnette. Les oolites blanches sont beaucoup plus communes , elles composent quelquefois seules toute la masse du calcaire. Ges différents corps lui donnent presque toujours un aspect grossier ou grenu , et les pelits cristaux spathi- ques , dont il est parsemé , le rendent plus ou moins brillant. Il éprouve cependant des modifi- cations, rares à la vérité, qui le rendraient mé- connaissable , si son gisement re le rattachait à cette formation. | Le calcaire à polypiers repose sur celui de Caen , partout où ces deux formations se trou- vent réunies , comme aux environs de Caen. Mais quand ce dernier vient à manquer , alors le calcaire à polypiers se trouve placé sur celui d'Évrecy (1), comme à la butte St.-Laurent et à celle de Rye, près Bayeux, et si le calcaire d'Évrecy manque, le calcaire à polypiers re (1) Lorsque j'ai rédigé ce mémoire , j'avais peu étudié les différentes couches inférieures au calcaire de Caen. Je ne con- naissais pas non plus les travaux de MM. de Hombholt et Pro- vost , et pour ne point tomber dans quelque erreur, j’ai désigné le nom de calcaire d’Evrecy, toutes les couches calcaires ren- fermant des gryphites arquées et non arquées , ainsi que les oolites inférieures qu’on remarque dans toute l’étendue du can- ton d’'Évrecy. | 292 CALCAIRE A POLYPIERS pose immédiatement sur les roches de transi- ton, comme à May, à Gouvix , à Ouilly-le- T'esson et à Condé-sur-Laison. Dans ces trois dernières localités , il renferme des galets rou- lés (1). Calcaire à polypiers reposant sur les ro- ches de transition. On trouve entre la commune de St.-Martin- de-Fontenay et celle de May, une carrière assez profonde , dont la pierre est absolument semblable à celle de Ranville; de petits cristaux de spath calcaire la rendent très-brillante. Elle renferme des débris de coquilles, et notamment des bé- lemnites. On a extrait de cette carrière de la pierre de taille pour la construction des piles du pont tournant, commencé sur le Quai de Caen, vis-à-vis la rue des Carmes. Le calcaire à polÿpiers est absolument isolé (:) Gette dernière circonstance paraît commune à d’autres formations calcaires, lorsqu'elles reposent sur les roches de transition. Les couches inférieures du calcaire d’Évrecy con- tiennent des galets roulés , à Fierville, à Vieux ,; à Maïzet, à Évrecy, à Grainville-sur-Odon. J’ai fait la même remarque à Orglandes, près de Valognes, où le calcaire à baculites et celui de Valognes paraissent reposer l’un et lautre sur le quartz _ grenu. è DU DÉPARTEMENT DU CALVADOS. 235 dañs cet endroit. Au sud, il se trouve séparé du grès de May par un petit vallon. A l’ouest, la rivière d’Orne le sépare du même grès qu’on : voit sur l’autre rive. Au nord, ilest borné par une roche de calcaire marbre de transition , et on ne le retrouve plus que dans la piaine d'Tfs. _ À l’ouest et très-près du village de May, est un plateau formé par le grès, sur lequel on re- marque un espace très-circonscrit de calcaire à polypiers , qui renferme aussi des bélemnites et les mêmes fossiles qui le précèdent ; mais il est d’un grain plus grossier. Le grès l’entoure de tous côtés. | | La vallée de la rivière de Laise est profon- dément encaissée dans des roches de transition de différentes natures. À Gouvix , en face du château d’Ouirelaise , le côté droit de cette val- lée ne présente que du grès ; au-dessus est un calcaire qui ne diffère de celui de May que par les galets roulés qu'il renferme, Le calcaire à po- lypiers se trouve également isolé dans cet en- droit ; car les environs ne présentent que le calcaire de Caen , dans lequel sont ouvertes d'immenses carrières à Quilly et à Grainville- la-Campagne. On trouve encore des galets roulés à Ouilly- 334 CALCAIRE À POLYPIERS le-Tesson et à Condé-sur-Laison. Je vais avoir occasion d’en parler en suivant le calcaire à * polypiers , depuis le Mont-d’Eraines jusqu'a Vaux-la-Campagne et Vieux-Fumé. Dans la commune de Perrières , des roches de quartz grenu traversent le calcaire de Caen, et s'élèvent à une petite hauteur au-dessus du sol. Elles se partagent en deux branches, l’une passe par Olendon et va gagner St.-Quentin-de-la- Roche, où elle forme ce qu’on appelle La Bré- che au Diable. L'autre se dirige par Sassy, et va se joindre aux énormes roches de Rouvres. Ces deux lignes de roches sont en grande par- tie recouvertes par le calcaire de Caen, etne se font apercevoir que de distance en distance, jusqu’au bord de la vallée de Laison où elles sont entièrement à nud. Si en partant des roches de Perrières, on se dirige au sud, on arrivera sur le Mont-d’'Erar- nes, entre les villages de Versainville et d’Am- blanville. Jusques-là, on aura toujours marché sur le calcaire de Caen , dont la direction con- tinue à l’ouest; mais en tournant à Pest , on trouve bientôt le calcaire à polypiers , composé uniquement de petites oolites blanches; en tour- aant ensuite sur la gauche et en longeant le co- DU DÉPARTEMENT DU CALVADOS. 239 teau qui borde la vallée de la Dive, on re- marque avant d’arriver à Vendeuvre, un chan- gement dans le calcaire ; des débris de polypiers et de coquilles sont mélés avec les oolites , et il continue dans cet état jusqu'à Ernes, sur le bord de la riviére de Laison. … Descendons maintenant cette rivière ; et sui vons les coteaux qui la bordent au levant , en partant de la Brèche au Diable. Nous trouverons que le quartz grenu passe au grès, pareil à celui de Feuguerolles et de May. Les rochers s’abais- sent ensuite insensiblement, et nous arrivons dans un petit vallon latéral , où est situé le vil- lage d'Ouilly-le-Tesson. Nous y trouvons le cal- caire à polypiers , avec des galets roulés , pareil à celui de Gouvix. En continuant à suivre la rivière , nous par venons aux rochers quartzeux de Rouvres. Cest-là que les roches de tran- sition cessent de paraître. On ne trouve plus au-delà que des coteaux calcures : à Ernes un petit vallon sépare le calcaire de Caen de celuià polypiers. Le premier paraît s'appuyer contre les rochers de Rouvres , et le second se prolonge et forme l’encaissement de la vallée. Il est d’abord composé d'oolites, de polypiers et de coquilles ; mais à Condé, ces fossiles disparaissent, et on ne voit plus que des oolites. | Lord 256 CALCAIRE A POLYPIERS En traversant la rivière dans cette dernière commune , on trouve sur le coteau opposé, derrière l’église, le calcaire avec des galets rou- lés. Il paraît avoir dans cet endroit une grande épaisseur. Il est très-dur, il se divise par cou- ches horizontales. On voit sur ce terrain une pierre provenant d’une de ces couches, qui a été mise sur son champ. Le temps l’a fortement endommagée ; elle a cependant encore plus de 13 pieds de haut sur 4 ou 5 de largeur, et envi- ron un pied et demi d'épaisseur. C’est sans doute une de ces pierres levées qu’on rencon- tre dans différent endroits. Elle est connue sous le nom de pierre cornue. La tradition du pays _ne lui donne aucune origme. Cette espèce de pouding se perd au nord, sous des couches de calcaire, ne contenant que des oolites blanches qui disparaissent bientôt, et on ne voit plus que le calcaire de Caen , sur les communes de Vieux- Fumé et de Vaux-la-Campagne. Calcaire à polypiers de l'arrondissement de Lisieux. Je n’ai pu parler, dans mon premier mémoire, du calcaire à polypiers qu’on trouve dans lPar- DU DÉPARTEMENT DU CALVADOS. 297 rondissement de Lisieux, parce que je n'avais pas encore parcouru ce pays; mais l’ayant vi- sité depuis , jai été à portée de l’observer sur plusieurs poinis.- Il occupe presque tout l’espace compris entre la butte St. - Laurent et la vallée de Coupe- Gorge. La présence de l'argile et des silex de la craie indique suffisamment que le terrain crayeux recouvre le calcaire à polypiers, depuis cette vallée jusqu’à celle de la Touques, où il reparaît dans la partie inférieure des coteaux de lune et l’autre rive. Il faut observer seulement qu’il se trouve beaucoup plus bas à l’est de la rivière de Touques , au-dessous de Lisieux , et que ce coteau est entièrement dans le terrain crayeux , ce n’est que dans les excayations faites dans la prairie qu’on voit le calcaire à polypiers, jusqu’à St.-Denis-de-Mailloc. On le trouve en- core depuis Lisieux ; mais j'en parlerai plus tard, lorsqu'il sera question des terrains qu’on rencontre entre cette ville et Orbec. : Plusieurs bancs du calcaire à polypiers de l’arrondissement Lisieux présentent des différen- ces remarquables. Ils sont d'autant plus intéres- _santsà connaître, qu'ils conservent entreeux un ordre régulier de superposition , et chacun d’eux 238 CALCAIRE À POLYPIERS éprouve aussi des modifications très-considéra- bles , et qu’un examen is, peut seul fare reconnaître. 10, Ce calcaire n’est composé que d’oolites blanches au bas des coteaux de la Touques, où 1l est absolument semblable à celui du Mont- d'Éraines et de Condé-sur-Laison , les oolites sont plus grosses dans les carrières de Glos ; Des coquilles sont mélées aux oolites au sommet de la butte St-Laurent ; 3°, Des débris de polypiers sont mêlés aux coquilles et aux oolites à St.-Denis-de-Mailloc. Îl est semblable à celui ae trouve à Ernes, à Sallenelles , village situé à l’embouchure de FOrRE. 2: k Je présume que les différences que je viens d'indiquer ne sont que des modifications du même banc ; car je ne les ai jamais remarquées dans des bancs distincts et superposés dans la même localité ; | | 4°. Des oolites blanches avec des noyaux et des empreintes de coquilles en spire Fi sont ie êtres des cérites. Ce banc, que je n’ai pas rencontré aux envi- rons de Caen , se trouve dans les coteaux de la rivière de Touques, et repose sur le calcaire —_ DU DÉPARTEMENT DU CALVADOS. 224 uniquement composé d’oolites. Notre collègue M. Pattu , m'en a donné des échantillons qu'il avait pris à Canapeville , près de Pont-l'Évé- Ur 50. Ces moules de coquilles en spire se trou- vent réunis à des polypiers, dont les uns sont incrustés dans la pierre , et les autres fixés des- : sus , Ou tapissant toutes les cavités dont elle est remplie. Elle est très-dure, très- brune , et sa cassure est très-cristalline. | Cette pierre doit faire partie du banc précé- dent; car je l’ai trouvée à une très - petite dis- tance de celui-ci, dans le même coteau , et à peu près sur la même ligne ; 60. On trouve au-dessus de ces bancs un autre calcaire , dont la pâte est très-fine : il ren- ferme des coquilles très-minces et très-diffciles à dégager et à reconnaître; quelques-unes de ses couches sont tendres et blanches, les autres sont plus dures et d’une couleur plus bise, à cassure un peu concoide. Dans cet état, elle serait propre à la lithographie , si elle ne conte- naît pas autant de coquilles. Notre collègue, M. Pattu, en à fait l'essai, et il lui a assez bien réussi. Elle est employée dans le Pays pour faire de la chaux. 240. - CALCAIRE À POLYPIERS Ce banc repose immédiatement sur celui qui contient des moules de coquilles en spire dans le coteau ouest de la vallée de la Touques ; on le voit sans interruption depuis le village de St.- Hippolyte, jusqu’à l'extrémité nord de la butte St.—Désir. Mais comme ce dernier manque dans les carrières de Glos , celui de pierre à chaux se trouve placé sur le banc qui ne contient que des oolites. Son épaisseur n’est que de deux pieds dans cet endroit; mais elle est bien plus considérable dans un coteau des environs de Manerbe,près de Coquanvilliers, où on en trouve des carrières de plus de 15 pieds de profondeur. Les couches dures y sont séparées des couches tendres par un banc d'argile. | Cette pierre à chaux, qui touche immédiate= ment au calcaire à polypiers , a un aspect bien différent de celui-ci. Appartiendrait-elle à une autre formation , ou ferait — elle partie du cal- caire à polypiers ? C’est ce que je ne puis pas décider d’une manière positive. Elle a au pre- mier aspect quelque analogie avec le calcaire de Caen, et avec certains bancs du terrain crayeux; mais le premier est inférieur au caleaïre à po- lypiers, et le terrain crayeux est beaucoup su- périeur à la pierre à chaux, dont 1l est séparé DU DÉPARTEMENY DU CALVADOS. 241 par plusieurs bancs d’une nature toute différente, conime on peut en juger dans les carrières de Glos , où des bancs d’un calcaire siliceux et de sable recouvrent celui de pierre à chaux. D’ail- leurs , les couches inférieures de la craie de ce pays se distinguent par le chlorite qu’elles con- tiennent. | Je terminerai ce mémoire en décrivant quel- ques-uns des coteaux de la rive gauche de la Touques, afin de faire mieux connaître l’ordre de superposition des différents bancs dont je viens de parler, et en indiquant les divers ter- rains qu’on rencontre en parcourant la route de Lisieux à Orbec. Coteau ouest de la vallée de la Touques, au sud de la route de Lisieux à Caen. Le chemin de Lisieux à St.-Hippolyte est pro- fondement encaissé dans le coteau du Montcas- sin, et on voit sur ses côtes les différents bancs du calcaire à polypiers. Le plus inférieur con- tient les ooltes blanches ; le second renferme les moules de coquilles en spire ; le troisième est le banc de pierre à chaux. Il est recouvert en grande partie par des éboulements. L’herbe 16 242 CALCAIRE A POLYPIERS et la terre végétale empêchent de connaître la partie supérieure du coteau. | Butte St.-Désir, au nord de la route de Lisieux à Caen. Deux chemins parcourent cette buite dans toute sa longueur. Le plus inférieur conduit de Lisieux à Coquainvilliers , et l’autre se dirige sur Manerbe. Le premier ne présente dans ses côtés que le banc avec des oolites. Le second , qui va en s’élevant gagner le haut du coteau, fait voir le banc avec des spires, reposant sur le précé- dent. En montant toujours par ce chemin, on remarque des alluvions terreuses remplies de chlorite. : Sion quitte ce chemin en se dirigeant à travers champs , vers la commune du Pré - d’Auge, on remarque d’abord sur le sol qui s'élève dou- cement des pierres siliceuses à cassure matte et grenue de couleur jaunâtre ou bleuâtre. Ces es- pèces de galets sont peu usés, et prennent des formes bizarres. Arrivé sur la hauteur, on ne trouve plus que les silex de la craie, déposés sur une argile qu’on emploie au Pré-d’Auge pour faire de la poterie grossière. On en extrait aussi DU DÉPARTEMENT DU CALVADOS. 249 la terre à foulon nécessaire aux fabriques de frocs et d’autres tissus en laine , établies à Lisieux et ailleurs. Route de Lisieux à Orbec. Le voyage quej’ai fait de Lisieuxà Orbec, avec M. Pattu, nous a fait connaître jusqu’où s'étend le calcaire à polypiers dans cette direc- tion , et quelles sont les formations qui lui suc- cèdent. Cette course géologique , entreprise dans la plus mauvaise saison de l’année ( c'était à la fin d'octobre 1821 ), m’aufait paru plus péni- ble, sans l’amabilité et les connaissances aussi profondes que variées de mon compagnon de voyage, qui voulait bien me communiquer ses observations, dont j'ai profité en rédigeant ce memoire. ; La route que nous avons parcourue est tal lée dans le coteau Est des rivières de Touques et d'Orbec : on y remarque d’abord le banc contenant les moules de coquilles en spire , depuis Lisieux jusqu’à peu de distance du village de Glos. Il y a dans cetie commune des carrie- res très-curieuses par la variété des bancs qu’on y trouve. 244 CALCAIRE A POLYPIERS Le fond de ces carrières est un sable com- posé d’oolites blanches. Le premier banc qu'on exploite , et qui est le plus inférieur , se divise en deux assises de pierre de taille, composées pareillement d’oolites. Le deuxième ,le banc de pierre à chaux. Le banc avec des moules de coquilles en spire se trouverait placé entre deux , s’il s’étendait jus- ques à ces carrières. Le troisième est un calcaire siliceux passant du gris pâle au bleu ; il forme souvent deux as- sises. Îl renferme différentes espèces de coquil- les , et notamment des trigonies , dont l’intérieur des valves a souvent conservé son éclat nacré ; On y trouve aussi du bois , tantôt à l’état char- bonneux, et tantôt converti en silex : cette pierre estirès-hygrométrique, et mériterait l’examen des chimistes. Le quatrième est un banc, ou dépôt très- puissant d’un sable siliceux et un peu calcaire, d’un grain très-fin , passant du jaune clair, dans sa partie inférieure, au jaune sombre dans sa par- lie supérieure, qui contient alors des veines d’oxide de fer et un peu d'argile. Il est rempli de trigonies et de plusieurs autres coquilles extrêmement fragiles, qui se réduisent en pou- dre blanche par le plus léger froissemeut, DU DÉPARTEMENT DU CALVABOS. 2/5 Ce banc récèle accidentellement une ou plu- sieurs couches minces d’un calcaire silhiceux, quelquefois très-dur , d’une couleur sombreun peu fauve, rempli de trigonies et d’autres co- quilles ; ces couches sont séparées par le sable’, et leur nombre varie jusqu'a quatre. On trouve encore dans ce sable , au-dessous des couches dont je viens de parler, une ligne de gros blocs arrondis de pierre siliceuse et cal- caire très-dure , bleux dans leur intérieur , et dun brun-roux à leur surface , sur laquelle on remarque des empreintes de trigonies. On casse ces blocs pour en faire des pavés. Ces carrières étant à mi-côte ne laissent pas voir les bancs supérieurs ; mais si on parcourt la parue élevée du coteau, dont la pente est beaucoup plus douce , on trouve à sa surface des débris de pierre siliceuse , dont j'ai déjà parlé , et la terre végétale est remplie de chlo- rite. On trouve tout à fait sur la hauteur les silex de la craie , et un sol très-argileux. Il est bon d’observer ici que ces débris de pierre siliceuse sont consiamment sur les terrains en pente , et séparent les silex de la craie, qui sont sur les hauteurs, du calcaire à polypiers ‘ qu’on trouve dans les coteaux ; on y trouve quel- 2/6 CALCAIRE A POLYPIERS quefois des polypiers et des empreintes de eo- quiiles différents de ceux qu’on trouve dans les. couches calcaires les plus voisines. En descendant à l’est le revers de la butte de Glos, on ne trouve plus que le terrain crayeux jusqu'au fond d’un petit vallon qui est beaucoup au-dessous du niveau des carrières, d’où on peut conclure que les différents bancs qu’on y trouve cessent de ce côté, ou y sont à une plus grande profondeur. Cet abaissement se fait remarquer dès la butte St.-Laurent, pour le cal- caire à polypiers , qui en occupe toute la côte, et qui ne parait que dans la partie inférieure des coteaux de la Touques. Nous allons reprendre maintenant la direc- tion d’Orbec. Les coupures qu’on a faites dans le coteau , pour l'emplacement de la route, lais- sent voir de temps en temps le calcaire à po- lypiers , depuis Glos, jusqu’à St. - Dénis - de- Mailoc. Les oolites blanches composent seules d’abord ce calcaire , puis elles sont mêlées avec des polypiers et des coquilles. Depuis la chapelle Yvon , tous les coteaux sont dans le terrain crayeux. jusqu’à Orbec et au-delà ; mais je ne le suivrai que jusqu’à la limite du dé- partement. DU DÉPARTEMENT DU CALVADOS 2/7 Les silex de la craie couvrent les hauteurs de ces coteaux. Ils y sont quelquefois en telle abondance, qu’on ne peut apercevoir la terre végétale , qu’on laboure cependant , et qui donne d'assez bonnes récoltes ; les sillons étroits ettrès- bombés que la charrue a tracés, ont l’air de vé- ritables tombes de silex qu’on aurait ramassés et placés de cette manière. Beaucoup de car- rières en galeries sont ouvertes dans les bancs crayeux inférieurs : on en extrait de la pierre detalle de mauvaise qualité, qu’on nomme, dans le pays , pierre de marne. Elle renferme des silex ; sa couleur est d’un blanc verditre ; la _chlorite devient plus apparente dans la partie in- férieure de ces carrières. J’y aï recueilli des scer- pules ‘des polypiers , de petits oursins entière ment calcaires , le pectin quinque costatus , le catillus cuvierü. ( Broorg. ) La partie inférieure des buttes de la Ves- pière et de Friardel qui avoisinent Orbec ne pré- sentent que de la pierre de marne , etles silex de la craie en occupent toute la partie supé- rieure. Ils sont agolutinés par un ciment siliceux, et forment des roches de poudingue très-considé- rables. Le ciment occupe seul quelquefois des places assez considérables, et formeun grès d’un 218 CALCATRE A POLYPIERS. grain assez fin et de couleur blanchâtre. Le plus dur n'est employé à aucun usage. Celui qui l’est un peu moins est cassé pour en fare des pavés ; on tranche et on pique le plus tendre pour l’employer aux mêmes usages que le granit. Quelquefois la matière siliceuse qui forme ce grès n’est point agglomérée , et cen'est plus alors qu'un sable très-fin de la même couleur que ce grès. | On n’exploite le grès que sur le plateau de St.-Laurent-des-Grès situé aux confins du dé- partement de l'Eure , où on le trouve dans tous ses différents états : les carrières de grès à pavés y sont peu profondes , parce que les couches in- inférieures contiennent des silex et deviennent des poudingues. Je n’ai trouvé dans le grès, ni dans le sable, aucuns vestiges de corps organisés ; cependant les ouvriers n’ont dit y avoir trouvé quelque- fois des coquilles. RAR LA RAA LAN VAR LES VAR VAL LAVE LUNA VAN LAURLAAUAAL VEN LAANLUATUANR LUS MÉMOIRE Sur les principales roches qui composent de terrain intermédiaire, dans le dépar- tement du Calvados, lu à la séance du 5 mai 1924, par M. HERAULT , ingénieur en chef des mines. Avant donné dans un premier mémoire , dont l'extrait a été imprimé par ordre de l'académie royale de Caen, une idée générale du terrain intermédiaire du Calvados, je me bornerai dans celui-ci, à décrire succinctement les principa- les roches qu'il renferme , en indiquant les lieux où elles se trouvent le plus abondamment. 1, Phyllade ordinaire. Il est un peuluisant, et se rencontre, en plus ou moins grande quantité, dans presque toute l'étendue du terrain auquel il donne son nom. La portion de ses couches qui est voisine de a 550 TERRAIN INTERMÉDIAIRE surface du sol, fournit dans plusieurs endroits, comme à Maltot, à Clinchamps , à Fierville, à Avenay, etc. , un phyllade d’un gris-jaunûtre | ou d’un vert-olive clair, légèrement nuancé de rougeâtre, qui est tendre , doux au toucher , dont on fait de très-bons crayons pour écrire sur lardoise, ainsi que des pierres à repasser les rasoirs, et d’autres qui servent à préparer les objets en cuivre auxquels on veut donner le poli. On a extrait, il y a quelques années, des carrières du Pont-Féron, près de Vire, et on exploite encore maintenant dans celles de Curcy, de Castillon et de la Bazoque, une ardoise qui n’est qu’une variété du phyllade or- _ dinaire. Ce dernier présente quelquefois , surtout dans le territoire de Condé-sur-Noireau , des Jeuillets siliceux et brunâtres, qui ressem- blent assez à de l’écorce de bois; et près d'Harcourt, il s'offre fréquemment sous la forme d'un prisme rhomboidal fort allongé. Cette roche passe très-souvent au phyllade arénifère. J'ai trouvé , en 1821, une Zrilobite, fort altérée 1ilest vrai, dans les couches de phyl- lade qui sont au pied du château de Falaise , du côté du conchant; et depuis, M. de Ba- zoches a recueillr dans les mêmes plusieurs A DU CALVADOS. 251 fragments de ce fossile, qui parait appartenir à l'espèce nommée Calymène. On m'a donné en outre à la mine de Littry, une autre T'rilobite parfaitement bien conservée ; elle est sur un morceau de phyllade provenant de la portion du territoire de celte commune, qui fait partie du terram intermédiaire. & 2€, Phyllade subluisant calcarifère. Cette roche est plus compacte que le phyl- lade ordinaire. Sa couleur est le gris légèrement verdâtre ou jaunâtre. L’acide nitrique y produit une effervescence assez forte, surtout si on à soin de l'appliquer sur la tranche des feuillets, et dans un endroit qui ait été frappé d’un coup de marteau , de manière à y produire un peu de poussière. On la trouve en couches minces, al- ternant avec le phyllade arénifère, et principa- lement avec le grès quarzeux phylladifère, sur la rive droite de la Laize, un peu au - dessus de la route d'Harcourt , à Roche-Pendante et dans quelques autres it 252 TERRAIN INTERMÉDIAIRE, 3°. Phyllade pailleté. Phyllade rouge ou violet, parsemé de la- melles de Ïica ordimarement blanc , etquelque- fois jaunâtre ; cette variété est beaucoup moins abondante que les précédentes , dans le terrain intermédiaire du Calvados. On la rencontre principalement au milieu des couches de grès quarzeux feldspathique , et certains morceaux paraissent même formés de feuillets alternatifs de ces deux substances : on peut voir de nombreux exemples de ce dernier fait, dans les carrières du pont de la Landelle, entre Harcourt et Condé- sur-Noireau. 4°. Phyllade arénifére. Il est presque uniquement composé de grains de quarz, de feldspaih et de phyllade : ce dernier y domine et lui donne son caractère. Sa couleur, qui est ordinairement le gris-ver- dâtre, passe quelquefois au gris-rougeâtre; on en trouve aussi de gris-blanchâtre plus ou moins foncé. Lorsqu'il n’est pas altéré , 1l paraît comme strié, et son aspect a même quelque chose de DÜ CALVADOS. 255 luisant ou de satiné. IL est souvent traversé par des filets de quarz hyalin. Les fissures qu'il renferme lui donnent une tendance à s’éclater dans divers sens, et il prend, par une longue exposition à l’air , une couleur brunâtre à l’exté- rieur. Il passe tantôt au phyllade ordinaire, tantôt au grès quarzeux phylladifére. Il accom- pagne presque partoul la première de ces roches, et il forme dans beaucoup d’endroits la partie dominante du terrain intermédiaire. On emploie les phyllades ordinaire et arénifère pour la cons- truction dés murs de toute espèce , ainsi que pour celle des grandes routes, dans les cantons où l’on ne peut pas se procurer de meilleurs matériaux ; ils sont exploités ensemble ou sé- parément, pour ces différents travaux, dans un grand nombre de communes. 5e. Grès quarzeux phylladifère. ( Grauwacke schistoide à grain fin. } Il renferme les mêmes parties constituantes que la roche précédente ; mais il en diffère en ce que le phyllade y est moins abondant : sa couleur varie, comme celle de cette substance , 254 TERRAIN INTERMÉDIAIRE du grisâtre au noir foncé, en passant par dif- férentes nuances de vert et de rougeñtre. Quel- auefois il se présente sous l'aspect d'une roche simple et compacte ; toutefois, en l’exposant quelques moments au dard d’un chalumeau , on parvient facilement à distinguer , au moyen d’une loupe , les grains de différentes natures dont 1l est formé ; le plus souvent , cependant, ses parties constituantes ,; quoique toujours assez fines , sont visibles à l’œil nud ; enfin on en trouve à Bully une variété dont les grains sont un peu plus gros , qui contient très-peu de phyllade , et dans laquelle on aperçoit quelques fragments de quarz argileux compacte noir. Cette variété, qui est grisâtre, semble former le passage entre le grès quarzeux phylladifére ordinaire, etle poudingue quarzeux qui existe dans la même formation. | Sur la rive droite de la Laize, entre Brette- ville et la route d'Harcourt , de nombreuses couches de grès quarzeux phylladifère verdä- ire alternent avec des couches de phyllade et de calcaire marbre ; on en rencontre également quelques-unes sur la rive gauche de la Guine ; dans les carrières de Condé-sur-Noireau , la même roche est ordinairement grisâtre , et plus DU CALVADOS. 255 rarement noirätre ; à Pierrefitte et dans les coteaux voisins du Pont-d'Ouilly , on en voit de verdâtre , de rougeûtre , de grisâtre et de noi- râtre ; au Pont-Féron , près de Vire, elle est très-noire, et accompagne le phyllade ardoisé. Le grès quarzeux phylladifère fournit , dans beaucoup d’endroits, des plaques fort grandes et très-solhides qui sont employées pour faire des tables , des auges, des marches d’escalier , des dalles pour paver , etc. J’observerai que le phyllade arénifere , auquel .il passe cependant fréquemment , ne donne jamais de plaques sem- blables. 6<. Grès quarzeux feldspathique. ( Variété du grès rouge ancien des anglais.) Ce grès n’est guère formé que de quarz et de feldspath. Ses grains ne sont jamais gros , et ils sont quelquefois si petits qu’on à peine à les discerner. Sa couleur la plus commune est le rouge clair; mais on en trouve aussi de blanchâtre, de jaunâtre et de verditre. Il passe fréquemment au grès quarzeux simple. Assez ordinairement 1l accompagne cette dernière ro- 256 . TÉRRAIN INTERMÉDIAIRE che, ou il est accompagné par elle , dans les lieux où il constitue la masse principale du ter- rain intermédiaire : sur la rive gauche de la Guine , cependant , il forme, avec le phyllade et le grès quarzeux phylladifère, des bancs su- bordonnés minces et peu nombreux, dans le calcaire marbre. Le grès quarzeux feldspatiqué occupe les sommités de la chaine de montagnes au midi d’Aulnay, qui se prolonge jusqu’à l'Orne, en traversant les territoires de Valcongrin et de Hamars, et renferme les points les plus élevés du département ; on le voit aussi sur les bords de cette rivière, à Athis, à Bully, à Roche- Pendante , au pont de la Landelle ; sur ceux de VOdon , à Baron , et on le trouve encore dans la bruyère de Mouen, à St.-Laurent-de-Con- del , etc. 7e. Grès feldspathique. ( Espèce de conglomérat pseudo-porphyritique. } Pâte de pétrosilex rouge, violet ou brun, enveloppant des grains de feldspath blancht- tre ou rosätre , de quarz hyahn, et quel- ‘ DÜ CALVADOS. no 257 quefois des fragments de phyllade. Cette roche est très-dure et très-tenace. Ses couches pré- sentent beaucoup de fissures transversales. Elle occupe principalement les sommités des hau- teurs moyennes , ou le penchant des monta- gnes les plus élevées : le côté nord de celle qui est au midi d’Aulnay est formé, dans sa partie supérieure , par des couches de grès quarzeux feldspathique , renfermant quelques bancs de grès ordinaire ; vers le point où sa pente devient moins rapide , le grès feldspathique lui succède ; enfin au pied de la même , en descendant vers Aulnay , on rencontre de nombreuses couches de phyllade et de grès quarzeux phylladifere. Le grès feldspathique se voit aussi sur presque tous les plateaux qui couronnent une chaîne de montagnes qui commence à St.-Martindon , tra- verse le territoire du Bény , passe entre Mon- champ et Monchauvet, près des villages de St.- Vigor, de Pontécoulant , de Proucy , et se montre , sous le nom des buttes de Clécy, sur la route de Caen à Condé-sur-Noireau. Le même grès se retrouve à l’extrémité sud — ouest du Mamelon de la Paugeils, près de Hamars ; on en voit encore une carrière ouverte dans la com- mune-du Détroit, entre le Pont-d’Ouilly et Fa- laise. 17 258 TERRAIN INTERMÉDIAIRE. Il est employé pour faire des murs , et sur— tout pour la construction et la réparation des routes. € 7 » 8€. Quarz grenu. Il est généralement blanc ou un peu grisâtre. Il ressemble assez , par sa texture, au grès quarzeux, qui fait partie de la même forma- tion ; mais il en diffère surtout, en ce quil n'est jamais coloré de rouge ou de violet , et en ce que ses couches sont ordinairement plus puis- santes: cependant on le rencontre quelquefois , comme à St.-Quantin-de-la-Roche, en plaques minces , Gont les faces sont recouvertes de la- melles de mica blanc ou jaune. Le sol de la vaste bruyère qui est au midi de Falaise est formé de couches de. quarz grenu ; cette roche se montre encore dans les coteaux qui sont au Nord - Ouest de la même ville, dans la bruyère de Noron et à St.-Vigor ; le côté Est du rocher sur lequel est bâti l’ancien château ducal de Falaise, présente aussi des couches de quarz, tandis que le côté opposé, ainsi que le monticule sur lequel est construite l’église du faubourg St. - Laurent , n’offrent que DU CALVADOS, 259 du phyllade ; enfin dans la commune d’Urville , on voit une couche puissante de quarz ,. dont la tête domine un terrain formé de phyllade , de grès quarzeux phylladifère et de minerai de fer: ces derniers faits prouvent évidemment l'alternance des couches du quarz et du phyl- lade. R On trouve aussi à Perrières des rochers de quarz, qui s’élévent à une petiie hauteur au- dessus du sol occupé par le calcaire de Caen, et se partagent en deux branches , non conti- nues, dont l’une passe par Olandon , et va ga- gner St.-Quantin-de-la-Roche , où elle forme ce qu'on appelle la Prèche-au-Diable ; et l’autre se dirige par Sassy , et va se joindre aux énormes rochers ( également quarzeux ) de Rouvre (1). | La bruyère de Jurques, entre Caen et Vire, renferme , comme celles précitées , de nombreu- ses couches de quarz grenu. Cette roche est principalement employée à la construction et à la réparation des routes , et celle qui est en plaques minces sert à rece- voir les ruches d’Abeilles, dans quelques parties du département. ui (1) Deuxième mémoire de M. de Magneville, sur le cal- eaire à polypiers, 260 _ TERRAIN INTERMÉDIAIRE 9°. Grès quarzeux coquiller. ( Variété du grès rouge ancien des anglais. } Cette roche est très-dure et son éclat a quel- que chose de lustré. Elle est parfois d’un blanc légèrement grisître, où d’un rouge tirant plus ou moins sur le violet; mais assez ordinaire- ment elle présente le mélange de ces deux couleurs, qui sont souvent disposées de ma nière à produire des effets bizarres et fort variés. On renconire aussi, plus rarement à la vérité, des morceaux de grès sur lesquels on voit des espèces de dendrites ,; et d’autres qu of- frent des figures formées par un assez grand nombre de cercles concentriques d’une matière calcédoineuse. Il existe à May , entre quelques- unes de ses couches, des veines d’une argile blanc aire ou jaunâtre avec des taches rouges. Cette argile est douce et onctueuse au toucher ; sa texture est compacte ; elle est remplie de par- celles de mica , et traversée par une multitude de filets brunätres , qui paraissent appartenir au règne végétal ; elle happe fortement à la langue ; elle ne fait point d’effervescence par DU CALVADOS. oGI l'acide nitrique ; enfin , elle se délaie facilement dans l’eau et forme une pâte tenace. J'ai découvert, en 1822, dans le grès de May, des empreintes d’une petite térébratule striée et d’une grande coquille bivalve, qu’on croit être une cypricarde modiolaire ; depuis on a encore trouvé dans le même, d’autres em preintes d’une térébratule lisse, et d’un corps particuhier que M. Eudes - Deslonchamps consi- dère comme une trilobite: M. Jules Desnoyers annonce qu'il renferme aussides entroques. Le grès intermédiaire du Calvados s’exploite, pour faire des pavés, à May, à Feuguerolles , a Soumont , à la Roche-St.-Quantin, à la Pé- relles, à Roche-Pendante, au pont de la Lan- delle, à Jurques , etc. Les menuisiers en tirent encore des pierres pour aiguiser leurs outils. 10°. Grès quarzeux micace. Le grès quarzeux offre souvent des lamelles de mica; on en remarque même quelquefois une assez grande quantité sur les parois de ses couches ; mais outre cela, ee grès renferme quelques bancs minces d’une roche très-friable , qui en contient presque autant que de quarz: 262 TERRAIN INTERMÉDIAIRE. c’est à cette dernière que je donne particulière- ment le nom de grès quarzeux micacé. Sa couleur varie comme celle du mica qui entre dans sa composition : elle est tantôt blanche , tantôt jaune d’or , et parfois d’un violet pour- pré. Elle est assez abondante à May , et on en rencontre également à Feuguerolles, à Bully ; ainsi que dans plusieurs autres localités. 11°. Poudingue quarzeux. ( Variété de Grauvwacke à gros grain. ) Ciment quarzeux enveloppant des noyaux, toujours assez petits et un peu auguleux , de quarz hyalin et de. feldspath. Ce poudigue est ordinairement grisâtre et quelquefois jaunâtre, avec des nuances légères de vert et de rougeitre : il parait passer dans beaucoup de circonstances , au grès feldspathique , et dans quelques autres, au grès quarzeux phylladifère. On le trouve le plus souvent, en bancs subordonnés et peu puissants, au milieu des couches de ces deux substances, du phyllade et du calcaire marbre ; il forme aussi dans certaines localités , mais très- rarement et jamais sur une grande élendue , la partie dominante du terrain qui le renferme , comme on peut le remarquer dans les carrières DU CALVADOS. 2063. situées un peu au-dessus du rocher dit de Campaux , en allant vers St.-Martindon. 12€. Poudingue feldspathique. Sa pâte est une espèce de conglomérat pseudo- porphyritique rougeâtre , analogue à celui quia été décrit précédemment , sous le nom de grès Jeldspathique ; ses noyaux, presque tous de grès quarzeux , quelques - uns de quarz hyalin , sont plus volumineux et mieux arrondis que ceux du poudingue précédent. On en voit des couches nombreuses et assez épaisses, sur la rive droite de la Laize, aux environs de Fresnay-le-Puceux. 13°. Calcaire marbre. Ce calcaire présente des couleurs très-variées: on en voit de blanc , de blanc jaunâtre , de blanc nuancé de rosâtre ou de bleuâtre , de rosâtre nuancé de rouge, de rouge plus ou moins foncé nuancé de rositre, de rouge vif parsemé de points blancs , de violet , de lie de vin , de bleuâtre, de gris, de noir et jaune { espèce de portor ) et de noir. Celui qu est blanc- jaunâtre est quelquefois traversé par une infinité 364 TERRAIN INTERMÉDIAIRE de jilets spathiques , ce quilui donne un as- pect tout particulier. À Bully , la variété bleuà- tre est souvent mélangée de grès quarzeux phylladifére, et dans d’autres endroits, elle est entrelacée de veines de phyllade ou d'argile. On n’a pas encore découvert de corps organisés fossiles dans le calcaire marbre du Calvados (1), et en général, on lui trouve beaucoup d’analo- aie avec le calcaire intermédiure du Hartz. Ses couches ont une épaisseur très-variable , mais qui ne dépasse jamais quelques décimètres. Elles occupent quelquefois une assez grande étendue de terrain , et ne renferment alors que quelques bancs fort minces de grès quarzeux feldspathique , de phyllade et de grès quarzeux phylladifère , comme à Vieux et à N. D. de- Laize ; mais plus souvent encore, elles alter- nent avec des couches nombreuses de ces deux dernières substances, ainsi qu'on peut le voir à Bretteville-sur-Laize , à Clinchamps, à Four- neaux , à Pierrefite, etc. Le marbre du Calvados est susceptible de prendre un très-beau poli, et il a été employé (1) Les points blancs que renferme la variété rouge vif, ont cependant quelque ressemblance , par leur cassure , avec des fragments d’encrinites. DU CALVADOS. 265 avec succès , pour faire des tables , des cham- branles de chemmée , des colonnes, et autres objets de cette nature. Il paraît que les Romains s'en étaient servis pour décorer quelques-uns des édifices publics qu'ils avaient construits dans ce département , notamment les bains nouvelle- ment découverts à Bayeux, et on assure que les colonnes de l’église de la Sorbonne, bâtie à Paris, par le cardinal de Richelieu , ont été faites avec du marbre de Vieux. Les variétés de couleurs tendres , telles que les blanches nuancées de rose , les rosâtres nuancées de rouge, etc. , s’allient très-bien avec les orne- ments en cuivre doré, et sont fort recherchées dans la capitale, à cause de cette propriété , pour faire des montures de pendules. Malheu- reusement ce calcaire est presque toujours rem— ph de fils, ce qui fait qu'il est difficile de s’en procurer des blocs bien sains, et propres à donner des pièces d’une certaine dimension. Une circonstance qui rend encore son exploitationfort désavantageuse , c’est que les carrières les plus abondantes , celles qui pourraient fournir les plus belles variétés , et qui sontles mieux situées pour la facilité des transports ( celles de Vieux et de la Laize ), se trouvent sur les limites d’un autre 266 TERRAIN INTERMÉDIAIRE calcaire beaucoup moins dur , et par ‘consé- quent moins dispendieux à employer , soit pour lés constructions ordinaires , soit pour faire de la chaux ; en sorte qu’on ne peut rer aucun parti des blocs de marbre qu'on est forcé de rebuter. Il est mfiniment probable que ce sont ces inconvénients qui ont obligé plusieurs entre- preneurs, à cesser de faire exploiter les carriè- res dont il s’agit, lesquelles ont été ouvertes étabandonnées à diverses époques ; les difficultés qu'ils présentent me paraissent sans remède , dans l’état actuel des choses, et je crois qu'il faudra se borner, par la suite, à extraire des mêmes carrières , quelques petits blocs pour les pendules ; parce que des pièces de cette dimen- sion se rencontrent plus aisément exemptes de défaut, et peuvent d’ailleurs, à raison de leur destination, être vendues un prix plus élevé que celles d'un plus:gros volume. Mais, si on venait à découvrir des variétés de marbre aussi belles que celles qui existent à Vieux et sur le bord de la Laize , dans la partie du département , où lon ne se sert que de calcaire intermédiaire pour faire de la chaux, on pourrait peut-être les exploiter avec bénéfice : c’est à lavantage d’une position semblable, favorisée encore par DÜ CALVADOS. 267 le voismage de la mer, et l'exportation qui se fait de la chaux pour la Brétagne , que les exploi- tants des carrières des environs de Coutances , département de la Manche, doivent la faculté qu'ils ont de pouvoir fournir au commerce des marbres à tres-bon compte. 14°. Ampélite. { Phyllade antraxifère et pyriteux. ) a. Ampélite graphique. M. de Brébisson fils atrouvé , dansles déblais d’un puits qu’on appro- fondissait à St.-Pierre-du-But, près de Falaise, des morceaux d’un ampélite graphique , qui pro- venaient probablement du terrain intermédiaire qui occupe une porüon du sol environnant. Cette substance formait une couche d’à peu près 4m. 20 d'épaisseur ; elle était, dit-on, mélangée dans sa partie supérieure, de schiste noir micacé en petits fragments, et, devenant ensuite plus argileuse , elle présentait des cristaux rares de chaux sulfatee trapézienne et de pyrite. b. Ampélite alunifère. Le cabinet d'histoire naturelle de la ville de Caen a recu de M. Du- bourg-d’Isigny , président du tribunal civil de 268 TERRAIN INTERMÉDIAIRE Vire, des échantillons de cette roche , qu’il avait ramassés près d’une carrière anciennement ex- ploitée dans la bruyère du Plessis- Grimoult. L’ampélite de cette localité renferme des boules de différentes grosseurs , et souvent aplaties, d’un calcaire gris-noirâtre , qui présentent des cou- ches concentriques et des veinules de pyrite : du reste , son gisement , ainsi que celui de la va- riété précédente , est encore fort peu connu. 15°. Minerai de fer. C’est un mélange d’oxides brun -rougeûtre, brun-jaunâtre et jaune, qui contient beaucoup d’oolites ferrugineuses.Ce minerai présente dans quelques morceaux la forme rhomboidale. Il constitue à Urville , pres de Bretteville-sur- Laïize, une couche puissante qui s'appuie sur un rocher de quarz grenu, dont lasommité s’élève au-dessus du terrain environnant, et qui esi re— couverte par d’autres couches de phyllade et de grès quarzeux phylladifère. La même renferme un poudingue à pâte ferrugineuse enveloppant des grains de quarz hyalin et de feldspath. On a traité autrefois à Danvou , canton d’Aul- nay,un minerai de fer absolument semblable à DU CALVADOS. 209 celui d'Urville, qu’on tirait des environs de Rou- camp , et qui, comme tous ceux du terrain inter- médiaire de la Basse-Normandie ; donnait du fer cassant à chaud. 16°. Pétrosilex basaltoïde. Cette roche est opaque et à pâte grossière. Sa couleur la plus ordinaire est le vert foncé ; mais elle est quelquefois grisâtre. Elle contient des cristaux microscopiques qui paraissent être de pyrroxène plutôt que d'amphibole; certains mor- ceaux renferment d’autres cristaux opaques, et un peu plus gros , d’un feldspath blanc-verdätre. C’est une espèce intermédiaire entre le Lornfels des allemands et le phonolite. Ce pétrosilex a été exploitépourdiverses constructions, dans le coteau de Montmirel près de la mine de Lüttry, à la Pourrie dans la forêt de Cérisy ; on en a obtenu des blocs assez considérables. 17°. Diorite ? La roche à laquelle on a donné provisoirement ce nom, dans le Calvados, est verdâtre, et sa dureté égale celle du granite, avec plus de té- 270 TERRAIN INTERMÉDIAIRE nacité. Son aspect a quelque chose de cristallin, Quoique son grain soit assez fin , ses parties cons- tituantes se laissent facilement apercevoir à l'œil nud; cependant, dans quelques morceaux, sa tex- ture est presque compacte. Elle est composée de cristaux blancs-verdâtres de feldspath , et d’une partie d’un vert plus foncé, qui semble formée de deux substances différentes, dont l’une , plus dure , plus cristalline , paraît être de l’amphibole, et l’autre , plus tendre et amorphe, pourrait bien être du talc chlorite. Elle renferme accidentel- lement des cristaux, assez volumineux , d’un felds- path légèrement verdätre , du quarz hyalin et de la pyrite de fer. Le Diorite n’a encore été trouvé dans ce dé- partement , qu’à Vieux ct à Pierrefitte. On en a extrait momentanément , dans ces deux commu- nes , pour faire des bornes et des pavés ; mais ces exploitations n’ont pas eu assez d’étendue pour donner lieu de juger s’il forme des couches ou des filons dans le terrain intermédiaire, ou sil n’est qu’en amas à sa surface : 1l en est ci même de la roche précédente. DU CALVADOS. = OBSERVATIONS. Le terrain que l’on vient d'examiner est com- posé de roches fort variées , dont plusieurs ne se rencontrent ailleurs , que dans des formations dif- férentes, et souvent dans des lieux très-éloignés. F1 est le seul du même genre en France , qui ren- ferme du grès contenant des empreintes de corps organisés fossiles ; on ne connaît, hors du royaume , qu’un ou deux exemples d’un fait sem- blable. Enfin il présente , dans un espace de peu d’étendue et facile à parcourir , presque tout ce que peuvent offrir intéressant les terrains inter- médiaires ; c’est ce qui l’a fait considérer , par le savant professeur de géologie du muséum d'histoire naturelle de Paris, avec lequel j'ai eu l'avantage d’en visiter une partie, comme étant , en petit, un des meilleurs que l’on puisse étudier, pour acquérir une connaissance classique de ces sortes de terrains. PALIER LU VAE EUR LUE VAL LEE LEE VUE VAS LEUR LLLUUEULL LA LU LUI UUR Des observations sur l’origine , la culture et l'usage de quelques plantes du Bessin, avec leur synonymie en patois de ce pays; par F. PLUQUET. ( lues à Ra séance du 3 mai 1824. ) Craoue peuple a eu ses plantes mythologiques. Les peintres, les sculpteurs , les architectes ont emprunté au règne végétal leurs ornements les plus gracieux. Les fleurs ornent nos fêtes , nos jeux et nos festins. Dans le moyen âge nos * églises en étaient jonchées. Le botaniste admire les phénomènes de la physiologie végétale ; il nous initie aux mystères de la fructification , et classe méthodiquement les plantes ; le peuple les vénère, parce qu'il voit dans chacune d’elle un remède offert par la Providence pour guérir les maladies qui l’affigent. De À cette foule de vertus souvent superstitieuse qui leurs sont attribuées , HS DU BESSIN. 273 et ces noms plus ou moins bizarres qui leur ont été imposés. | | J'ai pensé, Messieurs , que cette nomencla- ture et quelques observations qui se rapportent à la culture ou à l’usage de certaines plantes dans le moyen âge offriraient quelque intérêt, et que vous les accueilleriez avec l’indulgence que semblent réclamer les recherches locales de ce genre. Bouis. Buis. Buxus sempervirens; L. Cet ar- brisseau semble frappé de réprobation. On l’a chassé de nos jardins , où , docile sous le ciseau, il se prêtait aux formes les plus variées. IL existait dans le Bessin de très-belles haies de buis. Par- tout on les abat, et on ne les remplace point. Il servait de temps immémorial aux cérémonies religieuses du dimanche des Rameaux ; mais, depuis quelques années, le noble laurier a rem- placé le triste buis, qui bientôt disparaîtra en- tièrement du sol normand. Cawivière. Chanvre. Cannabis sativa ; L. Cette plante dioïque , d’un si grandusage dans l’é- conomie domestique, est cultivée depuis fort long- temps dans le Bessin. D’après les comptes ma- nuscrits de l’Hôtel-Dieu de Bayeux , 1l paraît que cette culture était fort étendue dès le X V®. siècle, T0 274 SUR LES PLANTES Cuerers. Espèce de chou cultivé dans le Bes- sin au X VIS. siècle. « Poireaux , chelets et na- veaux ne doibvent rien. » ( Ancien tarif de Bayeux. ) Cnêne. Quercus robur ; L. Il existe dans le Bessin un reste de vénération pour le chêne, qui se rattache peut-être encore au culte drui- dique. Les plantes parasites qui croissent sur cet arbre , passent pour avoir de grandes vertus médicinales : telles sont le gui, le lichen pulmo- naire, le poylpode , l’agaric , etc. Il existait avant la révolution, sur le mont Phaunus , proche l’abbaye de St.-Vigor, une an- tique chénaie où la statue de la Vierge se trou- vait placée dans un gros chène, proche une chapelle,queles vieux titresappellentl’Éeyciane, c’est-à-dire, chapelle dédiée à Ste. - Marie V'Égyptienne, La hache avait respecté pendant des siècles ces arbres vénérables, qui peut-être avaient prêté leur ombrage aux enfants du con- quérant. L'année 1792 les a vus disparaître. Proche le prieuré de St.-Nicolas-de-la-Mala- drerie , se trouvait aussi une chênaie qui avait fait donner à ce lieu le nom de Sr.-Nicolas- de-la-Chénée. Elle a été abattue à la même époque. Ces bois de chênes , placés près de deux DU BESSIN. 279 monastères, sur le mont Phaunus, centre du culte druidique dans le Bessin, me semblent avoir quelque rapport avec les bois sacrés des prêtres gaulois. | On voit dans la forêt de Cérisy , appelée an- ciennement foré du Bur, forét de Bur le Roï , proche Vaubadon, un chêne creux d’une énorme dimension, connu sous le nom de la Grosse Quénesse. Seize à dix-huit personnes peuvent facilement debout dans lPintérieur. La Grosse Quênesse est très-respectée dans le pays; elle a donné son nom à un triage particulier , et elle est exceptée de toutes les ventes. Presque tous les beaux chênes de notre pays ontété abattus depuis une quarantaine d’années,et on en plante fort peu. L’abandon de la culture du chène , et introduction de celle du peuplier , qu’un demi-siècle voit naître , croître et mourir, sufiraient pour ainsi dire à caractériser lPépo- que actuelle. Cuinezzes. Fruit acerbe du prunier sauvage. Prunus Spinosa; L. Resté long-temps à l'arbre, il se ramolhit ; en cet état les enfants le man- gent , et il pourrait fournir une boisson fermen- tée. Le prunier épineux est tous les ans couvert de fruits, ce qui a donné lieu à cette locution: Îly en a comme de chinelles. 270 SUR LES PLANTES Cou. Brassica Oleracea ; L. La culture de cette plantealimentaire est fort ancienne : au temps de Wace, elle était commune, puisqu'il fait dire à Rollon : Jo me mespris, dist-il, comme une fuille de col, Se Regnier poiz ataindre , se l’orguil ne li tol. Basselin a pris le chou pour sujet d’un de ses Vaux-de-Vire , qui commence ainsi : Faulte d'humeur nos choux sont morts... M. Heron dela Tuilerie a publié, en 1808, dans les Étrennes du Bocage , un fort joli poème sur la soupe aux choux-verts. | CauE. Grande ciguë , ciguë des anciens , Conium maculatum ; Li. On dit vert comme chue. Docxe ou Dove. Patience. Rumex patien- tia ; L. On appelle grande doche , la patience aquatique. Ce nom de. doche ou dogue, qu'on prononcçait dog est fort ancien. Je trouve dans un ütrede 1317 une delle des grandes Dogues, à Renchy. DU BESSIN. 277 Épine. Aubépine, épine blanche. Mespilus Oxyacantha ; L. Le peuple, qui a une tendance singulière à corrompre les noms, d’aubépine a fait noble épine. L'épine plantée isolément peut prendre un grand accroissement, et dure fort long-temps. L’épine de Crépon était célèbre dans le XVII. siecle. Nous avons encore la belle épine à Tierceville, sur la route de la Déli- vrande , qui sert de rendez - vous aux pélerins. À Sommervieu et sur d’autres points de l’arron- dissement , il existe des épines en arbre , que le peuple appelle belles épines , et quela hache res- pecte soigneusement. Marie de France , poëte so Ne du XIIe. siècle, a composé un lai , intitulé le Lai de l'Éspine, qui est regardé comme l’une de ses meilleures pièces. | Si a non li lais de l’espine, Ki bien comenche et miex défine. Feucière. Fougére. Polypodium jfilixmas ; L, On appelait anciennement feugueray - les lieux où il ne croissait que de la fougère , siége ordinaire des amants dans nos vieilles chansons. 270 SUR LES PLANTES Fève. Faba major ; T. Vicia faba ; L. Le peuple croit que la fleuraison des fèves est un temps très- critique pour les fous , et on répète ce dicton : Fêve florie, temps de folie. Frère. Fraxinus excelsior; L. Dans le moyen âge, on en fausait des füts de lance très- estimés. Wace vante souvent les lances de frène des chevaliers normands. On s’en servait à la guerre et dans les combats à outrance. Dans les tournois on préférait les lances de sap. Marie de France a composé le Lai du Fresne; elle décrit ainsi cet arbre : Un fresne vit lé (1) è branchu Ë mult espès ë bien ramu ; E quatre feis esteit ramé, Por umbre fere i fu planté. FromexrT. Il y a long-temps que les hommes ont renoncé au gland et aux faînes , et je pense qu’il serait fort difficile de fixer l’époque où l’on a commencé à cultiver le froment en Normandie. Les deux principales espèces de froment cul- tivées dans le Bessin, sont Le froment sans barbe ou franc blé , T'riticum æstivum; L. et le froment (1) Large, DU BESSIN.: + 279 barbu, blé gris ou gros blé. Triticum hyber- num aristatum ; L. Le premier est le plus estimé et fournit d’excellent pain. Le froment du Bessin a toujours été fort es- ümé ; j'ai trouvé plusieurs chartes des XIE. et XIVe. siècles, où les rentes sont stipulées en froment Baoueis. Granszzter, Groseillier non épineux. Rides rubrum , album L. Le fruit se nomme orades ou sradelles. Lenom de groseillier est exclusive- ment réservé à l’espèce épineuse, Ribes gros- sularia ; L. | HerBe-st.-JEan. Armoise. Aritemisia vul- garis ; L. Autrefois on attribuait à cette plante beaucoup de vertus superstitieuses, surtout si elle était cucilie le jour S.-Jean. Voici un pas- sage fort curieux à cet égard, tiré du dict de l’Herberie , pièce en vers eten prose ,; compo- sée vers la fin du XVe. siècle. « La meilleure herbe qui soit ès quatre par- « tes dou monde : ce est l’ermoize. Les fames « c’en ceignent le seir dela Saint-Jehan et en « font chapiaux sur leurs chiefs, et dient que « goutte neavertin ne les peut pranre n’en chief, « n’en bras, n’en pié, n’en main. Mais je me « merveil que les testes ne lor brisent tant à 260 | SUR LES PLANTES « l’erbe de vertu en soi. En cele campaigne où « je fui nez l’apele hon Marrebore , qui vaut « autant dire comme la mere des herbes. » Ir. Taxus baccata ; L. Cet arbre toujours vert, d’un aspect triste, est réputé vénéneux et considéré par le peuple comme l'emblême de la mort. On ne le trouve guère que dans les ci- retières, où l’usage de le planter , comme em- bléme funébre, remonte aux premiers temps du christianisme. Je ne doute pas que l’if de nos cimetières nait succédé au noir cyprès des an- aens. Dans le XVII. siècle , on citait Pif de St.-Germain-d'Elle, comme le plus gros du pays. Maintenant les plus beaux de notre arron- dissement sont ceux de Castillon, de Vaux- sur-Aure, de Sully et de Magny. La révolution a fat détruire beaucoup d'ifs ; on n’en plante plus , et l’arbre consacré aux morts disparaîtra bientôt de nos cimetières. La perte de cet usage est à regreter ; l'aspect tout à la fois triste et vénérable de ces vieux arbres , dont le noir feuillage couvrait les tombeaux de nos pères ne pouvait qu’exciter l’homme au recueil- lement , et lui inspirer des sentiments religieux. Laurette. Lauréole. Daphne Laureola ; L. Cet arbrisseau , dont les feuilles purgent violem- DU BESSIN. 281 ment , croît dans nos bois , à Sommervieu , à Sully , etc. Passe-Rose. Althea Rosea ; L. Cette fleur est cultivée depuis long-temps en Normandie. L'amour de moy sy est enclose En ung jolly jardinet Où croist la rose et le muguet , Et aussi faict la passe rose. ( Chansons Normandes , imprimées à la suite des Vaux-de-Vire, de Basselin , édition de 1821. ) PLANTES EMPLOYÉES COMME ORNEMENTS SUR LES OBJETS D’ANTIQUITÉS, TROUVÉS OU CONSER- VÉS DANS LE DESSIN. On a trouvé dans les fondements du château de Bayeux, lors de sa démolition , des füts de colonnes, couverts de feuilles de laurier : lors des fouilles de St.-Laurent, en 1827 , on a dé- couvert une bordure de marbre blanc, couverte de feuilles du même arbre. Ce beau fragment est entre les maims de M. Ed.Lambert. Dans la crypte de la cathédrale de Bayeux, que mon ami , M. Hylander , professeur de l’université de Lund en Suède ,qui a voyagé dans le Bessin,regarde comme le plus ancien monument de ce pays, on remar- 2892 | SUR LES PLANTES que des feuilles de laurier au chapiteau d'une des colonnes. Serait-ce une réminiscence d’un genre de décoration qui paraît avoir été beaucoup employé par les Gallo-Romains dans notre pays ? Les fragments de poterie romaine sont com- muns à Bayeux. Quelques-uns sont couverts de _bas-reliefs. Les seules plantes bien caractérisées qu’on y trouve , sont des feuilles de lierre et de vigne. Les chapiteaux des colonnes de la 2°. moitié de PXTe. siècle , des XITe. et XIII. , présentent souvent des feuiiles de chou, de bette, de sco- lopendre , de chardons , d’orties , etc. Dans les XIVe.,X Ve. etX VIe.siècles, où lestyle dit gothi- que fut dans toute sa vogue , le trèfle et la vigne furent presque exclusivement employés comme ornements. Les fleurs et lesfruits ont été très-employés comme ornements calligraphiques sur les ma- nuscrits du moyen âge, et particulièrement sur ceux des XIVe. , XVe, et XVI. siècles. On irouve sur les marges d’un recueil d’an- ciennes chansons normandes , appartenant à M. Lambert, des roses , des violettes bleues et blan- ches, des bluets, de la pervenche , du muguet , des œillets, des pensées, des raisins, des frai- DU BESSIN. 28 ses , eic. On retrouve les mêmes ornements moins variés sur les livres d'heures. J'en ai possédé un, où l’on voyait des noisettes, des prunes et plusieurs variétés de primevère. Pois. Le peuple confond le genre des pois pisum , avec celui des haricots phaseolus. Les normands reprochaient aux anglais, dans le XVe. siècle , leur goût excessif pour les pois. Ne craignez point , allez batre Ces godons, panches à pois, Carun de nous en vault quatre ; Au moins en vault il trois. ( Chansons normandes à la suite des Vaux- de-Vire de Basselin , édition de 1821. ) Portow. Narcisse des prés. Nascissus pseudo- narcissus ; L. Il y a long-temps que cette fleur est commune en Normandie;car, dansunechanson composée dans le XVe. siècle, pendant l’occu- pation des anglais , on trouve ce couplet : _Je ne puiïz faire cortoizie , Car povreté me contrarye Et me tient en subjection, Je. n'ay plus amy ne amye En France ne en Normandie Qui me donnast ung porion. Pommier. Malus communis ; T. Je vais es- 264 SUR LES PLANTES sayer de prouver, contre l’opinion commune, que la culture du pommier est fort ancienne en Nor- mandie , et que l'usage du cidre est né dans cette province. Je regarde comme fabuleuse la tradition qui veut que nous ayons emprunté aux biscayens l’usage du cidre et les greffes de nos meilleures espèces de pommes. J'aimerais mieux l’opinion de ce bon président de la Barre, élu à Mortain, qui dans son Formulaire des élus , imprimé en 1622 , s'exprime ainsi sur l’origine du cidre : « Et dit on qu’un normand ayant battu une « pomme contre son coude, et trouvant qu’elle «. donnait du jus, se print à la sucer , et que de là « 1l commenca à former son idée pour faire et « extraire le sidre. Encore les autres nations , « abondantes en vin, pour plaisir représentent « la contenance d’un normand battant une « pomme au coude ; ce qui ne se doit prendre « à reproche, mais à galantise et gentille 1n- « vention. » : Raoul Tortaire , mome de l’abbaye de Fleury- sur-Loire , qui voyagea dans le Bessin , vers le commencement du XITe. siècle , dit positivement qu'il but du cidre à Bayeux. Ingredior noti mediocria tecta sophistæ Tentatus quoniam, vina peto, fueram ; DU BESSIN. 285 Et succus pomis datus est extortus acerbis : Ori proposui , dum revr esse merum. Sed Bacchus minimè dominatur in hâc regione. ( Ex epistolà Radulphi Tortarii, Flo- riucensis monuchi ad Robertum. ) Robert Wace, qui écrivait vers le milieu du XIIe. siècle , parle de pommuers cultivés dans les jardins de Caen. Kar unkes pois cel parlement Co pois dire veraiement Li gardin ne fructefa Pome ne altre fruit ne porta. ( R. de Rou, vers 16408 et suiv. ) Guillaume le Breton, dans sa Phihippide,poëme latin, composé vers 1224, ne parle point du cidre comme d’une chose nouvelle. En parlant du pays d’Auge , il dit: c..s0s009 SICEIÆQUE Que potatrix Algia tumentes..., Dans un autre endroit , parlant toujours de la Normandie , il ajoute : | Non tot in autumni rubet Algia tempore pomis Unde liquare solet siceram sibi Neustuia gratam. Basselin , qui vivait dans la première moitié 2680 SUR LES PLANTES du XVe, siècle, a chanté le cidre dans beau- coup de ses Vaux-de-Vire, et 1l n’en parle ja- mais comme d’une boisson rare ni nouvelle. De nous se rit le francais , Mais vrayment quoiqu'il en dye Le sildre de Normendye Vaut bien son vin quelquefois. Coulle à val et loge loge, Il faict grant bier à la gorge. ( Vau-de-Vire 17. ) De son temps on plantait comme aujourd’hui des pommiers dans les cimetières , usage qui lui a inspiré des vers charmants. | On plante des pommiers ès bords Des cemetieres près des morts, Pour nous remettre en la mémoire, Que ceux dont là gizent les cors Ont amés comme nous à boire. Pommiers croissants ès environs Des tombeaulx des bons biberons Qui ont amés vostre breuvage, Puissions nous tant que vivrons Vous voir chargiés de bon fruitage. ( Vau-de-Vire 55. ) L'auteur anonyme du blason de la guerre du pape, pièce de vers écrite à la fin du XVe. siècle , parle : | DU BESSIN. 297 be... D'escailleurs d’uystres, Maistres bracheurs de servoise et de cystres. Je pourrais ajouter beaucoup d’autres citations d'auteurs postérieurs , concernant les pommiers et le cidre; mais il me semble avoir suffisam— ment prouvé que le pommier est enfant de la Normandie , et que le cidre est du à l’industrie de ses habitants. | Rosier. Je n’ai trouvé dans les manuscrits du moyen âge , que trois variétés de roses bien caractérisées. La rose d’Hollande, Rosa maxi- ma; L. La rose de Provins, Rosa Gallica et la rose blanche , Rosa alba. Nos pères aimaient le goût et l'odeur de la rose , et ils Pemployaient comme parure dans toutesles occasions de. joie et dallégresse. Ils en avaient comme nous, fait l’em- blëme du bonheur, de la volupté et de la perfec- tion , idée longuement délayée dans le roman de la Rose, qui faisait leurs délices. On a écrit que les roses étaient rares dans le moyen âge, et on cite des terres fieffées pour un chapel de roses. Mais ici les roses , comme une foule d’ob- jets plus ou moins communs, compris dans les redevances seigneuriales , n'étaient qu’un signe de vassalité. Moisant de Brieux, dans ses ori- 268 SUR LES PLANTES gines de quelques coutumes anciennes , dit que marier une fille avec un chapel de roses, cela signifiait avec peu de chose ou avec rien. Nos vieux poëtes ne font jamais la description d'un lieu agréable sans y placer des haies et des buissons de rosiers. On cultivait même les ro- siers en grand ; de là les noms de Rosières que portent plusieurs lieux. On trouve auprès d’Isi- gny la Rosière Gerville et le pré de la Rosière , à Mosles le chemin de la Rosière, etc. Les seigneurs consommaient beaucoup d’eau de rose ; on s’en servait pour laver les mains et pour une grande quantité de sauces. Brussel , dans son traité des fiefs , cite des redevances de boisseaux de roses, ce qui était bien autre chose qu’un cha- pel. Enfin, l'usage des roses était si général et si répandu dans toutes les classes de la société, et le rosier est un arbrisseau qui croît et se muluplie si facilement, qu'il est impossible de croire que cette fleur ait été dans le moyen âge aussi rare et aussi chère qu’on la dit. SARRASIN. Blé noir. On en cultive deux va- riétés dans le Bessin, le sarrasin de Tartarie, PolygonumT'ataricum; L., et le sarrasin d’Asie, Polygonum fagopyrum ; L. La dernière est la plus estimée. La culture du sarrasin en Basse— DU BESSIN. 259 Normandie , où elle a été si bien accueillie , ne remonte pas au-delà des dernières années du XVIe. siècle. Les comptes manuscrits de l’'Hô- tel- Dieu de Bayeux, qui contiennent tant de détails sur l’agriculture du Bessin dans les XIVe. et X Ve. siccles , n’en font aucune mention. On ne trouve aucune redevance en sarrasin avant le X VIT. siècle. Les comptes d’Eutrapel publiés en 1587, contiennent un passage fort curieux sur l’époque de l’introduction de ce végétal en Brétagne. « Tesmoin un droguiste de Lyon qui envoya « à feu Champenois , docte apothicaire de « Rennes un fardeau de blé noir, appelé en « aulcuns lieux sarrazin avec entiere descrip- « üon de ses qualités mirifiques et le prix qui « estoyt d’un escu la livre ; mais la piperie « congnue , on lui renvoia son paquet et que s’il « en vouloit envoyez querir , il lui en bailleroit « mille charges de cheval à un escu piece. Car « à la vérité sans ce grain qui nous est venu « depuis soixante ans, les pauvres gens de « ce pays auroient beaucoup à souffrir, quoiqu'il « amaigrisse fort la terre. » Le sarrasin est devenu un mets favori des Bas- Normands ; on en a fait de la bouillie , 10 290 SUR LES PLANTES de la galette et de fort mauvais pain, auquel on a renoncé. | La récolte du sarrasin forme une des épo- ques mémorables de l’année champêtre ; on mange de la galette, on boit du cidre , on danse et on chante de vieilles chansons normandes. On entend souvent dire : C’était lorsque le sar- rasin était en fleur: c'était lorsqu'on battait le sarrasin , manière de dater, qui peint assez bien la simplicité des mœurs champêtres. Tiéroque. Brassica erucastrum ; L. Cette plante croît en si grande abondance parmi les moissons,qu’elle étouffe souvent le gran. Depuis quelques années on s’est avisé d’en récolter la graine, et d’en extraire une huile, qui pour les usages économiques vautpresque celle de colsa. Verveine. /’erbena officinalis ; L. La ver- veine était une plante sacrée chez les gaulois, on la cueillait en cérémonie , et on lui attribuait des vertus miraculeuses pour la guérison des hommes et des animaux. De nos jours, quoique cette plante soit sans odeur et sans saveur, le peuple lui attribue de grandes vertus , surtout pour les coups et les blessures. La verveine, cueillie le jour de la St.-Jean , et conservée dans les maisons , porte bonheur et chasse les démons. DU BESSIN. 291 VERT DE POMMIER VI, où GI. V’iscum al- bum ; L. De toute la célébrité de cette plante mythologique , il ne lui reste plus qu’une fausse réputation de guérir l’épilepsie , à laquelle quel- ques gens crédules ajoutent encore foi. ( Voyez chéne.) Vausorre. Vrach, varech, sar ou goemon. Fucus maritimus. Les cultivateurs voisins de la côte s’en servent comme engrais. Ils Île coupent aux époques fixées par les ordonnan- ces de la marme. C'est ce qu'ils appellent : aller à la vauboire. On trouve sur les côtes du Bessin, et notam- ment à Port, quelques variétés de fucus assez rares. VicnoT. Ajonc, jonc marin ou jomarin. Ulex Europæus ; L. On donne le nom de ai gnet ou vigney aux lieux plantés de vignot. Le plus vaste et le plus célèbre du Bessin, est celui de Formigny , où se donna , en 1450, la bataille de ce nom, et où se tient une foire assez considérable le jour St.-Martn. FIN. ‘ Au : 3 A , | Mas LEA k UT #4 sh NS Sn Ni AM TPSE À EU A "4 4) a LAA AA VUE VIA LILUAL LAN VAR WIR UAUR LVL LR LR, VAR WTA UTYE VARUVAR AVR LR COMMUNICATION Lue par M. SPENCER SMYTH, dans la séance ordinaire tenue par la Société Linnéenne , le mardi 8 juin 1524. MEssiEurs , Dass un ouvrage périodique qui se publie à Londres depuis près d’un siecle, sous le titre du Gentleman's Magazine ( journal des Ca- valiers ), je viens de trouver , dans la livraison du mois de janvier dernier, un article qui na paru susceptible de quelque intérêt pour la So- ciété Linnéenne : c’est une communication faite à l’éditeur de ce recueil de trois lettres du grand naturaliste dont vous avez adopté le nom , écrites en latin , peu d'années avant sa mort , à un savant anglais, nommé TunsTALL , avantageusement connu par quelques ouvrages sur le règne ani- mal , ainsi que par des collections considérables. Ces lettres n’syant recu de la publicité en 29 204 COMMUNICATION x Angleterre que récemment , je suis fondé à les croire encore inédites en France, et par conséquent dignes d'occuper votre attention , et peut-être même de figurer dans vos archives. Je les ai donc extraites , et jai l'honneur de les offrir à la compagnie, avec une traduction de la leitre qui y avait été jointe par le cor- respondant du Gentleman’s Magazine. Cette lettre , à dire vrai, n’est pas remarqua- ble par le mérite épistolaire ; mais elle estle récit naïf des souvenirs d’un septuagénaire , un té- moignage en faveur de l’authenticité des trois épitres linñéennes, car elle porte elle-même le cachet de la vérité. AE a DE M. SPENCER SMYTH. 20) A l'Éditeur du Gentleman’s Magazine. Moreton , 9 janvier 1824. MonsiEUR, Vous êtes, je crois, l’une des trois personnes encore vivantes qui ont connu mes parents. Je me souviens parfaitement de les avoir entendus parler de vous, dès le moment où je fus en état de comprendre et d’agir. Comme je touche à l’âge de 70 ans, je me persuade que vous serez le premier à me féliciter de la mémoire que j’ai de choses qui datent déjà de 65 années. Cela seul, imdépendamment du cours exemplaire et utile de votre vie, suffirait pour vous placer bien avant dans mon estime, et c’est véritable- ment pour moi un nouveau motif de choisir votre ouvrage périodique pour communiquer à vos nombreux lecteurs, répandus dans tous les pays, les lettres ci-jointes qui nous restent du célèbre naturaliste avant lequel les œuvres de notre créateur n’étaient aux yeux de l’homme qu'un vrai cahos. Elles me furent obligeamment confiées, si ma mémoire ne me trompe pas, environ quatre ou cinq ans après qu'elles eurent été écrites à M, Marmaduke Tunstall, dont je pos- 296 LETTRES sède aujourd'hui quelques tableaux. S'il était pos- sible de révoquer en doute leur authenticité, la voie par laquelle elles me sont parvenues devrait, ainsi que le caractère particulier du style, dé- cider la question : je les tiens, Monsieur, d’un honnête littérateur qui, depuis long-temps déià , est allé dans un autre monde recevoir la ré- compense due à sa probité. Les lettres n’ont subi - aucune altération ni dans leur texte, ni dans leur sens : elles plairont sans doute au lecteur philosophe, et si, par hasard, elles satisfont sa curiosité , même à un dégré inférieur à la mienne. elles auront parfaitement rempli l’inten- tion de votre dévoué serviteur, SamuEz HOPKINSON. RARE UULUEUUE VULUUY VULUUE VULUUTLUUE URL WULUUVLUVVEUVURUVLE VUE Viro nobili et generoso, Domino MARMADUKE TUNSTALL, Armigero. CAROL. A LiNNE, S. Pen: Nihil magis inexpectatum contingere unquàm potuit, quam tuas exosculari litteras et gazas, quas antè duos dies ritè excepi; devotissima mea reddo pro litteris ; et affectum tuum since- DE LINNÉ. 207 rum, quem nullà ratione , quod doleo, deme- reri possum. Animæ tuæ candissimæ hæc debeo unicè, Nihil magis exoptavi quàm videre ali- quod documentum rei naturalis ex orbe antarc- üco per D. Banks et Socanprum allatum ; sed votum meum omnind frustraneum fuit. Tu, V. G., primus me ed beare voluisti, mittendo tam numerosa conchilia, quæ ipse deberes æstima- re uti sanctissima. Quantum pro his debeo effari profectà neqüeo, sed pietate et cultu omni dum vixero te prosequar. Occurrunt hæc pleraque, exceptis duobus auttribus conchilüs, in mari Me- diterraneo et proximis Africæ : sed, unicus tro- chus erat valdè singularis, et forte à nullo an- tea visus, Zrochus Tunstalli à me dicendus. Düm in eo sum, ut adornem novam editionem tomi 1%, Systematis, quem typographus ef- ilagitat à me, magnoperè exoptarem allegare Or- nithologiam tuam , quam dicis te liberali manu ad me misisse ; sed meo magno cum dolore non- düm excepi: quæso, dicas mihi per quem exop- tatissimum opus misisti, et,si rescribas , sit litulus epistolæ Societati Regiæ Scientiaruin Upsaliæ, cujus omnes literas ipse aperio, et certrus eas obtinebo. Ter Vale. Upsaliæ , 1772, aug. 15. 208 LETTRES Wiro nobili et generoso, Domino MARMADUKE TUNSTALL, Arimigero. No.12, Wezrsecx-SrresT , London. Caro. À LiNNÉ, $; pp: Dudum, die scilicet Augusti, à te litteras accepi; sed hodié primum pretiosissima tua dona. Tetrao- nas Scoticos marem et feminam pulcherrimè præ- paratos et asservatos , undè abundè constitit mihi distinctas esse species à T'etrasnib Lagopodibus. Ornithologiam tuam Britannicam. Insecta quatuor Orasiliensia, omnium pulcher- rimè delineata et rarissima. ; 1. Curculio à me visus. 2. Curculio rostro lanato admodum simgula- ris et nOVUS. | | 3. Cerambyx albo luteoque lineatus , pulcher- rimus. | | 4. Adeù singularis, ut nequeam devinare ad quoddam genus sit referendus : si roveris cu- jusquam sit generis, hoc me doceas, oro. 5. Curculio imperialis aureo splendore nobilis. DE LINNÉ. 299 Pro his omnibus et singulis nequeo alia re- ferre, quam diu vixero animum devotissimum .qui te omni pietate colat. Vive diù felix et sos- pes. Affectum meum, quæso, declares communi nostro amico domino PEnnanrT (*). Upsaliæ , 1773, oct. 13. ( Méme adresse que la précédente. ) CAROL. À LINNÉ, Accepi tandem exoptatissima dona tua, et valdè ex us lætatus fui. Tetraones istæ rarissi- mæ, quæ Grous Pennanti sine dubio , in patrià meà peregrinæ , summo me affecêre gaudio : eas- dem, ni fallor, hoc anno etiim habui à zo0- logiæ professore Edimburgensi domino Ramsey , sed planè alio colore , vixque dubitare licet ejusdem speciei , quas brevi prædio et musæo redditus conferam ; diversas esse à Lagopo nos- trate dubitare nec an (1) Pennant ( Thomæ ) Zoologia Britannica , GOXXII figuris æneis et coloratis ornata. — Augsbourg , 1771, in-fol. , fig. colo: riées, Ce volume a été poussé à 120 liv. à la vente des livres de M. Mel de St.-Céran, en 1791, 500 LETTRES DÉ LINNÉ. Curculio imperialis erat in suo genere planè singularis et eximius, de quo anteà nunquàm audivi. Catalogus tuus de Avibus Britannicis certe perplacuit. Aves tuas servo in museo meo, in quo- udianam memoriam favoris tui in me. Servet te Deus in seros annos. Upsaliæ, 1775; 21 nov. (*) (*) Ce grand homme mourut à Upsal, le 10 janvier 1775, âgé de 71 ans. DDR ei fa de Era ; î À \